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Version finale

33e législature, 2e session
(8 mars 1988 au 9 août 1989)

Le mercredi 15 juin 1988 - Vol. 30 N° 45

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Oix heures treize minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes.

Déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton:... M. le Président.

Le Président: Dépôt de documents. M. le ministre de la Justice.

M. Marx: Oui, M. le Président?

Le Président: Dépôt de documents.

Rapport annuel de l'Office de la protection du consommateur

M. Marx: En dépôt de documents. J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1987-1988 de l'Office de la protection du consommateur.

Le Président: M. le ministre de la Justice, votre document est maintenant déposé. Toujours à l'étape de dépôt de documents, M. le ministre délégué aux Finances et à la Privatisation.

Rapport annuel de l'Inspecteur général des institutions financières sur les assurances

M. Fortier: II me fait plaisir de déposer le rapport annuel de l'Inspecteur général des institutions financières pour l'année 1987 sur les assurances.

Lettre de démission de M. Normand Moyer comme commissaire à la CDP

Le Président: M. fe ministre, votre document est déposé. J'aimerais également déposer devant cette Assemblée une lettre de M. Normand Moyer dans laquelle il démissionne en tant que commissaire à la Commission des droits de la personne du Québec. Le document est maintenant déposé.

Dépôt de rapports de commissions. M. le Président de la commission de l'aménagement et des équipements et député de Bertrand.

Étude détaillée du projet de loi 16

M. Parent (Bertrand): Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé les 12 et 13 juin 1988 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 16, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le transport par autobus. Ce projet de loi a été adopté avec amendements.

Étude détaillée du projet de loi 17

J'ai aussi l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé le 14 juin 1988 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 17, Loi modifiant la Loi sur la sécurité dans les sports. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Le Président: M. le député de Bertrand, vos rapports sont maintenant déposés. Toujours à l'étape de rapports de commissions, M. le président de la commission de l'économie et du travail et député de Verchères.

Étude détaillée du projet de loi 27

M. Charbonneau: M. le Président, je dépose le rapport de la commission qui a siégé les 9, 13 et 14 juin dernier afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 27, Loi sur la Société de promotion économique du Québec métropolitain et modifiant la Loi sur la Société Inter-Port de Québec. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Le Président: M. le député de Verchères, votre rapport de commission est déposé.

M. le président de la commission des institutions et député de Taillon.

Étude détaillée du projet de loi 10

M. Filion: M. le Président, je dépose le rapport de la commission qui a siégé les 13 et 14 juin afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 10, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires et d'autres dispositions législatives en vue d'instituer la Cour unifiée. Le projet de loi a été adopté avec des amendements, dont un au titre.

Le Président: Votre rapport est maintenant déposé, M. le député de Taillon. Est-ce qu'il y a d'autres dépôts de rapports de commission?

Dépôt de pétitions?

Ce matin, il n'y aura pas d'intervention portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur une question de fait personnel.

Avant de reconnaîre la première principale, j'avise les membres de cette Assemblée qu'un complément de réponse sera apporté par M. le Solliciteur général ce matin à une question posée par M. le député de Jonquière, concernant les conditions d'embauché des futurs policiers.

Nous allons maintenant procéder à la période régulière des questions et réponses orales. Je vais reconnaître la première principale à M. le whip de l'Opposition.

QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES

Le concept de "société distincte* dans l'accord du lac Meech

M. Brassard: M. le Président, lors du discours inaugural, le premier ministre du Québec affirmait, relativement à l'accord du lac Meech, "on doit aussi noter, disait-il, que neuf mois se sont écoulés depuis cet accord sans qu'aucune erreur n'ait été relevée. "

Ce matin, le Conseil de la langue française en relève une erreur puisqu'il conclut de façon non équivoque, dans un avis sur l'accord du lac Meech, que le concept de "société distincte" est vide, flou et insaisissable. C'est d'ailleurs ce qu'on répétait depuis un an, comme Opposition officielle.

Cette analyse rejoint celle de bon nombre d'éminents constitutionnalistes dans le dernier numéro des Cahiers de droit, en particulier. Excellente revue. Le constitutionnaliste José Woehrling établit très clairement la primauté du concept de dualité linguistique comme caractéristique fondamentale du Canada sur celui de société distincte, au point où le Québec ne pourrait maintenir l'affichage unilingue français. La primauté du concept de dualité linguistique est d'ailleurs le fondement même du projet de loi C-72 sur les langues officielles.

Ma question au ministre responsable des Affaires intergouvernementales canadiennes: Au lendemain même de la ratification, par la Chambre des communes, de l'accord du lac Meech, est-ce que le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes est finalement disposé à reconnaître que son fameux concept de "société distincte" est vide, flou, insaisissable et que, par conséquent, l'accord du lac Meech n'assure aucune protection adéquate du caractère distinct de la société québécoise, particulièrement en ce qui concerne ses compétences linguistiques?

Le Président: M. le ministre des Relations internationales et délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

M. Rémillard: M. le Président, pour certains, le concept de "société distincte", c'est la voie de l'indépendance pour le Québec. M. Trudeau, M. Johnston et d'autres partagent cet avis que je respecte et je sais que l'Opposition le respecte aussi; on ne le partage pas, on le respecte. Pour d'autres, le concept de "société distincte", c'est un concept qui est vide de sens. C'est la position de l'Opposition, ils l'ont manifestée; je la respecte aussi, mais je ne la partage pas. (10 h 20)

Je ne sais pas si le député de Lac-Saint-Jean a lu l'avis du Conseil de la langue française. Pour ma part, je l'ai lu très attentivement. Ce que nous dit cet avis est très intéressant. Cet avis nous dit, entre autres, que le gouvernement avait raison de ne pas définir la société distincte par la langue, premièrement. On sait la grande bataille que vous avez livrée en commission parlementaire pour que l'on définisse la société distincte par la langue, alors que le Consei de la langue française nous dit - c'est en toutes lettres, à la page 37 de cet avis, je vous donne mes références directement, vous pourrez les consulter - 'l'évocation d'un seul paramètre linguistique ferait apparaître le Québec non comme une société, mais plutôt comme un groupe linguistique distinct. " C'était une batalle.

Deuxièmement, M. le Président, le Conseil de la langue française, en ce qui regarde la société distincte, loin de dire que c'est un concept vide de sens, au contraire, mentionne la grande valeur du concept de "société distincte" en suggérant...

Le Président: En conclusion, M. le ministre.

M. Rémillard:... même au gouvernement d'y référer pour justifier l'affichage commercial unilingue. Là, vous l'avez en toutes lettres. Et vous me permettrez, M. le Président, simplement de citer ce passage: "Face à une décision qui ne lui conviendrait pas, le gouvernement aurait trois voies et, entre autres voies, plaider la nécessité de ces dispositions pour le maintien et la promotion du caractère distinct de la société distincte. " Et le conseil conclut: "Que le concept de société distincte" serait un recours supplémentaire, efficace pour défendre non seulement la législation actuelle, mais aussi future, concernant la langue française. M. le Président, c'est cela l'avis du Conseil de la langue française.

Le Président: M. le whip de l'Opposition, en additionnelle.

M. Brassard: M. le Président, puisque M. Mulroney affirmait hier que l'entente du lac Meech n'était pas parfaite, est-ce que le ministre ne reconnaît pas que la principale et la plus grave des imperfections de l'accord du lac Meech est que la notion de "société distincte", subordonnée à celle de "dualité linguistique", et cela tout le monde le reconnaît, n'offre aucune garantie d'une protection efficace des compétences linguistiques du Québec et qu'en vous contentant du flou, du vide, de l'insignifiant, dans cette négociation, vous avez manqué à votre devoir de défense des intérêts fondamentaux du Québec?

Le Président: M. le ministre des Relations internationales et responsable des Affaires intergouvernementales canadiennes. M. le ministre.

M. Rémillard: M. le Président, encore une fois, ce n'est pas l'avis du Conseil de la langue française. Je me dois de le dire au député de Lac-Saint-Jean. Lorsqu'il lira l'avis, ï verra. Ce

que nous avons dans l'entente du lac Meech, c'est la reconnaissance de la dualité canadienne et c'est la reconnaissance que le Québec constitue une société distincte. Nous avons dit à plusieurs reprises que cette Assemblée nationale a le devoir, le pouvoir, de protéger et de promouvoir la spécificité québécoise. Nous avons cette clause de sauvegarde, cette clause de sauvegarde qui est un plancher et qui permet au Québec de pouvoir interpréter, en utilisant la clause de la société distincte, d'interpréter la constitution, non seulement la Charte canadienne, mais l'ensemble de la constitution canadienne dans le respect de ce caractère distinct. M. le Président, justement, le Conseil de la langue française, dans ses conclusions, dit bien qu'on peut avoir droit au recours supplémentaire pour défendre, non seulement la législation actuelle, mais toute nouvelle mesure linguistique que le Québec estimerait devoir prendre pour renforcer et promouvoir la langue française dans ses champs de compétence. C'est à la page 57, M. le Président.

Le Président: En conclusion.

M. Rémillard: En conclusion, M. le Président, cet avis du Conseil de la langue française est intéressant et, sur bien des aspects, il vient confirmer l'avis que nous avions de plusieurs autres spécialistes parmi les plus éminents au Québec et au Canada, M. le Président. Et, cet avis, nous le retenons, nous allons l'étudier. Il y a certains points que nous ne partageons pas, mais les points les plus fondamentaux sont là. La conclusion est claire, l'entente du lac Meech est une entente historique pour le Québec et pour le Canada.

Le Président: M. le whip de l'Opposition, en additionnelle.

M. Brassard: M. le Président, puisque le ministre semble avoir une très haute opinion de l'avis du Conseil de la langue française - il en parle en bien depuis le début, dans ce cas-là, je vais le prendre au mot - est-ce qu'il est prêt à suivre une des recommandations du Conseil de la langue française et à faire immédiatement un test judiciaire sur la portée de l'accord du lac Meech en demandant à la Cour d'appel - il est possible de le faire, on le lui a déjà demandé à plusieurs reprises - de se prononcer sur la portée réelle du concept de "société distincte" contenu dans l'accord du lac Meech, en particulier en référence à la question de l'affichage unilingue français? Puisqu'il a une si haute opinion de l'avis du Conseil de la langue française, au moins, qu'il applique une des principales recommandations du conseil...

Le Président: Vous êtes en additionnelle.

M. Brassard: ...et qu'il fasse un test judi- ciaire immédiatement sur la portée de l'accord du lac Meech.

Le Président: M. le ministre des Relations internationales et ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

M. Rémillard: M. le Président, je suis surpris de la suggestion du député de Lac-Saint-Jean, comme j'ai été surpris de cette suggestion qui a été faite, dans un premier temps, par M. Trudeau. Que l'Opposition et M. Trudeau nous demandent de consulter la Cour d'appel du Québec ou la Cour suprême du Canada pour connaître la signification de certaines expressions que nous utilisons dans une constitution, j'en suis surpris, venant du député de Lac-Saint-Jean, sachant à quel point l'Opposition s'est battue pour dire au gouvernement qu'on ne devait pas avoir un gouvernement par les juges, que le gouvernement devait prendre ses responsabilités. Et vous voulez maintenant qu'on fasse une constitution en se référant aux juges?

Le Président: M. le whip de l'Opposition, en additionnelle.

Des voix:...

Le Président: Un instant, un instant!

M. Rémillard: Je voudrais simplement terminer.

Le Président: En conclusion, M. le ministre.

M. Rémillard: La constitution d'un pays, c'est une responsabilité qui appartient à des gouvernements, qui appartient à des élus, qui appartient au peuple, et c'est la responsabilité que nous prenons, M. le Président.

Le Président: M. le whip de l'Opposition, en additionnelle.

M. Brassard: Le ministre ne reconnaît-il pas que c'est son propre gouvernement qui favorise le gouvernement par les juges? En mettant dans un accord constitutionnel des clauses aussi vagues, aussi floues, aussi insignifiantes, il oblige ainsi les tribunaux à se prononcer, à définir et à clarifier. Est-ce qu'il ne reconnaît pas que c'est son gouvernement qui instaure le gouvernement par les juges?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre des Relations internationales et ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

M. Rémillard: M. le Président, évidemment, je comprends que peut-être le député de Lac-Saint-Jean a dit des choses qui dépassent

vraiment sa pensée. Dire qu'une constitution, c'est insignifiant... Ce n'est pas insignifiant, une constitution, M. le Président, une constitution, c'est un contrat social, c'est la structure du pouvoir.

Des voix:...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Rémillard: M. le Président, je le dis pour le chef de l'Opposition comme je le dis pour le député de Lac-Saint-Jean. Ce que nous faisons avec l'entente du lac Meech, c'est une pièce majeure pour la constitution du Canada et pour le Québec. Et, je suis surpris de cette réaction du député de Lac-Saint-Jean parce que, pendant un an, nous avons discuté de l'entente du lac Meech ici, en Chambre, par les questions qu'il a bien voulu me poser et en dehors de cette Chambre. Je croyais qu'il avait vraiment compris. Maintenant, je m'aperçois qu'il y a encore des ambiguïtés. Je peux lui dire que ces ambiguïtés, qui vont demeurer dans l'entente du lac Meech, ne touchent en rien les droits et les pouvoirs essentiels du Québec. Bien au contraire, l'entente du lac Meech vient donner au Québec les pouvoirs dont il a besoin, par des règles d'interprétation qui sont maintenant dans notre constitution, pour interpréter l'ensemble de la constitution canadienne en fonction du fait que le Québec est une société distincte.

Le Président: M. le whip de l'Opposition, en additionnelle.

M. Brassard: En additionnelle. Puisque le ministre a une si haute opinion de l'avis du conseil et puisqu'il a une si haute opinion du contenu de l'accord du lac Meech, pourquoi a-t-il si peur, pourquoi craint-il tant de demander aux tribunaux de se prononcer sur le contenu de l'accord du lac Meech et sur sa portée? Qu'est-ce qui lui fait peur? Qu'est-ce qu'il craint?

Le Président: M. le ministre des Relations internationales et ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

M. Rémillard: M. le Président, concernant cet avis du Conseil de la langue française, j'ai dit que le gouvernement voyait là la confirmation de certains avis qu'il avait reçus d'experts qui sont parmi les plus reconnus en matière constitutionnelle tant au Québec qu'au Canada. (10 h 30)

Sur certains autres points, nous sommes beaucoup plus nuancés et nous voyons mal le raisonnement. Mais sur des points majeurs concernant la société distincte, entre autres, ce sont des éléments qui nous apparaissent comme très intéressants. Et je répète ce que j'ai dit tout à l'heure, M. le Président. Faire une constitution relève du pouvoir d'un gouverne- ment, d'une assemblée législative. Et c'est cette Assemblée législative qui a voté, le 23 juin 1987, cette résolution qui confirme l'entente du lac Meech pour le Québec, parce que nous avions cinq conditions et que nous avons reçu des réponses positives sur ces cinq conditions de la part de nos partenaires de la Fédération.

Le Président: En additionnelle, toujours. M. le député de Taillon, en additionnelle.

M. Filion: Oui, en additionnelle au ministre responsable de la Charte de la langue française. Je voudrais savoir du ministre depuis quand il a en main l'avis du Conseil de la langue française dont il est question depuis ce matin à cette période de questions. Et également, je voudrais savoir du ministre comment il explique que le gouvernement n'a pas adopté une attitude plus vigoureuse à l'égard du projet de loi C-72 alors que l'avis du Conseil de la langue française est précisément un avis au gouvernement d'agir systématiquement, visiblement et rapidement pour occuper tout le terrain de sa spécificité?

Le Président: M. le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française. M. le ministre.

M. Rivard: Le député de Taillon pose deux questions. En ce qui concerne la réception de cet avis, c'est au tout début de juin qu'on m'a fait connaître le contenu de l'avis. Deuxième question, en ce qui concerne le projet de loi C-72, j'ai souvent souligné en cette Chambre que la cohésion, la cohérence d'un gouvernement veut que chacun des ministres s'occupe de son champ de compétence et la deuxième question est du champ de compétence du ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

Le Président: M. le député de Taillon, en additionnelle.

M. Filion: En additionnelle, je voudrais savoir du ministre s'il a pris connaissance de la recommandation du Conseil de la langue française au gouvernement d'occuper, secteur par secteur, tout son champ de compétence. Si oui, je voudrais qu'il m'explique comment il concilie cette recommandation avec l'attitude molle du gouvernement à l'égard du projet de loi C-72 qui, par son article 42, empiète directement sur nos compétences linguistiques.

Le Président: M. le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française. M. le ministre.

M. Rivard: M. le Président, je pense que toutes les réponses qui devaient être données au député de Taillon ou au whip de l'Opposition ont été données en cette Chambre en ce qui concerne la position du gouvernement face au projet

de loi C-72. De mon point de vue, puisque je suis responsable de l'application de la Charte de la langue française-Une voix: On ne peut rien vous cacher! Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Rivard: Puisque je suis responsable de l'application de la Charte de la langue française, il est évident que tant que le gouvernement fédéral n'a pas posé de geste précis - c'est l'explication qui a été donnée constamment dans cette Chambre, en ce qui concerne l'utilisation d'outils ou de programmes de promotion de l'une des deux langues officielles du Canada - il n'est pas question, pour ce gouvernement, de contester la constitutionnalité de cette loi.

Une voix:...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Verchères, en principale. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Ver-chères, en principale.

Des voix:...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! La période de questions n'est pas terminée. Je vais reconnaître le député de Verchères.

Non-intervention d'Urgence

environnement lors d'un déversement

d'acide nitrique à McMasterville

M. Charbonneau: M. le Président, je voudrais remercier mes collègues de leur bon goût. Pour ceux que cela intéresse, je pourrai toujours leur fournir l'adresse.

M. le Président, malheureusement, j'aurais aimé que mon vis-à-vis, le ministre de l'Environnement, soit lui aussi au vert et en Chambre aujourd'hui, alors qu'il est absent depuis quelques jours sans doute pour des bonnes raisons, sauf que, lundi soir, dans mon comté, à McMasterville, à l'usine de CIL, il y a eu un déversement accidentel de 200 gallons d'acide nitrique.

Ce qui est le plus discutable dans cet incident, c'est qu'il y a eu un appel téléphonique d'Urgence environnement à la compagnie. C'est le service de sécurité qui a répondu et qui a indiqué que l'accès des lieux était interdit, à moins d'une autorisation expresse du directeur de l'usine. Le directeur de l'usine a effectivement téléphoné à Urgence environnement une heure plus tard pour donner des explications. À la suite de ces explications, Urgence environnement a décidé de ne pas se rendre sur les lieux.

La question que je dois maintenant poser à la vice-première ministre et ancienne critique à l'environnement est la suivante. Est-ce qu'elle et son gouvernement trouvent normal que, dans des circonstances comme celle-là, le ministère de l'Environnement, les fonctionnaires d'Urgence environnement se soient contentés de vérifications téléphoniques et n'aient pas décidé, quelle que soit la réponse, de se rendre sur les lieux pour faire des vérifications d'eux-mêmes?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: M. le Président, vous comprendrez que poser un jugement sur un dossier qui n'est pas le mien est assez difficile. Je pense que le premier, le député de Verchères, dans sa verdeur, va bien comprendre qu'on ne peut pas... Je veux bien qu'il représente les verts à ce point, mais il doit comprendre qu'on ne peut pas lui répondre aussi explicitement qu'il voudrait que je le fasse aujourd'hui.

Je vais prendre note de sa question. Dès que mon collègue, le ministre de l'Environnement, sera de retour en cette Chambre, il se fera sûrement un plaisir de donner ses opinions et, en même temps, un état de la situation, et d'actualiser le dossier.

M. Charbonneau: M. le Président.

Le Président: M. le député de Verchères, en additionnelle.

M. Charbonneau: Si la ministre le permet, on va rester encore sur le vert un certain temps. Je voudrais lui demander de vérifier également auprès de son collègue si c'est normal que les fonctionnaires du ministère de l'Environnement et d'Urgence environnement ne connaissent pas les procédures régulières d'urgence des entreprises qui représentent des potentiels de risques importants à l'égard de l'environnement, compte tenu de la nature de leurs opérations industrielles?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: Je ne peux que donner la même réponse. Je pense que ce que demande le député de Verchères est une question d'opinion. Je suis certaine que le ministre de l'Environnement lui fera connaître son opinion.

M. Charbonneau: M. le Président, une dernière question.

Le Président: Toujours en additionnelle, M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: Toujours en additionnelle. J'aimerais que la ministre vérifie auprès de son collègue si c'est normal, comme on l'apprend ce matin dans La Presse, que les fonctionnaires du ministère de l'Environnement considèrent qu'ils n'ont pas le pouvoir d'imposer leur présence sur les lieux lors d'incidents comme celui-là parce

qu'ils craignent d'être accusés d'effraction, alors que la Loi sur la qualité de l'environnement est très claire, notamment aux articles 119, 120, 121 et 123, et en particulier à l'article 119, qui dit clairement que les fonctionnaires autorisés peuvent pénétrer sur des lieux, procéder à des vérifications et à des inspections?

Est-ce qu'elle trouve normal que des fonctionnaires craignent à ce point que, finalement, ils décident de ne pas se rendre sur les lieux?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: M. le Président, je m'en voudrais d'exprimer une opinion sans vraiment connaître le dossier. Encore une fois, je prends avis de la question. Le ministre de l'Environnement apportera sûrement des réponses ou un éclairage nouveau à ces questions.

Le Président: M. le député d'Ungava, en principale.

Ventes de l'électricité de la Baie James à la Central Maine Power

M. Claveau: Oui, M. le Président. On se souviendra que le 8 mars dernier, ici même en cette Chambre, le premier ministre du Québec déclarait pathétiquement qu'il vivait ce qu'il appelait l'un des meilleurs moments de sa carrière politique. À ce moment-là, il nous annonçait la continuation des travaux de construction à la Baie James, prévue d'ailleurs par Hydro-Québec, et qui était liée à des ventes d'énergie, disait-il, garanties signées de 2400 mégawatts. On vient d'apprendre que tel n'est pas le cas. En effet, si on se réfère au journal Le Soleil du 11 février 1987, on pouvait lire: "Hydro-Québec et la Central Maine Power ont signé hier une lettre d'entente qui conduira dans quelques mois à la conclusion du plus important et du plus long contrat d'exportation d'électricité de l'histoire de la société d'État québécoise."

On vient donc d'apprendre que tel n'est pas le cas et qu'avant même que les travaux soient commencés à la Baie James, on encaisse déjà des pertes de 9 000 000 000 $ et de plus de 500 mégawatts sur les contrats qui étaient prévus. Comment le ministre de l'Énergie et des Ressources du Québec, lui qui se prétend fin négociateur, peut-il se satisfaire d'un tel résultat et comment peut-il continuer à prétendre que les acheteurs d'électricité pour le Québec se bousculent à nos portes comme il le clamait si bien en campagne électorale?

Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des Ressources. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: M. le Président, si le député d'Ungava avait lu tous les journaux ce matin, il n'aurait pas posé cette question. Je vais lui expliquer ce qui s'est produit.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! (10 h 40)

M. Ciaccia: Voulez-vous avoir la réponse ou vous ne la voulez pas? L'année dernière, il y a eu une annonce d'une lettre d'entente signée avec Central Maine pour 900 mégawatts. Il y avait certains délais de livraison dans la lettre. Les premiers 400 mégawatts devaient être livrés en 1992. La deuxième partie du contrat commençait en 1995. Avec la livraison de l'électricité au Maine, il y avait aussi une participation d'Hydro-Québec dans une ligne de transmission dans l'État du Maine pour créer une autoroute de l'électricité dans les États américains pour Hydro-Québec. Ce qui s'est produit, c'est que, pour maintenir les délais prévus pour la livraison de l'électricité et pour obtenir les consentements nécessaires par les organismes réglementaires, la Public Utilities Commission, Hydro-Québec avait deux choix: soit d'attendre ces consentements pour livrer tous les 900 mégawatts plus la ligne de transmission ou procéder immédiatement avec les 400 mégawatts, plus la ligne de transmission et obtenir les autres 500, finaliser les autres 500 dans la prochaine année.

C'est cela qu'Hydro-Québec a fait. Ils ont finalisé les 400 mégawatts. Ils vont procéder avec les travaux pour la ligne de transmission qui va nous permettre de livrer jusqu'à 2000 mégawatts dans l'État du Maine et, au cours de la prochaine année, nous allons conclure pour les autres 500 mégawatts. Il n'y a rien de changé, M. le Président.

Le Président: M. le député d'Ungava, en additionnelle. M. le député d'Ungava, en additionnelle.

M. Claveau: Oui. Le ministre de l'Énergie et des Ressources peut-il confirmer la déclaration du gouverneur du Maine à savoir que le contrat dont il était question, les chiffres qu'on retrouve dans le contrat ne correspondent pas aux chiffres qu'on retrouve dans la lettre d'entente de février 1987.

Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des Ressources. M. le ministre.

M. Ciaccia: M. le Président, je viens juste de donner l'explication. Peut-être que le député d'Ungava pourrait continuer de citer l'article dans le journal. Je vais le citer pour lui "Le ministre John Ciaccia explique que, pour se conformer à la volonté de la Public Utilities Commission du Maine, seuls les 400 premiers mégawatts prévus à l'entente initiale feront l'objet de cette signature."

Il y aura une signature de contrat pour accélérer les travaux. Un autre contrat sera

élaboré et ratifié d'ici à 1989 pour officialiser la deuxième tranche de l'accord qui portait sur 900 mégawatts. C'est l'explication.

M. le Président, dans les circonstances, suivant les conditions de la lettre d'entente signée par Hydro-Québec - c'est Hydro-Québec qui a négocié cette lettre d'entente - la décision d'aller de l'avant maintenant avec 400 mégawatts et avec la ligne de transmission qui va ouvrir des possibilités d'exportation jusqu'à 2000 mégawatts...

Le Président: En conclusion, M. le ministre.

M. Ciaccia: ...c'est la bonne décision qu'Hydro-Québec et le gouvernement ont prise.

Le Président: M. le député d'Ungava, en additionnelle.

M. Claveau: M. le Président, en février 1987, on annonçait une vente ferme garantie de 15 000 000 000 $, soit 900 mégawatts. Aujourd'hui, on nous dit qu'il y a 400 mégawatts de vendus et que pour les 500 autres, on ne sait pas quand cela va venir. Est-ce que le ministre de l'Énergie et des Ressources peut donner à la population du Québec la garantie que les 500 mégawatts dont il parle vont être signés dans les délais qu'il prévoit?

Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: L'année dernière, je regrette, on n'a pas annoncé la signature ferme de 900 mégawatts. On a annoncé la signature d'une lettre d'entente de 900 mégawatts et on a étalé toutes les conditions de cette lettre d'entente.

Je voudrais dire au député d'Ungava pour le rassurer que depuis la signature de cette lettre d'entente, nous avons signé d'autres contrats à des prix supérieurs aux conditions qui sont incluses dans la lettre d'entente du Central Maine. Nous avons signé des contrats excédant 1000 mégawatts.

Je peux assurer au député d'Ungava et à cette Assemblée que nous n'aurons aucune difficulté à concrétiser les 500 mégawatts additionnels de la lettre d'entente parce qu'ils sont à un prix inférieur à celui auquel nous vendons maintenant. Alors, le député d'Ungava n'a pas à se préoccuper et à s'inquiéter. HydroQuébec et nous allons faire nos devoirs et...

Le Président: En conclusion, M. le ministre.

M. Ciaccia: ...les 500 mégawatts seront signés dans les délais prévus pour livrer l'électricité pour 1995, selon la volonté du gouvernement, suivant les conditions de la lettre d'entente et...

Le Président: En conclusion, M. le ministre.

M. Ciaccîa: ...les besoins - le député d'Ungava doit le comprendre - d'électricité québécoise dans les États nord-américains des États-Unis.

Le Président: Je vais maintenant reconnaître la quatrième principale à M. le chef de l'Opposition.

Modifications possibles au projet de loi sur les services ambulanciers

M. Chevrette: Merci, M. le Président. On sait qu'il y a eu dépôt en cette Chambre d'un projet de loi 34 sur les services ambulanciers. On sait, à la suite des consultations particulières de la semaine dernière, que la majorité des groupes, à l'exception d'un seul, exigeaient des amendements majeurs sur le fond.

On sait que le ministre est embarrassé par ce projet de loi. Lundi matin, il avait convoqué les parlementaires à 10 heures le matin en commission. Le ministre n'a même pas daigné se présenter, sous prétexte qu'il était au comité de législation, pour préparer des amendements.

Encore aujourd'hui, le ministre doit aller au Conseil des ministres avec le projet de loi. On sait également qu'il y a un caucus à 18 heures, car - on doit le dire à la population - plusieurs députés ministériels sont fort embarrassés avec ce projet de loi.

Je voudrais savoir de la part du ministre s'il entend déposer, avant la fin de la présente session, un projet de loi modifié et s'il entend réaliser l'engagement que la CSN prétend qu'elle a avec lui, c'est-à-dire procéder à l'adoption du projet de loi avant l'ajournement de cette session?

Le Président: M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux. M. le ministre.

M. Dutil: M. le Président, le chef de l'Opposition vient de donner l'agenda des ministres et des parlementaires. Effectivement, le mercredi, en général, il y a un Conseil des ministres auquel assistent les ministres, bien sûr. Et, en général, il y a un caucus une fois par semaine et il a lieu ce soir parce que le premier ministre était absent, hier. C'est un caucus régulier, alors rien de nouveau sous le ciel à cet effet.

Quant à la dernière remarque du chef de l'Opposition, j'ai dit la semaine dernière et je le répète qu'il n'y a aucun engagement qui a été pris de ma part, à savoir qu'un projet de loi soit adopté à l'Assemblée nationale pour la fin de cette session. Nous en sommes à l'étude article par article. L'article 2, premier paragraphe, après douze heures de discussions, vient d'être adopté. Cet après-midi, j'espère que nous entreprendrons l'article 2, deuxième paragraphe!

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle.

M. Chevrette: M. le Président, est-ce que le ministre peut être sérieux et nous dire s'H est exact qu'il s'est présenté au comité de législation, lundi matin, afin d'apporter des amendements? Peut-il nier ce qu'il a dit à des propriétaires ambulanciers, qu'il allait au Conseil des ministres pour exiger des amendements? Peut-il nier le fait que le leader du gouvernement ait dit au leader de l'Opposition que le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux s'apprêtait à apporter des amendements? Peut-il être sérieux et répondre correctement aux questions qu'on lui pose?

Le Président: M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux. M. le ministre.

M. Dutil: M. le Président, les discussions du Conseil des ministres sont connues après que le Conseil des ministres a siégé.

Le Président: M. le chef de l'Opposition, en additionnelle.

M. Chevrette: M. le Président, peut-il nier qu'il est allé présenter des amendements au comité de législation et que celui-ci l'a référé précisément au Conseil des ministres? Peut-il nous dire s'il sera question au Conseil des ministres des amendements de fond quant au projet de loi 34?

Le Président: M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux. M. le ministre.

M. Dutil: M. le Président, ce que je peux dire et ce que le chef de l'Opposition sait, c'est qu'il y a une obstruction systématique actuellement de la part de l'Opposition au projet de loi. Nous considérons que c'est un bon projet de loi. L'Opposition n'est pas d'accord avec celui-ci et elle désire empêcher son adoption. C'est l'affaire de l'Opposition, nous sommes dans un système parlementaire. Si l'Opposition veut le considérer comme tel, c'est son affaire.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, en additionnelle.

M. Chevrette: M. le Président, si le ministre considère que son projet de loi est bon, comment peut-il nous expliquer qu'il ne s'est même pas présenté en commission parlementaire, lundi matin? Si son projet de loi est si bon que cela, peut-il nous expliquer pourquoi ses collègues à la commission même, au moins deux de ses collègues, ont demandé des amendements de fond? Comment peut-il expliquer, à ce moment- là, qu'il tente de faire porter l'odieux sur l'Opposition, alors qu'il n'a même pas le courage politique de déposer les amendements requis par ses propres collègues?

Le Président: M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux. M le ministre.

M. Dutil: M. le Président, quand I Opposition discute pendant deux heures sur un article qui spécifie qu'il y aura la création d'un organisme sans but lucratif, appelé Corporation d'urgences-santé*, quand on discute pendant deux heures sur ce sujet, il est bien évident que l'Opposition ne veut pas que ce projet de loi chemine, pour les raisons qui lui appartiennent et que je respecte, personnellement.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, en additionnelle?

M. Gendron: Oui, en additionnelle, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, en additionnelle. (10 h 50)

M. Gendron: Comment le ministre délégué à la Famille peut-il être sérieux et faire accroire à la population que c'est à cause de l'obstruction de l'Opposition dans ce dossier qu'il ne peut pas cheminer dans son projet de loi, alors que, la semaine dernière, il y avait obstruction de l'Opposition pour empêcher le gouvernement d'annuler le recensement et cinq heures après, après une loi spéciale, la loi a été adoptée?

Le Président: M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux M. le ministre.

M. Dutil: M. le Président, est-ce que je dois comprendre que l'Opposition suggère une motion de clôture? Je pense...

Une voix: Fais ta job, fais-la, mon niaiseux!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Dutil: M. le Président, entendons-nous bien.

Le Président (M. Saint-Roch): Allez, M. le ministre, vous avez la parole. À l'ordre, s'H vous plaît! À l'ordre, s'H vous plaît! M. le leader du gouvernement, une question de règlement.

M. Gratton: M. le Président, je ne sais si, effectivement, c'est la suggestion de l'Opposition

d'imposer ce qu'on appelle la clôture, mais encore faudrait-il avoir l'assurance que l'Opposition ne se retirera pas comme ils l'ont fait pour l'autre projet de loi.

Le Président: Alors, M. le ministre, vous avez toujours la parole. Vous avez toujours la parole, M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux.

M. Dutil: M. le Président, c'est un projet de loi important et sérieux. C'est un projet de loi qui mérite d'être discuté article par article. J'ai toujours montré une ouverture dans tous les projets de loi où j'ai été impliqué et où il y a eu des discussions en commission parlementaire. J'entends le député de Gouin qui ricane, mais le député de Gouin se rappellera que, lors de la discussion article par article sur le Conseil de la famille, à la suite d'une argumentation de très grande qualité qu'il avait faite, j'avais retiré un article du projet de loi. Alors, M. le Président, dans les discussions article par article, j'ai toujours considéré les arguments de valeur, qu'ils viennent de quelque côté que ce soit de la Chambre, des parlementaires qui siègent en commission. Nous pourrons...

Le Président: À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

En conclusion, M. le ministre. M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux, en conclusion. À l'ordre, s'il vous plaît!

Je m'excuse, M. le leader adjoint de l'Opposition, s'il vous plaît! M. le leader adjoint de l'Opposition, s'il vous plaît! En conclusion, M. le ministre.

M. Dutil: En conclusion, M. le Président, quand le ministre, en commission parlementaire, refuse des amendements, il est têtu et, quand il les accepte, il a un projet de loi qui n'était pas adéquat. Alors, on ne pourra jamais contenter l'Opposition sur ce point.

Le Président: Je vais reconnaître une additionnelle à M. le député de Gouin. Une additionnelle, M. le député de Gouin.

M. Rochefort: M. le Président, le ministre reconnaît-il que, s'il acceptait d'apporter des amendements sur les questions fondamentales qui posent des problèmes dans son projet de loi, d'une part, a l'égard des propriétaires ambulanciers, mais, deuxièmement, aussi à l'égard d'un système d'Urgences-santé qui fonctionne bien actuellement et qui, par les propositions législatives apportées par le ministre, sera chambardé et posera des problèmes de qualité et d'accès à des services d'urgence... Déposez des amendements sur ces questions et votre projet de loi pourra être adopté.

Le Président: M. le ministre délégué à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux.

M. Dutil: Le député de Gouin reconnaît-il que nous n'avons même pas pu aborder le débat de fond des articles cruciaux, puisque nous n'y sommes pas parvenus? Nous ne sommes pas parvenus à nous rendre à ces articles-là.

Le Président: À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Dutil: Après plus de deux jours de discussions en commission parlementaire, nous en sommes au paragraphe 1° de l'article 2. Cet après-midi, nous en serons au paragraphe 2° de l'article 2.

Le Président: Je vais reconnaître la cinquième principale ce matin à M. le whip du gouvernement. M. le whip du gouvernement, vous avez la parole.

Remboursements d'impôt provincial effectués à plus de 2 500 000 contribuables

M. Vallières: M. le Président, nous savons tous que le ministère du Revenu n'a plus à se faire une réputation en ce qui a trait à la perception des impôts des contribuables. À ce moment-ci de l'année, il serait peut-être, par ailleurs, plus dans le ton de parler de remboursements d'impôt. Je sais à cet égard que le ministre du Revenu avait fait, en particulier l'année dernière, des efforts considérables pour raccourcir les délais des remboursements aux contribuables québécois. Ma question s'adresse au ministre du Revenu. Est-ce qu'il peut nous indiquer si les contribuables du Québec sont en mesure de s'attendre à un remboursement plus rapide cette année? Quelles sont les mesures qu'il a mises de l'avant afin d'y arriver? Et croit-il pouvoir changer le vieil adage au Québec qui indique que le ministère du Revenu est un bien bon collecteur, mais un très mauvais payeur?

Le Président: M. le ministre du Revenu. M. le ministre.

M. Séguin: Merci, M. le Président. Je remercie mon collègue, député de Richmond, de me donner l'occasion de faire le point sur cette question. En effet, vous savez comme moi, M. le Président, que la question des remboursements d'impôt, chaque année, est une question fort importante et cruciale pour les contribuables. Je salue à ce sujet, M. le Président, les efforts qu'a faits le ministère du Revenu depuis plusieurs années, non pas uniquement, je l'avoue, depuis que nous sommes au pouvoir, mais depuis plusieurs années. Je salue l'effort particulier des employés du ministère qui ont voulu vraiment

améliorer le système des remboursements. Je dois dire que mon prédécesseur, l'actuel leader du gouvernement, qui était à ce moment-là ministre du Revenu, avait commencé une manoeuvre particulière pour qu'on puisse régler la question des remboursements. Cette année, je suis particulièrement fier de vous dire aujourd'hui que nous avons terminé l'opération des remboursements d'impôt pour l'ensemble des contribuables du Québec. C'est la première fois qu'une administration fiscale en Amérique du Nord réussit dans ce délai à envoyer la presque totalité des remboursements.

En terminant, je vais vous donner quelques chiffres. Des 4 000 000 de personnes qui ont fait des rapports d'impôt, nous avons émis 3 417 491 avis de cotisation, dont 2 526 320 étaient accompagnés d'un chèque de remboursement. Cela veut dire que, au moment où je vous parle, la mission est accomplie au ministère du Revenu.

Une voix: Cela veut dire qu'on n'a pas trop "collecté".

Le Président: M. le leader de l'Opposition, en principale.

Légalisation de programmes de réadaptation de la CSST invalidés par la Cour d'appel

M. Gendron: Lundi dernier, j'avais l'occasion d'interroger le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail, responsable de la CSST, à la suite du jugement rendu, le 3 juin dernier, par la Cour d'appel, invalidant les dispositions qui ont pour conséquence que les accidentés du travail sont menacés et sont très inquiets, en particulier, concernant toute la question des programmes de réadaptation qui ont été déclarés invalides par la cour.

Une des questions que je posais au ministre du Travail, c'est: Est-ce que le conseil d'administration de la CSST a pris une décision? La réponse a été: Non, le conseil d'administration n'a pas encore arrêté complètement sa décision concernant l'éventualité d'aller en appel de cette décision. Or, j'ai l'information que c'est inexact, le conseil d'administration a bel et bien statué à savoir, qu'il ne lui apparaît pas que le fait d'aller en appel réglerait la situation. C'est tellement vrai qu'il a acheminé un amendement au ministre du TravaS.

La question que je pose, c'est: Est-ce que le ministre du Travail maintient toujours que le conseil d'administration de la CSST n'a pas statué? Deuxièmement, quelle réception a-t-il accordée à l'amendement que le conseil d'administration lui a proposé?

Le Président: M. le ministre de la Main-ci Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, étant donné que le leader de l'Opposition officielle, député d'Abitibi-Ouest, avoue très honnêtement qu'il s'agit de la même question qu'il m'a posée lundi dernier, j'aurais la tentation de lui répondre que la même réponse s'applique. Quant à l'argument plus pointu, plus précis qu'il met de l'avant dans sa question additionnelle d'aujourd'hui, je lui indiquerai que tous les aspects juridiques du problème n'ont pas été vidés et qu'avant d'inviter l'Assemblée nationale du Québec à se prononcer sur la possibilité d'un projet de loi ou sur le contenu d'un projet de loi, il apparaît opportun au gouvernement de vider tout l'aspect juridique du problème parce que ces aspects juridiques affectent les droits de milliers de travailleurs accidentés.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, en additionnelle.

M. Gendron: Est-ce que le ministre peut nous indiquer si, oui ou non, il a reçu un amendement majeur du conseil d'administration de la CSST lui demandant de modifier l'article 570 afin de légaliser les anciens programmes de réadaptation?

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M le Président, le leader de l'Opposition officielle et député d'Abitibi-Ouest devrait connaître davantage le fonctionnement de l'appareil gouvernemental, lui qui a occupé d'importantes fonctions sous l'ancien gouvernement. En ce qui concerne les textes législatifs, ils sont habituellement approuvés par divers comités au sein de l'appareil gouvernemental et soumis à l'Assemblée nationale du Québec pour considération dans le processus que vous connaissez bien.

Le Président: M. le leader de l'Opposition. (11 heures)

M. Gendron: Oui, M. le Président, c'est exact que j'ai occupé d'importantes fonctions mais, comme ministre, je ne disais pas l'inverse de l'information que j'avais. La question est très claire, et je sais que cela n'intéresse pas le ministre de répondre aux questions. Mais ma question est précise. Est-ce que, oui ou non, vous avez reçu un amendement de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, à la suite d'une deuxième rencontre du conseil d'administration, vous demandant, comme ministre, d'apporter par voie législative, un amendement qui permettrait aux accidentés de recouvrer le droit qu'ils veulent avoir concernant leur indemnité, en particulier pour ce qui est des programmes de réadaptation?

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je comprends tout l'intérêt que le député d'Abttibi-Ouest et leader de l'Opposition officielle porte à toute la question de la procédure qui doit entourer le cheminement d'une modification législative. Je lui indiquerai qu'en tant que ministre du Travail, responsable devant cette Chambre de la Commission de la santé et de la sécurité du travail, ce qui m'importe davantage, c'est de m'assurer que les travailleurs ne se retrouvent pas dans un vide juridique. Ce qui m'importe davantage, c'est de m'assurer que ces travailleurs continuent de recevoir les prestations auxquelles ils ont droit. Et, ce qui m'importe également, c'est de me pencher très attentivement sur la non-indexation des pensions de ces gens-là, non-indexation causée par une négligence du gouvernement péquiste.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, en additionnelle.

M. Gendron: Le ministre du Travail admet-il qu'en répondant comme il le fait...

Une voix: II ne dit pas la vérité.

M. Gendron: ...il ne dit pas la vérité? Il laisse croire qu'il n'a pas obtenu l'amendement qui a été envoyé par le conseil d'administration de la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Et, rappelez-vous, M. le Président, c'est lui, le ministre, qui, lundi dernier, m'a dit que le conseil d'administration n'avait pas statué. C'est inexact. Je veux lui faire dire s'il admet que les informations qu'il a, aujourd'hui, sont contraires à ce qu'il nous a dit lundi dernier?

Une voix: C'est cela.

Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'admets et je répète devant cette Chambre, M. le Président, que sur le plan juridique, le dossier n'a pas encore été complètement vidé et qu'il m'apparaît qu'une question de cette importance mérite de recevoir les décisions finales de notre système judiciaire avant que l'Assemblée nationale soit saisie de quelque amendement que ce soit à un projet de loi. Je pense qu'il s'agit là d'un minimum requis avant d'agir. Merci, M. le Président.

Le Président: Tel qu'annoncé précédemment, je vais reconnaître M. le Solliciteur général à un... Si vous me permettez. En complément de réponse.

Réponse différée

Les conditions d'admission à l'Institut de police de Nicolet

M. Marx: M. le Président, vendredi passé le député de Jonquière a posé une question qui touche le ministère du Solliciteur général. Malheureusement, j'étais absent durant la période de questions. J'étais à Montréal afin de m'adres-ser à l'Association des psychologues sur la violence conjugale. Mais ceci dit, j'ai la réponse aujourd'hui en ce qui concerne les conditions d'embauché des futurs policiers.

Un comité interministériel a été formé il y a quelques mois pour examiner le programme de formation, les conditions d'admission au programme et les conditions d'embauché des futurs policiers. Ce comité est formé de représentants des ministères du Solliciteur général et de l'Éducation, de l'Institut de police et des cégeps. D'ici la fin de juin, mon collègue de l'Éducation et moi-même devrions recevoir les recommandations et soyez assuré, M. le Président, que nous vous ferons part de nos décisions dès qu'elles seront arrêtées.

Le Président: M. le député de Jonquière, en additionnelle.

M. Dufour: Est-ce que le ministre, après une réponse qui est pratiquement le mot à mot de celle du ministre de l'Éducation, est prêt à nous informer ce matin qu'il va donner suite à la réforme policière qu'il a tant vantée dans le passé et à laquelle il s'est engagé?

Le Président: M. le Solliciteur général.

M. Marx: Oui, M. le Président. En ce qui concerne la question de la formation des futurs policiers, quand j'aurai le rapport et quand le ministre de l'Éducation aura reçu la sienne, nous prendrons les mesures qui s'imposent dans ce dossier.

Le Président: Alors, fin de la période régulière de questions.

Ce matin, il n'y a pas de vote reporté.

Motions sans préavis.

Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Gratton: M. le Président, j'avise l'Assemblée qu'aujourd'hui après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et, si nécessaire, de 20 heures à 24 heures...

M. Gendron: M. le Président, question de règlement.

Le Président: Sur une question de règle-

ment, M. le leader de l'Opposition.

M. Gendron: Très simplement, aujourd'hui, étant donné l'ampleur des avis, en particulier pour les projets de loi privés, si on doit suspendre 30 secondes pour des questions de déplacement, qu'on le fasse tout de suite, mais j'aimerais bien qu'on entende les avis transmis par le leader du gouvernement.

Le Président: Je suis entièrement d'accord avec vous, M. le leader de l'Opposition. M. le leader du gouvernement, vous avez la parole. Je demanderais la collaboration de tous les députés en cette Chambre. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, j'avise l'Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et, si nécessaire, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission des affaires sociales poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 34, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives. Je rappelle à l'Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission du budget et de l'administration entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants, et ce dans l'ordre indiqué, soit le projet de loi 205, Loi concernant la conversion de la Fédération des caisses d'établissement du Québec, des caisses d'épargne et de crédit qui lui sont affiliées et de la Corporation de fonds de sécurité de la Fédération des caisses d'établissement du Québec ainsi que leur fusion avec la Société d'entraide économique du Québec inc.; projet de loi 214, Loi concernant Elzéar Plourde Itée; projet de loi 217, Loi concernant Vilmont inc.; projet de loi 233, Loi concernant Les Immeubles Benoît inc.; projet de loi 242, Loi concernant le Club des Portes de l'Estrie inc.; projet de loi 206, Loi concernant La Laurentienne, mutuelle d'assurance; et finalement le projet de loi 221, Loi modifiant la Loi fusionnant le Trust Général du Canada et la Société d'administration et de fiducie. L'ordre de l'étude de ces projets de loi pourra être modifié selon une décision de la commission.

Finalement, de 20 heures à 24 heures, à la salle 101 de l'édifice Pamphile-Le May, la commission de l'éducation entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi privé 204, Loi modifiant la Loi sur le Collège militaire Royal de Saint-Jean.

M. le Président, en dérogation à l'article concernant la convocation des intéressés dans le cadre de l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé et de consentement avec l'Opposition, j'avise l'Assemblée que demain, le 16 juin, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement et des équipements entendra les intéressés et procédera à l'étude détailée du projet de loi d'intérêt privé 209, Loi concernant la ville de Métabetchouan.

Le Président: Je m'excuse, M. le leader du gouvernement, avant de continuer...

M. Gratton: Je m'excuse, monsieur...

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour déroger aux règles de fonctionnement de cette Assemblée relativement à ce projet de loi 209?

M. Gendron: Puisqu'il vous a indiqué, M. le Président, qu'il avait le consentement de l'Opposition. Dans son avis, il indiquait qu'il y avait consentement...

Le Président: II y a consentement de cette Assemblée?

Une voix: Oui.

M. Gratton: M. le Président, j'avise également l'Assemblée que demain, le 16 juin, de 21 heures 30 à 24 heures, à la salle 101 de l'édifice Pamphile-Le May, la commission de l'économie et du travail entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi 213, Loi concernant la fusion par absorption entre la Coopérative forestière du Nord-Ouest et la Fédération des chantiers coopératifs de l'Ouest québécois. Cet avis annule celui donné le 8 juin concernant ledit projet de loi. Enfin, j'avise cette Assemblée que l'avis donné le 9 juin concernant l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé 235, Loi modifiant la charte de la ville de Saint-Hyacinthe, est annulé.

Le Président: J'ai également un avis à faire part aux membres de cette Assemblée. La commission de l'éducation se réunira ce soir, en séance de travail, dès que l'étude du projet de loi 204 sera terminée, à la salle 101 de l'édifice Pamphile-Le May. Est-ce qu'il y a d'autres avis concernant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement?

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée? Mme la députée de Chicoutimi.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Mme Blackburn: Oui, M. le Président. J'aimerais savoir si vous avez reçu une demande pour déposer une pétition qui a été signée par plusieurs milliers de pétitionnaires, des parents de la commission scolaire de Rivière-du-Loup. Cette pétition a été remise au ministre délégué aux Forêts, il y a deux semaines. Sinon, est-ce que vous pouvez me donner des directives quant aux moyens dont ces personnes disposent pour faire respecter leurs droits de voir une pétition déposée en Chambre?

Le Président: Je pense que c'est très clair. Je n'ai pas à donner d'opinion juridique quant au dépôt d'une pétition. La pétition doit être déposée au bureau du secrétaire général selon notre règlement. Quand on la recevra, elle sera présentée immédiatement à la Chambre si elle est conforme.

Mme Blackburn: M. le Prédisent, elle a été déposée au bureau du ministre délégué aux Forêts, il y a deux semaines.

Le Président: Je n'ai pas d'opinion juridique à donner à qui que ce soit dans cette Assemblée. Je le répète, il suffit qu'on respecte le règlement de cette Assemblée et elle sera présentée devant cette Assemblée.

Mme Blackburn: Bien, je vous remercie. (11 h 10)

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Oui. Aux affaires du jour, M. le Président?

Le Président: Oui, aux affaires du jour.

M. Gratton: Je vous prierais d'appeler l'article 27 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi 5

Le Président: À l'article 27 du feuilleton, il s'agit de l'adoption du projet de loi 5, Loi modifiant la Loi sur les mines, présenté par M. le ministre délégué aux Mines et aux Affaires autochtones. J'aimerais reconnaître le premier intervenant sur ce...

M. Gratton: M. le Président, je fais motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière pour considérer l'amendement déposé hier par le ministre délégué aux Mines.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Jolivet: Adopté.

Le Président: Adopté. Alors, cette Assemblée se transforme en commission plénière.

(Suspension de la séance à 11 h 12)

(Reprisée 11 h 15)

Commission plénière

Étude de l'amendement présenté par le ministre délégué aux Mines

M. Saintonge (président de la commission plénière): La commission plénière se réunit maintenant pour l'étude de l'amendement proposé par M. le ministre délégué aux Mines et aux Affaires autochtones, amendement proposé au projet de loi 5, Loi modifiant la Loi sur les mines. L'amendement en question concerne l'article 47.1 et se lit comme suit: Insérer après l'article 47 du projet de loi l'article suivant: 47.1 L'article 273 de cette loi est modifié, premièrement, par le remplacement dans la deuxième ligne du premier alinéa du mot "construire" par les mots "rechercher, le droit de construire et le droit d'exploiter".

Deuxièmement, par le remplacement du deuxième alinéa par le suivant: "Là où les droits ont été révoqués, le gouvernement peut, aux conditions qu'il fixe, accorder le droit de rechercher, le droit de construire et le droit d'exploiter un réservoir souterrain. Ces droits miniers sont des droits réels immobiliers et le gouvernement peut leur rendre applicable toute disposition de la présente loi."

Sur l'amendement en question, M. le ministre délégué aux Mines et aux Affaires autochtones.

M. Savoie: Merci. C'est une dernière addition à la modification de la Loi sur les mines qui est devenue nécessaire à la suite d'une révision de l'article 273. Étant donné que le gros de l'orientation porte sur les réservoirs souterrains construits et que cela relève finalement des opérations d'énergie au Québec et à la suite de la demande de l'Opposition, pour la présentation et la défense de cet article, la présence du ministre de l'Énergie et des Ressources pourra peut-être accéder à la demande de l'Opposition et répondre ainsi aux questions.

Le Président (M. Saintonge): Très bien, M. le ministre. M. le député d'Ungava.

M. Claveau: M. le Président, dans un premier temps, si on a demandé qu'il y ait une commission plénière qui siège là-dessus, c'est que le procédé qui a été entrepris nous semble un peu bizarre. On arrive en troisième lecture, au moment de l'adoption. On n'est même pas au discours du ministre, mais plutôt à la toute fin, au moment de sa réplique au discours de l'Opposition. Il nous arrive avec un amendement qui n'a jamais été annoncé à qui que ce soit de l'Opposition, en tout cas, moi, je n'en ai jamais eu connaissance. Personne n'en a eu connaissance. On a un amendement qui a l'air anodin mais qui peut nous amener à nous poser certaines questions sur la pertinence de le faire de cette façon, ce qui est complètement inacceptable, à notre avis, comme démarche.

D'autre part, le fait qu'on nous amène quelque chose à la toute dernière minute sans en annoncer les raisons ni en avoir jamais parlé nous amène à nous poser de sérieuses questions sur le fait qu'il pourrait s'agir de quelque chose que le ministre n'aimerait pas discuter. On

trouve que ça sent un peu le chauffé en-dessous de cela. On aura quelques questions à poser au ministre.

C'est pour cela, aussi, qu'on a exigé que le ministre de l'Énergie et des Ressources soit présent parce que, comme nous le disait le ministre délégué aux Mines, hier, l'amendement a été déposé à sa demande. C'est le ministre de l'Énergie et des Ressources qui lui a amené l'amendement pour qu'il le mette dans la Loi sur les mines. C'est quelque chose qui touche le gaz naturel et, éventuellement même, le gaz liquide.

À notre avis, il aurait pu très bien en être question alors qu'on en était à l'étape de l'adoption du rapport de la commission concernant la Loi sur la régie du gaz. Tout cela s'est fait sans que jamais on ne parle d'un amendement potentiel sur les mines. On nous arrive à la dernière minute avec cela. On tient à questionner les deux ministres qui sont présents pour connaître le véritable fondement et la pertinence de cet amendement.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: M. le Président, y n'y avait aucune intention de bousculer l'Opposition ou de cacher quoi que ce soit en ce qui concerne l'amendement qui est en discussion.

L'intention de l'article 273, tel que rédigé présentement, avant que nous apportions notre amendement, était que le gouvernement puisse "révoquer sur toute partie du territoire qu'il détermine le droit de construire... un réservoir souterrain pour l'emmagasinage de pétrole, de gaz naturel ou d'autres hydrocarbures." C'était l'intention.

Pour construire, il faut nécessairement faire une recherche. Après qu'on a construit, H faut exploiter. On s'est aperçu... Le principe de l'article 273 a été accepté quand le projet de loi a été adopté. Les rédacteurs et le service juridique du ministère nous ont donné un avis stipulant que de la façon dont c'est rédigé, cela limite à construire. Cela n'englobe pas l'aspect recherches. Avant de construire, il faut faire des recherches. Après avoir construit, il faut exploiter.

Alors, le premier but de l'amendement, c'est de clarifier cela. Ce n'est pas d'ajouter, de cacher ou d'enlever des droits qui existent déjà, c'est de clarifier l'intention du premier alinéa. C'est pour cela qu'on ajoute: "le gouvernement peut révoquer sur toute partie du territoire qu'il détermine, le droit de rechercher, de construire et d'exploiter un réservoir souterrain, pour l'emmagasinage de pétrole, de gaz naturel ou d'autres hydrocarbures."

Cela complète ce qui était l'intention du législateur pour ne pas qu'il y ait de lacune, pour permettre que l'article 273 veuille vraiment dire quelque chose. Si on a seulement le droit de construire, ce n'est pas assez. Juridiquement, il faut aller faire des recherches et exploiter. C'est le premier changement.

Le deuxième changement, c'est pour clarifier la sorte de droit qu'on accorde. C'est un régime particulier. On ne veut pas qu'y y ait d'ambiguïté et que le droit de rechercher, de construire ou d'exploiter soit un droit réel. Dans le deuxième alinéa, on ajoute les mots "ces droits miniers sont des droits réels immobiliers et le gouvernement peut lui rendre applicable toute disposition de la présente loi."

Premièrement, cela clarifie ce que le gouvernement peut faire. Deuxièmement, cela enlève l'ambiguïté sur le fait que c'est un régime particulier et que ce sont des droits réels. C'est le seul but de l'article 273. Maintenant, quand vous dites: Est-ce que cela peut aller à la Régie du gaz? Cela n'a rien à faire avec la Loi sur la Régie du gaz, parce que cela ne s'applique pas seulement au liquide de gaz naturel, cela s'applique à l'emmagasinage de pétrole, de gaz naturel ou d'autres hydrocarbures, cela peut être les liquides. Le gaz naturel, on peut avoir un entreposage à réservoir, emmagasiner le gaz naturel. Cela peut se faire pour les heures de pointe. Gaz métropolitain et le gouvernement regardent les possibilités parce que plus il y a de ventes, plus il va y avoir un besoin aux heures de pointe. Pour satisfaire ce besoin, cela prend de l'emmagasinage. L'emmagasinage de pétrole aussi, on parle toujours des possibilités d'avoir 90 jours de réserve de pétrole en territoire québécois. L'article 273 couvre cela.

Ce sont les buts de l'amendement, les objectifs recherchés. C'est vraiment une clarification. On n'ajoute rien de nouveau et on n'enlève pas les conditions du projet de loi en ce qui concerne les indemnisations. Cela est prévu dans d'autres aspects du projet de loi. On ne réduit pas les droits de ceux qui sont affectés en ce qui concerne l'indemnisation, il va falloir passer par les procédures régulières pour indemniser ceux qui vont demeurer propriétaires des droits de surface. Si on invoque l'article 273, N va falloir compenser, d'après la loi, la valeur de ce que le gouvernement va révoquer, conformément à l'article 273.

Je pense que ce sont, brièvement et aussi complètement que je peux l'expliquer, les raisons pour lesquelles on présente cet amendement maintenant.

Le Président (M. Saintonge): M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Vous me permettrez quand même d'avoir quelques remarques sur tout cela. Cela semble beau, à première vue, mais il doit y avoir des raisons qui ont fait qu'on le voit à la dernière minute, alors que cela a passé à travers... Il faut se rappeler que la Loi sur les mines est adoptée depuis juin 1987; elle n'est pas nouvelle. Cela fait déjà un an qu'elle devrait

être en application. On n'a même pas pu le voir avant de déposer le projet de loi 5. Il a fallu que cela vienne à la toute dernière minute. Qu'on me dise que ce n'est pas lié à un cas précis, vous allez avoir de la difficulté à me faire avaler cela. S'il n'y a pas un cas précis en dessous de cela, il n'y a aucune raison pour que cela apparaisse comme cela. Que les légistes s'en soient rendu compte! Cela fait douze mois que la loi est adoptée, alors on aurait pu le voir avant.

D'autre part, la question des droits réels immobiliers. L'article 8 définit un certain nombre de droits réels immobiliers. Si, par la modification qu'on amène à l'article 273, on veut introduire la notion de droits réels immobiliers, alors on ne voit pas pourquoi, à ce moment-là, on ne l'aurait pas mis à l'article 8. Pourquoi ne l'aurait-on pas inscrit avec les autres droits réels immobiliers, tels que décrits à l'article 8? La procédure que l'on prend à l'article 273, c'est comme si, par exemple, pour définir le daim, le permis d'exploration minière, le bail minier, la concession minière, etc., chaque fois, dans l'article de loi correspondant, on avait dit qu'il s'agissait d'un droit réel immobilier.

On a défini, à l'article 8, ce qui faisait l'objet d'un droit réel immobilier. Alors, il n'aurait pas été plus difficile, au moment où l'on se parle, de présenter un amendement pour modifier l'article 8 et ajouter un droit réel immobilier dans la liste, la propriété sur un réservoir.

En ce qui concerne la notion du droit de recherche, on la retrouve déjà. On la retrouve à l'article 10 où on parle des exemptions d'enregistrement au bureau de la division d'enregistrement. On dit, à l'article 10, que sont exemptés de l'enregistrement au bureau de la division d'enregistrement, le permis de recherche de réservoir souterrain... Donc, on inscrit, d'une part, les exemptions dans la liste des exemptions, tel que cela doit être à l'article 10, mais on n'inscrit pas avec les autres droits réels immobiliers, en 8, le droit réel immobilier sur le réservoir souterrain. Alors, là, il y a un problème. (11 h 30)

D'autre part, vous nous dites qu'il fallait préciser l'objet, la recherche, la construction et l'exploitation, enfin l'utilisation d'un réservoir. L'article 273 se lit comme suit, pour ceux qui pourraient nous écouter et qui n'ont pas le texte: "Le gouvernement peut révoquer sur toute partie du territoire qu'il détermine le droit de construire, à même les substances minérales faisant partie du domaine privé, un réservoir souterrain pour l'emmagasinage de pétrole, de gaz naturel ou d'autres hydrocarbures."

Je vous l'avais dit, il pouvait y en avoir plusieurs. Le droit de construire à même les substances minérales faisant partie du domaine privé, cela présuppose qu'il y a un droit de recherche. C'est bien évident que cela ne se construit pas n'importe où. Le droit de recher- che, on l'a déjà identifié en 10. Il est là, le permis de recherche de réservoir souterrain. Le permis existe. Si le permis existe, c'est parce que cela doit déboucher sur une possibilité de construire. Si on construit pour ces besoins, à ce moment-là, cela débouche aussi sur un permis d'exploitation. Si je ne m'abuse, dans l'ensemble du réseau de distribution du gaz naturel et autres, le réservoir est prévu comme étant un équipement de distribution. Donc, il y a une utilisation qui est là et qui est implicite.

C'est là-dessus que le ministre a parié jusqu'à présent. En tout cas, on peut dire que, qu'il ajoute ou qu'il n'ajoute pas les termes, qu'il les précise ou qu'il ne les précise pas, cela ne change pas grand-chose. Là où cela devient inquiétant, c'est quand on prend ce qu'on vient de lire à l'article 273 et qu'on le juxtapose à l'article 274. Il faut lire l'article 274, M. le Président, pour bien comprendre la portée de la différence que cela apporte. L'article 274 dit que lorsque, après la révocation du droit de construire un réservoir souterrain, un réservoir souterrain est construit et exploité - donc par quelqu'un d'autre - celui dont les droits ont été révoqués a droit, à titre d'indemnité, à une redevance égale à 50 % du loyer annuel fixé conformément à l'article 202 pour un bail d'exploitation de réservoir souterrain de la part du titulaire du bail d'exploitation de réservoir souterrain. Jusqu'à maintenant, à moins que l'on ne comprenne rien, l'article 274, qui suit l'article 273 dans la nomenclature, s'applique donc strictement à la révocation du droit de construire. On parle de "celui dont les droits ont été révoqués". Alors, c'est le droit de construire qui a été révoqué à l'article 273. Cela signifie que tous les droits qui pourraient être reliés à des droits de recherche de réservoir et à des droits d'exploitation de réservoir n'apparaissent pas dans la révocation, au moment où l'on se parle, donc ne peuvent faire l'objet d'indemnisation.

Si on lit l'article 273 tel que proposé, le gouvernement peut révoquer, sur toute partie du territoire qu'il détermine, les droits de recherche, les droits de construire et les droits d'exploiter dans la mesure où il y a des obligations, des droits. Il y a des avantages aussi qui sont liés aux droits de recherche et aux droits d'exploiter. Et cela, ça peut devenir monnayable. À ce moment-là, il faudra que le ministre nous explique dans quelle mesure l'article 273 ne vient pas modifier l'application de l'article 274 en rendant la négociation possible et en rendant les compensations financières substantielles, même nécessaires, dans le cas d'une révocation de permis, où les droits de construire sont révoqués, mais où on ajoute la révocation du droit de recherche et du droit d'exploitation. C'est d'autant plus évident si on a un cas précis en tête au moment où l'on se parle.

Le Président (Saintonge): M. le ministre

délégué aux Mines et aux Affaires autochtones.

M. Savoie: M. le Président, pour ce qui est de l'ajout à l'article 8 du fait que le droit d'avoir accès à un réservoir souterrain est un droit réel immobilier, il n'a pas été mis dans la liste parce qu'on a voulu concentrer, à même l'article 273, l'ensemble des articles portant sur des réservoirs souterrains construits.

M. Claveau: À l'article 10, on retrouve les droits sur les réservoirs souterrains.

M. Savoie: Oui, mais à l'article 10, on parle des deux types de réservoirs souterrains. Effectivement, on faisait référence aux réservoirs souterrains tant naturels que construits. Cela porte sur les deux. L'article 10 ne porte que sur les fins d'enregistrement. On n'a pas vu l'utilité de modifier l'article 8 ou l'article 10.

Pour ce qui est de l'article 273 par rapport à l'article 274, il n'y a pas d'opposition. La révocation d'un droit de rechercher, d'un droit de construire de même que d'un droit d'exploiter est affectée précisément par l'article 274 dans le sens que c'est une continuation. En conséquence, on n'a pas besoin de modifier l'article 274 pour tenir compte de l'article 273, puisqu'on parle effectivement des droits. Il n'y a pas là d'opposition entre la modification proposée et l'article 274.

M. Claveau: M. le Président, je crois que le ministre ne répond pas du tout à notre préoccupation. C'est certain qu'il n'a pas besoin de le modifier s'il veut amener la possibilité d'indemniser sur le droit de recherche et le droit d'exploitation. C'est certain qu'il ne le modifiera pas. L'article 274 est très clair, il dit que dans le cas où il y a une reprise d'exploitation par un tiers à la suite de la révocation du permis d'un premier occupant, à ce moment-là, le nouvel utilisateur devra payer des compensations égales à 50 % du loyer annuel fixé conformément à l'article 212, et ces dédommagements devront être payés en vertu des droits qui auront été révoqués. Cela, c'est clair.

À l'article 273, les droits qui sont révoqués, au moment où l'on se parle, à la lecture de l'article 273 tel quel, sans amendement, ce sont les droits de construire.

M. Ciaccia: Je voudrais juste ajouter...

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: S'il y a seulement une recherche, si cela s'arrête à la recherche et que rien ne se produit, il n'y a rien à faire. À l'article 274, on fixe l'indemnité d'après la construction. C'est seulement si c'est construit. Si quelqu'un fait une recherche et ne fait plus rien, il s'en va...

M. Claveau: Là, on entre dans le noeud du problème, M. le ministre. Si quelqu'un va faire une recherche et qu'il n'a rien construit, mais que ses droits sont révoqués pour un autre, à ce moment-là, en tant que premier intervenant, il peut essayer de se faire payer son forage de recherche, ce qu'il ne pourra pas faire en vertu de l'article 273 tel quel parce qu'il n'y a pas de construction de réservoir. Il ne peut pas avoir de dédommagement pour ses dépenses d'exploration, selon l'article 273 tel qu'on le lit actuellement. Si on le modifie, à ce moment-là, en vertu de l'article 274, il pourra se faire payer des dédommagements pour ses dépenses d'exploration et de recherche.

M. Ciaccia: Par qui voulez-vous qu'une personne qui fait les recherches se fasse payer?

M. Claveau: On le dit: Lorsque après la révocation d'un droit de construire un réservoir souterrain, un réservoir souterrain est construit et exploité, celui dont les droits ont été révoqués a droit, à titre d'indemnité, à une redevance égale, etc..

M. Ciaccia: Oui, cela veut dire le propriétaire.

M. Claveau: ...pour un bail d'exploration de réservoir souterrain de la part du titulaire du bail d'exploitation. Donc, celui qui va payer, c'est le nouveau titulaire du bail d'exploitation, et il va payer les dédommagements.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: Oui, et c'est fixé sur le loyer annuel, conformément à l'article 202. Je ne vois rien de contradictoire là-dedans. S'il y a eu une recherche et qu'il n'y a pas de construction, il va payer la recherche lui-même, c'est fini. S'il y a une construction, on fixe la façon de payer les indemnités à celui dont les droits ont été révoqués. Je ne vois pas de problème là-dedans. (11 h 40)

Le Président (M. Saintonge): M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Oui, M. le Président. Là, on parle en théorie, dans l'hypothèse où cela pourrait se répandre "at large", d'une façon très importante au Québec, ce qui, nous le supposons, ne sera jamais le cas. D'autre part, si le ministre est en train de nous dire qu'il n'y a pas de problème, que cela ne change rien, à ce moment-là, on ne voit pas pourquoi il y aurait des amendements puisque l'amendement change la définition du droit qui va être révoqué.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: Oui, c'est mieux de les prendre un à la fois. Excusez-moi, mais vous couvrez beaucoup de problèmes. Prenons-les un à la fois. Je dis que ce n'est pas nécessaire de changer l'article 274. Le changement pour le droit de rechercher, on le fait à l'article 273 pour donner ce droit-là. Mais cela n'affecte pas les compensations à l'article 274 parce que les compensations à l'article 274 sont établies quand c'est construit. Si on fait juste une recherche...

M. Claveau: Ce qu'on donne, M. le ministre, ce n'est pas le droit...

Le Président (M. Saintonge): Un instant, M. le député d'Ungava. Pour le bénéfice de la discussion, on ne peut pas se promener d'un côté ou de l'autre, comme ça. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources, avez-vous fini vos explications?

M. Ciaccia: Cette partie-là, oui.

Le Président (M. Saintonge): D'accord. Allez-y, M. le député d'Ungava, c'est à vous.

M. Claveau: Le ministre dit: On donne le droit de rechercher. Ce n'est pas cela qu'on donne. À l'article 273, on donne au gouvernement du Québec le droit de révoquer un permis de recherche.

M. Ciaccia: Oui.

M. Claveau: On ne donne pas un droit de rechercher à qui que ce soit. "Le gouvernement peut révoquer, sur toute partie du territoire qu'il détermine le droit de rechercher, le droit de construire et le droit d'exploiter". On n'a donné de droits additionnels à personne. On a juste identifié comme étant une matière révocable le permis de recherche qui va faire l'objet de compensation, après cela, à l'article 274.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre délégué aux Mines et aux Affaires autochtones.

M. Savoie: Je pense que je viens juste de saisir la nature de l'intervention du député d'Ungava. Le député d'Ungava dit, qu'à la suite de la modification à l'article 273 où on parie d'un droit de rechercher, d'un droit de construire et d'un droit d'exploiter, dans l'article 274, on ne parle d'une indemnité que pour le droit de construire et le droit d'exploiter et qu'en conséquence il n'y a pas, à sa face même, à l'article de loi 274, une indemnité pour celui qui a fait de la recherche. Est-ce que c'est cela?

Le Président (M. Saintonge): M. le député d'Ungava.

M. Claveau: C'est une des choses qu'on soulève actuellement.

M. Savoie: C'est une des choses. Si le député d'Ungava regarde la nature même de l'article 273, on dit: "Là où le droit a été révoqué, le gouvernement peut, aux conditions qu'il fixe, autoriser la construction d'un réservoir souterrain et lui rendre applicable à toute disposition de la présente loi relative au bail..." On dit, donc, que l'ensemble de la loi peut s'appliquer, par exemple, à une révocation. Si vous allez voir à l'article 235, il y a là, effectivement, les procédures d'indemnisation qui peuvent s'appliquer ou qui pourront s'appliquer à un droit de rechercher.

Le Président (M. Saintonge): M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Est-ce que l'amendement à l'article 273 va permettre d'indemniser plus de gens ou de les indemniser d'une façon plus large? Quand on dit, à l'article 274 "lorsqu'un réservoir souterrain est construit et exploité", on parle du nouvel utilisateur du réservoir. On n'est pas dans les droits de l'article 273. Là, ce sont les droits du nouvel utilisateur, pas de l'ancien. On dit: "Celui dont les droits ont été révoqués a droit, à titre d'indemnité..." Mais quels sont les droits dont on parie à l'article 274 si ce ne sont pas ceux qui sont déterminés à l'article 273? Est-ce qu'il y a d'autres droits?

M. Savoie: Non. Il n'y a pas d'autres droits. Cela porte sur les droits de l'article 273.

M. Claveau: Bon, actuellement, à l'article 273, il y a un seul droit qui est révoqué et qui peut faire l'objet de compensation. C'est le droit de construire.

M. Savoie: Non.

M. Claveau: Tel qu'on le lit.

M. Savoie: Le droit de construire et d'exploiter.

M. Claveau: Non, non. Dans l'article 273 on dit...

Le Président (M. Saintonge): C'est avant l'amendement, ce que vous mentionnez?

M. Claveau: Avant l'amendement. Tel qu'il est actuellement, il y a un seul droit qui peut faire l'objet de compensation, c'est le droit de construire. Avec l'amendement, il y a trois droits qui vont faire l'objet de compensation: le droit de rechercher, le droit de construire et le droit d'exploiter.

M. Savoie: C'est cela. C'est exactement ce qu'on dit à l'article 273.

M. Claveau: Pourquoi n'est-ce pas ce que vous dites dans les notes explicatives? Ce n'est pas ce que vous nous avez dit au moment de présenter l'amendement.

M. Savoie: Ce qu'on dit à l'article 273, c'est qu'il peut y avoir indemnisation pour les droits en question, en vertu de la Loi sur les mines.

M. Ciaccia: Si cela peut aider le député d'Ungava, révoquer le droit de rechercher ne cause pas de préjudice; on n'enlève rien, on n'enlève pas la substance, les minerais, tout le reste. Pour le droit de rechercher, on ne trouve pas d'indemnisation, parce qu'il n'y a pas d'indemnisation à donner. On n'enlève rien. C'est seulement quand on va enlever quelque chose qu'il va y avoir indemnisation et c'est à l'article 274 qu'on prévoit l'indemnisation. Juste pour rechercher, on n'enlève rien à personne. On peut argumenter à l'inverse et dire que, si on va rechercher à un endroit et qu'on trouve quelque chose, cela va ajouter de la valeur. Là, il va être indemnisé. S'ils ont seulement fait une recherche, cela n'enlève le droit à personne. Alors, il n'y a pas d'indemnisation à donner.

Le Président (M. Saintonge): M. le député d'Ungava.

M. Claveau: M. le ministre, on dit à l'article 273: "Le gouvernement peut révoquer sur toute partie du territoire qu'il détermine." Il est bien clair que, si sur une partie de territoire, on révoque les droits...

M. Ciaccia: De recherche.

M. Claveau: ...de recherche, à ce moment-là, ils sont perdus pour cette compagnie, cet individu ou cette personne morale ou physique. Ces droits de trouver sont perdus et ils appartiennent à quelqu'un d'autre sur ce territoire. Donc, on ne peut plus alléguer qu'il peut retourner chercher sur le même territoire, vous venez de lui enlever, ce droit.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre délégué aux Mines.

M. Savoie: M. le député d'Ungava, vous parlez d'un droit de rechercher. Ce que vous craignez, c'est qu'en révoquant le droit de rechercher celui qui effectue la recherche ne soit lésé, qu'il n'ait fait des dépenses qui ne seront pas remboursées.

M. Claveau: C'est cela.

M. Savoie: On vient tout juste de saisir. Il faut savoir, d'une part, qu'on ne parle ici que du domaine privé, on ne parle pas du domaine public. Alors, celui qui recherche ne peut pas le faire sur les territoires qui appartiennent à la couronne, il faut que cela soit sur un territoire privé. En plus de cela, il faut que cela se fasse sur son territoire à lui.

Une voix: Voulez-vous expliquer cela?

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Savoie: Si vous regardez l'article 273, il est écrit: "Le gouvernement peut révoquer sur toute partie du territoire qu'il détermine le droit de rechercher, le droit de construire et le droit d'exploiter, à même les substances minérales faisant partie du domaine privé", pas du domaine public. Celui qui cherche à construire un réservoir souterrain va le faire à partir d'un territoire sur lequel il a déjà l'autorisation de construire.

Le Président (M. Saintonge): M. le député d'Ungava.

M. Claveau: On parle de la zone urbaine où il peut y avoir différents...

M. Savoie: Pardon?

M. Claveau: On parle d'une zone urbanisée où il y a une occupation humaine et où le territoire est divisé en parcelles qui appartiennent à des propriétaires privés. On ne parle pas nécessairement d'une propriété privée qui appartient à la compagnie qui fait la recherche. On parle du domaine privé. On ne parle pas de la propriété privée de la compagnie.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Savoie: C'est cela. La personne qui fait de la recherche pour construire un réservoir souterrain. Il faut dire qu'il n'y en a pas actuellement au Québec. Ce qu'on veut faire, justement, c'est permettre, dans un avenir éventuel, la construction d'un tel réservoir. La personne ou la compagnie qui va désirer construire un réservoir souterrain, lorsqu'elle va effectuer ses recherches, va les faire sur un terrain privé, parce que cela ne concerne pas les terrains d'ordre public ou appartenant au public.

M. Claveau: Cela ne lui appartient pas nécessairement.

M. Savoie: C'est cela. La personne qui va utiliser ce droit de rechercher va le faire sur un terrain qu'elle est certaine d'être en mesure d'exploiter. On ne peut pas prévoir que le gouvernement va lui révoquer un droit qui va lui causer un préjudice autrement que sur un terrain qui lui appartient. À ce moment-là, le préjudice est inhérent en lui-même. Il ne perd rien sauf,

peut-être, une servitude sur son propre territoire. (11 h 50)

Le Président (M. Saintonge): M. le député d'Ungava.

M. Claveau: M. le Président, le ministre vient de dire qu'actuellement il n'y a pas de réservoirs souterrains au Québec. Donc, si tel est le cas, on parle d'une hypothèse. C'est la même chose que si on parlait de construire des réservoirs sur la lune. Si on tient tellement à apporter une modification semblable dans le texte de cet article de loi, cela doit se référer à quelque chose de bien précis. Quel est le cas précis que l'on entend traiter par cet amendement?

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: Je vais vous dire une chose, M. le député d'Ungava. Je ne commencerai pas à étaler sur la place publique des cas précis dans des négociations, s'il y en a un. Je vous donne les droits, la protection qu'on accorde au propriétaire, mais je n'étalerai pas de cas sur la place publique pour me les faire enlever par des compétiteurs du gouvernement venant de l'entreprise privée. On irait dire qu'on vise un certain endroit. Je ne peux pas vous dire cela. Je ne le dirai pas. Cela peut viser plus d'un cas et je ne pense pas que ce soit dans l'intérêt public de commencer à dire qu'on vise un certain cas et qu'on s'en va là.

Vous avez l'article devant vous. On vous a expliqué pourquoi on a besoin de cet article, les conséquences de l'article. Vous pouvez être pour ou contre. Je ne peux pas vous donner plus d'explications que je ne vous en donne maintenant en termes de portée juridique. Ne me demandez pas, s'il y a un emmagasinage de pétrole, où allez-vous aller, qui allez-vous viser? S'il y a des réservoirs pour le gaz naturel, où allez-vous aller, quelle compagnie allez-vous viser? Si c'est le but de votre question, je ne pense pas que ce serait dans l'intérêt public que je vous dévoile cela. Mais on peut établir, quelque soit l'endroit où le gouvernement peut révoquer ces droits, un régime qui va s'appliquer et un régime d'indemnisation si les droits, en termes de construction, en termes d'enlever les substances minières, sont révoqués. Mais aller plus loin et étaler sur la place publique toutes les négociations, toutes les discussions possibles entre différentes parties, je ne pense pas que ce soit dans l'intérêt public.

Le Président (M. Saintonge): M. le député d'Ungava.

M. Claveau: M. le Président, le ministre ne nous énervera pas avec ses excès de zèle. Ce n'est pas nous qui avons couru après le problè- me. Ce sont eux qui sont arrivés avec l'amendement à la toute dernière minute sans jamais en parler à personne, comme de quelque chose qu'il faut faire en sourdine le soir, sans que personne en ait connaissance, en s'imaginant qu'on va prendre l'Opposition pour une bande d'idiots qui vont dire: Oui, oui, oui, M. le ministre, vous avez raison, on adopte cela. Ce n'est pas vrai. On ne donnera pas de chèque en blanc comme cela.

J'ai posé une question au ministre. Il ne veut pas me répondre. Je vais la poser plus précisément. Est-ce que, oui ou non, cet amendement est relié au projet Soligaz?

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de l'énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: M. le Président, on va demander au député d'Ungava de se calmer.

M. Claveau: Voulez-vous une question plus précise encore?

M. Ciaccia: On va demander au député d'Ungava...

Le Président (M. Saintonge): Un instant, M. le député d'Ungava. J'ai cédé la parole au ministre. Un instant. Il y a des questions à poser. Comme président, je vais donner la parole à chacun des intervenants en temps et lieu. Je vous demanderais de respecter le droit de parole que je vous accorde. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: M. le Président, je vais demander au député d'Ungava de ne pas s'exciter, de ne pas partir en peur, de ne pas faire de la spéculation et de ne pas créer des endroits de spéculation au Québec. Alors, posez toutes les questions que vous voulez, ce sont là les seules réponses que je peux donner au député d'Ungava maintenant.

Le Président (M. Saintonge): Est-ce qu'il y a d'autres questions, M. le député d'Ungava?

M. Claveau: Est-ce que l'amendement dont il est question actuellement se réfère spécifiquement à un cas?

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Ciaccia: M. le Président, je ne veux pas répondre à cette question et dire si cela se réfère à un cas. L'amendement qu'on étudie maintenant s'applique à plus d'un cas.

M. Claveau: Dans ce cas, comment se fait-il...

M. Ciaccia: Laissez-moi finir.

M. Claveau: Je pensais que vous aviez fini.

M. Ciaccia: Cet amendement s'applique à plus d'un cas. Je n'identifierai pas à combien de cas cela s'applique et où ces cas se trouvent, mais cela s'applique à plusieurs cas.

Le Président (M. Saintonge): M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Comment se fait-il...

M. Ciaccia: Et cela peut s'appliquer encore à d'autres cas parce que cela a une portée générale et une portée d'indemnisation générale.

M. Claveau: Dans ce cas-là, M. le Président, comment se fait-il que depuis le 23 juin, la sanction... Je peux vous répéter la démarche qu'on a faite à propos de la loi: présentée le 9 décembre 1986, réimprimée le 10 juin 1987, principe adopté le 10 juin 1987 avec notre consentement, adoptée le 23 juin 1987. Cela fait depuis le 9 décembre 1986 que c'est sur la planche à dessin publique et il va falloir attendre à la dernière minute, au moment de la troisième lecture, de l'adoption d'un projet de loi qui amende, un an plus tard, cette loi et jamais personne n'a vu cela. Tout à coup, cela devient une urgence nationale. Il faudrait qu'on adopte tout cela sans dire un mot et dire: M. le ministre, c'est de valeur, on n'avait pas vu. Il ne faut, quand même, pas ridiculiser à ce point votre personnel compétent qui travaille aux projets de loi. Vous ne me ferez pas accroire que personne n'avait vu la possibilité de cela. Depuis un an et demi déjà que la première présentation du projet de loi a été faite, cela a été discuté en commission parlementaire, on a refait un texte, on l'a représenté au complet en juin 1987, discuté et adopté.

On revient avec une loi pour amender cette loi alors qu'elle n'est même pas encore en application. Il n'y a personne qui l'a vu au moment de la présentation du projet de loi pour l'amender. On a discuté du projet de loi pour l'amender et jamais personne ne l'a soulevé. En troisième lecture, un an plus tard, dans le projet de loi pour l'amender, on nous arrive avec quelque chose qui est tout à fait nouveau et qui devient une urgence nationale. Non, M. le ministre, on ne croit pas à cela. Il y a une raison sous cela et on veut la savoir.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.

M. Ciaccia: Ce n'est pas une urgence nationale. On n'empêche pas la discussion. Cela fait - je ne sais pas - 45 minutes que vous en discutez. On n'a pas fait cela pour vous empêcher de discuter. On est en commission plénière. Non seulement on en discute, mais on en discute devant les caméras, devant toute la population. Ne venez pas essayer de nous dire ou de faire croire à la population qu'on refuse des discussions et qu'on vous amène cela à la dernière minute pour essayer d'adopter cela vite. Ce n'est pas cela du tout. Je pourrais vous donner la liste de tous les changements que vous apportiez à la dernière minute, quand on était dans l'Opposition, nous. Il n'y en avait pas seulement un. Il y en avait plusieurs, des changements assez importants même sur le revenu, sur les taxes. Je me souviens qu'avec un de mes collègues on s'était aperçu après la session que vous aviez imposé une taxe.

Ne commencez pas à chercher des raisons, à spéculer et à nous prêter des intentions. La raison pour laquelle cela arrive maintenant, c'est qu'on est en fin de session et on ne siégera pas avant le mois d'octobre. On s'est aperçu de cette lacune maintenant. Ce n'est pas le seul changement qu'on fait au projet de loi. En faisant cela, en bons législateurs, on dit: Écoutez, on va maintenant faire les changements nécessaires que le service juridique du ministère et d'autres ont examinés et ont suggérés. C'est pour cela qu'on vous apporte cela maintenant. Ne regardez pas plus loin que cela. C'est en pleine discussion. Vous avez tout le loisir de discuter et on est prêt à vous apporter toutes les explications nécessaires.

Mais ne demandez pas qu'on identifie deux, trois, quatre, cinq endroits pour augmenter la spéculation. Je ne pense pas que c'est votre intention. Je ne pense pas qu'on puisse se permettre comme gouvernement de donner ce genre d'information. Mais on est prêt à vous donner les explications sur la portée juridique, les indemnisations, la façon dont l'article sera interprété, l'interprétation de l'article et je vous ai même dit les raisons pour lesquelles nous avions apporté les changements au premier alinéa et au deuxième alinéa.

Le Président (M. Saintonge): M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Oui. Ce matin, le ministre serait à même de considérer que l'Opposition veut faire un travail constructif. Il devrait, au moins, le regarder comme cela. Maintenant, pour faire un travail constructif, j'ai toujours appris dans ma vie qu'il fallait en connaître les tenants et les aboutissants. Le ministre nous dit: On va vous parler de la portée juridique. Je dois dire que, quand mon collègue a fait sa prise en considération du rapport de la commission parlementaire sur le projet de loi 5, j'étais ici à l'Assemblée, je l'écoutais avec attention. J'en étais abasourdi. Il m'expliquait qu'il y avait un projet de loi qui était apparu au mois de décembre 1986, qui avait été adopté au mois de juin 1987 et qui n'était même pas en vigueur, malgré l'urgence à l'époque. Je m'en souviens parce qu'il m'a rappelé les détails historiques de ce dossier. Il disait: On est en train d'amender une loi qui devrait normalement être en vigueur depuis fort longtemps et

qui ne l'est même pas.

On m'apprend que, lors de la réplique du ministre délégué aux Mines et aux Affaires autochtones, il y a une demande qui est faite à l'Opposition par motion disant: Écoute2, j'aurais un amendement technique, cet amendement technique doit être discuté en commission plénière, ce que nous avons accepté, d'ailleurs, en disant: On ne veut pas nuire au travail et aux décisions que prend le gouvernement. Mais vous allez comprendre qu'on veut en savoir plus, par exemple, avant de l'adopter. C'est dans ce sens que les interventions de mon collègue sont faites ce matin. (12 heures)

Le ministre dit: Je vais vous donner tous les renseignements techniques et juridiques. Mais il y a aussi certainement des décisions politiques qui doivent être prises parce que vous n'amèneriez pas cette proposition ce matin. Vous n'auriez pas fait cela au dernier moment, alors que le projet de loi n'est même pas en vigueur et qu'on doit y apporter des amendements, l'amender encore. Vous n'auriez pas fait cela si vous n'aviez pas quelque chose derrière la tête. Ce qui est en arrière de la tête n'est pas simplement juridique, à mon avis, ni technique. C'est plus que cela. C'est le but de nos questions.

Le ministre dit: Donnez-moi un chèque en blanc, faites-moi confiance. Comme Opposition, on serait mal venus d'accepter des choses semblables, de ne pas prendre les décisions en toute connaissance de cause. Le ministre doit bien comprendre que notre intervention n'est que normale, faite pour aller au fond de tout ce qui est caché derrière la tête du ministre pour en arriver à prendre une décision éclairée.

Il est évident, au bout de la course, que si on ne veut pas nuire au gouvernement dans ses décisions, on va devoir l'adopter. On fera les écritures nécessaires, avec la majorité, encore une fois, qui l'aura emporté. Mais on n'aura pas fait un travail convenable comme Opposition si on en arrive à donner un chèque en blanc au ministre sans avoir fait toutes les vérifications qui s'imposent. C'est dans ce sens que mon collègue intervient depuis de nombreuses minutes. On pensait que c'était une chose qui aurait duré cinq minutes, étant donné que c'était technique. Mais on s'aperçoit, à force de discussions, qu'on veut aller plus loin dans le dossier. Il y a certainement quelque chose qui est caché.

Le ministre dit: Ah! Vous n'êtes pas là pour faire de la spéculation ou inviter à en faire. Le ministre est conscient que notre travail d'Opposition ne peut pas non plus nous empêcher de poser toutes les questions qui s'imposent. C'est dans ce sens que le travail fait par mon collègue méritait mon intervention pour dire que j'appuie les nombreuses questions posées jusqu'à maintenant, et surtout les dernières. Je repose les mêmes questions au ministre. Donnez-nous toutes les indications nécessaires pour savoir où on s'en va. Il n'est certainement pas question de vous donner un chèque en blanc.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: Les amendements que nous discutons ce matin ne sont pas un chèque en blanc. Ils sont très clairement balisés. Ils ont un certain fait juridique, certaines conséquences très claires. Il y a des indemnisations, des pouvoirs de révocation. Ce n'est pas un chèque en blanc qu'on donne.

Si le député de Laviolette veut aller à la pêche pour savoir s'il y a un ou plusieurs autres projets où ces articles pourraient s'appliquer, je dois lui dire que le but de discuter une législation n'est pas d'aller à la pêche pour voir où un article particulier va s'appliquer. Il va admettre avec moi que si je donne - je ne l'ai pas, mais supposons que je l'ai - un endroit très clair et que je dis que cet article peut s'appliquer là... Donnons un exemple: Gaz Métropolitain va avoir besoin de l'entreposage pour le gaz naturel parce que le rythme de croissance des ventes du gaz naturel et la capacité du tuyau de TransCanada PipeLines font en sorte que pour répondre... Si vous n'écoutez pas... Je vous donne un exemple très précis sans identifier un endroit. Le député d'Ungava ne semble pas... Il semble rire. Il ne prend pas cela au sérieux.

M. Jolivet: On vous écoute, on vous écoute.

M. Ciaccia: II ne prend pas cela au sérieux. À quoi ça sert? Je vous donne des informations. Lui ne prend pas cela au sérieux, on discute et on discute. Après cela, on essaie de dire...

Le Président (M. Saintonge): Un instant.

M. Ciaccia: ...qu'on ne veut pas vous donner d'information.

Le Président (M. Saintonge): Un instant, M. le ministre.

M. Ciaccia: Je vais continuer.

Le Président (M. Saintonge): Juste un instant.

M. Claveau: Mon cas, ce n'est pas le sérieux de son propos.

Le Président (M. Saintonge): Même si nous sommes en commission plénière, il y a des règles strictes qui s'appliquent. Je demanderais, pour éviter toute discussion directe entre députés, que chaque intervenant s'adresse comme régulièrement à la présidence.

M. Claveau: Le ministre m'a pris à partie tout à l'heure. Ce qui m'a fait sourire, ce ne

sont pas ses propos.

Le Président (M. Saintonge): Non, l'incident est clos. On va..

M. Ciaccia: Non, non, il peut...

M. Claveau: ...et je crois qu'il faut le dire.

Le Président (M. Saintonge): ...en rester au début, M. le député d'Ungava.

M. Ciaccia: Ne faisons pas un débat.

M. Claveau: Alors qu'il a un cas bien précis en tête, il nous parle d'hypothèses. Qu'il travaille donc sur le cas précis qu'il a en tête.

Le Président (M. Saintonge): Écoutez, le ministre donne sa réponse. Vous l'écoutez. Si vous avez d'autres questions, vous les posez.

M. Ciaccia: M. le Président...

Le Président (M. Saintonge): Je vais simplement demander à chacun des députés de se limiter à nos règles de procédure usuelles, de s'adresser à la présidence et non pas directement à d'autres députés. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: Je n'accepte pas l'affirmation du député d'Ungava. Si Gaz métropolitain regarde pour trouver des endroits pour faire de l'entreposage de gaz naturel afin d'affronter les heures de pointe, je ne peux pas vous confirmer que oui, il y a un endroit spécifique où ils regardent, oui, ils regardent maintenant et oui, c'est dans un tel endroit. Je pense bien que ce serait irresponsable de ma part de vous dire cela et je pense que vous le comprenez. Vous pouvez faire tout le millage politique que vous pensez, vous pouvez tous aller à la pêche tant que vous voulez, ce genre d'information va au-delà des explications sur l'amendement. Alors, ne me demandez pas de vous identifier un ou plusieurs cas spécifiques, je ne peux pas le faire. Je serais irresponsable si je le faisais. Je sais que vous essayez de m'amener sur ce terrain; après cela, si, parfois, vous réussissiez à m'y amener et à en discuter, vous seriez les premiers à vous lever en Chambre et à dire: Pourquoi le ministre a-t-il été ausssi irresponsable, même avant que des discussions ou des négociations aient lieu, il a dévoilé les sites et il a encouragé la spéculation? Vous seriez les premiers à m'accuser.

Alors, si vous voulez des explications sur la portée de l'article, sur la portée des amendements, pourquoi nous le faisons maintenant, à la fin de la session, quelle est la signification des autres amendements que nous présentons quant aux indemnisations et à la protection des droits de ceux qui pourraient être affectés... - au moment où je vous parle, ce n'est- même pas sûr qu'il va y avoir des gens qui seront affectés par cela - sur cela, je suis prêt à vous donner toute l'information et toutes les explications dont vous avez besoin.

M. Jolivet: M. le Président...

Le Président (M. Saintonge): M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: ...tout à l'heure, le ministre m'a pris à partie en disant que je n'écoutais pas, j'écoutais. Je laissais à mon collègue la possibilité de poser une autre question additionnelle parce que je sais que c'est son temps qui compte.

Est-ce que le ministre pourrait m'indiquer, dans ce cas-là, l'urgence de présenter un tel amendement et, par le fait même, m'indiquer quel serait le projet qui ne serait pas annoncé publiquement dans quelques jours si l'amendement n'était pas adopté?

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: Là, vous voulez rire.

M. Jolivet: Non, non, je ne veux pas rire.

M. Ciaccia: Bien oui!

M. Jolivet: Je ne veux pas rire.

M. Ciaccia: Vous voulez rire. Premièrement, ce que vous dites n'existe pas. Pourquoi on arrive... Pourquoi ne posez-vous pas cette question pour chaque amendement qui est apporté? Tous les projets de loi qui sont devant cette Assemblée...

M. Jolivet: On connaît la réponse.

M. Ciaccia: Bien oui, si vous avez la question et la réponse...

M. Jolivet: Non, non.

M. Ciaccia: ...fermons et allons-nous-en.

M. Jolivet: Vous me posez une question, je vais vous donner la réponse.

M. Ciaccia: Parce qu'il y a des amendements... Vous pourriez poser cette question pour tous les amendements qui sont apportés en fin de session. Il y a des raisons; il y en a qui sont plus urgentes que d'autres; il y en a où il n'y a pas d'urgence du tout, mais les amendements sont apportés de toute façon. Il y a des raisons pour bonifier la loi et pour qu'elle soit claire. Présentement, l'article 273 n'est pas clair. On veut le clarifier et enlever les ambiguïtés. C'est pour cela que nous apportons les amendements.

Le Président (M. Saintonge): M. le député d'Ungava.

M. Claveau: M. le Président, vous conviendrez... D'ailleurs, le ministre est l'un de ceux qui disent souvent, en commission parlementaire, lorsqu'on fait l'étude article par article des projets de loi, qu'il ne s'agit pas de légiférer sur des hypothèses, mais qu'il faut toujours le faire en fonction de cas précis.

Le ministre comprendra très bien, étant lui-même originaire du milieu des juristes, des gens de loi, qu'il est très difficile d'évaluer la portée juridique d'un projet de loi lorsqu'on n'a aucun cas précis à se mettre sous la dent, lorsqu'on n'a rien à saveur précise sur quoi on peut travailler. Si le ministre est en train de nous dire qu'il travaille sur un cas hypothétique, qui pourrait être aussi hypothétique que de rechercher des réservoirs sur la lune, à ce moment-là, on se demande ce qu'il fait avec son amendement. Alors...

M. Ciaccia: Si vous avez besoin d'un cas précis pour chaque amendement présenté à l'Assemblée nationale, je vous dis que vous n'auriez pas à adopter beaucoup d'amendements. (12 h 10)

M. Claveau: Généralement, M. le Président, il y a des cas précis qui sont bien connus dans le fonctionnement normal de notre société.

M. Ciaccia: Pas ici.

M. Claveau: Quand on se réfère à telle ou telle chose, tout de suite on a une image en tête et on sait que dans tel secteur il y a telle chose qui s'est passée, de telle façon. Cela nous donne des références. Dans le cas présent il n'y a pas de référence. Le ministre a dit lui-même qu'il s'agit de quelque chose qui n'existe pas. Alors, on légifère sur le néant? Il faudrait se comprendre.

Tout cela m'amène à poser une question bien précise. Je conviens que le ministre ne veut pas nous donner de cas précis. Je conviens que le ministre est en train de nous demander un chèque en blanc, parce qu'il nous demande de légiférer sur la portée juridique d'un article de loi dont on ne connait aucun élément dans la pratique qui pourrait nous permettre, justement, de donner des paramètres, et de baliser cette portée juridique. Soit. Le ministre a fait son lit là-dessus et, le connaissant, ce n'est pas la première fois qu'il dit: Non, c'est non, cela finit là. Il y a quand même une chose sur laquelle le ministre pourrait nous répondre et pour laquelle nous souhaitons avoir pour le moins une réponse. Une réponse, de temps en temps, cela ne serait pas mauvais. Ce serait probablement la première aujourd'hui, mais il devrait être capable de nous répondre.

La modification à l'article 73, si elle est amenée, nous prétendons que ce n'est pas à cause de la couleur du temps, mais pour des raisons précises. Quelles sont ces raisons? Il y a deux possibilités. Est-ce qu'il s'agit, dans un cas précis dont le ministre ne veut pas nous faire part ici, de vouloir s'assurer, de la part du gouvernement, et d'avoir la garantie qu'en révoquant des droits en particulier, dans un cas précis, il va aussi, en même temps qu'il va révoquer le droit de construire, être certain que lui, comme ministre, il va révoquer aussi les droits de recherche et les droits d'exploitation, pour s'assurer qu'il n'y ait aucune contestation juridique de la part de celui qui aurait pu voir révoquer ses droits de construire, pour qu'il ne puisse pas revenir dire: Oui, mais l'article ne permet de révoquer mes droits de construire. Mes droits de recherche, mes droits d'exploitation ne sont pas touchés, donc j'ai le droit d'exploiter et j'ai le droit de recherche, même si je ne peux plus construire. Est-ce qu'il s'agit de cela ou est-ce qu'il s'agit d'un autre côté de quelqu'un, d'un groupe, d'un individu ou d'une société qui voudrait être certain que l'ensemble de ses droits vont pouvoir faire l'objet de compensation au moment de la révocation?

M. Ciaccia: Je voudrais répondre au député sur cette question.

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Claveau: On ne demande pas le où, le quand ni le comment. On demande en théorie, comme disait le ministre tout à l'heure.

M. Ciaccia: Oui, oui.

Le Président (M. Saintonge): D'accord?

M. Ciaccia: Non, non, je vais répondre.

Le Président (M. Saintonge): Alors, M. le ministre.

M. Ciaccia: Non, non, je vais répondre. Je pense que fa réponse au député, c'est: les deux. Présentement, il y a une ambiguïté. Dans l'article 274, on parle d'un bail d'exploitation de réservoir souterrain de la part du titulaire du bail d'exploitation qui suppose que dans l'article 273 la révocation pour construire incluait aussi la révocation de l'exploitation. Alors, cela va clarifier ce pouvoir au lieu de le laisser ambigu, comme il pourrait être ouvert à interprétation présentement, parce qu'on dit, dans l'article 274, mais on n'en parle pas dans l'article 273: On va clarifier cela. La révocation est non seulement pour la construction, mais elle est aussi pour l'exploitation, parce qu'on parle de la façon d'indemniser et de paiement dans l'article 274. En faisant cela, on s'assure aussi que l'indemnisation va être claire, que cela ne sera pas

seulement pour une partie, que cela va être pour la partie construction et la partie exploitation. En plus de cela, on clarifie en disant qu'avant de construire, il faut être en mesure de faire des recherches. Alors, on inclut cela pour que ce soit total et que ce soit complet.

Le Président (M. Saintonge): Alors, M. le député d'Ungava.

M. Claveau: C'est bien clair qu'avec les explications que le ministre vient de nous donner, cela veut dire que, dans l'hypothèse où il y a un projet - on parle d'hypothèse - qui est en voie de conclusion, à ce moment-là, les différents partenaires du projet, y compris le gouvernement, retrouveraient leurs droits de façon très claire et ne pourraient pas les contester. Ils ne pourraient pas être contestés tant en ce qui concerne la possibilité du gouvernement de révoquer l'ensemble des droits qui sont rattachés à une propriété, y compris celui de la recherche, et la même chose de la part de l'ancien propriétaire afin de s'assurer qu'il pourra bénéficier des indemnisations totales sur l'ensemble de ses droits qui étaient rattachés à ce territoire.

M. Ciaccia: Vous avez raison, cela va clarifier les droits, mais cela va clarifier aussi les obligations.

Le Président (M. Saintonge): Vous avez une autre question, M. le député d'Ungava?

M. Claveau: Non. Je pense qu'on a fait le tour de la question. On comprend bien que le ministre a des annonces à faire et qu'il ne veut pas les faire tout de suite. On pourrait vouloir faire la même chose que lui et attendre à la dernière minute. On pourrait jouer au plus fin, on pourrait presque les faire à sa place au moment où l'on se parle, mais on va quand même lui laisser le bénéfice de faire ses annonces dans les jours qui viennent, en souhaitant toutefois qu'y se souviendra que c'est grâce à la collaboration de l'Opposition, en toute dernière instance, que les annonces qu'il aurait à faire seront rendues possibles.

M. Ciaccia: Je veux remercier l'Opposition, mais ils vont être surpris s'il n'y a pas d'annonce, par exemple.

Le Président (M. Saintonge): M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Simplement, au point de vue technique, quand le ministre dit que, lorsqu'il y a des amendements en commission parlementaire, il arrive souvent qu'il n'y a pas beaucoup de questions de posées, comme c'est le cas ce matin, je dois lui rappeler que la procédure spéciale qu'ils ont prise, hier, pour présenter un amendement en réplique à la prise en considération du rapport, c'était exceptionnel. Donc, nous mettant la puce à l'oreille, voûtant, non pas jouer notre rôle - je n'aime pas dire cela - mais faire notre travail comme membres de l'Opposition, il était de notre devoir, dans nos obligations, de poser toutes les questions. Comme je le disais tout à l'heure, nous n'avons pas à empêcher le gouvernement de prendre ses décisions, mais nous ne voulons pas être dupes, non plus, des décisions qu'il aura prises.

M. Ciaccia: M. le Président, je voudrais juste ajouter...

Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Ciaccia: ...je ne veux pas éterniser le débat, mais je ne m'opposais pas au nombre de questions, c'était juste certaines questions particulières auxquelles je ne pouvais pas répondre. Quant au nombre de questions, vous avez tout le loisir de poser les questions que vous voulez, vous n'êtes pas limités quant au nombre.

Le Président (M. Saintonge): Très bien. En conséquence, est-ce que l'amendement proposé par M. le ministre délégué aux Mines et aux Affaires autochtones est adopté?

M. Claveau: Adopté.

Le Président (M. Saintonge): Adopté? L'amendement est donc adopté.

La commission plénière s'étant acquittée de son mandat, je demanderais aux personnes qui sont dans l'Assemblée...

M. Claveau: II y a un rapport...

Le Président (M. Saintonge): Oui, il y aura rapport, mais pour faire rapport, je demande aux personnes, qui sont à l'Assemblée, qui accompagnent les députés et les ministres, de bien vouloir quitter l'Assemblée pour que nous puissions faire rapport, étant donné que les règles de l'Assemblée prévoient que, quand l'Assemblée siège comme telle, aucune personne qui n'en est pas membre, sauf le personnel de soutien, ne peut s'y tenir.

Le Vice-Président: M. le président de la commission plénière, pour votre rapport, s'il vous plaît.

M. Baril (président de la commission plénière): M. le Président, je désire faire rapport que la commission plénière a étudié l'amendement proposé par le ministre délégué aux Mines et l'a adopté.

Le Vice-Président: Est-ce que le rapport de la commission plénière est adopté?

M. Jolivet: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Oui, M. le Président. Le débat sur l'adoption du projet de loi ayant déjà été complété, je souhaiterais que nous procédions à l'adoption du projet de loi.

Adoption

Le Vice-Président: Est-ce que la motion d'adoption du projet de loi 5, Loi modifiant la

Loi sur les mines, présentée par le ministre délégué aux Mines et aux Affaires autochtones, est adoptée?

M. Jolivet: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: M. le Président, si vous voulez appeler l'article 21 du feuilleton, s'il vous plaît. (12 h 20)

Projet de loi 11

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président: À l'article 21 du feuilleton, nous allons maintenant procéder à la prise en considération du rapport de la commission de l'économie et du travail qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 11, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le cadastre. Est-ce qu'il y a des interventions? M. le député d'Ungava.

M. Christian Claveau

M. Claveau: M. le Président, vous comprendrez que l'on vient tout juste de sortir d'un travail acharné sur la Loi sur les mines et qu'on se retrouve tout de suite à la prise en considération du rapport de la commission sur la Loi sur le cadastre. Je peux vous dire qu'on a eu des discussions intéressantes à maints égards et souvent même pour le moins houleuses lors de la discussion de ce projet de loi article par article.

Toujours est-il que les différents intervenants en sont arrivés à un consensus qui fait qu'on se retrouve aujourd'hui avec un projet de loi qui modifie certaines dispositions de la Loi sur le cadastre et qui a encore des lacunes, parce que, vous en conviendrez, le ministre de l'Énergie et des Ressources n'ayant pas accepté toutes les recommandations de l'Opposition sur son projet de loi, il est bien évident qu'il se retrouve avec quelques lacunes. Malgré ces quelques lacunes-là, il reste que l'Opposition dit au ministre que c'est lui qui aura à vivre avec son projet de loi et, dans ce sens-là, nous voterons pour le projet de loi qui nous est proposé.

Le Vice-Président: Y a-t-il d'autres interventions? M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: Seulement pour dire, M. le Président, que nous avons apporté les changements qui avaient été demandés, tous les changements nécessaires au projet de loi et que, après nos études et les considérations que nous avons faites de tous les articles du projet de loi, nous ne croyons pas qu'il y ait des lacunes. Non seulement n'y a-t-il pas de lacunes mais nous améliorons sensiblement spécialement la question d'obtention de permis. Nous réduisons à deux semaines un délai qui était parfois de deux mois. Et je pense que le milieu nous a demandé de faire ces changements et il sont heureux avec les changements que nous avons faits. Merci.

Le Vice-Président: Le débat étant clos, est-ce que le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 11, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le cadastre, est adopté?

M. Jolivet: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Jolivet: Étant donné que c'est encore notre collègue, le député d'Ungava qui va intervenir pour les deux prochains projets de loi, il aurait besoin de quelques minutes de suspension pour pouvoir se remettre dans le sujet.

Le Vice-Président: Alors très bien, nous allons suspendre nos travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 12 h 23)

(Reprise à 12 h 31)

Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous plaît! L'Assemblée nationale reprend ses travaux aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Article 22, M. le Président, s'il vous plaît.

Projet de loi 12

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président: L'article 22 du feuilleton. Nous allons maintenant procéder à la prise en

considération du rapport de la commission de l'économie et du travail qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 12, Loi sur la Régie du gaz naturel. Je dois immédiatement aviser l'Assemblée que nous avons reçu en temps utile deux amendements présentés par M. le ministre de l'Énergie et des Ressources, amendements qui devront être mis aux voix avant de mettre aux voix le rapport de la commission. Je cède donc la parole à M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: M. le Président, en commission parlementaire il a été fait mention de la possibilité que la régie puisse réglementer la distribution du gaz naturel transporté autrement que par canalisation. Le gouvernement ne désirant pas réglementer un secteur qui ne jouit pas d'un monopole, propose donc, de modifier l'article 51 qui spécifiera clairement que seul le gaz naturel transporté et livré par canalisation est réglementé. C'est pour éviter des situations où il peut y avoir du transport autrement que par canalisation, la régie n'a pas de juridiction pour réglementer cela. Le but de l'amendement est strictement pour clarifier cet aspect.

L'autre amendement à l'article 76. L'article 76 doit être modifié afin de s'assurer que seules les affaires engagées devant la régie, dans les matières visées à l'article 1 du projet de loi pourront être poursuivies par la régie, sans reprise d'instance. Vous vous souvenez, à l'article 1, qu'on mentionne que la présente loi s'applique à la fourniture, au transport et à l'emmagasinage de gaz naturel qui est livré ou destiné à être livré par canalisation à un consommateur. On prévoit dans la loi que s'il y a des causes pendantes, elles vont continuer. On a enlevé la juridiction sur la vapeur. Il ne faudrait pas que quelqu'un inscrive devant la régie, avant que la loi soit proclamée, une cause où la régie n'aura plus de juridiction. La juridiction de la régie va continuer seulement dans les matières où elle a juridiction. Je pense que c'est raisonnable pour ne pas permettre à la régie de faire, après l'adoption du projet de loi, ce que le projet de loi avait spécifiquement exclu. C'est le but de l'amendement à l'article 76.

Le Vice-Président: Je vais maintenant céder la parole... Est-ce que vous voulez intervenir, M. le député d'Ungava?

M. Claveau: II est bien évident que je...

Le Vice-Président: Je vais donc vous céder la parole. M. le député d'Ungava.

M. Claveau: II est bien évident que je veux intervenir. D'abord je demanderai au ministre de nous déposer par écrit les amendements qu'il vient de mentionner.

Le Vice-Président: M. le député d'Ungava, les amendements en question ont déjà été déposés par le ministre au bureau du secrétaire général. Les copies ont dû être transmises à l'Opposition. Nous allons vous en remettre copie. Ces amendements, en fait, ont été déposés le 10 juin 1988 au moment du dépôt du rapport de la commission. Je vous cède la parole.

M. Claveau: Si je comprends bien, le ministre a fait les choses dans les normes, tel que cela doit se faire. Il devrait passer le message à son collègue, le ministre délégué aux Mines.

Le Vice-Président: M. le député d'Ungava, je m'excuse d'intervenir. Évidemment, il y a diverses façons d'apporter des amendements au projet de loi selon notre règlement. Il y a une possibilité, lors du dépôt, que le ministre envoie dans un délai prescrit par le règlement des amendements. Il y a également possibilité qu'au moment de discussions sur la motion d'adoption du projet de loi certains amendements puissent être apportés.

Je n'ai pas à juger si effectivement c est mieux de le faire à un moment ou à l'autre, mais je veux simplement spécifier ici, pour les besoins de la cause, que ce sont deux possibilités au règlement d'apporter des amendements. Donc, deux moments prévus au règlement sans préjuger de la valeur du moment où on devrait les apporter. Je vous cède la parole.

M. Christian Claveau

M. Claveau: Oui, M. le Président. Nous acceptons les amendements qui sont proposés par le ministre et qui semblent être dans l'ordre des choses, à première vue. De toute façon, si tel n'est pas le cas, c'est le ministre qui aura à vivre avec.

Dans l'ensemble, la discussion lors de l'étude article par article du projet de loi 12 sur la Régie du gaz naturel ne portait pas à problème dans la mesure où il s'agissait comme le ministre l'a expliqué, de rectifier ou de corriger une situation qui est dépassée actuellement par la Régie de l'électricité et du gaz et d'établir une juridiction spécifique pour la régie dans le domaine du gaz naturel, à l'exception, comme on vient de le dire, du transport par camion.

Jusque là, cela va dans l'ensemble. Là où il y a eu des discussions et où l'Opposition reste en divergence avec le ministre, c'est sur l'application de l'article 65 qui dit que le ministre peut donner à la régie des directives sur les objectifs et orientations à poursuivre dans l'exécution de ses fonctions. On se souviendra qu'il y avait un article 63 dans le projet de loi dont on a discuté en commission parlementaire qui permettait au ministre de s'ingérer directement dans les décisions de la régie et dans son

fonctionnement quotidien. Cela avait été dénoncé par tout le monde. Le ministre a dit: D'accord, on va enlever cela. Par contre, il a ajouté une notion qui, à notre avis, est encore plus large et qui va peut-être permettre au ministre d'être encore plus présent dans le fonctionnement de la régie, dans la mesure où maintenant il se permet, en tant que ministre, de donner des directives à la régie, de réorienter les objectifs de la régie et que ces objectifs deviennent exécutoires à partir du moment où ils sont approuvés par le gouvernement.

Par après, dans le même article 65, on nous dit que ceci va être déposé devant l'Assemblée nationale dans les quinze jours qui suivent leur approbation par le gouvernement, donc deux semaines après qu'ils soient rendus exécutoires. C'est donc un dépôt de principe tout simplement sur lequel il n'y a plus rien à faire. D'autre part, si les décisions se prennent au cours de l'été ou pendant les périodes où le Parlement ne siège pas, cela ira à deux semaines après la reprise des travaux, ce qui veut dire, par exemple, que le ministre pourrait, au moment où l'on se parle, et en supposant que la loi soit en application... On peut se permettre de parler d'hypothèse, puisque, tout à l'heure, le ministre nous a parlé pendant près d'une heure sur des hypothèses. Alors, dans l'hypothèse où la loi serait en application au moment où l'on se parle et que dans les prochains jours, fin juin, une décision serait prise par le gouvernement de modifier certains objectifs de la régie pour les adapter, comme nous disait le ministre, ia politique énergétique... On y reviendra de toute façon parce qu'on ne connaît toujours pas la politique énergétique qui devait être annoncée avant la fin de la session.

Dans la mesure où des réorientations seraient prises à la fin de juin, lesquelles deviendraient exécutoires immédiatement après leur approbation par le gouvernement, à ce moment le ministre pourrait faire à sa guise avec la régie et faire approuver ou obliger la régie à fonctionner en vertu de ces nouvelles orientations, de ces nouveaux objectifs jusqu'à, la dernière semaine d'octobre, à toutes fins utiles, avant qu'il ait à venir les déposer devant l'Assemblée, parce que, en vertu du troisième paragraphe de l'article 65, on dit que toute directive donnée en vertu du présent article doit être déposée à l'Assemblée nationale dans les quinze jours de son approbation par le gouvernement, si elle est en session, sinon dans les quinze jours de la reprise de ses travaux. (12 h 40)

Nous, nous croyons qu'il s'agit là d'une mesure qui est nécessairement exorbitante, inconsidérée de la part du ministre. Quoi qu'en dise le ministre, nous continuons à nous opposer à l'application de l'article 65 ou à la présence de l'article 65 dans la loi que nous avons à discuter, dans la mesure où cela donne au gouvernement une possibilité d'agir énorme, qui peut même amener la régie à prendre des décisions strictement en vertu des impératifs du ministre. Dans la mesure aussi où les nouveaux régisseurs sont nommés, pour une période beaucoup plus courte, pour un maximum de cinq ans et, à ce moment, c'est clair que pour pouvoir essayer de rester en poste, les régisseurs seront beaucoup plus liés aux impératifs du ministre qu'ils peuvent l'être actuellement, alors qu'ils sont nommés pour une période de dix ans et que, finalement, comme le veut le dicton: Les politiciens passent, mais les fonctionnaires demeurent. Les administrateurs demeurent, à ce moment, pendant une période de dix ans. Il n'y a pas plus de marge de manoeuvre pour un régisseur pour pouvoir prendre des décisions sans que le renouvellement de son contrat soit nécessairement remis en cause parce que le ministre n'est pas d'accord.

Dans l'article 65, cela permet au ministre de pouvoir intervenir directement dans un certain nombe de modalités. Finalement, cela peut être très précis. Cela peut aller dans des cas très précis dans la mesure où au premier paragraphe de l'article on dit: Le ministre peut donner à la régie des directives sur les objectifs et l'orientation à poursuivre dans l'exécution de ses fonctions. Il ne s'agit pas uniquement d'objectifs au sens très large d'orientation, je dirais, du domaine national, etc., sinon que cela peut aller dans des objectifs bien précis directement liés à l'exécution quotidienne des fonctions de la régie. Nous continuons à nous opposer à cet article. Nous avons fait valoir, en commission parlementaire, toute notre argumentation sur ce point. Le ministre n'en a pas tenu compte. Il maintient et il a dit en commission: Vous avez beau dire ce que vous voulez, l'article est là pour rester et il va rester. L'article y reste et le ministre s'arrangera avec.

En gros, c'est le commentaire principal que l'on peut faire sur cette question. Il y a certaines choses, par contre, qui semblent un peu bizarres dans le comportement. Le ministre nous a dit que, justement, il n'avait pas à nuire au fonctionnement de la régie au moment où l'on se parle, mais dans l'application de l'article 77, entre autres, on a de petits problèmes dans la mesure où les régisseurs actuellement en poste vont le demeurer jusqu'à l'expiration de leur mandat en vertu de la loi actuelle, c'est-à-dire un mandat de dix ans.

On a des régisseurs qui viennent tout juste d'être nommés. Il y en a un qui a été nommé le 5 avril 1988 et qui occupe actuellement le poste de vice-président de la régie. Il a été nommé quelques jours à peine avant le dépôt du projet de loi. Dans son cas, le monsieur est très chanceux puisqu'il va être en poste jusqu'au 5 avril 1998. Le ministre nous disait: II n'est pas question d'intervenir dans la décision de la régie et si la régie avait besoin de monde, elle a pris son monde. Sauf qu'il reste que cela nous semble un peu bizarre que l'on s'empresse de combler un poste quelques jours à peine avant le début du

projet de loi, un poste qui va permettre, justement, à un régisseur d'avoir un mandat deux fois plus long que ce qu'l aurait été s'il avait été nommé quelques jours plus tard, en vertu de la nouvelle loi.

D'autant plus que dans la mesure où on introduit une nouvelle régie, on change les modalités. Le ministre nous disait: Afin d'être plus conforme, plus proche, de pouvoir avoir des gens plus compétents, etc. Il nous disait que les mandats de dix ans étaient trop longs et qu'il fallait les raccourcir parce qu'on n'est pas capable de garantir que quelqu'un qui est engagé pour dix ans sera capable de suivre la démarche évolutive de la régie pendant dix ans.

Il nous dit cela d'un côté de la bouche et de l'autre côté, il laisse la régie, qui est toujours sous sa juridiction, engager quelqu'un quelques jours à peine avant le dépôt du projet de loi. Je dis quelques jours à peine avant l'adoption du projet de loi puisque le projet de loi est en discussion depuis déjà longtemps. Il a fait l'objet d'une commission parlementaire l'automne dernier. Quelques jours avant que le projet de loi entre en vigueur, on laisse engager quelqu'un pour une période de dix ans et, qui plus est, on lui donne le poste de vice-président tout de suite en partant. Vous conviendrez avec nous, M. le Président, qu'on a eu raison de s'inquiéter de cette nomination qui, déjà, du moins dans le principe, va à rencontre de l'esprit de la loi qui voulait avoir des régisseurs pour une période plus courte dans la durée de leur contrat.

Ce sont là quelques éléments que nous retenons et qui font en sorte que l'Opposition officielle n'est pas entièrement d'accord avec le projet de loi qui nous est présenté. Bien que dans l'ensemble des éléments techniques relatifs à l'administration et au suivi des gens qui opèrent dans le domaine du gaz naturel, nous croyons que le projet de loi est adapté et conforme aux voeux du ministre et qu'il répond à un besoin nouveau, étant donné la grande importance qu'a prise le gaz naturel au cours des années dans le bilan énergétique québécois.

Toutefois, M. le Président, comme je le disais, il y a certains articles entres autres, et particulièrement l'article 65, sur lesquels nous ne sommes pas d'accord et que nous ne pourrons approuver d'aucune façon jusqu'à l'adoption finale du projet de loi.

Le Vice-Président: Je vais céder la parole à M. le ministre de l'Énergie et des Ressources pour une intervention de cinq minutes.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: M. le Président, en ce qui concerne la nomination du vice-président, il était absolument essentiel, après plusieurs mois, de procéder à cette nomination, parce qu'il y avait des travaux, des causes qui devaient être enten- dues. On n'était pas pour retarder les décisions, les causes devant la régie parce qu'il y avait un projet de loi qui était discuté devant l'Assemblée nationale et qu'il ne pouvait pas être adopté avant la fin de la session. On ne pouvait pas geler les travaux de la régie parce qu'il y avait un projet de loi en discussion. Nous avons agi raisonnablement. On n'avait pas d'autre choix que de le nommer d'après la loi qui était en vigueur au mois d'avril. C'est ce que nous avons fait et cela a permis à la régie de continuer ses travaux. Je ne vois pas... J'ai expliqué et donné toutes ces réponses au député d'Ungava en commission parlementaire mais il ne semble pas écouter quand on lui explique les raisons de nos décisions.

En ce qui concerne l'article 65, dans l'avant-projet de loi, l'article 63 était beaucoup plus large. Je voudrais référer le député d'Ungava aux propos de son prédécesseur, le député de Roberval. Ce n'est pas une abolition de l'article qu'il demandait. Je vais le citer, dans le Journal des débats du 14 octobre, à la page 4713, lors de la commission permanente de l'économie et du travail. Le député de Roberval, qui était le critique officiel de l'Opposition, disait: "II y a aussi des gens, M. le ministre, qui sont venus confirmer notre appréhension concernant le pouvoir très large, non balisé et irraisonnable, à notre point de vue, que vous vous attribuez par l'article 63 de l'avant-projet de loi. Je pense que vous vous montrerez davantage raisonnable, compte tenu de ce qui vous a été dit, et que vous modifierez substantiellement cet article pour baliser ce pouvoir."

C'est exactement cela que nous avons fart, M. le Président. Il n'était pas question d'éliminer l'article, comme le prétend aujourd'hui le député d'Ungava. Nous avons écouté les représentations qui ont été faites par les intervenants à la commission parlementaire. Nous avons accédé à la demande des intervenants et à celle du député, critique de l'Opposition officielle de cette époque. C'est pour cette raison que nous avons rédigé l'article 65 tel qu'il est rédigé maintenant. Vous allez le retrouver dans d'autres projets de loi, d'autres pouvoirs, d'autres régies, d'autres juridictions.

M. le Président, voici les raisons pour les changements que nous avons apportés, après avoir été à l'écoute des gens du milieu et d'après les représentations qu'ils nous ont faites. Merci.

Mise aux voix des amendements

Le Vice-Président: Alors, le débat étant clos, je vais maintenant mettre aux voix les amendements aux articles 51 et 76 présentés par le ministre de l'Énergie et des Ressources.

L'amendement à l'article 51 se lit comme suit: L'article 51 du projet de loi est modifié par l'insertion, dans la quatrième ligne du premier alinéa, après le mot "livrer", des mots "par canalisation". Est-ce que cet amendement à

l'article 51 est adopté?

M. Jolivet: Sur division.

Le Vice-Président: Adopté, sur division.

M. Jolivet: L'amendement est adopté, excusez.

Le Vice-Président: Donc, l'amendement est adopté, purement et simplement.

Maintenant, je vais lire l'amendement à l'article 76: L'article 76 du projet de loi est modifié par l'insertion, dans la deuxième ligne, après le mot "gaz", des mots "dans les matières visées par l'article 1". Est-ce que cet amendement à l'article 76 est adopté?

M. Jolivet: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. Donc, les amendements sont maintenant intégrés au rapport.

Est-ce que le rapport, tel qu'amendé, de la commission de l'économie et du travail, qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 12, Loi sur la Régie du gaz naturel, est adopté? (12 h 50)

M. Jolivet: Sur division.

Le Vice-Président: Adopté sur division. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Article 25, M. le Président, s'il vous plaît.

Projet de loi 32

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président: À l'article 25, nous allons maintenant procéder à la prise en considération du rapport de la commission de l'économie et du travail qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 32, Loi modifiant la Loi sur Hydro-Québec. Est-ce qu'il y a des interventions? M. le député d'Ungava.

M. Christian Claveau

M. Claveau: Oui, M. le Président. Vous me permettrez quelques réflexions sur l'étude article par article. En fait, le projet de loi 32 est un projet de loi très bref, six articles, dont deux articles de fond. Fondamentalement, c'est la création de deux têtes à Hydro-Québec. On divise le poste de président-directeur général d'Hydro-Québec, on en fait deux postes différents, dont un de président du conseil d'administration et chef de direction et un de président et chef de l'exploitation.

Nous avons défendu, en commission par- lementaire, le point de vue selon lequel il ne s'agissait pas là de quelque chose qui allait faire qu'Hydro-Québec allait être fondamentalement et foncièrement plus opérationnelle, avec de meilleurs comportements, que maintenant.

La structure actuelle d'Hydro-Québec a démontré qu'elle pouvait être très efficace, très rentable et qu'elle pouvait faire d'Hydro-Québec une société prospère remplissant intégralement son mandat, qui lui est donné par la loi qui l'a créée. Nous ne voyons dans la création de cette bicéphalie à Hydro-Québec, bien que le ministre va nous revenir avec son disque continuel disant qu'il s'agit de moderniser les structures d'une société d'État à l'instar d'autres sociétés, que l'impossibilité, pour le gouvernement, de réussir à trouver, à des conditions similaires, un remplaçant à M. Coulombe, qui a quitté la direction d'Hydro-Québec et que, ne pouvant trouver un seul individu à des conditions similaires, le gouvernement a dû se rabattre sur une solution alternative qui s'appelle la création de deux présidences à Hydro-Québec. Pour tout ceci, nous sommes contre le projet de loi 32.

Le Vice-Président: Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Il n'y a pas d'autre intervention. Le débat étant clos, est-ce que le rapport de la commission de l'économie et du travail, qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 32, Loi modifiant la Loi sur Hydro-Québec est adopté?

M. Jolivet: Contre.

Le Vice-Président: Donc, adopté sur division. M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Oui. Alors, M. le Président, si vous voulez bien appeler l'article 26 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi 2 Adoption

Le Vice-Président: À l'article 26 du feuilleton, Mme ta ministre des Affaires culturelles propose maintenant la motion d'adoption du projet de loi 2, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires culturelles. Je cède donc la parole à Mme la ministre des Affaires culturelles.

Mme Lise Bacon

Mme Bacon: Merci, M. le Président. Il me fait particulièrement plaisir, au lendemain de la remise du prix d'Europe, de solliciter l'adoption par cette Chambre du projet de loi 2, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires culturelles. Comme je l'ai mentionné précédemment, ce projet de loi a essentiellement pour objectif de revoir la procédure d'attribution de

la subvention remise annuellement à l'Académie de musique de Québec afin de lui permettre de procéder à l'organisation de la tenue du concours en vue de l'attribution d'une bourse qui est désignée sous le nom de prix d'Europe. La nouvelle procédure prévue par la loi permettra au gouvernement de s'ajuster, au fil des ans, aux exigences financières requises par l'organisation et à la remise aussi du prix d'Europe. Nous pourrons ainsi contribuer à maintenir le haut degré de prestige qui est attaché à ce prix, dont l'objectif est de stimuler les jeunes musiciens au perfectionnement de leur art en leur permettant de poursuivre des études musicales à l'étranger.

De plus, par ce geste, nous permettrons également à l'Académie de musique du Québec de poursuivre sa principale mission, qui est de promouvoir le goût de la musique à travers tout le Québec et aussi d'élever le niveau des études musicales pour toutes les disciplines vocales ou instrumentales.

J'ai souligné hier, au cours de l'hommage que je rendais à Mme Rolland, boursière du prix d'Europe, cette année, que ce prix est décerné depuis 1911 et qu'il nécessitait les ajustements prévus par le projet de loi que nous avons devant nous. Je le réaffirme aujourd'hui, et j'ajoute que, par l'adoption de ce projet de loi, nous contribuerons, de plus, à faire connaître nos talents à l'extérieur du Québec et à améliorer la condition de nos artistes. Ce sont, quand même, deux objectifs poursuivis par le ministère des Affaires culturelles. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Sur cette même motion, je vais céder la parole à M. le député de Mercier.

M. Gérald Godin

M. Godin: M. le Président, comme Opposition, on ne peut pas s'opposer à une loi qui favorise l'émergence de nouveaux talents musicaux au Québec. On disait à l'époque que les voyages forment la jeunesse, on peut dire maintenant que la culture forme la jeunesse. Toute récompense ou tout prix qui vise à permettre à des jeunes musiciens et musiciennes québécois d'aller ailleurs pour parfaire leurs connaissances musicales, rencontrer de nouvelles tendances, de nouveaux professeurs compétents dans leur domaine ne peut qu'amener le Québec à prendre sa place encore plus fermement dans le domaine culturel et artistique, qui est d'ailleurs son domaine de choix depuis des années.

Donc, M. le Président, nous voterons avec enthousiasme pour le projet de loi 2. Je ferai remarquer à ceux qui nous écoutent que la gagnante des concours musicaux, cette année, est une demoiselle Angela Cheng, née à Hong Kong et devenue canadienne par la suite, et la meilleure violoniste au Québec est une vietnamienne d'origine qui vit maintenant au Québec. Donc, l'immigration nous amène bien sûr des nouveaux citoyens, de la main-d'oeuvre et des consommateurs, mais aussi, dans bien des cas, des talents de toutes sortes qui font la preuve que le Québec est une terre d'accueil qui permet aux talents de s'épanouir.

Donc, ce projet de loi, nous l'appuyons fortement et nous suggérons qu'on étende le modèle du prix d'Europe dans d'autres domaines. Je sais qu'en littérature et en peinture, il existe déjà des prix New York et Paris. Nous souhaitons que des prix d'Europe soient créés par le ministère et le gouvernement dans d'autres domaines culturels parce que nous sommes convaincus que l'interfécondation des cultures ne peut qu'être bénéfique à nos jeunes talents. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président: Mme la ministre, pour une brève réplique.

Mme Lise Bacon (réplique)

Mme Bacon: M. le Président, je veux seulement rassurer le député de Mercier que nous allons faire renaître, pour deux étudiants du conservatoire, un garçon et une fille, un prix qui avait été discontinué il y a plusieurs années. Le prix permettra, encore une fois, à des étudiants du Conservatoire d'art dramatique de se perfectionner à l'étranger, avec des bourses, des montants réalistes pour leur permettre de bien se perfectionner, d'aller chercher ailleurs ce qu'ils ne trouvent pas ici mais d'apporter aussi ailleurs ce que nous leur enseignons. Nous avons l'intention de faire revivre ces deux prix qui sont importants, je pense, pour nos étudiants des conservatoires d'art dramatique. Nous annoncerons bientôt, à cet effet, les noms des gagnants.

Le Vice-Président: Le débat étant terminé, est-ce que cette motion d'adoption du projet de loi 2, Loi modifiant fa Loi sur le ministère des

Affaires culturelles présentée par Mme la ministre des Affaires culturelles est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. Puisque nous arrivons à 13 heures, nous allons maintenant suspendre nos travaux qui reprendront cet après-midi à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 59)

(Reprisée 15 h 15)

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. M. le leader adjoint du gouvernement

M. Lefebvre: Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler l'article 30 du feuilleton,

s'il vous plaît!

La Vice-Présidente: À l'article 30 de notre feuilleton... Est-ce que c'est l'article 30, monsieur?

M. Lefebvre: L'article 30. Je vous demande d'appeler le projet de loi 21. À mon ordre du jour, c'est indiqué article 30, un projet de loi du ministre Pagé, le projet de loi 21.

La Vice-Présidente: Le projet de loi 21 est inscrit au nom du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Lefebvre: C'est cela. Une voix: Oui, c'est cela.

M. Lefebvre: Appelez-le pour adoption, Mme la Présidente... Il n'y a pas d'intervention ni d'un côté ni de l'autre.

Projet de loi 21 Adoption

La Vice-Présidente: D'accord. Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose l'adoption du projet de loi 21, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles concernant le paiement des produits agricoles. Il n'y a pas d'intervention.

M. Gendron: Adopté.

La Vice-Présidente: Si vous me le permettez, je vais faire la lecture pour les fins du Journal des débats. Est-ce que le projet de loi 21, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles concernant le paiement des produits agricoles, est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Gendron: Non, Mme la Présidente. Un instant.

La Vice-Présidente: M. le leader de l'Opposition.

M. Gendron: Ce que le leader m'a demandé, c'est de faire l'étape prévue qui est la prise en considération du rapport de la commission. C'est bien cela?

M. Lefebvre: Oui, c'est cela, Mme la Présidente.

M. Gendron: Alors, c'est l'adoption du rapport. C'est pour cela que j'ai dit qu'il n'y a pas d'intervenant sur le rapport. En tout cas, selon ce que j'ai.

La Vice-Présidente: Si vous me le permettez. À mon feuilleton, c'est l'étape de l'adoption.

M. Lefebvre: Mme la Présidente, si vous me le permettez.

La Vice-Présidente: Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Effectivement, ce qui doit être appelé, c'est l'adoption du projet de loi 21. Les informations qu'on me donne c'est que, d'un côté comme de l'autre, il n'y a plus d'intervention et effectivement on serait prêts à procéder à l'adoption, sauf erreur, Mme la Présidente, et le leader de l'Opposition me corrigera. Je vais le laisser intervenir là-dessus.

La Vice-Présidente: M. le leader de l'Opposition.

M. Gendron: C'est exact, Mme la Présidente. Même si c'est écrit "prise en considération du rapport", cela a été fait. Nous en sommes à l'étape de l'adoption du projet de loi 21. Il n'y a pas d'intervenant de notre côté et il n'y a pas l'air d'en avoir de l'autre côté. En conséquence, le projet de loi 21 est adopté en ce qui concerne l'Opposition.

La Vice-Présidente: On s'entend bien. On est à l'étape de l'adoption du projet de loi 21 et, comme tel, le projet de loi 21 est adopté.

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Adopté, Mme la Présidente, et excusez-moi de cet imbroglio. Je vous demanderais maintenant d'appeler l'article 31 du feuilleton.

Projet de loi 22 Adoption

La Vice-Présidente: À l'article 31 de notre feuilleton, le ministre responsable de l'application des lois professionnelles propose l'adoption du projet du loi 22, Loi modifiant le Code des professions.

M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles.

M. Claude Ryan

M. Ryan: Mme la Présidente, ces applaudissement témoignent de l'importance que le groupe ministériel attache au travail remarquable accompli par les membres des professions libérales dans la société québécoise.

Le projet de loi que nous discutons a pour

objet d'apporter des améliorations concrètes au Code des professions. Le Code des professions, c'est la loi-cadre qui régit le fonctionnement des quelque 40 corporations professionnelles chargées de dispenser à la population québécoise des services identifiés comme des services professionnels. Ce Code des professions est complété par une série de lois qui regardent un certain nombre de professions particulières. Le Barreau, par exemple, a sa propre loi, la Corporation des ingénieurs, la Corporation des médecins, l'Ordre des comptables agréés, et je pourrais continuer. Mais il y a une loi-cadre, le Code des professions, qui vient fournir l'armature de base à l'intérieur de laquelle se déroule l'activité de chaque profession.

Dans les dispositions de ce Code des professions, il y a tout d'abord des dispositions qui visent à garantir au public la compétence professionnelle et l'intégrité morale des personnes qui exercent ces professions. La profession libérale au sens classique du terme est une profession exercée sur une base personnelle. C'est une personne, dans son bureau, qui dispense un service professionnel à une autre personne.

Par conséquent, cela demande un rapport de très grande confiance. Cela demande que la personne qui dispense un tel service puisse répondre à des exigences de compétence et d'intégrité très élevées. Déjà, le Code des professions prévoit plusieurs dispositions à cette fin. Entre autres, il y a des dispositions, par exemple, prévoyant que chaque profession doit se doter d'un comité d'inspection professionnelle, un comité qui va assurer que le bureau de chaque professionnel sera visité régulièrement afin qu'on puisse s'assurer qu'il fonctionne selon des normes éthiques et techniques élevées.

Il y a un comité d'inspection professionnelle, et il y a un comité de discipline aussi. Il y a des professionnels qui vont commettre des actes dérogatoires qui donnent lieu à des plaintes. Il faut bien que ces plaintes puissent être acheminées quelque part. Alors, chaque grande profession a un syndic qui est le chargé des plaintes. C'est à lui qu'on écrit ou qu'on se réfère pour l'examen d'une plainte en provenance du public. Lorsque l'enquête du syndic établit qu'il y a une matière sérieuse, on ne peut pas laisser la décision à une seule personne. Alors, la plainte est transmise au comité de discipline, lequel est habilité à prendre des décisions. Et, pour s'assurer que la corportion ne se protège pas mesquinement ou étroitement, le président du comité de discipline est nommé par le gouvernement et non pas par la corporation elle-même afin de s'assurer qu'encore une fois, les décisions soient prises dans le meilleur intérêt du public.

Pour surveiller les professions, on a créé, il y a plusieurs années, il y a déjà une quinzaine d'années, l'Assemblée nationale a institué l'Office des professions. C'est un organisme gouvernemental comprenant cinq membres et dont la fonction consiste à surveiller le fonctionnement des professions, à veiller à ce que chaque profession se dote de la réglementation dont elle a besoin pour fonctionner de manière ordonnée, compétente et efficace. L'Office des professions assure la liaison avec le ministre responsable de l'application des lois professionnelles lequel répond au cabinet.

Dans le projet de loi que nous allons adopter bientôt et à l'étude duquel nous avons procédé avec la collaboration active des membres de la commission parlementaire de l'éducation, nous apportons les principales modifications suivantes au Code des professions. Tout d'abord, nous introduisons des précisions concernant le fonctionnement des fonds d'indemnisation aux clients dont chaque corporation est obligée de se doter maintenant. Il est arrivé des cas, ces dernières années, on s'en souvient tous, où des professionnels avaient utilisé à d'autres fins les sommes d'argent qui leur avaient été confiées ou avaient entraîné des coûts considérables pour leurs clients par leur négligence. On s'est aperçu que certaines professions n'avaient même pas de fonds de compensation dans ces cas. Aujourd'hui, les professions sont obligées de se doter de fonds d'indemnisation. Mais dans le projet d'amendement que contient le texte législatif que nous examinons, une corporation pourrait déterminer par règlement la limite jusqu'à laquelle pourrait aller une compensation versée à une victime. S'il n'y avait pas de limite, il peut arriver qu'un seul cas ruine le fonds pour plusieurs années à venir. Il y a une limite raisonnable qui est fixée au-delà de laquelle les recours légaux demeureraient possibles. C'est un premier point.

Deuxièmement, il arrive souvent que des clients ont des chicanes avec leurs professionnels - cela peut être leur avocat, cela peut être leur notaire, cela peut être un architecte ou un ingénieur ou un comptable - quant à la note d'honoraires qu'ils reçoivent après avoir bénéficié des services du professionnel. Déjà dans nos lois, il est prévu une procédure d'arbitrage, mais cette procédure n'était pas complète. Alors là, nous ajoutons des compléments importants qui vont augmenter encore la capacité de recours du client. En particulier, il était dit: Une fois qu'un client avait acquitté sa note, il n'avait plus de recours. Là nous lui donnons le recours quand même. Il peut arriver que, de bonne foi, il acquitte sa note d'honoraires parce qu'il va craindre les représailles du professionnel Mais une fois qu'il a effectué un versement, il n'a plus de recours. Dans la loi actuelle, on lui donne un recours pendant une période de 45 jours. Il a 45 jours pour se réveiller, pour se dire: Là, j'ai été traité de manière injuste. Il peut en appeler à un arbitrage qui est prévu dans les règlements de la corporation, laquelle est obligée de donner un tel règlement en vertu de la loi. C'est une autre amélioration importante que nous apportons.

Chaque corporation est obligée, d'après le code professionnel et d'après sa propre loi constitutive, de se doter d'un gouvernement démocratique. C'est une société composée de ses membres, mais qui doit fonctionner de manière démocratique, c'est-à-dire d'une manière qui assure que la corporation sera dirigée par la volonté de la majorité de ses membres. Alors, il faut prévoir des procédures à cette fin; ce n'est pas tout de dire "vous fonctionnerez d'une manière démocratique". Au gouvernement, pour fonctionner de manière démocratique, nous avons besoin d'une Loi sur les élections qui nous dit comment nous allons faire nos élections. Nous avons besoin de procédures bien déterminées, de manière que chacun sache s'il a le droit de voter, à quel endroit il doit se présenter, à quelles conditions il doit se plier s'il veut exercer ses droits de citoyen.

Dans les corporations, c'est la même chose. Il faut indiquer avec précision les exigences de fonctionnement démocratique. Comme ces exigences évoluent continuellement, c'est normal que, de temps à autre, on apporte certaines améliorations. Nous apportons plusieurs améliorations dans le projet de loi. J'en donne seulement un exemple, Mme la Présidente. Actuellement, une corporation est obligée de publier un avis d'assemblée générale dans les journaux, c'est-à-dire, je m'excuse, elle est obligée d'adresser cela par correspondance à tous ses membres. Pour qu'une assemblée soit valide, il faut qu'elle ait été convoquée par un avis écrit envoyé par l'association. Prenez un organisme comme l'Ordre des infirmiers et des infirmières, qui a 58 000 membres, je pense; imaginez la dépense! Aujourd'hui, le timbre coûte 0,37 $ et parfois c'est un envoi qui va coûter 1 $ ou 1,25 $. À 58 000 membres, cela peut faire facilement 50 000 $ ou 60 000 $. Alors, dans le projet de loi, on dit: Aujourd'hui, il y a d'autres moyens d'informer les gens, en particulier la publication d'avis dans les publications professionnelles de ces organismes-là. L'ordre des infirmières a son bulletin régulier. Cela veut dire qu'il faudra un avis publié dans ce bulletin, suivant des normes qui auront été définies par les dirigeants de la corporation, par le bureau de la corporation. C'est une autre amélioration que nous apportons.

C'est la même chose, aujourd'hui, si on dit: Quand le bureau se réunit, il faut qu'il y ait quorum. Le quorum, généralement, c'est la moitié des membres plus un. Il y a des membres qui seraient prêts a participer à l'assemblée, mais qui ne peuvent pas se déplacer physiquement pour une raison ou pour une autre. De plus en plus, nous introduisons dans nos lois des procédures en vertu desquelles une personne peut communiquer son opinion sur un point et même son vote par des moyens modernes comme le téléphone, par exemple, ou les communications télévisées ou radiodiffusées, etc. Nous l'avons fait dans le cas des commissions scolaires. On nous avait demandé de le faire pour les organismes direc- teurs des corporations professionnelles. Nous introduisons également cette modification.

If faut se rendre compte de la gravité de la situation. Lorsqu'un professionnel est condamné par son comité de discipline à ne plus pouvoir exercer sa profession, il peut arriver qu'il ait été victime d'une décision injuste. Alors il faut qu'y ait un droit d'appel. Actuellement, il a un droit d'appel au Tribunal des professions, c'est normal. Nous maintenons le Tribunal des professions, cela va de soi. Maintenant il y a deux anomalies que nous corrigeons à propos du Tribunal des professions: il peut arriver qu'il soit saisi de demandes frivoles ou qui soient de purs prétextes pour retarder l'exécution d'une décision qui doit s'appliquer le plus vite possible, surtout s'il s'agit d'un chenapan qui a été rayé de la profession pour malhonnêteté, par exemple. Dans ce cas, le Tribunal des professions, avec la modification que nous apportons à la loi, sera autorisé à ne pas accepter une demande d'appel en constatant, par exemple, qu'elle est frivole ou sans fondement à sa face même. Il s'agit beaucoup plus d'un abus de procédure qu'autre chose.

On a la même chose aujourd'hui, comme vous le savez, Mme la Présidente, à la Cour suprême du Canada... Il faut qu'il y ait permission d'en appeler. Avant qu'un appel soit entendu, la Cour suprême examine le cas à sa face même. Si elle considère qu'il n'y a pas de fondement à la demande d'appel, elle se dit: Retournez à votre dossier et présentez-nous une demande plus étoffée, autrement on n'a pas de temps à perdre avec cela. Alors, le Tribunal des professions se voit conférer ce pouvoir. En outre, il peut arriver que lui aussi se trompe de bonne foi. Imaginez, par exemple, qu'il ait rendu une décision interdisant à un avocat ou à un médecin l'exercice de sa profession jusqu'à la fin de ses jours, à perpétuité, et qu'il soit saisi deux semaines ou deux mois ou deux ans plus tard d'éléments d'information nouveaux qui indiquent qu'il avait pris une mauvaise décision. On lui donne la permission de rouvrir le dossier dans des cas comme celui-là, toujours dans te souci de faire justice à la personne concernée. Une série de modifications de cette nature vont permettre d'humaniser encore davantage notre législation en matière de corporations professionnelles. (15 h 30)

Un dernier point très important, le plus important de tous. Nous avons deux sortes de professions: les professions à exercice exclusif et les professions que nous appelons de titre réservé. Les professions à exercice exclusif sont celles dont l'exercice est réservé exclusivement aux personnes qui font partie de la corporation. Par exemple, pour les médecins, il n'y a pas de problème, il faut être médecin diplômé d'une faculté de médecine reconnue pour être autorisé à pratiquer la médecine au Québec. Il faut être avocat, c'est-à-dire diplômé d'une université et avoir subi avec succès les épreuves d'admission du Barreau pour avoir le droit de pratiquer fa

profession d'avocat, c'est-à-dire de faire les actes professionnels qui sont caractéristiques de l'avocat.

Il y a d'autres professions qui ne vont pas aussi loin. Par exemple, on a les ergothérapeutes, on a les psychologues. Ce sont des professions très honorables, mais dont l'exercice n'est pas réservé de manière exclusive aux membres de la profession. Pourquoi? Parce que c'est plus difficile à définir. On peut avoir un psychologue consultant à la radio, on peut avoir une personne qui donne des conseils psychologiques dans les journaux, des courriers du coeur. On peut avoir des personnes qui se donnent le mandat de fournir des conseils; il y a souvent des membres du clergé qui vont s'ériger en conseillers de personnes. C'est très difficile de définir la psychologie d'une manière tellement rigide qu'il y ait une barrière et que personne ne puisse la franchir d'aucune manière. Le législateur a été assez souple là-dessus. Il dit: If ne faut pas pécher par excès de jalousie et d'exclusivisme. Mais, cependant, on s'est aperçu, depuis vingt ans, qu'il y avait des titres de professions qui étaient utilisés de manière abusive. L'appartenance, par exemple - je prends l'exemple des psychologues - à la Corporation des psychologues n'est pas obligatoire. Il peut arriver qu'une personne qui est en dehors s'intitule psychologue. Là, les gens sont mêlés. Elle va se dire psychologue consultant, psychologue expert ou psychologue-conseil. Elle utilise le mot psychologue et souvent elle n'a pas les qualifications d'un véritable psychologue professionnel.

Avec la modification que nous apportons au Code des professions, n'auraient droit au titre de psychologue que les membres en règle de la Corporation des psychologues et toute personne qui utiliserait un titre laissant croire qu'elle a la même compétence que les membres de la corporation commettrait une violation qui serait passible de sanction. Il y a déjà plusieurs années que l'Office des professions recommandait au gouvernement de procéder à une proposition devant l'Assemblée nationale visant la modification de cette disposition du Code des professions. Nous le faisons. Nous avons réuni dans ce projet de loi une bonne soixantaine de modifications fonctionnelles au Code des professions, qui rendront possible aux membres de nos corporations professionnelles un exercice plus souple, plus efficace de leur profession, en accord avec les règles de leurs corporations professionnelles respectives. Je pense que tout le monde sera très heureux. Il y a des questions qui surgissent à propos de certaines modifications. J'en ai parlé l'autre jour.

Par exemple, certaines corporations m'ont écrit pour me faire part de certaines inquiétudes. Nous examinerons ces inquiétudes avec attention, nous demeurerons à l'écoute, comme nous le sommes, des représentations qui nous parviennent des corporations et de leurs membres. Et si, plus tard, il y avait lieu d'apporter des nuances ou des modifications qui nous seraient dictées par l'expérience, nous le ferions volontiers, parce que nous n'avons d'autre but, en légiférant, que de rendre plus facile, dans le meilleur sens du terme, l'exercice de leur activité professionnelle par les membres de nos différentes professions libérales.

Je profite de l'occasion pour ajouter, en terminant, que le gouvernement considère avec beaucoup de respect le travail accompli dans notre société par les membres de nos corporations professionnelles. Il y a des moutons noirs dans tous les milieux, il y en a également dans certaines corporations également. Mais de manière très générale, nous sommes servis au Québec par des médecins, des ingénieurs, des architectes, des comptables, des notaires, des infirmiers et infirmières, des psychologues, des conseillers en orientation, des conseillers en relations industrielles, des travailleurs sociaux et des travailleuses sociales, etc., qui réunissent des qualités de compétence, de dignité et d'intégrité dont nous avons lieu d'être fiers.

Nous avons, en outre, un système d'organisation professionnelle qui repose sur le gouvernement des professions par elles-mêmes. Le gouvernement a mis en place un dispositif très léger, très modeste pour assurer la coordination et la surveillance générale du système, mais sans abus de surveillance ou de contrôle. Nous voulons que chaque corporation se dirige, se contrôle, s'autodiscipline elle-même. Je vous assure qu'avec ce projet de loi, nous n'avons d'autres intentions que de persévérer dans cette voie, et nous ne voulons aucunement envisager une quelconque étatisation de ces professions. Nous les préférons libres, nous les préférons capables d'exercer leurs activités sous la gouverne et la responsabilité de leurs membres.

Je suis très heureux de constater que ce projet de loi sera très probablement adopte avec l'adhésion unanime de tous les membres de cette Chambre. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles. Je vais maintenant reconnaître Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, Mme la Présidente. En fait, comme le dit le ministre, ce n'est pas un projet de loi majeur qui vient modifier profondément, sur le fond, le système actuel régissant les professions au Québec. Le ministre nous a dit à maintes reprises - je dois dire que je partage son avis - que le système professionnel au Québec fonctionne relativement bien. Cela, cependant, n'a pas empêché le ministre de multiplier les règlements et de resserrer les encadrements d'une façon peut-être un peu excessive. Mais on finit par s'y habituer, vous savez. En campagne électorale, on l'entendait, et

avant évidemment, comme critique de l'Opposition, qui nous servait souvent cette leçon: On entend légiférer et réglementer moins et mieux. Cela ne s'est pas démontré à ce jour.

Cependant, je dois dire que, pour l'essentiel, ce projet de loi maintient notre système actuel. Il apporte quelques modifications, quelques-unes intéressantes, d'autres discutables que nous avons déjà eu l'occasion, d'ailleurs, de signaler au moment du débat sur l'adoption du principe.

Je vais peut-être en rappeler quelques-unes. Elles ne sont pas nécessairement dans l'ordre des articles du projet de loi. Il y a la féminisation des désignations des corporations. On sait que le projet de loi profite de l'occasion pour accorder à deux corporations professionnelles des modifications dans la désignation de la corporation professionnelle pour la féminiser. Comme, de plus en plus au Québec, on retrouve des femmes dans toutes les corporations professionnelles, il serait normal que les titres des corporations véhiculent également cette réalité. Nous avons voulu apporter une modification à la loi. Le ministre, s'y refusant, nous l'avons retirée. Cependant, je voudrais juste rappeler au ministre l'engagement qu'il a pris en commission parlementaire à ce sujet, c'est-à-dire qu'il inviterait, et dans les meilleurs délais, toutes les associations professionnelles dont les titres pourraient être féminisés - il y en a environ une douzaine - qu'il entrerait en communication avec ces corporations pour voir s'il ne pourrait pas procéder, dans les meilleurs délais, à une féminisation des termes, ce qui refléterait mieux la réalité et la composition des différentes associations professionnelles.

Je dois dire également que le ministre et les membres de la commission parlementaire ont accepté d'apporter, deux modifications, à notre avis importantes, au projet de loi, à la suite de propositions que nous avons faites. La première touchait la publication des décisions du comité de discipline. Et, je dois reconnaître que dans ce projet de loi, c'est intéressant, puisque dorénavant, on prévoit les modes de publication des décisions rendues par les différents comités, bureaux ou tribunaux touchant les infractions au code d'éthique des différentes professions. Cependant, le projet de loi allait un peu loin et, juste pour vous l'illustrer, dans l'article qui parle du comité de discipline, on prévoyait que, non seulement la décision devait être publiée mais elle devait l'être au frais de la personne qui avait été trouvée coupable. Autrement dit, on disait à celui qui va être pendu: II faut aussi que tu paies ta corde. On trouvait que c'était aller un peu loin. Le ministre s'est rendu de bonne grâce à nos arguments et a retiré cette partie de l'article qui faisait obligation à celui qui était pénalisé par un jugement de payer également pour la publication du jugement rendu par les différentes instances disciplinaires dans un journal de sa ville ou de sa municipalité. (15 h 40)

L'article 47, qui vient modifier l'article 172 du Code des professions, prévoyait que le tribunal devait siéger à Québec et à Montréal et, exceptionnellement, dans les chefs-lieux judiciaires des personnes intimées. C'était un net recul par rapport à la situation actuelle où le tribunal, finalement, siège dans le district judiciaire des intimés et le ministre a accepté de revenir au libellé de la loi actuelle. Cela constitue pour nous une amélioration, une bonification intéressante du projet de loi.

Cependant, je dois dire que j'avais soulevé certaines réserves quant à l'article 188. C'est l'article 57 qui vient modifier l'article 188 du Code des professions et qui définit les infractions. J'ai souligné au ministre certaines inquiétudes quant à l'élargissement ou resserrement, je dirais, de cette définition des infractions possibles. Pour vous donner une idée, je me permets de lire cet article parce que cela me semblait, d'une part, pointilleux, pour ne pas dire un peu dangereux, susceptible de créer plus d'affrontements que d'en solutionner. Ainsi, cet article 188.1 dit au paragraphe c, 4°: "amène, par une autorisation, un conseil, un ordre ou un encouragement, mais autrement que par le fait de solliciter ou de recevoir des services professionnels d'une personne qui n'est pas membre d'une corporation professionnelle dont les membres exercent une profession à titre réservé, une personne qui n'est pas membre d'une telle corporation: a) à utiliser un titre ou une abréviation de ce titre, réservés aux membres d'une telle corporation, ou un titre pouvant laisser croire qu'elle l'est;". Le même article: "amène, par une autorisation, un conseil, un ordre ou un encouragement, mais autrement que par le fait de solliciter ou de recevoir des services professionnels, une personne qui n'est pas membre d'une corporation, a) à exercer une activité professionnelle réservée aux membres d'une telle corporation; b) à utiliser un titre ou une abréviation..." Autrement dit, on est en train de resserrer considérablement la définition ou les causes, les actes qui pourraient être considérés comme étant une infraction au Code des professions en vertu des professions exercées à titre réservé. Je dois dire que je le déplore parce que j'ai attiré l'attention du ministre sur ce point et il m'a dit: Non, écoutez, cela ne pourra pas aller aussi loin que vous le pensez; j'ai fait des vérifications.

Cependant, j'ai appris, au moment où on prenait en considération le rapport - d'ailleurs, c'était terminé - de la commission parlementaire, que l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec avait demandé au ministre, par télégramme, de surseoir à l'adoption du projet de loi, le temps d'examiner plus attentivement les impacts et les conséquences du resserrement de la définition des infractions. À la lecture du document que nous avons reçu depuis de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec, je pense qu'il y a lieu de s'inquiéter, sinon de s'alarmer par rapport à l'interprétation et aux conséquen-

ces que pourrait entraîner l'article 188.2 tel que modifié. Je me permets, Mme la Présidente, de manière qu'il n'y ait pas d'erreur quant à l'interprétation que fait l'ordre des infirmières, de citer des grands passages de l'avis; je ne sais pas s'ils appellent cela un avis, mais ce sont des commentaires que nous a fait tenir l'ordre des infirmières.

L'ordre des infirmières s'inquiète, comme je le faisais, de la portée de ce nouvel article, de cette nouvelle définition des infractions, et rappelant qu'il y avait eu des suggestions de modifications législatives au Code des professions et aux lois professionnelles qui avaient été présentées par l'Office des professions, mais qui touchaient les corporations professionnelles des médecins et qui visaient à resserrer, finalement, la définition des infractions, il y a eu un tollé et la proposition de l'Office des professions, comme nous le rappelait le ministre en commission parlementaire, n'a pas été retenue. Cependant, ce qui n'avait pas été retenu dans le cas des professions médicales l'a été dans le cas des professions à exercice réservé.

Selon l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec, et je cite, "une telle modification à l'article 188 du Code des professions est inadmissible, et elle le serait également si elle était dans une loi particulière, telle que la loi médicale, compte tenu de ses impacts possibles sur les employeurs, les dirigeants, les administrateurs, les officiers, les fondés de pouvoir, les employés d'une personne morale."

Il continue en disant: "Comment pourrait être géré le système de santé au Québec, comment assurer que la population reçoive les services et les soins de santé requis par sa condition, comment maintenir, protéger et promouvoir la santé, traiter la maladie, faciliter la réadaptation qui s'impose avec une telle épée de Damoclès? Comment, finalement, assurer les différents modes de distribution des services dans tout le système dans une optique de coordination, de multidisciplinarité et de complémentarité?"

En effet, la définition qui est donnée là pourrait pénaliser soit la corporation ou soit la personne qui pose un acte; par exemple, donner des médicaments dans un hôpital ou donner des conseils quant à l'utilisation de médicaments à un patient. Une infirmière, par exemple, qui dirait "faites attention, ce médicament crée de la somnolence si vous avez à prendre le volant", pourrait éventuellement être poursuivie parce qu'elle pose un jugement qui relève de la responsabilité ou des pouvoirs réservés au pharmacien ou au médecin.

L'ordre des infirmières cite un certain nombre d'exemples qui sont révélateurs des conséquences que pourrait avoir, si interprété tel qu'on le pense, l'article 188. En plus de l'administration des médicaments pour lesquels on peut se demander qui a le droit de donner des informations quant aux effets touchant l'utilisa- tion d'un médicament, qui a le droit de les administrer, qui a le droit de donner des conseils: le médecin, le pharmacien et l'infirmière. Mais on sait que, dans un centre hospitalier, dans les CLSC, dans les soins d'urgence, ce sont souvent ces trois personnes qui travaillent en concertation et en collaboration qui ont à intervenir auprès du patient, qui posent des gestes qui sont, à la limite, des responsabilités ou des actes réservés ou à titre exclusif.

L'ordre des infirmières cite également les services d'urgence en rappelant que les techniciens ambulanciers - on sait que c'est populaire d'en parler aujourd'hui - dans le domaine des soins préhospitaliers, donnent des soins d'urgence, alors que, d'une part, ils n'ont pas vraiment la préparation et que, d'autre part, ils ne sont pas reconnus comme professionnels au sens du Code des professions. Mais on sait qu'ils sont appelés à intervenir dans des situations d'urgence et à poser des gestes qui sont réservés soit aux infirmiers et infirmières, soit aux médecins.

Qui sera poursuivi dans le cas où un technicien ambulancier pose un geste qui relève d'une autre corporation ou d'une corporation professionnelle? Est-ce que ce sera les services ambulanciers ou la toute nouvelle corporation qui vient d'être créée? Est-ce que ce sera l'hôpital? Est-ce que ce sera le supérieur immédiat, la personne morale ou le technicien ambulancier lui-même? Je pense que cette situation sur laquelle l'Office des professions attire notre attention pourrait se produire plus rapidement qu'on ne le pense et créer des problèmes sérieux quant à la capacité de notre système de santé de coordonner son action, d'assurer un certain continuum, un certain suivi, dans les actions posées par les différents intervenants en matière de santé.

La corporation estime que, par l'article 188, ce projet de loi risque de venir ouvrir une porte plus grande aux poursuites pouvant viser les techniciens ambulanciers, mais pouvant également toucher les dirigeants et les administrateurs. (15 h 50)

Ce sont également les soins aux pieds qui sont de plus en plus donnés dans les CLSC, dans les centres d'accueil et qui le sont par les infirmières dans la très grande majorité des cas. Et combien cet article risque de venir porter atteinte à cette pratique qui s'est développée dans les CLSC et dans les centres d'accueil, mais également à la qualité des services et à la disponibilité des services aux personnes, particulièrement les personnes âgées, qui ont besoin de soins aux pieds.

Le cas est plus patent, je pense, et risque d'avoir plus de conséquences dans les services de psychiatrie et de santé mentale. Dans toutes les régions du Québec, on réclame de plus en plus et c'est particulièrement le cas de ma région, où on a des problèmes sérieux à recevoir en nombre suffisant des psychiatres. On parle de plus en

plus de la nécessité de créer des centres et d'ouvrir des centres de crises où on retrouverait des équipes multidisciplinaires dans lesquelles on retrouverait des médecins, des infirmières, des psychologues, des travailleurs sociaux, des ergothérapeutes. Ces personnes auraient à travailler en concertation pour rendre un service le plus accessible et le plus efficace possible à la clientèle. Un tel article, qui vient prévoir des infractions, qu'une infraction est commise si on encourage, si on suggère, si on propose, si on demande d'exercer une activité à titre réservé, une telle disposition risque tantôt de nous amener des conflits, des contestations touchant la capacité de nos institutions de mettre sur pied de telles équipes multidisciplinaires de façon efficace.

Je ne voudrais pas que mon propos soit interprété comme étant une volonté d'amener toutes les professions à faire de l'ingérence et du chevauchement en matière de services d'une profession à l'autre. Cependant, notre système, et plus particulièrement notre système de santé, appelle de plus en plus la concertation, la coordination. Dans ce sens, plus vous définissez finement ce qui relève des corporations professionnelles, plus cette activité ou cet exercice de concertation, de continuité dans les services de santé sera rendu difficile et cela portera atteinte directement, pas nécessairement à la corporation elle-même, mais cela portera atteinte à la qualité et à l'efficacité des services dispensés.

L'ordre des infirmières termine par quelques articles et je les cite au texte. "Voici, dit-il, quelques autres situations qui risquent d'être la cible de ces articles". Il parle toujours de l'article 188 tel que modifié. "Le médecin ou tout autre professionnel, lorsqu'il recommande ou encourage un bénéficiaire à consulter un mas-sothérapeute, un naturopathe ou un homéopathe." On sait qu'ici ce n'est pas reconnu. Le médecin qui pourrait faire une telle suggestion, parce que étant davantage conscient de l'influence et de la percée que font les nouvelles médecines, ce qu'on appelle les médecines douces, pourrait faire une telle recommandation avec comme résultat qu'il risque d'être poursuivi parce qu'il encourage un patient à aller consulter un massothérapeuthe, un naturopathe ou un homéopathe.

L'ordre poursuit, en disant: "Le responsable, par exemple, d'un programme de maintien à domicile d'un CLSC, lorsqu'il décide que certains soins infirmiers peuvent être faits par l'auxiliaire familiale." Donner des médicaments, par exemple, ou changer un pansement, pour quelque chose de mineur, alors on pourrait poursuivre cette personne parce qu'elle pose des actes qui sont réservés aux infirmières." Les responsables d'un centre d'accueil lorsqu'ils décident que les éducateurs de groupes ou d'appartements supervisés vont donner des soins tels que l'administration d'insuline, les soins de trachéotomie et ainsi que les éducateurs lorsqu'ils donnent ces soins." Dans ces cas on pourrait poursuivre à la fois le

CLSC et le centre d'accueil et on pourrait également poursuivre les personnes qui acceptent de rendre ces services ou de donner ces soins. "Les infirmières qui travaillent dans un service de première ligne d'un CLSC, lorsqu'elles procèdent à l'évaluation et à l'orientation des bénéficiaires." On peut penser, en particulier, aux infirmières qui travaillent à faire le tri dans les services d'urgence, lorsqu'elles portent une évaluation, lorsqu'elles posent un jugement qui relève davantage d'actes qui sont réservés aux médecins, elles pourraient éventuellement être poursuivies. "Un technicien en radiologie, et je termine là-dessus, lorsqu'il administre un médicament par voie intraveineuse ou encore par une substance iodée de contraste."

Autrement dit, ce que l'ordre des infirmières nous démontre, c'est que le nouvel article pourrait avoir des conséquences beaucoup plus graves et beaucoup plus négatives que ce que nous laissait entendre le ministre, de bonne foi, je pense. Je ne crois pas que le ministre ait voulu nous induire en erreur.

Cependant, je regrette deux choses pour les déplorer: d'abord, que le Conseil interprofessionnel... Pour voir si le projet de loi était assez satisfaisant, personnellement, j'ai communiqué avec le Conseil interprofessionnel pour savoir comment il percevait le projet de loi. Je suis obligée de constater que le conseil n'avait pas mené, sur cette question ou sur cet aspect du projet de loi, une consultation suffisamment large. Cela me préoccupe.

La deuxième chose, je le dis pour le déplorer et le regretter, c'est que le ministre n'ait pas jugé utile - au moment où il a reçu le télégramme de l'ordre des infirmières, le 7 juin dernier, il était encore temps - et qu'il n'ait pas décidé d'attendre l'avis de l'ordre pour faire un examen un peu plus approfondi de cet article de la loi. Vous savez, les corporations professionnelles fonctionnent, depuis plus d'une dizaine d'années, avec le code actuel. Ce n'était pas une question de vie ou de mort, l'adoption de ce projet de loi. Nous aurions très bien pu attendre, même la session d'automne, mais on aurait pu le faire aussi assez rapidement pour qu'il soit adopté à la présente session, si le ministre avait pris au sérieux la demande de l'Ordre des infirmières et infirmiers qui avait soulevé des inquiétudes quant à l'application de cet article.

L'ordre des infirmières, je dois également le dire pour leur rendre justice, soulève aussi quelques objections touchant les réglementations qui sont introduites dans le projet de loi et qui visent à réglementer, alors que l'ordre suggérait que de tels règlements devaient ' apparaître davantage dans la loi constitutive de l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec.

En conclusion, compte tenu de l'avancement des discussions, on ne peut plus revenir en arrière. Il me resterait à souhaiter qu'on n'éprouve pas les difficultés dans l'application de cet article 188 qu'appréhende l'ordre des infir-

mières. J'espère que nous ne nous retrouverons pas, parce que cela peut prendre peut-être une année avant que cela soulève de tels cas, avant qu'il y ait une jurisprudence établie en vertu de cet article de la loi, dans l'obligation de revoir le projet de loi. Je le déplore encore une fois. Comme on avait amplement le temps, on aurait pu procéder avec un peu plus de sérieux à l'examen des commentaires que nous a fournis l'ordre des infirmières. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de Chicoutimi. M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles, en réplique.

M. Claude Ryan (réplique)

M. Ryan: Rapidement, Mme la Présidente. Je voudrais revenir sur les représentations que m'avait transmises l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec, auxquelles a fait allusion la députée de Chicoutimi.

Nous nous souvenons tous que le projet de loi a été déposé à l'Assemblée nationale le 12 mai dernier. Après son dépôt à l'Assemblée nationale, le projet de loi, à la demande de mon cabinet, fut envoyé par l'Office des professions à toutes les corporations professionnelles. C'est dire que, dès le début de mai, les corporations professionnelles ont été saisies du projet de loi. C'est un projet de loi qui était dans l'air depuis très longtemps. Elles étaient au courant de toutes ces dispositions, à toutes fins utiles.

J'ai reçu un télégramme de la corporation des infirmiers et des infirmières le 7 juin. J'en ai eu connaissance le 8 juin. La commission avait siégé les 2 et 6 juin. Elle avait procédé à l'étude et à l'adoption du projet de loi, article par article. Il était trop tard pour revenir en arrière. Maintenant, j'ai examiné les représentations qui étaient contenues dans la lettre de l'Ordre des infirmières et infirmiers. Je pense que les craintes sont sincères; les appréhensions procèdent, à mon point de vue, d'un désir sincère de bon service dans ces professions de la santé. Je crois qu'elles ne sont pas justifiées et que l'expérience le prouvera. J'ai clairement indiqué, lorsque nous avons adopté la prise en considération du rapport, que nous verrons à suivre de très près les développements dans tout le secteur des professions de la santé, secteur qui est en évolution et en interrogation, actuellement, à la suite des recommandations formulées par la commission Rochon. (16 heures)

S'il avait fallu attendre qu'on ait tiré des conclusions définitives de la commission Rochon pour procéder à des modifications qui étaient demandées et souhaitées depuis longtemps, on aurait imposé de nouveaux retards qui auraient été nuisibles, finalement, au bon fonctionnement des professions.

Je réitère l'assurance que je formulais il y a quelques jours devant cette Assemblée, à savoir que suivant le cheminement que suivra le débat sur les suites devant être apportées au rapport Rochon et le cheminement que suivra tout le dossier des rapports entre les diverses professions de la santé, nous serons prêts à apporter au Code des professions, s'il y a lieu, les modifications qui tiendront compte de la réalité. Pour l'instant, je crois que les craintes dont on nous a saisis ne justifiaient pas un report indéfini du projet de loi.

Quand on sait comment, à l'Assemblée nationale, quand nous avons entrepris l'examen d'un projet de loi, il faut passer à travers cet examen dans des délais raisonnables, nous sommes tout à fait justifiés d'adopter ce projet de loi maintenant. Encore une fois, je donne l'assurance à toutes les personnes concernées... Des difficultés, il y en aura, il y en a tous les jours dans les professions de la santé auxquelles nous ne sommes pas en mesure d'apporter les solutions immédiates. Dans la mesure où on nous fera part des difficultés auxquelles nous pourrons trouver, avec les professions concernées, des solutions justes et raisonnables, nous serons très ouverts à envisager des modifications éventuelles au texte législatif. Pour l'instant, nous allons adopter un texte de loi qui rendra service à nos professions et en facilitera l'exercice du Parlement. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles. Le débat étant terminé, est-ce que le projet de loi 22, Loi modifiant le Code des professions, est adopté?

M. Lefebvre: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Oui, Mme la Présidente Je vous demanderais d'appeler maintenant l'article 34 du feuilleton, s'il vous plaît!

Projet de loi 29 Adoption

La Vice-Présidente: À l'article 34 de notre feuilleton, le ministre du Travail propose l'adoption du projet de loi 29, Loi modifiant la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

M. le ministre du Travail.

M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, Mme la Présidente, cet article vise strictement l'abolition de deux alinéas de l'article 284 de la loi 42. Le leader de l'Opposition officielle et critique en

cette matière m'a indiqué qu'étant donné les circonstances, étant donné le consentement au dépôt du projet de loi, à l'adoption de principe, à l'étude article par article concernant le rapport de la commission, que nous n'aurions pas d'intervention additionnelle à faire ni d'un côté ni de l'autre. Dans les circonstances, à la suite de cette entente, je vous demanderais de procéder à l'adoption dudit projet de loi.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre du Travail. Oui, M. le leader de l'Opposition.

M. Gendron: Une phrase: c'est exact. Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: En conséquence, il n'y aura pas de discours.

La Vice-Présidente: Donc, le débat est clos. Est-ce que le projet de loi 29, Loi modifiant la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles est adopté?

M. Lefebvre: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Mme la Présidente, je vous demanderais d'appeler maintenant l'article 35 du feuilleton, s'il vous plaît!

Projet de loi 31

La Vice-Présidente: À l'article 35 de notre feuilleton, le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu propose l'adoption du projet de loi 31, Loi modifiant la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre.

M. le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

M. Lefebvre: Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Étant donné que le ministre a l'intention de déposer un amendement à son projet, je fais donc immédiatement motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière.

La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Gendron: Cette motion est adoptée.

La Vice-Présidente: Adopté. Donc, je vais suspendre pour quelques minutes, afin que cette

Assemblée puisse se transformer en commission plénière.

(Suspension de la séance à 16 h 4)

(Reprise à 16 h 9)

Commission plénière Étude d'un amendement déposé par le ministre

Mme Bégin (présidente de la commission plénière): Nous sommes présentement en commission plénière et nous allons aborder l'étude de l'amendement proposé au projet de loi 31 par M. le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. J'aimerais, avant de reconnaître M. le ministre sur des remarques préliminaires, rappeler qu'en commission plénière, l'étude doit se limiter à l'amendement proposé. Là-dessus, je vous réfère à l'article 257 in fine. M. le ministre, est-ce que vous avez des remarques préliminaires?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, Mme la Présidente, je n'ai aucune remarque préliminaire. Nous serions prêt à passer à l'amendement.

La Présidente (Mme Bégin): M. le député d'Abitibi-Ouest, des remarques préliminaires?

M. Gendron: Même chose, sauf que, Mme la Présidente, parce que je veux être certain de ce qu'on va faire, je sais qu'on a transformé l'Assemblée nationale en commission plénière pour prendre connaissance de l'amendement, faire son analyse et son adoption, mais il est bien entendu, et c'est ce que je veux savoir, que nous allons revenir immédiatement après en Assemblée régulière, si je peux utiliser l'expression, pour faire la troisième lecture?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui.

M. Gendron: En conséquence, j'ai la même remarque, que je n'ai pas de remarque préliminaire.

La Présidente (Mme Bégin): Donc, comme vous l'avez dit, M. le député d'Abitibi-Ouest, nous allons, après l'adoption de l'amendement, nous retransformer en Assemblée pour pouvoir adopter le projet de loi. Donc, est-ce que je dois en déduire que l'amendement proposé par M. le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu concernant l'article 0.1 du projet de loi 31 est adopté?

M. Gendron: Non, parce qu'il me semble...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la

Présidente, sans qu'il y ait de remarques préliminaires, j'aurais quelques mots à adresser. Sans doute le critique de l'Opposition a-t-il quelques mots à répliquer sur le contenu de l'amendement proposé. Mme la Présidente, l'amendement se lit strictement comme suit: Insérer, après le paragraphe 1° de l'article 0. 1 le paragraphe suivant: "1. 1 par l'insertion, dans la troisième ligne du paragraphe s, après le mot "qui" des mots "depuis au moins six mois". Pratiquement parlant, Mme la Présidente, le paragraphe s se lirait désormais comme suit: "Salarié permanent": tout salarié qui fait habituellement des travaux d'entretien de bâtiments ou d'ouvrages de génie civil et tout salarié qui, depuis au moins six mois, travaille à la production dans un établissement*.

Cet amendement est de droit nouveau et vise à mettre un terme à certaines pratiques exercées par des employeurs qui affectent leurs salariés qui travaillent à la production dans leur établissement à des travaux de construction assujettis à la loi sur les relations du travail et la formation professionnelle. Le problème nous a été signalé au départ par M. Maurice Pouliot, président de l'International, le 30 avril dernier, lorsqu'il nous a sensibilisé au fait que, présentement, certaines entreprises exerçaient une telle pratique, comme, entre autres, la compagnie Kruger. Ainsi, aux fins de référence, l'amendement sera connu dans le milieu comme l'amendement Kruger. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. M. le leader de l'Opposition et député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Oui, je pense qu'effectivement, l'amendement, puisqu'on avait eu l'occasion d'en parier, en tout cas lors de l'étude article par article... Il y avait une certaine pratique selon laquelle certaines compagnies substituaient à la notion d'employé permanent des employés à une affectation autre pour des périodes d'une durée d'une couple de jours. À ce moment-là, cela se trouvait à faire changer le statut de ces personnes. Le ministre nous dit clairement, Mme la Présidente, qu'il s'agit d'un article de droit nouveau plus exigible ou exigé pour des raisons d'interprétation. A moins que je n'aie mal compris, il y a des interprétations qui étaient faites d'une façon différente et, en conséquence, le ministre souhaite apporter cet éclaircissement pour que, dorénavant, il soit un employé depuis au moins six mois. Alors, sur la disposition, on n'a pas de problème. La seule question que je voudrais lui poser, c'est: Est-ce que, dans les faits, il y a plusieurs intervenants, même s'il qualifie l'amendement, dans le jargon, d'amendement Kruger, est-ce que c'était devenu une pratique courante dans les différents chantiers de construction?

La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Chez les gros employeurs, comme l'a indiqué le député d'Abitibi-Ouest, c'était devenu une coutume, une habitude que l'on pratiquait de plus en plus, et c'était devenu courant de procéder de cette façon.

M. Gendron: Est-ce qu'une jurisprudence a été établie quant aux difficultés que posait l'interprétation de cet élément qui ne définissait pas la période minimale pour laquelle il devait être un employé dit permanent.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'interprétation de l'article s tel qu'il est rédigé faisait en sorte que la pratique de ces grandes entreprises était tout à fait conforme à la loi.

M. Gendron: Au-delà de la justification qui est une justification d'interprétation, est-ce que le ministre peut rappeler les principaux intervenants qui ont souhaité voir une disposition plus claire, prêtant moins à interprétation pour s'assurer que, dorénavant, il y ait au moins...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Tous les intervenants de l'industrie de la construction qui ont siégé au comité Mireault sont intervenus sur cet aspect. Mais comme je l'ai souligné tantôt dans mon introduction, plus particulièrement, le premier qui nous a sensibilisés était le président de l'International, M. Maurice Pouliot.

La Présidente (Mme Bégin): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Vous avez dit, au tout début, Mme la Présidente, qu'on ne pouvait discuter d'autre chose que de l'amendement déposé. Sauf que, que je sache, il est également de pratique courante, en commission plénière, d'indiquer au ministre pourquoi, puisque c'est vraiment la dernière occasion où on va jouer avec différents amendements, avant l'étape finale qui est la troisième lecture... Je sais que des représentations lui ont été faites, encore là, pour baliser davantage les deux sous-catégories, entrepreneurs en excavation et entrepreneurs en machinerie lourde. J'ai eu l'information selon laquelle, possiblement, le ministre arriverait avec un autre amendement que celui dont on vient de discuter pour empêcher que des employeurs professionnels puissent simultanément faire exécuter les travaux par ces diverses catégories. Je sais que, jusqu'à la dernière minute, le ministre semblait acquiescer à la demande qui lui a été faite, et je voudrais savoir pour quelle raison, semble-t-il, ilne donnera pas suite aux demandes qui lui ont été faites concernant des dispositions plus précises pour ces deux sous-catégories.

La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre du Travail.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la Présidente, effectivement, et sans que cela ne constitue un précédent de quelque nature que ce soit, j'accepte volontiers, à l'invitation du leader de l'Opposition, de discuter du sujet qu'il vient de mettre sur la table. Effectivement, certaines des parties importantes dans le domaine de la construction nous ont demandé de baliser les exclusions apportées pour les sous-catégories entrepreneurs de machinerie lourde ainsi qu'entrepreneurs en excavation et terrassement. J'ajouterais même que, tant chez certaines parties syndicales que chez certaines parties patronales, c'est une demande qu'on peut qualifier de conjointe.

J'indiquerai au député d'Abitibi-Ouest que nous avons fait le tour du dossier, analysé minutieusement la question, revisé tout l'historique qui sous-tend les exclusions quant à ces catégories d'entrepreneurs de machinerie lourde et d'entrepreneurs en excavation et terrassement, pour en arriver à la conclusion qu'il nous apparaît, pour le moment, beaucoup plus prudent de ne pas chambarder ces deux activités importantes dans le domaine de la construction. J'indiquerai quand même, pour le bénéfice du député d'Abitibi-Ouest, le nombre maximum de personnes que l'on pourrait toucher si on amendait le statut privilégié de ces deux catégories. Suivant les données dont nous disposons, il est de 863 personnes. Il ne peut donc s'agir d'un problème majeur. Mais pour ces 863 personnes, cela peut représenter des conséquences importantes.

Dans le langage usuel, ces personnes sont des entrepreneurs spécialisés, propriétaires de pépines, pour utiliser l'expression qui nous a été communiquée en commission parlementaire. Une des suggestions qui nous a été faite vise à interdire l'accès aux travaux de construction neuve à ces entrepreneurs spécialisés, sauf une pépine par chantier de construction. Pour les autres, l'entrepreneur général emploierait l'individu, le paierait suivant le salaire du décret et louerait de lui sa pièce d'équipement. Nous avons également requis l'avis du ministre du Revenu qui voit, dans cet aspect, certaines conséquences qui pourraient être financièrement très douloureuses pour ces individus, c'est-à-dire que, sur le plan de la taxation, il n'y a pas de problème quant au salaire. Un T-4 serait délivré par l'employeur, les retenues à la source, etc.. Mais quant à la location de la pièce d'équipement, le marché ferait en sorte que cette pièce d'équipement, selon toute vraisemblance, serait louée à un prix inférieur au prix du marché et que sous cet aspect "entreprise" de son rapport d'impôt, cet individu ne pourrait raisonnablement espérer faire un profit sur son entreprise. Et, à ce moment-là, le ministère du Revenu ne pourrait pas accepter ses pertes, ce qui placerait l'in- dividu dans une situation très complexe.

Nous nous sommes référés, comme je vous l'ai indiqué, à tout l'historique de cette législation. Le législateur, de quelque formation politique qu'il soit, depuis 1968, chaque fois que la loi a été ouverte, a été sensibilisé à ce problème et, chaque fois, on a créé des exceptions pour ces deux types d'intervenants. Je crois qu'au moment où nous nous parlons, cette fois-ci, nous avons peut-être progressé plus qu'à l'habitude parce que je fais référence à une entente entre certaines parties syndicales importantes et certaines parties patronales également importantes. Je pense qu'à ce chapitre-là cela constitue un précédent. Mais on ne peut pas parler d'unanimité et on ne peut surtout pas parler du fait qu'on a eu des représentations quant aux intérêts de ces individus. Ils ont été exclus de la commission parlementaire, si je peux m'exprimer ainsi, parce qu'ils n'étaient pas visés. Ils n'ont pas eu l'occasion de faire valoir leurs droits. Et, compte tenu de l'historique, compte tenu également des conséquences au plan de la fiscalité, il m'apparaît, au moment où nous traitons du sujet, plus opportun de maintenir le statu quo quitte à poursuivre les pourparlers avec les principaux intéressés.

La Présidente (Mme Bégin): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Les explications que le ministre vient de me donner par rapport à sa décision de ne pas poursuivre dans la voie qui avait été hypothétiquement envisagée par certaines parties me satisfont. Je n'ai pas d'autres questions sur l'amendement proposé. En conséquence, je suis d'accord avec l'adoption de l'amendement proposé.

La Présidente (Mme Bégin): Donc, je peux déduire que l'amendement proposé par M. le ministre du Travail et ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu concernant le projet de loi 31, qui a pour but d'amender l'article 0.1, est adopté.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Adopté, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bégin) : Adopté.

Je vais maintenant clore cette commission plénière et je vais suspendre nos travaux quelques minutes afin de permettre aux personnes qui ne sont pas membres de cette Assemblée de se retirer.

(Suspension de la séance à 16 h 22)

(Reprise à 16 h 25)

La Vice-Présidente: M. le président de la commission plénière.

M. Messier (président de la commission plénière): Mme la Présidente, j'ai l'honneur et le très grand privilège de vous faire rapport que la commission plénière a étudié l'amendement proposé par le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et l'a adopté tel quel.

La Vice-Présidente: Est-ce que le rapport est adopté?

Des voix: Adopté.

Adoption

La Vice-Présidente: Adopté. Nous allons donc revenir maintenant à l'étape de l'adoption du projet de loi 31. Là-dessus, je vais reconnaître le prochain intervenant. M. le député d'Abitibi-Ouest et leader de l'Opposition.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, Mme la Présidente. Nous en sommes rendus à la dernière étape de la saga particulière du projet de loi 31. C'est tellement vrai que, uniquement pour l'illustrer, ce n'est pas coutume que nous soyons obligés, lors de la troisième étape, de nous transformer en commission plénière, de redéposer pour la quatrième fois, cette fois, non pas une série d'amendements, mais un nouvel amendement. Je n'ai pas à vous faire un dessin. C'est juste pour faire une illustration. Pensez-vous que les groupes concernés ont eu le temps d'avoir une réaction, de communiquer avec celui qui vous parle et de lui faire connaître les réactions que ces gens auraient probablement aimé me communiquer par rapport à ce que j'appellerais le vécu, la portée et l'implication, qu'on appelle, de l'amendement proposé par le ministre?

Je veux juste illustrer par là que c'est tellement vrai que cela lui enlève le droit de parole qu'il avait, lui aussi, comme ministre, en troisième lecture. Bien sûr, il aura un droit de réplique en troisième lecture. Tout le monde sait cela. Ce qui fait que le pouvoir a toujours deux droits de parole sur chacune des étapes du projet de loi par rapport à un pour ce qui est de l'Opposition. Donc, je sais que le ministre fera la conclusion qu'il pense qu'il y a lieu de faire sur le projet de loi 31.

Je ne veux pas reprendre l'ensemble des échanges de propos qu'on a eus, Mme la Présidente, mais on ne peut pas terminer l'étude de ce projet de loi sans, encore là, resituer la justification législative qui a été soutenue par le ministre du Travail et par ie gouvernement libéral.

Le gouvernement libéral a prétendu, avec raison, que le travail au noir était une plaie dans le secteur de la construction et qu'en conséquence, il y avait lieu d'apporter des amendements législatifs aux diverses lois régissant tout le secteur des relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et également à la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre.

Le ministre a fait le dépôt d'un projet de loi tel que le règlement le prescrivait. Après avoir fait le dépôt du projet de loi, il a décidé d'entendre, comme c'est encore là courant dans le régime parlementaire, une série d'intervenants concernés par le vécu du projet de loi. Je ne veux pas en faire toute la liste, mais c'est important de prendre une minute, parce que cela ne prendra pas plus que cela, pour rappeler qu'il y a plusieurs intervenants qui ont décidé de venir se faire entendre lors des audiences particulières sur le point de vue qu'ils voulaient exprimer concernant ce projet de loi. La plupart de ces intervenants, Mme la Présidente, sont des gens qui connaissent effectivement le secteur de la construction. Cela a été des gens comme la Commission de la construction, l'Association des consommateurs, l'Association des entrepreneurs en construction, la Fédération de la construction du Québec, l'Association de la construction de Montréal et Québec, le Conseil provincial des métiers, la CSN, la FTQ, la CSD et les deux unions, l'Union des municipalités du Québec et l'Union des MRC du Québec de même que la Fédération des commissions scolaires ainsi que d'autres intervenants qui étaient intéressés.

Cela va être très court. Deux phrases là-dessus. Tout ce monde a dit deux choses: M. le ministre, on souhaiterait que vous retiriez votre projet de loi 31 ou, à tout le moins, si vous n'acceptez pas de le retirer, que vous le reportiez à l'automne. Les raisons du report étaient nombreuses. Tantôt je l'ai illustré par des représentations qui m'étaient faites, encore aujourd'hui, où ces gens-là venaient m'indiquer des conséquences réelles, concrètes qu'auront certaines dispositions du projet de loi dans le secteur de la construction. Je rappelle que notre responsabilité, comme parlementaires, qui que ce soit, autant les parlementaires dits ministériels que ceux de l'Opposition, notre responsabilité, quand on légifère, c'est de s'assurer que la loi que nous voulons adopter, à tout le moins, que ceux pour qui nous légiférons, dans leurs lunettes ou dans leur compréhension des choses, ces gens nous indiquent qu'ils trouvent que c'est une loi qui donnera suite aux objectifs du législateur.

Or, en commission sur les consultations particulières, tous ces gens sont venus nous dire que le projet de loi 31, d'après eux, ne permettrait pas de rencontrer l'objectif premier du législateur, contrer le travail au noir, s'assurer que, dorénavant, les règles établies dans le secteur de la construction soient davantage suivies et que nous ayons à l'intérieur des différentes lois qui régissent le secteur de la construction une application la plus conforme possible aux dispositions législatives. Tous ces gens, sauf un groupe, ont dit: M. le ministre,

nous on ne pense pas que votre projet de loi va permettre d'atteindre ces objectifs. Je m'arrête là pour la première étape.

Deuxième étape, le ministre dit: Écoutez, moi je vais vous prouver en apportant des modifications au projet de loi lors de l'étude article par article que vous êtes dans les patates, que vous vous trompez. Moi j'ai la vérité révélée - c'est le ministre qui parle - moi je suis convaincu que mon projet de loi va me permettre d'atteindre l'objectif sur lequel tous sont venus dire qu'il y avait des zones grises, des zones douteuses et même certains ont prétendu que l'effet de certaines mesures du projet de loi 31 aura comme conséquences de créer davantage de travail au noir que de régler certaines situations déplorées.

Le ministre a présenté une première série d'amendements. Dans sa première série d'amendements, il a essayé de faire taire des interprétations erronées. Ma compréhension à moi, Mme la Présidente, c'est qu'il a réussi, à certains égards, à faire taire des compréhensions erronées du projet de loi lorsqu'il a introduit des dispositions qui vont clairement établir que, dorénavant, c'est surtout pour soustraire à l'application du décret des travaux de réparation, d'entretien, de rénovations mineures - c'est une disposition qui a été ajoutée - et des modifications à la condition que ces travaux soient effectués pour le compte d'une personne physique, faisant affaire pour son propre compte, autre qu'un entrepreneur autonome... ne peut exécuter pour autrui et sans t'aide de salariés des travaux de construction.

Je prétends que cette disposition a eu comme conséquence, Mme la Présidente, de clarifier l'interprétation que certaines des parties sont venues donner lors des consultations particulières. Le ministre a eu raison, en ce qui me concerne, d'apporter ces modifications.

La deuxième partie importante à souligner, c'est toute la question de la signification exacte de la portée des amendements présentés par le ministre? Dorénavant, les travaux d'entretien, de réparations, de rénovations mineures et de modifications au logement qu'une personne habite ne seront plus assujettis au décret de la construction. Sur le plan concret, cela signifie, pour prendre un exemple très concret, que si je décide de me faire bâtir une résidence que j'ai l'intention d'habiter, tout autant pour la construction de la résidence que pour les travaux de rénovation que je pourrais apporter plus tard, je ne suis pas assujetti aux dispositions du décret si j'habite cette résidence, sauf pour la construction neuve, bien sûr. La construction neuve de la résidence va continuer à être assujettie au décret de la construction.

Pendant une seconde et demie, j'ai rendu le ministre nerveux, je m'en excuse. Il faut préciser que dans le secteur résidentiel et domiciliaire, de plus en plus de gens sont venus nous dire que les travaux de rénovation, de réparations, d'entretien et de modifications représentaient, quand même, un volume assez imposant, en particulier en ce qui a trait à la dimension rénovation qui, au début, était complètement ouverte et qui, vers la fin, s'est resserrée à la dimension rénovation mineure. C'est un terme dont le ministre a convenu pour mentionner qu'on n'avait pas la même jurisprudence que pour les notions d'entretien et de réparations. Sur les notions d'entretien et de réparations, règle générale, c'est bien établi dans le secteur de la construction. On sait ce que cela signifie. On sait quelle portée cela a. Tous les intervenants étaient unanimes pour, une fois pour toutes, ne pas bouleverser le régime dans la construction et pour qu'il soit clairement établi que, dorénavant, ce genre de travaux n'est plus assujetti aux dispositions du décret et aux mécanismes imposés par le décret, que ce soit toute la dimension des bénéfices de la caisse de retraite, des salaires, de la qualification professionnelle, des différentes lois et de la spécialisation des métiers. Je pense qu'on a réglé cela et c'est clair.

Cependant, le ministre n'a pas voulu rester au plan du consensus. À cette dernière étape, il est important de rappeler un peu plus ce que j'appellerais la philosophie qu'il y a derrière cela. Vous savez, Mme la Présidente, qu'on a affaire à un gouvernement qui a beaucoup plus le souci de déréglementer, de rapetisser la fonction de l'État dans différents secteurs. Pour eux, il est clair que le secteur domiciliaire... Il serait probablement plus avantageux dans leur esprit que ce secteur soit complètement soustrait au secteur de l'application des décrets. C'est tellement vrai que l'un de leurs anciens collègues a fait une réflexion qu'on a appelée le rapport Scowen.

Dans le rapport Scowen, c'est on ne peut plus clair. M. Scowen prétendait dans son rapport qu'il y aurait lieu de déréglementer complètement tout le secteur résidentiel ou domiciliaire de la construction au sens général et, à tout le moins, instaurer un régime différent, non parallèle, qui régirait l'ensemble des mécanismes qui donneraient les différentes structures dans le secteur de la construction résidentielle ou domiciliaire.

Dans le fond, Mme la Présidente, ce qu'il faut sentir dans le projet de loi 31, c'est un pied dans la porte, une ouverture pour commencer tranquillement à justifier. C'est ce qu'ils ont probablement l'intention de faire, mais qu'ils n'ont pas le courage de faire tout de suite d'un coup, de le dire franchement. On pense que le secteur domiciliaire devrait être complètement exclu du décret de la construction et que seule la construction commerciale et industrielle devrait en faire partie. C'est une loi à la pièce, faite sans regarder l'ensemble des autres morceaux du casse-tête compliqué du secteur névralgique, parce que le secteur de la construction, ce n'est pas un secteur facile, Mme la Présidente, pour toutes sortes de raisons historiques et parce

que le législateur, quel qu'il soit, a complexifié énormément les niveaux de responsabilité, les niveaux de garantie, les niveaux de qualification, les niveaux d'enregistrement.

Le ministre lui-même admettait, avec raison, qu'il n'est pas facile à la Commission de la construction du Québec d'avoir un suivi qui lui permettrait d'être certaine que l'entièreté ou l'ensemble du secteur de la construction fonctionne, dans son vécu quotidien, exactement comme les différentes lois l'ont prescrit ou prévu. Lui-même admettait qu'à plusieurs égards, cela prendrait des armées, disait-il, de fonctionnaires de toute nature pour s'assurer d'avoir la vérification totale et complète qui permettrait que seuls des travaux d'entretien et de réparations mineures soient exclus du décret. Parce qu'il n'est pas en mesure de faire le contrôle, il a dit simplement: Ce sera plus simple d'exclure au complet. Ce sera: entretien, réparations, rénovations et modifications. On mettra le paquet et, tout cela étant exclu du décret, il n'y a pas de problème de contrôle et de fonctionnaires et il n'y aura plus de problème de travail au noir, parce que l'on vient de légaliser ce qui se faisait au noir, on vient de dire: Dorénavant, ce n'est plus du travail au noir. (16 h 40)

II me semble qu'il est important de rappeler ces dispositions. Il est également important de rappeler comme je vous l'ai mentionné - je ne veux pas être très long là-dessus - que je trouve que le ministre a tort de prétendre qu'il offrira une formation et une qualification non pas professionnelle, mais semi-professionnelle à tous ceux qui seront exclus du décret. Cela fait drôle de dire que, dorénavant, il y a un certain nombre de travaux qui ne sont plus assujettis au décret, mais aux gens qui feront ce genre de travaux, je vais offrir une formation particulière. Dire que le ministre peut établir des programmes de formation et de qualification professionnelles pour tous ceux qui sont exclus du décret, cela fait drôle. On les exclut et on dit: Arrangez-vous, propriétaires, pour ceux qui voudront faire effectuer ces travaux d'une façon bona fide, en dehors des règles établies, pour avoir uniquement des relations de bonne entente et, même si c'est comme ça, je vais instaurer en parallèle un régime de formation pour ces gens.

Là, il nous dit que les activités comprises dans ces métiers ou ces professions, c'est lui qui va les définir. Les conditions d'admission, c'est le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre qui va les définir. En matière d'examen et de certificat de qualification auxquels cela conduit, c'est lui qui va définir cela. C'est donc un dédoublement de régime, une autre complication, une autre série de règlements. Pourtant, cela va exactement à rencontre de la philosophie de ce gouvernement qui avait dit: Nous, on va déréglementer partout. Tellement qu'il voulait même déréglementer tout le secteur de la construction. Là, ils ont décidé d'en faire seulement une partie - j'entends par là la construction domiciliaire - et ils vont réinstaurer une série de règlements concernant la formation et la qualification professionnelles.

La difficulté que j'ai eue tout au cours de ce que j'ai appelé la saga du projet de loi 31, c'est d'abord de travailler dans des conditions de fin de session, de dernière limite, de dernière minute - on l'a vu encore cet après-midi - et de ne pas avoir cette capacité d'aller discuter avec ceux qui vivent dans le secteur de la construction et de parler avec eux des conséquences probables des dispositions précises du projet de loi 31. J'en donne quelques exemples.

J'avais dit hier au ministre que j'aurais l'occasion, cet après-midi, de rencontrer des intervenants. Là, je le répète, si je les cite, encore là, ce n'est pas pour refaire un débat de fond. Le gouvernement a décidé que, dans ce projet de loi, indépendamment des points de vue qu'il recevrait, il procéderait. Et c'est tellement vrai que le ministre a refusé jusqu'à aujourd'hui, il a toujours refusé de rencontrer l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec depuis le dépôt des amendements. Écoutez, je tiens à dire que le ministre a refusé. Quand je prétends cela, ce sont les gens qu'on rencontrait cet après-midi, qui sont des gens de l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec, qui nous ont dit: On a tout essayé pour rencontrer le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, et jamais le ministre n'a voulu donner suite à notre demande de rencontre après le dépôt des amendements. Si le ministre les a rencontrés avant le dépôt de ses amendements, je n'en disconviens pas, mais après le dépôt des amendements, ces gens nous disent qu'ils n'ont pas eu l'occasion d'être rencontrés. Quoi qu'il en soit, c'est ce que j'ai dit - j'ai toujours dit cela - après le dépôt des amendements, ces gens-là n'ont pas été en mesure de rencontrer le ministre, même si eux disent qu'ils ont multiplié les demandes de rencontre, le ministre n'a pas voulu les rencontrer.

Mon propos n'est pas là-dessus parce que ce n'est pas ce que j'appellerais ce qu'il y a de plus majeur. Il n'en demeure pas moins que ces gens-là ont la prétention suivante. Les entrepreneurs spécialisés, titrent-ils dans un communiqué, les nouveaux interdits de la construction. Les derniers amendements au projet de loi 31 auront pour effet d'interdire à tout entrepreneur sans salariés de se présenter sur un chantier de construction neuve pour y effectuer lui-même les travaux. C'est exact parce que le ministre a introduit, à la place de la notion d'entrepreneur spécialisé, sur laquelle on a discouru pendant une couple de jours, la notion d'entrepreneur autonome. Le ministre a très bien spécifié ce que signifierait la notion d'entrepreneur autonome et, dans les faits, cela signifie qu'un entrepreneur autonome est un entrepreneur titulaire d'une licence d'entrepreneur spécialisé délivrée en

vertu, et ainsi de suite, mais qui exécute lui-même les travaux et qui, lorsqu'il le fait pour autrui, peut le faire à la condition qu'il ait des salariés sous sa juridiction. Donc, s'il est devenu un entrepreneur avec salariés, là, il a le droit d'aller oeuvrer dans le secteur de la construction.

Je veux seulement dire que ces gens-là disaient ceci: Les constructeurs d'habitations considèrent que le projet de loi fait abstraction du fait que, dans le secteur résidentiel, c'est l'ampleur des travaux et l'efficacité des chantiers qui déterminent le besoin de recourir à des salariés. En effet, il est courant que plusieurs types de travaux peuvent être effectués par une seule personne. Notamment, en fin de contrat, les entrepreneurs terminent eux-mêmes les travaux qui sont ceux des tireurs de joints, par exemple, des carreleurs, des peintres. Avec le projet de loi 31, un entrepreneur devra obligatoirement confier ces fins de travaux à un salarié, alors que lui-même sera sans travail. C'est une disposition législative qui changera la face de l'industrie de la construction résidentielle.

Je veux juste signaler que c'est quand même une prétention qui n'est pas mince, M. le Président. La meilleure façon d'aller vérifier cette prétention aurait été de procéder correctement, de retirer le projet de loi 31 ou, à tout le moins, de le reporter à l'automne, pour faire un certain nombre de discussions avec ceux qui vont vivre tout l'été avec les dispositions du projet de loi 31, pas comme application, comme échange - si c'était cela - et, à l'automne, voir si, effectivement, ces gens-là sont dans le domaine du rêve ou de la réalité. Si ces gens sont dans le domaine du rêve, on dira: Écoutez, vous avez des appréhensions qui ne sont pas fondées. Si le législateur prétend qu'il n'y a pas lieu d'en tenir compte, c'est son droit le plus strict. Mais on n'a même pas permis cela, on n'a pas permis d'avoir cette occasion d'aller vérifier avec les personnes concernées. Cela leur permet d'écrire un communiqué: Alerte, urgent, c'est confirmé. C'est vrai que c'est confirmé, on est dans la phase finale.

Le projet de loi 31 s'attaque à la structure même de l'industrie de la construction. Le ministre Paradis a modifié le projet de loi 31 de telle sorte que tout entrepreneur sans salariés n'aura plus le droit de se présenter sur un chantier de construction neuve pour effectuer lui-même les travaux, de même que sur la majorité des gros chantiers de rénovation. Tout entrepreneur sans salarié ne pourra plus travailler pour un employeur professionnel de l'industrie de la construction. Eux prétendent que les conséquences de ces modifications sont très inquiétantes puisqu'il y va de l'avenir d'une multitude d'entrepreneurs et de petites entreprises. Ils prétendent même que cela restreint la liberté d'entreprise.

Pourtant, ce sont ces gens qui pourfendent les tribunes comme étant les plus ardents défenseurs de la liberté d'entreprise et des valeurs presque... Il n'y a pas de qualificatif pour dire combien l'entrepreneurship a toutes les valeurs. Je prétends que l'entrepreneurship a beaucoup de valeurs, mais dans une société, de temps en temps, l'État a un rôle à jouer, et cela doit être cette mixité du leadership de l'État et de celui du secteur privé qui doivent travailler ensemble pour édifier une société plus forte, meilleure, qui répond aux exigences de changement d'une société qui doit constamment s'adapter à cette réalité d'une progression, d'un modernisme et d'un développement face à l'avenir. "À combien de reprises, à la fin d'un contrat, alors que les travaux peuvent être terminés par une seule personne, avez-vous vous-même effectué ces travaux", en voulant dire que c'est ainsi que cela se passe. "Mais avec le projet de loi 31, oubliez cela, vous ne pourrez plus le faire, vous ne pourrez plus travailler sur les chantiers. Pour ces raisons, il est de votre intérêt d'appuyer notre association et de contester ce projet de loi." Ils ne disaient pas cela il y a six mois, ils disaient cela cet après-midi. Sur le plan des conséquences - je m'arrêterai là-dessus, je voulais juste illustrer un propos - ils prétendent qu'on va affaiblir l'entrepreneurship régional. Voyez ce qu'ils disaient, M. le ministre: "II y aura ainsi une recrudescence du travail au noir en répétant l'exclusion de l'industrie de personnes compétentes et expérimentées." Ce ne sont quand même pas 200 ou 250 travailleurs, ce sont 2000 ou 2500 travailleurs de l'association qui effectuaient ce genre de travaux, le plus souvent seuls, à la fin des travaux, j'entends.

Ils prétendent qu'une des conséquences sera que le prix des maisons neuves sera modifié, sera en principe haussé, ce qui, du même coup, réduira le nombre d'acheteurs. On me donnait l'exemple suivant: Vous ne trouvez pas, M. Gendron, que cela crée deux régimes? Vous êtes propriétaire d'un immeuble, vous décidez de le transformer en logements multiples, mais vous décidez d'en occuper un comme propriétaire. Le logement que je décide d'occuper comme propriétaire, chaque fois que j'aurai le goût de faire des réparations, des modifications, des rénovations mineures ou de l'entretien, j'aurai le droit, pour ma partie du logement, de les faire effectuer comme bon me semble, avec qui je veux, avec ou sans perfectionnement offert par le ministre, alors que pour les deux logements au-dessus du mien, pour fins d'exemple, qui sont habités par deux locataires à qui je loue, les rénovations, les modifications, les réparations que je voudrais faire faire à ces deux logements-là, je devrai les faire faire par des gens qui sont assujettis au décret de la construction. (16 h 50)

Donc, par définition, vous venez de comprendre qu'il y a de grosses chances que le coûl de ces mêmes rénovations ne soit pas le même.

Et en cela, je trouve qu'ils ont un argument valable. C'est sûr que le coût peut ne pas être le même si je décide de faire peinturer ma galerie par mon jeune beau-frère et que je lui donne 4 $ ou 7 $ ou 15 $ l'heure. Cela me regarde. J'ai le droit de le faire, je ne suis plus assujetti au décret. Mais quand je ferai peinturer, si c'est de la peinture... Si c'est pour changer les dessus des comptoirs de cuisine des deux logements du haut que je loue, là, je vais être assujetti aux taux du décret. Assujetti aux taux du décret, je n'ai pas le choix, je vais payer ce que le décret me prescrit. Par définition, je suis sûr que ce que le décret me prescrit pour ces genres de travaux-là est supérieur à l'entente que j'aurais pu prendre avec un tiers qui n'a rien à voir avec le décret de la construction. Mais écoutez, si les réparations de mes deux logements que je loue à des personnes ou à des tiers coûtent trois fois le prix que j'ai payé pour la même rénovation, par définition, cela va se répercuter sur quelqu'un. Par définition, cela va se répercuter et, là, tout le monde vient de comprendre sur qui cela va se répercuter. Et ces gens-là alléguaient qu'à ce moment-là le coût des loyers peut être haussé sensiblement parce que tous les travaux de réparations, de rénovations d'habitations résidentielles, où je ne suis pas propriétaire résident, doivent être effectués par des gens assujettis aux taux du décret. Les loyers seront à un prix supérieur.

Je m'arrête sur cet élément-là. Je vous l'ai dit, M. le Président, je voulais juste illustrer que lorsqu'on légifère comme du monde, on prend le temps d'avoir la capacité d'évaluer les réactions de ceux qui auront à vivre avec le projet de loi 31.

Je disais, en commission parlementaire... Le ministre, il a été beau, il a été gentil, il a été sensible à tout ce qu'on a dit. Même si on apportait des amendements, il les a tous battus, par exemple, avec la majorité ministérielle. Il a battu tous nos amendements parce que nous ne pouvions pas avoir des points de vue, nous ne pouvions pas avoir raison sur quelque chose là-dedans. Qu'est-ce que vous voulez? Nous ne sommes que l'Opposition. Alors, pensez-vous qu'on puisse apporter un point valable pour bonifier le projet de foi 31? Bien non. Il est assis sur sa vérité et on procède. Et c'est tellement vrai qu'aujourd'hui on va conclure. On va conclure par l'adoption du projet de loi 31.

Je disais simplement que j'aurais aimé non seulement pouvoir exprimer mon point de vue - ce que j'ai fait tant que je l'ai pu en commission - mais exprimer le point de vue de ceux qui seront les plus touchés par les modifications apportées au secteur de la construction par le projet de loi 31. Il me semble qu'étant donné que tout cela s'est fait à la fin de la session, dans un contexte où on n'avait pas le temps qu'on aurait voulu avoir pour mesurer, évaluer l'ensemble des réactions que d'autres groupes ont faites... Là, j'ai cité tantôt l'As- sociation provinciale des constructions d'habitations, mais j'en ai eu aussi des organisations syndicales. Les organisations syndicales m'ont fait des représentations aussi. Tous les intervenants m'ont fait des représentations et la plupart prétendent qu'il ne nous reste qu'une seule chose à faire, c'est de souhaiter bonne chance au ministre. C'est de lui dire bonne chance par rapport à son objectif premier qui était de contrer le travail au noir. Parce que je n'ai pas plus - je ne l'avais pas au début, en passant... Parce que tout le monde est venu dire qu'entre les beaux principes et le communiqué de presse du ministre qui annonçait qu'enfin le travail au noir serait réglé... Tout le monde est venu dire: Écoutez, M. le ministre, on ne sait pas comment vous avez fait pour écrire cela. On ne comprend pas. Vous êtes probablement le seul à dégager un consensus.

C'est tellement vrai que j'avais l'occasion, avec les gens dont j'ai parlé tantôt, de vous citer le consensus que le ministre faisait à la fin des audiences. Il disait: Écoutez, je suis convaincu que tout le monde a compris. Là, je vais le citer au texte parce que je ne veux pas faire d'interprétation. Mais je vous le dis, seul le ministre du Travail peut faire une affaire de même. Il disait ceci: "L'ensemble des groupes se sont également montrés favorables quant aux intentions du gouvernement d'agir sur ce phénomène, sinon pour le faire disparaître, du moins pour le restreindre. Cela étant acquis, M. le Président, le gouvernement et celui qui vous parle - le ministre du Travail - demeurent fermement convaincus qu'il faut agir sur le travail au noir dans l'industrie de la construction du Québec." Jusque-là, il n'y a pas d'énormité, mais elle s'en vient, l'énormité. Écoutez la phrase suivante. "Le projet de loi 31, qui a été déposé le 10 mai dernier, correspond en termes d'objectifs à la volonté des partenaires socio-économiques de voir le travail au noir attaqué de front et, sinon totalement résorbé, à tout le moins réduit au maximum." Tous venaient juste de lui dire, avant qu'il conclue une affaire de même, que leur perception allait complètement à l'opposé, que ce n'étaient pas les dispositions du projet de loi 31, tel que déposé, qui permettraient de contrer le travail au noir.

Or, le ministre a décidé d'apporter des amendements à certains chapitres. Ceux-ci ont amené des clarifications, je l'ai dit tantôt et, aujourd'hui, nous sommes a l'étape finale. En ce qui concerne l'Opposition, elle a toujours la conviction qu'il aurait été préférable que ce projet de loi soit temporairement suspendu pour que nous ayons davantage le temps de faire le tour des organismes touchés et visés par ce projet de loi et pour nous assurer que la contribution quant à l'élimination du travail au noir soit plus probante, mieux consacrée et ait davantage de garanties de fonctionner. Il nous reste tout simplement, comme je l'ai mentionné tantôt, à dire au ministre: Nous vous souhaitons

la meilleure des chances et nous espérons qu'effectivement le projet de loi pourra contribuer à la réduction du travail au noir sans pour autant en créer d'une autre façon tout autant.

Nous espérons très sincèrement que le ministre ne se servira pas - c'était ma plus grande crainte et la plus grande crainte de l'Opposition - des effets que son projet de loi 31 aura dans le secteur de la construction et en conséquence, dans six mois ou dans un an, qu'il vienne prétendre que, malheureusement, le travail au noir n'ayant pas été contraint comme il le souhaitait, il est obligé d'avaler toute la bouchée - c'est ce qu'ils ont derrière la tête, on le sait, parce que cela a été publié dans un rapport officiel - et dire: J'ai essayé, en partie, de soustraire le secteur domiciliaire à l'application du décret de la construction, étant convaincu qu'on réglerait le problème du travail au noir, mais cela ne se passe malheureusement pas comme souhaité.

Il arrivera donc pour justifier le retrait complet du domaine domiciliaire, du domaine résidentiel, de l'assujettissement au décret de la construction en disant: Écoutez, vous avez toujours le même objectif que moi, qui est de contrer le travail au noir, et il m'apparait que la seule façon véritable de s'assurer qu'il y ait de moins en moins de travail au noir, M. le Président, c'est que l'ensemble du domaine résidentiel ne soit pas dans le régime universel du secteur de la construction, mais qu'il soit dans un régime à part, qu'il soit dans un régime particulier, probablement avec des conditions de travail particulières, avec un assujettissement également différent, comme les garanties pour le consommateur. Et j'ai l'impression que la boucle sera bouclée pour ce gouvernement. Il aura atteint ses buts. Il aura atteint son objectif d'une déréglementation totale.

Si ce n'était pas cela, je m'en réjouirais à la seule condition qu'effectivement, dans six mois, je puisse être en mesure de constater que les mesures apportées par le ministre du Travail auront atteint cet objectif. Pour le moment, avec les éléments d'amendements qui ont été apportés, même si certains avaient comme conséquence de resserrer et de bonifier le projet de loi, ce dernier demeure toujours globalement dans l'état où il a été. Le ministre lui-même, d'ailleurs, l'a confirmé hier lors de l'adoption du rapport de la commission et je prends sa parole - ce que j'appellerais au texte - lorsqu'il disait: Le projet de loi déposé a été sensiblement modifié.

Quand on modifie sensiblement un projet de loi, cela signifie, M. le Président, qu'on n'a pas altéré ses principes de fond. Comme l'Opposition s'est prononcée contre le projet de loi en principe et si, selon le ministre lui-même, ce projet de loi n'a été modifié que sensiblement, je suis dans la même situation et je me vois tout peiné, tout chagriné d'indiquer au ministre qu'en ce qui nous concerne, nous de l'Opposition, nous n'allons pas souscrire à l'adoption de la dernière phase de ce projet de loi 31 parce qu'on prétend toujours qu'il y a tellement de zones grises, qu'il y a tellement d'inquiétudes entre les beaux objectifs qu'il avait dans les notes explicatives et la résultante concrète qu'il aura dans le champ, qu'on ne peut souscrire aux objectifs qu'il avait énoncés. En conséquence, l'Opposition est d'accord pour finaliser la dernière étape mais en l'adoptant sur division. (17 heures)

Le Vice-Président: Je vais maintenant reconnaître M. le ministre du Travail et ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu pour l'exercice de son droit de réplique.

M. Pierre Paradis (réplique)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci, M. le Président. Le travail au noir dans l'industrie de la construction est qualifié par plusieurs de fléau, même de maladie.

En 1987, si l'on s'en remet à des estimations crédibles, il s'est travaillé au Québec près de 26 000 000 d'heures dans la clandestinité. Ce volume de travail équivaut à 25 % de toutes les heures travaillées et rapportées à la Commission de la construction du Québec. C'est donc l'équivalent du quart du marché officiel et connu de la construction qui se fait au noir dans toutes les régions et pour tous les genres de travaux.

Face a cette situation, le gouvernement du Québec a décidé de s'attaquer au problème. C'est pourquoi, le 10 mai dernier, nous avons saisi cette Chambre du projet de loi 31, Loi modifiant la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre. Cette pièce législative vise essentiellement à prendre les dispositions nécessaires afin d'éliminer complètement, du moins de réduire de manière importante, le travail au noir dans l'industrie de la construction au Québec.

Aujourd'hui, nous sommes conviés à clore le débat sur le projet de loi 31. Nous sommes appelés, des deux côtés de cette Chambre, à discuter de l'à-propos du projet de loi ainsi qu'à conclure positivement, du moins pour un côté de la Chambre, le cheminement entrepris depuis le 10 mai dernier.

Or, depuis ce moment, depuis le dépôt du projet de loi 31, les parlementaires ont eu l'occasion de discuter tant des modalités que des principes. D'abord, des auditions publiques ont été tenues, nous vous le rappelons, les 25 et 26 mai derniers. Elles ont permis à quinze groupes représentant un large éventail des concernés par le projet de loi 31 de se faire entendre. Les organismes syndicaux et patronaux de l'industrie, le monde municipal, le milieu scolaire et l'Association des consommateurs du Québec se sont présentés devant la commission parlementaire de l'économie et du travail et ont transmis leurs

points de vue aux députés membres de ladite commission.

Par la suite, le débat s'est déplacé en Chambre où nous avons discuté de l'adoption du principe avant de procéder à l'étude détaillée, article par article, du projet de loi en commission parlementaire. À ce stade du débat, après les nombreuses discussions qui ont eu lieu au cours des dernières semaines, je crois opportun de faire le point sur nos entretiens, et cela l'est d'autant plus que nous terminons aujourd'hui la dernière étape de l'adoption du projet de loi 31.

En proposant le projet de loi 31, le gouvernement proposait de s'intéresser au travail au noir dans l'industrie de la construction. Aujourd'hui, après les nombreux entretiens et discussions qui ont eu lieu depuis le 10 mai dernier, il nous est, au minimum, permis de convenir de l'à-propos de la législation gouvernementale. En effet, s'il y a un constat qu'il nous est possible d'établir aujourd'hui, c'est bien sur l'opportunité pour le gouvernement de s'intéresser au travail clandestin. Le travail au noir dans l'industrie de la construction est une réalité concrète. Il s'agit d'un phénomène vécu quotidiennement par tous les intervenants du secteur. Personne n'a mis en doute sa présence. Tous ceux et toutes celles que nous avons entendus sont unanimes à le dénoncer. Ces mêmes personnes reçues en commission parlementaire nous ont confirmé que le travail clandestin affecte l'ensemble de l'industrie et, davantage, le secteur de la rénovation résidentielle.

Le travail au noir dans l'industrie de la construction est donc un mal généralisé, un fléau qui touche ce secteur clé de l'économie depuis plusieurs années et une maladie qui indispose tous les intervenants qui oeuvrent dans ce domaine. Le gouvernement du Québec, par le projet de loi 31, confirme sa volonté de s'intéresser à cette situation et de s'y attaquer avec conviction.

À ce jour, cette initiative gouvernementale a été plus que confirmée dans ses fondements. Quant aux modalités, quant aux moyens privilégiés par le gouvernement pour contrer ce fléau qui ronge l'industrie de la construction, il faut d'abord préciser le contexte dans lequel nous intervenons.

Comme j'ai eu l'occasion de l'indiquer, cette industrie est hautement et fortement réglementée. Depuis 1968, les activités de construction au Québec sont régies par des lois et des règlements qui font en sorte, quelle que soit la région et peu importe le genre de travaux, que les exigences de qualification et du coût de la main-d'oeuvre sont les mêmes. Ce contexte réglementaire uniforme et homogène, appliqué à des domaines différents, est propice à générer le développement d'activités illicites en marge de la loi et des règles connues, c'est-à-dire le travail au noir. C'est ce qui s'est produit dans l'industrie de la construction.

Face à cette situation, M.- le Président, deux possibilités s'offrent au gouvernement s'il décide d'agir sur le problème du travail au noir. L'une consisterait à prendre les dispositions nécessaires pour que les lois et les règlements soient respectés. Cela signifie de s'assurer que les moyens appropriés de contrôle soient instaurés et que le non-respect des règles et des normes sanctionné. L'autre voudrait que ces règles et ces normes soient modifiées et qu'elles s'ajustent aux réalités qu'elles encadrent. Cependant, dans un cas comme dans l'autre, il est au minimum requis de s'assurer que la réglementation soit applicable. Il est de la responsabilité gouvernementale de voir à ce que les lois et les règlements qu'il propose puissent être appliqués sans nécessiter un système d'inspection hors de proportion en regard des objectifs à atteindre.

L'industrie de la construction, est-il nécessaire de le souligner, est un domaine diversifié. Les réalités ne sont pas les mêmes, que l'on soit dans le domaine industriel, commercial ou résidentiel. Les contraintes de la construction neuve ne correspondent pas à celles de la rénovation. C'est à ces différentes réalités que le projet de loi 31 s'est adressé. D'une part, il s'attaque au travail clandestin sur les chantiers de construction industrielle, commerciale et domiciliaire en resserrant les dispositions qui permettront à la Commission de la construction du Québec de mieux s'assurer du respect des règles et des normes sur ses chantiers. Nous pensons que, pour cette partie de l'industrie, la solution suggérée est adaptée au contexte, répond aux demandes répétées des partenaires de l'industrie de la construction et, surtout, est praticable.

Pour le secteur de la rénovation résidentielle, le projet de loi 31 suggère que dorénavant les travaux de rénovation, de modification, de réparations et d'entretien ne soient plus soumis aux conditions des lois' et règlements du secteur de la construction. Cette solution, pour s'attaquer au travail au noir dans le secteur de la rénovation résidentielle, est différente de celle mise de l'avant pour les chantiers de construction industrielle, commerciale et résidentielle.

Cette différence tient aux conditions propres au domaine de la rénovation résidentielle. En effet, le sens commun et les témoignages entendus en commission parlementaire nous confirment que la prolifération du travail au noir dans cette partie de l'industrie est avant tout le résultat de fa mésadaptation chronique de la réglementation par rapport aux conditions du marché. Les coûts prohibitifs qui ne correspondent pas à la capacité de payer du consommateur et le cloisonnement des métiers qui l'empêche de gérer lui-même les travaux le poussent vers la clandestinité.

À ce stade, M. le Président, je pense qu'il est opportun de rappeler ce que l'Association des consommateurs du Québec est venue nous dire à ce propos en commission parlementaire et je cite l'Association des consommateurs du Québec: "Ce

mal qui ronge le secteur de la construction, ce n'est pas le travail au noir qui n'en est que le symptôme, mais les coûts exorbitants reliés aux travaux de rénovation et le cloisonnement excessif des corps de métiers qui rend le système extrêmement rigide et aberrant, surtout lorsqu'il s'agit pour un consommateur ou une consommatrice d'exécuter ou de faire exécuter de menus travaux d'entretien ou de réparation. À chaque fois qu'une réglementation à caractère économique introduit dans le système des règles qui ne correspondent plus aux réalités du marché, ces règles engendrent des distorsions qui donnent naissance à des phénomènes comme celui du travail au noir". (17 h 10)

On constate donc que des deux solutions précédemment citées, celle visant la normalisation de la réglementation a été retenue par le gouvernement. Resserrer le contrôle du respect de la réglementation dans la rénovation résidentielle était et demeure une solution impraticable. Ce serait se bercer, sinon se noyer d'illusions que de penser qu'il serait possible de vérifier partout, dans l'ensemble du territoire du Québec, une réglementation applicable au secteur de la rénovation résidentielle. Il faudrait constituer des divisions complètes d'inspecteurs chargés de surveiller tous les logements du Québec pour y détecter le moindre mouvement de planche et le moindre coup de pinceau. Il est temps, pour citer M. Claude Bruneau du journal Le Nouvelliste, "que clouer une planche redevienne un geste à la portée du monde ordinaire."

Par ailleurs, comme je l'ai indiqué lors de la commission parlementaire du mois de mai dernier, la grande majorité des intervenants nous a fait de très sérieuses représentations relativement à la question de l'artisan. Introduit dans la loi en 1979, l'artisan est vu par plusieurs comme l'origine du travail au noir dans l'industrie et, par certains, comme un élément perturbateur du milieu. L'analyse des positions et des arguments qui ont été portés à mon attention nous a amenés à apporter des amendements qui ont été soumis à la commission parlementaire et qui ont été adoptés. Ainsi, en plus de ce que j'ai indiqué précédemment, le projet de loi 31 abroge toutes les dispositions relatives à l'artisan.

D'autre part, le projet de loi 31 introduit la notion d'entrepreneur autonome. Défini comme un entrepreneur titulaire d'une licence d'entrepreneur spécialisé, il pourra, pour autrui et sans l'aide de salariés, effectuer des travaux de réparations, d'entretien et de rénovations mineures dans les domaines industriel et commercial. Il pourra, également, dans les mêmes secteurs, agir dans la construction neuve, la rénovation majeure et la modification si sa licence d'entrepreneur spécialisé est relative aux sous-catégories entrepreneur de machinerie lourde ou entrepreneur en excavation et terrassement.

Ces modifications concernant les dispo- sitions du statut d'artisan et celles qui permettent l'introduction de la notion d'entrepreneur autonome répondent d'abord à l'insistance d'une bonne partie de l'industrie qui souhaite que l'on ne rencontre dans ce domaine que des employeurs et des salariés. Par ailleurs, cela assure aux propriétaires de petites entreprises de pouvoir se référer à un spécialiste compétent pour assurer le service dont ils ont besoin.

Voilà donc, pour l'essentiel, les objectifs et les modalités du projet de loi 31. Nous avons, jusqu'à ce jour, traversé toutes les étapes requises par le règlement et, comme nous l'a indiqué le leader de l'Opposition et député d'Abitibi-Ouest, le travail fait l'a été sérieusement. Le projet de loi a été amélioré. Malgré tout, l'Opposition, en tout cas jusqu'à maintenant, demeure contre ce projet de texte législatif. Même si elle est convaincue de la présence du travail clandestin, même si elle est consciente de l'ampleur du travail au noir et des difficultés qu'il pose pour l'industrie, même si elle affirme que les objectifs du projet de loi 31 sont bons et que celui-ci a été très nettement amélioré, l'Opposition, je le répète, M. le Président, demeure contre l'adoption du projet de loi. J'espère que, d'ici à quelques minutes ou quelques secondes, l'Opposition, plus particulièrement mon bon ami le député d'Abitibi-Ouest, prendra conscience de ses responsabilités et révisera sa position.

Quant à nous, de ce côté-ci, nous sommes fort conscients de nos responsabilités et nous souhaitons clarifier cette situation qui dure déjà depuis trop longtemps. Je conclurai donc en invitant l'ensemble des parlementaires des deux côtés de la Chambre à s'associer à l'adoption du projet de loi 31 et en rappelant ce qu'en disait M. Jean Francoeur dans le journal Le Devoir, que je cite: "En adoptant ce projet de loi, l'Assemblée nationale mettra fin à une immense hypocrisie sociale. Il est de commune renommée que le secteur des travaux à domicile est le terrain de prédilection du travail au noir. Dans son état actuel, la loi est absolument inapplicable. Il faudrait lâcher, sur tout le territoire, des divisions entières d'inspecteurs qui iraient frapper à toutes les portes. En outre, pourquoi appréhender de braves travailleurs pour les traduire devant des juges qui, la veille, ont fait repeindre leur appartement à un coût bien inférieur à celui du décret."

J'espère que, si je n'ai pu le faire, M. le Président, Jean Francoeur aura quand même réussi à convaincre l'Opposition et à lui arracher un vote positif en toute dernière analyse. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président: Le débat étant clos, est-ce que la motion d'adoption du projet de loi 31, Loi modifiant la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la

main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre, présentée par le ministre du Travail et ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu est adoptée?

Une voix: Adopté.

M. Gendron: Adopté sur division.

Le Vice-Président: Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Oui, M. le Président. Je vous demanderais d'appeler maintenant l'article 24 du feuilleton, s'il vous plaît!

Projet de loi 24

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président: À l'article 24 du feuilleton, nous allons maintenant procéder à la prise en considération du rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 24, Loi sur le traitement des élus municipaux.

Est-ce qu'il y a des interventions à ce moment-ci? Il n'y a pas d'intervention. Donc, est-ce que le rapport de la commission est adopté?

M. Gendron: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Oui, M. le Président. Je vous demanderais d'appeler maintenant l'article 28 du feuilleton, s'il vous plaît!

Projet de loi 7 Adoption

Le Vice-Président: À l'article 28 du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales propose la motion d'adoption du projet de loi 7, Loi sur l'organisation territoriale municipale. Y a-t-il des interventions à ce moment-ci?

M. le ministre des Affaires municipales.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: M. le Président, ce projet de loi a franchi toutes les étapes. Hier soir, nous avons étudié le rapport de la commission parlementaire. J'ai eu l'occasion à ce moment-là de faire un exposé, le député de l'Opposition aussi. En ce qui nous concerne, nous sommes prêts à procéder à l'adoption définitive du projet de loi 7.

Le Vice-Président: Sur cette même motion, je vais maintenant reconnaître M. le député de Jonquière.

M. Francis Dufour

M. Dufour: Merci, M. le Président. Au départ, je me dois de dire quelques mots concernant ce projet de loi qui se veut le deuxième volume de la refonte des lois municipales commencée sous l'égide de l'ancien gouvernement ou de l'ex-gouvernement, lorsque M. Marcoux était ministre des Affaires municipales.

C'est un projet de loi qui aurait pu apporter de l'innovation, des choses nouvelles, surtout concernant la question des fusions. Si le ministre avait voulu aller un peu plus loin ou s'il avait eu un peu plus de courage, il aurait amené un projet qui aurait pu favoriser les fusions ou les annexions d'une façon volontaire, mais en ne laissant pas les municipalités seules ou à peu près pour pallier les problèmes posés lors des débuts de fusion ou d'annexion. Le ministre s'est donc contenté de refondre des lois, en voulant s'approprier certains nouveaux pouvoirs qu'on a réussi, heureusement, à baliser quelque peu. Lorsqu'il y aura des fusions ou des annexions, ce ne sera pas laissé, toujours ou pratiquement toujours, à la bonne volonté du conseil, mais cela pourra être publié un peu plus. C'est un ajout important au point de vue de la démocratie, que les gens soient avertis lorsqu'il se passe des choses concernant leur vécu ou leur avenir. C'est important pour les citoyens des municipalités de savoir ce qui se passe chez eux quand on parle d'une fusion ou d'une élection.

Quant au redressement des limites municipales, c'est un point qu'on a débattu assez fortement. L'objection fondamentale que nous avions comme Opposition, c'est que, lorsqu'il y a redressement des limites territoriales, régulièrement et pratiquement tout le temps, il y a des actes qui sont posés pour des territoires qui n'appartiennent pas aux municipalités et cela amène l'invalidation de ces actes. Donc, il y avait ce fait, lorsque la municipalité se rend compte de cela et qu'elle veut redresser ses limites, que ces validations d'actes, le ministre voulait les faire de son propre chef ou de lui-même, mais cela ne pouvait pas être acceptable de notre part et on a obtenu, heureusement, que ce soit le gouvernement qui prenne ces actions. Si on doit valider des actes, c'est important que cela se fasse par le gouvernement car, jusqu'à maintenant, c'a toujours été l'Assemblée nationale, par le biais de commissions parlementaires, qui a validé les actes qui étaient passés dans les municipalités et les redressements de limites territoriales. Ce sont des points fondamentaux qui ont été apportés dans ce projet de loi. (17 h 20)

II y a bien sûr une réserve qu'on a faite: lorsqu'il y a annexion ou fusion, les municipalités

peuvent ne pas avoir le temps nécessaire pour préparer leur budget. Il est question des élections. Les municipalités pourraient agir encore, malheureusement, pour plusieurs mois sans que leur budget soit adopté officiellement. Donc, elles ne peuvent pas se fier sur le passé en disant: On adopte le budget de l'an dernier et on peut le prolonger. Dans cet article, l'article 80, la nouvelle municipalité sera obligée d'emprunter. Je trouve que c'est laisser une responsabilité trop grande a de nouveaux élus municipaux, à des gens qui n'ont pas l'expérience de ces budgets et qui n'ont pas l'expérience du vécu de leur municipalité. À ce moment-là, cela veut dire que le ministre des Affaires municipales, dans le temps, sera obligé de donner des prolongations de permission pour que les gens puissent adopter leur budget beaucoup plus tard. Donc, c'est évident qu'on ne pouvait pas être d'accord avec le gouvernement sur cet article, mais ce n'est pas une raison suffisante, à mes yeux et aux yeux de l'Opposition officielle, pour s'opposer au projet de loi.

J'ai l'impression aussi - je pense que c'est là-dessus que je vais conclure - que nous avons fait le travail sérieusement, qu'on l'a fait complètement, qu'on a pu le bonifier dans quelques articles et qu'il reste encore du travail à faire. Je pense que le ministre des Affaires municipales aura sûrement, dans le temps, lui ou un autre, le temps de travailler pour bonifier à nouveau ce projet de loi. Ce n'est pas la Bible, ce ne sont pas les tables de Moïse, comme je l'ai dit hier, mais il aura à améliorer ce projet de loi. Nous souhaitons tout de même que cela puisse apporter une amélioration dans l'administration des municipalités. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Alors, je vais maintenant reconnaître M. le ministre des Affaires municipales pour l'exercice de son droit de réplique.

Nous allons prendre quelques instants pour laisser le temps au ministre de se remettre de ses émotions. Alors, M. le ministre, la parole est à vous.

M. André Bourbeau (réplique)

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Alors, nous arrivons, comme je l'ai dit tout à l'heure, à la dernière étape, c'est-à-dire à l'adoption du projet de loi 7 qui traite de l'organisation territoriale municipale. C'est la deuxième étape de la révision des lois municipales qui, dans trois ou quatre années, lorsqu'elle sera terminée, fera en sorte que, dorénavant au Québec, il n'y aura qu'une seule loi qui s'appliquera pour toutes les municipalités, petites ou grandes, c'est-à-dire le Code des municipalités du Québec. Cela remplacera toutes les lois existantes - et il y a de très nombreuses lois - et cela remplacera également toutes les chartes privées des municipalités.

C'est donc une oeuvre de simplification et c'est une oeuvre colossale, je dois le dire, qui demande beaucoup de travail parce qu'il y a, dans le domaine municipal, des milliers et des milliers d'articles de loi qui, souvent, sont en vigueur depuis quelque chose comme 100 ans et plus, dans certains cas, et qui sont très souvent désuets. C'est, à toutes fins utiles, une jungle où seuls de très rares spécialistes peuvent se reconnaître. Le travail est considérable et nous avançons, je dirais, d'une façon régulière. Je ne peux pas dire à pas de géant, parce que c'est un travail qui prend du temps. Un projet de loi comme celui d'aujourd'hui aura pris quelque chose comme deux ans et demi ou trois ans à partir du moment de sa conception, du début des travaux jusqu'à l'adoption.

Nous sommes présentement à concevoir et à discuter des orientations du troisième volet. Les travaux préparatoires au quatrième volet vont commencer bientôt. Avec un peu de patience, on y arrivera. Dans le cas présent, le député de Jonquière a résumé rapidement le projet de loi. Bref, il s'agit d'un projet de loi qui traite de l'organisation territoriale municipale et de sujets comme la constitution de nouvelles municipalités, les fusions de municipalités, les regroupements et les annexions. J'aimerais signaler que, dans certains de ces cas-là, on pouvait procéder selon trois ou quatre scénarios différents pour arriver à des annexions, par exemple. Dorénavant, il n'y aura qu'une seule façon de procéder quand on voudra faire la constitution d'une nouvelle municipalité, une fusion ou une annexion. Il n'y aura pas trois ou quatre régimes différents, on n'en aura qu'un seul.

En ce qui concerne le redressement des limites des municipalités ou la validation d'actes qui ont été posés, il s'agit évidemment d'une procédure qui fait en sorte que, quand on découvre qu'une municipalité, depuis un certain nombre d'années, croyait avoir juridiction sur une partie de territoire qui n'était pas le sien, jusqu'à récemment, il fallait se présenter à l'Assemblée nationale et demander au gouvernement, par une loi privée, de redresser les limites de certaines municipalités. Or, pour un travail qui était parfois un peu anodin, pousser de quelques mètres les limites d'une municipalité, il fallait engager un processus législatif important, mettant en cause les députés, l'Assemblée nationale, les commissions parlementaires, bref, un appareil important pour accomplir un geste qui, souvent, était un simple geste administratif. Dorénavant, le gouvernement pourra, par un décret, redresser des limites de municipalités et valider les actes qui ont été posés à l'intérieur de ces territoires.

Bref, M. le Président, je pense que c'est un bon travail qui a été accompli par la commission parlementaire et par l'Assemblée nationale, un travail de nettoyage de lois, un travail qui ne peut que concourir à simplifier les lois municipales, et c'est ce que nous recherchons. Je remer-

cie encore les députés de l'Opposition et les députés du parti ministériel pour leur excellente collaboration et je vous donne rendez-vous au volet numéro 3 de la refonte des lois municipales, et j'espère que cela se fera au cours de la prochaine année. Je vous remercie.

Le Vice-Président: Le débat étant clos, est-ce que cette motion d'adoption du projet de loi 7, Loi sur l'organisation territoriale municipale, présentée par le ministre des Affaires municipales est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 33 du feuilleton, s'il vous plaft.

Projet de loi 28 Adoption

Le Vice-Président: À l'article 33 du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales propose maintenant l'adoption du projet de loi 28, Loi modifiant la Loi sur la Communauté urbaine de Québec et d'autres dispositions législatives en matière de promotion et de développement industriels. Je cède la parole à M. le ministre des Affaires municipales.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: M. le Président, hier soir, nous avons eu le temps de discourir longuement sur le projet de loi 28. Le député de Jonquière a fait une magistrale démonstration de la position de l'Opposition sur ce sujet qui est un sujet important, bien sûr, mais pour la région de Québec seulement. Dans les circonstances, M. le Président, je suis d'avis que tout a été dit des deux côtés de la Chambre. Quant à nous, nous sommes prêts à voter immédiatement ce projet de loi en troisième lecture.

Le Vice-Président: Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Jonquière.

M. Francis Dufour

M. Dufour: M. le Président, c'est vrai qu'on a eu le temps de discourir beaucoup, mais je ne pense pas que je puisse permettre au ministre des Affaires municipales de discourir à ma place. Il faudrait peut-être juste rappeler que ce projet de loi que nous avons devant nous, même s'il a fait l'unanimité de l'Opposition, du parti au pouvoir et de l'ensemble des maires de la Communauté urbaine de Québec, a tout de même suscité beaucoup d'intérêt et a soulevé un certain nombre d'interrogations concernant le vécu de la Communauté urbaine de Québec.

En fait, en adoptant ce projet de loi, on fait le constat que la communauté urbaine n'a pas rempli ses obligations concernant le développement économique de la région de Québec. Sans cela, il n'y aurait aucune raison d'adopter ce projet de loi, puisque nous démantelons les parcs à caractère régional sur le territoire de la Communauté urbaine de Québec. Ces territoires retourneront aux municipalités dans lesquelles ils sont situés et, à l'avenir, les municipalités de la Communauté urbaine de Québec pourront instituer ou créer des parcs industriels dans leur municipalité.

En corollaire, il reste la possibilité ou l'obligation de mettre sur pied des commissariats industriels, avec tout ce que cela comporte. Quand on met en place une structure industrielle, on doit aussi mettre en place des commissariats industriels, et cela veut dire deux fois plus d'efforts, deux fois plus de travail, et surtout deux fois plus de coûts, parce qu'il y a des coûts supplémentaires. Je souhaite que ces structures ne viennent pas en contradiction les unes par rapport aux autres et que cela amène réellement un meilleur développement économique dans la région de Québec, qui en a grandement besoin. Je pense que c'est vrai pour Québec, mais c'est vrai ainsi pour l'ensemble des régions du Québec. Souhaitons que la mise en place de ces parcs industriels locaux, de ces commissariats industriels locaux puisse amener de nouvelles industries et de nouvelles entreprises dans la région de Québec. (17 h 30)

Ce que je trouve un peu curieux ou paradoxal par rapport à ce projet, c'est que j'ai eu aussi l'occasion, au cours de mon travail de parlementaire, de travailler à un autre projet de loi qui crée la Société de promotion économique de Québec et qui a pour effet de ramener tous les participants à une même table pour faire la promotion de cette même région à l'extérieur, sur le plan national et international. Là, ce que la communauté urbaine n'a pu faire dans son milieu, on l'a reporté à un autre palier qui s'appelle la Société de promotion économique de Québec. Donc, c'est cela que je trouve un petit peu, pas incantatoire, mais je pourrais dire paradoxal. D'un côté, on défait et d'un autre côté, on refait. Je ne sais pas comment les gens vont se comprendre là-dedans.

Souhaitons, là comme ailleurs - je pense bien que c'est un peu différent - mais souhaitons que la compétition qui pourra s'installer à compter de maintenant entre les municipalités de la Communauté urbaine de Québec soit à l'avantage des municipalités. C'est sûr. Sans cela s'1 n'y avait pas eu cette compétition interne des municipalités, je suis fondamentalement convaincu que la Communauté urbaine de Québec pourrait continuer à administrer ses parcs régionaux et continuer à faire sa promotion économique pour

l'ensemble des territoires.

On en a décidé autrement. Le seul voeu que j'exprime, c'est que les craintes que j'émets ne se concrétisent jamais. Je pense que, comme Opposition, on ne peut pas être accusés d'aussi noirs desseins que de vouloir que les structures qu'on met en place, qu'on accepte aussi, n'arrivent pas à des résultats concrets. Au contraire, on doit se souhaiter mutuellement que ce projet de loi ait tous ses effets et que la compétition qu'on crée à l'intérieur des municipalités de la Communauté urbaine de Québec apporte les meilleurs résultats, apporte le plus d'entreprises possible et, qu'en même temps on puisse créer plus d'emplois. Et cela, c'est pour le mieux-être de l'ensemble de cette communauté pour laquelle on légifère et qu'on a légiféré.

C'est aussi, peut-être en conclusion... Je l'ai rappelé hier, je veux le rappeler aujourd'hui, depuis deux ans et demi, je ne sais combien de projets de loi on a adoptés, mais c'est le premier projet de loi, M. le Président, croyez-le ou pas, qui n'a pas subi d'amendement. Ce n'est pas dans le livre des records Guinness qu'on va l'inscrire mais, en tout cas, je peux dire que dans mes propres annales, cela fait différent. Tout à l'heure, on aura sûrement à prendre en considération un article où on a réussi à introduire une virgule; elle avait été oubliée lors de la rédaction.

Donc, ce projet de loi rapportera, je l'espère, en conclusion, des bénéfices pour l'ensemble des municipalités du Québec et espérons que ce voeu qui a été manifesté par l'ensemble des maires de la Communauté urbaine de Québec puisse profiter, encore une fois, aux municipalités et aux citoyens qui y demeurent. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: M. le ministre, pour une réplique.

M. André Bourbeau (réplique)

M. Bourbeau: M. le Président, nous voici maintenant à l'étape de l'adoption définitive de la Loi modifiant la Loi sur la Communauté urbaine de Québec et d'autres dispositions législatives en matière de promotion et de développement industriels. Je voudrais simplement rappeler ceci. Le député de Jonquière disait tout à l'heure qu'il ne comprenait pas exactement ce qu'on faisait puisqu'il disait: D'une part, on défait quelque chose et, après cela, on refait quelque chose. Bien, c'est effectivement un peu ce qu'on fait et le député de Jonquière l'a très bien décrit.

Jusqu'à récemment, dans la région de Québec, les parcs industriels étaient la propriété de la Communauté urbaine de Québec qui détenait les parcs industriels et qui faisait la promotion économique. Or, la communauté urbaine n'était pas la seule qui pouvait faire de la promotion économique. La ville de Québec également pouvait le faire en vertu de dispositions spéciales dans sa charte. Il y a également un organisme dans la région qu'on appelle la Société Inter-Port qui, elle aussi, pouvait et qui faisait de la promotion économique. De sorte qu'il arrivait parfois que tout ce beau monde-là se retrouvait quelque part, par exemple, en Europe, en train de solliciter le même industriel ou les mêmes investisseurs, ce qui, vous en conviendrez, M. le Président, pouvait créer une situation assez cocasse. Trois groupes provenant de la même région étaient au même endroit en train de solliciter les mêmes personnes. Cela ne faisait pas tellement organisé, en tout cas. Cela me fait penser à cette phrase de Victor Hugo qui disait: Nous sommes trois chez vous; c'est trop de deux, madame. C'est un peu la même chose, trois groupes différents qui viennent solliciter en même temps les mêmes industriels. Cela manquait un peu d'organisation, de sérieux.

On a alors décidé de mettre un peu d'ordre là-dedans et les maires de la région, après s'être consultés, ont convenu que, dorénavant, la Communauté urbaine de Québec n'aurait plus juridiction sur les parcs, ces parcs locaux-là, et qu'on retournerait aux municipalités où sont situés ces parcs la propriété de ces parcs-là, par exemple, la municipalité de Beauport et la municipalité de Saint-Augustin. Donc, les municipalités vont reprendre la propriété de leurs parcs et vont également s'occuper de promotion industrielle locale et sur le plan régional. Je pense que cela clarifie la situation.

Pour ce qui est de la promotion internationale, dorénavant, ce sera le nouvel organisme qui va être formé après l'adoption de l'autre projet de loi, le projet de loi 27 que parraine mon collègue, le ministre de l'Industrie et du Commerce, qui crée la Société de promotion économique du Québec métropolitain, cette société-là qui va dorénavant s'occuper de la promotion. C'est donc une clarification et, à l'avenir, chacun saura quel est son rôle.

En terminant, M. le Président, je voudrais à nouveau féliciter les députés de la région de Québec qui se sont occupés de rencontrer tous les intervenants du milieu et qui ont agi dans le sens de susciter un consensus parmi les élus locaux et régionaux. En particulier, je voudrais souligner le travail remarquable effectué par le député de La Peltrie et par le député de Tas-chereau. Le député de La Peltrie et le député de Taschereau ont travaillé d'arrache-pied pour tenter de faire en sorte qu'un consensus se dégage dans la région sur l'adoption de ces deux projets de loi, le projet de loi 27 et le projet de loi 28.

C'est donc, M. le Président, fort de l'appui non seulement du caucus des députés, mais de l'Opposition aussi, tel que je le perçois, et de tous les maires de la région, que j'ai le plaisir de proposer l'adoption définitive du projet de loi 28. Je vous remercie.

Le Vice-Président: Le débat étant terminé, est-ce que cette motion d'adoption du projet de loi 28, Loi modifiant la Loi sur la Communauté urbaine de Québec et d'autres dispositions législatives en matière de promotion et de développement industriels, est adoptée?

M. Gendron: Adopté. M. Lefebvre: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: M. le Président, je vous demanderais maintenant d'appeler l'article 6 du feuilleton.

Le Vice-Président: À l'article 6 du feuilleton, nous allons maintenant reprendre le débat sur la motion d'adoption du principe du projet de loi 37...

Une voix: Pardon?

Le Vice-Président: Le projet de loi 37... M. Lefebvre: Excusez-moi, M. le Président. Le Vice-Président: Oui. Il y a une erreur?

M. Lefebvre: Oui. Effectivement, il y a un dernier projet de loi qui doit être appelé pour permettre au ministre des Affaires municipales de terminer une partie de sa journée. Je vous demanderais d'appeler l'article 36 du feuilleton, M. le Président. Excusez-moi.

Projet de loi 38 Adoption

Le Vice-Président: À l'article 36 du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du projet de loi 38, Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale.

Je vais donc reconnaître M. le ministre des Affaires municipales.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: M. le Président, il s'agit de la dernière étape de l'adoption de ce projet de loi. Ce projet de loi ne contient que deux articles dont le deuxième traite de l'entrée en vigueur de la loi. Nous avons longuement discuté hier soir, lors du rapport de la commission parlementaire, de la portée de ce projet de loi et, si le député de Jonquière peut réussir à faire encore dix minutes sur la troisième lecture du projet de loi 38, je pense que je vais lui envoyer un cadeau, M. le Président, parce que je crois que tout a été dit. Mais je me fie au député de Jonquière, M. le Président, et je pense qu'effectivement il va certainement parler pendant deux ou trois minutes. Je vous remercie.

Le Vice-Président: Puisque le défi est lancé, je vais maintenant céder la parole à M. le député de Jonquière. (17 h 40)

M. Francis Dufour

M. Dufour: Merci, M. le Président. Je ne sais pas si je vais mériter un cadeau si je parle moins de dix minutes, mais il semble que le défi, c'est de faire dix minutes. Dieu sait que ce ne devrait pas être difficile, même si le projet de loi contient seulement un article qui dit ce qu'on doit faire et un autre qui donne la date de l'entrée en vigueur du projet de loi.

Pour avoir réussi à écrire un projet minceur de cette façon et en même temps s'être rendu compte qu'on peut apporter un amendement qui s'appelle une virgule, cela veut dire que des choses auraient pu se faire différemment. Le projet de loi 38 touche justement la fiscalité municipale. Depuis deux ans et demi que je suis le vis-à-vis du ministre des Affaires municipales, j'ai eu l'occasion de discuter de nombreuses fois de tout le problème de la fiscalité municipale.

Le ministre aurait pu profiter de ce projet de loi pour aller beaucoup plus loin dans sa prise de position. Il y a des projets, il y a des lois actuellement qui devraient être faites concernant la fiscalité municipale, par exemple, la loi sur les complexes industriels, l'article 65. 1 qui aurait permis à des villes à caractère industriel de s'en tirer beaucoup mieux avec les municipalités. Il y a toutes les contestations actuellement que le gouvernement lui-même suscite par la SIQ, la Société immobilière du Québec, concernant les centres d'accueil, les hôpitaux, les écoles.

Je vous le dis, j'ai actuellement en main un rapport que le ministre ne connaît pas qui fait que la ville, que j'administrais et où j'ai été maire pendant de nombreuses années, où j'ai été associé avec des contestations gouvernementales, perd en deux ans au-dessus de 500 000 $, à cause de contestations du gouvernement par la Société immobilière du Québec et aussi par la Société d'habitation du Québec. Il pourra nous dire: Bien oui, c'est normal puisqu'il y a certainement des choses ou des lacunes que vos évaluateurs n'ont pas remplies. Le problème n'est pas là. Le problème, c'est supposé être la valeur marchande. On sait bien que, pour des bâtisses gouvernementales, comme pour les offices municipaux d'habitation, il n'y a pas de marché. Mais on sait une chose, c'est qu'il y a des coûts pour des bâtisses qui viennent d'être mises en place, qui viennent d'être construites dans des municipalités. On sait le prix que cela a coûté pour les bâtir. On ne peut même pas se servir de ces chiffres comme évaluation puisque le gouvernement réussit à les contester. Donc, baisse d'évaluation et baisse de revenus pour les

municipalités. C'est inacceptable!

J'ai dit le printemps dernier que le gouvernement lui-même remettait en cause la fiscalité muncipale. C'est ce qu'on est en train de faire. C'est ce qu'on a voulu en 1979, mettre une réforme qui donnait de l'autonomie aux municipalités. Au moment où l'on se parle, c'est rendu à 95 % ou 96 %. Ces mêmes municipaltés auxquelles on donnait une autonomie... Le même gouvernement, parce qu'un gouvernement succède à un autre, mais lui succède avec les droits et les obligations, est en train de détruire ou de bâtir sa propre réforme fiscale.

Le contrat qui avait été signé entre les municipalités et le gouvernement est en train de s'effriter. Cela n'est pas correct. En vertu du principe, bien sûr, parce que le ministre a souvent eu l'occasion de nous faire connaître ses couleurs, selon lequel il disait: Oui, mais vous savez, les municipalités ne sont pas en déficit. Les municipalités ne sont pas en déficit. Elles ne sont pas en déficit, pourquoi? Il y a une bonne raison. La loi les empêche de faire un déficit. La loi les oblige à présenter des budgets équilibrés de A jusqu'à la fin.

Ce n'est pas le cas du gouvernement. Il faudrait que le gouvernement ou le ministre des Affaires municipales se rende compte que dans les lois il existe des obligations qui font que le gouvernement ne peut pas, que les municipalités ne peuvent pas faire autrement que de terminer l'année avec des surplus. Prenons des municipalités qui ont un budget de 2 000 000 $, de 10 000 000 $ ou 20 000 000 $, il y en a qui ont plus que cela, 1 % de 20 000 000 $, c'est 200 000 $. On ne peut pas dire que les prévisions n'ont pas été bonnes. Les gens des municipalités sont des administrateurs prudents donc, des administrateurs qui doivent voir avant que la fin de l'année arrive à ce que ces montants soient bien administrés, mais, en même temps, ils ne prennent pas de chance parce que s'ils font des déficits ils vont être obligés de répartir le coût immédiatement. Les municipalités, vis-à-vis de ces questions, sont tellement prudentes qu'il y a des surplus qui s'accumulent.

Mais il n'y a pas une municipalité qui met cet argent dans les poches des administrateurs de la municipalité. Ce ne sont pas les élus municipaux qui en profitent. Cet argent est retourné aux contribuables. Il est retourné sous forme de travaux qui sont payés comptant. Il peut être retourné sous la forme du budget qui revient et introduit à l'intérieur du budget. Il est mis de côté au cas où. Quand on comprend qu'il y a eu tellement de contestations au point de vue municipal, y compris son propre gouvernement vis-à-vis des municipalités, c'est heureux que les municipalités aient quelques dollars supplémentaires et cela fait l'affaire de ce gouvernement qui est en train de pressurer l'ensemble des intervenants de tout le Québec pour amener les gens ou aller chercher des fonds.

Ce projet de loi aurait pu aller un peu plus loin que ce qu'on voit décrit actuellement. Le phénomène qu'on vit avec ce projet de loi, c'est que dans un article on amène une action nouvelle. Cette action est faite parce qu'il y avait un problème dans la région de Montréal. Le ministre ne s'en est pas caché. C'est le problème de taxation à Montréal où il y a des contribuables qui contestent le rôle d'évaluation. Donc, c'est un groupe qui semble très structuré et qui a eu de la voix. On n'a qu'à regarder ce qui s'est passé à la télévision, dans les journaux, ils ont occupé beaucoup d'espace. Je ne sais pas si c'est l'ensemble des contribuables de l'île de Montréal, mais cela semblait gros parce qu'on y a attaché beaucoup d'importance et possiblement avec raison.

Ce comité qui n"a pas eu satisfaction a inscrit un certain nombre de plaintes. Je pense que c'est 17 000 qu'il a réussi à faire... Je pense que c'est 16 000 ou 18 000 inscriptions de contestation à la ville de Montréal. La contestation, règle générale, lorsqu'il y a contestation d'un rôle, cela pouvait empêcher le Bureau de révision de l'évaluation foncière de procéder à l'étude des plaintes. L'étude des plaintes n'étant pas jugée, c'est difficile de savoir de quelle façon on va répondre à ces questions. Cela n'est pas unique, par exemple, au Québec que des citoyens contestent un rôle d'évaluation. C'est arrivé dans d'autres municipalités. Il y avait des façons de passer à travers ces contestations. C'est qu'on suivait les procédures, souvent et régulièrement les contribuables laissaient tomber, parfois le rôle pouvait être cassé et cela n'empêchait pas le monde de tourner.

Parce que c'est un problème à Montréal, et une grippe à Montréal, c'est une pneumonie pour tout l'ensemble du Québec, cela prend des mesures extrêmes. Le ministre a décidé de passer par cela. Si cela était arrivé en région... Je rappelle au ministre qu'il y a eu des problèmes d'évaluation industrielle, il me dit régulièrement: Vous savez, c'est, une vendetta que le député de Jonquière a contre une compagnie. C'est seulement lui qui peut croire cela. En tout cas, celui qui vous parle a eu d'excellentes relations avec la compagnie, il y a même travaillé durant 27 ans et je n'ai rien à vider avec eux. Je ne suis plus là, la compagnie produit quand même et celui qui vous parle continue à produire même s'il n'est plus la. Donc, je pense que, de ce côté-là, donnant, donnant, j'ai fait mon travail, j'ai été payé pour et bonjour la visite.

Le problème qu'on a vis-à-vis d'une municipalité... C'est important qu'on établisse de bonnes relations entre les uns et les autres. Ce n'est pas parce qu'il y a une contestation d'évaluation par une industrie qui fait des profits de 500 000 000 $ et plus par année que cela empêche de respirer, mais une contestation de 20 000 000 $, 30 000 000 $ ou de 50 000 000 $, même de 100 000 000 $ - c'est là où on en était rendu - si la municipalité avait perdu, cela empêche les contribuables de respirer. C'est là

qu'on a besoin d'un gouvernement pour établir des règles du jeu. On ne l'a pas fait parce que c'était en région. Une pneumonie en région, c'est une petite grippe pour Montréal. On aurait presque envie de dire: Mon doux Seigneur! on devrait seulement avoir des problèmes à Montréal! C'est sûr que le Québec s'en porterait mieux. On réglerait tous les problèmes parce que - et il y a une raison fondamentale - tous les ministres viennent de la région de Montréal. Donc, quand il y a quelque chose qui se passe à Montréal, on s'empresse, on "montréalise" tout le monde. Ce n'est pas correct.

Donc, fe ministre aurait pu aller un peu plus loin avec ce projet de loi. Il aurait pu apporter des correctifs plus grands. Le problème qu'on voit, d'une part, c'est qu'on pourrait avoir des jugements du Bureau de révision de l'évaluation foncière et, d'autre part, un jugement qui casserait le rôle. Sensiblement, il y aurait des chances de mêler un peu plus tout le monde. Au point de vue juridique, je n'ai pas d'indication que cela améliorerait beaucoup la situation.

Donc, pour ces raisons, bien sûr, on va accepter que ce projet de loi soit ratifié parce que cela concerne beaucoup de monde, même si c'est du droit nouveau. Si le ministre fait une erreur, il vivra avec. On ne le lui souhaite pas, on souhaite seulement que les intervenants qui sont là-dedans, les gens de Montréal, puissent réussir à s'en tirer le mieux possible. Merci, M. le Président. (17 h 50)

Le Vice-Président: Alors, en réplique, M. le ministre des Affaires municipales.

M. André Bourbeau (réplique)

M. Bourbeau: M. le Président, le député de Jonquière a réussi l'impossible: parler quinze minutes sur un projet de loi qui n'a qu'un seul article et avec lequel, au surplus, H est totalement en accord. Après avoir parlé contre le projet de loi, il nous a dit qu'il était d'accord.

Ce qu'il faut bien réaliser, c'est ce que nous faisons avec ce projet de loi. Nous réglons un problème, un problème causé par l'ancien gouvernement. Il faut le dire car, entendre parler le député de Jonquière, c'est comme si le présent gouvernement était responsable de la situation. Or, tout ce problème vient d'un problème causé par l'ancien gouvernement, d'une loi votée par l'ancien gouvernement, la Loi sur la fiscalité municipale, qui ne réglait pas un problème mais, en fait, qui en créait un. Ce problème n'est pas survenu depuis l'adoption de la loi, en 1980, mais il vient de survenir maintenant. Il survient, le député l'a dit.

J'aimerais clarifier un peu ses propos car, à Montréal, on a déposé un nouveau rôle pour 1988, pas à Montréal mais à la Communauté urbaine de Montréal. Ce rôle contient des augmentations substantielles d'évaluation. On le sait, on l'a entendu; de nombreux contribuables ont trouvé que leur évaluation foncière augmentait trop vite par rapport aux années précédentes. Ils ont donc contesté l'évaluation, ce qui est leur droit, devant le Bureau de révision de l'évaluation foncière. Mais, en vertu d'un article de la loi, l'article 173, le bureau de révision ne peut pas entendre leurs plaintes. La loi interdit au bureau de révision d'entendre les plaintes de ces 15 000 ou 18 000 personnes avant plusieurs années.

Il est, vous en conviendrez, M. le Président, assez paradoxal et quelque peu injuste d'obliger ces milliers de personnes à attendre trois, quatre ou cinq ans avant que leur évaluation puisse être redressée par un jugement du Bureau de révision de l'évaluation foncière. C'est pourquoi nous avons décidé d'intervenir et de faire en sorte de faire adopter ce projet de loi qui permettra au Bureau de révision de l'évaluation foncière d'entendre dès maintenant les causes pour redresser les torts, s'il en est, et pour confirmer aux gens une évaluation conforme à la réalité, s'ils ont raison de se plaindre.

Or, pour ce faire, il faut modifier justement l'article 173 et permettre au bureau de révision d'entendre les contestations dès maintenant, même si un groupe a décidé de poursuivre ou de prendre un recours en nullité contre l'ensemble des rôles d'évaluation. C'est le seul objet du projet de loi, soit de permettre de régler ce problème que nous n'avons pas causé, mais qui est causé par une loi qui a été adoptée par l'ancien gouvernement. C'est la raison pour laquelle, M. le Président, même l'Opposition reconnaît qu'il faut régler le problème. Elle reconnaît qu'il y avait un problème dans la loi adoptée sous l'ancien gouvernement. Je ne leur fais pas de tort, je ne leur fais pas le reproche trop brutal d'avoir adopté cette loi. Toutes les lois sont perfectibles. Nous réussissons parfois à faire en sorte de corriger les imperfections qui existaient dans (es lois adoptées avant nous et probablement qu'après nous, d'autres viendront aussi améliorer les lois que nous votons présentement. C'est cela...

Je vois le député de Frontenac qui ne semble pas tout à fait d'accord avec mes propos. Je sais que nos lois sont bien faites, mais je ne veux pas présumer, M. le Président, que, sur une longue période de temps, on ne finira pas un jour par trouver une façon de les améliorer. Enfin, en toute humilité, je suis prêt à dire qu'il est possible qu'un jour on puisse trouver dans nos propres lois des articles qui pourraient être améliorés. C'est ce que nous faisons aujourd'hui à l'endroit d'une loi de l'ancien gouvernement et je constate que l'Oppositon est d'accord avec nous.

C'est pourquoi, M. le Président, c'est avec plaisir que nous voterons en faveur de la loi 38 dont je souhaite l'adoption dans les meilleurs délais. Je vous remercie.

Le Vice-Président: Le débat étant clos, est-

ce que la motion d'adoption du projet de loi 38, Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale, est adoptée.

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: M. le Président, j'avais l'intention d'appeler l'article 6 pour permettre au fougueux député de Sainte-Anne de faire son intervention sur le projet de loi 37, mais cinq minutes ne sont pas suffisantes pour lui. Alors, je me vois dans l'obligation de vous demander de suspendre les travaux jusqu'à 20 heures.

Le Vice-Président: Très bien. Puisque nous arrivons à 18 heures, l'Assemblée va suspendre ses travaux qui reprendront ce soir à 20 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 56)

(Reprise à 20 h 4)

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Jolivet: Pour un discours aussi important de la part du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, je sais qu'il y a eu des réunions avant le début de la séance de ce soir, mais je demanderais le quorum.

La Vice-Présidente: Qu'on appelle les députés.

(Suspension de la séance à 20 h 5)

(Reprise à 20 h 7)

Projet de loi 15 Adoption

La Vice-Présidente: Nous allons donc reprendre nos travaux. Comme je le disais, nous en sommes à l'adoption du projet de loi 15, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune concernant les habitats fauniques. Là-dessus, je suis prête à reconnaître M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: Merci, Mme la Présidente. C'est avec beaucoup de fierté que nous procédons ce soir à l'adoption par cette Chambre, après l'étude article par article par la commission parlementaire de l'aménagement et des équipements, du projet de loi 15, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune concernant les habitats fauniques.

Cette pièce de législation, en dépit de son allure modeste, s'inscrira, je crois, dans la grande lignée des législations "conservationnistes" dont s'est doté le Québec au cours des années. En effet, de la même manière que la société québécoise a un jour exigé que soient mieux protégés son milieu de vie environnemental, son patrimoine historique, culturel et linguistique et son territoire agricole, de la même manière aujourd'hui applaudira-t-elle à l'adoption par cette Chambre de mesures législatives assurant, pour les générations futures, la sauvegarde de son remarquable patrimoine faunique.

L'adoption de cette loi clôturera huit ans d'efforts, de sensibilisation et de démarches de toutes formes: colloques, congrès, discussions interministérielles, travaux de recherche, résolutions de fédérations et organismes de conservation, etc. Des millions de Québécois et de Québécoises, qu'ils soient reliés à l'utilisation consommatrice ou non consommatrice de la faune, s'assurent par l'adoption de cette loi de la préservation de ta diversité génétique et de l'utilisation durable de leur patrimoine faunique, que ce soit à des fins éducatives, récréatives, touristiques ou de loisir.

Au plan économique, ce sont les importantes industries reliées à l'exploitation et à l'observation de la faune qui se voient aujourd'hui garantir non seulement le maintien, mais aussi le développement des emplois et des retombées économiques qu'elles génèrent dans toutes les régions du Québec. Pour les populations autochtones, l'adoption de cette loi leur permettra de perpétuer la pratique des activités culturelles traditionnelles caractéristiques de ces peuples.

En effet, Mme la Présidente, face à l'altération et à la disparition de l'habitat de la faune que nous connaissions au Québec comme partout ailleurs du reste, la nécessité d'intervenir est apparue d'autant plus pressante que les divers lois et règlements en vigueur ne suffisaient pas à assurer une conservation adéquate de la faune. À quoi pouvaient servir à long terme des mesures comme la diminution de l'effort de chasse et un meilleur contrôle du braconnage, si nous n'étions pas en mesure d'assurer à la faune la condition essentielle à sa survie, soit la protection de son habitat? Sans les habitats, il n'y a pas de faune. C'est aussi simple et aussi cruellement évident que cela. De la même manière, sans terres agricoles, il n'y a ni agriculture ni agriculteurs.

C'est pourquoi, Mme la Présidente, pour assurer la perpétuation des espèces fauniques, notamment par la conservation de leurs habitats, et pour maximiser les retombées économiques de cette ressource, il est urgent de prendre les moyens appropriés pour arrêter l'érosion constante de la capacité de soutien du milieu de vie des animaux. C'est ce à quoi vise la présente loi qui poursuit les objectifs suivants: veiller à ce

qu'aucune espèce animale ne puisse être un jour mise en danger au Québec à cause d'une détérioration de son habitat; assurer la conservation et la mise en valeur d'habitats fauniques sur le territoire québécois; s'assurer qu'il n'y art pas de perte nette d'habitats et compenser les pertes inévitables d'habitats en en créant de nouveaux; s'assurer aussi d'un cadre de gestion intégrée des ressources pour la conservation des habitats de la faune de façon à maintenir la qualité, la diversité et la répartition des habitats dans tous les écosystèmes; associer la population québécoise et l'ensemble des intervenants à la conservation et à la mise en valeur des habitats fauniques.

Voilà, Mme la Présidente, les cinq objectifs importants que sous-tend le projet de loi que nous adopterons bientôt en troisième lecture et qui fait en sorte de protéger les habitats pour ces cinq objectifs-là. Les dispositions législatives que nous sommes appelés à adopter constituent la pierre angulaire sur laquelle le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche compte pour résoudre les principaux problèmes de conservation des habitats fauniques.

Le projet législatif déposé modifie essentiellement la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune par l'introduction d'un nouveau chapitre sur la conservation des habitats fauniques et par des ajustements de concordance à quelques autres articles de cette loi. Les éléments essentiels qui caractérisent ce projet sont les suivants: douze types d'habitats sont définis par voie réglementaire, dont dix feront l'objet d'une localisation au moyen de plans cartographiques qui seront intégres aux plans d'affectation des terres publiques et, éventuellement, aux schémas d'aménagement des MRC.

Le projet de loi prévoit aussi que nul ne peut, dans un habitat faunique, faire une activité susceptible d'entraîner des dommages à cet habitat. Cette interdiction ne s'applique cependant pas à une activité exclue par règlement, à une activité faite conformément aux normes ou aux conditions d'intervention déterminées par règlement et à une activité préalablement autorisée par le ministre ou le gouvernement et à une activité requise pour prévenir ou réparer un dommage résultant d'une catastrophe appréhendée.

À cet effet, j'aimerais souligner la collaboration de mon collègue, M. Côté, ministre délégué aux Forêts. Il y a une interrelation, en ce qui concerne les clientèles, pour que ces interventions fassent l'objet, et elles le font déjà, entre nous d'un règlement adapté au milieu d'intervention ou pour les interventions en milieu forestier. Je pense que nous allons accentuer entre nos deux ministères, entre nos collègues et entre nos clientèles respectives, cette pratique d'une interrelation.

Au cours du mois d'août, nous aurons, selon ce que j'ai proposé à mon collègue, le ministre délégué aux Forêts, une rencontre avec les différentes clientèles dans le but d'apporter encore probablement non pas nécessairement plus de souplesse, mais plus de compréhension et, effectivement aussi, faire en sorte que, d'un commun accord, nous puissions avoir tout ce qu'il faut dans cette loi pour que cette collaboration entre les deux ministères soit encore intensifiée davantage.

En cas de non-respect de la procédure d'autorisation ou des conditions d'autorisation, le ministre pourrait suspendre ou révoquer l'autorisation ou confisquer la garantie fournie par le titulaire et l'utiliser afin de réparer les dommages causés à l'habitat. Il pourrait également émettre une ordonnance ou requérir une injonction de la Cour supérieure.

Pour l'exercice de ses responsabilités, le ministre pourrait, par protocole d'entente, confier certains de ses pouvoirs à une corporation municipale ou à une municipalité régionale de comté. Cela a fait l'objet de discussions à l'intérieur du débat article par article.

Il ne sera pas question, Mme la Présidente, d'imposer aux MRC ou aux municipalités ce genre de responsabilité, mais, pour celle qui en fera la demande et qui voudra signer un protocole d'entente avec nous, nous serons ouverts à le faire. D'ailleurs, à cet effet, je dois rencontrer lundi prochain les membres de la table Québec-municipalités pour bien expliquer les points que nous avons discutés en commission parlementaire et qui ont fait l'objet d'un consensus entre nous, ce qui va venir démontrer qu'il n'y a pas lieu d'imposer quoi que ce soit, ni à une MRC ni à une municipalité, dans ce domaine, que ce sera tout simplement le fait d'une municipalité qui pourra à ce moment avoir cette délégation de pouvoirs si elle le souhaite bien.

Outre les amendes imposées pour une infraction à certaines dispositions, le ministre pourrait, aux frais du contrevenant, remettre un habitat dans l'état où il était avant la commission de l'infraction. Enfin, le ministre pourrait accorder une aide financière à toute personne sur une propriété privée où est situé un habitat faunique si le refus d'autoriser une activité, si une condition prévue dans une autorisation ou si une norme ou condition d'intervention prévue au règlement lui cause un préjudice réel.

Cet outil légal s'appliquera sur l'ensemble du territoire québécois, tant sur les terres publiques que privées, et à tous les intervenants, tant les ministères et organismes paragouveme-mentaux que les groupements privés ou le citoyen.

La loi permettra de protéger d'importantes aires de concentration des oiseaux aquatiques, des héronnières, des colonies d'oiseaux, les ravages du cerf de Virginie, des aires de fréquentation et de mise bas du caribou, l'habitat du rat musqué, des aires de confinement de l'orignal de même que des vasières et l'habitat du poisson.

Loin de vouloir empêcher la réalisation des activités nécessaires au bien-être de la collée-

tivité québécoise, les dispositions législatives favoriseront la concertation entre les intervenants pour les aider à intégrer à leurs activités projetées et ce, dès les étapes de planification, des mesures de conservation des habitats fauniques prioritaires. Des guides de conservation seront développés pour aider les intervenants à rendre leur activité conforme aux dispositions législatives et aux exigences du ministère.

Encore là, M. le Président, nous nous sommes entendus pour qu'il y ait un guichet unique pour que les gens qui ont à obtenir des autorisations n'aient pas à se promener entre soit le ministère de l'Environnement, mon ministère et le ministère des Forêts, mais qu'il y ait un guichet unique pour favoriser encore une fois la rapidité et éliminer l'administration. C'est pour cela qu'il y a des ententes faites entre les différents ministères.

La collaboration du public à la mise en oeuvre de cette loi constitue à la fois un prérequis et une condition de succès. Conscient de la nécessité d'intégrer la participation du public pour assurer la conservation de l'ensemble des habitats nécessaires à la faune, le ministère intensifiera ses efforts d'éducation et d'information auprès du public de façon à susciter une attitude positive et une certaine fierté à l'égard des ressources fauniques et leurs habitats et à mieux faire comprendre le rapport complexe qui existe entre les ressources et les habitats. Le ministère espère ainsi obtenir la collaboration du public à la conservation des habitats de la faune aussi bien ceux qui seraient éventuellement couverts par ces mesures législatives que l'ensemble des habitats de la faune.

Depuis de nombreuses années, les organisations préoccupées par la conservation de la faune s'intéressent activement à l'habitat faunique. Les utilisateurs de la faune sont de plus en plus conscients de la valeur de l'habitat faunique. L'intérêt que portent ces groupes à leur environnement se traduit par l'élaboration de programmes éducatifs, la publication de textes, la diffusion de magazines et de documents sur la nature et l'environnement et par des prises de position publiques. Le ministère compte effectuer des efforts particuliers pour sensibiliser également des groupes identifiés à certaines activités en interactions directes avec les habitats.

D'autres réalisations concrètes, tel le financement d'importants projets de conservation ou d'acquisition de terres à cette fin, suscitent aussi l'admiration.

Enfin, un nombre croissant de corporations publiques et privées se préoccupent davantage de la conservation des habitats fauniques. A ce titre, citons les schémas d'aménagement réalisés par les municipalités régionales de comté dans lesquels sont déjà reconnus certains habitats fauniques, en plus des efforts d'organismes comme Canards Illimités Canada et Duvetnor etc. (20 h 20)

Mme la Présidente, l'adoption de ce projet de loi constitue, à n'en pas douter, un geste déterminant et fondamental pour l'avenir de la faune au Québec. Ce geste s'ajoute à deux autres mesures fondamentales qui ont été prises au cours des douze derniers mois, soit la signature, le 10 novembre 1987, de l'entente-cadre concernant un plan quinquennal pour la protection et l'aménagement des habitats fauniques et, en juillet dernier, la dotation de moyens de financement en faveur de la Fondation de la faune du Québec. L'entente-cadre à laquelle je me réfère comporte des crédits de 16 400 000 $ qui permettront, tant pour l'habitat des zones humides que pour l'habitat de la faune terrestre et celui du poisson, l'acquisition de certains habitats, la réalisation de projets de restauration et d'aménagement de sites, la construction de divers ouvrages, la conclusion de baux et servitudes, le versement d'indemnités, etc. Quant à la Fondation de la faune du Québec, elle est maintenant en mesure d'assurer son financement et d'être active dans la mise en oeuvre des dispositions du projet de loi déposé pour adoption par cette Chambre, cette semaine. Ce projet de loi et les deux autres mesures auxquelles je viens de me référer brièvement constituent un train complet d'assurances qui feraient l'envie de n'importe quel courtier.

Il n'est pas exagéré de dire que plein de choses se produisent au Québec en faveur de la faune, qui font l'envie de nos amis ailleurs, au Canada. Je citerai à cet effet, et en terminant, l'extrait d'une lettre que je recevais récemment du président d'Habitat faunique Canada M. Denis Sherratt, qui, après étude du projet de loi 15, déclare ce qui suit: "Ayant eu l'occasion de voir ce qui se passe ailleurs au Canada, je puis vous assurer que cette loi sera de loin la plus complète qui soit dans ce domaine. En effet, dans la plupart des cas, la protection des habitats se limite, dans les textes législatifs, à une mention touchant les richesses naturelles, ou ne constitue qu'une composante mineure d'une loi sur la gestion de la faune."

Alors, Mme la Présidente, autant de notre côté que du côté de l'Opposition, l'ensemble des parlementaires de cette Chambre qui ont concouru à adopter cette loi et à la bonifier, dans certains cas, doivent être heureux que ce compliment nous soit adressé par quelqu'un qui a regardé toutes les lois du Canada. Sans aucun doute, cette loi fera l'orgueil des gens du Québec et de l'ensemble de tous ceux qui veulent protéger les habitats fauniques au Québec. Merci.

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. M. le député de Dubuc.

M. Hubert Desbiens

M. Desbiens: Mme la Présidente, l'Opposition, par ma voix, est heureuse de s'associer au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche

pour adopter le projet de loi 15 qui vient consacrer, comme le ministre l'a souligné lui-même, des années d'efforts, de colloques, de discussions au Québec concernant la possibilité et la nécessité d'établir une loi qui vienne protéger les habitats fauniques. Pas d'habitat faunique, Mme la Présidente, évidemment pas de faune.

La nature est de plus en plus sujette à toutes sortes d'agressions. Il était plus que nécessaire et même urgent, devrais-je dire, que le gouvernement accepte, décide plutôt de présenter ce projet de loi qui, comme l'a souligné le ministre lui-même, est le fruit de longues années de discussions. Il a été présenté finalement à la demande de nombreux organismes responsables et amants de la nature québécoise, de gens responsables et intéressés d'une façon très particulière par la conservation et par la mise en valeur de notre ressource faunique et qui étaient de plus en plus inquiets devant les agressions, comme je le mentionnais tantôt, que doit subir aujourd'hui le territoire québécois, la nature québécoise, devant tant d'agressions que de destructions pures et simples attribuables à la pollution, à l'utilisation industrielle et de la matière ligneuse dans le milieu forestier, etc.

Alors, le ministre par ce projet de loi 15 vient combler le manque qui existait au Québec. C'est évidemment important et l'Opposition est heureuse, par conséquent, de s'associer à son projet de loi.

Toutefois, j'ajouterai, Mme la Présidente - le ministre l'a mentionné aussi dans son intervention - la question des interrelations. L'utilisation de la matière ligneuse par les entreprises forestières, l'utilisation de la faune par les citoyens et citoyennes du Québec, l'utilisation de la nature sous toutes ses formes aussi par les citoyens et citoyennes du Québec créent toutes sortes de situations et il y a nécessairement interrelation entre toutes ces actions qui ont lieu.

Ces interrelations touchent le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et touchent, comme il l'a souligné tantôt, le ministère de l'Énergie et des Ressources et, également bien sûr, le ministère de l'Environnement du Québec. Lorsque des interventions seront nécessaires par des lois ou de la réglementation, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, en ce qui concerne ses devoirs de ministre responsable de la conservation et de la mise en valeur de la faune, sera celui qui devra le faire en coordination avec ses collègues, j'imagine, du ministère de l'Énergie et des Ressources et du ministère de l'Environnement du Québec.

Alors, de plus en plus, les lois et la réglementation qui existent au Québec viennent confirmer ces interrelations et ces interventions multiples qui doivent avoir lieu sur le territoire. La loi sur les habitats fauniques ou la partie de notre Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune concernant les habitats fauniques existe enfin. On ne peut que dire bravo, Mme la Présidente. Et l'Opposition, évidemment, votera en faveur du projet de loi 15.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Dubuc. Il n'y a pas d'autre intervention? Le débat est terminé. Est-ce que le projet de loi 15, Loi modifiant de nouveau la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune concernant les habitats fauniques, est adopté?

Des voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Adopté. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Picotte: Mme la Présidente, je vous demande d'appeler l'article 37 de notre feuilleton.

Projet de loi 101 Adoption

La Vice-Présidente: À l'article 37 de notre feuilleton, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche propose l'adoption du projet de loi 101, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et la Loi sur les parcs. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: Merci, Mme la Présidente. En déposant aujourd'hui, pour adoption en cette Chambre, après étude par la commission parlementaire de l'aménagement et des équipements, le projet de loi 101, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et la Loi sur les parcs, nous donnons suite, Mme la Présidente, avec une immense satisfaction, aux engagements pris avec l'ensemble des partenaires du gouvernement en matière de gestion de la ressource faunique.

Bien sûr, ce projet introduit des amendements à la loi actuelle visant, d'une part, à préciser certains pouvoirs des agents de conservation et, d'autre part, à assurer une plus grande efficacité et souplesse dans l'administration des revenus perçus dans les parcs et les réserves, de même que dans la gestion des permis et des certificats de chasse et de piégeage.

Avant tout, les modifications contenues dans cette pièce législative reflètent notre conviction que la gestion de la faune est une entreprise complexe qui ne peut et ne doit pas être assumée par le gouvernement seul. La conservation et la mise en valeur de la faune et de ses habitats sont des devoirs à responsabilité partagée. Les associations de chasseurs, de pêcheurs et de trappeurs, les organismes de la faune, les divers mouvements pour la conservation de la nature, les entreprises privées reliées

à l'utilisation de la faune ou influençant l'habitat faunique par leurs exploitations ou l'utilisateur de la faune, sont tous parties prenantes de ce que nous appelons la mission faunique. Plus que jamais, l'État a besoin d'assistance, plus que jamais aussi le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche doit compter sur la population, le monde associatif, l'entreprise privée, en somme, sur l'ensemble de ses partenaires du secteur privé autant que du secteur public, pour assurer une gestion efficace de la faune.

Ce partenariat ne peut toutefois s'exprimer clairement que si l'environnement législatif et réglementaire, tout en établissant clairement le cadre garantissant le respect de la responsabilité gouvernementale, donne aux partenaires toute la souplesse et l'autonomie nécessaires à l'exercice de cette assistance, de cette participation, je dirais même de cette complicité avec l'État, dans la réalisation de cette importante mission.

C'est donc cet esprit qui a constamment guidé notre démarche dans l'élaboration de ce projet de loi, du moins dans ses principaux éléments. C'est le même esprit que celui qui fut véhiculé auprès de nos partenaires à l'occasion du premier Sommet québécois sur la faune que j'ai tenu récemment les 29, 30 avril et 1er mai dernier, à Québec, sommet à l'occasion duquel les 23 organismes participants ont fait consensus sur les rôles que nous y proposions pour nos divers partenaires, autant du monde associatif que de l'entreprise privée. (20 h 30)

Ce projet de loi touche aussi, en grande partie, les zones d'exploitation contrôlée. On se souviendra que ce projet de loi a été déposé l'automne dernier et, compte tenu de certaines inquiétudes que pouvait susciter ce projet de loi - les membres de l'Opposition m'en avaient fait part à l'époque - j'avais préféré retarder l'adoption à ce printemps pour nous permettre de consulter les administrateurs des ZEC lors de leur congrès annuel qui a eu lieu, si ma mémoire est fidèle, au mois de février dernier. D'un commun accord, sauf sur un point, les administrateurs des ZEC m'ont demandé de faire diligence pour adopter l'ensemble du projet de loi, surtout cette partie touchant aux ZEC, dans le but de leur donner plus d'autonomie.

Il va de soi qu'après dix ans de vie des ZEC, il fallait songer à regarder de plus près, à moderniser la loi qui les régit, à faire en sorte qu'on leur donne le pouvoir de prendre certaines initiatives. À titre d'exemple, quand on parle de donner de l'autonomie aux ZEC, je vous soulignerai que dans une ZEC il peut y avoir une occasion où on aimerait défendre l'utilisation de moteurs à carburant sur les chaloupes, dans le but de moins polluer le lac, pour préserver l'oxygène nécessaire à la vie des poissons, etc. On n'avait pas cette possibilité antérieurement, sauf en faisant un règlement d'ordre général défendant toute utilisation de moteur à carburant sur tous les lacs du Québec. On sait que dans certains cas, selon la grandeur du lac et les dangers potentiels de certains lacs pour les pêcheurs, on ne pouvait pas prohiber l'utilisation de moteurs à carburant sur l'ensemble des lacs du Québec. Cela aurait été non sécuritaire, dans certains cas. Il fallait se donner une loi permettant l'utilisation de règlements ponctuels, un cadre donné pouvant permettre à une ZEC de l'utiliser s'il y a des possibilités et si on est capable de faire la preuve qu'il serait nécessaire d'agir dans ce cas. C'est un exemple, et je pourrais vous en donner beaucoup d'autres, mais il serait trop long de les énumérer.

Je pense qu'il faut se fier à ces 700 administrateurs bénévoles que nous retrouvons à l'intérieur des ZEC, des administrateurs de ZEC qui, eux, vivent sur le terrain, qui, eux ou elles dans certains cas, sont capables de prendre des décisions, à condition qu'on leur donne cette souplesse non seulement dans le but de protéger la faune, mais pour apporter des améliorations continuelles à ce qu'on appelle tout le réseau des ZEC qui a maintenant dix ans d'usure, dix ans d'utilisation et qui mérite, dans certains cas, d'avoir assez de souplesse pour être capable de prendre de bonnes décisions en moment opportun.

C'est souvent le reproche qu'on a fait aux ZEC, Mme la Présidente. Ce réseau-là a été instauré tellement rapidement que, dans certains cas, dans la majorité des cas, on n'a pas fait une bonne campagne d'éducation pour dire aux Québécois et aux Québécoises: Oui, effectivement, la faune nous appartient. Oui, effectivement vous devez profiter de la faune. On a aussi oublié de faire une campagne éducative qui aurait dit: Pas de n'importe quelle façon, pas à n'importe quel prix et pas n'importe comment! On a oublié de dire cela et on se retrouve avec un réseau où certains administrateurs bénévoles, consciencieux, respectueux de la nature se questionnent à savoir pourquoi, dans certains cas, on est en train de vider les lacs au Québec. C'est parce qu'on n'a pas eu cette souplesse là et cette campagne éducative qui n'a pas été faite auprès des Québécois et Québécoises pour assurer la survie et, dans certains cas, la protection adéquate de la ressource.

Mme la Présidente, je pense que, devant cette constatation générale, il nous fallait donner plus d'autonomie aux ZEC, pouvoir les suivre, pouvoir signer de bons protocoles d'entente avec elles, avec les administrateurs. Parfois cela cause des préjudices. Je pourrais vous donner d'autres exemples, notamment, l'utilisation d'un chemin à l'intérieur d'une ZEC par des groupes. Il faut avoir un mécanisme qui permette aux gens de pouvoir l'utiliser tout en défrayant une partie des coûts pour l'entretien sans que ceux qui ont des permis de villégiateurs à l'intérieur de certaines ZEC se voient lésés parce que, parfois, on n'a pas la souplesse de prendre des décisions et d'apporter des correctifs, dans certains cas, sur l'utilisation des routes.

Mme la Présidente, je pense qu'effectivement il était temps que nous apportions ces amendements-là et je suis persuadé que, connaissant la sagesse des administrateurs des ZEC, H y aura lieu d'en arriver à des compromis intéressants face aux différents utilisateurs.

Ce projet de loi touchait aussi la Fondation de la faune du Québec. On sait très bien que mon prédécesseur, je pense que c'est le député de Lac-Saint-Jean, avait créé la Fondation de la faune du Québec qui avait un nom plus long dans ce temps-là et pour laquelle on a modernisé le nom, si on peut le dire ainsi. Cela s'appellera, aux fins de faciliter les communications, la Fondation de la faune du Québec. Il y avait eu un bout de fait par mon prédécesseur avec beaucoup de difficulté. On sait que ce n'est pas facile de créer une fondation. La créer oui, cela peut être assez facile, mais lui donner aussi un cadre lui permettant d'aller générer de l'argent...

Pour cela, il y avait des étapes à franchir. On a d'abord créé la Fondation de la faune et moi, celui qui vous parle, j'ai fait en sorte d'aller chercher des pouvoirs additionnels lui permettant de se financer et d'aller recueillir des fonds. Je pense que tout cela encore fait l'orgueil des Québécois et des Québécoises.

Comme je vous l'ai mentionné tantôt, c'est un travail de longue haleine que nous nous sommes permis de faire. Il fallait moderniser. Il fallait ajouter des membres au conseil d'administration, pouvoir aller chercher des montants d'argent sur les permis de pêche, permettre que les communications soient plus faciles à la Fondation de la faune et aussi permettre à des citoyens, autant aux corps publics qu'aux corporations, aux usines, aux manufactures et aux PME de souscrire à la Fondation de la faune dans le but d'apporter leur quote-part à la protection des habitats et à tout ce que cela comporte. Il fallait améliorer et nous l'avons fait, Mme la Présidente.

Encore là, je pense qu'en commission parlementaire nous avons eu la collaboration de l'ensemble des membres de la commission pour faire en sorte que nous puissions améliorer constamment cette fondation pour qu'elle rapporte des dividendes au Québec, aux Québécois et aux Québécoises en ce qui concerne la protection de la faune et l'amélioration du patrimoine faunique.

Enfin, Mme la Présidente, nous avons aussi un volet concernant les pourvoiries. À l'égard de la pourvoirie, les expressions "pourvoyeur de chasse ou de pêche" et "pourvoirie de chasse ou de pêche" seront réservées sur proclamation. Cette mesure réclamée par les promoteurs de ce secteur s'inscrit dans le cadre des efforts de promotion visant à consolider l'activité touristique fondée sur la faune.

En conclusion, Mme la Présidente, nous devrons être très heureux de l'adoption de ce projet de loi 101 qui touche quelques domaines et qui va permettre encore une fois, j'en suis certain, tant aux groupes concernés, au gouvernement qu'à l'ensemble des Québécois et des Québécoises, d'ajouter à cette valeur inestimable qu'est la faune au Québec. Mme la Présidente, nous aurons à y revenir, bien sûr, parce que c'est un domaine qui est en constante évolution, qui évolue continuellement. Le nombre de chasseurs et de pêcheurs croît au Québec, il se multiplie annuellement. Le nombre de chasseurs et de pêcheurs au Québec est d'au-delà de 1 500 000. C'est évident que nous aurons à revenir pour encore perfectionner, améliorer, bonifier notre loi. Je pense qu'ensemble nous pourrons, tout le monde en cette Chambre, faire encore un grand bout de chemin pour améliorer cette faune et ce patrimoine faunique si cher à tous. Mme la Présidente, merci. (20 h 40)

La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. le député de Dubuc.

M. Hubert Desbiens

M. Desbiens: Merci, Mme la Présidente. Le projet de loi 101 que le ministre nous présente pour adoption en troisième lecture vise différentes parties de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Il touche à la Fondation de la faune. Il apporte des modifications aux pouvoirs des ZEC, les zones d'exploitation contrôlée. Il touche également à certains pouvoirs concernant l'action des agents de conservation de la faune, de même que plusieurs autres sujets. Comme on l'a vu lors de l'étude article par article, il permet au ministre plus de souplesse dans l'administration des droits qui sont perçus sur les territoires fauniques et dans les parcs. Évidemment, en ce qui concerne les amendements, somme toute, mineurs à la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, en ce qui concerne l'administration des redevances, par exemple, ou des droits perçus, ils ne créent aucun problème. Il en va de même pour ce qui concerne l'action des agents de conservation pour leur donner les moyens suffisants pour exercer leur activité. Et sur trois autres points plus importants.

Comme lors du discours que je prononçais au moment de l'étude du principe de ce projet de loi en décembre 1987, déjà à ce stade, j'avais clairement indiqué que l'Opposition était d'accord avec une marge d'autonomie supplémentaire et plus grande à accorder aux zones d'exploitation contrôlée, aux ZEC. Cela fait maintenant dix ans que le système de zones d'exploitation contrôlée a été créé par le gouvernement antérieur du Parti québécois, ce qui a permis, depuis ces dix dernières années, cet exercice de démocratisation qui remet à la population qui jouit des territoires ou qui utilise des territoires du Québec à des fins de prélèvement de chasse et de pêche, entre autres, qui leur donne donc l'autorité pour agir,

cet exercice de démocratisation donc qui a vécu une expérience pendant ces dix dernières années et qui a fait la preuve, comme l'a souligné le ministre, qu'ils étaient véritablement en mesure d'aller plus loin dans cet exercice de prise en charge du territoire faunique, de sa protection, de sa conservation et de sa mise en valeur selon les lois et les règlements édictés par le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

Donc, c'est bien évident aussi qu'encore et davantage aujourd'hui, six mois plus tard, nous sommes d'accord puisque c'est justement la façon que nous avions nous-mêmes choisie pour permettre à la population d'exercer elle-même certains pouvoirs, puisqu'elle était l'utilisatrice de ces territoires dans le domaine de la faune en général et aussi, de plus en plus, de la nature.

C'est bien sûr que, compte tenu de l'éclairage que le ministre a apporté en commission parlementaire sur certaines questions concernant divers articles relatifs à cette partie de la modification à la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, nous sommes d'accord avec cette expérience ni plus ni moins ou cette poursuite d'expérience plus élargie, plus complète, de démocratisation que le ministre veut accorder aux gestionnaires des ZEC. Comme je le soulignais moi-même pendant l'étude des articles, s'il arrive, par hasard ou autrement, qu'il se produise des erreurs de parcours, ce n'est pas pire que ce soient des citoyens et des citoyennes qui travaillent bénévolement, comme l'a souligné le ministre, au service de leurs concitoyens et concitoyennes, commettent des erreurs, que ce soit le ministère lui-même. À ce moment-là, il s'agira pour le ministre comme responsable, à la suite de l'application de cette nouvelle marge d'autonomie et il nous restera, comme législateurs de nous assurer de la suite des choses, puisque c'est notre travail ici à l'Assemblée nationale de modifier à nouveau, si nécessaire, dans le sens qui sera jugé à propos cette Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune.

En ce qui concerne la Fondation de la faune du Québec, son nouveau nom, qui est plus bref, il y avait un hic que nous avions souligné au moment de l'étude du principe, une modification qui était prévue initialement au projet de loi qui faisait en sorte que c'était le ministre lui-même qui, si la loi avait été adoptée telle quelle, devait choisir les membres du conseil d'administration, contrairement à ce que l'ancienne loi disait où le conseil d'administration de la Fondation de la faune était choisi par le ministre quand même, mais après consultation des organismes intéressés. Le ministre a accepté de revenir au texte de l'ancienne loi, ce qui nous satisfait entièrement comme Opposition.

Ce qui fait défaut, et en ce sens je compare un peu le projet de loi 101 à une belle pomme, mais une belle pomme dans laquelle il y a, quant à nous, encore un ver qui en rend plus difficile la digestion. Nous avons mentionné, je l'avais mentionné au nom de l'Opposition officielle à l'époque, au mois de décembre 1987, que nous voterions contre le projet de loi en raison des craintes raisonnables quant aux intentions du ministre. Non pas en ce qui concerne les ZEC, comme je viens de le mentionner, mais relativement au développement de certains types de pourvoiries haut de gamme qui semblaient être l'objectif et qui risquaient de mettre un frein à l'accessibilité. Le principe d'accessibilité reste, je pense que le ministre en a eu l'évidence même lors de sa période de consultation, enfin, ce qu'il a appelé sa consultation dans tout le Québec, que les citoyens et citoyennes tiennent mordicus et n'accepteront pas que ce principe d'accessibilité soit d'aucune façon remis en cause.

Nous avions espéré, à ce moment-là, qu'au stade de l'étude article par article à la suite de suggestions de l'Opposition et aussi de suggestions venant d'organismes très fortement impliqués dans le domaine de la faune, le ministre nous apporterait certaines garanties en acceptant d'inclure certains amendements que nous lui avons proposés et qui auraient, je pense - en tout cas c'est notre avis - bonifié son projet quant à la sauvegarde des intérêts de la collectivité toujours vis-à-vis de ce principe inalinéa-ble quant à nous de l'accessibilité à la ressource faunique pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises.

Les articles particulièrement visés ce sont les articles 6 et 7 du projet de loi 101. À l'article 6, nous avions suggéré au ministre, nous avions proposé au ministre même de modifier l'article de façon que le principe des appels d'offres publics au contraire de ce que le ministre veut faire, c'est-à-dire d'en éliminer l'application à certaines extensions de droit ou d'agrandissement de territoire, il y ait plutôt un durcissement de cette attitude ou de cette nécessité d'appeler, de faire des appels d'offres publics. Le ministre tient à maintenir dans ce domaine une plus large part de discrétion. Comme le soulignait la Fédération québécoise de la faune dans ses remarques au ministre, le discrétionnaire, c'est un danger constant de devoir prendre des décisions au cas par cas et d'en arriver à des situations qui frisent le favoritisme parfois, quand ce n'est pas vraiment cela. (20 h 50)

J'ai bien voulu indiquer au ministre, lors de l'étude article par article, que lui-même a une idée de son projet de loi; c'est lui qui le parraine et qui va avoir à l'appliquer dans l'immédiat. Il a une idée très claire de son projet de loi, sauf que le ministre n'est pas éternel, il y aura d'autres ministres après lui. Eux aussi auront une idée; ils se feront une idée à la lecture du texte de loi, alors, il pourrait se produire toutes sortes de situations.

Entre autres, la Fédération québécoise de la faune avait aussi proposé aussi au ministre au moins d'aller dans le cas de certaines modifica-

fions ou d'agrandissements des territoires ou des élargissements de droits... Il faut dire que le ministre nous a rassurés quant à la signification de l'élargissement des droits, bien qu'encore une fois, un autre ministre pourra l'interpréter à sa façon.

On avait espéré - c'était une proposition de la fédération au ministre, dans un document qu'elle lui avait transmis - qu'au moins, à la suite d'un avis public, des organismes qui sont reconnus comme étant de bonne foi dans le secteur - la fédération elle-même, l'Union québécoise de la conservation de la nature, la Fédération des gestionnaires de ZEC, l'Association des trappeurs indépendants, la Fédération québécoise des pourvoiries, la Fédération du saumon de l'Atlantique - puissent avoir le loisir, si un avis public était édicté par le ministre, présenté et connu de ces organismes, de donner au moins un avis sur la proposition ou le décret que le ministre entendait adopter. Le ministre a également refusé d'aller dans ce sens.

L'autre article qui vise... C'était l'article 7, qui modifie l'article 86; c'est un nouvel article qui fait suite à l'article 86.1 et qui décrète qu'une pourvoirie permissionnaire qui refuserait d'accepter ou d'accéder à la transformation en pourvoirie concessionnaire pourrait se voir retirer, tout simplement, son permis. Encore là, évidemment, c'est un pouvoir discrétionnaire d'agir que le ministre se donne unilatéralement ainsi pour mettre fin à une espèce de contrat qui existe entre le détenteur d'un permis d'une pourvoirie permissionnaire et le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

Les situations que ces deux articles peuvent causer, j'ai déjà eu l'occasion de les souligner au ministre à l'Assemblée nationale ou par mes questions lors de l'étude des crédits. J'ai mentionné qu'il pouvait y avoir des situations qui se manifesteraient et qui ne seraient pas du tout dans le sens des modifications que le ministre nous dit vouloir apporter. J'ai mentionné, fors d'une question posée à l'Assemblée nationale, le cas de la pourvoirie Archer, au Saguenay. L'agrandissement du territoire doit se faire selon les indications que le ministre m'avait données en commission parlementaire, lors de l'étude des crédits. Cela devait se faire selon des critères déterminés, des critères techniques qui visaient, entre autres, la rentabilisation de la pourvoirie, mais cela devait fournir aussi suffisamment de territoire dans le cas où une pourvoirie serait insuffisamment pourvue de lacs pour lui permettre d'en faire une utilisation rentable. Eh bien, c'est le cas de la pourvoirie Archer que j'ai souligné. On sait que l'agrandissement qui a été fait ne l'a sûrement pas été dans le cadre de critères de cette nature, puisque cette pourvoirie utilisait, au maximum, à peine 40 % du potentiel de son territoire existant.

Il y a le risque aussi qu'on a constaté et qui s'est produit dans ce cas-là, c'est que l'on vienne léser les droits des gens qui ont à participer ou à faire des prélèvements fauniques ou tout simplement qui sont des villégiateurs parfois et qui avaient accès, à la suite de permis du ministère de l'Énergie et des Ressources, à ces territoires avec lesquels on a agrandi, entre autres, la pourvoirie Archer. Donc, il y a risque en même temps de léser les droits de certains autres citoyens et, malgré les contestations des villégiateurs du secteur concerné et toutes les raisons qu'ils avaient mentionnées, le ministre a quand même accordé son agrandissement à la pourvoirie Archer.

Si la situation avait été connue par un avis public au moins, comme le suggérait la Fédération québécoise de la faune, eh bien, il est certain que le ministre aurait reçu des recommandations qui l'auraient sans aucun doute amené à ne pas accorder cet agrandissement de pourvoirie.

Un deuxième cas, pour illustrer les dangers qui existent présentement selon ce qui nous est proposé aux articles 6 et 7, c'est celui du lac Oscar. La pourvoirie du lac Oscar inc., on le sait, était à l'origine une pourvoirie qui avait 33 kilomètres carrés de superficie. Cette pourvoirie a été agrandie depuis un an, d'abord de 33 à 66 kilomètres carrés. Sa superficie a été doublée, ce qui était possiblement justifiable, mais, là, encore la même pourvoirie, après être passée de 33 à 66 kilomètres carrés, après avoir doublé de superficie, voilà qu'elle est à nouveau agrandie de 168 kilomètres carrés supplémentaires. Elle passe à 234 kilomètres carrés de superficie. Alors qu'elle est partie de 33 kilomètres carrés, elle est rendue maintenant à 234 kilomètres carrés de superficie.

Une voix: Cela n'a pas de bon sens.

M. Desbiens: Lorsque j'interrogeais le ministre en commission parlementaire, il nous disait qu'il fallait qu'une pourvoirie ait une superficie suffisante pour pouvoir être rentable et pour pouvoir faire la protection, la conservation des espèces, ainsi de suite. Il nous mentionnait que les études de son ministère déterminaient qu'une pourvoirie doit avoir plus ou moins 100 kilomètres. Cela peut être un peu plus ou un peu moins, dépendamment des territoires touchés. Mais, dans le cas de la pourvoirie du lac Oscar qui est située en Mauricie, on se retrouve maintenant avec une pourvoirie qui a augmenté son territoire de 33 kilomètres carrés à 234 kilomètres carrés, soit un agrandissement de 201 kilomètres carrés.

L'autre phénomène qui se passe dans ce cas-là, M. le ministre, c'est qu'il y avait sur ce territoire la pourvoirie Farrar. Il y avait aussi la pourvoirie Coucoushee, des pourvoiries permissionnaires qui exercent dans le même secteur. La pourvoirie Oscar était, à l'origine, une pourvoirie concessionnaire. Alors, en agrandissant de cette façon la pourvoirie concessionnaire du lac Oscar, le ministère se trouve à englober le territoire de

la pourvoirie Farrar, à englober des territoires libres et aussi une partie des territoires de la pourvoirie Coucoushee. Et cela crée des situations contraires aux normes que vous nous mentionniez et qui étaient l'étude préalable avec les intéressés des situations de chacune des pourvoiries quand il y avait nécessité de faire des modifications. On est d'accord avec votre principe qu'il doive y avoir consolidation de certaines pourvoiries, qu'il y ait des agrandissements si nécessaire, mais non lorsque des agrandissements se produisent de la façon dont cela se fait présentement comme dans le cas de la pourvoirie du lac Oscar. (21 heures)

II arrive donc qu'il y ait des pressions qui soient créées non pas par une discussion préalable, mais qui soient créées par la force des choses. Maintenant, comment une pourvoirie comme la pouvoirie Coucoushee peut-elle espérer vivre et se développer quand une partie importante de son territoire ou des territoires libres qui existaient autour d'elle sont maintenant disparus, votre ministère l'ayant confiée à l'agrandissement de la pourvoirie concessionnaire du lac Oscar? Alors, ce sont des situations qui sont créées et qui sont celles qu'on craignait lorsqu'on a étudié le projet de loi. C'est pour éviter ce genre de situation qu'on a justement proposé des amendements, que la Fédération québécoise de la faune nous a également proposé des modes différents d'attribution des pourvoiries, afin d'éviter que des citoyens soient lésés et qu'on se retrouve avec des situations comme celle qui est vécue dans le secteur.

Vous avez reçu de la part des citoyens, des groupes de citoyens, des pétitions vous demandant de ne pas accorder ce genre de pouvoirie où il y a nombre de villégiateurs qui sont maintenant privés puisque c'était en territoire libre et qu'ils avaient donc accès à la chasse et à la pêche. Ils sont maintenant privés de ces droits-là. C'est le genre de situation qu'on craignait. C'est celle, malheureusement, qui semble vouloir se développer et cela semble vouloir devenir la façon de procéder du ministère. On va partir d'une pourvoirie concessionnaire existante, on va l'agrandir soit sur du territoire libre, soit sur du territoire appartenant déjà à des permissionnaires, et on oblige ensuite ces permissionnaires à se fondre ou à disparaître complètement, à se faire avaler malgré leur volonté contraire, malgré leurs états de services excellents envers la population dans le domaine de la pourvoirie de chasse ou de pêche.

C'est ce ver-là, Mme la Présidente, qui existe dans le projet de loi 101, dans la pomme, dans la belle pomme du projet de loi 101, et c'est un ver, comme je le disais au début, qu'on ne peut digérer.

Je rappelle au ministre qu'il y a aussi d'autres questions qui sont demeurées sans réponses et qui nous permettent de douter de sa volonté de rayer de la carte certains clubs privés qui existent. Ce n'est pas la majorité, comme le ministre me répondra sans doute. Mais c'est ainsi, et il y a danger d'une perte d'accessibilité d'un territoire comme celui que je viens de mentionner, celui du lac Oscar, où la population est proche, où les moyens d'accès, pour la population, sont rapprochés. Il ne s'agit donc pas du tout de territoires inaccessibles, comme vous le disiez, que votre politique visait dans le domaine des pourvoiries. Il y a aussi, vous savez, les trois pourvoiries qui ont été accordées sur la rivière Moisie. Lors de l'étude des crédits, on a soulevé également le cas de ces trois pourvoiries sur la rivière Moisie, où il y avait sur le territoire, en 1978, au moment de la création des ZEC, de ces pourvoiries qui avaient été transformées et qui donc, avant de recevoir un bail, avant de signer un bail de pourvoirie concessionnaire, auraient dû faire l'objet d'appels d'offres publics. Alors, maintenant, on ne sait pas où tout cela s'arrêtera et quel sera le résultat de l'application des articles 6 et 7. Devant cette situation et devant les premières constatations qu'on peut faire après six mois, avant même que le projet de loi 101 soit voté, après six mois de ce qu'on vous indiquait comme étant nos craintes de ce côté-ci de l'Assemblée nationale, craintes qui reflétaient aussi, évidemment, celles de la population quant à l'accessibilité des territoires fauniques, c'est évident, pour toutes ces raisons-là et malgré le fait que le projet de loi en lui-même comporte d'autres situations avec lesquelles on est parfaitement d'accord, comme celles des ZEC puisque c'est nous-mêmes qui les avions créées et qui avions donc le goût de les voir se développer... D'ailleurs, vous pourriez très bien - je le soulignerai une dernière fois - si vous avez des situations particulières et si vous avez l'intention de donner des territoires à une gestion autre que celle du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, il vous serait loisible de développer de nouvelles ZEC. Il y a des demandes, justement, dans le territoire mentionné, il y a eu des demandes, je pense, pour la formation de ZEC. Tout cela nous laisse absolument craintifs et comme la population on a ce principe qui, je le répète - on ne le répétera jamais suffisamment - est absolument essentiel, comme la population l'a manifesté partout, dans toutes les régions du Québec depuis un an, le principe d'accessibilité le plus large possible de la population à qui appartiennent ces territoires et ces richesses fauniques. Pour toutes ces raisons, l'Opposition devra continuer à s'opposer à l'adoption du projet de loi 101, et on devra l'adopter sur division.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Dubuc. Je constate qu'il n'y a pas d'autre intervention, le débat est terminé. Est-ce que le projet de loi 101, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et la Loi sur les parcs, est adopté?

Une voix: Sur division.

La Vice-Présidente: Adopté sur division. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Picotte: Merci, Mme la Présidente. Je vous demanderais d'appeler l'article 17 du feuilleton, qui est une prise en considération.

Projet de loi 3

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

La Vice-Présidente: À l'article 17 de notre feuilleton, le ministre de la Justice propose la prise en considération du rapport de la commission des institutions qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 3, Loi modifiant le Code civil en matière de copropriété et d'em-phytéose.

Une voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Le rapport de la commission est donc adopté. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Picotte: Mme la Présidente, je vous demande d'appeler l'article 18, qui est une autre prise en considération.

Projet de loi 4

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

La Vice-Présidente: À l'article 18 de notre feuilleton, le ministre de la Justice propose également la prise en considération du rapport de la commission des institutions qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 4, Loi modifiant le Code civil et le Code de procédure civile en matière de séparation de corps.

Une voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Le rapport de la commission est donc adopté. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Picotte: Merci, Mme la Présidente. Je vous demande d'appeler l'article 20, qui est une autre prise en considération.

Projet de loi 8

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

La Vice-Présidente: À l'article 20 de notre feuilleton, le ministre de la Justice propose la prise en considération du rapport de la commission des institutions qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 8, Loi sur l'aide aux victimes d'actes criminels.

Une voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Le rapport de cette commission concernant le projet de loi 8 est donc adopté. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Picotte: Mme la Présidente, je vous demande d'appeler l'article 23 de notre feuilleton.

Projet de loi 20

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

La Vice-Présidente: À l'article 23 de notre feuilleton, le ministre de la Justice propose la prise en considération du rapport de la commission des institutions qui a procédé à l'étude détaillée du projet de loi 20, Loi portant abrogation de certaines dispositions législatives.

Une voix: Adopté.

La Vice-Présidente: Le rapport de ladite commission qui a étudié le projet de loi 20 est donc adopté.

M. Picotte: Adopté, Mme la Présidente. Je vous demanderais d'appeler l'article 6 de notre feuilleton, et j'aimerais vous suggérer une suspension de deux minutes.

La Vice-Présidente: Je vais appeler le projet de loi et, par la suite, nous allons suspendre pour quelques minutes.

Projet de loi 37 Reprise du débat sur l'adoption du principe

À l'article 6 de notre feuilleton, il s'agit de la reprise du débat, qui avait été ajourné, sur l'adoption du principe du projet de loi 37, Loi sur la sécurité du revenu.

Nous allons donc suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 21 h 10)

(Reprise à 21 h 13)

La Vice-Présidente: Nous allons maintenant reprendre nos travaux et je vais reconnaître le premier intervenant sur l'adoption du principe du projet de loi 37, M. le chef de l'Opposition.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. J'ai tenu à laisser les travaux de la commission parlementaire sur la loi 34, le domaine du transport ambulancier ou des services préhospitaliers, pour venir joindre ma voix à celle de mes collègues sur la désormais célèbre réforme Paradis. Mme la Présidente, j'ai rarement vu, en douze ans de vie politique, un ministre avoir le don de s'aliéner à peu près tout le monde quand il touche à quelque chose. On l'a vu avec la loi 119. On l'a vu avec la loi 31 - on ne reconnaît plus du tout la loi 31 sur la construction - et avec la réforme de l'aide sociale, ce ministre a su s'aliéner à peu près 95 % à 97 % des groupes qui sont venus témoigner en commission parlementaire.

Il a dû amender cette fameuse réforme à deux reprises depuis le début, parce que les jeunes libéraux lui ont demandé d'atténuer des points précis. Et on se retrouve à la fin d'une session avec un projet de loi qui vient encore semer, à toutes fins utiles, la frustration chez les moins bien nantis de notre société. Mais ce que je trouve le plus grave dans le processus qu'a suivi le ministre pour en arriver à proposer ce projet de loi 37, c'est qu'il a développé envers les moins bien nantis de notre société un sentiment de dégoût, de haine dans certains cas, de harcèlement pour d'autres, de joie même pour certains de voir qu'on coupait allègrement dans l'aide sociale. Parce qu'on a découvert 4 % ou 5 % d'assistés sociaux au Québec qui faisaient de mauvaises déclarations, donc qui s'appropriaient un bien auquel ils n'avaient pas droit, on a fait en sorte que l'ensemble des assistés sociaux du Québec passent pour des parasites de notre société, des gens qui touchaient des sommes d'argent d'une façon incorrecte, illicite. Et on a profité de ce vent de contentement - car on coupait allègrement dans l'aide sociale - pour diminuer à ces moins bien nantis des pitances qui leur permettaient, à toutes fins utiles, de survivre.

Entre vous et moi, quelqu'un qui gagne 190 $ par mois, aujourd'hui, en 1988, pensez-vous qu'il n'aimerait pas avoir un emploi? Chaque année j'ai des assistés sociaux, en particulier des jeunes, qui viennent par dizaines et par centaines à mon bureau me dire: Je veux m'en sortir mais je ne trouve pas d'emploi. Je prends ma propre circonscription électorale où encore deux usines dans le domaine du textile viennent de fermer: 200 emplois dans chacune d'elles, cela fait 400 emplois. Quelles sont les perspectives d'avenir pour les assistés sociaux quand on voit que, dans certains milieux, on ferme même des postes de travail? Ils n'ont pas d'espoir, Mme la Présidente. Et là, encore, le ministre arrive et dit avec une fierté déconcertante: Voici, nous remettons de l'ordre et nous allons donner plus d'argent. Est-ce que c'est donner plus d'argent à des assistés sociaux que de réduire la prestation mensuelle quand il y a partage du logement? Est-ce que c'est donner plus d'argent quand, dans le cas de deux jeunes assistés sociaux de moins de 30 ans qui ont 190 $ par mois, parce qu'ils cohabitent pour venir à bout de vivre un peu mieux, on leur coupe une partie de leur pitance mensuelle? Est-ce que c'est cela venir en aide aux moins bien nantis de notre société? Quand on sait que le vent politique peut être favorable, ce n'est pas grave de se rabattre sur le dos des moins bien nantis de notre société. Mme la Présidente, c'est un réflexe de politiciens qui ont bien courte vue que de faire cela, très courte vue, Mme la Présidente. À s'acharner sur le dos des plus pauvres, c'est un gouvernement qui se prépare des jours très sombres.

Moi le premier, comme député, j'ai dû défendre les assistés sociaux, parce que les gens disaient: Oui, mais on va mettre de l'ordre dans cela, mais jusqu'à ce que dans votre famille ou chez vos proches vous vous rendiez compte qu'il y a un jeune bénéficiaire de l'aide sociale à 190 $ qui est découragé. 190 $ par mois pour manger, sortir comme tous les jeunes sortent un peu, se loger, se vêtir! Quand on y pense un tant soit peu et qu'on fait ce qu'on est en train de faire, couper lorsque deux jeunes partagent le même logement, je vous avoue que cela prend un gouvernement à très courte vue, surtout de la part d'un gouvernement qui traverse des années de vaches grasses, surtout d'un gouvernement qui a promis la parité aux jeunes sans conditions. Moi, je n'en reviens tout simplement pas. Vous pouvez vous bidonner à court terme, parce que certains de vos gros "big shots" vous tapent sur l'épaule et vous disent que vous êtes après leur faire la "job", mais, comme société, vous avez une responsabilité. Vous devriez avoir un peu de conscience sociale. Il vous arrivera peut-être un jour d'avoir de très proches placés dans les mêmes circonstances, dans les mêmes conditions, et vous vous en repentirez drôlement. Je trouve inconcevable qu'un gouvernement aille jusqu'à développer ce réflexe. (21 h 20)

Mme la Présidente, plus encore. Ce gouvernement a essayé de faire croire à la population qu'il avait présenté un budget profamilial. Mme la Présidente, croyez-le ou non, les familles les moins bien nanties qui vivent dans des HLM verront leurs prestations' coupées. Il y a 14 000 ménages qui verront le montant mensuel de leur prestation réduit. Est-ce cela, un budget de famille? Les moins bien nantis, il faut les attaquer. Cela a pris quasiment l'intervention des vingt députés de l'Opposition pour que le ministre Paradis ou le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu se rende compte qu'il ne fallait pas, dans sa réforme, couper les prestations de la femme enceinte après six mois. Ça, il a compris ça. Mais imaginez-vous, cependant, que le ministre délégué à la Famille lui a dit que c'était la

première véritable mesure pour la famille, en faveur de la famille. Ce n'est pas des farces. C'est de l'incohérence, c'est de l'insignifiance quand on y pense comme il faut. Si le ridicule tuait, il y en aurait une couple là. Tous ceux qui aspirent à un poste, vous auriez eu de la place, parce que cela n'a pas de bon sens. Cela n'a pas de bon sens de réagir de la sorte, Mme la Présidente.

Je pense aussi à un autre point et les députés libéraux, dans vos comtés, vous en recevez des gens régulièrement. Je pense aux fameux tests qui seront requis maintenant pour juger de l'inaptitude ou de l'aptitude. Dans vos comtés, vous avez régulièrement des gens qui disent: j'ai fait un infarctus, je suis paralysé du côté droit, je ne peux plus travailler. Qu'est-ce qu'on vous répond à la Régie des rentes? On vous dit: Ah oui, mais t'es pas tout à fait mort, t'es peut-être capable de faire quelque chose encore, peut-être capable de lever un récepteur du bras gauche, donc, t'es pas invalide. Vous le savez. Vous savez comment toute l'approche pour accéder aux rentes est ridicule. On trouve cela tellement fou comme députés que, quand on s'en parle dans les couloirs, tout le monde dit qu'y faudrait changer cela parce que, les rentes, cela existe quasiment pour un gars qui en a pour dix jours à vivre.

Que fait Paradis, Mme la Présidente? Que fait le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu? Il introduit exactement le test de la Régie des rentes dans l'aide sociale. Exactement la même formule parce qu'il fait la distinction entre apte et inapte. Celui qui est inapte, préparez-vous, il a besoin d'être "maga-né", comme dirait mon père, parce qu'il n'aura rien, parce qu'il sera toujours apte pour faire un petit quelque chose. S'il est apte pour faire un petit quelque chose, bien coupez. C'est tout. Et vous jugez cela correct? Deux batteries de tests, deux formules. Cela va coûter plus cher en consultations médicales que de donner cette pitance aux moins bien nantis de notre société.

Si ce sont vos coffres que vous voulez renflouer, ne pensez-vous pas qu'au lieu de conclure des ententes de 25 ans pour des remboursements d'impôt de 100 000 $ à des gens qui ont les moyens pourrait peut-être être une formule pour remplir vos coffres? Demandez un peu plus et arrêtez de vous acharnez sur le dos des pauvres. Ne pensez-vous pas que ce serait une meilleure formule? Ne pensez-vous pas que, pour remplir vos coffres, vous pourriez avoir une opération également pour ceux et celles qui ne s'acquittent pas de leurs paiements d'impôt au Québec? Vous ne pensez pas cela? Plutôt que de vous acharner sur le dos de ceux qui ont de la misère à manger trois repas par jour. Et vous leur compliquez la vie au point qu'une batterie de tests ne suffira pas. Cela va être un autre contrôle médical. Et si t'as le malheur d'avoir un oeil où tu vois à 5 %, t'es apte pour faire quelque chose. L'autre, ce n'est pas grave. Cela n'a pas bon sens, Mme la Présidente. Je considère cela inhumain, tout à fait inacceptable.

Je vous donne un autre exemple parce que celui-là aussi m'a fâché. Un homme et une femme décident de se laisser. Leur ménage ne fonctionne pas. Ils se disent bonjour. Ils sont à l'aide sociale. Le gars se trouve un emploi. Oh! Il reçoit 15 000 $ ou 16 000 $ par année. Parce que la femme a laissé son mari sans exiger une pension alimentaire, le ministre, au-dessus de la femme elle-même qui n'a pas négocié, au-dessus de son propre avocat, va décider d'aller chercher une pension alimentaire. C'est cela, votre politique familiale? C'est cela, votre pensée sociale vis-à-vis de l'unité familiale? Alors que le ministre de la Justice paie ses avocats et ses procureurs pour rapprocher les ménages, nous autres, on s'organise pour qu'ils se chicanent davantage avec l'aide sociale. Grosse logique! Remarquez bien que cela ne me surprend pas tellement parce que des socio-démocrates de fin de semaine, de 24 heures en 24 heures à la veille d'un conseil national, je comprends que tu ne peux pas avoir une grosse pensée sociale constante.

Mais il me semble que dans un cas aussi précis que cela, cela ne demande même pas l'intervention des militants libéraux pour changer une telle loi. Cela saute aux yeux qu'un ministre qui a une vision de la collectivité, qui a une vision sociale, ne s'interroge même pas cinq minutes. Il dit: Je me dois immédiatement d'amender mon projet de loi, qui m'a été préparé par des fonctionnaires, que je n'avais pas compris sur le coup, mais là je réalise qu'il n'a pas de bon sens et je le change. Dans le cas du ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, changer un projet de loi, il s'y connaît. Après qu'il l'a publié et qu'il l'a amende trois, quatre fois, quand on l'adopte on ne le reconnaît plus. Là ce n'est plus le projet de loi du ministre, cela devient le projet de loi des députés qui ont apporté des amendements ou des groupes qui ont fait pression pour lui faire apporter des amendements. C'est tout croche au départ ça. Fiez-vous, c'est le champion pour se mettre le monde à dos.

Mme la Présidente, je dirai également qu'il y a un subterfuge dans cette loi et qu'il faut dores et déjà aviser la jeunesse québécoise du sapin qu'est à leur passer le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Il les coupe tout de suite dans sa loi, mais il dit: Laissez passer mon élection et après cela, je vous couperai comme il faut. Les coupures vont s'appliquer en 1990. S'il y en a un qui dit que ce n'est pas vrai, qu'il se lève. Les coupures vont s'appliquer en 1990, sauf qu'elles sont votées tout de suite. Est-ce croche à votre goût? C'est malhonnête. C'est trompeur. C'est absolument inacceptable de faire croire, d'avoir laissé aux jeunes l'illusion qu'ils auraient une parité,

s'aligner par la suite graduellement vers des coupures, prévoir ces coupures, mais faire en sorte que ces coupures ne viennent qu'après l'élection qui viendra en 1889.

Je vois le député de Saint-Maurice rire de cela. Il est habitué de patauger dans cela probablement. Mais moi je dois vous dire que je trouve cela vicieux, malhonnête et trompeur vis-à-vis de la jeunesse québécoise. Il faudra faire en sorte que les jeunes du Québec connaissent la stratégie libérale là-dessus. Il faut démasquer ces gens qui ont fait rêver toute la jeunesse québécoise et qui leur préparent des lendemains sombres. Il faut aviser cette jeunesse québécoise de la stratégie mesquine, machiavélique, à part cela, du Parti libéral qui vise concrètement à se donner raison dans un texte de loi immédiatement pour ensuite, bien sûr, en 1990, au lendemain d'une élection, avoir des coupures systématiques sur les chèques de paie de ceux qui ont déjà de la misère à manger trois repas par jour.

Donc, c'est inacceptable comme loi, Mme la Présidente, parce qu'elle est maintenant basée sur l'employabilité. Ça aussi les députés libéraux, j'espère, qui font du bureau de comté chaque lundi matin, reçoivent trois, quatre, cinq, dix demandes d'emploi, la plupart de jeunes... Toute la réforme de l'aide sociale est basée sur l'employabilité. L'employabilité... Mme la Présidente, voulez-vous demander au député de Sainte-Anne, s'il vous plaît, de respecter le droit de parole des individus.

La Vice-Présidente: S'il vous plaît, vous aurez l'occasion par la suite de pouvoir intervenir. Je vous demanderais de reconnaître le droit à M. le chef de l'Opposition. M. le chef de l'Opposition.

M. Chevrette: Mme la Présidente, toute cette réforme est axée sur l'employabilité. Déjà les expériences vécues ont démontré qu'on pouvait répondre à peine à 17 %. Qu'arrive-t-il aux autres 83 % qui sont aptes, qui veulent travailler, mais qui n'ont pas d'emploi, qui n'ont pas de travail? Ils seront pénalisés parce qu'il n'y a pas de poste de travail disponible. C'est là-dessus qu'est basée votre réforme. Cela ne vous fait rien. Cela ne vous dérange pas. Cela ne vous touche pas. Cela ne vous émeut pas seulement un tant soit peu. Considérez-vous les gens comme des robots? Ces jeunes qui viennent dans vos bureaux de comté solliciter de l'emploi et qui voient une réforme, ils sont pris sur l'aide sociale et ils vous disent: Je veux travailler, mais il n'y a pas de job dans mon comté, il n'y en a pas de job dans ma localité. Cela vous arrive cela aussi. Autant à Montréal que dans le reste de la province. (21 h 30)

Qu'est-ce qu'on répond à ces jeunes? On leur dit que M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu est malheureusement dans l'obligation de les couper parce qu'ils ne se trouvent pas d'emploi. Trouvez-vous cela correct, quand on vit dans un régime où les emplois sont limités, d'axer une réforme de soutien du revenu sur l'employabilité ou presque exclusivement là-dessus? Je trouve cela dégueulasse, inacceptable, même inhumain. Je considère qu'on devrait avoir le courage politique de dire que, tant et aussi longtemps que le nombre de postes de travail disponibles ne correspondra pas au nombre d'individus en place pour pouvoir les prendre, on ne peut pas pénaliser les jeunes. Là, on serait honnête envers cette jeunesse; on serait logique et correct. Ils ne font rien.

Aucun programme de création d'emplois, mais, par exemple, ils basent toute leur argumentation là-dessus. Toute leur réforme est axée sur l'employabilité, alors que - la preuve en est faite - c'est un échec de ce côté-là. On va encore aller faire croire aux jeunes... J'espère que c'est ceux-là que vous allez recruter pour amener à Paul-Sauvé, la prochaine fois, ils vont vous en parler parce qu'ils les vivent, eux autres, ils les vivent, ces problèmes concrets. Vous aurez beau leur payer leur autobus, ils vont peut-être avoir quelque chose à vous dire la prochaine fois. Ils vont peut-être avoir compris, Mme la Présidente, qu'ils ont été leurrés. La jeunesse québécoise a été leurrée. Les ménages québécois sont leurrés par cette réforme. Je ne connais aucune catégorie de personnes qui se trouve heureuse de cette réforme. Tous les groupes que nous avons rencontrés nous ont dit: C'est inacceptable.

Motion de report

Mme la Présidente, pour permettre à ce ministre et à ce gouvernement de réfléchir encore un peu sur cette réforme, de penser durant les vacances lorsque vous allez côtoyer du monde plus pauvre, des gens moins bien nantis... Testez votre réforme durant les vacances, vous nous arriverez sans doute, cet automne, avec des dispositions législatives tout autres que celles que vous avez présentées aux Québécois. C'est pour cette raison que, compte tenu de tout ce que je viens de dire et conformément à l'article 240 de nos règles de procédure, je propose que nous reportions à six mois l'étude et l'adoption du principe de ce projet de loi 37.

La Vice-Présidente: En vertu de l'article 240, cette motion est recevable. Comme il s'agit d'un débat restreint et qu'il est limité à deux heures, nous allons poursuivre ce débat restreint. Nous allons permettre que les leaders se rencontrent pour le partage du temps. Je suis prête à reconnaître le premier intervenant sur le débat restreint de deux heures.

M. Chevrette: Suspension, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Je vais suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 21 h 33)

(Reprise à 21 h 39)

La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous plaît!

Donc, nous allons reprendre nos travaux concernant la motion de report. Je vais informer la Chambre de l'entente sur le partage du temps qu'il y a eu entre les groupes parlementaires. Le temps sera partagé également entre chaque groupe parlementaire sans limite de temps par intervenant et, si un groupe parlementaire n'utilise pas son temps, il ne pourra pas être utilisé par l'autre.

À l'ordre, s'il vous plaît!

Je vais suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 21 h 40)

(Reprise à 21 h 44)

La Vice-Présidente: Nous allons donc reprendre nos travaux. Je vais reconnaître un premier intervenant sur la motion de report. Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, il est quand même surprenant qu'à ce moment-ci des travaux de l'Assemblée nationale, à la veille de cette fin de session, nous soyons à cette heure-ci en train de discuter de ce projet pourtant si controversé et qui mériterait certainement un examen beaucoup plus attentif dans des circonstances différentes de celle que nous vivons. Quelles que soient les fins de session, nous savons très bien qu'elles donnent toujours lieu à des bousculades législatives et ne sont pas les plus propices à examiner à tête reposée ce qui, pourtant, met en jeu le sort de centaines, de milliers, non pas de centaines de gens, mais de centaines de milliers de personnes, d'hommes, de femmes et d'enfants.

J'ai eu l'occasion, Mme la Présidente, de le signaler, mais je veux, avec insistance, vous rappeler que, pour les médias d'information, pour ceux des médias qui ont des représentants a la tribune parlementaire, c'est tout à fait inconséquent, ce dépôt, à cette veille tardive, d'un projet de loi qui mériterait, bien au contraire, d'être réexaminé par le gouvernement.

Nous en sommes au principe du projet de loi. Le chef de l'Opposition a proposé une motion de report qui devrait être retenue par les ministériels comme leur permettant, leur donnant le délai suffisant pour faire un réexamen de cette question qu'ils savent très bien ne pas pouvoir régler comme cela, du revers de la main, dans cette fin de session. Vous savez, Mme la Présidente, ce n'est pas parce que le poids du nombre ferait adopter en deuxième lecture le projet qui est devant nous que cela le rendrait pour autant plus convaincant, que cela le rendrait pour autant plus recevaWe par une opinion publique qu'ils savent être hostile aux orientations, au principe, non pas seulement aux modalités, mais au principe même du projet de loi 37.

Quel est-il, le principe du projet de loi 37, celui sur lequel les députés ministériels vont avoir à voter? Pour qu'ils ne le fassent pas les yeux fermés, en se donnant bonne conscience, sous prétexte qu'ils auront le temps cet été ou au début de l'automne prochain d'en changer les modalités? Mme la Présidente, je voudrais leur répéter le principe nouveau qui est contenu dans le projet de loi 37. Ce principe c'est que, dorénavant, au Québec, il n'y aura plus de droit à l'assistance. Il n'y aura plus de programme de dernier recours qui permettra à toute personne qui pense avoir un droit à l'assistance d'obtenir une assistance financière, quelle que soit la cause du besoin qu'elle a d'un soutien, quelles que soient les raisons de son dénuement, quels que soient les motifs de la misère dans laquelle elle est et de l'état de privation qui l'amène à rechercher une assistance. C'est pourtant le principe fondamental introduit par le rapport Boucher, au moment où l'opinion publique québécoise, la société québécoise avait décidé d'en finir avec une aide sociale catégorisée, stigmatisante, selon que l'on soit aveugle ou mère nécessiteuse, selon que l'on soit invalide ou personne âgée, une aide sociale qui n'était pas un droit, mais un privilège qu'on octroyait chichement, en faisant payer chèrement la dignité des personnes qui la réclamaient.

Je vous rappelle, Mme la Présidente, que ce principe du droit à l'assistance pour toute personne dans le besoin, quelle que soit la cause, a été la pierre d'assise de ce que la révolution tranquille a considéré comme étant la réforme majeure de la vie en société et de l'assistance que les uns et les autres se devaient dans la société québécoise. Par quoi remplace-t-on ce principe? D'abord, par la négation de ce droit à l'assistance, par la négation de la reconnaissance d'un programme de dernier recours qui vise à répondre aux besoins de base, besoins de base qui sont les mêmes: le loyer, la nourriture, l'alimentation, l'habillement. Quand vous êtes chef de famille et que vous avez des enfants... Il y a 168 000 enfants dans les écoles du Québec qui sont des enfants de familles assistées sociales. Ces enfants mangent comme les autres enfants, s'habillent comme les autres enfants, ont des besoins comme les autres enfants.

Dorénavant, le principe qu'introduit le projet de loi - le principe, non pas la modalité - c'est que l'assistance ne sera plus un droit et elle leur sera concédée selon les catégories

auxquelles ils vont appartenir. S'ils appartiennent à la catégorie que le ministre considère être la vraie catégorie de l'aide sociale, ils pourront bénéficier d'une légère amélioration de leurs conditions. Mais à quel prix? Au prix de l'appauvrissement des autres parce que la légère amélioration de ceux qui pourront bénéficier du programme de soutien financier sera financée par la réduction, par des coupures dans les prestations mensuelles de tous les autres hommes, femmes et enfants qui devront compenser pour ceux à qui le ministre pense, ceux pour qui le ministre seulement, considère avoir une responsabilité.

Non seulement le droit à l'assistance est maintenant écarté, mais encore plus, jusqu'à maintenant, au Québec les personnes assistées sociales qui, délibérément, quittaient un emploi étaient privées de prestation. On peut penser qu'il peut y avoir là des motifs discutables, mais qu'on doit prendre en considération. Dorénavant, pourront être privées de prestation non pas les personnes qui quittent, mais celles qui sont présumées ne pas être à la recherche active d'un emploi. Elles seront également privées du droit à la révision et du droit à l'appel des décisions qui peuvent aussi être arbitraires quand elles touchent au-delà de 300 000 ménages au Québec. 300 000 ménages, ce sont au-delà de 600 000 hommes, femmes et enfants. Pour la première fois, Mme la Présidente, le droit à la révision ne sera plus un droit acquis pour l'ensemble des personnes parce que le droit à l'assistance n'est plus un droit acquis.

Les décisions qui ne sont pas révisables sont notamment celles qui portent sur les cas de maintien dans un programme afin d'éviter le dénument total et celles aussi qui portent sur l'offre d'un programme de réintégration à un bénéficiaire par son agent. Cela veut dire que l'agent... On peut présumer que la grande majorité d'entre eux sont de bonne foi. Mais c'est quand même inouï, Mme la Présidente, d'abandonner un bénéficiaire totalement à l'arbitraire des décisions d'un agent qui peut aussi le prendre en grippe; de le laisser totalement à l'arbitraire d'un agent qui considère que les instructions qu'il a données relativement à la recherche d'un emploi ne sont pas suffisamment écoutés par le bénéficiaire. Cela pourrait même amener l'agent à cesser d'accorder l'aide à la personne et à ses dépendants - cela veut dire ses enfants - au cas où il considérerait que, finalement, le bénéficiaire ne se conforme pas assez rapidement aux instructions qu'il a données.

Le droit d'appel, Mme la Présidente, est absolument essentiel pour toutes les matières. Et c'est absolument inacceptable que les décisions rendues en vertu de l'article 23 du projet de loi, celles qui concernent l'appel sur l'offre d'un programme de réintégration par l'agent, celles qui prévoient que l'agent peut donner des instructions relatives à la recherche d'un emploi, les dispositions des articles 28 et 33 qui permettent à un agent de cesser l'aide au cas où un bénéficiaire ne se conformerait pas à ses instructions soient rendues sans que le bénéficiaire puisse contester la validité et même la "raisonnabilité" de ces instructions... C'est évident que ces décisions doivent être révisables.

C'est pas peu de chose, Mme la Présidente, que dans le projet de loi, le ministre ait prévu qu'une des plus importantes décisions, celle qui concerne justement la possibilité d'être admissible au programme Soutien fianncier, le programme qui est sensé être celui qui est offert aux vrais assistés sociaux... Ceux qui vont avoir le fardeau sur les épaules, pas simplement de prouver qu'ils sont en mauvaise santé, ils vont avoir le fardeau d'obtenir un certificat médical qui va prouver que leur état de santé physique est altéré d'une façon permanente ou indéfinie, ils vont avoir à obtenir dans le certificat médical la mention qu'ils sont incapables d'occuper un emploi. J'ai eu l'occasion de le dire ici en cette Chambre, c'est là un test d'invalidité qui est d'une lourdeur que tout le monde ici dans cette Chambre sait très bien qu'il va amener le rejet d'un très grand nombre de demandes.

Je suis certaine que l'ensemble des parlementaires qui siègent ici ont dans leurs dossiers de comté des concitoyens qui, déjà, ont tenté, par exemple, d'obtenir la rente d'invalidité de la Régie des rentes du Québec tout en ayant moins de 60 ans ou qui ont essayé d'obtenir une rente de la Commission de la santé et de la sécurité du travail pour invalidité. Je suis convaincue que la majorité sait très bien la difficulté que cela représente, n'est-ce pas, d'obtenir un certificat médical pour faire valoir un état de santé déficient profondément ou altéré de façon permanente. Le médecin traitant se sent autorisé à évaluer la condition physique, l'aspect médical d'une personne, mais tous savent très bien les réticences - d'une certaine façon, elles se comprennent - mais les réticences qui finissent par se traduire par une sorte de résistance systématique de la part des professionnels de la santé à conclure que même un état de santé profondément altéré a pour conséquence de ne pouvoir occuper un emploi.

Vous savez, Mme la Présidente, on en a un bel exemple malheureusement récent. C'est un exemple de courage. C'est l'exemple de la présidente du Conseil du statut de la femme qui, malgré un état de détérioration avancée de sa santé à cause d'un cancer, a tenu à rester en fonction jusqu'à la fin et à occuper pleinement ses responsabilités. Cela veut dire que, même un état de santé profondément détérioré, amène difficilement des professionnels de la santé à conclure pour autant qu'une personne n'est pas en mesure d'occuper un emploi et cela amène un très grand nombre de personnes qui font des demandes, même en révision, devant la Commission des affaires sociales, à être écartée pour leur demande d'invalidité pour le motif que,

malgré un état de santé qui, parfois, est clairement connu comme altérant profondément leur situation, on peut toujours à la rigueur prétendre qu'un emploi léger, un emploi d'agent de sécurité, un emploi de réceptionniste, pourrait être malgré tout théoriquement - parce qu'il s'agit toujours d'emploi théorique - occupé.

C'est donc dire, Mme la Présidente, que même ce programme Soutien financier qui est censé bénéficier à ceux que fe ministre prétend être les vrais, eh bien, même ce programme Soutien financier va exiger des tests de handicap tellement lourds qu'il va falloir que la personne prouve que sa situation est tellement terrible et il sait très bien que cela va écarter du programme un très grand nombre de personnes. De plus, Mme la Présidente, et c'est un aspect extrêmement important, c'est que l'appel d'une décision de refus à l'admissibilité au programme Soutien financier va se faire devant un comité composé de trois professionnels exclusivement nommés par le ministre. Vous vous rendez compte, il n'y a même plus de droit, plus seulement le droit à l'assistance, mais il n'y a même plus la reconnaissance du droit à la révision par un tribunal impartial comme c'était à la Commission des affaires sociales. Dorénavant, c'est un comité composé de trois professionnels. Pourra-t-on en appeler? Ce comité de trois professionnels est exclusivement nommé par le ministre, un seul comité provincial susceptible d'être appelé à ouvrir des dizaines de milliers de dossiers dans une seule et même année. Vous rendez-vous compte qu'ils ne pourront sans doute même pas faire respecter le droit d'être entendu pour un bénéficiaire qui se voit refuser l'accès à un programme? Non, le projet de loi 37 est, à tous égards, inacceptable non pas seulement au niveau des modalités, mais au niveau du principe lui-même.

Beaucoup de personnes se demandent certainement avec raison comment il se fait que ce gouvernement, qui résiste si peu aux moindres pressions qui lui sont faites, maintient cette prétention de force vis-à-vis des personnes assistées sociales. Pourquoi est-il si lâche avec les puissants, ceux qui établissent un rapport de forces, devant qui il s'incline généralement? Pourquoi est-il si violent d'une certaine façon, si dur, si brutal, si grossier à l'égard des personnes les plus démunies de notre société?

Mme la Présidente, je relisais les propos contenus dans un message du comité des affaires sociales de l'Assemblée des évêques du Québec. Le message s'intitulait "Une dignité menacée". Ce message était adressé au gouvernement le 1er mai dernier, à l'occasion de la Journée internationale des travailleurs et travailleuses. Ce message, qui ne semble manifestement pas avoir été entendu, signalait pourtant au gouvernement les dangers de poursuivre les orientations proposées en matière de contre-réforme.

J'en lis rapidement quelques passages. Les évêques disaient dans ce message: "Avec le projet de réforme - et je lis textuellement - de l'aide sociale actuellement débattu, nous assistons à un nouvel épisode qui transforme les victimes du système économique en présumés coupables. Il transforme radicalement les fondements mêmes de l'aide sociale. "En effet, en accord avec la recommandation du rapport Boucher en 1963, l'aide sociale a été considérée depuis 1969 comme un droit pour toute personne démunie, quelle que soit la cause de son indigence. Notre société reconnaissait alors implicitement que la pauvreté avait des causes économiques et sociales et, parce que notre société reconnaissait que les victimes ne devaient pas être traitées en coupables, la société se reconnaissait des responsabilités à leur égard."

Le message des évêques ajoute: "Le nouveau projet substitue au critère du besoin la vieille distinction entre les aptes et les inaptes, et s'articule tout entier autour de l'incitation au travail qui se révèle en fait de la coercition. Réduisant l'indigence à un simple problème individuel, sonne-il l'heure où l'État ne se reconnaît plus de responsabilités sociales et cela, au moment même où, dans un contexte de concurrence internationale et de rareté d'emploi..."

Je vous rappelle, Mme la Présidente, que demain, durant les deux prochains jours, nous discuterons du projet de libéralisation des échanges, des bouleversements que tout le monde sait que cela va provoquer dans le domaine de l'emploi. Nous en discuterons au moment où le gouvernement se déresponsabilise à l'égard de ceux et celles qu'il sait être amenés à connaître parfois des conditions de perte d'emploi à la suite de bouleversements technologiques ou de mutations qui amènent ces changements auxquels les personnes sont totalement étrangères. Plus encore, le gouvernement sait très bien que les décisions en matière économique, qui ont des effets sur le taux d'emploi ou de chômage, sont tellement étrangères aux décisions personnelles que les gens peuvent prendre. Il sait très bien les effets d'une simple décision de la Banque de Canada de hausser les taux d'intérêt, ce qui pourrait se justifier au regard de la surchauffe et de l'activité fébrile que connaît l'Ontario et qui, pour autant, est tout à fait inconcevable quand on regarde le taux de chômage qui, malgré la croissance économique, se maintient toujours autour des 10 % au Québec. Le gouvernement, les gens qui sont ici, les parlementaires en cette Chambre savent très bien qu'une simple décision de la Banque du Canada de hausser les taux d'intérêt a comme effet, dans les semaines qui suivent, d'augmenter de dizaines de milliers de nouveaux chômeurs qui vont rejoindre les rangs de l'aide sociale.

Il ne faudrait pas oublier, ce qu'on a parfois tendance à ne pas bien expliquer à la population du Québec, que la moyenne de durée à l'aide sociale est de neuf mois et demi, à peine

le temps de faire et d'accoucher d'un enfant, Mme la Présidente. Neuf mois et demi, c'est la moyenne du passage de ceux et celles qui demandent l'assistance, parce que c'est évident qu'on ne tombe pas sur l'aide sociale par plaisir. C'est un peu comme un chemin de croix, quand on tombe pour la première ou la deuxième ou la troisième fois. Les études réalisées par le ministère démontrent que la très grande majorité tente, souvent désespérément, après une année de chômage avec des allocations d'assurance-chômage qui n'ont souvent pas été utiles pour se trouver un emploi parce que, durant ces prestations de chômage, généralement, il y a très peu d'emplois qui sont offerts à toute personne, homme ou femme, qui vient de perdre celui qu'elle occupait depuis parfois quelque temps ou parfois plusieurs années...

Après ces douze mois, la perspective de l'aide sociale angoisse, traumatise profondément les personnes, la très grande majorité d'entre elles. Qu'on ne vienne pas me citer des cas de ceux qui en profiteraient inconsidérément. Cela existe, comme existent ceux et celles qui, dans les domaines économiques ou commerciaux, tentent d'augmenter leur compte de dépenses, ou tentent de diminuer leur revenu imposable, ou tentent par toutes sortes de moyens d'en payer le moins possible et de passer à côté des lois fiscales. Toutes les études démontrent ce que la commission Macdonald elle-même avait longuement expliqué dans son rapport, c'est toujours moins de 5 %, les cas d'abus, quels que soient les programmes sociaux ou fiscaux qui sont mis en place dans une société.

C'est donc dire qu'au moment où on sait très bien que le contexte économique connaît des situations de bouleversements, de mutations, qui créent des perdants dans notre société, qui font qu'il y a des gens qui sont des victimes, plutôt que de se responsabiliser à leur égard, en prenant en considération que la dignité passe par l'emploi, plutôt que de se donner la responsabilité non pas prétendument comme le fait le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, de façon complètement irresponsable, en prétendant qu'il y aura possibilité de participation à des mesures d'employabilité... C'est ce qu'on retrouve dans les notes explicatives du projet de loi, je ne veux pas revenir là-dessus, les mesures, c'est connu, c'est archiconnu. C'est vivre dans un monde totalement féerique et chimérique que de s'imaginer que ces mesures d'employabilité, qu'il sait n'être même pas capable d'offrir aux ménages de moins de 30 ans, pourront du jour au lendemain se transformer en une offre illimitée pour l'ensemble de centaines de milliers d'hommes et de femmes à travers tout le Québec qui verront leur assistance diminuer faute de ne pas pouvoir participer à ces mesures. (22 h 10)

Le gouvernement ne s'est donné aucune responsabilité en matière de création d'emploi pour les occuper dans des travaux socialement utiles et les occuper comme des vrais travailleurs avec un salaire reconnu comme un salaire décent pour vivre dans notre société. Le gouvernement libéral actuel s'est totalement déresponsabilisé, prétendant que c'est à l'entreprise privée seule de mener à terme ce qui pourtant n'est pas son rôle. L'entreprise privée, essentiellement, la fonction qui lui est dévolue dans la société, c'est que, quel que soit le nombre de personnes qui sont à son emploi, elle a comme principal objectif de réaliser des profits pour les investir à nouveau. C'est très connu, Mme la Présidente, elle est soumise à une concurrence qui l'amène à souhaiter parfois remplacer le plus grand nombre de travailleurs possible par des machines, des nouvelles technologies, qui vont permettre de produire sans avoir à verser pour autant des salaires, des traitements ou des avantages sociaux qu'elle peut considérer coûteux en matière de concurrence internationale. C'est au gouvernement de le faire.

C'est un problème politique, ce n'est pas qu'un problème économique. On est dans une société où on produit de plus en plus de biens et de services avec de moins en moins d'hommes et de femmes. C'est au gouvernement de prendre la responsabilité de créer cette redistribution qui était, jusqu'à maintenant, faite par des salaires, même si, à l'occasion, cette redistribution pouvait être considérée comme injuste. Cette redistribution par l'activité du travail était faite sous la forme d'une rémunération en salaire, et on sait très bien qu'il y a actuellement des investissements qui se font. Je pense simplement à l'Alcan, Mme la Présidente, où des investissements de 1 000 000 000 $ n'ont pas créé un seul emploi; bien au contraire, l'Alcan a dû déployer tous les efforts de ses relations publiques pour essayer d'expliquer qu'il n'y aurait pas trop de pertes d'emplois.

Dorénavant, les investissements en matière économique ne sont plus synonymes d'emplois, contrairement à ce qui était le cas quand on était enfant et que, lorsqu'une usine s'installait dans notre village, on disait que cela allait faire de la gagne.

Mme la Présidente, nous avons, comme Opposition, l'intention ferme de présenter une alternative à l'opinion publique québécoise, mais une véritable alternative en matière de sécurité du revenu. Nous avons l'intention, dès ce congrès d'orientation que nous tiendrons l'automne prochain et dès le mois de septembre où nous allons en conseil national à une date déjà fixée d'examiner des propositions, mais des propositions d'une véritable réforme de sécurité du revenu, qui ne consistera pas qu'à vouloir contrôler et gérer les pauvres comme s'ils étaient des parias dans notre société, mais une véritable proposition en matière de sécurité du revenu qui prenne en considération le fait que dans notre société travailler doit au moins permettre de gagner un revenu suffisant qui

corresponde au seuil de pauvreté.

Je termine, Mme la Présidente, en rappelant qu'en 1988, malgré les hausses, et le ministre peut toujours prétendre que les hausses actuelles sont graduelles et successives, je lui rappellerai que dans son premier mandat le gouvernement précédent a haussé de 39 % le salaire minimum et j'ai hâte, à la fin de ce premier mandat, de voir quel sera le résultat obtenu par le présent gouvernement.

Mais, Mme la Présidente, je veux vous rappeler qu'il est fondamental dans notre société que travailler ne veuille pas dire s'appauvrir. Pensons qu'actuellement le salaire minimum est à au moins 300 $, pour une personne seule, en dessous de ce qui est considéré le seuil de la pauvreté minimal pour simplement maintenir ses besoins de subsistance. Quand on constate que travailler, c'est s'appauvrir, Mme la Présidente, il y a des objectifs à se donner comme société. Cet objectif, nous avons l'intention de le proposer de façon que l'ensemble des travailleurs et des travailleuses à faibles revenus, comme l'ensemble des personnes qui ont des difficultés à se trouver une activité rémunératrice puissent être assurées d'un revenu minimum qui comble leurs besoins de subsistance de base en tant qu'être humain, un objectif qui les amène également à être motivés par une incitation positive et non pas par une obligation coercitive et négative, qui les amène à rechercher à améliorer leur sort par une activité qui leur permette de garder des revenus de travail.

En terminant, Mme la Présidente, les députés ministériels ne peuvent pas prétendre que nous n'en sommes qu'à la deuxième lecture pour justifier un vote dont ils auront à porter la responsabilité. Je le rappelle, ce vote aura des conséquences historiques. Pour la première fois depuis 25 ans au Québec, si ce vote a lieu dans cette Chambre, il consistera à écarter ce qui, jusqu'à maintenant, avait été considéré comme un minimum de solidarité entre tous les Québécois au profit d'une catégorisation qui va laisser des stigmates, qui va avoir des conséquences d'appauvrissement et de contrôle beaucoup plus violentes qu'elles ne l'ont été jusqu'à maintenant pour des centaines de milliers de nos concitoyens et concitoyennes.

Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de Maisonneuve. M. le député de Shefford.

M. Roger Paré

M. Paré: Merci, Mme la Présidente. Je ne sais pas si c'est parce que les gens d'en face ne veulent pas entendre ce qu'on va dire, mais ils ne sont pas très nombreux pour un projet de loi aussi important. C'est important de le rappeler parce que c'est une drôle de session qu'on est en train de vivre. Ce n'est pas une session intensive, c'est une fin de session. C'est une fin de session au cours de laquelle on nous présente des choses que je trouve tout à fait... Je comprends, en tout cas, même si je ne trouve pas cela normal, qu'on passe cela le soir. Le projet de loi 37 s'appelle Loi sur la sécurité du revenu. Quand les gens prennent un texte comme cela et qu'ils le regardent, il y a le mot "sécurité" là-dedans. Normalement, on devrait se dire: Bien, c'est une bonne chose, c'est positif, c'est favorable, cela amène des bonnes choses pour les gens qui sont concernés.

Mais, la réalité est tout autre. C'est un projet, c'est un programme, c'est une loi d'insécurité et l'insécurité, savez-vous pour qui, Mme la Présidente? Pour les plus démunis de la société. C'est pour cela que je tiens à intervenir sur cette motion de report, pour essayer de convaincre les gens d'en face qu'on ne doit pas voter maintenant, le soir, comme cela, qu'on ne doit pas voter en cette fin de session un projet de loi semblable. C'est un projet de loi qui est totalement inacceptable. Cela, l'ensemble des intervenants qui connaissent le secteur, le milieu, le disent, y compris l'Assemblée des évêques du Québec. Ils ont compris, eux, et ils savent très bien que l'État a un rôle social à jouer, un rôle indispensable et capital pour aider les gens qui sont dans le besoin. L'Etat est là pour cela. (22 h 20)

Oui, il est là pour le développement aussi. Si on me disait: On va passer cela vite, vite, vite pour ensuite s'occuper d'économie... On va y revenir à l'économie tantôt. Depuis le 2 décembre 1985, on n'a plus jamais entendu parler de plein-emploi de l'autre côté. On n'en parie plus. On ne parie plus des jeunes, non plus, d'ailleurs. Ah non, on parie juste de profits et de colonnes de chiffres, comme si calculer des chiffres, cela n'avait pas des conséquences à un moment donné. C'est comme un bilan, il y a de l'actif et du passif. Quand on touche une colonne, on touche les deux pages. Quand on fait en sorte que des gens soient plus mal pris, on finit, comme société, par payer pour. On va payer pour parce qu'il va peut-être falloir avoir des services sociaux qui vont s'en occuper «t, même si ce n'était pas cela, à cause de toute cette énergie qu'on n'utilise pas, de tout ce capital humain qu'on néglige et qu'on est en train de bafouer et de maltraiter. C'est inacceptable d'adopter une loi comme cela en 1988.

Rappelez-vous, Mme la Présidente, il n'y a pas très longtemps, il neigeait, il ventait, il pleuvait et, pourtant, il y avait à peu près 5000 personnes dehors venues manifester. Et ça, comme société, je dois vous le dire, c'est humiliant que des gens doivent braver la tempête, les plus démunis et les plus désorganisés de la société, pour venir non pas demander à l'État des avantages, mais dire. Gardez-nous l'essentiel; ne nous coupez pas l'essentiel, ce que cela nous prend pour vivre. Un État qui se dit en période de croissance économique, quand le ministre des Finances parle de période de vaches grasses, dit

aux plus démunis qui sont dehors: Gelez, vous autres, et on va couper vos prestations. On est en période de croissance économique. On va donner cela à nos "chums".

On va juste vous rappeler les urgences de ce gouvernement. Quand il a pris le pouvoir en décembre, il a présenté deux mesures: baisser les impôts pour les gens qui gagnent 50 000 $ et plus, mais le pendant - il faut aider tout le monde - il a coupé l'indexation trimestrielle des plus démunis de la société. On aide les plus gros et on coupe les plus petits. On s'est dit: Ils arrivent au pouvoir; ils n'ont pas eu le temps de voir qu'il y avait de la misère au Québec; on va leur donner une chance. Le budget de 1988 vient d'être déposé. Qu'est-ce qui arrive? On a changé les tables d'impôt. Encore une diminution pour les salariés de 50 000 $ et plus. Ceux-là, je suppose qu'ils font pitié, on va encore diminuer leurs impôts, mais, encore une fois, comme je vous le dis, il faut essayer d'équilibrer les choses, pour les plus pauvres, on va adopter la loi 37 parce qu'elle vient encore couper les plus pauvres de la société. Je trouve cela tout à fait inacceptable.

Je dis à mon collègue de Brome-Missisquoi, le ministre responsable, mon voisin de comté, que cela n'a pas de bon sens, un projet de loi comme celui-là, quand on a un peu de coeur au ventre, quand on veut autre chose que juste le pouvoir et des belles colonnes de chiffres. Il faut s'occuper avant tout du monde, du vrai monde. Les bénéficiaires de l'aide sociale, s'il vous plaît, arrêtez donc de les prendre pour des coupables. Ce ne sont pas des coupables. Ce sont des victimes, les bénéficiaires de l'aide sociale. Vous faites du bureau de comté et, si vous n'en faites pas, je vais vous dire comment cela se passe. Les bénéficiaires de l'aide sociale qui viennent nous voir veulent en sortir. Ils tirent le diable par la queue, comme on dit chez nous. Ce n'est pas vrai qu'ils se paient du luxe. Il y a peut-être des exceptions. Il y a peut-être des fraudeurs, mais il y en a dans d'autres domaines aussi. On ne met pas un paquet de boubou macoutes après les autres. Dans ce milieu-là, les gens ont l'essentiel. Ceux qui ne connaissent pas les barèmes de l'aide sociale, informez-vous et vous allez voir combien elles ont, les personnes seules, les familles avec enfants. Vous vous demanderez ensuite si vous autres, vous seriez capables d'arriver avec un revenu semblable et si vous seriez intéressés à rester sur l'aide sociale pour le plaisir d'être à la maison. Je suis certain, je suis convaincu que vous allez dire: Si cela m'arrivait, je ferais le maximum pour m'en sortir.

Mais ce qu'on présente là, c'est le contraire. C'est un projet de loi qui ne règle absolument pas la situation. S'il y avait une urgence de l'autre côté et si, dans ce projet de loi, c'était manifesté qu'il y avait une urgence pour, au moins, tenir parole... Ce fameux engagement qu'on a traîné pendant des mois et des mois avant les élections et qui était majeur pendant les élections, la parité pour les moins de 30 ans, si l'urgence c'était cela ce soir, je vous dirais: Je vais voter contre la motion de report; évidemment, vous avez raison; les jeunes sont mal pris; ils ont de la misère; il faut les aider; cela n'a pas de bon sens de laisser des gens crever de faim; adoptons la loi. Mais ce qu'elle dit, la fausse parité, la demi-parité, la parité à l'inverse pour les plus de 30 ans qu'on va pénaliser, c'est pour 1990, le 1er janvier 1990, probablement après les prochaines élections. Et on veut nous faire adopter cette loi ce soir, c'est urgent, il faut voter cela avant de s'en aller en vacances, c'est capital, c'est majeur. Ce serait majeur si on respectait son engagement électoral. Je trouve cela subtil - comique ou drôle, je ne sais pas quoi dire, parce que c'est un peu de la comédie pas drôle - d'entendre le ministre nous dire et nous répéter qu'il est content d'avoir tenu son engagement. Mais son engagement, c'est pour dans plus de deux ans ou à peu près, pas loin de deux ans. On aurait dû l'avoir il y a déjà deux ans et demi. Cela n'a pas de bon sens. Et on va nous passer maintenant? Je vous dis que cela n'a pas de bon sens.

Qu'on nous parle, donc, de plein-emploi et qu'on se dépêche, donc, de prendre des mesures ici pour créer des emplois. Au lieu de s'attaquer aux victimes du système, qu'on s'attaque, donc, aux problèmes du système. Bien non. On n'entend pas parler de cela de l'autre côté. Il y a le ministre délégué à la PME qui va faire un discours une fois par année pour présenter son volume où il a changé quelques pages. Cela ne fait pas tellement avancer le plein-emploi. Cela n'a pas de bon sens.

J'entends la ministre de l'immigration dire que cela donne des "jobs". Si ce soir, on était en train de présenter un projet de loi...

Une voix: Je vais vous en parier tout de suite.

La Vice-Présidente: À l'ordre! À l'ordre!

M. Paré: ...qui crée des emplois, je serais d'accord. Mais, parlons-en, de l'emploi. Avez-vous vu les derniers chiffres, Mme la ministre? Le chômage a encore augmenté au Québec. Le chômage a augmenté, alors qu'on se dit en période de croissance économique. C'est prédit malheureusement, et je ne suis pas content, on n'a même pas pris de mesures pour le prévoir, mais on s'en va vers un ralentissement. Entre autres, dans la construction, ce n'est même pas annoncé, on est en train de le vivre, on n'a qu'à regarder les chiffres depuis janvier, on est en ralentissement. On ne trouve pas de mesures. On ne propose pas de mesures pour accélérer l'économie. On se dit: Cela a bien été, cela va peut-être aller moins bien, cela ne dépend pas de nous.

Mais, par exemple, les victimes, on est

capable de les serrer davantage et on va le faire. Ce sont les mesures qu'on fait. On va s'attaquer aux victimes au lieu de s'attaquer aux véritables problèmes, aux véritables causes du malaise qu'on vit présentement. Si les gens sont à l'aide sociale, c'est qu'ils n'ont pas de jobs. Il faut en trouver.

Quand on entend, de l'autre côté, que le plein-emploi, c'est utopique, irréalisable et impensable, bien, en Ontario, c'est la surchauffe et ils sont en train de l'atteindre. Il y a trois fois moins de chômeurs à Toronto qu'à Montréal. On peut bien se péter les bretelles, on peut bien dire que cela va bien. Ah oui! On a le droit de le dire. Cela ne va pas si mal, cela va moins mal que cela n'allait en période de crise économique. Mais, quand on regarde ce qui se passe en Ontario, je dois vous dire qu'on est en train de prendre un retard inquiétant. D'un autre côté, Ottawa décide qu'il faut augmenter les intérêts parce qu'il y a de la surchauffe en Ontario. Mais si on fait cela, que va-t-il arriver ici au Québec? On va avoir encore plus de problèmes.

Je dis qu'on devrait au moins s'assurer que, quand on va adopter ce projet de loi, le ministre va avoir fait ses devoirs complètement. Il va avoir entendu les groupes, il va arrêter de fesser sur les plus démunis, pour regarder comment on peut, dans une société, aider les gens.

Juste en terminant, je vais parler des jeunes. On ne leur donne pas la parité. Cela va aller en 1990. En plus, je me rappelle le discours de l'année 1987: L'Année internationale du logement des sans-abri. On a dit: Pour nous, le gouvernement du Québec, on ne fera pas grand-chose cette année, cela va juste être le début, mais cela va devenir une préoccupation constante, régulière pour tes années futures. On n'en entend plus jamais parler. Heureusement, avec les mesures qu'on prend, on n'entend plus parler. Et une des mesures, c'est qu'on dit dans ce projet de loi à ceux qui, pour essayer de s'en sortir avec le peu de revenus qu'ils ont vont vouloir cohabiter, qu'on va leur enlever 85 $ chacun. Bien, cela, pour les plus démunis qui sont ensemble et qui essaient de s'en sortir à deux ou trois personnes, c'est une façon de les amener à être des itinérants. Il y aura plus de gens sans-abri. Pourquoi? Parce qu'ils n'auront plus les moyens. On va venir couper les prestations de ceux qui veulent s'aider. Et on le leur dit. Il y a un dicton qui dit: "Aide-toi et le ciel t'aidera." De l'autre côté, on dit: Si les citoyens veulent s'aider, on va les encourager. Et là, ceux qui veulent essayer de s'entraider, on leur dit: On va couper vos allocations. Cela mérite d'être regardé. (22 h 30)

II faudrait que le ministre aussi se fasse une bonne idée, précise, claire, et nous répète carrément ce qu'il nous a dit ici en commission parlementaire un vendredi où on lui a demandé si vraiment il était pour intervenir et empêcher que l'on ne pénalise aussi ceux qui vivent dans les

HLM et les coopératives d'habitation, qui se prennent en main et qui veulent s'aider, parce qu'il y avait des rumeurs selon lesquelles on voulait les couper.

On retrouve un article de son projet de loi, l'article 90.5°, effectivement ceux qui vont être des résidents d'un logement subventionné vont être pénalisés. On trouve encore un moyen de pénaliser ceux qui veulent s'aider dans des coopératives d'habitation et ceux qui sont dans les HLM. On trouve une façon de leur imposer la parité, c'est-à-dire la parité avec ceux qui sont encore plus mal pris qu'eux au lieu d'essayer de les aider à s'en sortir en les comparant au moins à un seuil de revenu minimum, soit le seuil de la pauvreté.

Ce projet de loi est inacceptable. Le ministre doit refaire ses travaux et doit s'assurer que son rôle c'est non pas de fesser sur les plus démunis mais, comme ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, d'essayer de les aider à s'en sortir. J'espère qu'il va accepter le report pour se donner le temps de comprendre cela et d'agir dans ce sens-là. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Shefford. Je suis prête à reconnaître le prochain intervenant. M. le député de Bertrand. J'aimerais vous informer qu'il reste à votre formation politique environ douze minutes.

M. Jean-Guy Parent

M. Parent (Bertrand): Merci, Mme la Présidente. Cela me fait plaisir d'intervenir ce soir sur ce projet de loi et plus particulièrement sur le report. Le député de Joliette et chef de l'Opposition a fait une motion de report afin de demander au gouvernement de demander au ministre porteur de la loi 37 de la réexaminer, de faire ses devoirs et de faire en sorte que l'on puisse avoir une réforme d'aide sociale qui se tienne.

Il faut réaliser qu'il y a quelque 600 000 personnes assistées sociales au Québec, il y a quelque 250 000 ménages qui sont touchés. Lorsqu'on est entre nous, on a parfois un peu l'impression que Jes assistés sociaux sont une autre classe de monde à part et on oublie très facilement qu'ici, au Québec, dans une société qui est très à l'aise, qu'il y a des gens qui doivent avoir une aide que l'on appelle l'assistance sociale.

Ce que le ministre a voulu faire avec le projet de loi 37, c'était de corriger supposément des inégalités. Ce que le ministre a voulu faire, cela a été de donner suite, soi-disant, Mme la Présidente, à des engagements qu'il avait pris lors de la campagne électorale. Mais, comme on a pu le voir au cours des derniers mois et des dernières semaines, ce n'est pas du tout ce qu'il a fait. Non seulement l'Opposition le dénonce, non seulement ici on s'élève contre cette loi 37,

mais on n'a qu'à voir des groupes de citoyens. On parle de 150, 160 groupes: différentes organisations, les centrales syndicales, la CEQ, la CSN, la FTQ, la coalition nationale, les groupes de femmes, la Ligue des droits et libertés, le Regroupement des ressources alternatives en santé mentale, la coalition, tous ces groupes sont venus manifester au ministre qu'ils étaient en désaccord avec ce qui était proposé. Pourquoi? Parce qu'on est en train de créer une société avec deux groupes. On aura les gens bien nantis, les gens qui vivent à l'aise, les gens capables d'être autonomes. Oui, cela existe, mais on aura, de l'autre côté, un ghetto où on retrouvera davantage de pauvres, des gens qui, aujourd'hui, sont aux prises avec une situation où ils sont inaptes ou incapables de se trouver du travail. Dans ce sens-là, ce que le ministre veut faire et qui est carrément inacceptable, c'est emprisonner, finalement, ces gens-là dans une situation où ils vont être complètement perdants.

Je ne comprends par pourquoi le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, qui propose ce projet de loi, vient, en fin de session, demander que l'on adopte le projet de loi 37 quand on sait toutes les recommandations qui lui ont été faites, même des propres députés de son parti, à ce que je me souvienne, de neuf d'entre eux. C'est rare que cela s'est vu. Depuis deux ans et demi, c'est la première fois. Il y en a qui se sont levés, qui se sont tenus debout et qui ont dit au ministre: Cela n'a pas de sens, il faut retirer certaines choses, il faut apporter des modifications.

Définitivement, le ministre ne comprend pas. Le ministre veut s'acharner à faire adopter sa loi 37 quand il sait que cela ne répond pas du tout, mais pas du tout, Mme la Présidente, à ce que la société québécoise est en droit d'obtenir. Parce que, dans une société, surtout quand on passe des périodes comme celle que nous passons actuellement, où on a une certaine marge de manoeuvre parce que cela va bien sur le plan économique, on n'a pas le droit de faire, comme le disait, justement, un éditorialiste de La Presse, le 15 avril dernier, Pierre Vennat, une réforme comptable.

Effectivement, c'est beau d'aligner des chiffres, c'est beau à voir, des colonnes qui montrent que le déficit baisse, mais ce n'est pas seulement cela, une société. Ce n'est pas seulement être capable d'épargner quelques milliers ou quelques millions. Il faut être capable de tenir compte des besoins de la population. Les besoins de la population et la réforme qui était attendue, la parité pour les moins de 30 ans, voilà autant de choses qui étaient promises par ce gouvernement et auxquelles beaucoup de gens étaient en droit de s'attendre, parce qu'il y avait eu des engagements de la part du gouvernement. Mais, qu'est-ce qu'on voit, Mme la Présidente? On voit un projet de loi 37 qui ne répond pas du tout.

Dans ce sens-là, ce que le chef de l'Opposition a demandé ce soir après avoir discouru quelques minutes, ce que ma collègue, la députée de Maisonneuve, a aussi demandé, c'est qu'il y ait un report d'au moins six mois, que le ministre aille refaire ses devoirs, comme cela lui est déjà arrivé dans d'autres lois, et qu'il puisse revenir et présenter à l'ensemble des Québécois et des Québécoises un projet de loi qui se tienne debout, un projet de loi qui va faire en sorte qu'on pourra dire: Voilà une vraie réforme de l'aide sociale. Mais, de la façon dont le projet de loi est articulé et lorsqu'on est rendu au 15 juin à quelques jours, voire à quelques heures de la fin d'une session intensive ici à l'Assemblée nationale, que le ministre essaie de faire adopter une loi semblable est carrément inacceptable.

Mme la Présidente, j'ajoute ma voix, dans ce sens, à celle de mes collègues, autant à celle du chef de l'Opposition qu'à celle de la députée de Maisonneuve, parce que le ministre doit comprendre le message de ce côté-ci. Le message est clair. On demande un report du projet de loi 37. On demande que le ministre refasse ses devoirs. On demande de ne pas faire adopter cette loi en fin de session, au mois de juin 1988. Mme la Présidente, je vais laisser la chance d'intervenir à mon collègue, le député de Lavio-lette, puisque le temps nous manque. Mais j'espère que ce message bref et très clair va être entendu par le ministre qui est porteur de cette loi, le ministre responsable d'une fausse réforme de l'aide sociale. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Bertrand. M. le député de Laviolette.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente. Je suis un peu abasourdi. Je m'attendais qu'un député du parti ministériel intervienne sur une décision aussi importante que celle-là. Il me semble, Mme la Présidente, que les gens qui sont en face de nous devraient défendre la position du ministre si vraiment ils avaient conscience qu'il fallait la défendre. L'impression que nous avons, c'est qu'ils n'ont même pas confiance dans ce qu'ils sont en train de nous proposer, parce qu'ils ne le défendent même pas. Nous sommes ici en train de demander à des gens de réfléchir encore quelques mois pour s'assurer que leur position soit meilleure que celle que nous avons connue jusqu'à maintenant et, pour la première fois de ma carrière politique ici en cette Assemblée nationale, je n'ai encore entendu, alors que nous arrivons au terme de notre droit de parole d'une heure, personne de l'autre côté venir défendre le ministre.

Le collègue qui m'a précédé a fait mention de gens - et il y en a qui sont ici dans cette salie - qui ont contesté le ministre à l'intérieur du parti politique, ce qui n'est pas tout à fait rare dans cette formation politique. On l'a déjà connu à d'autres moments sur des décisions

cruciales pour le Québec, en particulier sur toute la question de la constitution canadienne. Neuf personnes s'étaient élevées ici, de ce côté, des membres de l'Opposition, pour aller à rencontre de leur parti politique.

Il y a des gens, dans cette salle aujourd'hui, du côté ministériel, qui se sont élevés contre le ministre au conseil général, ont fait valoir leur point de vue en disant au ministre qu'il avait mal fait les devoirs qu'on lui avait demandé de faire et qu'en conséquence il devait retourner devant l'Assemblée nationale avec des amendements majeurs. (22 h 40)

On se retrouve avec un projet de loi dont les amendements sont tellement mineurs que, finalement, on ressent toujours de la part de la population, de l'ensemble des gens qui contestent ce projet de loi, les mêmes réticences, les mêmes occasions de décrier un tel projet de loi.

Mme la Présidente, quelque temps de plus au ministre pour refaire ses devoirs... Mme la Présidente, est-ce que je pourrais avoir un droit de parole convenable?

La Vice-Présidente: Vous pouvez continuer, M. le député de Laviolette. Cela semble rétabli.

M. Jolivet: Mme la Présidente...

La Vice-Présidente: S'il vous plaît, c'est maintenant le droit de parole du député de Laviolette. J'aimerais bien qu'on reconnaisse son droit de parole. M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente. Je pense que j'ai ici, à cette Assemblée, le droit de m'exprimer d'une façon discordante par rapport aux ministériels. Ils pourront aller de l'autre côté s'ils le désirent, mais qu'ils nous donnent la chance de faire valoir nos points de vue, s'ils ne sont aucunement capables de se lever pour défendre le ministre.

Nous sommes ici pour discuter de choses qui vont toucher l'ensemble des personnes assistées sociales au Québec pour des années à venir. Ce n'est pas le temps d'en rire, Mme la Présidente. L'occasion que nous avons de faire valoir nos points de vue, c'est, justement, de dire à ces gens qu'ils se trompent, que le ministre se trompe.

En réponse à une question, le ministre a dit: Le député de Laviolette devrait me féliciter. Oui, je devrais le remercier d'avoir accepté une des propositions que l'on faisait, mais ce n'est pas suffisant. Ce n'est pas en pénalisant des gens qu'on va en récompenser d'autres. Je pense qu'il faut regarder la réforme dans son ensemble, qu'il faut bien la décrire à l'ensemble des gens du Québec et aux assistés sociaux, en particulier, que l'on considère dans ce projet de loi comme étant, dans bien des cas, comme le disait mon collègue de Shefford, non pas des victimes, mais des fraudeurs.

On a l'impression que ce que nous laisse le projet de loi dans la bouche, c'est quelque chose de pas correct. C'est dans ce sens qu'on demande au ministre d'y réfléchir davantage, qu'on demande à ses collègues de l'Assemblée nationale d'y réfléchir davantage parce que cela engage pour longtemps. On est en train de faire en sorte que les gens qui, normalement, sont davantage dans le besoin soient considérés comme des gens qu'il faut écraser. J'ai eu l'occasion - les gens de ma région le savent et je suis assuré que le député de Saint-Maurice, qui m'écoute, le sait aussi - de prendre la défense de toutes les personnes qui viennent me voir dans mon comté depuis le moment où j'ai été élu député en 1976; je les ai défendues, qu'elles soient riches ou pauvres, à la condition qu'elles aient des raisons valables de faire valoir leur point de vue, mais j'ai défendu davantage les personnes qui sont en difficulté.

C'est dans ce sens qu'on leur demande aujourd'hui non pas de considérer des colonnes comptables et de considérer les gens comme des fraudeurs, mais plutôt de considérer les gens comme ayant des besoins essentiels, des besoins qu'il faut combler, mais pas par une réforme telle que celle qui nous est proposée. Il faut donner au ministre le temps nécessaire pour refaire son devoir, je devrais dire ses devoirs parce que ce n'est pas la première occasion qu'on lui donne de refaire ses devoirs.

Une chose est certaine, Mme la Présidente: nous ne pouvons pas accepter que, ce soir, les gens en arrivent, par la force du nombre, à nous obliger à voter comme ils le désirent. Dans ce sens, nous allons prendre tous les moyens que nous permet le règlement pour défendre les personnes les plus démunies. On verra à ce moment de quel côté penche le gouvernement. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député de Laviolette. M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci, Mme la Présidente. Je veux assurer à mon bon ami, le député de Laviolette, que ce n'est pas par la force du nombre que le gouvernement veut tenter de vous convaincre que vous faites fausse route. Je dirai à mon ami, le député de Laviolette, comme à mon ami, le député de Bertrand, comme à mon voisin de comté, le député de Shefford, que j'ai écouté attentivement les allocutions qu'ils ont prononcées sur cette motion de report et que je ne peux leur en tenir rigueur, vu que d'autres obligations les amènent à s'affairer à d'autres occupations et qu'en conséquence 3s ne connaissent pas tellement bien le dossier sur lequel ils se sont prononcés. Mes propos seront tout différents envers Mme la députée de Maisonneuve qui, elle, connaît bien le dossier et

je traiterai à la fin de mon exposé de son intervention.

En ce qui concerne les députés de Shefford, de Bertrand et de Laviolette, ]e leur indiquerai que la politique de sécurité du revenu proposée par le gouvernement libéral comprend trois programmes. Un programme Soutien financier qui s'adresse à quelque 100 000 chefs de famille qui sont considérés comme étant incapables de travailler, des personnes qui ne peuvent être compétitives sur le marché du travail. Le gouvernement propose d'ajouter 100 000 000 $ par année, indexés pour ces gens. Pour une personne, cela veut dire, à partir du moment où la loi est adoptée, 1000 $ par année de plus. Ce n'est peut-être pas important pour vous autres, les députés de l'Opposition, qui êtes déconnectés de cette population, 1000 $ par année de plus. Peut-être que vous ne considérez pas que le geste que vous posez ce soir vise à retarder ces paiements pour ces personnes, mais lorsque vous demandez...

Le Vice-Président: À l'ordre!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...au gouvernement de reporter cette réforme de l'aide sociale, vous privez ces gens de ces sommes que nous avons décidé, comme gouvernement, de consacrer aux plus démunis de la société. Mais, je le dis au député de Shefford, au député de Bertrand, au député de Laviolette: Je ne vous en tiens pas rigueur, vous n'étiez pas au courant.

En ce qui concerne le programme APTE, le programme APTE veut offrir à l'ensemble des bénéficiaires de l'aide sociale aptes au travail et disponibles pour le travail des cours de formation, des cours d'insertion sur le marché du travail, des programmes de rattrapage scolaire parce qu'une partie importante de notre clientèle ne peut se trouver d'emploi vu qu'elle a des problèmes de scolarisation quand ce ne sont pas des problèmes d'alphabétisation, tout simplement. Les stages en entreprise; le gouvernement est prêt à investir pour ces gens qui veulent améliorer leur niveau d'employabiiité quelque 450 000 000 $ de plus par année. Quand vous nous demandez de reporter cette décision, vous nous demandez de retarder d'investir dans l'employabilité des bénéficiaires de l'aide sociale. Mais, encore une fois, je ne peux en vouloir au député de Shefford, au député de Bertrand et au député de Laviolette, je ne peux pas les blâmer, ils ne sont pas au courant de la politique proposée par le gouvernement.

Il y a un troisième programme dans l'aide sociale, le programme APPORT: aide aux parents pour leurs revenus de travail. C'est quelque 45 000 000 $ par année d'argent additionnel que le gouvernement destine aux chefs de famille à faible revenu. Plus de la moitié de ces chefs de famille à faible revenu sont des chefs de famille monoparentale, des femmes, et vous voulez priver ces femmes de ces quelque 45 000 000 $ de dollars additionnels par votre motion de report. Je ne peux en vouloir au député de Shefford, je ne peux en vouloir au député de Bertrand, je ne peux en vouloir au député de Laviolette qui ont d'autres occupations et d'autres préoccupations.

Mais je peux en vouloir à Mme la députée de Maisonneuve de ne pas vous avoir informés sur le contenu du livre blanc sur la fiscalité, écrit par votre nouveau chef, M. Jacques Pari-zeau. Je peux en vouloir à Mme la députée de Maisonneuve de ne pas avoir insisté sur les consensus qui se sont établis dans la société québécoise auprès du caucus du Parti québécois, des consensus préalables à cette réforme de l'aide sociale. Mme la députée de Maisonneuve a été la première à dénoncer le système actuel. Mme la députée de Maisonneuve juge souhaitable une réforme de l'aide sociale et je pense qu'il y a sur ce point, parmi tous les intervenants de la société québécoise, un consensus à savoir qu'il est inapproprié de retarder toute réforme de l'aide sociale, qu'il y a consensus à savoir que cette réforme, s'il y a quelque chose, elle est en retard. Elle aurait dû survenir sous l'ancien gouvernement qui n'a pas eu le courage nécessaire pour réformer l'aide sociale.

Le deuxième consensus concerne une saine gestion du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu comme de l'ensemble des autres ministères du Québec. Là-dessus aussi il y a consensus je ne dirais pas entre tous les parlementaires en cette Chambre, mais entre la formation politique du Parti libéral du Québec et le chef du Parti québécois, M. Jacques Parizeau. (22 h 50)

Lorsque nous nous sommes attaqués à une saine gestion du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu - et c'est un peu gênant de vous le souligner ce soir, Mme la Présidente - M. Parizeau, alors qu'il n'était pas en politique active, déclarait aux journaux, aux médias... Je vous le répète, Mme la Présidente, c'est un peu gênant. Les journaux ont titré: "Parizeau félicite Paradis". Je cite un extrait du journal. "Nous aurions dû faire cela. Je ne peux que présenter des félicitations à M. Paradis pour ce qu'il fait. Il est un remarquable gardien de l'intérêt public".

Mme la Présidente, regrettant un peu ce qui s'était passé sous le gouvernement du Parti québécois, M. Parizeau d'ajouter "Les gouvernements sont au courant de ça depuis des années. Comme ministre des Finances, j'ai fait faire un certain nombre de tests à certains endroits au Québec, qui révélaient le même genre de chose". J'arrête là, parce que ce serait trop en ajouter.

Mais, outre ces deux principes de base préliminaires, soit la nécessité d'une réforme et la nécessité d'une saine gestion, les principes mêmes qui sous-tendent l'actuelle réforme de l'aide sociale, l'actuelle politique de sécurité du revenu sont, pour certains d'entre eux, partagés par le chef de l'Opposition officielle.

En ce qui concerne un des principes de

base de la distinction entre les bénéficiaires aptes et ceux considérés comme inaptes, donc, deux catégories de bénéficiaires à l'aide sociale, voici ce que dit M. Jacques Parizeau, dans son livre blanc sur la fiscalité des particuliers. Et, je cite M. Parizeau: "Les orientations de la réforme nous amènent à préconiser la modification de cette armature de base et la mise en place d'un régime pour les personnes à faible revenu aptes au travail qui soit distinct - Mme la députée de Maisonneuve - de celui visant les personnes inaptes au travail. Ainsi, le groupe de personnes de 18 à 64 ans qui ne sont pas aux études serait scindé", dixit M. Parizeau. "Le programme actuel d'aide sociale continuerait de s'appliquer aux personnes inaptes au travail. Par contre, pour ceux qui sont aptes au travail, le nouveau programme de garantie de revenu deviendrait le principal programme destiné à cette clientèle. " Donc, quant à la distinction entre les personnes aptes et inaptes, le chef actuel du Parti québécois est d'accord avec le Parti libéral du Québec sur ce principe fondamental de la réforme de l'aide sociale.

Quant à un autre principe fondamental de la réforme de l'aide sociale également important, l'accès à tous à des mesures de développement de l'employabilité visant la réintégration au marché du travail, que nous dit M. Parizeau dans son livre blanc sur la fiscalité? Que nous dit le chef du Parti québécois sur ce deuxième principe? Je cite M. Parizeau: "Le principe à la base de ces programmes est que les prestations sont augmentées pour tous ceux qui s'engagent dans de tels programmes. Il s'agit donc, au fur et à mesure que se développent les moyens administratifs pour encadrer ces activités, de les étendre a l'ensemble des assistés sociaux. En plus d'assurer ce revenu minimum pour les personnes aptes au travail, un des objectifs du nouveau programme est de favoriser leur réintégration sur le marché du travail. "

Et M. Parizeau de poursuivre dans le livre blanc sur la fiscalité: "à permettre aux bénéficiaires qui ne peuvent réintégrer le marché du travail, parce qu'ils ne réussissent pas à se trouver un emploi, d'augmenter leur niveau de prestation en participant à des activités qui favorisent leur réinsertion sur le marché du travail". Et le livre blanc d'ajouter "Ces activités sont la formation scolaire et professionnelle, la formation en industrie et les activités communautaires". Fin de la citation de M. Parizeau.

Donc, M. Parizeau, chef du Parti québécois, est d'accord pour une distinction entre aptes et inaptes. M. Parizeau, chef du Parti québécois, est d'accord pour offrir à tous les bénéficiaires d'aide sociale aptes et disponibles pour le travail des mesures de relèvement de leur employabilité.

Quant au troisième principe qui sous-tend la réforme de l'aide sociale, vous comprendrez son importance, étant donné que le Parti québécois avait choisi, à l'époque où il était au gouvernement, de geler le salaire minimum au même moment où il indexait les prestations d'aide sociale, c'est-à-dire de désinciter les gens au travail M Parizeau, à la suite d'une longue réflexion, en arrive à la conclusion que l'incitation au travail se devrait d'être un des principes de l'aide sociale

Dans le livre blanc sur la fiscalité - j'inviteMme la députée de Maisonneuve à le consulter et les autres députés qui ont d'autres préoccupations à le lire, la citation est tirée de la page 224 - M Parizeau quant à l'incitation au travail "Le taux de rémunération serait fixé de façon à ce que la rémunération d'un bénéficiaire qui participe a ces programmes soit inférieure à celle que le secteur privé offre aux plus faibles salariés" À la page 220 du livre blanc, il est mentionné que, "si l'on veut qu'il existe un minimum d'incitation au travail, le nouveau programme de garantie de revenu devrait être conçu de façon qu'il ne confère pas à ces bénéficiaires un niveau de vie supérieur à celui que peuvent obtenir sur le marché privé les travailleurs à faible revenu "

Donc, consensus sur la nécessité d'une réforme, consensus sur une saine gestion consensus sur une division entre aptes et inap tes, consensus quant à offrir des mesures à tous les assistés sociaux aptes et disponibles, consen sus quant à l'incitation au travail

Mme la Présidente, je vais maintenant vous expliquer l'obstruction systématique du Parti québécois dans ce dossier, parce qu après tous ces consensus il y a, quand même, des divisions profondes entre ceux et celles qui siègent en face Comme je l'ai indiqué tantôt, je n'en tiens pas rigueur au député de Shefford, au député de Bertrand et au député de Laviolette qui ont d'autres préoccupations, mais j'en tiens rigueur a Mme la députée de Maisonneuve qui a appuyé à la dernière course au leadership du Parti québécois, M Pierre Marc Johnson, qui était contre la parité de l'aide sociale

Des voix: Ha, ha!

La Vice-Présidente: À l' ordre!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): et qui a appuyé, lors du dernier couronnement du chef, M Jacques Parizeau, qui est également contre la parité a l'aide sociale et qui est en faveur d'exclure de l'aide sociale les jeunes de 18 19 et 20 ans

Des voix: Ha, ha!

La Vice-Présidente: À l'ordre!

M. Jolivet- Je veux vous aider

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la Présidente, le député de Laviolette veut m'aider Je vais le référer, encore une fois, au livre blanc sur la fiscalité parce que, oui, Mme Harel

a appuyé M. Parizeau dans sa course au leadership. Elle devait, donc, connaître parfaitement les positions de M. Parizeau sur ia réforme de l'aide sociale. Quant à la parité, M. Parizeau, à la page 328 de son livre blanc sur la fiscalité, s'exprime comme suit: "Dans la réforme envisagée, cette disparité n'est pas remise en cause, les raisons qui ont amené son instauration étant toujours valables. Ce choix implique que les bénéficiaires de moins de 30 ans doivent assurer eux-mêmes une plus grande partie de leurs besoins essentiels."

C'était la position de M. Parizeau au moment où il a écrit le livre blanc. Mais cette position a évolué et M. Parizeau est devenu encore plus sévère envers la jeunesse québécoise, encore plus discriminatoire, selon la position qu'il livrait au journal Le Soleil, il y a à peine trois mois. Le titre du journal Le Soleil est celui-ci: "La social-démocratie à la Jacques Parizeau". Je cite: "Mais il veut, par contre, exclure les jeunes de 18,19 et 20 ans de l'aide sociale."

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est une exclusion complète de la jeunesse d'un programme de dernier recours. C'est totalement inadmissible et, sur ce point, le Parti libéral du Québec est prêt à faire la guerre au Parti québécois.

Des voix: Bravo! Bravo!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais s'agit-il là du seul point de discordance entre le Parti libéral du Québec et le Parti québécois?

Des voix: Non. Non.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. Il y a ...

La Vice-Présidente: À l'ordre!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...un second point sur lequel il n'y aura jamais d'entente possible entre le Parti libéral du Québec et l'actuel chef du Parti québécois. C'est la question des personnes, chefs de ménage, qui seront admissibles au programme Soutien financier. Dans son livre blanc sur la fiscalité, M. Parizeau, chef du Parti québécois, propose à la page 205 "que le niveau des prestations de ces gens soit maintenu au niveau actuel". Le Parti libéral du Québec propose qu'il soit augmenté de quelque 1000 $ par année, soit un budget additionnel de 100 000 000 $.

Une voix: Bravo, Pierre!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Là-dessus, non plus, nous ne lâcherons pas, malgré l'obstruction systématique du Parti québécois.

Donc, en résumé, vous aurez compris qu'il y a consensus entre les formations politiques sur la nécessité d'une réforme de l'aide sociale, qu'il y a consensus sur une saine gestion du ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Quant aux principes de base qui sous-tendent la réforme qui est devant cette Chambre, vous aurez constaté qu'il y a consensus entre le chef du Parti québécois et la formation politique du Parti libéral du Québec sur les points suivants: division des assistés sociaux entre aptes et inaptes, offre de mesures de rehaussement de l'employabilité à tous les bénéficiaires de l'aide sociale aptes et disponibles pour le travail et incitation au travail. (23 heures)

Vous aurez également compris, Mme la Présidente, qu'il y a une lutte à finir entre l'Opposition officielle et le gouvernement en ce qui concerne la parité, les gens de l'autre côté se refusant d'accorder la parité aux jeunes et souhaitant exclure les 18-19-20 ans de l'aide sociale. Il y aura également guerre à finir entre le Parti libéral et le Parti québécois qui refuse d'accorder son consentement pour hausser les prestations des plus démunis de quelque 1000 $ par année.

Mme la Présidente, on peut, lorsque l'on accepte des fonctions gouvernementales, accepter d'être critiqué. Là-dessus, je vous dirai que le document que nous avons déposé sur la sécurité du revenu en décembre méritait d'être critiqué. La commission parlementaire qui a été tenue pendant plus de cinq semaines, à laquelle a participé une seule députée de l'Opposition - seule, solitaire, cela faisait pitié par bouts - et l'ensemble des députés ministériels, nous a amenés à proposer des modifications et des amendements quant à ce projet de réforme. D'autres discussions nous amèneront peut-être à en proposer d'autres quant aux modalités d'application. Mais, sur plan des principes, toujours, nous avons lutté et, toujours, nous continuerons de lutter.

Je vous dirai que vos critiques, autant positives étaient-elles à l'époque, n'ont plus aujourd'hui leur raison d'être. Je ne vous demande pas de me croire. Je suis le ministre parrain du projet de loi. Je vais quand même vous demander d'écouter ou de relire attentivement les propos tenus par l'un de vos anciens collègues, député d'une circonscription électorale où on retrouvait et on retrouve encore beaucoup d'assistés sociaux, le comté de Saint-Jacques. Je fais référence à l'ancien ministre, M. Claude Charron, qui disait la journée où nous avons apporté les modifications, et je le cite au texte: "Moi, je trouve... J'ai écouté ce que l'Opposition a dit sur ce projet de loi, cela me paraissait comme une Opposition qui n'avait pas, au fond, grand-chose à dire...

Des voix: Ah!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qui critiquait pour critiquer." C'est l'analyse que faisait

un ancien des vôtres, une fois détaché de cette partisanerie politique qui devrait être complètement absente du débat qui nous anime aujourd'hui parce qu'elle touchera et affectera la vie de 10 % de la population des Québécois et des Québécoises.

Mais il y a davantage. Ces blâmes que j'adresse à ma collègue, la députée de Maison-neuve, de ne pas avoir informé ses collègues députés qui ont d'autres préoccupations, vont plus loin et ils sont partagés par d'autres membres qui siègent du côté de l'Opposition. Il n'y a pas tellement longtemps, quelqu'un du côté de l'Opposition jugeait indécent le comportement de Louise Harel. C'était rapporté dans La Voix de l'Est du 8 décembre 1987. Et je vous préviens tout simplement qu'un éditorialiste du la région de Saguenay-Lac-Saint-Jean écrivait - et je vous incite à la prudence, les députés péquistes qui auront à intervenir - la même journée le 8 décembre 1987 - les idées se rencontrent d'une région à l'autre du Québec et je vous inviterais à réfléchir sur le sujet lorsque vous déciderez de suivre votre critique plutôt que votre chef: "Louise Harel mène le PQ au cimetière. " Peut-être auriez-vous avantage à relire le livre blanc sur la fiscalité de M. Parizeau et peut-être auriez-vous avantage à le convaincre de ne pas combattre cet argument de parité pour les jeunes de moins de 30 ans, peut-être auriez-vous avantage à le convaincre de faire preuve d'un peu plus d'équité envers les plus démunis de la société. Si vous réussissez à le convaincre de ces deux arguments, vous voterez contre votre propre motion. Merci, Mme la Présidente.

Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!

Le Vice-Président: II n'y a pas d'autres interventions. Ceci met donc fin au débat. Nous allons maintenant procéder à la mise aux voix de la motion de report présentée par M. le chef de l'Opposition.

Des voix: Vote enregistré!

Le Vice-Président: Donc, un vote enregistré. Qu'on appelle les députés! (23 h 10)

Le Vice-Président: À l'ordre!

Mesdames et messieurs, veuillez prendre place, s'il vous plaît.

Mmes et MM. les députés, s'il vous plaît!

Nous allons maintenant procéder à la mise aux voix de la motion de report présentée par M. le chef de l'Opposition, motion de report visant à reporter de six mois l'adoption du principe du projet de loi 37, Loi sur la sécurité du revenu.

Que ceux et celles qui sont favorables à cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: MM. Chevrette (Joliette), Gendron (Abitibi-Ouest), Perron (Duples- sis), Mme Blackburn (Chicoutimi), MM. Garon (Lévis), Jolivet (Laviolette), Brassard (Lac-Saint-Jean), Desbiens (Dubuc), Godin (Mercier), Paré (Shefford), Boulerice (Saint-Jacques), Claveau (Ungava), Dufour (Jonquière), Parent (Bertrand), Mme Harel (Maisonneuve), M. Rochefort (Gouin).

Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Que ceux et celles qui sont contre la motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: MM. Gratton (Gatineau), Levesque (Bonaventure), Paradis (Brome-Missisquoi), Séguin (Montmorency), Côté (Rivière-du-Loup), Dutil (Beauce-Sud), Mme Robic (Bourassa), MM. Savoie (Abitibi-Est), Vallières (Richmond), Picotte (Maskinongé), Fortier (Outremont), Mme Bégin (Bellechasse), MM. Cu-sano (Viau), Dauphin (Marquette), Philibert (Trois-Rivières), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), MM. Doyon (Louis-Hébert), Middlemiss (Pontiac). Beaudin (Gaspé), Chagnon (Saint-Louis), Lemire (Saint-Maurice), Paradis (Matapédia), Mme Pelchat (Vachon), MM. Polak (Sainte-Anne), Kehoe (Chapleau), Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Bélanger (Laval-des-Rapides), Bélisle (Mille-Îles), Mme Hovington (Matane). MM. Thérien (Rousseau), Tremblay (Iberville), Parent (Sauvé), Gervais (L'Assomption), Trudel (Bourget), Mme Bleau (Groulx), MM. Bradet (Charlevoix), Després (Limoilou), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), MM. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), Forget (Prévost), Gardner (Arthabaska), Gobé (Lafontaine), Hamel (Sherbrooke), Laporte (Sainte-Marie), Dubois (Huntingdon), Leclerc (Taschereau), Joly (Fabre), Khelfa (Richelieu), Lemieux (Vanier), Messier (Saint-Hyacinthe), Poulin (Chauveau), Mme Legault (Deux-Montagnes), MM. Thuringer (Notre-Dame-de-Grâce), Richard (Nicolet), Tremblay (Rimouski), Latulippe (Chambly), Théorêt (Vimont).

Le Vice-Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour: 16

Contre: 57

Abstentions: 0

Le Vice-Président: En conséquence, la motion est donc rejetée.

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Nous allons maintenant poursuivre le débat sur la motion d'adoption du principe du même projet de loi 37. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Sainte-Anne.

Des voix: Bravo!

M. Maximilien Polak

M. Polak: M. le Président, je suis fier

d'intervenir sur le projet de loi sur la sécurité du revenu communément connu sous le nom de la Loi sur l'aide sociale. Savez-vous, M. le Président, j'étais ici cet après-midi et ce soir, et j'ai entendu le chef de l'Opposition - le chef de l'Opposition - qui a dit de nous: Vous êtes des démocrates de fin de semaine. M. le chef de l'Opposition, votre chef, cela, c'est un démocrate de fin de semaine, celui qui a dit: Ne payez pas de l'aide sociale à ceux qui ont 18, 19 et 20 ans. C'est lui qui l'a dit, votre chef, ne l'oubliez jamais, dans votre programme. Savez-vous qui semblent, selon vous, vos démocrates de fin de semaine? Ce sont les députés qui sont membres de la commission des affaires sociales: les députés de Fabre, L'Assomption, Chambly, Sainte-Marie, Taschereau, Deux-Montagnes, Notre-Dame-de-Grâce, Laval-des-Rapides. Ce sont nos membres de la commission et nous sommes derrière notre ministre.

Savez-vous pourquoi? Parce que vous avez tenté de diviser, vous avez dit: Voici, division. Il n'y a pas de division du tout. Nous sommes tous unanimement en faveur du principe de l'aide sociale. Savez-vous pourquoi? Parce que - et je parle avec la connaissance personnelle de mon comté de Sainte-Anne, parce qu'on a le problème de l'aide sociale - on veut briser une fois pour toutes le cercle vicieux de l'aide sociale.

Le ministre a présenté un projet de loi, mais, avant de faire cela, il n'a pas présenté le projet de loi comme cela. Il a présenté un document, M. le Président. Le document s'appelle "Pour une politique de sécurité du revenu". Nous, on était ici parce que souvent on nous accuse, on dit: Les députés, vous êtes en vacances du 25 décembre jusqu'au 15 mars. Ce n'est pas vrai. Nous, on était ici à la commission, on a été ici du 22 février jusqu'au 29 mars, tous les membres. Je dois vous dire une chose: J'admire la députée de Maisonneuve. Elle a été la seule de votre groupe à être là, la seule. Savez-vous, on a eu des groupements qui sont venus devant nous. Nous avons eu 120 organismes qui sont venus témoigner le matin, l'après-midi, le soir. 20 minutes pour présenter le mémoire, 20 minutes au ministre, 20 minutes à l'Opposition. On a écouté. Il y a des groupements qui nous ont accusés: C'est une commission bidon, c'est tout arrangé d'avance, vous savez que le ministre a décidé, il ne nous écoute même pas. Mais, nous, on savait une chose: II écoutait. Il écoutait et il prenait des notes. Il a dit, à la fin: Je suis venu pour consulter et, quand je présenterai mon projet de loi, je vais faire des amendements si besoin est.

M. le Président, pas besoin d'aller dans les détails du projet, parce qu'il y a trois volets dans cette politique. Je me rappelle très bien un volet très important. On appelle cela le projet Soutien financier. Là, les groupements sont venus devant nous, y inclus l'Opposition, et ils n'ont pas parlé de cela. Savez-vous pourquoi? Parce que tout le monde était d'accord avec cela. Nous, on a dit: Ceux qui sont vraiment dans le besoin, on va les traiter mieux, on va les traiter parce qu'ils méritent vraiment une attention toute spéciale. On va les traiter mieux qu'avant. Eux, ils n'ont rien dit. Il y a des groupements qui sont venus devant nous et qui ont critiqué. Ils n'ont jamais parlé de ce programme de soutien financier. Nous, on dit: Nous sommes fiers, unanimement, que le ministre ait présenté, premièrement, le volet qui s'appelle le projet Soutien financier. (23 h 20)

M. le Président, je me rappelle très bien parce que c'était tout de même difficile. Les groupements sont venus devant nous, ils sont venus pour critiquer. C'étaient toujours des groupements communautaires qui sont venus de nos comtés respectifs pour s'exprimer. Je me rappelle qu'à un moment donné, il y a un groupe qui est venu de mon propre comté. Il s'appelle CODAS, l'Organisation d'aide aux assistés sociaux. Ils sont très actifs dans le comté de Sainte-Anne, dans la Petite Bourgogne et à Pointe-Saint-Charles? Après, ils m'ont dit: Maximilien, vous n'avez même pas écouté, vous parliez avec le ministre; nous, nous sommes venus et nous avions 20 minutes. Ils sont venus de Montréal dans un petit autobus que, moi, j'ai financé par exemple. Ils sont venus et ils m'ont dit: Vous n'avez même pas écouté parce que vous avez parlé avec le ministre quand nous présentions notre mémoire. Savez-vous pourquoi je parlais avec le ministre? J'ai dit au ministre: C'est ma "gang", là, c'est mon groupe, donnez-moi, s'il vous plaît, quatre minutes, parce qu'il parlait souvent, lui, le ministre. Il intervenait pendant ses 20 minutes, et il restait deux ou trois minutes pour nous. J'ai dit: M. le ministre, s'il vous plaît, donnez-moi quatre ou cinq minutes pour interroger mon groupe. Ils m'ont critiqué parce que je parlais avec le ministre pour lui demander le droit de les interroger.

Donc, j'ai dit à Mme Martineau, présidente du Front commun des assistés sociaux: S'il vous plaît, tentez donc de rester raisonnable, parce qu'on travaille pour vous et qu'on fait notre possible toujours à l'intérieur d'un cadre. J'ai écrit une lettre à ce groupe le 31 mars et je leur ai dit: Voici donc ce qui est arrivé quand j'étais là. Je dis: Nous, comme députés ministériels, nous avons aussi des inquiétudes sur ce projet de loi concernant, par exemple, le danger du travail au rabais. Parce qu'on a apporté l'argument à un moment donné du "cheap labour", excusez-moi, en français, le travail au rabais, le partage du logement ainsi que la contribution parentale. On avait des inquiétudes là-dessus.

Savez-vous, tout au long des travaux - et, Mme la députée de Maisonneuve, il n'y a pas de dissension parmi nous du tout - on se rencontrait. On était ici au mois de février. On a mangé ensemble. On a parlé ensemble. On a dit au ministre: M. le ministre, on veut vous rencontrer. Il a dit: Vous êtes les bienvenus. Le

plus, le mieux. On l'a rencontré à mi-chemin. Il nous a demandé: Qu'est-ce que vous en pensez? Nous avons dit: M. le ministre, n'écoutez pas toujours vos fonctionnaires, écoutez donc les députés qui représentent des comtés où il y a des assistés sociaux. Nous sommes des gens qui savent un peu ce qui se passe à la base. Nous vous demandons de nous écouter. On l'a vu à mi-chemin. À la fin de nos travaux, on l'a rencontré de nouveau. On a dit: Voici, M. le ministre, ce que nous pensons, voici nos inquiétudes. On parle peut-être par sentiment, par conscience sociale, parce qu'au Parti libéral du Québec, tout de même, nous avons une grande conscience sociale.

C'est pourquoi j'étais pas mal insulté quand, tout à l'heure, le chef de l'Opposition a dit: Vous, vous êtes des démocrates de fin de semaine. S'il vous plaît, ne répétez plus jamais cela. Vous n'avez pas le droit de dire cela. Nous sommes toujours des démocrates parce que nous avons autant de conscience sociale que vous, et peut-être plus. Nous ne jouons jamais à la politique partisane sur le dos de ceux qui sont le plus dans le besoin. Je peux vous l'assurer.

Des voix: C'est cela. Bravo!

M. Polak: On a parié avec le ministre. On lui a fait part de nos inquiétudes. Je ne veux pas dire que c'est nous qui avons influencé le ministre pour changer d'avis et faire des amendements. Pas du tout. Mais je pense qu'on a contribué à influencer le ministre avec ceux qui sont venus devant lui. Il a écouté les gens qui sont venus et il a présenté son projet de loi par la suite, soit le 12 mai. On trouve des amendements dans le projet de loi qui changent pas mal déjà la politique sur la sécurité du revenu. Ils vont pas mal dans le sens de comprendre les inquiétudes qui ont été exprimées.

Par exemple, auparavant, ceux qui étaient dans les neuf premiers mois n'avaient pas le droit de participer au programme APTE et de se reclasser au travail, je me rappelle très bien. Il a changé cela dans son projet de loi. Il a aboli cette catégorie tout de suite. Il a changé tout cela, pas à cause de nos pressions, parce que nous avions parlé de cela, des intervenants ont parlé de cela aussi. Le ministre a dit que cela avait du bon sens et qu'il était prêt à accepter cette recommandation.

Je me rappelle d'un autre amendement que je trouve très important. Dans son projet de politique de sécurité du revenu, il disait qu'un parent d'un enfant de moins de deux ans, auparavant, était considéré comme non disponible. À cause des représentations faites par tous les groupes qui sont venus, non pas à une commission bidon, mais à une commission qui écoute et un ministre qui écoute, on ne trouve plus cela dans son projet de loi. Il a changé cela. Il dit: C'est un parent qui a la charge d'un enfant qui ne fréquente pas l'école, parce qu'il n'a pas atteint l'âge requis. En d'autres termes, au lieu de prendre un parent d'un enfant jusqu'à l'âge de deux ans, il y a maintenant une prolongation pour ceux qui sont d'âge préscolaire.

M. le Président, dans un projet de loi aussi important que celui-ci, je pense qu'il est important de parler aussi de temps en temps en anglais parce que dans mon comté - je me rappelle très bien - avant qu'on ait eu la consultation, nous avons rencontré - et pas seulement moi, les autres députés avec moi aussi à la commission des affaires sociales - individuellement les groupes de nos comtés. Le député de Taschereau, je sais qu'il a rencontré les gens de son comté, ceux qui sont venus le voir. Moi, j'ai rencontré les gens de mon comté, ils sont venus à mon bureau de comté ou je les ai visités. Je me rappelle très bien.

For instance, in the English community, we have in Pointe-Sainte-Charles a group very active in the Saint-Columba House. It is English-speaking and one evening, they asked me: Please explain what your Minister, Mr. Paradis, wants to do because Mme Harel tells us we will all die. And I said: I do not think that it is the intention, I think we explained that it is not the intention. Please listen to us, let us explain what we intend to do. And I went there and I spoke to them. Maybe I did not convince them, but I told them one thing: If you have a good point to make, I will be your interpreter at the commission and before the Minister. And do you know what they told me? They said: We call this sharing lodging, le partage du logement". They said: You are our MNA. How are you going to explain that, when if we have to pay 40 % or 50 % of our welfare check on rental? How can we live? We have to pay 40 % or 50 % just to rent an apartment. So what remains of the check? Not enough to eat. So, then you have problems; we will have problems of health, medical problems, psychological problems. People say: Welfare people, look at them, all they do is smoke cigarettes. You know why they smoke? Maybe because they are stressed, maybe they have a lot of problems and the cigarette is perhaps just an idea to do something, to try and sort of compensate for the misery that they suffer. That is how bad it is.

I said to them: I will take your point there; I agree with you. Because I look at the statistics and I agree. I went to the Minister and we went to the commission. We said: Look, "le partage du logement", there is something wrong there. We agree with the principle. If you have four young men living together in one apartment, sure, there should be a "partage du logement"; there should be a contribution. They have the same lights, the same heating, the same electricity. I understand that. But when two or three people who have to pay 40 % or 50 % of their welfare check on rental, who are trying to be what we call "en français débrouillards" or in English, people who are resourceful, please, we should not kill that initiative. We must make a distinction somewhere

along the line.

The Minister told us: You have to be careful, I have set a certain principle. He told us in the beginning: We were charging for the "partage du logement" 115 $ per month and in this "projet de loi", he reduced it to 85 $. I am not giving up on this point. I will talk to him and say: Look at this again. I agree with you, there are cases where we must employ the "partage du logement", I agree. But, in some cases, you are penalizing people that should not be penalized.

And I was very happy when, last week, he said: "On peut toujours faire quelque chose avec les modalités. " When he said: We agree with the principles, we will not give in on the principles. However, regarding the application, we are open for discussion. That is why in our "équipe", we work this way, we said. Here is a problem we see. And the Opposition should not try to take advantage and say: Look at this: Some of the members of the commission are against the Minister. We are not at all against the Minister. We are in favour of this reform. We are behind it solidly, but we are saying: Sometimes the application is not the way it should be; there should be some changes there.

We are proceeding today, we are talking on the principle of the law. We are talking on the principle and later, maybe in the fall, we are going to study it article by article. And we will talk to the Minister before. I am sure we will invite him during the summer, somewhere, we have some corn roasts where we will meet him and discuss it. And we will try to improve the law. (23 h 30)

Tout ce que je dis, M. le Président, nous, notre attitude a toujours été celle de dire: Nous sommes en arrière de notre ministre parce que nous savons comment il a bien travaillé, comment il a eu le courage de briser ce cercle vicieux de l'aide sociale. C'est grave, cela et c'est difficile à faire. Et nous, nous sommes là pour vraiment le supporter.

En ce qui concerne les modalités, il a déjà ouvert la porte et il nous a dit: Pour les modalités, je suis prêt à vous écouter. Notre tâche n'est pas d'aller plus loin que cela.

M. le Président, en terminant, juste une chose. Nous parlions souvent et les gens qui sont venus témoigner devant la commission nous disaient: Mais qu'est-ce que vous allez faire avec toutes ces choses? Où sont les jobs? "Where are the jobs?" Nous, on avait dit: Savez-vous, il y a des réponses. Savez-vous où les réponses se trouvent? J'ai reçu par exemple dans mon comté un groupe, le ministre le connaît bien, qui s'appelle le Projet économique Pointe-Saint-Charles. Ces gens ont envoyé un projet au ministre. C'est un projet tellement intéressant; c'est un projet de travaux communautaires d'implication d'une corporation de développement économique communautaire locale parce qu'il faut aller dans cette voie. Ils ont envoyé un projet vraiment très intéressant.

Savez-vous ce qui est arrivé? Le ministre a reçu ce projet. Cela est arrivé après parce qu'on parle toujours de "scrap" Paradis. Nous, on ne dit pas "scrap" Paradis, on leur dit: Écoutez Paradis. C'est une grande différence. Savez-vous, il a reçu la lettre et le projet. J'ai reçu une réponse, avec une copie à ce groupe de Pointe-Saint-Charles. Il a dit: Je suis tellement impressionné par ce projet que j'ai donné instruction à mon sous-ministre de communiquer avec ce groupe pour le rencontrer immédiatement pour parler justement de ce projet et de la création d'emplois puisqu'il s'agit de création d'emplois.

Sur le plan local, communautaire, H y a beaucoup à faire. Il y a des gens qui sont prêts à prendre la relève, qui sont prêts à créer des emplois dans les PME. Moi, je me rappelle très bien un cas à Pointe-Saint-Charles où une jeune femme de 27 ou 28 ans, opticienne, n'était pas capable d'obtenir aucun montant d'argent d'aucune instance. C'est le groupe PEP (Projet économique Pointe-Saint-Charles) qui a, avec un peu d'argent, aidé cette femme. Maintenant, elle a ouvert sa boutique. Cela fonctionne. Elle vend des prescriptions de lunettes aux gens et non seulement elle est indépendante, elle a même déjà embauché quelqu'un pour travailler pour elle.

Pour vous donner un petit exemple, je pense que c'est important, c'est un message. Si on croit en quelque chose, on peut réussir. Quand j'étais à la commission devant le ministre, j'étais à côté du ministre. Mon fils travaille dans un bureau d'avocats. J'ai demandé: Est-ce qu'il y a moyen d'embaucher quelqu'un avec un bon d'emploi à un bureau d'avocats? On a vérifié. Il a dit: Oui. On a trouvé une fille - je ne donne pas le nom, je vous jure que c'est une histoire vraie - de Pointe-Saint-Charles qui vient d'une famille bénéficiaire de l'aide sociale en permanence. Elle était là-dessus depuis le début. Elle n'a jamais connu autre chose que l'aide sociale. On l'a fait rentrer comme assistante standardiste, avec un bon d'emploi du gouvernement où le gouvernement paie, je pense, 100 $ par mois, à un bureau de 18 avocats à Montréal, où mon fils se trouve. Elle est là. Savez-vous que c'est merveilleux de voir cela! Cette fille travaille à ce bureau. Elle est standardiste. Elle répond aux appels téléphoniques. Elle fait de la photocopie. Elle apporte le courrier. Elle distribue les messages, etc. Savez-vous ce qui est arrivé? Une des standardistes est partie et elle a pris sa place. Cette fille est déjà là sur une base permanente.

Donc, si tout le monde a la même bonne volonté... Parce que les autres avocats m'ont dit: Maximilien, qu'est-ce que cela donne, une assistée sociale? C'est difficile. La fille n'est peut-être pas habituée. J'ai dit: Donnez-lui donc une chance. Il ne faut pas trop se plaindre que cette fille ne coûtera pas trop cher. Le gouver-

nement paie une partie de son salaire. Vous n'aurez pas à vous plaindre, vous ne paierez pas trop. Et c'est déjà un succès. Si tout le monde faisait la même expérience. Il y a tant de gens de bonne volonté qui veulent. On va combattre ce problème de l'aide sociale, de ceux qui veulent travailler et qui cherchent des emplois.

M. le Président, je suis fier d'endosser ce projet. Je suis fier d'être membre de cette commission. Même après le 15 mars, quand je n'étais plus membre de la commission j'ai demandé de rester là parce que j'ai trouvé des vrais amis. J'ai trouvé des députés de comtés différents. Par exemple, le député de Fabre, H n'a pas les mêmes problèmes que moi. Le député de Chambly, il n'a pas comme moi d'assistés sociaux dans son comté, mais il y a une chose que nous avons en commun, nous avons une conscience sociale très développée et très grande. Nous sommes là pour justement tenter de faire naviguer ce projet dans la bonne direction. Nous savons que le ministre a eu le courage d'attaquer le problème; on va trouver une solution. Et quand il parle de changer les modalités, on va tenter encore de l'influencer pour qu'il en change, et vous, de l'Opposition, ne parlez jamais pour dire: il y a dissension, il y a six, sept ou huit députés contre. Pas du tout. Nous sommes tous avec notre ministre. Nous sommes tous solidaires avec lui. Je dis officiellement aux regroupements des assistés sociaux: S'il vous plaît, vous êtes mieux de vous fier sur nous, sur ceux qui sont là pour batailler pour vous, pour tenter d'améliorer le projet que sur ceux de l'Opposition qui ne sont là que pour critiquer, pour tenter de détruire et qui n'a aucun apport positif à faire.

Vous, l'Opposition, à ce jour, vous n'avez rien fait. C'est malheureux. Je pensais, que vous étiez plus forts que cela. Alors que nous, quand j'étais dans l'Opposition, on a déjà fait de la critique, mais on a toujours fait une critique positive. On a dit: On va tenter...

Des voix:...

M. Polak: Oui, j'ai critiqué vos projets. Quand c'était quelque chose de bon, on a dit oui. On a tenté d'améliorer, on n'a jamais fait de critique négative, comme vous. Je vous dis une chose: vous êtes mieux de nous joindre dans cette fantastique entreprise de tenter de faire sortir les assistés sociaux du cercle vicieux de l'aide sociale pour les réembarquer sur le chemin du bonheur et du travail. Merci beaucoup.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président: Je voudrais simplement rappeler, à ce moment-ci, avant la prochaine intervention, qu'un article de notre règlement stipule - l'article 35, paragraphe 4 - que: "Le député qui a la parole ne peut s'adresser directement à un autre député." Donc, je prierais l'ensemble des députés de bien respecter cette règle. Je vais donc céder la parole à M. le député de Dupiessis.

M. Denis Perron

M. Perron: Merci, M. le Président. Dès le début de mon exposé, j'aimerais, bien sûr, vous dire combien je regrette l'intervention du ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, en particulier, les propos qu'il a tenus à l'endroit de ma collègue de Maisonneuve. Je considère les propos du ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu comme étant une bassesse, ici même, à cette Assemblée nationale.

Je considère que le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu a trituré les informations qu'il a données à cette Chambre, face à certains documents et face à certains propos qui ont été tenus par ma collègue de Maisonneuve et par d'autres personnes qui sont actuellement à l'extérieur de cette Chambre. Je voudrais vous dire que n'eut été, justement, de la députée de Maisonneuve, en aucun temps, nous n'aurions eu les informations que nous avons actuellement pour nous battre d'arrache-pied contre l'attitude gouvernementale, pour nous battre d'arrache-pied pour les personnes qui sont touchées actuellement par ce projet de loi 37.

Nous n'accepterons pas que, dans cette Chambre, on traite ces gens qui sont actuellement sur l'aide sociale comme a peu près n'importe quoi dans notre société, comme des gens qui sont bas dans la société, parce qu'il ne faut pas oublier que ces personnes font partie de la société québécoise, comme beaucoup d'autres personnes en font partie aussi. N'eut été de la députée de Maisonneuve, nous n'aurions sûrement pas fait certaines découvertes qu'elle a fartes elle-même avec son équipe, qu'elle a fartes avec d'autres députés de l'Opposition, qu'elle a faites avec des membres du Parti québécois, pour en arriver à ce que nous nous opposions systématiquement à ce projet de loi 37, qui ne règle rien dans notre société québécoise et, en particulier, qui ne règle rien pour les personnes qui sont actuellement sur l'aide sociale.

Lorsque j'entendais le ministre du Revenu venir nous dire, ici, dans cette Chambre, et venir dire à la télévision que les actions de l'Opposition empêchaient actuellement le gouvernement de dépenser, voyons donc, M. le Président! Rien n'empêche ce gouvernement de dépenser dans les programmes qui sont existants. Mais ce n'est pas la faute de l'Opposition si le gouvernement n'avait pas assez d'argent dans ses programmes. Ce n'est pas la faute de l'Opposition si le ministre actuel, grâce au ministre responsable du Conseil du trésor, à son président du Conseil du trésor, ne fait pas les efforts nécessaires pour investir les fonds nécessaires pour aider les personnes démunies de notre société.

Là, on vient nous présenter un projet de loi

qui, en somme, vient assommer littéralement l'ensemble d'une société qui est mal prise. On parie de 10 % ou 12 %. Cela touche des hommes, des femmes et aussi des enfants. Donc, cela touche des familles dans l'ensemble. Je n'accepterai pas qu'en cette Chambre, on triture des informations comme le font actuellement les libéraux et, en particulier, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Je n'accepterai pas cela. (23 h 40)

Je me rappelle très -bien, lorsque le ministre était de ce côté-ci de la Chambre, à combien de reprises, il est venu lui-même dire... J'aimerais bien que certains libéraux lisent ses discours, lorsqu'on intervenait en tant que gouvernement, sur la politique de l'aide sociale, sur les augmentations que nous donnions dans le temps, non pas à toutes les années comme l'a fait le gouvernement libéral, mais comme on le faisait à tous les trois mois, sur une base trimestrielle, où on aidait les gens à gagner un peu plus, à avoir un peu plus de revenus pour faire vivre leur famille d'une façon plus honorable. Bien sûr que ce n'était pas le Pérou; bien sûr que ce n'était pas cela. Mais, par contre, on faisait des efforts. Lorsque le gouvernement libéral est arrivé au pouvoir, la première chose qu'il a faite a été d'abolir cette politique que nous avions d'indexer les prestations d'aide sociale tous les trois mois pour le faire une fois par année. Cela économise un montant global de l'ordre de 35 000 000 $ à 40 000 000 $ par année à ce gouvernement libéral. C'est de cette façon qu'il agit.

Après cela, le gouvernement vient se targuer d'être un gouvernement responsable. Ce que je peux vous dire, M. le Président, c'est que ce même gouvernement ne s'est pas gêné pour donner, détaxer, "désimposer" les personnes à hauts revenus pour leur permettre d'avoir un peu plus de services personnels pendant que, aujourd'hui, au moment où l'on se parle, on est en train de littéralement assommer - comme je le mentionnais tout à l'heure - les personnes qui sont les plus mal prises dans notre société.

Quant à moi, les contenus qui sont amenés dans ce projet de loi, c'est du néant. Cela veut dire que c'est rien. Je ne vois pas beaucoup de libéraux, mis à part le député de Sainte-Anne qui a parlé pour à peu près rien dire. Qu'on relise son discours. Il a parlé pour à peu près rien dire, sinon dire qu'il était d'accord avec le ministre, qu'il était derrière le ministre, etc. Il l'a répété quatre ou cinq fois. Ce que je peux dire, M. le Président, c'est qu'en aucun temps je ne serai derrière le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu dans ce projet de loi 37 qui, actuellement, cause des préjudices énormes à des hommes, à des femmes et à des enfants de notre société québécoise.

Tout à l'heure, je regardais la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration, lorsque mon collègue de Shefford pariait, qui riait à gorge déployée de ce qu'il disait. J'in- viterais la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration à se lever debout en Chambre et à nous dire exactement ce qu'elle pense du projet de loi 37. Je l'inviterais à nous dire ce qu'elle pense de la façon dont elle a traité les Turcs lorsqu'ils étaient au Québec. Je l'inviterais à informer les membres de cette Chambre et à leur dire combien a coûté son voyage outre-mer. Actuellement, on parle de 20 000 $, 25 000 $ ou 30 000 $. J'ai hâte de savoir, lors de l'étude des crédits et des engagements financiers, combien la ministre a dépensé pour aller se pavaner outremer - je peux vous dire cela - pendant que nos bénéficiaires de l'aide sociale sont en train de se faire littéralement organisés par son propre gouvernement.

Mme Robic:...

M. Perron: M. le Président, Mme la ministre vient de me dire que j'étais malade. Je pense qu'entre les deux elle est bien plus malade que moi je peux l'être. Qu'elle fasse son travail comme ministre, qu'elle protège ce qu'elle doit protéger en tant que ministre. Si elle a le courage, si elle a le culot de se lever en cette Chambre pour parler en faveur du projet de loi 37, qu'elle le fasse. Mais, lorsqu'on parle, qu'elle nous laisse tranquilles.

M. le Président, je voudrais vous lire ici un des engagements. Hier, le ministre nous pariait de l'engagement du Parti libéral. Il ne nous a pas donné la vraie lecture de l'engagement du Parti libéral en 1985, lors de la période électorale, parce qu'il avait bel et bien prêché, il avait bel et bien amené des gens à voter pour les libéraux en leur promettant la parité de l'aide sociale. Mais ce que nous avons dans le projet de loi 37, ce n'est pas la parité, ce n'est pas la demi-parité non plus. C'est à peu près le néant. On prend d'une main, on donne de l'autre. Pendant tout ce temps-là, le gouvernement en retire même des bénéfices. Il va chercher des dizaines de millions de dollars dans les poches des assistés sociaux pour permettre d'avoir une politique qu'il dit cohérente et qui n'est pas cohérente du tout. C'est carrément de l'injustice, c'est carrément de l'insécurité sociale qu'il est en train d'amener actuellement par ce projet de loi. C'est aussi de l'injustice face à l'ensemble des familles québécoises.

M. le Président, on a vu de quelle façon le ministre avait traité les personnes qui sont venues présenter des mémoires lors de la commission parlementaire sur l'avant-projet de loi. Toutes les personnes, en grande majorité, ont contesté le projet de loi. Pour moi, pour les membres de l'Opposition et pour la majorité des personnes qui se sont présentées en commission parlementaire, ce projet de loi est actuellement le plus beau torchon ambulant que nous puissions avoir comme législation.

Je pense que ce n'est pas la façon dont on peut aider nos personnes démunies. Qu'on prenne

de l'argent qui est dû à ces personnes parce qu'elles n'ont pas de travail, qu'on prenne de l'argent de ces personnes et qu'on le transfère par la bande à des riches, je ne suis pas d'accord avec ça du tout. Tout le monde sait très bien qu'ici, en cette Assemblée nationale, lorsque, au plan de la fiscalité, on a réduit l'imposition des hauts salariés, la majorité des députés libéraux étaient contents parce que, justement, cela les touchait aussi. Tous les députés de cette Assemblée, incluant les députés de l'Opposition - chose que nous avons dénoncée, d'ailleurs - ont profité de la situation. Mais ce n'est pas comme cela qu'on va régler nos problèmes de société. Ce n'est pas comme cela qu'on va aider notre petit monde dans la vie. Ce n'est pas de cette façon. Ce n'est pas en leur sacrant des coups de masse sur la tête qu'on va régler leurs problèmes.

Lorsque le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu vient nous parler de ses programmes de création d'emplois, bien sûr que le ministre s'est servi des programmes que nous avions antérieurement, mais ces programmes donnent quoi sous les libéraux, aujourd'hui? Que donnent-ils? Au cours des deux dernières années, 17 % des personnes s'en sont servies, et en particulier au cours de 1987. Et il vient nous dire qu'il faut continuer dans le même sens pour aider les personnes qui sont sur l'aide sociale, les personnes qui sont aptes au travail, pour permettre à des inaptes d'avoir plus de revenus.

Lorsqu'on regarde l'ensemble des décisions gouvernementales qui vont suivre, par réglementation ou autres, lorsque ce projet de loi sera adopté à l'Assemblée nationale, que restera-t-il aux personnes qui sont actuellement sur l'aide sociale? Il ne restera pratiquement rien. Par contre, les personnes bien nanties de notre société vont être très encouragées à continuer à bénéficier de tout ce que les libéraux veulent bien leur donner. Rien ne dit que cela ne les aide même pas au cours de leur campagne de financement annuelle. Ce n'est pas pour rien qu'ils amassent des 5 000 000 $, 6 000 000 $, 7 000 000 $ par année. Ce n'est pas pour rien.

Des voix: Elle est déjà faite.

M. Perron: Je sais qu'elle est déjà faite. Je demanderais au whip du gouvernement, s'il veut s'adresser à cette Chambre, qu'il se lève de son siège et qu'il s'adresse à cette Chambre. Qu'il nous parle aussi du projet de loi 37. Comment le voit-il, lui? De quelle façon va-t-il se répercuter sur les assistés sociaux et les assistées sociales de son comté? Qu'il nous en parle au lieu de placoter comme il le fait avec un autre de ses collègues. Qu'il se lève et qu'il nous dise ce qu'il en pense au lieu de placoter ou de dire à peu près n'importe quoi en cette Chambre.

Dans l'ensemble de ce projet de loi que nous avons devant nous, il est sûr que... Pour l'information des libéraux, à peine un mois et demi après la fin des travaux de la commission parlementaire, le ministre rendait publics, le mercredi 11 mai, les amendements à son projet de réforme et déposait son projet de loi sur la sécurité du revenu. Le projet de loi comporte certaines améliorations, bien sûr, par rapport à l'avant-projet de loi. Cependant, l'analyse du projet de loi nous révèle qu'il y a encore de nombreux aspects qui demeurent totalement inacceptables. Premièrement, la baisse des prestations par rapport à la situation actuelle pour la catégorie des disponibles, les neuf premiers mois et les admissibles. Que l'on comprenne bien, c'est-à-dire pour ceux et celles qui voudront participer aux mesures, mais qui seront dans l'impossibilité de le faire en raison de l'incapacité du gouvernement de les offrir réellement. Deuxièmement, la coupure pour partage de logement qui demeure, bien qu'elle soit diminuée de 115 $ à 85 $. Troisièmement, la contribution parentale. De plus, de nombreux autres aspects demeurent flous, tels les montants de gains de travail permis, par exemple, les besoins spéciaux qui seront reconnus, les montants d'avoirs liquides et de biens permis.

Je continue, M. le Président: Après une lecture attentive du projet de loi, on constate également que le ministre a profité de son projet de loi pour apporter des modifications pour le moins extrêmement inquiétantes. Que l'on parle, par exemple, de la distinction entre apte et inapte. On présume clairement, contrairement au projet de réforme initial, de l'aptitude de tous les bénéficiaires. Ceux-ci devront démontrer leur inaptitude sur la base d'une définition plus sévère. Celle-ci est maintenant liée à la possibilité ou non d'occuper un emploi. Mise en place d'un comité de professionnels dont un médecin, tous désignés par le ministre, pour entendre les demandes de révision liées à l'aptitude. De plus, la Loi sur la Commission des affaires sociales est modifiée pour permettre que l'assesseur soit un médecin dans le cas d'un appel relatif à l'aptitude d'une personne à occuper un emploi. De plus, la possibilité pour le ministre d'exiger en tout temps un nouvel examen médical. (23 h 50)

Pour qui se prend-il, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu? Se prend-il pour un médecin? Se prend-il pour une personne qui a une ligne directe avec le Saint-Esprit? Pour qui se prend-il? Il se prend pour un autre, tout simplement. Il se réserve des pouvoirs par la loi et par la réglementation pour faire, après cela, à peu près n'importe quoi pour assommer les gens encore plus qu'il ne les assomme actuellement et surtout les personnes qui sont démunies, les personnes qui, dans notre société, y ont déjà assez goûté.

Je pense, M. le Président, que, par exemple, sur les pensions alimentaires, par l'élargissement de ses pouvoirs discrétionnaires au niveau de la fixation, de la modification ou de l'annulation de la pension alimentaire, le ministre se donne

notamment le droit d'intervenir sans l'autorisation du bénéficiaire et se donne même le droit d'imposer une amende si le bénéficiaire obtient une entente de pension alimentaire sans avoir obtenu une autorisation préalable du ministre.

Comme je le disais tout à l'heure, M. le Président, pour qui se prend-il, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu?

Une voix: Pour lui-même!

M. Perron: Oui, il se prend pour lui-même, il se prend pour un autre. Il se prend pour un autre et cela vient d'un libéral. Concernant les dettes et les remboursements, le ministre se donne la possibilité de couper les prestations du programme APPORT et de réclamer en vertu d'autres lois des sommes d'argent pour rembourser une dette à l'aide sociale.

M. le Président, le pouvoir de tutelle au niveau de l'administration du chèque. En vertu de l'article 27, le ministre s'arroge le droit, compte tenu de circonstances particulières ou du comportement antérieur du bénéficiaire dans l'administration de ses biens, de payer directement à un créancier les coûts de logement, d'électricité ou de chauffage et d'en remettre l'excédent aux bénéficiaires. Voilà les principaux faits de ce que nous apporte ce projet de loi 37, M. le Président.

Je peux vous assurer qu'en ce qui me concerne je ne suis pas d'accord du tout avec la façon dont le gouvernement traite ce dossier des assistés sociaux et la façon dont le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu traite ces personnes.

Lorsqu'on dit que la loi déposée préconise un recul important, essentiellement par une baisse de prestations que reçoivent actuellement les personnes assistées sociales, donc, un appauvrissement pour la grande majorité d'entre elles... Encore une fois, le ministre a fait la sourde oreille aux groupes qui se sont présentés en commission parlementaire, car 80 % de ces groupes ont dénoncé les fondements mêmes de la réforme du ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, donc, du gouvernement libéral.

Trois grands principes sont mis de l'avant dans le projet de loi: l'équité et la parité pour les moins de 30 ans ainsi que l'incitation au travail. Comment ne pas être d'accord avec ces principes? Bien sûr que nous sommes d'accord avec ces principes! Bien sûr que l'Opposition est d'accord avec ces principes! Bien sûr que le Parti québécois est d'accord avec ces principes! Mais, cependant, les modalités d'application contenues dans le projet de loi ne permettent en aucune façon d'atteindre ces grands principes qui sont énoncés.

On constate de plus que la parité pour les moins de 30 ans exigée par l'ensemble de la société et faisant partie d'une promesse électorale du Parti libéral demeurera encore un cheval de bataille très important. Le projet de loi n'accorde pas cette fameuse parité promise par les libéraux au cours de la campagne électorale de 1985. On pourrait aller jusqu'à dire, M. le Président, que certains des libéraux ont été élus dans cette Chambre par fausse représentation, parce que la grande majorité des promesses qui ont été fartes au cours de la campagne électorale de 1985 n'ont pas été tenues. Je me demande vraiment, M. le Président, pourquoi la population du Québec n'en tient pas compte actuellement. La population du Québec devrait se rappeler toutes les promesses qui ont été faites par ce gouvernement libéral, devrait se rappeler combien ce gouvernement devait être transparent, combien ce gouvernement devait régler l'ensemble des problèmes de la société québécoise. Mais, depuis qu'il est au pouvoir, ce gouvernement ne s'occupe que des personnes bien nanties de notre société, il oublie littéralement toutes les personnes qui sont dans le besoin.

On a seulement à regarder, M. le Président, la façon dont le président du Conseil du trésor et certains ministres responsables ou supposément responsables de ce gouvernement traitent actuellement des organismes de bénévoles dans tout le Québec et aussi toutes les personnes qui sont touchées dans les 80 maisons de femmes qu'on est en train de couper dans tout le Québec, les maisons d'hébergement. Que pense-t-on aussi des jeunes de qui vous avez été chercher des votes lors des dernières élections en 1985? Quelles promesses aviez-vous faites à ces jeunes? Quelles sont les promesses que vous avez tenues? Aucune! Aucune promesse n'a été tenue face aux jeunes. Aujourd'hui, le gouvernement vient se targuer, avec le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu en tête, de régler l'ensemble des problèmes des Québécois et des Québécoises.

Moi, je regrette, M. le Président, mais ce que je peux vous dire, c'est qu'en aucun temps je ne serai d'accord avec ce gouvernement lorsqu'il viendra, sort par loi, soit par réglementation, soit par des programmes quelconques, soit par des coupures quelconques nuire aux personnes les plus démunies dans notre société ou, encore, nuire à la majorité des organismes qui aident ces mêmes personnes démunies dans notre société. Je voudrais mettre en garde le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, son gouvernement et l'ensemble des ministériels de faire bien attention à la façon dont on va adopter ce projet de loi, à la façon dont, par la suite, on va traiter les assistés sociaux parce que c'est à ce moment peut-être que ces gens vont comprendre combien ils n'ont pas été corrects pour la société québécoise, pour au moins une partie de la société québécoise qui est extrêmement démunie.

M. le Président, j'aurais beaucoup de choses encore à dire, mais je vais m'arrêter ici puisque mon temps est écoulé. En conclusion, je ferai tous les efforts nécessaires pour empêcher que

ce projet de loi soit adopté de la façon qu'il est actuellement libellé. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Est-ce qu'il y a un autre intervenant? Alors, je vais maintenant reconnaître M. le député de Saint-Jacques.

M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, j'ai vu bien des choses dans cette Chambre depuis mon élection, le 2 décembre 1985. J'ai commencé par voir notre langue française bafouée. J'ai vu, après cela, nos droits de parlementaires également bafoués. Là, j'ai devant moi une loi mal faite, une loi pénalisante, une loi sans générosité, une toi qui confirme le vieil adage: Au plus fort la poche. Donc, le Parti libéral, les rouges, le parti des forts écrase inévitablement les petits, les plus faibles, les plus démunis.

J'écoutais le député de Sainte-Anne, personnage coloré qui se disait tellement à l'écoute de ces personnes dans sa circonscription, qu'il les comprenait bien, qu'il les avait amenées à Québec. Les citoyens de Pointe-Saint-Charles dans sa circonscription connaissent tellement bien son degré d'écoute qu'ils ont fait une pétition de 796 noms, je crois. Cette pétition, ils n'ont pas demandé à leur député, le député de Sainte-Anne actuel, de la déposer, cela a été le député de Saint-Jacques, un député de l'Opposition qui l'a déposée. Quelle belle écoute de la part de ce député! Je voyais le député de Saint-Louis - dans quel monde vit-il et quel comté représente-t-il où il y a des îlots de pauvreté - je voyais le député de Saint-Louis adjoint au président du Conseil du trésor applaudir d'une façon délirante parce qu'ils avaient remporté la motion de report, M. le Président.

Si les députés du centre-est et du centre-sud, si quelques-uns d'entre eux ont murmuré certaines réserves au sujet de la loi présentée par le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, je peux vous dire que, nous, les députés du Parti québécois de Montréal, on ne va pas murmurer notre désaccord envers cette loi, on va le clamer très fort: C'est non et il n'en est pas question de cette réforme. Si, pour le député de Sainte-Marie, ce n'est pas important la rue Poupart et les gens qui y habitent, comme la rue Fullum, la rue Delorimier, la rue Mont-Royal et la rue Ontario, eh bien, que les gens de ce coin se disent que bientôt ils auront une voix forte pour les représenter. Je connais très bien ce coin de pays-là et je sais ce que cela peut représenter que d'être sur l'assistance sociale. J'en vois à mon bureau qui viennent et je n'en ai pas encore vu un qui est venu dans mon bureau, qui s'est assis et qui s'est pété les bretelles et qui m'a dit: Je suis assisté social, je suis donc fier, je suis donc bien! Je n'en ai pas encore vu un. Ceux qui auraient encore ces préjugés, qui ont été alimentés par le terrorisme psychologique des boubous macoutes, n'en croyez rien. Venez passer une journée dans mon bureau de circonscription et vous allez voir qu'il n'y a personne qui est heureux d'être dans un état de dépendance comme celui-là, quand on sait tout ce que cela peut causer au point de vue psychologique d'être dans un tel état, M. le Président, (minuit)

Je suis content d'avoir entendu le discours de M. le ministre de la Santé et des Services sociaux qui se plaisait à citer le président du Parti québécois. Vous savez, je n'ai pas le droit de dire que le ministre a menti en Chambre. Je n'ai pas le droit. Je dirai donc, M. le Président, que toute la vérité n'a pas été dite. Le ministre fait bien les lectures qu'il veut faire. Il lit bien ce qu'il veut. Le Devoir de mardi, le 26 avril 1988, titre "Parizeau démolit la réforme de Paradis". Ah, regardez-donc cela. M. Paradis perd des appuis, semble-t-il! "Seules des personnes "tombées sur le crâne" retourneront travailler dans le cadre que créera la réforme de l'aide sociale du gouvernement libéral" a affirmé hier le chef du Parti québécois, M. Jacques Parizeau. "Cette réforme est "viciée à la base". Elle taxe les bénéficiaires de l'aide sociale plus qu'aucun millionnaire et doit être jetée à la poubelle" a ajouté l'ex-ministre des Finances du gouvernement péquiste qui avait mis en place les programmes d'employabilité, aujourd'hui au coeur du projet de la réforme. Ah, voyez-vous!

D'ailleurs, cette rencontre se faisait avec des bénéficiaires de l'aide sociale et avec ma collègue, la députée de Maisonneuve, que le ministre essayait de discréditer, parce que le vieil adage est toujours vrai, M. le Président: Quand le message blesse, essaie donc de tuer le messager. C'est bien ce qu'il a tenté de faire. Alors, quand il s'agira, pour le ministre libéral d'en face, de travestir les propos que tient le président de ma formation politique, je l'encourage à tout lire ce qu'il a dit ou ce qu'il a écrit et de ne pas dire de faussetés un peu comme l'a fait l'affable député de Sainte-Anne en disant qu'il écoutait tout le monde quand - je vous le répète - on sait fort bien que les 796 bénéficiaires de Pointe-Saint-Charles ont confié plutôt à un député de l'Opposition, celui de Saint-Jacques, de déposer une pétition contre ce projet de réforme. Ce n'est pas à lui qu'iis l'ont remis.

Mon collègue, le député de Duplessis, vous a parlé du partage du logement et c'est sur ce volet du projet de loi 37 que j'aimerais vous parler un peu plus à fond, le logement. Premièrement, je pense et j'espère que, de l'autre côté, on se rend compte de l'importance du logement, ne serait-ce que pour les conditions climatiques. Remarquez que je n'en suis pas certain, puisqu'ils ont aboli le dernier Programme d'accès à la propriété. Là, il en ont remis un, mais plus ou moins bon, en définitive, comparativement avec ce que nous, on avait fait.

En ce qui concerne le logement social, on avait promis 15 000 000 $ uniquement pour la

circonscription de Saint-Jacques. On n'a même pas encore vu un cent de cela. Alors, le logement, c'est important. Du logement social à Montréal, depuis le 2 décembre 1985, il ne s'en construit plus. Les logements, qu'on a inaugurés ces derniers mois, étaient des logements planifiés à l'époque du gouvernement du Parti québécois. Il n'y a pas un logement neuf qui a été inauguré dans les circonscriptions du centre-sud de Montréal qui date du régime libéral.

Le partage du logement qui est pénalisé dans la réforme présentée par le ministre, dans son projet de loi 37, c'est une mesure qui est totalement inéquitable. Il veut adopter un principe d'économie d'échelle qui en coûte moins à deux individus qui partagent le même logement qu'à deux individus qui habitent chacun dans son logement. La mesure des économies d'échelle, c'est seulement le logement et les communications, c'est-à-dire le téléphone. Regardez la logique mathématique de cela. Pour une personne, le logement, c'est 277 $ - ce sont ses calculs - pour deux personnes, 338 $, chacune, 169 $; communications, 17 $, le téléphone; deux personnes, 18 $ chacune, 9 $. Total: Pour une personne, 294 $, chacune 178 $.

On peut donc conclure que deux personnes qui partagent le même logement consacrent 178 $ chacune au logement et aux communications, c'est-à-dire au téléphone. Si ces personnes habitaient seules, elles consacreraient 294 $ pour les mêmes postes budgétaires.

Sur quelle planète vivent ces gens, M. le Président? Dans quelle banlieue cossue habitent-ils? Essayez de me trouver un logement convenable, ne serait-ce que pour une seule personne, à 294 $ par mois. On est en train de faire adopter un projet de loi où on va dire: Si vous cherchez un mieux-être, c'est-à-dire à ne pas habiter un taudis, eh bien, vous allez être pénalisés parce que vous êtes des assistés sociaux. Vous autres, les assistés sociaux, vivez dans un taudis, vivez dans les maisons de chambres délabrées, comme il y en avait une sur la rue Ontario et où il y a eu quatre morts, vivez dans les maisons de chambres délabrées comme il y en avait une sur la rue Saint-Hubert près de Viger, qui a brûlé au mois d'avril et où il y a eu deux morts! Ce n'est pas grave, vous autres, les assistés sociaux. Partager un logement, essayer d'avoir quelque chose d'un peu plus convenable, que votre détresse soit moins grande, ben, voyons donc! c'est du vol. C'est de l'exploitation. Vous êtes des assistés sociaux. Vous êtes des moins que rien. Habitez des taudis. Vivotez. Puis jamais le moindre petit plaisir. Vous êtes des assistés sociaux. Vous êtes les parias de la terre. Vous êtes les damnés.

C'est ce qu'on dit dans ce projet de loi, M. le Président. C'est ce qu'il y a là-dedans. C'est ça, le plus honteux dans le projet de loi. C'est cette mentalité qu'on veut imprégner à nos compatriotes, que ceux qui sont dans la détresse y sont par choix, qu'ils y sont par goût. Je vous le répète. Je n'en ai encore jamais rencontré. Ah! il peut peut-être y en avoir un ou deux. Il y a toujours des exceptions dans la vie. Mais, en tout cas, tous ceux que j'ai rencontrés... Et Dieu seul sait que j'en ai rencontré parce que, malheureusement, il en reste encore un bon nombre dans ma circonscription. On était bien parti pour les aider, notamment au plan du logement, que vous avez complètement "scrappé". Il faut employer un mauvais mot français pour que vous le compreniez bien.

Eh bien, tous ces gens vont se retrouver, en 1990, avec 120 $ par mois, parce que, pour employer le mot de M. le député de Sainte-Anne, ils sont "débrouillards". Pas débrouillards dans le sens de faussaires, mais ils ont cru qu'un partage des coûts pouvait les aider à améliorer un peu leur sort, en sachant aussi qu'un partage de logement, cela a un contrecoup, qui est celui d'avoir un peu moins d'intimité et des choses comme celle-là. Ils ne le font pas par unique plaisir. Ils le font par besoin d'abord, par une certaine solidarité, pour briser peut-être aussi la solitude dans laquelle le sytème les confond, les enferme, mais de là à dire qu'ils sont fraudeurs, que c'est du vol et qu'il va falloir les couper parce que cela n'a pas d'allure qu'ils réussissent en se mettant à deux à économiser à peu près 20 $, 30 $ ou 40 $, quand justement, mon collègue y a fait allusion, on n'a pas posé de question pour savoir combien cela a coûté à la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration pour faire son "caravane-sérail" de trois semaines en Afrique, en Asie, en Amérique et où elle veut. Mais si, par malheur, eux autres, ils faisaient une maigre économie de 40 $ ou 50 $ sur le partage d'un logement, ce serait épouvantable! On va économiser là-dessus peut-être quelques millions, oui, mais les bénéficiaires du programme APTE seront toujours soumis à la réduction de 120 $ en 1990 s'ils partagent leur logement avec d'autres personnes, apparentées ou non. (0 h 10)

Je reviens aux données mathématiques. Savez-vous combien cela représente de ménages? 121 723 ménages seront susceptibles d'être soumis en 1990 à la réduction pour le partage du logement. On va pénaliser 121 773 ménages d'avoir essayé de s'en tirer un peu mieux, d'avoir des conditions non pas maximales, M. le Président, mais de se rapprocher des conditions strictement minimales, du moins pire, comme on dit en langage coutumier. Les résultats de cela - il faut voir un autre chiffre - parmi les ménages soumis au partage du logement, 84,8 % sont des personnes seules. Est-ce qu'on se rend compte? De l'autre côté, je vois mon collègue, le député de Sainte-Marie. Est-ce qu'il se rend compte de cela, que, parmi les ménages qui seront soumis au partage du logement, 84,8 % sont des personnes seules?

Une personne seule, je vous le répète, je l'ai dit tantôt, M. le Président, est-elle encore

capable de se payer, à moins que ce ne soit un taudis, un logement convenable, décent, selon des standards qui puissent exister et qui ne soient pas les nids à feu qui brûlent régulièrement? Il en brûle autant dans son coin que dans le mien, et on en meurt. Des personnes seules sont-elles capables de vivre décemment avec 294 $ par mois pour le logement et les communications? Est-ce qu'on va être capables de faire cela, M. le Président? M. le Président, c'est quelque chose d'épouvantable!

Quand on regarde l'évolution de la clientèle touchée, c'est-à-dire les personnes seules, en mars 1987, les chiffres donnaient d'exclus 17 687; ceux qui étaient pour être réduits: 3616. Quelle est la solution de rechange pour eux? Les programmes d'emploi? Je vois M. le député de Bourget qui a eu un large sourire quand j'ai prononcé programmes d'emploi. On vit une situation économique qui nous est très favorable, et je vais m'en réjouir. Oui, je suis d'accord avec le député de Bourget quand il crie du fond de la salle que cette loi est dégueulasse, M. le Président. On vit dans une période de forte croissance économique, et je m'en réjouis pour le Québec, mais au niveau de la création d'emplois, le gouvernement en place n'est pas le champion, quand on voit ce qui se fait en Ontario et quand on voit malheureusement que le taux de chômage à Montréal est trois fois plus élevé qu'à Toronto même.

Est-ce que c'est un projet de loi qui va aider les gens qui sont sur le bien-être social, sur l'assistance sociale, à acquérir un peu de dignité après qu'on les ait tellement humiliés depuis deux ans et demi de gouvernement libéral. Est-ce une loi qui va nous permettre cela? J'en doute, M. le Président. Je pense que, malheureusement, c'est une loi qui va continuer à les enfermer dans ce cercle, une loi qui va continuer à les appauvrir, quand on sait que cela touche 600 000 personnes au Québec, la réforme d'aide sociale dans laquelle le gouvernement Bourassa a fait son lit. On a vu le vote tantôt et, quels que soient les assistés sociaux qui nous écoutez, quelles que soient les risettes que vous ont faites les députés que vous avez rencontrés, n'ayez pas peur, ils vont tous voter en arrière de leur ministre quand va venir le temps du vote, n'ayez pas peur!

Alors qu'on se serait attendus à la mise en place d'une politique de sécurité du revenu, on se retrouve avec des réaménagements qui sont tortueux, qui maintiennent les 600 000 assistés sociaux du Québec dans une société à part, dans un véritable ghetto de pauvreté, dans de véritables camps de concentration que sont les taudis. On est en train de faire du Québec un Québec brisé et cela, c'est le gouvernement d'en face qui l'a fait. Ce gouvernement tellement fort en promesses, mais faible en réalisations, M. le Président.

Vous me faites signe de conclure? Vous avez remarqué que j'ai été très calme. Ce n'est pas parce que je n'avais pas le goût de rugir, mais je vous le répète, non, jamais je ne... Oui, je rougis de honte d'être dans une Assemblée nationale où c'est vous qui êtes en face. Jamais y n'y a eu des lois comme celle-là qui ont été adoptées précédemment. Mais la population du Québec n'est pas dupe. Les Québécois, ce ne sont pas des caves. Les Québécois vont bien comprendre ce qu'ils ont fait. J'ai bien hâte au prochain porte-à-porte pour parler de vous, M. le député de Bourget, qui aurez adopté cette loi, ou d'Anjou, si vous changez de comté, pour mieux vous faire battre. Et vous, M. le député de L'Assomption, vous savez qui vous attend là-bas? Vous verrez! J'ai bien hâte qu'on fasse le porte-à-porte, cher collègue du comté de Sainte-Marie. On va parler du sort que votre gouvernement est en train de faire aux assistés sociaux et on verra lequel des deux aura la crédibilité de la population. Vous, M. le député de Vimont, on verra...

Le Vice-Président: En conclusion, M. le député.

M. Boulerice: En conclusion, ce n'est pas compliqué. Les riches peuvent tout attendre de ce gouvernement, mais que les pauvres, les plus démunis n'attendent rien, ils n'auront jamais rien. De toute façon, c'est une réalité que l'on peut retrouver très facilement dans les livres du président-directeur général des élections: Dis-moi qui finance ton parti, je te dirai qui tu es. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président: Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Sainte-Marie.

M. Michel Laporte

M. Laporte: Merci, M. le Président. Le hasard a voulu que deux députés du centre-sud puissent prendre la parole l'un après l'autre pour défendre, je crois bien, les intérêts de leurs concitoyens et concitoyennes. Il me fait plaisir de prendre la parole pour une première fois sur l'adoption du principe du projet de loi 37, la Loi sur la sécurité du revenu, et la réforme.

Avant de commencer à parler plus précisément de la réforme et des éléments que j'en ai ressortis, il faut dire qu'après le discours du député de Saint-Jacques je ne me surprends plus des types d'inflation qui existent. On sait qu'il en existe plusieurs, mais plus particulièrement du type d'inflation verbale. Moi, je n'ai jamais eu comme principe d'être très volubile, mais d'être surtout pragmatique. En ce sens, je vais répéter au député de Saint-Jacques un peu ce que j'ai répété lors de la commission parlementaire qui a siégé sur la levée du moratoire, à l'époque où ï y avait des tergiversations dans Montréal-centr* lorsqu'il était président et que, moi, j'étais poigne comme avocat à défendre les gens par rapport au logement. Oui, M. le Président, c'est vrai que celui qui vous parle, avant d'avoir des

cas d'aide sociale dans son bureau de comté, cela faisait déjà au moins cinq ans qu'il défendait les intérêts de ces gens. Je pense que c'est toujours important de rappeler que des leçons de morale, on en a à recevoir parfois, mais que cela dépend de qui cela vient.

Des voix: Bravo!

M. Laporte: M. le Président, on a souligné tantôt que le projet de loi 37 visait à réformer l'aide sociale. Par définition, je crois bien que réformer quelque chose fait appel à une nouvelle conception, à une nouvelle mentalité et, surtout, à une nouvelle approche. Assurément, comme n'importe quelle réforme qui existe, il faut en discuter, et ce, passablement, comme lors de la commission parlementaire qui a siégé depuis le 22 février, et il faut discuter passablement avec les gens pour essayer d'étendre sur une forme de consensus ce qu'est une réforme et de quelle façon les philosophies peuvent se rejoindre.

D'ailleurs, j'ai écouté avec plaisir le député de Duplessis qui mentionnait tantôt qu'il était d'accord avec les objectifs poursuivis par l'actuel gouvernement pour ce qui est de la réforme de l'aide sociale et en mentionnant même, si je ne me trompe point, que son parti était d'accord avec les principes de l'aide sociale. Cependant, les modalités ne lui plaisent pas. J'ai pu comprendre, en sous-entendu, le député de Saint-Jacques parler du programme, mais simplement du programme APTE. Par cela, j'ai cru comprendre - qui ne dit mot consent - qu'il est en accord avec les deux autres programmes qui étaient avancés, en tant que tels, pour ce qui est de la réforme de l'aide sociale.

Alors, il faudrait peut-être s'entendre pour dire quelles sont les propositions actuelles qui nous permettraient, comme on le dit depuis le début... En ce sens-là, je pense qu'il faut louer le ministre pour sa très grande ouverture d'esprit... Quelles sont, pour bien desservir la population qu'on dessert actuellement et qu'on représente, de façon concrète ce qu'on pourrait leur rendre comme meilleurs services, mais surtout comme propositions, afin d'adopter ce projet de loi qui fait appel - je le dis depuis le début - à un autre concept et à une autre mentalité?

D'une part, comme je le disais, le principe de réforme, comme l'indique... Je vais donner deux citations de dictionnaires qui nous indiquent ce qu'est une réforme. Dans Le Petit Robert, on nous indique que c'est "un changement qu'on apporte dans la forme d'une institution, afin de l'améliorer, d'en obtenir de meilleurs résultats". Comme je le dis, il y a des principes et des philosophies qui diffèrent. Cela, je le conçois très bien. Mais je pense qu'il faut comprendre ce qui est sous-jacent à une réforme.

Dans le Larousse, qu'est-ce qu'on nous indique? C'est un "changement opéré en vue d'une amélioration". Quelles sont donc, à l'inté- rieur d'une réforme, les améliorations ou, à tout le moins, les éléments qu'on compte apporter? Je tiens toujours à les réexprimer, parce que j'ai eu plusieurs rencontres dans mon comté, au-delà de 50, avec des individus, avec des groupes et aussi, plus particulièrement, avec les principaux intervenants qui avaient à manoeuvrer ou plutôt, si je peux m'exprimer ainsi, qui ont tout le temps la clientèle qu'on appelle de l'aide sociale.

La première appréhension qu'ont ces gens, c'est de dire: On ne sait pas sur quoi on s'en va. Cette glace semble mince. Devant cette forme d'incertitude, quelles sont réellement les propositions et comment cela va-t-il s'établir? Comme je le disais - je vais le répéter plusieurs fois dans ce discours-ci - il faut regarder cela dans un ensemble et voir, et cela continuellement, de façon concrète et pragmatique, comment cela va se répercuter et quelles vont en être les conséquences.

Assurément, M. le Président, tant et aussi longtemps qu'il n'y a pas une application concrète, comme le démontre le sondage qui était ressorti, il y avait, plus ou moins, une personne sur deux qui avait entendu parler de la réforme de l'aide sociale. Je pense qu'on se doit, ne serait-ce qu'à ce niveau, de pouvoir avoir ce qu'on pourrait appeler une campagne de sensibilisation, qui pourrait nous permettre, d'une autre façon, d'avoir un autre "feed-back" toujours dans le même sens que je l'ai exprimé tantôt.

Les gens de l'aide sociale sont des gens dignes, des gens autonomes et on se doit d'avoir un respect mutuel, parce que ces gens-là... Je suis issu du comté de centre-sud, de ce quartier plus particulièrement. Je suis natif de ce comté qu'on appelle le comté de Sainte-Marie. Oui, M. le Président, j'ai côtoyé régulièrement - et je n'ai aucune honte à dire que j'ai même des amis personnels qui le sont actuellement, malheureusement, pour des motifs indépendants de leur volonté - des gens de l'aide sociale.

Ce sont des gens fiers et nobles. En ce sens-là, je crois qu'il faut le souligner et le resouligner plus particulièrement. Je l'ai même souligné au député de Saint-Jacques tantôt. Il arrive quelquefois, comme dans n'importe quelle organisation et comme dans n'importe quel programme qu'il existe, et ce, en minorité, des situations qui font en sorte qu'on en fait une généralité pour ce qui est du groupe qu'on dessert.

Cela a été exprimé à plusieurs reprises. Ce que je souligne, c'est que, parfois, avec les énergies qu'on peut y mettre, la compréhension qu'on peut donner à ces gens et les informations qu'on peut leur soumettre comme à une réunion, d'ailleurs, que j'ai tenue à l'automne sur les divers programmes qui avaient été mis en place par l'ancien gouvernement sur les possibilités d'utiliser ces programmes en vue d'une réinsertion sur le marché du travail... Il est certain que j'ai deux choix. Soit celui de dire: Écoutez, ce

n'est pas bon. Vous allez faire du 'cheap labour", etc. Là, vous mettez cela de côté. Ou bien on dit: On l'a, on l'utilise, on va de l'avant avec cela. On essaie de s'en sortir. Je pense que ce sont deux concepts auxquels on fait appel et qui sont différents. Ce sont surtout deux façons de travailler qui sont différentes. J'en appelle justement et plus particulièrement au raisonnement de base qui est de dire que nous, comme députés, avons un travail de base à faire à ce chapitre et que nous devons aider nos concitoyens en ce sens.

Un bref historique, pour rappeler ce qui a amené la réforme de l'aide sociale et ce qu'elle est. C'est assurément un peu plus théorique, mais je pense que cela va nous aider à comprendre. En 1976, il y avait 435 045 personnes sur l'aide sociale. En 1987, 649 555 personnes. En 1971, il y avait deux ménages sur trois qui étaient considérés comme inaptes. En 1987, 73, 4 % des personnes sont actuellement aptes. Il y a donc un changement dans la clientèle de l'aide sociale. L'âge moyen en 1976 était de 36 ans. En 1988, il est actuellement de 32 ans. Le coût en 1976 était de 618 600 000 $; en 1986, 2 200 000 000 $.

Ce sont des données de base qui peuvent, je pense, nous guider pour voir que la photographie de l'implantation d'un système de dernier recours, qui se trouvait l'aide sociale au moment où elle a été créée, n'est plus la même photographie qu'on a aujourd'hui, en 1988. C'est comme n'importe quoi. Les gens ont vieilli. Les attentes sont différentes. Les besoins sont différents. Ce qui a amené... Et même à cela, je pense qu'on peut revenir couramment sur des points plus particuliers. J'aurai l'occasion d'y revenir. Ce sont des points qui ont même été soulevés par des députés actuels de l'Opposition, qui n'avaient jamais été modifiés et qui faisaient le constat que l'aide sociale, actuellement, ne visait plus ce qu'elle visait au début et qu'elle ne desservait plus spécifiquement la clientèle à laquelle elle s'adressait.

Sainte-Marie, mon comté, est assurément constitué de plusieurs personnes sur l'aide sociale. Approximativement 27 % des gens bénéficient actuellement, dans le comté de Sainte-Marie, des prestations de l'aide sociale.

Il est bon d'expliquer simplement ce que sont l'aide sociale et sa réforme. Comme je le disais plus particulièrement, il y a trois programmes: Soutien financier, APTE, que l'on décrit comme une Action positive pour le travail et l'emploi et le programme APPORT, soit l'Aide aux parents pour leurs revenus de travail.

En ce sens, j'aimerais bien que même les députés de l'Opposition se fassent fort d'expliquer à leurs citoyens ce qu'est la réalité et ce qui est proposé concrètement. Dans le soutien financier est reconnue l'obligation de pourvoir aux besoins essentiels des personnes inaptes au travail qui représentent actuellement environ 25 % de la clientèle. Cela constitue 100 000 personnes. Dans mon comté, je pourrais vous citer plusieurs cas, dont un, entre autres, d'une personne qui, à 59 ans, pour une raison de santé, a dû laisser son travail. Il ne peut retirer de prestations de la Régie des rentes du Québec et encore moins, parce qu'il travaillait dans une petite compagnie, des prestations de retraite. Qu'arrive-t-il à ce monsieur qui a toujours travaillé et surtout aux membres de sa famille? Il s'est retrouvé sur l'aide sociale, avec ce qu'on connaît comme procédures administratives, etc.

Ce qu'apporte le programme Soutien financier, premièrement, c'est qu'il y aura moins de tracasseries administratives. Deuxièmement, c'est que les gens recevront un montant supérieur à celui qu'on donne actuellement. Je pense qu'il est important de souligner cela et que cela va s'adresser à une partie de notre clientèle. On bonifie le projet de loi en ce sens. Je veux bien croire, comme le soulignait peut-être un peu le dernier p. -d. g. d'Hydro-Québec, qu'il ne faut pas s'opposer pour s'opposer. Il faut souligner qu'à l'intérieur de ce projet de loi il y a des choses qui vont toucher notre clientèle et il faut l'expliquer en ce sens. Comme je l'indiquais tantôt, ce programme Soutien financier se veut plus généreux. Par exemple, avec les montants que l'on connaît actuellement de 480 $ par mois, une personne seule recevrait 585 $ par mois; une famille constituée de deux personnes adultes avec deux enfants recevrait 1037 $ par mois. (Oh 30)

II est certain, M. le Président - et la commission parlementaire nous a servi en ce sens-là - que plusieurs représentations ont été faites par des groupes et plus spécifiquement par l'OPHQ concernant les programmes d'employabilité qui étaient pour s'adresser à cette clientèle qui était pour être - comment pourrais-je m'exprimer? - classifiée dans le Soutien financier. C'est la raison pour laquelle le ministre a pris ces points-là en considération et, à juste titre, pour ne pas qu'on les classe justement comme des gens complètement inaptes, pour leur offrir, plus particulièrement aux personnes handicapées et aux personnes qui le peuvent, un programme adapté qui s'adresserait à elles.

Continuité de l'aide sociale, M. le Président. Je pense qu'il est important que ce soit comme cela. On se rappellera aussi, M. le Président, que la commission parlementaire qui a reçu au-delà de 125 mémoires a permis à ses membres, dont je fais partie, au ministre et aux membres de l'Opposition, de s'exprimer. Et, plus particulièrement, je crois que la députée de Maisonneuve a été de tous les instants présente à cette commission pour soulever justement les objections majeures qu'on avait entraînées à ce stade.

Se souvenir - j'y pense plus particulièrement avant de revenir à cette commission parlementaire - que l'objectif initial de l'instauration de ce programme-là était ce qu'on appelle une aide de dernier recours. Pour le répéter, on ne le répétera jamais assez, ï arrive

des situations, comme j'ai pu le mentionner, pour les citoyens de mon comté tantôt et comme je pourrais vous le mentionner aussi d'autres familles, des situations qui sont vécues par des individus dans leur secteur qui, pour de multiples raisons, se retrouvent à un certain moment bénéficiaires de l'aide sociale, non pas parce qu'ils ie désirent ou parce qu'ils aiment cela, mais parce que la situation de la vie a fait en sorte que ces gens-là sont malheureusement sur l'aide sociale. On doit leur procurer ce soutien de dernier recours et on doit continuellement avoir cela à l'esprit et même ne pas avoir peur de dépenser pour dire que ces gens sont des humains et qu'on doit à l'intérieur de cela les soutenir financièrement.

Il y a l'autre programme, M. le Président, qui est le programme APPORT, objectif, philosophie, qui a comme prémisses de base d'aider les familles actuelles à faible revenu à être soutenues par l'État financièrement pour mieux continuer - comment pourrais-je m'exprimer? - à se valoriser à l'intérieur de leur travail. Il y a même des frais de garderie remboursés jusqu'à 50 %. Cela aussi est un autre programme dont je pense que tous les membres de cette Assemblée doivent retransmettre aux gens l'information, et le plus objectivement, et faire en sorte que, ces programmes puissent être utilisés.

Je peux comprendre que nous avons tous un rôle à jouer comme parlementaires, mais ce rôle-là doit aussi faire en sorte que quand on sort de cette enceinte-ci, ces gens-là soient informés et qu'on puisse l'utiliser au maximum parce que cela vient en aide aux familles démunies et à celles qui peuvent se retrouver plus particulièrement dans mon comté. Cette aide du programme APPORT se veut un équilibre financier qui, contrairement à ce qui était connu auparavant par le programme SUPRET, sera versé mensuellement aux gens à 75 % du coût. Je pense que, du fait que ce soit versé mensuellement comme cela, cela va permettre à ces gens qui travaillent et qui mettent des énergies de pouvoir mieux soutenir financièrement ce qu'ils font actuellement.

Certes, M. le Président, on peut avoir des concepts philosophiques différents, mais tout le monde - je parle de façon générale et j'ai pu l'entendre ici à l'Assemblée nationale - se disait insatisfait de l'actuel régime de l'aide sociale.

Avec ses prémisses de base, comme j'ai pu l'exprimer - et je pense que le député de Duplessis l'a pratiquement exprimé au nom de sa formation politique - avec les objectifs que la réforme a voulu se donner, il était en accord, mais les modalités, c'est une autre paire de manches. Mais je comprends que ce qu'on pourrait appeler la partie politique l'incite à faire ressortir cela de cette façon-là.

Oui, M. le Président, l'aide sociale doit donner l'aide aux plus démunis. Elle doit aussi, selon la philosophie qui est son appoint, inciter les gens au travail. Je pense que personne - et pour avoir discuté avec des gens qui sont actuellement bénéficiaires de l'aide sociale - ne peut être contre ce principe. Comment fait-on, cependant, pour des gens qui ont des problèmes en alphabétisation? On peut dénombrer - et pour avoir travaillé ce dossier-ci depuis les trois dernières années - dans mon secteur, à ce qu'on me dit, environ 10 % de gens qui ont des problèmes en alphabétisation. Il est certain qu'il va falloir consacrer à ces gens-là une attention plus spécifique, une aide plus particulière; quand on ne peut même pas, M. le Président - et cela, je pense qu'il faut le souligner plus particulièrement - lire une annonce publicitaire pour souligner en tant que tels certains rabais qu'on a en ce qui concerne l'alimentation. On a une prémisse de base qui peut faire en sorte qu'on ne peut pas se supporter et qu'on ne peut pas se prendre en main nous-mêmes. Là, c'est certain qu'on peut souligner plusieurs éléments de ce type que la réforme, en accord avec l'ensemble des ministères de ce gouvernement, doit prendre en considération pour les aider. Ce qui m'amène plus précisément au programme APTE qui est, ce que je pourrais appeler, le noeud ou le noyau de l'ensemble des discussions qui ont cours et qui vont continuer à avoir cours en ce qui concerne le programme qu'on compte présenter. C'est certain qu'au début, on avait plusieurs formulations. Il y avait la catégorie admissible et non admissible, disponible et non disponible, participant et non participant. Le ministre a ramené cela à trois catégories plus précises qui sont: disponible et non disponible... Non disponible, on peut retrouver cela plus précisément à 55 ans et plus, je pense qu'il faut le souligner, pour les gens qui ont des problèmes par rapport à l'emploi plus temporaire et par rapport aussi aux femmes enceintes. Je répéterai un autre point particulier des amendements: Au début de la réforme, on voulait que des familles puissent ressortir de l'aide sociale pour les deux prochaines années. Le ministre a mis un amendement au niveau du préscolaire. C'est important à souligner aussi.

L'autre catégorie est participant et participation volontaire assurément aux mesures d'employabilité. À. l'intérieur de ce programme, pour y aller rapidement, vous me l'indiquez, M. le Président, il y a un renforcement en ce qui a trait aux SEMO. Tout le monde connaît le travail qui existe aux SEMO et plus particulièrement la clientèle qu'ils desservent et, bien souvent, la clientèle est celle de l'aide sociale. Il y a aussi, et je n'ai entendu aucun membre de l'Opposition le souligner - cela a été réclamé à cor et à cri à plusieurs reprises - le ministre a pu annoncé ici, en cette enceinte, que les frais scolaires du secteur primaire vont être augmentés de 35 $ à 46 $ et, au secondaire, on va se retrouver avec 93 $. M. le Président, ce sont des revendications qui ont été faites bien avant que je sois député. Enfin, je pense qu'on commence à avoir une

réponse sur cela.

En ce qui a trait aux familles d'accueil, c'est un dossier qui traîne depuis six ans. Que disait ce dossier par rapport à l'aide sociale? Après trois mois, une personne qui se retrouvait sur l'aide sociale, si son enfant était placé en famille d'accueil, la mère naturelle ou le père naturel de cet enfant était comme retiré et plus responsable de cet enfant. Même s'il l'avait quinze jours ou toutes les fins de semaine, il voyait son soutien financier retiré pour cette personne. Assurément, j'aimerais indiquer aussi qu'en ce qui concerne les besoins spéciaux que c'est conservé aussi dans le programme actuel de l'aide sociale.

L'une des parties de mon intervention voulait porter sur le logement social. M. le Président, permettez-moi un bref historique du logement social. J'aimerais rappeler qu'il existe depuis 1973 ce partage du logement. À cette époque, c'était 10 $ par mois pour les ménages qui partageaient un logement avec un parent ou un enfant. Je pense que les barèmes sont demeurés tels quels. En 1974, c'était 67 $ par mois; en 1975, c'était 85 $ par mois, et depuis cette époque c'est toujours demeuré pareil quant au partage du logement. Je veux bien qu'on me dise que cela n'a pas de sens. Mais je voudrais qu'on me dise ce qu'ils ont fait à cette époque et ce qui est arrivé depuis ce moment.

M. le Président, H y a aussi un autre élément, soit celui du salaire minimum. De 1981 à 1986, on a fait une part du chemin. Je ne dis pas qu'il n'en reste pas à faire, assurément qu'il en reste à faire, mais de 1981 à 1986, je voudrais bien qu'on me donne la raison pour laquelle cela n'a jamais été augmenté et la raison pour laquelle, nous, cela fait trois fois qu'on l'augmente.

Je conclurai en vous remerciant de votre indulgence, mais particulièrement en soulignant aux citoyens et aux citoyennes du comté de Sainte-Marie que toujours je vais être près d'eux pour défendre leurs intérêts. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président: Nous allons maintenant poursuivre avec M. le député de Mercier.

M. Gerald God in

M. Godin: M. le Président, nous avons devant nous un gouvernement qui manque de compassion à l'égard des démunis. On peut dire que tous les préjugés qu'on entend à Montréal dans chaque taxi - il y a eu quand même des clichés et des accusations non fondées contre les assistés sociaux - le ministre les a repris un peu comme Le Pen reprenait en France des accusations racistes contre les immigrants et les réfugiés. Donc, on a un gouvernement qui a manqué de compassion à l'égard des démunis de la société du Québec et qui a montré qu'il n'était pas du tout au courant de ce qui se passait dans la vie réelle des démunis du Québec Est-ce que le ministre, par exemple, est au courant que l'attitude des boubous macoutes a amené des médecins à refuser des certificats médicaux à des gens qui en avaient vraiment besoin? Je ne pense pas que le ministre ou le gouvernement ait pris connaissance de l'ampleur des effets de son "lepenisme", de son front national anti-assisté social

Chaque préjugé a été repris par le ministre et par le gouvernement. En fait, on les a amplifiés. On a même souligné les préjugés, les clichés, les accusations non fondées portées contre les assistés sociaux. Ce gouvernement a créé à l'égard des assistés sociaux un climat de méfiance, pour ne pas dire d'agressivité de la part des gens, qui n'est pas très sain pour le climat social à maintenir vis-à-vis des plus pauvres du Québec.

Chaque lundi, dans mon comté, j'entends et je vois des personnes qui me disent à quel point en tant qu'assisté social, en tant que BAS - bénéficiaire d'aide sociale - on les méprise maintenant et on se méfie d'elles, à quel point le statut social a été encore empiré par les propos du ministre et des libéraux à l'égard des assistés sociaux. On a donc devant nous un gouvernement sans précédent, exceptionnel, avec un comportement historique, qui enlève aux pauvres et donne aux riches. C'est Robin des Bois à l'envers.

Il suffit de se demander ce que la réforme Paradis va donner à la province sur le plan budgétaire: 140 000 000 $, pris dans la poche des plus pauvres et donnés en rabattement d'impôt pour les riches. On peut dire que ce gouvernement n'a aucun sens social. Nous souhaitons que ceux qui nous écoutent se rendent compte qu'ils sont les boucs émissaires des préjugés "lepenis-tes" et non pas "lepenisses" de ce gouvernement

Je tiens à souligner, M. le Président, qu'y serait souhaitable que ce gouvernement, surtout le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, s'ouvre enfin les yeux et se rende compte que son comportement a miné le respect que les gens pouvaient avoir dans le passé pour les bénéficiaires de l'aide sociale et la compassion que les Québécois entretiennent naturellement et spontanément à l'égard de ceux qu'on appelait dans le temps les pauvres et qu'on appelle maintenant les démunis. Ce sont des gens qui n'ont rien à se mettre sous la dent, dans bien des cas, qui vivent au seuil de la pauvreté et qui passent aujourd'hui, au Québec, pour des gens qui exploitent le gouvernement et le budget, et qui bénéficient, comme des vrais parasites, du régime actuel.

Cette réforme, présentée par le député de Sainte-Marie comme une amélioration, est en fait un moyen de récupérer des fonds que le gouvernement va confier à d'autres programmes budgétaires, entre autres la baisse des impôts des riches. Donc, un gouvernement qui donne aux

riches et qui enlève aux pauvres. Le président américain Franklin Roosevelt avait inventé une formule, à l'époque, qui décrit fort bien l'attitude des libéraux. C'est: Si les chevaux sont bien nourris, il y aura à manger pour les moineaux. C'est une philosophie économique dite libérale qui illustre fort bien que, si les riches paient moins d'impôt, ils vont créer de l'emploi et acheter plus, qu'il y aura plus d'emplois, donc moins d'assistés sociaux. Je répète la phrase de M. Franklin Roosevelt: Si les chevaux sont bien nourris, il y aura à manger pour les moineaux. Sauf que je demande à mes collègues d'en face: Qu'est-ce que les moineaux auront à manger?

Je ne doute pas de la bonne foi de mes collègues d'en face sur cette question, M. le Président. Je sais que, dans chacun des comtés du Québec, il y a des assistés sociaux qui se présentent et qui font connaître leurs problèmes à leur député. Mais je trouve que la formule inventée par le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu n'est pas la bonne. Elle va chercher une coupure de 140 000 000 $ dans le budget de l'aide sociale. Elle coupe les assistés sociaux, les démunis et leur enlève littéralement le pain de la bouche.

En plus d'avoir créé ce climat de méfiance à l'égard des bénéficiaires de l'aide sociale, le gouvernement actuel leur enlève 140 000 000 $ pour mieux réduire les impôts de ceux qui gagnent plus d'argent, pour parler de vaches grasses et, comme le ministre des Finances en parle souvent, comme un pharaon, d'une époque rose pour le gouvernement. Mon collègue de Sainte-Marie disait tout à l'heure: Pourquoi le Parti québécois n'a-t-il pas augmenté le salaire minimum de 1980 à 1985? Réponse: À cause de la crise. Pourquoi les libéraux peuvent-ils l'augmenter maintenant? Parce que la crise est terminée. C'est aussi simple que cela.

Je voudrais aussi citer notre chef, M. Jacques Parizeau, qui est abondamment cité à contretemps et de façon très incomplète par le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. M. Parizeau a dit une phrase qui résume bien, à mon avis, l'idée que j'ai voulu rendre ici: Les asistés sociaux sont plus taxés per capita que n'importe quel millionnaire du Québec. Donc, le gouvernement est bien celui qui enlève aux pauvres pour donner aux riches. Cette réforme est donc une contre-réforme, c'est une réforme antisociale et donc inacceptable. Pour cette raison, nous voterons unanimement contre cette réforme, qui enlève aux pauvres et donne aux riches. M. le Président, je vous remercie beaucoup.

Le Président: Alors, nous allons maintenant poursuivre le débat avec l'intervention de Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jeanne L. Blackburn Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le Président, ce débat, qui se poursuit déjà depuis le tout début de Tannée sur le projet de réforme de la loi 37, a malheureusement, pour les membres de cette Assemblée, été considéré comme un débat de l'Opposition, alors que tous les groupes à l'exception de quelques groupes d'hommes d'affaires patentés, tous les groupes sont venus dénoncer le projet de loi appelé la réforme Paradis. Vous allez me permettre, ce soir, M. le Président, de citer des parties importantes du message du comité des affaires sociales de l'Assemblée des évêques du Québec, message qu'il a communiqué à l'occasion du 1er mai, la fête des travailleurs. Ce message parle du coeur, parle d'esprit, parle de compassion, parie de la réalité des Québécois, parle des conséquences de ce projet de loi dans des termes si clairs, si précis qu'il nous interpelle et qu'il exprime mieux que je ne saurais le faire moi-même; alors, vous allez me permettre de le citer.

Tout d'abord, l'Assemblée des évêques a choisi le 1er mai pour présenter son message touchant la réforme. Pourquoi le 1er mai alors qu'on parle d'assistés sociaux, de personnes qui ne veulent pas travailler ou qui sont sans emploi? Parce que, pour l'Assemblée des évêques, les assistés sociaux, les personnes assistées sociales sont, dans la plupart des cas, des extravailleurs et travailleuses à la recherche d'emploi. Le message de l'assemblée des évêques, M. le Président, se résume ainsi et il est frappant. Il dit: Le projet de loi transforme les fondements mêmes de l'aide sociale. L'aide sociale reconnaissait le droit à l'aide sociale. L'aide sociale était un droit et là, on en fait un privilège quand on n'appelle pas cela une usurpation. L'Assemblée des évêques dit également que cette réforme est une menace de régression aux conséquences insoupçonnées. En conclusion, l'Assemblée des évêques conclut à la nécessité de retirer l'actuel projet de loi et invite le ministre à refaire ses devoirs sur la base d'une politique d'emploi, une politique de formation, une réforme fiscale et un revenu minimum pour les assistés sociaux.

L'Assemblée des évêques va beaucoup plus loin. L'Assemblée des évêques nous invite, nous interpelle, nous appelle tous à être proches des assistés sociaux, des assistées sociales, de les appuyer de toutes les façons possibles. On ne parle pas de l'Opposition ici, on ne parle pas d'un groupe d'assistés sociaux, on parle de l'Assemblée des évêques, qui invite la population à appuyer, de toutes les façons possibles, les assistés sociaux de manière que le projet de loi ne soit pas adopté, qu'il soit retiré.

M. le Président, vous allez me permettre de citer de larges extraits de ce texte parce que, comme je l'ai dit tout à l'heure, il parle mieux, il exprime mieux que je ne saurais le faire et il exprime finalement ce qu'on a entendu en commission parlementaire par la plupart des intervenants. (Oh 50)

Au début du texte, on rappelle les paroles prononcées par Mgr Protix, en 1986, au moment où le gouvernement mettait en route ces boubou macoutes. Mgr Proulx disait alors: "Les assistés sociaux sont déjà des citoyens humiliés qu'on n'a pas décemment le droit de blâmer et de harceler". Parlant du projet, le message nous dit: Ce projet transforme radicalement les fondements mêmes de l'aide sociale. En effet, en accord avec les recommandations du rapport Boucher, l'aide sociale a été considérée depuis 1969 - le rapport Boucher a été déposé en 1963 - comme un droit pour toute personne démunie, quelle que soit la cause de son indigence. Notre société reconnaissait alors implicitement que la pauvreté avait des causes économiques et sociales. Le nouveau projet substitue aux critères de besoin la vieille distinction entre apte et inapte qui s'articule entièrement autour de l'incitation au travail, incitation au travail qui se révèle en fait de la coercition, réduisant l'indigence à un simple problème individuel. Sonne-t-il l'heure où l'État ne se reconnaît plus de responsabilité sociale et rend les assistés sociaux responsables du manque d'emploi?

Le message conclut en disant: Nous voyons là, je le rappelle, une menace de régression sociale aux conséquences insoupçonnées au moment même où, dans un contexte de concurrence internationale, de rareté des emplois, les personnes ont de moins en moins de prise sur les décisions qui affectent leurs conditions de vie. Les évêques nous disent également: C'est un projet de loi qui concerne tout le monde. On nous dit: Un choix de société s'évalue d'après le sort qu'on fait aux plus pauvres. Vous savez, la loi du plus fort, on n'a pas besoin de gouvernement pour organiser cela. La jungle l'organise très bien. On juge de la valeur d'une société par la façon qu'elle a de protéger ses plus démunis. C'est ce que nous rappelle ce message. Il nous rappelle que les personnes ne valent pas seulement par leur utilité économique. Elles valent en tant qu'êtres humains, en tant que valeur de partage, en tant que valeur d'équité, en tant que valeur de respect de l'humanité.

Le projet de loi, selon les évêques, est un appauvrissement des personnes assistées sociales par une augmentation des contrôles. On cite en particulier le cas des femmes, le cas des femmes qui se trouvent appauvries par le projet, le cas des femmes pour lesquelles on ne reconnaît pas la valeur du travail domestique ni de l'éducation des enfants comme un véritable travail. Le projet de loi vient également appauvrir les jeunes, projet de loi qui semble, en théorie... Et je reprends le texte: Le projet accorde, en théorie, la parité aux jeunes de moins de 30 ans, mais, dans les faits, diverses mesures, telles la contribution alimentaire des parents et la pénalité pour le partage du logement, viennent le restreindre, pour ne pas dire l'annuler. Il y a un contraste, constate le message, un contraste entre le traitement qu'on accorde aux assistés sociaux et celui qu'on accorde aux mieux nantis. La société est une, nous dit le message. Le sort des personnes les plus démunies est étroitement tributaire de l'ensemble des politiques sociales, économiques et fiscales et du traitement accordé aux autres secteurs de la société. Par exemple, les contraintes budgétaires qu'on invoque à l'appui du projet de réforme s'expliquent au moins en partie par diverses formes de transfert de richesses collectives aux secteurs les plus fortunés. Cela n'est pas l'Opposition qui est en train de vous dire cela, c'est le message de l'Assemblée des évêques. On poursuit en disant: Certains abris fiscaux inutiles, des évasions fiscales de grande échelle, certaines subventions discutables, ces régimes cachés d'assistance sociale empêchent de récupérer des sommes importantes qu'on pourrait affecter aux politiques sociales. Un contraste, dit le message. Déréglementation qui tend à retirer graduellement du monde des affaires tout contrôle social et étatique qui contraste singulièrement avec le poids des contrôles qu'on veut imposer aux personnes assistées sociales. De telles faits, nous dit le message, sont révélateurs d'une orientation de l'économie qui a pour nom néolibéralisme. Le projet de réforme sociale se situe nettement dans cette direction.

Des valeurs détournées. On a entendu ad nauseam le ministre et les différents intervenants nous parler de travail, de responsabilisation et d'équité. Le message nous dit: On peut inciter les pauvres au travail, mais on sait que le nombre des emplois est insuffisant, inexistant On parie d'épanouissement par le travail, sauf qu'on ne se préoccupe pas de la qualité des emplois. Ce ne sont pas tous les emplois qui permettent à la personne de s'épanouir. Nous le savons tous. On incite au travail à n'importe quelle condition. Cette incitation, dit le message, devient ainsi abstraite, coupée de la réalité. Elle ne peut que profiter à certaines compagnies qui seront trop heureuses d'avoir une main-d'œuvre à bon marché.

Responsabilités. Quand on se sert de ces termes pour rendre coupables les personnes qui ne se trouvent pas de travail, on leur fait porter la responsabilité d'un sous-développement économique, alors qu'elles n'ont aucune prise sur le développement de l'emploi L'individu, si libre soit-il, ne peut porter à lui seul la responsabilité de toute une société.

L'équité. L'équité, selon ces haut-parleurs du ministre de la Main-d'Oeuvre... L'équité n'est pas l'enrichissement des uns au détriment des autres, nous dit le message, ni l'effort de nivellement par le bas. Pour nous tous, l'équité consiste, d'abord et avant tout, à aider les personnes dans le besoin et non pas, comme on le fait actuellement, prendre au plus pauvre pour donner au plus riche. La toute première décision de ce gouvernement, en décembre 1985, a été de décider qu'on n'indexerait pas trimestriellement les allocations destinées aux personnes assistées

sociales. L'État faisait une économie de 31 000 000 $, et, du même coup, il prenait la décision de réduire l'impôt des hauts revenus et il retournait 86 000 000 $ dans les poches des personnes les plus à l'aise au Québec. C'est ce qu'on appelle voler les pauvres pour donner aux riches.

Le message des évêques est le suivant. Il nous dit: Nous affirmons donc que la promotion concrète des droits des personnes assistées sociales doit se faire sur d'autres bases. Le travail, si important soit-il pour assurer sa subsistance, n'est pas une valeur sociale absolue en elle-même. Il doit respecter et développer la dignité des personnes. La responsabilité devient un leurre si elle ne permet pas la liberté de s'exercer et à la personne de prendre des initiatives. L'équité n'est pas une excuse pour appauvrir un plus grand nombre de personnes. Elle est une mesure qui fait, de la poursuite des droits humains, une priorité.

Les évêques sont également conscients, comme le rappelait mon collègue de Mercier tout à l'heure, que ces préjugés faciles, entretenus de façon démagogique par l'actuel gouvernement, touchent toutes les classes de la société. Les évêques nous disent: On reconnaît qu'on n'a pas toujours eu la compassion qu'on devrait avoir à l'endroit des personnes assistées sociales. (1 heure)

L'Assemblée des évêques conclut: "Si nous analysons la situation à partir de la perspective des personnes les plus démunies, une conclusion s'impose: la nécessité de retirer l'actuel projet de réforme de l'aide sociale. Une véritable politique de sécurité du revenu appelle une reprise de la question sur d'autres bases. Nous avons retenu, entre autres, certains éléments déjà formulés par de nombreux groupes en commission parlementaire".

Suit une liste de mesures que le gouvernement devrait reprendre à son compte en même temps qu'il reprendrait l'exercice de rédaction d'un projet de loi décent "une politique réelle et créatrice de plein-emploi qui devrait conduire à réévaluer les choix économiques et technologiques opérés depuis quelques années, des programmes de formation de l'ensemble de la main-d'oeuvre pour faire face aux nouvelles méthodes de travail, une réforme de la fiscalité qui avantage les familles et les personnes à faible revenu; une réforme de l'aide sociale basée sur les besoins réels des personnes et définie en fonction d'un seuil reconnu de pauvreté."

L'Assemblée des évêques, M. le Président, invite ce gouvernement a refaire son devoir, invite ce gouvernement à faire preuve d'honnêteté, à faire preuve de sens des responsabilités, à faire preuve d'équité, d'une équité réelle et non pas feinte, d'une équité qui sert les plus démunis et non pas qui vient vider les poches des plus démunis pour en donner supposément à ceux qui, paraît-il volent le régime. L'Assemblée des évêques nous dit: "Nous devons reconnaître que nous nourrissons trop souvent des préjugés à l'égard des personnes assistées sociales. On prétend qu'elles vivent aux dépens de l'État, alors que, pour la plupart, elles sont victimes d'un régime économique et social qui n'est pas tendre pour les plus faibles et les plus petits. "Ces préjugés, M. le Président, sont entretenus par l'actuel gouvernement.

Une société qui, comme on l'a fait à l'occasion de la poursuite des boubou macoutes encourage la délation - on n'a jamais vu cela au Québec, le voisin qui dénonce son voisin parce qu'il pense qu'il fraude l'assistance sociale - une société qui fait des plus démunis des fraudeurs potentiels une société qui fait reposer le fardeau de la preuve sur les plus démunis, c'est une société indécente, c'est une société malade.

L'Assemblée des évêques nous dit et j'ai rarement vu un tel message... Les évêques sont progressistes pour la plupart d'entre eux, mais souvent aussi assez conservateurs. Mais écoutez bien le message qu'ils lancent à la population du Québec. Cela devrait vous impressionner. Ils nous disent - si on les écoutait, je pense que le gouvernement devrait plier, c'est une invitation -"Ensemble, acceptons de nous faire proches des personnes assistées sociales, essayons de mieux comprendre les difficultés auxquelles elles sont confrontées souvent bien malgré elles et appuyons-les de toutes les façons possibles." Cela veut dire de toutes les façons possibles.

M. le Président, je vois que le ministre vient d'entrer en Chambre. Je trouve infiniment déplorable qu'on soit ici en train de discuter d'un projet de loi dont il a la paternité et qu'il n'ait pas la décence de venir assister au débat qui se déroule ici en cette Chambre. Je trouve cela inacceptable de la part de celui qui est en train de faire des mesures, de prendre des décisions qui vont avoir des effets considérables sur la société québécoise, mais plus particulièrement sur les valeurs véhiculées par la société québécoise.

M. le Président, quand l'Assemblée des évêques juge la situation suffisamment sérieuse et importante pour inviter tous les chrétiens, tous ceux qui ont à coeur le mieux-être des plus démunis, tous ceux qui ont encore un peu de compassion pour ceux qui ont des difficultés dans la société, et va aussi loin que de nous dire: Appuyons-les de toutes les façons possibles, c'est que la situation appelle des actions qui fassent réfléchir ce gouvernement et le plus rapidement possible.

Donc, M. le Président, on ne peut pas être d'accord avec un tel projet de loi. J'espère que, même si on est en train de discuter l'adoption de principe, les débats en cette Chambre feront réfléchir sérieusement le ministre et le gouvernement actuel quant au fondement même de cette réforme qui est, en fait, une contre-réforme qui vient, pour ainsi dire, kidnapper les plus démunis de la société en faveur des mieux-nantis. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président: M. le député de L'Assomption.

M. Gervais: M. le Président, je demande l'ajournement des débats sur le projet de loi 37.

Le Vice-Président: Est-ce que cette motion d'ajournement des débats est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président: Adopté. N'ayant plus d'autres sujets à l'ordre du jour, nous allons maintenant ajourner nos travaux qui reprendront ce matin, le jeudi 16 juin, à 10 heures.

(Fin de la séance à 1 h 7)

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