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(Oix heures treize minutes)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes.
Déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.
M. Gratton:... M. le Président.
Le Président: Dépôt de documents. M. le
ministre de la Justice.
M. Marx: Oui, M. le Président?
Le Président: Dépôt de documents.
Rapport annuel de l'Office de la protection du
consommateur
M. Marx: En dépôt de documents. J'ai l'honneur de
déposer le rapport annuel 1987-1988 de l'Office de la protection du
consommateur.
Le Président: M. le ministre de la Justice, votre document
est maintenant déposé. Toujours à l'étape de
dépôt de documents, M. le ministre délégué
aux Finances et à la Privatisation.
Rapport annuel de l'Inspecteur général
des institutions financières sur les assurances
M. Fortier: II me fait plaisir de déposer le rapport
annuel de l'Inspecteur général des institutions
financières pour l'année 1987 sur les assurances.
Lettre de démission de M. Normand Moyer comme
commissaire à la CDP
Le Président: M. fe ministre, votre document est
déposé. J'aimerais également déposer devant cette
Assemblée une lettre de M. Normand Moyer dans laquelle il
démissionne en tant que commissaire à la Commission des droits de
la personne du Québec. Le document est maintenant
déposé.
Dépôt de rapports de commissions. M. le Président de
la commission de l'aménagement et des équipements et
député de Bertrand.
Étude détaillée du projet de loi
16
M. Parent (Bertrand): Oui, M. le Président. J'ai l'honneur
de déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des
équipements qui a siégé les 12 et 13 juin 1988 afin de
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 16, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le
transport par autobus. Ce projet de loi a été adopté avec
amendements.
Étude détaillée du projet de loi
17
J'ai aussi l'honneur de déposer le rapport de la commission de
l'aménagement et des équipements qui a siégé le 14
juin 1988 afin de procéder à l'étude
détaillée du projet de loi 17, Loi modifiant la Loi sur la
sécurité dans les sports. Le projet de loi a été
adopté avec des amendements.
Le Président: M. le député de Bertrand, vos
rapports sont maintenant déposés. Toujours à
l'étape de rapports de commissions, M. le président de la
commission de l'économie et du travail et député de
Verchères.
Étude détaillée du projet de loi
27
M. Charbonneau: M. le Président, je dépose le
rapport de la commission qui a siégé les 9, 13 et 14 juin dernier
afin de procéder à l'étude détaillée du
projet de loi 27, Loi sur la Société de promotion
économique du Québec métropolitain et modifiant la Loi sur
la Société Inter-Port de Québec. Le projet de loi a
été adopté avec des amendements.
Le Président: M. le député de
Verchères, votre rapport de commission est déposé.
M. le président de la commission des institutions et
député de Taillon.
Étude détaillée du projet de loi
10
M. Filion: M. le Président, je dépose le rapport de
la commission qui a siégé les 13 et 14 juin afin de
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 10, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires et d'autres
dispositions législatives en vue d'instituer la Cour unifiée. Le
projet de loi a été adopté avec des amendements, dont un
au titre.
Le Président: Votre rapport est maintenant
déposé, M. le député de Taillon. Est-ce qu'il y a
d'autres dépôts de rapports de commission?
Dépôt de pétitions?
Ce matin, il n'y aura pas d'intervention portant sur une violation de
droit ou de privilège ou sur une question de fait personnel.
Avant de reconnaîre la première principale, j'avise les
membres de cette Assemblée qu'un complément de réponse
sera apporté par M. le Solliciteur général ce matin
à une question posée par M. le député de
Jonquière, concernant les conditions d'embauché des futurs
policiers.
Nous allons maintenant procéder à la période
régulière des questions et réponses orales. Je vais
reconnaître la première principale à M. le whip de
l'Opposition.
QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES
Le concept de "société distincte* dans
l'accord du lac Meech
M. Brassard: M. le Président, lors du discours inaugural,
le premier ministre du Québec affirmait, relativement à l'accord
du lac Meech, "on doit aussi noter, disait-il, que neuf mois se sont
écoulés depuis cet accord sans qu'aucune erreur n'ait
été relevée. "
Ce matin, le Conseil de la langue française en relève une
erreur puisqu'il conclut de façon non équivoque, dans un avis sur
l'accord du lac Meech, que le concept de "société distincte" est
vide, flou et insaisissable. C'est d'ailleurs ce qu'on répétait
depuis un an, comme Opposition officielle.
Cette analyse rejoint celle de bon nombre d'éminents
constitutionnalistes dans le dernier numéro des Cahiers de droit,
en particulier. Excellente revue. Le constitutionnaliste José
Woehrling établit très clairement la primauté du concept
de dualité linguistique comme caractéristique fondamentale du
Canada sur celui de société distincte, au point où le
Québec ne pourrait maintenir l'affichage unilingue français. La
primauté du concept de dualité linguistique est d'ailleurs le
fondement même du projet de loi C-72 sur les langues officielles.
Ma question au ministre responsable des Affaires intergouvernementales
canadiennes: Au lendemain même de la ratification, par la Chambre des
communes, de l'accord du lac Meech, est-ce que le ministre des Affaires
intergouvernementales canadiennes est finalement disposé à
reconnaître que son fameux concept de "société distincte"
est vide, flou, insaisissable et que, par conséquent, l'accord du lac
Meech n'assure aucune protection adéquate du caractère distinct
de la société québécoise, particulièrement
en ce qui concerne ses compétences linguistiques?
Le Président: M. le ministre des Relations internationales
et délégué aux Affaires intergouvernementales
canadiennes.
M. Rémillard: M. le Président, pour certains, le
concept de "société distincte", c'est la voie de
l'indépendance pour le Québec. M. Trudeau, M. Johnston et
d'autres partagent cet avis que je respecte et je sais que l'Opposition le
respecte aussi; on ne le partage pas, on le respecte. Pour d'autres, le concept
de "société distincte", c'est un concept qui est vide de sens.
C'est la position de l'Opposition, ils l'ont manifestée; je la respecte
aussi, mais je ne la partage pas. (10 h 20)
Je ne sais pas si le député de Lac-Saint-Jean a lu l'avis
du Conseil de la langue française. Pour ma part, je l'ai lu très
attentivement. Ce que nous dit cet avis est très intéressant. Cet
avis nous dit, entre autres, que le gouvernement avait raison de ne pas
définir la société distincte par la langue,
premièrement. On sait la grande bataille que vous avez livrée en
commission parlementaire pour que l'on définisse la
société distincte par la langue, alors que le Consei de la langue
française nous dit - c'est en toutes lettres, à la page 37 de cet
avis, je vous donne mes références directement, vous pourrez les
consulter - 'l'évocation d'un seul paramètre linguistique ferait
apparaître le Québec non comme une société, mais
plutôt comme un groupe linguistique distinct. " C'était une
batalle.
Deuxièmement, M. le Président, le Conseil de la langue
française, en ce qui regarde la société distincte, loin de
dire que c'est un concept vide de sens, au contraire, mentionne la grande
valeur du concept de "société distincte" en
suggérant...
Le Président: En conclusion, M. le ministre.
M. Rémillard:... même au gouvernement d'y
référer pour justifier l'affichage commercial unilingue.
Là, vous l'avez en toutes lettres. Et vous me permettrez, M. le
Président, simplement de citer ce passage: "Face à une
décision qui ne lui conviendrait pas, le gouvernement aurait trois voies
et, entre autres voies, plaider la nécessité de ces dispositions
pour le maintien et la promotion du caractère distinct de la
société distincte. " Et le conseil conclut: "Que le concept de
société distincte" serait un recours supplémentaire,
efficace pour défendre non seulement la législation actuelle,
mais aussi future, concernant la langue française. M. le
Président, c'est cela l'avis du Conseil de la langue
française.
Le Président: M. le whip de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Brassard: M. le Président, puisque M. Mulroney
affirmait hier que l'entente du lac Meech n'était pas parfaite, est-ce
que le ministre ne reconnaît pas que la principale et la plus grave des
imperfections de l'accord du lac Meech est que la notion de
"société distincte", subordonnée à celle de
"dualité linguistique", et cela tout le monde le reconnaît,
n'offre aucune garantie d'une protection efficace des compétences
linguistiques du Québec et qu'en vous contentant du flou, du vide, de
l'insignifiant, dans cette négociation, vous avez manqué à
votre devoir de défense des intérêts fondamentaux du
Québec?
Le Président: M. le ministre des Relations
internationales et responsable des Affaires intergouvernementales canadiennes.
M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, encore une fois, ce
n'est pas l'avis du Conseil de la langue française. Je me dois de le
dire au député de Lac-Saint-Jean. Lorsqu'il lira l'avis, ï
verra. Ce
que nous avons dans l'entente du lac Meech, c'est la reconnaissance de
la dualité canadienne et c'est la reconnaissance que le Québec
constitue une société distincte. Nous avons dit à
plusieurs reprises que cette Assemblée nationale a le devoir, le
pouvoir, de protéger et de promouvoir la spécificité
québécoise. Nous avons cette clause de sauvegarde, cette clause
de sauvegarde qui est un plancher et qui permet au Québec de pouvoir
interpréter, en utilisant la clause de la société
distincte, d'interpréter la constitution, non seulement la Charte
canadienne, mais l'ensemble de la constitution canadienne dans le respect de ce
caractère distinct. M. le Président, justement, le Conseil de la
langue française, dans ses conclusions, dit bien qu'on peut avoir droit
au recours supplémentaire pour défendre, non seulement la
législation actuelle, mais toute nouvelle mesure linguistique que le
Québec estimerait devoir prendre pour renforcer et promouvoir la langue
française dans ses champs de compétence. C'est à la page
57, M. le Président.
Le Président: En conclusion.
M. Rémillard: En conclusion, M. le Président, cet
avis du Conseil de la langue française est intéressant et, sur
bien des aspects, il vient confirmer l'avis que nous avions de plusieurs autres
spécialistes parmi les plus éminents au Québec et au
Canada, M. le Président. Et, cet avis, nous le retenons, nous allons
l'étudier. Il y a certains points que nous ne partageons pas, mais les
points les plus fondamentaux sont là. La conclusion est claire,
l'entente du lac Meech est une entente historique pour le Québec et pour
le Canada.
Le Président: M. le whip de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Brassard: M. le Président, puisque le ministre semble
avoir une très haute opinion de l'avis du Conseil de la langue
française - il en parle en bien depuis le début, dans ce
cas-là, je vais le prendre au mot - est-ce qu'il est prêt à
suivre une des recommandations du Conseil de la langue française et
à faire immédiatement un test judiciaire sur la portée de
l'accord du lac Meech en demandant à la Cour d'appel - il est possible
de le faire, on le lui a déjà demandé à plusieurs
reprises - de se prononcer sur la portée réelle du concept de
"société distincte" contenu dans l'accord du lac Meech, en
particulier en référence à la question de l'affichage
unilingue français? Puisqu'il a une si haute opinion de l'avis du
Conseil de la langue française, au moins, qu'il applique une des
principales recommandations du conseil...
Le Président: Vous êtes en additionnelle.
M. Brassard: ...et qu'il fasse un test judi- ciaire
immédiatement sur la portée de l'accord du lac Meech.
Le Président: M. le ministre des Relations internationales
et ministre délégué aux Affaires intergouvernementales
canadiennes.
M. Rémillard: M. le Président, je suis surpris de
la suggestion du député de Lac-Saint-Jean, comme j'ai
été surpris de cette suggestion qui a été faite,
dans un premier temps, par M. Trudeau. Que l'Opposition et M. Trudeau nous
demandent de consulter la Cour d'appel du Québec ou la Cour
suprême du Canada pour connaître la signification de certaines
expressions que nous utilisons dans une constitution, j'en suis surpris, venant
du député de Lac-Saint-Jean, sachant à quel point
l'Opposition s'est battue pour dire au gouvernement qu'on ne devait pas avoir
un gouvernement par les juges, que le gouvernement devait prendre ses
responsabilités. Et vous voulez maintenant qu'on fasse une constitution
en se référant aux juges?
Le Président: M. le whip de l'Opposition, en
additionnelle.
Des voix:...
Le Président: Un instant, un instant!
M. Rémillard: Je voudrais simplement terminer.
Le Président: En conclusion, M. le ministre.
M. Rémillard: La constitution d'un pays, c'est une
responsabilité qui appartient à des gouvernements, qui appartient
à des élus, qui appartient au peuple, et c'est la
responsabilité que nous prenons, M. le Président.
Le Président: M. le whip de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Brassard: Le ministre ne reconnaît-il pas que c'est son
propre gouvernement qui favorise le gouvernement par les juges? En mettant dans
un accord constitutionnel des clauses aussi vagues, aussi floues, aussi
insignifiantes, il oblige ainsi les tribunaux à se prononcer, à
définir et à clarifier. Est-ce qu'il ne reconnaît pas que
c'est son gouvernement qui instaure le gouvernement par les juges?
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre des Relations internationales
et ministre délégué aux Affaires intergouvernementales
canadiennes.
M. Rémillard: M. le Président, évidemment,
je comprends que peut-être le député de Lac-Saint-Jean a
dit des choses qui dépassent
vraiment sa pensée. Dire qu'une constitution, c'est
insignifiant... Ce n'est pas insignifiant, une constitution, M. le
Président, une constitution, c'est un contrat social, c'est la structure
du pouvoir.
Des voix:...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Rémillard: M. le Président, je le dis pour le
chef de l'Opposition comme je le dis pour le député de
Lac-Saint-Jean. Ce que nous faisons avec l'entente du lac Meech, c'est une
pièce majeure pour la constitution du Canada et pour le Québec.
Et, je suis surpris de cette réaction du député de
Lac-Saint-Jean parce que, pendant un an, nous avons discuté de l'entente
du lac Meech ici, en Chambre, par les questions qu'il a bien voulu me poser et
en dehors de cette Chambre. Je croyais qu'il avait vraiment compris.
Maintenant, je m'aperçois qu'il y a encore des ambiguïtés.
Je peux lui dire que ces ambiguïtés, qui vont demeurer dans
l'entente du lac Meech, ne touchent en rien les droits et les pouvoirs
essentiels du Québec. Bien au contraire, l'entente du lac Meech vient
donner au Québec les pouvoirs dont il a besoin, par des règles
d'interprétation qui sont maintenant dans notre constitution, pour
interpréter l'ensemble de la constitution canadienne en fonction du fait
que le Québec est une société distincte.
Le Président: M. le whip de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Brassard: En additionnelle. Puisque le ministre a une si haute
opinion de l'avis du conseil et puisqu'il a une si haute opinion du contenu de
l'accord du lac Meech, pourquoi a-t-il si peur, pourquoi craint-il tant de
demander aux tribunaux de se prononcer sur le contenu de l'accord du lac Meech
et sur sa portée? Qu'est-ce qui lui fait peur? Qu'est-ce qu'il
craint?
Le Président: M. le ministre des Relations internationales
et ministre délégué aux Affaires intergouvernementales
canadiennes.
M. Rémillard: M. le Président, concernant cet avis
du Conseil de la langue française, j'ai dit que le gouvernement voyait
là la confirmation de certains avis qu'il avait reçus d'experts
qui sont parmi les plus reconnus en matière constitutionnelle tant au
Québec qu'au Canada. (10 h 30)
Sur certains autres points, nous sommes beaucoup plus nuancés et
nous voyons mal le raisonnement. Mais sur des points majeurs concernant la
société distincte, entre autres, ce sont des
éléments qui nous apparaissent comme très
intéressants. Et je répète ce que j'ai dit tout à
l'heure, M. le Président. Faire une constitution relève du
pouvoir d'un gouverne- ment, d'une assemblée législative. Et
c'est cette Assemblée législative qui a voté, le 23 juin
1987, cette résolution qui confirme l'entente du lac Meech pour le
Québec, parce que nous avions cinq conditions et que nous avons
reçu des réponses positives sur ces cinq conditions de la part de
nos partenaires de la Fédération.
Le Président: En additionnelle, toujours. M. le
député de Taillon, en additionnelle.
M. Filion: Oui, en additionnelle au ministre responsable de la
Charte de la langue française. Je voudrais savoir du ministre depuis
quand il a en main l'avis du Conseil de la langue française dont il est
question depuis ce matin à cette période de questions. Et
également, je voudrais savoir du ministre comment il explique que le
gouvernement n'a pas adopté une attitude plus vigoureuse à
l'égard du projet de loi C-72 alors que l'avis du Conseil de la langue
française est précisément un avis au gouvernement d'agir
systématiquement, visiblement et rapidement pour occuper tout le terrain
de sa spécificité?
Le Président: M. le ministre responsable de l'application
de la Charte de la langue française. M. le ministre.
M. Rivard: Le député de Taillon pose deux
questions. En ce qui concerne la réception de cet avis, c'est au tout
début de juin qu'on m'a fait connaître le contenu de l'avis.
Deuxième question, en ce qui concerne le projet de loi C-72, j'ai
souvent souligné en cette Chambre que la cohésion, la
cohérence d'un gouvernement veut que chacun des ministres s'occupe de
son champ de compétence et la deuxième question est du champ de
compétence du ministre délégué aux Affaires
intergouvernementales canadiennes.
Le Président: M. le député de Taillon, en
additionnelle.
M. Filion: En additionnelle, je voudrais savoir du ministre s'il
a pris connaissance de la recommandation du Conseil de la langue
française au gouvernement d'occuper, secteur par secteur, tout son champ
de compétence. Si oui, je voudrais qu'il m'explique comment il concilie
cette recommandation avec l'attitude molle du gouvernement à
l'égard du projet de loi C-72 qui, par son article 42, empiète
directement sur nos compétences linguistiques.
Le Président: M. le ministre responsable de l'application
de la Charte de la langue française. M. le ministre.
M. Rivard: M. le Président, je pense que toutes les
réponses qui devaient être données au député
de Taillon ou au whip de l'Opposition ont été données en
cette Chambre en ce qui concerne la position du gouvernement face au projet
de loi C-72. De mon point de vue, puisque je suis responsable de
l'application de la Charte de la langue française-Une voix: On ne
peut rien vous cacher! Le Président: À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Rivard: Puisque je suis responsable de l'application de la
Charte de la langue française, il est évident que tant que le
gouvernement fédéral n'a pas posé de geste précis -
c'est l'explication qui a été donnée constamment dans
cette Chambre, en ce qui concerne l'utilisation d'outils ou de programmes de
promotion de l'une des deux langues officielles du Canada - il n'est pas
question, pour ce gouvernement, de contester la constitutionnalité de
cette loi.
Une voix:...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député de Verchères, en principale. Je vais maintenant
reconnaître M. le député de Ver-chères, en
principale.
Des voix:...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! La
période de questions n'est pas terminée. Je vais
reconnaître le député de Verchères.
Non-intervention d'Urgence
environnement lors d'un déversement
d'acide nitrique à McMasterville
M. Charbonneau: M. le Président, je voudrais remercier mes
collègues de leur bon goût. Pour ceux que cela intéresse,
je pourrai toujours leur fournir l'adresse.
M. le Président, malheureusement, j'aurais aimé que mon
vis-à-vis, le ministre de l'Environnement, soit lui aussi au vert et en
Chambre aujourd'hui, alors qu'il est absent depuis quelques jours sans doute
pour des bonnes raisons, sauf que, lundi soir, dans mon comté, à
McMasterville, à l'usine de CIL, il y a eu un déversement
accidentel de 200 gallons d'acide nitrique.
Ce qui est le plus discutable dans cet incident, c'est qu'il y a eu un
appel téléphonique d'Urgence environnement à la compagnie.
C'est le service de sécurité qui a répondu et qui a
indiqué que l'accès des lieux était interdit, à
moins d'une autorisation expresse du directeur de l'usine. Le directeur de
l'usine a effectivement téléphoné à Urgence
environnement une heure plus tard pour donner des explications. À la
suite de ces explications, Urgence environnement a décidé de ne
pas se rendre sur les lieux.
La question que je dois maintenant poser à la
vice-première ministre et ancienne critique à l'environnement est
la suivante. Est-ce qu'elle et son gouvernement trouvent normal que, dans des
circonstances comme celle-là, le ministère de l'Environnement,
les fonctionnaires d'Urgence environnement se soient contentés de
vérifications téléphoniques et n'aient pas
décidé, quelle que soit la réponse, de se rendre sur les
lieux pour faire des vérifications d'eux-mêmes?
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: M. le Président, vous comprendrez que poser un
jugement sur un dossier qui n'est pas le mien est assez difficile. Je pense que
le premier, le député de Verchères, dans sa verdeur, va
bien comprendre qu'on ne peut pas... Je veux bien qu'il représente les
verts à ce point, mais il doit comprendre qu'on ne peut pas lui
répondre aussi explicitement qu'il voudrait que je le fasse
aujourd'hui.
Je vais prendre note de sa question. Dès que mon collègue,
le ministre de l'Environnement, sera de retour en cette Chambre, il se fera
sûrement un plaisir de donner ses opinions et, en même temps, un
état de la situation, et d'actualiser le dossier.
M. Charbonneau: M. le Président.
Le Président: M. le député de
Verchères, en additionnelle.
M. Charbonneau: Si la ministre le permet, on va rester encore sur
le vert un certain temps. Je voudrais lui demander de vérifier
également auprès de son collègue si c'est normal que les
fonctionnaires du ministère de l'Environnement et d'Urgence
environnement ne connaissent pas les procédures régulières
d'urgence des entreprises qui représentent des potentiels de risques
importants à l'égard de l'environnement, compte tenu de la nature
de leurs opérations industrielles?
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: Je ne peux que donner la même réponse. Je
pense que ce que demande le député de Verchères est une
question d'opinion. Je suis certaine que le ministre de l'Environnement lui
fera connaître son opinion.
M. Charbonneau: M. le Président, une dernière
question.
Le Président: Toujours en additionnelle, M. le
député de Verchères.
M. Charbonneau: Toujours en additionnelle. J'aimerais que la
ministre vérifie auprès de son collègue si c'est normal,
comme on l'apprend ce matin dans La Presse, que les fonctionnaires du
ministère de l'Environnement considèrent qu'ils n'ont pas le
pouvoir d'imposer leur présence sur les lieux lors d'incidents comme
celui-là parce
qu'ils craignent d'être accusés d'effraction, alors que la
Loi sur la qualité de l'environnement est très claire, notamment
aux articles 119, 120, 121 et 123, et en particulier à l'article 119,
qui dit clairement que les fonctionnaires autorisés peuvent
pénétrer sur des lieux, procéder à des
vérifications et à des inspections?
Est-ce qu'elle trouve normal que des fonctionnaires craignent à
ce point que, finalement, ils décident de ne pas se rendre sur les
lieux?
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: M. le Président, je m'en voudrais d'exprimer
une opinion sans vraiment connaître le dossier. Encore une fois, je
prends avis de la question. Le ministre de l'Environnement apportera
sûrement des réponses ou un éclairage nouveau à ces
questions.
Le Président: M. le député d'Ungava, en
principale.
Ventes de l'électricité de la Baie James
à la Central Maine Power
M. Claveau: Oui, M. le Président. On se souviendra que le
8 mars dernier, ici même en cette Chambre, le premier ministre du
Québec déclarait pathétiquement qu'il vivait ce qu'il
appelait l'un des meilleurs moments de sa carrière politique. À
ce moment-là, il nous annonçait la continuation des travaux de
construction à la Baie James, prévue d'ailleurs par
Hydro-Québec, et qui était liée à des ventes
d'énergie, disait-il, garanties signées de 2400 mégawatts.
On vient d'apprendre que tel n'est pas le cas. En effet, si on se
réfère au journal Le Soleil du 11 février 1987, on
pouvait lire: "Hydro-Québec et la Central Maine Power ont signé
hier une lettre d'entente qui conduira dans quelques mois à la
conclusion du plus important et du plus long contrat d'exportation
d'électricité de l'histoire de la société
d'État québécoise."
On vient donc d'apprendre que tel n'est pas le cas et qu'avant
même que les travaux soient commencés à la Baie James, on
encaisse déjà des pertes de 9 000 000 000 $ et de plus de 500
mégawatts sur les contrats qui étaient prévus. Comment le
ministre de l'Énergie et des Ressources du Québec, lui qui se
prétend fin négociateur, peut-il se satisfaire d'un tel
résultat et comment peut-il continuer à prétendre que les
acheteurs d'électricité pour le Québec se bousculent
à nos portes comme il le clamait si bien en campagne
électorale?
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: M. le Président, si le député
d'Ungava avait lu tous les journaux ce matin, il n'aurait pas posé cette
question. Je vais lui expliquer ce qui s'est produit.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! (10
h 40)
M. Ciaccia: Voulez-vous avoir la réponse ou vous ne la
voulez pas? L'année dernière, il y a eu une annonce d'une lettre
d'entente signée avec Central Maine pour 900 mégawatts. Il y
avait certains délais de livraison dans la lettre. Les premiers 400
mégawatts devaient être livrés en 1992. La deuxième
partie du contrat commençait en 1995. Avec la livraison de
l'électricité au Maine, il y avait aussi une participation
d'Hydro-Québec dans une ligne de transmission dans l'État du
Maine pour créer une autoroute de l'électricité dans les
États américains pour Hydro-Québec. Ce qui s'est produit,
c'est que, pour maintenir les délais prévus pour la livraison de
l'électricité et pour obtenir les consentements
nécessaires par les organismes réglementaires, la Public
Utilities Commission, Hydro-Québec avait deux choix: soit d'attendre ces
consentements pour livrer tous les 900 mégawatts plus la ligne de
transmission ou procéder immédiatement avec les 400
mégawatts, plus la ligne de transmission et obtenir les autres 500,
finaliser les autres 500 dans la prochaine année.
C'est cela qu'Hydro-Québec a fait. Ils ont finalisé les
400 mégawatts. Ils vont procéder avec les travaux pour la ligne
de transmission qui va nous permettre de livrer jusqu'à 2000
mégawatts dans l'État du Maine et, au cours de la prochaine
année, nous allons conclure pour les autres 500 mégawatts. Il n'y
a rien de changé, M. le Président.
Le Président: M. le député d'Ungava, en
additionnelle. M. le député d'Ungava, en additionnelle.
M. Claveau: Oui. Le ministre de l'Énergie et des
Ressources peut-il confirmer la déclaration du gouverneur du Maine
à savoir que le contrat dont il était question, les chiffres
qu'on retrouve dans le contrat ne correspondent pas aux chiffres qu'on retrouve
dans la lettre d'entente de février 1987.
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources. M. le ministre.
M. Ciaccia: M. le Président, je viens juste de donner
l'explication. Peut-être que le député d'Ungava pourrait
continuer de citer l'article dans le journal. Je vais le citer pour lui "Le
ministre John Ciaccia explique que, pour se conformer à la
volonté de la Public Utilities Commission du Maine, seuls les 400
premiers mégawatts prévus à l'entente initiale feront
l'objet de cette signature."
Il y aura une signature de contrat pour accélérer les
travaux. Un autre contrat sera
élaboré et ratifié d'ici à 1989 pour
officialiser la deuxième tranche de l'accord qui portait sur 900
mégawatts. C'est l'explication.
M. le Président, dans les circonstances, suivant les conditions
de la lettre d'entente signée par Hydro-Québec - c'est
Hydro-Québec qui a négocié cette lettre d'entente - la
décision d'aller de l'avant maintenant avec 400 mégawatts et avec
la ligne de transmission qui va ouvrir des possibilités d'exportation
jusqu'à 2000 mégawatts...
Le Président: En conclusion, M. le ministre.
M. Ciaccia: ...c'est la bonne décision
qu'Hydro-Québec et le gouvernement ont prise.
Le Président: M. le député d'Ungava, en
additionnelle.
M. Claveau: M. le Président, en février 1987, on
annonçait une vente ferme garantie de 15 000 000 000 $, soit 900
mégawatts. Aujourd'hui, on nous dit qu'il y a 400 mégawatts de
vendus et que pour les 500 autres, on ne sait pas quand cela va venir. Est-ce
que le ministre de l'Énergie et des Ressources peut donner à la
population du Québec la garantie que les 500 mégawatts dont il
parle vont être signés dans les délais qu'il
prévoit?
Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources.
M. Ciaccia: L'année dernière, je regrette, on n'a
pas annoncé la signature ferme de 900 mégawatts. On a
annoncé la signature d'une lettre d'entente de 900 mégawatts et
on a étalé toutes les conditions de cette lettre d'entente.
Je voudrais dire au député d'Ungava pour le rassurer que
depuis la signature de cette lettre d'entente, nous avons signé d'autres
contrats à des prix supérieurs aux conditions qui sont incluses
dans la lettre d'entente du Central Maine. Nous avons signé des contrats
excédant 1000 mégawatts.
Je peux assurer au député d'Ungava et à cette
Assemblée que nous n'aurons aucune difficulté à
concrétiser les 500 mégawatts additionnels de la lettre d'entente
parce qu'ils sont à un prix inférieur à celui auquel nous
vendons maintenant. Alors, le député d'Ungava n'a pas à se
préoccuper et à s'inquiéter. HydroQuébec et nous
allons faire nos devoirs et...
Le Président: En conclusion, M. le ministre.
M. Ciaccia: ...les 500 mégawatts seront signés dans
les délais prévus pour livrer l'électricité pour
1995, selon la volonté du gouvernement, suivant les conditions de la
lettre d'entente et...
Le Président: En conclusion, M. le ministre.
M. Ciaccîa: ...les besoins - le député
d'Ungava doit le comprendre - d'électricité
québécoise dans les États nord-américains des
États-Unis.
Le Président: Je vais maintenant reconnaître la
quatrième principale à M. le chef de l'Opposition.
Modifications possibles au projet de loi sur les
services ambulanciers
M. Chevrette: Merci, M. le Président. On sait qu'il y a eu
dépôt en cette Chambre d'un projet de loi 34 sur les services
ambulanciers. On sait, à la suite des consultations particulières
de la semaine dernière, que la majorité des groupes, à
l'exception d'un seul, exigeaient des amendements majeurs sur le fond.
On sait que le ministre est embarrassé par ce projet de loi.
Lundi matin, il avait convoqué les parlementaires à 10 heures le
matin en commission. Le ministre n'a même pas daigné se
présenter, sous prétexte qu'il était au comité de
législation, pour préparer des amendements.
Encore aujourd'hui, le ministre doit aller au Conseil des ministres avec
le projet de loi. On sait également qu'il y a un caucus à 18
heures, car - on doit le dire à la population - plusieurs
députés ministériels sont fort embarrassés avec ce
projet de loi.
Je voudrais savoir de la part du ministre s'il entend déposer,
avant la fin de la présente session, un projet de loi modifié et
s'il entend réaliser l'engagement que la CSN prétend qu'elle a
avec lui, c'est-à-dire procéder à l'adoption du projet de
loi avant l'ajournement de cette session?
Le Président: M. le ministre délégué
à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux. M. le
ministre.
M. Dutil: M. le Président, le chef de l'Opposition vient
de donner l'agenda des ministres et des parlementaires. Effectivement, le
mercredi, en général, il y a un Conseil des ministres auquel
assistent les ministres, bien sûr. Et, en général, il y a
un caucus une fois par semaine et il a lieu ce soir parce que le premier
ministre était absent, hier. C'est un caucus régulier, alors rien
de nouveau sous le ciel à cet effet.
Quant à la dernière remarque du chef de l'Opposition, j'ai
dit la semaine dernière et je le répète qu'il n'y a aucun
engagement qui a été pris de ma part, à savoir qu'un
projet de loi soit adopté à l'Assemblée nationale pour la
fin de cette session. Nous en sommes à l'étude article par
article. L'article 2, premier paragraphe, après douze heures de
discussions, vient d'être adopté. Cet après-midi,
j'espère que nous entreprendrons l'article 2, deuxième
paragraphe!
Le Président: M. le chef de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Chevrette: M. le Président, est-ce que le ministre peut
être sérieux et nous dire s'H est exact qu'il s'est
présenté au comité de législation, lundi matin,
afin d'apporter des amendements? Peut-il nier ce qu'il a dit à des
propriétaires ambulanciers, qu'il allait au Conseil des ministres pour
exiger des amendements? Peut-il nier le fait que le leader du gouvernement ait
dit au leader de l'Opposition que le ministre délégué
à la Santé et aux Services sociaux s'apprêtait à
apporter des amendements? Peut-il être sérieux et répondre
correctement aux questions qu'on lui pose?
Le Président: M. le ministre délégué
à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux. M. le
ministre.
M. Dutil: M. le Président, les discussions du Conseil des
ministres sont connues après que le Conseil des ministres a
siégé.
Le Président: M. le chef de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Chevrette: M. le Président, peut-il nier qu'il est
allé présenter des amendements au comité de
législation et que celui-ci l'a référé
précisément au Conseil des ministres? Peut-il nous dire s'il sera
question au Conseil des ministres des amendements de fond quant au projet de
loi 34?
Le Président: M. le ministre délégué
à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux. M. le
ministre.
M. Dutil: M. le Président, ce que je peux dire et ce que
le chef de l'Opposition sait, c'est qu'il y a une obstruction
systématique actuellement de la part de l'Opposition au projet de loi.
Nous considérons que c'est un bon projet de loi. L'Opposition n'est pas
d'accord avec celui-ci et elle désire empêcher son adoption. C'est
l'affaire de l'Opposition, nous sommes dans un système parlementaire. Si
l'Opposition veut le considérer comme tel, c'est son affaire.
Le Président: M. le leader de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Chevrette: M. le Président, si le ministre
considère que son projet de loi est bon, comment peut-il nous expliquer
qu'il ne s'est même pas présenté en commission
parlementaire, lundi matin? Si son projet de loi est si bon que cela, peut-il
nous expliquer pourquoi ses collègues à la commission même,
au moins deux de ses collègues, ont demandé des amendements de
fond? Comment peut-il expliquer, à ce moment- là, qu'il tente de
faire porter l'odieux sur l'Opposition, alors qu'il n'a même pas le
courage politique de déposer les amendements requis par ses propres
collègues?
Le Président: M. le ministre délégué
à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux. M le
ministre.
M. Dutil: M. le Président, quand I Opposition discute
pendant deux heures sur un article qui spécifie qu'il y aura la
création d'un organisme sans but lucratif, appelé Corporation
d'urgences-santé*, quand on discute pendant deux heures sur ce sujet, il
est bien évident que l'Opposition ne veut pas que ce projet de loi
chemine, pour les raisons qui lui appartiennent et que je respecte,
personnellement.
Le Président: M. le leader de l'Opposition, en
additionnelle?
M. Gendron: Oui, en additionnelle, M. le Président.
Le Président: M. le leader de l'Opposition, en
additionnelle. (10 h 50)
M. Gendron: Comment le ministre délégué
à la Famille peut-il être sérieux et faire accroire
à la population que c'est à cause de l'obstruction de
l'Opposition dans ce dossier qu'il ne peut pas cheminer dans son projet de loi,
alors que, la semaine dernière, il y avait obstruction de l'Opposition
pour empêcher le gouvernement d'annuler le recensement et cinq heures
après, après une loi spéciale, la loi a été
adoptée?
Le Président: M. le ministre délégué
à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux M. le
ministre.
M. Dutil: M. le Président, est-ce que je dois comprendre
que l'Opposition suggère une motion de clôture? Je pense...
Une voix: Fais ta job, fais-la, mon niaiseux!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Dutil: M. le Président, entendons-nous bien.
Le Président (M. Saint-Roch): Allez, M. le ministre, vous
avez la parole. À l'ordre, s'H vous plaît! À l'ordre, s'H
vous plaît! M. le leader du gouvernement, une question de
règlement.
M. Gratton: M. le Président, je ne sais si, effectivement,
c'est la suggestion de l'Opposition
d'imposer ce qu'on appelle la clôture, mais encore faudrait-il
avoir l'assurance que l'Opposition ne se retirera pas comme ils l'ont fait pour
l'autre projet de loi.
Le Président: Alors, M. le ministre, vous avez toujours la
parole. Vous avez toujours la parole, M. le ministre
délégué à la Famille, à la Santé et
aux Services sociaux.
M. Dutil: M. le Président, c'est un projet de loi
important et sérieux. C'est un projet de loi qui mérite
d'être discuté article par article. J'ai toujours montré
une ouverture dans tous les projets de loi où j'ai été
impliqué et où il y a eu des discussions en commission
parlementaire. J'entends le député de Gouin qui ricane, mais le
député de Gouin se rappellera que, lors de la discussion article
par article sur le Conseil de la famille, à la suite d'une argumentation
de très grande qualité qu'il avait faite, j'avais retiré
un article du projet de loi. Alors, M. le Président, dans les
discussions article par article, j'ai toujours considéré les
arguments de valeur, qu'ils viennent de quelque côté que ce soit
de la Chambre, des parlementaires qui siègent en commission. Nous
pourrons...
Le Président: À l'ordre! À l'ordre, s'il
vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre,
s'il vous plaît!
En conclusion, M. le ministre. M. le ministre
délégué à la Famille, à la Santé et
aux Services sociaux, en conclusion. À l'ordre, s'il vous
plaît!
Je m'excuse, M. le leader adjoint de l'Opposition, s'il vous
plaît! M. le leader adjoint de l'Opposition, s'il vous plaît! En
conclusion, M. le ministre.
M. Dutil: En conclusion, M. le Président, quand le
ministre, en commission parlementaire, refuse des amendements, il est
têtu et, quand il les accepte, il a un projet de loi qui n'était
pas adéquat. Alors, on ne pourra jamais contenter l'Opposition sur ce
point.
Le Président: Je vais reconnaître une additionnelle
à M. le député de Gouin. Une additionnelle, M. le
député de Gouin.
M. Rochefort: M. le Président, le ministre
reconnaît-il que, s'il acceptait d'apporter des amendements sur les
questions fondamentales qui posent des problèmes dans son projet de loi,
d'une part, a l'égard des propriétaires ambulanciers, mais,
deuxièmement, aussi à l'égard d'un système
d'Urgences-santé qui fonctionne bien actuellement et qui, par les
propositions législatives apportées par le ministre, sera
chambardé et posera des problèmes de qualité et
d'accès à des services d'urgence... Déposez des
amendements sur ces questions et votre projet de loi pourra être
adopté.
Le Président: M. le ministre délégué
à la Famille, à la Santé et aux Services sociaux.
M. Dutil: Le député de Gouin reconnaît-il que
nous n'avons même pas pu aborder le débat de fond des articles
cruciaux, puisque nous n'y sommes pas parvenus? Nous ne sommes pas parvenus
à nous rendre à ces articles-là.
Le Président: À l'ordre! À l'ordre, s'il
vous plaît!
M. Dutil: Après plus de deux jours de discussions en
commission parlementaire, nous en sommes au paragraphe 1° de l'article 2.
Cet après-midi, nous en serons au paragraphe 2° de l'article 2.
Le Président: Je vais reconnaître la
cinquième principale ce matin à M. le whip du gouvernement. M. le
whip du gouvernement, vous avez la parole.
Remboursements d'impôt provincial
effectués à plus de 2 500 000 contribuables
M. Vallières: M. le Président, nous savons tous que
le ministère du Revenu n'a plus à se faire une réputation
en ce qui a trait à la perception des impôts des contribuables.
À ce moment-ci de l'année, il serait peut-être, par
ailleurs, plus dans le ton de parler de remboursements d'impôt. Je sais
à cet égard que le ministre du Revenu avait fait, en particulier
l'année dernière, des efforts considérables pour
raccourcir les délais des remboursements aux contribuables
québécois. Ma question s'adresse au ministre du Revenu. Est-ce
qu'il peut nous indiquer si les contribuables du Québec sont en mesure
de s'attendre à un remboursement plus rapide cette année? Quelles
sont les mesures qu'il a mises de l'avant afin d'y arriver? Et croit-il pouvoir
changer le vieil adage au Québec qui indique que le ministère du
Revenu est un bien bon collecteur, mais un très mauvais payeur?
Le Président: M. le ministre du Revenu. M. le
ministre.
M. Séguin: Merci, M. le Président. Je remercie mon
collègue, député de Richmond, de me donner l'occasion de
faire le point sur cette question. En effet, vous savez comme moi, M. le
Président, que la question des remboursements d'impôt, chaque
année, est une question fort importante et cruciale pour les
contribuables. Je salue à ce sujet, M. le Président, les efforts
qu'a faits le ministère du Revenu depuis plusieurs années, non
pas uniquement, je l'avoue, depuis que nous sommes au pouvoir, mais depuis
plusieurs années. Je salue l'effort particulier des employés du
ministère qui ont voulu vraiment
améliorer le système des remboursements. Je dois dire que
mon prédécesseur, l'actuel leader du gouvernement, qui
était à ce moment-là ministre du Revenu, avait
commencé une manoeuvre particulière pour qu'on puisse
régler la question des remboursements. Cette année, je suis
particulièrement fier de vous dire aujourd'hui que nous avons
terminé l'opération des remboursements d'impôt pour
l'ensemble des contribuables du Québec. C'est la première fois
qu'une administration fiscale en Amérique du Nord réussit dans ce
délai à envoyer la presque totalité des
remboursements.
En terminant, je vais vous donner quelques chiffres. Des 4 000 000 de
personnes qui ont fait des rapports d'impôt, nous avons émis 3 417
491 avis de cotisation, dont 2 526 320 étaient accompagnés d'un
chèque de remboursement. Cela veut dire que, au moment où je vous
parle, la mission est accomplie au ministère du Revenu.
Une voix: Cela veut dire qu'on n'a pas trop
"collecté".
Le Président: M. le leader de l'Opposition, en
principale.
Légalisation de programmes de
réadaptation de la CSST invalidés par la Cour d'appel
M. Gendron: Lundi dernier, j'avais l'occasion d'interroger le
ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et
ministre du Travail, responsable de la CSST, à la suite du jugement
rendu, le 3 juin dernier, par la Cour d'appel, invalidant les dispositions qui
ont pour conséquence que les accidentés du travail sont
menacés et sont très inquiets, en particulier, concernant toute
la question des programmes de réadaptation qui ont été
déclarés invalides par la cour.
Une des questions que je posais au ministre du Travail, c'est: Est-ce
que le conseil d'administration de la CSST a pris une décision? La
réponse a été: Non, le conseil d'administration n'a pas
encore arrêté complètement sa décision concernant
l'éventualité d'aller en appel de cette décision. Or, j'ai
l'information que c'est inexact, le conseil d'administration a bel et bien
statué à savoir, qu'il ne lui apparaît pas que le fait
d'aller en appel réglerait la situation. C'est tellement vrai qu'il a
acheminé un amendement au ministre du TravaS.
La question que je pose, c'est: Est-ce que le ministre du Travail
maintient toujours que le conseil d'administration de la CSST n'a pas
statué? Deuxièmement, quelle réception a-t-il
accordée à l'amendement que le conseil d'administration lui a
proposé?
Le Président: M. le ministre de la Main-ci Oeuvre et de la
Sécurité du revenu et ministre du Travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président,
étant donné que le leader de l'Opposition officielle,
député d'Abitibi-Ouest, avoue très honnêtement qu'il
s'agit de la même question qu'il m'a posée lundi dernier, j'aurais
la tentation de lui répondre que la même réponse
s'applique. Quant à l'argument plus pointu, plus précis qu'il met
de l'avant dans sa question additionnelle d'aujourd'hui, je lui indiquerai que
tous les aspects juridiques du problème n'ont pas été
vidés et qu'avant d'inviter l'Assemblée nationale du
Québec à se prononcer sur la possibilité d'un projet de
loi ou sur le contenu d'un projet de loi, il apparaît opportun au
gouvernement de vider tout l'aspect juridique du problème parce que ces
aspects juridiques affectent les droits de milliers de travailleurs
accidentés.
Le Président: M. le leader de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Gendron: Est-ce que le ministre peut nous indiquer si, oui ou
non, il a reçu un amendement majeur du conseil d'administration de la
CSST lui demandant de modifier l'article 570 afin de légaliser les
anciens programmes de réadaptation?
Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu et ministre du Travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M le Président, le leader
de l'Opposition officielle et député d'Abitibi-Ouest devrait
connaître davantage le fonctionnement de l'appareil gouvernemental, lui
qui a occupé d'importantes fonctions sous l'ancien gouvernement. En ce
qui concerne les textes législatifs, ils sont habituellement
approuvés par divers comités au sein de l'appareil gouvernemental
et soumis à l'Assemblée nationale du Québec pour
considération dans le processus que vous connaissez bien.
Le Président: M. le leader de l'Opposition. (11
heures)
M. Gendron: Oui, M. le Président, c'est exact que j'ai
occupé d'importantes fonctions mais, comme ministre, je ne disais pas
l'inverse de l'information que j'avais. La question est très claire, et
je sais que cela n'intéresse pas le ministre de répondre aux
questions. Mais ma question est précise. Est-ce que, oui ou non, vous
avez reçu un amendement de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, à la suite d'une deuxième
rencontre du conseil d'administration, vous demandant, comme ministre,
d'apporter par voie législative, un amendement qui permettrait aux
accidentés de recouvrer le droit qu'ils veulent avoir concernant leur
indemnité, en particulier pour ce qui est des programmes de
réadaptation?
Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu et ministre du Travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je comprends tout
l'intérêt que le député d'Abttibi-Ouest et leader de
l'Opposition officielle porte à toute la question de la procédure
qui doit entourer le cheminement d'une modification législative. Je lui
indiquerai qu'en tant que ministre du Travail, responsable devant cette Chambre
de la Commission de la santé et de la sécurité du travail,
ce qui m'importe davantage, c'est de m'assurer que les travailleurs ne se
retrouvent pas dans un vide juridique. Ce qui m'importe davantage, c'est de
m'assurer que ces travailleurs continuent de recevoir les prestations
auxquelles ils ont droit. Et, ce qui m'importe également, c'est de me
pencher très attentivement sur la non-indexation des pensions de ces
gens-là, non-indexation causée par une négligence du
gouvernement péquiste.
Le Président: M. le leader de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Gendron: Le ministre du Travail admet-il qu'en
répondant comme il le fait...
Une voix: II ne dit pas la vérité.
M. Gendron: ...il ne dit pas la vérité? Il laisse
croire qu'il n'a pas obtenu l'amendement qui a été envoyé
par le conseil d'administration de la Commission de la santé et de la
sécurité du travail. Et, rappelez-vous, M. le Président,
c'est lui, le ministre, qui, lundi dernier, m'a dit que le conseil
d'administration n'avait pas statué. C'est inexact. Je veux lui faire
dire s'il admet que les informations qu'il a, aujourd'hui, sont contraires
à ce qu'il nous a dit lundi dernier?
Une voix: C'est cela.
Le Président: M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu et ministre du Travail. M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): J'admets et je
répète devant cette Chambre, M. le Président, que sur le
plan juridique, le dossier n'a pas encore été complètement
vidé et qu'il m'apparaît qu'une question de cette importance
mérite de recevoir les décisions finales de notre système
judiciaire avant que l'Assemblée nationale soit saisie de quelque
amendement que ce soit à un projet de loi. Je pense qu'il s'agit
là d'un minimum requis avant d'agir. Merci, M. le Président.
Le Président: Tel qu'annoncé
précédemment, je vais reconnaître M. le Solliciteur
général à un... Si vous me permettez. En complément
de réponse.
Réponse différée
Les conditions d'admission à l'Institut de
police de Nicolet
M. Marx: M. le Président, vendredi passé le
député de Jonquière a posé une question qui touche
le ministère du Solliciteur général. Malheureusement,
j'étais absent durant la période de questions. J'étais
à Montréal afin de m'adres-ser à l'Association des
psychologues sur la violence conjugale. Mais ceci dit, j'ai la réponse
aujourd'hui en ce qui concerne les conditions d'embauché des futurs
policiers.
Un comité interministériel a été
formé il y a quelques mois pour examiner le programme de formation, les
conditions d'admission au programme et les conditions d'embauché des
futurs policiers. Ce comité est formé de représentants des
ministères du Solliciteur général et de
l'Éducation, de l'Institut de police et des cégeps. D'ici la fin
de juin, mon collègue de l'Éducation et moi-même devrions
recevoir les recommandations et soyez assuré, M. le Président,
que nous vous ferons part de nos décisions dès qu'elles seront
arrêtées.
Le Président: M. le député de
Jonquière, en additionnelle.
M. Dufour: Est-ce que le ministre, après une
réponse qui est pratiquement le mot à mot de celle du ministre de
l'Éducation, est prêt à nous informer ce matin qu'il va
donner suite à la réforme policière qu'il a tant
vantée dans le passé et à laquelle il s'est
engagé?
Le Président: M. le Solliciteur général.
M. Marx: Oui, M. le Président. En ce qui concerne la
question de la formation des futurs policiers, quand j'aurai le rapport et
quand le ministre de l'Éducation aura reçu la sienne, nous
prendrons les mesures qui s'imposent dans ce dossier.
Le Président: Alors, fin de la période
régulière de questions.
Ce matin, il n'y a pas de vote reporté.
Motions sans préavis.
Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du
gouvernement.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Gratton: M. le Président, j'avise l'Assemblée
qu'aujourd'hui après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et,
si nécessaire, de 20 heures à 24 heures...
M. Gendron: M. le Président, question de
règlement.
Le Président: Sur une question de règle-
ment, M. le leader de l'Opposition.
M. Gendron: Très simplement, aujourd'hui, étant
donné l'ampleur des avis, en particulier pour les projets de loi
privés, si on doit suspendre 30 secondes pour des questions de
déplacement, qu'on le fasse tout de suite, mais j'aimerais bien qu'on
entende les avis transmis par le leader du gouvernement.
Le Président: Je suis entièrement d'accord avec
vous, M. le leader de l'Opposition. M. le leader du gouvernement, vous avez la
parole. Je demanderais la collaboration de tous les députés en
cette Chambre. M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, j'avise l'Assemblée
qu'aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures
et, si nécessaire, de 20 heures à 24 heures, à la salle
Louis-Joseph-Papineau, la commission des affaires sociales poursuivra
l'étude détaillée du projet de loi 34, Loi modifiant la
Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres
dispositions législatives. Je rappelle à l'Assemblée
qu'aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures,
de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la
salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission du budget et de
l'administration entendra les intéressés et procédera
à l'étude détaillée des projets de loi
d'intérêt privé suivants, et ce dans l'ordre
indiqué, soit le projet de loi 205, Loi concernant la conversion de la
Fédération des caisses d'établissement du Québec,
des caisses d'épargne et de crédit qui lui sont affiliées
et de la Corporation de fonds de sécurité de la
Fédération des caisses d'établissement du Québec
ainsi que leur fusion avec la Société d'entraide
économique du Québec inc.; projet de loi 214, Loi concernant
Elzéar Plourde Itée; projet de loi 217, Loi concernant Vilmont
inc.; projet de loi 233, Loi concernant Les Immeubles Benoît inc.; projet
de loi 242, Loi concernant le Club des Portes de l'Estrie inc.; projet de loi
206, Loi concernant La Laurentienne, mutuelle d'assurance; et finalement le
projet de loi 221, Loi modifiant la Loi fusionnant le Trust
Général du Canada et la Société d'administration et
de fiducie. L'ordre de l'étude de ces projets de loi pourra être
modifié selon une décision de la commission.
Finalement, de 20 heures à 24 heures, à la salle 101 de
l'édifice Pamphile-Le May, la commission de l'éducation entendra
les intéressés et procédera à l'étude
détaillée du projet de loi privé 204, Loi modifiant la Loi
sur le Collège militaire Royal de Saint-Jean.
M. le Président, en dérogation à l'article
concernant la convocation des intéressés dans le cadre de
l'étude détaillée des projets de loi
d'intérêt privé et de consentement avec l'Opposition,
j'avise l'Assemblée que demain, le 16 juin, à la salle
Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement et des
équipements entendra les intéressés et procédera
à l'étude détailée du projet de loi
d'intérêt privé 209, Loi concernant la ville de
Métabetchouan.
Le Président: Je m'excuse, M. le leader du gouvernement,
avant de continuer...
M. Gratton: Je m'excuse, monsieur...
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour
déroger aux règles de fonctionnement de cette Assemblée
relativement à ce projet de loi 209?
M. Gendron: Puisqu'il vous a indiqué, M. le
Président, qu'il avait le consentement de l'Opposition. Dans son avis,
il indiquait qu'il y avait consentement...
Le Président: II y a consentement de cette
Assemblée?
Une voix: Oui.
M. Gratton: M. le Président, j'avise également
l'Assemblée que demain, le 16 juin, de 21 heures 30 à 24 heures,
à la salle 101 de l'édifice Pamphile-Le May, la commission de
l'économie et du travail entendra les intéressés et
procédera à l'étude détaillée du projet de
loi 213, Loi concernant la fusion par absorption entre la Coopérative
forestière du Nord-Ouest et la Fédération des chantiers
coopératifs de l'Ouest québécois. Cet avis annule celui
donné le 8 juin concernant ledit projet de loi. Enfin, j'avise cette
Assemblée que l'avis donné le 9 juin concernant l'étude
détaillée du projet de loi d'intérêt privé
235, Loi modifiant la charte de la ville de Saint-Hyacinthe, est
annulé.
Le Président: J'ai également un avis à faire
part aux membres de cette Assemblée. La commission de l'éducation
se réunira ce soir, en séance de travail, dès que
l'étude du projet de loi 204 sera terminée, à la salle 101
de l'édifice Pamphile-Le May. Est-ce qu'il y a d'autres avis concernant
les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement?
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée? Mme la
députée de Chicoutimi.
Renseignements sur les travaux de
l'Assemblée
Mme Blackburn: Oui, M. le Président. J'aimerais savoir si
vous avez reçu une demande pour déposer une pétition qui a
été signée par plusieurs milliers de
pétitionnaires, des parents de la commission scolaire de
Rivière-du-Loup. Cette pétition a été remise au
ministre délégué aux Forêts, il y a deux semaines.
Sinon, est-ce que vous pouvez me donner des directives quant aux moyens dont
ces personnes disposent pour faire respecter leurs droits de voir une
pétition déposée en Chambre?
Le Président: Je pense que c'est très clair. Je
n'ai pas à donner d'opinion juridique quant au dépôt d'une
pétition. La pétition doit être déposée au
bureau du secrétaire général selon notre règlement.
Quand on la recevra, elle sera présentée immédiatement
à la Chambre si elle est conforme.
Mme Blackburn: M. le Prédisent, elle a été
déposée au bureau du ministre délégué aux
Forêts, il y a deux semaines.
Le Président: Je n'ai pas d'opinion juridique à
donner à qui que ce soit dans cette Assemblée. Je le
répète, il suffit qu'on respecte le règlement de cette
Assemblée et elle sera présentée devant cette
Assemblée.
Mme Blackburn: Bien, je vous remercie. (11 h 10)
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Oui. Aux affaires du jour, M. le
Président?
Le Président: Oui, aux affaires du jour.
M. Gratton: Je vous prierais d'appeler l'article 27 du
feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 5
Le Président: À l'article 27 du feuilleton, il
s'agit de l'adoption du projet de loi 5, Loi modifiant la Loi sur les mines,
présenté par M. le ministre délégué aux
Mines et aux Affaires autochtones. J'aimerais reconnaître le premier
intervenant sur ce...
M. Gratton: M. le Président, je fais motion pour que
l'Assemblée se transforme en commission plénière pour
considérer l'amendement déposé hier par le ministre
délégué aux Mines.
Le Président: Est-ce que cette motion est
adoptée?
M. Jolivet: Adopté.
Le Président: Adopté. Alors, cette Assemblée
se transforme en commission plénière.
(Suspension de la séance à 11 h 12)
(Reprisée 11 h 15)
Commission plénière
Étude de l'amendement présenté
par le ministre délégué aux Mines
M. Saintonge (président de la commission
plénière): La commission plénière se
réunit maintenant pour l'étude de l'amendement proposé par
M. le ministre délégué aux Mines et aux Affaires
autochtones, amendement proposé au projet de loi 5, Loi modifiant la Loi
sur les mines. L'amendement en question concerne l'article 47.1 et se lit comme
suit: Insérer après l'article 47 du projet de loi l'article
suivant: 47.1 L'article 273 de cette loi est modifié,
premièrement, par le remplacement dans la deuxième ligne du
premier alinéa du mot "construire" par les mots "rechercher, le droit de
construire et le droit d'exploiter".
Deuxièmement, par le remplacement du deuxième
alinéa par le suivant: "Là où les droits ont
été révoqués, le gouvernement peut, aux conditions
qu'il fixe, accorder le droit de rechercher, le droit de construire et le droit
d'exploiter un réservoir souterrain. Ces droits miniers sont des droits
réels immobiliers et le gouvernement peut leur rendre applicable toute
disposition de la présente loi."
Sur l'amendement en question, M. le ministre
délégué aux Mines et aux Affaires autochtones.
M. Savoie: Merci. C'est une dernière addition à la
modification de la Loi sur les mines qui est devenue nécessaire à
la suite d'une révision de l'article 273. Étant donné que
le gros de l'orientation porte sur les réservoirs souterrains construits
et que cela relève finalement des opérations d'énergie au
Québec et à la suite de la demande de l'Opposition, pour la
présentation et la défense de cet article, la présence du
ministre de l'Énergie et des Ressources pourra peut-être
accéder à la demande de l'Opposition et répondre ainsi aux
questions.
Le Président (M. Saintonge): Très bien, M. le
ministre. M. le député d'Ungava.
M. Claveau: M. le Président, dans un premier temps, si on
a demandé qu'il y ait une commission plénière qui
siège là-dessus, c'est que le procédé qui a
été entrepris nous semble un peu bizarre. On arrive en
troisième lecture, au moment de l'adoption. On n'est même pas au
discours du ministre, mais plutôt à la toute fin, au moment de sa
réplique au discours de l'Opposition. Il nous arrive avec un amendement
qui n'a jamais été annoncé à qui que ce soit de
l'Opposition, en tout cas, moi, je n'en ai jamais eu connaissance. Personne
n'en a eu connaissance. On a un amendement qui a l'air anodin mais qui peut
nous amener à nous poser certaines questions sur la pertinence de le
faire de cette façon, ce qui est complètement inacceptable,
à notre avis, comme démarche.
D'autre part, le fait qu'on nous amène quelque chose à la
toute dernière minute sans en annoncer les raisons ni en avoir jamais
parlé nous amène à nous poser de sérieuses
questions sur le fait qu'il pourrait s'agir de quelque chose que le ministre
n'aimerait pas discuter. On
trouve que ça sent un peu le chauffé en-dessous de cela.
On aura quelques questions à poser au ministre.
C'est pour cela, aussi, qu'on a exigé que le ministre de
l'Énergie et des Ressources soit présent parce que, comme nous le
disait le ministre délégué aux Mines, hier, l'amendement a
été déposé à sa demande. C'est le ministre
de l'Énergie et des Ressources qui lui a amené l'amendement pour
qu'il le mette dans la Loi sur les mines. C'est quelque chose qui touche le gaz
naturel et, éventuellement même, le gaz liquide.
À notre avis, il aurait pu très bien en être
question alors qu'on en était à l'étape de l'adoption du
rapport de la commission concernant la Loi sur la régie du gaz. Tout
cela s'est fait sans que jamais on ne parle d'un amendement potentiel sur les
mines. On nous arrive à la dernière minute avec cela. On tient
à questionner les deux ministres qui sont présents pour
connaître le véritable fondement et la pertinence de cet
amendement.
Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: M. le Président, y n'y avait aucune intention
de bousculer l'Opposition ou de cacher quoi que ce soit en ce qui concerne
l'amendement qui est en discussion.
L'intention de l'article 273, tel que rédigé
présentement, avant que nous apportions notre amendement, était
que le gouvernement puisse "révoquer sur toute partie du territoire
qu'il détermine le droit de construire... un réservoir souterrain
pour l'emmagasinage de pétrole, de gaz naturel ou d'autres
hydrocarbures." C'était l'intention.
Pour construire, il faut nécessairement faire une recherche.
Après qu'on a construit, H faut exploiter. On s'est aperçu... Le
principe de l'article 273 a été accepté quand le projet de
loi a été adopté. Les rédacteurs et le service
juridique du ministère nous ont donné un avis stipulant que de la
façon dont c'est rédigé, cela limite à construire.
Cela n'englobe pas l'aspect recherches. Avant de construire, il faut faire des
recherches. Après avoir construit, il faut exploiter.
Alors, le premier but de l'amendement, c'est de clarifier cela. Ce n'est
pas d'ajouter, de cacher ou d'enlever des droits qui existent
déjà, c'est de clarifier l'intention du premier alinéa.
C'est pour cela qu'on ajoute: "le gouvernement peut révoquer sur toute
partie du territoire qu'il détermine, le droit de rechercher, de
construire et d'exploiter un réservoir souterrain, pour l'emmagasinage
de pétrole, de gaz naturel ou d'autres hydrocarbures."
Cela complète ce qui était l'intention du
législateur pour ne pas qu'il y ait de lacune, pour permettre que
l'article 273 veuille vraiment dire quelque chose. Si on a seulement le droit
de construire, ce n'est pas assez. Juridiquement, il faut aller faire des
recherches et exploiter. C'est le premier changement.
Le deuxième changement, c'est pour clarifier la sorte de droit
qu'on accorde. C'est un régime particulier. On ne veut pas qu'y y ait
d'ambiguïté et que le droit de rechercher, de construire ou
d'exploiter soit un droit réel. Dans le deuxième alinéa,
on ajoute les mots "ces droits miniers sont des droits réels immobiliers
et le gouvernement peut lui rendre applicable toute disposition de la
présente loi."
Premièrement, cela clarifie ce que le gouvernement peut faire.
Deuxièmement, cela enlève l'ambiguïté sur le fait que
c'est un régime particulier et que ce sont des droits réels.
C'est le seul but de l'article 273. Maintenant, quand vous dites: Est-ce que
cela peut aller à la Régie du gaz? Cela n'a rien à faire
avec la Loi sur la Régie du gaz, parce que cela ne s'applique pas
seulement au liquide de gaz naturel, cela s'applique à l'emmagasinage de
pétrole, de gaz naturel ou d'autres hydrocarbures, cela peut être
les liquides. Le gaz naturel, on peut avoir un entreposage à
réservoir, emmagasiner le gaz naturel. Cela peut se faire pour les
heures de pointe. Gaz métropolitain et le gouvernement regardent les
possibilités parce que plus il y a de ventes, plus il va y avoir un
besoin aux heures de pointe. Pour satisfaire ce besoin, cela prend de
l'emmagasinage. L'emmagasinage de pétrole aussi, on parle toujours des
possibilités d'avoir 90 jours de réserve de pétrole en
territoire québécois. L'article 273 couvre cela.
Ce sont les buts de l'amendement, les objectifs recherchés. C'est
vraiment une clarification. On n'ajoute rien de nouveau et on n'enlève
pas les conditions du projet de loi en ce qui concerne les indemnisations. Cela
est prévu dans d'autres aspects du projet de loi. On ne réduit
pas les droits de ceux qui sont affectés en ce qui concerne
l'indemnisation, il va falloir passer par les procédures
régulières pour indemniser ceux qui vont demeurer
propriétaires des droits de surface. Si on invoque l'article 273, N va
falloir compenser, d'après la loi, la valeur de ce que le gouvernement
va révoquer, conformément à l'article 273.
Je pense que ce sont, brièvement et aussi complètement que
je peux l'expliquer, les raisons pour lesquelles on présente cet
amendement maintenant.
Le Président (M. Saintonge): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Vous me permettrez quand même d'avoir quelques
remarques sur tout cela. Cela semble beau, à première vue, mais
il doit y avoir des raisons qui ont fait qu'on le voit à la
dernière minute, alors que cela a passé à travers... Il
faut se rappeler que la Loi sur les mines est adoptée depuis juin 1987;
elle n'est pas nouvelle. Cela fait déjà un an qu'elle devrait
être en application. On n'a même pas pu le voir avant de
déposer le projet de loi 5. Il a fallu que cela vienne à la toute
dernière minute. Qu'on me dise que ce n'est pas lié à un
cas précis, vous allez avoir de la difficulté à me faire
avaler cela. S'il n'y a pas un cas précis en dessous de cela, il n'y a
aucune raison pour que cela apparaisse comme cela. Que les légistes s'en
soient rendu compte! Cela fait douze mois que la loi est adoptée, alors
on aurait pu le voir avant.
D'autre part, la question des droits réels immobiliers. L'article
8 définit un certain nombre de droits réels immobiliers. Si, par
la modification qu'on amène à l'article 273, on veut introduire
la notion de droits réels immobiliers, alors on ne voit pas pourquoi,
à ce moment-là, on ne l'aurait pas mis à l'article 8.
Pourquoi ne l'aurait-on pas inscrit avec les autres droits réels
immobiliers, tels que décrits à l'article 8? La procédure
que l'on prend à l'article 273, c'est comme si, par exemple, pour
définir le daim, le permis d'exploration minière, le bail minier,
la concession minière, etc., chaque fois, dans l'article de loi
correspondant, on avait dit qu'il s'agissait d'un droit réel
immobilier.
On a défini, à l'article 8, ce qui faisait l'objet d'un
droit réel immobilier. Alors, il n'aurait pas été plus
difficile, au moment où l'on se parle, de présenter un amendement
pour modifier l'article 8 et ajouter un droit réel immobilier dans la
liste, la propriété sur un réservoir.
En ce qui concerne la notion du droit de recherche, on la retrouve
déjà. On la retrouve à l'article 10 où on parle des
exemptions d'enregistrement au bureau de la division d'enregistrement. On dit,
à l'article 10, que sont exemptés de l'enregistrement au bureau
de la division d'enregistrement, le permis de recherche de réservoir
souterrain... Donc, on inscrit, d'une part, les exemptions dans la liste des
exemptions, tel que cela doit être à l'article 10, mais on
n'inscrit pas avec les autres droits réels immobiliers, en 8, le droit
réel immobilier sur le réservoir souterrain. Alors, là, il
y a un problème. (11 h 30)
D'autre part, vous nous dites qu'il fallait préciser l'objet, la
recherche, la construction et l'exploitation, enfin l'utilisation d'un
réservoir. L'article 273 se lit comme suit, pour ceux qui pourraient
nous écouter et qui n'ont pas le texte: "Le gouvernement peut
révoquer sur toute partie du territoire qu'il détermine le droit
de construire, à même les substances minérales faisant
partie du domaine privé, un réservoir souterrain pour
l'emmagasinage de pétrole, de gaz naturel ou d'autres
hydrocarbures."
Je vous l'avais dit, il pouvait y en avoir plusieurs. Le droit de
construire à même les substances minérales faisant partie
du domaine privé, cela présuppose qu'il y a un droit de
recherche. C'est bien évident que cela ne se construit pas n'importe
où. Le droit de recher- che, on l'a déjà identifié
en 10. Il est là, le permis de recherche de réservoir souterrain.
Le permis existe. Si le permis existe, c'est parce que cela doit
déboucher sur une possibilité de construire. Si on construit pour
ces besoins, à ce moment-là, cela débouche aussi sur un
permis d'exploitation. Si je ne m'abuse, dans l'ensemble du réseau de
distribution du gaz naturel et autres, le réservoir est prévu
comme étant un équipement de distribution. Donc, il y a une
utilisation qui est là et qui est implicite.
C'est là-dessus que le ministre a parié jusqu'à
présent. En tout cas, on peut dire que, qu'il ajoute ou qu'il n'ajoute
pas les termes, qu'il les précise ou qu'il ne les précise pas,
cela ne change pas grand-chose. Là où cela devient
inquiétant, c'est quand on prend ce qu'on vient de lire à
l'article 273 et qu'on le juxtapose à l'article 274. Il faut lire
l'article 274, M. le Président, pour bien comprendre la portée de
la différence que cela apporte. L'article 274 dit que lorsque,
après la révocation du droit de construire un réservoir
souterrain, un réservoir souterrain est construit et exploité -
donc par quelqu'un d'autre - celui dont les droits ont été
révoqués a droit, à titre d'indemnité, à une
redevance égale à 50 % du loyer annuel fixé
conformément à l'article 202 pour un bail d'exploitation de
réservoir souterrain de la part du titulaire du bail d'exploitation de
réservoir souterrain. Jusqu'à maintenant, à moins que l'on
ne comprenne rien, l'article 274, qui suit l'article 273 dans la nomenclature,
s'applique donc strictement à la révocation du droit de
construire. On parle de "celui dont les droits ont été
révoqués". Alors, c'est le droit de construire qui a
été révoqué à l'article 273. Cela signifie
que tous les droits qui pourraient être reliés à des droits
de recherche de réservoir et à des droits d'exploitation de
réservoir n'apparaissent pas dans la révocation, au moment
où l'on se parle, donc ne peuvent faire l'objet d'indemnisation.
Si on lit l'article 273 tel que proposé, le gouvernement peut
révoquer, sur toute partie du territoire qu'il détermine, les
droits de recherche, les droits de construire et les droits d'exploiter dans la
mesure où il y a des obligations, des droits. Il y a des avantages aussi
qui sont liés aux droits de recherche et aux droits d'exploiter. Et
cela, ça peut devenir monnayable. À ce moment-là, il
faudra que le ministre nous explique dans quelle mesure l'article 273 ne vient
pas modifier l'application de l'article 274 en rendant la négociation
possible et en rendant les compensations financières substantielles,
même nécessaires, dans le cas d'une révocation de permis,
où les droits de construire sont révoqués, mais où
on ajoute la révocation du droit de recherche et du droit
d'exploitation. C'est d'autant plus évident si on a un cas précis
en tête au moment où l'on se parle.
Le Président (Saintonge): M. le ministre
délégué aux Mines et aux Affaires autochtones.
M. Savoie: M. le Président, pour ce qui est de l'ajout
à l'article 8 du fait que le droit d'avoir accès à un
réservoir souterrain est un droit réel immobilier, il n'a pas
été mis dans la liste parce qu'on a voulu concentrer, à
même l'article 273, l'ensemble des articles portant sur des
réservoirs souterrains construits.
M. Claveau: À l'article 10, on retrouve les droits sur les
réservoirs souterrains.
M. Savoie: Oui, mais à l'article 10, on parle des deux
types de réservoirs souterrains. Effectivement, on faisait
référence aux réservoirs souterrains tant naturels que
construits. Cela porte sur les deux. L'article 10 ne porte que sur les fins
d'enregistrement. On n'a pas vu l'utilité de modifier l'article 8 ou
l'article 10.
Pour ce qui est de l'article 273 par rapport à l'article 274, il
n'y a pas d'opposition. La révocation d'un droit de rechercher, d'un
droit de construire de même que d'un droit d'exploiter est
affectée précisément par l'article 274 dans le sens que
c'est une continuation. En conséquence, on n'a pas besoin de modifier
l'article 274 pour tenir compte de l'article 273, puisqu'on parle effectivement
des droits. Il n'y a pas là d'opposition entre la modification
proposée et l'article 274.
M. Claveau: M. le Président, je crois que le ministre ne
répond pas du tout à notre préoccupation. C'est certain
qu'il n'a pas besoin de le modifier s'il veut amener la possibilité
d'indemniser sur le droit de recherche et le droit d'exploitation. C'est
certain qu'il ne le modifiera pas. L'article 274 est très clair, il dit
que dans le cas où il y a une reprise d'exploitation par un tiers
à la suite de la révocation du permis d'un premier occupant,
à ce moment-là, le nouvel utilisateur devra payer des
compensations égales à 50 % du loyer annuel fixé
conformément à l'article 212, et ces dédommagements
devront être payés en vertu des droits qui auront
été révoqués. Cela, c'est clair.
À l'article 273, les droits qui sont révoqués, au
moment où l'on se parle, à la lecture de l'article 273 tel quel,
sans amendement, ce sont les droits de construire.
M. Ciaccia: Je voudrais juste ajouter...
Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: S'il y a seulement une recherche, si cela
s'arrête à la recherche et que rien ne se produit, il n'y a rien
à faire. À l'article 274, on fixe l'indemnité
d'après la construction. C'est seulement si c'est construit. Si
quelqu'un fait une recherche et ne fait plus rien, il s'en va...
M. Claveau: Là, on entre dans le noeud du problème,
M. le ministre. Si quelqu'un va faire une recherche et qu'il n'a rien
construit, mais que ses droits sont révoqués pour un autre,
à ce moment-là, en tant que premier intervenant, il peut essayer
de se faire payer son forage de recherche, ce qu'il ne pourra pas faire en
vertu de l'article 273 tel quel parce qu'il n'y a pas de construction de
réservoir. Il ne peut pas avoir de dédommagement pour ses
dépenses d'exploration, selon l'article 273 tel qu'on le lit
actuellement. Si on le modifie, à ce moment-là, en vertu de
l'article 274, il pourra se faire payer des dédommagements pour ses
dépenses d'exploration et de recherche.
M. Ciaccia: Par qui voulez-vous qu'une personne qui fait les
recherches se fasse payer?
M. Claveau: On le dit: Lorsque après la révocation
d'un droit de construire un réservoir souterrain, un réservoir
souterrain est construit et exploité, celui dont les droits ont
été révoqués a droit, à titre
d'indemnité, à une redevance égale, etc..
M. Ciaccia: Oui, cela veut dire le propriétaire.
M. Claveau: ...pour un bail d'exploration de réservoir
souterrain de la part du titulaire du bail d'exploitation. Donc, celui qui va
payer, c'est le nouveau titulaire du bail d'exploitation, et il va payer les
dédommagements.
Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: Oui, et c'est fixé sur le loyer annuel,
conformément à l'article 202. Je ne vois rien de contradictoire
là-dedans. S'il y a eu une recherche et qu'il n'y a pas de construction,
il va payer la recherche lui-même, c'est fini. S'il y a une construction,
on fixe la façon de payer les indemnités à celui dont les
droits ont été révoqués. Je ne vois pas de
problème là-dedans. (11 h 40)
Le Président (M. Saintonge): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Oui, M. le Président. Là, on parle en
théorie, dans l'hypothèse où cela pourrait se
répandre "at large", d'une façon très importante au
Québec, ce qui, nous le supposons, ne sera jamais le cas. D'autre part,
si le ministre est en train de nous dire qu'il n'y a pas de problème,
que cela ne change rien, à ce moment-là, on ne voit pas pourquoi
il y aurait des amendements puisque l'amendement change la définition du
droit qui va être révoqué.
Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: Oui, c'est mieux de les prendre un à la fois.
Excusez-moi, mais vous couvrez beaucoup de problèmes. Prenons-les un
à la fois. Je dis que ce n'est pas nécessaire de changer
l'article 274. Le changement pour le droit de rechercher, on le fait à
l'article 273 pour donner ce droit-là. Mais cela n'affecte pas les
compensations à l'article 274 parce que les compensations à
l'article 274 sont établies quand c'est construit. Si on fait juste une
recherche...
M. Claveau: Ce qu'on donne, M. le ministre, ce n'est pas le
droit...
Le Président (M. Saintonge): Un instant, M. le
député d'Ungava. Pour le bénéfice de la discussion,
on ne peut pas se promener d'un côté ou de l'autre, comme
ça. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources, avez-vous fini
vos explications?
M. Ciaccia: Cette partie-là, oui.
Le Président (M. Saintonge): D'accord. Allez-y, M. le
député d'Ungava, c'est à vous.
M. Claveau: Le ministre dit: On donne le droit de rechercher. Ce
n'est pas cela qu'on donne. À l'article 273, on donne au gouvernement du
Québec le droit de révoquer un permis de recherche.
M. Ciaccia: Oui.
M. Claveau: On ne donne pas un droit de rechercher à qui
que ce soit. "Le gouvernement peut révoquer, sur toute partie du
territoire qu'il détermine le droit de rechercher, le droit de
construire et le droit d'exploiter". On n'a donné de droits additionnels
à personne. On a juste identifié comme étant une
matière révocable le permis de recherche qui va faire l'objet de
compensation, après cela, à l'article 274.
Le Président (M. Saintonge): M. le ministre
délégué aux Mines et aux Affaires autochtones.
M. Savoie: Je pense que je viens juste de saisir la nature de
l'intervention du député d'Ungava. Le député
d'Ungava dit, qu'à la suite de la modification à l'article 273
où on parie d'un droit de rechercher, d'un droit de construire et d'un
droit d'exploiter, dans l'article 274, on ne parle d'une indemnité que
pour le droit de construire et le droit d'exploiter et qu'en conséquence
il n'y a pas, à sa face même, à l'article de loi 274, une
indemnité pour celui qui a fait de la recherche. Est-ce que c'est
cela?
Le Président (M. Saintonge): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: C'est une des choses qu'on soulève
actuellement.
M. Savoie: C'est une des choses. Si le député
d'Ungava regarde la nature même de l'article 273, on dit: "Là
où le droit a été révoqué, le gouvernement
peut, aux conditions qu'il fixe, autoriser la construction d'un
réservoir souterrain et lui rendre applicable à toute disposition
de la présente loi relative au bail..." On dit, donc, que l'ensemble de
la loi peut s'appliquer, par exemple, à une révocation. Si vous
allez voir à l'article 235, il y a là, effectivement, les
procédures d'indemnisation qui peuvent s'appliquer ou qui pourront
s'appliquer à un droit de rechercher.
Le Président (M. Saintonge): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Est-ce que l'amendement à l'article 273 va
permettre d'indemniser plus de gens ou de les indemniser d'une façon
plus large? Quand on dit, à l'article 274 "lorsqu'un réservoir
souterrain est construit et exploité", on parle du nouvel utilisateur du
réservoir. On n'est pas dans les droits de l'article 273. Là, ce
sont les droits du nouvel utilisateur, pas de l'ancien. On dit: "Celui dont les
droits ont été révoqués a droit, à titre
d'indemnité..." Mais quels sont les droits dont on parie à
l'article 274 si ce ne sont pas ceux qui sont déterminés à
l'article 273? Est-ce qu'il y a d'autres droits?
M. Savoie: Non. Il n'y a pas d'autres droits. Cela porte sur les
droits de l'article 273.
M. Claveau: Bon, actuellement, à l'article 273, il y a un
seul droit qui est révoqué et qui peut faire l'objet de
compensation. C'est le droit de construire.
M. Savoie: Non.
M. Claveau: Tel qu'on le lit.
M. Savoie: Le droit de construire et d'exploiter.
M. Claveau: Non, non. Dans l'article 273 on dit...
Le Président (M. Saintonge): C'est avant l'amendement, ce
que vous mentionnez?
M. Claveau: Avant l'amendement. Tel qu'il est actuellement, il y
a un seul droit qui peut faire l'objet de compensation, c'est le droit de
construire. Avec l'amendement, il y a trois droits qui vont faire l'objet de
compensation: le droit de rechercher, le droit de construire et le droit
d'exploiter.
M. Savoie: C'est cela. C'est exactement ce qu'on dit à
l'article 273.
M. Claveau: Pourquoi n'est-ce pas ce que vous dites dans les
notes explicatives? Ce n'est pas ce que vous nous avez dit au moment de
présenter l'amendement.
M. Savoie: Ce qu'on dit à l'article 273, c'est qu'il peut
y avoir indemnisation pour les droits en question, en vertu de la Loi sur les
mines.
M. Ciaccia: Si cela peut aider le député d'Ungava,
révoquer le droit de rechercher ne cause pas de préjudice; on
n'enlève rien, on n'enlève pas la substance, les minerais, tout
le reste. Pour le droit de rechercher, on ne trouve pas d'indemnisation, parce
qu'il n'y a pas d'indemnisation à donner. On n'enlève rien. C'est
seulement quand on va enlever quelque chose qu'il va y avoir indemnisation et
c'est à l'article 274 qu'on prévoit l'indemnisation. Juste pour
rechercher, on n'enlève rien à personne. On peut argumenter
à l'inverse et dire que, si on va rechercher à un endroit et
qu'on trouve quelque chose, cela va ajouter de la valeur. Là, il va
être indemnisé. S'ils ont seulement fait une recherche, cela
n'enlève le droit à personne. Alors, il n'y a pas d'indemnisation
à donner.
Le Président (M. Saintonge): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: M. le ministre, on dit à l'article 273: "Le
gouvernement peut révoquer sur toute partie du territoire qu'il
détermine." Il est bien clair que, si sur une partie de territoire, on
révoque les droits...
M. Ciaccia: De recherche.
M. Claveau: ...de recherche, à ce moment-là, ils
sont perdus pour cette compagnie, cet individu ou cette personne morale ou
physique. Ces droits de trouver sont perdus et ils appartiennent à
quelqu'un d'autre sur ce territoire. Donc, on ne peut plus alléguer
qu'il peut retourner chercher sur le même territoire, vous venez de lui
enlever, ce droit.
Le Président (M. Saintonge): M. le ministre
délégué aux Mines.
M. Savoie: M. le député d'Ungava, vous parlez d'un
droit de rechercher. Ce que vous craignez, c'est qu'en révoquant le
droit de rechercher celui qui effectue la recherche ne soit lésé,
qu'il n'ait fait des dépenses qui ne seront pas remboursées.
M. Claveau: C'est cela.
M. Savoie: On vient tout juste de saisir. Il faut savoir, d'une
part, qu'on ne parle ici que du domaine privé, on ne parle pas du
domaine public. Alors, celui qui recherche ne peut pas le faire sur les
territoires qui appartiennent à la couronne, il faut que cela soit sur
un territoire privé. En plus de cela, il faut que cela se fasse sur son
territoire à lui.
Une voix: Voulez-vous expliquer cela?
Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.
M. Savoie: Si vous regardez l'article 273, il est écrit:
"Le gouvernement peut révoquer sur toute partie du territoire qu'il
détermine le droit de rechercher, le droit de construire et le droit
d'exploiter, à même les substances minérales faisant partie
du domaine privé", pas du domaine public. Celui qui cherche à
construire un réservoir souterrain va le faire à partir d'un
territoire sur lequel il a déjà l'autorisation de construire.
Le Président (M. Saintonge): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: On parle de la zone urbaine où il peut y avoir
différents...
M. Savoie: Pardon?
M. Claveau: On parle d'une zone urbanisée où il y a
une occupation humaine et où le territoire est divisé en
parcelles qui appartiennent à des propriétaires privés. On
ne parle pas nécessairement d'une propriété privée
qui appartient à la compagnie qui fait la recherche. On parle du domaine
privé. On ne parle pas de la propriété privée de la
compagnie.
Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.
M. Savoie: C'est cela. La personne qui fait de la recherche pour
construire un réservoir souterrain. Il faut dire qu'il n'y en a pas
actuellement au Québec. Ce qu'on veut faire, justement, c'est permettre,
dans un avenir éventuel, la construction d'un tel réservoir. La
personne ou la compagnie qui va désirer construire un réservoir
souterrain, lorsqu'elle va effectuer ses recherches, va les faire sur un
terrain privé, parce que cela ne concerne pas les terrains d'ordre
public ou appartenant au public.
M. Claveau: Cela ne lui appartient pas nécessairement.
M. Savoie: C'est cela. La personne qui va utiliser ce droit de
rechercher va le faire sur un terrain qu'elle est certaine d'être en
mesure d'exploiter. On ne peut pas prévoir que le gouvernement va lui
révoquer un droit qui va lui causer un préjudice autrement que
sur un terrain qui lui appartient. À ce moment-là, le
préjudice est inhérent en lui-même. Il ne perd rien
sauf,
peut-être, une servitude sur son propre territoire. (11 h 50)
Le Président (M. Saintonge): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: M. le Président, le ministre vient de dire
qu'actuellement il n'y a pas de réservoirs souterrains au Québec.
Donc, si tel est le cas, on parle d'une hypothèse. C'est la même
chose que si on parlait de construire des réservoirs sur la lune. Si on
tient tellement à apporter une modification semblable dans le texte de
cet article de loi, cela doit se référer à quelque chose
de bien précis. Quel est le cas précis que l'on entend traiter
par cet amendement?
Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: Je vais vous dire une chose, M. le
député d'Ungava. Je ne commencerai pas à étaler sur
la place publique des cas précis dans des négociations, s'il y en
a un. Je vous donne les droits, la protection qu'on accorde au
propriétaire, mais je n'étalerai pas de cas sur la place publique
pour me les faire enlever par des compétiteurs du gouvernement venant de
l'entreprise privée. On irait dire qu'on vise un certain endroit. Je ne
peux pas vous dire cela. Je ne le dirai pas. Cela peut viser plus d'un cas et
je ne pense pas que ce soit dans l'intérêt public de commencer
à dire qu'on vise un certain cas et qu'on s'en va là.
Vous avez l'article devant vous. On vous a expliqué pourquoi on a
besoin de cet article, les conséquences de l'article. Vous pouvez
être pour ou contre. Je ne peux pas vous donner plus d'explications que
je ne vous en donne maintenant en termes de portée juridique. Ne me
demandez pas, s'il y a un emmagasinage de pétrole, où allez-vous
aller, qui allez-vous viser? S'il y a des réservoirs pour le gaz
naturel, où allez-vous aller, quelle compagnie allez-vous viser? Si
c'est le but de votre question, je ne pense pas que ce serait dans
l'intérêt public que je vous dévoile cela. Mais on peut
établir, quelque soit l'endroit où le gouvernement peut
révoquer ces droits, un régime qui va s'appliquer et un
régime d'indemnisation si les droits, en termes de construction, en
termes d'enlever les substances minières, sont révoqués.
Mais aller plus loin et étaler sur la place publique toutes les
négociations, toutes les discussions possibles entre différentes
parties, je ne pense pas que ce soit dans l'intérêt public.
Le Président (M. Saintonge): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: M. le Président, le ministre ne nous
énervera pas avec ses excès de zèle. Ce n'est pas nous qui
avons couru après le problè- me. Ce sont eux qui sont
arrivés avec l'amendement à la toute dernière minute sans
jamais en parler à personne, comme de quelque chose qu'il faut faire en
sourdine le soir, sans que personne en ait connaissance, en s'imaginant qu'on
va prendre l'Opposition pour une bande d'idiots qui vont dire: Oui, oui, oui,
M. le ministre, vous avez raison, on adopte cela. Ce n'est pas vrai. On ne
donnera pas de chèque en blanc comme cela.
J'ai posé une question au ministre. Il ne veut pas me
répondre. Je vais la poser plus précisément. Est-ce que,
oui ou non, cet amendement est relié au projet Soligaz?
Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de
l'énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: M. le Président, on va demander au
député d'Ungava de se calmer.
M. Claveau: Voulez-vous une question plus précise
encore?
M. Ciaccia: On va demander au député
d'Ungava...
Le Président (M. Saintonge): Un instant, M. le
député d'Ungava. J'ai cédé la parole au ministre.
Un instant. Il y a des questions à poser. Comme président, je
vais donner la parole à chacun des intervenants en temps et lieu. Je
vous demanderais de respecter le droit de parole que je vous accorde. M. le
ministre de l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: M. le Président, je vais demander au
député d'Ungava de ne pas s'exciter, de ne pas partir en peur, de
ne pas faire de la spéculation et de ne pas créer des endroits de
spéculation au Québec. Alors, posez toutes les questions que vous
voulez, ce sont là les seules réponses que je peux donner au
député d'Ungava maintenant.
Le Président (M. Saintonge): Est-ce qu'il y a d'autres
questions, M. le député d'Ungava?
M. Claveau: Est-ce que l'amendement dont il est question
actuellement se réfère spécifiquement à un cas?
Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.
M. Ciaccia: M. le Président, je ne veux pas
répondre à cette question et dire si cela se réfère
à un cas. L'amendement qu'on étudie maintenant s'applique
à plus d'un cas.
M. Claveau: Dans ce cas, comment se fait-il...
M. Ciaccia: Laissez-moi finir.
M. Claveau: Je pensais que vous aviez fini.
M. Ciaccia: Cet amendement s'applique à plus d'un cas. Je
n'identifierai pas à combien de cas cela s'applique et où ces cas
se trouvent, mais cela s'applique à plusieurs cas.
Le Président (M. Saintonge): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Comment se fait-il...
M. Ciaccia: Et cela peut s'appliquer encore à d'autres cas
parce que cela a une portée générale et une portée
d'indemnisation générale.
M. Claveau: Dans ce cas-là, M. le Président,
comment se fait-il que depuis le 23 juin, la sanction... Je peux vous
répéter la démarche qu'on a faite à propos de la
loi: présentée le 9 décembre 1986,
réimprimée le 10 juin 1987, principe adopté le 10 juin
1987 avec notre consentement, adoptée le 23 juin 1987. Cela fait depuis
le 9 décembre 1986 que c'est sur la planche à dessin publique et
il va falloir attendre à la dernière minute, au moment de la
troisième lecture, de l'adoption d'un projet de loi qui amende, un an
plus tard, cette loi et jamais personne n'a vu cela. Tout à coup, cela
devient une urgence nationale. Il faudrait qu'on adopte tout cela sans dire un
mot et dire: M. le ministre, c'est de valeur, on n'avait pas vu. Il ne faut,
quand même, pas ridiculiser à ce point votre personnel
compétent qui travaille aux projets de loi. Vous ne me ferez pas
accroire que personne n'avait vu la possibilité de cela. Depuis un an et
demi déjà que la première présentation du projet de
loi a été faite, cela a été discuté en
commission parlementaire, on a refait un texte, on l'a représenté
au complet en juin 1987, discuté et adopté.
On revient avec une loi pour amender cette loi alors qu'elle n'est
même pas encore en application. Il n'y a personne qui l'a vu au moment de
la présentation du projet de loi pour l'amender. On a discuté du
projet de loi pour l'amender et jamais personne ne l'a soulevé. En
troisième lecture, un an plus tard, dans le projet de loi pour
l'amender, on nous arrive avec quelque chose qui est tout à fait nouveau
et qui devient une urgence nationale. Non, M. le ministre, on ne croit pas
à cela. Il y a une raison sous cela et on veut la savoir.
Le Président (M. Saintonge): M. le ministre.
M. Ciaccia: Ce n'est pas une urgence nationale. On
n'empêche pas la discussion. Cela fait - je ne sais pas - 45 minutes que
vous en discutez. On n'a pas fait cela pour vous empêcher de discuter. On
est en commission plénière. Non seulement on en discute, mais on
en discute devant les caméras, devant toute la population. Ne venez pas
essayer de nous dire ou de faire croire à la population qu'on refuse des
discussions et qu'on vous amène cela à la dernière minute
pour essayer d'adopter cela vite. Ce n'est pas cela du tout. Je pourrais vous
donner la liste de tous les changements que vous apportiez à la
dernière minute, quand on était dans l'Opposition, nous. Il n'y
en avait pas seulement un. Il y en avait plusieurs, des changements assez
importants même sur le revenu, sur les taxes. Je me souviens qu'avec un
de mes collègues on s'était aperçu après la session
que vous aviez imposé une taxe.
Ne commencez pas à chercher des raisons, à spéculer
et à nous prêter des intentions. La raison pour laquelle cela
arrive maintenant, c'est qu'on est en fin de session et on ne siégera
pas avant le mois d'octobre. On s'est aperçu de cette lacune maintenant.
Ce n'est pas le seul changement qu'on fait au projet de loi. En faisant cela,
en bons législateurs, on dit: Écoutez, on va maintenant faire les
changements nécessaires que le service juridique du ministère et
d'autres ont examinés et ont suggérés. C'est pour cela
qu'on vous apporte cela maintenant. Ne regardez pas plus loin que cela. C'est
en pleine discussion. Vous avez tout le loisir de discuter et on est prêt
à vous apporter toutes les explications nécessaires.
Mais ne demandez pas qu'on identifie deux, trois, quatre, cinq endroits
pour augmenter la spéculation. Je ne pense pas que c'est votre
intention. Je ne pense pas qu'on puisse se permettre comme gouvernement de
donner ce genre d'information. Mais on est prêt à vous donner les
explications sur la portée juridique, les indemnisations, la
façon dont l'article sera interprété,
l'interprétation de l'article et je vous ai même dit les raisons
pour lesquelles nous avions apporté les changements au premier
alinéa et au deuxième alinéa.
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: Oui. Ce matin, le ministre serait à même
de considérer que l'Opposition veut faire un travail constructif. Il
devrait, au moins, le regarder comme cela. Maintenant, pour faire un travail
constructif, j'ai toujours appris dans ma vie qu'il fallait en connaître
les tenants et les aboutissants. Le ministre nous dit: On va vous parler de la
portée juridique. Je dois dire que, quand mon collègue a fait sa
prise en considération du rapport de la commission parlementaire sur le
projet de loi 5, j'étais ici à l'Assemblée, je
l'écoutais avec attention. J'en étais abasourdi. Il m'expliquait
qu'il y avait un projet de loi qui était apparu au mois de
décembre 1986, qui avait été adopté au mois de juin
1987 et qui n'était même pas en vigueur, malgré l'urgence
à l'époque. Je m'en souviens parce qu'il m'a rappelé les
détails historiques de ce dossier. Il disait: On est en train d'amender
une loi qui devrait normalement être en vigueur depuis fort longtemps
et
qui ne l'est même pas.
On m'apprend que, lors de la réplique du ministre
délégué aux Mines et aux Affaires autochtones, il y a une
demande qui est faite à l'Opposition par motion disant: Écoute2,
j'aurais un amendement technique, cet amendement technique doit être
discuté en commission plénière, ce que nous avons
accepté, d'ailleurs, en disant: On ne veut pas nuire au travail et aux
décisions que prend le gouvernement. Mais vous allez comprendre qu'on
veut en savoir plus, par exemple, avant de l'adopter. C'est dans ce sens que
les interventions de mon collègue sont faites ce matin. (12 heures)
Le ministre dit: Je vais vous donner tous les renseignements techniques
et juridiques. Mais il y a aussi certainement des décisions politiques
qui doivent être prises parce que vous n'amèneriez pas cette
proposition ce matin. Vous n'auriez pas fait cela au dernier moment, alors que
le projet de loi n'est même pas en vigueur et qu'on doit y apporter des
amendements, l'amender encore. Vous n'auriez pas fait cela si vous n'aviez pas
quelque chose derrière la tête. Ce qui est en arrière de la
tête n'est pas simplement juridique, à mon avis, ni technique.
C'est plus que cela. C'est le but de nos questions.
Le ministre dit: Donnez-moi un chèque en blanc, faites-moi
confiance. Comme Opposition, on serait mal venus d'accepter des choses
semblables, de ne pas prendre les décisions en toute connaissance de
cause. Le ministre doit bien comprendre que notre intervention n'est que
normale, faite pour aller au fond de tout ce qui est caché
derrière la tête du ministre pour en arriver à prendre une
décision éclairée.
Il est évident, au bout de la course, que si on ne veut pas nuire
au gouvernement dans ses décisions, on va devoir l'adopter. On fera les
écritures nécessaires, avec la majorité, encore une fois,
qui l'aura emporté. Mais on n'aura pas fait un travail convenable comme
Opposition si on en arrive à donner un chèque en blanc au
ministre sans avoir fait toutes les vérifications qui s'imposent. C'est
dans ce sens que mon collègue intervient depuis de nombreuses minutes.
On pensait que c'était une chose qui aurait duré cinq minutes,
étant donné que c'était technique. Mais on
s'aperçoit, à force de discussions, qu'on veut aller plus loin
dans le dossier. Il y a certainement quelque chose qui est caché.
Le ministre dit: Ah! Vous n'êtes pas là pour faire de la
spéculation ou inviter à en faire. Le ministre est conscient que
notre travail d'Opposition ne peut pas non plus nous empêcher de poser
toutes les questions qui s'imposent. C'est dans ce sens que le travail fait par
mon collègue méritait mon intervention pour dire que j'appuie les
nombreuses questions posées jusqu'à maintenant, et surtout les
dernières. Je repose les mêmes questions au ministre. Donnez-nous
toutes les indications nécessaires pour savoir où on s'en va. Il
n'est certainement pas question de vous donner un chèque en blanc.
Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: Les amendements que nous discutons ce matin ne sont
pas un chèque en blanc. Ils sont très clairement balisés.
Ils ont un certain fait juridique, certaines conséquences très
claires. Il y a des indemnisations, des pouvoirs de révocation. Ce n'est
pas un chèque en blanc qu'on donne.
Si le député de Laviolette veut aller à la
pêche pour savoir s'il y a un ou plusieurs autres projets où ces
articles pourraient s'appliquer, je dois lui dire que le but de discuter une
législation n'est pas d'aller à la pêche pour voir
où un article particulier va s'appliquer. Il va admettre avec moi que si
je donne - je ne l'ai pas, mais supposons que je l'ai - un endroit très
clair et que je dis que cet article peut s'appliquer là... Donnons un
exemple: Gaz Métropolitain va avoir besoin de l'entreposage pour le gaz
naturel parce que le rythme de croissance des ventes du gaz naturel et la
capacité du tuyau de TransCanada PipeLines font en sorte que pour
répondre... Si vous n'écoutez pas... Je vous donne un exemple
très précis sans identifier un endroit. Le député
d'Ungava ne semble pas... Il semble rire. Il ne prend pas cela au
sérieux.
M. Jolivet: On vous écoute, on vous écoute.
M. Ciaccia: II ne prend pas cela au sérieux. À quoi
ça sert? Je vous donne des informations. Lui ne prend pas cela au
sérieux, on discute et on discute. Après cela, on essaie de
dire...
Le Président (M. Saintonge): Un instant.
M. Ciaccia: ...qu'on ne veut pas vous donner d'information.
Le Président (M. Saintonge): Un instant, M. le
ministre.
M. Ciaccia: Je vais continuer.
Le Président (M. Saintonge): Juste un instant.
M. Claveau: Mon cas, ce n'est pas le sérieux de son
propos.
Le Président (M. Saintonge): Même si nous sommes en
commission plénière, il y a des règles strictes qui
s'appliquent. Je demanderais, pour éviter toute discussion directe entre
députés, que chaque intervenant s'adresse comme
régulièrement à la présidence.
M. Claveau: Le ministre m'a pris à partie tout à
l'heure. Ce qui m'a fait sourire, ce ne
sont pas ses propos.
Le Président (M. Saintonge): Non, l'incident est clos. On
va..
M. Ciaccia: Non, non, il peut...
M. Claveau: ...et je crois qu'il faut le dire.
Le Président (M. Saintonge): ...en rester au début,
M. le député d'Ungava.
M. Ciaccia: Ne faisons pas un débat.
M. Claveau: Alors qu'il a un cas bien précis en
tête, il nous parle d'hypothèses. Qu'il travaille donc sur le cas
précis qu'il a en tête.
Le Président (M. Saintonge): Écoutez, le ministre
donne sa réponse. Vous l'écoutez. Si vous avez d'autres
questions, vous les posez.
M. Ciaccia: M. le Président...
Le Président (M. Saintonge): Je vais simplement demander
à chacun des députés de se limiter à nos
règles de procédure usuelles, de s'adresser à la
présidence et non pas directement à d'autres
députés. M. le ministre de l'Énergie et des
Ressources.
M. Ciaccia: Je n'accepte pas l'affirmation du
député d'Ungava. Si Gaz métropolitain regarde pour trouver
des endroits pour faire de l'entreposage de gaz naturel afin d'affronter les
heures de pointe, je ne peux pas vous confirmer que oui, il y a un endroit
spécifique où ils regardent, oui, ils regardent maintenant et
oui, c'est dans un tel endroit. Je pense bien que ce serait irresponsable de ma
part de vous dire cela et je pense que vous le comprenez. Vous pouvez faire
tout le millage politique que vous pensez, vous pouvez tous aller à la
pêche tant que vous voulez, ce genre d'information va au-delà des
explications sur l'amendement. Alors, ne me demandez pas de vous identifier un
ou plusieurs cas spécifiques, je ne peux pas le faire. Je serais
irresponsable si je le faisais. Je sais que vous essayez de m'amener sur ce
terrain; après cela, si, parfois, vous réussissiez à m'y
amener et à en discuter, vous seriez les premiers à vous lever en
Chambre et à dire: Pourquoi le ministre a-t-il été ausssi
irresponsable, même avant que des discussions ou des négociations
aient lieu, il a dévoilé les sites et il a encouragé la
spéculation? Vous seriez les premiers à m'accuser.
Alors, si vous voulez des explications sur la portée de
l'article, sur la portée des amendements, pourquoi nous le faisons
maintenant, à la fin de la session, quelle est la signification des
autres amendements que nous présentons quant aux indemnisations et
à la protection des droits de ceux qui pourraient être
affectés... - au moment où je vous parle, ce n'est- même
pas sûr qu'il va y avoir des gens qui seront affectés par cela -
sur cela, je suis prêt à vous donner toute l'information et toutes
les explications dont vous avez besoin.
M. Jolivet: M. le Président...
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: ...tout à l'heure, le ministre m'a pris
à partie en disant que je n'écoutais pas, j'écoutais. Je
laissais à mon collègue la possibilité de poser une autre
question additionnelle parce que je sais que c'est son temps qui compte.
Est-ce que le ministre pourrait m'indiquer, dans ce cas-là,
l'urgence de présenter un tel amendement et, par le fait même,
m'indiquer quel serait le projet qui ne serait pas annoncé publiquement
dans quelques jours si l'amendement n'était pas adopté?
Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: Là, vous voulez rire.
M. Jolivet: Non, non, je ne veux pas rire.
M. Ciaccia: Bien oui!
M. Jolivet: Je ne veux pas rire.
M. Ciaccia: Vous voulez rire. Premièrement, ce que vous
dites n'existe pas. Pourquoi on arrive... Pourquoi ne posez-vous pas cette
question pour chaque amendement qui est apporté? Tous les projets de loi
qui sont devant cette Assemblée...
M. Jolivet: On connaît la réponse.
M. Ciaccia: Bien oui, si vous avez la question et la
réponse...
M. Jolivet: Non, non.
M. Ciaccia: ...fermons et allons-nous-en.
M. Jolivet: Vous me posez une question, je vais vous donner la
réponse.
M. Ciaccia: Parce qu'il y a des amendements... Vous pourriez
poser cette question pour tous les amendements qui sont apportés en fin
de session. Il y a des raisons; il y en a qui sont plus urgentes que d'autres;
il y en a où il n'y a pas d'urgence du tout, mais les amendements sont
apportés de toute façon. Il y a des raisons pour bonifier la loi
et pour qu'elle soit claire. Présentement, l'article 273 n'est pas
clair. On veut le clarifier et enlever les ambiguïtés. C'est pour
cela que nous apportons les amendements.
Le Président (M. Saintonge): M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: M. le Président, vous conviendrez...
D'ailleurs, le ministre est l'un de ceux qui disent souvent, en commission
parlementaire, lorsqu'on fait l'étude article par article des projets de
loi, qu'il ne s'agit pas de légiférer sur des hypothèses,
mais qu'il faut toujours le faire en fonction de cas précis.
Le ministre comprendra très bien, étant lui-même
originaire du milieu des juristes, des gens de loi, qu'il est très
difficile d'évaluer la portée juridique d'un projet de loi
lorsqu'on n'a aucun cas précis à se mettre sous la dent,
lorsqu'on n'a rien à saveur précise sur quoi on peut travailler.
Si le ministre est en train de nous dire qu'il travaille sur un cas
hypothétique, qui pourrait être aussi hypothétique que de
rechercher des réservoirs sur la lune, à ce moment-là, on
se demande ce qu'il fait avec son amendement. Alors...
M. Ciaccia: Si vous avez besoin d'un cas précis pour
chaque amendement présenté à l'Assemblée nationale,
je vous dis que vous n'auriez pas à adopter beaucoup d'amendements. (12
h 10)
M. Claveau: Généralement, M. le Président,
il y a des cas précis qui sont bien connus dans le fonctionnement normal
de notre société.
M. Ciaccia: Pas ici.
M. Claveau: Quand on se réfère à telle ou
telle chose, tout de suite on a une image en tête et on sait que dans tel
secteur il y a telle chose qui s'est passée, de telle façon. Cela
nous donne des références. Dans le cas présent il n'y a
pas de référence. Le ministre a dit lui-même qu'il s'agit
de quelque chose qui n'existe pas. Alors, on légifère sur le
néant? Il faudrait se comprendre.
Tout cela m'amène à poser une question bien
précise. Je conviens que le ministre ne veut pas nous donner de cas
précis. Je conviens que le ministre est en train de nous demander un
chèque en blanc, parce qu'il nous demande de légiférer sur
la portée juridique d'un article de loi dont on ne connait aucun
élément dans la pratique qui pourrait nous permettre, justement,
de donner des paramètres, et de baliser cette portée juridique.
Soit. Le ministre a fait son lit là-dessus et, le connaissant, ce n'est
pas la première fois qu'il dit: Non, c'est non, cela finit là. Il
y a quand même une chose sur laquelle le ministre pourrait nous
répondre et pour laquelle nous souhaitons avoir pour le moins une
réponse. Une réponse, de temps en temps, cela ne serait pas
mauvais. Ce serait probablement la première aujourd'hui, mais il devrait
être capable de nous répondre.
La modification à l'article 73, si elle est amenée, nous
prétendons que ce n'est pas à cause de la couleur du temps, mais
pour des raisons précises. Quelles sont ces raisons? Il y a deux
possibilités. Est-ce qu'il s'agit, dans un cas précis dont le
ministre ne veut pas nous faire part ici, de vouloir s'assurer, de la part du
gouvernement, et d'avoir la garantie qu'en révoquant des droits en
particulier, dans un cas précis, il va aussi, en même temps qu'il
va révoquer le droit de construire, être certain que lui, comme
ministre, il va révoquer aussi les droits de recherche et les droits
d'exploitation, pour s'assurer qu'il n'y ait aucune contestation juridique de
la part de celui qui aurait pu voir révoquer ses droits de construire,
pour qu'il ne puisse pas revenir dire: Oui, mais l'article ne permet de
révoquer mes droits de construire. Mes droits de recherche, mes droits
d'exploitation ne sont pas touchés, donc j'ai le droit d'exploiter et
j'ai le droit de recherche, même si je ne peux plus construire. Est-ce
qu'il s'agit de cela ou est-ce qu'il s'agit d'un autre côté de
quelqu'un, d'un groupe, d'un individu ou d'une société qui
voudrait être certain que l'ensemble de ses droits vont pouvoir faire
l'objet de compensation au moment de la révocation?
M. Ciaccia: Je voudrais répondre au député
sur cette question.
Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Claveau: On ne demande pas le où, le quand ni le
comment. On demande en théorie, comme disait le ministre tout à
l'heure.
M. Ciaccia: Oui, oui.
Le Président (M. Saintonge): D'accord?
M. Ciaccia: Non, non, je vais répondre.
Le Président (M. Saintonge): Alors, M. le ministre.
M. Ciaccia: Non, non, je vais répondre. Je pense que fa
réponse au député, c'est: les deux. Présentement,
il y a une ambiguïté. Dans l'article 274, on parle d'un bail
d'exploitation de réservoir souterrain de la part du titulaire du bail
d'exploitation qui suppose que dans l'article 273 la révocation pour
construire incluait aussi la révocation de l'exploitation. Alors, cela
va clarifier ce pouvoir au lieu de le laisser ambigu, comme il pourrait
être ouvert à interprétation présentement, parce
qu'on dit, dans l'article 274, mais on n'en parle pas dans l'article 273: On va
clarifier cela. La révocation est non seulement pour la construction,
mais elle est aussi pour l'exploitation, parce qu'on parle de la façon
d'indemniser et de paiement dans l'article 274. En faisant cela, on s'assure
aussi que l'indemnisation va être claire, que cela ne sera pas
seulement pour une partie, que cela va être pour la partie
construction et la partie exploitation. En plus de cela, on clarifie en disant
qu'avant de construire, il faut être en mesure de faire des recherches.
Alors, on inclut cela pour que ce soit total et que ce soit complet.
Le Président (M. Saintonge): Alors, M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: C'est bien clair qu'avec les explications que le
ministre vient de nous donner, cela veut dire que, dans l'hypothèse
où il y a un projet - on parle d'hypothèse - qui est en
voie de conclusion, à ce moment-là, les différents
partenaires du projet, y compris le gouvernement, retrouveraient leurs droits
de façon très claire et ne pourraient pas les contester. Ils ne
pourraient pas être contestés tant en ce qui concerne la
possibilité du gouvernement de révoquer l'ensemble des droits qui
sont rattachés à une propriété, y compris celui de
la recherche, et la même chose de la part de l'ancien propriétaire
afin de s'assurer qu'il pourra bénéficier des indemnisations
totales sur l'ensemble de ses droits qui étaient rattachés
à ce territoire.
M. Ciaccia: Vous avez raison, cela va clarifier les droits, mais
cela va clarifier aussi les obligations.
Le Président (M. Saintonge): Vous avez une autre question,
M. le député d'Ungava?
M. Claveau: Non. Je pense qu'on a fait le tour de la question. On
comprend bien que le ministre a des annonces à faire et qu'il ne veut
pas les faire tout de suite. On pourrait vouloir faire la même chose que
lui et attendre à la dernière minute. On pourrait jouer au plus
fin, on pourrait presque les faire à sa place au moment où l'on
se parle, mais on va quand même lui laisser le bénéfice de
faire ses annonces dans les jours qui viennent, en souhaitant toutefois qu'y se
souviendra que c'est grâce à la collaboration de l'Opposition, en
toute dernière instance, que les annonces qu'il aurait à faire
seront rendues possibles.
M. Ciaccia: Je veux remercier l'Opposition, mais ils vont
être surpris s'il n'y a pas d'annonce, par exemple.
Le Président (M. Saintonge): M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: Simplement, au point de vue technique, quand le
ministre dit que, lorsqu'il y a des amendements en commission parlementaire, il
arrive souvent qu'il n'y a pas beaucoup de questions de posées, comme
c'est le cas ce matin, je dois lui rappeler que la procédure
spéciale qu'ils ont prise, hier, pour présenter un amendement en
réplique à la prise en considération du rapport,
c'était exceptionnel. Donc, nous mettant la puce à l'oreille,
voûtant, non pas jouer notre rôle - je n'aime pas dire cela - mais
faire notre travail comme membres de l'Opposition, il était de notre
devoir, dans nos obligations, de poser toutes les questions. Comme je le disais
tout à l'heure, nous n'avons pas à empêcher le gouvernement
de prendre ses décisions, mais nous ne voulons pas être dupes, non
plus, des décisions qu'il aura prises.
M. Ciaccia: M. le Président, je voudrais juste
ajouter...
Le Président (M. Saintonge): M. le ministre de
l'Énergie et des Ressources.
M. Ciaccia: ...je ne veux pas éterniser le débat,
mais je ne m'opposais pas au nombre de questions, c'était juste
certaines questions particulières auxquelles je ne pouvais pas
répondre. Quant au nombre de questions, vous avez tout le loisir de
poser les questions que vous voulez, vous n'êtes pas limités quant
au nombre.
Le Président (M. Saintonge): Très bien. En
conséquence, est-ce que l'amendement proposé par M. le ministre
délégué aux Mines et aux Affaires autochtones est
adopté?
M. Claveau: Adopté.
Le Président (M. Saintonge): Adopté? L'amendement
est donc adopté.
La commission plénière s'étant acquittée de
son mandat, je demanderais aux personnes qui sont dans
l'Assemblée...
M. Claveau: II y a un rapport...
Le Président (M. Saintonge): Oui, il y aura rapport, mais
pour faire rapport, je demande aux personnes, qui sont à
l'Assemblée, qui accompagnent les députés et les
ministres, de bien vouloir quitter l'Assemblée pour que nous puissions
faire rapport, étant donné que les règles de
l'Assemblée prévoient que, quand l'Assemblée siège
comme telle, aucune personne qui n'en est pas membre, sauf le personnel de
soutien, ne peut s'y tenir.
Le Vice-Président: M. le président de la commission
plénière, pour votre rapport, s'il vous plaît.
M. Baril (président de la commission
plénière): M. le Président, je désire faire
rapport que la commission plénière a étudié
l'amendement proposé par le ministre délégué aux
Mines et l'a adopté.
Le Vice-Président: Est-ce que le rapport de la commission
plénière est adopté?
M. Jolivet: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: Oui, M. le Président. Le débat sur
l'adoption du projet de loi ayant déjà été
complété, je souhaiterais que nous procédions à
l'adoption du projet de loi.
Adoption
Le Vice-Président: Est-ce que la motion d'adoption du
projet de loi 5, Loi modifiant la
Loi sur les mines, présentée par le ministre
délégué aux Mines et aux Affaires autochtones, est
adoptée?
M. Jolivet: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, si vous voulez appeler
l'article 21 du feuilleton, s'il vous plaît. (12 h 20)
Projet de loi 11
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président: À l'article 21 du feuilleton,
nous allons maintenant procéder à la prise en
considération du rapport de la commission de l'économie et du
travail qui a procédé à l'étude
détaillée du projet de loi 11, Loi modifiant diverses
dispositions législatives concernant le cadastre. Est-ce qu'il y a des
interventions? M. le député d'Ungava.
M. Christian Claveau
M. Claveau: M. le Président, vous comprendrez que l'on
vient tout juste de sortir d'un travail acharné sur la Loi sur les mines
et qu'on se retrouve tout de suite à la prise en considération du
rapport de la commission sur la Loi sur le cadastre. Je peux vous dire qu'on a
eu des discussions intéressantes à maints égards et
souvent même pour le moins houleuses lors de la discussion de ce projet
de loi article par article.
Toujours est-il que les différents intervenants en sont
arrivés à un consensus qui fait qu'on se retrouve aujourd'hui
avec un projet de loi qui modifie certaines dispositions de la Loi sur le
cadastre et qui a encore des lacunes, parce que, vous en conviendrez, le
ministre de l'Énergie et des Ressources n'ayant pas accepté
toutes les recommandations de l'Opposition sur son projet de loi, il est bien
évident qu'il se retrouve avec quelques lacunes. Malgré ces
quelques lacunes-là, il reste que l'Opposition dit au ministre que c'est
lui qui aura à vivre avec son projet de loi et, dans ce sens-là,
nous voterons pour le projet de loi qui nous est proposé.
Le Vice-Président: Y a-t-il d'autres interventions? M. le
ministre de l'Énergie et des Ressources.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: Seulement pour dire, M. le Président, que nous
avons apporté les changements qui avaient été
demandés, tous les changements nécessaires au projet de loi et
que, après nos études et les considérations que nous avons
faites de tous les articles du projet de loi, nous ne croyons pas qu'il y ait
des lacunes. Non seulement n'y a-t-il pas de lacunes mais nous
améliorons sensiblement spécialement la question d'obtention de
permis. Nous réduisons à deux semaines un délai qui
était parfois de deux mois. Et je pense que le milieu nous a
demandé de faire ces changements et il sont heureux avec les changements
que nous avons faits. Merci.
Le Vice-Président: Le débat étant clos,
est-ce que le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a
procédé à l'étude détaillée du projet
de loi 11, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant
le cadastre, est adopté?
M. Jolivet: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint de
l'Opposition.
M. Jolivet: Étant donné que c'est encore notre
collègue, le député d'Ungava qui va intervenir pour les
deux prochains projets de loi, il aurait besoin de quelques minutes de
suspension pour pouvoir se remettre dans le sujet.
Le Vice-Président: Alors très bien, nous allons
suspendre nos travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à 12 h 23)
(Reprise à 12 h 31)
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! L'Assemblée nationale reprend ses travaux aux affaires du
jour. M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Article 22, M. le Président, s'il vous
plaît.
Projet de loi 12
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président: L'article 22 du feuilleton. Nous allons
maintenant procéder à la prise en
considération du rapport de la commission de l'économie et
du travail qui a procédé à l'étude
détaillée du projet de loi 12, Loi sur la Régie du gaz
naturel. Je dois immédiatement aviser l'Assemblée que nous avons
reçu en temps utile deux amendements présentés par M. le
ministre de l'Énergie et des Ressources, amendements qui devront
être mis aux voix avant de mettre aux voix le rapport de la commission.
Je cède donc la parole à M. le ministre de l'Énergie et
des Ressources.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: M. le Président, en commission parlementaire
il a été fait mention de la possibilité que la
régie puisse réglementer la distribution du gaz naturel
transporté autrement que par canalisation. Le gouvernement ne
désirant pas réglementer un secteur qui ne jouit pas d'un
monopole, propose donc, de modifier l'article 51 qui spécifiera
clairement que seul le gaz naturel transporté et livré par
canalisation est réglementé. C'est pour éviter des
situations où il peut y avoir du transport autrement que par
canalisation, la régie n'a pas de juridiction pour réglementer
cela. Le but de l'amendement est strictement pour clarifier cet aspect.
L'autre amendement à l'article 76. L'article 76 doit être
modifié afin de s'assurer que seules les affaires engagées devant
la régie, dans les matières visées à l'article 1 du
projet de loi pourront être poursuivies par la régie, sans reprise
d'instance. Vous vous souvenez, à l'article 1, qu'on mentionne que la
présente loi s'applique à la fourniture, au transport et à
l'emmagasinage de gaz naturel qui est livré ou destiné à
être livré par canalisation à un consommateur. On
prévoit dans la loi que s'il y a des causes pendantes, elles vont
continuer. On a enlevé la juridiction sur la vapeur. Il ne faudrait pas
que quelqu'un inscrive devant la régie, avant que la loi soit
proclamée, une cause où la régie n'aura plus de
juridiction. La juridiction de la régie va continuer seulement dans les
matières où elle a juridiction. Je pense que c'est raisonnable
pour ne pas permettre à la régie de faire, après
l'adoption du projet de loi, ce que le projet de loi avait
spécifiquement exclu. C'est le but de l'amendement à l'article
76.
Le Vice-Président: Je vais maintenant céder la
parole... Est-ce que vous voulez intervenir, M. le député
d'Ungava?
M. Claveau: II est bien évident que je...
Le Vice-Président: Je vais donc vous céder la
parole. M. le député d'Ungava.
M. Claveau: II est bien évident que je veux intervenir.
D'abord je demanderai au ministre de nous déposer par écrit les
amendements qu'il vient de mentionner.
Le Vice-Président: M. le député d'Ungava,
les amendements en question ont déjà été
déposés par le ministre au bureau du secrétaire
général. Les copies ont dû être transmises à
l'Opposition. Nous allons vous en remettre copie. Ces amendements, en fait, ont
été déposés le 10 juin 1988 au moment du
dépôt du rapport de la commission. Je vous cède la
parole.
M. Claveau: Si je comprends bien, le ministre a fait les choses
dans les normes, tel que cela doit se faire. Il devrait passer le message
à son collègue, le ministre délégué aux
Mines.
Le Vice-Président: M. le député d'Ungava, je
m'excuse d'intervenir. Évidemment, il y a diverses façons
d'apporter des amendements au projet de loi selon notre règlement. Il y
a une possibilité, lors du dépôt, que le ministre envoie
dans un délai prescrit par le règlement des amendements. Il y a
également possibilité qu'au moment de discussions sur la motion
d'adoption du projet de loi certains amendements puissent être
apportés.
Je n'ai pas à juger si effectivement c est mieux de le faire
à un moment ou à l'autre, mais je veux simplement
spécifier ici, pour les besoins de la cause, que ce sont deux
possibilités au règlement d'apporter des amendements. Donc, deux
moments prévus au règlement sans préjuger de la valeur du
moment où on devrait les apporter. Je vous cède la parole.
M. Christian Claveau
M. Claveau: Oui, M. le Président. Nous acceptons les
amendements qui sont proposés par le ministre et qui semblent être
dans l'ordre des choses, à première vue. De toute façon,
si tel n'est pas le cas, c'est le ministre qui aura à vivre avec.
Dans l'ensemble, la discussion lors de l'étude article par
article du projet de loi 12 sur la Régie du gaz naturel ne portait pas
à problème dans la mesure où il s'agissait comme le
ministre l'a expliqué, de rectifier ou de corriger une situation qui est
dépassée actuellement par la Régie de
l'électricité et du gaz et d'établir une juridiction
spécifique pour la régie dans le domaine du gaz naturel, à
l'exception, comme on vient de le dire, du transport par camion.
Jusque là, cela va dans l'ensemble. Là où il y a eu
des discussions et où l'Opposition reste en divergence avec le ministre,
c'est sur l'application de l'article 65 qui dit que le ministre peut donner
à la régie des directives sur les objectifs et orientations
à poursuivre dans l'exécution de ses fonctions. On se souviendra
qu'il y avait un article 63 dans le projet de loi dont on a discuté en
commission parlementaire qui permettait au ministre de s'ingérer
directement dans les décisions de la régie et dans son
fonctionnement quotidien. Cela avait été
dénoncé par tout le monde. Le ministre a dit: D'accord, on va
enlever cela. Par contre, il a ajouté une notion qui, à notre
avis, est encore plus large et qui va peut-être permettre au ministre
d'être encore plus présent dans le fonctionnement de la
régie, dans la mesure où maintenant il se permet, en tant que
ministre, de donner des directives à la régie, de
réorienter les objectifs de la régie et que ces objectifs
deviennent exécutoires à partir du moment où ils sont
approuvés par le gouvernement.
Par après, dans le même article 65, on nous dit que ceci va
être déposé devant l'Assemblée nationale dans les
quinze jours qui suivent leur approbation par le gouvernement, donc deux
semaines après qu'ils soient rendus exécutoires. C'est donc un
dépôt de principe tout simplement sur lequel il n'y a plus rien
à faire. D'autre part, si les décisions se prennent au cours de
l'été ou pendant les périodes où le Parlement ne
siège pas, cela ira à deux semaines après la reprise des
travaux, ce qui veut dire, par exemple, que le ministre pourrait, au moment
où l'on se parle, et en supposant que la loi soit en application... On
peut se permettre de parler d'hypothèse, puisque, tout à l'heure,
le ministre nous a parlé pendant près d'une heure sur des
hypothèses. Alors, dans l'hypothèse où la loi serait en
application au moment où l'on se parle et que dans les prochains jours,
fin juin, une décision serait prise par le gouvernement de modifier
certains objectifs de la régie pour les adapter, comme nous disait le
ministre, ia politique énergétique... On y reviendra de toute
façon parce qu'on ne connaît toujours pas la politique
énergétique qui devait être annoncée avant la fin de
la session.
Dans la mesure où des réorientations seraient prises
à la fin de juin, lesquelles deviendraient exécutoires
immédiatement après leur approbation par le gouvernement,
à ce moment le ministre pourrait faire à sa guise avec la
régie et faire approuver ou obliger la régie à fonctionner
en vertu de ces nouvelles orientations, de ces nouveaux objectifs
jusqu'à, la dernière semaine d'octobre, à toutes fins
utiles, avant qu'il ait à venir les déposer devant
l'Assemblée, parce que, en vertu du troisième paragraphe de
l'article 65, on dit que toute directive donnée en vertu du
présent article doit être déposée à
l'Assemblée nationale dans les quinze jours de son approbation par le
gouvernement, si elle est en session, sinon dans les quinze jours de la reprise
de ses travaux. (12 h 40)
Nous, nous croyons qu'il s'agit là d'une mesure qui est
nécessairement exorbitante, inconsidérée de la part du
ministre. Quoi qu'en dise le ministre, nous continuons à nous opposer
à l'application de l'article 65 ou à la présence de
l'article 65 dans la loi que nous avons à discuter, dans la mesure
où cela donne au gouvernement une possibilité d'agir
énorme, qui peut même amener la régie à prendre des
décisions strictement en vertu des impératifs du ministre. Dans
la mesure aussi où les nouveaux régisseurs sont nommés,
pour une période beaucoup plus courte, pour un maximum de cinq ans et,
à ce moment, c'est clair que pour pouvoir essayer de rester en poste,
les régisseurs seront beaucoup plus liés aux impératifs du
ministre qu'ils peuvent l'être actuellement, alors qu'ils sont
nommés pour une période de dix ans et que, finalement, comme le
veut le dicton: Les politiciens passent, mais les fonctionnaires demeurent. Les
administrateurs demeurent, à ce moment, pendant une période de
dix ans. Il n'y a pas plus de marge de manoeuvre pour un régisseur pour
pouvoir prendre des décisions sans que le renouvellement de son contrat
soit nécessairement remis en cause parce que le ministre n'est pas
d'accord.
Dans l'article 65, cela permet au ministre de pouvoir intervenir
directement dans un certain nombe de modalités. Finalement, cela peut
être très précis. Cela peut aller dans des cas très
précis dans la mesure où au premier paragraphe de l'article on
dit: Le ministre peut donner à la régie des directives sur les
objectifs et l'orientation à poursuivre dans l'exécution de ses
fonctions. Il ne s'agit pas uniquement d'objectifs au sens très large
d'orientation, je dirais, du domaine national, etc., sinon que cela peut aller
dans des objectifs bien précis directement liés à
l'exécution quotidienne des fonctions de la régie. Nous
continuons à nous opposer à cet article. Nous avons fait valoir,
en commission parlementaire, toute notre argumentation sur ce point. Le
ministre n'en a pas tenu compte. Il maintient et il a dit en commission: Vous
avez beau dire ce que vous voulez, l'article est là pour rester et il va
rester. L'article y reste et le ministre s'arrangera avec.
En gros, c'est le commentaire principal que l'on peut faire sur cette
question. Il y a certaines choses, par contre, qui semblent un peu bizarres
dans le comportement. Le ministre nous a dit que, justement, il n'avait pas
à nuire au fonctionnement de la régie au moment où l'on se
parle, mais dans l'application de l'article 77, entre autres, on a de petits
problèmes dans la mesure où les régisseurs actuellement en
poste vont le demeurer jusqu'à l'expiration de leur mandat en vertu de
la loi actuelle, c'est-à-dire un mandat de dix ans.
On a des régisseurs qui viennent tout juste d'être
nommés. Il y en a un qui a été nommé le 5 avril
1988 et qui occupe actuellement le poste de vice-président de la
régie. Il a été nommé quelques jours à peine
avant le dépôt du projet de loi. Dans son cas, le monsieur est
très chanceux puisqu'il va être en poste jusqu'au 5 avril 1998. Le
ministre nous disait: II n'est pas question d'intervenir dans la
décision de la régie et si la régie avait besoin de monde,
elle a pris son monde. Sauf qu'il reste que cela nous semble un peu bizarre que
l'on s'empresse de combler un poste quelques jours à peine avant le
début du
projet de loi, un poste qui va permettre, justement,
à un régisseur d'avoir un mandat deux fois plus long que ce qu'l
aurait été s'il avait été nommé quelques
jours plus tard, en vertu de la nouvelle loi.
D'autant plus que dans la mesure où on introduit une
nouvelle régie, on change les modalités. Le ministre nous disait:
Afin d'être plus conforme, plus proche, de pouvoir avoir des gens plus
compétents, etc. Il nous disait que les mandats de dix ans
étaient trop longs et qu'il fallait les raccourcir parce qu'on n'est pas
capable de garantir que quelqu'un qui est engagé pour dix ans sera
capable de suivre la démarche évolutive de la régie
pendant dix ans.
Il nous dit cela d'un côté de la bouche et de
l'autre côté, il laisse la régie, qui est toujours sous sa
juridiction, engager quelqu'un quelques jours à peine avant le
dépôt du projet de loi. Je dis quelques jours à peine avant
l'adoption du projet de loi puisque le projet de loi est en discussion depuis
déjà longtemps. Il a fait l'objet d'une commission parlementaire
l'automne dernier. Quelques jours avant que le projet de loi entre en vigueur,
on laisse engager quelqu'un pour une période de dix ans et, qui plus
est, on lui donne le poste de vice-président tout de suite en partant.
Vous conviendrez avec nous, M. le Président, qu'on a eu raison de
s'inquiéter de cette nomination qui, déjà, du moins dans
le principe, va à rencontre de l'esprit de la loi qui voulait avoir des
régisseurs pour une période plus courte dans la durée de
leur contrat.
Ce sont là quelques éléments que nous
retenons et qui font en sorte que l'Opposition officielle n'est pas
entièrement d'accord avec le projet de loi qui nous est
présenté. Bien que dans l'ensemble des éléments
techniques relatifs à l'administration et au suivi des gens qui
opèrent dans le domaine du gaz naturel, nous croyons que le projet de
loi est adapté et conforme aux voeux du ministre et qu'il répond
à un besoin nouveau, étant donné la grande importance qu'a
prise le gaz naturel au cours des années dans le bilan
énergétique québécois.
Toutefois, M. le Président, comme je le disais, il y
a certains articles entres autres, et particulièrement l'article 65, sur
lesquels nous ne sommes pas d'accord et que nous ne pourrons approuver d'aucune
façon jusqu'à l'adoption finale du projet de loi.
Le Vice-Président: Je vais céder la parole à
M. le ministre de l'Énergie et des Ressources pour une intervention de
cinq minutes.
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: M. le Président, en ce qui concerne la
nomination du vice-président, il était absolument essentiel,
après plusieurs mois, de procéder à cette nomination,
parce qu'il y avait des travaux, des causes qui devaient être enten-
dues. On n'était pas pour retarder les décisions, les causes
devant la régie parce qu'il y avait un projet de loi qui était
discuté devant l'Assemblée nationale et qu'il ne pouvait pas
être adopté avant la fin de la session. On ne pouvait pas geler
les travaux de la régie parce qu'il y avait un projet de loi en
discussion. Nous avons agi raisonnablement. On n'avait pas d'autre choix que de
le nommer d'après la loi qui était en vigueur au mois d'avril.
C'est ce que nous avons fait et cela a permis à la régie de
continuer ses travaux. Je ne vois pas... J'ai expliqué et donné
toutes ces réponses au député d'Ungava en commission
parlementaire mais il ne semble pas écouter quand on lui explique les
raisons de nos décisions.
En ce qui concerne l'article 65, dans l'avant-projet de loi, l'article
63 était beaucoup plus large. Je voudrais référer le
député d'Ungava aux propos de son prédécesseur, le
député de Roberval. Ce n'est pas une abolition de l'article qu'il
demandait. Je vais le citer, dans le Journal des débats du 14
octobre, à la page 4713, lors de la commission permanente de
l'économie et du travail. Le député de Roberval, qui
était le critique officiel de l'Opposition, disait: "II y a aussi des
gens, M. le ministre, qui sont venus confirmer notre appréhension
concernant le pouvoir très large, non balisé et irraisonnable,
à notre point de vue, que vous vous attribuez par l'article 63 de
l'avant-projet de loi. Je pense que vous vous montrerez davantage raisonnable,
compte tenu de ce qui vous a été dit, et que vous modifierez
substantiellement cet article pour baliser ce pouvoir."
C'est exactement cela que nous avons fart, M. le Président. Il
n'était pas question d'éliminer l'article, comme le
prétend aujourd'hui le député d'Ungava. Nous avons
écouté les représentations qui ont été
faites par les intervenants à la commission parlementaire. Nous avons
accédé à la demande des intervenants et à celle du
député, critique de l'Opposition officielle de cette
époque. C'est pour cette raison que nous avons rédigé
l'article 65 tel qu'il est rédigé maintenant. Vous allez le
retrouver dans d'autres projets de loi, d'autres pouvoirs, d'autres
régies, d'autres juridictions.
M. le Président, voici les raisons pour les changements que nous
avons apportés, après avoir été à
l'écoute des gens du milieu et d'après les représentations
qu'ils nous ont faites. Merci.
Mise aux voix des amendements
Le Vice-Président: Alors, le débat étant
clos, je vais maintenant mettre aux voix les amendements aux articles 51 et 76
présentés par le ministre de l'Énergie et des
Ressources.
L'amendement à l'article 51 se lit comme suit: L'article 51 du
projet de loi est modifié par l'insertion, dans la quatrième
ligne du premier alinéa, après le mot "livrer", des mots "par
canalisation". Est-ce que cet amendement à
l'article 51 est adopté?
M. Jolivet: Sur division.
Le Vice-Président: Adopté, sur division.
M. Jolivet: L'amendement est adopté, excusez.
Le Vice-Président: Donc, l'amendement est adopté,
purement et simplement.
Maintenant, je vais lire l'amendement à l'article 76: L'article
76 du projet de loi est modifié par l'insertion, dans la deuxième
ligne, après le mot "gaz", des mots "dans les matières
visées par l'article 1". Est-ce que cet amendement à l'article 76
est adopté?
M. Jolivet: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Donc, les amendements
sont maintenant intégrés au rapport.
Est-ce que le rapport, tel qu'amendé, de la commission de
l'économie et du travail, qui a procédé à
l'étude détaillée du projet de loi 12, Loi sur la
Régie du gaz naturel, est adopté? (12 h 50)
M. Jolivet: Sur division.
Le Vice-Président: Adopté sur division. M. le
leader du gouvernement.
M. Gratton: Article 25, M. le Président, s'il vous
plaît.
Projet de loi 32
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président: À l'article 25, nous allons
maintenant procéder à la prise en considération du rapport
de la commission de l'économie et du travail qui a procédé
à l'étude détaillée du projet de loi 32, Loi
modifiant la Loi sur Hydro-Québec. Est-ce qu'il y a des interventions?
M. le député d'Ungava.
M. Christian Claveau
M. Claveau: Oui, M. le Président. Vous me permettrez
quelques réflexions sur l'étude article par article. En fait, le
projet de loi 32 est un projet de loi très bref, six articles, dont deux
articles de fond. Fondamentalement, c'est la création de deux
têtes à Hydro-Québec. On divise le poste de
président-directeur général d'Hydro-Québec, on en
fait deux postes différents, dont un de président du conseil
d'administration et chef de direction et un de président et chef de
l'exploitation.
Nous avons défendu, en commission par- lementaire, le point de
vue selon lequel il ne s'agissait pas là de quelque chose qui allait
faire qu'Hydro-Québec allait être fondamentalement et
foncièrement plus opérationnelle, avec de meilleurs
comportements, que maintenant.
La structure actuelle d'Hydro-Québec a démontré
qu'elle pouvait être très efficace, très rentable et
qu'elle pouvait faire d'Hydro-Québec une société
prospère remplissant intégralement son mandat, qui lui est
donné par la loi qui l'a créée. Nous ne voyons dans la
création de cette bicéphalie à Hydro-Québec, bien
que le ministre va nous revenir avec son disque continuel disant qu'il s'agit
de moderniser les structures d'une société d'État à
l'instar d'autres sociétés, que l'impossibilité, pour le
gouvernement, de réussir à trouver, à des conditions
similaires, un remplaçant à M. Coulombe, qui a quitté la
direction d'Hydro-Québec et que, ne pouvant trouver un seul individu
à des conditions similaires, le gouvernement a dû se rabattre sur
une solution alternative qui s'appelle la création de deux
présidences à Hydro-Québec. Pour tout ceci, nous sommes
contre le projet de loi 32.
Le Vice-Président: Est-ce qu'il y a d'autres
interventions? Il n'y a pas d'autre intervention. Le débat étant
clos, est-ce que le rapport de la commission de l'économie et du
travail, qui a procédé à l'étude
détaillée du projet de loi 32, Loi modifiant la Loi sur
Hydro-Québec est adopté?
M. Jolivet: Contre.
Le Vice-Président: Donc, adopté sur division. M. le
leader du gouvernement.
M. Gratton: Oui. Alors, M. le Président, si vous voulez
bien appeler l'article 26 du feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 2 Adoption
Le Vice-Président: À l'article 26 du feuilleton,
Mme ta ministre des Affaires culturelles propose maintenant la motion
d'adoption du projet de loi 2, Loi modifiant la Loi sur le ministère des
Affaires culturelles. Je cède donc la parole à Mme la ministre
des Affaires culturelles.
Mme Lise Bacon
Mme Bacon: Merci, M. le Président. Il me fait
particulièrement plaisir, au lendemain de la remise du prix d'Europe, de
solliciter l'adoption par cette Chambre du projet de loi 2, Loi modifiant la
Loi sur le ministère des Affaires culturelles. Comme je l'ai
mentionné précédemment, ce projet de loi a essentiellement
pour objectif de revoir la procédure d'attribution de
la subvention remise annuellement à l'Académie de musique
de Québec afin de lui permettre de procéder à
l'organisation de la tenue du concours en vue de l'attribution d'une bourse qui
est désignée sous le nom de prix d'Europe. La nouvelle
procédure prévue par la loi permettra au gouvernement de
s'ajuster, au fil des ans, aux exigences financières requises par
l'organisation et à la remise aussi du prix d'Europe. Nous pourrons
ainsi contribuer à maintenir le haut degré de prestige qui est
attaché à ce prix, dont l'objectif est de stimuler les jeunes
musiciens au perfectionnement de leur art en leur permettant de poursuivre des
études musicales à l'étranger.
De plus, par ce geste, nous permettrons également à
l'Académie de musique du Québec de poursuivre sa principale
mission, qui est de promouvoir le goût de la musique à travers
tout le Québec et aussi d'élever le niveau des études
musicales pour toutes les disciplines vocales ou instrumentales.
J'ai souligné hier, au cours de l'hommage que je rendais à
Mme Rolland, boursière du prix d'Europe, cette année, que ce prix
est décerné depuis 1911 et qu'il nécessitait les
ajustements prévus par le projet de loi que nous avons devant nous. Je
le réaffirme aujourd'hui, et j'ajoute que, par l'adoption de ce projet
de loi, nous contribuerons, de plus, à faire connaître nos talents
à l'extérieur du Québec et à améliorer la
condition de nos artistes. Ce sont, quand même, deux objectifs poursuivis
par le ministère des Affaires culturelles. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président: Sur cette même motion, je vais
céder la parole à M. le député de Mercier.
M. Gérald Godin
M. Godin: M. le Président, comme Opposition, on ne peut
pas s'opposer à une loi qui favorise l'émergence de nouveaux
talents musicaux au Québec. On disait à l'époque que les
voyages forment la jeunesse, on peut dire maintenant que la culture forme la
jeunesse. Toute récompense ou tout prix qui vise à permettre
à des jeunes musiciens et musiciennes québécois d'aller
ailleurs pour parfaire leurs connaissances musicales, rencontrer de nouvelles
tendances, de nouveaux professeurs compétents dans leur domaine ne peut
qu'amener le Québec à prendre sa place encore plus fermement dans
le domaine culturel et artistique, qui est d'ailleurs son domaine de choix
depuis des années.
Donc, M. le Président, nous voterons avec enthousiasme pour le
projet de loi 2. Je ferai remarquer à ceux qui nous écoutent que
la gagnante des concours musicaux, cette année, est une demoiselle
Angela Cheng, née à Hong Kong et devenue canadienne par la suite,
et la meilleure violoniste au Québec est une vietnamienne d'origine qui
vit maintenant au Québec. Donc, l'immigration nous amène bien
sûr des nouveaux citoyens, de la main-d'oeuvre et des consommateurs, mais
aussi, dans bien des cas, des talents de toutes sortes qui font la preuve que
le Québec est une terre d'accueil qui permet aux talents de
s'épanouir.
Donc, ce projet de loi, nous l'appuyons fortement et nous
suggérons qu'on étende le modèle du prix d'Europe dans
d'autres domaines. Je sais qu'en littérature et en peinture, il existe
déjà des prix New York et Paris. Nous souhaitons que des prix
d'Europe soient créés par le ministère et le gouvernement
dans d'autres domaines culturels parce que nous sommes convaincus que
l'interfécondation des cultures ne peut qu'être
bénéfique à nos jeunes talents. Merci beaucoup, M. le
Président.
Le Vice-Président: Mme la ministre, pour une brève
réplique.
Mme Lise Bacon (réplique)
Mme Bacon: M. le Président, je veux seulement rassurer le
député de Mercier que nous allons faire renaître, pour deux
étudiants du conservatoire, un garçon et une fille, un prix qui
avait été discontinué il y a plusieurs années. Le
prix permettra, encore une fois, à des étudiants du Conservatoire
d'art dramatique de se perfectionner à l'étranger, avec des
bourses, des montants réalistes pour leur permettre de bien se
perfectionner, d'aller chercher ailleurs ce qu'ils ne trouvent pas ici mais
d'apporter aussi ailleurs ce que nous leur enseignons. Nous avons l'intention
de faire revivre ces deux prix qui sont importants, je pense, pour nos
étudiants des conservatoires d'art dramatique. Nous annoncerons
bientôt, à cet effet, les noms des gagnants.
Le Vice-Président: Le débat étant
terminé, est-ce que cette motion d'adoption du projet de loi 2, Loi
modifiant fa Loi sur le ministère des
Affaires culturelles présentée par Mme la ministre des
Affaires culturelles est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Puisque nous arrivons
à 13 heures, nous allons maintenant suspendre nos travaux qui
reprendront cet après-midi à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 59)
(Reprisée 15 h 15)
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît! Nous allons reprendre nos travaux. M. le leader adjoint du
gouvernement
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je vous demanderais
d'appeler l'article 30 du feuilleton,
s'il vous plaît!
La Vice-Présidente: À l'article 30 de notre
feuilleton... Est-ce que c'est l'article 30, monsieur?
M. Lefebvre: L'article 30. Je vous demande d'appeler le projet de
loi 21. À mon ordre du jour, c'est indiqué article 30, un projet
de loi du ministre Pagé, le projet de loi 21.
La Vice-Présidente: Le projet de loi 21 est inscrit au nom
du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Lefebvre: C'est cela. Une voix: Oui, c'est cela.
M. Lefebvre: Appelez-le pour adoption, Mme la
Présidente... Il n'y a pas d'intervention ni d'un côté ni
de l'autre.
Projet de loi 21 Adoption
La Vice-Présidente: D'accord. Le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose l'adoption du
projet de loi 21, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des
produits agricoles concernant le paiement des produits agricoles. Il n'y a pas
d'intervention.
M. Gendron: Adopté.
La Vice-Présidente: Si vous me le permettez, je vais faire
la lecture pour les fins du Journal des débats. Est-ce que le
projet de loi 21, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des
produits agricoles concernant le paiement des produits agricoles, est
adopté?
Des voix: Adopté.
M. Gendron: Non, Mme la Présidente. Un instant.
La Vice-Présidente: M. le leader de l'Opposition.
M. Gendron: Ce que le leader m'a demandé, c'est de faire
l'étape prévue qui est la prise en considération du
rapport de la commission. C'est bien cela?
M. Lefebvre: Oui, c'est cela, Mme la Présidente.
M. Gendron: Alors, c'est l'adoption du rapport. C'est pour cela
que j'ai dit qu'il n'y a pas d'intervenant sur le rapport. En tout cas, selon
ce que j'ai.
La Vice-Présidente: Si vous me le permettez. À mon
feuilleton, c'est l'étape de l'adoption.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, si vous me le
permettez.
La Vice-Présidente: Oui, M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: Effectivement, ce qui doit être appelé,
c'est l'adoption du projet de loi 21. Les informations qu'on me donne c'est
que, d'un côté comme de l'autre, il n'y a plus d'intervention et
effectivement on serait prêts à procéder à
l'adoption, sauf erreur, Mme la Présidente, et le leader de l'Opposition
me corrigera. Je vais le laisser intervenir là-dessus.
La Vice-Présidente: M. le leader de l'Opposition.
M. Gendron: C'est exact, Mme la Présidente. Même si
c'est écrit "prise en considération du rapport", cela a
été fait. Nous en sommes à l'étape de l'adoption du
projet de loi 21. Il n'y a pas d'intervenant de notre côté et il
n'y a pas l'air d'en avoir de l'autre côté. En conséquence,
le projet de loi 21 est adopté en ce qui concerne l'Opposition.
La Vice-Présidente: On s'entend bien. On est à
l'étape de l'adoption du projet de loi 21 et, comme tel, le projet de
loi 21 est adopté.
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: Adopté, Mme la Présidente, et
excusez-moi de cet imbroglio. Je vous demanderais maintenant d'appeler
l'article 31 du feuilleton.
Projet de loi 22 Adoption
La Vice-Présidente: À l'article 31 de notre
feuilleton, le ministre responsable de l'application des lois professionnelles
propose l'adoption du projet du loi 22, Loi modifiant le Code des
professions.
M. le ministre responsable de l'application des lois
professionnelles.
M. Claude Ryan
M. Ryan: Mme la Présidente, ces applaudissement
témoignent de l'importance que le groupe ministériel attache au
travail remarquable accompli par les membres des professions libérales
dans la société québécoise.
Le projet de loi que nous discutons a pour
objet d'apporter des améliorations concrètes au Code des
professions. Le Code des professions, c'est la loi-cadre qui régit le
fonctionnement des quelque 40 corporations professionnelles chargées de
dispenser à la population québécoise des services
identifiés comme des services professionnels. Ce Code des professions
est complété par une série de lois qui regardent un
certain nombre de professions particulières. Le Barreau, par exemple, a
sa propre loi, la Corporation des ingénieurs, la Corporation des
médecins, l'Ordre des comptables agréés, et je pourrais
continuer. Mais il y a une loi-cadre, le Code des professions, qui vient
fournir l'armature de base à l'intérieur de laquelle se
déroule l'activité de chaque profession.
Dans les dispositions de ce Code des professions, il y a tout d'abord
des dispositions qui visent à garantir au public la compétence
professionnelle et l'intégrité morale des personnes qui exercent
ces professions. La profession libérale au sens classique du terme est
une profession exercée sur une base personnelle. C'est une personne,
dans son bureau, qui dispense un service professionnel à une autre
personne.
Par conséquent, cela demande un rapport de très grande
confiance. Cela demande que la personne qui dispense un tel service puisse
répondre à des exigences de compétence et
d'intégrité très élevées.
Déjà, le Code des professions prévoit plusieurs
dispositions à cette fin. Entre autres, il y a des dispositions, par
exemple, prévoyant que chaque profession doit se doter d'un
comité d'inspection professionnelle, un comité qui va assurer que
le bureau de chaque professionnel sera visité
régulièrement afin qu'on puisse s'assurer qu'il fonctionne selon
des normes éthiques et techniques élevées.
Il y a un comité d'inspection professionnelle, et il y a un
comité de discipline aussi. Il y a des professionnels qui vont commettre
des actes dérogatoires qui donnent lieu à des plaintes. Il faut
bien que ces plaintes puissent être acheminées quelque part.
Alors, chaque grande profession a un syndic qui est le chargé des
plaintes. C'est à lui qu'on écrit ou qu'on se
réfère pour l'examen d'une plainte en provenance du public.
Lorsque l'enquête du syndic établit qu'il y a une matière
sérieuse, on ne peut pas laisser la décision à une seule
personne. Alors, la plainte est transmise au comité de discipline,
lequel est habilité à prendre des décisions. Et, pour
s'assurer que la corportion ne se protège pas mesquinement ou
étroitement, le président du comité de discipline est
nommé par le gouvernement et non pas par la corporation elle-même
afin de s'assurer qu'encore une fois, les décisions soient prises dans
le meilleur intérêt du public.
Pour surveiller les professions, on a créé, il y a
plusieurs années, il y a déjà une quinzaine
d'années, l'Assemblée nationale a institué l'Office des
professions. C'est un organisme gouvernemental comprenant cinq membres et dont
la fonction consiste à surveiller le fonctionnement des professions,
à veiller à ce que chaque profession se dote de la
réglementation dont elle a besoin pour fonctionner de manière
ordonnée, compétente et efficace. L'Office des professions assure
la liaison avec le ministre responsable de l'application des lois
professionnelles lequel répond au cabinet.
Dans le projet de loi que nous allons adopter bientôt et à
l'étude duquel nous avons procédé avec la collaboration
active des membres de la commission parlementaire de l'éducation, nous
apportons les principales modifications suivantes au Code des professions. Tout
d'abord, nous introduisons des précisions concernant le fonctionnement
des fonds d'indemnisation aux clients dont chaque corporation est
obligée de se doter maintenant. Il est arrivé des cas, ces
dernières années, on s'en souvient tous, où des
professionnels avaient utilisé à d'autres fins les sommes
d'argent qui leur avaient été confiées ou avaient
entraîné des coûts considérables pour leurs clients
par leur négligence. On s'est aperçu que certaines professions
n'avaient même pas de fonds de compensation dans ces cas. Aujourd'hui,
les professions sont obligées de se doter de fonds d'indemnisation. Mais
dans le projet d'amendement que contient le texte législatif que nous
examinons, une corporation pourrait déterminer par règlement la
limite jusqu'à laquelle pourrait aller une compensation versée
à une victime. S'il n'y avait pas de limite, il peut arriver qu'un seul
cas ruine le fonds pour plusieurs années à venir. Il y a une
limite raisonnable qui est fixée au-delà de laquelle les recours
légaux demeureraient possibles. C'est un premier point.
Deuxièmement, il arrive souvent que des clients ont des chicanes
avec leurs professionnels - cela peut être leur avocat, cela peut
être leur notaire, cela peut être un architecte ou un
ingénieur ou un comptable - quant à la note d'honoraires qu'ils
reçoivent après avoir bénéficié des services
du professionnel. Déjà dans nos lois, il est prévu une
procédure d'arbitrage, mais cette procédure n'était pas
complète. Alors là, nous ajoutons des compléments
importants qui vont augmenter encore la capacité de recours du client.
En particulier, il était dit: Une fois qu'un client avait
acquitté sa note, il n'avait plus de recours. Là nous lui donnons
le recours quand même. Il peut arriver que, de bonne foi, il acquitte sa
note d'honoraires parce qu'il va craindre les représailles du
professionnel Mais une fois qu'il a effectué un versement, il n'a plus
de recours. Dans la loi actuelle, on lui donne un recours pendant une
période de 45 jours. Il a 45 jours pour se réveiller, pour se
dire: Là, j'ai été traité de manière
injuste. Il peut en appeler à un arbitrage qui est prévu dans les
règlements de la corporation, laquelle est obligée de donner un
tel règlement en vertu de la loi. C'est une autre amélioration
importante que nous apportons.
Chaque corporation est obligée, d'après le code
professionnel et d'après sa propre loi constitutive, de se doter d'un
gouvernement démocratique. C'est une société
composée de ses membres, mais qui doit fonctionner de manière
démocratique, c'est-à-dire d'une manière qui assure que la
corporation sera dirigée par la volonté de la majorité de
ses membres. Alors, il faut prévoir des procédures à cette
fin; ce n'est pas tout de dire "vous fonctionnerez d'une manière
démocratique". Au gouvernement, pour fonctionner de manière
démocratique, nous avons besoin d'une Loi sur les élections qui
nous dit comment nous allons faire nos élections. Nous avons besoin de
procédures bien déterminées, de manière que chacun
sache s'il a le droit de voter, à quel endroit il doit se
présenter, à quelles conditions il doit se plier s'il veut
exercer ses droits de citoyen.
Dans les corporations, c'est la même chose. Il faut indiquer avec
précision les exigences de fonctionnement démocratique. Comme ces
exigences évoluent continuellement, c'est normal que, de temps à
autre, on apporte certaines améliorations. Nous apportons plusieurs
améliorations dans le projet de loi. J'en donne seulement un exemple,
Mme la Présidente. Actuellement, une corporation est obligée de
publier un avis d'assemblée générale dans les journaux,
c'est-à-dire, je m'excuse, elle est obligée d'adresser cela par
correspondance à tous ses membres. Pour qu'une assemblée soit
valide, il faut qu'elle ait été convoquée par un avis
écrit envoyé par l'association. Prenez un organisme comme l'Ordre
des infirmiers et des infirmières, qui a 58 000 membres, je pense;
imaginez la dépense! Aujourd'hui, le timbre coûte 0,37 $ et
parfois c'est un envoi qui va coûter 1 $ ou 1,25 $. À 58 000
membres, cela peut faire facilement 50 000 $ ou 60 000 $. Alors, dans le projet
de loi, on dit: Aujourd'hui, il y a d'autres moyens d'informer les gens, en
particulier la publication d'avis dans les publications professionnelles de ces
organismes-là. L'ordre des infirmières a son bulletin
régulier. Cela veut dire qu'il faudra un avis publié dans ce
bulletin, suivant des normes qui auront été définies par
les dirigeants de la corporation, par le bureau de la corporation. C'est une
autre amélioration que nous apportons.
C'est la même chose, aujourd'hui, si on dit: Quand le bureau se
réunit, il faut qu'il y ait quorum. Le quorum,
généralement, c'est la moitié des membres plus un. Il y a
des membres qui seraient prêts a participer à l'assemblée,
mais qui ne peuvent pas se déplacer physiquement pour une raison ou pour
une autre. De plus en plus, nous introduisons dans nos lois des
procédures en vertu desquelles une personne peut communiquer son opinion
sur un point et même son vote par des moyens modernes comme le
téléphone, par exemple, ou les communications
télévisées ou radiodiffusées, etc. Nous l'avons
fait dans le cas des commissions scolaires. On nous avait demandé de le
faire pour les organismes direc- teurs des corporations professionnelles. Nous
introduisons également cette modification.
If faut se rendre compte de la gravité de la situation. Lorsqu'un
professionnel est condamné par son comité de discipline à
ne plus pouvoir exercer sa profession, il peut arriver qu'il ait
été victime d'une décision injuste. Alors il faut qu'y ait
un droit d'appel. Actuellement, il a un droit d'appel au Tribunal des
professions, c'est normal. Nous maintenons le Tribunal des professions, cela va
de soi. Maintenant il y a deux anomalies que nous corrigeons à propos du
Tribunal des professions: il peut arriver qu'il soit saisi de demandes frivoles
ou qui soient de purs prétextes pour retarder l'exécution d'une
décision qui doit s'appliquer le plus vite possible, surtout s'il s'agit
d'un chenapan qui a été rayé de la profession pour
malhonnêteté, par exemple. Dans ce cas, le Tribunal des
professions, avec la modification que nous apportons à la loi, sera
autorisé à ne pas accepter une demande d'appel en constatant, par
exemple, qu'elle est frivole ou sans fondement à sa face même. Il
s'agit beaucoup plus d'un abus de procédure qu'autre chose.
On a la même chose aujourd'hui, comme vous le savez, Mme la
Présidente, à la Cour suprême du Canada... Il faut qu'il y
ait permission d'en appeler. Avant qu'un appel soit entendu, la Cour
suprême examine le cas à sa face même. Si elle
considère qu'il n'y a pas de fondement à la demande d'appel, elle
se dit: Retournez à votre dossier et présentez-nous une demande
plus étoffée, autrement on n'a pas de temps à perdre avec
cela. Alors, le Tribunal des professions se voit conférer ce pouvoir. En
outre, il peut arriver que lui aussi se trompe de bonne foi. Imaginez, par
exemple, qu'il ait rendu une décision interdisant à un avocat ou
à un médecin l'exercice de sa profession jusqu'à la fin de
ses jours, à perpétuité, et qu'il soit saisi deux semaines
ou deux mois ou deux ans plus tard d'éléments d'information
nouveaux qui indiquent qu'il avait pris une mauvaise décision. On lui
donne la permission de rouvrir le dossier dans des cas comme celui-là,
toujours dans te souci de faire justice à la personne concernée.
Une série de modifications de cette nature vont permettre d'humaniser
encore davantage notre législation en matière de corporations
professionnelles. (15 h 30)
Un dernier point très important, le plus important de tous. Nous
avons deux sortes de professions: les professions à exercice exclusif et
les professions que nous appelons de titre réservé. Les
professions à exercice exclusif sont celles dont l'exercice est
réservé exclusivement aux personnes qui font partie de la
corporation. Par exemple, pour les médecins, il n'y a pas de
problème, il faut être médecin diplômé d'une
faculté de médecine reconnue pour être autorisé
à pratiquer la médecine au Québec. Il faut être
avocat, c'est-à-dire diplômé d'une université et
avoir subi avec succès les épreuves d'admission du Barreau pour
avoir le droit de pratiquer fa
profession d'avocat, c'est-à-dire de faire les actes
professionnels qui sont caractéristiques de l'avocat.
Il y a d'autres professions qui ne vont pas aussi loin. Par exemple, on
a les ergothérapeutes, on a les psychologues. Ce sont des professions
très honorables, mais dont l'exercice n'est pas réservé de
manière exclusive aux membres de la profession. Pourquoi? Parce que
c'est plus difficile à définir. On peut avoir un psychologue
consultant à la radio, on peut avoir une personne qui donne des conseils
psychologiques dans les journaux, des courriers du coeur. On peut avoir des
personnes qui se donnent le mandat de fournir des conseils; il y a souvent des
membres du clergé qui vont s'ériger en conseillers de personnes.
C'est très difficile de définir la psychologie d'une
manière tellement rigide qu'il y ait une barrière et que personne
ne puisse la franchir d'aucune manière. Le législateur a
été assez souple là-dessus. Il dit: If ne faut pas
pécher par excès de jalousie et d'exclusivisme. Mais, cependant,
on s'est aperçu, depuis vingt ans, qu'il y avait des titres de
professions qui étaient utilisés de manière abusive.
L'appartenance, par exemple - je prends l'exemple des psychologues - à
la Corporation des psychologues n'est pas obligatoire. Il peut arriver qu'une
personne qui est en dehors s'intitule psychologue. Là, les gens sont
mêlés. Elle va se dire psychologue consultant, psychologue expert
ou psychologue-conseil. Elle utilise le mot psychologue et souvent elle n'a pas
les qualifications d'un véritable psychologue professionnel.
Avec la modification que nous apportons au Code des professions,
n'auraient droit au titre de psychologue que les membres en règle de la
Corporation des psychologues et toute personne qui utiliserait un titre
laissant croire qu'elle a la même compétence que les membres de la
corporation commettrait une violation qui serait passible de sanction. Il y a
déjà plusieurs années que l'Office des professions
recommandait au gouvernement de procéder à une proposition devant
l'Assemblée nationale visant la modification de cette disposition du
Code des professions. Nous le faisons. Nous avons réuni dans ce projet
de loi une bonne soixantaine de modifications fonctionnelles au Code des
professions, qui rendront possible aux membres de nos corporations
professionnelles un exercice plus souple, plus efficace de leur profession, en
accord avec les règles de leurs corporations professionnelles
respectives. Je pense que tout le monde sera très heureux. Il y a des
questions qui surgissent à propos de certaines modifications. J'en ai
parlé l'autre jour.
Par exemple, certaines corporations m'ont écrit pour me faire
part de certaines inquiétudes. Nous examinerons ces inquiétudes
avec attention, nous demeurerons à l'écoute, comme nous le
sommes, des représentations qui nous parviennent des corporations et de
leurs membres. Et si, plus tard, il y avait lieu d'apporter des nuances ou des
modifications qui nous seraient dictées par l'expérience, nous le
ferions volontiers, parce que nous n'avons d'autre but, en
légiférant, que de rendre plus facile, dans le meilleur sens du
terme, l'exercice de leur activité professionnelle par les membres de
nos différentes professions libérales.
Je profite de l'occasion pour ajouter, en terminant, que le gouvernement
considère avec beaucoup de respect le travail accompli dans notre
société par les membres de nos corporations professionnelles. Il
y a des moutons noirs dans tous les milieux, il y en a également dans
certaines corporations également. Mais de manière très
générale, nous sommes servis au Québec par des
médecins, des ingénieurs, des architectes, des comptables, des
notaires, des infirmiers et infirmières, des psychologues, des
conseillers en orientation, des conseillers en relations industrielles, des
travailleurs sociaux et des travailleuses sociales, etc., qui réunissent
des qualités de compétence, de dignité et
d'intégrité dont nous avons lieu d'être fiers.
Nous avons, en outre, un système d'organisation professionnelle
qui repose sur le gouvernement des professions par elles-mêmes. Le
gouvernement a mis en place un dispositif très léger, très
modeste pour assurer la coordination et la surveillance générale
du système, mais sans abus de surveillance ou de contrôle. Nous
voulons que chaque corporation se dirige, se contrôle, s'autodiscipline
elle-même. Je vous assure qu'avec ce projet de loi, nous n'avons d'autres
intentions que de persévérer dans cette voie, et nous ne voulons
aucunement envisager une quelconque étatisation de ces professions. Nous
les préférons libres, nous les préférons capables
d'exercer leurs activités sous la gouverne et la responsabilité
de leurs membres.
Je suis très heureux de constater que ce projet de loi sera
très probablement adopte avec l'adhésion unanime de tous les
membres de cette Chambre. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre responsable de
l'application des lois professionnelles. Je vais maintenant reconnaître
Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, Mme la Présidente. En fait, comme le
dit le ministre, ce n'est pas un projet de loi majeur qui vient modifier
profondément, sur le fond, le système actuel régissant les
professions au Québec. Le ministre nous a dit à maintes reprises
- je dois dire que je partage son avis - que le système professionnel au
Québec fonctionne relativement bien. Cela, cependant, n'a pas
empêché le ministre de multiplier les règlements et de
resserrer les encadrements d'une façon peut-être un peu excessive.
Mais on finit par s'y habituer, vous savez. En campagne électorale, on
l'entendait, et
avant évidemment, comme critique de l'Opposition, qui nous
servait souvent cette leçon: On entend légiférer et
réglementer moins et mieux. Cela ne s'est pas démontré
à ce jour.
Cependant, je dois dire que, pour l'essentiel, ce projet de loi
maintient notre système actuel. Il apporte quelques modifications,
quelques-unes intéressantes, d'autres discutables que nous avons
déjà eu l'occasion, d'ailleurs, de signaler au moment du
débat sur l'adoption du principe.
Je vais peut-être en rappeler quelques-unes. Elles ne sont pas
nécessairement dans l'ordre des articles du projet de loi. Il y a la
féminisation des désignations des corporations. On sait que le
projet de loi profite de l'occasion pour accorder à deux corporations
professionnelles des modifications dans la désignation de la corporation
professionnelle pour la féminiser. Comme, de plus en plus au
Québec, on retrouve des femmes dans toutes les corporations
professionnelles, il serait normal que les titres des corporations
véhiculent également cette réalité. Nous avons
voulu apporter une modification à la loi. Le ministre, s'y refusant,
nous l'avons retirée. Cependant, je voudrais juste rappeler au ministre
l'engagement qu'il a pris en commission parlementaire à ce sujet,
c'est-à-dire qu'il inviterait, et dans les meilleurs délais,
toutes les associations professionnelles dont les titres pourraient être
féminisés - il y en a environ une douzaine - qu'il entrerait en
communication avec ces corporations pour voir s'il ne pourrait pas
procéder, dans les meilleurs délais, à une
féminisation des termes, ce qui refléterait mieux la
réalité et la composition des différentes associations
professionnelles.
Je dois dire également que le ministre et les membres de la
commission parlementaire ont accepté d'apporter, deux modifications,
à notre avis importantes, au projet de loi, à la suite de
propositions que nous avons faites. La première touchait la publication
des décisions du comité de discipline. Et, je dois
reconnaître que dans ce projet de loi, c'est intéressant, puisque
dorénavant, on prévoit les modes de publication des
décisions rendues par les différents comités, bureaux ou
tribunaux touchant les infractions au code d'éthique des
différentes professions. Cependant, le projet de loi allait un peu loin
et, juste pour vous l'illustrer, dans l'article qui parle du comité de
discipline, on prévoyait que, non seulement la décision devait
être publiée mais elle devait l'être au frais de la personne
qui avait été trouvée coupable. Autrement dit, on disait
à celui qui va être pendu: II faut aussi que tu paies ta corde. On
trouvait que c'était aller un peu loin. Le ministre s'est rendu de bonne
grâce à nos arguments et a retiré cette partie de l'article
qui faisait obligation à celui qui était pénalisé
par un jugement de payer également pour la publication du jugement rendu
par les différentes instances disciplinaires dans un journal de sa ville
ou de sa municipalité. (15 h 40)
L'article 47, qui vient modifier l'article 172 du Code des professions,
prévoyait que le tribunal devait siéger à Québec et
à Montréal et, exceptionnellement, dans les chefs-lieux
judiciaires des personnes intimées. C'était un net recul par
rapport à la situation actuelle où le tribunal, finalement,
siège dans le district judiciaire des intimés et le ministre a
accepté de revenir au libellé de la loi actuelle. Cela constitue
pour nous une amélioration, une bonification intéressante du
projet de loi.
Cependant, je dois dire que j'avais soulevé certaines
réserves quant à l'article 188. C'est l'article 57 qui vient
modifier l'article 188 du Code des professions et qui définit les
infractions. J'ai souligné au ministre certaines inquiétudes
quant à l'élargissement ou resserrement, je dirais, de cette
définition des infractions possibles. Pour vous donner une idée,
je me permets de lire cet article parce que cela me semblait, d'une part,
pointilleux, pour ne pas dire un peu dangereux, susceptible de créer
plus d'affrontements que d'en solutionner. Ainsi, cet article 188.1 dit au
paragraphe c, 4°: "amène, par une autorisation, un conseil, un ordre
ou un encouragement, mais autrement que par le fait de solliciter ou de
recevoir des services professionnels d'une personne qui n'est pas membre d'une
corporation professionnelle dont les membres exercent une profession à
titre réservé, une personne qui n'est pas membre d'une telle
corporation: a) à utiliser un titre ou une abréviation de ce
titre, réservés aux membres d'une telle corporation, ou un titre
pouvant laisser croire qu'elle l'est;". Le même article: "amène,
par une autorisation, un conseil, un ordre ou un encouragement, mais autrement
que par le fait de solliciter ou de recevoir des services professionnels, une
personne qui n'est pas membre d'une corporation, a) à exercer une
activité professionnelle réservée aux membres d'une telle
corporation; b) à utiliser un titre ou une abréviation..."
Autrement dit, on est en train de resserrer considérablement la
définition ou les causes, les actes qui pourraient être
considérés comme étant une infraction au Code des
professions en vertu des professions exercées à titre
réservé. Je dois dire que je le déplore parce que j'ai
attiré l'attention du ministre sur ce point et il m'a dit: Non,
écoutez, cela ne pourra pas aller aussi loin que vous le pensez; j'ai
fait des vérifications.
Cependant, j'ai appris, au moment où on prenait en
considération le rapport - d'ailleurs, c'était terminé -
de la commission parlementaire, que l'Ordre des infirmières et
infirmiers du Québec avait demandé au ministre, par
télégramme, de surseoir à l'adoption du projet de loi, le
temps d'examiner plus attentivement les impacts et les conséquences du
resserrement de la définition des infractions. À la lecture du
document que nous avons reçu depuis de l'Ordre des infirmières et
infirmiers du Québec, je pense qu'il y a lieu de s'inquiéter,
sinon de s'alarmer par rapport à l'interprétation et aux
conséquen-
ces que pourrait entraîner l'article 188.2 tel que modifié.
Je me permets, Mme la Présidente, de manière qu'il n'y ait pas
d'erreur quant à l'interprétation que fait l'ordre des
infirmières, de citer des grands passages de l'avis; je ne sais pas
s'ils appellent cela un avis, mais ce sont des commentaires que nous a fait
tenir l'ordre des infirmières.
L'ordre des infirmières s'inquiète, comme je le faisais,
de la portée de ce nouvel article, de cette nouvelle définition
des infractions, et rappelant qu'il y avait eu des suggestions de modifications
législatives au Code des professions et aux lois professionnelles qui
avaient été présentées par l'Office des
professions, mais qui touchaient les corporations professionnelles des
médecins et qui visaient à resserrer, finalement, la
définition des infractions, il y a eu un tollé et la proposition
de l'Office des professions, comme nous le rappelait le ministre en commission
parlementaire, n'a pas été retenue. Cependant, ce qui n'avait pas
été retenu dans le cas des professions médicales l'a
été dans le cas des professions à exercice
réservé.
Selon l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec, et
je cite, "une telle modification à l'article 188 du Code des professions
est inadmissible, et elle le serait également si elle était dans
une loi particulière, telle que la loi médicale, compte tenu de
ses impacts possibles sur les employeurs, les dirigeants, les administrateurs,
les officiers, les fondés de pouvoir, les employés d'une personne
morale."
Il continue en disant: "Comment pourrait être géré
le système de santé au Québec, comment assurer que la
population reçoive les services et les soins de santé requis par
sa condition, comment maintenir, protéger et promouvoir la santé,
traiter la maladie, faciliter la réadaptation qui s'impose avec une
telle épée de Damoclès? Comment, finalement, assurer les
différents modes de distribution des services dans tout le
système dans une optique de coordination, de multidisciplinarité
et de complémentarité?"
En effet, la définition qui est donnée là pourrait
pénaliser soit la corporation ou soit la personne qui pose un acte; par
exemple, donner des médicaments dans un hôpital ou donner des
conseils quant à l'utilisation de médicaments à un
patient. Une infirmière, par exemple, qui dirait "faites attention, ce
médicament crée de la somnolence si vous avez à prendre le
volant", pourrait éventuellement être poursuivie parce qu'elle
pose un jugement qui relève de la responsabilité ou des pouvoirs
réservés au pharmacien ou au médecin.
L'ordre des infirmières cite un certain nombre d'exemples qui
sont révélateurs des conséquences que pourrait avoir, si
interprété tel qu'on le pense, l'article 188. En plus de
l'administration des médicaments pour lesquels on peut se demander qui a
le droit de donner des informations quant aux effets touchant l'utilisa- tion
d'un médicament, qui a le droit de les administrer, qui a le droit de
donner des conseils: le médecin, le pharmacien et l'infirmière.
Mais on sait que, dans un centre hospitalier, dans les CLSC, dans les soins
d'urgence, ce sont souvent ces trois personnes qui travaillent en concertation
et en collaboration qui ont à intervenir auprès du patient, qui
posent des gestes qui sont, à la limite, des responsabilités ou
des actes réservés ou à titre exclusif.
L'ordre des infirmières cite également les services
d'urgence en rappelant que les techniciens ambulanciers - on sait que c'est
populaire d'en parler aujourd'hui - dans le domaine des soins
préhospitaliers, donnent des soins d'urgence, alors que, d'une part, ils
n'ont pas vraiment la préparation et que, d'autre part, ils ne sont pas
reconnus comme professionnels au sens du Code des professions. Mais on sait
qu'ils sont appelés à intervenir dans des situations d'urgence et
à poser des gestes qui sont réservés soit aux infirmiers
et infirmières, soit aux médecins.
Qui sera poursuivi dans le cas où un technicien ambulancier pose
un geste qui relève d'une autre corporation ou d'une corporation
professionnelle? Est-ce que ce sera les services ambulanciers ou la toute
nouvelle corporation qui vient d'être créée? Est-ce que ce
sera l'hôpital? Est-ce que ce sera le supérieur immédiat,
la personne morale ou le technicien ambulancier lui-même? Je pense que
cette situation sur laquelle l'Office des professions attire notre attention
pourrait se produire plus rapidement qu'on ne le pense et créer des
problèmes sérieux quant à la capacité de notre
système de santé de coordonner son action, d'assurer un certain
continuum, un certain suivi, dans les actions posées par les
différents intervenants en matière de santé.
La corporation estime que, par l'article 188, ce projet de loi risque de
venir ouvrir une porte plus grande aux poursuites pouvant viser les techniciens
ambulanciers, mais pouvant également toucher les dirigeants et les
administrateurs. (15 h 50)
Ce sont également les soins aux pieds qui sont de plus en plus
donnés dans les CLSC, dans les centres d'accueil et qui le sont par les
infirmières dans la très grande majorité des cas. Et
combien cet article risque de venir porter atteinte à cette pratique qui
s'est développée dans les CLSC et dans les centres d'accueil,
mais également à la qualité des services et à la
disponibilité des services aux personnes, particulièrement les
personnes âgées, qui ont besoin de soins aux pieds.
Le cas est plus patent, je pense, et risque d'avoir plus de
conséquences dans les services de psychiatrie et de santé
mentale. Dans toutes les régions du Québec, on réclame de
plus en plus et c'est particulièrement le cas de ma région,
où on a des problèmes sérieux à recevoir en nombre
suffisant des psychiatres. On parle de plus en
plus de la nécessité de créer des centres et
d'ouvrir des centres de crises où on retrouverait des équipes
multidisciplinaires dans lesquelles on retrouverait des médecins, des
infirmières, des psychologues, des travailleurs sociaux, des
ergothérapeutes. Ces personnes auraient à travailler en
concertation pour rendre un service le plus accessible et le plus efficace
possible à la clientèle. Un tel article, qui vient prévoir
des infractions, qu'une infraction est commise si on encourage, si on
suggère, si on propose, si on demande d'exercer une activité
à titre réservé, une telle disposition risque tantôt
de nous amener des conflits, des contestations touchant la capacité de
nos institutions de mettre sur pied de telles équipes
multidisciplinaires de façon efficace.
Je ne voudrais pas que mon propos soit interprété comme
étant une volonté d'amener toutes les professions à faire
de l'ingérence et du chevauchement en matière de services d'une
profession à l'autre. Cependant, notre système, et plus
particulièrement notre système de santé, appelle de plus
en plus la concertation, la coordination. Dans ce sens, plus vous
définissez finement ce qui relève des corporations
professionnelles, plus cette activité ou cet exercice de concertation,
de continuité dans les services de santé sera rendu difficile et
cela portera atteinte directement, pas nécessairement à la
corporation elle-même, mais cela portera atteinte à la
qualité et à l'efficacité des services
dispensés.
L'ordre des infirmières termine par quelques articles et je les
cite au texte. "Voici, dit-il, quelques autres situations qui risquent
d'être la cible de ces articles". Il parle toujours de l'article 188 tel
que modifié. "Le médecin ou tout autre professionnel, lorsqu'il
recommande ou encourage un bénéficiaire à consulter un
mas-sothérapeute, un naturopathe ou un homéopathe." On sait
qu'ici ce n'est pas reconnu. Le médecin qui pourrait faire une telle
suggestion, parce que étant davantage conscient de l'influence et de la
percée que font les nouvelles médecines, ce qu'on appelle les
médecines douces, pourrait faire une telle recommandation avec comme
résultat qu'il risque d'être poursuivi parce qu'il encourage un
patient à aller consulter un massothérapeuthe, un naturopathe ou
un homéopathe.
L'ordre poursuit, en disant: "Le responsable, par exemple, d'un
programme de maintien à domicile d'un CLSC, lorsqu'il décide que
certains soins infirmiers peuvent être faits par l'auxiliaire familiale."
Donner des médicaments, par exemple, ou changer un pansement, pour
quelque chose de mineur, alors on pourrait poursuivre cette personne parce
qu'elle pose des actes qui sont réservés aux infirmières."
Les responsables d'un centre d'accueil lorsqu'ils décident que les
éducateurs de groupes ou d'appartements supervisés vont donner
des soins tels que l'administration d'insuline, les soins de
trachéotomie et ainsi que les éducateurs lorsqu'ils donnent ces
soins." Dans ces cas on pourrait poursuivre à la fois le
CLSC et le centre d'accueil et on pourrait également poursuivre
les personnes qui acceptent de rendre ces services ou de donner ces soins. "Les
infirmières qui travaillent dans un service de première ligne
d'un CLSC, lorsqu'elles procèdent à l'évaluation et
à l'orientation des bénéficiaires." On peut penser, en
particulier, aux infirmières qui travaillent à faire le tri dans
les services d'urgence, lorsqu'elles portent une évaluation,
lorsqu'elles posent un jugement qui relève davantage d'actes qui sont
réservés aux médecins, elles pourraient
éventuellement être poursuivies. "Un technicien en radiologie, et
je termine là-dessus, lorsqu'il administre un médicament par voie
intraveineuse ou encore par une substance iodée de contraste."
Autrement dit, ce que l'ordre des infirmières nous
démontre, c'est que le nouvel article pourrait avoir des
conséquences beaucoup plus graves et beaucoup plus négatives que
ce que nous laissait entendre le ministre, de bonne foi, je pense. Je ne crois
pas que le ministre ait voulu nous induire en erreur.
Cependant, je regrette deux choses pour les déplorer: d'abord,
que le Conseil interprofessionnel... Pour voir si le projet de loi était
assez satisfaisant, personnellement, j'ai communiqué avec le Conseil
interprofessionnel pour savoir comment il percevait le projet de loi. Je suis
obligée de constater que le conseil n'avait pas mené, sur cette
question ou sur cet aspect du projet de loi, une consultation suffisamment
large. Cela me préoccupe.
La deuxième chose, je le dis pour le déplorer et le
regretter, c'est que le ministre n'ait pas jugé utile - au moment
où il a reçu le télégramme de l'ordre des
infirmières, le 7 juin dernier, il était encore temps - et qu'il
n'ait pas décidé d'attendre l'avis de l'ordre pour faire un
examen un peu plus approfondi de cet article de la loi. Vous savez, les
corporations professionnelles fonctionnent, depuis plus d'une dizaine
d'années, avec le code actuel. Ce n'était pas une question de vie
ou de mort, l'adoption de ce projet de loi. Nous aurions très bien pu
attendre, même la session d'automne, mais on aurait pu le faire aussi
assez rapidement pour qu'il soit adopté à la présente
session, si le ministre avait pris au sérieux la demande de l'Ordre des
infirmières et infirmiers qui avait soulevé des
inquiétudes quant à l'application de cet article.
L'ordre des infirmières, je dois également le dire pour
leur rendre justice, soulève aussi quelques objections touchant les
réglementations qui sont introduites dans le projet de loi et qui visent
à réglementer, alors que l'ordre suggérait que de tels
règlements devaient ' apparaître davantage dans la loi
constitutive de l'Ordre des infirmières et infirmiers du
Québec.
En conclusion, compte tenu de l'avancement des discussions, on ne peut
plus revenir en arrière. Il me resterait à souhaiter qu'on
n'éprouve pas les difficultés dans l'application de cet article
188 qu'appréhende l'ordre des infir-
mières. J'espère que nous ne nous retrouverons pas, parce
que cela peut prendre peut-être une année avant que cela
soulève de tels cas, avant qu'il y ait une jurisprudence établie
en vertu de cet article de la loi, dans l'obligation de revoir le projet de
loi. Je le déplore encore une fois. Comme on avait amplement le temps,
on aurait pu procéder avec un peu plus de sérieux à
l'examen des commentaires que nous a fournis l'ordre des infirmières. Je
vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de
Chicoutimi. M. le ministre responsable de l'application des lois
professionnelles, en réplique.
M. Claude Ryan (réplique)
M. Ryan: Rapidement, Mme la Présidente. Je voudrais
revenir sur les représentations que m'avait transmises l'Ordre des
infirmières et infirmiers du Québec, auxquelles a fait allusion
la députée de Chicoutimi.
Nous nous souvenons tous que le projet de loi a été
déposé à l'Assemblée nationale le 12 mai dernier.
Après son dépôt à l'Assemblée nationale, le
projet de loi, à la demande de mon cabinet, fut envoyé par
l'Office des professions à toutes les corporations professionnelles.
C'est dire que, dès le début de mai, les corporations
professionnelles ont été saisies du projet de loi. C'est un
projet de loi qui était dans l'air depuis très longtemps. Elles
étaient au courant de toutes ces dispositions, à toutes fins
utiles.
J'ai reçu un télégramme de la corporation des
infirmiers et des infirmières le 7 juin. J'en ai eu connaissance le 8
juin. La commission avait siégé les 2 et 6 juin. Elle avait
procédé à l'étude et à l'adoption du projet
de loi, article par article. Il était trop tard pour revenir en
arrière. Maintenant, j'ai examiné les représentations qui
étaient contenues dans la lettre de l'Ordre des infirmières et
infirmiers. Je pense que les craintes sont sincères; les
appréhensions procèdent, à mon point de vue, d'un
désir sincère de bon service dans ces professions de la
santé. Je crois qu'elles ne sont pas justifiées et que
l'expérience le prouvera. J'ai clairement indiqué, lorsque nous
avons adopté la prise en considération du rapport, que nous
verrons à suivre de très près les développements
dans tout le secteur des professions de la santé, secteur qui est en
évolution et en interrogation, actuellement, à la suite des
recommandations formulées par la commission Rochon. (16 heures)
S'il avait fallu attendre qu'on ait tiré des conclusions
définitives de la commission Rochon pour procéder à des
modifications qui étaient demandées et souhaitées depuis
longtemps, on aurait imposé de nouveaux retards qui auraient
été nuisibles, finalement, au bon fonctionnement des
professions.
Je réitère l'assurance que je formulais il y a quelques
jours devant cette Assemblée, à savoir que suivant le cheminement
que suivra le débat sur les suites devant être apportées au
rapport Rochon et le cheminement que suivra tout le dossier des rapports entre
les diverses professions de la santé, nous serons prêts à
apporter au Code des professions, s'il y a lieu, les modifications qui
tiendront compte de la réalité. Pour l'instant, je crois que les
craintes dont on nous a saisis ne justifiaient pas un report indéfini du
projet de loi.
Quand on sait comment, à l'Assemblée nationale, quand nous
avons entrepris l'examen d'un projet de loi, il faut passer à travers
cet examen dans des délais raisonnables, nous sommes tout à fait
justifiés d'adopter ce projet de loi maintenant. Encore une fois, je
donne l'assurance à toutes les personnes concernées... Des
difficultés, il y en aura, il y en a tous les jours dans les professions
de la santé auxquelles nous ne sommes pas en mesure d'apporter les
solutions immédiates. Dans la mesure où on nous fera part des
difficultés auxquelles nous pourrons trouver, avec les professions
concernées, des solutions justes et raisonnables, nous serons
très ouverts à envisager des modifications éventuelles au
texte législatif. Pour l'instant, nous allons adopter un texte de loi
qui rendra service à nos professions et en facilitera l'exercice du
Parlement. Merci.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre responsable de
l'application des lois professionnelles. Le débat étant
terminé, est-ce que le projet de loi 22, Loi modifiant le Code des
professions, est adopté?
M. Lefebvre: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: Oui, Mme la Présidente Je vous demanderais
d'appeler maintenant l'article 34 du feuilleton, s'il vous plaît!
Projet de loi 29 Adoption
La Vice-Présidente: À l'article 34 de notre
feuilleton, le ministre du Travail propose l'adoption du projet de loi 29, Loi
modifiant la Loi sur les accidents du travail et les maladies
professionnelles.
M. le ministre du Travail.
M. Pierre Paradis
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, Mme la Présidente, cet
article vise strictement l'abolition de deux alinéas de l'article 284 de
la loi 42. Le leader de l'Opposition officielle et critique en
cette matière m'a indiqué qu'étant donné les
circonstances, étant donné le consentement au dépôt
du projet de loi, à l'adoption de principe, à l'étude
article par article concernant le rapport de la commission, que nous n'aurions
pas d'intervention additionnelle à faire ni d'un côté ni de
l'autre. Dans les circonstances, à la suite de cette entente, je vous
demanderais de procéder à l'adoption dudit projet de loi.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre du Travail. Oui,
M. le leader de l'Opposition.
M. Gendron: Une phrase: c'est exact. Des voix: Ha, ha,
ha!
M. Gendron: En conséquence, il n'y aura pas de
discours.
La Vice-Présidente: Donc, le débat est clos. Est-ce
que le projet de loi 29, Loi modifiant la Loi sur les accidents du travail et
les maladies professionnelles est adopté?
M. Lefebvre: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je vous demanderais
d'appeler maintenant l'article 35 du feuilleton, s'il vous plaît!
Projet de loi 31
La Vice-Présidente: À l'article 35 de notre
feuilleton, le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu propose l'adoption du projet de loi 31, Loi
modifiant la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et
la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et la Loi
sur la formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre.
M. le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu.
M. Lefebvre: Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Oui, M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: Étant donné que le ministre a
l'intention de déposer un amendement à son projet, je fais donc
immédiatement motion pour que l'Assemblée se transforme en
commission plénière.
La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est
adoptée?
M. Gendron: Cette motion est adoptée.
La Vice-Présidente: Adopté. Donc, je vais suspendre
pour quelques minutes, afin que cette
Assemblée puisse se transformer en commission
plénière.
(Suspension de la séance à 16 h 4)
(Reprise à 16 h 9)
Commission plénière Étude d'un
amendement déposé par le ministre
Mme Bégin (présidente de la commission
plénière): Nous sommes présentement en commission
plénière et nous allons aborder l'étude de l'amendement
proposé au projet de loi 31 par M. le ministre du Travail, de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. J'aimerais, avant de
reconnaître M. le ministre sur des remarques préliminaires,
rappeler qu'en commission plénière, l'étude doit se
limiter à l'amendement proposé. Là-dessus, je vous
réfère à l'article 257 in fine. M. le ministre, est-ce que
vous avez des remarques préliminaires?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non, Mme la Présidente, je
n'ai aucune remarque préliminaire. Nous serions prêt à
passer à l'amendement.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député d'Abitibi-Ouest, des remarques préliminaires?
M. Gendron: Même chose, sauf que, Mme la Présidente,
parce que je veux être certain de ce qu'on va faire, je sais qu'on a
transformé l'Assemblée nationale en commission
plénière pour prendre connaissance de l'amendement, faire son
analyse et son adoption, mais il est bien entendu, et c'est ce que je veux
savoir, que nous allons revenir immédiatement après en
Assemblée régulière, si je peux utiliser l'expression,
pour faire la troisième lecture?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui.
M. Gendron: En conséquence, j'ai la même remarque,
que je n'ai pas de remarque préliminaire.
La Présidente (Mme Bégin): Donc, comme vous l'avez
dit, M. le député d'Abitibi-Ouest, nous allons, après
l'adoption de l'amendement, nous retransformer en Assemblée pour pouvoir
adopter le projet de loi. Donc, est-ce que je dois en déduire que
l'amendement proposé par M. le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre
et de la Sécurité du revenu concernant l'article 0.1 du projet de
loi 31 est adopté?
M. Gendron: Non, parce qu'il me semble...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la
Présidente, sans qu'il y ait de remarques préliminaires,
j'aurais quelques mots à adresser. Sans doute le critique de
l'Opposition a-t-il quelques mots à répliquer sur le contenu de
l'amendement proposé. Mme la Présidente, l'amendement se lit
strictement comme suit: Insérer, après le paragraphe 1° de
l'article 0. 1 le paragraphe suivant: "1. 1 par l'insertion, dans la
troisième ligne du paragraphe s, après le mot "qui" des mots
"depuis au moins six mois". Pratiquement parlant, Mme la Présidente, le
paragraphe s se lirait désormais comme suit: "Salarié permanent":
tout salarié qui fait habituellement des travaux d'entretien de
bâtiments ou d'ouvrages de génie civil et tout salarié qui,
depuis au moins six mois, travaille à la production dans un
établissement*.
Cet amendement est de droit nouveau et vise à mettre un terme
à certaines pratiques exercées par des employeurs qui affectent
leurs salariés qui travaillent à la production dans leur
établissement à des travaux de construction assujettis à
la loi sur les relations du travail et la formation professionnelle. Le
problème nous a été signalé au départ par M.
Maurice Pouliot, président de l'International, le 30 avril dernier,
lorsqu'il nous a sensibilisé au fait que, présentement, certaines
entreprises exerçaient une telle pratique, comme, entre autres, la
compagnie Kruger. Ainsi, aux fins de référence, l'amendement sera
connu dans le milieu comme l'amendement Kruger. Merci, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Bégin): Merci, M. le ministre du
Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. M. le
leader de l'Opposition et député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Oui, je pense qu'effectivement, l'amendement,
puisqu'on avait eu l'occasion d'en parier, en tout cas lors de l'étude
article par article... Il y avait une certaine pratique selon laquelle
certaines compagnies substituaient à la notion d'employé
permanent des employés à une affectation autre pour des
périodes d'une durée d'une couple de jours. À ce
moment-là, cela se trouvait à faire changer le statut de ces
personnes. Le ministre nous dit clairement, Mme la Présidente, qu'il
s'agit d'un article de droit nouveau plus exigible ou exigé pour des
raisons d'interprétation. A moins que je n'aie mal compris, il y a des
interprétations qui étaient faites d'une façon
différente et, en conséquence, le ministre souhaite apporter cet
éclaircissement pour que, dorénavant, il soit un employé
depuis au moins six mois. Alors, sur la disposition, on n'a pas de
problème. La seule question que je voudrais lui poser, c'est: Est-ce
que, dans les faits, il y a plusieurs intervenants, même s'il qualifie
l'amendement, dans le jargon, d'amendement Kruger, est-ce que c'était
devenu une pratique courante dans les différents chantiers de
construction?
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et ministre du
Travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Chez les gros employeurs, comme
l'a indiqué le député d'Abitibi-Ouest, c'était
devenu une coutume, une habitude que l'on pratiquait de plus en plus, et
c'était devenu courant de procéder de cette façon.
M. Gendron: Est-ce qu'une jurisprudence a été
établie quant aux difficultés que posait l'interprétation
de cet élément qui ne définissait pas la période
minimale pour laquelle il devait être un employé dit
permanent.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): L'interprétation de
l'article s tel qu'il est rédigé faisait en sorte que la pratique
de ces grandes entreprises était tout à fait conforme à la
loi.
M. Gendron: Au-delà de la justification qui est une
justification d'interprétation, est-ce que le ministre peut rappeler les
principaux intervenants qui ont souhaité voir une disposition plus
claire, prêtant moins à interprétation pour s'assurer que,
dorénavant, il y ait au moins...
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Tous les intervenants de
l'industrie de la construction qui ont siégé au comité
Mireault sont intervenus sur cet aspect. Mais comme je l'ai souligné
tantôt dans mon introduction, plus particulièrement, le premier
qui nous a sensibilisés était le président de
l'International, M. Maurice Pouliot.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Vous avez dit, au tout début, Mme la
Présidente, qu'on ne pouvait discuter d'autre chose que de l'amendement
déposé. Sauf que, que je sache, il est également de
pratique courante, en commission plénière, d'indiquer au ministre
pourquoi, puisque c'est vraiment la dernière occasion où on va
jouer avec différents amendements, avant l'étape finale qui est
la troisième lecture... Je sais que des représentations lui ont
été faites, encore là, pour baliser davantage les deux
sous-catégories, entrepreneurs en excavation et entrepreneurs en
machinerie lourde. J'ai eu l'information selon laquelle, possiblement, le
ministre arriverait avec un autre amendement que celui dont on vient de
discuter pour empêcher que des employeurs professionnels puissent
simultanément faire exécuter les travaux par ces diverses
catégories. Je sais que, jusqu'à la dernière minute, le
ministre semblait acquiescer à la demande qui lui a été
faite, et je voudrais savoir pour quelle raison, semble-t-il, ilne
donnera pas suite aux demandes qui lui ont été faites concernant
des dispositions plus précises pour ces deux sous-catégories.
La Présidente (Mme Bégin): M. le ministre du
Travail.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la Présidente,
effectivement, et sans que cela ne constitue un précédent de
quelque nature que ce soit, j'accepte volontiers, à l'invitation du
leader de l'Opposition, de discuter du sujet qu'il vient de mettre sur la
table. Effectivement, certaines des parties importantes dans le domaine de la
construction nous ont demandé de baliser les exclusions apportées
pour les sous-catégories entrepreneurs de machinerie lourde ainsi
qu'entrepreneurs en excavation et terrassement. J'ajouterais même que,
tant chez certaines parties syndicales que chez certaines parties patronales,
c'est une demande qu'on peut qualifier de conjointe.
J'indiquerai au député d'Abitibi-Ouest que nous avons fait
le tour du dossier, analysé minutieusement la question, revisé
tout l'historique qui sous-tend les exclusions quant à ces
catégories d'entrepreneurs de machinerie lourde et d'entrepreneurs en
excavation et terrassement, pour en arriver à la conclusion qu'il nous
apparaît, pour le moment, beaucoup plus prudent de ne pas chambarder ces
deux activités importantes dans le domaine de la construction.
J'indiquerai quand même, pour le bénéfice du
député d'Abitibi-Ouest, le nombre maximum de personnes que l'on
pourrait toucher si on amendait le statut privilégié de ces deux
catégories. Suivant les données dont nous disposons, il est de
863 personnes. Il ne peut donc s'agir d'un problème majeur. Mais pour
ces 863 personnes, cela peut représenter des conséquences
importantes.
Dans le langage usuel, ces personnes sont des entrepreneurs
spécialisés, propriétaires de pépines, pour
utiliser l'expression qui nous a été communiquée en
commission parlementaire. Une des suggestions qui nous a été
faite vise à interdire l'accès aux travaux de construction neuve
à ces entrepreneurs spécialisés, sauf une pépine
par chantier de construction. Pour les autres, l'entrepreneur
général emploierait l'individu, le paierait suivant le salaire du
décret et louerait de lui sa pièce d'équipement. Nous
avons également requis l'avis du ministre du Revenu qui voit, dans cet
aspect, certaines conséquences qui pourraient être
financièrement très douloureuses pour ces individus,
c'est-à-dire que, sur le plan de la taxation, il n'y a pas de
problème quant au salaire. Un T-4 serait délivré par
l'employeur, les retenues à la source, etc.. Mais quant à la
location de la pièce d'équipement, le marché ferait en
sorte que cette pièce d'équipement, selon toute vraisemblance,
serait louée à un prix inférieur au prix du marché
et que sous cet aspect "entreprise" de son rapport d'impôt, cet individu
ne pourrait raisonnablement espérer faire un profit sur son entreprise.
Et, à ce moment-là, le ministère du Revenu ne pourrait pas
accepter ses pertes, ce qui placerait l'in- dividu dans une situation
très complexe.
Nous nous sommes référés, comme je vous l'ai
indiqué, à tout l'historique de cette législation. Le
législateur, de quelque formation politique qu'il soit, depuis 1968,
chaque fois que la loi a été ouverte, a été
sensibilisé à ce problème et, chaque fois, on a
créé des exceptions pour ces deux types d'intervenants. Je crois
qu'au moment où nous nous parlons, cette fois-ci, nous avons
peut-être progressé plus qu'à l'habitude parce que je fais
référence à une entente entre certaines parties syndicales
importantes et certaines parties patronales également importantes. Je
pense qu'à ce chapitre-là cela constitue un
précédent. Mais on ne peut pas parler d'unanimité et on ne
peut surtout pas parler du fait qu'on a eu des représentations quant aux
intérêts de ces individus. Ils ont été exclus de la
commission parlementaire, si je peux m'exprimer ainsi, parce qu'ils
n'étaient pas visés. Ils n'ont pas eu l'occasion de faire valoir
leurs droits. Et, compte tenu de l'historique, compte tenu également des
conséquences au plan de la fiscalité, il m'apparaît, au
moment où nous traitons du sujet, plus opportun de maintenir le statu
quo quitte à poursuivre les pourparlers avec les principaux
intéressés.
La Présidente (Mme Bégin): M. le
député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Les explications que le ministre vient de me donner
par rapport à sa décision de ne pas poursuivre dans la voie qui
avait été hypothétiquement envisagée par certaines
parties me satisfont. Je n'ai pas d'autres questions sur l'amendement
proposé. En conséquence, je suis d'accord avec l'adoption de
l'amendement proposé.
La Présidente (Mme Bégin): Donc, je peux
déduire que l'amendement proposé par M. le ministre du Travail et
ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
concernant le projet de loi 31, qui a pour but d'amender l'article 0.1, est
adopté.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Adopté, Mme la
Présidente.
La Présidente (Mme Bégin) : Adopté.
Je vais maintenant clore cette commission plénière et je
vais suspendre nos travaux quelques minutes afin de permettre aux personnes qui
ne sont pas membres de cette Assemblée de se retirer.
(Suspension de la séance à 16 h 22)
(Reprise à 16 h 25)
La Vice-Présidente: M. le président de la
commission plénière.
M. Messier (président de la commission
plénière): Mme la Présidente, j'ai l'honneur et le
très grand privilège de vous faire rapport que la commission
plénière a étudié l'amendement proposé par
le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu et
l'a adopté tel quel.
La Vice-Présidente: Est-ce que le rapport est
adopté?
Des voix: Adopté.
Adoption
La Vice-Présidente: Adopté. Nous allons donc revenir
maintenant à l'étape de l'adoption du projet de loi 31.
Là-dessus, je vais reconnaître le prochain intervenant. M. le
député d'Abitibi-Ouest et leader de l'Opposition.
M. François Gendron
M. Gendron: Oui, Mme la Présidente. Nous en sommes rendus
à la dernière étape de la saga particulière du
projet de loi 31. C'est tellement vrai que, uniquement pour l'illustrer, ce
n'est pas coutume que nous soyons obligés, lors de la troisième
étape, de nous transformer en commission plénière, de
redéposer pour la quatrième fois, cette fois, non pas une
série d'amendements, mais un nouvel amendement. Je n'ai pas à
vous faire un dessin. C'est juste pour faire une illustration. Pensez-vous que
les groupes concernés ont eu le temps d'avoir une réaction, de
communiquer avec celui qui vous parle et de lui faire connaître les
réactions que ces gens auraient probablement aimé me communiquer
par rapport à ce que j'appellerais le vécu, la portée et
l'implication, qu'on appelle, de l'amendement proposé par le
ministre?
Je veux juste illustrer par là que c'est tellement vrai que cela
lui enlève le droit de parole qu'il avait, lui aussi, comme ministre, en
troisième lecture. Bien sûr, il aura un droit de réplique
en troisième lecture. Tout le monde sait cela. Ce qui fait que le
pouvoir a toujours deux droits de parole sur chacune des étapes du
projet de loi par rapport à un pour ce qui est de l'Opposition. Donc, je
sais que le ministre fera la conclusion qu'il pense qu'il y a lieu de faire sur
le projet de loi 31.
Je ne veux pas reprendre l'ensemble des échanges de propos qu'on
a eus, Mme la Présidente, mais on ne peut pas terminer l'étude de
ce projet de loi sans, encore là, resituer la justification
législative qui a été soutenue par le ministre du Travail
et par ie gouvernement libéral.
Le gouvernement libéral a prétendu, avec raison, que le
travail au noir était une plaie dans le secteur de la construction et
qu'en conséquence, il y avait lieu d'apporter des amendements
législatifs aux diverses lois régissant tout le secteur des
relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la
main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et également à
la Loi sur la formation et la qualification professionnelles de la
main-d'oeuvre.
Le ministre a fait le dépôt d'un projet de loi tel que le
règlement le prescrivait. Après avoir fait le dépôt
du projet de loi, il a décidé d'entendre, comme c'est encore
là courant dans le régime parlementaire, une série
d'intervenants concernés par le vécu du projet de loi. Je ne veux
pas en faire toute la liste, mais c'est important de prendre une minute, parce
que cela ne prendra pas plus que cela, pour rappeler qu'il y a plusieurs
intervenants qui ont décidé de venir se faire entendre lors des
audiences particulières sur le point de vue qu'ils voulaient exprimer
concernant ce projet de loi. La plupart de ces intervenants, Mme la
Présidente, sont des gens qui connaissent effectivement le secteur de la
construction. Cela a été des gens comme la Commission de la
construction, l'Association des consommateurs, l'Association des entrepreneurs
en construction, la Fédération de la construction du
Québec, l'Association de la construction de Montréal et
Québec, le Conseil provincial des métiers, la CSN, la FTQ, la CSD
et les deux unions, l'Union des municipalités du Québec et
l'Union des MRC du Québec de même que la Fédération
des commissions scolaires ainsi que d'autres intervenants qui étaient
intéressés.
Cela va être très court. Deux phrases là-dessus.
Tout ce monde a dit deux choses: M. le ministre, on souhaiterait que vous
retiriez votre projet de loi 31 ou, à tout le moins, si vous n'acceptez
pas de le retirer, que vous le reportiez à l'automne. Les raisons du
report étaient nombreuses. Tantôt je l'ai illustré par des
représentations qui m'étaient faites, encore aujourd'hui,
où ces gens-là venaient m'indiquer des conséquences
réelles, concrètes qu'auront certaines dispositions du projet de
loi dans le secteur de la construction. Je rappelle que notre
responsabilité, comme parlementaires, qui que ce soit, autant les
parlementaires dits ministériels que ceux de l'Opposition, notre
responsabilité, quand on légifère, c'est de s'assurer que
la loi que nous voulons adopter, à tout le moins, que ceux pour qui nous
légiférons, dans leurs lunettes ou dans leur compréhension
des choses, ces gens nous indiquent qu'ils trouvent que c'est une loi qui
donnera suite aux objectifs du législateur.
Or, en commission sur les consultations particulières, tous ces
gens sont venus nous dire que le projet de loi 31, d'après eux, ne
permettrait pas de rencontrer l'objectif premier du législateur, contrer
le travail au noir, s'assurer que, dorénavant, les règles
établies dans le secteur de la construction soient davantage suivies et
que nous ayons à l'intérieur des différentes lois qui
régissent le secteur de la construction une application la plus conforme
possible aux dispositions législatives. Tous ces gens, sauf un groupe,
ont dit: M. le ministre,
nous on ne pense pas que votre projet de loi va permettre d'atteindre
ces objectifs. Je m'arrête là pour la première
étape.
Deuxième étape, le ministre dit: Écoutez, moi je
vais vous prouver en apportant des modifications au projet de loi lors de
l'étude article par article que vous êtes dans les patates, que
vous vous trompez. Moi j'ai la vérité
révélée - c'est le ministre qui parle - moi je suis
convaincu que mon projet de loi va me permettre d'atteindre l'objectif sur
lequel tous sont venus dire qu'il y avait des zones grises, des zones douteuses
et même certains ont prétendu que l'effet de certaines mesures du
projet de loi 31 aura comme conséquences de créer davantage de
travail au noir que de régler certaines situations
déplorées.
Le ministre a présenté une première série
d'amendements. Dans sa première série d'amendements, il a
essayé de faire taire des interprétations erronées. Ma
compréhension à moi, Mme la Présidente, c'est qu'il a
réussi, à certains égards, à faire taire des
compréhensions erronées du projet de loi lorsqu'il a introduit
des dispositions qui vont clairement établir que, dorénavant,
c'est surtout pour soustraire à l'application du décret des
travaux de réparation, d'entretien, de rénovations mineures -
c'est une disposition qui a été ajoutée - et des
modifications à la condition que ces travaux soient effectués
pour le compte d'une personne physique, faisant affaire pour son propre compte,
autre qu'un entrepreneur autonome... ne peut exécuter pour autrui et
sans t'aide de salariés des travaux de construction.
Je prétends que cette disposition a eu comme conséquence,
Mme la Présidente, de clarifier l'interprétation que certaines
des parties sont venues donner lors des consultations particulières. Le
ministre a eu raison, en ce qui me concerne, d'apporter ces modifications.
La deuxième partie importante à souligner, c'est toute la
question de la signification exacte de la portée des amendements
présentés par le ministre? Dorénavant, les travaux
d'entretien, de réparations, de rénovations mineures et de
modifications au logement qu'une personne habite ne seront plus assujettis au
décret de la construction. Sur le plan concret, cela signifie, pour
prendre un exemple très concret, que si je décide de me faire
bâtir une résidence que j'ai l'intention d'habiter, tout autant
pour la construction de la résidence que pour les travaux de
rénovation que je pourrais apporter plus tard, je ne suis pas assujetti
aux dispositions du décret si j'habite cette résidence, sauf pour
la construction neuve, bien sûr. La construction neuve de la
résidence va continuer à être assujettie au décret
de la construction.
Pendant une seconde et demie, j'ai rendu le ministre nerveux, je m'en
excuse. Il faut préciser que dans le secteur résidentiel et
domiciliaire, de plus en plus de gens sont venus nous dire que les travaux de
rénovation, de réparations, d'entretien et de modifications
représentaient, quand même, un volume assez imposant, en
particulier en ce qui a trait à la dimension rénovation qui, au
début, était complètement ouverte et qui, vers la fin,
s'est resserrée à la dimension rénovation mineure. C'est
un terme dont le ministre a convenu pour mentionner qu'on n'avait pas la
même jurisprudence que pour les notions d'entretien et de
réparations. Sur les notions d'entretien et de réparations,
règle générale, c'est bien établi dans le secteur
de la construction. On sait ce que cela signifie. On sait quelle portée
cela a. Tous les intervenants étaient unanimes pour, une fois pour
toutes, ne pas bouleverser le régime dans la construction et pour qu'il
soit clairement établi que, dorénavant, ce genre de travaux n'est
plus assujetti aux dispositions du décret et aux mécanismes
imposés par le décret, que ce soit toute la dimension des
bénéfices de la caisse de retraite, des salaires, de la
qualification professionnelle, des différentes lois et de la
spécialisation des métiers. Je pense qu'on a réglé
cela et c'est clair.
Cependant, le ministre n'a pas voulu rester au plan du consensus.
À cette dernière étape, il est important de rappeler un
peu plus ce que j'appellerais la philosophie qu'il y a derrière cela.
Vous savez, Mme la Présidente, qu'on a affaire à un gouvernement
qui a beaucoup plus le souci de déréglementer, de rapetisser la
fonction de l'État dans différents secteurs. Pour eux, il est
clair que le secteur domiciliaire... Il serait probablement plus avantageux
dans leur esprit que ce secteur soit complètement soustrait au secteur
de l'application des décrets. C'est tellement vrai que l'un de leurs
anciens collègues a fait une réflexion qu'on a appelée le
rapport Scowen.
Dans le rapport Scowen, c'est on ne peut plus clair. M. Scowen
prétendait dans son rapport qu'il y aurait lieu de
déréglementer complètement tout le secteur
résidentiel ou domiciliaire de la construction au sens
général et, à tout le moins, instaurer un régime
différent, non parallèle, qui régirait l'ensemble des
mécanismes qui donneraient les différentes structures dans le
secteur de la construction résidentielle ou domiciliaire.
Dans le fond, Mme la Présidente, ce qu'il faut sentir dans le
projet de loi 31, c'est un pied dans la porte, une ouverture pour commencer
tranquillement à justifier. C'est ce qu'ils ont probablement l'intention
de faire, mais qu'ils n'ont pas le courage de faire tout de suite d'un coup, de
le dire franchement. On pense que le secteur domiciliaire devrait être
complètement exclu du décret de la construction et que seule la
construction commerciale et industrielle devrait en faire partie. C'est une loi
à la pièce, faite sans regarder l'ensemble des autres morceaux du
casse-tête compliqué du secteur névralgique, parce que le
secteur de la construction, ce n'est pas un secteur facile, Mme la
Présidente, pour toutes sortes de raisons historiques et parce
que le législateur, quel qu'il soit, a complexifié
énormément les niveaux de responsabilité, les niveaux de
garantie, les niveaux de qualification, les niveaux d'enregistrement.
Le ministre lui-même admettait, avec raison, qu'il n'est pas
facile à la Commission de la construction du Québec d'avoir un
suivi qui lui permettrait d'être certaine que l'entièreté
ou l'ensemble du secteur de la construction fonctionne, dans son vécu
quotidien, exactement comme les différentes lois l'ont prescrit ou
prévu. Lui-même admettait qu'à plusieurs égards,
cela prendrait des armées, disait-il, de fonctionnaires de toute nature
pour s'assurer d'avoir la vérification totale et complète qui
permettrait que seuls des travaux d'entretien et de réparations mineures
soient exclus du décret. Parce qu'il n'est pas en mesure de faire le
contrôle, il a dit simplement: Ce sera plus simple d'exclure au complet.
Ce sera: entretien, réparations, rénovations et modifications. On
mettra le paquet et, tout cela étant exclu du décret, il n'y a
pas de problème de contrôle et de fonctionnaires et il n'y aura
plus de problème de travail au noir, parce que l'on vient de
légaliser ce qui se faisait au noir, on vient de dire:
Dorénavant, ce n'est plus du travail au noir. (16 h 40)
II me semble qu'il est important de rappeler ces dispositions. Il est
également important de rappeler comme je vous l'ai mentionné - je
ne veux pas être très long là-dessus - que je trouve que le
ministre a tort de prétendre qu'il offrira une formation et une
qualification non pas professionnelle, mais semi-professionnelle à tous
ceux qui seront exclus du décret. Cela fait drôle de dire que,
dorénavant, il y a un certain nombre de travaux qui ne sont plus
assujettis au décret, mais aux gens qui feront ce genre de travaux, je
vais offrir une formation particulière. Dire que le ministre peut
établir des programmes de formation et de qualification professionnelles
pour tous ceux qui sont exclus du décret, cela fait drôle. On les
exclut et on dit: Arrangez-vous, propriétaires, pour ceux qui voudront
faire effectuer ces travaux d'une façon bona fide, en dehors des
règles établies, pour avoir uniquement des relations de bonne
entente et, même si c'est comme ça, je vais instaurer en
parallèle un régime de formation pour ces gens.
Là, il nous dit que les activités comprises dans ces
métiers ou ces professions, c'est lui qui va les définir. Les
conditions d'admission, c'est le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre qui
va les définir. En matière d'examen et de certificat de
qualification auxquels cela conduit, c'est lui qui va définir cela.
C'est donc un dédoublement de régime, une autre complication, une
autre série de règlements. Pourtant, cela va exactement à
rencontre de la philosophie de ce gouvernement qui avait dit: Nous, on va
déréglementer partout. Tellement qu'il voulait même
déréglementer tout le secteur de la construction. Là, ils
ont décidé d'en faire seulement une partie - j'entends par
là la construction domiciliaire - et ils vont réinstaurer une
série de règlements concernant la formation et la qualification
professionnelles.
La difficulté que j'ai eue tout au cours de ce que j'ai
appelé la saga du projet de loi 31, c'est d'abord de travailler dans des
conditions de fin de session, de dernière limite, de dernière
minute - on l'a vu encore cet après-midi - et de ne pas avoir cette
capacité d'aller discuter avec ceux qui vivent dans le secteur de la
construction et de parler avec eux des conséquences probables des
dispositions précises du projet de loi 31. J'en donne quelques
exemples.
J'avais dit hier au ministre que j'aurais l'occasion, cet
après-midi, de rencontrer des intervenants. Là, je le
répète, si je les cite, encore là, ce n'est pas pour
refaire un débat de fond. Le gouvernement a décidé que,
dans ce projet de loi, indépendamment des points de vue qu'il recevrait,
il procéderait. Et c'est tellement vrai que le ministre a refusé
jusqu'à aujourd'hui, il a toujours refusé de rencontrer
l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec
depuis le dépôt des amendements. Écoutez, je tiens à
dire que le ministre a refusé. Quand je prétends cela, ce sont
les gens qu'on rencontrait cet après-midi, qui sont des gens de
l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec, qui
nous ont dit: On a tout essayé pour rencontrer le ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, et jamais le ministre
n'a voulu donner suite à notre demande de rencontre après le
dépôt des amendements. Si le ministre les a rencontrés
avant le dépôt de ses amendements, je n'en disconviens pas, mais
après le dépôt des amendements, ces gens nous disent qu'ils
n'ont pas eu l'occasion d'être rencontrés. Quoi qu'il en soit,
c'est ce que j'ai dit - j'ai toujours dit cela - après le
dépôt des amendements, ces gens-là n'ont pas
été en mesure de rencontrer le ministre, même si eux disent
qu'ils ont multiplié les demandes de rencontre, le ministre n'a pas
voulu les rencontrer.
Mon propos n'est pas là-dessus parce que ce n'est pas ce que
j'appellerais ce qu'il y a de plus majeur. Il n'en demeure pas moins que ces
gens-là ont la prétention suivante. Les entrepreneurs
spécialisés, titrent-ils dans un communiqué, les nouveaux
interdits de la construction. Les derniers amendements au projet de loi 31
auront pour effet d'interdire à tout entrepreneur sans salariés
de se présenter sur un chantier de construction neuve pour y effectuer
lui-même les travaux. C'est exact parce que le ministre a introduit,
à la place de la notion d'entrepreneur spécialisé, sur
laquelle on a discouru pendant une couple de jours, la notion d'entrepreneur
autonome. Le ministre a très bien spécifié ce que
signifierait la notion d'entrepreneur autonome et, dans les faits, cela
signifie qu'un entrepreneur autonome est un entrepreneur titulaire d'une
licence d'entrepreneur spécialisé délivrée en
vertu, et ainsi de suite, mais qui exécute lui-même les
travaux et qui, lorsqu'il le fait pour autrui, peut le faire à la
condition qu'il ait des salariés sous sa juridiction. Donc, s'il est
devenu un entrepreneur avec salariés, là, il a le droit d'aller
oeuvrer dans le secteur de la construction.
Je veux seulement dire que ces gens-là disaient ceci: Les
constructeurs d'habitations considèrent que le projet de loi fait
abstraction du fait que, dans le secteur résidentiel, c'est l'ampleur
des travaux et l'efficacité des chantiers qui déterminent le
besoin de recourir à des salariés. En effet, il est courant que
plusieurs types de travaux peuvent être effectués par une seule
personne. Notamment, en fin de contrat, les entrepreneurs terminent
eux-mêmes les travaux qui sont ceux des tireurs de joints, par exemple,
des carreleurs, des peintres. Avec le projet de loi 31, un entrepreneur devra
obligatoirement confier ces fins de travaux à un salarié, alors
que lui-même sera sans travail. C'est une disposition législative
qui changera la face de l'industrie de la construction
résidentielle.
Je veux juste signaler que c'est quand même une prétention
qui n'est pas mince, M. le Président. La meilleure façon d'aller
vérifier cette prétention aurait été de
procéder correctement, de retirer le projet de loi 31 ou, à tout
le moins, de le reporter à l'automne, pour faire un certain nombre de
discussions avec ceux qui vont vivre tout l'été avec les
dispositions du projet de loi 31, pas comme application, comme échange -
si c'était cela - et, à l'automne, voir si, effectivement, ces
gens-là sont dans le domaine du rêve ou de la
réalité. Si ces gens sont dans le domaine du rêve, on dira:
Écoutez, vous avez des appréhensions qui ne sont pas
fondées. Si le législateur prétend qu'il n'y a pas lieu
d'en tenir compte, c'est son droit le plus strict. Mais on n'a même pas
permis cela, on n'a pas permis d'avoir cette occasion d'aller vérifier
avec les personnes concernées. Cela leur permet d'écrire un
communiqué: Alerte, urgent, c'est confirmé. C'est vrai que c'est
confirmé, on est dans la phase finale.
Le projet de loi 31 s'attaque à la structure même de
l'industrie de la construction. Le ministre Paradis a modifié le projet
de loi 31 de telle sorte que tout entrepreneur sans salariés n'aura plus
le droit de se présenter sur un chantier de construction neuve pour
effectuer lui-même les travaux, de même que sur la majorité
des gros chantiers de rénovation. Tout entrepreneur sans salarié
ne pourra plus travailler pour un employeur professionnel de l'industrie de la
construction. Eux prétendent que les conséquences de ces
modifications sont très inquiétantes puisqu'il y va de l'avenir
d'une multitude d'entrepreneurs et de petites entreprises. Ils
prétendent même que cela restreint la liberté
d'entreprise.
Pourtant, ce sont ces gens qui pourfendent les tribunes comme
étant les plus ardents défenseurs de la liberté
d'entreprise et des valeurs presque... Il n'y a pas de qualificatif pour dire
combien l'entrepreneurship a toutes les valeurs. Je prétends que
l'entrepreneurship a beaucoup de valeurs, mais dans une société,
de temps en temps, l'État a un rôle à jouer, et cela doit
être cette mixité du leadership de l'État et de celui du
secteur privé qui doivent travailler ensemble pour édifier une
société plus forte, meilleure, qui répond aux exigences de
changement d'une société qui doit constamment s'adapter à
cette réalité d'une progression, d'un modernisme et d'un
développement face à l'avenir. "À combien de reprises,
à la fin d'un contrat, alors que les travaux peuvent être
terminés par une seule personne, avez-vous vous-même
effectué ces travaux", en voulant dire que c'est ainsi que cela se
passe. "Mais avec le projet de loi 31, oubliez cela, vous ne pourrez plus le
faire, vous ne pourrez plus travailler sur les chantiers. Pour ces raisons, il
est de votre intérêt d'appuyer notre association et de contester
ce projet de loi." Ils ne disaient pas cela il y a six mois, ils disaient cela
cet après-midi. Sur le plan des conséquences - je
m'arrêterai là-dessus, je voulais juste illustrer un propos - ils
prétendent qu'on va affaiblir l'entrepreneurship régional. Voyez
ce qu'ils disaient, M. le ministre: "II y aura ainsi une recrudescence du
travail au noir en répétant l'exclusion de l'industrie de
personnes compétentes et expérimentées." Ce ne sont quand
même pas 200 ou 250 travailleurs, ce sont 2000 ou 2500 travailleurs de
l'association qui effectuaient ce genre de travaux, le plus souvent seuls,
à la fin des travaux, j'entends.
Ils prétendent qu'une des conséquences sera que le prix
des maisons neuves sera modifié, sera en principe haussé, ce qui,
du même coup, réduira le nombre d'acheteurs. On me donnait
l'exemple suivant: Vous ne trouvez pas, M. Gendron, que cela crée deux
régimes? Vous êtes propriétaire d'un immeuble, vous
décidez de le transformer en logements multiples, mais vous
décidez d'en occuper un comme propriétaire. Le logement que je
décide d'occuper comme propriétaire, chaque fois que j'aurai le
goût de faire des réparations, des modifications, des
rénovations mineures ou de l'entretien, j'aurai le droit, pour ma partie
du logement, de les faire effectuer comme bon me semble, avec qui je veux, avec
ou sans perfectionnement offert par le ministre, alors que pour les deux
logements au-dessus du mien, pour fins d'exemple, qui sont habités par
deux locataires à qui je loue, les rénovations, les
modifications, les réparations que je voudrais faire faire à ces
deux logements-là, je devrai les faire faire par des gens qui sont
assujettis au décret de la construction. (16 h 50)
Donc, par définition, vous venez de comprendre qu'il y a de
grosses chances que le coûl de ces mêmes rénovations ne soit
pas le même.
Et en cela, je trouve qu'ils ont un argument valable. C'est sûr
que le coût peut ne pas être le même si je décide de
faire peinturer ma galerie par mon jeune beau-frère et que je lui donne
4 $ ou 7 $ ou 15 $ l'heure. Cela me regarde. J'ai le droit de le faire, je ne
suis plus assujetti au décret. Mais quand je ferai peinturer, si c'est
de la peinture... Si c'est pour changer les dessus des comptoirs de cuisine des
deux logements du haut que je loue, là, je vais être assujetti aux
taux du décret. Assujetti aux taux du décret, je n'ai pas le
choix, je vais payer ce que le décret me prescrit. Par
définition, je suis sûr que ce que le décret me prescrit
pour ces genres de travaux-là est supérieur à l'entente
que j'aurais pu prendre avec un tiers qui n'a rien à voir avec le
décret de la construction. Mais écoutez, si les
réparations de mes deux logements que je loue à des personnes ou
à des tiers coûtent trois fois le prix que j'ai payé pour
la même rénovation, par définition, cela va se
répercuter sur quelqu'un. Par définition, cela va se
répercuter et, là, tout le monde vient de comprendre sur qui cela
va se répercuter. Et ces gens-là alléguaient qu'à
ce moment-là le coût des loyers peut être haussé
sensiblement parce que tous les travaux de réparations, de
rénovations d'habitations résidentielles, où je ne suis
pas propriétaire résident, doivent être effectués
par des gens assujettis aux taux du décret. Les loyers seront à
un prix supérieur.
Je m'arrête sur cet élément-là. Je vous l'ai
dit, M. le Président, je voulais juste illustrer que lorsqu'on
légifère comme du monde, on prend le temps d'avoir la
capacité d'évaluer les réactions de ceux qui auront
à vivre avec le projet de loi 31.
Je disais, en commission parlementaire... Le ministre, il a
été beau, il a été gentil, il a été
sensible à tout ce qu'on a dit. Même si on apportait des
amendements, il les a tous battus, par exemple, avec la majorité
ministérielle. Il a battu tous nos amendements parce que nous ne
pouvions pas avoir des points de vue, nous ne pouvions pas avoir raison sur
quelque chose là-dedans. Qu'est-ce que vous voulez? Nous ne sommes que
l'Opposition. Alors, pensez-vous qu'on puisse apporter un point valable pour
bonifier le projet de foi 31? Bien non. Il est assis sur sa
vérité et on procède. Et c'est tellement vrai
qu'aujourd'hui on va conclure. On va conclure par l'adoption du projet de loi
31.
Je disais simplement que j'aurais aimé non seulement pouvoir
exprimer mon point de vue - ce que j'ai fait tant que je l'ai pu en commission
- mais exprimer le point de vue de ceux qui seront les plus touchés par
les modifications apportées au secteur de la construction par le projet
de loi 31. Il me semble qu'étant donné que tout cela s'est fait
à la fin de la session, dans un contexte où on n'avait pas le
temps qu'on aurait voulu avoir pour mesurer, évaluer l'ensemble des
réactions que d'autres groupes ont faites... Là, j'ai cité
tantôt l'As- sociation provinciale des constructions d'habitations, mais
j'en ai eu aussi des organisations syndicales. Les organisations syndicales
m'ont fait des représentations aussi. Tous les intervenants m'ont fait
des représentations et la plupart prétendent qu'il ne nous reste
qu'une seule chose à faire, c'est de souhaiter bonne chance au ministre.
C'est de lui dire bonne chance par rapport à son objectif premier qui
était de contrer le travail au noir. Parce que je n'ai pas plus - je ne
l'avais pas au début, en passant... Parce que tout le monde est venu
dire qu'entre les beaux principes et le communiqué de presse du ministre
qui annonçait qu'enfin le travail au noir serait réglé...
Tout le monde est venu dire: Écoutez, M. le ministre, on ne sait pas
comment vous avez fait pour écrire cela. On ne comprend pas. Vous
êtes probablement le seul à dégager un consensus.
C'est tellement vrai que j'avais l'occasion, avec les gens dont j'ai
parlé tantôt, de vous citer le consensus que le ministre faisait
à la fin des audiences. Il disait: Écoutez, je suis convaincu que
tout le monde a compris. Là, je vais le citer au texte parce que je ne
veux pas faire d'interprétation. Mais je vous le dis, seul le ministre
du Travail peut faire une affaire de même. Il disait ceci: "L'ensemble
des groupes se sont également montrés favorables quant aux
intentions du gouvernement d'agir sur ce phénomène, sinon pour le
faire disparaître, du moins pour le restreindre. Cela étant
acquis, M. le Président, le gouvernement et celui qui vous parle - le
ministre du Travail - demeurent fermement convaincus qu'il faut agir sur le
travail au noir dans l'industrie de la construction du Québec."
Jusque-là, il n'y a pas d'énormité, mais elle s'en vient,
l'énormité. Écoutez la phrase suivante. "Le projet de loi
31, qui a été déposé le 10 mai dernier, correspond
en termes d'objectifs à la volonté des partenaires
socio-économiques de voir le travail au noir attaqué de front et,
sinon totalement résorbé, à tout le moins réduit au
maximum." Tous venaient juste de lui dire, avant qu'il conclue une affaire de
même, que leur perception allait complètement à
l'opposé, que ce n'étaient pas les dispositions du projet de loi
31, tel que déposé, qui permettraient de contrer le travail au
noir.
Or, le ministre a décidé d'apporter des amendements
à certains chapitres. Ceux-ci ont amené des clarifications, je
l'ai dit tantôt et, aujourd'hui, nous sommes a l'étape finale. En
ce qui concerne l'Opposition, elle a toujours la conviction qu'il aurait
été préférable que ce projet de loi soit
temporairement suspendu pour que nous ayons davantage le temps de faire le tour
des organismes touchés et visés par ce projet de loi et pour nous
assurer que la contribution quant à l'élimination du travail au
noir soit plus probante, mieux consacrée et ait davantage de garanties
de fonctionner. Il nous reste tout simplement, comme je l'ai mentionné
tantôt, à dire au ministre: Nous vous souhaitons
la meilleure des chances et nous espérons qu'effectivement le
projet de loi pourra contribuer à la réduction du travail au noir
sans pour autant en créer d'une autre façon tout autant.
Nous espérons très sincèrement que le ministre ne
se servira pas - c'était ma plus grande crainte et la plus grande
crainte de l'Opposition - des effets que son projet de loi 31 aura dans le
secteur de la construction et en conséquence, dans six mois ou dans un
an, qu'il vienne prétendre que, malheureusement, le travail au noir
n'ayant pas été contraint comme il le souhaitait, il est
obligé d'avaler toute la bouchée - c'est ce qu'ils ont
derrière la tête, on le sait, parce que cela a été
publié dans un rapport officiel - et dire: J'ai essayé, en
partie, de soustraire le secteur domiciliaire à l'application du
décret de la construction, étant convaincu qu'on réglerait
le problème du travail au noir, mais cela ne se passe malheureusement
pas comme souhaité.
Il arrivera donc pour justifier le retrait complet du domaine
domiciliaire, du domaine résidentiel, de l'assujettissement au
décret de la construction en disant: Écoutez, vous avez toujours
le même objectif que moi, qui est de contrer le travail au noir, et il
m'apparait que la seule façon véritable de s'assurer qu'il y ait
de moins en moins de travail au noir, M. le Président, c'est que
l'ensemble du domaine résidentiel ne soit pas dans le régime
universel du secteur de la construction, mais qu'il soit dans un régime
à part, qu'il soit dans un régime particulier, probablement avec
des conditions de travail particulières, avec un assujettissement
également différent, comme les garanties pour le consommateur. Et
j'ai l'impression que la boucle sera bouclée pour ce gouvernement. Il
aura atteint ses buts. Il aura atteint son objectif d'une
déréglementation totale.
Si ce n'était pas cela, je m'en réjouirais à la
seule condition qu'effectivement, dans six mois, je puisse être en mesure
de constater que les mesures apportées par le ministre du Travail auront
atteint cet objectif. Pour le moment, avec les éléments
d'amendements qui ont été apportés, même si certains
avaient comme conséquence de resserrer et de bonifier le projet de loi,
ce dernier demeure toujours globalement dans l'état où il a
été. Le ministre lui-même, d'ailleurs, l'a confirmé
hier lors de l'adoption du rapport de la commission et je prends sa parole - ce
que j'appellerais au texte - lorsqu'il disait: Le projet de loi
déposé a été sensiblement modifié.
Quand on modifie sensiblement un projet de loi, cela signifie, M. le
Président, qu'on n'a pas altéré ses principes de fond.
Comme l'Opposition s'est prononcée contre le projet de loi en principe
et si, selon le ministre lui-même, ce projet de loi n'a été
modifié que sensiblement, je suis dans la même situation et je me
vois tout peiné, tout chagriné d'indiquer au ministre qu'en ce
qui nous concerne, nous de l'Opposition, nous n'allons pas souscrire à
l'adoption de la dernière phase de ce projet de loi 31 parce qu'on
prétend toujours qu'il y a tellement de zones grises, qu'il y a
tellement d'inquiétudes entre les beaux objectifs qu'il avait dans les
notes explicatives et la résultante concrète qu'il aura dans le
champ, qu'on ne peut souscrire aux objectifs qu'il avait énoncés.
En conséquence, l'Opposition est d'accord pour finaliser la
dernière étape mais en l'adoptant sur division. (17 heures)
Le Vice-Président: Je vais maintenant reconnaître M.
le ministre du Travail et ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu pour l'exercice de son droit de
réplique.
M. Pierre Paradis (réplique)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci, M. le Président. Le
travail au noir dans l'industrie de la construction est qualifié par
plusieurs de fléau, même de maladie.
En 1987, si l'on s'en remet à des estimations crédibles,
il s'est travaillé au Québec près de 26 000 000 d'heures
dans la clandestinité. Ce volume de travail équivaut à 25
% de toutes les heures travaillées et rapportées à la
Commission de la construction du Québec. C'est donc l'équivalent
du quart du marché officiel et connu de la construction qui se fait au
noir dans toutes les régions et pour tous les genres de travaux.
Face a cette situation, le gouvernement du Québec a
décidé de s'attaquer au problème. C'est pourquoi, le 10
mai dernier, nous avons saisi cette Chambre du projet de loi 31, Loi modifiant
la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion
de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et la Loi sur la
formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre. Cette
pièce législative vise essentiellement à prendre les
dispositions nécessaires afin d'éliminer complètement, du
moins de réduire de manière importante, le travail au noir dans
l'industrie de la construction au Québec.
Aujourd'hui, nous sommes conviés à clore le débat
sur le projet de loi 31. Nous sommes appelés, des deux
côtés de cette Chambre, à discuter de l'à-propos du
projet de loi ainsi qu'à conclure positivement, du moins pour un
côté de la Chambre, le cheminement entrepris depuis le 10 mai
dernier.
Or, depuis ce moment, depuis le dépôt du projet de loi 31,
les parlementaires ont eu l'occasion de discuter tant des modalités que
des principes. D'abord, des auditions publiques ont été tenues,
nous vous le rappelons, les 25 et 26 mai derniers. Elles ont permis à
quinze groupes représentant un large éventail des
concernés par le projet de loi 31 de se faire entendre. Les organismes
syndicaux et patronaux de l'industrie, le monde municipal, le milieu scolaire
et l'Association des consommateurs du Québec se sont
présentés devant la commission parlementaire de l'économie
et du travail et ont transmis leurs
points de vue aux députés membres de ladite
commission.
Par la suite, le débat s'est déplacé en Chambre
où nous avons discuté de l'adoption du principe avant de
procéder à l'étude détaillée, article par
article, du projet de loi en commission parlementaire. À ce stade du
débat, après les nombreuses discussions qui ont eu lieu au cours
des dernières semaines, je crois opportun de faire le point sur nos
entretiens, et cela l'est d'autant plus que nous terminons aujourd'hui la
dernière étape de l'adoption du projet de loi 31.
En proposant le projet de loi 31, le gouvernement proposait de
s'intéresser au travail au noir dans l'industrie de la construction.
Aujourd'hui, après les nombreux entretiens et discussions qui ont eu
lieu depuis le 10 mai dernier, il nous est, au minimum, permis de convenir de
l'à-propos de la législation gouvernementale. En effet, s'il y a
un constat qu'il nous est possible d'établir aujourd'hui, c'est bien sur
l'opportunité pour le gouvernement de s'intéresser au travail
clandestin. Le travail au noir dans l'industrie de la construction est une
réalité concrète. Il s'agit d'un phénomène
vécu quotidiennement par tous les intervenants du secteur. Personne n'a
mis en doute sa présence. Tous ceux et toutes celles que nous avons
entendus sont unanimes à le dénoncer. Ces mêmes personnes
reçues en commission parlementaire nous ont confirmé que le
travail clandestin affecte l'ensemble de l'industrie et, davantage, le secteur
de la rénovation résidentielle.
Le travail au noir dans l'industrie de la construction est donc un mal
généralisé, un fléau qui touche ce secteur
clé de l'économie depuis plusieurs années et une maladie
qui indispose tous les intervenants qui oeuvrent dans ce domaine. Le
gouvernement du Québec, par le projet de loi 31, confirme sa
volonté de s'intéresser à cette situation et de s'y
attaquer avec conviction.
À ce jour, cette initiative gouvernementale a été
plus que confirmée dans ses fondements. Quant aux modalités,
quant aux moyens privilégiés par le gouvernement pour contrer ce
fléau qui ronge l'industrie de la construction, il faut d'abord
préciser le contexte dans lequel nous intervenons.
Comme j'ai eu l'occasion de l'indiquer, cette industrie est hautement et
fortement réglementée. Depuis 1968, les activités de
construction au Québec sont régies par des lois et des
règlements qui font en sorte, quelle que soit la région et peu
importe le genre de travaux, que les exigences de qualification et du
coût de la main-d'oeuvre sont les mêmes. Ce contexte
réglementaire uniforme et homogène, appliqué à des
domaines différents, est propice à générer le
développement d'activités illicites en marge de la loi et des
règles connues, c'est-à-dire le travail au noir. C'est ce qui
s'est produit dans l'industrie de la construction.
Face à cette situation, M.- le Président, deux
possibilités s'offrent au gouvernement s'il décide d'agir sur le
problème du travail au noir. L'une consisterait à prendre les
dispositions nécessaires pour que les lois et les règlements
soient respectés. Cela signifie de s'assurer que les moyens
appropriés de contrôle soient instaurés et que le
non-respect des règles et des normes sanctionné. L'autre voudrait
que ces règles et ces normes soient modifiées et qu'elles
s'ajustent aux réalités qu'elles encadrent. Cependant, dans un
cas comme dans l'autre, il est au minimum requis de s'assurer que la
réglementation soit applicable. Il est de la responsabilité
gouvernementale de voir à ce que les lois et les règlements qu'il
propose puissent être appliqués sans nécessiter un
système d'inspection hors de proportion en regard des objectifs à
atteindre.
L'industrie de la construction, est-il nécessaire de le
souligner, est un domaine diversifié. Les réalités ne sont
pas les mêmes, que l'on soit dans le domaine industriel, commercial ou
résidentiel. Les contraintes de la construction neuve ne correspondent
pas à celles de la rénovation. C'est à ces
différentes réalités que le projet de loi 31 s'est
adressé. D'une part, il s'attaque au travail clandestin sur les
chantiers de construction industrielle, commerciale et domiciliaire en
resserrant les dispositions qui permettront à la Commission de la
construction du Québec de mieux s'assurer du respect des règles
et des normes sur ses chantiers. Nous pensons que, pour cette partie de
l'industrie, la solution suggérée est adaptée au contexte,
répond aux demandes répétées des partenaires de
l'industrie de la construction et, surtout, est praticable.
Pour le secteur de la rénovation résidentielle, le projet
de loi 31 suggère que dorénavant les travaux de
rénovation, de modification, de réparations et d'entretien ne
soient plus soumis aux conditions des lois' et règlements du secteur de
la construction. Cette solution, pour s'attaquer au travail au noir dans le
secteur de la rénovation résidentielle, est différente de
celle mise de l'avant pour les chantiers de construction industrielle,
commerciale et résidentielle.
Cette différence tient aux conditions propres au domaine de la
rénovation résidentielle. En effet, le sens commun et les
témoignages entendus en commission parlementaire nous confirment que la
prolifération du travail au noir dans cette partie de l'industrie est
avant tout le résultat de fa mésadaptation chronique de la
réglementation par rapport aux conditions du marché. Les
coûts prohibitifs qui ne correspondent pas à la capacité de
payer du consommateur et le cloisonnement des métiers qui
l'empêche de gérer lui-même les travaux le poussent vers la
clandestinité.
À ce stade, M. le Président, je pense qu'il est opportun
de rappeler ce que l'Association des consommateurs du Québec est venue
nous dire à ce propos en commission parlementaire et je cite
l'Association des consommateurs du Québec: "Ce
mal qui ronge le secteur de la construction, ce n'est pas le travail au
noir qui n'en est que le symptôme, mais les coûts exorbitants
reliés aux travaux de rénovation et le cloisonnement excessif des
corps de métiers qui rend le système extrêmement rigide et
aberrant, surtout lorsqu'il s'agit pour un consommateur ou une consommatrice
d'exécuter ou de faire exécuter de menus travaux d'entretien ou
de réparation. À chaque fois qu'une réglementation
à caractère économique introduit dans le système
des règles qui ne correspondent plus aux réalités du
marché, ces règles engendrent des distorsions qui donnent
naissance à des phénomènes comme celui du travail au
noir". (17 h 10)
On constate donc que des deux solutions précédemment
citées, celle visant la normalisation de la réglementation a
été retenue par le gouvernement. Resserrer le contrôle du
respect de la réglementation dans la rénovation
résidentielle était et demeure une solution impraticable. Ce
serait se bercer, sinon se noyer d'illusions que de penser qu'il serait
possible de vérifier partout, dans l'ensemble du territoire du
Québec, une réglementation applicable au secteur de la
rénovation résidentielle. Il faudrait constituer des divisions
complètes d'inspecteurs chargés de surveiller tous les logements
du Québec pour y détecter le moindre mouvement de planche et le
moindre coup de pinceau. Il est temps, pour citer M. Claude Bruneau du journal
Le Nouvelliste, "que clouer une planche redevienne un geste à la
portée du monde ordinaire."
Par ailleurs, comme je l'ai indiqué lors de la commission
parlementaire du mois de mai dernier, la grande majorité des
intervenants nous a fait de très sérieuses représentations
relativement à la question de l'artisan. Introduit dans la loi en 1979,
l'artisan est vu par plusieurs comme l'origine du travail au noir dans
l'industrie et, par certains, comme un élément perturbateur du
milieu. L'analyse des positions et des arguments qui ont été
portés à mon attention nous a amenés à apporter des
amendements qui ont été soumis à la commission
parlementaire et qui ont été adoptés. Ainsi, en plus de ce
que j'ai indiqué précédemment, le projet de loi 31 abroge
toutes les dispositions relatives à l'artisan.
D'autre part, le projet de loi 31 introduit la notion d'entrepreneur
autonome. Défini comme un entrepreneur titulaire d'une licence
d'entrepreneur spécialisé, il pourra, pour autrui et sans l'aide
de salariés, effectuer des travaux de réparations, d'entretien et
de rénovations mineures dans les domaines industriel et commercial. Il
pourra, également, dans les mêmes secteurs, agir dans la
construction neuve, la rénovation majeure et la modification si sa
licence d'entrepreneur spécialisé est relative aux
sous-catégories entrepreneur de machinerie lourde ou entrepreneur en
excavation et terrassement.
Ces modifications concernant les dispo- sitions du statut d'artisan et
celles qui permettent l'introduction de la notion d'entrepreneur autonome
répondent d'abord à l'insistance d'une bonne partie de
l'industrie qui souhaite que l'on ne rencontre dans ce domaine que des
employeurs et des salariés. Par ailleurs, cela assure aux
propriétaires de petites entreprises de pouvoir se référer
à un spécialiste compétent pour assurer le service dont
ils ont besoin.
Voilà donc, pour l'essentiel, les objectifs et les
modalités du projet de loi 31. Nous avons, jusqu'à ce jour,
traversé toutes les étapes requises par le règlement et,
comme nous l'a indiqué le leader de l'Opposition et député
d'Abitibi-Ouest, le travail fait l'a été sérieusement. Le
projet de loi a été amélioré. Malgré tout,
l'Opposition, en tout cas jusqu'à maintenant, demeure contre ce projet
de texte législatif. Même si elle est convaincue de la
présence du travail clandestin, même si elle est consciente de
l'ampleur du travail au noir et des difficultés qu'il pose pour
l'industrie, même si elle affirme que les objectifs du projet de loi 31
sont bons et que celui-ci a été très nettement
amélioré, l'Opposition, je le répète, M. le
Président, demeure contre l'adoption du projet de loi. J'espère
que, d'ici à quelques minutes ou quelques secondes, l'Opposition, plus
particulièrement mon bon ami le député d'Abitibi-Ouest,
prendra conscience de ses responsabilités et révisera sa
position.
Quant à nous, de ce côté-ci, nous sommes fort
conscients de nos responsabilités et nous souhaitons clarifier cette
situation qui dure déjà depuis trop longtemps. Je conclurai donc
en invitant l'ensemble des parlementaires des deux côtés de la
Chambre à s'associer à l'adoption du projet de loi 31 et en
rappelant ce qu'en disait M. Jean Francoeur dans le journal Le Devoir,
que je cite: "En adoptant ce projet de loi, l'Assemblée nationale
mettra fin à une immense hypocrisie sociale. Il est de commune
renommée que le secteur des travaux à domicile est le terrain de
prédilection du travail au noir. Dans son état actuel, la loi est
absolument inapplicable. Il faudrait lâcher, sur tout le territoire, des
divisions entières d'inspecteurs qui iraient frapper à toutes les
portes. En outre, pourquoi appréhender de braves travailleurs pour les
traduire devant des juges qui, la veille, ont fait repeindre leur appartement
à un coût bien inférieur à celui du
décret."
J'espère que, si je n'ai pu le faire, M. le Président,
Jean Francoeur aura quand même réussi à convaincre
l'Opposition et à lui arracher un vote positif en toute dernière
analyse. Merci, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président: Le débat étant clos,
est-ce que la motion d'adoption du projet de loi 31, Loi modifiant la Loi sur
les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la
main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et la Loi sur la
formation et la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre,
présentée par le ministre du Travail et ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu est adoptée?
Une voix: Adopté.
M. Gendron: Adopté sur division.
Le Vice-Président: Adopté sur division. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: Oui, M. le Président. Je vous demanderais
d'appeler maintenant l'article 24 du feuilleton, s'il vous plaît!
Projet de loi 24
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président: À l'article 24 du feuilleton,
nous allons maintenant procéder à la prise en
considération du rapport de la commission de l'aménagement et des
équipements qui a procédé à l'étude
détaillée du projet de loi 24, Loi sur le traitement des
élus municipaux.
Est-ce qu'il y a des interventions à ce moment-ci? Il n'y a pas
d'intervention. Donc, est-ce que le rapport de la commission est
adopté?
M. Gendron: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: Oui, M. le Président. Je vous demanderais
d'appeler maintenant l'article 28 du feuilleton, s'il vous plaît!
Projet de loi 7 Adoption
Le Vice-Président: À l'article 28 du feuilleton, M.
le ministre des Affaires municipales propose la motion d'adoption du projet de
loi 7, Loi sur l'organisation territoriale municipale. Y a-t-il des
interventions à ce moment-ci?
M. le ministre des Affaires municipales.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: M. le Président, ce projet de loi a franchi
toutes les étapes. Hier soir, nous avons étudié le rapport
de la commission parlementaire. J'ai eu l'occasion à ce moment-là
de faire un exposé, le député de l'Opposition aussi. En ce
qui nous concerne, nous sommes prêts à procéder à
l'adoption définitive du projet de loi 7.
Le Vice-Président: Sur cette même motion, je vais
maintenant reconnaître M. le député de
Jonquière.
M. Francis Dufour
M. Dufour: Merci, M. le Président. Au départ, je me
dois de dire quelques mots concernant ce projet de loi qui se veut le
deuxième volume de la refonte des lois municipales commencée sous
l'égide de l'ancien gouvernement ou de l'ex-gouvernement, lorsque M.
Marcoux était ministre des Affaires municipales.
C'est un projet de loi qui aurait pu apporter de l'innovation, des
choses nouvelles, surtout concernant la question des fusions. Si le ministre
avait voulu aller un peu plus loin ou s'il avait eu un peu plus de courage, il
aurait amené un projet qui aurait pu favoriser les fusions ou les
annexions d'une façon volontaire, mais en ne laissant pas les
municipalités seules ou à peu près pour pallier les
problèmes posés lors des débuts de fusion ou d'annexion.
Le ministre s'est donc contenté de refondre des lois, en voulant
s'approprier certains nouveaux pouvoirs qu'on a réussi, heureusement,
à baliser quelque peu. Lorsqu'il y aura des fusions ou des annexions, ce
ne sera pas laissé, toujours ou pratiquement toujours, à la bonne
volonté du conseil, mais cela pourra être publié un peu
plus. C'est un ajout important au point de vue de la démocratie, que les
gens soient avertis lorsqu'il se passe des choses concernant leur vécu
ou leur avenir. C'est important pour les citoyens des municipalités de
savoir ce qui se passe chez eux quand on parle d'une fusion ou d'une
élection.
Quant au redressement des limites municipales, c'est un point qu'on a
débattu assez fortement. L'objection fondamentale que nous avions comme
Opposition, c'est que, lorsqu'il y a redressement des limites territoriales,
régulièrement et pratiquement tout le temps, il y a des actes qui
sont posés pour des territoires qui n'appartiennent pas aux
municipalités et cela amène l'invalidation de ces actes. Donc, il
y avait ce fait, lorsque la municipalité se rend compte de cela et
qu'elle veut redresser ses limites, que ces validations d'actes, le ministre
voulait les faire de son propre chef ou de lui-même, mais cela ne pouvait
pas être acceptable de notre part et on a obtenu, heureusement, que ce
soit le gouvernement qui prenne ces actions. Si on doit valider des actes,
c'est important que cela se fasse par le gouvernement car, jusqu'à
maintenant, c'a toujours été l'Assemblée nationale, par le
biais de commissions parlementaires, qui a validé les actes qui
étaient passés dans les municipalités et les redressements
de limites territoriales. Ce sont des points fondamentaux qui ont
été apportés dans ce projet de loi. (17 h 20)
II y a bien sûr une réserve qu'on a faite: lorsqu'il y a
annexion ou fusion, les municipalités
peuvent ne pas avoir le temps nécessaire pour préparer
leur budget. Il est question des élections. Les municipalités
pourraient agir encore, malheureusement, pour plusieurs mois sans que leur
budget soit adopté officiellement. Donc, elles ne peuvent pas se fier
sur le passé en disant: On adopte le budget de l'an dernier et on peut
le prolonger. Dans cet article, l'article 80, la nouvelle municipalité
sera obligée d'emprunter. Je trouve que c'est laisser une
responsabilité trop grande a de nouveaux élus municipaux,
à des gens qui n'ont pas l'expérience de ces budgets et qui n'ont
pas l'expérience du vécu de leur municipalité. À ce
moment-là, cela veut dire que le ministre des Affaires municipales, dans
le temps, sera obligé de donner des prolongations de permission pour que
les gens puissent adopter leur budget beaucoup plus tard. Donc, c'est
évident qu'on ne pouvait pas être d'accord avec le gouvernement
sur cet article, mais ce n'est pas une raison suffisante, à mes yeux et
aux yeux de l'Opposition officielle, pour s'opposer au projet de loi.
J'ai l'impression aussi - je pense que c'est là-dessus que je
vais conclure - que nous avons fait le travail sérieusement, qu'on l'a
fait complètement, qu'on a pu le bonifier dans quelques articles et
qu'il reste encore du travail à faire. Je pense que le ministre des
Affaires municipales aura sûrement, dans le temps, lui ou un autre, le
temps de travailler pour bonifier à nouveau ce projet de loi. Ce n'est
pas la Bible, ce ne sont pas les tables de Moïse, comme je l'ai dit hier,
mais il aura à améliorer ce projet de loi. Nous souhaitons tout
de même que cela puisse apporter une amélioration dans
l'administration des municipalités. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Alors, je vais maintenant
reconnaître M. le ministre des Affaires municipales pour l'exercice de
son droit de réplique.
Nous allons prendre quelques instants pour laisser le temps au ministre
de se remettre de ses émotions. Alors, M. le ministre, la parole est
à vous.
M. André Bourbeau (réplique)
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Alors, nous arrivons,
comme je l'ai dit tout à l'heure, à la dernière
étape, c'est-à-dire à l'adoption du projet de loi 7 qui
traite de l'organisation territoriale municipale. C'est la deuxième
étape de la révision des lois municipales qui, dans trois ou
quatre années, lorsqu'elle sera terminée, fera en sorte que,
dorénavant au Québec, il n'y aura qu'une seule loi qui
s'appliquera pour toutes les municipalités, petites ou grandes,
c'est-à-dire le Code des municipalités du Québec. Cela
remplacera toutes les lois existantes - et il y a de très nombreuses
lois - et cela remplacera également toutes les chartes privées
des municipalités.
C'est donc une oeuvre de simplification et c'est une oeuvre colossale,
je dois le dire, qui demande beaucoup de travail parce qu'il y a, dans le
domaine municipal, des milliers et des milliers d'articles de loi qui, souvent,
sont en vigueur depuis quelque chose comme 100 ans et plus, dans certains cas,
et qui sont très souvent désuets. C'est, à toutes fins
utiles, une jungle où seuls de très rares spécialistes
peuvent se reconnaître. Le travail est considérable et nous
avançons, je dirais, d'une façon régulière. Je ne
peux pas dire à pas de géant, parce que c'est un travail qui
prend du temps. Un projet de loi comme celui d'aujourd'hui aura pris quelque
chose comme deux ans et demi ou trois ans à partir du moment de sa
conception, du début des travaux jusqu'à l'adoption.
Nous sommes présentement à concevoir et à discuter
des orientations du troisième volet. Les travaux préparatoires au
quatrième volet vont commencer bientôt. Avec un peu de patience,
on y arrivera. Dans le cas présent, le député de
Jonquière a résumé rapidement le projet de loi. Bref, il
s'agit d'un projet de loi qui traite de l'organisation territoriale municipale
et de sujets comme la constitution de nouvelles municipalités, les
fusions de municipalités, les regroupements et les annexions. J'aimerais
signaler que, dans certains de ces cas-là, on pouvait procéder
selon trois ou quatre scénarios différents pour arriver à
des annexions, par exemple. Dorénavant, il n'y aura qu'une seule
façon de procéder quand on voudra faire la constitution d'une
nouvelle municipalité, une fusion ou une annexion. Il n'y aura pas trois
ou quatre régimes différents, on n'en aura qu'un seul.
En ce qui concerne le redressement des limites des municipalités
ou la validation d'actes qui ont été posés, il s'agit
évidemment d'une procédure qui fait en sorte que, quand on
découvre qu'une municipalité, depuis un certain nombre
d'années, croyait avoir juridiction sur une partie de territoire qui
n'était pas le sien, jusqu'à récemment, il fallait se
présenter à l'Assemblée nationale et demander au
gouvernement, par une loi privée, de redresser les limites de certaines
municipalités. Or, pour un travail qui était parfois un peu
anodin, pousser de quelques mètres les limites d'une
municipalité, il fallait engager un processus législatif
important, mettant en cause les députés, l'Assemblée
nationale, les commissions parlementaires, bref, un appareil important pour
accomplir un geste qui, souvent, était un simple geste administratif.
Dorénavant, le gouvernement pourra, par un décret, redresser des
limites de municipalités et valider les actes qui ont été
posés à l'intérieur de ces territoires.
Bref, M. le Président, je pense que c'est un bon travail qui a
été accompli par la commission parlementaire et par
l'Assemblée nationale, un travail de nettoyage de lois, un travail qui
ne peut que concourir à simplifier les lois municipales, et c'est ce que
nous recherchons. Je remer-
cie encore les députés de l'Opposition et les
députés du parti ministériel pour leur excellente
collaboration et je vous donne rendez-vous au volet numéro 3 de la
refonte des lois municipales, et j'espère que cela se fera au cours de
la prochaine année. Je vous remercie.
Le Vice-Président: Le débat étant clos,
est-ce que cette motion d'adoption du projet de loi 7, Loi sur l'organisation
territoriale municipale, présentée par le ministre des Affaires
municipales est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: M. le Président, je vous demanderais
d'appeler l'article 33 du feuilleton, s'il vous plaft.
Projet de loi 28 Adoption
Le Vice-Président: À l'article 33 du feuilleton, M.
le ministre des Affaires municipales propose maintenant l'adoption du projet de
loi 28, Loi modifiant la Loi sur la Communauté urbaine de Québec
et d'autres dispositions législatives en matière de promotion et
de développement industriels. Je cède la parole à M. le
ministre des Affaires municipales.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: M. le Président, hier soir, nous avons eu le
temps de discourir longuement sur le projet de loi 28. Le député
de Jonquière a fait une magistrale démonstration de la position
de l'Opposition sur ce sujet qui est un sujet important, bien sûr, mais
pour la région de Québec seulement. Dans les circonstances, M. le
Président, je suis d'avis que tout a été dit des deux
côtés de la Chambre. Quant à nous, nous sommes prêts
à voter immédiatement ce projet de loi en troisième
lecture.
Le Vice-Président: Je vais maintenant céder la
parole à M. le député de Jonquière.
M. Francis Dufour
M. Dufour: M. le Président, c'est vrai qu'on a eu le temps
de discourir beaucoup, mais je ne pense pas que je puisse permettre au ministre
des Affaires municipales de discourir à ma place. Il faudrait
peut-être juste rappeler que ce projet de loi que nous avons devant nous,
même s'il a fait l'unanimité de l'Opposition, du parti au pouvoir
et de l'ensemble des maires de la Communauté urbaine de Québec, a
tout de même suscité beaucoup d'intérêt et a
soulevé un certain nombre d'interrogations concernant le vécu de
la Communauté urbaine de Québec.
En fait, en adoptant ce projet de loi, on fait le constat que la
communauté urbaine n'a pas rempli ses obligations concernant le
développement économique de la région de Québec.
Sans cela, il n'y aurait aucune raison d'adopter ce projet de loi, puisque nous
démantelons les parcs à caractère régional sur le
territoire de la Communauté urbaine de Québec. Ces territoires
retourneront aux municipalités dans lesquelles ils sont situés
et, à l'avenir, les municipalités de la Communauté urbaine
de Québec pourront instituer ou créer des parcs industriels dans
leur municipalité.
En corollaire, il reste la possibilité ou l'obligation de mettre
sur pied des commissariats industriels, avec tout ce que cela comporte. Quand
on met en place une structure industrielle, on doit aussi mettre en place des
commissariats industriels, et cela veut dire deux fois plus d'efforts, deux
fois plus de travail, et surtout deux fois plus de coûts, parce qu'il y a
des coûts supplémentaires. Je souhaite que ces structures ne
viennent pas en contradiction les unes par rapport aux autres et que cela
amène réellement un meilleur développement
économique dans la région de Québec, qui en a grandement
besoin. Je pense que c'est vrai pour Québec, mais c'est vrai ainsi pour
l'ensemble des régions du Québec. Souhaitons que la mise en place
de ces parcs industriels locaux, de ces commissariats industriels locaux puisse
amener de nouvelles industries et de nouvelles entreprises dans la
région de Québec. (17 h 30)
Ce que je trouve un peu curieux ou paradoxal par rapport à ce
projet, c'est que j'ai eu aussi l'occasion, au cours de mon travail de
parlementaire, de travailler à un autre projet de loi qui crée la
Société de promotion économique de Québec et qui a
pour effet de ramener tous les participants à une même table pour
faire la promotion de cette même région à
l'extérieur, sur le plan national et international. Là, ce que la
communauté urbaine n'a pu faire dans son milieu, on l'a reporté
à un autre palier qui s'appelle la Société de promotion
économique de Québec. Donc, c'est cela que je trouve un petit
peu, pas incantatoire, mais je pourrais dire paradoxal. D'un côté,
on défait et d'un autre côté, on refait. Je ne sais pas
comment les gens vont se comprendre là-dedans.
Souhaitons, là comme ailleurs - je pense bien que c'est un peu
différent - mais souhaitons que la compétition qui pourra
s'installer à compter de maintenant entre les municipalités de la
Communauté urbaine de Québec soit à l'avantage des
municipalités. C'est sûr. Sans cela s'1 n'y avait pas eu cette
compétition interne des municipalités, je suis fondamentalement
convaincu que la Communauté urbaine de Québec pourrait continuer
à administrer ses parcs régionaux et continuer à faire sa
promotion économique pour
l'ensemble des territoires.
On en a décidé autrement. Le seul voeu que j'exprime,
c'est que les craintes que j'émets ne se concrétisent jamais. Je
pense que, comme Opposition, on ne peut pas être accusés d'aussi
noirs desseins que de vouloir que les structures qu'on met en place, qu'on
accepte aussi, n'arrivent pas à des résultats concrets. Au
contraire, on doit se souhaiter mutuellement que ce projet de loi ait tous ses
effets et que la compétition qu'on crée à
l'intérieur des municipalités de la Communauté urbaine de
Québec apporte les meilleurs résultats, apporte le plus
d'entreprises possible et, qu'en même temps on puisse créer plus
d'emplois. Et cela, c'est pour le mieux-être de l'ensemble de cette
communauté pour laquelle on légifère et qu'on a
légiféré.
C'est aussi, peut-être en conclusion... Je l'ai rappelé
hier, je veux le rappeler aujourd'hui, depuis deux ans et demi, je ne sais
combien de projets de loi on a adoptés, mais c'est le premier projet de
loi, M. le Président, croyez-le ou pas, qui n'a pas subi d'amendement.
Ce n'est pas dans le livre des records Guinness qu'on va l'inscrire mais, en
tout cas, je peux dire que dans mes propres annales, cela fait
différent. Tout à l'heure, on aura sûrement à
prendre en considération un article où on a réussi
à introduire une virgule; elle avait été oubliée
lors de la rédaction.
Donc, ce projet de loi rapportera, je l'espère, en conclusion,
des bénéfices pour l'ensemble des municipalités du
Québec et espérons que ce voeu qui a été
manifesté par l'ensemble des maires de la Communauté urbaine de
Québec puisse profiter, encore une fois, aux municipalités et aux
citoyens qui y demeurent. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: M. le ministre, pour une
réplique.
M. André Bourbeau (réplique)
M. Bourbeau: M. le Président, nous voici maintenant
à l'étape de l'adoption définitive de la Loi modifiant la
Loi sur la Communauté urbaine de Québec et d'autres dispositions
législatives en matière de promotion et de développement
industriels. Je voudrais simplement rappeler ceci. Le député de
Jonquière disait tout à l'heure qu'il ne comprenait pas
exactement ce qu'on faisait puisqu'il disait: D'une part, on défait
quelque chose et, après cela, on refait quelque chose. Bien, c'est
effectivement un peu ce qu'on fait et le député de
Jonquière l'a très bien décrit.
Jusqu'à récemment, dans la région de Québec,
les parcs industriels étaient la propriété de la
Communauté urbaine de Québec qui détenait les parcs
industriels et qui faisait la promotion économique. Or, la
communauté urbaine n'était pas la seule qui pouvait faire de la
promotion économique. La ville de Québec également pouvait
le faire en vertu de dispositions spéciales dans sa charte. Il y a
également un organisme dans la région qu'on appelle la
Société Inter-Port qui, elle aussi, pouvait et qui faisait de la
promotion économique. De sorte qu'il arrivait parfois que tout ce beau
monde-là se retrouvait quelque part, par exemple, en Europe, en train de
solliciter le même industriel ou les mêmes investisseurs, ce qui,
vous en conviendrez, M. le Président, pouvait créer une situation
assez cocasse. Trois groupes provenant de la même région
étaient au même endroit en train de solliciter les mêmes
personnes. Cela ne faisait pas tellement organisé, en tout cas. Cela me
fait penser à cette phrase de Victor Hugo qui disait: Nous sommes trois
chez vous; c'est trop de deux, madame. C'est un peu la même chose, trois
groupes différents qui viennent solliciter en même temps les
mêmes industriels. Cela manquait un peu d'organisation, de
sérieux.
On a alors décidé de mettre un peu d'ordre
là-dedans et les maires de la région, après s'être
consultés, ont convenu que, dorénavant, la Communauté
urbaine de Québec n'aurait plus juridiction sur les parcs, ces parcs
locaux-là, et qu'on retournerait aux municipalités où sont
situés ces parcs la propriété de ces parcs-là, par
exemple, la municipalité de Beauport et la municipalité de
Saint-Augustin. Donc, les municipalités vont reprendre la
propriété de leurs parcs et vont également s'occuper de
promotion industrielle locale et sur le plan régional. Je pense que cela
clarifie la situation.
Pour ce qui est de la promotion internationale, dorénavant, ce
sera le nouvel organisme qui va être formé après l'adoption
de l'autre projet de loi, le projet de loi 27 que parraine mon collègue,
le ministre de l'Industrie et du Commerce, qui crée la
Société de promotion économique du Québec
métropolitain, cette société-là qui va
dorénavant s'occuper de la promotion. C'est donc une clarification et,
à l'avenir, chacun saura quel est son rôle.
En terminant, M. le Président, je voudrais à nouveau
féliciter les députés de la région de Québec
qui se sont occupés de rencontrer tous les intervenants du milieu et qui
ont agi dans le sens de susciter un consensus parmi les élus locaux et
régionaux. En particulier, je voudrais souligner le travail remarquable
effectué par le député de La Peltrie et par le
député de Tas-chereau. Le député de La Peltrie et
le député de Taschereau ont travaillé d'arrache-pied pour
tenter de faire en sorte qu'un consensus se dégage dans la région
sur l'adoption de ces deux projets de loi, le projet de loi 27 et le projet de
loi 28.
C'est donc, M. le Président, fort de l'appui non seulement du
caucus des députés, mais de l'Opposition aussi, tel que je le
perçois, et de tous les maires de la région, que j'ai le plaisir
de proposer l'adoption définitive du projet de loi 28. Je vous
remercie.
Le Vice-Président: Le débat étant
terminé, est-ce que cette motion d'adoption du projet de loi 28, Loi
modifiant la Loi sur la Communauté urbaine de Québec et d'autres
dispositions législatives en matière de promotion et de
développement industriels, est adoptée?
M. Gendron: Adopté. M. Lefebvre: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: M. le Président, je vous demanderais
maintenant d'appeler l'article 6 du feuilleton.
Le Vice-Président: À l'article 6 du feuilleton,
nous allons maintenant reprendre le débat sur la motion d'adoption du
principe du projet de loi 37...
Une voix: Pardon?
Le Vice-Président: Le projet de loi 37... M. Lefebvre:
Excusez-moi, M. le Président. Le Vice-Président: Oui.
Il y a une erreur?
M. Lefebvre: Oui. Effectivement, il y a un dernier projet de loi
qui doit être appelé pour permettre au ministre des Affaires
municipales de terminer une partie de sa journée. Je vous demanderais
d'appeler l'article 36 du feuilleton, M. le Président. Excusez-moi.
Projet de loi 38 Adoption
Le Vice-Président: À l'article 36 du feuilleton, M.
le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du projet de loi 38,
Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale.
Je vais donc reconnaître M. le ministre des Affaires
municipales.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: M. le Président, il s'agit de la
dernière étape de l'adoption de ce projet de loi. Ce projet de
loi ne contient que deux articles dont le deuxième traite de
l'entrée en vigueur de la loi. Nous avons longuement discuté hier
soir, lors du rapport de la commission parlementaire, de la portée de ce
projet de loi et, si le député de Jonquière peut
réussir à faire encore dix minutes sur la troisième
lecture du projet de loi 38, je pense que je vais lui envoyer un cadeau, M. le
Président, parce que je crois que tout a été dit. Mais je
me fie au député de Jonquière, M. le Président, et
je pense qu'effectivement il va certainement parler pendant deux ou trois
minutes. Je vous remercie.
Le Vice-Président: Puisque le défi est
lancé, je vais maintenant céder la parole à M. le
député de Jonquière. (17 h 40)
M. Francis Dufour
M. Dufour: Merci, M. le Président. Je ne sais pas si je
vais mériter un cadeau si je parle moins de dix minutes, mais il semble
que le défi, c'est de faire dix minutes. Dieu sait que ce ne devrait pas
être difficile, même si le projet de loi contient seulement un
article qui dit ce qu'on doit faire et un autre qui donne la date de
l'entrée en vigueur du projet de loi.
Pour avoir réussi à écrire un projet minceur de
cette façon et en même temps s'être rendu compte qu'on peut
apporter un amendement qui s'appelle une virgule, cela veut dire que des choses
auraient pu se faire différemment. Le projet de loi 38 touche justement
la fiscalité municipale. Depuis deux ans et demi que je suis le
vis-à-vis du ministre des Affaires municipales, j'ai eu l'occasion de
discuter de nombreuses fois de tout le problème de la fiscalité
municipale.
Le ministre aurait pu profiter de ce projet de loi pour aller beaucoup
plus loin dans sa prise de position. Il y a des projets, il y a des lois
actuellement qui devraient être faites concernant la fiscalité
municipale, par exemple, la loi sur les complexes industriels, l'article 65. 1
qui aurait permis à des villes à caractère industriel de
s'en tirer beaucoup mieux avec les municipalités. Il y a toutes les
contestations actuellement que le gouvernement lui-même suscite par la
SIQ, la Société immobilière du Québec, concernant
les centres d'accueil, les hôpitaux, les écoles.
Je vous le dis, j'ai actuellement en main un rapport que le ministre ne
connaît pas qui fait que la ville, que j'administrais et où j'ai
été maire pendant de nombreuses années, où j'ai
été associé avec des contestations gouvernementales, perd
en deux ans au-dessus de 500 000 $, à cause de contestations du
gouvernement par la Société immobilière du Québec
et aussi par la Société d'habitation du Québec. Il pourra
nous dire: Bien oui, c'est normal puisqu'il y a certainement des choses ou des
lacunes que vos évaluateurs n'ont pas remplies. Le problème n'est
pas là. Le problème, c'est supposé être la valeur
marchande. On sait bien que, pour des bâtisses gouvernementales, comme
pour les offices municipaux d'habitation, il n'y a pas de marché. Mais
on sait une chose, c'est qu'il y a des coûts pour des bâtisses qui
viennent d'être mises en place, qui viennent d'être construites
dans des municipalités. On sait le prix que cela a coûté
pour les bâtir. On ne peut même pas se servir de ces chiffres comme
évaluation puisque le gouvernement réussit à les
contester. Donc, baisse d'évaluation et baisse de revenus pour les
municipalités. C'est inacceptable!
J'ai dit le printemps dernier que le gouvernement lui-même
remettait en cause la fiscalité muncipale. C'est ce qu'on est en train
de faire. C'est ce qu'on a voulu en 1979, mettre une réforme qui donnait
de l'autonomie aux municipalités. Au moment où l'on se parle,
c'est rendu à 95 % ou 96 %. Ces mêmes municipaltés
auxquelles on donnait une autonomie... Le même gouvernement, parce qu'un
gouvernement succède à un autre, mais lui succède avec les
droits et les obligations, est en train de détruire ou de bâtir sa
propre réforme fiscale.
Le contrat qui avait été signé entre les
municipalités et le gouvernement est en train de s'effriter. Cela n'est
pas correct. En vertu du principe, bien sûr, parce que le ministre a
souvent eu l'occasion de nous faire connaître ses couleurs, selon lequel
il disait: Oui, mais vous savez, les municipalités ne sont pas en
déficit. Les municipalités ne sont pas en déficit. Elles
ne sont pas en déficit, pourquoi? Il y a une bonne raison. La loi les
empêche de faire un déficit. La loi les oblige à
présenter des budgets équilibrés de A jusqu'à la
fin.
Ce n'est pas le cas du gouvernement. Il faudrait que le gouvernement ou
le ministre des Affaires municipales se rende compte que dans les lois il
existe des obligations qui font que le gouvernement ne peut pas, que les
municipalités ne peuvent pas faire autrement que de terminer
l'année avec des surplus. Prenons des municipalités qui ont un
budget de 2 000 000 $, de 10 000 000 $ ou 20 000 000 $, il y en a qui ont plus
que cela, 1 % de 20 000 000 $, c'est 200 000 $. On ne peut pas dire que les
prévisions n'ont pas été bonnes. Les gens des
municipalités sont des administrateurs prudents donc, des
administrateurs qui doivent voir avant que la fin de l'année arrive
à ce que ces montants soient bien administrés, mais, en
même temps, ils ne prennent pas de chance parce que s'ils font des
déficits ils vont être obligés de répartir le
coût immédiatement. Les municipalités, vis-à-vis de
ces questions, sont tellement prudentes qu'il y a des surplus qui
s'accumulent.
Mais il n'y a pas une municipalité qui met cet argent dans les
poches des administrateurs de la municipalité. Ce ne sont pas les
élus municipaux qui en profitent. Cet argent est retourné aux
contribuables. Il est retourné sous forme de travaux qui sont
payés comptant. Il peut être retourné sous la forme du
budget qui revient et introduit à l'intérieur du budget. Il est
mis de côté au cas où. Quand on comprend qu'il y a eu
tellement de contestations au point de vue municipal, y compris son propre
gouvernement vis-à-vis des municipalités, c'est heureux que les
municipalités aient quelques dollars supplémentaires et cela fait
l'affaire de ce gouvernement qui est en train de pressurer l'ensemble des
intervenants de tout le Québec pour amener les gens ou aller chercher
des fonds.
Ce projet de loi aurait pu aller un peu plus loin que ce qu'on voit
décrit actuellement. Le phénomène qu'on vit avec ce projet
de loi, c'est que dans un article on amène une action nouvelle. Cette
action est faite parce qu'il y avait un problème dans la région
de Montréal. Le ministre ne s'en est pas caché. C'est le
problème de taxation à Montréal où il y a des
contribuables qui contestent le rôle d'évaluation. Donc, c'est un
groupe qui semble très structuré et qui a eu de la voix. On n'a
qu'à regarder ce qui s'est passé à la
télévision, dans les journaux, ils ont occupé beaucoup
d'espace. Je ne sais pas si c'est l'ensemble des contribuables de l'île
de Montréal, mais cela semblait gros parce qu'on y a attaché
beaucoup d'importance et possiblement avec raison.
Ce comité qui n"a pas eu satisfaction a inscrit un certain nombre
de plaintes. Je pense que c'est 17 000 qu'il a réussi à faire...
Je pense que c'est 16 000 ou 18 000 inscriptions de contestation à la
ville de Montréal. La contestation, règle générale,
lorsqu'il y a contestation d'un rôle, cela pouvait empêcher le
Bureau de révision de l'évaluation foncière de
procéder à l'étude des plaintes. L'étude des
plaintes n'étant pas jugée, c'est difficile de savoir de quelle
façon on va répondre à ces questions. Cela n'est pas
unique, par exemple, au Québec que des citoyens contestent un rôle
d'évaluation. C'est arrivé dans d'autres municipalités. Il
y avait des façons de passer à travers ces contestations. C'est
qu'on suivait les procédures, souvent et régulièrement les
contribuables laissaient tomber, parfois le rôle pouvait être
cassé et cela n'empêchait pas le monde de tourner.
Parce que c'est un problème à Montréal, et une
grippe à Montréal, c'est une pneumonie pour tout l'ensemble du
Québec, cela prend des mesures extrêmes. Le ministre a
décidé de passer par cela. Si cela était arrivé en
région... Je rappelle au ministre qu'il y a eu des problèmes
d'évaluation industrielle, il me dit régulièrement: Vous
savez, c'est, une vendetta que le député de Jonquière a
contre une compagnie. C'est seulement lui qui peut croire cela. En tout cas,
celui qui vous parle a eu d'excellentes relations avec la compagnie, il y a
même travaillé durant 27 ans et je n'ai rien à vider avec
eux. Je ne suis plus là, la compagnie produit quand même et celui
qui vous parle continue à produire même s'il n'est plus la. Donc,
je pense que, de ce côté-là, donnant, donnant, j'ai fait
mon travail, j'ai été payé pour et bonjour la visite.
Le problème qu'on a vis-à-vis d'une municipalité...
C'est important qu'on établisse de bonnes relations entre les uns et les
autres. Ce n'est pas parce qu'il y a une contestation d'évaluation par
une industrie qui fait des profits de 500 000 000 $ et plus par année
que cela empêche de respirer, mais une contestation de 20 000 000 $, 30
000 000 $ ou de 50 000 000 $, même de 100 000 000 $ - c'est là
où on en était rendu - si la municipalité avait perdu,
cela empêche les contribuables de respirer. C'est là
qu'on a besoin d'un gouvernement pour établir des règles
du jeu. On ne l'a pas fait parce que c'était en région. Une
pneumonie en région, c'est une petite grippe pour Montréal. On
aurait presque envie de dire: Mon doux Seigneur! on devrait seulement avoir des
problèmes à Montréal! C'est sûr que le Québec
s'en porterait mieux. On réglerait tous les problèmes parce que -
et il y a une raison fondamentale - tous les ministres viennent de la
région de Montréal. Donc, quand il y a quelque chose qui se passe
à Montréal, on s'empresse, on "montréalise" tout le monde.
Ce n'est pas correct.
Donc, fe ministre aurait pu aller un peu plus loin avec ce projet de
loi. Il aurait pu apporter des correctifs plus grands. Le problème qu'on
voit, d'une part, c'est qu'on pourrait avoir des jugements du Bureau de
révision de l'évaluation foncière et, d'autre part, un
jugement qui casserait le rôle. Sensiblement, il y aurait des chances de
mêler un peu plus tout le monde. Au point de vue juridique, je n'ai pas
d'indication que cela améliorerait beaucoup la situation.
Donc, pour ces raisons, bien sûr, on va accepter que ce projet de
loi soit ratifié parce que cela concerne beaucoup de monde, même
si c'est du droit nouveau. Si le ministre fait une erreur, il vivra avec. On ne
le lui souhaite pas, on souhaite seulement que les intervenants qui sont
là-dedans, les gens de Montréal, puissent réussir à
s'en tirer le mieux possible. Merci, M. le Président. (17 h 50)
Le Vice-Président: Alors, en réplique, M. le
ministre des Affaires municipales.
M. André Bourbeau (réplique)
M. Bourbeau: M. le Président, le député de
Jonquière a réussi l'impossible: parler quinze minutes sur un
projet de loi qui n'a qu'un seul article et avec lequel, au surplus, H est
totalement en accord. Après avoir parlé contre le projet de loi,
il nous a dit qu'il était d'accord.
Ce qu'il faut bien réaliser, c'est ce que nous faisons avec ce
projet de loi. Nous réglons un problème, un problème
causé par l'ancien gouvernement. Il faut le dire car, entendre parler le
député de Jonquière, c'est comme si le présent
gouvernement était responsable de la situation. Or, tout ce
problème vient d'un problème causé par l'ancien
gouvernement, d'une loi votée par l'ancien gouvernement, la Loi sur la
fiscalité municipale, qui ne réglait pas un problème mais,
en fait, qui en créait un. Ce problème n'est pas survenu depuis
l'adoption de la loi, en 1980, mais il vient de survenir maintenant. Il
survient, le député l'a dit.
J'aimerais clarifier un peu ses propos car, à Montréal, on
a déposé un nouveau rôle pour 1988, pas à
Montréal mais à la Communauté urbaine de Montréal.
Ce rôle contient des augmentations substantielles d'évaluation. On
le sait, on l'a entendu; de nombreux contribuables ont trouvé que leur
évaluation foncière augmentait trop vite par rapport aux
années précédentes. Ils ont donc contesté
l'évaluation, ce qui est leur droit, devant le Bureau de révision
de l'évaluation foncière. Mais, en vertu d'un article de la loi,
l'article 173, le bureau de révision ne peut pas entendre leurs
plaintes. La loi interdit au bureau de révision d'entendre les plaintes
de ces 15 000 ou 18 000 personnes avant plusieurs années.
Il est, vous en conviendrez, M. le Président, assez paradoxal et
quelque peu injuste d'obliger ces milliers de personnes à attendre
trois, quatre ou cinq ans avant que leur évaluation puisse être
redressée par un jugement du Bureau de révision de
l'évaluation foncière. C'est pourquoi nous avons
décidé d'intervenir et de faire en sorte de faire adopter ce
projet de loi qui permettra au Bureau de révision de l'évaluation
foncière d'entendre dès maintenant les causes pour redresser les
torts, s'il en est, et pour confirmer aux gens une évaluation conforme
à la réalité, s'ils ont raison de se plaindre.
Or, pour ce faire, il faut modifier justement l'article 173 et permettre
au bureau de révision d'entendre les contestations dès
maintenant, même si un groupe a décidé de poursuivre ou de
prendre un recours en nullité contre l'ensemble des rôles
d'évaluation. C'est le seul objet du projet de loi, soit de permettre de
régler ce problème que nous n'avons pas causé, mais qui
est causé par une loi qui a été adoptée par
l'ancien gouvernement. C'est la raison pour laquelle, M. le Président,
même l'Opposition reconnaît qu'il faut régler le
problème. Elle reconnaît qu'il y avait un problème dans la
loi adoptée sous l'ancien gouvernement. Je ne leur fais pas de tort, je
ne leur fais pas le reproche trop brutal d'avoir adopté cette loi.
Toutes les lois sont perfectibles. Nous réussissons parfois à
faire en sorte de corriger les imperfections qui existaient dans (es lois
adoptées avant nous et probablement qu'après nous, d'autres
viendront aussi améliorer les lois que nous votons présentement.
C'est cela...
Je vois le député de Frontenac qui ne semble pas tout
à fait d'accord avec mes propos. Je sais que nos lois sont bien faites,
mais je ne veux pas présumer, M. le Président, que, sur une
longue période de temps, on ne finira pas un jour par trouver une
façon de les améliorer. Enfin, en toute humilité, je suis
prêt à dire qu'il est possible qu'un jour on puisse trouver dans
nos propres lois des articles qui pourraient être
améliorés. C'est ce que nous faisons aujourd'hui à
l'endroit d'une loi de l'ancien gouvernement et je constate que l'Oppositon est
d'accord avec nous.
C'est pourquoi, M. le Président, c'est avec plaisir que nous
voterons en faveur de la loi 38 dont je souhaite l'adoption dans les meilleurs
délais. Je vous remercie.
Le Vice-Président: Le débat étant clos,
est-
ce que la motion d'adoption du projet de loi 38, Loi modifiant la Loi
sur la fiscalité municipale, est adoptée.
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Lefebvre: M. le Président, j'avais l'intention
d'appeler l'article 6 pour permettre au fougueux député de
Sainte-Anne de faire son intervention sur le projet de loi 37, mais cinq
minutes ne sont pas suffisantes pour lui. Alors, je me vois dans l'obligation
de vous demander de suspendre les travaux jusqu'à 20 heures.
Le Vice-Président: Très bien. Puisque nous arrivons
à 18 heures, l'Assemblée va suspendre ses travaux qui reprendront
ce soir à 20 heures.
(Suspension de la séance à 17 h 56)
(Reprise à 20 h 4)
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Jolivet: Pour un discours aussi important de la part du
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, je sais qu'il y a eu des
réunions avant le début de la séance de ce soir, mais je
demanderais le quorum.
La Vice-Présidente: Qu'on appelle les
députés.
(Suspension de la séance à 20 h 5)
(Reprise à 20 h 7)
Projet de loi 15 Adoption
La Vice-Présidente: Nous allons donc reprendre nos
travaux. Comme je le disais, nous en sommes à l'adoption du projet de
loi 15, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la
faune concernant les habitats fauniques. Là-dessus, je suis prête
à reconnaître M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Merci, Mme la Présidente. C'est avec beaucoup
de fierté que nous procédons ce soir à l'adoption par
cette Chambre, après l'étude article par article par la
commission parlementaire de l'aménagement et des équipements, du
projet de loi 15, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur
de la faune concernant les habitats fauniques.
Cette pièce de législation, en dépit de son allure
modeste, s'inscrira, je crois, dans la grande lignée des
législations "conservationnistes" dont s'est doté le
Québec au cours des années. En effet, de la même
manière que la société québécoise a un jour
exigé que soient mieux protégés son milieu de vie
environnemental, son patrimoine historique, culturel et linguistique et son
territoire agricole, de la même manière aujourd'hui
applaudira-t-elle à l'adoption par cette Chambre de mesures
législatives assurant, pour les générations futures, la
sauvegarde de son remarquable patrimoine faunique.
L'adoption de cette loi clôturera huit ans d'efforts, de
sensibilisation et de démarches de toutes formes: colloques,
congrès, discussions interministérielles, travaux de recherche,
résolutions de fédérations et organismes de conservation,
etc. Des millions de Québécois et de Québécoises,
qu'ils soient reliés à l'utilisation consommatrice ou non
consommatrice de la faune, s'assurent par l'adoption de cette loi de la
préservation de ta diversité génétique et de
l'utilisation durable de leur patrimoine faunique, que ce soit à des
fins éducatives, récréatives, touristiques ou de
loisir.
Au plan économique, ce sont les importantes industries
reliées à l'exploitation et à l'observation de la faune
qui se voient aujourd'hui garantir non seulement le maintien, mais aussi le
développement des emplois et des retombées économiques
qu'elles génèrent dans toutes les régions du
Québec. Pour les populations autochtones, l'adoption de cette loi leur
permettra de perpétuer la pratique des activités culturelles
traditionnelles caractéristiques de ces peuples.
En effet, Mme la Présidente, face à l'altération et
à la disparition de l'habitat de la faune que nous connaissions au
Québec comme partout ailleurs du reste, la nécessité
d'intervenir est apparue d'autant plus pressante que les divers lois et
règlements en vigueur ne suffisaient pas à assurer une
conservation adéquate de la faune. À quoi pouvaient servir
à long terme des mesures comme la diminution de l'effort de chasse et un
meilleur contrôle du braconnage, si nous n'étions pas en mesure
d'assurer à la faune la condition essentielle à sa survie, soit
la protection de son habitat? Sans les habitats, il n'y a pas de faune. C'est
aussi simple et aussi cruellement évident que cela. De la même
manière, sans terres agricoles, il n'y a ni agriculture ni
agriculteurs.
C'est pourquoi, Mme la Présidente, pour assurer la
perpétuation des espèces fauniques, notamment par la conservation
de leurs habitats, et pour maximiser les retombées économiques de
cette ressource, il est urgent de prendre les moyens appropriés pour
arrêter l'érosion constante de la capacité de soutien du
milieu de vie des animaux. C'est ce à quoi vise la présente loi
qui poursuit les objectifs suivants: veiller à ce
qu'aucune espèce animale ne puisse être un jour mise en
danger au Québec à cause d'une détérioration de son
habitat; assurer la conservation et la mise en valeur d'habitats fauniques sur
le territoire québécois; s'assurer qu'il n'y art pas de perte
nette d'habitats et compenser les pertes inévitables d'habitats en en
créant de nouveaux; s'assurer aussi d'un cadre de gestion
intégrée des ressources pour la conservation des habitats de la
faune de façon à maintenir la qualité, la diversité
et la répartition des habitats dans tous les écosystèmes;
associer la population québécoise et l'ensemble des intervenants
à la conservation et à la mise en valeur des habitats
fauniques.
Voilà, Mme la Présidente, les cinq objectifs importants
que sous-tend le projet de loi que nous adopterons bientôt en
troisième lecture et qui fait en sorte de protéger les habitats
pour ces cinq objectifs-là. Les dispositions législatives que
nous sommes appelés à adopter constituent la pierre angulaire sur
laquelle le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche
compte pour résoudre les principaux problèmes de conservation des
habitats fauniques.
Le projet législatif déposé modifie essentiellement
la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune par l'introduction
d'un nouveau chapitre sur la conservation des habitats fauniques et par des
ajustements de concordance à quelques autres articles de cette loi. Les
éléments essentiels qui caractérisent ce projet sont les
suivants: douze types d'habitats sont définis par voie
réglementaire, dont dix feront l'objet d'une localisation au moyen de
plans cartographiques qui seront intégres aux plans d'affectation des
terres publiques et, éventuellement, aux schémas
d'aménagement des MRC.
Le projet de loi prévoit aussi que nul ne peut, dans un habitat
faunique, faire une activité susceptible d'entraîner des dommages
à cet habitat. Cette interdiction ne s'applique cependant pas à
une activité exclue par règlement, à une activité
faite conformément aux normes ou aux conditions d'intervention
déterminées par règlement et à une activité
préalablement autorisée par le ministre ou le gouvernement et
à une activité requise pour prévenir ou réparer un
dommage résultant d'une catastrophe appréhendée.
À cet effet, j'aimerais souligner la collaboration de mon
collègue, M. Côté, ministre délégué
aux Forêts. Il y a une interrelation, en ce qui concerne les
clientèles, pour que ces interventions fassent l'objet, et elles le font
déjà, entre nous d'un règlement adapté au milieu
d'intervention ou pour les interventions en milieu forestier. Je pense que nous
allons accentuer entre nos deux ministères, entre nos collègues
et entre nos clientèles respectives, cette pratique d'une
interrelation.
Au cours du mois d'août, nous aurons, selon ce que j'ai
proposé à mon collègue, le ministre
délégué aux Forêts, une rencontre avec les
différentes clientèles dans le but d'apporter encore probablement
non pas nécessairement plus de souplesse, mais plus de
compréhension et, effectivement aussi, faire en sorte que, d'un commun
accord, nous puissions avoir tout ce qu'il faut dans cette loi pour que cette
collaboration entre les deux ministères soit encore intensifiée
davantage.
En cas de non-respect de la procédure d'autorisation ou des
conditions d'autorisation, le ministre pourrait suspendre ou révoquer
l'autorisation ou confisquer la garantie fournie par le titulaire et l'utiliser
afin de réparer les dommages causés à l'habitat. Il
pourrait également émettre une ordonnance ou requérir une
injonction de la Cour supérieure.
Pour l'exercice de ses responsabilités, le ministre pourrait, par
protocole d'entente, confier certains de ses pouvoirs à une corporation
municipale ou à une municipalité régionale de
comté. Cela a fait l'objet de discussions à l'intérieur du
débat article par article.
Il ne sera pas question, Mme la Présidente, d'imposer aux MRC ou
aux municipalités ce genre de responsabilité, mais, pour celle
qui en fera la demande et qui voudra signer un protocole d'entente avec nous,
nous serons ouverts à le faire. D'ailleurs, à cet effet, je dois
rencontrer lundi prochain les membres de la table
Québec-municipalités pour bien expliquer les points que nous
avons discutés en commission parlementaire et qui ont fait l'objet d'un
consensus entre nous, ce qui va venir démontrer qu'il n'y a pas lieu
d'imposer quoi que ce soit, ni à une MRC ni à une
municipalité, dans ce domaine, que ce sera tout simplement le fait d'une
municipalité qui pourra à ce moment avoir cette
délégation de pouvoirs si elle le souhaite bien.
Outre les amendes imposées pour une infraction à certaines
dispositions, le ministre pourrait, aux frais du contrevenant, remettre un
habitat dans l'état où il était avant la commission de
l'infraction. Enfin, le ministre pourrait accorder une aide financière
à toute personne sur une propriété privée où
est situé un habitat faunique si le refus d'autoriser une
activité, si une condition prévue dans une autorisation ou si une
norme ou condition d'intervention prévue au règlement lui cause
un préjudice réel.
Cet outil légal s'appliquera sur l'ensemble du territoire
québécois, tant sur les terres publiques que privées, et
à tous les intervenants, tant les ministères et organismes
paragouveme-mentaux que les groupements privés ou le citoyen.
La loi permettra de protéger d'importantes aires de concentration
des oiseaux aquatiques, des héronnières, des colonies d'oiseaux,
les ravages du cerf de Virginie, des aires de fréquentation et de mise
bas du caribou, l'habitat du rat musqué, des aires de confinement de
l'orignal de même que des vasières et l'habitat du poisson.
Loin de vouloir empêcher la réalisation des
activités nécessaires au bien-être de la collée-
tivité québécoise, les dispositions
législatives favoriseront la concertation entre les intervenants pour
les aider à intégrer à leurs activités
projetées et ce, dès les étapes de planification, des
mesures de conservation des habitats fauniques prioritaires. Des guides de
conservation seront développés pour aider les intervenants
à rendre leur activité conforme aux dispositions
législatives et aux exigences du ministère.
Encore là, M. le Président, nous nous sommes entendus pour
qu'il y ait un guichet unique pour que les gens qui ont à obtenir des
autorisations n'aient pas à se promener entre soit le ministère
de l'Environnement, mon ministère et le ministère des
Forêts, mais qu'il y ait un guichet unique pour favoriser encore une fois
la rapidité et éliminer l'administration. C'est pour cela qu'il y
a des ententes faites entre les différents ministères.
La collaboration du public à la mise en oeuvre de cette loi
constitue à la fois un prérequis et une condition de
succès. Conscient de la nécessité d'intégrer la
participation du public pour assurer la conservation de l'ensemble des habitats
nécessaires à la faune, le ministère intensifiera ses
efforts d'éducation et d'information auprès du public de
façon à susciter une attitude positive et une certaine
fierté à l'égard des ressources fauniques et leurs
habitats et à mieux faire comprendre le rapport complexe qui existe
entre les ressources et les habitats. Le ministère espère ainsi
obtenir la collaboration du public à la conservation des habitats de la
faune aussi bien ceux qui seraient éventuellement couverts par ces
mesures législatives que l'ensemble des habitats de la faune.
Depuis de nombreuses années, les organisations
préoccupées par la conservation de la faune s'intéressent
activement à l'habitat faunique. Les utilisateurs de la faune sont de
plus en plus conscients de la valeur de l'habitat faunique.
L'intérêt que portent ces groupes à leur environnement se
traduit par l'élaboration de programmes éducatifs, la publication
de textes, la diffusion de magazines et de documents sur la nature et
l'environnement et par des prises de position publiques. Le ministère
compte effectuer des efforts particuliers pour sensibiliser également
des groupes identifiés à certaines activités en
interactions directes avec les habitats.
D'autres réalisations concrètes, tel le financement
d'importants projets de conservation ou d'acquisition de terres à cette
fin, suscitent aussi l'admiration.
Enfin, un nombre croissant de corporations publiques et privées
se préoccupent davantage de la conservation des habitats fauniques. A ce
titre, citons les schémas d'aménagement réalisés
par les municipalités régionales de comté dans lesquels
sont déjà reconnus certains habitats fauniques, en plus des
efforts d'organismes comme Canards Illimités Canada et Duvetnor etc. (20
h 20)
Mme la Présidente, l'adoption de ce projet de loi constitue,
à n'en pas douter, un geste déterminant et fondamental pour
l'avenir de la faune au Québec. Ce geste s'ajoute à deux autres
mesures fondamentales qui ont été prises au cours des douze
derniers mois, soit la signature, le 10 novembre 1987, de l'entente-cadre
concernant un plan quinquennal pour la protection et l'aménagement des
habitats fauniques et, en juillet dernier, la dotation de moyens de financement
en faveur de la Fondation de la faune du Québec. L'entente-cadre
à laquelle je me réfère comporte des crédits de 16
400 000 $ qui permettront, tant pour l'habitat des zones humides que pour
l'habitat de la faune terrestre et celui du poisson, l'acquisition de certains
habitats, la réalisation de projets de restauration et
d'aménagement de sites, la construction de divers ouvrages, la
conclusion de baux et servitudes, le versement d'indemnités, etc. Quant
à la Fondation de la faune du Québec, elle est maintenant en
mesure d'assurer son financement et d'être active dans la mise en oeuvre
des dispositions du projet de loi déposé pour adoption par cette
Chambre, cette semaine. Ce projet de loi et les deux autres mesures auxquelles
je viens de me référer brièvement constituent un train
complet d'assurances qui feraient l'envie de n'importe quel courtier.
Il n'est pas exagéré de dire que plein de choses se
produisent au Québec en faveur de la faune, qui font l'envie de nos amis
ailleurs, au Canada. Je citerai à cet effet, et en terminant, l'extrait
d'une lettre que je recevais récemment du président d'Habitat
faunique Canada M. Denis Sherratt, qui, après étude du projet de
loi 15, déclare ce qui suit: "Ayant eu l'occasion de voir ce qui se
passe ailleurs au Canada, je puis vous assurer que cette loi sera de loin la
plus complète qui soit dans ce domaine. En effet, dans la plupart des
cas, la protection des habitats se limite, dans les textes législatifs,
à une mention touchant les richesses naturelles, ou ne constitue qu'une
composante mineure d'une loi sur la gestion de la faune."
Alors, Mme la Présidente, autant de notre côté que
du côté de l'Opposition, l'ensemble des parlementaires de cette
Chambre qui ont concouru à adopter cette loi et à la bonifier,
dans certains cas, doivent être heureux que ce compliment nous soit
adressé par quelqu'un qui a regardé toutes les lois du Canada.
Sans aucun doute, cette loi fera l'orgueil des gens du Québec et de
l'ensemble de tous ceux qui veulent protéger les habitats fauniques au
Québec. Merci.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche. M. le député de Dubuc.
M. Hubert Desbiens
M. Desbiens: Mme la Présidente, l'Opposition, par ma voix,
est heureuse de s'associer au ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche
pour adopter le projet de loi 15 qui vient consacrer, comme le ministre
l'a souligné lui-même, des années d'efforts, de colloques,
de discussions au Québec concernant la possibilité et la
nécessité d'établir une loi qui vienne protéger les
habitats fauniques. Pas d'habitat faunique, Mme la Présidente,
évidemment pas de faune.
La nature est de plus en plus sujette à toutes sortes
d'agressions. Il était plus que nécessaire et même urgent,
devrais-je dire, que le gouvernement accepte, décide plutôt de
présenter ce projet de loi qui, comme l'a souligné le ministre
lui-même, est le fruit de longues années de discussions. Il a
été présenté finalement à la demande de
nombreux organismes responsables et amants de la nature
québécoise, de gens responsables et intéressés
d'une façon très particulière par la conservation et par
la mise en valeur de notre ressource faunique et qui étaient de plus en
plus inquiets devant les agressions, comme je le mentionnais tantôt, que
doit subir aujourd'hui le territoire québécois, la nature
québécoise, devant tant d'agressions que de destructions pures et
simples attribuables à la pollution, à l'utilisation industrielle
et de la matière ligneuse dans le milieu forestier, etc.
Alors, le ministre par ce projet de loi 15 vient combler le manque qui
existait au Québec. C'est évidemment important et l'Opposition
est heureuse, par conséquent, de s'associer à son projet de
loi.
Toutefois, j'ajouterai, Mme la Présidente - le ministre l'a
mentionné aussi dans son intervention - la question des interrelations.
L'utilisation de la matière ligneuse par les entreprises
forestières, l'utilisation de la faune par les citoyens et citoyennes du
Québec, l'utilisation de la nature sous toutes ses formes aussi par les
citoyens et citoyennes du Québec créent toutes sortes de
situations et il y a nécessairement interrelation entre toutes ces
actions qui ont lieu.
Ces interrelations touchent le ministère du Loisir, de la Chasse
et de la Pêche et touchent, comme il l'a souligné tantôt, le
ministère de l'Énergie et des Ressources et, également
bien sûr, le ministère de l'Environnement du Québec.
Lorsque des interventions seront nécessaires par des lois ou de la
réglementation, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche, en ce qui concerne ses devoirs de ministre responsable de la
conservation et de la mise en valeur de la faune, sera celui qui devra le faire
en coordination avec ses collègues, j'imagine, du ministère de
l'Énergie et des Ressources et du ministère de l'Environnement du
Québec.
Alors, de plus en plus, les lois et la réglementation qui
existent au Québec viennent confirmer ces interrelations et ces
interventions multiples qui doivent avoir lieu sur le territoire. La loi sur
les habitats fauniques ou la partie de notre Loi sur la conservation et la mise
en valeur de la faune concernant les habitats fauniques existe enfin. On ne
peut que dire bravo, Mme la Présidente. Et l'Opposition,
évidemment, votera en faveur du projet de loi 15.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Dubuc. Il n'y a pas d'autre intervention? Le débat est terminé.
Est-ce que le projet de loi 15, Loi modifiant de nouveau la Loi sur la
conservation et la mise en valeur de la faune concernant les habitats
fauniques, est adopté?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le ministre du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
M. Picotte: Mme la Présidente, je vous demande d'appeler
l'article 37 de notre feuilleton.
Projet de loi 101 Adoption
La Vice-Présidente: À l'article 37 de notre
feuilleton, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche propose
l'adoption du projet de loi 101, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la
mise en valeur de la faune et la Loi sur les parcs. M. le ministre du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Merci, Mme la Présidente. En déposant
aujourd'hui, pour adoption en cette Chambre, après étude par la
commission parlementaire de l'aménagement et des équipements, le
projet de loi 101, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en
valeur de la faune et la Loi sur les parcs, nous donnons suite, Mme la
Présidente, avec une immense satisfaction, aux engagements pris avec
l'ensemble des partenaires du gouvernement en matière de gestion de la
ressource faunique.
Bien sûr, ce projet introduit des amendements à la loi
actuelle visant, d'une part, à préciser certains pouvoirs des
agents de conservation et, d'autre part, à assurer une plus grande
efficacité et souplesse dans l'administration des revenus perçus
dans les parcs et les réserves, de même que dans la gestion des
permis et des certificats de chasse et de piégeage.
Avant tout, les modifications contenues dans cette pièce
législative reflètent notre conviction que la gestion de la faune
est une entreprise complexe qui ne peut et ne doit pas être
assumée par le gouvernement seul. La conservation et la mise en valeur
de la faune et de ses habitats sont des devoirs à responsabilité
partagée. Les associations de chasseurs, de pêcheurs et de
trappeurs, les organismes de la faune, les divers mouvements pour la
conservation de la nature, les entreprises privées reliées
à l'utilisation de la faune ou influençant l'habitat
faunique par leurs exploitations ou l'utilisateur de la faune, sont tous
parties prenantes de ce que nous appelons la mission faunique. Plus que jamais,
l'État a besoin d'assistance, plus que jamais aussi le ministère
du Loisir, de la Chasse et de la Pêche doit compter sur la population, le
monde associatif, l'entreprise privée, en somme, sur l'ensemble de ses
partenaires du secteur privé autant que du secteur public, pour assurer
une gestion efficace de la faune.
Ce partenariat ne peut toutefois s'exprimer clairement que si
l'environnement législatif et réglementaire, tout en
établissant clairement le cadre garantissant le respect de la
responsabilité gouvernementale, donne aux partenaires toute la souplesse
et l'autonomie nécessaires à l'exercice de cette assistance, de
cette participation, je dirais même de cette complicité avec
l'État, dans la réalisation de cette importante mission.
C'est donc cet esprit qui a constamment guidé notre
démarche dans l'élaboration de ce projet de loi, du moins dans
ses principaux éléments. C'est le même esprit que celui qui
fut véhiculé auprès de nos partenaires à l'occasion
du premier Sommet québécois sur la faune que j'ai tenu
récemment les 29, 30 avril et 1er mai dernier, à Québec,
sommet à l'occasion duquel les 23 organismes participants ont fait
consensus sur les rôles que nous y proposions pour nos divers
partenaires, autant du monde associatif que de l'entreprise privée. (20
h 30)
Ce projet de loi touche aussi, en grande partie, les zones
d'exploitation contrôlée. On se souviendra que ce projet de loi a
été déposé l'automne dernier et, compte tenu de
certaines inquiétudes que pouvait susciter ce projet de loi - les
membres de l'Opposition m'en avaient fait part à l'époque -
j'avais préféré retarder l'adoption à ce printemps
pour nous permettre de consulter les administrateurs des ZEC lors de leur
congrès annuel qui a eu lieu, si ma mémoire est fidèle, au
mois de février dernier. D'un commun accord, sauf sur un point, les
administrateurs des ZEC m'ont demandé de faire diligence pour adopter
l'ensemble du projet de loi, surtout cette partie touchant aux ZEC, dans le but
de leur donner plus d'autonomie.
Il va de soi qu'après dix ans de vie des ZEC, il fallait songer
à regarder de plus près, à moderniser la loi qui les
régit, à faire en sorte qu'on leur donne le pouvoir de prendre
certaines initiatives. À titre d'exemple, quand on parle de donner de
l'autonomie aux ZEC, je vous soulignerai que dans une ZEC il peut y avoir une
occasion où on aimerait défendre l'utilisation de moteurs
à carburant sur les chaloupes, dans le but de moins polluer le lac, pour
préserver l'oxygène nécessaire à la vie des
poissons, etc. On n'avait pas cette possibilité antérieurement,
sauf en faisant un règlement d'ordre général
défendant toute utilisation de moteur à carburant sur tous les
lacs du Québec. On sait que dans certains cas, selon la grandeur du lac
et les dangers potentiels de certains lacs pour les pêcheurs, on ne
pouvait pas prohiber l'utilisation de moteurs à carburant sur l'ensemble
des lacs du Québec. Cela aurait été non
sécuritaire, dans certains cas. Il fallait se donner une loi permettant
l'utilisation de règlements ponctuels, un cadre donné pouvant
permettre à une ZEC de l'utiliser s'il y a des possibilités et si
on est capable de faire la preuve qu'il serait nécessaire d'agir dans ce
cas. C'est un exemple, et je pourrais vous en donner beaucoup d'autres, mais il
serait trop long de les énumérer.
Je pense qu'il faut se fier à ces 700 administrateurs
bénévoles que nous retrouvons à l'intérieur des
ZEC, des administrateurs de ZEC qui, eux, vivent sur le terrain, qui, eux ou
elles dans certains cas, sont capables de prendre des décisions,
à condition qu'on leur donne cette souplesse non seulement dans le but
de protéger la faune, mais pour apporter des améliorations
continuelles à ce qu'on appelle tout le réseau des ZEC qui a
maintenant dix ans d'usure, dix ans d'utilisation et qui mérite, dans
certains cas, d'avoir assez de souplesse pour être capable de prendre de
bonnes décisions en moment opportun.
C'est souvent le reproche qu'on a fait aux ZEC, Mme la
Présidente. Ce réseau-là a été
instauré tellement rapidement que, dans certains cas, dans la
majorité des cas, on n'a pas fait une bonne campagne d'éducation
pour dire aux Québécois et aux Québécoises: Oui,
effectivement, la faune nous appartient. Oui, effectivement vous devez profiter
de la faune. On a aussi oublié de faire une campagne éducative
qui aurait dit: Pas de n'importe quelle façon, pas à n'importe
quel prix et pas n'importe comment! On a oublié de dire cela et on se
retrouve avec un réseau où certains administrateurs
bénévoles, consciencieux, respectueux de la nature se
questionnent à savoir pourquoi, dans certains cas, on est en train de
vider les lacs au Québec. C'est parce qu'on n'a pas eu cette souplesse
là et cette campagne éducative qui n'a pas été
faite auprès des Québécois et Québécoises
pour assurer la survie et, dans certains cas, la protection adéquate de
la ressource.
Mme la Présidente, je pense que, devant cette constatation
générale, il nous fallait donner plus d'autonomie aux ZEC,
pouvoir les suivre, pouvoir signer de bons protocoles d'entente avec elles,
avec les administrateurs. Parfois cela cause des préjudices. Je pourrais
vous donner d'autres exemples, notamment, l'utilisation d'un chemin à
l'intérieur d'une ZEC par des groupes. Il faut avoir un mécanisme
qui permette aux gens de pouvoir l'utiliser tout en défrayant une partie
des coûts pour l'entretien sans que ceux qui ont des permis de
villégiateurs à l'intérieur de certaines ZEC se voient
lésés parce que, parfois, on n'a pas la souplesse de prendre des
décisions et d'apporter des correctifs, dans certains cas, sur
l'utilisation des routes.
Mme la Présidente, je pense qu'effectivement il était
temps que nous apportions ces amendements-là et je suis persuadé
que, connaissant la sagesse des administrateurs des ZEC, H y aura lieu d'en
arriver à des compromis intéressants face aux différents
utilisateurs.
Ce projet de loi touchait aussi la Fondation de la faune du
Québec. On sait très bien que mon prédécesseur, je
pense que c'est le député de Lac-Saint-Jean, avait
créé la Fondation de la faune du Québec qui avait un nom
plus long dans ce temps-là et pour laquelle on a modernisé le
nom, si on peut le dire ainsi. Cela s'appellera, aux fins de faciliter les
communications, la Fondation de la faune du Québec. Il y avait eu un
bout de fait par mon prédécesseur avec beaucoup de
difficulté. On sait que ce n'est pas facile de créer une
fondation. La créer oui, cela peut être assez facile, mais lui
donner aussi un cadre lui permettant d'aller générer de
l'argent...
Pour cela, il y avait des étapes à franchir. On a d'abord
créé la Fondation de la faune et moi, celui qui vous parle, j'ai
fait en sorte d'aller chercher des pouvoirs additionnels lui permettant de se
financer et d'aller recueillir des fonds. Je pense que tout cela encore fait
l'orgueil des Québécois et des Québécoises.
Comme je vous l'ai mentionné tantôt, c'est un travail de
longue haleine que nous nous sommes permis de faire. Il fallait moderniser. Il
fallait ajouter des membres au conseil d'administration, pouvoir aller chercher
des montants d'argent sur les permis de pêche, permettre que les
communications soient plus faciles à la Fondation de la faune et aussi
permettre à des citoyens, autant aux corps publics qu'aux corporations,
aux usines, aux manufactures et aux PME de souscrire à la Fondation de
la faune dans le but d'apporter leur quote-part à la protection des
habitats et à tout ce que cela comporte. Il fallait améliorer et
nous l'avons fait, Mme la Présidente.
Encore là, je pense qu'en commission parlementaire nous avons eu
la collaboration de l'ensemble des membres de la commission pour faire en sorte
que nous puissions améliorer constamment cette fondation pour qu'elle
rapporte des dividendes au Québec, aux Québécois et aux
Québécoises en ce qui concerne la protection de la faune et
l'amélioration du patrimoine faunique.
Enfin, Mme la Présidente, nous avons aussi un volet concernant
les pourvoiries. À l'égard de la pourvoirie, les expressions
"pourvoyeur de chasse ou de pêche" et "pourvoirie de chasse ou de
pêche" seront réservées sur proclamation. Cette mesure
réclamée par les promoteurs de ce secteur s'inscrit dans le cadre
des efforts de promotion visant à consolider l'activité
touristique fondée sur la faune.
En conclusion, Mme la Présidente, nous devrons être
très heureux de l'adoption de ce projet de loi 101 qui touche quelques
domaines et qui va permettre encore une fois, j'en suis certain, tant aux
groupes concernés, au gouvernement qu'à l'ensemble des
Québécois et des Québécoises, d'ajouter à
cette valeur inestimable qu'est la faune au Québec. Mme la
Présidente, nous aurons à y revenir, bien sûr, parce que
c'est un domaine qui est en constante évolution, qui évolue
continuellement. Le nombre de chasseurs et de pêcheurs croît au
Québec, il se multiplie annuellement. Le nombre de chasseurs et de
pêcheurs au Québec est d'au-delà de 1 500 000. C'est
évident que nous aurons à revenir pour encore perfectionner,
améliorer, bonifier notre loi. Je pense qu'ensemble nous pourrons, tout
le monde en cette Chambre, faire encore un grand bout de chemin pour
améliorer cette faune et ce patrimoine faunique si cher à tous.
Mme la Présidente, merci. (20 h 40)
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche.
M. le député de Dubuc.
M. Hubert Desbiens
M. Desbiens: Merci, Mme la Présidente. Le projet de loi
101 que le ministre nous présente pour adoption en troisième
lecture vise différentes parties de la Loi sur la conservation et la
mise en valeur de la faune. Il touche à la Fondation de la faune. Il
apporte des modifications aux pouvoirs des ZEC, les zones d'exploitation
contrôlée. Il touche également à certains pouvoirs
concernant l'action des agents de conservation de la faune, de même que
plusieurs autres sujets. Comme on l'a vu lors de l'étude article par
article, il permet au ministre plus de souplesse dans l'administration des
droits qui sont perçus sur les territoires fauniques et dans les parcs.
Évidemment, en ce qui concerne les amendements, somme toute, mineurs
à la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, en ce qui
concerne l'administration des redevances, par exemple, ou des droits
perçus, ils ne créent aucun problème. Il en va de
même pour ce qui concerne l'action des agents de conservation pour leur
donner les moyens suffisants pour exercer leur activité. Et sur trois
autres points plus importants.
Comme lors du discours que je prononçais au moment de
l'étude du principe de ce projet de loi en décembre 1987,
déjà à ce stade, j'avais clairement indiqué que
l'Opposition était d'accord avec une marge d'autonomie
supplémentaire et plus grande à accorder aux zones d'exploitation
contrôlée, aux ZEC. Cela fait maintenant dix ans que le
système de zones d'exploitation contrôlée a
été créé par le gouvernement antérieur du
Parti québécois, ce qui a permis, depuis ces dix dernières
années, cet exercice de démocratisation qui remet à la
population qui jouit des territoires ou qui utilise des territoires du
Québec à des fins de prélèvement de chasse et de
pêche, entre autres, qui leur donne donc l'autorité pour agir,
cet exercice de démocratisation donc qui a vécu une
expérience pendant ces dix dernières années et qui a fait
la preuve, comme l'a souligné le ministre, qu'ils étaient
véritablement en mesure d'aller plus loin dans cet exercice de prise en
charge du territoire faunique, de sa protection, de sa conservation et de sa
mise en valeur selon les lois et les règlements édictés
par le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
Donc, c'est bien évident aussi qu'encore et davantage
aujourd'hui, six mois plus tard, nous sommes d'accord puisque c'est justement
la façon que nous avions nous-mêmes choisie pour permettre
à la population d'exercer elle-même certains pouvoirs, puisqu'elle
était l'utilisatrice de ces territoires dans le domaine de la faune en
général et aussi, de plus en plus, de la nature.
C'est bien sûr que, compte tenu de l'éclairage que le
ministre a apporté en commission parlementaire sur certaines questions
concernant divers articles relatifs à cette partie de la modification
à la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, nous
sommes d'accord avec cette expérience ni plus ni moins ou cette
poursuite d'expérience plus élargie, plus complète, de
démocratisation que le ministre veut accorder aux gestionnaires des ZEC.
Comme je le soulignais moi-même pendant l'étude des articles, s'il
arrive, par hasard ou autrement, qu'il se produise des erreurs de parcours, ce
n'est pas pire que ce soient des citoyens et des citoyennes qui travaillent
bénévolement, comme l'a souligné le ministre, au service
de leurs concitoyens et concitoyennes, commettent des erreurs, que ce soit le
ministère lui-même. À ce moment-là, il s'agira pour
le ministre comme responsable, à la suite de l'application de cette
nouvelle marge d'autonomie et il nous restera, comme législateurs de
nous assurer de la suite des choses, puisque c'est notre travail ici à
l'Assemblée nationale de modifier à nouveau, si
nécessaire, dans le sens qui sera jugé à propos cette Loi
sur la conservation et la mise en valeur de la faune.
En ce qui concerne la Fondation de la faune du Québec, son
nouveau nom, qui est plus bref, il y avait un hic que nous avions
souligné au moment de l'étude du principe, une modification qui
était prévue initialement au projet de loi qui faisait en sorte
que c'était le ministre lui-même qui, si la loi avait
été adoptée telle quelle, devait choisir les membres du
conseil d'administration, contrairement à ce que l'ancienne loi disait
où le conseil d'administration de la Fondation de la faune était
choisi par le ministre quand même, mais après consultation des
organismes intéressés. Le ministre a accepté de revenir au
texte de l'ancienne loi, ce qui nous satisfait entièrement comme
Opposition.
Ce qui fait défaut, et en ce sens je compare un peu le projet de
loi 101 à une belle pomme, mais une belle pomme dans laquelle il y a,
quant à nous, encore un ver qui en rend plus difficile la digestion.
Nous avons mentionné, je l'avais mentionné au nom de l'Opposition
officielle à l'époque, au mois de décembre 1987, que nous
voterions contre le projet de loi en raison des craintes raisonnables quant aux
intentions du ministre. Non pas en ce qui concerne les ZEC, comme je viens de
le mentionner, mais relativement au développement de certains types de
pourvoiries haut de gamme qui semblaient être l'objectif et qui
risquaient de mettre un frein à l'accessibilité. Le principe
d'accessibilité reste, je pense que le ministre en a eu
l'évidence même lors de sa période de consultation, enfin,
ce qu'il a appelé sa consultation dans tout le Québec, que les
citoyens et citoyennes tiennent mordicus et n'accepteront pas que ce principe
d'accessibilité soit d'aucune façon remis en cause.
Nous avions espéré, à ce moment-là, qu'au
stade de l'étude article par article à la suite de suggestions de
l'Opposition et aussi de suggestions venant d'organismes très fortement
impliqués dans le domaine de la faune, le ministre nous apporterait
certaines garanties en acceptant d'inclure certains amendements que nous lui
avons proposés et qui auraient, je pense - en tout cas c'est notre avis
- bonifié son projet quant à la sauvegarde des
intérêts de la collectivité toujours vis-à-vis de ce
principe inalinéa-ble quant à nous de l'accessibilité
à la ressource faunique pour l'ensemble des Québécois et
des Québécoises.
Les articles particulièrement visés ce sont les articles 6
et 7 du projet de loi 101. À l'article 6, nous avions
suggéré au ministre, nous avions proposé au ministre
même de modifier l'article de façon que le principe des appels
d'offres publics au contraire de ce que le ministre veut faire,
c'est-à-dire d'en éliminer l'application à certaines
extensions de droit ou d'agrandissement de territoire, il y ait plutôt un
durcissement de cette attitude ou de cette nécessité d'appeler,
de faire des appels d'offres publics. Le ministre tient à maintenir dans
ce domaine une plus large part de discrétion. Comme le soulignait la
Fédération québécoise de la faune dans ses
remarques au ministre, le discrétionnaire, c'est un danger constant de
devoir prendre des décisions au cas par cas et d'en arriver à des
situations qui frisent le favoritisme parfois, quand ce n'est pas vraiment
cela. (20 h 50)
J'ai bien voulu indiquer au ministre, lors de l'étude article par
article, que lui-même a une idée de son projet de loi; c'est lui
qui le parraine et qui va avoir à l'appliquer dans l'immédiat. Il
a une idée très claire de son projet de loi, sauf que le ministre
n'est pas éternel, il y aura d'autres ministres après lui. Eux
aussi auront une idée; ils se feront une idée à la lecture
du texte de loi, alors, il pourrait se produire toutes sortes de
situations.
Entre autres, la Fédération québécoise de la
faune avait aussi proposé aussi au ministre au moins d'aller dans le cas
de certaines modifica-
fions ou d'agrandissements des territoires ou des élargissements
de droits... Il faut dire que le ministre nous a rassurés quant à
la signification de l'élargissement des droits, bien qu'encore une fois,
un autre ministre pourra l'interpréter à sa façon.
On avait espéré - c'était une proposition de la
fédération au ministre, dans un document qu'elle lui avait
transmis - qu'au moins, à la suite d'un avis public, des organismes qui
sont reconnus comme étant de bonne foi dans le secteur - la
fédération elle-même, l'Union québécoise de
la conservation de la nature, la Fédération des gestionnaires de
ZEC, l'Association des trappeurs indépendants, la
Fédération québécoise des pourvoiries, la
Fédération du saumon de l'Atlantique - puissent avoir le loisir,
si un avis public était édicté par le ministre,
présenté et connu de ces organismes, de donner au moins un avis
sur la proposition ou le décret que le ministre entendait adopter. Le
ministre a également refusé d'aller dans ce sens.
L'autre article qui vise... C'était l'article 7, qui modifie
l'article 86; c'est un nouvel article qui fait suite à l'article 86.1 et
qui décrète qu'une pourvoirie permissionnaire qui refuserait
d'accepter ou d'accéder à la transformation en pourvoirie
concessionnaire pourrait se voir retirer, tout simplement, son permis. Encore
là, évidemment, c'est un pouvoir discrétionnaire d'agir
que le ministre se donne unilatéralement ainsi pour mettre fin à
une espèce de contrat qui existe entre le détenteur d'un permis
d'une pourvoirie permissionnaire et le ministre du Loisir, de la Chasse et de
la Pêche.
Les situations que ces deux articles peuvent causer, j'ai
déjà eu l'occasion de les souligner au ministre à
l'Assemblée nationale ou par mes questions lors de l'étude des
crédits. J'ai mentionné qu'il pouvait y avoir des situations qui
se manifesteraient et qui ne seraient pas du tout dans le sens des
modifications que le ministre nous dit vouloir apporter. J'ai mentionné,
fors d'une question posée à l'Assemblée nationale, le cas
de la pourvoirie Archer, au Saguenay. L'agrandissement du territoire doit se
faire selon les indications que le ministre m'avait données en
commission parlementaire, lors de l'étude des crédits. Cela
devait se faire selon des critères déterminés, des
critères techniques qui visaient, entre autres, la rentabilisation de la
pourvoirie, mais cela devait fournir aussi suffisamment de territoire dans le
cas où une pourvoirie serait insuffisamment pourvue de lacs pour lui
permettre d'en faire une utilisation rentable. Eh bien, c'est le cas de la
pourvoirie Archer que j'ai souligné. On sait que l'agrandissement qui a
été fait ne l'a sûrement pas été dans le
cadre de critères de cette nature, puisque cette pourvoirie utilisait,
au maximum, à peine 40 % du potentiel de son territoire existant.
Il y a le risque aussi qu'on a constaté et qui s'est produit dans
ce cas-là, c'est que l'on vienne léser les droits des gens qui
ont à participer ou à faire des prélèvements
fauniques ou tout simplement qui sont des villégiateurs parfois et qui
avaient accès, à la suite de permis du ministère de
l'Énergie et des Ressources, à ces territoires avec lesquels on a
agrandi, entre autres, la pourvoirie Archer. Donc, il y a risque en même
temps de léser les droits de certains autres citoyens et, malgré
les contestations des villégiateurs du secteur concerné et toutes
les raisons qu'ils avaient mentionnées, le ministre a quand même
accordé son agrandissement à la pourvoirie Archer.
Si la situation avait été connue par un avis public au
moins, comme le suggérait la Fédération
québécoise de la faune, eh bien, il est certain que le ministre
aurait reçu des recommandations qui l'auraient sans aucun doute
amené à ne pas accorder cet agrandissement de pourvoirie.
Un deuxième cas, pour illustrer les dangers qui existent
présentement selon ce qui nous est proposé aux articles 6 et 7,
c'est celui du lac Oscar. La pourvoirie du lac Oscar inc., on le sait,
était à l'origine une pourvoirie qui avait 33 kilomètres
carrés de superficie. Cette pourvoirie a été agrandie
depuis un an, d'abord de 33 à 66 kilomètres carrés. Sa
superficie a été doublée, ce qui était possiblement
justifiable, mais, là, encore la même pourvoirie, après
être passée de 33 à 66 kilomètres carrés,
après avoir doublé de superficie, voilà qu'elle est
à nouveau agrandie de 168 kilomètres carrés
supplémentaires. Elle passe à 234 kilomètres carrés
de superficie. Alors qu'elle est partie de 33 kilomètres carrés,
elle est rendue maintenant à 234 kilomètres carrés de
superficie.
Une voix: Cela n'a pas de bon sens.
M. Desbiens: Lorsque j'interrogeais le ministre en commission
parlementaire, il nous disait qu'il fallait qu'une pourvoirie ait une
superficie suffisante pour pouvoir être rentable et pour pouvoir faire la
protection, la conservation des espèces, ainsi de suite. Il nous
mentionnait que les études de son ministère déterminaient
qu'une pourvoirie doit avoir plus ou moins 100 kilomètres. Cela peut
être un peu plus ou un peu moins, dépendamment des territoires
touchés. Mais, dans le cas de la pourvoirie du lac Oscar qui est
située en Mauricie, on se retrouve maintenant avec une pourvoirie qui a
augmenté son territoire de 33 kilomètres carrés à
234 kilomètres carrés, soit un agrandissement de 201
kilomètres carrés.
L'autre phénomène qui se passe dans ce cas-là, M.
le ministre, c'est qu'il y avait sur ce territoire la pourvoirie Farrar. Il y
avait aussi la pourvoirie Coucoushee, des pourvoiries permissionnaires qui
exercent dans le même secteur. La pourvoirie Oscar était, à
l'origine, une pourvoirie concessionnaire. Alors, en agrandissant de cette
façon la pourvoirie concessionnaire du lac Oscar, le ministère se
trouve à englober le territoire de
la pourvoirie Farrar, à englober des territoires libres et aussi
une partie des territoires de la pourvoirie Coucoushee. Et cela crée des
situations contraires aux normes que vous nous mentionniez et qui
étaient l'étude préalable avec les
intéressés des situations de chacune des pourvoiries quand il y
avait nécessité de faire des modifications. On est d'accord avec
votre principe qu'il doive y avoir consolidation de certaines pourvoiries,
qu'il y ait des agrandissements si nécessaire, mais non lorsque des
agrandissements se produisent de la façon dont cela se fait
présentement comme dans le cas de la pourvoirie du lac Oscar. (21
heures)
II arrive donc qu'il y ait des pressions qui soient créées
non pas par une discussion préalable, mais qui soient
créées par la force des choses. Maintenant, comment une
pourvoirie comme la pouvoirie Coucoushee peut-elle espérer vivre et se
développer quand une partie importante de son territoire ou des
territoires libres qui existaient autour d'elle sont maintenant disparus, votre
ministère l'ayant confiée à l'agrandissement de la
pourvoirie concessionnaire du lac Oscar? Alors, ce sont des situations qui sont
créées et qui sont celles qu'on craignait lorsqu'on a
étudié le projet de loi. C'est pour éviter ce genre de
situation qu'on a justement proposé des amendements, que la
Fédération québécoise de la faune nous a
également proposé des modes différents d'attribution des
pourvoiries, afin d'éviter que des citoyens soient lésés
et qu'on se retrouve avec des situations comme celle qui est vécue dans
le secteur.
Vous avez reçu de la part des citoyens, des groupes de citoyens,
des pétitions vous demandant de ne pas accorder ce genre de pouvoirie
où il y a nombre de villégiateurs qui sont maintenant
privés puisque c'était en territoire libre et qu'ils avaient donc
accès à la chasse et à la pêche. Ils sont maintenant
privés de ces droits-là. C'est le genre de situation qu'on
craignait. C'est celle, malheureusement, qui semble vouloir se
développer et cela semble vouloir devenir la façon de
procéder du ministère. On va partir d'une pourvoirie
concessionnaire existante, on va l'agrandir soit sur du territoire libre, soit
sur du territoire appartenant déjà à des permissionnaires,
et on oblige ensuite ces permissionnaires à se fondre ou à
disparaître complètement, à se faire avaler malgré
leur volonté contraire, malgré leurs états de services
excellents envers la population dans le domaine de la pourvoirie de chasse ou
de pêche.
C'est ce ver-là, Mme la Présidente, qui existe dans le
projet de loi 101, dans la pomme, dans la belle pomme du projet de loi 101, et
c'est un ver, comme je le disais au début, qu'on ne peut
digérer.
Je rappelle au ministre qu'il y a aussi d'autres questions qui sont
demeurées sans réponses et qui nous permettent de douter de sa
volonté de rayer de la carte certains clubs privés qui existent.
Ce n'est pas la majorité, comme le ministre me répondra sans
doute. Mais c'est ainsi, et il y a danger d'une perte d'accessibilité
d'un territoire comme celui que je viens de mentionner, celui du lac Oscar,
où la population est proche, où les moyens d'accès, pour
la population, sont rapprochés. Il ne s'agit donc pas du tout de
territoires inaccessibles, comme vous le disiez, que votre politique visait
dans le domaine des pourvoiries. Il y a aussi, vous savez, les trois
pourvoiries qui ont été accordées sur la rivière
Moisie. Lors de l'étude des crédits, on a soulevé
également le cas de ces trois pourvoiries sur la rivière Moisie,
où il y avait sur le territoire, en 1978, au moment de la
création des ZEC, de ces pourvoiries qui avaient été
transformées et qui donc, avant de recevoir un bail, avant de signer un
bail de pourvoirie concessionnaire, auraient dû faire l'objet d'appels
d'offres publics. Alors, maintenant, on ne sait pas où tout cela
s'arrêtera et quel sera le résultat de l'application des articles
6 et 7. Devant cette situation et devant les premières constatations
qu'on peut faire après six mois, avant même que le projet de loi
101 soit voté, après six mois de ce qu'on vous indiquait comme
étant nos craintes de ce côté-ci de l'Assemblée
nationale, craintes qui reflétaient aussi, évidemment, celles de
la population quant à l'accessibilité des territoires fauniques,
c'est évident, pour toutes ces raisons-là et malgré le
fait que le projet de loi en lui-même comporte d'autres situations avec
lesquelles on est parfaitement d'accord, comme celles des ZEC puisque c'est
nous-mêmes qui les avions créées et qui avions donc le
goût de les voir se développer... D'ailleurs, vous pourriez
très bien - je le soulignerai une dernière fois - si vous avez
des situations particulières et si vous avez l'intention de donner des
territoires à une gestion autre que celle du ministère du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche, il vous serait loisible de développer
de nouvelles ZEC. Il y a des demandes, justement, dans le territoire
mentionné, il y a eu des demandes, je pense, pour la formation de ZEC.
Tout cela nous laisse absolument craintifs et comme la population on a ce
principe qui, je le répète - on ne le répétera
jamais suffisamment - est absolument essentiel, comme la population l'a
manifesté partout, dans toutes les régions du Québec
depuis un an, le principe d'accessibilité le plus large possible de la
population à qui appartiennent ces territoires et ces richesses
fauniques. Pour toutes ces raisons, l'Opposition devra continuer à
s'opposer à l'adoption du projet de loi 101, et on devra l'adopter sur
division.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Dubuc. Je constate qu'il n'y a pas d'autre intervention, le débat est
terminé. Est-ce que le projet de loi 101, Loi modifiant la Loi sur la
conservation et la mise en valeur de la faune et la Loi sur les parcs, est
adopté?
Une voix: Sur division.
La Vice-Présidente: Adopté sur division. M. le
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
M. Picotte: Merci, Mme la Présidente. Je vous demanderais
d'appeler l'article 17 du feuilleton, qui est une prise en
considération.
Projet de loi 3
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
La Vice-Présidente: À l'article 17 de notre
feuilleton, le ministre de la Justice propose la prise en considération
du rapport de la commission des institutions qui a procédé
à l'étude détaillée du projet de loi 3, Loi
modifiant le Code civil en matière de copropriété et
d'em-phytéose.
Une voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Le rapport de la commission est donc
adopté. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
M. Picotte: Mme la Présidente, je vous demande d'appeler
l'article 18, qui est une autre prise en considération.
Projet de loi 4
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
La Vice-Présidente: À l'article 18 de notre
feuilleton, le ministre de la Justice propose également la prise en
considération du rapport de la commission des institutions qui a
procédé à l'étude détaillée du projet
de loi 4, Loi modifiant le Code civil et le Code de procédure civile en
matière de séparation de corps.
Une voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Le rapport de la commission est donc
adopté. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
M. Picotte: Merci, Mme la Présidente. Je vous demande
d'appeler l'article 20, qui est une autre prise en considération.
Projet de loi 8
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
La Vice-Présidente: À l'article 20 de notre
feuilleton, le ministre de la Justice propose la prise en considération
du rapport de la commission des institutions qui a procédé
à l'étude détaillée du projet de loi 8, Loi sur
l'aide aux victimes d'actes criminels.
Une voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Le rapport de cette commission
concernant le projet de loi 8 est donc adopté. M. le ministre du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche.
M. Picotte: Mme la Présidente, je vous demande d'appeler
l'article 23 de notre feuilleton.
Projet de loi 20
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
La Vice-Présidente: À l'article 23 de notre
feuilleton, le ministre de la Justice propose la prise en considération
du rapport de la commission des institutions qui a procédé
à l'étude détaillée du projet de loi 20, Loi
portant abrogation de certaines dispositions législatives.
Une voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Le rapport de ladite commission qui a
étudié le projet de loi 20 est donc adopté.
M. Picotte: Adopté, Mme la Présidente. Je vous
demanderais d'appeler l'article 6 de notre feuilleton, et j'aimerais vous
suggérer une suspension de deux minutes.
La Vice-Présidente: Je vais appeler le projet de loi et,
par la suite, nous allons suspendre pour quelques minutes.
Projet de loi 37 Reprise du débat sur
l'adoption du principe
À l'article 6 de notre feuilleton, il s'agit de la reprise du
débat, qui avait été ajourné, sur l'adoption du
principe du projet de loi 37, Loi sur la sécurité du revenu.
Nous allons donc suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 21 h 10)
(Reprise à 21 h 13)
La Vice-Présidente: Nous allons maintenant reprendre nos
travaux et je vais reconnaître le premier intervenant sur l'adoption du
principe du projet de loi 37, M. le chef de l'Opposition.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, Mme la Présidente. J'ai tenu à
laisser les travaux de la commission parlementaire sur la loi 34, le domaine du
transport ambulancier ou des services préhospitaliers, pour venir
joindre ma voix à celle de mes collègues sur la désormais
célèbre réforme Paradis. Mme la Présidente, j'ai
rarement vu, en douze ans de vie politique, un ministre avoir le don de
s'aliéner à peu près tout le monde quand il touche
à quelque chose. On l'a vu avec la loi 119. On l'a vu avec la loi 31 -
on ne reconnaît plus du tout la loi 31 sur la construction - et avec la
réforme de l'aide sociale, ce ministre a su s'aliéner à
peu près 95 % à 97 % des groupes qui sont venus témoigner
en commission parlementaire.
Il a dû amender cette fameuse réforme à deux
reprises depuis le début, parce que les jeunes libéraux lui ont
demandé d'atténuer des points précis. Et on se retrouve
à la fin d'une session avec un projet de loi qui vient encore semer,
à toutes fins utiles, la frustration chez les moins bien nantis de notre
société. Mais ce que je trouve le plus grave dans le processus
qu'a suivi le ministre pour en arriver à proposer ce projet de loi 37,
c'est qu'il a développé envers les moins bien nantis de notre
société un sentiment de dégoût, de haine dans
certains cas, de harcèlement pour d'autres, de joie même pour
certains de voir qu'on coupait allègrement dans l'aide sociale. Parce
qu'on a découvert 4 % ou 5 % d'assistés sociaux au Québec
qui faisaient de mauvaises déclarations, donc qui s'appropriaient un
bien auquel ils n'avaient pas droit, on a fait en sorte que l'ensemble des
assistés sociaux du Québec passent pour des parasites de notre
société, des gens qui touchaient des sommes d'argent d'une
façon incorrecte, illicite. Et on a profité de ce vent de
contentement - car on coupait allègrement dans l'aide sociale - pour
diminuer à ces moins bien nantis des pitances qui leur permettaient,
à toutes fins utiles, de survivre.
Entre vous et moi, quelqu'un qui gagne 190 $ par mois, aujourd'hui, en
1988, pensez-vous qu'il n'aimerait pas avoir un emploi? Chaque année
j'ai des assistés sociaux, en particulier des jeunes, qui viennent par
dizaines et par centaines à mon bureau me dire: Je veux m'en sortir mais
je ne trouve pas d'emploi. Je prends ma propre circonscription
électorale où encore deux usines dans le domaine du textile
viennent de fermer: 200 emplois dans chacune d'elles, cela fait 400 emplois.
Quelles sont les perspectives d'avenir pour les assistés sociaux quand
on voit que, dans certains milieux, on ferme même des postes de travail?
Ils n'ont pas d'espoir, Mme la Présidente. Et là, encore, le
ministre arrive et dit avec une fierté déconcertante: Voici, nous
remettons de l'ordre et nous allons donner plus d'argent. Est-ce que c'est
donner plus d'argent à des assistés sociaux que de réduire
la prestation mensuelle quand il y a partage du logement? Est-ce que c'est
donner plus d'argent quand, dans le cas de deux jeunes assistés sociaux
de moins de 30 ans qui ont 190 $ par mois, parce qu'ils cohabitent pour venir
à bout de vivre un peu mieux, on leur coupe une partie de leur pitance
mensuelle? Est-ce que c'est cela venir en aide aux moins bien nantis de notre
société? Quand on sait que le vent politique peut être
favorable, ce n'est pas grave de se rabattre sur le dos des moins bien nantis
de notre société. Mme la Présidente, c'est un
réflexe de politiciens qui ont bien courte vue que de faire cela,
très courte vue, Mme la Présidente. À s'acharner sur le
dos des plus pauvres, c'est un gouvernement qui se prépare des jours
très sombres.
Moi le premier, comme député, j'ai dû
défendre les assistés sociaux, parce que les gens disaient: Oui,
mais on va mettre de l'ordre dans cela, mais jusqu'à ce que dans votre
famille ou chez vos proches vous vous rendiez compte qu'il y a un jeune
bénéficiaire de l'aide sociale à 190 $ qui est
découragé. 190 $ par mois pour manger, sortir comme tous les
jeunes sortent un peu, se loger, se vêtir! Quand on y pense un tant soit
peu et qu'on fait ce qu'on est en train de faire, couper lorsque deux jeunes
partagent le même logement, je vous avoue que cela prend un gouvernement
à très courte vue, surtout de la part d'un gouvernement qui
traverse des années de vaches grasses, surtout d'un gouvernement qui a
promis la parité aux jeunes sans conditions. Moi, je n'en reviens tout
simplement pas. Vous pouvez vous bidonner à court terme, parce que
certains de vos gros "big shots" vous tapent sur l'épaule et vous disent
que vous êtes après leur faire la "job", mais, comme
société, vous avez une responsabilité. Vous devriez avoir
un peu de conscience sociale. Il vous arrivera peut-être un jour d'avoir
de très proches placés dans les mêmes circonstances, dans
les mêmes conditions, et vous vous en repentirez drôlement. Je
trouve inconcevable qu'un gouvernement aille jusqu'à développer
ce réflexe. (21 h 20)
Mme la Présidente, plus encore. Ce gouvernement a essayé
de faire croire à la population qu'il avait présenté un
budget profamilial. Mme la Présidente, croyez-le ou non, les familles
les moins bien nanties qui vivent dans des HLM verront leurs prestations'
coupées. Il y a 14 000 ménages qui verront le montant mensuel de
leur prestation réduit. Est-ce cela, un budget de famille? Les moins
bien nantis, il faut les attaquer. Cela a pris quasiment l'intervention des
vingt députés de l'Opposition pour que le ministre Paradis ou le
ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu se rende compte qu'il ne fallait pas, dans sa réforme, couper les
prestations de la femme enceinte après six mois. Ça, il a compris
ça. Mais imaginez-vous, cependant, que le ministre
délégué à la Famille lui a dit que c'était
la
première véritable mesure pour la famille, en faveur de la
famille. Ce n'est pas des farces. C'est de l'incohérence, c'est de
l'insignifiance quand on y pense comme il faut. Si le ridicule tuait, il y en
aurait une couple là. Tous ceux qui aspirent à un poste, vous
auriez eu de la place, parce que cela n'a pas de bon sens. Cela n'a pas de bon
sens de réagir de la sorte, Mme la Présidente.
Je pense aussi à un autre point et les députés
libéraux, dans vos comtés, vous en recevez des gens
régulièrement. Je pense aux fameux tests qui seront requis
maintenant pour juger de l'inaptitude ou de l'aptitude. Dans vos comtés,
vous avez régulièrement des gens qui disent: j'ai fait un
infarctus, je suis paralysé du côté droit, je ne peux plus
travailler. Qu'est-ce qu'on vous répond à la Régie des
rentes? On vous dit: Ah oui, mais t'es pas tout à fait mort, t'es
peut-être capable de faire quelque chose encore, peut-être capable
de lever un récepteur du bras gauche, donc, t'es pas invalide. Vous le
savez. Vous savez comment toute l'approche pour accéder aux rentes est
ridicule. On trouve cela tellement fou comme députés que, quand
on s'en parle dans les couloirs, tout le monde dit qu'y faudrait changer cela
parce que, les rentes, cela existe quasiment pour un gars qui en a pour dix
jours à vivre.
Que fait Paradis, Mme la Présidente? Que fait le ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu? Il introduit
exactement le test de la Régie des rentes dans l'aide sociale.
Exactement la même formule parce qu'il fait la distinction entre apte et
inapte. Celui qui est inapte, préparez-vous, il a besoin d'être
"maga-né", comme dirait mon père, parce qu'il n'aura rien, parce
qu'il sera toujours apte pour faire un petit quelque chose. S'il est apte pour
faire un petit quelque chose, bien coupez. C'est tout. Et vous jugez cela
correct? Deux batteries de tests, deux formules. Cela va coûter plus cher
en consultations médicales que de donner cette pitance aux moins bien
nantis de notre société.
Si ce sont vos coffres que vous voulez renflouer, ne pensez-vous pas
qu'au lieu de conclure des ententes de 25 ans pour des remboursements
d'impôt de 100 000 $ à des gens qui ont les moyens pourrait
peut-être être une formule pour remplir vos coffres? Demandez un
peu plus et arrêtez de vous acharnez sur le dos des pauvres. Ne
pensez-vous pas que ce serait une meilleure formule? Ne pensez-vous pas que,
pour remplir vos coffres, vous pourriez avoir une opération
également pour ceux et celles qui ne s'acquittent pas de leurs paiements
d'impôt au Québec? Vous ne pensez pas cela? Plutôt que de
vous acharner sur le dos de ceux qui ont de la misère à manger
trois repas par jour. Et vous leur compliquez la vie au point qu'une batterie
de tests ne suffira pas. Cela va être un autre contrôle
médical. Et si t'as le malheur d'avoir un oeil où tu vois
à 5 %, t'es apte pour faire quelque chose. L'autre, ce n'est pas grave.
Cela n'a pas bon sens, Mme la Présidente. Je considère cela
inhumain, tout à fait inacceptable.
Je vous donne un autre exemple parce que celui-là aussi m'a
fâché. Un homme et une femme décident de se laisser. Leur
ménage ne fonctionne pas. Ils se disent bonjour. Ils sont à
l'aide sociale. Le gars se trouve un emploi. Oh! Il reçoit 15 000 $ ou
16 000 $ par année. Parce que la femme a laissé son mari sans
exiger une pension alimentaire, le ministre, au-dessus de la femme
elle-même qui n'a pas négocié, au-dessus de son propre
avocat, va décider d'aller chercher une pension alimentaire. C'est cela,
votre politique familiale? C'est cela, votre pensée sociale
vis-à-vis de l'unité familiale? Alors que le ministre de la
Justice paie ses avocats et ses procureurs pour rapprocher les ménages,
nous autres, on s'organise pour qu'ils se chicanent davantage avec l'aide
sociale. Grosse logique! Remarquez bien que cela ne me surprend pas tellement
parce que des socio-démocrates de fin de semaine, de 24 heures en 24
heures à la veille d'un conseil national, je comprends que tu ne peux
pas avoir une grosse pensée sociale constante.
Mais il me semble que dans un cas aussi précis que cela, cela ne
demande même pas l'intervention des militants libéraux pour
changer une telle loi. Cela saute aux yeux qu'un ministre qui a une vision de
la collectivité, qui a une vision sociale, ne s'interroge même pas
cinq minutes. Il dit: Je me dois immédiatement d'amender mon projet de
loi, qui m'a été préparé par des fonctionnaires,
que je n'avais pas compris sur le coup, mais là je réalise qu'il
n'a pas de bon sens et je le change. Dans le cas du ministre de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, changer un projet de
loi, il s'y connaît. Après qu'il l'a publié et qu'il l'a
amende trois, quatre fois, quand on l'adopte on ne le reconnaît plus.
Là ce n'est plus le projet de loi du ministre, cela devient le projet de
loi des députés qui ont apporté des amendements ou des
groupes qui ont fait pression pour lui faire apporter des amendements. C'est
tout croche au départ ça. Fiez-vous, c'est le champion pour se
mettre le monde à dos.
Mme la Présidente, je dirai également qu'il y a un
subterfuge dans cette loi et qu'il faut dores et déjà aviser la
jeunesse québécoise du sapin qu'est à leur passer le
ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Il les
coupe tout de suite dans sa loi, mais il dit: Laissez passer mon
élection et après cela, je vous couperai comme il faut. Les
coupures vont s'appliquer en 1990. S'il y en a un qui dit que ce n'est pas
vrai, qu'il se lève. Les coupures vont s'appliquer en 1990, sauf
qu'elles sont votées tout de suite. Est-ce croche à votre
goût? C'est malhonnête. C'est trompeur. C'est absolument
inacceptable de faire croire, d'avoir laissé aux jeunes l'illusion
qu'ils auraient une parité,
s'aligner par la suite graduellement vers des coupures, prévoir
ces coupures, mais faire en sorte que ces coupures ne viennent qu'après
l'élection qui viendra en 1889.
Je vois le député de Saint-Maurice rire de cela. Il est
habitué de patauger dans cela probablement. Mais moi je dois vous dire
que je trouve cela vicieux, malhonnête et trompeur vis-à-vis de la
jeunesse québécoise. Il faudra faire en sorte que les jeunes du
Québec connaissent la stratégie libérale là-dessus.
Il faut démasquer ces gens qui ont fait rêver toute la jeunesse
québécoise et qui leur préparent des lendemains sombres.
Il faut aviser cette jeunesse québécoise de la stratégie
mesquine, machiavélique, à part cela, du Parti libéral qui
vise concrètement à se donner raison dans un texte de loi
immédiatement pour ensuite, bien sûr, en 1990, au lendemain d'une
élection, avoir des coupures systématiques sur les chèques
de paie de ceux qui ont déjà de la misère à manger
trois repas par jour.
Donc, c'est inacceptable comme loi, Mme la Présidente, parce
qu'elle est maintenant basée sur l'employabilité. Ça aussi
les députés libéraux, j'espère, qui font du bureau
de comté chaque lundi matin, reçoivent trois, quatre, cinq, dix
demandes d'emploi, la plupart de jeunes... Toute la réforme de l'aide
sociale est basée sur l'employabilité. L'employabilité...
Mme la Présidente, voulez-vous demander au député de
Sainte-Anne, s'il vous plaît, de respecter le droit de parole des
individus.
La Vice-Présidente: S'il vous plaît, vous aurez
l'occasion par la suite de pouvoir intervenir. Je vous demanderais de
reconnaître le droit à M. le chef de l'Opposition. M. le chef de
l'Opposition.
M. Chevrette: Mme la Présidente, toute cette
réforme est axée sur l'employabilité. Déjà
les expériences vécues ont démontré qu'on pouvait
répondre à peine à 17 %. Qu'arrive-t-il aux autres 83 %
qui sont aptes, qui veulent travailler, mais qui n'ont pas d'emploi, qui n'ont
pas de travail? Ils seront pénalisés parce qu'il n'y a pas de
poste de travail disponible. C'est là-dessus qu'est basée votre
réforme. Cela ne vous fait rien. Cela ne vous dérange pas. Cela
ne vous touche pas. Cela ne vous émeut pas seulement un tant soit peu.
Considérez-vous les gens comme des robots? Ces jeunes qui viennent dans
vos bureaux de comté solliciter de l'emploi et qui voient une
réforme, ils sont pris sur l'aide sociale et ils vous disent: Je veux
travailler, mais il n'y a pas de job dans mon comté, il n'y en a pas de
job dans ma localité. Cela vous arrive cela aussi. Autant à
Montréal que dans le reste de la province. (21 h 30)
Qu'est-ce qu'on répond à ces jeunes? On leur dit que M. le
ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu est
malheureusement dans l'obligation de les couper parce qu'ils ne se trouvent pas
d'emploi. Trouvez-vous cela correct, quand on vit dans un régime
où les emplois sont limités, d'axer une réforme de soutien
du revenu sur l'employabilité ou presque exclusivement là-dessus?
Je trouve cela dégueulasse, inacceptable, même inhumain. Je
considère qu'on devrait avoir le courage politique de dire que, tant et
aussi longtemps que le nombre de postes de travail disponibles ne correspondra
pas au nombre d'individus en place pour pouvoir les prendre, on ne peut pas
pénaliser les jeunes. Là, on serait honnête envers cette
jeunesse; on serait logique et correct. Ils ne font rien.
Aucun programme de création d'emplois, mais, par exemple, ils
basent toute leur argumentation là-dessus. Toute leur réforme est
axée sur l'employabilité, alors que - la preuve en est faite -
c'est un échec de ce côté-là. On va encore aller
faire croire aux jeunes... J'espère que c'est ceux-là que vous
allez recruter pour amener à Paul-Sauvé, la prochaine fois, ils
vont vous en parler parce qu'ils les vivent, eux autres, ils les vivent, ces
problèmes concrets. Vous aurez beau leur payer leur autobus, ils vont
peut-être avoir quelque chose à vous dire la prochaine fois. Ils
vont peut-être avoir compris, Mme la Présidente, qu'ils ont
été leurrés. La jeunesse québécoise a
été leurrée. Les ménages québécois
sont leurrés par cette réforme. Je ne connais aucune
catégorie de personnes qui se trouve heureuse de cette réforme.
Tous les groupes que nous avons rencontrés nous ont dit: C'est
inacceptable.
Motion de report
Mme la Présidente, pour permettre à ce ministre et
à ce gouvernement de réfléchir encore un peu sur cette
réforme, de penser durant les vacances lorsque vous allez côtoyer
du monde plus pauvre, des gens moins bien nantis... Testez votre réforme
durant les vacances, vous nous arriverez sans doute, cet automne, avec des
dispositions législatives tout autres que celles que vous avez
présentées aux Québécois. C'est pour cette raison
que, compte tenu de tout ce que je viens de dire et conformément
à l'article 240 de nos règles de procédure, je propose que
nous reportions à six mois l'étude et l'adoption du principe de
ce projet de loi 37.
La Vice-Présidente: En vertu de l'article 240, cette
motion est recevable. Comme il s'agit d'un débat restreint et qu'il est
limité à deux heures, nous allons poursuivre ce débat
restreint. Nous allons permettre que les leaders se rencontrent pour le partage
du temps. Je suis prête à reconnaître le premier intervenant
sur le débat restreint de deux heures.
M. Chevrette: Suspension, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Je vais suspendre pour quelques
instants.
(Suspension de la séance à 21 h 33)
(Reprise à 21 h 39)
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît!
Donc, nous allons reprendre nos travaux concernant la motion de report.
Je vais informer la Chambre de l'entente sur le partage du temps qu'il y a eu
entre les groupes parlementaires. Le temps sera partagé également
entre chaque groupe parlementaire sans limite de temps par intervenant et, si
un groupe parlementaire n'utilise pas son temps, il ne pourra pas être
utilisé par l'autre.
À l'ordre, s'il vous plaît!
Je vais suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 21 h 40)
(Reprise à 21 h 44)
La Vice-Présidente: Nous allons donc reprendre nos
travaux. Je vais reconnaître un premier intervenant sur la motion de
report. Mme la députée de Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. Mme la
Présidente, il est quand même surprenant qu'à ce moment-ci
des travaux de l'Assemblée nationale, à la veille de cette fin de
session, nous soyons à cette heure-ci en train de discuter de ce projet
pourtant si controversé et qui mériterait certainement un examen
beaucoup plus attentif dans des circonstances différentes de celle que
nous vivons. Quelles que soient les fins de session, nous savons très
bien qu'elles donnent toujours lieu à des bousculades
législatives et ne sont pas les plus propices à examiner à
tête reposée ce qui, pourtant, met en jeu le sort de centaines, de
milliers, non pas de centaines de gens, mais de centaines de milliers de
personnes, d'hommes, de femmes et d'enfants.
J'ai eu l'occasion, Mme la Présidente, de le signaler, mais je
veux, avec insistance, vous rappeler que, pour les médias d'information,
pour ceux des médias qui ont des représentants a la tribune
parlementaire, c'est tout à fait inconséquent, ce
dépôt, à cette veille tardive, d'un projet de loi qui
mériterait, bien au contraire, d'être réexaminé par
le gouvernement.
Nous en sommes au principe du projet de loi. Le chef de l'Opposition a
proposé une motion de report qui devrait être retenue par les
ministériels comme leur permettant, leur donnant le délai
suffisant pour faire un réexamen de cette question qu'ils savent
très bien ne pas pouvoir régler comme cela, du revers de la main,
dans cette fin de session. Vous savez, Mme la Présidente, ce n'est pas
parce que le poids du nombre ferait adopter en deuxième lecture le
projet qui est devant nous que cela le rendrait pour autant plus convaincant,
que cela le rendrait pour autant plus recevaWe par une opinion publique qu'ils
savent être hostile aux orientations, au principe, non pas seulement aux
modalités, mais au principe même du projet de loi 37.
Quel est-il, le principe du projet de loi 37, celui sur lequel les
députés ministériels vont avoir à voter? Pour
qu'ils ne le fassent pas les yeux fermés, en se donnant bonne
conscience, sous prétexte qu'ils auront le temps cet été
ou au début de l'automne prochain d'en changer les modalités? Mme
la Présidente, je voudrais leur répéter le principe
nouveau qui est contenu dans le projet de loi 37. Ce principe c'est que,
dorénavant, au Québec, il n'y aura plus de droit à
l'assistance. Il n'y aura plus de programme de dernier recours qui permettra
à toute personne qui pense avoir un droit à l'assistance
d'obtenir une assistance financière, quelle que soit la cause du besoin
qu'elle a d'un soutien, quelles que soient les raisons de son dénuement,
quels que soient les motifs de la misère dans laquelle elle est et de
l'état de privation qui l'amène à rechercher une
assistance. C'est pourtant le principe fondamental introduit par le rapport
Boucher, au moment où l'opinion publique québécoise, la
société québécoise avait décidé d'en
finir avec une aide sociale catégorisée, stigmatisante, selon que
l'on soit aveugle ou mère nécessiteuse, selon que l'on soit
invalide ou personne âgée, une aide sociale qui n'était pas
un droit, mais un privilège qu'on octroyait chichement, en faisant payer
chèrement la dignité des personnes qui la réclamaient.
Je vous rappelle, Mme la Présidente, que ce principe du droit
à l'assistance pour toute personne dans le besoin, quelle que soit la
cause, a été la pierre d'assise de ce que la révolution
tranquille a considéré comme étant la réforme
majeure de la vie en société et de l'assistance que les uns et
les autres se devaient dans la société québécoise.
Par quoi remplace-t-on ce principe? D'abord, par la négation de ce droit
à l'assistance, par la négation de la reconnaissance d'un
programme de dernier recours qui vise à répondre aux besoins de
base, besoins de base qui sont les mêmes: le loyer, la nourriture,
l'alimentation, l'habillement. Quand vous êtes chef de famille et que
vous avez des enfants... Il y a 168 000 enfants dans les écoles du
Québec qui sont des enfants de familles assistées sociales. Ces
enfants mangent comme les autres enfants, s'habillent comme les autres enfants,
ont des besoins comme les autres enfants.
Dorénavant, le principe qu'introduit le projet de loi - le
principe, non pas la modalité - c'est que l'assistance ne sera plus un
droit et elle leur sera concédée selon les catégories
auxquelles ils vont appartenir. S'ils appartiennent à la
catégorie que le ministre considère être la vraie
catégorie de l'aide sociale, ils pourront bénéficier d'une
légère amélioration de leurs conditions. Mais à
quel prix? Au prix de l'appauvrissement des autres parce que la
légère amélioration de ceux qui pourront
bénéficier du programme de soutien financier sera financée
par la réduction, par des coupures dans les prestations mensuelles de
tous les autres hommes, femmes et enfants qui devront compenser pour ceux
à qui le ministre pense, ceux pour qui le ministre seulement,
considère avoir une responsabilité.
Non seulement le droit à l'assistance est maintenant
écarté, mais encore plus, jusqu'à maintenant, au
Québec les personnes assistées sociales qui,
délibérément, quittaient un emploi étaient
privées de prestation. On peut penser qu'il peut y avoir là des
motifs discutables, mais qu'on doit prendre en considération.
Dorénavant, pourront être privées de prestation non pas les
personnes qui quittent, mais celles qui sont présumées ne pas
être à la recherche active d'un emploi. Elles seront
également privées du droit à la révision et du
droit à l'appel des décisions qui peuvent aussi être
arbitraires quand elles touchent au-delà de 300 000 ménages au
Québec. 300 000 ménages, ce sont au-delà de 600 000
hommes, femmes et enfants. Pour la première fois, Mme la
Présidente, le droit à la révision ne sera plus un droit
acquis pour l'ensemble des personnes parce que le droit à l'assistance
n'est plus un droit acquis.
Les décisions qui ne sont pas révisables sont notamment
celles qui portent sur les cas de maintien dans un programme afin
d'éviter le dénument total et celles aussi qui portent sur
l'offre d'un programme de réintégration à un
bénéficiaire par son agent. Cela veut dire que l'agent... On peut
présumer que la grande majorité d'entre eux sont de bonne foi.
Mais c'est quand même inouï, Mme la Présidente, d'abandonner
un bénéficiaire totalement à l'arbitraire des
décisions d'un agent qui peut aussi le prendre en grippe; de le laisser
totalement à l'arbitraire d'un agent qui considère que les
instructions qu'il a données relativement à la recherche d'un
emploi ne sont pas suffisamment écoutés par le
bénéficiaire. Cela pourrait même amener l'agent à
cesser d'accorder l'aide à la personne et à ses dépendants
- cela veut dire ses enfants - au cas où il considérerait que,
finalement, le bénéficiaire ne se conforme pas assez rapidement
aux instructions qu'il a données.
Le droit d'appel, Mme la Présidente, est absolument essentiel
pour toutes les matières. Et c'est absolument inacceptable que les
décisions rendues en vertu de l'article 23 du projet de loi, celles qui
concernent l'appel sur l'offre d'un programme de réintégration
par l'agent, celles qui prévoient que l'agent peut donner des
instructions relatives à la recherche d'un emploi, les dispositions des
articles 28 et 33 qui permettent à un agent de cesser l'aide au cas
où un bénéficiaire ne se conformerait pas à ses
instructions soient rendues sans que le bénéficiaire puisse
contester la validité et même la "raisonnabilité" de ces
instructions... C'est évident que ces décisions doivent
être révisables.
C'est pas peu de chose, Mme la Présidente, que dans le projet de
loi, le ministre ait prévu qu'une des plus importantes décisions,
celle qui concerne justement la possibilité d'être admissible au
programme Soutien fianncier, le programme qui est sensé être celui
qui est offert aux vrais assistés sociaux... Ceux qui vont avoir le
fardeau sur les épaules, pas simplement de prouver qu'ils sont en
mauvaise santé, ils vont avoir le fardeau d'obtenir un certificat
médical qui va prouver que leur état de santé physique est
altéré d'une façon permanente ou indéfinie, ils
vont avoir à obtenir dans le certificat médical la mention qu'ils
sont incapables d'occuper un emploi. J'ai eu l'occasion de le dire ici en cette
Chambre, c'est là un test d'invalidité qui est d'une lourdeur que
tout le monde ici dans cette Chambre sait très bien qu'il va amener le
rejet d'un très grand nombre de demandes.
Je suis certaine que l'ensemble des parlementaires qui siègent
ici ont dans leurs dossiers de comté des concitoyens qui,
déjà, ont tenté, par exemple, d'obtenir la rente
d'invalidité de la Régie des rentes du Québec tout en
ayant moins de 60 ans ou qui ont essayé d'obtenir une rente de la
Commission de la santé et de la sécurité du travail pour
invalidité. Je suis convaincue que la majorité sait très
bien la difficulté que cela représente, n'est-ce pas, d'obtenir
un certificat médical pour faire valoir un état de santé
déficient profondément ou altéré de façon
permanente. Le médecin traitant se sent autorisé à
évaluer la condition physique, l'aspect médical d'une personne,
mais tous savent très bien les réticences - d'une certaine
façon, elles se comprennent - mais les réticences qui finissent
par se traduire par une sorte de résistance systématique de la
part des professionnels de la santé à conclure que même un
état de santé profondément altéré a pour
conséquence de ne pouvoir occuper un emploi.
Vous savez, Mme la Présidente, on en a un bel exemple
malheureusement récent. C'est un exemple de courage. C'est l'exemple de
la présidente du Conseil du statut de la femme qui, malgré un
état de détérioration avancée de sa santé
à cause d'un cancer, a tenu à rester en fonction jusqu'à
la fin et à occuper pleinement ses responsabilités. Cela veut
dire que, même un état de santé profondément
détérioré, amène difficilement des professionnels
de la santé à conclure pour autant qu'une personne n'est pas en
mesure d'occuper un emploi et cela amène un très grand nombre de
personnes qui font des demandes, même en révision, devant la
Commission des affaires sociales, à être écartée
pour leur demande d'invalidité pour le motif que,
malgré un état de santé qui, parfois, est
clairement connu comme altérant profondément leur situation, on
peut toujours à la rigueur prétendre qu'un emploi léger,
un emploi d'agent de sécurité, un emploi de
réceptionniste, pourrait être malgré tout
théoriquement - parce qu'il s'agit toujours d'emploi théorique -
occupé.
C'est donc dire, Mme la Présidente, que même ce programme
Soutien financier qui est censé bénéficier à ceux
que fe ministre prétend être les vrais, eh bien, même ce
programme Soutien financier va exiger des tests de handicap tellement lourds
qu'il va falloir que la personne prouve que sa situation est tellement terrible
et il sait très bien que cela va écarter du programme un
très grand nombre de personnes. De plus, Mme la Présidente, et
c'est un aspect extrêmement important, c'est que l'appel d'une
décision de refus à l'admissibilité au programme Soutien
financier va se faire devant un comité composé de trois
professionnels exclusivement nommés par le ministre. Vous vous rendez
compte, il n'y a même plus de droit, plus seulement le droit à
l'assistance, mais il n'y a même plus la reconnaissance du droit à
la révision par un tribunal impartial comme c'était à la
Commission des affaires sociales. Dorénavant, c'est un comité
composé de trois professionnels. Pourra-t-on en appeler? Ce
comité de trois professionnels est exclusivement nommé par le
ministre, un seul comité provincial susceptible d'être
appelé à ouvrir des dizaines de milliers de dossiers dans une
seule et même année. Vous rendez-vous compte qu'ils ne pourront
sans doute même pas faire respecter le droit d'être entendu pour un
bénéficiaire qui se voit refuser l'accès à un
programme? Non, le projet de loi 37 est, à tous égards,
inacceptable non pas seulement au niveau des modalités, mais au niveau
du principe lui-même.
Beaucoup de personnes se demandent certainement avec raison comment il
se fait que ce gouvernement, qui résiste si peu aux moindres pressions
qui lui sont faites, maintient cette prétention de force
vis-à-vis des personnes assistées sociales. Pourquoi est-il si
lâche avec les puissants, ceux qui établissent un rapport de
forces, devant qui il s'incline généralement? Pourquoi est-il si
violent d'une certaine façon, si dur, si brutal, si grossier à
l'égard des personnes les plus démunies de notre
société?
Mme la Présidente, je relisais les propos contenus dans un
message du comité des affaires sociales de l'Assemblée des
évêques du Québec. Le message s'intitulait "Une
dignité menacée". Ce message était adressé au
gouvernement le 1er mai dernier, à l'occasion de la Journée
internationale des travailleurs et travailleuses. Ce message, qui ne semble
manifestement pas avoir été entendu, signalait pourtant au
gouvernement les dangers de poursuivre les orientations proposées en
matière de contre-réforme.
J'en lis rapidement quelques passages. Les évêques disaient
dans ce message: "Avec le projet de réforme - et je lis textuellement -
de l'aide sociale actuellement débattu, nous assistons à un
nouvel épisode qui transforme les victimes du système
économique en présumés coupables. Il transforme
radicalement les fondements mêmes de l'aide sociale. "En effet, en accord
avec la recommandation du rapport Boucher en 1963, l'aide sociale a
été considérée depuis 1969 comme un droit pour
toute personne démunie, quelle que soit la cause de son indigence. Notre
société reconnaissait alors implicitement que la pauvreté
avait des causes économiques et sociales et, parce que notre
société reconnaissait que les victimes ne devaient pas être
traitées en coupables, la société se reconnaissait des
responsabilités à leur égard."
Le message des évêques ajoute: "Le nouveau projet substitue
au critère du besoin la vieille distinction entre les aptes et les
inaptes, et s'articule tout entier autour de l'incitation au travail qui se
révèle en fait de la coercition. Réduisant l'indigence
à un simple problème individuel, sonne-il l'heure où
l'État ne se reconnaît plus de responsabilités sociales et
cela, au moment même où, dans un contexte de concurrence
internationale et de rareté d'emploi..."
Je vous rappelle, Mme la Présidente, que demain, durant les deux
prochains jours, nous discuterons du projet de libéralisation des
échanges, des bouleversements que tout le monde sait que cela va
provoquer dans le domaine de l'emploi. Nous en discuterons au moment où
le gouvernement se déresponsabilise à l'égard de ceux et
celles qu'il sait être amenés à connaître parfois des
conditions de perte d'emploi à la suite de bouleversements
technologiques ou de mutations qui amènent ces changements auxquels les
personnes sont totalement étrangères. Plus encore, le
gouvernement sait très bien que les décisions en matière
économique, qui ont des effets sur le taux d'emploi ou de chômage,
sont tellement étrangères aux décisions personnelles que
les gens peuvent prendre. Il sait très bien les effets d'une simple
décision de la Banque de Canada de hausser les taux
d'intérêt, ce qui pourrait se justifier au regard de la surchauffe
et de l'activité fébrile que connaît l'Ontario et qui, pour
autant, est tout à fait inconcevable quand on regarde le taux de
chômage qui, malgré la croissance économique, se maintient
toujours autour des 10 % au Québec. Le gouvernement, les gens qui sont
ici, les parlementaires en cette Chambre savent très bien qu'une simple
décision de la Banque du Canada de hausser les taux
d'intérêt a comme effet, dans les semaines qui suivent,
d'augmenter de dizaines de milliers de nouveaux chômeurs qui vont
rejoindre les rangs de l'aide sociale.
Il ne faudrait pas oublier, ce qu'on a parfois tendance à ne pas
bien expliquer à la population du Québec, que la moyenne de
durée à l'aide sociale est de neuf mois et demi, à
peine
le temps de faire et d'accoucher d'un enfant, Mme la Présidente.
Neuf mois et demi, c'est la moyenne du passage de ceux et celles qui demandent
l'assistance, parce que c'est évident qu'on ne tombe pas sur l'aide
sociale par plaisir. C'est un peu comme un chemin de croix, quand on tombe pour
la première ou la deuxième ou la troisième fois. Les
études réalisées par le ministère démontrent
que la très grande majorité tente, souvent
désespérément, après une année de
chômage avec des allocations d'assurance-chômage qui n'ont souvent
pas été utiles pour se trouver un emploi parce que, durant ces
prestations de chômage, généralement, il y a très
peu d'emplois qui sont offerts à toute personne, homme ou femme, qui
vient de perdre celui qu'elle occupait depuis parfois quelque temps ou parfois
plusieurs années...
Après ces douze mois, la perspective de l'aide sociale angoisse,
traumatise profondément les personnes, la très grande
majorité d'entre elles. Qu'on ne vienne pas me citer des cas de ceux qui
en profiteraient inconsidérément. Cela existe, comme existent
ceux et celles qui, dans les domaines économiques ou commerciaux,
tentent d'augmenter leur compte de dépenses, ou tentent de diminuer leur
revenu imposable, ou tentent par toutes sortes de moyens d'en payer le moins
possible et de passer à côté des lois fiscales. Toutes les
études démontrent ce que la commission Macdonald elle-même
avait longuement expliqué dans son rapport, c'est toujours moins de 5 %,
les cas d'abus, quels que soient les programmes sociaux ou fiscaux qui sont mis
en place dans une société.
C'est donc dire qu'au moment où on sait très bien que le
contexte économique connaît des situations de bouleversements, de
mutations, qui créent des perdants dans notre société, qui
font qu'il y a des gens qui sont des victimes, plutôt que de se
responsabiliser à leur égard, en prenant en considération
que la dignité passe par l'emploi, plutôt que de se donner la
responsabilité non pas prétendument comme le fait le ministre de
la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, de façon
complètement irresponsable, en prétendant qu'il y aura
possibilité de participation à des mesures
d'employabilité... C'est ce qu'on retrouve dans les notes explicatives
du projet de loi, je ne veux pas revenir là-dessus, les mesures, c'est
connu, c'est archiconnu. C'est vivre dans un monde totalement féerique
et chimérique que de s'imaginer que ces mesures d'employabilité,
qu'il sait n'être même pas capable d'offrir aux ménages de
moins de 30 ans, pourront du jour au lendemain se transformer en une offre
illimitée pour l'ensemble de centaines de milliers d'hommes et de femmes
à travers tout le Québec qui verront leur assistance diminuer
faute de ne pas pouvoir participer à ces mesures. (22 h 10)
Le gouvernement ne s'est donné aucune responsabilité en
matière de création d'emploi pour les occuper dans des travaux
socialement utiles et les occuper comme des vrais travailleurs avec un salaire
reconnu comme un salaire décent pour vivre dans notre
société. Le gouvernement libéral actuel s'est totalement
déresponsabilisé, prétendant que c'est à
l'entreprise privée seule de mener à terme ce qui pourtant n'est
pas son rôle. L'entreprise privée, essentiellement, la fonction
qui lui est dévolue dans la société, c'est que, quel que
soit le nombre de personnes qui sont à son emploi, elle a comme
principal objectif de réaliser des profits pour les investir à
nouveau. C'est très connu, Mme la Présidente, elle est soumise
à une concurrence qui l'amène à souhaiter parfois
remplacer le plus grand nombre de travailleurs possible par des machines, des
nouvelles technologies, qui vont permettre de produire sans avoir à
verser pour autant des salaires, des traitements ou des avantages sociaux
qu'elle peut considérer coûteux en matière de concurrence
internationale. C'est au gouvernement de le faire.
C'est un problème politique, ce n'est pas qu'un problème
économique. On est dans une société où on produit
de plus en plus de biens et de services avec de moins en moins d'hommes et de
femmes. C'est au gouvernement de prendre la responsabilité de
créer cette redistribution qui était, jusqu'à maintenant,
faite par des salaires, même si, à l'occasion, cette
redistribution pouvait être considérée comme injuste. Cette
redistribution par l'activité du travail était faite sous la
forme d'une rémunération en salaire, et on sait très bien
qu'il y a actuellement des investissements qui se font. Je pense simplement
à l'Alcan, Mme la Présidente, où des investissements de 1
000 000 000 $ n'ont pas créé un seul emploi; bien au contraire,
l'Alcan a dû déployer tous les efforts de ses relations publiques
pour essayer d'expliquer qu'il n'y aurait pas trop de pertes d'emplois.
Dorénavant, les investissements en matière
économique ne sont plus synonymes d'emplois, contrairement à ce
qui était le cas quand on était enfant et que, lorsqu'une usine
s'installait dans notre village, on disait que cela allait faire de la
gagne.
Mme la Présidente, nous avons, comme Opposition, l'intention
ferme de présenter une alternative à l'opinion publique
québécoise, mais une véritable alternative en
matière de sécurité du revenu. Nous avons l'intention,
dès ce congrès d'orientation que nous tiendrons l'automne
prochain et dès le mois de septembre où nous allons en conseil
national à une date déjà fixée d'examiner des
propositions, mais des propositions d'une véritable réforme de
sécurité du revenu, qui ne consistera pas qu'à vouloir
contrôler et gérer les pauvres comme s'ils étaient des
parias dans notre société, mais une véritable proposition
en matière de sécurité du revenu qui prenne en
considération le fait que dans notre société travailler
doit au moins permettre de gagner un revenu suffisant qui
corresponde au seuil de pauvreté.
Je termine, Mme la Présidente, en rappelant qu'en 1988,
malgré les hausses, et le ministre peut toujours prétendre que
les hausses actuelles sont graduelles et successives, je lui rappellerai que
dans son premier mandat le gouvernement précédent a haussé
de 39 % le salaire minimum et j'ai hâte, à la fin de ce premier
mandat, de voir quel sera le résultat obtenu par le présent
gouvernement.
Mais, Mme la Présidente, je veux vous rappeler qu'il est
fondamental dans notre société que travailler ne veuille pas dire
s'appauvrir. Pensons qu'actuellement le salaire minimum est à au moins
300 $, pour une personne seule, en dessous de ce qui est
considéré le seuil de la pauvreté minimal pour simplement
maintenir ses besoins de subsistance. Quand on constate que travailler, c'est
s'appauvrir, Mme la Présidente, il y a des objectifs à se donner
comme société. Cet objectif, nous avons l'intention de le
proposer de façon que l'ensemble des travailleurs et des travailleuses
à faibles revenus, comme l'ensemble des personnes qui ont des
difficultés à se trouver une activité
rémunératrice puissent être assurées d'un revenu
minimum qui comble leurs besoins de subsistance de base en tant qu'être
humain, un objectif qui les amène également à être
motivés par une incitation positive et non pas par une obligation
coercitive et négative, qui les amène à rechercher
à améliorer leur sort par une activité qui leur permette
de garder des revenus de travail.
En terminant, Mme la Présidente, les députés
ministériels ne peuvent pas prétendre que nous n'en sommes
qu'à la deuxième lecture pour justifier un vote dont ils auront
à porter la responsabilité. Je le rappelle, ce vote aura des
conséquences historiques. Pour la première fois depuis 25 ans au
Québec, si ce vote a lieu dans cette Chambre, il consistera à
écarter ce qui, jusqu'à maintenant, avait été
considéré comme un minimum de solidarité entre tous les
Québécois au profit d'une catégorisation qui va laisser
des stigmates, qui va avoir des conséquences d'appauvrissement et de
contrôle beaucoup plus violentes qu'elles ne l'ont été
jusqu'à maintenant pour des centaines de milliers de nos concitoyens et
concitoyennes.
Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de
Maisonneuve. M. le député de Shefford.
M. Roger Paré
M. Paré: Merci, Mme la Présidente. Je ne sais pas
si c'est parce que les gens d'en face ne veulent pas entendre ce qu'on va dire,
mais ils ne sont pas très nombreux pour un projet de loi aussi
important. C'est important de le rappeler parce que c'est une drôle de
session qu'on est en train de vivre. Ce n'est pas une session intensive, c'est
une fin de session. C'est une fin de session au cours de laquelle on nous
présente des choses que je trouve tout à fait... Je comprends, en
tout cas, même si je ne trouve pas cela normal, qu'on passe cela le soir.
Le projet de loi 37 s'appelle Loi sur la sécurité du revenu.
Quand les gens prennent un texte comme cela et qu'ils le regardent, il y a le
mot "sécurité" là-dedans. Normalement, on devrait se dire:
Bien, c'est une bonne chose, c'est positif, c'est favorable, cela amène
des bonnes choses pour les gens qui sont concernés.
Mais, la réalité est tout autre. C'est un projet, c'est un
programme, c'est une loi d'insécurité et
l'insécurité, savez-vous pour qui, Mme la Présidente? Pour
les plus démunis de la société. C'est pour cela que je
tiens à intervenir sur cette motion de report, pour essayer de
convaincre les gens d'en face qu'on ne doit pas voter maintenant, le soir,
comme cela, qu'on ne doit pas voter en cette fin de session un projet de loi
semblable. C'est un projet de loi qui est totalement inacceptable. Cela,
l'ensemble des intervenants qui connaissent le secteur, le milieu, le disent, y
compris l'Assemblée des évêques du Québec. Ils ont
compris, eux, et ils savent très bien que l'État a un rôle
social à jouer, un rôle indispensable et capital pour aider les
gens qui sont dans le besoin. L'Etat est là pour cela. (22 h 20)
Oui, il est là pour le développement aussi. Si on me
disait: On va passer cela vite, vite, vite pour ensuite s'occuper
d'économie... On va y revenir à l'économie tantôt.
Depuis le 2 décembre 1985, on n'a plus jamais entendu parler de
plein-emploi de l'autre côté. On n'en parie plus. On ne parie plus
des jeunes, non plus, d'ailleurs. Ah non, on parie juste de profits et de
colonnes de chiffres, comme si calculer des chiffres, cela n'avait pas des
conséquences à un moment donné. C'est comme un bilan, il y
a de l'actif et du passif. Quand on touche une colonne, on touche les deux
pages. Quand on fait en sorte que des gens soient plus mal pris, on finit,
comme société, par payer pour. On va payer pour parce qu'il va
peut-être falloir avoir des services sociaux qui vont s'en occuper
«t, même si ce n'était pas cela, à cause de toute
cette énergie qu'on n'utilise pas, de tout ce capital humain qu'on
néglige et qu'on est en train de bafouer et de maltraiter. C'est
inacceptable d'adopter une loi comme cela en 1988.
Rappelez-vous, Mme la Présidente, il n'y a pas très
longtemps, il neigeait, il ventait, il pleuvait et, pourtant, il y avait
à peu près 5000 personnes dehors venues manifester. Et ça,
comme société, je dois vous le dire, c'est humiliant que des gens
doivent braver la tempête, les plus démunis et les plus
désorganisés de la société, pour venir non pas
demander à l'État des avantages, mais dire. Gardez-nous
l'essentiel; ne nous coupez pas l'essentiel, ce que cela nous prend pour vivre.
Un État qui se dit en période de croissance économique,
quand le ministre des Finances parle de période de vaches grasses,
dit
aux plus démunis qui sont dehors: Gelez, vous autres, et on va
couper vos prestations. On est en période de croissance
économique. On va donner cela à nos "chums".
On va juste vous rappeler les urgences de ce gouvernement. Quand il a
pris le pouvoir en décembre, il a présenté deux mesures:
baisser les impôts pour les gens qui gagnent 50 000 $ et plus, mais le
pendant - il faut aider tout le monde - il a coupé l'indexation
trimestrielle des plus démunis de la société. On aide les
plus gros et on coupe les plus petits. On s'est dit: Ils arrivent au pouvoir;
ils n'ont pas eu le temps de voir qu'il y avait de la misère au
Québec; on va leur donner une chance. Le budget de 1988 vient
d'être déposé. Qu'est-ce qui arrive? On a changé les
tables d'impôt. Encore une diminution pour les salariés de 50 000
$ et plus. Ceux-là, je suppose qu'ils font pitié, on va encore
diminuer leurs impôts, mais, encore une fois, comme je vous le dis, il
faut essayer d'équilibrer les choses, pour les plus pauvres, on va
adopter la loi 37 parce qu'elle vient encore couper les plus pauvres de la
société. Je trouve cela tout à fait inacceptable.
Je dis à mon collègue de Brome-Missisquoi, le ministre
responsable, mon voisin de comté, que cela n'a pas de bon sens, un
projet de loi comme celui-là, quand on a un peu de coeur au ventre,
quand on veut autre chose que juste le pouvoir et des belles colonnes de
chiffres. Il faut s'occuper avant tout du monde, du vrai monde. Les
bénéficiaires de l'aide sociale, s'il vous plaît,
arrêtez donc de les prendre pour des coupables. Ce ne sont pas des
coupables. Ce sont des victimes, les bénéficiaires de l'aide
sociale. Vous faites du bureau de comté et, si vous n'en faites pas, je
vais vous dire comment cela se passe. Les bénéficiaires de l'aide
sociale qui viennent nous voir veulent en sortir. Ils tirent le diable par la
queue, comme on dit chez nous. Ce n'est pas vrai qu'ils se paient du luxe. Il y
a peut-être des exceptions. Il y a peut-être des fraudeurs, mais il
y en a dans d'autres domaines aussi. On ne met pas un paquet de boubou macoutes
après les autres. Dans ce milieu-là, les gens ont l'essentiel.
Ceux qui ne connaissent pas les barèmes de l'aide sociale, informez-vous
et vous allez voir combien elles ont, les personnes seules, les familles avec
enfants. Vous vous demanderez ensuite si vous autres, vous seriez capables
d'arriver avec un revenu semblable et si vous seriez intéressés
à rester sur l'aide sociale pour le plaisir d'être à la
maison. Je suis certain, je suis convaincu que vous allez dire: Si cela
m'arrivait, je ferais le maximum pour m'en sortir.
Mais ce qu'on présente là, c'est le contraire. C'est un
projet de loi qui ne règle absolument pas la situation. S'il y avait une
urgence de l'autre côté et si, dans ce projet de loi,
c'était manifesté qu'il y avait une urgence pour, au moins, tenir
parole... Ce fameux engagement qu'on a traîné pendant des mois et
des mois avant les élections et qui était majeur pendant les
élections, la parité pour les moins de 30 ans, si l'urgence
c'était cela ce soir, je vous dirais: Je vais voter contre la motion de
report; évidemment, vous avez raison; les jeunes sont mal pris; ils ont
de la misère; il faut les aider; cela n'a pas de bon sens de laisser des
gens crever de faim; adoptons la loi. Mais ce qu'elle dit, la fausse
parité, la demi-parité, la parité à l'inverse pour
les plus de 30 ans qu'on va pénaliser, c'est pour 1990, le 1er janvier
1990, probablement après les prochaines élections. Et on veut
nous faire adopter cette loi ce soir, c'est urgent, il faut voter cela avant de
s'en aller en vacances, c'est capital, c'est majeur. Ce serait majeur si on
respectait son engagement électoral. Je trouve cela subtil - comique ou
drôle, je ne sais pas quoi dire, parce que c'est un peu de la
comédie pas drôle - d'entendre le ministre nous dire et nous
répéter qu'il est content d'avoir tenu son engagement. Mais son
engagement, c'est pour dans plus de deux ans ou à peu près, pas
loin de deux ans. On aurait dû l'avoir il y a déjà deux ans
et demi. Cela n'a pas de bon sens. Et on va nous passer maintenant? Je vous dis
que cela n'a pas de bon sens.
Qu'on nous parle, donc, de plein-emploi et qu'on se
dépêche, donc, de prendre des mesures ici pour créer des
emplois. Au lieu de s'attaquer aux victimes du système, qu'on s'attaque,
donc, aux problèmes du système. Bien non. On n'entend pas parler
de cela de l'autre côté. Il y a le ministre
délégué à la PME qui va faire un discours une fois
par année pour présenter son volume où il a changé
quelques pages. Cela ne fait pas tellement avancer le plein-emploi. Cela n'a
pas de bon sens.
J'entends la ministre de l'immigration dire que cela donne des "jobs".
Si ce soir, on était en train de présenter un projet de
loi...
Une voix: Je vais vous en parier tout de suite.
La Vice-Présidente: À l'ordre! À
l'ordre!
M. Paré: ...qui crée des emplois, je serais
d'accord. Mais, parlons-en, de l'emploi. Avez-vous vu les derniers chiffres,
Mme la ministre? Le chômage a encore augmenté au Québec. Le
chômage a augmenté, alors qu'on se dit en période de
croissance économique. C'est prédit malheureusement, et je ne
suis pas content, on n'a même pas pris de mesures pour le prévoir,
mais on s'en va vers un ralentissement. Entre autres, dans la construction, ce
n'est même pas annoncé, on est en train de le vivre, on n'a
qu'à regarder les chiffres depuis janvier, on est en ralentissement. On
ne trouve pas de mesures. On ne propose pas de mesures pour
accélérer l'économie. On se dit: Cela a bien
été, cela va peut-être aller moins bien, cela ne
dépend pas de nous.
Mais, par exemple, les victimes, on est
capable de les serrer davantage et on va le faire. Ce sont les mesures
qu'on fait. On va s'attaquer aux victimes au lieu de s'attaquer aux
véritables problèmes, aux véritables causes du malaise
qu'on vit présentement. Si les gens sont à l'aide sociale, c'est
qu'ils n'ont pas de jobs. Il faut en trouver.
Quand on entend, de l'autre côté, que le plein-emploi,
c'est utopique, irréalisable et impensable, bien, en Ontario, c'est la
surchauffe et ils sont en train de l'atteindre. Il y a trois fois moins de
chômeurs à Toronto qu'à Montréal. On peut bien se
péter les bretelles, on peut bien dire que cela va bien. Ah oui! On a le
droit de le dire. Cela ne va pas si mal, cela va moins mal que cela n'allait en
période de crise économique. Mais, quand on regarde ce qui se
passe en Ontario, je dois vous dire qu'on est en train de prendre un retard
inquiétant. D'un autre côté, Ottawa décide qu'il
faut augmenter les intérêts parce qu'il y a de la surchauffe en
Ontario. Mais si on fait cela, que va-t-il arriver ici au Québec? On va
avoir encore plus de problèmes.
Je dis qu'on devrait au moins s'assurer que, quand on va adopter ce
projet de loi, le ministre va avoir fait ses devoirs complètement. Il va
avoir entendu les groupes, il va arrêter de fesser sur les plus
démunis, pour regarder comment on peut, dans une société,
aider les gens.
Juste en terminant, je vais parler des jeunes. On ne leur donne pas la
parité. Cela va aller en 1990. En plus, je me rappelle le discours de
l'année 1987: L'Année internationale du logement des sans-abri.
On a dit: Pour nous, le gouvernement du Québec, on ne fera pas
grand-chose cette année, cela va juste être le début, mais
cela va devenir une préoccupation constante, régulière
pour tes années futures. On n'en entend plus jamais parler.
Heureusement, avec les mesures qu'on prend, on n'entend plus parler. Et une des
mesures, c'est qu'on dit dans ce projet de loi à ceux qui, pour essayer
de s'en sortir avec le peu de revenus qu'ils ont vont vouloir cohabiter, qu'on
va leur enlever 85 $ chacun. Bien, cela, pour les plus démunis qui sont
ensemble et qui essaient de s'en sortir à deux ou trois personnes, c'est
une façon de les amener à être des itinérants. Il y
aura plus de gens sans-abri. Pourquoi? Parce qu'ils n'auront plus les moyens.
On va venir couper les prestations de ceux qui veulent s'aider. Et on le leur
dit. Il y a un dicton qui dit: "Aide-toi et le ciel t'aidera." De l'autre
côté, on dit: Si les citoyens veulent s'aider, on va les
encourager. Et là, ceux qui veulent essayer de s'entraider, on leur dit:
On va couper vos allocations. Cela mérite d'être regardé.
(22 h 30)
II faudrait que le ministre aussi se fasse une bonne idée,
précise, claire, et nous répète carrément ce qu'il
nous a dit ici en commission parlementaire un vendredi où on lui a
demandé si vraiment il était pour intervenir et empêcher
que l'on ne pénalise aussi ceux qui vivent dans les
HLM et les coopératives d'habitation, qui se prennent en main et
qui veulent s'aider, parce qu'il y avait des rumeurs selon lesquelles on
voulait les couper.
On retrouve un article de son projet de loi, l'article 90.5°,
effectivement ceux qui vont être des résidents d'un logement
subventionné vont être pénalisés. On trouve encore
un moyen de pénaliser ceux qui veulent s'aider dans des
coopératives d'habitation et ceux qui sont dans les HLM. On trouve une
façon de leur imposer la parité, c'est-à-dire la
parité avec ceux qui sont encore plus mal pris qu'eux au lieu d'essayer
de les aider à s'en sortir en les comparant au moins à un seuil
de revenu minimum, soit le seuil de la pauvreté.
Ce projet de loi est inacceptable. Le ministre doit refaire ses travaux
et doit s'assurer que son rôle c'est non pas de fesser sur les plus
démunis mais, comme ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, d'essayer de les aider à s'en sortir.
J'espère qu'il va accepter le report pour se donner le temps de
comprendre cela et d'agir dans ce sens-là. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Shefford. Je suis prête à reconnaître le prochain
intervenant. M. le député de Bertrand. J'aimerais vous informer
qu'il reste à votre formation politique environ douze minutes.
M. Jean-Guy Parent
M. Parent (Bertrand): Merci, Mme la Présidente. Cela me
fait plaisir d'intervenir ce soir sur ce projet de loi et plus
particulièrement sur le report. Le député de Joliette et
chef de l'Opposition a fait une motion de report afin de demander au
gouvernement de demander au ministre porteur de la loi 37 de la
réexaminer, de faire ses devoirs et de faire en sorte que l'on puisse
avoir une réforme d'aide sociale qui se tienne.
Il faut réaliser qu'il y a quelque 600 000 personnes
assistées sociales au Québec, il y a quelque 250 000
ménages qui sont touchés. Lorsqu'on est entre nous, on a parfois
un peu l'impression que Jes assistés sociaux sont une autre classe de
monde à part et on oublie très facilement qu'ici, au
Québec, dans une société qui est très à
l'aise, qu'il y a des gens qui doivent avoir une aide que l'on appelle
l'assistance sociale.
Ce que le ministre a voulu faire avec le projet de loi 37,
c'était de corriger supposément des inégalités. Ce
que le ministre a voulu faire, cela a été de donner suite,
soi-disant, Mme la Présidente, à des engagements qu'il avait pris
lors de la campagne électorale. Mais, comme on a pu le voir au cours des
derniers mois et des dernières semaines, ce n'est pas du tout ce qu'il a
fait. Non seulement l'Opposition le dénonce, non seulement ici on
s'élève contre cette loi 37,
mais on n'a qu'à voir des groupes de citoyens. On parle de 150,
160 groupes: différentes organisations, les centrales syndicales, la
CEQ, la CSN, la FTQ, la coalition nationale, les groupes de femmes, la Ligue
des droits et libertés, le Regroupement des ressources alternatives en
santé mentale, la coalition, tous ces groupes sont venus manifester au
ministre qu'ils étaient en désaccord avec ce qui était
proposé. Pourquoi? Parce qu'on est en train de créer une
société avec deux groupes. On aura les gens bien nantis, les gens
qui vivent à l'aise, les gens capables d'être autonomes. Oui, cela
existe, mais on aura, de l'autre côté, un ghetto où on
retrouvera davantage de pauvres, des gens qui, aujourd'hui, sont aux prises
avec une situation où ils sont inaptes ou incapables de se trouver du
travail. Dans ce sens-là, ce que le ministre veut faire et qui est
carrément inacceptable, c'est emprisonner, finalement, ces
gens-là dans une situation où ils vont être
complètement perdants.
Je ne comprends par pourquoi le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, qui propose ce projet de loi, vient, en fin
de session, demander que l'on adopte le projet de loi 37 quand on sait toutes
les recommandations qui lui ont été faites, même des
propres députés de son parti, à ce que je me souvienne, de
neuf d'entre eux. C'est rare que cela s'est vu. Depuis deux ans et demi, c'est
la première fois. Il y en a qui se sont levés, qui se sont tenus
debout et qui ont dit au ministre: Cela n'a pas de sens, il faut retirer
certaines choses, il faut apporter des modifications.
Définitivement, le ministre ne comprend pas. Le ministre veut
s'acharner à faire adopter sa loi 37 quand il sait que cela ne
répond pas du tout, mais pas du tout, Mme la Présidente, à
ce que la société québécoise est en droit
d'obtenir. Parce que, dans une société, surtout quand on passe
des périodes comme celle que nous passons actuellement, où on a
une certaine marge de manoeuvre parce que cela va bien sur le plan
économique, on n'a pas le droit de faire, comme le disait, justement, un
éditorialiste de La Presse, le 15 avril dernier, Pierre Vennat, une
réforme comptable.
Effectivement, c'est beau d'aligner des chiffres, c'est beau à
voir, des colonnes qui montrent que le déficit baisse, mais ce n'est pas
seulement cela, une société. Ce n'est pas seulement être
capable d'épargner quelques milliers ou quelques millions. Il faut
être capable de tenir compte des besoins de la population. Les besoins de
la population et la réforme qui était attendue, la parité
pour les moins de 30 ans, voilà autant de choses qui étaient
promises par ce gouvernement et auxquelles beaucoup de gens étaient en
droit de s'attendre, parce qu'il y avait eu des engagements de la part du
gouvernement. Mais, qu'est-ce qu'on voit, Mme la Présidente? On voit un
projet de loi 37 qui ne répond pas du tout.
Dans ce sens-là, ce que le chef de l'Opposition a demandé
ce soir après avoir discouru quelques minutes, ce que ma
collègue, la députée de Maisonneuve, a aussi
demandé, c'est qu'il y ait un report d'au moins six mois, que le
ministre aille refaire ses devoirs, comme cela lui est déjà
arrivé dans d'autres lois, et qu'il puisse revenir et présenter
à l'ensemble des Québécois et des
Québécoises un projet de loi qui se tienne debout, un projet de
loi qui va faire en sorte qu'on pourra dire: Voilà une vraie
réforme de l'aide sociale. Mais, de la façon dont le projet de
loi est articulé et lorsqu'on est rendu au 15 juin à quelques
jours, voire à quelques heures de la fin d'une session intensive ici
à l'Assemblée nationale, que le ministre essaie de faire adopter
une loi semblable est carrément inacceptable.
Mme la Présidente, j'ajoute ma voix, dans ce sens, à celle
de mes collègues, autant à celle du chef de l'Opposition
qu'à celle de la députée de Maisonneuve, parce que le
ministre doit comprendre le message de ce côté-ci. Le message est
clair. On demande un report du projet de loi 37. On demande que le ministre
refasse ses devoirs. On demande de ne pas faire adopter cette loi en fin de
session, au mois de juin 1988. Mme la Présidente, je vais laisser la
chance d'intervenir à mon collègue, le député de
Lavio-lette, puisque le temps nous manque. Mais j'espère que ce message
bref et très clair va être entendu par le ministre qui est porteur
de cette loi, le ministre responsable d'une fausse réforme de l'aide
sociale. Je vous remercie, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Bertrand. M. le député de Laviolette.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente. Je suis un peu
abasourdi. Je m'attendais qu'un député du parti
ministériel intervienne sur une décision aussi importante que
celle-là. Il me semble, Mme la Présidente, que les gens qui sont
en face de nous devraient défendre la position du ministre si vraiment
ils avaient conscience qu'il fallait la défendre. L'impression que nous
avons, c'est qu'ils n'ont même pas confiance dans ce qu'ils sont en train
de nous proposer, parce qu'ils ne le défendent même pas. Nous
sommes ici en train de demander à des gens de réfléchir
encore quelques mois pour s'assurer que leur position soit meilleure que celle
que nous avons connue jusqu'à maintenant et, pour la première
fois de ma carrière politique ici en cette Assemblée nationale,
je n'ai encore entendu, alors que nous arrivons au terme de notre droit de
parole d'une heure, personne de l'autre côté venir défendre
le ministre.
Le collègue qui m'a précédé a fait mention
de gens - et il y en a qui sont ici dans cette salie - qui ont contesté
le ministre à l'intérieur du parti politique, ce qui n'est pas
tout à fait rare dans cette formation politique. On l'a
déjà connu à d'autres moments sur des décisions
cruciales pour le Québec, en particulier sur toute la question de
la constitution canadienne. Neuf personnes s'étaient
élevées ici, de ce côté, des membres de
l'Opposition, pour aller à rencontre de leur parti politique.
Il y a des gens, dans cette salle aujourd'hui, du côté
ministériel, qui se sont élevés contre le ministre au
conseil général, ont fait valoir leur point de vue en disant au
ministre qu'il avait mal fait les devoirs qu'on lui avait demandé de
faire et qu'en conséquence il devait retourner devant l'Assemblée
nationale avec des amendements majeurs. (22 h 40)
On se retrouve avec un projet de loi dont les amendements sont tellement
mineurs que, finalement, on ressent toujours de la part de la population, de
l'ensemble des gens qui contestent ce projet de loi, les mêmes
réticences, les mêmes occasions de décrier un tel projet de
loi.
Mme la Présidente, quelque temps de plus au ministre pour refaire
ses devoirs... Mme la Présidente, est-ce que je pourrais avoir un droit
de parole convenable?
La Vice-Présidente: Vous pouvez continuer, M. le
député de Laviolette. Cela semble rétabli.
M. Jolivet: Mme la Présidente...
La Vice-Présidente: S'il vous plaît, c'est
maintenant le droit de parole du député de Laviolette. J'aimerais
bien qu'on reconnaisse son droit de parole. M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: Merci, Mme la Présidente. Je pense que j'ai
ici, à cette Assemblée, le droit de m'exprimer d'une façon
discordante par rapport aux ministériels. Ils pourront aller de l'autre
côté s'ils le désirent, mais qu'ils nous donnent la chance
de faire valoir nos points de vue, s'ils ne sont aucunement capables de se
lever pour défendre le ministre.
Nous sommes ici pour discuter de choses qui vont toucher l'ensemble des
personnes assistées sociales au Québec pour des années
à venir. Ce n'est pas le temps d'en rire, Mme la Présidente.
L'occasion que nous avons de faire valoir nos points de vue, c'est, justement,
de dire à ces gens qu'ils se trompent, que le ministre se trompe.
En réponse à une question, le ministre a dit: Le
député de Laviolette devrait me féliciter. Oui, je devrais
le remercier d'avoir accepté une des propositions que l'on faisait, mais
ce n'est pas suffisant. Ce n'est pas en pénalisant des gens qu'on va en
récompenser d'autres. Je pense qu'il faut regarder la réforme
dans son ensemble, qu'il faut bien la décrire à l'ensemble des
gens du Québec et aux assistés sociaux, en particulier, que l'on
considère dans ce projet de loi comme étant, dans bien des cas,
comme le disait mon collègue de Shefford, non pas des victimes, mais des
fraudeurs.
On a l'impression que ce que nous laisse le projet de loi dans la
bouche, c'est quelque chose de pas correct. C'est dans ce sens qu'on demande au
ministre d'y réfléchir davantage, qu'on demande à ses
collègues de l'Assemblée nationale d'y réfléchir
davantage parce que cela engage pour longtemps. On est en train de faire en
sorte que les gens qui, normalement, sont davantage dans le besoin soient
considérés comme des gens qu'il faut écraser. J'ai eu
l'occasion - les gens de ma région le savent et je suis assuré
que le député de Saint-Maurice, qui m'écoute, le sait
aussi - de prendre la défense de toutes les personnes qui viennent me
voir dans mon comté depuis le moment où j'ai été
élu député en 1976; je les ai défendues, qu'elles
soient riches ou pauvres, à la condition qu'elles aient des raisons
valables de faire valoir leur point de vue, mais j'ai défendu davantage
les personnes qui sont en difficulté.
C'est dans ce sens qu'on leur demande aujourd'hui non pas de
considérer des colonnes comptables et de considérer les gens
comme des fraudeurs, mais plutôt de considérer les gens comme
ayant des besoins essentiels, des besoins qu'il faut combler, mais pas par une
réforme telle que celle qui nous est proposée. Il faut donner au
ministre le temps nécessaire pour refaire son devoir, je devrais dire
ses devoirs parce que ce n'est pas la première occasion qu'on lui donne
de refaire ses devoirs.
Une chose est certaine, Mme la Présidente: nous ne pouvons pas
accepter que, ce soir, les gens en arrivent, par la force du nombre, à
nous obliger à voter comme ils le désirent. Dans ce sens, nous
allons prendre tous les moyens que nous permet le règlement pour
défendre les personnes les plus démunies. On verra à ce
moment de quel côté penche le gouvernement. Merci, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député de
Laviolette. M. le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité
du revenu.
M. Pierre Paradis
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Merci, Mme la Présidente.
Je veux assurer à mon bon ami, le député de Laviolette,
que ce n'est pas par la force du nombre que le gouvernement veut tenter de vous
convaincre que vous faites fausse route. Je dirai à mon ami, le
député de Laviolette, comme à mon ami, le
député de Bertrand, comme à mon voisin de comté, le
député de Shefford, que j'ai écouté attentivement
les allocutions qu'ils ont prononcées sur cette motion de report et que
je ne peux leur en tenir rigueur, vu que d'autres obligations les
amènent à s'affairer à d'autres occupations et qu'en
conséquence 3s ne connaissent pas tellement bien le dossier sur lequel
ils se sont prononcés. Mes propos seront tout différents envers
Mme la députée de Maisonneuve qui, elle, connaît bien le
dossier et
je traiterai à la fin de mon exposé de son
intervention.
En ce qui concerne les députés de Shefford, de Bertrand et
de Laviolette, ]e leur indiquerai que la politique de sécurité du
revenu proposée par le gouvernement libéral comprend trois
programmes. Un programme Soutien financier qui s'adresse à quelque 100
000 chefs de famille qui sont considérés comme étant
incapables de travailler, des personnes qui ne peuvent être
compétitives sur le marché du travail. Le gouvernement propose
d'ajouter 100 000 000 $ par année, indexés pour ces gens. Pour
une personne, cela veut dire, à partir du moment où la loi est
adoptée, 1000 $ par année de plus. Ce n'est peut-être pas
important pour vous autres, les députés de l'Opposition, qui
êtes déconnectés de cette population, 1000 $ par
année de plus. Peut-être que vous ne considérez pas que le
geste que vous posez ce soir vise à retarder ces paiements pour ces
personnes, mais lorsque vous demandez...
Le Vice-Président: À l'ordre!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...au gouvernement de reporter
cette réforme de l'aide sociale, vous privez ces gens de ces sommes que
nous avons décidé, comme gouvernement, de consacrer aux plus
démunis de la société. Mais, je le dis au
député de Shefford, au député de Bertrand, au
député de Laviolette: Je ne vous en tiens pas rigueur, vous
n'étiez pas au courant.
En ce qui concerne le programme APTE, le programme APTE veut offrir
à l'ensemble des bénéficiaires de l'aide sociale aptes au
travail et disponibles pour le travail des cours de formation, des cours
d'insertion sur le marché du travail, des programmes de rattrapage
scolaire parce qu'une partie importante de notre clientèle ne peut se
trouver d'emploi vu qu'elle a des problèmes de scolarisation quand ce ne
sont pas des problèmes d'alphabétisation, tout simplement. Les
stages en entreprise; le gouvernement est prêt à investir pour ces
gens qui veulent améliorer leur niveau d'employabiiité quelque
450 000 000 $ de plus par année. Quand vous nous demandez de reporter
cette décision, vous nous demandez de retarder d'investir dans
l'employabilité des bénéficiaires de l'aide sociale. Mais,
encore une fois, je ne peux en vouloir au député de Shefford, au
député de Bertrand et au député de Laviolette, je
ne peux pas les blâmer, ils ne sont pas au courant de la politique
proposée par le gouvernement.
Il y a un troisième programme dans l'aide sociale, le programme
APPORT: aide aux parents pour leurs revenus de travail. C'est quelque 45 000
000 $ par année d'argent additionnel que le gouvernement destine aux
chefs de famille à faible revenu. Plus de la moitié de ces chefs
de famille à faible revenu sont des chefs de famille monoparentale, des
femmes, et vous voulez priver ces femmes de ces quelque 45 000 000 $ de dollars
additionnels par votre motion de report. Je ne peux en vouloir au
député de Shefford, je ne peux en vouloir au député
de Bertrand, je ne peux en vouloir au député de Laviolette qui
ont d'autres occupations et d'autres préoccupations.
Mais je peux en vouloir à Mme la députée de
Maisonneuve de ne pas vous avoir informés sur le contenu du livre blanc
sur la fiscalité, écrit par votre nouveau chef, M. Jacques
Pari-zeau. Je peux en vouloir à Mme la députée de
Maisonneuve de ne pas avoir insisté sur les consensus qui se sont
établis dans la société québécoise
auprès du caucus du Parti québécois, des consensus
préalables à cette réforme de l'aide sociale. Mme la
députée de Maisonneuve a été la première
à dénoncer le système actuel. Mme la députée
de Maisonneuve juge souhaitable une réforme de l'aide sociale et je
pense qu'il y a sur ce point, parmi tous les intervenants de la
société québécoise, un consensus à savoir
qu'il est inapproprié de retarder toute réforme de l'aide
sociale, qu'il y a consensus à savoir que cette réforme, s'il y a
quelque chose, elle est en retard. Elle aurait dû survenir sous l'ancien
gouvernement qui n'a pas eu le courage nécessaire pour réformer
l'aide sociale.
Le deuxième consensus concerne une saine gestion du
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
comme de l'ensemble des autres ministères du Québec.
Là-dessus aussi il y a consensus je ne dirais pas entre tous les
parlementaires en cette Chambre, mais entre la formation politique du Parti
libéral du Québec et le chef du Parti québécois, M.
Jacques Parizeau. (22 h 50)
Lorsque nous nous sommes attaqués à une saine gestion du
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu
- et c'est un peu gênant de vous le souligner ce soir, Mme la
Présidente - M. Parizeau, alors qu'il n'était pas en politique
active, déclarait aux journaux, aux médias... Je vous le
répète, Mme la Présidente, c'est un peu gênant. Les
journaux ont titré: "Parizeau félicite Paradis". Je cite un
extrait du journal. "Nous aurions dû faire cela. Je ne peux que
présenter des félicitations à M. Paradis pour ce qu'il
fait. Il est un remarquable gardien de l'intérêt public".
Mme la Présidente, regrettant un peu ce qui s'était
passé sous le gouvernement du Parti québécois, M. Parizeau
d'ajouter "Les gouvernements sont au courant de ça depuis des
années. Comme ministre des Finances, j'ai fait faire un certain nombre
de tests à certains endroits au Québec, qui
révélaient le même genre de chose". J'arrête
là, parce que ce serait trop en ajouter.
Mais, outre ces deux principes de base préliminaires, soit la
nécessité d'une réforme et la nécessité
d'une saine gestion, les principes mêmes qui sous-tendent l'actuelle
réforme de l'aide sociale, l'actuelle politique de
sécurité du revenu sont, pour certains d'entre eux,
partagés par le chef de l'Opposition officielle.
En ce qui concerne un des principes de
base de la distinction entre les bénéficiaires aptes et
ceux considérés comme inaptes, donc, deux catégories de
bénéficiaires à l'aide sociale, voici ce que dit M.
Jacques Parizeau, dans son livre blanc sur la fiscalité des
particuliers. Et, je cite M. Parizeau: "Les orientations de la réforme
nous amènent à préconiser la modification de cette
armature de base et la mise en place d'un régime pour les personnes
à faible revenu aptes au travail qui soit distinct - Mme la
députée de Maisonneuve - de celui visant les personnes inaptes au
travail. Ainsi, le groupe de personnes de 18 à 64 ans qui ne sont pas
aux études serait scindé", dixit M. Parizeau. "Le programme
actuel d'aide sociale continuerait de s'appliquer aux personnes inaptes au
travail. Par contre, pour ceux qui sont aptes au travail, le nouveau programme
de garantie de revenu deviendrait le principal programme destiné
à cette clientèle. " Donc, quant à la distinction entre
les personnes aptes et inaptes, le chef actuel du Parti québécois
est d'accord avec le Parti libéral du Québec sur ce principe
fondamental de la réforme de l'aide sociale.
Quant à un autre principe fondamental de la réforme de
l'aide sociale également important, l'accès à tous
à des mesures de développement de l'employabilité visant
la réintégration au marché du travail, que nous dit M.
Parizeau dans son livre blanc sur la fiscalité? Que nous dit le chef du
Parti québécois sur ce deuxième principe? Je cite M.
Parizeau: "Le principe à la base de ces programmes est que les
prestations sont augmentées pour tous ceux qui s'engagent dans de tels
programmes. Il s'agit donc, au fur et à mesure que se développent
les moyens administratifs pour encadrer ces activités, de les
étendre a l'ensemble des assistés sociaux. En plus d'assurer ce
revenu minimum pour les personnes aptes au travail, un des objectifs du nouveau
programme est de favoriser leur réintégration sur le
marché du travail. "
Et M. Parizeau de poursuivre dans le livre blanc sur la
fiscalité: "à permettre aux bénéficiaires qui ne
peuvent réintégrer le marché du travail, parce qu'ils ne
réussissent pas à se trouver un emploi, d'augmenter leur niveau
de prestation en participant à des activités qui favorisent leur
réinsertion sur le marché du travail". Et le livre blanc
d'ajouter "Ces activités sont la formation scolaire et professionnelle,
la formation en industrie et les activités communautaires". Fin de la
citation de M. Parizeau.
Donc, M. Parizeau, chef du Parti québécois, est d'accord
pour une distinction entre aptes et inaptes. M. Parizeau, chef du Parti
québécois, est d'accord pour offrir à tous les
bénéficiaires d'aide sociale aptes et disponibles pour le travail
des mesures de relèvement de leur employabilité.
Quant au troisième principe qui sous-tend la réforme de
l'aide sociale, vous comprendrez son importance, étant donné que
le Parti québécois avait choisi, à l'époque
où il était au gouvernement, de geler le salaire minimum au
même moment où il indexait les prestations d'aide sociale,
c'est-à-dire de désinciter les gens au travail M Parizeau,
à la suite d'une longue réflexion, en arrive à la
conclusion que l'incitation au travail se devrait d'être un des principes
de l'aide sociale
Dans le livre blanc sur la fiscalité - j'inviteMme
la députée de Maisonneuve à le consulter et les autres
députés qui ont d'autres préoccupations à le lire,
la citation est tirée de la page 224 - M Parizeau quant à
l'incitation au travail "Le taux de rémunération serait
fixé de façon à ce que la rémunération d'un
bénéficiaire qui participe a ces programmes soit
inférieure à celle que le secteur privé offre aux plus
faibles salariés" À la page 220 du livre blanc, il est
mentionné que, "si l'on veut qu'il existe un minimum d'incitation au
travail, le nouveau programme de garantie de revenu devrait être
conçu de façon qu'il ne confère pas à ces
bénéficiaires un niveau de vie supérieur à celui
que peuvent obtenir sur le marché privé les travailleurs à
faible revenu "
Donc, consensus sur la nécessité d'une réforme,
consensus sur une saine gestion consensus sur une division entre aptes et inap
tes, consensus quant à offrir des mesures à tous les
assistés sociaux aptes et disponibles, consen sus quant à
l'incitation au travail
Mme la Présidente, je vais maintenant vous expliquer
l'obstruction systématique du Parti québécois dans ce
dossier, parce qu après tous ces consensus il y a, quand même, des
divisions profondes entre ceux et celles qui siègent en face Comme je
l'ai indiqué tantôt, je n'en tiens pas rigueur au
député de Shefford, au député de Bertrand et au
député de Laviolette qui ont d'autres préoccupations, mais
j'en tiens rigueur a Mme la députée de Maisonneuve qui a
appuyé à la dernière course au leadership du Parti
québécois, M Pierre Marc Johnson, qui était contre la
parité de l'aide sociale
Des voix: Ha, ha!
La Vice-Présidente: À l' ordre!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): et qui a appuyé, lors du
dernier couronnement du chef, M Jacques Parizeau, qui est également
contre la parité a l'aide sociale et qui est en faveur d'exclure de
l'aide sociale les jeunes de 18 19 et 20 ans
Des voix: Ha, ha!
La Vice-Présidente: À l'ordre!
M. Jolivet- Je veux vous aider
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mme la Présidente, le
député de Laviolette veut m'aider Je vais le
référer, encore une fois, au livre blanc sur la fiscalité
parce que, oui, Mme Harel
a appuyé M. Parizeau dans sa course au leadership. Elle devait,
donc, connaître parfaitement les positions de M. Parizeau sur ia
réforme de l'aide sociale. Quant à la parité, M. Parizeau,
à la page 328 de son livre blanc sur la fiscalité, s'exprime
comme suit: "Dans la réforme envisagée, cette disparité
n'est pas remise en cause, les raisons qui ont amené son instauration
étant toujours valables. Ce choix implique que les
bénéficiaires de moins de 30 ans doivent assurer eux-mêmes
une plus grande partie de leurs besoins essentiels."
C'était la position de M. Parizeau au moment où il a
écrit le livre blanc. Mais cette position a évolué et M.
Parizeau est devenu encore plus sévère envers la jeunesse
québécoise, encore plus discriminatoire, selon la position qu'il
livrait au journal Le Soleil, il y a à peine trois mois. Le titre
du journal Le Soleil est celui-ci: "La social-démocratie à la
Jacques Parizeau". Je cite: "Mais il veut, par contre, exclure les jeunes de
18,19 et 20 ans de l'aide sociale."
Des voix: Ah! Ah! Ah!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): C'est une exclusion
complète de la jeunesse d'un programme de dernier recours. C'est
totalement inadmissible et, sur ce point, le Parti libéral du
Québec est prêt à faire la guerre au Parti
québécois.
Des voix: Bravo! Bravo!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Mais s'agit-il là du seul
point de discordance entre le Parti libéral du Québec et le Parti
québécois?
Des voix: Non. Non.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Non. Il y a ...
La Vice-Présidente: À l'ordre!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...un second point sur lequel il
n'y aura jamais d'entente possible entre le Parti libéral du
Québec et l'actuel chef du Parti québécois. C'est la
question des personnes, chefs de ménage, qui seront admissibles au
programme Soutien financier. Dans son livre blanc sur la fiscalité, M.
Parizeau, chef du Parti québécois, propose à la page 205
"que le niveau des prestations de ces gens soit maintenu au niveau actuel". Le
Parti libéral du Québec propose qu'il soit augmenté de
quelque 1000 $ par année, soit un budget additionnel de 100 000 000
$.
Une voix: Bravo, Pierre!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Là-dessus, non plus, nous
ne lâcherons pas, malgré l'obstruction systématique du
Parti québécois.
Donc, en résumé, vous aurez compris qu'il y a consensus
entre les formations politiques sur la nécessité d'une
réforme de l'aide sociale, qu'il y a consensus sur une saine gestion du
ministère de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.
Quant aux principes de base qui sous-tendent la réforme qui est devant
cette Chambre, vous aurez constaté qu'il y a consensus entre le chef du
Parti québécois et la formation politique du Parti libéral
du Québec sur les points suivants: division des assistés sociaux
entre aptes et inaptes, offre de mesures de rehaussement de
l'employabilité à tous les bénéficiaires de l'aide
sociale aptes et disponibles pour le travail et incitation au travail. (23
heures)
Vous aurez également compris, Mme la Présidente, qu'il y a
une lutte à finir entre l'Opposition officielle et le gouvernement en ce
qui concerne la parité, les gens de l'autre côté se
refusant d'accorder la parité aux jeunes et souhaitant exclure les
18-19-20 ans de l'aide sociale. Il y aura également guerre à
finir entre le Parti libéral et le Parti québécois qui
refuse d'accorder son consentement pour hausser les prestations des plus
démunis de quelque 1000 $ par année.
Mme la Présidente, on peut, lorsque l'on accepte des fonctions
gouvernementales, accepter d'être critiqué. Là-dessus, je
vous dirai que le document que nous avons déposé sur la
sécurité du revenu en décembre méritait
d'être critiqué. La commission parlementaire qui a
été tenue pendant plus de cinq semaines, à laquelle a
participé une seule députée de l'Opposition - seule,
solitaire, cela faisait pitié par bouts - et l'ensemble des
députés ministériels, nous a amenés à
proposer des modifications et des amendements quant à ce projet de
réforme. D'autres discussions nous amèneront peut-être
à en proposer d'autres quant aux modalités d'application. Mais,
sur plan des principes, toujours, nous avons lutté et, toujours, nous
continuerons de lutter.
Je vous dirai que vos critiques, autant positives étaient-elles
à l'époque, n'ont plus aujourd'hui leur raison d'être. Je
ne vous demande pas de me croire. Je suis le ministre parrain du projet de loi.
Je vais quand même vous demander d'écouter ou de relire
attentivement les propos tenus par l'un de vos anciens collègues,
député d'une circonscription électorale où on
retrouvait et on retrouve encore beaucoup d'assistés sociaux, le
comté de Saint-Jacques. Je fais référence à
l'ancien ministre, M. Claude Charron, qui disait la journée où
nous avons apporté les modifications, et je le cite au texte: "Moi, je
trouve... J'ai écouté ce que l'Opposition a dit sur ce projet de
loi, cela me paraissait comme une Opposition qui n'avait pas, au fond,
grand-chose à dire...
Des voix: Ah!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qui critiquait pour critiquer."
C'est l'analyse que faisait
un ancien des vôtres, une fois détaché de cette
partisanerie politique qui devrait être complètement absente du
débat qui nous anime aujourd'hui parce qu'elle touchera et affectera la
vie de 10 % de la population des Québécois et des
Québécoises.
Mais il y a davantage. Ces blâmes que j'adresse à ma
collègue, la députée de Maison-neuve, de ne pas avoir
informé ses collègues députés qui ont d'autres
préoccupations, vont plus loin et ils sont partagés par d'autres
membres qui siègent du côté de l'Opposition. Il n'y a pas
tellement longtemps, quelqu'un du côté de l'Opposition jugeait
indécent le comportement de Louise Harel. C'était rapporté
dans La Voix de l'Est du 8 décembre 1987. Et je vous
préviens tout simplement qu'un éditorialiste du la région
de Saguenay-Lac-Saint-Jean écrivait - et je vous incite à la
prudence, les députés péquistes qui auront à
intervenir - la même journée le 8 décembre 1987 - les
idées se rencontrent d'une région à l'autre du
Québec et je vous inviterais à réfléchir sur le
sujet lorsque vous déciderez de suivre votre critique plutôt que
votre chef: "Louise Harel mène le PQ au cimetière. "
Peut-être auriez-vous avantage à relire le livre blanc sur la
fiscalité de M. Parizeau et peut-être auriez-vous avantage
à le convaincre de ne pas combattre cet argument de parité pour
les jeunes de moins de 30 ans, peut-être auriez-vous avantage à le
convaincre de faire preuve d'un peu plus d'équité envers les plus
démunis de la société. Si vous réussissez à
le convaincre de ces deux arguments, vous voterez contre votre propre motion.
Merci, Mme la Présidente.
Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!
Le Vice-Président: II n'y a pas d'autres interventions.
Ceci met donc fin au débat. Nous allons maintenant procéder
à la mise aux voix de la motion de report présentée par M.
le chef de l'Opposition.
Des voix: Vote enregistré!
Le Vice-Président: Donc, un vote enregistré. Qu'on
appelle les députés! (23 h 10)
Le Vice-Président: À l'ordre!
Mesdames et messieurs, veuillez prendre place, s'il vous
plaît.
Mmes et MM. les députés, s'il vous plaît!
Nous allons maintenant procéder à la mise aux voix de la
motion de report présentée par M. le chef de l'Opposition, motion
de report visant à reporter de six mois l'adoption du principe du projet
de loi 37, Loi sur la sécurité du revenu.
Que ceux et celles qui sont favorables à cette motion veuillent
bien se lever, s'il vous plaît.
Le Secrétaire adjoint: MM. Chevrette (Joliette), Gendron
(Abitibi-Ouest), Perron (Duples- sis), Mme Blackburn (Chicoutimi), MM. Garon
(Lévis), Jolivet (Laviolette), Brassard (Lac-Saint-Jean), Desbiens
(Dubuc), Godin (Mercier), Paré (Shefford), Boulerice (Saint-Jacques),
Claveau (Ungava), Dufour (Jonquière), Parent (Bertrand), Mme Harel
(Maisonneuve), M. Rochefort (Gouin).
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! Que ceux et celles qui sont contre la motion veuillent bien se
lever, s'il vous plaît.
Le Secrétaire adjoint: MM. Gratton (Gatineau), Levesque
(Bonaventure), Paradis (Brome-Missisquoi), Séguin (Montmorency),
Côté (Rivière-du-Loup), Dutil (Beauce-Sud), Mme Robic
(Bourassa), MM. Savoie (Abitibi-Est), Vallières (Richmond), Picotte
(Maskinongé), Fortier (Outremont), Mme Bégin (Bellechasse), MM.
Cu-sano (Viau), Dauphin (Marquette), Philibert (Trois-Rivières), Mme
Dougherty (Jacques-Cartier), MM. Doyon (Louis-Hébert), Middlemiss
(Pontiac). Beaudin (Gaspé), Chagnon (Saint-Louis), Lemire
(Saint-Maurice), Paradis (Matapédia), Mme Pelchat (Vachon), MM. Polak
(Sainte-Anne), Kehoe (Chapleau), Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue),
Bélanger (Laval-des-Rapides), Bélisle (Mille-Îles), Mme
Hovington (Matane). MM. Thérien (Rousseau), Tremblay (Iberville), Parent
(Sauvé), Gervais (L'Assomption), Trudel (Bourget), Mme Bleau (Groulx),
MM. Bradet (Charlevoix), Després (Limoilou), Mme Dionne
(Kamouraska-Témiscouata), MM. Farrah (Îles-de-la-Madeleine),
Forget (Prévost), Gardner (Arthabaska), Gobé (Lafontaine), Hamel
(Sherbrooke), Laporte (Sainte-Marie), Dubois (Huntingdon), Leclerc
(Taschereau), Joly (Fabre), Khelfa (Richelieu), Lemieux (Vanier), Messier
(Saint-Hyacinthe), Poulin (Chauveau), Mme Legault (Deux-Montagnes), MM.
Thuringer (Notre-Dame-de-Grâce), Richard (Nicolet), Tremblay (Rimouski),
Latulippe (Chambly), Théorêt (Vimont).
Le Vice-Président: Y a-t-il des abstentions?
Le Secrétaire: Pour: 16
Contre: 57
Abstentions: 0
Le Vice-Président: En conséquence, la motion est
donc rejetée.
Reprise du débat sur l'adoption du
principe
Nous allons maintenant poursuivre le débat sur la motion
d'adoption du principe du même projet de loi 37. Je suis prêt
à reconnaître le prochain intervenant, M. le député
de Sainte-Anne.
Des voix: Bravo!
M. Maximilien Polak
M. Polak: M. le Président, je suis fier
d'intervenir sur le projet de loi sur la sécurité du
revenu communément connu sous le nom de la Loi sur l'aide sociale.
Savez-vous, M. le Président, j'étais ici cet après-midi et
ce soir, et j'ai entendu le chef de l'Opposition - le chef de l'Opposition -
qui a dit de nous: Vous êtes des démocrates de fin de semaine. M.
le chef de l'Opposition, votre chef, cela, c'est un démocrate de fin de
semaine, celui qui a dit: Ne payez pas de l'aide sociale à ceux qui ont
18, 19 et 20 ans. C'est lui qui l'a dit, votre chef, ne l'oubliez jamais, dans
votre programme. Savez-vous qui semblent, selon vous, vos démocrates de
fin de semaine? Ce sont les députés qui sont membres de la
commission des affaires sociales: les députés de Fabre,
L'Assomption, Chambly, Sainte-Marie, Taschereau, Deux-Montagnes,
Notre-Dame-de-Grâce, Laval-des-Rapides. Ce sont nos membres de la
commission et nous sommes derrière notre ministre.
Savez-vous pourquoi? Parce que vous avez tenté de diviser, vous
avez dit: Voici, division. Il n'y a pas de division du tout. Nous sommes tous
unanimement en faveur du principe de l'aide sociale. Savez-vous pourquoi? Parce
que - et je parle avec la connaissance personnelle de mon comté de
Sainte-Anne, parce qu'on a le problème de l'aide sociale - on veut
briser une fois pour toutes le cercle vicieux de l'aide sociale.
Le ministre a présenté un projet de loi, mais, avant de
faire cela, il n'a pas présenté le projet de loi comme cela. Il a
présenté un document, M. le Président. Le document
s'appelle "Pour une politique de sécurité du revenu". Nous, on
était ici parce que souvent on nous accuse, on dit: Les
députés, vous êtes en vacances du 25 décembre
jusqu'au 15 mars. Ce n'est pas vrai. Nous, on était ici à la
commission, on a été ici du 22 février jusqu'au 29 mars,
tous les membres. Je dois vous dire une chose: J'admire la
députée de Maisonneuve. Elle a été la seule de
votre groupe à être là, la seule. Savez-vous, on a eu des
groupements qui sont venus devant nous. Nous avons eu 120 organismes qui sont
venus témoigner le matin, l'après-midi, le soir. 20 minutes pour
présenter le mémoire, 20 minutes au ministre, 20 minutes à
l'Opposition. On a écouté. Il y a des groupements qui nous ont
accusés: C'est une commission bidon, c'est tout arrangé d'avance,
vous savez que le ministre a décidé, il ne nous écoute
même pas. Mais, nous, on savait une chose: II écoutait. Il
écoutait et il prenait des notes. Il a dit, à la fin: Je suis
venu pour consulter et, quand je présenterai mon projet de loi, je vais
faire des amendements si besoin est.
M. le Président, pas besoin d'aller dans les détails du
projet, parce qu'il y a trois volets dans cette politique. Je me rappelle
très bien un volet très important. On appelle cela le projet
Soutien financier. Là, les groupements sont venus devant nous, y inclus
l'Opposition, et ils n'ont pas parlé de cela. Savez-vous pourquoi? Parce
que tout le monde était d'accord avec cela. Nous, on a dit: Ceux qui
sont vraiment dans le besoin, on va les traiter mieux, on va les traiter parce
qu'ils méritent vraiment une attention toute spéciale. On va les
traiter mieux qu'avant. Eux, ils n'ont rien dit. Il y a des groupements qui
sont venus devant nous et qui ont critiqué. Ils n'ont jamais
parlé de ce programme de soutien financier. Nous, on dit: Nous sommes
fiers, unanimement, que le ministre ait présenté,
premièrement, le volet qui s'appelle le projet Soutien financier. (23 h
20)
M. le Président, je me rappelle très bien parce que
c'était tout de même difficile. Les groupements sont venus devant
nous, ils sont venus pour critiquer. C'étaient toujours des groupements
communautaires qui sont venus de nos comtés respectifs pour s'exprimer.
Je me rappelle qu'à un moment donné, il y a un groupe qui est
venu de mon propre comté. Il s'appelle CODAS, l'Organisation d'aide aux
assistés sociaux. Ils sont très actifs dans le comté de
Sainte-Anne, dans la Petite Bourgogne et à Pointe-Saint-Charles?
Après, ils m'ont dit: Maximilien, vous n'avez même pas
écouté, vous parliez avec le ministre; nous, nous sommes venus et
nous avions 20 minutes. Ils sont venus de Montréal dans un petit autobus
que, moi, j'ai financé par exemple. Ils sont venus et ils m'ont dit:
Vous n'avez même pas écouté parce que vous avez
parlé avec le ministre quand nous présentions notre
mémoire. Savez-vous pourquoi je parlais avec le ministre? J'ai dit au
ministre: C'est ma "gang", là, c'est mon groupe, donnez-moi, s'il vous
plaît, quatre minutes, parce qu'il parlait souvent, lui, le ministre. Il
intervenait pendant ses 20 minutes, et il restait deux ou trois minutes pour
nous. J'ai dit: M. le ministre, s'il vous plaît, donnez-moi quatre ou
cinq minutes pour interroger mon groupe. Ils m'ont critiqué parce que je
parlais avec le ministre pour lui demander le droit de les interroger.
Donc, j'ai dit à Mme Martineau, présidente du Front commun
des assistés sociaux: S'il vous plaît, tentez donc de rester
raisonnable, parce qu'on travaille pour vous et qu'on fait notre possible
toujours à l'intérieur d'un cadre. J'ai écrit une lettre
à ce groupe le 31 mars et je leur ai dit: Voici donc ce qui est
arrivé quand j'étais là. Je dis: Nous, comme
députés ministériels, nous avons aussi des
inquiétudes sur ce projet de loi concernant, par exemple, le danger du
travail au rabais. Parce qu'on a apporté l'argument à un moment
donné du "cheap labour", excusez-moi, en français, le travail au
rabais, le partage du logement ainsi que la contribution parentale. On avait
des inquiétudes là-dessus.
Savez-vous, tout au long des travaux - et, Mme la députée
de Maisonneuve, il n'y a pas de dissension parmi nous du tout - on se
rencontrait. On était ici au mois de février. On a mangé
ensemble. On a parlé ensemble. On a dit au ministre: M. le ministre, on
veut vous rencontrer. Il a dit: Vous êtes les bienvenus. Le
plus, le mieux. On l'a rencontré à mi-chemin. Il nous a
demandé: Qu'est-ce que vous en pensez? Nous avons dit: M. le ministre,
n'écoutez pas toujours vos fonctionnaires, écoutez donc les
députés qui représentent des comtés où il y
a des assistés sociaux. Nous sommes des gens qui savent un peu ce qui se
passe à la base. Nous vous demandons de nous écouter. On l'a vu
à mi-chemin. À la fin de nos travaux, on l'a rencontré de
nouveau. On a dit: Voici, M. le ministre, ce que nous pensons, voici nos
inquiétudes. On parle peut-être par sentiment, par conscience
sociale, parce qu'au Parti libéral du Québec, tout de même,
nous avons une grande conscience sociale.
C'est pourquoi j'étais pas mal insulté quand, tout
à l'heure, le chef de l'Opposition a dit: Vous, vous êtes des
démocrates de fin de semaine. S'il vous plaît, ne
répétez plus jamais cela. Vous n'avez pas le droit de dire cela.
Nous sommes toujours des démocrates parce que nous avons autant de
conscience sociale que vous, et peut-être plus. Nous ne jouons jamais
à la politique partisane sur le dos de ceux qui sont le plus dans le
besoin. Je peux vous l'assurer.
Des voix: C'est cela. Bravo!
M. Polak: On a parié avec le ministre. On lui a fait part
de nos inquiétudes. Je ne veux pas dire que c'est nous qui avons
influencé le ministre pour changer d'avis et faire des amendements. Pas
du tout. Mais je pense qu'on a contribué à influencer le ministre
avec ceux qui sont venus devant lui. Il a écouté les gens qui
sont venus et il a présenté son projet de loi par la suite, soit
le 12 mai. On trouve des amendements dans le projet de loi qui changent pas mal
déjà la politique sur la sécurité du revenu. Ils
vont pas mal dans le sens de comprendre les inquiétudes qui ont
été exprimées.
Par exemple, auparavant, ceux qui étaient dans les neuf premiers
mois n'avaient pas le droit de participer au programme APTE et de se reclasser
au travail, je me rappelle très bien. Il a changé cela dans son
projet de loi. Il a aboli cette catégorie tout de suite. Il a
changé tout cela, pas à cause de nos pressions, parce que nous
avions parlé de cela, des intervenants ont parlé de cela aussi.
Le ministre a dit que cela avait du bon sens et qu'il était prêt
à accepter cette recommandation.
Je me rappelle d'un autre amendement que je trouve très
important. Dans son projet de politique de sécurité du revenu, il
disait qu'un parent d'un enfant de moins de deux ans, auparavant, était
considéré comme non disponible. À cause des
représentations faites par tous les groupes qui sont venus, non pas
à une commission bidon, mais à une commission qui écoute
et un ministre qui écoute, on ne trouve plus cela dans son projet de
loi. Il a changé cela. Il dit: C'est un parent qui a la charge d'un
enfant qui ne fréquente pas l'école, parce qu'il n'a pas atteint
l'âge requis. En d'autres termes, au lieu de prendre un parent d'un
enfant jusqu'à l'âge de deux ans, il y a maintenant une
prolongation pour ceux qui sont d'âge préscolaire.
M. le Président, dans un projet de loi aussi important que
celui-ci, je pense qu'il est important de parler aussi de temps en temps en
anglais parce que dans mon comté - je me rappelle très bien -
avant qu'on ait eu la consultation, nous avons rencontré - et pas
seulement moi, les autres députés avec moi aussi à la
commission des affaires sociales - individuellement les groupes de nos
comtés. Le député de Taschereau, je sais qu'il a
rencontré les gens de son comté, ceux qui sont venus le voir.
Moi, j'ai rencontré les gens de mon comté, ils sont venus
à mon bureau de comté ou je les ai visités. Je me rappelle
très bien.
For instance, in the English community, we have in Pointe-Sainte-Charles
a group very active in the Saint-Columba House. It is English-speaking and one
evening, they asked me: Please explain what your Minister, Mr. Paradis, wants
to do because Mme Harel tells us we will all die. And I said: I do not think
that it is the intention, I think we explained that it is not the intention.
Please listen to us, let us explain what we intend to do. And I went there and
I spoke to them. Maybe I did not convince them, but I told them one thing: If
you have a good point to make, I will be your interpreter at the commission and
before the Minister. And do you know what they told me? They said: We call this
sharing lodging, le partage du logement". They said: You are our MNA. How are
you going to explain that, when if we have to pay 40 % or 50 % of our welfare
check on rental? How can we live? We have to pay 40 % or 50 % just to rent an
apartment. So what remains of the check? Not enough to eat. So, then you have
problems; we will have problems of health, medical problems, psychological
problems. People say: Welfare people, look at them, all they do is smoke
cigarettes. You know why they smoke? Maybe because they are stressed, maybe
they have a lot of problems and the cigarette is perhaps just an idea to do
something, to try and sort of compensate for the misery that they suffer. That
is how bad it is.
I said to them: I will take your point there; I agree with you. Because
I look at the statistics and I agree. I went to the Minister and we went to the
commission. We said: Look, "le partage du logement", there is something wrong
there. We agree with the principle. If you have four young men living together
in one apartment, sure, there should be a "partage du logement"; there should
be a contribution. They have the same lights, the same heating, the same
electricity. I understand that. But when two or three people who have to pay 40
% or 50 % of their welfare check on rental, who are trying to be what we call
"en français débrouillards" or in English, people who are
resourceful, please, we should not kill that initiative. We must make a
distinction somewhere
along the line.
The Minister told us: You have to be careful, I have set a certain
principle. He told us in the beginning: We were charging for the "partage du
logement" 115 $ per month and in this "projet de loi", he reduced it to 85 $. I
am not giving up on this point. I will talk to him and say: Look at this again.
I agree with you, there are cases where we must employ the "partage du
logement", I agree. But, in some cases, you are penalizing people that should
not be penalized.
And I was very happy when, last week, he said: "On peut toujours faire
quelque chose avec les modalités. " When he said: We agree with the
principles, we will not give in on the principles. However, regarding the
application, we are open for discussion. That is why in our "équipe", we
work this way, we said. Here is a problem we see. And the Opposition should not
try to take advantage and say: Look at this: Some of the members of the
commission are against the Minister. We are not at all against the Minister. We
are in favour of this reform. We are behind it solidly, but we are saying:
Sometimes the application is not the way it should be; there should be some
changes there.
We are proceeding today, we are talking on the principle of the law. We
are talking on the principle and later, maybe in the fall, we are going to
study it article by article. And we will talk to the Minister before. I am sure
we will invite him during the summer, somewhere, we have some corn roasts where
we will meet him and discuss it. And we will try to improve the law. (23 h
30)
Tout ce que je dis, M. le Président, nous, notre attitude a
toujours été celle de dire: Nous sommes en arrière de
notre ministre parce que nous savons comment il a bien travaillé,
comment il a eu le courage de briser ce cercle vicieux de l'aide sociale. C'est
grave, cela et c'est difficile à faire. Et nous, nous sommes là
pour vraiment le supporter.
En ce qui concerne les modalités, il a déjà ouvert
la porte et il nous a dit: Pour les modalités, je suis prêt
à vous écouter. Notre tâche n'est pas d'aller plus loin que
cela.
M. le Président, en terminant, juste une chose. Nous parlions
souvent et les gens qui sont venus témoigner devant la commission nous
disaient: Mais qu'est-ce que vous allez faire avec toutes ces choses? Où
sont les jobs? "Where are the jobs?" Nous, on avait dit: Savez-vous, il y a des
réponses. Savez-vous où les réponses se trouvent? J'ai
reçu par exemple dans mon comté un groupe, le ministre le
connaît bien, qui s'appelle le Projet économique
Pointe-Saint-Charles. Ces gens ont envoyé un projet au ministre. C'est
un projet tellement intéressant; c'est un projet de travaux
communautaires d'implication d'une corporation de développement
économique communautaire locale parce qu'il faut aller dans cette voie.
Ils ont envoyé un projet vraiment très intéressant.
Savez-vous ce qui est arrivé? Le ministre a reçu ce
projet. Cela est arrivé après parce qu'on parle toujours de
"scrap" Paradis. Nous, on ne dit pas "scrap" Paradis, on leur dit:
Écoutez Paradis. C'est une grande différence. Savez-vous, il a
reçu la lettre et le projet. J'ai reçu une réponse, avec
une copie à ce groupe de Pointe-Saint-Charles. Il a dit: Je suis
tellement impressionné par ce projet que j'ai donné instruction
à mon sous-ministre de communiquer avec ce groupe pour le rencontrer
immédiatement pour parler justement de ce projet et de la
création d'emplois puisqu'il s'agit de création d'emplois.
Sur le plan local, communautaire, H y a beaucoup à faire. Il y a
des gens qui sont prêts à prendre la relève, qui sont
prêts à créer des emplois dans les PME. Moi, je me rappelle
très bien un cas à Pointe-Saint-Charles où une jeune femme
de 27 ou 28 ans, opticienne, n'était pas capable d'obtenir aucun montant
d'argent d'aucune instance. C'est le groupe PEP (Projet économique
Pointe-Saint-Charles) qui a, avec un peu d'argent, aidé cette femme.
Maintenant, elle a ouvert sa boutique. Cela fonctionne. Elle vend des
prescriptions de lunettes aux gens et non seulement elle est
indépendante, elle a même déjà embauché
quelqu'un pour travailler pour elle.
Pour vous donner un petit exemple, je pense que c'est important, c'est
un message. Si on croit en quelque chose, on peut réussir. Quand
j'étais à la commission devant le ministre, j'étais
à côté du ministre. Mon fils travaille dans un bureau
d'avocats. J'ai demandé: Est-ce qu'il y a moyen d'embaucher quelqu'un
avec un bon d'emploi à un bureau d'avocats? On a vérifié.
Il a dit: Oui. On a trouvé une fille - je ne donne pas le nom, je vous
jure que c'est une histoire vraie - de Pointe-Saint-Charles qui vient d'une
famille bénéficiaire de l'aide sociale en permanence. Elle
était là-dessus depuis le début. Elle n'a jamais connu
autre chose que l'aide sociale. On l'a fait rentrer comme assistante
standardiste, avec un bon d'emploi du gouvernement où le gouvernement
paie, je pense, 100 $ par mois, à un bureau de 18 avocats à
Montréal, où mon fils se trouve. Elle est là. Savez-vous
que c'est merveilleux de voir cela! Cette fille travaille à ce bureau.
Elle est standardiste. Elle répond aux appels
téléphoniques. Elle fait de la photocopie. Elle apporte le
courrier. Elle distribue les messages, etc. Savez-vous ce qui est
arrivé? Une des standardistes est partie et elle a pris sa place. Cette
fille est déjà là sur une base permanente.
Donc, si tout le monde a la même bonne volonté... Parce que
les autres avocats m'ont dit: Maximilien, qu'est-ce que cela donne, une
assistée sociale? C'est difficile. La fille n'est peut-être pas
habituée. J'ai dit: Donnez-lui donc une chance. Il ne faut pas trop se
plaindre que cette fille ne coûtera pas trop cher. Le gouver-
nement paie une partie de son salaire. Vous n'aurez pas à vous
plaindre, vous ne paierez pas trop. Et c'est déjà un
succès. Si tout le monde faisait la même expérience. Il y a
tant de gens de bonne volonté qui veulent. On va combattre ce
problème de l'aide sociale, de ceux qui veulent travailler et qui
cherchent des emplois.
M. le Président, je suis fier d'endosser ce projet. Je suis fier
d'être membre de cette commission. Même après le 15 mars,
quand je n'étais plus membre de la commission j'ai demandé de
rester là parce que j'ai trouvé des vrais amis. J'ai
trouvé des députés de comtés différents. Par
exemple, le député de Fabre, H n'a pas les mêmes
problèmes que moi. Le député de Chambly, il n'a pas comme
moi d'assistés sociaux dans son comté, mais il y a une chose que
nous avons en commun, nous avons une conscience sociale très
développée et très grande. Nous sommes là pour
justement tenter de faire naviguer ce projet dans la bonne direction. Nous
savons que le ministre a eu le courage d'attaquer le problème; on va
trouver une solution. Et quand il parle de changer les modalités, on va
tenter encore de l'influencer pour qu'il en change, et vous, de l'Opposition,
ne parlez jamais pour dire: il y a dissension, il y a six, sept ou huit
députés contre. Pas du tout. Nous sommes tous avec notre
ministre. Nous sommes tous solidaires avec lui. Je dis officiellement aux
regroupements des assistés sociaux: S'il vous plaît, vous
êtes mieux de vous fier sur nous, sur ceux qui sont là pour
batailler pour vous, pour tenter d'améliorer le projet que sur ceux de
l'Opposition qui ne sont là que pour critiquer, pour tenter de
détruire et qui n'a aucun apport positif à faire.
Vous, l'Opposition, à ce jour, vous n'avez rien fait. C'est
malheureux. Je pensais, que vous étiez plus forts que cela. Alors que
nous, quand j'étais dans l'Opposition, on a déjà fait de
la critique, mais on a toujours fait une critique positive. On a dit: On va
tenter...
Des voix:...
M. Polak: Oui, j'ai critiqué vos projets. Quand
c'était quelque chose de bon, on a dit oui. On a tenté
d'améliorer, on n'a jamais fait de critique négative, comme vous.
Je vous dis une chose: vous êtes mieux de nous joindre dans cette
fantastique entreprise de tenter de faire sortir les assistés sociaux du
cercle vicieux de l'aide sociale pour les réembarquer sur le chemin du
bonheur et du travail. Merci beaucoup.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président: Je voudrais simplement rappeler,
à ce moment-ci, avant la prochaine intervention, qu'un article de notre
règlement stipule - l'article 35, paragraphe 4 - que: "Le
député qui a la parole ne peut s'adresser directement à un
autre député." Donc, je prierais l'ensemble des
députés de bien respecter cette règle. Je vais donc
céder la parole à M. le député de Dupiessis.
M. Denis Perron
M. Perron: Merci, M. le Président. Dès le
début de mon exposé, j'aimerais, bien sûr, vous dire
combien je regrette l'intervention du ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, en particulier, les propos qu'il a tenus
à l'endroit de ma collègue de Maisonneuve. Je considère
les propos du ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu comme étant une bassesse, ici même, à cette
Assemblée nationale.
Je considère que le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu a trituré les informations qu'il a
données à cette Chambre, face à certains documents et face
à certains propos qui ont été tenus par ma collègue
de Maisonneuve et par d'autres personnes qui sont actuellement à
l'extérieur de cette Chambre. Je voudrais vous dire que n'eut
été, justement, de la députée de Maisonneuve, en
aucun temps, nous n'aurions eu les informations que nous avons actuellement
pour nous battre d'arrache-pied contre l'attitude gouvernementale, pour nous
battre d'arrache-pied pour les personnes qui sont touchées actuellement
par ce projet de loi 37.
Nous n'accepterons pas que, dans cette Chambre, on traite ces gens qui
sont actuellement sur l'aide sociale comme a peu près n'importe quoi
dans notre société, comme des gens qui sont bas dans la
société, parce qu'il ne faut pas oublier que ces personnes font
partie de la société québécoise, comme beaucoup
d'autres personnes en font partie aussi. N'eut été de la
députée de Maisonneuve, nous n'aurions sûrement pas fait
certaines découvertes qu'elle a fartes elle-même avec son
équipe, qu'elle a fartes avec d'autres députés de
l'Opposition, qu'elle a faites avec des membres du Parti
québécois, pour en arriver à ce que nous nous opposions
systématiquement à ce projet de loi 37, qui ne règle rien
dans notre société québécoise et, en particulier,
qui ne règle rien pour les personnes qui sont actuellement sur l'aide
sociale.
Lorsque j'entendais le ministre du Revenu venir nous dire, ici, dans
cette Chambre, et venir dire à la télévision que les
actions de l'Opposition empêchaient actuellement le gouvernement de
dépenser, voyons donc, M. le Président! Rien n'empêche ce
gouvernement de dépenser dans les programmes qui sont existants. Mais ce
n'est pas la faute de l'Opposition si le gouvernement n'avait pas assez
d'argent dans ses programmes. Ce n'est pas la faute de l'Opposition si le
ministre actuel, grâce au ministre responsable du Conseil du
trésor, à son président du Conseil du trésor, ne
fait pas les efforts nécessaires pour investir les fonds
nécessaires pour aider les personnes démunies de notre
société.
Là, on vient nous présenter un projet de loi
qui, en somme, vient assommer littéralement l'ensemble d'une
société qui est mal prise. On parie de 10 % ou 12 %. Cela touche
des hommes, des femmes et aussi des enfants. Donc, cela touche des familles
dans l'ensemble. Je n'accepterai pas qu'en cette Chambre, on triture des
informations comme le font actuellement les libéraux et, en particulier,
le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Je
n'accepterai pas cela. (23 h 40)
Je me rappelle très -bien, lorsque le ministre était de ce
côté-ci de la Chambre, à combien de reprises, il est venu
lui-même dire... J'aimerais bien que certains libéraux lisent ses
discours, lorsqu'on intervenait en tant que gouvernement, sur la politique de
l'aide sociale, sur les augmentations que nous donnions dans le temps, non pas
à toutes les années comme l'a fait le gouvernement
libéral, mais comme on le faisait à tous les trois mois, sur une
base trimestrielle, où on aidait les gens à gagner un peu plus,
à avoir un peu plus de revenus pour faire vivre leur famille d'une
façon plus honorable. Bien sûr que ce n'était pas le
Pérou; bien sûr que ce n'était pas cela. Mais, par contre,
on faisait des efforts. Lorsque le gouvernement libéral est
arrivé au pouvoir, la première chose qu'il a faite a
été d'abolir cette politique que nous avions d'indexer les
prestations d'aide sociale tous les trois mois pour le faire une fois par
année. Cela économise un montant global de l'ordre de 35 000 000
$ à 40 000 000 $ par année à ce gouvernement
libéral. C'est de cette façon qu'il agit.
Après cela, le gouvernement vient se targuer d'être un
gouvernement responsable. Ce que je peux vous dire, M. le Président,
c'est que ce même gouvernement ne s'est pas gêné pour
donner, détaxer, "désimposer" les personnes à hauts
revenus pour leur permettre d'avoir un peu plus de services personnels pendant
que, aujourd'hui, au moment où l'on se parle, on est en train de
littéralement assommer - comme je le mentionnais tout à l'heure -
les personnes qui sont les plus mal prises dans notre
société.
Quant à moi, les contenus qui sont amenés dans ce projet
de loi, c'est du néant. Cela veut dire que c'est rien. Je ne vois pas
beaucoup de libéraux, mis à part le député de
Sainte-Anne qui a parlé pour à peu près rien dire. Qu'on
relise son discours. Il a parlé pour à peu près rien dire,
sinon dire qu'il était d'accord avec le ministre, qu'il était
derrière le ministre, etc. Il l'a répété quatre ou
cinq fois. Ce que je peux dire, M. le Président, c'est qu'en aucun temps
je ne serai derrière le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu dans ce projet de loi 37 qui, actuellement,
cause des préjudices énormes à des hommes, à des
femmes et à des enfants de notre société
québécoise.
Tout à l'heure, je regardais la ministre des Communautés
culturelles et de l'Immigration, lorsque mon collègue de Shefford
pariait, qui riait à gorge déployée de ce qu'il disait.
J'in- viterais la ministre des Communautés culturelles et de
l'Immigration à se lever debout en Chambre et à nous dire
exactement ce qu'elle pense du projet de loi 37. Je l'inviterais à nous
dire ce qu'elle pense de la façon dont elle a traité les Turcs
lorsqu'ils étaient au Québec. Je l'inviterais à informer
les membres de cette Chambre et à leur dire combien a coûté
son voyage outre-mer. Actuellement, on parle de 20 000 $, 25 000 $ ou 30 000 $.
J'ai hâte de savoir, lors de l'étude des crédits et des
engagements financiers, combien la ministre a dépensé pour aller
se pavaner outremer - je peux vous dire cela - pendant que nos
bénéficiaires de l'aide sociale sont en train de se faire
littéralement organisés par son propre gouvernement.
Mme Robic:...
M. Perron: M. le Président, Mme la ministre vient de me
dire que j'étais malade. Je pense qu'entre les deux elle est bien plus
malade que moi je peux l'être. Qu'elle fasse son travail comme ministre,
qu'elle protège ce qu'elle doit protéger en tant que ministre. Si
elle a le courage, si elle a le culot de se lever en cette Chambre pour parler
en faveur du projet de loi 37, qu'elle le fasse. Mais, lorsqu'on parle, qu'elle
nous laisse tranquilles.
M. le Président, je voudrais vous lire ici un des engagements.
Hier, le ministre nous pariait de l'engagement du Parti libéral. Il ne
nous a pas donné la vraie lecture de l'engagement du Parti
libéral en 1985, lors de la période électorale, parce
qu'il avait bel et bien prêché, il avait bel et bien amené
des gens à voter pour les libéraux en leur promettant la
parité de l'aide sociale. Mais ce que nous avons dans le projet de loi
37, ce n'est pas la parité, ce n'est pas la demi-parité non plus.
C'est à peu près le néant. On prend d'une main, on donne
de l'autre. Pendant tout ce temps-là, le gouvernement en retire
même des bénéfices. Il va chercher des dizaines de millions
de dollars dans les poches des assistés sociaux pour permettre d'avoir
une politique qu'il dit cohérente et qui n'est pas cohérente du
tout. C'est carrément de l'injustice, c'est carrément de
l'insécurité sociale qu'il est en train d'amener actuellement par
ce projet de loi. C'est aussi de l'injustice face à l'ensemble des
familles québécoises.
M. le Président, on a vu de quelle façon le ministre avait
traité les personnes qui sont venues présenter des
mémoires lors de la commission parlementaire sur l'avant-projet de loi.
Toutes les personnes, en grande majorité, ont contesté le projet
de loi. Pour moi, pour les membres de l'Opposition et pour la majorité
des personnes qui se sont présentées en commission parlementaire,
ce projet de loi est actuellement le plus beau torchon ambulant que nous
puissions avoir comme législation.
Je pense que ce n'est pas la façon dont on peut aider nos
personnes démunies. Qu'on prenne
de l'argent qui est dû à ces personnes parce qu'elles n'ont
pas de travail, qu'on prenne de l'argent de ces personnes et qu'on le
transfère par la bande à des riches, je ne suis pas d'accord avec
ça du tout. Tout le monde sait très bien qu'ici, en cette
Assemblée nationale, lorsque, au plan de la fiscalité, on a
réduit l'imposition des hauts salariés, la majorité des
députés libéraux étaient contents parce que,
justement, cela les touchait aussi. Tous les députés de cette
Assemblée, incluant les députés de l'Opposition - chose
que nous avons dénoncée, d'ailleurs - ont profité de la
situation. Mais ce n'est pas comme cela qu'on va régler nos
problèmes de société. Ce n'est pas comme cela qu'on va
aider notre petit monde dans la vie. Ce n'est pas de cette façon. Ce
n'est pas en leur sacrant des coups de masse sur la tête qu'on va
régler leurs problèmes.
Lorsque le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité
du revenu vient nous parler de ses programmes de création d'emplois,
bien sûr que le ministre s'est servi des programmes que nous avions
antérieurement, mais ces programmes donnent quoi sous les
libéraux, aujourd'hui? Que donnent-ils? Au cours des deux
dernières années, 17 % des personnes s'en sont servies, et en
particulier au cours de 1987. Et il vient nous dire qu'il faut continuer dans
le même sens pour aider les personnes qui sont sur l'aide sociale, les
personnes qui sont aptes au travail, pour permettre à des inaptes
d'avoir plus de revenus.
Lorsqu'on regarde l'ensemble des décisions gouvernementales qui
vont suivre, par réglementation ou autres, lorsque ce projet de loi sera
adopté à l'Assemblée nationale, que restera-t-il aux
personnes qui sont actuellement sur l'aide sociale? Il ne restera pratiquement
rien. Par contre, les personnes bien nanties de notre société
vont être très encouragées à continuer à
bénéficier de tout ce que les libéraux veulent bien leur
donner. Rien ne dit que cela ne les aide même pas au cours de leur
campagne de financement annuelle. Ce n'est pas pour rien qu'ils amassent des 5
000 000 $, 6 000 000 $, 7 000 000 $ par année. Ce n'est pas pour
rien.
Des voix: Elle est déjà faite.
M. Perron: Je sais qu'elle est déjà faite. Je
demanderais au whip du gouvernement, s'il veut s'adresser à cette
Chambre, qu'il se lève de son siège et qu'il s'adresse à
cette Chambre. Qu'il nous parle aussi du projet de loi 37. Comment le voit-il,
lui? De quelle façon va-t-il se répercuter sur les
assistés sociaux et les assistées sociales de son comté?
Qu'il nous en parle au lieu de placoter comme il le fait avec un autre de ses
collègues. Qu'il se lève et qu'il nous dise ce qu'il en pense au
lieu de placoter ou de dire à peu près n'importe quoi en cette
Chambre.
Dans l'ensemble de ce projet de loi que nous avons devant nous, il est
sûr que... Pour l'information des libéraux, à peine un mois
et demi après la fin des travaux de la commission parlementaire, le
ministre rendait publics, le mercredi 11 mai, les amendements à son
projet de réforme et déposait son projet de loi sur la
sécurité du revenu. Le projet de loi comporte certaines
améliorations, bien sûr, par rapport à l'avant-projet de
loi. Cependant, l'analyse du projet de loi nous révèle qu'il y a
encore de nombreux aspects qui demeurent totalement inacceptables.
Premièrement, la baisse des prestations par rapport à la
situation actuelle pour la catégorie des disponibles, les neuf premiers
mois et les admissibles. Que l'on comprenne bien, c'est-à-dire pour ceux
et celles qui voudront participer aux mesures, mais qui seront dans
l'impossibilité de le faire en raison de l'incapacité du
gouvernement de les offrir réellement. Deuxièmement, la coupure
pour partage de logement qui demeure, bien qu'elle soit diminuée de 115
$ à 85 $. Troisièmement, la contribution parentale. De plus, de
nombreux autres aspects demeurent flous, tels les montants de gains de travail
permis, par exemple, les besoins spéciaux qui seront reconnus, les
montants d'avoirs liquides et de biens permis.
Je continue, M. le Président: Après une lecture attentive
du projet de loi, on constate également que le ministre a profité
de son projet de loi pour apporter des modifications pour le moins
extrêmement inquiétantes. Que l'on parle, par exemple, de la
distinction entre apte et inapte. On présume clairement, contrairement
au projet de réforme initial, de l'aptitude de tous les
bénéficiaires. Ceux-ci devront démontrer leur inaptitude
sur la base d'une définition plus sévère. Celle-ci est
maintenant liée à la possibilité ou non d'occuper un
emploi. Mise en place d'un comité de professionnels dont un
médecin, tous désignés par le ministre, pour entendre les
demandes de révision liées à l'aptitude. De plus, la Loi
sur la Commission des affaires sociales est modifiée pour permettre que
l'assesseur soit un médecin dans le cas d'un appel relatif à
l'aptitude d'une personne à occuper un emploi. De plus, la
possibilité pour le ministre d'exiger en tout temps un nouvel examen
médical. (23 h 50)
Pour qui se prend-il, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu? Se prend-il pour un médecin? Se
prend-il pour une personne qui a une ligne directe avec le Saint-Esprit? Pour
qui se prend-il? Il se prend pour un autre, tout simplement. Il se
réserve des pouvoirs par la loi et par la réglementation pour
faire, après cela, à peu près n'importe quoi pour assommer
les gens encore plus qu'il ne les assomme actuellement et surtout les personnes
qui sont démunies, les personnes qui, dans notre société,
y ont déjà assez goûté.
Je pense, M. le Président, que, par exemple, sur les pensions
alimentaires, par l'élargissement de ses pouvoirs
discrétionnaires au niveau de la fixation, de la modification ou de
l'annulation de la pension alimentaire, le ministre se donne
notamment le droit d'intervenir sans l'autorisation du
bénéficiaire et se donne même le droit d'imposer une amende
si le bénéficiaire obtient une entente de pension alimentaire
sans avoir obtenu une autorisation préalable du ministre.
Comme je le disais tout à l'heure, M. le Président, pour
qui se prend-il, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu?
Une voix: Pour lui-même!
M. Perron: Oui, il se prend pour lui-même, il se prend pour
un autre. Il se prend pour un autre et cela vient d'un libéral.
Concernant les dettes et les remboursements, le ministre se donne la
possibilité de couper les prestations du programme APPORT et de
réclamer en vertu d'autres lois des sommes d'argent pour rembourser une
dette à l'aide sociale.
M. le Président, le pouvoir de tutelle au niveau de
l'administration du chèque. En vertu de l'article 27, le ministre
s'arroge le droit, compte tenu de circonstances particulières ou du
comportement antérieur du bénéficiaire dans
l'administration de ses biens, de payer directement à un
créancier les coûts de logement, d'électricité ou de
chauffage et d'en remettre l'excédent aux bénéficiaires.
Voilà les principaux faits de ce que nous apporte ce projet de loi 37,
M. le Président.
Je peux vous assurer qu'en ce qui me concerne je ne suis pas d'accord du
tout avec la façon dont le gouvernement traite ce dossier des
assistés sociaux et la façon dont le ministre de la Main-d'Oeuvre
et de la Sécurité du revenu traite ces personnes.
Lorsqu'on dit que la loi déposée préconise un recul
important, essentiellement par une baisse de prestations que reçoivent
actuellement les personnes assistées sociales, donc, un appauvrissement
pour la grande majorité d'entre elles... Encore une fois, le ministre a
fait la sourde oreille aux groupes qui se sont présentés en
commission parlementaire, car 80 % de ces groupes ont dénoncé les
fondements mêmes de la réforme du ministre de la Main-d'Oeuvre et
de la Sécurité du revenu, donc, du gouvernement
libéral.
Trois grands principes sont mis de l'avant dans le projet de loi:
l'équité et la parité pour les moins de 30 ans ainsi que
l'incitation au travail. Comment ne pas être d'accord avec ces principes?
Bien sûr que nous sommes d'accord avec ces principes! Bien sûr que
l'Opposition est d'accord avec ces principes! Bien sûr que le Parti
québécois est d'accord avec ces principes! Mais, cependant, les
modalités d'application contenues dans le projet de loi ne permettent en
aucune façon d'atteindre ces grands principes qui sont
énoncés.
On constate de plus que la parité pour les moins de 30 ans
exigée par l'ensemble de la société et faisant partie
d'une promesse électorale du Parti libéral demeurera encore un
cheval de bataille très important. Le projet de loi n'accorde pas cette
fameuse parité promise par les libéraux au cours de la campagne
électorale de 1985. On pourrait aller jusqu'à dire, M. le
Président, que certains des libéraux ont été
élus dans cette Chambre par fausse représentation, parce que la
grande majorité des promesses qui ont été fartes au cours
de la campagne électorale de 1985 n'ont pas été tenues. Je
me demande vraiment, M. le Président, pourquoi la population du
Québec n'en tient pas compte actuellement. La population du
Québec devrait se rappeler toutes les promesses qui ont
été faites par ce gouvernement libéral, devrait se
rappeler combien ce gouvernement devait être transparent, combien ce
gouvernement devait régler l'ensemble des problèmes de la
société québécoise. Mais, depuis qu'il est au
pouvoir, ce gouvernement ne s'occupe que des personnes bien nanties de notre
société, il oublie littéralement toutes les personnes qui
sont dans le besoin.
On a seulement à regarder, M. le Président, la
façon dont le président du Conseil du trésor et certains
ministres responsables ou supposément responsables de ce gouvernement
traitent actuellement des organismes de bénévoles dans tout le
Québec et aussi toutes les personnes qui sont touchées dans les
80 maisons de femmes qu'on est en train de couper dans tout le Québec,
les maisons d'hébergement. Que pense-t-on aussi des jeunes de qui vous
avez été chercher des votes lors des dernières
élections en 1985? Quelles promesses aviez-vous faites à ces
jeunes? Quelles sont les promesses que vous avez tenues? Aucune! Aucune
promesse n'a été tenue face aux jeunes. Aujourd'hui, le
gouvernement vient se targuer, avec le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu en tête, de régler l'ensemble des
problèmes des Québécois et des
Québécoises.
Moi, je regrette, M. le Président, mais ce que je peux vous dire,
c'est qu'en aucun temps je ne serai d'accord avec ce gouvernement lorsqu'il
viendra, sort par loi, soit par réglementation, soit par des programmes
quelconques, soit par des coupures quelconques nuire aux personnes les plus
démunies dans notre société ou, encore, nuire à la
majorité des organismes qui aident ces mêmes personnes
démunies dans notre société. Je voudrais mettre en garde
le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, son
gouvernement et l'ensemble des ministériels de faire bien attention
à la façon dont on va adopter ce projet de loi, à la
façon dont, par la suite, on va traiter les assistés sociaux
parce que c'est à ce moment peut-être que ces gens vont comprendre
combien ils n'ont pas été corrects pour la société
québécoise, pour au moins une partie de la société
québécoise qui est extrêmement démunie.
M. le Président, j'aurais beaucoup de choses encore à
dire, mais je vais m'arrêter ici puisque mon temps est
écoulé. En conclusion, je ferai tous les efforts
nécessaires pour empêcher que
ce projet de loi soit adopté de la façon qu'il est
actuellement libellé. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Est-ce qu'il y a un autre intervenant?
Alors, je vais maintenant reconnaître M. le député de
Saint-Jacques.
M. André Boulerice
M. Boulerice: M. le Président, j'ai vu bien des choses
dans cette Chambre depuis mon élection, le 2 décembre 1985. J'ai
commencé par voir notre langue française bafouée. J'ai vu,
après cela, nos droits de parlementaires également
bafoués. Là, j'ai devant moi une loi mal faite, une loi
pénalisante, une loi sans générosité, une toi qui
confirme le vieil adage: Au plus fort la poche. Donc, le Parti libéral,
les rouges, le parti des forts écrase inévitablement les petits,
les plus faibles, les plus démunis.
J'écoutais le député de Sainte-Anne, personnage
coloré qui se disait tellement à l'écoute de ces personnes
dans sa circonscription, qu'il les comprenait bien, qu'il les avait
amenées à Québec. Les citoyens de Pointe-Saint-Charles
dans sa circonscription connaissent tellement bien son degré
d'écoute qu'ils ont fait une pétition de 796 noms, je crois.
Cette pétition, ils n'ont pas demandé à leur
député, le député de Sainte-Anne actuel, de la
déposer, cela a été le député de
Saint-Jacques, un député de l'Opposition qui l'a
déposée. Quelle belle écoute de la part de ce
député! Je voyais le député de Saint-Louis - dans
quel monde vit-il et quel comté représente-t-il où il y a
des îlots de pauvreté - je voyais le député de
Saint-Louis adjoint au président du Conseil du trésor applaudir
d'une façon délirante parce qu'ils avaient remporté la
motion de report, M. le Président.
Si les députés du centre-est et du centre-sud, si
quelques-uns d'entre eux ont murmuré certaines réserves au sujet
de la loi présentée par le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, je peux vous dire que, nous, les
députés du Parti québécois de Montréal, on
ne va pas murmurer notre désaccord envers cette loi, on va le clamer
très fort: C'est non et il n'en est pas question de cette
réforme. Si, pour le député de Sainte-Marie, ce n'est pas
important la rue Poupart et les gens qui y habitent, comme la rue Fullum, la
rue Delorimier, la rue Mont-Royal et la rue Ontario, eh bien, que les gens de
ce coin se disent que bientôt ils auront une voix forte pour les
représenter. Je connais très bien ce coin de pays-là et je
sais ce que cela peut représenter que d'être sur l'assistance
sociale. J'en vois à mon bureau qui viennent et je n'en ai pas encore vu
un qui est venu dans mon bureau, qui s'est assis et qui s'est
pété les bretelles et qui m'a dit: Je suis assisté social,
je suis donc fier, je suis donc bien! Je n'en ai pas encore vu un. Ceux qui
auraient encore ces préjugés, qui ont été
alimentés par le terrorisme psychologique des boubous macoutes, n'en
croyez rien. Venez passer une journée dans mon bureau de circonscription
et vous allez voir qu'il n'y a personne qui est heureux d'être dans un
état de dépendance comme celui-là, quand on sait tout ce
que cela peut causer au point de vue psychologique d'être dans un tel
état, M. le Président, (minuit)
Je suis content d'avoir entendu le discours de M. le ministre de la
Santé et des Services sociaux qui se plaisait à citer le
président du Parti québécois. Vous savez, je n'ai pas le
droit de dire que le ministre a menti en Chambre. Je n'ai pas le droit. Je
dirai donc, M. le Président, que toute la vérité n'a pas
été dite. Le ministre fait bien les lectures qu'il veut faire. Il
lit bien ce qu'il veut. Le Devoir de mardi, le 26 avril 1988, titre
"Parizeau démolit la réforme de Paradis". Ah, regardez-donc cela.
M. Paradis perd des appuis, semble-t-il! "Seules des personnes "tombées
sur le crâne" retourneront travailler dans le cadre que créera la
réforme de l'aide sociale du gouvernement libéral" a
affirmé hier le chef du Parti québécois, M. Jacques
Parizeau. "Cette réforme est "viciée à la base". Elle taxe
les bénéficiaires de l'aide sociale plus qu'aucun millionnaire et
doit être jetée à la poubelle" a ajouté
l'ex-ministre des Finances du gouvernement péquiste qui avait mis en
place les programmes d'employabilité, aujourd'hui au coeur du projet de
la réforme. Ah, voyez-vous!
D'ailleurs, cette rencontre se faisait avec des
bénéficiaires de l'aide sociale et avec ma collègue, la
députée de Maisonneuve, que le ministre essayait de
discréditer, parce que le vieil adage est toujours vrai, M. le
Président: Quand le message blesse, essaie donc de tuer le messager.
C'est bien ce qu'il a tenté de faire. Alors, quand il s'agira, pour le
ministre libéral d'en face, de travestir les propos que tient le
président de ma formation politique, je l'encourage à tout lire
ce qu'il a dit ou ce qu'il a écrit et de ne pas dire de faussetés
un peu comme l'a fait l'affable député de Sainte-Anne en disant
qu'il écoutait tout le monde quand - je vous le répète -
on sait fort bien que les 796 bénéficiaires de
Pointe-Saint-Charles ont confié plutôt à un
député de l'Opposition, celui de Saint-Jacques, de déposer
une pétition contre ce projet de réforme. Ce n'est pas à
lui qu'iis l'ont remis.
Mon collègue, le député de Duplessis, vous a
parlé du partage du logement et c'est sur ce volet du projet de loi 37
que j'aimerais vous parler un peu plus à fond, le logement.
Premièrement, je pense et j'espère que, de l'autre
côté, on se rend compte de l'importance du logement, ne serait-ce
que pour les conditions climatiques. Remarquez que je n'en suis pas certain,
puisqu'ils ont aboli le dernier Programme d'accès à la
propriété. Là, il en ont remis un, mais plus ou moins bon,
en définitive, comparativement avec ce que nous, on avait fait.
En ce qui concerne le logement social, on avait promis 15 000 000 $
uniquement pour la
circonscription de Saint-Jacques. On n'a même pas encore vu un
cent de cela. Alors, le logement, c'est important. Du logement social à
Montréal, depuis le 2 décembre 1985, il ne s'en construit plus.
Les logements, qu'on a inaugurés ces derniers mois, étaient des
logements planifiés à l'époque du gouvernement du Parti
québécois. Il n'y a pas un logement neuf qui a été
inauguré dans les circonscriptions du centre-sud de Montréal qui
date du régime libéral.
Le partage du logement qui est pénalisé dans la
réforme présentée par le ministre, dans son projet de loi
37, c'est une mesure qui est totalement inéquitable. Il veut adopter un
principe d'économie d'échelle qui en coûte moins à
deux individus qui partagent le même logement qu'à deux individus
qui habitent chacun dans son logement. La mesure des économies
d'échelle, c'est seulement le logement et les communications,
c'est-à-dire le téléphone. Regardez la logique
mathématique de cela. Pour une personne, le logement, c'est 277 $ - ce
sont ses calculs - pour deux personnes, 338 $, chacune, 169 $; communications,
17 $, le téléphone; deux personnes, 18 $ chacune, 9 $. Total:
Pour une personne, 294 $, chacune 178 $.
On peut donc conclure que deux personnes qui partagent le même
logement consacrent 178 $ chacune au logement et aux communications,
c'est-à-dire au téléphone. Si ces personnes habitaient
seules, elles consacreraient 294 $ pour les mêmes postes
budgétaires.
Sur quelle planète vivent ces gens, M. le Président? Dans
quelle banlieue cossue habitent-ils? Essayez de me trouver un logement
convenable, ne serait-ce que pour une seule personne, à 294 $ par mois.
On est en train de faire adopter un projet de loi où on va dire: Si vous
cherchez un mieux-être, c'est-à-dire à ne pas habiter un
taudis, eh bien, vous allez être pénalisés parce que vous
êtes des assistés sociaux. Vous autres, les assistés
sociaux, vivez dans un taudis, vivez dans les maisons de chambres
délabrées, comme il y en avait une sur la rue Ontario et
où il y a eu quatre morts, vivez dans les maisons de chambres
délabrées comme il y en avait une sur la rue Saint-Hubert
près de Viger, qui a brûlé au mois d'avril et où il
y a eu deux morts! Ce n'est pas grave, vous autres, les assistés
sociaux. Partager un logement, essayer d'avoir quelque chose d'un peu plus
convenable, que votre détresse soit moins grande, ben, voyons donc!
c'est du vol. C'est de l'exploitation. Vous êtes des assistés
sociaux. Vous êtes des moins que rien. Habitez des taudis. Vivotez. Puis
jamais le moindre petit plaisir. Vous êtes des assistés sociaux.
Vous êtes les parias de la terre. Vous êtes les damnés.
C'est ce qu'on dit dans ce projet de loi, M. le Président. C'est
ce qu'il y a là-dedans. C'est ça, le plus honteux dans le projet
de loi. C'est cette mentalité qu'on veut imprégner à nos
compatriotes, que ceux qui sont dans la détresse y sont par choix,
qu'ils y sont par goût. Je vous le répète. Je n'en ai
encore jamais rencontré. Ah! il peut peut-être y en avoir un ou
deux. Il y a toujours des exceptions dans la vie. Mais, en tout cas, tous ceux
que j'ai rencontrés... Et Dieu seul sait que j'en ai rencontré
parce que, malheureusement, il en reste encore un bon nombre dans ma
circonscription. On était bien parti pour les aider, notamment au plan
du logement, que vous avez complètement "scrappé". Il faut
employer un mauvais mot français pour que vous le compreniez bien.
Eh bien, tous ces gens vont se retrouver, en 1990, avec 120 $ par mois,
parce que, pour employer le mot de M. le député de Sainte-Anne,
ils sont "débrouillards". Pas débrouillards dans le sens de
faussaires, mais ils ont cru qu'un partage des coûts pouvait les aider
à améliorer un peu leur sort, en sachant aussi qu'un partage de
logement, cela a un contrecoup, qui est celui d'avoir un peu moins
d'intimité et des choses comme celle-là. Ils ne le font pas par
unique plaisir. Ils le font par besoin d'abord, par une certaine
solidarité, pour briser peut-être aussi la solitude dans laquelle
le sytème les confond, les enferme, mais de là à dire
qu'ils sont fraudeurs, que c'est du vol et qu'il va falloir les couper parce
que cela n'a pas d'allure qu'ils réussissent en se mettant à deux
à économiser à peu près 20 $, 30 $ ou 40 $, quand
justement, mon collègue y a fait allusion, on n'a pas posé de
question pour savoir combien cela a coûté à la ministre des
Communautés culturelles et de l'Immigration pour faire son
"caravane-sérail" de trois semaines en Afrique, en Asie, en
Amérique et où elle veut. Mais si, par malheur, eux autres, ils
faisaient une maigre économie de 40 $ ou 50 $ sur le partage d'un
logement, ce serait épouvantable! On va économiser
là-dessus peut-être quelques millions, oui, mais les
bénéficiaires du programme APTE seront toujours soumis à
la réduction de 120 $ en 1990 s'ils partagent leur logement avec
d'autres personnes, apparentées ou non. (0 h 10)
Je reviens aux données mathématiques. Savez-vous combien
cela représente de ménages? 121 723 ménages seront
susceptibles d'être soumis en 1990 à la réduction pour le
partage du logement. On va pénaliser 121 773 ménages d'avoir
essayé de s'en tirer un peu mieux, d'avoir des conditions non pas
maximales, M. le Président, mais de se rapprocher des conditions
strictement minimales, du moins pire, comme on dit en langage coutumier. Les
résultats de cela - il faut voir un autre chiffre - parmi les
ménages soumis au partage du logement, 84,8 % sont des personnes seules.
Est-ce qu'on se rend compte? De l'autre côté, je vois mon
collègue, le député de Sainte-Marie. Est-ce qu'il se rend
compte de cela, que, parmi les ménages qui seront soumis au partage du
logement, 84,8 % sont des personnes seules?
Une personne seule, je vous le répète, je l'ai dit
tantôt, M. le Président, est-elle encore
capable de se payer, à moins que ce ne soit un taudis, un
logement convenable, décent, selon des standards qui puissent exister et
qui ne soient pas les nids à feu qui brûlent
régulièrement? Il en brûle autant dans son coin que dans le
mien, et on en meurt. Des personnes seules sont-elles capables de vivre
décemment avec 294 $ par mois pour le logement et les communications?
Est-ce qu'on va être capables de faire cela, M. le Président? M.
le Président, c'est quelque chose d'épouvantable!
Quand on regarde l'évolution de la clientèle
touchée, c'est-à-dire les personnes seules, en mars 1987, les
chiffres donnaient d'exclus 17 687; ceux qui étaient pour être
réduits: 3616. Quelle est la solution de rechange pour eux? Les
programmes d'emploi? Je vois M. le député de Bourget qui a eu un
large sourire quand j'ai prononcé programmes d'emploi. On vit une
situation économique qui nous est très favorable, et je vais m'en
réjouir. Oui, je suis d'accord avec le député de Bourget
quand il crie du fond de la salle que cette loi est dégueulasse, M. le
Président. On vit dans une période de forte croissance
économique, et je m'en réjouis pour le Québec, mais au
niveau de la création d'emplois, le gouvernement en place n'est pas le
champion, quand on voit ce qui se fait en Ontario et quand on voit
malheureusement que le taux de chômage à Montréal est trois
fois plus élevé qu'à Toronto même.
Est-ce que c'est un projet de loi qui va aider les gens qui sont sur le
bien-être social, sur l'assistance sociale, à acquérir un
peu de dignité après qu'on les ait tellement humiliés
depuis deux ans et demi de gouvernement libéral. Est-ce une loi qui va
nous permettre cela? J'en doute, M. le Président. Je pense que,
malheureusement, c'est une loi qui va continuer à les enfermer dans ce
cercle, une loi qui va continuer à les appauvrir, quand on sait que cela
touche 600 000 personnes au Québec, la réforme d'aide sociale
dans laquelle le gouvernement Bourassa a fait son lit. On a vu le vote
tantôt et, quels que soient les assistés sociaux qui nous
écoutez, quelles que soient les risettes que vous ont faites les
députés que vous avez rencontrés, n'ayez pas peur, ils
vont tous voter en arrière de leur ministre quand va venir le temps du
vote, n'ayez pas peur!
Alors qu'on se serait attendus à la mise en place d'une politique
de sécurité du revenu, on se retrouve avec des
réaménagements qui sont tortueux, qui maintiennent les 600 000
assistés sociaux du Québec dans une société
à part, dans un véritable ghetto de pauvreté, dans de
véritables camps de concentration que sont les taudis. On est en train
de faire du Québec un Québec brisé et cela, c'est le
gouvernement d'en face qui l'a fait. Ce gouvernement tellement fort en
promesses, mais faible en réalisations, M. le Président.
Vous me faites signe de conclure? Vous avez remarqué que j'ai
été très calme. Ce n'est pas parce que je n'avais pas le
goût de rugir, mais je vous le répète, non, jamais je ne...
Oui, je rougis de honte d'être dans une Assemblée nationale
où c'est vous qui êtes en face. Jamais y n'y a eu des lois comme
celle-là qui ont été adoptées
précédemment. Mais la population du Québec n'est pas dupe.
Les Québécois, ce ne sont pas des caves. Les
Québécois vont bien comprendre ce qu'ils ont fait. J'ai bien
hâte au prochain porte-à-porte pour parler de vous, M. le
député de Bourget, qui aurez adopté cette loi, ou d'Anjou,
si vous changez de comté, pour mieux vous faire battre. Et vous, M. le
député de L'Assomption, vous savez qui vous attend là-bas?
Vous verrez! J'ai bien hâte qu'on fasse le porte-à-porte, cher
collègue du comté de Sainte-Marie. On va parler du sort que votre
gouvernement est en train de faire aux assistés sociaux et on verra
lequel des deux aura la crédibilité de la population. Vous, M. le
député de Vimont, on verra...
Le Vice-Président: En conclusion, M. le
député.
M. Boulerice: En conclusion, ce n'est pas compliqué. Les
riches peuvent tout attendre de ce gouvernement, mais que les pauvres, les plus
démunis n'attendent rien, ils n'auront jamais rien. De toute
façon, c'est une réalité que l'on peut retrouver
très facilement dans les livres du président-directeur
général des élections: Dis-moi qui finance ton parti, je
te dirai qui tu es. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Je vais maintenant céder la
parole à M. le député de Sainte-Marie.
M. Michel Laporte
M. Laporte: Merci, M. le Président. Le hasard a voulu que
deux députés du centre-sud puissent prendre la parole l'un
après l'autre pour défendre, je crois bien, les
intérêts de leurs concitoyens et concitoyennes. Il me fait plaisir
de prendre la parole pour une première fois sur l'adoption du principe
du projet de loi 37, la Loi sur la sécurité du revenu, et la
réforme.
Avant de commencer à parler plus précisément de la
réforme et des éléments que j'en ai ressortis, il faut
dire qu'après le discours du député de Saint-Jacques je ne
me surprends plus des types d'inflation qui existent. On sait qu'il en existe
plusieurs, mais plus particulièrement du type d'inflation verbale. Moi,
je n'ai jamais eu comme principe d'être très volubile, mais
d'être surtout pragmatique. En ce sens, je vais répéter au
député de Saint-Jacques un peu ce que j'ai
répété lors de la commission parlementaire qui a
siégé sur la levée du moratoire, à l'époque
où ï y avait des tergiversations dans Montréal-centr*
lorsqu'il était président et que, moi, j'étais poigne
comme avocat à défendre les gens par rapport au logement. Oui, M.
le Président, c'est vrai que celui qui vous parle, avant d'avoir des
cas d'aide sociale dans son bureau de comté, cela faisait
déjà au moins cinq ans qu'il défendait les
intérêts de ces gens. Je pense que c'est toujours important de
rappeler que des leçons de morale, on en a à recevoir parfois,
mais que cela dépend de qui cela vient.
Des voix: Bravo!
M. Laporte: M. le Président, on a souligné
tantôt que le projet de loi 37 visait à réformer l'aide
sociale. Par définition, je crois bien que réformer quelque chose
fait appel à une nouvelle conception, à une nouvelle
mentalité et, surtout, à une nouvelle approche.
Assurément, comme n'importe quelle réforme qui existe, il faut en
discuter, et ce, passablement, comme lors de la commission parlementaire qui a
siégé depuis le 22 février, et il faut discuter
passablement avec les gens pour essayer d'étendre sur une forme de
consensus ce qu'est une réforme et de quelle façon les
philosophies peuvent se rejoindre.
D'ailleurs, j'ai écouté avec plaisir le
député de Duplessis qui mentionnait tantôt qu'il
était d'accord avec les objectifs poursuivis par l'actuel gouvernement
pour ce qui est de la réforme de l'aide sociale et en mentionnant
même, si je ne me trompe point, que son parti était d'accord avec
les principes de l'aide sociale. Cependant, les modalités ne lui
plaisent pas. J'ai pu comprendre, en sous-entendu, le député de
Saint-Jacques parler du programme, mais simplement du programme APTE. Par cela,
j'ai cru comprendre - qui ne dit mot consent - qu'il est en accord avec les
deux autres programmes qui étaient avancés, en tant que tels,
pour ce qui est de la réforme de l'aide sociale.
Alors, il faudrait peut-être s'entendre pour dire quelles sont les
propositions actuelles qui nous permettraient, comme on le dit depuis le
début... En ce sens-là, je pense qu'il faut louer le ministre
pour sa très grande ouverture d'esprit... Quelles sont, pour bien
desservir la population qu'on dessert actuellement et qu'on représente,
de façon concrète ce qu'on pourrait leur rendre comme meilleurs
services, mais surtout comme propositions, afin d'adopter ce projet de loi qui
fait appel - je le dis depuis le début - à un autre concept et
à une autre mentalité?
D'une part, comme je le disais, le principe de réforme, comme
l'indique... Je vais donner deux citations de dictionnaires qui nous indiquent
ce qu'est une réforme. Dans Le Petit Robert, on nous indique que
c'est "un changement qu'on apporte dans la forme d'une institution, afin de
l'améliorer, d'en obtenir de meilleurs résultats". Comme je le
dis, il y a des principes et des philosophies qui diffèrent. Cela, je le
conçois très bien. Mais je pense qu'il faut comprendre ce qui est
sous-jacent à une réforme.
Dans le Larousse, qu'est-ce qu'on nous indique? C'est un
"changement opéré en vue d'une amélioration". Quelles sont
donc, à l'inté- rieur d'une réforme, les
améliorations ou, à tout le moins, les éléments
qu'on compte apporter? Je tiens toujours à les réexprimer, parce
que j'ai eu plusieurs rencontres dans mon comté, au-delà de 50,
avec des individus, avec des groupes et aussi, plus particulièrement,
avec les principaux intervenants qui avaient à manoeuvrer ou
plutôt, si je peux m'exprimer ainsi, qui ont tout le temps la
clientèle qu'on appelle de l'aide sociale.
La première appréhension qu'ont ces gens, c'est de dire:
On ne sait pas sur quoi on s'en va. Cette glace semble mince. Devant cette
forme d'incertitude, quelles sont réellement les propositions et comment
cela va-t-il s'établir? Comme je le disais - je vais le
répéter plusieurs fois dans ce discours-ci - il faut regarder
cela dans un ensemble et voir, et cela continuellement, de façon
concrète et pragmatique, comment cela va se répercuter et quelles
vont en être les conséquences.
Assurément, M. le Président, tant et aussi longtemps qu'il
n'y a pas une application concrète, comme le démontre le sondage
qui était ressorti, il y avait, plus ou moins, une personne sur deux qui
avait entendu parler de la réforme de l'aide sociale. Je pense qu'on se
doit, ne serait-ce qu'à ce niveau, de pouvoir avoir ce qu'on pourrait
appeler une campagne de sensibilisation, qui pourrait nous permettre, d'une
autre façon, d'avoir un autre "feed-back" toujours dans le même
sens que je l'ai exprimé tantôt.
Les gens de l'aide sociale sont des gens dignes, des gens autonomes et
on se doit d'avoir un respect mutuel, parce que ces gens-là... Je suis
issu du comté de centre-sud, de ce quartier plus
particulièrement. Je suis natif de ce comté qu'on appelle le
comté de Sainte-Marie. Oui, M. le Président, j'ai
côtoyé régulièrement - et je n'ai aucune honte
à dire que j'ai même des amis personnels qui le sont actuellement,
malheureusement, pour des motifs indépendants de leur volonté -
des gens de l'aide sociale.
Ce sont des gens fiers et nobles. En ce sens-là, je crois qu'il
faut le souligner et le resouligner plus particulièrement. Je l'ai
même souligné au député de Saint-Jacques
tantôt. Il arrive quelquefois, comme dans n'importe quelle organisation
et comme dans n'importe quel programme qu'il existe, et ce, en minorité,
des situations qui font en sorte qu'on en fait une
généralité pour ce qui est du groupe qu'on dessert.
Cela a été exprimé à plusieurs reprises. Ce
que je souligne, c'est que, parfois, avec les énergies qu'on peut y
mettre, la compréhension qu'on peut donner à ces gens et les
informations qu'on peut leur soumettre comme à une réunion,
d'ailleurs, que j'ai tenue à l'automne sur les divers programmes qui
avaient été mis en place par l'ancien gouvernement sur les
possibilités d'utiliser ces programmes en vue d'une réinsertion
sur le marché du travail... Il est certain que j'ai deux choix. Soit
celui de dire: Écoutez, ce
n'est pas bon. Vous allez faire du 'cheap labour", etc. Là, vous
mettez cela de côté. Ou bien on dit: On l'a, on l'utilise, on va
de l'avant avec cela. On essaie de s'en sortir. Je pense que ce sont deux
concepts auxquels on fait appel et qui sont différents. Ce sont surtout
deux façons de travailler qui sont différentes. J'en appelle
justement et plus particulièrement au raisonnement de base qui est de
dire que nous, comme députés, avons un travail de base à
faire à ce chapitre et que nous devons aider nos concitoyens en ce
sens.
Un bref historique, pour rappeler ce qui a amené la
réforme de l'aide sociale et ce qu'elle est. C'est assurément un
peu plus théorique, mais je pense que cela va nous aider à
comprendre. En 1976, il y avait 435 045 personnes sur l'aide sociale. En 1987,
649 555 personnes. En 1971, il y avait deux ménages sur trois qui
étaient considérés comme inaptes. En 1987, 73, 4 % des
personnes sont actuellement aptes. Il y a donc un changement dans la
clientèle de l'aide sociale. L'âge moyen en 1976 était de
36 ans. En 1988, il est actuellement de 32 ans. Le coût en 1976
était de 618 600 000 $; en 1986, 2 200 000 000 $.
Ce sont des données de base qui peuvent, je pense, nous guider
pour voir que la photographie de l'implantation d'un système de dernier
recours, qui se trouvait l'aide sociale au moment où elle a
été créée, n'est plus la même photographie
qu'on a aujourd'hui, en 1988. C'est comme n'importe quoi. Les gens ont vieilli.
Les attentes sont différentes. Les besoins sont différents. Ce
qui a amené... Et même à cela, je pense qu'on peut revenir
couramment sur des points plus particuliers. J'aurai l'occasion d'y revenir. Ce
sont des points qui ont même été soulevés par des
députés actuels de l'Opposition, qui n'avaient jamais
été modifiés et qui faisaient le constat que l'aide
sociale, actuellement, ne visait plus ce qu'elle visait au début et
qu'elle ne desservait plus spécifiquement la clientèle à
laquelle elle s'adressait.
Sainte-Marie, mon comté, est assurément constitué
de plusieurs personnes sur l'aide sociale. Approximativement 27 % des gens
bénéficient actuellement, dans le comté de Sainte-Marie,
des prestations de l'aide sociale.
Il est bon d'expliquer simplement ce que sont l'aide sociale et sa
réforme. Comme je le disais plus particulièrement, il y a trois
programmes: Soutien financier, APTE, que l'on décrit comme une Action
positive pour le travail et l'emploi et le programme APPORT, soit l'Aide aux
parents pour leurs revenus de travail.
En ce sens, j'aimerais bien que même les députés de
l'Opposition se fassent fort d'expliquer à leurs citoyens ce qu'est la
réalité et ce qui est proposé concrètement. Dans le
soutien financier est reconnue l'obligation de pourvoir aux besoins essentiels
des personnes inaptes au travail qui représentent actuellement environ
25 % de la clientèle. Cela constitue 100 000 personnes. Dans mon
comté, je pourrais vous citer plusieurs cas, dont un, entre autres,
d'une personne qui, à 59 ans, pour une raison de santé, a
dû laisser son travail. Il ne peut retirer de prestations de la
Régie des rentes du Québec et encore moins, parce qu'il
travaillait dans une petite compagnie, des prestations de retraite.
Qu'arrive-t-il à ce monsieur qui a toujours travaillé et surtout
aux membres de sa famille? Il s'est retrouvé sur l'aide sociale, avec ce
qu'on connaît comme procédures administratives, etc.
Ce qu'apporte le programme Soutien financier, premièrement, c'est
qu'il y aura moins de tracasseries administratives. Deuxièmement, c'est
que les gens recevront un montant supérieur à celui qu'on donne
actuellement. Je pense qu'il est important de souligner cela et que cela va
s'adresser à une partie de notre clientèle. On bonifie le projet
de loi en ce sens. Je veux bien croire, comme le soulignait peut-être un
peu le dernier p. -d. g. d'Hydro-Québec, qu'il ne faut pas s'opposer
pour s'opposer. Il faut souligner qu'à l'intérieur de ce projet
de loi il y a des choses qui vont toucher notre clientèle et il faut
l'expliquer en ce sens. Comme je l'indiquais tantôt, ce programme Soutien
financier se veut plus généreux. Par exemple, avec les montants
que l'on connaît actuellement de 480 $ par mois, une personne seule
recevrait 585 $ par mois; une famille constituée de deux personnes
adultes avec deux enfants recevrait 1037 $ par mois. (Oh 30)
II est certain, M. le Président - et la commission parlementaire
nous a servi en ce sens-là - que plusieurs représentations ont
été faites par des groupes et plus spécifiquement par
l'OPHQ concernant les programmes d'employabilité qui étaient pour
s'adresser à cette clientèle qui était pour être -
comment pourrais-je m'exprimer? - classifiée dans le Soutien financier.
C'est la raison pour laquelle le ministre a pris ces points-là en
considération et, à juste titre, pour ne pas qu'on les classe
justement comme des gens complètement inaptes, pour leur offrir, plus
particulièrement aux personnes handicapées et aux personnes qui
le peuvent, un programme adapté qui s'adresserait à elles.
Continuité de l'aide sociale, M. le Président. Je pense
qu'il est important que ce soit comme cela. On se rappellera aussi, M. le
Président, que la commission parlementaire qui a reçu
au-delà de 125 mémoires a permis à ses membres, dont je
fais partie, au ministre et aux membres de l'Opposition, de s'exprimer. Et,
plus particulièrement, je crois que la députée de
Maisonneuve a été de tous les instants présente à
cette commission pour soulever justement les objections majeures qu'on avait
entraînées à ce stade.
Se souvenir - j'y pense plus particulièrement avant de revenir
à cette commission parlementaire - que l'objectif initial de
l'instauration de ce programme-là était ce qu'on appelle une aide
de dernier recours. Pour le répéter, on ne le
répétera jamais assez, ï arrive
des situations, comme j'ai pu le mentionner, pour les citoyens de mon
comté tantôt et comme je pourrais vous le mentionner aussi
d'autres familles, des situations qui sont vécues par des individus dans
leur secteur qui, pour de multiples raisons, se retrouvent à un certain
moment bénéficiaires de l'aide sociale, non pas parce qu'ils ie
désirent ou parce qu'ils aiment cela, mais parce que la situation de la
vie a fait en sorte que ces gens-là sont malheureusement sur l'aide
sociale. On doit leur procurer ce soutien de dernier recours et on doit
continuellement avoir cela à l'esprit et même ne pas avoir peur de
dépenser pour dire que ces gens sont des humains et qu'on doit à
l'intérieur de cela les soutenir financièrement.
Il y a l'autre programme, M. le Président, qui est le programme
APPORT, objectif, philosophie, qui a comme prémisses de base d'aider les
familles actuelles à faible revenu à être soutenues par
l'État financièrement pour mieux continuer - comment pourrais-je
m'exprimer? - à se valoriser à l'intérieur de leur
travail. Il y a même des frais de garderie remboursés
jusqu'à 50 %. Cela aussi est un autre programme dont je pense que tous
les membres de cette Assemblée doivent retransmettre aux gens
l'information, et le plus objectivement, et faire en sorte que, ces programmes
puissent être utilisés.
Je peux comprendre que nous avons tous un rôle à jouer
comme parlementaires, mais ce rôle-là doit aussi faire en sorte
que quand on sort de cette enceinte-ci, ces gens-là soient
informés et qu'on puisse l'utiliser au maximum parce que cela vient en
aide aux familles démunies et à celles qui peuvent se retrouver
plus particulièrement dans mon comté. Cette aide du programme
APPORT se veut un équilibre financier qui, contrairement à ce qui
était connu auparavant par le programme SUPRET, sera versé
mensuellement aux gens à 75 % du coût. Je pense que, du fait que
ce soit versé mensuellement comme cela, cela va permettre à ces
gens qui travaillent et qui mettent des énergies de pouvoir mieux
soutenir financièrement ce qu'ils font actuellement.
Certes, M. le Président, on peut avoir des concepts
philosophiques différents, mais tout le monde - je parle de façon
générale et j'ai pu l'entendre ici à l'Assemblée
nationale - se disait insatisfait de l'actuel régime de l'aide
sociale.
Avec ses prémisses de base, comme j'ai pu l'exprimer - et je
pense que le député de Duplessis l'a pratiquement exprimé
au nom de sa formation politique - avec les objectifs que la réforme a
voulu se donner, il était en accord, mais les modalités, c'est
une autre paire de manches. Mais je comprends que ce qu'on pourrait appeler la
partie politique l'incite à faire ressortir cela de cette
façon-là.
Oui, M. le Président, l'aide sociale doit donner l'aide aux plus
démunis. Elle doit aussi, selon la philosophie qui est son appoint,
inciter les gens au travail. Je pense que personne - et pour avoir
discuté avec des gens qui sont actuellement bénéficiaires
de l'aide sociale - ne peut être contre ce principe. Comment fait-on,
cependant, pour des gens qui ont des problèmes en
alphabétisation? On peut dénombrer - et pour avoir
travaillé ce dossier-ci depuis les trois dernières années
- dans mon secteur, à ce qu'on me dit, environ 10 % de gens qui ont des
problèmes en alphabétisation. Il est certain qu'il va falloir
consacrer à ces gens-là une attention plus spécifique, une
aide plus particulière; quand on ne peut même pas, M. le
Président - et cela, je pense qu'il faut le souligner plus
particulièrement - lire une annonce publicitaire pour souligner en tant
que tels certains rabais qu'on a en ce qui concerne l'alimentation. On a une
prémisse de base qui peut faire en sorte qu'on ne peut pas se supporter
et qu'on ne peut pas se prendre en main nous-mêmes. Là, c'est
certain qu'on peut souligner plusieurs éléments de ce type que la
réforme, en accord avec l'ensemble des ministères de ce
gouvernement, doit prendre en considération pour les aider. Ce qui
m'amène plus précisément au programme APTE qui est, ce que
je pourrais appeler, le noeud ou le noyau de l'ensemble des discussions qui ont
cours et qui vont continuer à avoir cours en ce qui concerne le
programme qu'on compte présenter. C'est certain qu'au début, on
avait plusieurs formulations. Il y avait la catégorie admissible et non
admissible, disponible et non disponible, participant et non participant. Le
ministre a ramené cela à trois catégories plus
précises qui sont: disponible et non disponible... Non disponible, on
peut retrouver cela plus précisément à 55 ans et plus, je
pense qu'il faut le souligner, pour les gens qui ont des problèmes par
rapport à l'emploi plus temporaire et par rapport aussi aux femmes
enceintes. Je répéterai un autre point particulier des
amendements: Au début de la réforme, on voulait que des familles
puissent ressortir de l'aide sociale pour les deux prochaines années. Le
ministre a mis un amendement au niveau du préscolaire. C'est important
à souligner aussi.
L'autre catégorie est participant et participation volontaire
assurément aux mesures d'employabilité. À.
l'intérieur de ce programme, pour y aller rapidement, vous me
l'indiquez, M. le Président, il y a un renforcement en ce qui a trait
aux SEMO. Tout le monde connaît le travail qui existe aux SEMO et plus
particulièrement la clientèle qu'ils desservent et, bien souvent,
la clientèle est celle de l'aide sociale. Il y a aussi, et je n'ai
entendu aucun membre de l'Opposition le souligner - cela a été
réclamé à cor et à cri à plusieurs reprises
- le ministre a pu annoncé ici, en cette enceinte, que les frais
scolaires du secteur primaire vont être augmentés de 35 $ à
46 $ et, au secondaire, on va se retrouver avec 93 $. M. le Président,
ce sont des revendications qui ont été faites bien avant que je
sois député. Enfin, je pense qu'on commence à avoir
une
réponse sur cela.
En ce qui a trait aux familles d'accueil, c'est un dossier qui
traîne depuis six ans. Que disait ce dossier par rapport à l'aide
sociale? Après trois mois, une personne qui se retrouvait sur l'aide
sociale, si son enfant était placé en famille d'accueil, la
mère naturelle ou le père naturel de cet enfant était
comme retiré et plus responsable de cet enfant. Même s'il l'avait
quinze jours ou toutes les fins de semaine, il voyait son soutien financier
retiré pour cette personne. Assurément, j'aimerais indiquer aussi
qu'en ce qui concerne les besoins spéciaux que c'est conservé
aussi dans le programme actuel de l'aide sociale.
L'une des parties de mon intervention voulait porter sur le logement
social. M. le Président, permettez-moi un bref historique du logement
social. J'aimerais rappeler qu'il existe depuis 1973 ce partage du logement.
À cette époque, c'était 10 $ par mois pour les
ménages qui partageaient un logement avec un parent ou un enfant. Je
pense que les barèmes sont demeurés tels quels. En 1974,
c'était 67 $ par mois; en 1975, c'était 85 $ par mois, et depuis
cette époque c'est toujours demeuré pareil quant au partage du
logement. Je veux bien qu'on me dise que cela n'a pas de sens. Mais je voudrais
qu'on me dise ce qu'ils ont fait à cette époque et ce qui est
arrivé depuis ce moment.
M. le Président, H y a aussi un autre élément, soit
celui du salaire minimum. De 1981 à 1986, on a fait une part du chemin.
Je ne dis pas qu'il n'en reste pas à faire, assurément qu'il en
reste à faire, mais de 1981 à 1986, je voudrais bien qu'on me
donne la raison pour laquelle cela n'a jamais été augmenté
et la raison pour laquelle, nous, cela fait trois fois qu'on l'augmente.
Je conclurai en vous remerciant de votre indulgence, mais
particulièrement en soulignant aux citoyens et aux citoyennes du
comté de Sainte-Marie que toujours je vais être près d'eux
pour défendre leurs intérêts. Merci, M. le
Président.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président: Nous allons maintenant poursuivre avec
M. le député de Mercier.
M. Gerald God in
M. Godin: M. le Président, nous avons devant nous un
gouvernement qui manque de compassion à l'égard des
démunis. On peut dire que tous les préjugés qu'on entend
à Montréal dans chaque taxi - il y a eu quand même des
clichés et des accusations non fondées contre les assistés
sociaux - le ministre les a repris un peu comme Le Pen reprenait en France des
accusations racistes contre les immigrants et les réfugiés. Donc,
on a un gouvernement qui a manqué de compassion à l'égard
des démunis de la société du Québec et qui a
montré qu'il n'était pas du tout au courant de ce qui se passait
dans la vie réelle des démunis du Québec Est-ce que le
ministre, par exemple, est au courant que l'attitude des boubous macoutes a
amené des médecins à refuser des certificats
médicaux à des gens qui en avaient vraiment besoin? Je ne pense
pas que le ministre ou le gouvernement ait pris connaissance de l'ampleur des
effets de son "lepenisme", de son front national anti-assisté social
Chaque préjugé a été repris par le ministre
et par le gouvernement. En fait, on les a amplifiés. On a même
souligné les préjugés, les clichés, les accusations
non fondées portées contre les assistés sociaux. Ce
gouvernement a créé à l'égard des assistés
sociaux un climat de méfiance, pour ne pas dire d'agressivité de
la part des gens, qui n'est pas très sain pour le climat social à
maintenir vis-à-vis des plus pauvres du Québec.
Chaque lundi, dans mon comté, j'entends et je vois des personnes
qui me disent à quel point en tant qu'assisté social, en tant que
BAS - bénéficiaire d'aide sociale - on les méprise
maintenant et on se méfie d'elles, à quel point le statut social
a été encore empiré par les propos du ministre et des
libéraux à l'égard des assistés sociaux. On a donc
devant nous un gouvernement sans précédent, exceptionnel, avec un
comportement historique, qui enlève aux pauvres et donne aux riches.
C'est Robin des Bois à l'envers.
Il suffit de se demander ce que la réforme Paradis va donner
à la province sur le plan budgétaire: 140 000 000 $, pris dans la
poche des plus pauvres et donnés en rabattement d'impôt pour les
riches. On peut dire que ce gouvernement n'a aucun sens social. Nous souhaitons
que ceux qui nous écoutent se rendent compte qu'ils sont les boucs
émissaires des préjugés "lepenis-tes" et non pas
"lepenisses" de ce gouvernement
Je tiens à souligner, M. le Président, qu'y serait
souhaitable que ce gouvernement, surtout le ministre de la Main-d'Oeuvre et de
la Sécurité du revenu, s'ouvre enfin les yeux et se rende compte
que son comportement a miné le respect que les gens pouvaient avoir dans
le passé pour les bénéficiaires de l'aide sociale et la
compassion que les Québécois entretiennent naturellement et
spontanément à l'égard de ceux qu'on appelait dans le
temps les pauvres et qu'on appelle maintenant les démunis. Ce sont des
gens qui n'ont rien à se mettre sous la dent, dans bien des cas, qui
vivent au seuil de la pauvreté et qui passent aujourd'hui, au
Québec, pour des gens qui exploitent le gouvernement et le budget, et
qui bénéficient, comme des vrais parasites, du régime
actuel.
Cette réforme, présentée par le
député de Sainte-Marie comme une amélioration, est en fait
un moyen de récupérer des fonds que le gouvernement va confier
à d'autres programmes budgétaires, entre autres la baisse des
impôts des riches. Donc, un gouvernement qui donne aux
riches et qui enlève aux pauvres. Le président
américain Franklin Roosevelt avait inventé une formule, à
l'époque, qui décrit fort bien l'attitude des libéraux.
C'est: Si les chevaux sont bien nourris, il y aura à manger pour les
moineaux. C'est une philosophie économique dite libérale qui
illustre fort bien que, si les riches paient moins d'impôt, ils vont
créer de l'emploi et acheter plus, qu'il y aura plus d'emplois, donc
moins d'assistés sociaux. Je répète la phrase de M.
Franklin Roosevelt: Si les chevaux sont bien nourris, il y aura à manger
pour les moineaux. Sauf que je demande à mes collègues d'en face:
Qu'est-ce que les moineaux auront à manger?
Je ne doute pas de la bonne foi de mes collègues d'en face sur
cette question, M. le Président. Je sais que, dans chacun des
comtés du Québec, il y a des assistés sociaux qui se
présentent et qui font connaître leurs problèmes à
leur député. Mais je trouve que la formule inventée par le
ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu n'est
pas la bonne. Elle va chercher une coupure de 140 000 000 $ dans le budget de
l'aide sociale. Elle coupe les assistés sociaux, les démunis et
leur enlève littéralement le pain de la bouche.
En plus d'avoir créé ce climat de méfiance à
l'égard des bénéficiaires de l'aide sociale, le
gouvernement actuel leur enlève 140 000 000 $ pour mieux réduire
les impôts de ceux qui gagnent plus d'argent, pour parler de vaches
grasses et, comme le ministre des Finances en parle souvent, comme un pharaon,
d'une époque rose pour le gouvernement. Mon collègue de
Sainte-Marie disait tout à l'heure: Pourquoi le Parti
québécois n'a-t-il pas augmenté le salaire minimum de 1980
à 1985? Réponse: À cause de la crise. Pourquoi les
libéraux peuvent-ils l'augmenter maintenant? Parce que la crise est
terminée. C'est aussi simple que cela.
Je voudrais aussi citer notre chef, M. Jacques Parizeau, qui est
abondamment cité à contretemps et de façon très
incomplète par le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu. M. Parizeau a dit une phrase qui
résume bien, à mon avis, l'idée que j'ai voulu rendre ici:
Les asistés sociaux sont plus taxés per capita que n'importe quel
millionnaire du Québec. Donc, le gouvernement est bien celui qui
enlève aux pauvres pour donner aux riches. Cette réforme est donc
une contre-réforme, c'est une réforme antisociale et donc
inacceptable. Pour cette raison, nous voterons unanimement contre cette
réforme, qui enlève aux pauvres et donne aux riches. M. le
Président, je vous remercie beaucoup.
Le Président: Alors, nous allons maintenant poursuivre le
débat avec l'intervention de Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Jeanne L. Blackburn Mme Blackburn: Merci, M. le
Président. M. le Président, ce débat, qui se poursuit
déjà depuis le tout début de Tannée sur le projet
de réforme de la loi 37, a malheureusement, pour les membres de cette
Assemblée, été considéré comme un
débat de l'Opposition, alors que tous les groupes à l'exception
de quelques groupes d'hommes d'affaires patentés, tous les groupes sont
venus dénoncer le projet de loi appelé la réforme Paradis.
Vous allez me permettre, ce soir, M. le Président, de citer des parties
importantes du message du comité des affaires sociales de
l'Assemblée des évêques du Québec, message qu'il a
communiqué à l'occasion du 1er mai, la fête des
travailleurs. Ce message parle du coeur, parle d'esprit, parle de compassion,
parie de la réalité des Québécois, parle des
conséquences de ce projet de loi dans des termes si clairs, si
précis qu'il nous interpelle et qu'il exprime mieux que je ne saurais le
faire moi-même; alors, vous allez me permettre de le citer.
Tout d'abord, l'Assemblée des évêques a choisi le
1er mai pour présenter son message touchant la réforme. Pourquoi
le 1er mai alors qu'on parle d'assistés sociaux, de personnes qui ne
veulent pas travailler ou qui sont sans emploi? Parce que, pour
l'Assemblée des évêques, les assistés sociaux, les
personnes assistées sociales sont, dans la plupart des cas, des
extravailleurs et travailleuses à la recherche d'emploi. Le message de
l'assemblée des évêques, M. le Président, se
résume ainsi et il est frappant. Il dit: Le projet de loi transforme les
fondements mêmes de l'aide sociale. L'aide sociale reconnaissait le droit
à l'aide sociale. L'aide sociale était un droit et là, on
en fait un privilège quand on n'appelle pas cela une usurpation.
L'Assemblée des évêques dit également que cette
réforme est une menace de régression aux conséquences
insoupçonnées. En conclusion, l'Assemblée des
évêques conclut à la nécessité de retirer
l'actuel projet de loi et invite le ministre à refaire ses devoirs sur
la base d'une politique d'emploi, une politique de formation, une
réforme fiscale et un revenu minimum pour les assistés
sociaux.
L'Assemblée des évêques va beaucoup plus loin.
L'Assemblée des évêques nous invite, nous interpelle, nous
appelle tous à être proches des assistés sociaux, des
assistées sociales, de les appuyer de toutes les façons
possibles. On ne parle pas de l'Opposition ici, on ne parle pas d'un groupe
d'assistés sociaux, on parle de l'Assemblée des
évêques, qui invite la population à appuyer, de toutes les
façons possibles, les assistés sociaux de manière que le
projet de loi ne soit pas adopté, qu'il soit retiré.
M. le Président, vous allez me permettre de citer de larges
extraits de ce texte parce que, comme je l'ai dit tout à l'heure, il
parle mieux, il exprime mieux que je ne saurais le faire et il exprime
finalement ce qu'on a entendu en commission parlementaire par la plupart des
intervenants. (Oh 50)
Au début du texte, on rappelle les paroles prononcées par
Mgr Protix, en 1986, au moment où le gouvernement mettait en route ces
boubou macoutes. Mgr Proulx disait alors: "Les assistés sociaux sont
déjà des citoyens humiliés qu'on n'a pas décemment
le droit de blâmer et de harceler". Parlant du projet, le message nous
dit: Ce projet transforme radicalement les fondements mêmes de l'aide
sociale. En effet, en accord avec les recommandations du rapport Boucher,
l'aide sociale a été considérée depuis 1969 - le
rapport Boucher a été déposé en 1963 - comme un
droit pour toute personne démunie, quelle que soit la cause de son
indigence. Notre société reconnaissait alors implicitement que la
pauvreté avait des causes économiques et sociales. Le nouveau
projet substitue aux critères de besoin la vieille distinction entre
apte et inapte qui s'articule entièrement autour de l'incitation au
travail, incitation au travail qui se révèle en fait de la
coercition, réduisant l'indigence à un simple problème
individuel. Sonne-t-il l'heure où l'État ne se reconnaît
plus de responsabilité sociale et rend les assistés sociaux
responsables du manque d'emploi?
Le message conclut en disant: Nous voyons là, je le rappelle, une
menace de régression sociale aux conséquences
insoupçonnées au moment même où, dans un contexte de
concurrence internationale, de rareté des emplois, les personnes ont de
moins en moins de prise sur les décisions qui affectent leurs conditions
de vie. Les évêques nous disent également: C'est un projet
de loi qui concerne tout le monde. On nous dit: Un choix de
société s'évalue d'après le sort qu'on fait aux
plus pauvres. Vous savez, la loi du plus fort, on n'a pas besoin de
gouvernement pour organiser cela. La jungle l'organise très bien. On
juge de la valeur d'une société par la façon qu'elle a de
protéger ses plus démunis. C'est ce que nous rappelle ce message.
Il nous rappelle que les personnes ne valent pas seulement par leur
utilité économique. Elles valent en tant qu'êtres humains,
en tant que valeur de partage, en tant que valeur d'équité, en
tant que valeur de respect de l'humanité.
Le projet de loi, selon les évêques, est un appauvrissement
des personnes assistées sociales par une augmentation des
contrôles. On cite en particulier le cas des femmes, le cas des femmes
qui se trouvent appauvries par le projet, le cas des femmes pour lesquelles on
ne reconnaît pas la valeur du travail domestique ni de l'éducation
des enfants comme un véritable travail. Le projet de loi vient
également appauvrir les jeunes, projet de loi qui semble, en
théorie... Et je reprends le texte: Le projet accorde, en
théorie, la parité aux jeunes de moins de 30 ans, mais, dans les
faits, diverses mesures, telles la contribution alimentaire des parents et la
pénalité pour le partage du logement, viennent le restreindre,
pour ne pas dire l'annuler. Il y a un contraste, constate le message, un
contraste entre le traitement qu'on accorde aux assistés sociaux et
celui qu'on accorde aux mieux nantis. La société est une, nous
dit le message. Le sort des personnes les plus démunies est
étroitement tributaire de l'ensemble des politiques sociales,
économiques et fiscales et du traitement accordé aux autres
secteurs de la société. Par exemple, les contraintes
budgétaires qu'on invoque à l'appui du projet de réforme
s'expliquent au moins en partie par diverses formes de transfert de richesses
collectives aux secteurs les plus fortunés. Cela n'est pas l'Opposition
qui est en train de vous dire cela, c'est le message de l'Assemblée des
évêques. On poursuit en disant: Certains abris fiscaux inutiles,
des évasions fiscales de grande échelle, certaines subventions
discutables, ces régimes cachés d'assistance sociale
empêchent de récupérer des sommes importantes qu'on
pourrait affecter aux politiques sociales. Un contraste, dit le message.
Déréglementation qui tend à retirer graduellement du monde
des affaires tout contrôle social et étatique qui contraste
singulièrement avec le poids des contrôles qu'on veut imposer aux
personnes assistées sociales. De telles faits, nous dit le message, sont
révélateurs d'une orientation de l'économie qui a pour nom
néolibéralisme. Le projet de réforme sociale se situe
nettement dans cette direction.
Des valeurs détournées. On a entendu ad nauseam le
ministre et les différents intervenants nous parler de travail, de
responsabilisation et d'équité. Le message nous dit: On peut
inciter les pauvres au travail, mais on sait que le nombre des emplois est
insuffisant, inexistant On parie d'épanouissement par le travail, sauf
qu'on ne se préoccupe pas de la qualité des emplois. Ce ne sont
pas tous les emplois qui permettent à la personne de s'épanouir.
Nous le savons tous. On incite au travail à n'importe quelle condition.
Cette incitation, dit le message, devient ainsi abstraite, coupée de la
réalité. Elle ne peut que profiter à certaines compagnies
qui seront trop heureuses d'avoir une main-d'uvre à bon
marché.
Responsabilités. Quand on se sert de ces termes pour rendre
coupables les personnes qui ne se trouvent pas de travail, on leur fait porter
la responsabilité d'un sous-développement économique,
alors qu'elles n'ont aucune prise sur le développement de l'emploi
L'individu, si libre soit-il, ne peut porter à lui seul la
responsabilité de toute une société.
L'équité. L'équité, selon ces haut-parleurs
du ministre de la Main-d'Oeuvre... L'équité n'est pas
l'enrichissement des uns au détriment des autres, nous dit le message,
ni l'effort de nivellement par le bas. Pour nous tous, l'équité
consiste, d'abord et avant tout, à aider les personnes dans le besoin et
non pas, comme on le fait actuellement, prendre au plus pauvre pour donner au
plus riche. La toute première décision de ce gouvernement, en
décembre 1985, a été de décider qu'on n'indexerait
pas trimestriellement les allocations destinées aux personnes
assistées
sociales. L'État faisait une économie de 31 000 000 $, et,
du même coup, il prenait la décision de réduire
l'impôt des hauts revenus et il retournait 86 000 000 $ dans les poches
des personnes les plus à l'aise au Québec. C'est ce qu'on appelle
voler les pauvres pour donner aux riches.
Le message des évêques est le suivant. Il nous dit: Nous
affirmons donc que la promotion concrète des droits des personnes
assistées sociales doit se faire sur d'autres bases. Le travail, si
important soit-il pour assurer sa subsistance, n'est pas une valeur sociale
absolue en elle-même. Il doit respecter et développer la
dignité des personnes. La responsabilité devient un leurre si
elle ne permet pas la liberté de s'exercer et à la personne de
prendre des initiatives. L'équité n'est pas une excuse pour
appauvrir un plus grand nombre de personnes. Elle est une mesure qui fait, de
la poursuite des droits humains, une priorité.
Les évêques sont également conscients, comme le
rappelait mon collègue de Mercier tout à l'heure, que ces
préjugés faciles, entretenus de façon démagogique
par l'actuel gouvernement, touchent toutes les classes de la
société. Les évêques nous disent: On reconnaît
qu'on n'a pas toujours eu la compassion qu'on devrait avoir à l'endroit
des personnes assistées sociales. (1 heure)
L'Assemblée des évêques conclut: "Si nous analysons
la situation à partir de la perspective des personnes les plus
démunies, une conclusion s'impose: la nécessité de retirer
l'actuel projet de réforme de l'aide sociale. Une véritable
politique de sécurité du revenu appelle une reprise de la
question sur d'autres bases. Nous avons retenu, entre autres, certains
éléments déjà formulés par de nombreux
groupes en commission parlementaire".
Suit une liste de mesures que le gouvernement devrait reprendre à
son compte en même temps qu'il reprendrait l'exercice de rédaction
d'un projet de loi décent "une politique réelle et
créatrice de plein-emploi qui devrait conduire à
réévaluer les choix économiques et technologiques
opérés depuis quelques années, des programmes de formation
de l'ensemble de la main-d'oeuvre pour faire face aux nouvelles méthodes
de travail, une réforme de la fiscalité qui avantage les familles
et les personnes à faible revenu; une réforme de l'aide sociale
basée sur les besoins réels des personnes et définie en
fonction d'un seuil reconnu de pauvreté."
L'Assemblée des évêques, M. le Président,
invite ce gouvernement a refaire son devoir, invite ce gouvernement à
faire preuve d'honnêteté, à faire preuve de sens des
responsabilités, à faire preuve d'équité, d'une
équité réelle et non pas feinte, d'une
équité qui sert les plus démunis et non pas qui vient
vider les poches des plus démunis pour en donner supposément
à ceux qui, paraît-il volent le régime. L'Assemblée
des évêques nous dit: "Nous devons reconnaître que nous
nourrissons trop souvent des préjugés à l'égard des
personnes assistées sociales. On prétend qu'elles vivent aux
dépens de l'État, alors que, pour la plupart, elles sont victimes
d'un régime économique et social qui n'est pas tendre pour les
plus faibles et les plus petits. "Ces préjugés, M. le
Président, sont entretenus par l'actuel gouvernement.
Une société qui, comme on l'a fait à l'occasion de
la poursuite des boubou macoutes encourage la délation - on n'a jamais
vu cela au Québec, le voisin qui dénonce son voisin parce qu'il
pense qu'il fraude l'assistance sociale - une société qui fait
des plus démunis des fraudeurs potentiels une société qui
fait reposer le fardeau de la preuve sur les plus démunis, c'est une
société indécente, c'est une société
malade.
L'Assemblée des évêques nous dit et j'ai rarement vu
un tel message... Les évêques sont progressistes pour la plupart
d'entre eux, mais souvent aussi assez conservateurs. Mais écoutez bien
le message qu'ils lancent à la population du Québec. Cela devrait
vous impressionner. Ils nous disent - si on les écoutait, je pense que
le gouvernement devrait plier, c'est une invitation -"Ensemble, acceptons de
nous faire proches des personnes assistées sociales, essayons de mieux
comprendre les difficultés auxquelles elles sont confrontées
souvent bien malgré elles et appuyons-les de toutes les façons
possibles." Cela veut dire de toutes les façons possibles.
M. le Président, je vois que le ministre vient d'entrer en
Chambre. Je trouve infiniment déplorable qu'on soit ici en train de
discuter d'un projet de loi dont il a la paternité et qu'il n'ait pas la
décence de venir assister au débat qui se déroule ici en
cette Chambre. Je trouve cela inacceptable de la part de celui qui est en train
de faire des mesures, de prendre des décisions qui vont avoir des effets
considérables sur la société québécoise,
mais plus particulièrement sur les valeurs véhiculées par
la société québécoise.
M. le Président, quand l'Assemblée des
évêques juge la situation suffisamment sérieuse et
importante pour inviter tous les chrétiens, tous ceux qui ont à
coeur le mieux-être des plus démunis, tous ceux qui ont encore un
peu de compassion pour ceux qui ont des difficultés dans la
société, et va aussi loin que de nous dire: Appuyons-les de
toutes les façons possibles, c'est que la situation appelle des actions
qui fassent réfléchir ce gouvernement et le plus rapidement
possible.
Donc, M. le Président, on ne peut pas être d'accord avec un
tel projet de loi. J'espère que, même si on est en train de
discuter l'adoption de principe, les débats en cette Chambre feront
réfléchir sérieusement le ministre et le gouvernement
actuel quant au fondement même de cette réforme qui est, en fait,
une contre-réforme qui vient, pour ainsi dire, kidnapper les plus
démunis de la société en faveur des mieux-nantis. Je vous
remercie, M. le Président.
Le Vice-Président: M. le député de
L'Assomption.
M. Gervais: M. le Président, je demande l'ajournement des
débats sur le projet de loi 37.
Le Vice-Président: Est-ce que cette motion d'ajournement
des débats est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. N'ayant plus d'autres
sujets à l'ordre du jour, nous allons maintenant ajourner nos travaux
qui reprendront ce matin, le jeudi 16 juin, à 10 heures.
(Fin de la séance à 1 h 7)