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(Quatorze heures neuf minutes)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Un moment de recueillement.
Veuillez vous asseoir.
Mmes et MM. les députés, avant de procéder aux
affaires courantes, je vais céder la parole à M. le chef de
l'Opposition. M. le chef de l'Opposition.
Minute de silence à la mémoire de
l'ex-premier ministre René Lévesque
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Il y a un an
aujourd'hui décédait M. René Lévesque, ex-premier
ministre du Québec. M. le Président, il y a une entente entre les
deux partis, entre les deux formations politiques pour qu'on observe une minute
de silence à sa mémoire.
Le Président: Alors que tous et chacun veuillent bien se
lever. Tel qu'entendu et du consentement de tous les membres de cette
Assemblée, nous allons tenir une minute de silence à la
mémoire de l'ex-premier ministre du Québec, M. René
Lévesque.
Veuillez vous asseoir.
Présence de l'ambassadeur du Zaïre
J'ai le très grand plaisir de souligner la présence dans
la tribune de l'ambassadeur de la République du Zaïre, Son
Excellence Mbeka Makosso. Excellence.
Nous allons maintenant procéder aux affaires courantes.
Déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, je vous prierais d'appeler
l'article a du feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 56
Le Président: À l'article a du feuilleton
d'aujourd'hui, M. le ministre responsable de l'application de la loi
professionnelle présente le projet de loi 56, Loi modifiant la Loi sur
les dentistes. M. le leader du gouvernement au nom du ministre de
l'Éducation.
M. Michel Gratton
M. Gratton: M. le Président, au nom de mon collègue
je voudrais indiquer que ce projet de loi vise à harmoniser la Loi sur
les dentistes aux dispositions de la Loi sur les règlements et du Code
des professions relativement à l'approbation et à l'entrée
en vigueur des règlements.
Il vise en outre à permettre l'utilisation dans une raison
sociale du nom d'un ou de plusieurs associés ayant cessé
d'exercer leur profession, suivant certaines conditions.
Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte de se
saisir de ce projet de loi? M. le leader adjoint de l'Opposition.
M. Gendron: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: Article d, M. le Président.
Projet de loi 57
Le Président: À l'article d au feuilleton, M. le
ministre responsable de l'application des lois professionnelles présente
le projet de loi portant le no 57, Loi modifiant la Loi sur la podiatrie. M. le
leader du gouvernement au nom du ministre.
M. Michel Gratton
M. Gratton: Oui. M. le Président, ce projet de loi vise
à assurer la détermination, par le bureau de l'Ordre des
podiatres du Québec, de normes relatives à la forme et au contenu
des ordonnances faites par un podiatre.
Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte de se
saisir de ce projet de loi? M. le leader adjoint de l'Opposition?
M. Gendron: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: Article c, M. le Président.
Projet de loi 58
Le Président: À l'article c au feuilleton, M. le
ministre de l'Éducation présente le projet de loi portant le no
58, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Éducation. M. le
leader du gouvernement au nom du ministre.
M. Michel Gratton
M. Gratton: M. le Président, ce projet de loi modifie la
Loi sur le ministère de l'Éducation et prévoit
l'institution du Fonds de la formation à distance. Il confère au
ministre de l'Éducation le pouvoir de fournir, moyennant
considération, 1° dans les domaines de sa compétence,
à toute personne ou tout organisme, des services reliés à
la formation à distance et, 2° à la demande d'un autre
ministre, dans les domaines de compétence de ce dernier, à toute
personne ou tout organisme, les mêmes services.
Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte de se
saisir de ce projet de loi 58? Adopté?
M. Gendron: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Grattoir Article e, M. le Président.
Projet de loi 61
Le Président: À l'article e cet après-midi,
M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles
présente le projet de loi portant le no 61, Loi modifiant la Loi sur la
pharmacie. M. le leader du gouvernement.
M. Michel Gratton
M. Gratton: M. le Président, ce projet de loi vise
à régulariser l'exécution par les pharmaciens du
Québec d'ordonnances équivalant à celles émises au
Québec mais obtenues ailleurs au Canada.
Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte de se
saisir de ce projet de loi?
M. Gendron: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Gratton: Article f, M. le Président.
Projet de loi 62
Le Président: À l'article f au feuilleton, M. le
ministre responsable de l'application des lois professionnelles présente
le projet de loi portant le no 62, Loi modifiant la Loi sur les
infirmières et les infirmiers. M. le leader du gouvernement.
M. Michel Gratton
M. Gratton: M. le Président, le projet de loi vise
principalement à assouplir certaines règles régissant le
processus électoral au sein du bureau de l'Ordre des infirmières
et infirmiers du Québec et dans les conseils de section qui le
composent, tout en assurant le cens électoral de tous ses membres.
Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte de se
saisir du projet de loi portant le no 62?
M. Gendron: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement,
est-ce qu'il y a présentation d'autres projets de loi?
M. Gratton: C'est tout.
Le Président: Dépôt de documents. M. le
ministre de l'Environnement.
Rapport annuel du Conseil consultatif de
l'environnement
M. Lincoln: M. le Président, je veux déposer le
rapport annuel 1987-1988 du Conseil consultatif de l'environnement.
Le Président: M. le ministre de l'Environnement, votre
document est finalement déposé. Toujours à l'étape
du dépôt de documents, M. le ministre délégué
aux Affaires culturelles et responsable de l'application de la Charte de la
langue française.
Rapport d'activité de la Commission de
protection de la langue française
M. Rivard: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport d'activité de la Commission de protection de
la langue française pour l'exercice 1987-1988.
Le Président: M. le ministre, votre rapport est maintenant
déposé.
Décisions du Bureau de
l'Assemblée
J'ai également un document à déposer
conformément à l'article 109 de la Loi de l'Assemblée
nationale. Je dépose quatre décisions du Bureau de
l'Assemblée nationale. Documents déposés.
Est-ce qu'il y a d'autres dépôts de documents cet
après-midi?
Alors, dépôt de rapports de commissions, M. le
président de la commission de la culture et député de
Bourget. M. le député de Bourget, vous avez la parole.
Étude détaillée du projet de loi
43
M. Trudel: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission de la culture qui a
siégé les 18 et 20 octobre 1988, afin de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 43, Loi sur la
Bibliothèque nationale du Québec. Le projet de loi a
été adopté avec des amendements.
Le Président: Votre rapport, M. le député de
Bourget, est maintenant déposé.
Dépôt de pétitions. Mme la députée de
Marie-Victorin.
Mme Vermette: M. le Président, je dépose...
Le Président: Mme la députée, avez-vous le
consentement, étant donné que votre pétition est
non conforme.
Mme Vermette: Oui, M. le Président, j'ai le
consentement.
Le Président: II y a consentement, alors, Mme la
députée de Marie-Victorin.
Que le dimanche reste un jour de repos
Mme Vermette: M. le Président, je dépose l'extrait
d'une pétition adressée par 177 pétitionnaires du
comté de Marie-Victorin. Les faits invoqués sont les suivants:
"Que le dimanche est un jour de repos collectif et que la famille a besoin de
ce jour pour resserrer ses liens et ainsi favoriser une société
plus humaine en évitant une vie réduite à la production et
à la consommation."
L'intervention réclamée se résume ainsi: "Que le
premier ministre du Québec fasse en sorte que le dimanche ne devienne
pas un jour comme les autres de la semaine."
Le Président: Mme la députée de
Marie-Victorin, votre pétition est maintenant déposée.
Est-ce qu'il y a d'autres dépôts de pétitions?
Cet après-midi il n'y aura pas d'intervention portant sur une
violation de droit ou de privilège ou sur une question de fait
personnel. Nous allons immédiatement procéder à la
période régulière de questions et de réponses
orales et je suis prêt à reconnaître une première
principale.
M. le député de Bertrand, en première principale
cet après-midi.
QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES
L'ouverture des commerces d'alimentation le
dimanche
M. Parent (Bertrand): M. le Président, dans son rapport
sur les heures d'affaires, le député de Nicolet concluait,
à la page 41, que l'ouverture des commerces le dimanche ne
représente pas la solution idéale visant à régler
la problématique actuelle. Le ministre a choisi d'ignorer cette
recommandation et prône maintenant l'ouverture des commerces
d'alimentation le dimanche. Le ministre, qui disait vouloir rallier le maximum
d'intervenants la semaine dernière en cette Chambre n'aura réussi
qu'à semer la zizanie chez les détaillants et à se mettre
à dos l'ensemble des travailleurs et des travailleuses.
Comment le ministre de l'Industrie et du Commerce peut-il aujourd'hui,
à part son supposé consensus au caucus libéral, rejeter du
revers de la main la principale recommandation du comité Richard qui a
siégé pendant plus de neuf mois pour faire de la
consultation?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce
et de la Technologie. M. le ministre.
M. MacDonald: M. le Président, depuis une semaine, on a
été à même d'observer de quel côté se
rangeaient les divers intervenants du dossier vis-à-vis de la
proposition que nous avons formulée. On a vu, entre autres, que les
trois plus grandes chaînes, c'est-à-dire Métro-Richelieu,
Provigo et Steinberg, tant sur le plan corporatif que sur le plan des
affiliés, se disaient favorables à cette situation ou cette
recommandation moyen terme que nous avons formulée pour un travail
partiel le dimanche.
Quelques jours plus tard, l'ADA, l'Association des détaillants en
alimentation s'est ajoutée. Cette association regroupe et il ne faudrait
pas sortir du dossier, parce qu'on parle d'élargissement des heures
d'ouverture dans le domaine de l'alimentation seulement. Dans ce domaine de
l'alimentation, l'ADA a convoqué une conférence de presse et,
pour ses milliers de membres, disait se rallier à la proposition de
l'ouverture à temps partiel le dimanche. Elle signifiait que, dans son
bureau de direction, il y avait neuf représentants sur dix qui
étaient favorables, le groupe IGA tenant la position qu'il avait depuis
le début.
À ceci s'ajoute nécessairement ce que vous avez
observé, soit des gens qui ont signé une pétition, soit
des gens qui sont intervenus par des lignes ouvertes ou autrement,
c'est-à-dire un très large consensus d'une majorité des
intervenants quant à cette solution moyen terme.
Le Président: M. le député de Bertrand, en
additionnelle.
M. Parent (Bertrand): Comment le ministre peut-il parler de large
consensus alors que les principaux impliqués, qui sont les travailleurs,
n'ont eu d'autre consultation avec le ministre que de se faire dire que la
consultation résidait dans la proposition du ministre? Comment,
aujourd'hui, le ministre peut-il dire qu'il y a consensus? (14 h 20)
Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce
et de la Technologie. M. le ministre.
M. MacDonald: J'ai eu des rencontres avec les
représentants syndicaux, les chefs des centrales et les
représentants de syndicats individuels. Cela a été des
rencontres où ils m'ont présenté leur point de vue. J'ai
fait de même. Je leur ai présenté les arguments. Il y a eu
consensus sur un certain nombre de choses. En fait, la totalité des
intervenants voient dans la situation actuelle, c'est-à-dire dans le
statu quo, une situation injuste pour plusieurs, et ils voient le besoin de
faire des changements.
Leur solution, qui en est une de fermeture quasi intégrale, sinon
intégrale nous semble revenir en arrière de beaucoup. Parler de
revenir en arrière, nous semble être absolument à
l'opposé, aux antipodes de ce qu'est la réalité et
la place du marché en 1988.
Ces représentants syndicaux sont retournés à leurs
collègues, ils ont formulé leur position, ils sont des
intervenants sérieux, mais je crois qu'ils vont admettre avec moi, et
vous aussi, M. le député, qu'ils ne sont pas les seuls
intervenants dans ce dossier.
Le Président: M. le député de Bertrand, en
additionnelle.
M. Parent (Bertrand): Comment le ministre peut-il, avec cette
proposition d'ouverture le dimanche, prétendre que lui et son
gouvernement ont comme préoccupation majeure le noyau familial?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce
et de la Technologie. M. le ministre.
M. MacDonald: J'aimerais rappeler à cette Chambre et au
député qu'il existe actuellement dans la province de
Québec environ 438 conventions collectives regroupant 370 419
travailleurs et dans lesquelles sont prévus les termes et conditions
pour le travail le dimanche.
J'aimerais rappeler que, dans certaines des chaînes - je pense
à Provigo en particulier - les travailleurs dont les principaux
représentants annoncent une opposition totale, ont signé avec
leurs employeurs, au cours des dernières années et ce, dans 150
conventions collectives, des prévisions au cas où il y aurait
réouverture de la loi et travail partiel ou complet le dimanche, ce qui
est suggéré actuellement. Ce n'est pas une nouvelle situation.
Aucun de ces travailleurs ou leurs représentants, à ma
connaissance, ne peut prétendre que ces 370 419 travailleurs sont des
citoyens de seconde classe ou que ceux qui ont déjà convenu d'une
entente dans le secteur de l'alimentation ont été forcés,
contraints de le faire.
Le Président: M. le député de Bertrand, en
additionnelle. Je m'excuse.
M. Chevrette: M. le Président, est-il exact... En
additionnelle.
Le Président: M. le chef de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Chevrette: Je voudrais demander au ministre de l'Industrie, du
Commerce et de la Technologie s'il est exact que son adjoint parlementaire, le
19 octobre, au bureau du MIC, a carrément dit aux représentants
des grandes chaînes d'alimentation: Provigo, Metro et Steinberg: C'est
à prendre ou à laisser. Si vous prenez le compromis d'ouverture
minimale le dimanche, le gouvernement va vous suivre et que, par la suite,
précisément, à Rimouski, à Québec, à
la ville de Laval et à Sherbrooke on s'est retrouvé avec des
majorités contre. On ne laissait pas voter les repésentants d'IGA
ni ceux de Metro qui étaient contre, mais on faisait voter exclusivement
les gens de Provigo pour dégager un consensus.
Des voix: Oh! Oh!
Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce
et de la Technologie. M. le ministre.
M. MacDonald: Je n'étais pas présent à cette
réunion et je serais fort surpris que ce soit la façon avec
laquelle mon adjoint parlementaire, le député de Vimont, ait
présenté cette situation. Son mandat était clair,
c'était de présenter la situation que je vous ai décrite,
à savoir que nous ne retenons et que personne ne retient le statu quo
comme une solution acceptable. Nous ne retenons pas les extrêmes non
plus. Voici un moyen terme et nous aimerions avoir vos commentaires. Il nous
semble que c'est la direction vers laquelle on devrait aller.
Pour ce qui est des autres réunions, Provigo, IGA, je ne sais pas
de quoi vous parlez.
Le Président: M. le chef de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Chevrette: M. le Président, est-ce que le ministre
pourrait s'informer auprès de son adjoint parlementaire s'il est exact
qu'à Laval, il y avait 75 marchands IGA et qu'il n'y avait que 50
marchands Provigo et que ce sont les représentants, M. Bouret en
tête, qui ont loué une salle pour que les marchands d'IGA ne
soient pas dans la même salle pour ne pas influencer le consensus? Que
s'est-il produit à Sherbrooke? Que s'est-il produit à
Québec? 22 étaient pour et 35 marchands contre, mais qui
étaient d'IGA, donc qui ne comptaient pas dans le consensus. Comment se
fait-il que le ministre ne soit pas au courant de ces données? Les gens
assistaient à ces réunions et étaient presque mis dehors
par les représentants de Provigo qui ne voulaient pas voir les
dissidents?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce
et de la Technologie. M. le ministre.
M. MacDonald: Je dirai au chef de l'Opposition que,
nécessairement, comme tout le monde, je suis habitué à ses
excès de langage. Mais je crois que sa question est assez pertinente et
je vais m'informer. Et plutôt que vous donner la moitié des
détails, j'irai chercher exactement ce qu'il en est et je vous
répondrai demain.
Le Président: M. le chef de l'Opposition, en
principale.
Le dossier de la vente des Nordiques de
Québec
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Ma question
s'adresse à Mme la vice-première ministre. Je pense bien que tous
les députés en cette Chambre connaissent l'attachement qu'ont les
Québécois de Québec et même des environs aux
Nordiques de Québec. On sait que cela accapare les manchettes
aujourd'hui d'une façon extraordinaire.
Une voix: Pas de fanatisme!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le chef de l'Opposition, vous avez toujours la parole.
M. Chevrette: C'est le député de La Peltrie qui a
parti la claque.
Une voix: Go Habs go!
M. Chevrette: M. le Président, le premier ministre a
manifesté ses craintes vis-à-vis de la situation. Je voudrais
poser deux questions à la vice-première ministre.
Premièrement, est-ce que le gouvernement a su, avant qu'elle ne soit
déposée à Caiiing O'Keefe, que cette offre d'achat venait?
A-t-il fait des démarches avant que cette offre d'achat soit
effective?
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: II est évident que le dossier des Nordiques -
et pour certains de mes collègues, aussi - est un dossier prioritaire
qui est suivi de près par le gouvernement. Je dois dire que le
gouvernement fera le maximum pour faire en sorte que les entreprises du
Québec puissent se porter acquéreur des Nordiques, que cela reste
à des Québécois. Et nous voulons assurer aussi aux
dirigeants des Nordiques toute la collaboration du gouvernement du
Québec, parce que nous voulons éviter le
déménagement des Nordiques ailleurs. Nous allons aider les
Nordiques, mais nous n'achèterons pas les Nordiques, M. le
Président.
Le Président: Très bien. M. le chef de
l'Opposition, en additionnelle.
M. Chevrette: Je vais reprendre ma question. Je comprends qu'on
avait sans doute donné certains paramètres de réponse,
mais la question était la suivante. Est-ce que vous l'avez su avant que
l'offre d'achat ne soit déposée? Est-ce que vous êtes
intervenus avant? Et que veulent dire "des moyens concrets de soutien aux
dirigeants des Nordiques"?
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: M. le Président, tout ce que je peux
répondre... Je sais qu'on me donne des paramètres comme les
recherchistes du chef de l'Opposition lui donnent ses questions. Je dois dire
aussi, M. le Président, que, comme l'a indiqué M. le premier
ministre, le gouvernement suit ce dossier de près. Je ne peux pas en
dire plus aujourd'hui. Il faudra qu'il questionne à nouveau le premier
ministre. Ce n'est pas notre rôle de gérer des franchises de clubs
de hockey, et je pense que le chef de l'Opposition est conscient de ça
et qu'il va être d'accord avec moi. Ce sont les Nordiques, comme
corporation, qui gèrent ce dossier-là. Nous ne voulons pas
intervenir indûment dans ce dossier. Nous allons le suivre de très
près afin que les Nordiques restent au Québec et que cette
franchise ne soit pas déménagée ailleurs, puisque c'est un
club important tant par ses retombées économiques que dans la vie
des Québécois. Il est important pour les citoyens de
Québec et du Québec en général.
Le Président: M. le chef de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais demander
à la vice-première ministre, tout en sachant comme elle qu'un
club de la ligue nationale est un élément promotionnel important
pour le Québec - je pense qu'on est tous d'accord là-dessus...
Que le gouvernement du Québec se soucie que ce soient des
intérêts québécois qui s'en portent
acquéreurs, tant mieux, bravo! Mais je voudrais savoir de Mme la
ministre, M. le Président, ce que veulent dire "les moyens concrets" de
soutien de la part du gouvernement, puisque le premier ministre, directement de
Winnipeg, a garanti à André Arthur ce matin qu'il utiliserait des
"moyens concrets" pour venir en aide aux Nordiques? Je voudrais peut-être
lui poser une question: Est-ce qu'il ne lui apparaîtrait pas un peu
contraire à la vérité...
Le Président: À l'ordre! À l'ordre!
M. Chevrette: ...qu'on mette tellement d'accent sur le
déménagement, alors qu'on sait très bien que les normes de
déménagement d'une équipe professionnelle à une
autre ville sont très compliquées. Cela ne se fait pas en criant
lapin. Est-ce qu'on n'est pas en train de fausser le débat et que le
vrai débat est plutôt que des intérêts
québécois demeurent propriété des Nordiques? (14 h
30)
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: M. le Président, il faudra attendre comme
gouvernement d'être appelé par les dirigeants à intervenir,
il faut regarder l'évolution du dossier. Si nous sommes appelés
à
intervenir par les dirigeants des Nordiques, nous le ferons. Je pense
que toute spéculation sur les solutions qui seraient envisagées,
c'est trop tôt pour les mentionner. En ce moment, il faudrait voir
l'évolution du dossier. Nous interviendrons à mesure que le
dossier évoluera et suivant les appels que nous feront les Nordiques. Il
n'est pas question que nous achetions le club des Nordiques.
Le Président: Mme la députée de Chicoutimi.
Une voix: Question principale.
Le Président: M. le député de Taillon, en
principale.
Répondeurs automatiques bilingues dans certains
ministères et organismes
M. Filion: Merci, M. le Président. L'article 1 de la loi
101 fait du français la seule langue officielle au Québec, mais
c'était avant le 2 décembre 1985 car, depuis, concernant la
langue de l'administration, la langue publique, la langue du gouvernement,
l'État québécois glisse insidieusement vers le bilinguisme
institutionnel. À preuve, si vous appelez après les heures
d'ouverture - je vous invite à le faire ce soir - au ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, au ministère du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche, au ministère de la
Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, à la CARRA,
à ia Régie des rentes, à la Régie de
l'assurance-maladie, à la Société d'habitation du
Québec, à l'Office des personnes handicapées, à la
Régie du logement, et j'en oublie, M. le Président, donc si vous
appelez après les heures d'ouverture, c'est un répondeur qui vous
livrera un message bilingue ici, dans la ville de Québec. Ma question
s'adresse au ministre responsable de la loi 101. Est-ce qu'il trouve normal,
acceptable, est-ce qu'il trouve impeccable, pour employer l'expression qu'il
utilisait au printemps lorsqu'il nous promettait un français impeccable
au niveau de la langue de l'administration, est-ce qu'il trouve donc impeccable
et acceptable qu'ici, à Québec, ce soit un répondeur
automatique qui vous livre un message bilingue après les heures
d'ouverture de ces ministères et organismes?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Affaires culturelles et responsable de l'application de la Charte de la
langue française.
M. Rivard: M. le Président, il est évident que le
député de Taillon et moi partageons la même
préoccupation de faire en sorte...
Une voix:...
Le Président: À l'ordre! À l'ordre!
Des voix:...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le ministre, vous avez la parole.
M. Rivard: Je disais donc...
Des voix:...
Le Président: M. le ministre.
M. Rivard: Je disais donc, M. le Président, que le
député de Taillon et moi partageons la même
préoccupation, celle de faire en sorte que l'administration publique
québécoise soit impeccable quant à la langue qu'elle
utilise dans ses communications avec les citoyens. Pourrais-je cependant, M. le
Président, rappeler au député de Taillon la façon
dont le gouvernement précédent a rédigé cette loi?
Le député de Taillon parle du chapitre de la langue de
l'administration. Il va s'apercevoir qu'à l'article 15, H est dit que
l'administration rédige et publie dans la langue officielle ses textes
et documents et que, règle générale, dans cette loi 101,
on dit relativement peu de choses quant au message qui n'est pas écrit.
C'est le premier point. Le deuxième point. Pourrais-je souligner au
député de Taillon que le gouvernement précédent du
Parti québécois a mis dans la loi 101 l'article 89 qui dit ceci:
"Dans les cas où la présente loi n'exige pas l'usage exclusif de
la langue officielle, on peut continuer à employer à la fois la
langue officielle et une autre langue." J'aimerais demander au
député de Taillon où il trouve l'article qu'il faut dans
cette loi 101 pour interdire l'utilisation d'une autre langue dans ce genre de
message.
Le Président: M. le député de Taillon, en
additionnelle.
M. Filion: Le ministre responsable de la loi 101 ne se rend-il
pas compte que, finalement, I suffirait d'un minimum de volonté
politique à son gouvernement pour que ses propres ministères et
ses propres organismes appliquent la loi 101 de façon évidente,
comme ça se faisait avant le 2 décembre 1985? Est-ce que le
ministre responsable de la loi 101 est en train d'inviter ses collègues
responsables de ces ministères et de ces organismes à faire du
juridisme sur une question qui n'a jamais posé de problème avant
l'arrivée au pouvoir du gouvernement du Parti libéral?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Affaires culturelles et responsable de l'application de la Charte de la
langue française.
M. Rivard: M. le Président, je pense qu'il faut regarder
aussi, dans ce genre de dossier, la façon dont la population en
général évalue les gestes posés par
l'administration. Je viens de déposer en cette Chambre le rapport
d'activité 1987-1988 de la Commission de protection de la
langue française. Pour cet exercice de douze mois, eu
égard à tous les articles qui concernent la langue de
l'administration, en tout et partout, la commission a reçu un total de
49 plaintes, ce qui représente 1,3 % de l'ensemble des plaintes.
Où est le problème?
Le Président: M. le député de Taillon, en
additionnelle.
M. Filion: M. le Président, est-ce que le ministre ou mes
collègues de la Chambre accepteraient que je dépose, pour
l'information du ministre, l'avis du Conseil de la langue française
lequel dit fort bien que si le ministre interprète "autre langue" comme
voulant dire l'anglais, c'est son interprétation à lui et non
celle du Conseil de la langue française? Donc, c'est un
dépôt de document.
Le Président: M. le ministre, est-ce que vous consentez
à ce que soit déposé le document allégué par
M. le député de Taillon? Il y a consentement?
M. le député de Taillon, en additionnelle, sans
préambule, s'il vous plaît!
M. Filion: En additionnelle.
Le Président: Votre document est maintenant
déposé.
M. Filion: Je voudrais savoir si le ministre, qui nous a promis
une enquête, qui nous a promis un français impeccable, pourrait
nous dire si l'enquête promise a eu lieu par l'Office de la langue
française? Je voudrais savoir également quelles directives ont
été émises par son ministère afin que ce
français utilisé par l'administration gouvernementale soit
impeccable?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Affaires culturelles et responsable de l'application de la Charte de la
langue française.
M. Rivard: M. le Président, nous sommes à
travailler cet élément du dossier, ce que j'appelle le plan
d'action gouvernemental en matière de politiques linguistiques.
Effectivement, un des chapitres importants concerne le français, langue
de l'administration. Je suis en mesure de dire en cette Chambre que je
proposerai au gouvernement un ensemble de mesures plutôt contraignantes
afin de faire en sorte que le français soit vraiment la langue de
l'administration et d'éviter ainsi un certain nombre d'incidents.
Le Président: M. le député de Taillon, en
additionnelle.
M. Filion: Est-ce que le ministre responsable de la loi 101 ne se
rend pas compte de l'effet d'entraînement énorme qu'a l'attitude
relâchée du gouvernement à l'égard de la langue
française dans l'entreprise privée? Une voix: C'est
vrai.
M. Filion: Est-ce que le ministre ne se rend pas compte qu'il est
difficile d'expliquer à Hyundai qu'elle ne devrait pas exiger le
bilinguisme inutilement dans son entreprise...
Le Président: À l'ordre! À l'ordre!
M. Filion: ...si le gouvernement lui-même...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Votre question, M. le député de Taillon:
A l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous
plaît!
M. le député de Taillon, votre question.
M. Filion: Est-ce que le ministre a besoin d'un dessin, comme son
gouvernement, pour comprendre que l'effet d'entraînement d'une attitude
relâchée comme celle du présent gouvernement
vis-à-vis de sa propre langue de communication est énorme dans
l'entreprise privée où l'exigence du bilinguisme est devenue
telle que nous sommes en train de construire au Québec des francophones
unilingues...
Une voix: Oui.
Des voix: Bravo!
M. Filion: ...évidemment français...
Le Président: M. le député de Taillon, vous
êtes en additionnelle.
M. Filion: Nous sommes en train de construire, M. le Président,
des listes d'assistés sociaux et de personnes sur
l'assurance-chômage qui sont des francophones unilingues.
(14 h 40)
Le Président: M. le ministre délégué
aux Affaires culturelles et responsable de l'application de la Charte de la
langue française.
M. Rivard: M. le Président, je ne peux pas interdire au
député de Taillon de vivre le dossier linguistique dans le
pessimisme et la déprime. Je pense que ce qu'il faut faire en 1988, au
contraire, c'est mesurer, d'une part, l'immense chemin qui a été
parcouru par la société québécoise en
matière de langue de travail, de langue d'accueil et d'éducation
des immigrants... Oui, même en matière de langue d'affichage. Il
faut mesurer ce chemin intéressant parcouru, partir de là et
continuer d'agir. Ce gouvernement est déterminé à
continuer d'agir, mais à aller peut-être au-delà de ce qu'a
fait le gouvernement précédent qui ne s'est pas
préoccupé de la qualité du français enseigné
dans les écoles...
Des voix: Bravo!
M. Rivard: ...qui ne s'est pas préoccupé de la
façon dont on accueillait les immigrants, dont on les francisait et on
les intégrait vraiment...
Des voix: Bravo!
M. Rivard: ...et qui ne s'est pas préoccupé non
plus des techniques du français dans les techniques de l'information. La
semaine dernière, le Conseil de la langue française...
Le Président: En conclusion.
M. Rivard: ...a rendu publique une étude pertinente qui
parle beaucoup sur cette question des termes techniques de l'information, sur
l'informatique...
Le Président: En conclusion.
M. Rivard: ...et l'utilisation du français. Je ne
reçois aucune espèce de question du député de
Taillon à ce sujet et le gouvernement précédent ne s'est
jamais préoccupé de cette question vitale.
Des voix: Bravo!
Le Président: Je vais reconnaître une
quatrième question principale à Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme la députée de Chicoutimi, en principale.
Plan de désengorgement des urgences de la
région de Montréal
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. La revue
L'Actualité médicale du 19 octobre dernier titrait: Tes
salles d'urgence débordent toujours". En effet, selon les 23
médecins chefs des départements des cliniques d'urgence de la
région de Montréal, le plan de désengorgement des urgences
pour mettre fin à la médecine de guerre est un échec
presque total. Plusieurs mesures estimées urgentes n'en seraient qu'au
stade de la planification. Le manque flagrant de ressources, tant dans les
salles d'urgence que pour le maintien à domicile des personnes
âgées, expliquerait en grande partie l'engorgement des
urgences.
M. le Président, la ministre peut-elle nous dire comment il se
fait que, deux ans après le dépôt de son plan de
désengorgement des urgences, plusieurs mesures n'en soient qu'au stade
de la planification et comment il se fait qu'elle n'ait pas compris et investi
dans les ressources de maintien a domicile de manière à
désengorger les urgences?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais d'abord
faire remarquer à la députée de Chicoutimi qu'à la
suite de ce titre de journal, où on disait que les mesures d'urgence
étaient un échec, il y a eu dès le lendemain une mise au
point faite par la personne à laquelle la députée fait
référence, le président de l'Association des
médecins de Montréal, pour dire qu'on présumait de
résultats qui n'y étaient pas encore et que c'était un
titre exagéré.
Cela dit, M. le Président, je ferai remarquer qu'à
plusieurs reprises, j'ai eu l'occasion de répondre en cette Chambre sur
la question. des urgences, et qu'il s'agissait d'un plan de trois ans et que
toutes les mesures n'avaient pas encore porté fruit. Il reste qu'en ce
qui a trait à toutes les mesures d'urgence touchant les coordonnateurs,
le développement de services ou de ressources alternatives, tout
l'argent a été investi. Il y a eu un retard, je l'ai
expliqué en Chambre ici l'an dernier, quant à la
réalisation des places en centre d'accueil, mais nous avons tenté
de pallier ce problème en convertissant dans certains centres d'accueil
ou hôpitaux des places qui étaient fermées ou, encore, des
places d'hébergement en places de longue durée.
Une grande partie des investissements ont été faits. Je
pense que même s'H subsiste des problèmes dans la région de
Montréal - on ne parle plus de la région de Québec - des
progrès ont été réalisés.
À cet effet, je voudrais référer la
députée de Chicoutimi...
Le Président: Brièvement, Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Mais c'est une grande question, M. le
Président.
Le Président: II va y avoir plusieurs questions
additionnelles, Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: II va y avoir plusieurs questions
additionnelles. Alors, je retiens pour la prochaine.
Le Président: Mme la députée de Chicoutimi,
en additionnelle.
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. La source de
l'engorgement des urgences, c'est l'insuffisance des ressources consenties pour
le maintien à domicile. La ministre a-t-elle été
informée que, selon l'évaluation faite par le CRSSS du
Montréal métropolitain quant aux besoins de soins à
domicile des personnes, on estime qu'il y aurait environ 8600 personnes qui
auraient besoin de soins intensifs à domicile, alors que les ressources
ne permettent d'en offrir qu'à environ 1000 personnes? Quand va-t-elle
corriger ces situations concrètes?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, ce que je veux dire
à la députée de Chicoutimi, c'est que nous avons
injecté dans les services à domicile sur cette période de
trois ans, 40 000 000 $ supplémentaires. De 80 000 000 $, les services a
domicile sont passés à 119 000 000 $, pour une augmentation de 49
%. Je pense que ce sont là des chiffres importants. Je trouve toujours
étonnant que l'Opposition se lève pour nous dire d'injecter des
millions et des millions alors qu'eux, pendant neuf ans, ont coupé d'une
façon systématique dans les services de santé et les
services sociaux.
Le Président: Mme la députée de Chicoutimi,
en additionnelle. En additionnelle, Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: M. le Président, il faut donc comprendre du
plan d'urgence de la ministre qu'il n'a pas donné les résultats
qu'on attendait puisque, selon les médecins chefs de départements
des salles d'urgence de Montréal, on connaît la même
situation. Est-il exact que la ministre aurait l'intention de
récupérer quelque 89 000 000 $ des soins à domicile qui
sont actuellement dans les CLSC, à la suite du jugement touchant le CLSC
Kateri?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux. Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je trouve que c'est une
question - je m'excuse auprès de la députée de Chicoutimi
- de quelqu'un qui ne connaît pas son dossier. Depuis quand a-t-on
parlé de couper de 89 000 000 $? Moi, je veux bien, M. le
Président, essayer de donner les réponses les plus justes
possible. Je voudrais qu'on me pose des questions basées sur quelque
chose de réel, au moins. Alors que je viens de dire qu'on a
ajouté 40 000 000 $ dans les maintiens à domicile depuis - 39 000
000 $ plus exactement - trois ans, elle vient me dire que j'ai l'intention d'en
couper 89 000 000 $. Ce serait tout à fait irresponsable. Je me demande
si la députée de Chicoutimi est tout à fait bien
renseignée, pour ne pas utiliser d'autres termes.
Le Président: Mme la députée de Chicoutimi,
en additionnelle. À l'ordre! À l'ordre! À l'ordre, s'il
vous plaît! Mme la députée de Chicoutimi, en additionnelle.
À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît!
Mme Blackburn: M. le Président, à défaut de
bien connaître le dossier comme Mme la ministre, je sais lire.
Le Président: En additionnelle, madame.
Mme Blackburn: M. le Président, je sais lire. Vous me
permettrez...
Le Président: Votre question, Mme la
députée, sans préambule.
Mme Blackburn:... La Presse...
Le Président: Votre question.
Mme Blackburn: La ministre a-t-elle pris connaissance de
l'article suivant: La Presse, Montréal, le samedi 1er octobre:
"Québec entend recouvrer les millions que coûtent les soins
à domicile et le rapport Rochon sera mis aux oubliettes". Ma question
est la suivante, M. le Président. La ministre a-t-elle, oui ou non,
l'intention de maintenir la gratuité des soins à domicile?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux. Mme la ministre de la Santé et des Services
sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je répète
qu'il n'est pas question de récupérer x millions de dollars,
comme vient de l'indiquer la députée de Chicoutimi. Non plus, il
n'est aucunement question que les suites à donner aux recommandations de
la commission Rochon deviennent caduques ou, enfin, n'aient pas lieu. Il a
toujours été entendu que le gouvernement acceptera des
orientations relativement à certains changements apportés dans le
domaine de la santé et des services sociaux en temps et lieu. Je ne puis
être responsable de ce que j'appelle un canard, que nous allons
récupérer 90 000 000 $ dans les services de maintien à
domicile. Cela m'apparaît tout à fait inexact.
Le Président: Je vais reconnaître, cet
après-midi, une cinquième principale à M. le
député de La Peltrie. M. le député de La
Peltrie.
M. Cannon: M. le Président...
Le Président: À l'ordre! À l'ordre! À
l'ordre, s'il vous plaît!
(14 h 50)
Ouverture du Québec sur les marchés
européens
M. Cannon: M. le Président, ma question s'adresse au
ministre délégué aux Affaires internationales, et concerne
l'ouverture du Québec sur les marchés européens. Comme on
le sait, douze pays d'Europe se préparent à affronter un
défi économique de taille au cours des années
quatre-vingt-dix en formant un regroupement de pays dans le cadre d'un
véritable marché commun, on évalue que cette force
économique représentera une entité de tout près de
325 000 000 d'individus. La valeur économique de la production de la
consommation des échanges économiques atteindra plus de 40 % du
commerce mondial, dont 22 % se situent à
l'extérieur de la CEC.
Est-ce que le ministre pourrait nous indiquer l'impact d'un tel
défi pour le Québec des années quatre-vingt-dix et nous
dire les orientations du gouvernement québécois au soutien et
à l'encouragement de nos petites et moyennes entreprises afin qu'elles
puissent accéder à un marché aussi vaste?
Le Président: M. le ministre des Affaires internationales.
M. le ministre.
M. Gendron: M. le Président, il y a consentement...
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Gendron: II y aurait consentement pour qu'on entende la
question.
Une voix: Consentement pour que tu reprennes la question.
Le Président: M. le ministre des Affaires
internationales.
Une voix: Consentement.
Le Président: M. le ministre des Affaires
internationales.
M. Vallerand: M. le Président, il aurait été
préférable, évidemment, que la question vienne de
l'Opposition, mais on sait le peu d'intérêt qu'ils attachent aux
questions économiques, si bien que le...
Le Président: À l'ordre! À l'ordre!
M. Vallerand: ...parti gouvernemental se doit d'être
très vigilant...
Le Président: M. le ministre, M. le ministre.
M. Vallerand: Donc, on se doit, M. le Président...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre des Affaires
internationales.
M. Vallerand: Je voudrais strictement ajouter, M. le
Président, qu'on se doit d'être très vigilant sur les
questions économiques et l'Opposition en fait la démonstration.
Pour eux... Le marché de plus de 320 000 000 de personnes, davantage
peut-être - plus de 350 000 000 quand on prend en considération
l'association économique de libre-échange européenne -
sera, de fait, l'intégration économique de l'Europe de l'Ouest
d'ici à 1992.
Des occasions considérables pour nos entreprises! Nous, du
gouvernement, du parti gouvernemental, nous nous faisons fort, d'abord. de
sensibiliser nos entreprises à ces nouvelles occasions, ces nouvelles
opportunités. Nous nous faisons fort, également, de
systématiser l'information pour la diriger très pratiquement vers
nos entreprises. On dit, également, aux personnes de chez nous que ce
marché, cet espace économique va constituer une occasion
d'investissements. Preuve en est: hier, l'annonce d'un investissement important
dans la région de Québec, à Saint-Augustin, Glaverbel, 145
000 000 $. Je pense que...
Le Président: Conclusion.
M. Vallerand: ...le nouvel espace économique qui est
à se créer en Europe de l'Ouest...
Le Président: À l'ordre! À l'ordre!
M. Vallerand: ...va créer des occasions
considérables au titre des opportunités, autant pour nos
exportations que pour les investissements au Québec.
Le Président: Je vais reconnaître la sixième
principale à M. le député de Lévis. M. le
député de Lévis.
L'utilisation de lignosulfonates sur les
routes
M. Garon: M. le Président, sans préambule,
j'aimerais demander au ministre de l'Environnement s'il a en main une
étude qui contredit les conclusions du Dr Del isle, du Service de
génie de l'environnement à l'École polytechnique de
Montréal, lequel a testé le produit épandu sur les routes
de gravelle du Québec par le ministère des Transports, en 1987,
et dont il a démontré la forte toxicité par rapport aux
organismes aquatiques?
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Lincoln: M. le Président, je pense que la position de
la question, la sixième, démontre que même son parti
commence à être tanné de son roman-fleuve sur les
lignosulfonates.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Lincoln: Je ne sais pas ce qui arrive depuis quelque
temps...
Le Président: M. le ministre.
M. Lincoln: ...au député de Lévis, s'il a
mangé du calcium ou quoi, mais H est déchaîné avec
son...
Le Président: M. le ministre, à la question;
à la question, s'il vous plaît!
M. Lincoln: Je ne sais pas ce qu'il cherche.
Tous les jours, je vois une nouvelle entête disant: "nous mettons
au défi de produire des études". J'ai déposé
l'étude de 1986 de notre ministère à laquelle était
annexée une étude de 1984. Je ne peux pas pondre des
études tous les jours sur les lignosulfonates. Les études qui
sont là, je les ai déposées, elles sont publiques, aussi
publiques pour vous que pour tout le monde. Tout ce que je veux vous dire,
c'est que j'ai lu les études comme vous. Les études disent en
conclusion, à deux endroits - je pourrais vous la relire encore pour une
nième fois - que dans les circonstances d'utilisation
recommandées, les lignosulfonates et le calcium sont des matières
équivalentes. Je vous ai aussi dit que le ministère de
l'Environnement procédera l'an prochain à des études
complètes sur tous les abat-poussière au Québec, le
lignosulfonate et votre cher calcium. À ce moment-là, on va
déposer ces études aussi et vous en saurez un peu plus sur le
sujet. Merci beaucoup!
Des voix: Bravo!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député de Lévis, en additionnelle.
M. Garon: M. le Président, c'est le même genre de
rire qui répondait aux questions de l'Opposition au printemps 1986 sur
les BPC de Saint-Basile-le-Grand.
Des voix: Oui!
M. Garon: J'aimerais demander au ministre de l'Environnement s'il
a en main une étude qui contredit les conclusions du Dr Delisle qui est
le seul, que nous sachions, qui a étudié le produit épandu
par le ministère des Transports en 1987, et dont il a
démontré la forte toxicité par rapport aux organismes
aquatiques, un rapport qui a été publié en novembre 1987
et mis à jour en 1988. J'aimerais demander également au ministre
s'il a une contre-étude qui démontre que le produit épandu
par le ministère des Transports en 1987, près de 20 000 tonnes et
près de 18 000 tonnes en 1988 est non toxique.
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Lincoln: Je ne sais pas pourquoi le député de
Lévis s'excite tellement. J'ai déposé les études
que j'avais du ministère de l'Environnement, mais je vous ai aussi
cité la conclusion même de la dernière étude. Je
pense que c'est en septembre 1988, c'était la mise à jour de
l'étude de novembre 1987 du professeur Delisle, où lui-même
conclut que le lignosulfonate peut être utilisé dans des
circonstances qu'il recommande. Je n'ai pas envie de commenter sur les poissons
etc. Je ne suis pas un expert scientifique pour commenter cela. J'ai
déposé les études que j'avais. J'ai lu la conclusion de
l'étude du professeur Delisle qui arrive à une conclusion qui
semble être tout à fait différente de celle que vous nous
donnez. Que voulez-vous que je vous dise de plus? Vous allez me questionner
tous les jours. Je ne peux pas inventer des choses. Je ne suis pas un
scientifique. Je vous dis ce que j'ai lu, et ce que j'ai lu, c'est
différent de ce que vous interprétez. C'est tout!
Le Président: M. le député de Lévis,
en additionnelle.
M. Garon: M. le Président, est-ce que le ministre de
l'Environnement peut déposer les résultats des tests et du suivi
que son ministère a effectués à la suite de
l'épandage des liqueurs de sulfite usées sur 1695
kilomètres de routes de gravelle en 1987 et sur 1475 kilomètres
de routes en 1988?
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Lincoln: Pour la dizième, quinzième et
vingtième fois, le ministère de l'Environnement a fait une
étude en 1986 et a décidé que dans des circonstances et
selon des critères très bien établis et
précisés - je pourrais vous citer les pages - il est possible
d'utiliser le lignosulfonate comme un équivalent de calcium dans
certaines conditions climatiques et d'après des critères bien
établis qui ont été suivis par le ministère des
Transports. Donc, dans ces conditions on a permis cela. Maintenant en
1988-1989, nous allons faire une étude par rapport à tous les
abat-poussière. Entre-temps, on n'a pas fait d'étude en
1987-1988. C'est cela la réponse, pour la dizième fois. On va en
faire une en 1989-1990. Si, entre-temps, vous avez des constatations
différentes à apporter, apportez-les. Vous n'avez rien
révélé de nouveau de ce que vous nous avez dit depuis
quatre, cinq, dix jours en conférence de presse et partout. Je crois que
vous êtes obsédé par le sujet. Qu'est-ce que je peux
faire?
Le Président: Je vais reconnaître la septième
question principale cet après-midi à M. le leader adjoint de
l'Opposition. M. le leader adjoint de l'Opposition.
Droits de coupe imposés aux industries
forestières
M. Jolivet: M. le Président, jeudi dernier j'ai
posé une question au ministre délégué aux
Forêts qui me confirmait qu'il avait l'intention de déposer un
projet de loi pour régler certains problèmes de la loi actuelle
sur les forêts. Il m'indiquait que c'étaient des amendements
majeurs. Quand le ministre, par l'intermédiaire du ministre
délégué aux Finances et à la Privatisation, a fait
la vente de la scierie Des Outardes, à la compagnie QNS, il faut le
rappeler, Ontario
Paper, il a pu, par voie réglementaire, en vertu de la loi
actuelle, abaisser les droits de coupe de la zone où sont
localisées les coupes de Quebec North Shore, QNS, et de la scierie Des
Outardes, ce qui, par le fait même, a permis d'abaisser le prix d'achat
de la scierie Des Outardes à la compagnie Ontario Paper. Est-ce que le
ministre peut m'indiquer qu'au moment où il a fait ces transactions avec
la compagnie, il est réel que, par voie réglementaire,
d'après les renseignements que nous avons, il a pu baisser les droits de
coupe pour QNS et la scierie Des Outardes, et que cela a eu pour effet aussi de
profiter à toutes les autres usines localisées dans la même
zone que QNS et la scierie Des Outardes? (15 heures)
Le Président: M. le ministre délégué
aux Forêts.
M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le
Président, il est exact qu'il y a eu un réajustement sur la
tarification de la zone qui implique la scierie Des Outardes, Reed Paper et les
autres entreprises de cette région. La réduction proposée
par ceux qui avaient établi les tarifs était de 0,25 $ le
mètre cube. Cela n'a eu aucun effet sur la vente de la scierie Des
Outardes, contrairement à ce que ie député de Laviolette
prétend.
Le Président: M. le leader adjoint de l'Opposition, en
additionnelle.
M. Jolivet: Est-ce que le ministre, en vertu du document qu'il a
déposé ou qu'il a l'intention de déposer devant le Conseil
des ministres, à l'article 1 des amendements proposés, vient
corriger l'article 5, alinéa 4, de la Loi actuelle sur les forêts
et que cet amendement, s'il avait été en vigueur au moment
où on se parie, aurait permis d'abaisser les droits de coupe de QNS et
la scierie Des Outardes, sans donner les mêmes droits à tous les
autres utilisateurs de la zone, comme c'était le cas actuellement?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Forêts.
M. Côté (Rivière-du-Loup): Non, M. le
Président, je dirai au député de Laviolette que nous avons
formé une équipe pour réviser la tarification,
c'est-à-dire les redevances facturées à toute l'industrie
du Québec, et cette tarification serait basée sur les
données géomorphologiques, sur la distance des marchés,
sur les difficultés d'exploitation, et ce document devrait être
déposé dans pas grand temps.
Le Président: Je vais reconnaître une dernière
très brève question cet après-midi à la
période de questions. M. le chef de l'Opposition.
Entente de principe avec les techniciens ambulanciers
affiliés à la CSN
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Ma question
s'adresse au ministre délégué à la Santé et
aux Services sociaux. Le ministre annonçait dernièrement qu'il y
avait une entente de principe entre les employeurs et les techniciens
ambulanciers syndiqués. Or, M. le Président, il y a une demande
de conciliation faite par les employeurs. Comment peut-on concilier une entente
de principe avec une demande faite au ministre du Travail, demande de
conciliation, et comment concilier cette entente de principe avec le fait qu'un
groupe de travailleurs affiliés à la FTQ avisent le ministre
qu'ils seront à la table des négociations le 3 novembre prochain?
Est-ce que le ministre peut nous dire ce qu'est une entente de principe pour
lui? Je lui permettrais de passer la parole au ministre du Travail dans sa
réponse, puisqu'il n'y en aura pas d'autre. Comment le ministre du
Travail, qui est chargé d'administrer le Code du travail, va-t-tl faire
pour respecter le droit des employeurs, en l'occurrence?
Le Président: Très brièvement, M. le
ministre délégué à la Famille, à la
Santé et aux Services sociaux.
M. Dutil: M. le Président, j'ai expliqué longuement
durant l'interpellation que nous avons eue vendredi matin ce qu'il en
était de l'entente de principe que nous avons effectivement. Ce qui se
fait comme travail actuellement entre la CSN et les employés, c'est la
vérification du libellé final de l'entente de principe qui avait
été prise. Quant au fait que la FTQ négocie avec les
employeurs actuellement, il est bien évident que c'est attribuable au
fait que l'entente de principe a été prise relativement aux
négociations avec la CSN et non pas avec la FTQ. Les négociations
avec la FTQ n'étant pas terminées, on poursuit les
négociations qui se sont toujours déroulées dans ce
cas-ci, non seulement en collaboration, mais en présence des
employeurs.
J'ai mentionné et je tiens à répéter que
dans le cas de l'entente de principe intervenue avec la CSN, les employeurs,
bien que n'étant pas dans la même salle, pour les raisons de
tension qui existent, que l'on connaît et que nous ne nions pas, et les
syndiqués se servaient un peu du coordonnateur gouvernemental pour
trouver un terrain d'entente dans ce dossier qui, effectivement, est
très difficile et très litigieux. Merci.
Le Président: Fin de la période
régulière de questions et de réponses.
Cet après-midi il n'y a pas de vote reporté. Motion sans
préavis. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche.
Félicitations aux athlètes des Jeux pour
handicapés de Séoul
M. Picotte: Merci, M. le Président. Que cette
Assemblée nationale accepte de féliciter les athlètes qui
ont participé aux Jeux paraolympi-ques de Séoul.
Le Président: Y a-t-il consentement pour débattre de la
motion de M. le ministre du
Loisir, de la Chasse et de la Pêche? Il y a consentement. Alors,
M. le ministre, vous avez déposé copie de votre motion?
M. Picotte: Oui, M. le Président.
Le Président: Vous avez maintenant la parole, M. le
ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
Un instant! Je n'accorderai pas la parole à M. le ministre si je
n'ai pas le silence et la collaboration de tous les membres de cette
Assemblée.
M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Merci, M. le Président. Au nom de toute la
population du Québec et en celui du gouvernement du Québec et de
tous les parlementaires réunis en cette Assemblée, il m'est
agréable de féliciter un groupe d'athlètes tout à
fait exceptionnels dont on a peu entendu parler dans les médias. Ils
nous sont revenus dernièrement de Séoul où se
déroulaient les paraolympi-quesde 1988.
En effet, pour la première fois de l'histoire, ces
athlètes handicapés ont eu l'occasion de compétionner sur
le même site que les olympiens des jeux d'été de
Séoul. Parmi la délégation canadienne se trouvaient
vingt-sept Québécois, dont dix-neuf athlètes. Ces derniers
ont remporté vingt-quatre médailles: huit d'or, sept d'argent et
neuf de bronze. Trois de ces athlètes québécois se sont
illustrés plus particulièrement en remportant quatre
médailles chacun. Il s'agit de MM André Beaudoin, Serge Raymond
et André Viger. Nous sommes très fiers de tous les participants
québécois car ils ont dû, comme tous les athlètes de
calibre international, travailler avec acharnement sans compter les heures, et
faire beaucoup de sacrifices pour atteindre ce calibre de
compétition.
Leur détermination et leur courage doivent servir d'exemple
à la population tout entière et, plus particulièrement,
à notre jeunesse. Encore une fois, à ces athlètes qui nous
ont si bien représentés: bravo et félicitations!
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président: Sur la même motion, Mme la
députée de Johnson.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci, M. le Président. Au nom de ma formation
politique, je suis très fière de porter notre voix à celle
que le ministre vient de nous présenter aujourd'hui, cette motion de
félicitations tout à fait spéciale à des gens qui
le méritent peut-être plus encore que ceux qui ne souffrent pas
d'un handicap. Premièrement, ces personnes ont dû faire le
sacrifice, accepter leur condition et travailler deux, trois ou quatre fois
plus fort peut-être que des athlètes en bonne forme.
Étant donné qu'André Viger est un athlète de
ma région, un athlète de Sherbrooke qui s'est
mérité quatre médailles, je suis d'autant plus
fière de m'associer à André, ainsi qu'aux autres
athlètes. En Estrie, nous avons aussi, un autre athlète qui
s'appelle Jacques Martin. Il s'est mérité trois médailles.
Au nom de ma formation politique, nous sommes tous et chacun très fiers
de leur performance. Nous souhaitons qu'il y ait de la relève puisque
c'est pour nous tous, gens du Québec, cette formulation de leur donner
la chance de s'exprimer devant 100 000 spectateurs.
On lisait dans les journaux: C'est la première fois que nous, les
athlètes handicapés, avons le privilège de nous
présenter devant 100 000 personnes. Pour eux, c'est vraiment quelque
chose d'exceptionnel, et nous devons encourager la tenue de jeux comme
ceux-là un peu partout. Merci beaucoup.
Le Vice-Président: II n'y a pas d'autre intervention.
Est-ce que la motion présentée par M. le ministre du Loisir, de
la Chasse et de la Pêche pour féliciter les athlètes qui
ont participé aux jeux paraolympiques de Séoul est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Toujours sur une motion
sans préavis, M. le député de Saint-Jacques.
Condoléances à la famille du peintre
Alfred Pellan
M. Boulerice: M. le Président, cette Assemblée,
malheureusement, souligne le décès du grand peintre Alfred
Pellan, et exprime à sa famille ses plus sincères
condoléances.
Le Vice-Président: Est-ce qu'il y a consentement à
ce que nous débattions de cette motion?
Des voix:...
Le Vice-Président: II y a consentement. Alors, allez-y, M.
le député de Saint-Jacques.
M. André Boulerice
M. Boulerice: M. le Président, au moment où les
Québécoises et les Québécois commémorent le
décès de notre ancien premier ministre, M. Lévesque, et
où nous sommes encore sous le choc de la mort du grand Félix
Leclerc, voilà que notre peuple est frappé par un autre deuil: la
mort du peintre Alfred Pellan. (15 h 10)
Pendant les quatorze ans qu'il a passés à Paris, Alfred
Pellan a côtoyé ceux qui animaient les mouvements d'avant-garde
qui se sont succédé en Europe durant la première partie de
ce siècle. Il a côtoyé notamment Picasso, Miro, Emst,
Léger et plusieurs autres grands noms. Il a assimilé le langage
pictural qui était le trait distinctif de leur oeuvre, tout en se
gardant un espace personnel de création qui a fait de lui un grand
maître de la couleur et du dessin. De Matisse, son ami, il nous a
livré des tableaux qui sont, eux aussi, ceux de la magie de la
vision.
Pellan, c'était et c'est toujours, M. le Président, les
formes simples, les contours géométriques et les personnages
burlesques. M. André Breton, le pape du surréalisme disait de
Pellan: Toutes les lampes intérieures au pouvoir de mon ami Pellan. " Il
s'agit bien, M. le Président, de lampes intérieures, de
lumière intérieure, de lumière intime, de soleil
domestique, d'éclairage introverti. Il s'agit bien de pouvoir, de
puissance de suggestion et d'évocation comme l'écrivait
d'ailleurs M. Guy Robert dans son livre Pellan, sa vie et son
oeuvre.
M. le Président, le monde de l'art contemporain est en deuil
aujourd'hui. Heureusement, dans un sens, l'oeuvre colossale d'Alfred Pellan
demeure et nos musées ici, comme les grands autres musées du
monde, permettront aux autres générations de voir, de sentir, la
force de la création québécoise en arts plastiques.
À sa famille, M. le Président, à tout le monde de
l'art contemporain qui saura s'inspirer de son oeuvre, j'offre, au nom de
l'Opposition officielle et en mon nom personnel, nos plus sincières
condoléances.
Le Vice-Président: Sur la même motion, Mme la
ministre des Affaires culturelles et vice-première ministre du
Québec.
Mme Lise Bacon
Mme Bacon: Merci, M. le Président. Alfred Pellan nous a
quittés doucement, après avoir donné à ses
compatriotes une oeuvre sans cesse renouvelée pendant près d'un
demi-siècle. Alfred Pellan a connu le Québec des grandes
noirceurs, a participé aussi au mouvement de libération de l'art
aux côtés d'amis comme Paul-Émile Borduas et a
côtoyé à Paris les initiateurs de l'art moderne, du cubisme
et du surréalisme.
Alfred Pellan s'était donné comme tâche de
créer, d'inventer et de changer. Il y est parvenu non sans risque, mais
aussi non sans gloire. Gloire qu'il a toujours reçue avec
l'humilité propre aux grands et aux véritables
créateurs.
Il a été le premier boursier du gouvernement du
Québec, en 1926, et quelque 30 années plus tard, après
quelques séjours a l'étranger, il rentre définitivement
chez lui, au Québec.
On est unanime à reconnaître son apport à la
peinture québécoise. Récemment encore, c'étaient
ses concitoyens lavalois qui lui rendaient hommage en donnant son nom à
l'une des grandes salles de la Maison des arts de Laval. Bientôt, nous
aurons une exposition de ses oeuvres à Laval.
Alfred Pellan nous a quittés, mais il nous a aussi laissé
un message, un message que le critique d'art François-Marc Gagnon
résume merveilleusement quand il écrit: "On ne s'est pas encore
remis de la couleur de Pellan dans la peinture au Québec. Il nous reste
à apprendre quelque chose de son amour de la vie, de son amour de
l'amour. "
À sa famille et à ses concitoyens, M. le Président,
j'offre les plus sincères condoléances de la part du
gouvernement.
Le Vice-Président: Sur la même motion, M. le
député de Mercier.
M. Gerald Godin
M. Godin: M. le Président, je voudrais évoquer
l'homme, Alfred Pellan, que j'ai fréquenté un peu chez lui. Je
voudrais aussi joindre mes paroles à celles de mes collègues pour
son épouse, Madeleine, femme extraordinaire et dire aussi que M. Pellan
était un dynamo, une locomotive. On ne pouvait passer une heure avec lui
sans être inspiré par son élan, sa force physique
jusqu'à la toute fin et, surtout, son inspiration et la manière
qu'il avait, avec beaucoup d'humour, d'évoquer ses copains de
l'époque, Picasso, Miro, Léger, qu'il fréquentait
quotidiennement et avec lesquels il a visité les boîtes de
Montparnasse. D'ailleurs, ils se sont interinfluencés de telle
manière que l'art moderne aujourd'hui passe aussi bien par Picasso que
par Alfred Pellan.
Je voudrais aussi souligner, M. le Président, qu'il a
formé d'excellents disciples, devenus ses amis par la suite, et qui
continuent à donner à l'art moderne des oeuvres
considérables et irremplaçables. Je veux nommer Jean
Benoît, Mimi Parent et Allen Glass qui, eux aussi, par la suite, ont
donné au Québec et au monde de la peinture et de l'art moderne
des oeuvres irremplaçables.
Alfred Pellan était un ami de tous ceux qui sont liés aux
arts au Québec. Je voudrais souligner à quel point le
Québec perd un dynamo irremplaçable. Merci beaucoup, M. le
Président.
Le Vice-Président: Toujours sur la même motion, M.
le député de Vimont.
M. Jean-Paul Théorêt
M. Théorêt: La population de Vimont apprenait avec
tristesse ce matin le décès de l'un de ses plus illustres
concitoyens, le peintre M. Alfred Pellan. La population de Vimont s'est
enorgueillie de compter parmi elle de nombreux talents dans les
différentes disciplines des arts. Le domaine des artistes peintres a
été particulièrement choyé. En effet, la population
de Vimont a eu l'honneur de compter parmi elle deux des plus grands peintres
québécois des dernières décennies,
Marc-Aurèle Fortin et Alfred Pellan.
Ce grand artiste lavallois, aimé et admiré de tous, a sans
contredit enrichi notre patrimoine culturel tout en contribuant à
l'essor de notre vie culturelle au Québec. Cet artiste peintre de grand
talent reconnu autant au Canada qu'à l'étranger aura permis
d'accroître la reconnaissance internationale de nos artistes peintres
québécois.
Au nom de la population de Vimont, je me joins à mes
collègues pour offrir à la famille et à tous les artistes
peintres québécois nos plus sincères
condoléances.
Le Vice-Président: Est-ce que cette motion de
condoléances à la famille du peintre Alfred Pellan est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président: Nous allons maintenant passer aux avis
touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Gratton: M. le Président, je voudrais aviser
l'Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes
jusqu'à 18 heures, de 20 heures à 22 heures et, si
nécessaire, mercredi le 2 novembre de 10 heures à 13 heures,
à la salle Louis-Joseph Papineau, la commission des institutions
procédera à l'étude détaillée du projet de
loi 42, Loi sur le ministère des Affaires internationales.
Après les affaires courantes jusqu'à 17 heures, et de 20
heures à 22 heures, à la salle du conseil législatif, la
sous-commission des institutions poursuivra sa consultation
générale sur l'avant-projet de loi intitulé Loi portant
réforme au Code civil du Québec du droit des obligations.
J'avise également l'Assemblée que mardi le 8 novembre,
après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle
Louis-Joseph Papineau, la commission des affaires sociales entendra les
intéressés et procédera à l'étude
détaillée du projet de loi d'intérêt privé
228, Loi modifiant la Loi concernant le sanatorium Ross.
Le Vice-Président: J'ai un avis à transmettre. Je
vous avise que la commission du budget et de l'administration se réunira
aujourd'hui après les affaires courantes jusqu'à 18 heures,
à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, afin de vérifier les
engagements financiers du Conseil du trésor et des organismes relevant
du ministre délégué à l'Administration.
En ce qui concerne les renseignements sur les travaux de
l'Assemblée, est-ce qu'il y a des questions? Il n'y a pas de questions.
Cela met donc fin à la période des affaires courantes.
Nous allons maintenant procéder aux affaires du jour. M. le
leader du gouvernement.
M. Gratton: M. le Président, je vous prierais d'appeler
l'article 13 du feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 107
Reprise du débat sur l'adoption du
principe
Le Vice-Président: À l'article 13 du feuilleton,
nous allons maintenant reprendre le débat sur la motion d'adoption du
principe du projet de loi 107, Loi sur l'instruction publique,
présenté par le ministre de l'Éducation. Je vais
reconnaître comme premier intervenant M. le député
d'Abitibi-Témiscamingue. Je m'excuse, je veux dire le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Gilles Baril
M. Baril: Merci, M. le Président, j'allais justement vous
reprendre.
C'est avec fierté et enthousiasme que je donne mon appui à
la loi 107 présentée par le ministre de l'Éducation la
semaine dernière. En tant que député parent, j'ai la
conviction que ce projet de loi constitue un pas en avant. Son contenu adapte
le système scolaire à la réalité sociale du
Québec d'aujourd'hui. Je m'en voudrais de ne pas rendre hommage à
son auteur, le ministre de l'Éducation, M. Ryan, dont le projet de loi
porte la marque. (15 h 20)
En présentant son nouveau projet de loi, le ministre de
l'Éducation nous a fourni la preuve qu'il a bien fait ses devoirs. En
effet, depuis le dépôt du projet de loi en décembre 1987,
le ministre de l'Éducation ne s'est pas assis sur ses lauriers. Il a
assisté avec assiduité aux travaux de la commission parlementaire
chargée de recevoir les avis de la population en général
et du monde de l'éducation en particulier. Il a lu les mémoires
qui lui ont été soumis, a posé des questions à ceux
et celles qui se sont exprimés en commission. Il a
réfléchi avant de rédiger un projet de loi scolaire pour
le Québec d'aujourd'hui.
Le projet de loi 107, auquel nous sommes appelés à donner
notre accord de principe, comporte plusieurs amendements, comme l'a
souligné le critique de l'Opposition la semaine dernière.
Cependant, contrairement aux critiques
de l'Opposition et malgré le respect que je lui dois, je suis
loin de m'en offusquer.
S'il y a une différence fondamentale entre le gouvernement actuel
et celui qui l'a précédé, c'est celle-ci. De ce
côté-ci de la Chambre, nous n'avons jamais prétendu
détenir le monopole de la vérité. Nous avons toujours cru
et nous croyons plus que jamais qu'U est important de consulter la population
et d'évaluer les avis parfois contradictoires qu'elle nous fournit.
C'est ce qu'a fait le ministre de l'Éducation qui est à la fois
un grand démocrate et un homme de décision. On est heureusement
loin du temps où nos amis d'en face consultaient pour la forme et
adoptaient à la vapeur des lois qui étaient ensuite
rejetées par les tribunaux et la population en général. Le
projet de loi 107 en constitue un exemple frappant, un cas éloquent que
j'avance. En effet, la loi 3 a été rejetée par la Cour
d'appel. Nous avions mis le gouvernement de l'époque en garde, mais il
n'a pas voulu comprendre l'importance de la réalité
constitutionnelle. De plus, le ministre de l'Éducation actuel avait
formulé - et le critique de l'Opposition en convient - une série
d'objections fondamentales à la loi 3. Le gouvernement d'alors n'a pas
voulu écouter la voix de la sagesse.
Aujourd'hui, le critique de l'Opposition s'étonne de nous voir
défendre les mêmes principes que ceux que nous défendions
en décembre 1984. Évidemment, la continuité, la
fidélité aux principes défendus, la cohérence entre
les engagements et les politiques qui y donnent suite, ne constituent pas la
marque de commerce de nos amis d'en face qui cherchent toujours à
récupérer les appuis qu'ils ont perdus peu importe s'ils doivent
sacrifier des principes qu'ils ont déjà défendus ou si
leur position ne respecte pas la constitution qui nous régit.
Le critique de l'Opposition en matière d'éducation
voudrait qu'on agisse comme si la constitution n'existait pas. Le ministre de
l'Éducation est plus responsable que cela. Il agit à
l'intérieur des limites du cadre constitutionnel. Il recherche des avis
sur les questions litigieuses. En d'autres mots, il ne recherche pas la
confrontation pour la confrontation.
Une raison qui m'incite, M. le Président, à appuyer le
projet de loi 107, c'est la place importante qu'il accorde aux parents. Le
rôle des parents est reconnu de façon déterminante. Ainsi,
il me semble important que les parents aient la possibilité de choisir
pour leurs jeunes enfants l'école qui correspond le mieux à leurs
préférences. Ce droit leur est maintenant reconnu par le projet
de loi qui est maintenant à l'étude. De plus, nous reconnaissons
spécifiquement le droit des parents de choisir jusqu'au niveau
secondaire II, entre l'enseignement moral et religieux confessionnel,
catholique ou protestant, et l'enseignement moral.
Encore là, le ministre démontre qu'il comprend et surtout
qu'il respecte la réalité sociale d'aujourd'hui. Plusieurs
citoyens et citoyennes ne veulent pas d'enseignement religieux. Abolir le droit
à l'éducation religieuse que semble encore favoriser la grande
majorité de la population. L'Opposition voudrait-elle qu'on instaure et
surtout que l'on impose l'école neutre parce que c'est le voeu d'une
partie de la population? Le ministre de l'Éducation respecte et assure
les droits de l'un et de l'autre de ces groupes. Mais il n'est pas vrai que la
minorité non religieuse dont je respecte le choix va forcer tous les
autres à faire l'école neutre sous prétexte de respecter
son option. La tolérance et le respect d'autrui nous obligent à
nous orienter vers la solution proposée par le ministre de
l'Éducation.
Deux instances, M. le Président, permettront aussi aux parents,
non seulement d'être informés de ce qui se passe à
l'école, mais aussi d'informer l'école et la commission scolaire
de leurs aspirations. Il s'agit du comité d'école dont le
ministre a déjà annoncé le caractère obligatoire,
ainsi que le conseil d'orientation de l'école. Ainsi, les parents seront
mieux en mesure de façonner l'école à l'image qu'ils s'en
font. L'école du Québec d'aujourd'hui collera à la
réalité d'aujourd'hui. Elle fera l'objet d'un véritable
consensus établi entre les différents intervenants
intéressés à l'éducation de nos enfants. Les
parents font partie, en premier lieu, de ces intervenants
intéressés, et la loi 107 le reconnaît.
L'école d'aujourd'hui n'appartient pas et ne doit pas appartenir
à aucun groupe en particulier. L'école n'appartient pas aux
commissaires. L'école n'appartient pas au ministère ni à
ses fonctionnaires. Elle n'appartient pas non plus aux directeurs
d'école et aux enseignants. Elle appartient à la
communauté. Elle doit être faite pour répondre aux
aspirations de nos enfants. Elle doit être incorporée aux
défis auxquels ils auront à faire face. C'est pourquoi il est
tellement important de faire appel au dynamisme et à l'expertise des
parents. Eux aussi ont leur mot à dire. Je suis donc heureux que le
ministre de l'Éducation reconnaisse cette réalité, et
j'espère que les parents se prévaudront de leurs droits et nous
aideront à façonner l'école qui convient le mieux à
leurs enfants.
Par exemple, dans mon propre comté de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue, une expérience intéressante a
vu le jour en 1972. Cette expérience se poursuit présentement
à Témisca-ming. Il s'agit d'une commission scolaire
fusionnée où tous les élèves, francophones comme
anglophones, catholiques comme protestants, fréquentent la même
école, et ce, je le répète, depuis 1972. Cette
école voulue et décidée par les parents fait partie de la
Commission scolaire Lac-Témiscamingue qui est beaucoup plus proche et
plus à même de régler les problèmes que la
Northwestern Protestant School Board de Hull. J'espère que cette
expérience pourra se poursuivre, et j'invite d'ores et
déjà le ministre de l'Éducation à faire en sorte
que ce sort le cas.
La loi 107 permettra à d'autres parents de définir
l'école qui leur convient et qui convient à leurs enfants tout en
respectant le cadre général des programmes et le contenu des
cours. On verra là une autre application de l'unité dans la
diversité, et je m'en réjouis.
Le rôle bénéfique des parents sera aussi
élargi par l'obligation qui sera faite à la commission scolaire
de mettre sur pied un comité consultatif de parents. Encore là,
nous avons une preuve que le présent gouvernement est sensibilisé
à la contribution positive que les parents peuvent apporter aux
questions scolaires. C'est pourquoi nous les intégrons au processus
décisionnel. Nous voulons que les suggestions venant de la base trouvent
leur écho au niveau de l'administration. Nous ne voulons pas que les
opinions exprimées par les parents meurent à l'école. Nous
voulons qu'elles se rendent jusqu'aux commissaires parce qu'il n'y a rien de
plus frustrant que de discuter pour discuter. Nous assurerons donc aux parents
que leurs observations seront canalisées à la commission scolaire
par le truchement de ce comité et par la présence même des
parents à la commission scolaire puisque, dorénavant, les
comités de parents seront appelés à désigner des
commissaires qui siégeront a la commission scolaire.
Nous entrons donc dans une nouvelle phase de la démocratie
participative, une phase qui permettra concrètement aux parents de se
faire entendre à la commission scolaire et d'influencer celle-ci dans le
sens de leurs revendications. De plus, les parents d'élèves
handicapés de même que les parents dont les enfants
présentent des difficultés d'adaptation et d'apprentissage
pourront occuper la majorité des sièges au sein du comité
consultatif de la commission scolaire. Ce principe de l'implication des parents
dans le processus de décision et les garanties qu'offre la mise en place
du mécanisme assurant qu'on ne consultera plus les parents pour la forme
seulement, mais aussi pour qu'ils puissent influencer les décideurs,
m'incitent donc à appuyer le projet de loi 107, tant ses principes me
semblent atteindre les vues de la population québécoise. (15 h
30)
II y a cependant un autre principe, contenu de façon implicite
dans le projet de loi présentement à l'étude, sur lequel
j'aimerais me prononcer. Il s'agit des responsabilités dévolues
au ministre de l'Éducation versus les pouvoirs que détiennent les
commissions scolaires. Même si nous accordons plus de pouvoirs et plus de
responsabilités aux commissions scolaires, le critique de l'Opposition
en matière d'éducation aurait voulu qu'on aille plus loin. Je ne
suis pas de son avis et je vais vous dire pourquoi. Il faut conserver au
ministre de l'Éducation un droit de regard véritable sur
l'application des politiques de son ministère. Il nous faut ajouter
à la cohérence de nos programmes scolaires. Il faut s'assurer de
la qualité des diplômes décernés par nos commissions
scolaires. Si on se rendait au désir de l'Opposition, cela voudrait dire
que le ministre ne ferait qu'envoyer de l'argent aux commissions scolaires sans
avoir quoi que ce soit à dire sur la façon dont ces sommes
seraient dépensées, sans avoir quelque contrôle que ce soit
sur le type d'enseignement dispensé. Ce serait une vraie tour de
Babel.
M. le Président, dans notre système parlementaire, c'est
celui qui taxe qui a les responsabilités ultimes et nous n'avons pas
l'intention d'abdiquer nos responsabilités. Nous sommes plus
responsables que cela. On ne veut pas avoir la surprise comme l'ancien
gouvernement l'a eue dans le passé, de se retrouver avec un trou
inexpliqué de 150 000 000 $ dans l'éducation. Nous sommes
d'accord pour déléguer mais nous allons conserver le
contrôle. Nous allons assumer nos responsabilités. L'époque
du "free-for-all" de l'administration précédente est
terminée. Je reconnais bien là le sens des responsabilités
dont a toujours fait preuve le ministre de l'Éducation lorsqu'il refuse,
à ce chapitre, de se rendre aux arguments de l'Opposition et de
certaines commissions scolaires. "No taxation without representation" a-t-on
dit à une certaine époque. "No power without taxation"
pourrait-on dire et nous ne sommes pas prêts à accroître les
pouvoirs de taxation des commissions scolaires. Nous ne voulons pas que les
territoires les plus riches aient les meilleures écoles. Nous ne voulons
pas que les milieux défavorisés aient un enseignement de
deuxième classe. C'est pourquoi nous nous assurons que chaque commission
scolaire dispose des mêmes ressources.
Enfin, M. le Président, je m'en voudrais de ne pas souligner mon
appui à la réforme fondamentale de ce projet, soit
l'établissement de commissions scolaires linguistiques au lieu de
commissions scolaires confessionnelles. Cette réforme s'imposait depuis
longtemps afin de répondre à la réalité sociale
d'aujourd'hui. Grâce à l'adoption de la Charte des droits et
libertés et à l'accord du lac Meech nous croyons être en
mesure de contourner les obstacles que pouvait représenter l'article 93
de la constitution.
S'il y a un article qui a été mal rédigé en
1867, c'est bien celui-là. On confondait, à l'époque,
catholiques et francophones, protestants et anglophones. Si cette confusion
pouvait se comprendre jusqu'à un certain point en 1867, il n'en reste
pas moins que, depuis de nombreuses années, l'article 93 ne nous permet
plus de faire face à la réalité socioculturelle du
Québec sans avoir recours à une structure complexe, lourde et
dispendieuse.
Nous croyons maintenant pouvoir faire face à cette situation
grâce à la cohérence des actions que nous avons
menées au niveau constitutionnel.
L'autre jour, j'entendais le député d'Abitibi-Ouest
s'insurger contre le fait que nous n'allions pas en appel de la loi 3. Ce
qu'aime le député
d'Abitibi-Ouest, c'est la provocation pour la provocation. Malgré
le respect que je peux avoir pour lui je me sens dans l'obligation de lui dire
que même un enfant d'école le moindrement éveillé
savait que la loi 3 était inconstitutionnelle.
Pour ceux pour qui "pire ça va, mieux ça va", pour ceux
qui veulent détruire notre pays au lieu de l'améliorer, il est
certain que l'attitude critique de l'Opposition est idéale. Pour ma
part, et le ministre de l'Éducation est sûrement d'accord avec moi
à ce sujet, je crois qu'il faut adopter une position plus
réaliste et plus positive. Une constitution, ça ne s'écrit
pas au jour le jour, selon les humeurs des ministres et de leur chef. On ne
donne pas des droits un jour pour les enlever le lendemain. Le respect de la
constitution, le respect de nos institutions, le respect des droits individuels
font partie de nos traditions et nous les respectons.
C'est par la persévérance que nous pouvons apporter des
changements et l'établissement des commissions scolaires linguistiques
plutôt que confessionnelles nous permet non seulement de répondre
à la réalité du Québec d'aujourd'hui mais elle nous
permet aussi de le faire dans le respect des individus et de notre
constitution.
Pour résumer, M. le Président, je donne mon appui au
principe contenu dans le projet de loi 107 parce que celui-ci reconnaît
un rôle accru aux parents, parce qu'il respecte les principes de saine
gestion administrative, parce qu'il respecte le rôle primordial que doit
jouer un ministre de l'Éducation responsable et parce qu'il respecte la
constitution. En un mot, c'est une loi progressive qui permet de mieux faire
face à la réalité d'aujourd'hui. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président: Je cède maintenant la parole
à M. le député de Shefford.
M. Roger Paré
M. Paré: Merci, M. le Président. Vous ne serez pas
surpris que je vous dise, contrairement à mon collègue qui a
parlé avant moi, que je vais aller dans la direction totalement
opposée au principe de ce projet de loi 107 et je vais vous expliquer
pourquoi.
C'est sûr que la Loi sur l'instruction publique est une loi
fondamentale puisque son objectif est l'éducation, non pas seulement
l'instruction, mais l'éducation de nos enfants. C'est une réforme
majeure. Ce n'est pas nouveau, cela fait longtemps qu'on en parle. À la
fin des années soixante-dix, une réforme fiscale qui est venue
toucher à l'éducation, mais aussi le livre orange sur
l'éducation. Ensuite, au début des années quatre-vingt, le
livre blanc sur l'école; la place de l'école dans le
système scolaire et dans la vie collective des Québécois.
Cela a débouché sur la loi 40, la loi 3 et, maintenant, sur la
loi 107.
Quand je regarde le projet de loi 107, je m'aperçois
jusqu'à quel point le ministre actuel n'a pas beaucoup de
mémoire. S'il se rappelle certaines choses, il ne se rappelle
certainement pas les choses qu'il a dites en commission parlementaire lorsque
nous avons étudié la loi 40 et la loi 3. C'est presque
incroyable. C'est un virage à 180 degrés. Il dit le contraire de
ce qu'il disait au moment où H était porte-parole de l'Opposition
en matière d'éducation. Ses grands principes viennent d'en
prendre une claque. C'est pour ça aujourd'hui, quand je regarde les
jeunes de nos cégeps et de nos universités manifester, non pas
nécessairement sur le fond, mais contre le ministre lui-même, je
ne suis pas surpris non plus d'entendre les jeunes libéraux dire
qu'ïs ont leur voyage de l'actuel ministre de l'Éducation, qu'ils
ont soupe de cet individu pour qui les principes passent après la ligne
de parti ou après l'image qu'il a l'intention de donner.
Le discours antérieur du ministre a totalement changé.
Cela n'a pas de bon sens. Si on est contre le projet de loi 107, c'est pour une
raison: c'est un recul, par rapport à la loi 3, sur plusieurs facettes
et j'espère que j'aurai le temps de vous entretenir sur quelques-unes de
celles-là.
Dans le discours sur les lois précédentes concernant
l'éducation, le ministre actuel disait qu'on ne pouvait pas modifier la
Loi sur l'instruction publique sans un très très large consensus.
Il se faisait le défenseur des commissions scolaires. Cela prenait le
consensus des intervenants pour modifier la Loi sur l'instruction publique.
Pourtant, on a été à même en commission
parlementaire, au mois de mai et au mois d'août 1988, de voir que le
consensus était contre le projet de loi 107, que le consensus
était contre l'orientation qui était donnée à
l'intérieur de ce projet de loi par l'actuel ministre de
l'Éducation. Pourtant, le ministre a l'intention d'aller de l'avant.
C'est un projet beaucoup trop centralisateur.
Lorsqu'il était dans l'Opposition, le ministre actuel reprochait
à l'ancien gouvernement de conserver trop de pouvoirs, non pas d'en
prendre, mais de conserver trop de pouvoirs. Que fait le ministre actuel par le
projet de loi 107? Il va en chercher davantage. Tout ce qu'on voit là,
c'est un contrôle par l'État, à un tel point que certains
intervenants qualifient ce projet de loi centralisateur en disant que le projet
de loi propose un modèle d'organisation qui fait du gouvernement et du
ministre de l'Éducation les pivots du système scolaire.
Imaginez-vous! Alors que l'école doit d'abord être au service des
enfants, alors que l'école est aussi le milieu de vie et de travail des
enseignants, alors que l'école doit aussi être le prolongement de
la famille, donc une responsabilité parentale, par le projet de loi 107,
c'est le ministre qui devient le pivot de l'enseignement au Québec. De
plus, un ministre aussi dictateur que celui-là, c'est un danger public.
C'est inacceptable. (15 h 40)
C'est ce même ministre qui a passé l'éponge sur ceux
qui étaient illégalement inscrits à l'école
anglaise. Il s'est donné le pouvoir, et on accepte: tout ce qui est
illégal devient légal. Donc, c'est un message qu'on lance aux
gens: Soyez illégaux; si ça fait mon affaire, un jour, je
viendrai mettre ma croix là-dessus, ma signature sous l'autorisation.
C'est inacceptable.
C'est ce même ministre qui, à l'heure actuelle, accepte par
dérogation des milliers de cas pour permettre aux jeunes d'entrer
à l'école avant l'âge. Mais c'est un pouvoir
discrétionnaire qu'il se donne, sans règlement. Monsieur a
décidé que, sur son château, il était roi et
maître et qu'il appliquait ça comme il le veut. Des
dérogations selon son bon vouloir.
C'est ce même ministre qui veut se donner plus de pouvoirs en
allant en ôter aux commissions scolaires qui ont fait la preuve qu'elles
connaissaient leur territoire, qu'elles connaissaient leurs besoins et qu'elles
avaient l'expérience et l'expertise, chacune dans son secteur et dans sa
région. Le ministre veut maintenant récupérer ces
pouvoirs. C'est exactement la ligne de conduite que l'on retrouve à
l'intérieur de ce projet de loi.
Je dois vous dire que je considère que le ministre, non seulement
pour les prêts et bourses, les faux espoirs qu'il a donnés aux
étudiants des cégeps et des universités, mais dans le
projet de loi qu'on étudie, la Loi sur l'instruction publique, vient de
nous prouver encore une fois qu'il a mal fait ses devoirs. C'est inacceptable.
Un devoir aussi mal fait n'a pas de bon sens. Premièrement, il est
rejeté par à peu près tous les intervenants du milieu.
Mais, à la suite de la commission parlementaire, on s'aperçoit
qu'il va y avoir 250, 300 et peut-être même plus de 300 amendements
sur un projet de loi. Pour quelqu'un qui était censé
connaître son dossier, qui savait où il s'en allait, qui
connaissait l'éducation, qui connaissait les besoins du milieu et qui
était censé rechercher un consensus, être obligé
d'avoir 250 modifications à son projet de loi à la suite d'une
commission parlementaire, alors que ça faisait suite à deux
autres commissions parlementaires où le ministre actuel était
présent en permanence comme porte-parole de l'Opposition officielle...
Et il était censé connaître les besoins de la population,
les volontés du milieu: 250 modifications. Devoir tellement mal fait que
si le ministre avait voulu être un peu respectueux du milieu, il aurait
tout simplement présenté un nouveau projet de loi parce que
celui-ci va être modifié profondément, du moins en termes
de quantité d'amendements, de 250 à 300, tellement son devoir
était mal fait lors de là présentation du projet de loi
107.
Donc, 250 modifications, mais, malgré tout, ça ne vient
pas corriger toutes les lacunes du projet de loi. Cela va en corriger
quelques-unes. Tant mieux! C'est au moins ça d'acquis. Mais ça
garde cette ligne directrice d'espèce de centralisateur qui veut tout
dominer de Québec. Le contrôle, c'est à Québec. Cela
devient le pivot de notre système d'éducation. Ce ne sont plus
les parents, plus les enfants, pas l'école, même plus les
commissions scolaires. Le ministre. Le ministre veut s'arroger ces pouvoirs
d'être capable de tout contrôler. Ce n'est pas comme ça
qu'on va parler de décentralisation. Ce n'est pas comme ça qu'on
va parler de responsabilisation des structures et des gens dans le milieu. Ce
n'est pas comme ça qu'on va parler de développement des
régions non plus. Ce serait plutôt dans le sens totalement
contraire. Mais non, le ministre a décidé que c'était
comme ça.
Quant aux pouvoirs que se donne le ministre, c'est inacceptable. Ce
qu'il reprochait à l'ancien ministre de l'Éducation, c'est de
conserver trop de pouvoirs. Et que vient-il faire avec son projet de loi 107?
Il va en chercher davantage au détriment des commissions scolaires qui
ont pourtant toujours prouvé leur compétence et leur
détermination à gérer d'une façon efficace dans le
milieu les sommes qui leur étaient dévolues et surtout la charge
d'avoir une éducation pour tous les jeunes et une éducation de
qualité.
Quand on regarde comment ça se déroule sur le plan
éducatif au Québec à l'heure actuelle, qui est en train de
défendre nos commissions scolaires, qui est en train de faire la
promotion du système d'enseignement plublic au Québec? Les
commissions scolaires. Pas le ministre de l'Éducation. Que fait le
ministre de l'Éducation? Il en arrache au secteur public pour en donner
davantage au secteur privé. Il en fait même l'apologie. J'en ai
chez nous et c'est vrai que j'ai de bonnes écoles privées, et je
ne parlerai pas contre les écoles privées.
Le ministre de l'Éducation a une responsabilité face au
secteur public. Il doit leur donner le maximum de chances d'avoir une
éducation de qualité et en quantité pour répondre
aux besoins dans tous les milieux du Québec. Au lieu de faire ça,
il coupe dans le secteur public pour en donner davantage au secteur
privé, comme s'il voulait favoriser l'un par rapport à l'autre.
Il veut qu'on lui donne plus de pouvoirs pour défendre le secteur public
alors que, au moment où l'on se parle, la promotion du secteur de
l'éducation publique au Québec est faite par nos commissions
scolaires. On peut donc faire confiance à nos commissions scolaires. Non
pas leur en arracher, mais leur en donner plutôt davantage.
D'autres critiques sont venues concernant le projet de loi 107. Recul de
la loi 3 concernant l'éducation des adultes, concernant la
gratuité scolaire et concernant les services complémentaires qui
sont pourtant tellement importants. Vous savez, l'école, c'est un lieu
d'éducation, d'instruction évidemment où on doit apprendre
des matières à nos jeunes qui seront les citoyens de demain.
L'école est un lieu très important. C'est un milieu de vie non
seulement pour ceux qui y vivent comme travailleurs, mais surtout
pour nos élèves. C'est important. C'est une étape
majeure dans la vie de nos jeunes. On doit se donner toutes les chances
possibles de donner non seulement l'instruction, mais l'éducation en
qualité au maximum.
Mais, il n'y a pas seulement la matière qu'on enseigne, on doit
faire de ces jeunes des citoyens de demain. On reconnaît dans l'article 1
du projet de loi qu'il y a des services complémentaires, et ils sont
énormes. C'est bon d'en nommer quelques-uns pour que les gens, la
population sache exactement quels sont ces services complémentaires.
Oui, il y a la pastorale, l'éducation catholique ou protestante en
fonction du choix des parents. Il y a aussi la psychologie, l'orthophonie, les
services de santé et les services sociaux parce qu'il faut aussi avoir
des jeunes, des citoyens en santé. Il y a l'encadrement, la
surveillance; il y a la recherche d'emploi, l'éducation aux droits et
aux responsabilités comme citoyens et la participation à la vie
éducative.
Il y a donc une foule de choses, de matières qu'on doit avoir
dans les écoles par le personnel non enseignant pour que nos
élèves soient des citoyens bien préparés a la vie.
Si on n'a pas ça dans les écoles, comme société, il
y aura de plus en plus de décrocheurs. Pourtant, dans le projet de loi
107, si on reconnaît ce grand principe à l'article 1, là
où on doit retrouver la volonté, la détermination,
l'imposition et l'obligation qu'on retrouve à l'intérieur des
écoles, tous ces services complémentaires très importants,
à l'article 208, on n'en fait pas du tout mention. Là où
on mettrait une obligation à chaque commission scolaire d'avoir en
quantité et en qualité suffisante ces matières, on ne
retrouve plus cette obligation à l'article 208.
Est-ce parce que le ministre ne veut pas s'obliger, lui, à mettre
les sommes nécessaires pour faire de nos élèves des
citoyens de premier ordre? Peut-être. Mais ce qu'on sait, c'est que les
gens sont venus nous dire en commission parlementaire qu'on n'a pas pris les
mesures, les moyens nécessaires à l'intérieur du projet de
loi 107, à l'article 208, pour mettre tout ce qui est nécessaire
comme obligation. Et à l'article 1, seulement le principe alors que
c'est une obligation, à mon avis. On doit donner toute l'importance aux
services complémentaires parce que ce sont des citoyens qu'on forme. Ce
ne sont pas juste des robots. Ce n'est pas seulement des gens à qui on
apprend que deux plus deux font quatre, ce sont les citoyens de demain. On doit
s'en occuper comme individus à l'intérieur de l'école. On
doit en faire une priorité. Surtout au secondaire, il faut s'assurer
qu'on va être capables de recevoir ces gens, de les écouter, de
les diriger concernant le professionnel, le cégep et
l'université, par la suite.
Mais non, on ne reconnaît même pas cette priorité
dans l'éducation, cette priorité qu'on doit avoir dans les
écoles, dans les commissions scolaires, de faire en sorte de diriger nos
jeunes, de faire en sorte qu'on va tellement bien les encadrer qu'il va y avoir
de moins en moins de décrocheurs. Dans le projet de loi 107, on dirait
qu'on fait en sorte que... Non, non. Le ministre va faire passer ses
idées, le ministre va tout contrôler. On va en enlever aux
commissions scolaires. Au niveau des écoles, on va envoyer tous les
régimes pédagogiques, mais le citoyen, comme individu, comme
être humain, on dirait que c'est moins important. (15 h 50)
C'est tellement moins important, alors qu'on parle de l'autre
côté d'une politique familiale, que c'est fondamental et capital -
et effectivement, ça l'est - qu'on ne retrouve plus dans la loi 107
l'obligation du projet de loi 3, savoir qu'il y ait des services de garde en
milieu scolaire. D'un côté, le beau discours de la politique
familiale: ça prend des garderies. On se pète les bretelles avec
ça, mais concrètement, pendant qu'une ministre parle de services
augmentés en garderie, l'autre ministre vient en enlever dans les
écoles. Il vient enlever l'obligation des services de garde en milieu
scolaire. C'était une obligation, donc c'était l'assurance qu'il
y en aurait dans tous les quartiers du Québec puisqu'il y en aurait dans
les écoles du Québec. Mais non, l'obligation a été
retirée. Est-ce comme cela qu'on va avoir une politique familiale?
Est-ce que c'est comme cela qu'on va s'occuper de nos jeunes, de l'autre
côté? Je dois vous dire que lorsqu'on parie de politique
familiale, de l'autre côté, il faut regarder les gestes
posés par ceux qui ne tiennent pas de discours, mais par ceux qui
tiennent des moyens aussi importants, aussi fondamentaux que le ministre de
l'Éducation.
Je vais conclure - parce que je sais qu'a ne me reste pas grand temps -
sur une autre disposition importante du projet de loi 107, la base même
du projet de loi 107: faire de nos commissions scolaires des commissions
scolaires linguistiques au lieu de commissions scolaires confessionnelles.
Pourquoi? Pour essayer de régler les problèmes qu'on vit,
spécialement à Montréal et à Québec, et pour
essayer d'intégrer les nouveaux venus dans nos écoles
francophones, parce qu'on est fier de les accueillir et qu'on veut les avoir
avec nous.
Non seulement le projet de loi 107 ne vient rien régler, mais il
vient compliquer davantage la situation. Le ministre de l'Éducation,
l'actuel ministre, n'a eu ni la volonté, ni le courage de mettre ses
culottes longues et de régler le problème. Pourquoi n'est-il pas
allé en appel sur la loi 3? Il n'est pas pour se battre contre son grand
frère d'Ottawa qui le contrôle et qui le domine. Bien non, on ne
va pas en appel, à la place, on présente le projet de loi 107. On
ne profite même pas des négociations constitutionnelles du lac
Meech pour dire au gouvernement fédéral: On va accepter à
la condition que vous reconnaissiez que le domaine de l'éducation est de
compétence québécoise, de compétence
provinciale. Mais non! Le ministre, à la place, a laissé
faire, a laissé aller. Il n'a pas pris ses responsabilités comme
ministre important de ce gouvernement. Bien non! Il a laissé aller. Et
là, il nous présente un projet de loi dans lequel tout ce qui
devait être réglé - des commissions scolaires linguistiques
pour attirer les nouveaux venus et régler les problèmes de
Montréal et de Québec - devient compliqué.
Dans le projet de loi, on dit que cela va s'appliquer partout sur le
territoire québécois, sauf à Montréal et à
Québec où le problème se vit. Tout ce qui est litigieux,
va aller devant la cour et on va regarder comment cela va se régler. On
reviendra avec cela un peu plus tard. On reporte le vrai problème de
Montréal et de Québec dans l'avenir. On vient imposer des
structures linguistiques dans les autres régions du Québec, alors
que le problème se vit à Montréal et à
Québec, parce que l'actuel ministre n'a pas pris ses
responsabilités, qu'il n'est pas intervenu quand c'était le temps
lors des négociations constitutionnelles, pour dire que
l'éducation, c'est de notre juridiction, de notre compétence, de
notre responsabilité et qu'on va s'en occuper. À la place, il
fait croire qu'il s'en occupe, mais tout ce qui est litigieux, tout ce qui
aurait pu régler le problème d'intégration des nouveaux
venus à la majorité francophone, eh bien, on va envoyer cela
à la cour et attendre d'avoir des résultats.
On n'a pas profité de l'occasion idéale qu'on avait lors
de la négociation constitutionnelle pour dire, une fois pour toutes:
Cela nous regarde. Dans la loi 3, vous l'avez refusé, maintenant on
l'exige pour signer l'entente du lac Meech. Bien non! M. Ryan a
été totalement muet, totalement absent. Il n'a pas fait son
devoir d'état parce que c'est majeur. Il s'est retiré et,
maintenant, c'est la cour qui décidera. On va aller voir. On fait
accroire qu'on aura, à partir de maintenant, des commissions scolaires
linguistiques et que cela va régler tout le problème, c'est faux.
On aura des commissions scolaires linguistiques sur le territoire
québécois, sauf à Montréal et à
Québec où ce seront des commissions scolaires qui vont s'ajouter
pour rendre encore plus complexe le système scolaire dans ces deux
régions. On complique, mais on ne règle pas... Rien ne sera
réglé par cela. Pourquoi? Parce que le ministre n'aura pas fait
sa job.
Donc, le projet de loi 107 ne vient pas régler les
problèmes fondamentaux qu'il devait régler. Le ministre devra,
encore une fois, lors de la commission parlementaire où on
l'étudiera article par article, amener une foule de modifications
à son projet de loi pour qu'il soit moins centralisateur, pour
répondre aux demandes de la Fédération des commissions
scolaires et que non seulement les commissions scolaires ne perdent pas des
pouvoirs, comme c'est prévu dans le projet de loi 107, mais, au
contraire, que le ministre suive l'esprit de ses discussions du temps qu'il
était dans l'Opposition et donne aux commissions scolaires les pouvoirs
et les responsabilités nécessaires pour que, sur chacun des
territoires, il y ait un système d'éducation de qualité
donné en quantité pour tous les élèves du
Québec. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Je vais maintenant céder la
parole à Mme la députée de Johnson.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Depuis que le
Parti libéral est au pouvoir, on n'est pas habitué à avoir
des projets de loi de cette envergure. Habituellement, on a des projets de loi
d'un, de deux ou de trois articles, dix au maximum. Aujourd'hui, on se voit en
train d'étudier un projet de loi de 579 articles.
C'est bien beau tout cela, mais quand on amène, avec ce projet de
loi de 579 articles, 300 amendements, c'est une autre paire de manches. Il
faudrait peut-être que le ministre s'assoie bien tranquille avec les
personnes qu'il peut consulter autour de lui, celles qui sont sur le terrain,
c'est-à-dire les membres des commissions scolaires, pour être en
mesure de nous présenter un projet de loi avec peut-être moins
d'articles, mais des articles qui correspondront aux besoins du milieu, des
articles qui seront le reflet des besoins des écoles dans le milieu, un
projet de loi qui ressemblera finalement à ce dont les gens s'attendent,
un projet de loi conforme, non seulement pour le mieux-être des
étudiants, mais pour le mieux-être des parents, des commissions
scolaires et de tous les gens qui travaillent dans le milieu scolaire.
M. le Président, je pourrais vous parler de tout ce qui s'est dit
lors de la consultation sur le projet de loi 107. Je pourrais vous dire que la
fédération des commissions scolaires catholiques trouve que le
projet de loi est centralisateur, qu'il centralise davantage le système
public d'enseignement et qu'il témoigne d'un sentiment de
méfiance de l'État à l'endroit de ses partenaires. Je
pourrais vous parler du mémoire qui a été
présenté par la Fédération des commissions
scolaires. Je pourrais aussi vous parler de l'Association des commissions
scolaires protestantes du Québec et vous dire que ses membres trouvent
que le projet de loi 107 a une philosophie de centralisation qui placerait les
écoles du Québec sous la tutelle du ministère. Je pourrais
aussi vous parler du mémoire présenté par l'Association
des directeurs généraux des commissions scolaires qui dit aussi
qu'elle n'est pas d'accord avec ce que le projet de loi contient. On dit: "Nous
nous opposons fortement à cette accumulation des pouvoirs du
gouvernement et du ministre. Nous jugeons impertinent que le ministre prenne
occasion du projet de loi pour augmenter ses pouvoirs réglementaires et,
par là, son emprise sur le système scolaire." Je pourrais vous
parler de l'Association des cadres scolaires
du Québec dont les membres, eux aussi, trouvent que le projet de
loi est un recul par rapport au projet de loi 3 de l'ancien gouvernement.
Je pourrais vous parler de l'Association des institutions d'enseignement
secondaire qui, non pas par hasard, mais par connaissance de la situation, dit
que le projet de loi n'est pas conforme à ce qu'on attendait. "Le projet
de loi 107, dit-on dans les associations d'institutions d'enseignement
secondaire, accentue cette méfiance de l'État à l'endroit
de ses partenaires." Comment voulez-vous que les commissions scolaires
réagissent quand le projet de loi 107 les met sous tutelle? Comment
voulez-vous qu'elles applaudissent à un tel projet de loi pendant
qu'elles croyaient que le projet de loi 107 serait en mesure de régler
les problèmes qu'elles vivaient dans le milieu? (16 heures)
M. le Président, je pense qu'autant l'Association des
institutions d'enseignement secondaire que les autres que je vous ai
nommées précédemment ne sont pas d'accord avec ce projet
de loi. Habituellement, le ministre hésite lorsqu'il y a un fort
consensus de la part des intervenants du milieu. Là, H ne semble pas
hésiter, je ne sais pas ce qui se passe. Je ne sais pas s'H veut
complètement anéantir les commissions scolaires ou leur donner
seulement un rôle tout à fait timide à l'endroit du travail
qu'elles doivent faire dans le milieu. Je ne sais pas. Je ne comprends pas la
réaction du ministre dans le projet de loi 107, M. le Président.
La Centrale de l'enseignement du Québec dit: C'est un carcan que le
ministre est en train de nous mettre. Et ainsi de suite. Je pourrais vous
donner ce que l'Alliance des professeurs de Montréal a dit.
"Extrêmement déçus - disent-ils - nous demandons au
gouvernement de tout mettre en oeuvre pour mettre fin à cette anomalie,
traiter les citoyens montréalais du XXe siècle en sujets du IXe
siècle." Et ainsi de suite.
Mais je vais me contenter, M. le Président, de vous parler des
deux commissions scolaires de chez nous, du comté de Johnson. La
commission scolaire Morilac et la commission scolaire des Chênes d'Acton
Vale qui, elles aussi, comme les fédérations, comme les
associations, comme toutes celles que je viens de vous mentionner, ne sont pas
d'accord sur le projet de loi que nous discutons dans le moment.
Lors de la commission parlementaire, le ministre a dit: Nous allons
apporter plusieurs amendements au projet de loi, 300 amendements ou à
peu de chose près. Je pense qu'il aurait été bien mieux de
se rasseoir avec son monde et d'essayer d'écrire des choses qui ont de
l'allure, et de demander la participation du milieu.
M. le Président, le ministre a parié du maintien des
comités d'école - il va apporter des amendements là-dessus
- maintien des comités exécutifs, droit de vote
réservé aux commissions élues, modifications tecnniques.
Par contre, il a refusé l'offre de collaboration de la
fédération pour rechercher avec son ministère un partage
des responsabilités plus adéquat et plus acceptable aussi dans le
milieu.
Le ministre refuse aussi de modifier le partage des
responsabilités entre le ministère de l'Éducation et les
commissions scolaires. Pour M. le ministre de l'Éducation, le partage
actuel des pouvoirs est égal au partage du financement: 95 % pour le
gouvernement et 5 % pour les commissions scolaires. C'est ça pour le
ministre de l'Éducation que de prendre les idées des autres.
M. le Président, j'ai hâte de voir ce que ça va
faire quand le droit d'ester en justice sera accordé au comité
exécutif du conseil des commissaires, aux comités consultatifs de
gestion, aux comités consultatifs des services aux élèves
handicapés et aux élèves en difficulté d'adaptation
ou d'apprentissage, aux comités consultatifs de transport, aux
comités de parents, aux comités consultatifs des adultes à
l'éducation des adultes, aux comités d'orientation de chaque
école et aux comités d'écoles. Allez-vous voir ça
quand tout le monde va avoir recours à la justice et se disputer sur un
sujet ou un autre? Savez-vous ce que je crois? Je crois que le ministre est en
train de mettre ce pouvoir-là dans cette loi parce qu'il se dit que le
temps qu'ils vont se disputer entre eux ou qu'ils vont revendiquer, il va
pouvoir faire du dirigisme à outrance et à ce moment-là
ils n'auront pas le choix. Ils vont se disputer sur le terrain et nous allons
nous organiser avec le reste. Cela fait que, pendant ce temps-là, ils ne
le dérangeront pas.
Je pense que l'idée du ministre est surtout de tellement
encarcaner les commissions scolaires qu'elles ne pourront plus faire de
revendications tout à fait justifiées. Ce sont elles qui
travaillent sur le terrain. Elles sont donc en mesure de nous faire part des
besoins et des attentes des gens du milieu. Et je pense que le ministre de
l'Éducation fait une grave erreur en refusant l'aide des commissions
scolaires pour bonifier son projet de loi. Je pense que le ministre aura
finalement à porter la responsabilité de son refus de collaborer
avec les gens du milieu, collaborer dans le bon sens en leur laissant la
parole, en les écoutant et aussi en prenant pour avis qu'ils ont des
choses importantes à dire qui sont pour un mieux-être de la
population étudiante.
M. le Président, les commissaires sont fort perplexes, et je vous
assure que les deux rencontres que j'ai eues avec les représentants des
commissions scolaires Morilac et des Chênes, chez nous, ont
été pour moi une preuve suffisante. Lorsque j'ai lu l'ensemble de
ce qui s'était passé en commission parlementaire, M. le
Président, je n'avais pas besoin de plus pour me rendre compte combien
le ministre ne fait pas une bonne chose en mettant ce projet de loi de l'avant
et en refusant l'aide des gens du milieu. Si le ministre acceptait un partage
raisonnable des responsabilités entre le ministère et les
commissions scolaires, on ne serait pas ici aujourd'hui avec tant de
gens qui refusent de collaborer dans le sens que le ministre veut,
c'est-à-dire les tenir au ras du sol pour ne pas qu'ils soient en mesure
d'intervenir.
M. le Président, les commissaires sont fort perplexes aussi des
relations harmonieuses qui sont nécessaires dans le développement
d'une éducation de qualité. Ils se posent de sérieuses
questions quand ils voient que le ministre sera, de toute autorité, la
seule et unique personne qui décidera dans plusieurs cas. M. le
Président, les commissaires sont fort perplexes d'une autonomie
suffisante pour que les commissions scolaires puissent s'acquitter correctement
de leurs responsabilités dans leur milieu. Les commissaires ont-ils les
outils financiers et de fonctionnement suffisants et adéquats pour faire
un bon travail? Je pense qu'il faut se poser la question.
M. le Président, le projet de loi 107 nie le pouvoir local et
signifie la mainmise du ministère de l'Éducation sur les
commissions scolaires. En général, c'est ce que l'ensemble
des personnes ont dit lors des consultations. Je vais vous lire seulement
quelques articles. Désormais, le ministre pourra empêcher une
commission scolaire d'offrir des cours aux adultes. À l'article 427,
voilà l'autorité du ministre dans ce sens-là. Le ministre
va-t-il accepter de laisser la commission scolaire offrir les cours aux
adultes, ou si, dans tel cas, il va dire: Non, vous n'avez pas le droit de
faire ça? Est-ce lui qui va décider si, dans tel endroit, il doit
y en avoir et, dans l'autre, II ne doit pas y en avoir? M. le Président,
je pense que les commissions scolaires ne sont pas du tout d'accord avec
ça. Est-ce que l'article 428 ne signifie pas que les commissions
scolaires pourraient être empêchées d'organiser certains
cours en formation professionnelle? Le ministre va-t-il décider qu'il
n'y aura pas de formation professionnelle à Sherbrooke, chez nous, ou
ailleurs? Est-ce que les commissions scolaires n'auront rien à dire dans
ça? Est-ce que vous trouvez ça acceptable? Pour les deux
commissions scolaires que j'ai rencontrées, M. le Président,
c'est inacceptable, et ce l'est pour d'autres aussi.
A l'article 428, fournir des services particuliers aux
élèves handicapés. Est-ce que le ministre va, de son
propre chef, refuser qu'une chose comme ça puisse se passer? Il en aura
l'autorité, avec le projet de loi 107. Les commissions scolaires
trouvent que l'autorité du ministre va trop loin. Elles trouvent
ça inacceptable et ne sont pas prêtes à acquiescer à
une chose comme celle-là. Est-ce que le ministre va aussi définir
combien il doit y avoir d'élèves de moins de cinq ans dans telle
école? Est-ce que le ministre va décider finalement de tout ce
qui va se passer? Comment va-t-il faire pour, de son propre chef, dicter aux
uns et aux autres de quelle façon? M. le Président, la commission
scolaire chez nous n'est pas d'accord avec ça, et je pense qu'elle est
dans son droit de ne pas l'être. Le ministre devrait
l'écouter.
Le projet de loi 107 augmente les pouvoirs du gouvernement et du
ministre de l'Éducation. C'est l'ensemble des commissions scolaires.
J'espère que vous serez en mesure, dans vos 300 amendements, de trouver
un terrain d'entente pour qu'il n'y ait pas un peu trop de centralisation,
comme vous êtes en mesure de le faire dans bien des cas, au niveau du
ministère. J'espère que vous comprendrez que les commissions
scolaires ont des choses à dire, et il serait peut-être bon que
vous les écoutiez. (16 h 10)
M. le Président, le projet de loi 107 fait en sorte que les
ressources financières des commissions scolaires soient insuffisantes.
Elles le sont depuis un certain temps, mais je n'ai pas l'impression que c'est
en train de "s'emmieuter", comme on dit. Pour les commissions scolaires, cela
va de pis en pis, parce que les ressources financières ne sont pas tout
à fait adéquates aux besoins du milieu. Les commissions scolaires
doivent bénéficier, disent-elles... La commission scolaire
Morilac me dit qu'elle doit bénéficier d'un pouvoir de taxation
locale accrue ou d'une source de revenu autonome, significative pour être
en mesure de répondre aux besoins et aux attentes spécifiques de
son milieu. Ce qui se passe dans une commission scolaire en Estrie, en
région, dans un comté ou ailleurs, ce n'est pas tout à
fait pareil. Je pense que le ministre devrait regarder ça avec les
commissions scolaires et peut-être leur donner le pouvoir ou la
possibilité de faire des choses.
M. le Président, je pourrais continuer ainsi. Il y a eu plusieurs
recommandations de commissions scolaires qui sont venues nous rencontrer. Si le
ministre le permet, après mon intervention, je pourrai lui passer les
documents que les représentants de la commission scolaire de chez nous
sont venus me porter à mon bureau. Ils sont venus discuter avec moi
puisqu'ils n'ont peut-être pas eu la chance ou le plaisir de venir
s'exprimer lors des auditions. Peut-être que ce serait bon que le
ministre puisse avoir les recommandations ou les attentes des commissions
scolaires de chez nous, peut-être que ça lui donnerait
l'éclairage des gens du milieu, peut-être que ça pourrait
l'aider à changer son fusil d'épaule, en certains cas, pour
être en mesure de correspondre aux attentes du milieu.
Les représentants de mon autre commission scolaire veulent aussi
informer le ministre de certaines choses pour que le projet de loi 107 devienne
de plus en plus acceptable pour les commissions scolaires. La commission
scolaire des Chênes dit: "Que le gouvernement réoriente son
approche envers les commissions scolaires en remplaçant les
contrôles et les normes administratives de plus en plus poussées
par des mesures menant à une responsabilisation locale accrue." Je pense
que c'est quand même une réflexion importante.
Deuxièmement, on dit: "Que le rôle du ministère de
l'Éducation soit redéfini et limité."
Tous et chacun le prétendent et avec raison, j'imagine. Je ne
travaille pas à la commission scolaire mais j'ai foi aux gens qui sont
venus me présenter leur mémoire...
M. le Président, la commission scolaire des Chênes dit:
"Que les gouvernements locaux scolaires soient revalorisés et
responsabilisés par un transfert de pouvoirs du ministère de
l'Éducation vers les commissions scolaires." Elle dit aussi: "Que les
commissions scolaires soient autonomes dans la gestion des activités
éducatives et dans la gestion des ressources humaines,
matérielles et financières." Cela signifie, pour la commission
scolaire des Chênes, une réduction de la réglementation,
l'élimination des contrôles a priori et l'évaluation
centrée sur les résultats.
La commission scolaire dit toujours: "Que le pouvoir du ministre se
limite à retenir la subvention destinée à une commission
scolaire en cas de refus à observer la loi et les règlements ou
lorsque les services ne sont pas rendus."
M. le Président, je pourrais énumérer d'autres
interventions, mais comme le temps qui m'était alloué tire
à sa fin, je dois vous dire que tant et aussi longtemps que le ministre
ne sera pas plus attentif aux gens du milieu je ne pense pas qu'on sera en
mesure de pouvoir collaborer de la façon dont H le souhaiterait. Merci,
M. le Président.
Le Vice-Président: Nous allons maintenant poursuivre avec
l'intervention de M. le député de Sherbrooke.
M. André J. Hamel
M. Hamel: Merci, M. le Président. Je suis heureux
d'intervenir dans ce débat afin de démontrer la place importante
dévolue aux commissions scolaires dans le projet de loi 107. Les
amendements majeurs apportés à ce projet de loi permettront aux
commissions scolaires d'accroître la place qu'elles occupent à
l'intérieur du système scolaire québécois. De plus,
les amendements répondent aux demandes mêmes des commissions
scolaires. Afin d'appuyer cette affirmation, j'aimerais citer le ministre de
l'Éducation, dans son intervention du mardi 25 octobre dernier, et je
cite: "Les commissions scolaires ont joué un rôle capital dans le
développement du système d'enseignement québécois.
En vertu du projet de loi 107, elles se voient confirmées dans leur
vocation d'organisme chargé de fournir à la population, dans les
limites de leur territoire respectif, les services éducatifs auxquels
elle a droit." Y a-t-il, M. le Président, déclaration plus
limpide, plus claire et plus significative?
Le projet de loi 107, enrichi par les améliorations qui y seront
apportées, maintient le rôle essentiel des commissions scolaires
dans l'aménagement et la dispensation des services éducatifs sur
leur territoire respectif. Sur plusieurs points, le projet de loi renforce, en
les précisant, les attributions des commissions scolaires et, sur
d'autres, le projet de loi 107 accroît la marge de souplesse de ces
mêmes commissions scolaires. De tous les changements que propose le
projet de loi 107, le plus important est sans doute celui qui vise à
remplacer les commissions scolaires fondées sur l'allégeance
religieuse par des commissions scolaires fondées sur l'appartenance
linguistique. Car, M. le Président, la réalité du
Québec d'aujourd'hui est celle d'une société où se
manifestent d'importantes différences d'ordre culturel, linguistique et
religieux.
L'affiliation religieuse que nous avons connue au cours du dernier quart
de siècle est devenue beaucoup moins distincte et verifiable qu'à
une autre époque. De plus, le phénomène ne pourra que
s'amplifier à l'avenir avec l'importance accrue que connaîtra
l'immigration. Dans ces conditions nouvelles, le regroupement des commissions
scolaires selon la langue apparaît comme la forme d'organisation la plus
pratique et la plus logique. Ainsi, notre gouvernement est persuadé que
la création de commissions scolaires linguistiques répondra
véritablement aux besoins du Québec d'aujourd'hui.
Contrairement aux affirmations de l'Opposition selon lesquelles le
ministre veut s'arroger d'excessifs pouvoirs, il a tenu compte des
représentations qui lui ont été faites en commission
parlementaire. Ainsi, le partage des pouvoirs et des responsabilités
entre le gouvernement et les commissions scolaires serait
réaménagé afin d'assurer une plus grande cohérence
et plus de souplesse.
Les commissions scolaires resteraient les premières responsables
d'offrir les services éducatifs sur leur territoire. De plus, elles
jouiraient d'une plus grande latitude dans l'application des décisions
gouvernementales et dans la gestion de leur organisation. Relativement au
conseil des commissaires, le directeur général participerait aux
séances du conseil, mais sans droit de vote. De plus, les commissaires
représentant le comité déférant n'auraient plus le
droit de vote. La commission scolaire n'aurait plus à suivre les
instructions générales ou particulières du ministre quant
à la tenue de ses livres et registres. Elle ne serait plus tenue de
suivre la procédure d'adoption d'un règlement pour
déterminer la rémunération des commissaires. Nous sommes
donc loin, M. le Président, de la centralisation excessive
reprochée au ministre par l'Opposition.
Les comités de la commission scolaire. Le comité
exécutif redeviendrait obligatoire et ses décisions n'auraient
plus à être entérinées par le conseil des
commissaires. Le comité consultatif de gestion institué par une
commission scolaire lorsqu'elle divise son territoire en régions
administratives ne serait plus assujetti à l'obligation pour la
commission scolaire d'adopter un règlement pour en déterminer la
composition, les modalités de fonctionnement et les fonctions. Le
comité consultatif des services aux élèves
handicapés et aux élèves en difficulté d'adaptation
ou d'apprentissage serait assuré de la présence d'un membre du
personnel non enseignant, d'un membre du personnel de soutien, d'un directeur
d'école et du directeur général de la commission scolaire
ou de son représentant. Je pense qu'on peut plutôt parler
d'ouverture démocratique et décentralisatrice que de
centralisation accentuée. (16 h 20)
De plus, certains aspects litigieux du projet de loi dans sa version
originelle ont été modifiés complètement. Le droit
de vote que l'on accordait aux représentants des parents à la
table des commissaires serait retiré. Le pouvoir du ministre de
suspendre l'application d'une décision d'une commission scolaire ayant
donné lieu à une enquête serait aboli. Le pouvoir d'ester
en justice que la version originelle du projet de loi 107 accordait à
divers organismes, tels le conseil d'orientation et le comité
d'école, serait aboli. Voilà, il me semble, quelques
recommandations importantes retenues par le ministre démontrant une
attitude beaucoup plus ouverte que fermée.
Il n'y aurait plus obligation de nommer un directeur
général adjoint. Si une commission scolaire décidait d'en
nommer plus d'un, elle n'aurait plus à obtenir l'autorisation du
ministre. Le directeur général pourrait être nommé
à la majorité simple des membres du conseil, mais il ne pourrait
être destitué ou son mandat ne pourrait être
résilié qu'avec le vote des deux tiers. Enfin, en cas
d'incapacité d'agir du directeur général, ce serait le
conseil des commissaires qui désignerait son remplaçant et non
pas le directeur général lui-même. Voilà une autre
amélioration démontrant une volonté marquée de
respecter les pouvoirs des commissions scolaires et des commissaires.
En passant, j'aimerais réfuter les prétentions du
député de Shefford qui tantôt affirmait que l'on voulait
enlever les garderies des commissions scolaires. Je citerai textuellement
l'article 228 du projet de loi 107: "La commission scolaire peut organiser des
services de garde pour les élèves de l'éducation
préscolaire et de l'enseignement primaire conformément à
la Loi sur les services de garde à l'enfance. Elle peut aussi organiser
des services de garde en garderie ou agir à titre d'agence de service de
garde en milieu familial et, à ces fins, demander un permis
conformément à cette loi." Voilà, M. le
Président.
En matière de pédagogie, les commissions scolaires
seraient investies du pouvoir d'exempter d'une autre matière un
élève qui a besoin de mesures d'appui en français, en
anglais ou en mathématiques. Concernant les services à la
communauté, les commissions scolaires pourraient exiger une contribution
financière des usagers des services qu'elle offre. De plus, les
commissions scolaires pourraient établir, maintenir ou améliorer
des centres sportifs, culturels ou récréatifs avec d'autres
commissions scolaires, des institutions ou une municipalité.
Relativement aux ressources matérielles et financières, une
commission scolaire ne serait pas tenue d'obtenir l'autorisation du ministre
pour démolir, hypothéquer, vendre, échanger ou, autrement,
aliéner un immeuble si la valeur marchande de celui-ci est de 20 000 $
ou moins. Quant à ses livres de comptes, elle pourra les tenir de la
manière qui lui convient sans être soumise à des formules
ou instructions du ministre. Enfin, le ministre n'aurait plus le pouvoir de
diminuer ou annuler une subvention destinée à une commission
scolaire lorsqu'elle ne respecte pas la loi ou les règlements. Il ne
pourrait que la retenir en tout ou en partie.
M. le Président, il y a encore de très nombreux aspects
qui démontrent clairement que ce projet de loi 107, avec les
modifications importantes qui y ont été apportées,
répond aux attentes véritables du monde de
l'éducation.
J'ai choisi de traiter brièvement du volet des pouvoirs des
commissions scolaires afin d'indiquer la volonté démocratique du
gouvernement de partager cette importante responsabilité qu'est
l'éducation avec nos élus scolaires. Le projet de loi 107 est une
pièce législative majeure, et j'y donne mon entier appui. Merci,
M. le Président.
Le Vice-Président: Je cède la parole à M. le
chef de l'Opposition et député de Joliette.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Pendant trois ou
quatre ans, j'ai eu la chance en cette Chambre d'occuper les banquettes du
pouvoir au moment où l'actuel ministre de l'Éducation
était critique en matière d'éducation. Je me souviens,
entre autres, d'un de ses discours - il prenait naturellement toujours son
heure comme critique - pendant une heure, d'une façon assez
chloroformante, le ministre de l'Éducation actuel et ex-critique en
éducation au moment où il occupait les banquettes de l'Opposition
clamait qu'il voterait contre le projet de loi 3, à l'époque,
parce que, disait-il, ce projet de loi était un projet centralisateur
qui enlevait des pouvoirs aux commissions scolaires, qui centralisait les
pouvoirs au ministère, au gouvernement et je ne peux, comme critique en
matière d'éducation... Et vous vous rappelez qu'il avait son
petit calepin noir, à l'époque, ouvrant chacune des pages
régulièrement - il l'a encore, il me le montre au moment
où l'on se parle - dans son petit calepin noir, le projet de loi 3
était trop centralisateur. Il faut le faire!
Aujourd'hui, les principaux participants au monde scolaire, les
principaux intervenants disent qu'ils n'ont jamais vu de projet de loi - le
projet de loi 107 - aussi centralisateur qui a été
présenté en cette Chambre. Ils disent: Parce qu'il multiplie les
contrôles, les ingérences plutôt que d'octroyer aux
partenaires locaux une autonomie
accrue et favoriser leur responsabilisation. M. le Président, le
ministre dit: Bien non, ce n'est pas un projet de loi centralisateur. Voyons!
Tout le monde se trompe. La CEQ erre. L'Alliance des professeurs de
Montréal ne dit pas la vérité. La Fédération
des commissions scolaires est dans les carottes. Tout le monde est dans les
carottes. Seul le ministre a la vérité.
D'ailleurs, ses collègues qui se lèvent nous disent dans
les coulisses, et mon collègue de l'Abitibi pourrait en
témoigner: C'est effrayant, le ministre ne veut rien savoir. Il tient
à son fameux projet de loi centralisateur. Il sait que les commissions
scolaires sont contre. Il sait que les enseignants sont contre. Cela ne fait
rien. Il dit: J'y tiens à mon projet de loi. Ce n'est pas des farces. M.
le Président, je vais vous donner des extraits du résumé
du mémoire de la Fédération des commissions scolaires, et
on va pouvoir juger si ce projet de loi 107 est centralisateur ou non. Le
gouvernement pourra dorénavant inclure plus d'éléments
dans son règlement relatif au régime pédagogique. Est-ce
un pouvoir qu'il se donne? Il va pouvoir inclure lui-même
unilatéralement plus d'éléments dans tout le régime
pédagogique.
Le gouvernement pourra établir la liste des commissions scolaires
qui pourraient admettre les élèves âgés de moins de
cinq ans. C'est le gouvernement dorénavant, exclusivement. Le
gouvernement pourra établir un régime pédagogique pour les
adultes. Le gouvernement. Vous savez, pourtant, rappelez-vous, l'homme au
calepin noir au moment où il était critique, il disait: Mais
quand est-ce qu'on va faire ça en communauté, en collaboration
avec les gens du milieu, avec les premiers intéressés? Et je le
vois encore brandir son bras avec son petit calepin. Quand est-ce qu'on va
mettre les enseignants dans le coup? M. le Président, dans le projet de
loi 107, c'est qui? C'est le gouvernement qui va faire ça. Le
gouvernement étend son pouvoir de réglementation au sujet du
personnel non syndiqué en se donnant le pouvoir d'établir la
classification des emplois sans consultation avec qui que ce soit.
Le nombre maximum de postes pour chaque emploi, chaque classe d'emploi,
la rémunération pour chaque emploi, pas de problème. Pas
de consultation avec les employeurs. Non, non, unilatéralement.
Écoutez, je suis la voie, la vérité, la vie. Il ne se
trompe pas, ce gars-là. Même s'il disait le contraire dans
l'Opposition, il ne se trompe pas. Ah! non, M. le Président, je suis la
voie, la vérité, la vie. Écoutez-moi quand je parle. Quand
j'étais dans l'Opposition, je disais le contraire, je disais la
vérité. Là, je suis rendu au pouvoir, je dis le contraire,
je dis la vérité. C'est à peu près ce qu'il tient
comme discours, M. le Président. Centralisateur au bout! (16 h 30)
Le gouvernement pourra établir des conditions d'attribution de
contrats que la commission scolaire devra respecter, même si celle-ci,
écoutez bien ça, finance ses travaux à même ses
revenus de taxation. On sait que les commissions scolaires ont un certain
pouvoir de taxation. Elles ne le trouvent pas suffisant, mais elles ont un
pouvoir de taxation. Quand elles financent des travaux, elles ne pourront
même plus fixer les règlements. Non, le nouveau ministre de
l'Éducation qui, à l'époque, trouvait qu'on devait laisser
toute liberté aux commissions scolaires, parce que c'était dans
leur assiette fiscale, dans leur champ de taxation, aujourd'hui dit: Non, non;
ce que je disais dans l'Opposition, cela n'avait pas d'allure. Là, je
suis au pouvoir; dans mon petit calepin noir, j'ai arraché cette
feuille. Si cela ne vous dérange pas, aujourd'hui, vous allez faire ce
que je vais vous dire de faire. Je suis la vie, la vérité et la
voie.
M. le Président, je continue. Le gouvernement pourra obliger une
commission scolaire à aliéner un immeuble à une valeur
nominale qu'H pourra fixer. Si ce n'est pas un pouvoir qui s'ajoute dans la
loi, qu'est-ce que c'est? Le gouvernement désignera le premier directeur
général de la nouvelle commission scolaire linguistique,
jusqu'à ce que celle-ci nomme quelqu'un pour occuper ce poste. Non, non!
Ne prenez pas votre envol, on est trop insignifiant pour engager
nous-mêmes quelqu'un de temporaire et d'intérimaire. C'est vous
qui devez procéder. Comme ministre, c'est moi qui dois procéder,
c'est cela qu'il dit. Donc, il s'approprie un autre pouvoir.
De plus, le projet de loi 107 ajoute de nouveaux pouvoirs. Exemple: le
ministre peut refuser d'adresser une plainte relative à un enseignant au
comité d'enquête prévu à cette fin. Lui-même!
Ne vous gênez pas, je prends tout sur moi. Vous étiez des gens
corrects au moment où j'étais dans l'Opposition, des gens qui
n'aviez pas assez de pouvoirs. Maintenant que je suis au pouvoir, vous en avez
beaucoup trop, c'est moi qui dois les avoir, maintenant.
Quel homme peut se contredire d'une façon aussi magistrale dans
un projet de loi aussi important? Comment peut-il changer de philosophie d'une
façon aussi catégorique? Cet homme qui a prêché la
décentralisation, la collaboration, la concertation entre les divers
intervenants, qui a trouvé, pendant les huit, presque neuf ans où
il a été dans l'Opposition, qu'on négligeait de faire
participer les principaux intervenants dans le domaine de l'éducation,
est celui qui nous présente, par le projet de loi 107, un des projets de
loi les plus centralisateurs jamais présentés en cette
Assemblée nationale. Ce n'est pas l'Opposition qui dit cela, ce n'est
pas l'Opposition seule qui constate cela et qui se rappelle des discours de
l'actuel ministre de l'Éducation au moment où il occupait les
banquettes de l'Opposition, ce sont les intervenants du milieu, les
enseignants, les professionnels, les commissaires d'écoles, toutes les
catégories de personnels qui oeuvrent en éducation. Même
les parents n'y retrouvent pas leur compte par rapport au
beau discours que tenait le député d'Argenteuil, actuel
ministre de l'Éducation, au moment où il était sur les
banquettes de l'Opposition.
Le ministre pourra statuer sur les différends relatifs à
la répartition des droits et obligations d'une commission scolaire lors
d'une division ou d'une annexion de territoire. Ce n'est pas un
problème. Il se place au-dessus de tout le monde, sans laisser
précisément de privilèges à ces personnes, sans
leur donner un mécanisme pour régler les problèmes. Au
contraire, je suis la voie, la vérité, la vie; ceux qui m'aiment,
m'écoutent et ceux qui ne m'aiment pas, rentrent dans le rang. C'est
à peu près son discours.
Rappelez-vous ce qu'il disait. Je prends à témoin certains
députés du pouvoir. Quand vous allez rencontrer les commissaires
d'écoles dans vos milieux, quand vous parlez aux enseignants et aux
professionnels de toutes catégories, aux professionnels non enseignants,
qu'est-ce qu'ils vous disent en parlant du projet de loi 107? Ils vous disent:
Cela n'a quasiment pas d'allure. Le député d'Argenteuil, qui
voulait la collaboration de tout le monde, qui voulait remettre les pouvoirs
entre les mains des intervenants du milieu, qu'est-ce qu'il fait avec le projet
de loi 107? Il centralise. Il y en a même qui vont jusqu'à le
comparer à l'ayatollah sous prétexte, précisément,
qu'il veut tout diriger à lui seul, qu'il veut centrer sur sa personne
tous les pouvoirs dans le domaine éducatif. Cela n'a pas de bon sens, M.
le Président. C'est contraire à la logique que lui-même,
cet homme, a voulu démontrer en cette Chambre au moment où il
occupait les banquettes de l'Oppositjon.
Le ministre pourra, de façon discrétionnaire,
libérer une commission scolaire de toute ou d'une partie de ses
fonctions. Pas de problème, "de toutes ou d'une partie de ses
fonctions"! Tout seul, de façon discrétionnaire, quand cela va le
tenter, quand bon lui semblera! Si un président de commission scolaire
ose lui dire ses quatre vérités entre quatre yeux, ce sera en
tout qu'on lui enlèvera les pouvoirs, et cela, d'une façon
discrétionnaire. L'autre ne pourra même pas faire valoir ses
droits. C'est excessif, c'est abusif, et, à mon point de vue, c'est tout
à fait contraire à l'esprit qui doit animer un ministre de
l'Éducation qui dit rechercher les consensus, qui dit rechercher, sur le
plan éducatif, la collaboration spontanée de tous les
intervenants en matière d'éducation.
M. le Président, je pourrais continuer à vous en citer un
joyeux paquet. "Le ministre pourra exiger d'approuver les plans et devis en
plus des travaux que la loi actuelle prévoit. Le ministre acquiert un
pouvoir discrétionnaire quant aux travaux nécessitant son
approbation. Le ministre pourra exiger d'avoir des rapports d'étape sur
la situation financière de la commission scolaire. Le ministre pourra
préciser le mandat des vérificateurs de la commission scolaire,
que ce soit de façon générale ou particulière. Le
ministre pourra établir la liste des commissions scolaires qui peuvent
organiser l'éducation aux adultes. " Est-ce assez fort pour vous? C'est
lui qui va décider où cela se fera et ce qui se fera. "Le
ministre pourra établir la liste des spécialités et des
services particuliers aux élèves handicapés qu'une
commission scolaire peut offrir. " Mais, qu'est-ce qu'il leur restera à
faire? Qu'est-ce qu'on veut que deviennent ces commissions scolaires? Des
pantins? Des exécutants aveugles d'une volonté
ministérielle, pour ne pas dire plus, volonté d'un homme qui se
croit omnipuissant? Il me semble qu'un ministre de l'Éducation, pour
faire une oeuvre éducationnelle véritable, doit d'abord et avant
tout, dans notre système, chercher le consensus le plus large
possible.
Et, dans la situation actuelle, que se passe-t-il? Personne n'y trouve
son compte. M. le Président, on a eu droit à une unanimité
de vues quant à la perception du projet de loi comme étant un
projet de loi extrêmement trop centralisateur. Et le ministre n'a pas
bronché. Il nous a promis quelque chose comme 300 amendements, me disait
le député d'Abitibi-Ouest. Si le ministre était
sérieux, il aurait réécrit son projet de loi. Il aurait
dit: Je vais aller refaire mes devoirs. Et ce gouvernement, là-dessus, a
cette fâcheuse habitude. Rappelez-vous le discours du 14 ou du 15
décembre 1985 de Mme Bacon, la vice-première ministre: "Nous
allons légiférer peu, mais mieux. " C'étaient les propos
exacts de Mme la vice-première ministre. Peu? Cela, c'est vrai. On n'a
à peu près plus de lois substantielles. Mais mieux? C'est faux.
On a retrouvé, dans des projets de loi, jusqu'à maintenant, des
modifications même dans les notes explicatives; ce fut le cas du ministre
des Finances. L'ex-ministre du Travail, le député de
Brome-Missisquoi, actuel ministre des Affaires municipales, a
réécrit presque tous ses projets de loi; on n'y reconnaissait
plus un article. Cela a été le cas pour les mines. Cela a
été le cas pour les forêts avec le député de
Rivière-du-Loup, on ne reconnaissait plus le projet de loi, des
centaines et des centaines d'amendements pour des centaines d'articles. Mais
qui fait leurs devoirs à ces gens-là?
C'est le cas du ministre de l'Éducation. J'ai vu des projets de
loi de quatre articles arriver avec cinq amendements. M. le Président,
on légifère peu, mais on ne légifère pas mieux.
C'est épouvantable! Et on ne crée que des illusions par les
amendements. D'ailleurs, dans son discours de deuxième lecture, discours
que j'ai écouté religieusement, il y a un aspect que le ministre
s'est bien refusé à aborder, c'est précisément de
donner aux intervenants cette place qui leur revient de droit dans un
système où l'on recherche le consensus pour une meilleure
éducation au Québec. (16 h 40)
Imprégné qu'il est de cette volonté de tout
contrôler, il maintient un projet de loi extrêmement centralisateur
qui sera nocif, qui bureau-
cratise encore davantage les relations commissions
scolaires-gouvernement, qui accentue les formes de contrôle, qui tue la
spontanéité dans l'organisation du milieu, dans la
créativité du milieu. Et on se ramassera encore une fois avec un
projet de loi mal foutu où les gens nous demanderont purement et
simplement: Vous n'avez pas d'alternative, il faut que vous le bloquiez dans
son état actuel.
M. le Président, je voudrais également parler quelques
minutes du financement. Ce n'est pas à nous de l'Opposition de
décider comment le gouvernement peut concrètement verser des sous
additionnels ou permettre à des commissions scolaires d'avoir une
assiette fiscale plus large que celle dont elles disposent présentement.
Mais il est bien évident, en tout cas, que ce point précis fait
l'objet de discussions très fermes dans chacun de nos milieux. Les
commissaires d'école ont une perception, les directeurs
généraux ont une perception également et les cadres
scolaires ont une perception. Et il serait peut-être intéressant
de voir si le ministre de l'Éducation a au moins l'intention claire,
bien déterminée, de permettre plus d'initiatives dans le
milieu.
Dans une conjoncture où il ressert la vis à peu
près sur tous les plans, malgré qu'on traverse des années
de vaches grasses, le ministre de l'Éducation, dans son droit de
réplique, pourrait-il nous dire éventuellement quelles sont ses
intentions quant aux initiatives qu'on pourrait prendre dans le milieu sans
contrôle ministériel? Quelle est la perception claire? Cela
tergiverse, vous savez. Il y a des conseillers du ministre qui disent des
choses. Ils font miroiter des amendements possibles. À ce stade-ci,
quand bien même que le ministre a l'intention d'amender les choses, on
sait très bien que cela n'a aucune valeur légale tant qu'on n'est
pas en commission parlementaire. On est à étudier des principes.
Et, globalement, c'est en commission parlementaire qu'on pourra voir la nature
précise de chacun des amendements.
Mais, à notre point de vue, au moment où on se parle, le
ministre de l'Éducation a montré certaines ouvertures sur
certains volets de sa loi, mais n'a pas montré une clarté des
volontés affichées, des volontés politiques
précises de donner de plus en plus aux intervenants du milieu la chance
de s'associer à l'action éducative dans leur milieu. Le ministre
n'a pas démontré sa volonté de permettre aux parents et
aux commissaires d'écoles de jouer un rôle encore plus responsable
dans leur milieu. Au contraire, son discours laisse encore tous les
intervenants perplexes à l'idée que le ministre - et c'est sa
nature - ait encore l'intention claire de ce côté-là de
mettre le grappin sur tout ce qu'il y a à peu près comme
décision à prendre dans le monde de l'éducation.
Pour cette raison-là, il est évident qu'on ne peut
souscrire à une volonté de centralisation aussi marquée.
Il est impensable, M. le Président, qu'on appuie les propos et la
présentation d'un projet de loi d'un ministre qui exigeait et qui
prônait le contraire au moment où il occupait les banquettes de ce
côté-ci de la Chambre. Et je vais répéter au
ministre exactement ies paroles qu'il nous servait au moment où il
était dans l'Opposition. Nous lui disons: Nous ne pouvons adhérer
au projet de loi 107 parce que, précisément, il a tous ies vices
que vous reconnaissiez à la loi 3 qui, pourtant, M. le Président,
était beaucoup plus ouverte vis-à-vis de la répartition,
vis-à-vis de la composition des pouvoirs, vis-à-vis de la
possibilité de créativité qu'on offrait autant aux parents
qu'au personnel et qu'aux structures scolaires.
Le ministre de l'Éducation, M. le Président, contrairement
à ce qu'il nous a toujours dit, nous présente un projet de loi
diamétralement opposé aux propos qu'il a tenus pendant des
années. Et si on n'était pas en cette Chambre, il y aurait des
mots qui qualifieraient très bien ce contenu. Vous savez, M. le
Président, quand c'est contraire à la vérité, quand
c'est contraire à ce qu'on a prôné, on est en droit de se
demander - on n'a pas le droit de le dire - mais on a le droit de dire aux
gens: Pensez exactement ce que je voudrais vous dire. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président: Nous poursuivons maintenant avec M. le
député de Duplessis.
M. Denis Perron
M. Perron: Merci, M. le Président. Comme tout le monde
sait que le ministre de l'Éducation a vraiment annoncé son
intention de faire adopter ce projet de loi, c'est-à-dire le projet de
loi 107, Loi sur l'instruction publique, et ce, avant la fin de la
présente session, vous me permettrez sûrement d'intervenir et de
profiter de cette occasion qui m'est offerte pour donner mon point de vue et le
point de vue de certains représentants et certaines
représentantes du milieu de l'éducation du comté de
Duplessis.
Tout le monde sait que les audiences publiques ont fait ressortir
l'absence de consensus vis-à-vis de cette réforme, et ce,
à partir de tous les milieux de l'éducation. De très
nombreux organismes et parmi les plus importants ont exprimé leur
profond désaccord et réclamé des modifications majeures si
ce n'est, dans certains cas, jusqu'au retrait du projet de loi. Parmi ces
opposants, on retrouve notamment les commissions scolaires, les comités
de parents, les commissions scolaires avec leur fédération en
tête, qui dénoncent le caractère centralisateur du projet
de loi 107. On se pose de sérieuses questions quant à l'avenir de
l'éducation au Québec puisque ce projet de loi 107 vient
remplacer l'actuelle Loi sur l'instruction publique afin, selon les notes
explicatives, de lui donner une structure nouvelle, j'en conviens, et plus
cohérente.
Selon ce que j'ai vu dans le projet de loi et selon les rencontres que
j'ai eues avec des
représentants et représentantes du comté de
Duplessis, plus cohérente? Non. La moderniser et la rationaliser,
excusez-moi, M. le Président, mais on est aussi en droit de se poser de
sérieuses questions quant au dire de l'actuel ministre de
l'Éducation et de son gouvernement. Il s'agit donc d'un projet
d'importance majeure qui vient offrir un cadre remanié de l'organisation
de l'ensemble de notre système d'éducation. Il traite à la
fois de ses structures, écoles, commissions scolaires, conseil scolaire
de l'île de Montréal, ministre de l'Éducation, des pouvoirs
et responsabilités de chacun de ces niveaux, de la nature de leurs
rapports, de leur fonctionnement, c'est-à-dire régie interne,
comités, ainsi que des droits de l'élève et des droits et
obligations des enseignants.
M. le Président, le projet de loi diverge cependant, et de
très loin, avec la loi 3 à maints égards. Par exemple,
absence de définition des services éducatifs, absence de recours
pour l'élève au Protecteur du citoyen, fonctions et pouvoirs du
conseil d'orientation et du comité d'école, c'est-à-dire
parents, composition du conseil des commissaires, maintien des commissions
scolaires régionales. M. le Président, la position des
intervenants dans ce dossier est à l'effet de contester le projet de loi
qui est le plus centralisateur jamais présenté par aucun
gouvernement en ce qu'il multiplie les contrôles, les ingérences,
plutôt que d'octroyer aux partenaires locaux une autonomie accrue et,
même, favoriser leur responsabilisation.
Je voudrais parler de l'accessibilité aux services
éducatifs, de la participation des parents au système
d'éducation, du rôle des enseignants puisqu'ils sont des personnes
responsables dans le milieu et responsables de l'éducation de nos
enfants au Québec. Je voudrais parler de la structure scolaire qui est
actuellement dans le projet de loi, mais je vais parler surtout d'un sujet
extrêmement important. Je vais parler de la mainmise du ministère
de l'Éducation sur les commissions scolaires, puisque le projet de loi
nie le pouvoir local et signifie la mainmise du ministère de
l'Éducation sur les commissions scolaires du Québec. Les nouveaux
pouvoirs du ministre sont exorbitants. Ils placent souvent la commission
scolaire en situation de tutelle permanente, et ce, dans la grande
majorité de nos régions du Québec. Désormais, le
ministre pourra empêcher une commission scolaire d'offrir des cours aux
adultes - article 427 - d'organiser certains cours en formation professionnelle
- article 428 - de fournir des services particuliers aux élèves
handicapés - article 428 - ou d'admettre dans ses écoles des
élèves de moins de cinq ans - article 413 - même si la
commission scolaire utilise ses propres ressources pour répondre
à des besoins voulus par la population de son territoire. (16 h 50)
Désormais, le ministre pourra suspendre l'application d'une
décision prise de façon légitime et légale par les
représentants élus de la population à la commission
scolaire - article 439. Désormais, le ministre pourra aussi, sans autre
forme de procès, annuler ou diminuer le montant d'une subvention
destinée à fournir des services éducatifs à la
population de certaines commissions scolaires, donc, à la population du
Québec.
Le projet de loi est un projet de loi centralisateur puisqu'il augmente
les pouvoirs du gouvernement et du ministre de l'Éducation.
Là-dessus, M. le Président, vous me permettrez de dire que
j'endosse entièrement les propos qui ont été tenus par le
chef de l'Opposition à l'Assemblée nationale du Québec
lorsqu'il parlait de l'actuel ministre de l'Éducation. Lorsque ce
dernier était chef de l'Opposition à l'Assemblée
nationale, il se portait, toujours avec son petit calepin noir, à la
défense des commissions scolaires du Québec dans le cadre d'une
décentralisation qui devait être importante. Il se
prononçait contre certaines attitudes de l'ancien gouvernement parce
qu'il voulait plus de pouvoirs pour les comités de parents, plus de
pouvoirs pour les enseignants et les enseignantes. Aujourd'hui on se rend
compte que ce même homme, ministre de l'Éducation, n'a pas les
mêmes opinions qu'il avait lorsqu'il était chef de l'Opposition et
ça, M. le Président, nous le regrettons énormément.
On remarque que lorsque le ministre de l'Éducation a une
clientèle devant lui, il parle du coin gauche de la bouche et lorsqu'il
est devant une autre, il parie du coin droit. Cela veut dire qu'il se fait une
opinion différente sur le même sujet, dépendamment des
groupes qu'il a en face de lui. On a pu constater ça depuis qu'il est
à l'Assemblée nationale.
Donc, un projet de loi centralisateur qui augmente les pouvoirs du
gouvernement et particulièrement ceux du ministre de l'Éducation.
Or, la centralisation des décisions amène les commissions
scolaires à se limiter à l'administration des normes des
fonctionnaires plutôt que de prendre des décisions qui tiennent
compte des besoins des citoyens et citoyennes du Québec et en
particulier ceux de nos grandes régions de la Côte-Nord, de
l'Abitibi-Témiscamingue, du Saguenay-Lac-Saint-Jean et aussi, bien
sûr, du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie et des grandes
régions de Montréal et de Québec. La centralisation des
décisions reflète la méfiance du gouvernement envers des
personnes choisies par la population pour gérer les commissions
scolaires du Québec. Le gouvernement actuel s'est fait élire en
promettant d'éliminer plusieurs normes ou règlements qui
alourdissent le processus décisionnel et qui obligent les
employés des commissions scolaires à prendre beaucoup de temps
pour répondre aux demandes des fonctionnaires.
C'est pourquoi en ce qui me concerne, M. le Président, les
gouvernements locaux scolaires doivent être revalorisés et
responsabilisés par un transfert de pouvoirs du ministère de
l'Éducation vers les commissions scolaires du Québec, non
pas de la façon dont le fait l'actuel projet de loi 107, mais
bien comme le disait lui-même le ministre de l'Éducation lorsqu'il
était dans l'Opposition et comme nous le disons nous-mêmes
aujourd'hui, en tant que membre de l'Opposition. Les deux thèmes que je
viens de soulever, c'est-à-dire la mainmise du ministère de
l'Éducation sur les commissions scolaires et ce projet de loi vraiment
centralisateur, vont à rencontre d'une véritable
décentralisation.
M. le Président, je vous dis tout simplement qu'il serait
important que les gens d'en face, les membres du gouvernement libéral,
comprennent que nous avons devant nous un projet de loi extrêmement
important où on a une belle occasion de voir s'exprimer ce que j'appelle
la démocratie régionale, mais ce n'est pas le cas. Si on veut
vraiment exprimer la démocratie régionale, on doit avoir une
nouvelle loi qui soit près des gens du milieu, qui reconnaisse les
droits et les pouvoirs de ceux et celles qui sont élus dans les
commissions scolaires, de ceux et celles qui sont élus dans les
comités de parents, de ceux et celles qui sont élus dans les
syndicats d'enseignement du Québec, de ceux et celles qui sont aussi
nommés par les différents organismes que je viens de
mentionner.
M. le Président, si on veut vraiment exprimer la
démocratie, je dis oui pour revaloriser les commissions scolaires tels
de véritables gouvernements autonomes; je dis oui pour faire des
commissaires d'écoles de véritables partenaires élus du
gouvernement, je dis oui pour limiter les pouvoirs accrus que veut se donner
l'actuel ministre de l'Éducation; je dis oui aussi pour faire
disparaître de nombreux contrôles gouvernementaux sur l'ensemble
des appareils des commissions scolaires et sur l'ensemble des décisions
que devront éventuellement prendre les commissions scolaires et les
commissaires d'écoles. Je dis oui, M. le Président, à
cette démocratie pour faire éliminer le caractère
centralisateur du projet de loi 107 afin que nous ayons une loi et ce, pour une
fois qu'on a l'occasion de s'exprimer et d'avoir du concret dans le domaine de
l'éducation, c'est-à-dire une Loi sur l'instruction publique qui
soit potable et qui démontre vraiment qu'il existe un consensus dans le
milieu, ce qui n'est pas le cas actuellement. Bien sûr, cette Loi sur
l'instruction publique devrait être non pas pour le bien de ceux et
celles qui parlent en cette Chambre, mais bien plus pour le bien de notre
peuple lui-même, c'est-à-dire des femmes du Québec, des
hommes du Québec et des enfants du Québec qui sont actuellement
aux études, donc de l'ensemble de nos familles
québécoises.
M. le Président, je termine en vous disant tout simplement que,
tant et aussi longtemps que le contenu du projet de loi 107 et ce, dans sa
grande majorité, sera celui que nous avons devant nous, je
déploierai, en tant que député de l'Opposition à
l'Assemblée nationale et en tant que député de Duplessis,
tous les efforts néces- saires pour que des amendements substantiels
soient apportés lors de l'étude article par article en commission
parlementaire et, bien sûr, nous ferons tous les efforts pour corriger
les erreurs qui sont commises par le gouvernement libéral avec le
contenu de ce projet de loi 107 qui, pour moi, est aberrant pour l'ensemble de
nos commissions scolaires, pour l'ensemble du monde de l'éducation,
c'est-à-dire de nos enfants en particulier et des parents qui ont mis
ces enfants au monde. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président: Nous allons nous préparer
à entendre le prochain intervenant, M. le député de
Taillon.
M. Claude Filion
M. Filion: Merci, M. le Président. Je pense que cette
Chambre sait amplement que le ministre de l'Éducation a
déposé en décembre dernier le projet de loi 107, Loi sur
l'instruction publique. Ce projet de loi a évidemment fait l'objet, - et
il aurait été impossible d'en conclure, autrement - d'une
consultation générale qui a eu lieu, sauf erreur, durant
l'été, au cours de laquelle une centaine d'intervenants se sont
fait entendre. C'est donc dire, de façon assez simple, à quel
point l'instruction publique au Québec revêt une importance tout
à fait capitale.
Le ministre de l'Éducation et député d'Argent euil
a déjà annoncé son intention de faire adopter, avant la
fin de la présente session, ce projet de loi ainsi que le projet de loi
106 sur les élections scolaires qui l'accompagne en quelque sorte.
M. le Président, les audiences publiques que nous avons tenues
doivent être un exercice parlementaire utile et l'ensemble des
commentaires que nous avons entendus en commission parlementaire doit servir
à bonifier le projet de loi. Malheureusement, les audiences publiques et
les amendements déposés par le ministre sont insuffisants
à cet égard. Les audiences publiques ont donc fait ressortir
l'absence de consensus vis-à-vis de la réforme du ministre de
l'Éducation dans les milieux de l'éducation. (17 heures)
De très nombreux organismes, et parmi les plus importants, ont
exprimé leur profond désaccord et réclamé des
modifications majeures, si ce n'est même, dans certains cas, le retrait
du projet de loi du ministre de l'Éducation. Parmi ces opposants, on
retrouve notamment les commissions scolaires avec leur fédération
en tête, qui dénoncent le caractère centralisateur de la
loi 107. Afin de faire entendre raison au ministre et d'expliquer leur
position, les représentants des commissions scolaires ont d'ailleurs
rencontré tous et chacun des députés dans cette Chambre
probablement. Du moins tous et chacun des députés de l'Opposition
ont été rencontrés. J'ai des raisons de croire que les
commissions scolaires ont fait la même chose dans tous les
comtés du Québec pour, encore une fois, faire en sorte de
faire entendre raison au ministre. Malheureusement force est de constater,
à la lecture des intentions d'amendements du ministre - on n'a pas
encore vu la couleur des amendements proprement dits - que cette
opération de sensibilisation qui a eu Heu partout au Québec n'a
pas eu les résultats escomptés auprès du ministre.
Pour votre information, M. le Président, il serait utile,
à ce stade, de réviser le contenu du projet de loi. D'abord,
évidemment, le projet de loi vient remplacer l'actuelle Loi sur
l'instruction publique pour lui donner, nous disent les notes explicatives, une
structure supposément nouvelle et plus cohérente, pour moderniser
cette loi et la rationaliser. Il s'agit donc, personne n'en doutera, d'un
projet de loi d'importance majeure. Je crois que, sauf erreur, il y a
près de 600 articles qui viennent offrir un cadre remanié
à l'organisation de l'ensemble de notre système
d'éducation. Ce cadre juridique traite à la fois des structures
scolaires, des écoles, des commissions scolaires, du conseil scolaire de
111e de Montréal, du rôle du gouvernement, celui du ministre de
l'Éducation. Ce cadre traite également des pouvoirs et
responsabilités à chacun de ces niveaux, de la nature des
rapports entre eux, des droits et obligations de chacun de ses intervenants, de
leur fonctionnement au niveau de la régie interne, des comités
ainsi que des droits de l'élève, des droits et obligations des
enseignants, bien sûr.
Ce projet s'inspire, mais malheureusement de façon nettement
insuffisante, de la loi 3 qui avait été adoptée en
décembre 1984 par le gouvernement précédent mais qui avait
évidemment été suspendue dans son application par suite
d'un jugement rendu en Cour supérieure en juin 1985, qui
déclarait inconstitutionnelle partie de cette loi 3.
Donc, la réforme proposée par le ministre de
l'Éducation a été puisée dans la loi 3, mais de
façon nettement insuffisante. Par exemple, ce projet de loi 107 diverge
de la loi 3 relativement à l'absence de définition des services
éducatifs, à l'absence de recours pour l'élève au
Protecteur du citoyen, aux fonctions et pouvoirs du conseil d'orientation, aux
fonctions et pouvoirs du comité d'école, des comités de
parents, à la composition du conseil des commissaires, au maintien des
commissions scolaires régionales.
Également, M. le Président, ce projet de loi consacre une
malheureuse concentration des pouvoirs dans les mains du gouvernement et, plus
particulièrement, dans les mains du ministre de l'Éducation. Je
serais porté à rappeler au ministre de l'Éducation actuel
que les ministres de l'Éducation passent, c'est normal, ils sont de la
nature des hommes et des femmes politiques, mais que les lois, elles,
demeurent. C'est pourquoi une trop grande centralisation, comme c'est le cas
actuellement, entre les mains du ministre ne peut qu'être absolument
néfaste au dévelop- pement de notre système d'instruction
au Québec.
Plusieurs articles confèrent au ministre des possibilités
accrues d'intervention dans plusieurs secteurs, dans les affaires des
commissions scolaires, par exemple, directement ou par voie
réglementaire. Mentionnons, à titre d'exemple, le pouvoir
d'établir unilatéralement la liste des commissions scolaires qui
peuvent organiser des services éducatifs pour les adultes. C'est
incroyable, M. le Président! Les fédérations scolaires qui
sont venues à mon bureau pour me sensibiliser à cette
réalité pourraient, je pense, facilement convaincre n'importe
quel esprit raisonnable rapidement. Cela n'a pas de sens de demander de
concentrer dans les mains du ministre le pouvoir d'établir de
façon unilatérale la liste des commissions scolaires qui
pourraient organiser des services éducatifs pour les adultes. C'est nier
l'expertise, l'expérience, le bon sens des commissions scolaires,
finalement. À quoi cela sert-il d'avoir une structure d'éducation
au Québec si le ministre garde pour lui des pouvoirs semblables?
Autres pouvoirs. Le pouvoir, encore une fois, de définir la liste
des spécialités professionnelles ou même des services
particuliers aux élèves handicapés et aux
élèves en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage.
À ce sujet, les commissions scolaires, c'est le projet de loi, qui sont
non désignées perdent compétence à ce niveau. Le
projet de loi contient également des dispositions visant à la
détermination des conditions de travail du personnel non
syndiqué. Là, on a finalement peine à comprendre la raison
d'une mesure semblable: que le ministre de l'Éducation dans son bureau,
à Québec, définisse lui-même les conditions de
travail du personnel non syndiqué et même le nombre de postes pour
chaque classe d'emploi. Autre pouvoir centralisé entre les mains du
ministre: la multiplication des autorisations préalables
nécessaires pour la gestion des immeubles. Qu'il s'agisse, par exemple,
d'aliénation de projet d'immobilisation, qu'il s'agisse de la
procédure de tutelle. Rien qu'à ce sujet, le ministre nous a
annoncé certains amendements lors de son discours de deuxième
lecture.
Maintenant, au chapitre des structures scolaires, permettez-moi de dire
quelques mots là-dessus. Le projet de loi 107 prévoit la
création de commissions scolaires linguistiques le gouvernement
libéral n'entendant cependant procéder qu'une fois testée
la constitutionnalité de son projet devant les tribunaux. Il maintient
donc à Montréal et à Québec les commissions
scolaires confessionnelles sur leurs territoires actuels, alors que la loi 3
les ramenait à leurs limites de 1867. Le projet de loi prévoit
enfin, tout comme la loi 3, la possibilité pour une école
d'obtenir une reconnaissance confessionnelle de la part des comités
confessionnels du Conseil supérieur de l'éducation, et
d'intégrer cette dimension dans son projet éducatif.
Donc, il s'agit là d'une courte liste, mais de pouvoirs que le
ministre de l'Éducation, pour des
raisons difficiles à cerner, encore une fois, qui
répondent à une motivation saine, nous n'en doutons pas, mais qui
dans les faits donnent lieu à un type d'exercice de pouvoirs qui n'a pas
de sens. On ne peut demander à un homme, fût-il ministre de
l'Éducation, de garder semblables pouvoirs entre ses mains, en
négligeant d'utiliser la structure que nous avons mise sur pied au fil
des années au Québec. C'est une longue tradition. Le ministre de
l'Éducation le sait. Il a écrit plusieurs éditoriaux que
je pourrais lui citer à ce sujet. Donc, on ne peut pas concentrer le
pouvoir d'une semblable façon.
C'est alors procéder à une démotivation profonde
des commissions scolaires, du personnel des commissions scolaires et des
administrateurs des commissions scolaires. Je résume, M. le
Président, ce qu'est, au moment où je vous parle, la position
consensuelle de l'ensemble des intervenants du milieu de l'éducation sur
le projet de loi 107. Je comprends que le ministre est très
occupé actuellement à essayer d'analyser la réaction des
étudiants qui demandent un changement d'interlocuteur dans le dossier
des prêts et bourses. Quand même, je pense que ça vaut la
peine de faire cette mise au point. Pouvoirs du ministre qui sont beaucoup trop
étendus. L'aspect qui suscite l'opposition la plus large, la plus
unanime chez les commissions scolaires, comme chez les divers regroupements de
cadres scolaires. Ces intervenants nous confient même que le projet de
loi de l'actuel député d'Argenteuil, le ministre de
l'Éducation, est le plus centralisateur jamais présenté.
(17 h 10)
Je suis sûr que le ministre de l'Éducation n'est pas fier
de cette épithète qui ne vient pas de l'Opposition, mais qui
vient des intervenants qui ont à travailler chaque jour dans le milieu
de l'éducation. Le plus centralisateur jamais présenté, en
ce qu'il multiplie les contrôles, les ingérences plutôt que
d'octroyer une autonomie accrue et de favoriser la responsabilité, la
responsabilisation des intervenants.
Deuxième point: l'accessibilité aux services
éducatifs. Je l'ai mentionné tantôt, un bon nombre de
mémoires ont abordé en commission parlementaire cette
accessibilité aux services éducatifs. J'ai remarqué que le
ministre a apporté ou apportera certaines modifications à ce
chapitre. Il demeure qu'au moment où nous nous parlons, le projet de loi
107 contient une série de dispositions dont il nous faut déplorer
l'absence de définition des services éducatifs particuliers,
complémentaires, notamment pour réclamer le report, au 31
décembre, de la date servant à fixer l'âge
d'admissibilité, pour contester les restrictions à la
gratuité en matière d'éducation des adultes. Les
organismes oeuvrant auprès d'élèves handicapés et
d'élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage ont
souligné les nombreuses lacunes du projet de loi en ce qui concerne,
notamment, l'affirmation de principes d'intégration en classes
régulières et le plan d'intervention.
Autre chose, M. le Président. Je résume pour le
bénéfice du ministre. Ce que je dis là, c'est la position
de l'ensemble des intervenants, c'est le consensus au Québec,
actuellement, à l'égard de votre projet de loi: les pouvoirs du
ministre trop concentrés, l'accessibilité aux services
éducatifs, troisièmement, la participation des parents. On peut
dire qu'une nette majorité de comités de parents souhaite le
maintien du comité d'école actuel, qui devenait facultatif
à l'intérieur du projet de loi 107. Le conseil d'orientation,
quant à lui, est l'objet de positions très variées.
Certains le qualifient de, lieu intéressant de concertation, d'autres,
de structure inutile et lourde.
Quant au droit de vote des parents commissaires, il n'y a pas là
non plus consensus, bien que le ministre, sauf erreur, nous a annoncé
des modifications lors de son discours de deuxième lecture.
Le rôle des enseignants, maintenant. Quatrième point. Les
syndicats d'enseignants concernés expriment de très
sérieuses réserves sur les droits et obligations des enseignants
tels que définis dans le projet de loi. Vous savez, M. le
Président, lorsque nous aurons adopté cette loi, elle ne nous
appartiendra plus, ni n'appartiendra au ministre de l'Éducation qui
trouve des justifications à chacune des dispositions du projet de loi.
Lorsque ce projet de loi sera adopté, il fera partie de notre corps
législatif et vivra indépendamment du ministre de
l'Éducation actuel, de ses intentions, de ses aspirations, de ses
souhaits. En deux mots, de ses bonnes intentions. On le sait, l'enfer est
pavé de bonnes intentions. Dans le secteur de l'éducation, il est
d'autant plus important que toute modification législative majeure -
cela en est une - opère ou reçoive l'approbation ou le
consentement d'une large partie des intervenants. On ne peut pas
légiférer dans le secteur de l'éducation, ni dans le
secteur de la santé sans avoir un minimum d'approbation et de
consentement de la part des principaux intéressés.
Pourquoi est-ce que c'est sain? Parce que la loi une fois
adoptée, je le répète, elle ne nous appartient plus. Elle
sera vécue par d'autres personnages, autant au gouvernement, que dans
les commissions scolaires, autant par des enseignants que par des
élèves. C'est pourquoi H faut apporter un soin à obtenir
un consensus. Les textes de loi... Mes trois années en cette
Assemblée nationale ne font que renforcer ma conviction initiale: les
textes de loi sont une chose, mais la volonté, l'attitude, le climat en
est une autre. Il n'y a pas de texte de loi qui peut fonctionner quatre saisons
par année dans le milieu de l'éducation sans obtenir l'appui de
la majorité des intervenants, pas de tout le monde, c'est
évident. D'ailleurs, il n'y a pas un projet de loi qui reçoit le
consentement de tout le monde, sauf si le projet de loi ne dit rien.
Je l'admets, M. le ministre de l'Éduca-
tion, l'Opposition le concède, à partir du moment
où l'on prend position, à partir du moment où l'on
tranche, on crée des insatisfaits. Mais, là, les insatisfaits
sont trop nombreux. C'est ce que l'Opposition dit bien simplement au ministre
de l'Éducation depuis le début. Sa réforme met de
côté trop d'éléments contenus dans le projet de loi
3, sa réforme ne tient pas compte de façon suffisante du souhait
des élèves, des enseignants, du personnel et des administrateurs
des commissions scolaires. En ce sens, nous, de l'Opposition, disons au
ministre de l'Éducation qu'il convient de refaire ses devoirs. Il n'y a
pas de honte à chercher à bonifier, à chercher à
améliorer un projet de loi. En ce sens, nous recommandons au ministre de
regarder plus étroitement du côté du projet de loi 3 qui
contient plusieurs éléments progressistes, plusieurs
éléments de nature à accueillir l'approbation des
intervenants du milieu de l'éducation.
Je termine là-dessus, M. le Président, puisque vous
m'indiquez qu'il reste peu de temps. Le projet de loi du député
d'Argenteuil, le projet de loi du ministre de l'Éducation consacre le
rétrécissement des droits des élèves en
matière de recours, en matière d'association et en matière
d'accès aux services éducatifs. Le projet de loi du ministre de
l'Éducation consacre le rétrécissement des droits des
adultes en matière de gratuité et le rétrécissement
des droits des élèves handicapés ou en difficulté
sur le plan de l'intégration. Ce projet de loi consacre également
le rétrécissement des droits des enseignants sur le plan
pédagogique et le rétrécissement des droits des parents au
chapitre des mécanismes de participation et des services de garde.
Deuxièmement, ce projet de loi, en même temps qu'il diminue
les obligations du ministre, notamment en matière
d'accessibilité, agrandit les pouvoirs du ministre, et c'est
inacceptable. Tous les autres intervenants voient leurs obligations augmenter
au détriment de leurs droits, mais, dans le cas du ministre de
l'Éducation, c'est la balance à l'envers. Le ministre se donne
des pouvoirs et diminue ses obligations.
M. le Président, je sais que ministre de l'Éducation a
réfléchi sur la question de l'instruction publique. Je sais qu'il
connaît l'importance d'établir un consensus solide en
matière d'éducation comme dans tous les secteurs importants de la
société. Je me souviens avoir entendu le ministre de
l'Éducation parler de l'importance, dans le secteur de la santé,
de bâtir des consensus. Je lui rappelle ses propres paroles. M. le
ministre, actuellement, le projet de loi 107 doit être refait et
amélioré en collaboration avec les partenaires du milieu de
l'éducation. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président: Je vais maintenant céder la
parole à M. le député de Notre-Dame-de-Grâces. (17 h
20)
M. Harold Peter Thuringer
M. Thuringer: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir
d'appuyer le projet de loi 107. Quelques-uns parmi vous trouveront
peut-être un peu drôle que je ne sois ni professeur ni
administrateur d'école. Je suis plutôt un parent, quelqu'un qui a
travaillé dans un organisme bénévole et qui a
traité parmi d'autres dossiers celui de l'éducation. Cet
organisme s'appelle le Conseil catholique d'expression anglaise. Il regroupait
les professeurs, les membres du syndicat, les administrateurs, les directeurs
d'école et les parents. Et leur devoir était d'améliorer
tout le domaine de l'éducation et de trouver les moyens de mieux
répondre aux besoins des élèves. Je félicite le
ministre pour sa vision et sa volonté de répondre aux besoins de
la société québécoise avec ce projet de loi, qui
modifiera sensiblement les structures administratives pour mieux
répondre aux réalités du Québec. Et plutôt
que d'avoir des commissions confessionnelles, on propose des commissions
linguistiques.
Le projet sera dans les faits beaucoup plus conforme aux orientations
générales de la société québécoise.
Et le ministre précisait mercredi dernier que le gouvernement n'avait
nullement l'intention d'exclure purement et simplement la religion de
l'école. Il s'agit d'un principe important. Nous aurons remarqué
au cours des représentations qui ont été faites
auprès du gouvernement durant la commission parlementaire qu'aucun
intervenant n'a réclamé le retrait de la religion de nos
écoles. On a plutôt demandé au gouvernement de respecter
les droits des parents et de ne pas porter atteinte au choix que l'enfant peut
effectuer dans tel ou tel type d'école.
Parmi les principes mis de l'avant dans ce projet de loi, nous citerons
le remplacement des commissions scolaires confessionnelles par des commissions
scolaires linguistiques, que je viens de mentionner. Je citerai
également l'accès plus étendu aux services
éducatifs qui améliorera la qualité de vie au
Québec. Enfin, le maintien du partage des responsabilités entre
les commissions scolaires et le gouvernement québécois conservera
la cohérence voulue en vue d'atteindre justement cette qualité
d'enseignement au Québec.
De son côté, le ministre n'est pas resté insensible
aux nombreuses représentations qui lui ont été faites au
cours des derniers mois. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle, le 25
octobre dernier, il rendait publics les nombreux amendements qui
amélioraient son projet initial et qui tenaient compte des demandes
formulées. Pour en arriver à des modifications aussi profondes
dans le système d'éducation, qui respectent les faits et
l'évolution historique du Québec, le gouvernement
québécois n'a pas l'intention de procéder à des
changements majeurs dans le partage des responsabilités entre les
commissions scolaires et
le gouvernement. On a clairement dit que le partage actuel des
tâches permet d'assurer une direction fort équilibrée du
système d'enseignement. Voilà un principe susceptible de diminuer
les appréhensions entendues dans le milieu, il y a quelques mois.
Pour ma part, je partage entièrement la volonté du
gouvernement d'élargir les frontières d'accessibilité
à des tranches de la population qui, jusqu'ici, n'avaient à peu
près pas accès à notre réseau d'éducation,
comme une majorité d'adultes au Québec, les élèves
handicapés et les élèves en difficulté
d'apprentissage. Le gouvernement démontre par là son souci
d'assurer une qualité de vie à tout citoyen du Québec,
quel que soit son statut, quelle que soit sa situation particulière ou
familiale.
M. le Président, c'est vraiment un choix de
société, à mon avis. Comme on le voit, M. le
Président, le projet de loi 107 résulte, à plus d'un point
de vue, d'un véritable projet de société. Le
développement démographique du Québec ainsi que les
efforts de la société québécoise en vue
d'intégrer les minorités à la culture française,
tout en respectant leurs droits acquis, font en sorte qu'aujourd'hui le
gouvernement du Québec réitère sa volonté de tenir
compte des deux grandes réalités linguistiques du
Québec.
Pour l'Opposition officielle, le projet de loi paraît inacceptable
dans la mesure où probablement, selon elle, le ministre s'arroge encore
beaucoup trop de pouvoirs, et ce, en dépit des modifications qu'il a
apportées.
Il ne faut pas oublier que le projet de loi 3, que le gouvernement du
Parti québécois avait lui-même présenté, a
suscité des réactions nettement négatives, d'une part, de
l'ensemble du milieu éducationnel aussi, mais en même temps, ce
même gouvernement l'avait présenté d'une façon
tellement arrogante, sans trop tenir compte des doléances
présentées en commission parlementaire et en se servant à
outrance de la majorité parlementaire dont il disposait à
l'époque.
Je viens d'entendre le député de Taillon qui, encore une
fois, indique comment le projet de loi va centraliser les pouvoirs du ministre.
Personnellement, j'ai vécu dans mon ancien poste des situations
où quelques commissions scolaires essayaient d'avoir une entente pour
partager des services que les parents avaient bien voulu avoir. Mais parce
qu'il y a deux entités égales, on n'a pas été
capables d'en arriver à une décision. Cela a été un
échec. À cause de la loi, même le ministre n'était
pas capable de prendre une décision. Il est donc très important,
dans certains cas, d'assurer que quelqu'un prenne le leadership qu'il faut, et
je pense que le ministre est capable de le faire, entouré de tous les
groupes et des intervenants dont on parte dans le projet de loi 107.
It is fairly clear too, Mr. President, that there are draw backs. We are
already late in this reform. By referring certain articles to the courts, time
will run out especially as we look at the drop in statistics of students,
particularly in the English community, both in the protestant and catholic
sectors, and by implementing some parts of the law while checking the legality
oi some clauses, it will no doubt cause some administrative difficulties. But
over all, I am convinced that, with the amendments proposed, the various groups
of parents, specialists, school boards, and the Minister will, in fact, go a
long way to make the structures proposed reflect the needs of students, their
parents and Québec society.
J'aimerais aussi souligner une autre chose très importante dans
ce projet de loi pour tout le milieu scolaire. Je sais qu'il est difficile
d'impliquer les parents dans la gérance d'une école, d'une
commission scolaire, mais c'est primordial. Ce projet de loi permet aux
structures de vraiment répondre aux besoins des parents et des
élèves, et je pense que ça va aussi permettre, avec de
l'imagination, de stimuler la participation des parents et de les impliquer
vraiment dans le milieu scolaire.
Pour ma part, j'espère que ce projet de loi fournira à
tous les agents du monde de l'éducation un cadre de gestion et de
référence idéal pour toutes les années à
venir et, surtout, qui tiendra compte des développements dans les
communautés linguistiques au Québec.
Le projet de loi 107 m'apparaît tout à fait conforme aux
grandes tendances qui se profileront au sein de notre société
dans les années à venir et pave la voie à une
qualité de vie de l'éducation au Québec. Dans l'ensemble,
l'essentiel de l'objectif est atteint. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président: M. le leader du gouvernement.
M. Gratton: Après consultation avec l'Opposition, M. le
Président, je proposerais à ce moment-ci que nous ajournions le
débat et que nous suspendions nos travaux jusqu'à 20 heures.
Le Vice-Président: Est-ce que la motion d'ajournement du
débat est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté. Suivant la demande et le
consentement des deux partis en cette Chambre, nous allons suspendre nos
travaux qui reprendront ce soir à 20 heures.
(Suspension de la séance à 17 h 32)
(Reprise à 20 h 5)
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît!
Veuillez vous asseoir, nous allons reprendre nos travaux. M. le leader
adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je vous demanderais
d'appeler l'article 13 du feuilleton, s'il vous plaît.
La Vice-Présidente: À l'article 13, il s'agit de la
reprise du débat concernant l'adoption du principe du projet de loi 107,
Loi sur l'instruction publique. Là-dessus, je suis prête à
reconnaître la prochaine intervenante, Mme la députée de
Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, Mme la Présidente. C'est avec plaisir
que j'interviens à la fin, je pense, de l'étude que mène
l'Assemblée nationale en deuxième lecture sur le projet de loi
107. C'est avec énormément de modestie que j'entends faire cette
intervention. Vous savez sûrement combien mes responsabilités en
matière de main-d'oeuvre et de sécurité du revenu, de
condition féminine et de politique familiale exigent toute
l'énergie que je peux investir.
Je ne pouvais pas demeurer silencieuse à l'égard de ce
projet de loi. D'abord, je dois vous... Mme la Présidente, je
souhaiterais qu'il y ait un peu plus d'ordre dans la Chambre, s'il vous
plaît. Je souhaiterais qu'il y ait un peu plus d'ordre.
La Vice-Présidente: Mme la députée de
Maisonneuve, vous pouvez poursuivre.
Mme Harel: Je vous remercie. C'est un sujet extrêmement
important pour notre société et c'est malheureusement, dans une
sorte d'indifférence que ce débat se fait ici à
l'Assemblée. C'est un sujet extrêmement important et fondamental
et, finalement, c'est l'avenir de notre système d'éducation qui
est en cause. La question qui est posée est la suivante: Est-ce que ce
projet de loi est un recul ou un progrès?
Pour y répondre, j'ai voulu connaître les amendements que
le ministre entendait y apporter, étant convaincue, à la suite
des interventions qui se sont faites devant l'Assemblée et ayant eu
l'occasion d'en écouter quelques-unes dans les débats
télédiffusés, qu'il y avait des amendements qui
étaient déposés, puisque plusieurs députés
libéraux ministériels de cette Chambre avaient invoqué ces
amendements pour justifier la bonification du projet de loi qui est devant nous
et pour en souhaiter l'adoption, jusqu'à ce que je me rende compte que
d'amendement, il n'y en avait point de déposé. Les
députés libéraux qui les applaudissaient ne les
connaissaient pas encore puisqu'ils soutenaient, appuyaient des amendements qui
allaient tout prochainement être connus. Je trouvais que c'était
là un acte de foi qui était un peu exces- sif en regard de ce
qu'on attend d'un parlementaire, habituellement.
Je conçois que pour certains députés
ministériels, le ministre de l'Éducation soit un ministre auquel
ils accordent entièrement confiance, mais je pense qu'ils auraient
intérêt à exiger, comme la fait l'Opposition, que les
amendements soient déposés au moment même où nous
discutons du principe du projet de loi. C'est fondamental parce que ce projet
de loi porte sur une question qui est attendue par la population, celle des
changements profonds que réclame l'école québécoise
à l'aube de l'an 2000.
Il y a quatorze ans de cela maintenant, j'étais moi-même
très engagée dans le réseau montréalais en faveur
d'une réforme de nos structures scolaires complètement
dépassées et en faveur d'une restructuration des commissions
scolaires sur une base linguistique. Il y a maintenant bien longtemps, quatorze
ans, je me rappelle avoir animé des soirées d'information dans
les différents quartiers de Montréal pour transmettre de
l'information et faire comprendre à l'ensemble de nos concitoyens
l'importance de cet enjeu, l'importance de cette restructuration scolaire.
C'est avec énormément de regret que je me rendais compte que ce
changement, qui était le plus important, était sans doute celui
qui était le plus retardé puisque, contrairement à ce que
pouvait dire le ministre de l'Éducation dans son discours
prononcé en deuxième lecture ici même le 25 octobre
dernier, malheureusement, il ne s'agit pas d'un projet de loi qui remplace les
commissions scolaires fondées sur (a confession-nalité pour y
introduire des commissions scolaires fondées sur l'appartenance
linguistique.
Finalement, c'est un projet de loi qui ne remplace pas, mais qui ajoute
aux commissions scolaires déjà existantes des commissions
scolaires linguistiques. Sur le territoire de IHe de Montréal, il faut
voir que c'est une sorte de cacophonie à laquelle on pourra assister
dans les années qui viennent. C'est avec inquiétude que je me
rends compte qu'on va à nouveau mettre les difficultés en dessous
du tapis plutôt que de le secouer, comme il aurait certainement
été souhaitable de le faire à ce moment-ci de notre
histoire, où nous avons un défi à relever qui est celui de
l'intégration des nouveaux arrivants. Je parle en connaissance de cause,
puisque, sur l'île de Montréal, 92 % des nouveaux arrivants
s'installent sur une superficie qui est l'équivalent du territoire du
Luxembourg. Il est évident qu'on a un grand pays à bâtir,
mais quand on constate que ceux et celles qui nous adoptent et qui souhaitent
vivre avec nous dans notre société le font essentiellement,
à 92 %, sur le territoire de l'île de Montréal, c'est
justement sur ce territoire que les problèmes vont continuer à se
renforcer, Mme la Présidente, parce que, essentiellement, contrairement
à nos voisins américains qui ont choisi, il y a maintenant 20 ans
de cela, la voie de l'intégration des différentes
communautés... Et vous vous rappelez certainement
ce que cela a pu créer d'effervescence et d1
ebullition dans la société américaine, ce qu'on a
appelé le "bossing" pour favoriser le brassage des communautés
raciales et pour le favoriser de telle sorte que l'école vienne à
être le ferment de l'intégration et de la promotion de
l'intégration de tous au sein de la société.
Il faut comprendre que la voie choisie est malheureusement celle, au
contraire, où chaque communauté pourra se protéger l'une
contre l'autre en fuyant le contact de l'une à l'autre, et se
réfugier dans sa propre communauté sans s'exposer au défi,
au pari, à l'enjeu fondamental de la cohésion multlculturelle et
multiconfession-nelle. C'est évident, Mme la Présidente, que je
suis déçue que nous allions consacrer le statu quo avec le projet
de loi 107. On me dira qu'il y aura des changements dans les régions
scolaires autres que sur l'île de Montréal, mais je pense bien
qu'aucun esprit avisé de cette Assemblée ne peut prétendre
que c'est à Montréal d'abord que cela aurait dû commencer.
Et c'est certainement une sorte de démission devant cette
difficulté qu'est l'article 93 de l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique, une difficulté de taille à laquelle un grand nombre
de gouvernements se sont butés, une difficulté incontournable
qu'il faut affronter comme société si on veut évoluer.
Malheureusement, Mme la Présidente, le choix a été
d'essayer de dissimuler cette difficulté, et de la dissimuler de
façon telle qu'on va se retrouver dans une sorte de consécration
du statu quo où, finalement, les communautés linguistiques, les
communautés ethniques vont même pouvoir invoquer des questions
confessionnelles pour, chacune d'entre elles, se réfugier dans leur
propre identité et pour, sans doute, refuser, comme je le soulignais
tantôt, le pari certainement le plus stimulant pour une
société, qui est celui du multiculturalisme et du
multiconfessionnalisme.
Au moment où l'on se parle, à Montréal, cinq
systèmes scolaires transportent les enfants d'âge primaire comme
d'âge secondaire, un système confessionnel anglo-catholique et
franco-catholique, un système confessionnel anglo-protestant et
franco-protestant et un système privé, un secteur privé
qui vient s'ajouter aux quatre autres et qui transporte à travers un
réseau de quartiers, des enfants d'un quartier à l'autre. C'est
finalement, Mme la Présidente, non pas une correction majeure qui sera
apportée à cet état, à cette réalité,
mais encore là faut-il, sans être pessimiste, dessiner une
multiplication de ces réseaux parallèles, de ces solitudes qui
viendront s'additionner pour, malheureusement, composer une
société québécoise qui, pour plusieurs, devient de
plus en plus en voie de désintégration.
Les dispositions du projet de loi 107 vont donc maintenir ces
commissions scolaires confessionnelles. Éventuellement, le droit
à la dissidence pourra être invoqué pour,
théoriquement tout au moins, voir venir la mise en place d'un secteur
neutre. C'est évidemment extrêmement décevant de penser que
la vision que nous avons, le projet que nous avons comme société
est finalement un projet d'isolement. J'y suis très sensible, je suis
convaincue qu'il aurait fallu résolument adopter une voie
différente et qu'il aurait fallu résolument s'engager dans la
remise en cause de ce qui est littéralement une arme contre le
développement d'une société québécoise
culturellement harmonieuse. Je parle de l'article 93 de l'Acte de
l'Amérique du Nord britannique.
Je lisais avec plaisir les propos que tenait l'Alliance des professeurs
de Montréal devant la commission parlementaire, propos auxquels je
souscris, à savoir que les opposants à une véritable
restructuration avaient entre leurs mains une arme puissante, l'article 93, et
que le gouvernement du Québec se résignait, à toutes fins
utiles, à laisser les structures scolaires montréalaises dans
l'état où elles étaient. Malheureusement, le gouvernement
abdique ses responsabilités à l'égard de privilèges
qui freinent ce développement harmonieux qui n'est pas un projet auquel
nous pouvons croire avec l'adoption du projet de loi 107.
Je pense qu'il est extrêmement regrettable à ce moment-ci
de notre histoire qu'à défaut de viser mieux, le ministre nous
éloigne de ce que l'on peut souhaiter comme un objectif de
société en nous consolidant dans des dispositions qui isoleront
certainement les communautés les unes par rapport aux autres.
J'ai également pris connaissance, Mme la Présidente, de
quelques-unes des dispositions du projet de loi qui me semblent
particulièrement faibles en matière des défis nouveaux. Je
veux parler de la formation des adultes. Je crois que nous avons un enjeu de
taille à relever comme société au moment où nous
comptons parmi nous un nombre impressionnant de personnes, au moment où
les nouvelles technologies deviennent des réalités de tous les
jours, un nombre grandissant de personnes qui ont des difficultés
simplement à lire ou écrire et qui se révèlent des
analphabètes fonctionnels, c'est-à-dire des personnes qui, pour
l'usage courant, ont de grandes difficultés à manoeuvrer avec les
journaux, avec les informations écrites, les formulaires d'emploi et les
curriculum qu'ils doivent remplir. (20 h 20)
Avec le projet de libre-échange, comme société plus
que jamais exposée à la concurrence internationale, en
particulier à celle de nos voisins, nous avons un immense défi de
recyclage et de formation professionnelle à relever. Ce défi est
aussi celui d'une bonne formation générale, et les restrictions
apportées à la gratuité pour les adultes me semblent,
d'une certaine façon, compromettre ce projet auquel nous pouvons appeler
l'ensemble de nos concitoyens, projet d'une formation continue et
permanente.
J'aimerais également souligner la disparition de l'obligation
faite aux commissions scolaires de
fournir des services de garde. Au moment où 65 % des femmes de
moins de 35 ans, en âge de procréer, sont sur le marché du
travail, il est pourtant évident que ces services de garde scolaires
sont non seulement indispensables durant le calendrier scolaire, mais tout
aussi indispensables comme services continus pour permettre cette
responsabilité accrue qu'ont dorénavant les femmes dans la double
tâche parentale, et celle de gagner simplement leur vie et souvent celle
des enfants dont elles ont la charge.
J'aimerais également souligner, Mme la Présidente - je
crois qu'on l'a fait, mais, pour moi, c'est extrêmement important - cette
dimension que l'on ne retrouve plus dans le projet de loi 107, qui était
un élément positif des dispositions du projet de loi 3
déposé par le précédent gouvernement et qui
permettait la reconnaissance, pour les parents et pour les
élèves, du droit de recourir au Protecteur du citoyen. Il
m'apparaH important que l'on reconnaisse que l'éducation est aussi un
droit qui peut être mis en échec, à l'occasion, par
certaines pratiques et qui peut donner lieu à un arbitrage de quelqu'un
reconnu et sanctionné par l'ensemble de l'Assemblée comme
étant au-dessus du pouvoir exécutif. Cela m'aurait semblé
extrêmement pertinent, surtout au moment où le ministre utilise
abondamment la formule de la dérogation. Je pense en particulier
à l'âge d'admission, je pense au secteur privé. Je me
rappelais un texte d'un vieux professeur juriste qui disait qu'à moins
de se prendre pour saint Louis, il ne fallait surtout pas, lorsqu'on devenait
parlementaire, que l'on pense que l'équité valait mieux que la
loi, que la loi en tout, à moins qu'on soit saint Louis et qu'on puisse
juger comme un saint en équité, mais que la loi et le
règlement en tout assuraient une plus grande égalité entre
les citoyens.
Je sais que ce n'est pas l'opinion partagée par le ministre de
l'Éducation, mais je le mets en garde de penser que juger en
équité quand on n'a pas les pouvoirs d'un saint ou d'un roi est
meilleur que de faire réglementer les dispositions ouvertes à
l'ensemble des citoyens.
Mme la Présidente, ce soir je voulais surtout vous souligner
quelques difficultés majeures qui m'amènent à croire que
nous sommes malheureusement loin d'une vision réformatrice dont nous
avons pourtant tant besoin en matière d'éducation. Je vous
remercie.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de
Maisonneuve. Je vais maintenant reconnaître M. le député de
Richmond et whip du gouvernement.
M. Yvon Vallières
M. Vallières: Merci, Mme la Présidente. Pour bien
comprendre le contexte dans lequel est présenté ce projet de loi
107 intitulé Loi sur l'instruction publique, il faut accepter
l'idée que l'évolution linguistique et historique de
l'éducation au Québec nécessite un changement, à
l'aube des années quatre-vingt-dix.
Ainsi, lorsqu'il a jugé opportun de présenter une
législation sur la confessionalité des écoles au
Québec, le gouvernement québécois a pris en
considération un certain nombre d'éléments qui tenaient
compte de l'évolution de l'éducation au Québec aussi bien
que des tendances linguistiques, religieuses ou morales dans les années
à venir.
Il faut également comprendre qu'au fil des années s'est
tissée, sur l'ensemble du territoire québécois, une
situation sociolinguistique qui fait en sorte qu'une modernisation s'impose
aujourd'hui.
Rappelons-nous qu'hier les débats entourant le système
d'éducation ne portaient pas du tout sur les mêmes
nécessités. Il s'agissait davantage de répondre à
une marée montante de clientèle scolaire qui, entre 1945 et 1960
est passée de 728 000 à 1 300 000 de l'école primaire
à l'université, soit une expansion sans précédent
au Québec. La province était alors confrontée à un
problème d'insuffisance d'équipements. On note également
qu'il s'agissait, majoritairement, d'écoles de rang où
l'institutrice s'adressait en même temps aux enfants de tous les
niveaux.
Aux niveaux primaire et secondaire publics, ce sont les commissions
scolaires qui assument la plus grande partie des dépenses. L'État
participe au financement des autres types d'institutions gouvernementales ou
privées. Malgré la hausse des dépenses allouées
à l'éducation entre les années cinquante et soixante, les
commissions scolaires font face à un sous-financement et certaines
d'entre elles sont lourdement endettées.
Des lois sont venues s'ajouter afin d'assurer un financement
adéquat aux commissions scolaires et même, une d'entre elles
autorisait certaines commissions scolaires à prélever une taxe de
vente sur leur territoire. Ce n'est que graduellement que l'État a pris
de plus en plus de place dans le monde de l'éducation au Québec
puisque ce rôle était assumé en grande partie par le
clergé.
Dans le sillon des années de la Révolution tranquille, on
assiste à une mutation des grandes valeurs jusqu'ici
véhiculées au Québec ou ailleurs en Amérique du
Nord. Le rôle de l'Église s'estompe graduellement, tout en
conservant un pouvoir certain, au point d'influencer les grandes orientations
des commissions scolaires.
La décennie 1970 confirme cette tendance au niveau de l'influence
de l'Église, puisqu'elle s'ouvre sous le signe d'un
désintéressement grandissant et ce, à tous les niveaux:
recrutement des membres du clergé, départ des prêtres,
religieux et religieuses et baisse généralisée de la
pratique. Cependant, dans la société, l'Église conserve
malgré tout une influence importante. Dans l'enseignement, on
s'aperçoit que toutes les réformes doivent faire l'objet de
négociations
entre le gouvernement et les différentes hiérarchies du
monde scolaire au cours des années soixante-dix.
Depuis quelques années déjà, les débats
portent davantage sur l'accessibilité à l'éducation car il
est manifeste que la société québécoise
désire d'abord et avant tout que la garde montante possède des
atouts de qualité maximale afin de faire face à la vie. En 1964
naît le ministère de l'Éducation, mais la confessionnal
ité du système public est assurée par diverses mesures
comme la nomination de sous-ministres associés de foi catholique et
protestante et la création des comités catholique et protestant
dotés de pouvoirs de contrôle au sein du Conseil supérieur
de l'éducation. Depuis, on s'entend à peu près dans tous
les milieux pour affirmer que les dimensions linguistique et religieuse de
l'éducation deviennent aussi, au cours des années soixante-dix,
des enjeux majeurs. Les lois 63, 22 et 101 se répercutent directement
sur l'école et mobilisent une partie de la population.
L'objet de ce débat porte presque essentiellement sur la
restructuration des commissions scolaires dont l'existence est fondée
sur la confessionnalité. Le problème se pose avec acuité
dans la région de Montréal, entre autres, où, selon
certains, la rigidité des structures confessionnelles répond
difficilement aux besoins d'une population diversifiée tant sur le plan
ethnique et linguistique que religieux. D'autres sont d'avis contraire,
affirmant plutôt que les structures confessionnelles correspondent
toujours aux réalités d'aujourd'hui et de demain.
Toujours dans les années soixante-dix, deux solutions sont alors
proposées. D'une part, on pourrait créer des commissions
scolaires unifiées, d'autre part, on pourrait répartir les
commissions scolaires selon la langue. Dans l'un et l'autre cas, les
commissions scolaires administreraient à la fois les écoles
catholiques, protestantes et neutres. Depuis ce temps, la société
québécoise a assisté à plusieurs tentatives des
gouvernements successifs pour régler ces dossiers qui se heurtent
à l'opposition des commissions scolaires en pjace et à celle de
plusieurs groupes de pressions. C'est là que nous en sommes aujourd'hui
et la position de notre gouvernement veut en être une de consensus. (20 h
30)
Malgré l'imposition de l'article 93 de la constitution de 1867,
les gouvernements n'en sont arrivés, jusqu'à maintenant,
qu'à réduire le nombre de commissions scolaires et à
créer, en 1972, le Conseil scolaire de l'île de Montréal
auquel on confie certaines tâches limitées de coordination.
D'autres aspects des réformes envisagées par le
passé concernaient des volets différents du système de
l'éducation, comme le financement où le gouvernement joue et
jouera toujours un rôle important en versant aux commissions scolaires
une part considérable de leur budget.
Ce court rappel historique, Mme la Prési- dente, m'amène
à considérer un élément important dans ce
débat de société qui s'est déroulé sur la
vaste et complexe question de l'éducation au Québec, dont celle
de la confessionnalité. Le projet de loi 107 offre l'avantage de
respecter le choix des parents à faire éduquer leurs enfants
selon leurs croyances religieuses ou selon les valeurs morales auxquelles ils
adhèrent. Rappelons que c'est le 15 décembre dernier que le
ministre de l'Éducation déposait en cette Chambre le projet de
loi en annonçant son intention de créer des commissions scolaires
linguistiques sur tout le territoire du Québec, sauf à
Montréal et à Québec. Ce projet de loi s'inscrit à
la suite du projet de loi 3, présenté en 1984, qui avait fait
l'objet de débats et d'audiences publiques à l'Assemblée
nationale. Cependant, le projet de loi 107 préconise une approche plus
progressiste qui tente d'harmoniser les positions et les attentes parfois
opposées des parents d'élèves. Ainsi, il prévoit la
création de commissions scolaires linguistiques françaises et
anglaises, au lieu de commissions scolaires confessionnelles catholiques et
protestantes actuelles.
En vertu de ce projet de loi. cependant, la CECM et la CEPGM voient leur
existence assurée. De plus, le ministre s'engage à ne rien faire
avant d'avoir obtenu l'avis de la Cour suprême du Canada sur les pouvoirs
du gouvernement québécois sur ces questions.
Un des avantages majeurs du projet de loi 107 repose sur le fait que la
création de commissions scolaires linguistiques devrait permettre
à chaque communauté linguistique de regrouper tous ses effectifs
scolaires sous une direction unifiée, émanant directement
d'elle-même.
En ce qui a trait aux réactions du milieu, j'aurai noté
qu'avant même le dépôt du projet de loi 107, un consensus
semblait s'établir, voulant que cette question de commissions scolaires
linguistiques soulève un véritable débat, mais on estimait
que notre société se reconnaît de moins en moins dans les
structures confessionnelles, même quand elles défendent des
valeurs religieuses.
Dans le quotidien La Presse du 7 décembre 1987, un
éditorialiste avançait l'idée qu'on se convaincra que
même l'école confessionnelle n'a pas besoin d'une commission
scolaire confessionnelle, pas plus qu'un ministère confessionnel, pour
exister. On peut, bien sûr, apporter plusieurs nuances à une telle
affirmation, mais 1 reste néanmoins que les structures
véhiculées jusqu'à maintenant nécessitaient un
réaménagement qui soit plus conforme à la
réalité linguistique du Québec.
À l'autre extrémité, on y retrouve des opinions
contraires, telle celle de la Fédération des commissions
scolaires catholiques du Québec, qui a mis en garde le ministre de
l'Éducation contre la tentation qu'il aurait de céder à un
plus grand interventionnisme à l'endroit des commissions scolaires. La
fédération désire que
les commissions scolaires conservent le pouvoir de gérer
elles-mêmes les budgets qui leur appartiennent en propre.
Depuis ces réactions, le ministre de l'Éducation a
apporté plusieurs amendements sur lesquels je m'attarderai pendant
quelques minutes.
D'abord, à l'occasion de l'ouverture du présent
débat sur l'adoption de principe du projet de loi 107, le ministre de
l'Éducation a proposé plusieurs modifications touchant
l'éducation, les missions et les structures de l'école, la
confessionnal ité scolaire, les missions et les attributions des
commissions scolaires, ainsi que le rôle des attributions du gouvernement
et du ministre de l'Éducation.
Par exemple, le droit de vote de la version originale du projet de loi
107 accordé aux représentants des parents à la table des
commissaires sera retiré. Seuls pourront voter aux réunions des
commissaires les membres réguliers élus au suffrage universel par
la population.
En second lieu, le pouvoir que se voyait attribuer le ministre de
l'Éducation de suspendre l'application d'une décision de
commission scolaire ayant donné lieu à une enquête est
aboli. Telle était l'une des revendications entendues dans le cadre des
audiences publiques sur ce sujet.
En troisième lieu, le ministre indiquait, au niveau de la
commission scolaire, que la formation d'un comité exécutif sera
obligatoire. De plus, il ne sera pas nécessaire que les décisions
du comité exécutif soient entérinées par le conseil
des commissaires. En outre, le ministre de l'Éducation annonçait
que l'obligation faite aux commissions scolaires de procéder par voie de
réglementation dans différents domaines serait
considérablement allégée.
En ce qui a trait à la représentation de la
minorité linguistique au sein de la commission scolaire, là
où elle sera justifiée par le nombre, elle sera assurée,
non plus par la création d'un district électoral superposé
au district ordinaire, mais plutôt par l'addition de commissaires parents
ayant le même statut que les autres commissaires représentant les
parents.
Pour ce qui est de l'école, le ministre de l'Éducation a
annoncé qu'une modification du projet de loi 107 viserait à
rendre le comité d'école obligatoire. Voilà qui assurera
un élément supplémentaire de l'autonomie de
l'école.
Au chapitre de la confessionnalité, le pouvoir d'approbation des
programmes, des manuels et du matériel didactique des comités
confessionnels du Conseil supérieur de l'éducation ne
s'appliquera plus à l'avenir qu'aux programmes, aux manuels et au
matériel didactique concernant l'enseignement moral et religieux,
catholique et protestant. Pour le reste, le ministre indiquait que le
rôle des comités confessionnels se limitera à soumettre les
recommandations qu'ils jugeront appropriées.
En ce qui a trait à l'accessibilité aux services
éducatifs pour les adultes, le ministre annonçait que des centres
habilités à offrir ces services seront établis et reconnus
exclusivement à cette fin dans le texte législatif.
Telles sont les principales modifications apportées par le
ministre en vue d'assurer une cohérence dans la loi, laquelle permettra
de répondre à la plus grande partie des recommandations soumises
en audience publique, tout en respectant l'esprit et la lettre du projet de loi
107, lequel correspond même au Québec d'aujourd'hui et de
demain.
Mme la Présidente, cette question de la confessionnalité
des écoles a aussi fait l'objet de délibérations au sein
de notre formation politique. À titre d'exemple, je ne citerai que la
tenue du conseil général en juin 1985, à l'issue duquel
les militants de notre formation avaient adopté plusieurs
résolutions visant à assurer la qualité de l'enseignement
au Québec, et ce, tant aux niveaux primaire et secondaire que
postsecondaire et universitaire.
Sur la question plus spécifique de la confessionnalité des
écoles, les résolutions adoptées furent suivies à
la lettre, dans le sens que le projet de loi 107, qui nous est soumis
aujourd'hui, répond aux attentes alors exprimées en
congrès. Nous y retrouvons par exemple l'essentiel d'une
résolution du congrès de juin 1985, laquelle stipulait, au sujet
de la confessionnalité des écoles, qu'il fallait aménager
l'école de manière qu'elle réponde aux attentes des
parents et des élèves, au point de vue religieux et moral.
À cette fin, proposait-on de faire en sorte que les parents puissent
inscrire leurs enfants à des écoles confessionnelles ou à
des écoles non confessionnelles, suivant leur choix. De plus, il fallait
faire en sorte que, dans tous les cas, l'élève ait la
possibilité de choisir entre un enseignement religieux et moral
confessionnel ou l'enseignement moral laïque.
À ce même congrès, une autre résolution
concernait essentiellement le partage des responsabilités et des
méthodes de gestion des commissions scolaires. Dans cette
résolution, il était précisé "qu'un gouvernement
libéral verrait au respect des droits constitutionnels et existants, et
des exigences légitimes des familles religieuses concernées, que
les commissions scolaires seraient regroupées à travers le
territoire québécois en deux réseaux linguistiques
autonomes, un réseau de commissions scolaires de langue française
et un réseau de commissions scolaires de langue anglaise". On
précisait également "qu'aucun réaménagement dans
les territoires scolaires de Montréal et de Québec n'aurait lieu
tant que les causes pendantes devant les tribunaux n'auraient pas
été réglées de manière définitive ou
qu'une entente négociée n'aurait pas été conclue
avec les commissions scolaires concernées".
Dans la situation présente, le gouvernement du Québec
préfère proposer à ce stade-ci de l'histoire de
l'éducation, un système dit linguis-
tique plutôt qu'une commission scolaire unifiée. Il reste
à souhaiter que les deux groupes linguistiques vivront de façon
harmonieuse dans l'une et l'autre de leur communauté, en fonction de la
marge de manoeuvre que prévoit le projet de loi 107, tant sur le point
de vue administratif que sur le point de vue des stratégies de gestion
en général. Mais, de toute évidence, il fallait que le
gouvernement en vienne à une décision pour qu'évolue le
système actuel des commissions scolaires tel que nous l'avons
vécu depuis les tout débuts.
Enfin, l'un des points qui a souvent agacé les commissions
scolaires concerne la structure d'autorité en place. Le gouvernement
désire, comme l'a démontré le ministre de
l'Éducation, que la structure d'autorité bipolaire, qui a depuis
longtemps caractérisé notre régime scolaire, devienne une
structure qui assure un rôle important aux commissions scolaires et qui
réserve également un rôle essentiel de direction
générale du système d'enseignement au gouvernement et au
ministre de l'Éducation. En vertu de ce projet de loi, le gouvernement
du Québec a réussi a créer un équilibre qui
n'existait pas dans le passé et qui permettra aux commissions scolaires
de gérer un véritable gouvernement autonome et au ministre de
l'Éducation d'agir de façon adéquate et pertinente dans le
dossier. Le gouvernement a fait en sorte de conserver aux commissions scolaires
et au ministre de l'Éducation leur propre niveau de compétence et
s'est assuré que chacun de ces deux intervenants ait un rôle clair
à jouer dans l'avenir. (20 h 40)
Ce concept d'équilibre qui, d'ailleurs, régira l'ensemble
des intervenants dans le domaine scolaire m'apparait essentiel pour la survie
et le développement des commissions scolaires au Québec. En bout
de piste, il devient impérieux que l'élève y trouve son
compte dans le sens d'un enseignement de qualité et d'une formation
adéquate lui permettant de tracer les voies de son avenir. En
définitive, on constate qu'un projet de société de la
sorte en matière d'éducation constitue un aboutissement heureux
et conséquent. Gardons à l'esprit, Mme la Présidente, que
l'existence et la gestion du réseau des commissions scolaires au
Québec ont dû être pensées pour et par l'enfant.
Comme on l'a vu précédemment, c'est dans la foulée
d'une scolarisation massive des Québécois et la laïcisation
de nombreuses fonctions scolaires que les commissions scolaires furent mises
sur pied. Parallèlement, nous assistons à une prise en charge par
l'État des espaces libérés par le clergé dans des
domaines stratégiques comme l'éducation. Pour bien saisir la
portée du projet de loi 107, on doit également prendre en
considération la situation sociolin-guistique, ainsi que comprendre la
structure des valeurs auxquelles adhère la population, valeurs
nécessairement différentes par rapport aux 25 ou 30
dernières années.
Sur le plan de la gestion, et ce, en incluant les modifications
apportées par le ministre, le projet de loi 107 doit se comprendre
à partir de quatre caractéristiques qui modernisent l'instruction
publique au Québec: 1° les pouvoirs et les responsabilités de
la direction de l'école sont clairement affirmées; 2° les
enseignants se voient attribuer des droits et des devoirs qui n'avaient jamais
été inscrits explicitement jusqu'à ce jour dans notre
Législature; 3° les parents reçoivent l'assurance qu'ils
pourront participer directement à la vie de l'école par
l'intermédiaire du comité d'école et du conseil
d'orientation; 4° les autres personnels se voient également garantir
une représentation au sein du conseil d'orientation.
En outre, le projet éducatif intégrera les enfants dans
des orientations et des valeurs auxquelles ils croient, dans le respect des
droits de l'individu. De plus, le caractère confessionnel de
l'école ne pourra être acquis qu'à l'issue d'une
consultation sérieuse auprès des parents concernés, et
devra faire l'objet d'une vérification périodique au moins tous
les cinq ans.
Mme la Présidente, d'emblée, nous sommes convaincus que
l'ensemble de la population estime essentiel un excellent réseau
d'éducation au Québec. Il le sera dans la mesure où nous
en accepterons les différents changements qui marquent
l'évolution du Québec dans son ensemble.
C'est ainsi qu'en termes d'évolution, on constate que notre
société évolue en conformité de la distinction
qu'on lui reconnaît partout au Canada. Par exemple, vu sous l'angle de la
langue d'enseignement, on constate que le nombre des élèves
inscrits en enseignement en français représente 89,8 % du total
des inscriptions contre 85,4 % cinq ans plus tôt.
Bien que coûteux dans une société aussi moderne que
la nôtre, on peut avancer l'idée que notre collectivité
accepte sans réticence d'assumer le prix de la qualité de
l'enseignement au Québec. Le coût est actuellement
évalué par le ministère de l'Éducation à
environ 5000 $ par élève.
Par le biais de subventions et/ou de paiements de transferts,
l'État québécois joue un rôle stratégique en
matière d'éducation. Aussi, il lui revient d'assurer un
système cohérent et conforme à une société
moderne et dotée d'une culture qui lui est propre. Je suis convaincu que
le projet de loi 107 offrira à la commission scolaire un encadrement qui
tende vers l'idéal, tant sur le plan des ressources humaines que
matérielles et financières qui, en bout de piste, faciliteront
l'apprentissage afin que l'éducation soit véritablement au
service de l'enfant.
En dernier lieu, Mme la Présidente, et en terminant, ce projet de
loi 107 n'a pas pour but de nier le passé en matière
d'éducation au Québec. Le gouvernement québécois
n'est pas prêt à priver de ses droits une partie de la population
qui tient à conserver les acquis du
système confessionnel puisque la loi le permettra toujours, selon
des conditions préalablement établies.
Depuis le milieu des années soixante, le débat portant sur
la confessionnalité n'a cessé d'évoluer. On pourra relire
à ce sujet l'excellent contenu du rapport Parent qui renferme un
chapitre complet sur cette question et propose un aménagement dans le
sens de l'acceptation de la diversité religieuse. Le gouvernement du
Québec présente aujourd'hui un aménagement moderne et
cohérent dans le but avoué de satisfaire l'ensemble des agents du
secteur de l'éducation. Il en va, Mme la Présidente, d'une
meilleure maîtrise de notre avenir collectif, et je vous remercie.
La Vice-Présidente: Merci, M. le député
de
Richmond et whip du gouvernement. Je vais maintenant reconnaître
Mme la députée de Chicoutimi.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, Mme la Présidente. Je ne puis
m'empêcher, avant de commencer à commenter le projet de loi, de
relever quelques remarques du député de Richmond. Je remarquais
le sourire en coin du ministre et ça se comprenait bien lorsqu'on a
assisté aux travaux de la commission parlementaire. Lorsque le
député de Richmond dit que l'un des avantages les plus
remarquables du projet de loi, c'est la création de commissions
scolaires linguistiques, ce qu'on peut lui concéder, c'est qu'il ne dit
pas en même temps que ces commissions scolaires linguistiques ne
s'appliquent pas précisément où il y a problème au
Québec, c'est-à-dire dans les grandes régions de
Montréal et de Québec.
Il ajoutait également que ce projet de loi, c'était un
aménagement moderne qui s'adaptait à la situation d'aujourd'hui
et qui permettait un réel choix des parents quant à la
confessionnalité. Mme la Présidente, je vais dire des choses qui
ont été longuement dites et sur lesquelles on a longuement
disserté, ici comme en commission parlementaire. On ne règle en
rien la situation de la confessionnalité, des écoles
confessionnelles dans la grande région de Montréal, là
où, je le rappelle, existent les plus grands problèmes.
Le projet de loi 107 constitue un net recul par rapport au projet et
à la loi 3. Mme la Présidente, je me permets de relever une
phrase du mémoire de l'Association des institutions d'enseignement
secondaire privées. On ne dira pas que cette association a
particulièrement été favorable à l'endroit du
gouvernement du Parti québécois, comme je dois dire que le
gouvernement du Parti québécois n'a pas été
très ouvert, non plus, à l'endroit de ces écoles.
Pourtant, l'Association des institutions d'enseignement secondaire
privées dit, en parlant du projet de loi, et je cite: "Le projet de loi
107 accentue cette méfiance de l'État à l'endroit de ses
partenaires. Il accroît les pouvoirs discrétionnaires du ministre.
Il ajoute aux multiples normes existantes de nouvelles exigences
d'autorisations ministérielles. Il confirme le statut univoque de
l'école dont l'essentiel est décidé par l'État et
le ministre et le statut d'école gouvernementale et non communautaire et
responsable. "Le projet de loi 3 du précédent gouvernement visait
une plus grande responsabilisation de l'école. Le projet de loi 107
marque, sur ce point, un net recul." Je rappelle que ces propos sont tenus par
les représentants de l'Association des institutions d'enseignement
secondaire privées. On ne peut pas prétendre que cette
association ait un préjugé autrement développé
à l'endroit du secteur public et ses propos méritent qu'on s'y
arrête parce qu'ils sont sous le couvert de la totale liberté de
pensée. Je pense qu'à ce titre, ils sont crédibles.
L'actuel projet de loi qui est sur la table, le projet de loi 107,
comporte évidemment certaines améliorations en regard de la
vieille Loi sur l'instruction publique, mais, par rapport à la loi 3, il
s'agit, en effet, d'un net recul. Il faut se rappeler que la loi 3, qui est
venue après la loi 40, avait été le fruit d'un consensus
assez général entre les différents partenaires, ce qui
n'est pas le cas, est-il utile de le rappeler, en ce qui concerne les projets
de loi 107 et 106. Le projet de loi de l'actuel ministre de l'Éducation
consacre un net rétrécissement des droits des
élèves en matière de recours, d'association,
d'accès aux services éducatifs, comme if consacre le
rétrécissement des droits des adultes en matière de
gratuité, le rétrécissement des droits des
élèves handicapés ou en difficulté d'adaptation sur
le plan de l'intégration, le rétrécissement des droits des
enseignants sur le plan pédagogique, le rétrécissement des
droits des parents au chapitre des mécanismes de participation aux
activités scolaires comme des services de garde. En même temps que
le ministre diminue les droits des différents partenaires, il diminue
ses propres obligations et il se donne de nouveaux pouvoirs. (20 h 50)
Le ministre, par son projet de loi 107, porte sérieusement
atteinte à tout ce qui a constitué la pierre d'assise de notre
système d'éducation, c'est-à-dire l'accessibilité.
Le projet de loi 107 en la matière réduit l'accessibilité
des jeunes aux services éducatifs.
Dans le projet de loi 3, le législateur avait cru utile de
définir ce qu'étaient les services éducatifs de
manière que tout élève au Québec, dans quelque
commission scolaire que ce soit, puisse être assuré d'avoir les
mêmes services. Que vous soyez dans la commission scolaire de Chicoutimi
ou des Mille-Îles ou à la CECM, CECQ ou à Rimouski, La
Neigette, vous aviez droit aux mêmes services éducatifs. Pourtant,
ces services éducatifs dont on avait reconnu la pertinence de retrouver
la définition dans le projet de loi 3, le ministre n'a pas cru utile
de
les replacer dans le projet de loi 107. Qu'est-ce que ça veut
dire? Cela veut simplement dire que les commissions scolaires seront
laissées à elles-mêmes quant à la
nécessité ou à la possibilité d'offrir, par
exemple, des services de participation de l'élève à la vie
de l'école, des services de promotion des droits et
responsabilités de l'élève, notamment pour favoriser
l'exercice du droit d'association, des services d'encadrement et de
surveillance, des services d'orientation scolaire et professionnel, des
services de santé, des services sociaux, des services de placement. Nous
retrouvions dans le projet de loi 3 neuf services que les commissions scolaires
se voyaient dans l'obligation d'offrir où que ce soit sur le
territoire.
Vous me direz que ça n'empêchera pas les commissions
scolaires d'offrir ces services et vous avez raison. Cependant, compte tenu de
la conjoncture économique, des compressions budgétaires
auxquelles sont soumises les commissions scolaires, il y a gros à parier
que la tendance sera - ce qu'on connaît déjà actuellement -
de couper dans les différents services offerts aux étudiants.
Demain, on se retrouvera dans des écoles qui se contenteront
d'offrir exclusivement un service d'enseignement, sans ajouter à
ça tous les services additionnels ou complémentaires qui donnent
et qui font la qualité des services d'enseignement. Un
rétrécissement donc dans l'accessibilité par l'absence de
toute définition de services éducatifs complémentaires
à l'exception de deux touchant l'enseignement religieux et les enfants
handicapés. Rétrécissement également des droits
à l'accessibilité à des services éducatifs pour les
adultes.
Tous ceux qui sont en Chambre aujourd'hui et qui étaient en
Chambre au moment où on déposait le projet de loi 3 se
rappelleront les propos violents que tenait le ministre de l'Éducation
à l'endroit du projet de loi et du ministre qui portait ce projet de loi
parce que, disait-il, il n'assurait pas aux adultes les services
éducatifs auxquels ils avaient droit. Le ministre de l'Éducation
d'aujourd'hui, qui était alors critique de l'Opposition en
matière d'éducation, faisait de cette question - la
gratuité à l'éducation des adultes - une des raisons pour
justifier qu'il n'endossait pas le projet de loi.
Le projet de loi qu'il nous a déposé, contre toute
attente, et, d'ailleurs, je dois le dire, Mme la Présidente, cela a
été, à la grande déception de tous les intervenants
adultes du réseau scolaire, de voir que les propos du ministre ne
s'accordaient pas avec ses intentions une fois qu'il avait le pouvoir de mettre
en pratique les beaux propos qu'il tenait comme critique de l'Opposition...
En effet, en matière de gratuité à
l'éducation des adultes, il ne nous reste plus rien comparativement
à la loi 3. Il faut se rappeler que la loi 3 précisait que les
adultes avaient droit à des services éducatifs gratuits pour tous
les cours qui étaient crédités. Le critique de
l'Opposition d'alors disait: Cela n'est pas suffisant, H faudrait que les
adultes aient droit à la gratuité totale, y compris pour des
cours de formation personnelle, disait-il. Si quelqu'un veut aller chercher un
cours d'histoire ou de géographie, il a droit à sa formation
personnelle de niveau secondaire. Et il expliquait et justifiait ainsi le fait
qu'il n'adhérait pas au projet de loi 3. Il ajoutait: II faudrait que
ces adultes aient droit à des services éducatifs distincts.
Dans le projet de loi, Mme la Présidente, nous n'avons rien
à ce sujet. Il a, me dit-on, annoncé - pas déposé
parce que ça reste le secret du prince - quelques amendements, quelques
modifications à son projet de loi qui définiraient un peu
l'accessibilité, qui n'irait pas aussi loin que ce qu'il
réclamait dans le temps, et il s'en faut, et qui définiraient
qu'il y aurait des services, des centres d'éducation des adultes dans
les commissions scolaires. Mais avoir des centres d'éducation des
adultes dans les commissions scolaires ne garantit pas une approche
pédagogique différente selon que vous êtes étudiant
adulte ou jeune. Cela ne vous garantit pas dans l'école des services
éducatifs distincts. Tout au plus, ça vous garantit
l'accès à une porte pour entrer à l'école. Mais les
centres d'éducation des adultes ne seront pas assurés dans toutes
les commissions scolaires non plus, et ça, c'est un pouvoir que le
ministre s'est réservé.
Le projet de loi 107 vient donc réduire l'accès des
adultes à l'éducation au Québec. Il vient également
réduire l'accès des enfants handicapés à certains
services. La loi 3 prévoyait de façon claire que tous les enfants
handicapés, pour autant que leur intérêt était
préservé, devaient être en mesure de s'intégrer dans
des classes régulières, comme il reconnaissait que le plan
d'intervention aux fins d'intégration scolaire était conçu
en collaboration avec les différents partenaires. Tout ça est
disparu du projet de loi 107. Encore là, le ministre vient
réduire les droits des personnes handicapées à des
services réels et concrets qui correspondent mieux à leurs
besoins et à leur situation, et il s'assure ainsi de diminuer ses
obligations à l'endroit des enfants handicapés.
Le ministre vient également réduire les droits des
étudiants jeunes en matière de protection. La loi 3
prévoyait que l'enfant lésé dans ses droits pouvait
recourir au Protecteur du citoyen. À l'époque, différentes
hypothèses avaient été avancées. On avait le
protecteur de l'élève ou l'ombudsman ou encore, au minimum, le
droit de l'élève d'en appeler devant le Protecteur du citoyen.
Cet homme prétendument de justice qu'est le ministre de
l'Éducation n'a pas cru utile d'inscrire dans la loi ce droit
élémentaire de tout individu au Québec d'en appeler devant
le Protecteur du citoyen lorsqu'il estime que ses droits sont
lésés. C'est difficilement acceptable. Comme on comprend
difficilement que
le ministre n'ait pas consenti à ces jeunes ces droits qui nous
apparaissent, au Québec d'aujourd'hui, comme étant
élémentaires. Comment se fait-il que le ministre n'ait pas
reconnu ce droit pour les élèves, alors que, dans son projet de
loi, il reconnaissait au comité d'école et au comité de
parents le droit d'ester à l'endroit des commissions scolaires,
c'est-à-dire de poursuivre une commission scolaire qui ne respecterait
pas certains articles de la loi? Pourtant, ce qu'il reconnaissait à ces
comités d'école et de parents qui, au nom des parents et avec
l'argent des contribuables, pouvaient poursuivre une commission scolaire, il ne
le reconnaît pas aux élèves qui sont, quand on parle de
système d'éducation, me semble-t-il, les premiers
concernés. (21 heures)
À ma connaissance, le ministre n'est pas revenu sur cette
décision de reconnaître aux élèves du Québec
qui se sentiraient lésés dans leurs droits le droit de recourir
au Protecteur du citoyen. Il semble qu'il a l'intention de retirer les articles
touchant ie droit d'ester des différents comités. Je pense qu'il
y a réussi. Les différents intervenants ont réussi
à l'amener à la raison sur cette question qui me paraissait
élémentaire. Cela veut dire que si c'était maintenu dans
la loi, un comité d'école aurait pu, avec l'argent de la
commission scolaire, poursuivre la commission scolaire ou encore, avec l'argent
de l'aide juridique, poursuivre une commission scolaire. Cela commence à
faire un peu ridicule. Cela risquait de provoquer inutilement des tensions,
alors qu'on a besoin de beaucoup de concertation, de collaboration et de
coopération dans le réseau de l'éducation.
Lorsque le ministre pariait d'accessibilité, il incluait dans son
propos d'alors, je le rappelle, alors qu'il était critique en
matière d'éducation, la nécessité de
reconnaître dans la loi l'accès aux manuels scolaires. Non
seulement aux manuels scolaires, mais il disait également aux cahiers
d'exercices dans lesquels on écrit et on dessine. Avec le projet de loi
qu'on a sur la table, on est loin de ces belles intentions. On le prenait au
sérieux, voyez-vous. On le prenait au sérieux, avec ses belles
intentions et ses beaux propos de critique de l'Opposition, l'actuel ministre
de l'Éducation.
Le projet de loi 107 constitue un net recul par rapport au projet de loi
3. Je ne voudrais pas revenir sur l'aspect très centralisateur de ce
projet de loi autrement que pour dire qu'une des raisons, c'était la
deuxième raison qu'invoquait le critique de l'Opposition pour dire qu'il
n'adhérait pas au projet de loi 3. Il invoquait qu'il ne pouvait
agréer, adhérer au projet de loi, se sentir porteur ou
responsable ou entériner ce projet de loi qui venait, disait-il,
consacrer des pouvoirs accrus du ministre. Pourtant, Mme la Présidente,
le projet de loi 3 était largement plus décentralisateur que ne
l'est l'actuel projet de toi 107. Ce n'est pas moi qui le dis. Ce sont tous les
intervenants en commission parlemen- taire, à l'exception des directeurs
d'école qui, eux, n'ont pas examiné le projet de loi dans son
ensemble. Les directeurs d'école se sont contentés d'examiner le
projet de loi sous l'angle des pouvoirs qui leur étaient impartis en
vertu des articles touchant les écoles. A l'exception de cet organisme,
la très grande majorité des intervenants sont venus
dénoncer la trop grande centralisation de ce projet de loi qui vient
consacrer ni plus ni moins une mise en tutelle des commissions scolaires du
Québec.
Rappelons que ce projet de loi, en plus du rétrécissement
des droits des élèves, adultes et jeunes, à
l'accessibilité, du rétrécissement des droits
d'accès au Protecteur du citoyen, ne reconnaît pas aux
élèves du Québec le droit d'association. Cela nous
semblait aussi quelque chose d'élémentaire. Au Québec, le
droit d'association est reconnu. Pourquoi le ministre n'a-t-il pas cru
nécessaire de le reconnaître? Lorsqu'on voit les
élèves du Québec, les étudiants actuellement en
débrayage, peut-être peut-on comprendre qu'ils ne souhaitent pas
créer la même situation dans les écoles. Je vais
peut-être lui rappeler qu'il ne restera pas à ce ministère,
si je ne m'abuse, vingt autres années et probablement que le temps que
ces associations s'installent dans les écoles, il n'aura pas eu à
en subir les effets.
Mme la Présidente, ce projet de loi vient consacrer un
rétrécissement des droits et des pouvoirs des
élèves, jeunes et adultes, des parents, des enseignants et des
commissions scolaires. Ce projet de loi, tel que le réclamaient et l'ont
réclamé la très grande majorité des intervenants,
devrait être réécrit. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, Mme la députée de
Chicoutimi. Y a-t-il d'autres interventions? M. le ministre de
l'Éducation, pour votre droit de réplique. Vous avez 20
minutes.
M. Claude Ryan (réplique)
M. Ryan: J'ai 20 minutes seulement. Je sais qu'il y a tellement
de choses que le leader de l'Opposition veut connaître à propos
des amendements que nous apporterons au projet de loi qu'il me permettra sans
doute, à la fin, si je n'ai pas tout dit dans les 20 minutes qui me sont
imparties, de poursuivre. Je l'en remercie à l'avance.
Mme la Présidente, inutile de vous dire que j'ai suivi avec
beaucoup d'intérêt les interventions qui ont
caractérisé notre débat sur le principe du projet de loi
107. Je voudrais tout d'abord remercier tous les membres de l'Assemblée
nationale qui sont intervenus dans le débat. Je sais qu'ils auraient pu
être plus nombreux du côté gouvernemental, si le souffle
avait été plus fort du côté de l'Opposition. Je ne
peux m'empêcher de signaler que des interventions que nous avons
entendues du côté gouver-
nemental étaient toutes des interventions très bien
structurées, soigneusement rédigées et
débitées avec une dignité exemplaire. Je me réjouis
de cette qualité de participation pour le bien de notre vie
parlementaire.
Nous avons eu un débat éminemment civilisé,
généralement très élevé et je pense que
c'est bon pour la vie parlementaire et qu'on peut s'en réjouir sans
arrière-pensée. Je remercie également les
députés de l'Opposition qui ont fait leur devoir en communiquant
aux membres de l'Assemblée nationale et à la population du
Québec les inquiétudes ou les interrogations, parfois même
les objections que suscite chez eux le projet de loi 107. Je comprends qu'ils
étaient dans une situation un peu difficile. Ils avaient le texte
originel du projet de loi. D'autre part, ils savaient très clairement
que le gouvernement a décidé d'apporter de nombreux amendements
au projet de loi, amendements dont j'avais d'ailleurs livré l'essentiel
dans mon intervention qui a marqué le début du débat.
Je crois que l'Opposition avait un choix à faire. Elle aurait pu
faire confiance à la parole du gouvernement et décider d'aborder
le débat en tenant compte de ses intentions très explicites dont
j'avais fait part à la Chambre. Elle pouvait également se
réfugier derrière la lettre de la version originelle du projet de
loi, c'est-à-dire à un document qui remonte déjà au
mois de décembre dernier et mener son action en fonction de l'une ou
l'autre des deux hypothèses. Étant donné tout ce qui s'est
produit depuis le dépôt du projet de loi en décembre
dernier, je pense que la première voie était beaucoup plus
intéressante et utile que la seconde. Il me semble qu'il aurait
été bon de prendre le train au point où il en était
rendu et d'essayer de le faire avancer un peu plus si on trouvait qu'il
n'avançait pas assez rapidement.
L'Opposition a malheureusement choisi la voie d'un négativisme
plutôt stérile. Elle a choisi de s'arrêter en
décembre 1987, comme s'il ne s'était rien passé depuis ce
temps, et de s'en tenir à une critique littérale du projet de
loi, qui est bien en-deçà, malheureusement, du point où
nous en sommes rendus maintenant. Je le regrette, parce que je suis convaincu
qu'avec les ressources et l'expérience que l'on possède du
côté de l'Opposition en matière d'éducation, on
aurait pu faire avancer le débat et préparer un travail plus
expéditif et plus efficace en commission parlementaire, mais
c'était le choix de l'Opposition. Je n'ai pas à le critiquer
à ce moment-ci. J'en prends acte pour le regretter dans une certaine
mesure. Cela fait partie du processus parlementaire aussi. (21 h 10)
II me fait plaisir d'informer les députés, à ce
stade-ci, que dès cette semaine, dès jeudi, je communiquerai aux
membres de la commission parlementaire, pour les aider à préparer
les travaux de la commission qui débuteront vraisemblablement dès
le commencement de la semaine prochaine, les principaux amendements. Tous les
amendements de caractère substantiel qui seront apportés au
projet de loi seront portés à la connaissance des
députés membres de la commission parlementaire de
l'éducation, de manière qu'ils puissent se préparer aux
travaux de la commission. Je pense que les députés de
l'Opposition, qui se sont nourris jusqu'à maintenant de scepticisme
à l'endroit du gouvernement, verront que tout ce que nous avions
annoncé était rigoureusement l'expression des intentions
véritables du gouvernement.
Je voudrais profiter de l'occasion, Mme la Présidente, pour
remercier tous les organismes qui ont participé au travail que nous
avons fait ensemble au cours des derniers mois pour essayer d'améliorer
ce projet de loi. Je veux rendre hommage en particulier aux organismes nombreux
et aux personnalités qui ont jugé devoir venir témoigner
devant la commission parlementaire de l'éducation, qui ont
présenté à celle-ci des recommandations très
constructives dont nous avons essayé de tenir largement compte.
J'écoutais les discours des députés de l'Opposition
au cours des derniers jours et, parfois, j'étais enclin à
sourire, pas pour les motifs que semblait lire sur mon visage la
députée de Chicoutimi, mais pour d'autres motifs beaucoup plus
simples et faciles à comprendre. D'un côté, j'entendais un
intervenant qui disait: Ah, le ministre est absolument figé dans sa
position, il ne veut rien entendre. J'entendais le chef de l'Opposition en
particulier... J'ai remarqué qu'il y a quelques députés de
l'Opposition qui ont un curieux de travers. Quand ils s'adressent à moi
ou qu'ils parlent du ministre de l'Éducation, ils sont toujours
obligés d'avoir des points de référence religieux. Je ne
sais pas ce qui les fatigue, ce qui les obsède, mais il me semble que,
personnellement, je ne les ennuie pas avec cela. J'entendais le
député de l'Opposition citer l'Évangile selon saint Jean.
S'il y en a un qui n'est pas qualifié pour citer l'Évangile selon
saint Jean, qui est le plus difficile des quatre Évangiles, un
évangile hautement mystique, il me semble que c'est le
député de Joliette. Il me semble qu'il ne devrait surtout
pas l'appliquer au député d'Argenteuil dont ce n'est pas la
caractéristique d'être un mystique à part de ça.
Cela étant dit, je pense qu'on pourrait se passer de ces
choses-là dans cette Chambre et discuter des questions à leur
mérite. J'ai remarqué qu'on fait cela souvent de l'autre
côté, cela m'apparaît disgracieux et témoigner d'un
certain infantilisme qu'on devrait avoir dépassé depuis longtemps
au Québec.
Les gens disaient, d'un côté - je reviens à mon
sourire de tantôt "il est inflexible, il ne veut rien entendre" et, de
l'autre côté, "il va nous apporter 300 amendements, c'est bien
trop". C'est un ou l'autre des deux, cela ne peut pas être les deux en
même temps; il faut que vous choisissiez. Aristote nous a enseigné
un principe quand nous étions dans les collèges d'autrefois;
malheureusement, c'est une philosophie un peu plus complexe qu'on
enseigne souvent aujourd'hui, un petit peu plus obscure parfois. Il nous a
enseigné un principe de base qu'on appelait le principe de
contradiction, je vais vous le répéter, il est extrêmement
simple: une chose ne peut pas être et ne pas être en même
temps et sous le même rapport. Alors, je vous remercie de ce don de
polyvalence que vous m'attribuez. Vous m'attribuez en même temps le
mérite d'une inflexible rigidité et, en même temps, le
mérite d'une souplesse trop grande. J'essaierai de faire mon choix en
puisant dans les deux pour offrir une synthèse qui soit au moins
présentable.
Je reviens tout de suite sur un avertissement. C'est vrai qu'il y aura
au-delà de 300 amendements, je n'en fais pas un mystère, mais le
député d'Abitibi-Ouest, qui est familier avec ces choses, sait
très bien, pour sa part, que lorsqu'on touche une loi aussi complexe que
la Loi sur l'instruction publique, il y a énormément de
problèmes d'harmonisation et de correspondance. Quand on fait un
changement à un endroit, il faut le faire à dix ou quinze autres
endroits. Cela fait quinze ou vingt amendements, mais cela ne fait pas autant
d'amendements. En réalité, ce sont des problèmes de
concordance avec lesquels sont familiers les rédacteurs de textes
législatifs. Je pense qu'il faut s'en tenir au fond. Vous remarquerez
qu'après que j'eus annoncé publiquement les principaux
changements que nous apporterons au projet de loi 107, la reaction des journaux
a été de dire: le ministre de l'Éducation apportera
certains changements qui ne modifient pas le fond du projet de loi. Je pense
qu'ils ont vu très juste. Ce sont des changements qui visent à
améliorer le projet de loi, mais qui ne le chambardent pas, qui ne
modifient pas la structure essentielle. Je pense que c'est comme cela qu'on
doit normalement procéder dans le bon travail parlementaire.
Alors, ces remarques étant faites, je voudrais, très
brièvement, répondre à quelques objections que j'ai
entendues en cours de route. On les reprendra en commission parlementaire,
évidemment, mais je serai très bref là-dessus. On disait,
par exemple, en matière de services de garde - cela fait deux ou trois
fois qu'on entend cette observation aujourd'hui: Le projet de loi 107
représente un recul par rapport à la loi 3. J'ai relu les deux
textes. D'abord, dans le projet de loi 107, il en est question, des services de
garde, ne nous trompons pas. On dit que la commission scolaire peut organiser
des services de garde dans une école et qu'elle est habilitée
également à demander une contribution financière aux
parents pour en financer au moins une partie. Cela peut sembler curieux. Je
regarde ce qu'il y avait dans la loi 3. On disait: "Sur demande d'un conseil
d'orientation ou d'un conseil d'école, la commission scolaire organise
un service de garde." Cela paraît bien. Mais ce qui était
écrit tout de suite après, c'est que la commission scolaire peut
- et j'ai le texte devant moi - "obliger les parents à verser une
contribution financière."
Je ne fais pas de reproche aux auteurs de la loi 3, je pense qu'ils ont
passé par les mêmes canaux que moi. Ils sont passés par le
Conseil du trésor, ils sont passés par l'ensemble des organismes
du gouvernement et ils se sont fait dire: Nous ne sommes pas prêts
à aller plus loin que tel point à propos des services de garde.
Et, finalement, le point où nous en sommes aujourd'hui, surtout
après la période de restrictions budgétaires que nous
avons connue depuis quelques années, est à peu près le
même où en était le gouvernement à l'époque
de la loi 3 là-dessus. Par conséquent, je pense que c'est du
pareil au même, c'est quatre 25 cents pour une piastre.
Je pense que, lorsque la ministre déléguée à
la Condition féminine fera connaître le plan magnifique qu'elle a
conçu pour tout ce qui concerne le développement des services de
garde au Québec, l'Opposition se rendra compte que le gouvernement est
rendu infiniment plus loin qu'il n'a jamais pu envisager de le faire dans son
temps. Nous ne lui faisons pas de reproche, mais je pense que chaque chose
vient en son temps. Ici nous avons des éléments d'un plan qui est
beaucoup plus vaste et qui fera une place très importante aux garderies
en milieu scolaire.
On parle de l'éducation des adultes. Fondamentalement, dans le
projet de loi 3, on disait que l'éducation des adultes serait gratuite
pour les personnes qui s'inscrivent à des cours devant conduire à
l'obtention du diplôme d'études secondaires. Qu'est-ce que nous
disons dans le projet de loi 107? Nous disons que l'éducation sera
gratuite pour les adultes aux conditions qui seront définies dans le
régime pédagogique pour adultes. C'est la même chose. Le
régime pédagogique pour adultes sera une innovation qui
répond à la critique que faisait tantôt la
députée de Chicoutimi. On aura un régime propre pour les
adultes. On sait très bien que le régime pédagogique qui
vaut pour les jeunes ne répond pas en tout point aux besoins propres des
adultes. Dans ce régime pédagogique, il sera dit... D'ailleurs,
nous aurons l'occasion de déposer un projet de règlement au cours
des prochains mois. Le projet de loi nous donne deux ans pour compléter
cette besogne qui est très difficile. L'un des points qui seront
explicitement énoncés, ce sera justement la gratuité pour
les adultes qui sont inscrits à des cours donnant lieu à des
crédits conduisant à un diplôme d'études
secondaires. Je peux vous assurer que c'est une position qui a
été approuvée par le gouvernement, y compris par le
Conseil du trésor. De ce point de vue, nous nous rejoignons.
On peut bien chercher le Bonhomme Sept Heures et dresser des
épouvantails sur la route, mais quand on va s'asseoir
sérieusement pour regarder ces choses, on se rendra compte que, sur
certains points, c'est du pareil au même. Sur d'autres, nous
améliorons les choses. Il y en a
d'autres sur lesquels nous nuançons. Et, s'il y a lieu
d'écouter des représentations qui nous permettraient d'avancer a
l'intérieur des limites dont nous devons tenir compte au point de vue
financier, nous en serons extrêmement heureux.
Je prends le cas des élèves en difficulté
d'adaptation et d'apprentisage. J'ai cherché dans la loi 3 s'il y avait
une clause leur faisant obligation d'avoir un plan d'intervention personnel
pour chaque élève handicapé ou en difficulté
d'adaptation et d'apprentissage. Je ne l'ai pas trouvé dans la loi 3.
Vous l'avez dans projet de loi 107. On peut bien avoir toutes les
superstructures qu'on voudra, tous les règlements qu'on voudra, toutes
les affirmations de principe souhaitables, ce qui importe, c'est ce qui va se
passer dans la classe, ce qui va se passer pour rendre service à ces
enfants. Or, dans le projet de loi 107, il y a deux choses très
importantes pour ces élèves en trouble ou en difficulté
d'adaptation ou d'apprentissage. D'un côté, dès le premier
article du projet de loi, nous leur garantissons l'accès aux services
éducatifs qui sont disponibles pour tout le monde. Et là, le
principe d'intégration dont parlait la députée de
Chicoutimi est énoncé dès le premier article du projet de
loi.
Plus loin, nous disons qu'ils auront également droit aux services
spéciaux que requiert leur condition propre. Nous leur donnons le droit
à un plan d'intervention particulier pour chacun, pour lequel leurs
parents devront être consultés de même que les
éducateurs de l'école. Ce sont des améliorations
importantes qu'on doit noter, je pense, avec beaucoup de satisfaction. (21 h
20)
On a beaucoup parlé dans le débat du pouvoir du ministre
et des commissions scolaires. Tantôt, pendant un discours - je m'en
confesse, Mme la Présidente - j'ai fait un exercice avec mon bon ami, le
député de Frontenac, leader adjoint du gouvernement. Nous avons
fait un exercice intéressant. Mon collègue de Frontenac m'a dit:
J'ai rencontré ces jours derniers les dirigeants de ma commission
scolaire, la commission scolaire de Thetford Mines. Ils m'ont fait part de
leurs inquiétudes à propos du projet de loi. J'ai dit: On va
regarder ça ensemble. Il s'est assis à côté de moi.
Vous l'avez vu. On a pris les articles qu'il m'a mentionnés. Il a dit:
D'abord les commissions scolaires sont inquiètes. On leur impose
beaucoup de comités. On regarde cela froidement. Il y a
déjà un comité exécutif. Ce n'est pas un de plus.
Il y en a déjà un. On impose un comité spécial pour
les élèves en difficulté d'adaptation et d'apprentissage.
Oui, et nous le maintenons. D'abord parce que tous les organismes qui
s'intéressent aux enfants en difficulté d'adaptation et
d'apprentissage l'ont exigé. Et, deuxièmement, parce qu'un bon
nombre de commissions scolaires ne se sont pas toujours acquittées de
toutes leurs responsabilités de ce côté, même quand
nous leur fournissions les ressources nécessaires à cette fin.
Alors là, on aura des choses beaucoup plus claires pour tout le monde,
et je pense que c'est un progrès énorme. Il y aura un
comité de parents. Il n'y a rien de neuf, on en a déjà un.
Il y aura un comité de transport. Il y en a déjà un en
vertu de la Loi sur les transports. Alors c'est pas mal... À part le
comité consultatif sur les élèves en difficulté
d'adaptation et d'apprentissage, tout ce que j'ai entendu sur cette partie du
projet de loi c'est du chialage injustifié, qu'il vienne de l'Opposition
ou d'ailleurs. Cela n'impressionnera ni n'arrêtera le gouvernement, je
vous l'assure. C'est clair.
Le député de Frontenac me soulignait qu'il y avait un
article où on faisait aux commissions scolaires l'obligation de
dispenser trois ou quatre sortes d'enseignement moral ou religieux dans chaque
école. Les députés de l'Opposition ont souligné ce
point. Évidemment que cela va être enlevé dans les
amendements. La commission scolaire aura l'obligation de dispenser
l'enseignement moral et religieux catholique, protestant ou neutre selon les
élèves avec lesquels elle fera affaire, mais elle ne sera pas
obligée de donner chacune de ces catégories dans chacune de ses
écoles parce que, là, ça deviendrait rapidement
prohibitif.
Mme la Présidente, vous me faites signe qu'il reste trois
minutes. Vous savez très bien que la matière est infiniment plus
abondante.
La Vice-Présidente: Je veux bien le croire, M. le
ministre, mais je dois faire respecter les règlements et je tiens
à vous dire que votre droit de réplique est de 20 minutes.
M. Ryan: Je voulais passer par vous, avec tout le respect que je
vous porte, pour demander si l'Opposition consentirait à ce que mon
exposé se prolonge quelque peu, sans abus.
La Vice-Présidente: M. le leader de l'Opposition.
M. Gendron: Personnellement, je n'ai pas d'objection. Mais je
voudrais quand même aviser la Présidente qu'il ne faudrait pas en
faire une règle. C'est ça qui est le danger. À partir du
moment où vous me dites quatre ou cinq minutes de plus, je n'ai pas
d'objection. De toute façon, le ministre est quand même conscient
qu'en commission parlementaire, il est toujours prévu de commencer
l'étude d'un projet de loi par des remarques préliminaires. Et si
le ministre avait la conviction - et je le dis sérieusement - qu'il n'a
pas été en mesure de faire le tour, selon ses prétentions,
de l'ensemble des choses qui ont été dites et sur lesquelles il
voudrait revenir, il a le loisir de le faire lors du début des audiences
en commission parlementaire. Et c'est spécifiquement pour ça que
c'est prévu à notre règlement.
La Vice-Présidente: Si je comprends bien, il y a
consentement pour accorder quelques minutes
supplémentaires au ministre de l'Éducation pour poursuivre
son... M. le ministre.
M. Ryan: Je n'en demandais point davantage, Mme la
Présidente, et j'apprécie beaucoup la courtoisie
coutumière du député d'Abitibi-Ouest. Son chef m'a
prévenu l'autre jour de ne pas trop l'inonder de louanges. Cela
l'inquiétait.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Ryan: Alors le député de Frontenac poursuivait
son exercice. Il m'a parlé d'un article qui inquiétait des
commissions scolaires à juste titre. Nous l'avions inséré
de bonne foi dans le projet de loi. On donnait au ministre le pouvoir de
retenir, d'annuler ou de diminuer, pour une juste raison évidemment, une
subvention à laquelle aurait normalement droit une commission scolaire.
Cela inquiétait les commissions scolaires. Je pense que les
députés savent très bien que le texte actuel de la Loi sur
l'instruction publique donne seulement le pouvoir de retenir une subvention.
Nous reviendrons au texte originel là-dessus. Il n'est pas question de
vouloir écraser les commissions scolaires. Nous pensions qu'il serait
plus fonctionnel de préciser davantage. Mais vu les
interprétations inquiétantes auxquelles cela pouvait donner lieu,
c'est une chose qui va s'arranger très bien.
Je mentionne juste un autre point. Les spécialités
professionnelles et l'éducation des adultes. Il en a été
question tantôt. Ce n'était pas l'intention du gouvernement
d'empêcher une commission scolaire d'offrir des services pour les adultes
ou d'offrir certaines spécialités en enseignement professionnel
de niveau secondaire. Nous voulions dire clairement que c'est impossible
d'avoir ces services partout et que, vu que c'est impossible de les avoir
partout parce que ça coûte très cher, il faut que les
décisions en matière de subventions, de financement soient prises
par le ministre de l'Éducation. Nous avons travaillé avec la
Fédération des commissions scolaires un amendement qui nous
permet de dire exactement ça. Je pense que tous seront satisfaits quand
ils verront l'amendement. Nous préserverons - nous l'affirmerons
clairement -cette autorité que doit avoir le ministre de prendre des
décisions efficaces et claires en ces matières. La formulation
laissait peut-être à désirer et c'est l'avantage des
commissions parlementaires et du processus de critique que nous avons dans
notre régime démocratique, cela permet d'identifier plus
clairement la difficulté et d'y apporter des solutions raisonnables.
Je donne seulement un autre exemple. En matière de vente, de
réparation, de transformation ou d'aliénation d'immeubles, on
élargissait les pouvoirs donnés aux commissions scolaires avec
des amendements, des nouveaux textes que nous apportions. Cela a
été compris différemment. On va revenir très proche
des textes actuels de ce point de vue-là parce que ce n'est pas notre
intention d'aller contrôler chaque geste que va faire une commission
scolaire pour améliorer ses constructions. Au contraire, tout ce que
nous avons fait ces dernières années a tendu à
élargir leurs responsabilités. Nous allons continuer de le faire.
Je pense qu'encore là il n'y aura pas de problème.
Je mentionne un dernier exemple. Le ministre a un pouvoir
d'enquête en vertu de la loi actuelle. Évidemment, il le conserve
dans le projet de loi 107. Le pouvoir d'enquête actuel porte surtout sur
l'administration d'une commission scolaire. Dans le projet de loi 107, on dit:
"Sur l'administration et la qualité des services éducatifs." Et
nous tenons beaucoup à garder cette précision parce que,
franchement, le ministre de l'Éducation n'est pas là pour
être un vérificateur comptable. Il est là pour être
le gardien et le responsable de la qualité de l'éducation partout
au Québec. Ça, il n'est pas question de le modifier. Je pense que
les gens le comprennent. Mais on donnait au ministre le pouvoir de demander
qu'une décision ayant donné lieu à une enquête
puisse être suspendue pendant la tenue de l'enquête. C'était
le bon sens même, mais cela a provoqué des craintes, même
des tremblements dans certains milieux. On ne veut pas que les gens aient des
tremblements en face d'un projet de loi qui veut leur rendre service. On va
laisser tomber ça. On va garder l'esprit du texte actuel,
c'est-à-dire que l'enquête pourra avoir lieu et, s'il y a une
situation vraiment pourrie, il incombera au ministre de recommander au
gouvernement la mise en tutelle, et ça finira là. De ce
côté-là, on va s'entendre. Je crois que le
député de Frontenac convenait avec moi que tous les points qui
avaient été portés à son attention trouveront une
solution heureuse dans les amendements qui seront apportés.
J'écoutais, l'autre soir, une des interventions les plus
constructives que j'aie entendues du côté de l'Opposition. Elle
est venue du député de Lévis. Il avait fait son travail
très honnêtement et sérieusement sur le projet de loi 107
et je l'en remercie. Le député de Lévis a mentionné
une série de points. Il a parlé des services aux adultes. On en a
parlé tantôt. Il a parlé de l'application d'une
décision prise par la commission scolaire. Je viens d'en parler. Il a
parlé de l'obligation qu'on faisait à la commission scolaire de
décider beaucoup de choses par voie de règlement plutôt que
par voie de résolution sur au moins une dizaine de points. L'obligation
de procéder par règlement est enlevée dans les amendements
que nous allons proposer. Il y en a une autre. Il disait: Vous parlez de
fonctions des commissions scolaires, pourquoi ne parlez-vous pas de pouvoirs?
On va mettre fonctions et pouvoirs. Il n'y aura pas de chicane, si c'est
ça qui était le problème. Ce ne sont pas des exercices
d'exégèse que nous faisons. On laissera aux professeurs de droit,
qui semblent intéresser la députée de Maisonneuve, le soin
d'écrire des manuels de 150 pages dans dix ans sur la dis-
tinction entre fonctions et pouvoirs. On va mettre les deux dans le
projet de loi et c'est ce qui va être contenu dans le chapitre qui va
compter. Là-dessus, on aura de la matière pour discuter
abondamment.
Tout ceci pour indiquer qu'if s'est fait un cheminement
considérable, Mme la Présidente, au cours des dernières
semaines et même au cours des derniers jours. J'espère que ce
cheminement va continuer à travers les études que fera la
commission parlementaire. Si l'Opposition et, évidemment aussi, les
députés ministériels ont des modifications à
proposer à celles que nous déposerons sur la table, nous les
écouterons avec toute la disponibilité concevable. Nous serons
très heureux d'accueillir des améliorations qui pourraient venir
de tous les députés des deux côtés de la Chambre et
notre seul objectif, c'est d'arriver, à la fin, avec un projet de loi
qui permette d'améliorer l'accessibilité de l'éducation
partout au Québec et d'améliorer également la
qualité de l'éducation pour tous les Québécois et
toutes les Québécoises. Je vous remercie, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Merci, M. le ministre de
l'Éducation.
Cette réplique termine le débat. Nous allons donc mettre
aux voix le principe du projet de loi 107. Est-ce que le principe du projet de
loi 107, Loi sur l'instruction publique, est adopté?
M. Gendron: Mme la Présidente...
La Vice-Présidente: Oui, M. le leader de l'Opposition.
M. Gendron: ...on souhaiterait de ce côté-ci que
nous puissions faire un vote enregistré. Le leader du gouvernement est
d'accord. En conséquence, on vous inviterait à reporter le vote
à demain après la période de questions.
La Vice-Présidente: Merci, M. le leader de l'Opposition.
Il y a donc consentement pour que le vote soit reporté à demain
aux affaires courantes?
M. Lefebvre: Oui, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Nous allons donc reporter le vote sur
l'adoption du principe du projet de loi 107 aux affaires courantes de
demain.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Lefebvre: Mme la Présidente, je fais motion pour
ajourner les travaux à demain matin, 10 heures.
La Vice-Présidente: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. Nous allons donc
ajourner nos travaux à demain 10 heures.
(Fin de la séance à 21 h 31)