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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le lundi 18 juin 1990 - Vol. 31 N° 58

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures six minutes)

Le Président: Mmes et MM. les députés, s'il vous plaît.

Nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

En demandant l'attention de tous les députés, nous allons entreprendre les affaires courantes. Il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi.

Dépôt de documents. Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.

Rapport annuel de SOQUIP

Mme Bacon: Oui, M. le Président, il me fait plaisir de déposer le rapport annuel 1989-1990 de SOQUIP.

Le Président: Document déposé. Est-ce qu'il y a d'autres dépôts de documents? M. le leader du gouvernement, au nom du ministre du Travail.

Rapport annuel de la Régie des entreprises de construction du Québec

M. Pagé: M. le Président, qu'il me soit permis de déposer le rapport annuel de la Régie des entreprises de construction du Québec, pour l'année financière 1989 se terminant le 31 mars dernier.

Le Président: Ce rapport est déposé.

Dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission de l'économie et du travail...

M. Pagé: M. le Président.

Le Président: ...et député de Laval... Excusez-moi. Oui, M. le leader du gouvernement, un autre document, je m'excuse.

Rapport d'activités de la Commission de la construction du Québec

M. Pagé: toujours au nom du ministre du travail, qu'il me soit permis de déposer le rapport d'activités de la commission de la construction du québec, toujours pour le même exercice financier.

Le Président: Ce rapport est également déposé. Je vous remercie.

Au dépôt de rapports de commission, M. le président de la commission de l'économie et du travail et député de Laval-des-Rapides.

Étude détaillée du projet de loi 75

M. Bélanger: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé les 12, 13 et 14 juin 1990, afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 75, c'est-à-dire Loi sur les heures et les jours d'admission dans les établissements commerciaux. Le projet de loi n'a pas été adopté.

Le Président: Ce rapport est déposé. Dépôt de pétitions. M. le député de Gouin.

Surseoir à la fermeture du bureau de Radio-Québec en Gaspésie

M. Boisclair: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 724 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de la région de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine.

Les faits invoqués sont les suivants: "Considérant l'importance de Radio-Québec en tant que véhicule privilégié de la réalité culturelle du Québec; "Considérant que cette réalité culturelle est constituée de plusieurs composantes culturelles régionales; "Considérant que la région de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine se doit d'être présente dans l'univers culturel de l'ensemble des Québécois et Québécoises; "Considérant que la fermeture du bureau régional de Radio-Québec, en Gaspésie, attaque directement la présence de la région de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine dans cet univers culturel et, par conséquent, risque de déformer la vision des réalités culturelles du Québec offerte à l'ensemble des Québécois et Québécoises l'intervention réclamée se résume ainsi: "Que l'Assemblée nationale intervienne auprès de la ministre des Communications afin qu'elle demande au conseil d'administration de Radio-Québec de surseoir à sa décision de fermer le bureau régional de Radio-Québec en Gaspésie".

Merci, M. le Président.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée. M. le député de Drummond.

Maintien intégral des principes d'égalité entre époux

M. St-Roch: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 3954 pétitionnaires, membres de l'Association féminine d'éducation et d'action

sociale avec l'appui confirmé de la Confédération des organismes familiaux du Québec, de l'Association des femmes collaboratrices et des 30 000 membres de l'Association féminine d'éducation et d'action sociale AFEAS".

Les faits invoqués sont les suivants: "Nous réaffirmons notre appui à la constitution d'un patrimoine familial composé de biens désignés dont la valeur est partageable à part égale entre les époux."

L'intervention réclamée se résume ainsi: "Nous demandons à l'Assemblée nationale et au gouvernement du Québec de continuer à soutenir les principes d'équité et d'équilibre qui ont prévalu lors de l'adoption de la Loi favorisant l'égalité des époux et nous réclamons donc le maintien intégral des principes de cette loi".

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, votre pétition est déposée. Mme la députée de Chicoutimi.

Réduire les heures d'ouverture des commerces et assurer la protection du dimanche

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le Président, j'ai l'honneur de déposer l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 472 pétitionnaires, travailleurs et travailleuses, commerçants et commerçantes des Provi-soir du Québec. "Considérant que les signataires sont contre l'ouverture des commerces le dimanche, et l'intervention réclamée se résume ainsi: "Que l'Assemblée nationale du Québec amende le projet de loi 75 sur les heures d'affaires tel que présenté par le gouvernement en demandant au ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie de réduire les heures en semaine et de s'assurer dans les faits la protection du dimanche tel que proposé par la Coalition".

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, votre pétition est déposée. M. le député de Labelle.

M. Léonard: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 275 pétitionnaires, travailleurs et travailleuses, commerçants et commerçantes du centre-ville de Saint-Jérôme.

Les faits invoqués sont les suivants: "Considérant que les signataires sont contre l'ouverture des commerces le dimanche, et l'intervention réclamée se résume ainsi: "Que l'Assemblée nationale amende le projet de loi 75 sur les heures d'affaires tel que présenté par le gouvernement en demandant au ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie de réduire les heures en semaine et d'assurer, dans les faits, la protection du dimanche, tel que proposé par la Coalition." Je certifie que cet extrait est conforme aux règlements et à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, votre pétition est déposée. Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 156 pétitionnaires, travailleurs et travailleuses, commerçants et commerçantes du Québec. Les faits invoqués sont les suivants: "Considérant que les signataires sont contre l'ouverture des commerces le dimanche", l'intervention réclamée se résume ainsi: "Que l'Assemblée nationale du Québec amende le projet de loi 75 sur les heures d'affaires, tel que présenté par le gouvernement, en demandant au ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie de réduire les heures en semaine et d'assurer, dans les faits, la protection du dimanche, tel que proposé par la Coalition." Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, votre pétition est déposée. Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.

Réfection de la route Lagueux réclamée

Mme Carrier-Perreault: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 1533 pétitionnaires, citoyens et citoyennes du Québec, dont 314 de Saint-Étienne-de-Lauzon. Les faits invoqués sont les suivants: "Considérant qu'au cours des dernières années, la route Lagueux a été le lieu de plusieurs accidents graves; "Considérant que la route Lagueux a été identifiée comme l'un des sites dangereux du réseau routier de la MRC des Chutes-de-la-Chaudière; "Considérant que la chaussée de cette route est en outre dans un état déplorable, ce qui est susceptible de créer des dommages aux véhicules et ajoute aux problèmes de sécurité; "Considérant que, malgré les démarches entreprises par la corporation municipale auprès du ministère des Transports du Québec, les travaux de réfection tardent à être décrétés", l'intervention réclamée se résume ainsi: "Que l'Assemblée nationale du Québec accorde au ministère des Transports du Québec les crédits suffisants pour l'exécution des travaux de réfection de la route Lagueux." Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, votre pétition est déposée. Maintenant, Mme la députée de Taillon.

Réduire les heures d'ouverture des commerces et assurer la protection du dimanche

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 883 pétitionnaires, travailleurs et travailleuses, commerçants et commerçantes de la région de Montréal. Les faits invoqués sont les suivants: "Considérant que les signataires sont contre l'ouverture des commerces le dimanche", l'intervention réclamée se résume ainsi: "Que l'Assemblée nationale du Québec amende le projet de loi 75 sur les heures d'affaires, tel que présenté par le gouvernement, en demandant au ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie de réduire les heures en semaine et d'assurer, dans les faits, la protection du dimanche, tel que proposé par la Coalition." Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition, M. le Président.

Le Président: Alors, votre pétition est déposée. M. le député de Bertrand.

Permettre l'ouverture des fruiteries ie dimanche

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 1000 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de Boucherville.

Les faits invoqués sont les suivants: "Considérant que plus de 90 % des revenus des fruiteries proviennent de la vente de produits périssables; "Considérant que le commerce des fruiteries exige un approvisionnement quotidien qui peut comporter plusieurs arrivages; "Considérant que la minutie, la manipulation fréquente et délicate qu'exigent les produits périssables des fruiteries les oblige à une flexibilité dans le nombre d'employés requis; "Considérant que les fruiteries du Québec sont un important débouché pour les producteurs maraîchers locaux du Québec; "Considérant que les fruiteries emploient un grande nombre de jeunes et d'étudiants; "Considérant que l'ouverture des fruiteries le dimanche ajoute à la qualité de vie des Québécois et reçoit l'appui de plus de 78 % des Québécois consultés par IQOP."

L'intervention réclamée se résume ainsi: "Que l'Assemblée nationale intervienne auprès du ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie afin qu'il amende le projet de loi 75 sur l'ouverture des commerces le dimanche, conformément aux recommandations formulées par l'Association provinciale des fruiteries du Québec."

Le Président: Votre pétition est déposée.

Il n'y a pas d'intervention portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

Je vous avise qu'après la période de questions il y aura deux votes reportés: le premier sur la motion de ministre de la Santé et des Services sociaux proposant l'adoption du principe du projet de loi 42, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-maladie et la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec; le deuxième sur la motion de Mme la ministre déléguée à la Condition féminine et ministre responsable de la Famille proposant l'adoption du principe du projet de loi 61, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance.

Nous allons maintenant passer à la période de questions et réponses orales des députés. Je vais reconnaître, en première question principale, M. le député de Lévis.

QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES

Recrutement du personnel occasionnel au ministère des Transports

M. Garon: M. le Président, le ministre délégué aux Transports a admis, la semaine dernière, que les fiches de recrutement et de sélection du personnel occasionnel au ministère des Transports sont acheminées et centralisées à son cabinet politique.

Il disait textuellement alors: Cette information est effectivement colligée à l'intérieur de mon cabinet afin d'en transmettre l'information auprès de la deputation qui, à juste titre, comme on le mentionnait tantôt, doit obtenir de l'information sur l'état du dossier d'un commettant. C'était le travail que M. Bourassa effectuait.

On voit, dans les journaux de fin de semaine, notamment dans La Presse de samedi, que le secrétaire de la Commission d'accès à l'information, Me André Ouimet, conteste ce droit du ministre des Transports de colliger des renseignements confidentiels à partir des applications que les individus, les personnes font pour postuler des emplois et, encore plus, il va sans dire, d'utiliser ces renseignements-là pour les acheminer au bureau de comté de député où il voit carrément violation de la loi sur l'accès à l'information. M. le Président, comment le ministre concilie-t-il ce fait avec la politique officielle de son ministère relative à l'embauche du personnel occasionnel, qui oblige une décentralisation dans la région et les bureaux de districts, là où devraient se prendre les décisions finales d'embauché? Et, comment peut-il expliquer qu'il compile toutes ces données-là dans son cabinet pour demander des renseignements ensuite dans des bureaux de députés, plutôt que d'attendre que les députés lui demandent des renseignements concernant des individus en particulier?

Le Président: M. le ministre délégué aux

Transports.

M. Vallières: M. le Président, dans son préambule, le député de Lévis fait parler le secrétaire de la Commission, M. Ouimet, par l'intermédiaire d'un article de journal. Je laisse les commentaires du député de Lévis, je laisserai le député de Lévis vivre avec son introduction à la question qu'il vient de faire en lui indiquant que, évidemment je ne partage pas son entrée en matière.

Pour ce qui est de la question précise du député de Lévis, j'ai déjà eu l'occasion, la semaine dernière, de donner toute une série d'informations sur le processus d'embauché qui est suivi à l'intérieur du ministère pour les employés occasionnels. Et, M. ie Président, j'ai été très précis en indiquant que le processus vise à ce que le gestionnaire local, le gestionnaire en région prenne la décision sur l'embauche de ses employés occasionnels. J'ai indiqué également que la procédure qui est prévue dans la directive 161000 émanant du Conseil du trésor était intégralement respectée.

J'ai également indiqué au député de Lévis que pour ce qui est de l'usage qui a été fait d'un document qui circulait à l'interne dans mon ministère, l'employé qui en a fait l'usage a été remercié de ses services. J'espère que c'est suffisamment clair pour informer adéquatement le député de Lévis sur sa question.

Le Président: Question complémentaire.

M. Garon: Est-ce que le ministre pense sincèrement que le public a cru que c'est un documentalisme qui a établi un système de renseignements... (10 h 20)

Le Président: Un instant, M. le député de Lévis. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Seulement, M. le Président, pour prévenir le député de Lévis que le respect intégral du règlement commande qu'il ne peut demander d'opinion et il doit se limiter, dans sa question additionnelle, à formuler une question complémentaire, sans préambule. Faites-le comme ça, ça va bien aller, vous allez avoir toutes les réponses.

Le Président: Alors, M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: Oui, il est évident que la question de mon collègue de Lévis était très conforme au règlement puisqu'elle commençait sous forme interrogative et qu'elle ne laissait place à aucun débat ici. Le débat, c'est dans l'opinion publique qu'il a lieu en disant que ça ne se peut pas, se faire conter, ce qu'on est en train de se faire conter. C'est là qu'est le problème.

Le Président: Évidemment, la dernière remarque, vous le savez fort bien, n'était pas pertinente à votre question de règlement. Mais simplement, je vous demanderais, M. le député de Lévis, de poser une question, mais en vous mettant en garde que l'article 77 dit bien que les questions ne peuvent viser à obtenir un avis professionnel ou personnel. Votre question semblait suggérer une demande au ministre, son avis sur un sujet donné. Alors, allez à votre question, s'il vous plaît.

Des voix:...

Le Président: Non. Nous allons l'écouter jusqu'au bout et nous pourrons juger si elle est recevable.

M. Garon: M. le Président, ce que j'ai demandé: Est-ce que le ministre a vraiment cru que le public a cru qu'un documentaliste a établi la politique à son ministère, dans son cabinet, de renseignements concernant les employés qui postulaient des emplois occasionnels dans les différentes régions? Est-ce que le ministre peut donner une explication comme quoi la politique d'embauché des employés occasionnels au ministère des Transports est décentralisée dans les régions et les districts, mais qu'en même temps, les fiches des personnes qui postulent des emplois sont acheminées et centralisées à son cabinet? Peut-il donner une explication qui est plus plausible que ce qu'il nous a dit jusqu'à maintenant?

Le Président: M. le ministre délégué aux Transports.

M. Vallières: M. le Président, si j'avais plus de temps, je citerais Machiavel, ce matin, pour parler du député de Lévis; il parlait de trois sortes de cerveaux. Et j'aurai l'occasion, peut-être en d'autres circonstances, de le faire. M. le Président, je veux indiquer qu'à ce jour...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît!

M. Vallières: ...comme premier gestionnaire au sein du ministère des Transports, je veux indiquer au député de Lévis que les informations qui me sont transmises sur les employés occasionnels, je veux le répéter, les postulants aux postes d'occasionnels, servent à donner quelques indications à certains députés qui nous demanderaient de l'information là-dessus. Et j'en prends...

Des voix:...

Le Président: S'il vous plaît!

M. Vallières: ...à témoin les nombreux députés en cette Chambre, dont les députés de l'autre côté de la Chambre qui, à l'occasion, ont besoin d'informations sur l'état de certains dossiers. Je pense que ça prend un minimum d'instrumentation à l'intérieur d'un cabinet pour pouvoir y travailler.

Des voix:...

Le Président: S'il vous plaît!

M. Vallières: Si ça vous intéresse, je peux même indiquer, à l'époque du Parti québécois, certaines coutumes, certaines pratiques qui étaient utilisées par des attachés politiques et qui étaient drôlement plus impliquantes, drôlement plus compromettantes pour un gouvernement.

Des voix: Ah! Des voix: Oh!

Le Président: Alors, évidemment, la période de questions est pour des demandes d'informations. Ceux qui ont des questions, je vous prierais, au lieu d'aller directement en interpellant, de vous lever et de demander une question additionnelle. Je vais reconnaître M. le député de Lévis.

M. Garon: M. le Président, est-ce que le ministre nous affirme qu'il bâtit des listes, actuellement, à partir des personnes qui postulent des emplois dans les différents districts de son ministère et qu'il compile toutes ces listes-là dans son cabinet au cas où des députés lui demanderaient des renseignements concernant tel individu qui a fait application dans tel district, pour savoir s'il a des chances d'avoir l'emploi?

Deuxièmement, est-ce qu'il pense ou il affirme qu'il a le droit de bâtir ces listes, contrairement à la Loi d'accès à l'information qui, justement, interdit cela?

Le Président: M. le ministre.

M. Vallières: M. le Président, j'ai déjà largement étayé ma réponse la semaine dernière aux questions du député de Lévis. Je veux juste, pour sa gouverne, également lui indiquer, même si je ne partage pas la façon dont le documentaliste s'est servi de documents qui circulaient à l'interne chez nous, que lorsqu'un employé postule, fait une offre de services à titre d'occasionnel au ministère des Transports du Québec, donc au gouvernement du Québec, sous sa signature apparaît un paragraphe - je veux en faire lecture à cette Chambre, M. le Président -qui dit: "J'atteste que les renseignements fournis sont complets et conformes à la vérité, sachant qu'une fausse déclaration peut entraîner le rejet de ma candidature et d'autres sanctions prévues par la loi. De plus, je consens à ce que l'employeur divulgue les renseignements nominatifs fournis."

Il paraît bien clair que, comme premier gestionnaire du ministère, je dois permettre aux gens qui sont à mon emploi de travailler avec un minimum d'instrumentation. Je veux indiquer au député de Lévis que le sujet qu'il soulève est un sujet qui pourrait être l'occasion d'un tout autre questionnement que celui auquel il s'adresse présentement. Je veux l'assurer que la procédure qui a été établie, tant par le Conseil du trésor qu'à l'intérieur du ministère, pour la sélection des employés occasionnels a été respectée.

Si le député de Lévis veut savoir s'il y a des listes chez nous, des listes qui seraient pointées, vérifiant les allégeances politiques des gens, etc., qu'il oublie ça, ça n'existe pas, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire.

M. Garon: M. le Président, est-ce que le ministre peut nous donner une explication comme quoi, quand quelqu'un fait application dans un district, le cabinet a quelque chose à faire concernant l'emploi des employés occasionnels et qu'il a besoin d'avoir la compilation des différents noms des gens qui font application dans les différents bureaux de district de son ministère, puisqu'il n'a même pas le droit d'intervenir dans l'engagement? Est-ce qu'il croit, comme gestionnaire, comme chef du ministère, que ceux qui font application pour un emploi ont droit à la confidentialité des données, ont droit à la confidentialité des renseignements qu'ils donnent et qu'ils ont surtout droit à ce qu'il n'y ait aucune intervention politique, surtout que leur dossier ne remonte pas au cabinet du ministre s'ils n'en ont pas fait la demande et qu'ils n'en ont pas donné l'autorisation?

Le Président: Alors, M. le ministre délégué aux Transports.

M. Vallières: M. le Président, je ne peux pas voir comment le député de Lévis réussit encore à parler d'intervention politique dans ce type de dossier. Je lui ai dit et répété la semaine dernière que tous les dossiers des occasionnels sont gérés en fonction de la date d'entrée des postulants aux postes, que tous sont évalués par le gestionnaire local qui doit tenir compte de ce fait et également du niveau de compétence vis-à-vis de l'emploi sur lequel le postulant réclame d'être embauché. Comment le député de Lévis peut-il voir que c'est le bureau du ministre qui engage? Je ne peux pas voir comment il peut faire le lien.

Je l'invite également à regarder la fiche sur

laquelle sont indiqués quelques renseignements que vos bureaux ont eu la gentillesse de soumettre à la presse et aux médias la semaine dernière, et de voir la nature également des informations qui y sont. On n'est même pas capable, avec cette liste-là, d'envoyer une carte d'anniversaire aux personnes que l'on peut signaler sur une pareille liste. Alors, je ne vois pas en quoi le député de Lévis veut s'offenser aujourd'hui du fait que le ministre, comme premier gestionnaire, tient, à l'intérieur de son cabinet, de l'information que les gens qui répondent de lui, les gens qui travaillent pour lui pourraient avoir besoin.

J'invite le député de Lévis, encore une fois, à faire attention quand il dit que le ministre, son cabinet, les députés n'ont pas d'affaire à certaines informations. Je lui rappelle, en tout cas... si d'autres députés étaient en cette Chambre, dont le député de Joliette, je lui rappellerais certaines interventions qu'il a tenté de faire dans certains dossiers. Si le député de Lévis insiste, je pourrais lui indiquer comment, à l'époque, l'attaché politique d'un ministre sous son gouvernement, alors qu'il faisait partie du Conseil des ministres, agissait vis-à-vis du Conseil exécutif pour en arriver à des nominations partisanes, où on demandait de blanchir des listes qui, à l'époque, étaient jaunes. On indiquait même, par écrit...

Des voix: Ah! Ah!

(10 h 30)

M. Vallières: ...M. le Président, on priait même de bien vouloir excuser ces pressions indues. Nous vous remercions de votre collaboration au nom du ministre Untel. M. le Président, je trouve que ce type d'action...

M. Gendron: M. le Président, question de règlement.

Le Président: Sur une question de règlement, M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: Que le ministre délégué aux Transports dépose le document qu'il cite et on verra qu'il s'agit uniquement de renverser la vapeur parce que d'aucune façon les faits invoqués ne sont exacts.

Le Président: M. le ministre, est-ce que vous voulez déposer le document dont vous avez fait lecture?

M. Vallières: M. le Président, vous me permettrez donc de la lire.

Le Président: S'il vous plaît! s'il vous plaît! Sur la question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, très brièvement, je retiens que le leader adjoint de l'Opposition allègue, affirme que les faits ne sont pas exacts, qu'il tient à voir le document, mais que, lorsqu'on veut lui lire le document, il refuse qu'il soit lu. M. le Président, un ministre peut citer un document. Il peut lire le document et il peut déposer ie document.

Le Président: Écoutez. Le règlement dit à l'article 214: "Lorsqu'un ministre cite, même en partie, un document, tout député peut lui demander de le déposer immédiatement. Le ministre doit s'exécuter, sauf s'il juge que cela serait contraire à l'intérêt public." Alors, M. le ministre délégué aux Transports a, je pense, cité une partie du document et, à ce moment-là, fe leader adjoint de l'Opposition a demandé le dépôt dudit document. Alors, est-ce que te ministre consent à déposer le document ou s'il invoque la prescription de l'article 214? M. le ministre.

M. Vallières: M. le Président, devant l'attitude du député de Lévis, en particulier, qui joue aux vierges offensées ce matin...

Le Président: Un instant, un instant! Oui, oui... Écoutez, s'il vous plaît! L'article est... S'il vous plaît! L'article 214 est clair: "Lorsque le ministre cite, même en partie, un document..." Le ministre a cité une partie du document. On demande le dépôt du document. Est-ce que vous vous exécutez, M. le ministre, ou si vous invoquez le dernier alinéa, la dernière phrase de l'article 214? Est-ce que vous déposez le document?

M. Vallières: M. le Président, je vais accepter de déposer le document. Je vais indiquer à qui il était expédié. Vous me le permettrez. Je ne l'ai pas indiqué encore et... Oui, M. le Président, il était expédié au Conseil exécutif, à M. Jean-Noël Poulin...

Une voix: Question de règlement...

M. Vallières: ...signé...

Le Président: Un instant, un instant! S'il vous plaît! Le ministre va déposer un document, alors je pense qu'il est normal qu'il l'identifie rapidement. C'est une lettre. Il informe l'Assemblée. Comme à tout moment donné, si on veut demander à une partie consentement au dépôt d'un document, on demande d'identifier le document. Je demande simplement au ministre, s'il veut identifier son document, qu'il l'identifie rapidement, non pas d'en faire lecture complète, mais de nous dire: C'est tel document et je le dépose. M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: En vertu de l'article du règlement, il est très clair que, si on demande le dépôt, c'est justement pour prendre connaissance

de ces faits-là. Et s'il avait voulu le faire, l'indiquer, il l'aurait fait au préalable. Préalablement, quand il a commencé sa réponse, il l'aurait indiquée, la nature du document. Ce n'est pas ça, il veut nous lire une lettre pour lancer des accusations gratuites. Qu'il dépose le document et on est assez grands garçons pour en prendre connaissance et on va savoir à qui c'est adressé et on va savoir c'est quoi le contenu de ce document-là.

Le Président: Simplement... Je suis d'accord avec vous. S'il vous plaît! Je suis entièrement d'accord avec vous; uniquement, le ministre peut identifier son document - et je vous demande de l'identifier et de le déposer, non pas d'en faire lecture - identifier son document et le déposer. M. le ministre délégué aux Transports.

M. Vallières: M. le Président, je veux bien identifier le document en question, comme vous me l'indiquez. Il s'agit d'un attaché politique travaillant, à l'époque, pour le ministre responsable du ministère de l'Habitation et de la Protection du consommateur, M. (ailles Gosselin. C'est une lettre à M. Jean-Noël Poulin, du Conseil exécutif, pour des nominations à l'Office de la protection du consommateur et à la Régie du logement du Québec.

Le Président: Très bien.

M. Vallières: M. le Président, je voudrais, en même temps...

Le Président: Oui. S'il vous plaît! S'il vous plaît! Écoutez, autant des deux côtés de l'Assemblée, je pense que la période de questions dure 45 minutes. Si vous continuez comme ça, c'est du temps que vous perdez pour poser des questions. Rapidement, M. le ministre, comment complétez-vous?

M. Vallières: M. le Président, je veux déposer un autre document qui...

Le Président: Bon, un instant.

M. Vallières: ...s'est accroché à celui-là.

Le président: le premier document va être déposé. le premier document... vous déposez le premier document. très bien. m. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président...

Le Président: Un instant. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, je n'ai pas osé interrompre le leader de l'Opposition tout à l'heure. Il faut reconnaître qu'il n'a pas précisé le document qu'il voulait voir déposer. Par conséquent, le ministre est habilité à déposer les deux documents. Bien oui, vous ne l'avez pas précisé, vous ne lui avez même pas permis de le lire, vous avez demandé qu'il soit dépose-Le Président: Alors, M. le...

M. Pagé: ...or, comme il a référé à un certain nombre de documents, il est tout à fait légitime de déposer ceux auxquels il a référé.

Une voix: C'est ça.

Le Président: M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: À deux reprises, M. le Président, vous m'avez donné raison; à deux reprises, vous avez dit: II a une chose à faire: se lever, identifier le document - ce qui a été fait - et le déposer. Il ne reste que ça à faire et on vous demande d'appliquer le règlement. Là, on ne perdra pas de temps.

Le Président: c'est exactement ce que je fais. maintenant, si le ministre requiert de déposer un deuxième document, il ne l'a pas cité. est-ce qu'il y a consentement au dépôt d'un deuxième document?

Des voix:...

Le Président: Pas de consentement. Le premier document, M. le ministre, veuillez le déposer. Document déposé. Non, non, vous déposez un premier document; la réponse est terminée. Je vais aller en question additionnelle maintenant. Un instant! Un instant! Le document est déposé. Vous avez une question additionnelle, M. le député de Lévis?

M. Garon: m. le président, est-ce qu'il va falloir que le premier ministre fasse à son endroit ce qu'il a fait à l'intention de son documentaliste...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Est-ce qu'il peut nous dire... Est-ce qu'il comprend tout simplement que la loi de l'accès à l'information lui interdit, comme ministre, dans son cabinet politique, de compiler les données confidentielles concernant les gens qui font application à son ministère? Il n'a pas l'air de comprendre. Est-ce qu'il comprend ça? Et est-ce qu'il comprend qu'il doit faire une distinction entre une personne qui va à un bureau de député pour demander un renseignement concernant son cas et le fait de compiler les noms de toutes les personnes qui n'ont pas demandé, elles, d'être compilées, qui n'ont pas demandé d'avoir leur nom envoyé au bureau du ministre et qui n'ont

pas demandé d'avoir leur nom envoyé dans les bureaux de députés? Est-ce qu'il comprend qu'il y a une distinction là-dedans?

Le Président: M. le ministre délégué aux Transports.

M. Vallières: M. le Président, j'invite le député de Lévis à demeurer calme, à éviter de brasser une soupe dans laquelle il vient d'impliquer certains de ses collègues. Afin de compléter la réponse que j'étais en train de lui donner tantôt et sur laquelle j'ai été interrompu par le député d'Abitibi-Ouest, je veux déposer, M. le Président, un document à la suite de celui que j'ai déposé tantôt qui indique, dans ce cas-ci, un bel exemple d'un "score* parfait pour le Parti québécois où les cinq personnes recommandées ont toutes été évidemment retenues aux postes pour lesquels elles avaient, semble-t-il, postulé. C'est un extrait de la Gazette officielle du 22 mai 1985 qui fait état des nominations dont j'ai déposé le document tout à l'heure, M. le Président. Alors, ça pourra compléter le...

Le Président: Un instant! S'il vous plaît, est-ce qu'il y a consentement au dépôt du document?

Des voix: Oui.

Le Président: Document déposé. Alors, maintenant, en question principale, M. le député de Lac-Saint-Jean.

Entente fédérale-provinciale de

développement économique

régional en négociation

M. Brassard: M. le Président...

Une voix: La Gazette officielle!

M. Brassard: ...présumément mauvais négociateur, le gouvernement du Parti québécois concluait, en décembre 1984, une entente-cadre avec Ottawa sur le développement régional, connue sous le nom de EDER et impliquant une contribution fédérale de l'ordre de 900 000 000 $. En juin 1988, le gouvernement libéral, supposé-ment bon négociateur en raison de sa foi fédéraliste inébranlable, signait, il y a deux ans donc, une entente auxiliaire sur le développement régional impliquant une modeste contribution du fédéral de 515 000 000 $, ce qui est d'ailleurs un véritable scandale dans les régions - je vous le signale - parce que deux ans plus tard les régions attendent toujours tous les programmes, les programmes d'aide en vertu de cette entente. (10 h 40)

Parallèlement à cela, l'entente sur le développement régional conclue en décembre 1984 est venue à échéance le 30 mars dernier. Ottawa n'offre que 247 000 000 $ pour son renouvellement, le renouvellement de l'entente pour la période 1990-1995, et payables uniquement en 1994 et en 1995, offre carrément indécente et insultante pour les Québécois. Un autre beau cas de fédéralisme rentable!

Ma question au ministre responsable des négociations avec le gouvernement fédéral: Qu'est-ce qu'il compte faire pour débloquer les négociations avec Ottawa tout en s'assurant d'un niveau de contribution fédérale convenable qui se rapproche en tout cas de celle de 900 000 000 $ consentie en 1984, alors que nous étions au gouvernement plutôt que les maigres 247 000 000 $ offerts par le fédéral pour le renouvellement de cette entente? Qu'est-ce qu'il compte faire pour débloquer des négociations qui sont visiblement bloquées?

Le Président: Alors, M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

M. Rémillard: M. le Président, le député de Lac-Saint-Jean a raison lorsqu'il dit que les ententes de l'EDER, qui avaient été signées en 1984 sont venues à échéance au mois de mars dernier. Nous avions signé, en juin 1988, une autre entente de 820 000 000 $ dont 150 000 000 $ aussi en rallongement de cette entente de CEDER de 1984 qui s'est donc terminée au mois de mars. Alors, il y a encore ces 150 000 000 qui sont en application. J'ai rencontré, M. Benoît Bouchard, le nouveau représentant, le nouveau responsable du Québec et aussi responsable des ententes de développement économique régional. Je l'ai rencontré à deux reprises jusqu'à présent. On doit se rencontrer dans les prochains jours. Les offres qui sont faites par le gouvernement fédéral sont nettement inacceptables, ridicules, 247 000 000 $ payables en 1993-1994 sur deux ans, ce qui est inacceptable pour nous. Nous avons discuté de différentes modalités et je crois que M. Bouchard comprend que ce qui nous avait été offert est totalement inacceptable pour le Québec.

Par conséquent, M. le Président, pendant ce temps-là, nos fonctionnaires travaillent à différentes tables sectorielles et j'espère bien que, dans une prochaine réunion, il y aura plus d'ouverture et plus de possibilité de discuter fructueusement.

Le Président: En question complémentaire.

M. Brassard: Comment le ministre peut-il prétendre sérieusement obtenir davantage que les maigres 247 000 000 $ qui sont sur la table, alors qu'il sait très bien qu'il négocie avec un gouvernement de cassés - tout le monde le sait, tout le monde connaît le niveau d'endettement et de déficit du gouvernement fédéral - et que, par conséquent, il va à contre-courant d'une volonté déterminée du fédéral de diminuer ses transferts

au québec, de toute nature, sous toutes les formes qu'on connaît? comment peut-il sérieusement penser obtenir davantage dans des circonstances semblables et face à une dynamique fédérale qui va dans le sens d'une diminution constante de toutes les contributions fédérales tous azimuts?

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Rémillard: De par mes conversations avec M. Bouchard, il y a deux aspects que je retiens. Le premier aspect, c'est qu'il semble y avoir des questions du côté du gouvernement fédéral sur le principe de l'EDER lui-même. Et ça, j'ai bien mentionné à M. Bouchard que, pour nous, il est essentiel de protéger le principe de l'EDER, qu'on n'acceptera jamais qu'on retrouve des situations où le gouvernement fédéral vient ici dépenser des sommes d'argent sans coordination et sans concertation avec le gouvernement provincial et l'EDER a eu cet avantage.

Nous avons, par l'entente de développement économique régional de juin 1988, bonifie, entre autres, l'entente de l'EDER de 1984. C'est encore mieux. Ça nous permet de travailler en étroite concertation avec le gouvernement fédéral. Donc, au départ, il y a cette première question et, pour nous, l'EDER doit être continuée, telle que bonifiée par les aménagements que nous avons faits avec l'entente sur le développement économique régional de 1988.

Deuxièmement, en ce qui regarde le montant, c'est à négocier. Nous sommes à négocier et j'ai l'impression, M. le Président, que nous avons reçu, chez M. Bouchard, quand même une oreille attentive. Il va voir que la situation que nous présentons est une position qui est très ferme et coordonnée. On ne va pas là en quê-teux. C'est de l'argent qui nous revient et cet argent-là doit nous revenir en fonction des plans de développement dont nous avons ici la maîtrise d'oeuvre au Québec. Si cette condition-là n'est pas respectée, il n'y a pas d'entente possible de notre part.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: M. le Président, le ministre pourrait-il cesser de faire preuve d'un jovialisme euphorique totalement déplacé dans les circonstances et reconnaître au moins - au moins, on demande du gouvernement un peu de lucidité -qu'il est impuissant à changer le cours des choses? La contribution fédérale, sur dix ans, est en stagnation en matière de développement régional, alors qu'elle est en hausse, elle a plus que doublé dans l'Ouest, de 980 000 000 $ à 1 800 000 000 $, et, dans l'Atlantique, de 1 400 000 000 $à2 100 000 000 $...

Le Président: M. le député, s'il vous plaît.

M. Brassard: Bien, ce sont des chiffres, c'est important.

Le Président: Je comprends, mais vous posez une question. Vous ne pouvez pas faire de préambule. Vous savez fort bien que vous faites indirectement ce que vous ne pouvez pas faire directement. Si vous voulez donner tous ces chiffres... Quand même, même le préambule d'une question doit être court, rapide. On dit qu'une seule phrase, généralement, devrait suffire. Les préambules, généralement, s'allongent un peu. Je voudrais les rétrécir, d'autant plus qu'en question additionnelle, vous n'avez pas le droit de faire un préambule, vous ne pouvez pas faire indirectement un préambule, même sous forme interrogative.

Alors, rapidement, votre question.

M. Brassard: Je vais la raccourcir, M. le Président. Reconnaît-il que le gouvernement fédéral est d'abord généreux envers l'Ouest et l'Atlantique et radin envers le Québec?

Le Président: M. le ministre.

M. Rémillard: C'est une vraie question. Alors, voilà une vraie question, M. le Président. J'ai eu l'occasion d'en discuter avec le député de Lac-Saint-Jean lorsque nous avons discuté des crédits du ministère du Secrétariat aux Affaires canadiennes. Le député sait très bien les critiques qu'on peut faire à ce niveau-là, puisque je lui ai fourni un tableau que nos fonctionnaires ont fait à partir des chiffres qu'on retrouve dans le budget Wilson.

Je n'ai pas ce tableau devant moi, mais peut-être que le député de Lac-Saint-Jean l'a devant lui pour me poser la question. Et là, d'une façon éloquente, il va s'apercevoir que, dans les dernières années, le Québec a perdu substantiellement, si on compare, entre autres, à l'Ouest canadien, c'est évident et que cette situation-là ne peut pas durer. Bien sûr qu'on nous arrive avec d'autres programmes qui peuvent exister. Il faut se méfier des chiffres, M. le Président. Il ne faut pas prendre simplement l'EDER dans son sens brut, mais il faut voir aussi avec les autres programmes qui peuvent venir compléter l'EDER.

Mais il demeure quand même une chose, c'est qu'essentiellement, quand on relève les chiffres qui ont été publiés dans le budget de M. Wilson, le Québec n'a pas sa part en ce qui regarde le développement économique régional. Nous allons rencontrer encore M. Bouchard, dans les prochains jours, et j'entends bien faire valoir ce point-là. C'est de l'argent qui revient au Québec, pour nous, un élément de politique qui est fondamental, puisque le développement économique du Québec passe par les régions essentiellement et que nous avons besoin de cet argent-là, c'est de l'argent qui nous revient à

nous.

Le Président: Alors, maintenant, M. le député de Lévis, en question principale.

Commission parlementaire sur la situation des camionneurs artisans

M. Garon: M. le Président, alors que tout le monde sait que le budget de la voirie régionale va baisser de 42 % cette année par rapport à l'an dernier, que les camionneurs sont ici pour demander l'élargissement de leur secteur de travail et la reconnaissance de leur association, nous avons suggéré, la semaine dernière, au ministre d'ajourner ses travaux, à l'Assemblée nationale, en commission parlementaire pour ces projets de loi qui ne sont pas d'une urgence nationale, pour qu'il ait des rencontres avec les camionneurs pour faire le point sur ce conflit.

Voilà que le ministre, presque deux semaines plus tard, propose de faire une commission parlementaire en la fixant au 11 septembre prochain.

Le ministre ne reconnaît-il pas que la tenue d'une commission parlementaire en septembre va seulement envenimer une situation difficile pour le camionnage en vrac et que le conflit actuel risque de se perpétuer sur les chantiers de construction cet été? Et pourquoi le ministre refuse-t-il de trouver une solution immédiate et de convoquer la commission parlementaire dès cet après-midi a 15 heures? (10 h 50)

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Elkas: M. le Président, je trouve les propos du député de Lévis... Il n'est pas trop consistant dans son approche. Il me prie d'avoir une commission parlementaire. Vu les négociations de la semaine dernière, il est très important qu'on continue les négociations, et de s'assurer que tous, incluant les autres groupes qui veulent se faire entendre, aient une chance de se faire entendre. Et nous trouvons que la seule place où on peut le faire, c'est devant une commission parlementaire. Quant à la date du 11 septembre qu'on a retenue ou évoquée, il est évident que ces gens-là aimeraient au moins avoir le temps de se préparer. Ce n'est pas une solution à court terme qu'on recherche. On cherche une solution à long terme. C'est pour cette raison-là que j'ai insisté que ces groupes, le regroupement des entrepreneurs, l'association des constructeurs, les membres à l'intérieur de l'ANCAl, qui sont très très préoccupés par la façon que leur direction les amène... Eux aussi ont demandé de se faire entendre.

Alors, pour ces raisons-là, nous avons cru bon de leur donner le temps de se préparer et de convoquer une commission parlementaire pour le 11 septembre.

Le Président: Question additionnelle.

M. Garon: Est-ce que le ministre veut nous dire que les 2000 à 3000 camionneurs qui sont à Québec ne sont pas prêts à faire état de leur problème? Ils sont ici depuis deux semaines rien que pour ça. Est-ce qu'il veut nous faire croire qu'une commission parlementaire immédiate soit moins bonne qu'une commission parlementaire en septembre alors qu'ils sont déjà là et que les problèmes sont actuels? Et est-ce que le ministre peut comprendre que le refus de régler le conflit avant la fin de la session va créer une situation intenable et explosive au cours des prochains mois? Est-ce qu'il est capable de comprendre ça?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Elkas: M. le Président, je veux réitérer le point que j'ai fait. On a eu des rencontres, on a eu des négociations, on a eu des propositions et on revient toujours à la même situation. Ces gens-là ne représentent pas l'ensemble des camionneurs en vrac et nous avons offert une commission parlementaire. On est flexible quant à la date où on veut la tenir.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Lévis.

M. Garon: Une dernière question, M. le Président. Est-ce que le ministre est prêt à faire cette commission parlementaire immédiatement, dès cet après-midi, et à inviter les autres groupes, s'il le veut, ils diront qui ils représentent? Et est-ce qu'il peut nous dire si c'est lui qui est en charge du budget de son ministère ou si ce sont les entrepreneurs en construction? Qu'il dise quelle partie du budget de son ministère doit aller pour les travaux pour les camionneurs artisans, et celle qui doit aller pour les camionneurs, les entrepreneurs en construction? Est-ce que c'est lui qui dirige son ministère ou si ce sont les entrepreneurs en construction avec son sous-ministre?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Elkas: M. le Président, sur ce point, je crois que l'ensemble de cette Chambre croit vraiment à la libre entreprise. C'est dans cette direction qu'on veut s'enligner. Et puis, nous sommes la seule province dans tout le Canada à avoir des réglementations. Alors, quant à nous, on est prêt à répondre à des demandes que ces gens-là ont faites, mais n'oublions pas une chose. Il y en a d'autres et c'est difficile de tous les regrouper. Ils sont tous dans les régions, en plus du fait que ces gens-là se réunissent cet après-midi à 15 heures pour discuter de la proposition qu'on a faite.

Le Président: Alors, en question principale,

Mme la députée de Marie-Victorin.

Le rapport Bertrand sur la lutte contre la drogue

Mme Vermette: Oui, M. le Président, le groupe de travail de Mario Bertrand a déposé son rapport jeudi dernier. Le rapport contient 33 recommandations que devront appliquer 9 ministères ou organismes, ce qui ne répond pas du tout à la demande des intervenants du milieu qui, depuis de nombreuses années, demandent justement un organisme unificateur, catalyseur dans le domaine de la toxicomanie et ils demandent et réclament un conseil québécois en toxicomanie.

M. le Président, en l'absence du premier ministre, ma question s'adressera à la vice-première ministre. Comment considérez-vous la demande des différents intervenants en toxicomanie qui réclament depuis de nombreuses années et surtout depuis les propositions formulées par Mario Bertrand, parce que vous avez suscité beaucoup d'attentes... Comment allez-vous concilier les recommandations du rapport Bertrand et les demandes des intervenants dans le milieu de la toxicomanie?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: Je suis surprise, M. le Président, de la question de la députée de Marie-Victorin. On a eu quand même toute latitude d'en discuter lors de l'étude des crédits que j'ai eu le plaisir de faire avec elle. Je dois dire que partout on a reçu avec beaucoup de positivisme, les gens ont été très positifs face au rapport du dossier Bertrand. Je dois dire que, sauf la députée de Marie-Victorin, il m'a semblé, en tout cas, en lisant la satisfaction du milieu des recommandations qui ont été faites par le comité Bertrand, que c'étaient des recommandations qu'il était possible d'appliquer et qui répondaient à des attentes et des besoins du milieu. J'aurais aimé que la députée de Marie-Victorin aille déposer devant ce comité, avec son groupe qu'elle a formé elle-même et, au-dessus de toute partisanerie, se rende témoigner des besoins et des attentes de son groupe et le fasse devant le comité qui a rencontré, qui a discuté, qui a eu un grand nombre de groupes devant lui pour discuter de ce dossier qui est fort important pour le Québec. J'aurais aimé qu'elle fasse connaître à ce groupe ses attentes, ses préoccupations, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire.

Mme Vermette: Oui, M. le Président. Est-ce que la vice-première ministre peut nous dire, entre les recommandations du rapport Mario Bertrand et les demandes des intervenants qui réclament un organisme unificateur et catalyseur, comment elle peut concilier les neuf organismes qui devront répondre pour faire cette coordination et cette concertation-là, à travers les recommandations du rapport Bertrand et les demandes des intervenants d'avoir un orgnisme unificateur et catalyseur?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: M. le Président, devant le problème de la drogue, qui est un problème fort important et qu'on est loin de minimiser, je pense que les gestes que ce gouvernement a posés depuis son arrivée au pouvoir le disent. Le premier ministre a confié à son secrétaire général, M. Benoît Morin, la tâche de coordonner les travaux qui sont faits. J'ai entièrement confiance au secrétaire général pour faire de cette coordination un mouvement fort positif qui permettra de régler certains de ces problèmes, sinon tous les problèmes.

Le Président: Une question complémentaire.

Mme Vermette: Oui, M. le Président. Est-ce que la vice-première ministre peut nous donner l'assurance qu'elle ira au Conseil du trésor pour réclamer les budgets nécessaires pour actualiser les recommandations pour l'année 1990-1991 et quel montant les sommes représentent-elles pour, justement, faire en sorte que les victimes de la toxicomanie puissent avoir des services décents pour cette année?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: M. le Président, j'espère qu'elles seront - sûrement - plus importantes que les sommes que l'ancien gouvernement a accordées à ce dossier, qui sont de 300 000 $ pendant neuf ans. Et je suis certaine que ces sommes-là seront certainement plus importantes que ce que ce gouvernement a donné.

Le Président: En question principale, M. le député de Jonquière.

Demande d'enquête sur la corporation municipale Anjou '80

M. Dufour: II y a trois semaines, le maire d'Anjou, M. Richard Quirion, adressait au ministère des Affaires municipales une demande d'enquête concernant la corporation municipale Anjou' 80. M. Quirion s'est dit prêt à collaborer de près avec le gouvernement du Québec afin de faire la lumière sur Anjou' 80. Rappelons que la corporation a été mise sur pied par l'administration précédente du maire Corbeil qui disait, qui affirmait par lettre, le 21 octobre 1987, que "les

contribuables angevins n'auront jamais à éponger de leurs taxes un déficit de la corporation Anjou' 80, je vous en donne ma parole." Le déficit s'élève aujourd'hui à 10 300 000 $, auxquels il faut ajouter 7000 $ en intérêts, chaque jour.

Ma question au ministre des Affaires municipales: Est-ce que le ministre entend donner suite à la demande d'enquête du maire Qui-rion?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Picotte: M. le Président, à chaque occasion, chez nous, où une demande d'enquête nous est formulée, le service de la vérification de mon ministère se présente sur les lieux, va faire les vérifications d'usage. Et s'il y a lieu, par la suite, il y a recommandation d'aller plus loin, ce qui veut dire qu'il y a possibilité d'aller à la Commission municipale du Québec; mais on n'en est pas rendu là. La demande d'enquête a été reçue chez nous. Les vérificateurs vont faire l'essentiel pour aller cueillir les informations. Et par la suite, les recommandations seront faites à celui qui vous parle. S'il faut aller plus loin, nous irons.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Devant des faits aussi importants que 10 300 000 $ de déficit, est-ce que le ministre ne peut pas accélérer le processus? Et est-ce qu'il pourrait nous informer si les contribuables de la ville d'Anjou vont être obligés de payer le déficit?

Le Président: Alors, M. le ministre des Affaires municipales.

M. Picotte: M. le Président, il y a une chose que je ne fais jamais à mon ministère, c'est d'aller ordonner à des demandes d'enquêtes de faire des préséances à gauche ou à droite. Je pense que celui qui me questionne me ferait de drôles de reproches si je faisais venir mes fonctionnaires du côté des demandes de vérification et tout simplement leur dire: Vous devriez passer ce cas-là avant tel autre cas, parce qu'il me semble plus important. Je ne touche pas à ça, les vérifications. Je laisse faire le travail du ministère en conséquence et ce n'est que lorsqu'ils me feront des recommandations que j'agirai par la suite. Je ne veux pas et je ne ferai pas, sur quelque insistance de qui que ce soit, une intervention entre la demande de vérification et les vérificateurs qui vont aller à l'endroit désigné pour tâcher de s'enquérir des faits.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Dufour: M. le ministre des Affaires municipales, comme gardien de la transparence et de l'honnêteté des administrateurs municipaux, est-ce que vous ne considérez pas que l'ensemble des cas que j'ai soulevés lors de l'étude des crédits, plus ceux qui s'accumulent à chaque jour, qu'il y a un certain laxisme qui se passe actuellement et que le ministre a tous les pouvoirs pour faire les enquêtes, en temps et lieu, quand il le veut.

Le Président: M. le ministre.

M. Picotte: M. le Président, je ne considère pas ce que le député de Jonquière a dit du côté du laxisme, parce que, effectivement, nous avons de multiples demandes d'enquêtes chez nous. Nous les faisons, ces enquêtes-là, et ça va arriver très souvent qu'il y a des enquêtes qui nous sont demandées et qui ne touchent pas du tout les Affaires municipales. Un exemple concret que je pourrais vous donner, c'est: Pourriez-vous vérifier si, dans telle transaction, il y a eu pot-de-vin de la part de qui que ce soit? Non. Nous préférons, nous, nous faire dire: M. Untel ou Mme Unetelle aurait reçu des pots-de-vin. Quand on ne veut pas préciser ces choses-là, ce n'est pas à nous, aux Affaires municipales, à faire ça, ce sont des enquêtes d'ordre criminel. Nous ne vérifions que ce que les municipalités font dans la légalité des municipalités. Point final à la ligne. Et, par la suite, nous avisons. Si, évidemment, nous découvrons qu'il y a lieu d'aller plus loin du côté criminel, nous déférons ces cas-là à la Justice et, à ce moment-là, je n'interviens pas davantage auprès de mon collègue, le ministre de la Justice, qui, lui, évalue la possibilité de poursuivre ou de ne pas poursuivre. Et, à ce moment-là, ça ne relève pas de mon domaine comme tel. Mais moi, je fais exactement ce que je dois faire.

Le Président: C'est la fin de la période de questions.

Tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder aux deux votes reportés. (11 h4 - 11 h6)

Le Président: Mmes, MM. les députés. Si vous voulez prendre place, s'il vous plaît. Je requiers l'attention de tous les députés, s'il vous plaît. Mmes, MM. les députés. Je me demande si tout le monde est prêt. Je requiers votre attention. Je vous remercie infiniment.

Mise aux voix de l'adoption du principe du projet de loi 42

Je vais d'abord mettre aux voix la motion présentée par M. le ministre de la Santé et des Services sociaux proposant que le principe du projet de loi 42, Loi modifiant la Loi sur l'as-surance-maladie et la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec, soit maintenant

adopté. Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: m. pagé (portneuf), m. bissonnet (jeanne-mance), mme gagnon-tremblay (saint-françois), m. paradis (brome-missisquoi), mme bacon (chomedey), m. ryan (argen-teuil), m. côté (charlesbourg), m. bourbeau (la-porte), m. vallerand (crémazie), m. côté (rivière-du-loup), m. sirros (laurier), m. vallières (richmond), m. savoie (abitibi-est), m. séguin (montmorency), m. rémillard (jean-talon), m. dutil (beauce-sud), mme frulla-hébert (margue-rite-bourgeoys), m. elkas (robert-baldwin), m. lefebvre (frontenac), m. johnson (vaudreuil), m. cusano (viau), m. picotte (maskinongé), mme robillard (chambly), m. blackburn (roberval), m. houde (bert hier), m. maltais (saguenay), m. ri-vard (rosemont), mme trépanier (dorion), m. middlemiss (pontiac), m. chagnon (saint-louis), mme dionne (kamouraska-témiscouata), m. hamel (sherbrooke), m. st-roch (drummond), mme pelchat (vachon), m. marcil (salaberry-soulanges), m. lemire (saint-maurice), m. poulin (chauveau), m. thérien (rousseau), m. tremblay (rimouski), m. benoit (orford), m. williams (nelligan), m. kehoe (chapleau), m. doyon (louis-hébert), m. fradet (vimont), m. lemieux (vanier), m. messier (saint-hyacinthe), m. richard (nicolet-yamaska), mme bégin (bellechasse), m. bélanger (laval-des-rapides), m. chenail (beauharnois-huntingdon), m. larouche (anjou), m. khelfa (richelieu), m. gobé (lafontaine), mme hoving-ton (matane), m. joly (fabre), m. lesage (hull), m. bergeron (deux-montagnes), mme boucher bacon (bourget), m. audet (beauce-nord), m. parent (sauvé), mme bélanger (mégantic-compton), m. camden (lotbinière), m. brouillette (champlain), m. bradet (charlevoix), mme cardinal (châteauguay), m. després (limoilou), m. farrah (îles-de-la-madeleine), mme loiselle (saint-

Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau), M. Libman (D'Arcy-McGee), M. Cameron (Jacques-Cartier).

Le Président: Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Parizeau (L'Assomption), M. Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Baril (Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour (Jonquière), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Claveau (Ungava), M. Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terre-bonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), Mme Dupuis (Verchères), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les

Chutes-de-la-Chaudière).

Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions? (11 h 10)

La motion est adoptée. M. le leader du gouvernement.

Le Secrétaire: pour: 73 contre: 22

Le Président: La motion est adoptée. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Pagé: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des affaires sociales pour étude détaillée.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Mise aux voix de la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 61

Le Président: Adopté. Je vais maintenant mettre aux voix la motion présentée par Mme la ministre déléguée à la Condition féminine et ministre responsable de la Famille, proposant que le principe du projet de loi 61, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance, soit maintenant adopté.

Que ceux et celles qui sont pour cette motion veuillent bien se lever s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Portneuf), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argen-teuil), M. Côté (Charlesbourg), M. Bourbeau (La-porte), M. Vallerand (Crémazie), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Sirros (Laurier), M. Vallières (Richmond), M. Savoie (Abitibi-Est), M. Séguin (Montmorency), M. Rémillard (Jean-Talon), M. Dutil (Beauce-Sud), Mme Frulla-Hébert (Margue-rite-Bourgeoys), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Lefebvre (Frontenac), M. Johnson (Vaudreuil), M. Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinongé), Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), M. Houde (Berthier), M. Maltais (Saguenay), M. Ri-vard (Rosemont), Mme Trépanier (Dorion), M. Middlemiss (Pontiac), M. Chagnon (Saint-Louis), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel (Sherbrooke), M. St-Roch (Drummond), Mme Pelchat (Vachon), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Kehoe (Chapleau), M. Doyon (Louis-Hébert), M.

Fradet (Vimont), M. Lemieux (Vanier), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Larouche (Anjou), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hoving-ton (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Audet (Beau-ce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Brouillette (Champlain), M. Bradet (Charlevoix), Mme Cardinal (Châteauguay), M. Després (Limoilou), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), Mme Loi-selle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau).

M. Parizeau (L'Assomption), M. Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Baril (Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour (Jonquière), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette (Ma-rie-Victorin), M. Claveau (Ungava), M. Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), Mme Dupuis (Verchères), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière).

M. Libman (D'Arcy-McGee), M. Cameron (Jacques-Cartier).

Le Président: Est-ce qu'il y a des députés qui sont contre cette motion? Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: pour: 94 contre: aucun

Le Président: Alors, la motion est adoptée. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Pagé: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des affaires sociales pour étude détaillée.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

Maintenant, aux motions sans préavis. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, j'avais donné dans les notes un avis comme quoi j'entendais déposer une motion sans préavis, ce matin. Je vais le faire demain. Vous pouvez reconnaître le député du comté de Lac-Saint-Jean. Je voudrais confirmer avec le leader de l'Opposition l'objet d'une entente qui est intervenue relativement au cadre d'intervention à la suite de cette motion très importante où on aura un représentant du

Parti québécois, un représentant du Parti libéral du Québec et un représentant du Parti Égalité, s'il juge opportun de se prévaloir de son droit.

Le Président: Alors, M. le député de Lac-Saint-Jean, pour une motion sans préavis.

Souligner le 50e anniversaire de

l'appel lancé au peuple français

par le général de Gaulle

M. Jacques Brassard

M. Brassard: Oui, M. le Président. Comme le leader du gouvernement vient de le mentionner il y a, semble-t-il, consentement unanime pour qu'on débatte et qu'on adopte la motion suivante: "Que l'Assemblée nationale souligne le 50e anniversaire de l'appel lancé le 18 juin 1940 au peuple français par le général de Gaulle qui devait permettre à la France de conserver sa dignité au moment de la triste période de l'occupation, tout en favorisant le regroupement des forces de libération qui contribuèrent à la victoire de la démocratie sur le régime nazi".

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

Des voix: Consentement.

Le Président: Consentement. Également, nous allons faire un ordre de l'Assemblée à l'effet que les interventions sur cette motion seront de cinq minutes pour le député de Lac-Saint-Jean, de cinq minutes pour un représentant du parti ministériel et de cinq minutes pour un député indépendant. Il y a un ordre de l'Assemblée à cet effet-là? Très bien, donc c'est un ordre de l'Assemblée. En requérant la collaboration et l'attention de tous les députés, s'il vous plaît. Alors, MM. les députés, ceux qui doivent tenir des caucus, veuillez le faire à l'extérieur. Alors, sur votre motion, maintenant, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: M. le Président, l'année 1990, c'est, je pense qu'on peut le dire, l'année de Gaulle, puisque c'est le 100e anniversaire de sa naissance, le 20e anniversaire de sa mort et aussi, aujourd'hui même, le 50e anniversaire de ce qu'il est convenu d'appeler l'Appel du 18 juin.

En juin 1940, la France est vaincue. Son armée est en déroute et le maréchal Pétain va engager la France dans la voie de la collaboration avec l'ennemi. C'est alors que de Londres nous arrive un appel à la résistance. Il vient d'un général récemment nommé sous-secrétaire d'État dans le dernier gouvernement Reynaud, donc pratiquement inconnu, le général de Gaulle.

L'Appel du 18 juin est une invitation

solennelle à la poursuite de la lutte. Alors que Pétain se soumet et collabore, de Gaulle affirme, lui, que rien n'est perdu pour la France. Il dira: La France a perdu une bataille, mais n'a pas perdu la guerre; qu'il s'agit, selon lui, d'une guerre mondiale et que, dans ces conditions, la résistance française ne doit pas s'éteindre. Un jour, dira-t-il, les forces de l'univers libre écraseront l'ennemi. Il faut que la France, ce jour-là, soit présente à la victoire; alors, elle retrouvera sa liberté et sa grandeur! C'est le but qu'il s'est fixé et ce sera, tout au cours de la guerre, je dirais, son obsession passionnée.

Le 18 juin, c'est donc un acte de foi dans l'avenir de la France, mais c'est aussi un acte politique puisque, considérant comme illégitime le gouvernement issu de la défaite, devenu, selon lui, un instrument de l'ennemi, l'avenir et le destin de la France sont désormais représentés par ceux, ceux de la France libre, qui ont décidé de combattre pour sa survie, son indépendance et sa grandeur. Grâce à de Gaulle, non seulement la France est restée dans la guerre, mais elle a aussi, dans l'honneur, contribué à la libération du territoire national et à la victoire sur l'ennemi commun. Grâce à de Gaulle, elle a reconquis sa place, ce qui n'a pas toujours été facile quand on connaît, par exemple, les relations de de Gaulle avec Roosevelt, elle a donc repris et reconquis sa place au milieu de ses alliés, participé à toutes les discussions et à toutes les responsabilités internationales.

Dans un numéro spécial de L'Express consacré à de Gaulle, Régis Debray écrit: "Le-clerc est un héros, de Gaulle est un génie. Pourquoi? Parce qu'il joue les profondeurs contre les surfaces en faisant, le 18 juin, un coup de nation comme d'autres font un coup d'État. Il ne choisit pas seulement la légitimité contre la légalité; il joue la permanence contre l'accidentel, la longue durée contre la vision courte qui prévalait en 1940 à Vichy comme chez neuf Français sur dix." (11 h 20)

M. le Président, c'était donc, comme on le voit, un visionnaire, donc quelqu'un apte à saisir l'avenir ou à aller au fond des choses, selon l'expression qu'il utilisait souvent. Il avait à cet égard des intuitions prophétiques. On se rappellera, M. le Président, que, le soir de l'attaque japonaise contre Pearl Harbor, il avait dit à un de ses proches: "Maintenant la guerre est définitivement gagnée" puisque c'était devenu une guerre mondiale, les États-Unis étant maintenant partie prenante du camp des Alliés. Il démontrera plus tard, d'ailleurs, ce sens de la vision et cette aptitude à saisir l'avenir. La réunification de l'Allemagne qui est en cours, par exemple, ne le surprendrait pas. Il a toujours cru, selon André Fontaine, que les nations étaient plus fortes que les idéologies. Et on peut dire également que son Europe, de l'Atlantique à J'Oural, est peut-être en train de naître présen- tement.

Aujourd'hui, donc, M. le Président, nous célébrons le cinquantenaire de l'Appel du 18 juin. Il convient de se rappeler cet acte de naissance de la France libre, mais aussi de se souvenir de cette figure de proue de l'histoire de France qui incarna de façon exemplaire, dans la tourmente de la Deuxième Guerre mondiale, l'honneur, la dignité et la liberté de la France.

Le Président: Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre délégué à la Francophonie.

M. Guy Rivard

M. Rivard: Merci, M. le Président. À mon tour, je souhaite que les membres de l'Assemblée nationale s'associent à la communauté française du Québec pour souligner de façon particulière un moment de l'histoire moderne. C'est aujourd'hui le 50e anniversaire de cet Appel du 18 juin 1940 du général de Gaulle.

Il y a, en effet, un demi-siècle, à Londres, la BBC diffusait, à l'intention de tous les Français, un message du général. "La France a perdu une bataille, disait-il, mais la France n'a pas perdu la guerre. Rien n'est perdu parce que cette guerre est une guerre mondiale. Voilà pourquoi je convie tous les Français, où qu'ils se trouvent, à s'unir à moi dans l'action, dans le sacrifice et dans l'espérance." Appelant à l'espoir, ce message constitue un refus vibrant de l'armistice et de la fin des combats que demandait aux Français le maréchal Pétain.

Le message qui fut diffusé à plusieurs reprises dans les jours suivants et reproduit par la presse britannique et certains journaux français annonçait encore, et je cite: "Quoiqu'il arrive, la flamme de la résistance française ne doit pas s'éteindre et ne s'éteindra pas." Fin de la citation.

M. le Président, l'Appel du 18 juin 1940 constitue un événement historique qui mérite d'être souligné à plus d'un titre. Il aura d'abord été le point de départ de ce vaste mouvement que l'on a appelé la France libre, aussi bien en métropole que dans les territoires et colonies françaises, voire à l'extérieur de la France. L'exploit du générai de Gaulle est d'autant plus impressionnant que l'on sait que, peu après la diffusion de son message sur les ondes de la radio de Londres, c'est presque seul, avec à peine quelques capitaines inconnus et journalistes, que le général a commencé son entreprise.

L'appel de Charles de Gaulle aura permis également de découvrir un homme, jusque-là peu connu. Michel Debré, alors ministre, écrira plus tard, et je cite: "Le 18 juin 1940 est né un chef dont, en 30 ans, le destin a élargi la dimension jusqu'aux limites de la terre." Lorsqu'il lança son appel, de Gaulle était alors général à titre temporaire et ne pouvait compter, comme ex-

périence politique, qu'un bref moment comme membre du cabinet Reynaud.

Au plus fort de la tempête qui secouait alors l'Europe et le monde, Charles de Gaulle assuma pleinement et porta seul le poids de la France. Il se décrira lui-même, dans ses mémoires, comme un homme au bord de l'océan qu'il prétendait traverser à la nage. Garant, à ce moment-là, de l'honneur de la France, Charles de Gaulle met le plus clair de son génie à faire en sorte que l'on ne profite pas de la faiblesse momentanée de son pays pour empiéter sur les intérêts et les positions de la France dans le monde. De Gaulle fait alors ce qu'il croit devoir faire pour assurer à son pays toute la place qui lui revient.

M. le Président, je demande donc aux membres de cette Assemblée d'unir leur voix à celles qui se lèvent ici au Québec, en France, ce pays qui nous est cher, et partout dans le monde, pour rappeler un événement dont le caractère historique est indéniable. Je vous remercie.

Le Président: Merci, M. le ministre délégué à la Francophonie. Je vais maintenant reconnaître M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Robert Libman

M. Libman: Merci, M. le Président. Le général était, à tous points de vue, un grand homme, un géant. La motion du député de Lac-Saint-Jean commémore son appel aux Français le 18 juin 1940.

Si le député de Notre-Dame-de-Grâce avait pu être ici, il aurait rappelé à la Chambre les faits suivants: que, le 10 mai 1940, Winston Churchill devint premier ministre de l'Angleterre; que du 26 mai au 4 juin 1940, il y eut l'évacuation de Dunkerque. La flotte de 900 bateaux de toutes sortes a évacué 338 266 soldats, dont 26 175 soldats français. Peu de temps après, ces troupes se sont formées comme armée de la France libre sous l'enseigne de la Croix de Lorraine. Leur chef, le général de Gaulle, est devenu la personnification de la France libre. C'est lui et le général Leclerc qui ont été en tête de file lors de la libération de Paris, le 25 août 1944.

Nous n'avons pas le temps, M. le Président, de suivre toute la carrière politique du général. Plus tard, il a répondu de nouveau à l'appel du peuple français. Il est devenu président de la Ve République et, entre autres succès, il a réglé la guerre en Algérie. Le général est sans doute, avec Winston Churchill, Roosevelt et Staline, l'un des grands hommes du XXe siècle.

Ici, au Québec, nous ne pouvons pas oublier sa déclaration du 23 juillet 1967 à l'hôtel de ville de Montréal. Here is what one author has written about the General's statement, on that date. He said that "the President of France had uttered the rallying cry of the Québec independence movement. For the next 24 hours, Montreal, Québec and most of Canada were charged with the electricity that augurs a great storm. Some immediately suggested that de Gaulle did not realize the impact of what he was saying. But over the next few months the General would make it crystal clear that he did.

English press and politicians reacted as if de Gaulle had shouted "fire" in a crowd of people who did not know how to handle themselves, as if his shouting "Vive le Québec libre" would suddenly send the French population of Québec stampeding toward the separatist option.

In Ottawa, Prime Minister Lester Pearson came out of an emergency cabinet meeting on the question to say that the Canadian Government regarded de Gaulle's remarks as an unacceptable intrusion, that "Canadians do not need to be liberated... Canada will remain united and will reject any attempts to destroy her unity."

Part of the Canadian Government's statement read as follows: The people of Canada are free. Each province of Canada is free. Canadians do not need to be liberated. Indeed many thousands of Canadians gave their lives in two world wars in the liberation of France and other European countries. "Canada will continue to remain united and will reject any effort to destroy her unity." Fin de la citation.

Pauvre M. Pearson. Je suis presque heureux qu'il ne soit pas ici ces jours-ci pour témoigner du déchirement actuel de notre pays à ce moment de notre histoire.

Mais passons. Tout homme politique a le droit de faire des déclarations-chocs de temps à autres:

Alors, c'est pour ça, M. le Président, que notre formation politique et moi-même nous rallions à la résolution de ce matin et j'appuie son adoption.

Le Président: Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Le débat étant terminé, est-ce que la motion soulignant le 50e anniversaire de l'appel lancé au peuple français par le général de Gaulle est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.

Maintenant, aux avis touchant les travaux des commissions.

M. le leader adjoint du gouvernement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Lefebvre: M. le Président, j'avise l'Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 47,

Loi modifiant le Code civil du Québec concernant le partage du patrimoine familial. Après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission de l'aménagement et des équipements poursuivra TéTûde "détaillée dû projet de loi 60, Loi sur la Société québécoise de récupération et de recyclage. Après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle du Conseil législatif, la commission des affaires sociales poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 70, Loi concernant l'adoption et modifiant le Code civil du Québec, le Code de procédure civile et la Loi sur la protection de la jeunesse.

De 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-Lafontaine, la commission de l'aménagement et des équipements procédera à l'étude détaillée du projet de loi 51, Loi modifiant la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités. (11 h 30)

De 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif, la commission des affaires sociales procédera à l'étude détaillée des projets de loi suivants, et ce dans l'ordre ci-après indiqué: le projet de loi 61, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance, le projet de loi 32, Loi modifiant la Loi sur la protection de la santé publique et le projet de loi 42, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-maladie et la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec.

De 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission des institutions procédera à l'étude détaillée du projet de loi 68, Loi modifiant la Loi sur l'organisation policière et modifiant la Loi de police et diverses dispositions législatives. Merci, M. le Président.

Le Président: merci, m. le leader adjoint du gouvernement. de mon côté, je vous avise que demain, le mardi 19 juin 1990, à compter de 8 h 30, la commission des affaires sociales se réunira en séance de travail à la salle rc-171 de l'hôtel du parlement.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Est-ce qu'il y a des questions? Il n'y a pas de question. Ceci met donc fin à la période des affaires courantes.

Aux affaires du jour, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, je vous inviterais à appeler l'article 80 du feuilleton d'aujourd'hui, se référant à la motion présentée concernant l'article 251 du règlement et portant sur le projet de loi 50.

Motion de clôture de l'étude détaillée du projet de loi 50

Le Président: Alors, à l'article 80 du feuilleton, nous allons maintenant débattre de la motion proposée par M. le leader adjoint du gouvernement, conformément à l'article 251 du règlement, motion qui se lit comme suit: "Que la commission de l'aménagement et des équipements, à qui a été confiée l'étude détaillée du projet de loi 50, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec et d'autres dispositions législatives, mette fin à ses travaux quant à ce mandat dès l'adoption de la présente motion et fasse rapport au moment prévu de la période des affaires courantes de la séance qui suit celle au cours de laquelle aura été adoptée la présente motion."

Je suis donc prêt à reconnaître un premier intervenant sur cette motion. Alors, M. le ministre des Transports.

M. Sam L. Elkas

M. Elkas: M. le Président, nous nous voyons aujourd'hui obligés de débattre une motion pour clore le débat sur l'étude en commission parlementaire sur le projet de loi 50. Nous étions prêts à terminer l'étude de ce projet de loi et nous avions espoir que les débats se dérouleraient dans un esprit de collaboration, de recherche et de franche discussion. Les membres de l'Opposition, cependant, ont préféré continuer d'utiliser pendant deux jours les mêmes tactiques dilatoires qu'ils ont utilisées tout au long de la semaine dernière.

Après avoir déposé des motions de scission et de report, en Chambre, les membres de l'Opposition ont systématiquement torpillé les travaux en commission, en présentant à nouveau des motions dilatoires pour entendre des groupes et des personnes qui n'étaient, pour la plupart, pas concernés par le projet de loi en question. Nous avons donc dû débattre pendant des heures ces motions dilatoires dont le seul but réel était de retarder le plus possible l'étude détaillée du projet de loi 50.

On nous a demandé de convoquer le conseil d'administration de la Régie de l'assurance automobile du Québec, des représentants de la Fédération des femmes du Québec, des gens de l'association des personnes de l'âge d'or du Québec, le Vérificateur général, le Protecteur du citoyen, les membres de l'exécutif de l'ANCAl, l'Association des camionneurs artisans. Il n'y a personne qu'on n'a pas demandé de venir siéger chez nous. Si on avait poursuivi les travaux de la commission, on aurait peut-être demandé d'entendre les Expos ou les Nordiques.

Il était clair qu'au bout de 14 heures de discours interminables de la part des membres de l'Opposition il n'y avait aucune volonté de réaliser l'étude du projet de loi 50. Bien au contraire, on a tenu, pendant des heures, à discuter des discours de sourds sur le projet de loi 92 qui, pourtant, avait été longuement discuté par mon prédécesseur et les membres de l'Opposition et adopté par cette Chambre en juin

1989. Non, M. le Président, il s'agit tout simplement de nous faire perdre notre temps. Mais le temps presse, justement. Des milliers de Québécois attendent avec impatience et ont droit que leur réseau routier soit amélioré et devienne plus sécuritaire.

Après un premier mandat pendant lequel le gouvernement a pu assainir ses finances, il se voit capable maintenant d'injecter 1 700 000 000 $ pour réparer et améliorer un réseau routier que le gouvernement précédent a laissé se détériorer pendant des années. Finalement, après quatre ans de saine gestion financière, le gouvernement s'apprête à investir sur les routes du Québec pour les rendre plus sécuritaires. Les membres de l'Opposition ne sont pas d'accord avec nous. C'est normal, c'est leur rôle de s'opposer. Ils ne sont pas d'accord sur nos sources de financement. Plutôt que de puiser dans les économies du gouvernement, les économies des Québécois, et de les réinvestir pour qu'elles soient plus rentables à courte et à longue échéance en termes d'un meilleur bilan routier, en termes d'économie d'argent et de vies humaines, les membres de l'Opposition, qui ont systématiquement bloqué les travaux de la commission, préféreraient augmenter les taxes des Québécois.

Ce gouvernement, M. le Président, ne veut pas taxer davantage les Québécois. Il veut utiliser judicieusement et de façon transparente des économies accumulées dans la réserve de stabilisation de la Régie de l'assurance automobile du Québec, conformément à la mission de la Régie qui est d'assurer aux usagers de la route un accès sécuritaire au réseau routier au Québec.

Le gouvernement du Québec a décidé sagement d'utiliser ces fonds accumulés de la Régie à des fins d'immobilisations en matière de sécurité routière par la voie du projet de loi 50. En retarder indûment l'adoption, c'est priver des centaines de milliers de Québécois d'un accès plus sécuritaire aux routes du Québec. Nous ne voulons ménager aucun effort pour diminuer le nombre de morts et de blessés graves sur nos routes. Les immobilisations en matière de sécurité routière, glissières de la signalisation, construction de lits d'arrêt, meilleur éclairage, correction des courbes dangereuses, toutes ces améliorations prévues vont contribuer à ce même objectif. Nous sommes tous d'accord que les routes du Québec ont besoin de réparations. Les infrastructures et bien des ponts ont besoin d'être consolidés. Le gouvernement du Québec a élaboré son plan quinquennal précisément pour remédier à cette situation.

Les membres de l'Opposition ont tenté systématiquement de scinder ou de reporter ce projet de loi. Ces motions dilatoires équivalent non seulement à empêcher de corriger ces situations dangereuses, mais aussi à ralentir le développement économique au Québec, puisque l'amélioration du réseau routier et de ses infrastructures est indispensable au bon fonctionnement de l'industrie du transport dans toutes les régions. Ce projet de loi est trop important et trop urgent pour ne pas être mis en vigueur aussitôt que possible.

Je vous le dis, M. le Président, et je le répète, comme je l'ai fait à maintes reprises au cours de la commission parlementaire, si les membres de l'Opposition ne sont pas intéressés à améliorer les routes du Québec et à offrir, par le fait même, du travail et des emplois dans leur région, moi, je le suis. Je me permets d'insister, M. le Président, afin que mes propos soient bien compris, car ce sont des emplois pour toutes les régions du Québec, incluant celles des membres de l'Opposition. 1 700 000 000 $ sur cinq ans représentent un réel effort de trouver une solution viable à notre situation routière. C'est aussi 1 700 000 000 $ de travaux auxquels les camionneurs pourront également participer dans leur région.

Il est temps de clore ces débats qui n'aboutissent à rien et de passer à l'action pour mettre en marche le plan quinquennal du ministère des Transports auquel les Québécois ont droit et qu'ils attendent avec impatience. Merci, M. le Président. (11 h 40)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Je reconnais maintenant, à titre de porte-parole du groupe parlementaire, M. le député de Joliette et leader de l'Opposition officielle.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. M. le Président, ce matin, c'est de l'inédit, du jamais vu, de l'inconcevable. C'est la troisième fois en cinq jours ouvrables, la troisième fois en cinq jours ouvrables, que ce Parlement impose un bâillon, la troisième fois en cinq jours ouvrables. Trouvez-moi ça dans les annales du parlementarisme, M. le Président, et je vous avoue que je m'excuserai publiquement! C'est la troisième fois dans l'histoire du parlementarisme qu'un gouvernement, pour des raisons que nous ignorons, mais dont on peut se douter, impose au Parlement un troisième bâillon en cinq jours ouvrables, un troisième bâillon, sur trois lois: l'imposition de taxes scolaires; un rapt, un vol littéral aux assurés de la Régie de l'assurance automobile, soit deux mesures fiscales, deux lois fiscales - et jamais, dans l'histoire du Parlement, on a imposé des bâillons sur des lois fiscales - et la troisième loi, M. le Président, c'était pour les heures d'affaires où il n'y a aucune urgence. Ordinairement, pourquoi utilise-t-on un bâillon à l'Assemblée nationale? Quelle est la tradition? Quelle est la coutume? Et ça sert à quoi un bâillon? M. le Président, je vais essayer d'expliquer ça un peu à la population.

On a un gouvernement qui ne veut surtout

pas entendre parler de quoi que ce soit au cas où on pourrait informer les citoyens du Québec. On a un gouvernement qui veut cacher littéralement la vérité au monde ordinaire, aux citoyens du Québec qui sont en droit d'avoir des informations. Le bâillon, ordinairement, vient mettre fin à une discussion, M. le Président, qui a duré des centaines et des centaines d'heures et où tout a été dit. Mais là ça fait... Dans le cas présent, savez-vous après combien d'heures arrive le bâillon, M. le Président? Après treize heures, treize heures; vingt-trois heures sur le projet de loi 69 et vingt-quatre heures sur les heures de commerce, le projet de loi 75, puis un troisième bâillon après treize heures seulement de discussion, M. le Président. Pourquoi? Parce que ce gouvernement ne veut pas que l'on explique aux citoyens du Québec quelles sont les cachettes, quelles sont les passe-passe qu'il fait aux citoyens du Québec. Et je vais vous l'expliquer, M. le Président. Ils ne veulent pas qu'on dise aux citoyens: Ils n'ont pas augmenté les taxes officiellement dans le budget, mais voici comment ils s'y prennent. C'est ça, fondamentalement, qu'ils ne veulent pas qu'on dise. Ils ne veulent pas qu'on éclaire les citoyens sur le fait qu'on n'aura jamais vu, au Québec, dans un seul budget, autant de taxes déguisées, camouflées, de taxes cachées, M. le Président. C'est ça, fondamentalement. Et ce que le gouvernement dit c'est: Dorénavant, on n'en veut plus de travail d'Opposition, M. le Président. On n'en veut plus. On ne veut plus que vous parliez au monde là-dessus. On impose un bâillon.

Je me souviens, M. le Président, de lois, de lois bien plus importantes que celles que nous votons présentement, de lois autrement plus importantes également pour l'avenir du Québec où l'Opposition libérale d'alors a parlé deux cent cinquante, trois cents heures, en plein mois de juillet à 102° de chaleur, M. le Président. Les libéraux "s'effervesçaient". Mais, pour la démocratie, pour permettre véritablement aux citoyens du Québec de comprendre les gestes qui étaient posés, M. le Président, on les a laissés parler des heures et des heures. Sur la loi 101, par exemple, on a parié pendant au-delà de deux cent cinquante heures et ce, en plus des mémoires que nous avions écoutés. Sur la Loi sur l'assurance automobile, on a passé au-delà de deux cents à trois cents heures, M. le Président, à écouter les libéraux, parce que ça engageait... c'était une mutuelle que l'on créait pour les assurés du Québec. Sur la loi sur le financement des partis politiques, que les libéraux ont rejetée par vote de leur côté - ils ont voté contre - ils ont parlé des centaines d'heures, M. le Président. Et là on parle de la Régie de l'assurance automobile où les assurés, qui se sont créé une mutuelle en vertu de la Loi sur l'assurance automobile, se font littéralement voler 625 000 000 $ - ils se font voler littéralement 625 000 000 $ - et, après treize heures, le gouvernement libéral, M. le Président, est fatigué, il est tanné d'entendre parler de ça. Si vous voulez pas en entendre parler, c'est purement et simplement parce que vous ne méritez pas de gouverner, parce que gouverner, c'est l'art d'assumer la critique et de l'assurer aussi. Je ne comprends pas que ce gouvernement-là ne soit pas capable d'écouter la critique. On est fait pour ça, dans ce Parlement-là, sinon c'est dans la rue que les oppositions se manifestent, M. le ministre et messieurs du gouvernement. C'est dans la rue et vous en vivez quelque chose déjà, les camionneurs de l'ANCAl sont devant le parlement, M. le Président. Ça fait 10 jours... Quelle efficacité administrative! N'est-ce pas, M. le Président? Ça fait 10 jours, et vous n'avez pas entendu le gouvernement dire: Bien, on essaie de régler. Après 13 heures, littéralement, sur un vol aux assurés de la Régie de l'assurance automobile, là ils sont fatigués, M. le Président. C'est épouvantable. L'Opposition... Je vais utiliser les mots qu'ils ont utilisés, je les ai pris en note, M. le Président: "L'Opposition a torpillé la commission", M. le Président. Ce n'est pas des farces! Je ne sais pas si le ministre est conscient du sens des termes qu'il a utilisés. L'Opposition a torpillé... est-ce que le fait de vouloir entendre le vérificateur général sur l'utilisation des sommes de la raaq et lui demander si elles sont véritablement versées au fonds consolidé ou bien aux travaux de voirie, c'est torpiller une commission que de vouloir savoir ça pour renseigner les québécois, m. le président? est-ce que le fait de vouloir entendre le conseil d'administration de la raaq pour s'enquérir, m. le président, si le fait de faire une ponction de 625 000 000 $ sur trois ou quatre ans, ce n'est pas suffisamment inquiétant, et demander au conseil d'administration si les tarifs des permis de conduire et si les tarifs d'immatriculation changeront d'ici trois ans, alors que si, on avait gardé cette réserve qui est dans le fonds de la régie de l'assurance automobile, on n'aurait pas eu à augmenter les permis de conduire et les plaques d'immatriculation... est-ce que ce n'est pas susceptible de renseigner la population, de lui donner véritablement, m. le président, un éclairage correct? est-ce que c'est torpiller une commission, ça, m. le président? est-ce que c'est faire perdre du temps à une commission que de dire ou de faire dire aux citoyens du québec par le conseil d'administration de la raaq: c'est dangereux si vous en prenez trop, vous risquez de vous en aller vers une augmentation de tarifs de permis, une augmentation de l'immatriculation, vous risquez qu'on ne soit plus capables de maintenir le taux des indemnités qu'on donne présentement? est-ce que c'est torpiller une commission que de faire ça, m. le président?

Est-ce que c'est torpiller une commission que de vouloir, M. le Président, rencontrer l'association des accidentés de la route et leur dire: Voici, vous avez eu telle tarification depuis

toujours? Est-ce que vous considérez qu'on aurait pu améliorer? Qu'est-ce qui a fait défaut dans ce que vous avez vécu et ne considère-t-on pas qu'il serait plutôt temps d'améliorer la procédure de gestion même de la Régie de l'assurance automobile plutôt que d'assister à une ponction fondamentale assez importante de 625 000 000 $ sur un nombre d'années, M. le Président? Est-ce que c'est torpiller une commission que de faire ça, M. le Président?

Retarder indûment... Le ministre a dit: L'Opposition voulait retarder indûment... Mais c'est quoi, pour eux, administrer? C'est quoi, pour eux, gouverner? Est-ce que c'est comme au Nouveau-Brunswick, sans opposition? Est-ce que c'est des gouvernements de régime de bananes que vous voulez, sans qu'il y ait, dans le Parlement, des gens qui aient le droit de s'exprimer pour et au nom des concitoyens du Québec? Est-ce que gouverner, ce n'est pas accepter, M. le Président, de se faire critiquer? Est-ce que gouverner, ce n'est pas précisément de permettre aux citoyens de s'exprimer et d'aller dans le sens d'un consensus qui se dégage dans la société? Est-ce que gouverner, c'est faire du nombrilisme à partir du fait qu'on fait partie du Parti libéral et que le monde qui parle, ça ne marche pas? Vous ne nous comprenez pas. On est beaux, on est fins, on a la science infuse, on sait où on s'en va, nous autres; on a la vérité absolue et vous n'avez pas un mot à dire. C'est ça, pour vous, gouverner. Quand vous posez un troisième bâillon, M. le Président, quand on propose un troisième bâillon en cette Chambre, c'est exactement le message que vous donnez à l'Opposition et le message que vous donnez à la population québécoise. Vous dites à la population: Nous, on a la vérité tranquille et tout ce qui s'objecte, nous autres, on tasse ça. On tasse ça par une motion de suspension des règles, quand ça ne va pas assez vite, ou bien on tasse ça, par une motion de clôture quand on est tannés. On a hâte d'aller en vacances, là. (11 h 50)

Voyons, M. le Président! Une loi fiscale de ce genre n'a aucune presse, comme on dit en bon québécois. Ça n'urgeait pas. Ils peuvent se rendre jusqu'à la fin de mars de l'année prochaine, de 1991, pour avoir cette loi-là et ça ne change rien, M. le Président. La preuve que ça ne change rien... Et je mets au défi le ministre de son siège. La preuve que ça ne change rien - je défie le ministre - comment ont-ils pu, pendant deux ans, trois ans, aller faire des ponctions de 45 000 000 $ par année et verser ça pour la réforme ambulancière? Comment avez-vous pu faire ça pendant trois ans sans législation et qu'aujourd'hui vous veniez imposer un bâillon dans ce Parlement-là, M. le Président, pour vous servir de l'argent des assurés de la Régie de l'assurance automobile supposément pour améliorer, supposément pour améliorer le système routier? Encore là, des faussetés, c'est complètement contraire à la vérité, M. le Président. Le budget a été amputé cette année, M. le Président. On le sait très bien. Le ministre délégué aux Transports a moins d'argent qu'il n'en avait l'an passé. Donc, contraire à la vérité! Et le ministre s'en vient nous dire, M. le Président: Écoutez, là, ils nous ont fait perdre du temps. Je répète: Je le mets au défi, je le mets au défi; s'il veut jouer son siège contre le mien, je vais le mettre au défi de me dire que cette loi-là est urgente. Je le mets au défi de me prouver qu'il a besoin de la loi avant mars 1991. Je le mets au défi de me prouver qu'ils n'ont pas agi dans l'illégalité depuis 1987...

M. Lefebvre: Une question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur une question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Quand est-ce que qu'on met un ministre au défi, M. le Président? On n'a pas le droit de prétendre que le ministre ou le gouvernement est dans l'illégalité. C'est carrément illégal en regard des dispositions de nos règlements. On ne peut pas prétendre ça, M. le Président. C'est irrégulier!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur la question de règlement, M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: Je ne veux pas que ce soit comptabilisé dans mon temps, M. le Président, parce que c'est une question de règlement du leader adjoint du gouvernement. Je vais vous prouver, M. le Président, qu'à partir même du projet de loi - à partir même du projet de loi, s'il veut le lire, le leader adjoint, c'est un avocat - l'article 155.5, page 5 du projet de loi, ils légalisent a posteriori ce qu'ils ont fait depuis trois ans. L'article 155: "La Société verse aux conseils régionaux de la santé et des services sociaux, à la Corporation d'urgences-santé de la région de Montréal métropolitain, selon la répartition déterminée par le ministre de la Santé et des Services sociaux, une contribution au coût du transport ambulancier établie de la façon suivante: 9 100 000 $ pour l'exercice financier 1988-1989" - c'est passé, ça? - 37 200 000 $ pour 1989-1990 - ça finit le 31 mars cette année - et 37 500 000 $ pour l'an prochain. Dans le propre projet de loi que nous étudions et sur lequel vous mettez un bâillon, ils légalisent pour deux ans en arrière ce qu'ils ont fait et ils viennent nous imposer un bâillon, M. le Président, sur une loi supposément qui est importante et urgente.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur les questions de règlement, M. le leader de l'Opposition officielle, le temps, c'est 30 minutes et c'est

inclut à l'intérieur du temps.

Quant à vos propos, M. le leader de l'Opposition officielle - s'il vous plaît, M. le leader adjoint du gouvernement - j'estime qu'il s'agit d'une opinion, mais je voudrais quand même vous notifier qu'il ne faut pas avoir des propos blessants ou injurieux pour aucun des membres de cette Assemblée. M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, ce n'est pas blessant que de prendre un projet de loi, de le lire et de dire que le gouvernement ne dit pas la vérité quand il dit qu'il ne légalise pas rétroactivement, M. le Président. C'est la vérité, c'est écrit dans leur projet de loi. Vous ne viendrez pas me dire que c'est des propos blessants, ça. C'est des propos...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous ai simplement dit, M. le leader de l'Opposition officielle, que c'est une question d'opinion. Je vous invite à faire attention à vos propos, quant à des propos qui pourraient blesser ou injurier quelque parlementaire.

M. Chevrette: Une question de règlement, M. le Président. Je m'excuse, la présidence n'a pas à mettre en garde. La présidence a à rectifier si j'utilise des mots blessants. Mais, pour le moment, je m'excuse, avec toute la déférence que j'ai pour la présidence de l'Assemblée nationale, ce n'est pas parce que quelqu'un se lève en cette Chambre et qu'il dit: Faites attention à ce que vous allez dire... Je suis habitué à faire attention à ce que j'ai à dire et, si vous avez quelque chose à dire, M. le Président, au moment où je le dirai, vous le ferez, mais pas pour le moment.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je ne vous ai pas demandé à cet effet-ci de retirer vos propos et je vous permets de poursuivre.

M. Chevrette: Merci. Donc, je peux continuer, M. le Président, et je vais continuer encore plus dans ma conviction parce que, par le projet de loi que vous déposez, vous légalisez après deux ans ce que je vous avais dit de faire au moment où on avait adopté la loi 34 sur la réforme ambulancière du Québec. Et, aujourd'hui, on vient devant le Parlement et, à l'Opposition officielle, qui avait carrément dit à l'époque: Vous n'avez aucune assise légale, on dit: Le bâillon après treize heures; après treize heures, ils ont torpillé. On n'a pas torpillé. Ça nous prendrait 40 heures pour vous dire que ça n'a pas de bon sens ce que vous faites, ou 50 heures, et c'est dans l'objectif fondamental que la démocratie s'exerce précisément, qu'on prend ce temps-là. C'est pour éviter que des citoyens ne se révoltent et qu'ils ne veuillent se faire eux-mêmes justice. C'est pour ça qu'il existe un Parlement, au cas où le ministre ne le saurait pas et au cas où le pouvoir ne le saurait pas.

Il est de tradition dans cette Chambre qu'on laisse s'exprimer sur des lois non urgentes, mais des lois importantes, l'Opposition, d'une façon correcte et d'une façon complète, M. le Président. On est en train carrément de dénaturer le règlement. Le règlement de l'Assemblée nationale, M. le Président, donne des pouvoirs à l'Opposition pour qu'elle reflète précisément les points de vue des citoyens qui ne sont pas assis ici. On n'est pas au pouvoir, M. le Président, je le sais, mais on représente plus de 40 %, 46 % de la population si on compte tous les partis politiques sur lesquels les gens ont exprimé leur vote. C'est 46 % de la population qui, par notre voix, veut s'exprimer et Dieu sait combien il y a de libéraux qui veulent précisément qu'on s'exprime là-dessus aussi, M. le Président, qui ont voté libéral et qui ne sont pas d'accord! Et c'est le rôle du Parlement de laisser aux élus le soin de dire ce qu'ils pensent d'un projet de loi.

Rendue à un troisième bâillon en cinq jours ouvrables, la formation libérale a perdu, M. le Président, toute notion de ce qu'est la démocratie. On n'a pas besoin d'un parlementarisme où il y a de l'opposition, si on veut la museler. On n'a qu'à parler de régime totalitaire, unique. On fait ce qu'on veut jusqu'au prochain renversement de pouvoir. Ce n'est pas de même que ça marche, M. le Président.

Le Québec a opté pour un régime démocratique où il y avait des partis d'opposition, où les parlementaires de l'opposition pouvaient s'exprimer librement et sans contraintes. Relisez l'article de la Loi sur l'Assemblée nationale, relisez les articles du règlement, c'est bien dit que toute notre loi et tous nos règlements convergent, M. le Président, à l'effet que l'Opposition, dans un Parlement, a un rôle primordial à jouer, prépondérant à jouer, M. le Président. Ce qui, aux yeux du ministre, peut passer pour avoir l'air de torpiller un projet de loi, c'est peut-être le plus grand bienfait de la démocratie qui s'exprime. Parce qu'il n'a pas encore compris ça, le sens de la démocratie où l'Opposition a non seulement le droit de s'exprimer, M. le Président, et je vais aller plus loin que ça ce matin, où l'Opposition a même le devoir de s'exprimer, M. le Président. Quand, en son âme et conscience, l'Opposition sait que tel projet de loi ou tel autre projet de loi n'est pas partagé par la population, c'est non seulement son droit, c'est son devoir le plus fondamental de s'exprimer.

On a assisté au bâillon, M. le Président, sur les taxes scolaires. Est-ce qu'on avait le droit ou le devoir de s'exprimer? Les deux, M. le Président. Le droit parce qu'on ne pouvait pas accepter en ce qui nous concerne et, dans nos règlements, on pouvait parier comme on voulait, et le devoir parce qu'on a la conviction qu'il n'y a pas un citoyen du Québec ou très peu de

citoyens au Québec qui veulent voir leur compte de taxes augmenter de 140 $ par famille en moyenne. C'est notre devoir, donc, de le dire et de le crier bien haut et bien fort, et tout le temps qu'on veut, M. le Président, parce que c'est une loi fiscale à part ça et, par tradition, on n'impose pas de bâillon sur les lois fiscales.

On nous a imposé les heures d'affaires. Est-ce qu'on avait le devoir de s'exprimer, M. le Président? Il y a un très large consensus dans la population qui dit: N'ouvrez pas les commerces le dimanche. N'ouvrez pas les commerces le dimanche. Il y a des centaines de milliers de travailleurs qui nous disent, M. le Président: On ne veut pas embarquer dans ce nouveau carcan-là. Qu'on modifie donc dans le sens des consultations qu'a faites le député de Nicolet-Yamaska. On n'est pas retournés sur un dix sous, nous autres. On a été cohérents, on a été constants dans notre évaluation là-dessus et on a dit: On respecte le consensus qui se dégage et on va le défendre. C'est ça fondamentalement que l'on dit et on a le devoir de le faire, M. le Président. Mais c'est inadmissible qu'un gouvernement, parce que, temporairement, il est supérieur en nombre, n'accepte pas de se ranger derrière les consensus sociaux qui se dégagent et impose des bâillons.

Et on nous arrive avec un troisième bâillon. Avons-nous le droit ou le devoir de nous exprimer contre une loi qui va faire une ponction chez les assurés, mais qui n'améliorera en rien, à très court terme, M. le Président, l'état des routes québécoises? Le budget est plus faible que l'an passé. Demi-vérités, absence de vérité totale, M. le Président. Est-ce qu'on a le droit? Oui, on a le droit. Est-ce qu'on a le devoir? Oui, on a le devoir aussi de s'opposer fondamentalement et c'est ça, l'esprit du règlement et de la Loi sur l'Assemblée nationale. C'est quoi ça, en trois jours: Fermez-vous la boîte, on ne parle plus? C'est quoi, après treize heures, venir dire aux parlementaires: Vous ne vous exprimez plus là-dessus? (12 heures)

M. le Président, fondamentalement, ils ne veulent pas qu'on parle de leurs cachettes qu'ils essaient de faire aux citoyens du Québec. Ils ne veulent pas que l'on révèle aux citoyens du Québec qu'ils n'ont pas eu le courage politique de faire un budget où l'ensemble des citoyens du Québec seraient traités équitablement. Ils préfèrent y aller par taxes déguisées et ils disent: Bien, tant et aussi longtemps que ces péquistes-là vont parler, ils vont nous démasquer. Mais c'est le rôle fondamental d'une Opposition dans un Parlement. Et le jour où le gouvernement impose un troisième bâillon en cinq jours, c'est qu'il se fout éperdument du Parlement, qu'il se fout éperdument du processus normal de la démocratie, qu'il se fout éperdument des règles édictées qui conduisent normalement à l'aboutissement d'une sanction légale, M. le Président. Et ça, on ne le prendra pas. Et vous verrez ces mêmes personnes, dans quelques jours, dire à la population du Québec: Ah bien! Tel projet de loi n'est pas passé, c'est la faute de l'Opposition. C'est-y assez fort pour vous? Ils vont dire ça, à part de ça.

Ce n'est pas de notre faute, à nous autres, s'ils ont commencé à légiférer le 6 juin, M. le Président. Ce n'est pas de notre faute s'ils n'ont pas appelé les projets de loi, s'ils les ont tous déposés ou à peu près tous déposés, les projets de loi, à la dernière journée permise, à savoir le 15 mai. Ce n'est pas de notre faute, ça. Ce n'est pas nous qui administrons. C'est toujours la faute du PQ quand ils parlent, eux autres, mais ce n'est pas le PQ qui dépose les projets de loi. C'est le Parti libéral de Robert Bourassa, premier ministre du Québec. C'est eux autres qui, le 15 mai, ont déposé l'avalanche de projets de loi, qui ont fait leur budget après, qui ont fait l'étude des crédits après, puis s'il n'y a presque pas de jours pour légiférer, ce n'est pas la faute du PQ, ça, M. le Président.

Et ce n'est pas vrai que, parce qu'ils ont attendu à la dernière minute pour déposer leur législation, on va se sentir obligés d'écourter nos discours, M. le Président, surtout quand on a la conviction profonde que, quand on parle contre des projets de loi tels que les 140 $ par famille pour l'augmentation des taxes scolaires, on parie au nom de centaines, de milliers de travailleurs, comme les petits propriétaires de commerces qui nous disent: Non au dimanche. En tout temps, quatre, s'il vous plaît. Non à une prolongation même le lundi soir. Ça n'a pas d'allure. Nos petits commerces, on ne fera pas plus d'argent et on va avoir plus de dépenses et on va craquer. Ce n'est pas vrai, ça, M. le Président, qu'on va écourter nos discours sous prétexte que ces messieurs ne veulent pas qu'on parle. Non, M. le Président. On va continuer à parler.

Et leur troisième bâillon, M. le Président, tout comme leur deuxième et leur premier, il passe mal ici, il ne se digère pas par l'Opposition. Il ne se digère pas par la population. Et vous allez en entendre parler dans les prochains jours, M. le Président. Nous allons utiliser les moyens parlementaires pour nous faire respecter maintenant.

Tout a un prix dans la vie. On ne peut pas vouloir faire taire une formation politique qui a des droits, et des droits fondamentaux en vertu d'une loi et en vertu d'un règlement. On ne peut pas faire taire une Opposition, M. le Président, qui a des droits légitimes, d'autant plus que tout le débat porte sur des choses très légitimes. Essayez de me dire qu'il n'y a pas consensus dans la population, présentement, contre les heures d'affaires, essayez de nous dire qu'il n'y a pas consensus dans le monde municipal et même dans le monde scolaire contre les 140 $ de taxes scolaires. On va en parler de ça. Essayez

de me dire qu'il y a pas des consensus contre ça. Puis, vous êtes légitimés d'essayer de nous faire taire alors qu'on parle dans le sens des consensus, alors que ça correspond à ce que la population attend d'un parlementaire! Est-ce que vous êtes mandatés pour augmenter les taxes scolaires ou si on ne va pas plus dans le sens du consensus qui se dégage contre? Est-ce qu'on ne va pas plus que vous autres dans le sens du consensus qui se dégage sur les heures d'affaires? On est légitimés, M. le Président, on a le droit.

Et l'esprit du règlement maintenant. L'esprit du règlement, M. le Président, c'est que le bâillon, ça s'utilise à l'ultime limite. C'est la première fois que je vois un gouvernement aussi désinvolte vis-à-vis des règles édictées dans notre règlement. C'est la première fois que je vois un gouvernement utiliser à la va-comme-je-te-pousse n'importe quand, selon l'humeur, des motions de suspension de règles ou des motions de clôture. C'est la première fois que je vois ça. Ça ressemble à un esprit dictatorial, M. le Président, qui veut imposer ses volontés au-delà de tout processus normal sur le plan démocratique.

Et ce n'est pas bon, ça, M. le Président. Ce n'est pas bon pour notre société. Ce n'est pas bon pour la collectivité d'agir de la sorte. Ne venez pas me dire que c'est bon. Et celui qui me dira que c'est bon, qu'il se lève et qu'il nous explique pourquoi, qu'il nous dise pourquoi c'est bon: de hâter les choses, M. le Président, d'empêcher le processus démocratique de s'exprimer, de s'expliquer, M. le Président.

Rappelez-vous le passé. Le passé est garant de l'avenir. Si, dans les lois contestées, vous imposez vos volontés immédiates, sans discussion, sans que le Parlement s'exprime librement et longuement, vous créez automatiquement et vous le savez, il y en a au moins certains de votre côté qui savent ça... Ce n'est peut-être pas tout le monde qui peut comprendre ça. Mais je suis sûr que, de votre côté, il y en a quelques-uns qui comprennent. J'ai la conviction qu'il y en a quelques-uns qui comprennent qu'un processus démocratique ne peut pas être continuellement bafoué. C'est extrêmement dangereux comme répercussion sociale et vous le savez, ça, pour certains.

Vous savez qu'on n'a pas le droit de faire exercer exclusivement et tout le temps le poids du nombre. C'est une histoire de boomerang, ça. C'est extrêmement dangereux de ne se fier, M. le Président, qu'au poids du nombre. C'est exactement pour ça qu'on a des règlements permettant à ceux qui ont le nombre moindre de s'exprimer dans des cadres le plus longuement possible. C'est ça, fondamentalement, qui est bafoué aujourd'hui. C'est ça, fondamentalement, que vous reniez depuis le début, depuis cinq ans déjà, M. le Président. Dans l'espace de cinq ans, on aura eu un paquet de motions de clôture, un paquet de motions de suspension des règles, M. le

Président.

Ah oui, il ne faut pas laisser... C'est fini, on décide! Après treize heures, c'est assez. Après treize heures, c'est assez. Vous allez peut-être avoir des heures longues de voir la population vous faire comprendre que ce n'est pas assez. Vous avez peut-être besoin de temps pour assouplir vos positions. Il aurait peut-être été plus brillant, par exemple, dans les heures d'affaires que le ministre prenne quelques heures pour échafauder un compromis qui allait dans le sens des gens qui ont à vivre avec ces lois-là. Ça aurait peut-être été intéressant pour vous, comme députés ministériels, de prendre le temps de convaincre un ministre d'y aller avec nuance, d'y aller avec parcimonie, d'y aller avec un peu plus de doigté, un peu plus d'étude, un peu plus de compréhension vis-à-vis des situations, M. le Président.

Ce que vous faites là, vous bafouez complètement le processus démocratique du Parlement. Et je dois vous avouer, M. le Président, qu'on va prendre tout notre temps. Je voudrais vous prévenir de ça, M. le Président. Ils ne diront pas qu'on n'est pas francs, nous, qu'on n'est pas clairs. On va dire la vérité. Nous allons prendre tout notre temps sur la motion qu'on a devant nous, M. le Président. Jusqu'au dernier des parlementaires qui pourra venir parler, oui, il va parler. C'est-y clair, M. le Président? Oui. Quand on va arriver au rapport de la loi 69 sur l'augmentation de la taxe scolaire, on va tous parler, M. le Président. On va tous prendre notre temps parce que la population du Québec, qui sait ce qui se passe ici, elle ne l'accepte pas, l'augmentation des taxes scolaires. C'est-y correct? Elle ne l'accepte pas. Et il faut qu'on reflète, nous, de l'Opposition, ce sentiment-là de la population. C'est ça, notre rôle.

Vous avez voulu nous enlever à une commission parlementaire, c'est devant les caméras qu'on va faire comprendre à la population qu'on est contre, M. le Président, l'augmentation de 140 $ par famille pour les taxes scolaires. C'est devant les caméras de la télévision qu'on va également, en troisième lecture, sur le même projet de loi, venir répéter qu'on est contre, que ça n'a pas d'allure, que ce n'est pas une façon correcte, que c'est plutôt hypocrite d'agir de la façon dont on l'a fait par des taxes indirectes. On va dire tout ça aux yeux et au su de tout le monde, M. le Président. Oui, malgré le fait que, normalement, un projet de loi subit son étude article par article, oui. Et c'est aussi en commission parlementaire qu'on a le droit de convoquer des gens comme on a essayé de le faire et ne venez pas me dire que c'était torpiller. Ne venez pas me dire que c'est torpiller. Ne venez pas dire, M. le Président, que c'est retarder indûment.

Ne venez pas dire qu'on n'est pas intéressés à améliorer les routes. On est intéressés à améliorer les routes. Mais on n'est pas intéressés

à se faire emplir et on n'est pas intéressés à ce que le ministre des Transports et le gouvernement du Parti libéral viennent littéralement emplir les gens, M. le Président. Parce que qu'est-ce qu'on nous dit? On dit qu'on n'est pas intéressés à voir améliorer le réseau routier. On est tellement intéressés qu'on ne veut pas qu'ils nous disent qu'ils mettent de l'argent alors qu'ils n'en mettent pas. C'est ça qu'on dit aux citoyens. Je pourrais vous donner des exemples dans ma région où il y a un petit pont, ça fait trois élections qu'ils font dessus, il va falloir qu'ils arrêtent, M. le Président. (12 h 10)

Ce qu'ils font aujourd'hui, en déposant un troisième bâillon en cinq jours ouvrables, M. le Président, ils vont le payer jusqu'à la dernière minute de l'utilisation de notre temps parce que nous avons la conviction profonde, la conviction intime que nous reflétons dans nos exposés, autant sur la Régie de l'assurance automobile dont nous discutons présentement que sur la loi imposant 140 $ de taxes scolaires, comme sur la loi sur les heures de commerce, et que nous allons parler pour et au nom de la population du Québec.

Le Vice-Président (m. bissonnet): merci, m. le leader de l'opposition officielle. je reconnais maintenant le prochain intervenant, m. le député de louis-hébert. m. le député.

M. Réjean Doyon

M. Doyon: Merci, M. le Président. Le gouvernement a donc décidé de passer une loi absolument essentielle, nécessaire, dont il a besoin pour pouvoir effectuer des travaux essentiels qui ont trait à la sécurité routière. L'Opposition, dans le moment, est en train de déchirer son linge et de se scandaliser de ce que le gouvernement fait. Le gouvernement décide, après avoir envisagé la balance des inconvénients, parce qu'il y en a, des inconvénients, M. le Président... Nous avons regardé les choses la tête froide. Nous ne nous sommes pas excités; nous avons tout simplement pesé le pour et le contre pour savoir si la population tirerait plus de bénéfices à avoir un projet de loi semblable pour assurer la sécurité routière ou si la population tirerait plus de bénéfices à continuer d'entendre les discours tels que ceux qu'on vient d'entendre. C'est quoi, la décision qui doit être prise? Qu'est-ce que la population veut dans le moment? Entendre des discours tels qu'en a fait avec grandiloquence le leader de l'Opposition? Est-ce que c'est ça que la population veut ou si la population veut que le gouvernement dispose des fonds qui sont nécessaires pour effectuer des travaux que tout le monde s'entend à demander? A choisir, qu'est-ce que le gouvernement doit faire? Se rendre aux désirs de la population qui a des besoins, qui les exprime ou continuer d'écouter l'Opposition heure après heure, jour après jour, présenter toutes sortes de motions aussi dilatoires les unes que les autres, des motions qui n'ont pour seul effet que de bloquer la législation?

On dit: Vous n'avez utilisé que treize heures en commission parlementaire; treize heures à entendre l'Opposition répéter ad nauseam la même chose, répéter sans cesse les mêmes arguments à l'effet que ce projet de loi là ne faisait pas son affaire, qu'elle n'en voulait pas, que c'était du vol, que c'était du rapt, que c'était des hold-up, qu'on vidait la Régie de l'assurance automobile de ses fonds. On a entendu ça pendant treize heures de temps. Vous pensez qu'on aurait avancé un petit peu; on n'avait pas encore touché au premier article, on en était aux motions préliminaires. Et l'Opposition nous disait ça avec un sourire, avec un grain de malice dans les yeux, nous laissant entendre très clairement que ça continuerait comme ça tant et aussi longtemps qu'on se prêterait à ce jeu-là. On s'est prêté à ce jeu-là pendant treize heures. M. le Président, vous venez d'entendre un discours qui vous a peut-être paru long, une demi-heure, mais ce n'était qu'une demi-heure. Pendant treize heures, on en a eu des semblables. L'Opposition a parfaitement le droit de les faire. Nous, on est dans l'obligation de les entendre, de les écouter, mais quand on nous dit ça pendant treize heures... Au bout de treize heures: motion pour entendre tel intervenant, motion pour obtenir la comparution de tel autre intervenant.

On leur a fourni les réponses aux questions qu'ils nous posent. Il y avait des questions sur la Régie, on a fourni ces réponses-là. La Régie était prête à en donner d'autres si on avait d'autres questions. On a fourni toutes les assurances possibles. Et, le sourire en coin, on nous disait: On va continuer; vous aimez ça, on va vous en donner. On peut parler 20 minutes sur chaque motion, chacun d'entre nous, et on va faire des motions l'une après l'autre. Et, une fois qu'on aura envisagé un premier article, on va recommencer les motions qu'on a faites en remarques préliminaires. Quand est-ce que ça va finir? Ça va finir, simplement, quand le gouvernement va dire: C'est assez, c'a assez duré.

C'est ça qu'on vient de faire. On a le mandat de gouverner, on a le mandat de prendre des décisions. On n'a pas le mandat de se faire charrier par l'Opposition. Ce n'est pas ça, notre mandat. Alors, c'est le mandat qu'on exerce et on va continuer de l'exercer parce qu'il n'y a pas d'autre moyen d'agir. Si l'Opposition avait envisagé le premier article et nous avait fait des propositions en disant: Ce n'est pas 150 000 000 $, nous pensons qu'avec 148 000 000 $ pour telle année, vous en auriez eu assez, s'ils faisaient une démonstration qu'il y a 2 000 000 $ dont on n'a pas besoin et qu'ils nous arrivaient avec des chiffres sensés - c'est

un exemple que je donne - en disant: Ces 2 000 000 $ ne vous sont pas absolument nécessaires, M. le ministre, vous pourriez vous tirer d'affaire avec simplement 148 000 000 $ au lieu de 150 000 000 $, on pourrait discuter en hommes sensés, on pourrait discuter entre personnes adultes, de bonne foi, qui regardent des solutions possibles.

Mais quand, après treize heures, on n'a pas touché au premier article, c'est quoi la conclusion qu'on doit tirer? C'est qu'avec un autre treize heures on ne le touchera pas plus et, quand on sera rendu au premier article, on va encore y passer des heures et des heures, motion après motion et pendant ce temps-là la population dira au gouvernement: C'est quoi, ces histoires-là? On en a des gens aussi qui suivent les débats. On en a des gens qui nous parlent et qui nous disent: On vous a élus; c'est qui qui décide dans ce Parlement-là? C'est-y vous autres ou si c'est l'Opposition? Mettez donc vos culottes, le gouvernement, et, une fois que vous avez expliqué un projet de loi, que vous en avez défendu le principe, ayez donc le courage de le passer, ce projet de loi là, et ne vous mettez pas à la merci de l'Opposition. C'est ça, gouverner. C'est ça, avoir un mandat. C'est ça qu'on a fait et c'est ça qu'on doit faire parce qu'il n'y a pas d'alternative. Nous n'avons pas d'autre choix, M. le Président.

Je vous inviterais, M. le Président, parce que votre fonction vous retient sur votre siège, à lire les transcriptions, dans le Journal des débats, de ce qui s'est passé en commission parlementaire. J'invite la population à le faire, par curiosité, pour se faire une idée, une fois pour toutes, de la frivolité des manoeuvres de l'Opposition. Après ça, la population saura à quoi s'en tenir sur tous les cris qu'elle pourra entendre si jamais le gouvernement est amené à n'avoir d'autre choix que d'imposer une telle motion de clôture. Je vous invite, M. le Président, à prendre connaissance de ces transcriptions-là. Vous verrez qu'aucune des motions qui ont été présentées n'était sérieuse, que c'était fait en pure frivolité pour faire perdre le temps de la commission parlementaire, pour user le ministre qui est sollicité par toutes sortes d'autres problèmes et qui doit, jour après jour, heure après heure, s'astreindre à écouter des discours qui sont tous plus vides les uns que les autres et qui n'ont qu'un but: retarder les débats, mettre le gouvernement dans l'embarras, l'obliger à venir à une seule conclusion, la seule qui s'impose, c'est que jamais l'Opposition n'acceptera ce projet de loi, qu'elle va faire tout en son pouvoir, par tous les moyens dont elle dispose, pour empêcher le gouvernement de le passer.

Cette certitude-là, nous l'avons acquise en observant et en écoutant l'Opposition. Nous n'avions pas d'autre alternative. Nous nous sommes résolus à invoquer le règlement pour mettre fin aux travaux de la commission parlementaire parce que c'était le seul moyen de nous rendre au désir de la population, au désir que le ministre connaît, qu'il a l'intention de "rencontrer" et, pour ça, ça lui prend des fonds. C'est ce que ce projet de loi lui assure, M. le Président. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant M. le député de Labelle. M. le député de Labelle. (12 h 20)

M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, le ministre des Transports nous amène une motion de clôture après treize heures de débats en commission parlementaire. Et j'entendais le député de Louis-Hébert, qui a participé pendant une heure ou deux à la commission, venir nous dire qu'il y avait là des futilités qui ont été dites. M. le Président, je voudrais simplement rappeler une chose: c'est que l'Opposition a joué son rôle, mais que le ministre ne répondait même pas aux questions, jamais ou pratiquement jamais. La première journée, il n'a pas ouvert la bouche et, la deuxième, très timidement, il a commencé à dire quelques phrases par-ci, par-là. m. le président, j'ai bien souvenir qu'en 1960, quand le parti libéral a pris le pouvoir, il a promis la démocratie aux québécois. or, ce qu'il fait aujourd'hui, c'est le contraire. quand on impose le bâillon, ça veut dire qu'on empêche les débats. ça veut dire qu'on empêche les débats. après treize heures, c'est inédit et ça, ça veut dire qu'on empêche les débats. m. le président, je voudrais simplement dire aux québécois qui nous écoutent pourquoi le gouvernement procède comme cela. tout le long de l'hiver, il a annoncé des mesures fiscales qu'il n'avait pas le courage de dévoiler, dont il n'avait pas le courage de porter la responsabilité. il en faisait porter le poids aux commissions scolaires, aux étudiants, à hydro-québec et puis, maintenant, aux municipalités dans les régies de transport. c'est ça qu'il fait. et, maintenant, il arrive avec une loi où lui-même est obligé de dire, par un projet de loi, qu'il augmente les taxes, ce qu'il ne veut pas admettre, ce qu'il ne veut pas dire. il augmente les taxes et il veut aller se chercher 625 000 000 $ à la régie de l'assurance automobile du québec. m. le président, il veut se cacher dans une fin de session, en imposant le bâillon après treize heures, juste avant les vacances, avant que les gens partent, en espérant que la plupart oublieront la mesure durant l'été. c'est ça qu'il veut faire.

M. le Président, ce que l'Opposition a cherché à faire au cours de ces treize heures, c'est entendre des groupes, le Vérificateur général du Québec, pour leur demander si le ministre avait le droit de faire cela. Or, les

objets et la mission de la Régie de l'assurance automobile du Québec n'ont pas été modifiés et, donc, on peut soupçonner que le gouvernement n'a même pas le droit d'aller chercher l'argent qu'il veut aller chercher actuellement, parce qu'il ne modifie pas la mission et les objectifs de la Régie de l'assurance automobile du Québec. Et, donc, sa propre loi pourrait être contestée éventuellement à cause de ça.

M. le Président, qu'est-ce qui s'est passé? Finalement, c'est qu'au cours des dernières années, des toutes dernières années, à cause des hauts taux d'intérêt, la Régie a accumulé des surplus - si on l'admet - mais ces surplus appartiennent aux assurés de la Régie qui ont payé des primes trop élevées, compte tenu du rendement des placements de la Régie. Alors, qu'est-ce qu'il veut faire? Il veut aller mettre la main sur les surplus. Par une loi qu'il passe en cachette, sur laquelle il impose un bâillon au bout de treize heures seulement de délibérations, il veut partir avec le sac qui appartient aux assurés, mais qui n'appartient pas au gouvernement et il veut aller se chercher ce droit par une loi, en cachette, treize heures en commission. C'est ça qu'il fait. C'est ça qu'il fait. Il veut littéralement voler les assurés de la Régie de l'assurance automobile du Québec, parce que ces surplus, normalement, devraient servir, soit à stabiliser les primes, soit à les diminuer, parce que cela veut dire qu'on est allé en chercher trop par les primes. C'est là que ça devrait se faire, se jouer et non pas aller piger dans la caisse pour le gouvernement. Parce que ces surplus appartiennent aux assurés. Il faut que les gens en soient profondément convaincus; le gouvernement lui-même en est convaincu et il se cache pour aller voler le sac. Il se cache pour aller voler le sac. C'est ça qu'il fait.

Donc, le ministre nous arrive ce matin en nous disant qu'il y a eu des débats interminables, treize heures. Quand la Loi sur l'assurance automobile a été adoptée, c'est de plus de 200 heures qu'il s'est agi. Et, aujourd'hui, on est en train de dénaturer la fonction de la Régie de l'assurance automobile du Québec et puis, après treize heures qu'on en parle, c'est trop.

M. le Président, je pense que le Vérificateur général aurait eu son mot à dire et, d'ailleurs, il s'est réservé pour son rapport annuel, dans ce contexte. M. le Président, le conseil de la Régie de l'assurance automobile du Québec aurait dû venir à la barre. Effectivement, le président était là, assis à côté du ministre. On lui a demandé de se présenter à la barre pour répondre lui-même aux questions qu'on aurait à lui poser. Le ministre a refusé. On lui a demandé de donner la parole au président de la Régie de l'assurance automobile du Québec. Le ministre a refusé et lui-même n'a pas répondu aux questions qu'on lui a posées lorsqu'on a discuté de cette question. Au fond, ils ne veulent pas en parler. C'est un projet de loi dont ils ne veulent pas parler, qu'ils veulent passer en cachette, avant les vacances, dans une fin de session où beaucoup de projets de loi se bousculent parce qu'ils n'ont rien fait, parce qu'il se sont traîné les pieds depuis le 13 mars, le jour où ils ont ouvert la session, le 13 mars. Ils auraient pu l'ouvrir 15 jours avant, la session, on aurait parié de ce projet de loi, parce qu'ils savaient ce qui venait, le gouvernement savait ce qui venait. Alors, pourquoi avoir attendu?

Justement, ils ont attendu, comme pour d'autres projets de loi, comme pour le projet de loi 69 sur l'impôt foncier dans les commissions scolaires. Et ils attendent toujours à la dernière minute. Quand il y a le moindre problème qui se dessine autour d'un projet de loi, ils vous camouflent ces projets de loi en fin de session parce que les gens s'en vont en vacances au mois de juillet ou bien s'en vont en vacances à Noël et là, ils pensent que plus personne ne va en parler. Bien, nous allons en parler de ce projet de loi, le plus qu'on pourra cette semaine, même avec le bâillon. Évidemment, ils vont raccourcir, c'est ce qu'ils tentent de faire, mais je pense que les Québécois ne l'oublieront pas.

Ce que je dis ici, ce n'est pas de la démagogie, parce que, dans des projets de loi importants comme celui qui touche la Régie de l'assurance automobile du Québec, ça mérite un débat, parce qu'on est en train d'en modifier l'orientation. On est en train de s'en servir comme d'une caisse pour financer des travaux routiers, ce qui va à rencontre de l'article 2 de la loi constitutive de la Régie de l'assurance automobile du Québec. C'est ça que le gouvernement fait.

Il voudrait que la Régie de l'assurance automobile du Québec devienne un deuxième ministère du Revenu du Québec. Il veut financer... Il veut revenir au Moyen Âge, alors qu'ils avaient mis des péages sur les autoroutes. C'est un nouveau péage par la Régie de l'assurance automobile du Québec. C'est ça que le gouvernement fait dans l'actuel projet de loi. Il est en train de modifier complètement la mission, la fonction, l'orientation de la Régie de l'assurance automobile du Québec, et tout ça, sans vouloir en parler, après 13 heures de débat en commission - 13 heures. C'est le temps normal qu'on aurait dû prendre d'ailleurs, si le ministre avait eu le moindrement d'ouverture pour entendre, justement, des groupes dont nous parlions. Parce que, s'il les avait entendus, au bout d'une heure, probablement que nous aurions eu réponse à nos questions. Mais il a refusé qu'on les entende, de peur qu'il y ait des réponses qui ne conviennent pas exactement au gouvernement. Or, je maintiens que le conseil d'administration de la Régie de l'assurance automobile du Québec doit avoir son autonomie, ou bien, qu'est-ce qu'il fait là? Justement, il l'empêche de parler, ce conseil.

M. le Président, je pense que nous assistons à une opération de camouflage qui est la suite de

tout le discours sur le budget où nous avons démontré que le gouvernement augmentait, cette année, ses taxes de 1 219 000 000 $, alors qu'il disait, dans une autre phrase à côté, que l'impôt sur le revenu n'augmentait pas. Même si le rendement de l'impôt sur le revenu augmentait de 1 442 000 000 $, de 14 %, il affirmait cela mais il ne payait pas des taxes. Mais, les taxes, il les a augmentées une par une, systématiquement. Et, dans le cas ici, c'est un véritable vol des assurés de la Régie de l'assurance automobile du Québec qui est en train de se faire et ces messieurs ne veulent pas qu'on en parle. 13 heures pour entendre les principaux intéressés de la Régie de l'assurance automobile du Québec, comme l'Association des victimes d'accidents, comme le Protecteur du citoyen aussi qui, lui, sait quels sont les problèmes qui ne se résolvent pas a la Régie de l'assurance automobile du Québec. Il aurait été bon d'entendre ces gens. Au contraire, ils n'ont pas le temps et ils veulent tout de suite passer à l'étude article par article sans éclairer le fond des choses, pour se camoufler, pour éviter que les Québécois se rendent compte que leurs taxes augmentent considérablement durant toute cette année, de toutes sortes de façons. C'est une loi qui est amenée de façon hypocrite, qu'ils veulent adopter de façon hypocrite et qui est la caractéristique absolue, je pense, de ce gouvernement: l'hypocrisie. (12 h 30)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le député de Rousseau.

M. Robert Thérien

M. Thérien: Merci beaucoup, M. le Président. C'est d'abord avec plaisir que je prends la parole sur ce projet de loi pour la quatrième fois. Une première fois sur la loi elle-même, une deuxième fois sur la scission, une troisième fois sur la motion de report et aujourd'hui sur la clôture. Lorsqu'on parle du nombre d'heures, le peu de nombre d'heures qu'on a pu discuter, je vous mentionne, M. le Président, toutes les courbettes que le parti de l'Opposition a dû faire pour bloquer cette loi. C'est l'intention, M. le Président, qu'il faut percevoir là-dedans. Ils ont utilisé tout ce qui était possible et donné à l'Opposition pour bloquer la foi.

Ne me dites pas que ces gens-là ont voulu discuter de la loi, M. le Président. On a fait d'abord une scission; motion de report. Puis on a été obligé de mettre le bâillon justement pour qu'on puisse passer notre loi conformément au budget qu'on a voté. On ne s'est pas caché de rien, M. le Président. Quand on parle de cachette, d'hypocrisie. On ne s'est pas caché de rien. On a fait un budget où c'était indiqué à l'intérieur du budget et une loi qui vient rendre conforme la déclaration du ministre des Finances. Où est la cachette, M. le Président? Où est l'hypocrisie? Mais ne me dites pas... Et quand le député de Labelle parle, lui qui a été aussi ministre des Transports - on cherche encore ses réalisations; mais ne l'a pas été longtemps, on en convient, il ne l'a pas été longtemps là-dessus. Sauf que, M. le Président...

Le Vice-Président (m. bissonnet): m. le député de rousseau, je vous demanderais de ne pas vous adresser à un autre député mais de vous adresser à la présidence, s'il vous plaît.

M. Thérien: Merci, M. le Président. Donc, on parlait des 13 heures. Je pense qu'on a posé un geste tout à fait responsable comme on a posé une loi qui vise une responsabilité. La responsabilité, c'est de réparer nos routes. C'est dire: Où on va prendre l'argent? Le Parti québécois aurait souhaité peut-être qu'on endette davantage la province, qu'on impose davantage les Québécois. On n'a pas pris cette voie-là. C'est nous le gouvernement. On a des responsabilités, on a des choix à faire. Le choix que... M. le Président, moi, je pense que j'ai écouté très bien le député de Labelle, si vous voulez le rappeler à l'ordre. Ça me ferait plaisir de prendre ses commentaires à l'extérieur de la Chambre. Donc, M. le Président, on nous parle du nombre d'heures. Moi, je vous parle de gestes responsables. On a décidé de mettre fin à une discussion qui n'était pas une discussion, qui était un monologue tout simplement. Cette loi-là vise tout simplement à donner aux Québécois un certain budget, à donner une meilleure qualité dans l'exécution, la réparation et la rénovation de nos routes. On ne s'est caché de rien là-dessus. Le budget est clair: 1 700 000 000 $ dans les quatre prochaines années et l'argent est pris à telle place.

L'Opposition est un peu surprise mais n'est-ce pas l'Opposition elle-même qui, au début des années quatre-vingt a utilisé 238 000 000 $ de la Régie justement? Ce ne sont pas eux autres, eux-mêmes qui ont utilisé cet argent-là? Puis non pas comme finalité de réparer des routes, M. le Président. Ça a servi pour stabiliser le budget au Québec. Nous, on dit: C'est complémentaire. C'est complémentaire. La Régie de l'assurance automobile du Québec et la qualité de nos routes, M. le Président, est tout à fait complémentaire à la Régie de l'assurance automobile du Québec, c'est-à-dire les routes dans un meilleur état. On a un taux d'accidents qui est à la baisse, donc, une qualité de vie et surtout une capacité monétaire au niveau de la Régie qui est davantage... Donc, si ces gens-là ont pu le faire au début des années quatre-vingt, ça, c'est possible. Mais que le gouvernement ou le Parti libéral puisse le faire au début des années quatre-vingt-dix où on l'a fait aussi dans l'année 1987, ça, c'est impossible. Ça, c'est un parjure, c'est une trahison!

M. le Président, je pense que le ministre

des Transports a été très clair. On dit: pour le bien des Québécois, on utilise l'argent à tel endroit et on l'applique à tel autre endroit. En 1987, lorsqu'on avait adopté une loi similaire et sous la recommandation d'un rapport préalablement - qu'on a appelé le rapport Middlemiss - à l'effet que c'était essentiel au Québec qu'on intervienne rapidement dans des endroits dangereux, lequel rapport vise à la sécurité... Et, à ce moment-là, on a utilisé 200 000 000 $ de la Régie de l'assurance automobile. Là aussi, on a fait le même discours, de l'autre côté. On a arraché notre chemise en disant: C'est impossible de prendre l'argent là. C'est un hold-up! On l'avait fait auparavant, mais là c'est difficile de le faire. M. le Président, savez-vous c'est quoi, la crainte du parti de l'Opposition? C'est de voir qu'on va les réparer, les routes. C'est ça sa crainte. C'est de voir qu'avec cet argent-là, on va pouvoir justement donner cette qualité que les petites municipalités ou les municipalités en régions souhaitent depuis longtemps.

M. le Président, on a utilisé tous les moyens dilatoires pour arriver à bloquer la loi. Nous, on dit: On veut notre loi, et c'est une loi responsable. Donc, on a utilisé le bâillon de façon telle qu'il n'y avait pas de dialogue. Ce n'est pas les 13 heures, les 75 heures ou les 90 heures, M. le Président, qui sont importantes, c'est dire que le gouvernement pose un geste tout à fait responsable là-dessus. Les gens pourront en juger par la suite et je pense que c'est comme ça que les citoyens du Québec font. Ils élisent un gouvernement pour prendre des décisions. La décision qu'on a prise, c'est celle-là vis-à-vis des routes, qui a été, à mon point de vue, si je parle de mon comté, M. le Président, fort bien accueillie de voir qu'on va mettre autant d'argent dans les routes du Québec.

Donc, on a reporté les travaux, on a voulu sillonner la loi. On a voulu étendre, prendre tous les moyens nécessaires pour qu'on ne puisse pas passer notre loi avant la clôture de la session. C'est parfait, M. le Président! Ils ont le droit de le faire. Mais, nous aussi, nous avons le droit de le faire, autant pour des lois aussi responsables que celle sur la question des commissions scolaires. On a dû, après un certain temps, poser un geste que les gens jugeront sûrement comme un geste responsable. M. le Président, c'est le jeu des parlementaires de faire ce qu'ils font. Il n'y a pas de reproche là-dessus. Mais le moyen utilisé, de dire qu'on a utilisé seulement 13 heures, de demander plusieurs groupes... Je regarde le député de Labelle qui a une expérience parlementaire, c'est ce qui se fait habituellement, on demande tel groupe; tel groupe est refusé et on en demande un autre, M. le Président. Ce n'est pas le Parti libéral, ce n'est pas le gouvernement présent qui fait en sorte que les choses sont comme ça. C'est de même, c'est le jeu parlementaire, M. le Président. Le jeu parlementaire, ça se termine le 22 ou le 23. Le 23, la fin de session. Leur jeu, c'est de faire en sorte que notre loi ne passe pas et que, face au budget qui a été déposé ici on n'arrive pas à rencontrer les exigences. Mais nous, c'est le contraire, M. le Président. Les exigences, c'est d'être responsables, donc c'est de voter notre loi.

M. le Président, c'est évident que de faire des lois où on a certaines impositions à faire, ce n'est jamais facile, mais c'est responsable. Donc, M. le Président, les Québécois seront sûrement fiers de voir qu'il y a des travaux qui vont se faire dans la voirie en 1991-1992, des travaux supplémentaires. On a convenu qu'en 1990, il y avait des travaux qui étaient faits majoritairement dans la région de Montréal. Là aussi, M. le Président, c'est un geste responsable. Il faut réparer la Métropolitaine. Ce n'est pas d'aujourd'hui qu'elle est négligée, la Métropolitaine. Donc, on ne s'est pas cachés de ça non plus. On a dit: On fait ces travaux-là et, malheureusement, en faisant ces travaux-là, il y en a d'autres qui vont en avoir moins. On a décidé, nous, de ne pas endetter les Québécois. C'est la décision du gouvernement, M. le Président. Elle peut être critiquée, sauf qu'on a fait un budget pour cinq ans, déposé par le ministre des Finances et député de Bonaventure et le ministre des Transports avait cette loi à faire pour s'harmoniser au budget. M. le Président, on peut la critiquer.

Vous me dites qu'il me reste seulement une minute. M. le Président, c'est donc pour la quatrième fois et toujours avec plaisir que je vous répète qu'on va appuyer tout au long cette loi qui fait que c'est une harmonisation avec le budget qui a été déposé et fort bien accueilli par les Québécois. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le chef de l'Opposition officielle. (12 h 40)

M. Jacques Parizeau

M. Parizeau: M. le Président, le gouvernement nous impose un troisième bâillon en cinq jours. Ça ne s'est jamais vu en cette Chambre et vous comprendrez que, dans ces conditions, je me sens forcé d'intervenir dans ce débat et, d'ailleurs, de continuer d'intervenir dans tous les débats qui vont marquer les prochains jours à l'occasion de ces trois bâillons. Il s'agit d'un changement important, je pense, dans les règles de fonctionnement de cette Assemblée et il faut marquer ce moment-là. Le gouvernement a décidé de se conduire comme aucun des gouvernements qui l'avaient précédé ne s'est conduit à cet égard.

Pour le moment, dans les quelques minutes que j'ai, j'aimerais, à cet égard, M. le Président, parler du rôle de l'Opposition. À quoi ça sert

une Opposition? J'entendais tout à l'heure le député de Louis-Hébert qui, manifestement, n'a pas l'air de se rendre compte très bien de ce que c'est que l'Opposition. Un jour, il y sera et peut-être qu'il verra mieux. Il a déjà été dans l'Opposition. Manifestement, il n'a rien appris et n'a rien compris. Peut-être que la prochaine fois, ça servira.

M. le Président, les trois projets pour lesquels on nous impose un bâillon ont ceci en commun que nous, comme Opposition, on trouve que ces trois lois ne devraient pas passer. On est contre les trois lois. Comprenons-nous bien. Nous sommes absolument contre ces trois lois. D'un autre côté, nous savons que nous n'avons pas le nombre dans cette Chambre. Si nous avions le nombre, nous serions au gouvernement et non pas où nous sommes.

Donc, puisque le gouvernement a l'intention de passer ces trois projets de loi, nous nous disons: Comment peut-on sauver les meubles? Qu'est-ce qu'on pourrait faire apparaître comme compromis, comme amendement, de façon à ce que les aspects, à notre sens, les plus odieux de ces projets de loi puissent être atténués? C'est ça, le rôle d'une Opposition responsable. alors, dans le cas de la loi 69 qui augmente les taxes foncières scolaires au québec de 320 000 000 $, est-ce qu'on s'imagine un instant, m. le président, que nous n'avons pas aidé substantiellement à faire accepter par le gouvernement, première étape, les cinq conditions de l'union des municipalités du québec et de l'umrcq? mais oui, bien sûr, nous avons été dans ce débat-là. et qu'est-ce qu'elle implique, la cinquième condition, enfin, une des cinq conditions? elle implique que le transfert de l'administration des écoles aux commissions scolaires contre 320 000 000 $ d'augmentation de taxes sera remis sur la table pour discussion à l'occasion du sommet québec-municipalités, enfin de la table québec-municipalités.

Bien, M. le Président, puisque, après s'être fait beaucoup tirer et pousser, le gouvernement a accepté de remettre sur la table cet aspect-là de fa question, est-ce qu'il est anormal pour l'Opposition de dire dans ces conditions: Écoutez, on ne va pas transférer aux commissions scolaires pour un an seulement l'administration des immeubles scolaires pour avoir la possibilité peut-être de tout récupérer à nouveau au gouvernement dans un an? Vous trouvez ça aberrant, M. le Président, qu'on soulève cette question-là en commission parlementaire et qu'on dise au gouvernement: Écoutez, il y a quelque chose d'incohérent dans votre affaire. Vous ne pouvez pas, d'une part, faire augmenter les taxes scolaires, faire en sorte que l'administration de tous les immeubles scolaires soit rendue aux commissions scolaires et que, d'autre part, on remette à la table Québec-municipalités toute cette question-là qui pourrait être changée de bout en bout. On ne transfère pas 317 000 000 $ d'administration d'immeubles pour un an! Et on croit vraiment que, quand on veut discuter de ça en Chambre, ce sont des mesures dilatoires et, quand on dit en commission: On voudrait rencontrer les principaux officiers de l'Union des municipalités du Québec ou du MRCQ, c'est une demande frivole?

Mais ce n'est pas une demande frivole, M. le Président. Ce sont ces gens-là qui ont posé leurs cinq conditions acceptées par le gouvernement. Et on nous répond: Non, non, nous avons accepté ça comme une des cinq conditions, on ne vous dit pas comment on va résoudre ça. De toute façon, ceux qui sont directement impliqués dans ce conflit, on ne veut pas les voir en commission parlementaire. Mesure dilatoire, mesure frivole? Bien sûr, si on nous donnait la possibilité, on pourrait amener le gouvernement à faire des compromis là-dessus. Alors, comment est-ce que le gouvernement va éviter de faire des compromis là-dessus? Bien, que ça se discute le moins longtemps possible et qu'il y ait un bâillon. Comme ça, l'opinion publique ne sera pas trop agitée, parce que ça prend toujours un certain temps pour que ces choses-là soient comprises par tout le monde, les enjeux. Ça prend quelques jours, ça. On dit: Non, non, non, non. Le risque est trop grand pour le gouvernement. Bâillon.

Les heures d'affaires. Les heures d'affaires, c'est encore extrêmement intéressant parce que le ministre impliqué a finalement, sous la pression, accepté certains compromis, déposé des amendements qui sont un pas en avant. La réduction du nombre d'heures d'ouverture pendant la semaine, M. le Président, ça indique que le ministre est sur la bonne voie. Mais pensez-vous que ça s'est fait tout seul? Est-ce qu'on croit un instant que ma collègue, la députée de Taillon, a fait ça comme ça, là? Vous croyez que ça lui a pris deux, trois heures pour obtenir ça du ministre, à ma collègue du comté de Taillon, avec l'aide de toutes espèces de groupes, bien sûr, qui travaillent dans le même sens qu'elle?

Alors, quelques heures de débat, c'a donné un certain nombre de compromis déjà fort intéressants. Mais là, on allait aborder la question du dimanche et des conditions d'application. Les compromis avaient été faits pour les jours de la semaine. Là, on était sur le point d'aborder le dimanche. Et un ministre qui se sent coincé, qui dit: J'ai fait assez de compromis, je serais peut-être forcé à en faire d'autres, comment est-ce que je peux arrêter ça? Bâillon.' Comme disait le député de Louis-Hébert, ces commissions parlementaires, ça use les ministres. Les pauvres! Eh bien, s'ils se sentent trop usés, qu'ils cèdent leurs sièges. Nous les prendrons volontiers. Nous accepterons d'être usés.

Finalement, troisième bâillon. C'est frivole de demander l'avis du Vérificateur général. Comme le disait tout à coup le député de Labelle, est-ce que c'est frivole de demander

l'avis du Vérificateur général? Bien, le Vérificateur général, il dépend de qui? Il dépend de l'Assemblée nationale. Est-ce qu'il y a quelque chose de plus normal que l'Assemblée nationale demande au Vérificateur: Pourriez-vous venir ici pour nous dire si vous pensez que c'est possible de faire cette opération-là? Comme le disait le député de Labelle, c'est loin d'être évident que les surplus de la Régie n'appartiennent pas aux assurés. Il y a un homme qui peut nous éclairer là-dessus, c'est celui que nous, à l'Assemblée nationale, on a nommé pour nous éclairer sur des choses comme celle-là, c'est-à-dire le Vérificateur général. Et on demande qu'il vienne témoigner en commission parlementaire et on nous dit: C'est une demande frivole; si vous continuez à faire des demandes pareilles, bâillon! Et, effectivement, le bâillon se produit.

Alors, je ne peux en tirer qu'une conclusion, une seule, c'est que ce gouvernement ne comprend plus le rôle que l'Opposition doit jouer, a cessé de comprendre que l'Opposition représente en cette Chambre, quels que soient les aléas du système de représentation, 40 % de tous les Québécois, qu'à ce titre, une Opposition responsable qui représente autant de Québécois doit être capable de poser des questions, doit être capable de manifester son objection, doit surtout être capable d'amener le gouvernement à des compromis et à des amendements dans l'espoir de sauver les meubles, dans l'espoir de faire en sorte, comme disent nos amis d'en face, sans toujours préciser de quoi il s'agit, qu'ils relèvent de l'intérêt supérieur des Québécois. Et quand on dit "l'intérêt supérieur des Québécois", chez nos amis d'en face et chez le premier ministre, très souvent, c'est quelque chose d'abstrait. Il ne va toujours bien pas dire "les intérêts inférieurs des Québécois". Chez nous, ça se traduit concrètement par le refus, le rejet, la non-acceptation de ces trois bâillons. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le chef de l'Opposition. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le député de Jonquière. (12 h 50)

M. Francis Dufour

M. Dufour: Merci, M. le Président. C'est, je ne dirai pas avec plaisir, parce qu'on n'intervient jamais sur une motion semblable qui, en fait, s'identifie comme à peu près la plus mauvaise mesure qu'un Parlement puisse adopter... Et, dans les circonstances, on ne peut, par exemple, passer sous silence la motion que le gouvernement s'apprête à adopter. Il faut toujours se rappeler que ce débat-là origine d'une situation importante qui est basée sur des faits très précis. Quelles que soient les personnes qui ont participé à l'adoption ou au refus de cette loi, je ne pense pas que l'on puisse leur faire quelque reproche que ce soit, surtout pour le refus, puisqu'il faut se rappeler que ce gouvernement-là, qui exerce le pouvoir depuis cinq ans, a posé des actions sinon ignominieuses, certainement des actions contestables.

Il faut se rappeler tout d'abord, que, de plus en plus, le temps nous donne raison. De plus en plus, le temps démontre que le gouvernement précédent, donc le gouvernement du Parti québécois, malgré les accusations de mauvaise gestion ou de mauvaise administration... On est en frais de faire la preuve, dis-je, de plus en plus, que le gouvernement précédent était un gouvernement responsable, qu'il a fait face à ses responsabilités et qu'il a pris de bonnes décisions, des décisions qu'on a pu critiquer, dans le temps, mais qui s'avèrent aujourd'hui de plus en plus vraies.

Il faut juste regarder ce qui s'est passé, par exemple, pour le Régime d'assurance automobile. On l'a décrié. Non seulement on l'a décrié, le gouvernement libéral du temps ou le parti de l'Opposition, mais on s'y est opposés et on a fait des "filibusters" pour essayer de l'empêcher de passer. Et Dieu sait si on a couvert du terrain, si le Parti libéral, dans le temps, a couvert le terrain pour décrier la loi et pour susciter des "antilois" ou des gens contre la loi. Ils ont peut-être réussi à soulever des passions, à soulever les discussions, mais, heureusement, ils n'ont pas réussi à empêcher l'approbation de la loi qui s'avère, après 10 ans, un des plus beaux fleurons ou un des fleurons du gouvernement du Québec puisqu'elle fait l'envie d'autres provinces comme d'autres pays. Non seulement elle fait l'envie, mais on a juste à relever certaines discussions où même les ministres qui ont exercé la fonction aux Transports ont dit, à trois reprises dans une période de 15 jours, que c'était une très bonne loi. Une bonne loi pourquoi? Parce que c'est eux qui l'administrent ou si c'est une bonne loi parce qu'elle donne de bons services aux citoyens et qu'elle remplit bien la mission pour laquelle on l'a mise sur pied? Voilà toute la question.

Mais j'ai des doutes lorsqu'on dit que c'est une belle loi, par exemple, et qu'on s'en sert de cette façon-ci; j'ai des doutes très forts qu'on puisse dire, en même temps, que c'est une bonne loi, mais j'ai l'impression que c'est une bonne loi qui permet d'aller vider, siphonner pour mettre ailleurs. C'est ça qui s'est produit. Il faut se rappeler qu'en 1987 c'est 200 000 000 $ qu'on était supposé de voir, j'étais heureux... J'écoutais le député de Rousseau, tout à l'heure, qui, en fait, a été véridique en quelque part, car, dans tout son exposé, je vous mets au défi de regarder ce qu'il a dit, il n'a jamais parlé d'investissements 1990-1991. Il a toujours parlé des investissements de 1991-1992. Je l'attendais là-dessus parce que j'ai assisté à la commission parlementaire pour étudier les crédits de la voirie. À ce moment-là, il a admis, très hon-

nêtement, qu'il n'y avait rien pour les régions, cette année. Et vous pensez que les régions, que les individus vont applaudir un projet de loi semblable en voyant qu'on se fait, d'une part, retirer des montants importants dans la Régie et que les régions vont continuer à être maltraitées comme elles le sont depuis cinq ans par ce gouvernement-là?

Il y a des gens qui disent: Bien oui, mais vous devriez applaudir, vous devriez être avec nous autres. Sous quel motif? Sous le motif d'approuver des actions qu'on réprouve, qu'on n'a jamais voulu faire? En tout cas, si on l'avait fait, on l'aurait fait ouvertement, on est responsables de nos actes.

Mais non. Je comprends le ministre des Transports qui vient d'arriver là, il est "pogné". Il est pogné avec ce qui se passe. Moi, j'en ai pitié, dans le fond, c'est un de mes ex-collègues dans le domaine municipal. Je suis sûr qu'il est de bonne foi, il voulait aller chercher de l'argent, il voulait faire quelque chose. Mais il a un ministère qui n'a pas été contrôlé. Pendant quatre ans, on s'est fait dire toutes sortes de choses: Attendez, vous allez voir, on va faire plus avec moins et on va vous en faire, des choses. Il ne s'est rien produit. On se ramasse avec une grève, en avant. On le sait, ça, une contestation depuis 10 jours. Et, dans nos régions, les budgets sont en baisse. Mais dans le temps... L'année passée, dans le temps des élections, disons-nous, l'argent a sorti un peu plus, un peu plus allègrement. On avait la poche un peu plus légère.

Quand on regarde 80 000 000 $ qui ont servi à fabriquer des plans et on n'a pas une cent à mettre dans les routes. On a des plans mais, comme je disais à mon collègue de Lévis, ça ne roule pas beaucoup sur des plans. Ça roule, mais sur de l'asphalte, sur du gravier et il n'y en a pas. 80 000 000 $, et cette année... Vous savez un manque de caisse qu'il y a actuellement au ministère? On a 250 000 000 $ de promesses qu'il faut payer. C'est ça, la réalité. Et après 13 heures, les ténors de l'autre côté viennent nous faire accroire, viennent nous dire: Aie, ça a duré assez longtemps. Voulez-vous, on va regarder dans le passé? 264 heures de session ou de commission parlementaire pour la fusion de Baie-Comeau-Hauterive. Ça, ça touchait - je ne dis pas que ce n'est pas important - à peu près 20 000 ou 22 000 personnes. Lorsque le gouvernement du temps a imposé, a dit: C'est assez là, on s'est mis à crier: On n'a pas eu de temps.

Je voudrais bien qu'on regarde ensemble ce qui s'est passé dans ce temps-là pour savoir si c'étaient des choses extraordinaires que le Parti libéral ou le parti d'Opposition disait dans le temps. Il faudrait bien analyser froidement tous les faits et toutes les discussions qu'il y a eu dans ce temps-là pour savoir s'il s'est dit juste des choses extraordinairement intelligentes, sen- sées, posées, raisonnables. Je pense bien que personne ne peut douter que 264 heures, c'est que le gouvernement reconnaissait que l'Opposition avait un point de vue à faire valoir. On acceptait démocratiquement de jouer le jeu de la démocratie qui est de permettre à l'Opposition d'exprimer son point de vue parce qu'elle défend aussi des intérêts à l'extérieur. Et ces intérêts-là peuvent être politiques avec un grand P, et peuvent être avec des petits p. Et dans ce cas-ci, si on regarde un peu partout et ce qui s'est passé dans le passé, dans les travaux que vous avez faits ou que le gouvernement, le parti d'Opposition avant, le Parti libéral, il y avait beaucoup de petits p, des petits p, beaucoup.

Ça, regardez ce qu'on a fait avec le régime d'assurance, les taxes sur l'assurance automobile et les baisses du coût de l'essence et les augmentations ou la question de la taxe-ascenseur, vous allez voir qu'on a appris quelque chose. On a appris comment faire taxer les autres pour s'en tirer élégamment. C'est ça qu'on a appris. C'est ça que ce gouvernement-là nous dit depuis cinq ans. Il y a une façon: Faites percevoir par les autres, nous autres, on s'en lave les mains. Des Pilate. C'est ça qu'on appelle des Pilate. Dans le cas qui nous préoccupe, après 13 heures, si on dit qu'on a suffisamment discuté, moi, je trouve qu'il y en a qui ont hâte d'avoir des vacances. Ils ne sont pas habitués de travailler. C'est fatigant, travailler, parce que ça, c'est difficile, mais ça fait partie de la vie. Respirer, c'est fatigant pour du monde. On se rend compte qu'il y en a qui fatiguent vite. S'ils ont trop de travail, on pourrait distribuer le travail différemment. Ce n'est pas notre rôle, mais on pourrait peut-être demander de leur donner de l'aide; peut-être écouter un peu plus l'Opposition et peut-être attendre... Au lieu de solutionner les problèmes en temps de crise, on pourrait peut-être les voir venir et les régler avant que la crise arrive. Mais depuis cinq ans, on attend non seulement que la crise arrive, mais il y a des fois où on est allé jusqu'à la provoquer, la crise, pour être bien sûr qu'on va passer pour le sauveur.

Dans le réseau routier, fondamentalement, ce que les gens doivent savoir, c'est qu'il n'y a pas plus d'argent, cette année, qui sera investi que l'an passé. C'est ça qu'il faut comprendre. Dans le montant qu'on siphonne de la caisse du régime de l'assurance automobile, ce n'est pas beaucoup plus d'argent et ça va se répercuter sur les coûts tout à l'heure et, tantôt, les coûts sur l'assurance automobile vont augmenter. Mais on espère toujours que les gens ne s'en rappelleront plus. Régie des permis et les coûts d'immatriculation... Voilà pourquoi on doit dénoncer un gouvernement qui, après si peu d'efforts, si peu de temps bâillonne l'Opposition et veut toujours garder les bons coups pour lui et les mauvais coups, sur le dos des autres. C'est à réprouver et c'est la raison pour laquelle je

m'oppose fermement à cette clôture.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Compte tenu de l'heure, je vais suspendre les travaux de cette Assemblée jusqu'à 15 heures.

Une voix: Peut-être demander l'ajournement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): J'ai suspendu les travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 4)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je suis prêt maintenant à reconnaître le prochain intervenant, Mme la députée de Johnson.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: M. le Président, dans la nuit de mardi à mercredi, soit du 12 au 13, à deux heures du matin, je faisais une intervention sur le premier bâillon, que le gouvernement que nous avons en face de nous venait de mettre sur la loi 69. On se souviendra que la loi 69, c'est la loi de la fiscalité des commissions scolaires. Vendredi, vers tout près de 18 heures, au début de la soirée, j'intervenais une autre fois sur un deuxième bâillon - ça c'était quelques jours après - sur la loi 75, la Loi sur les heures d'affaires.

Aujourd'hui - il y a eu samedi puis dimanche, bien sûr, où on n'était pas à l'Assemblée nationale - aujourd'hui, un autre! La loi 50 sur laquelle j'avais l'honneur de travailler en commission parlementaire avec d'autres collègues sous la responsabilité de mon collègue de Lévis puisque c'est lui qui est le porteur du dossier Nous faisions une étude sérieuse du projet de loi 50, un projet de loi fort important puisqu'il vient chercher dans la poche des assurés, dans la caisse des assurés, des millions de dollars pour soi-disant intervenir dans les chemins; mais on a eu une démonstration très concrète que, pour cette année, il n'y aura pas un sou noir, sinon une diminution dans les chemins. N'a-t-on pas, pour ce seul motif, l'obligation, en tant qu'Opposition officielle, de faire des représentations auprès du gouvernement pour que ce projet de loi soit reporté à plus tard pour nous donner un peu la chance de pouvoir faire en sorte de faire comprendre au gouvernement par des moyens que les parlementaires ont tous le droit d'utiliser selon nos règles?

Nous avons fait notre travail sérieusement dans les deux autres projets de loi comme dans celui d'aujourd'hui qui est le troisième bâillon, je le répète. Ça ne s'est jamais vu, M. le Président, ici a l'Assemblée nationale, trois bâillons pour faire taire l'Opposition; trois d'affilée. C'est incroyable de gouverner de cette façon-là, M. le Président! Et je pense que les gens ne sont pas dupes. Ils ne connaissent peut-être pas nos règles de procédure à fond, mais ils vont se rendre compte que de faire fermer, faire taire les députés de l'Opposition ça ne rapporte jamais.

Je vais vous expliquer pourquoi on a fait demander certains groupes. On a fait demander, pour commencer, le Vérificateur général. Pourquoi? Parce que, en date du 25 mai, mon collègue le député de Lévis avait écrit une lettre au Vérificateur général lui demandant d'intervenir dans l'évaluation de la Régie de l'assurance automobile du Québec. Donc, on avait toutes les possibilités d'entendre le Vérificateur général en réponse à la lettre de mon collègue de Lévis. Donc, qu'on ne vienne pas me dire qu'on n'avait pas de raison de demander le Vérificateur général. La demande était faite bien avant que notre commission parlementaire commence ses travaux.

Pour quelle raison a-t-on demandé que le conseil d'administration de la Régie de l'assurance automobile vienne à notre table d'invités? Pour répondre à nos questions? M. le Président, c'est une loi de la Régie. N'a-t-on pas le droit d'entendre les gens qui travaillent à la Régie? Et le président était assis à côté du ministre. Il n'a pas répondu à une question que l'Opposition a posée. N'avons-nous pas tous les droits de requérir que les membres de la commission, M. Vézina ou un autre membre... Je l'ai clairement défini dans une intervention que j'ai faite à la commission parlementaire, que ce soit M. Vézina ou un autre membre de l'exécutif, pour autant que nous ayons le privilège de les questionner sur une loi qui parie d'eux, qui les concerne, de laquelle on va aller chercher l'argent des assurés, de la caisse des assurés. Est-ce que l'Opposition n'avait pas le droit d'exiger que les membres du conseil d'administration de la Régie soient présents avec nous? Vous voyez, M. le Président, c'était fort logique qu'on demande que les membres du conseil d'administration soient là.

Ensuite, nous avons demandé la Fédération de l'âge d'or. Les députés du pouvoir se sont tous mis à rire. Bon! Qu'est-ce qu'ils vont aller chercher là? Ils "vont-u" faire venir les Expos? M. le Président, écoutez une minute là, avec la loi 92, la loi de l'année dernière, à la Régie de l'assurance automobile, on avait fait en sorte, dans l'article 83.1, je pense, que les gens âgés de 65 ans, même s'ils étaient sur le marché du travail, s'ils avaient un accident d'auto, en conduisant leur auto ou autre, n'avaient plus le droit de recevoir la compensation - ça s'appelle l'indemnité de remplacement du revenu. Est-ce que c'est normal que tu paies tes plaques d'automobile, que tu paies ton permis pour conduire une automobile, que tu sois assuré avec la Régie de l'assurance automobile et que tu

n'aies pas droit à l'indemnité de remplacement? Bien, c'est ça que la foi 92 a fait, M. le Président. C'a passé en douce. On n'en a pas entendu parler. Les personnes âgées non plus, je ne le crois pas, parce qu'elles n'étaient pas à la commission parlementaire. Et je suis la responsable du dossier des aînés.

Est-ce que je n'avais pas le droit, au nom des personnes dont j'ai la responsabilité ici à l'Assemblée nationale, d'exiger qu'elles puissent venir se faire entendre pour corriger une situation aberrante que la loi 92 leur avait imposée? Je n'avais pas le droit de demander que la Fédération de l'âge d'or vienne s'exprimer au nom de ses 200 000 membres? M. le Président, s'il vous plaît, on avait le droit que la Fédération de l'âge d'or soit là pour nous expliquer comment elle vivait ça, comment elle l'avait expliqué aux gens qui font partie de l'âge d'or. Que tu sois sur le marché du travail ou pas, c'est une discrimination par rapport à l'âge. Est-ce que ça va contre la Charte des droits et libertés du Québec envers les personnes âgées, M. le Président? On avait le droit de demander que l'âge d'or, la Fédération de l'âge d'or soit là pour représenter ses membres.

Les gens de l'autre côté nous ont dit: Vous n'avez pas de preuves. Il n'y a personne qui l'a demandé. M. le Président, j'exhibe fièrement au moins deux télégrammes que j'ai reçus des conseils régionaux de l'âge d'or, un qui représente 6000 membres et l'autre, 14 000, que j'aurais pu déposer à la commission parlementaire, qui étaient une preuve de plus...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Mme Juneau: ...de gens insatisfaits.

Le Vice-Président (m. bissonnet): ceux qui ne sont pas assis à leur place, s'il vous plaît, nous avons la députée de johnson et j'apprécierais que vous respectiez son droit de parole. merci.

Mme Juneau: Je vous remercie, M. le Président, et je ne voudrais pas qu'on brime mon droit de parole. Je n'ai que 10 minutes. Je ne veux pas les perdre.

On a demandé, après ça, les gens de l'ANCAI. Pourquoi les a-t-on demandés? Ça fait deux semaines qu'ils sont en avant du parlement. Deux semaines a essayer de se faire comprendre de façon très civilisée. Ils étaient même dans la salle quand on a demandé qu'ils apparaissent à notre table d'invités pour répondre à nos questions. Le ministre n'a pas voulu, n'a pas dit un mot à aucune de nos questions. Est-ce qu'on n'avait pas le droit d'exiger que ces gens-là viennent s'exprimer sur la loi 50? Comment ils verraient que l'argent de la caisse des assurés puisse se retrouver dans les chemins... Oui, ou non, peut-être que oui, peut-être que non, ou peut-être pour payer la facture du gouvernement, la facture d'épicerie. On a demandé aussi l'Association des victimes d'accidents. Il y a plein de copies de presse qui parlent de gens qui n'ont pas été capables de se faire écouter à la Régie. Est-ce qu'on n'avait pas tous les privilèges de demander ces gens-là, M. le Président? Est-ce qu'on faisait retarder la commission pour des futilités, comme le ministre le disait ce matin? Non. On voulait avoir le Protecteur du citoyen. Savez-vous combien le Protecteur du citoyen a réglé de causes à la Régie de l'assurance automobile? Tout près de 1000 causes, M. le Président. Est-ce qu'il n'y aurait pas eu une décence la plus élémentaire qu'on puisse faire une demande pour que le Protecteur du citoyen nous explique comment il se faisait que ces gens-là soient obligés de régler des causes qui sont pendantes devant la Régie de l'assurance automobile? Nous avions tous les droits. Tous les droits! Nous avons eu aussi une demande de la Fédération des femmes du Québec. Vous savez, par la loi 92, les femmes qui sont à la maison n'ont pas le droit d'avoir une indemnité de remplacement, n'ont plus le droit. Ce n'est pas important, ça. On voulait les entendre et on voulait qu'il y ait une correction dans le projet de loi 50. On n'a pas retardé, M. le Président. Et quand j'entendais le député de Louis-Hébert, ce matin, dire qu'il fallait discuter en adultes, avec des gens civilisés, qu'on se rappelle la loi 22, M. le Président, quand il nous a fait un discours de fou...

M. Gendron: Oui.

Mme Juneau: ...debout, en criant et en hurlant, les deux bras dans les airs.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Mme la députée, en vertu du règlement, je vous demanderais de retirer vos dernières paroles, s'il vous plaît.

Mme Juneau: M. le Président, je retire le mot "fou". Je veux dire, un discours qui n'avait pas sa raison d'être parce que, sur la loi 22, il a crié, il a hurlé contre nous.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!

Mme Juneau: Puis la loi 22 a été corrigée par le ministre responsable. C'est la Loi sur les allocations familiales.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure.

Mme Juneau: M. le Président, en terminant, l'Opposition officielle n'a fait que son travail et elle l'a fait de façon que tous les gens qui

veulent se faire entendre puissent le faire. Et c'est une honte qu'on ait un troisième bâillon sur trois lois, en cinq jours.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, Mme la députée. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Dubuc. M. le député, vous avez la parole.

M. Gérard R. Morin

M. Morin: Merci, M. le Président. Honnêtement, j'espère que le ministre des Transports était à l'écoute de ma collègue de Johnson parce que je pense, malgré sa volonté, la volonté du gouvernement de bâillonner l'Opposition, je suis convaincu qu'il ne pourrait demeurer insensible aux propos de ma collègue. Alors, M. le Président, considérant que le gouvernement a décidé de bâillonner l'Opposition, je ne prendrai pas de chance et je vais profiter du temps qui m'est donné pour revenir à la charge sur les principes mêmes de la loi, revenir à des propos qui, semble-t-il, ont passé par une oreille du ministre pour sortir par l'autre.

Effectivement, la semaine dernière, lors de l'adoption du principe, je soutenais que le gouvernement, en s'appropriant des sommes importantes à même la caisse d'assurance automobile ne faisait que dénaturer la mission de la Régie de l'assurance automobile, parce qu'il n'a pas eu l'audace de faire face à la situation, lors de l'adoption du budget, que c'était une autre illustration d'un manque de courage politique du gouvernement. En effet, par son projet de loi 50, le gouvernement libéral ne respecte pas les objectifs de la réforme du Parti québécois de 1977. Car vous savez, M. le Président, le régime de l'assurance automobile doit offrir aux assurés les meilleures indemnités aux meilleurs prix possible. Ce n'est pas ça, avec le projet de loi 50, le gouvernement refuse de faire bénéficier les assurés des fruits du régime, parce que ce gouvernement finance ses dépenses courantes à même les primes d'assurance.

Donc, je le répète, le gouvernement dénature carrément la mission de la Régie de l'assurance automobile. Avec son projet de loi, il affecte des surplus, des surplus de la Régie, à des fins autres que l'indemnisation et la sécurité routière. En vertu de la mission de la Régie, le gouvernement n'a pas le droit de siphonner la caisse des assurés pour faire des travaux de voirie. Et cette situation doit être dénoncée, d'autant plus qu'il m'apparait moralement inacceptable que le gouvernement puise, dès cette année, des centaines de millions pour des travaux qui ne se feront, peut-être, que l'an prochain. Donc, il faut rappeler, encore une fois, M. le Président, que, lorsque la Loi sur l'assurance automobile a été adoptée en 1977, l'objectif du gouvernement n'était pas de créer la Régie pour prélever des taxes pour la voirie, le transport ou l'assurance-maladie. La Régie avait pour mandat principal d'administrer l'assurance.

Alors, en partant de ces principes-là, nous avons cru, lors de notre travail en commission, que le ministre accepterait peut-être d'entendre des organismes pour apporter des points de vue auxquels il ne se serait peut-être pas attardé, et de là peut-être la possibilité d'envisager des amendements importants à ce projet de loi, sinon son retrait. Alors, pour ce faire, en commission parlementaire, nous avons proposé au ministre d'entendre des groupes.

En premier lieu, nous avons cru que le ministre serait intéressé à entendre le conseil d'administration de la Régie, parce que, comme le disent les notes explicatives du projet de loi, le projet de loi apporte des modifications importantes de nature financière. Le fait de puiser tant d'argent n'aurait pas, nous présumons, des effets majeurs sur le plan actuariel, en plus, bien sûr, d'attaquer durement la mission de la Régie.

Donc, pour ces trois considérations, je pense que le point de vue du conseil d'administration sur l'efficacité de l'assurance automobile à partir des trois éléments que je viens de vous soumettre aurait été intéressant. Mais le ministre a vu dans nos motions une mesure dilatoire visant à empêcher, et c'étaient de loin nos intentions. (15 h 20)

Alors, on a cru, à un moment donné, qu'il y avait un malentendu. Nous avons proposé au ministre d'entendre l'Association des victimes d'accidents d'automobile. Nous étions convaincus que le ministre trouverait moyen de mettre en oeuvre les démarches pour entendre ces gens dans le plus court laps de temps possible, car, en fait, y a-t-il des gens mieux placés que les victimes? En plus d'être des assurés, des gens qui ont payé des primes, soit par la voie de leur permis de conduire ou par l'immatriculation, ils se voient malheureusement victimes d'accidents. Alors, s'il y a des gens, à partir de leur association, qui auraient sensibilisé ou informé tous les membres de la commission, en fait, sur ce que vivent les victimes d'accidents d'automobile par rapport aux ratés ou aux difficultés entourant le service d'indemnisation, si le ministre avait accepté de les entendre, je suis convaincu qu'avant d'aller chercher un iota dans cette caisse, il se serait assuré que les problèmes graves ou les injustices graves que subissent les victimes d'accidents d'automobile soient d'abord réglés.

Enfin, je pense que c'était la dernière proposition, en plus des autres, je ne ferai pas l'énumération, nous avons demandé au ministre d'entendre l'Association nationale des camionneurs artisans parce que, effectivement, on en avait même dans la salle qui nous écoutaient, en commission. Alors, la démarche aurait été courte. On aurait pu leur demander, sur le champ, de venir nous dire ce qu'ils en pensent parce que,

effectivement, y a-t-il des gens mieux placés que des camionneurs, des gens qui vivent le tiers de leur temps sur la route, pour venir nous parler du coût des permis et de toute l'administration entourant l'immatriculation, venir nous parler de la condition du réseau routier? Je pense que nous aurions eu là des propos fort intéressants et peut-être, devant, je pense, les bonnes intentions du ministre, il y aurait eu lieu de songer, sinon au retrait total du projet de loi, du moins à des amendements importants.

Mais nous n'avions même pas, M. le Président... Nous ne nous étions même pas attaqués à l'étude du projet de loi article par article que la nouvelle nous est parvenue. Le gouvernement, en plus de dire: Nous connaissons tout, nous savons tout, nous n'avons pas besoin de plus de consultations et même vous, l'Opposition, c'est terminé, on vous a suffisamment entendus. Alors, ça, je considère que c'est le comble, M. le Président, pour un gouvernement, en plus de ne pas vouloir entendre personne, que de trouver moyen d'enlever, ni plus ni moins, la parole à l'Opposition. Mais il n'y a quand même pas lieu de se scandaliser. Il m'apparaît que c'est l'opération camouflage qui se continue. Que ce soit à partir du projet de loi 69 qui, à travers une modification de la Loi sur l'instruction publique, réussit à s'attaquer à ce qu'il y avait de plus important en termes de lois fiscales, soit la loi 57 sur la fiscalité municipale... Alors, il tente de passer par le biais de cette loi-là pour s'attaquer à quelque chose d'important pour les contribuables au niveau du champ foncier municipal.

Il y a le projet de loi 75. Je n'ai pas eu l'opportunité d'assister à la commission, mais selon ce qu'on en sait, le ministre réussira à mécontenter tout le monde, en plus, de façon astucieuse, de proposer aux municipalités d'en faire l'application à travers un projet de loi qui me paraît très confus. Mais le côté le plus intéressant de percevoir les fruits d'un tel projet de loi, d'une telle loi, eh bien, il le laisse aux municipalités.

Il me reste seulement une minute, M. le Président, pour déplorer que nous sommes devant un troisième bâillon. Si ce n'était que ça, si ce n'était que ça, mais on n'est pas rendus au bout de nos peines. En plus, nous devons vivre avec des menaces que le ministre a proférées à l'endroit de plusieurs membres de la commission à l'effet que devant notre questionnement envers ce projet de loi, eh bien, malheureusement, il n'y aura pas de travaux dans nos comtés. Alors, voyez-vous, en plus de se faire couper la parole, de voir le gouvernement qui dit: Je sais tout, j'entends tout, je n'ai plus besoin de consulter personne, à vous l'Opposition, c'est terminé, en plus, ceux qui ont parlé devront payer le prix. Or, M. le Président, je termine ici. Mais pour une première expérience, une première session parlementaire comme nouveau député, vous comprendrez qu'on a beaucoup de difficulté à comprendre tout ça. J'ai vécu dans des organismes ou dans d'autres organisations où la place... enfin le système démocratique semblait beaucoup mieux implanté qu'en cette Chambre. Je vous remercie, M. le Président, de votre bonne attention.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant la prochaine intervenante, Mme la députée de Taillon. Mme la députée.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Effectivement, on se retrouve, pour la troisième fois en cinq jours, devant le bâillon, c'est-à-dire que l'on empêche l'Opposition d'assumer ses fonctions, parce que c'est bien ça dont on parle, et je vais y revenir.

J'écoutais ce matin l'intervention de notre collègue d'en face, le député de Louis-Hébert, qui, semble-t-il, n'aurait participé que quelques heures à peine à la commission et qui nous dit: On est obligés d'entendre les discours de l'Opposition, discours de l'Opposition...

M. Doyon: Question de règlement, M. le Président.

Mme Marois: ...qui nous font perdre du temps en pures frivolités...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je m'excuse, Mme la députée. Question de règlement, M. le député de Louis-Hébert.

M. Doyon: Oui, M. le Président. Il est de coutume, dans cette Assemblée, de ne pas reprocher à qui que ce soit de ne pas être ou d'être à une commission. Il y a beaucoup d'activités qui nous appellent, alors je demanderais à la députée de tenir compte de ça, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Bissonnet):Mme la députée, si vous voulez- poursuivre votre intervention.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Non, je suis très consciente et j'admets avec le député qu'il pouvait être impliqué dans une autre commission. Je comprends ça, ça m'arrive aussi à l'occasion.

Il nous disait, ce matin, qu'il était obligé d'entendre nos discours qui n'étaient que pures frivolités. Mais vous savez, dans une démocratie, l'obligation d'entendre l'Opposition, ça fait partie des règles du jeu. L'Opposition a une lourde responsabilité de s'assurer, et là, je vais y revenir au cas où on oublierait c'est quoi le rôle de l'Opposition, essentiellement, l'Opposition doit s'assurer que, au moins, premièrement, l'éclairage soit fait sous tous les angles, lorsqu'un projet de

toi, lorsqu'une mesure fiscale, budgétaire, nous est présentée ici, que l'ensemble des aspects qui concernent cette mesure-là soient bien traités, qu'on en parle, qu'on sache de quoi il s'agit.

Premier rôle d'une Opposition ici, à l'intérieur de nos institutions. Ce n'est pas de s'opposer pour s'opposer, mais c'est de s'assurer que l'éclairage soit bien fait. C'est de s'assurer que les principes sur lesquels les lois s'appuient sont bien respectés et que, lorsqu'on veut en changer, M. le Président, on prenne le temps de le faire, qu'on prenne le temps d'en débattre, qu'on prenne le temps d'en discuter. Et cela, oui, ça peut être long. Et le moyen qu'a l'Opposition pour le faire, c'est un encadrement qui nous est donné par notre règlement, ici, à l'Assemblée nationale, qui nous dit: Pendant une commission parlementaire, vous avez tout le temps qu'il faut, comme membre de l'Opposition, pour voir des gens, questionner les principaux intéressés, discuter avec le gouvernement, poser des questions au ministre. C'est ça, le rôle, M. le Président, d'une Opposition.

Un troisième rôle d'une Opposition - et c'est probablement le plus fondamental - c'est de s'assurer que les personnes qui vont être touchées par la loi et qui sont en désaccord avec ce que cela a comme impact dans leur vie puissent faire entendre leur point de vue. Et si nous ne le faisions pas, M. le Président, nous pourrions être accusés de manquer à notre devoir d'Opposition, à notre responsabilité de député, qui est de représenter des points de vue qui n'ont pas été entendus, qui n'ont pas été défendus ni retenus par le gouvernement. Et, pendant les travaux de la commission qui ont duré treize heures, on a refusé de voir les personnes concernées par le projet de loi, touchées par le projet de loi, on a refusé d'entendre les gestionnaires de la Régie de l'assurance automobile du Québec. On a finalement refusé que les personnes concernées soit par l'action à l'intérieur du projet de loi actuel soit par l'effet ne puissent venir émettre leur point de vue. M. le Président, on a rappelé à quelques reprises devant les membres de cette Assemblée que, lorsque nous étions au gouvernement, nous nous étions trouvés devant des projets de loi qui soulevaient, oui, de l'opposition assez importante ou pour lesquels il n'y avait pas nécessairement consensus. Et nous avons rappelé aux membres de cette Assemblée comment nous avions pris le temps d'entendre, de discuter, d'échanger, comment nous avions été patients de telle sorte que cet éclairage dont je parlais puisse être apporté. (15 h 30)

Là, M. le Président, la loi qui est devant nous, elle est en fait un changement majeur du principe même sur lequel s'appuie la Régie de l'assurance automobile qui se constitue un fonds d'assurances. Attention! Tout le monde sait à peu près ce que c'est de l'assurance. Quand je contribue à une assurance, je paie pour un risque que j'encours quand je conduis. Ainsi je m'achète une police, finalement, comme on dit dans le langage populaire et lorsque je suis confrontée au risque, c'est-à-dire j'ai un accident, le fonds auquel j'ai contribué avec tous les millions de Québécois aussi qui l'ont fait en même temps que moi, me rembourse, m'aide à passer à travers un handicap, m'aide à remplacer mon salaire pendant que je suis en congé de maladie à cause de cet accident-là. Donc, c'est un fonds que l'on se constitue. Une assurance c'est un pacte que l'on passe avec des assurés et quand le comportement des assurés, c'est-à-dire les conducteurs et les conductrices d'automobiles, est de bonne qualité, quand on a moins d'accidents, le fonds qu'on a constitué sert dans une assurance à baisser ce que cela nous coûte de participer au régime. C'est ça le principe de base d'une assurance. Et la loi dont nous parlons attaque en fait ce principe-là. Elle dit: Ce ne seront plus les assurés qui ont payé pour se faire protéger qui vont avoir un retour finalement si ça va bien, s'ils se comportent correctement, s'ils conduisent mieux, s'ils sont plus prudents sur la route, mais on va, nous, comme gouvernement, s'en servir comme d'une taxe que l'on ira chercher sur le dos de ceux qui ont contribué dans la caisse et on va le répartir sur les routes et sur l'amélioration d'un certain nombre de systèmes routiers. On change, on dénature, on modifie la base même du principe sur lequel s'appuie la loi. Par exemple, vous savez à Hydro-Québec lorsque nous étions au gouvernement on a modifié les modes de gestion comptable d'Hydro-Québec et on est allé chercher des redevances d'Hydro-Québec.

On a débattu de ce projet de loi-là, si ma mémoire est bonne, pendant près de trois semaines, pas pendant treize heures, pendant trois semaines parce que, oui, on modifiait une règle du jeu fondamentale.

C'est actuellement ce qu'on est en train de faire avec la caisse de l'assurance auto. On en modifie fondamentalement le principe. Quand on fait ça, M. le Président, on prend le temps qu'il faut pour réfléchir, pour consulter, pour se demander: Est-ce que c'est la bonne décision que l'on prend? Qu'est-ce que ça aura ensuite sur d'autres pactes que l'on voudrait conclure - parce que c'est une loi un peu particulière dans ce sens-là - avec la population? Est-ce que ça ne vient pas détruire, une telle approche, la crédibilité qu'a un gouvernement lorsqu'il veut modifier en profondeur un fonctionnement, une base de loi? Imaginez si, demain matin, le gouvernement disait: Je prends à même la réserve des régimes de rentes du Québec, de la Régie des rentes du Québec, et je m'en sers pour aider les personnes âgées parce que la Régie des rentes du Québec, ça va vous servir quand vous serez plus âgés. Mais ce serait le tollé. Ce serait le drame total. On dirait: Moi, j'ai contribué pendant toute ma vie active à un régime et là, on s'en

sert à d'autres fins. Pareil! Pareil! Pareil! Même comparaison. On a un régime d'assurance, d'un côté, et là, on est en train de le transformer en une espèce de réserve pour que le gouvernement se serve et taxe, de façon déguisée et maquillée, les personnes qui ont contribué à ce régime. Quand on discute un principe, on prend le temps de le faire, M. le Président, et, dans ce sens-là, je vais m'opposer de toutes mes forces à ce qu'on nous impose le bâillon. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. M. le député de Saguenay.

M. Maltais: Moi? Non.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le député d'Arthabaska.

M. Jacques Baril

M. Baril: Oui, M. le Président. Je comprends un peu l'hésitation du député de Saguenay à vouloir se présenter et parler...

Une voix: Oui, oui.

M. Baril: Je suis sûr qu'il aime beaucoup mieux parler après moi qu'avant. De toute façon, pour un député au pouvoir, ça ne doit pas être facile de parler pour suspendre les règles de procédure en cette Chambre, parce que le rôle de l'Opposition, M. le Président, c'est d'abord de faire connaître, avec les moyens dont on dispose ici, la portée d'une loi, les conséquences d'une loi sur une population.

Le rôle que nous avons joué en commission parlementaire, si nous avons demandé durant treize heures, treize heures et demie ou quatorze heures, je ne le sais pas, au ministre d'entendre différents organismes pour connaître leur opinion sur la portée de la loi 50, c'est parce que, M. le Président, on connaît la gravité du geste que le gouvernement s'apprête à poser. Là, on suspend les règles. On se dépêche en toute hâte et, si on a ouvert la session trop tard et qu'on n'a pas eu le temps de finir, ce n'est pas à nous à l'expliquer. Mais, actuellement, on a une hâte folle de terminer ce projet de loi. Imaginez-vous l'importance.

D'abord, il touche trois sujets, ce projet de loi. Le premier, d'une importance capitale sans doute pour le gouvernement au pouvoir, c'est de changer le nom de la Régie de l'assurance automobile du Québec en Société d'assurance automobile du Québec. Imaginez-vous, M. le Président, c'est effrayant comme ça va être beaucoup plus profitable. Je ne sais pas quel avantage le gouvernement va aller chercher là-dedans, autre que d'essayer d'annuler, d'effacer, de faire oublier aux Québécois et aux Québécoises une loi que le Parti québécois avait passée en créant la Régie de l'assurance automobile du Québec. Et en créant la Société d'assurance automobile du Québec, on ne voit rien dans la loi qui va permettre à cette Société de construire des routes ou bien d'améliorer des routes, de les entretenir. Ce n'est pas la Société de construction des routes du Québec, c'est la Société d'assurance automobile du Québec. On change le premier mot. On change le mot "régie" pour "société". Qu'est-ce que ça va donner de plus demain matin, ça? Et là, on se dépêche de passer ça.

Le deuxième sujet, c'est là que c'est grave, M. le Président. Qu'on change le mot "société" pour "régie", ça ne me fait pas grand-chose en soi. Si au moins on nous disait combien ça va coûter aussi aux Québécois de changer de nom. Parce que sur tous les permis de conduire, sur toutes les publicités, sur les bâtisses, etc., changer le mot "régie" pour le mot "société", imaginez-vous, M. le Président, les coûts que ça va engendrer juste pour faire plaisir à ce gouvernement-là. La terre n'arrêtera pas de tourner, même si ça continue de s'appeler la Régie. Mais, d'une façon obstinée, ce gouvernement-là dit: On va effacer ça, on va mettre "Société". Peu importe combien ça coûtera.

Le deuxième rôle qu'on veut faire jouer à la SAAQ - parce que, maintenant, ça ne s'appellera plus la RAAQ, ça va s'appeler la SAAQ, hein, voyez-vous? - c'est de prendre les surplus. Là, il y a environ 253 000 000 $ ou 300 000 000 $ de surplus actuellement en réserve. On va prendre cet argent-là sur les cinq prochaines années au moins et on va dire: Là, on va construire des routes et on va entretenir des routes, question de sécurité au Québec. On va améliorer ça, on va prendre cet argent-là.

M. le Président, je ne sais pas si c'est parlementaire, mais, en tout cas, vous me reprendrez, c'est du vol qu'on va légaliser par cette loi-là parce que chaque individu au Québec qui paie, qui achète son permis de conduire, qui paie son immatriculation, se paie une assurance en cas d'accident de la route. Il ne paie pas une assurance pour construire des routes ou entretenir des routes. C'est ça qui n'est pas correct, M. le Président, là-dedans. Maintenant, on va légaliser un geste que ces gens-là... On leur dit de se payer une assurance. On va s'emparer de cet argent-là pour construire des routes. Puis là, on vient nous annoncer un grand programme de développement de 1 400 000 000 $ ou 1 700 000 000 $ - ils lancent assez de chiffres qu'à un moment donné on en oublie - pour les cinq prochaines années. Là, il va s'en construire des routes et ça ne sera pas des farces comme ça va aller, puis il va y avoir de la construire en région.

Le ministre nous dit, et ses collègues de ce bord-là: Vous êtes contre ça, la construction de routes. Voyons, M. le Président, ce n'est pas parce qu'on est contre la construction de routes.

On est contre la façon dont le gouvernement va puiser dans les fonds pour supposément construire des routes parce qu'il ne s'en construira pas plus. Sur le projet, la grosse annonce de un milliard, quelques cents millions, d'ici cinq ans, il va y avoir 104 000 000 $ supplémentaires de dépensés pour la construction de routes dans les régions. 104 000 000 $ seulement quand on vient nous dire que c'est 1 700 000 000 $ ou 1 400 000 000 $. 104 000 000 $ de dépensés et ce sera uniquement sur les deux dernières années. Ça va commencer en 1993. (15 h 40)

Et on justifie d'abolir, de suspendre des procédures dans cette Chambre pour permettre au gouvernement de changer le nom d'une régie pour celui de société et aller s'emparer de fonds que les gens, les citoyens et les citoyennes du Québec se sont donnés pour se donner une assurance, une garantie en cas d'accident ou d'invalidité et là, on construit des routes au Québec.

C'est un non-sens, M. le Président. En plus de faire accroire aux gens qu'on va améliorer la sécurité, en même temps, le ministère des Transports diminue son budget de base. C'est là qu'est le hic, c'est là qu'est le problème et que la population n'est pas rendue au point où elle peut gober n'importe quoi. Ça ne se peut pas, ce n'est pas de même que ça marche.

On réduit le budget de base du ministère des Transports et là, on dit: On va aller en chercher dans les fonds d'assurance automobile et on va construire tant de routes de plus. On n'en construira pas, sur les quelque 1 000 000 000 $; il n'en construira pas plus. C'est 104 000 000 $, et ça, c'est des chiffres du ministère. Ce que je trouve déplorable, M. le Président, je l'ai dit au ministre, je le répète. Ce qu'on a voulu l'empêcher de faire, c'est que son gouvernement s'empare de ces fonds qui sont créés pour se donner une assurance, et le ministre des Transports, M. le Président, actuellement, est un exécutant, il est uniquement un exécutant du ministre des Finances qui, lui, dans son budget n'a pas su planifier, dans les années de croissance, supposément, les budgets, les sommes d'argent pour les construire et les entretenir, ces fameuses routes-là.

Et là, à cause d'un manque de prévoyance, on parle d'un début de récession économique, on s'en va piger de l'argent un peu partout. Le ministre des Transports est uniquement un exécutant du ministre des Finances parce que, dans son budget, c'est une mesure que le ministre des Finances a annoncée, d'aller chercher 625 000 000 $ d'ici les cinq prochaines années dans les fonds de l'assurance automobile.

Le troisième "item", M. le Président, on va aller chercher encore 83 800 000 $ rétroactivement pour payer un service ambulancier dans le Montréal métropolitain. Et ça, M. le Président, les organismes qu'on a voulu faire venir en commission parlementaire pour les entendre, les écouter et savoir c'était quoi leur opinion face à ça, je ne suis pas certain, moi, que les automobilistes du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie ou de la Côte-Nord soient d'accord pour payer de l'assurance pour répondre à une loi que ce gouvernement-là a votée en Chambre pour donner un service ambulancier au Grand Montréal métropolitain, et pas à n'importe quel coût, M. le Président, à 1500 $ l'accidenté.

Imaginez-vous, c'est ce gouvernement, pour faire plaisir à sa gang, imaginez-vous, hein, qui a voté ici une loi pour établir un service ambulancier dans la région de Montréal à 1500 $. Quand ce sera un accidenté de la route, ça va coûter 1500 $ au gouvernement du Québec. Quand c'est un transport pour un malade quelconque ou une autre maladie, c'est 70 $. Mais, pour un accidenté de la route, c'est 1500 $, M. le Président, qu'on vient chercher dans le fonds de l'assurance automobile, 83 800 000 $ pour toutes les années à venir. 37 200 000 $ chaque année, uniquement pour payer ce service-là au Montréal métropolitain pour dispenser un service d'ambulance pour tous les gens qu'il y a là.

Et c'est ça qu'on voulait savoir de la part de différents intervenants, ce qu'ils pensent. Est-ce que nous autres, nos demandes de l'Opposition, c'est farfelu? Est-ce que ça n'a pas de bon sens? On aurait voulu que ces gens-là viennent nous le dire, M. le Président. Mais non, on fait la sourde oreille. Le ministre nous a dit continuellement: Attendez. Il n'a pas répondu à une question. On lui posait des questions sur différentes affaires. Attendez à l'étude article par article, je vais vous le dire. On n'a rien su, M. le Président, et je l'ai dit, le ministre des Transports aurait dû suivre l'exemple de son collègue de l'Agriculture.

Avant les dernières fêtes, on a retardé l'adoption d'une loi, la Loi sur les courses de chevaux. On demandait d'entendre trois organismes, le ministre de l'Agriculture a répondu à notre appel. La semaine dernière, trois organismes sont venus et, suite au témoignage de ces gens-là, le ministre de l'Agriculture a retiré deux articles de sa loi. C'était exactement ce que l'Opposition demandait ici. Donc, ce n'est pas du temps perdu que l'Opposition demande d'entendre les organismes pour savoir l'opinion de tout le monde. C'est une preuve frappante, M. le Président, que, quand ce gouvernement-là veut écouter la population, on est capable de bonifier les lois pour que cela n'ait pas un impact négatif sur l'ensemble de la population.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant M. le député de Saguenay. M. le député de Saguenay.

M. Ghislain Maltais M. Maltais: Merci, M. le Président. Voilà

donc, sur la motion de clôture, mettant fin à la commission parlementaire, qui avait pour mandat de l'Assemblée nationale d'étudier article par article le projet de loi 50. Il faudra peut-être se poser la question, M. le Président, comment se fait-il que nous en sommes arrivés à une motion de clôture? J'ai voulu spécifiquement attendre que les intervenants du Parti québécois, membres de la commission des aménagements et des équipements, aient pris la parole pour voir s'il y avait quelqu'un dans le groupe qui aurait osé parler de ce qui s'est passé en commission parlementaire pendant ces treize heures.

M. le Président, j'ai quand même quelques années d'expérience en cette Chambre et j'ai vu des choses tout à fait insolites, alors qu'on débattait d'une motion en cours, on voyait d'autres motions se préparer et même des députés inexpérimentés les annoncer pendant qu'on n'avait même pas débattu les premières. M. le Président, on est en droit de se poser une question sur la bonne volonté des gens qui sont en face. Treize heures, on aurait pu quand même ouvrir au moins le projet de loi, regarder ce que disait l'article 1, l'article 2. Au pis aller, on aurait passé deux articles. Et, M. le Président, cette mauvaise foi, elle était connue. Le projet de loi n'est pas arrivé sur la table comme une soupe. Dans le discours du budget du 4 mai, il avait été clairement annoncé par le ministre des Finances que le ministre des Transports devrait, par un projet de loi, se conformer aux directives du ministre des Finances. M. le Président, je pense que le ministre des Transports a fait preuve d'une patience angélique tout au cours de cette commission.

Et je me rappelle, après avoir écouté plusieurs discours, que les gens d'en face ont peu de mémoire ou ils ont un oubli permanent. Dire que le bâillon a été inventé à cette session, ça serait présumer qu'il n'y en pas eu au cours des dix dernières années. Mme la députée de Taillon a certainement la mémoire beaucoup plus longue que ça. Qu'elle se rappelle la loi 38, la loi 111. Je lui laisse le temps de réfléchir. Il y avait beaucoup de Québécois qui ont réfléchi à ces lois. C'étaient des lois qui ne concernaient même pas, à cette époque-là, 38, le Parlement du Québec. C'était une loi qui empêchait les municipalités de recevoir des subventions du gouvernement fédéral. M. le Président, pourtant ces lois-là ont été débattues sans vergogne ici. Et des motions de clôture ont eu lieu également. Chaque gouvernement a été élu pour administrer. Il administre selon ses politiques et doit vivre avec ses bons coups, comme avec ses mauvais coups. L'Opposition, comme la députée de Taillon nous l'a bien expliqué... Elle a tellement bien expliqué, que je suis convaincu que l'ensemble de la population va lui permettre d'exercer son métier de députée de l'Opposition pendant plusieurs autres années, et plusieurs autres mandats. Elle est tellement compétente en la matière que je suis convaincu que la population québécoise ne pourra lui enlever ce rôle.

M. le Président, la loi 50 a pour objectif d'aller chercher des surplus dans la caisse de la Régie de l'assurance automobile, de les investir sur les routes québécoises. Tous les groupes qu'on voulait nous faire entendre en commission parlementaire n'avaient qu'une réponse, ou qu'une demande à faire au gouvernement du Québec: Réparez les routes, ça urge. Ça fait presque 15 ans qu'on oublie le réseau routier au Québec. On est rendu avec un réseau routier qui coûte énormément cher à entretenir. Et ça prend des sommes d'argent importantes. Or, le gouvernement du Québec, comme un bon administrateur, avant d'en emprunter à des taux bancaires fort élevés, a décidé d'aller dans ses sociétés d'État se servir des surplus qui appartiennent à l'ensemble des citoyens et citoyennes du Québec, pour simplement réparer nos routes. (15 h 50)

M. le Président, j'ai le privilège de représenter une région éloignée du Québec, où le réseau routier a une importance capitale, où le réseau routier a été malheureusement souvent ignoré au cours des 10 dernières années. Le développement régional ne peut se faire sans un réseau routier adéquat. Le réseau routier fait partie de la vie quotidienne de tous les nord-côtiers. Il est important que le gouvernement du Québec puisse intervenir immédiatement et à long terme également. Ce qui nous avait manqué, au Québec, c'était une planification à long terme. On a passé beaucoup d'années à faire ce qu'on appelle du rapiéçage. Il était temps qu'un gouvernement s'installe, par des lois à l'Assemblée nationale, pour permettre une intervention soutenue, continue, et ce, pendant de nombreuses années. C'était la seule façon, je pense, de le faire, et le ministre des Transports a la volonté de le faire pour permettre que nos régions puissent se développer à un même rythme que les grandes villes.

Vous savez, M. le Président, le député de Saguenay ne demandera pas de tunnel entre Baie Comeau et Matane. C'est utopique de penser à ça. D'autres députés peuvent en demander, ils sont connus, ils ont fait connaître leurs couleurs, mais moi je n'en demanderai pas. Ce que je demande au ministre des Transports, c'est d'avoir des sommes disponibles pour intervenir sur la route 138, pour qu'elle devienne carrossable autant pour les routiers que pour les usagers d'automobiles, autant pour les personnes de l'âge d'or qui circulent en autobus que pour les jeunes qui circulent en autobus. Le message qu'ils nous font, c'est: Réparez les routes. Et le gouvernement est élu pour administrer et, que je sache, ça ne fait pas tellement longtemps qu'il est élu. Le 25 septembre, la population a redonné un mandat au gouvernement du Québec pour administrer en bon père de famille, en bon gestionnaire, et c'est ce que le ministre des

Transports veut faire, et c'est important. Je trouve un petit peu décevant de la part des gens de l'Opposition qui représentent des régions, de voir que dès que le ministre des Transports ou le ministre délégué aux Transports arrive en cette Chambre, ils courent après derrière le trône pour demander des subventions additionnelles pour leurs services routiers, et, lorsqu'ils arrivent en Chambre, ils ont un deuxième langage, leur vrai langage, celui de faire de l'obstruction systématique, tout simplement pour bloquer un projet de loi qui a une importance tout à fait capitale pour nos régions.

M. le Président, je suis convaincu que l'ensemble de mes collègues du Parti libéral auront le sérieux de mettre fin à cette mascarade le plus rapidement possible pour pouvoir adopter le projet de loi 50 qui va permettre, au cours des prochaines années, une amélioration sensible du réseau routier, qui va permettre d'accroître le développement régional, parce que dans les régions éloignées, le réseau routier est d'une importance première, première. J'arrive, en fin de semaine, de mon comté, et les gens nous le disent: Quand allez-vous commencer à faire des réparations majeures sur la 138? On doit leur répondre: Quand l'Opposition nous permettra d'adopter le projet de loi 50. Je ne suis pas sûr, à ce moment-là, que l'Opposition joue bien son rôle en retardant un projet de loi qui, lui, automatiquement, retarde le développement régional. Deux discours, deux discours, M. le Président, deux discours, et le premier discours, c'est celui que les gens de nos comtés nous envoient comme message. Je pense que, à ce niveau-là, on n'a pas de leçon à recevoir de personne. Les actions, M. le Président, que le ministre des Transports veut faire par le projet de loi 50, elles sont connues, elles sont précises, elles sont concrètes, elles vont permettre aux régions de se développer au rythme du dynamisme des gens des régions. M. le Président, en concluant, je demande à mes collègues de voter le plus rapidement possible pour que le projet de loi 50 soit adopté. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le député de La Prairie.

M. Denis Lazure

M. Lazure: Merci, M. le Président. Mon collègue de Lévis disait, l'autre soir, que durant ses huit années comme ministre, et ayant présenté plusieurs projets de loi - neuf années, excusez-moi - il n'a jamais eu à faire présenter par son gouvernement, par son leader, de motion de clôture, de motion de bâillon et je peux en dire autant. Ayant été environ cinq ans au ministère des Affaires sociales, j'ai eu l'occasion moi aussi de piloter un grand nombre de projets de loi, un grand nombre de projets de loi, mais jamais je n'ai eu à demander à mon gouvernement d'invoquer une motion de clôture. Jamais. Ce gouvernement-ci est en train d'établir des records. Après à peine treize heures de débat en commission parlementaire... Treize heures, imaginez-vous! Moi, j'ai connu une époque, quand nous étions au gouvernement, où nous avons eu des débats de 200 heures et plus sur la loi, justement, qui a créé la Régie de l'assurance automobile, sur la loi de la protection du territoire agricole, sur la loi de la langue française, entre 200 et 250 heures de débat en commission parlementaire. Dans ce temps-là, on avait un gouvernement qui écoutait l'Opposition, premièrement, parce que l'Opposition ça représente du monde ça. L'Opposition actuelle, M. le Président, représente 40 % de la population. C'est beaucoup, 40 % de la population québécoise. Il y a seulement 10 % de différence entre le pourcentage de la population représentée par le Parti libéral et de pourcentage de celle représentée par le Parti québécois. Ce qui veut dire que par une motion comme celle que nous avons devant nous, on prive l'Opposition, et par conséquent 40 % de la population, du droit normal de s'exprimer, de poser des questions.

J'entendais le député de Saguenay tantôt reprocher à nos collègues de l'Opposition, en commission parlementaire, de ne pas avoir abordé les articles durant les treize heures. Bien, c'est normal. Nos règlements prévoient, M. le Président, qu'avant d'aborder l'étude article par article, nous pouvons demander d'entendre des groupes, des individus qui vont éclairer l'Opposition, qui vont éclairer la commission parlementaire. Et, en l'occurrence, étant donné que c'est un projet de loi majeur qui transforme complètement la vocation de la Régie de l'assurance automobile, il était normal que l'Opposition veuille rencontrer les dirigeants de la Régie de l'assurance automobile, rencontrer le Vérificateur général, rencontrer le Protecteur du citoyen et rencontrer des usagers, par exemple des camionneurs. Il y en a beaucoup à Québec de ce temps-ci et ces gens-là avaient quelque chose à nous dire.

Pourquoi le Vérificateur général? Parce que, M. le Président, on n'est pas sûrs que cette loi 50 qui vient amender la Loi sur la Régie de l'assurance automobile, on n'est pas sûrs qu'elle soit tout à fait légale. Et on aurait aimé ça que le Vérificateur général, qui est un peu le grand surveillant des finances de la machine gouvernementale... Nous aurions aimé que le Vérificateur général vienne nous dire: Oui ou non, cette loi est légale, est légitime.

Pourquoi le Protecteur du citoyen? Parce que la Régie de l'assurance automobile du Québec, c'est une Régie qui doit faire face à des milliers et des milliers de réclamations. Et le Protecteur du citoyen a beaucoup de plaintes de citoyens et de citoyennes quant au fonctionnement de la Régie de l'assurance automobile.

Alors, c'eût été intéressant, instructif d'entendre le Protecteur du citoyen.

Finalement, M. le Président, quand je vois le ministre des Transports s'impatienter au bout de treize heures de discussion, là j'apprécie encore plus que jamais, 100 fois plus qu'auparavant, la patience angélique de celle qui était ministre lorsque le projet de loi de l'assurance automobile a été piloté, c'est-à-dire Mme Lise Payette. Quelle patience cette personne-là a eue! Quelle patience mon collègue et ami, Camille Laurin, autrefois député de Bourget et ministre pilote de la loi 101 a eue lorsqu'il a passé 225 heures en commission parlementaire - 225 heures, M. le Président. Moi, je suis étonné de voir l'impatience de ce nouveau ministre des Transports. Je comprends qu'il a beaucoup de difficultés de ce temps-ci avec les camionneurs artisans. Peut-être que ça le rend plus impatient. Mais il faudrait que ses collègues qui ont un peu plus d'expérience - je n'en vois pas beaucoup dans cette Chambre, cet après-midi - mais il faudrait que ses collègues qui ont plus d'expérience que lui au Conseil des ministres lui donnent des conseils. Parce que cette Loi sur l'assurance automobile, qui a été et qui demeure l'un des fleurons du gouvernement du Québec, c'est une loi modèle, plusieurs États s'en sont inspirés. Le Québec, avec le gouvernement du Parti québécois, quand il a adopté cette loi, était à l'avant-garde en Amérique du Nord. (16 heures)

Même si les libéraux - avec mes excuses au président puisque vous faites partie de cette formation, mais je sais que, actuellement, comme président, vous êtes tout à fait neutre - ont décrié ce projet de loi, qu'ils ont même voté contre, ils ont voté contre, mais jamais n'ont-ils eu le courage d'en demander le retrait ou de l'abolir eux-mêmes, lorsqu'ils sont arrivés au pouvoir en 1985, parce qu'ils savent très bien que c'est une loi qui est chère au coeur des Québécoises et des Québécois. Alors, avant que l'Opposition, au nom des 40 % de la population, accepte de changer radicalement cette loi-là, il faut regarder ça à deux reprises, pas à une seule. C'est pour ça que nous voulions rencontrer des groupements.

Le geste du gouvernement, quand il dit: Non, ce n'est pas de vos affaires, ça; vous n'avez pas besoin, comme Opposition, même si vous représentez 40 % de la population, vous n'avez pas à poser de questions aux dirigeants de la Régie, vous n'avez pas à poser de questions au Vérificateur général ou au Protecteur du citoyen... Après treize heures, le bâillon, fermez-la et on passe le rouleau compresseur.

Mais là, ça devient une habitude, la troisième fois en cinq jours. Et c'est en même temps des lois qui sont utilisées par ce gouvernement pour faire indirectement ce qu'il n'a pas le courage de faire directement, c'est-à-dire que, directement, ce gouvernement devrait dire à la population: Nous devons hausser les impôts, nous devons hausser les taxes. Il n'a pas le courage de le faire. Il l'a fait de façon détournée; il va dans la caisse de la Régie de l'assurance automobile, il va saisir 250 000 000 $ par année. Il a fait la même chose avec les municipalités, avec les commissions scolaires. Ce gouvernement devient l'expert en taxes indirectes, en taxes camouflées, en impôts camouflés.

M. le Président, en plus de changer, de transformer complètement le rôle de cette régie d'État, qui est une société d'assurance, cette loi va pénaliser les conducteurs qui sont prudents, qui ont été prudents, comme dans n'importe quelle société d'assurance. Si les utilisateurs qui paient une prime régulièrement n'ont pas besoin de compensation parce qu'ils sont de bons citoyens, de bons conducteurs, qu'ils n'ont pas d'accident, normalement, les primes, au lieu d'augmenter, vont ou bien être gelées, ou baisser. Mais ce n'est pas ça qui va arriver, parce que ce gouvernement-ci a décidé que la Régie de l'assurance automobile était dorénavant un agent percepteur de taxes, d'impôts. Alors, qu'on conduise bien, qu'on conduise mal, on n'est pas avantagé, on n'a pas les bénéfices normaux qu'une société d'assurance donne aux utilisateurs qui sont des utilisateurs prudents et qui n'ont pas d'accident.

M. le Président, je veux aussi dire deux mots sur cette mesure exceptionnelle, scandaleuse, que la Régie de l'assurance automobile prend, que le gouvernement prend, en allant chercher 1500 $ pour chaque voyage en ambulance; 1500 $, pour un accidenté de la route, seront versés par la Régie de l'assurance automobile du Québec à Urgences-santé Montréal ou aux Conseils régionaux de la santé. Imaginez-vous, pour le prix d'un voyage en ambulance, alors que le prix normal, on le sait, c'est 70 $. Alors, c'est un autre façon camouflée d'aller chercher des impôts.

M. le Président, je pense qu'il faut conclure en disant à ce gouvernement: Vous abusez de votre pouvoir, vous abusez de la marge de 10 % que vous avez eue: 50 % au lieu de 40 % de notre côté; vous abusez de cette marge de 10 % pour imposer le silence à l'Opposition, pour priver les 40 % de la population qui ont voté pour le Parti québécois de s'exprimer et de poser des questions.

C'est pourquoi, M. le Président, j'enjoins non seulement les membres de ma formation, mais les députés de l'autre côté aussi qui ont encore un sens démocratique, je les enjoins de voter contre cette motion de clôture. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le député de Lévis. M. le député de Lévis, vous avez la parole.

Motion d'ajournement M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, en vertu des règlements de l'article 100 du règlement de l'Assemblée nationale, je voudrais faire motion pour que le débat en cours sur la motion soit ajourné.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, cette motion est recevable. Si vous voulez rester à votre place, s'il vous plaît, M. le député. Merci. En vertu de l'article 100, la motion d'ajournement du débat est recevable et en vertu de l'article 101, l'auteur de la motion et le représentant de chaque groupe parlementaire ont chacun un temps de parole de dix minutes. L'auteur de la motion a un droit de réplique de cinq minutes. Alors, M. le député, je suis prêt à vous reconnaître sur votre motion d'ajournement.

M. Garon: M. le Président, cette motion est absolument importante. C'est le député de Saguenay qui m'en a un peu donné l'idée, puisqu'il m'a dit qu'il faudrait que les gens aillent réfléchir. Je pense que c'est vrai qu'il faut que le gouvernement aille réfléchir. M. le Président, j'ai été neuf ans ministre. J'ai présenté au-dessus de 60 lois dans le Parlement, des lois complexes. Je n'ai jamais demandé le bâillon une seule fois. J'ai pris le temps qu'il fallait, et parfois elles n'ont pas été adoptées; c'est arrivé, même s'il y avait entente avec la ville de Montréal dans le cas du Parc de l'exposition agro-alimentaire. Je me rappelle, à ce moment-là, par stratégie politicienne, les libéraux avaient empêché qu'un projet de loi sur lequel même le gouvernement était d'accord et la ville de Montréal était d'accord sur le Parc de me Notre-Dame pour des investissements de 40 000 000 $... L'Opposition a empêché le projet de loi d'être adopté, et on ne s'est pas servi du bâillon. Mais aujourd'hui quand on voit le ministre... Imaginez-vous le ministre: fatigué, usé comme dit le député de Louis-Hébert. C'est sa deuxième loi. La première, la loi 26. Une loi de quelques articles; on n'a même pas passé quelques heures en commission parlementaire et là aujourd'hui on voit qu'après...

On demande au fond de taxer, d'aller chercher 877 000 000 $ dans la caisse de la Régie de l'assurance automobile. 877 000 000 $ en 1990, 1991, 1992, 1993, 1994, dans cinq ans. Même d'aller chercher rétroactivement des sommes d'argent puisque le gouvernement fait des décrets illégaux. Il n'avait pas pris le temps de réfléchir encore là. Des décrets illégaux pour aller chercher des fonds pour les ambulances. Et aujourd'hui il est obligé d'adopter une loi pour aller chercher de l'argent pour 1988, pour 1989, pour 1990 et en indexant 32 500 000 $ par année après ça. Le gouvernement n'a pas assez réfléchi, if passe des décrets illégaux, M. le Président. C'est pour ça qu'il y a beaucoup de gens qui commencent à penser que dans notre société, à l'heure de crise qu'on vit actuellement, le principal danger dans notre société c'est le gouvernement: le gouvernement du Québec et le gouvernement d'Ottawa qui vont nous précipiter une crise d'inflation l'an prochain, parce qu'ils ne font pas leur travail. Mais aujourd'hui qu'un ministre qui en est à sa deuxième loi, comme le ministre de l'Industrie, du Commerce qui est tanné... Il vient d'arriver en Chambre. C'est un bureaucrate; fatigué d'entendre les débats. Imaginez-vous! Quand on est fatigué, on prend sa retraite, M. le Président! Moi, ça fait depuis 1976, 14 ans, que je suis en cette Chambre, je ne suis pas fatigué d'entendre le monde. Je dis toujours à mon personnel: La journée où vous serez fatigués d'entendre des gens qui viennent vous conter leurs problèmes, vous me le direz et je vais vous donner congé.

Notre rôle ce n'est pas d'entendre les félicitations, ce n'est pas de recevoir les gens qui sont heureux, c'est de recevoir ceux qui sont malheureux, ceux qui ont des problèmes, parce que je ne vois pas souvent des gens qui passent pour me dire: M. Garon, j'arrête vous voir à votre bureau. Je voulais vous dire que je suis heureux. Ça arrive, mais pas souvent! Les gens qui viennent me voir ont un problème. Souvent c'est à la dernière extrémité, c'est en dernier recours qu'ils viennent me voir. Ils disent: Je suis venu vous voir en désespoir de cause. Je ne sais plus qui aller voir. Je viens vous voir pour voir si vous ne pourriez pas me donner un coup de main. Actuellement au fond, le gouvernement demande une loi fiscale pour aller chercher 877 000 000 $ sur cinq ans et il n'est pas prêt même à en discuter. On a demandé d'entendre qui, en commission parlementaire? Le Vérificateur général. On aurait aimé qu'il le fasse de lui-même, en vertu de l'article 45, mais on ne peut pas demander à quelqu'un d'avoir du courage quand il n'en a pas. L'article 45 de la loi lui donne le droit d'intervenir et il dit: Je vais intervenir l'an prochain. Quand la caisse sera vidée, je suppose. Alors, on pensait qu'un Vérificateur général, son rôle au mois de juin ce n'est pas de jouer dans le sable en Espagne mais de voir à donner des avis à l'Assemblée nationale quand elle lui en demande et, comme porte-parole de l'Opposition officielle, je calcule que ce n'est pas suffisant. J'ai dit: Bien, la commission parlementaire peut le convoquer. C'est pour ça qu'on a demandé à le voir pour qu'il fasse sa job. À 110 000 $ par année, peut-on avoir un avis de temps en temps? Peut-on? Est-ce que c'est possible, M. le Président? Pensez-vous qu'on abuse du Vérificateur général, qu'on l'use, le Vérificateur général, si on lui demande un avis sur une loi, si on lui demande si le gouvernement a le droit de faire ça? (16 h 10)

La Régie de l'assurance automobile, on a demandé de l'entendre aussi. C'est elle qui administre le "pot". C'est elle qui administre l'argent. Pensez-vous que c'est abuser, de demander de l'entendre pour lui demander son opinion? D'autant plus que, sur un ensemble de rapports annuels que j'ai cités en commission parlementaire, la Régie elle-même se plaint, oh! poliment, élégamment, diplomatiquement, que, s'il y avait un contrôle routier, ça coûterait moins cher d'assurance, on éviterait des abus. Et elle le dit dans son rapport annuel qui a été déposé au mois de mai 1990. On voulait l'entendre.

On voulait entendre l'Association des victimes d'accidents d'automobile du Québec. Ce sont les victimes qui sont privées de fonds actuellement parce qu'on économise des fonds sur leur dos. On voulait entendre la Fédération des femmes du Québec parce que les femmes se sont plaintes, avec les amendements du mois de juin de l'an dernier, qu'aujourd'hui, une mère à la maison, on dit qu'elle n'a pas d'emploi, qu'elle ne travaille pas à la maison, qu'elle n'a pas de salaire. Alors elle est pénalisée. On la compense moins, lorsqu'elle est victime d'un accident d'automobile, qu'on la compensait auparavant. On a diminué. On a économisé sur le dos des mères de famille. Le gouvernement a dit: Je veux faire une politique familiale. On va économiser de l'argent sur le dos des mères de famille et on n'aura pas le droit d'inviter les femmes à venir nous dire ce qu'elles en pensent.

On a voulu inviter les clubs de l'âge d'or parce que, eux aussi, on a économisé sur leur dos. Passé 64 ans, dans la loi du mois de juin 1989, qu'est-ce qu'on dit qu'on va faire? Passé 64 ans, on va couper les redevances de 25 % par année. À 68, zéro, fini, terminé! Hein? Pourquoi? On veut passer et on dit: Vous allez économiser sur les personnes âgées également. Elles ont payé leurs assurances. Pourquoi n'auraient-elles pas le droit de nous dire ce qu'elles en pensent avant que le ministre des Finances parte avec la caisse? Pensez-vous qu'elles n'ont pas le droit? C'est elles qui ont payé les assurances.

Le ministre des Transports nous dit: Ce sont des économies. Des économies qui ne lui appartiennent pas. Est-ce que c'est parce que j'économise qu'il est obligé de venir mettre la main dans ma poche en disant: Je vais t'en prendre un peu. Voyons donc! Ce n'est pas à lui. Le ministre des Finances, ce n'est pas à lui non plus. Il vole la caisse. Et c'est ça qu'on voulait demander au Vérificateur général, de venir nous dire s'il avait le droit de faire ça, légalement. Parce que ce n'est pas possible qu'on ait fait ces choses-là. Quand je dis "légalement", M. le Président, rappelez-vous qu'on demande, dans cette loi, de légaliser un décret du gouvernement qui a été adopté en 1988, sans droit. Et on essaie de faire verser les fonds rétroactivement ou de légaliser les fonds qu'on aurait versés sans droit dans le passé, en 1988 et 1989. Alors, le gouver- nement, comprenez-vous, quand on dit: Est-ce que c'est légal? On est en droit de le demander.

Le gouvernement veut faire faire de la promotion de la sécurité routière, alors que la loi dit que c'est dans tel cas. Il y a deux cas de sécurité routière où la Régie peut intervenir: un, pour analyser le comportement des assurés, des conducteurs, par exemple si vous conduisez sans ceinture. Il a le droit de dépenser de l'argent pour faire mettre les ceintures. Il a le droit également pour analyser l'état des automobiles. Si les automobiles sont trop maganées, qu'il n'y a pas de freins, il a le droit aussi de faire des inspections. Point. L'article 2d de la loi. Il n'y a pas autre chose sur laquelle il peut intervenir au plan de la sécurité routière. Et maintenant, il veut faire payer l'asphalte, il veut faire payer les barres blanches. On est rendu qu'on a des ministres qui annoncent des barres blanches. Je n'ai jamais vu ça, moi. Hein? Et ils nous disent: On est en train de développer le réseau routier. Ils font des annonces pour annoncer les barres blanches. C'est quelque chose!

M. le Président, alors, quand on nous dit: On part avec la caisse et il n'y aura pas une cent de plus dans le réseau routier cette année. On va aller chercher 363 000 000 $ et pas une cent de plus dans le réseau routier! On a demandé de faire venir le Protecteur du citoyen. Le Protecteur du citoyen, pourquoi? Parce que le Protecteur du citoyen, dans ses rapports annuels, dit à quel point il y a des délais à la Régie et il se plaint d'un paquet de circonstances où la Régie n'a pas rendu justice aux assurés. Est-ce que ce n'est pas normal de le faire venir pour faire le point avec lui? Avant de voter des lois, on va vider la caisse d'assurance qui appartient aux assurés. D'autant plus que la Régie de l'assurance automobile est supposée "collecter" uniquement ce dont elle a besoin pour administrer l'assurance. Elle n'est pas supposée "collecter" plus que ce dont elle a besoin. Ce n'est pas un ministère du Revenu. Ce n'est pas une taxe, l'assurance automobile, c'est une assurance et, en vertu de la loi, je l'ai dit, je suis allé loin et je l'ai dit. J'ai dit aussi, en lisant l'article 16 et l'article 16.1, que le conseil d'administration n'est pas redevable de sa conduite s'il agit de bonne foi, un, et, deuxièmement, s'il agit légalement. J'ai dit que moi, comme ministre - parce qu'on va reprendre le pouvoir avant longtemps - je n'hésiterais pas à prendre des poursuites contre un conseil d'administration qui aurait enlevé de l'argent de la Régie sans droit, parce que le conseil d'administration n'est pas exempté des choses illégales qu'il fait ou des choses qui ne sont pas de bonne foi, alors qu'on essaie d'avoir des avis juridiques et que personne ne veut en produire.

M. le Président, c'est un projet de loi sérieux, majeur et le gouvernement n'a pas réfléchi, c'est clair. Treize heures de débat pour

un projet de loi de cette ampleur, vous n'aurez pas d'exemple dans aucune Législature démocratique du monde entier. Peut-être dans des républiques... En Haïti, peut-être. Dans des républiques de bananes, peut-être, dans des dictatures, peut-être. Mais vous ne trouverez aucun exemple où on va aller chercher 877 000 000 $ en l'espace de cinq ans. Puis, vous dites, après treize heures d'étude en commission parlementaire: C'est assez, fini, on coupe tout le monde et c'est fini, on n'étudie plus l'affaire.

Le grand Disraeli qui était un des penseurs du parlementarisme britannique disait - je vais finir là-dessus - The duty of the Opposition is to oppose." M. Elkas, le ministre des Transports, me rappelait que je l'avais cité. Il n'a pas compris que le rôle de l'Opposition est justement de faire valoir à rencontre d'un projet de loi les arguments qui sont contre ce projet de loi. On n'est pas là pour féliciter le gouvernement. On est là pour montrer ce qui ne va pas dans le projet de loi. C'est pourquoi, M. le Président, et je termine là-dessus, ma motion d'ajournement, c'est pour permettre au gouvernement d'aller réfléchir. Merci.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur la motion d'ajournement, M. le député de Chauveau.

M. Rémy Poulin

M. Poulin: Merci, M. le Président. J'écoutais attentivement le député de Lévis qui, maintenant, est rendu avec une motion d'ajournement. Comment le gouvernement pourrait-il faire une motion et accepter une motion d'ajournement quand nous, nous avons décidé d'aller de l'avant avec ce projet de loi? D'aller de l'avant avec ce projet de loi-là, M. le Président, justement pour la réfection du réseau routier.

L'importance de la réfection du réseau routier...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît, MM. les députés. S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député, vous pouvez poursuivre.

M. Poulin: Je vous remercie, M. le Président. Je remarque que de l'autre côté on commence un peu à s'agiter. J'ai participé aussi à la commission parlementaire de l'aménagement et des équipements. Je me rends compte aujourd'hui que oui, on a besoin de ce montant d'argent là. Oui, on a besoin du projet de loi 50. Pour une raison. Quand je regarde dans la région de Québec, le réseau routier oublié de 1976 à 1985; quand on a mis des moratoires sur l'autoroute 73, sur Du Vallon, sur Henri IV. C'est ces gens-là qui ont abusé du système aussi. Quand on regarde que eux, de 5 000 000 000 $ à 25 000 000 000 $... Qu'est-ce qu'on a fait pour la région de Québec pour le réseau routier? C'est pour cette raison-là, M. le Président. Nous, on ne veut pas endetter le Québec. À des déficits comme ces gens-là sont habitués, de 5 000 000 000 $, dans 10 ans, on n'a qu'à en mettre encore 5 000 000 000 $ cette année et on va y aller. Il n'y a pas de problème sur ça. Ça, c'est le député de Lévis.

Je regarde encore... Tantôt, le député de Lévis a parlé des gens... Il invitait tout le monde, d'une façon ou d'une autre, en commission parlementaire, à venir s'expliquer. Mais, quand je regarde, quand on a invité l'ANCAl, j'étais là, moi. Les gens étaient là. On se sert du dossier de l'ANCAl pour venir bloquer un projet de loi, le projet de loi 50, quand, à un moment donné ou à un autre, d'ici les trois prochaines années, ils auront de l'emploi parce que le projet de loi 50 aura été bénéfique. Ces gens-là avaient juste à voter le projet de loi 50 si ça les fatiguait et qu'ils étaient pour nous battre dans trois ans. Ils n'ont même pas osé prendre un article dans ce projet de loi-là.

Je regarde quand on a pris l'ANCAl. On va dire oui, on va attendre l'ANCAl. Ces gens-là ont plus que le problème du projet de loi 50... C'est le député de Lévis qui, en commission parlementaire, nous disait: Le ministre n'est pas allé en région, le ministre ne veut pas aller voir dans les régions ce qui se passe. Si c'est ce que le député de Lévis veut, et d'ailleurs, c'est ce qu'on lui avait dit au moment de la commission -parlementaire, si ça prend une commission parlementaire pour aller sur le terrain, nous irons. Mais il ne s'agit pas de prendre des gens en otage, les amener une heure à les entendre, comme lui le désirait. Ça prend des gens qui vont aller voir où est le problème en région parce que le problème du transport en vrac n'est pas le même à Montréal qu'à Québec, à Matane, à Rimouski ou à Sherbrooke, M. le Président.

Quand je regarde ces gens-là faire encore une motion, c'est, oui, pour retarder le projet de loi. On est prêts, comme gouvernement, c'est une décision administrative, on l'a prise. Et on vivra avec aux prochaines élections. On est capables. Mais le député de Lévis, quand je regarde comment il fonctionne... "Ça prend un tunnel entre la rive sud et la rive nord". On a vu le maire de Québec comment il lui a répondu en lui disant: Un instant, un instant! Ce n'est peut-être pas la priorité dans la région de Québec. On a des problèmes majeurs. On est capables de prendre nos responsabilités et on les a prises avec le projet de loi 50, M. le Président. Et, encore là, la motion d'ajournement du député de Lévis, c'est encore lui qui la présente pour tout retarder. Oui, c'est dilatoire. Mais, ça, on comprend le député de Lévis, on le voit même dans la région de Québec. C'est le seul homme politique de la région de Québec qui a raison sur tout, d'une façon ou d'une autre. Ça, c'est le

député de Lévis. (16 h 20)

Une voix: Ça c'est vrai.

M. Poulin: Mais ça, on vit avec, nous, dans la région de Québec, parce que ce qu'on aime, c'est qu'on ne voit pas beaucoup de ses organisateurs autour de lui. C'est lui, l'homme dans la région de Québec. Donc, on en a juste un à battre.

M. le Président, l'importance de ce projet de loi là, moi, je la vois par le boulevard Talbot parce que le député de Lévis, lui, disait en commission parlementaire: II n'y en aura plus de construction. Fini la construction. Le boulevard Talbot est un bel exemple. Si ces gens-là, en 1976, n'avaient pas mis le moratoire sur le boulevard Talbot, on n'aurait pas ce qu'on a aujourd'hui avec les décès qu'on a eus.

Dix ans de temps que le Parti québécois, dans la région de Québec, a mis des moratoires sur les autoroutes. Est-ce que c'est de même qu'on respecte les gens? On verra dans trois ans, sur le projet de loi 50, les répercussions qu'on aura. Ils sont outrés. Le Parti québécois est outré. On va vous battre! Passez-les, les projets de loi, si vous voulez nous battre, vous allez avoir des raisons. Mais vous avez peur, par exemple. D'ici trois ans, on va vous le prouver sur le terrain, ce qu'on a fait. C'est ces gens-là, ces braves... Je vous comprends, les autres députés. Je sais que vous vivez avec le député de Lévis. Ça ne doit pas être facile, parce que nous, on le voit les fins de semaine, un peu partout, là.

Mais c'est un bon homme, par exemple. Un bon homme. Il se promène seul avec son cheval. Je peux vous dire une chose, aujourd'hui, c'est non à la motion d'ajournement pour une raison: l'importance de ce projet de loi là, l'importance pour les régions... La députée de Johnson peut bien rire, ça l'amuse. D'une façon ou d'une autre, on le sait, on l'a entendue en commission parlementaire, motion par-dessus motion. Je vois le député de Dubuc; c'est celui-là même qui disait: Elle n'est pas finie, mais on en a une autre motion. Il était prêt, il en avait une tonne. Je vois le député d'Ungava aussi.

C'est ces gens-là, en commission parlementaire: Oui, pas fini, mais on en a une autre motion. On va vous garder ici. Si c'est de même, ils avaient juste à l'ouvrir, le projet de loi, article par article; on serait peut-être encore là, mais on aurait avancé article par article. Mais on ne discute pas avec des intraitables, d'une façon ou d'une autre. Et on est prêts à vivre avec nos décisions, M. le Président. Je reviens et c'est pour cette raison que je demande à mes collègues du caucus, du gouvernement, d'appuyer le projet de loi 50 et de battre cette motion d'ajournement, et on vivra avec nos décisions, M. le Président.

Une voix: C'est ça.

M. Poulin: Ce matin, j'écoutais le leader du Parti québécois qui parlait de son petit pont qu'il n'avait pas eu. Qu'a-t-il fait avec les 13 000 000 $ dans son comté, depuis 1986 jusqu'à aujourd'hui? S'il avait à "prioriser" un petit pont, il avait juste à le prioriser, mais qu'il ne vienne pas se scandaliser ici dans cette enceinte qu'il n'a pas eu son petit pont. Nous aussi on en a des petits ponts qui ne sont pas faits. C'est pour ça qu'on a besoin du projet de loi 50 pour finaliser ce qu'on a entrepris dans nos comtés. Merci, M. le Président.

Mme Juneau: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée.

Mme Juneau: En vertu de l'article 213, est-ce que le député me permettrait une question?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que, M. le député, vous permettez une question à la députée de Johnson?

M. Poulin: Non.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non. Je suis prêt à reconnaître M. le député de Lac-Saint-Jean comme porte-parole de la formation du groupe parlementaire de l'Opposition officielle. M. le député de Lac-Saint-Jean, vous avez la parole.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: Merci, M. le Président. Je pense que c'est là une motion tout à fait pertinente présentée par mon collègue de Lévis parce que c'est dans l'intérêt des ministériels. Les ministériels, au moment où on est rendus dans le débat sur ce projet de loi, ont vraiment intérêt à faire une réflexion en profondeur sur le fonctionnement de la démocratie, sur la façon dont fonctionne une vraie démocratie - pas une république de bananes, pas une république d'opérette, une vraie démocratie; et, au Québec, c'est supposé être le cas - de façon que - et je vois le ministre des Transports qui m'écoute - les ministériels se fassent un peu de couenne. Permettez l'expression "se fassent un peu de couenne". Ils ont l'épiderme extraor-dinairement sensible. Leur capacité de tolérer les débats démocratiques est on ne peut plus limitée. C'est pourtant ça, la démocratie. C'est de permettre le plus largement possible le débat, la controverse, de faire en sorte que les opinions s'expriment, se confrontent, qu'on puisse diverger d'opinion et pouvoir l'exprimer librement. C'est ça, la démocratie.

Et les ministériels ont intérêt à réfléchir, y

compris le député de Chauveau qui nous quitte à l'instant. Ils ont intérêt à réfléchir là-dessus et à se faire un peu de couenne parce que leur épiderme est extraordinairement sensible. Ils sont incapables de tolérer les débats. En démocratie, quand on est incapable de tolérer les débats, on rentre chez soi, on rentre à la maison parce que c'est ça, essentiellement, dans son essence même, c'est ça, la démocratie. C'est de permettre aux idées de s'exprimer, de se confronter, aux opinions de circuler et de s'exprimer. Si on n'est pas capable de tolérer ça, on retourne chez soi faire autre chose, ça veut dire qu'on n'a pas ce qu'il faut, qu'on n'a pas la couenne qu'il faut pour vivre ça et supporter ça. On a l'épiderme trop sensible, alors on fait autre chose, mais on n'est pas ici, dans ce Parlement-là. Imaginez-vous, treize heures de débat, c'est un record, c'est quasiment un championnat. Et avoir droit au bâillon après treize heures de débat. Je pense que les recherchistes de la bibliothèque devraient faire une recherche, je suis convaincu que c'est un record. Je suis convaincu que c'est un championnat. Treize heures de débat et le ministre est usé! C'est ça que le brillant député de Louis-Hébert est venu nous dire: Écoutez, là, l'Opposition, vous usez nos ministres.

Des voix: Ah! Ah!

M. Brassard: C'est grave! Arrêtez ça! Arrêtez d'user nos ministres! Treize heures de débat et le ministre des Transports est déjà usé. Bien, moi, je vais vous dire, M. le Président, quand on a une santé aussi faible, on n'est pas ici, on fait autre chose, on prend sa retraite, comme disait le député de Lévis. Quand on est une petite nature comme ça et qu'après treize heures de débat c'est assez, on est usé, fatigué, épuisé, vidé, on fait autre chose.

Une voix: On va en Floride.

Une voix: On s'en va chez Bell Canada.

M. Brassard: On prend des vacances ou on retourne d'où on vient; dans le cas du ministre des Transports, chez Bell Canada.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brassard: Écoutez! Il faut quand même être sérieux! Treize heures de débat et le ministre est usé! Il y a des limites. Alors, je pense que les ministériels ont intérêt à faire une réflexion. Et la motion d'ajournement du débat va leur permettre de faire une réflexion sur le fonctionnement d'une démocratie, sur la nature de ce qu'est une démocratie et aussi d'essayer, en même temps, de trouver un tonique pour refaire une santé au ministre qu'on use très rapidement.

Et puis, ils ont besoin aussi d'une profonde réflexion pour prendre vraiment conscience de ce qu'ils sont en train de faire avec le projet de loi 50. C'est d'une gravité considérable, ils sont en train de faire un hold-up sur la caisse des assurés. Le ministre des Transports s'est transformé, métamorphosé en "pistolero" et il a organisé un braquage: le braquage de la caisse des assurés de la Régie de l'assurance automobile. On se croirait dans un western. C'est un braquage qu'on est en train de faire, c'est un hold-up sur la caisse des assurés, par un ministre qui s'est transformé en "pistolero". Ce n'est pas joli, ça, et ça prend du temps pour prendre conscience de la gravité du geste que vous êtes en train de poser, et cela, en détournant la Régie de sa vocation et de sa mission. Non seulement on braque la caisse, on fait un hold-up sur la caisse des assurés, mais on détourne la Régie de sa véritable vocation et de sa véritable mission, telle qu'on la retrouve dans sa loi constitutive.

Vous avez besoin de temps aussi, les ministériels, vous avez besoin de temps, et la motion d'ajournement va vous le donner, ce temps-là, pour apprendre vraiment les règles de base de gestion d'un régime d'assurances. Un régime d'assurances public ou privé, peu importe, c'est alimenté par des primes d'assurances des assurés. Et quand il y a un surplus dans la caisse du régime d'assurances, ça doit servir aux assurés, soit à améliorer leurs indemnités, soit à baisser leurs primes; c'est à ça que ça doit servir, c'est à cette fin-là que ça doit servir - c'est ça, les règles de base de gestion d'un régime d'assurances - pas à faire un hold-up sur la caisse et à siphonner près de 900 000 000 $ pour les envoyer au ministre des Finances, au fonds consolidé du ministre des Finances, dans le Trésor public. Ce n'est pas à cette fin-là que sert un régime d'assurances. (16 h 30)

Alors, M. le Président, motion d'ajournement tout à fait pertinente. J'invite les ministériels à voter cette motion d'ajournement et à prendre le temps qu'il faut pour prendre conscience, d'abord, de la façon dont fonctionne une démocratie, et prendre conscience aussi du fait qu'ils sont en train de poser un geste très grave. Ils sont en train de faire un "hold-up" qui n'est pas permis, qui est illégal.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député, whip en chef de l'Opposition. Est-ce que vous voulez utiliser votre droit de réplique, M. le député? M. le député de Lévis, sur votre droit de réplique de cinq minutes, maximum.

M. Jean Garon (réplique)

M. Garon: M. le Président. J'écoutais le député de Lac-Saint-Jean qui disait au ministre qu'il avait l'épiderme sensible. Il y a quelqu'un qui me disait ce midi: Ils ont le poil court

comme des rats. Je pense que c'est un peu ça, au fond. Je vais vous faire part d'une expérience. Il y deux ou trois ans, le ministre des Finances avait présenté un projet de loi, la loi 129, Loi sur l'administration financière. Il était absent, à ce moment-là, lorsque ça avait été déposé par le ministre responsable du Conseil du trésor. Lorsqu'il était revenu en cette Chambre, on avait fait le débat de deuxième lecture. J'avais fait un discours d'une heure pour lui dire à quel point c'était une loi qui n'avait pas de bon sens, la Loi sur l'administration financière, où le gouvernement pouvait, en cours d'année, dépasser ses engagements financiers, les sommes votées par le Parlement, à condition de voter une loi réparatrice avant la fin de l'année. J'ai dit au ministre des Finances: C'est épouvantable, ce que vous faites là! Peut-être que vous ne l'avez pas vu, vous étiez absent lorsque ça a été déposé à l'automne, mais vous n'avez pas le droit de voter une loi comme ça. Les Parlements se sont battus pour avoir le droit à l'approbation budgétaire. Ils se sont battus pour avoir le droit. Les grandes démocraties du monde, l'Angleterre, la France, tes États-Unis, le pouvoir premier... C'est d'ailleurs là-dessus que les Américains ont fait leur indépendance. Ils n'ont pas voulu être taxés sans avoir leur mot à dire là-dedans. J'ai dit au ministre des Finances: Vous êtes en train de faire un crime contre le Parlement. Après mon discours, il est venu me voir en arrière du trône et m'a dit: J'ai écouté ton discours, et je n'en suis pas revenu de voir à quel point tu étais scandalisé, mais j'ai demandé à mes fonctionnaires de regarder ça positivement, ce que tu as dit.

Savez-vous qu'est-ce que c'a donné comme résultat? La loi a été changée au complet. Il n'y a pas un article qui n'a pas été changé. Les notes explicatives ont été changées. Il n'est resté que le numéro et le titre. Pourquoi? Parce qu'il avait compris que, comme critique de l'Opposition, c'était ma tâche de critiquer son projet de loi. Et je ne le blâme pas, parce qu'à ce moment-là il était absent. Il avait été absent pendant quelques semaines pour des raisons personnelles que les gens de cette Chambre connaissent. Il était absent et ça avait été déposé. Possiblement que le projet de loi n'avait pas été étudié sur le plan parlementaire, comme il aurait dû être étudié, mais il avait compris.

Ça m'est arrivé déjà, en commission parlementaire, de dire au ministre des Transports, le député de Charlesbourg, qui voulait se donner un droit d'appel par rapport aux transports en commun au Québec: Le ministre peut bien se donner ce pouvoir-là s'il veut, on va voter contre. On ne l'empêchera pas, on ne peut pas l'empêcher, on va voter contre. Mais, si on était à votre place, on ne ferait pas ça, parce qu'on n'est pas convaincu que les municipalités ne peuvent pas faire un meilleur travail que vous. Et on ne pense pas que, comme ministre des

Transports, vous ayez le droit, vous ayez le temps d'entendre tous les appels de toutes municipalités où les gens vont demander des changements de circuits d'autobus, des changements d'arrêts d'autobus. On ne pense pas que ce soit votre travail. Si vous voulez, vous le voterez. Lé député de Jonquière, qui était présent en commission avec moi à ce moment-là, avait dit: Moi, j'ai été maire pendant 22 ans, président de l'Union des municipalités pendant 2 ans, échevin pendant tant d'années. Je pense que vous faites une erreur d'adopter une telle mesure. On l'a convaincu. On a essayé de le convaincre. Qu'est-ce qu'il a dit, le ministre des Transports du temps? Tel article à tel article, suspendus. Le lendemain ou le surlendemain, il a dit: Tel article à tel article, abrogés. Il s'est aperçu que, dans le fond, il était en train de faire une erreur. Le rôle de l'Opposition, c'était de faire représenter que c'était une erreur de faire ça.

On sait bien qu'à la longue, à la limite, le gouvernement gouverne, le gouvernement va faire passer les lois qu'il veut faire passer, sauf que le rôle de l'Opposition, c'est de montrer ce qui ne va pas dans un projet de loi. Il y a bien des gens qui m'ont dit qu'ils voient l'Opposition d'une façon différente. Ils me disent: Tu n'aurais pas dû leur dire, tu aurais dû les laisser s'organiser, se faire embarquer. J'ai dit: Non, moi, je ne conçois pas ça comme ça. Je conçois ça comme Disraeli. Le rôle de l'Opposition, c'est de s'opposer à ce qui n'est pas correct dans les projets de loi qui sont présentés devant le Parlement et de faire valoir tous les arguments comme si je représentais les citoyens, comme je représente les citoyens qui pourraient s'opposer. Mais le rôle du gouvernement, c'est aussi d'entendre les représentations qui sont faites.

Que le ministre, qui est un nouveau ministre qui n'a même pas l'expérience d'analyser les projets de loi, qui n'a pas dit un mot en commission parlementaire... Je vous défie, M. le Président... La seule fois où il a pris la parole, c'était pour menacer les députés de l'Opposition qui s'opposaient à son projet de loi. À peu près la seule fois où il a pris la parole, c'était pour dire: Si vous ne votez pas ça, vous n'aurez rien dans vos comtés. C'est à peu près la seule fois. Dans les treize heures, il n'y a pas un quart d'heure qui appartient au ministre là-dedans. Il n'a pas parlé. Il n'a pas expliqué son projet de loi. Je me demande s'il le comprend, son projet de loi. Et c'est pourquoi, M. le Président, cette motion d'ajournement est nécessaire. Parce que le ministre n'a pas l'air de connaître son projet de loi parce qu'il ne le défend pas et, deuxièmement, parce que les sommes qu'il annonce dans le domaine des transports, on a fait la démonstration que ce n'est pas vrai. Il n'y aura pas 1 700 000 000 $ additionnels...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous

voulez conclure.

M. Garon: ...et je conclus là-dessus, m. le président, si le ministre persiste à dire qu'il y a des sommes d'argent qu'il prétend avoir pour la voirie, bien, il trompe la population...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Est-ce que la motion d'ajournement du débat est adoptée?

Des voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vote nominal. Qu'on appelle les députés. (16 h 36 - 16 h 44)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez vous asseoir, s'il vous plaît.

Je mets maintenant aux voix la motion d'ajournement du débat du député de Lévis. Que ceux et celles qui sont pour cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hoche-laga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), M. Claveau (Unga-va), M. Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Mme Dupuis (Vercheres), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Côté (Charlesbourg), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cusa-no (Viau), M. Picotte (Maskinongé), Mme Robillard (Chambly), M. Houde (Berthier), M. Maltais (Saguenay), M. Middlemiss (Pontiac), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel (Sherbrooke), M. St-Roch (Drummond), Mme Pelchat (Vachon), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc (Taschereau), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Kehoe (Chapleau), M. Doyon (Louis-Hébert), M. Fradet (Vimont), M. Messier (Saint-Hyacinthe), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Larouche (Anjou), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. Bergeron (Deux-Montagnes), Mme Boucher Bacon

(Bourget), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Brouillette (Champlain), M. Bradet (Charlevoix), Mme Cardinal (Château-guay), M. Després (Limoilou), M. Forget (Prévost), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui s'abstiennent veuillent bien se lever.

Le secrétaire: pour: 23 contre: 49

Le Vice-Président (M. Bissonnet): La motion est donc rejetée. Je vais donner quelques instants aux députés pour qu'ils puissent poursuivre leurs travaux en commission parlementaire, et je reconnaîtrai immédiatement le député de Lévis pour poursuivre le débat sur cette motion.

Je vous demande votre collaboration, s'il vous plaît. Merci de votre collaboration, M. le député de Lévis.

Reprise du débat sur la motion de clôture M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, ce matin, lorsque j'ai entendu le ministre des Transports faire son discours et qu'il a dit qu'une commission parlementaire pour entendre du monde, c'était une mesure dilatoire, je me suis demandé si les camionneurs étaient à l'écoute et si, justement, faire une commission parlementaire le 11 septembre, alors que les camionneurs sont devant le parlement, ça, ce n'était pas une mesure dilatoire, parce qu'on ne veut pas la faire pour entendre les gens, on veut promettre une commission parlementaire pour les entendre en septembre, en espérant qu'ils vont s'en aller entre-temps alors que les problèmes ne sont pas réglés. Ça, c'est une mesure dilatoire, mais faire une commission parlementaire pour entendre les gens avant de faire un projet de loi, ça, c'est normal.

Je dois vous dire, M. le Président, que, lorsque j'ai fait la Loi sur la protection du territoire agricole, j'ai entendu plus de 100 mémoires dans les différentes régions. C'était l'une des premières fois qu'un groupe se promenait comme ça pour entendre les différentes régions du Québec concernant un projet de loi, parce que le Conseil des ministres l'avait demandé. Il avait dit: Allez dans les différentes régions et allez voir ce que les gens pensent de ces mesures avec un différent nombre de paramètres, les différents paramètres. Quand le projet de loi a été déposé, encore là, on a entendu les gens pour qu'ils viennent donner leur opinion. On ne craignait pas l'opinion des gens. Au contraire.

Est-ce qu'on fait des lois pour nous-mêmes ou si l'on fait des lois pour la population?

Mais quand on a honte, quand on a peur de l'opinion des gens, quand on veut leur siphonner 877 000 000 $, là, on a peur de les voir. On a peur de voir la Fédération des femmes qui va venir nous dire: Gardez l'argent dans la caisse parce que c'est les femmes que vous avez coupées en juin 1990 pour qu'elles n'aient plus droit à des mesures de remplacement de revenus. On ne veut pas les entendre. On ne veut pas entendre les personnes âgées parce qu'on les a coupées en juin 1989 dans un projet de loi qui a pour effet de diminuer les montants à payer aux personnes âgées de 25 % par année, à partir de 64 ans. Là, on ne veut pas les entendre. (16 h 50)

Mais la personne dangereuse, est-ce que c'est la femme qui se fait siphonner sa pension? Est-ce que c'est la personne âgée qui se fait couper sa pension? Ou le gouvernement qui lui coupe? M. le Président, c'est le gouvernement qui est dangereux. Ce n'est pas la personne âgée, ni la femme qu'on veut entendre, ni le camionneur qui veut gagner sa vie. Quand le ministre des Transports nous dit: II faut voter cette loi-là parce qu'on a besoin de cet argent pour faire les travaux supplémentaires... Or, il n'y a pas une cenne de travaux supplémentaires cette année, pas une cenne, au contraire. Il y aura à peu près pour 50 000 000 $ de moins de travaux puisque c'est le même montant que dans le budget de l'an dernier. Comme il y a une inflation de 5 %, on sait que l'augmentation des prix, ça ne fait pas de travaux additionnels. 5 % de 1 020 000 000 $, ça fait 51 000 000 $, si on dit 4,8 % d'inflation, comme le ministre l'a supposé dans son budget. À ce moment-là, on parle de 49 000 000 $ de travaux de moins.

Donc, on va aller chercher toutes ces sommes d'argent sans faire une cenne de travaux de plus, pas une cenne. Le ministre ne peut pas dire n'importe quoi. Il n'a pas le droit de tromper la population. Il n'a pas le droit de dire des choses inexistantes. Il a fait la démonstration, et c'est dans le discours sur le budget, à la page 8 de l'annexe A, où on parle d'un budget de base et des montants additionnels qu'il va y avoir, et on voit la colonne à la fin montrant les montants totaux qu'il va y avoir additionnés au budget de base. On voit, on peut comparer avec l'année 1989-1990, en supposant une inflation de 5 %. Vous savez qu'à 5 % l'an prochain, on n'est pas trop dedans, hein? L'an prochain, j'ai l'impression que ça va être bien plus, 6 %, 7 % ou peut-être 8 % d'inflation avec la TPS qui va arriver. Alors, quand on dit là... Je vais vous dire une chose. On a dit que le montant total de 104 000 000 $ de plus arriverait en 1993-1994, après les prochaines élections, à condition que l'inflation ne dépasse pas 5 %. Il n'est même pas certain s'il aura une cenne de plus, parce que si l'inflation dépasse 5 % l'an prochain, ça veut dire, M. le Président, qu'il n'y aura même pas une cenne de plus dans la voirie en 1993-1994.

Alors, cette année, pas une cenne de plus que l'an passé et, l'an prochain, pas une cenne de plus que l'an dernier. Les trois premières années 1990, 1991 et 1992, la moyenne des trois ne fait pas une cenne de plus que l'année 1989-1990. Et on nous dit qu'on a besoin d'aller siphonner ces sommes d'argent? 877 000 000 $? Où va-t-on aller les chercher, M. le Président? 625 000 000 $ et on dit pour des fins de voirie, comme si les gens qui avaient pris une police d'assurance, c'était pour faire payer l'asphalte. Alors qu'on est le gouvernement qui charge le plus cher pour l'essence et pour les taxes sur l'essence, c'est ça qui paie pour la voirie. L'assurance doit payer pour de l'assurance. On veut voler la caisse. On veut partir avec la caisse en faisant accroire au monde qu'on va mettre plus d'argent, alors qu'on n'en mettra pas plus. Qu'est-ce qu'on va aller chercher? 625 000 000 $ qu'on va aller chercher par ce projet de loi. 625 000 000 $ pour la voirie; 9 100 000 $ pour 1988 pour les ambulances. Pourquoi en 1988-1989? Parce que le Conseil des ministres a adopté un décret illégal. Illégal. Ou bien ils ont versé l'argent et ils n'en avaient pas le droit, ou bien ils veulent le faire verser pareil parce qu'ils savaient qu'ils n'en avaient pas le droit et que la Régie a refusé. On ne sait pas ce qui s'est passé. On n'a pas pu interroger la Régie et le ministre n'a pas parlé.

Le ministre, chaque fois qu'il a parlé, imaginez-vous, c'était pour menacer la députée de Johnson qui faisait son travail. Il se sentait menacé par la députée de Johnson. Un peu plus et il avait besoin d'une mitraillette pour se protéger parce que la députée de Johnson lui disait: Les femmes et les personnes âgées, vous les avez maganées l'an passé, vous avez économisé sur leur dos et, après ça, vous voulez donner l'argent au ministre des Finances, alors que c'est l'argent des assurés et des victimes d'accidents d'automobile. Imaginez-vous la députée de Johnson qui est une femme députée qui fait son travail et le ministre de l'ouest de Montréal se sentait menacé. Il se sentait en danger. Il a même été fait des menaces dans son comté. Il se sentait menacé par rapport à ses électeurs. C'est quelque chose, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Le député de Lévis revient sur un propos qui aurait été tenu par le ministre, semble-t-il, en commission parlementaire. Ce propos-là a fait l'objet d'une question de privilège. Le ministre a eu l'occasion de s'expliquer sur la question de privilège. Est-ce que, M. le Président - c'est une question de règlement et, en même temps, une demande de directive - vous

croyez que le député de Lévis a le droit de reprendre le propos qu'il vient de tenir, qui dénature un peu tout ce qui s'est fait ici, à l'Assemblée, depuis l'incident de la commission parlementaire?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Effectivement, il y a eu une question de fait personnel qui a été portée à l'attention des membres de cette Assemblée et chacun des députés a pu intervenir à ce sujet et donner son opinion sur la question de fait personnel. Effectivement, M. le député de Lévis, je crois que le leader adjoint du gouvernement a raison de soulever cette question de règlement puisqu'elle a déjà été réglée suite aux faits personnels qui ont été apportés devant cette Chambre la semaine dernière. Je vous permets de poursuivre votre intervention.

M. Garon: M. le Président, je fais juste citer la commission parlementaire. Est-ce qu'on peut dire que le ministre des Transports n'a pas menacé la députée de Johnson? Qu'il se soit excusé par la suite parce qu'on lui a demandé de le faire, c'est une autre affaire, sauf qu'en commission parlementaire il l'a fait. Et la députée de Johnson faisait son travail d'Opposition, de dire: Moi, mon rôle dans l'Opposition, c'est de protéger les personnes âgées que vous avez coupées en 1989, 25 % à partir de l'âge de 64 ans. Et elle voulait faire venir la Fédération de l'âge d'or. Est-ce que c'est son droit, M. le Président? Est-ce que la Fédération de l'âge d'or menaçait le ministre? Est-ce que le ministre pouvait être en danger parce que la Fédération de l'âge d'or pouvait être appelée à venir donner son opinion?

M. le Président, il faut être conscients que le ministre vide la caisse: 877 000 000 $; 625 000 000 $ qu'il veut envoyer à la voirie et 9 100 000 pour les ambulances en 1988, 32 500 000 $ pour les ambulances en 1989. C'est des années passées. Parce que le gouvernement n'est même pas foutu de faire un décret légal, parce que le gouvernement, avec toute sa batterie d'experts, est même capable de faire des règlements illégaux. Gang d'incompétents! Gang d'incompétents! Imaginez-vous, un Conseil des ministres, à 28, n'est même pas capable de faire des décrets légaux. Il est obligé de voter des lois pour aller chercher de l'argent dans la caisse de la Régie rétroactivement. C'est quelque chose, M. le Président.

Vous sentez-vous en confiance devant un gouvernement qui n'est même pas capable de faire des décrets légalement, qui est capable d'aller vous chercher de l'argent comme ça, 40 000 000 $, plus de 40 000 000 $ illégalement? Les gens se sentent menacés par ce gouvernement-là qui va vider la caisse et, après ça, augmenter les primes des assurés parce que l'argent ne sera plus là pour payer les indem- nités. Il devra augmenter les primes des assurés et réduire les prestations des victimes d'accidents d'automobile. Des gens qui ont été maga-nés, qui sont victimes d'accidents d'automobile, qui sont handicapés - handicapés partiels ou totaux - on va couper leurs prestations parce qu'on veut donner l'argent au ministre des Finances.

M. le Président, c'est un gouvernement sans coeur. C'est une gang d'incompétents qui votent des lois et des décrets qu'ils n'ont pas le droit de voter. Et ils n'ont même pas le coeur de faire venir le Protecteur du citoyen et le Vérificateur général pour qu'ils donnent leur opinion sur ces projets de loi...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure.

M. Garon: ...sans droit, qu'on n'a pas le droit de faire.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure.

M. Garon: M. le Président, vous comprenez que, dans l'enthousiasme, je serais prêt à parler des heures là-dessus. C'est parce que je suis limité à 10 minutes - c'est épouvantable - par le bâillon de ce gouvernement.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Je reconnais maintenant la prochaine intervenante, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. Oui, M. le Président, notre porte-parole officiel, le député de Lévis, a parfaitement raison. Nous nous retrouvons devant un gouvernement tout à fait incapable, mais vraiment incapable de respecter les règles les plus élémentaires de la démocratie. Un gouvernement qui suspend les règles. J'entendais le député de Saguenay tantôt nous parler de la patience angélique du ministre des Transports. Eh bien! Une patience angélique qui dure treize heures, M. le Président, permettez-moi de mettre en doute cette patience.

Au début de l'étude du projet de loi 69, le ministre de l'Éducation nous parlait de sa patience éternelle. Eh bien! Une patience angélique, ça dure treize heures et une patience éternelle, c'est seize heures, M. le Président. Seize heures, une patience éternelle. Je n'ose même pas qualifier la patience du ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, mais il faut dire que, lui, il y a eu un élément qui l'a aidé à être un petit peu plus patient. Alors, c'est peut-être la patience tout court. Il a tenu vingt-trois heures, mais il avait un grand

auditoire qui le soutenait fortement, M. le

Président.

(17 heures)

Donc, ce gouvernement n'accepte, dans les faits, aucune opposition, parce qu'un gouvernement qui cesse d'étudier un projet de loi, qui met le bâillon après aussi peu de temps, c'est un gouvernement qui n'accepte aucune opposition. Un gouvernement qui se voit obligé d'imposer trois bâillons en trente-six heures, un gouvernement qui ne gouverne que depuis neuf mois seulement, quant à moi, c'est un gouvernement qui a peur. C'est un gouvernement qui craint de l'opposition, qui n'en accepte aucunement et qui se sent obligé d'appliquer la manière forte pour passer ses lois.

Il n'accepte aucune discussion, il impose, ce gouvernement. Nous avons eu certains discours, la semaine dernière, pour nous faire expliquer - comme si l'Opposition ne connaissait aucunement les règles d'une motion de clôture - en long et en large que pour un bâillon, M. le Président, l'élément important, essentiel, c'était la notion d'urgence. Alors, on doit se la poser, la question: Est-ce qu'il y a urgence? Est-ce qu'il y a urgence à déposséder les 4 000 000 d'automobilistes québécois par le projet de loi 50 qui constitue, dans les faits, un véritable détournement de fonds de 877 000 000 $? Est-ce qu'il y a urgence pour ça?

Une voix: Non.

Mme Caron: Pas pour l'Opposition, M. le Président. La véritable urgence de cette motion de clôture, c'est de répondre, tout comme avec la loi 69, à la commande du président du Conseil du trésor qui manque de fonds, M. le Président. Le Conseil du trésor n'a plus d'argent, on manque de revenus et on ne veut pas imposer directement les Québécois, donc on fait porter l'odieux... Et on trouve toutes sortes de tactiques pour aller chercher des taxes chez les contribuables indirectement.

On ne peut pas étudier le projet de loi 50 sans se demander quel était le but premier de la réforme de l'assurance automobile en 1977. Cette réforme-là avait été présentée par Mme Lise Payette, sous le gouvernement du Parti québécois, et, je veux le rappeler, sous l'égide du ministère des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières, parce que, dans ce temps-là, M. le Président, les consommateurs étaient considérés, puisqu'il y en avait un, ministère des consommateurs. Il n'y en a plus, M. le Président. Ça n'existe plus, un ministère des consommateurs. Il y en avait un à ce moment-là.

Et le but de cette loi-là, c'était d'assurer aux automobilistes québécois une indemnisation meilleure, rapide et au coût le plus bas possible. Le but, ce n'était pas de faire des surplus. Si, aujourd'hui, on a des surplus à la Régie de l'assurance automobile, il y a trois possibilités: ou qu'on réduise les primes des automobilistes. De toute façon, on les taxe partout ailleurs. Ça serait peut-être intéressant d'en avoir une, réduction pour les consommateurs. Ou qu'on augmente les compensations qui sont versées aux accidentés de la route, parce que là aussi il y a des plaintes, et très nombreuses. Je suis convaincu que les députés ministériels aussi en ont, des plaintes dans leurs bureaux de comté. Et, enfin, on peut augmenter l'efficacité de ce système bureaucratique à la Régie de l'assurance automobile, parce qu'il ne gagnerait pas un prix d'efficacité, M. le Président. Les listes d'attente sont extrêmement longues et tous les gens qui sont ici devraient au moins reconnaître cet élément.

Donc, le prétexte qu'on a utilisé pour aller détourner les fonds, c'est, bien sûr, un sujet dont on entend parier partout, le réseau routier, bien sûr. On promet aux Québécois qu'on va réparer le réseau routier, qui est dans un état déplorable, on l'avoue. Le député de Saguenay a candidement avoué tantôt, il nous a clairement dit: Ça fait quinze ans qu'on oublie le réseau routier. Bien, il faudrait peut-être qu'il se rappelle que sur ces quinze années son gouvernement est là depuis cinq ans. C'est bien beau de nous rappeler que ça fait quinze ans, mais ça fait cinq ans qu'ils sont là. Je pense qu'il l'avait oublié.

Donc, la théorie et la pratique, il serait peut-être temps de mettre les deux ensemble, M. le Président, parce que, quand on regarde les investissements additionnels qu'on nous propose pour les cinq prochaines années, si on les regarde, est-ce qu'on veut utiliser l'argent qu'on va aller chercher dans la caisse? On peut regarder année par année. 1990-1991, moins 49 000 000 $ d'investissements additionnels. Est-ce que c'est pour aller réparer le réseau routier en 1990-1991? Non. 1991-1992, moins 18 000 000 $ d'investissements, M. le Président. Est-ce que c'est pour réparer le réseau routier en 1991-1992? Non. 1992-1993, ah! là, 59 000 000 $. 1993-1994, 58 000 000 $. Et 1994-1995, 55 000 000 $. Ça fait 104 000 000 $ et on va chercher 877 000 000 $. Et on veut tenter de faire croire aux automobilistes québécois et à tous les consommateurs qu'on va réparer le réseau routier avec cet argent? La démonstration, elle est là, sur papier; c'est complètement faux.

Qui sont les grands perdants? C'est évident que ce sont les accidentés. Ce sont les accidentés qui avaient clairement défini qu'ils avaient des besoins. Ils ont dit à quel point les délais étaient longs, à la Régie de l'assurance automobile. Lorsque le dossier est en révision, est-ce que vous avez une petite idée du temps d'attente des contribuables? C'est, minimum, douze mois. Alors, douze mois, pour une personne qui n'a pas de revenus, je pense que c'est un peu long et qu'on pourrait peut-être mettre

un peu d'argent pour augmenter cette efficacité.

On avait eu aussi des revendications qui avaient été faites, comme l'a si bien souligné le député de Lévis, par la Fédération des femmes du Québec. Elles l'ont dénoncée, la nouvelle loi. Elle l'ont dénoncée parce qu'il y a un recul et que les gens qui demeurent à la maison, donc plutôt une majorité de femmes et les personnes âgées qui ne travaillent plus, il y a une discrimination, dans cette loi-là, pour ces gens-là. Est-ce qu'on ne pourrait pas utiliser les surplus de la Régie pour régler ces injustices-là? Non, M. le Président, ce n'est pas du tout ce qu'on fait, absolument pas. Les gens qui sont pénalisés, qui vont en révision et qui finissent par gagner, est-ce qu'on leur remet les intérêts de l'argent qu'ils ont perdus? Pas du tout. Par contre, le gouvernement, lui, en fait, des intérêts.

Il y a eu un rapport qui a été présenté à la Régie de l'assurance automobile. Il y a eu un bilan de la réforme, en 1986. Et dans ce bilan-là on disait qu'il n'y avait pas de doute que, dans le nouveau régime de protection, tant à l'égard des dommages corporels que des dommages matériels, il y avait une amélioration remarquable par rapport à ce qui existait avant. On nous disait qu'on avait fait une évaluation du coût de l'efficacité de l'assurance automobile pour les bénéficiaires et que c'était positif. La conclusion de ce rapport, qui était signé par Claude Fluet et Pierre Lefebvre, du département de sciences économiques de l'Université du Québec à Montréal, était très éclairante: Tant en ce qui concerne l'indemnisation des dommages matériels que celle des dommages corporels, mais évidemment de façon plus marquée pour ces derniers, le bilan de la réforme apparaît comme tout à fait positif. La protection globale a augmenté, des gains d'efficacité appréciables ont permis de diminuer les coûts relatifs de l'assurance, les aspects plus qualitatifs de procédure d'indemnisation ont aussi connu une amélioration certaine." Qu'est-ce qu'on fait de ce bilan positif, aujourd'hui? On l'annule complètement, M. le Président. Et au lieu de continuer à améliorer le système pour les consommateurs québécois, on vient prendre cet argent pour couper et pour les empêcher d'améliorer le système.

En conclusion, chaque fois que le gouvernement sent de l'opposition dans la population, sur un projet de loi - qu'on regarde les projets de loi 69, 75 et 50, trois bons exemples - il se dépêche de suspendre les règles démocratiques et empêche l'Opposition officielle de faire son travail. Eh bien, M. le Président, ils devront supporter le jugement de la population.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant M. le député de Lac-Saint-Jean et whip en chef de l'Opposition officielle. M. le député.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: Merci, M. le Président. Je parlais tout à l'heure, à l'occasion du débat sur la motion d'ajournement du député de Lévis, de "hold-up". Je reprends l'expression, je la répète, je voudrais que ça se répande partout au Québec que ce que le gouvernement est en train de faire, c'est un "hold-up" sur la caisse des assurés, sur la caisse de la Régie de l'assurance automobile; 877 000 000 $ vont être ainsi siphonnés par le gouvernement pour ensuite aller alimenter le fonds consolidé du ministre des Finances. C'est un "hold-up" et le ministre des Transports, de concert avec le ministre des Finances, agit en "pistolero". Et ça, il faut que ça se fasse vite. Un "hold-up", ça doit se faire vite. On voit ça dans les westerns, un "hold-up", ça se fait vite. Les braqueurs arrivent rapidement dans la banque, ils remplissent les sacs vite, sous la menace du pistolet, et ils sacrent le camp, vite aussi, à cheval, évidemment.

Une voix: II n'est même pas là. Il est parti, le ministre.

M. Brassard: Et quand ça va bien, il faut que ça se fasse vite, de sorte que le shérif, quand il s'en aperçoit, il est trop tard. Et la population aussi, elle s'aperçoit que sa banque a été vidée. Alors, il faut que ça se fasse vite, un "hold-up", c'est pour ça qu'après treize heures seulement de débats en commission parlementaire le bâillon est arrivé. La clôture est tombée, on a réduit au silence l'Opposition. (17 h 10)

Dans le cas présent, si je continue mon exemple, M. le Président, le shérif, en l'occurrence l'Opposition, a fait preuve de vigilance. On ne dormait pas. On était aux aguets. Et on s'est vite aperçu que la caisse était en train d'être braquée, qu'on était en train d'assister à un "hold-up". Alors, vite, rapidement, l'Opposition a alerté tout le monde, toute la population pour, à tout le moins, faire en sorte que les intéressés, c'est-à-dire les millions d'automobilistes au Québec, sachent ce qui se passe, sachent et connaissent ce qu'on est en train de faire, qu'on est en train de faire main basse sur ce qui leur appartient, puisque c'est le produit de leurs primes. C'est pourquoi, d'ailleurs, certains de mes collègues ont parlé de vol qualifié. Ça appartient aux assurés, aux automobilistes et le ministre des Finances, aidé par le ministre des Transports, est en train de faire main basse sur les surplus de la caisse de la Régie de l'assurance automobile pour payer ses dépenses courantes. Parce que c'est de ça qu'il s'agit. Ça va alimenter le fonds consolidé pour permettre au ministre des Finances de payer les dépenses courantes dans à peu près tous les ministères.

Les ministériels s'indignent et nous disent:

C'est effrayant, ce que vous faites. Ce qu'on veut faire avec ça, vous le savez, on veut construire des routes. On veut les restaurer, les routes, assurer l'entretien du réseau routier qui est dans un état lamentable, tout le monde le sait. C'est ça qu'on veut faire avec cet argent. Vous voulez empêcher ça? Dans vos comtés, nous disent-ils, votre réseau routier se détériore, est dans un état pitoyable, vous le savez. Il faut investir de l'argent pour construire et entretenir les routes. Vous n'avez pas honte, nous disent-ils toujours, d'empêcher l'adoption de cette loi? Vous "devriez cautionner ce "hold-up". Vous devriez l'approuver, parce que ça va faire en sorte que dans vos comtés, si vous êtes gentils... Parce que ceux qui ne sont pas gentils, vous le savez, le ministre des Transports vous l'a dit, vous n'aurez rien dans vos comtés si vous n'êtes pas gentils. Ceux qui sont gentils, vous aurez de l'argent pour améliorer votre réseau routier et construire les routes.

Mais ce n'est pas vrai, M. le Président. Si, au moins, c'était vrai. Ce n'est pas vrai. Le livre des crédits parle de lui-même. C'est faux ce qu'on nous dit. C'est faux quand on nous dit: II faut adopter ça vite pour pouvoir faire des travaux routiers, financer les travaux routiers. Ce n'est pas vrai. Le livre des crédits que j'ai entre les mains, M. le Président, est éloquent. En matière de construction routière, il y avait l'an passé des crédits de l'ordre de 440 893 600 $. Cette année, il y en a 444 056 000 $. Il n'y a même pas 4 000 000 $ de plus par rapport à l'an passé. On est loin même de l'indexation ou, disons, la même chose. Ne nous chicanons pas sur les petites différences, disons qu'il y a l'équivalent. Les mêmes crédits cette année que l'an passé, en matière de construction routière, en matière d'entretien du réseau routier. Conservation des infrastructures routières de transport. Ça, c'est l'entretien. L'an passé, il y avait 439 836 700 $. Cette année, il y a 424 413 800 $. Il y en a moins. Il y a 15 000 000 $ de moins cette année que l'an passé. Mais, sur des montants aussi considérables, soyons bon prince, disons que, grosso modo, le budget de cette année est sensiblement le même que celui de l'an passé. Ça, c'est dans les crédits.

Après ça, il y a eu le discours sur le budget. Le ministre des Finances a annoncé le "hold-up", le siphonnage de la caisse, en disant que ça allait servir à la construction et à l'entretien du réseau routier. Mais il y avait une petite note qui disait: Ça ne changera pas les crédits, cependant. Ce que vous avez dans les crédits, ça ne changera pas cette année; c'est la même chose. Ça n'ajoute pas un sou de plus aux crédits. On siphonne. On siphonne, on alimente le fonds consolidé pour permettre de payer les dépenses courantes, mais ça n'ajoute rien, en termes de crédits aux budgets de construction et d'entretien du réseau routier. Alors, l'argument des ministériels qui revient sans cesse, c'est de nous dire: Vous n'avez pas honte d'empêcher ça? Vous empêchez le gouvernement de faire de la construction routière et de l'entretien du réseau routier. Ça ne tient pas. C'est faux. Ça n'a aucun fondement puisque le livre des crédits est clair et net: les budgets de construction et d'entretien du réseau routier sont les mêmes, sensiblement, que ceux de l'an passé. Il n'y a pas un sou de plus.

Ah! il y a bien l'entourioupette - je vois le ministre délégué aux Transports - sur le budget de base, mais ça, vraiment, il n'y a personne qui est dupe. Personne n'a marché dans ce truc-là, cette entourioupette digne du ministre des Finances, député de Bonaventure, dont on connaît l'expérience parlementaire. Ça fait plus de 30 ans qu'il est ici. Alors, il en connaît bien des trucs. Ça, c'est une entourioupette. Le budget de base, ça ne veut rien dire, ça. Ce qui compte, c'est les crédits qui sont votés et inscrits au livre des crédits. C'est ça qui compte. On aura beau faire toutes les pirouettes qu'on voudra sur le budget de base et prétendre qu'il s'est ajouté des sommes considérables à partir du budget de base, ça ne change rien sur le terrain, ça. Il n'y a pas plus d'argent sur le terrain. Il n'y a pas plus d'argent dans les routes. Le budget est le même que l'an passé, sensiblement. Alors, l'argument ne vaut pas de la part des ministériels. Ce projet de loi là, même s'il était adopté, n'ajoute rien du tout en termes de budgets, en termes de crédits, en matière de construction et d'entretien du réseau routier. Alors, il n'y a pas urgence, il n'y a pas de presse. Il n'y a pas péril en la demeure. En aucune façon il n'y a lieu de se presser et d'adopter à toute vapeur ce projet de loi avec, en plus, une motion de clôture à la clef, un bâillon.

C'est vrai que ça existe dans nos règles parlementaires, le bâillon et la motion de clôture. C'est évident que le leader du gouvernement invoque des dispositions du règlement. Mais on sait tous que ces dispositions-là devraient être utilisées pour des motifs exceptionnels, dans des circonstances exceptionnelles, quand il y a véritablement urgence et que l'urgence saute aux yeux. Ce n'est pas le cas présentement. Malheureusement, avec ce gouvernement, M. le Président, la motion de clôture, le bâillon est devenu une mesure banale. C'est devenu monnaie courante et, ce faisant, on brime non seulement les droits de la population, mais on brime aussi les droits des citoyens. Merci.

Le Vice-Président (m. bissonnet): merci, m. le député de lac-saint-jean. je suis prêt à reconnaître maintenant le prochain intervenant, m. le député d'ungava. m. le député.

Une voix: Bravo, Christian! Une voix: C'est beau, Christian!

M. Christian Claveau

M. Claveau: Oui, M. le Président. La semaine dernière, en cette Chambre, vendredi dernier, la dernière intervention que j'ai eu à faire pour clôturer la semaine, c'était sur le bâillon sur la loi sur les heures d'affaires. C'était épouvantable. Avec mes collègues, on a passé vingt-trois heures à parier de la loi sur les heures d'affaires et personne n'était d'accord avec cette loi-là. On l'a démontré autant comme autant. À l'exception de 355 propriétaires de grandes surfaces à travers le Québec, tous les autres intervenants dans le domaine de l'alimentation et du commerce au détail étaient, pour l'essentiel, contre ce projet de loi là. On en a parlé pendant vingt-trois heures. On s'est retrouvés avec un bâillon en cette Chambre.

M. le Président, on reprend la semaine. Je pensais qu'avec le répit de la fin de semaine le gouvernement aurait réfléchi...

Une voix: Bien non!

M. Claveau: ...je pensais que quelques heures de repos auraient permis aux ministres qui forment ce gouvernement de revenir la tête rafraîchie, et un peu plus rapprochés des intérêts de l'ensemble de la population québécoise, qu'ils auraient oublié, en quelque sorte, ou dilué leur arrogance durant les quelques heures de répit que nous a permises la fin de semaine. (17 h 20)

Eh bien non, M. le Président, bien au contraire! Tout de suite en recommençant, en s'empresse d'appeler un nouveau bâillon, le troisième, parce qu'on en avait eu un autre avant, la semaine dernière aussi; trois bâillons consécutifs. Et cette fois-là, M. le Président, pourquoi? Parce que imaginez-vous que l'Opposition a eu la disgrâce d'amener ce gouvernement à passer treize heures en commission parlementaire sur une loi aussi fondamentale que la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec.

Certes, M. le Président, ces gens-là ont voté contre la loi lorsqu'elle a été mise en place par le Parti québécois; ils ont voté contre le principe; ils ont passé des centaines d'heures en commission parlementaire à expliquer que ce n'était pas bon, qu'il ne fallait surtout pas avoir une loi semblable au Québec, pour protéger les intérêts de l'ensemble de ceux qui utilisent l'automobile. Ils étaient contre et ils sont encore contre aujourd'hui. Ils sont contre mais, comme ils n'osent pas le dire vraiment, parce que la population, elle, elle est pour, eh bien, ils ont trouvé une façon déviée d'en profiter, de dire: On est contre mais, en fait, on va faire comme si on était pour et on va s'en servir à nos fins.

Et quelles sont ces fins-là, M. le Président? Se servir de la caisse de la Régie de l'assurance automobile du Québec pour combler le manque à gagner ou l'incapacité de ce gouvernement d'administrer clairement, ouvertement. M. le Président, après treize heures de discussion en commission parlementaire, ce gouvernement nous dit: On n'a plus le temps de discuter, il faut aller vite, ça presse. On met le bâillon, il n'y a plus personne qui va parler et on passe la loi.

M. le Président, on l'a déjà dit à ce gouvernement. Comme on ne peut s'adresser à personne en cette Chambre directement, sinon en passant par vous, je vous demande, M. le Président, de faire le message aux membres du gouvernement que, s'ils ne veulent pas que l'opposition s'exerce à l'intérieur du cadre législatif, eh bien, que voulez-vous, ce sera à l'extérieur du parlement que s'exercera l'opposition. Ce sera à l'extérieur du parlement que les gens feront connaître leur mécontentement, et ils l'auront bien voulu. Ils ne l'auront pas voie; s'ils ont volé la caisse, ils n'auront pas volé la rancoeur, la rogne de ceux qui avaient mis l'argent dans cette caisse-là et qu'ils iront leur exprimer, M. le Président. Je compte sur vous pour leur passer le message.

Il est absolument incroyable que ce gouvernement utilise à tout vent une règle d'exception comme le bâillon, une règle qui devrait être utilisée avec beaucoup de discernement et qui n'a pas été instaurée dans le but d'empêcher les parlementaires de parler, d'empêcher ceux qui ont été élus pour défendre les intérêts du peuple d'exprimer ces intérêts-là, en cette Chambre. Ce n'est pas la raison pour laquelle on a instauré ce principe qui permet à un gouvernement, lorsque l'on considère qu'il y a eu suffisamment de débat, que tout à été dit, que tout le monde est intervenu et que, finalement, on constate un désaccord, qui permet donc à ce moment-là, au gouvernement d'aller de l'avant quand même, s'il juge que politiquement il peut le faire.

M. le Président, l'utilisation du bâillon comme l'a fait ce gouvernement, c'est exactement comme si, à la première séance de négociation, dans n'importe quoi, on arrivait avec un conciliateur et on disait: Ah! On ne s'entend pas parce que les positions sont diamétralement opposées au départ. Alors, dès la première séance de négociation, on dit: II n'y a pas consensus; donc, on amène un conciliateur et on règle vite. C'est de cette façon-là, M. le Président, pour ramener ça à une image peut-être un peu plus populaire qui va permettre aux gens de comprendre, c'est de cette façon-là que ce gouvernement utilise le bâillon.

M. le Président, je vais vous donner juste un exemple. En 1984, lorsque le gouvernement du Parti québécois a retravaillé la Loi sur HydroQuébec pour permettre à Hydro-Québec de verser des dividendes au gouvernement, ce gouvernement, M. le Président, ces êtres chastes et purs qui, à ce moment-là, étaient dans l'Opposition, se scandalisaient, se scandalisaient que l'on puisse demander à Hydro-Québec de verser quelques

sous de dividendes pour aider le gouvernement à passer à travers la crise économique. Ils se scandalisaient et ils ont gardé le gouvernement pendant plus de trois semaines en commission parlementaire, M. le Président, en prônant à qui voulait les entendre qu'il était tout à fait immoral pour un gouvernement d'aller chercher de l'argent dans les fonds d'une société d'État et d'obliger une société d'État comme Hydro-Québec à verser des dividendes. Ils en étaient scandalisés et ils trouvaient ça immoral. Pendant trois semaines, ils ont utilisé tous les tons possibles et imaginables pour se faire comprendre. En bout de piste, et après trois semaines, non pas après treize heures, finalement, le projet de loi a été amené en Chambre pour son vote final. On était en 1984; ces chastes individus, M. le Président, étaient à ce moment-là dans l'Opposition. N'ayez crainte, M. le Président, n'ayez crainte, lorsqu'ils ont pris le pouvoir, ils ont été les premiers à bénéficier, mais amplement, tant qu'on pouvait le faire, de cette loi de 1984 qui permettait à Hydro-Québec de verser des dividendes. Par centaines de millions, en 1986 et en 1987, ils sont allés ramasser les dividendes d'HydroQuébec. M. le Président, dans cette loi de 1984 on prévoyait des paramètres. On fixait des conditions pour que le gouvernement ne puisse aller piger à sa guise dans les bénéfices nets d'Hydro-Québec. Et on s'en offusquait.

Alors, où sont ces chastes individus qui, aujourd'hui, après treize heures de débat veulent carrément et littéralement dilapider les fonds de la caisse de la Régie de l'assurance automobile du Québec, veulent s'en emparer comme des "desperados"? Qui sont ces gens? Où sont-ils, ces chastes individus? Seraient-ce les mêmes? Seraient-ce les Pilate d'hier? On se le demande très sérieusement. Et ils ne se contentent pas, M. le Président, de surtaxer par la bande, de surtaxer d'une façon cachée les citoyens du Québec en allant piger dans les surplus de la caisse qui leur sert d'assurance dans le domaine de l'automobile. C'est ça que l'on fait parce que, lorsqu'on va chercher cet argent-là, on empêche la Régie de l'assurance automobile de pouvoir diminuer ses frais ou augmenter ses prestations. On va piger directement dans les poches du contribuable, mais sans que ça paraisse, M. le Président. On vole littéralement les contribuables québécois; on les vole de 877 000 000 $ sur cinq ans et sans paramètre, le seul paramètre étant les colonnes comptables du ministre des Finances et du président du Conseil du trésor. Et croyez-vous, M. le Président, que c'est comme ça, sans rouspéter, sans rien dire, qu'on va se laisser imposer le bâillon? M. le Président, un jour ou l'autre, ce gouvernement - et l'heure est peut-être plus proche qu'il ne le pense - va avoir à répondre de ses actes devant la population du Québec. Merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le député de Gouin. M. le député.

M. André Boisclair

M. Boisclair: Merci, M. le Président. La semaine dernière j'ai eu l'occasion, tout comme l'ensemble de mes collègues, de m'exprimer sur le bâillon qui était proposé par le gouvernement sur le projet de loi modifiant la loi sur les heures d'affaires. J'avais commencé mon intervention, M. le Président, vous vous en souviendrez, en vous disant que dix minutes, c'était bien peu pour parler sur ce genre de motion.

J'aimerais donc aujourd'hui vous redire jusqu'à quel point nous, de l'Opposition, sommes indignés de l'attitude du gouvernement, parce qu'il faut bien comprendre... Je pense qu'au-delà du débat de fond - j'aurai l'occasion d'y revenir sur le projet de loi 50 - il y a une question de fond qui se pose. Est-ce que nous croyons en nos institutions? Est-ce que nous croyons en l'efficacité de notre Parlement? Une question encore plus importante: Pourquoi a-t-on un Parlement? Parce que, dans le fond, ce que ces gens-là aimeraient, c'est de pouvoir gouverner par décret, c'est de pouvoir faire fi de toutes les étapes d'adoption d'un projet de loi. (17 h 30)

Pourquoi présente-t-on des motions de bâillon, si ce n'est que pour outrepasser notre règlement? Je comprends que l'économie générale du règlement prévoit des motions de bâillon semblables à celle-là, qui sont essentiellement prévues dans le cas de mesures d'urgence, lorsqu'il y a des besoins bien particuliers, mais où est-elle, l'urgence, M. le Président, sur le projet de loi 50? Qu'est-ce qui vient justifier la pertinence d'une motion semblable à celle dont nous discutons? Y a-t-il, comme le disait mon collègue, péril en la demeure? Eh bien, non, M. le Président!

Donc, on peut se poser la question: Pourquoi présenter une motion semblable à celle-là si ce n'est que pour manifester le mépris que le gouvernement libéral manifeste à l'égard de nos institutions? Je l'ai dit et je le répète, M. le Président, moi, j'ai fait le choix de venir et de me présenter aux élections générales parce que je croyais en nos institutions, parce que je crois que c'est encore là le meilleur lieu et le meilleur endroit pour faire valoir les préoccupations de nos citoyens. C'est une décision légitime que j'ai décidé de prendre. J'aurais pu très bien aller m'impliquer dans d'autres organisations communautaires, dans des organisations syndicales, dans différentes organisations qui font valoir un certain nombre d'intérêts bien particuliers. Non, M. le Président, j'ai choisi l'Assemblée nationale parce que je crois que c'est là l'institution la plus efficace pour faire valoir notre point de vue. Et ça fait trois fois, M. le Président, trois

fois en même pas une semaine, que nous avons à débattre d'une motion qui vient bâillonner l'Opposition. Ce n'est pas n'importe quoi.

Il faut bien comprendre, et le chef de l'Opposition l'a bien dit dans son discours, cet avant-midi, jusqu'à quel point l'Opposition a un rôle important à jouer dans le processus démocratique. Si notre règlement prévoit un certain nombre de dispositions, un certain nombre d'étapes pour en arriver à l'adoption d'un projet de loi, c'est pour permettre aux citoyens de véhiculer leurs intérêts, de faire valoir leurs points de vue. Ce n'est pas si simple que ça, l'adoption d'un projet de loi. Ça peut avoir des retombées importantes qu'on n'a peut-être pas prévues au moment de l'adoption du principe et au moment du débat qui a mené à la rédaction du projet de loi.

M. le Président, on se retrouve dans une situation où le gouvernement manifeste encore une fois son arrogance, son mépris à l'égard de l'Opposition, à l'égard de l'institution à laquelle nous appartenons, et moi, si j'étais à votre place, M. le Président, vous qui avez à faire respecter l'ordre et le règlement dans cette Chambre, je me questionnerais aussi sur la pertinence du geste qui est posé par le gouvernement, parce que c'est là une attitude totalement méprisante. Et le problème de fond est toujours le même, M. le Président. Pourquoi est-on si pressé? Pourquoi n'a-t-on pas commencé le débat sur le projet de loi 50 au mois de mai ou plus tôt au mois de juin? Pourquoi le gouvernement a-t-il attendu à la date limite permise par notre règlement pour déposer l'ensemble de ses projets de loi? Il y a plus d'une cinquantaine de projets de loi qui sont, à l'heure actuelle, en attente pour être discutés en cette Chambre. Comment se fait-il qu'au mois d'avril on ait eu très peu de législations? Comment se fait-il qu'au mois de mai on n'ait eu pratiquement pas de législations à discuter en Chambre ou en commission? Pourquoi attendre à la toute dernière minute pour nous arriver avec une tonne de projets de loi et maintenant invoquer des motions de bâillon, venir bâillonner complètement l'Opposition? Pourquoi attend-on à la toute dernière minute, si ce n'est peut-être que pour éviter qu'il n'y ait un débat de fond dans la population, pour peut-être se dépêcher, à la toute dernière minute, pour adopter ce projet de loi, sans que les véritables effets de ce projet de loi puissent se faire sentir dans la population, pour que l'ensemble des gens puissent en prendre connaissance et puissent être vraiment conscients des conséquences de l'adoption de ce projet de loi?

M. le Président, il y a eu quoi? Une vingtaine d'heures de débat en commission. C'est quoi, ça, vingt heures? Au moment de l'adoption de la loi de la Régie...

Une voix: Treize heures, treize heures.

M. Boisclair: Treize heures, me dit-on. Ce n'est même pas vingt, c'est treize heures, M. le Président. Au moment de l'adoption de la loi qui a créé la Régie de l'assurance automobile du Québec, c'est plus d'une centaine d'heures qu'on a eues et jamais le gouvernement de l'époque, le gouvernement du Parti québécois n'a invoqué le bâillon parce que nous y croyons en ces institutions-là, parce que nous les respectons. Après treize heures de débat, M. le Président, alors que l'urgence n'est même pas démontrée, n'est même pas prouvée...

Je le disais vendredi dernier, l'urgence, si elle est quelque part, c'est de changer le leader du gouvernement. Parce qu'on les entend parler, les différents ministres, dans les corridors. Ils viennent même voir le leader de l'Opposition pour s'assurer que leur projet de loi puisse être discuté en Chambre. C'est ça, la réalité, M. le Président. Et les mesures que l'Opposition a prises en commission parlementaire, ce ne sont pas des mesures farfelues. Nous avons demandé de bonne foi que soit entendu le Vérificateur général. Dans la loi du Vérificateur général, il est très clair, à l'article 45, que le Vérificateur général, de par sa loi constitutive, peut soumettre un rapport spécial à l'Assemblée nationale. C'aurait pu être très pertinent d'entendre le Vérificateur général, de connaître son avis sur ce transfert de fonds de la Régie de l'assurance automobile du Québec pour financer le transport ambulancier à Montréal, pour financer la voirie, les dépenses de voirie. C'aurait pu être très pertinent de l'entendre parler. Parce que ce qu'on fait, dans le fond, M. le Président, par le projet de loi 50 qui est devant nous, on va subtiliser une somme importante d'argent de la caisse des assurés qui appartient à ceux et celles qui contribuent à cette caisse-là au moment de renouveler leur permis de conduire. On prend ces sommes d'argent là et, au lieu d'augmenter les indemnités qui sont versées à ceux qui détiennent un permis de conduire, au lieu de diminuer aussi les primes d'assurance exigées lorsque l'on renouvelle son permis de conduire, on va prendre cet argent-là et on va le transférer à des fins qui sont tout autres.

M. le Président, vous comprendrez, comme moi, facilement que ce qu'on fait, c'est qu'on prend de l'argent qui appartient à la caisse des assurés sans leur consentement et, possiblement, en ne respectant pas la Loi actuelle sur la Régie de l'assurance automobile. On prend cet argent-là et on l'emploie à d'autres fins. Et ce ne sont pas des petits montants qu'on détournera de la Régie de l'assurance automobile vers la voirie, vers le financement du transport ambulancier. Laissez-moi vous donner quelques exemples. De 1986-1987 à 1990-1991, le gouvernement libéral a détourné de la caisse des assurés 762 000 000 $. À un moment où la Régie nous dit ouvertement qu'elle n'a pas les budgets nécessaires dont elle aimerait disposer pour faire la promotion

d'une plus grande sécurité sur les routes, on prend déjà 762 000 000 $: 328 000 000 $ sont allés à la Régie de l'assurance-maladie du Québec, 350 000 000 $ sont allés à des fins de voirie, 83 800 000 $ au transport ambulancier. De 1991-1992 à 1994-1995, 109 000 000 $ indexés, par année, iront à l'assurance-maladie pour le transport ambulancier dans la région de Montréal; 475 000 000 $ pour des travaux de voirie.

M. le Président, la question de fond qui se pose: Pourquoi le gouvernement, s'il fait une priorité de l'amélioration du réseau routier, n'a-t-il pas augmenté les crédits alloués au ministre des Transports? Parce que c'est ça, la question. On s'est retrouvés dans une situation où le ministre des Finances, à l'occasion de son budget, a décrété, de façon unilatérale, que, dorénavant, au lieu d'augmenter les crédits alloués au ministère des Transports, on ira chercher cet argent-là ailleurs.

Et, souvenez-vous, mon collègue, député d'Ungava, le disait avec pertinence, au moment où on a décidé, en période de récession économique, qu'Hydro-Québec verserait des dividendes au gouvernement du Québec: Détournement de fonds, vous violez les règlements, vous violez les lois. C'est ce que nous disait l'Opposition à ce moment-là, M. le Président. Et, je ne sais pas si c'est parce qu'ils sont frappés du syndrome du deuxième mandat, si c'est parce qu'ils se croient arrogants, s'ils croient qu'ils détiennent la pure vérité qu'ils agissent aujourd'hui de façon autre que ce qu'ils disaient au moment où ils étaient dans l'Opposition.

M. le Président, si tout allait bien à la Régie de l'assurance automobile du Québec, les choses seraient peut-être différentes, mais combien de témoignages avons-nous dans nos bureaux, de façon quotidienne, de gens qui sont aux prises avec la Régie de l'assurance automobile du Québec? Laissez-moi vous donner quelques exemples des articles de journaux qu'on m'a remis. Je pourrais lire juste un extrait de quelques-uns d'entre eux. "Aux prises avec la Régie de l'assurance automobile du Québec, je suis en train de crever de faim." Ce n'est pas des membres de l'Opposition qui parlent, c'est des gens que nous représentons à l'Assemblée nationale. "Accident. Victime de la bureaucratie". "Accident à Granby, Régie blâmée". Et on pourrait continuer, M. le Président, à plusieurs reprises pour illustrer jusqu'à quel point la situation n'est pas simple et jusqu'à quel point aussi il est important que l'Opposition prenne tous les moyens nécessaires pour faire valoir son point de vue.

M. le Président, je conclurai en disant que le mépris que ces gens-là manifestent à l'égard de l'Opposition, à l'égard de plus de 40 % des Québécois et des Québécoises que nous représentons à l'Assemblée nationale, il y aura un prix à payer et souhaitons que ce soit rapidement.

Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant le prochain intervenant...

M. Boulerice: M. le Président, sur une question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le...

M. Boulerice: M. le Président, suspension, bâillon, mais, au moins, cette Chambre et surtout les députés ministériels pourraient respecter l'article 32 de notre règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!

M. Boulerice: Je vous demanderais de le faire...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je fais très bien appliquer l'article 32 du règlement. Je n'ai personne à...

Une voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Si vous voulez être plus spécifique, M. le député. Vous voulez que les députés soient assis à la place que le président leur a bien assignée. Alors, je demanderais aux députés de bien vouloir prendre leur siège et je reconnaîtrai immédiatement Mme la députée de Chicoutimi. (17 h 40)

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le Président, mépris de l'Assemblée nationale, disait l'orateur précédent. Mépris. Un troisième bâillon en fin de session, c'est du jamais vu à l'Assemblée nationale du Québec. C'est une attitude arrogante et méprisante à l'endroit de cette Assemblée, M. le Président. Arrogante et méprisante à l'endroit des parlementaires de cette Assemblée. Arrogante et méprisante à l'endroit des députés de l'Opposition, des personnes que nous représentons et des comtés que nous représentons, M. le Président. Arrogante et méprisante à l'endroit des souscripteurs de l'assurance automobile du Québec, et ils sont 4 000 000, M. le Président. Arrogante et méprisante à l'endroit de la démocratie.

M. le Président, notre régime politique est démocratique. On est chanceux, on a ce privilège. Il y a même une loi de l'Assemblée nationale qui vient interpréter les droits et devoirs des députés. Dans les dépliants que nous fournissons à tout visiteur qui vient à l'Assemblée nationale, il est clairement indiqué, d'abord, que le député

est à la défense de leurs intérêts. Ça, c'est donné aux électeurs. Et lorsqu'on parle de la défense des intérêts des citoyens, M. le Président, voici ce que l'on dit: "II défend les intérêts de ses électeurs, pose des questions au ministre responsable du dossier et commente les propositions de ses collègues. Les commissions jouent un rôle très actif dans le processus législatif. Lorsqu'il y a consultation générale, le député membre de la commission concernée doit lire les mémoires, rencontrer les personnes et se faire le porte-parole des citoyens qui veulent être entendus."

M. le Président, c'est un mépris de l'Assemblée nationale et c'est un mépris des principaux intervenants qui souhaitaient et qui souhaiteraient être entendus sur ces lois-là comme sur les deux autres sur lesquelles nous avons été bâillonnés, c'est-à-dire la loi sur les heures d'affaires et la loi sur la fiscalité scolaire.

M. le Président, toujours dans les mêmes dépliants, dans le rôle du député à l'Assemblée nationale, il est dit: "L'exercice de la démocratie. À l'Assemblée nationale comme en commission parlementaire, le député a la responsabilité de légiférer, de contrôler et de représenter ses électeurs." M. le Président, la responsabilité et le devoir des députés se trouvent foulés au pied, lorsque le gouvernement décide de bâillonner l'Opposition dès qu'il estime qu'un projet de loi est plus ou moins contentieux et qu'il risque d'être contesté. La seule façon qu'il a trouvée pour s'assurer que la population ne soit pas suffisamment informée, c'était encore, M. le Président, d'imposer le bâillon aux députés de l'Opposition.

M. le Président, la loi 50 constitue un véritable "hold-up" de l'assurance automobile du Québec. On dévalise les coffres de la Régie de l'assurance automobile du Québec. La loi vient siphonner dans la caisse 87V 000 000 $ sur cinq ans. C'est une taxe déguisée et c'est pour ça qu'on nous bâillonne, parce qu'on ne veut pas « que la population apprenne ce qu'on est en train de faire avec la caisse de l'assurance automobile du Québec.

M. le Président, jamais, mais jamais, l'assurance automobile du Québec n'a été prévue pour réparer les routes du Québec. C'est comme toute autre assurance. Verriez-vous, M. le Président, que dans votre assurance-vie ou votre assurance-santé on prenne les fonds pour construire les hôpitaux? Vous vous y "objecteriez", et avec raison. Comment se fait-il qu'on puisse prendre le fonds de la caisse de l'assurance automobile du Québec pour construire des routes, et pas de l'argent neuf? Et c'est là qu'on trompe la population. On n'ajoute même pas au budget de construction et de rénovation des routes, on ne fait qu'une ponction dans l'enveloppe de la RAAQ, la Régie de l'assurance automobile du Québec, pour maintenir les budgets de construc- tion de routes au même niveau qu'il l'était; c'est inacceptable.

La Régie de l'assurance automobile du Québec, lorsqu'elle a été instituée, avait comme responsabilité d'appliquer le régime d'indemnisation, d'appliquer le régime de compensation dans les cas de dommages matériels. Elle devait assurer le traitement de l'immatriculation des voitures et l'émission des permis, de même qu'elle devait faire des campagnes de sensibilisation sur les habitudes des conducteurs automobiles. C'est ça, essentiellement, la responsabilité de la Régie de l'assurance automobile, qu'elle ne peut même pas assumer entièrement, faute de budget. On est en train d'envoyer les budgets pour faire la construction de routes. Mais il n'y a rien, absolument rien, qui permette au gouvernement de faire ça, en vertu de cette loi-là. C'est du détournement de fonds. C'est une nouvelle taxe déguisée de l'ordre de 877 000 000 $.

Pour pouvoir obtenir autant de fonds dans la caisse, qu'est-ce qu'on a fait au cours des deux autres modifications? On a considéré que les femmes au foyer, que les personnes âgées de plus de 64 ans et les étudiants n'auraient plus droit au même traitement que les autres assurés. Parce qu'il y a deux catégories d'assurés à la Régie de l'assurance automobile. Curieusement, il y a ces personnes qui n'ont pas droit à l'indemnisation pour perte de revenus et il y a les autres. Pourtant, il n'y a pas d'écart dans la prime. Elles paient, ces personnes, les femmes, les personnes âgées et les étudiants, les mêmes primes d'assurance automobile, mais elles n'ont pas droit au même service, et ça, c'est inacceptable. Et encore une fois, on s'en prend aux plus petits, aux plus démunis, à ceux qui sont les moins bien protégés de la société.

Ces deux décisions ont permis que ça coûte moins cher à la Régie de l'assurance automobile, ce qui fait qu'on est en train de mettre de l'argent sur les routes. Mais il y en a une aussi qui est fort méprisable et extrêmement contestable, le fait que le traitement des dossiers prenne un temps tel que les gens viennent nous dire: Écoutez, je n'ai plus le choix, je suis sur le bien-être social, incapable de travailler, on n'a pas réglé mon cas, ça fait plus de 12 mois. Des fois, même, c'est contesté et ça s'en va devant la Commission des affaires sociales, et là, vous pouvez y être trois ans. Et c'est toute la qualité de vie des personnes qui se trouve ainsi affectée, pas seulement la personne accidentée, c'est son conjoint, c'est sa conjointe, ce sont ses enfants, c'est son entourage. Et d'un niveau de vie qui était relativement acceptable, il tombe sur l'aide sociale aussi longtemps qu'on n'a pas réglé son cas. On fait des économies sur le dos des gens les plus mal pris pour faire quoi, M. le Président? Pour faire un détournement, pour maintenir le budget de construction de nos routes au niveau où il était les dernières années, c'est-à-

dire à un niveau relativement bas. Il ne s'agit même pas, comme le prétend le gouvernement, d'ajouter des budgets à l'enveloppe de la voirie. Il s'agit, en clair et net, d'une ponction pour des budgets courants de construction et de rénovation des routes.

Cette loi est inéquitable, elle est illégitime. Bâillonner l'Opposition, l'empêcher de faire son travail, l'empêcher d'assumer les responsabilités, tel que prévu dans les lois et les règlements qui le définissent, empêcher l'Opposition d'informer la population sur le contenu des trois projets de loi sur lesquels nous avons été bâillonnés, c'est une atteinte à la démocratie. Et ce gouvernement pratique dans les faits, aujourd'hui, en bâillonnant, ce qu'il fait de façon générale. Il n'y a pas une journée en Chambre où on ne se fait dire, à la période de questions: Ça ne vous regarde pas. Comme si nous n'étions pas députés élus par nos gens, M. le Président. Ça arrive très fréquemment de nous faire dire: Ça ne vous regarde pas.

J'écoutais le président du Conseil de trésor, à une question qui était posée par le député de Gouin, qui lui demandait quand est-ce qu'il déposerait une loi. Il a dit: Vous le saurez quand on l'appellera. Arrogance, mépris, M. le Président, et insulte à la démocratie. On ne peut pas exercer les fonctions qui sont les nôtres. On ne peut pas rendre compte des attentes de notre population, des gens qui viennent faire des représentations pour défendre des points de vue à l'occasion de l'adoption d'un projet de loi, mais, qui plus est, en bâillonnant l'Opposition, M. le Président, on empêche l'Opposition d'informer la population sur des projets de loi qui vont affecter tous les citoyens du Québec. Et ça, M. le Président, en démocratie, c'est condamnable, on appelle ça de l'autoritarisme ou de l'autocratie. Et ce n'est pas ça, notre régime politique. Il faut s'élever contre ce projet de loi. Et j'espère qu'il y aura d'autres députés gouvernementaux qui en feront autant. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant M. le député de Bertrand. M. le député de Bertrand.

M. Boulerice: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. Boulerice: M. le Président, je suis encore obligé, et on voit que le mépris se poursuit... Le leader du gouvernement voulait avoir un entretien privé avec un député de l'Opposition. Ils ont quitté cette Chambre. Je les félicite de respecter le décorum... (17 h 50)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Quelle est votre question de règlement?

M. Boulerice: ...mais l'article 32...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En vertu de l'article 32, si je comprends bien, M. le député, vous demandez que la présidence vérifie si les députés sont assis à leur siège. Je demanderai aux députés... C'est fait. Alors, je demande au député de Bertrand de poursuivre son intervention. M. le député de Bertrand.

M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Mes collègues ont eu amplement l'occasion d'exposer les raisons pour lesquelles ils sont indignés par l'utilisation de ce nouveau bâillon concernant l'adoption du projet de loi 50. Pour ma part, j'aimerais ajouter ma voix à la leur, mais à partir d'un point de vue un peu différent. Il me semble que l'utilisation de ce nouveau bâillon, dans le contexte de ce projet de loi, est difficilement justifiable parce que ce projet de loi, au fond, introduit deux précédents qui m'ap-paraissent fort dangereux dans la conduite des affaires publiques du Québec à l'avenir. D'abord, le projet de loi, au fond, entérine une initiative du conseil d'administration de la Régie, qui a été prise sans l'assentiment de l'Assemblée nationale. Et deuxièmement, il déroge au principe fondamental de saine gestion qui veut que des sommes recueillies pour des fins spécifiques soient utilisées à ces fins spécifiques.

Lors de l'étude des crédits 1990-1991 du ministère des Transports, le directeur des services juridiques de la Régie a affirmé que c'est le conseil d'administration de la Régie qui a transformé la mission de la société en ce qui a trait à laA- sécurité routière, pour l'élargir à l'entretien du service routier. Je vous lis les transcriptions officielles des commentaires du directeur des services juridiques, M. Gélinas, et je cite: Nqhs, comme je vous le dis, on a toujours donné une interprétation très large de cet article, de façon que la mission de la Régie, on puisse l'appliquer de la façon la plus efficace possible, qui était de diminuer les risques, les risques inhérents à la route pour l'ensemble des usagers de la route.

Cette mission-là, la Régie l'a entérinée par son conseil d'administration il y a plusieurs années. Elle s'est fixé également toute une série de mesures en matière de sécurité routière qui sont conformes à cette mission qui avait été acceptée par son conseil d'administration. Or, M. le Président, il me semble - et j'ai eu l'occasion de l'exposer lors de ma première intervention sur le principe de ce projet de loi - qu'il n'appartient pas au conseil d'administration de la Régie, ni au conseil d'administration d'aucune autre société d'État, de modifier la mission que leur confèrent les

dispositions légales sans que ces amendements-là ou que ces changements de cap n'aient été entérinés, acceptés et présentés à l'Assemblée nationale.

Un examen des rapports annuels de la Régie montre que c'est en fait en 1986 que le conseil d'administration a modifié substantiellement sa mission, sans que sa loi constitutive n'ait été amendée pour changer son mandat. En fait, dans les rapports annuels de la Régie, de 1978 à 1985, on reprend essentiellement l'article 2 de la loi de la Régie pour décrire la mission de la Régie. Dans le rapport de 1986, déposé en mai 1987 à l'Assemblée nationale, on remarque un changement de cap important. Et ce changement de cap, on le voit par la référence à la loi de la Régie qui disparaît pour être substituée par, et je cite: "La Régie a pour mission de réduire les risques inhérents à l'usage de la route."

M. le Président, il me semble que c'est établir ici un précédent dangereux que de ne pas insister de part et d'autre de cette Chambre pour que les changements d'orientation majeurs dans les lois constitutives des sociétés d'Etat soient entérinés par l'Assemblée nationale. Que ce soit le Parti libéral ou le Parti québécois qui soit au pouvoir, il me semble que c'est une règle de fonctionnement à laquelle on devrait s'astreindre parce qu'une loi qui a été votée à l'Assemblée nationale pour constituer une société d'État, lui consacrer des objectifs, lui attribuer des ressources et lui attribuer un mandat spécifique, une loi votée par l'Assemblée nationale ne peut, il me semble, être modifiée que par la propre Assemblée qui l'a constituée.

Or, ce que nous faisons par la loi 50, en fait, c'est indirectement entériner une décision qui a été prise par le conseil d'administration de la Régie dès 1986 - et nous avons les déclarations de son directeur juridique pour le confirmer - décision qui a été prise à l'initiative du conseil d'administration, probablement avec la bénédiction du ministre responsable de l'époque, mais qui constitue néanmoins une dérogation au principe fondamental du respect des droits de l'Assemblée nationale.

D'autre part, ce projet de loi déroge au principe fondamental de saine gestion financière. Ceux qui ont oeuvré dans les milieux financiers savent très bien quel est le principe sous-jacent à ce qu'on appelle un fonds d'amortissement. Un fonds d'amortissement ou ce qu'on appelle, en anglais, un "sinking fund" est constitué pour amortir des dépenses précises en fonction de projets spécifiques. Le fonds de la Régie de l'assurance automobile du Québec a été mis sur pied en 1977 pour des buts bien spécifiques. Or, le fait de nous arriver à l'heure actuelle avec un projet de loi qui aurait pour effet de détourner les fonds amassés pendant 10 ans par la Régie vers d'autres fins pour lesquelles elle avait été conçue constitue, lui aussi, un précédent dangereux.

J'ai eu l'occasion, ce matin, en fait, de terminer en commission l'étude d'un excellent projet de loi que nous acceptons, en principe, le projet de loi 60 mettant sur pied la Société de récupération et de recyclage du Québec qui, elle aussi, va devoir administrer des fonds qui vont être perçus, par voie de consigne, sur une foule de produits. Les fonds qui sont constitués de cette façon et qui vont l'être dans des domaines qui sont nouveaux au Québec, en particulier dans le domaine de l'environnement, dans le secteur de la recherche et du développement, ce sont des fonds qui font appel, somme toute, à la collaboration du public, à la collaboration des entreprises et qui font appel, par voie de la politique des consignes, à une acceptation de ces politiques par ceux qui sont appelés à y consacrer des énergies et surtout des ressources.

Je suis un peu inquiet face au précédent qui est introduit par la loi 50 parce que, dans le cas de projets de loi intéressants comme le projet de loi 60, dans la mise sur pied de la Société de recyclage du Québec, il est tout à fait louable et il est tout à fait important, d'ailleurs, que les Québécois soient sensibilisés à l'importance du recyclage et que nous mettions sur pied des structures qui facilitent la recherche dans ce domaine.

Comment voulez-vous convaincre la population d'accepter des politiques de consigne, par exemple, dans les secteurs visés par la Société de récupération et de recyclage du Québec, alors que la population n'aura aucune garantie que d'ici à trois, cinq, six ou dix ans, selon le bon vouloir de la majorité et du ministre, le mandat de la Société et plus particulièrement les fonds qui ont été consacrés et collectés à des fins spécifiques, dans le cas de la Société de recyclage en matière d'environnement, ne seront pas détournés à d'autres fins? Il me semble que, par ce précédent, on est en train, en quelque sorte, de miner la crédibilité que le public pourrait avoir dans des fonds qui seraient constitués pour un but spécifique, que ce soit par votre gouvernement ou par un autre gouvernement futur. Il y a ici une question de crédibilité de la part du public qui est en jeu et je pense que nous devons d'ores et déjà empêcher et, en quelque sorte, constituer un précédent en empêchant que les fonds de la Régie de l'assurance automobile du Québec ne soient utilisés à d'autres fins.

Nous connaissons tous la place que joue le bâillon dans la stratégie politique parlementaire. Mais je pense que le fait que le gouvernement, cette fois-ci, ait recours à plusieurs motions de bâillon, au fond, camoufle la véritable question que nous devrions nous poser tous comme Québécois, c'est-à-dire: Où allons-nous puiser les fonds qui vont nous permettre de consolider les acquis, dans la société québécoise, que nous avons développés jusqu'ici et où allons-nous aller chercher les fonds qui nous permettront d'améliorer la qualité de vie qui semble être une

priorité pour l'ensemble des Québécois? Et je pense que la question qu'on doit se poser ici, qui est derrière ça, c'est le recours du gouvernement à la taxation indirecte, faute d'avouer son impuissance dans le carcan constitutionnel où l'enferme présentement le fédéralisme canadien, parce qu'il y en a de l'argent au Québec. Le gouvernement du Québec peut aller chercher des fonds pour maintenir la qualité de vie des Québécois mais, à la lumière de l'idéologie et de la politique du gouvernement, il est impensable de réviser, de remettre en question les arrangements financiers qui nous lient présentement au gouvernement fédéral.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure...

M. Beaulne: Le ministre des Finances a ouvert la porte en admettant qu'il devait réviser ses prévisions en fonction de la baisse de certains paiements de transferts. Je pense que c'est là la question que nous allons nous poser avant de procéder à toutes sortes de manipulations et de révision des fonds qui ont été constitués à des buts spécifiques. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Compte tenu de l'heure je suspends les travaux de cette Assemblée jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 1)

(Reprise à 20 h 5)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez vous asseoir.

Avant de poursuivre le présent débat, je voudrais simplement vous faire part d'une information. Une motion de censure a été inscrite au feuilleton et préavis de l'Assemblée, le vendredi 15 juin 1990, par le député indépendant de D'Arcy-McGee, en vertu de l'article 304 du règlement. Cet article prévoit notamment que les députés d'Opposition peuvent proposer six motions de censure au cours d'une session et que ces motions sont précédées d'un avis d'un jour franc.

Décision du président sur la répartition des

motions de censure entre l'Opposition et

les députés indépendants

Avant que la motion de censure du député de D'Arcy-McGee soit inscrite aux affaires prioritaires, je crois nécessaire de rendre une décision concernant la répartition des motions de censure entre le groupe parlementaire de l'Opposition et les députés indépendants, en application de l'article 305 du règlement. Cet article se lit comme suit: "305. Le président répartit les motions de censure entre les groupes parlementaires d'Opposition, en tenant compte de la présence des députés indépendants." Fin de la citation.

Pour effectuer la répartition des motions de censure, le président doit, pour éviter l'arbitraire, tenir compte de l'usage et apprécier de façon juste et équitable ce qui revient au groupe parlementaire de l'Opposition et aux députés indépendants. À ce chapitre, l'usage reconnaît aux députés indépendants le droit de proposer une motion de censure sur les six motions prévues au règlement pour la durée d'une session.

De plus, tel qu'il a déjà été exprimé lors d'une décision antérieure, il y a lieu de rechercher un certain équilibre dans la répartition des motions entre le groupe parlementaire de l'Opposition et celui des députés indépendants. Ainsi, une motion de censure n'est pas automatiquement débattue à partir du moment où elle est inscrite au feuilleton et il n'y a pas de notion de priorité fondée sur ce critère. Si c'était le cas, on pourrait assister à une course à la motion de censure dès le début de la session et l'article 305 du règlement perdrait sa raison d'être.

Compte tenu qu'il s'agit de la troisième motion de censure de la présente session et de la première au nom d'un député indépendant, j'accorde cette motion de censure au député de D'Arcy-McGee. Cependant, je vous avise que cette motion de censure sera la seule qui pourra être présentée pour l'ensemble des députés indépendants pour la session en cours. Je réserve le droit de présenter toute autre motion de censure pour la présente session à l'Opposition officielle.

Nous allons maintenant poursuivre les travaux de l'Assemblée. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Oui, M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 80 du feuilleton, s'il vous plaît.

Reprise du débat sur la motion de clôture de l'étude du projet de loi 50

Le Président: À l'article 80 du feuilleton, nous allons maintenant reprendre le débat sur la motion proposée par le leader adjoint du gouvernement conformément à l'article 251 du règlement, motion qui se lit comme suit: "Que la commission de l'aménagement et des équipements, à qui a été confiée l'étude détaillée du projet de loi 50, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec et d'autres dispositions législatives, mette fin à ses travaux quant à ce mandat dès l'adoption de la présente motion et fasse rapport au moment prévu de la période des affaires courantes de la séance qui suit celle au cours de laquelle aura été adoptée la présent motion." Je suis donc prêt à recon-

naître le prochain intervenant, soit M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, je viens d'écouter très attentivement vos propos et je sais que votre rôle est ingrat quelquefois en cette Chambre, d'être obligé de prononcer des paroles qui, j'en suis sûr, ne viendraient pas de votre propre bouche, mais qui vous sont imposées par le régime parlementaire dans lequel on vit.

M. le Président, si mon collègue, le député de Gouin, tantôt exprimait avec beaucoup de fierté le fait qu'il arrivait dans cette Assemblée nationale - très jeune d'ailleurs, 23 ans ou 24 ans - avec un goût immense de vivre la démocratie, eh bien! moi, je vous dirai, M. le Président, que l'ayant vécu cinq années avant lui ici dans cette Chambre, sous un gouvernement libéral, je peux vous dire que nous sommes loin de la démocratie.

S'il y a trois mots que j'ai entendus malheureusement trop souvent dans cette Chambre, ça a été "suspension des règles". Ça, on l'a entendu je ne sais combien de fois. Je pourrais d'ailleurs vous rappeler des épisodes très importants pour ce qui était de l'avenir du Québec, la loi 178, loi qui modifiait la Charte de la langue française. Et voilà, M. le Président, que nous sommes actuellement dans un bâillon imposé à une commission, une commission qui n'avait siégé que très exactement treize heures. Treize heures seulement. Et, quand on regarde les comptes rendus des travaux, à la fois des commissions et de cette Chambre, des années 1976 à 1985, on s'aperçoit quel respect le gouvernement de l'époque, le gouvernement du Parti québécois, portait, lui, à l'Opposition, parce que l'Opposition, démocrate comme les péquistes peuvent l'être... Et j'entends un collègue d'un comté acquiescer à mon propos; je suis heureux qu'il y en ait au moins un qui ne partage pas la ligne déviationniste de son parti. Donc, un gouvernement du Parti québécois, démocrate il va de soi, nous sommes un parti social-démocrate. Social dans le sens que le sort de la population nous préoccupe et démocrate parce que nous croyons aux vertus de la démocratie.

Et je regarde le nombre d'heures qui ont été passées en commission parlementaire. Rappelons-nous justement la commission parlementaire qui a étudié le projet de loi présenté par l'ancienne députée de Dorion, Mme Payette. Je le rappelle, les heures et les heures, sans compter les innombrables tournées qu'a faites à travers le Québec l'ancien député de Bourget, le Dr Laurin, le père de la loi 101. Respect de l'Opposition, M. le Président. Des heures et des heures de commission. Des heures même pour l'adoption de la loi, je ne me souviens plus si c'était 73 ou 78, qui modifiait, et je m'en souviens fort bien, M. le Président, puisque j'étais venu intervenir... Je pourrais, d'ailleurs, interpeller, s'il était en Chambre, le ministre de l'Éducation, qui siégeait à cette commission. Eh bien, le gouvernement d'alors, M. le Président, écoutait et donnait aux commissions parlementaires le temps de regarder un projet de loi et surtout d'inviter des gens qui ont quelque chose à dire au sujet de ce projet de loi.

Et là, il y en a un, projet de loi, actuellement, pour lequel on veut nous mettre un bâillon. Et, belle illustration de démocratie, M. le Président, le député de Laporte, qui est toujours friand de citations, eh bien, je lui en ai amené une ce soir. Elle vient d'un parlementaire britannique qui est William Pitt et qui dit: "La nécessité - parce que c'était l'argument qu'on employait, M. le Président, pour mettre le bâillon - est l'argument invoqué lors de toute atteinte à la liberté humaine. C'est la raison à laquelle recourent les tyrans". Eh bien, M. le Président, j'espère que la citation convient au député de Laporte, lui qui en est tellement friand. Il se range du bord des tyrans, maintenant, quand vient le temps pour l'Opposition de réclamer le temps nécessaire, M. le Président, à l'adoption d'une loi.

Ce projet de loi que nous présente le gouvernement, M. le Président, ce n'est pas compliqué. Le gouvernement est en train de jouer les Robin Hood à l'envers. Robin Hood, lui, il dévalisait les riches pour donner l'argent, et le distribuer aux pauvres. Là, le gouvernement libéral, lui, décide de jouer au Robin Hood sans Lady Marianne, par exemple, joue Robin Hood, maintenant, mais à l'inverse. Lui, il va aller voler les pauvres, M. le Président, et il va aller donner ça aux plus gros. C'est ça qui est en train de se faire avec la Régie de l'assurance automobile, M. le Président. Ça va devenir une espèce de belle vache à lait pour le gouvernement qui va être capable de la poncer.

Si vous aviez prévu vos actions futures, c'est-à-dire si vous aviez eu un petit peu de planification, vous auriez peut-être eu la décence, au moment où le Parti québécois a fait adopter cette loi qui recueille encore une très grande faveur populaire, si vous aviez eu le moindrement un petit peu de prévoyance, de voter avec le gouvernement du Parti québécois, sachant que vous étiez prêts à y prendre tous les pis, à cette vache, pour y faire couler l'argent.

Ce n'est pas le mandat, M. le Président, de la Régie de l'assurance automobile. Son mandat est très clair, c'est d'administrer un régime universel d'indemnisation pour les personnes victimes de dommages corporels causés par une automobile. C'est de gérer l'indemnisation des victimes d'accidents causés par certains véhicules et qui se produisent hors des chemins publics et dont les responsables sont inconnus ou insolvables. C'est d'assumer toutes les fonctions relatives à l'immatriculation des véhicules auto-

mobiles, à la délivrance des permis de conduire et au contrôle de l'assurance obligatoire pour les dommages matériels à autrui. Et, finalement, c'est de promouvoir la sécurité routière en collaboration avec les divers agents sociaux, par l'élaboration de politiques et de programmes visant à améliorer le bilan routier du Québec.

Mais les quelque 125 000 000 $ qu'on veut aller chaparder dans la caisse de la Régie de l'assurance automobile, est-ce qu'ils vont servir aux quatre énoncés que je viens de donner et qui font partie du mandat de la Régie? Est-ce qu'ils vont aller là? C'est une façon très maqui-gnonne de détourner des sommes d'argent à d'autres fins. Ah! on nous a fait croire que c'était pour l'amélioration des routes. Et je suis étonné, d'ailleurs, du silence complice de la députée de Matane, du député de Saint-Hyacinthe, du député de Nicolet et je pourrais même parler de M. le député de Hull. Est-ce qu'ils ont obtenu plus d'argent pour leurs routes rurales? Parce qu'ils ont des circonscriptions qui ne sont pas urbaines comme la mienne. Moi, c'est la ville qui s'en occupe. Est-ce qu'ils ont plus d'argent pour les routes? On nous a fait accroire que c'était pour augmenter le budget du ministère des Transports, donc pour avoir un meilleur réseau routier au Québec. Voyons donc! Voyons donc! Cet argent-là s'en va où? M. le Président, j'aimerais bien que vous me donniez la réponse. Et ce qu'ils n'ont même pas pensé - je leur ai dit leur manque de prévoyance - ils sont obligés d'aller poncer de l'argent qui devait rester là.

Mais comment se fait-il qu'ils ont besoin d'argent? Voyons! Notre brillant économiste premier ministre qui, entre parenthèses, a trouvé son diplôme d'économiste dans une bonne vieille boîte de Cracker Jack... Parce qu'il n'est pas économiste, il a suivi des cours d'économie politique. C'est bien différent entre un économiste et quelqu'un qui a suivi un cours d'économie politique auquel n'importe qui peut aller s'inscrire comme étudiant libre.

Comment se fait-il qu'ils ont besoin d'argent? Bons gestionnaires! Le Québec roule sur l'or, M. le Président. Oui, mais si ce gouvernement-là a géré tellement d'argent, une reprise économique fulgurante, comment se fait-il qu'ils ont besoin d'aller dans ce domaine poncer 125 000 000 $ par année? C'est justement parce qu'il n'y a pas la réponse, qu'on a impose un bâillon à la commission. Mépris des institutions parlementaires. M. le Président, depuis six ans, dans la candeur d'un pseudo deuxième mandat qu'ils ont eu, avec des majorités passablement réduites pour la plupart d'entre eux, ils s'imaginent toujours détenteurs. Nous sommes la voie, la vie, et la vérité. Je ne sais pas si c'est le député d'Argenteuil qui déteint sur eux, mais c'est un peu leur attitude.

Mais ce mépris face au Parlement, M. le Président... Et je vais conclure là-dessus, puisque vous me faites signe. Malheureusement, je n'avais que 10 minutes pour dénoncer ce manque flagrant à la démocratie. Je leur ai donné une citation tantôt, M. le Président, je vais les laisser sur un proverbe: Quand on crache en l'air, ça risque de nous retomber sur le nez. Faites bien attention de la façon dont vous traitez la démocratie dans ce Parlement, M. le député de Frontenac. Vos électeurs seraient les premiers à vous le reprocher et ils le feront aux prochaines élections. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président: Avant le prochain intervenant, je vous prierais également de vous adresser toujours à la présidence et non directement à un autre député. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Laviolette.

M. Boulerice: M. le Président, sur une question de règlement.

Le Président: Sur une question de règlement, M. le député...

M. Boulerice: Je m'excuse, M. le Président, effectivement de ne pas m'être adressé à vous, sauf que je vous demanderais, s'il vous plaît, de faire respecter l'article 32 de notre règlement. Je vois que, malheureusement, les députés n'occupent pas les fauteuils que vous leur avez assignés.

Le Président: Évidemment, il y a une coutume à l'Assemblée qui fait en sorte que les députés peuvent parfois aller discuter avec quelques collègues mais, si on demande à la présidence que les députés reprennent leur place, je vais demander à chacun des députés de reprendre le siège qu'on leur a assigné.

Nous allons maintenant poursuivre avec l'intervention de M. le député de Laviolette. (20 h 20)

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Tout comme mes collègues, je suis un peu peiné de voir que le gouvernement utilise encore une fois le bâillon, d'autant plus que, comme vice-président d'une commission parlementaire sur les heures d'ouverture et de fermeture de magasins et de commerces, j'ai eu l'occasion de faire valoir mon point de vue.

M. le Président, je l'ai d'ailleurs fait valoir, ce point de vue là, lorsque nous avons étudié la question - encore une fois bâillonnés - de toute la taxe scolaire versus la taxe municipale. C'est le ministre de l'Éducation qui a cette responsabilité. Alors, je dois vous dire que ça me peine beaucoup, d'autant plus que c'est la première fois depuis que je suis dans ce lieu sacré, ce qu'on appelle le lieu du peuple, de cette démocratie qui, normalement, doit se faire valoir ici plutôt qu'à l'extérieur, c'est-à-dire

dans les aies... Elle doit plutôt être faite normalement ici. Je le dis souvent à des gens: J'aime mieux avoir de bonnes engueulades à l'Assemblée nationale que de les avoir dans la rue. Elles se terminent toujours par un ordre du président de nous tenir en ordre et à l'ordre. Mais, à l'extérieur, c'est plus difficile, des fois, de contenir des foules en colère.

Mais, quand je dis ça, M. le Président, je pourrais vous faire un très beau discours, vous dire que ça n'a pas de bon sens. Je le pense autant que mes collègues. Ça n'a pas d'allure, trois bâillons en trois jours. Parce que ce n'est pas trois bâillons en deux semaines, c'est l'un après l'autre. Un bâillon après l'autre a été imposé en commission parlementaire, nous obligeant à revenir ici à l'Assemblée nationale. Nous avons eu l'occasion de déposer le rapport de la commission de l'éducation dont nous ferons la prise en considération du rapport, ce soir, ici à l'Assemblée nationale. Nous avons eu l'obligation d'amener à l'Assemblée nationale le rapport de la commission de l'économie et du travail sur la loi du ministre de l'Industrie et du Commerce et, maintenant, voilà que sur la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec nous nous sommes fait bâillonner pour une troisième fois en trois jours.

M. Le Président, je pense qu'il va falloir que l'on regarde sérieusement - et vous avez cette responsabilité comme gardien de la démocratie au québec, m. Le Président. cette responsabilité comme gardien est peut-être d'amener les groupes parlementaires à regarder la façon dont les lois sont passées au québec. quand je suis arrivé, en 1976, c'était à la dernière minute qu'étaient présentés des projets de loi. c'était à la vitesse. on disait "passés à la vapeur". déjà, notre groupement, qui est le parti québécois, avait proposé à l'assemblée nationale, à ce moment-là, des changements parce qu'on trouvait que ça n'avait pas de bon sens. mais, même avec ces changements-là, m. Le Président, ce n'est pas suffisant. le gouvernement nous amène des projets de loi à la dernière minute, se donne des objectifs et promet à du monde qu'il va faire adopter le projet de loi avant telle date. et, malheureusement, il n'en est pas capable, compte tenu des circonstances dans lesquelles il est placé, de vendre la marchandise et de rendre la marchandise à terme. et, après ça, ça lui permet de dire à tout le monde: écoutez, c'est la faute de l'opposition. nous autres, on voudrait bien vous le passer, votre projet de loi, mais ce n'est pas notre faute, l'opposition nous boycotte; l'opposition utilise des moyens démocratiques, mais on trouve que, pour nous autres, ce n'est pas correct, ce n'est pas de même que ça doit être fait, ce n'est pas de même que ça doit se passer.

J'ai eu l'occasion, à 3 heures du matin, de poser une question au ministre de l'Éducation qui m'a répondu à la question suivante: Quand vous étiez, vous, M. le ministre de l'Éducation, membre de l'Opposition, quand vous étiez chef de l'Opposition, est-ce que vous n'avez pas utilisé tous les moyens démocratiques mis à votre disposition? N'avez-vous pas utilisé tous les moyens prévus par le règlement pour faire valoir votre point de vue, quand vous considériez, à ce moment-là, le projet de loi non viable, à votre façon de voir les choses, et un projet de loi qui ne devait pas passer à l'Assemblée nationale? La réponse a été claire, nette et précise de la part du ministre de l'Éducation. Ça a été: Mais oui, M. le député, c'est ce que j'ai fait.

Aujourd'hui, on nous reproche d'utiliser les moyens démocratiques que le règlement nous donne pour faire valoir le point de vue d'une population qui est en colère, à quelque niveau que ce soit. Le danger dans lequel nous sommes placés, c'est que des gens, voyant qu'ils ne peuvent faire valoir leurs points de vue dans l'institution au sein de laquelle ils ont élu des gens pour les défendre, vont être obligés de le faire à l'extérieur.

Je lisais, à travers les activités de la fin de semaine, M. le Président, que des éditorialistes commencent à dire que le deuxième mandat du gouvernement actuel ressemble étrangement à ce mandat de 1973 à 1976 où on a connu un gouvernement qui utilisait toute la force dont il avait besoin et qui obligeait les gens à vivre à l'extérieur, ce que, malheureusement, une poignée d'hommes, à l'époque, ne pouvaient pas faire à l'intérieur de l'Assemblée nationale. Ce qu'on ne peut pas faire démocratiquement à l'intérieur, M. le Président, ces choses risquent de devenir violentes à l'extérieur. J'aime mieux avoir une évolution tranquille à l'intérieur qu'une révolution dangereuse à l'extérieur.

Pour ce faire, M. le Président, on devrait, à mon avis, changer les moyens que nous avons à notre disposition. Pour éviter que le gouvernement ne soit pris en otage, comme disent les gens du gouvernement, par une Opposition qui fait son travail, peut-être qu'à ce moment-là il faudrait changer notre façon de voir les choses.

Pourquoi, au Québec, comme cela existe dans des Parlements démocratiques, on n'en arriverait pas à déposer des projets de loi pendant une session, mais il serait impossible, à moins de consentement et d'utilisation qui sont prévus par le règlement, de les adopter avant l'autre session? Je vous donne un exemple. Nous sommes à la session du printemps. Le mois de juin se terminant, nous allons reprendre à la session d'automne, au mois d'octobre. On pourrait déposer des projets de loi à la session du printemps, prendre le temps de les examiner, ne pas aller à la vapeur et, finalement, arriver à l'automne et les adopter comme cela existe, à ma connaissance, au niveau du gouvernement fédéral où on ne peut adopter, dans la même session, le projet de loi. Il faut donner la chance à tout le

monde de s'exprimer. Peut-être qu'à ce moment-là on n'aurait pas de projets de loi qui seraient amenés à la vapeur. Et là, je parle pour quelque gouvernement que ce soit, M. le Président. Je ne veux pas en faire une question partisane. Je veux simplement faire comprendre à tous les parlementaires dans cette Assemblée, de quelque côté que ce soit, cette capacité qu'on a actuellement d'adopter à la vapeur beaucoup de projets de loi. Il y a des choses qui demandent d'être passées rapidement et qui n'amènent pas de disputes et de discussions mais, sur des projets majeurs... Je ne fais pas allusion à tous les projets. Je sais bien qu'un projet de loi privé, dans certains cas, peut être adopté rapidement, selon des besoins parce que c'est des petits dossiers. Mais quand on a un projet de loi de plusieurs articles qui change énormément la face du Québec, pourquoi sommes-nous obligés de l'adopter dans la même session? Pourquoi sommes-nous obligés, au Conseil des ministres, pour que le projet soit présenté pour le 15 mai, d'arriver dans certains cas pour le mois de janvier, passer toutes les étapes des comités ministériels permanents, passer l'étape de la législation, passer l'étape du Conseil du trésor si cela a des impacts budgétaires et revenir après ça à l'Assemblée nationale à la dernière limite, le 15 mai, et demander à des hommes et à des femmes d'adopter ces projets de loi à la vapeur, de les adopter en pleine nuit, dans certains cas, de les voter de façon que, finalement, il arrive des erreurs qui sont impardonnables, ce qui fait dire à du monde que, comme législateurs, on n'a pas vu à notre affaire?

Nous ne sommes pas tous connaissant de tous les dossiers, M. le Président. Et le gouvernement devrait le savoir que trois projets de loi aussi importants que celui qui implique des changements au niveau de la taxation scolaire... Je l'expliquais - j'aurai l'occasion d'y revenir, ce soir, M. le Président - au ministre de l'Éducation en disant que chez moi, à Grand-Mère, c'est près de trois fois plus de taxes scolaires que je paierai parce que de 0,13 $ nous allons passer à 0,35 $. La commission scolaire a l'intention de l'utiliser.

Quant à celui de la Régie de l'assurance automobile du Québec, M. le Président, celui qui est devant nous, encore beaucoup d'argent qui est mis en cause et pour lequel nous faisons valoir le point de vue de la population.

Celui des heures d'ouverture et de fermeture de commerces et de magasins qui a fait l'unanimité contre lui: ce projet de loi demanderait d'être amendé de façon à répondre plus adéquatement aux besoins de la population. Nous sommes pris dans un système où le gouvernement nous indique que, parce que nous utilisons les moyens qui sont mis à notre disposition, nous sommes bâillonnés.

M. le Président, il va falloir qu'on se penche sur la façon dont les lois sont votées au

Québec, la façon dont on devrait les voter pour en arriver à faire en sorte que ce soit beaucoup mieux planifié. On ne serait pas obligés, parce que le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie a promis que le projet de loi serait adopté avant le 22 juin, d'être amenés en commission parlementaire et, finalement, d'être obligés par 'a force des choses, par le rouleau compresseur gouvernemental, à revenir en Chambre.

Or, M. le Président, j'ai voulu donner mon opinion totalement non partisane pour démontrer qu'au Québec la façon dont les lois sont votées, avec ce qu'on a connu dans le passé et ce qu'on devrait connaître dans le futur, des changements importants doivent se manifester. Je m'adresse à vous comme gardien de nos droits et de nos privilèges pour peut-être amener des changements aussi importants que ceux-là à l'Assemblée nationale. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président: Je vais maintenant reconnaître M. le député de Pointe-aux-Trembles. (20 h 30)

M. Michel Bourdon

M. Bourdon: M. le Président, le gouvernement est rendu à trois motions de clôture en une semaine, pour empêcher l'Opposition de s'exprimer sur des projets de loi qui sont importants. En fait, M. le Président, je n'hésite pas à dire que le bâillon est au gouvernement libéral ce que les mineurs sont au gouvernement roumain: un moyen draconien utilisé pour empêcher l'Opposition de se faire entendre.

Des voix:...

Le Président: S'il vous plaît!

M. Boulerice: M. le Président, en vertu de l'article 32...

Le Président: Un instant! Un instant! M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, sur un rappel au règlement.

M. Bouierice: En vertu de l'article 32, M. le Président. Malheureusement, j'ai l'impression que si on peut contester les propos de mon collègue on est tenu de les écouter et vous voyez...

Le Président: Votre question de règlement, quelle est-elle?

M. Boulerice: L'article 32, M. le Président: "Les députés doivent observer le règlement et contribuer au maintien du décorum... Ils occupent la place qui leur a été assignée par le président, y demeurent assis et gardent le silence à moins d'avoir obtenu la parole." Il m'a été difficile d'entendre mon collègue, M. le Président, à cause d'autres députés, quelques mètres plus loin, qui

parlaient trop fort.

M. Lefebvre: M. le Président.

Le Président: Oui, sur la même question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Je comprends que les règlements existent pour être respectés, sauf qu'il ne faudrait pas que ça devienne une farce. Le député laisse entendre que le discours d'un de ses collègues aurait provoqué des réactions. J'en ai entendu, des réactions, d'un côté comme de l'autre, M. le Président. Badinage!

Le Président: Très bien. Effectivement, tous les parlementaires savent bien qu'il est d'usage et de coutume à l'Assemblée que, parfois, les propos d'un parlementaire, d'un côté ou de l'autre de l'Assemblée, puissent susciter certaines réactions. C'est peut-être difficile d'empêcher toute réaction. On demande aux députés, cependant, de ne pas nuire à celui qui s'exprime et j'espère que j'aurai la collaboration de l'Assemblée dans ce sens-là. Vous pouvez poursuivre, M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Bourdon: Or, M. le Président, le gouvernement veut empêcher le débat sur des lois qui ont une portée considérable. Celle qui amène la motion qui est devant nous, c'est la loi 50 par laquelle le gouvernement veut aller piger dans la caisse de la Régie de l'assurance automobile afin de se financer.

Bien sûr, on a parlé d'un plan nébuleux d'investir 1 700 000 000 $ dans la voirie dans les cinq prochaines années, sauf que - c'est une vieille technique du gouvernement - il s'agit d'argent pas plus important que l'année passée, mais qu'on présente autrement en utilisant des artifices de comptabilité. Bref, le gouvernement s'apprête à piger 125 000 000 $ par année à la Régie de l'assurance automobile en la détournant des fins pour lesquelles le gouvernement du Parti québécois l'avait créée en 1978.

En effet, M. le Président, le parti qui est au pouvoir actuellement avait voté contre la loi créant la Régie de l'assurance automobile et il y a une certaine logique maintenant à piger dans le fonds pour détourner la Régie des fins pour lesquelles elle a été créée. La Régie de l'assurance automobile, M. le Président, existe pour indemniser les victimes d'accidents et elle existe aussi pour favoriser une meilleure sécurité routière. Or, la construction ou la réfection de routes n'entre pas là-dedans. C'est le gouvernement qui vient ajouter ce mandat parce qu'il y a là de l'argent et, au lieu de prendre cette assurance que le gouvernement du Parti québécois a donnée à l'ensemble de la population, au lieu de la laisser remplir ses fonctions, c'est-à-dire indemniser plus vite les victimes, parce qu'on parle de délais d'un an avant d'avoir une décision quand on conteste les décisions de la Régie de l'assurance automobile, au lieu d'accélérer le service, d'améliorer les prestations aux victimes, le gouvernement veut, par cette loi 50, piger dans le fonds et s'administrer à même une assurance qui avait des fins précises: une meilleure sécurité routière et l'indemnisation des victimes.

M. le Président, je pense que c'est toute la question du financement par programmes particuliers que le gouvernement met en cause. La population n'aime pas payer des taxes, c'est bien connu. Mais, quand on parvient à mettre sur pied une mesure qui se finance pour ses fins à elle, je pense qu'on avance et qu'on progresse. Sauf que là, le gouvernement nous fait faire un grand recul puisque les gens vont dire: À quoi ça sert de conduire plus prudemment pour réduire les coûts? On ne recevra pas la baisse de primes d'assurance qui devrait venir, on n'aura pas de meilleurs services parce que le gouvernement va financer autre chose avec.

C'est ce que nous avons dit en commission parlementaire pendant treize heures, ce qui est très peu, de l'avis de la plupart des parlementaires, sauf que le ministre des Transports est mal patient, bourru, marabout, de mauvaise humeur et a décidé que, non, vraiment, on le soumettait à une pression indue. Pourtant, en commission parlementaire, M. le Président, on voulait faire venir le Vérificateur général pour nous dire ce que c'est, cette idée d'aller "holduper" les fonds de la Régie de l'assurance automobile. On voulait faire entendre le conseil d'administration de la Régie de l'assurance automobile. Les gens qui l'administrent, cette Régie, auraient été à même de nous donner un éclairage sur ce projet de piger dans le fonds qui a été créé à d'autres fins. La Fédération des femmes du Québec, qu'on voulait faire entendre, la Fédération des clubs de l'âge d'or, l'Association des accidentés de la route, le Protecteur du citoyen qui aurait pu nous dire quelles sortes de plaintes viennent de la part d'usagers de la Régie de l'assurance automobile pour qu'on voie s'il n'y aurait pas moyen de consacrer cet argent-là à ça au lieu de le verser dans le fonds consolidé de la province.

M. le Président, lors du premier mandat du Parti québécois, il y a trois mesures principales qui ont fait l'affaire des Québécois: la création d'une vraie assurance par la Régie de l'assurance automobile pour mettre fin à une situation où des victimes d'accidents attendaient des procès au civil et attendaient d'être indemnisées parfois jusqu'à dix ans; la loi 101 sur la langue française, et le zonage agricole. Et, force est de constater que ces trois mesures populaires, à bon titre, sont en train de se faire donner des coups de hache par le gouvernement libéral. On pige à toutes sortes de fins dans l'assurance automobile: pour financer les services ambulanciers, pour financer la Régie de l'assurance-maladie et,

maintenant, pour financer, dit-on, la voirie, mais, en réalité, pour le mettre dans le fonds. Quant à la loi 101, bien, le gouvernement a poussé le cynisme jusqu'à financer Alliance Québec pour contester la loi 101. Et, quant au zonage agricole, M. le Président, on sait qu'à Laval et ailleurs les Tommy D'Errico et Alex Kotler demandent leur part et que le zonage agricole aussi est en danger.

Je crois donc, M. le Président, qu'on devrait permettre à ce Parlement de faire le tour de l'ensemble des trois projets de loi que le gouvernement ne veut pas discuter à fond: les heures d'ouverture, projet de loi qui est fait pour les grands intérêts du commerce et au détriment des 400 000 personnes qui en tirent leurs revenus; celui sur les taxes scolaires qui vont doubler, et, dans certains cas, tripler et, enfin, celui de l'assurance automobile où on se prépare à "holduper" un fonds, une régie qui a donné de bons résultats afin de financer les activités du gouvernement.

Je crois, M. le Président, que les parlementaires de l'autre côté ne devraient pas courir en masse...

Le Président: Un instant. Une question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Le temps de parole du député est écoulé et je ne crois pas qu'on soit obligés d'en souffrir plus, M. le Président.

Le Président: non, il reste encore une minute au temps de parole du député de pointe-aux-trembles.

M. Bourdon: M. le Président, je pense que les ministériels devraient avoir l'instinct moins grégaire que les mineurs de Roumanie et ne pas courir au secours du ministre des Transports. Merci.

Le Président: Nous allons poursuivre maintenant avec l'intervention de Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Le député de Pointe-aux-Trembles a raison. Trois bâillons en trois jours. Trois jours qui ne sont pas consécutifs, mais trois jours de session, les trois précédents. M. le Président, c'est certainement un championnat et il faut certainement mettre longtemps pour essayer de retrouver un précédent semblable dans cette Assemblée.

M. Jolivet: Je n'en connais pas. (20 h 40)

Mme Harel: M. le Président, c'est d'autant plus inquiétant que, cette fois-ci, la loi 50 qui est devant nous, il n'y avait pas d'urgence à la faire adopter. C'est une loi fiscale et, comme toutes les lois fiscales, elle aurait très bien pu être adoptée l'automne prochain. De toute manière, le gouvernement avait déjà, en 1986 et en 1987, créé des précédents en siphonnant la caisse d'assurance automobile et il sait très bien qu'il avait, d'une certaine façon, abusé de la situation avec des bons motifs, à l'époque, en 1986. Il s'agissait d'aller chercher 100 000 000 $ pour compenser les frais encourus par l'hospitalisation des victimes d'accidents de la route.

Ces 100 000 000 $, M. le Président, en 1986, ils ne couvraient pas les accidents pour l'année. Le gouvernement avait cru bon d'aller chercher 40 000 000 $ rétroactifs sans s'expliquer plus amplement. C'est ce dont il avait besoin comme liquidité et il est allé, en 1986, chercher 40 000 000 $ pour des années antérieures et 60 000 000 $ pour l'année en cours et l'année à venir. Il récidivait en 1988 avec 228 000 000 $; ça faisait déjà un total de 328 000 000 $, tout ça, là. À ce montant qu'il est allé siphonner dans la caisse d'assurance automobile, il ajoute maintenant ce qu'il faut pour aller payer de l'asphalte sur les routes et puis les coûts du transport ambulancier.

Quand je pense à cette caisse d'assurance automobile et quand j'entendais mon collègue de Lac-Saint-Jean parler d'un "hold-up", littéralement du "hold-up" que le gouvernement faisait dans cette caisse, je lui donnais raison et je pensais à Mme Payette, marraine de cette caisse d'assurance automobile, et à tous les quolibets qu'elle a dû supporter dans cette Chambre, avec une Opposition qui était farouchement et obstinément contre la constitution et la création de cette caisse d'assurance automobile pour les victimes d'accidents d'automobile, M. le Président, parce que rappelez-vous toute la campagne d'information pour essayer de contrer la campagne de diffamation qui avait semé un peu de méfiance dans la population. Cette campagne disait: "La personne avant toute chose." C'était ça, la campagne pour créer la Régie de l'assurance automobile et la caisse d'assurance automobile. "La personne avant toute chose."

Qu'est-ce qui est advenu, M. le Président, de la personne avant toute chose? Je constatais que la Régie, pour l'an passé, en 1989, avait réalisé un excédent de 336 000 000 $ de ses revenus sur ses dépenses. La Régie n'a pas le droit de faire des profits, elle fait des excédents. 336 000 000 $ et, si cet excédent avait été retourné aux 3 700 000 propriétaires de véhicules automobiles du Québec, cela se serait traduit par une diminution du coût des plaques de 100 $ pour chaque véhicule. Vous vous rendez compte, M. le Président, que, cotisant à une caisse d'assurance, les assurés auraient dû bénéficier de ses excédents.

En 1988, le rapport indique que la Régie déclarait des revenus de 900 000 000 $ et des dépenses de 829 000 000 $ et qu'elle avait

récupéré 265 000 000 $ par redressement de sa réserve actuarielle. C'est que, dès le départ, dès sa création, la Régie de l'assurance automobile a été ainsi conçue qu'elle n'a jamais été, sauf dans les années 1982-1983, les années de crise économique les plus difficiles avec les taux d'intérêt de 21 %, 22 % qu'on a connus... Sauf durant ces années 1982-1983, la Régie a toujours été administrée de façon à pouvoir faire des excédents qu'elle devait retourner, comme une caisse d'assurance constituée pour le bénéfice des assurés doit retourner les avantages aux assurés.

C'est très dangereux, ce que fait le gouvernement, M. le Président, très dangereux, parce que nos concitoyens avaient confiance dans leur caisse d'assurance jusqu'à tout récemment. Vous allez me dire que ce n'est pas qu'à Québec, il y a Ottawa aussi. La caisse d'assurance-chômage est en train de connaître la même ponction, le même siphonnage, pour des bons motifs, prétend le gouvernement, mais le bon motif étant surtout celui de camoufler un gouvernement qui n'ose pas donner le portrait de la situation réelle à la population et qui n'ose pas dire clairement que des hausses de taxes sont nécessaires dans les circonstances, et qu'il le fait indirectement.

Alors, comment procède-t-on? Nos concitoyens avaient confiance dans des caisses dans lesquelles ils cotisaient, indépendamment des impôts qu'ils payaient au fonds consolidé. Parce que les impôts, les gens pensent souvent que ça s'en va là où on ne sait pas trop à quoi ça sert; ils ont souvent l'impression que ça sert surtout à payer des dépenses "fashionables" et, parfois, ils ont l'impression que ça sert à bien d'autres choses qu'à ce qui est utile pour la société, tandis qu'il y a peu de mécontents à l'égard de ce qui leur est pourtant réclamé pour payer l'assurance-maladie, pour payer la Régie des rentes ou pour payer des caisses dont ils savent qu'un jour ils pourront avoir besoin soit pour obtenir un fonds de pension soit pour payer leur hospitalisation. Ils savent que ce sont là des caisses sur lesquelles le gouvernement ne devrait pas faire main basse.

Dans ce sens-là, ce que j'espère toujours, c'est qu'une fois au gouvernement nous ayons, nous, de ce côté de la Chambre, la responsabilité, le sens des responsabilités pour mettre sur pied une caisse de la petite enfance et de la maternité pour offrir aux Québécoises un vrai congé de maternité. Et je me dis que c'est une façon de garantir, de sécuriser nos concitoyens, qu'en mettant de l'argent dans ces caisses, ça retourne à l'ensemble de ceux et celles qu'on prétend faire bénéficier de ces caisses, et non pas pour des fins détournées. Que ça ne soit pas utilisé par le gouvernement sans qu'on sache trop à quoi ça peut servir. Et c'est ça l'inquiétude, une inquiétude qui est d'autant plus importante que le gouvernement se sert d'une caisse d'assurances comme si c'était une banque, comme s'il pouvait y piger sans que ça ait des conséquences.

Ça a des conséquences, surtout que ça diminue les services qui sont offerts aux personnes qui cotisent pourtant et qui, lorsqu'elles sont victimes de la route, devraient compter sur une Régie de l'assurance automobile qui soit de leur côté.

Quand vous pensez que, durant la commission parlementaire qui étudiait les crédits du ministère de la Main-d'?uvre et de la Sécurité du revenu, le juge Poirier, président de la Commission des affaires sociales, est venu nous expliquer qu'il fallait au moins 12 mois pour qu'un accidenté de la route qui fait appel devant la Commission des affaires sociales soit entendu. Le Protecteur du citoyen non seulement déplore, mais désapprouve ces délais jugés déraisonnables, désapprouve cet embourbement. Et le Protecteur du citoyen disait, d'ailleurs: Comment faire accepter à un accidenté de la route que son appel ne pourra être entendu avant au moins un an, sans compter le délai probable additionnel de trois mois pour que la décision soit rendue et ensuite communiquée? On sait, d'autre part, que la décision en révision a pu déjà exiger plusieurs mois d'attente après cette première décision. Et le Protecteur rappelait qu'en créant des tribunaux administratifs, comme l'est la Commission des affaires sociales, le législateur, le Parlement prétendait simplifier la procédure, réduire les coûts pour la victime et en venir à une décision plus rapide. Ce n'est pas le cas, M. le Président.

Vous vous rendez compte? Au moins un an et demi avant d'avoir une décision! Et pendant ce temps-là, la victime de la route ne peut obtenir aucune indemnité. Pendant ce temps-là, le gouvernement va piger dans la caisse constituée par les cotisants, sous prétexte qu'il y a des excédents, sans donner les ressources suffisantes à la Commission des affaires sociales pour faire en sorte que les victimes de la route ne soient pas pénalisées. C'est extrêmement déplorable. Le gouvernement ne choisit pas, bien évidemment, la bonne façon pour se faire respecter des citoyens. Et c'est avec toute l'opposition dont on est capables qu'on va évidemment en appeler à l'opinion publique du Québec contre des lois semblables. Je vous remercie.

Le Président: Alors, je cède maintenant la parole à M. le député de Rouyn-Noranda-Témis-camingue. (20 h 50)

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président. Oui, il est du devoir impératif de tout député de l'Opposition et j'imagine que, s'il n'y avait pas cette ligne de parti aussi dure chez la majorité ministérielle... Il est du devoir d'intervenir sur cette motion, cette troisième motion sur un troisième projet de loi qui nous amène à imposer

le bâillon aux parlementaires et à l'Opposition officielle, parce que l'Opposition a bien analysé, bien regardé ce projet de loi sur la réforme de la Régie de l'assurance automobile.

Essentiellement, c'est une réforme qui vise à aller piger dans la caisse. Lorsque, personnellement, j'ai été amené à regarder ce projet de loi, il m'est immédiatement venu à l'esprit que jadis, au tournant des années 1987-1988, comme administrateurs d'une université, nous avions été amenés à constater que, dans le fonds de pension des employés de l'Université du Québec, qui est une forme de mutuelle, nous avions des surplus actuariels, pas des surplus comptabilisés, mais des surplus actuariels d'une vingtaine de millions. Alors là, dès le moment où on constate des choses comme cela, comme on peut le constater à la caisse de la Régie de l'assurance automobile, il y a bien sûr tout de suite une question qui se pose, ou une tentation qui nous arrive: Nous pourrions prendre ces quelque 20 000 000 $, dans le cas d'un fonds de pension, et l'affecter à l'amélioration de telle partie du réseau. Nous pourrions l'utiliser pour réduire un certain nombre d'endettements qu'avaient des institutions du réseau. Nous aurions pu l'utiliser, en quelque sorte, à d'autres fins, mais, après cinq minutes, mais cinq minutes de réflexion, nous nous sommes bien aperçus qu'une mutuelle qui crée un fonds de pension, ça appartient à qui? Ça appartient aux cotisants et, à cet égard, après consultation, il fallait retourner aux gens qui ont contribué à ce fonds leur propre argent, leur propre surplus, parce que, en fait, une compagnie d'assurances, une mutuelle, un fonds collectif que l'on constitue, c'est toujours à partir d'un certain groupe que l'on couvre, à qui l'on dit: Si nous nous donnions tel régime de sécurité, si nous nous donnions tel régime de couverture, si nous nous donnions tel régime d'avantages pour protéger notre retraite, pour nous protéger en cas de difficultés, d'accidents ou de dommages corporels, dans le cas de la Régie de l'assurance automobile du Québec. On se donne ce service et on se dit: Si nous sommes, comme dans le cas de la Régie de l'assurance automobile, assez prudents, si nous prenons un certain nombre de mesures de sécurité, nous en arriverons à abaisser le prix de ce que nous allons payer, chacun et chacune, au niveau de ce régime universel.

C'est un peu ce qu'ont fait les Québécois et les Québécoises, de façon telle qu'au niveau des primes, au niveau des cotisations que nous avons accepté de payer, de mettre dans la caisse, nous sommes arrivés un bon matin avec un surplus dans cette caisse-là. Là, la tentation est arrivée du côté du gouvernement. Qu'est-ce qu'on pourrait bien faire avec ce surplus qui s'est accumulé à la Régie de l'assurance automobile du Québec? On s'est bien aperçu aussi que le nouveau gouvernement qu'on avait formé en septembre, avec un nouveau ministre affecté aux transports... Lui, en examinant ses dossiers, s'est bien aperçu qu'on l'avait poussé dans un traquenard. On l'avait affecte à un poste où d'autres auparavant, en période électorale, où auparavant d'autres ministres responsables de ce secteur avaient pris plein d'engagements, avaient fait plein de promesses, avaient dit que l'on compléterait ou qu'on réaliserait un certain nombre d'améliorations sur le réseau routier, sans vérifier si l'argent était dans la caisse générale des revenus du gouvernement du Québec ou bien si nous aurions le courage, dans le gouvernement, de dire à l'ensemble de la population: Voyez-vous, nous pensons qu'il faut rénover une bonne partie de notre réseau routier et, pour cela, nous allons vous proposer un réaménagement fiscal. Nous allons vous proposer d'augmenter, s'il le faut, les revenus du fonds consolidé du Québec pour nous permettre de nous donner un réseau routier qui ait de l'allure.

Non, ce n'est pas cela qui s'est passé. Ce n'est pas cela qui s'est passé. On est allés du côté de la Régie de l'assurance automobile et on a mis la main, on a fait main basse sur la caisse. Cet argent appartient à ceux et celles qui cotisent, et qui cotisent en vertu d'une loi qui leur dit qu'essentiellement ces cotisations vont servir à payer des dédommagements à ceux et à celles qui auraient des accidents, qui auraient des dommages corporels au cours de leur vie, comme ça peut arriver à tout le monde au niveau de la circulation automobile. Alors on leur dit: On va faire un détournement de la caisse. Et c'est ça qui est inacceptable, que l'on dise à une population: Voyez-vous, l'objet pour lequel nous avons créé cette caisse est maintenant détourné et on va faire autre chose avec. Et ce que ça veut dire aussi, c'est qu'au moment où on aura besoin de ces surplus, qu'on aura besoin de ces sommes que nous avons amassées dans cette caisse de la Régie de l'assurance automobile du Québec, eh bien on augmentera les cotisations, on augmentera le coût des permis de conduire, on augmentera le coût de la prime au niveau de l'assurance automobile, ce qui nous permettra, un an plus tard ou quelques mois plus tard, à l'occasion d'une déclaration budgétaire, de dire: Voyez comme nous sommes de bons gestionnaires. Nous vous présentons un budget sans augmentation d'impôts. Comme ça a été fait cette année par le ministre des Finances.

L'Opposition a été très rapide à découvrir et à dénoncer le subterfuge. Nous avions, en fait, toute une série de taxes déguisées: refiler aux commissions scolaires une partie des responsabilités jusqu'ici assumées par le ministère de l'Éducation; refiler par Hydro-Québec, par la facture d'électricité, un certain nombre d'augmentations qui font en sorte que ça va coûter plus cher encore aux consommateurs. Et là on arrive rapidement à l'assurance automobile en disant: Là-dessus, nous allons aller piger dans votre caisse pour permettre de rénover les

routes. Et encore, s'il y avait au moins un plan d'amélioration du réseau routier. Dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue, avec mon collègue d'Abitibi-Ouest, nous sommes en mesure de constater que non seulement on va piger dans notre caisse, mais qu'il ne se fera pas de travaux. Allez voir les nombreuses voies publiques des nombreuses communautés rurales de la région de l'Abitibi-Témiscamingue et vous arriverez, comme un député de la majorité ministérielle l'a dit, il y a trois ou quatre ans... Maintenant, il y a seulement 11 % de notre réseau qui est pavé et, cette année, aucun travail ne sera réalisé sur le réseau rural parce que ce gouvernement a décidé qu'il fallait d'abord payer à même la caisse commune les arrérages, les promesses qui avaient été faites. Non seulement, donc, on y va au niveau de la caisse commune, mais on n'a même pas de travaux à réaliser quant à l'amélioration du réseau routier dans les régions rurales du Québec.

Détournement, subterfuge, ministre placé dans une situation de traquenard et, pour faire tout cela, on dit: Finalement, vous autres, de l'Opposition, vous n'avez pas le droit, en quelque sorte, d'être les porte-parole d'au-delà de 40 % de la population et de dénoncer, de dire ouvertement ce qui est en train de se passer au sein de ce Parlement. Non, la méthode la plus simple, c'est d'invoquer la mesure du bâillon et de dire: Nous, on n'aime pas entendre ce que vous êtes en train de dévoiler au public et, là-dessus, nous allons vous imposer cette mesure. Alors, c'est tellement vrai que les parlementaires de ce côté-ci vont accepter de travailler bien au-delà des heures normales et faire en sorte que la population sache le détournement auquel on est en train de se livrer et que nous n'acceptons pas de ce côté-ci, M. le Président. (21 heures)

Le Président: Je vais maintenant reconnaître Mme la députée de Verchères, pour la prochaine intervention sur cette motion présentée par le leader adjoint du gouvernement. Mme la députée de Verchères.

Mme Luce Dupuis

Mme Oupuis: M. le Président, le Parti libéral a combattu avec acharnement la réforme de l'assurance automobile, en 1977. On se rappelle tous, lorsque Mme Payette l'avait soumise, quelle bataille les libéraux ont livrée pour empêcher justement l'adoption d'une loi sur l'assurance automobile.

Aujourd'hui, ce même parti s'autorise le droit d'aller vider les caisses qui avaient accumulé des surplus. En vidant les caisses, M. le Président, il dévie, il oublie, il ignore les fonctions premières pour lesquelles l'assurance automobile avait été créée: d'appliquer le régime d'indemnisation des victimes de dommages corporels; d'appliquer le régime de compensation des dommages matériels; d'appliquer le Code de la sécurité routière; de promouvoir la sécurité routière. Si on les prend un à un, M. le Président, indemniser les victimes de dommages corporels. On a tous vu, dans nos comtés... Depuis un an, j'ai vu au moins 10 cas de victimes d'accidents d'automobile, M. le Président, qui ont de la difficulté à se faire payer. Il y a même un cas, c'est quasiment pathétique. Il est en chaise roulante, il passe examen par-dessus examen. On dit que ce n'est pas à cause de ça, mais il reste que cette personne-là, avant d'avoir un accident d'automobile, était un père de famille, bien installé, qui avait un maison et qui faisait vivre sa famille. Il a un accident. Que les médecins disent ce qu'ils voudront, il reste que, depuis son accident, cet homme-là est en chaise roulante et en béquilles. Il passe des béquilles à la chaise roulante, en plus des séances de thérapie.

Une autre des fonctions, c'était la sécurité routière, justement injecter des fonds pour faire des bonnes études, amener plus de sécurité sur nos routes du Québec et promouvoir les moyens de sécurité routière, dont la ceinture. Je veux bien qu'on mette une amende, mais, si on avait mis peut-être un petit peu plus d'argent dans la promotion, pour convaincre, peut-être que ça aurait coûté un petit peu moins cher en amendes aux assurés, aux conducteurs d'automobiles, mais ça aurait rempli un peu moins les coffres que le Parti libéral veut utiliser maintenant.

Donc, on voit que les fonctions pour lesquelles était destinée l'assurance, c'était à des motifs humanitaires. On fait fi de ça, comme on le voit aussi dans d'autres projets de loi qui ont été bâillonnés. Et là, ces motifs humanitaires ont été changés, M. le Président, pour construire des routes, si elles sont construites. Lorsqu'on voit les budgets qui sont alloués pour la réfection des routes, on se demande si vraiment ça va être utilisé à cette fin.

Première erreur, je pense, la loi en elle-même, et on voit que c'est une constante des politiques du Parti libéral, M. le Président, de complètement oublier le côté humanitaire. On le voit aussi dans les heures d'affaires; il a complètement oublié la qualité de vie, même si c'est inscrit dans les trois principes. On voyait, dans les faits, en étudiant le projet de loi, que le côté humanitaire était complètement délaissé. Vous allez me dire que c'est humain, vous, de demander aux femmes de travailler de 8 heures le matin à 23 heures, sept jours par semaine ou presque? C'est à peu près l'équivalent de ça. On va me dire que c'est humain de tout mettre en oeuvre pour faire crever le petit commerçant, avec aucun respect? On voit que tout a été dirigé pour amener à une libéralisation totale. On sait très bien que, là, c'est les gros qui vont bouffer les petits, ça ne sera pas long. Encore là, côté humanitaire complètement négligé, M. le

Président.

Et là ça m'amène aux moyens qu'ils ont utilisé pour voter leur loi après treize heures de débat seulement; de débat, non pas un débat où on lisait le Journal de Montréal et des choses comme ça, là. Un débat, je pense, bien structuré, un débat où on présentait des motions pour réentendre des gens qui avaient déjà été entendus, c'est vrai, mais qui n'avaient pas vu le projet de loi et, lorsqu'ils l'ont vu, n'étaient plus d'accord avec et on voulait les ramener à réécouter ça pour que le ministre prenne conscience de l'erreur qu'il faisait. Et là, on le voit dans les trois projets de loi. Un coup de force! Moi, on m'a toujours dit, M. le Président, qu'un coup de force pareil, lorsque les gens qui ont le pouvoir l'exercent avec autant d'autorité, avec autant de force, dénotait un signe de faiblesse. Lorsqu'on n'arrive pas à convaincre par des arguments valables et convaincants une population ou des intervenants du bien-fondé, on l'applique avec force.

Je pense que je n'apprends rien à personne en disant que, lorsqu'on applique avec autant d'autorité, ça dénote de la faiblesse, M. le Président. Un manque de respect dans l'Opposition démocratiquement élue, un manque de respect de la démocratie. Lorsqu'on ne respecte pas les élus, lorsqu'on ne respecte pas nos institutions démocratiques, il y a d'autres moyens et, si la démocratie ne s'exerce pas dans notre Parlement, ce qui va arriver, M. le Président, tout le monde le sait, c'est dans la rue que ça va s'exercer. Je pense que là, le gouvernement réalisera que les moyens qu'il a utilisés pour bâillonner, ça a été une grave erreur. Mon collègue, le député de Saint-Jean, disait que, oui, on en a fait, nous aussi, des erreurs et on a payé pour et on a eu la facture et le public ne s'est pas gêné pour le dire. Eux aussi, ils vont avoir la facture. On ne peut pas bafouer la démocratie à ce point. On ne peut pas bafouer une majorité. On ne peut pas faire fi des opinions d'une majorité sans qu'un jour ou l'autre on en paie la facture. Mais ce que je déplore le plus dans cette attitude, dans ces politiques, c'est que tous les moyens sont bons lorsqu'il s'agit d'argent au détriment, ça c'est constant, du côté humanitaire, du côté humain, et on en a la preuve concrète dans la loi qui s'apprête à être votée, la loi 50 sur l'assurance automobile; de l'argent qui était destiné à des victimes de l'assurance automobile est injecté dans les routes. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président: Alors, je cède maintenant la parole à Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.

Mme Denise Carrier-Perreault Mme Carrier-Perreault: Merci, M. le Prési- dent. J'ai entendu mes collègues qui sont venus témoigner ici, à tour de rôle, leur indignation face à cette motion de clôture, ce bâillon qui nous est appliqué, sans pour autant nous avoir démontré qu'il y avait urgence, car on nous a expliqué, M. le Président, que pour appliquer une motion de clôture, un bâillon, c'était quelque chose qui était possible effectivement, mais qu'il fallait qu'il y ait urgence. C'est le troisième bâillon en une semaine dans la même session, du jamais vu, semble-t-il! (21 h 10)

Tout ce que notre gouvernement nous démontre, M. le Président, c'est son arrogance et son mépris envers la population et envers l'institution démocratique qu'est le Parlement. En agissant ainsi, le gouvernement nous dit qu'il est le seul à avoir le pas. Il ne veut pas discuter, ne veut pas consulter. Il ne peut, en fait, se remettre en question. Il est vraiment le seul à avoir le pas et à posséder la vérité, alors, il décrète. Ce n'est pas exactement l'image que j'avais de la démocratie, M. le Président. À mon avis, ça ressemble beaucoup plus à de la dictature.

C'est un fait que l'Opposition a essayé, par plusieurs moyens, par les moyens mis à sa disposition, de faire réfléchir le gouvernement sur la portée de ce projet de loi. D'abord, il y a eu une motion de scission parce que notre désaccord et nos inquiétudes face à ce projet de loi ne portent pas nécessairement sur l'ensemble du projet de loi, mais sur une partie bien précise et c'est sur le "hold-up" ou sur ce qu'on a appelé le siphonnage de la caisse des assurés, la caisse de la Régie de l'assurance automobile. C'est sur le paragraphe qui nous dit: "De plus, ce projet donne suite au discours sur le budget en prévoyant que la Société verse au fonds consolidé du revenu, pour l'exercice financier 1990-1991 du gouvernement et pour les quatre exercices financiers subséquents, une redevance aux fins d'immobilisations en matière de sécurité routière dont le montant et la périodicité des paiements sont fixés par la loi."

Non seulement on va aller chercher de l'argent pour cette année, mais on va même aller chercher de l'argent pour les années subséquentes, M. le Président. Alors, nous avions demandé ici, en cette Chambre, une motion de scission pour au moins essayer de voter sur les parties où on était d'accord et pour pouvoir discuter des parties où notre désaccord portait. Cette motion de scission a été refusée, comme on le sait. Alors, l'Opposition officielle a demandé une motion de report. Le gouvernement ayant refusé la motion de scission, nous avons demandé de le reporter de six mois, M. le Président, pour que l'on puisse y réfléchir et consulter davantage. Encore une fois, refus du gouvernement. J'étais membre, M. le Président, de la commission de l'aménagement et des équipements où on a essayé de débattre - je dis bien "essayé de

débattre" parce que, finalement, on n'a pas eu de réponse, M. le Président. En fait, les seules réponses qu'on a eues, c'est plutôt dans le genre: Si vous ne voulez pas qu'on passe le projet de loi, vous n'aurez pas vos routes dans vos comtés. On nous a fait des menaces, si on veut. On n'a pas vraiment eu de réponse face aux questions et aux interrogations que l'on se posait.

On a eu beau demander à rencontrer des groupes, on n'a pas été tellement longtemps non plus parce que, après treize heures, le gouvernement a décidé de nous appliquer une motion de clôture et de nous bâillonner. Il ne voulait plus en entendre parler, il ne voulait pas consulter, alors c'était clair, on n'en parlait plus et on passait au plus vite le fameux projet de loi.

Bien sûr, on a demandé des consultations particulières, M. le Président, avec différents groupes, des groupes qui étaient vraiment concernés, qui auraient pu nous apporter un éclairage intéressant par rapport à ce projet de loi, qui auraient pu aussi répondre à certaines de nos interrogations. On a parlé du Vérificateur général. On a demandé de parler au Vérificateur général. Le Vérificateur général est probablement une des personnes désignées qui aurait pu nous émettre un avis avant de passer le projet de loi. On m'a appris qu'il valait mieux prévenir que guérir, alors nous autres, on pensait que faire venir le Vérificateur général pour avoir un avis de sa part, c'eût été intéressant. Non! C'a été refusé, ça aussi.

On a eu beau en appeler, on a appelé pour plusieurs groupes qui étaient concernés: l'Association des accidentés de la route. Est-ce qu'il y a un groupe plus concerné que l'Association des accidentés de la route? On parie bien d'un projet de loi qui vide les caisses de l'assurance automobile. Alors, les accidentés de la route, quelque part, sont très concernés. On pensait qu'ils pourraient nous apporter aussi des détails et nous donner vraiment leur vision des choses quant à ce projet de loi. Non plus. Un refus total de la part du gouvernement. On ne veut pas les voir, les accidentés de la route. C'est bien évident que c'est difficile. Probablement que ça prend du courage pour recevoir les accidentés de la route. Quand on vient leur enlever des millions, 877 000 000 $ en cinq ans, c'est vrai que ça prend un certain courage. Mais le gouvernement n'a pas eu ce courage-là. On a refusé tout simplement de rencontrer l'Association des accidentés de la route.

On a demandé de rencontrer le Protecteur du citoyen, M. le Président. Le Protecteur du citoyen, c'est quelqu'un qui est bien placé pour nous donner un éclairage. C'est quelqu'un qui reçoit des plaintes par rapport à l'institution, quelqu'un qui règle des plaintes aussi, parce qu'on sait que le Protecteur du citoyen réussit à régler 99 % des plaintes, à peu près. Ça veut dire qu'il aurait eu quelque chose à dire, le Protecteur du citoyen. Encore là, pas question.

Le Protecteur du citoyen, comme les autres, pas question qu'on consulte cette personne avant de passer le projet de loi.

On a demandé aussi de rencontrer l'ANCAl, l'Association des camionneurs artisans qui est dans les problèmes jusqu'au cou présentement, si on peut s'exprimer ainsi. Pas du tout. Pas question. C'est sûr qu'ils ne sont pas de bonne humeur après le gouvernement et, encore là, j'imagine que ça prend un certain courage pour recevoir une association qui est déjà plus ou moins bien disposée. Mais c'eût été intéressant, ces gens-là paient très cher pour rouler sur les routes.

On a demandé aussi de rencontrer la Fédération des femmes du Québec et la Fédération de l'âge d'or parce que la Fédération des femmes du Québec et la Fédération de l'âge d'or représentent des gens qui ont été très touchés par la loi 92 qui a été mise en application en janvier dernier. Pas du tout. On ne voyait pas, le gouvernement ne voyait pas la pertinence de consulter ces groupes parce que le gouvernement a raison et il ne peut pas souffrir, il ne peut pas entendre des gens qui pourraient lui dire: Attention! Le gouvernement est sûr d'avoir raison.

Enfin, treize heures plus tard, on s'est fait dire que c'était fini, qu'on ne pariait plus, qu'il y avait une motion de clôture, comme pour les deux autres projets de loi. Ça fait trois. Ça fait qu'on ne parle plus, on vient de clore le bec, si on veut, a l'Opposition et, par le fait même, on vient de clore le bec à la population parce que l'Opposition ici en cette Chambre représente aussi la population, fait son travail d'opposition et est supposée être là aussi pour faire réfléchir le gouvernement avant qu'il n'y ait des erreurs trop graves qui se produisent.

Je voudrais aussi vous rappeler, M. le Président, un peu pourquoi l'Opposition s'oppose au projet de loi 50. Il faut se rappeler que la réforme de l'assurance automobile, en 1977, qui a donné naissance à la Régie de l'assurance automobile, a été le résultat de plusieurs années de réflexion au Québec. C'est le Parti québécois qui a eu le courage, à l'époque, d'entreprendre cette réforme. On se rappelle tous que l'Opposition libérale, au projet de loi présenté par Mme Payette, était tout à fait déchaînée face à la réforme de l'assurance automobile. Je pense qu'ils sont encore contre aujourd'hui parce que, à regarder ce que ça va donner comme résultat, on se demande ce qui pourra rester des caisses de l'assurance automobile quand tous ces prélèvements ou ces vols - appelons-les par leur nom - auront été effectués.

Pourtant, le régime d'assurance automobile, M. le Président, le régime québécois est cité en exemple dans plusieurs pays du monde. Il est démontré que c'est une réussite et un des faits marquants du régime du Parti québécois. Cette réforme avait un objectif, en fait, visait cinq

objectifs, mais, très clairement, devait permettre aux assurés d'obtenir de meilleures indemnités au meilleur prix possible.

Une minute? Ça m'a coupé mon erre d'aller, M. le Président. En tout cas!

De toute façon, c'était une réforme importante qui a très bien réussi puisqu'on sait maintenant que la Régie de l'assurance automobile est non seulement rentable, mais qu'elle a des sous en caisse. Et le gouvernement libéral, s'étant rendu compte qu'il y avait des sous à aller chercher, nous fait accroire que c'est pour faire des routes, alors que c'est bien écrit que c'est pour aller dans le fonds consolidé et que le porte-parole de l'Opposition officielle a démontré clairement qu'il n'y avait pas un sou de plus pour les routes. C'est louable, faire des routes, M. le Président, mais pas avec l'argent des assurés, pas avec la caisse de la Régie de l'assurance automobile.

Enfin, M. le Président, je conclurai en vous disant que cette motion de clôture est une erreur, ce projet de loi est une erreur...

Une voix:...

Mme Carrier-Perreault: bien, le gouvernement aura sûrement à rendre des comptes à la population et devra vivre avec ses erreurs. merci, m. le président.

Le Président: Je reconnais maintenant M. le député de Ouplessis. (21 h 20)

M. Denis Perron

M. Perron: M. le Président, encore une fois, depuis maintenant près de cinq ans, l'Opposition du Parti québécois est brimée dans ses droits de parlementaires et de défenseurs de la population du Québec qui ne peut pas s'exprimer en cette Chambre. Nous avons devant nous, M. le Président, une motion qui fait en sorte d'empêcher les parlementaires de continuer à parler de l'assurance automobile, d'empêcher les parlementaires de le faire en commission parlementaire et de le faire aussi, en quelque sorte, sur la place publique. On dit - par cette motion, on s'adresse à l'ensemble des députés de l'Opposition - au député de Laviolette: Dorénavant, sur la question de la loi 50, sur la question de l'avenir de cette législation, sur les droits des citoyens et des citoyennes du Québec face à l'assurance automobile, vous n'avez plus le droit de parole.

On dit à la députée de Johnson exactement la même chose, M. le Président. On dit aussi au député d'Abitibi-Ouest exactement la même chose et à l'ensemble des députés de cette Chambre: Dorénavant, on vous clôt le bec, vous n'avez plus voix au chapitre, vous n'avez plus rien à dire face à ce projet de loi qui concerne l'assurance automobile du Québec.

M. le Président, c'est vraiment déplorable de voir l'attitude de ces rouges que nous avons en face de nous. J'ai eu l'occasion, d'ailleurs, en fin de semaine de vivre la présence, dans le comté de Duplessis, de deux bons rouges de ce Parlement libéral. Ce que je peux vous dire, M. le Président, c'est que c'est déplorable de voir ces personnes faire des promesses, encore une fois, en région, et ne pas les faire ici, à l'Assemblée nationale, non, pas trop, trop parce que ce serait écrit dans le Journal des débats, mais s'en venir faire des promesses comme elles le font ici, devant cette Assemblée nationale, face à la récupération des dollars qu'elles vont chercher dans la caisse de l'assurance automobile pour supposément investir sur les routes du Québec. Je vais vous en parler, M. le Président, tout à l'heure.

Parce que l'Opposition défend les intérêts de la population du Québec, des populations régionales du Québec, on décide de déposer une motion de clôture, une motion de bâillon. La guillotine, comme on dit dans le jargon. Et ce n'est pas la première fois que l'on voit ce gouvernement agir de la sorte.

Une voix: Guillotiné.

M. Perron: M. le Président, je me souviens très bien - et il ne faut pas oublier que cette devise, c'est la devise du Québec; j'espère que les citoyens et les citoyennes du Québec vont se souvenir de ça lors des prochaines élections - de 1977, quand Mme Payette, qui était la personne en charge de la loi 67 sur l'assurance automobile, avait comme slogan, avait comme principal motif, dans ce projet de loi et dans tous les mémoires qui ont suivi, la personne avant toute chose. Je me rappelle aussi, en commission parlementaire, puisque je faisais partie de cette commission parlementaire, que le Parti libéral s'est acharné contre la passation de cette loi 67. Ce n'était pas pour protéger les citoyens et les citoyennes du Québec, dans le temps. C'était pour protéger les intérêts des compagnies d'assurances et des ténors des compagnies d'assurances. C'était pour défendre les intérêts des mieux nantis de notre société québécoise.

Je me souviens, M. le Président, des insultes qui ont été subies par Mme Payette, lors des commissions parlementaires en particulier, et je dis bien des insultes, qui provenaient du député de Gatineau, qui n'est plus ici en cette Chambre, M. Gratton, qui provenaient aussi de M. Fernand Lalonde, l'ancien député de Mar-guerite-Bourgeoys, qui insultait avec tous les mots, toutes les épithètes nécessaires, Mme Payette et le Parti québécois, en commission parlementaire sur ce projet de loi.

Je me souviens aussi, M. le Président, de l'offre qui avait été faite par le gouvernement du Parti québécois, dans le temps, pour faire en sorte qu'on ait une commission parlementaire

itinérante pour écouter l'ensemble des populations de chacune des régions du Québec. Ça a été un refus catégorique. Non. C'est à ce moment, M. le Président, que l'ancien gouvernement du Parti québécois a décidé de partir et de faire des pèlerinages à travers le Québec pour écouter toutes les personnes et tous les groupes qui voulaient se faire entendre sur le projet de loi de l'assurance automobile, le projet de loi 67.

Je me souviens de tout ça, M. le Président. Je me souviens aussi de toutes ces insultes, non seulement en commission parlementaire, mais aussi en coulisses. J'ai même eu le privilège, si je peux m'exprimer ainsi, de rappeler à l'ordre le député de Marguerite-Bourgeoys en coulisses, parce qu'il s'était adressé à Mme Payette d'une façon déshonorante. Cette loi, M. le Président, qui est actuellement un fleuron de notre législation québécoise, c'a été créé pour le peuple québécois et c'a été créé aussi avec le peuple québécois et, bien sûr, avec la participation du gouvernement du temps, c'est-à-dire le gouvernement du Parti québécois.

Aujourd'hui, on se rend compte que le projet de loi 50 vient faire une ponction énorme dans le fonds d'indemnisation de l'assurance automobile. Et ce n'est pas la première fois, d'ailleurs, que ce gouvernement agit de la sorte, ce n'est pas la première fois. Et je présume, de la façon dont il s'oriente depuis qu'il est au gouvernement, que ce ne sera pas la dernière fois non plus. Parce qu'on peut s'attendre que, tant et aussi longtemps qu'il sera là, il va faire des ponctions dans des fonds d'indemnisation, que ce soit au niveau de l'assurance automobile ou encore ailleurs, quand ce n'est pas dans les poches des citoyens de façon directe ou indirecte. Ce gouvernement, on sait de quelle façon il agit. Comme il ne voulait pas amener des augmentations réelles et directes sur les taxes du Québec, sur les impôts à payer et sur les taxes, ce gouvernement s'est servi d'un fonds d'indemnisation que nous avions pour aller chercher de l'argent pour, supposément, faire autre chose avec. On piège peut-être aujourd'hui la population du Québec, mais l'Opposition du Parti québécois, qui est habituée depuis cinq ans de voir les agissements de ce gouvernement, n'est pas piégée. Et on va voir réellement jusqu'à quand et jusqu'à combien ce gouvernement va faire des ponctions à l'intérieur de notre législation.

Et si c'est actuellement de l'inconnu, quant à l'avenir concernant les agissements du gouvernement libéral, M. le Président, ce que je peux vous dire, c'est que ce n'est pas tout à fait de l'inconnu pour les membres de l'Opposition parce qu'on les voit venir. Et rien ne dit - je mets ainsi en garde l'ensemble des parlementaires - je mets aussi en garde l'ensemble des organismes, des représentants et représentantes d'organismes - rien ne dit que cette habitude du gouvernement libéral ne se répétera pas dans l'avenir.

Et rien ne dit que cette habitude ne fera pas en sorte de ramener le fonds d'indemnisation de l'assurance automobile du Québec, au cours des prochaines années, au minimum pour justement permettre la privatisation de ce que nous avons comme législation québécoise en rapport avec l'assurance automobile. Là aussi, on les voit venir. Et lorsque le Parti libéral du Québec, par le biais de son ministre des Transports ou encore de toutes les personnes - et il n'y en a pas gros qui sont intervenus à date, M. le Président, du côté libéral, il n'y en a pas gros, il n'y en a pas beaucoup - intervient en cette Chambre pour dire: Les quelque 300 000 000 $ qu'on va récupérer, on va les réinvestir dans les routes... Là non plus, on ne croit pas du tout, et en aucune façon, les dires de ce gouvernement libéral ou de quelque représentant libéral que ce soit. Et même si les gens du gouvernement en cette Chambre nous donnaient des garanties à genoux pour dire que ces quelque 300 000 000 $ vont s'en aller dans les régions du Québec, en aucun temps je ne les croirai et en aucun temps l'Opposition du Parti québécois ne croira non plus le gouvernement libéral, en tout cas pas dans Duplessis, sûrement pas dans Duplessis.

Actuellement, dans le budget et au cours des dernières années, on a vu ce que le gouvernement libéral a refusé. Que ce soit dans un dossier qui s'appelle la côte à Vachon, entre Port-Cartier et Sept-îles, que ce soit dans le dossier de Mingan jusqu'à Havre-Saint-Pierre où, soit dit en passant, sur une longueur d'à peu près 20 kilomètres de route on met 500 000 $ en 1990 - 500 000 $, vous imaginez-vous? - lorsqu'on refuse de continuer la route, une route en gravier d'ailleurs, entre Kégaska et Pointe-Parent, pas un rond cette année, lorsqu'on refuse de mettre un sou dans la route qui est déjà commencée, entre Tête-à-la-Baleine en direction de Chevery, pas un sou cette année, et lorsqu'on regarde la même chose qui se passe entre Vieux-Fort et Rivière-Saint-Paul, en Basse-Côte-Nord du golfe Saint-Laurent, on est en droit de se poser de sérieuses questions.

M. le Président, j'en aurais encore à dire, mais je vais terminer sur deux points. Le premier point, c'est qu'il est dérisoire de voir que le ministre délégué aux Transports donne, dans l'ensemble des municipalités, 41 localités du comté de Duplessis, pour l'ensemble de ces localités-là, 142 000 $ - 450 milles de territoire québécois dans le comté de Duplessis - pour le budget de l'amélioration des routes municipales. Dérisoire! Dégueulasse, même! Et la conclusion réelle, le deuxième point, c'est qu'en ce qui me concerne, j'ai toujours gardé ce que disait Mme Payette: "La personne avant toute chose". Mais on se rend compte aujourd'hui qu'en ce qui a trait à l'assurance automobile, c'est "le Parti libéral avant toute chose". Merci, M. le Président. (21 h 30)

Le Président: Je cède maintenant la parole

à M. le député de Shefford.

M. Roger Paré

M. Paré: Merci, M. le Président. Je dois vous dire que, comme parlementaire dans un système démocratique comme celui qu'on connaît ici au Québec, je trouve dommage, je trouve inacceptable qu'on en soit à notre troisième bâillon en trois jours. C'est inacceptable de suspendre les règlements parce que, de l'autre côté, on invoque l'urgence. Je dois dire que de l'autre côté, ce qu'on devrait plutôt invoquer, M. le Président, c'est plutôt la mauvaise planification des travaux, ou bien plutôt la volonté de cacher quelque chose à la population. D'une façon ou d'une autre, c'est inacceptable.

Comment se fait-il qu'en juin nous soyons ici, à 21 h 30, en train de parler de suspension de règlement, alors que la session a débuté au mois de mars? Ça veut dire mars, avril, mai, juin, quatre mois. Et pourtant, dans les mois précédents, mois de mars, mois d'avril et mois de mai, à plusieurs occasions l'Assemblée nationale n'a même pas siégé les heures régulières. Pourquoi? De l'autre côté on n'était pas prêt à apporter les projets de loi. Nous n'étions pas prêts à discuter. Nous n'étions pas prêts à informer la population. On a attendu à la dernière minute pour nous apporter des projets de loi contestés, contestables. Et là, maintenant, on nous dit: II y a urgence.

On n'a jamais vu, dans une session aussi courte, autant de bâillons. Trois dans la même session, ça n'a pas de bon sens. Et on est en train de faire en sorte que cette mesure d'urgence, qui est spécifique et qui le dit en soi: c'est pour être utilisé en cas d'urgence... Danger pour la santé ou la sécurité des citoyens, par rapport à un sinistre, par rapport à une grève illégale, par rapport à une menace à la démocratie. Mais il se passe quoi, ici? Il se passe que le gouvernement est en train de passer des lois qui ne sont pas populaires. Donc, ifs ne veulent pas qu'on en parle pour ne pas informer la population. De l'autre côté, la façon de gérer, c'est plutôt: Ne faites pas ce que l'on dit, parce que même nous, on ne fait pas ce que l'on dit.

Je me rappelle ce qu'on avait dit de l'autre côté: Nous allons légiférer moins, mais nous allons légiférer mieux. Mais la réalité, qu'est-ce que c'est? Légiférer moins et légiférer mieux. Et on avait même dit: II va falloir déréglementer. Les chiffres nous prouvent maintenant que c'est tout à fait l'inverse qui s'est produit depuis cinq ans. 50 % de plus de lois. 100 % de plus de règlements. Imaginez-vous! Le beau discours qu'on a tenu de l'autre côté et la réalité qu'on est en train de nous faire vivre, ici dans ce Parlement. On a doublé les règlements, on a augmenté de 50 % les lois. On a tout fait pour judiciariser davantage les lois et, maintenant, on fait en sorte que la mesure d'urgence, qui est le bâillon, soit utilisée d'une façon courante, régulière, tout à fait normale. C'est ça qui n'est pas normal. C'est ça qui n'est pas acceptable. On doit, nous, parlementaires, avoir le temps nécessaire pour faire tout l'éclairage sur les projets de loi et peut-être que ça vous rendrait service, aux gens du gouvernement. Parce que si vous légiférez plus, contrairement à ce que vous aviez dit, c'est souvent parce que vous légiférez mal, parce que vous ne prenez pas le temps de bien légiférer.

Je pourrais vous donner juste quelques exemples. Au moins quatre lois qui sont discutées présentement dans ce Parlement sont des correctifs à des lois votées à la session précédente ou au cours des sessions précédentes. On est en train de corriger des gestes mal foutus de l'autre côté. Les lois dont je parle, c'est l'adoption internationale. On l'avait dénoncée, ça n'avait pas de bon sens. Pourtant, on l'a votée pareil. Qu'est-ce qu'on est en train de faire? On est en train de la corriger pour l'amender par rapport à ce que nous avions demandé.

Le partage du patrimoine familial, loi votée il y a moins d'une année, ça va faire une année dans quelques jours. On est en train, maintenant, de légiférer pour amener des corrections à cette loi l'année suivante. Et, comme on refuse dans cette loi, entre autres, de répondre aux demandes de beaucoup d'associations, probablement qu'à l'automne ou au printemps prochain on sera encore devant une autre loi pour amener des corrections parce que, présentement, on ne légifère pas bien.

On est en train aussi de regarder une loi sur l'organisation policière. Et, pourtant, on a fait la même chose il y a quelques mois, mais on l'a mal fait. On est en train, encore une fois, de recommencer nos devoirs.

Schefferville est un bon exemple. Une loi pour fermer Schefferville. On avait dit que ça n'avait pas de bon sens. On fait quoi durant la présente session? Une loi pour réouvrir Schefferville. Chapeau, messieurs! Très bonne façon de légiférer. Mon collègue de Duplessis avait raison tantôt.

Le projet de loi qui nous concerne et sur lequel on nous empêche de discuter, c'est le projet de loi 50, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec et d'autres dispositions législatives. C'est très inoffensif lorsqu'on lit ça comme ça, sauf qu'en commission parlementaire, si on avait le temps d'aller jusqu'au bout, de regarder tous les articles, on verrait que ce n'est pas si inoffensif que ça. Et il faut se rappeler, comme le disait mon collègue de Duplessis, la Régie de l'assurance automobile du Québec, créée de toutes pièces par l'ancien gouvernement du Parti québécois, afin de faire en sorte de donner une meilleure protection aux automobilistes, une meilleure garantie de revenu en cas d'accident et des primes moins élevées spécialement pour les

jeunes qui voulaient s'assurer. De l'autre côté, on avait dénoncé ça d'une façon souvent outrageante. Ça n'avait pas de bon sens. Encore une fois, c'est une société d'État, et on est contre.

Mais qu'est-ce qu'on est en train de faire avec ce projet de loi là? On est en train de l'utiliser comme une vache à lait. On est en train d'aller fouiller dans la caisse. On est en train de vider la caisse. Et, sous le beau prétexte de nous donner de plus belles routes... Bon Dieu! Comment nous donner de plus belles routes lorsque les budgets diminuent? Et c'est notre rôle, M. le Président, comme Opposition, de faire sortir la vérité, de montrer que de l'autre côté, le discours et la réalité, ça ne va pas de pair. Ça va plutôt en sens inverse. On vide la caisse. Ça veut dire qu'on pénalise directement tous ceux qui détiennent des permis de conduire, tous ceux qui doivent payer des assurances, l'assurance automobile du Québec. Parce que si on ne vidait pas la caisse, ça voudrait dire que ça nous coûterait moins cher pour s'assurer, moins cher pour les plaques d'immatriculation, moins cher pour les permis de conduire. Le gouvernement a plutôt décidé de continuer à garder les taux élevés de cette société d'État et, ensuite, on entendra probablement de beaux discours de l'autre côté pour s'en prendre justement aux sociétés d'État comme n'étant pas rentables, pas efficaces, pas bénéfiques. Je comprends. Quand on vide la caisse, il risque d'y avoir des problèmes plus tard.

Mais cette société d'État là a fait ses preuves au point où, aujourd'hui, on est en train de vider sa caisse. On dit que c'est pour des plus belles routes au Québec parce que le réseau est dans un état pitoyable. Mais la réalité, c'est quoi? La réalité, c'est 41 % de moins dans le budget de la région du Bas-Saint-Laurent; 40 % dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue; 45 % dans la région de Drummondville-Yamaska; 39 % de moins dans la région Chaudière-Appalaches; 42 % de moins au Saguenay-Lac-Saint-Jean; 54 % de moins en Estrie; 39 % de moins en Mauri-cie-Bois-Francs. On s'aperçoit que dans toutes les régions du Québec if y a moins d'argent pour l'entretien de nos routes, alors qu'on nous fait accroire, dans le projet de loi 50, que l'argent qu'on va aller puiser dans le fonds de la Régie de l'assurance automobile du Québec qui nous appartient à nous tous qui y contribuons... On est en train de siphonner l'argent de la Régie, non pas pour la raison qui est utilisée dans les discours. On utilise de faux prétextes. On n'aura pas de plus belles routes. On n'aidera pas la Régie de l'assurance automobile du Québec, mais on va faire payer les contribuables en leur faisant accroire qu'il va y avoir de plus belles routes.

Dans l'énumération que je viens de faire, M. le Président, on est informés - les chiffres, c'est les chiffres du gouvernement lui-même - que toutes les régions du Québec vont avoir moins d'argent cette année pour être capables d'entretenir les routes, de construire de nouvelles routes. Pourtant, tous ceux qui conduisent, qui doivent s'assurer, qui doivent prendre un permis de conduire, eux autres ne paieront pas moins cher, alors que la Régie est très rentable, a fait la preuve que c'était un choix vraiment formidable du Parti québécois de mettre cette société d'État au service des automobilistes. Mais, maintenant, on est en train de vider la caisse sous de faux prétextes, et c'est ça qui n'est pas acceptable et c'est pour ça que le bâillon est injustifiable. On aurait dû commencer les discussions avant, pour faire tout l'éclairage, sinon on va pénaliser des gens ou on va faire comme on a fait au cours des dernières sessions, on viendra corriger à l'automne des erreurs faites parce qu'on aura voté d'urgence des lois ici, à l'Assemblée nationale. Merci, M. le Président. (21 h 40)

Le Président: Je cède maintenant la parole à M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition.

M. François Gendron

M. Gendron: M. le Président, je vous indique tout de suite que je vais le faire davantage comme leader adjoint, plutôt que sur le fond, parce que si, après 27 interventions de mes collègues sur le fond, les gens d'en face ont toujours la conviction qu'après treize heures ils ont raison, il n'y a rien à faire sur le fond. Donc, moi, j'abandonne.

Mais, sur la forme, M. le Président, je suis obligé de dire haut et fort et sincèrement que c'est vraiment inqualifiable, inadmissible, immoral; c'est du jamais vu. Moi, en quatorze ans, comme leader adjoint, comme leader un bout, comme membre de ce Parlement qui connaît les règles un peu du parlementarisme et l'obligation, dans un Parlement normal, d'avoir des échanges de part et d'autre et de fonctionner un peu plus sur une base de respect de la démocratie, je n'ai jamais vu un fonctionnement de bric-à-brac comme celui-là et je pourrais vous en parler longtemps. À titre d'exemple, et je le disais à un membre de ce gouvernement-là, un senior de ce gouvernement-là, il y a 30 secondes, et ça ne me fait rien de dire ça parce que c'est de même que ça s'est passé, pour la première fois, M. le Président, vendredi dernier, le leader du gouvernement décidait de convoquer notre leader pour regarder sur le feuilleton, pour la première fois, l'immense nombre de projets de loi qui ne sont même pas encore adoptés au niveau du principe et, normalement, dans quatre, cinq jours, on devrait finir une session dans la normalité.

La véritable raison pour laquelle ces gens-là ont dit: C'est fini, il n'y a plus d'Opposition, nous sommes la voie, la vérité, nous nous déguisons en exécutif, c'est l'absence totale de

planification; l'absence de respect, l'absence de responsabilité, l'absence de compréhension des valeurs du véritable parlementarisme.

Un Parlement, surtout en fin de session, ça ne peut pas marcher comme un gouvernement, comme si c'était un exécutif. Nous sommes à l'Assemblée nationale, c'est long et ça va être long jusqu'à la fin. Et c'est décevant qu'on soit placés dans des conditions comme ça. Tous les jours, je rencontre des gens qui me disent: Vous pensez-vous bien efficaces, à 3 heures du matin et à 4 heures du matin, comme on va nous obliger à le faire, cette nuit, probablement la nuit prochaine et les autres nuits? La réponse, c'est évidemment non. Parce que ce n'est pas vrai, quand on commence toutes nos journées à 7 h 30 et qu'on fait à peu près une partie de la nuit - on a fait ça la semaine passée et on va faire ça encore toute la semaine - que c'est respecter un Parlement, que c'est respecter les parlementaires. C'est faire une caricature du Parlement. C'est ces gens-là qui en ont la responsabilité. En quatorze ans de parlementarisme, je n'ai jamais vu trois bâillons d'affilée; trois jours d'affilée, on bâillonne. Est-ce qu'on bâillonne après un abus d'usage des règles du parlementarisme? Réponse: Non.

Treize heures sur le projet de loi qu'on discute; treize heures, M. le Président, quand on sait que ces gens-là, les mêmes gens en face, peut-être pas sur le plan du même corps, mais au moins sur le plan de la même mentalité du gros club d'intérêts privés qu'est le Parti libéral, en 1977, ils nous ont fait siéger tout le mois de juillet, tout le mois d'août, deux mois de temps, parce que nous, on avait acquis la conviction qu'on ne pouvait pas faire une loi pour faire du fait français quelque chose de significatif, de majeur que donnait la loi 101 et le faire uniquement avec notre vérité. On a dit: On va prendre le temps que ça prendra, parce que c'est une loi majeure. C'est une loi fondamentale. On a siégé tout le mois de juillet et tout le mois d'août, je me rappelle très bien. On est revenus la sanctionner d'une façon finale le 28 août 1977.

On pourrait multiplier les exemples sur l'assurance auto. On pourrait multiplier les exemples sur la loi 125, parce que, en gros, M. le Président, tous ces gens-là, ce sont des gens qui ne bougent pas. Vous le savez, la seule raison, c'est que ce sont des gens qui ne bougent sur rien, pas capables de se décider, ayant tellement pratiqué l'indécision de ce premier ministre là, et c'est ce qui fait que, pendant quatre ans, la conjoncture étant pas pire, étant même très bonne, l'économie étant assez performante, ils ont pu dormir sur cette situation de regarder passer la parade. Mais, sur à peu près toutes les réformes importantes, sur à peu près toutes les réformes importantes que nous avons passées, ce gouvernement-là non seulement a voté les unes après les autres contre les réformes importantes, mais a abusé comme ce n'était pas possible du temps prescrit et permis par le règlement. La différence, c'est qu'on a laissé à ces gens-là le temps d'abuser du règlement tel que c'est permis à une Opposition pour respecter le parlementarisme et ne pas arriver en bousculade, en fin de session, avec des motions de clôture en disant: On a la voie, la vérité. C'est fini, treize heures. On amène ça en Chambre. On en finit un, on en recommence un autre.

Vous allez voir, je suis le dernier intervenant là-dessus. Tout de suite après, on va recommencer quelque chose qui va avoir exactement la même signification jusqu'à 3 heures demain matin ou 4 heures demain matin, pour dénoncer une autre motion de clôture, une autre motion de bâillon où on a dit à l'Opposition: Nous, on se fout de vous, c'est-y clair? On s'en fout, c'est nous qui menons. Et on veut ces lois-là.

J'entendais, et je ne les nommerai même pas parce que ça ne vaut pas la peine, certains collègues de l'autre côté dire: On a été élus pour prendre des décisions. Comme si nous autres, on ne l'avait pas été, élus, comme si moi, je m'étais amené ici parce que j'ai décidé de prendre ce siège-là comme ça, là! Je pense que nous aussi, on a été élus. Et la population a voulu nous donner des responsabilités comme Opposition, parce que dans un Parlement normal il y aura toujours une Opposition. Mais c'est pour ça qu'il y a des règles. C'est pour ça qu'on a un règlement, c'est pour ça que normalement on doit suivre un peu les règles du parlementarisme pour permettre à l'Opposition de faire son travail.

Imaginez, treize heures sur une loi qui n'a pas de sens, ça n'a pas de bon sens, c'est un détournement. C'est un "hold-up". Mon collègue, le député de Lac-Saint-Jean, l'a très bien exprimé. "Hold-up"! Criminel! En catimini, rapidement! treize heures, c'est assez parce qu'on ne veut pas que la population prenne conscience qu'on détourne des fonds par hypocrisie. On fait accroire dans les discours du budget qu'il n'est pas question qu'eux augmentent les taxes; qu'est-ce qu'ils font? Ils prennent l'argent dans une caisse qui a été constituée par les cotisants, parce qu'ils se sont comportés correctement sur le plan de la conduite automobile: réduction du nombre d'accidents, réduction de toutes sortes de choses. Réduction du prix des permis? Bien non! Réduction du prix des plaques? Bien non! Donc, les contribuables vont devoir payer, assumer davantage, alors que c'est contre toute logique.

Quand on demande à des gens de mettre une caisse spéciale pour une fin spéciale, on ne détourne pas la loi à d'autres fins. Qu'ils mettent donc leurs culottes et qu'ils assument leurs responsabilités. Assumer leurs responsabilités, qu'est-ce que ça voulait dire dans le présent cas? Ça voulait dire: Oui, on a mal géré, on a fait des mauvais choix et on est obligés de hausser les taxes ou d'augmenter les revenus dans le fonds consolidé. Ça, ça aurait été de

l'honnêteté. Mais bien trop hypocrite pour procéder comme ça comme gouvernement. Alors, comme gouvernement, détournement de la caisse qui a été constituée, et après treize heures de débat ces gens-là nous disent: Nous avons la vérité, c'est assez, il n'y a plus d'Opposition, motion de clôture. Vous invoquerez les arguments que vous voudrez, nous avons raison et nous sommes les seuls à avoir raison. Ça va passer par là parce que c'est ça. Ça serait le nouveau cénacle du Conseil des ministres.

Que je sache, le Conseil des ministres n'est pas encore composé de 125 parlementaires. Nous sommes à l'Assemblée nationale, et à l'Assemblée nationale on est ici pour prendre des décisions de législation et surtout, surtout, surveiller l'exécutif. S'il y a un exécutif qui mérite d'être surveillé, c'est bien celui-là. Il mérite d'être surveillé parce que je vous dis que, si l'on ne prend pas la peine de faire tomber les masques et qu'on fait uniquement jouer la parade comme il essaie de nous la faire jouer, bien, la population se voit tromper régulièrement, constamment et continuellement parce que c'est des demi-vérités à peu près dans tout ce que ces gens font et dans tout ce qu'ils disent.

On en a des exemples sur tous les dossiers. Quand j'entends ces gens-là: C'est pour faire les routes. Tu vas voir dans le budget, il n'y a pas une cenne. Ils ne font même pas confiance à ce qu'ils disent. C'est censé, cette motion de clôture là, permettre de dégager 1 700 000 000 $ pour faire des routes. On prend leur budget - pas le nôtre, on n'est pas au pouvoir - on prend leur budget, on l'ouvre et on s'en va aux crédits: pas un rond, pas une cenne! Pensez-vous qu'on va se laisser piler sur le corps, comme ça, après treize heures, comme si de rien n'était? Et là, on vient nous demander: Es-tu sérieux? Penses-tu que ça va être long? Oui, ça va être long. Je suis très sérieux. Pas parce que j'aime ça, ça n'a pas de bon sens. C'est vraiment caricaturer le Parlement et on est contre la caricature, même si on a une image comme ça en face, M. le Président.

Le Président: II n'y a pas d'autre intervention? Donc, le débat étant terminé, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix de cette motion de M. le leader adjoint du gouvernement. M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: M. le Président, vote nominal.

Le Président: En conséquence, le vote est demandé. Qu'on appelle donc les députés! (21 h 51 - 21 h 58)

Le Président: Veuillez prendre place, s'il vous plaît.

Alors, nous allons maintenant procéder à la mise aux voix de la motion présentée par M. le leader adjoint du gouvernement, conformément à l'article 251 du règlement, motion qui se lit comme suit: "Que la commission de l'aménagement et des équipements à qui a été confiée l'étude détaillée du projet de loi 50, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec et d'autres dispositions législatives, mette fin à ses travaux quant à ce mandat dès l'adoption de la présente motion et fasse rapport au moment prévu de la période des affaires courantes de la séance qui suit celle au cours de laquelle aura été adoptée la présente motion."

Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

M. Chevrette: M. le Président.

Le Président: Oui. M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: II se peut que la commission de l'environnement n'ait pas été avisée pour le vote. C'est parce que mes collègues de l'environnement sont en commission et je m'aperçois que le ministre n'y est pas non plus et on me dit qu'on a de la difficulté à entendre les cloches en bas.

Le Président: Un instant, s'il vous plaît. Nous allons immédiatement vérifier. Oui, un instant! S'il vous plaît! Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Le leader de l'Opposition fait sûrement référence à commission de l'aménagement et des équipements qui ne siège pas présentement, au moment où on se parle.

Le Président: Alors, toutes les commissions, donc, ont été rappelées. Alors, ça va? S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Alors, que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Ryan (Argenteuil), M. Vallerand (Crémazie), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cusano (Viau), M. Blackburn (Roberval), M. Houde (Berthier), M. Middlemiss (Pontiac), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel (Sherbrooke), M. St-Roch (Drummond), Mme Pelchat (Vachon), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc (Taschereau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Kehoe (Chapleau), M. Doyon (Louis-Hébert), M. Fradet (Vimont), M. Lemieux (Vanier), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Larouche (Anjou), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé

(LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbi-nière), M. Brouillette (Champlain), M. Bradet (Charlevoix), Mme Cardinal (Châteauguay), M. Després (Limoilou), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Forget (Prévost), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau). (22 heures)

Le Président: Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hoche-laga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour (Jonquière), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), M. Paré (Shefford), M. Claveau (Ungava), M. Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière).

Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions?

Le Secrétaire: pour: 53 contre: 22

Le Président: La motion est donc adoptée.

Alors, maintenant, M. le leader adjoint du gouvernement, si vous voulez m'indiquer le prochain objet de nos débats.

M. Lefebvre: Oui, M. le Président. Je vous demanderais d'appeler maintenant l'article 50 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi 69

Prise en considération du rapport de la commission

Le Président: À l'article 50 du feuilleton, nous allons maintenant prendre en considération le rapport de la commission de l'éducation ainsi que les amendements qui ont été transmis en vertu de l'article 252 de notre règlement par M. le ministre de l'Éducation et par M. le leader adjoint de l'Opposition officielle, le tout relativement au projet de loi 69, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et la Loi sur l'enseignement privé. Je suis maintenant prêt à reconnaître une première intervention sur le sujet.

Je prierais les députés qui doivent quitter l'Assemblée de le faire le plus rapidement possible et en silence.

Alors, je suis donc prêt à reconnaître le premier intervenant, et ce sera M. le ministre de l'Éducation.

Des voix: Bravo! Bravo!

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, je résumerai très brièvement ce dont traite le projet de loi 69. Tout d'abord, aucun principe vraiment nouveau dans ce projet de loi, contrairement à ce que l'on voudrait laisser entendre à la population. Les commissions scolaires étaient dans le champ de l'impôt foncier, elles le demeurent. Les municipalités l'étaient, elles le demeurent. Il y a un certain changement dans l'équilibre des revenus que chacun des deux organismes retirera de la taxation foncière, mais il n'y a pas de changement de principe radical, contrairement à ce qu'on veut laisser entendre de l'autre côté, encore une fois.

Deuxièmement, le projet de loi n'enlève rien aux municipalités. Celles-ci conservent tous les revenus auxquels elles ont accès actuellement. Elles pourraient même les augmenter si elles voulaient recourir davantage à l'impôt foncier. Rien ne le leur interdit.

Troisièmement, contrairement à ce que nous avons entendu, le projet de loi vise à procurer une plus grande égalité des chances à travers tout le Québec et il entraînera un déplacement important de ressources des parties les plus riches du territoire québécois vers les parties les moins favorisées. Ça, je pense que c'est très important de le souligner également. L'adoption du projet de loi procurera aux commissions scolaires une marge de manoeuvre accrue de 40 000 000 $ qui iront, encore une fois, vers les commissions scolaires moins favorisées, parce que les commissions scolaires le moindrement confortables n'auront aucun accès à la péréquation.

Aucune commission scolaire ne sera perdante. Toute commission scolaire retirera un minimum de 5 % de revenus autonomes de plus qu'actuellement. Il y en a qui essaient de répandre actuellement dans l'opinion publique que des commissions scolaires vont se faire jouer un tour avec ce projet-là. C'est faux. Toute commission scolaire retirera un gain net d'au moins 5 % en revenus autonomes à partir du projet de loi.

J'ajoute, enfin, qu'il y a urgence parce que, dans ce cas-ci, les commissions scolaires en ont besoin pour l'année 1990-1991 qui, dans le cas des commissions scolaires, commence le 1er juillet - pas dans trois mois, pas dans trois semaines, le 1er juillet. Elles ont besoin de cette source additionnelle de revenus et le gouvernement a également besoin de la marge accrue au

point de vue financier qui résultera, pour lui, de l'adoption du projet de loi. Le gouvernement pourra sauver de cette manière cette année 191 000 000 $ qui pourront aller pour la santé et pour les autres objets sur lesquels doit porter l'action du gouvernement.

Pour toutes ces raisons, M. le Président, je pense que l'Assemblée eût manqué à sa responsabilité si, par des trucs de procédure interminable, elle avait réussi à empêcher l'adoption du projet de loi à cette session-ci.

J'ajoute juste un mot de commentaire sur les amendements que le gouvernement propose au projet de loi. Nous en avons déposé, en tout, 13. On fera des gorges chaudes, on dira, sur un projet de loi qui comprend en tout - je crois que c'est 22 articles - 22 articles, on dira encore une fois: 13 amendements. Mais il faut être réalistes, il y a deux sortes d'amendements importants. Il y a des amendements qui portent sur le Conseil scolaire de Montréal, qui visent à permettre à cet organisme qui regroupe les commissions scolaires de l'île de Montréal de percevoir la taxe scolaire, comme le font toutes les commissions scolaires à travers le Québec. Alors, on applique aux commissions scolaires de l'île de Montréal un régime qui est celui de tout le reste du Québec. Il y avait une exception, on la fait tomber. Ça, ça entraîne 4 ou 5 amendements sur les 13 dont je viens de parler.

Il y a d'autres amendements qui étaient nécessaires pour assurer que la marge de revenus accrus que les commissions scolaires iront chercher par l'augmentation de la taxation foncière reste acquise, même dans l'hypothèse où le montant de base auquel auront accès toutes les commissions scolaires serait augmenté par le gouvernement. Si on n'avait pas mis les précisions qu'on met, on aurait risqué que le fruit de la taxe diminue à mesure que les années passent pendant un mandat de commission scolaire. Avec ce que nous faisons, le produit de la taxe sera fixe et viendra s'ajouter au montant de base. Que celui-ci soit de 500 $, 505 $ ou 510 $, si le produit de la taxe est de 50 $, c'est 50 $ qui viendront s'ajouter au montant de base. Alors, voilà, il n'y a pas autre chose que ceci dans les amendements que nous proposons.

L'Opposition a déposé, de son côté, des amendements dont l'effet serait de réduire à néant la portée le moindrement stable de ce projet de loi. L'Opposition voudrait que le projet de loi n'ait d'effet que pour l'année 1990-1991. Ceci signifierait qu'il faudrait revenir dans un an, rediscuter encore de manière interminable ce dont nous avons parlé depuis maintenant plus de trois semaines, et je pense que ce serait inadmissible pour un Parlement sérieux. Il se pourrait que des changements interviennent dans la politique du gouvernement. Des conversations auront lieu avec les municipalités; on pourra voir. Mais, pour le moment, le gouvernement institue ce régime, et il n'a jamais dit qu'il l'instituait seulement pour 1990-1991. Il l'institue pour qu'il soit là de manière stable, à moins d'avis contraire. Comme je l'ai dit dans mon discours de l'autre jour, il pourrait arriver que des circonstances se produisent. Mais on ne veut pas que l'Opposition se voit décerner un droit de veto qui lui permettrait de recommencer les mêmes discussions souvent équivalentes à des pertes de temps dont nous avons eu le spectacle au cours des deux dernières semaines.

Alors, voilà, M. le Président, la portée de ce que nous faisons ce soir. Je ne reviens pas sur la motion de clôture que nous avons discutée l'autre jour; nous en avons disposé, la Chambre a eu l'occasion de s'exprimer à ce sujet. Nous en sommes maintenant au stade de la prise en considération du rapport de la commission parlementaire qui a étudié le projet de loi et je veux m'en tenir strictement à l'objet pour lequel cette phase particulière de l'examen d'un projet de loi a été prévue dans nos règlements. Merci. (22 h 10)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Je reconnais maintenant M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition officielle à titre de porte-parole du groupe parlementaire de l'Opposition officielle. M. le député.

M. François Gendron

M. Gendron: M. le Président, dépendamment qu'on est de ce côté-ci de la Chambre ou de l'autre côté... Et je l'ai vécu avec le même homme qui vient de s'exprimer. Je vous dis que les choses étaient pas mal plus compliquées quand il était de ce côté-ci que ce qu'il vient de nous dire.

Alors, je vais être obligé, bien sûr, de rétablir les faits et d'indiquer exactement ce qui s'est passé, parce que nous sommes à l'étape de la prise en considération du rapport de la commission. Et la commission n'a pas pu faire sa "job", alors ça ne peut pas être aussi simple qu'il vient de l'expliquer. On a essayé de faire notre travail comme du monde. C'est ça qu'on est censés analyser. On est censés prendre connaissance du rapport de la commission qui n'a pas pu faire son travail. Et on voudrait qu'on n'ait rien à dire. On voudrait qu'on passe ça du revers de la main, comme d'ailleurs il vient de le dire. J'y reviendrai sur les amendements, en avertissant qu'on ferait les gorges chaudes, parce que, bien sûr, il faut se rappeler que le projet de loi, il avait 22 articles au total et 13 amendements. Mais ça, je ne peux pas faire les gorges chaudes là-dessus, c'est une pratique. C'est une pratique systématique de ce ministre. Il ne fait jamais un projet de loi où on n'y trouve pas autant, sinon plus d'amendements que le projet de loi lui-même. Alors ça montre un peu, des fois, dans quel niveau de préparation et de respect ces gens-là se situent au niveau du législatif.

une loi mal foutue, mal faite, ça ne les dérange pas. parce que, de toute façon, quand ils décident qu'ils en ont assez de l'opposition, ils s'en viennent en chambre, motion de clôture, c'est réglé, c'est fini. et on a droit à quatre, cinq minutes de présentation en disant: écoutez, là-dedans il n'y a rien là. ça ne change rien pour les municipalités. je pourrais vous lire, jusqu'à 6 heures demain matin, une série de lettres très virulentes du monde municipal, tant de l'umrcq que de l'umq qui nous disent: ça change, d'abord, le pacte de la fiscalité pour lequel on a mis un an et demi d'échanges avec les concernés. ça change au moins ça. ça commence à faire. ce n'est pas une mince affaire. ce n'est pas de la tarte. ça fait dix ans que ça marche de même. ça fait dix ans qu'on avait un pacte fiscal qui disait que l'essentiel du champ foncier municipal, il est occupé par les municipalités. il n'est pas occupé par le scolaire, parce que le scolaire c'est une responsabilité de l'état. ce n'est pas dur à comprendre ça. l'éducation ça devrait appartenir à l'état. ces gens-là se vantaient en campagne électorale: nous on va faire de l'éducation une priorité nationale. on est des ardents défenseurs de l'éducation. quand on est aussi ardent défenseur de l'éducation que ça, on devrait au moins comprendre que si la santé est une responsabilité de l'état, l'éducation est une responsabilité de l'état. et on ne s'en va pas hypocritement, encore là, leur dire: on va modifier la fiscalité et on va vous donner des choses que vous ne voulez pas, en faisant croire que vous allez avoir de l'argent de plus. parce que moi, je tiens à revenir là-dessus. et tantôt on sera un peu plus précis sur la façon dont ça s'est passé.

Mais le fond des choses, comprenons-nous bien, le projet de loi avait deux objectifs: élargir la marge de manoeuvre du milieu scolaire suite aux compresssions budgétaires exercées depuis huit, neuf ans. Je répète: élargir la marge budgétaire, la marge financière requise. Eux ils appelaient ça la marge de manoeuvre. Là, je n'ai pas le temps de citer ça, mais je pourrais le prendre: Pour le président de la Fédération c'est un pas, mais la marge de manoeuvre que nous avons demandée demeure tout à fait insuffisante en regard des besoins actuels. Donc, ce n'est pas moi qui compte des menteries. Ce n'est pas moi qui trompe la population et les concernés. Le président de la Fédération lui-même dit: L'objectif de la marge de manoeuvre n'est pas atteint. C'était l'objectif du projet de loi 69. Un des objectifs. Deuxième objectif c'était de dire: II faut corriger une formule pour que, dorénavant, vous ayez plus d'autonomie. La réponse des commissions scolaires c'est clair: C'est faux. Ce n'est pas un projet de loi qui leur donne plus d'autonomie. Parce que quand tu tombes sur le bien-être social de la péréquation, par définition ce n'est pas de l'autonomie. On le sait, nous on le vit au Québec avec le régime de fous du fédéral dans lequel on est. on le sait. oui, on reçoit de la péréquation de ce magnifique régime de fous, mais on la reçoit en assurance-chômage et en aide sociale. je te dis que ça fait un peuple en devenir, ça, ça fait un peuple fort dont l'économie est solide. ce n'est pas pour rien que le taux de chômage est toujours le double ou le triple de l'ontario. ce n'est pas pour rien que, ici, montréal par rapport à toronto... il n'y a pas besoin de chercher pourquoi toronto n'a pas de chômage et à montréal, il y en a le triple. la raison c'est simple, c'est que le régime fédéral est un régime pour tout autre que pour nous autres. et on le corrige comment? on le corrige par la péréquation. et le ministre, dans son droit de réplique, si jamais il l'exerçait vers 9 heures demain matin, il va vous parler de la péréquation. mais la péréquation, je le répète, c'est une formule, quand on sait le sens des mots, pour rééquilibrer quelque chose qui ne marche pas. donc, c'est clair que, dans ce projet de loi là, parce que je veux insister, il faut insister, est-ce que les deux objectifs sont atteints? autonomie et marge de manoeuvre? réponse, non. venons-en à comment ça s'est passé en commission parlementaire. il faut en parler parce que nous on a essayé de faire notre travail. et rapidement on a dit: pas question de faire votre travail. c'est nous autres qui menons. d'ailleurs il vient de le dire. le ministre vient de le dire et de le répéter en cette chambre, m. le président: indépendamment, vous auriez fait ce que vous vouliez, nous autres, le 1er juillet s'en vient et il faut que ça marche comme on pense. l'umrcq est contre, l'upa est contre, l'umq est contre, la moitié des commissions scolaires sont contre et les commissions scolaires sont obligées de passer des résolutions disant: on ne veut rien savoir. et à la commission scolaire la neigette on n'a pas du tout le goût de fêter. et il y avait un autre article que je n'ai pas le temps de chercher. les commissions scolaires déchantent. les commissions scolaires sont déçues. ce n'est pas grave. ce gouvernement-là se déguise encore une fois en exécutif ici à l'assemblée nationale, alors que ce n'est pas censé être l'exécutif et il procède.

En commission, d'abord, M. le Président, j'entendais des répondeurs automatiques à qui on met des mots dans la bouche et on dit: tu diras ça. Un des répondeurs a dit: Après plus de trente heures de commission... Faux, M. le Président, archifaux. J'ai fait sortir les chiffres. On a fait exactement dix-neuf heures et quelques minutes. Parce qu'il faut enlever deux heures et quelque chose de perte de temps, retards du ministre, votes en Chambre, suspension. M. Gendron, je suis demandé au Conseil des ministres, est-ce que je peux y aller? Oui, M. le ministre, je comprends ça, vous pouvez y aller. Ça c'est la vérité. Vous devez y aller. Mais est-ce qu'on a fait trente heures en commission?

Bien non. La réponse c'est faux, archifaux. Ils ont fait vingt heures, maximum. Et est-ce qu'on a fait vingt heures pour perdre notre temps? Non, M. le Président. On a fait vingt heures en disant: On a des demandes des plus touchés par cette nouvelle loi de fous et les plus touchés par cette loi-là, c'est l'UMRCQ. Ils voudraient être entendus. Le ministre a fait accroire. Il a dit: Bien sûr qu'on était d'accord pour les entendre. Il a dit ça dans son discours de deuxième lecture sur le principe. C'est drôle, moi j'ai une lettre qui dit: "On exprime notre déception de ne pas avoir été entendus." Et c'est normal, ils n'ont pas été entendus. Parce que quand on en a parlé, à 16 heures, de les entendre, il a dit: Je suis d'accord, à condition qu'ils soient ici à 20 heures. Comme si ces gens-là étaient à la disposition du ministre.

L'Union des municipalités du Québec, qui regroupe l'ensemble des municipalités du Québec, ce n'est pas grave ça. Quatre heures d'avis, vous êtes à ma disposition. C'est de même que ces gens-là gouvernent. Il était à peu près 16 h 30, 17 heures, quand on a fait l'autre motion sur l'UMRCQ. Même chose. S'ils sont prêts à venir à soir, ça va, mais demain, pas question. Et, bien sûr, la convenance minimum, la convenance minimale aurait exigé qu'on leur donne l'occasion, au moins, de pouvoir recevoir le coup de téléphone et prendre la soirée pour se concerter et dire: Bien oui, on va envoyer nos représentants de l'exécutif le lendemain. Mais ce n'est pas ça qui est arrivé. C'est que si vous n'êtes pas ici ce soir, on ne veut pas vous voir. C'est ça qui est arrivé. Et dans les lettres que, si j'ai le temps tantôt, je lirai, c'est ce qu'on a dit. (22 h 20)

Déçus, choqués, parce qu'on s'est fait tromper, on s'est fait rouler sur toute la ligne et, nous, on a essayé. C'est pour ça qu'on voulait que ces gens-là parlent. Parce qu'on avait tellement d'éléments pour démontrer que c'était un changement de cap, c'était un changement de cap qui n'avait pas de bon sens, pour aller jusqu'à parler de cadeau empoisonné: Cadeau empoisonné déçoit les commissions scolaires. L'odieux de la taxe sans la marge de manoeuvre. Le titre est significatif, M. le Président. Très calmement: L'odieux de la taxe sans la marge de manoeuvre, parce que c'est ça le résultat, on "clenche" ces gens-là pour 320 000 000 $; ces gens-là n'auront que 40 000 000 $ d'argent neuf dans leurs poches et on leur impute une responsabilité qu'ils n'ont jamais demandée. Vous pensez que c'est responsable, ça? Et là, j'y viens, à la lettre, je donne un exemple. L'UMRCQ réitère son opposition formelle au projet de loi 69. Est-ce que c'était légitime, M. le Président, pour nous, d'entendre l'UMRCQ? Je comprends. C'est la plus touchée par le pacte sur la fiscalité.

Je continue à lire: "Le maire de Mont-Joli s'est surtout dit extrêmement surpris et déçu d'apprendre du ministre de l'Éducation que le gouvernement - et écoutez bien ça, parce qu'il va arriver d'autre chose tantôt - préconisait de façon définitive le nouveau principe de financement scolaire. Soulignons enfin que l'UMQ a demandé à être entendue en commission parlementaire aujourd'hui sur le sujet et que le ministre a refusé." Pas celui qui vous parle, pas le critique de l'Opposition officielle, le ministre a refusé son intervention. Donc, c'est un petit peu plus compliqué que ce qu'il essayait de vous dire tantôt, M. le Président. Ce n'est pas juste un petit projet de loi, comme il dit: Ça ne change rien, il n'y a rien là et, normalement, on ne voit pas pourquoi l'Opposition est déçue de s'être fait imposer le bâillon là-dessus, alors que nous, on a voulu entendre une commission scolaire qui s'opposait. La première intervenante était ma collègue, députée de Terrebonne et elle l'avait dit dans son intervention.

Même si on avait une liste de sept, huit et qu'on avait des amendements prêts pour entendre sept, huit, on a dit: Non, on va se comporter en gens responsables. On va demander d'entendre une commission scolaire. Pourquoi n'es-tu pas d'accord? Je l'ai cité tantôt, on avait la résolution - c'est la commission scolaire des Cascades l'Achigan - proposée par M. Untel, appuyée par M. Untel et ça finissait comme ceci: "La commission scolaire des Cascades l'Achigan n'est pas d'accord - ce n'est pas dur à comprendre ça - avec une perception d'impôt foncier accrue pour compenser une coupure de subvention de l'ordre de 1 900 000 $ à notre commission scolaire sans pouvoir offrir de services supplémentaires à la population." Ça, c'est la réalité des choses. Donc, on a dit: Celle-là, on aimerait ça l'entendre et on aimerait ça discuter un peu avec elle, parce que, quand même, on est membres de la commission permanente de l'éducation et on voulait se comporter en gens responsables, faire notre travail comme il faut. Pourquoi êtes-vous contre? Quel inconvénient ça va vous créer? Est-ce que vous partagez - type de questions qu'on voulait poser - le point de vue, entre autres, d'Alain Dubuc, qui disait ceci - et pourtant quand ça leur fait plaisir, ils le citent, Alain Dubuc: "Les équipements scolaires sont partie intégrante de la qualité de l'éducation. En se débarrassant de certaines responsabilités, le gouvernement québécois fera en sorte que l'environnement scolaire ne sera pas le même partout et que la qualité de l'éducation variera selon la richesse."

Le ministre nous a dit: Ils ne comprennent pas, ils sont dans les patates, comme d'habitude, parce que, chaque fois qu'on est d'opinion contraire, soit qu'on n'est pas informés - c'est ce qu'ils avaient dit aux gens du Saguenay-Lac-Saint-Jean - soit qu'on ne sait pas lire ou soit qu'on n'a pas eu assez de temps pour comprendre. C'est toujours les trois mêmes arguments qui

reviennent constamment. Si c'est ça, M. le Président, êtes-vous capable de nous donner une bonne raison, à savoir pourquoi vous n'étiez pas capables, pourquoi, M. le Président, le ministre n'était pas capable de leur dire ça en pleine face? Pourquoi le ministre de l'Éducation n'était pas capable de leur dire ça en leur permettant de venir à la commission parlementaire pour le leur dire: Moi, je suis complètement en désaccord avec les prétentions d'Alain Dubuc. Ce n'est pas vrai que les équipements sont liés à l'éducation. Ça n'a rien à voir avec la qualité de l'éducation. Et c'est pour ça que, dorénavant, je dis: Ce sont les commissions scolaires qui auront la responsabilité de taxer les contribuables, taxer dans la poche des contribuables pour aller chercher le fric requis pour assumer leurs responsabilités.

Je l'entendais tantôt dans ses quelques phrases, il disait: II n'y a rien d'autre. Ah non! On ne coupe même pas dans le champ foncier municipal. Êtes-vous au courant que, depuis que ces gens-là sont au pouvoir, à toutes les cinq minutes à peu près, il y a des nouvelles responsabilités données aux municipalités, mais pas de fric, pas d'argent, et je ne parle pas de la revue Fric, je parle d'argent.

Alors, donnons des exemples. 150 000 000 $ de fonctionnement des usines en assainissement des eaux, nouvelle responsabilité. 100 000 000 $ en disposition des neiges usées: Est-ce que les municipalités sont financées par le gouvernement pour s'occuper des neiges usées? Il n'y a pas de saint danger. Déchets domestiques: Qui a fait les règlements? Vous n'avez plus le droit de disposer des déchets domestiques sans avoir soit un système de tranchées et remplissage ou d'autres systèmes qui coûtent des fortunes. Ça ne veut pas dire que je suis en désaccord là-dessus. Je suis pour ces affaires-là, mais je veux juste indiquer qu'ils sont trompeurs de la population, ces gens-là, quand ils lui font accroire que les municipalités n'ont pas hérité de nouvelles responsabilités. Elles ont reçu une série de responsabilités par la tête et pas une cenne pour les assumer. Et là, le champ foncier, ce qui restait de la place, la réponse, c'est oui. Qui va occuper la place qui restait pour que les municipalités puissent s'acquitter de leurs responsabilités, M. le Président? Ça va être le monde scolaire, dorénavant, et ça va faire en sorte que c'est toujours Baptiste le payeur de taxes qui va écoper.

Moi, dorénavant, chez nous, je l'ai expliqué et je vais revenir parce qu'ils ne comprennent rien, je ne change pas d'avis, M. le Président, je suis certain que la qualité des équipements éducatifs dans ma belle région de l'Abitibi n'aura pas la même allure que sur le mont Royal, dans le quartier Westmount et dans le West Island. Je peux vous garantir ça. Je ne sais pas ce que je jurerais là-dessus, M. le Président, j'en ai l'assurance, parce que je les connais. Vous viendrez voir les pressions que nos contribuables commissaires vont devoir subir parce qu'ils se connaissent tous, c'est un petit milieu et ils vont dire: Bien, laisse faire la peinture, laisse faire les fenêtres qui sont finies et laisse faire la porte qui ne ferme pas, de l'école du rang 10 à Val-Saint-Gilles; ça ne presse pas parce que c'est le contribuable, dorénavant, qui va être obligé de payer pour. Ça, ce serait honnête de dire ça de même parce que c'est ça qui va arriver. C'est ça qui va arriver. 320 000 000 $ de taxes de plus chez le contribuable québécois et du beurre dans la poêle. Tout est là. On a la vérité et il n'y a pas de problème. Qu'est-ce que vous avez, l'Opposition, à vous énerver? Pourquoi n'êtes-vous pas d'accord avec une motion de clôture, après 20 heures de débat où on a essayé de commencer notre travail?

Le projet de loi, je vous l'ai dit tantôt, a 22 articles. Est-ce qu'on avait commencé? Bien, je comprends. On était rendu au coeur même, et le ministre l'a dit à trois reprises. Je pourrais sortir les galées, quand on a commencé l'article 3, il a dit: On est dans la viande, on est au coeur même du projet de loi. Bien, au moment où on était au coeur du projet de loi, son leader en Chambre, il s'en foutait, lui: Motion de blâme; fini, c'est assez! Au moment où on était au coeur du projet de loi.

Une voix: Bâillon.

M. Gendron: J'y viens un peu aux amendements. Combien d'amendements sur 22 articles? Je l'ai dit tantôt, 13 amendements. Bon. C'est sûr que, là-dedans, le ministre a toujours développé cette habitude-là et il y a des amendements de concordance, vous dira-t-il. Il y a des amendements d'ajustement, vous dira-t-il. Il y a des amendements de législation, vous dira-t-il. O.K. Ça va. Je suis d'accord là-dessus. Mais il y a trois amendements majeurs, par exemple.

Il y a trois amendements majeurs dont on aurait aimé discuter comme parlementaires. On avait des choses à dire. On avait reçu des représentations. Moi, j'avais pris la peine, dans mes responsabilités de critique, d'aller passer deux jours à Montréal, il y a à peu près un mois et demi, pour rencontrer ces intervenants, dont le Conseil de l'île. Le Conseil de l'île vous a fait des représentations pour modifier des choses du projet de loi 69 en disant: Ça n'a pas de bon sens parce qu'on a toujours eu la responsabilité de taxer au nom des commissions scolaires et de redistribuer le montant que nous percevons pour s'occuper d'une meilleure équité et ainsi de suite. Je les avais reçues, les représentations du Conseil de l'île. J'aurais aimé ça les discuter. Et là, dans les amendements, bien oui, il va nous déposer ça tantôt, il va en mettre un en disant: Pour le Conseil scolaire de l'île de Montréal, ça va être normal qu'il continue à percevoir lui-même la taxe scolaire et à établir un nouveau mode de répartition de la taxe entre les commis-

sions scolaires situées sur le territoire de 111e de Montréal. Ah bon! Ça, c'est normal. Le Conseil de l'île peut venir à bout de faire comprendre le bon sens au ministre, mais pas l'Opposition et pas tous les intervenants qui sont en défaveur. (22 h 30)

II va également modifier le libellé de la formule soumise aux électeurs lors d'un référendum autorisant une commission scolaire à dépasser l'une ou l'autre des limites de taxation permises par la loi, soit 0, 35 $ par 100 $ d'évaluation ou un montant parallèle, 500 $ ou 650 $. Le nouveau libellé spécifie que, dans le cas où la limite dont on propose le dépassement est celle du produit maximal de la taxe, le montant soumis s'ajoute au montant parallèle permis par la loi.

Nos commentaires sur ces amendements, j'ai envie de ne pas en faire. Il n'a pas voulu qu'on étudie le projet de loi, pourquoi je ferais des commentaires sur les amendements? Il n'a pas voulu qu'on étudie le projet de loi. On était rendus à l'article 3, il a dit: Non, c'est fini. Motion de clôture. Alors, on le fera peut-être bien en troisième lecture ou je ne sais pas quand. Mais quand même je dirais que les modifications relatives au Conseil scolaire de l'île font suite à des pressions et à des revendications du Conseil de l'île lui-même, je viens de l'indiquer. C'est à pleine page dans les journaux. "Le Conseil scolaire de l'île de Montréal veut percevoir lui-même ses taxes. Les commissions scolaires veulent percevoir elles-mêmes leurs taxes". Il y en avait à pleine page. Il aurait pu les écouter. Alors, c'est ce qu'il a fait. Il propose un amendement à la dernière minute, alors que c'est dans le projet de loi qu'on aurait dû voir ça, pas un amendement. C'est dans le projet de loi qu'on aurait dû avoir ça. Il savait bien que ça finirait comme ça.

Il mentionnait tantôt: Est-ce que ça va être un effet qui va durer un an ou... Parce qu'il dit: L'amendement que l'Opposition nous a fait à l'article 3, c'est que ce projet de loi n'ait qu'une durée d'un an. Bien sûr qu'on a fait ça parce que nous, on pensait que ces gens-là avaient un peu de parole. On pensait que ces gens-là avaient un peu le sens de l'honneur. Et quand l'Union des municipalités a envoyé une lettre à M. Bourassa pour rétablir les relations et ainsi de suite, M. Bourassa a dit: Bien sûr qu'on va rétablir les relations et on va discuter tous tes points que vous voulez. La tenue de véritables assises. La publication le plus tôt possible par le gouvernement de l'ensemble de notre projet de décentralisation et ainsi de suite. Sauf que, quand ils sont arrivés: Est-ce à dire qu'on va pouvoir remettre sur la table l'ouverture dans le champ foncier municipal par le monde scolaire? la réponse du premier ministre, c'a été: Non, pas question. Ça, vous ne jouerez pas là-dedans.

Et le ministre avait pris ses précautions en disant, lors de l'adoption du principe... Et je le cite parce qu'il faut voir comment entre souvent le beau discours de ces gens-là et ce qu'ils prêchent un peu partout dans le Québec il y a un méchant écart. D'ailleurs, pourquoi on a pris quelques heures, M. le Président? C'était pour dire qu'il y avait un décret du Conseil des ministres depuis le 6 novembre. Toute la stratégie démentielle, toute la stratégie teintée d'hypocrisie et de factice était connue dans le décret depuis le 6 novembre 1989, pas 1990, et depuis le 6 novembre 1989 on avait dit: On clenche ces gens-là parce que, dans le deuxième mandat, il faut commencer à clencher du monde. C'est pour ça qu'il y en a tant dans les galeries, qu'il y en a tant devant le parlement et il va y en avoir de plus en plus, parce que ces gens-là sont conscients que, s'ils n'avaient pas l'Opposition, il resterait le Conseil des ministres parce qu'ils veulent que l'Assemblée nationale se déguise en Conseil des ministres.

Et là je cite le ministre qui disait ceci: "II faut bien se rendre compte que les mesures annoncées par le gouvernement n'ont pas été révoquées et ne sauraient l'être pour l'exercice budgétaire en cours, c'est-à-dire 1990-1991. Il y a également lieu de présumer, à moins d'avis contraire, que le gouvernement qui a voulu instituer des modifications aussi importantes... " Ah! Tantôt, c'était des niaiseries, tantôt il n'y avait rien là. Le ministre a parlé cinq minutes et il a dit: Écoutez, énervez-vous pas, il n'y a rien de majeur là-dedans là. Et là je le cite. "Que le gouvernement qui a voulu instituer des modifications aussi importantes - deux discours, ils parlent des deux côtés de la bouche, ils peuvent bien appuyer quelqu'un - dans le champ de la fiscalité scolaire, qui a assumé les risques politiques inhérents à cet exercice, devrait avoir à l'esprit des changements dont la nature et les effets ne seraient pas seulement transitoires, mais seraient durables". Et ça, c'est le ministre de l'Éducation qui a annoncé ça.

Alors, il ne faut pas se surprendre, M. le Président, que nous, on arrive ici en Chambre et qu'on dise: Écoutez, on ne peut pas être d'accord avec une façon de légiférer comme ça. On ne peut pas être d'accord...

M. Boulerice: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, vous avez une question de règlement en vertu de quel article?

M. Boulerice: De l'article 32, M. le Président. Vous avez constaté comme moi, M. le Président. On bafoue les droits des parlementaires. Mon collègue est bafoué dans sa liberté d'expression. Je vous demande de faire appliquer l'article 32.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, sur

la question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques voit des choses qu'il est le seul à voir. Le député d'Abitibi-Ouest faisait une intervention et on écoutait, et il avait l'air très à l'aise, ça avait l'air de bien aller. L'article 32, je ne vois pas...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que c'est sur le décorum, M. le député?

Une voix: Les banquettes.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur les banquettes. Alors, il y a une tradition, une coutume, en Chambre. Lorsqu'un député demande à la présidence de demander aux députés de reprendre leurs sièges, le président doit demander aux députés de reprendre leurs sièges. Alors, je demande aux députés de reprendre le siège qui leur a été assigné.

Une voix: Intolérance! Intolérance!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! MM. les députés, si vous voulez reprendre vos sièges, s'il vous plaît.

Une voix: Intolérance! Intolérance!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député. M. le leader adjoint, si vous voulez poursuivre, s'il vous plaît.

M. Gendron: alors, j'en étais à indiquer que l'opposition nous venait de partout, tant du monde municipal que de l'upa également, et c'est eux qu'on a voulu entendre en commission, et une commission scolaire. et on a commencé à vouloir discuter sur le fond du projet de loi. étant rendus à l'article 3, le leader du gouvernement décide de mettre fin à nos travaux. et penser que nous, on serait d'accord là-dessus et qu'on n'assume pas nos responsabilités d'indiquer à la population que c'est pas mal plus profond que ce qu'il a indiqué tantôt...

Ce n'est pas pour rien que, dans une lettre, M. Jean-Louis Desrosiers et M. Nicolet faisaient la même chose: "Dans une telle perspective - écoutez bien comment ça traduisait toute l'hypocrisie de ce gouvernement-là - comment justifier une réforme du financement scolaire qui, à moyen terme, ne pourra que creuser les inégalités, pénalisera les plus démunis, accumulera les obstacles au redressement collectif de régions entières. Aucune forme de péréquation ne réglera des problèmes de cette ampleur. L'expérience municipale l'a amplement prouvé - parce qu'eux autres aussi, ils ont vécu un bout avec des affaires de péréquation - ce sont les institutions, les structures, les règles fiscales dont se dote l'État qui seules peuvent d'abord annoncer la générosité des politiques, puis concrètement garantir l'égalité des chances." Je vous dis que cette phrase-là, M. le Président, est significative, je la reprends: "Ce sont les institutions, les structures et les règles fiscales dont se dote l'État qui seules peuvent d'abord annoncer la générosité des politiques, puis garantir l'égalité des chances."

À l'Assemblée nationale, dans le même discours auquel je me référais précédemment, vous faites allusion au fait que le gouvernement qui a voulu instituer des modifications aussi importantes dans le champ de la fiscalité scolaire, qui a assumé des risques politiques inhérents à cet exercice, devait avoir à l'esprit des changements dont la nature et les efforts ne seraient pas seulement transitoires. Et vous pensez, M. le Président, que ça demeure convenant de se gourmer en Chambre, de faire, encore là, semblant qu'on va rétablir un climat de confiance au niveau du monde municipal, des intervenants municipaux, alors que, de toute évidence, ce ne sera plus négociable. De toute évidence, il est clair que, dans l'avenir, c'est à long terme. Et c'est pour ça que nous, on a pris nos responsabilités. On avait proposé un amendement à l'article 3 en disant: Pas plus qu'un an. Parce que ça a commencé de même. C'était 75 000 000 $ au début, et ça devait être exceptionnel, uniquement à cause de la conjoncture.

J'en profite également pour conclure. On voit qu'on aura beau dire ce qu'on voudra, on a affaire à un ministre pour qui le pouvoir centralisateur, ça fait partie intégrante de sa perception des choses et de sa façon de gérer le ministère. C'est soit la dérogation ou la centralisation. Vous verrez, pour ceux qui en prendront connaissance. Mais c'est évident qu'ils ne sont même pas au courant des amendements et ça va voter pour massivement. Je suis convaincu qu'il n'y a pas un parlementaire qui a pris connaissance des amendements; je suis convaincu de ça. Oui, M. le Président, je suis convaincu qu'il n'y a aucun parlementaire, de l'autre côté de cette Chambre, qui a pris connaissance des amendements. (22 h 40)

Et, à l'article 11, je vous lis juste la finale et je termine là-dessus, pour vous montrer comment ça n'a pas de bon sens. "Le ministre statue sur tout différend qui lui est ainsi soumis; il peut à cette fin modifier le montant que détermine le Conseil pour ses besoins, les époques de versement ou les règles de répartition du Conseil" de l'île de Montréal.

Savez-vous après quoi il met ça? Après avoir dit au Conseil de l'île: Je vous laisse le pouvoir de taxer. C'est vous autres qui l'avez. Je répète le paragraphe en concluant: Mais c'est moi, après que vous aurez assumé la responsabilité que je vous donne, qui me réserve encore une fois...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur une question de règlement, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. Boulerice: Oui, M. le Président. Est-ce que vous pourriez, s'il vous plaît, vérifier le quorum en cette Chambre?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, il y a quorum. M. le député, si vous voulez conclure.

M. Gendron: M. le Président, en disant que, lorsqu'un ministre prétend que constamment il y a lieu de finir ses amendements par des dispositifs où il doit constamment avoir la mainmise sur tout ce qui se passe, ça ne peut pas faire autrement que recevoir des lettres de résolutions de diverses commissions scolaires en disant - je conclus là-dessus - deux objectifs pas atteints, on n'a pas de marge de manoeuvre, puis c'est un projet très centralisateur qui ne nous donne aucune autonomie additionnelle et, en conséquence, c'est clair que c'est inacceptable, puis on va se battre jusqu'à la dernière once d'énergie qui nous restera pour dénoncer ce gouvernement hypocrite.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Nous poursuivons le débat maintenant avec M. le député de Jonquière.

M. Francis Dufour

M. Dufour: Oui. Merci, M. le Président. Il est clair que le bâillon qui nous a été imposé par le gouvernement actuellement nous permet de constater que le débat qui devait avoir lieu entre les municipalités et le gouvernement du Québec n'a pas eu lieu. Ça a été un débat escamoté, ce qui a eu pour effet que nous, comme parlementaires, on est obligés de reprendre ce débat-là et de le mettre sur la place publique.

À l'intérieur, bien sûr, du cheminement qu'on a vécu, on a constaté des choses excessivement intéressantes. D'abord, contrairement à ce qu'on a appris au cours du mois de mars, de même que les municipalités, concernant le pacte municipal Québec-municipalités, c'est que la bataille n'a pas commencé à cette date-là, mais elle a commencé effectivement lors de l'adoption de principe à un Conseil de ministres le 6 novembre 1989. C'est comme ça que ça s'est déroulé et c'est comme ça que la décision a été prise.

Nous apprenions, par cet arrêté en conseil, que le ministre des Affaires municipales avait été chargé, en collaboration avec le président du Conseil du trésor, de trouver une formule pour couper ou pour chercher des sources de financement pour le monde scolaire comme des sources de restrictions budgétaires. C'est un peu tout ça qui a été compris, ce qui fait que ça a pour effet de fausser le débat et ce débat-là n'a pas eu lieu.

Ce qui est curieux - et là, je vois presque une vengeance de la part du ministre de l'Éducation qui, lorsque le pacte municipal a été signé en 1979, même s'il était dans l'Opposition, avait assisté non pas indifférent, mais n'avait jamais accepté le pacte fiscal entre les municipalités et le gouvernement du Québec - le même ministre décide ou pilote le projet pour justement défaire ce pacte-là et, en retour, il fait exactement le même cheminement, la même chose. En 1979, le monde scolaire était exclu - je pense que c'est loin d'être prouvé, je pense que, au contraire, le gouvernement avait été bien respectueux par rapport à ça - en 1990, le monde municipal est complètement écarté de la discussion, ce qui fait que, d'une façon ou de l'autre, il y a quelqu'un qui a été mis hors de combat avant de partir et moi, je pense que, de ce côté-là, le ministre de l'Éducation a réussi à mettre knock-out le ministre des Affaires municipales, parce qu'il n'a pas participé au débat. Il a répondu à des questions si peu lorsqu'on l'a questionné au cours de différentes séances de l'Assemblée nationale, il a répondu si peu que, effectivement, le ministre de l'Éducation a gagné sa partie de bras de fer avec le ministre des Affaires municipales. Et c'est de même que la question est en train de se régler.

Le ministre de l'Éducation dit aussi: Quand on fait ça, vous savez, ce n'est pas... Parce que les commissions scolaires disaient: On veut revaloriser notre assiette fiscale, parce que ça ne ressemble pas à ce qui nous avait été accordé, en 1979, par le gouvernement du Québec. Donc, elles demandaient une revalorisation d'environ 75 000 000 $. Le ministre est allé un peu plus loin que ça et il a dit: Écoutez un peu, il faudrait peut-être vous donner un peu plus d'autonomie. Quelle est la forme d'autonomie que le ministre de l'Éducation veut accorder à ses commissions scolaires ou, en fait, à ses créatures, parce qu'il a la main haute sur les commissions scolaires, comme sur à peu près tout ce qu'il touche? Il a dit aux commissions scolaires: Je vais vous donner le pouvoir de taxer pour 320 000 000 $. Pour ça, il y a là un montant dont vous allez vous servir pour l'entretien des écoles. Puis, je vais vous accorder 13 000 000 $ de valorisation de l'assiette fiscale. Parce qu'il faut faire attention. On pense souvent que 40 000 000 $ sur 320 000 000 $... Il y a 27 000 000 $ qui sont une forme de bien-être social pour les commissions scolaires qui n'ont pas suffisamment de revenus. Donc, pour valoriser les commissions scolaires, on va leur maintenir le souffle, on va leur donner la respiration artificielle pour qu'elles demeurent à peu près au niveau où elles peuvent se tirer d'affaire. Mais il n'y a pas de richesse excessive et il n'y a pas beaucoup de municipalités dans les comtés les mieux nantis du Québec. Donc, il y a

27 000 000 $ pour garder une équité artificielle, parce que, effectivement, il n'y aura pas une assiette fiscale valorisée. Pour les autres, on va vous donner 13 000 000 $, donc la valorisation de l'assiette.

Donc, pour "collecter" 320 000 000 $ de taxes, là, ça va donner à peu près 4 % de commission. C'est ça que ça donne aux commissions scolaires: 4 % de commission pour faire le travail d'un gouvernement qui ne veut pas faire son travail. C'est ce qu'on appelle l'autonomie? Je dis: Loin de là. Non seulement il n'y a pas d'autonomie, parce que gérer le personnel pour faire l'entretien, ce n'est pas une grosse autonomie, pour savoir si les écoles sont en bon état ou pas, mais, en même temps, on leur dit: On va vous fixer votre assiette. Elles ne peuvent pas "collecter" comme elles le veulent, les commissions scolaires: 0,35 $, c'est le maximum. Il n'y a rien de changé. En 1989, les commissions scolaires n'étaient pas plus autonomes, parce qu'elles taxaient en fonction de ce que le ministre des Finances décidait. Il n'y a pas plus d'économies après qu'avant. Ça, je pense qu'il faut le faire ressortir.

Je pense que le ministre de l'Éducation, lorsqu'il parle de l'autonomie des commissions scolaires, à moins qu'il n'ait autre chose dans la tête, qu'il ne veuille aller beaucoup plus loin... Parce que, ce qu'on a appris, c'est que ce n'est pas 320 000 000 $ - ça c'est le commencement, c'est juste la pointe de l'iceberg - c'est 1 400 000 000 $. Parce qu'il y a d'autres ministères qui ont les mêmes ambitions et les mêmes prétentions. Quand on parle du ministre des Transports, lui, il dit: Je veux avoir de l'argent. Les routes, on va donner ça aux municipalités. Une autre belle jambe. On traverse ça de l'autre côté. Vous allez "collecter" les taxes. Ça fait une deuxième passe rapide. Le ministre de l'Environnement fait la même chose: Moi, j'ai besoin du concours des municipalités. Je suis prêt à leur donner un certain nombre d'obligations. Je ne parle pas d'argent. Vous allez "collecter" des taxes pour le travail que vous allez donner.

M. le Président, il ne faut pas se surprendre que l'Opposition se soit faite le défenseur des petits. Parce que, dans ce projet de loi, c'est sur les contribuables qu'on frappe. On semble défendre les municipalités, mais, à l'intérieur des municipalités, ce sont tous les contribuables qu'on défend. Combien de décisions ou de responsabilités on a données aux municipalités depuis 10 ans? Je ne vais pas en faire une enumeration, mais l'assainissement de l'eau, l'enfouissement sanitaire, les neiges usées, il y a un nombre assez important de responsabilités qui ont été confiées aux municipalités. Elles l'ont fait pourquoi? Parce qu'elles avaient une assiette fiscale qui semblait intéressante. Aujourd'hui, par l'intrusion du scolaire dans le municipal, il est de plus en plus évident que les gens n'iront pas deux fois piger dans la même assiette. Et ça fait une contrainte supplémentaire.

Le gouvernement, dans le même souffle, nous dit: Vous savez, j'ai sauvé à peu près... J'ai baissé, depuis les quatre dernières années, 1 300 000 000 $. Je ne sais pas où il les a baissés, parce que j'ai comme l'impression qu'on en paye toujours de plus en plus. Et je fais appel au bon sens de l'ensemble de la population qui suit ce débat, à savoir si les gens ont l'impression que, depuis cinq ans, ils payent moins de taxes qu'avant. Les 1 300 000 000 $, je ne sais pas où ils ont passés, mais il y a un court de caisse de 1 300 000 000 $. S'ils avaient été des bons administrateurs comme ils le prétendent, ils auraient peut-être pu ne pas baisser les taxes, parce qu'on n'en voit pas tellement le résultat, mais, en faisant ça, ils auraient pu prendre leurs responsabilités au lieu d'essayer de les transférer aux autres. Ce n'est jamais fini avec ça. (22 h 50)

Donc, il y a des taxes qui ont été mises, des taxes hypocrites, des taxes cachées, des taxes qui vont s'appliquer après. Mais, dans le fin fond ou dans l'exactitude des faits, c'est 140 $ qu'on transfère sur les petits contribuables. Voilà une façon de bien les récompenser de vouloir se loger et de ne pas vouloir être à la charge de l'État. Et ça, c'est quoi? C'est les familles qui sont attaquées. Ce sont les personnes âgées. C'est un peu tout ça. Et les seuls arguments qu'on a pour aller chercher de la taxe là, c'est que la propriété, c'est une coutume. Ça semble être dans la manière de faire en Amérique. Il n'y a pas de relation entre l'éducation et la propriété. Mais c'est la coutume. Donc, la coutume, il faut respecter ça et notre distinction, c'est d'essayer d'être pareil à l'Ontario. Et on se compare juste quand ça fait notre affaire. Si c'est vrai qu'on veut se comparer à l'Ontario, je dis: Qu'on décide de descendre le chômage à 5 %.

Voilà un certain nombre de raisons et j'en aurais bien d'autres, M. le Président. J'aimerais ça pouvoir développer ce sujet-là beaucoup plus, avec beaucoup plus d'argumentation, plus fortement. Mais il est inacceptable que la position du gouvernement actuel, qui a pour effet de siphonner... Parce qu'on siphonne dans le régime d'assurance automobile, mais on siphonne aussi dans les poches du petit contribuable les montants nécessaires non pas à l'éducation, mais à l'administration des commissions scolaires. Ça, c'est une autre paire de manches, et je ne vois pas de quelle façon le gouvernement peut faire ça les yeux bien ouverts et avec fierté et élégance. Je dis non à cette action-là et ce n'est pas après treize heures qu'on clôt un débat aussi important. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, Mme la députée de Chicoutimi. Mme

la députée.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le Président, nous ne serions pas ce soir en train de discuter de ce projet de loi si le gouvernement n'avait pas abdiqué ses responsabilités en matière d'éducation, s'il avait eu le courage, comme il se doit, comme il aurait été normal qu'il le fasse, d'aller chercher, par le biais de l'impôt sur les particuliers, les sommes nécessaires au fonctionnement des commissions scolaires du Québec. Un projet que nous n'aurions pas à discuter aujourd'hui s'il avait pris ses responsabilités, s'il avait eu le courage de les prendre.

M. le Président, le projet de loi que nous avons sur la table permettra à ce gouvernement d'imposer aux propriétaires fonciers des taxes nouvelles de 321 000 000 $ pour cette année seulement et on estime que, d'ici à quelques années, ce sera annuellement 1 400 000 000 $. Le gouvernement, qui s'est vu couper les transferts par le fédéral, n'a pas pris ses responsabilités. Il s'est tourné vers les commissions scolaires et il a dit: Moi, je n'ai pas le courage de prélever des taxes: vous, vous allez le faire à ma place. C'est ce pourquoi, ce soir, M. le Président, nous sommes en train de discuter de ce projet de loi.

C'est un projet de loi à ce point contesté que le gouvernement, après dix-neuf heures de commission parlementaire - et c'est une atteinte à la démocratie, aux droits des parlementaires -a bâillonné l'Opposition. Pourquoi pensez-vous que le gouvernement a bâillonné l'Opposition? Parce que l'Opposition s'en allait dans toutes les directions? Parce que l'Opposition défendait un dossier qui n'était pas appuyé par la population? Parce que c'était un bon projet de loi? C'est pour ça que le gouvernement a bâillonné l'Opposition? Non, M. le Président. M. le Président, si le gouvernement a cru bon et utile de bâillonner l'Opposition, de brimer les droits des parlementaires, d'empêcher qu'on exerce nos responsabilités fondamentales de représenter les citoyens et les citoyennes du Québec, c'est parce que ce projet de loi est fortement contesté. Nous aurions l'air complètement demeurés si nous étions en train d'essayer d'amener ce gouvernement à entendre les partenaires sur une bonne loi. Tout le monde dirait: À quelle place qu'ils s'en vont? Si nous avons pu le faire, si nous le faisons, c'est parce que nous savons tous - et ils le savent aussi - que ce projet de loi est contesté et contestable.

Contesté et contestable et on a imposé le bâillon. Vous savez pourquoi, le bâillon? Parce que le gouvernement sait - et le ministre s'en est aperçu le premier - que plus on avançait dans l'examen du projet de loi, plus les partenaires trouvaient que le projet de loi était mauvais et, M. le Président, y compris les commissions scolaires qui, au premier abord, se sont laissées impressionner par le discours du ministre. Vous savez, il a le tour le ministre. Il disait: Ça va vous donner des nouveaux pouvoirs. Ça va vous donner une plus grande autonomie. Les commissions scolaires l'ont cru au départ. Mais plus elles examinaient le projet de loi, plus les commissions scolaires, les seules qui auraient pu être satisfaites de ce projet de loi, disaient: On n'en veut pas dans cette formule-là, on n'en veut pas.

Les commissions scolaires, les municipalités et l'UPA l'ont dit avec beaucoup de vigueur. Le gouvernement a refusé de les entendre parce qu'il savait pertinemment qu'elles seraient contre le projet de loi. En venant se faire entendre, elles auraient pu ainsi mobiliser un peu l'opinion publique. Alors, si le gouvernement a imposé le bâillon, ce n'est certainement pas parce que c'était un projet de loi qui était bon et ce n'est certainement pas parce que c'était un projet de loi qui était apprécié; c'est parce qu'il craignait que les gens s'aperçoivent qu'il s'agissait d'un mauvais projet de loi où le gouvernement abdique ses responsabilités.

Vous aurez remarqué également - ce soir, c'était assez frappant - que le ministre a changé son discours. D'un projet de loi qui ne modifiait pas sensiblement la capacité des municipalités à aller chercher des revenus par le biais de la taxe foncière, dès le départ, le ministre reconnaît qu'il y a un changement dans l'équilibre, et je le cite: "Un changement dans l'équilibre du partage de l'assiette fiscale entre les commissions scolaires et les municipalités." Là, il le reconnaît, ce soir.

Vous ne l'avez pas non plus entendu parler d'un pouvoir accru pour les commissions scolaires, parce que là il ne pouvait plus tenir le discours parce qu'on lui disait, en commission parlementaire: M. le ministre, on ne peut pas parler de pouvoir, parce qu'ils sont allés chercher notre taxe. Le pouvoir de taxation. Il existe un véritable pouvoir lorsque vous pouvez utiliser le fruit de la taxation pour atteindre vos objectifs particuliers, pas pour aller entretenir des équipements. Les commissions scolaires ne veulent pas de ça. Les commissions scolaires, les équipements, les bâtisses, qu'est-ce que vous voulez que ça leur fasse? Ce que les commissions scolaires veulent comme pouvoir, c'est définir les objectifs et avoir les budgets nécessaires pour se donner des objectifs, une pédagogie, des services qui correspondent aux besoins de leur communauté. C'est ça que les commissions scolaires veulent et il n'y a rien dans de projet de loi qui va leur permettre ça, M. le Président.

Curieusement, nous n'avons pas non plus entendu le ministre parler de pouvoirs additionnels, parce qu'il sait bien qu'il n'en existe pas, pas plus qu'il n'existe d'autonomie accrue pour les commissions scolaires. La marge de manoeuvre, par exemple, parlons-en. La marge de

manoeuvre, c'est moins de 1 % pour les commissions scolaires. Il n'y a pas plus de pouvoirs, pas plus d'autonomie et les marges de manoeuvre, c'est ridicule. Par exemple, ce projet de loi, M. le Président, va obliger les propriétaires fonciers des régions à payer le maximum de la taxe. Vous allez comprendre. Dès que vous êtes dans une grande municipalité, vous allez payer à peu près 50 % moins d'impôt foncier que si vous étiez dans une région éloignée parce que la valeur foncière, dans nos petits villages, dans nos régions éloignées, est beaucoup moindre et elle n'est même pas suffisante pour combler les besoins des commissions scolaires et là, on va avoir recours à la péréquation.

La péréquation, M. le Président, vous savez ce que c'est. La péréquation, c'est quand vous avez un système qui est inéquitable, qui ne permet pas de donner les mêmes services. Là, on dit: C'est bien, on va faire la péréquation. Terre-Neuve connaît ça; elle a tout près de 8000 $ par personne, par citoyen qui lui reviennent en péréquation parce que c'est une province pauvre, une province à l'endroit de laquelle on a la même attitude qu'on a à l'endroit des assistés sociaux. La péréquation, M. le Président, dans les commissions scolaires: on fait des commissions scolaires du Québec en région des assistés sociaux du réseau scolaire parce qu'elles seront toujours obligées d'aller défendre le maintien des ressources en dépit de la décroissance, par exemple, des clientèles. On en fait des assistés sociaux. La responsabilité d'un gouvernement, c'est d'assumer entièrement les frais de l'éducation pour que les services soient les mêmes, quelle que soit la région, et qu'une région, parce que plus pauvre, ne se sente pas à la remorque des autres commissions scolaires pour subvenir à ses besoins. C'est méprisant et c'est dévalorisant pour des individus, mais ça l'est également pour des commissions scolaires, M. le Président.

Les équipements scolaires ont de bonnes chances de ne pas être égaux sur le territoire du Québec. Que les équipements scolaires ne soient pas comparables d'une région à une autre, M. le Président, ça a un effet direct sur la qualité de l'éducation. La qualité de l'éducation dépend des équipements que vous avez en main pour la dispenser. Et, là, on va introduire une iniquité dans la dispensation des services éducatifs. On remet en question le droit à l'éducation, à un service éducatif égal, quel que soit votre lieu de résidence. C'est ça qui est remis en question par le biais de ce projet de loi, M. le Président.

L'éducation, c'est une responsabilité de l'État, tout comme la santé, M. le Président. Il n'est pas permis d'introduire une disposition qui vient remettre en question ce principe fondamental. Nous étions convaincus qu'il s'agissait là d'un acquis de notre société, d'un droit inaliénable qui reconnaissait que, quel que soit votre lieu de résidence, vous aviez droit à l'éducation.

C'est intéressant pour une société, pour un gouvernement, que les gens soient scolarisés, c'est même extrêmement rentable, c'est prouvé. Alors, d'abord, c'est un mauvais calcul, c'est inéquitable et c'est un gouvernement qui n'a pas le sens des responsabilités. (23 heures)

M. le Président, le projet de loi que nous avons sur la table introduit de l'inéquité, fait des commissions scolaires des commissions scolaires assistées sociales du réseau scolaire, appauvrira les régions en matière de services éducatifs, en matière de qualité des équipements, M. le Président, mais plus sérieusement, ce qui est tout à fait inacceptable - je cherche un terme qui soit parlementaire, M. le Président -c'est ce mépris que ce gouvernement a eu à l'endroit de son principal partenaire qui s'appelle les municipalités.

Tout ça s'est fait en cachette, non seulement des municipalités, mais du ministre des Affaires municipales. Ça s'est concocté en catimini entre le ministre de l'Éducation et le président du Conseil du trésor et, quand le ministre des Affaires municipales s'en est aperçu, il était comme un peu trop tard. Ils ont un peu trompé tout le monde en disant: D'abord, on va aller chercher 75 000 000 $. Alors, les municipalités se sont dit: 75 000 000 $, de façon temporaire, ça peut toujours aller. Elles se sont réveillées le lendemain matin, c'était rendu à quelque chose comme 190 000 000 $ et, à terme, nous sommes rendus pour cette année à 321 000 000 $. Et, au total, on estime qu'il en coûtera 1 400 000 000 $, de 75 000 000 $ à 1 400 000 000 $. Le gouvernement a trompé ses principaux partenaires que sont les municipalités et, sans consultation, il a modifié, comme l'a dit le ministre, d'entrée de jeu, il a apporté un changement dans l'équilibre du partage de l'assiette fiscale entre les commissions scolaires et les municipalités, et les partenaires n'étaient pas dans le coup, M. le Président. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (m. bissonnet): merci, mme la députée de chicoutimi. je reconnais maintenant le prochain intervenant, m. le député de rimouski et adjoint parlementaire au ministre de l'éducation.

M. Michel Tremblay

M. Tremblay (Rimouski): M. le Président, vous me permettrez d'ajouter mon propos au sujet de l'adoption du projet de loi 69, surtout sa prise en considération suite au rapport de la commission de l'éducation. J'ai écouté avec beaucoup d'attention les propos de l'Opposition, surtout de Mme la députée de Chicoutimi qui a tendance à vouloir traduire dans ses propos des intentions beaucoup plus grandes ou attribuer au gouvernement des intentions beaucoup plus

grandes qu'on a là virtuellement. Je qualifierais même ses propos...

M. Boulerice: Question de règlement, M. le Président. Je vous demanderais de bien vouloir vérifier...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vais vérifier ça, M. le député. Qu'on appelle les députés, s'il vous plaît!

Des voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Une voix: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît, M. le député! S'il vous plaît! Vous pouvez poursuivre, M. le député de Rimouski.

M. Tremblay (Rimouski): Alors, M. le Président, j'allais dire que la députée de Chi-coutimi avait tenu des propos démagogiques à l'effet de laisser entendre que nous avions l'intention, comme gouvernement, d'aller chercher 1 300 000 000 $ avec la ponction que nous voulons faire pour la taxe scolaire. Bien au contraire, nous avons établi bien correctement nos positions et je pense que notre discours est bien connu, il est bien clair et bien net. La ponction maximum que nous pouvons aller chercher l'année prochaine est de l'ordre de 312 000 000 $. Alors, bien au contraire de ce que la députée de Chicoutimi veut laisser entendre, nous n'avons pas l'intention d'aller chercher des sommes supplémentaires à ce montant de 312 000 000 $ pour l'année prochaine.

Elle laissait entendre que les commissions scolaires étaient des assistées sociales du système. Imaginez-vous! Des commissions scolaires au Québec étaient sous-financées. Nous n'en disconvenons pas. Les commissions scolaires n'ont peut-être pas la totalité du financement dont elles auraient besoin. Cependant, nous devons constater que les commissions scolaires ont des surplus accumulés de l'ordre d'à peu près 130 000 000 $, ce qui n'est pas une somme énorme, mais c'est loin d'être une situation désastreuse. L'opération que nous allons faire pour aller chercher des taxes scolaires dans l'impôt foncier donnera une marge supplémentaire de 41 000 000 $ aux commissions scolaires, de façon à leur donner un petit peu plus de marge de manoeuvre et assumer leurs responsabilités.

Nous avons entendu la députée de Chicoutimi nous faire un reproche, à savoir d'avoir bâillonné l'Opposition. Bien au contraire, nous n'avons pas bâillonné l'Opposition. Nous les avons entendus 23 heures de temps en commission parlementaire pour finalement n'avoir procédé à l'adoption d'aucun article du projet de loi. Alors, quand on entend l'Opposition faire de l'opposition systématique à un projet de loi, la bonne volonté n'étant plus, il nous faut procéder. Et nous avons procédé comme gouvernement et nous avons demandé de suspendre les règles et nous les avons effectivement suspendues de façon à assumer nos responsabilités comme législateurs et comme gouvernement.

Le critique officiel de l'Opposition nous reproche aussi d'avoir refusé d'entendre des organismes, entre autres, l'UMQ et l'UMRCQ. Bien au contraire, nous les avons invités. Nous leur avons donné un temps d'antenne, une heure chacun, et, nécessairement, ils n'ont pas pu répondre à notre invitation. Alors, encore là, nous n'avons pas refusé d'entendre les organismes; au contraire, nous avons voulu les entendre, mais les organismes n'ont pu se présenter en temps et lieu et, forcément, nous avons dû procéder à l'étude article par article du projet de loi. Mais, comme l'Opposition a fait un refus de collaborer, nous n'avons pu adopter aucun de ces articles et, par conséquent, il nous a fallu passer à la loi des mesures exceptionnelles.

Maintenant, le critique officiel de l'Opposition semble laisser entendre qu'il n'y aura aucun revenu autonome pour les commissions scolaires. Mais je dois vous dire que toutes les commissions scolaires recevront un revenu autonome augmenté net de 5 %, ce qui est loin d'être négligeable. C'est-à-dire que les 41 000 000 $ plus le système de péréquation feront en sorte que le» commissions scolaires auront une marge de manoeuvre nette d'environ 5 % pour les aider à subvenir à leurs besoins.

La péréquation aussi est un excellent système. C'est un système qui va aider des commissions scolaires plus petites ou encore qui ont moins d'argent à pouvoir avoir accès à une source de financement qui viendra équilibrer la taxe scolaire à travers la province de Québec.

Le projet de loi qui a 22 articles, nécessairement, a eu droit à des amendements. Sou-ventefois, l'Opposition nous reproche ou reproche au ministre d'apporter beaucoup d'amendements. Pourquoi apportons-nous des amendements? Nous apportons des amendements parce que nous sommes à l'écoute de l'Opposition, nous sommes à l'écoute des commissions scolaires, nous sommes à l'écoute de la population et, de ce fait, en cours de route, nous sommes en mesure d'apporter des amendements plutôt que de laisser partir la loi avec des règlements qui ne feraient pas l'affaire de la collectivité.

La députée de Chicoutimi a tendance à vouloir laisser entendre que le ministère de l'Éducation, ou encore le ministre de l'Éducation ou le gouvernement n'a pas une attention particulière pour la qualité ou l'aspect pédagogique. Dois-je vous dire que nous avons une très grande considération pour l'aspect pédagogique? A preuve, nous avons signé une convention

collective avec l'ensemble des enseignants au québec et avec l'ensemble des différents services qui sont offerts dans les commissions scolaires, offerts par les personnels. alors, tous les personnels des commissions scolaires ont vu leur convention collective reportée, et avec des augmentations substantielles et, nécessairement, ça a eu pour effet d'améliorer le climat à l'intérieur de l'école. quand j'entends la députée de chicoutimi nous blâmer de ne pas donner un apport particulier à l'aspect pédagogique, je pense que quand nos personnels sont heureux à l'intérieur des commissions scolaires, à ce moment-là, le climat étant meilleur, je pense qu'on peut s'attendre que les enseignements seront également meilleurs. (23 h 10)

II faut considérer aussi les enveloppes de fonctionnement des commissions scolaires qui sont indexées et qui donnent à ce moment-là un petit peu plus d'argent aux commissions scolaires pour l'augmentation des services à leur équipement scolaire.

M. le Président, lorsque j'entends l'Opposition nous dire que nous ne tenons pas compte des lettres de M. Desrosiers ou de M. Nicolet, les deux présidents des Unions des municipalités et que ces gens-là nous disent que la péréquation ne règle pas le sous-financement des commissions scolaires, dois-je vous dire qu'à ce moment-là, si nous n'en avions pas du tout de péréquation, je me demande quelle formule magique nous pourrions inventer pour donner un juste équilibre des ressources financières des commissions scolaires dans l'ensemble du territoire québécois.

Le député de Jonquière nous a dit que nous avions à ce moment-là trompé la population parce que nous avions trompé les municipalités. Bien au contraire, nous avons entendu les municipalités. Dans un premier temps, celles-ci nous ont laissé entendre qu'elles étaient prêtes à nous laisser un champ de taxation de 75 000 000 $. Nécessairement, le gouvernement en avait besoin d'un peu plus et nous avons profité de la circonstance pour pouvoir donner au gouvernement un petit peu plus de marge de manoeuvre et c'est pourquoi le projet de loi que nous avons devant nous présentement, le projet de loi 69, permettra aux commissions scolaires d'aller chercher une taxation de 0,35 $ dans la piastre. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Nous poursuivons maintenant le débat avec l'intervention de M. le député de Laviolette. M. le député.

Motion d'ajournement

M. Jolivet: M. le Président, avant de commencer mon intervention, je voudrais vous faire une motion qui est la suivante: Qu'en vertu des dispositions de l'article 100 du règlement de l'Assemblée nationale, le débat en cours soit ajourné.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, votre motion d'ajournement du débat est recevable et je vous cède la parole.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je suis bien heureux de savoir que la motion que je présente est une motion recevable, d'autant plus que la demande d'ajournement que je fais de ce débat est basée sur beaucoup d'arguments. Je vais vous en donner un comme exemple. Le ministre va me regarder avec un drôle d'air en disant: Pas encore celui-là, ça n'a pas de bon sens.

Au début du mandat en 1985, le ministre de l'Éducation est arrivé en cette Assemblée avec un projet de loi. Le projet de loi touchait la commission scolaire du Nouveau-Québec. Il avait pour but d'intégrer l'ensemble des bâtisses de cette commission scolaire qui avait été mise sur pied, à l'époque, pour donner des cours à des jeunes à la Baie James. Alors, quand le gouvernement est arrivé au pouvoir en 1985, il s'est retrouvé avec une certaine obligation qui avait fait suite aux négociations avec les gens du Nord pour permettre justement que la commission scolaire ne soit plus sous la responsabilité de la Société d'énergie de la Baie James qui avait la responsabilité d'organiser les services dans le milieu, mais beaucoup plus selon le système normal et traditionnel des commissions scolaires.

Le projet de loi avait quatre articles et, comme ce projet de loi avait quatre articles, sur le coup, comme critique de l'Opposition en matière d'éducation, je me suis dit: Bien, ça ne doit pas être difficile, un projet de loi de quatre articles, vous avez l'introduction, la fin puis deux articles à l'intérieur. Ce n'est pas grand-chose. Ça doit être facile J'ai quand même pris le projet de loi. J'ai demandé à mon collègue, le député d'Ungava qui était un nouveau à l'Assemblée à cette époque, d'examiner avec sa commission scolaire ce qui se passait. La réponse est venue directe, rapide de la commission scolaire: Ça n'a pas de bon sens, M. le Président, oh est en train de nous spolier.

Comme commission scolaire, on nous donne des obligations et on nous enlève la crème sur le gâteau et, en plus, on nous donne la crème sûre. Et là, les gens ont dit: Ça n'a pas de bon sens, il faudrait que le ministre nous entende. Alors, j'ai fait mon travail d'Opposition. J'ai dit au ministre, en le rencontrant avant qu'on débute l'étude du principe: M. le ministre, d'après les renseignements que j'ai, il y a quelque chose qui se passe. Vous devriez peut-être consulter plus à fond, plus profondément, vous devriez avoir la chance de regarder avec la commission scolaire et moi, comme membre de l'Opposition, dans ce qu'on appelle une rencontre particulière. Donc,

des auditions particulières, entendre ce que la commission scolaire a à dire. Le ministre me voue depuis ce temps une sincérité la plus forte du fait que je l'ai aidé à éviter une erreur. Le ministre sait très bien que, n'eût été de l'intervention que je lui ai demandée, il se serait fait passer, comme on dit en bon québécois, un sapin. Ses fonctionnaires, voyant arriver un nouveau ministre, comme il est normal, il arrive, disent: On va lui en passer une petite vite. La petite vite, c'est le ministre qui, je dis bien normalement, parce que ce n'est pas toujours vrai... Il est considéré comme un homme méticuleux, consciencieux, qui examine de fond en comble les sujets, mais je vais vous dire que, n'eût été de mon intervention, cette fois-là il ne le faisait pas comme ça. Ce n'est pas la seule fois d'ailleurs qu'il risque et, même dans celui-là, j'ai quelques craintes. Alors, je me disais: Si je prends cet exemple qui a fait en sorte que le ministre a été obligé de réimprimer le projet de loi, suite à l'audition particulière que nous avons eue, suite aux représentations que nous avons faites, je dois dire que j'ai utilisé mon pouvoir d'Opposition de devoir donner mon consentement, parce que le but du ministre était exactement le mien, ce n'était pas de pénaliser la commission scolaire, mais, vous savez, il n'avait pas toute la responsabilité comme ministre. Il y avait un ministre à l'époque qui s'appelait Gobeil, qui était président du Conseil du trésor et qui avait pour but d'aller chercher un peu plus d'argent. Il s'est aperçu que le président du Conseil du trésor était en train de lui jouer un tour avec l'aide de ses fonctionnaires du ministère. Le ministre a changé d'idée, mais là ça lui prenait mon opinion et mon accord. Si le ministre veut le prendre comme tel, mon droit de veto.

Comme membre de l'Opposition, ne voulant pas pénaliser la commission scolaire, j'ai accepté, avec le ministre, la réimpression du document: huit nouveaux articles sont apparus et j'ai profité de la circonstance pour régler un petit problème, le ministre s'en souvient, celui des professionnels non enseignants intégrés à la commission scolaire pour leur donner une justice que le projet de loi ne leur donnait pas.

Alors, si je demande ce soir l'ajournement du débat, peut-être que pendant cet ajournement de ce débat qui est en cours, M. le ministre va dire: le député de Laviolette et ses collègues ont peut-être raison. Il serait peut-être mieux que je me recule un peu, que je regarde avant d'agir. Je sais que c'est plus dur pour lui, cependant, M. le Président, parce que le ministre a été l'initiateur. Des fois j'ai quasiment l'impression, mais je ne peux pas lui prêter d'intention, mais je peux dire: peut-être même dans le dos du ministre des Affaires municipales. Le ministre des Affaires municipales a pris, pour une rare fois, des vacances au mois de janvier. Même si le ministre des Affaires municipales avait accepté le décret du mois de novembre, il n'était pas présent à ce moment-là. C'est quand il est revenu qu'il a été tout surpris. On a même eu des conversations de corridor où le ministre des Affaires municipales s'est fait donner des petites tapes dans le dos par ses employés, par des gens, lui disant: C'est une mauvaise passade à faire, puis le ministre reste en place. N'ayez pas peur, on va vous aider. Mais, pendant ce temps-là, le ministre des Affaires municipales se faisait avoir rondement, pour ne pas dire directement, par un ministre qui semble être un peu plus fort, qui est supposé voir ses dossiers davantage, le ministre de l'Éducation.

Là on a fait accroire à du monde des choses, de telle sorte, M. le Président, que j'aurai l'occasion de revenir sur le fond, mais je vous dirai que cette inquiétude demeure dans mon esprit. Comme elle demeure dans mon esprit, il me semble qu'un ajournement de ce débat pourrait permettre au ministre de l'Éducation d'aller se coucher, de nous permettre d'aller nous coucher et de regarder ça et de revoir demain, peut-être après la période de questions, et dire: M. le Président, M. le député de Laviolette avait raison. En conséquence, je vais demander à mon leader de ne point rappeler le sujet en discussion. On reverra ça à l'automne. Peut-être qu'entre-temps on aura eu l'occasion de rencontrer les municipalités. Peut-être qu'on aura compris auprès des commissions scolaires que le cadeau qu'on est en train de leur donner, c'est un peu un cheval de Troie, ou, selon le principe, un cadeau de Grecs. Pas parce qu'on en a contre les Grecs, mais c'était un moyen qu'ils avaient de pouvoir gagner une bataille en ayant un beau cadeau qui s'appelait le cheval de Troie, mais, une fois qu'on a ouvert le ventre du cheval de Troie, l'armée est entrée dans les palissades et a gagné la bataille. Alors, on pourrait dire que le cadeau qu'on est en train de donner aux commissions scolaires, c'est un cadeau empoisonné, un cadeau dont elles verront les effets plus tard. Alors, avant que le ministre n'utilise le pouvoir qu'il a dans ce début du second mandat de faire comme il a dit à des jeunes d'un collège quelque part dans la péninsule gaspésienne, dans le Bas-Saint-Laurent, Gaspésie: Écoutez, on est mieux de le faire immédiatement que de le faire au moment de l'élection... (23 h 20)

Alors, le ministre n'est pas plus fou qu'un autre. Il utilise le pouvoir de faire oublier les choses. Il pense que la mémoire publique n'est que de six mois. Nous allons lui rappeler que la mémoire de l'Opposition rafraîchira continuellement la mémoire de la population sur les gestes qu'ils ont posés aujourd'hui.

Si, par exemple, le ministre s'aperçoit, comme je lui disais l'autre jour, que c'est environ presque trois fois plus de taxes scolaires qu'on va prélever dans ma municipalité, chez moi... Le ministre ne m'a jamais contredit sur le fait que la commission scolaire de Grand-Mère,

qui a 0,13 $ actuellement, n'aura pas la possibilité de les faire monter à 0,35 $. C'est presque trois fois, 0,35 $; ce n'est pas trois fois plus, mais c'est presque trois fois. Disons deux fois et quart, deux fois et trois quarts, même une fois et demie. C'est pour ça que je vous dirais qu'il y a des débalancements qui vont se faire dans la municipalité, selon tel et tel niveau de la valeur réajustée de la maison, du terrain, etc.

Donc, le ministre réfléchirait peut-être et dirait: Oup! Le député de Laviolette vient de m'ouvrir un peu une idée ou l'éclair... Alors, à ce moment-là, je pense que je serais mieux non pas de reculer... Je ne lui demande pas de reculer; je lui demande d'attendre pour mieux réfléchir, pour prendre une décision qui soit convenable dans les circonstances, M. le Président.

Alors, il me semble que la motion d'ajournement que je présente est une motion totalement dans l'ordre. Cette motion, c'est pour aider le ministre. Je ne veux pas lui nuire. Le ministre le sait très bien, il me connaît. Je veux l'aider. Je veux l'aider pour qu'il prenne la plus difficile décision de sa vie, mais la meilleure en soi. Alors, M. le Président, j'aurai l'occasion d'entendre les deux intervenants qui restent et j'utiliserai mon droit de réplique pour essayer de convaincre à nouveau - si je ne l'ai pas fait maintenant - le ministre de l'Éducation. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Laviolette. Je reconnais maintenant M. le ministre de l'Éducation sur la motion d'ajournement du débat. M. le ministre.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, l'Opposition continue de fonctionner au rythme reposant auquel elle nous a habitués depuis une couple de semaines, un rythme de charrette rurale des anciens temps. Elle s'imagine qu'à ce rythme on pourra régler les problèmes énormes et très complexes auxquels fait face l'Assemblée nationale de 1990. Je regrette infiniment, mais ce n'est pas la manière d'aborder des problèmes, si l'on veut en venir à des solutions.

Je rappelle brièvement un point qui a fait l'objet d'interventions précédentes, mais qui me servira d'introduction cette fois-ci. On laisse croire que le projet de loi 69 serait générateur d'iniquités à travers le Québec, ce qui mettrait en difficulté les commissions scolaires situées en périphérie ou disposant d'un niveau de développement économique et social moins avancé que les régions métropolitaines, par exemple. Je pense que c'est absolument faux et le projet de loi a été conçu de la manière suivante: II aura pour objet de procurer à chaque commission scolaire un plancher de revenus autonomes qui lui fournira des ressources nécessaires pour prendre en main la gestion de ses bâtisses, de ses écoles et de ses immeubles scolaires. C'est arrangé de telle manière, par le jeu combiné de la taxation et de la péréquation, que les commissions scolaires moins riches se verront garantir un montant de base plus élevé et les commissions scolaires plus riches, un montant de base moins élevé.

Si vous prenez les commissions scolaires de l'île de Montréal et la commission scolaire de Québec, par exemple la Commission des écoles catholiques de Québec, ces commissions se verront garantir un montant de base qui va être autour de 502 $ à 505 $ par année par élève, tandis que dans les commissions scolaires moins riches ça va graviter plus autour de 550 $, 560 $ et 570 $. Pourquoi? Parce que le but du projet de loi, c'est de faire en sorte que partout à travers le Québec on dispose de ressources qui vont permettre de garder notre pacte scolaire dans l'état déjà excellent où il se trouve actuellement.

J'entendais le député d'Abitibi-Ouest nous dire: Oui, mais l'éducation, c'est la responsabilité de l'État. L'éducation, c'est la responsabilité de la société politique, laquelle comprend le gouvernement qui est à Québec, les gouvernements municipaux et les commissions scolaires aussi, qui sont un corps politique de plein droit. Et qu'on donne une responsabilité un petit peu plus large à la commission scolaire en matière de financement scolaire, il n'y a absolument rien d'hérétique à ça. Ça ne contredit absolument pas le principe suivant lequel l'éducation est la responsabilité de la société politique. On voit un aménagement différent des responsabilités.

Et je vous dirai, M. le Président, que les ressources totales que l'État consacre à l'éducation, cette année, sont supérieures à 9 000 000 000 $ et le montant dont il est question en ce qui touche la réduction des subventions de l'État aux commissions scolaires est de 191 000 000 $ pour l'année 1990-1991. Faites le calcul sur l'ensemble des dépenses que le gouvernement consacre à l'éducation. Qu'on voie à transférer cette faible partie à un mode de financement qui relèverait directement des commissions scolaires par la voie d'un impôt qui était sous-utilisé au Québec, l'impôt foncier, il n'y a absolument rien d'hérétique là-dedans et, encore une fois, je le répète, il n'y a absolument pas de quoi bouleverser les montants.

Le député de Laviolette a présenté une motion d'ajournement du débat. Je pense qu'il nous donne un bon exemple de ce dont nous avons été témoins depuis déjà plusieurs jours: des tactiques dilatoires pures et simples. On vient à peine de commencer le débat, M. le député de Laviolette. Il est de bonne heure, il est 23 h 25. On est habitués à veiller beaucoup plus tard que ça. J'apprécie votre sollicitude à mon endroit, mais mes besoins de sommeil ne sont pas aussi considérables, soyez bien à l'aise.

Vous avez raconté un exemple, tantôt, qui m'a vivement intéressé. Vous avez parlé de la commission scolaire à propos de laquelle on avait préparé un petit projet de loi au sujet duquel votre intervention fut très utile et, je vous l'ai dit à ce moment-là et je le répète aujourd'hui sans arrière-pensée, j'en fus reconnaissant, même si elle ne fut peut-être pas la seule à m'influen-cer dans ce cas-là. Il y en eut d'autres également, mais la vôtre en fut une et on ne la diminuera pas ce soir. Mais rappelez-vous une chose, vous n'avez pas fait d'obstruction cette fois-là. Vous en êtes venu directement au point. Nous sommes arrivés à la commission parlementaire et, dans les 10 premières minutes de discussion, on était directement sur le coeur du sujet. Je vous ai dit de venir au coeur du sujet, ça, ça nous intéresse, c'est notre préoccupation majeure et, dans l'espace d'une heure, je pense que nous étions passés à travers le problème. Nous avions rédigé un nouveau projet de huit articles dont les bons effets durent encore et qui a donné satisfaction à tout le monde.

Si les collègues du député de Laviolette s'étaient comportés de la même façon qu'il le fit cette fois-là dès le début des travaux de la commission parlementaire, dans les 22 heures que nous avons eues, nous serions passés à travers le projet de loi et je connais assez l'esprit cons-tructif du député d'Abitibi-Ouest pour savoir que, s'il n'avait pas obéi à une consigne de parti, nous aurions amélioré ce projet de loi comme nous le faisons toujours en commission parlementaire, avec l'esprit d'accueil qui caractérise le gouvernement. Encore une fois, les faits sont là et c'est à vous d'en offrir la réfutation. Vous dites vous-même: Le ministre de l'Éducation prend trop d'amendements. C'est parce qu'il écoute trop, ça. Il ne peut pas arriver qu'il écoute trop à l'année et qu'une semaine il ait eu, je ne sais pas, un mal de foie particulier cette semaine. Je n'ai pas mal à la tête, je suis en très bonne santé, du moins tant que j'évite de voir les médecins. On est capables de vous écouter cette semaine, comme on le fait à l'année longue, mais il y a quelque chose, là, qui n'a pas fonctionné quelque part et j'ai l'impression que c'est de votre côté. Consentir à la motion d'ajournement qui nous est proposée, ce serait non pas amoindrir le mal, mais l'aggraver, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Je reconnais maintenant le porte-parole du groupe parlementaire de l'Opposition officielle, M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président, parce que c'est très important. C'est très important de rappeler ce qui n'a pas fonctionné. Ce n'est pas compliqué, c'est que c'est la première fois en 14 ans qu'on se fait imposer trois motions de bâillon, c'est ça le problème, sans permettre que des discussions aient eu lieu au préalable et sans une planification de ce gouvernement et du leader du gouvernement. Quand mon collègue présente la motion d'ajournement, c'est évident que c'est facile, pour le ministre, de prétendre qu'il ne s'agit que de mesures dilatoires. Mais on n'a pas le choix. Qu'est-ce qu'il nous reste? Je vous l'ai dit, M. le Président, on n'a pas autre chose. On n'a pas autre chose que de prendre les articles du règlement qu'il nous reste puisqu'on doit vivre une motion de bâillon qui a été imposée sans aucune règle logique depuis que je suis dans ce Parlement, puisqu'on commençait à peine notre travail et qu'on l'avait fart correctement.

C'est évident que s'il y avait eu une planification par ce gouvernement, si on n'avait pas attendu à la dernière minute pour appeler les projets de loi importants, majeurs, qui venaient chambouler des principes de fond... parce que, écoutez... Le ministre, tantôt, a pris la peine de dire: II n'y a pas de raison de refaire nos devoirs. Pourquoi disait-il, lui, quand on a adopté le principe... Je ne peux pas parler des deux côtés de la bouche, il y a toujours un bout. Lui, quand on a adopté le principe, il disait: Modification majeure et importante dans le champ de la fiscalité scolaire". Je le cite au texte. Modification majeure et importante! De deux choses l'une: il n'y a rien là ou c'est majeur et important. (23 h 30)

Je tiens à dire à la population du Québec, je tiens à dire aux électeurs, à l'Union des municipalités, à l'UPA, à tous ceux qui sont contre, que nous, on ne parle pas pour dire, dans la même soirée, deux choses différentes. Il y a cinq minutes, il m'a dit: II n'y a rien là, ce n'est pas significatif, sur un budget de 7 000 000 000 $, ça ne représente même pas 1 % de déplacement de la masse monétaire. Il a raison. Ce n'est pas ça le problème, on n'a jamais parlé de ça. Le problème, c'est des devoirs mal faits, des devoirs irrespectueux d'un pacte fiscal, c'est du mensonge de a à z. C'est pour ça qu'on demande l'ajournement.

Si on avait tort, comment se fait-il que, le 14 mai, le premier ministre du Québec, M. Bourassa, écrit aux deux unions en disant: On est d'accord sur les conditions que vous posez pour restaurer le climat de confiance avec ce gouvernement-là, ainsi de suite. Et là, c'est de la littérature, comme d'habitude c'est des belles phrases qui ne veulent rien dire. Regardez quand il arrive à l'os: "J'ai pris connaissance de la vôtre avec intérêt." Mensonge! Pensez-vous qu'il a pris connaissance de ça avec intérêt? S'il avait pris ça avec intérêt, il aurait donné suite à leurs demandes. "Dans un premier temps, il convient de signaler que, compte tenu des politiques du gouvernement fédéral et de sa ferme volonté de

poursuivre l'assainissement..." C'est ça qu'il y a de pire, je reprends, je pensais qu'il avait fait une erreur, mais il n'a même pas fait une erreur: "Dans un premier temps, il convient de signaler que, compte tenu des politiques du gouvernement fédéral - gouvernement qu'ils défendent, qu'ils appuient et à genoux, en plus - et de sa ferme volonté de poursuivre l'assainissement de sa situation financière de même que de la tendance à la décentralisation qui est déjà amorcée - quelle décentralisation qu'il y a dans le projet de loi? - le gouvernement du Québec doit adopter une approche nouvelle en matière de gestion des dépenses publiques. Son choix de continuer à offrir à la population québécoise des services de qualité l'amène donc à redéfinir le rôle de notre secteur public. Le ministre des Affaires municipales, M. Picotte, a largement fait état, lors du congrès de l'Union... "Dans un second temps, j'ai le plaisir de vous informer que le gouvernement vient de créer un comité ministériel sur le partage des responsabilités Québec-municipalités présidé par le ministre des Affaires municipales. Ce comité aura comme mandat, d'une part, d'étudier les impacts d'une révision - regardez ça, regardez l'hypocrisie - du partage des responsabilités entre le gouvernement et les municipalités dans le but d'élaborer une nouvelle entente fiscale." Dans le but d'élaborer une nouvelle entente fiscale! Son ministre, en Chambre, sur le principe, je l'ai cité tantôt: "Nous avons fait des changements dont la nature et les effets ne seraient pas seulement transitoires, mais seraient durables."

Comment voulez-vous qu'on comprenne ce monde-là? Comment voulez-vous qu'on n'arrive pas avec une motion d'ajournement? C'est toujours un écart comme, je ne sais pas, moi, la distance entre La Sarre et Dupuis et le parlement de Québec et, c'est quoi qui est le plus loin dans le monde? Peu importe! C'est un écart qui n'a pas de bon sens. Regardez bien ce paragraphe... C'est l'Australie que je voulais dire. "À cet égard - il arrive à l'os - il convient cependant de vous dire que la question du financement scolaire pourra être abordée à l'occasion de ces assises sans cependant remettre en cause l'approche que le gouvernement a privilégiée dans son dernier budget", parce qu'on a la vérité.

Est-ce qu'on n'est pas légitimé de demander l'ajournement du débat et de dire: Recommencez votre travail comme du monde, en respectant les concernés et en cessant d'écrire des lettres qui n'ont aucune signification, même si c'est signé par le premier ministre du Québec par rapport à la demande des deux unions. Il dit: Écoutez, oui, on va accepter vos conditions, sauf que l'os, le coeur, l'entrée dans le champ foncier et, dorénavant, de vous donner une responsabilité que vous n'avez jamais demandée, il n'est pas question de toucher à ça, c'est réglé. Par contre, venez vous asseoir, vous êtes les bienvenus, on va discuter. On va discuter de ce qui s'est passé pendant sept jours, alors qu'on avait à peu près dix premiers ministres, et n'importe qui qui ne suit même pas la politique disait: C'est une honte, c'est une disgrâce, ça n'a pas de bon sens d'assister à une espèce de magouille comme ça où il y a eu une manipulation sans précédent de l'information par la presse, par des gens qui, volontairement, avaient des messages qui étaient complètement contradictoires aux faits.

Les premiers ministres se succédaient au micro les uns à la suite des autres pour nous dire: Ça avance; ça avance, on progresse. On leur demandait: Sur quoi? Bien, on ne le sait pas, on vous le dira demain. C'est de même qu'on respecte une population? C'est de même qu'on respecte des élus? Alors, quand on propose l'ajournement, je comprends qu'on est légitimé de proposer l'ajournement. On peut bien appeler ça dilatoire et on le sait que, pour eux autres, c'est dilatoire. Qu'est-ce que vous voulez? Avec une motion de clôture, tout est dilatoire. On n'a plus le droit de parole. C'est eux autres qui ont la vérité. Alors, c'est normal que le ministre pense qu'on fait ça uniquement par mesure dilatoire, mais on ne faisait pas ça pour ça. On faisait ça volontairement pour leur indiquer que, quand tu as des partenaires d'impliqués et que tu as un minimum de respect pour des institutions comme les deux unions, tu ne peux pas te comporter comme ils se comportent, surtout pas quand tu leur envoies une lettre, que c'est le premier ministre qui la signe et en disant: Oui, venez vous asseoir et on va le mettre, le sujet, à l'ordre du jour, mais on ne bougera pas; on ne bougera pas.

Ce même premier ministre était partenaire du décret du 6 novembre 1989. Imaginez! Alors, écoutez, je ne peux pas écrire une lettre le 30 mai 1990 et, le 6 novembre, exiger du ministre des Affaires municipales de restaurer une nouvelle formule de fiscalité. Ça ne marche pas ensemble et c'est pourquoi on propose la motion d'ajournement parce que ce sont des devoirs mal faits. C'est quelque chose d'irrespectueux et d'irrévérencieux et, dans ce temps-là, on dit à un gouvernement: Refais donc tes devoirs. Puisque, de toute façon, ce n'est pas un problème d'argent. Lui-même, le ministre, vient de dire: Écoutez, c'est insignifiant ce que ça représente, la marge de manoeuvre. Ce sont ses propos de tantôt, parce que n'oubliez pas, ne pensez pas que les commissions scolaires vont obtenir le montant qu'elles pensaient avoir. Le président lui-même, et je le cite, le président de la Fédération, même si souvent il félicite le ministre, il dit: "Cependant, la marge de manoeuvre demeure tout a fait insuffisante en regard de nos besoins actuels." Parce que, rappelez-vous, à l'origine ils demandaient quoi? 114 000 000 $. Qu'est-ce qu'ils auront d'argent neuf? 40 000 000 $ et, en plus, ils auront des respon-

sabilités pour 300 000 000 $ et quelques. Ils parlaient de 160 000 000 $ et quelques, 173 000 000 $ ou 183 000 000 $ en année d'école, mais nous, on ne marche pas en année scolaire parce que l'année scolaire, il y en a une partie qui est sur l'autre année, six mois-six mois. Mais, en année normale, en année pour le contribuable, eux autres vont comprendre ça que ça va leur coûter 320 000 000 $ de plus et ça, ça veut dire 320 000 000 $ de taxes dans la poche des contribuables.

Alors, c'est pour ça, M. le Président, avec le temps qui m'est imparti, que je suis complètement d'accord avec la proposition de mon collègue de proposer une motion d'ajournement parce que ça n'a pas de bon sens de se foutre d'une population comme ces gens-là le font.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. Je reconnais, en vertu de votre droit de réplique, M. le député de Laviolette et en vous indiquant qu'il y a un maximum de cinq minutes.

M. Jean-Pierre Jolivet (réplique)

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je ne suis pas surpris de l'attitude du ministre. Je suis, cependant, reconnaissant envers mon collègue, le député d'Abitibi-Ouest, de m'appuyer dans la démarche que j'ai entreprise, d'autant plus que le député d'Abitibi-Ouest a eu l'occasion de discuter avec le ministre de l'Éducation de l'ensemble de ce projet de loi. Du moins s'il ne l'a pas fait comme il l'aurait voulu au niveau des articles du projet de loi, article par article, il l'a fait quant aux principes qui sont les principales pierres d'achoppement de ce projet de loi. Alors, dans ce contexte, M. le Président, le ministre, j'aurais pensé qu'il m'aurait, encore une fois, compris comme il l'avait fait il y a maintenant près de quatre ans, qu'il m'aurait accordé le bénéfice du doute, comme on dit dans le métier, mais j'ai l'impression que c'est peine perdue.

Dans ce contexte, M. le Président, pour ne pas retarder indûment les discussions, je ne prendrai pas mes cinq minutes. Je vous demanderais simplement, parce que j'ai l'assurance de ne point convaincre le ministre cette fois-ci, d'appeler les députés pour qu'on passe au vote.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors comme les interventions sont terminées, est-ce la motion d'ajournement du débat est adoptée?

Des voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur vote nominal. Alors, qu'on appelle les députés.

(23 h 40 - 23 h 46)

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je mets aux voix la motion d'amendement d'ajournement du débat du député de Laviolette, que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hoche-laga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour (Jonquière), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), M. Paré (Shefford), M. Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui sont contre cette motion veulent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cusano (Viau), M. Houde (Berthier), M. Maltais (Saguenay), M. Middlemiss (Pontiac), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel (Sherbrooke), M. St-Roch (Drummond), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc (Taschereau), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nel-ligan), M. Kehoe (Chapleau), M. Fradet (Vimont), M. Lemieux (Vanier), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Char-bonneau (Saint-Jean), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Larouche (Anjou), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbi-nière), M. Brouillette (Champlain), M. Bradet (Charlevoix), Mme Cardinal (Châteauguay), M. Després (Limoilou), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Forget (Prévost), M. Lafrenière (Gati-neau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Pa-pineau).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y en a qui s'abstiennent?

Le Secrétaire: pour: 21 contre: 47

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, la motion d'ajournement du débat est donc rejetée.

Nous poursuivons le débat, avec M. le député de Laviolette.

Reprise du débat sur la prise en considération du rapport de la commission

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: M. le Président, je vous remercie de me redonner le droit de parole, d'autant plus...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Laviolette, nous allons attendre quelques instants pour permettre aux députés de retourner à leur commission parlementaire.

S'il vous plaît, je vous demande votre collaboration.

M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Merci, M. le Président, de me redonner la parole, d'autant plus que j'aurais aimé ne pas la prendre. J'aurais aimé que le ministre accepte l'invitation que je lui avais faite, mais comme il m'oblige par le vote grégaire de ses moutons...

Des voix: Hé! Wo!

M. Jolivet: Je dois vous dire, M. le Président,...

Une voix: Un instant!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député. S'il vous plaît, si vous voulez retirer votre dernier propos, M. le député.

S'il vous plaît, M. le député, si vous voulez retirer votre dernier propos.

M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: M. le Président, j'ignore pourquoi le leader du gouvernement est très offusqué. Il ne sait même pas ce que le député a dit, il n'écoutait même pas. Donc, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plait! M. le leader.

M. Chevrette: Un instant!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, je m'excuse, s'il vous plaît! Oui, je vous écoute.

M. Chevrette: m. le président, que je sache, il n'y a rien eu de violent. c'est l'article 35. il n'y a rien eu qui pouvait blesser. c'a déjà été le symbole d'une certaine fête. voyons donc!

Une voix: Voyons donc! On n'est pas des moutons, les Québécois.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le leader, je vous écoute et je demande la collaboration des députés. S'il vous plaît!

M. Chevrette: M. le Président, je...

Le Vice-Président (m. bissonnet): s'il vous plaît! s'il vous plaît! un seul député à la fois. m. le leader de l'opposition officielle, s'il vous plaît! je vous écoute. m. le député, la parole est au leader de l'opposition officielle. si vous voulez poursuivre sur votre question de règlement, m. le leader, je vous écoute.

M. Chevrette: M. le Président, si j'étais certain que ça pourrait permettre au député d'Anjou de faire entendre le son de sa voix, j'attendrais qu'il ait fini pour lever ma question de règlement. Parce que l'objectif fondamental de ma question de règlement c'est simple, c'est que le député de Laviolette, loin d'avoir utilisé un langage violent, contrairement à l'article 35, a même utilisé des termes, M. le Président, avec un air plutôt jovial, en voulant purement et simplement indiquer qu'il y en avait qui votaient par instinct, par réflexe, plutôt que par conviction.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député. M. le leader adjoint du gouvernement, s'il vous plaît!

M. Lefebvre: Oui. J'imagine que le leader de l'Opposition serait d'accord pour ajouter que le député de Laviolette parlait pour les deux groupes parlementaires.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! M. le député de Laviolette, si vous voulez retirer... Ce n'était pas un langage violent, mais j'aimerais quand même que vous retiriez... S'il vous plaît! Ce n'était pas un langage violent ni injurieux, je comprends, mais j'apprécierais que vous retiriez ces propos, tout simplement.

M. Jolivet: M. le Président, vous connaissez ce que je suis. Alors, pour ne pas envenimer ce débat, je n'ai point dit ces mots pour, surtout, ne pas blesser les bergers.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Jolivet: Je vous dirai, d'abord, "les disciples de Panurge", d'autant plus, M. le Président, que j'essayais de convaincre le ministre de l'Éducation du bien-fondé de mon intervention.

Des voix:...

M. Jolivet: M. le Président, il y a des gens qui me dérangent à ma gauche, m'indiquant qu'il n'y a personne qui nous écoute. C'est insultant pour les gens qui nous écoutent. J'aimerais autant que madame puisse se taire et me laisser parler. Donc, j'étais en train de dire-Une voix:...

M. Boulerice: Je vais invoquer, M. le Président, l'article 32 de notre règlement de nouveau...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, mes chers collègues...

M. Boulerice: ...et surtout le dernier paragraphe.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...je vous demande votre collaboration et je demanderais, conformément à la demande du député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, que les députés soient assis à la place que la présidence leur a indiquée. S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Je demande la collaboration des députés dans l'ordre de cette Assemblée, et je vous indique, M. le député de Laviolette, qu'il vous reste cinq minutes.

M. Jolivet: M. le Président, je n'ai pas dit grand-chose jusqu'à maintenant. Je comprends qu'on a voulu me déranger, mais je vais essayer de prendre les cinq minutes pour vous dire ceci: Connaissant ce qui arriverait, peut-être que je n'aurais jamais demandé le vote. Ça n'a pas de bon sens! M. le Président, j'essaie de convaincre le ministre du bien-fondé de notre position. Et quand on nous accuse, de l'autre côté, d'utiliser les moyens qui nous sont permis par le règlement, je rappellerai au ministre de l'Éducation la question que je lui posais à 3 heures dans la nuit de jeudi à vendredi, la semaine passée, et dans laquelle je lui demandais: M. le ministre, lorsque vous étiez membre de l'Opposition, critique dans une telle matière, quand vous étiez chef de l'Opposition, n'avez-vous pas utilisé tous les moyens que vous donnait le règlement pour faire valoir votre point, pour essayer de convaincre le gouvernement qu'il faisait fausse route? Il m'a répondu aussi naïvement qu'il pouvait l'être à l'époque, à certaines occasions, que, mais oui, le ministre avait utilisé ce que le règlement lui donnait. Et je peux vous dire que j'ai longuement entendu ses discours lorsque j'étais président de commission parlementaire, parce que même à l'époque de ses premières armes, il n'y avait pas le temps réglementaire qu'on connaît aujourd'hui. Nous avions d'interminables commissions parlementaires et on lui donnait même la chance de pouvoir excéder le nombre de minutes prévues. j'étais président à votre place, m. le président, et je me souviendrai... parce que le ministre, qui était critique de l'opposition à ce moment-là en matière de finances, avait utilisé énormément de temps et même les gens de l'assistance qui étaient ici avaient dit: oui, on lui donne le temps voulu.

M. Chevrette: Un instant, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: m. le président, vous savez exactement pourquoi j'interviens. quand on n'entend pas parler son collègue qui est à notre gauche immédiate, je pense que...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vais demander à tous les collègues leur collaboration. Il y a un article 32 et je vais vous le lire. À l'article 32: "Les députés doivent observer le règlement et contribuer au maintien du décorum de l'Assemblée. Ils occupent la place qui leur a été assignée par le président, y demeurent assis et gardent le silence à moins d'avoir obtenu la parole. Ils doivent s'abstenir de tout ce qui peut nuire à l'expression d'autrui ou au bon fonctionnement de l'Assemblée." Alors, je vous demande votre collaboration. M. le député de Laviolette, s'il vous plaît.

M. Jolivet: M. le Président, j'étais en train de dire que le ministre avait utilisé, alors qu'il était dans l'Opposition, tout le temps nécessaire, selon son besoin, pour expliquer sa position. D'un autre côté, on lui avait même, dans certains cas, permis d'excéder le temps voulu. Je veux juste lui rappeler une chose qui se passe actuellement sur un dossier aussi important que celui dont on a à discuter ce soir pour des gens qui croient en ce qu'ils ont à défendre.

Je prends l'exemple de M. Elijah Harper, qui est le député autochtone du Manitoba, qui dit: "J'utilise tous les artifices de la procédure parlementaire avec l'appui de 61 chefs autochtones de la province pour bloquer la ratification de Meech avant la date ultime du 23 juin." Dans un autre document, qui est le journal Le Soleil de samedi, on dit: "Dans le clan du représentant néo-démocrate, on assure, de plus, que le répertoire des tactiques dilatoires est loin d'être épuisé. Trois autres motions relatives au dossier constitutionnel devraient, notamment, être mises sur la table avant un vote et sont donc potentiellement susceptibles d'être longuement débattues."

Pourquoi, dans d'autres Parlements, on accepte la démocratie, on accepte que les moyens prévus par le règlement soient utilisés et qu'ici on nous bâillonnerait? On nous empêcherait, à ce moment-là, de pouvoir utiliser ce que l'on croit

être utile dans le règlement pour faire valoir une position de la population. J'aimerais savoir pourquoi il y a deux poids deux mesures. Pourquoi, ici, un gouvernement, après peu de temps, pourrait nous dire: Écoutez, si j'ai parlé longuement, c'est parce que moi, j'avais de la matière, j'étais capable, je connaissais mon dossier et que nous, parce qu'on utilise le temps, on serait des innocents? Voyons donc, M. le Président! Vous savez très bien ce que le gouvernement est en train de faire. C'est qu'il ne nous a même pas laissé la chance de faire valoir les points de vue. Il n'a pas voulu écouter les gens. Mon collègue, le député d'Abitibi-Ouest, qui est le porteur du dossier pour l'Opposition, en a fait longuement mention dans son droit de trente minutes pour convaincre le ministre qu'il a fait fausse route et qu'il continue de faire fausse route, et on voudrait lui éviter qu'il continue à faire fausse route, (minuit)

C'est dans ce sens-là, M. le Président, que nous présentons le dossier comme étant un dossier important pour l'ensemble de la population. Nous ne voulons pas que les commissions scolaires soient flouées, pas plus que les municipalités. Nous ne voulons pas que, par le projet de loi qui est devant nous, on en arrive un jour à dire: On a mal fait. Il est temps - j'ai présenté une motion dans ce sens-là - d'arrêter le débat et de réfléchir davantage avant d'y revenir. Le ministre n'a pas voulu. Alors, nous allons, comme membres de l'Opposition, essayer de le convaincre de ne pas passer le projet de loi. Si les gens qui sont de sa formation politique, parce qu'il dit par le petit doigt: Votez de telle façon, votent de telle façon, c'est bien leur droit, mais vous ne me ferez pas accroire, M. le Président, que le ministre n'indique pas de quel côté le vent souffle. En conséquence, les gens qui le suivent le suivent au doigt et à l'oeil, à la baguette, comme autrefois dans les écoles où on suivait à la baguette le directeur, ou la directrice, ou l'enseignant, ou l'enseignante qui indiquait de quel côté il fallait pencher. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. Mme la députée de Terrebonne.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. Vous savez, M. le Président, je suis intervenue à quelques reprises en commission parlementaire sur ce projet de loi que nous n'avons malheureusement pas eu le temps d'étudier complètement. Au tout début de l'étude, le ministre de l'Éducation nous avait assuré de sa patience infinie, mais, malgré sa patience infinie, notre commission s'est limitée a seize heures. Tout de suite après, motion de clôture, bâillon. J'ai toujours cru, M. le Président, que, lorsqu'on passait un projet de loi, c'était vraiment pour répondre à un besoin exprimé par une partie de la population. Lorsqu'on regarde attentivement le projet de loi 69, on s'aperçoit que, loin de répondre à un besoin, il a été dénoncé par plusieurs instances, mais ce soir je veux vraiment m'attarder sur les revendications des commissions scolaires.

Vous savez, le but premier de ce projet de loi était la responsabilisation des commissions scolaires. J'ai toujours entendu, durant ma jeunesse: Demandez et vous recevrez. Mais je vous avoue que je ne peux vraiment pas citer la loi 69 comme exemple, parce qu'on va prendre le temps, M. le Président, de regarder ensemble, durant les minutes qui me sont attribuées, quelles étaient les demandes exactes des commissions scolaires et quelle a été la réponse du ministre. Je vais commencer par cette réponse.

La réponse du ministre pour la responsabilisation, elle est uniquement liée aux dépenses consacrées au fonctionnement des équipements; uniquement. En termes clairs, ce que le ministre donne aux commissions scolaires par la loi 69, c'est l'obligation d'entretenir et de réparer tout ce qui a trait aux écoles, donc les terrains, les bâtiments, l'ameublement, le mobilier, l'outillage. Il y a aussi l'entretien ménager qui est compris dans ça, la consommation énergétique, et on sait à quel point les commissions scolaires sont inquiètes sur ce sujet-là, parce que tout dernièrement en cette Chambre a été votée une augmentation pour l'électricité. L'augmentation a été accordée à Hydro-Québec et déjà on a commencé à recevoir, et je suis convaincue que les députés ministériels en ont reçu, que le ministre de l'Éducation en a reçu, des objections du côté des commissions scolaires qui s'inquiètent de cette hausse de taxes. On doit assurer aussi la protection et la sécurité. Donc, c'est ce que le ministre leur donne comme responsabilité: tout ce qui regarde les bâtisses, ce qui peut aller, de son aveu même, jusqu'à 312 000 000 $. Mais qu'est-ce que les commissions scolaires demandaient? On en a, des outils pour nous le dire.

La Fédération, à l'automne dernier, parce qu'elle s'inquiétait de son sous-financement, avait passé un questionnaire aux commissions scolaires catholiques et protestantes. Dans ce questionnaire, on retrouve les besoins réels et vous allez voir, M. le Président, que ça ne ressemble aucunement mais aucunement à ce qu'on leur donne par la loi 69. Moi, je veux bien qu'on permette aux commissions scolaires d'être plus autonomes et d'être responsables, mais pour leur accorder ce qu'elles demandent, pas pour aller à rencontre de leurs demandes. Voici ce qu'elles ont demandé. D'abord, pour l'enseignement préscolaire, primaire et secondaire, elles ont demandé des ressources supplémentaires pour le perfectionnement, l'encadrement, le support aux enseignants parce que, présentement, nos commissions scolaires, elles doivent implanter de

nouveaux programmes et, pour ce faire, elles ont besoin d'encadrement, elles ont besoin de support aux enseignants, elles ont besoin de mesures de perfectionnement. Est-ce que la loi 69 les leur donne? Non, elle ne les leur donne pas.

Elles avaient aussi demandé des ressources supplémentaires pour former des groupes plus petits, pour mieux répondre aux besoins d'apprentissage des élèves. Elles avaient demandé des ressources aussi pour acheter des manuels scolaires, du matériel didactique qui répond mieux aux nouvelles normes des programmes. Elles en voulaient en quantité suffisante et en qualité suffisante aussi, M. le Président. Elles avaient également réclamé des ressources pour l'enseignement professionnel. On sait à quel point l'enseignement professionnel est important dans notre société. Donc, on voulait pouvoir acheter de la matière première, le matériel, pour implanter les nouveaux programmes en matière d'enseignement professionnel. On voulait aussi aménager les ateliers, les laboratoires et on voulait, bien sûr, pouvoir donner du perfectionnement aux enseignants pour qu'ils répondent mieux aux nouvelles normes du marché parce que, présentement, il ne faut pas se le cacher, il y a souvent une distorsion entre les besoins des entreprises et l'enseignement professionnel qui est dispensé dans nos écoles. Donc, conscientes, les commissions scolaires souhaitaient pouvoir pallier à ce besoin.

On avait aussi demandé des ressources financières pour des mesures particulières. On sait à quel point, dans notre système, nous avons des enfants en difficulté d'adaptation et d'apprentissage et, ça, dans toutes les commissions scolaires. Le fait qu'on évoque le plus souvent, ce sont, bien sûr, les familles éclatées, mais la réalité est là quand même. Il y a des besoins extrêmement nombreux dans nos écoles pour répondre à tous nos jeunes en difficulté d'apprentissage. Ils sont de plus en plus nombreux. On avait également besoin de ressources pour les personnes handicapées parce que l'Office des personnes handicapées ne subventionne plus, depuis cette année, les nouveaux élèves qui sont admis dans les écoles et on a calculé que les coûts d'intégration de 500 élèves, c'est évalué à peu près à 5 000 000 $. Donc, les commissions scolaires souhaitaient avoir une partie de budget pour répondre à ces besoins-là.

On a aussi des besoins nouveaux du côté des immigrants parce qu'on sait, surtout à la commission scolaire de Montréal, que, de plus en plus, on a des écoles où les immigrants sont même en plus grand nombre que les francophones et, automatiquement, c'est évident que ça demande des sommes d'argent supplémentaires.

On souhaitait aussi répondre à certains problèmes qui existent aussi de plus en plus dans nos écoles du côté de la douance - et je sais que c'est un thème qui est quand même cher au ministre - et on souhaitait aussi... parce que, du côté de nos élèves réguliers, il y a également un manque de psychologues, d'orthophonistes, de travailleurs sociaux, de travailleurs de la santé et, ça, ce besoin-là, il est là. Il est là depuis plusieurs années. Il est réclamé autant par les parents, les comités de parents que par les commissions scolaires. Est-ce que le projet de loi 69 va leur permettre de répondre à ça aussi? Non, M. le Président, parce qu'elles devront répondre à des besoins au niveau de l'immobilier.

Dans notre contexte moderne, il y a aussi un autre sujet qui existe et qui n'existait pas avant, c'est-à-dire la toxicomanie. Elle est là, elle est présente, elle est omniprésente dans nos écoles, principalement dans nos écoles secondaires et ça commence même dans nos écoles primaires, malheureusement, M. le Président. Est-ce qu'on a des sommes d'argent pour contrer cette consommation de drogues qui est de plus en plus évidente dans nos écoles? Est-ce qu'on a des moyens pour faire de la prévention? C'est impossible. Les commissions scolaires ne peuvent répondre à ce besoin-là présentement. (0 h 10)

On souhaitait aussi, du côté des commissions scolaires, avoir des moyens d'enseignement adéquats et, par là, on entendait, bien sûr, le problème des bibliothèques qui sont dans un état lamentable au Québec. Et là aussi, je suis convaincue, autant les députés du côté ministériel et le ministre que nous-mêmes, nous avons reçu des demandes des commissions scolaires. On nous a demandé d'injecter de l'argent pour répondre aux besoins des bibliothèques. Les besoins des bibliothèques sont grands: on manque de conseillers en documentation, de techniciens, de bibliothécaires, et on manque même de l'outil de base, c'est-à-dire les volumes, pour pouvoir les renouveler, pour pouvoir offrir une documentation intéressante à nos étudiants. Et c'est très lié au problème d'alphabétisation dans nos écoles. Donc, on voulait relancer les bibliothèques et on a calculé, du côté des commissions scolaires, que c'est au moins 18 000 000 $ pour relancer les bibliothèques. On a aussi parlé de l'insuffisance d'équipements micro-informatiques, parce que, ça aussi, c'est une nouvelle réalité. De plus en plus, dans nos écoles, on a besoin de matériel moderne, on a besoin des ordinateurs, et c'est à des coûts très élevés, M. le Président. Et les commissions scolaires ont difficilement les moyens de s'offrir des équipements aussi perfectionnés.

Déjà, les commissions scolaires... Ah, pas seulement une minute, M. le Président, j'en aurais pour tellement longtemps. Les commissions scolaires déploraient déjà les exigences bureaucratiques auxquelles elles devaient répondre et elles en avaient nommé beaucoup: des déclarations mensuelles de clientèle, des contrôles de personnel, la dérogation au régime pédagogique, l'âge d'admission, etc; toutes les exigences légales, l'application de la loi 107, l'application

de la loi sur les élections scolaires. Là on en a au moins pour une trentaine de millions. Mais, non contentes de leur laisser toute cette bureaucratie qui demeure, la loi 69, à l'article 1 qui corrige l'article 219 de la Loi sur l'instruction publique, leur ajoute des demandes de documents. Donc, elles vont devoir en avoir encore plus que ce qu'elles avaient déjà à faire, M. le Président.

Donc, en conclusion, puisque mon temps est écoulé, comment peut-on appuyer un projet de loi qui a été dénoncé par l'Union des municipalités du Québec, par l'Union des municipalités régionales de comté, par l'UPA, par les contribuables - et Dieu sait si les contribuables vont le dénoncer encore plus l'an prochain - et qui, en plus, va à rencontre des besoins clairement exprimés par les commissions scolaires? Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Terrebonne. En vertu de l'article 252, M. le ministre de l'Éducation, vous avez cinq minutes pour intervenir après chaque discours. Donc, M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Claude Ryan

M. Ryan: Oui, juste quelques mots, M. le Président, pour apporter certaines précisions aux interrogations que la députée de Terrebonne a, de toute évidence, formulées de bonne foi et en oubliant peut-être de chercher la réponse là où elle se trouve, c'est-à-dire non pas dans le projet de loi, mais dans les nombreuses décisions administratives et budgétaires qu'a déjà prises le gouvernement. Elle a parlé des coûts énergétiques des commissions scolaires. Déjà, par le budget de cette année, nous avons indexé à 4,6 % tous les coûts autres que les coûts salariaux et, en plus, nous avons ajouté une somme spéciale qui sera versée aux commissions scolaires pour leur permettre de faire face aux coûts additionnels d'énergie qui découleront des politiques arrêtées par Hydro-Québec au cours de la dernière année. Par conséquent, de ce côté-là, je pense que c'est bien couvert.

Elle a parlé de la taille des groupes d'élèves. À l'occasion de la dernière convention collective, nous avons diminué de deux unités le nombre moyen d'élèves dans les classes de première année dans les écoles primaires. Les enseignants eux-mêmes nous avaient indiqué, pendant la campagne de l'été dernier, que c'était là le problème majeur auquel il fallait apporter un remède. Nous avons réduit de deux unités le nombre moyen d'élèves et le coût de ça, savez-vous combien c'est? C'est 16 000 000 $, 8 000 000 $ par élève qu'on diminuait, 16 000 000 $. Ce serait bon de le mentionner.

Au point de vue de la formation professionnelle, nous avons eu, ces trois dernières années, un budget de près de 13 000 000 $ par année pour les équipements, et nous avons modernisé des équipements en formation professionnelle de manière formidable. La députée devrait le savoir. Dans son propre comté, nous avons donné, pour l'année 1989-1990, un budget de 1 000 000 $ pour moderniser des ateliers. Je pense que c'est à l'école secondaire Corbeil. Nous l'avons fait dans bien des endroits de la province, du territoire. Ce serait bon de le mentionner si on affirme vouloir s'intéresser à ces choses.

Au point de vue de la micro-informatique, nous avons mis sur pied ce réseau formidable de CEMIS; ce sont des centres d'excellence en micro-informatique scolaire, des centres régionaux qui ont mission de rayonner à travers toute une région pour assurer qu'au lieu d'acheter seulement de la tuyauterie et de la mécanique, comme on faisait autrefois, on ait l'expertise pour se servir de ces instruments très coûteux, et tout le monde reconnaît, c'est une des initiatives les plus intéressantes à travers le monde entier, en matière d'éducation. Il y a seulement l'Opposition qui ne semble pas l'avoir remarqué.

Au point de vue des immigrants, là, avec le programme de promotion du français que nous avons implanté l'an dernier, nous avons injecté, dans les sommes versées aux commissions scolaires, des crédits qui sont récurrents, de près de 6 000 000 $, qui permettent aux commissions scolaires de la région métropolitaine de fournir un meilleur encadrement pédagogique aux élèves en provenance de communautés culturelles, fournir une meilleure assistance pédagogique aux élèves qui sortent des classes d'accueil pour passer en classes régulières, pour aider les commissions scolaires et les directions d'école à établir des meilleurs contacts avec les parents d'enfants de communautés culturelles. Ce sont seulement quelques exemples que je mentionne rapidement, mais puisqu'on me pose des questions, j'espère qu'on voudra bien noter les réponses. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Nous poursuivons le débat. Je reconnais Mme la députée de Johnson.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci, beaucoup, M. le Président. Vous savez, M. le Président, si nous n'étions pas une Opposition responsable, si nous ne prenions pas très sérieusement le travail que nous avons a faire ici, si nous n'avions pas le respect que nous avons des gens que l'on représente et qui souhaitent que nous fassions des interventions pour les aider à voir clair, si nous n'étions pas cette Opposition responsable, vous savez ce que l'on ferait? Depuis le troisième bâillon que nous avons eu aujourd'hui, on aurait fermé boutique. C'est notre dernière semaine avant la fête nationale. On aurait dit: Si

le gouvernement veut gouverner tout seul, si on n'a plus rien à dire, on ferme nos livres et on s'en va chez nous. C'est ça que mériterait le gouvernement. Mais non, M. le Président, nous sommes des gens responsables. Nous avons ici un travail de responsabilité à faire. Et nous avons bien l'intention de le faire, et c'est pour ça que ce soir on parle sur la prise en considération du rapport du projet de loi 69. C'est pour ça, M. le Président, que l'Opposition officielle va faire, jusqu'au bout, et jour et nuit s'il le faut, le travail qu'elle a à faire pour bien représenter son monde. Ce serait beaucoup plus facile de s'en aller chez nous, quand ces gens-là ne respectent pas la population, quand on nous met trois bâillons de file.

C'est quoi la loi 69? La loi 69 c'est la Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et la Loi sur l'enseignement privé. Mais en clair, c'est quoi? En mots clairs, ça veut dire que la loi 69 modifie le financement des commissions scolaires, du Conseil scolaire de 111e de Montréal. C'est ainsi que le projet de loi élargit le pouvoir de taxation des commissions scolaires et du Conseil scolaire de l'île de Montréal, en fixant de nouvelles limites, de nouvelles façons d'intervenir.

Si on faisait un petit peu d'histoire, on se rendrait compte que c'est depuis 1979, plus précisément le 21 décembre, que la Loi sur la fiscalité municipale fut adoptée. On n'était pas là, ni vous ni moi, M. le Président, puisqu'on a été élus en 1981, avec d'autres collègues. Mais c'est depuis 1979, et ça découlait de la conférence Québec-municipalités de 1978. Et après, l'accord s'est fait en 1979. Ce qui a amené le gouvernement à passer la loi sur la fiscalité en 1979 sur le pacte gouvernement-municipalités, c'est que les dépenses des municipalités augmentaient continuellement, avec de nouvelles responsabilités que le gouvernement leur donnait, mais leurs revenus n'augmentaient pas en conséquence. Donc, il fallait que le gouvernement intervienne, de façon ponctuelle, dans l'un ou l'autre des dossiers. Et souvenez-vous, je suis certaine que vous vous souvenez de ça, vous qui avez déjà été maire, je pense, d'une municipalité. (0 h 20)

Donc vous devez vous souvenir que les maires faisaient des processions ici, au gouvernement. Ils faisaient une petite parade pour venir voir le ministre, pour venir chercher un peu d'argent et il fallait qu'ils soient beaux, fins et flattés sur le bon bord pour arriver une journée que le ministre filait de bonne humeur pour revenir avec les montants d'argent pour boucher des trous. Alors, en 1979, le gouvernement de l'époque, le gouvernement du Parti québécois, a fait en sorte qu'il y ait une loi qui soit adoptée et qui dise que le champ d'impôt foncier, ça va être réservé aux municipalités, que les commissions scolaires, elles, ça serait autre chose. Donc, c'était entendu, à l'époque, pas de problème. Ça devait se régler, à ce moment-là, comme ça. C'était une décision, je pense, que le gouvernement de l'époque a prise et il a bien fait de la prendre puisqu'à partir de ce temps-là, de 1979 à aller à il y a quelque temps, pas très longtemps, quand le gouvernement libéral a décidé de mettre la hache dans cet accord qui fonctionnait relativement bien, je crois, puisqu'on n'entendait pas les tollés de protestations qu'on a eus dernièrement, quand le gouvernement du Parti libéral a mis la hache dans la décision, qu'il a donné une tape en pleine face à ce partenaire que sont les municipalités du Québec...

M. le Président, de faire en sorte que le pacte qui avait été suivi près de 10 ans, au-dessus de 10 ans, faire en sorte qu'une décision unilatérale soit prise ici par le gouvernement et, ensuite, on a refilé ça aux municipalités sans qu'elles, qui sont supposées être des partenaires, ne soient à la base de cette décision. Unilatéralement, le gouvernement a décidé de briser le pacte de 1979, M. le Président, et on sait ce qui en a découlé. Les municipalités n'étaient pas très heureuses de la décision gouvernementale puisqu'elles n'avaient pas été consultées. Elles croyaient que le gouvernement était toujours ce partenaire qu'il avait dit qu'il était en 1979 et les années qui ont suivi. Il n'était plus ce partenaire honnête, qui discutait honnêtement, qui demandait aux municipalités leur impression sur telle ou telle décision. Il n'était plus ce partenaire sur lequel on pouvait compter. Il était devenu un étranger qui décidait tout seul et qui intervenait dans une décision qui datait de plusieurs années. Les commissions scolaires, bien sûr, elles avaient une petite marge de manoeuvre de taxation, entre 2 % et 6 %, et cette petite marge de taxation, M. le Président, c'était pour donner une couleur locale, une saveur locale à des décisions qu'elles voulaient prendre.

Par exemple, chez nous, on a eu la construction de la Domtar, l'usine la plus moderne au monde, avec de la machinerie moderne. Donc, la commission scolaire chez nous, avec ce petit pourcentage-là, pouvait, si elle avait eu l'argent nécessaire, engager un professeur pour enseigner à nos élèves comment faire pour être des spécialistes pour travailler sur cet équipement-là à haute technologie. Ça, c'aurait été une saveur locale parce que c'est chez nous que ça se passe. Chez Bombardier, à Valcourt - c'est encore chez nous, dans mon comté - on aurait pu, avec ce petit pourcentage-là, faire en sorte que les étudiants sortent des écoles avec une saveur locale, c'est-à-dire répondre à un besoin que Bombardier a dans ses usines et faire en sorte que nos étudiants soient branchés, soient édu-qués, soient formés pour travailler chez Bombardier. Mais hélas! le petit pourcentage qui restait aux commissions scolaires n'était pas suffisant parce que le gouvernement a manqué à ses engagements et qu'il n'a pas fait en sorte que les commissions scolaires reçoivent l'argent

nécessaire pour les immobilisations et les dépenses, l'application des lois. Donc, qu'est-ce que ça fait? Le petit pourcentage qui devait avoir une saveur locale-

Une voix: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement.

Une voix: Je m'excuse auprès de ma collègue.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.

Une voix: Ses propos sont intéressants, mais je vous prierais de vérifier le quorum.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vais vérifier le quorum, monsieur, à votre demande. Qu'on appelle les députés. C'est 23. Alors, Mme la députée, si vous voulez poursuivre.

Mme Juneau: J'étais en train de dire, M. le Président, que les commissions scolaires n'avaient plus cette possibilité de donner une couleur locale aux besoins des municipalités ou des entreprises qu'il y avait dans les municipalités. Les crédits de mars dernier nous ont révélé le pot aux roses ou le pot au rouge qui a fait en sorte que les municipalités auraient une soustraction de 191 000 000 $ dans les revenus que le gouvernement était pour leur donner, ce qui équivaut à 191 000 000 $ de subventions de fonctionnement et ce qui équivaut en années scolaires à une baisse de 272 400 000 $, mais elles auront droit au pouvoir de taxation. Mais le pouvoir de taxation, M. le Président, ça ne fait l'affaire de personne, ni des commissions scolaires... Je regardais la réaction de la commission scolaire de l'Estrie. M. Jacques Demers dit: Je suis en désaccord avec le gouvernement. Le président de l'Union des municipalités, qui est maire de mon comté, maire de Valcourt: De la "putasserie" politique, selon l'UMQ. Ça fait trente ans, dit-il, que je suis en politique municipale et je n'ai jamais rien vu de pareil.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure, s'il vous plaît.

Mme Juneau: En terminant, M. le Président, ça ne fait pas l'affaire de personne. Alors, pourquoi le gouvernement essaie-t-il de passer à travers tout le monde?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Louise Harel Mme Harel: Merci, M. le Président. D'abord, permettez-moi de rendre hommage à mes collègues du côté de l'Opposition qui ont siégé durant la commission parlementaire qui a étudié le projet de loi 69. Je veux dire qu'avec sobriété, ils ont manifesté tous une connaissance approfondie du dossier et ils ont indiqué au ministre qu'il faisait fausse route. M. le Président, j'avais le sentiment qu'il y avait une sorte de coquetterie de la part du ministre à faire croire qu'un exercice de réécriture de la loi, similaire à celui effectué conjointement avec le député de Laviolette, aurait pu être possible. M. le Président, c'est une loi de nature fiscale à laquelle lui-même, le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur n'aurait pu déroger. Mes collègues et le député d'Abitibi-Ouest en tête n'auraient pas pu amener le ministre à s'asseoir pour justement procéder à cette réécriture. Parce que le principe en cause, le ministre lui-même ne pouvait pas y déroger.

Quel est le principe en cause? En caricaturant à peine, M. le Président, c'est l'équivalent de l'employé qui s'est fait taper sur la tête à l'ouvrage et qui tape sur la tête des enfants en rentrant à la maison. C'est essentiellement le principe. Parce que, pour connaître l'origine de ce projet de loi qui est devant nous ce soir, il faut se rappeler le budget Wilson et se rappeler la facture que le gouvernement fédéral a transférée à Québec et se rendre compte que le gouvernement du Québec a décidé de faire financer son propre déficit en faisant une économie nette de subventions à l'éducation. Finalement, cette décision de faire essuyer - parce que c'est ça, essentiellement, dont il s'agit - faire essuyer par l'impôt foncier les problèmes d'équilibre budgétaire du gouvernement du Québec... Et pour ce faire, le gouvernement a presque faussement, d'une façon... Et mon collègue d'Abitibi-Ouest a utilisé des mots très très sévères, peu fréquents d'ailleurs dans la bouche du député d'Abitibi-Ouest, quand il parlait d'hypocrisie, quand il parlait de tartuferie. C'est que, M. le Président, on a faussement, du côté du gouvernement, utilisé le prétexte - on s'en est servi - de la santé financière des commissions scolaires. Ça faisait longtemps déjà que la Fédération des commissions scolaires dénonçait le sous-financement du réseau scolaire. Ça faisait donc longtemps qu'il indiquait au gouvernement qu'il y avait un manque à gagner. Mais le gouvernement a décidé de se servir, en renvoyant la facture, puisque le transfert des responsabilités d'entretien, en tout et pour tout, va laisser une bien maigre pitance aux commissions scolaires en regard de ce qu'elles attendaient. (0 h 30)

M. le Président, il y avait même eu une entente avec l'Union des municipalités. Je ne dis pas qu'elle avait été faite de gaieté de coeur. Mais l'Union des municipalités du Québec avait même consenti à ce que les commissions scolaires

puissent aller, dans le champ foncier chercher les 75 000 000 $ qu'elles considéraient avoir à suppléer, M. le Président. Et d'où viennent ces 75 000 000 $ dont parlaient les commissions scolaires et sur lesquels l'Union des municipalités du Québec consentait à actualiser les revenus des commissions scolaires? Ça vient essentiellement d'une différence dans les recettes des commissions scolaires, comparativement aux recettes des villes, et cette différence vient des politiques de subvention à l'éducation du gouvernement et vient du fait que la masse des dépenses à l'Éducation n'a pas suivi le même rythme que le taux d'inflation. Et les commissions scolaires se retrouvaient dans un manque à gagner évalué à 75 000 000 $, compte tenu de l'indexation au même rythme que l'augmentation du total des taxes municipales, considéré à peu près entre 80 000 000 $ et 90 000 000 $. Et l'Union des municipalités du Québec consentait à ce que les commissions scolaires puissent aller chercher ce montant et démontrait sa bonne foi en permettant ce que tout le monde appelait l'actualisation.

Mais ce n'est pas de ça dont il est question: il ne s'agit pas de corriger le sous-financement des commissions scolaires, M. le Président. C'est une hypocrisie, c'est une tartufferie, finalement, ce qui s'est passé. C'est que le gouvernement a décidé de ne pas injecter plus d'argent, au contraire, de transférer - et ma collègue, la députée de Terrebonne, l'a bien décrit - des responsabilités d'entretien des bâtisses en faisant une économie de subvention à l'éducation et, ce faisant, le gouvernement porte une atteinte grave à deux principes largement appuyés, partagés par l'opinion publique du Québec. Ces principes, essentiellement, sont les suivants: l'autonomie municipale et la responsabilité collective de toute la société à l'endroit de l'Éducation.

D'abord, M. le Président, voyons le principe de l'autonomie municipale. C'est en 1980 que fut mis en vigueur ce pacte fiscal. Essentiellement, il s'agissait de convenir que les municipalités avaient l'exclusivité du champ d'impôt foncier, à la différence des dépenses non admissibles des commissions scolaires jusqu'à un maximum de 6 %. Et c'est ces 75 000 000 $ dont il s'agit maintenant, pour actualiser ce champ dans lequel se trouvaient les commissions scolaires. Mais, essentiellement, les commissions scolaires, d'un côté, obtenaient le champ d'impôt foncier et puis, de l'autre côté, se retiraient complètement des taxes à la consommation. C'était quand même une concession majeure qui était faite de la part des municipalités au gouvernement et le gouvernement promettait de remplir ses obligations comme citoyen corporatif, ce qui veut dire, concrètement, de payer ses taxes, comme tous les autres citoyens les paient, de payer les taxes sur les bâtisses dont il est propriétaire et qui sont situées dans les municipalités, ce qu'il n'a jamais complètement assumé, une obligation à laquelle il s'est, en partie, soustrait, et, d'autre part, le gouvernement consacrait l'exclusivité du champ foncier aux municipalités. Et, dans ce document qui revalorisait le pouvoir municipal, on pouvait lire: "Les municipalités doivent donc pouvoir compter sur un champ fiscal qui leur est propre, qui leur permet de fixer elles-mêmes, avec la participation des citoyens, le niveau des services municipaux et le niveau des impôts locaux correspondants." Bien, c'est ça qu'on a saccagé, M. le Président, et c'est pour ça qu'on a assisté à cette clameur qui est venue de l'ensemble du Québec, de toutes les municipalités, les plus petites comme la plus grosse, Montréal, dont j'espère avoir l'occasion de vous parler ce soir, en particulier. M. le Président, le gouvernement s'est soustrait à cette obligation qu'il avait de respecter ce pacte qu'il avait conclu avec les municipalités...

Mme Caron: Je m'excuse, M. le Président. Mme Harel: ...ou de le renégocier.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Excusez-moi, Mme la députée.

Mme Caron: Je m'excuse auprès de ma collègue, question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, question de règlement, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: Est-ce que vous voulez vérifier s'il y a quorum?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, qu'on appelle les députés.

Si vous voulez poursuivre, Mme la députée.

Mme Harel: M. le Président, je disais donc que le gouvernement du Québec a décidé de boucler son budget au mépris des municipalités du Québec et au mépris, surtout, de l'autonomie municipale qui assurait aux municipalités un sens des responsabilités et qu'il ne faudra pas que le gouvernement les blâme maintenant qu'elles remettent en question, qu'il a lui-même remis en question ce pacte. D'autre part, au mépris également de ce qui était convenu comme allant de soi, c'est-à-dire la responsabilité collective de toute la société à l'endroit de l'éducation.

M. le Président, les contribuables de Montréal vont souffrir de ce qui va suivre l'adoption du projet de loi 69. Le compte de taxes scolaires augmentera, selon les responsables municipaux, de 121 %, avec une perception additionnelle de 35 000 000 $, le taux passant de 0,068 $ à 0,155 $ les 100 $ d'évaluation. Ce sont là des chiffres que m'ont fournis les responsables de l'administration à la ville de Montréal, M. le

Président, en rappelant que le paradoxe est évidemment important quand on pense que les Montréalais et les Montréalaises vont payer plus du double de taxes scolaires, alors que la population étudiante, à la CECM est passée de 118 000, en 1980, à 84 000, en 1990: baisse de la clientèle scolaire et hausse du double des taxes scolaires.

D'autre part, M. le Président, ça signifie que pour Montréal, l'augmentation de la taxe scolaire va rendre encore plus difficile l'accès à la propriété. C'est quand même étonnant que ce gouvernement ne s'intéresse pas aux effets pervers des politiques qu'il met en place. Quand on pense que la politique d'accès à la propriété en matière d'habitation, dont ont pu bénéficier 26 000 ménages du Québec, n'a réussi à favoriser que 1380 d'entre eux dans la ville de Montréal. Imaginez-vous une politique québécoise qui ne profite qu'à 5 % des Montréalais qui sont plus de 15 % de la population. Parce que ce sont des politiques qui ne tiennent pas compte, justement, des coûts a la hausse de la valeur marchande des propriétés.

C'est évident, M. le Président, je termine en vous disant que les Montréalais vont certainement avoir à subir plus que quiconque les contrecoups de ces politiques budgétaires du gouvernement du Québec. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Je reconnais le prochain intervenant, M. le député de Lac-Saint-Jean et whip en chef de l'Opposition officielle. M. le député.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: Merci, M. le Président. Ce projet de loi 69, c'est d'abord et avant tout - mes collègues l'ont maintes fois signalé mais je pense qu'il faut encore une fois le répéter - une rupture brutale et sauvage du pacte fiscal qui avait été conclu, il y a un peu plus de 10 ans, entre le monde municipal et le gouvernement. Ce pacte municipal avait vu le jour à la suite d'une longue négociation, de discussions laborieuses, mais tout à fait démocratiques, puisque ça s'était fait à l'occasion d'assises où les deux parties étaient largement représentées. Et, à la suite de cette longue négociation, on en est arrivés à un véritable pacte, je pense que le terme est tout à fait exact, un véritable pacte fiscal où les municipalités voyaient leur autonomie élargie et où l'on acceptait le principe que le champ de l'impôt foncier était, d'abord et avant tout, réservé aux municipalités. Donc, les bases de ce pacte étaient connues et acceptées et c'est comme ça qu'on a fonctionné pendant plus de dix ans. (Oh 40)

Bien sûr, on pourra nous dire que les municipalités, ce sont comme, pour employer l'expression courante, des créatures du gouvernement ou des créatures du Parlement et que, par conséquent, le gouvernement dispose des pouvoirs requis, des compétences constitutionnelles requises pour imposer ses vues, pour imposer les décisions qu'il a prises. J'en conviens, c'est vrai. C'est vrai que constitutionnellement, légalement, juridiquement, le gouvernement peut changer le pacte fiscal conclu il y a 10 ans, le modifier, le chambarder, le bouleverser unilatéralement, sans consultation. C'est vrai. Sur le plan légal et juridique, c'est sans faille, mais il reste qu'on avait établi depuis plus d'une dizaine d'années un véritable partenariat entre le gouvernement et le monde municipal et on avait convenu, dès le départ, de faire les choses d'un commun accord, de faire les choses par la voie du consensus. Tout cela est maintenant rompu, brisé, bouleversé, parce que le gouvernement a décidé d'aller chercher 320 000 000 $ de plus en taxes foncières pour financer une partie de ses dépenses. Remarquez que les intentions sont louables. Quand on regarde les motifs, on est obligés de constater que ce sont des motifs louables puisque, face à des problèmes financiers vécus par les commissions scolaires - et Dieu sait que tout le monde le reconnaît, même les unions municipales reconnaissaient que les commissions scolaires, le monde scolaire vivait difficilement des problèmes de caractère financier et que, donc, par conséquent, il y avait lieu de trouver des solutions aux problèmes financiers vécus par les commissions scolaires-Mais quand on regarde la façon dont on s'y est pris, je pense qu'on est obligés de qualifier de brutale cette façon de procéder, cette manière de faire. Ça nous indique, cependant, l'influence du ministre de l'Éducation. Ça, il faut le reconnaître; le ministre de l'Éducation a manifesté, à l'occasion de cette affaire, son influence très grande, déterminante au sein du Conseil des ministres. Il a vraiment gagné sur toute la ligne. C'est son point de vue qui a prévalu et son collègue des Affaires municipales s'est retrouvé dans une position on ne peut plus délicate, sa fierté outragée et blessée. On sait comment il a réagi et comment, en fait, il s'est difficilement contenu, il a difficilement contenu ses émotions et ses positions parce que, vraiment, il s'était fait carrément écarter, reléguer aux oubliettes, humilier, disons-le, par son collègue de l'Éducation. Au moins, toute cette affaire démontre que le ministre de l'Éducation est très puissant au sein du Conseil des ministres et qu'il peut assez facilement rabrouer ses collègues. Dans le cas de son collègue des Affaires municipales, c'est évident, c'est clair qu'il a été carrément rabroué. On comprend que le ministre des Affaires municipales en soit sorti blessé, mais il reste que la manière de faire a été brutale et ça a suscité, évidemment, un fort mécontentement au sein du monde municipal qui est entré pratiquement en rébellion pendant un certain nombre de semaines

parce qu'on considérait comme sauvage la façon dont on avait procédé, et aussi une façon méprisante de procéder, parce qu'il n'y a eu aucune discussion pour en arriver à une décision de cet ordre-là, de cette envergure-là.

Quand ça implique 320 000 000 $ de taxes foncières, ce n'est pas rien. Ce n'est pas négligeable. Ce n'est pas1 anodin en soi, 320 000 000 $ de taxes foncières, et ça s'est fait sans aucune discussion, sans; aucune consultation avec le monde municipal et de façon délibérée. On sait qu'à partir du mois de décembre 1989, il y a une décision du Conseil des ministres qui enclenche le processus pour en arriver à une solution concernant les problèmes financiers des commissions scolaires. C'était donc planifié à l'avance. Il n'y a rien de spontané là-dedans; c'était programmé, c'était planifié et il y avait une volonté de ne pas consulter le monde municipal, puisqu'il n'a pas été consulté. Et le discours sur le budget est venu en quelque sorte consacrer ce coup de force perpétré par le gouvernement à l'égard du monde municipal.

Et puis, il n'y a pas de retour en arrière possible. C'est ça qui fait la gravité du geste et de la décision de ce projet de loi, il n'y a pas de retour en arrière possible. Écoutez, quand on autorise les commissions scolaires à aller chercher 320 000 000 $ en taxes foncières, il ne faut pas s'imaginer que ça va avoir lieu uniquement une année, que c'est temporaire. C'est évident qu'une décision de cette envergure-là, ça va durer longtemps. C'est inscrit dans la réalité pour un bon bout de temps. D'ailleurs, tout le monde l'admet, même si les municipalités ont réclamé ou réclament dans leurs cinq conditions une révision de cette décision à l'occasion d'assises Québec-municipalités réclamées par les deux unions, à partir du moment où le gouvernement accepte qu'il y ait des assises Québec-municipalités, il y en aura. Je ne sais pas quand. D'ici un certain nombre de mois, il y aura des assises Québec-municipalités où on va aborder un certain nombre de sujets et le gouvernement dit: Oui, oui, on pourra discuter du financement scolaire - il n'y a pas de problème - à ces assises-là, mais, cependant, et je cite le premier ministre dans sa lettre au président, M. Desrosiers, de l'Union des municipalités du Québec: "II convient également de mentionner que la question du financement scolaire pourra être abordée à l'occasion de ces assises, sans cependant remettre en cause l'approche que le gouvernement a priviligiée dans son dernier budget." Alors, vous pourrez en discuter; vous pourrez dire ce que vous en pensez, vous pourrez exprimer votre insatisfaction, votre mécontentement, mais je vous dis tout de suite qu'il n'y aura rien de changé. C'est là pour longtemps.

Le ministre d'ailleurs, toujours aussi franc - c'est au moins une de ses qualités qu'on doit lui reconnaître, sa franchise - l'a également indiqué lui aussi à l'occasion de ce débat-là, je pense que c'est en commission parlementaire. "Il y a également lieu de présumer, à moins d'avis contraire - c'est le ministre qui parle - que le gouvernement qui a voulu instituer des modifications aussi importantes dans le champ de la fiscalité scolaire, qui a assumé les risques politiques inhérents à cet exercice, devait avoir à l'esprit des changements dont la nature et les effets ne seraient pas seulement transitoires, mais durables."

Alors, il y aura des assises Québec-municipalités, mais ces assises vont porter sur je ne sais pas trop quoi, probablement des sujets sans doute intéressants, mais sur le fond des choses, sur le problème du financement, sur le problème de la fiscalité, on pourra en discuter. Seulement, la décision du gouvernement est irrévocable, on ne reviendra pas là-dessus, il n'y aura pas de retour en arrière. C'est donc un projet de loi qui, encore une fois, je le répète et je termine là-dessus, M. le Président, constitue une rupture sauvage et brutale du pacte fiscal et qui, en plus, nous a été imposé et est adopté aussi de façon brutale et sauvage par le bâillon. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le député d'Arthabaska.

M. Jacques Baril

M. Baril: Oui, M. le Président. Nous faisons encore face une autre fois avec cette loi, à une imposition supplémentaire au niveau des contribuables. Ce qui veut dire que le gouvernement, n'ayant pas le courage de taxer directement les contribuables, comme normalement tous les gouvernements doivent le faire, agit d'une façon tout à fait détournée pour faire passer l'odieux et faire prendre toute la responsabilité à d'autres organismes que lui-même pour aller chercher de l'argent dans la poche des contribuables. Ce moyen ici pour permettre aux commissions scolaires de taxer davantage les contribuables - mes collègues l'ont dit également - c'est un bris du pacte, de l'entente qu'il y avait eue en 1979 avec le gouvernement du Québec et les municipalités du Québec. (0 h 50)

Depuis 1979, il y avait une paix entre les commissions scolaires, qui sont des élues, et les élus municipaux. On avait chacun notre champ de taxation, notre capacité de revenu, nos moyens, et ça allait bien. Et, 10 ans plus tard, le gouvernement libéral arrive et vient, encore une autre fois, anéantir tous les efforts que le Parti québécois avait faits à l'époque pour essayer de mettre de l'ordre dans l'administration publique. Et, par cette loi, la loi 69, le gouvernement, dans son appétit vorace d'aller chercher des revenus supplémentaires ou taxer, faire taxer davantage d'autres organismes que lui, a trouvé

ce moyen de permettre aux commissions scolaires de taxer à peu près le double de ce qu'elles taxaient avant.

Chez nous, dans les Bois-Francs, les commissions scolaires imposaient à peu près 0,18 $ du 100 $. Ça variait entre 0,16 $ et 0,18 $ du 100 $ d'évaluation. Maintenant, par le biais de cette loi, les commissions scolaires pourront taxer jusqu'à 0,35 $ du 100 $ d'évaluation. Pourquoi n'allaient-elles pas chercher plus que 0,18 $ avant? C'est parce qu'il y avait aussi un maximum d'imposé en pourcentage. Elles ne devaient pas dépasser un certain pourcentage.

Et, là, on a fait sauter le pourcentage. Donc, on peut aller chercher jusqu'à 0,35 $ de plus. Et ce même gouvernement dit: Ce n'est pas grave! C'est encore moins pire qu'en Ontario. En Ontario, les contribuables ontariens sont encore plus taxés par les municipalités qu'ils sont taxés ici au Québec. Et quand on regarde les choses comme il faut, à chaque fois qu'en Ontario, le gouvernement a donné plus de pouvoir, a élargi le champ de taxation des municipalités, lui, il s'est retiré, en partie, à une part égale, et des fois plus. Tandis qu'ici, au gouvernement du Québec, on augmente le pouvoir de taxation au niveau des commissions scolaires et, en même temps, lui, il ne se retire pas. Il continue à imposer, il continue à taxer de la même façon.

Et, ça, c'est suite, encore une fois, au discours sur le budget qu'on a entendu ce printemps. Le gouvernement s'est vanté qu'il n'y avait pas de hausse de taxes importante, qu'il n'y avait pas de hausse d'impôt. Mais, quand on prend le temps d'analyser ça comme il faut, on s'aperçoit que le gouvernement va chercher des milliards de plus dans la poche des contribuables en autorisant les organismes à les taxer davantage pendant que lui, il ne bouge pas. Il n'impose pas moins. Il impose les mêmes choses qu'avant et il permet aux autres d'y aller.

Si on regarde au niveau de cette loi comme d'autres qu'on vient d'adopter, ce gouvernement est en train de faire l'unanimité - je l'ai dit - contre lui, parce que même si le gouvernement faisait ça pour avantager les commissions scolaires, au tout début, plusieurs commissions scolaires se réjouissaient de voir élargir leur revenu et, par la suite, quand elles se sont aperçues que le gouvernement, en même temps, se retirait d'engagements qu'il avait pris au préalable, entre autres, au niveau de l'entretien des bâtisses, la transformation à apporter aux immeubles pour les rendre conformes aux exigences actuelles, et les règles concernant la sécurité, les exigences aux programmes pédagogiques, les méthodes d'enseignement et la qualité de vie.

Maintenant, ce seront les commissions scolaires qui auront à administrer leurs bâtisses. Dans une étude qui a été faite en 1987 ici sur la gestion des équipements, il est intéressant de lire qu'un comité composé de représentants des commissions scolaires de la Direction régionale du centre du Québec - ça, c'est dans mon coin - dans le but d'évaluer les besoins de remise à neuf des immeubles de 22 commissions scolaires qui font partie de cette région et de connaître les transformations apportées aux immeubles pour les rendre conformes aux exigences actuelles, ce que j'ai dit tout à l'heure. Les résultats de cette étude sont à l'effet qu'il faut investir 40 000 000 $ dans cette région d'ici cinq ans pour remettre les bâtiments à neuf, et 25 000 000 $ pour les rendre conformes aux exigences actuelles.

C'est de l'argent, ça, M. le Président, dont le gouvernement se désengage. Il dit: Je vais vous permettre de taxer; arrangez-vous avec vos problèmes. Les commissions scolaires qui sont situées dans les régions, c'est elles, encore une fois, qui en souffriront le plus parce qu'on s'aperçoit que les régions se vident, M. le Président. Les commissions scolaires sont obligées de maintenir, heureusement, les structures, les immeubles nécessaires aux enfants qui restent encore dans la région et il y a de moins en moins de contribuables pour payer les taxes. Quand on se promène, aujourd'hui, dans les rangs, dans les régions, c'est triste à voir. Souvent, dans un rang où jadis il y avait 7, 8 ou 10 fermes, de grosses entreprises qui pouvaient participer à amener des revenus au niveau des municipalités, aujourd'hui, ce n'est pas rare de voir qu'il en reste juste une, deux ou trois. Donc, la municipalité, elle, est obligée de continuer à entretenir le rang ou le chemin.

Le gouvernement, d'un autre côté, est en train de discuter. Ça a été dit ce printemps, j'y avais fait allusion dans les journaux et le ministre délégué à l'Agriculture ne m'a pas contredit. On a dit: C'est remis à l'automne. Le gouvernement est en train d'étudier la possibilité de revoir toute la taxation au niveau de la fiscalité municipale. On sait qu'actuellement le gouvernement du Québec rembourse 70 % des taxes foncières aux agriculteurs du Québec. Mais, par contre, les municipalités ont un maximum. Elles ne peuvent pas évaluer les fermes à plus qu'un maximum et le gouvernement ferait sauter ce maximum. Maintenant, selon ce qui est discuté, ce qu'on s'apprête à discuter, c'est que les municipalités pourraient imposer à 100 % la valeur foncière et le gouvernement rembourserait, on ne sait pas si ça va être 70 % ou 80 % de ce montant-là aux agriculteurs. Mais ce sera aux municipalités de percevoir cette taxe au complet, à 100 %. Ce sera aux contribuables de payer cette taxe à la municipalité et le contribuable devra réclamer du gouvernement la partie qu'on lui remboursera. Mais on dit bien dans les discussions que ce sera uniquement au niveau de la taxe foncière; les immeubles, soit les bâtisses, la maison, la grange, les remises ne seront plus remboursables pour la taxation.

En retour, aussi, le ministère des Affaires municipales qui remboursait aux municipalités une

compensation pour la partie qu'elles ne pouvaient pas évaluer n'aurait plus à rembourser cette partie-là, puisque ce serait la municipalité qui irait la chercher à 100 %. Ceci veut dire, M. le Président, en clair... Je donne des chiffres comme ça pour qu'on puisse se comprendre. Admettons que le ministère des Affaires municipales remboursait aux municipalités - je vais dire un chiffre, là - 20 000 000 $ par année, là, il n'aura plus à le rembourser. C'est possible que ça coûte 5 000 000 $ ou 10 000 000 $ de plus à l'agriculture pour rembourser la partie en surplus, mais si on compare ça, le gouvernement va épargner 10 000 000 $.

C'est de cette façon-là, M. le Président, que ce gouvernement va chercher des taxes, va chercher des revenus supplémentaires d'une façon tout à fait hypocrite, tout à fait cachée. Et on vient passer, on essaie de se vendre, on essaie de passer pour un bon gouvernement, un bon administrateur pendant qu'à tour de bras ça va avoir été, à cette session-ci, une session de taxes. Ce gouvernement s'acharne à nous passer sur le corps, à nous empêcher de parler avec des motions pour suspendre les règles de toutes sortes de façons pour taxer davantage les contribuables québécois.

Donc, je suis certain, M. le Président, que sa fin de règne arrive parce que les contribuables vont finir par être tannés et, surtout, ils ne seront plus capables de payer les taxes que le gouvernement impose lui-même et que le gouvernement oblige les municipalités, les commissions scolaires et d'autres organismes à taxer davantage. (1 heure)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant M. le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, j'écoutais le député d'Arthabaska et je pensais commencer où il a terminé. Au fond, quand on regarde les augmentations de taxes que les gouvernements québécois et fédéral sont en train de mettre en place pour l'année 1990-1991, dans une période de récession économique, je pense qu'il y a vraiment une absence de planification, une absence de prise de conscience de la capacité de payer des contribuables.

On vit une époque, une période, actuellement, où on dit qu'on est entrés en récession économique. Le taux de chômage va s'accroître. On voit qu'il y a des milliers de camionneurs qui sont devant le parlement. Pourquoi? Essentiellement parce qu'ils veulent augmenter leur secteur de travail. Ils ont eu des augmentations de taux d'intérêt sur leur camion, ils paieront donc plus chers de remboursement d'intérêt, parce que les taux d'intérêt sont accrus; le gouvernement va affecter moins de travaux que jamais dans les différentes régions du Québec, donc moins de revenus pour avoir des dépenses plus élevées, payer des remboursements plus élevés. On voit que les contribuables qui ont des maisons, cette année et l'an prochain, vont avoir des renouvellements d'hypothèques, vont payer des frais beaucoup plus élevés de prêts pour leur prêt hypothécaire; qu'il va y avoir, avec cette année et l'an prochain, une augmentation équivalente sur deux ans de 23 % du compte d'électricité; qu'en 1991 il y aura la taxe sur les produits et services, qui va augmenter de 7 % en valeur ajoutée, et qui va, sans doute, accroître l'inflation. Le gouvernement fédéral admet 1,2 % mais la plupart des gens qui sont réalistes parlent de 2 % à 3 %. Donc, des frais accrus considérables. Par dessus ça, le gouvernement va imposer 320 000 000 $ de taxes scolaires aux contribuables du Québec. Les municipalités vont, sans doute, augmenter aussi leurs taxes, parce que les taux d'intérêt à payer sont plus élevés. Il y aura du refinancement de dette municipale, qui amènera des remboursements plus élevés, et, parce que les municipalités n'ont pas le droit de faire de déficit, elles devront donc taxer davantage pour rencontrer leurs obligations. Et il me semble qu'à ce moment-ci, dans le temps, ce n'est peut-être par le moment le plus opportun qu'a choisi le gouvernement pour le choix qu'il a fait. Comme vient de dire le député d'Arthabaska, au fond le gouvernement a choisi de pelleter sa neige dans la cour du voisin, de sorte que le contribuable, lui, qui est le même citoyen, "squeeze" par le gouvernement fédéral, par le gouvernement provincial, par le gouvernement municipal, par les commissions scolaires, en même temps que par les banques à cause des taux d'intérêt augmentés par le taux d'escompte de la Banque du Canada, va dire: Je n'en peux plus dans une période de récession économique.

Et c'est essentiellement pourquoi je dis qu'il y a des mesures, comme la TPS par exemple, qui pourraient être, en théorie, une meilleure taxe que celles qui existent, mais que, dans le temps, c'est une qualification épouvantable, dans le temps. De la même façon, à mon avis, qu'on peut discuter, parce qu'il y a deux questions qui se posent: est-ce qu'on peut faire ce que le gouvernement veut faire, ou non? Deux questions qui se posent, en réalité, M. le Président. Les municipalités ont-elles trop de revenus? Et, deuxièmement, est-ce que le meilleur moyen de financer l'enseignement, au niveau primaire et secondaire, c'est par le biais de l'impôt foncier? Est-ce que les municipalités ont trop de revenus? Il y en a qui le pensent. Je voyais récemment le journal Les Affaires qui indiquait que les cadres des municipalités ont des salaires qui sont 35 % au-dessus du marché de l'entreprise privée, qui sont beaucoup plus élevés, également, que ceux du gouvernement du Québec. Il y en a qui pensent que si les municipalités ont le moyen de payer le niveau de salaire qu'elles paient, à

comparer au secteur privé et au gouvernement du québec, c'est peut-être parce qu'elles ont beaucoup de revenus. il y en a qui le pensent. et je pense que le débat pourrait se faire en comparant le gouvernement du québec, les commissions scolaires et les municipalités. c'est un débat qui peut se faire. mais est-ce que la meilleure façon de faire le financement scolaire c'est, pour le gouvernement, d'aller chercher, par l'impôt foncier, des revenus additionnels? ça, je pense que c'est une erreur, parce que, essentiellement, au lieu d'avoir une politique familiale, d'aider les familles, d'aider les territoires qui ont plus d'enfants, au contraire, là, on va pénaliser les secteurs qui ont des enfants.

Je fais partie d'un territoire où il y a des enfants, sur la rive sud de Québec, dans les deux comtés représentés... Dans Chutes-de-la-Chaudière, le taux de natalité est le plus fort, et aussi dans Desjardins, où il y a beaucoup d'enfants. Qu'est-ce qui va arriver? Au lieu d'avoir représenté les enfants comme une charge collective de l'ensemble des citoyens, on en arrive, par le biais de l'impôt foncier, à faire payer pour les écoles les gens qui ont des enfants, comme s'il fallait faire un frein aux enfants, pénaliser davantage les territoires où le taux de natalité est plus élevé, alors que ces enfants-là, plus tard, paieront des taxes, autant pour ceux qui n'en ont pas eu que pour ceux qui en ont eu, des enfants. Le financement scolaire, au niveau primaire ou secondaire, jusqu'au niveau où la scolarité est obligatoire, ça devrait être une charge collective de l'ensemble des citoyens, autant de ceux qui n'ont pas d'enfant, que ceux qui ont des enfants. Parce que, plus tard, ces enfants-là paieront des taxes pour les citoyens malades, pour les citoyens âgés, pour les citoyens, indistinctement, indifféremment, qu'ils aient eu des enfants ou qu'ils n'en n'aient pas eu. C'est pourquoi l'ensemble de la collectivité doit contribuer pour l'éducation des enfants qui est une richesse collective. Je dis, au fond, que, dans une société, le capital humain, c'est une de ses principales richesses à condition de développer ce capital humain. La meilleure façon de le développer, c'est par l'éducation, mais l'éducation ne doit pas être considérée comme la seule responsabilité des parents pour assumer eux-mêmes les frais, de la même façon qu'elle ne doit pas être la seule responsabilité des territoires où il y a plus d'enfants qu'ailleurs. C'est ça qui va arriver. Les territoires où il y a plus d'enfants, le niveau d'impôt foncier devra être plus élevé pour payer une plus grande partie des écoles qui deviendront de moins en moins une charge collective. C'est là que je dis qu'est l'erreur, M. le Président, de retourner à l'impôt foncier pour faire le financement scolaire au niveau primaire et secondaire. Je pense que c'est là qu'est l'erreur. Le gouvernement, s'il considérait qu'il y avait trop d'argent dans les municipalités, avait différentes façons d'aller le chercher. Mais d'aller imposer le financement scolaire par l'impôt foncier, à mon avis, ça, c'est une erreur fondamentale. C'est là-dessus, M. le Président, si on veut avoir une politique familiale, au fond, qu'il va falloir faire en sorte que l'ensemble des citoyens contribuent à cette richesse que sont les enfants. Il va falloir que l'ensemble des citoyens paient pour ces enfants-là parce que ces enfants-là...

Si on regarde la Régie des rentes du Québec, quand on regarde la Régie des rentes du Québec, on se rend compte, actuellement, qu'il y a une personne de plus de 65 ans par rapport à six qui ont entre 20 et 65 ans, 15 % à 17 % actuellement. En l'an 2030, d'après les prévisions actuelles, il y aura 47 personnes au-dessus de 65 ans par rapport à 100 qui auront entre 20 et 65 ans. Ça veut dire que les enfants qui viennent au monde actuellement devront assumer des charges sociales considérables à cause du vieillissement de la population. Il me semble qu'à ce moment-là c'est à l'ensemble de la société à payer pour l'éducation de ces enfants-là parce qu'eux, demain, devront assumer des charges sociales considérables à cause d'un vieillissement de la population dont ils ne seront pas responsables. C'est pour ça que je dis: Si on considère qu'il y avait trop d'argent dans les municipalités... C'est un débat qui peut se faire. Je sais qu'il y en a qui pensent ça. Je ne me prononcerai pas là-dessus. J'aimerais ça avoir davantage de données. Mais s'il y a trop d'argent dans les municipalités, à mon avis, la façon de le faire, ce n'est pas de transférer l'impôt foncier aux commissions scolaires, c'aurait été, pour le gouvernement, possiblement, de faire des transferts moins considérables aux municipalités, s'il pense qu'elles ont trop d'argent, pour garder ces montants d'argent là pour lui pour, lui, continuer à payer pour l'ensemble du système scolaire. Il me semble que c'est une erreur fondamentale de retourner à l'impôt foncier pour faire le financement scolaire.

C'est pourquoi, M. le Président, je dis qu'il y a deux questions: Les municipalités ont-elles trop de revenus? Première question. Si elles ont trop de revenus, le gouvernement du Québec peut dire, à ce moment-là, en vertu d'une justice sociale: J'ai le droit d'en prendre une plus grande part. Mais je pense que la deuxième question c'est: Est-ce qu'on doit faire le financement scolaire par l'impôt foncier? Je pense qu'on ne doit pas faire le financement scolaire par l'impôt foncier jusqu'à l'âge primaire et secondaire parce que ça doit être une charge à laquelle doit contribuer l'ensemble des citoyens de la collectivité, non pas seulement, principalement ceux qui sont dans le territoire où sont les enfants qui devront payer pour les écoles qui sont bâties dans ces territoires-là. Ça devrait être une charge répartie dans l'ensemble de la société et davantage, à mon avis, par l'impôt sur le revenu où ceux qui ont plus de revenus contribueront davantage et ceux qui ont en

moins paieront moins pour ces charges scolaires. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député.

M. Boulerice: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, M. le député, question de règlement.

M. Boulerice: Oui. Puisqu'on nous impose le bâillon, que les "bâillonneurs" soient présents...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Quelle est votre question de règlement?

M. Boulerice: Je voudrais vérifier le quorum.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vérifier le quorum? Alors, qu'on appelle les députés, s'il vous plaît.

Alors, M. le ministre de l'Éducation, en vertu de l'article 253, vous avez un maximum de cinq minutes suite à l'intervention... (1 h 10)

M. Ryan: Merci.

M. Boulerice: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.

M. Boulerice: Sauf le respect que j'ai pour le ministre - j'aimerais bien qu'il puisse m'en-tendre - j'invoquerais l'article 32.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À quel sujet, M. le député, l'article 32, sur le quorum?

M. Boulerice: Sur le décorum, parce que, dans cette Chambre, il y a des places assignées.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, si les députés veulent prendre leur place, en vertu de l'article 32, conformément à la demande du député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, s'il vous plaît. Veuillez prendre vos places, s'il vous plaît. S'il vous plaît! S'il vous plaît, M. le député! Je vous demanderais de respecter le décorum, tous et chacun d'entre vous. Ce n'est pas parce qu'il est 1 h 10 qu'on est obligés de ne pas respecter le décorum. M. le ministre de l'Éducation, en vertu de l'article 253.

M. Boulerice: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui. S'il vous plaît! Quelle est votre question de règlement, M. le député?

M. Boulerice: Vous connaissez, comme moi, l'article 35, alinéa 9: "...adresser des menaces à un député". Sous prétexte que j'ai adressé une question de privilège, de droit, plutôt, à cette Assemblée, le député s'est permis de me menacer physiquement. Vous l'avez entendu comme moi, M. le Président!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le . député, je m'excuse, je ne l'ai pas entendu. Je ne l'ai pas entendu. Ecoutez, M. le député, si je l'avais entendu, je l'aurais dit. M. le leader adjoint, je pense qu'on peut poursuivre. M. le député.

M. Lefebvre: Je veux juste rappeler au député de Sainte-Marie-Saint-Jacques qu'il existe la troisième disposition de l'article 32 qui dit ceci: "Ils - les députés - doivent s'abstenir de tout ce qui peut nuire à l'expression d'autrui". L'abus des règlements, l'utilisation de l'article 32, M. le Président, de façon inappropriée, inutile et insignifiante, ça déroge au paragraphe 3 de l'article 32.

M. Boulerice: M. le Président, en vertu de l'article 35 du règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, je m'excuse. M. le député. Écoutez, je vais en régler une et je vais aller à vous après. En vertu de l'article 32, tout député peut faire toujours une question de règlement dans cette Chambre en vertu des articles du règlement. Et quelle est votre question de règlement maintenant, M. le député?

M. Boulerice: Bien, justement, M. le Président, le leader adjoint du gouvernement, selon l'article 35, paragraphe 6, effectivement, a imputé des motifs indignes à un autre de ses collègues, c'est-à-dire, moi, M. le Président. Je trouve inapproprié qu'un gouvernement qui impose un bâillon m'accuse de me servir de la procédure...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît. M. le député, sur la question de règlement, j'ai rendu ma décision. Sur la question de règlement, en vertu de l'article 32, du leader adjoint, j'ai rendu ma décision. J'ai dit que tout député pouvait en tout temps se servir d'une question de règlement à l'intérieur du règlement. Et, suite à ceci, je vais maintenant permettre au ministre de l'Éducation d'intervenir suite au droit de parole du député de Lévis, eh bien! avec un maximum de cinq minutes.

M. Claude Ryan

M. Ryan: Oui. Je ne prendrai pas cinq minutes, M. le Président. Je ne veux pas prendre le temps de la Chambre inutilement. J'ai quelques précisions qui s'imposent à la suite des propos très sérieux que j'ai entendus de la part du

député de Lévis. Je voudrais lui signaler, tout d'abord, que je suis d'accord avec lui pour reconnaître que la responsabilité principale dans le financement de l'éducation à tous ses niveaux doit résider dans l'État provincial, dans l'État du Québec. Et c'est tellement vrai que, pour la présente année, le gouvernement consacrera à l'enseignement primaire, secondaire, collégial et universitaire au-delà de 9 000 000 000 $. Le montant dont il est question à l'occasion du projet de loi 69, c'est 191 000 000 $ pour l'année 1990-1991 et - soyons francs - 272 000 000 $ pour l'année 1991-1992, c'est-à-dire moins de 2 % de l'ensemble. On dit: Ce n'est pas bon non plus que l'État québécois finance tout, parce que ça met les commissions scolaires dans une situation de dépendance excessive. On a dit: II faudrait que les commissions scolaires en financent un petit peu plus de l'activité de l'éducation, pas énormément, un montant qui est correspondant à ce qui est prévu par le projet de loi sur une ponction, évidemment, sur l'impôt foncier. Pourquoi? Les conseillers économiques eux-mêmes de l'Union des municipalités du Québec lui disaient, il y a déjà un an: Si le gouvernement fait le tour des sources de taxation - ils reconnaissaient les besoins financiers découlant surtout de l'endettement que le gouvernement précédent lui avait laissé - s'il y a une source où le gouvernement pouvait puiser, là, comparativement aux autres provinces, c'est du côté de l'impôt foncier qui n'est pas aussi occupé que les autres. C'est tout ce que le gouvernement fait avec ceci: il va chercher une petite tranche de l'impôt foncier. Comparé à la valeur totale du pacte foncier au Québec, qui est à peu près, je pense, de 250 000 000 000 $, ce qui va être fait là demeure très très modéré. Je pense que c'est important de le réaliser aussi puis d'éviter, par conséquent, de verser dans des débats doctrinaires qui n'ont pas leur place dans ces considérations-là qui doivent être éminemment pragmatiques. j'ajoute un deuxième point. je causais récemment avec mon collègue, le ministre de l'éducation de l'ontario, et je lui disais: comment ça fonctionne, chez vous, la taxe foncière, la taxe scolaire? savez-vous ce qu'il m'a dit? il m'a dit: dans le toronto métropolitain, toute l'éducation primaire et secondaire est financée par la taxe foncière. ils n'en meurent pas! ils n'ont pas créé un déséquilibre social comme celui auquel on voudrait nous faire croire. nous autres, on va chercher une portion infiniment modérée, comparativement à ce qui est fait dans la province voisine de l'ontario et dans toutes les provinces situées à l'ouest du québec où l'apport des revenus des commissions scolaires qui leur provient de l'impôt foncier est au minimum de 30 %, 35 %, 40 %. alors, par conséquent, nous sommes dans une situation où nous pouvons nous comparer très avantageusement à ce qui existe autour de nous et, dans ces matières, je pense que ce n'est pas mauvais de regarder ce qui se passe autour de nous, et, quand on peut être dans l'honnête moyenne, on n'est peut-être pas tellement loin d'une situation qui a du bon sens.

Des voix: Bravo! le vice-président (m. bissonnet): merci, m. le ministre de l'éducation. nous allons poursuivre le débat maintenant avec m. le député de pointe-aux-trembles. m. le député.

M. Michel Bourdon

M. Bourdon: Alors, M. le Président, le comté que je représente ici est formé en grande partie de propriétaires. Alors qu'à Montréal à peine 25 % des personnes sont propriétaires de leur domicile, dans le comté de Pointe-aux-Trembles, on fait presque le double de cette moyenne, avec 45 % de la population qui est propriétaire de sa résidence. C'est donc dire, M. le Président, que l'augmentation importante de l'impôt foncier qui est annoncée au plan scolaire va frapper lourdement les contribuables du comté de Pointe-aux-Trembles, qui se divisent en deux grands groupes. D'une part, les familles...

On sait, au plan foncier, que les familles ayant besoin de plus d'espace occupent des maisons dont l'évaluation est plus considérable que, disons, un célibataire ou une célibataire. Et, en conséquence, l'impôt foncier va les frapper lourdement. M. le Président, je pense qu'ils ne trouveront pas de réconfort, s'ils nous écoutent cette nuit, à entendre le ministre de l'Éducation citer l'exemple de l'Ontario, puisqu'il nous dit qu'en Ontario l'impôt foncier peut se rendre jusqu'à 30 %, 35 % et 40 % de la facture de l'éducation. Alors, le pli étant pris, M. le Président, on peut s'attendre à ce que, d'année en année, le gouvernement force les commissions scolaires à augmenter l'impôt foncier et que les contribuables écopent.

Ce qui est évident aussi, M. le Président, quand on parie avec les gens et qu'on fait du porte-à-porte, c'est que les renouvellements d'hypothèque font très mal. Des personnes qui avaient emprunté à 10 % renouvellent à 14,75 %, et ça, pour une famille, c'est un poids très considérable. Il va s'ajouter à ça l'impôt foncier, et ça, ça ne tient pas compte de leur capacité de payer. Je voudrais ajouter que, dans ma circonscription, il y a une population appréciable d'aînés qui éprouvent déjà de la difficulté à s'acquitter de leur impôt foncier. À Montréal, pendant les cinq dernières années, il y a eu une spéculation assez effrénée sur l'immeuble, ce qui a fait que la valeur des propriétés a augmenté, mais la valeur de la propriété ne donne pas de liquidité pour payer, et les personnes qui ont des retraites qui ne sont pas ou partiellement indexées éprouvent de la difficulté, déjà, à

s'acquitter de leur impôt foncier scolaire. (1h20)

II y a l'autre aspect, M. le Président, soit que le pacte fiscal de 1979 a été déchiré unilatéralement par le gouvernement et la municipalité de Montréal va se trouver tassée dans un coin, si on veut. C'est sa marge de manoeuvre qu'on va aller chercher éventuellement. Parce que la question est complexe. D'une part, le gouvernement coupe les vivres aux commissions scolaires et les force à aller chercher en impôts fonciers... Il n'y a pas de cadeau qui se fait. Il leur pelleté une partie de ses obligations. Ça occupe le champ de l'impôt foncier. Et parallèlement à ça, M. le Président, on donne de plus en plus aux municipalités et aux MRC, les municipalités régionales de comté, des responsabilités en environnement. Par exemple, on force les municipalités à s'occuper d'assainissement des eaux, de la qualité de l'air, de la réhabilitation des terrains contaminés, des sites d'enfouissement de déchets.

Dans le budget, M. le Président, on a également annoncé que le gouvernement couperait les subventions à l'opération des transports en commun, ce qui, pour IHe de Montréal, est quelque chose de très considérable. J'en vois, du côté ministériel, qui font signe que non. On a bien lu, on a bien entendu le ministre des Finances lire le budget, il a annoncé un désengagement du gouvernement en matière de financement des opérations de transport en commun.

Pour ce qui est de la fiscalité, le gouvernement n'avait rien annoncé et en traître, et avec le bâillon maintenant, il l'impose aux municipalités. Si le gouvernement fait des choses qu'il n'avait pas annoncées, vous comprenez bien que dans le monde municipal, on s'attend à ce qu'il fasse ce qu'il a annoncé qu'il ferait. Je pense que ça, ça va avoir des conséquences importantes.

Il y a également la question des "en lieu" de taxes qui se pose toujours. Et cette loi passe complètement à côté. On sait que du côté du gouvernement du Québec, parce que le gouvernement fédéral fait de même, il acquitte à peu près 50 % de la valeur foncière de ses immeubles à Montréal. À cet égard, il y a toujours quelque chose d'un peu scandaleux de voir le gouvernement augmenter les taxes foncières des autres et ne pas s'acquitter des siennes propres. Alors, au plan de l'équité, je pense qu'à un moment donné cette question-là devrait se régler.

Finalement, M. le Président, nous maintenons que c'est à même le budget général du Québec qu'on devrait financer l'éducation et non pas en fonction d'une taxe foncière qui, premièrement, ne correspond pas nécessairement à la capacité de payer des propriétaires, qui, deuxièmement, va faire fluctuer les revenus de façon considérable d'une commission scolaire à l'autre. Et, à cet égard, qu'on nous dise que l'Ontario fonctionne autrement, il faudrait bien qu'en quelque matière quelque part ça paraisse qu'on est une société distincte. Je ne suis pas de ceux qui trouvent que l'Ontario détient la pierre philosophale. Et dans la région de Toronto, par exemple, il y a une inflation effrénée qu'on ne voudrait pas connaître à Montréal. Si le gouvernement, par ailleurs, veut absolument imiter l'Ontario, au lieu de se désengager du transport en commun, qu'il imite donc le gouvernement de l'Ontario qui vient d'annoncer, pour la région de Toronto, 5 000 000 000 $ d'investissements dans les transports en commun, alors que notre gouvernement annonce plutôt son intention de se désengager.

Finalement, le député de Lévis le soulignait, plus il y aura d'enfants dans une commission scolaire, dans un lieu quelconque, dans une municipalité, plus ça va coûter cher et plus les taxes seront élevées. Ça, on voit déjà ça sur l'île de Montréal, des jeunes couples qui quittent l'île pour s'installer en banlieue, notamment parce que les taxes foncières sont élevées. Alors on va ajouter ce poids-là et ça va se retrouver sur le dos des familles encore une fois. Alors, une famille de deux ou trois enfants, qui vient d'apprendre que son hypothèque va augmenter de 200 $ ou 250 $ par mois, ne peut pas apprendre de gaieté de coeur que les tarifs d'électricité vont augmenter de 23 % sur 12 mois de par les décisions du gouvernement du Québec et par la TPS que le fédéral va appliquer à partir du 1er janvier. Elle va apprendre que son impôt foncier scolaire, dans le cas de Montréal, va augmenter de 121 %, va apprendre aussi que, pour l'ensemble de ce qu'elle consomme, la TPS va se fixer bêtement à 7 % de n'importe quoi parce que le fédéral a décidé cette taxe tout à fait inique et planifiée pour créer de l'inflation à un moment où l'économie se ralentit. Alors, je pense que c'est une très mauvaise nouvelle pour les contribuables. C'est le gouvernement qui conscrit les commissions scolaires pour les envoyer percevoir à sa place, le même gouvernement qui pige dans la Régie de l'assurance automobile. Tout est bon pour se soustraire à ses responsabilités, y compris d'augmenter un impôt foncier qui n'est pas juste, qui va empêcher les municipalités de se développer, qui va mettre fin et qui endommage sérieusement un pacte fiscal, où les municipalités ont renoncé à leur part de la taxe de vente entre autres, étant compris qu'elles garderaient en pratique l'exclusivité de l'impôt foncier. Alors, pour les propriétaires de mon comté, c'est une très mauvaise nouvelle, M. le Président, et je pense que le gouvernement s'acharne sur ceux qui se sont donné une propriété. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Nous poursuivons les interventions avec l'intervention du député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. M. le député.

M. André Boulerice

M. Boulerice: Oui, M. le Président. Je remercie M. le député de Limoilou d'appuyer mes paroles avant que je les aie énoncées, mais je vous en ai déjà entretenu en privé et je sais que votre ligne de parti vous interdit de voter, mais je comprends ce que vous vivez dans votre circonscription, M. le député de Limoilou.

M. le Président, le ministre, tantôt, disait qu'il ne voulait pas faire perdre inutilement le temps de la Chambre. J'aurais le goût de lui répondre que c'est une décision qu'il aurait peut-être pu prendre en 1979. Mais, le mal étant fait, je vais poursuivre sur son projet de loi. Le ministre nous disait, M. le Président, tantôt: Ah! Vous semez l'inquiétude et la panique partout; ce n'est pas 320 000 000 $, c'est juste 191 000 000 $ en 1990-1991 et c'est 270 000 000 $ en 1991-1992. Je sais aussi bien additionner que le ministre. Ça fait donc 461 000 000 $ qui vont être pris dans les poches des contribuables durant les deux années fiscales, M. le ministre, et si je me trompe vous me corrigerez, mais, peu importe, vous allez quand même "poncer" de l'argent, M. le ministre.

J'étais heureux d'entendre mon collègue, le député de LaFontaine, M. le Président, parler d'habitation parce que, s'il y a une circonscription qui, au niveau de l'habitation, a des difficultés, c'est la circonscription de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Il ne se construit plus du tout de HLM comparativement à ce qu'on a fait, nous, entre 1976 et 1985. Les coopératives d'habitation, M. le Président, celles que j'inaugure encore aujourd'hui, sont celles qui ont été planifiées sous notre régime et, pire encore, le nombre de groupes, les GRT qu'on appelle en habitation, diminuent; ils n'ont plus de budget, ils n'ont absolument rien. Alors, M. le Président, qu'est-ce qu'il va en résulter?

Ah! Bien oui, on va faire un exemple, M. le Président. Le ministre dit: Je ne vais pas chercher beaucoup, je vais aller chercher juste 1 $. C'est bien entendu que se faire prendre chacun 1 $, ce n'est pas la fin du monde, mais quand il y en a 40 qui vous siphonnent 1 $, M. le Président, ça fait 40 $ et, là, ça commence à paraître dans un budget. Quand vous êtes, M. le Président, député d'une circonscription où, malheureusement, il y a le plus fort taux de chômage au Québec... S'il y a beaucoup de chômage en Gaspésie - et j'espère que le député de Gaspé va intervenir contre ce projet de loi - moi, j'aimerais vous informer qu'il y a au-delà de 20 % de chômage dans la circonscription que je représente et pas de programme de création d'emplois, entre parenthèses. Alors, le 1 $ que le ministre va chercher sous forme de taxes scolaires va être additionné à un autre dollar, pour employer toujours la figure de style, qui a été imposé par l'augmentation des frais de scolarité, un autre dollar par la ponction qui a été faite dans la

Régie de l'assurance automobile du Québec, M. le Président, donc un autre dollar encore qui va être enlevé. (1 h 30)

Maintenant, M. le Président, augmentation des tarifs d'Hydro-Québec, un autre dollar qui va être encore pris là-dedans. Comme il y a le désengagement progressif dans tous les ministères vers les municipalités, c'est-à-dire le bon vieux pelletage de la neige chez le voisin, il y aura encore un autre dollar, toujours figuratif, ce dollar, qui sera pris parce qu'il y aura une augmentation des taxes municipales.

Alors, comment pouvez-vous vous imaginer ce que va être la vie quotidienne d'un citoyen de classe moyenne dans la circonscription de Sainte-Marie-Saint-Jacques qui vient de se faire siphonner une piastre par chacun des ministères concernés? Mais comment les gens vont-ils arriver? C'est une circonscription où, comme dans la majorité des circonscriptions urbaines, les gens sont locataires. Qui va assumer les augmentations subséquentes? Eh bien, ça va être le locataire, M. le Président.

Mais ce que M. le ministre de l'Éducation semble oublier, c'est que le ministre des Affaires municipales, responsable du dossier de l'Habitation - parce qu'on a même aboli le ministère de l'Habitation - n'a pas proposé de gel des loyers cette année. La ville de Québec a été courageuse. Elle a adopté une résolution, 2 % maximum d'augmentation. C'est courageux, ça. Je pense qu'il faut féliciter le maire L'Allier de Québec d'avoir voté une telle résolution. Mais le ministre n'a pas emboîté le pas à ça. Donc, H va y avoir des augmentations de loyer qui devront être assumées par les locataires.

Déjà, M. le Président, c'est une circonscription qui a sans doute été la plus grande victime du "stampede" de la spéculation qu'a provoqué le député de Laporte, ancien ministre des Affaires municipales, où c'est maintenant devenu impossible, dans un comté de centre-ville comme le mien, de réussir à trouver un logement abordable, parce qu'il y en a de moins en moins. On ne construit plus de HLM, je vous l'ai dit tantôt. Il n'y a plus de coopératives d'habitation. L'augmentation des taxes, comme il n'y a pas de programme de rénovation domiciliaire... Et c'est un parc de logements parmi les plus vieux de Montréal. Il date des années 1946, en moyenne. À ce moment-là, ça va dépérir. Les conditions vont être lesquelles?

C'est le cumul de toutes ces actions que le ministre ne veut pas considérer. Le ministre ne regarde que la taxe déguisée qu'il impose en disant: Oui, mais comparativement au budget et comparativement à l'Ontario... Bien oui, mais en Ontario ils ont bien moins de chômage que nous, M. le ministre. Je pense que c'est une chose, M. le Président, qu'il devrait savoir. Ils ont une économie qui est plus florissante que la nôtre. Pourtant, c'est bizarre, ce sont deux

premiers ministres qui sont du Parti libéral. Il faut croire que le Parti libéral ontarien, économiquement, est plus solide que le Parti libéral du Québec. Mais, enfin, ce serait une autre analyse à faire. Il a été élu par la peau des dents.

Une voix:...

M. Boulerice: Oui mais, M. le Président, il y a un gouvernement conservateur. Pourtant, c'est le bon négociateur; ça, vous autres, les conservateurs, ça va bien ensemble, vous négociez bien.

Donc, c'est tout ce cumul dont le ministre fait abstraction. C'est ça que je trouve inadmissible dans son discours. Je veux dire, le ministre a toujours célébré et même écrit partout les libertés, sauf ici, dans cette Chambre. Il le sait fort bien, il a rompu un pacte qui avait été signé de gré à gré entre l'État et les municipalités qui sont sur le territoire de cet État. Le ministre a armé sa plume durant des années pour défendre ces libertés. Mais là, aujourd'hui, il se sert de la même plume, mais il a changé de couleur d'encre. Là, il a une encre rouge - figure de style, il va de soi - une encre rouge, M. le Président, où là il est en train de rayer une signature et, après ça, ça nous fera des petites démonstrations en disant: Vous avez déjà renié des signatures, vous autres, oui. Ce n'est rien, à comparer avec ça.

Donc, M. le Président, cette loi que nous présente le ministre, c'est encore toujours dans la foulée du désengagement progressif de l'État et d'aller remettre dans la main des autres ce que lui-même devrait assumer. Ça, c'est l'impact financier. Le député de Lévis a posé des questions tantôt, on disait: Oui, mais est-ce que c'est parce que les municipalités avaient trop d'argent? En tant qu'administrateur scolaire en congé sans solde pour charges publiques, M. le Président, je pense que je pourrais poser la question, moi aussi: Comment ça se fait que les commissions scolaires manquent d'argent? Oui, il y a un sous-financement, mais on pourrait peut-être regarder attentivement les comptes de certaines commissions scolaires, ça pourrait être intéressant. Il y a eu des exemples. À un moment donné, je pense que le porte-parole de l'Opposition avait posé des questions au ministre et on n'a pas eu grand-réponse là-dessus.

Donc, M. le Président, si on regarde la loi que nous présente le ministre de l'Éducation, ce n'est pas compliqué, c'est tout simplement, là aussi, M. le Président - et là, vous me faites signe de conclure - c'est comme dans le cas de la RAAQ, c'est comme dans le cas d'un paquet d'autres lois... Et je vois M. le député de Pontiac qui me fait signe que ça, oui, M. le Président, il a bien raison, on tape encore sur la tête...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, si vous voulez conclure, s'il vous plaît.

M. Boulerice: ...de la classe moyenne et des petits, M. le Président, parce que ce sont toutes des augmentations de taxes déguisées, et je voterai contre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

En vertu de l'article 253, M. le ministre, vous pouvez intervenir, mais vous avez cinq minutes, au maximum.

M. Ryan: Oui, quelques précisions. Je pense que c'est important lorsqu'il y a des choses erronées...

Une voix: ...M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de privilège ou question de règlement?

Une voix: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement.

Une voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): II y avait quorum, M. le député. M. le ministre.

Une voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non, non, il y a quorum. M. le député, vous étiez ici quand j'ai compté. Si vous voulez...

M. Ryan: Je pense que le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques n'a pas bien compris les explications fournies à maintes reprises au sujet de la réduction des subventions gouvernementales aux commissions scolaires qui découlera de l'adoption du projet de loi 69. Pour la première année, la réduction sera de 191 000 000 $ pour la raison suivante: c'est que l'année des commissions scolaires commence le 1er juillet et l'année du gouvernement commence le 1er avril. Par conséquent, il y a un décalage de trois mois. Pour la première année d'application de la loi, on n'aura à compter les opérations que pour cette période de neuf mois. Si vous transposez sur la période de douze mois qui suivra après, ça fait 272 000 000 $. Ce ne sont pas des montants qui viennent s'ajouter l'un à l'autre, c'est le montant annuel que procurera cette taxe, si elle demeure.

On ne le cache pas du tout, c'est une taxe foncière, il n'y a personne qui a dit que ce n'en était pas une, mais c'est dans les privilèges et attributions du gouvernement de décider où il effectuera des ponctions fiscales. Pour les raisons que j'ai maintes fois énoncées en cette Chambre, il est apparu cette année qu'une opération pouvait être faite là sans aucun

dommage ni pour l'économie ni pour l'équilibre des finances municipales et pour l'amélioration des finances des commissions scolaires. Ça, nous en avons fait la preuve à maintes reprises, ça n'enlève absolument rien aux municipalités. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Nous poursuivons maintenant le débat avec M. le député de Shefford.

M. Roger Paré

M. Paré: Oui, merci, M. le Président. J'ai eu la chance d'être assez impliqué, durant quelques années, au niveau du secteur de l'éducation en commission parlementaire, lorsque nous avons étudié, entre autres, le livre blanc sur l'école communautaire et, ensuite, la loi 40. À ce moment-là, l'actuel ministre de l'Éducation était porte-parole de l'Opposition en matière d'éducation. Je dois vous dire qu'on a eu à discuter longtemps tard et souvent. Bravo, parce que c'est un sujet qui était important et qui mérite encore qu'on y consacre tout le temps nécessaire. Ce n'est pas ce qu'on est en train de faire. (1 h 40)

On peut se poser la question: Comment se fait-il, connaissant et la rigueur et la patience du ministre de l'Éducation, que, sur le projet de loi 69, on soit si rapide, si pressé, si peu enclin à la discussion? La réponse est bien simple, c'est que ce n'est absolument pas une loi en faveur de l'amélioration du secteur scolaire, de l'éducation comme telle. Il s'agit purement et simplement d'une loi fiscale. C'est ça, la réalité des choses.

M. Boulerice: M. le Président, je vous demanderais d'appeler le quorum s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le député. Qu'on appelle les députés!

Si vous voulez poursuivre, M. le député de Shefford.

M. Paré: Oui, merci, M. le Président. Donc, comme j'étais en train de le dire, il ne s'agit pas d'une loi favorisant l'amélioration de la qualité de l'éducation, il s'agit d'une mesure strictement fiscale, soit l'application d'une décision ministérielle annoncée dans le discours sur le budget.

Je me rappelle aussi des débats qu'on avait à ce moment-là où on parlait de structure scolaire. Le ministre actuel, porte-parole de l'Opposition à ce moment-là, nous disait: Quand allons-nous cesser de parler de structure et commencer à parler de qualité de l'éducation? Aujourd'hui, on ne parle plus de structure, on ne parle pas de qualité de l'éducation, on parle de bâtisse, on parle d'immobilisation. Ça ne répond pas aux véritables problèmes qu'on vit en éducation présentement. Ça, je sais que le ministre est bien conscient de ça. Il y a des problèmes graves en matière d'éducation.

Quand on parte de la qualité du français, je dois vous dire, on n'a pas à se glorifier de la situation actuelle. Quand on parle des décro-cheurs à 38 % au secondaire, là non seulement on ne doit pas se glorifier, on doit s'inquiéter. Le signal d'alarme est donné par l'ensemble des intervenants qui se préoccupent non seulement de l'éducation mais de l'avenir de la jeunesse québécoise. Ce qui préoccupe les gens du secteur de l'éducation, les commissions scolaires... Parce qu'ils ont tenu des forums, des colloques, des symposiums, toutes sortes de rencontres avec un thème particulier à chaque fois ou même globalement, sur un ensemble de préoccupations en matière scolaire. On parle de perfectionnement des professeurs, on parle d'encadrement, on parle de groupes scolaires, de façon à être capables de donner un suivi encore plus personnalisé par rapport à chacun de nos jeunes dans nos écoles primaires et secondaires. On sait à quel point il manque de manuels dans nos bibliothèques scolaires. C'est incroyable! Et ça, c'est directement relié à la qualité du français, à la grammaire, à la façon d'écrire. Si nos jeunes ne lisent pas suffisamment, eh bien évidemment, ils vont être moins enclins à être plus efficaces en termes de français, en termes d'écriture. Mais c'est tout relié, il ne faut pas l'oublier.

L'enseignement professionnel au Québec, ce n'est pas adapté à la conjoncture moderne. Alors qu'on parle de mondialisation de l'économie, de libre-échange, d'ouverture, il faut se préparer. Mais quand on parle de se préparer, ce n'est pas seulement les structures, ce n'est pas seulement les institutions financières, ce n'est pas seulement les entreprises, c'est d'abord et avant tout la préparation de notre main-d'oeuvre. C'est ça notre plus grande richesse. C'est la main-d'oeuvre. Et notre main-d'oeuvre va être compétente, va être prête en autant qu'on va avoir une bonne école et un bon système d'éducation et de formation professionnelle.

Tout le monde en parle et pourtant, dans le 69, absolument aucune mesure, sinon peut-être de faire fuir des gens de l'école. Mais aucune mesure de formation professionnelle alors qu'on sait qu'on a périmé, seulement au niveau du ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, 32 000 000 $ en formation professionnelle l'an dernier. Et probablement que quand on fait le calcul par rapport aux sommes qui auraient dû être investies, autant du fédéral que du provincial, c'est 100 000 000 $ qu'on a périmés parce qu'on n'a pas adapté la formation en fonction des besoins.

On connaît tous les problèmes d'intégration au niveau des personnes handicapées. Les gens qui le vivent dans le milieu, dans les écoles à chaque jour, d'une façon quotidienne, l'exigent, le demandent. Et pourtant, on ne retrouve de

l'autre côté, rien, aucune mesure pour permettre d'améliorer ça.

On connaît, spécialement mes collègues qui sont de la région de Montréal, le problème d'intégration des immigrants. C'est une nécessité de survie collective au Québec. Qu'est-ce qu'on y fait? Quel effort y a-t-on mis? Pas grand-chose, malheureusement. Per capita, c'est moins d'argent qu'il y a quelques années au niveau de l'enseignement du français par rapport à nos immigrants. Pour être capable de moderniser nos écoles, on aurait dû faire en sorte de prévoir, d'augmenter les montants nécessaires, parce que c'est bien d'argent qu'on parle. Ça, autant les commissions scolaires, autant la Centrale de l'enseignement du Québec qui, lors d'un congrès tout récent, disait qu'il faut s'occuper de formation professionnelle, de modernisation de notre équipement par rapport à la technologie. Ça prend des sous. Est-ce qu'on en donne pour parler de qualité de l'enseignement, de formation? Non, M. le Président. Pourquoi? Parce que le projet de loi 69 dont on discute présentement fait en sorte tout simplement d'augmenter les revenus de l'État, en transférant directement aux contribuables, mais ramassés par les commissions scolaires, quelque chose comme 272 000 000 $ par année, annuellement. C'est incroyable et c'est inquiétant pour les Québécois quand on regarde à quel point, de façon indirecte, le gouvernement va chercher l'argent dans les poches des contribuables, et on le fait comme ça présentement en pleine nuit, par un projet de loi qui parle d'éducation et, pourtant, si on fait juste se rappeler et reculer de quelques heures, de quoi a-t-on parlé ici? De taxes déguisées. À la Régie de l'assurance automobile, on va aller chercher des dizaines et des dizaines de millions, même pas, des centaines de millions annuellement dans les poches des contribuables. C'est une loi ici qui s'appelle "modifications à la Régie de l'assurance automobile du Québec". C'était-u beau au budget? Pas d'augmentation de taxes, pas d'augmentation d'impôt direct, mais, de façon indirecte maintenant, chaque ministre est en train de faire ce qu'on appelle la sale job. La Régie de l'assurance automobile, augmentation, parce que, finalement, on aurait diminué, n'eût été seulement la rentabilité de la société.

Maintenant, on fait la même chose et ça, c'est inquiétant quand on connaît la situation des petits propriétaires et des locataires au Québec. C'est inquiétant, parce que, après avoir annoncé 23 % d'augmentation sur le compte d'électricité en 12 mois, les 12 mois à venir, on leur a dit aussi: Avec l'assurance automobile on va chercher de l'argent; il y a l'augmentation du taux d'intérêt. Ça veut dire des hypothèques renouvelées qui vont faire en sorte qu'il y a des gens qui vont avoir de la difficulté à absorber l'augmentation. Pas contents de ça, ils vont devoir absorber la TPS le 1er janvier prochain. Encore une augmentation qui fait en sorte que les

Québécois vont avoir encore de plus en plus de difficultés à joindre les deux bouts et spécialement les Québécois à salaire modeste, au salaire minimum, avec des revenus qui frôlent souvent le seuil de la pauvreté pour un grand pourcentage de travailleurs au Québec, plus tous les autres qui vivent de prestations. Ils vont devoir absorber ces augmentations-là. Maintenant, on nous annonce par le projet de loi de ce soir qu'on va augmenter les taxes scolaires. C'est ça qu'on est en train de dire aux Québécois et vous pensez qu'on va voter pour ça? Ça n'augmentera pas la qualité de l'enseignement au Québec. Ça n'augmentera pas la quantité des sommes investies dans l'éducation. On va transférer aux commissions scolaires, non pas de l'argent qu'ils vont aller chercher en taxes scolaires pour l'amélioration de la qualité de l'enseignement, mais qu'ils vont aller chercher pour prendre la place du gouvernement pour payer l'entretien, la réparation des bâtisses, l'entretien ménager et les coûts d'électricité. C'est incroyable. C'est un transfert, non pas de responsabilités aux commissions scolaires, mais de dépenses, et on leur fait faire la collecte d'argent que le gouvernement ne veut pas faire directement, au vu et au su de tout le monde, d'une façon claire et directe. Ce n'est pas surprenant, si on ne veut pas faire ça à la clarté, qu'on soit en train de voter ce projet de loi ici à la noirceur, cette nuit. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (m. bissonnet): merci, m. le député de shefford. je reconnais maintenant le prochain intervenant, m. le député de gouin. m. le député.

M. Boisclair: M. le Président, avant que je puisse commencer mon intervention, j'apprécierais que l'article 32 du règlement puisse être mis en application et qu'on puisse aussi constater le quorum.

Des voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Silence, s'il vous plaît! M. le député, vous pouvez poursuivre, vous avez le quorum. M. le député de Gouin.

M. Boisclair: Merci, M. le Président. Il y en a qui diront...

M. Lefebvre: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur la question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

(1 h 50)

M. Lefebvre: On a le droit et c'est prévu dans notre règlement, effectivement, qu'il doit y avoir quorum. Maintenant, les deux derniers

appels au règlement qui ont été faits par l'Opposition là-dessus étaient faits carrément dans le vide. Alors, je rappelais tout à l'heure, M. le Président, les dispositions de l'article 32, effectivement, et le troisième paragraphe de l'article 32 qui dit que les députés doivent s'abstenir de tout ce qui peut nuire à l'expression d'autrui et au bon fonctionnement de l'Assemblée.

Alors, M. le Président, appeler le quorum à tout bout de champ alors qu'on sait très bien qu'on est dans l'erreur, on nuit au bon fonctionnement de l'Assemblée.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît.

Des voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député a soulevé une question de règlement. J'ai écouté le leader adjoint du gouvernement. Avant de commencer votre intervention, vous avez demandé le quorum. Le quorum est maintenant atteint. Je tiens à dire que tout député peut demander le quorum à cette Assemblée. Je tiens à vous informer de ça.

M. Boisclair: Je vous remercie, M. le Président, pour votre sage décision.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 32 est bien clair.

M. Boulerice: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.

Une voix: Vous avez raison.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît.

M. Lefebvre: Tout député peut demander le quorum, sauf, M. le Président - et je vous demanderais de m'indiquer si je me trompe là-dessus - qu'à partir du moment où il est évident qu'il y a quorum et qu'on soulève des appels au règlement qui, en fait, n'en sont pas, c'est de l'abus, M. le Président, et c'est prévu à l'article 32, paragraphe 3. Lorsque, de toute évidence, autrement dit, il y a quorum dans l'Assemblée... À deux reprises, au cours des 10 dernières minutes, et le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques et, maintenant, le député de Gouin, avant d'entreprendre son intervention, ont appelé le quorum alors que, de toute évidence, il y avait quorum.

Je me répète, M. le Président, je pense que j'ai raison là-dessus, c'est ça, nuire au bon fonctionnement de l'Assemblée. Le député de Gouin, malheureusement, suit le mauvais exemple du député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vais vous lire l'article 32.

M. Boulerice:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur la question de règlement?

M. Boulerice: Oui. En vertu de l'article 35, M. le Président-Une voix:... M. Boulerice: Pardon? Le Vice-Président (M. Bissonnet): Allez-y.

M. Boulerice: "...imputer des motifs indignes à un député..."

Des voix: Ah!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît. M. le député, s'il vous plaît! Pour le moment, vous allez attendre, on va se calmer, ici, un petit peu. S'il vous plaît. M. le leader adjoint du gouvernement a cite l'article 32, il a fait une revendication, et ça n'a pas rapport du tout à l'article 35, M. le député.

Selon l'article 32, il est évident qu'il ne faut pas abuser du règlement non plus. Je laisse ça à votre simple jugement, de ne pas abuser du règlement. Je reconnais maintenant M. le député...

Des voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Je demande votre collaboration, il est 1 h 45. J'attends votre question de règlement, M. le député.

M. Boulerice: À l'article 35, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 35 quoi?

M. Boulerice: 7.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui. Expliquez-moi ça, là!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boulerice: "...se servir d'un langage violent...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boulerice: "...injurieux ou blessant..." Je n'emploierai pas...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! M. le député, avec tout le respect que j'ai pour vous, je n'ai pas entendu de langage blessant. Je n'en ai pas entendu parce que j'ai eu des questions de règlement d'un côté et de l'autre et, à un moment donné, il faut poursuivre le débat. Alors je vous demanderais, M. le député de Gouin, de commencer votre intervention. Je tiens à vous dire que nous sommes à l'Assemblée nationale et qu'il est 1 h 55. Je vous demanderais du sérieux. M. le député de Gouin.

M. Boisclair: M. le Président... Des voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît. En vertu de l'article 38: "Le Président doit immédiatement signaler toute violation du règlement dont il a connaissance." Je fais tout mon possible, je vous demanderais votre collaboration, s'il vous plaît.

M. Boulerice:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, mes chers collègues, M. le député, s'il vous plaît.

M. Boulerice: ...avez-vous, M. le Président, eu connaissance qu'en vertu de l'article 32 Mme la députée de Mégantic-Compton a interrompu le droit de parole de M. le député de Gouin?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, je n'en ai pas eu connaissance. Je vous lis l'article 38.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, je demande votre collaboration. Ça devient très désagréable. En vertu de l'article 38 - je vais vous le lire - "Le Président doit immédiatement signaler toute violation du règlement dont il a connaissance." Je n'en ai pas eu connaissance et je voulais... attirer votre attention.

M. Boulerice: ...les deux paragraphes?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député!

M. Boulerice: M. le Président, puis-je vous demander de lire les deux paragraphes précédents?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député! S'il vous plaît!

M. Boulerice: ...M. le Président. Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! M. le député de Gouin, si vous voulez commencer votre intervention, s'il vous plaît.

M. André Boisclair

M. Boisclair: Merci, M. le Président. Après cet intermède, je n'en ferai pas une question de règlement, mais si vous me permettez de qualifier l'utilisation que les membres de l'Opposition font du règlement, on pourrait peut-être et il serait aussi justifié de questionner l'utilisation que fait le leader du gouvernement et le leader adjoint du gouvernement du règlement quant aux motions de bâillon, la troisième, M. le Président, que nous avons étudiée cette semaine, en plus des différentes motions de censure.

Je n'en ferai pas une question de règlement, M. le Président. Cependant, si vous permettez de qualifier l'attitude de l'Opposition, il serait aussi intéressant de voir quels sont vos commentaires et opinions quant à ce que je pourrais appeler l'utilisation abusive du règlement et des motions de bâillon et de suspension des règles aussi qu'on a connues la session dernière.

Quant au projet de loi 69, il y a été très clairement explicité par l'ensemble de mes collègues que, d'abord et avant tout, ce pourquoi l'Opposition s'oppose tant aux différentes dispositions du projet de loi 69, c'est essentiellement parce qu'on vient élargir le pouvoir de taxation des commissions scolaires, particulièrement dans la situation du Conseil scolaire de l'île de Montréal.

Comme mes collègues l'ont souligné précédemment, sans consultation, sans avis et en cachette, on a mis fin au pacte fiscal de 1979, ce qui a causé une colère justifiée, à notre avis, des municipalités. M. le Président, ce sont 320 000 000 $ additionnels que les commissions scolaires iront chercher dans les poches des contribuables en date du 1 juillet 1990. Je croyais qu'il y avait un consensus en cette Chambre. S'il y a une réforme qui a été réussie par le Parti québécois, c'est bien celle qui a été menée en 1979-1980 par feu M. René Lévesque, ancien premier ministre, par M. Parizeau, actuel chef de l'Opposition officielle, par M. Tardif.

C'est bien cette réforme de la fiscalité municipale qui a pourtant été applaudie par l'ensemble des intervenants. M. le Président, rappelez-vous les circonstances au moment de l'adoption de ce pacte fiscal. Les municipalités avaient manifesté plusieurs craintes et plusieurs grincements de dents à l'égard de ce nouveau pacte fiscal qui était proposé. Et les municipalités, à ce moment-là, avaient décidé, d'un com-

mun accord, de se départir de la taxe de vente au profit du gouvernement; en retour, cependant, les municipalités se voyaient accorder l'exclusivité dans tout le champ de l'impôt foncier. _____Voilà, cependant, M. le Président, qu'en deux temps trois mouvements, en raison - il faut se le rappeler - des compressions fédérales dont le ministre de l'Éducation a fait état immédiatement après le budget fédéral...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, Mme la députée! S'il vous plaît! M. le député. S'il vous plaît!

Une voix: ...M. le Président. Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Si vous voulez appeler les députés, s'il vous plaît. On appelle les députés.

Une voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Je suis à la veille de suspendre l'Assemblée, là. 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11. Si vous voulez poursuivre, M. le député.

Une voix:...

Une voix: C'est quoi, ça? Le député de quoi? De Chauveau?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Chauveau, s'il vous plaît! Vous n'avez pas la parole. M. le député de Gouin, si vous voulez poursuivre, s'il vous plaît.

M. Boisclair: Si M. le député de Chauveau veut prendre la parole, il me ferait plaisir de la lui céder.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député! M. le député! S'il vous plaît, M. le député, vous avez la parole. Adressez-vous à la présidence. Merci.

M. Poulin:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député! M. le député de Chauveau, s'il vous plaît! Vous n'avez pas la parole. Quand vous voudrez prendre la parole, vous me ferez signe et je vous reconnaîtrai.

Une voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! M. le député de Gouin. (2 heures)

M. Boisciair: Merci, M. le Président. S'il fallait qu'on bâillonne certains membres du gouvernement comme on bâillonne l'Opposition, je pense qu'il y aurait sans doute beaucoup plus de discipline en cette Chambre. Ceci étant dit, M. le Président... Si vous n'êtes pas content, demandez la parole au président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!

M. Boisclair: M. le Président, je vous parle-Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Vous pouvez poursuivre, M. le député.

M. Boisclair: Je vous remercie, M. le Président. Alors, comme j'en discutais tout à l'heure, voilà donc qu'en deux temps et trois mouvements, en raison, bien sûr, des compressions fédérales - et le ministre de l'Éducation l'a souligné à juste titre au lendemain du budget fédéral - en raison aussi d'une mauvaise conjoncture économique ou d'une conjoncture économique qu'on pourrait dire plus difficile et aussi de la mauvaise croissance qu'on a connue des différentes dépenses dans les domaines de la santé, de l'éducation, le gouvernement libéral a donc décidé en catastrophe, M. le Président, de partager le champ de l'impôt foncier entre les municipalités et les commissions scolaires et d'autoriser celles-ci à utiliser jusqu'à 10 % ou 15 % de cette forme de taxation limitée jusqu'ici à 6 %.

Au départ, le transfert devait se chiffrer à 75 000 000 $. En déposant ses prévisions budgétaires, le président du Conseil du trésor, M. Daniel Johnson, a mentionné 191 000 000 $. Ensuite, c'est à l'Assemblée nationale que le ministre de l'Éducation annonçait que le transfert pourrait atteindre jusqu'à 320 000 000 $. En termes pratiques, ce que ça veut dire, c'est que le taux moyen de la taxe foncière scolaire doublera de 12 % à 24 % des 100 $ d'évaluation, ce qui signifie, pour le contribuable moyen, une augmentation des taxes scolaires d'environ 100 $ dès cette année.

La décision qui est prise à la vapeur par le gouvernement Bourassa est toute croche, incohérente, injuste et injustifiée. Tout le monde reconnaîtra que le gouvernement doit travailler avec un certain nombre de contraintes budgétaires qui, ces temps-ci, on l'admettra, ne sont pas faciles, mais d'autres solutions auraient eu avantage à être examinées. L'Opposition officielle a manifesté sa bonne volonté à l'occasion de l'étude des travaux de la commission de l'éducation qui a étudié le projet de loi 69. Nous avons fait un certain nombre de propositions: d'entendre l'UMQ, d'entendre l'UMRCQ. Bien sûr, on a accepté, mais en leur donnant si peu d'avis, si peu de temps pour se préparer que, bien sûr, ces gens-là n'ont pas eu le temps de se présenter. C'est un peu l'équivalent de dire qu'on ne les

aurait pas invités. Nous avons demandé d'entendre un certain nombre de commissions scolaires, M. le Président. Il ne s'agissait pas là de demandes futiles. Il s'agissait tout simplement... Nous croyions qu'il était pertinent d'entendre un certain nombre d'intervenants pour pouvoir connaître leur point de vue et y aller à fond pour voir, justement, ce qu'il en était de ce nouveau partage de la fiscalité municipale.

M. le Président, de toute évidence, en plus des besoins réels de l'État, le gouvernement, il faut le dire, a voulu profiter de la conjoncture pour redonner aux commissions scolaires une partie du champ d'impôt foncier. À ce titre, le ministre de l'Éducation est conséquent. Il avait eu d'aillleurs l'occasion de le dire dans un discours qu'il a prononcé à l'occasion du Sommet sur le financement de l'éducation primaire et secondaire où le ministre Ryan, à ce moment-là, le ministre de l'Éducation, avait remis en question un certain nombre de principes régissant le pacte fiscal de 1980. Ce qui est plus intéressant, M. le Président, c'est en termes politiques, de voir jusqu'à quel point M. le ministre de l'Éducation a eu gain de cause sur son homologue, ministre des Affaires municipales.

Toute cette situation nous mène dans un contexte où, au-delà de l'argent, des orientations fondamentales sont remises en cause par la décision du gouvernement du Québec. Le gouvernement - et c'est très clair - se r(Presse, autant et si souvent cité par le ministre de l'Éducation.

La situation est encore plus difficile lorsque l'on connaît la réalité à Montréal. Dans un article de La Presse du jeudi, 12 avril 1990, on apprenait que l'impôt scolaire pourrait grimper de 128 % à Montréal. Cette facture, donc, d'impôt scolaire augmenterait de 128 % dans l'île de Montréal si le gouvernement du Québec maintient, comme il le fait à l'heure actuelle, son intention d'aller chercher jusqu'à 320 000 000 $ afin d'élargir son champ d'imposition de la taxe des commissions scolaires. Cette augmentation annulera totalement - c'est ça qu'il faut comprendre, dans une situation où la ville de Montréal avait manifesté un certain nombre d'intentions - l'impact à la baisse du taux d'imposition foncier annoncé par la ville de Montréal dans son budget de 1990. Ce sont les conclusions auxquelles arrivait le Service de planification et de concertation de la ville de Montréal.

M. le Président, le taux de taxation, si ce projet de loi que nous étudions ce soir devient loi, à Montréal, passera dès cette année de 0,068 $ à 0,155 $ les 100 $ d'évaluation sur tout le territoire couvert par le Conseil scolaire de l'île de Montréal. À Montréal, le propriétaire d'une maison évaluée, par exemple, à 121 000 $ au rôle d'évaluation municipale, qui est inférieur - le ministre sera d'accord avec moi - au rôle d'évaluation scolaire, verra sa facture scolaire augmenter d'environ 130 $. Plus précisément, M. le Président, sa commission scolaire lui enverra cette année une facture de 232,50 $ contre 102 $ en 1989.

M. le Président, je conclurai en disant que l'Opposition a raison de s'offusquer de cette opération de délestage, comme l'ont fait les gens de la ville de Montréal, comme l'a fait l'Union des municipalités, comme l'ont fait plusieurs intervenants dans le dossier. Je conclurai en disant que encore une fois, si nous n'avons pas été capables d'aller au fond des choses et de faire valoir correctement les intérêts des citoyens et des citoyennes que nous représentons à l'Assemblée nationale, c'est parce que nous avons été bâillonnés une fois de plus par ce gouvernement qui nous empêche de faire valoir notre point de vue de façon légitime. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant Mme la députée de Verchères.

Mme Luce Dupuis

Mme Dupuis: M. le Président, il y a une chanson qui dit qu'à Toronto les nuits sont longues. Je pense qu'on va pouvoir l'attribuer...

Une voix: À Winnipeg. Mme Dupuis: À Winnipeg? Une voix: À Winnipeg.

Mme Dupuis: À Toronto aussi, pour moi. Je pense qu'on va pouvoir attribuer ce qualificatif au Québec aussi, ou à nos fins de session. Mes savants et distingués collègues ont tour à tour dénoncé le projet de loi qui permet un transfert de fonds qui, finalement, est pris dans les poches des contribuables, et ont démontré aussi qu'ils étaient très respectueux des quorums.

En ce qui me concerne, les actions et la manière de faire du gouvernement m'amènent à me questionner. Comment un gouvernement peut-il arriver à avoir une attitude aussi méprisante envers autant de personnes, d'organismes et envers les valeurs qui nous sont propres? Je dis un gouvernement, mais ce serait, je pense, plus exact de dire une petite poignée d'individus, quatre, six, peut-être dix, au plus, qui sont les supposés décideurs de ce gouvernement. Quel motif peut amener cette petite poignée d'in-

divkjus à bafouer de façon aussi indécente autant les membres de notre société québécoise que nos institutions québécoises?

J'ai fait une petite liste qui ressemble un peu, peut-être, à des accusations, mais, je pense, qui donne un aperçu de ce qui a été bafoué, de ce qui a été méprisé par ce projet de loi. J'ai pris mes feuilles pour ne pas en oublier, mais j'en ai sûrement oublié. La rupture du pacte fiscal conclu en 1979 entre le gouvernement et les municipalités, le manque de respect des engagements du gouvernement à laisser l'exclusivité du champ foncier aux municipalités, le retrait de la marge de manoeuvre garantie aux municipalités afin qu'elles puissent remplir leurs responsabilités, la ponction dans les transferts acquis aux municipalités afin de combler le manque à gagner en matière d'éducation, M. le Président; le transfert au niveau local des coupures du fédéral. (2 h 10)

Est-ce qu'un gouvernement peut se permettre de ne servir que de courroie de transmission? C'est ça qui arrive. Le fédéral refile sa facture au provincial, le provincial refile la facture au municipal et le municipal, par la force des choses, devra refiler la facture aux contribuables. Refus de débattre des principes de fond, modification des règles du jeu en matière de fiscalité municipale et scolaire, manque de respect des partenaires avec lesquels le gouvernement se doit de travailler en étroite collaboration, et je parle ici des commissions scolaires et des municipalités. Le manque de considération des impacts de ces nouvelles orientations dans le partage des responsabilités, et là on parle des services éducatifs. Le retrait aux municipalités d'un espace fiscal adéquat, qui leur était autorisé, qui leur est maintenant enlevé, puisque les commissions scolaires auront le droit de venir puiser dans ce fonds fiscal. Le recul du gouvernement devant ses responsabilités en matière d'éducation. Le désengagement du gouvernement à garantir l'accessibilité et l'universalité de l'éducation. Le non-respect des contribuables. Le manque de franchise, en laissant croire qu'il n'augmente pas les impôts, et qui, par tous les moyens, trouve le moyen, oui, de taxer le contribuables. Si, au moins, toutes ces accusations, entre guillemets, servaient à améliorer notre système d'éducation, les failles qu'on retrouve dans notre système d'éducation, et Dieu sait s'il y en a, il faut avoir oeuvré dans l'enseignement pour les connaître... Et là, je ne les énumérerai pas toutes, parce que je pense que je n'aurais pas assez de mes dix minutes. Ce n'est pas pour améliorer notre système d'éducation, mais pour la maintenance des bâtiments scolaires. À ces questions posées, le gouvernement peut-il répondre, a-t-il seulement quelques motifs valables?

Si le gouvernement a trouvé le moyen de museler l'Opposition parlementaire, il devra cependant répondre de ses actes devant la population. On peut, oui, museler, par des moyens qui leur sont permis, l'Opposition en Chambre. Mais comme je disais précédemment, dans mon intervention, cet après-midi, museler une population c'est un peu plus difficile. Et lorsqu'on ne permet pas à la démocratie de s'exercer à l'intérieur de nos institutions, c'est dans la rue qu'elle s'exerce. Le fait d'avoir été élu majoritairement, M. le Président, ne donne pas tous les droits à un gouvernement. J'ai entendu cette réflexion-là à plusieurs reprises: Nous avons été élus et nous sommes majoritaires. Et là, je terminerai par une autre question, est-ce que le fait d'avoir été élu par une forte majorité, donne tous les droits à un gouvernement, toutes les permissions, dont celle de bafouer nos institutions, notre population? Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant M. le député de Dubuc. M. le député de Dubuc.

M. Gérard R. Morin

M. Morin: Merci, M. le Président. Je vous dirai bien honnêtement que j'ai beaucoup de peine à reconnaître le ministre de l'Éducation, ministre parrain de la présente loi, car on sait que le ministre a la réputation d'un homme de grands principes. Mais, aujourd'hui, on doit admettre qu'il est presque méconnaissable, pour avoir accepté de se faire complice de la pire machination qui a pour effet de tromper, finalement, consciemment ou pas, le monde scolaire et le monde municipal. La deuxième raison, c'est, bien sûr, de se rendre complice d'une démarche aveugle, qui aura pour effet de rendre vulnérable la qualité de l'enseignement parce qu'on la rend vulnérable à la disparité qui existe entre les municipalités au niveau de l'indice de richesse. Et enfin, on pourrait écrire ce soir une page de l'histoire qui pourrait s'intituler: Un grand démocrate est disparu. Effectivement, le ministre de l'Éducation s'est toujours fait un grand défenseur de la démocratie. Pourtant, aujourd'hui, il n'a eu, semble-t-il, aucun scrupule pour souscrire à la motion qui nous a été imposée et qui a pour effet d'empêcher l'Opposition d'aller plus au fond des choses et cela, à peine après vingt-trois heures de discussions en commission parlementaire.

Ceci dit, M. le Président, dans un autre ordre d'idées, je ferai référence à ma première expérience comme député, je pense, au mois de décembre où nous avons eu à étudier le projet de loi 5 en commission parlementaire. Ce projet de loi avait pour but de clarifier une situation à l'effet qu'on ne pourrait, dorénavant, se servir d'une plainte sur l'évaluation municipale pour justifier le non-paiement des taxes. Bien que nous n'avions pas, à ce moment-là, mon collègue de Jonquière et moi-même, contesté la pertinence

parce que, effectivement, il y avait matière à corriger une situation, j'en avais profité pour questionner le ministre pour avoir eu des expériences dans le passé au niveau municipal pour ce qui est de la fiscalité. Je lui avais demandé: Pourquoi, M. le ministre, ne profitez-vous pas de l'occasion pour finalement apporter un amendement en profondeur à la Loi sur la fiscalité municipale, particulièrement sur l'évaluation? On sait qu'on a entendu beaucoup parler de l'article 65.1 concernant les rôles d'évaluation, les fameux "en lieu" de taxes qui devaient être augmentés au cours des années et enfin, ce qui n'est pas directement collé à la fiscalité mais qui a un impact majeur sur les finances municipales, c'est tout le domaine des responsabilités, des nouvelles responsabilités municipales. À ce moment-là, le ministre m'avait répondu que la Loi sur la fiscalité était une loi fort complexe et comme elle avait été adoptée suite à un long processus de consultation, il ne pouvait en être autrement lors d'un amendement. Or, à ce moment-là, le ministre s'était engagé formellement à ne jamais procéder d'aucune façon à une atteinte à cette Loi sur la fiscalité ou autrement sans procéder à une longue consultation et obtenir un consensus du monde municipal. Il avait pris cet engagement. Or, c'est pour ça qu'on ne peut faire autrement que de conclure que, que ce soit le ministre de l'Éducation ou le ministre des Affaires municipales, tous les deux auront... On pourrait les déclarer coupables aujourd'hui de trahison envers le monde municipal.

Mais si, en cette Chambre, beaucoup de députés, que ce soit du côté ministériel ou dans la population en général, on ne voit pas ce qui se passe, c'est peut-être parce qu'il y a une méconnaissance de cette Loi sur la fiscalité municipale. Pourtant, ce n'est pas une loi comme les autres. C'est une loi fort importante, une loi qui avait été précédée pendant peut-être deux décennies d'une multitude de commissions, de rapports, d'enquêtes, sort les commissions Tremblay, les commissions Bélanger, Castonguay, la fameuse conférence provinciale-municipale de 1975 où on retrouvait le même constat à l'effet que les municipalités devenaient de plus en plus dépendantes du gouvernement et, de ce fait, cela constituait un obstacle majeur à l'autonomie municipale. Alors, rappelons, pour ce qui est de l'essentiel de cette loi, évidemment, qui était le résultat d'un consensus, d'un large consensus entre Québec et les municipalités: évidemment, il y avait transfert de taxes de vente, tout le domaine des "en lieu" de taxes, des modifications majeures entourant le rôle d'évaluation et aussi la consécration de l'exclusivité du champ foncier aux municipalités. (2 h 20)

Ce qui est malheureux et ce qu'on doit admettre aujourd'hui et déplorer, c'est que la loi 57, avant même ce projet de loi, est une loi en régression. En régression pour plusieurs raisons, c'est que les "en lieu" de taxes, qui devaient normalement progresser avec les années en termes de paiement de taxes de la part du gouvernement sur ces établissements, sont demeurés tels quels sans compter la multitude de contestations du gouvernement au niveau de son réseau, que ce soit des affaires municipales - non pas municipales - des affaires scolaires, le monde scolaire, ou d'autres établissements du gouvernement. Et que dire de l'article 65.1 qui, à cause de son manque de clarté, a fait en sorte que, suite à des contestations, particulièrement dans l'industrie, les municipalités se sont vues perdre des évaluations, donc des sources de revenu importantes. Nous ne parlerons pas des responsabilités qui se sont ajoutées à travers les années aux municipalités. Et cette loi 69 qui, finalement, vient s'attaquer au consensus qui avait pour effet de consacrer l'exclusivité du champ foncier. Et ça, à moyen et long terme, M. le Président, ça aura des impacts majeurs.

En conclusion, nous ne pouvons arriver à autre chose... conclure autrement que les effets ne sont pas autre chose que négatifs sur toute la ligne parce que, d'abord, ils portent atteinte à la fragilité de la fiscalité municipale. C'est quand même un domaine fragile. C'est aussi négatif parce que ce projet de loi propose l'élargissement du champ foncier scolaire. En plus, ce que le ministre tente de nous faire croire, c'est qu'en élargissant le champ foncier au monde scolaire, cela a pour effet d'augmenter leur autonomie alors que, finalement, ça paraît davantage une autonomie très artificielle, sans considérer qu'à moyen et long terme cette loi aura un effet négatif sur la qualité de l'enseignement, même si le ministre semble vouloir minimiser l'impact là-dessus. Qu'on le veuille ou non, le fait d'assujettir la qualité de l'enseignement à la disparité que l'on connaît à travers les municipalités au niveau de l'indice de richesse, ça ne peut faire autrement qu'avoir des effets négatifs sur la qualité de l'enseignement à travers le Québec. Donc, pour toutes ces raisons, M. le Président, nous ne pouvons faire autrement qu'être contre ce projet de loi et le dénoncer. Mais, finalement, on reste toujours avec la question: Pourquoi tout ça, tant d'efforts, tant de détermination, tant d'entêtement de la part du gouvernement pour passer cette loi sans avoir obtenu le consensus du monde municipal, avoir été obligé d'imposer le bâillon? Je pense que la seule raison ou la seule explication, c'est que le ministre a dû obtempérer à la directive du président du Conseil du trésor de puiser dans le champ foncier municipal, et cela, bien sûr, pour combler le manque à gagner du budget qui a été présenté récemment. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant pour la prochaine intervention Mme la députée des

Chutes-de-la-Chaudière. Mme la députée.

Mme Denise Carrier-Perreault

Mme Carrier-Perreault: Merci, M. le Président. Le projet de loi 69 est ce projet de loi qui apporte diverses modifications à la Loi sur l'instruction publique relativement aux modalités de financement des commissions scolaires et du Conseil scolaire de l'île de Montréal. C'est ainsi aussi que le projet de loi élargit le pouvoir de taxation des commissions scolaires en rehaussant les limites permises par la loi. C'est un projet de loi aussi qui remplace les règles relatives à la subvention de péréquation que le ministre de l'Éducation verse aux commissions scolaires.

M. le Président, dans son allocution tout à l'heure, le ministre nous disait qu'il ne comprenait pas les objections de l'Opposition officielle, qu'il n'y avait pas de changement de principe radical, que les commissions scolaires étaient dans le champ d'impôt foncier et qu'elles le demeuraient, tout comme les municipalités, d'ailleurs. C'est vrai. Mais le ministre peut-il tout de même admettre que, s'il n'y a pas de changement de principe, comme il nous le faisait remarquer, il vient quand même changer les règles du jeu, il vient modifier, il vient rompre le pacte fiscal de 1979, et tout cela, sans qu'il n'y ait eu aucune entente? Enfin, il n'y a pas eu d'entente entre les municipalités et le gouvernement.

Il faut se rappeler que, pour en arriver à ce pacte, en 1979, il y avait eu de véritables négociations. Bien sûr, moi, personnellement, je n'étais pas là à l'époque, mais j'en avais parlé avec notre collègue, ici, de l'Opposition officielle et porte-parole de l'Opposition en affaires municipales qui, lui, était très bien renseigné puisqu'il était maire à l'époque et qu'il était très au courant de ce qui s'est passé par rapport aux négociations. Alors, à ce moment-là, il y avait eu des assises entre le gouvernement - municipalités et il y avait eu aussi une véritable négociation. Donc, il y avait eu entente, en 1979.

Ce qui me frappe, M. le Président, c'est que ce gouvernement procède, encore une fois, de façon unilatérale. L'Union des municipalités du Québec n'est pas d'accord avec le projet de loi. L'Union des municipalités régionales de comté du Québec n'est pas d'accord non plus. Plusieurs commissions scolaires réagissent; elles ne sont pas d'accord, elles non plus. La Fédération des commissions scolaires nous affirme, elle l'affirmait dans un communiqué de presse, que la marge de manoeuvre demeurait insuffisante en regard des besoins actuels. Mais, qu'à cela ne tienne, le gouvernement a raison. Le gouvernement a la vérité, c'est lui qui sait ce qui est bon pour la population, qui sait ce qui est bon pour les municipalités, qui sait ce qui est bon pour les commissions scolaires. Il a le gros bout du bâton, M. le Président. Il a le pouvoir de faire ce qu'il veut, il décrète. Ça devient une manie.

M. le Président, le gouvernement y prend goût, on dirait. L'Opposition officielle essaie de faire son travail, essaie de discuter, demande des consultations particulières, essaie de faire entendre la voix de la majorité des intervenants directement impliqués par ce projet de loi. Même scénario, M. le Président. L'Opposition, c'est embarrassant pour le gouvernement. Après seize heures, seize heures de commission parlementaire, le gouvernement fait adopter une motion de clôture et bâillonne l'Opposition. Il en a le pouvoir, pourquoi se priver? On a vu qu'il en a même usé et abusé, si on veut, puisque ça fait trois motions de clôture qu'on a à subir dans une semaine.

Avec le projet de loi 69, le gouvernement fait faire aux municipalités ce qu'il n'a pas eu le courage de faire lui-même, c'est-à-dire qu'il leur fait collecter des taxes plus élevées et leur donne, en même temps, l'odieux d'augmenter les taxes. Il fait exactement ce qu'il reprochait au gouvernement fédéral lors de la lecture du budget: il est en train de pelleter dans la cour des municipalités.

M. le Président, il est vrai que les commissions scolaires ont des besoins importants, et, cela, l'Opposition officielle en convient. On en est conscients; nous en convenons. Lors du sommet sur le financement, en février dernier, les commissions scolaires s'étaient exprimées à ce sujet. Elles avaient fait valoir au ministre qu'elles avaient besoin de plus d'argent pour financer de nouveaux programmes afin d'améliorer les services offerts aux élèves. La Fédération des commissions scolaires du Québec avait questionné les commissions scolaires et, de façon globale, les commissions scolaires se disaient insatisfaites des services que leurs ressources financières leur permettaient d'offrir à leur clientèle. Elles disaient aussi qu'elles étaient dans l'incapacité d'investir adéquatement dans des projets de développement à caractère pédagogique, social, sportif et culturel. Avec le projet de loi 69, on leur répond qu'elles pourront, en fait, obtenir un montant de 320 000 000 $ additionnel. Ça leur permet d'aller chercher 120 000 000 $. Mais, en même temps, on leur annonce qu'elles devront financer elles-mêmes la gestion et l'entretien des écoles. Ce qu'on donne d'une main, M. le Président, pour ceux qui pensent que c'est un cadeau aux commissions scolaires - d'ailleurs, on voyait ça: "Le cadeau empoisonné déçoit les commissions scolaires" - ce qu'on donne d'une main, M. le Président, on va le chercher de l'autre.

On sait qu'en 1987, une étude a été réalisée dans le but d'évaluer les besoins de remise à neuf des immeubles de 22 commissions scolaires du centre du Québec. On a réalisé qu'il faudrait investir 40 000 000 $ d'ici à cinq ans, et, en même temps, par extrapolation, en dollars de 1988 pour remettre à neuf l'ensemble du parc

immobilier des commissions scolaires du Québec, il faudrait investir 400 000 000 $, sans parler des sommes requises pour les rendre conformes aux lois et aux règlements actuels. (2 h 30)

M. le Président, j'entendais, un peu plus tôt en soirée, mon collègue, le député de Lévis, qui essayait d'expliquer au ministre à quel point cela deviendrait lourd pour les contribuables, particulièrement dans certains comtés. À ce moment-là, il mentionnait le comté des Chutes-de-la-Chaudière. C'est vrai que le député de Lévis connaît très bien le comté des Chutes-de-la-Chaudière puisqu'il en représentait une partie antérieurement. Maintenant, c'est le comté que, moi, j'ai l'honneur de représenter ici à l'Assemblée nationale. Je dois vous dire, M. le Président, que je partage les inquiétudes du député de Lévis.

Voyez-vous, le comté que je représente, le comté des Chutes-de-la-Chaudière risque d'être particulièrement touché par ce projet de loi. C'est un comté banlieusard, majoritairement composé de propriétaires, donc de gens qui paient des taxes. C'est un comté aussi qui a une forte expansion démographique et où les besoins en matière d'éducation vont en s'accroissant et vont continuer de s'accroître, si on se fie à l'étude des affaires sociales, jusqu'à l'an 2006. Le ministre est aussi au courant du comté des Chutes-de-la-Chaudière, puisqu'il reçoit des demandes assez régulièrement de chez nous. Il nous a déjà accordé quelques écoles primaires et secondaires, dont une récemment à Saint-Étien-ne-de-Lauzon. Mais on en est encore à faire des demandes. On fait des demandes pour un cégep. Que voulez-vous, les enfants, ça grandit. C'est évident que les besoins suivent leur cours et les besoins sont importants dans un comté comme le nôtre.

Par ailleurs, on sait que c'est beaucoup de résidences privées. C'est des gens qui vivent dans des résidences privées. C'est un comté, comme je le disais, banlieusard. Pas beaucoup d'entreprises importantes qui peuvent aider à venir générer des fonds, quand on parle d'impôts fonciers. C'est évident que, pour les contribuables, la facture va être lourde, M. le Président. C'est des parents qui ont des enfants et, dans un contexte comme celui où on est, ici au Québec, où on se plaint, où on trouve que le taux de natalité est trop bas, à ce moment-là, peut-être qu'on devrait donner des services et peut-être qu'on devrait aider particulièrement ces comtés où les gens ont des enfants, où le taux de natalité est élevé.

Enfin, M. le Président, je terminerai mon intervention en disant que, oui, effectivement, je suis inquiète pour la population du comté des Chutes-de-la-Chaudière, la population que je représente en cette Chambre, mais je suis inquiète aussi par rapport à la façon dont ce gouvernement, le gouvernement libéral, gouverne et fait passer ses lois. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant M. le député de Bertrand. M. le député.

M. François Beauine

M. Beauine: Merci, M. le Président. Ce qui est regrettable dans l'évolution du processus de discussion que nous avons suivi sur le^projet de loi 69, c'est, comme l'ont souligné mes collègues encore une fois, que le gouvernement ait dû avoir recours au bâillon pour précipiter l'adoption du projet de loi. En fait, ce qui me pousse ce soir à intervenir à la suite de mes collègues, c'est deux raisons principales. D'abord, en raison de l'équilibre fragile qui a été rompu dans ce processus. Comme l'ont indiqué l'Union des municipalités du Québec et l'Union des municipalités régionales du Québec, il y a, dans la façon dont le gouvernement a approché cette question, une sorte de rouleau compresseur qui s'est exercé sans que, entre autres, les intervenants du milieu municipal puissent apporter leur contribution et puisssent faire valoir leur point de vue autrement que par des pressions auprès du ministre, par des déclarations publiques ou par des participations à des forums publics. Dans ce sens, il me semble que le jeu n'en valait pas la chandelle. En quelque sorte, si l'on regarde le montant global que les commissions scolaires vont chercher sous forme de montants additionnels, c'est peut-être important pour certaines commissions en particulier, mais par rapport à l'ensemble, ne réduit guère l'apport que le ministère de l'Éducation doit fournir au financement du système scolaire québécois.

Dans ce contexte, embarquer dans un processus aussi radical que celui qu'a choisi le ministre de rompre un équilibre fragile, qui avait d'ailleurs été établi il y a plusieurs années, sans que cela, finalement, change énormément quoi que ce soit à l'ampleur des responsabilités des commissions scolaires, me semble un peu déplorable. Si on ajoute à cela la façon dont le projet de loi a été guidé à travers l'Assemblée nationale, si on ajoute à cela le fait que nous en sommes rendus au troisième bâillon, je trouve qu'il y a quelque chose d'un peu malsain dans la façon dont le gouvernement semble s'orienter dans son second mandat quant à la gestion des finances publiques du Québec.

On a invoqué souvent, au cours de ce débat, le principe de la responsabilisation. J'ai entendu à maintes reprises le ministre ainsi que les intervenants du côté gouvernemental invoquer la responsabilisation des commissions scolaires, c'est-à-dire que, en donnant aux commissions scolaires des responsabilités additionnelles quant à la gestion des édifices, quant à la gestion de certains biens, on prétend que cette initiative va avoir comme conséquence de rendre plus cons-

cients de leur responsabilité les gestionnaires des commissions scolaires.

J'ai quelques remarques à faire à ce sujet-là. Il me semble, M. le Président, d'abord, que, lorsqu'on est un bon gestionnaire et lorsqu'on préconise des procédures de gestion saine, peu importe le montant impliqué - si vous avez 1000 $ à gérer comme si vous avez 1 000 000 $ à gérer - peu importe l'ampleur du montant, le principe de la responsabilité dans la gestion de ces montants-là est présent en tout temps. La différence entre les deux, c'est qu'un montant peut susciter de plus grands maux de tête que l'autre. Mais le principe demeure le même, de sorte que, si les commissions scolaires ont à administrer un budget de l'ampleur qu'elles avaient avant la réforme qui est proposée par rapport au budget qu'elles vont avoir à administrer suite à cette réforme, le principe de la saine gestion et le principe de la responsabilité administrative, à mon avis, demeurent les mêmes. Donc, on n'infériorise pas le concept de responsabilité ou de responsabilisation simplement en jouant sur l'ampleur des montants administrés. d'autre part, il y a également un argument qui a été invoqué à l'effet que la participation au vote, lors des élections scolaires, était particulièrement faible et que possiblement ce réaménagement des responsabilités ça pourrait entraîner une plus grande participation de la population et un plus grand intérêt envers la chose scolaire. si on regarde la tendance qui s'est développée aux élections municipales au cours des 10 ou 15 dernières années, on s'aperçoit qu'il n'y a aucune tendance en ce sens qui se dégage. en fait, il y a eu, dans des municipalités qui sont de petite taille, des taux de participation parfois de loin supérieurs à ceux des grandes municipalités. c'est donc dire que l'ampleur, encore une fois, des budgets qui sont administrés par les corps publics élus n'a pas grande influence sur l'attitude des participants au vote, et ce n'est pas parce qu'une municipalité administre un budget plus élevé qu'une autre municipalité qu'il peut en résulter une participation plus grande au vote. alors, encore une fois, m. le président, je pense que cet argument est encore fautif dans l'argumentation qui a été invoquée. l'ampleur des budgets administrés n'incite pas nécessairement un plus grand nombre de personnes à aller voter pour le corps qui est concerné par l'administration de ces sommes d'argent.

Autre point que j'aimerais faire pour peut-être, probablement, conclure sur ce point-là: on a assisté à trois bâillons au cours de cette session. Lors de mon intervention sur le projet de loi concernant la Régie de l'assurance automobile du Québec et sur d'autres projets de loi qui visent à augmenter indirectement la contribution des payeurs de taxes, des contribuables aux finances publiques, il me semble qu'on a escamoté une partie de la discussion. Je comprends le gouvernement du Québec, dans le contexte actuel, de vouloir limiter l'augmentation du déficit du gouvernement provincial et, pour ce faire, d'avoir recours à toutes sortes de stratagèmes qui sont, d'ailleurs, tout à fait légitimes en milieu politique et en milieu parlementaire. (2 h 40)

II me semble qu'en voulant procéder de la sorte on évite de discuter du fond de la question. Le fond de fa question, c'est que le gouvernement du Québec, quel que soit le parti au pouvoir à Québec, est en train d'atteindre un plafond, un maximum, en termes de ce qu'il peut aller chercher dans les poches des contribuables québécois pour financer les dépenses publiques, les dépenses budgétaires du gouvernement du Québec, de quelque nature qu'elles soient. J'ai l'impression que c'est ici que le problème se pose. Pour le gouvernement qui a une option fédéraliste, il s'agit de trouver toutes sortes d'aménagements à l'intérieur de la structure actuelle, sans remettre en question, en quelque sorte, les arrangements qui ont été conclus quant à la répartition des sommes fiscales entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial.

Pour nous, de ce côté de la Chambre, nous reconnaissons les problèmes budgétaires. Nous reconnaissons le dilemme auquel le gouvernement doit faire face dans la gestion des finances publiques et surtout au chapitre d'aller chercher ces sommes d'argent. La différence, c'est que nous disons: Le Québec est un pays riche. Le Québec est un pays qui possède une base de taxation importante. Mais, malheureusement, une partie de cette taxation nous échappe. Et si nous avions accès, comme gouvernement, à une portion plus grande de cette source de taxation, de ce bassin de taxation, probablement que beaucoup de projets de loi qui sont introduits, beaucoup de stratagèmes politiques qui sont invoqués par le gouvernement pourraient être évités. Nous pourrions financer une bonne partie des programmes qui ont été mis sur pied jusqu'ici, en particulier dans le domaine de l'éducation où nous avons des acquis à préserver. Nous pourrions les conserver à même notre propre bassin de taxation.

C'est là, il me semble, le problème qu'on n'a pas discuté suffisamment et qui, probablement, est à la base de toutes ces frictions et de toutes ces tensions qui sont et seront probablement le résultat de projets de loi comme celui qui est à l'étude présentement, d'ailleurs, comme ça a été le cas pour la Régie de l'assurance automobile du Québec.

Je terminerai là-dessus, M. le Président, en disant que je comprends très bien les préoccupations du gouvernement. Mais je pense qu'il s'est enfermé lui-même dans un carcan administratif, à cause de l'orientation qu'il a choisie en ce qui concerne les liens qui devraient régir le Québec et le Canada. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le député de Labelle. M. le député de Labelle, vous avez la parole.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, je pense que la loi 69, qui découle de décisions du gouvernement prises cet hiver qui augmentaient les taxes foncières parmi d'autres taxes, est une entrée en matière très probablement à une modification importante dans le fardeau fiscal du Québec. Je pense que, ce faisant, le gouvernement n'a pas économisé de sous ni à lui-même, ni aux contribuables québécois. Ou peut-être qu'il en a économisé à lui-même, mais aux contribuables québécois, il n'en a pas économisé.

Mais, après avoir entendu tous mes collègues expliquer la logique de cette loi et en critiquer les différentes articulations, je voudrais simplement ramener ceux qui nous écoutent au discours sur le budget, aux trois dernières pages de ce discours, à l'annexe E, pages 42, 43 et 44, lesquelles sont très significatives et, en ce qui me concerne, je crois, éclairantes pour l'avenir. Vous me permettrez de lire deux paragraphes et ensuite de commenter le tableau de la toute dernière page du discours sur le budget. Dans cette annexe, ces deux paragraphes commencent par un titre "Fardeau fiscal supplémentaire" et on fait la comparaison entre le fardeau fiscal de l'Ontario et celui du Québec. "Le ministère des Finances utilise depuis quelques années une méthode afin d'évaluer le fardeau fiscal supplémentaire des contribuables du Québec. Cette méthode consiste à appliquer alternativement aux assiettes fiscales québécoises deux structures de taxation, celle du Québec et celle d'une autre juridiction avec laquelle on la compare. On peut ainsi quantifier l'écart entre le fardeau fiscal que supportent les contribuables du Québec et celui qu'ils supporteraient sous un autre régime de taxation. La similitude des économies québécoise et ontarienne ainsi que les liens commerciaux très étroits qui les unissent ont incité à retenir l'Ontario comme base de comparaison." Pour des fédéralistes, je pense qu'ils ont tendance à se comparer à l'Ontario. Soit, continuons.

Deuxième paragraphe très indicateur des méthodes qui vont nous faire réfléchir. "Pour des fins de simplification, cette méthode d'évaluation du fardeau fiscal supplémentaire au Québec est basée sur une approche légale, en ce sens que les taxes sont imputées aux contribuables qui ont la responsabilité légale de les payer, en vertu des lois fiscales, et non à ceux qui les supportent en bout de ligne. Or, une telle façon de procéder peut à l'occasion ne pas tenir compte de certaines pratiques des agents économiques et elle ne tente pas de discerner dans quelle mesure les impôts et taxes imposés légalement aux entreprises sont supportés en définitive par les particuliers par le biais de prix plus élevés payés pour les biens et services qu'ils consomment ou encore sous forme de salaires moins élevés versés par les entreprises."

Mme la Présidente, ces deux paragraphes sont très éclairants sur les méthodes, parce que, par la suite, nous pourrons en tirer quelques explications. Or, au tableau de la dernière page, les taxes provinciales, sous toutes leurs formes, sont de 2 315 000 000 $ plus élevées au Québec et les taxes locales, sous leurs deux formes, municipales et scolaires, sont de 1 286 000 000 $ de moins au Québec qu'en Ontario: la différence nette étant qu'au Québec il y aurait 1 030 000 000 $ de plus de taxes. Première remarque, Mme la Présidente, c'est que, lorsque nous arrivons aux taxes municipales où le Québec paie 1 362 000 000 $ de plus qu'en Ontario, cela est dû essentiellement au fait que les taxes municipales en Ontario sont moins élevées, parce que les propriétaires paient leurs taxes, leur bout de rue, leur bout de trottoir, leur bout de service. Et ça, H est très important de le dire et de le comptabiliser, et c'est pourquoi j'ai lu les deux premiers paragraphes, de telle sorte que la comparaison cloche dès ce moment.

Je pense qu'il ne faut pas l'oublier, parce que les propriétaires paient comptant avec leur maison les services municipaux en Ontario, règle générale, à moins d'exception, mais on sait que c'est le cas, par exemple, dans le Toronto métropolitain et, j'imagine bien, aussi à Ottawa et dans les environs. Cela explique en grande partie la différence de 1 000 000 000 $ de plus que les Québécois paient en taxes, parce que les services locaux sont collectifs, alors qu'en Ontario ils sont individualisés au niveau de la taxe. Donc, ce que nous disions dans le temps était d'ailleurs vrai, c'est que l'écart du fardeau fiscal, tel que calculé, n'était pas nécessairement le même, n'était pas exactement ce à quoi on en arrivait, à cause des indications de cette taxe municipale qui était décrite aux deux paragraphes que j'ai lus.

Or, revenons maintenant à deux autres différences. Nous payons en impôt sur le revenu des particuliers 2 529 000 000 $ de plus qu'en Ontario, mais nous payons de moins en taxes scolaires 2 648 000 000 $. C'est à peu près le même montant, de sorte qu'en Ontario ce qu'ils paient en moins d'impôt sur le revenu, ils le paient en plus sur les taxes scolaires. C'est un système, je veux bien, mais je pense que l'intention du gouvernement, c'est d'en arriver à augmenter de beaucoup la taxe foncière. C'est l'intention. (2 h 50)

J'ai fait quelques sondages. J'ai eu l'occasion de poser une question bien anodine au président du Conseil du trésor sur le 1 286 000 000 $ que nous payons de moins en taxes locales et il m'a dit: J'espère bien que

nous arriverons à augmenter les taxes foncières de ce montant. Parce que l'objectif, étant fédéralistes, c'est de se comparer à l'Ontario et, donc, de se rendre le plus semblables possible pour être concurrentiels, parce que le grand mot que l'on dit, c'est qu'ils veulent être concurrentiels sur le plan économique. Donc, pour être concurrentiels, ils veulent être pareils sous tous les rapports. Je ne pense pas que ça se traduise de façon aussi stricte, mais je pense que c'est ça, leur conclusion. Et, donc, leur intention, c'est d'augmenter l'impôt foncier. Cette année, ils ont commencé par ouvrir la porte: 320 000 000 $ ou 191 000 000 $ d'impact sur le budget du Québec, mais 320 000 000 $ d'impact chez les contribuables. Et l'intention, le rêve, c'est d'aller chercher 1 286 000 000 $ de plus. Pourquoi, M. le Président?

Évidemment, il y a le fait que l'on veut uniformiser davantage les systèmes au Canada. Bien sûr, ça peut être un objectif. Il y a aussi un autre facteur qu'il ne faut pas oublier dans le décor général actuel, c'est que le fédéral a accumulé un déficit de 352 000 000 000 $ que, tôt ou tard, il nous renverra, pour lequel, tôt ou tard, nous paierons la facture. Il la fera payer à ses propres contribuables directement, mais il fera aussi payer la facture aux gouvernements des provinces, au gouvernement du Québec et ceci se traduira en coupures sur les grands programmes de péréquation, les programmes à frais partagés, les programmes de financement de l'enseignement secondaire, postsecondaire et de santé, etc., les programmes de développement régional; on l'a vu ce matin à la période de questions, on a commencé à sabrer largement là-dedans. On va continuer. Et, donc, le gouvernement qui ne veut pas augmenter l'impôt sur le revenu s'est ouvert une porte sur l'impôt foncier qu'il va agrandir, élargir et les contribuables québécois non seulement risquent, mais seront pénalisés dans le futur.

Je voulais toucher à ce point, parce que mes collègues vont toucher a bien d'autres points. Mais ce point, je pense, éclaire, de façon globale, générale, les intentions du gouvernement. C'est de cela qu'il s'agit: il veut augmenter l'impôt foncier pour se rendre comparable à l'Ontario. Et quand on regarde attentivement les structures de taxation, au fond, elles sont pareilles entre l'Ontario et le Québec. L'écart fiscal n'existe pas, pratiquement, parce que ce que nous payons de plus en impôt sur le revenu, nous le payons de moins en taxes scolaires.

Et, quant à nous, simplement sur le plan des principes, nous considérons que l'éducation relève beaucoup plus du gouvernement du Québec que des municipalités et je pense qu'on doit y aller à fond quelles que soient les distinctions que l'on peut faire sur l'importance du montant. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. M. le ministre, en vertu de l'article 253 et en vous indiquant que vous avez un maximum de cinq minutes pour répondre à l'intervention du député de Labelle. M. le ministre.

M. Claude Ryan

M. Ryan: Je voudrais simplement indiquer que, si on suivait jusqu'à ses conclusions ultimes la logique de la position défendue par plusieurs porte-parole de l'Opposition, il faudrait conclure à la nécessité d'évacuer complètement les commissions scolaires du champ de l'impôt foncier. Si le principe qu'on affirme est vrai, que l'éducation, c'est l'affaire de l'État national, à ce moment-là, il faudrait que l'Opposition ait la franchise de nous dire qu'elle veut aller jusqu'au bout de sa logique et finir d'éliminer ce restant de taxes foncières qui a pu rester aux commissions scolaires à la suite des accords de 1979.

Si l'Opposition tient la position contraire, si elle reconnaît avec nous qu'une partie du champ foncier doit être réservée aux commissions scolaires, nous lui demandons pourquoi ça devrait toujours être la limite qui a été fixée à deux, en 1979, alors qu'il y avait trois partenaires qui auraient dû être partie à l'entreprise. C'est ça que nous allons prendre à compter de prochainement: les trois partenaires seront impliqués et non pas seulement deux, comme ce fut le cas en 1979.

J'ajoute un autre point. Le député de Labelle disait: Je conclus que c'est de l'intention du gouvernement de puiser davantage dans l'impôt foncier. Je dois dire, faisant partie du gouvernement, que je n'en sais rien, qu'aucune décision n'a été arrêtée de ce côté-là, qu'aucune orientation n'a été retenue et que ce sont des choses sur lesquelles chacun est libre de spéculer, en prenant bien soin de mettre un point d'interrogation à côté des observations qu'il formule et non pas un signe de certitude. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. Oui, M. le député.

M. Léonard: Une question en vertu de l'article 213.

Le Vice-Président (m. bissonnet): en vertu de l'article 213, si le ministre le permet, pourvu que la question soit brève avec une réponse brève.

M. Ryan: M. le Président, je regrette... Étant donné l'heure...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ça va, M. le ministre. Il n'y a pas de problème. M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, vous avez la parole.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président. Même s'il est 3 heures de la nuit, nous avons bien décidé, de ce côté-ci de la Chambre, que nous allions utiliser tous les moyens qui sont à la disposition de l'Opposition pour faire en sorte qu'au moins tous les citoyens et toutes les citoyennes du Québec comprennent bien ce qu'on est en train de leur faire. Le projet de loi 69, le ministre l'a bien indiqué il y a quelques secondes, il y a quelques minutes, oui, il s'agit d'une nouvelle taxe. À ma connaissance, nous n'avions pas entendu ce langage de façon aussi claire et aussi ferme depuis le discours sur le budget du ministre des Finances. Alors, là, le chat est sorti du sac. Oui, il s'agit bien d'une nouvelle taxe.

Il faut se souvenir qu'au niveau de la population, lorsque nous avons posé les premières questions au ministre responsable, suite à la publication du budget, nous avons tous très bien entendu le premier ministre répondre que nous ne pouvions, pour l'éducation nationale, augmenter le fardeau fiscal parce que nous allions obtenir un résultat qui créerait une trop grande différence avec la province d'Ontario, avec d'autres provinces, et qu'on perdrait une certaine compétitivité avec cette province, avec d'autres provinces au Canada, au plan de la taxation.

Là, il faudrait bien que quelqu'un explique à la population, le ministre de l'Éducation en premier, en quoi l'équilibre n'est pas rompu lorsqu'on dit: Dorénavant, il y aura pour 320 000 000 $ de dépenses dont le gouvernement du Québec avait la responsabilité et, pour les années à venir, ça va être les commissions scolaires qui vont assumer cette dépense-là dans la partie du MAO, comme on dit communément dans le langage de l'éducation, dans le mobilier, l'ameublement et l'outillage; toute cette partie qui était assurée par une décision que nous avions prise collectivement, tout ça était assuré par l'État. On avait gardé une petite marge de manoeuvre pour les commissions scolaires. On dit: Dorénavant, vous allez avoir à assumer cette responsabilité.

Le ministre a dit, il y a quelques minutes: II s'agit d'une nouvelle taxe. Alors, en quoi les taxes versées à la commission scolaire, à la municipalité, au gouvernement du Québec et au gouvernement fédéral vont faire en sorte, comme répondait le premier ministre au début du débat, suite au discours sur le budget... En quoi la situation fiscale des Québécois va-t-elle être différente de celle de la province d'Ontario? Ça, à écouter le langage de la majorité ministérielle, ce serait comme dire: Écoute, moi, lorsque je vais faire mon épicerie, ça me coûte 50 $ de moins que le voisin. J'ai une famille comparable, j'ai trois enfants, on est cinq à la maison et, lorsque je vais faire l'achat des marchandises pour la semaine, ça me coûte 50 $ de moins. Lorsqu'on l'examine un petit peu, on se rend compte facilement qu'il y a un détail qu'on a oublié dans la comparaison. C'est que l'un ne va pas acheter la viande en même temps que son marché général et il est obligé de la payer ailleurs. Parce qu'on la paie à la commission scolaire, ce n'est pas une nouvelle taxe qui entre dans le fardeau financier qu'on doit tous se donner pour se donner des services d'éducation de qualité. Voilà pourquoi il faut expliquer, voilà pourquoi il faut demander à ce gouvernement de rendre des comptes et de donner l'heure juste sur la véritable situation fiscale. (3 heures)

J'entendais, par ailleurs, le ministre de l'Éducation et ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science, il y a quelques secondes, en utilisant l'article 213, répondre à un de mes collègues qu'il n'y a absolument rien qu'on enlève aux municipalités par ce projet de loi qui va permettre aux commissions scolaires de taxer davantage pour répondre et pour assumer, au niveau de certaines dépenses, ses responsabilités en lieu et place du gouvernement. Bien sûr, le projet de loi ne nous indique pas formellement que les municipalités seront limitées dans leur champ de taxation. Pour avoir été, dans une municipalité, élu municipal pendant tout près de huit ans, je peux dire au ministre... Et on sait véritablement comment ça se passe. Le matin où vous préparez généralement, en novembre ou en décembre, vos prévisions budgétaires pour l'année suivante, vous faites un peu comme toutes les organisations, les organismes, vous calculez l'ensemble des revenus qui sont à votre disposition et vous mettez dans l'autre colonne l'ensemble des besoins et des demandes de la population. On est tous bien conscients que cette colonne des demandes et des besoins est généralement très longue. Après de très longues discussions et des échanges entre les différents représentants des différents quartiers, on en arrive souvent à la conclusion de dire: Finalement, ce qu'on va pouvoir se payer, c'est la somme totale que l'on pourrait imposer à nos concitoyens et à nos concitoyennes. Pour avoir été témoin d'autres discussions avec d'autres conseils municipaux, cette discussion consiste généralement à dire: C'est quoi, le fardeau fiscal de nos citoyens et de nos citoyennes dans notre municipalité? On va regarder ce que nous avons au plan scolaire pour cette année, on va regarder ce que nous-mêmes, au plan municipal, on impose, on va regarder ce que ça veut dire au plan provincial et on va regarder ce que ça veut dire au plan fédéral.

Encore un peu plus loin, généralement, la discussion amène à dire: Comment on impose, nous? On est à quel taux des 100 $ d'évaluation pour nos citoyens et nos citoyennes et à combien la commission scolaire, elle, est-elle rendue? Et on fait ensuite une comparaison, généralement, avec les villages, avec les municipalités, avec les villes environnantes. Et là, on s'aperçoit que l'on

peut peut-être ajouter quelques cents à l'effort fiscal municipal que l'on peut exiger soit pour répondre à de nouveaux besoins ou donner de meilleurs services, pour répondre à certains créneaux de besoins qui ont été exprimés aux membres du conseil municipal.

C'est là qu'entre le problème, c'est là que se pose la situation problématique pour le monde municipal, c'est-à-dire que cette situation va se répéter au cours des années et dès le moment où les commissions scolaires seront obligées d'utiliser la marge qui serait autorisée en vertu du projet de loi 69, on va recommencer ce petit jeu et on va vite s'apercevoir qu'au niveau municipal c'est elles, les municipalités, qui vont être obligées de faire le travail que ce gouvernement n'a pas voulu faire. C'est elles qui devront prendre, autour de Noël, généralement, les décisions les plus difficiles pour dire aux citoyens et aux citoyennes des municipalités: Voyez-vous, nous sommes acculées à une coupure de services ou à une augmentation de la taxe foncière qui va faire en sorte que, additionnée à la taxe scolaire, eh bien, votre fardeau va être de tant de dollars, tant de cents du dollar d'évaluation.

C'est dans ce sens-là que les unions de municipalités et que les municipalités se sont opposées à la révision de ce pacte qui avait été passé en 1979 et qui disait: Voilà, il y a une limite qui va être établie pour les commissions scolaires et pour le restant du champ fiscal de l'impôt foncier, voilà, vous l'occuperez, les municipalités. Alors donc, l'effet net de la loi 69, ce que les gens du Québec doivent comprendre, c'est qu'il y a 320 000 000 $ qu'on leur passe en taxation ailleurs. Le ministre l'a dit tantôt, oui, c'est une nouvelle taxe pour vos écoles. Est-ce qu'il y aura plus d'écoles, plus de services, plus de MAO, plus de mobilier, plus d'aménagement, plus d'outillage? On ne fait que retirer nos billes, et dire: Payez-les, vos billes. C'est donc un fardeau financier supplémentaire qui sera imposé aux commissions scolaires, mais surtout, bien sûr, aux contribubles, citoyens et citoyennes ordinaires, qui, après Hydro-Québec, après le transfert qu'on fera au niveau de la Régie de l'assurance automobile, maintenant c'est sur le front scolaire, et ça va se répercuter sur les municipalités, et les citoyens et citoyennes du Québec s'en souviendront, de celle-là. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant la prochaine intervention de M. le député d'Ungava. M. le député.

M. Christian Claveau

M. Claveau: Oui, M. le Président, alors en prenant en considération le rapport sur le projet de loi 69, les travaux de la commission parlementaire, qui, en fait, n'ont pas eu lieu, vous comprendrez qu'on est plutôt obligés de parler sur le fond du projet de loi, dans la mesure où on ne peut pas parler beaucoup de la considération du rapport des travaux de la commission parlementaire, on n'a pas eu le temps d'en faire, de travaux. Le projet de loi que l'on a sous les yeux va dans la lignée de la façon dont ce gouvernement entend opérer pour se cacher, pour prendre des détours afin de refiler aux autres ses responsabilités.

Je ne sais pas si c'est le ministre des Transports qui a copié sur le ministre de l'Éducation, ou vice versa, ou si les décisions ont été prises conjointement, mais l'approche du ministre des Transports et l'approche du ministre de l'Éducation ont énormément de ressemblances. Et c'est de mauvais augure pour les autres projets de loi qui vont venir des autres ministres, au cours des prochains mois et des prochaines années. On a vu tout à l'heure, en discutant du bâillon sur la modification à la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec, que le ministre des Transports se cherche un faux-fuyant, une façon de faire pour partir avec la caisse des assurés dans le domaine du transport automobile. Il essaie de se trouver un moyen de justifier le cambriolage de la caisse de la Régie de l'assurance automobile du Québec.

Dans ce projet de loi-là sur l'éducation, M. le Président, le ministre de l'Éducation arrive aussi avec une autre façon de justifier son emprise sur une autre caisse, sa façon de mettre la patte sur le champ d'impôt foncier pour payer des équipements scolaires. Il faut quand même le faire! On a vu le domaine municipal qui a essayé de faire comprendre au gouvernement qu'en ce qui le concerne, il se fiait à l'attitude et à la parole du gouvernement, suite au pacte fiscal de 1979. Ah, certes, le ministre de l'Éducation a dit: À cette époque, j'étais responsable de l'Opposition en cette Chambre, et nous avons voté contre. Vous remarquerez qu'il n'a pas fallu beaucoup de temps après pour que le ministre de l'Éducation perde sa job de responsable de l'Opposition en cette Chambre. Peut-être que ça y est pour quelque chose. Peut-être aurait-il dû mieux réfléchir sur la valeur du pacte fiscal de 1979, et sur tout ce qu'il représente pour les municipalités. Bien non, pas assez de dire: J'étais contre en 1979, maintenant qu'il a la chance d'être au pouvoir, il s'acharne à le démolir, alors que les municipalités disent: II faut qu'il soit respecté, c'est ça qui nous permet de souffler encore. (3 h 10)

La même chose que lorsque l'on parlait, tout à l'heure, de la Régie de l'assurance automobile. Ces gens-là étaient contre aussi, lorsque c'a été voté, et finalement, maintenant qu'ils sont au pouvoir, ils sont encore contre, mais ils ne veulent pas le dire, alors ils partent avec la caisse et ils font en sorte de la rendre impossible à gérer. Et, un jour ou l'autre, vous le

verrez, M. le Président, si, par malheur, ce gouvernement administre les biens du Québec pendant encore quelques années, il est fort probable qu'ils trouveront bien le moyen de tout envoyer ça à l'entreprise privée pour faire l'affaire de quelques-uns de leurs partenaires, de quelques-uns de ceux qui les financent.

M. le Président, toujours est-il que l'on a sur la table ici un bel exemple d'iniquité sociale. Oui, M. le Président, de l'iniquité sociale. L'éducation, par principe, doit être gratuite et accessible à tout le monde, au Québec, de la même façon, avec les mêmes règles. On doit faire en sorte que, d'où que l'on vienne sur le territoire du Québec, quelles que soient nos origines, quelle que soit la capacité de payer de nos parents, l'on puisse avoir accès à l'éducation et que l'on puisse avoir accès aussi, de toute évidence, à des équipements semblables, des équipements ayant la même valeur et permettant à tous d'avoir la même possibilité d'apprendre. C'est justement à rencontre de ce principe-là que va le ministre de l'Éducation avec son projet de loi. S'il nous dit qu'il ne l'a pas compris, eh bien! M. le Président, on se demande quand il va commencer à comprendre quelque chose. Comment voulez-vous...

Je vois le ministre qui opine du bonnet en m'écoutant. Comment voulez-vous que, si l'on refile la responsabilité des équipements, des amortissements de nouveaux équipements dans les commissions scolaires, le financement de laboratoire pour les études, le financement d'annexés, le financement de gymnases, comment voulez-vous qu'on va s'assurer que, dans un milieu défavorisé, un milieu où les gens peuvent supporter des fardeaux fiscaux moins importants, on ait le même niveau d'équipements que dans un milieu plus huppé, dans un milieu où les gens peuvent s'en permettre plus en termes de fardeau fiscal? C'est important. Il faut y réfléchir, M. le Président. Est-ce qu'on va revenir au jour où on vivait, par exemple, dans les petites villes du Lac-Saint-Jean où on avait un quartier anglophone un peu isolé qui pouvait tout se permettre, gymnase, court de tennis et où il y avait un gros quartier francophone, les ouvriers qui transportaient l'eau et la sciure de bois, les scieurs et les porteurs d'eau qui, eux, ne pouvaient à peu près rien se permettre et qui, ayant des revenus plus bas, se contentaient de ce qu'ils pouvaient uniquement générer comme petites activités dans le milieu? C'est ça que l'on vivait. Si le ministre ne l'a pas vécu, nous, on l'a vécu. Je peux vous en dire quelque chose, moi. Je demeurais dans un petit village, M. le Président, où il y avait quatre ou cinq familles anglophones qui étaient à trois quarts de mille du restant des familles francophones. L'école était bâtie chez eux. C'est tous les francophones qui marchaient trois quarts de mille à pied pour se rendre à l'école parce qu'on avait bâti l'école du côté des quatre à cinq familles anglophones pour ne pas qu'elles aient à se promener, elles. C'est comme ça que ça se passait. Est-ce que le ministre est en train de nous dire qu'il veut rétablir ce genre d'équilibre social qui, évidemment, plaisait sûrement à certains de ses supporteurs, mais qui déplaisait drôlement à la grande majorité?

Enfin, M. le Président, ça ne les fatigue pas de déplaire à la majorité. Remarquez, dans la Loi sur les heures d'affaires, ça ne les a pas fatigués, ce gouvernement, de déplaire à la majorité. Dans la loi sur le camionnage, M. le Président, dans l'application des règlements sur le transport en vrac, ça ne les fatigue pas, M. le Président, de déplaire à la majorité des propriétaires de camions. Et c'est comme ça sur toute la ligne. Alors, peut-être le ministre est-il dans la même ligne. Mais qu'il nous dise clairement que, par le Blais du transfert de certaines responsabilités au champ foncier perçu par les commissions scolaires, il se dégage de ses responsabilités quant à sa garantie qu'il a d'offrir les mêmes services à tout le monde sur le territoire du Québec et qu'il dise aux commissions scolaires: Arrangez-vous et, si vous êtes capables de vous financer parce que vous êtes dans un milieu plus riche, plus huppé, plus favorisé, eh bien! soit, tant mieux pour vos enfants, eux pourront étudier, eux pourront avoir de vrais laboratoires, eux pourront avoir de vrais gymnases, eux pourront avoir des salles de classe bien ventilées. Et si, par malheur, vous êtes dans un autre milieu moins favorisé, moins bien pensant et que votre capacité de payer est moindre, eh bien, à ce moment-là, vous devrez vous contenter de ce que vous serez capable de payer quand même, et tant pis pour les beaux gymnases, tant pis pour les laboratoires, tant pis pour les salles d'écoles bien ventilées et bien décorées. Est-ce que c'est vers ça, M. le Président, que l'on s'en va? Est-ce que c'est ça le genre de système d'éducation que le ministre de l'Éducation est en train de nous préparer? Moi, M. le Président, lorsque l'on embarque dans ce genre de projet de loi là, eh bien, ça me fait peur. Ça me fait peur, parce que l'on préconise la réouverture de ce genre d'administration basée sur l'iniquité sociale, sur les différences des milieux de vie et d'origine des étudiants et des étudiantes. Alors, M. le Président, permettez-moi de conclure très brièvement en disant que c'est avec raison que l'Opposition s'inquiète des véritables intentions du ministre dans ce projet de loi là. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député.

En vertu de l'article 253, suite à l'intervention du député d'Ungava, M. le ministre avait quelque chose à ajouter, en vous indiquant que vous n'avez pas plus que cinq minutes.

M. Claude Ryan

M. Ryan: Oui, deux minutes de précisions à l'intention du député d'Ungava. Tout d'abord, s'il a lu la documentation afférente au projet de loi, il se sera rendu compte qu'il n'est pas question de transférer la responsabilité des investissements, ni en bâtisse, ni en équipement du gouvernement aux commissions scolaires. Le gouvernement continuera d'assumer cette responsabilité. Et par conséquent, les trois-quarts à peu près des frayeurs qui ont inspiré le discours du député d'Ungava sont tout à fait non fondées. Alors, c'est tout de suite une question qui est réglée, ça, en partant.

Deuxièmement, il semble indiquer que le projet de loi aura pour effet d'appauvrir les régions qui auraient le plus besoin d'être soutenues tandis que celles qui sont plus confortables, en particulier, si elles avaient par malheur une autre langue que le français, seront avantagées. C'est absolument faux. Je vais lui donner un exemple. Je pense qu'il est familier avec la commission scolaire du Nouveau-Québec. En vertu du projet de loi, elle aura accès à un revenu minimum pour l'entretien de ses immeubles scolaires de 637 $ par élève admissible tandis que les commissions scolaires plus populeuses, comme les commissions scolaires de 111e de Montréal ou la Commission des écoles catholiques de Montréal, auront accès à un revenu de base qui sera d'à peu près 505 $ par élève admissible. Le projet de loi a été conçu de manière à assurer aux commissions scolaires qui en ont plus besoin un niveau de ressources de base plus élevé qu'à celles qui sont mieux placées. Alors, ça, c'est une autre dimension du projet de loi qui portera le député d'Ungava à considérer le projet avec beaucoup plus de sympathie quand il se sera donné la peine de l'étudier davantage.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Je reconnais maintenant Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Merci, M. le Président.

M. Léonard: M. le Président?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.

M. Léonard: Avant de commencer, est-ce que vous pourriez vérifier le quorum?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Une question de règlement du député de Labelle qui a démandé de vérifier le quorum. Oui, appelez les députés. Qu'on appelle les députés! Nous avons quorum, je reconnais maintenant Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Marois: Non, de Taillon.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée de Taillon, excusez-moi.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: II est très tard, effectivement, et je comprends que vous puissiez confondre mon comté avec celui de ma voisine. De toute façon, ce sont deux magnifiques comtés qui représentent la ville de Longueuil. Cela étant dit, j'interviens évidemment tôt ce matin sur le projet de loi 69, soit la Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et la Loi sur l'enseignement privé. J'aimerais, M. le Président, revenir sur ce que mentionnait tout à l'heure le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur où il disait vouloir refaire le pacte, refaire le pacte municipal et scolaire avec l'ensemble des partenaires, dans un esprit et un souci de collaboration avec les trois principaux concernés, évidemment, le gouvernement se prêtant positivement à ce type d'échanges et de discussions. (3 h 20)

Vous savez, M. le Président, j'ai toujours appris que la confiance appelle la confiance et que la confiance se bâtit sur le respect qu'on a des engagements qu'on a pris. Et quand je lis ce que nous disait le président de l'Union des municipalités régionales de comté, au moment où il nous parlait de ce virage que prend actuellement le gouvernement et qu'il veut nous faire confirmer en nous mettant le bâillon, d'ailleurs - on n'y reviendra pas, on en a longuement parlé - en fait, je crains un peu, comme le président de l'Union des municipalités régionales de comté du Québec, qu'il soit difficile de rebâtir la confiance. Écoutons ce qu'il nous disait, le 27 avril: "Constatant le virage improvisé de décentralisation de l'État proposé dans le discours sur le budget, l'Union des municipalités régionales de comté du Québec considère maintenant que ce gouvernement a unilatéralement provoqué une brèche importante dans ses relations avec les municipalités et définitivement miné la confiance que lui portaient les élus municipaux." C'est ça qu'il disait le 27 avril, et il ajoutait: "En agissant ainsi, le gouvernement démontre son manque de vision globale et brise le Québec de partenariat, qui est si essentiel pour le développement de la collectivité québécoise."

Alors, c'est bien mal engager le processus, M. le Président, si vous me permettez de l'affirmer ici, que, d'une part, briser une entente dans laquelle on avait investi tant efforts qu'énergie. Qu'on puisse la remettre en question, cette entente, cela va de soi: ce n'est pas immuable, les modes de relation qu'on a établis entre les différents paliers de gouvernement, mais que, sans impliquer l'un des partenaires, on remette en question l'entente, sans que le ministre des Affaires municipales ne soit particulièrement présent non plus au débat. On a

constaté que, tout au long de la discussion qu'on a eue ici en cette Chambre, le ministre des Affaires municipales, qui pourtant se préoccupe de l'un des partenaires que sont justement les municipalités, n'est pas intervenu beaucoup. Alors, c'est bien mal engager un processus que de commencer par briser un lien de confiance pour ensuite dire: On va en créer un nouveau. On va en créer un nouveau et, non seulement, on va mal repartir sur de mauvaises bases, mais on va ajouter un troisième partenaire, que vous aimiez ou non, que vous soyez d'accord ou non, il sera là. Alors, à mon point de vue, c'est vraiment faire fi, je dirais, d'ententes que l'on a établies, de processus de discussion, de décisions, même, avec lesquels on avait appris à vivre et à fonctionner, remise en question, donc, de ce processus, sans que l'un des partenaires ne se sente impliqué par la remise en question. Et, non seulement il ne se sent pas impliqué, mais il se sent floué, M. le Président, dans le processus. Bon!

Deuxièmement, on est intervenu dans le cours de ce débat pour rappeler que nous souhaitions, nous souhaitions que l'Éducation reste, certains ont dit une responsabilité de l'État, en fait, ce qu'on veut dire essentiellement, c'est que l'Éducation, tout comme la santé, doit être une responsabilité nationale. On ne peut pas, d'aucune espèce de façon, faire en sorte que des services à rendre à des citoyens, dans des domaines que l'on juge essentiels pour le progrès, l'accomplissement de la nation, l'accomplissement des personnes qui vivent sur le territoire, on ne remet pas cette préoccupation sur la base de critères qui seraient la richesse respective des uns et des autres. Donc, on dit - dans le cas présent, aux municipalités et aux commissions scolaires - c'est une responsabilité nationale, c'est une responsabilité à laquelle on participe collectivement, sur la base d'une contribution fiscale par l'impôt sur nos revenus, ou la taxation en général. Le gouvernement se charge, s'assure de répartir l'ensemble des fonds ainsi accumulés ou ramassés, de les répartir d'une façon équitable sur l'ensemble du territoire pour que jamais on ne puisse imaginer qu'on brime ou on prive l'un ou l'autre des citoyens ou citoyennes du Québec de son droit fondamental à la santé et à l'éducation. Le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, sûrement, viendra en répartie sur ça en disant: Oui, mais, écoutez, on instaure un processus de péréquation, c'est-à-dire que les régions qui, effectivement, ont moins de capacité de ponctionner des fonds, d'aller chercher des fonds, on fera en sorte qu'on rétablisse un équilibre entre les régions dont la capacité fiscale sur la base de l'impôt foncier est moins importante, on la répartira ou on refera un partage au niveau national, au niveau de l'ensemble.

Vous savez, je n'ai rien contre le principe en soi de la péréquation, c'est un modèle comme un autre, sauf qu'il m'apparaissait que nous avions privilégié, pour justement l'éducation et la santé, qui sont des biens collectifs essentiels et auxquels il apparaît absolument nécessaire de répondre d'une façon équitable, en recherchant la perfection de cette équité... Il ne m'apparaissait pas que le processus nous permettant d'utiliser la péréquation était celui nécessairement qu'on devait retenir. Voilà pour ce deuxième point quant à la responsabilité nationale que nous avons à l'égard de ces biens fondamentaux que sont la santé et l'éducation.

Évidemment, l'autre point que l'on peut souligner dans le projet de loi actuel et qui est absolument, là encore, du camouflage... D'ailleurs, je me dis que ce gouvernement aura le championnat des camouflages en fin de session, parce que je pourrais parler longuement, comme je l'ai fait déjà avec plusieurs de mes collègues, de la Loi sur les heures d'affaires où on constate que, d'un côté, on annonce qu'on protège le dimanche et, de l'autre côté, on ne le fait pas. Maintenant, c'est quoi le camouflage dont on parle avec la loi qui est devant nous? Essentiellement, on en profite, en modifiant la part occupée dans le champ d'impôt foncier entre les municipalités et les commissions scolaires, pour refiler une joyeuse augmentation de taxes aux contribuables qui, sur une base annuelle, sera de l'ordre de 320 000 000 $.

J'ai écouté, à l'occasion des débats précédents concernant cette loi, des collègues de cette Chambre qui ont dit: Vous savez, en nous accusant, nous, comme gouvernement... Vous savez, le gouvernement a une certaine limite à sa capacité de payer. Donc, il ne peut pas toujours assumer cette responsabilité en grossissant les déficits d'une année à l'autre. Oui, mais il faudrait peut-être se rappeler que la source de notre argent, ici, comme gouvernement, ou là, dans une municipalité, ou là, dans la commission scolaire, c'est toujours la même source, M. le Président. C'est toujours le contribuable, c'est toujours le payeur de taxes. Que cette taxe, il la paie sur son revenu ou qu'il la paie finalement sur la valeur de sa propriété, c'est toujours la même personne. Ce n'est pas l'État qui a des sous. Ce n'est absolument pas l'État, c'est le citoyen qui confie à l'État une partie de ses revenus pour qu'ainsi il retrouve en contrepartie des services. Alors, dans les faits, on a tout simplement refoulé, renvoyé vers un autre niveau de gouvernement une hausse de taxe qu'on n'a pas eu le courage d'assumer soi-même. C'est ça, la loi, M. le Président, qu'on risque d'adopter, et évidemment pour laquelle je ne voterai absolument pas, parce que je ne suis absolument pas d'accord avec cette loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Je reconnais maintenant M. le député de La Prairie.

M. Denis Lazure M. Lazure: Merci, M. le Président. Des voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de La Prairie, vous pouvez poursuivre. (3 h 30)

M. Lazure: M. le Président, je pense que c'est une journée absolument triste qui va rester mémorable dans les annales de la vie parlementaire québécoise. Trois motions de clôture dans l'espace de moins d'une semaine. Celle que nous débattons aujourd'hui pour mettre fin au débat, à la discussion sur le projet de loi 69, projet de loi piloté par le ministre de l'Éducation, me paraît particulièrement difficile à accepter parce qu'à date, M. le Président, nous avons eu à peine une vingtaine d'heures de discussion en commission parlementaire et, moi, ça me paraît difficile d'accepter cette motion parce que je croyais que le ministre de l'Éducation, qui est dans cette Chambre, qui nous écoute religieusement, avait beaucoup de patience. Sa patience est légendaire. C'est une personne qui a toujours aimé écouter beaucoup. On l'a souvent consulté dans le passé, les dirigeants politiques du Québec allaient le consulter et, depuis qu'il est ministre de l'Éducation, il se fait un point d'orgueil de recevoir des groupements, des parents, des étudiants. Je dois dire que la plupart du temps, surtout dans le cas des étudiants, ces groupes ressortent assez déçus, mais, quand même, le ministre de l'Éducation est reconnu pour être une personne à l'écoute, d'où notre surprise, notre grande surprise de voir une motion de clôture après à peine une vingtaine d'heures de débat.

Le ministre de l'Éducation sait pourtant que le gouvernement précédent, le gouvernement du Parti québécois, pouvait passer des douzaines d'heures et parfois au-delà de 200 heures en commission parlementaire. Il se souvient sans doute que lors de l'étude du projet de loi sur la protection du territoire agricole, par exemple, lors de l'étude du projet de loi sur la langue française, la loi 101, lors de l'étude du projet de loi sur l'assurance automobile, il y a eu au-delà de 200 heures de débat, M. le Président, et voici que le ministre de l'Éducation, au bout d'une vingtaine d'heures de débat, donc dix fois moins d'heures de débat, dit: Non, c'est assez, là, je ne veux plus entendre ces gens-là. Et, en faisant ça, lui et son gouvernement, qu'est-ce qu'ils font? Bien, ils privent 40 % de la population, les 40 % de la population qui ont appuyé le Parti québécois au moment de l'élection. Ces gens-là ont le droit d'être entendus à travers les 29 députés de l'Opposition et je pense, M. le Président, que c'est un jour triste dans notre histoire parlementaire lorsque, dans l'espace de cinq jours, on assiste à trois motions de clôture.

C'est du jamais vu. Moi, ça fait neuf ans, à peu près, que je suis dans la vie parlementaire et jamais je n'ai vu ça, et Dieu sait qu'on en a vu des projets de loi de toutes sortes. Alors, c'est un gouvernement qui, de moins en moins, porte intérêt ou porte attention à ce que les députés de l'Opposition ont à dire, à ce que les groupements à l'extérieur ont à dire en commission parlementaire.

En plus, M. le Président, il s'agit d'un projet qui, sur le fond, est absolument inéquitable, injuste. Pourquoi est-il injuste? Parce que, en remettant aux commissions scolaires, par le biais de taxation, d'impôts scolaires, le soin de l'entretien des bâtiments scolaires, on risque - et le risque est très grand - de revenir à deux poids, deux mesures: les commissions scolaires où la population est à l'aise et les commissions scolaires où la population est moins à l'aise. Un taux de chômage de 20 %, 30 %, revenus annuels trois fois moins élevés que dans l'ensemble du Québec, ça existe, ça, M. le Président. Alors, des commissions scolaires qui, devant réparer, entretenir des bâtiments scolaires, doivent se serrer la ceinture, doivent s'imposer de nouvelles taxes. Elles n'auront pas les moyens et c'est ainsi qu'au bout de quelques années on va revenir à l'ancien système où vous aurez dans le Québec des écoles bien entretenues et des écoles mal entretenues, selon le revenu annuel de la population. C'est aussi inacceptable que si on disait: Dorénavant, les hôpitaux devront être entretenus par des impôts locaux ou régionaux. Ça fait longtemps qu'on a tourné la page. Et moi, je ne comprends pas le ministre de l'Éducation de nous présenter un tel projet de loi. C'est un recul, c'est un retour en arrière. Je sais qu'il a un petit côté très conservateur, le ministre de l'Éducation, très conservateur; il est très traditionnaliste. Mais je lui demanderais, de grâce, de ne pas retourner à des systèmes qui sont injustes, des systèmes tout à fait injustes. Les populations qui ont de la difficulté à boucler leur budget, que ce soit en Gaspésie ou dans le Bas-Saint-Laurent, où on retrouve, par exemple, actuellement, le taux de chômage le plus élevé au Canada, malgré leur bonne volonté, ces populations devront dire: Non, la réparation de l'école, l'entretien de l'école ou des écoles, ce sera remis à plus tard. M. le Président, autant ce serait inacceptable s'il s'agissait d'hôpitaux, autant ça doit être inacceptable quand il s'agit d'écoles.

Et un autre aspect tout à fait injuste de ce projet de loi, c'est que, sous le couvert de donner un plus grand champ de taxation aux commissions scolaires, ce gouvernement, au fond leur soutire des millions de subventions en leur disant: Allez-y, nous, on va économiser, on va sauver de l'argent, on vous donne moins de subventions; on n'a pas l'air de gens qui vont taxer, on n'a pas l'air de gens qui vont ajouter des impôts aux contribuables; vous autres, vous

atlez le faire, vous autres, les commissions scolaires, vous le faites, vous autres, les municipalités, vous le faites; et nous autres, le gouvernement du Parti libéral, on va passer pour un gouvernement qui est bon pour la population, qui n'augmente pas les impôts, qui n'augmente pas les taxes. Mais ça, ça s'appelle de l'hypocrisie. C'est de la taxation indirecte. Ce gouvernement est en train d'établir des records de taxation indirecte. Il n'a pas le courage d'aller dire à la population clairement: Nous devons augmenter les impôts de 5 %, de 10 %. Mais il se sert des commissions scolaires. Il se sert des municipalités. Il se sert de la Régie de l'assurance automobile, dans un autre projet de loi, une autre motion qu'on discute ces jours-ci, pour empêcher l'Opposition de poser des questions aux dirigeants de la Régie de l'assurance automobile. Alors, c'est un gouvernement qui procède par détour, un gouvernement qui n'est pas direct, qui n'est pas franc, un gouvernement qui fait faire son sale travail par d'autres, par les commissions scolaires, par les conseils municipaux et par la Régie de l'assurance automobile.

Et en plus, avec une loi comme celle-là, qu'est-ce que le gouvernement a réussi à faire? Ce gouvernement a réussi à briser l'harmonie, la bonne entente qui existait entre le gouvernement du Québec, les municipalités et les commissions scolaires. Depuis plus de 10 ans, grâce aux démarches que le gouvernement du Parti québécois avait faites avec les commissions scolaires et les municipalités, il existait un pacte, et tout le monde était satisfait de cette entente. Les municipalités avaient leur champ de taxation, les commissions scolaires avaient un tout petit champ de taxation et ça fonctionnait bien. Parce que le gouvernement, encore une fois, n'a pas le courage de relever les impôts parce qu'il a besoin d'argent et qu'il fait faire ça par les municipalités et les commissions scolaires, il vient briser cette bonne entente, ce pacte entre le Québec, les municipalités et les commissions scolaires. (3 h 40)

Alors, M. le Président, en terminant, je pense qu'il faut dire bien haut et bien fort, malgré cette heure tardive - 3 h 42 - dans cette nuit de débat, que ce gouvernement est en train d'établir des records en matière de bâillon pour empêcher les députés de l'Opposition de faire leur travail. Les députés de l'Opposition ont le devoir de s'opposer à des projets de loi qui ne sont pas acceptés par de larges parties de la population. M. le Président, en conclusion, je déplore que le ministre de l'Éducation se prête à ce jeu-là. Moi, je me serais attendu à plus de patience de la part du ministre de l'Éducation. Je me déclare très déçu, très désappointé. J'espère que non seulement mes collègues vont voter contre cette motion de clôture, mais que même certains de ses collègues à lui - c'est possible -vont nous appuyer parce que dans leurs régions, surtout dans les régions éloignées...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure, s'il vous plaît.

M. Lazure: ...on va assister à des injustices. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (m. bissonnet): merci. nous poursuivons avec le prochain intervenant, m. le député de joliette et leader de l'opposition officielle.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, 3 h 40, mardi matin. Ce sera de même, sans doute, demain matin; ce sera sans doute de même également mercredi matin. Parce que ce n'est pas vrai que le Parlement, l'Opposition officielle va se laisser bâillonner. Ce n'est pas vrai. Il y a un prix à payer pour un gouvernement au pouvoir qui a décidé d'être arrogant et de faire taire un Parlement. Il y a un prix à payer.

Il y a un prix à payer parce qu'on vit dans un Parlement où il n'y a pas d'Assemblée législative, où il n'y a pas de Sénat, où il n'y a pas de structure autre que celle que nous avons ici pour étudier les projets de loi, pour étudier en profondeur la législation. On a pris la fâcheuse habitude - je ne sais pas si ce sont nos règlements qu'il faudra peut-être réviser - d'attendre à la dernière minute pour déposer les projets de loi. C'est pratiquement, le 15 novembre, une avalanche de projets de loi - regardez dans le Journal des débats - le 15 mai, une avalanche de projets de loi qui sont déposés. On dirait qu'il n'y a pas cet effort de planification des travaux à longueur d'année, mais on arrive avec une avalanche de projets de loi et on voudrait que, du 6 juin au 23 juin, excluant les samedis et les dimanches, on adopte 55 ou 60 projets de loi. C'est un peu ça, la réalité Regardez le feuilleton, regardez les dates, regardez exactement le contenu des projets de loi. Et, en un rien de temps, on voudrait que ce Parlement-là étudie, à la vapeur, plusieurs lois.

Vous regarderez dans plusieurs Parlements, souvent, on dépose les projets à une session et ils ne sont adoptés qu'à l'autre session. Vous irez voir comment ça marche, par exemple, à la Chambre des communes, où on siège, en termes de nombre de jours, plus qu'ici; les projets de loi qui sont déposés à la Chambre des communes à une session sont souvent adoptés exclusivement à l'autre session. Et qui plus est, il y a une chambre de décompression qu'on appelle le Sénat. Je ne vous dis pas que c'est la meilleure formule, je ne vous dis pas que c'est celle que je favorise, je n'en veux pas. Je ne vous dis pas que je voterais pour un Sénat élu, je voterais pour l'abolition du Sénat, en ce qui me regarde, personnellement, moi. Mais vous avez dans des

systèmes, quand on compare des systèmes, une chambre de décompression qui s'appelle le Sénat qui peut prendre un temps X aussi pour étudier les projets de loi. Ici, on est scandalisés qu'une commission parlementaire prenne quelques heures en commission et on décide de passer le bâillon. Pensez-y 30 secondes et vous allez peut-être réfléchir avant d'être empressés à passer des bâillons comme vous le faites présentement. Vous allez peut-être réfléchir avant d'aller, d'une façon très spontanée, à cette fameuse motion de suspension des règles. Ici, dans ce Parlement, c'est devenu une banalité que de suspendre les règles. C'est devenu une banalité que de mettre une motion de clôture.

M. le Président, c'est regrettable, mais c'est antidémocratique. Ne serait-ce que pour contribuer à ne pas banaliser la motion de clôture et la motion de suspension des règles, il y aura un prix à payer pour ce que vous avez fait. C'est clair! On ne peut pas, comme Opposition responsable, laisser banaliser des motions aussi importantes et faire en sorte de mettre fin aux discussions mêmes sur le fond d'un projet de loi. Et des législations, c'est pas des pinottes. Un gouvernement décide, du jour au lendemain, de dire aux commissions scolaires: Écoutez, je vous coupe 280 000 000 $ et je vous en donne 320 000 000 $; donc, tu ne chiales pas, tu en veux plus. Mais, du même souffle, il dit: Je te donne, par contre, l'entretien des bâtisses, l'entretien de tout le parc immobilier. Qu'est-ce que vous allez donner de plus aux commissions scolaires? Plusieurs viennent de se réveiller. Il y en a un ou deux... Le président de la Fédération, aveuglément, disait que ça avait de l'allure, dans les premiers temps, mais il y a de plus en plus de son monde qui dit: Tu as parlé un peu trop vite, toi. Qui est-ce que t'as rencontré pour te prononcer de même aussi vite? Qu'est-ce que tu as fait? Tu vois bien qu'on est plus mal organisés qu'on était. On a la responsabilité de l'entretien et t'as crié bravo spontanément et tu n'as pas réfléchi.

Les commissions scolaires ne sont pas heureuses. Les commissions scolaires sont déçues de voir que... Ce qu'elles demandaient au ministre ce n'était pas d'avoir l'entretien. Elles demandaient au ministre d'avoir un pouvoir de taxation un petit peu accru, de modifier les 6 % ou les 0,25 $, mais pas nécessairement d'avoir des obligations en retour. Et ça, c'est une situation, je pense, qui est véridique.

M. le Président, ce n'est pas une petite loi ça, de dire, au gouvernement, plutôt que de nous verser 280 000 000 $, je vais aller les chercher dans la poche des contribuables, diminuant d'autant la possibilité des gouvernements locaux d'aller chercher des augmentations foncières. C'est l'envahissement du champ de taxes foncières qui commence. Et on sait que ça n'a pas plus de limite, ça. Je pense véritablement, M. le Président, que c'est là un projet de loi d'enver- gure, un projet de loi majeur et qu'on a le droit de discuter assez longuement parce que les contribuables... D'abord, le monde municipal ne l'aime pas ce projet de loi là. Le monde municipal est diamétralement opposé à ce projet de loi là et il demande, M. le Président, qu'on soit leur prolongement et c'est ce qu'on fait démocratiquement. Et c'est ce qu'on aurait dû faire sans avoir de bâillon, M. le Président. Et c'est pas le seul, on en a deux autres, deux autres sur des lois tout aussi importantes.

La ponction de 625 000 000 $, si c'est pas des pinottes, sur la caisse de l'assurance collective que se sont donnée les Québécois en matière d'assurance automobile, c'est pas une petite loi de deux sous, ça. C'est sérieux. L'autre loi sur les heures de commerce bouleverse toutes les habitudes de vie chez les consommateurs. Vous irez voir vos petits dépanneurs chacun. Vous allez voir que c'est un projet de loi d'envergure qui touche des centaines et des milliers de travailleurs, des centaines de milliers de travailleurs. C'est sérieux ça, trois bâillons sur les trois lois les plus importantes, je pense, du menu législatif, ça je n'en disconviens pas. C'est sans doute les trois législations les plus importantes de tout le menu législatif. Mais trois bâillons, ça m'apparait excessif, M. le Président. Et je vous répète que l'Opposition a bien l'intention de ne pas laisser banaliser, je le répète, on ne laissera pas banaliser, comme Opposition, ces motions de clôture, ce type de motions qui, à toutes fins pratiques, limitent le pouvoir de l'exercice de la démocratie dans le Parlement.

Donc, M. le Président, on se retrouve ce mardi matin à 3 h 50 ou presque, en Chambre. Demain on procédera sans doute au rapport de la commission sur les heures de commerce, la loi 75. On se prononcera sans doute sur le rapport de la commission concernant les ponctions faites à la Régie de l'assurance automobile et, à la même heure demain matin, on aura fini, dans la journée de mardi à mercredi, deux rapports. Et ça sera aussi tard. Je vous le dis d'avance. Et mercredi, préparez-vous, ce sera l'étape de la troisième lecture: troisième lecture du projet de loi 69, sur les taxes scolaires, troisième lecture sur les heures de commerce. Et il faudra attendre à jeudi pour voir le dernier effet du dernier bâillon. Et on connaîtra le dénouement, sans doute jeudi soir vers les 11 heures, du troisième bâillon. Mais, d'ici jeudi soir, M. le Président, avec la petite équipe que nous sommes, nous allons, sans pouvoir former des équipes pour qu'on se succède ici, nous allons démontrer dans ce Parlement que nous sommes capables de lutter pour les droits démocratiques, que nous sommes capables de lutter face à des contenus de lois que la population n'accepte pas, que c'est inconcevable, M. le Président, qu'on n'ait pas su planifier un tant soit peu pour que ces législations, à mon point de vue très importantes, que la population d'ailleurs nous demande, parce

qu'on rencontre des gens et ils disent: Oui, battez-vous là-dessus... Comment de gens nous demandent, des propriétaires de commerces qui nous disent: Allez-vous vous battre longtemps? Allez-vous vous battre pour essayer de l'empêcher de passer? Ils nous ont mis le bâillon. C'est ça qu'on doit répondre. (3 h 50)

Donc, notre devoir, M. le Président, c'est de lutter avec tous les moyens qu'on a, tous les moyens qu'il nous reste, devrais-je dire, pour retarder ou empêcher l'adoption de ces projets de loi. C'est ça, la démocratie, M. le Président. Et, en plus de ça, on a un double objectif, ce qui nous motive encore davantage comme équipe d'Opposition, c'est qu'on a l'objectif et je pense qu'on a le devoir, M. le Président, de faire en sorte que l'utilisation excessive de ces motions de clôture doit cesser, que l'utilisation excessive de la motion de clôture, M. le Président, ne doit pas contribuer à banaliser ces normes d'exception et qu'on se doit, comme parti politique, de faire en sorte que ce soit utilisé le moins possible. Et ce n'est pas vrai qu'on va laisser ça d'une façon facile, qu'on va laisser le gouvernement utiliser cela quand bon lui semble. Oui, M. te Président.

Je conclus en disant que, si vous êtes heureux de cette nuit, préparez-vous aux deux autres.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En vertu de l'article 253, M. le ministre, une intervention vous est permise... Non, c'est après chaque-Non, après chaque intervention, il n'y a pas de droit de réplique, M. le député, sur une prise en considération du rapport. M. le leader de l'Opposition officielle, sur une prise en considération du rapport, il n'y a pas de réplique à la fin, mais il y a une réplique de cinq minutes après chaque intervention. M. le ministre de l'Éducation, vous avez la parole, en vertu de l'article 253, pour un maximum de cinq minutes.

M. Claude Ryan

M. Ryan: Oui, M. le Président, je serai évidemment bref. Je voudrais, tout d'abord, signaler qu'il est nécessaire d'adopter le projet de loi 69 à la présente session, étant donné ses implications financières autant pour les commissions scolaires que pour le gouvernement.

Une fois cette prémisse établie clairement, je pense qu'on peut conclure avec beaucoup de justification que l'Opposition, de son côté, avait décidé de faire obstacle à l'adoption du projet de loi. C'est son droit, c'est même son devoir, si telle est sa conviction. Mais il doit y avoir des limites aux obstacles que l'on place sur la route de l'adoption d'un projet de loi, lorsque celui-ci est absolument nécessaire pour l'équilibre de la bonne gestion publique, tant au niveau du gouvernement qu'au niveau des commissions scolaires.

J'assure cette Chambre que nous n'en sommes venus à la conclusion qu'il fallait recourir à ce moyen extraordinaire pour obtenir l'adoption du projet de loi qu'après que nous eûmes acquis la conviction que l'Opposition n'était aucunement intéressée à faciliter l'adoption du projet de loi au cours de la présente session. Nous conservions le souvenir d'un projet de loi qui avait été présenté à la session antérieure, qui était beaucoup moins important, et au sujet duquel l'Opposition nous a dit, vers la fin: Vous reviendrez l'année prochaine, nous ne sommes pas intéressés à vous donner ce projet de loi là maintenant. C'était un projet de loi sur les questions scolaires, on se rappelle très bien. Alors, le gouvernement n'avait strictement pas le droit de se laisser dicter sa ligne de conduite dans une question comme celle-là, par l'Opposition. Il avait le droit de l'entendre et de l'écouter. Et je pense que ceux qui ont suivi les débats du début jusqu'à maintenant auront pu se rendre compte qu'on a entendu à peu près les principaux témoins intervenir une dizaine de fois jusqu'à maintenant.

N'oublions pas une chose. Les orientations fondamentales de ce projet de loi ont été connues dès le 28 mars 1990, c'est-à-dire il y a deux mois et demi, lors du dépôt des crédits en cette Chambre. Déjà, à ce moment-là, on avait tout l'essentiel du projet de loi 69, lequel n'est venu que donner forme juridique à des orientations budgétaires qui avaient déjà été arrêtées par le Conseil du trésor et le gouvernement et confirmées dans le discours sur le budget. Par conséquent, quand on plaide les vierges, offensées, quand on feint de plaider qu'on est en face d'une affaire de dernière minute mal planifiée, dans ce cas-ci, il y a un dossier de deux mois et demi solidement étayé qui plaide pour le sérieux de la position gouvernementale. J'affirme qu'après deux mois et demi de débats, parce que le débat a commencé le 28 mars et se termine ces jours-ci, qu'après deux mois et demi de débats on n'a rien entendu, du côté de l'Opposition, qui soit de nature à mettre en doute le bien-fondé du projet de loi et, même, je dois dire les modalités du projet de loi.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Conformément à l'article 253 du règlement, à la suite d'une réunion des leaders parlementaires, je vais maintenant procéder à la mise aux voix des amendements proposés au rapport de la commission de l'éducation.

M. Chevrette: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.

M. Chevrette: ...je demande un vote enregistré si...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous demandez un vote enregistré. Qu'on appelle les députés!

Veuillez prendre place, s'il vous plaît!

Mise aux voix des amendements

Conformément à l'article 253 du règlement et à la suite d'une réunion des leaders parlementaires, je vais maintenant procéder à la mise aux voix des amendements proposés au rapport de la commission de l'éducation. Je mets aux voix les amendements proposés par M. le ministre de l'Éducation à l'article 9, 1°. S'il vous plaît, je vous demande votre collaboration. J'ai plusieurs amendements à lire et je voudrais votre collaboration pour m'aider à cet effet. 1° remplacer l'article 434 de la Loi sur l'instruction publique proposé par le suivant: "434. Le Conseil peut imposer une taxe scolaire sur tout immeuble imposable situé sur le territoire des commissions scolaires de l'île de Montréal pour ses besoins et pour assurer le rattrapage en matière d'éducation dans les milieux défavorisés de ces commissions scolaires." 2° remplacer l'article 434.3 de la Loi sur l'instruction publique proposé par le suivant: "434.3 Les articles 302, 310, 311, 313 à 318 et 324 à 344 s'appliquent à la taxation par le Conseil compte tenu des adaptations nécessaires. À cette fin, les mots "commission scolaire" désignent le Conseil." (4 heures)

L'article 9.1: Insérer, après l'article 9, le suivant: "9.1 L'article 435 de cette loi, modifié par l'article 48 du chapitre VIII des lois de 1990, est remplacé par le suivant: "435. Le Conseil fixe le taux de la taxe scolaire après l'approbation du budget des commissions scolaires de l'île de Montréal. "Le Conseil peut, malgré le premier alinéa, fixer le taux de la taxe scolaire si une commission scolaire de l'île de Montréal est autorisée à effectuer un montant de dépense avant l'approbation de son budget."

L'article 11: Remplacer l'article 11 par le suivant: "11. L'article 439 de cette loi est remplacé par le suivant: "439. Le Conseil répartit pour chaque année scolaire le produit de la taxe scolaire et les revenus de placement de tout ou partie de ce produit selon les règles suivantes: "1° chaque commission scolaire de lite de Montréal reçoit, au plus tard le 3 janvier de chaque année, le montant qu'elle a demandé jusqu'à concurrence d'un montant équivalent à la moins élevée des limites déterminées en appliquant l'article 308 comme si la commission scolaire avait imposé elle-même la taxe scolaire; "2° le solde, déduction faite au montant que le conseil détermine par résolution pour ses besoins, est réparti entre les commissions scolaires pour assurer le rattrapage en matière d'éducation dans les milieux défavorisés de ces commissions scolaires, aux époques et selon les règles de répartition indiquées dans une résolution du Conseil. "Dans les 60 jours de l'adoption par le conseil d'une résolution visée au paragraphe 2° du premier alinéa, une commission scolaire peut, par résolution, soumettre au ministre qu'elle s'oppose à la résolution du Conseil. Le ministre statue sur tout différend qui lui est ainsi soumis. Il peut, à cette fin, modifier le montant que détermine le Conseil pour ses besoins, les époques de versement ou les règles de répartition du Conseil."

L'article 19. Remplacer l'article 19 par le suivant: "19. Lorsqu'une taxe scolaire imposée par une commission scolaire pour l'année scolaire 1988-1989 ou 1989-1990 a été approuvée par un référendum: "1° la somme du taux maximal de la taxe scolaire fixé par l'article 308 de la Loi sur l'instruction publique édicté par la présente loi et de l'excédent du taux maximal prévu à l'article 308 tel qu'il se lisait le - entre parenthèses, inscrire ici le jour précédant celui de la sanction de la présente loi - constitue le nouveau taux maximal de la taxe scolaire aux fins de l'article 308 pour l'année scolaire 1990-1991 et si elle a été imposée en 1989-1990 pour l'année scolaire 1991-1992. "2° la somme du montant obtenu en appliquant la partie du pourcentage excédant 6 % de sa dépense nette, approuvée par référendum, à sa dépense nette calculée pour l'année scolaire 1990-1991 ou, si la taxe a été imposée en 1989-1990, pour l'année scolaire 1991-1992 et du produit maximal de la taxe scolaire calculée pour ces mêmes années conformément à l'article 308 édicté par la présente loi constitue le nouveau produit maximal de la taxe scolaire pour les années visées. "L'article 309 de la Loi sur l'instruction publique tel qu'il se lisait le (inscrire ici le jour précédant celui de la sanction de la présente loi) s'applique au calcul de la dépense nette visée au paragraphe 2° du premier alinéa du présent article. "Pour l'application du premier alinéa de l'article 475 de la Loi sur l'instruction publique édicté par la présente loi, il n'est pas tenu compte des majorations prévues au présent article." Ainsi que les autres amendements aux articles 6, 7, 9.2, 9.3, 12, 13, 15, 21 et 21.1 qu'on me dispense de lire...

Une voix: Pardon?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Qu'on me dispense de lire. Il y a eu une entente entre les deux leaders.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez que je les lise, je vais les lire, mais il y a eu une dispense entre les deux leaders. C'est l'information que le président, suite à la conférence des leaders qu'il a tenue en vertu de l'article 253, M. le leader de l'Opposition officielle...

Alors, vu qu'il y a eu consentement, j'imagine que vous avez donné le consentement avec le leader adjoint. Non?

M. Chevrette: Ce n'est pas là-dessus que je veux vous parler.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non? Sur quoi?

M. Chevrette: J'ai hâte que vous vous asseyiez. Je ne peux plus vous parler.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est parce qu'à ce moment-ci je dois mettre au vote...

M. Chevrette:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, avant. Je vous écoute, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: C'est parce que je comprends qu'il y a eu dispense pour trois articles techniques. C'est ça?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): II y a eu une dispense pour les articles 6, 7, 9.2, 9.3, 12, 13,15,21 et 21.1.

M. Chevrette: C'est des articles techniques. Les autres articles se référant à des numéros seulement, pour permettre un vote intelligent, est-ce qu'on pourrait demander des explications? Parce qu'il m'apparait qu'on ne doit pas voter sans connaître essentiellement sur quoi on vote.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, M. le leader.

M. Chevrette: ...avoir voté des conneries. Je pense que c'est très important qu'on ait un vote très éclairé.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: M. le Président, je n'ai pas d'objection, moi, à renoncer à la lecture si c'est ce que souhaite le leader de l'Opposition. Maintenant...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a un consentement pour que le ministre... Oui, M. le leader adjoint.

M. Lefebvre: M. le Président, je veux m'assurer cependant...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!

M. Lefebvre: ...que les amendements qui sont appelés au vote correspondent aux amendements que le ministre a entre les mains. Je veux être certain qu'il n'y aura pas d'erreur.

Dans ce sens-là, M. le Président, j'apprécierais, sans que vous en donniez...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): II y a un consentement des membres de cette Assemblée pour que le ministre explique brièvement. Alors, il y a consentement. M. le ministre, s'il vous plaît, et je mettrai au vote après, les amendements du ministre et après, je vais passer au vote les amendements de l'Opposition. M. le ministre de l'Éducation.

M. Ryan: M. le Président, je pense qu'avec les explications qui seront fournies, tout apparaîtra simple et justifié. Il y a deux séries d'amendements. Il y en a 13 en tout. Il y a une série d'amendements qui visent à assurer que, lorsqu'un référendum est tenu pour autoriser la commission scolaire à taxer au-delà du plafond prévu dans la loi, le plafond de 0,35 $ par 100 $ d'évaluation, que le montant obtenu, disons que c'est 0,40 $, soit toujours garanti, quel que soit le montant de base que fixera le gouvernement. Ce montant de base sera ajusté année après année suivant l'inflation ou les autres critères que retiendra le gouvernement, mais il y aura toujours le produit du surplus de taxes qui viendra s'ajouter à ça. Tandis que s'il avait été incorporé au montant de base la première fois de manière immuable, le rendement de cette taxe supplémentaire obtenue par référendum aurait connu un effet décroissant.

Il y a toute une série de dispositions qui portent là-dessus. Je pense que le député d'Abi-tibi-Ouest a très bien saisi le sens de ces modifications. Si lui a compris, je suis sûr qu'il communiquera la bonne nouvelle.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: Peu importe l'heure, aucun parlementaire ne peut imputer des motifs à un autre parlementaire.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je

demanderais, M. le ministre, de pouvoir expliquer les règlements le plus rapidement possible pour qu'on puisse passer au vote.

M. Ryan: M. le Président, j'ai voulu imputer du talent et non pas des motifs au député d'Abitibi-Ouest. Pour une fois que je lui faisais un compliment, je regrette de m'être exprimé gauchement.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre, si vous voulez poursuivre, s'il vous plaît. Merci.

M. Ryan: Les autres amendements portent sur le Conseil scolaire de l'île de Montréal. Ils confirment le pouvoir du Conseil scolaire de l'île de Montréal de fixer une taxe pour les commissions scolaires de l'île de Montréal.

Deuxièmement, ces amendements lui confèrent, au Conseil scolaire de l'île de Montréal, le pouvoir de percevoir la taxe scolaire, laquelle était perçue en vertu de la loi jusqu'à maintenant par les municipalités de l'île de Montréal. Avec cet amendement, nous donnons au Conseil scolaire de l'île le même statut qu'aux commissions scolaires du reste du Québec, c'est-à-dire qu'il sera habilité soit à percevoir la taxe lui-même, soit à conclure des ententes avec les municipalités afin que celles-ci la perçoivent en son nom aux conditions qui donneront lieu à une entente. Et, troisièmement, il y a des amendements qui prévoient comment...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Avec consentement. Consentement?

M. Gendron: Le ministre acceptera de donner une explication additionnelle sur l'article 11 concernant le pouvoir de taxation qui est laissé au Conseil de l'île. Mais est-ce que vous pourriez lire uniquement le dernier paragraphe, au bas de la page, où vous vous réservez un pouvoir discrétionnaire de revoir certaines dispositions si le Conseil de l'île s'acquiert de la responsabilité que vous lui confiez? D'ailleurs, je tiens à vous signaler qu'après avoir consulté le Conseil de l'île et avoir pris connaissance du libellé de l'amendement tel que vous l'avez formulé, le Conseil de l'île souhaitait au moins retirer le dernier paragraphe qui, selon lui, n'a aucune espèce d'utilité et ne comprend pas vraiment pourquoi le ministre, après lui avoir laissé le pouvoir, tient à conserver quand même un dernier droit de regard pour je ne sais trop quel usage il entend en faire. J'aimerais ça, moi, entendre l'explication que le ministre pourrait fournir là-dessus parce que, effectivement, il y a des représentations qui vous ont été faites et qui nous ont été faites; si on avait fait notre travail en commission, ils nous auraient demandé de retirer la dernière partie du dernier paragraphe au bas de la page. (4 h 10)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je tiens à informer les membres de cette Assemblée que c'est une procédure très exceptionnelle qu'on fait là. Habituellement...

Une voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): écoutez, M. le leader de l'Opposition, compte tenu que lorsqu'on lit les amendements, habituellement, on vote là-dessus, il y a eu consentement. M. le ministre, si vous voulez répondre.

M. Ryan: On n'a jamais hésité à répondre aux questions qui étaient bien fondées. Je pense que la question est légitime. Elle est venue prématurément parce que je complétais la présentation du deuxième aspect des amendements concernant le Conseil scolaire de l'île de Montréal. Le premier, on confirme son pouvoir de percevoir une taxe et de fixer une taxe. Deuxièmement, on lui donne le pouvoir de la percevoir et, troisièmement, on définit comment seront répartis le produit de la taxe et le produit d'autres revenus afférents à la taxe. Le produit de la taxe elle-même sera réparti entre les commissions scolaires suivant la part qui revient à chacune en vertu de ce qui leur est attribué par la loi. Deuxièmement, il y a des revenus qui vont provenir du fart que le produit de la taxe va être placé pendant un certain temps. Disons que la taxe est perçue au mois de septembre; elle devra être versée aux commissions scolaires au mois de janvier. Entre-temps, elle va rapporter des revenus. Alors, comment seront répartis ces revenus-là? Il y a une troisième chose. Il peut arriver que le Conseil scolaire de l'île ait d'autres placements qui produisent des revenus également. Comment seront-ils répartis? Ça, c'est un problème.

Alors, jusqu'à maintenant, cette situation s'est présentée. Il y a eu des conflits qui se révélaient pratiquement insolubles quand la Commission des écoles catholiques de Montréal était en conflit avec la majorité au Conseil scolaire de l'île de Montréal. On avait une situation où la majorité de la population étudiante représentée par la CECM était mise en minorité à cause des mécanismes de décision qui existaient au Conseil scolaire de l'île de Montréal. Le ministre était obligé de recevoir les deux parties dans son bureau pendant des heures chaque année, en leur disant: Bien, retournez, essayez de vous entendre, moi, je ne peux rien faire. Alors, avec l'amendement qui est apporté ici, quand il y aura un conflit, qu'une commission scolaire ne pourra pas accepter la décision qui a été prise au Conseil scolaire de l'île de Montréal, le litige pourra être tranché par le ministre dans les termes suivants: "Dans les 60 jours de

l'adoption par le Conseil d'une résolution visée au paragraphe 2° du premier alinéa, une commission scolaire peut, par résolution, soumettre au ministre qu'elle s'oppose à la résolution du Conseil. Le ministre statue sur tout différend qui lui est ainsi soumis; il peut à cette fin modifier le montant que détermine le Conseil pour ses besoins, les époques de versement ou les règles de répartition du Conseil. "

Une voix:...

M. Ryan: Je viens de lire le dernier paragraphe. Il n'y a pas de cachette.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): II n'y a pas d'autres paragraphes. Merci, M. le ministre. Alors, je mets aux voix les... S'il vous plaît! Je mets aux voix les amendements proposés par le ministre de l'Éducation aux articles 9, 9. 1, 11, 19, 6, 7, 9. 2, 9. 3, 12, 13, 15, 21 et 21. 1.

Que ceux et celles qui sont en faveur veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Savoie (Abitibi-Est), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cusano (Viau), M. Houde (Berthier), M. Maltais (Saguenay), M. Middlemiss (Pontiac), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. St-Roch (Drummond), Mme Pelchat (Vachon), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc (Taschereau), M. Poulin (Chauveau)...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Merci..

Le Secrétaire adjoint: M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Kehoe (Chapleau), M. Fradet (Vimont), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Gautrin (Verdun), M. Larouche (Anjou), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Ho-vington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Brouillette (Champlain), M. Bradet (Charlevoix), M. Després (Limoilou), M. Forget (Prévost), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau).

Le Président: Que ceux et celles qui sont contre veuillent bien se lever!

Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), Mme Marois (Taillon), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), M.

Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), M. Paré (Shefford), M. Claveau (Ungava), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ceux qui s'abstiennent? S'il vous plaît!

Le Secrétaire: pour: 45 contre: 21

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, les amendements du ministre de l'Éducation sont adoptés.

Je vais maintenant mettre aux voix l'amendement de M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition officielle à l'article 3. Article 3. L'article 308 de la Loi sur l'instruction publique remplacé par l'article 3 du projet de loi 69, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et la Loi sur l'enseignement privé, est amendé: 1° par l'insertion, dans la deuxième ligne du premier alinéa, après le mot "imposition" des mots "pour l'année scolaire 1990-1991"; 2° par le remplacement, dans la première ligne du deuxième alinéa des mots "une année scolaire" par les mots "l'année scolaire 1990-1991"; 3° par le remplacement du troisième alinéa par le suivant: "Le montant par élève est de 500 $ ou, si le nombre admissible d'élèves est inférieur à 1000, de 650 $ et le montant de base est de 150 000 $.

Que ceux et celles qui sont en faveur de cet amendement veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), Mme Marois (Taillon), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), M. Paré (Shefford), M. Claveau (Ungava), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui sont contre veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Savoie (Abitibi-Est), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cusano (Viau), M. Houde (Berthier)...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, un petit peu d'ordre pour permettre au

secrétaire de poursuivre. Merci. (4 h 20)

Le Secrétaire adjoint: M. Maltais (Saguenay), M. Middlemiss (Pontiac), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. St-Roch (Drummond), Mme Pelchat (Vachon), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc (Taschereau), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Kehoe (Cha-pleau), M. Fradet (Vimont), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Gautrin (Verdun), M. Larouche (Anjou), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Ho-vington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Brouillette (Champlain), M. Bradet (Charlevoix), M. Després (Limoilou), M. Forget (Prévost), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui s'abstiennent veuillent bien se lever.

Le Secrétaire: pour: 21 contre: 45

Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'amendement est donc rejeté.

Mise aux voix du rapport

Je mets maintenant aux voix le rapport de la commission de l'éducation relatif au projet de loi 69, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et la Loi sur l'enseignement privé, tel qu'amendé. Que ceux et celles qui sont en faveur du rapport tel qu'amendé veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Savoie (Abitibi-Est), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cusano (Viau), M. Houde (Berthier), M. Maltais (Saguenay), M. Middlemiss (Pontiac), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. St-Roch (Drummond), Mme Pelchat (Vachon), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc (Taschereau), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Kehoe (Cha-pleau), M. Fradet (Vimont), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Gautrin (Verdun), M. Larouche (Anjou), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Ho-vington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Audet (Beauce-Nord),

M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Brouillette (Champlain), M. Bradet (Charlevoix), M. Després (Limoilou), M. Forget (Prévost), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui sont contre veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), Mme Marois (Taillon), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), M. Paré (Shefford), M. Claveau (Ungava), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui s'abstiennent veuillent bien se lever.

Le Secrétaire: pour: 45 contre: 21

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Le rapport tel qu'amendé est adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 23 du feuilleton.

Projet de loi 77 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 23, M. le ministre délégué aux Mines et au Développement régional propose l'adoption du principe du projet de loi 77, Loi modifiant la Loi sur les mines et la Loi concernant les droits sur les mines. Avant de vous céder la parole, M. le ministre, je vais suspendre l'Assemblée pour cinq à dix minutes.

(Suspension de la séance à 4 h 26)

(Repriseà4h 32)

Le Vice-Président (m. bissonnet): l'assemblée poursuit ses travaux sur l'adoption du principe du projet de loi 77. je reconnais maintenant le ministre délégué aux mines. m. le ministre.

M. Raymond Savoie M. Savoie: Merci, M. le Président. À cette

heure, il me fait quand même grand plaisir de vous présenter les modifications à la Loi sur les mines. On se rappellera que la Loi sur les mines a été adoptée en 1987 et qu'elle est entrée en vigueur le 24 octobre 1988, à la grande satisfaction de l'ensemble de l'industrie minière. Je voudrais souligner à mes collègues qui sont ici présents ce matin qu'effectivement cette loi est maintenant citée en exemple, que la province de l'Ontario, par exemple, apporte une nouvelle loi sur les mines qui sera en grande partie calquée sur le projet de loi sur les mines que nous avons adopté, à l'unanimité de cette Assemblée, en 1987.

On doit, toutefois, continuer à maintenir notre leadership au niveau de l'industrie minière au Québec et ça nécessite de temps à autre des modifications à la loi et c'est ce que nous faisons ce matin. Nous apportons, nous présentons à l'Assemblée nationale un ensemble de modifications pour justement permettre à l'industrie minière de maintenir sa compétitivité et d'assurer le leadership qu'elle exerce sur l'ensemble du territoire canadien; pour ne pas dire, non plus, sur l'ensemble du territoire nord-américain puisque, comme vous le savez peut-être, quelques États américains ont déjà pris connaissance de certaines de nos modifications et de nos orientations. Je pense bien qu'on va voir apparaître des échos de notre projet de loi ailleurs qu'au Canada.

Donc, après bientôt deux ans d'application de cette nouvelle loi, il apparaît toutefois que certaines modifications seraient de nature à simplifier davantage son administration ou encore à en clarifier certaines dispositions. Ainsi, l'Association des prospecteurs du Québec et d'autres membres de notre industrie minière ont exprimé le souhait de voir apporter quelques assouplissements aux exigences fixées par la loi pour assurer le renouvellement de leurs daims et plus particulièrement à l'endroit des travaux d'exploration.

Tel que prévu par la loi, les travaux effectués pendant la période de validité d'un daim doivent être rapportés, pour valoir à leur pleine valeur c'est-à-dire 100 %, avant la date de renouvellement du claim. Rapportés après cette date, c'est-à-dire après la date du renouvellement du daim, ils ne valent plus que 50 % de leur valeur. Or, cette procédure complique indûment la planification des travaux d'exploration surtout pour les titulaires qui possèdent de nombreux daims contigus, mais dont les dates de renouvellement diffèrent. Alors, nous proposons donc de reconnaître à leur pleine valeur les travaux d'exploration rapportés après la date de renouvellement du daim pourvu qu'ils aient été réalisés pendant la période de validité antérieure, et ce, rétroactivement au 24 octobre 1988, puisqu'on ne veut, évidemment, qu'aider l'industrie minière de l'exploration à maintenir les daims qu'elle possède et surtout dans une époque où le financement ne se fait pas aussi facilement que la période de 1987. On pense que ça va leur donner un bon coup de pouce, quoique les indications que nous avons tout dernièrement reçues nous indiquent que pour 1990, les montants qui seront levés par la structure des actions accréditives que le ministre des Finances a annoncée lors de son dernier budget et qui, finalement, rétroagit sur 1989 et va se maintenir jusqu'à la fin de 1991, nous indiquent que, pour cette année, des montants de 75 000 000 $ à 80 000 000 $, à ce jour, seront souscrits dans le public. On peut s'attendre, cette année, à des montants, je pense, très intéressants au niveau de l'exploration minière, certainement une amélioration sur l'année 1989 et ce, malgré un prix de l'or particulièrement bas.

Une autre exigence à l'égard des travaux d'exploration et la signature du rapport par un professionnel du domaine minier. Certains prospecteurs qui exercent depuis longtemps ce métier m'ont exprimé qu'ils aimeraient bien être dispensés de cette formalité, c'est-à-dire la formalité de recourir à d'autres pour signer les travaux qu'ils doivent soumettre. Le projet de loi prévoit donc un assouplissement à cet égard, et certains travaux dont la valeur n'excédera pas un montant fixé par règlement seront dispensés de l'approbation du professionnel.

Par ailleurs, le projet de loi propose des modifications à caractère administratif. Par exemple, il est proposé que les limites d'un permis de recherche de substances minérales de surface correspondent, tout comme le daim, à celles du lot existant en territoire arpenté, puisqu'on a évidemment permis des modifications au niveau du territoire arpenté dans la loi de 1987. Cela simplifiera de beaucoup la description technique pour localiser un tel permis en plus de minimiser les risques de conflit avec des chevauchements de titres, par exemple. En d'autres circonstances, la loi actuelle exige l'autorisation préalable du ministre pour jalonner en certains territoires, notamment, à l'intérieur des municipalités, mais ne prévoit aucune mesure d'arbitrage lorsque plusieurs demandes d'autorisation nous sont formulées simultanément la même journée.

Pour pallier à cette situation, le projet de loi propose d'élargir l'actuelle formule de tirage au sort, qui est très populaire au sein de l'industrie, lorsqu'il y a plusieurs demandes faites en même temps. Par la même occasion, je désire corriger une certaine pratique qui semble vouloir se populariser graduellement. Ainsi, pour accroître leurs chances lors d'un tirage au sort, il semble bien que certaines personnes aient tendance à se concerter pour formuler une demande en grand nombre, abusive, mais non illégale. Une telle pratique n'a pas intérêt à se développer si l'on veut maintenir une chance équitable à tous pour obtenir une propriété minière. Ça avait tendance à favoriser les gens qui étaient capa-

blés, finalement, d'acheter une certaine coopération et ce n'est pas dans l'intérêt de l'industrie minière et ce n'est pas ce qu'on vise là. On veut donner la chance à tous les intervenants, y compris le prospecteur qui travaille seul.

C'est pourquoi le projet de loi propose d'introduire par voie réglementaire un ticket modérateur, si vous voulez, en prévoyant des droits à payer pour toutes les personnes désireuses de participer à un tirage au sort. Ce qui arrivait, c'est que, des fois, pour participer à un tirage au sort, lorsqu'un claim s'ouvrait la même journée, une personne pouvait regrouper une quinzaine de personnes pour se déclarer intéressée à être propriétaire, titulaire d'un claim et, en conséquence, avait plus de chances que son nom soit tiré au sort, lui ou un de ses amis, lorsqu'on faisait le tirage au sort, lorsque ça se produisait. Ce n'est pas quelque chose qui se produit d'une façon régulière. Ça peut arriver une quinzaine, une vingtaine de fois par année. Mais lorsque ça arrive, on veut favoriser aussi bien le prospecteur seul que celui qui travaille en groupe ou qui se forme un groupe pour obtenir un claim. Donc, on veut maintenir une certaine équité. Nous observons que l'industrie minière, et elle ne fait pas exception à ce sujet, comporte quelques personnes qui, parfois, n'hésiteront pas à user des moyens fort peu orthodoxes pour s'approprier des droits miniers appartenant déjà à d'autres titulaires.

Le projet de loi propose donc deux mesures particulières pour contrer ces situations malencontreuses. Tout d'abord, la loi actuelle prévoit déjà la révocation d'un droit minier lorsque son titulaire l'a obtenu par fraude ou fausse représentation. Pour ajouter à cette sanction, le ministre pourra dorénavant révoquer le permis de prospection de cette personne qui ne pourra formuler une nouvelle demande de permis qu'après deux ans de la date de révocation. Cette mesure l'empêchera donc d'acquérir un claim personnellement et de prospecter, sans pour autant lui interdire d'acheter des droits miniers déjà existants. Il s'agit de ce qu'on appelle communément, dans le jargon du prospecteur, des "claim jumpers", des gens qui font de fausses représentations, se fient sur la bonne foi des administrateurs du ministère et, finalement, cherchent à obtenir des droits miniers en faisant ces fausses déclarations. Non seulement on peut annuler son droit, mais je pense que, justement, pour protéger l'intégrité de l'industrie et l'intégrité du prospecteur, pour ces quelques "claim jumpers" là, on pourra, à ce moment-là, annuler son permis de prospecteur pour une période de deux ans. Il pourra toujours aller en appel de la décision du ministre, s'il le désire. Je pense que c'est recherché par l'ensemble de l'industrie et ça va créer une pression morale, davantage. Ça existe aussi dans plusieurs autres professions où, effectivement, lorsqu'il y a fausse représentation, fausse déclaration, le ministre peut intervenir et annuler ce droit; on pense, par exemple, à différentes corporations.

Plus importante encore est la nécessité de consacrer, par ce projet de loi, l'irrévocabilité de plusieurs milliers de daims renouvelés ces deux dernières années sous l'application des mesures transitoires, de l'ancien au nouveau régime. En effet, une requête en révocation de daims appartenant à un titulaire a été formulée récemment, mettant en doute une interprétation administrative qui a eu cours pendant plusieurs décennies. À noter, en passant, que cette requête n'est pas touchée par le présent projet de loi, celui-ci visant plutôt à se prémunir contre de futures requêtes similaires, le cas échéant. Le problème rencontré ici est fort simple. Depuis longtemps, je considérais comme recevable une demande de renouvellement d'un claim déposée à la poste le dernier jour de sa période de validité. C'est-à-dire qu'en vertu de l'ancienne Loi sur les postes, il y avait une disposition qui disait - la Loi sur les postes étant une loi fédérale - qui stipulait que, lorsqu'on voulait renouveler son claim et qu'on mettait une lettre à la poste, en vertu de la Loi sur les postes, la lettre était censée être reçue le jour où le ministère des Postes apposait une marque de réception. Alors, c'était dans le but de bien desservir l'industrie minière. Et une telle pratique a bien servi des milliers de titulaires pendant plus de 20 ans. Or, voilà qu'une personne allègue que cette pratique n'était pas conforme au texte prescrit par la loi et, par conséquent, demande que les daims de propriétés minières qu'il convoite soient révoqués en sa faveur, et ça, suite à une modification de la Loi sur les postes. Ne pouvant présumer du dénouement de ce litige, il nous apparaît nécessaire de protéger immédiatement les quelques milliers de daims qui pourraient se retrouver dans un telle situation litigieuse, par suite de l'application d'une pratique administrative du ministère qui ne se voulait à rien de moins qu'à l'avantage de toute la clientèle minière.

Dans le domaine des sablières, nous avons pu observer, à un degré moindre toutefois, que la nouvelle loi pouvait comporter certaines lacunes. Donc, il serait préférable qu'elles ne soient pas exploitées à mauvais escient. Ainsi, la loi donne préséance au requérant d'un bail exclusif, même si celui-ci vise un terrain déjà exploité par d'autres, sur une base non exclusive. Si le premier doit toujours avoir préséance parce qu'il importe de lui assurer une garantie d'approvisionnement pour l'exercice de ses activités industrielles, il serait tout aussi équitable de l'obliger à verser une indemnité aux petits exploitants qu'il délogera, même si ces derniers n'auront généralement pas de difficulté à se relocaliser. On doit tenir compte du fait qu'ils ont déjà encouru certaines dépenses, telle la construction d'une voie d'accès au site de son déboisement. Puisque ces investissements profiteront également au nouveau venu, il est donc

juste qu'il défraie une partie du coût en versant une compensation aux premiers occupants.

Enfin, le projet de loi propose également, par souci d'équité, l'harmonisation des régimes d'imposition pour ceux qui exploitent des substances minérales de surface, telles la silice, le granit ou la tourbe. À l'heure actuelle, ceux qui exploitent des substances en vertu d'un bail minier ou d'une concession minière délivrée sous les anciennes lois minières sont assujettis aux dispositions de la Loi concernant les droits sur les mines. Dans ce cas, les droits à payer sont de 18 % du profit après une exemption de base de 500 000 $. Par contre, le nouvel exploitant qui, dorénavant, se verra accorder un bail d'exploitation de substances minérales de surface, c'est-à-dire depuis l'entrée en vigueur de la nouvelle Loi sur les mines, devra s'acquitter d'une redevance volumétrique sur chaque tonne extraite et vendue.

Ainsi, deux exploitants de tourbe - c'est un exemple qui va certainement intéresser le député de Rivière-du-Loup - l'un ancien et l'autre nouveau, seraient assujettis à deux régimes d'imposition totalement différents dans leur conception. En pratique, les droits à payer différeront également plus souvent au désavantage du nouvel exploitant, puisque tous ces exploitants opèrent dans des conditions comparables, somme toute, et seront souvent présents sur les mêmes marchés. Il apparaît donc raisonnable de les assujettir à un seul régime d'imposition, en l'occurrence celui introduit par la nouvelle Loi sur les mines.

Le régime retenu aux fins de cette harmonisation présente beaucoup de similitude avec les régimes de droits prescrits par l'Ontario et le Nouveau-Brunswick à l'égard de ces mêmes substances. C'est particulièrement important pour l'industrie de la tourbe au Québec, puisqu'on sait que le Québec veut développer une industrie de la tourbe particulièrement compétitive et veut accaparer une bonne partie du marché américain. Compte tenu du fait qu'on est en mesure de le faire et compte tenu aussi des mesures que nous avons introduites, telle une allocation, par exemple, d'un montant de 270 000 $, justement pour leur permettre de présenter leurs produits sur les marchés américains et vendre davantage la tourbe qu'on produit au Québec, c'est un secteur qui devrait connaître une assez forte expansion au cours des quelques prochaines années, tout comme le granite, d'ailleurs.

Alors, il y a là un ensemble de mesures que nous avons présentées dans le projet de loi 77. Je vois que Mme la présidente est maintenant M. le président, ça me fait plaisir. En conséquence, je pense que ces modifications-là vont, comme je vous l'ai mentionné au début, permettre à l'industrie minière de maintenir, je pense, l'avantage compétitif qu'elle exerce actuellement sur les marches, assurer finalement des ajustements, des corrections qui vont permettre aussi à l'industrie de l'exploration d'être encore plus performante au cours des prochaines années. Ces modifications apportées à la Loi sur les mines vont grandement bénéficier à l'ensemble de l'industrie minière. Elles sont demandées par l'Association des prospecteurs du Québec, par l'Association des prospecteurs gaspésiens. Les consultations d'usage - M. le Président, vous connaissez mon habitude de toujours consulter le milieu avant de présenter un projet de loi à cette Assemblée - ont été, je pense, fort bien reçues. C'est suite à ces commentaires et aux échanges ces avec organismes-là que je propose donc, pour adoption, le projet de loi 77.

Le Vice-Président (m. bissonnet): merci, m. le ministre. je reconnais donc comme porte-parole du groupe parlementaire de l'opposition officielle, m. le député d'ungava.

M. Claveau: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député.

M. Christian Claveau

M. Claveau: Alors, il me fait plaisir de prendre quelques minutes pour passer, sommairement, quelques réflexions sur le projet de loi 77 et, en même temps, en profiter peut-être pour se refaire une idée du panorama général de l'industrie minière, dans la mesure où on n'a pas eu l'occasion de discuter, de façon très suivie, de la problématique minière au cours des dernières semaines. Pourtant, on aurait dû le faire parce que ce n'est pas le beau fixe dans l'industrie minière. On verra qu'il y a un certain nombre de problèmes qui mériteraient que l'on s'y attarde de façon beaucoup plus attentive de la part du gouvernement. Moi, je veux bien que l'on nous fasse des petits projets de loi de 27 articles pour régler un certain nombre de petits problèmes, mais il reste qu'il faudrait, à l'occasion, s'attaquer aux problèmes fondamentaux, aux problèmes qui sont la substance même de l'industrie et qui font en sorte que si on ne fait rien, si on laisse les choses aller comme elles vont actuellement, eh bien, avant longtemps, on n'aura même plus besoin de Loi sur les mines, au rythme où ça va. Il faudra probablement arriver avant longtemps, si le gouvernement n'y voit pas, avec une loi pour abroger carrément la Loi sur les mines. On va voir pourquoi. (4 h 50)

Alors, M. le Président, certes, il y a des éléments positifs dans le projet de loi 77, mais ce n'est pas là s'attaquer à l'essentiel. Si on veut que ces projets de loi soient applicables d'une façon ou d'une autre un jour et donnent vraiment l'effet qu'on peut attendre d'eux, eh bien, il va falloir regarder les problèmes d'une façon beaucoup plus attentive et essayer de

trouver des solutions aux vrais problèmes, M. le Président.

Je dois vous dire qu'au moment de regarder le projet de loi... D'abord, il faut quand même préciser, pour le bénéfice de tout le monde, que pour un projet de loi qui a été pensé depuis si longtemps, semble-t-il, qui a fait l'objet de consultations, nous dit le ministre, qui, comme il le disait tout à l'heure, est proche de son milieu, pour un projet de loi donc qui n'est pas une émanation spontanée, je suis toujours surpris qu'on n'ait pas réussi à le déposer en dedans des délais permis ou des délais prévus au règlement de l'Assemblée nationale.

Je ferais une remarque, M. le Président, que vous pourriez peut-être transmettre au ministre délégué aux Mines, à l'effet qu'il serait bon qu'il prenne l'habitude de faire comme ses collègues et de déposer ses projets de loi avant la date limite prévue à nos règlements, parce que c'est, chez lui, une habitude, M. le Président. Je dois avoir en mémoire au moins trois ou quatre projets de loi semblables qui arrivent rapidement sur la table à la dernière minute, laissant ainsi très peu de temps à l'Opposition pour les regarder, où on nous dit: Écoute, j'ai fait des consulations, il faut que ça passe absolument avant la fin de la session. Il nous faudrait des consentements. Est-ce que l'Opposition va être d'accord? Vous savez, c'est fondamental, ça fait partie de la dynamique. Tout le monde dans le milieu est d'accord. Donc, il faut trouver une solution pour donner des consentements pour le passer avant la fin de la session. On s'excuse d'être en retard, mais on ne pouvait pas faire autrement.

Allez donc, M. le Président, il y a des ministres ici qui préparent des projets de loi beaucoup plus importants. Je ne dis pas qu'ils écoutent le monde nécessairement, mais qui préparent des projets de loi beaucoup plus importants et qui arrivent à les préparer dans les délais prévus et qui nous déposent, avant les dates limites du 15 novembre ou du 15 mai, tous leurs projets de loi. Et il n'en n'ont pas juste un petit durant toute la session. Ils en ont quand même plusieurs à l'occasion. Certains ministres, pour le moins, en ont plusieurs. Et ils sont tous déposés à temps. Le ministre délégué aux Mines, lui, nous arrive régulièrement, presque à toutes les sessions, M. le Président, avec un petit projet de loi qui a fait l'objet d'une longue consultation, mais dont personne n'avait entendu parler avant, du moins du côté des parlementaires, et qui nous est présenté comme ça, à la sauvette, en dehors des délais normaux et avec le consentement de l'Opposition. Vous comprendrez, qu'étant donné notre intérêt, M. le Président, pour toute la question minière au Québec et l'intérêt que l'Opposition a toujours démontré pour l'industrie minière... D'ailleurs, il en a fait foi en mettant en place, entre autres, le programme des actions accréditives qui a eu les effets que l'on connaît et dont on reparlera tout à l'heure. Donc, connaissant cet intérêt, nous donnons nos consentements. Nous donnons nos consentements, mais il nous reste toujours quelques réserves derrière la tête, quelques soupçons que nous n'arrivons pas à liquider complètement. Nous avons toujours l'impression d'avoir affaire à quelque chose qui n'est pas clairement élucidé. Parce que ça arrive à la dernière minute. Ça arrive en dehors des délais prévus. Il y a des délais pour tout le monde et il faudrait peut-être que le ministre délégué aux Mines s'habitue lui aussi à entrer dans les délais comme l'ensemble de ses collègues réussissent à le faire d'une façon très régulière.

Donc, M. le Président, petit projet de 27 articles qui nous arrive en dehors des délais prévus et pour lequel on nous demande notre consentement. Moi, je veux bien. Connaissant quelque peu l'industrie minière, je comprends les problèmes qui sont vécus dans cette industrie et je suis tout attentif à quelque programme ou à quelque loi que ce soit qui puisse aider l'industrie minière et minérale en général. Mais, lorsque j'ai pris en main ce projet de loi, pour la première fois, en dehors des délais prévus, j'ai été comme surpris, étonné par l'ampleur des notes explicatives, quoi qu'on en dise, M. le Président, pour un projet de loi mineur, un projet de loi visant à faire des ajustements, à simplifier la dynamique administrative, comme le disait le ministre tout à l'heure, à rendre plus clairs un certain nombre de points, d'éléments dans l'application de la Loi sur les mines. J'ai trouvé que les notes explicatives étaient particulièrement longues et ardues à lire, il faut bien se le dire, ardues à lire.

J'ai presque envie de vous en faire la lecture intégrale, M. le Président, pour vous montrer jusqu'à quel point les notes explicatives ne sont claires que dans la mesure où on s'attarde à les éclaircir soi-même. Je vais vous en donner un exemple. "Ce projet de loi propose diverses modifications à la Loi sur les mines en vue notamment d'en faciliter l'application."

Et, voici: "Ainsi, ce projet de loi propose d'abord que l'on puisse appliquer à leur pleine valeur, et non plus à la moitié de celle-ci, certains travaux effectués au titre d'un claim et exigés par règlement. Il permet également que soient assouplies certaines normes réglementaires en ce qui a trait, entre autres, à certains droits ou redevances prévus par règlement et aux normes que doivent respecter les rapports relatifs à des travaux effectués sur un claim ainsi que les documents les accompagnant."

D'une clarté exceptionnelle! Tout est dans l'hypothèse. Certains droits, sur certains règlements, relatifs à certaines normes. Tout est dans le flou, tout est dans le vague. Écoutez bien le chef-d'oeuvre du chapitre suivant: "Au chapitre du bail d'exploitation de substances minérales de surface, le projet de loi permet au ministre de déterminer, a l'intérieur des limites

actuellement prévues, la superficie du terrain qui fera l'objet d'un bail exclusif ainsi que la durée d'un tel bail. Il soumet de plus à de nouvelles exigences la conclusion d'un bail exclusif et, lorsqu'il s'agit d'une exploitation de sable, de gravier ou d'argile commune, l'augmentation de la superficie du terrain visé par un tel bail. Enfin, il prévoit notamment que certaines obligations applicables à un titulaire de bail d'exploitation de substances minérales de surface s'appliqueront également à toute personne qui exploite ou extrait, à des fins commerciales, des substances minérales de surface."

Un autre chef-d'oeuvre de limpidité, M. le Président! Cela fait que, lorsque j'ai eu à prendre connaissance de ce projet de loi avec mes collègues, nous nous sommes dit que, quoi qu'en dise le ministre, bien qu'au départ il nous dise: Écoutez, il nous faut le consentement pour pouvoir discuter de cette loi-là qui, dans le fond ne change pas grand-chose - ce ne sont que des concordances. Ce n'est que de la simplication administrative - bien, à la lecture de cela, je me suis dit: Ça vaut la peine d'aller un peu plus loin et d'essayer de comprendre ce qu'il peut bien y avoir sous ce projet de loi. Je vous dis, M. le Président, j'aurais préféré avoir pas mal plus de temps pour le faire. J'aurais préféré que le ministre dépose son projet de loi dans les délais normaux pour nous permettre de pouvoir regarder d'une façon beaucoup plus attentive... Parce qu'on nous demande, M. le Président, de voter sur des amendements à la Loi sur les mines, loi qui n'est pas si vieille que ça; une loi qui, à bien des égards, n'a pas encore fait toutes ses preuves; une loi qui mériterait peut-être d'être observée sur un laps de temps un peu plus long avant d'en faire des modifications parce que, au moment de discuter la Loi sur les mines, il y a à peine deux ans, le ministre lui-même nous le disait, il y à peine deux ans, au moment, donc, de la discuter, le ministre nous disait avec ses fonctionnaires, avec tout son personnel politique, tous les gens qui étaient spécialisés dans le domaine et qui avaient travaillé sur cette loi-là, que, dans le fond, on avait réussi presque un chef-d'oeuvre dans le genre en faisant une loi qui, enfin, allait pouvoir gérer les mines.

M. Jolivet: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Une question de règlement, M. le député? (5 heures)

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Est-ce que vous pourriez examiner de visu s'il y a quorum? Sinon, appelez les députés.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vais vérifier le nombre. Qu'on appelle les députés s'il vous plaît! Qu'on appelle les députés!

Alors, M. le député, si vous voulez pour- suivre votre intervention.

M. Claveau: Alors, on a fait quorum!

Non, il est important, M. le Président, et j'en conviens avec mon collègue, d'avoir le quorum lorsqu'on discute de ces projets de loi, parce que, pour l'essentiel, il y a des députés qui vont se retrouver en commission parlementaire et qui auront à prendre des votes aussi en commission parlementaire. S'ils n'ont pas participé au débat en deuxième lecture, qui leur permet d'économiser un tant soit peu leur temps pour ne pas avoir à se payer, tout seuls dans leur bureau, tout le travail ardu de prendre connaissance d'un projet de loi aussi technique, mais, bien au contraire, de bénéficier de la discussion en Chambre pour se faire une idée globale, eh bien, à ce moment-là, il y a risque que nos collègues qui participeront à la discussion article par article du projet de loi en commission parlementaire ne puissent pas être mieux informés et, enfin, voter en leur âme et conscience sur les différents articles du projet de loi, sans avoir pour autant à se fier exclusivement sur la ligne de parti ou sur le point de vue de leurs collègues ministres.

À l'occasion - et on l'a vu dans d'autres projets de loi, d'ailleurs - je pense que plusieurs de nos collègues auraient avantage à s'informer plus à fond sur des projets de loi et, comme ça, éventuellement, eh bien, l'Opposition ne se serait pas trouvée toute seule, par exemple, à se battre avec tout le monde et contre le ministre et ses collègues dans la loi sur les heures d'affaires. De la même façon, l'Opposition ne se serait pas trouvée toute seule en cette Chambre à défendre les municipalités dans la question de la Loi sur la fiscalité municipale et scolaire. L'Opposition ne se serait peut-être pas retrouvée toute seule, dans cette Chambre, à prendre le parti des assurés de l'assurance automobile pour empêcher le ministre de mettre la main sur la caisse.

Alors, dans ce cas-là particulièrement, étant donné que c'est un projet de loi qui nous est arrivé en dehors des délais prévus, eh bien, je pense que l'ensemble de nos collègues auraient intérêt à être en cette Chambre, du moins pour assurer le quorum, et, après, à nous accompagner à l'étude article par article en commission parlementaire pour, de cette façon-là, pouvoir comprendre un peu aussi ce qui se passe dans l'industrie minière. Parce que ce n'est pas tout de voter sur des articles de loi. Il faut savoir à quoi ça s'applique, ces articles de loi, qui va en profiter, qui va en être pénalisé, ce que ça va donner à long terme. Est-ce qu'on a une vision de gestionnaire à long terme pour régler des problèmes de société ou si, tout simplement, on a une vision de gestionnaire à court terme qui vise à faire des petites modifications ici et là pour accommoder certains ou pour régler temporairement des problèmes régionaux, ou se préparer tout simplement pour la prochaine élection? Ça

peut arriver éventuellement qu'un gouvernement ait comme motivation de faire des projets de loi ou des amendements à certaines lois dans le but de préparer ses prochaines élections. Eh bien, là, il faut tirer ça au clair dans ce temps-là, et c'est le rôle du Parlement de tirer ça au clair, M. le Président, indépendamment des prétentions d'un ministre qui nous dit que, pour lui, tout est clair. Parce que, si tel n'était pas le cas, on n'aurait plus besoin de Parlement. Il faudrait se référer à des régimes comme ceux qu'on retrouve dans les républiques de bananes où le ministre décide et tout le monde se doit de suivre. Et, si on n'est pas content, eh bien, on sait ce qui nous arrive.

On n'a pas voulu ce genre de régime là, M. le Président. On a voulu un régime parlementaire. Notre société s'est donné un régime parlementaire qui fait en sorte qu'un ministre ne peut, à partir de ses propres émanations personnelles, de ses idées préconçues sur un problème, faire des lois qui ne sont pas amendables. Et on a voulu aussi que l'ensemble des parlementaires, de quelque formation politique que ce soit, qui se retrouvent en Chambre, ait l'opportunité de voter librement sur les différents projets de loi. D'où l'importance de participer aux travaux pour savoir sur quoi on vote, M. le Président; c'est la moindre des choses si on veut faire un travail sérieux en cette Chambre.

Je pense que les gens ne nous ont pas élus pour que l'on se fie d'une façon, je dirais, aveugle au point même presque de demander la traduction en braille de certains projets de loi, M. le Président, pour qu'on suive de façon aveugle, donc, une ligne de parti où une idée qu'un ministre amène est traduite en projet de loi, mais qui, peut-être, ne correspond pas au vrai problème du milieu. Et je crois que l'on en a un bel exemple dans la question de la loi sur les heures d'affaires, M. le Président, qui, de toute évidence, ne fait pas consensus.

Toujours est-il qu'avec le projet de loi que l'on a sous les yeux, dans à peine 27 articles, M. le Président, on s'attaque à un nombre quand même impressionnant de problèmes dans la Loi sur les mines. D'où ce que je disais tout à l'heure, avant que l'on demande le quorum: la nécessité de se pencher sérieusement sur le projet de loi et de prendre le temps de comprendre pourquoi on veut amender la Loi sur les mines dans autant de secteurs et d'une façon aussi succincte, aussi, je dirais, superficielle à bien des égards, sans retoucher fondamentalement la dynamique qui peut créer le problème auquel on veut s'attaquer. Du moins, c'est à partir de ce questionnement-là que j'ai regardé le projet de loi, et je me suis rendu compte - et vous avez dû tous vous en rendre compte d'ailleurs, vous, le premier, M. le Président - du nombre impressionnant d'aspects que le ministre nous a élaborés tout à l'heure, nous a défilés dans son discours de présentation. Il nous a parlé de la problématique du renouvellement des daims. Il nous a parlé de la problématique des travaux statutaires, dont les rapports doivent être faits avant le renouvellement du claim ou après le renouvellement du claim, ce qui change le pourcentage des travaux admissibles par rapport aux travaux réellement réalisés sur ces daims. Il nous a parlé de la problématique du tirage au sort. Il nous a dit qu'il voulait empêcher les regroupements d'individus. Il nous a dit qu'il voulait élargir aussi le tirage au sort à de nouvelles catégories d'activités dans le domaine. Il nous a parlé de la concordance des droits miniers. Il nous a parlé de baux de substances minérales de surface exclusifs, non exclusifs, de la façon dont on devait transférer ces baux-là à partir d'un territoire où on aurait un bail exclusif, par exemple, ou des baux non exclusifs appartenant à différents individus sur un "pit" de gravelle, comment on peut faire pour...

Je vois, M. le Président, que mes propos sont entendus et je souhaite qu'ils soient écoutés avec toute la pertinence que cela demande, M. le Président, ou qui est nécessaire pour la survie de l'industrie minière. Et je me dois de revenir là-dessus, parce que l'idée de faire une loi n'est pas de s'autosatisfaire entre nous, comme parlementaires, ce n'est pas de penser que l'on va régler les problèmes comme parlementaires, mais bel et bien de s'assurer que les orientations que l'on prenne, M. le Président, règlent les vrais problèmes de la société.

Je regarde, par exemple, le ministre délégué aux Forêts qui nous accompagne et qui est sûrement très attentif à la discussion, parce que lui-même a vécu un certain nombre de problèmes semblables dans l'application de sa Loi sur les forêts. Et, de toute évidence, il y a encore des trous à combler, il y a encore des problèmes qui ne sont pas réglés et on attend toujours de savoir comment il va s'y prendre pour, enfin, s'affirmer politiquement, pour assurer la survie, par exemple, des scieries indépendantes, pour assurer que les copeaux de ces scieries-là puissent être écoulés sur les marchés. Et, d'ailleurs, son collègue, le ministre délégué aux Mines, devrait applaudir à mes propos, dans la mesure où, dans son propre comté, il a des problèmes avec des scieries...

Des voix: Bravo! Bravo!

M. Claveau: ...dans la mesure où, dans son propre comté, M. le Président, il a des problèmes avec des scieries indépendantes ou des scieries qui ont été incorporées à des entreprises, mais dont on n'a pas réussi à définir vraiment le rôle et qui, aujourd'hui, ont de la difficulté, entre autres, à écouler leurs copeaux sur le marché. C'est un problème. (5 h 10)

Alors, dans ce sens-là, vous voyez, M. le Président, l'importance de faire des lois en

fonction des problèmes du milieu et non pas en fonction de s'autosatisfaire comme parlementaires ou en fonction de ne travailler que pour une minorité de la société ou une minorité d'intervenants qui défendent des intérêts bien particuliers et, souvent, aux dépens de la grande majorité, comme a pu le voir, par exemple, et comme on l'a démontré sans l'ombre d'un doute dans la question de la loi sur les heures d'affaires.

Donc, pour le bénéfice de tout le monde, pour le bénéfice de tous les parlementaires surtout qui auront à voter sur ce projet de loi et qui, probablement, au moment où on se parle, n'en cernent pas toute la complexité parce que ça fait beaucoup de points à aborder, ça fait beaucoup de problèmes que l'on veut régler à travers 27 articles qui, au départ, semblent anodins, M. le Président...

Mme Juneau: M. le Président, je m'excuse. Je ne voudrais pas être désagréable. Mon collègue est en train de faire un bon discours...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Attendez que je vous reconnaisse, Mme la députée. Vous avez une question de règlement, Mme la députée.

Mme Juneau: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, Mme la députée de Johnson, sur une question de règlement.

Mme Juneau: Je considère qu'on n'a pas quorum, M. le Président. Il faudrait demander...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vais vérifier, madame, s'il y a quorum ou non.

Effectivement, qu'on appelle les députés.

S'il vous plaît! Nous avons quorum. M. le député, je vous écoute.

M. Claveau: Oui, M. le Président. Au moment...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! MM. les députés, je vous demande l'ordre. Je reconnais maintenant M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Donc, M. le Président, pour bien comprendre toute la problématique, je pense que l'on se doit, en terminant, de prendre quelques minutes pour regarder la situation minière en général au Québec, se faire un minimum d'idées du problème que vivent les gens qui travaillent dans l'industrie minière, et, après, on sera en mesure de voir s'il y a concordance entre les amendements que l'on a actuellement à la Loi sur les mines ou l'importance, par exemple, que l'on veut mettre à la gestion des "pits* de gravelle ou des minéraux de surface par rapport à la dynamique globale et à la problématique réelle que vit l'industrie minière actuellement et dont on a très peu parlé en cette Chambre, je dirais malheureusement, au cours des derniers mois.

D'abord, si vous me le permettez, je n'en ferai pas le dépôt à l'exemple d'un ministre qui, ce matin, s'est permis de déposer une partie des documents qui sont déjà très publics, mais je vais le lire. Il y a quelques données qui sont essentielles et que nous nous devons d'avoir en tête au moment où on parle de quelque chose d'aussi important que l'industrie minérale au Québec. Ce sont des données aussi qui sont vraiment liées à la dynamique décisionnelle d'un gouvernement.

D'abord, l'emploi, M. le Président. On parle beaucoup d'emploi dans ce gouvernement. Un de nos collègues de l'aile ministérielle, en commission parlementaire sur les heures d'affaires, nous disait: Nous avons une vision d'affaires, de gens d'affaires, nous regardons les choses comme des gens d'affaires. C'est ce que nous disait un collègue de l'aile ministérielle, et, à juste titre, je crois, il devait avoir une préoccupation quant à cette saine gestion, comme il la voyait à travers une lunette de gens d'affaires qui veulent articuler l'activité sociale en territoire québécois.

Eh bien, M. le Président, à travers une lunette semblable, un gouvernement ne peut se permettre de laisser se détériorer la situation de l'emploi. C'est presque incroyable qu'un gouvernement laisse se détériorer la situation de l'emploi. Eh bien, M. le Président, regardons où nous en sommes dans le domaine minier. Ça vaut la peine de se le dire. Et je me réfère en cela à un texte qui nous a été déposé par le ministère de l'Énergie et des Ressources au moment de l'étude des crédits, le cahier explicatif des crédits 1990-1991. Ça, ça n'a pas été fait par un recherchiste du Parti québécois, n'ayez crainte. Ça relève du cahier des crédits déposé par le ministère de l'Énergie et des Ressources, cahier explicatif pour les crédits 1990-1991. qu'est-ce que l'on dit en page m-4? on dit: "l'emploi dans l'industrie - on est dans le secteur mines, là, vous comprendrez - était évalué à 21 233 personnes-années, incluant la première transformation des métaux, sauf l'aluminium, en égard à 22 146 en 1988, soit un repli de 4 %." on a perdu, en 1989, selon les chiffres mêmes du ministère, 4 % des emplois dans l'industrie minière, dans l'industrie minérale en général, incluant la première transformation des métaux et, là, on exclut l'aluminium. on sait que, dans le domaine de l'aluminium, avec les nouvelles techniques d'hydrolyse, bien, encore là, l'emploi diminue terriblement rapidement, ce qui est dramatique, d'ailleurs, pour des régions comme le saguenay-lac-saint-jean.

Alors, 4 % de moins d'emplois. Ça, ça représente, à toutes fins pratiques, 1000 emplois de moins. Juste dans le secteur minier, on a

perdu 1000 emplois, m. le président. pourquoi on a perdu tant d'emplois que ça? bien, dans le deuxième paragraphe plus bas, on nous explique sommairement pourquoi on a perdu tant d'emplois dans l'industrie minière au cours de 1989. on les a perdus, m. le président, et je cite au texte: "l'industrie minérale continue donc à jouer un rôle économique considérable en région, même si près du tiers des emplois ont disparu depuis 1980." c'est-à-dire que, depuis 1980, on a perdu près du tiers des emplois dans l'industrie minière, dont 4 % juste en 1989. je continue: "les investissements sont demeurés vigoureux dans ce secteur économique - vigoureux, il faut bien comprendre comment - malgré la réduction des abris fiscaux et le bas prix de l'or de janvier 1988 à septembre 1989. toutefois, les dépenses d'exploration ont connu une diminution importante de -42 % dans l'exploration minière en 1989, partiellement compensée par le résultat des activités antérieures qui a amené une certaine croissance des dépenses de mise en valeur, soit une augmentation de 10 %."

Une chance que des projets de mise en valeur ont pu être réalisables à partir de l'exploration qui a été faite antérieurement, depuis le début des années quatre-vingt, avec le programme d'exploration minière dit programme des actions accréditives; sinon, il n'y aurait pas eu de mise en valeur dans l'exploration minière ou il y en aurait eu si peu que, finalement, il n'eût pas valu la peine de les comptabiliser. On le dit bien: "partiellement compensée par le résultat des activités antérieures - dans l'exploration, sous-entendu - qui a amené une certaine croissance des dépenses de mise en valeur."

On dit qu'en 1989 seulement il y a eu une diminution de 42 % dans l'exploration minière. C'est peut-être ce à quoi on devrait s'attaquer en priorité au lieu d'essayer de modifier la façon d'obtenir un bail d'exclusivité, par exemple, sur un "pit" de gravelle ou un "pit" de sable. On en reparlera, on aura l'occasion d'en rediscuter, de cette problématique parce que vous savez très bien qu'un bail d'exclusivité sur un "pit" de gravelle, ça peut modifier passablement de choses dans le comportement, entre autres, des contrac-teurs qui vont avoir les contrats de route. Pour ceux qui ne le sauraient pas, un "pit" de gravelle, c'est à peu près essentiel pour construire des routes. On m'a dit que c'était un banc, pardon. Je vais parler de bancs de gravier...

Des voix: Ah!

M. Claveau: ...mais chez nous on appelle encore ça des "pits" de gravelle. Quand le contracteur se promène ou quand le camionneur se promène pour savoir où aller faire charger son camion, il cherche le "pit" de gravelle, en autant qu'il ait du travail, c'est bien évident.

On se demande s'ils ne sont pas tous venus chercher de la gravelle à Québec parce qu'ils n'en trouvaient nulle part ailleurs. C'est peut-être pour ça qu'ils sont tous ici en ville à attendre. C'est peut-être aussi la modification à la Loi sur les mines qu'ils attendaient pour retourner chez eux, pour avoir de la gravelle à transporter. On ne le sait pas, mais j'en doute. Les problèmes sont plus fondamentaux que ça, semble-t-il, et ils sont plus fondamentaux. (5 h 20)

M. le Président, on ne s'est jamais moqués des artisans, bien au contraire, et si on me permet une parenthèse pour en discuter, ça me fera plaisir. Je suis tout à fait disposé à ouvrir une parenthèse pour finir la journée à parier du domaine des artisans, si vous voulez. Ça va me faire plaisir.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Berthier, sur une question de règlement.

M. Houde: Oui. J'aimerais, avec votre permission, rappeler à la pertinence le député d'Ungava.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je rappelle au député d'Ungava que nous en sommes au projet de loi 77, Loi modifiant la Loi sur les mines et la Loi concernant les droits sur les mines. Compte tenu de la largesse dans l'adoption du principe, je vous cède la parole sur le projet de loi 77.

M. Claveau: M. le Président, de toute évidence, si on veut se mettre à parler de la mine des artisans, on risque d'en discuter longtemps parce que le ministre ne semble pas être prêt à la relever.

M. le Président, on m'a accusé de me moquer des artisans. Eh bien, moi, je voudrais bien savoir qui se moque des artisans, qui fait en sorte que les artisans en sont à leur troisième semaine, parqués devant le parlement. On s'en reparlera.

Je reviens donc...

Des voix:...

M. Claveau: II a l'air d'y avoir plein de gérants d'estrade en cette Chambre. Est-ce qu'on pourrait faire la lumière sur qui est le véritable capitaine de l'équipe?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, c'est moi. Vous avez la parole, M. le député. Je vous rappelle qu'il reste a votre temps de parole 28 minutes.

Des voix: Ah! Parfait!

M. Claveau: On va peut-être avoir le temps d'aborder le...

Des voix:...

M. Claveau: M. le Président!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Claveau: Bon!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Je demanderais de la collaboration. Je comprends qu'il est 5 h 20 du matin, mais le député a le droit de s'exprimer ici, et vous avez le devoir de l'écouter. Sur l'article 32, M. le député.

M. Claveau: On nous met le bâillon en commission parlementaire, M. le Président. J'espère que, pour le moins...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!

M. Claveau: ...on va respecter notre droit de parole en Chambre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, si vous voulez poursuivre...

M. Claveau: si on ne peut pas s'exprimer... après avoir été bloqués en commission parlementaire, si on n'a plus le droit de parler en chambre non plus...

M. Lefebvre: Question de règlement, M. le Président.

M. Claveau: ...il va nous rester la rue, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député!

M. Lefebvre: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: En effet, le député d'Ungava a le droit de s'exprimer, d'autant plus, et pour le bénéfice de tous les parlementaires je tiens à le souligner, que, depuis quelques heures, le député d'Ungava fête son 38e anniversaire de naissance.

Des voix: Ah! Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Alors, sur ces voeux de bon anniversaire, M. le député, nous vous écoutons religieusement pour la fin de votre allocution.

M. Claveau: On essaie de me distraire, M. le Président, mais ça ne prendra pas. Ha, ha, ha! Des voix: Ha, ha, ha!

M. Claveau: Nous devons travailler très sérieusement sur les problèmes de la société.

Donc, on parlait très brièvement de la question de la gestion des bancs de gravier. En tout cas, on aura sûrement l'occasion d'en rediscuter. D'ailleurs, mon collègue de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, qui connaît bien les problèmes de la gestion des bancs de gravier, va sûrement l'aborder tout à l'heure parce que, vous savez, ce n'est pas indépendant de tout le reste. Le gravier, on en a besoin pour certaines activités, et ces activités-là, généralement, sont l'objet de contrats qui sont donnés en soumissions. Lorsque l'on a un contrat de route, lorsque l'on a un contrat de pont, lorsque l'on a un contrat pour construire un édifice quel qu'il soit, eh bien, il est important d'avoir du gravier et du sable disponibles. À bien des égards, finalement, les enjeux liés à la réalisation d'un contrat se jouent autour d'un banc de gravier ou d'une sablière. Lorsque l'on met en place des mécaniques qui vont faire en sorte de permettre, à partir d'une négociation avec ceux qui ont des baux non exclusifs, d'aller vers l'exclusivité dans l'utilisation des bancs de gravier, moi, ça me préoccupe. Parce que, vous savez, M. le Président, lorsque l'on a un bail exclusif sur un banc de gravier, on peut l'utiliser, à toutes fins pratiques, comme on veut. Et si on l'utilise comme on veut, eh bien, on n'est pas loin de créer des obligations supplémentaires à tout contracteur qui ne détiendrait pas un tel bail et qui voudrait avoir un contrat de route dans la même région ou qui voudrait avoir un contrat de pont ou un contrat pour un édifice scolaire, un hôpital, du remplissage de terrain. Ça fait partie de la dynamique. Moi, je me préoccupe quant à cette dynamique-là, à l'effet que l'on tende ou que l'on semble tendre.... On est en droit de se poser des questions puisque le projet de loi nous a été amené en dehors des délais normaux et qu'on n'a pas eu le temps d'explorer toutes les pistes qui ont amené le ministre à écrire ces articles-là. Si on avait eu plus de temps, peut-être qu'on aurait moins de questions à poser. Mais comme on n'a pas eu beaucoup de temps, on est encore au stade du questionnement intensif.

Donc, ça nous préoccupe de voir ou de sentir que l'on veut aller vers une gestion des bancs de gravier, des minéraux de surface en général à travers des baux d'exclusivité. Mais, c'était une parenthèse, M. le Président. Je vais donc revenir à mon propos quant à la situation de l'industrie minière: main-d'oeuvre à la baisse, coupure dans l'exploration minière et des investissements dans l'exploitation qui sont, pour l'essentiel, liés à du travail d'exploration qui a été réalisé au moment où les actions accréditives

marchaient à plein, c'est-à-dire dans la lignée de ce qui avait été mis en place par un gouvernement du Parti québécois.

Question d'emplois, c'est très préoccupant. On voit des chiffres, O.K.? Ça ne coûte rien de regarder des chiffres, ça ne fait pas mal de regarder des chiffres. On ne voit pas la misère qu'il y a derrière les chiffres lorsque l'on dit: Ah bien, on a perdu 4 % des emplois en 1989 dans le domaine minier, à peine 1000 jobs de moins. Je regardais le ministre lui-même qui, en conférence de presse, le printemps dernier ou l'hiver dernier, nous disait, au moment de rendre publiques les statistiques pour 1989: Ce n'est quand même pas si mal, on a perdu à peine 4 % des emplois dans le domaine minier. Mais il y a de la misère, il y a des problèmes sociaux en dessous de ça. Je vais vous en donner un exemple, de là où on en est rendu dans l'exploitation minière. Ça vaut la peine que l'on s'y attarde. Si jamais les gens pensent que les choses vont bien, que les négociations, que les relations du travail sont au beau fixe, eh bien, je vais vous donner la preuve du contraire immédiatement en lisant ici, textuellement, une lettre qui a été adressée à tous les travailleurs de Westminer Canada Itée, Mines Chibougamau, en date du 15 juin 1990...

Une voix: Hein!

M. Claveau: Ça ne date pas de trois générations en arrière; on ne remonte pas aux calendes grecques; ça fait quatre jours. Le 15 juin 1990, donc, la direction, le vice-président aux opérations de Westminer Canada Itée envoyait la lettre qui suit à tous les travailleurs de Westminer Canada Itée, à Chibougamau...

Une voix: À Chibougamau.

M. Claveau: À Chibougamau, oui. "Dans le but d'informer ses employés, Westminer vous communique les renseignements suivants: À cause de la situation économique prévalant actuellement et pour les années à venir, la survie des Mines Chibougamau constitue l'enjeu de la présente négociation." Tiens, tiens, comme par hasard, on est en négociation de convention collective. "Des modifications majeures doivent être apportées aux habitudes de travail afin d'améliorer la productivité des opérations de façon substantielle. En l'absence de telles modifications, il sera impossible de justifier les nouveaux investissements requis pour la survie des opérations et tout développement futur." C'est bien dit, mais ça dit ce que ça veut dire: Vous négociez à rabais, tel qu'on l'exige, ou bien on n'investit plus rien et, à la limite, on ferme nos portes. Je vais reprendre la dernière phrase, écoutons-la bien, ce qu'elle veut dire; si ce n'est pas du chantage, on s'en reparlera. "En l'absence de telles modifications - on parle de modifications à la convention de travail - il sera impossible de justifier les nouveaux investissements requis pour la survie des opérations et tout développement futur." (5 h 30)

Ça commence bien la négociation d'un renouvellement de convention collective. C'est très intéressant pour des travailleurs. Il y en a au-delà de 300 qui sont impliqués là-dedans. Et je continue: "Les rumeurs voulant que Westminer souhaite remplacer tous ses employés par des contracteurs sont dénuées de tout fondement. Pour des fins d'efficacité et de diminution de risques financiers considérables, il est essentiel que la compagnie puisse faire appel à des contracteurs dans certaines circonstances, précisons-le. Par ailleurs, le travail de production minière continuera d'être exécuté exclusivement par nos propres employés." C'est la moindre des choses. "Cette orientation a clairement été expliquée au comité syndical de négociation. Les clauses majeures en litige sont l'utilisation de contracteurs, la répartition des places de travail et l'absentéisme. Ces clauses sont d'une importance capitale, si l'on veut parvenir à améliorer le rendement des opérations, et doivent être résolues de façon satisfaisante avant d'en arriver à la conclusion d'une entente." Les intentions de la compagnie sont toujours bien assez claires. On négocie ça ou bien il n'y aura pas d'entente.

Malheureusement, dans ce cas-là, M. le Président, le syndicat n'a pas de pouvoir pour fermer la compagnie. Le syndicat ne peut pas prendre le "bâillon" pour dire: Non, ce n'est pas comme ça que ça va marcher. Le gouvernement, lui, peut le faire. Les travailleurs syndiqués, eux autres, ne peuvent pas le faire. Et s'ils ne se plient pas, on ne sera plus capable de justifier les investissements, nous dit la compagnie. Et qui plus est, on ne négocie rien d'autre tant qu'on n'a pas réglé ces problèmes-là.

M. le Président, je continue donc la lecture de la lettre. "En présence du conciliateur du ministre du Travail - tiens, tiens - Westminer a participé à cinq rencontres, lesquelles ont progressé très lentement alors que très peu de négociation touchant les points litigieux majeurs a été faite. La dernière séance de conciliation a pris fin, alors que la partie syndicale signifiait qu'elle n'avait pas le mandat pour négocier les clauses majeures. Par conséquent, la balle est dans le camp du syndicat." C'est encore la faute du syndicat, de toute évidence. "Le manque de sincérité dans les discussions et la violence ne pourront résoudre ce conflit. Des changements seront essentiels si nous voulons progresser avec succès au cours des années quatre-vingt-dix." Imaginez-vous! "Des changements seront essentiels si nous voulons progresser avec succès au cours des années quatre-vingt-dix..." C'est signé: Tony Owens, vice-président aux opérations, Westminer Canada Itée.

C'est comme ça, M. le Président, que l'on

négocie dans l'industrie minière depuis quelque temps. Ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres. C'est ça, la libre négociation. C'est d'envoyer des lettres à tous les travailleurs en dehors des instances syndicales, des lettres qui sont accessibles à toute la population d'une région pour faire peur au monde et pour dire: C'est par là que vous allez passer ou bien on ferme nos portes. C'est comme ça que ça fonctionne, M. le Président. C'est comme ça qu'on négocie. Ce n'est, comme je le dis, qu'un exemple de la façon dont les compagnies minières négocient actuellement. Par chance, il y en a encore quelques-unes qui font mieux que ça.

M. le Président, ces travailleurs-là étaient heureux il y a quelques années à peine, quelques mois même, devrais-je dire, lorsqu'ils ont appris qu'une multinationale australienne spécialisée dans le domaine minier, Westminer, avait racheté les opérations d'une compagnie qui allait plutôt mal. Mais ce dont on se rend compte, c'est que c'est la méthode australienne. La façon de faire a changé. Les relations du travail ont changé. Et aujourd'hui on en est au point de parler de fermeture systématique si on n'accepte pas les conditions de la compagnie. Et ces conditions-là sont rendues publiques par le biais de communiqués et de lettres que la compagnie envoie à qui veut bien les avoir. Ah! c'est sûr, on les distribue aux travailleurs, mais en sachant très bien que tout le monde va les avoir lues dans le milieu, que ce soient les commerçants, les enseignants, les politiciens y compris. Et on les a.

C'est comme ça qu'on travaille dans le milieu des mines actuellement. C'est ça, la relation harmonieuse de l'industrie minière. C'est ça que l'on a développé comme caractéristique de l'industrie minière, la confrontation entre des intérêts étrangers qui opèrent sur notre territoire et les travailleurs québécois qui, eux, n'ont pas d'autre choix que de se plier à ces intérêts étrangers là. Et on va défendre les intérêts étrangers? Allez donc! Commençons donc par défendre les intérêts de nos propres travailleurs québécois avant de faire des lois qui ne vont faire en sorte que de faciliter les choses pour des investisseurs étrangers. Je veux bien en avoir des investisseurs étrangers sur le territoire québécois, je n'ai rien contre ça, mais que nos lois protègent les travailleurs québécois, d'abord et avant tout. À quoi bon investir, à quoi bon aller chercher des investisseurs à travers le monde, si ce n'est que pour rendre la situation encore plus difficile, plus misérable, pour nos propres travailleurs québécois? Est-ce que ça vaut la peine? Posons-nous sérieusement la question. C'est pourtant ce qui se passe dans le domaine des mines, M. le Président.

M. le Président, dans le seul secteur de Chibougamau-Chapais... C'est un secteur que je connais bien, j'ai eu à travailler dans ces mines-là aussi comme mineur. Je sais de quoi je parle quand je parle de cette région-là, M. le Président. Dans ce seul secteur, entre les chiffres que l'on retrouve dans le rapport annuel 1989 des géologues résidents et les chiffres d'hier, 18 juin 1990, c'est-à-dire entre le 31 décembre 1989, chiffres officiels, et les chiffres compilés par moi-même pas plus tard qu'hier, 18 juin 1990, nous avons un total de 199 emplois de moins dans le secteur de Chibougamau-Chapais; 199 emplois directs perdus en moins de six mois. Et là, on n'a pas parlé de ceux qui ont été perdus l'automne dernier. Et nous avons, M. le Président, depuis le 14 mai, 365 travailleurs de Westminer qui sont en lock-out de la compagnie, parce que ce n'est pas tout, cette date-là. Il faut bien comprendre que les gens de Westminer sont en lock-out depuis le 14 mai. Ils n'ont pas gagné un rond, ils n'ont pas gagné un sou noir depuis le 14 mai, parce que la compagnie a décrété un lock-out. 365 travailleurs sont en lock-out. Et vous pensez que la situation dans l'industrie minière est rose, M. le Président?

Juste un petit coup d'oeil sur l'exploration minière, à partir des données mêmes des géologues résidents. Pour le géologue de la région de Rouyn-Noranda, qu'est-ce qu'il dit dans l'exploration minière? Je lis un document officiel du ministère de l'Énergie et des Ressources, secteur mines: "Les perspectives demeurent particulièrement sombres pour les compagnies "juniors" qui ont éprouvé beaucoup de difficulté à effectuer leurs travaux d'exploration, voire même à survivre en 1989. L'année 1990 sera encore plus difficile pour celles qui n'ont pas de projets de mise en valeur suffisamment sérieux pour attirer les investisseurs ou qui n'ont pas de propriétés bien placées susceptibles d'intéresser les compagnies majeures. Ces dernières devraient poursuivre leur programme d'exploration au même rythme que celui des dernières années." On parle des majeures, des grosses compagnies, mais, dans les petites compagnies, ça va mal, ça va tout leur prendre pour ne pas crever dans l'année qui vient, pour celles qui n'ont pas encore crevé. que dit maintenant le géologue résident du secteur de val-d'or? écoutons-le pendant quelques secondes. "le volume des activités d'exploration a connu une baisse substantielle en 1989 comme cela avait été le cas en 1988." oh! ce n'était pas nouveau, ça existait même en 1988. 'toutefois, on signale deux découvertes significatives de métaux de base." et il dit plus loin: "le nombre de projets d'exploration recensés est passé de 263 à 181; en 1987, on en avait compté 387. en 1990, les projets avec des travaux de forage sont au nombre de 107, soit 59 % de ce qu'ils étaient l'année dernière. cette proportion était de 61 % l'année précédente. un peu plus de 60 projets disposaient d'un budget supérieur à 100 000 $ alors qu'une dizaine seulement ont dépassé le cap de 1 000 000 $. ce n'est pas beaucoup, 1 000 000 $, dans l'exploration minière.

Que dit maintenant le géologue résident d'une autre région minière du Québec? Allons voir, toujours dans le même rapport. On va le trouver, n'ayez crainte. Que dit le géologue résident du secteur de Chibougamau? Ça vaut la peine qu'on le lise: "La production minière de la région de Chibougamau-Chapais s'est établie à 1 594 076 tonnes comparativement à 1 831 211 tonnes en 1988, pour une baisse de 13 %. La production a diminué chez tous les producteurs, à l'exception de ressources du lac Meston et de la division Opémisca de Minova. La production d'or passe de 7045 kilogrammes en 1988 à 6636 kilogrammes en 1989, soit une diminution de 6 %. La production de cuivre baisse de 15 % entre 1988 et 1989 tandis que la production d'argent, elle, augmente de 7 %." C'est la seule production qui a augmenté, c'est de l'argent. Tout le reste a baissé partout. Et on trouve ça normal. On trouve que c'est correct. On trouve qu'il n'y a pas de problème là. (5 h 40)

Comment voulez-vous, M. le Président, que l'on prenne au sérieux un gouvernement qui, dans le fond, est en train de tout mettre en place pour minimiser l'industrie minière au Québec, sous prétexte de faire de grandes choses, sous prétexte de nous amener une nouvelle loi sur les mines, d'amender cette loi-là pour la rendre plus efficace? Il ne reste plus rien en dessous. Tout tombe, tout dégringole, tout se détériore continuellement et le ministre va nous dire, pour l'essentiel, qu'il n'a pas le contrôle sur le prix des métaux. Certes, il n'a peut-être pas le contrôle sur le prix des métaux, mais il a un minimum de contrôle sur la façon de faire, par exemple, dans notre industrie. Il a du contrôle sur des programmes pour inciter les gens à explorer, pour inciter les investisseurs à mettre de l'argent dans l'exploration minière. On sait très bien que dans l'exploration minière les gens n'y vont pas par réflexe spontané. Les risques sont énormes. Et si on veut amener de l'argent dans l'exploration, il faut mettre en place des programmes qui permettent un minimum de sécurité ou des compensations pour ceux qui veulent y investir. C'est clair, c'est facile à comprendre, ça. Le Parti québécois l'avait compris, M. le Président. Il avait mis en place le programme des actions accréditives. Or, certes, le ministre des Finances va nous dire: J'ai reconduit le programme pour une nouvelle année! Un an. J'ai reconduit le programme pour une nouvelle année. Je viens d'entendre un bourdonnement dans le fond de la salle, M. le Président. J'aimerais bien que la personne qui a bourdonné nous fasse part de ses explications pour savoir en quoi le programme a été amélioré.

M. le Président, le programme d'exploration minière mérite d'être révisé totalement, au complet, parce que ce n'est pas sur la base d'un an que des investisseurs vont aller mettre de l'argent dans de l'exploration minière et dans de nouveaux sites, quand on sait très bien que ça prend une dizaine d'années avant d'avoir les résultats. Comment voulez-vous, M. le Président? Vous-même, M. le Président, est-ce que vous iriez investir 500 000 $ dans un projet d'un an quand vous savez que vous n'en verrez pas les résultats avant 10 ans? Êtes-vous en train de me dire, M. le Président, que vous le feriez? Je suis certain que vous ne le feriez pas, pas plus d'ailleurs que les autres ne le font. C'est pour ça qu'actuellement, quoi qu'en dise le ministre qui dit: J'ai reconduit le programme pour un an, il n'en reste pas moins que les investisseurs n'y vont plus, dans ces programmes, parce qu'un an ça ne donne aucune garantie, parce qu'un an c'est presque comme dire: Je brûle mon argent l'année prochaine plutôt que de le brûler cette année, mais je vais le mettre de coté pendant un an puis, l'année prochaine, l'hiver prochain, j'allumerai mon foyer avec. On ne fait que reculer l'échéance d'un an. Mais tant qu'on n'aura pas de garanties à long terme, comme c'était le cas avant - alors qu'on savait que, sur plusieurs années, on allait profiter du programme; eh bien, à ce moment-là, ça valait la peine - tant qu'on ne reviendra pas à ça, on ne relancera pas l'industrie de l'exploration minière au Québec, M. le Président.

En terminant, peut-être une dernière citation, M. le Président, celle du géologue résident du secteur de Chibougamau quand il parle d'exploration minière. En page 91 du rapport annuel des géologues résidents, il dit: "Si la tendance des trois dernières années se poursuit, on devrait assister à une légère baisse du niveau de l'activité d'exploration dans la région." Ce n'est pas une hausse, là. On continue à baisser pour la troisième année consécutive. Ça va déjà mal, on l'a vu. Il n'y a rien qui marche. "Les sociétés concentreront leurs activités sur des projets déjà bien engagés. Les secteurs les plus actifs seront, encore une fois, les environs immédiats des mines de Chibougamau et de Cha-pais et, plus au sud, le segment de roches vertes entre les mines Shortt et Joe Mann." Mais ce qu'on nous dit essentiellement, c'est qu'on va continuer encore à diminuer dans les programmes d'exploration minière. C'est ça qu'on nous dit.

Et le ministre nous arrive avec une loi qui va régler des problèmes, j'en conviens. Oui, il y a des problèmes qui vont être réglés, mais, éventuellement, il y a d'autres problèmes qui vont être créés aussi par cette loi-là, dans d'autres secteurs, dans d'autres domaines, parce que la loi est beaucoup plus complexe qu'on semble le voir à première vue. Ce n'est pas parce qu'il y a peu d'articles dans une loi, M. le Président, que ça ne mérite pas qu'on s'y attarde très sérieusement pour en étudier tous les impacts.

Dans ce sens-là, M. le Président, je vous dirai brièvement, en terminant, puisqu'on me dit que mon temps est déjà terminé, c'est dommage,

que nous restons suspicieux quant aux véritables intentions du ministre derrière ce projet de loi, que nous avons toujours des doutes raisonnables quant aux aspects qui pourraient être dissimulés derrière l'application de certains articles de ce projet de loi, tout en étant, d'ailleurs, convaincus qu'en ce qui touche l'exploration minière, le projet de loi a toute la valeur que l'on doit lui reconnaître. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Nous poursuivons avec la prochaine intervention, M. le député de Rouyn-Noran-da-Témiscamingue. M. le député.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président. Il est tout à fait normal d'intervenir sur ce projet de loi portant le numéro 77, modifiant la Loi sur les mines et la Loi concernant les droits sur les mines, pour le député de Rouyn-Noranda-Témis-camingue qui est fort intéressé, évidemment, par cette question, étant donné la situation des collectivités de son comté qui, pour une bonne part, sont liées à l'industrie minière et également à certains autres aspects que l'on retrouve dans ce projet de loi. Peut-être que certains trouveront qu'il est tard ou qu'il est tôt pour discuter à fond de l'adoption du principe de la loi 77 proposée par le ministre délégué aux Mines, mais on saura bien que, du côté de l'Opposition, il n'est jamais trop tôt et il n'est jamais trop tard pour discuter à fond de chacun des projets de loi qui nous sont présentés.

Également, on ne se surprendra pas qu'on soit pris, ce matin, à 5 h 50, Mme la Présidente, à discuter d'un projet de loi qui, en apparence, est très technique, mais qui, encore une fois, je le répète et j'y reviendrai, comporte des modifications à la loi sur les mines et à la loi sur les droits miniers qui vont avoir des répercussions importantes. Peut-être qu'on pourrait parler aussi, à l'occasion de l'adoption du principe de cette loi, de ce qu'il n'y a pas dans la loi et qui nous amène à des interrogations très sérieuses. Mais ce n'est pas surprenant, Mme la Présidente, qu'on se retrouve donc, à 5 h 50, quand on pense comment ce gouvernement a décidé de mener sa législation à sa première année de deuxième mandat. (5 h 50)

Les collègues du côté de l'Opposition l'ont peut-être suffisamment expliqué. Du jamais vu, on n'a jamais observé, depuis un bon nombre d'années dans ce Parlement, un gouvernement imposer trois motions de bâillon pour clore des débats sur des lois extrêmement importantes sur le fardeau fiscal des Québécois et des Québécoises. Quand on veut piller la Régie de l'assurance automobile du Québec, quand on veut céder aux pressions des gros commerçants et des grandes chaînes de magasins sur la Loi sur les heures d'affaires et quand on veut absolument imposer un fardeau fiscal supplémentaire aux commissions scolaires avec le projet de loi 69, eh bien! ça nous amène à discuter tard ou tôt le matin du projet de loi qui est présenté ce matin par le ministre délégué aux Mines.

Bien sûr, le ministre nous a expliqué qu'il s'agit d'amendements à une excellente loi, dit-il, qui a été présentée, homologuée le 24 octobre 1988. Elle est tellement bonne que, deux ans plus tard, il faut l'amender, il faut l'ajuster. Deux ans et demi plus tard, il faut l'amender. On l'a répété souvent ici, ce gouvernement disait: Nous allons légiférer moins, nous allons légiférer mieux, et tout ce qu'on fait depuis le début, ou à peu près, de cette nouvelle session du nouveau Parlement, c'est la correction de projets de loi parce que les devoirs avaient été mal faits et c'est pour ça qu'il faut prendre le temps, qu'il faut prendre tout le temps à la disposition de la Chambre, tout le temps nécessaire en vertu de nos règlements, pour faire en sorte qu'on n'ait plus à revenir et qu'on puisse plutôt étudier des projets de loi sur le fond, sur des véritables questions de fond et non pas sur des questions techniques, sur des questions de corrections parce qu'on a mal fait les devoirs.

Et le ministre ajoutait dans sa présentation: La loi de 1988 était tellement bonne que beaucoup d'États, beaucoup d'autres provinces s'en inspirent maintenant pour légiférer, semble-t-il, à leur tour dans le domaine des droits miniers. Il terminait son exposé, cependant, en disant que la question de toute la partie qui concerne les droits miniers, ça, c'est plutôt inspiré de l'Ontario, du Nouveau-Brunswick et des autres provinces. Alors, là, il faudrait qu'il se décide, le ministre: ou c'est les autres provinces qui regardent sa loi qui est bonne, ou bien on est obligés de regarder ce qui se passe dans les autres provinces pour corriger ce qu'on a à corriger. Alors, il y a quelque chose qui ne fonctionne pas là-dedans.

Mais on va regarder ça d'un petit peu plus près, au niveau du principe, quelles sont les corrections qui sont proposées et qui font encore problème, que nous aurons l'occasion, bien sûr, de discuter en commission parlementaire. Mais, déjà, au niveau du principe, il faut regarder ce qui est en cause, ce qui nous est présenté. Tous ces amendements au niveau de la répartition ou de l'attribution des daims, des droits miniers, apportent un certain nombre de corrections, quand il y a plusieurs intervenants qui réclament souvent, très, très tôt après le début du jour ou très, très tôt, quelquefois, avant le début du jour, font en sorte que, maintenant, on irait par un appel au sort, par un tirage au sort ou, encore, dans le cas d'un bail relatif dans une autre catégorie, soit les baux relatifs au pétrole, au gaz naturel, à la saumure et aux réservoirs souterrains, par appel d'offres. C'est le ministre qui se garderait une marge discrétionnaire pour

établir ça par tirage au sort ou par appel d'offres.

Ce qui doit également nous inquiéter dans ce projet de loi au niveau de l'adoption du principe, c'est toute la partie qui concerne l'attribution des baux exclusifs ou non exclusifs sur les gravières. Le ministre apporte, je pense, d'ailleurs, un certain nombre de corrections à sa loi suite- à des problèmes que je lui avais moi-même soumis en regard de l'exploitation d'un certain nombre de bancs de gravier dans la région de Rouyn-Noranda-Témiscamingue et encore là, à l'application pratique de cette loi des mines qui avait été adoptée en 1988, on s'est bien rendu compte qu'il y avait des trous. Je pense qu'il y en a encore un bon nombre sous cet aspect et il peut apparaître, à première vue, que le sort de la nation n'est pas en jeu lorsqu'on discute de l'attribution de droits exclusifs ou non exclusifs d'exploitation d'une gravière, mais c'est de la responsabilité du législateur de prendre bien soin de légiférer autant pour la grande partie de la population que pour le moindre petit entrepreneur, le moindre petit exploitant, qui a établi qu'il va gagner sa vie, qu'il va développer, par exemple, la vie de sa famille à l'aide du transport, à l'aide des matériaux qu'il faut fournir pour construire édifices et routes pour le ministère des Transports, pour le gouvernement lui-même quelquefois. Et c'est pour ça qu'il faut être très précautionneux qu'il faut être très attentif, même à ces petits entrepreneurs, qui obéissent, bien sûr, aux grands principes de la loi comme n'importe lequel des grands entrepreneurs ou d'un gouvernement.

Ce n'est pas parce que l'on a des grandes discussions constitutionnelles derrière des portes closes pendant un bon nombre d'heures sur l'avenir de la nation qu'il ne faut pas, oui, se préoccuper des plus petits, des gagne-petit, des gens qui ont établi durement un commerce, qui ont établi durement une expertise au niveau de leur exploitation, et qui se voient remettre en question souvent ce type d'exploitation par le projet de loi qui nous est soumis ici. Je donnerai un exemple, M. le Président, de ce que ça peut vouloir dire. Le ministre a dit: Je vous présente un projet de loi qui vise à corriger certaines anomalies, certains problèmes techniques que j'ai vécus ou qui m'ont été présentés dans l'attribution de l'exploitation des substances minérales de surface. Mon collègue du comté d'Ungava en parlait il y a quelques secondes en disant: Oui, les sablières, communément appelées, c'a une très grande importance pour le réseau routier.

Mais c'a surtout une grande importance pour celui qui en a fait son gagne-pain, celui qui en a fait le moyen par lequel il gagne la vie de sa famille. Et on nous présente ici une modification en disant: Eh bien, dans la loi actuelle des mines, quiconque se décide un bon matin de développer une industrie qui a besoin pour s'approvisionner de substances minérales de surface peut présenter une demande au ministre délégué aux Mines pour obtenir, ce que l'on appelle dans le projet de loi et dans le langage courant de ces exploitants, un bail exclusif d'exploitation à condition que ce soit pour maintenir une installation industrielle permanente. Enfin, permanente pour la période pour laquelle le projet de loi autorise le bail exclusif. Or, il peut arriver, et c'est nommément mentionné au projet de loi, que, sur ledit terrain sur lequel on ferait une demande de bail d'exploitation de façon exclusive pour maintenir ou développer une activité industrielle, il y a déjà un exploitant qui est là depuis 5 ans, 10 ans, 20 ans, 25 ans - j'ai soumis des cas au ministre - 36 ans dans certains cas d'exploitants qui ont développé un commerce, qui ont développé une industrie à partir de tel site et qui sont reconnus dans le milieu.

La loi permet donc à quelqu'un de venir un bon matin et dire: Moi je réclame mes droits exclusifs sur ce terrain. Je réclame le droit d'exploiter les substances minérales de surface. Et au revoir. Zingo! Je pars avec le matériel et je peux quitter, vous devez quitter ce terrain, qui vous était accordé par permission, c'est vrai, par permission annuellement renouvelable, non pas pour maintenir une installation industrielle sur place, mais tout simplement pour faire le commerce, pour faire une exploitation de vente des matériaux de surface. (6 heures)

Le ministre dit: J'ajoute un article dans lequel, maintenant, il y aura compensation - soit! - pour le détenteur d'un bail non exclusif sur ce terrain et, au cas où on ne s'entendrait pas au niveau de la compensation, il y aura une décision par un arbitre, réclamée par l'une ou l'autre des parties, en vertu des dispositions du Code civil. Ce qui n'est pas précisé dans le projet de loi et qui devrait l'être, à notre avis, très sérieusement, très carrément, c'est que, comme l'a dit le ministre dans ses explications préliminaires sur l'adoption du principe de ce projet de loi, il ne s'agit pas de compenser uniquement pour les travaux qui ont été réalisés sur ledit terrain réclamé et attribué à une autre personne. Il faut que le ministre inscrive dans ce projet de loi, comme élément fondamental de compensation, tout l'élément que nous appellerions "achalandage". L'achalandage, c'est-à-dire qu'il s'est développé là une industrie, quelqu'un s'est fait reconnaître dans son milieu comme étant un commerçant, comme étant un exploitant d'une gravière et qu'à ce titre, par rapport au site sur lequel il opère et par rapport également à la façon dont il opère, quant aux matériaux qu'il produit, il a développé une expertise, une connaissance, une reconnaissance. Et ce faisant, tout ça a de la valeur. Il ne s'agit pas de compenser uniquement pour les travaux de déboisement, pour les travaux d'aménagement des routes...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: C'est très très évident, ils sont beaucoup trop pour nous écouter.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous voulez...

M. Chevrette: Quorum!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...que je vérifie le quorum, M. le leader? Je vais le vérifier. Qu'on appelle les députés!

Des voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député, pas de commentaires!

Bon! Si vous voulez poursuivre, M. le député...

M. Trudel: Merci, M. le Président. Parce que je répète que c'est important de vérifier le quorum pour qu'un minimum de députés puissent entendre que, oui, il y a des problèmes - je le répète - qui ne sont peut-être pas de la nature de tout l'avenir de la nation, mais qui sont importants aussi pour un certain nombre de personnes. Même si elles sont situées en régions périphériques, souvent, dans des milieux moins densément peuplés ou qu'elles vivent dans des petites collectivités, on doit - et de ce côté-ci, on le fait - s'en préoccuper au même titre que les grands projets de loi qui concernent plus spécifiquement les grands pans de la législation. Et il faut avoir le souci des gens ordinaires. Il faut avoir le souci des gens qui ont développé des petits commerces, qui ont développé à bout de bras de petites organisations commerciales qui peuvent être mises en danger parce qu'on gère ça comme si les normes administratives allaient être applicables de la même façon à travers tout le Québec, de Chibougamau jusqu'n Aylmer, dans la région de l'Outaouais, ou des Cantons de l'Est jusqu'à La Tuque.

C'est pourquoi il nous faut regarder, par exemple, l'article 151 qui, à notre avis, présente des difficultés certaines au niveau de son application et ne permettra pas de rendre justice à ces petits commerçants, à ces petits exploitants qui ont honnêtement développé ce type d'entreprises et qui risquent de se faire damer le pion parce que quelqu'un, un bon matin, a décidé qu'il allait s'emparer, en parfaite conformité avec la loi, de ces terrains. Et la juste compensation pour les éléments pour lesquels on devrait prendre en considération la compensation à être donnée à cet entrepreneur, ce n'est absolument pas prévu au projet de loi.

Il y a aussi, dans ce projet de loi, un certain nombre de pouvoirs que se donne le ministre au niveau du règlement d'un certain nombre de différends ou d'attribution à l'un ou à l'autre, soit de permis, soit de baux exclusifs ou non exclusifs sans qu'il y ait de mécanisme d'appel. Les gens peuvent avoir d'excellents motifs de nous présenter un appel sur une décision du ministre qui, ayant bien fait avec la littérature, avec les documents qu'il possède, a pu tenter de rendre la meilleure décision possible, mais n'a pu le faire parce qu'il lui manquait peut-être des informations.

Alors, dans ce sens-là, au nom de l'équité, au nom d'un certain nombre de choses qui nous semblent absentes dans ce projet de loi, au nom d'une plus grande justice distributive pour nos petits entrepreneurs, pour l'État aussi qui fait affaire souvent avec ces entrepreneurs et pour que personne ne soit lésé, je pense qu'il faudrait réfléchir encore un moment sur le principe de ce projet de loi, et que, si ça nous est arrivé bien tard, nous pensons qu'il faille le regarder avec précaution, avec minutie.

Motion de report

C'est pourquoi, M. le Président, en vertu de l'article 240 de notre règlement, je proposerai la motion suivante: Que la motion en discussion soit modifiée en retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant, à la fin, les mots "dans six mois", en vertu de l'article 240 de notre règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Votre motion est recevable. Compte tenu de cette motion, en vertu de l'article 210, je vais faire une réunion avec les leaders et je suspends les travaux de cette Assemblée pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 6 h 8)

(Reprise à 6 h 23)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, si vous voulez prendre place. Alors, suite à la rencontre avec les leaders des deux formations politiques, la répartition du temps, selon l'entente conclue, est comme ceci: il n'y a pas de droit de réplique, évidemment, sur une motion de report; cinq minutes pour les députés indépendants, le reste du temps étant réparti moitié-moitié entre les deux formations politiques. Le temps non utilisé par une formation politique accroît à l'autre formation politique, et il n'y a pas de limite dans les interventions. Et sur ce, je reconnais M. le député d'Ungava.

M. Christian Claveau

M. Claveau: Merci, M. le Président. Je pense qu'il est important de préciser des choses

quant à la portée de cette motion de report, parce que je vois déjà le moment où on va essayer de nous taxer de formation politique qui veut faire reculer les choses et empêcher le gouvernement de passer une loi qui pourrait être bien vue par certains intervenants dans l'industrie minière québécoise.

Si vous le permettez, M. le Président, juste un aparté, en commençant cette intervention, pour saluer les gens qui se joignent à nous à partir de leur résidence, et qui se demandent s'ils sont toujours en direct à l'Assemblée nationale du Québec. Eh oui, on est toujours en direct à la télévision. Alors, pour ceux qui nous ont laissés hier soir, au moment des nouvelles, on était en train de voter sur le bâillon sur la loi 50, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'assurance automobile du Québec. On se souviendra, à ce moment-là, que l'on a parlé, durant la veillée, du ministre des Transports qui voulait accaparer manu militari la caisse de la Régie de l'assurance automobile du Québec, et qui, de cette façon-là, enfin, pour justifier son acte, sans que ça aie l'air trop d'un "hold-up", s'est fait voter une loi sur laquelle il nous a imposé un bâillon, pour ne pas nous laisser le temps d'en discuter à sa juste valeur, à sa pleine mesure. Alors, nous étions là-dessus, à 22 heures, hier soir.

Après ça, on est revenus à la prise en considération d'un rapport sur un projet de loi, suite à un passage très rapide de la loi 69 en commission parlementaire. En effet, après à peine quelques heures, encore là, on s'est vu affligés d'un autre bâillon, nous empêchant de discuter à fond d'un autre projet de loi de grande importance qui modifie les relations entre le gouvernement et les municipalités en ce qui a trait au pacte sur la fiscalité municipale qui liait ces deux instances-là. Et on sait que par cette mesure, par la loi 69, le ministre de l'Éducation s'apprête à aller ponctionner quelque 320 000 000 $ dans le champ foncier de taxation qui était réservé aux municipalités.

M. Lefebvre: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Une question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Je veux juste rappeler, avec toute la délicatesse voulue, qu'on est à traiter d'une motion de report relativement au projet de loi 77, Loi modifiant la Loi sur les mines et la Loi concernant les droits sur les mines. Jusqu'à maintenant, le député d'Ungava, n'a pas dit un traître mot de la loi 77.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le député d'Ungava, je vous rappelle que nous sommes sur la motion de report, pour reporter dans six mois l'adoption du principe de la loi 77 sur les mines et je vous demanderais de vous en tenir au sujet, si c'est possible.

M. Claveau: Oui, j'y arrivais, M. le Président. J'y étais juste. On était rendus à 4 heures du matin, après avoir parlé de la loi 69. Alors j'y arrivais, et je vois que l'empressement du leader adjoint du gouvernement n'a d'égal que celui de ses collègues ministres pour nous bâillonner en commission parlementaire. Alors, voici donc que nous arrivons au projet de loi 77 sur les mines, projet de loi dont nous discutons, M. le Président, depuis 4 heures ce matin et qui, à la suite d'un certain nombre de considérations, eh bien, fait l'objet d'une motion de report. Donc nous en sommes là pour ceux qui ont eu la chance de bénéficier dans leur foyer de quelques heures de repos entre 22 heures hier soir et 6 h 30 ce matin. Mais pour le reste, soyez convaincus que nous sommes toujours en direct et que nous avons passé la nuit à essayer d'amener le gouvernement à comprendre le bon sens, d'amener le gouvernement à réfléchir plus à fond avant de prendre des décisions par le biais de lois qui vont modifier substantiellement le comportement d'une importante partie de la population québécoise et qui risquent d'avoir des impacts importants sur le plan fiscal puisqu'on parle, entre autres, de la Régie de l'assurance automobile du Québec et du pacte avec les municipalités sur le champ d'imposition foncier.

Donc, nous en sommes arrivés à la conclusion, étant donné le très peu de délai qui nous a été alloué à nous, de l'Opposition, pour regarder le projet de loi 77... Comme j'ai eu l'occasion de le dire et je vais le répéter, parce qu'il est fort probable que quelques-uns de ceux qui nous écoutent actuellement ne nous écoutaient pas lorsque j'en ai parlé à 4 h 30, ce matin, le projet de loi 77 nous a été déposé en dehors du temps normal prévu aux règlements pour le faire-Une voix: Ce n'est pas vrai.

M. Claveau: ...parce qu'on nous est arrivé avec une demande de consentement après la date limite. Le projet de loi 77, bien qu'il ne compte que quelques articles, 27 en tout, bien qu'il ne compte que 27 articles, n'en demeure pas moins un projet de loi qui modifie passablement d'aspects dans la Loi sur les mines, une loi qui est toute neuve, M. le Président, une loi qui n'a pas encore deux ans, une loi qui avait été faite, semble-t-il, avec des garanties mur à mur dont on a discuté en commission parlementaire, qui avait fait l'objet d'une consultation publique et qui devait, normalement, assurer d'intégrer à long terme les différents aspects de l'industrie minière et faire en sorte d'avoir protégé les arrières partout, nous disait-on. Et lorsque l'Opposition, à ce moment-là, arrivait avec des

arguments et disait: M. le ministre, vous auriez peut-être avantage à regarder ça d'un autre angle. M. le ministre, peut-être que ce que vous avancez là mériterait plus de réflexion, on nous répondait à peu près toujours la même chose: On a pensé à tout ça. Nos experts se sont penchés sur le dossier. La solution que nous apportons est la meilleure; tout le monde est d'accord dans l'industrie; ça fait consensus, etc., etc., etc.

Alors, M. le Président, moins de deux ans après la mise en application de cette loi-là, on n'en est pas à la première modification. D'ailleurs, on nous arrive, en toute fin de session, en dehors des délais normaux, avec un projet de loi qui vient modifier des dispositions diverses. On ne s'attaque pas à un seul petit problème dans le projet de loi, non, on s'attaque à un certain nombre de dispositions. On parle de droits ou de baux d'exclusivité sur les dépôts, les bancs de gravier, les sablières contre des baux non exclusifs. On est en train d'introduire des mesures pour faire en sorte de faciliter la négociation entre ceux qui veulent des baux exclusifs et ceux qui détiennent, au moment où on se parle, des baux non exclusifs sur des dépôts de gravier et de sable.

Pourquoi? Qu'est-ce qu'il y a derrière tout ça? Nous voulons, en tant que parlementaires, avoir la chance, le temps, comme on a le droit de l'exiger, de faire notre propre petite enquête sur le terrain, d'aller voir pourquoi le ministre se - sent si pressé d'amener une clause semblable dans un projet de loi, en toute dernière minute, en fin de session, sans nous laisser le temps d'aller voir ce qu'il y a en dessous.

M. le Président, je pense qu'étant donné l'importance de ce projet de loi, nous aurions avantage à avoir quorum en cette Chambre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous demandez à la présidence de vérifier s'il y a quorum, si je comprends bien?

Mme Marois: Oui.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, après vérification rapide, qu'on appelle les députés.

Alors, si vous voulez poursuivre, M. le député.

M. Claveau: Oui, M. le Président. N'ayez crainte, on n'a pas à se faire enregistrer nos discours avant d'intervenir en cette Chambre. Il n'y a personne qui écrit nos discours à notre place et on parle en pleine liberté, en vertu des principes que nous croyons défendre. Lorsque j'entends, M. le Président, certaines réflexions un peu douteuses quant à nos intentions, vous me permettez de douter moi-même de la pertinence de la présence de certains députés à cette Assemblée nationale.

Il y a une chose...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Excusez-moi, M. le député. Il y a un député qui siffle, là. S'il vous plaît, c'est plutôt une place pour parler ici et non pour siffler. M. le député.

M. Claveau: Avant longtemps, M. le Président, il ne lui restera que cela à faire, siffler!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Claveau: M. le Président, moi, personnellement, comme parlementaire, ayant été élu démocratiquement en cette Chambre pour représenter des intérêts et ayant à voter sur des projets de loi en fonction de ce que je crois être le meilleur pour l'intérêt public en général, je comprends que cela puisse développer certaines hilarités chez nos amis d'en face qui n'ont pas l'habitude d'intervenir en cette Chambre en fonction de leurs convictions, mais bien plus en vertu de lignes politiques prédéterminées. Mais en ce qui me concerne, M. le Président, lorsque je parle sur quelque chose, que je prends position, c'est parce que j'y crois. C'est en fonction de l'importance que je donne au dossier, au problème et aussi en m'assurant que c'est là l'intérêt de la majorité. Je n'ai pas dit des plus riches. Je n'ai pas dit des plus puissants. Je n'ai pas dit de ceux qui sont le plus en mesure de s'imposer. Je n'ai pas dit de ceux qui essaient, par des tractations de toutes sortes, de trouver des moyens pour faire que les lois ressemblent à leurs intérêts personnels. Non. J'ai parié de l'intérêt de la majorité. Celle que l'on appelle souvent la majorité silencieuse, mais qui n'en demeure pas moins avec des droits et qui doit être respectée même si elle n'a pas l'argent pour se payer des avocats, même si elle n'a pas la possibilité de se faire faire des lois à son avantage. C'est pour ces gens-là, M. le Président, que nous dirigeons, pour ces gens-là que les gouvernements sont élus. Un gouvernement est élu pour l'ensemble de la population et non pas pour quelques minorités. Un gouvernement doit voir à l'intérêt général d'un peuple et non pas à l'intérêt particulier de quelques individus qui, de toute façon, dans quelque société que ce soit, essaieront toujours d'amener le pouvoir à l'image de leurs intérêts.

M. le Président, dans ce sens-là, je ne peux que me questionner quant aux intérêts qu'il y a derrière certains articles. Je n'ai pas dit tous les articles du projet de loi 77, mais derrière certains articles. Et je pense, M. le Président, qu'il est tout à fait nécessaire de se donner un peu le temps de penser, de se donner le temps de bien faire les choses, de se donner le temps de modifier pour le mieux la Loi sur les mines qui est encore toute jeune, la nouvelle Loi sur les mines. Non pas modifier parce que, éventuellement, il y a quelqu'un qui veut avoir un contrat pour faire un bout de chemin quelque part en Abitibi et qui a besoin de l'exclusivité

sur un banc de gravier. Ce n'est pas ça, là, ce n'est pas pour ça qu'on fait des lois.

Je ne dis pas, M. le Président, que c'est la situation, mais je dis que je suis tout à fait en droit de me poser la question au cas où cela serait la situation, au cas où c'est à partir d'intérêts semblables que le ministre nous amène les modifications dans son projet de loi. Il se peut que ce soient de simples spéculations. Et je le souhaite. Je souhaite qu'il en soit ainsi. Mais je tiens à avoir le temps de pouvoir le vérifier pour savoir ce sur quoi je vais voter comme ce sur quoi tous mes collègues vont voter en cette Chambre. On ne peut pas se moquer continuellement de l'Assemblée et de ses règlements. On ne peut pas empêcher l'Opposition de faire son travail en commission parlementaire sans, un jour ou l'autre, en payer la note. On ne peut pas, M. le Président, nous amener continuellement, à la dernière minute, demandant le consentement pour l'intérêt public, des projets de loi sans respecter ce qui est prévu au règlement. Et, dans ce sens-là, le ministre délégué aux Mines le savait très bien. Il avait une date limite pour déposer son projet de loi et s'il s'en était donné le moindrement la peine ou s'il n'avait pas de raison d'attendre à la toute dernière minute pour avoir notre consentement, eh bien, il aurait trouvé le moyen de déposer son projet de loi en dedans des limites prévues par le règlement. Non pas deux semaines plus tard. (6 h 40)

II a dit lui-même qu'il avait consulté, que tout le monde était d'accord, que l'Association des prospecteurs était tout à fait d'accord avec ce qu'il amenait et que les autres intervenants dans d'autres domaines étaient d'accord avec les propositions qui sont dans le projet de loi. Moi, je veux bien le croire, M. le Président, mais si tel est le cas, ça suppose, ça, que les revendications et toutes les démarches pour arriver à préparer ce projet de loi là ont commencé bien avant le 15 mai! Bien avant le 15 mai, je suppose, et je suis en droit de supposer, si je me fie aux propos du ministre. Eh bien, si c'est vrai qu'il n'y a pas de cachette, qu'il n'y a pas de problème, pourquoi le ministre n'a-t-il pas été capable de nous amener son projet de loi avant la date limite? Pourquoi le ministre ne nous a-t-il pas donné le temps à nous, de l'Opposition, de faire notre travail convenablement, d'aller voir les groupes, de les consulter?

J'en profite en même temps, si vous me le permettez, M. le Président, pour faire un petit message aux groupes qui négocient avec lé gouvernement sur des projets de loi et qui, sûrement, nous écoutent avec beaucoup d'intérêt à la télévision ce soir ou ce matin ou qui, sûrement, liront avec beaucoup d'intérêt nos interventions en Chambre et, probablement, cette intervention-là sur la loi 77, celle que je suis en train de faire actuellement. Eh bien, je leur dis, M. le Président, qu'un projet de loi, ça ne se négocie pas uniquement avec un ministre, aussi bien intentionné qu'il soit. Un projet de loi n'est pas le résultat d'une connivence entre un groupe en particulier et un ministre isolé du reste de son gouvernement et du reste des membres de l'Assemblée nationale. Un projet de loi, ça se négocie, ça se travaille dans une dynamique globale qui doit être respectueuse de nos institutions, respectueuse du rôle du Parlement, et un projet de loi, M. le Président, je tiens à le préciser encore, pour le bien, pour la bonne compréhension de tous ceux qui, dans le futur, auraient envie de se concocter de petits projets de loi bien à eux, avec des ministres en secret derrière des portes capitonnées, un projet de loi, ça doit passer devant l'Assemblée nationale, devant le vote de l'ensemble des parlementaires et ça doit être discuté à la lumière du jour avant d'être voté.

Si, M. le Président, quelqu'un avait quelque pan" l'idée, la prétention de vouloir nous accuser de retarder l'entrée en vigueur du projet de loi 77, nuisant ainsi, semble-t-il ou peut-être, à certains intérêts qui auraient pu en profiter immédiatement, si nous n'avions pas amené cette motion de report de six mois, eh bien, je leur dirais, M. le Président, à tous ces individus, à tous ces groupes que, s'ils voulaient vraiment s'assurer que le projet de loi passe tel que prévu, avant l'ajournement de juin, dans le meilleur intérêt des membres de ces associations-là ou dans le meilleur intérêt des individus impliqués directement par une clause ou l'autre de ce projet de loi là, eh bien, c'était à eux à faire autrement que d'en discuter sournoisement derrière les portes capitonnées du bureau du ministre. C'était à eux à l'emmener sur la place publique, c'était à eux à faire connaître leurs intentions à l'Opposition. C'était à eux à faire en sotte d'amener le ministre à déposer son projet de loi avant la date limite, c'était à eux à s'occuper de leurs intérêts et non pas attendre que le ministre le fasse par lui-même. On n'est jamais mieux servi que par soi-même, M. le Président.

Alors si les associations, les regroupements d'individus qui peuvent bénéficier de la mise en application immédiate de ce projet de loi là voulaient à tout prix en arriver à ce qu'il soit voté sans délai, ils n'avaient qu'à agir en conséquence et non pas se contenter uniquement d'aller concocter quelques petits amendements à la Loi sur les mines, dans les secrets les plus ténébreux, en faisant bien attention que personne ne le sache avant la date limite du dépôt des projets de loi pour qu'après, on nous arrive en nous demandant à nous, de l'Opposition, notre consentement, pour faire les choses rapidement, pour faire les choses sans avoir le temps d'aller à fond dans le problème. Lorsqu'on aura voté sur la loi, ce sera peut-être juste dans six mois, dans un an ou dans deux ans que l'on se rendra compte jusqu'à quel point il pouvait y avoir des

phrases ou des sous-entendus mesquins dans l'application de certaines clauses, de certains articles de ce projet de loi là. De cela, je me méfie, M. le Président. De cela, je me méfie et c'est mon devoir de m'en méfier. C'est mon devoir de le faire. M. le Président, si l'on veut travailler honnêtement en vertu du règlement de l'Assemblée nationale et pour l'ensemble de la population qui nous a élus, nous nous devons, M. le Président, d'avoir les délais nécessaires pour faire en sorte que les choses soient respectées, que les projets de loi à l'avenir soient déposés dans les délais normaux et pour faire en sorte aussi que ceux qui ont des intérêts particuliers à défendre amènent ces intérêts-là sur la place publique, démontrent au grand jour l'importance de leurs intérêts pour l'ensemble des activités d'un secteur en particulier. Nous ne légiférons pas, M. le Président, sur un bill privé. Nous ne légiférons pas pour régler un problème ponctuel d'un groupe bien déterminé, bien spécifique comme c'est souvent le cas lorsqu'on fait des lois pour régler des problèmes de testament, ou lorsque l'on fait des lois pour régler un problème de zonage ou pour déterminer la priorité ou la propriété d'un terrain, enfin, toutes sortes de lois que l'on peut faire pour régler des problèmes ponctuels et spécifiques. Ce n'est pas le cas du projet de loi 77, M. le Président. Le jour où ce projet de loi là sera voté et intégré en amendement à la Loi sur les mines, il aura force de loi pour l'ensemble de la population du Québec et pour aussi longtemps que la Loi sur les mines sera en vigueur, tant qu'il restera des mines ouvertes au Québec.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Une question de règlement, M. le ministre délégué aux Mines.

M. Savoie: Oui, M. le Président. Je voudrais tout simplement souligner à cette Assemblée que le projet de loi dont discute le député d'Ungava, s'il contient des dispositions au niveau des sablières et des gravières, c'est à la demande du député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue qui est un député du Parti québécois. C'est à sa demande que j'ai introduit ces mesures.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre délégué, vous aurez l'opportunité lors de votre intervention, soit en droit de réplique, soit à la motion de report, de clarifier ces faits-là. M. le député, si vous voulez poursuivre.

M. Claveau: Vous remarquerez, M. le Président, que c'est le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue lui-même qui a demandé le report. Donc, je suis en droit de me demander si jamais, pour le bénéfice et pour le mieux-être des citoyens de son comté, le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue avait fait une demande au ministre dans le sens d'apporter quelques amendements à la Loi sur les mines pour la gestion des sablières et des dépôts de gravier, je suis en droit de me demander si les amendements qu'on a sur la table correspondent aux intérêts de l'ensemble des citoyens du comté de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Je pense qu'encore là...

M. Savoie: Une question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Une question de règlement, M. le...

M. Claveau: En vertu de quel article?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député, c'est moi qui préside ici. Je vais faire mon travail. Une question de règlement en vertu de quel article?

M. Savoie: M. le Président, le député d'Ungava soulève constamment le fait qu'on a présenté un projet de loi après les délais autorisés par l'Assemblée pour adoption à cette session-ci. Je tiendrais à souligner qu'il y a eu des discussions avec le député d'Ungava et que j'avais expliqué la motion d'urgence. Il m'avait dit qu'effectivement une motion d'urgence lui semblait acceptable.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ce n'est pas une question de règlement, M. le ministre délégué aux Mines. Vous aurez l'opportunité tantôt de vous exprimer dans votre droit de réplique sur l'adoption du principe et, de plus, si vous voulez intervenir sur la motion de report, vous pourrez le faire pour votre formation politique. M. le député, si vous voulez poursuivre votre intervention.

M. Claveau: M. le Président, effectivement il n'y a pas beaucoup d'articles au règlement qui permettent ce genre d'intervention là. D'autre part, j'en suis fort aise, j'en suis fort aise parce que, ce faisant, le ministre m'amène de l'eau au moulin pour continuer mon intervention. S'il pense que c'est de cette façon-là qu'il va abréger mes propos, eh bien, il se trompe et je l'invite à se lever encore plus souvent pour continuer à alimenter mes propos. (6 h 50)

M. le Président, ce que le ministre a dit va exactement dans le sens de mon intervention et va exactement dans l'esprit de la justification de la motion de report. Le ministre nous est arrivé avec un projet de loi en dehors des délais prévus, un projet de loi qu'il nous a apporté en disant: Écoutez, pour une question d'harmonisation, j'ai quelques articles à amener sur la question des prospecteurs pour légaliser des pratiques et pour régler des choses sur des pratiques qui se font au niveau des déclarations de propriété et de travaux statutaires faits sur

les propriétés minières, sur les claims... Mme Marois: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, Mme la députée. Question de règlement.

Mme Marois: Est-ce qu'on pourrait constater s'il y a quorum, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée de Taillon me demande s'il y a quorum. Je vais vérifier.

Qu'on appelle les députés!

Alors, M. le député, voulez-vous poursuivre, s'il vous plaît?

M. Claveau: Oui, M. le Président. Donc, vous comprendrez, M. le Président, que, sur la base des informations que le ministre m'avait données et si je voulais avoir l'opportunité de consulter le projet de loi... En toute bonne foi, j'ai assuré le ministre que j'interviendrais auprès de mon leader pour donner un consentement sur la base des informations verbales que j'avais eues du ministre. C'était, il faut bien en convenir, la seule façon que l'on avait de se saisir du projet de loi, en tant que membres de ce Parlement, puisqu'il n'avait pas été déposé dans les délais normaux. Alors, nous avons consenti à ce que le ministre dépose son projet de loi après le délai normal du 15 mai, et nous en avons pris connaissance. C'était la seule façon de faire. Donc, nous avons consenti à cela, M. le Président.

Mais, alors que je croyais, comme j'ai eu l'occasion de le dire dans mon intervention, à 4 heures ce matin, que c'était un projet de loi tout à fait succinct qui allait régler les problèmes concernant l'éligibilité à réclamer ou à continuer des activités sur une propriété, sur un claim de la part d'un prospecteur et, éventuellement, avec une ou deux dispositions de concordance où on parlerait de la question de la part des travaux statutaires admissibles après le délai imparti normalement, eh bien! j'ai eu la grande surprise, M. le Président, de ne retrouver ces articles-là qu'à la toute fin du projet de loi. Dans les premières pages, il ne parlait pas de ça du tout. Dans les premières pages, il parle du gravier, du sable, des avis de désignation sur une carte, de baux relatifs au pétrole, au gaz naturel, à la saumure, aux réservoirs souterrains.

Mon Dieu! M. le Président, dans moins de 27 articles, on fait le tour de l'ensemble de la Loi sur les mines, on touche à peu près à tout ce qui est touchable dans la Loi sur les mines, on tire sur tout ce qui bouge dans 27 articles. Ce n'était pas à cela du tout que je m'attendais lorsque j'ai donné mon consentement parce qu'on m'avait dit au départ: C'est pour régler, entre autres, le problème de prospecteurs qui auraient abusé ou, enfin, appliqué d'une façon très stricte la loi dans un cas en particulier. C'est sur cette base-là que j'ai donné mon consentement. Mais, à l'étude de la loi, à la lecture des articles de loi, après consentement avec mon collègue de Rouyn-Noranda-Témiscamingue qui est particulièrement intéressé par toute la question des baux d'exclusivité sur les dépôts de gravier et de sable dans son comté - c'est vrai, on en a parlé - eh bien! M. le Président, nous en sommes arrivés à la conclusion que ce projet de loi est trop important, que ce projet de loi implique trop de choses. M. le Président, j'y reviendrai.

Si l'Association des prospecteurs, comme le dit le ministre, est si intéressée par l'application de ce projet de loi, c'était à elle de prévoir qu'il y avait une Opposition en cette Chambre. C'était à elle de prévoir que son projet de loi devait passer devant l'Assemblée nationale. C'est aussi clair que ça. Il y a une Opposition et un projet de loi, ça ne se concocte pas derrière des portes capitonnées avec un ministre en faisant bien attention pour qu'il n'y ait personne d'autre qui le sache et en faisant bien attention pour le déposer à la toute dernière minute pour ne pas que personne puisse y réfléchir pour le faire voter et, après, on verra les conséquences. Ce n'est pas comme ça que ça se fait, un projet de loi.

Je le répète, M. le Président, pour le bénéfice de tous ceux qui veulent l'entendre, puisque le ministre vient de le prononcer lui-même en cette Chambre, en dehors des micros, de toute évidence, parce qu'il n'a pas le courage de le faire devant les micros. Il dit: II s'arrangera lui-même avec l'Association des prospecteurs. Oui, M. le Président, je vais répondre devant les micros. Si l'Association des prospecteurs trouve que ce projet de loi là est tellement important qu'il doit être voté immédiatement, eh bien! c'était à l'Association des prospecteurs de s'assurer que ceux qui allaient voter sur ce projet de loi là soient informés en temps opportun, dans les délais prévus au règlement et d'obliger le ministre à le déposer avant la date du 15 mai, tel que c'est prévu. Et si, pour une raison ou une autre, l'Association des prospecteurs, justement, avait fait une entente avec le ministre pour l'amener en toute fin, je suis en droit de me poser la question pourquoi le ministre, qui, semble-t-il, a consulté de longue date l'Association des prospecteurs sur ce projet de loi là, n'a pas trouvé le moyen de l'amener en Chambre avant la date limite prévue au règlement. Je me pose sérieusement la question sur les intentions qu'il y a derrière tout cela, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! s'il vous plaît! s'il vous plaît, m. le député, je vous rappelle que vous avez déjà utilisé 36 minutes de votre temps. si vous voulez poursuivre. (7 heures)

M. Claveau: merci, m. le président. je dirai

au ministre que je n'ai jamais eu besoin de colporteur pour passer mes messages. Je suis capable de les faire moi-même, comme nous tous de l'Opposition sommes capables de faire nos messages nous-mêmes. Dans ce sens-là, je n'ai pas peur de mes propos. Je suis en toute légitimité, ici, de revendiquer le droit d'avoir le temps d'étudier les conséquences d'un projet de loi avant de le voter. Et, si l'Association des prospecteurs n'est pas capable de comprendre ça tout de suite, elle le comprendra sûrement à l'automne, lorsque nous reviendrons sur ce projet de loi, après avoir pris six mois pour regarder attentivement les implications de telles modifications dans la Loi sur les mines. C'est aussi clair et aussi simple que ça. On fonctionne en démocratie ou on ne fonctionne pas du tout. Qu'est-ce que ce gouvernement essaie de nous faire croire? Est-ce que ce gouvernement, M. le Président, serait en train de vendre l'idée à travers les différentes associations, comme l'Association des prospecteurs ou d'autres, que ce n'est qu'en concoctant avec le Conseil des ministres à guichet fermé, en faisant bien attention qu'il n'y ait personne d'autre pour voir ce qui se passe, que les problèmes vont se régler? Est-ce que c'est la façon de faire de ce gouvernement, M. le Président? Est-ce que c'est comme ça que le ministre délégué aux Mines a abordé l'Association des prospecteurs en disant: Surtout, n'ayez garde d'en parler à l'Opposition, sinon vous ne l'aurez pas votre projet de loi? Est-ce que c'est de cette façon-là qu'on a traité avec l'Association des prospecteurs? Est-ce que le ministre ne leur a pas dit, M. le Président: Écoutez, moi, je suis prêt à travailler vos affaires, mais ne mettez pas l'Opposition dans le coup? Si tel est le cas, et je souhaite que non, je souhaite que ce ne soit pas le cas, mais encore là, dans les circonstances, je crois que je puis en toute légitimité me poser la question...

Une voix: Et c'est quoi la réponse?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Richelieu, s'il vous plaît!

M. Claveau: ...et nous allons prendre...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député de Richelieu, je vous ai informé qu'il y a un seul orateur qui parle à la fois.

M. Khelfa:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous n'avez pas la parole pour le moment, M. le député.

M. Khelfa: Pardon?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je ne vous ai pas encore cédé la parole.

Une voix: C'est parce qu'il est debout.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je ne vous ai pas encore cédé la parole. Sur une question de règlement, M. le député de Richelieu.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Khelfa:...oui, M. le président. je demande la pertinence du débat. le député d'ungava, ça fait un bout de temps qu'il parle de n'importe quoi...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député! S'il vous plaît, M. le député! M. le député, si vous voulez poursuivre, vous êtes pertinent sur l'article 211.

M. Claveau: M. le Président... M. Chevrette: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, M. le leader.

M. Chevrette: Question de règlement, et une vraie question de règlement en vertu de...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: ...l'article 32. il n'y a pas eu deux minutes qu'il n'a pas été achalé, que le député d'ungava a eu la paix réelle. c'était toujours là, m. le président, et ça c'est une question en vertu de l'article 32 de notre règlement. critiquer un député qui veut prendre la parole...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le leader de l'Opposition officielle. J'informe tous les députés que l'article 32 existe pour tout le monde et j'ai informé le député de Richelieu d'être à l'ordre. M. le député, si vous voulez poursuivre.

M. Claveau: M. le Président, étant donné que je ne peux m'adresser personnellement à un député en cette Chambre, je vous prierais, M. le Président, de faire le message vous-même au député de Richelieu, à l'effet que, si le député avait pris le temps d'écouter, il se serait rendu compte que l'ensemble de mes propos est justement à l'effet de justifier le report de ce projet de loi, de faire en sorte d'expliquer pourquoi nous ne pouvons, nous comme Opposition, M. le Président, accepter ces techniques antiparlementaires non respectueuses de notre fonctionnement démocratique, M. le Président, et pourquoi, dans les circonstances, nous croyons qu'il serait

normal que ce gouvernement vote avec l'Opposition pour avoir un délai pour nous permettre de voir quelles vont être les implications à long terme des clauses dans ce projet de loi.

Certes, M. le Président, à première vue, je suis essentiellement d'accord, à première vue, dis-je, avec les articles concernant l'Association des prospecteurs du Québec. Oui, il semble, à première vue, que ce soient des mesures intéressantes. Mais je n'ai aucune indication à l'effet qu'à long terme ce devrait être comme ça. Je n'ai aucune indication à l'effet que, si l'on modifie la loi en vertu de ce qui est présenté là, cela n'aura pas d'effet néfaste sur certains prospecteurs. Est-ce qu'il est prévu quelque part que, si jamais un prospecteur pourrait en souffrir, il y aura des mesures compensatoires pour faire en sorte qu'il ne soit pas mis de côté, négligé par une modification ou un amendement à la Loi sur les mines qu'on aurait votée en toute hâte, avant même d'avoir eu le temps de savoir quels sont les impacts réels sur le quotidien de la vie des prospecteurs? Ce sont des questions qu'on est en droit de se poser comme Opposition et ce sont des questions auxquelles on est en droit, aussi, d'avoir des réponses. C'est clair, c'est pourtant facile à comprendre.

M. le Président, moi, je veux bien que, dans le contexte actuel, des prospecteurs aient des problèmes. Ce n'est pas parce que je le veux, mais je le comprends, en tout cas. Mais ça fait des années que ça marche comme ça, ça fait des années que les prospecteurs sont traités de cette façon-là par la loi. Alors, vous ne me ferez pas accroire, M. le Président, que, pour six mois, on va ruiner l'industrie.

Une voix: Sûrement pas.

M. Claveau: Donnons-nous le temps d'y réfléchir. Le principal problème, de toute façon, ce n'est pas que les prospecteurs puissent déclarer, après les délais prévus, 100 % des travaux comme étant des travaux statutaires, ce n'est pas ça le problème. Le problème, c'est qu'il n'y a plus d'exploration minière au Québec. C'est ça. Si les prospecteurs étaient capables de vendre leur propriété à leur pleine valeur, comme c'était le cas il y a quelques années, il n'y en aurait pas de problème, les travaux statutaires, on les ferait.

On est en train, encore là, de contourner les véritables problèmes, de courir après des chimères pour faire oublier les réalités. Les prospecteurs, aujourd'hui, sont acculés au pied du mur, c'est vrai. On le voyait tout à l'heure dans les rapports... Si vous le permettez, je pense que je vais relire quelques notes concernant les compagnies juniors qui sont membres de l'Association des prospecteurs du Québec. Qu'est-ce que dit, en page 27, le rapport 1989 des géologues et résidents sur l'activité minière régionale? Le gouvernement du Québec, ministère, Direction générale de l'exploration géologique et minérale. Que dit le géologue résident de Rouyn-Noranda? "Les perspectives demeurent particulièrement sombres pour les compagnies juniors qui ont éprouvé beaucoup de difficultés à effectuer leurs travaux d'exploration, voire même à survivre en 1989."

Ce n'est pas un discours qui émane du programme du Parti québécois, ça. C'est un document officiel du gouvernement, de ce gouvernement, avec ce ministre délégué aux Mines depuis presque cinq ans. C'est ça qu'il dit, c'est ça le problème des prospecteurs, c'est pour ça que les prospecteurs ont de la difficulté à vivre aujourd'hui, ce n'est pas parce qu'il faut immédiatement changer la Loi sur les mines pour faire en sorte qu'ils puissent déclarer 100 % de leurs travaux à titre de travaux statutaires après une telle date. Ça ne changera rien à la dynamique globale parce que la dynamique globale, M. le Président, c'est qu'il n'y a plus d'exploration minière. L'exploration minière a diminué, d'après, même, les livres des crédits du gouvernement, du ministère de l'Énergie et des Ressources du Québec. Ministère de l'Énergie et des Ressources du Québec, budget 1990-1991, cahier explicatif des crédits. Ce n'est pas encore un discours péquiste, je n'ai pas trouvé ça en fouillant dans le programme du Parti québécois. Qu'est-ce qu'on dit? Je vais le relire pour ceux qui n'étaient pas là lorsque je l'ai lu la première fois, entre 4 h 15 et 4 h 20, ce matin: Toutefois, les dépenses d'exploration ont connu une diminution importante, de -42 % en 1989." C'est ça qui est écrit, on ne l'a pas inventé, c'est les chiffres officiels.

C'est pour ça que les prospecteurs ont de la difficulté à vivre, c'est pour ça que l'Association des prospecteurs du Québec ne sait plus à quel saint se vouer et essaie de trouver des solutions à travers des amendements dans des articles de loi qui pourraient peut-être leur faire récupérer quelques sous ici et là. Mais le vrai problème, il est complètement ailleurs, et le ministre le sait très bien. Le problème n'est pas dans le fait qu'on va pouvoir déclarer 100 % de 10 000 $ de travaux au lieu d'en déclarer 50 %; à la limite, ça affecte 5000 $ de différence de travaux que l'on peut déclarer pour déduction d'impôt. Ce n'est pas ça qui va faire vivre les prospecteurs, ce n'est pas ça qui va relancer l'exploration minière. (7 h 10)

Le ministre aura beau nous faire toutes les peurs qu'il veut, aura beau nous faire toutes les menaces qu'il veut quant à l'idée que les prospecteurs vont avoir de l'opposition, moi, je n'ai pas honte de dire devant les caméras que nous ne faisons que notre boulot, que nous ne faisons que ce pour quoi nous avons été élus. Dans ce sens-là, si les choses étaient si importantes que ça, si c'était la façon de relancer l'exploitation minière au Québec, eh bien, il est fort probable

que l'Association des prospecteurs québécois aurait pris contact avec l'Opposition.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Est-ce qu'on peut constater le quorum, s'il vous plaît, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, qu'on appelle les députés.

M. le député, si vous voulez poursuivre, je vous rappelle qu'il reste neuf minutes à votre formation politique.

M. Claveau: À peine neuf minutes, M. le Président. J'en étais à dire que, si c'était une mesure semblable qui pouvait relancer l'industrie de l'exploration minière au Québec, si elle avait toute l'importance que le ministre veut bien y donner, il est fort probable que l'Association des prospecteurs, les prospecteurs d'une façon individuelle, les propriétaires de petites entreprises d'exploration minière, communément appelés les "juniors", auraient fait les consultations qu'il faut, l'ensemble des contacts qu'il faut, pour s'assurer que l'Opposition allait voter dans le sens de ce qu'ils veulent, pour s'assurer que les députés de l'aile ministérielle du parti ne laissent ' pas leur ministre délégué aux Mines voguer tout seul à la dérive. Ils auraient fait les consultations comme ils le font normalement.

Et, s'ils n'ont pas senti que ça valait la peine d'informer, dans les dates prévues au règlement, l'ensemble des parlementaires de l'importance de cette loi, alors pourquoi voulez-vous, M. le ministre, que je doive, moi, me fier uniquement à la parole du ministre? Pourquoi voulez-vous que l'Opposition doive se plier à ce que le ministre nous dit? Le ministre ne fait pas la loi pour lui et, souhaitons-le, ne la fait pas non plus pour quelques-uns de ses amis, mais il la fait pour l'ensemble des gens qui opèrent dans le milieu. Et, dans ce sens-là, il ne devrait pas avoir honte de faire en sorte que tout le monde puisse en parler, que les associations sortent dans la rue pour l'appuyer. Il devrait être content de faire en sorte qu'il y ait une émanation spontanée de points de vue à travers le Québec pour dire: Oui, M. le ministre, vous avez raison, c'est comme ça qu'on va relancer l'exploration minière.

M. le Président, j'ai plutôt l'impression qu'il s'agit là d'une petite manoeuvre facile pour que le ministre puisse dire par après: Vous voyez, je suis attentif aux problèmes de l'industrie minière, je suis attentif aux revendications des prospecteurs, et j'ai modifié la Loi sur les mines de façon à pouvoir faciliter pour les prospecteurs certaines compensations financières pour les travaux statutaires effectués sur les propriétés, sur les daims miniers. Le ministre se fait ainsi bonne gueule, M. le Président, se rafraîchit l'haleine, mais n'a absolument pas réglé le problème. Parce que le problème est pas mal plus fondamental que ça. On le retrouve dans ses propres documents pour les crédits du ministère et on le retrouve dans le rapport des géologues résidant dans différentes régions du Québec. C'est ce à quoi le ministre devrait s'attaquer. C'est ça, le vrai problème.

Pour le reste, M. le Président, dans ce projet de loi, qu'est-ce qu'on retrouve? Des "technicalités" pour permettre que des entreprises ou des individus s'approprient des sites de gravier par bail exclusif. M. le Président, ça sent drôlement les travaux routiers, ça. Ça sent drôlement une espèce de juxtaposition avec d'autres points de vue qu'on a vus ailleurs. Et quand je pense, par exemple, au ministre des Transports qui dit aux camionneurs qui sont ici depuis près de trois semaines à nous accompagner en ville... Je veux bien croire qu'ils aiment ça, la ville de Québec, mais ils ont hâte d'aller travailler eux autres aussi et ils ont hâte d'avoir de l'ouvrage. Et quand le ministre des Transports dit à ces camionneurs-là: Écoutez, si vous voulez, vous devrez négocier avec l'Association...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député.

Une voix: M. le Président?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre délégué-Une voix: Question de pertinence.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, sur la pertinence, je vous rappelle que nous sommes toujours sur la motion de report du projet de loi 77.

M. Claveau: C'est très pertinent, M. le Président. Vous allez voir pourquoi. Que dit le ministre des Transports? Que dit le ministre des Transports aux camionneurs artisans qui crèvent avec leurs camions? Il leur dit: Allez négocier avec les contracteurs de grands travaux du Québec, ceux qui ont les gros contrats de voirie, ceux qui ont les gros contrats de construction. C'est avec eux autres que vous arrangerez vos petits litiges pour déterminer combien de voyages de "truck" vous allez avoir le droit de faire sur un contrat, au lieu de mettre ses culottes et de le faire lui-même. Parce que c'est une responsabilité du gouvernement de s'assurer que les camionneurs puissent vivre en tant que petits investisseurs.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Là, M. le député... C'est le projet de loi 77. Je vais vous lire le titre: Loi modifiant la Loi sur les mines et la Loi concernant les droits sur les mines. C'est une motion de report et je demanderais de

discuter de cette motion de report, M. le député.

M. Claveau: Alors, M. le Président, voilà où j'en suis. Article 9 de la loi 77, Loi modifiant la Loi sur les mines et la Loi concernant les droits sur les mines à l'article 151.1, M. le Président. Et je vais me permettre de le citer pour convaincre tout le monde de la pertinence de mes propos: "Un bail exclusif ne peut être conclu, pour un terrain qui fait l'objet d'un ou de plusieurs baux non exclusifs au moment de la demande, que si le demandeur du bail exclusif s'est préalablement entendu avec chacun de ces titulaires de bail non exclusif sur le montant et les conditions de l'indemnisation à laquelle chacun a droit." Qu'est-ce qui se passe? Qu'est-ce que ça veut dire, ça, M. le Président? Ou, du moins, qu'est-ce que ça peut vouloir dire? Ça peut vouloir dire qu'encore une fois, à l'instar du ministre des Transports, le ministre va dire à tous les constructeurs de grands travaux, les mêmes entrepreneurs qui sont en litige avec les camionneurs ici dans la rue, M. le Président, il va leur dire: Là, hein, ces entreprises-là veulent avoir des baux exclusifs sur des sablières et des sites de gravier pour pouvoir faire leur contrat, pour pouvoir faire leur job. Alors, le ministre qu'est-ce qu'il dit par cet article de loi là? Il dit: Ceux qui ont des baux non exclusifs et qui opèrent déjà sur ces sites-là, vous devrez vous entendre avec ces grands contracteurs-là. Vous devrez négocier avec eux des modalités de rachat de votre bail non exclusif. Et une fois que ça sera conclu, bien, là, le grand entrepreneur... Parce qu'il n'y en a pas d'autres qu'eux autres qui peuvent être intéressés par des baux exclusifs, c'est très clair, c'est évident, ce n'est pas sorcier...

Une voix: Le quorum, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, Mme la députée.

Une voix: C'est en plein ça, question de règlement. Le quorum, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je vérifie le quorum. Qu'on appelle les députés, s'il vous plaît. S'il vous plaît, M. le député!

Alors, si vous voulez terminer. Je vous informe qu'il vous reste une minute à votre intervention.

M. Claveau: Merci, M. le Président. Donc, vous comprenez la pertinence de mes propos. Dans le fond, ce que le ministre est en train de faire ou ce qu'il peut vouloir faire par le biais de l'application de l'article 9 de ce projet de loi là, c'est d'obliger les petits propriétaires de bail non exclusif sur des sites de gravier et de sable à négocier avec les gros qui veulent avoir des baux d'exclusivité et qu'après ça, ils seront en mesure de prendre tous les contrats. Et quand le ministre dit non, j'aimerais qu'il m'explique le problème de Norascon, par exemple, à Rouyn-Noranda-Témiscamingue dans le comté de mon collègue de Rouyn-Noranda-Témiscamingue qui essaie par tous les moyens de prendre des exclusivités sur des sites de gravier. J'aimerais qu'il m'en parle très particulièrement de la situation de Norascon et on pourrait peut-être se comprendre sur les intentions qu'il y a derrière ce projet de loi. (7 h 20)

C'est pour ça, M. le Président, et pour des choses semblables que nous avons de fortes réticences, après avoir pris connaissance du projet de loi, et que, dans ce sens-là, j'invite l'ensemble des parlementaires en cette Chambre à voter pour la motion de report, nous permettant ainsi de nous donner tout le temps nécessaire pour bien comprendre les implications qu'il y a derrière ces articles.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le ministre délégué aux Mines.

M. Raymond Savoie

M. Savoie: Alors, M. le Président, nous sommes à traiter d'une motion de report demandée par l'Opposition sur un projet de loi qui vise à venir en aide à l'industrie de l'exploration minière en apportant des modifications qui sont très importantes pour l'industrie et qui rétroa-gissent au mois de septembre 1989, M. le Président.

M. le Président, il faut bien comprendre que ce projet de loi est déposé de bonne foi à cette Assemblée pour être traité et, parce que l'Opposition a de la difficulté avec d'autres législations que nous sommes en voie de traiter, elle a décidé de faire un "filibuster" sur l'ensemble de la législation de ce gouvernement, y compris sur la Loi sur les mines. J'aimerais souligner que ces mesures... Et je comprends bien que l'Opposition puisse prendre cette position-là; ça fait partie des règles du jeu, sauf, toutefois, que ça demande un minimum de discernement. Et ils ne démontrent pas ce discernement; ils agissent, je pense, dans l'intérêt, finalement, de ceux et celles qui ne voudraient pas voir une industrie minière forte au Québec. Et vous pouvez être certain, M. le Président, que je vais aviser l'Association des prospecteurs, que je vais aviser l'ensemble des intervenants au niveau de la production de la tourbe, du granit, au Québec, et que je vais aviser...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement. M. le leader de l'Opposition officielle.

Une voix: On n'a pas peur de nos opinions.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous

plaît, M. le député, vous n'avez pas la parole. M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: M. le Président, notre règlement est clair, à l'article 35. On ne peut pas utiliser le chantage pour empêcher un député de cette Chambre de faire son travail. Le ministre est en train de nous dire, là: Je vais aller le dire aux mineurs et aux prospecteurs que c'est votre faute si, si, si...

M. Lefebvre: Une question de règlement, M. le Président.

M. Chevrette: M. le Président, je suis sur une question de règlement.

M. Lefebvre: Question de règlement.

Le Vice-Président (m. bissonnet): m. le député, je vais écouter la question de règlement et je vais vous reconnaître. je vais attendre, je n'ai pas terminé d'écouter m. le leader de l'opposition, mais je vous rejoins après. je ne peux pas prendre deux questions de règlement en même temps, m. le député.

Une voix: On peut avoir une question de règlement sur une question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vais attendre de l'avoir écouté, je ne l'ai pas écouté encore, M. le député. Si vous voulez, très brièvement, sur votre question de règlement.

M. Chevrette: M. le Président, il ne peut pas y avoir de chantage, en vertu de notre règlement, pour empêcher ou intimider, dans son travail, un député. Si le ministre a du chantage à faire, qu'il aille chanter en dehors, mais pas en dedans, pas en Chambre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, votre question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Ce que j'allais dire, c'est qu'il peut y avoir une question de règlement sur une question de règlement, à savoir que, si le leader de l'Opposition interprète mal, en soulevant sa question de règlement, les propos du ministre, il n'est pas correct. Et, sur la question de règlement comme telle, je ne vois absolument rien dans les propos qui ont été tenus par le ministre à date, M. le Président, qui puisse justifier une question de règlement du leader de l'Opposition, absolument pas.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, sur la question de règlement, M. le ministre délégué a eu des propos. Évidemment, il y a eu des propos aussi de M. le député...

M. Chevrette: D'Ungava.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...d'Un-gava, dont les débats sont enregistrés. M. le ministre a tout simplement dit qu'il indiquerait aux groupes concernés... Évidemment, c'est une question d'opinion et je ne lui demanderai pas de retirer ses paroles, à ce moment-là. M. le ministre délégué, si vous voulez poursuivre.

M. Savoie: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En vertu de l'article 32, je demanderais aux députés de regagner leur place, s'il vous plaît. Alors, M. le ministre délégué, si vous voulez poursuivre.

M. Savoie: M. le Président, alors, je reviens. Donc, ce que je disais, concernant la motion de report, c'est qu'il faut bien comprendre que, dans le projet de loi modifiant la Loi sur les mines et la Loi concernant les droits sur les mines, il y a quelques modifications qui sont apportées suite à des interventions de la part du député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, suite, également, à l'Association des prospecteurs du Québec et suite aussi à une intervention de la part d'un intervenant, un prospecteur, qui a trouvé une faille au niveau de l'administration de la Loi sur les mines, et on doit absolument protéger l'ensemble des daims miniers du Québec contre la faille que ce prospecteur-là a mise à jour et qu'il faut évidemment corriger.

C'est bien sûr après échanges avec l'Opposition que j'ai présenté ce projet de loi. Le projet de loi vise à permettre à plusieurs "juniors" au Québec de bénéficier d'un élément de report quant aux dépenses d'exploration pour permettre de maintenir leurs daims en leur nom. Il s'agit donc, je pense, de quelque chose qui est dans l'intérêt de l'ensemble de l'industrie minière du Québec, de l'industrie de l'exploration du Québec. Je pense, par exemple, à l'industrie de la tourbe qui va être maintenant sur un même pied d'égalité, donc être en mesure de mieux com-pétitionner les marchés américains. Et il y a d'autres secteurs de l'industrie minière également qui vont certainement fortement apprécier ces recommandations. Et il est donc souhaitable, dans l'intérêt de la communauté québécoise, que cette mesure soit adoptée le plus rapidement possible.

Et, comme je le disais tout à l'heure, il est de mon devoir d'expliquer à l'industrie, ce que je vais faire aujourd'hui par communiqué, que j'ai agi tel que le voulait l'Association des prospecteurs du Québec, tel que le voulait l'ensemble des prospecteurs du Québec, tel que le voulaient plusieurs intervenants au niveau de l'industrie minière. Je pense particulièrement aux travailleurs de la tourbe, je pense aux travailleurs au niveau du granit, je pense aux hommes et aux femmes qui travaillent au niveau de la géologie au Québec et des "juniors". Je vais leur dire

qu'effectivement leurs modifications ont été présentées, mais qu'essentiellement, à cause d'une politique de "filibuster" actuellement qui a cours ici à l'Assemblée nationale, je ne suis pas certain que je vais être en mesure d'adopter le projet de loi en question et qu'en conséquence ils devraient diriger toutes leurs attentions sur le leader de l'Opposition, de même que sur le député d'Ungava pour justement faire valoir que, bien qu'on respecte cette volonté d'entreprendre ce processus parlementaire pour de gros projets de loi, il me semble que le bon sens doit régner, surtout en ce qui concerne des projets de loi qui sont d'intérêt public et qui sont de nature à encourager l'activité économique du Québec, et à protéger aussi plusieurs régions qui sont en difficulté, comme la région de Chapais-Chibouga-mau.

Vous savez que, tel que la situation se présente au niveau de la région de Chapais-Chibougamau, on parle de mise à pied d'environ 47 % de la main-d'oeuvre minière, des travailleurs miniers; 47 %, c'est énorme. Les 47 % doivent être en force à compter de 1991, avec toutes les mises à pied qui ont eu lieu depuis 1989. Alors, nous voulons nous assurer que cette région se développe davantage. Ces mesures-là sont là pour protéger les daims qui sont en cours. En conséquence, la motion de report ne peut pas être acceptée. Évidemment, au point de vue de mes collègues, ce n'est pas acceptable non plus. Je suis certain que les députés ici présents ne peuvent pas accepter...

M. Chevrette: Je trouve indécent, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, s'il vous plaît. Question de règlement. Je vais vérifier s'il y a quorum. Qu'on appelle les députés.

S'il vous plaît! M. le député, on est en session ici.

M. le ministre délégué, si vous voulez poursuivre votre intervention.

M. Savoie: Très rapidement, M. le Président, on ne peut pas accepter cette motion de report. Je suis certain que mes collègues, non plus, ne peuvent pas accepter ce report demandé à ce projet de loi. Puisqu'il est dans l'intérêt de l'ensemble de la communauté québécoise, je pense qu'il est essentiel qu'il soit adopté. En conséquence, je vais demander à l'Opposition de reconsidérer sa motion et d'agir en conséquence.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: M. le Président, on discute depuis plus ou moins une heure d'une motion de report qui a été soumise par le député d'Ungava sur le projet de loi 77. Toutes les raisons et justifications quant à l'adoption du projet de loi lui-même, M. le Président, ont été données par le ministre délégué aux Mines dans son intervention principale lors de la présentation du projet de loi, et quant à l'adoption du principe de ce même projet de loi là, et les mêmes explications avec plus de détails, M. le Président, ont été reprises dans l'intervention du ministre qu'il vient tout juste de terminer.

Je n'ai pas l'intention, M. le Président, de revenir sur les différents arguments du ministre. Il s'agit, évidemment, de lire les notes explicatives qui ont sûrement été lues par le député d'Ungava, probablement pas par le leader de l'Opposition parce qu'il n'était pas là. Il y a, au niveau des notes explicatives, M. le Président, toutes les justifications qui nous amènent à conclure que ce projet de loi là est important et qu'il faut l'adopter, pas le reporter à six mois, parce qu'il y a toutes sortes de bonnes raisons. C'est important pour le monde minier qu'on procède le plus tôt possible, le plus rapidement possible à l'adoption du projet de loi 77.

Je comprends, évidemment, l'Opposition de faire de l'obstruction par une motion de report, c'est une vieille stratégie, c'est une vieille tactique, sauf, M. le Président, que l'Opposition finit par se contredire. Le député d'Ungava, dans son intervention principale en critique au ministre délégué aux Mines, a dit qu'il y avait, dans le projet de loi 77, plein de dispositions qui étaient intéressantes, qui étaient avantageuses pour l'industrie et, en même temps, à la fin de son intervention, il décide de reporter l'adoption du projet de loi. Alors, moi, je ne comprends pas, finalement, la contradiction évidente du député d'Ungava qui, en même temps, est pour le projet de loi et se contredit en soumettant à l'attention de l'Assemblée une motion de report.

C'est tellement vrai que le député d'Ungava, M. le Président, est d'accord avec le projet de loi qu'il a consenti - et il a insiste là-dessus - à ce que le projet de loi soit déposé après les délais prévus dans nos règlements, c'est-à-dire après le 15 mai. Et il faut prendre pour acquis qu'avant de consentir il a pris connaissance du projet de loi, de son contenu. Il aurait eu, à ce moment-là, toute l'opportunité de bloquer le projet de loi. Il n'avait qu'à refuser le dépôt et on n'en serait pas à le débattre ce soir, cette nuit ou ce matin, M. le Président.

M. Chevrette: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: M. le Président, quand on remarque qu'une fausseté est dite...

M. Lefebvre: II n'y a pas de question de règlement là-dessus, M. le Président.

M. Chevrette: ...on doit le souligner immédiatement. Le leader adjoint qui a la responsabilité d'appliquer ce règlement sait très bien, M. le Président, que, jusqu'à la deuxième lecture et même sur le travail en commission, on ne peut pas bloquer un projet de loi, même s'il était déposé avant-hier. C'est aussi clair que ça. C'est seulement en troisième lecture et à l'adoption qu'on peut l'arrêter. Donc, j'espère que le leader connaît un petit peu son règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur la question de règlement, M. le député.

M. Lefebvre: Non. Vous aurez remarqué, M. le Président, qu'il ne s'agissait pas là du tout d'une question de règlement. Le député d'Ungava a insisté en disant qu'il avait consenti au dépôt du projet de loi 77 après les délais prévus dans nos règlements et je prends pour acquis qu'avant de consentir il avait, à tout le moins, pris connaissance du contenu du projet de loi. À partir du moment, M. le Président, où il consent après les délais, après la date limite du 15 mai, il considère le projet de loi comme étant valable et c'est, d'ailleurs, ce qu'il nous a répété cette nuit, que le projet de loi 77 contenait des dispositions intéressantes, souhaitables. Alors, il se contredit 30 minutes après en soumettant, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, la motion de report. C'est, comme je l'ai mentionné également tout à l'heure, M. le Président, de la vieille stratégie. Je m'arrête là-dessus. Les motifs ont été abondamment expliqués par le ministre délégué aux Mines. Il restera, évidemment, du temps sur l'enveloppe, parce qu'on sait, M. le Président, qu'une motion de report, c'est un débat restreint de deux heures. On n'a pas l'intention, de ce côté-ci, de prendre tout le temps qui nous est alloué. Alors, M. le Président, je m'arrête là-dessus.

On invitera les parlementaires, d'un côté comme de l'autre de l'Assemblée, à voter contre la motion de report et, après, M. le Président, à régler le plus rapidement possible le sort du projet de loi 77 qu'on soumet à l'attention de l'Assemblée, parce que c'est bon pour l'industrie minière, parce que c'est bon pour les gens d'Ungava, parce que c'est bon pour l'industrie minière dans son ensemble, partout au Québec, M. le Président. Alors, si l'Opposition a encore des choses à dire sur la motion de report, M. le Président, je m'assois et on l'écoute.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Avant de vous reconnaître, Mme la députée, je vais suspendre les travaux de cette Assemblée pour deux minutes.

(Suspension de la séance à 7 h 36)

(Reprise à 7 h 39)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, si vous voulez bien prendre place. Nous en sommes à une motion de report sur le projet de loi 77 et je cède la parole à Mme la députée de Taillon.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. J'aimerais un peu intervenir, à ce moment-ci, sur le sens d'une motion de report. Essentiellement, une motion de report ne dit pas que nous sommes en désaccord avec le fond d'une loi, absolument pas. Ça ne dit pas que nous ne partageons pas les objectifs poursuivis pas une loi. Une motion de report, ça ne dit pas que les notes explicatives du projet de loi ne sont pas pertinentes. Une motion de report, ça a comme objectif essentiel de s'assurer qu'on mette le temps nécessaire pour bien comprendre ce sur quoi nous légiférons, pour qui nous légiférons, dans quel contexte nous le faisons, quelles conséquences cela aura sur l'industrie, sur les travailleurs et les travailleuses qui sont impliqués, quelles conséquences cela aura quant aux autres lois qui pourraient être concernées. Alors, essentiellement, on ne débat pas, donc, du fond du projet de loi, mais on veut s'assurer, en proposant qu'on prenne un peu de temps, qu'on puisse y apporter un éclairage qui va nous permettre de mieux comprendre la loi.

Je prenais la peine de lire avec attention les notes explicatives de la loi et je m'arrêtais à un certain nombre d'articles. Et, dans le fond, je pensais à quelques-uns d'entre nous qui me houspillaient tout à l'heure, en trouvant que ce n'était peut-être pas pertinent qu'on leur demande de venir entendre les débats, alors que ça m'apparait tout à fait pertinent, M. le Président, même s'il est 7 h 40, parce que c'est aussi important que n'importe quelle autre loi, et le ministre nous l'a bien fait valoir, et le critique de l'Opposition officielle aussi. Il nous a fait valoir l'importance qu'il y avait de débattre de cette loi-là et combien de personnes allaient être concernées. À quelques reprises, on a donc demandé que les députés soient présents en cette Chambre pour débattre et discuter du projet de loi. Et certains étaient un peu choqués que l'on fasse ça, qu'on demande le quorum, alors que ça va de soi que ça fait partie de nos règles; sinon, à quoi ça sert de siéger ici si on ne peut pas échanger entre nous. Et j'aimerais ça, moi, poser des questions à ces députés-là, qu'ils m'expliquent chacun des articles de la loi qui est devant nous, pour savoir si ça ne vaudrait pas la peine de prendre quelque temps pour les comprendre.

Alors, je ne sais pas, moi, peu importe, il y a un certain nombre de députés qui sont dans la Chambre. Évidemment, ils sont au travail, donc

ils seraient heureux sûrement qu'on les mentionne. Il y a le député de Berthier...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée...

Mme Marois: ...avec le député de...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...vous vous adressez à la présidence. Vous le savez très bien. Vous connaissez le règlement. Alors, si vous voulez poursuivre sur la motion de report du projet de loi 77, je vous écoute attentivement.

Mme Marois: Très certainement, M. le Président. Alors, on pourrait donc se poser tous, comme députés, M. le Président, la question de la signification de l'article 19. Je ne suis pas certaine, moi, que ça ne vaudrait pas la peine qu'on aille en débattre dans un cadre un peu différent qui est celui de l'Assemblée nationale.

M. Chevrette: M. le Président, quorum.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le leader de l'Opposition, sur une demande de quorum. Qu'on appelle les députés. S'il vous plaît! S'il vous plaît! Non, on est en séance actuellement, M. le député. On est en séance. S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît!

Si vous voulez poursuivre, Mme la députée.

Mme Marois: Merci, M. le Président. J'allais donc dire qu'une motion de report, c'est essentiellement pour que l'on puisse prendre le temps nécessaire pour regarder en profondeur certains éléments du projet de loi. Probablement qu'un bon nombre d'entre nous, si je leur lisais, par exemple, l'article 19 du projet de loi où on dit: "L'article 314 de cette loi, modifié par les articles 575 et 576 du chapitre 4 des Lois de 1990, est de nouveau modifié par la suppression, dans la deuxième ligne du premier alinéa, du chiffre ", 160". Je ne suis pas certaine que quelqu'un, qu'à peu près tous les membres de cette Chambre ici pourraient se lever et m'expli-quer - évidemment, le ministre concerné pourrait le faire d'une façon très complète - ce que ça signifie, cet article-là. Alors, je donne un exemple.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Mme la députée, si vous voulez poursuivre.

Mme Marois: Quand on parcourt le projet de loi qui est devant nous, effectivement, on constate qu'il s'agit d'un projet de loi très technique qui vient amender d'autres lois. D'ailleurs, le titre le mentionne: "Loi modifiant la Loi sur les mines et la Loi concernant les droits sur les mines". Donc, tout au long de ce projet, qui est quand même assez court malgré tout, de 27 articles, il reste qu'il y a une série d'amendements et une série d'articles qui sont très techniques. Donc, la motion de report nous permettrait d'aller un peu plus loin dans la compréhension de ce texte de loi et surtout dans l'évaluation de ses impacts, et je suis persuadée qu'il n'y aurait pas que moi dans cette Assemblée qui serais éclairée. Je suis persuadée qu'il y en a d'autres pour qui ça viendrait permettre de mieux comprendre ce qu'on retrouve au projet de loi.

Vous savez, M. le Président, quand on fait une motion de report, évidemment il y a un sens à toute cette mécanique qui est dans nos règlements. Je pense que ce que l'on signifie aux membres de l'Assemblée nationale, c'est que, quand on regarde l'ensemble de nos projets de loi qui vont débouler pendant une semaine devant nous, à peine, même pas une semaine, à compter d'aujourd'hui pendant quatre jours... On va regarder ça. On a devant nous la loi 77. On a la loi 57 sur le Barreau, la loi 63 qui n'a passé aucune étape encore. C'est quoi, la loi 63? C'est la Loi modifiant la Loi sur le Centre de recherche industrielle du Québec. On a une Loi sur la denturologie, une Loi sur la Société des alcools du Québec qui vient modifier essentiellement des responsabilités qu'assume actuellement le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie et qu'il veut transférer vers la Société des alcools du Québec. On a la loi 65 sur la qualité de l'environnement: toutes des lois qui, comme la loi 77, M. le Président...

M. Houde: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Oui, M. le député de Berthier.

M. Houde: ...je demanderais à la députée de Taillon de respecter la pertinence.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée, alors, on parle du projet de loi 77, c'est une motion afin de reporter l'étude dans six mois. Alors, si vous voulez intervenir sur ce projet de loi, sur cette motion de report.

Mme Marois: Certainement, M. le Président, et, sur la pertinence, vous avez remarqué que je faisais une comparaison avec un certain nombre d'autres lois. Or, ces autres lois dont je parlais sont aussi, dans certains cas, assez techniques; dans d'autres cas, un peu plus faciles à saisir dans le sens commun d'une recherche un peu moins exhaustive à faire sur chacun des articles. Quand on fait des comparaisons, ce qu'on constate, M. le Président, c'est que toutes les autres lois ont été déposées le 15 mai et, pour un bon nombre d'entre elles, on aurait probablement besoin de temps supplémentaire pour nous

permettre de creuser certains aspects. (7 h 50) je vous donne un exemple qui montre bien ce qui se passe avec la loi 77: la loi visant à modifier la société des alcools du québec, la loi 56. j'ai reçu des représentations. je les ai reçues la semaine dernière et, là, j'ai dit: vous m'envoyez des documents, vous m'envoyez des papiers un peu, vous me dites en quoi consistent les représentations que vous voulez faire. en même temps que je reçois cela, je suis aux prises avec des débats sur un tas d'autres thèmes qui concernent les travaux de l'assemblée nationale, pour lesquels j'ai à investir du temps, des efforts et de l'énergie.

Donc, on me présente ces lois-là le 15 mai qui est déjà la date limite. On se permet de passer le bâillon pour deux des lois qui ont été déposées depuis le 15 mai et qui exigeraient que l'on continue les débats pendant un bon moment. Et le projet de loi 77, malgré que nous partagions, pour l'essentiel, les points qui s'y trouvent, nous a été déposé, il y a à peine quelques semaines, en dehors des délais. Je le répète: Malgré le fait que nous partagions les points de vue qui s'y trouvent, il m'apparaîtrait pertinent que nous...

Des voix: Bravo!

Mme Marois: M. le Président, il est inhabituel, quand quelqu'un est en train de prononcer un discours, qu'on se mette à applaudir comme ça, mais je pense que les gens qui nous écoutent comprendront que notre vice-président a assumé la fonction de la présidence pendant un très long moment cette nuit. Nous voulions donc saluer cette performance du député de Jeanne-Mance et le remercier par nos applaudissements bien nourris, d'ailleurs, M. le Président.

On vous souhaite la bienvenue sur le trône ce matin. Alors, nous étions donc au projet de loi 77 avec une motion de report. J'essayais de faire des comparaisons avec d'autres projets de loi qui se trouvent devant nous, M. le Président, qui ont été déposés dans les délais, mais qui exigeraient qu'on puisse les étudier beaucoup plus en profondeur, qu'on puisse prendre la peine et le temps de consulter des gens concernés par le projet de loi.

On se trouve donc avec le projet de loi 77 qui, lui, nous a été déposé plus tard, qui est très technique. Je n'ai pas à en refaire la démonstration. Je pense que la lecture d'un seul article en a convaincu plusieurs dans cette Chambre à qui, d'ailleurs, j'aurai sûrement l'occasion de poser des questions pour qu'on nous éclaire davantage. Donc, ce projet de loi très technique, on nous demande comme ça en quelques jours à peine, à 8 heures le matin, alors que nous avons siégé toute la nuit, d'en prendre connaissance, de voter dessus et de nous prononcer.

Alors, je voudrais bien rassurer le gouvernement et le ministre, la motion de report n'est pas du tout dans le sens que nous sommes en désaccord, loin de là. Mais nous souhaiterions avoir une compréhension plus significative, plus importante de tous les aspects techniques de ce projet de loi et de ses implications pour l'ensemble du milieu concerné, comme il serait sûrement fort pertinent aussi que d'autres projets de loi nous soient davantage expliqués et qu'ils ne créent pas, comme celui sur les heures d'affaires, par exemple, le tollé auquel on est confrontés.

Vous savez, j'ai une certaine expérience gouvernementale, enfin, presque cinq ans comme membre du gouvernement et du cabinet et je peux vous dire que nous avons adopté, à l'occasion, des projets de loi qui ont été adoptés un peu rapidement. Nous avons constaté, lorsque ces lois ont été appliquées, qu'il y avait des failles. Nous avons dû ramener ces lois devant l'Assemblée nationale. Je le dis bien humblement et je pense que, de l'autre côté aussi, on va admettre que c'est arrivé dans leur cas, à l'occasion. On reprend, d'ailleurs, à cette session-ci, un certain nombre de lois pour lesquelles on n'avait pas suffisamment fait le travail d'analyse.

C'est probablement normal, mais c'est justement ça qu'on veut prévenir, M. le Président. On veut éviter qu'on ne passe à la vapeur, sans comprendre, pour l'essentiel et pour un bon nombre d'entre nous, tous les impacts qu'il peut avoir, un projet de loi. C'est dans ce sens-là, M. le Président, qu'il est évident que je vais voter pour cette motion de report et que jamais, j'imagine, mon vote ne puisse être interprété dans le sens d'un désaveu ou d'un désaccord au projet de loi qui est devant nous. Sans doute, certaines améliorations pourraient y être apportées, mais ce que je demande aux membres de cette Assemblée, c'est un éclairage plus complet pour qu'on en voie tous les impacts. Je vous remercie, M. le Président, de m'avoir entendue.

Le Président: Alors, je cède maintenant la parole à M. le leader de l'Opposition.

Motion d'ajournement du débat

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais, en vertu de l'article 100, proposer que le débat soit ajourné.

Des voix: Oh, non! Vote nominal!

Le Président: Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: M. le Président, je m'attendais à ce que le leader de l'Opposition fasse cette motion d'ajournement et je me suis posé la question à savoir si la motion d'ajournement

était recevable dans le sens suivant. C'est que je considère qu'une motion d'ajournement d'une motion de report, ces deux motions-là se contredisent l'une et l'autre, M. le Président. On demande le report de l'adoption du principe du projet de loi 77 ou on ne le demande pas. Lorsqu'on demande l'ajournement de la motion de report, c'est qu'on annule ladite motion de report. Dans ce sens-là, M. le Président, je considère, et je vous le soumets, qu'une motion d'ajournement lorsqu'on demande l'ajournement d'une motion de report, techniquement, c'est impossible. Ça se contredit.

M. Chevrette: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Président: Alors, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, vous remarquerez que la motion de report, c'est une chose et la motion d'ajournement du débat, c'est une autre chose. Discuter sur une motion de report, c'est un débat; discuter sur une motion d'amendement, c'est un débat; discuter sur une motion de fond, c'est un débat. Ce que la proposition, en vertu de l'article 100, vient faire, c'est dire: Le présent débat est ajourné en vertu de l'article 100. C'est une clause tout à fait automatique et ça suppose 25 minutes de discussion, 10 minutes de chaque côté et 5 minutes de réplique, alors que la motion de report, elle, il faut qu'elle identifie très clairement le moment où on veut qu'un projet de loi, par une motion qui, normalement, fixe une date, soit reporté dans le temps. Vous verrez que c'est différent parce qu'on a prévu précisément deux heures à une motion de report, purement et simplement pour permettre un débat qui touche à la fois la forme et le fond, parce qu'il faut argumenter sur le fond pour justifier une motion de report, alors que l'ajournement, c'est purement et simplement temporel, dans le temps.

Et on va discuter. Pourquoi je propose une motion d'ajournement? Je n'ai qu'à regarder certains visages, M. le Président, et j'en justifierai le fond tantôt. Mais, pour le moment, je propose l'ajournement en vertu de l'article 100, ce qui est complètement admissible.

Le Président: Là-dessus, il y a une décision qui a été rendue par la présidence, en l'occurrence par moi-même, le 2 décembre 1986, qui spécifiait, justement, que la motion de report est possible pour chacun des débats et la motion de report constitue un débat. L'adoption du principe constitue également un débat distinct. Donc, la motion d'ajournement en vertu de l'article 100, à ce moment-ci, est possible, donc recevable. En conséquence, ça peut donner lieu à un débat en vertu de l'article 101. L'auteur de la motion et un représentant de chaque groupe parlementaire ont chacun un temps de parole de 10 minutes; l'auteur de la motion a droit à une réplique de 5 minutes. Je vais donc reconnaître M. le leader, pas le leader adjoint, je m'excuse, M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. C'est juste une clarification pour être bien sûr, comme on a eu d'autres débats à cette Assemblée sur une motion d'ajournement... Il y a d'abord la personne qui présente la motion qui a 10 minutes; ensuite, il y a de chaque côté 10 minutes, ce qui fait 30 minutes, plus 5 minutes du proposeur de la motion, ça fait 35 minutes au total. C'est bien ça?

Le Président: Exactement. Donc, tel que l'article 101 le dit: L'auteur de la motion et un représentant de chacun des groupes ont une possibilité d'intervention de 10 minutes chacun, donc, trois fois 10 minutes, plus une réplique de 5 minutes. Mais, avant de poursuivre ce débat, nous allons suspendre simplement quelques minutes.

(Suspension de la séance à 8 heures)

(Reprise à 8 h 2)

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Nous avons communiqué ensemble, le leader du gouvernement et moi-même. Compte tenu du temps que prendra la motion de l'ajournement des débats et qu'il reste également du temps sur la motion report, après entente, nous voudrions que vous appeliez le vote sur la loi 77 quant au principe. Il y aurait ajournement après que le leader aura donné les avis - comment dirais-je - appropriés pour les référer en commission.

Retrait de la motion d'ajournement

Le Président: là, maintenant, nous en sommes à la discussion d'une motion d'ajournement. pour la motion d'ajournement, je comprends que vous retirez votre motion d'ajournement.

M. Chevrette: Oui. Le tout serait réglé par l'entente que nous venons de faire.

Le Président: Très bien. Oui, un instant. Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Lefebvre: Oui. Alors, M. le Président, ce que je comprends de la proposition et de la discussion que nous avons eue, c'est que la motion d'ajournement, à toutes fins pratiques, tombe. Il restait plus ou moins 20 ou 25 minutes à débattre sur la motion de report, ce qui serait

annulé. Et, comme l'a laissé entendre, l'a suggéré le leader de l'Opposition, il s'agit pour vous d'appeler le vote sur le principe du projet de loi 77 et je ferai la motion de déférence qui suivra.

Le Président: Pour être dans les formes, nous avons actuellement, nous sommes saisis, avant d'arriver au vote sur l'adoption du principe... Dans un premier temps, je comprends, M. le leader de l'Opposition, que vous retirez votre motion d'ajournement. Donc, la motion d'ajournement est retirée. Maintenant, la motion de report qui a été présentée par le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue est également retirée? O.K.

Rejet de la motion de report

Très bien. Mettons la motion au vote. À ce moment-là, est-ce que la motion de report visant à reporter l'adoption du projet de loi 77 à six mois est adoptée? Elle n'est pas adoptée. Elle est rejetée. Très bien, rejeté. Maintenant, nous allons appeler les députés. Mais rejeté, évidemment, sur division. Oui, disons rejeté, très bien. Donc, rejeté sur division.

Adoption du principe du projet de loi

Maintenant, nous allons appeler les députés pour le vote sur l'adoption du principe.

M. Chevrette: Adopté. M. Lefebvre: Mise aux voix.

Le Président: Mise aux voix. Donc, à ce moment-ci, est-ce que la motion d'adoption du projet de loi 77... Je m'excuse. Nous arrivons. Donc, est-ce que la motion d'adoption du principe du projet de loi 77, Loi modifiant la Loi sur les mines et la Loi concernant les droits sur les mines présentée par le ministre délégué aux Mines et au Développement régional est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'économie et du travail

M. Lefebvre: Je fais motion, M. le Président, pour déférer le projet de loi 77 à la commission de l'économie et du travail pour son étude détaillée.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté. En conséquence, nous allons maintenant ajourner les travaux qui reprendront ce matin à 10 heures.

(Fin de la séance à 8 h 5)

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