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(Dix heures sept minutes)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Veuillez vous asseoir,
s'il vous plaît!
M. le ministre des Approvisionnements et Services.
M. Dutil: m. le président, pouvez-vous, s'il vous
plaît, appeler l'article 10?
Projet de loi 103 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 10,
M. le ministre des Approvisionnements et Services propose l'adoption du
principe du projet de loi 103, Loi modifiant la Loi sur le ministère des
Approvisionnements et Services. M. le ministre.
M. Robert Dutil
M. Dutil: Merci, M. le Président. Ce projet de loi
concerne une recommandation du rapport Bernard. Le rapport Bernard est un
comité qui avait été formé, il y a de cela tout
près d'un an, par le premier ministre, pour vérifier certains
aspects de l'octroi des contrats du gouvernement. De tout temps, les
gouvernements se sont .. impliqués, se sont intéressés au
processus d'octroi de contrats. Il ne s'agit pas là d'un nouveau
problème. C'est un problème qui est aussi vieux que les
gouvernements. Tous les gouvernements, dans le passé, ont essayé
de gérer les contrats qu'ils donnaient, d'une façon
équitable et d'une façon transparente. Des réformes ont
été apportées, il y a de cela plusieurs décennies.
Je citerai, plus particulièrement, la réforme
présentée, à l'époque, par le premier ministre du
Québec, M. Jean Lesage, qui a institué, dans le processus
d'octroi des contrats, des soumissions publiques. C'était une
nouveauté considérable à l'époque. C'a permis, en
allant en soumissions publiques, d'obtenir des soumissions avec prix et
d'accorder les contrats au plus bas soumissionnaire conforme, ce qui rendait te
processus d'octroi beaucoup plus équitable et transparent que cela ne
l'avait été auparavant. D'autres réformes, M. le
Président, ont suivi celle-ci.
Je citerai deux de ces réformes, pour mémoire, qui ont
été présentées sous le gouvernement de M.
René Lévesque, particulièrement la Loi régissant le
financement des partis politiques, qui pourrait sembler ne pas avoir de rapport
avec le processus d'octroi des contrats, mais, comme on le sait, M. le
Président, on fait souvent des rapprochements, à tort ou à
raison, entre le financement des partis politiques et l'octroi des contrats.
Cette réforme sur le financement des partis politiques avait
amené le niveau maximum de financement à 3000 $, avait
amené davantage de transparence, avait amené le
dévoilement des noms de ceux qui donnaient des montants plus
élevés que 100 $.
Une autre réforme a également été
amenée et nous concerne plus particulièrement. Il s'agit de
l'organisation du fichier des fournisseurs, qui a été
élaboré sous le gouvernement Lévesque également, en
1977. Ce fichier des fournisseurs est plus connu sous le nom de "Rosalie".
C'est donc ainsi que je vais l'appeler pour être bien sûr qu'ici,
à l'Assemblée, nous nous comprenions tous. Ce système a
évolué depuis plus d'une décennie et il est devenu,
aujourd'hui, un fichier fort élaboré. En effet, le fichier
informatique, appelé Rosalie, le fichier des fournisseurs, contient plus
de 10 000 fournisseurs, qui sont inscrits sur quelque 60 000 listes
différentes.
Pour la plupart des citoyens du Québec, le fonctionnement de
Rosalie est à peu près inconnu. Le rôle du fichier des
fournisseurs consiste particulièrement, dans des contrats de moindre
envergure, à tirer au hasard des noms qui sont inscrits sur une liste de
façon à ce qu'un contrat puisse être octroyé
à l'un ou l'autre de ces noms qui sont tirés de l'ordinateur.
La raison en était que, bien sûr, pour les contrats
d'ampleur, pour les contrats d'envergure, il était convenu d'ores et
déjà, depuis deux décennies, que nous allions, comme
gouvernement, aux soumissions publiques, et que le contrat était
accordé au plus bas soumissionnaire conforme. Mais, pour les petits
contrats, les soumissions publiques sont un processus lourd et difficile et on
ne voyait pas comment amener une multitude de fournisseurs à
préparer des soumissions dispendieuses, parfois, pour des contrats qui
n'étaient pas très élevés.
Donc, il a été convenu que lorsqu'un certain seuil de
contrat - et, à l'époque, si j'ai bonne mémoire, le seuil
était autour de 100 000 $... Ce sont des seuils qui peuvent varier en
fonction des contrats et en fonction du temps. Mais, en dessous d'un certain
seuil de contrat, le ministère qui veut accorder un contrat transmet au
fichier informatique, transmet au ministère des Approvisionnements et
Services, que je dirige, une commande pour obtenir des noms de la liste
appropriée, de l'une des 60 000 listes. À ce moment-là, le
ministère des Approvisionnements et Services, avec des procédures
que nous discuterons plus en détail tout à l'heure, transmet
parfois au ministère une liste d'un seul nom, lorsque le contrat est
très petit et que la modalité veut que l'on ne transmette qu'un
seul nom. Et, à ce moment-là, de toute évidence, le
contrat est accordé à ce fournisseur-là et ça ne
présente pas de difficulté.
Dans d'autres cas, on transmet trois noms. Et c'est là qu'entrent
en jeu les comités de sélection. Évidemment, à
partir du moment où nous transmettons trois noms, il faut que quelqu'un
choisisse, parmi les trois noms, celui qui obtiendra le contrat.
Alors, vous voyez, M. le Président, la complexité de cette
procédure. Il s'avère important que le comité de
sélection fasse le travail le plus objectif possible et le mieux
possible. Il est important de préciser que 95 % des contrats
octroyés par le gouvernement sont accordés en fonction du prix
qui est donné et vont aux plus bas soumissionnaires conformes. Ça
ne présente donc aucune difficulté que de choisir, d'une
façon tout à fait transparente - et il est important de le
préciser ici - dans 95 % des cas, qui obtiendra le contrat du
gouvernement. Ces 95 % représentent environ 950 000 000 $ du 1 000 000
000 $ que le gouvernement, bon an mal an, accorde comme contrats. Il reste donc
50 000 000 $, soit 5 %, qui ne sont pas accordés en fonction du prix
pour une multitude de raisons qu'il faut bien expliquer.
Il y a des services qu'on ne peut requérir en fonction du prix.
Je m'explique. Si vous avez besoin de faire confectionner un devis, par
exemple, pour la réparation d'une structure, supposons, le pont
Pierre-Laporte, il est évident qu'on ne peut pas ou qu'il est difficile
d'envisager de demander une soumission pour quelque chose qui n'est pas bien
connu, sur lequel il n'y a pas de devis. Préparer un devis,
évidemment, si on fait un raisonnement par l'absurde, on ne peut pas
avoir un devis pour préparer un devis et c'est là que la
difficulté la plus considérable apparaît dans l'octroi des
contrats. C'est là que les critiques sont les plus
véhémentes sur le processus d'octroi des contrats de services
lorsqu'il n'y a pas de prix, bien que les noms soient choisis, en règle
générale, par Rosalie. Il y a un comité de
sélection qui doit se prononcer là-dessus et qui doit faire une
sélection. Nous reviendrons plus abondamment là-dessus, tout
à l'heure.
Le gouvernement et le premier ministre, plus particulièrement,
l'année dernière, suite à des allégations qui
avaient été faites durant la précampagne électorale
et la campagne électorale et qui faisaient un lien entre le financement
de notre parti et les contrats, le premier ministre a décidé de
demander à un groupe de travail de faire une étude sur les
processus d'octroi du gouvernement. On sait, quant au financement des partis
politiques - et je ferai un bref aparté, ici, M. le Président, je
pense qu'il est important de le faire - qu'il avait été
considéré, en 1977, lorsque la réforme du financement des
partis politiques avait été votée à
l'Assemblée nationale et, si je me le rappelle bien, avait
été votée à l'unanimité, que c'était
un progrès considérable d'avoir réduit le seuil maximum
des dons à 3000 $. On avait estimé, à cette époque,
que 3000 $, c'était un montant raisonnable pour un parti politique et
j'imagine qu'on avait estimé que quelqu'un qui donnait 3000 $ ne
risquait pas, ne semblait pas, n'allait pas être en conflit
d'intérêts, même si, d'autre part, il pouvait - et
c'était son droit aussi - obtenir des contrats du gouvernement par le
processus préétabli, le processus régulier et le processus
que, personnellement, j'estime d'une grande objectivité.
Curieusement, 12 ans plus tard, alors que le seuil est toujours de 3000
$, maximum, pour les dons aux partis politiques, curieusement, il semble y
avoir eu un certain changement d'opinion dans le public face aux dons de 3000 $
aux partis politiques. On sait qu'aujourd'hui 3000 $ de 1990, c'est loin de
valoir 3000 $ de 1977. Probablement que, depuis les 13 ans qui se sont
écoulés, le dollar a perdu à peu près la
moitié de sa valeur, ce qui fait que les 3000 $ de 1977 vaudraient sans
doute 6000 $ aujourd'hui ou, si on le fait à l'inverse, les 3000 $
d'aujourd'hui auraient valu, en 1977,1500 $.
Quoi qu'il en soit, ce lien malheureux et, la plupart du temps, à
mon avis, non fondé que l'on fait entre contrats accordés par le
gouvernement et dons à un parti politique fait que l'on souhaitait
regarder de plus près la question non pas du financement - c'est une
autre question, sans doute faudrait-il la regarder - mais de l'octroi, du
processus de l'octroi des contrats lui-même. Je dis qu'il faudra sans
doute regarder également la Loi sur le financement des partis
politiques. Si on se donne aujourd'hui la peine, et nous commençons par
une législation, de faire une révision du processus d'octroi des
contrats du gouvernement, il sera peut-être valable, il sera sans doute
intéressant, un jour, d'envisager une réforme du financement,
également, des partis politiques devant ce changement de
mentalité.
D'ailleurs, j'ai moi-même fait, cette année, une
expérience qui n'est peut-être pas exportable, mais qui
m'apparaît intéressante au niveau du financement. Dans mon propre
comté, nous ne souhaitions pas cette année ou nous souhaitions
avoir le moins possible de dons supérieurs à 100 $ et nous avons
organisé une activité-bénéfice à 50 $, avec
un maximum de deux billets qui ont été accordés. Je dois
vous avouer que ça a été un franc succès, puisque
800 personnes ont compris que nous tenions à élargir la base de
notre financement et que nous tenions à avoir des dons
équilibrés un peu partout.
D'ailleurs, d'autres exemples de ce genre-là, dans le monde, se
sont faits à ma grande surprise et à mon grand plaisir. J'ai
ouï-dire que, lors des dernières élections pour devenir
gouverneur de la Ronde, l'un des candidats avait décidé que le
don maximal pour sa campagne de financement ne devait pas dépasser 100
$. On comprend l'importance du défi que ce candidat-là devait
relever, puisqu'une campagne pour devenir gouverneur est autrement plus
dispendieuse qu'une campagne pour devenir député d'un
comté.
C'est plusieurs millions de dollars qu'il devait amasser et,
effectivement, on me mentionnait qu'il avait amassé 75 000 dons qui
variaient de 0 $ à 100 $ pour un montant de 5 200 000 $ et que,
récemment, ce candidat-là avait été élu
gouverneur de la Floride et que l'un de ses arguments avait justement
été que le financement de sa campagne électorale
était véritablement un financement populaire, un financement bien
réparti, et qu'il ne dépendait pas de quelques gros donateurs.
Cet aparté étant fini, M. le Président, puisque c'est une
autre question que le financement et que, sans doute, un gouvernement ou
l'autre sera appelé un jour ou l'autre à s'y repencher, revenons
maintenant au rapport Bernard et à ce qui nous concerne plus
particulièrement aujourd'hui. (10 h 20)
En effet, donc, le premier ministre, le 7 novembre 1989, a formé
un groupe de travail sur les processus de contrats du gouvernement. Ce
comité s'est appelé le comité Bernard, du nom de son
président. Je vous donne les noms des membres du comité pour bien
montrer la grande crédibilité que ce comité-là doit
avoir et les raisons de prendre ses conclusions fort au sérieux.
D'abord, M. Louis Bernard qui est bien connu ici, dans les milieux
gouvernementaux, puisqu'il a été secrétaire
général pendant plusieurs années au gouvernement,
c'est-à-dire le plus haut fonctionnaire du gouvernement; il est
actuellement premier vice-président à l'administration de la
Banque Laurentienne. Il y avait également M. Denis Bédard qui est
secrétaire au Conseil du trésor du gouvernement du Québec,
l'équivalent de sous-ministre, M. le Président; M. Claude
Séguin, sous-ministre au ministère des Finances, et il y avait
également deux personnes externes qui étaient M. Raymond Sirois,
le président et chef de la direction de
Québec-Téléphone et, également, M. Claude
Chamberland, vice-président, ingénierie-construction, à la
société Alcan. Il y avait donc, dans les cinq membres de ce
comité, deux personnes, trois personnes de l'extérieur, si
j'inclus M. Bernard, qui, toutefois, peut être considéré
également comme une personne de l'intérieur étant
donné le grand nombre d'années qu'il a passées ici au
niveau du gouvernement, comme fonctionnaire. Donc, un comité dont la
crédibilité, à mon avis, est à toute
épreuve.
Ce comité-là, évidemment, a rencontré une
multitude de personnes et, dans le rapport, on prend la peine de citer les
personnes qui ont été rencontrées et consultées
pour en arriver au rapport que l'on a ici, aujourd'hui. Un seul
député a été consulté, mais je le mentionne,
M. le Président, et c'est une preuve supplémentaire que le
comité voulait voir tous les points de vue, voulait voir tous les angles
du processus d'octroi de contrats puisque le député
consulté a été le critique officiel de l'Opposition, le
député de Pointe-aux-Trembles.
À mon avis, il est important de prendre la peine de relire le
mandat qui avait été attribué à ce
comité-là. Le premier ministre a demandé au comité
- et je cite textuellement le mandat du groupe de travail - d'analyser les
législations, réglementations et directives en vigueur en ce qui
a trait au processus d'octroi de contrats d'approvisionnement, de contrats de
services et de contrats de location ou de construction de biens immeubles, que
ces processus soient utilisés par le gouvernement du Québec ou
approuvés par le gouvernement à l'égard d'organismes qu'il
finance.
En deuxième lieu, d'analyser le fonctionnement de ces processus
d'octroi de contrats afin d'évaluer s'ils répondent aux
critères d'efficacité, d'équité,
d'accessibilité et de transparence. J'attire votre attention sur le
dernier terme: tel qu'exprimé dans les législations, les
règlements et les directives en vigueur.
Et, en troisième lieu, de proposer au gouvernement les moyens
pour améliorer les processus d'octroi de contrats existants et de
proposer tout nouveau processus afin de respecter des critères
élevés d'efficacité, d'équité,
d'accessibilité et de transparence. Encore une fois, M. le
Président, j'attire votre attention sur les critères que le
premier ministre souhaitait obtenir du rapport: efficacité,
équité, accessibilité et transparence. Je poursuis ma
lecture: Préciser la liste des organismes ou des catégories
d'organismes dont le gouvernement devrait déterminer ou approuver les
processus d'octroi de contrats.
Un rapport fut donc remis; il est daté du 18 mai. Il a
été remis au premier ministre le 18 mai, il a été
rendu public par le groupe de travail lui-même, le groupe Bernard, le 4
juin dernier, et il était intitulé: L'efficacité dans la
transparence.
Pour ma part, je trouve que le titre reflète bien les objectifs
qui étaient visés par le groupe de travail pour en arriver
à l'équilibre nécessaire entre l'efficacité et la
transparence. Évidemment, à la limite - et c'est cité dans
le rapport à un endroit ou l'autre - le maximum de transparence pourrait
amener une efficacité trop réduite. Il est important d'avoir un
processus qui aboutisse à l'octroi de contrats. On doit donner des
contrats; on doit le faire de la façon la plus transparente possible,
nous le concevons, mais il faut, bien sûr, en arriver à ce que ce
coût d'émission de contrats ne dépasse pas les
bénéfices que le gouvernement en reçoit, et c'est
très bien expliqué à l'intérieur du texte que je
vous cite actuellement.
Dans le rapport, le premier point qui est soulevé, ce sont les
constats du système actuel. Encore là, M. le Président, je
me permettrai de vous faire une brève lecture de ce constat, de
façon à ne pas être mal interprété et
à ne pas mal interpréter ce que nous disait le rapport Bernard.
Toutefois, ce constat-là est important
pour le reste de nos discussions et vous me permettrez également
de lire quelques paragraphes. Alors, je cite, à la page 9 du rapport
Bernard, l'état de la situation: "La réglementation actuelle
touchant les processus d'octroi des contrats du gouvernement s'est
constituée au fil des ans, comme l'addition de couches
sédimen-taires, pour répondre à des besoins successifs. Il
en est résulté tout un ensemble de lois, politiques,
règlements et directives qui a atteint un degré
élevé de complexité, et par son volume et par sa
diversité. "Les comparaisons que nous avons pu faire avec ce qui existe
dans d'autres gouvernements comparables nous ont confirmés dans notre
intuition de départ, à l'effet que notre système valait la
peine d'être conservé. Mais les informations qui nous ont
été transmises nous ont également convaincus qu'il y avait
néanmoins place pour de l'amélioration. Nous avons en effet
constate que la multiplicité des règles et des autorités
qui les édicterrt amène un manque
d'homogénéité qui cause beaucoup de confusion. D'autres
éléments de la problématique générale ont
aussi attiré notre attention: l'efficacité et la transparence des
processus d'octroi de contrats; le suivi et l'évaluation de la
performance des fournisseurs; le partage des responsabilités et
l'imputabilite des intervenants gouvernementaux. Nous reviendrons plus en
détail sur ces points dans les autres parties du rapport. "En ce qui
concerne les ministères et les organismes budgétaires, ils sont
généralement tous assujettis à la même
réglementation gouvernementale. M existe cependant des exceptions en ce
qui touche les services juridiques et les services bancaires, dont
l'acquisition n'est aucunement réglementée sauf en ce qui a trait
aux autorisations par le Conseil du trésor".
Le rapport, en page 10, nous dit, dans Actions à entreprendre:
"Nous considérons que le système actuel en matière
d'octroi de contrats est valable, mais qu'il y a lieu d'y apporter plusieurs
correctifs non seulement pour en améliorer la cohérence, mais
aussi pour en augmenter l'efficacité et la transparence". Et c'est
à partir de là que les recommandations commencent, M. le
Président. C'est donc la fin de ma citation. Je reprends tout simplement
quelques mots du dernier paragraphe que je viens de vous lire. Le rapport
Bernard, le comité Bernard considère qu'en matière
d'octroi de contrats le système que nous avons est valable, bien qu'il y
ait lieu d'y apporter quelques correctifs et c'est ce qui explique les quelque
45 recommandations qui nous sont présentées ici.
Suite à ce rapport qui a été déposé,
comme je le disais tout à l'heure, en juin dernier, plusieurs entrevues
publiques nous ont amenés, m'ont amené personnellement à
dire que ce rapport a été très bien accueilli, nous
apparaissait très réaliste à notre point de vue et qu'un
travail se ferait rapidement pour en arriver à ce que des
décisions gouvernementales, quant à la mise en oeuvre, quant
à la mise en application des recommandations du rapport Bernard,
puissent être faites.
Nous n'avons pas chômé, M. le Président. Vous savez
qu'entre le mois de juin et le mois de septembre, il y a l'été et
que, durant l'été, le travail au niveau gouvernemental est plus
difficile à cause des vacances, à cause de l'été.
Toutefois, dès le 12 septembre, c'est-à-dire quelque trois mois
plus tard, quelque trois mois après que le rapport était rendu
public, une décision du Conseil des ministres de mise en oeuvre du
rapport était déjà prise et, encore là, vous me
permettrez, M. le Président, de cette importante décision de lire
les principaux éléments de façon à bien faire
comprendre à la population à toutes les personnes
concernées l'importance que le gouvernement accorde à ce rapport
et son grand intérêt de le voir être mis en oeuvre. (10 h
30)
Ainsi donc, et je cite: À la suite du mémoire soumis par
le président du Conseil du trésor et du ministre des
Approvisionnements et Services et portant sur les suites à apporter au
rapport du groupe de travail sur les processus d'octroi de contrats du
gouvernement, il est décidé, le Conseil des ministres
décide d'approuver les orientations générales du rapport,
du groupe de travail sur les processus d'octroi de contrats du gouvernement,
notamment celle de mettre l'accent sur l'efficacité des processus
gouvernementaux d'octroi de contrats tout en s'assurant de la compétence
des fournisseurs du gouvernement et de la qualité de leurs services;
deuxièmement, de confier au secrétariat du Conseil du
trésor, en collaboration avec le ministre de la Justice, le soin de
faire une étude sur l'impact législatif et réglementaire
de l'assujettissement des organismes à la réglementation
générale, à la lumière des recommandations du
groupe de travail sur les processus d'octroi de contrats du gouvernement; en
troisième lieu, de demander au président du Conseil du
trésor de soumettre au Conseil des ministres, après consultation
du ministre des Approvisionnements et Services, une proposition portant sur le
champ d'application de la réglementation gouvernementale; en
quatrième lieu, de demander au secrétariat du Conseil du
trésor et au ministère des Approvisionnements et Services de
convenir avec les ministères et les organismes concernés des
modalités d'action à entreprendre pour donner suite aux
orientations du groupe de travail sur les processus d'octroi de contrats du
gouvernement étant entendu que les ministères et organismes
pourront exprimer, à cette occasion, leurs réserves quant
à l'application intégrale de certaines recommandations du groupe
de travail; de rescinder sa décision 8839 du 2 mars 1988 concernant le
partage des responsabilités en matière d'élaboration de la
réglementation re-
lative aux contrats de services, d'achat et de location de biens
octroyés par le gouvernement; de reporter sa décision sur le
partage des responsabilités en matière de dérogation au
moment de la présentation des projets de règlement sur les
conditions de contrats et sur l'acquisition des biens, sur l'acquisition des
services, sur la construction et sur l'acquisition d'espaces.
Suit une page, M. le Président, qui concerne le partage des
responsabilités entre le Conseil du trésor et le ministère
des Approvisionnements et Services. Je vous fais grâce de la lecture. Ce
document est public. Si l'Opposition veut en prendre connaissance, il n'y a
aucun problème.
Vous me permettrez de passer immédiatement au point 8 de la
décision du Conseil des ministres, qui se lit comme suit: Le Conseil des
ministres décide de demander au Conseil du trésor et au
ministère des Approvisionnements et Services de présenter au
Conseil des ministres les modifications qui doivent être apportées
à la réglementation actuelle, pour donner suite au nouveau
partage des responsabilités et aux autres recommandations du groupe de
travail sur les processus d'octroi de contrats du gouvernement;
neuvièmement, de demander au secrétariat du Conseil du
trésor et au ministère des Approvisionnements et Services de
faire rapport périodiquement au Secrétaire général
du Conseil exécutif sur la mise en application des recommandations du
rapport du groupe de travail sur les processus d'octroi des contrats du
gouvernement et, enfin, dixièmement, de demander au ministère des
Approvisionnements et Services de présenter au Conseil du trésor
un mémoire sur les ressources nécessaires pour assurer la
réalisation des recommandations du groupe de travail sur les processus
d'octroi de contrats du gouvernement.
Alors, suite à cette décision qui date, je vous le
rappelle, du 12 septembre dernier, au ministère des Approvisionnements
et Services, en autant que nous sommes concernés, puisque dans le
rapport Bernard - il est bon de le préciser -la moitié des
recommandations concerne le ministère des Approvisionnements et Services
- donc, 22 recommandations, sur les 45 qui sont écrites dans ce rapport,
concernent le ministère que je dirige et, donc, nous avons un rôle
fort important à jouer dans le suivi du rapport Bernard - plusieurs
gestes ont été posés. Nous avons l'intention, au
ministère des Approvisionnements et Services, de rendre public un
rapport du suivi de l'application du rapport Bernard. Ce rapport devrait
être rendu public relativement prochainement et fera le point sur les
gestes que nous avons posés sur l'ensemble des recommandations et,
particulièrement, sur chacune d'entre elles, certaines étant
déjà appliquées, M. le Président, je tiens à
le dire. Il y a quelques recommandations, évidemment, celles qui
étaient les plus faciles d'application, celles qui n'exigeaient pas des
modifications législatives puisque nous ne siégions pas cet
été, celles qui nous apparaissaient les plus évidentes et
les plus faciles à mettre en pratique, qui l'ont déjà
été. Donc, un pas est déjà fait. D'autres ont vu le
processus de leur réalisation enclenché et c'est dans ce
suivi-là, qui sera rendu public ultérieurement, que nous pourrons
démontrer d'une façon transparente - je pense que le terme est
aussi approprié à l'application du rapport Bernard: une
façon transparente - les gestes que nous avons posés, que nous
avons l'intention de poser et que nous poserons relativement prochainement
quant à l'application d'autres recommandations.
Toutefois - et c'est le but de notre exercice d'aujourd'hui - l'une des
recommandations, la recommandation 30, qui touchait le ministère des
Approvisionnements et Services, devait nous amener à faire une courte
législation. C'est, en ce qui concerne le ministère des
Approvisionnements et Services, la seule législation nécessaire
pour l'application du rapport Bernard et ça pourra surprendre certaines
personnes. Mais, quant aux autres recommandations, des directives, ou des
décisions, ou des règlements suffisent à les mettre en
oeuvre, ce qui confirme, d'ailleurs, M. le Président, que le
ministère des Approvisionnements et Services a la loi qu'il faut, la loi
qui lui est nécessaire pour appliquer l'ensemble du rapport Bernard.
Ça confirme donc que nous avions déjà en place un
système valable de processus d'octroi de contrats, un système,
donc, qui assurait une très grande limpidité. Le rapport Bernard
vient nous permettre d'éliminer certaines ambiguïtés et de
resserrer un peu cette assurance de garantir l'impartialité. Mais le
système - je le répète, il est très important de le
dire et le rapport Bernard le confirmait - en lui-même est valable.
Alors, la recommandation 30 concernait les spécialités du
gouvernement. Plusieurs critiques ont été amenées par des
fournisseurs à l'effet qu'il était difficile de voir les
spécialités s'adapter aux changements que nous connaissons dans
notre société. On sait que les spécialités d'il y a
10 ans et les spécialités d'aujourd'hui sont fort
différentes. Surtout dans les domaines de haute technologie, on doit
sans cesse envisager de se mettre à jour de ce
côté-là et le processus de mise à jour est
extrêmement long.
La recommandation que l'on retrouve en page 30 et qui est la
recommandation 30, donc, aucune ambiguïté; c'est facile de s'y
retrouver. On dit: Que le ministère des Approvisionnements et Services
mette en place un mécanisme plus souple pour apporter des modifications
à la liste des spécialités. Alors, nous avons donc
préparé, M. le Président, un projet de loi qui nous
permettrait de modifier la Loi sur le ministère des Approvisionnements
et Services pour arriver à cette fin.
C'est donc la loi 103 qui confie au ministre
la responsabilité de proposer au gouvernement des politiques
relatives a l'acquisition et à la fourniture de biens et services et de
faire approuver par le gouvernement des règlements aux fins d'en assurer
l'application et la coordination. La loi du ministère comprenait
implicitement que les politiques et les règlements à faire
approuver par le gouvernement devaient également couvrir la construction
de biens et la location. alors, afin de préciser les pouvoirs
accordés au ministre des approvisionnements et services en
matière d'acquisition de biens et de services, ce que je propose
aujourd'hui, c'est d'insérer à l'article 7 de la loi sur le
ministère des approvisionnements et services, dans la deuxième
ligne, après le mot "acquisition", "et à la construction de biens
ainsi qu'à la location". alors, c'est une modification
d'éclaircissement qui, elle, nous permet de donner suite non pas
à la recommandation 30, mais à la recommandation 44. c'est
vraiment une question de précision, m. le président. quant
à la recommandation 30, on y revient un peu plus loin dans le projet de
loi. cette recommandation 44 se lit d'ailleurs comme suit: que le ministre des
approvisionnements et services soit chargé d'élaborer et de
proposer au gouvernement des politiques et des règlements pour les
ministères et les organismes publics dans les matières suivantes:
l'acquisition de biens, l'acquisition de services, la construction et
l'acquisition d'espaces. alors, c'est ce que nous venons préciser.
Quant à l'article 8.1, le projet de loi prévoit
également que: Le ministre établit, avec l'approbation du
gouvernement, des répertoires identifiant des catégories de
biens, des catégories de services et des spécialités dans
lesquelles les fournisseurs peuvent être inscrits lorqu'un fichier est
utilisé pour la sélection des fournisseurs. Ces
répertoires sont publiés à la Gazette officielle du
Québec. À ce jour, les spécialités ou
catégories de biens et de services dans lesquelles les fournisseurs
pouvaient être inscrits lorsqu'ils désiraient s'inscrire à
un fichier se trouvaient en annexe de la réglementation. (10 h 40)
Le groupe de travail Bernard sur les processus d'octroi de contrats du
gouvernement s'est penché sur cet aspect de la réglementation et,
entre autres, il affirmait à la page 29, avant de faire sa
recommandation - et je cite: Pour remplir pleinement son rôle, le fichier
doit pouvoir s'adapter aux changements, par exemple, en regard des nouvelles
technologies de production. C'est un point important dans la mesure où
l'absence d'une spécialité au fichier occasionne un processus de
sélection où la part de discrétionnaire peut être
plus importante. Le ministère ou l'organisme peut alors inviter des
fournisseurs de son choix et en informer le fichier. Nous sommes conscients,
dit M. Bernard, que la liste des spécialités intéresse
directement les fournisseurs de services et que c'est ce qui a justifié
la décision de l'inclure dans le règlement. Cette situation a
cependant pour conséquence d'alourdir le processus de modification de la
liste qui compte actuellement 222 spécialités. Il faudrait
trouver une solution plus souple, par exemple, prévoir dans le
règlement sur les contrats de services, que la liste des
spécialités soit définie par une directive du
ministère des Approvisionnements et Services.
Alors, M. le Président, c'est soucieux d'atteindre cette
souplesse et cette efficience, tout en assurant, cependant - et c'est fort
important - la transparence requise que je propose plutôt que le
ministère établisse dans un répertoire approuvé par
le gouvernement et publié à la Gazette officielle les
catégories de biens, les catégories de services et les
spécialités dans lesquelles les fournisseurs du gouvernement
peuvent s'inscrire lorsqu'un fichier est créé. L'amendement
proposé a justement pour but de simplifier le processus de mise à
jour du fichier en permettant au ministre de publier dans la Gazette
officielle du Québec des répertoires contenant la liste des
biens et spécialités dans lesquels les fournisseurs peuvent
être inscrits pour les fins de sélection au moyen d'un
fichier.
La publication à la Gazette officielle, en plus des moyens
de publicité à la disposition du ministère dont, entre
autres, les différents comités conjoints permanents de
fournisseurs, permettra une diffusion élargie des répertoires de
biens et spécialités et ce, pour l'ensemble des fournisseurs
potentiels. Toutefois, avant leur publication, ces répertoires devront
être soumis à l'approbation du gouvernement dans le but d'assurer
la plus grande cohérence avec l'ensemble des autres dispositions de la
loi exigeant que les politiques et les règlements pris par le ministre
n'entrent en vigueur qu'après l'approbation du gouvernement. C'est un
point important, M. le Président. Il s'agit de maintenir
également un très haut niveau, un niveau très
élevé de transparence et ça démontre la
problématique que je vous soulevais, tout à l'heure, de cet
équilibre nécessaire et important entre l'efficacité - et,
par cette loi, nous obtenons davantage d'efficacité, davantage de
rapidité - et, de l'autre côté de la balance, la
transparence qui, elle, exige que les décisions à ce niveau ne
soient pas prises par un seul ministère, mais soient prises par
l'ensemble du gouvernement.
Je veux également rappeler que la définition de toute
nouvelle spécialité à inclure au fichier des fournisseurs
de biens comme des fournisseurs de services fait l'objet d'une consultation
permanente avec les partenaires d'affaires du gouvernement par
l'intermédiaire des comités conjoints permanents de fournisseurs.
De tels comités fonctionnent déjà depuis quelques
années dans des secteurs d'activité que j'élabore, que
j'énumère rapidement, M. le Président, parce que c'est bon
de savoir qu'au ministère des
Approvisionnements et Services, on consulte les organismes requis. Nous
avons, en plus des fonctionnaires sur les comités conjoints,
évidemment, des spécialistes ou des représentants de ces
milieux qui sont en mesure de nous donner leur point de vue de façon
à ce que nos règles, nos pratiques collent à la
réalité.
Alors, nous avons des comités en génie et laboratoire, en
architecture, en arpentage, en communication, en administration, en
informatique, en construction, en acquisition de biens et nous avons
également un comité en environnement. Ce sont des comités
qui se réunissent trois à quatre fois par année et qui ont
pour mandat d'étudier le découpage de leur secteur
d'activité en spécialités, de définir les
règles de qualification relatives à chaque
spécialité et de proposer des améliorations qui doivent
être apportées à la réglementation actuelle.
Les articles 8 et 9 sont des articles de concordance, de toute
façon, puisque nous discuterons de ce projet de loi, article par
article, à la suite de son adoption de principe. Si l'Assemblée
nationale accepte cette adoption de principe, nous aurons le temps
d'élaborer davantage sur les mots de chacun des textes. voici, m. le
président, en bref et en résumé, le travail que nous avons
fait sur l'ensemble du rapport bernard. je rappelle brièvement, en
conclusion, les gestes qui ont été posés: demande à
un comité, à un groupe de travail que l'on connaît
aujourd'hui sous le nom de bernard, de vérifier le processus d'octroi
des contrats, le 7 novembre 1989. ce rapport est déposé au
premier ministre, qui l'avait demandé, le 18 mai 1990. le 4 juin 1990,
il est rendu public. dès lors, dans tous les ministères, et
particulièrement dans le mien puisque nous sommes le ministère le
plus concerné, et je précise les autres ministères qui
sont concernés par les recommandations du rapport bernard... il est
assez peu fréquent qu'un groupe de travail fasse des recommandations qui
touchent autant de ministères. alors, 22 recommandations touchent le
ministère des approvisionnements et services, 6 touchent directement le
conseil du trésor et, par la suite, 2 touchent le ministère des
transports, 3 touchent le ministère de la santé et des services
sociaux, 1 touche le ministère de l'enseignement supérieur, 1
autre touche le ministère de l'éducation du québec, et
ainsi de suite. au total: des recommandations spécifiques pour 10
ministères, 2 recommandations touchent l'ensemble des ministères
et quelques organismes également, comme, par exemple,
hydro-québec qui est touchée par une recommandation, la
recommandation 7.
Alors, ce rapport-là étant déposé, une
première réaction nous a amenés devant l'évidence
de la qualité des personnes qui ont rempli leur mandat et du
réalisme de leurs recommandations, recommandations qui partent d'un
constat que le système est valable, il faut le dire. Et je suis
quelqu'un qui est porté à attribuer le mérite, même
à un adversaire, d'avoir établi de bonnes mesures. On sait que le
fichier informatique a été établi sous l'ancien
gouvernement, bien que les soumissions publiques aient été
établies de longue date par un gouvernement libéral, en 1960.
Alors, je pense que chacun des gouvernements a eu à coeur de vouloir
améliorer la transparence tout en ayant un minimum
d'efficacité.
Dès lors, donc, nous nous sommes mis au travail dès cet
été. Un mémoire a été préparé
par mon ministère, en collaboration avec le Conseil du trésor. Il
a été acheminé aux instances décisionnelles. Ces
instances décisionnelles là ont fait des recommandations au
Conseil des ministres qui a approuvé la décision que je vous ai
lue tout à l'heure. Donc, depuis le 12 septembre, nous sommes vraiment
dans l'application de chacune des recommandations.
Aujourd'hui, ce que nous faisons ici, à l'Assemblée
nationale, nous adoptons le principe du seul projet de loi nécessaire
quant au ministère des Approvisionnements et Services pour mettre en
oeuvre une recommandation du rapport Bernard, les 21 autres recommandations ne
nécessitant pas de législation. Et je pense que l'interrogation
que tout le monde est en droit de se poser: Quand saurons-nous de quelle
façon le gouvernement applique le rapport Bernard? Y aura-il un rapport
d'étapes? Je l'ai mentionné tout à l'heure, il y aura un
rapport d'étapes, un rapport sur le suivi de la mise en application des
recommandations du groupe de travail sur le processus d'octroi de contrats, le
plus rapidement possible. Ça donnera, de façon transparente, les
gestes qui ont été posés par le gouvernement, les gestes
qui seront posés par le gouvernement et quand ils seront posés
par le gouvernement. Et ça fera la démonstration que notre
gouvernement tient beaucoup à l'intégrité et à la
transparence de son processus d'octroi de contrats.
On se rappelle que 95 % des contrats accordés le sont au plus bas
soumissionnaire conforme et que la difficulté, règle
générale, et les critiques viennent des 5 % de contrats qui ne
peuvent être accordés en fonction d'un prix, puisque ce sont des
services professionnels. Ces 5 % représentent des contrats d'environ 50
000 000 $ par année; c'est une somme appréciable. Ça
exige, bien sûr, un processus qui est tout à fait transparent;
c'est la volonté de notre gouvernement. Je le dis également,
c'était, j'en suis convaincu, la volonté du gouvernement
précédent. La lutte que nous nous faisons auprès de
l'électorat, comme parti politique, ce doit être, à mon
avis, une lutte pour défendre les moyens que nous voulons mettre en
oeuvre pour la société québécoise et non pas une
lutte sur un terrain, malheureusement, en politique, traditionnellement
employée. On s'accuse de toutes sortes de choses en campagne
électorale. J'ai toujours trouvé que c'était la partie la
plus dommageable
de la démocratie, mais, que voulez-vous, c'est inscrit dans nos
moeurs. Toutefois, avec le geste que nous posons aujourd'hui, avec les gestes
que nous poserons dans le futur, avec les gestes que nous avons posés
dans le passé, je pense que la population comprendra que notre objectif,
en tant que gouvernement, c'est l'efficacité dans la transparence.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre
des Approvisionnements et Services. Je reconnais le prochain intervenant, M. le
député de Pointe-aux-Trembles. (10 h 50)
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, d'entrée de jeu, je
voudrais dire qu'en tant que porte-parole de l'Opposition je n'ai aucun doute
sur la volonté du ministre de réformer certaines choses dans son
gouvernement, mais j'ai des doutes sur la volonté de son gouvernement de
changer certaines pratiques. Le projet de loi 103 qu'on a devant nous
représente un bien maigre suivi du rapport Bernard intitulé:
"L'efficacité dans la transparence". En effet, des 45 recommandations du
rapport, le projet de loi en applique 2. Bien sûr, M. le
Président, l'ensemble des recommandations du rapport Bernard ne
nécessitait pas des amendements par voie législative, mais je
souligne qu'on nous amène une souris qui fait suite à la montagne
qui était le rapport Bernard et qu'il n'y a pas de déclaration
ministérielle qui montre des volontés et des intentions
réelles d'appliquer les réformes que le comité Bernard
recommandait d'appliquer.
M. le Président, j'écoutais le ministre parler et je
retrouvais le ronron des rapports sur les rapports du rapport du
sous-comité qui étudie le rapport du comité principal, en
associant, dans la plus grande fraternité, le ministère des
Approvisionnements et le Conseil du trésor. Et c'est à peu
près comme de marier une souris avec une montagne, non pas à
cause de la personne qui est titulaire du poste, chacun sait que le Conseil du
trésor avale et digère tout ce qu'il touche. Et là, il y
aura un rapport d'étapes, nous dit le ministre. On ne sait pas quand,
mais le plus rapidement possible. Bref, M. le Président, j'ai bien peur
- et j'espère que ma peur n'est pas fondée et que le ministre et
surtout son gouvernement vont me convaincre que j'ai tort - que le rapport
Bernard ne soit sur une tablette glissante et qu'il ne se dirige vers la
poubelle.
Le ministre des Approvisionnements et Services, en vertu de la loi,
pourra dorénavant établir des répertoires identifiant des
catégories de biens et de services dans lesquels seront inscrits des
fournisseurs pour fins de sélection au moyen du fichier. De plus, la
construction et la location de biens pourront faire l'objet de politiques et de
règlements du ministre des Approvisionnements et Services. Cinq articles
dans le projet de loi, alors que nous nous serions attendus à au moins
45 articles reprenant les 45 recommandations du comité Bernard ou,
à tout le moins, peut-être moins d'articles, mais une
déclaration ministérielle et des arrêtés en conseil
donnant suite aux propositions du rapport Bernard.
M. le Président, qui peut être contre le fait que,
désormais, te ministère puisse établir des
répertoires identifiant des catégories de biens et de services
dans lesquels seront inscrits des fournisseurs pour fins de sélection au
moyen du fichier. C'est dur d'être contre ça, M. le
Président. Être contre ça, c'est un peu comme être
contre la maternité ou la tarte aux pommes, sauf que, dans le concret
des choses, pour tous les Vincent Rochette de l'appareil gouvernemental,
ça, ça ne dérange rien aux pratiques, M. le
Président. Et, pourtant, le groupe de travail qui avait
été formé, rappelons-le, à la suite de
révélations de pratiques et de favoritisme pendant la campagne
électorale de l'année dernière, était formé
de personnes dont l'autorité morale, la compétence et la
connaissance de ces sujets étaient indiscutables. Le ministre les a
nommées, je suis heureux de les nommer à mon tour pour montrer
que ce rapport-là pourrait donner quelque chose, s'il y avait la moindre
volonté politique de la part non pas du ministre, mais du gouvernement
de changer des choses.
Le président, M. Louis Bernard, est premier vice-président
à l'administration de la Banque Laurentienne. Tout le monde sait, M. le
Président, que M. Bernard a également été
Secrétaire général du Conseil exécutif sous le
gouvernement de M. René Lévesque et, donc, il connaît
à la fois intimement les affaires, il a donc la compétence et il
a, en plus, une connaissance poussée de l'appareil gouvernemental,
puisqu'à titre de Secrétaire général du Conseil
exécutif il a été le plus haut fonctionnaire du
Québec, celui dont tout l'appareil dépend. Il avait, avec lui, M.
Denis Bédard, Secrétaire du Conseil du trésor du
gouvernement du Québec. Alors, il ne s'agit pas d'un excité de
péquiste qui voit du mal partout, M. le Président. Il s'agit du
Secrétaire du Conseil du trésor qui connaît donc intimement
l'appareil gouvernemental et qui va peut-être être appelé
maintenant à diriger l'étude de sa propre étude puisque le
Conseil du trésor, avec le ministère des Approvisionnements et
Services, continue l'étude de l'étude de l'étude sur
l'étude de la fois que le premier ministre se trouva embarrassé
et décida de confier à un groupe de travail le soin
d'étudier les problèmes posés par les médias et par
l'Opposition.
Il y avait également sur le groupe de travail, M. Claude
Chamberiand, vice-président ingénierie et construction,
énergie électrique, approvisionnements et entretien à la
Société d'électrolyse et de chimie Alcan Itée.
Donc, une
personne de premier plan du milieu des affaires, non pas dans le secteur
bancaire, cette fois-ci, mais dans le secteur industriel; un dirigeant en vue
d'une des plus grandes entreprises du Québec, Alcan. M. Claude
Séguin, le sous-ministre du ministère des Finances du
gouvernement du Québec. Encore là, une personne qui connaît
bien l'appareil gouvernemental et qui est proche des problèmes qu'on
mentionne. Et, enfin, M. Raymond Sirois, président et chef de la
direction de Québec-Téléphone.
M. le Président, si la liste des responsables du groupe de
travail présidé par M. Louis Bernard est impressionnante, la
liste des personnes qui ont été vues par le comité Bernard
est aussi longue et intéressante. J'en mentionne quelques-unes: M. Bill
Bartlett, directeur des transactions immobilières à la
Société immobilière du Québec; M. Mario Bertrand,
alors directeur du cabinet du premier ministre, donc, non pas un
péquiste avoué, ni même un souverainiste en devenir, M. le
Président, c'était la personne de confiance du premier ministre;
M. Jean-Claude Carreau, directeur général des achats au
ministère des Affaires sociales; M. Guy Gaulin, directeur de la
direction des contrats à la Société immobilière du
Québec; M. Clermont Gignac, sous-ministre au ministère des
Affaires sociales; M. John Parisella, dorénavant directeur du cabinet du
premier ministre. Donc, une foule de personnes qui savaient... Et votre
serviteur a eu l'occasion aussi, avec un attaché politique, de
rencontrer le comité Bernard parce que, en ces matières,
l'Opposition n'a jamais dénoncé pour le plaisir de
dénoncer; c'est même une tâche plutôt
désagréable quand on met ses bottes pour aller nettoyer
l'écurie parce que les responsables de l'écurie ne se
décident pas à le faire. Ce n'est pas une tâche
agréable. Le rapport Bernard nous a donné raison sur tout ce que
nous avons dénoncé et il reste maintenant à ceux qui ont
les bottes appropriées de mettre leurs culottes, de chausser leurs
bottes et de nettoyer leurs écuries. (11 heures)
Donc, 5 articles dans cette loi alors que nous aurions pu attendre 45
articles, soit dans une loi, soit dans des arrêtés en conseil
reprenant les recommandations du comité Bernard. Manque de courage ou
absence de volonté, le projet de loi 103 est bien loin de
répondre aux attentes et aux espérances suscitées par le
rapport Bernard. À ce rapport, le premier ministre, lors du caucus
libéral de Bécancour, avait déclaré vouloir
apporter un suivi législatif. Espérons qu'il pensait à
autre chose qu'au projet de loi 103 qui est devant nous! M. le
Président, comment peut-on appeler un suivi législatif
sérieux et conséquent, un projet de loi dont la mesure principale
est d'établir des répertoires identifiant des catégories
de biens et de services dans lesquelles seront inscrits des fournisseurs pour
fins de sélection au moyen du fichier?
Encore une fois, M. le Président, je répète que
nous n'avons rien contre la mesure, que nous n'avons rien contre mieux
établir les répertoires et mieux faire travailler le fichier.
Dans son exposé, M. le Président, le ministre avait le
fair-play de souligner que le fichier central et l'instrument informatique pour
ce qui est des locations de services ou des achats de biens ont
été instaurés sous un gouvernement du Parti
québécois par la ministre des Travaux publics de l'époque,
Mme Jocelyne Ouellette. À cause des fonctionnaires qui travaillaient
avec le fichier central et sous l'influence des médias, M. le
Président, on a appelé ce fichier et cette machine
électronique Rosalie. Je ne peux m'empêcher de penser que, si
Rosalie était pure à son origine, il y a vraiment des personnes
qui, depuis, l'ont fait veiller tard et lui ont fait commettre des choses qui
ne se disent pas. M. le Président, vous le savez, un ordinateur, c'est
pur, c'est objectif et ça travaille bien, mais la population élit
des personnes qui ont la responsabilité de l'ordinateur et Rosalie, avec
ses nouveaux parents, a été amenée à faire des
choses qui ne se disent pas.
M. le Président, est-ce qu'il y aurait moyen qu'on maintienne
l'ordre dans ce salon?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous avez raison, M. le
député. Le ministre, lorsqu'il est intervenu, a pu intervenir
très facilement. Alors, je demanderais la collaboration de tous les
collègues pour que vous ayez cette même diligence de vos
collègues, M. le député.
M. Bourdon: M. le Président, j'ajoute que le ministre a
souligné un fait réel aussi, c'est que le système des
soumissions publiques comme tel a été instauré en 1960 et
dans les années suivantes par un gouvernement libéral. Les
libéraux de l'époque, M. le Président, étaient des
libéraux qui combattaient la corruption et le favoritisme qui avaient eu
cours sous le régime de Maurice Duplessis. Et ça, M. le
Président, on peut bien le reconnaître.
J'ai parlé des parents d'adoption de Rosalie. Il ne faut jamais
oublier, M. le Président, que le Parti libéral est le père
du Parti québécois puisque mon parti a été
fondé par un ancien ministre libéral, M. René
Lévesque, un ministre libéral de la grande époque de la
Révolution tranquille, à l'époque où les
libéraux combattaient le favoritisme et étaient partisans de
réformes de toutes sortes. Qui n'a pas vu, M. le Président, il y
a un certain nombre d'années, la série "Duplessis" à
Radio-Canada, où Duplessis était interprété, avec
un talent magistral, par Jean Lapointe et qui ne se souvient pas de la
conversation de Gérald Martineau qui était à
l'époque un conseiller législatif et un ministre important du
gouvernement et qui disait, et, là, je vous ramène aux
années cinquante: Chaque contrat, 5 % en argent comptant au
gouverne-
ment. Pas de jaloux, pas d'envieux, pas de problèmes.
Et les libéraux de 1960 étaient ceux qui combattaient ce
système de favoritisme et qui, comme première mesure pour
combattre le favoritisme, M. le Président, ont instauré le
régime des soumissions publiques. Donc, rendons hommage à ces
libéraux-là et tendons la main à ceux d'aujourd'hui qui
sont les héritiers de cette tradition; je pense qu'il y en a encore. Il
y a presque autant de libéraux décidés à combattre
le favoritisme qu'il y en a qui commencent à être
intéressés à réaliser la souveraineté du
Québec.
Le groupe présidé par M. Louis Bernard s'était
fixé trois objectifs: analyser le processus d'octroi des contrats du
gouvernement; identifier des améliorations à apporter au
processus actuel; et, enfin, proposer des voies de solution. Le groupe de
travail a intitulé son rapport, d'une manière extrêmement
révélatrice de ce qu'il cherchait à améliorer,
"L'efficacité dans la transparence". Il vaut peut-être la peine de
rappeler, M. le Président, les principales recommandations du rapport
Bernard.
Premièrement, que le gouvernement maintienne l'essentiel du
système en matière d'octroi de contrats, mais qu'il apporte les
ajustements nécessaires pour l'améliorer. M. le Président,
j'entends déjà, j'entends encore le ministre dire: Comme le
rapport Bernard disait de maintenir l'essentiel du système en
matière d'octroi de contrats, c'est donc que le rapport Bernard a fait
fi des dénonciations de l'Opposition du Parti québécois et
a reconnu que notre système était bon.
M. le Président, on le verra un peu après, il n'y a pas un
système qui peut résister à des personnes
décidées à le contourner. Dans ce sens-là, quand on
voit passer une voiture à 140 ou 150 kilomètres à l'heure
sur l'autoroute Jean-Lesage, et ce n'est pas toujours des voitures de ministre,
M. le Président, ni la Chrysler du lieutenant-gouverneur, on se dit: Ce
n'est pas la loi sur les limites de vitesse qui est mauvaise; ce sont les
comportements des automobilistes qui sont mauvais.
Donc, on disait: Que le gouvernement maintienne l'essentiel du
système en matière d'octroi de contrats, mais qu'il apporte une
foule d'ajustements nécessaires pour l'améliorer. Et on
mentionnait, M. le Président, la cohérence de la
réglementation; il y a eu, au cours des ans des réglementations
successives qui ont fini par faire une montagne de papier et qui n'ont pas
toujours une cohérence, un papier par rapport à l'autre.
Deuxièmement, la précision du champ d'application de la
réglementation. C'est évident, M. le Président. Qui fait
quoi et dans quel champ?
Troisièmement, l'efficacité et la transparence des
processus d'octroi de contrats. On va voir plus tard que, là, ça
devient plus sensible et que ça touche au coeur du système de
favoritisme. Je répète, M. le Président: garantir
l'efficacité et la transparence des processus d'octroi de contrats.
Quatrièmement, assurer le suivi et l'évaluation de la
performance des fournisseurs. M. le Président, cette
recommandation-là touche à l'efficacité et non pas
à la question de l'intégrité. On dit: Comme une entreprise
sérieuse, l'État doit agir en entreprise sérieuse et en
bon père de famille qui administre nos fonds et assurer le suivi et
l'évaluation de la performance des fournisseurs.
Cinquièmement, le partage des responsabilités et
l'imputabilité des intervenants gouvernementaux. M. le Président,
cela a peut-être l'air d'un jargon technocratique, mais le ministre
conviendra que, quand on parie du partage des responsabilités, on entre
dans un champ qui est sensible dans n'importe quel gouvernement. Sur les
banquettes ministérielles, du côté des ministres, M. le
Président, on peut quasiment identifier cette zone de conflit où
des ministres et des ministères s'affrontent sur le partage des
responsabilités, des chicanes où personne veut être le
Koweït du voisin, le voisin étant toujours son Saddam Hussein. (11
h 10)
Le rapport Bernard proposait également, M. le Président
que la réglementation gouvernementale soit rédigée de
telle façon qu'elle s'applique automatiquement à tous les
organismes du gouvernement ainsi qu'aux organismes partiellement assujettis et
aux organismes actuellement exempts. Et ça impliquait le principal
organisme qui dépend du gouvernement, M. le Président,
Hydro-Québec, dont le rapport Bernard disait: Qu'Hydro-Québec
soit amenée à faire état de l'application de sa politique
d'octroi de contrats dans le cadre de sa comparution annuelle en commission
parlementaire.
M. le Président, j'insiste sur l'importance de cette
réforme que le rapport Bernard préconisait dans le cas
d'Hydro-Québec. Tout à l'heure, M. le Président, le
ministre a souligné, avec raison, que les 95 % des contrats du
gouvernement qui sont donnés, selon le régime de soumissions, au
plus bas soumissionnaire ne faisaient pas l'objet de critiques très
sérieuses. Habituellement, M. le Président, quand on ne recourt
pas au plus bas soumissionnaire, c'est que sa soumission n'est pas conforme. Il
y a un problème qui est posé à l'occasion. C'est que, si
on ne prend pas garde et qu'on prend un peu trop vite le plus bas
soumissionnaire - et ça s'est présenté - ou si le prix qui
est fait est en bas du prix coûtant, il y a des cas où
l'État peut se retrouver avec un problème d'entrepreneur en
faillite ou qui triche sur les plans et devis pour pouvoir se rattraper. Le
ministre ajoutait, M. le Président, que les problèmes ont surgi
dans les 5 % des contrats où, actuellement, le prix n'est pas un facteur
et ça, ce sont les contrats principalement de deux ministères,
Santé et Services sociaux, d'une part, et Transports, d'autre part,
qui
sont donnés à des professionnels qui, tous, quels qu'ils
soient, touchent le même pourcentage de la valeur des contrats.
J'étais heureux d'entendre le ministre le dire parce que je me
disais: La population m'a entendu l'année dernière quand j'ai
condamné certaines pratiques et, au moins, de l'autre côté
de la Chambre, il y avait un ministre qui écoutait et qui comprenait.
C'est là qu'il y a des problèmes: dans le choix des
ingénieurs, des firmes d'ingénieurs et d'architectes qui
réalisent des contrats soit aux Transports, soit à la
Santé et aux Services sociaux. Mais le ministre ajoutait, M. le
Président, qu'on parle d'une valeur de contrats de 50 000 000 $, ce qui,
sur un budget global de l'État d'à peu près 35 000 000 000
$, est finalement peu. Il disait avec raison: C'est peu, mais il faut quand
même s'en occuper parce que 50 000 000 $ à prendre, ça
suscite des appétits, quel que soit le parti au pouvoir, et il faut
s'assurer que tout le monde est traité avec justice.
À cet égard, M. le Président, je voudrais assurer
le ministre que, pour ma part et avec mes collègues qui ont des
dossiers, on n'a pas une optique et une façon de voir les choses qui
est, dans le fond, comme maniaque à l'égard de la moralité
publique. Ce qu'on défend, M. le Président, c'est
l'égalité des citoyennes et des citoyens vis-à-vis de la
loi et vis-à-vis de l'État. Je m'explique. Ce que nous
défendons, M. le Président, c'est que le gouvernement du
Québec a des relations d'affaires avec des firmes et des individus, et
nous pensons que ces relations d'affaires doivent être exemptes de tout
favoritisme, que ce soit du favoritisme administratif, ou du copinage, ou du
favoritisme politique partisan. Pourquoi, M. le Président? Pas juste
parce que c'est une question d'intégrité. Oui, c'en est une.
C'est une question d'intégrité, mais une firme
d'ingénieurs ou une firme d'architectes, M. le Président, doit
être traitée selon sa compétence et sa capacité
d'effectuer les travaux dans le délai.
À cet égard, M. le Président, le rapport Bernard
préconise d'autoriser, par la loi, des appels de soumissions à
des professionnels avec un prix, pour que ça puisse être au plus
bas soumissionnaire. Là-dessus, M. le Président, j'ajoute que
c'est sûr que, quand, la compétence ayant été
vérifiée, le coût devient le facteur, ça, ça
devient objectif, puis ça enlève toute place aux tripoteurs.
Mais, M. le Président, 50 000 000 $ de contrats à des firmes
d'ingénieurs et d'architectes, c'est beaucoup, c'est énorme. Et
on a vu, à l'occasion, des fortunes se faire suite à
l'élection du parti politique qui est actuellement au pouvoir. Et c'est
reprehensible.
Mais le gros de l'affaire, c'est HydroQuébec qui, d'ici 10 ans,
va accorder 62 000 000 000 $ de contrats de construction, de barrages et de
lignes électriques. Et ça, 62 000 000 000 $ de contrats en 10
ans, c'est une moyenne de 6 000 000 000 $ par année. Alors, 6 000 000
000 $ par année. Si les dépanneurs attirent les "brokers", 62 000
000 000 $ de contrats, ça suscite des appétits
considérables. Et le rapport Bernard - et c'était une des
suggestions de mon parti - a dit: Qu'Hydro-Québec soit amenée
à faire état de l'application de sa politique d'octroi de
contrats dans le cadre de sa comparution annuelle en commission
parlementaire.
C'est ainsi, M. le Président, qu'on pourrait demander à
Hydro-Québec d'éclaircir les circonstances dans lesquelles le
contrat pour la construction d'un tunnel sous le fleuve, à Gron-dines, a
été donné. Pourquoi a-t-on allongé le délai
des soumissions pour permettre à une firme à numéro de
pouvoir avoir un numéro de bureau dans un bureau de Montréal?
Puis, il y a bien des questions qu'on pourrait poser à
HydroQuébec. Le , rapport Bernard recommandait également que le
ministère des Approvisionnements et Services procède à la
mise à jour périodique des répertoires de fournisseurs de
biens et émette une directive générale pour
préciser les modalités de sélection des fournisseurs de
biens. On s'attaque un peu, dans la loi qui est devant nous, à cette
recommandation.
Plus loin, le rapport Bernard proposait que, pouf les appels d'offres
sur invitation, les comités de sélection soient composés,
outre le secrétaire, de trois membres ainsi désignés: deux
membres appartenant au ministère ou à l'organisme, un membre
externe au ministère ou à l'organisme, agréé par le
ministère des Approvisionnements et Services. Les appels d'offres sur
invitation, ce n'est pas, dans l'activité de l'État,
l'équivalent d'une invitation à un cocktail. C'est qu'il y a des
valeurs de contrats où on dit que ça ne vaut pas la peine de
dépenser de l'argent et de subir des délais pour faire un appel
d'offres public, mais c'est parfaitement normal de le faire. Et, à cet
égard, le ministère des Approvisionnements et Services a un
fichier. On relève les fournisseurs de biens et services en cause et on
leur écrit pour leur demander de faire une offre. Et, à cet
égard, le comité Bernard propose que les comités de
sélection, pour recevoir ces offres et en disposer, soient
composés de trois personnes: deux membres appartenant au
ministère ou à l'organisme qui est en demande et un membre
externe au ministère ou à l'organisme, agréé par le
ministère des Approvisionnements et Services.
Sur ce dernier point, M. le Président, on en vient à une
réforme majeure du rapport Bernard qui veut une présence
significative du ministère des Approvisionnements et Services dans tous
les comités de sélection pour donner des contrats de biens ou des
contrats de services dans tous les ministères du gouvernement et dans
tous les organismes, y compris Hydro-Québec. Pourquoi, M. le
Président? C'est que le ministère des Approvisionnements et
Services est à la fois
responsable de tous les immeubles du gouvernement du Québec et de
tous les achats de biens et de services du gouvernement. Je me trompe en disant
"tous les achats". Je devrais dire presque tous les achats. Et ce que le
rapport Bernard proposait, c'est que le ministère ait son mot à
dire dans tous les comités de sélection et qu'il se porte garant
de l'efficacité, de la transparence et de l'intégrité du
processus. (11 h 20)
Maintenant, pour les appels d'offres publics, les comités de
sélection, selon le rapport Bernard, devraient être
composés, en plus du secrétaire qui n'aurait pas droit de vote,
de cinq membres: trois membres appartenant au ministère ou à
l'organisme, un membre externe nommé par Approvisionnements et Services
et un membre externe au gouvernement relié au champ de compétence
du contrat à être octroyé. Donc, cinq membres, M. le
Président, trois du ministère ou de l'organisme, un membre
externe au ministère ou à l'organisme et agréé par
le ministère des Approvisionnements et Services et, enfin, un membre
externe au gouvernement relié au champ de compétence du contrat
à être octroyé. Le dernier membre, c'est très
important, parce que si c'est un contrat de services pour des firmes
d'architectes ou pour des firmes d'ingénieurs, il serait logique que le
membre externe au gouvernement relié au champ de compétence du
contrat à être octroyé, bien, ce soit quelqu'un de l'Ordre
des ingénieurs ou quelqu'un de l'Ordre des architectes. Pour un contrat
de construction, on pourrait avoir quelqu'un qui connaisse la construction et
qui ne soit pas une partie intéressée dans le contrat à
donner.
On demandait également, dans le rapport Bernard, que le
sous-ministre ou le dirigeant d'organisme s'assure de la rotation des membres
qu'il désigne et qu'il s'assure que les fonctionnaires
désignés respectent toutes les prescriptions du code
d'éthique de la fonction publique. Là, on en vient à une
recommandation majeure qui touche aux accusations que l'ingénieur
Deschênes, les médias et l'Opposition officielle ont
formulées. Je le répète, M. le Président: Que le
sous-ministre ou le dirigeant d'organisme s'assure de la rotation des membres -
qu'on change pour qu'il n'y ait pas de mauvaises habitudes qui se créent
- et qu'il s'assure que les fonctionnaires désignés respectent
toutes les prescriptions du code d'éthique de la fonction publique.
Si le rapport Bernard dit qu'il faut s'assurer de ça, c'est que
ça n'a pas toujours été assuré. Quand le
sous-ministre d'un ministère a été lui-même membre
du comité de financement d'un candidat à la direction du Parti
libéral, en 1983, il n'est pas bien placé pour enseigner aux
autres l'éthique puisque lui-même était au coeur du
processus partisan. Le rapport Bernard recommandait également que les
autorisations pour accomplir des travaux qui occasionnent des
suppléments aux contrats de construction soient accordées
seulement par la haute direction des ministères et des organismes.
Encore là, c'est connu dans le milieu que, souvent, le plus bas
soumissionnaire pour un contrat, c'est la firme qui connaît la liste
secrète des extra qui vont venir après. Quand on a la liste
secrète des extra qui vont venir après, on peut soumissionner en
bas du prix coûtant et se reprendre sur les extra. On verra plus tard
qu'il y a des extra qui ont été pas mal chouettes, dans le cas de
Beaver Asphalte, par exemple, une compagnie bien identifiée au Parti
libéral du Québec.
On dit: Que le ministère des Transports définisse une
procédure interne pour l'autorisation des suppléments. Donc, il
faut qu'elle soit faite pour s'assurer qu'il n'y ait pas de favoritisme dans
l'octroi des extra, des suppléments. Une autre recommandation
très importante, on dit: Qu'avant d'aller en appel d'offres pour la
location d'espaces, le périmètre de recherche défini par
la Société immobilière du Québec doit être
approuvé par le ministère des Approvisionnements et Services. On
va voir plus tard qu'il y a au moins un cas où le
périmètre recherché, ça ne touchait pas beaucoup
d'immeubles et ça favorisait une figure bien connue des questions de
terrain, de zonage agricole à Laval, etc.
M. le Président, je voudrais résumer, en rapport avec le
sujet à l'étude et la nécessité d'une
réforme, quelques cas gênants pour le gouvernement. Le premier
cas: Jacques Alepin, fonctionnaire au ministère des Transports,
chargé de recommander les autorisations pour les dépassements de
coûts et la substitution de matériaux pour les travaux importants
de voirie dans la région de Montréal. M. Alepin fut
également collecteur de fonds pour le Parti libéral, sous
l'égide de Tommy D'Errico. Or, comme par hasard, la firme Beaver
Asphalte, que possède Tommy D'Errico, fut l'une des grandes
bénéficiaires des nombreux dépassements de coûts au
ministère des Transports. Seulement pour un contrat...
Le Vice-Président
(m. bissonnet): s'il vous
plaît, mme la députée, je vous demanderais votre
collaboration. si vous voulez poursuivre, m. le député.
Mme Bleau: M. le...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous
plaît!
Mme Bleau: Je voudrais avoir juste une...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de
règlement, oui.
Mme Bleau: ...directive, s'il vous plaît.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est
quoi?
Mme Bleau: Est-ce qu'il est permis, comme ça, d'avancer
des noms sans que personne ne puisse rien faire pour empêcher ça?
Je trouve ça épouvantable.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la
députée, M. le député de Pointe-aux-Trembles
intervient sur le projet de loi 103 et, pour le moment, il intervient sur fe
projet de loi 103 et, à mon point de vue, il est dans l'ordre. Donc, je
permets au député de poursuivre.
M. Bourdon: M. le Président, je donne des noms parce que
le ministre lui-même a mentionné qu'il peut y avoir des
problèmes d'intégrité à l'occasion. Et le rapport
Bernard parle de changer les règles pour les dépassements de
coûts pour s'assurer que ce n'est pas donné à des amis du
parti au pouvoir. J'entends un député libéral me dire
qu'il n'y a pas d'hommes d'affaires au Parti québécois; c'est
inexact.
Une voix: II n'y en a pas gros.
M. Bourdon: II y en a beaucoup moins que dans le Parti
libéral et je pense qu'on travaille à changer ça.
Une voix: Ils sont tous dans les syndicats.
Le Vice-Président (m. bissonnet): s'il vous plaît!
m. le député de papineau, s'il vous plaît! m. le
député de pointe-aux-trembles, si vous voulez poursuivre.
M. Bourdon: M. le Président, les hommes d'affaires qui
adhèrent au Parti québécois ne viennent pas pour obtenir
des contrats et, après ça, se négocier des
dépassements de coûts. Et le trésorier de notre parti n'est
pas un entrepreneur en construction de routes, ce n'est pas un poseur
d'asphalte.
Et, à cet égard, je voudrais faire observer au
député qui m'interrompt continuellement que je n'ai pas
l'intention d'avoir honte qu'il y ait des syndiqués et des syndicalistes
qui appuient le Parti québécois. S'occuper d'unions, ce n'est pas
une honte, et il y a plus de gloire à s'occuper d'un syndicat local
qu'à être un poseur d'asphalte qui tète le gouvernement
pour avoir des contrats et des extra.
Seulement pour un contrat de réfection d'un viaduc, dans la ville
de Saint-Pierre, le dépassement fut de 1 000 000 $ au profit de Beaver
Asphalte et de son dirigeant, Tommy D'Errico, le même qu'on a
retrouvé avec des terrains, dans le zonage agricole, à Laval. Je
donne le nom parce qu'il existe, Tommy D'Errico, et parce qu'il profite.
Deuxième cas: l'octroi d'un contrat à la firme T.J.A., de
Rivière-du-Loup, par la Société immobilière du
Québec. La firme avait obtenu le contrat de relocalisation des bureaux
du ministère de l'Énergie et des Ressources à
Rivière-du-Loup alors qu'elle ne respectait pas un article important de
l'appel d'offres. Il va sans dire que la firme T.J.A. était du bon bord.
Heureusement, grâce à notre intervention et grâce à
une décision rapide du ministre des Approvisionnements et Services dont
dépend la Société immobilière du Québec, la
question s'est réglée et la soumission qui n'était pas
conforme a été rejetée.
C'est donc dire que notre action a un but bien précis: corriger
des situations. Et je dois dire que, jusqu'ici, au ministère des
Approvisionnements et Services, quand l'Opposition a acheminé, en
Chambre ou autrement, un cas au ministre, il a pris action et il a
corrigé la situation. Écoutez, M. le Président, on n'est
pas des gens qui croient à l'angélisme en politique. Quand, le
moment venu, un jour, je ne sais pas quand, le Parti québécois
formera le gouvernement - parce que, quand on parte d'alternance, c'est dire
que chaque parti, dans cette Chambre, finit un jour par être au
gouvernement - ça se pourrait qu'à ce moment-là il y ait
des gens qui aient des tentations et qu'il y ait des situations anormales. Et
quand l'Opposition de cette époque-là nous le fera observer, on
corrigera la situation, et c'est ce que le ministre des Approvisionnements et
Services, M. le Président, a fait dans le cas de Rivière-du-Loup
et je le salue, je le félicite de l'avoir fait. M. le Président,
qu'on m'applaudisse ou qu'on grogne, je trouve que ça dérange.
(11 h 30)
Un troisième cas: la location d'un immeuble appartenant à
M. Alex Kotler devenu célèbre avec l'affaire du dézonage
agricole à Laval au printemps 1989. L'appel d'offres était si
précis, quant à la définition du périmètre,
qu'à peu près seulement le 50, rue Crémazie, à
Montréal qui appartenait à M. Kotler, pouvait y répondre,
un contrat de location de plusieurs millions de dollars était en cause.
Le journal La Presse a dénoncé la situation et, encore une
fois, le ministère des Approvisionnements et Services a fait un nouvel
appel d'offres et c'est une nouvelle entreprise qui l'a eu. M. le
Président, je n'hésite pas à dire que voilà un
autre exemple de décision rapide et intègre du ministre des
Approvisionnements et Services. Et ça tombe bien, M. le
Président, parce que le titulaire agit dans ce sens-là et, en
plus, il serait logique que le ministère des Approvisionnements et
Services ait son mot à dire dans tous les contrats des ministères
et des organismes puisque c'est le ministère qui est, dans le fond, le
mandataire du gouvernement pour louer, acheter les immeubles, acheter les biens
et acheter les services. Alors, M. le Président, ce serait logique qu'on
donne rapidement suite au rapport Bernard et que le Conseil du trésor ne
retarde pas les choses
indûment, ce qui est ma crainte. D'une certaine façon,
à cet égard, M. le Président, le ministre a plus d'amis de
ce côté-ci de la Chambre que dans le cabinet des ministres et
j'espère qu'il va s'en faire assez aux cabinets des ministres pour
pouvoir passer les réformes qui s'imposent. quatrièmement,
rappelons l'ensemble des dépassements de coût au ministère
des transports. d'avril à novembre 1989 - ce n'est pas une
période très longue, m. le président - 26 000 000 $ ont
été accordés en supplément de coût pour tout
le québec, une augmentation moyenne de 28 % sur les coûts
initiaux. à montréal, pour la même période, cette
augmentation moyenne a atteint 31 %. m. le président, j'ai entendu en
chambre, j'ai vu et entendu à la télévision le ministre
délégué aux transports expliquer ça avec une
très brillante formule qui touche au quotidien des
québécoises et des québécois: un viaduc ou
l'autoroute métropolitaine, quand on touche à ça, c'est
comme un particulier qui rénove sa maison. on a toutes sortes de
surprises. c'est vrai, je n'en disconviens pas, mais, quand une entreprise, m.
le président, obtient l'autorisation de substituer aux matériaux
prévus au devis un matériau qui coûte dix fois moins cher,
on n'en est plus aux surprises dans la rénovation, on en est à
l'entrepreneur qui vous facture pour du chêne et qui utilise du pin, un
bois mou qui ne résiste pas à l'usage.
D'autre part, M. le Président, si le gouvernement doit faire une
réflexion sur la notion de plus basse soumission, quand il s'agit de
travaux de rénovation d'une route, d'un viaduc ou d'une autoroute, eh
bien, qu'il fasse la réflexion et qu'il nous ramène ses
conclusions. Le problème que ça pose, c'est que quand, pour
l'autoroute Métropolitaine, par exemple, les coûts sont de 20 000
000 $ supérieurs a ce qui avait été prévu,
ça peut être pour des raisons, M. le Président,
parfaitement légitimes parce qu'on a eu des surprises, mais là
ça pose un grand nombre de problèmes. D'abord, on a payé
à prix d'or des ingénieurs pour analyser la structure et savoir
ce qui pouvait en arriver. M. le Président, je regrette, mais la science
et la technologie ont fait des progrès au point qu'on peut
démolir une partie d'un ouvrage et définir ce qui le ronge, cet
ouvrage-là. D'autre part, M. le Président, quand il y a de tels
dépassements de coût, ça suscite des soupçons et des
récriminations chez ceux qui n'étaient pas le plus bas
soumissionnaire. Vous savez, la firme qui arrive, par exemple, à 500 000
$ de plus que l'autre et qui s'aperçoit que l'autre à 3 000 000 $
d'extra, elle dit: Est-ce que c'était vrai que c'était le plus
bas soumissionnaire? Et s'il faut trouver d'autres bases pour ce type de
contrats, où ce serait le taux horaire qui serait en cause ou d'autres
méthodes, peu importe, il faut le faire. Et, d'autre part, il faut se
poser des questions sur les firmes d'ingénieurs qui ont
préparé les estimés qui ont don- né lieu aux
soumissions.
Enfin, M. le Président, l'affaire Deschênes, où ce
dernier, ingénieur, révélait les nombreux tripotages des
comités de sélection du ministère de la Santé et
des Services sociaux, notamment pour l'octroi de contrats de construction ou de
réfection d'établissements du réseau de la santé.
Donc, M. le Président, ce n'est pas de gaieté de coeur et pour
faire fâcher le député de Groulx que j'ai donné
cette liste. C'est parce que cette liste existe, c'est parce que le
problème existe. Ce qu'on veut, ce n'est pas la mort du pécheur,
c'est son repentir, sa contrition et son ferme propos. Et, à cet
égard, nous voulons que le pécheur se confie et se confesse au
ministre des Approvisionnements et Services et que ce dernier, avant de donner
l'absolution, s'assure du repentir du pécheur.
M. le Président, il y a une chose qui est sûre. Quel que
soit le parti politique au pouvoir, des milliards de contrats, ça
suscite des appétits très importants. Il faut que l'État
se donne les moyens d'assurer la transparence, l'efficacité et
l'intégrité du système.
Le ministre devrait relire, je pense, à cet
égard-là, ce qui s'est publié à l'époque de
la publication du rapport Bernard. Je pense, entre autres, à un
editorial de Gilles Lesage dans Le Devoir et à un editorial de
Pierre Vennat dans La Presse, pour se convaincre de l'urgence d'agir.
Là-dessus, je souligne que, lorsqu'on parle d'urgence d'agir, on a lieu
d'être inquiets parce que le rapport Bernard a été
publié il y a maintenant six mois, et le ministre, malgré ses
efforts, n'a pas pu obtenir de résultats plus tangibles que d'avoir une
loi qui touche 2 des 45 recommandations du rapport Bernard.
À cet égard, ce qu'on attend, et au plus tôt, M. le
Président, c'est un rapport d'étape précis d'où
sont rendues les 43 autres recommandations. Le ministre a dit qu'il ferait ce
rapport d'étape, mais il n'a même pas dit quand. Alors, il faut
que ça bouge un peu et que le ministre, qui en est capable, secoue un
peu la cage pour que les choses avancent.
M. le Président, le 5 juin 1990, Gilles Lesage disait, du rapport
de M. Louis Bernard, et je cite: "Le document présenté par M.
Louis Bernard fourmille d'observations et de recommandations d'ordre
administratif, aptes à améliorer un système valable qui a
fait ses preuves. Sur le plan politique, toutefois, le comité ne porte
aucun jugement sur quelque décision ou acte préjudiciable. En ce
sens, il laisse en appétit les amateurs d'histoires croustillantes. Il
n'en reste pas moins que, avec cet outil de travail, le gouvernement n'a
désormais plus d'alibi au laxisme." Donc, M. le Président, le
comité Bernard n'avait pas pour but d'étudier les accusations que
nous et les médias avons portées sur des cas de favoritisme. Il
n'y avait rien de croustillant, mais il y avait des recommandations
précises pour corriger ce que nous, avec d'autres, avions
dénoncé.
Et M. Lesage disait, je répète: "Le gouvernement n'a
désormais plus d'alibi au laxisme. " (11 h 40)
Un peu plus loin dans son editorial, M. Lesage disait, et je cite: "Si
le gouvernement ne donne pas un vif coup de barre vers une plus grande
efficacité, l'on saura qu'il était plus intéressé
à gagner du temps avec le comité Bernard et, comme le
soupçonnait le chef de l'Opposition, à se débarrasser de
l'Opposition plutôt que du favoritisme allégué depuis un
an, surtout durant la campagne électorale." Fin de la citation.
Voilà un observateur objectif et impartial de la scène
politique, M. le Président, qui, dès la publication du rapport
Bernard disait: J'espère qu'on n'est pas en train de cacher le squelette
dans une garde-robe et qu'on n'est pas en train de maquiller ce qui se passe.
Un peu plus loin, M. Lesage écrivait, et je cite: "Même avec les
prescriptions les plus rigoureuses, les décisions à prendre ne
sont pas mathématiques. Il y entre donc une grande part de jugement
personnel, surtout au titre du suivi des contrats et de l'évaluation des
résultats, des biens et services rendus. Ce qu'il faut, pour
éviter toute méfiance ou soupçon dommageable -
écrit toujours M. Lesage - c'est que l'inévitable part de
discrétion soit renforcée et mieux encadrée, de
façon à empêcher toute manipulation indue. Le rapport fait
à cet égard des recommandations pertinentes pour augmenter la
rigueur et l'impartialité. Par exemple, il y a moins de risques de
collusion - comme on l'a allégué l'automne dernier -s'il y a
rotation des membres des comités de sélection." Fin de la
citation. C'est clair, M. le Président, que M. Vincent Rochette, par
exemple, a siégé bien trop longtemps sur les comités de
sélection, qu'il était bien trop près du ministre des
Transports d'alors et bien trop impliqué dans la collecte de fonds pour
le parti au pouvoir, pour être vraiment objectif sur les comités
de sélection auxquels il siégeait.
Un peu plus loin, M. Lesage écrivait, toujours en juin 1990:
"Malheureusement - et je le cite - tout en accueillant favorablement
l'étude dont il a lui-même pris l'initiative l'automne dernier, le
premier ministre ne fait pas preuve de célérité." M. le
Président, on est en juin et l'auteur dit que le gouvernement ne fait
pas preuve de célérité. Eh bien là, on n'est plus
en juin. L'automne est venu, les feuilles sont tombées, y compris la
feuille d'érable qui tombe, cette année, à un rythme
incroyable, et là, on se retrouve en décembre, Noël est
à vue de nez, M. le Président, et on a toujours 2 petites
recommandations du rapport Bernard sur 45 qui sont vraiment en cours. Pour le
reste, le ministre est obligé de faire rapport qu'au Conseil des
ministres on veut une étude de l'étude de l'étude par un
comité et sous-comité et de nombreuses rencontres.
Je reviens à la citation, M. le Président. M.
Lesage disait, après avoir blâmé le peu de
célérité du gouvernement, et je cite: "Bien au contraire.
Les ministres en cause devront faire des analyses, sous la coordination du
secrétaire général du gouvernement. Mais celui-ci a
jusqu'au 31 janvier prochain, soit huit mois, pour faire rapport à M.
Bourassa." Et, à cet égard, M. le Président, je suis un
peu inquiet parce que, là, je lis ça et je dis: Jusqu'au 31
janvier prochain. Mais là, le ministre dit qu'il y aura un rapport
d'étape, il ne sait pas quand. N'oubliez pas la date: 31 janvier... Il y
aura un rapport sur le rapport par le secrétaire général
du gouvernement au premier ministre.
Je continue la citation: "Ce délai est anormalement long. S'il
voulait faire preuve d'efficacité et de transparence, comme il le
prétend, le chef du gouvernement s'empresserait de mettre en oeuvre
quelques recommandations qui vont de soi. Le premier ministre attend et
esquive. Ça lui ressemble. Après, il s'étonnera de la
méfiance et du scepticisme renaissant, comme il y a 15 ans,
hélas." Alors, c'est ce qu'écrivait M. Lesage dans le journal
Le Devoir.
M. Pierre Vennat, dans La Presse, pariait lui aussi de tout ce
qui est arrivé à Rosalie, qui est l'ordinateur du gouvernement
qui distribue les contrats. Et il pariait, en plus, d'une nomination d'un
collecteur de fonds à la Caisse de dépôt et placement, mais
je ne puis en parier, M. le Président, vu mon souci de respecter la
pertinence du débat.
M. le Président, il est un point-Dès voix: Ha, ha,
ha!
M. Bourdon: M. le Président, sur la pertinence, je peux
confesser que, l'année dernière, peut-être à
certains moments je me suis égaré. Mais le rapport Bernard
portait sur l'intégrité, les attributions de contrats, et le
ministre n'a parié que d'attribution de contrats, il a mentionné
l'intégrité et j'ai donné des exemples où, sur la
route de la pureté, il y a des gens qui sont tombés, M. le
Président. Donc, j'étais pertinent au débat qui est devant
nous et, M. le Président, il y a un élément essentiel du
débat, c'est le financement des partis politiques.
Je ne suis pas d'accord avec le ministre quand il mentionne que la
limite de 3000 $ de contributions de particuliers, que cette limite-là
est peut-être dépassée. Moi, je pense que la loi devrait
rester dans cet état, à l'égard de cette limite-là.
D'autant, M. le Président, que 30 fois 3000 $, ça fait 90 000 $.
Ce que je trouve, par ailleurs, extrêmement correct du ministre, ce sont
les décisions que lui a prises dans son comté pour assurer un
financement populaire de son parti. Il a parié de 800 personnes à
50 $ le couvert en interdisant l'achat par une personne de plus de deux billets
parce qu'on le sait là - le fédéral entre autres, et c'est
très lourd à
l'occasion, et au Québec aussi - on voit une firme acheter 200
billets à 100 $ - ça fait 20 000 $ - et faire semblant de les
revendre à ses employés.
Donc, dans le comté du ministre des Approvisionnements et
Services, on s'assure d'un financement parce que 800 fois 50 $, ça fait
une somme rondelette de 40 000 $ et il doit en rester quelque chose. Et je
trouve ça parfaitement correct, M. le Président. Bien... M. le
Président, ceux qui applaudissent devraient me laisser terminer ma
phrase parce que, après, ça se pourrait qu'ils changent
d'état d'esprit: J'aime mieux les soupers-bénéfices du
ministre des Approvisionnements et Services à 50 $ le couvert dans sa
Beauce natale, M. le Président, que les tournois de golf à 3000 $
au Club de golf Islesmere où, avec 200 invités dans la même
journée, ça faisait une somme rondelette de 600 000 $, M. le
Président. Et, dans ces tournois de golf, on voyait surtout, M. le
Président, des ingénieurs et des architectes. À croire que
leurs contrats gouvernementaux leur laissent "en masse" de temps pour jouer au
golf.
L'autre aspect, M. le Président, ce sont ces soupers où on
paie 1000 $ et il y a en prime une rencontre avec un ministre. Et, M. le
Président, on n'en est pas, loin de là, au Québec, au
degré de corruption qui existe en France au plan politique et à
celui qui existe aux États-Unis. Mais je pense qu'il faut être
vigilant et je promets au ministre des Approvisionnements et Services mon appui
le plus entier dans sa lutte pour avoir des modes d'attribution de contrats qui
feront en sorte que les Tommy D'Errico et les Vincent Rochette ne pourront plus
influencer et manipuler le système à leur profit.
Dans ce sens, on ne peut pas voter contre la loi parce que ça
serait être comme le mariage et la tarte aux pommes, mais c'est bien peu
et je dis au ministre: Lâchez pas, continuez, battez-vous, vous aurez
notre appui enthousiaste.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Pointe-aux-Trembles. Je reconnais maintenant le
prochain intervenant, M. le député de Lotbinière. M. le
député. (11 h 50)
M. Lewis Camden
M. Camden: Merci, M. le Président. La Loi sur le
ministère des Approvisionnements et Services confie au ministre la
responsabilité de proposer au gouvernement des politiques relatives
à l'acquisition et à la fourniture de biens et services. Le
projet de loi 103 précise les modalités et les pouvoirs
confiés au ministre dans l'accomplissement de son mandat. Le groupe de
travail présidé par M. Louis Bernard, qui a étudié
le processus d'octroi de contrats du gouvernement, avait formulé des
recommandations à ce sujet et je cite: "Que le ministre des
Approvisionnements et Services soit chargé d'élaborer et
de proposer au gouvernement des politiques et des règlements pour les
ministères et les organismes publics dans les matières suivantes:
l'acquisition des biens, l'acquisition des services, la construction et
l'acquisition d'espaces."
Comme on le verra, la politique d'achat, aussi bien que celle de
l'acquisition, du gouvernement québécois a des incidences
majeures sur l'économie du Québec. Aussi, on me permettra de
rappeler, d'abord, les grands axes autour desquels s'est érigé le
développement du Québec moderne, dans le but d'y voir les
incidences au niveau de l'expansion du gouvernement québécois au
fil des années; ensuite, les achats et acquisitions effectués par
le gouvernement du Québec, qui génèrent des
activités majeures au niveau du développement économique
de chacune de nos régions; le souci de transparence du gouvernement
libéral qui a conduit à l'analyse du processus d'octroi de
contrats effectuée par un groupe de travail présidé par M.
Louis Bernard; et, enfin, l'élaboration du projet de loi 103 qui
précise les pouvoirs du ministre responsable des achats ou acquisitions
de biens, de services, la construction, ou d'espaces.
M. le Président, le projet de loi 103 comporte des incidences
majeures, aussi bien sur la notion de transparence du gouvernement
québécois qu'en matière économique ou de
développement régional. Pour bien en comprendre la perspective,
il faut replacer ce projet législatif dans son véritable
contexte.
Pensons d'abord au développement économique du
Québec des années soixante. Nous avions, à cette
époque, un long retard à rattraper, par exemple, en
matière de développement régional, en matière
d'éducation, où on a dû se doter d'écoles un peu
partout. De plus, un contexte favorable de croissance économique assura,
au Québec, une période de prospérité. En fait, tout
était à faire sur le territoire québécois: des
infrastructures industrielles à ériger, des ressources naturelles
à exploiter et à transformer. Un gouvernement libéral qui
assuma un leadership, à cette époque, jamais vu auparavant.
M. le Président, disons-le franchement, on était loin de
parler de rationalisation, de mises à pied, de fermetures d'entreprises,
à cette époque de croissance extraordinaire de l'économie.
Bien au contraire, le courant de Pentrepreneurship" a pris tout son sens au
cours de cette période.
Pour sa part, l'appareil d'État suivait, lui aussi, la même
courbe. On assistait à des événements historiques, tels
ceux de la création de plusieurs nouveaux ministères
québécois, dont les budgets se sont accrus à des vitesses
parfois faramineuses. Or, chacun de ces ministères devait, à son
tour, se doter d'outils de travail afin d'assumer son mandat correctement, dont
les acquisitions d'immeubles, de fournitures de matériel, d'appels
d'offres publics, de soumissions pu-
bliques, d'octrois de contrats, tous des termes familiers dans le
secteur des Approvisionnements et Services. Donc, on comprend en quoi le
rôle de l'État québécois fut capital dans
l'édification du Québec moderne qu'on connaît
aujourd'hui.
Certains opinent que l'endettement du Québec contracté
à cette époque a eu des conséquences à moyen et
long terme. D'autres, au contraire, défendent l'idée que
l'État québécois a rempli son rôle de manière
à ce que soit rattrapé le retard qu'avait pris le Québec
par rapport à d'autres provinces. On pense également à la
construction du réseau routier québécois qui n'aurait pas
connu un tel développement sans une intervention majeure de
l'État québécois.
Or, pour réaliser de tels travaux, l'État
québécois a dû mettre en place une série d'outils de
développement économique, lequel phénomène a permis
l'édification d'un véritable réseau d'entreprises
privées, petites, moyennes et grandes, dans toutes les régions du
Québec. On devine aussi l'effet d'entraînement de la politique
d'achat du gouvernement québécois, avec ses forces et ses
faiblesses.
L'une des forces de cette politique d'achat du gouvernement s'est
très certainement reflétée sur l'édification d'un
réseau de petites et moyennes entreprises qui ont contribué
à la création d'emplois partout au Québec et à la
multiplication des sous-secteurs d'activités sur l'ensemble du
territoire du Québec. Une des faiblesses a peut-être reposé
sur la façon dont a été élaboré le processus
d'octroi de contrats. Mieux connu sous le nom de Rosalie, on disait, à
l'époque du Parti québécois, que ce fichier des
fournisseurs allait être infaillible et allait contrer les dangers de
patronage d'une façon quasi absolue. Je crois que l'ancien gouvernement
a eu un comportement, ma foi, un peu audacieux. On se souviendra, en effet,
que, chiffres à l'appui, le Parti libéral du Québec avait
démontré que le fichier des fournisseurs du Québec ne fut
pas toujours utilisé pour l'octroi de contrats.
L'Opposition officielle de l'époque avait effectué, en
1982, un relevé du nombre et des montants des contrats alloués en
matière de sondages et de publicité qui furent très
révélateurs de l'attitude de certaines personnes. Ainsi, il fut
démontré que le recours aux contrats sans soumission ou, si on
préfère, sans appel d'offres fut utilisé de façon
supérieure au processus normal d'appels d'offres. M. le
Président, non seulement l'ancien gouvernement ne se conformait pas aux
règles en vigueur, mais il dérogeait dans un domaine où,
pourtant, la concurrence est vive. En effet, on ne compte plus le nombre de
firmes en matière d'études de toutes sortes, de sondages ou de
publicité. Mais encore a-t-il fallu que le travail soit bien fait. Les
faits n'ont jamais été réfutés par l'ancien
gouvernement et pour cause, puisque l'on a - délibérément
ou non - encouragé des entreprises au détriment d'autres.
Et c'a été ici, dans cette Assemblée, largement
décrié, largement démontré pendant tout le mandat
de 1980 à 1985. Il a fallu voir l'arrivée du ministre des
Approvisionnements et Services, le nouveau ministre, en 1985, qui est venu
rétablir les faits et redonner sa pureté originelle qu'on avait
prêtée à Rosalie au départ. C'est pourtant les
libéraux qui l'ont fait.
Alors, M. le Président, l'Opposition officielle serait donc
malvenue de lancer des critiques à l'égard des façons de
procéder du gouvernement libéral, puisque nous avions voté
en faveur de la mise sur pied d'un tel fichier, pourvu que l'on respecte les
modalités en tout temps. Par la suite, le gouvernement libéral a
mis sur pied le groupe de travail sur le processus d'octroi de contrats du
gouvernement. Le système a littéralement été
épluché par ce comité présidé par M. Louis
Bernard, dont le mandat était divisé en trois parties.
Premièrement, d'analyser les législations, la
réglementation et les directives en vigueur en ce qui a trait aux
processus d'octroi de contrats d'approvisionnements ou de contrats de services
et de contrats de location ou de construction de biens immeubles, que ces
processus soient utilisés par le gouvernement du Québec ou
approuvés par le gouvernement à l'égard d'organismes qu'il
finance.
Deuxièmement, d'analyser le fonctionnement de ces processus
d'octroi de contrats, afin d'évaluer s'ils répondent aux
critères d'efficacité, d'équité,
d'accessibilité et de transparence tels qu'exprimés dans la
législation, les règlements et les directives en vigueur.
Troisièmement, de proposer au gouvernement les moyens pour
améliorer les processus existants d'octroi de contrats ou proposer tout
nouveau processus, afin de respecter des critères élevés
d'efficacité, d'équité, d'accessibilité et de
transparence; préciser la liste des organismes ou des catégories
d'organismes dont le gouvernement devrait déterminer ou approuver les
processus d'octroi de contrats.
Le groupe de travail s'était aussi fixé des objectifs qui
se résument de la façon suivante: Premier objectif, jeter un
regard d'ensemble sur le processus d'octroi des contrats du gouvernement;
deuxième objectif, identifier des améliorations à apporter
au processus actuel; troisième objectif, proposer des voies de solution
et, si possible, décrire les correctifs à apporter.
Les constatations et recommandations émises dans ce rapport
justifient le bien-fondé du projet de loi 103 et il recevra un bon
accueil des membres de l'Assemblée nationale. Le gouvernement
désire que soient précisées les matières sur
lesquelles peuvent porter les politiques et les règlements que le
ministère des Approvisionnements et Services est autorisé
à établir. Ainsi, les pouvoirs confiés au ministre pour
établir des répertoires et identifier des catégories de
biens et services sont précisés. (12 heures)
M. le Président, un tel cheminement est nécessaire pour
que soient préservés les acquis d'un processus de
sélection et d'octroi de contrats de biens ou de services qui puisse se
faire dans le maximum de transparence et que soit exclue toute
possibilité de patronage dans le système. Il faut, en somme, que
l'opérationalisa-tion du fichier central des fournisseurs produise les
effets escomptés dans toutes les régions du Québec.
L'impact des contrats de biens et de services effectués pour le
gouvernement du Québec est toujours aussi grand aujourd'hui. Les
ministères nécessiteront encore des biens ou services
actuellement desservis par des centaines de petites et moyennes entreprises, et
même de très grandes entreprises au Québec.
Dans un période économique un peu difficile, on
réclame, par exemple, du gouvernement qu'il devance
l'échéancier des travaux publics. Or, pour y arriver, le choix de
firmes ou d'entreprises chargées d'exécuter lesdits travaux est,
on s'en doute, capital pour que le gouvernement fasse preuve
d'intégrité en tout temps. Voilà pourquoi le gouvernement
libéral tient à ce que soit préservée cette
intégrité au nom de la bonne gestion des fonds publics. D'autre
part, un choix judicieux des mandataires du gouvernement dans
l'élaboration et l'exécution de travaux ou de contrats de
services contribue à assurer un développement économique
régional harmonieux.
Aussi, la présente loi permettra-t-elle de renforcer le processus
d'attribution des contrats de services, et il en résultera des choix
encore plus judicieux, et on aura prouvé que l'équilibre entre
les régions du Québec est possible dans ce secteur
d'activité. En ce sens, le dépôt du projet de loi
apparaît opportun et rejoint les intérêts de l'ensemble de
ceux et celles qui font affaire avec le gouvernement du Québec.
M. le Président, je voudrais peut-être profiter de
l'occasion pour soulever certains éléments que mon
prédécesseur a portés à l'attention de cette
Chambre. Je suis étonné, vous savez, de ce petit
dégobillage qu'on fait à gauche et à droite quant à
l'octroi de contrats et surtout aux dépassements de contrats.
J'inviterais particulièrement le député de
Pointe-aux-Trembles à relire les propos tenus à la commission de
l'aménagement et des équipements sur le dossier du camionnage en
vrac. Les gens qui sont venus à cette commission nous ont
expliqué, dans les faits, comment sont octroyés les contrats,
comment sont exécutés les contrats et comment il est difficile
d'évaluer et d'apprécier le niveau de détérioration
des structures. Particulièrement, on pense à l'autoroute
Métropolitaine et comment il faudrait démolir, démonter
pour pouvoir constater de visu l'état de détérioration. En
passant, je dois indiquer que, si ça avait été fait,
ça, dans le passé - parce que ce n'est pas récent, un
réseau ne se détériore pas en l'espace de deux ou trois
ans, c'est au fil des années et des décennies - peut-être
aurions-nous eu des coûts beaucoup moins élevés que ceux
auxquels on est confrontés et que les évaluations auraient
été beaucoup plus précises. Je trouve malheureux qu'on
fasse cette petite campagne de salissage. On détruit, on démotive
les gens qui travaillent au sein du ministère des Transports et de
l'ensemble des organismes du gouvernement du Québec. Ces gens-là,
par le fait même, finissent par être désabusés parce
qu'ils ne se sentent pas appréciés par ceux qui
représentent l'ensemble de la population. Il faut être, je pense,
réaliste et sérieux dans l'ensemble de ces contrats.
M. le Président, je voudrais peut-être souligner une chose
sur la qualité des travaux, sur la qualité des
approvisionnements. Dans mon comté, sur la route 265, le gouvernement
précédent, en 1984, a procédé à des travaux
de pavage, de couche d'usure. Bien étonnant! Ce ne sont pas les
libéraux. Le béton bitumineux suintait, il suintait le bitume,
parce que la qualité des approvisionnements de bitume n'était pas
adéquate.
Une voix: Pas nécessairement.
M. Camden: J'entends pas nécessairement, M. le
Président, c'est un constat visuel que l'ensemble de la population de
mon comté a fait. Après, c'était manifestement
extrêmement dangereux sur la surface et, pendant qu'il y avait des
pluies, c'était encore plus dangereux, ce qui a fait en sorte que notre
gouvernement a établi un bon nombre de normes, ce qui a fait en sorte
que, maintenant, le gouvernement procède aux acquisitions du bitume qui
entre dans la composition pour assurer la qualité des matériaux
qui sont posés. Et ça, évidemment, vous savez, on s'en
cache bien, on se garde bien de le mentionner, mais ça m'apparaissait
important de le souligner.
Je voudrais aussi relever un autre élément que je trouve
déplorable, c'est qu'on tente de laisser croire à la population
que, sur l'acquisition de biens, de matériaux pour la restauration du
boulevard Métropolitain, on a payé le prix du chêne et
qu'on a reçu la qualité du pin. C'est particulièrement
étonnant, pour un député qui était dans le domaine
de l'industrie de la construction, de lancer de telles choses en l'air. C'est
aller faire en sorte qu'on discrédite l'ensemble de la fonction
publique. C'est inconcevable et inacceptable. Et, si on a des accusations
à porter, j'espère qu'on aura la décence de se lever et de
les porter publiquement, plutôt que d'essayer de faire son petit
dégobillage sur la place publique pour se faire du crédit
politique.
Une voix: C'est vrai.
M. Camden: M. le Président, le projet de loi vient
modifier et améliorer l'ensemble de la situation des appels d'offres
publics. Il faudrait
que, de l'autre côté, ils aient au moins la décence
d'être respectueux du processus qu'il y avait dans le passé, celui
avec lequel ils ont vécu pendant des années, soit 9 ans, ces purs
du système.
M. le Président, c'étaient les faits que je voulais porter
à votre attention parce que c'est inacceptable et intolérable
qu'on accepte et qu'on endure ces insinuations et ces allégations de la
part de gens qui, dans le passé, se faisaient passer comme étant
des purs, alors qu'eux-mêmes ont fait des erreurs de parcours. On ne
passera pas notre temps à le leur remettre sur le nez, mais il faudrait
peut-être qu'ils soient capables et assez honnêtes avec
eux-mêmes pour s'en rendre compte.
Alors, M. le Président, je terminerai là-dessus en vous
remerciant de votre attention et en vous indiquant que je voterai pour ce
projet de loi qui mérite notre considération et notre appui.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. Je reconnais
maintenant M. le député de Jonquière. M. le
député.
M. Francis Dufour
M. Dufour: Merci, M. le Président. Il est heureux qu'on
écoute certaines interventions; ça permet d'enlever un peu de
pesanteur sur les propos qui se passent ici, en cette Chambre. Ça nous
permet aussi de faire un peu un retour à l'histoire. Je voudrais juste
vous rappeler que, effectivement, ça ne peut pas être tout blanc
et tout noir, dépendant du côté de la Chambre où on
est. Je pense bien qu'on ne changera pas le processus qui se passe. En fait, il
y a une critique de projets de loi et on doit rappeler certains
éléments et certaines circonstances qui ont amené ces
projets de loi.
Je suis surpris de voir que nos jeunes ne connaissent pas plus
l'histoire qu'Us devraient la connaître. Parce que si on veut faire nos
beaux jours de ce qui se passait dans les contrats, il faudrait peut-être
retourner à 1935 où, dans le temps, c'était l'Union
Nationale, ou l'action nationale, qui critiquait ce qui se faisait par le Parti
libéral, justement. Parce qu'ils ont été tellement
longtemps au pouvoir qu'on ne peut pas accuser le Parti québécois
d'avoir mis ou défait le réseau routier. S'il y a des choses qui
ont été mal faites, c'est par ceux-là qui ont
été là le plus longtemps. Et si on regarde l'histoire du
Québec, je pense que les libéraux ont occupé suffisamment
le siège du conducteur pour faire un peu des actes d'humilité et
accepter qu'on puisse critiquer les lois d'une façon correcte, d'une
façon claire, sur des faits très précis.
Lorsqu'on regarde le projet de loi qu'on a devant nous, il faut bien
accepter et examiner que ça découle de certains constats, de
certaines circonstances. Ce n'est pas le Parti québécois qui a
demandé qu'on étudie le problème de Rosalie ou ce qui
arrivait à Rosalie. Disons-le clairement, on a sorti des gros
épouvantails à moineaux et, quand la firme Pominville a sorti son
résultat, ce n'était pas fort, fort. Il n'est pas sorti de
grandes, grandes affaires là-dedans, si ce n'est que c'est un
système informatique où le gouvernement du Parti
québécois avait eu le courage d'établir un processus
d'octroi de contrats qui, avec le temps, n'a pas donné 100 % des
résultats. Et je pense bien que, même si vous prétendez, le
gouvernement actuel, que vous faites des choses parfaites, on pourrait vous
dire que, même actuellement, on constate qu'il y a des choses qui ne sont
pas correctes. Et de plus en plus ça changera, et ça change.
Je voudrais bien aussi rappeler certains propos, puisqu'il y a certaines
personnes qui, dans cette salle ou dans cette Assemblée, nous disent:
C'est drôle, le gouvernement du Parti québécois, vous
n'avez pas d'amis chez les gens d'affaires. Il y a quelqu'un qui a dit
ça tout à l'heure: Vous n'avez pas d'amis chez les gens
d'affaires, ils ne sont pas avec vous autres. Et, pourtant, selon ce que vous
dites, on a tellement favorisé les gens d'affaires qu'il devrait bien
nous rester quelques amis là-dedans, si on en a ou on n'en a pas. Parce
que, normalement, les gens d'affaires, ce ne sont pas des ingrats. Si on les
sert bien, d'habitude, il vont garder une certaine allégeance. Comme on
en connaît plus sur votre côté, là, je
m'interrogerais à savoir qui les a favorisés le plus, qui a
donné plus et qui a fait plus pour ces gens-là. (12 h 10)
Une voix: C'est pour ça que la population a voté
pour nous.
M. Dufour: Ne vous en faites pas, la population, des fois, elle
comprend et, dans l'ensemble, sur les dernières années, on a eu
notre part de pouvoir et ça reviendra plus vite qu'on pense et pour le
meilleur des choses, pour le meilleur de l'histoire du Québec. Il
faudrait bien penser à ça. Quand on dit qu'on a des gens
d'affaires... Quand on a eu ce débat-là ou quand la commission
Bernard a été mise sur pied, ça a été
amené justement par des anomalies où on croyait qu'il pouvait se
produire des choses mieux faites dans l'octroi de contrats gouvernementaux.
Le gouvernement est un gros dispensateur de contrats. Ce sont des gros
montants d'argent qui sont en cause et, à ce moment-là, on a tout
intérêt, quel que soit le côté de la Chambre
où on est, que ce soit dans les normes, que ce soit fait correct. La
commission Bernard, c'est le gouvernement libéral qui l'a mise sur pied.
Le choix des gens qui font partie de cette commission, c'est encore le
gouvernement en place. Et pourquoi a-t-elle siégé, cette
commission-là? Et
qu'est-ce qu'elle a fait? Elle a demandé des gens pour venir
témoigner, venir déposer, venir nous dire ce qui marchait et ce
qui ne marchait pas.
L'Association des constructeurs du Québec - on ne devrait pas
avoir beaucoup d'amis chez ces gens-là; ça devrait être les
vôtres -qu'est-ce qu'ils sont venus dire dans le mémoire? Ils ont
dénoncé les modalités techniques abusives du
système de soumissions actuel qui veut que l'octroi des contrats soit
attribué au plus bas soumissionnaire. Ces mêmes gens-là
nous disent un peu plus loin: "II est étonnant de constater que
l'écart entre le premier et le second soumissionnaire soit très
élevé, atteignant même parfois 40 %. Une telle situation ne
s'explique pas seulement par l'apport de nouvelles techniques de construction
ou de gestion, mais surtout par l'augmentation des erreurs de soumission."
Comme c'est souvent le plus bas qui a l'octroi ou qui a le contrat, ça
ne nous donne pas une grande marge de manoeuvre. Ils disent à un autre
endroit: "Même si le principe du plus bas soumissionnaire peut comporter
certains avantages, dont celui de se procurer un produit de construction au
plus bas coût possible, il n'en demeure pas moins que cette règle
doit être encadrée de critères plus sévères
au chapitre de la préqualification des entreprises
soumissionnaires."
En fait, ce qu'ils nous disent et ce qu'on croit déceler par
rapport à ça, c'est que, lorsqu'on va en appel de soumissions,
c'est toujours le plus bas qui est retenu. Mais, avec le plus bas, quand on
regarde dans les faits, il y a pratiquement toujours des dépassements de
coûts. Alors, on serait peut-être mieux de choisir des
soumissionnaires avec des grilles plus rigoureuses qui permettent de mieux
céduler, "ceinturer" ou décider lequel est le meilleur pour faire
les travaux. Donc, à ce moment-là, ça veut dire que les
augmentations de coûts, les dépassements de coûts seraient
moins nombreux.
Je peux juste vous donner l'expérience que j'ai vécue le
printemps dernier justement dans le système d'attribution de contrats
dans le réseau Métropolitain, dans la région de
Montréal. On a constaté des dépassements de coûts.
Contrairement au collègue qui a parlé avant moi, M. Camden, de
Lotbinière, qui nous dit: J'ai décelé telle chose dans un
réseau routier, je peux dire qu'il y a du travail à faire et
qu'il faudrait possiblement qu'il regarde un peu plus parce que ça prend
un peu plus d'expérience que ça pour parler en
général, en partant d'un cas particulier. Vous le savez bien. Et,
surtout, je ne montrerai pas ça au ministre des Approvisionnements et
Services qui a été maire comme je l'ai été et qui a
sûrement construit des routes, peut-être pas autant, mais
certainement beaucoup de routes. Il sait bien que, même en prenant toutes
les précautions, ça peut arriver qu'il y ait des
défectuosités; je pense que ça, il faut reconnaître
ça.
Moi, je pense à une route, en tout cas, à un bout de route
qu'on a fait chez nous; ça a coûté les yeux de la
tête. On a pris toutes les précautions possibles. C'était
une route qui avait des panses de vache, ça veut dire qu'elle gardait
des morceaux d'humidité; il y avait des poches d'humidité dans
cette route-là. On a mis un système d'irrigation à tout
casser. Cette route-là a coûté les yeux de la tête.
C'est la ville même qui l'a farte. Donc, il n'est pas question
d'attribution de contrat, il n'est pas question d'économie de
coûts et, malgré tout, cette route-là a encore des
difficultés et elle a encore des petits cahots. Ce n'est pas la question
qu'elle est mal faite, c'est que la technique n'a pas encore trouvé la
solution à tous les problèmes.
Donc, ça a pu arriver que, dans le temps du Parti
québécois, il y ait des choses qui ont été mal
faites ou qui ont été faites d'une bonne façon, mais qui
n'ont pas donné les bons résultats. Ça peut arriver et
ça arrive dans n'importe quoi. Une bâtisse peut s'écrouler
même si elle a tous les critères exigés par le
système, par les connaissances qu'on a actuellement de l'état des
situations.
Donc, moi, je ne partirai pas en peur avec un exemple pour dire que tout
a été mal fait parce qu'il y a quelque chose qui s'est produit.
Je ne dirai pas non plus que tout est mal fait parce que vous l'avez fait. Ce
n'est pas ça qu'on essaie de dire. On dit: On a intérêt
à ce que ces critères qui président la donnée de
contrats à des firmes soient les plus rigoureux possible. On a tout
à gagner à ce que le favoritisme soit exclu de l'octroi de ces
contrats-là. On doit s'interroger. Ce printemps, lorsqu'on a
étudié les coûts ou les comptes financiers du gouvernement,
au ministère des Transports, on a découvert qu'il y a à
peu près 80 000 000 $ de contrats qui ont été
donnés pour la fabrication de plans. Cette année, on constate
qu'il n'y a pas un sou pour mettre à exécution ces
plans-là. Mon collègue de Lévis, à cette occasion,
disait: On ne roule pas sur les plans! Je pense qu'il n'y a pas un organisme
sérieux, qui se respecte, qui va donner... Il faut dire que
l'année passée, c'était une année
d'élections. Qu'est-ce qui explique qu'on a donné autant
d'ouvrage à des contrac-teurs, c'est-à-dire des contractuels
professionnels pour fabriquer des plans? 80 000 000 $, là-dessus, il y
en a un qui va commencer probablement l'an prochain parce que, même si on
prétend que Stoneham est commencé, je n'ai pas vu encore trop,
trop de machinerie dans le coin. Donc, Stoneham, ça a coûté
8 000 000 $ pour une route qui devrait en coûter possiblement autour de
30 000 000 $. Et là, tout le monde va crier au scandale parce que
l'Opposition se questionne par rapport à ça? Est-ce qu'il y a de
la rigueur dans l'octroi de ces contrats-là à des professionnels?
Parce que, cette année, il n'y a pas un sou dans le cash, il n'y a pas
un sou
dans la caisse pour faire faire les travaux. Vous savez bien qu'une
entreprise privée qui ferait ça, elle serait en faillite. Le
gouvernement ne l'est pas encore, heureusement, mais il y a des
problèmes, et, pour ceux qui prétendent être des
administrateurs à tous crins, pour des gens qui se disent
compétents, rationnels dans leurs décisions, est-ce que vous
pouvez me vendre ça longtemps?
En tout cas, moi je trouve que vous avez un bon langage. Bien oui, c'est
intéressant pour les gens d'entendre ce langage-là: Nous, on est
des gens rigoureux, on est des bons comptables, on va bien vous administrer et
on sait quoi faire de l'argent. Alors, je vous invite à regarder un peu
partout. Il y a beaucoup d'économies, en tout cas, que, moi, avec mes
yeux, je peux voir, dans beaucoup de domaines et dans beaucoup de
ministères où on pourrait économiser des sommes d'argent
intéressantes. Beaucoup de voyages se font un peu partout; on pourrait
peut-être sauver quelques piastres dans ça. Il y a peut-être
d'autres endroits aussi. Pas juste dans les limousines. Moi, ça ne me
scandalise pas contrairement au ministre des Approvisionnements et Services,
que le lieutenant-gouverneur, se promène en Chrysler. Je le fais aussi
et je n'ai pas à m'en excuser parce que je trouve que c'est une
automobile, sans vouloir la vanter, où je me sens plus en
sécurité. Ça, c'est une question de goût et je pense
que ou le lieutenant-gouverneur est de trop ou il est correct. S'il doit
être là, qu'on l'organise et, s'il est de trop, bien enlevons-le.
Ça, c'est la bonne réponse et je pense qu'il n'y en a pas
d'autre.
Quand on regarde aussi le rapport Bernard, M. Bernard a
été nommé et mis en place par le gouvernement du
Québec, avec un mandat très précis pour aller regarder et
examiner ce qui se passait dans la demande des soumissions et dans les
contrats, soit dans l'octroi des contrats et, en même temps, dans
l'exécution des contrats. Le rapport Bernard arrive à des
conclusions qu'on doit... il y a 45 recommandations, 45 recommandations
suffisamment précises pour resserrer encore ces
critères-là. Il n'y a pas d'accusations là-dedans. On ne
dit pas au gouvernement libéral: Vous n'êtes pas correct. On ne
dit pas: Vous avez fait des choses malhonnêtes. Ce n'est pas son
rôle. Son rôle, c'était d'essayer de déterminer, de
mieux circonscrire l'action dans laquelle on évolue par rapport à
l'octroi des contrats. Et ils ont fait 45 recommandations. (12 h 20)
Quand on regarde le projet de loi qu'on a devant nous, il y a seulement
2 de ces recommandations qui sont suivies. Donc, établir un fichier -
c'est à peu près ça - pour les fournisseurs. Puis, une
autre sur "acquisition", "et à la construction de biens ainsi
qu'à la location", 4 articles. Voilà ce que ça donne: 45
recommandations avec 2; 2 sur 45, ça fait 1/22, ça veut dire
à peu près 5 % des recommandations Bernard. Il faudrait
s'interroger à savoir qu'est-ce que c'a coûté, la
confection de ces 45 recommandations. Ça doit avoir coûté
quelque chose. Depuis le mois de juin qu'il est déposé. On est
rendus au mois de décembre et on accouche de 2 recommandations. Donc, on
peut dire: Ce n'est pas un éléphant parce que, avec 45
recommandations, on ne pourrait pas parler d'éléphant. Mais on
pourrait dire probablement: Un chat qui a accouché d'une souris parce
qu'il n'y a pas de relation entre les deux. 2 petites recommandations sur 45.
On ne peut pas dire que ce comité-là...
En tout cas, je suppose que M. Bernard devait être très
heureux de voir ce qu'on a fait de ce rapport-là. Même s'il est un
fonctionnaire, un cadre du gouvernement, même s'il est certain de son
emploi, je ne pense pas qu'il puisse être satisfait de ce qu'on a fait de
son rapport parce que je suis convaincu, le connaissant, connaissant quelques
membres qui ont fait partie de cette commission-là, qui ont
étudié pendant quelques mois, qui se sont penchés sur le
problème; qu'ils accouchent de 45 recommandations et que cet
accouchement-là donne lieu, prise et place à une loi avec 2
articles de loi, je pense que ce n'est pas fort et je pense aussi que le
gouvernement ne devrait pas être fier de ça.
Est-ce que ça voudrait dire que le gouvernement ne prend pas au
sérieux ses décisions? Parce que, avant de mettre un
comité sur pied, il faut y réfléchir. Est-ce que c'est
pour gagner du temps? Est-ce que c'est pour un enterrement de première
classe? Moi, je vous le dis honnêtement, c'est difficilement acceptable
qu'on puisse mettre sur pied un comité, un comité que nous, on
nomme... Donc, on ne les a pas forcés. Ils l'ont nommé, leur
comité. Probablement qu'ils ont trouvé, dans ce qu'on disait et
dans ce qu'on dénonçait, qu'il y avait du vrai. Et, là, on
ferme le couvert et on dit: On va nommer une commission. On vient de fermer le
couvert et, après ça, on sort ça, le couvert, par le trou
de la serrure et on sort 2 petites recommandations sur 45, et on dit: Alleluia!
le Messie est arrivé le jour de Noël. Le Père Noël
vient d'arriver. Ce n'est pas de même qu'on va régler les
problèmes et il n'y a pas seulement ça, on sait bien qu'il y a
d'autres endroits où il y a des montants d'argent extraordinaires qui
sont en cause. Je ne pense pas que personne, que ce soient des libéraux
ou des péquistes, puisse accepter...
On ne dit pas qu'il y a de la malhonnêteté. On dit qu'on
doit prendre tous les moyens pour ne pas qu'il y en ait, même pour ne pas
que la femme de César sort tentée. Enlevons-lui toutes les
tentations possibles et, même en le faisant, on sait qu'il y aura encore
un coulage quelque part et on le recorrigera. On fermera les trous au fur et
à mesure. Ce n'est pas parfait. Mais, dans le contexte actuel où
il y a d'autres contrats à donner, par exemple, à
Hydro-Québec, 60 000 000 000 $ d'annoncés pour les prochaines
années, est-ce qu'on n'aurait pas intérêt à
ce qu'on sache ce qui se passe dans tout ça? Est-ce qu'on n'a pas
intérêt à ce que tous les montants d'argent ou toutes les
sommes qui seront affectées à des contrats, à des
fournisseurs, à des professionnels soient bien dépensés,
soient dépensés de la bonne façon pour que les citoyens en
profitent le plus possible? Ça, ça me semble
élémentaire. Moi, je défie quelque libéral que ce
soit de venir parler le contraire de ce que je dis là. Parce qu'il ne se
fera pas élire nulle part. Mais, tout de même, il faut avoir le
courage de le dire. On a avantage à resserrer le plus possible tout ce
qui tourne autour de ça.
Tout à l'heure, je faisais un petit retour sur l'histoire. Je
parlais de 1935. C'était dans le temps de Taschereau. Un des gros
problèmes qu'il avait, c'étaient les comptes publics. Duples-sis
en faisait ses gorges chaudes. D'ailleurs, c'est ce qui a fait le scandale du
siècle. On l'a remplacé. Le gouvernement de l'Union Nationale a
pris le pouvoir et il y a eu certainement, un certain temps, quelque chose de
très resserré. Il y a eu du relâchement. Le Parti
libéral l'a dénoncé et il a pris le pouvoir.
Rappelons-nous ça, c'était dans le temps - je recule à
1935 à 1960 - où les gouvernements changeaient, justement parce
qu'il y avait ces anomalies-là.
Ça se fait sur de hautes échelles dans d'autres pays. Nous
autres, on est au Québec. Notre société exige de la
rigueur parce qu'on est une petite société, parce qu'on n'a pas
les moyens de gaspiller. On n'a pas les moyens de s'enrichir à
même les deniers publics. Donc, on a tout intérêt à
donner l'exemple et à resserrer les moeurs. On l'a fait, au point de vue
politique, par la loi du financement des partis politiques. On l'a fait aussi
par l'octroi des contrats, mais on peut, avec le temps, resserrer ces
actions-là et ces décisions-là. C'est ça que la
commission Bernard a déposé comme critères: 45
recommandations, dont 2 sont retenues! Qu'est-ce qu'on fait des autres?
Le ministre nous informe qu'il va y avoir un comité et qu'il va
encore fouiller à travers ça pour savoir... Un comité du
comité! Ça devient de la réunionite, purement et
simplement. On se réunit pour se réunir et, dans ce
temps-là, on gagne du temps, le temps passe, en disant: Le temps va
régler les choses. Mais non, le temps ne règle pas toutes les
choses. Le temps ne fait qu'augmenter ou accélérer la
dégradation qu'on a constatée. Des fois, le temps peut
réparer. On a des disputes ensemble, le temps peut réparer
ça. Je pense que c'est normal. Mais, dans une maladie, normalement, ce
n'est pas le temps qui permet de guérir la maladie. Souventefois, c'est
la différence entre vivre et mourir et c'est vrai dans beaucoup de
domaines. Si on ne donne pas un coup de barre et si on ne se ressaisit pas,
bien, le temps ne fait que dégrader. Dans un réseau routier, si
vous ne le réparez pas à temps, ou si vous ne pouvez pas le
réparer, à ce moment-là, ce n'est pas le temps qui va
l'améliorer. Ça veut dire que votre réseau routier va se
détériorer.
M. le Président, vous me dites que mon temps est pratiquement
écoulé. J'aurais eu beaucoup d'éléments à
soulever. Je veux juste vous dire aussi que, dans les questions que le rapport
Bernard a soulevées, il y avait, définitivement, dans les choix,
dans les comités de sélection de contrats, des solutions
intéressantes qui auraient pu être retenues, qui ne
coûtaient pas grand-chose au gouvernement et qui auraient
amélioré le système.
Donc, on aura sûrement l'occasion d'y revenir, mais je vous dis
que, si j'étais à la place du ministre des Approvisionnements et
Services, un mémoire qui a été commandé par mon
gouvernement, qui produit 45 recommandations et dont on en retient 2, je ne
serais pas fier, fier, même si c'est une amélioration de ce qui se
passait auparavant. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Jonquière. Alors, compte tenu de l'heure et
conformément à notre règlement, je suspends les travaux de
cette Assemblée jusqu'à 14 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 28)
(Reprise à 14 h 3)
Le Président: Mmes et MM. les députés, nous
allons nous recueillir quelques instants.
Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.
L'Assemblée entreprend ses travaux aux affaires courantes.
Il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi.
M. le leader du gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, je vous invite à
appeler l'article m du feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 272
Le Président: À l'article m du feuilleton, j'ai
reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de
loi 272, Loi concernant la Compagnie de fiducie Guardian. Le directeur de la
législation a constaté que les avis ont été faits
et publiés conformément aux règles de fonctionnement des
projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce
rapport.
En conséquence, M. le whip en chef du gouvernement, au nom de M.
le député de Saint-Louis, présente le projet de loi
d'intérêt privé 272, Loi concernant la Compagnie de fiducie
Guardian.
Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet
de loi?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
Renvoi à la commission du budget et de
l'administration
M. Pagé: M. le Président, je fais motion pour que
le projet de loi soit déféré à la commission du
budget et de l'administration et, aussi, pour que Mme la ministre
déléguée aux Finances en soit membre.
Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?
Adopté. M. le leader du gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, je vous invite à
appeler l'article h du feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 258
Le Président: À l'article h du feuilleton, j'ai
reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de
loi 258, Loi sur la Compagnie American Realty Investors Corporation. Le
directeur de la législation a constaté que les avis ont
été faits et publiés conformément aux régies
de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je
dépose ce rapport.
En conséquence, M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, au nom de M. le député de Westmount,
présente le projet de loi d'intérêt privé 258, Loi
sur la Compagnie American Realty Investors Corporation. Est-ce que
l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
Renvoi à la commission du budget et de
l'administration
M. Pagé: M. le Président, je fais motion pour que
ce projet de loi soit déféré à la commission du
budget et de l'administration et, aussi, pour que Mme la ministre
déléguée aux Finances soit membre de cette commission.
Le Président: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Maintenant, au niveau du
dépôt de documents.
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
Copie de la réforme axée sur le citoyen
du ministère de la Santé et des Services sociaux
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président,
c'est avec plaisir et honneur que je dépose copie de la réforme
axée sur le citoyen dans le ministère de la Santé et des
Services sociaux.
Des voix: Bravo!
Le Président: Ce document est déposé.
Toujours au niveau du dépôt de documents, M. le leader du
gouvernement, au nom du ministre des Affaires municipales.
Rapport annuel du ministère des Affaires
municipales
M. Pagé: M. le Président, au nom de mon
collègue, le ministre des Affaires municipales, j'ai l'honneur de
déposer le rapport annuel 1989-1990 du ministère des Affaires
municipales.
Une voix: Est-il à la commission
Bélanger-Campeau?
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Pagé: Toujours au nom de mon collègue...
Pardon?
Une voix: Est-ce qu'il est à la commission
Bélanger-Campeau?
Le Président: M. le député!
Rapports annuels de la Société
d'aménagement de l'Outaouais et de la
Commission municipale du Québec
M. Pagé: M. le Président, quand même! Un peu
d'éthique! J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel de la
Société d'aménagement de l'Outaouais, au nom du ministre
des Affaires municipales et, toujours au nom du ministre des Affaires
municipales, je dépose les rapports annuels 1988-1989 et 1989-1990 de la
Commission municipale du Québec.
Le Président: Ces rapports sont déposés.
Maintenant, M. le ministre de l'Environnement.
Rapport annuel de la Société
québécoise d'assainissement des eaux
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président,
conformément à notre règlement, je dépose le
rapport annuel 1989-1990 de la Société québécoise
d'assainissement des eaux.
Le Président: Ce rapport est également
déposé.
Dépôt de rapports de commissions.
Dépôt de pétitions.
Il n'y a pas d'intervention portant sur une violation de droit, de
privilège ou sur un fait personnel.
Avant de procéder à la période de questions, M. le
député de Laviolette.
M. Jolivet: Oui, M. le Président. J'aimerais savoir,
compte tenu du nombre de ministres qui, pour différentes raisons, sont
absents et on nous a confirmé leur absence, tel qu'entendu
normalement... Cependant, un ministre n'est pas présent ici et, compte
tenu des dernières nouvelles, semblerait-il, ne sera pas présent.
J'aimerais savoir où se trouve le ministre de l'Industrie et du
Commerce.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, effectivement, certains
collègues sont à l'extérieur pour des motifs qui sont
connus, soit en mission dans le cadre des négociations des accords du
GATT, où le Québec se doit d'être présent pour la
protection des intérêts du Québec. Certains autres
collègues participent, aujourd'hui, à la Commission sur l'avenir
politique et constitutionnel du Québec; Mme la ministre
déléguée à la Famille est à Rome, pour
représenter le gouvernement du Québec là-bas; M. le
ministre des Finances est dans sa circonscription électorale, comme
c'est une tradition bien enracinée chez lui, et M. le ministre de
l'Industrie et du Commerce rencontre actuellement - je lui ai parié il y
a quelques minutes - les représentants d'une importante entreprise de la
région de Montréal qui avait des motifs importants et urgents
à invoquer auprès du ministre, qui a rempli sa
responsabilité et qui a reçu mon autorisation pour rencontrer ce
groupe.
M. Jolivet: M. le Président...
Le Président: M. le député de
Laviolette.
M. Jolivet: Sans vouloir insister davantage, vous comprendrez
très bien que, lorsque nous préparons notre période de
questions et que nous ne sommes avertis que vers 13 h 15 que le ministre ne
sera pas présent, ça implique nécessairement des
difficultés de notre part, et j'aimerais que le ministre responsable,
comme leader, en soit bien conscient.
Le Président: M. le leader.
M. Pagé: J'en suis conscient, sauf que le caractère
urgent et éminemment important de sa présence à
Montréal cet après-midi - d'ailleurs, il sera avec nous ce soir
pour étudier son projet de loi en commission parlementaire -
était suffisamment justifié que j'ai autorisé l'absence.
Je comprends, j'ai déjà siégé dans
l'Opposition,
M. le député, et si ça amène un
problème de questions à poser, on pourra le faire sur 30 minutes
seulement. Pas de problème en ce qui me concerne. (14 h 10)
Des voix: Ha, ha, ha!
QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES
Le Président: Très bien. Nous allons maintenant
procéder à la période régulière de questions
et réponses orales des députés. Je vais reconnaître,
en première question principale, M. le chef de l'Opposition.
Mesures pour protéger l'économie contre
les effets de la récession
M. Parizeau: M. le Président, ce matin, Statistique Canada
rendait publiques les données sur l'emploi pour le mois de novembre.
Nous apprenons donc, ce matin, que le taux de chômage au Québec
atteint maintenant 11,4 %, son plus haut niveau depuis quatre ans et demi. On
compte maintenant au Québec 386 000 chômeurs, une hausse de 87 000
chômeurs en un an, c'est-à-dire une augmentation d'un quart.
Nous apprenons aussi qu'il y a, en novembre, au Québec, 36 000
emplois de moins que l'année dernière à pareille date. La
vice-première ministre va-t-elle enfin accepter, en cette Chambre, qu'il
y a une récession au Québec? Et a-t-elle l'intention, au nom du
gouvernement, ou son collègue des Finances, ou son collègue de
l'Industrie et du Commerce, l'un ou l'autre a-t-il l'intention d'annoncer des
mesures dans un proche avenir pour faire en sorte que l'on cherche à
protéger l'économie du Québec contre les effets de la
récession dans les plus brefs délais?
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: M. le Président, c'est justement parce que nous
avions anticipé un contexte économique difficile que le ministre
des Finances et que le gouvernement avaient mis en place des mesures pour
contrer la baisse de croissance, des mesures de création d'emplois. Des
38 000 emplois, M. le Président, qui ont été
créés de janvier à octobre, 65 % sont des emplois à
temps plein, ce qui est la marque de commerce de notre gouvernement, et non des
emplois temporaires, ce qui est la marque de commerce de l'ancien gouvernement.
Je dois dire que je n'ai pas à faire d'aveux au chef de l'Opposition,
aujourd'hui, M. le Président, quand on regarde ce qui a
été fait en 1981 par l'ancien gouvernement, des budgets
supplémentaires, mais où on avait une ponction fiscale de plus de
1 000 000 000 $ qui était faite dans les poches des contribuables. Nous
ne l'avons pas fait, M. le Président. En mai
1982, coupures salariales de 500 000 000 $ des employés du
secteur public. Je ne sais pas si c'est ce genre de gestes que veut nous voir
poser le chef de l'Opposition.
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
M. Parizeau: La vice-première ministre con-viendra-t-elle
que c'est dans l'ordre des choses, pour un gouvernement responsable, quand une
récession apparaît, de poser des gestes destinés à
faire en sorte qu'elle ne devienne pas plus grave encore et que
l'économie puisse remonter rapidement, ce que nous avions fait pour
l'année à laquelle elle se référait, ce que le
gouvernement de l'Ontario est en train de faire depuis déjà
quelques semaines? Est-ce que le gouvernement du Québec a l'intention de
poser quelque geste que ce soit pour essayer de faire en sorte que ce
ralentissement de l'économie du Québec, cette récession
dure le moins longtemps possible et que le relèvement se fasse le plus
rapidement possible? Est-ce que ce gouvernement va annoncer quoi que ce
soit?
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: Oui, M. le Président.
Le Président: En question complémentaire.
Une voix: Ça va créer de l'emploi.
M. Parizeau: Étant donné la réponse que la
vice-première ministre vient de nous donner, puis-je attirer son
attention sur ceci? Est-ce qu'elle ne conviendra pas que les mesures que le
gouvernement envisage - puisqu'elle nous a répondu oui - pourraient
s'adresser rapidement à la situation financière d'un bon nombre
d'entreprises québécoises qui, à l'heure actuelle, sont
sur le bord de la faillite puisque le Québec a connu, depuis le
début de l'année, 3800 faillites, alors que l'Ontario n'en a
connu que 2300?
Le Président: M. le chef de l'Opposition...
M. Parizeau: Ça terminait mon interrogation.
Le Président: Sur une question de règlement, M. le
leadei.
M. Pagé: M. le Président, le chef de l'Opposition
semble profiter de l'absence du leader de l'Opposition, qui est occupé,
de façon tout à fait pertinente, à d'autres
responsabilités, pour déborder un peu le cadre de l'application
stricte du règlement. Je l'invite à poser ses additionnelles,
sans préambule.
Le Président: Alors, la question est posée. La
question a été posée, je pense, M. le chef de
l'Opposition, je vais laisser la vice-première ministre y
répondre.
Mme Bacon: M. le Président, dans le dernier budget, le
ministre des Finances avait annoncé une somme supplémentaire de
45 000 000 $, qui a été accordée à la SDI pour
aider les entreprises qui avaient à affronter une conjoncture difficile.
Je pense qu'on a déjà posé des gestes, même avant la
situation que nous connaissons maintenant. Il y a eu aussi des investissements
importants dans le réseau de l'éducation, M. le Président,
de la santé, dans les équipements culturels, une somme de 279 000
000 $. HydroQuébec a investi 4 500 000 000 $, qui contribuent à
créer et à soutenir 29 000 emplois, M. le Président, parce
que nous lui avons aussi demandé de devancer certains travaux. Le
gouvernement a prévu investir 1 700 000 000 $ sur cinq ans dans le
réseau routier, ce qui va créer environ 82 000 emplois, et le
ministre des Finances annoncera bientôt, comme ma réponse voulait
le dire tantôt, d'autres possibilités d'aide par rapport à
cette situation pour contrer la situation difficile sur le plan
économique que nous connaissons en ce moment.
Le Président: En question complémentaire.
M. Parizeau: La vice-première ministre pourrait-elle nous
indiquer à quel moment ces autres mesures, auxquelles elle vient de
faire allusion, sont susceptibles de nous être
révélées?
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: m. le président, je voudrais dire au chef de
l'opposition que je voudrais lui donner une date aujourd'hui, mais vous
comprendriez bien que je ne peux pas annoncer, pour le ministre des finances,
quelle sera la date où il fera ses annonces. je laisse au ministre des
finances la possibilité de le faire lui-même, mais ce sera
bientôt, m. le président.
Une voix: Très bien!
Le Président: Toujours en question complémentaire,
Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Oui, M. le Président. La vice-première
ministre peut-elle nous dire quelles mesures de relance, quel plan d'actions
son gouvernement entend adopter à l'égard de la situation
dramatique de Montréal qui a connu, en un an, une baisse sans
précédent de 53 000 emplois, un niveau, M. le Président,
de 5 % de moins que le niveau d'emploi habituel?
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: M. le Président, la députée de
Hochelaga-Maisonneuve sait très bien que nous avons un comité qui
travaille sur les grands dossiers du Grand Montréal-Une
voix:...
Mme Bacon: Voulez-vous répondre à ma place?
Une voix: On aurait une réponse... Le Président:
S'il vous plaît! Des voix:...
Mme Bacon: ...et qui apporte-Le Président: Bon! Un
instant! Alors, j'apprécierais simplement de la collaboration...
Une voix: Elle pose une question.
Le Président: Oui. Évidemment que Mme la
vice-première ministre pose une question, puisqu'elle a des
réactions qui l'interpellent. S'il n'y a pas d'interprétation
d'un côté, il n'y aura pas plus d'interprétation d'un autre
côté. Donc, si tout le monde collabore, il n'y aura aucun
problème et vous aurez une réponse. Alors, Mme la ministre.
Mme Bacon: II ne faudrait pas que le chef de l'Opposition prenne
ses fantasmes pour des réalités, M. le Président, il n'est
pas encore au pouvoir.
Des voix:...
Mme Bacon: le ministre des finances annoncera bientôt des
mesures concrètes, des mesures qui vont régler les
problèmes que nous connaissons, et montréal est compris dans
toutes ces mesures.
Le Président: Alors, en question complémentaire -
une dernière complémentaire - M. le chef de l'Opposition.
M. Parizeau: Puis-je demander à la vice-première
ministre, peut-être, de prendre préavis de la question que je vais
poser ou de la transmettre à son collègue de l'Industrie et
Commerce qui n'est pas ici aujourd'hui? Compte tenu que l'emploi, dans
l'industrie manufacturière, au Québec, est tombé de 9 % en
un an, est-ce que le ministre de l'Industrie et du Commerce a l'intention, lui
aussi, d'annoncer certaines petites choses que, peut-être, il pourrait
faire pour essayer de relever un secteur manufacturier qui, dans le
passé, a rarement été touché de façon aussi
forte?
Le Président: Mme la vice-première ministre. (14 h
20)
Mme Bacon: L'aide totale de la SDI aux entreprises
québécoises s'élevait à 2 100 000 000 $ en mars
1990. Le dernier budget a donné une somme supplémentaire de 45
000 000 $ à la SDI pour aider, justement, les entreprises. Je viens de
le dire au chef de l'Opposition, ce sont déjà des gestes concrets
qui ont été posés par notre gouvernement pour aider les
entreprises et faire en sorte que nous connaissions une situation
économique moins dramatique que ne voudrait l'avoir le chef de
l'Opposition. Le ministre de l'Industrie et du Commerce pourra répondre
amplement pour tous les gestes qu'il a posés depuis qu'il est en poste,
et surtout dans les derniers mois, au chef de l'Opposition, dès qu'il
sera présent en Chambre.
Le Président: Toujours en additionnelle. M. Parizeau:
Dernière... Le Président: Alors, une toute
dernière. M. Parizeau: ...dernière additionnelle... Le
Président: Allez-y.
M. Parizeau: ...M. le Président. Mais la question a une
certaine importance. Est-ce que la vice-première ministre est consciente
que 45 000 000 $ de plus pour l'aide à la PME au Québec, dans les
circonstances actuelles, c'est une goutte d'eau? Est-ce qu'elle est consciente
que la dernière fois que nous sommes intervenus pour aider les
entreprises dans des circonstances analogues, c'est près de 1 000 000
000 $ que la SDI avait garantis?
Le Président: Alors, Mme la vice-première
ministre.
Mme Bacon: M. le Président, on peut bien parler de 1 000
000 000 $, mais c'est 768 000 000 $, si ma mémoire est fidèle et
si ce que j'ai devant moi est fidèle. Résultat de cette annonce
qui avait été faite par le gouvernement, en 1983: retards de mise
en place, mises en place laborieuses, projets non réalisés,
critiques sévères de l'actuelle députée de Taillon
quant à la gestion de son gouvernement en matière
économique.
Des voix: Bravo!
Le Président: Alors, en question principale, M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
Nouvelle politique de santé et de services
sociaux
M. Trudel: Alors, contre toute attente, M. le Président,
ce matin et contrairement aux recommandations formulées par la
commission Rochon, le ministre de la Santé a décidé de
remettre en cause les grands principes d'universalité,
d'accessibililté et de gratuité de notre système de
santé au Québec. Il remet en cause des services gratuits en
imposant un ticket de 5 $ qui conditionne l'accès à la salle
d'urgence pour celui qui ignore la gravité du mal qui l'affecte. Il
remet en cause les services gratuits en optométrie, les soins dentaires,
les prothèses, les médicaments, en levant un nouvel impôt.
Il remet en cause la gamme et l'étendue des services payés par
l'assurance-maladie au Québec.
Ma question est simple et pointue, M. le Président, au ministre
de la Santé et des Services sociaux: Le ministre reconnaît-il que
le montant de 5 $ imposé à l'entrée de la salle d'urgence
n'aura pas le même impact selon que l'on est riche ou que l'on est pauvre
dans cette société?
Le Président: M. le ministre de la Santé et des
Services sociaux.
Une voix: II n'a rien compris.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, oui,
effectivement, mon collègue a raison: ou il n'a pas compris ou il ne
veut pas comprendre, pour des fins politiques.
Une voix: II n'a pas compris.
M. Côté (Charlesbourg): le ticket orienteur, je l'ai
dit et je le répète, n'est pas un ticket pour permettre au
gouvernement de faire des sous. lorsque le député de
rouyn-noran-da-témiscamingue tente, par ses propos, d'induire la
population en erreur sur la salle d'urgence, il ment effrontément. c'est
clair, là!
Des voix: Aïe! Aïe!
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous
plaît! Alors, M. le ministre, vous connaissez notre règlement, je
vous demanderais de... S'il vous plaît! S'il vous plaît! Vous
connaissez notre règlement, je vous demanderais de retirer les derniers
propos que vous avez énoncés.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je
m'excuse auprès du député de
Rouyn-Noran-da-Témiscamingue, il se trompe - c'est beaucoup plus doux,
c'est beaucoup plus doux - pour la simple et bonne raison que ce que nous
instaurons est un ticket orienteur, un ticket orienteur qui ne prive pas les
individus d'un service puisqu'ils pourront l'avoir en cabinet privé, ils
pourront avoir au niveau d'un CLSC des services qui sont totalement gratuits.
Donc, lorsque vous prenez cet exemple, vous prenez un très mauvais
exemple. Mais dites-moi donc vous, par exemple, ce que vous feriez avec des
centres hospitaliers universitaires qui ont des cliniques externes, alors
qu'à ce moment-ci les centres hospitaliers universitaires, c'est la
pointe de l'excellence, où on doit viser l'excellence, où il y a
des cliniques externes, où les gens vont dans les cliniques externes.
Qu'est-ce que vous feriez pour tenter d'enrayer cette situation? Et de dire que
le ticket orienteur touche les pauvres, les plus démunis, c'est de la
démagogie, et vous ne nous avez pas habitués à ce genre de
langage.
Le Président: En question complémentaire.
M. Trudel: Le ministre peut-il expliquer à la population
du Québec comment ça va fonctionner à l'entrée de
la salle d'urgence, avec ce ticket? Est-ce que le ministre est en train de nous
dire que la mère qui va apporter son enfant qui a avalé un 0,10
$, lui, ça ne sera pas suffisamment grave, on va le retourner en
première ligne, mais que celui qui va avoir avalé un 0,25 $,
ça va être suffisamment grave pour qu'on l'accepte à
l'urgence? Comment ça va fonctionner, ça?
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): m. le président, je
trouve ça extraordinaire, au moment où on dépose une
réforme aussi substantielle - tous les intervenants sont à
même de dire que c'est une réforme qui est substantielle - que le
député de rouyn-noranda-témiscamingue trouve une question
de 0,25 $ - c'est une question de 0,25 $ - et qu'il ait décidé de
faire de sa première question sur la réforme une question sur le
ticket orienteur à 0,25 $. ce que vous n'avez pas compris... allez faire
un tour dans les hôpitaux, dans les urgences, ce n'est pas aux urgences
que ça s'applique, c'est aux cliniques externes. j'espère
qu'aujourd'hui vous faites la distinction entre une clinique externe et une
urgence, s'il vous plaît; au moins, c'est un minimum.
Une voix: Bravo!
Le Président: Question complémentaire.
M. Trudel: Le ministre peut-il nous expliquer pourquoi, dans ce
projet de réforme, il brise le régime de gratuité pour les
soins dentaires et les services optométriques puisqu'il introduit un
nouvel impôt, l'impôt à rebours ou l'impôt service?
N'est-il pas prêt à reconnaître qu'un tel impôt,
ça va carrément à rencontre des objectifs de
prévention qu'il prétend se donner lui-même? Est-ce que le
ministre est prêt à
reconnaître que ce nouvel impôt va jouer contre les
objectifs de prévention?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Non, non et non. C'est
clair! Non. Il y a un impôt services qui est créé non pas
sur l'ensemble des services courants mais, avant que les épouvantails
à moineaux ne se promènent un peu partout, il y a un impôt
services qui est créé sur 600 000 000 $, sur un budget de 11 000
000 000 $. C'est d'abord ça qu'il est important de dire.
La deuxième chose qui est importante à dire, c'est
qu'effectivement ça s'applique aux médicaments, ça
s'applique au dentaire, ça s'applique à l'ophtalmologie et
ça s'applique aux orthèses et prothèses, mais ça ne
s'applique pas aux gens démunis que vous évoquiez tantôt,
parce qu'ils sont protégés, et c'est très clairement
écrit et inscrit à l'intérieur du document.
Une voix: C'est ça, c'est ça.
M. Côté (Charlesbourg): Les gens, comme des
personnes âgées qui auront la sécurité du revenu et
le supplément de sécurité du revenu sont exemptés
de cette mesure. Le principe est le suivant et il est très simple:
À partir du moment où vous consommez - prenons, comme exemple -
pour 500 $ de médicaments dans un an et que vous gagnez 30 000 $ par
année de revenu imposable, ce que l'État vous demande de faire,
dans la mesure où le "bracket" serait de 30 %, c'est de payer 150 $ pour
les médicaments, avec un maximum de 3 % de votre revenu imposable sur
des services complémentaires que le Québec s'est donnés au
moment où le Québec était capable de le faire, soit avant
votre arrivée au pouvoir. Et, depuis ce temps, vous avez endetté
le Québec et il faut aller chercher de l'argent pour payer le service de
la dette que vous nous avez laissé.
Des voix: Ah! Ah! Ah!
Le Président: Toujours en complémentaire.
M. Trudel: Ticket, nouvel impôt! Comment le ministre
peut-il, en toute décence, expliquer aux personnes âgées
que leurs maigres économies les puniront en les privant de
l'accessibilité totalement gratuite à certains médicaments
ou à d'autres services comme les services de la vue? Comment peut-il
expliquer aux personnes âgées que, selon le total de leurs
économies, à la fin de l'année, ils pourront être
imposés, ils pourront être taxés sur leur revenu pour les
services qui sont actuellement assurés complètement au
Québec?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Ça fait partie du
langage démagogique qu'on peut colporter un peu partout à travers
le Québec quand l'intention est d'abord politique au lieu de la
personne. C'est ça que fait la réforme: d'abord la personne.
Le Québec a maintenu des programmes gratuits, accessibles
à l'ensemble de ses citoyens et très généreux. Il
est évident qu'aujourd'hui le Québec ne peut plus se payer ce
qu'il s'est payé dans le passé, au niveau des médicaments
pour personnes âgées. Prenons un exemple; lorsqu'on dit que les
personnes qui ont la sécurité du revenu plus le supplément
de sécurité du revenu seront exemptées, c'est 49 % des
personnes qui n'auront à payer aucun sou au niveau des
médicaments et la gratuité est toujours là. (14 h 30)
Une voix: Les autres?
M. Côté (Charlesbourg): Oui, quant aux autres, ce
sont des gens qui, de plus en plus, sortent du marché du travail avec
des régimes de pension qu'ils ont acquis au fil des années, avec
une sécurité sur le plan financier pas mal plus importante que
ceux qui sont en difficulté aujourd'hui. Ceux qui sont en
difficulté, aujourd'hui, sont protégés; alors, ne venez
pas me dire, à moi, que le gouvernement du Québec doit continuer
de payer au-delà de ses capacités de payer.
Le Président: En conclusion.
M. Côté (Charlesbourg): L'autre effet positif est de
vous faire prendre conscience que la consommation des médicaments,
ça y est pour 15 % ou 16 % des hospitalisations des personnes au niveau
des hôpitaux, dans les lits de soins de courte durée, et
ça, c'est de la prévention quand on le fait comme ça.
Des voix: Bravo!
Le Président: En question complémentaire.
M. Trudel: Alors, le ministre nous confirme que le régime
de pensions durement acquises au cours des années par les personnes
âgées, maintenant on va l'imposer. Comment le...
Des voix: Ah!
M. Trudel: Comment le ministre...
Le Président: S'il vous plaît!
M. Trudel: Le ministre peut-il nous expliquer très
concrètement l'objectif décrit à la réforme,
à la page 82, qui autorise dorénavant le ministre de la
Santé à revoir périodiquement la gamme et l'étendue
des services assurés en matière de santé et de services
sociaux au Québec? Le ministre a-t-il l'intention de nous
refaire le coup de l'application de la TPS au Québec et de nous
annoncer en juillet, le vendredi après-midi, qu'il y a des services
à l'assurance-maladie qui ne seront plus assurés au
Québec? Comment le ministre peut-il nous expliquer la brisure qu'il
introduit dans l'universalité des programmes sociaux, des programmes de
santé que nous avons au Québec?
Une voix: Bravo!
Le Président: m. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Je ne sais pas si le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue connaît
ça, les pilules, un peu. Il aurait avantage à étudier un
petit peu. Quand on regarde et qu'on dit qu'on va revoir, on indique
très clairement que c'est au niveau des médicaments. Qu'est-ce
qu'il a à être scandalisé, le chef de l'Opposition?
Une voix: II se scandalise de tout de ce temps-ci.
Le Président: S'il vous plaît! M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Parce qu'on aborde des
questions qui sont là, à l'intérieur de la réforme,
mais, lorsqu'on parie de revoir la gamme des services, M. le Président,
ça peut vouloir dire aussi revoir la gamme des médicaments
assurés. Ce n'est pas le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue qui a la compétence pour être
capable de savoir si les médicaments ont des effets positifs ou
négatifs, ni le député de Charlesbourg et ministre de la
Santé et des Services sociaux mais un comité de pharmacologie qui
est mis sur pied, de spécialistes qui vont conseiller le gouvernement
sur ce qui est souhaitable et non souhaitable comme médicaments
assurés pour le bien-être des citoyens à travers le
Québec et qui sont payés et seront payés par le
gouvernement.
Quand on parle de révision de ta gamme, c'est ça que
ça veut dire, si vous n'avez pas compris. Et si jamais vous voulez en
savoir davantage, payez-vous une petite visite au ministère et je vais
vous en expliquer plus longtemps.
Une voix:...
Le Président: En question principale, M. le
député de La Prairie.
Étude du projet Soligaz par le BAPE
M. Lazure: M. le Président, on apprenait avant-hier que
les commissaires du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement
chargés de l'étude du projet Soiigaz ont demandé au
ministre de l'Environnement de prolonger leur mandat de quatre mois. Il semble
en effet que l'étude d'impact présentée par Soiigaz
comportait des lacunes si importantes que les commissaires se sont dits
incapables de finir leur travail dans l'état actuel du dossier. On sait
que ces études d'impact doivent être d'abord approuvées par
le ministère avant d'être acheminées au Bureau d'audiences
et que c'est la première fois depuis la création du Bureau
d'audiences qu'une telle situation se présente, où les
commissaires renvoient l'étude.
Alors, la question au ministre de l'Environnement: Est-il exact que
l'étude de Soiigaz ne corresponde pas, comme les commissaires le disent,
aux directives émises par son prédécesseur - premier volet
- qui est à sa droite et, deuxièmement, est-il exact que le
Service d'évaluation des rejets toxiques de son propre ministère
ainsi que le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche
considéraient comme insatisfaisante cette étude que le
ministère a approuvée?
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Le
député de La Prairie situe le dossier dans son contexte exact. Il
est, en effet, exact que le Bureau d'audiences publiques a demandé au
ministre de l'Environnement un prolongement de délai de quelque quatre
mois. Suite à cette réponse, le député de La
Prairie comprendra que le BAPE est encore saisi du dossier et que, pendant que
le BAPE est saisi d'un dossier, le ministre de l'Environnement est très
prudent dans ses commentaires.
Le Président: Question complémentaire.
M. Lazure: Est-ce que le ministre se rend compte qu'il se cache
derrière une soi-disant discrétion vis-à-vis du BAPE pour
éviter de répondre à ma question? La question: Est-ce que
c'est lui qui a approuvé l'étude de conformité que la
compagnie lui a présentée, qui était différente des
directives émises par son prédécesseur? Est-ce que c'est
lui qui l'a approuvée, oui ou non?
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Ce que le ministre comprend de
cette question additionnelle du député de La Prairie, c'est que
si le ministre tombait dans le piège de répondre aux questions
directes du député de La Prairie, le ministre serait
accusé par le député de La Prairie d'ingérence dans
un processus qui se doit d'être neutre.
Le Président: En question complémentaire.
M. Lazure: M. le Président, est-ce que le ministre va
donner ce délai de quatre mois aux commissaires?
Le Président: M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, c'est la
raison de la prudence dans les réponses que j'ai données
jusqu'ici au député de La Prairie. Ce délai a
déjà été octroyé au Bureau d'audiences
publiques par le ministre.
Le Président: En complémentaire.
M. Lazure: Est-ce que le ministre peut admettre que c'est la
première fois, depuis l'existence du Bureau d'audiences publiques sur
l'environnement, qu'une telle situation se présente? Est-ce qu'il peut
l'admettre, ça, ou est-ce qu'il peut le nier? Deuxièmement,
est-ce qu'il a l'intention d'exiger que ces audiences soient publiques et non
pas de les faire à huis clos, comme les commissaires semblaient le
désirer?
Le Président: M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Quant à la première
partie de la question, je peux confirmer au député de La Prairie
qu'il s'agit d'un précédent. Quant à la deuxième
partie de la question, il n'y a rien dans la demande que m'a adressée le
Bureau d'audiences publiques en matière environnementale qui
dénote que le caractère de la deuxième phase d'audiences
ne serait pas public.
Le Président: En question principale, M. le
député de Jonquière.
Conséquences de la TPS et de la TVQ sur les
municipalités
M. Dufour: Oui. Selon une étude de la firme Raymond,
Chabot, Martin, Paré et Associés, l'application de la TPS
entraînera une augmentation d'au moins 1 % des budgets municipaux.
À titre d'exemple pour Montréal seulement, il s'agit d'une
augmentation de 3 700 000 $. Les deux unions municipales ont exprimé
à quelques reprises leur inquiétude face à la TPS
fédérale et à la taxe de vente du Québec. Dans ces
conditions, est-ce que le ministre des Affaires municipales peut me dire si son
ministère a effectué des études sur les
conséquences de la TVQ, de la taxe de vente du Québec, sur les
municipalités du Québec?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Ryan: Oui. Des échanges nombreux ont eu lieu à
ce sujet entre les fonctionnaires du ministère des Affaires municipales
et ceux du ministère des Finances de manière à adoucir le
plus possible l'impact pour les municipalités du régime de la
TPS.
M. Dufour: Est-ce que le ministre est prêt, s'il veut
renforcer son apologie des bienfaits du fédéralisme, à
demander et à obtenir du gouvernement canadien d'exempter les
municipalités de la TPS?
Le Président: M. le ministre.
M. Ryan: Je transmettrai volontiers ce voeu au ministre des
Finances qui est habilité en ces choses à négocier avec le
gouvernement fédéral.
M. Dufour: Comme on est dans les échanges des bons voeux,
dans le contexte où plusieurs responsabilités seront
transférées vraisemblablement aux municipalités, ce qui
aura pour effet d'alourdir leur budget, le ministre a-t-il l'intention de
demander à son collègue des Finances l'exemption des
municipalités québécoises de la taxe de vente du
Québec? (14 h 40)
Le Président: M. le ministre.
M. Ryan: La réponse à cette question viendra avec
le dossier d'ensemble qui sera présenté aux municipalités
le 14 décembre prochain, à l'occasion d'une rencontre assez
importante de la table Québec-municipalités.
Le Président: En question principale, M. le
député de Laviolette.
Négociations avec les agents de la paix de
l'Assemblée nationale
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Les
négociations entre les agents de la paix qui assurent notre
sécurité aussi bien à l'extérieur qu'à
l'intérieur de l'Assemblée nationale et le Conseil du
trésor entrent déjà dans leur troisième
année et aucune augmentation de salaire ne leur a été
accordée, malgré l'augmentation du coût de la vie. On sait
qu'il y a des familles que ces hommes et ces femmes ont à
protéger.
De plus, les agents de la paix souhaitent une clarification de leur
statut quant aux effectifs et quant à leur plan de carrière.
J'aimerais demander au ministre de la Sécurité publique s'il a
l'intention d'intervenir auprès de son collègue du Conseil du
trésor afin qu'avant la fin de la décision qui doit être
rendue par le juge du tribunal d'arbitrage on leur accorde au moins, en
attendant, d'ici à Noël, une avance sur l'augmentation qui leur
sera accordée fort probablement par le juge au tribunal d'arbitrage?
Le Président: M. le ministre de la Sécurité
publique.
M. Ryan: Le député de Laviolette est bien gentil,
M. le Président. Sans me prévenir, hier, il m'avait
informé de son inquiétude à ce sujet. Et malheureusement,
le président du Conseil du trésor, à qui il incombe de
conduire ces négociations avec les groupes d'employés du secteur
public, est absent ce matin. Je n'ai pas eu l'occasion de lui parler. Et comme
je n'ai pas eu de représentations directes de l'association qui regroupe
les travailleurs dont il a parlé, je ne suis pas saisi des derniers
éléments, les plus récents du dossier. Je le ferai
sûrement au début de la semaine. Je prends en considération
la suggestion pleine de générosité qui était
impliquée dans sa question.
Le Président: En question complémentaire.
M. Jolivet: Oui, M. le Président, le ministre ne
convient-il pas aussi que ces personnes qui nous servent, pour plusieurs depuis
de nombreuses années, sont en droit de s'attendre à une
entente-cadre à la fois sur les effectifs et sur le plan de
carrière? Et en conséquence, le ministre est-il prêt
à prévoir dans les prochains jours de "prioriser" les rencontres
nécessaires afin de clarifier le statut des agents de la paix de
l'Assemblée nationale?
Le Président: M. le ministre de la Sécurité
publique.
M. Ryan: Sans être au courant des détails du
dossier, je suis fondé de présumer, vu qu'il n'y a pas d'entente
depuis une période aussi longue, qu'il y a des sujets sur lesquels le
syndicat concerné n'accepte pas la politique du gouvernement. S'il
l'avait acceptée, les conventions seraient sans doute signées. Je
vérifierai les points sur lesquels la politique du gouvernement est mise
en question. J'en causerai avec le président du Conseil du trésor
et nous aviserons au gouvernement quant à la ligne de conduite qui doit
être suivie là-dedans.
Mais, pour le moment, je pense que la présomption joue
plutôt en faveur du Conseil du trésor qui, chaque fois qu'il a les
éléments d'une entente, s'empresse de la conclure. Mais on verra
l'autre point de vue aussi.
Le Président: En question complémentaire.
M. Jolivet: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre
pourrait prendre avis, pour discussion avec son collègue, de l'ensemble
de la problématique qui est ici, c'est-à-dire les effectifs qui
sont demandés pour notre sécurité, aussi bien pour les
députés que pour l'ensemble des gens qui travaillent ici à
l'Assemblée nationale et des gens qui viennent nous visiter, et,
deuxièmement, quant à ce plan de carrière qu'ils
demandent, parce qu'actuellement ils sont confinés à rester ce
qu'ils sont sans avoir la capacité de passer à des postes
supérieurs?
M. Ryan: M. le Président... Le Président: M.
le ministre.
M. Ryan: ...je prends note volontiers en vous prévenant
cependant que j'ai un certain préjugé défavorable quand il
est question de plancher d'effectifs.
Le Président: En question principale, M. le
député de Jacques-Cartier.
Contrats octroyés par le gouvernement
M. Cameron: Merci, M. le Président. Ma question est pour
Mme la vice-première ministre. The Federal Government has recently
announced that they are willing to allow open competitive bidding on contracts
in the Civil Service. The reason they are willing to do this is to gain access
to the large American market for Government Civil Service contracts. In other
words, contracts offered by the Federal Government should be open even to
American suppliers or the Canadian suppliers across the country.
Is the Québec Government considering opening contracts to this
general competition?
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: C'est un dossier, M. le Président, qui est
étudié en ce moment, par mon collègue qui a
sensibilisé ses collègues du Conseil des ministres et il n'y a
pas de décision qui a été prise jusqu'à
maintenant.
Le Président: En question principale maintenant, M. le
député de Rouyn-Noranda-Témis-camingue.
Abandon par la compagnie Auger du service de transport
en commun en Abitibi-Témîscamingue
M. Trudel: M. le Président, question au ministre des
Transports. Après la disparition quasi complète du réseau
ferroviaire de toute la région de l'Abitibi-Témiscamingue, c'est
maintenant tout le réseau de transport en commun par autobus qui est
menacé dans cette région périphérique du
Québec. En effet, depuis quelques jours, nous savons que la compagnie
Auger, qui s'était portée acquéreur des circuits de
transport de la région de Trois-Rivières, de la région de
l'Estrie et de la région de Abitibi-Témiscamingue veut maintenant
se départir de la portion la moins rentable du circuit: la région
de Abitibi-Témiscamingue.
Ma question est très simple au ministre des Transports. Comme ce
gouvernement a introduit
une politique de déréglementation dans tout le
système de transport au Québec, a-t-il l'intention d'intervenir
très fermement auprès de la compagnie qui s'est portée
acquéreuse de trois tronçons de transport en commun au
Québec pour, dans un deuxième temps, laisser la région de
l'Abitibi-Témiscamingue à elle-même et que ça en
soit fini avec le système de transport en commun pour les gens les plus
défavorisés dans cette région périphérique
du Québec? A-t-il l'intention d'intervenir?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Elkas: M. le Président, on a vu un témoignage de
ce gouvernement qui veut s'assurer de la desserte de transport dans plusieurs
régions, dans toutes les régions, d'ailleurs, de la province de
Québec. Dans ce dossier-ci, j'ai demandé à mes
fonctionnaires d'intervenir, à savoir à quel point les dessertes
vont être abolies. Il est évident que je suis très
sérieux dans les approches de m'assurer qu'il y ait un maintien du
transport en commun dans ces régions.
Le Président: En question complémentaire.
M. Trudel: Mais le ministre peut-il assurer la population de
l'Abitibi-Témiscamingue et les autres régions
périphériques du Québec éventuellement - de toute
façon, c'est toujours le même processus - qu'on va interdire
à cette entreprise de garder les circuits les plus rentables de la
région vers Montréal et qu'on laisse ce qu'on appelle le "petit
lait", qui n'est pas payant, ce qui ne rapporte pas de sous, à l'abandon
et qu'on va continuer à appliquer cette politique du libéralisme
à tous crins qui fait, finalement, que c'est toujours les petites
régions du Québec les moins densément peuplées qui
paient la note à l'autre bout?
Est-ce que le ministre va fermement interdire cette pratique et
intervenir dans de la transaction qui est en train de s'opérer entre
Auger et de petits entrepreneurs qui seront floués d'ici, à deux
ou trois mois dans cette expérience ou dans cette transaction?
Le Président: M. le ministre.
M. Elkas: M. le Président, j'aimerais assurer le
député que je vais faire mon possible pour m'assurer que le
service soit maintenu, que les compagnies vont assumer leurs
responsabilités et ne pas abolir les lignes qui ne sont pas
nécessairement rentables.
Le Président: En complémentaire.
M. Trudel: Question simple. Je la répète. Le
ministre va-t-il intervenir auprès de la compagnie Auger? Va-t-il
intervenir auprès de la com- pagnie Auger d'ici quelques heures,
quelques jours?
Le Président: M. le ministre.
M. Elkas: M. le Président, comme je l'ai mentionné,
j'ai demandé à mes fonctionnaires de regarder le dossier au
complet. Ils vont me faire rapport. Je vais revenir pour dire au
député quelle sorte de position le gouvernement va prendre.
Le Président: En question principale, Mme la
députée de Terrebonne.
Coupures du service d'électricité durant
l'hiver
Mme Caron: Merci, M. le Président. Le 9 mai dernier, lors
de la consultation sur la situation et les perspectives de l'énergie
électrique au Québec, la Fédération des
associations coopératives d'économie familiale présentait
un excellent mémoire sur l'impact des mesures de recouvrement
d'Hydro-Québec sur les familles à faible revenu. Alors que les
familles les plus pauvres auront, elles aussi, à faire face à une
hausse de leur compte d'électricité de plus de 23 % sur deux ans,
la ministre de l'Énergie et des Ressources a-t-elle l'intention
d'intervenir auprès d'Hydro-Québec pour mettre fin aux coupures
de ce service essentiel durant l'hiver?
Le Président: Mme la ministre de l'Énergie et des
Ressources. (14 h 50)
Mme Bacon: Ce qu'oublie de dire la députée, M. le
Président, c'est qu'avant d'en arriver à une coupure, ce qui se
fait le plus rarement possible, il y a au moins une période de 120 jours
où Hydro-Québec essaie, avec les gens qui sont en retard dans
leur paiement de comptes, de régler ces paiements de comptes avec eux et
essaie, par tous les moyens, que ce soit avec l'aide sociale ou avec d'autres
possibilités gouvernementales, de trouver un terrain d'entente pour le
paiement de ces comptes. Mais on ne coupe pas sauvagement, comme tente de le
faire comprendre, de le faire dire la députée, on ne coupe pas
sauvagement l'électricité à quelqu'un sans avoir pris tous
les moyens nécessaires pour régler le dossier entre les deux
parties.
Le Président: En question complémentaire.
Mme Caron: Est-ce que la ministre sait qu'actuellement il n'y a
aucune politique d'établie et qu'on laisse à la discrétion
des bureaux régionaux le soin de décider de couper ou non
l'électricité l'hiver, qu'il n'y a aucun arbitre impartial pour
juger des ententes de paiement conclues à Hydro-Québec et qu'en
1988-1989 il y a eu 9653 coupures, l'hiver?
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: Mme la ministre.
Mme Bacon: M. le Président, vous comprendrez bien que les
gens des régions sont aussi au fait des informations que je viens de
donner et ne coupent pas l'électricicté du jour au lendemain aux
personnes. Quand la députée dit, encore une fois, que ces
gens-là n'ont aucun recours, il faudrait qu'elle se renseigne davantage.
Elle semble oublier qu'il y a quand même un ombudsman qui est là
pour répondre aux plaintes de la population.
Le Président: En question complémentaire.
Mme Caron: Est-ce que la ministre est d'accord avec le
commissaire aux plaintes, justement, des services des distributeurs
d'électricité qui, lors de l'étude des crédits,
disait que ce service était essentiel et qu'il ne comprenait pas
pourquoi il y avait des coupures l'hiver?
Des voix: Bravo!
Le Président: Mme la ministre.
Mme Bacon: II est tellement essentiel, ce service, que je me bats
pour essayer de l'assurer à la population du Québec.
Le Président: En question principale, M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
Projet de bibliothèques publiques
M. Boulerice: M. le Président, après le rapport
Mittermeyer et le rapport Sauvageau qui avaient été
commandés par le prédécesseur de son
prédécesseur, la ministre retire le projet des
bibliothèques publiques présenté par son
prédécesseur, en vertu d'une promesse faite par le
prédécesseur de son prédécesseur.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Boulerice: Compte tenu qu'on a autant d'études sur le
sujet que de ministres prédécesseur du
prédécesseur, est-ce que l'actuelle ministre pourrait nous
expliquer le pourquoi du retrait de ce projet de loi, alors que 900 000
Québécois sont toujours privés de
bibliothèques?
Des voix: Bravo!
Le Président: Mme la ministre des Affaires
culturelles.
Mme Frulla-Hébert: M. le Président, je peux vous
assurer que la bonne santé de nos bibliothèques est quand
même une des priorités du ministère des Affaires
culturelles et de ce gouvernement et que, si le projet de loi a
été, pour l'instant, retiré, c'est pour que je puisse
mieux en prendre connaissance, et je le déposerai le plus tôt
possible.
Le Président: En question complémentaire.
M. Boulerice: Est-ce que la ministre est en train de nous dire
qu'elle doit en prendre connaissance parce qu'elle a des doutes sur la
qualité de ce que son prédécesseur avait
présenté selon la promesse de son prédécesseur? Et
devrons-nous attendre qu'elle soit le prédécesseur d'un autre
avant que 900 000 Québécois aient accès à une
bibliothèque?
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: Mme la ministre.
Mme Frulla-Hébert: M. le Président, depuis 1985,
l'aide financière aux bibliothèques a été de plus
117 000 000 $...
Une voix: C'est ça.
Mme Frulla-Hébert: ...dont 22 700 000 $, seulement en
1990. Donc, le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques devrait se
réjouir et reconnaître que le gouvernement que je
représente a fait plus, au cours des dernières années,
pour la culture, malheureusement, que le gouvernement
précédent.
Le Président: En question principale, M. le
député de La Prairie.
Aide aux parents d'enfants handicapés
M. Lazure: M. le Président, hier, j'avais l'occasion de
poser une question au ministre de l'Éducation concernant
l'intégration des enfants handicapés dans le réseau
scolaire. Le ministre de la Santé et des Services sociaux, responsable
de l'Office des personnes handicapées étant présent
aujourd'hui, j'aimerais lui poser une seule question, M. le Président.
Compte tenu que l'Office des personnes handicapées a, dans le
passé, souvent aidé des parents d'enfants handicapés
à revendiquer leurs droits en cour, pour préparer le dossier,
est-ce que le ministre
Le Président: M. le député...
M. Lazure: ...en payant ses frais d'avocats?
Le Président: Alors, M. le ministre de la Santé et
des Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président,
c'est un dossier qui a fait l'objet de plusieurs échanges avec le
député d'Argenteuil alors qu'il était ministre de
l'Éducation, et aussi avec le député de Portneuf, qui
assume sa succession, et à la base même des discussions et des
décisions du Conseil des ministres qui faisaient qu'il y aurait
transfert de tous les programmes de l'Office aux différents
ministères sur le plan sectoriel.
Nous avons éprouvé un certain nombre de difficultés
quant au transfert de certains programmes au niveau du soutien du maintien
à domicile, par exemple, au lieu du transport, et nous sommes à
finaliser un ensemble d'interventions qui nous permettraient de
régulariser la situation budgétaire d'un ensemble de programmes.
Nous avons des ententes avec le ministère de l'Éducation que nous
allons respecter et nous nous sommes donné - vous vous en souviendrez
très certainement - lors de l'étude des crédits l'an
dernier, une volonté de transférer effectivement l'administration
du programme au ministère de l'Éducation le plus rapidement
possible; comme ça n'a pas été possible pour septembre
1990, l'objectif est toujours de le faire en 1991, en harmonie avec le
ministère de l'Éducation et avec l'OPHQ.
Le Président: Alors, ceci met fin à la
période régulière de questions.
Il n'y a pas de votes reportés.
Aux motions sans préavis, M. le leader du gouvernement.
Motion proposant la tenue de consultations
particulières dans le cadre de
l'étude
détaillée du projet de loi 110
M. Pagé: Alors, M. le Président, je voudrais faire
motion, qu'à la suite d'une entente avec l'Opposition, que la commission
de l'aménagement et des équipements tienne, le lundi 10
décembre 1990, de 16 heures à 18 h 35, à la salle
Louis-Joseph-Papineau, des consultations particulières dans le cadre de
l'étude détaillée du projet de loi 110, Loi modifiant
diverses dispositions législatives concernant les organismes
intermunicipaux de l'Outaouais. Évidemment, je fais motion pour que le
ministre des Affaires municipales soit membre de ladite commission pour la
durée de ce mandat. Je voudrais ici indiquer l'objet et le contenu de
l'entente, la liste des groupes invités et l'horaire des
consultations.
À la suite de cette entente avec l'Opposition, je dépose
la liste des groupes invites et l'horaire des consultations: De 16 heures
à 16 h 45, les maires des municipalités rurales de Cantley,
Chelsea, L'Ange-Gardien, La Pêche, Notre-Dame-de-la-Salette, Pontiac et
Val-d es-
Monts; de 16 h 45 à 17 h 30, les échanges auront cours
avec la Corporation professionnelle des évaluateurs agréés
du Québec; de 17 h 30 à 18 h 15, les maires des
municipalités urbaines de Hull, Aylmer, Gatineau, Buckingham et Masson
seront entendus et, enfin, de 18 h 15 à 18 h 35, le Commissariat
agricole de la ville d'Ayl-mer échangera avec les membres de la
commission.
Le Président: Alors, est-ce que cette motion est
adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Président: La motion est donc adoptée.
Toujours au niveau des motions sans préavis, je vais maintenant
reconnaître Mme la ministre des Affaires culturelles. Alors, Mme la
ministre des Affaires culturelles, aux motions sans préavis.
M. Pagé: M. le Président...
Le Président: Oui, M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: ...Mme la ministre des Affaires culturelles... On
a deux autres motions sans préavis qui, j'en suis convaincu,
nécessitent l'attention de chacun et chacune des collègues. Me
serait-il permis de donner les avis à la Chambre
immédiatement?
Une voix: Non. M. Pagé: Non!
Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement?
Une voix: Non.
Le Président: Non, il n'y a pas consentement. Alors, nous
devons procéder aux motions sans préavis. Je vais
reconnaître Mme la ministre des Affaires culturelles.
Hommage au comédien Jean Duceppe et
condoléances à sa famille
Mme Frulla-Hébert: M. le Président, je sollicite le
consentement de cette Assemblée pour présenter la motion sans
préavis suivante: "Qu'à la suite du décès de M.
Jean Duceppe, l'Assemblée nationale rende hommage à cette grande
figure du monde artistique québécois et offre ses plus
sincères condoléances à sa famille."
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour
débattre cette motion?
Une voix: Consentement.
Le Président: II y a consentement. En conséquence,
je vous cède la parole, Mme la ministre des Affaires culturelles.
Mme Liza Frulla-Hébert
Mme Frulla-Hébert: M. le Président, c'est avec
énormément de tristesse et de chagrin que nous avons appris ce
matin le décès de M. Jean Duceppe.
Au-delà du comédien de génie qui s'est
particulièrement affirmé dans La mort d'un commis voyageur et
dans Charbonneau et le Chef, nous ne pouvons passer sous silence sa
contribution magistrale au développement de la dramaturgie
québécoise. Que l'on pense aux
téléthéâtres auxquels il a participé, entre
autres, Zone, Un simple soldat, Chambre à louer, Le jugement dernier, Le
gars de Québec. (15 heures)
Ayant participé à la naissance de la
télévision au Québec avec les Plouffe et, par la suite,
dans Rue des Pignons, Le survenant, Rue de l'Anse, Terre humaine, Monsieur le
ministre, il sut s'illustrer de plus au cinéma dans des films tels Mon
oncle Antoine et Les beaux dimanches, Les colombes, Tit-Coq, Bingo et j'en
passe.
Sa modestie, sa simplicité, à l'écart de toute
gloire personnelle, n'avait d'égal que la richesse de l'héritage
qu'il nous lègue. En près de 50 ans de vie artistique, M. le
Président, M. Duceppe a travaillé sans relâche à
développer le goût du théâtre au Québec et
à le faire partager à de nombreux publics dans toutes les
régions. Son dynamisme et sa créativité ont
profondément marqué l'évolution non seulement du secteur
du théâtre et de l'ensemble du milieu des arts, mais aussi de
notre société entière.
Il s'est fait l'interprète de nos plus grands dramaturges
québécois, que ce soit Marcel Dubé, Mia Riddez, Roger
Lemelin, Gratien Gélinas et bien d'autres. Il appartient, M. le
Président, aux plus grands de sa génération. Il a
été homme de tous les combats pour affirmer l'identité
culturelle du Québec. Il fut et demeurera dans notre mémoire un
grand Québécois.
M. le Président, je n'ai pas eu l'honneur de connaître
personnellement M. Jean Duceppe, mais ce matin, lorsque j'ai appris son
décès, j'ai eu en mémoire une image du passé, un
souvenir d'adolescente, alors qu'au collègue Mont Saint-Louis où
étudiaient ses fils, je me souviens de lui, de la fierté que l'on
pouvait lire dans ses yeux lorsqu'il venait les encourager lors
d'activités sportives, notamnent les joutes de football
intercollégiales.
Donc, en plus d'être un très grand bâtisseur du
Québec, un homme de théâtre, un homme engagé,
profondément humain et passionné, il était
également un père et un grand-père exemplaire.
Il fut récipiendaire du prix Denise-Pelletier, plus haute
distinction que le gouvernement du
Québec décerne dans le secteur des arts
d'interprétation et fait chevalier de l'Ordre du Québec. Nous lui
rendons aujourd'hui un ultime hommage et nous lui exprimons toute notre
reconnaissance au moment où il entre dans l'histoire. Et, à vous,
Jean Duceppe, ce n'est qu'un au revoir, puisque vous vivrez pour toujours
à travers l'héritage théâtral que vous nous avez
légué. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre):Merci, Mme la ministre.
sur cette même motion, je reconnais maintenant m. le chef de l'opposition
officielle.
M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: M. le Président, le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques présentera tout à l'heure l'hommage de
toute notre formation à M. Jean Duceppe. Donc, je ne dirai que quelques
mots avant lui. J'ai assez bien connu M. Duceppe. J'ai été en
contact avec lui pendant de très nombreuses années. Je voudrais
simplement souligner comme faisant partie de cet hommage de cette Chambre le
rôle que Jean Duceppe a joué pour le développement du
théâtre au Québec. Montréal est maintenant une place
de création théâtrale importante, pas seulement pour le
Québec, mais sur le plan international. Ça n'est pas Paris,
Londres et New York, bien sûr, mais ça ne vient pas loin
après. Si Montréal est devenue une telle place de création
théâtrale, c'est à une demi-douzaine de gens de
théâtre que nous le devons, dont en particulier, Jean Duceppe.
Ça n'est pas tout de dire qu'il aura été un homme
du théâtre québécois. Il nous a initiés, au
fond, au théâtre, à une vision internationale du
théâtre. Si nous connaissons le théâtre
américain contemporain, c'est largement grâce à lui que
nous le devons. Ça a été, d'autre part, un
Québécois qui adorait les Québécois. Il n'y avait
pas de méchanceté chez Jean Duceppe. Il était dans le
Québec comme un poisson dans l'eau, c'était sa
société, une société qu'il admirait et qui le lui
rendait bien. C'est dans ce sens que je veux, moi aussi, présenter
à sa famille nos condoléances, bien sûr, mais toute
l'admiration que nous ressentons à l'égard d'une carrière
comme celle de Jean Duceppe.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): merci, m. le chef de
l'opposition officielle. je reconnais maintenant, sur cette même motion,
m. le député de sainte-marie-saint-jacques. m. le
député.
M. André Boulerice
M. Boulerice: M. le Président, chers collègues, le
théâtre québécois devenait orphelin ce matin. Vous
comprendrez qu'intervenir aujourd'hui, en cette Chambre, est un
privilège dont je
me serais facilement passé, compte tenu de la tristesse de
l'événement.
Jean Duceppe est mort. L'un des plus grands comédiens
québécois nous a quittés, au moment où,
après avoir tant donné à son peuple, nous attendions
encore de lui, de son art, de son talent.
Dans un moment comme celui-ci, il est difficile de trouver le mot juste,
la phrase adéquate, tellement l'émotion est grande et le chagrin
est profond, autant pour moi, pour mes collègues du Parti
québécois et pour toutes les femmes et les hommes de ce pays qui
nourrissaient pour Jean Duceppe une admiration légitime, un respect et
une affection sincère.
Jean Duceppe était un homme de théâtre avant tout!
Rappelons-nous les oeuvres maîtresses comme Bousille et les justes qui
exprimait l'oppression des faibles, des petits. Remémorons-nous
Charbonneau et le Chef, une page importante de notre histoire récente.
Je m'en voudrais d'oublier une pièce, Médium saignant, qui posait
la problématique du débat linguistique au Québec, au
moment de la crise de Saint-Léonard. C'est ce qu'on appelle du
théâtre engagé. À ces oeuvres, j'ajouterais La mort
d'un commis voyageur et sa participation dans neuf pièces du
théâtre de Marcel Dubé.
Créateur de ses propres théâtres, il a fondé
le ou un des premiers théâtres d'été au
Québec, à Joliette, ma ville natale, où j'ai eu, la
première fois, la joie de faire sa rencontre et celle de sa famille. Peu
de temps après, il créait sa propre compagnie
théâtrale et s'installait au complexe de la Place des Arts de
Montréal.
Oui, M. le Président, nous sommes tristes mais, à travers
nos larmes, se dessine quand même un sourire quand nous reviennent les
images du film Mon oncle Antoine du regretté Claude Jutra, où M.
Duceppe jouait le rôle d'un magasinier général roublard et
truculent dans son vocabulaire et ses expressions. Grâce à lui, ce
film est devenu un classique du cinéma québécois.
M. Duceppe a été également présent sur nos
écrans de télévision; songeons aux Plouffe et surtout
à cette autre belle série télévisée qu'a
été Rue des Pignons, de Mme Mia Riddez, où M. Duceppe et
les autres personnages de cette série illustraient la vie quotidienne de
la population simple et attachante du centre-sud de Montréal.
À plusieurs reprises, Jean Duceppe a été
honoré par ses pairs. Il a reçu des prix soulignant ce talent
exceptionnel et son travail de comédien ainsi que sa qualité de
citoyen émérite du Québec. Récipiendaire du Prix du
Québec, le prix Denise-Pelletier, je sais pertinemment que cet homme
humble se refusait aux honneurs personnels. Il suggérait les autres et
non pas lui. Les applaudissements nourris de ses milliers d'admirateurs
étaient le plus bel hommage à ses yeux. Engagé, je le
répète de nouveau, le 25 juin dernier, le Québec
retentissait de son immense cri du coeur. Devant des milliers de personnes sur
111e Sainte-Hélène et des millions de
téléspectateurs, il traduisait son espoir, l'espoir collectif de
notre peuple en disant d'une voix forte: Le Québec est notre seul pays.
(15 h 10)
À Mme Duceppe, j'offre de nouveaux nos plus sincères
condoléances. À Louise, qui poursuivra l'oeuvre de son
père, à Monique, à Anne, à Yves, à Pierre,
à Claude et à Gilles, maintenant devenu mon collègue dans
Sainte-Marie-Saint-Jacques, je dis que, quel que soit notre âge, la mort
d'un père aimant et attentif est un deuil cruel. Puisse ce message
d'amitié et de sympathie être un réconfort pour vous tous.
Votre père vivra toujours dans nos coeurs car il a assuré la
continuité et elle sera peut-être exprimée par ses
petits-enfants. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Sur cette même
motion de Mme le ministre des Affaires culturelles, je cède maintenant
la parole à M. le député de Louis-Hébert. M. le
député.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: Oui, merci, M. le Président. La sombre faucheuse
qu'est la mort est venue nous ravir, pour la grande scène de
l'au-delà, un grand acteur québécois hier. Il est parti,
mais les marques qu'il laisse sont là pour longtemps. Nous nous
souviendrons de Jean Duceppe comme étant l'acteur qui nous a souvent
fait sourire, parfois pleurer, qui nous a émus et qui nous a permis de
nous retrouver dans ce qu'il était.
Jean Duceppe nous a quittés et, en nous quittant, il a rendu le
théâtre québécois plus pauvre. C'était un
grand acteur. C'était quelqu'un qui ne peut laisser que des souvenirs
impérissables. Il est né, rappelons-le, M. le Président,
le 25 octobre 1923. Il a fait ses débuts très jeune au
Théâtre du Nouveau Monde et au Rideau Vert, dans d'innombrables
pièces. Dès 1952, il a fait partie de la distribution du premier
téléthéâtre de Radio-Canada, Le Seigneur de
Brinqueville que ça s'appelait. S'ensuivit un nombre impressionnant de
téléthéâtres parmi lesquels il faut citer: Pauvre
Amour, La Cellule, et Florence, de Marcel Dubé. Au théâtre,
il a interprété avec brio le rôle de Maurice Duplessis, on
le rappelait tout à l'heure, dans Charbonneau et le Chef et le
rôle principal dans La mort d'un commis voyageur. Ces rôles, il les
sentait profondément et il les interprétait de telle façon
qu'on ne peut penser à aucun autre interprète que lui, même
aujourd'hui.
Jean Duceppe n'a pas seulement excellé au théâtre,
mais aussi à la télévision et au cinéma. Les
téléspectateurs se souviendront des personnages qu'il a
incarnés dans certains téléromans. Entre autres,
mentionnons le sympathique Stan Labrie, dans La Famille Plouffe, Émery
Lafeuille
dans Rue des Pignons, Léandre Jacquemin dans Terre humaine et,
plus récemment, Renaud Monnier dans Monsieur le ministre. Au
cinéma, son interprétation du rôle titre de Mon oncle
Antoine, de Claude Jutra, lui a valu le prix du meilleur comédien de
l'année au Festival du cinéma canadien en 1972. M. Jean Duceppe a
été de tous les radioromans, de tous les
téléromans, sauf un, Un homme et son péché. Sans
oublier qu'il fit également partie de nombreuses émissions
radiophoniques à CKAC.
Mais il nous faut aussi souligner l'intérêt et
l'attachement de Jean Duceppe. Cet attachement, il l'a porté à la
production et à la diffusion d'un théâtre de qualité
de chez nous. C'est pourquoi après avoir dirigé, durant quatre
ans, les tournées du Théâtre populaire Molson et
fondé le Théâtre des prairies en 1961, il a
créé en 1973 la Compagnie Jean Duceppe que dirige maintenant sa
fille. Parmi les nombreuses distinctions qui lui ont été
attribuées tout au long de son impressionnante carrière, il faut
mentionner le prix Victor-Morin en 1969. Dix ans plus tard, le Conseil des arts
du Canada lui décerne le prix Molson pour sa contribution exceptionnelle
au théâtre. Il reçoit le prix Denise-Pelletier
institué par le Québec pour reconnaître les mérites
exceptionnels d'un artiste dans le domaine des arts
d'interprétation.
On pourrait allonger la liste, et de beaucoup, M. le Président,
mais ces quelques mots permettent de souligner d'une façon tangible le
rayonnement très exceptionnel de Jean Duceppe au Québec et
à l'étranger. m. duceppe fut plus qu'un comédien. il avait
un souci pour l'affirmation de la culture québécoise, la culture
d'ici. cela lui a valu toute la reconnaissance et l'admiration que nous tous,
nous lui vouons aujourd'hui. la mort, le décès, le départ
de ce grand homme crée un vide immense au sein du milieu artistique
québécois et c'est avec sincérité que, comme
président de la commission de la culture, je me joins à mes
collègues députés et, plus particulièrement,
à mme la ministre des affaires culturelles, aux membres de la commission
de la culture, à tous mes collègues pour offrir à la
famille et aux amis de m. jean duceppe nos plus profondes condoléances
et toute notre sympathie.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Louis-Hébert. Sur cette même motion, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Gordon Atkinson
M. Atkinson: M. le Président, I am of an age that each day
brings forth both joy and sorrow. Joy, to know that I may still enjoy the
bounties of a full life, sorrow, when I hear of the death of a friend or
acquaintance. Aujourd'hui est une journée de tristesse. Mon ami, Jean
Duceppe, est décédé hier d'une crise cardiaque.
Jean Duceppe était un géant dans le monde du
théâtre. Son nom et son talent s'étendaient bien
au-delà des frontières du Québec. Il était un homme
d'un calibre et d'une énergie incroyables dans sa profession.
J'ai fait la connaissance de Jean dans le milieu des années
cinquante alors que nous travaillions tous deux pour une plus grande
reconnaissance de tous les artistes du Québec et du Canada. À
cette époque, nous étions chapeautés par un organisme
appelée Association of Canadian Authors and Artists. Il fut élu
au conseil d'administration en tant que représentant des artistes
francophones alors que j'étais un membre du conseil représentant
les intérêts des artistes anglophones.
The mandate of the original coalition was broad. We were to look into
how to integrate all performers and writers, whether in radio, television,
motion pictures and on the stage. The mandate extended beyond what was
possible, but we persevered, and from this growth was created the French Union
des artistes and the English Association of Canadian Radio and Television
Artists.
One of the first adventurers into which this fledgling organization
exerted its influence was at the Stratford Shakespearean Festival. Incredible
talents, such as Denise Pelletier and Jean Gascon, now also sadly no longer
with us, brought a bright shining ray of blinding light to the Canadian
cultural scene.
Dans les années qui ont suivi, Jean Duceppe devait faire un pas
dans le monde plus exotique de la production et devenir son propre metteur en
scène, directeur et acteur principal.
Il me disait une fois, alors que nous prenions une tasse de café
dans un bistro de la rue de la Montagne, à Montréal, qu'il avait
décidé de se lancer dans cette nouvelle aventure parce qu'il
avait le sentiment que le grand auditoire de langue française n'avait
aucun contact avec le monde du théâtre anglais. Il souhaitait
créer et mettre en scène des pièces francophones à
partir de pièces anglaises, telles que La mort d'un commis voyageur,
lui-même jouant le rôle du personnage principal, Willy Loman.
Plusieurs membres de la troupe originale de Broadway sont venus à
Montréal pour voir la représentation et ont déclaré
que la version française de cette pièce était, de
plusieurs façons, plus près de son caractère et de sa
signification que la représentation originale à New York.
Je pleure la perte d'un grand talent théâtral, pour ne pas
dire tout le chagrin que je ressens en perdant un ami de longue date. Merci,
Jean Duceppe. You will be missed. Merci, M. le Président. (15 h 20)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions sur cette motion de Mme la ministre? Pas d'autres
interventions.
Est-ce que la motion de Mme la ministre des Affaires culturelles, qui se
lit comme suit: "Qu'à la suite du décès de M. Jean Duceppe
l'Assemblée nationale rende hommage à cette grande figure du
monde artistique québécois et offre ses plus sincères
condoléances à sa famille", est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. Est-ce
qu'il y a d'autres motions sans préavis? M. le ministre des
Transports.
Journée nationale de l'Opération Nez
rouge
M. Elkas: M. le Président, je sollicite le consentement de
cette Assemblée afin de souligner le début de l'Opération
Nez rouge aujourd'hui le 7 décembre et que soit déclarée
le 14 décembre 1990 Journée officielle de l'Opération Nez
rouge.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a
consentement pour qu'on puisse débattre cette motion? Allez-y, M. le
ministre.
M. Sam L. Elkas
M. Elkas: M. le Président, j'aimerais souligner la
présence dans les gradins de M. Jean-Marie DeKoninck, président
fondateur de l'Opération Nez rouge.
M. le Président, fondée à Québec par M.
DeKoninck, en 1984, l'Opération Nez rouge est, à peine sept ans
plus tard, présente presque partout au Québec. De 200
bénévoles et 463 transports réalisés en 1984,
l'année dernière, Opération Nez rouge compte presque 15
000 bénévoles, dont 5000 à Québec seulement, et
plus de 20 000 transports à travers les 34 opérations Nez rouge
en 1989.
Il existe maintenant 41 opérations Nez rouge qui couvrent plus de
325 municipalités et qui permettent de sensibiliser 85 % de la
population au problème de la conduite avec facultés
affaiblies.
Au cours des dernières années, cette Chambre a
adopté des mesures très sévères contre l'alcool au
volant, et pour cause. Rappelons, en effet, que l'alcool est présent
dans presque la moitié des accidents. Le gouvernement du Québec,
par l'entremise de la Société de l'assurance automobile, fait des
efforts considérables pour comprimer le nombre de victimes sur nos
routes.
L'Opération Nez rouge est une initiative dont les
bénéfices sont destinés à la société
québécoise. Cependant, la meilleure façon dont les
conducteurs peuvent profiter de l'Opération Nez rouge, c'est de ne pas
hésiter à utiliser ce service quand ils en ont besoin durant la
période des fêtes. C'est aussi de participer à
l'Opération Nez rouge et d'avoir la satisfaction de contribuer
concrètement à l'amélioration de la sécurité
sur nos routes, à cette époque de l'année où la
paix nous tient particulièrement à coeur.
Je désire féliciter M. DeKoninck, la Société
de l'assurance automobile du Québec et tous ceux qui appuient cette
heureuse initiative, commanditaires, organismes bénévoles.
L'Opération Nez rouge débute aujourd'hui et se terminera le 31
décembre. Et j'invite tous les députés à participer
à l'Opération Nez rouge de leur région et appuyer ainsi
une action bénéfique à tous les citoyens. Merci.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Sur cette même motion, M. le député de
Jonquière.
M. Francis Dufour
M. Dufour: Merci, M. le Président. On serait tenté,
à l'occasion du lancement de la campagne, de regarder les statistiques
concernant le réseau routier, les accidents mortels sur le réseau
routier, les accidents avec dommages matériels, ou des accidents causant
des séquelles. Une chose que je retiens seulement, c'est qu'au
Québec il y a environ 1100 accidents mortels par année, dont 50 %
causés par l'alcool. Donc, on doit se réjouir, aujourd'hui, qu'on
puisse rendre hommage à des gens ou à une personne,
spécialement, qui a pensé à cette opération ou
à cette organisation d'activités pour permettre à plus de
gens de passer une période des fêtes plus heureuse, en bonne
santé.
M. DeKoninck est connu et on l'a dit beaucoup. Je pense qu'il a
réussi à s'allier d'autres personnes, des entreprises, mais aussi
d'autres personnes qui lui ont permis d'étendre ce mouvement. Et je veux
souligner la puissance des moyens de communication. On peut être d'accord
ou en désaccord avec l'animateur André Arthur. On n'en parle pas
beaucoup, ici, en cette Chambre. Par contre, il faut dire que M. Arthur a
réussi, à cause des moyens de communication très forts
dans lesquels il travaille, à propager cette idée-là. Je
pense que la vérité a certaines parts de droit. Il faut aussi lui
rendre une partie de ces hommages-là, parce que je me demande de quelle
façon même la meilleure idée, si elle reste sous le
boisseau, peut progresser.
Donc, je pense que je me devais de souligner le travail du poste CHRC
qui s'est allié, au début, à cette Opération qui a
fait des petits et, disons-le, heureusement. Soyons heureux de cette
propagation, de cette bonne cause qui a pour effet de diminuer le nombre
d'accidents et de permettre à des gens d'avoir une période des
fêtes beaucoup plus heureuse. Il faudrait peut-être que la
période Nez rouge dure à l'année longue. Ce serait
peut-être un idéal, mais c'est peut-être aussi un voeu
pieux. Ce serait peut-être difficile d'engager autant de
bénévoles, autant d'entreprises, autant de ressources pour
foire cette propagande ou permettre à la sécurité
d'être plus présente dans nos esprits. Mais, le fait qu'on ne
puisse le faire à l'année, ça n'empêche pas de se
réjouir de ce qui se passe actuellement chez nous et de rendre hommage,
encore une fois, à tous ces bénévoles - à cette
personne, M. DeKoninck - qui se sont engagés à faire de la
sécurité routière dans notre société, dans
le temps des fêtes.
Bien sûr, le ministre pourra dire: Oui, depuis les
dernières années, on fait beaucoup pour la sécurité
routière, avec des lois. Mais je pense que les lois ne feront jamais ce
que l'éducation réussit à faire. Et c'est ça, je
pense, qu'est la grande oeuvre de Nez rouge et c'est pour ça qu'elle
doit se continuer. Et je souhaite que tout le Québec soit couvert par
cette Opération pour que le temps des fêtes soit vraiment un temps
de réjouissance, un temps de réconciliation, mais, aussi, un
temps sans accident. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Sur la même motion,
je reconnais M. le député de Taschereau.
M. Jean Leclerc
M. Leclerc: Merci, M. le Président. J'aimerais me joindre
brièvement à la motion du ministre des Transports pour souligner
également le bon travail de Nez rouge. Puisque le siège social,
si on peut dire, de Nez rouge est situé dans mon comté pour la
région de Québec, à la centrale de police, j'ai
été amené, l'an dernier, à participer, comme
bénévole, et à offrir le service Nez rouge à un
certain nombre de nos concitoyens et concitoyennes. Et vous me permettrez,
d'abord, M. le Président, de louer l'efficacité de l'organisation
de Nez rouge. Ce sont des gens admirablement bien organisés qui savent
où ils s'en vont et qui font en sorte d'impliquer
énormément de bénévoles pour rendre un service
efficace à la population qui en a besoin.
Et, parlant de bénévoles, jamais une organisation comme
Nez rouge ne pourrait avoir autant de rayonnement si autant de femmes et
d'hommes du Québec ne croyaient important de donner de leur temps,
d'investir des soirées à faire en sorte d'aider des gens qui
auraient festoyé un peu trop. Et vous me permettrez de rendre hommage
à tous les bénévoles qui, depuis le tout début de
Nez rouge, en commençant par M. DeKoninck qui en a été
l'instigateur, mais aussi, tous ceux et toutes celles qui, année
après année, soirée après soirée,
investissent de leur temps dans cette grande Opération.
Je voudrais donc encourager les citoyens et citoyennes du Québec
à continuer à s'impliquer dans cette oeuvre importante, mais je
voudrais aussi encourager... J'ai effectué un certain nombre de voyages
et j'ai été en mesure de me rendre compte combien c'était
un service qu'on pouvait rendre à des gens qui, malheureusement, avaient
festoyé un peu trop. Et je pense qu'il faut encourager les gens qui ne
se sentent pas en état de conduire leur véhicule à
utiliser les services de Nez rouge. Ce n'est pas une honte de recourir aux
services de Nez rouge. C'est une preuve de civisme. C'est un geste empreint de
responsabilité que d'admettre que nous n'avons plus, à un certain
moment donné de la soirée, toutes les facultés
nécessaires pour conduire notre véhicule. (15 h 30)
En encourageant ceux et celles qui peuvent en avoir besoin, il faut
aussi encourager les gens qui, festoyant en groupe, se rendent compte qu'un de
leurs collègues, amis, parents, confrères, consoeurs de travail
n'est peut-être pas en mesure de conduire son véhicule. Et c'est
souvent par des amis que l'on peut être encouragé à
utiliser le service Nez rouge. Ce sont souvent les amis qui prennent le soin de
dire: Non, ne conduis pas ta voiture, je vais téléphoner pour toi
à Nez rouge. Donc, je veux encourager tous ceux et toutes celles qui
peuvent avoir besoin de ce service-là à ne pas hésiter. Ce
n'est pas une honte d'avoir recours aux services de Nez rouge.
M. le Président, il faut se réjouir que Nez rouge art un
tel rayonnement, au moment où l'on se parie. Année après
année, d'autres régions du Québec se sont dotées de
tels services. Et c'est dire combien l'idée originale de M. DeKoninck
était sérieuse, était importante. Donc, tous les
Québécois et toutes les Québécoises peuvent se
réjouir qu'un tel organisme soit en place pour leur bien-être,
pour faire en sorte que les fêtes, au Québec, soient un moment de
réjouissances et que, d'aucune façon, ces réjouissances ne
soient assombries par de malheureux accidents. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Sur cette même
motion, M. le député de Jacques-Cartier.
M. Neil Cameron
M. Cameron: Merci, M. le Président. I am happy to support
the "motion sans préavis" of the Member for Baldwin and, in general, to
support the idea of "Opération Nez rouge". I can perhaps provide a
slightly different perspective on the issue of automobiles, alcohol and the
problem of public security than some people can, because when I first started
noticing that problem, about 30 years ago, I decided that I preferred never to
drive a car, and I never have.
Furthermore, I am a commuter in the opposite direction from the vast
majority of people. I have always lived essentially either in Westmount or in
the riding of the Member sitting next to me, and I have commuted out to work at
John Abbott College, in the West Island of Montréal, most commonly by
car pool or by
bus, which has given me constant opportunity to see that other people
did not make my wise choice, in consequence, I am in favor of anything that
reduces the danger on the highways and it is something that I think both the
Member for Baldwin and myself are particularly aware of because of the long
distances between residences on the West Island and either work or social
entertainments in the core of Montréal.
I would add, furthermore, that what is remarkable about
"Opération Nez rouge" is that it actually does some good. I notice that
"motions sans préavis" frequently require us to support some
magnificient idea where we all know that it really has absolutely no actual
effect on anything that takes place but merely indicates that we have good
intentions. In this case, we are talking about something which I believe
probably actually saves lives and, at a minimum, certainly increases the
chances that lives will be saved or that injuries will be reduced and,
therefore, it Is deserving of the highest praise. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Jacques-Cartier. Il n'y a pas d'autres
interventions?
Est-ce que cette motion du ministre des Transports à l'effet "que
cette Assemblée souligne le début de l'Opération Nez
rouge, aujourd'hui, le 7 décembre, et que soit déclaré le
14 décembre 1990 journée officielle de l'Opération Nez
rouge" est adoptée?
M. Pagé: Adopté. M. Jolivet:
Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. Pas
d'autres motions sans préavis.
À l'étape des avis touchant les travaux des commissions,
M. le leader du gouvernement.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Pagé: M. le Président, j'avise cette
Assemblée qu'aujourd'hui, à compter de maintenant - en invitant
les députés visés à se rendre dans les meilleurs
délais dans leur salle de commission, compte tenu de l'heure tardive -
et ce, jusqu'à 18 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine, la
commission des affaires sociales poursuivra l'étude
détaillée du projet de loi 97, Loi modifiant la Loi sur les
normes du travail et d'autres dispositions législatives.
À compter de maintenant jusqu'à 18 h 30 et de 20 heures
à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission du
budget et de l'administration poursuivra l'étude détaillée
du projet de loi 89, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur la vente
en détail et d'autres dispositions législatives d'ordre
fiscal.
À compter de maintenant, jusqu'à 18 h 30, à la
salle du Conseil législatif, la commission de l'éducation
poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 102, Loi
modifiant la Loi sur l'instruction publique et la Loi sur l'enseignement
privé; et de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil
législatif, la commission de l'économie et du travail
procédera à l'étude détaillée des projets de
loi suivants: projet de loi 86, Loi abrogeant la Loi sur l'Agence
québécoise de valorisation industrielle de la recherche; projet
de loi 87, Loi sur l'aide au développement des coopératives.
C'est tout.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le leader du
gouvernement.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.
Nous en arrivons maintenant à l'étape des affaires du
jour. M. le leader du gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, je dois corriger un avis
que je viens d'indiquer.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le leader.
M. Pagé: La commission des affaires sociales va amorcer
ses travaux à 16 heures, c'est bien ça, à la suite d'un
consentement, pour que ça arrange tout le monde.
Aucune demande de renseignements sur les travaux?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Non. Aux affaires du
jour, M. le leader du gouvernement.
M. Pagé: Tout est correct. C'est formidable. Ça va
bien, continuons.
Alors, M. le Président, je vous invite à appeler l'article
32 de notre feuilleton, soit la prise en considération du rapport sur
l'étude du projet de loi 62. Je vous indique tout de suite
qu'immédiatement après la fin de cette étape de la
procédure nous aborderons l'article 10 du feuilleton, soit l'adoption du
principe du projet de loi 103, Loi modifiant la Loi sur le ministère des
Approvisionnements et Services.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le leader du
gouvernement.
Projet de loi 62
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
À l'article 32 de notre feuilleton, M. le ministre des
Communications propose à l'Assemblée de prendre en
considération le rapport de la commission de la culture sur le projet de
loi 62, Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes
publics et sur la
protection des renseignements personnels et d'autres dispositions
législatives. M. le ministre des Communications.
M. Lawrence Cannon
M. Cannon: Merci, M. le Président. Si nous sommes
aujourd'hui à l'étape de la prise en considération du
rapport de la commission sur le projet de loi 62, Loi modifiant la Loi sur
l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des
renseignements personnels, c'est grâce à un long processus de
consultation et à une excellente collaboration du critique de
l'Opposition officielle lors de l'étude article par article. Je profite
de la tribune qui m'est donnée aujourd'hui pour le remercier
publiquement.
D'autre part, M. le Président, on se souviendra que le projet de
loi 62 est, en fait, une révision de la Loi sur l'accès aux
documents des organismes publics et sur la protection des renseignements
confidentiels, personnels. Cette loi, adoptée à
l'unanimité par les membres de cette Chambre en 1982, comportait une
clause dite crépusculaire qui veut que la loi soit révisée
à tous les cinq ans. Ce processus relativement nouveau en est à
ses derniers ébats et aura eu comme résultat de bonifier la loi
existante.
Ce projet de loi a donné lieu à une vaste consultation des
ministères et organismes publics et à de multiples
représentations d'intervenants, citoyens, groupes
d'intérêts et organismes publics. Les commentaires recueillis ont
été abondants et constructs. Pour vous donner une bonne
idée de l'ampleur de cette vaste consultation, je vous fais la liste des
groupes ou organismes qui ont participé activement à ce
processus. Il s'agit de la Commission d'accès à l'information, de
la Fédération professionnelle des journalistes du Québec,
la Centrale de l'enseignement du Québec, le Mouvement Retrouvailles, la
Conférence des recteurs et des principaux des universités du
Québec, la Ligue des droits et libertés, le Barreau, le journal
The Gazette, le Groupe de recherche informatique et droit, la
Fédération nationale des communications, la Coalition
démocratique de Montréal, Directron Média inc. et
l'Association des quotidiens du Québec. Le processus a été
long, mais jamais pénible. Tous les intervenants qui ont
été consultés avaient pour objectif d'améliorer
cette loi. Je remercie tous ces organismes et tous ces individus de leur
précieuse collaboration.
Ainsi, après ces nombreuses consultations, nous nous sommes
présentés à la commission de la culture pour
l'étude article par article, de même que pour certains amendements
au projet de loi 62. Ces amendements, je vous le rappelle, viennent au
même titre que le projet de loi lui-même, bonifier une loi qui
s'inscrit dans un contexte démocratique, premier fleuron d'une
société libre. (15 h 40)
N'oublions pas que les principes de la loi sur l'accès
découlent de deux droits inscrits dans la Charte des droits et
libertés de la personne, à savoir le droit à l'information
et le droit à la vie privée. D'ailleurs, ces principes venaient
consolider et appuyer fermement notre volonté commune de protéger
les Québécois et les Québécoises.
Vous me permettrez, M. le Président, d'élaborer un peu
plus sur cette volonté commune. Il a été convenu,
dès le début de ce processus de révision, que le projet de
loi motivait une action qui dépasse les intérêts
particuliers ou même les attitudes partisanes. Cette volonté
commune a eu pour résultat d'adopter à l'unanimité dans
cette Chambre la loi sur l'accès et la création de la Commission
d'accès à l'information. Cette Commission, à l'instar de
la loi sur l'accès, a deux rôles distincts, mais, à mes
yeux, de la même importance, soit la protection des renseignements et
l'accessibilité à l'information. Et ça, M. le
Président, il faut toujours le garder à notre esprit et, je le
répète, l'organisme et la loi sont établis sur ces deux
droits inscrits à la Charte des droits et libertés de la
personne.
Par ailleurs, et pour en revenir au débat qui motive notre
présence ici aujourd'hui, en plus des amendements que nous avons
apportés un groupe de travail sur la commercialisation des banques de
données a été formé récemment. Ce groupe,
dont les membres proviennent de la Commission d'accès à
l'information, de la Ligue des droits et libertés, de l'Inspecteur
général des institutions financières, de l'Union des
municipalités, du ministère de la Justice, du Groupe de recherche
informatique et droit, de l'entreprise privée et du ministère des
Communications, a pour mandat de proposer une politique qui permettra au
gouvernement de déterminer quels sont les types de banques de
données pouvant faire l'objet d'une commercialisation et de recommander,
le cas échéant, les moyens les plus appropriés à la
mise en oeuvre d'une telle politique.
Je veux assurer les membres de cette Chambre, M. le Président, et
la population en général qu'en ce qui concerne les données
nominatives ou personnelles je ne permettrai jamais que de telles
données soient commercialisées. Qu'on se comprenne bien, le
groupe de travail n'a pas été formé pour donner
accès à qui que ce soit à ce genre de données.
Pour leur part, les amendements au projet de loi 62 avaient
déjà fait l'objet d'un consensus au sein des intervenants et ont
été acceptés sans modification à l'étude
article par article. M. le Président, je l'ai dit à maintes
reprises et je tiens à le répéter aujourd'hui, je
considère le projet de loi 62 comme une législation
nécessitant le plus large consensus de tous les intérêts de
la société québécoise. Gardons bien à
l'esprit que ce sont là nos intérêts communs et
que ce défi n'appartient pas uniquement à la formation
politique majoritaire à l'Assemblée nationale et qui forme le
gouvernement. C'est notre société, dans son ensemble, qui est
concernée par le projet de loi 62 et c'est pourquoi je suis convaincu
que, tous, nous lui avons accordé la même priorité.
Je suis également convaincu, M. le Président, que notre
objectif premier de bonifier la Loi sur l'accès aux documents des
organismes publics et sur la protection des renseignements personnels aurait
été atteint. N'oublions pas que le projet de loi 62 a plusieurs
visées. Il s'agit d'assurer que tous les organismes publics sont
assujettis à la loi, de faciliter l'exercice du droit d'accès aux
documents par les citoyens, d'améliorer la protection des renseignements
personnels détenus par les organismes, d'apporter des
aménagements administratifs aux obligations des organismes publics et,
finalement, d'alléger la procédure d'appel à la Cour du
Québec des décisions de la Commission d'accès à
l'information.
M. le Président, les travaux que nous avons menés
jusqu'à maintenant témoignent de notre volonté commune
d'atteindre ces objectifs. C'est pourquoi je propose à cette Chambre
d'adopter le rapport de la commission de la culture qui a procédé
à l'étude détaillée du projet de loi 62, Loi
modifiant - à nouveau je le répète - la Loi sur
l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des
renseignements personnels et d'autres dispositions législatives. Merci
de votre attention, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Sur ce même sujet, je cède maintenant la parole à M. le
député de Masson.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Je
félicite le ministre d'avoir présenté cette loi. Je le
félicite surtout d'avoir retiré du projet de loi, en commission
parlementaire, tout ce qu'il y avait d'irritant. Et, en enlevant ce qui
était irritant ou contre les droits de la personne, eh bien, ça
demeure, il faut bien le dire, une réforme excessivement timide. Elle
apporte quand même certaines améliorations et je me dois, en tant
que critique de l'Opposition, de le reconnaître.
Cependant, le ministre est responsable de l'accès aux banques
d'informations; il est aussi responsable de ceux qui voudraient y porter
atteinte. Et, de par son poste, il devrait regarder la loi 102 qui vient parce
que la loi d'accès à l'information, que nous étudions
actuellement, défend tout renseignement nominatif et, dans la loi 102
qui s'en vient, le ministre de l'Éducation demandera aux commissions
scolaires de fournir des renseignements personnels et privés, ce qui est
contre le principe de la loi d'accès à l'infor- mation.
Nous avons peur, M. le Président, que cet accroc majeur à
la protection de la vie privée des êtres humains par le ministre
de l'Éducation et le ministre des Transports ouvre la porte à
d'autres abus. Et, j'aimerais beaucoup que le mutisme, probablement
étudié, du ministre à ce sujet, vu que nous parions ici
d'une loi d'accès à l'information, se transforme en
déclaration en cette Chambre. Il a lui-même dit, il y a quelques
jours, à l'émission Le Midi-10 de Radio-Canada que, sur la loi
102, le temps venu, il ferait une déclaration pour s'y objecter. Eh
bien, je crois que c'est exactement le temps de ce faire.
Je le félicite, cependant, parce que les gens responsables de
l'accès à l'information ne voulaient pas qu'il y ait des banques
de vente à l'entreprise privée de renseignements personnels,
d'avoir accepté de l'enlever de cette loi. Cependant, il n'y a rien qui
ouvre la porte vers l'accès dans l'entreprise privée. Nous en
sommes encore à 3000 points de repère, mais toujours publics.
Une chose, cependant, qui est très prometteuse: le ministre des
Communications, actuellement, comme être humain, est un type qui veut
énormément travailler en collaboration avec ceux qui l'entourent
et avec l'Opposition. Je me dois de reconnaître, ici, que ça me
fait plaisir et que, personnellement, c'est mon genre de personne, moi, de
travailler en collaboration. Je vous promets, M. le ministre, une grande
collaboration, mais j'aimerais qu'elle se concrétise sur la loi 102 et
que vous ayez une déclaration à ce sujet-là parce que
l'ensemble des gens qui surveillent cette loi 102 disent qu'elle brime la vie
privée des étudiants. M. le Président, c'est une remarque
un peu acerbe, mais je me dois, par devoir, de la servir.
Ceci dit, M. le Président, M. le ministre, vous avez toute ma
collaboration et la loi 62 a été faite dans un esprit de
collaboration et, sur ce, je ne dois que vous en féliciter et vous en
remercier. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le
député de Masson, je vous remercie.
M. le ministre, vous avez droit à cinq minutes. (15 h 50)
M. Lawrence Cannon (réplique)
M. Cannon: Oui, je serai très bref, M. le
Président, puisque le député de Masson m'offre
l'opportunité de commenter sur le rôle de la Commission
d'accès à l'information et sur le projet de loi 62 qui sera
étudié prochainement en commission parlementaire.
Je tiens à préciser au départ, M. le
Président, que ce qu'il est important de comprendre - et je suis
persuadé que M. le député de Masson l'a saisi, ceci n'est
pas nouveau, bien sûr - c'est qu'administrativement la Commission
d'accès à l'information relève du ministre des
Communications. Cependant, la loi sur l'accès est une loi
prépondérante. Le législateur a prévu que la CM
répond ultimement de ses gestes et opinions devant l'Assemblée
nationale et la CAI a pleine et entière autonomie et joue en ce sens
très bien son rôle.
Ce que je peux dire au député de Masson, c'est que des
discussions se poursuivent entre le ministère de l'Éducation et
la CAI en vue d'en arriver à une solution. Ce que la CAI craint, c'est
que des renseignements personnels, qui, après tout, sont des
données sensibles sur les citoyens, circulent sans motif fondé et
sans protection. La CAI craint également que ce phénomène
se multiplie et devienne monnaie courante. D'autre part, mon collègue,
le ministre de l'Éducation, veut pouvoir disposer des données les
plus fiables sur les clientèles d'élèves handicapés
et en difficulté d'apprentissage, afin de déterminer
adéquatement les montants de subventions à allouer aux
commissions scolaires, et je comprends sa préoccupation qui est une
préoccupation de fonds publics.
Il faut comprendre que la Commission d'accès à
l'information a un pouvoir quasi judiciaire et qu'en conséquence le
ministère des Communications et le ministre ne peuvent s'ingérer
dans ses prises de décision. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Sur ce même sujet, M. le... Alors, je vais proposer, effectivement,
l'adoption du rapport de la commission de la culture sur le projet de loi 62,
Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et
sur la protection des renseignements personnels et d'autres dispositions
législatives. Est-ce que la motion est adoptée?
M. Blais: Adopté.
Projet de loi 103 Reprise du débat sur
l'adoption du principe
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté.
Tel qu'indiqué précédemment par le leader du
gouvernement, nous enchaînons avec l'article 10 de notre feuilleton,
suggérant la reprise du débat sur l'adoption du principe du
projet de loi 103, Loi modifiant la Loi sur le ministère des
Approvisionnements et Services. Je suis prêt à reconnaître
le premier intervenant, M. le député de Montmagny-L'Islet.
M. Réal Gauvin
M. Gauvin: Merci, M. le Président, de me permettre
d'intervenir au niveau du projet de loi 103, à l'occasion de la reprise
des affaires courantes. J'aimerais vous rappeler que le projet de loi 103
modifiant la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services
revêt une importance indéniable pour le gouvernement du
Québec. Présenté récemment par le ministre
responsable du dossier, M. Dutil, ce projet de loi modifiant la Loi sur le
ministère des Approvisionnements et Services a ainsi été
élaboré afin de préciser les matières sur
lesquelles peuvent porter les politiques et les règlements que le
ministre est autorisé à établir.
La Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services confie
au ministre la responsabilité de proposer au gouvernement des politiques
relatives à l'acquisition et à la fourniture de biens et services
et de faire approuver par le gouvernement des règlements aux fins d'en
assurer l'application et la coordination. La loi du ministère comprenait
implicitement que les politiques et les règlements à faire
approuver par le gouvernement devaient également couvrir la construction
de biens et la location. Par ailleurs, ce projet précise les pouvoirs du
ministre des Approvisionnements et Services de mettre sur pied des
répertoires et d'identifier des catégories de biens et de
services ainsi que des spécialités dans lesquelles les
fournisseurs peuvent être inscrits pour les fins de sélection au
moyen d'un fichier.
Mais ce projet de loi est également important, et ce, pour la
raison suivante. Nous savons tous, M. le Président, qu'un bon
système d'octroi de contrats gouvernementaux est un atout essentiel pour
un gouvernement. Tout d'abord, cela permet de démontrer à la
population la notion d'équité et de justice que les élus
veulent adopter à l'endroit des entrepreneurs.
En effet, la création d'un climat favorable à l'expansion
des entreprises est essentielle puisque ces dernières ont une incidence
sur la croissance de l'emploi et, par le fait même, de l'économie
québécoise. L'Etat ne doit pas oublier que son rôle est de
veiller à créer des conditions favorables à
l'éclosion ou à la croissance d'une force entrepreneuriale
québécoise. Aussi, le Québec détient un potentiel
reconnu dans plusieurs secteurs d'activité, entre autres dans les
secteurs porteurs d'avenir. Notre gouvernement doit donc continuer à
encourager les entreprises à exceller dans leur domaine respectif.
Octroyer des contrats, c'est d'abord encourager nos entreprises
québécoises. J'aimerais ici, M. le Président, ouvrir une
parenthèse pour démontrer l'importance que peut avoir une
politique d'achat gouvernementale pour les régions où la PME
s'est développée à partir de sous-traitance et de
services, comme, par exemple, la région que je représente, la
grande région de Montmagny. La région que le ministre
représente a souvent été citée comme une
région remarquable au niveau du développement des PME et des
services depuis plusieurs années, donc la région de Beauce-Sud,
entre autres.
Par le passé, nous avons eu besoin, en
matière de développement d'entreprises, à maintes
reprises, de l'apport de ces dernières. En voici d'ailleurs un exemple.
Lors de l'expansion du gouvernement du Québec il y a quelques
décennies, les élus du temps ont mis sur pied plusieurs
ministères. Une telle expansion nécessitait, bien entendu,
l'apport des industries et des entreprises d'ici afin de mener à terme
ces projets de structuration et de construction.
Aujourd'hui, les résultats sont visibles et tangibles, mais,
à l'époque, tout était à faire et à
bâtir. Pensons simplement aux matériaux de construction et aux
équipements utilisés pour bâtir les édifices dans
lesquels logent les bureaux du gouvernement du Québec aujourd'hui, aux
terrains dont il a fallu se servir pour ériger ces mêmes
édifices. Ces détails, on a parfois tendance à les
oublier, M. le Président.
Il est donc primordial qu'un gouvernement fasse des soumissions et des
appels d'offres pour les services dont il a besoin pour la construction et
l'entretien des édifices, pour meubler ces derniers et ainsi de
suite.
Tout cela, qui, de prime abord, peut paraître de second ordre aux
yeux de plusieurs, revêt pourtant une grande importance lorsque arrive le
temps de payer la facture. La plus petite différence de prix peut, en
bout de ligne, faire varier considérablement une facture et les
coûts dans leur ensemble, d'où l'intérêt de faire des
soumissions et des appels d'offres afin que les sommes payées par le
gouvernement et, du même coup, par les contribuables
québécois soient les moins élevées possible. Il en
va de cette façon lorsqu'un individu désire acheter un objet. Il
veut se le procurer au meilleur prix possible, tout en étant
assuré de la bonne qualité.
M. le Président, ceci démontre bien le besoin du
gouvernement d'avoir, en guise de soutien, un répertoire contenant une
liste de fournisseurs et d'entrepreneurs en construction. Ainsi, lorsqu'il y a
des appels d'offres sur invitation, à part quelques rarçs
exceptions, la sélection des fournisseurs passe par le recours à
des fichiers du ministère des Approvisionnements et Services.
L'existence de ces fichiers n'est toutefois pas récente. Il
suffît de penser à Rosalie, ce système informatisé
créé en 1977 qui contient les noms et les données des
fournisseurs de services au gouvernement. Les fichiers sont donc un acquis pour
le gouvernement du Québec et nous ne devrions pas nousen défaire, évidemment. En effet, nous ne devrions pas
les remettre en cause, mais il faudrait certes les réviser pour suivre
l'évolution des firmes québécoises et arriver à les
rendre le plus transparents possible.
Le gouvernement, par son rôle de catalyseur, peut et doit
développer rentrepreneurship" local et régional. Il doit prendre
les moyens nécessaires afin de donner une chance égale à
toutes les entreprises pour obtenir un contrat. Au départ, lorsque le
Parti québécois a instauré le système de fichier
appelé Rosalie, il s'agissait d'une initiative légitime et
louable. L'idée initiale d'octroyer des contrats gouvernementaux aux
meilleurs soumissionnaires avait l'avantage d'être juste et
équitable, comme je le mentionnais tantôt. (16 heures)
Effectivement, M. le Président, ceux-là même qui ne
se gênaient pas pour accuser notre formation politique de se livrer
à un quelconque favoritisme politique et de se livrer aussi à des
reconnaissances plutôt générales des contracteurs et des
fournisseurs de services, ces mêmes personnes au tout début de la
mise en place de ce fichier, aujourd'hui toujours appelé Rosalie, ont eu
un fonctionnement pour le moins douteux. Et tout ça, pour la
réputation de cette Rosalie qui, finalement, a eu à en subir une
mauvaise renommée.
Le gouvernement libéral, dès son arrivée au pouvoir
en 1985, a décidé de mettre un terme à cette pratique. Et
c'est dans la foulée des engagements qu'il a pris pour diminuer ce
problème que s'inscrit le projet de loi 103 modifiant la Loi sur le
ministère des Approvisionnements et Services, dont nous discutons
aujourd'hui.
J'aimerais, à ce moment-ci de mon intervention, souligner les
efforts que mon gouvernement a faits pour améliorer le système
des octrois de contrats. Vous vous souviendrez sans doute, M. le
Président, de la création du groupe de travail pour analyser les
processus d'octroi des contrats du gouvernement. Le 7 novembre 1989, ce groupe
de travail, présidé par M. Bernard, avait d'ailleurs reçu
plusieurs mandats. Plus spécifiquement, le premier ministre lui avait
demandé d'analyser les législations en ce qui a trait aux
processus d'octroi d'approvisionnement de contrats et de services et de
contrats de location ou de construction de biens immeubles.
Que ces processus soient utilisés par le gouvernement du
Québec ou approuvés par le _. gouvernement à
l'égard d'organismes qu'il -fi-, nance, le deuxième aspect
consistait à analyser le fonctionnement de ces processus d'octrois afin
' d'évaluer s'ils répondent aux critères
d'efficacité, d'équité, d'accessibilité et de
transparence tels qu'exprimés dans la législation en vigueur.
Finalement, il s'agissait de proposer au gouvernement les moyens pour
améliorer les processus existants d'octroi de contrats ou proposer un
nouveau processus dans le but de respecter des critères
élevés d'efficacité, d'équité et
d'accessibilité.
Parallèlement à ces directives émanant du premier
ministre, le groupe de travail s'est fixé quelques objectifs pour tenir
compte, d'une part, du mandat reçu et, d'autre part, du temps disponible
pour le réaliser, soit un délai de six
mois. Le premier objectif consistait à jeter un regard d'ensemble
sur le processus d'octroi des contrats du gouvernement. Le deuxième,
à identifier des améliorations à apporter au processus
actuel. Et enfin, le dernier objectif était celui de proposer des voies
de solution et, si possible, décrire les correctifs à
apporter.
M. le Président, la réglementation actuelle concernant le
processus d'octroi des contrats du gouvernement a été
établie pour répondre à des besoins successifs. C'est
pourquoi nous possédons un ensemble de lois, de politiques, de
règlements et de directives. Les comparaisons effectuées par le
groupe de travail sur les processus d'octroi de contrats du gouvernement au
sujet de ce qui existe dans d'autres gouvernements leur ont confirmé que
le système actuellement en vigueur au Québec avait sa
nécessité et ses avantages.
Par contre, il en ressort qu'il pouvait être
amélioré pour le rendre plus cohérent, mais
également pour augmenter l'efficacité et la transparence.
À la suite de ces constatations, le groupe de travail a publié
des recommandations ayant pour objet de rendre plus strictes les règles
d'attribution des contrats et ainsi diminuer la possibilité de faire de
la sélection arbitraire au niveau des entreprises. J'en mentionnerai ici
l'essentiel. À prime abord, le groupe de travail souligne que le
système actuel d'octroi doit être plus rigoureux. Il recommande
ainsi la centralisation du secrétariat des comités de
sélection au ministère des Approvisionnements et Services.
Il recommande également que le gouvernement maintienne
l'essentiel du système en matière d'octroi de contrats, mais
qu'il apporte toutefois les ajustements nécessaires pour
améliorer la cohérence de la réglementation. Comme
d'autres améliorations, mentionnons la précision du champ
d'application de la réglementation, l'efficacité et la
transparence des processus d'octroi ¦ de contrats, le suivi et
l'évaluation de la performance des fournisseurs, de même que le
partage des responsabilités et l'imputabilité des intervenants
gouvernementaux.
De plus, le rapport insiste sur le fait que la réglementation
gouvernementale soit rédigée de façon telle qu'elle
s'applique automatiquement à tous les organismes du gouvernement,
à l'exception de ceux qui seraient expressément
désignés soit comme organismes partiellement assujettis, soit
comme organismes exempts.
Les sociétés d'État ont été
également touchées par les recommandations du rapport Bernard. En
effet, il est indiqué dans le rapport que les sociétés
d'État devraient toujours rendre compte de leur politique d'octroi lors
de leur venue en commission parlementaire.
Par ailleurs, M. le Président, l'analyse du groupe de travail les
a amenés à examiner le processus d'octroi des contrats
s'appliquant dans les commissions scolaires et les cégeps. En guise de
recommandation, il en est arrivé à la conclusion suivante. Qu'en
plus des dispositions réglementaires concernant les contrats de
construction qui s'appliquent déjà ou qui vont s'appliquer,
chaque commission scolaire soit tenue d'élaborer une politique d'octroi
de contrats. Cette politique devra concerner l'acquisition de biens et de
services, faire l'objet d'une approbation par le conseil des commissaires et
être rendue publique.
En ce qui a trait à la gestion des acquisitions de biens, le
groupe recommande que le ministère des Approvisionnements et Services
donne suite, le plus rapidement possible, à son intention d'informatiser
les mécanismes d'acquisition de biens. Concernant le fichier des
fournisseurs de services, la recommandation stipule que le ministère des
Approvisionnements et Services maintienne une mise à jour continuelle de
ce fichiers, de manière à le passer en revue sur un cycle maximum
de trois ans.
De plus, dans le cadre de cette opération, ce même
ministère devrait vérifier la qualification des fournisseurs et
s'assurer de leur intérêt à demeurer des fournisseurs du
gouvernement du Québec. Enfin, pour ce qui est du partage des
responsabilités, le groupe de travail recommande que le ministère
des Approvisionnements et Services soit, entre autres, chargé
d'élaborer et de proposer au gouvernement des politiques et des
règlements pour les ministères et les organismes publics dans les
matières suivantes: l'acquisition des biens, l'acquisition des services,
de même que la construction.
Ainsi, M. le Président, on voit bien la nécessité
pour un gouvernement de se prévaloir d'un système d'octroi de
contrats qui est juste pour tous les soumissionnaires, sans exception. Avec la
mise en place d'un projet de loi comme celui modifiant la Loi sur le
ministère des Approvisionnements et Services, le gouvernement
libéral a donc décidé de passer d'une attribution de
contrats basée sur plutôt ou de la reconnaissance de personnes de
par leurs qualifications, ou des personnes connues, et d'éviter le
patronage sur une attribution de contrats empreinte de transparence. Nous avons
voulu contrôler la carence engendrée par le favoritisme autrefois
reconnu sous le règne du Parti québécois. Je suis fier
d'affirmer que c'est au nom de l'équité que nous avons agi
ainsi.
M. le ministre responsable de ce projet de loi, il me fera plaisir de
vous supporter lors de la prise en considération et de l'adoption finale
de votre projet de loi pour le meilleur bien des fournisseurs de services, en
région comme à la grandeur du Québec. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): merci, m. le
député de montmagny-l'islet. toujours sur ce même
débat, à savoir l'adoption du principe du projet de loi 103, je
reconnais maintenant m. le député de deux-montagnes.
M. Jean-Guy Bergeron
M. Bergeron: Merci, M. le Président. Le projet de loi 103,
présenté le 15 novembre dernier par mon collègue, le
ministre québécois des Approvisionnements et Services, a
principalement pour objet de modifier la Loi sur le ministère des
Approvisionnements et Services, afin de préciser les matières sur
lesquelles peuvent porter les politiques et les règlements que le
ministère des Approvisionnements et Services est autorisé
à établir. (16 h 10)
En effet, le projet de loi 103, que nous, proposons aujourd'hui aux
membres de cette Assemblée, donne suite aux recommandations du
comité Bernard, lequel avait été mandaté le 7
novembre 1989, afin d'analyser le cadre réglementaire et les processus
d'octroi des contrats gouvernementaux, en vue d'améliorer
l'efficacité, l'équité, l'accessibilité et la
transparence. On se rappellera également que le premier ministre du
Québec, M. Robert Bourassa, avait accueilli favorablement le rapport du
comité Bernard déposé en juin dernier et avait
immédiatement mandaté le président du Conseil du
trésor et le ministre des Approvisionnements et Services pour
procéder à l'analyse des recommandations et voir à ce que
les modifications nécessaires soient apportées dans les plus
brefs délais. Un tel processus devait conséquemment conduire
à l'élaboration du projet de loi 103 que nous soumettons
aujourd'hui pour adoption.
M. le Président, permettez-moi de resituer ce projet de loi dans
son véritable contexte en expliquant le rôle de l'État
québécois dans l'économie, notamment en regard de sa
politique d'achat. On se rappellera notamment que, depuis le début des
années soixante, l'État québécois a joué un
rôle positif majeur dans l'orientation du développement
économique du Québec. En effet, la création de conditions
environnantes favorables aux affaires aura constitué l'une des
premières priorités du gouvernement québécois de
l'époque. Au niveau de l'appareil de l'État, rappelons, en outre,
la création de nouveaux ministères, tels que le ministère
des Affaires culturelles, en 1961, et l'embauche de personnel qualifié,
les investissements d'infrastructures ou encore la constitution de services
juridiques, financiers ou administratifs de support à l'entreprise
privée. Sur le plan économique, on se rappellera, bien sûr,
les appuis réitérés à l'entreprise privée,
les programmes incitatifs en faveur de l'investissement, de la consolidation et
de la restructuration des entreprises. De même, des investissements
routiers auront également permis de stimuler la localisation des
industries dans les régions jugées prioritaires, ce qui
contribua, par le fait même, à assurer le développement
économique régional.
L'avènement de sociétés d'État à
vocation industrielle, commerciale ou financière a égale- ment
constitué l'un des éléments notables de la politique
économique du gouvernement québécois. À cet
égard, la création des sociétés d'Etat, comme la
Société générale de financement en 1962, la Caisse
de dépôt et placement en 1965, avaient pour objet de canaliser
l'énergie vers l'investissement. Enfin, un certain nombre de
sociétés industrielles ont également été
créées dans le secteur des ressources naturelles, dans le but
d'exercer un plus grand contrôle public sur leur exploitation,
d'accroître le degré de transformation, de socialiser le risque
d'investissement. C'est dans cette perspective qu'était instituée
la société Hydro-Québec en 1963, la SOQUEM en 1965, REXFOR
et SOQUIP en 1969.
Ainsi, depuis les années soixante, l'État
québécois a développé des outils efficaces de
développement économique. Un de ces outils devait
également reposer sur la politique d'achat du gouvernement. En effet, la
réglementation actuelle touchant les processus d'octroi des contrats du
gouvernement s'est constituée, au fil des ans, comme l'addition de
couches sédimen-taires pour répondre à des besoins
successifs. Par exemple, la création de nouveaux ministères s'est
traduite par un accroissement des besoins en immeubles, besoins en terrains,
matériels de bureau ou autres. À l'aide des budgets mis à
leur disposition, les ministères pouvaient ainsi effectuer les achats
nécessaires auprès des firmes privées afin de pouvoir se
procurer les biens et services dont ils avaient besoin pour leur
fonctionnement. L'octroi de contrats gouvernementaux à de telles firmes
privées situées en région, par exemple, aura permis de
favoriser le développement économique régional et de
stimuler la création d'emplois.
Dans un autre ordre d'idées, le développement de notre
patrimoine routier aura également contribué à stimuler la
croissance économique du Québec. En effet, la construction de
nouvelles routes et d'autoroutes permettant ainsi d'assurer les liaisons entre
les différentes régions du Québec, de même que les
activités d'entretien et de réfection des chaussées
existantes ont dû nécessiter le recours à des entreprises
spécialisées pour l'achat de matériaux nécessaires
à la réalisation des travaux. Cependant, M. le Président,
au cours des dernières années, la politique d'achat du
gouvernement québécois a subi diverses transformations. À
cet égard, on se rappellera, entre autres, la création, sous
l'ancien gouvernement péquiste, du fichier des fournisseurs de services,
plus communément appelé Rosalie. D'abord, il s'est
avéré que ce système comportait certaines carences. Plus
particulièrement, on n'arrivait pas à sélectionner les
entreprises selon des méthodes de transparence absolues. Il y avait donc
là un problème de structure dans cette façon de
procéder. Enfin, depuis la création de Rosalie en 1977, il n'y a
eu qu'une seule révision importante, ce qui, à mon avis,
s'avère tout à fait insuffisant si l'on veut
suivre l'évolution continuelle des firmes
québécoises.
Conséquemment, afin de pouvoir combler certaines lacunes dans le
processus d'octroi des contrats gouvernementaux, le Conseil des ministres
décidait de mettre sur pied, en novembre 1989, un groupe de travail pour
analyser ce processus d'octroi des contrats du gouvernement. Ce groupe de
travail, présidé par M. Louis Bernard, avait principalement pour
mandat: premièrement, d'analyser les législations,
réglementations et directives en vigueur en ce qui a trait aux processus
d'octroi de contrats d'approvisionnements, de contrats de services et de
contrats de location ou de construction de biens immeubles;
deuxièmement, d'analyser le fonctionnement de ces processus d'octroi de
contrats afin d'évaluer s'ils répondent aux critères
d'efficacité, d'équité, d'accessibilité et de
transparence; troisièmement, de proposer au gouvernement les moyens pour
améliorer les processus existants d'octroi de contrats et de
préciser la liste des organismes ou des catégories d'organismes
dont le gouvernement devrait déterminer ou approuver les processus
d'octroi de contrats. (16 h 20)
Dans son rapport déposé en juin dernier, le comité
Bernard considère que le système d'attribution des contrats
gouvernementaux du Québec est "valable et avantageusement comparable
à ce qu'il y a de mieux ailleurs, mais qu'il a besoin de plus de
cohérence, d'efficacité et de transparence". Par
conséquent, le rapport Bernard a soumis des mesures spécifiques
afin d'assurer une plus grande cohérence de la réglementation
pour accroître, comme je viens de le dire, l'efficacité et la
transparence des processus.
Enfin, selon le comité Bernard, le système actuel d'octroi
de contrats gouvernementaux doit faire l'objet de plus de rigueur et il
propose, en outre, diverses mesures susceptibles de mieux encadrer les
jugements qualitatifs du comité de sélection. À cette fin,
le comité Bernard recommandait, par exemple, la centralisation du
secrétariat des comités de sélection au ministère
des Approvisionnements et Services, la mise en place de comités de
sélection de cinq membres pour les contrats qui nécessitent le
recours à l'appel d'offres public et que l'on dispense une formation
appropriée aux membres appelés à siéger
régulièrement sur les comités de sélection.
M. le Président, en ce qui concerne le fameux fichier
informatisé connu sous le nom de Rosalie, ce dernier a dû faire
l'objet d'une attention particulière de la part du comité Bernard
qui recommandait sa mise à jour continuelle. En effet, selon le groupe
de travail, il importe de s'assurer de l'exactitude des informations contenues
dans le fichier pour vérifier la qualification des fournisseurs et leur
aptitude à demeurer dans le fichier. Enfin, au chapitre de la
qualité des biens et services acquis par le gouvernement, le rapport
recommandait le renforcement des mesures de contrôle pour suivre
l'exécution des contrats et pour suivre l'application de la politique
administrative par les ministères et les organismes
intéressés. Le rapport insistait également sur
l'importance d'évaluer le rendement des entreprises. Voilà donc,
M. le Président, un aperçu général des
recommandations soumises par le rapport Bernard.
Comme je l'ai déjà mentionné au début de mon
intervention, le projet de loi 103 que nous proposons à cette
Assemblée donne suite à certaines recommandations du rapport
Bernard. Aussi, une autre recommandation, le fichier des fournisseurs de
services aura également retenu l'attention des membres du comité
Bernard, particulièrement en ce qui concerne la description de la
compétence des fournisseurs inscrits au fichier et la liste des
spécialités, laquelle se retrouvait en annexe au règlement
sur les contrats de service du gouvernement. Le comité Bernard s'est
donc penché sur cet aspect de la réglementation. À cet
égard, le rapport précisait, entre autres: "Nous sommes
conscients que la liste des spécialités intéresse
directement les fournisseurs de services et que c'est ce qui a justifié
la décision de l'inclure dans le règlement. Cette situation a
cependant pour conséquence d'alourdir le processus de modification de la
liste qui compte actuellement 222 spécialités. Il faudrait
trouver une solution plus souple."
M. le Président, soucieux d'atteindre cette souplesse et cette
efficience tout en assurant cependant la transparence requise, nous proposons,
conformément à l'article 3 du projet de loi 103, que le ministre
des Approvisionnements et Services établisse dans un répertoire
approuvé par le gouvernement et publié à la Gazette
officielle du Québec, les catégories de biens, les
catégories de services et les spécialités dans lesquelles
les fournisseurs du gouvernement peuvent s'inscrire lorsqu'un fichier est
créé.
Ce faisant, M. le Président, l'amendement ainsi proposé
par le présent projet de loi aura conséquemment pour effet de
simplifier le processus de mise à jour du fichier des fournisseurs de
services.
De même, la publication à la Gazette officielle du
Québec, en plus des moyens de publicité à la
disposition du ministère des Approvisionnements et Services, dont les
différents comités conjoints permanents de fournisseurs,
permettra une diffusion élargie des répertoires des biens et
spécialités, et ce, pour l'ensemble des fournisseurs
potentiels.
Enfin, les modifications proposées aux articles 8 et 9 de
l'actuelle Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services ne
sont que des modifications de concordance dans le but d'assurer la
cohérence du texte.
En conclusion, M. le Président, le régime
québécois relatif à l'acquisition de biens et
services dans le secteur public s'est développé avec les
années pour refléter à la fois les besoins d'une
administration moderne et complexe, et les valeurs d'une société
de plus en plus exigeante en ce qui concerne la moralité et la
transparence dans la gestion des fonds publics.
Il en est donc résulté un ensemble de processus
structurés qui, en tant que système, a permis jusqu'à
maintenant de rencontrer des critères élevés
d'efficacité, d'équité, d'accessibilité, de
transparence qui se compare avantageusement à ce qui existe
ailleurs.
Ainsi, M. le Président, il n'y avait pas lieu de mettre au
rancart ce mode de fonctionnement et de le remplacer par un autre. Cependant,
il y avait lieu de prendre certaines mesures afin d'améliorer son
rendement et pour donner de meilleures garanties quant à son
impartialité. Les nouvelles mesures que nous proposons, en vertu du
projet de loi 103, permettront certainement d'atteindre ces objectifs. Merci,
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Deux-Montagnes.
Sur ce même sujet, je reconnais maintenant, M. le
député d'Ungava.
M. Christian Claveau
M. Claveau: Merci, M. le Président. Ça fait
au-delà de 40 minutes que j'écoute mes collègues du parti
ministériel, de l'opposition en ce qui me concerne, se gargariser sur le
rapport Bernard, sur l'amélioration des modalités quant à
l'octroi des contrats, et je me dis qu'il va falloir se parler. J'ai
l'impression qu'ils ne sont pas toujours au fait des vraies situations, M. le
Président.
D'abord, le rapport Bernard comprenait 45 recommandations. D'ailleurs,
il faudrait déjà commencer par expliquer - je ne m'attarderai pas
là-dessus - mais disons que la commission Bernard, comme vous le savez,
a été créée de toute urgence dans un contexte
où ça pressait que le premier ministre intervienne pour
rétablir un peu la situation, enfin pour continuer à nager
au-dessus de la vague. Alors, il a créé dans un contexte
plutôt ombrageux la commission Bernard afin de faire la lumière
sur les allégations qu'il y avait contre certaines malversations faites
par son gouvernement dans l'octroi de contrats, et non pas par le gouvernement
précédent, M. le Président, mais par son gouvernement dans
sa façon d'appliquer la dynamique qui avait été mise en
place par l'ancien gouvernement. Ce n'est pas tout d'avoir des principes, mais
il faut savoir comment on applique ces choses-là. Et à partir
d'une organisation, de principes excellents, d'une façon de faire sans
faille, si on modifie l'approche, on peut arriver à lui enlever toute sa
valeur. C'est à la suite d'allégations semblables, fondées
sur des faits précis, que le premier ministre s'est vu acculer au mur,
dans l'obliga- tion de mettre en place la commission Bernard pour faire la
lumière et proposer des recommandations, M. le Président. (16 h
30)
II y en a 45, recommandations. Nous, on s'attendait,
légitimement, à avoir un projet de loi substantiel, lorsque le
ministre des Approvisionnements et Services nous a dit: Je vais déposer
un projet de loi, avec un titre pour le moins révélateur, Loi
modifiant la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services.
À la suite du dépôt du rapport Bernard, eh bien, on s'est
dit: Enfin! Le ministre a vu clair et il va sûrement amener des
modifications importantes qui vont faire en sorte que plus personne au
Québec ne pourra tenir, dorénavant, des allégations
semblables à celles qui ont eu cours avant que le premier ministre mette
en place la commission Bernard.
M. le Président, c'est ça, le projet de loi substantiel
que l'on a entre les mains: une feuille 8 1/2 par 11 pliée en 2, avec 5
articles. Et quand je regarde ou j'écoute les membres du parti
ministériel siégeant en cette Chambre, qui essaient de faire
accroire à la population du Québec que l'on modifie
fondamentalement le comportement dans le cas des soumissions, avec une feuille
8 1/2 par 11 pliée en 2, comprenant 5 articles dont un sur la date
d'entrée en vigueur de la loi, eh bien, M. le Président, il y a
loin entre la coupe et les lèvres.
M. le Président, il y a un certain nombre de problèmes qui
se posent dans l'octroi des contrats. C'est vrai que Rosalie, pour revenir sur
ce qu'on disait tout à l'heure, enfin, sur la mécanique
informatisée de choix de soumissionnaires, de gens à qui on
octroie des contrats, où on respecte une certaine rotation dans l'octroi
des contrats aux entreprises, c'est vrai que ce n'est peut-être pas
parfait. C'est vrai qu'il y a place à l'amélioration, mais
ça empêche des nouveaux Stades olympiques, par exemple! Le Stade
olympique, on peut s'en parler si vous voulez. Lorsqu'on parie de contrats mal
octroyés, où il y a des gens qui en ont profité un peu, on
n'a pas vu de nouveaux Stades olympiques, depuis l'arrivée de Rosalie,
dans la façon d'octroyer des contrats au Québec. Parions-en si
vous voulez.
J'écoutais le député de Montmagny-L'Islet dire: II
faut empêcher que se continuent les malversations faites du temps du
Parti québécois. Voulez-vous qu'on se parie des octrois de
contrats à la Baie James, durant la première Baie James, entre
1971 et 1976? Voulez-vous qu'on se parie du Stade olympique? Voulez-vous qu'on
se parie de certains contrats sur des routes au Québec? On pourrait s'en
parier. Voulez-vous qu'on se parie de l'octroi de certains contrats pour la
construction d'édifices publics, puisque le député de
Montmagny-L'Islet nous a parlé longuement de la construction des
édifices publics au Québec dans ces années-là? On
pourrait s'en parier.
M. le Président, ce sont des faits qui sont connus, donc je ne
m'attarderai pas là-dessus. Mais qu'on ne vienne pas, par exemple, jouer
à la sainte nitouche en cette Chambre en nous disant: Nous allons
corriger, cinq ans après avoir pris le pouvoir, des malversations qui
auraient été faites par l'ancien gouvernement, alors que ce
gouvernement, depuis cinq ans, s'applique à prendre toutes les mesures
possibles et imaginables pour contourner la dynamique qui avait
été mise en place par un gouvernement du Parti
québécois de façon à la rendre inopérante!
Et c'est pour ça que la commission Bernard a été
créée par l'actuel premier ministre. Ce n'est pas pour ce qui
s'était passé avant 1985. C'est pour ce qui s'est passé
entre 1985 et 1989.
M. le Président, quand on parle de malversation, il y a un
certain nombre de choses, effectivement, qu'on retrouve dans le rapport de la
commission Bernard, que le ministre aurait dû regarder avec plus
d'attention. Il semble que ie ministre se soit attardé à deux ou
trois considérations techniques qui ne sont pas mauvaises en soi, qu'on
peut considérer comme des améliorations, mais il n'a pas
touché le fond du problème, M. le Président, dans les
façons de faire. Comment pouvez-vous comprendre et comment pouvez-vous
m'expliquer - et j'espère que le ministre sera en mesure de m'expliquer
- comment les modifications qu'il apporte actuellement vont pouvoir faire en
sorte que, dans les années financières qui s'en viennent,
à partir de l'année prochaine, on ne retrouve plus, comme on a vu
cette année, des dépassements, juste au niveau des contrats de
voirie, contrats de travaux sur les routes du Québec, des
dépassements de 28 % sur l'ensemble des contrats de travaux de
réfection et de réparation de routes au Québec? Ça
a coûté la modique somme de 26 000 000 $ au gouvernement du
Québec juste pour les dépassements sur les contrats. Allez donc!
Vous ne me ferez toujours pas accroire, M. le Président, qu'il n'y a
personne au ministère des Transports qui est capable d'évaluer un
contrat à sa juste valeur.
Depuis, pour le moins, 1867 que le gouvernement du Québec fait
des routes. C'est vrai que les modalités d'octroi de contrats ont
évolué avec les années, c'est vrai que les normes de
construction ont relativement changé aussi depuis 1867, c'est tout vrai,
mais depuis qu'il y a un gouvernement au Québec qu'on fait des routes.
On en faisait même avant probablement. Et, au moment où on se
parie, avec toute la technologie dont on dispose, avec toute l'expertise qu'a
le ministère des Transports, avec toutes les compétences
accumulées avec les années, l'expérience du vécu
depuis de nombreuses années au ministère des Transports, on n'est
pas encore capables d'évaluer un contrat pour faire une couche d'usure
sur un chemin sans que ça dépasse de 26 % sur le contrat. Allez
donc!
On écoutait le ministre il n'y a pas si longtemps en cette
chambre nous dire: bien oui, mais dans la région de montréal,
vous savez, bon... non, c'était le ministre des transports qui nous le
disait, mais, enfin, c'est le même gouvernement qui parlait. il disait:
bien, quand on ouvre un mur pour changer la tuyauterie, si on se rend compte
qu'il faut changer les fils électriques, on les change en même
temps, sauf que, lorsque l'on a à couler des verges cubes de
béton, m. le président... parce qu'à ma connaissance la
composition interne d'un viaduc ou le fond d'un chemin ça se fait pas
mal tout de la même façon. c'est assez facile de prévoir ce
qu'on va trouver dans un mur de béton quand on le défonce,
surtout si c'est un pilier en béton, qu'il n'est composé que de
béton avec de l'armature. il serait plutôt surprenant d'y trouver
des appareils très sophistiqués et très coûteux.
alors, comment peut-on imaginer, à partir d'un exemple semblable... le
ministre nous disait: bien, c'est vrai qu'on peut avoir des
dépassements. vous savez, on ne sait jamais ce qu'on va trouver quand on
refait du vieux. oui, il y a toujours un facteur de risque, mais un facteur de
risque qui, normalement, est prévu par le soumissionnaire dans le
montant de sa soumission, de l'ordre de 10 % à 12 %. c'est des choses
qui sont possibles. mais il n'y a pas un soumissionnaire honnête et
raisonnable, m. le président, qui ne prévoira pas, dans le
montant de sa soumission, une marge pour les imprévus. c'est clair.
comment se fait-il que, malgré ça, avec des contracteurs qui sont
supposément compétents - ils ont été cotés
par le ministère et on leur a donné des chiffres, on a dit: toi,
tu vaux 90 %, toi, tu en vaux 75 %, toi, tu en vaux 72 %; on ne prend que les
meilleurs, donc, toi, tu es à 90 %, tu es un bon soumissionnaire - en
bout de piste, on arrive avec un dépassement de 31 %? ce n'est pas des
chiffres en l'air, c'est le chiffre réel: 31 % de dépassement
dans tous les travaux d'infrastructure sur l'île de montréal, dans
les autoroutes et viaducs de montréal, entre le mois d'avril et le mois
de novembre 1989. 31 %. des gens qui sont supposés connaître
ça!
Moi, je voudrais bien savoir à quelle place dans le 8 1/2 X 14,
perforé au centre, qu'on nous a présenté comme projet de
loi on va retrouver des modalités pour faire en sorte que ce genre de
chose là ne se reproduise plus.
M. le Président, c'est clair, et si les députés de
l'aile ministérielle n'ont pas compris, on va leur expliquer comment les
contrats sont octroyés depuis 1985. On a eu l'occasion, en
région, nous autres, de voir un certain nombre de modifications qui nous
surprenaient un peu et on a regardé comment ça évoluait.
D'ailleurs, je ferai une parenthèse. Lorsqu'on accuse le Parti
québécois d'avoir privilégié de ses amis, je
dirais, M. le Président, à tous ces gens-là que, dans mon
propre comté, comme dans la plupart des régions du Québec,
les comtés régionaux - et . vous irez voir dans le
Bas-Saint-Laurent-Gaspé-
sie, c'est la même chose - des contracteurs locaux,
libéraux notoires, parce qu'on les connaît, les gens chez nous, et
on sait qui travaille pour qui en campagne électorale, et tout
ça, et qui finance qui - c'est facile quand vous êtes 3000 ou 4000
habitants dans un petit village de savoir de quel bord chacun se trouve - des
contracteurs locaux, libéraux notoires, viennent nous dire à
nous, députés péquistes: Comment ça se fait, quand
vous étiez au pouvoir, on avait des contrats et astheure que c'est un
autre qui est là, on n'en a plus, on crève? C'est ça qu'on
nous dit. (16 h 40)
Comment ça se fait qu'on n'a plus de contrat, pourtant c'est
notre gang qui est au pouvoir? Quand vous étiez là, on en a
toujours eu, nous autres, des contrats. Ces gens-là vont venir nous
accuser d'avoir des préférences pour certains contracteurs?
Voyons donc! Allez voir comment ça se passe. Je vais vous dire pourquoi,
par exemple. Ma parenthèse étant fermée, je vais vous
expliquer pourquoi maintenant ça arrive comme ça.
Parce que ce gouvernement, M. le Président, n'étant pas
très près des préoccupations des régions,
étant beaucoup plus intéressé par l'aide ou le retour de
l'ascenseur qu'il peut * envoyer à certains de ses gros contribueurs sur
l'ensemble du territoire du Québec, s'organise pour faire en sorte que
les soumissions soient octroyées par le biais de petites filiales
locales à de gros contracteurs bien connus. Il n'y en a pas bien bien
des gros contracteurs bien connus au Québec, il y en a juste
quelques-uns dont je ne donnerai pas le nom. Mais, si vous voulez, tout de
suite dans le corridor, tout à l'heure, je peux vous donner la liste. Ce
n'est pas long. Il y en a cinq ou six. On les connaît bien et on en a
déjà largement parlé en cette Chambre.
Alors, ces gros contracteurs ont compris la mécanique et, avec la
complicité du gouvernement, s'associent avec un petit contracteur dans
la région en question, en Abitibi-Témiscamingue, au
Saguenay-Lac-Saint-Jean, dans le Bas-Saint-Laurent, en Beauce, s'associent avec
un petit contracteur et puis viennent chercher des contrats régionaux.
Et puis, tranquillement, on se rend compte, en bout de piste, que nos locaux
n'ont plus de contrats et ce sont des gars de l'extérieur qui viennent
chercher des contrats. Et on a de la difficulté à comprendre
comment ça se fait, par exemple, qu'un contrat de 200 000 $ de
concassé 0-3\4" attribué dans mon comté, hein, est
ramassé par quelqu'un du Lac-Saint-Jean ou du Bas-Saint-Laurent, qui
soumissionne, lui, à 150 000 $ ou à 160 000 $, alors que les
propriétaires de concasseurs dans le milieu même où
ça se fait disent: Je ne suis jamais capable d'arriver avec ce
prix-là. Je ne comprends pas.
Parce qu'il y a quelqu'un derrière qui supporte le contracteur
d'ailleurs qui est venu chercher le contrat, qui se sert de ces contrats-
là pour venir se faire des assises dans la région, pour se faire
passer comme un régional, et puis, après ça, qui commence
à regarder, à reluquer pour ramasser les gros contrats tout le
tour. C'est comme ça que ça se passe. Et en bout de piste, on se
retrouve avec une espèce de sélection qui se fait à la
lumière du jour de façon naturelle, mais par en dessous de
façon bien organisée de façon à ce que le petit
contracteur local, qui veut continuer à être indépendant et
à agir tel qu'il le souhaite, ne soit plus jamais concurrentiel ou se
voie tranquillement sortir du marché même si c'est un bon
libéral. Mais lui, c'est un local et il n'est pas capable de financer
assez fort, probablement, je ne le sais pas. En tout cas, il n'a pas de poids
sur l'ensemble des régions ou dans l'ensemble des 125 comtés du
Québec, il est juste dans un comté. Or, on préfère
l'autre qui s'en vient tranquillement par le biais de petites filiales
ramasser, avec une image de régionalisme, les contrats de tous les
autres. C'est une des façons de faire, M. le Président.
L'autre façon de faire, c'est ce que j'appellerais les
dépassements calculés. C'est clair que lorsque l'on regarde la
façon dont les soumissions sont données, et je suis souvent
intervenu là-dessus à l'étude d'engagements financiers en
commission parlementaire... Comment se fait-il, par exemple, que dans une
région donnée, prenons l'Abitibi-Témiscamingue, il y a
cinq contracteurs de la région qui soumissionnent sur un contrat de 1
000 000 $ - et ça se tient; la marge est à peu près la
même; ça joue, disons, entre 900 000 $ et 1 000 000 $, 1 100 000
$; c'est quand même dans des marges raisonnables - et, tout à
coup, il y a un contracteur de la Beauce, lui, qui arrive avec 685 000 $? Ah!
Là, on dit: Les autres exagèrent; ceux de l'Abi-tibi
exagèrent; ils pensent que, parce que c'est chez eux, ils vont avoir
plus d'argent et il n'y en aura pas d'autres qui vont venir de
l'extérieur. On donne le contrat au gars de la Beauce à 685 000
$. Mais là, il est rendu aux trois quarts de son contrat et il n'est
plus capable de le finir. Qu'est-ce qu'on fait? On lui donne des petits ajouts.
Je pourrais vous dire qu'une compagnie bien connue du Bas-Saint-Laurent,
Rivière-du-Loup pour ne pas la nommer, est venue faire des chemins
à Hydro-Québec comme ça chez nous, du chemin de ligne,
pour la ligne 6, la ligne à courant continu, la ligne RNDC; si on veut
que je précise encore sur mon exemple, je le ferai. Ils sont venus
chercher, par-dessus la tête de tout le monde, un contrat où tout
le monde disait: Mais, je ne vous comprends pas, ils vont arracher leurs
chemises, ils vont perdre leurs chemises, ils ne passeront pas au travers.
Définitivement, ils ne sont pas passés au travers, à moins
qu'on leur ait donné des extensions, parce que c'est une façon de
faire. Aujourd'hui, il y a plein de contracteurs qui réagissent comme
ça. Ils se disent: Ah, ça
semble être la nouvelle mécanique! Je vais soumissionner
plus bas, puis si ça ne marche pas, on ajoutera, on va me le donner.
Comment pouvez-vous comprendre, par exemple... Et je vais revenir
là-dessus, puisque mon temps commence déjà à
avancer et je ne veux surtout pas oublier de parler d'Hydro-Québec.
Comment pouvez-vous comprendre, M. le Président, après
information de bonne source, qu'au moment où on se parie on soumissionne
à la Baie James sur les contrats de LG 2A, entre autres, à
travail égal pour le même genre d'ouvrage, au même montant
qu'en 1975? Ce n'était pas un gouvernement péquiste qui
était là en 1975. Donc, supposons que ça ne dépend
pas de nous autres. Quinze ans plus tard, entre 1975 et 1990, à
l'ouverture des soumissions pour le même genre d'ouvrage, on arrive aux
mêmes montants. C'est ce qui fait qu'en bout de piste, quand on
réalise les travaux, on se retrouve avec des grosses entreprises comme
Komo construction, entreprise bien connue qui a perdu sa chemise parce qu'on a
refusé, après le fait, de lui octroyer des ajouts à son
contrat.
Mais tout le monde savait très bien, quand Komo a pris le contrat
d'excavation de la salle des machines de la centrale de LG 2A, qu'il n'y avait
à peu près pas moyen de passer au travers au montant qu'elle
avait soumissionné. Elle était à peu près dans les
normes d'un même contrat 15 ans avant. Elle n'a pas passé au
travers non plus, sauf que d'autres passent au travers quand on leur donne des
ajouts, quand on leur accepte des ajouts. Dans ce cas-là, la
Société d'énergie de la Baie James a dit: Non. C'est
ça, la soumission. Pas capable de passer au travers, bien, on
continuera. Et c'est la Société d'énergie de la Baie James
qui a repris le contrat elle-même pour continuer.
Mais dans d'autres cas, au ministère des Transports, au
ministère de la Santé et des Services sociaux, dans d'autres
sociétés d'État, si on accepte des ajouts aux contrats, eh
bien, on grossit le contrat. Et c'est ce qui fait, qu'en bout de piste on a 30
% ou 31 % de plus que ce qui était prévu, sans pour autant avoir
modifié le contenu de l'appel d'offres. On écarte, de cette
façon-là, ceux qu'on ne veut pas et on fait en sorte de donner
toujours le contrat à celui qu'on veut, parce que, étant le plus
bas soumissionnaire, mais d'une soumission fictive, M. le Président.
Ce ne sont là que quelques exemples de ce à quoi le
ministre aurait pu s'attaquer en nous amenant son projet de loi suite aux
recommandations de la commission Bernard. Hélas, il a passé
à côté, il s'est contenté de quelques
considérations techniques qui ne modifieront pas grand-chose au
comportement des soumissionnaires, et qui font en sorte de ne pas
empêcher que des aberrations comme celles que je viens d'expliquer
continuent à se perpétuer par la suite. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député d'Ungava. Sur le même sujet, M. le
député d'Iberville.
M. Yvon Lafrance
M. Lafrance: Merci, M. le Président. J'aimerais d'abord
vous dire qu'il me fait plaisir de participer au débat entourant le
projet de loi 103, Loi modifiant la Loi sur le ministère des
Approvisionnements et Services. Je dois ajouter d'emblée qu'après
étude de toute la documentation entourant ce projet de loi je dois
admettre que ce projet de loi n'est quand même pas très
émouvant et emportant, mais qu'il est d'autant plus très
important pour tout notre processus de sélection des contrats. Et il est
accompagné - il va de soi - d'un jargon très technique. (16 h
50)
M. le Président, j'aimerais tout de suite vous signifier que je
suis le dernier intervenant ministériel avant le mot final de M. le
ministre et que je me propose de reprendre certains arguments, en quelque
sorte, pour résumer ce qui a été avancé
jusqu'à maintenant. J'aimerais surtout replacer le débat dans sa
vraie perspective, surtout après l'intervention colorée du
député d'Ungava qui s'est livré, je pense, à une
sorte de chasse aux sorcières, faisant toutes sortes
d'allégations, voire même d'accusations aux quatre vents. Il est
évident qu'avec des faits précis il pourrait très bien
s'adresser officiellement au ministère que, s'il y avait matière
à investigation, je suis certain que le ministère lui
répondrait officiellement. D'ailleurs, je pense que sa façon
simpliste de dénigrer le processus de sélection est, en quelque
sorte, un affront pour les dizaines et les dizaines de fonctionnaires qui
oeuvrent dans tout ce processus de sélection.
La Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services confie
au ministre en titre la responsabilité de proposer au gouvernement des
politiques relatives à l'acquisition et à la fourniture de biens
et services. C'est justement dans le cadre de cette lourde
responsabilité que, le 7 novembre dernier - je dis bien le 7 novembre
1989 - le ministre en titre a proposé au Conseil ^des ministres, qui l'a
approuvée par la suite, la formation d'un groupe de travail qui avait
pour but d'analyser tout le processus d'octroi des contrats gouvernementaux. Le
but, évidemment, était d'apporter, si nécessaire, des
modifications non seulement aux lois, mais également aux nombreux
règlements, pratiques et politiques en vigueur. C'est donc par souci,
avant tout, d'améliorer le processus et par un souci de transparence que
ce groupe de travail s'est réuni et a effectué son travail.
J'aimerais, M. le Président, justement pour souligner
l'importance du groupe de travail, rappeler rapidement les mandats de ce groupe
de travail. Tout d'abord, il avait, comme premier mandat - et je me
réfère à la documentation
officielle - "d'analyser les législations, réglementations
et directives en vigueur en ce qui a trait au processus d'octroi de contrats
d'approvisionnements, de contrats de services et de contrats de location ou de
construction de biens immeubles, que ces processus soient utilisés par
le gouvernement du Québec ou approuvés par le gouvernement
à l'égard d'organismes qu'il finance; d'analyser le
fonctionnement de ces processus d'octroi de contrats, afin d'évaluer
s'ils répondent aux critères d'efficacité,
d'équité, d'accessibilité et de transparence, tel
qu'exprimés dans la législation, les règlements et les
directives en vigueur." Et finalement, comme troisième mandat, "de
proposer au gouvernement les moyens pour améliorer les processus
existants d'octroi de contrats ou proposer tout nouveau processus, afin de
respecter des critères élevés d'efficacité,
d'équité, d'accessibilité et de transparence;
préciser la liste des organismes ou des catégories d'organismes
dont le gouvernement devrait déterminer ou approuver les processus
d'octroi de contrats." Alors, c'est donc très clair, en ce qui a trait
au mandat.
C'est donc à partir de novembre 1989, et pour une période
de six mois, que le groupe de travail a oeuvré. Ce groupe de travail
dont M. le ministre a mentionné la composition ce matin, afin d'y amener
une preuve de crédibilité, a rencontré quelque 30 - je dis
bien 30 - experts dans le domaine. D'ailleurs, M. le député de
Pointe-aux-Trembles mentionnait les noms de ces 30 experts, ce matin, mais a
omis, je pense, de façon très modeste, de dire que lui-même
avait été parmi ces 30 conseillers. On retrouve même son
nom officiellement dans le rapport Bernard. Ceci, M. le Président,
d'entrée de jeu, pour vous montrer, en fait pour prouver toute l'ampleur
et l'importance de l'étude d'où ont découlé le
rapport Bernard que nous connaissons et le projet de loi que nous proposons ce
matin. Il faut bien réaliser que c'est donc l'ensemble du processus
d'octroi des contrats sur lequel le groupe de travail s'est penché. Il a
identifié les améliorations à apporter et proposé
des voies de solution.
M. le Président, après avoir pris connaissance, il va de
soi, très attentivement des recommandations de ce rapport et du contenu
qui contient quelque 60 pages, j'en suis arrivé à deux
conclusions. Tout d'abord, que le processus actuel, par son ensemble,
c'est-à-dire de lois, de politiques, de règlements et de
directives, est fort complexe et très diversifié et qu'il a
été, en tout état de fait, bâti au travers des
années, au fil des ans selon les besoins qui, progressivement, se sont
avérés nécessaires et successifs. D'ailleurs, M. le
ministre a avancé le côté historique du processus qui se
rapporte aux années soixante, sous M. Lesage, et qui avait pour but
d'apporter plus de transparence avant tout, après les années de
M. Duplessis, au processus. D'ailleurs, M. le député de
Pointe-aux-
Trembles l'a officiellement reconnu, ce matin, que cette initiative de
l'époque avait été louable. En deuxième conclusion
de cette lecture, je retiens que le système actuel - c'a
été mentionné, tout à l'heure, par mes
collègues ministériels - se compare plus que favorablement avec
les systèmes étrangers. Il mérite donc d'être
conservé avec, il va de soi, des correctifs. C'est
précisément ce que nous proposons avec ce projet de loi, ceci
afin d'améliorer la cohérence, l'efficacité et aussi la
transparence.
M. le député d'Ungava mentionnait, tout à l'heure,
qu'il y avait 45 recommandations. Oui, il y avait 45 recommandations de
contenues dans le rapport. C'est vrai! Il faut préciser, par contre,
qu'il y en a 22 qui touchent le ministère des Approvisionnements et
Services. On mentionnait aussi, dans ce projet de loi, qu'on touchait seulement
deux aspects de ces 22 recommandations. C'est vrai, mais ce qui n'a pas
été dit, c'est que les autres recommandations ne
nécessitent pas nécessairement de retoucher la loi, mais
plutôt de retoucher des règlements, des politiques qui sont
internes aussi à certains organismes qui travaillent sous M. le ministre
des Approvisionnements et Services.
De ces recommandations, donc, certaines étaient pertinentes,
comme je l'ai dit, au ministère des Approvisionnements et Services et
ont nécessité le projet de loi que nous débattons
présentement, plus précisément - je me
réfère au texte officiel - la recommandation 44 qui se lit comme
suit, je cite: "Que le ministre des Approvisionnements et Services soit
chargé d'élaborer et de proposer au gouvernement des politiques
et des règlements pour les ministères et les organismes publics
dans les matières suivantes: l'acquisition des biens, l'acquisition des
services, la construction et l'acquisition d'espaces."
C'est précisément à la suite de cette
recommandation que nous avons inclus cet aspect dans le projet de loi. C'est
donc très technique et c'est pourquoi le premier article du projet de
loi s'applique précisément à cette recommandation qui, en
particulier, touche la question d'acquisition d'espaces. J'aimerais ici
rappeler que certains organismes oeuvrent sous la responsabilité du
ministre des Approvisionnements et Services et que ces organismes ont
également des pouvoirs qui leur sont conférés, des
pouvoirs de location, des pouvoirs d'acquisition, des pouvoirs de construction
d'immeubles. J'aimerais, notamment, en mentionner deux: tout d'abord, du
côté des achats, la Direction générale des
approvisionnements possède plusieurs de ces pouvoirs et,
également, la Société immobilière du Québec,
qui relève directement du ministre des Approvisionnements et Services.
(17 heures)
Le second aspect du projet de loi, donc, modifie l'article 8 et
découle des recommandations qui sont contenues à la page 29 du
rapport
Bernard. Il faut bien préciser qu'à ce stade-ci, donc
à ce jour, les spécialités ou catégories de biens
et services dans lesquelles les fournisseurs pouvaient être inscrits,
lorsqu'ils désiraient s'inscrire à un fichier, se trouvaient en
annexe de la réglementation. Le groupe de travail s'est
arrêté sur cette question précise parce qu'ils ont pu y
voir, je pense, certaines conditions qui pouvaient porter à
matière grise. Afin d'éclaircir cet aspect, le rapport dit, et
j'aimerais le citer comme tel: "Pour remplir pleinement son rôle, le
fichier doit pouvoir s'adapter aux changements, par exemple, en regard des
nouvelles technologies de production. C'est un point important dans la mesure
où l'absence d'une spécialité au fichier occasionne un
processus de sélection où la part de discrétionnaire peut
être plus importante." Et, lorsque je parlais de secteur gris, c'est
précisément sur ça que le rapport s'est
arrêté. "Le ministère ou l'organisme peut alors inviter des
fournisseurs de son choix et en informer le fichier. Nous sommes conscients,
dit M. Bernard, qui présidait le groupe de travail, que la liste des
spécialités intéresse directement les fournisseurs de
services et que c'est ce qui a justifié la décision de l'inclure
dans le règlement. Cette situation a cependant pour conséquence
d'alourdir le processus de modification de la liste qui compte actuellement 222
spécialités. Il faudrait trouver une solution plus souple, par
exemple prévoir dans le règlement sur les contrats de services
que la liste des spécialités soit définie par une
directive du ministère des Approvisionnements et Services."
M. le Président, c'est là en fait tout le coeur du projet
de loi et c'est suite à cette proposition qui pouvait, comme je l'ai
dit, amener un secteur un peu gris dans (a réglementation que nous avons
inclus l'article 8.1 qui se lit comme suit: "Le ministre établit des
répertoires identifiant des catégories de biens, des
catégories de services et des spécialités dans lesquelles
les fournisseurs peuvent être inscrits pour les fins de sélection
de fournisseurs au moyen d'un fichier. Ces répertoires sont soumis
à l'approbation du gouvernement et publiés à la Gazette
officielle du Québec."
M. le Président, la raison de cet ajout, évidemment, c'est
avant tout dans un but de "souciance", d'atteindre encore plus de souplesse et
d'efficacité en assurant une plus grande transparence, que nous avons
établi ce paragraphe de la loi qui crée un répertoire
approuvé par le gouvernement et publié, je le dis bien, dans la
Gazette officielle du Québec. Et on y retrouve des
catégories de biens, des catégories de services et, aussi, des
spécialités dans lesquelles les fournisseurs du gouvernement
peuvent s'inscrire lorsqu'un fichier est créé.
M. le Président, l'amendement qui est inclus dans ce projet de
loi aura, comme conséquence, de simplifier le processus de mise à
jour du fichier en permettant au ministre de publier, dans la Gazette
officielle du Québec, des répertoires contenant la liste des
biens et des spécialités dans lesquelles les fournisseurs peuvent
être inscrits pour les fins de sélection au moyen d'un fichier. Et
il faut bien noter ici, M. le Président, que cette Gazette officielle
du Québec représente une diffusion encore plus élargie
pour l'ensemble des répertoires de biens et de
spécialités, ceci pour l'ensemble des fournisseurs potentiels. Il
est bon de préciser aussi, M. le Président, que cette publication
se fait après l'approbation, évidemment, du gouvernement et que
nous ne changeons nullement... En fait, nous voulons maintenir le même
processus d'approbation.
En ce qui concerne les spécialités, les nouvelles
spécialités sont définies par processus de consultation
dite permanente par des comités conjoints permanents de fournisseurs.
Ces comités existent déjà dans plusieurs domaines. On a
ainsi les comités suivants: le génie et laboratoire,
architecture, arpentage, communication, administration, informatique,
construction, acquisition des biens et environnement. C'est donc dire que toute
la gamme, en fart, des spécialités est couverte dans ces
comités qui regardent chacune de ces spécialités. Ces
comités-là se réunissent trois ou quatre fois par
année et leur but, évidemment, c'est d'étudier le
découpage de leur spécialité, de leur activité, de
définir aussi les règles de qualification relatives à
chaque spécialité et aussi, il va de soi, de proposer des
améliorations à la réglementation. Voilà, M. le
Président, les points et les propos sur lesquels je voulais
m'arrêter dans ce projet de loi.
En conclusion, je dirais que c'est avant tout par souci
d'améliorer la cohérence, l'efficacité et la transparence
du processus, lequel processus, comme on l'a dit, existe depuis les
années soixante et s'est ajusté au fil des années, que le
gouvernement a créé la formation d'un groupe de travail qui a
été connu comme le groupe Bernard d'où est
découlé un rapport imposant et qui est, je pense, très
crédible. Je pense qu'il est important en conclusion de mentionner que
le point principal du rapport aussi mentionne que le système se compare
favorablement, très favorablement à ceux des pays
étrangers, et ça, je pense qu'on peut en être très
fiers, que le système actuel donc est très adéquat et
résulte d'ajustements réfléchis au fil des
années.
Finalement, les 45 recommandations, comme j'ai mentionné,
touchent des lois, des règlements, des politiques et aussi des aspects
qui sont en train d'être étudiés, non seulement au
ministère des Approvisionnements et Services, mais dans les autres
ministères de notre gouvernement. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député d'Iberville. M. le ministre, je vous permets de faire
votre réplique sur ce projet de
loi 103. M. le ministre.
M. Robert Dutil (réplique)
M. Dutil: Merci, M. le Président. Alors, nous avons
discuté abondamment, non seulement du projet de loi, mais de l'ensemble
du rapport Bernard, M. le Président. J'avais apporté quelques
précisions ce matin que je tiendrais à répéter tout
à l'heure, mais avant de ce faire, je voudrais revenir sur quelques
propos qu'a tenus particulièrement le député de
Pointe-aux-Trembles ce matin et, ultérieurement, également sur
quelques propos tenus par le député d'Ungava tout à
l'heure. Le député de Pointe-aux-Trembles, ce matin, s'est
référé à plusieurs cas en donnant son
interprétation de ce qui s'était passé, et je pense qu'il
est important de rectifier certaines choses ou de compléter certaines
informations.
Le premier cas qu'il a soulevé était le
périmètre concernant une bâtisse qui devait servir
ultérieurement à regrouper le ministère des Transports
à Montréal et pour lequel il n'y avait eu qu'un soumissionnaire.
L'interprétation du député de Pointe-aux-Trembles, M. le
Président, avait été que le périmètre
était trop petit et qu'on savait d'ores et déjà qu'il n'y
aurait qu'un seul soumissionnaire. Je tiens à rappeler la
réaction du ministère, à ce moment-là, devant le
fait qu'il n'y avait qu'un seul soumissionnaire pour un contrat de cette
importance-là. Il s'agissait d'un contrat, qui se répartissait
sur une quinzaine d'années, de quelque 18 000 000 $ dans la soumission
initiale. Le ministère a donc décidé de retourner aux
soumissions en rectifiant ce qui avait fait, à notre point de vue, qu'il
n'y ait qu'un seul soumissionnaire. Nous avons donc élargi le
périmètre, nous avons apporté deux autres modifications
toutefois qui étaient aussi, à notre point de vue, importantes,
qui ont été l'extension du délai pour fournir la
bâtisse et également l'extention du temps de location, qui a
été porté de 15 ans à 20 ans. Nous avons eu, suite
à ce retour aux soumissions, six soumissionnaires. (17 h 10)
II est important de souligner deux choses: d'abord, le plus bas
soumissionnaire était à 11 000 000 $ ou 12 000 000 $ au lieu de
18 000 000 $, ce qui fait que le gouvernement, effectivement, a
économisé environ 30 % par rapport à la soumission
initiale. Mais l'autre point fort important, c'est que, dans le
périmètre initial, puisque le nouveau périmètre
incluait entièrement l'ancien périmètre, il y avait trois
soumissionnaires et, s'il n'y avait eu qu'un soumissionnaire dans la
première soumission, il y avait-là des raisons qui
n'étaient pas dues, qui n'étaient pas liées
nécessairement, comme le prétendait ce matin le
député de Pointe-aux-Trembles au dessin initial de ce
périmètre. Le député a également
soulevé un cas de Rivière-du-Loup sur lequel il m'avait
interrogé d'ailleurs à l'Assemblée nationale ici,
l'année dernière, où je lui avais tout simplement dit: II
faudra attendre, M. le député, que le jugement qu'ont
demandé les plus bas soumissionnaires, le jugement qu'ils ont
demandé, comme quoi ils étaient conformes, soit rendu. Ce
jugement a été rendu un mois plus tard, au mois de janvier, et
leur était défavorable, et, dès cet instant-là, le
ministère des Approvisionnements et Services a renconté le
deuxième plus bas soumissionnaire pour lui remettre le contrat. Ce n'est
donc pas sur l'insistance et parce que le député de
Pointe-aux-Trembles s'est levé -en Chambre et a soulevé cette
question-là que nous avons agi, c'est tout simplement parce que nous
voulions respecter le processus habituel, lorsqu'une soumission est
contestée devant les tribunaux. Attendre la décision du juge fait
partie, je pense, de nos règles normales de fonctionnement.
Un troisième point qui a été soulevé
également par le député d'Ungava concerne les extra, les
fameux extra que l'on retrouve dans certains dossiers et que l'on met
pêle-mêle. Sans prétendre que tous les extra sont
parfaitement et entièrement justifiés, sans prétendre
qu'il ne faut pas être, de ce côté-là,
extrêmement prudents - nous en convenons, il faut être
extrêmement prudents et trouver des façons de procéder
adéquates - il arrive que des contrats soient donnés, non pas sur
un montant global mais sur des prix unitaires. Il y a une évaluation
globale qui est faite; on estime que ça prendra environ tant de
matériel, par exemple, pour faire un travail et, par la suite, on peut
se rendre compte qu'il y a eu davantage de matériel requis. Ça ne
change pas la soumission au niveau du prix unitaire. Il y a une multitude de
situations qui se présentent et qui justifient qu'il puisse y avoir ce
que l'on appelle des extra. Les extra, en soi, ne sont pas toujours
évitables, premièrement, et ne sont pas toujours mal
gérés. Les extra, je pense, en général, sont bien
gérés, c'est-à-dire que ça prend des raisons
extrêmes, ça prend des raisons valables et vérifiées
par les gestionnaires en question pour qu'ils puissent être
accordés.
Un dernier point avant de conclure, M. le Président. Ce matin,
vous vous rappelez, j'ai soulevé la problématique du financement
des partis politiques versus l'octroi des contrats. J'ai posé la
question de la façon suivante: Est-ce qu'une nouvelle réforme du
financement des partis politiques ne serait pas nécessaire étant
donné les liens que l'on fait entre l'octroi des contrats et ceux qui
donnent de l'argent à un parti politique, bien que, personnellement, je
croie que la première réforme avait été fort
intéressante, suffisante. On sent qu'il y a eu une évolution dans
la mentalité des gens qui fait que 3000 $ en 1977 ait pu
apparaître quelque chose de raisonnable et qu'aujourd'hui, on semble
estimer que quelqu'un qui donne 3000 $ à un parti politique se retrouve
dans une espèce de conflit
d'intérêts s'il reçoit un contrat, même s'il
le reçoit conformément à toutes les normes, directives et
à toutes les façons correctes de procéder.
Le député de Pointe-aux-Trembles ne semblait pas
être d'accord avec cette façon de voir les choses, ne semblait pas
voir qu'il y ait lieu de modifier, de discuter, de regarder cet aspect de la
question, cet autre côté de la balance, mais il est toutefois
arrivé, à la fin de sa présentation, avec les mêmes
remarques de surface où on faisait des liens entre ceux qui avaient
donné à un parti politique et les contrats qui avaient
été octroyés, j'en suis convaincu, d'une façon
correcte aux soumissions publiques et de la façon que nous
procédons actuellement. Je ne pense pas qu'il faille envisager d'exclure
du processus d'octroi de contrats des gens qui, par conviction la plupart du
temps, par désir de promouvoir des idées à
l'intérieur, de la façon que nous connaissons, de la façon
moderne qui est de travailler, de militer à l'intérieur d'un
parti politique, puissent être exclus de façon automatique des
soumissions publiques parce qu'ils ont des convictions qu'ils veulent exprimer
à travers un parti politique qui, parfois, est au pouvoir, parfois ne
l'est pas, parce que, entre autres, les noms qui étaient soulevés
par le député de Pointe-aux-Trembles ce matin se
référaient à des gens qui militaient à
l'intérieur du Parti libéral depuis fort longtemps, depuis bien
avant notre prise du pouvoir en 1985.
Quant au député d'Ungava, il a mentionné certaines
difficultés reliées aux soumissions publiques, qu'il est
important de noter ici en disant: II arrive parfois qu'un soumissionnaire, le
plus bas soumissionnaire, soumissionne en bas du prix coûtant pour
obtenir le contrat et qu'il essaie, par la suite, par toutes sortes de moyens,
par toutes sortes d'échappatoires et en insinuant qu'il pouvait y avoir
des collusions non évidentes et non prouvées, bien sûr,
qu'il pouvait y avoir donc des difficultés avec les soumissions
publiques.
Il y a des discussions qui sont faites là-dessus et qui sont
importantes à mon point de vue. On a toujours estimé que le
processus de soumissions publiques était le processus le plus
équitable pour tout le monde, y compris pour les fournisseurs.
Effectivement, on se rend compte que, parfois, des soumissionnaires
soumissionnent à très bon marché, ce qui est à
l'avantage de l'État dans un certain sens, puisque nous devons nous
attendre à obtenir le service requis, mais à un moindre
coût puisque le soumissionnaire a soumissionné à un prix
plus que raisonnable, sauf que certaines difficultés d'application,
parfois, se présentent. Et, effectivement, il y a certaines
difficultés à obtenir la qualité requise parce que le
fournisseur a soumissionné trop bas, ou à obtenir la fin des
travaux parce que, parfois, certains soumissionnaires qui ont fait ce genre de
soumission-là se retrouvent dans des situa- tions qui vont
jusqu'à la faillite.
C'est la difficulté inhérente au processus de soumissions
publiques. C'est une difficulté réelle. Je pense que, toutefois,
ce n'est pas une difficulté si fréquente qu'il faille se priver
de ce processus équitable que l'on retrouve depuis maintenant trois
décennies au Québec. Si on a des suggestions à
présenter pour trouver une formule tout aussi équitable et qui
éviterait ce risque de difficultés face à un
soumissionnaire qui amènerait des problèmes de ce
genre-là, eh bien, je pense qu'on se doit de se les dire ici en Chambre,
on se doit de chercher ensemble une meilleure façon, si elle existe.
Mais, pour l'instant, après trois décennies de façon de
fonctionner par soumissions publiques, il n'y a pas lieu d'envisager des
modifications substantielles à cette façon de faire.
En conclusion et, encore là, pour répondre à
certaines critiques de l'Opposition en particulier, on mentionne que cette loi
ne recouvre que deux aspects du rapport Bernard, deux recommandations du
rapport Bernard, et c'est vrai. J'ai expliqué ce matin, et je le
répète, que le rapport Bernard a mentionné que le
système était valable. Et, de fait, on se rend compte que nos
lois permettent d'apporter les quelques correctifs mineurs qu'il nous demande
d'apporter par réglementation et par directives. Ainsi, dans mon
ministère, il y a 22 recommandations sur 45 qui sont dirigées
vers le ministère des Approvisionnements et Services, et,
là-dessus, seulement deux requièrent une législation. Les
autres pourront être mises en application à partir soit de
directives ou de modifications réglementaires qui n'ont pas besoin de
venir ici à l'Assemblée nationale.
Toutefois, il est important que l'Assemblée nationale et que la
population soit au courant de ce que nous faisons avec le rapport Bernard, soit
au courant de la mise en oeuvre des recommandations du rapport Bernard, et
c'est la raison pour laquelle j'ai mentionné ce matin, et je le
répète en terminant, que nous allons certainement rendre public
incessamment un suivi, un rapport d'étape de l'application des mesures
qui sont prévues dans le rapport Bernard. Certaines mesures, je le dis,
sont déjà en application, toutes les décisions ont
été prises et ces mesures-là sont déjà
appliquées d'ores et déjà, d'autres, le travail pour les
mettre en application est déjà commencé. Donc, nous aurons
un portrait transparent, un portrait global de la mise en application de cet
important rapport. Je mentionnais ce matin que le débat politique doit
s'élever au-dessus du niveau des accusations gratuites, des accusations
et des insinuations sur la transparence. Et, pour ce faire, je pense qu'il est
du devoir du gouvernement - et c'est ce que nous avons fait en demandant
à un comité, tel le comité Bernard, de nous soumettre des
recommandations - de trouver les façons les plus correctes, les plus
équitables, les plus transpa-
rentes possible tout en étant efficaces pour que les contrats
qu'octroie le gouvernement soient octroyés en respectant les payeurs de
taxes, c'est-à-dire en essayant, bien sûr, d'obtenir le meilleur
service possible au meilleur prix possible et en le faisant dans la plus grande
transparence possible.
Le rapport Bernard s'intitule "L'efficacité dans la
transparence". Nous trouvons que c'est là non seulement un titre bien
choisi, mais que le rapport reflète exactement ce point de vue. On a
voulu faire un rapport où on tenait compte de l'aspect de
l'efficacité, où on tenait compte de l'équilibre
nécessaire de la transparence. M. le Président, je peux vous dire
que, pour ma part, je l'ai mentionné lorsque le rapport a
été déposé, j'adhère aux recommandations,
j'ai l'intention de les appliquer et j'ai l'intention que l'application soit
donnée publiquement de telle sorte que les gens, les citoyens du
Québec, sachent nos intentions là-dessus.
Alors, M. le Président, en terminant, je ferai motion pour que
ledit projet de loi...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le ministre.
Votre réplique met fin, effectivement, au débat relativement au
projet de loi 103. Est-ce que le principe du projet de loi 103, Loi modifiant
la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services, est
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le ministre.
Renvoi à la commission du budget et de
l'administration
M. Dutil: M. le président, je fais motion pour que ledit
projet de loi soit déféré à la commission du budget
et de l'administration pour étude détaillée.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion
de déférence est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre.
M. Dutil: M. le Président, est-ce que je pourrais me
permettre de proposer l'ajournement de nos travaux au lundi 10 décembre
1990, à 14 heures?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que la proposition
d'ajournement de nos travaux est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, cette proposition
met fin à nos travaux pour cette semaine. Les travaux de
l'Assemblée nationale sont terminés pour cette semaine, et
j'ajourne donc tes travaux de l'Assemblée au lundi 10 décembre,
à 14 heures.
(Fin de la séance à 17 h 23)