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(Dix heures six minutes)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez vous
asseoir, s'il vous plaît! M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Oui, M. le Président. Je vous
demanderais d'appeler l'article 55 de notre feuilleton.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 55,
il s'agit de l'étude des crédits supplémentaires n° 1
pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1991, déposés
par le ministre des Finances, le 5 décembre 1990, et renvoyés
pour étude à la commission plénière. M. le leader
adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Oui, M. le Président. Je fais
immédiatement motion pour que l'Assemblée se constitue en
commission plénière.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que vous pouvez
me donner l'ordre des travaux, M. le leader adjoint?
M. Bélisle: J'aurais voulu que la motion soit
adoptée et, après, je vous aurais donné l'ordre des
travaux.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si on se constitue en
commission plénière, nous allons aller en commission
plénière et, à ce moment-là, je
préférerais, au préalable, que vous me donniez l'ordre des
travaux.
M. Bélisle: L'ordre des travaux pour la matinée, M.
le Président, sera le suivant: pendant la première heure,
l'étude des crédits additionnels du ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et, pendant l'heure et
trente minutes qui va suivre par la suite, jusqu'à la fin de nos
travaux, jusqu'à midi trente, de 11 heures à midi trente,
l'étude des crédits supplémentaires pour le
ministère des Finances.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, en faites-vous un
ordre de l'Assemblée?
M. Bélisle: Je vous demande d'en faire un ordre de
l'Assemblée, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est un ordre de
l'Assemblée. Pourriez-vous faire votre motion, maintenant?
M. Bélisle: Je fais motion pour que l'Assemblée se
constitue en commission plénière, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion
est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors,
cette Assemblée se constitue en commission plénière selon
l'ordre de la Chambre qui a été établi
précédemment.
Commission plénière
M. Bissonnet (président de la commission
plénière): S'il vous plaît, si vous voulez prendre
place, messieurs! Messieurs, si vous voulez prendre place, s'il vous
plaît!
Étude des crédits supplémentaires
n° 1 pour l'année financière se terminant le 31 mars
1991
La commission plénière entreprend ses travaux. Il s'agit
de l'étude des crédits supplémentaires n° 1 pour
l'exercice financier se terminant le 31 mars 1991, déposés par le
ministre des Finances le 5 décembre 1990. L'ordre des travaux pour la
commission plénière ce matin est celui-ci: Pour une heure, nous
étudierons les crédits du ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation et, pour l'autre heure et trente minutes,
nous étudierons les crédits du ministère des Finances
jusqu'à 12 h 30.
Aux remarques préliminaires, M. le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation.
Ministère de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation
Remarques générales M. Yvon
Picotte
M. Picotte: M. le Président, d'abord, je voudrais
mentionner que le budget supplémentaire présenté par mon
collègue, le ministre des Finances, fait référence
à environ une vingtaine de millions de piastres qui étaient
réparties au ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation et la répartition de ces budgets-là se fait en
fonction des éléments suivants de notre ventilation de budget.
D'abord, programme, éléments, catégories: Financement
agricole, Prêts à long terme et Transfert. On parle d'un montant
de 10 760 000 $. Essentiellement, c'est dû à l'augmentation du
taux d'intérêt.
Vous savez très bien, M. le Président, que surtout
à l'Office du crédit agricole, nous assumons les
intérêts des prêts que les agriculteurs font. Et,
essentiellement, le budget initial
prévu par le ministre des Finances, en début
d'année, le premier semestre, faisait référence à
un taux possible, probable, de 13,29 % et, le deuxième trimestre, de
11,77 %. or, la réalité des faits, maintenant que nous pouvons
examiner ce qui s'est passé après ces
prévisions-là, la réalité des taux
d'intérêt vécus durant cette période est de 13,50 %
à 14,59 % pour le premier semestre. comme vous voyez, de 13,29 %
à 13,50 % et 14,59 %, donc, une augmentation. et, pour le
deuxième semestre où, au ministère des finances, on avait
prévu 11,77 %, on en est à 14 %. alors, vous voyez qu'il y a une
augmentation de 2,23 % du taux d'intérêt pour le deuxième
trimestre. et le taux actuel est présentement de 13,75 %. alors, on se
rappellera que le gouvernement rembourse la moitié de
l'intérêt au-dessus des 4 % jusqu'à concurrence du taux de
base, le "prime rate" qu'on appelle, plus 1,5 % sur les premiers 200 000 $.
Alors, les prêts en circulation, pour lesquels s'appliquent les
remboursements du taux d'intérêt, totalisent présentement 1
500 000 000 $. Alors, on a des prêts en circulation pour 1 500 000 000 $,
ce qui fait qu'avec la différence des taux d'intérêt
ça nous oblige à avoir des sommes additionnelles de 10 760 000 $
et le coût du financement agricole, au Québec, atteindra, bien
sûr, 180 000 000 $.
L'assurance. En ce qui concerne, maintenant, le programme Assurances
agricoles, d'abord, l'assurance-stabilisation des revenus agricoles, on parle
d'un transfert de 5 000 000 $. La cause, c'est l'augmentation de 346 000 des
unités assurées dans le porc; les veaux d'embouche, 5000
unités de plus; le maïs en grain, 11 300 hectares de plus et
l'orge, 13 500 hectares de plus. Donc, comme vous voyez, M. le
Président, il y a eu, évidemment, des choses en plus, autant en
ce qui concerne le maïs en grain que l'orge et aussi les veaux d'embouche
et le porc. Ça, ça nécessite une somme additionnelle de 5
000 000 $ au niveau du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation. C'est cette somme qui s'ajoute aux 10 700 000 $ que nous
avons vus tantôt au sujet de l'Office du crédit agricole et,
maintenant, les assurances agricoles.
Il y a de la gestion interne et du soutien aussi qui entre en ligne de
compte parce qu'on parle de 8 337 000 $ en ce qui concerne le programme
Assurances agricoles. Gestion interne et soutien, autres
rémunérations, contrats de services et équipement, on
parle d'environ 1 900 000 $ et quelques. Le budget est alloué en
fonction du volume d'activité généré par
l'administration des programmes. Donc, en début d'année, il y a
un volume d'activité généré par l'administration
des programmes. On fait une prévision. Le ministère des Finances
nous accorde un certain montant d'argent. Ce volume dépend directement
du nombre d'assurés et des conditions climatiques. Alors, bien sûr
qu'on est sujets au climat. si, évidemment, on est obligés
d'avoir plus de visites auprès des gens, si on est obligés
d'aller vérifier certaines choses, si le climat est plus malsain et
qu'on est obligés de mettre des heures additionnelles dans le but de
faire des vérifications, si on est obligés d'aller aussi faire
des vérifications chez les producteurs pour avoir certaines
données, pour nous permettre d'établir des taux en toute justice
et équité pour le bénéficiaire... pour chaque
assuré, le conseil du trésor attribue, au 1er avril, un budget
préliminaire qui est réajusté selon le volume que nous
avons. donc, en 1989, 33 839 assurés et, en 1990-1991, 35 373
assurés. il y a tout près de 1500 assurés de plus que
l'année précédente. donc, nos chiffres sont basés
sur l'année précédente, 1534 assurés de plus,
ça fait un budget qui passe de 18 409 900 $ dans ce domaine à 19
424 000 $, donc 1 015 000 $ qui manquait, un écart de 5,5 %. alors, on
retrouve un budget supplémentaire pour combler cet
écart-là parce qu'il y a plus d'assurés qu'on avait
prévu en début d'année. l'an prochain, on aura
probablement à nous baser sur 35 373 assurés. s'il y en a moins,
évidemment, on n'aura pas de crédits additionnels et, s'il y en a
plus, eh bien, il faudra revenir en crédits additionnels.
Programmes nationaux tripartites. Le transfert des programmes nationaux
tripartites. Cette augmentation est due à l'augmentation du taux de
cotisation pour les troisième et quatrième trimestres 1990, dans
le domaine du porc, et à l'augmentation des unités
assurées du côté de la pomme. Donc, le porc et la pomme
nous obligent à avoir des crédits de transfert sur les programmes
nationaux tripartites de 1 360 000 $. Le budget 1989-1990 était de 144
100 000 $ et il y a 20 % d'augmentation au budget de transfert. Ce qui fait
pour 1990-1991: 172 700 000 $. Le total de ce programme-là, de ces
éléments-là, est de 8 337 000 $, M. le
Président.
Et enfin, pour terminer l'ensemble de nos opérations, bien
sûr, il y a l'élément Commission de protection du
territoire agricole. Il y a dans la catégorie 2, Autres
rémunérations, et dans la catégorie 7, Fournitures, un
montant de 415 700 $ d'attribué là-dedans qui se répartit
comme suit: Dans le cadre de la révision des zones agricoles
découlant de la Loi sur la protection du territoire agricole, il a
été requis d'augmenter le budget initial prévu. On sait
très bien que la loi que nous avons adoptée a fait en sorte que
les MRC et la Commission de protection du territoire agricole devaient
enclencher un processus pour s'entendre sur les schémas
d'aménagement et faire en sorte qu'on puisse s'entendre avec les MRC,
les municipalités pour procéder à certains
dézonages. Alors, ça a nécessité évidemment
des rencontres et des discussions et il a été requis un budget
additionnel. Au début, il a été requis d'augmenter le
budget initial prévu de 415 675 $ pour le porter
à 630 500 $ et ce, pour couvrir des frais d'opération,
tels les frais de voyages, fournitures, salaires du personnel occasionnel,
parce qu'il a fallu avoir des occasionnels pour discuter de ces dossiers et
faire en sorte de mener à bonne fin ces dossiers-là. Donc, le
pourquoi des 425 700 $ à la Commission de protection du territoire
agricole, c'est dans le but de satisfaire à la loi que nous avions
adoptée ici, à l'Assemblée nationale.
Je termine, M. le Président, en vous présentant les gens
qui m'accompagnent. Ils s'identifieront au fur et à mesure. Il y a M.
Michel Saint-Pierre, de l'Office du crédit agricole, M. Jean Proteau, de
la Commission de protection du territoire agricole, M. Guy Blanchet, de la
Régie des assurances agricoles. De l'Office du crédit agricole
maintenant, il y a M. Pierre Simard et Julien Burns. Du ministère, il y
a MM. Marcel Miville-Déchêne, André Abgral et Mme Suzanne
Pilote, qui est la nouvelle secrétaire du ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Et, plus
précisément, de mon bureau, il y a M. Pierre
Lacoursière, attaché politique au niveau agricole et, bien
sûr il y a aussi M. Pierre Fillion, qui est l'attaché de presse du
cabinet. Alors voilà, M. le Président, pour les brèves
explications de ce budget additionnel. Maintenant, bien sûr j'attends les
commentaires de mon collègue, le député d'Ar-thabaska, et
nous aurons, bien sûr, l'occasion d'avoir un échange durant les
quelques minutes qu'il nous restera à passer ensemble. Merci.
Le Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Je
suis maintenant prêt à reconnaître, pour les remarques
préliminaires, M. le député d'Arthabaska. M. le
député. (10 h 20)
M. Jacques Baril
M. Baril: Oui, M. le Président. Nous sommes ici pour
approuver une augmentation du budget d'environ 19 000 000 $ au ministère
de l'Agriculture - j'allais dire Pêcheries, mais c'est un autre secteur,
un autre domaine; même si c'est le même ministre, ce n'est pas le
même critique. On s'aperçoit, entre autres, que les plus grandes
affectations de ces sommes d'argent vont au financement agricole et aux
assurances agricoles. Il y en a, évidemment, comme le ministre l'a
expliqué, pour la gestion du territoire agricole, mais on y reviendra
plus tard.
Si on se souvient bien, le printemps dernier, lors de l'annonce du
discours sur le budget, nous avions fait mention, dans notre critique sur le
budget de 1990-1991, que le ministre des Finances, ou le ministère de
l'Agriculture, n'avait pas semblé faire de prévisions en
considérant la hausse des taux d'intérêt pour
l'année qui était en cours. On signalait que, entre autres,
l'Ontario, elle, avait prévu une augmentation de 30 000 000 $
affectés uniquement en prévision de la hausse des taux
d'intérêt touchait le financement agricole. Nous avions
insisté beaucoup sur ce manque de prévision de la part du
gouvernement face aux obligations auxquelles il devait sans aucun doute faire
face, tout en reconnaissant que les taux d'intérêt ne sont pas de
juridiction provinciale, mais que nous sommes obligés d'en subir les
conséquences. Même, nous n'avons pas un mot à dire sur la
décision de maintenir des taux d'intérêt que tout le monde
reconnaît aujourd'hui affreusement élevés. On maintient ces
taux d'intérêt supposément pour maintenir une
économie plus stable ou empêcher la récession. On est en
pleine récession et le gouverneur de la Banque du Canada continue
à dire qu'il n'y en a pas et continue à maintenir les taux
d'intérêt. Il baisse ça de 1/4 de 1/10 de 1 % et on fait
les manchettes des journaux à cause de ça.
On va avoir la chance, sans doute, de poser certaines questions au
ministre. Et je suis certain, connaissant le ministre, qu'il va être
capable de nous fournir les réponses sur l'affectation des budgets de
l'ensemble de son ministère. Partout, cet automne ou l'automne dernier,
les gens que nous avons rencontrés nous mentionnaient que les programmes
avaient commencé, que l'application de la plupart des programmes avait
été annoncée à la mi-juin et entrait en vigueur
à la mi-juin. Rendus à la mi-septembre, il y a eu des directives
à l'effet qu'on mettait fin à l'ensemble des programmes du
ministère de l'Agriculture en région. Donc, si on regarde
ça, ça fait - juin, juillet, août, septembre - trois mois
et demi, quatre mois au plus que les programmes élaborés ont pu
s'appliquer. Souvent, on reconnaît que, dans le milieu agricole, pour
bien des programmes, c'est au début de la saison et aussi à la
fin de la saison, avant l'automne, que les producteurs agricoles profitent le
plus de l'application de ces programmes.
Donc, si, aujourd'hui, on a à adopter 19 000 000 $ de
crédits supplémentaires, le ministre doit sans doute avoir
réaménagé les budgets dans différents programmes
pour être en mesure d'avoir une demande de seulement 19 000 000 $.
Comment le ministre a-t-il pu... Combien y a-t-il de crédits
périmés dans d'autres programmes, puisque, comme je le dis, et je
le répète, les programmes ont été appliqués
à peu près durant trois mois et demi, quatre mois, tout au plus?
Au niveau de la révision des zones agricoles, le ministre nous a fait
mention que c'était l'engagement de surplus d'occasionnels et que
ça allait également dans le respect de la loi de la
définition des zones agricoles. Sur cet item-là, j'aurai sans
doute des questions plus précises à poser au ministre sur,
justement, la gestion du territoire agricole comme tel.
Je terminerai en signalant simplement qu'au niveau des assurances
agricoles nous avons une demande de crédit de 8 337 000 $. Encore
là, je mentionnais au ministre dernièrement, lors d'une
interpellation en Chambre, que la politique du gouvernement, depuis les
quatre, cinq dernières années, a fart en sorte que moins tu
investis ou moins tu supportes l'agriculture, plus ça va te coûter
cher en stabilisation, parce que c'est un signe évident que moins
l'agriculture se porte bien, plus ça coûte cher en stabilisation.
Le ministre m'avait quand même donné raison, là-dessus, je
pense, parce que quelques jours plus tard, en Chambre, suite à une
question que je lui posais, il avait lui-même avoué que
l'assurance-stabilisation - il avait même repris mes mots en disant que
l'assurance-stabilisation, ce n'est pas là pour faire... Tu ne peux pas
vivre avec l'assurance-stabilisation. Parce que si tu continues à
toujours payer pour la stabilisation et toujours payer pour la stabilisation,
ça veut dire que les revenus ont diminué, que la production se
porte moins bien, que la mise en marché se porte moins bien; donc,
ça coûte cher au gouvernement. Et le Conseil du trésor
avait déjà demandé au ministère de l'Agriculture de
réviser l'ensemble, de réviser globalement tout le système
d'assurance-stabilisation parce que ça coûtait trop cher.
Aujourd'hui, on va essayer d'avoir plus de détails sur l'orientation ou
sur la volonté que le ministre a de réviser...
M. Picotte: ...de faire le ménage.
M. Baril: ...de faire le ménage, oui, pour prendre
exactement ses termes, dans l'assurance-stabilisation. Je lui soulignerais,
puisqu'il a passé la semaine dernière à Genève pour
les négociations du GATT, que l'assurance-stabilisation, c'est l'un des
piliers fondamentaux qui fait partie des quatre outils fondamentaux que les
agriculteurs se sont donnés au Québec et qu'ils veulent
protéger de tout risque. Je me demande, avec la décision ou
l'annonce du ministre de réviser globalement et de faire le
ménage dans l'assurance-stabilisation, si ce programme fondamental de
l'agriculture québécoise n'est pas aussi mis en danger avec cette
nouvelle orientation du gouvernement, ou remis en cause lors des
négociations du GATT. Je ne sais pas si le ministre a quelques
réponses à donner ou s'il veut que je lui pose des questions bien
précises sur tel et tel sujet. Je ne sais pas si le ministre a quelques
réponses à donner ou s'il aime mieux que je précise des
questions mais, avant de commencer, j'aimerais, moi aussi, vous
présenter toute mon équipe, comprenant mon recherchiste, M.
Pierre Brochu.
Le Président (M. Bissonnet): Alors, bienvenue M. Brochu.
Alors, vous faites l'échange; je peux répondre et après
ça vous irez...
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Merci, M. le Président. Oui, j'ai, à
tout le moins, quelques commentaires à donner sur ce qu'a dit mon
collègue, le député d'Ar-thabaska, et, en ce sens, je
pense que certaines questions rejoignent de beaucoup le questionnement que mon
adjoint parlementaire, le député de Berthier, me faisait à
quelques reprises, dès que j'ai accédé à ce
ministère. Je sais que le député de Berthier a
souligné les mêmes questions et les mêmes
appréhensions du côté de certains programmes de
stabilisation, etc. Entre autres, on se questionne sur la stabilisation, et le
député de Berthier avait l'occasion de me faire quelques
recommandations, dans ce domaine, que je trouvais fort pertinentes.
Pour vous dire ceci, d'abord, parlons des taux d'intérêt au
point de départ. Les taux d'intérêt, on le sait très
bien - le député d'Arthabaska l'a mentionné - ne sont pas
fixés par nous et s'ajoute à ça, évidemment, le
fait que le premier ministre du Québec a eu l'occasion, à maintes
et maintes reprises, de souligner au gouvernement fédéral qu'il
fallait abaisser, diminuer les taux d'intérêt. Mais vous
comprendrez qu'on ne peut pas prévoir en début d'année
quels seront les taux d'intérêt exacts que nous aurons à
subir en cours d'année. Il faut prévoir un certain taux
d'intérêt en sachant toujours, chaque année, à moins
d'être un bon tireur de cartes et d'arriver bien juste à la
virgule près ou au dixième près du taux
d'intérêt, qu'on aura à réajuster ça en cours
d'année, en plus ou en moins. C'est évident que, si on ajoute en
plus, les gens disent: Bien, vous paraissez mettre plus d'argent dans
l'agriculture, et, si on rajoute en moins, les gens nous reprochent de faire
des périmés. Alors, on ne s'en sort pas ni d'un bord, ni de
l'autre. De toute façon, comme on ne tire pas aux cartes et qu'on n'a
pas de boule de cristal, on ne le prévoira jamais juste et chez nous
encore moins parce qu'on n'est pas tributaires de ça, c'est le
ministère des Finances qui prévoit ces taux
d'intérêt là. Donc, à chaque année, il ne
faut pas s'énerver avec ça; on va revenir à tous les ans
avec un ajustement en plus ou en moins, mais il faudra revenir avec un
ajustement parce que, même le président de la Banque du Canada
n'est pas bien fort dans ce genre de prévisions. Il a de la
misère à comprendre qu'il faut les abaisser; imaginez-vous
comment il aurait de la misère à expliquer qu'il peut les
prévoir. Il ne joue pas, lui non plus, avec de la magie. Alors, je pense
qu'il faut se dire ça au point de départ. (10 h 30)
En ce qui concerne le budget total du ministère de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation, moi je dis qu'il faut quand
même bien regarder les choses en face. Le budget de l'agriculture, au
Québec, est passé de 211 000 000 $ en 1976, à 467 000 000
$ en 1984, à 506 000 000 $ en 1986, à 551 000 000 $ en 1987, pour
en arriver, en 1990, trois ans plus tard, à 682 000 000 $. Il n'y a pas
beaucoup de ministères au Québec, mis à part le
ministère de
la Santé et des Services sociaux et peut-être le
ministère de l'Éducation, qui ont subi une telle augmentation.
J'ai même eu l'occasion d'aller dans d'autres ministères où
on avait des diminutions. Il n'y a pas beaucoup de ministères qui
peuvent se vanter d'avoir connu une progression dans ce sens-là.
Maintenant, on me parle des périmés. Il y aura 4 005 000
000 $ de périmés cette année, donc, 0, 5 %. Si je regarde
tout ce qui s'est passé depuis 1976, donnons quelques chiffres au
hasard: 1976-1977, 10, 6 % de périmés; allons maintenant en
1982-1983, 11, 9 % de périmés; allons maintenant en 1985-1986, 8,
8 % de périmés; allons en 1988-1989, on parle de 4, 1 % de
périmés et on va parler, cette année, de 0, 5 % de
périmés. Il n'y a jamais eu si peu de périmés que
nous en avons présentement. C'est donc dire que non seulement le
gouvernement coupe en agriculture, mais il en met de plus en plus.
Maintenant, quels choix avons-nous eu à faire? Ça, on en
conviendra, quels choix avons-nous eu à faire? Notre
assurance-stabilisation, c'est un choix qu'on s'est donné dans notre
ensemble québécois d'agriculture. Nos agriculteurs ont
préféré discuter et parler d'assurance-stabilisation.
Ça, il y a un prix à payer pour ça. On ne peut pas, en
même temps, faire de l'assurance-stabilisation avec des coûts
astronomiques et continuer de faire des programmes avec des coûts
astronomiques et des programmes universels. Donc, il faut se dire quoi, entre
nous? Le choix qu'on a fait de l'assurance-stabilisation fait en sorte que nous
mettons beaucoup d'argent à l'intérieur de
l'assurance-stabilisation. Quand le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'alimentation a dit, quelques jours après son
assermentation, qu'il va falloir regarder ça de près, d'abord
c'est pour, bien sûr, sortir carrément du système des gens
qui n'ont pas d'affaire dans le système. S'il en a et quelle
quantité il y en a, on verra. On regarde ça, on étudie
ça et les gens qui produisent peu, est-ce qu'ils doivent être
indemnisés de la même façon que ceux qui produisent
beaucoup? Est-ce que les gens qui produisent pour leur propre consommation,
à l'intérieur de leur ferme, doivent être indemnisés
de la même façon que ceux qui produisent pour faire de la
commercialisation? Ce sont toutes des choses qu'on doit se dire parce qu'on
peut avoir de la stabilisation, produire du maïs, produire des
céréales, faire manger ça par ses animaux, avoir de la
stabilisation sur le boeuf, sur les animaux et avoir de la stabilisation, par
après, sur ce qu'on vend. Alors, finalement, il y a des gens qui
bénéficient de la stabilisation. Je ne dis pas qu'il ne doit pas
y avoir de stabilisation, mais a quel pourcentage faut-il faire
référence? Est-ce qu'on doit avoir de la stabilisation de la
même façon à tous ces niveaux-là?
Ce sont des discussions qu'on aura. Je n'ai pas la réponse, bien
sûr que non. Je n'ai pas la réponse, mais on peut, à tout
le moins, se questionner et c'est tellement vrai que l'UPA a même
accepté de signer une lettre, de signer un protocole d'entente avec nous
pour qu'on regarde ça parce que eux autres mêmes trouvent que, de
ce côté-là, il y a probablement un peu de ménage
à faire. L'UPA m'a donné un protocole d'entente signé
là-dessus pour qu'on regarde ça ensemble, pour éviter et
sortir carrément des abus s'il y en a. Et à quel pourcentage y en
a-t-il? Je ne le sais pas. Encore là, je ne peux pas tirer ça
d'un chapeau de magicien, mais il y a sûrement un certain abus dans le
système qu'il faut éviter carrément parce qu'ils ne
profitent pas, ces abus-là, à l'agriculture.
Maintenant, il faut se dire une chose aussi. Il ne faut pas croire et il
ne faudra pas croire que l'assurance-stabilisation est là pour enrichir
les producteurs. Ce n'est pas vrai. Ça ne peut pas être,
là, une assurance. Une assurance, ce n'est pas fait pour faire en sorte
que ta maison passe au feu et que tu t'en bâtisses une deux fois plus
chère après. Si c'est ça, ça n'a pas de bon sens.
Ce n'est pas une assurance, ça, c'est un billet de loto. Ce qu'il faut
faire, à mon point de vue, c'est de faire comprendre aux gens et faire
savoir, une fois pour toutes, qu'une assurance-stabilisation est une assurance
qui fait en sorte que le producteur ne perd pas. Il ne gagne pas, mais il ne
perd pas. C'est' pour qu'il ne perde pas d'argent et non pas pour qu'il en
fasse. S'il en fait le double, ce n'est plus une assurance, parlons d'autre
chose. On changera nos régimes s'il le faut, mais ne parlons plus
d'assurance. L'assurance fait en sorte que le producteur ne doit pas
s'appauvrir quand il arrive des imprévus. Quand il arrive de la
grêle, quand il arrive des cataclysmes, quand il arrive des mauvaises
récoltes, quand les prix chutent trop, l'assurance-stabilisation vient
faire en sorte qu'on soutient le prix pour l'amener à ce qu'il ne perde
pas d'argent.
Si l'assurance-stabilisation est là pour faire des millionnaires,
il faut changer notre philosophie. Il faut changer ça et il faut voir
ça d'une autre façon. Le fait de faire certains ménages
là-dedans, va, bien sûr, nous amener à avoir une autre
philosophie, parce que, moi aussi, je suis d'accord avec le
député d'Arthabaska. Si on fait uniquement de la stabilisation,
on peut en faire, nous autres, chez nous, mais ce n'est pas comme ça
qu'on va développer l'agriculture. Ce n'est pas comme ça qu'on va
développer l'agriculture, parce que les gens vont continuer de
s'appauvrir, on n'aura pas de technologies nouvelles, on ne fera pas de
recherche et on va faire en sorte qu'on ne mettra pas en plan de nouvelles
façons avec les technologies nouvelles de produire, d'améliorer
la production, d'améliorer la gestion des fermes. On ne fera rien de
ça parce qu'on va faire uniquement la différence entre ce qu'ils
devraient faire et ce qu'ils n'ont pas fait.
Alors, il faut carrément changer cette philosophie-là,
tout en gardant l'assurance-stabilisation. Il ne faut pas l'éliminer, au
contraire. Mais le fait de faire du ménage là-dedans et de donner
la juste mesure de ce que doit être une assurance-stabilisation va faire
en sorte que nous allons dégager des sommes d'argent pour nous permettre
d'avoir des programmes.
Quelles sortes de programmes, maintenant? Je pense qu'il est fini le
temps d'avoir des programmes provinciaux, parce qu'il y a des gens qui se
sentent obligés d'utiliser un programme provincial, parce que le
gouvernement paie 25 %, 30 %, 40 %, 50 % ou 60 %. Quand la personne dit: Ah!
bien, le gouvernement paie 50 %, pourquoi ne l'utiliserait-on pas? Tout d'un
coup, dans trois ou quatre ans, il n'y en a plus, je vais perdre 50 %. Il va
l'utiliser sans savoir s'il en a réellement besoin.
On ne fait pas d'agriculture au Québec de la même
façon en Abitibi qu'on en fait en Gaspésie, qu'on en fait en
Mauricie, qu'on en fait dans la région de Montréal ou qu'on en
fait dans la région de Saint-Hyacinthe. Ce n'est pas vrai. Ce n'est pas
le même genre d'agriculture. C'est tellement vrai que quand je me
promène sur le terrain... Et allez voir ça pour le "fun". Sortez
un peu et vous allez voir que sortir, ça forme la jeunesse. Vous allez
voir ce que ça donne quand on sort. Partez, M. le Président, vous
qui n'êtes pas nécessairement un gars du monde agricole. Je sais
que vous connaissez bien des choses, mais ça va quand même vous
aider. Vous partirez fin de mars début avril et vous ferez la route 20
tranquillement pour voir le paysage. Je vous prêterez mon chauffeur si
vous voulez en voir plus. Vous allez voir que la neige et les bancs de neige
s'en vont en augmentant de Saint-Hyacinthe à Québec. Elle fond
plus vite à Saint-Hyacinthe qu'elle ne fond à Québec.
C'est de valeur, mais c'est ça!
Alors, on fait de l'agriculture plus vite à Saint-Hyacinthe qu'on
n'en fait dans la région de Québec. Les sols sont plus
prêts, ça sèche plus vite; on sème plus rapidement.
On fait peut-être plus de récoltes. Au lieu d'en faire deux, on en
fait trois. Peut-être qu'ailleurs, on peut en faire juste deux. C'a une
incidence, ça. Et c'est pour ça qu'il faut maintenant avoir des
programmes régionaux, donner ce qui est bon aux régions pour
faire du développement agricole.
Mais on ne fera jamais ça si on ne se dégage pas une marge
de manoeuvre dans notre assurance-stabilisation. Et j'invite tous les gens bien
pensants... Je sais que le député comprend ça, parce qu'il
est issu du monde agricole. Il faut faire en sorte que notre
assurance-stabilisation soit bien protégée, qu'elle vienne
protéger surtout notre producteur pour qu'il ne subisse pas de coups
durs. Mais il faut aussi, bien sûr, faire le ménage pour se
dégager une marge de manoeuvre qui va nous permettre, en bout de piste,
d'avoir des programmes adaptés aux régions, qui vont faire
développer nos régions selon l'agriculture qu'elles souhaitent,
en concertation avec l'agriculteur.
Vous étiez ici hier quand je l'ai dit, mais je vais le
répéter, parce que c'est important et je ne devrais pas le
répéter à vous. Vous comprenez ça bien avant tous
ceux qui l'ont entendu. Mais je vais vous le dire pareil, M. le
Président. Trop fort casse pas; on dit ça souvent en langage
rural et répéter, répéter, répéter,
il en reste toujours quelque chose, vous savez ça, hein? C'est un
principe pédagogique, ça. Il faut répéter sans
cesse et dire tout simplement que tout doit être fait en fonction de
l'agriculteur. S'il n'y avait pas d'agriculteurs, il n'y aurait pas de ministre
de l'Agriculture. S'il n'y avait pas de ministre de l'Agriculture, il
manquerait de quoi au gouvernement du Québec, en tout cas, pour
l'instant. Je suis sûr de ça. C'est parce qu'il y a des
agriculteurs que je suis là et que le critique de l'Opposition est
là. C'est parce qu'il y a du monde au Québec qu'on a besoin de
gouvernement, sinon, on n'aurait pas besoin de gouvernement. Et quand on
réussit à comprendre ça, tous tant que nous sommes dans
cette grande pyramide-là, qu'on soit du syndicalisme agricole, qu'on
soit du gouvernement, qu'on soit à la tête de quoi que ce soit,
ça, ce sont des titres. Mais nos pensées doivent tout simplement
être en fonction de celui qui a les deux pieds sur le terrain qui, lui,
vit avec ça. C'est pour lui qu'on est là et, si on oublie
ça, à un moment donné, quand il n'y en aura plus, nous
autres non plus, on ne sera plus là. De plus en plus, les agricultrices
et les agriculteurs du Québec ont besoin d'avoir quelqu'un qui pense en
fonction d'elles et d'eux plutôt qu'en fonction des structures. Les
structures sont là pour gober des piastres et non pas pour rendre
nécessairement d'ultimes services aux agriculteurs et aux agricultrices
du Québec. Voilà, M. le Président. (10 h 40)
Le Président (M. Bissonnet): M. le député
d'Arthabaska.
M. Jacques Baril
M. Baril: C'est toute une belle envolée de la part du
ministre, la fin de ses propos surtout, parlant de sa vision du
développement des régions, d'avoir des programmes
régionaux adaptés à chacune des régions. Tu ne peux
pas faire autrement que d'embarquer là-dedans et, je dirais, de
féliciter le ministre sur l'orientation qu'il veut donner, mais je vais
le féliciter davantage lorsque ça se concrétisera
parfaitement, adéquatement, avec les besoins de chacune des
régions. J'espère que j'aurai la chance de féliciter le
ministre là-dessus dans les mois qui viennent, parce que c'est urgent.
Il y a un rattrapage à faire qui est énorme au niveau des
régions. Je vais profiter de l'occasion pour sensibiliser encore le
ministre sur ce que je lui
avais dit lors de l'interpellation, il y a, je ne sais pas, 15 jours ou
trois semaines - le temps passe vite - sur sa vision de l'agriculture.
C'est vrai, il a raison de dire que l'agriculture dans la région
de Saint-Hyacinthe ou de la plaine du Saint-Laurent n'est pas la même que
dans le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie, le Lac-Saint-Jean ou
l'Abitibi-Témiscamingue. Dans ces régions, entre autres, il y a
beaucoup d'agriculture, il se fait beaucoup d'agriculture à temps
partiel et, avant que le ministre mette la hache dans plusieurs programmes ou
fasse le tri ou le ménage dans les agriculteurs, qui fait de
l'agriculture et qui n'en fait pas, je voudrais encore sensibiliser le ministre
sur son orientation. Il faut faire attention à ça.
Il y a un nouveau discours qui s'en vient et il va falloir probablement
s'habituer avec. Depuis plusieurs années, on a parlé de
productivité, productivité, productivité. Aujourd'hui, je
dirais que de plus en plus de personnes commencent à
réévaluer cette philosophie de la productivité, parce
qu'on parle, entre autres, de la qualité de vie que les agriculteurs
cherchent de plus en plus, on parie d'une sorte d'agriculture durable. Tout
ça, la productivité, va à rencontre, en bonne partie, de
l'agriculture durable. Selon les spécialistes, il faut arrêter de
dire que plus tu vas récolter de tonnage à l'acre ou à
l'hectare, plus ça va être rentable. À court terme, c'est
vrai, mais à long terme, tu épuises le soi d'une façon
très marquée. Il faut absolument remettre en cause cette
philosophie de la productivité.
Si on regarde les crédits supplémentaires que nous allons
adopter, la part du financement agricole va aller chercher 26 % de la
totalité du budget du ministère de l'Agriculture et la part de
l'assurance-stabilisation va aller chercher 31 % du budget du ministère
de l'Agriculture. C'est énorme, M. le ministre. C'est énorme.
Juste les deux, ça fait 57 % de l'ensemble de votre budget. Qu'est-ce
qui reste après? Je n'ai pas décortiqué vos cahiers, mais
si on enlève l'administration du ministère comme telle, qu'est-ce
qui vous reste concrètement pour, justement, développer le
secteur agricole, pour développer - parce que ça relève de
vous aussi - le secteur de la transformation ou de la mise en marché?
C'est énorme parce que, si on regarde et si on fait des comparaisons,
durant les années du Parti québécois, les deux, le
financement agricole et l'assurance-stabilisation, allaient chercher environ 35
% du budget. Là, nous sommes rendus à 57 %. C'est astronomique,
M. le Président. Si vous voulez le dire au ministre, parce que je trouve
ça astronomique, je vous en laisse la liberté. Mais comment le
ministre entend-il corriger cette situation, non pas en augmentant les
critères d'admissibilité au niveau de l'assurance-stabilisation,
ce n'est pas comme ça que tu vas régler le problème, mais
comment le ministre entend-il corriger cette situation? Le ministre pourrait-il
nous déposer le protocole d'entente qu'il a signé avec l'Union
des producteurs agricoles sur la révision ou les négociations
globales du système de l'assurance-stabilisation? Il serait
intéressant d'en prendre connaissance pour voir exactement quelle piste,
si on peut dégager des pistes de solution, dans ce protocole
d'entente.
Aussi, j'aimerais savoir de la part du ministre - ça fait
quelques fois que je le demande et je n'ai pas encore eu la réponse - et
là je vois les représentants de la Régie qui sont avec
vous - comment il évalue les sommes supplémentaires que ça
a coûté à la Régie de l'assurance-stabilisation
lorsque le gouvernement libéral a accepté de reconnaître
les producteurs de porc intégrateurs, faisant partie ou pouvant
bénéficier de l'assurance-stabilisation. Parce que le
gouvernement du Parti québécois a toujours été
contre le fait que les intégrateurs soient bénéficiaires,
si je peux dire, de l'assurance-stabilisation, et, personnellement en tout cas,
je suis encore contre parce qu'ils ont - les intégrateurs toujours - un
avantage marqué face aux producteurs indépendants, parce que pour
l'intégrateur, sa moulée est fournie par la compagnie de
moulées ou par la compagnie ou la coopérative. Remarquez bien, il
peut donc avoir les aliments à un coût beaucoup moindre que le
particulier qui, lui, dépend de la compagnie ou de la coopérative
pour acheter ses aliments. Il n'est pas un fabriquant.
J'aimerais savoir concrètement combien ça a pu
coûter par année et si on peut nous fournir les chiffres - je ne
sais pas si c'est décortiqué comme ça - année par
année depuis que le système s'applique aux
intégrateurs.
Le Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député d'Arthabaska. M. le ministre de l'Agriculture.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: D'abord, M. le Président, il faut bien dire
une chose, et il ne faut pas que le député d'Arthabaska oublie
ça, le programme de crédit agricole au Québec est un
programme de développement. Il faut accepter ça comme un
programme de développement. Si ce n'est pas un programme de
développement, si demain matin on l'enlevait tout simplement, prenons
pour acquis qu'on enlève ça demain matin, je vous dis qu'il ne se
ferait pas grand-chose de développement du côté des fermes,
il n'y a plus beaucoup de fermes qui jailliraient au Québec, de
nouvelles fermes et de jeunes qui s'établiraient. Donc, c'est un
programme de développement. On peut bien l'ignorer quand on aligne des
chiffres ensemble, mais on n'a pas le droit d'ignorer que c'est un programme de
développement et, moi, je tenais à rétablir ces
faits-là.
Je suis content parce que le député d'Ar-thabaska est
d'accord sur pas mal de points avec moi, puis je vais lui démontrer
qu'il est d'accord, mais, au préalable, je vais corriger une mauvaise
perception qu'il a eue de notre débat du vendredi matin, ici à
l'Assemblée nationale. Le ministre de l'Agriculture n'a jamais et ne
fera jamais référence aux agriculteurs à temps partiel.
Ils ont un apport énorme en agriculture, puis c'est important. Non, mais
je vais vous dire à quoi j'ai fait référence et vous allez
comprendre. Vous êtes vous-même victime comme agriculteur de ce
genre d'agriculteurs de salon. Je n'ai rien contre un médecin, un
avocat, un notaire, un professionnel, un ingénieur, un architecte,
nommez-les tous un à côté de l'autre, qui veut s'acheter
une ferme de 100 000 $ ou 200 000 $ au Québec et qui veut la faire
produire et fonctionner. Ça, c'est un gars qui vient donner un apport
d'agriculteur, un apport à l'agriculture, un apport à
l'économie. Bienvenue à tout ce monde-là qui veut investir
en milieu rural et s'ils veulent prendre des fermes abandonnées, sans
culture, et qu'ils veulent justement faire de la culture et en faire une
exploitation, notre porte est grande ouverte pour ces gens-là. Mais j'en
ai un petit peu contre les gens, de quelque profession que ce soit, qui
décident de s'acheter une maison de campagne en campagne, qui
s'achètent une terre, qui achètent la maison, qui ne produisent
pas, qui s'organisent avec un voisin qui est agriculteur, qui va tout
simplement faire en sorte de lui louer sa terre pour le pacage ou aller
chercher un petit peu de foin pour la somme de 3000 $, qui se fait donner une
carte de producteur agricole et qui va chercher une ristourne de taxes.
Ça, j'en ai contre un gars comme ça. Ça, c'est un
agriculteur de salon. Ça, c'est un gars qui bénéficie du
système. Ça, c'est un gars qui vient chercher 20 000 000 $, 25
000 000 $ et 30 000 000 $ dans son ensemble, qui vient priver l'agriculteur
comme vous et comme d'autres agriculteurs d'avoir du développement dans
son domaine. Et c'est à ça que j'ai fait référence.
(10 h 50)
Je n'ai pas parlé de l'agriculture à temps partiel, voyons
donc. L'agriculture à temps partiel, c'est important. Même qu'il y
a des gens qui ont besoin de ça pour continuer à travailler et
commencer à s'implanter en agriculture pour que, après 40 ans,
ils puissent se consacrer entièrement à ça. Ils partent
sur une base plus solide. Donc, non seulement on n'est pas contre ça,
parfois on le souhaite. À ce moment-là, ce que j'entends par
agriculteurs, qu'il faut sortir carrément et ne vous en faites pas, j'ai
été ministre des Affaires municipales, je sais de quoi je
parle... Il y a entre 12 000 000 $ et 17 000 000 $ qui, chaque année,
s'en vont en ristournes de taxes à des gens qui ne sont pas du tout
agriculteurs, qui ont tout simplement une carte de l'UPA de 3000 $. Ils ont
réussi à avoir une carte parce qu'ils ont fait une vente de 3000
$, et encore faut-il se demander si ça valait vraiment 3000 $,
l'échange qu'ils ont fait avec le voisin et s'il n'y a pas eu autre
chose en conséquence. Ça, on ne va pas questionner ça, on
n'est pas encore là-dedans. C'est ça, la réalité,
et c'est ces gens-là qui font mal aux agriculteurs. Toutes les fois
qu'un agriculteur accepte de troquer ou de transiger avec un de ses voisins
dans le sens que je l'explique, il vient tout simplement faire mal à son
propre avenir agricole. Donc, ça, je tenais à préciser
ça et je vous remercie de me fournir l'occasion de le
préciser.
L'autre point, M. le Président, ça rentre dans le discours
que j'ai tenu. Je suis en train de me demander si je n'ai pas été
élevé sur la même ferme que mon collègue
d'Arthabaska pour penser comme ça. Le budget du ministère de
l'Agriculture et la stabilisation vont chercher une trop grande part de notre
budget. Ça veut dire quoi, ça? Ça veut dire quoi? C'est
pour ça que je lui dis qu'il faut faire le ménage de notre
assurance-stabilisation, c'est astronomique. Ça ne pourra pas toujours
continuer de même. Est-ce que le député me suggère,
pour ne pas que ça continue de grossir, d'éliminer des
productions de la stabilisation? On ne peut pas continuellement demander
d'avoir des productions additionnelles qui embarquent dans la stabilisation des
prix et que ça coûte moins cher, c'est impossible. Et le budget du
ministère de l'Agriculture, j'ai eu l'occasion de le dire à
maintes et maintes reprises, M. le Président, c'a été la
finale tantôt, mon envolée oratoire, comme l'a qualifiée le
député d'Arthabaska. S'il a bien entendu, ça voulait dire
ça, tout simplement.
Comme on est là pour l'agriculteur, il faut faire attention aux
dépenses qu'on a chez nous. Il faut faire attention aux dépenses
qu'on a chez nous. Si le budget du ministère de l'Agriculture augmente
continuellement dans son administration, il y a une raison à ça.
Ce n'est pas parce qu'on a du monde de trop. Ce n'est pas parce qu'il y a du
monde qui ne fait rien. Ce n'est pas parce qu'il y a du monde qui est
incompétent. C'est parce qu'à un moment donné on a
peut-être oublié une chose fondamentale: en quoi les structures
peuvent-elles être bénéfiques à l'agriculteur sur le
terrain? Est-ce que le fait d'avoir plus de structures sur le terrain va
être aussi bénéfique à l'agriculteur que d'avoir des
programmes de développement? Là, ça rejoint ce que je dis.
Il faut faire le ménage de nos structures aussi. Il faut faire le
ménage de nos structures aussi. Il faut faire en sorte que l'agriculteur
puisse s'adresser de plus en plus, dans nos régions, à des
guichets qui sont de plus en plus uniques, à nos guichets qui sont de
plus en plus uniques.
Parfois, je le dis devant les présidents des différentes
régies qui sont là, ils connaissent mon discours, ils n'aimeront
peut-être pas ça, mais ce n'est pas grave, je ne suis pas ici
pour
qu'eux autres aiment ça, je suis ici pour administrer le
ministère, pour dégager de l'argent pour les vrais agriculteurs.
Des fois, c'est intéressant pour le président de l'Office du
crédit agricole d'avoir son bureau à lui dans une région,
avec ses fonctionnaires. C'est intéressant pour le gars de la
Régie des assurances agricoles d'avoir son bureau à lui, avec ses
fonctionnaires, pour fins de consultations. C'est intéressant pour le
ministère de l'Agriculture d'avoir son bureau avec ses consultants. Mais
je pense qu'il est temps de penser en fonction d'une économie de
piastres pour donner un meilleur service à l'agriculteur. Il faut
qu'à la fois le bon sens du président de l'Office du
crédit agricole, le bon sens du président de la Régie, le
bon sens du ministre de l'Agriculture triomphent pour dire: II ne serait pas
mieux d'avoir un seul bureau avec tout ce beau monde-là à
l'intérieur et que l'agriculteur, au lieu de se gratter la tête
avant de partir et de dire: Là, je m'en vais à telle place, c'est
sur telle rue au lieu de telle autre rue, dise: Je m'en vais à une place
et je vais trouver tout ce qu'il faut pour avoir un renseignement. Quand on va
avoir fait ça, on va avoir éliminé un peu de structures,
on va avoir dégagé peut-être bien 3 000 000 $, 4 000 000 $,
5 000 000 $, 6 000 000 $. et quand on aura dégagé 3 000 000 $, 4
000 000 $, 5 000 000 $, 6 000 000 $, nous autres, on n'aura pas notre petite
chapelle chacun. parce que, moi aussi, je suis jaloux de ça. je parle
d'eux autres, mais je suis aussi jaloux, moi aussi. on n'aura pas chacun notre
petite chapelle, tous les trois, mais on va avoir au moins la chance de dire:
les 5 000 000 $, les 6 000 000 $ ou 8 000 000 $ qu'on a
économisés, on les a mis dans du financement pour les
agriculteurs qui sont plus heureux et qui ne cherchent plus, maintenant,
à aller parier à qui, et où, et comment, et sur quelle
rue, et à quelle adresse. c'est ça, la réalité. et
ce n'est qu'à ces seules conditions-là qu'on va diminuer
l'administration du ministère, de nos offices et de nos régies,
pour consacrer ces sommes-là à l'agriculteur. si on ne fait pas
ça, on va continuer à se dire durant des années, ensemble:
l'administration prend de plus en plus une part, la stabilisation prend de plus
en plus une part et on ne fait plus rien pour le reste. et c'est ça
qu'il faut changer, qu'il faut modifier, tout en conservant, bien sûr, un
bon service à la clientèle, aux agriculteurs et aux agricultrices
du québec de la part des régies, de la part de l'office, de la
part du ministère. donc, consacrer un bon service à notre
clientèle bénéficiaire tout en conservant aussi, bien
sûr, un niveau de garantie des prix et des revenus des agriculteurs, sans
éliminer la stabilisation parce qu'il faut que ce soit là. et on
va avoir tout fait ça, mais on va avoir aussi dégagé des
sommes importantes pour que l'agriculteur et l'agricultrice sur le terrain en
bénéficient. et quand je me dis ça, à moi, comme
ministre, même si je suis jaloux de ça... Quand je me dis
ça, à moi, comme ministre-Une voix: Ah!
M. Picotte: ...et quand je dis ça au président de
l'Office du crédit agricole, et quand je dis ça au
président de la Régie, je dis ça aussi à vous
autres, mes collègues députés, qui êtes ici. Et
à la première occasion où on voudra rationaliser, je vous
vois m'écrire pour me dire: II ne faut pas faire disparaître des
bureaux. On ne peut pas manger son gâteau et le garder pour le lendemain;
il faut au moins savoir en couper la moitié pour... Si on veut en avoir
un peu pour le lendemain, il faut le couper de la moitié. Il n'y a pas
de miracle à faire là-dedans. Et c'est comme ça que
ça se passe; ça ne se passera pas autrement. C'est une
volonté collective pour satisfaire l'agriculteur. Si c'est comme
ça, si on travaille pour l'agriculteur, c'est comme ça qu'il faut
le faire.
Maintenant, je réponds aux deux dernières questions que
m'a demandées le député d'Ar-thabaska qui serait mieux de
m'écouter que d'écouter son collègue, le
député, parce que, en agriculture, ce n'est pas lui qui va lui
donner les meilleurs conseils - je le connais assez bien pour ça.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Picotte: Je voudrais tout simplement lui dire, à deux
de ses questions, que, premièrement, j'aurai l'occasion de lui
acheminer, dans les jours qui viennent, le protocole d'entente qui est
intervenu entre le ministère et l'UPA sur le regard que nous ferons
ensemble sur l'assurance-stabilisation pour changer et modifier des choses,
pour dégager des sommes, permettre à l'agriculteur de vraiment
bénéficier de ce dont il doit bénéficier et
éliminer carrément ceux qui ne doivent pas en
bénéficier.
En 1990, les intégrateurs possédaient 925 000 porcs, ce
qui coûtait 3 000 000 $ sur 20 000 000 $ qu'on a mis dans le porc; c'est
3 000 000 $ sur 20 000 000 $, donc 17 000 000 $ qui restent pour les
producteurs de porc dont vous faites mention. Les intégrateurs sont
allés chercher 3 000 000 $. Quand on regarde la juste proportion, par
rapport à 925 000 porcs produits, il y a peut-être un
questionnement à se faire, cependant. Je dis "peut-être", encore,
parce que je veux le faire avec les principaux intéressés. Il y a
peut-être un questionnement. Peut-être que fe pourcentage de nos
interventions, pour les intégrateurs, pourrait être
différent de celui des producteurs indépendants. Peut-être!
Ça, c'est une discussion qu'on fera avec eux. Et quand on aura fait
cette discussion avec eux, on verra ce qu'on doit apporter. Mais vous vouliez
savoir les chiffres. Vous dites que ça fait longtemps que vous les
demandez...
M. Baril: Les années avant.
M. Picotte: ...vous les avez, pour cette année.
M. Baril: Pouvez-vous me les fournir pour les années
antérieures?
M. Picotte: Ah! bien, ça, évidemment...
M. Baril: Quand même ce ne serait pas aujourd'hui, quand
même ce serait dans les jours à venir.
M. Picotte: On me dit que, bon an, mal an, ça joue dans 3
000 000 $. Mais je vais demander de sortir les chiffres, et je vous les
fournirai.
Le Président (M. Bissonnet): Une dernière question,
compte tenu du temps, M. le député d'Arthabaska.
M. Baril: Nous avons commencé à 10 h 10, M. le
Président.
Le Président (M. Bissonnet): Oui, c'est ça. Mais je
vous dis qu'il reste 10 minutes, là. (11 heures)
M. Jacques Baril
M. Baril: Bon. Quand le ministre parle... Il vient de nous dire
que l'assurance-stabilisation, c'est... Si on regarde, sous l'administration du
Parti québécois, les programmes de stabilisation étaient
plus généraux qu'ils ne le sont aujourd'hui et coûtaient
moins cher au gouvernement du Québec. Dans notre temps: 12 % du budget
total. Sous le régime du Parti libéral du Québec, les
programmes d'assurance-stabilisation sont plus sévères. Ça
prend plus de têtes, ça prend plus d'"acrage", et on a
augmenté les gains de productivité, puis, ça coûte
plus cher que dans notre temps, on est rendu à 31 % du budget. Ce qui
veut dire que ça coûte 19 % de plus que sous notre administration.
Donc, M. le ministre, ça veut dire que c'est un signe flagrant que notre
agriculture est malade. Et, en plus de ça, durant les cinq
dernières années que vous avez été là, les
budgets d'aide à la production, qui est du développement, ont
diminué de 200 000 000 $. C'est une autre raison pourquoi, quand vous
nous dites qu'on va en faire du développement et que le financement,
c'est du développement, du financement agricole, il y en a toujours eu
au Québec. C'est nous autres, dans notre temps à part ça,
qu'on avait fait la réforme au niveau du financement agricole qui
était adapté aux besoins des producteurs et productrices
agricoles. Donc, il ne faut pas penser que tout va bien dans le meilleur des
mondes, mais il reste beaucoup de choses à faire. Ma question est bien
précise, au niveau du financement. Aujourd'hui, on va voter des
crédits de 10 800 000 $, et le budget du printemps dernier était
à 163 000 000 $. Vous avez dit tout à l'heure que ça
prendrait un budget de 180 000 000 $; donc, si je fais un calcul rapide, vous
avez dû aller chercher, à l'intérieur de votre
ministère, 10 000 000 $ supplémentaires. Je ne sais pas si le
ministre a saisi ma question.
M. Picotte: Oui.
M. Baril: Vous avez dit que le financement coûterait 180
000 000 $ environ cette année, vous aviez prévu un budget de 163
000 000 $ et, aujourd'hui, on vote des crédits supplémentaires de
10 800 000 $. Ce qui veut dire qu'il manque 6 000 000 $, 7 000 000 $, que vous
avez dû aller chercher quelque part dans votre ministère. est-ce
qu'on peut savoir si c'est le résultat de la coupure des budgets ou la
fin de l'application des programmes c'est-à-dire, à la
mi-septembre, c'est l'une des raisons pourquoi les bureaux régionaux et
les bureaux de renseignements agricoles n'ont même plus de budget pour
s'acheter du papier et se payer des sorties pour informer davantage ou aider
les agriculteurs? ces 7 000 000 $ environ, à l'intérieur de quel
programme êtes-vous allé les chercher?
Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre de
l'Agriculture.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: M. le Président, certains facteurs ont
changé et les paiements des pertes ont été moindres aussi.
Mais, en fait, quand on parle de 180 000 000 $, ça joue aux alentours de
176 000 000 $; donc, il y a 4 000 000 $ de différence. 180 000 000 $,
c'est un chiffre arrondi. Alors quand on regarde ça, le facteur de
différence et le paiement des pertes en moins, c'est pour ça
qu'on voit cette différence-là.
Maintenant, M. le Président, il y a une question que je n'aurais
jamais pensé que le député d'Arthabaska pouvait me poser,
mais il me l'a posée, je vais être obligé d'y
répondre. Ça, j'étais certain qu'il savait ça hors
de tout doute ou bien il veut me le faire dire devant l'écran, ce qui
n'est pas mauvais non plus. Il dit: Qu'est-ce que ça veut dire que la
stabilisation monte tant que ça? D'abord, je ne vais rien lui apprendre
en lui parlant des céréales. Les céréales, il sait
ce que c'est, et je ne vais rien lui apprendre en lui disant que le prix du
marché des céréales depuis 1986 a beaucoup chuté.
Savez-vous comment on a été obligés de mettre dans les
céréales pour ne pas que les producteurs soient dans la
misère? 100 000 000 $ par année depuis 1986. 100 000 000 $ par
année, soyons francs, c'est les deux tiers qui sont payés par
l'État. 70 000 000 $, j'arrondis, 66 000 000 $, c'est deux tiers. O.K.
Parlons de 70 000 000 $,
ça se comprend mieux. 70 000 000 $ depuis 1986, à cause du
prix du marché qui a chuté, ont été investis par le
gouvernement du Québec dans le domaine des céréales. C'est
une question que je n'aurais jamais pensé que le député
d'Arthabaska pouvait me poser. Il se demande pourquoi? Écoutez, à
moins qu'il dise que c'est la faute à M. Picotte ou que c'est la faute
à M. Pagé ou que c'est la faute du gouvernement du Québec,
si le prix du marché a baissé mondialement, là
écoutez... Si vous me prêtez tant de pouvoir, il est temps que je
change d'enceinte, je ne suis pas à la bonne place ici. Je ne suis pas
à la bonne place pour discuter de ces affaires-là, si je suis si
puissant que ça. Que voulez-vous que je vous dise? Le prix mondial du
marché des céréales a chuté à un point tel
qu'il a fallu mettre 70 000 000 $ par année depuis 1986, 70 000 000 $.
On ne peut pas se demander pourquoi ça grimpe tant que ça.
D'autre chose aussi qu'il faut rajouter, c'est qu'il y a un petit peu plus de
programmes, peut-être pas beaucoup plus, mais un petit peu plus de
programmes, un programme en tout cas pour l'instant, c'est un petit peu plus
ça. C'est pour ça que j'ai pris la peine de dire "un petit peu
plus" et non pas "plus". Un programme de plus, donc, un programme de plus,
c'est de l'argent de plus qu'on met dedans, ne serait-ce que 5 000 000 $, 6 000
000 $, 7 000 000 $, 8 000 000 $, 10 000 000 $, 12 000 000 $ ou 15 000 000 $.
À coup de millions comme ça, on finit par approcher les trois
chiffres, les six chiffres et les neuf chiffres et on parle des 100 000 000 $.
Alors, c'est pour ça que le prix a changé, bien sûr.
Maintenant, demain matin, M. le Président, faites en sorte que le prix
des céréales... Ni vous, ni le député d'Arthabaska,
ni moi, on ne peut contrôler ça. Faisons en sorte demain matin que
le prix du marché dans les céréales monte de beaucoup ou
revienne au prix qu'il était antérieurement, vous allez voir
qu'il y a 70 000 000 $ qu'on n'aura pas besoin de mettre. Ou bien - on joue le
jeu tel que les règles du jeu sont établies et, à ce
moment-là, on ne peut pas dire demain matin: le prix du marché a
baissé, donc on arrête de soutenir les céréaliers,
parce que, là, c'est vrai qu'il va y avoir des problèmes. Alors,
on joue les règles du jeu. On dit: On ne peut rien changer à
ça. Et dans ce temps-là, il faut dire sa prière de la
sérénité: "Mon Dieu, donnez-moi la
sérénité d'accepter les choses que je ne peux pas
changer." Ça c'en est une; le prix du marché mondial, on ne peut
pas changer ça. J'accepte les choses que je ne peux pas changer et je
paie. "Le courage de changer les choses que je peux." Ça va être
de changer les règles de la stabilisation et de faire du ménage,
de regrouper les différents bureaux pour avoir moins d'administration au
ministère, ça, c'est le courage de changer les choses qu'on peut.
"Et la sagesse d'en connaître la différence." On en reparlera
quand on sortira de la politique tous les deux.
Le Président (M. Bissonnet): Très rapidement,
dernière intervention.
M. Jacques Baril
M. Baril: Une dernière intervention parce que...
Le Président (M. Bissonnet): Très rapidement.
M. Baril: ...le ministre a annoncé dernièrement
qu'il suspendait l'application d'un article de la loi, je ne sais pas lequel
sur le financement agricole comme quoi les agriculteurs ne seraient plus
obligés de payer le 1,85 % pour l'assurance-prêts agricoles. Ma
question va être rapide: Est-ce que le ministre également s'est
engagé à rembourser les agriculteurs et agricultrices qui avaient
dû payer cette somme? Ma question va être claire: Est-ce qu'ils
vont être remboursés avec les budgets de l'année
financière 1990-1991 ou bien s'ils vont être remboursés
avec le budget 1991-1992 et vers quelle date à peu près le
ministre entend-il signer les chèques pour que ces agriculteurs et ces
agricultrices en profitent parce que son prédécesseur avait
déjà pris un engagement de rembourser? Je voudrais savoir si le
ministre va inclure aussi ceux et celles à qui, dans la première
étape, au début de la loi, on avait fait payer de
l'assurance-prêts sur les anciens prêts qu'on avait
refinancés? Dans l'annonce du ministre, est-ce que cette
partie-là d'emprunteurs vont être remboursés et quand
vont-ils être remboursés?
Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre, vous avez une
minute pour répondre à cette question.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: C'est la loi 49, M. le Président. Je me
rappelle d'avoir demandé au député de Berthier de me faire
un peu un résumé. Quand je suis arrivé là, tout le
monde me parlait qu'il fallait retirer la loi 49, j'en avais entendu parler aux
dernières élections et j'avais demandé au
député de Berthier, mon adjoint parlementaire, de bien faire en
sorte de s'enquérir et de s'informer auprès de son monde,
à tout le moins, dans sa région, pour savoir ce que les gens
désiraient au juste pour qu'on ne retouche pas à ça
régulièrement. J'ai même demandé ça a mes
collègues du caucus agricole du Parti libéral qui sont ici
présents et que je remercie de me faire aussi des suggestions. On est
arrivés évidemment à la suggestion suivante: qu'il fallait
retirer la loi 49, c'est-à-dire suspendre l'application du 1,85 %. Donc,
comment va être remboursé l'argent? On va le prendre dans le fonds
d'assurance, le fonds
est là, il était mis à part. On va le prendre
là; ça n'affectera pas le budget du ministère comme tel;
c'est un fonds qui est constitué et qu'on ne devait pas toucher. Alors,
on n'a pas joué avec ça, ce fonds-là, nous. C'est un fonds
qui existe. Donc, on le prend dans le fonds, il est là, il est existant.
Ça n'affecte pas nos budgets.
La deuxième des choses, ce qui va se passer et quand ça?
Je ne vous le dis pas quand, parce qu'il faut que je mette des gens à
l'ouvrage pour qu'on retourne, en arrière pour savoir exactement ce que
les gens ont souscrit, ce qu'ils ont de donné et ce qu'ils vont
retourner. Mais tout le monde qui a mis un cent là-dedans va être
remboursé sur son cent, pas un cent et quart, pas trois quart de cent
sur son cent. On va retourner uniquement l'argent de ça. C'est ça
que les gens souhaitaient, et en plus de ça, que ces gens ne soient pas
pénalisés. C'est ce que j'ai annoncé au congrès de
l'UPA, et il faut changer la loi d'ici la fin de juin. Alors, vous comprendrez
bien que, comme je ne peux pas présenter la loi présentement, il
faudra que je présente la loi - il faut avoir le temps de la bâtir
et de l'écrire - si le député d'Arthabaska veut prendre un
engagement avec moi, au mois de mars. Je vais la déposer, et s'il veut
l'étudier d'ici le 15 avril, plus vite on l'étudiera ensemble,
plus vite elle sera adoptée, plus vite mes fonctionnaires commenceront
à faire du remboursement. Ça dépendera de vous,
l'Opposition, si notre loi est adoptée rapidement. Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre et M.
le député d'Arthabaska.
M. Picotte: M. le Président, je voudrais remercier mes
collaborateurs immédiats, les gens de mon ministère et de mon
cabinet qui se sont déplacés, les députés de
l'Assemblée nationale pour leur intérêt. Je voudrais
remercier le député d'Arthabaska et M. Brochu, son recherchiste.
Nous avons eu une discussion très intéressante. Et vous, M. le
Président, comme de coutume, vous faites ça comme un pro.
Le Président (M. Bissonnet): Ceci met fin, M. le ministre,
MM. les députés, chers collègues, à la
période consacrée au ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation.
Nous allons suspendre pour permettre aux personnes qui doivent se
retirer et à celles qui doivent entrer de le faire. Je suspends pour
quelques instants.
(Suspension de la séance à 11 h 11)
(Reprise à 11 h 13)
Le Président (M. Bissonnet): La commission
plénière reprend ses travaux et nous étudions les
crédits supplémentaires n° 1 pour l'exercice financier qui se
termine le 31 mars 1991, déposés par le ministre des finances le
5 décembre 1990.
Ministère des Finances
Nous en sommes à une intervention, pour le ministère des
Finances, pour une heure et demie. Donc, les travaux se termineront vers 12 h
44. Et je vous résume les articles, en ce qui a trait aux crédits
supplémentaires. Nous allons entendre le ministre des Finances pour une
période d'au plus 20 minutes et, également, le critique pour une
période d'au plus 20 minutes, et, après, l'échange se fera
entre les deux.
Alors, M. le ministre des Finances, vous avez la parole.
Remarques générales M. Gérard D.
Levesque
M. Levesque: M. le Président, je vous remercie. Le
dépôt des crédits n° 1 s'inscrit dans l'approche
poursuivie par le gouvernement au cours des cinq dernières
années, à savoir une gestion responsable des finances publiques.
L'un des principaux éléments de cette approche réside dans
le contrôle exercé sur les dépenses, afin de
répondre aux besoins prioritaires de la société
québécoise, et ce, de façon compatible avec - ce qui est
bien important - la capacité de payer de nos concitoyens.
L'évolution de la situation financière au cours des
dernières années indique que cette approche a porté fruit.
D'abord, le déficit, le fameux déficit, qui était de 3 344
000 000 $ en 1985-1986, a été réduit en 1989-1990 à
1 659 000 000 $. La croissance des dépenses - et c'est là,
évidemment, que nous touchons un point essentiel - a été
limitée à 5,1 % en moyenne par année, ce qui est moins de
1 % de pourcentage au-dessus de l'inflation. Je pense que même
l'Opposition sera d'accord avec nous que c'est là un effort louable qui
a été l'un des facteurs déterminants du succès que
nous avons connu dans la réduction du déficit.
La part des dépenses dans le PIB est passée de 25,3 % en
1985-1986, à 21,9 % en 1989-1990. L'amélioration de la situation
financière, au cours des dernières années, a donc permis
de faire face aujourd'hui à des coups plus durs. Sans remettre en cause
les objectifs de moyen et long terme, le gouvernement doit reviser l'objectif
de dépenses de 35 351 000 000 $ très légèrement,
à 35 551 000 000 $, soit 200 000 000 $ de plus, pour l'année
1990-1991 et cela en raison d'événements inattendus et,
évidemment, comme tout le monde le sait, de la
détérioration de la conjoncture économique. C'est dans ce
cadre que les crédits supplémentaires n° 1 qui totalisent 504
700 000 $ permettront de répondre à des
besoins additionnels dans de nombreux secteurs.
Maintenant, nous arrivons à cette partie du Budget 1990-1991,
Crédits supplémentaires n° 1, qui touche le ministère
des Finances, c'est-à-dire 53 800 000 $ qui sont imputables à
notre ministère. Et nous lisons dans les crédits
supplémentaires: Fonds de suppléance, programme 4.1, 30 900 000
$, Service de la dette directe, programme 2.2, 21 400 000 $ et Gestion de
certains emprunts à long terme des organismes des réseaux des
affaires sociales, programme 2.3, 1 500 000 $, pour un total que nous demandons
à cette Chambre d'approuver de 53 800 000 $.
D'abord, le fonds de suppléance et cela ne touche que le
programme 4.1 pour une somme de 30 900 000 $. Ces crédits additionnels
sont rendus nécessaires afin de pourvoir aux dépenses
imprévues pour l'ensemble du gouvernement et des réseaux,
dépenses de fonctionnement, de capital et de transfert d'ici la fin de
l'année financière. On sait que le fonds de suppléance est
un fonds qui est au ministère des Finances justement pour cette fin,
faire face à des imprévus.
Quant à l'item 2, c'est-à-dire le service de la dette
directe, programme 2.2, la somme est de 21 400 000 $. La prévision de la
dette directe établie à 2 974 600 000 $, c'est-à-dire
près de 3 000 000 000 $ dans le livre des crédits, est maintenant
révisée à 2 996 000 000 $. Autrement dit, nous demandons
21 400 000 $ sur un budget, à cette fin, de près de 3 000 000 000
$. L'augmentation de 21 000 000 $ résulte principalement de la hausse
des taux d'intérêt par rapport aux prévisions initiales du
budget du printemps dernier. On comprendra que les taux d'intérêt
se sont maintenus élevés plus longtemps que ce qui était
prévu par tous les analystes.
Finalement, au troisième facteur, au troisième item si
vous voulez, les emprunts à long terme des organismes des réseaux
des affaires sociales, programme 2.3, pour 1 500 000 $. On se rappellera de
cela, les déficits accumulés par 'es hôpitaux au cours de
la période 1982-1986, qui ont dû être pris en charge par le
gouvernement, se chiffraient à 282 600 000 $. La loi 130 avait
autorisé les crédits requis pour rembourser le capital des
emprunts à long terme contractés pour financier ces
déficits. Seuls les intérêts sur ces emprunts demandent de
nouveaux crédits. En effet, la hausse de 1 500 000 $ résulte
essentiellement, comme c'était le cas d'ailleurs pour le service de la
dette directe, de l'augmentation du coût d'intérêts depuis
le début de l'année.
Eh bien, M. le Président, malgré les dépenses
additionnelles que représente le dépôt des crédits
supplémentaires n° 1, il ne faut pas conclure que le gouvernement a
décidé de laisser tomber ces objectifs financiers de moyen et
long terme. Ces objectifs impliquent, rappelons-le, un taux de croissance des
dépenses publiques égal à l'indice des prix à la
consommation, plus 1 %. La révision à la hausse de 200 000 000 $
de l'objec- tif de dépenses par rapport à ce qui avait
été prévu au budget correspond plutôt à une
gestion responsable du gouvernement qui vise à accommoder la faible
conjoncture économique. Au contraire, ce serait une mauvaise gestion que
de faire supporter par les autres secteurs le coût
d'éléments d'ordre conjoncturel ou d'événements
inattendus.
Lorsque la reprise économique sera bien enclenchée, et
j'espère que cela se fera le plus rapidement possible, le gouvernement
pourra rétablir un rythme de croissance des dépenses plus
compatible avec les objectifs financiers de moyen et long terme. Dans
l'évolution de la situation financière du gouvernement, les deux
principaux éléments qui militent en faveur d'une révision
à la hausse des dépenses en 1990-1991, par rapport à
l'objectif fixé dans le discours sur le budget d'avril dernier, sont,
comme vous le savez, les coûts reliés à la crise autochtone
et les dépenses additionnelles attribuables à la
détérioration de la conjoncture.
D'abord, le conflit autochtone entraînera des dépenses
additionnelles de l'ordre de 115 000 000 $ en 1990-1991 - on l'a
mentionné d'ailleurs dans la synthèse récente - dont 75
500 000 $ ont été financés à même le mandat
spécial de 79 500 000 $ du 3 octobre 1990. Quant à la
détérioration de la conjoncture économique, elle se
traduit, comme je le mentionnais d'ailleurs à ce moment-là, par
une hausse des dépenses de 187 200 000 $ au titre des programmes de
sécurité du revenu, de l'aide sociale, de développement de
l'emploi et d'intégration au marché du travail, suite
principalement à un niveau de clientèles plus élevé
qu'anticipé.
On note également une hausse du service de la dette d'environ 80
000 000 $, qui est attribua-ble notamment au relèvement des taux
d'intérêt par rapport aux prévisions établies dans
le discours sur le budget. Et, par ailleurs, dans le secteur de la santé
et des services sociaux où des pressions se font de plus en plus fortes,
on anticipe des dépassements de l'ordre de 105 100 000 $. Lorsqu'on
arrive à ces dépassements, on ne peut faire autrement que de
songer à la stagnation des transferts fédéraux qui est
l'une des raisons importantes des difficultés que nous avons justement
dans le financement des programmes de santé, alors que les transferts
fédéraux ne suivent pas, malheureusement. La courbe des
coûts dans les domaines où l'on devait au début partager
50-50 fédéral-provincial, aujourd'hui, de plus en plus, le
fédéral se désengage de ses obligations et nous laisse
faire face à une situation de plus en plus difficile, surtout à
cause du vieillissement de la population et du coût de la nouvelle
technologie médicale.
L'annexe E du discours sur le budget d'avril dernier faisait état
de la nécessité pour le gouvernement de maintenir une situation
financière saine et un régime fiscal compétitif.
Malgré la hausse de l'objectif de dépenses pour ac-
commoder la conjoncture à court terme, le gouvernement entend
maintenir ses objectifs de moyen et long terme à l'égard des
finances publiques. La gestion responsable, dont a fait preuve le gouvernement
au cours des dernières années, nous rend évidemment moins
vulnérables. On se rappellera en 1981-1982 - on peut prendre des
leçons du passé aussi - où le gouvernement s'était
laissé dans une situation beaucoup plus inquiétante. Par
ailleurs, même si le gouvernement est disposé à accommoder
la conjoncture, il ne faudrait pas aller trop loin et trop augmenter les
dépenses dans le seul but de stimuler l'activité
économique. Ce serait aller à rencontre des efforts
d'assainissement des dernières années.
Grâce à cette gestion, le bilan de la situation
financière du gouvernement du Québec indique une réduction
substantielle des besoins financiers nets, nos besoins d'emprunt nets, qui
étaient de 1 740 000 000 $ en 1985-1986 et qui ont été
réduits à 758 000 000 $ en 1989-1990. Du ratio dette-PIB, qui
était de 29,3 % en 1985-1986 à 27,3 % en 1989-1990. La
réduction du taux d'accroissement de la dette a permis de réduire
la part des revenus budgétaires à consacrer au service de la
dette. C'était 14 % en 1985-1986, c'a été réduit
à 13,2 % en 1989-1990. On note aussi une amélioration importante
du solde du compte courant. On se rappellera que - sans vouloir jeter la
pierre, mais il faut bien comprendre - pendant plusieurs années, le
gouvernement antérieur a emprunté à long terme pour payer
des dépenses courantes, ce qu'on a appelé "payer
l'épicerie". Seulement de 1977 à 1982-1983, si je me rappelle
bien, c'était à peu près 12 000 000 000 $ d'emprunts
à long terme pour payer les dépenses courantes. Et nous vivons
encore ce problème-là aujourd'hui. C'est un autre grand
problème que nous avons à vivre à cause de cette politique
qui a été suivie pendant plusieurs années,
particulièrement à la fin des années soixante-dix et au
début des années quatre-vingt alors que, par exemple, en
1985-1986, on empruntait 2 075 000 000 $ pour payer T'épicerie".
Ça, c'était des dettes qu'on remettait aux
générations futures, des dettes qui nous font mal aujourd'hui.
Nous avons réduit ces 2 075 000 000 $ de 1985-1986, à 329 000 000
$, en 1989-1990. (11 h 30)
La réduction du déficit du compte courant nous a ainsi
permis de nous rapprocher de notre objectif de n'emprunter que pour financer
les immobilisations. On avait pris l'habitude de faire supporter une partie
substantielle des dépenses courantes par les générations
futures. Je le répète, en fait, on empruntait pour payer les
dépenses d'épicerie. Autrement dit, on hypothéquait la
maison pour payer les dépenses d'épicerie de la fin de semaine.
Notre gestion responsable a permis de renverser cette tendance, et nous allons
travailler dans le sens de continuer à trouver autant que possible des
façons pour réduire à zéro cette tendance qui est
certainement condamnable. On peut peut-être faire une exception, dans une
année où la conjoncture nous oblige à le faire, mais que
cela se perpétue pendant plusieurs années, c'est
inacceptable.
Un autre point marquant de la gestion de notre gouvernement est la
réduction du déficit. Bien qu'en principe les gouvernements aient
des possibilités d'emprunt énormes, il ne faut pas oublier que le
recours à un niveau de déficit plus élevé implique
un transfert du fardeau fiscal des générations présentes
aux générations futures.
Enfin, et je termine là-dessus, M. le Président, il faut
souligner que, malgré l'amélioration importante des finances
publiques, le Québec accuse encore un retard en ce domaine par rapport
à l'Ontario. Les principaux écarts se situent au chapitre de
l'endettement et du service de la dette qui sont beaucoup plus
élevés qu'en Ontario. Nous avons réduit le fardeau fiscal
par rapport à l'Ontario. Nous avons réduit les impôts par
rapport à l'Ontario, depuis quelques années, mais nous sommes
encore dans une situation vulnérable, moins vulnérable que nos
prédécesseurs au moment de la récession de 1981-1982, mais
nous aurions eu encore besoin d'une couple de bonnes années avant
d'arriver à ce que nous connaissons aujourd'hui, c'est-à-dire
deux trimestres, bientôt trois trimestres négatifs; c'est un peu
ce qui fait la définition d'une récession. Nous espérons
bien que ce sera de courte durée et que nous pourrons reprendre cette
politique de réduction du déficit, de réduction du fardeau
fiscal, pour nous rendre de plus en plus compétitifs et essayer de nous
éloigner le plus possible de ce fardeau dont nous avons
hérité, qui est toujours là et qui nous pèse
très fort aujourd'hui.
Et si j'ai un message à faire à ceux qui nous
écoutent, parmi les jeunes, n'oublions jamais que, lorsque l'on fait des
demandes à l'État et que l'Etat n'a pas les moyens d'y
répondre au moment où ces demandes sont faites, et que
l'État accepte d'emprunter à long terme pour répondre
à ces demandes, il y a quelqu'un qui va payer quelque part; et c'est
simplement remettre à des générations futures un fardeau
qu'on ne veut pas assumer collectivement aujourd'hui. Deux et deux font quatre,
M. le Président. Je termine sur ces paroles, étant donné
que vous m'indiquez que mon temps est écoulé.
Le Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre des
Finances. Je reconnais maintenant M. le député de Labelle.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: Merci, M. le Président. Alors, nous
entendons le même discours, encore une fois, fait depuis cinq ans, avec
un tableau
sombre sur ce qui a été fait de 1976 à 1985 et,
évidemment, des fleurs pour ce qui se fait depuis ce temps-là.
Mais il me semble que le discours est usé, très usé,
d'autant plus qu'il est à sens unique. On se rappellera que, lorsque
nous avions pris la direction du gouvernement, en 1976-1977, le taux
d'augmentation des dépenses, de 1970 à 1976, avait
été de 18 % par année. C'est ça, la
réalité, et nous l'avons réduit, en tout cas pour la
période de 1981 à 1986, à 8 %. Donc, il y avait eu
déjà une augmentation sensible et toute la politique qu'il vient
d'exposer a commencé à être appliquée par notre
gouvernement à partir de 1977. Alors, il faudrait que le ministre,
à un moment donné, reconnaisse ce fait.
Par ailleurs, on ne peut pas ne pas souligner comment ils ont
tripoté dans la comptabilité, camouflé des choses par la
comptabilité en modifiant les procédures et les méthodes
comptables. Il ne faut jamais oublier ça. Quand le ministre nous parle
sans arrêt de l'année 1985-1986, c'est leurs états
financiers qu'ils ont dressés en arrivant sur le budget que nous avions
fait en 1985. Alors là, si vous voulez, c'est un peu ce qu'on en disait
hier, c'étaient les pédophiles dans la garderie, au moment
où ils ont pris le pouvoir. Ils ont modifié, tripoté les
méthodes comptables. Alors, sur ce plan-là, toute comparaison
à l'année 1985-1986 sur des états financiers
dressés par ce gouvernement alors même que le Vérificateur
du gouvernement a émis des réserves sur ce plan-là, je
pense qu'il faut prendre ça avec un grain de sel.
Le ministre, en faisant un tel discours - je le rappelle - ne fait que
regarder dans son rétroviseur. Et je crois que la population du
Québec s'attend à autre chose. Ce qui l'intéresse, c'est
le futur, c'est l'avenir, ce qui va arriver à partir de maintenant? Je
pense que le ministre aurait dû nous renseigner davantage sur ce qu'il
entendait faire sur des procès d'intention, sur de mauvais procès
qu'il dresse à partir de mauvaises prémisses, quant au
passé. Je pense que ce qui intéresse le gens actuellement, c'est
le futur. Or, qu'est-ce que nous avons? Nous avons un déficit qui va
augmenter de 230 000 000 $. C'est ça qu'il vient de nous annoncer cet
automne. En même temps qu'il fait son discours sur l'avenir, il pourrait
quand même constater ce qui vient de se passer, il a augmenté son
déficit de 230 000 000 $.
Il s'agit d'un dépassement de dépenses de 200 000 000 $ et
d'un manque à gagner, au chapitre des revenus, de 30 000 000 $. Tout ce
que ça indique, c'est qu'il y a un problème d'équilibre,
parce que, au-delà de ce qu'il vient de nous dire, d'une augmentation de
déficit de 230 000 000 $, il faut se rappeler que, cette année,
il a augmenté les taxes de 1 014 000 000 $. Et je vais en faire la liste
pour qu'on soit bien conscients que non seulement il n'a pas maintenu la
situation là où elle était, mais il est allé piger
dans les poches des con- tribuables, directement ou indirectement, une somme de
1 014 000 000 $. Je les rappelle: lui-même, au gouvernement du
Québec, il a imposé des surtaxes sur les boissons alcooliques, y
compris sur la bière pour 103 000 000 $. Il a mis une surtaxe sur les
tabacs pour 133 000 000 $. Il a haussé les impôts des entreprises:
contribution des employeurs au fonds des services de santé, taxe sur le
capital, impôt sur le revenu, pour 104 000 000 $. Sa réforme des
taxes à la consommation et de l'impôt des entreprises, ce qu'on
appelle la TPS québécoise, il va chercher 77 000 000 $
additionnels cette année. Lui-même, donc, quand on fait l'addition
de toutes ces sommes, est allé chercher directement dans les poches des
contribuables 417 000 000 $. Mais ce n'est pas fini parce que, par des
organismes interposés, il augmente le fardeau des contribuables. Par
exemple, il a augmenté les frais de scolarité pour les
étudiants aux universités: 52 000 000 $ que ça coûte
aux étudiants cette année; des gens qui n'ont rien, 52 000 000 $
de plus pour ces étudiants. HydroQuébec va augmenter ses tarifs
au-delà du taux de l'inflation, de 133 000 000 $. Le gouvernement s'est
désengagé à l'égard du financement des commissions
scolaires et les commissions scolaires, en contrepartie, ont dû augmenter
l'impôt foncier scolaire. Ça représente, pour le
gouvernement, 320 000 000 $. Et, enfin, la Société de l'assurance
automobile du Québec, suite à la ponction du gouvernement dans
son fonds de stabilisation et le fait aussi qu'elle a augmenté les
permis de conduire, les immatriculations de 92 000 000 $ de plus; sans compter
la ponction, 92 000 000 $! Alors, nous avons là des sommes
considérables et donc, indirectement, le gouvernement est allé
chercher dans les goussets des contribuables 597 000 000 $. C'est ça la
réalité présente. Le ministre n'en a pas parlé du
tout, de son augmentation de taxes cette année. (11 h 40)
Le rendement de l'impôt sur le revenu, nous l'avons établi
lors du discours sur le budget, a été augmenté de 1 441
000 000 $. C'est une augmentation considérable pour équilibrer
ses budgets. Ces augmentations de taxes se sont produites cette année,
mais, l'an prochain, les mêmes taxes que je viens de vous citer vont
augmenter. Ça va continuer l'an prochain, ces augmentations, mais le
rendement va être beaucoup plus fort l'an prochain. D'abord, ça va
s'appliquer dans tous les cas sur une année complète et ce
rendement va être de 1 531 000 000 $; 742 000 000 $ que lui-même va
prendre directement dans les poches des contribuables et par les organismes
interposés, comme je le disais tout à l'heure, 789 000 000 $, au
total 1 531 000 000 $ d'augmentation par rapport à ce que
c'était.
Il y a un autre facteur qui va entrer en ligne de compte. C'est qu'il a
annoncé que le gouvernement se désengagerait du financement
et
du fonctionnement du transport en commun: une somme additionnelle de 293
000 000 $ qu'il entend négocier avec les communautés urbaines ou
les grandes villes qui ont des systèmes de transport en commun; donc,
total de toutes ces taxes par rapport à la situation antérieure,
1 824 000 000 $. Et là-dessus, je vais simplement revenir sur un des
facteurs importants qu'il a imposé, au cours de l'été, par
sa déclaration ministérielle du 30 août. Il va aller
chercher dans les poches des contribuables, en 1991, 324 000 000 $ de plus dans
le budget 1991-1992 au titre de la TPS québécoise, la taxe de
vente québécoise qui a été harmonisée
à celle du fédéral, 324 000 000 $.
Bref, résumons, 1 824 000 000 $ de taxes additionnelles pour l'an
prochain, année financière 1991-1992. M. le Président,
cela indique qu'il y a un problème majeur, le ministre des Finances qui
vient de se vanter qu'il équilibrait son budget, en fait, ne
l'équilibre pas. Il va augmenter son déficit de 230 000 000 $
pour dépasser les 2 000 000 000 $ pratiquement, et cela, tout en
augmentant les taxes de 1 014 000 000 $ cette année, de 1 824 000 000 $
l'an prochain, augmentation considérable surtout en période de
récession économique. C'est ça la gestion du gouvernement
actuel. Il nous dépose ses crédits additionnels six mois
après le début de l'année. Qu'en sera-t-il exactement en
termes de résultats réels? Nous avons hâte de les
connaître et nous espérons que nous les connaîtrons avant le
1er décembre de l'an prochain parce qu'en passant, le
Vérificateur a bien indiqué que les parlementaires n'avaient pas
les documents suffisants pour être éclairés de façon
correcte pour discuter de la politique financière et des
décisions financières du gouvernement.
M. le Président, tout cela, ces augmentations de taxes, cette
augmentation du déficit, se passe dans une situation économique
difficile. Et il faudrait simplement relever quelques grands indicateurs qui
ont été rendus publics tout récemment. Par exemple, les
ventes au détail ont baissé de 6 % durant le mois de septembre.
C'est une diminution considérable des ventes au détail, qui
indique que l'activité économique baisse. Ça, c'est un
indicateur majeur. Le taux de chômage dans le mois de novembre a
continué d'augmenter, il est passé de 11,1 % à 11,4 %. Il
s'est perdu 39 000 emplois par rapport à l'an passé, mais il
s'est perdu 87 000 emplois depuis le mois de juillet. C'étaient les
manchettes des journaux de cette semaine ou de la semaine dernière. Ce
sont les données de Statistique Canada dont on parle, donc, des
indications que l'économie est en récession maintenant - on
l'admet - et je pense que nous avons là des éléments
très importants auxquels le ministre des Finances devrait être
sensible. Alors, lorsqu'il se vante de sa bonne gestion, il faudrait qu'il soit
quand même un peu plus au fait de la véritable situation.
Peut-être qu'il ne prend plus le temps de lire les journaux.
La question qui se pose actuellement, c'est celle de la durée de
cette situation économique. C'est une question, évidemment, que
tout le monde se pose, que les experts se posent et, finalement, à
laquelle il va falloir donner des réponses maintenant.
Je voudrais remettre en lumière, par exemple, cet editorial
d'Alain Dubuc, tout récent, du lundi 10 décembre, donc, d'hier,
pour simplement faire ce constat sur la situation économique actuelle.
"Pendant des mois, même si la récession affectait
déjà des secteurs comme l'immobilier et les commerces, elle
n'était, pour la plupart des Québécois, qu'une
épée de Damoclès, inquiétante, mais encore
abstraite. Maintenant, la récession frappe de plein fouet. Les
données de Statistique Canada montrent qu'au seul mois de .novembre le
Québec a perdu 39 000 emplois, après en avoir perdu 28 000 en
octobre. Ces chiffres n'indiquent pas seulement que la récession est
visible; ils montrent aussi que le processus s'accélère.
Désormais, la gravité de la récession dépendra de
sa durée. S'agit-il d'un mauvais moment à passer, ou plutôt
du début d'une longue période de détérioration?
Plusieurs facteurs commencent à suggérer que cette
récession pourrait être longue, et donc dure. Au mois de novembre,
on a assisté à un virage important sur le marché du
travail. D'une part, les pertes d'emploi au Québec, 87 000 depuis
juillet, dernier mois où l'emploi augmentait, ont atteint une masse
critique. Ensuite, pour la première fois depuis le début de la
récession, le niveau de l'emploi est inférieur à ce qu'il
était il y a un an." Donc, un constat très net de la
gravité de la situation.
Le même éditorialiste continue en disant qu'il y a, en
effet, lieu de s'inquiéter parce que trois facteurs, qui d'habitude
jouent un rôle essentiel dans la relance, ne sont pas au rendez-vous. Le
premier d'entre eux, ce sont les taux d'intérêt. Ils sont encore
très élevés. Au fond, nous sommes dans une période
de récession limitée pratiquement au Canada. Les
États-Unis sont en période de ralentissement économique,
mais pas en récession et, nous, nous sommes en récession au
Canada. C'est une récession faite pratiquement par le Canada
lui-même. Taux d'intérêt, premier élément. Ils
sont encore très élevés. Depuis longtemps, nous disons que
ces taux d'intérêt sont trop élevés, encore une
fois, dans le contexte où l'Ontario a été lui-même
une cause de l'augmentation de l'inflation et, donc, du fait que la Banque du
Canada a maintenu ses taux d'intérêt élevés au
détriment des intérêts du Québec.
Un autre élément de relance qui fait défaut, c'est
l'intervention massive de l'État qui peut injecter des sommes pour
favoriser l'activité économique. Avant d'y arriver, parce que j'y
reviendrai, le troisième facteur, c'est la situation internationale.
Disons qu'à ce stade-ci, tant que nous ne sommes pas souverains, nous
avons moins de prise sur les taux d'intérêt, moins de
prise aussi sur la situation internationale. Nous la subissons, mais il
y a un élément sur lequel nous reviendrons, c'est l'intervention
de l'État, qui devrait être l'objet de nos réflexions.
Avant d'y arriver, je vais simplement souligner sa conclusion. "La
situation est donc sombre et inquiétante. Elle l'est d'autant plus parce
que les deux gouvernements y réagissent avec un mutisme troublant.
Même si le temps des fêtes approche, on ne s'attend pas à ce
que l'État joue au Père Noël, mais tout simplement à
ce qu'il prenne ses responsabilités." (11 h 50)
Alors, ses responsabilités. Est-ce que l'État fait quelque
chose dans la situation actuelle? Je comprends que le ministre parle des
déficits antérieurs, mais, au fond, ils ont été
importants lorsque la récession s'est accélérée,
1981-1982. Aujourd'hui, nous faisons face à une situation qui s'en
rapproche. Je ne dis pas qu'elle est aussi grave, mais elle s'en rapproche et
nous n'avons aucune indication, présentement, de la part du ministre des
Finances qu'il fera quelque chose.
Sa collègue, la vice-première ministre, a annoncé
la semaine dernière en réponse à une question de
l'Opposition que le gouvernement pourrait intervenir. Cependant, comme le
rapportent les journaux, la vice-première ministre a refusé
d'élaborer sur le contenu et l'ampleur de ces mesures devant
l'Assemblée nationale. C'est le ministre des Finances, a-t-elle dit, qui
en fera bientôt l'annonce, à une question qu'avait posée M.
Parizeau, le chef de l'Opposition officielle. Et nous réclamons toujours
ces mesures urgentes et de plus en plus urgentes pour protéger
l'économie.
M. le ministre, je pense que nous attendons des réponses sur
cette question. Nous attendons de savoir ce que vous allez faire, parce que
nous sommes en période de récession économique. Les
faillites s'accélèrent au Québec. Il y en a de plus en
plus, malheureusement. Et parfois il suffit d'un coup de pouce qui coûte
peu au gouvernement pour maintenir ces entreprises en vie. Nous attendons votre
plan de relance et j'espère que vous allez nous en parler.
M. le Président, un autre facteur qu'a abordé mon
collègue, excusez, pas mon collègue mais le ministre des
Finances, c'est l'attitude du gouvernement fédéral. C'est un fait
que le gouvernement fédéral a stabilisé ses paiements, ses
versements au gouvernement du Québec. Et les perspectives ne sont
guère reluisantes par rapport à ce qu'il pourrait faire. Je
voudrais que le ministre nous renseigne et nous confirme ou infirme ce que son
collègue, le ministre du Revenu, nous a déclaré en
commission parlementaire vendredi dernier, à savoir qu'il avait mis la
main sur un article du Vancouver Sun qui avait, lui même, mis la
main sur un document du fédéral à l'effet que le
fédéral s'apprêtait à couper, à faire des
coupures de l'ordre de 700 000 000 $ à 800 000 000 $ dans les paiements
de transferts au Québec.
Je voudrais qu'on nous informe, qu'on infirme ou qu'on confirme s'il
s'agit vraiment du Québec ou s'il s'agit du Canada. Si ces
renseignements sont exacts, je voudrais simplement résumer et dire que
le gouvernement lui-même avait l'an dernier évalué sa
propre impasse à 700 000 000 $ par année. Et je suppose bien que
la situation du gouvernement fédéral devrait le préoccuper
au plus haut point, parce que lorsqu'il parle du déficit du
Québec il faudrait se rendre compte que, du côté du
gouvernement fédéral, la part du Québec dans
l'augmentation du déficit fédéral accumulé est de
l'ordre de 8 000 000 000 $ cette année.
Si le gouvernement fédéral fait présentement un
déficit de 32 000 000 000 $, 30 000 000 000 $ ou 32 000 000 000 $, nous
verrons bien - et je pense que ce ne sera pas moins que cela - le Québec
en assume environ le quart. Et cela veut dire que nous, nous accumulons 8 000
000 000 $ de déficit par année sur les épaules des
Québécois. Ça, c'est le prix du système
fédéral, le coût du fédéralisme. Et
j'aimerais ça que le ministre nous en parle un peu et nous dise comment
lui, qui a conseillé aux Québécois de voter non au
référendum de 1980, comment lui peut concilier son attitude quant
à la situation actuelle du gouvernement fédéral, parce que
ça veut dire qu'il accepte que les Québécois assument 8
000 000 000 $ de déficit par année, par-dessus le déficit
du gouvernement du Québec.
Donc, nous en sommes à nous accumuler 10 000 000 000 $ de dette
par année. c'est ça, la réalité. c'est ça,
la réalité, et lorsqu'il parle du paiement des
intérêts sur la dette du québec, 11 ne faut pas oublier le
paiement des intérêts sur la dette fédérale qui sont
payés par les mêmes québécois. je voudrais qu'il
nous en parle, parce qu'il a des convictions, paraît-il, depuis un
certain temps. ça fait 35 ans qu'il est député; il a
toujours été fédéraliste, et je lui demande s'il
l'est toujours autant maintenant et s'il entend le demeurer.
Le Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Labelle. M. le ministre des Finances.
M. Gérard D. Levesque
M. Levesque: Alors, M. le Président, si on revient sur
tout ce qu'a dit le député de Labelle, je suis porté
à lui retourner le compliment qu'il a sûrement un discours qu'on
peut qualifier d'usé, étant donné que ce n'est pas la
première fois qu'il nous répète ces choses-là
à l'Assemblée nationale, en particulier lorsqu'il parle des
conventions comptables. Je pense qu'on a parlé de ça pendant des
années et tout ce que nous avons fait, c'était de donner suite
à des recom-
mandations du Vérificateur général relativement
à la façon de comptabiliser, en particulier, les résultats
financiers des sociétés d'État. Aujourd'hui, nous
continuons de le faire, même si les sociétés d'État,
comme le reste des entreprises commerciales, doivent, évidemment,
écoper de la conjoncture économique. Nous faisons en sorte que
nous traduisions exactement dans nos bilans, dans nos équilibres, la
situation réelle, non pas seulement du gouvernement du Québec,
mais de ses institutions, de ses sociétés d'État, de ses
organismes. Je pense qu'en ce faisant nous avons donné suite à
une demande légitime du Vérificateur général,
demande qui avait été rejetée par nos
prédécesseurs, malheureusement.
Cela étant dit, lorsque j'ai parlé de l'héritage
que nous ont laissé nos précédesseurs et que
j'évoquais les emprunts massifs qu'a faits, à long terme,
l'ancien gouvernement pour payer les dépenses courantes, qu'on a
appelées les dépenses d'épicerie, le député
de Labelle me rétorque qu'il faudrait regarder ce qui s'est passé
avant qu'ils arrivent, dans le début des années soixante-dix
où il y avait eu une progression importante des dépenses. Mais je
lui rappellerai tout simplement que ceci n'infirme en rien ce que je dis parce
que, lorsque nous sommes passés par cette période, nous avions un
solde positif du compte courant. Il y avait un surplus au compte courant. Il
n'y avait pas d'emprunt; même si on augmentait les dépenses, on ne
les augmentait pas au point d'aller emprunter pour payer les dépenses
courantes.
Ce que je reproche à l'ancien gouvernement, c'est ce qui est
arrivé par la suite. Si on regarde en 1970-1971, le solde du compte
courant était à 302 000 000 $ - positif! - et ainsi de suite, 305
000 000 $, 353 000 000 $, etc. Ce n'est qu'à l'arrivée du
gouvernement précédent que nous commençons à avoir
un solde négatif: moins 323 000 000 $ en 1976-1977 et, par la suite,
1978-1979, moins 551 000 000 $, 1979-1980, moins 1 422 000 000 $, 1980-1981,
moins 2 500 000 000 $, etc. Ça a été continuellement
l'histoire du gouvernement qui nous a précédés et c'est
pourquoi je dis que nous héritons, aujourd'hui, de ces emprunts a long
terme pour payer les dépenses courantes. Ça paraissait bien dans
le temps. On disait oui ici, on disait oui à ça, on
préparait le référendum. Ça allait bien, sauf
qu'aujourd'hui nous avons cette dette qui est toujours là et qui
pèse très lourd, particulièrement avec les taux
d'intérêt que nous connaissons.
Je voudrais aussi ajouter, lorsque le député de Labelle
fait la sorte de gymnastique qu'il a faite en disant: Bien, il y a des taxes
qui augmentent, les revenus augmentent. D'abord, il mêle les taxes avec
ce qui est courant dans l'industrie. Lorsqu'on parle, par exemple,
d'Hy-dro-Québec, ça ne donne pas un sou de dividende, absolument
rien au gouvernement actuel, mais Hydro fait comme les compagnies
d'utilité publique dans d'autres domaines, dans d'autres provinces et
dans d'autres pays, il y a des augmentations. Que voulez-vous? Elle couvre ses
coûts. Cette société couvre ses coûts. Alors,
ça n'a rien à voir avec les revenus du gouvernement. Pourquoi
faire cette addition? Il le sait lui-même, étant donné sa
profession, que ce n'est pas correct. Il fait la même chose avec les
frais de scolarité. Les frais de scolarité vont aux
universités, ils ne viennent pas au gouvernement du Québec. Il ne
tient pas compte, évidemment, des baisses aussi. L'indexation, c'est une
baisse d'impôt. On n'en parle pas. On ne parle pas des allocations
à la naissance, de la formation de la main-d'oeuvre, des prêts et
bourses qui ont été réajustés, on ne parle pas de
ces choses-là. Quand on fait un tableau, il faut mettre d'un
côté ce qu'il y a de positif et, de l'autre côté, ce
qu'il y a de négatif. (12 heures)
Ce qui me frappe davantage, c'est lorsqu'il prend les chiffres bruts. Il
dit: Voici ce que vous avez comme revenus cette année. Voici ce que vous
vous attendez d'avoir comme revenus l'an prochain. Si on faisait la même
chose, qu'est-ce qu'on verrait? Alors que les budgets dans les années
quatre-vingt étaient de l'ordre de 10 000 000 000 $ à 15 000 000
000 $, on avait à ce moment-là dans les revenus des hausses...
Prenez, par exemple, 1980-1981, les revenus autonomes du gouvernement
étaient de 10 560 000 000 $, l'année suivante, non plus 10 500
000 000 $, mais 13 237 000 000 $. alors qu'on avait des budgets deux fois
moindres dans ce temps-là, on augmentait les revenus du gouvernement
d'une somme aussi importante que ce n'est rien aujourd'hui comparativement aux
augmentations de ce temps-là. mais ce n'est pas une façon de
discuter parce que, en même temps, 11 faut regarder les services qu'il y
a d'autre part, les coûts de l'administration, il faut tenir compte des
conventions collectives qui sont un élément très important
dans les finances publiques du québec.
De toute façon, je passe rapidement, M. le Président, et
je pense, si on veut jeter un coup d'oeil sur d'autres facteurs et toucher
peut-être à autre chose qu'à ces éléments qui
ont été abordés par le député de Labelle,
surtout lorsqu'il parle d'une augmentation de revenus et - ça, c'est
suave - qu'il ajoute: Surtout dans une conjoncture comme celle que nous
traversons... Mais est-ce qu'il se rappelle ce qui est arrivé? Je n'aime
pas le voir finir, parce qu'on me demande de regarder vers l'avenir, je vais le
regarder avec plaisir, mais est-ce qu'on se rappelle? J'étais ici, je me
rappelle très bien. Avant l'élection de 1981, il y a eu un
budget; après l'élection de 1981, ce budget-là a
été mis en pièces après que le gouvernement
antérieur se fut fait réélire. Là, il est
arrivé tout d'un coup après l'élection; on s'est
aperçu que ça n'allait pas le budget et on a fait une ponction
fiscale
de 1 300 000 000 $. Est-ce qu'il se rappelle ça? Sans oublier ce
qu'il a fait vis-à-vis des employés du secteur public: une coupe
de 20 %. Est-ce qu'il se rappelle ça? Je ne veux pas insister.
Regardons un peu: dans le budget 1990-1991 on prévoyait une
conjoncture particulièrement difficile en 1990. Vous savez, ce n'est pas
quelque chose qui était imprévu; au contraire, on
prévoyait alors que la croissance de production devait être
réduite à 1,3 %, la création d'emplois limitée
à 30 000, le taux de chômage devait s'établir à 9,9
% en moyenne. C'est ça qu'on a dit au budget du printemps dernier. Notre
prévision était globalement la même que celle qui se
dégageait d'ailleurs des analyses du secteur privé, lesquelles
prévoyaient pour la plupart que la croissance se poursuivrait cette
année, même si elle devait être inférieure au
potentiel d'expansion de notre économie. Dans l'ensemble, on s'attendait
en effet à ce que le dynamisme des investissements non
résidentiels, privés et publics, atténue le
fléchissement de la demande des ménages et de la construction
domiciliaire alors prévue.
Qu'est-ce qui est arrivé? La demande des ménages a
continué à ralentir. Au cours des neuf premiers mois de 1990, les
ventes au détail n'ont pas progressé. La construction
d'habitations, bien qu'un peu plus forte que prévue - on avait
prévu au budget 43 700 mises en chantier - ça affiche une
diminution de 49 000 en 1989 à quelque 47 000 au cours des 10 premiers
mois de l'année, mais ça, c'est supérieur à nos
prévisions. On avait prévu 43 700; dans les 10 premiers mois,
nous sommes à 47 000. L'investissement non résidentiel a, comme
attendu, contribué à atténuer le ralentissement avec une
hausse de 11,6 %, selon Statistique Canada. Quant au marché du travail,
il a évolué tel qu'anticipé au début de
l'année avec une création d'emplois, pas une perte d'emplois
comme dans le temps qu'on mentionnait tout à l'heure de 149 000 emplois,
en 1981-1982, mais une création d'emplois de 30 000, de janvier à
novembre, et un taux de chômage moyen de 9,9 %. Et, évidemment,
les politiques macro-économiques canadiennes étaient là.
C'était un ralentissement voulu. Depuis deux ans, les politiques
macro-économiques canadiennes sont délibérément
restrictives, ni le ministre des Finances fédéral ni le
gouverneur de la Banque du Canada ne s'en cachent, d'ailleurs. Dans un discours
récent, M. Wilson déclarait encore: II fallait que la demande
intérieure ralentisse. C'est pourquoi nous avons défini et suivi
une voie clairement tracée, celle d'une politique économique et
financière afin de résorber l'inflation. On ne doit donc pas se
surprendre que le Canada soit actuellement le premier grand pays
industrialisé à être en récession.
On pourrait continuer à faire une analyse de ce qui se passe, si
on pense au dollar canadien, si on pense aux hauts taux d'intérêt.
Ça fait longtemps que notre premier ministre demande au gouvernement
fédéral, demande à la Banque du Canada de réduire
les taux d'intérêt, leur dit, que l'inflation n'est pas un mal
québécois et qu'on ne devrait pas lui servir un tel
remède. Cependant, je pense qu'il y a des facteurs intéressants
qu'on peut regarder. Comme disait un ancien premier ministre, M. Daniel
Johnson: Quand on se compare, on se désole - non, quand on se regarde,
on se désole et, quand on se compare, on se console, quelque chose comme
ça. regardons un instant ce qui se passe du côté de
québec-ontario. dans l'emploi, en 1990, nous avons une augmentation de
1,1 %; en ontario, une diminution de 0,1 %. dans les ventes au détail,
nous avons une diminution de 0,1 %; en ontario, une diminution de 0,5 %. dans
l'investissement non résidentiel, augmentation au québec de 11,6
%; ontario, 6,5 %. dans la fabrication, au québec, augmentation de 14,3
%; en ontario, réduction de 3,1 %. les mises en chantier urbaines, une
diminution de 0,5 %, un demi de 1 %, au québec; une diminution de 29,1 %
en ontario. les livraisons manufacturières, une diminution de 2,9 % au
québec, mais une diminution de 4 % en ontario. les faillites,
augmentation au québec de 23,7 %; en ontario, 72,6 % d'augmentation. il
ne faut pas se réjouir de ce qui arrive chez nos voisins, mais, au
moins, lorsqu'on se compare, on a l'impression que par notre politique nous
nous sommes préparés à cette
éventualité-là.
Même durant le dernier budget, on avait déjà - on me
demande: Qu'est-ce que vous allez faire pour l'avenir? - on avait
déjà dans le budget du printemps dernier des mesures très
concrètes. Par exemple, rappelons-nous brièvement
l'accélération des investissements du secteur public. Nous avons
déjà décidé, dès le printemps dernier,
d'augmenter les investissements dans l'éducation, l'enseignement
supérieur, la santé et les services sociaux, les
équipements culturels, toutes des immobilisations, la construction, les
équipements dont nous avons accéléré
l'arrivée, entraînant ainsi une création de 5000 emplois
dans la construction et les industries connexes. Nous avons également
prévu une aide aux entreprises en difficulté de 45 000 000 $.
Nous avons apporté un soutien à l'économie
régionale: le plan quinquennal des Pêches de 50 000 000 $, les
programmes d'emplois saisonniers en Gaspésie et aux
Îles-de-la-Madeleine, 6 000 000 $ et, ensuite, un autre 6 000 000 $, tout
récemment, région de Chibougamau ou Chapais, une aide de 4 000
000 $ pour le démarrage de projets miniers, la hausse des crédits
de plusieurs programmes, l'aménagement des forêts publiques et
privées, la promotion touristique et d'autres initiatives
gouvernementales qui aident présentement à avoir les indicateurs
que nous venons de toucher. (12 h 10)
Hydro-Québec, dont les investissements sont en hausse d'environ 1
000 000 000 $ en 1990, par rapport à 1989. Les investissements
d'Hydro-Québec soutiendront plus de 29 000 emplois, cette année.
Les alumineries. Vous savez que ça a été la politique de
notre premier ministre de faire en sorte de travailler, de toujours avoir
à l'esprit le développement de nos ressources
hydroélectriques. Là, nous avons des résultats concrets: 1
360 000 000 $, en 1990, 50 % de plus qu'en 1989, grâce aux initiatives du
gouvernement.
Alors, voilà des choses concrètes. Mme la
vice-première ministre a annoncé, comme le disait le
député de Labelle tout à l'heure, qu'il est possible que
nous ayons des choses à annoncer. Certainement! Nous travaillons encore
là-dessus. Mais il ne faut pas oublier une chose, on ne veut pas arriver
au même moment que l'ancien gouvernement. On se rappelle le grand plan de
relance. C'était quand, le grand plan de relance de l'ancien
gouvernement? C'était à l'automne 1983, alors que la reprise
avait commencé au printemps 1983. C'était un peu en retard pour
arriver avec des mesures, pour nous donner des leçons. Il faudrait faire
attention à ça. Nous avons déjà pris des mesures
avant même d'avoir le ralentissement; nous les avons prises le printemps
dernier. Au tout début des premiers signes que nous avions, nous avons
pris immédiatement des mesures que je viens d'énumé-rer.
Et nous avons présentement, sur notre table de travail, une autre
série de mesures qui pourront être annoncées au moment
opportun.
Le député de Labelle m'a demandé si j'étais
au courant d'un article du Vancouver Sun. Non, je ne suis pas au
courant. Je peux aller aux renseignements. Je n'ai pas eu l'occasion de lire
cet article. Et, quant à mes vues constitutionnelles, je dois vous dire,
M. le Président, que nous avons mis sur pied une commission
parlementaire très active à laquelle participe d'ailleurs, je
pense, activement le député de Labelle. Je suis sûr que
cette commission nous apportera un rapport, éventuellement. Je suis de
très près, comme tous mes concitoyens, l'évolution des
choses et je suis à l'écoute. Soyez assurés que cette
question-là me préoccupe grandement et que je n'ai pas
l'intention de m'en désintéresser, au contraire.
Le Président (M. Bissonnet): Alors, M. le
député de Labelle, la parole est à vous.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: M. le Président, pour 18 minutes -
comment dirais-je - de transport, on a eu les yeux sur le rétroviseur.
Il a parlé à peu près deux minutes des mesures qu'il
entendait prendre par rapport à la situation actuelle. C'est toujours ce
qui est un peu désolant dans les échanges qu'on a avec le
ministre des Finances, il parle des choses passées il y a 15 ans, il y a
10 ans; mais ce qui intéresse les Québécois, c'est ce qui
va se passer. Et là, je pense qu'il n'en parle pas beaucoup, de ces
mesures. Ce qu'on peut constater, à l'écouter, c'est qu'on l'a au
moins ramené à une chose: il a commencé à comparer
avec l'Ontario. Il a dit: Ce n'est pas si pire parce que c'est pire ailleurs.
C'est à peu près ce qu'il dit, c'est à peu près ce
qu'est sa réponse. Il cite des statistiques sur l'Ontario qui aurait
dégringolé, pour une fois, un peu plus vite dans le dernier mois
et c'est sa bouée de sauvetage par rapport aux questions que je lui
pose.
C'est là que je trouve que c'est désolant parce que la
réalité, c'est que c'est pire que ce qu'il prévoyait au
printemps. Il prévoyait 9,9 % de taux de chômage, c'est 11,4 %;
1,5 % de plus! L'année n'est pas finie, en plus. Alors ça,
ça veut dire 45 000, 50 000 chômeurs de plus au Québec que
ce qu'il prévoyait. C'est grave. Moi, je crois que c'est grave.
Ces mesures, il me semble qu'elles apparaissent microscopiques
comparativement aux taxes qu'il a imposées aux Québécois.
Il essaie de faire des arguties autour du fait que ce n'est pas lui qui les
impose, ce sont les commissions scolaires. En réalité, on sait
que les subventions aux commissions scolaires n'ont pas augmenté,
même pas du rythme de l'inflation, et, donc, qu'elles ont dû
compenser par une augmentation de l'impôt foncier scolaire; c'est
évident, tous les Québécois le savent. Son
problème, c'est qu'il essaie de se justifier, mais il faudrait qu'il se
mette un peu dans la peau des Québécois qui paient ces taxes.
Eux, ils savent qu'ils paient ces taxes.
Quand il a parlé d'Hydro-Québec, ce que nous avons
comptabilisé, c'est l'excédent des augmentations
d'Hydro-Québec au-dessus de l'inflation. Donc, les augmentations sont
beaucoup plus grandes que ce que j'en ai dit. Ce que j'ai mis dans le total,
c'est seulement ce qu'il y a, ce qui dépasse l'inflation. Donc, il me
semble que nous avons été de bon compte, nous avons ajouté
133 000 000 $. Mais les augmentations d'Hydro-Québec sont beaucoup plus
grandes que ça, parce que nous avons soustrait l'inflation.
La question que je me pose présentement, c'est celle des mesures
qu'entend prendre le gouvernement, parce qu'il y a deux signaux dans le
paysage. Il y a ce que dit ou ce qu'a déclaré la
vice-première ministre à l'effet qu'il y aurait des mesures
d'annoncées. Le ministre dit: En temps opportun. Moi, la question que je
lui pose: Sera-ce avant Noël? Parce que c'est urgent de les prendre.
Est-ce que ce sera avant Noël?
Ça, c'est un signal et j'y reviendrai tout à l'heure. Mais
il y en a un autre qui est plus préoccupant, qui est celui qu'ils
veulent encore augmenter les taxes, qu'ils veulent encore se décharger
de leur fardeau de façon à présenter une certaine image du
déficit pour se péter les
bretelles, mais qui fait que, dans le fond des choses, les
Québécois vont payer davantage.
L'un des indices de ce deuxième volet de question, c'est par
exemple la table Québec-municipalités qui va se tenir le 14
décembre prochain. Il s'est tenu une première réunion
à la fin du mois d'octobre, je pense le 25 octobre, quelque part par
là. Peu de choses ont transpiré, sauf que les élus
municipaux qui ont émis quelques commentaires sur cette question ont
été plutôt avares et ont dit qu'ils n'étaient pas
très optimistes par rapport au futur. Dans le discours du budget,
dernière page d'un volume quand même assez épais - mais il
faut aller à la dernière page ? le gouvernement du
Québec ou le ministre des Finances avait indiqué que le fardeau
de la taxation locale était de i 286 000 000 $ de moins ici, au
québec, et tout le monde a compris que le gouvernement s'apprêtait
à remettre ça, ce 1 286 000 000 $, sur le dos des
municipalités du québec et des commissions scolaires; enfin,
difficile à savoir! la réalité c'est que le gouvernement
du québec s'apprête à remettre aux instances locales:
municipalités, commissions scolaires, toute espèce de transport
en commun, un fardeau énorme. il s'apprête à leur remettre
les routes sur le dos; il s'apprête à leur remettre des
dépenses d'habitation sur le dos; il s'apprête à leur
remettre au complet le coût du fonctionnement de transport en commun et
là il va dire qu'il n'a pas augmenté les taxes lui-même,
mais il aura ouvert des champs de taxation considérables aux
municipalités pour compenser pour le transport en commun, pour compenser
pour les routes. là, je crois qu'encore une fois ils vont faire des
discours sur le développement régional mais ils vont aller
vraiment toucher les petites municipalités au québec et toutes
les municipalités régionales au québec. on peut s'attendre
à une avalanche de taxes de cet ordre.
Bref, le gouvernement s'apprête à refiler à toutes
les instances politiques locales qui existent dans le paysage des fardeaux
considérables. ii s'apprête à faire payer par de la
tarification des sommes énormes aux contribuables. et il va dire, encore
une fois, que son déficit n'a pas augmenté, sauf que les taxes
auront augmenté. il va encore une fois toucher aux permis de conduire,
c'est une des hypothèses - paraît-il -qui est envisagée. il
veut augmenter les taxes foncières pour le non-résidentiel alors
qu'un des principes de la réforme de la fiscalité municipale
ça avait été la neutralité des taxes
foncières, il s'apprête à le faire. il s'apprête
aussi à taxer les grandes concentrations commerciales importantes au
détriment, très vraisemblablement, de l'habitation, de la
concentration urbaine et probablement en étant inconscient, si je
comprends bien, des effets sur l'étalement urbain qui est toujours un
des problèmes importants. il s'apprête à toucher aussi au
stationnement dans les centres urbains.
(12 h 20)
Bref, juste pour le transport en commun, nous aurons là une
avalanche de taxes qui va s'abattre sur le contribuable. C'est son signal en ce
qui concerne les taxes. Malheureusement, il me semble que ça va à
contre-courant de ce qu'il devrait faire. Alors qu'il devrait stimuler
l'économie puisque nous sommes en récession, de façon
claire, son collègue, le ministre du Revenu l'a admis, et je pense aussi
qu'il est en train de l'admettre, alors qu'il devrait déposer des
mesures de relance, il ne le fait pas. Il est encore en train de regarder ce
qui a été fait il y a 10 ans, et là il essaie de tirer des
petites conclusions, je dirais, minables par rapport aux gestes qui avaient
été posés, en oubliant effectivement ce qui avait
été fait dès le départ de la crise.
Alors, je lui reposerai la question et j'espère qu'il aura une
réponse plus précise qu'en temps opportun, parce qu'il va
admettre avec moi que ça ne veut rien dire, rien, absolument rien dire
parce que le temps opportun, c'est maintenant. Nous sommes en récession,
il ne faut pas attendre plus tard pour le faire.
Je vais aller sur le plan des crédits eux-mêmes. Les
crédits additionnels qu'il a déposés, 504 000 000 $ de
plus de dépenses qu'il entend faire, vont entraîner une hausse du
déficit de l'ordre de 200 000 000 $. Cela veut dire que la
différence devra, elle, être financée par des
réaffectations de crédits, ce qu'on appelle les crédits
périmés. Je voudrais rappeler au ministre qu'au
dépôt des crédits, au mois d'avril, lorsqu'il a fait son
discours et que le président du Conseil du trésor avait
déposé ses crédits lui-même, on prévoyait
déjà 440 000 000 $ de crédits périmés que
les ministères devaient aller chercher sur leur propre enveloppe.
Aujourd'hui, la commande qu'il donne, si je comprends bien les chiffres, c'est
qu'il en demande 744 000 000 $ au total.
Par ailleurs, après six mois seulement, le gouvernement
s'approche des 2,5 % de ce qu'il avait estimé l'an passé comme
crédits périmés ordinaires ou traditionnels. Je ne sais
pas s'il entend garder les mêmes prévisions cette année,
2,5 % du budget, comme crédits périmés ordinaires ou
réguliers. Est-ce qu'on s'attend à ce que ça
s'améliore? Il. a modifié la prévision de ses
crédits de 150 000 000 $, je pense, au mois de juin. Dans sa
synthèse des opérations financières du mois de juin, il y
avait 150 000 000 $; maintenant, on parle de 120 000 000 $. J'aimerais qu'il
nous fasse le tableau de ce qui a vraiment été fait en termes de
crédits périmés, la commande qui avait été
passée dès le départ, celle qui a été, je
pense, ajoutée au mois de juin et celle qui a été
révisée au mois de septembre. Je voudrais que le ministre nous
fasse un bilan de tout cela présentement. À l'heure actuelle, il
a haussé son déficit de 200 000 000 $.
Par ailleurs, j'aimerais qu'il nous parie davantage de ses
prévisions quant au comportement du gouvernement fédéral.
Est-ce qu'il y a
eu des négociations? Il nous a dit qu'il négociait avec le
gouvernement fédéral. Il nous a dit ça au mois de juin...
au mois de mai, lorsque nous avons étudié ses crédits,
qu'il était en négociation avec le gouvernement
fédéral quant aux paiements de transferts. Est-ce que ça
s'est poursuivi? Est-ce que les perspectives sont meilleures? Est-ce qu'il faut
ajouter foi au discours du premier ministre du Canada qui a demandé aux
provinces de réduire leurs dépenses? Est-ce qu'il a conclu que
ça s'adressait à lui, ministre des Finances du Québec, et
au Conseil du trésor du Québec? Dans un discours assez
récent, il y a deux ou trois semaines, le premier ministre Mulroney a
demandé aux provinces canadiennes de réduire leurs
dépenses. Est-ce que cela indique pour lui que les paiements de
transferts du gouvernement fédéral risquent, encore une fois,
d'être non seulement non maintenus, mais coupés, par rapport
à la situation financière de plus en plus préoccupante du
gouvernement fédéral? Est-ce que le ministre des Finances peut
nous donner quelques indications sur te comportement futur du gouvernement
fédéral?
Bien sûr, il n'a pas lu le Vancouver Sun. C'est son
collègue qui l'a lu. Son collègue, à mon sens, devrait
l'avoir mis au courant. Je suppose qu'ils se parlent. Je parle bien de son
collègue, le ministre du Revenu, qui nous a dit qu'il avait
ajouté, quelque foi à cet article du Vancouver Sun
à l'effet que les paiements de transferts risquaient d'être
coupés de 700 000 000 $ à 800 000 000 $. Est-ce que le ministre
pourrait nous donner des renseignements? Est-ce qu'il y a quelque fonctionnaire
que ce soit ici qui soit au courant? Et c'est pour ça que je lui pose la
question par rapport à ces négociations avec le gouvernement
fédéral. Il n'y en pas eu de négociations du tout depuis
le mois de juin, depuis le mois de mai par rapport à ces paiements de
transferts?
Je croyais comprendre que le Québec n'était pas satisfait.
Et il me semble même que ça avait été
mentionné à l'époque, au printemps dernier, que le
ministre devait discuter avec le gouvernement fédéral et devait
nous renseigner. Il me reste encore du temps, M. le Président?
Le Président (M. Bissonnet): Vous avez encore cinq minutes
à votre temps.
M. Léonard: Ah bon! Alors, nous pourrons
échanger.
M. Levesque: M. le Président, est-ce que je comprends
que...
M. Léonard: Si le ministre des Finances nous répond
de façon succincte et non pas dans 20 minutes, je veux bien qu'il nous
réponde. Peut-être, d'ailleurs, que l'échange sera mieux.
Mais j'ai appris depuis que je suis de retour à l'Assemblée
nationale que, lorsque nous donnons la parole au ministre des Finances, il
prend toujours 20 minutes, quel que soit le contenu de ce qu'il a à
dire. Parfois, c'est une réponse qui pourrait tenir en 30 secondes, mais
il prend 20 minutes, parce que, là, il a fait le procès du
passé. C'est quelqu'un qui avance, mais je pense qu'il avance
très lentement, parce qu'il a constamment les yeux dans son
rétroviseur, et les deux yeux dans son rétroviseur. Je comprends
qu'il aille lentement.
Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre des Finances,
je tiens à vous rappeler, à vous deux, qu'il reste 16 minutes
à ce débat, à cette intervention sur le ministère
des Finances. Alors, 16 minutes en tout. Nous terminons à 12 h 44. M. le
ministre des Finances.
M. Levesque: Ah bon! Alors, je vais le laisser continuer. Je
pensais que ça terminait à 12 h 30.
M. Léonard: Si vous voulez nous donner des réponses
par rapport à ces prévisions quant au gouvernement
fédéral, à mon sens, si le ministre me permet encore de
continuer quelque temps avant de me répondre...
M. Levesque: D'accord, je vais répondre rapidement s'il le
veut.
M. Léonard: Oui.
Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre des
Finances.
M. Levesque: D'abord, pour le rétroviseur, je pense que,
si l'ancien gouvernement avait regardé de temps en temps dans le
rétroviseur, il ne nous aurait pas mis dans la situation où on
est présentement. Et il y aurait eu des surplus au compte courant au
lieu d'avoir l'endettement qui va nous affecter pendant longtemps.
Deuxièmement, pour la question des chiffres exacts pour les
crédits périmés, on demande de donner une idée. Il
y avait d'abord, au livre des crédits, 440 000 000 $; ensuite, il a
été identifié, en cours d'année, 210 000 000 $; il
reste encore 120 000 000 $ de non identifiés, pour un total de 770 000
000 $. Alors, le député de Labelle dit: Qu'est-ce que ça
représente, ça, 2,5 %? Ça représente 2,1 %. Or, si
le député de Labelle pense que c'est beaucoup de crédits
périmés, 770 000 000 $...
M. Léonard: Je n'ai pas porté de jugement
là-dessus.
M. Levesque: Non, il n'a pas porté de jugement, mais, tout
de même, il a laissé entendre que...
M. Léonard: L'an dernier, vous aviez déclaré
que, d'une année à l'autre, l'expérience c'était
que, en général, les ministères périmaient 2.5 % de
leurs crédits. et, présentement, si on regarde la commande qui a
été passée, plus les dépassements de coût qui
doivent être financés par des crédits
périmés, on s'approche des 2,5 %. est-ce que vous prévoyez
l'atteindre cette année?
M. Levesque: Présentement, avec les 770 000 000 $ que je
viens de vous donner en détail, ça représente 2,1 %. Si on
regarde ce qui s'est passé dans les années antérieures
avec notre rétroviseur, on voit 3,5 %, 3,2 %, 2,5 %, 2.6 %, 2,5 %, 3 %,
3,1 %, depuis 1982 à nos jours. alors, c'est encore, par rapport aux
pourcentages, le pourcentage le plus bas encore depuis 1982. alors, est-ce que
j'en prévois d'autres? je n'en prévois pas d'autres au moment
où je vous parle, mais ce n'est pas exclu, on verra.
(12 h 30)
M. Léonard: Est-ce que vous prévoyez, finalement...
Est-ce que vous en tirez la conclusion que les ministères ont maintenant
des budgets très serrés et que c'est difficile d'aller en
éponger plus?
M. Levesque: Avec le contrôle que nous avons apporté
sur les dépenses du gouvernement depuis quelques années, c'est
sûr, comme on dit, qu'il y a moins de gras à couper, mais nous
devons continuer à faire en sorte que le dollar du contribuable soit
utilisé pleinement et dans l'intérêt public et que nous ne
laissions pas de sommes être utilisées sans
nécessité.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Est-ce que je peux avoir une réponse
sur les questions portant sur les négociations avec le gouvernement
fédéral quant aux paiements de transferts?
M. Levesque: Quant à nos négociations avec le
gouvernement fédéral, elles portent évidemment sur la
période de 1992 à 1997. Ce sont ce qu'on appelle les accords
fiscaux. Au niveau des fonctionnaires, c'est déjà
commencé. Je m'attends à avoir une rencontre avec le ministre
fédéral des Finances d'ici Noël et j'ai l'intention
également de poursuivre ces pourparlers ou ces entretiens après
Noël ou, également, au début de l'année.
M. Léonard: Ça porte strictement sur de 1992
à 1997. Donc, vous excluez qu'il y ait à ce moment-ci des
restrictions ou des coupures quant aux engagements du gouvernement
fédéral jusqu'en 1992?
M. Levesque: Je pense que le gouvernement fédéral
doit être conscient de ce qui arrive. Quand on parle de 1983, sans mettre
notre rétroviseur trop précis, on s'aperçoit qu'à
ce moment-là, le gouvernement du temps, dont vous faisiez partie, avait
à peu près des transferts de l'ordre de 6 200 000 000 $ ou 6 300
000 000 $, si ma mémoire est fidèle. Et c'est encore à peu
près de cet ordre-là. En chiffres absolus, c'est 6 500 000 000 $,
6 600 000 000 $, quelque chose de ce genre-là. Autrement dit, alors que
tous les coûts ont augmenté, la contribution
fédérale demeure stagnante. Autrement dit, ça
représentait dans votre temps près de 30 % du budget des revenus.
Aujourd'hui, ça représente quoi? Ça représente
moins de 20 %. Alors, c'est un problème sérieux et, lorsque
j'entends le ministre fédéral de la Santé faire des
déclarations comme celles de ce matin, en parlant de la réforme
du ministre de la Santé et des Services sociaux: Nous ne permettrons pas
de changer quoi que ce soit dans la loi, c'est bien beau, quand on paie 50-50,
on peut dire ça, mais quand on est rendu avec la proportion de
contributions que le gouvernement fédéral fait, je pense qu'il
est temps qu'il nuance un peu ses propos.
M. Léonard: Et s'il maintenait sa position, est-ce que
vous trouvez que ce serait le moment de lui demander de s'en sortir
complètement et de nous faire des transferts sans condition?
M. Levesque: Je suis très... D'ailleurs, j'en ai
déjà parlé. J'ai dit: Si vous n'êtes pas capable
d'assumer pleinement vos responsabilités financières, il n'y a
pas lieu que vous continuiez d'assumer d'autres responsabilités dans ce
domaine.
M. Léonard: Est-ce que, comme ministre des Finances, vous
ne trouvez pas que le fardeau de la dette dans le budget fédéral
est tellement important que le gouvernement fédéral n'aura pas
d'autre choix finalement que de réduire de plus en plus et de
façon importante ses paiements de transferts au Québec? Non
seulement il ne pourra arriver à les maintenir, mais il va devoir les
couper. Est-ce qu'il n'y a pas un danger important en ce sens que...
M. Levesque: D'ailleurs, la formule actuelle, si elle est
menée à terme dans le domaine du financement des programmes
établis, fera justement en sorte que les transferts financiers,
près de l'an 2000, seront réduits à néant.
M. Léonard: Est-ce que, comme ministre des Finances, vous
n'avez pas éprouvé l'envie, parfois, de donner ou de dire un
certain nombre de vérités au ministre des Finances
fédéral, à l'effet que le budget ou la propension à
dépenser du gouvernement fédéral est épouvantable
et que, finalement, ils sont en train de mettre tout le
pays en faillite?
M. Levesque: Je pense qu'on peut attribuer surtout aux taux
d'intérêt élevés les problèmes que le
gouvernement fédéral connaît depuis quelque temps et qui
affectent directement son déficit, sans vouloir le défendre.
Parce que, sur le plan des dépenses strictement, si je mets de
côté les transferts et si je mets de côté le service
de la dette, le gouvernement fédéral, et le ministre des Finances
en particulier, me répète souvent qu'ils ont une augmentation
annuelle d'à peu près 3,5 %, je pense, sur leurs dépenses.
Je pense que le gros problème que nous vivons présentement, et au
gouvernement fédéral ils le vivent également, les hauts
taux d'intérêt et l'héritage du passé.
Le Président (M. Bissonnet): M. le député de
Labelle.
M. Léonard: Oui, je pense que, disons qu'en augmentant les
taxes, les tarifs, etc., vous avez quand même contribué
jusqu'à un certain point à l'augmentation de l'inflation au
Québec, et, effectivement, quand on regarde les dernières
statistiques là-dessus, vous n'avez pas tellement aidé,
disons.
M. Levesque: À ce sujet, monsieur... M. Léonard:
Mais par ailleurs...
M. Levesque: À ce sujet, M. le Président, vu qu'on
essaie de répondre le plus rapidement possible, notre taux d'inflation
au Québec est inférieur à la moyenne canadienne.
M. Léonard: Sauf le dernier mois.
M. Levesque: Nous sommes plutôt près de 4 %. alors,
je pense qu'au cours des années, nous avons fait preuve de...
M. Léonard: Oui, je suis...
M. Levesque: ...responsabilité. Et, d'ailleurs, lorsque le
gouvernement fédéral a fait des représentations aux
provinces, récemment encore, disant aux provinces de faire attention
à l'augmentation des dépenses, chaque fois, j'entends le
gouvernement fédéral mentionner: Le Québec, c'est
peut-être différent, Québec, réellement,
contrôle ses dépenses.
M. Léonard: Les journaux, notamment le Globe &
Mail, nous apprenaient que, vraisemblablement, l'impasse du gouvernement
fédéral par rapport à son déficit, par rapport
à son budget et au déficit prévu au budget du printemps
dernier, risquait d'être de l'ordre de 5 000 000 000 $,
c'est-à-dire une augmentation des dépenses surtout à cause
du service de la dette qui augmentait de l'ordre de 2 800 000 000 $ et des
diminutions ou des manques à gagner en termes de revenus, surtout
à cause de la récession qui s'est accélérée,
de l'ordre de 2 000 000 000 $ et quelques, de sorte que le Globe & Mail,
il y a deux semaines à peu près, a titré que l'impasse
pourrait être de 5 000 000 000 $. Est-ce que ce sont des chiffres que
vous contestez, vous, ou si ça vous semble d'un ordre de grandeur
possible, même probable?
M. Levesque: D'abord, vous savez, mes fonctions me demandent de
m'occuper d'abord de mes oignons, et j'essaie de prévoir le mieux
possible ce qui va arriver aux finances du Québec d'abord. C'est la
responsabilité première que j'ai. Ça ne veut pas dire
qu'il n'y a pas de relation entre les deux niveaux de gouvernement, et il faut
également faire attention à ce qui se passe ailleurs.
M. Léonard: Mais je...
M. Levesque: Mais lorsque vous comparez les prévisions du
gouvernement actuel à la réalité, je pense que depuis cinq
ans, nous sommes arrivés - et j'en rends témoignage surtout
à l'équipe qui travaille avec moi - presque nez à nez
continuellement, que ce soit du côté des dépenses, des
revenus ou des équilibres.
M. Léonard: M. le ministre, je ne mettais pas ça en
cause. Mais ce qui me préoccupe, c'est que dans les sources de revenus
du gouvernement du Québec, il y a quelque chose de l'ordre de 20 % qui
vient d'un fournisseur de fonds dont la solvabilité devient de plus en
plus discutable. Ça, c'est vraiment préoccupant. Je pense qu'au
fond, les Québécois versent des taxes en proportion très
importante au fédéral. Mais lorsqu'on voit révolution de
la situation, il s'accumule sur leur tête un déficit additionnel
de l'ordre de 8 000 000 000 $ par année. Parce que, si le déficit
du gouvernement fédéral est de 32 000 000 000 $,
grossièrement, disons 25 % chez nous, c'est 8 000 000 000 $. Je trouve
que, si on fait des discours quant à l'avenir de nos enfants, il faut
tenir compte de cette partie de la réalité financière
publique et qu'on ne peut pas passer à côté. Par ailleurs,
il y a ce déficit qui s'accumule. Nous recevons, au gouvernement du
Québec, 6 750 000 000 $ en gros du gouvernement fédéral.
Et ça, ça me paraît de plus en plus problématique
que de mettre une telle prévision dans l'avenir. Et c'est pour ça
que je vous pose des questions sur vos négociations avec le gouvernement
fédéral. Et, au fond, est-ce que vous avez tellement foi que,
même en négociant avec eux et quelles que soient les promesses
qu'il vous fait, en réalité, ce qu'il vous donne, il va de toute
façon l'emprunter lui-même. Finalement, en empruntant
systématiquement, il me semble qu'on en vient à se poser des
questions sur la valeur même du système monétaire
canadien. Est-ce que ça, ça va nous amener à une
dévaluation du dollar canadien à terme d'ici un an, par exemple?
Est-ce que vous prévoyez une telle chose?
Le Président (M. Bissonnet): C'est la dernière
question, il reste deux minutes et demie.
M. Gérard D. Levesque
M. Levesque: Alors, M. le Président, pour terminer, je
veux dire que la situation, je ne m'en cache pas, est préoccupante. Mais
nous avons pensé aussi qu'il fallait aborder cette question-là
d'une façon positive, ne pas céder à des sentiments de
panique, mais plutôt regarder ce qui peut être fait. Et nous
pensons que ces transferts fédéraux, sans nécessairement
augmenter le coût tellement pour le gouvernement fédéral,
pourraient être restructurés pour tenir compte davantage de la
capacité fiscale des provinces et que certains facteurs pourraient faire
en sorte que les transferts au Québec et à certaines autres
provinces puissent être augmentés, et qu'on tienne compte de la
richesse de chacune des provinces lorsque l'on fait de tels tranferts.
Nous l'avons déjà abordé et nous avons l'intention
d'aborder encore ce sujet. Et dans l'annexe E, si vous retournez au budget,
vous verrez là qu'on a avancé des chiffres qui n'ont pas
été niés par rapport à ce qui a été
versé, soit dans les dépenses fédérales ou les
transferts par province. Nous sommes arrivés à la conclusion que,
depuis quelques années, on semble fonctionner dans un courant inverse
à ce qui normalement devrait être la direction de ces fonds.
Certaines provinces, qu'on appelle les provinces riches, ont reçu
davantage que les provinces qui, normalement, en avaient le plus besoin.
Et la raison d'être, justement, du gouvernement
fédéral dans son rôle de redistribution de la richesse
nationale, si on peut l'appeler ainsi aujourd'hui, c'est de faire en sorte de
remettre un meilleur équilibre à travers le pays. C'est une des
grandes fonctions du fédéralisme et, tout en prônant le
fédéralisme, on peut en même temps s'attaquer à ses
faiblesses. Si on ne pratique pas un véritable
fédéralisme, on arrive à des conclusions comme celles que
nous dénonçons.
Le Président (M. Bissonnet): Alors, conformément
à l'article 21 du règlement et à l'ordre adopté en
début de séance, la commission plénière suspend ses
travaux. Je remercie celles et ceux qui y ont participé et, pour
permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je prie
toutes les personnes qui doivent se retirer de le faire
immédiatement.
(Suspension de la séance à 12 h 44)
(Reprise à 12 h 45)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le
président de la commission plénière.
M. MacMillan (président de la commission
plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de vous
aviser que la commission plénière, qui se réunit pour
étudier les crédits supplémentaires n° 1 pour
l'année financière se terminant le 31 mars 1991, n'a pas fini de
délibérer et qu'elle demande de siéger à
nouveau.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
président de la commission plénière. En
conséquence, les travaux de la commission plénière sont
ajournés et je suspends les travaux de l'Assemblée jusqu'à
14 heures cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 46)
(Reprise à 14 h 5)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir
quelques instants.
Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.
L'Assemblée reprend ses travaux aux affaires courantes.
Il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, je vous demande d'appeler
l'article j du feuilleton.
Projet de loi 268
Le Président: À l'article j du feuilleton, j'ai
reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de
loi 268, Loi modifiant la charte de la ville de Montréal. Le directeur
de la législation a constaté que les avis ont été
faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement
des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce
rapport.
En conséquence, M. le whip en chef du gouvernement et
député de Viau, au nom du député de Saint-Louis,
présente le projet de loi d'intérêt privé 268, Loi
modifiant la charte de la ville de Montréal. Est-ce que
l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
Renvoi à la commission de l'aménagement
et des équipements
M. Johnson: M. le Président, je fais donc
motion pour que ce projet de loi soit déféré
à la commission de l'aménagement et des équipements, pour
étude détaillée et pour que le ministre des Affaires
municipales en soit membre.
Le Président: Est-ce que cette motion est
adoptée?
M. Gendron: Adopté.
Le Président: Adopté. Maintenant, au niveau du
dépôt de documents, M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.
Document intitulé " Les régimes de
retraite: Le partage équitable des excédents d'actif
M. Bourbeau: M. le Président, en vue d'en venir à
la levée du moratoire qui interdit la distribution des surplus dans les
fonds de pension privés, j'ai l'honneur de déposer un document
qui s'intitule "Le partage équitable des excédents
d'actif.
Le Président: Alors, ce document est déposé.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, je fais motion pour que la
commission des affaires sociales procède à des consultations
particulières et tienne des auditions publiques les 13 et 14 mars 1991
sur le document intitulé "Les régimes de retraite: Le partage
équitable des excédents d'actif", que les mémoires soient
reçus au Secrétariat des commissions au plus tard le 8
février 1991, que le ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle soit membre
de la commission pour la durée du mandat et que la liste des groupes
invités soit celle ci-après déposée.
Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour la
présentation de cette motion?
M. Gendron: II y a consentement, M. le Président.
Le Président: Consentement. Est-ce que cette motion est
adoptée? Adopté. Donc, la motion est adoptée.
Décisions du Bureau de l'Assemblée
nationale
Toujours au niveau du dépôt de documents, je voudrais
déposer les décisions 404, 405 et 408 du Bureau de
l'Assemblée nationale. Alors, ces documents sont
déposés.
Dépôt de rapports de commissions. M. le président de
la commission de l'aménagement et des équipements et
député de Lévis.
Étude détaillée du projet de loi
85
M. Garon: M. le Président, je dépose le rapport de
la commission de l'aménagement et des équipements qui a
siégé le 3 décembre 1990 afin de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 85, Loi modifiant de
nouveau la Loi sur la Société québécoise
d'assainissement des eaux. Le projet de loi a été adopté
avec des amendements.
Le Président: Ce rapport est déposé.
Dépôt de pétitions.
Il n'y a pas interventions portant sur une violation de droit ou de
privilège ou sur un fait personnel.
Je voudrais vous aviser qu'après la période de questions
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux répondra
à une question posée lors d'une séance
précédente, soit celle d'hier, par M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, question concernant la distribution des vaccins au
Québec.
QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES
Nous allons maintenant procéder à la période
régulière de questions et réponses orales des
députés. Je reconnais en première question principale, M.
le député d'Ungava.
Campagne publicitaire d'Hydro-Québec
M. Claveau: Merci, M. le Président. Hier, nous assistions
en cette Chambre à une nouvelle contradiction de ce gouvernement. D'une
part, la ministre de l'Énergie et des Ressources du Québec nous
affirmait que, quant à elle, la publicité d'Hydro-Québec
parue en fin de semaine et faisant la promotion de la deuxième phase de
la Baie James, et particulièrement du projet Grande Baleine,
était de l'information nécessaire pour contrecarrer, soi-disant,
la désinformation faite par tous ceux qui s'opposent au projet. De son
côté, le ministre de l'Environnement nous disait
qu'Hydro-Québec doit être traitée comme tous les autres
promoteurs et ce n'est pas à lui ou à elle, comme
société, de décider si ces études auront ou non un
impact significatif sur l'environnement. Aujourd'hui, nous apprenions dans le
quotidien The Gazette qu'il s'agissait là de la première
phase d'une campagne publicitaire s'élevant à 6 000 000 $ qui
devrait être réalisée avant le mois de février,
campagne d'ailleurs, M. le Président, qui se fera en français et
en anglais, dans la version anglaise, la famille Gervais devenant la famille
Wilson.
Le Président: Votre question, s'il vous plaît, M. le
député.
M. Claveau: II s'agit là d'une opération
d'envergure, vous en conviendrez, M. le Président. À ce titre,
est-ce que la ministre de
l'Énergie et des Ressources du Québec peut nous dire si
elle a autorisé cette campagne publicitaire d'Hydro-Québec qui
s'élèvera à 6 000 000 $?
Le Président: Mme la ministre de l'Énergie et des
Ressources.
Mme Bacon: D'abord, je pense qu'il faudrait peut-être dire
au député d'Ungava qu'il est tout à fait faux de dire
qu'Hydro-Québec fait de la publicité tendancieuse ou une
publicité propagandiste. Hydro-Québec est une entreprise autonome
qui a un rôle d'information à jouer dans la société
québécoise. Depuis 1983, depuis la deuxième phase du
développement hydroélectrique, Hydro-Québec a suivi
à la lettre toutes les prescriptions du gouvernement ainsi que les
mesures qui sont inscrites dans la Convention de la Baie James. Je dois dire
aussi qu'Hydro-Québec a développé une grande expertise
dans l'adaptation des écosystèmes suite au développement
des grands projets. Je dois dire aussi, M. le Président,
qu'Hydro-Québec a le droit de faire les campagnes de publicité
qu'elle veut entreprendre et, encore une fois, je répète au
député d'Ungava: Hydro-Québec est une entreprise autonome
qui a un rôle d'information du public, qui a un rôle à jouer
dans notre société québécoise et qui joue ce
rôle.
Le Président: En question complémentaire.
M. Claveau: La ministre de l'Énergie et des Ressources
conviendra-t-elle que, dans le contexte actuel où se situe le dossier
Grande Baleine, il est plutôt étonnant de voir HydroQuébec
faire de la publicité pour dire que son projet n'aura pas d'impacts
significatifs? C'est une question, M. le Président. Vous voulez que je
reprenne la formulation?
Le Président: Allez-y, c'est correct. Si c'est une
question, allez-y.
M. Claveau: Alors, la ministre de l'Énergie et des
Ressources conviendra-t-elle que dans le contexte actuel, où se situe le
projet Grande Baleine, dans l'opinion publique, il est plutôt
inusité de voir cette société d'État engager des
fonds publics pour faire une publicité signifiant que son projet n'aura
pas d'impacts environnementaux? Et, dans ce sens-là, la ministre
est-elle d'accord que la société d'État qui s'appelle
Hydro-Québec utilise des fonds publics pour faire des pressions sur son
gouvernement?
Le Président: Alors, Mme la ministre.
Mme Bacon: M. le Président, il y a deux campagnes
d'information, en ce moment, qui sont faites par Hydro-Québec. La
première campagne:
Évitons le gaspillage. J'espère que le
député d'Ungava n'est pas contre ça, M. le
Président! Et l'efficacité énergétique,
j'espère, encore une fois, que le député d'Ungava n'est
pas contre ça! La deuxième... Voulez-vous avoir la
réponse?
Le Président: S'il vous plaît!
Mme Bacon: La deuxième, c'est "Notre propre
énergie" qui, oui, concerne aussi les travaux qui sont prévus
dans le plan de développement d'Hydro-Québec, mais qui concerne
aussi l'environnement, l'exportation, l'efficacité
énergétique, les retombées économiques qui
concernent la demande d'électricité, les exportations, la
description des différents projets, les études d'impact, les
inondations, les oiseaux migrateurs, et le reste.
Le Président: Toujours en complémentaire.
M. Claveau: M. le Président, la campagne que nous
questionnons est celle qui porte sur l'efficacité gouvernementale. Celle
que nous questionnons, c'est la campagne de publicité sur
l'efficacité gouvernementale d'Hydro-Québec. Dans ce
sens-là, la ministre de l'Énergie et des Ressources
conviendra-t-elle qu'il appartient au ministère de l'Environnement, au
ministre de l'Environnement de confirmer si les projets d'Hydro-Québec
auront des impacts environnementaux significatifs ou non sur l'environnement et
que ce n'est pas à Hydro-Québec de le faire, alors que c'est elle
qui a réalisé ces études, comme promoteur et ce, avant
même que ces études aient été étudiées
par le ministère de l'Environnement?
Le Président: Mme la ministre.
Mme Bacon: M. le Président, ce n'est pas nouveau, les
informations qui sont données par Hydro-Québec. On a eu ça
pendant tout le mois de mai, M. le Président. On a discuté de ce
dossier de l'avenir énergétique du Québec pendant toute la
période du mois de mai et Hydro-Québec est venue témoigner
devant cette commission parlementaire sur le dossier de son plan de
développement.
Dans "Notre propre énergie", elle explique, justement, les
différents thèmes qui ont été expliqués, et
c'est le député d'Ungava lui-même et ses collègues
qui se plaignaient qu'on n'ouvrait pas davantage l'information, M. le
Président. On l'a, l'information, maintenant. Il n'est pas encore
content. Il veut du nucléaire?
Des voix: Oh!
Le Président: En question principale, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Remboursement d'impôt aux
bénéficiaires du programme APPORT
Mme Harel: Contrairement à ce qu'annonçait le
ministre du Revenu dès le mois de juin dernier, l'opération
remboursement d'impôt 1989 n'est toujours pas terminée, en tout
cas pas pour les familles de travailleuses et de travailleurs à faible
revenu inscrites au programme APPORT, qui attendent toujours leur retour
d'impôt du Québec pour l'année 1989.
Une voix: Ça n'a pas de bon sens.
Mme Harel: Les dossiers de milliers de familles sont
bloqués depuis des mois à cause d'erreurs dues à la
complexité du programme APPORT lui-même. Le gouvernement avait
pourtant reconnu sa responsabilité en 1988 en annulant par décret
les supposés trop-payés et, pour 1990, en corrigeant le mode de
calcul. Rien de tel pour 1989. Le ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle
confirme-t-il que le Conseil des ministres a plutôt décidé,
le 17 octobre dernier, de réclamer à ces familles démunies
et de bonne foi des trop-payés de 548 $ en moyenne? Et comment peut-il
expliquer une décision aussi odieuse, M. le Président?
Le Président: M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.
M. Bourbeau: M. le Président, à ma connaissance, le
dossier du remboursement des prestations à APPORT n'a pas fait l'objet
d'une décision du Conseil des ministres. Tout ce que je peux dire
à la députée de Hochelaga-Maison-neuve, c'est que,
présentement, toute cette question fait l'objet d'une révision au
ministère de la Main-d'oeuvre et que, dans l'appareil gouvernemental,
des discussions ont cours présentement. Je ne suis pas en mesure,
à ce moment-ci, de dire quelles décisions pourront
éventuellement être prises.
Le Président: En question complémentaire.
Mme Harel: Comment le ministre peut-il expliquer que, dans un
programme qui périme chaque année 11 000 000 $, qui n'atteint
toujours que le tiers des familles qui devaient en bénéficier,
ces familles démunies de travailleurs à faible revenu attendent
toujours un remboursement d'impôt après que le ministre du Revenu
ait annoncé que l'opération était terminée en juin
dernier?
Le Président: M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, le programme APPORT, comme
l'a dit la députée de Hochelaga-
Maisonneuve, est un programme complexe qui rend de grands services aux
familles qui travaillent, en ce qu'il permet de complementer les revenus de
travail, ce qui évite d'attirer à la Sécurité du
revenu ou à l'aide sociale des travailleurs qui en raison de revenus
modestes pourraient être tentés de cesser de travailler à
un salaire faible pour se laisser attirer par l'aide sociale.
Le programme encourage justement ces familles-là en leur disant:
Si vous continuez à travailler, nous allons supplémenter vos
revenus de travail, de sorte qu'il sera toujours plus intéressant de
travailler même au salaire minimum, intéressant au point de vue
monétaire, que de rester à ne rien faire à l'aide sociale.
M. le Président, c'est un programme qui, bien que complexe, est
essentiellement important, parce qu'il récompense ceux qui veulent faire
un effort pour s'en sortir et nous faisons tous les efforts, de notre
côté, pour améliorer ce programme.
Le Président: En question complémentaire.
Mme Harel: Est-ce que le ministre reconnaît que ceux qui
sont sensés être récompensés par le programme
pourraient être punis très prochainement et s'engage-t-ii,
aujourd'hui, à faire annuler ces supposés trop-payés pour
1989 dus à la complexité du programme qu'il vient
d'expliquer?
Le Président: M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, des études
approfondies ont été faites récemment et ont
dénoté des modifications à certaines données que
nous possédions, ce qui fait que nous sommes en train de réviser
la totalité non seulement des données, mais également des
paramètres du programme. Alors, je ne peux rien annoncer pour l'instant.
La députée de Hochelaga-Maisonneuve n'a pas raison d'alerter la
population ou de tenter de faire en sorte de semer chez la clientèle le
désarroi. M. le Président, attendons pour voir quelle sera la
décision éventuelle du gouvernement, puisque le gouvernement ne
s'est pas prononcé encore sur cette question.
Le Président: Toujours en additionnelle.
Mme Harel: Est-ce que le ministre est conscient que ce sont des
familles de travailleurs et travailleuses démunies qui attendent la
décision éventuelle du gouvernement depuis des mois et
reconnaît-il qu'à l'instar de l'Association coopérative
d'économie familiale, qu'à l'instar du Protecteur du citoyen
lui-même son gouvernement devrait prendre rapidement et le ministre
devrait s'engager à prendre rapidement une décision dans ce
dossier?
Le Président: M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, pour l'instant, je ne pense
pas qu'il y ait de catastrophe en vue. Les travailleurs, qui devaient recevoir
une décision, ne l'ont pas reçue, j'en conviens, mais tout est en
suspens. Alors, éventuellement, M. le Président, quand le
gouvernement aura pris sa décision, on verra quelles actions nous
devrons prendre dans ce dossier. (14 h 20)
Le Président: Une question complémentaire, M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamin-gue.
M. Trudel: En additionnelle, au ministre du Revenu. Comment le
ministre du Revenu peut-il nous expliquer, aujourd'hui, que pas plus tard qu'il
y a trois semaines, dans cette Chambre, il nous affirmait que la
récupération moyenne pour les familles les plus démunies
du programme APPORT était en moyenne de 37 $ quand, en
réalité, on parle aujourd'hui d'une somme d'au-delà de 500
$ et que le gouvernement n'a pas encore pris la décision de rembourser
les familles à qui on dort des sous, par ailleurs?
Le Président: M. le ministre du Revenu.
M. Savoie: II est exact, M. le Président, que j'ai
affirmé, en cette Chambre, que la réclamation moyenne
était de l'ordre de 37 $. C'était sur la base des informations
qu'on m'avait fournies à ce moment-là et on a continué
à travailler le dossier. J'ai demandé des modifications
additionnelles et, effectivement, la somme est exacte, une fois la compensation
faite et non pas avant la compensation faite. Alors, c'est pour ça qu'on
est en train de revoir le dossier et, comme l'a expliqué mon
collègue, le ministre de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu, la décision n'est pas encore prise. Le
dossier est toujours, actuellement, sous étude.
Une voix: Très bien!
Le Président: Une dernière question
additionnelle.
M. Trudel: Alors, ce que le ministre nous confirme, c'est que le
chiffre n'est pas encore définitif, mais que c'est beaucoup plus
élevé que le montant établi de 37 $ - c'est au-delà
de 500 $ - et que tout ça bloque également le remboursement aux
familles qui ont droit à des remboursements d'impôt. Le ministre
peut-il confirmer cela?
Le Président: M. le ministre du Revenu.
M. Savoie: Merci, M. le Président. La question est en deux
parties. En première partie, effectivement, le montant est
supérieur à 37 $, comme je vous l'ai mentionné, mais je ne
crois pas qu'il se rende à 500 $. Deuxièmement, pour ce qui est
du programme, comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure, la
décision n'est pas encore prise quant aux orientations. Une fois qu'elle
sera prise, elle vous sera transmise. Il faut bien dire que, pour la grande
majorité des gens qui ont reçu des montants, c'est des montants
trop perçus dans le cadre de l'application du programme.
Le Président: En question principale, M. le
député de La Prairie.
Mandat de gestion du Programme des lacs du MENVIQ
confié à la FAPEL
M. Lazure: Oui, M. le Président. Depuis plusieurs
années, il existe, au ministère de l'Environnement, un programme
qui fonctionne très bien. Il s'agit du Programme des lacs. Depuis cinq
ou six ans, on a confié la gestion de ce programme à la
Fédération des associations pour la protection de l'environnement
des lacs, communément appelée la FAPEL. Cette
Fédération regroupe 750 associations à travers tout le
Québec et au-delà de 100 000 bénévoles. Cette
Fédération administre de façon très
économique, pour le gouvernement, un programme qui est tout à
fait conforme aux directives et aux objectifs du ministère.
Or, le programme expire dans quelques mois et la
Fédération a besoin de savoir le plus tôt possible, dans le
but de recruter et de former ses bénévoles, si le contrat sera
renouvelé. Alors, la question au ministre de l'Environnement est toute
simple. Est-ce que le ministre peut prendre l'engagement qu'il va renouveler le
contrat à la Fédération et, deuxièmement, est-ce
que le mandat confié à Fédération sera
élargi comme celle-ci le souhaite?
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, le
député de La Prairie a raison de souligner l'action positive que
mène la FAPEL sur le terrain. Effectivement, il s'agit pour le
ministère de l'Environnement du Québec d'un partenaire qui a
été à la fois efficace et performant sur le terrain. Nous
sommes présentement en négociation avec cette association de
bénévoles et je suis optimiste, je crois que, dans les meilleurs
délais, nous en arriverons à un règlement
négocié à la satisfaction de toutes les parties
impliquées.
Le Président: En question complémentaire.
M. Lazure: Est-ce que le ministre est conscient que la
Fédération peut avoir raison d'être inquiète quant
à l'intérêt du ministre? Parce qu'il faut se rappeler que,
pour la première
fois en dix ans, le ministre de l'Environnement n'était pas
présent au congrès de la FAPEL Est-ce que le ministre peut
répondre au premier volet de la question, à savoir: Est-ce que le
mandat de gestion de la Fédération sera élargi comme
celle-ci le souhaite?
Le Président: M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je peux
assurer le député de La Prairie ainsi que les autres membres de
l'Assemblée nationale du Québec que les négociations qui
sont actuellement menées avec la FAPEL visent à apporter des
modifications suffisamment importantes au contrat qui lie depuis trois ans le
ministère de l'Environnement du Québec à la FAPEL
Le Président: Question complémentaire.
M. Lazure: Oui, la dernière, M. le Président. Le
ministre nous déclarait récemment qu'il s'appuie sur la
population en l'absence d'appui de ses collègues. Est-ce que, dans cet
esprit-là, le ministre peut s'engager à augmenter l'aide
financière aux organismes environnementaux, aux associations
écologiques à travers le Québec, laquelle aide
financière est gelée depuis 1985? Est-ce qu'il peut s'engager
à augmenter l'aide financière aux organismes?
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je
rappellerai brièvement au député de La Prairie qu'à
l'occasion de l'annonce des crédits, cette année, à
l'Assemblée nationale du Québec, le ministère de
l'Environnement a obtenu 15 000 000 $ additionnels comparativement au budget de
l'an passé. Je lui rappellerai également que le ministère
de l'Environnement du Québec s'est vu octroyer, pour une période
de cinq ans, un fonds de recherche et de développement de quelque 50 000
000 $. Je rappellerai également au député de La Prairie
qu'en créant la société d'Etat RECYC, c'est 30 000 000 $
de ressources additionnelles qui ont été confiées au
ministère de l'Environnement du Québec. Et je soulignerai au
député de La Prairie qu'à l'occasion des dernières
compressions budgétaires du gouvernement du Québec, le
ministère de l'Environnement du Québec a été
épargné de toute compression. C'est là l'appui que j'ai
reçu de l'ensemble des collègues du cabinet et du caucus
libéral. C'est beaucoup plus que ce que mes prédécesseurs
péquistes pouvaient dire des appuis qu'ils recevaient des autres
ministres de l'époque. Merci, M. le Président.
Le Président: En question principale, M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
Mesures transitoires relatives à la
répartition des effectifs médicaux
en
région dans le cadre de la réforme
en
matière de santé et de services
sociaux
M. Trudel: La réforme déposée vendredi
dernier par le ministre de la Santé et des Services sociaux
prévoit un ensemble de mesures pour assurer une juste répartition
des effectifs médicaux dans les régions du Québec. Parmi
ces mesures, il faut noter la répartition régionale de
l'enveloppe de la Régie de l'assurance-maladie du Québec,
l'intégration des cabinets privés ou des effectifs des cabinets
privés au plan d'effectifs médicaux régionaux, la
rémunération différenciée et, également,
l'emphase mise sur les spécialités de base. Or, hier, le
président de la Fédération des médecins
omnipraticiens du Québec, le Dr Clément Richer, soumettait qu'il
s'agissait là peut-être d'une arme à deux tranchants
puisque, compte tenu que la réforme ne devrait entrer en vigueur qu'en
1992, on pourrait assister à une migration massive des médecins
vers les grands centres urbains du Québec.
Ma question au ministre de la Santé et des Services sociaux est:
Est-ce que l'effet pervers que peut avoir le délai d'entrée en
vigueur des mesures de répartition des effectifs régionaux fait
en sorte que le ministre a prévu déjà des mesures
transitoires pour s'assurer que toutes les régions du Québec ne
se vident pas de leurs médecins d'ici à 1992?
Le Président: M. le ministre de la Santé et des
Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je
remercie le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue de
souligner, par le fait même de sa question, que le Dr Clément
Richer, président de la Fédération des médecins
omnipraticiens du Québec, s'est dit d'accord avec le reste des mesures
de la réforme.
Dans le cas particulier des médecins un peu partout à
travers le Québec, effectivement, c'est une problématique dont
nous avions discuté avec le Dr Richer et les représentants de la
FMOQ et qui, quant à eux, soulevait certaines interrogations,
particulièrement dans le comment de l'application des mesures, soit
d'inclusion des cabinets privés dans les plans d'effectifs
médicaux où, effectivement, ils me transmettent
l'inquiétude de certains médecins qui sont déjà en
région depuis 5 ans, 7 ans, 10 ans et qui, devant une possibilité
comme celle-là, prendraient tout de suite l'envie de revenir tout de
suite dans les grands centres, de peur de ne pas pouvoir y revenir par
après.
Il faut rendre hommage à tous ces médecins qui ont
accepté de s'installer partout à travers le Québec, dans
les régions et dans les sous-
régions. Il n'est aucunement question à ce moment-ci de
faire en sorte que ceux qui ont accepté d'aller oeuvrer dans les
régions éloignées du Québec soient les
pénalisés de la réforme et nous allons prendre les moyens
dans le comment, avec la Fédération des médecins
omnipraticiens du Québec, pour régler ce problème
particulier.
Le Président: Alors, en complémentaire.
M. Trudel: Le ministre ne convient-il pas qu'il faudrait
être un peu plus précis et nous indiquer s'il y a effectivement,
pas de la part de la Fédération des médecins
omnipraticiens, mais de la part du ministre de la Santé et des Services
sociaux, des mesures transitoires qui ont été prévues pour
que les régions du Québec ne soient pas pénalisées
en termes de répartition des effectifs médicaux pour lesquels ils
sont déjà en déficit? Est-ce que le ministre, lui, a
prévu des mesures transitoires? (14 h 30)
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président,
l'essence même de la réforme est de faire en sorte qu'il y ait,
dans le cas des médecins, plus de médecins à travers le
Québec, que ce soient des omnipraticiens, que ce soient des
spécialistes dans les spécialités de base. C'est clair,
vous l'avez vous-même, dans votre communiqué de presse, vendredi
dernier, salué de manière admirable, par rapport à votre
entrée en matière, au niveau de votre critique. Laissant les
aspects fiscaux de côté, vous avez dit: Voici les mesures
où nous, de l'Opposition... Vous n'avez pas dit: Bravo pour les mesures!
Vous avez dit: Où nous, de l'Opposition, n'accepterons aucun recul dans
la loi - c'est à peu près comme ça que c'était
libellé...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): ...signifiant ainsi, par le
fait même, que c'étaient des bonnes mesures. N'ayez pas peur de le
dire.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): N'ayez pas peur de dire
franchement et honnêtement que ce sont des bonnes mesures qui vont
nécessairement, quand elles seront appliquées, profiter aux
sous-régions du Québec et à l'ensemble des régions
du Québec. Entre-temps, le ministre de la Santé et des Services
sociaux va prendre les responsabilités qui lui incombent pour faire en
sorte que les régions ne se vident pas des médecins qui sont
là.
Le Président: Toujours en complémentaire.
M. Trudel: Est-ce que le ministre pourrait avoir la même
franchise, la même honnêteté que l'Opposition...
Des voix: Oh! Oh!
M. Trudel: ...et nous dire..
Des voix:...
M. Trudel: ...la même franchise et la même
honnêteté...
Des voix:...
M. Trudel: ...et nous dire, effectivement, qu'à part les
voeux pieux il peut garantir aux gens des régions qu'effectivement le
déficit, en termes de médecins, dont il souffre actuellement ne
sera pas aggravé par le fait que les mesures vont entrer en vigueur
seulement au mois d'avril 1992? Et sur cette question précise, est-ce
qu'il en a des mesures de prévues, oui ou non?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue me surprend toujours
un petit peu par ses questions. Je comprends qu'il a l'obligation de jouer le
rôle qui lui incombe, soit celui de l'Opposition. Mais une chose est
certaine, c'est que jamais comme auparavant le gouvernement n'a pris ses
responsabilités pour faire en sorte que des médecins aillent dans
les régions du Québec. Ce n'est pas pour rien que mon bon ami
Augustin Roy a dit qu'il y a des mesures qui ne sont pas acceptables. On le
fait en parfaite harmonie avec les facultés de médecine avec qui
on a discuté, avec les fédérations de médecins, en
particulier la Fédération des omnipraticiens, et aussi en
collaboration et en discussion avec la Fédération des
médecins spécialistes du Québec et en particulier des
spécialités de base qui manquent tant au niveau des
régions du Québec. Oui, le ministre va prendre ses
responsabilités et, oui, il va rester des médecins dans les
régions du Québec, et on va faire en sorte que les
médecins restent dans les régions du Québec.
Le Président: En question principale, M. le
député de Masson.
Financement du Conseil de presse
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Le Conseil de
presse, qui a pour mission de veiller au respect du droit au public à
l'information, se demande encore une fois s'il survivra à ses
problèmes financiers actuels. Le ministre des Communications, qui dit,
depuis une dizaine de jours, réfléchir sur ce problème,
entend-il proposer à son gouvernement un projet de loi qui
assurerait un financement adéquat au Conseil de presse? En
d'autres mots, le ministre des Communications considère-t-il comme
important d'avoir un organisme, le Conseil de presse, et se sent-il un petit
peu responsable d'assurer l'avenir d'un organisme qui veille à la
liberté de presse et au droit du public à une information la plus
impartiale possible, grâce à ce conseil de surveillance de la
nouvelle?
Le Président: M. le ministre des Communications.
M. Cannon: Merci, M. le Président. Je remercie le
député de Masson de me poser cette question, puisque ça me
permet de rectifier un peu les propos qui ont été tenus par le
leader de l'Opposition, en cette Chambre. Au fait, je ne lui apprends rien en
lui disant que le Conseil de presse a été créé
grâce à l'initiative de journalistes et de certaines entreprises
de presse. La Fédération professionnelle des journalistes du
Québec est l'une des associations qui constituent évidemment le
CPQ et qui a, comme vous le savez, formulé une résolution le 2
décembre dernier. Actuellement, vous le savez, la position finale du CPQ
se fera connaître à l'occasion des états
généraux qui se tiendront le 12 janvier prochain. Quant à
celui qui vous parie, je crois qu'il est tout à fait sage et normal que
nous attendions que l'ensemble des intervenants, l'ensemble des membres du
Conseil de presse puisse formuler, évidemment, ses commentaires,
après quoi, comme je l'ai indiqué au leader de l'Opposition, nous
aurons l'occasion de regarder ces recommandations et d'en analyser le
contenu.
Le Président: En question complémentaire.
M. Blais: M. le Président, une question
complémentaire qui va être la même question, parce que je
n'ai pas eu de réponse. Le ministre entend-il emmener une loi cadre qui
obligerait soit les journalistes, les "médiums" et le gouvernement ou
les médias d'information à participer obligatoirement à la
survie financière du Conseil de presse qui est en difficulté
financière actuellement? C'est ça, la question.
Une voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre.
M. Cannon: M. le député de Masson, M. le
Président, fait la prétention que le ministre des Communications
n'a pas compris sa question. Au contraire, vous n'avez pas compris ma
réponse.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Cannon: Je vous ai dit: Lorsque l'ensemble des intervenants,
c'est-à-dire les membres du Conseil de presse, aura terminé sa
réflexion sur cette question, j'aviserai la Chambre quant à
l'attitude et à la position que nous allons adopter. Merci, M. le
Président.
Une voix: Très bien.
Le Président: En question principale, M. le leader adjoint
de l'Opposition et député d'Abiti-bi-Ouest.
Rapport de la firme Caron, Bélanger, Ernst et
Young sur l'affaire Durand à l'UQTR
M. Gendron: oui. il y a une couple de mois, m. le
président, le rapport sanfaçon nous apprenait que m. durand
était parti avec la caisse, à l'université du
québec à trois-rivières, c'est-à-dire une fraude de
600 000 $...
Une voix: Ça arrive.
M. Gendron: ...et M. Sanfaçon a fait un rapport objectif
à l'effet de faire la lumière là-dessus. La ministre de
l'Enseignement supérieur et de la Science a indiqué que le
rapport Sanfaçon soulevait plus de questions que de réponses.
Elle voulait que la lumière soit faite davantage sur cette
question-là, donc elle a demandé au président de
l'Université du Québec, M. Hamel, de confier à une autre
firme, comme c'est l'habitude de faire deux fois la même chose, de faire
toute la lumière là-dessus. Ce rapport est sorti hier, c'est le
rapport de la firme Caron, Bélanger, Ernst et Young. Ma question
à la ministre aujourd'hui: Est-ce qu'elle est satisfaite des conclusions
de ce rapport? Estime-t-elle qu'elles donnent suite de façon
satisfaisante aux éléments précis contenus dans le mandat
confié à cette firme? Je voudrais juste rappeler le mandat,
c'était marqué: Faire l'analyse des mécanismes de
contrôle et de vérification interne à l'Université
du Québec à Trois-Rivières. Donc, ma question: Est-ce que
la ministre est satisfaite du rapport de 7 pages qui devait faire la
lumière sur un rapport de 60 pages?
Le Président: Mme la ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science.
Mme Robillard: M. le Président, de fait, j'ai reçu
hier, par l'intermédiaire du président de l'Université du
Québec, le rapport de la firme Caron, Bélanger et je pense que le
critique de l'Opposition doit être quand même content que, cette
fois-ci, le rapport ait été fait non pas par quelqu'un de
l'interne, mais par une firme externe, crédible, déjà
connue dans plusieurs milieux de vérification au niveau de la province
de Québec. Alors, j'ai reçu ce rapport hier après-midi, M.
le Président, je suis en train de l'analyser, je vais discuter avec le
président de l'Université du Québec et je pourrai faire
part de mes commentaires de façon publique par la
suite.
Le Président: En question complémentaire.
M. Gendron: je veux bien que la ministre de l'enseignement
supérieur analyse le rapport, mais est-ce qu'elle ne convient pas,
dès aujourd'hui.,.
Une voix: Une autre analyse. Ha, ha, ha!
M. Gendron: ...que les commentaires soumis par la firme Caron,
bien sûr, une firme externe, que l'analyse qu'elle fait, que le rapport
qu'elle soumet est plutôt bref, mince, peu loquace et absolument pas
significatif par rapport à l'essentiel du mandat? Ma crainte: Est-ce
qu'elle peut nous indiquer qu'elle aurait l'intention, après l'avoir
analysé, d'en faire un troisième?
Le Président: Mme la ministre.
Mme Robillard: M. le Président, je ne pense pas qu'on
puisse décider ou juger de la qualité d'un rapport au nombre de
pages d'un rapport, mais beaucoup plus en termes de qualité de contenu.
Et c'est à cet égard, M. le Président, que d'ici quelques
jours je vais en discuter avec le président de l'Université du
Québec et, encore une fois, je pourrai faire part, à ce
moment-là, de mes commentaires publics sur ce rapport.
Une voix: Les 10 commandements.
Le Président: Question complémentaire.
M. Gendron: Est-ce que vous, Mme la ministre, vous pouvez
affirmer en cette Chambre que vous auriez reçu autre chose que
ça, autre chose que ce qui a été rendu public? En termes
clairs: Vous, est-ce que vous disposez du même rapport qui a
été rendu public hier ou si vous disposez d'un autre rapport sur
la même question?
Le Président: Mme la ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science.
Mme Robillard: M. le Président, il m'est difficile de
répondre à la question parce que je n'ai aucune idée de ce
que le critique de l'Opposition a en main. Mais j'ai reçu le rapport du
président de l'Université du Québec directement.
(14 h 40)
Le Président: Toujours en complémentaire.
M. Gendron: Pour être certains qu'on a la même
information, est-ce que la ministre peut prendre l'engagement en cette Chambre
- puisqu'il s'agit d'une somme publique, c'est des fonds publics qui
appartiennent à tous les Québécois - de déposer ce
qu'elle a reçu - moi, je peux déposer ce que j'ai reçu,
ça ne me dérange pas - et, deuxièmement, nous indiquer
quelle somme a été versée à la firme Caron,
Bélanger pour la réalisation de ce mandat-là?
Le Président: Alors, Mme la ministre.
Mme Robillard: M. le Président, dès que j'aurai
analysé ce rapport et que j'en aurai discuté avec le
président de l'Université du Québec, il me fera plaisir de
faire des commentaires en cette Chambre et même de déposer ce
rapport.
Le Président: Alors, en question principale maintenant, M.
le député de Lévis.
Protocole d'entente entre le ministère
des Transports et le conseil de bande
de Kahnawake en vue de transport en
commun sur le pont Mercier
M. Garon: M. le Président, en avril dernier, le Conseil du
trésor a autorisé le ministre des Transports à verser une
subvention de 308 000 000 $ au conseil de bande de Kahnawake. Cette subvention
devait permettre l'opération et la surveillance policière de la
voie réservée au transport collectif sur le pont Mercier. En
raison des événements survenus l'été dernier et du
blocage du pont Mercier, j'ai écrit au ministre des Transports, le 7
septembre dernier, pour lui demander certains renseignements sur cette
subvention et le protocole d'entente intervenu entre le ministère des
Transports et le conseil de bande concernant l'octroi de cette subvention. Je
vais déposer une copie de cette lettre qui n'a toujours pas fait l'objet
d'une réponse de la part du ministre. Alors, M. le Président,
j'aimerais demander au ministre: Quand va-t-il répondre à ma
lettre et quand va-t-il me faire parvenir les renseignements que je lui ai
demandés?
Le Président: Alors, M. le député de
Lévis, vous voulez déposer un document, si je comprends bien. Il
y a consentement au dépôt du document? Consentement. Donc, le
document est déposé. M. le ministre, pour la réponse.
M. Elkas: Demain!
Le Président: Alors, en complémentaire.
M. Garon: Alors, est-ce que le ministre peut nous dire si les
conditions, pour ne pas nous prendre trop par surprise, rattachées au
protocole d'entente ont été respectées entièrement
depuis le versement de cette subvention?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Elkas: Je donnerai une réponse demain, M. le
Président.
Le Président: En complémentaire.
M. Garon: II n'a pas l'air au courant, mais je vais continuer
à lui poser des questions. Quelles mesures ont été prises
par le ministère des Transports pour faire respecter le protocole
d'entente intervenu entre lui et le conseil de bande de Kahnawake au cours des
derniers mois ou s'il pense que c'est une question qui n'est pas
sérieuse, que ça n'a pas d'importance que le pont Mercier soit
ouvert au transport en commun?
Le Président: Alors, M. le ministre des Transports.
M. Elkas: M. le Président, c'est un contrat qui a
été reconduit et qui avait été signé par mon
prédécesseur pour une voie réservée, comme vous le
comprenez. Vous allez comprendre aussi qu'on va payer pour des services offerts
et, si la voie réservée est fermée, on ne paie pas.
Le Président: Toujours en question complémentaire,
M. le député de Lévis.
M. Garon: Comme l'entente intervenue concernait la période
du 1er juillet 1989 au 31 décembre 1993 et que les autobus n'ont pas
utilisé la voie réservée sur le pont Mercier pendant plus
de deux mois, est-ce que le ministre entend modifier le montant de la
subvention et, s'il y a lieu, de récupérer les sommes
versées?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Elkas: Je vais vous répondre tout de suite. M. le
Président, il me semble que c'est seulement normal qu'on paie
après que les services ont été offerts. Les services n'ont
pas été offerts, on ne paie pas!
Le Président: En question principale maintenant, M. le
député de La Prairie.
Déversements de contaminants à la
sablière Thouin par la compagnie Shell
M. Lazure: Oui, M. le Président, en réponse
à une question que je lui adressais la semaine passée concernant
l'enquête sur les déversements de produits pétrochimiques
à la carrière Thouin, le ministre de l'Environnement nous
informait qu'il commanderait une enquête à l'intérieur de
son ministère et le ministre ne pouvait pas nous dire, à ce
moment-là, où étaient passées les
évaluations quant à la quantité d'hydrocarbures
déversée dans la sablière Thouin. Je rappelle au ministre
qu'il s'agit d'une pièce importante qui manquait au dossier depuis
quelque temps et tellement importante qu'on apprend, ce matin, que Shell
conteste les 87 % qui lui sont attribués comme étant sa
responsabilité. Alors, la question au ministre de l'Environnement:
Est-ce qu'il peut dire s'il a enfin mis la main sur cette pièce
manquante? Sinon, est-ce qu'il pense mettre la main bientôt
là-dessus et est-ce qu'il va la déposer en Chambre lorsqu'il
l'aura, cette pièce manquante?
Le Président: Alors, M. le ministre de
l'Environnement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, j'ai
effectivement informé le député de La Prairie de
même que les autres membres de l'Assemblée nationale à
l'occasion d'une des périodes de questions de la semaine
dernière, que j'avais demandé au sous-ministre de
l'Environnement, M. André Trudeau, de faire effectuer une enquête
administrative complète sur les allégations d'un article de
journal paru dans le journal Le Devoir, sous la plume de Louis-Gilles
Fran-coeur.
J'ai été rassuré par le sous-ministre de
l'Environnement, le mandat a été confié au directeur des
services administratifs qui va s'acquitter, avec compétence et
célérité, du mandat qu'on lui a confié. Maintenant,
je réitère l'engagement, une fois l'enquête
complétée, de déposer ces conclusions devant
l'Assemblée nationale du Québec.
Le Président: En question complémentaire.
M. Lazure: Puisque le ministre, la semaine passée, nous
disait que les négociations traînaient en longueur avec Shell et
semblait blâmer Shell, comment explique-t-il qu'aujourd'hui les
autorités de la compagnie Shell disent publiquement qu'elles ont
déposé un plan de décontamination au ministère de
l'Environnement et qu'elles attendent encore la réponse du
ministère de l'Environnement. Comment concilie-t-il ces deux
versions?
Le Président: M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Très facilement, M. le
Président. La version publiée ce matin relève d'un appel
d'offres ou de consultations qui ont été faites par le
ministère de l'Environnement auprès de compagnies
spécialisées en techniques de décontamination au cours de
l'été. Cette approche auprès de six compagnies, si ma
mémoire est fidèle, s'est effectuée dans le cadre de
l'entente fédérale-provinciale sur la décontamination des
sols, où vous avez une somme de 50 000 000 $ qui est
réservée à la recherche et au développement. Cette
entente ne portait pas sur la décontamination comme telle du site et sur
l'application de la loi 65 en vertu du principe pollueur-payeur; en vertu de
l'entente fédérale-provinciale, ce sont les pollués qui
paient et, là-dessus, le ministre de l'Environnement n'a pas l'intention
de céder dans l'actuel dossier.
Le Président: En question complémentaire.
M. Lazure: Est-ce que le ministre pourrait s'abstenir de faire un
discours et répondre directement à la question? La semaine
dernière, il nous a dit: Les négociations sont en cours avec
Shell. Nous attendons le plan de décontamination. Shell dit aujourd'hui:
Nous avons soumis le plan de décontamination. Depuis quand le
ministère de l'Environnement a-t-il le plan de décontamination de
Shell? Et quand va-t-il le mettre en action, ce plan-là?
Le Président: M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président,
très brièvement, pour le bénéfice du
député de La Prairie, le plan de caractérisation qui peut
nous conduire à la décontamination a été
reçu au ministère de l'Environnement du Québec, comme je
l'ai indiqué la semaine passée dans cette Chambre, au mois de
juin, le 14 si ma mémoire est fidèle.
Quant à la décontamination comme telle, je lui
répète la réponse que je viens de lui donner. Il ne faut
pas mélanger cela avec l'entente fédérale-provinciale sur
les sites orphelins parce que, à ce moment-là, vous seriez
d'opinion que Shell n'est pas responsable de la contamination. Quand on parle
d'un site orphelin, on parle d'un site où on ne sait pas qui a
pollué et qui est responsable comme tel de la contamination du terrain.
En ce qui concerne les négociations avec Shell, pour que Shell assume sa
part de responsabilité dans ce qu'elle a contaminé à la
sablière Thouin, les négociations doivent se poursuivre, non pas
sous le cadre de l'entente fédérale-provinciale sur les sites
orphelins, mais sous le cadre de la loi 65, la loi du pollueur-payeur. Merci,
M. te Président.
Le Président: Alors, en question principale, M. le
député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint.
Classification de la route Villebois Selbaie
M. Gendron: Oui, M. le Président. Depuis au moins deux
ans, les intervenants et les usagers de la route Villebois Selbaie, qui est une
route importante dans la région de l'Abitibi-Témis-camingue et le
comté d'Ungava, se plaignent, avec raison, du mauvais état de la
route. Ça fait plusieurs interventions qui sont faites par les
travailleurs de la mine de même que par les usagers pour faire modifier
la classification de la route concernant l'entretien.
La semaine dernière, malheureusement, encore une fois - et ce
n'était pas la première - la région a dû subir une
perte de vie, suite au mauvais état de la route. Alors, ma question
très simple au ministre délégué aux Transports:
Quand entend-il donner suite sérieusement à la pile de
revendications qui lui ont été faites, tant par la chambre de
commerce, le conseil économique, les dirigeants de la mine, les
travailleurs, le ministère des Transports...
Une voix:...
M. Gendron:... pour nous donner une classification
routière qui correspondrait au niveau d'usage de cette route-là,
afin qu'on protège un peu mieux la sécurité des
travailleurs qui l'utilisent?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Transports.
M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Je remercie le
député d'Abitibi-Ouest de sa question. Je dois lui dire que, ce
matin, il m'a envoyé une lettre par messager m'indiquant qu'il venait de
nous envoyer une lettre pour nous demander de regarder l'état de ce
dossier et, suite à la réception de cette lettre, j'ai
demandé au responsable au ministère de faire les
vérifications nécessaires pour qu'on puisse vous donner une
réponse. Donc, j'ai donné suite à votre lettre de ce
matin. Je croyais que c'était un cas de comté vu que vous avez
pris la peine de m'envoyer une lettre et de faire des vérifications. (14
h 50)
Le Président: Question complémentaire.
Une voix:...
M. Gendron: Non. J'espère que le ministre en rentrant
à son bureau, s'il veut prendre connaissance du dossier de la route
Villebois Selbaie, constatera que la lettre de ce matin ne venait que
s'additionner à la pile et pourquoi le dossier est
d'intérêt public. Ma question...
Le Président: Votre question.
M. Gendron: Ma question est la même, M. le
Président. C'est un dossier d'intérêt public. Ça
fait deux ans que ministre délégué après ministre
délégué, on fait les mêmes revendications. La
question, c'est: Quand le ministre délégué à la
Voirie, pas sur la base de la lettre de ce matin, prendra-t-il la
décision de relever la classification de ce tronçon routier, qui
se trouve dans un état lamentable, donc, dangereux pour la
sécurité des usagers?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Transports.
M. Middlemiss: M. le Président, une chose dont je veux
assurer cette Chambre, nous sommes préoccupés et nous voulons
assurer la sécurité sur toutes les routes du Québec.
Ça là, il n'y a pas de question sur ça. M. le
Président, je pense que si on a écouté hier, le
ministère
des Transports a indiqué les sommes d'argent que nous
dépensons pour faire l'entretien l'hiver, pour s'assurer de la
sécurité. Mais ce que je trouve, M. le Président,
étonnant de la part du député d'Abitibi-Ouest, c'est qu'il
m'a parlé de plusieurs cas importants. Jamais, jamais il ne m'a
parié de ce cas-là, sauf que ce matin, ce matin, il m'a
envoyé une lettre, il m'a envoyé une lettre, et en plus, M. le
Président, la route de Selbaie, nous avons investi 6 000 000 $ sur cette
route-là pour améliorer sa condition.
Le Président: Alors, en question principale, Mme la
députée de Taillon.
Difficultés reliées à la nouvelle
taxe de vente du Québec
Mme Marois: Merci, M. le Président. Vendredi dernier, lors
de la discussion sur la TPS et sur la nouvelle taxe de vente dans certains
secteurs au Québec, le ministre du Revenu affirmait: Tout ce qu'on fait,
c'est qu'on s'étend un petit peu plus au niveau de certains secteurs qui
autrefois étaient taxés et qui ne l'étaient plus depuis
quelques années. Je pense aux meubles, au linge et, bien sûr, on
reconnaît les difficultés que cela va faire naître. Alors,
si le ministre reconnaît les difficultés, il semble être le
seul dans son gouvernement. Est-ce qu'il pourrait m'expliquer de quelles
difficultés il s'agit et qu'est-ce qu'il a prévu pour les
contrer, ces difficultés-là, M. le Président?
Le Président: M. le ministre du Revenu.
M. Savoie: M. le Président, dans le contexte de
l'application de la taxe de vente au Québec, évidemment, le taux
de la taxe passe de 9 % à 8 %, et elle sera à 7 % à
compter du 1er janvier 1992. Bien sûr, par contre, on doit aussi, dans le
processus d'harmonisation, justement dans le but d'épargner aux
entreprises québécoises quelque 400 000 000 $ à 500 000
000 $ par année avec les procédures d'harmonisation, tenir compte
du fait que la TPS s'applique sur l'ensemble du linge et sur la fabrication des
biens meubles, ce qui, au Québec, auparavant, comme vous le savez fort
bien, jusqu'à bientôt là, ne faisait pas l'objet de la taxe
de vente. Or, évidemment, les problèmes auxquels on pense
étaient surtout au niveau des régions frontalières, par
exemple, particulièrement la région de l'Outaouais où,
auparavant, il n'y avait pas de taxe de vente sur le linge. Les gens de
l'Ontario venaient magasiner davantage au Québec. Toutefois, avec
l'introduction de la taxe de vente au niveau du linge, le linge au
Québec arrive quand même un peu moins cher, mais quasiment
à parité avec le linge de l'Ontario.
Une voix: On va aider l'Ontario.
M. Savoie: Non, on aide pas l'Ontario. Le Président:
S'il vous plaît.
M. Savoie: Mais par contre, on devrait quand même maintenir
l'avantage comme je l'ai expliqué lors d'une tournée dans la
région de l'Outaouais, il y a environ deux semaines. J'ai
expliqué, qu'effectivement, l'initiative que nous avions devrait
être maintenue et, bien sûr, toutefois nous devrons agrandir notre
compétitivité, surtout du côté de ces régions
frontalières. Évidemment, M. le Président, c'est une
grande question. C'est assez difficile de s'expliquer sur une grande question
comme le meuble, le linge sur l'ensemble du territoire du Québec dans le
contexte d'une question.
Réponse différée
Le Président: Alors, c'est la fin de la période des
questions. Tel qu'annoncé précédemment, il y aura
maintenant un complément de réponse donné par M. le
ministre de la Santé et des Services sociaux à une question
adressée par M. le député de Notre-Dame-de-Grâce
concernant la distribution des vaccins au Québec. M. le ministre.
Distribution des vaccins au Québec
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, vous
vous rappelez qu'hier le député de Notre-Dame-de-Grâce
s'inquiétait de la non-disponibilité de doses pour des vaccins au
niveau des personnes âgées en particulier. Je vous ai dit, hier,
que nous avions acheté le même nombre de vaccins qu'en 1989. Je
vous rappelle que 23 % de ces vaccins-là n'ont pas été
utilisés en 1989 et que, par conséquent, nous étions dans
la bonne voie en renouvelant le même nombre, soit 483 000 doses. Il y a
un problème et je l'avais dit au député de
Notre-Dame-de-Grâce, hier. Nous avons donc, hier, acheté ce que
l'institut Armand-Frappier pouvait nous rendre disponible: 8550 doses, qui sont
disponibles, depuis hier, dans les différents DSC pour être
capables de combler les lacunes qu'il y avait à ce moment-là.
Le Président: Tel que le prévoit le
règlement, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, vous
avez droit à une question complémentaire.
M. Atkinson: Merci, M. le Président. Je me réjouis
et remercie le ministre de la Santé et des Services sociaux pour sa
réponse. J'ai une information à savoir que l'institut
Armand-Frappier avait environ 72 000 doses disponibles entreposées
à l'institut. M. le Président, j'ai une question. À cause
de la grande demande et de la non-disponibilité de ces vaccins,
plusieurs hôpitaux et CLSC ont pris l'initiative de s'approvisionner en
vaccins à même leurs fonds, au
coût de 2,30 $ la dose. Ma question est la suivante, M. le
Président: Le ministre rembour-sera-t-il ces hôpitaux et CLSC pour
ces vaccins?
Le Président: M. le ministre de la Santé et des
Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je
suis prêt à examiner la possibilité, effectivement, de les
rembourser pour les doses qui auront été utilisées et
peut-être même faire en sorte que les doses qui n'auraient pas
été utilisées par des CLSC ou des centres d'accueil et
d'hébergement puissent financer, en partie, les doses utilisées
dans les autres établissements qui en ont acheté en surplus.
Le Président: Nous allons maintenant procéder aux
étapes suivantes de nos travaux. Il n'y a pas de votes reportés.
Motions sans préavis.
Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader adjoint du
gouvernement.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Johnson: Oui, M. le Président. J'avise cette
Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes
jusqu'à 18 h 30, de 20 heures à minuit ainsi que demain, le
mercredi 12 décembre, de 10 heures à 12 h 30, à la salle
Louis-Joseph-Papi-neau, la commission du budget et de l'administration
poursuivra l'étude détaillée des projets de loi suivants:
le projet de loi 112, Loi modifiant la Loi sur les assurances et d'autres
dispositions législatives; le projet de loi 101, Loi modifiant la Loi
sur les valeurs mobilières.
Après les affaires courantes jusqu'à 18 h 30, de 20 heures
à minuit ainsi que demain, le mercredi 12 décembre, de 10 heures
à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine, la commission
de l'aménagement et des équipements poursuivra l'étude
détaillée du projet de loi 108, Loi modifiant le Code de la
sécurité routière et d'autres dispositions
législatives.
J'avise également cette Assemblée que le mercredi 12
décembre, de 10 heures à 12 h 30, à la salle 1.38 de
l'édifice Pamphile-Le May, la commission de l'éducation
poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 102, Loi
modifiant la Loi sur l'instruction publique et la Loi sur l'enseignement
privé.
M. le Président, en terminant, j'avise cette Assemblée que
le mercredi 19 décembre, à compter de 10 heures, à la
salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement et des
équipements entendra les intéressés et procédera
à l'étude détaillée du projet de loi
d'intérêt privé 268, Loi modifiant la charte de la ville de
Montréal.
Le mercredi 19 décembre, à compter de 10 heures, à
la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine, la commission du budget et de
l'administration entendra les intéressés et procédera
à l'étude détaillée des projets de loi
d'intérêt privé suivants et ce, dans l'ordre
ci-après indiqué: projet de loi 272, Loi concernant la Compagnie
de fiducie Guardian et projet de loi 258, Loi sur la Compagnie American Realty
Investors Corporation.
Le Président: Merci, M. le leader adjoint du
gouvernement.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.
Est-ce qu'il y a des questions?
Une voix: II n'y en a pas.
Le Président: II n'y a pas de question. Donc, ceci met fin
aux affaires courantes.
Maintenant, aux affaires du jour, M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, je vous demande d'appeler
l'article 55 du feuilleton.
Le Président: Â l'article 55 du feuilleton, il
s'agit des crédits supplémentaires n° 1 pour l'exercice
financier se terminant le 31 mars 1991, déposés par le ministre
des Finances le 5 décembre 1990. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, j'indiquerais, à ce
moment-ci, l'ordre des travaux que nous pourrions poursuivre. Pendant une
durée d'une heure, le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la
Technologie aura à assumer la défense des crédits
supplémentaires qui le concernent. Pendant une période suivante
d'une heure, ce sera au tour du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation quant au secteur des pêcheries. Donc, le ministre
délégué aux Pêches sera interpellé et, durant
une heure additionnelle, finalement, le ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle sera
disponible, ici même.
Je fais motion, conséquemment, pour que nous nous constituions en
commission parlementaire. le président: en commission
plénière, m. le leader adjoint. je comprends que vous voulez dire
en commission plénière. c'est ça. oui, m. le leader
adjoint de l'opposition.
M. Gendron: M. le Président, je n'ai pas d'objection, mais
comme il était prévu qu'on commencerait à 15 h 15 et que,
de toute façon, dans le temps qui nous est imparti, il nous reste du
temps, puisqu'on finit à 18 h 15, je suis d'accord. Mais qu'on le fasse
à l'heure prévue pour attendre certains collègues qui ne
pouvaient pas être disponibles avant, de mon côté. Alors, on
suspend pour quelques minutes, mais à
15 h 15, on sera en commission plénière pour faire les
crédits.
Le Président: très bien. pour être
très clair, vous avez donné un certain ordre des travaux pour des
périodes consécutives de trois heures. c'était indicatif
seulement, c'est bien ça? alors, la motion pour envoi en
plénière est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. En conséquence,
l'Assemblée va maintenant se transformer en plénière
à compter de 15 h 15 et, entre-temps, il y aura une suspension de nos
travaux. Donc, cette Assemblée se constitue en plénière
pour l'étude des crédits supplémentaires n° 1 de
l'exercice financier se terminant le 31 mars 1991. Alors, l'Assemblée se
transforme en plénière immédiatement et, en
conséquence, nous suspendons nos travaux jusqu'à 15 h 15.
(Suspension de la séance à 15 h 2)
(Reprise à 15 h 19)
Commission plénière
Reprise de l'étude des crédits
supplémentaires
n° 1 pour l'année financière
se
terminant le 31 mars 1991
Le Président (M. Lefebvre): Nous sommes réunis en
commission plénière afin de poursuivre l'étude des
crédits supplémentaires n° 1 pour l'exercice financier se
terminant le 31 mars 1991.
Je vous rappellerai l'ordre des travaux qui a été
indiqué tout à l'heure par le leader adjoint du gouvernement,
à savoir que, dans un premier temps, pour une durée d'une heure,
nous procéderons à l'étude des crédits
supplémentaires du ministère de l'Industrie, du Commerce et de la
Technologie. Dans l'heure qui suivra, nous procéderons à
l'étude des crédits supplémentaires pour le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation,
secteur pêcheries, et dans la dernière période,
c'est-à-dire pour une autre heure, nous procéderons à
l'étude des crédits supplémentaires du ministère de
la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle.
Ministère de l'Industrie, du Commerce et de la
Technologie
Alors, nous commençons, tel que mentionné tout à
l'heure, immédiatement avec les crédits du ministère de
l'Industrie, du Commerce et de la Technologie. Je reconnais à partir de
maintenant M. le ministre. M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): Alors, M. le Président, je suis
ici pour répondre aux questions de l'Opposition concernant les
crédits supplémentaires.
Mme Marois: La première question...
Le Président (M. Lefebvre): Mme la députée
de Taillon.
Mme Marois: Merci, M. le Président. La première
question sera très simple: j'aimerais que le ministre nous explique en
quoi consistent ces 54 000 000 $ que l'on semble ajouter en crédits
supplémentaires, et je pèse bien mes mots en disant qu'on semble
ajouter, parce qu'une fois que l'explication sera donnée peut-être
qu'on comprendra que ce n'est tout simplement que la réalisation
d'engagements déjà pris. Alors là, j'aimerais ça,
d'abord, qu'on me fasse un portrait de ce que ça signifie, les
crédits qu'on ajoute.
Le Président (M. Lefebvre): M. le ministre. Remarques
générales M. Gérald Tremblay
M. Tremblay (Outremont): II s'agit essentiellement, comme la
députée de Taillon vient de le mentionner, de dépenses qui
avaient été prévues dans les années
précédentes, qui n'ont pas été
dépensées. Alors, si on prend, par exemple, un des gros montants
qui est une dépense de transfert, c'est la compagnie Noranda. Alors, le
montant, c'est 30 544 800 $. C'est une aide qui avait été
consentie sous forme de prêt sans intérêt au montant de 41
000 000 $, qui comportait, entre autres, certaines modalités
d'exonération totalisant 5 000 000 $. Alors, le prêt est
entièrement déboursé et la compagnie nous a remis
récemment la condition pour profiter d'une exonération du
remboursement du prêt pour la totalité de 41 666 000 $ moins 5 000
000 $; c'est parce qu'elle se conforme maintenant aux nouvelles normes
antipollution. Donc, aujourd'hui, dans les crédits
supplémentaires, on demande une somme additionnelle de 30 544 800 $ pour
répondre en partie à la demande de l'entreprise qui a droit
à 41 666 667 $ moins 5 000 000 $, donc 36 666 667 $.
Je pourrais passer à travers les montants qui totalisent 57 421
500 $ qui sont essentiellement des programmes, par exemple, d'aide aux
entreprises à technologie moderne, des aides aux entreprises dynamiques,
aide au développement touristique, aide aux entreprises du tertiaire
moteur, et selon l'article 7 de la Loi sur la Société de
développement industriel du Québec, des dépenses qui
avaient été périmées pour 13 000 000 $ parce que
l'entreprise ne nous avait pas fait sa demande. À ce moment-là,
c'étaient
des anciens programmes de la Société de
développement industriel du Québec, donc des subventions, et
aujourd'hui les entreprises nous font leurs demandes qui totalisent, incluant
Noranda, 57 421 500 $.
Le Président (M. Lefebvre): Mme la députée
de Taillon.
Mme Marois: Merci, M. le Président. Je comprends bien que
les 15 000 000 $ supplémentaires prévus à l'aide aux
entreprises en situation difficile ne sont pas compris dans ce budget
supplémentaire.
M. Tremblay (Outremont): Du tout, du tout. Ce sont
essentiellement des dépenses de transfert qui sont, des fois,
budgétées; mais si l'entreprise ne fait pas sa demande, elles
sont périmées. L'année dernière, on avait
périmé, aux derniers crédits, 13 253 000 $. Alors, c'est
évident que les entreprises reviennent aujourd'hui et nous demandent
sensiblement le même montant qui, aujourd'hui, totalise 14 943 340 $. Et
si on ajoute à ça la demande de Noranda, on totalise les 57 421
500 $.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Alors, M. le Président, ça
m'inquiète. Je suis très sérieusement inquiète
parce que le ministre nous avait annoncé qu'il ajouterait des sommes
supplémentaires pour venir en aide aux entreprises. Au discours sur le
budget, il y avait déjà de prévu 30 000 000 $ - j'ai le
discours sur le budget devant moi - de prêts participatifs de dernier
recours aux entreprises qui se qualifieront, sur deux ans. On nous a
annoncé, en cours d'année, il y a à peine quelques
semaines, que, déjà, ces 30 000 000 $ allaient être
largement dépassés et donc qu'on ajouterait 15 000 000 $. Mais si
je comprends, on attend que la catastrophe se produise pour l'ajouter,
finalement. Et je suis inquiète parce que j'ai l'impression que ce
gouvernement est absolument insensible à la situation économique
dans laquelle on se trouve, à la récession dans laquelle sont
plongées des milliers, des dizaines, des centaines d'entreprises, au
Québec. Et on a l'air, ici, d'être à peu près les
seuls à parler dans le désert parce qu'on n'a pas l'impression
d'avoir, de l'autre côté, des interlocuteurs qui sont capables de
recevoir les questionnements qu'on a.
Hier, j'interrogeais le ministre, dans cette Assemblée, sur la
question des taxes sur les inventaires que le fédéral va
rembourser à moitié, à 30 %, à 40 % de ce que les
entreprises ont payé, et il me dit: Oui, on discute avec Ottawa. Je pose
la même question au ministre du Revenu sur l'implantation de la taxe de
vente sur les meubles et sur les vêtements, il me dit: Oui, ça va
poser des difficultés, mais, finalement, vous savez, c'est plutôt
en zone frontalière; parce que ça avait amélioré la
situation des entreprises qui vendent des vêtements et des meubles; parce
que, comme en Ontario ou ailleurs, on payait la taxe de vente et que,
maintenant, on la paiera aussi au Québec. Avant, ils venaient acheter
chez nous, ils ne viendront plus. Bien voyons! C'est absolument prendre le
problème par le petit bout de la lorgnette et n'avoir absolument aucune
espèce de conscience de ce qui se passe actuellement au
Québec.
Mais là, on nous dit toujours que, dans ce gouvernement, mieux
vaut prévenir que guérir. Bon! Bien, il y a quelqu'un, quelque
part, qui a oublié de prévenir, sûrement, parce que la
récession est là, les entreprises risquent de s'engouffrer dans
une situation dont elles ne pourront jamais sortir et on attend Godot, de
l'autre côté. Et je ne suis pas la seule à le dire. Cette
semaine, l'éditorialiste de La Presse, Alain Dubuc, disait:
"Récession: le Québec frôle la catastrophe", ce n'est
toujours bien pas moi qui l'ai inventé, le titre, je ne pense pas avoir
ce pouvoir-là. "Québec frôle la catastrophe" - qu'est-ce
qu'il nous dit? - "La récession frappe de plein fouet". Les
données de Statistique Canada montrent qu'au seul mois de novembre, le
Québec a perdu 39 000 emplois, après en avoir perdu 28 000 en
octobre. Ces chiffres n'indiquent pas seulement que la récession est
visible; ils montrent aussi que le processus s'accélère.
Désormais, la gravité de la récession dépendra de
sa durée. S'agit-il d'un mauvais moment à passer, ou plutôt
du début d'une longue période de détérioration?
Plusieurs facteurs commencent à suggérer que cette
récession pourrait être longue et donc dure. Je ne me
réjouis pas de ça, je ne veux pas embêter le gouvernement
avec ça, sauf que je voudrais qu'il réagisse. Je voudrais qu'il
se passe quelque chose de l'autre côté et qu'on cesse de faire
comme si "business as usual", M. le Président, parce que c'est
ça, l'impression que j'ai de ce côté-ci. Et, à moult
reprises, je suis intervenue auprès du ministre, auprès du
premier ministre, lorsque le ministre a dû s'absenter, qui a eu la
même attitude, un peu flegmatique, nous disant: On s'en occupe. Qui s'en
occupe? J'aimerais bien savoir, et où? Et quelles sont les sommes qu'on
verse? Quand on regarde les crédits du ministère et de la
Société de développement industriel parce que, là,
on parle évidemment de crédits à la Société
de développement industriel, que je regarde les budgets de 1989-1990 et
ceux de 1990-1991, malgré l'ajout dont nous parie le ministre
actuellement, de l'ordre de 57 000 000 $, dont 34 000 000 $ vont à
Noranda... D'ailleurs on pourrait y revenir sur Noranda, hein? J'aimerais
ça voir si on va aider autant d'autres entreprises au Québec
à régler leur problème de pollution comme on le fait avec
Noranda. Je ne dis pas que ce n'est pas important de régler les
problèmes de pollution, au contraire. Mais est-ce qu'on
est prêt à mettre les mêmes sommes, dans les
mêmes proportions, pour d'autres entreprises qui vivent des situations
similaires? Je pose la question, M. le Président, et j'aurai
sûrement l'occasion de revenir sur ce thème-là et sur ce
sujet-là. (15 h 30)
Mais revenons maintenant aux crédits de la SDI. Malgré
l'ajout de 57 000 000 $ dont on nous parle aujourd'hui qui, d'une part, va en
prêts participatifs et, d'autre part, en transferts, on est encore en
retard, en termes d'argent neuf injecté par la SDI, de 38 000 000 $ par
rapport au budget de 1989-1990 où nous n'étions pas, M. le
Président, que je sache, en récession, où le taux de
chômage était en bas de 10 %. À combien est-il actuellement
le taux de chômage? II est à 11,5 %, M. le Président. On
nous dit, de l'autre côté: Ah! Mais vous regardez toujours des
choses que vous avez faites, vous n'avez pas d'idées neuves à
nous suggérer. Je m'excuse, mais lorsque nous avons traversé la
crise de 1981-1982, qui n'était pas la plus facile à traverser -
on va en convenir - elle a été l'une de celles qui a
été la plus difficile, après la crise des années
trente, on a bâti un certain nombre d'outils et d'instruments. Je
comprends qu'à chaque fois que j'en parle, le ministre se montre un peu
agacé, en me disant: Écoutez, nous, on veut procéder
autrement, on veut capitaliser les entreprises autrement, on veut les
capitaliser, on ne veut pas les endetter. Je lui répéterai ce que
je lui ai dit l'autre jour en cette Chambre, lors de la période de
questions: Quand il n'y en aura plus d'entreprises, M. le Président, on
ne pourra pas les capitaliser parce qu'elles ne seront plus là.
J'écoutais ce matin, à la Commission Bélanger-Campeau qui
siège à Trois-Rivières, l'Association des fabricants de
meubles du Québec. Ils sont à peu près 125 qui sont venus
faire une présentation devant la Commission. Ils nous ont
expliqué combien de milliers d'emplois avaient été perdus
dans les dernières années et, particulièrement, dans la
dernière période. Et, ça, chez nous, ça a une
importance majeure, M. le Président. Qu'est-ce qu'on fait pour soutenir
ces entreprises pendant le mauvais moment qu'elles ont à traverser?
Sera-t-il de quatre mois? Sera-t-il de six mois? Sera-t-il d'un an? Ce n'est
pas le Parti québécois qui a inventé Corvée PME,
c'est un ancien président de la Chambre de commerce de Montréal,
actuellement au service d'une grande entreprise conseil de la région
montréalaise, qui dit au ministre: "Nous croyons pertinent de mettre en
place une nouvelle mesure qui s'adresserait spécifiquement à la
petite et à la moyenne entreprise." Le ministre me dit: Oui, j'en ai
discuté avec lui. C'est peut-être intéressant, mais ce
n'est pas tout à fait l'avenue qu'on veut privilégier. Bon, alors
d'accord. Si les entreprises ont des idées à aller
suggérer et que celui-ci nous dit: Non, ce n'est pas tout à fait
ce que je voulais, qu'est-ce qu'il a à nous proposer en contrepartie?
Alors, non seulement il n'a rien à nous proposer, en tout cas, à
ce que j'ai pu entendre jusqu'à maintenant, si ce n'est de dire: Oui, on
a investi un certain montant dans l'aide aux entreprises, 30 000 000 $. On a
dit qu'on en mettrait 15 autres, je n'en vois trace nulle part, M. le
Président, et nous sommes, à ce que je sache, à
l'étude des crédits supplémentaires. Où sont-ils
les fameux 15 000 000 $ qu'on nous annonce depuis déjà quelques
semaines pour combler le manque qu'il semble y avoir au fonds disponible
déjà prévu pour aider les entreprises? On nous propose
Corvée PME. Quelles réactions y a-t-il à cela, M. le
Président? On en discute, on a regardé la chose, mais
peut-être que les avenues seraient différentes. J'aimerais
ça que le ministre responsable du dossier de l'Industrie et du Commerce,
le ministre responsable de la Société de développement
industriel nous dise ce qu'il va faire pour aider les entreprises à
survivre parce que c'est de ça dont il s'agit, M. le
Président.
Ça l'amuse beaucoup quand je lui rappelle le plan Biron, mais je
vais lui rappeler encore aujourd'hui. Et je lui répète que je
vais l'appuyer s'il en bâtit un et il l'appellera comme il voudra mais,
il va admettre avec moi, que ça a permis - on a parlé l'autre
jour, j'ai fait une erreur en donnant le chiffre à la Chambre, je l'ai
fait corriger d'ailleurs au Journal des débats mais le ministre
ne l'a pas relevé parce qu'il savait que c'était ça - de
plus de 1000 entreprises, en fait c'est 1300 entreprises qui ont
été aidées au moment du pian Biron et qui a
coûté en fait à peine 10 000 000 $ au gouvernement du
Québec. Alors, à ce moment-là, son projet de 30 000 000 $
à 45 000 000 $ on nous dit: On ne le sait pas, on ne sait pas si c'est
30 000 000 $ ou 45 000 000 $; la seule chose qui est sûre c'est qu'on a
30 000 000 $ au budget, mais on n'a pas les 15 000 000 $ nulle part dans ce
qu'on discute aujourd'hui. Alors, j'aimerais bien savoir si, effectivement, il
est prévu qu'il s'ajoute, et quand il s'ajoutera. Il n'aidera pas,
ça va de soi, parce que les règles sont différentes. Il ne
pourra pas aider un nombre d'entreprises aussi significatif qu'a pu le faire le
programme que nous avions mis en place au moment où nous étions
au pouvoir, M. le Président.
M. Gérald Tremblay
M. Tremblay (Outremont): Alors, j'ai beaucoup de renseignements
à donner à la députée de Taillon. On va commencer
par juste la question des crédits supplémentaires. Les
crédits supplémentaires, ça n'ajoute absolument rien au
développement économique du Québec; ce sont des
engagements pris, il y a trois ans, il y a quatre ans, qui sont en voie de
liquidation. Alors, quand on se réfère aux 57 421 500 $, c'est
essentiellement de l'argent engagé par l'ancienne
Société de développement industriel du
Québec, donc, dans les années 1985-1986, où on disait
à une entreprise par exemple: Si vous faites tel projet, on va vous
donner un congé d'intérêts pour une période de trois
ans, ou cinq ans dans le secteur touristique. Alors, la seule raison pour
laquelle on vient en crédits supplémentaires aujourd'hui, c'est
parce que ce sont des engagements budgétaires, ce sont des engagements
qui ont été pris avant 1986 par la Société de
développement industriel du Québec. Ça n'ajoute absolument
rien au développement économique du Québec, parce que les
projets ont déjà été réalisés. On ne
fait que respecter un contrat, un engagement que nous avions pris avec ces
entreprises.
La députée de Taillon dit: Oui, mais, en Chambre, le
ministre s'est levé pour dire qu'il y avait 15 000 000 $ additionnels.
C'est vrai, mais ce n'est pas un engagement budgétaire. Ça ne
prend pas des crédits supplémentaires. La Société
de développement industriel prête de l'argent, alors l'engagement
qui avait été pris lors du discours du budget, au mois d'avril
1990, c'était de dire qu'on aurait 15 000 000 $ pour l'année
1990-1991, 15 000 000 $ pour l'année 1991-1992 et nous avons
augmenté l'année 1990-1991 de 15 000 000 $, ce qui fait 30 000
000 $, et les crédits disponibles pour l'année 1991-1992 sont
toujours là, ce qui fait un total disponible, pour aider les
entreprises, de 45 000 000 $.
Au moment où on se parle, la Société de
développement industriel du Québec a déjà
reçu une centaine de demandes qui totalisent 40 000 000 $. Je l'ai dit
et je le répète encore, toutes les entreprises qui
présentent de bonnes perspectives économiques, mais qui, à
cause du présent ralentissement économique, ont des
problèmes, on va les aider. On va les aider parce que c'est dans fa
continuité de ce que nous faisons depuis le dernier budget, depuis avril
1990.
Il ne faut pas que l'Opposition laisse croire à la population
qu'elle est la seule à se préoccuper des grands indicateurs
économiques. C'est évident qu'en tant que deputation
ministérielle on regarde également les grands indicateurs
économiques, mais on regarde tous les indicateurs économiques.
Alors, ça veut dire, en pratique, si on regarde au niveau de la
création d'emplois, depuis les 11 derniers mois, qu'il y a eu une
création nette d'emplois au Québec de 30 200 emplois, alors qu'il
y a eu une perte de 2700 emplois en Ontario. Le Québec a
créé 30 % de tous les emplois au Canada; le Canada en a
créé 105 700 et le Québec, 30 200. Alors, c'est un des
indicateurs économiques. Je ne veux pas dire qu'il n'y a pas eu
certaines pertes d'emplois récentes, mais, au niveau de la
création nette d'emplois, depuis 1989, au cours des 11 derniers mois, le
Québec en a créé. Est-ce que c'est assez? Non, ce n'est
pas assez. Est-ce qu'on veut en créer plus? Oui, on va en créer
plus.
Deuxième indicateur économique. On parie beaucoup des
faillites. Il faut dire également qu'il y a certaines entreprises qui,
dans une conjoncture économique défavorable, pour certaines
raisons, vont faire des propositions aux créanciers, vont restructurer
leur entreprise, et je dois informer la députée de Taillon que
les mécanismes que nous avons mis en place récemment nous
permettent de développer une meilleure complicité avec les
institutions financières traditionnelles ainsi que les
sociétés de capitaux de risque. La preuve, c'est que, au
début de la semaine dernière, on a beaucoup parié d'une
fermeture d'usine, avec 500 emplois. Nous avons travaillé toute la fin
de semaine et nous avons émis aujourd'hui, en collaboration avec une
société de capital de risque que la députée de
Taillon connaît très bien, une lettre d'intention pour relancer
cette entreprise. (15 h 40)
Je veux bien, moi, regarder le Biron 1 et le Biron 2, mais, pour
l'information de la députée de Taillon, pour qu'on parte bien
toujours des mêmes chiffres, je vais vous les donner. Au niveau du nombre
d'autorisations du Biron 1, c'a été 766 autorisations et les
autorisations du Biron 2, 684, donc sensiblement le même chiffre, c'est
1350. Donc, quand vous pariez de 1300, on est entièrement d'accord avec
ça. Le montant des garanties dans le Biron 1 était de 140 390 289
$. Le nombre de cas en défaut dans le Biron 1, c'a été 186
sur 766 et le montant payé par la Société de
développement industriel, c'est 27 946 790 $. Présentement, il
reste une garantie en vigueur, et nous n'anticipons aucune perte. Dans le Biron
2, les 684 autorisations d'aide, c'a totalisé 296 155 415 $. Le nombre
de cas payés sur les 684, c'est 54. Les montants payés, donc
déboursés maintenant, les pertes, 9 102 727 $. le nombre de
dossiers encore en vigueur sur lesquels une perte est anticipée est de
84, pour 8 266 565 $. donc, globalement, quand la députée de
taillon mentionne que c'est 10 000 000 $ de pertes, les pertes sont
sensiblement d'à peu près 45 000 000 $.
Je ne critique pas le Biron 1, le Biron 2. Je dois dire que dans la
conjoncture économique de 1981, où le précédent
gouvernement a dû réagir à une situation, je pense que le
plan Biron 2 et le plan Biron 1 ont fait un bon travail. Je ne nie pas
ça. Sauf que depuis 1984, le Parti québécois avait mis en
place une commission Saucier sur la capitalisation des entreprises et on a
continué, dans la même voie, de favoriser la capitalisation des
entreprises. Alors, aujourd'hui, la mesure la plus importante au niveau de la
Société de développement industriel, c'est de prêter
de l'argent à des entreprises pour favoriser la restructuration
financière de l'entreprise.
Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? Ça fonctionne
très, très, très bien. Ça fonctionne très
bien au point où, en ce moment, pour accélérer, parce
qu'au niveau de la formule, ça va bien... On travaille en
complicité avec les
institutions financières traditionnelles et les
sociétés de capital de risque et, ce qui est intéressant,
c'est qu'on restructure la capitalisation d'une entreprise. Donc, on ne fait
pas qu'endetter l'entreprise de façon additionnelle. On ne fait pas que
retarder l'échéance. On permet à une entreprise,
même si elle est dans une conjoncture économique moins favorable,
d'avoir une meilleure capitalisation pour lui permettre d'avoir cette vision
à moyen terme qui est essentielle pour faire de la formation des
ressources humaines, relever le défi technologique et, finalement,
mettre en place des mécanismes de qualité totale.
Je vais juste ajouter une dernière chose. On a parlé tout
à l'heure de la Corvée PME. C'est vrai que j'ai rencontré
M. Serge Godin, qui est le président de l'entreprise CGI, qui a
été président de la Semaine de la PME, qui m'a
consulté sur la Corvée PME. Je n'ai jamais dit non à une
Corvée PME. Par contre, la Corvée PME, la base même de la
Corvée PME, c'est d'essayer de faire une superstructure qui regrouperait
des sommes financières importantes pour jouer un rôle
complémentaire aux autres sociétés de capital de risque et
aux institutions financières traditionnelles, incluant la
Société de développement industriel du Québec.
Mais cette Corvée PME implique, à cause d'avantages
fiscaux, que la population va réinvestir des sommes importantes pour
aider les entreprises. On analyse présentement, avec Serge Godin et avec
entre autres d'autres intervenants qui sont parties au forum de l'emploi, une
formule. Je dois juste rappeler à la députée de Taillon
que si on réussit - et je le souhaite sincèrement, - à
mettre en place une formule, c'est une formule qui va apporter des
résultats à moyen terme. Avant que la population regagne la
confiance dans un véhicule style REA, Société de
placements dans l'entreprise québécoise, ça peut prendre
un certain temps.
Alors, je termine en disant ceci: Oui, oui, on est en train de donner
suite aux demandes de toutes les entreprises qui, à cause d'une
conjoncture économique moins favorable, ont des problèmes. Si la
députée de Taillon a des entreprises, et qu'elle veut me dire:
Cette entreprise a un problème. Je travaille, je vous dis, constamment
avec la deputation ministérielle et l'Opposition, je ne vous dirai pas
le nombre d'heures parce que ce n'est pas important, c'est notre rôle.
Mais l'important, c'est qu'on soit disponible pour régler les
problèmes des entreprises. Ça, c'est au niveau de la
Société de développement industriel du Québec; au
niveau du gouvernement, il y a des mesures pour accélérer les
investissements publics, il y a des mesures qui ont été
annoncées, de 279 000 000 $. Le premier ministre du Québec, la
vice-première ministre ont annoncé que, dans un avenir
rapproché, on va annoncer de nouvelles mesures pour
accélérer les investissements publics au Québec. Alors, je
pense que les moyens sont en place. Ce qu'il s'agit de faire, c'est
peut-être de mieux les publiciser, d'être davantage à
l'écoute des entreprises, d'accélérer les délais,
d'accélérer certaines mesures, disons,
d'éligibilité des demandes. C'est ce que nous faisons
présentement et toute suggestion qui pourrait améliorer l'aide
qu'on peut apporter aux entreprises, je suis prêt à
l'écouter.
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Mme la
députée de Taillon.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: M. le Président, je vais revenir sur certains
éléments que mentionne le ministre parce qu'il m'apparaît
qu'il essaie un peu d'arrondir les coins, d'atténuer un peu les
événements que l'on vit. D'abord, quand ce ne serait qu'au niveau
du langage, ce n'est pas un ralentissement qu'on vit, c'est une
récession. C'est différent. Un ralentissement, ça veut
dire que ça va un peu moins vite. Une récession, ça veut
dire qu'on plonge. Les termes relèvent de deux réalités,
décrivent deux réalités tout à fait
différentes. Je veux bien que, de son côté, il veuille
parler de ralentissement, mais dans les faits, ce n'est pas ça qu'on
vit. C'est une récession. Si le ministre regarde les indicateurs, nous
le faisons aussi et pas seulement un ou deux indicateurs, mais un ensemble
d'indicateurs. Alors, il va falloir qu'il convienne aussi avec moi que, de
juillet à novembre, on a perdu 87 000 emplois et qu'on a... J'ai dit
11,5 % tantôt, c'est 11,4 % de taux de chômage. Bien, ça, ce
sont des gens, à quelque part, qui n'ont plus de job et qui se
retrouvent actuellement à l'assurance-chômage.
J'entendais le ministre de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu nous dire tout à l'heure: On a
baissé le taux de présence à l'aide sociale sauf que,
là, je pense qu'il devrait y aller un peu plus mollo parce que les gens
qui sont actuellement à l'assurance-chômage, dans quelques
semaines et dans quelques mois, vont apparaître à l'aide sociale,
malheureusement. Ils vont venir grossir les rangs des gens qui perdent leur
expertise, qui perdent leur capacité de se retrouver un travail parce
que c'est ça, aussi, le drame auquel on fait face. Eh oui, j'en ai un
certain nombre de suggestions et j'y reviendrai, entre autres, autour des
outils permettant peut-être, au moins, de profiter de la période
que l'on vit pour essayer de mieux former nos gens parce qu'ils ont des
problèmes en bout de piste. C'est le problème de formation de la
main-d'oeuvre qui est majeur. Les entreprises nous le disent: Je ne
dépose pas de demande sur des projets, c'est-à-dire que je ne
fais pas de soumission pour avoir des contrats, parce que je n'ai pas le
personnel nécessaire pour assumer, dans mon entreprise, les fonctions de
fabrication qui sont nécessaires. Je ne les ai pas, dans mon entreprise,
ces gens-là.
Oui, ça frôle la catastrophe actuellement, la
récession et la situation économique dans laquelle on est,
et pour différentes raisons dont, entre autres, cette fameuse
différence entre les taux d'intérêt que l'on connaît
et les taux d'inflation. Et ce n'est pas dû à des politiques - je
vais en convenir avec le ministre et je suis persuadée qu'il en convient
avec moi - du gouvernement du Québec, c'est dû à des
politiques de la Banque du Canada. On est en train, d'ailleurs, actuellement,
d'essayer de nous faire valoir les bienfaits et les avantages du
fédéralisme. Je me dis: Je commence à avoir des
problèmes sérieux avec ça parce que je pense que le Canada
est en faillite technique et il est temps qu'on sacre le camp, et au plus vite
à part cela, parce qu'on va casquer une partie de ça et je ne
suis pas certaine que c'est à notre avantage de le faire. Cela
étant dit, c'est un autre débat. On y reviendra sûrement
dans... On est dans un autre forum et on y reviendra sûrement ici. Donc,
ce n'est pas de ralentissement, mais c'est de réelle récession.
(15 h 50)
Revenons sur les chiffres. Je sens le besoin de le faire et je sais que
c'est agaçant un peu, mais revenons sur les chiffres que le ministre
nous donnait autour du plan Biron 1 et du plan Biron 2. Il va admettre avec moi
que si j'additionne les 27 000 000 $ de cas qui ont été
payés, assumés - 27 700 000 $ - dans le plan 1, et 9 000 000 $
dans le plan 2, on arrive autour de quelque chose comme 37 000 000 $, quand on
additionne tout ça, mais on aura aidé quand même, ou
soutenu 1300 entreprises. D'une façon moins structurante, je l'admets,
Je ne nie pas ça. C'est moins structurant que ce qui se fait
actuellement par le prêt participatif ou par d'autres formes
d'intervention, mais, dans les faits, II y aura peut-être eu 1000
entreprises de plus. Peut-être que ce n'est pas ça.
Peut-être que c'est simplement 500. Mais ce seront quand même 500
entreprises qui seront peut-être viables, peut-être en très
grande santé maintenant et qui fournissent de l'emploi aux gens du
Québec. En tout cas, elles n'ont pas failli pour la majorité
d'entre elles. Peut-être seraient-elles passées à travers
sans notre aide. Mais soyons un peu pessimistes et ramenons cela à 500.
Ça ne se comparera jamais aux 60 ou aux 100. On me dit 100 demandes qui
sont devant... Ça ne se comparera jamais. Bien sûr, ce n'est pas
sur les mêmes règles.
Mais il reste qu'il faut quand même aller reconnaître les
avantages qu'ont procurés ces deux programmes gouvernementaux et que le
programme actuel ne procure pas ou procure sous un autre angle, mais à
un nombre d'entreprises beaucoup moins significatif. Je pense qu'on va convenir
de ça.
Le plan Saucier, mais je n'ai rien contre! Est-ce que j'ai
déjà critiqué une seconde le plan Saucier? Jamais. Est-ce
que j'ai même critiqué l'intervention de la SDI quant à ses
outils? Pas du tout. Et le ministre pourra retourner dans les documents qui
concernent nos travaux, les relevés de nos propos. Je n'ai pas
critiqué la SDI. J'ai dit: Je veux qu'elle en fasse plus. J'ai dit:
Est-ce qu'elle choisit les bonnes cibles? Mais je n'ai pas dit: Les outils
qu'elle a sont de mauvais outils. J'ai dit: J'aimerais ça qu'elle en ait
plus, qu'ils soient davantage diversifiés. J'ai dit ça, j'en
conviens. Mais je n'ai jamais dit que ce qui nous avait été
proposé dans le plan Saucier, d'ailleurs, étude que nous avions
commandée et pour laquelle nous avions bien l'intention d'intervenir...
Nous avions d'ailleurs commencé à le faire si je me rappelle
bien. Il faudrait que je remonte dans le temps pour voir exactement les gestes
qu'on avait posés. Mais c'est secondaire, au moment où on se
parie. Donc, je n'ai rien contre ça. Je dis: C'est plus. Et je suis
contente que le ministre me dise qu'il regarde d'un oeil favorable la
possibilité de mettre ensemble des ressources autour d'une Corvée
PME.
Vous savez, même si les gens, au départ, souhaitent parfois
aller dans un sens, en disant: Là, on va donner tel objectif à
notre regroupement d'intérêt pour, nous aussi, aller essayer de
chercher notre compte, y faire notre compte, parce que ça va de sol. On
ne fait pas ça gratuitement. Mais on s'entend que ce type de
concertation, dans une société comme la nôtre, qui est
tissée relativement serrée en termes de réseau... On sait
fort bien qu'il faut se ramasser dans une réunion de gens d'affaires
pour voir qu'on a à peu près le Québec tout entier qui y
participe à cet égard-là.
Donc, on a un réseau tissé serré et ce type de
concertation a souvent des impacts beaucoup plus profonds quant à un
éventuel travail de collaboration qui peut permettre de pousser plus
loin certains projets, qui peut permettre d'Innover aussi en matière de
progrès et d'avancement.
Je vais revenir avec deux autres indicateurs, M. le Président,
puis, après ça, on va parler un petit peu d'outils auxquels on
pourrait songer actuellement autour des politiques d'emploi qui rejoignent
essentiellement, je le souhaite, la volonté qu'a le ministre de dire: II
faut que nos entreprises passent à travers la situation "que l'on vit
maintenant.
On va regarder deux autres indicateurs. On va regarder les livraisons
manufacturières. Je ne les invente pas. C'est Statistique Canada,
ça encore. Alors, les livraisons manufacturières, de septembre
1989 à septembre 1990, ont baissé de l'ordre de 1, 4 %. Alors,
évidemment, si on tient compte de l'inflation, effectivement, c'est
beaucoup plus significatif que cela. Alors, on parle des livraisons
manufacturières.
Les ventes au détail. Je pourrais faire un beau lien avec notre
Loi sur les heures d'affaires. Mais on ne parle pas de ça, et j'y
reviendrai de toute façon. Les ventes au détail ont baissé
de 2,9 %. Le ministre Ira se promener voir les petits indépendants pour
voir comment
leur situation actuelle est en train de se détério-rier.
Les ventes au détail, une baisse de 2,9 %. Ce n'est pas parce qu'on
magasine plus longtemps qu'on a plus d'argent pour acheter, plus
particulièrement en période de récession.
On parlait des faillites. C'est vrai que ça peut être un
outil, effectivement, pour sortir d'une mauvaise passe que d'utiliser une
espèce d'entente que l'on propose, finalement, à nos
prêteurs.
Mais, là, ça peut être un outil comme ça,
mais on est comme mal pris. Quand on est rendu là, c'est parce que
ça va bien, bien mal. On va en convenir, tout le monde. On peut se dorer
la pilule, on peut se faire plaisir, mais on va ' convenir que c'est parce que
ça va mal. Bien, regardons la situation des faillites d'affaires.
J'exclus les faillites personnelles parce qu'on nous dit: Ah! il y a toujours
les gens qui utilisent ça. Bon. Prenons les faillites d'affaires. En
octobre, on aura eu 429 faillites d'affaires au Québec, soit un record
mensuel. Sur une période s'étalant de 1981 à 1990, on est
allés voir dans les statistiques, et on se rend compte qu'en octobre
1990 on aura atteint le nombre record de faillites mensuelles au Québec,
avec des hausses d'un mois à l'autre, M. le Président, qui sont
absolument faramineuses. On parle de janvier 1990 sur décembre 1989, 53
%, puis les mois se suivent et, malheureusement, se ressemblent: 23 %, 36 %, 43
%, 19 %. C'est inacceptable.
Quand on regarde les passifs: en octobre, 114 000 000 $ pour le
Québec, 123 000 000 $ pour l'Ontario. Mais aucune espèce de
comparaison possible, quand on sait la population qu'il y a en Ontario qui
frôle, quoi, 8 000 000 passés. Alors, évidemment, le nombre
d'entreprises étant aussi assez significatif, on nous dit: Oui, mais,
comme ce sont de grandes entreprises, peut-être que ça a un impact
assez différent sur les résultats nets en termes de nombres et de
passif. Bien, le passif ontarien est à peine quelques millions de
dollars de plus, si on considère 114 000 000 $ et 123 000 000 $. Alors,
c'est effectivement le Québec qui casque nettement davantage ce qui se
passe ailleurs. D'ailleurs, quand on regarde les statistiques cumulatives,
c'est absolument, mais alors là, catastrophique: 3000 faillites
d'affaires, statistiques cumulatives pour 1990. On parle de 3777 de janvier
à octobre. C'est absolument inacceptable. L'Ontario parle, lui, de 2278.
Donc, ça donne déjà la mesure.
Ce sont d'autres indicateurs dont doit tenir compte le ministre. Moi,
oui, je vais lui en faire une, suggestion, actuellement...
M. Tremblay (Outremont): M. le Président.
Le Président (M. Lefebvre): Oui, allez-y, M. le
ministre.
M. Gérald Tremblay
M. Tremblay (Outremont): Je vais répondre
brièvement. Je sais qu'il nous reste juste 15 minutes, mais je vais
être très rapide pour bien encadrer les suggestions, pour
être certain qu'on s'entend bien, parce que j'aimerais ça les
écouter, les suggestions. Mais j'aimerais vous dire au préalable
que j'ai toujours été très préoccupé par les
fermetures d'entreprise, principalement à cause de l'impact
socio-économique. Ce n'est réellement pas drôle, surtout
quand il y a une conjoncture économique moins favorable. Si j'emploie un
terme "conjoncture économique moins favorable" par rapport à un
autre terme, ce n'est pas que je veux faire de la sémantique, mais il y
a un terme qui ne fait pas partie de mon vocabulaire, puis c'est celui que vous
mentionnez. Alors, moi, j'appelle ça une conjoncture économique
moins favorable.
Alors, je veux vous dire que j'ai commencé à plonger non
pas au mois de septembre ou octobre 1990, mais au mois de mars 1990. Mars 1990.
J'ai réalisé que la politique monétaire du gouvernement
fédéral, une dette aussi importante que 380 000 000 000 $...
C'est inévitable que, pour financer cette dette, il faut avoir des taux
d'intérêt élevés, parce qu'en ce moment le Japon est
en train de rapatrier ses fonds pour développer sa propre
économie, 280 000 000 000 $ au niveau du développement
technologique, et l'Allemagne, l'autre pourvoyeur de fonds, est en train de
rapatrier ses fonds pour favoriser la réunification des deux
Allemagnes.
Donc, si on s'attend à ce que les taux d'intérêt
baissent de façon importante au cours des prochains mois, le financement
de la dette fédérale ne peut qu'engendrer des taux
d'intérêt élevés qui engendrent un dollar canadien
élevé, avec la conséquence qu'on engendre des fermetures
d'usine ou un développement économique moins important. Mais,
ceci dit, je ne contrôle pas ces deux variables. Alors, ce que je me suis
dit à la suite d'une analyse des indicateurs économiques... Quand
vous avez dit 11,4 % le taux de chômage, vous avez raison, mais il ne
faut pas oublier le 11,7 % que vous avez dit également parce que
ça, c'est pour la région de Montréal, 11,7 %. C'est
totalement inacceptable. (16 heures)
Alors, je l'admets, on peut regarder les autres variables au niveau des
livraisons. Je pourrais vous démontrer que, les huit premiers mois de
l'année, ça a bien été. Ça a bien
été, mais la situation se détériore,
présentement. Elle se détériore et il faut agir. Alors, si
on ne peut pas agir sur les variables que nous ne contrôlons pas,
c'est-à-dire les taux d'intérêt, la valeur du dollar
canadien, on peut, par contre, si on veut concurrencer dans un système
nord-américain... Parce qu'on s'aperçoit que c'est le
système nord-américain qu'il faut repenser, en fonction de trois
variables qui sont essentielles à la corn-
pétitivité de nos entreprises.
La première, vous l'avez mentionnée tout à l'heure:
il faut avoir la main-d'?uvre la plus qualifiée. Et c'est dans
cette optique que le gouvernement a mis en place une politique de 100 000 000
$, en crédits d'impôt, en partenariat avec les entreprises. Et
c'est également dans cette optique que je rencontre les leaders
syndicaux et la partie patronale pour développer un nouveau contrat
social dans les entreprises. Il faut que l'entrepreneur comprenne que c'est
important d'avoir des employés qui ont un sentiment d'appartenance
à l'entreprise, qui sont fiers et qui sont prêts à faire
des suggestions pour améliorer la productivité des entreprises.
C'est important que l'employeur assure la formation de ses ressources humaines;
24 % de nos employés, de nos travailleuses et nos travailleurs, sont
analphabètes, 11 % âgés de plus de 15 ans, dans le secteur
manufacturier. Alors qu'on dit: On va concurrencer sur la scène
internationale, on a de la misère à inculquer à nos
entreprises l'importance d'avoir des machines numériques, la conception
assistée par ordinateur, la fabrication assistée par ordinateur;
les employés, les travailleurs et les travailleuses, ne sont pas
prêts. Alors, premier défi, première variable: formation
des ressources humaines.
La deuxième variable qui est importante, c'est le défi
technologique. On doit être à la fine pointe du
développement technologique. On a mis en place des programmes importants
- je ne veux pas revenir là-dessus - une politique
intégrée, mais on doit s'attaquer maintenant à la culture
technologique. On doit inculquer, tant à nos employeurs qu'à nos
travailleurs, l'importance de la culture technologique.
La troisième variable qui est essentielle, c'est la gestion de la
qualité. Il me semble que ça devrait être évident,
la gestion de la qualité. La non-qualité, le coût de la
non-qualité, c'est 21 000 000 000 $; ça représente 15 % du
chiffre d'affaires d'une entreprise. Et on prétend pouvoir concurrencer
sur la scène internationale.
Je veux juste ajouter deux petites choses. Quand on parle de l'aide
à toutes les entreprises, 1350 aides, ça s'est fait sur une
période de quatre ans. Je l'admets, ça s'est fait sur une
période de quatre ans. En ce moment, nos entreprises - on va l'admettre
- à cause des efforts faits par les deux gouvernements - ce n'est pas
une question de savoir qui en a fait plus qu'un autre - étaient,
jusqu'à tout récemment, mieux capitalisées, donc un peu
mieux préparées à faire face à un ralentissement
économique. Ça explique pourquoi, là, on a une centaine de
demandes. Mais on va en avoir plus de demandes; on verra. Je n'en souhaite
certainement pas 1300, mais je pense qu'on va avoir beaucoup de demandes, et
nous sommes prêts. Nous sommes prêts, en tant que gouvernement,
à assumer nos responsabilités, pour permettre à toutes les
entreprises de passer à travers la conjoncture économique moins
favorable.
Et, finalement - c'est ma conclusion - on va réussir. On va
réussir, en autant que tous les partenaires économiques... C'est
fini, le beau discours d'aller sur la place publique et de dire, comme, par
exemple, le Conseil économique du Canada l'a mentionné encore
récemment: II faut travailler davantage, nouveau partenariat entre le
gouvernement, entre les entreprises et entre les syndicats; il faut maintenant
le faire. Il faut le faire ensemble. Alors, sur ça, moi, je suis
prêt à collaborer avec tous les intervenants économiques
pour améliorer la conjoncture économique, présentement, et
permettre à nos entreprises de passer à travers la conjoncture
économique moins favorable, mais à une condition: je ne veux pas
retarder des échéances. Je veux m'assurer que cette entreprise,
étant mieux capitalisée, va investir dans les trois variables que
j'ai mentionnées tout à l'heure: la formation des ressources
humaines, le défi technologique, la gestion de la qualité, pour
devenir une entreprise de demain. On va réussir parce qu'on va le faire
ensemble. Et sur ça, si vous avez des suggestions à faire,
j'écoute, et je vais noter toutes ces suggestions.
Le Président (M. Lefebvre): Merci... Mme Marois:
Alors, on en a déjà...
Le Président (M. Lefebvre): ...M. le ministre. Je veux
vous indiquer, Mme la députée...
Mme Marois: II reste 10 minutes.
Le Président (M. Lefebvre): ...de Taillon et
également à vous, M. le ministre, qu'il reste environ une
douzaine de minutes. Alors, Mme la députée de Taillon.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: D'accord. Alors, merci, M. le Président.
J'étais bien consciente de cela.
Je vais aborder d'abord... Bien, on va en régler une en premier.
Et, après ça, on regardera les mesures qui pourraient être
envisagées, effectivement, pour nous aider à passer à
travers la crise. Mais plus que ça, parce qu'il n'y a pas juste des
problèmes de capitalisation, on en convient, dans les entreprises. Il y
a aussi d'autres types de problèmes - le ministre en parlait - de
formation; je vais y revenir aussi. Il y a aussi un problème de
concertation entre les partenaires, dans une perspective de
développement des régions, là où se crée,
par la petite et la moyenne entreprise, le plus d'emplois.
La première, je n'y reviens plus, on en a assez longuement
parlé, c'est effectivement un plan du type de celui que nous avions mis
en place qui, à mon point de vue, mériterait d'être retenu,
quitte à ce qu'il soit l'espèce de roue de secours pour ne pas
que les entreprises s'y
engouffrent. Je pense au plan Biron. Vous avez dit: Oui, on va le
regarder, mais ça va être quelque chose de différent. Vous
ne vouiez pas le regarder; moi, je vous le dis: Envisagez-le comme une roue de
secours parce que quand on sera dans - j'allais utiliser un terme non
parlementaire, mais quand serons effectivement dedans - une situation encore
plus pénible que celle que nous vivons maintenant, peut-être bien
qu'en catastrophe, ce sera utile de le sortir. Alors je vous le dis: C'est une
prévention que je fais. Vous avez abordé deux problèmes
qui dépendent d'un autre ordre de gouvernement et qui, effectivement,
sont à la source des problèmes que l'on vit actuellement au
Québec. On va convenir que la récession, d'abord, elle est
nord-américaine, et non seulement est-elle nord-américaine, mais
elle est canadienne. Il y a un ralentissement actuellement qui commence
à se... Un ralentissement dans leur cas, par exemple, qui commence
à se faire sentir aux États-Unis, mais, essentiellement, c'est
ici que ça se passe et le ministre a bien identifié les
problèmes reliés à la dette et aux capitaux qui sont moins
disponibles; les capitaux étant moins disponibles, il faut payer plus
cher pour les avoir. Donc, évidemment, on se retrouve avec des taux
d'intérêt absolument faramineux et on est pris dans une
espèce de cercle vicieux dont on ne réussit pas à se
sortir.
Moi, j'aimerais qu'on se rappelle que si, actuellement, les finances de
l'État du Québec sont en bonne santé, parce que je crois
qu'elles sont en bonne santé et que, toute proportion gardée, la
dette accumulée du gouvernement du Québec a un effet beaucoup
moins dommageable et absolument infime par comparaison - je dis bien par
comparaison - avec ce qui se passe à Ottawa, alors, je prends pour
acquis que si nous avons su, et notre gouvernement et le vôtre qui a
suivi, mieux géré les finances du Québec qu'on n'a su le
faire à Ottawa, si on gérait toutes nos finances, peut-être
bien que le résultat au bout, net, serait le même, qu'on
réussirait mieux que ne réussit le gouvernement d'Ottawa
actuellement. Évidemment, ça, par exemple, c'est un changement
pas mal plus fondamental qu'une mesure ici ou une mesure là, si
pertinente soit-elle. Je suis persuadée que la plus grande crainte qu'on
doit avoir actuellement, quant au projet de souveraineté nationale du
Québec, c'est d'être pris à assumer ce qui se passe
à Ottawa, plutôt que de prendre en main nos propres affaires et,
à ce moment-là, avoir un impact, selon le système
monétaire que l'on choisira, sur le niveau monétaire que l'on
retiendra et sur nos taux d'intérêt. Et je pense que c'est
possible d'en avoir, étant, bien sûr, modestes, puisqu'il y a
à peu près trois monnaies dans le monde qui ont une certaine
signification pour les économies, c'est le yen, c'est le mark et c'est
le dollar américain. Alors, je pense qu'on ne se prendra pas pour
d'autres et on sait fort bien que c'est à partir de la monnaie
américaine qu'on s'alignera quelque part et que ça flottera en
fonction d'un certain pourcentage.
Cela étant dit, pour moi, c'est le plus fondamental, parce que je
pense que notre passé est garant de notre avenir et qu'à cet
égard-là l'expérience que nous avons vécue au
Québec, quant au contrôle de nos dépenses, est tout
à fait enviable, M. le Président, et que le gouvernement
fédéral aurait dû prendre exemple sur nous plutôt que
de nous imposer ce qu'on vit maintenant.
Revenons maintenant à des mesures plus concrètes à
court terme, parce que celle-là peut être très
concrète aussi, même si elle se situe peut-être un peu plus
à moyen terme. Vous parliez de formation. Je suis fondamentalement
d'accord avec vous. C'est à cela qu'il faut s'attaquer. D'ailleurs, la
qualité totale dont vous parlez, discours auquel je suis très
sensible, vous savez fort bien, M. le Président, que ça
s'atteindra - et le ministre le sait - si on a des gens bien formés dans
l'entreprise. moi, je vous dirai encore là: le choix des moyens... on a
donné un crédit d'impôt pour assurer que la formation se
fasse dans les entreprises. est-ce qu'on peut convenir ensemble que les grandes
entreprises, qu'elles s'appellent bombardier, qu'elles s'appellent alcan,
qu'elles s'appellent, je ne sais pas, moi, provigo, ces grandes entreprises
mettaient déjà de l'argent d'une façon importante dans la
formation de leur personnel et à raison - et je ne les blâme pas,
loin de là, je leur dis bravo! - sauf qu'avec la nouvelle mesure qu'on a
mise en place, ces entreprises-là qui le déboursaient, dont une
partie était d'ailleurs remboursée et payée par ottawa
parce que, évidemment, ça faisait partie des dépenses de
l'entreprise, là, maintenant, on dit: vous allez
bénéficier d'un crédit d'impôt.
(16 h 10)
Elles n'en feront pas plus, M. le Président, elles vont en faire
autant sans doute; peut-être augmenteront-elles un peu leur pourcentage,
mais est-ce que l'outil va être adapté, par exemple, à la
moyenne entreprise, à la petite entreprise? M. le Président, pour
avoir été responsable des politiques de formation professionnelle
pendant au moins deux ans et demi au sein de ce gouvernement, je peux vous dire
non. Ce sont d'autres outils, différents et je suis d'accord quand le
ministre me dit: Des nouveaux contrats sociaux. S'il y en a une à qui
vous n'avez pas besoin de vendre ça, c'est moi. Le partenariat, je suis
d'accord à 100 % mais nous n'avons pas privilégié et
choisi les bons outils. La crise, elle devrait nous permettre - et s'il y a un
endroit où le gouvernement devrait être capable d'investir et de
dégager des ressources - de refaire un brassage chez nos gens qui ont
besoin de formation, de préparer dans des entreprises des gens qui ont
été mis à pied pour qu'ils puissent revenir à
l'entreprise lorsqu'on sera sorti un petit peu de la récession dans
la-
quelle on est actuellement, ou aller vers de nouveaux secteurs.
Je discutais avec le ministre de l'Éducation l'autre jour,
l'éducation des adultes, c'est le parent pauvre de tous nos budgets au
ministère de l'Éducation et c'est un élément d'une
formation professionnelle aussi. On gaspille nos énergies, on
s'épivarde un peu partout et on ne réussit pas à atteindre
les cibles. Ça, ça en est un moyen. Je vous dirai et je suis
d'accord, on s'entend donc sur la fin, on ne s'entend pas sur la façon,
et je suis persuadée que ma façon permettrait d'atteindre plus
facilement des objectifs pointus, des objectifs bien ciblés.
Encore une fois, on se laisse porter par les lois du marché avec
parfois ce que cela donne. Je ne dis pas que c'est toujours mauvais, non, on
vit dans ce système-là, c'est un système mixte, sauf que
je vous dis qu'en matière de formation professionnelle, compte tenu du
contexte dans lequel on applique ça - nous sommes dans le royaume de la
PME au Québec - bien, ça ne marchera pas. Le gouvernement va
payer mais il va payer les entreprises qui en faisaient déjà de
la formation. Alors, on n'aura pas résolu le problème.
L'autre aspect, M. le ' Président, et je sais que le temps presse
et je veux m'y arrêter encore quelques instants, ce sont les politiques
de développement régional, et là, je pense qu'on pourrait
en parler pendant des heures. De toute façon, je viens de faire le tour
du Québec, évidemment avec la commission
Campeau-Bélan-ger, et c'est un cri de désespoir qui nous vient
des régions qui nous disent: Démêlez-nous un peu cette
espèce d'imbroglio absolument inacceptable que vous nous faites vivre
gouvernement à gouvernement. Deux gouvernements qui se mêlent
à peu près de tout, à tort et à travers, chacun
voulant aller y chercher son heure de gloire -parce que c'est comme ça
que ça se passe malheureusement - au détriment des
régions.
Moi, ce que je souhaiterais, c'est qu'on bâtisse avec les
régions, en collaboration avec l'entreprenariat au Québec et avec
les représentants des travailleurs et des travailleuses, des fonds de
développement régionaux, et j'ai bien dit "régionaux" pour
dire que ça devrait se passer dans les régions, qu'on devrait
attribuer des ressources, pourquoi pas! Rapatrions donc, tant que nous ne
sommes pas souverains, l'assurance-chômage, et essayons de faire un
programme bâti à notre mesure, entre la sécurité du
revenu et l'assurance-chômage plutôt que de se garrocher nos
chômeurs et nos bénéficiaires d'aide sociale. Vous allez
voir, si sur le terrain on ne peut pas résoudre une partie des
problèmes que vivent les entreprises si elles ont besoin de personnel
formé, et essayons de voir si on ne créerait pas des motivations
supplémentaires dans les régions pour qu'elles cessent
d'être des quémandeuses. Ce n'est pas ça que les gens des
régions ont le goût d'être, mais que ce soient des gens qui
se prennent en main et qui décident qu'effectivement ils vont
contrôler une partie de leur développement, non pas tout leur
développement, mais une partie de leur développement.
Le Président (M. Lefebvre): II faudrait conclure, Mme la
députée, si on veut permettre au ministre de réagir!
Mme Marois: Oui, M. le Président. Je termine, de toute
façon c'étaient les points majeurs que je voulais souligner au
ministre, convenant, cependant, que sans que ce soit le pactole et la solution
à tout, je pense et ça m'apparait à l'évidence que
nous serions mieux servis par nous-mêmes si nous pouvions posséder
tous nos outils et tous nos moyens et qu'à cet égard là on
puisse bâtir des politiques qui ne viendront pas être
défaites le lendemain par une décision prise quelque part
à Ottawa pour régler ses problèmes, M. le
Président. Alors, je vous remercie. C'est ce que j'avais à dire
pour l'instant, mais vous conviendrez avec moi que j'en aurais eu au moins pour
une heure ou deux de plus.
Le Président (M. Lefebvre): M. le ministre, quelques
minutes pour vous permettre de conclure.
M. Gérald Tremblay
M. Tremblay (Outremont): Oui. Merci beaucoup, M. le
Président. Très brièvement pour respecter le temps parce
que j'en aurais, moi, pas pour des heures, j'en aurais pour des
journées. Alors, je voudrais au moins éclaircir une chose. Quand
on a attribué la saine gestion des finances publiques, je dois dire que
ça, c'est le présent gouvernement parce que, quand on a pris la
refève, le déficit était de 4 500 000 000 $ et si,
aujourd'hui, on a une santé financière, c'est à cause du
présent gouvernement qui a bien géré les finances
publiques.
Deuxièmement, il y a bien beau critiquer le fédéral
et dire qu'il a une dette de 400 000 000 000 $, 380 000 000 000 $, mais qu'on
pourrait rapatrier toutes sortes de pouvoirs. J'en conviens, mais qu'on me
démontre que notre part de la dette, 100 000 000 000 $... Qui va la
financer, comment et à quel coût?
Mme Marois: Pourquoi...
M. Tremblay (Outremont): La députée de Taillon m'a
fait des suggestions. Elle m'a dit: Au niveau de la formation, on a mis en
place 100 000 000 $ de crédits d'impôt. Elle a dit: Ça
s'applique juste à des grosses compagnies. Au contraire, c'a
été fait pour des PME québécoises. La preuve, c'est
un crédit d'impôt remboursable, c'est un crédit qui
s'applique sur les impôts à payer, c'est un crédit qui
s'applique sur la taxe et le capital et, en plus, c'est un crédit qui
est
finançable par la Société de développement
industriel à 75 %. Il ne faut pas commencer à dire que le
crédit d'impôt mis en place par le présent gouvernement,
ça favorise les grandes entreprises. C'est faux. Ça favorise les
PME québécoises au niveau de la formation.
Le Biron 1 et le Biron 2, c'a été une réaction
à une crise économique. Le présent gouvernement a fait un
choix dans la continuité de capitaliser nos entreprises, donc on ne
contribuera pas à les endetter, d'autant plus que ce qui est important
pour l'avenir, c'est de bâtir une saine capitalisation des entreprises
pour s'attaquer aux trois variables essentielles que j'ai mentionnées
tout à l'heure.
Quand on parie du développement économique
régional, j'aimerais juste mentionner à la députée
de Taillon que j'ai mis en place un comité, avec les organismes de
soutien aux initiatives-jeunesse, les corporations de développement
économique, l'Union des municipalités du Québec, l'Union
des municipalités régionales du Québec, le
ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie et l'OPDQ,
justement pour m'asseoir avec les intervenants et leur dire: De quoi avez-vous
besoin pour vous prendre en main? Quand on dit qu'on n'a pas mis en place des
fonds de développement régionaux, je regrette, la
Société de développement industriel du Québec, la
Caisse de dépôt et placement du Québec, le Fonds de
Solidarité des travailleurs du Québec ont mis ensemble sur pied,
Capidem à Québec, Capital Estrie, Capital Mauricie-Bois-Francs;
le Mouvement Desjardins a mis en place des fonds de développement
régional et il y a aussi le Fonds Emplois-Montréal, a
été mis en place par la Société de
développement avec le Fonds de Solidarité des Travailleurs du
Québec. Ça existe.
La solution, on me le dit dans toutes les régions du
Québec, parce que j'ai fait le tour du Québec à trois
reprises, ce n'est pas de créer de nouveaux véhicules; la
solution, c'est de travailler davantage ensemble et de passer à l'action
plutôt que de réinventer la roue, alors que le présent
gouvernement a démontré qu'il est capable de gérer
financièrement un bon gouvernement et, en plus, il a mis en place des
moyens pour permettre à toutes les entreprises qui ont de bons projets
de passer à travers une conjoncture économique moins
favorable.
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Alors...
Mme Marois: Est-ce que j'ai droit à une phrase?
Le Président (M. Lefebvre): Avec le consentement du
ministre, si vous permettez à Mme la députée de Taillon
une très courte intervention.
M. Tremblay (Outremont): Oui.
Mme Marois: Une chose, M. le Président.
M. Tremblay (Outremont): C'est normal. Je n'aurai jamais le
dernier mot!
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Marois: Pas du tout. Ça ne m'inquiète pas
là-dessus. Disons que vous êtes au pouvoir.
Je voudrais juste dire au ministre, et il va être d'accord avec
moi, que le problème de 100 000 000 000 $, la dette
fédérale, on l'a actuellement, et il n'y a personne qui propose
de solution pour le résoudre, alors que la façon dont nous avons
géré nos finances fait en sorte que nous, on se retrouve avec une
dette contrôlée au Québec.
Le Président (M. Lefebvre): Cette dernière
intervention, et je tiens à vous remercier, Mme la députée
de Taillon et M. le ministre de l'Industrie et du Commerce, termine
l'étude des crédits supplémentaires du ministère de
l'Industrie, du Commerce et de la Technologie.
J'inviterais les personnes qui doivent quitter à le faire
immédiatement et je prierais les autres personnes qui participeront
à l'étude des crédits du ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation à prendre place
dès maintenant.
(Suspension de la séance à 16 h 20)
(Reprise à 16 h 23)
Ministère de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation, secteur pêcheries
Le Président (M. Lefebvre): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Toujours à l'étude des crédits
supplémentaires n° 1 pour l'exercice financier se terminant le 31
mars 1991, tel qu'indiqué au début de la séance de la
commission plénière, nous procédons maintenant à
l'étude des crédits du ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation, secteur pêcheries. M. le ministre,
pour vos remarques préliminaires.
Remarques générales M. Yvon
Vallières
M. Vallières: Alors, je vous remercie, M. le
Président. C'est un plaisir renouvelé pour celui qui vous parie
de pouvoir participer au débat en cette Assemblée, plus
particulièrement aujourd'hui, avec une demande de crédits
supplémentaires de l'ordre de 5 360 000 $, pour le secteur des
pêches. Je voudrais simplement, M. le Président, vous faire un
court historique qui remonte au dernier budget, qui nous amène au
contexte dans lequel nous sommes aujourd'hui, en
demande de crédits supplémentaires.
En fait, le 25 avril 1990, le Conseil des ministres acceptait le
Programme de coopération pour l'avenir des pêches, un programme de
50 000 000 $. Le lendemain, le ministre des Finances confirmait, lors du
discours sur le budget, l'octroi de tels crédits. Le 23 mai 1990, le
Conseil des ministres en acceptait également la répartition par
objectif et par année budgétaire, dont, pour 1990-1991, 10 000
000 $ en subventions et 7 425 000 $ en garantie d'emprunts accordés par
le ministère et/ou par intervention de la Société
québécoise des pêches, sous forme de capital-actions.
Le 11 juillet 1990, un emprunt de 2 360 000 $ du fonds de
suppléance du ministère des finances était accordé
afin de débuter l'opérationnalisation du programme de
coopération pour l'avenir des pêches. le 25 juillet 1990, un
mandat spécial de 3 000 000 $ était également consenti
afin de poursuivre les projets à l'intérieur du même
programme cap. de plus, le ministère réussissait à
autofinancer un montant de 645 000 $ lors des mesures de réduction des
dépenses du 26 septembre dernier, alors qu'un autre 625 000 $
était autofinancé à même les crédits de
transfert des programmes réguliers.
Ainsi, M. le Président, le ministère a réussi
jusqu'à maintenant, à financer pour 6 630 000 $ et, par rapport
aux besoins financiers du Programme de coopération pour l'avenir des
pêches, pour le présent exercice financier, maintenant
évalués à 9 630 000 $, il manque des crédits de 3
000 000 $. en ajoutant à ce montant le remboursement de l'emprunt du
fonds de suppléance de 2 360 000 $, les crédits
supplémentaires à voter pour le programme 10, soit
développement des pêches et de l'aquiculture,
s'établissent, donc, maintenant à 5 360 000 $.
Tel est l'objet de cette demande qui est devant l'Assemblée
nationale et à laquelle j'espère pouvoir associer les membres de
l'Opposition officielle. Je veux d'ores et déjà indiquer que des
personnes, ici, m'accompagnent et s'il y avait, de la part du
député de Duplessis, plus particulièrement, du
questionnement face aux différents éléments du programme
ou face à certaines aides qui ont été apportées,
c'est volontiers que nous pourrons y répondre. Voilà, M. le
Président, pour mes remarques qui, comme vous pouvez le constater,
étaient tout à fait préliminaires.
Le Vice-Président (M. Lefebvre):Je vous remercie, m. le
ministre. toujours à l'étape des remarques préliminaires,
m. le député de duplessis.
M. Denis Perron
M. Perron: Merci, M. le Président. On sait que les
crédits supplémentaires qui sont octroyés au programme 10,
en rapport avec le développe- ment des pêches et de l'aquiculture
du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation,
s'élèvent, dans cette demande, à 5 360 000 $. Cette somme
est entièrement composée de crédits de transferts qui sont
des subventions. On devait s'attendre à ces crédits puisque
l'annonce du programme de relance des pêches, soit l'annonce du 24 mai
dernier, le Programme de coopération pour l'avenir des pêches, ou
encore le programme CAP, promettait une injection de 50 000 000 $ sur cinq ans
dans l'industrie des pêches, dont 17 400 000 $ en 1990-1991,
c'est-à-dire l'année budgétaire en cours.
En fait, les sommes véritablement investies par le gouvernement
sont moindres que celles annoncées puisque des 50 000 000 $, 12 000 000
$ prennent la forme de garantie de prêts et de capital-actions, lesquels
ne sont pas des déboursés. Ainsi, pour 1990-1991, l'aide
supplémentaire annoncée de 17 400 000 $ ne comprend que 10 000
000 $ de subventions et le ministre me corrigera si ce n'est pas exact. C'est
aussi le montant de crédits supplémentaires auquel on aurait
dû s'attendre aujourd'hui. Ma première question, M. le
Président, est la suivante: Est-ce que le ministre pourrait nous dire
exactement ce qu'il entend faire avec les 5 360 000 $ de crédits
additionnels qui sont demandés aujourd'hui?
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Duplessis. M. le ministre.
Période de questions
M. Vallières: M. le Président, d'abord, il n'y a
pas de cachette là-dedans. Quand le programme CAP a été
déposé, rendu public, il a été indiqué qu'il
y aurait pour 38 000 000 $ de subventions, grosso modo, bon an mal an, en
moyenne, pour les cinq prochaines années, à partir de 1990
jusqu'en 1995: 10 000 000 $ qui étaient prévus en 1990-1991, 10
000 000 $ en 1991-1992, une troisième année, 1992-1993, avec 10
000 000 $, les deux années subséquentes à 4 000 000 $,
qu'il y aurait aussi des garanties d'emprunt et que, pour les cinq
années annoncées au programme, on en retrouverait pour 12 000 000
$, ce qui faisait un total de 50 000 000 $ pour l'ensemble du programme.
A la question plus précise du député de Duplessis
qui désire savoir à quoi seront attribués ces 5 360 000 $,
il faut indiquer que, déjà, plusieurs ont été
l'objet d'analyses et de confirmations. L'argent qui est ici vise tout
simplement à venir financer les programmes déjà
annoncés. On pense, par exemple, au niveau de la rationalisation de la
flotte, à une aide financière spéciale au soutien de la
flotte de pêche pour un montant de 3 875 700 $. Comme vous le savez, le
programme consiste en des subventions pour les agrès de pêche et
les filets maillants,
pour l'assurance maritime, la pêche au homard, le carburant.
Ça sert également, l'argent qu'on vous demande aujourd'hui, pour
l'achat de crevettiers par la BCN, l'aide pour bateaux de pêche
semi-hauturiers pour la Basse-Côte-Nord, une étude sur la flotte
côtière, tout ça se chiffrant à quelque 600 000 $ ou
700 000 $ au total; également des sommes d'argent qui sont
prévues pour la restructuration et la rationalisation des usines de
première transformation pour un montant de 4 285 000 $; également
pour la restructuration des usines de deuxième et de troisième
transformation, aux environs de 90 000 $. (16 h 30)
Pour ce qui est de la restructuration des entreprises aquicoles,
également un montant prévu de 648 500 $; pour le
développement de la commercialisation, un montant de l'ordre de 227 000
$ pour un total, à date - prévisible de dépenses à
l'intérieur des 10 000 000 $ qui avaient été
annoncés - de 9 036 300 $. Et, donc, les sommes qui sont
demandées aujourd'hui visent à combler certains de ces
engagements qui ont été pris par le gouvernement et qui sont
déjà, dans plusieurs cas, des dossiers en réalisation ou
déjà complétés.
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Duplessis.
M. Perron: m. le président, pour 1990-1991, dans le cas de
la garantie d'emprunts et capital-actions, est-ce que le ministre pourrait nous
donner, nous décortiquer le montant de 7 400 000 $ qui est
mentionné pour le programme cap?
M. Vallières: M. le Président, effectivement, je
peux faire l'énumération de différents projets qui ont
été l'objet de garantie à ce jour, ou d'autres qui sont
à l'état de projet. Alors, par exemple, il y a la Baie des
Chaleurs Aquiculture inc., pour un montant de 550 000 $ en garantie; les
Pêcheries Trudel et Curadeau, 400 000 $; Poissonnerie de Cloridorme inc.,
100 000 $, Les Pêcheries de Rivière-au-Renard, 300 000 $;
Nord-Pêche, 150 000 $; H.E. Journeaux produits de la mer Itée,
pour 325 000 $; Madelipêche...
Il y a tellement de chiffres que vous allez me permettre de suivre
ça autrement. Journeaux, j'ai bien dit 325 000 $; Madelipêche, 1
000 000 $; Fruits de mer Côte-Nord inc., 400 000 $; Les Produits de la
mer Assets inc., 100 000 $; à l'état de projet, Pêcheries
Arctiques inc., 400 000 $; Fruits de mer de Grande-Entrée inc., 75 000
$; Centre de déshydratation Nord-Sud, 300 000 $ et, évidemment,
on s'attend à ce qu'il y ait d'autres projets qui entrent d'ici à
la fin du présent exercice financier.
Alors, on fait donc un total, pour les projets que je viens de vous
énumérer, en garantie de 4 100 000 $. Il y a un autre projet ici
que je vais mentionner au député de Duplessis, Baie des chaleurs
Aquiculture qui est probablement un dossier qu'il connaît bien et, en
acquisition d'actions, ça a été autorisé pour 514
600 $ et, sous forme de prêt, pour 985 400 $. ÇavientdeSOQUIA.
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. M. le
député de Duplessis.
M. Perron: D'abord, M. le Président, je voudrais demander
au ministre s'il a des raisons fondamentales, à savoir pourquoi, dans
les projets qu'il vient d'énumérer, il n'y a aucun projet de la
Côte-Nord et, en particulier, du comté de Duplessis, où il
y a effectivement trois activités générales qui sont
pratiquées, quatre éventuellement avec l'aluminerie. On a
actuellement la forât, on a actuellement le fer, on a les pêches.
Ce sont les trois grands secteurs d'activité.
Le Président (M. Lefebvre): Oui, M. le ministre.
M. Vallières: Les Pêcheries Arctiques, ce n'est pas
chez vous?
M. Perron: Les Pêcheries Arctiques s'en vont à
Ottawa.
M. Vallières: O.K. Alors, c'en est un que j'ai
mentionné, donc...
M. Perron: Ah! je ne l'avais pas entendu, celui-là. C'est
combien?
M. Vallières: Oui, c'est ça. Il est en demande pour
une garantie de 400 000 $.
M. Perron: Ah! il est en demande. M. Vallières: II
est en traitement, oui.
M. Perron: C'est suite aux problèmes financiers qui ont
été vécus cette année, en 1990?
M. Vallières: Oui, c'est ça. En 1990, oui. Comme
bien d'autres dans ce secteur-là, et souvent on est obligés de
revoir à l'intérieur des garanties déjà
données pour donner un coup de pouce additionnel et permettre à
ces gens de demeurer en affaires.
M. Perron: Maintenant, sur les garanties d'emprunt que le
ministre vient d'énumérer, est-ce que le ministre a des
prévisions, à savoir quelles sont les mauvaises créances
qui seraient éventuellement endossées par le gouvernement du
Québec?
Le Président (M. Lefebvre): M. le ministre.
M. Vallières: À date, dans le secteur qu'on vient
de vous mentionner, on n'anticipe pas de mauvaise créance. On vient
juste de le mettre à jour et on n'anticipe pas de problème
majeur.
Je pourrais peut-être mentionner au député de
Duplessis qu'il disait qu'il n'y a pas de programme particulier pour son
comté, mais je pense aussi qu'il est visé pour l'aide pour
bateaux de pêches semi-hauturiers sur la Basse-Côte-Nord. Je pense
que vous devez être visé par cette mesure où on a consenti
un programme de 550 000 $. Je pense qu'il y a certains de vos bateaux qui sont
concernés, certaines entreprises.
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Duplessis.
M. Perron: M. le Président, concernant le programme CAP,
puisque le programme CAP permettrait 10 000 000 $ de subventions pour 1990-1991
et que les crédits supplémentaires des Pêcheries ne sont
que de 5 360 000 $, quand peut-on espérer, d'ici avril prochain, des
crédits supplémentaires des Pêcheries de 4 640 000 $?
Le Président (M. Lefebvre): M. le ministre.
M. Perron: C'est-à-dire pour le montant global pour
l'année en cours.
M. Vallières: On a déjà, M. le
Président, obtenu les crédits d'autres sources, entre autres un
mandat spécial qui nous est parvenu - j'ai donné la date
tantôt - au mois de juillet 1990 pour 3 000 000 $ qu'on a touché,
de même que l'autofinancement à l'intérieur même du
ministère pour 1 270 000 $, ce qui fait qu'à date on a 9 630 000
$, par rapport aux 10 000 000 $ annoncés. Donc, il n'y a pas d'autres
crédits supplémentaires à venir. Je veux dire, on les
complète. On est à l'intérieur des 10 000 000 $, tel que
prévu.
Le Président (M. Lefebvre): M. le
député.
M. Perron: C'est donc dire qu'il y aurait eu une compression de
645 000 $, un genre de coupure, si on peut dire?
M. Vallières: Oui, au budget des opérations, et je
pense que c'est à l'honneur du ministère, parce que c'est
à l'intérieur des frais fixes et autres qui ont été
finalement remis au secteur des pêches, directement aux pêcheurs et
aux entreprises du secteur.
M. Perron: Bon. Maintenant, M. le Président, pour
l'année en cours, est-ce que le ministre pourrait nous dire, parce que
les crédits globaux qui sont alloués au ministère des
Pêcheries concernent plusieurs facteurs, concernent plusieurs endroits
où le gouvernement se doit de dépenser, au niveau des
associations de pêcheurs, quels sont les montants qui ont
été versés aux associations locales, aux associations
régionales, ainsi qu'à l'Alliance des pêcheurs du
Québec?
M. Vallières: Oui. Dans 30 secondes, le temps de trouver
les documents requis.
On prévoit, M. le Président, dépenser quelque 300
000 $ au niveau de ces différentes associations et ça inclut
l'Alliance des pêcheurs. Je n'ai pas le montant pour l'ensemble des
autres et celui de l'Alliance, mais je pourrais volontiers le faire parvenir
ultérieurement au député de Duplessis; mais on pense
dépenser au complet les 300 000 $, tel que prévu
originellement.
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Duplessis. (16 h 40)
M. Perron: Puisqu'on parle des associations de pêcheurs,
est-ce que le ministre pourrait nous dire s'il a réglé le
problème qui existait en Basse-Côte-Nord du golfe Saint-Laurent,
se rapportant à l'Association des pêcheurs de la Basse-Côte?
Vous avez Neil Roberts qui se trouve à être le directeur
général de l'Association de la Basse-Côte,
c'est-à-dire de l'association qui couvre Kegaska jusqu'à
Blanc-Sablon.
M. Vallières: Alors, M. Bougie, qui est bien au fait du
dossier, va répondre au député de Duplessis, M. le
Président.
M. Perron: Pas de problème, M. le Président.
Le Président (M. Lefebvre): Oui, M. Bougie, allez-y.
M. Bougie (Yvon): Oui. La réponse a deux volets,
simplement. Oui, on était au courant de ces problèmes-là.
Et je crois que, récemment, l'Association a opté pour un autre
permanent, je pense. En tout cas, ils se sont désistés de M.
Roberts.
En ce qui concerne le programme lui-même, l'Association a eu sa
subvention qui est de 50 000 $, dans le cas de l'Association de cette
région-là.
M. Perron: Ça a été versé. M.
Bougie: Oui.
M. Perron: Qui est actuellement le nouveau directeur
général? Est-ce que vous avez le nom?
M. Bougie: À ma connaissance, il n'est pas remplacé
encore.
M. Perron: II n'est pas remplacé. Mais Neil Roberts n'est
plus là.
M. Bougie: Voilà.
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Duplessis.
M. Perron: Toujours dans le cas de cette même association,
est-ce que le ministre pourrait me dire, combien il y a de membres
actuellement? Parce que je pense que le problème du versement de la
subvention était probablement dû au fait que l'Association des
pêcheurs de la Basse-Côte-Nord du golfe Saint-Laurent n'aurait pas
eu assez de membres qui payaient leur cotisation pour pouvoir avoir un montant
de versé par le gouvernement. Est-ce que c'est réglé,
cette partie-là?
Le Président (M. Lefebvre): M. le ministre.
M. Vallières: M. le Président, je vais laisser
à nouveau M. Bougie, après moi, répondre à la
question parce qu'il peut y répondre de façon très
précise. Je pense à ce cas en particulier. Je veux par ailleurs
indiquer au député de Duplessis que je me penche actuellement,
avec le sous-ministre adjoint aux Pêcheries, sur les modifications aux
critères permettant aux associations de profiter de certaines aides. On
s'est rendu compte que certains critères étaient peut-être
un peu trop difficiles à rencontrer par les associations. Et j'ai
l'intention de libéraliser un petit peu plus de ce côté, en
particulier au niveau du nombre de membres qui étaient requis, afin
d'alléger ça un peu pour permettre un peu plus de facilité
aux associations à devenir admissibles à ce programme. Mais sur
le point précis demandé par le député de Duplessis,
je demanderais à M. Bougie d'y répondre.
Le Président (M. Lefebvre): M. Bougie, pour un
complément de réponse.
M. Bougie: Oui, M. le Président. Au niveau des
détails techniques, l'assouplissement qui est en cours à l'heure
actuelle, c'est au niveau du nombre de pêcheurs qui doivent être
représentés. L'exigence du programme, par les années
antérieures, était des deux tiers des pêcheurs, et
maintenant, ce sera la majorité simple. Il y avait aussi une exigence
à l'effet que l'Association ait un représentant permanent; donc,
on pense essentiellement à un directeur général. Pour
cette année, afin que les associations puissent bénéficier
de l'aide qui est prévue au programme, cette exigence-là va
être mise de côté pour l'année. Et je sais, pour
compléter, que l'an dernier l'Association des pêcheurs de la
Basse-Côte-Nord avait de la difficulté, vu la mauvaise situation
de la pêche, à collecter les cotisations et qu'elle a mis en place
un système qui maintenant fonctionne bien. Donc, on pense que cette
Association-là, cette année, va remplir, maintenant, les
conditions du programme et va pouvoir continuer de recevoir la subvention qui
est prévue à ce programme-là.
M. Vallières: M. le Président.
Le Président (M. Lefebvre): Oui, M. le ministre.
M. Vallières: Je pense que le député de
Duplessis en conviendra, beaucoup de gens qui travaillent aux pêches,
incluant le député de Duplessis, connaissent l'importance de
permettre aux pêcheurs de se regrouper. L'objectif qui était
poursuivi par le ministère a été atteint partiellement. Je
pense que c'est important d'avoir des politiques qui peuvent, comme ça,
s'adapter, dépendamment de la réponse qu'on obtient. Et je trouve
important que, sans aucune espèce de gêne, on ait, des fois,
à revoir des programmes parce qu'ils collaient plus ou moins au
contexte, et à cause de la conjoncture également, pour que
ça puisse s'adapter et permettre à ce secteur qu'on veut
être bien organisé, qu'on veut permettre de bien s'organiser, que
nos programmes collent bien à la réalité et permettent
à ces gens qui sont sur le terrain d'avoir accès à nos
programmes qui, dans certains cas, sont absolument nécessaires.
M. Perron: M. le Président.
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Duplessis.
M. Perron: Je voudrais remercier le ministre pour, justement, les
informations qu'il vient de nous donner là, mais il a oublié un
bout, c'est justement dû au fait que l'ancien gouvernement du Parti
québécois a permis d'abord ce regroupement de pêcheurs,
d'une part, et, d'autre part, il a permis d'ouvrir un programme spécial
de subventions qui s'adressait directement à ces associations de
pêcheurs ainsi qu'à l'Alliance. Par rapport à l'Alliance,
si j'ai bien compris le ministre tout à l'heure - je lui fais un petit
message, en passant, et à vous aussi, M. le Président: Vous
êtes un gars bien aimable. C'est pour ça que je vous passe le
message. Concernant l'Alliance, si j'ai bien compris le ministre, la
réponse va venir éventuellement en rapport avec les
déboursés qui seront faits ou qui ont été faits
vers l'Alliance des pêcheurs du Québec et qui sont pris à
l'intérieur du montant de 300 000 $ qu'il y a en crédits.
Le Président (M. Lefebvre): M. le ministre.
M. Vallières: Je peux répondre maintenant, les
données sont déjà arrivées.
M. Perron: Ah! D'accord, ça va.
M. Vallières: l'alliance touche 70 000 $; l'aqip, 55 000
$, l'association des industriels de la pêche, et l'apbcn, celle dont vous
parliez tantôt, je pense, touche 50 000 $.
M. Perron: D'accord.
M. Vallières: Je pense qu'on peut convenir...
M. Perron: Ça, c'est une partie des 300 000 $.
M. Vallières: Oui, c'est ça. Je pense qu'on peut
convenir avec le député de Duplessis que s'il y a des
renseignements de cette nature qu'on ne pourrait pas donner aujourd'hui,
dès demain, on sera en mesure de lui faire parvenir les informations
dont il aurait besoin.
M. Perron: Pour l'ensemble des 300 000 $? M. Vallières:
Oui, oui. M. Perron: Ça va! M. Vallières:
Oui.
Socomer
M. Perron: Dans un autre ordre d'idées, M. le
Président, est-ce que le ministre pourrait me dire quels sont les
membres du conseil d'administration de Socomer et quel est le budget, quels
sont les crédits alloués à Socomer?
M. Vallières: Évidemment, Socomer est une
entreprise de pêche qui ne nous appartient pas, ni à SOQUIA, mais
ça doit être des informations dont on peut disposer par la SQP; il
me fera plaisir de les transmettre au député de Duplessis. Je
n'ai pas cette information en ma possession aujourd'hui.
M. Perron: Oui, mais, M. le Président, concernant Socomer,
n'est-il pas exact que le gouvernement verse une subvention directement
à Socomer, depuis sa création?
M. Vallières: Oui.
M. Perron: De combien?
M. Vallières: Je n'ai pas le chiffre en ma possession. On
peut vous l'obtenir probablement à l'intérieur des minutes qui
viennent. Mais l'entreprise, comme telle, n'est pas gouvernementale...
M. Perron: Non. C'est un regroupement d'entreprises qui font la
mise en marché.
M. Vallières: C'est ça. Alors, on n'a pas
nécessairement les... Mais on peut s'informer auprès de
l'Association pour obtenir les noms des membres de leur conseil
d'administration.
M. Perron: O.K. À ce moment-là, je voudrais avoir
le nom des membres du conseil d'administration de Socomer, ainsi que les
subventions qui ont été versées jusqu'à date
à Socomer.
M. Vallières: On parle de l'année financière
1990?
M. Perron: Oui. M. Vallières: O.K.
M. Perron: Et les années antérieures depuis sa
création parce que je pense que ça a été
créé il y a trois ans.
M. Vallières: Oui. On va vous donner ça, depuis sa
création jusqu'à maintenant.
M. Perron: M. le Président, sur la question de Socomer,
vous me permettrez de vous dire que, dès le début de sa
création, j'avais certaines inquiétudes qui sont de plus en plus
confirmées en rapport avec l'attitude de Socomer depuis sa
création. Dans mon esprit, il est clair que certaines entreprises qui
sont près de Socomer sont plutôt favorisées par rapport
à d'autres entreprises concernant la mise en marché. Ça,
ce sont des informations qu'on reçoit de part et d'autre, venant
directement des milieux concernés, que ce soit sur la côte sud, la
Côte-Nord ou encore ailleurs. Je trouve aussi extrêmement
déplorable de voir que, même si c'est pour la mise en
marché, il n'y a aucune représentativité des associations
de travailleurs et travailleuses sur ce conseil d'administration et je trouve
aussi extrêmement déplorable de voir qu'il n'y ait aucune
présence de pêcheurs. J'inviterais le ministre à regarder
très attentivement ce qui existe actuellement en Islande et ce, depuis
maintenant près de 50 ans, concernant ce qu'on appelle la corporation
Islandic. Cette corporation, qui est formée, fait la mise en
marché à l'extérieur de l'Islande et la mise en
marché est faite en coordination avec des décisions qui sont
prises quant au prix international, les décisions qui sont prises non
seulement par les propriétaires d'usines en Islande, mais aussi, par les
propriétaires de bateaux et, aussi, par les syndicats faisant partie de
différentes usines de l'Islande. Quant au marché intérieur
de l'Islande, il est parfaitement libre au niveau des prix à la
consommation, lorsqu'il s'agit du territoire islandais. Mais à
l'extérieur, c'est Islandic. Et remarquez qu'il y a plusieurs compagnies
qui existent actuellement en Islande, mais tous les produits qui s'adressent
à l'exportation sont seulement sous une marque de commerce,
contrairement à ce qui se passe dans d'autres pays du monde. La marque
est connue sous le nom de Islandic. Peu importe le nom du fabricant, je ne sais
pas si le ministre a quelque chose à dire concernant le fait que Socomer
- moi, j'appelle ça dans le jargon un club
paqueté - est un club paqueté où on a exclu
complètement les pêcheurs, les représentants des
pêcheurs et des travailleurs et travailleuses d'usine. (16 h 50)
Le Président (M. Lefebvre): M. le ministre.
M. Vallières: D'abord, je suis intéressé de
voir la comparaison que le député de Duplessis fait avec
l'Islande. C'est certainement un modèle que je vais regarder à la
loupe. Le modèle dont il fait mention pour la mise en marché des
produits, je ne sais pas si c'en est un qui s'apparente à celui qu'on a
mis en place avec Socomer ou si c'est un modèle beaucoup plus
évolué ou plus efficace. Il y a une chose qui est certaine, c'est
que depuis que je suis aux Pêcheries je me suis fait dire, à
maintes reprises, que Socomer était un instrument, un outil plus
qu'intéressant. C'est un outil qui est nouveau, qui donne des
résultats intéressants. Évidemment, je suis très
intéressé aussi d'avoir le point de vue du député
de Duplessis qui, évidemment, est à même de connaître
les réactions des gens du milieu sur une base quasi quotidienne;
ça m'intéresse aussi. Évidemment, quand Socomer a
été formée il y avait engagement du gouvernement du
Québec à verser certaines subventions. Inutile de vous dire
qu'à ce moment-là je regardais le secteur des pêches un peu
plus du côté de l'oeil et je serai toujours
intéressé à regarder le contexte que me décrit le
député de Duplessis afin de voir si la composition, entre autres,
du conseil d'administration est conforme à la vocation, à la
mission que veut se donner Socomer, et conforme aussi aux objectifs que
poursuit le gouvernement du Québec en la subventionnant.
Ceci étant dit, quand j'y aurai réfléchi et si le
ministère peut faire des propositions précises pour modifier le
conseil d'administration, assurément je demanderai au
député de Duplessis de me faire certaines recommandations face
à des noms d'individus qui accepteraient de travailler à
l'intérieur de cet organisme. Comme je vous le dis, quand il s'agit
d'outils nouveaux, je pense qu'il faut s'attendre, à un moment
donné, que certains ajustements soient requis. Le député
de Duplessis me semblait un petit peu sceptique vis-à-vis des niveaux
d'efficacité de Socomer. Moi, je veux lui indiquer immédiatement
que ça m'intéresse, et de beaucoup, de connaître
peut-être à un moment donné, ailleurs qu'en commission
où on fait l'étude des crédits, son point de vue assez
étayé sur cette question parce que, comme lui, je sais que des
sommes assez importantes, sont versées à cet organisme et,
même si cet organisme n'est pas gouvernemental, s'il profite de
subventions gouvernementales, je pense qu'on est en droit de poser certaines
questions.
Le Président (M. Lefebvre): M. le député
de
Duplessis.
M. Perron: À ce moment-là, M. le Président,
comme il s'agit de Socomer et puisque le ministre est ouvert à donner
des informations se rapportant à cette entreprise, le ministre pourrait
peut-être ajouter des informations à savoir quel est le mode de
participation financière des entreprises qui sont reliées
directement à Socomer parce qu'il doit sûrement y avoir de la part
des entreprises qui en sont membres des déboursés faits par
cesdites entreprises? D'autre part, je voudrais savoir si toutes les
entreprises qui font la transformation première, deuxième et
troisième au Québec sont membres de Socomer automatiquement ou
s'il y a des exclusions?
Le Président (M. Lefebvre): M. le ministre.
M. Vallières: Ça regroupe environ 40 %,
m'indique-t-on, des entreprises en termes de volume de transformation; donc, ce
ne sont pas toutes les entreprises au départ. La première
question, c'était?
M. Perron: Les contributions des entreprises dans Socomer?
M. Vallières: Ah! le mode de participation? Oui, je pense
qu'effectivement, sur les ventes qui sont faites, il y a une commission qui est
retenue auprès des entreprises qui fournissent la matière. C'est
donc dire que la contribution, à ce moment-là, est une retenue
qui est automatique sur les ventes comme telles. Mais ce n'est pas l'ensemble
des entreprises, je veux immédiatement le mentionner. On pourra, je
pense, en en faisant la demande à Socomer, obtenir la façon dont
son financement s'effectue de façon générale et remonter,
peut-être, au cours de la dernière année, incluant la
subvention qu'on lui verse.
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Duplessis.
Programme de coopération pour l'avenir des
pêches
M. Perron: Toujours d'ordre général, mais se
rapportant directement au programme CAP, c'est-à-dire le Programme de
coopération pour l'avenir des pêches du Québec, lors de
l'annonce du programme CAP le 24 mai dernier, le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation indiquait que le budget des
pêcheries pour 1990-1991 était augmenté de 17 400 000 $, ce
dont nous venons de parler, ce dont le ministre vient de parler dans son
introduction, millions qui s'ajouteraient aux 14 600 000 $ du programme
régulier des pêcheries pour l'année 1990-1991, ce qui
donnerait une aide totale, pour cette année, de 32 000 000 $.
Pourtant, les crédits du secteur des pêches annoncés
lors du discours du budget d'avril 1990 s'élevaient à 23 600 000
$. Le total devrait donc être de 41 000 000 $, si on prend 23 600 000 $
plus 17 400 000 $, plutôt que de 32 000 000 $. Est-ce que le ministre
peut nous expliquer comment il se fait que le programme CAP faisait mention
d'un budget de 14 600 000 $ en 1990-1991, pour les programmes réguliers
des pêcheries, alors que les crédits 1990-1991 pour les
pêcheries sont de 23 600 000 $?
Le Président (M. Lefebvre): M. le ministre.
M. Vallières: le total des crédits pour la
présente année financière sera de l'ordre de 31 969 000 $.
ce qu'on retrouvait au livre du budget 1990-1991 indiquait un budget total de
23 600 000 $, comme l'indiquait le député de duplessis, auquel
s'ajoutent 8 360 000 $ d'argent nouveau, pour un total de 31 969 000 $.
M. Perron: Oui, mais, M. le Président, si je prends 23 600
000 $ des crédits et que j'y ajoute 17 400 000 $, comment est-ce que le
ministre peut arriver à 32 000 000 $?
Le Président (M. Lefebvre): M. le ministre.
M. Vallières: II y a les 7 400 000 $ que vous ne retrouvez
pas là-dedans, qui sont de la participation en garantie d'emprunt en
capital-actions de la Société québécoise des
pêches. Donc, c'est l'extrabudgétaire.
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Duplessis.
M. Perron: Mais ça n'explique pas, M. le Président,
la différence qu'il y a entre 14 600 000 $ et le montant des
crédits, de 23 600 000 $. Et, puisqu'on est dans les chiffres, M. le
Président, dans le programme CAP du 24 mai 1990, il est fait mention,
à la fin, de restructuration pour un montant de 10 000 000 $. Est-ce que
le ministre peut nous donner des informations à savoir les montants qui
sont affectés à différents endroits?
M. Vallières: Oui. Alors, ià je pense qu'il va
falloir vous donner un peu d'explications sur la provenance des 7 400 000 $, du
total que vous faites et qui, normalement, selon vos données, devrait
arriver à 41 000 000 $. On va essayer de vous expliquer maintenant
comment, nous, on arrive à 31 969 000 $ et pourquoi c'est normal qu'on y
arrive.
Dans les crédits budgétaires, on retrouvait 23 000 000 $
et, avec un ajout global de 8 360 000 $, on est à 31 969 000 $. J'ai ici
M. Abgral qui est directeur des ressources financières et qui va essayer
de mettre de l'ordre un peu dans nos chiffres.
M. Perron: D'accord. M. Abgral (André): O.K.?
Le Président (M. Lefebvre): Oui, allez-y. (17 heures)
M. Abgral: Écoutez, dans un premier temps, on se
réfère au livre des crédits 1990-1991, budgets initiaux,
de 23 609 400 $. Ce que M. Vallières mentionnait tout à l'heure,
c'est que les crédits supplémentaires actuels sont de l'ordre de
5 360 000 $ et viennent s'ajouter à ce montant-là; et un mandat
spécial obtenu au 25 juillet 1990, de 3 000 000 $, ce qui fait un total
de crédits additionnels, de crédits nouveaux, de 8 360 000 $. Si
on prend les 23 609 400 $, au total du programme 10, et qu'on ajoute les 8 360
000 $, on se retrouve avec des crédits de 31 969 400 $.
Maintenant, ce qu'on disait tout à l'heure par M.
Vallières, c'est qu'évidemment les 8 360 000 $ de crédits
nouveaux ne correspondent pas aux 10 000 000 $ de subventions indiqués
lors du discours sur le budget par M. Gérard D.- Levesque dans sa
distribution de 50 000 000 $ sur cinq ans. Pourquoi? C'est parce que dans
l'écart entre les 8 360 000 $ et les 10 000 000 $, il va y avoir aussi
une somme de près de 1 300 000 $ qui va être autofinancée
à même le budget de base du ministère. Ce qui veut dire
qu'on est très près. On va être à g 600 000 $,
versus les 10 000 000 $ promis.
Maintenant, je passe évidemment, si on veut totaliser par rapport
aux engagements de 17 400 000 $, on a un montant de 7 400 000 $. Dans ces 7 400
000 $, il faut comprendre que ce ne sont pas les crédits en soi, mais ce
sont les implications financières extrabudgétaires, soit par
garanties d'emprunt qu'on a détaillées tout à l'heure,
pour un montant de 4 100 000 $ environ. Et on ajoute aussi l'implication de
SOQUIA en termes d'acquisition d'actions, comme on a dit tout à l'heure
- une seconde, je vais vous dire ça - si je ne me trompe pas, de
près de 800 000 $ et un prêt d'actionnaires de 500 000 $, ce qui
fait un montant d'environ 1 400 000 $.
Donc, à date, si je prends 4 100 000 $ plus 1 400 000 $, on est
rendu à 5 500 000 $ sur 7 400 000 $, ce qui veut dire que d'ici à
la fin de l'année, sûrement d'autres interventions en projets
actuellement, au niveau de garanties d'emprunts ou d'acquisition de SOQUIA,
vont venir s'ajouter. Et on prévoit effectivement respecter de
très près le montant promis de 7 400 000 $ dans le montant total
de 50 000 000 $.
Il reste quand même que, comme vous le savez, les 50 000 000 $,
c'est un montant de prévision de départ. Si on en dépense
ou qu'on en débourse 16 000 000 $, il reste que l'année d'ensuite
où on a prévu 14 600 000 $ viendra s'ajouter ce 1 000 000 $ parce
que l'engagement gouvernemental est de 50 000 000 $. Il peut y
avoir les engagements qui ne se réaliseront pas
nécessairement cette année, mais l'engagement est de 50 000 000
$, en termes d'implications financières auprès des entreprises et
des pêcheurs.
Le Président (M. Lefebvre): Je vous remercie. M. le
député de Duplessis.
M. Perron: Oui. Il y a quelque chose qui ne marche pas, M. le
Président. Lorsqu'on parle des 32 000 000 $ globaux, où il est
question actuellement de 31 969 400 $, tel que le montant vient d'être
exprimé, pour être plus juste dans le montant, ce que je ne
comprends pas, c'est: Pourquoi a-t-on inclus dans ces 32 000 000 $ les 7 400
000 $, puisque ce sont des garanties d'emprunt?
M. Abgral: Lorsqu'on parle de 7 400 000 $ ce n'est pas dans les
32 000 000 $ ou les 31 969 400 $. Les 7 400 000 $, ça va être des
déboursés ou des garanties d'emprunt extrabudgétaires qui
n'ont aucune référence au cahier des crédits et qui n'ont
pas à être votés par l'Assemblée nationale, c'est
déjà prévu dans des lois. O.K.? Mais les 10 000 000 $ de
subventions, dans les 17 400 000 $ totaux, effectivement, ils sont dans les 31
060 000 $.
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Duplessis.
M. Perron: Lors de l'annonce de le CAP, on a parlé de
programme régulier, pour un montant de 14 600 000 $. O.K.? 14 600 000 $.
Ils font partie de quel endroit au niveau des crédits qui ont
été alloués par rapport aux 23 609 400 $, ces 14 600 000
$?
Le Président (M. Lefebvre): Ça va?
M. Perron: Est-ce que vous avez ce tableau-là? Ça
vient de chez vous, ça. Ça, c'est lorsque l'annonce a
été faite, le 24 mai 1990.
M. Vallières: Vous vous référez à
quel...
M. Perron: C'est le programme régulier total.
M. Vallières: O.K. Vous donniez, programme
régulier, 14 600 000 $...
M. Perron: Oui.
M. Vallières: ...et restructuration, 10 000 000 $.
M. Perron: C'est ça.
M. Vallières: Ce que vous tentez de savoir, c'est
d'où nous viennent les 14 600 000 $? À quoi ç'a-t-il
servi? C'est ça, l'objet de votre question?
M. Perron: C'est ça, exactement.
M. Abgral: Dans les programmes réguliers,
évidemment... Juste deux secondes, je vais revenir.
O.K. Si on prend bien le document qui a été
diffusé... Je ne sais pas si vous avez ça en main, le programme
CAP, ici...
Le Président (M. Lefebvre): Je m'excuse, pour bien...
M. Vallières: M. Abgral répond.
Le Président (M. Lefebvre): ...respecter la règle,
vous avez donné votre consentement pour qu'un de vos conseillers puisse
intervenir.
M. Vallières: Oui. M. Abgral parle en mon nom.
M. Perron: II n'y a aucun problème, M. le
Président.
Le Président (M. Lefebvre): Ça va monsieur... Et,
également, M. le député de Duplessis,
évidemment.
M. Perron: Pour le restant des discussions aussi.
Le Président (M. Lefebvre): Et je voudrais vous rappeler
que sur l'heure qui vous est allouée il nous reste moins de 10 minutes,
c'est-à-dire 9 minutes, pour compléter l'étude des
crédits supplémentaires...
M. Vallières: D'accord.
Le Président (M. Lefebvre): ...du ministère de
l'Agriculture et des Pêcheries.
M. Vallières: M. le Président, je pense que...
Le Président (M. Lefebvre): Je m'excuse, M. le ministre,
13 minutes.
M. Vallières: Bien.
Le Président (M. Lefebvre): Nous avons commencé
à 16 h 20.
M. Vallières: Je pense que ce sont des précisions
importantes que demande le député de Duplessis au niveau de
l'annonce qui avait été faite originalement sur le budget
1990-1991: la ventilation du programme CAP, ce qui était pris à
l'intérieur du programme régulier et ce qui était pris
dans l'argent neuf. Je pense que c'est l'objet de la question du
député de Duplessis. On
va demander à M. Abgral d'y répondre.
Le Président (M. Lefebvre): M. Abgral.
M. Abgral: Dans les programmes réguliers et tel
qu'indiqué aux documents que vous avez en main, au niveau de la flotte
de pêche, au programme régulier, il y a 9 800 000 $
d'indiqués. Première transformation, programme régulier, 2
500 000 $. Deuxième et troisième transformations, il y a 200 000
$. Dans le programme d'aquiculture, il y a 1 600 000 $ et, au niveau de la
commercialisation, il y a 500 000 $. Ce qui totalise, au niveau des programmes
réguliers, 14 600 000 $ auxquels viennent s'ajouter les 10 000 000 $
dont on a parlé tout à l'heure, qui étaient de 9 600 000
$.
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Duplessis.
M. Perron: Alors, logiquement, M. le Président, si on
tient compte de l'annonce qui a été faite par le ministre du
temps, cette journée-là, il a dit: 50 000 000 $ pour cinq ans et,
en 1990-1991, il a dit: 10 000 000 $ en subventions, 7 400 000 $ en garanties
d'emprunts et capital-actions, pour un montant global de 17 400 000 $. Si ma
mémoire est bonne, il a, en même temps, dit que c'était de
l'argent nouveau. Alors, si c'est de l'argent nouveau, comment se fait-il que,
lors des crédits d'avril 1990, on avait un montant de 23 609 400 $ et si
je prends les 23 609 400 $ qu'il y a dans les crédits d'avril 1990 et si
j'ajoute les 17 400 000 $, ce n'est plus 32 000 000 $. Là, on se ramasse
avec quelque chose comme 40 000 000 $. Il manque 9 000 000 $ d'argent neuf
à quelque part.
M. Vallières: Non, mais enfin...
Le Président (M. Lefebvre): M. le ministre.
M. Vallières: ...je pense qu'on va devoir voir la feuille
de comptabilité du député afin qu'on puisse confronter ses
chiffres avec les nôtres. Ce qui a été dit par mon
prédécesseur, à l'effet qu'on retrouverait 10 000 000 $
d'argent neuf, y est, selon les données qu'on m'indique ici. Maintenant,
pour faire la conciliation de ce qui arrive, le programme régulier
versus l'argent neuf, j'aimerais qu'on puisse comparer vos données avec
les nôtres afin qu'on puisse en arriver à trouver là
où loge toute la vérité.
M. Perron: Est-ce qu'on peut suspendre, M. le Président,
pour deux ou trois minutes?
M. Vallières: Oui. Je pense que ça vaudrait la
peine qu'on voie vos chiffres.
Le Président (M. Lefebvre): J'allais suggérer que
l'on suspende les travaux de la commission quelques minutes pour que vous
puissiez confronter vos propres chiffres, de part et d'autre.
(Suspension de la séance à 17 h 11)
(Reprise à 17 h 14)
Le Vice-Président (M. Lefebvre):Je veux vous rappeler, m.
le député de duplessis et m. le ministre, qu'il reste 7 minutes
à l'étude des crédits supplémentaires du
ministère de l'agriculture, des pêcheries; et, à une
question de m. ie député de duplessis, je permets
évidemment à m. le ministre de répondre.
M. Vallières: Merci, M. le Président.
Évidemment, on a regardé nos données. Nous maintenons que
l'argent qui est dans CAP est de l'argent neuf et M. Abgral va vous donner une
réponse qui est verbale. Mais je peux d'ores et déjà
m'engager auprès du député de Duplessis à lui faire
la démonstration sur papier, à même les budgets qui sont
consentis au ministère, chez nous, de même qu'avec d'autres
données qui sont extrabudgétaires, de démontrer que les
sommes qui sont là sont bel et bien de l'argent neuf qui a
été dépensé. Je vais demander à M. Abgral de
compléter ma réponse, et pour moi c'est important qu'on puisse
éclaircir cette situation pour éviter aussi de véhiculer
dans le secteur que l'argent qui avait été promis n'est pas
là. Pour moi c'est important qu'on y réponde à
l'intérieur des minutes qui nous restent. M. Abgral.
Le Président (M. Lefebvre): M. Abgral, en
complément de réponse à votre ministre.
M. Abgral: O.K. Je m'excuse, tout à l'heure j'ai omis une
certaine chose. On parlait d'extrabudgétaire, mais j'ai quand même
omis le portefeuille de garanties de prêt sur lequel on subventionne les
intérêts. C'est le portefeuille de 30 000 000 $ qui est
prévu dans la Loi sur le crédit aux pêcheries maritimes.
O.K.? Donc, de ce portefeuille-là, il y a environ entre 4 000 000 $ et 5
000 000 $ qui sont prévus pour 1990-1991 à faire des prêts
en garantie, d'où notre implication financière qui n'est pas
budgétaire. D'accord? Je m'en excuse, je n'ai pas pu vous donner
ça tout à l'heure. Si je prends les 9 800 000 $ -
considérons qu'il y a environ entre 4 000 000 $ et 5 000 000 $ - je peux
vous dire qu'il s'ajoute à ceci des subventions aux prêts et
garanties de prêt pour un montant de 4 880 000 $ pour les bateaux de
pêches de 12,17 mètres et, au niveau de la flotte de pêche
côtière, dans les budgets réguliers, un montant de 650 000
$. donc, si j'additionne un prêt de 5 600 000 $ ou 4 000 000 $ que
j'ajoute au niveau des garanties de prêt dans le portefeuille de
prêts aux pêcheurs de 30 000 000 $, effec-
tivement c'est ceci. J'explique les 9 800 000 $ qui apparaissent
là. Je peux vous confirmer ça demain matin sans
problème.
Maintenant, en ce qui concerne l'aide pour la première
transformation, deuxième et troisième transformations, on parle
de 2 500 000 $ et de 200 000 $, ce qui fait 2 700 000 $, effectivement. C'est
ce qu'on a prévu ici. Dans l'aide financière au secteur de la
transformation et de la conservation des produits bioaquatiques, dans les
budgets réguliers, une somme de 3 107 000 $ est bien effectivement dans
les budgets réguliers. La même chose au niveau de l'aquiculture,
pour laquelle on a une somme de 800 000 $, mais il était prévu de
transférer une somme de la transformation parce qu'on a 500 000 $ de
trop; si on prend la transformation qui est à être virée,
ça correspond à 1 600 000 $ dans les budgets réguliers. Au
niveau de la commercialisation, évidemment, ce sont les budgets qui sont
prévus: une partie dans le programme Innovac-tions du secteur des
pêches et une partie dans le programme Innovactions dans le secteur de la
commercialisation du ministère de l'Agriculture. Je ne peux pas vous
dire précisément si c'est 250 000 $, ou 300 000 $ ou 200 000 $,
mais demain vous aurez dans le détail de quoi sont composés les
500 000 $ qui sont prévus.
Le Président (M. Lefebvre): M. le ministre.
M. Vallières: je pense que c'est important de fournir la
conciliation entre la description du programme cap qui a été
faite et le budget dont disposent les pêches, c'est-à-dire...
M. Perron: Vous comprenez très bien les questions que je
me posais!
Le Président (M. Lefebvre): M. le
député.
M. Vallières: Très bonne question. Je veux
peut-être immédiatement, parce que M. le député de
Duplessis me posait la question, M. le Président, faire part que j'ai
obtenu quelques informations sur la composition du conseil d'administration de
Socomer. Je suis aussi bien de vous le livrer immédiatement. Il s'agit
de M. Jacques Desrosiers, de Purdel, de M. Gaston Clou-tier, de Pêcheries
Gaspésiennes, de Mme Line Jutras, de Novi-pêche, de M. Jean-Paul
Leblanc, de COOP Carieton, de M. Guy Lavoie, de la Société des
pêches de Newport et de Jean-Louis Feriand, de la Société
québécoise des pêches.
Pour ce qui est de l'implication financière du gouvernement du
Québec dans Socomer, quelques données préliminaires, ici.
Par le biais de la SQP, soit la Société québécoise
des pêches, nous disposons de 16,6 % des actions qui ont
été payées au coût de 20 000 $. Et également,
le MAPAQ a cautionné, pour un montant de 3 000 000 $, à une
banque à charte. C'est ça.
Le Président (M. Lefebvre): M. le député de
Duplessis.
Alipêche
M. Perron: M. le Président, dans un autre dossier que le
ministre connaît de plus en plus parce qu'il en entend parler et qu'il a
reçu des lettres dernièrement, Alipêche, est-ce que le
ministre pourrait me dire quel était le prix de la crevette payé
cette année, sur la côte sud et sur la Côte-Nord? Parce que,
selon les informations, de source très sûre, il appert que le prix
de la livre de crevettes était différent, et de plusieurs sous,
entre la Côte-Nord et la côte sud.
Le Président (M. Lefebvre): M. le ministre, à la
question du député de Duplessis.
M. Vallières: Oui. Il y avait des différences de
prix. Il y a des explications à cela, M. Bougie pourra vous les donner
tantôt. Mais je profite de cette occasion, M. le Président,
puisque le député de Duplessis y fait allusion... Mais vous avez
l'air pressé; pour moi, ça achève, là.
Le Président (M. Lefebvre): II reste environ trois
minutes.
M. Vallières: Oui. Alors, c'est important, je pense, le
dossier qui est soulevé par le député de Duplessis. Je
veux profiter de l'occasion qui m'est offerte afin de lui indiquer que le
dossier est toujours actif au ministère, chez nous, pour ce qui est de
la demande qui a été faite par le comité de survie, que
nous sommes en attente et que, comme je l'expliquais récemment par voie
de lettre dont j'ai fait tenir copie au député de Duplessis, je
demeure positif que les gens qui ont décidé de présenter
un projet de relance le feront dans les délais que j'ai
mentionnés. Je maintiens évidemment ce type de moratoire qu'on
m'a demandé sur le permis, jusqu'au début de janvier, en
espérant que les gens du milieu réussiront à relancer
cette entreprise dans le milieu. Il y a plusieurs facteurs, évidemment,
qui sont à la base des problèmes qu'a connus Alipêche. Et
probablement que le député de Duplessis, en faisant allusion au
prix de la crevette, veut également nous amener à la source du
problème qui a été vécu. Alors, je laisserai M.
Bougie vous indiquer comment on peut arriver à deux prix
différents pour les crevettes.
Le Président (M. Lefebvre): M. Bougie.
M. Perron: En attendant que M. Bougie prépare sa
réponse...
M. Vallières: On est prêt.
M. Perron: ...je voudrais savoir, M. le Président, pour le
bénéfice des gens qui nous
écoutent... Là, on est en train, avec l'assentiment du
gouvernement du Québec, même si le ministre me dit qu'il est
d'accord avec le comité ad hoc à l'effet de revoir la
possibilité de réouverture d'Alipêche de Sept-îles,
de faire en sorte que toute la transformation de la crevette du golfe, de la
crevette nordique, c'est-à-dire de la crevette qui vient directement du
comté de Duplessis, de la côte^ du comté de Duplessis, dans
le banc de Sept-îles-Port-Cartier, le banc de IHe d'Anticosti et le banc
du chenail des Esquiman - mais là, on en prend très peu parce
qu'elle s'en va surtout à Terre-Neuve... On est en train de faire toute
la transformation et de faire tous les transferts d'équipements, etc.,
vers la côte sud. Et il n'y aura plus une maudite crevette qui va
être transformée sur la Côte-Nord, mis à part
Fortier...
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Duplessis.
M. Perron: ...à cause de leurs deux bateaux.
Le Président (M. Lefebvre): Alors, M. le
député de Duplessis...
M. Perron: Et ça, je ne le prends pas, j'aime autant vous
le dire tout de suite. La crevette vient de chez nous, on la transforme
ailleurs et, après ça, on vient nous la revendre.
Le Président (M. Lefebvre): Alors, dans un premier temps,
je vais suggérer à M. Bougie de compléter la
réponse de M. le ministre, tout à l'heure. Et M. le ministre,
vous aurez une minute ou deux pour conclure. Je reviendrai avec M. le
député de Duplessis. M. Bougie.
M. Bougie: Oui, M. le Président. Effectivement, il
pourrait y avoir une différence de prix parce qu'il y a d'abord les
méthodes de classification qui sont différentes d'une usine
à l'autre. Il y a également le fait que, dans les
débarquements qui sont effectués dans la région de
Sept-îles, il y a des bateaux qui cuisent et qui congèlent. Alors,
la crevette résiduelle qui a été livrée à
l'usine d'Alipêche était de la petite crevette et cette
crevette-là commande un prix qui est moindre. Donc, quand on regarde le
prix moyen qui est payé pour l'ensemble des volumes
débarqués, on obtient un prix qui est moindre. Donc, il y a ces
deux facteurs-là. Dans quelle mesure le poids de chacune des deux
joue-t-il? Je ne saurais vous le dire, mais il y a ces deux facteurs-là
qui expliquent la différence.
M. Perron: Oui, mais, M. le Président...
Le Président (M. Lefebvre): Monsieur... Je m'excuse, M. le
député de Duplessis.
M. Perron: ...qu'est-ce que ça veut dire que
Purdel...
Le Président (M. Lefebvre): Je m'excuse, M. le
député de Duplessis. Je vais devoir vous indiquer qu'il vous
reste...
M. Perron: Une dernière question.
Le Président (M. Lefebvre): ...quelques secondes à
vous et quelques secondes à M. le ministre pour permettre à
d'autres intervenants qui suivent, à savoir le ministre de la
Main-d'oeuvre et Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, de
procéder à l'étude des crédits d'un autre
ministère.
M. Vallières: Je vais être bon garçon, parce
que vous m'aviez indiqué que je parlerais immédiatement
après M. Bougie, pour compléter une autre question qui a
été posée par le député de Duplessis. Il ne
faudrait pas qu'il s'attende, par ailleurs, à ce qu'on lui permette tout
simplement de poser les questions et qu'on n'ait pas le temps de donner les
réponses.
Le Président (M. Lefebvre): Allez-y, allez-y, M. le
ministre.
M. Vallières: Je veux indiquer, parce que,
évidemment je comprends le député de Duplessis qui,
littéralement, voit une entreprise de chez lui qui a des
problèmes majeurs et qui s'appelle Alipêche. Je ne veux quand
même pas laisser passer le fait que cette entreprise connaît
actuellement et a connu, au cours des années, des problèmes
majeurs de financement, avec des déficits, année par-dessus
année, et on se dirige, cette année, vers un déficit qui
dépasserait le 1 000 000 $. C'est sûr qu'il est du devoir
également du gouvernement du Québec de s'assurer que l'on
investit pas non plus toujours à perte à l'intérieur de
certaines entreprises. Maintenant, le député de Duplessis faisait
allusion tantôt à des transactions, qui sont faites actuellement
par Purdel, de matériel qui sort d'Alipêche présentement.
Il faut lui indiquer que c'est là du matériel qui est
loué, que celui qui vous parle n'a pas la capacité comme telle
d'empêcher la location par Lethram, qui est locateur du
matériel... On ne peut l'empêcher de transiger avec Purdel qui est
située à Rivière-au-Renard. Mai foi, malgré toute
la bonne volonté de celui qui vous parle, à l'intérieur du
dossier, il y a des choses que je peux faire, comme je l'ai fait au niveau du
moratoire sur le permis. Je m'étais engagé avec les gens du
milieu, chez vous, à le faire. J'ai fixé certaines
conditions...
Le Président (M. Lefebvre): En concluant, M. le
ministre.
M. Vallières: En concluant, M. le Président, celui
qui vous parle a l'intention de continuer
d'être positif au dossier, mais dans la mesure de mes
responsabilités et de mes capacités d'intervenir à
l'intérieur d'un dossier qui, au départ, est l'objet
d'investisseurs. Il y a des gens là-dedans qui ont de l'argent et qui
sont du secteur privé et qui ont aussi droit de faire certaines
transactions.
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Cette
dernière intervention dispose de l'heure qui était mise à
notre disposition pour l'étude des crédits supplémentaires
n° 1 du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation. J'invite les personnes qui doivent quitter à le faire
immédiatement. Je prierais les autres personnes qui participeront
à l'étude des crédits supplémentaires du
ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et
de la Formation professionnelle de bien vouloir prendre place dès
maintenant.
(Suspension de la séance à 17 h 26)
(Reprise à 17 h 31)
Ministère de la Main-d'oeuvre,
de la Sécurité du revenu et de la
Formation professionnelle
Le Président (M. Lefebvre): Nous procédons à
la dernière partie de l'étude des crédits
supplémentaires n° 1 à savoir, les crédits du
ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et
de la Formation professionnelle. Nous disposons d'une heure pour
procéder à l'étude de ces crédits
supplémentaires. Je cède immédiatement la parole à
M. le ministre pour ses remarques préliminaires.
Remarques générales M. André
Bourbeau
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Cette commission
parlementaire entreprend l'étude du budget supplémentaire du
ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et
de la Formation professionnelle.
Ce budget d'un montant de 194 000 000 $ sert essentiellement à
réviser à la hausse les crédits alloués aux divers
programmes de la sécurité du revenu. En effet, plus de 96 % des
crédits supplémentaires présentés ici sont
destinés au régime de la sécurité du revenu. Le
solde du budget supplémentaire est attribué, pour l'essentiel,
à l'administration des allocations familiales et au versement des
allocations de maternité.
L'augmentation des dépenses à laquelle le gouvernement
doit faire face en matière de sécurité du revenu
résulte de deux facteurs: d'une part, ces dépenses sont
occasionnées par des améliorations que le gouvernement a
apportées au régime de la sécurité du revenu,
communément appelé l'aide sociale, depuis le début de
l'année financière; d'autre part, l'évolution de la
conjoncture économique entraîne une augmentation plus forte que
prévue du nombre de personnes et de ménages qui ont recours
à la sécurité du revenu pour subvenir à leurs
besoins essentiels, notamment parce que ces personnes-là
éprouvent davantage de difficultés à
réintégrer le marché du travail.
Dans son discours sur le budget, le ministre des Finances a
annoncé que les prestations versées aux clients de la
sécurité du revenu aptes au travail seront indexées
à compter du 1er janvier prochain 1991 de 4,8 %, soit le taux annuel
d'inflation. Cette décision requiert des crédits additionnels de
19 800 000 $.
Par ailleurs, en prévision de l'entrée en vigueur,
dès janvier 1991, de la taxe de vente élargie, le gouvernement
alloue aux clients de la sécurité du revenu des crédits
d'impôt par le biais d'une augmentation des barèmes d'aide
sociale. La majoration des prestations qui s'ensuit, dont le montant varie de 8
$ à 20 $ par mois selon le type de ménage, représente pour
le gouvernement une dépense additionnelle de 12 700 000 $ d'ici le 31
mars 1991. Je tiens à préciser que les clients de la
sécurité du revenu, de l'aide sociale, recevront, en outre, du
gouvernement fédéral, un crédit d'impôt pour
compenser les effets de la taxe sur les produits et services, la TPS, et que le
gouvernement du Québec n'effectuera aucune récupération de
ce crédit.
Par-delà ces bonifications apportées au régime de
la sécurité du revenu, la raison première de la
présentation d'un budget supplémentaire ou de crédits
supplémentaires tient à l'augmentation de la clientèle de
la sécurité du revenu. Nous avions prévu, en effet, que
durant l'année financière 1990-1991 il y aurait en moyenne,
chaque mois, 329 850 ménages, disons 330 000 ménages qui
recevraient des prestations d'aide sociale. Il appert maintenant que cette
moyenne mensuelle s'établira plutôt à 345 500
ménages, soit 15 500 ménages de plus. Évidemment, ce
débordement de clientèle de 4,7 % provoque un dépassement
budgétaire correspondant. Nous devons effectivement accroître le
budget de la sécurité du revenu de 187 000 000 $ dans le but
premier de verser des prestations à ces ménages, d'aider ces
personnes à réintégrer le marché du travail et de
leur offrir les autres services disponibles, dont celui de
l'assurance-médicaments.
Ce chiffre de 345 500 ménages doit être situé dans
son contexte. Je ne tenterai pas d'en diminuer l'importance ou la
signification, mais je m'objecterai aux interprétations excessives qu'on
pourrait prêter à ces statistiques. Les prestataires de la
sécurité du revenu éprouvent, il est vrai, davantage de
difficultés à recouvrer un emploi. Il faut remonter à
l'été 1988 avant
d'enregistrer un nombre de ménages à la
sécurité du revenu comparable à celui d'aujourd'hui. Si on
ne peut contester les liens qui relient l'augmentation de la clientèle
de la sécurité du revenu au ralentissement économique que
nous observons depuis quelques mois, on ne doit pas dramatiser, par ailleurs,
ces chiffres sur la clientèle. Même avec 345 500 ménages,
on est très loin des records peu enviables de 415 287 ménages
enregistrés en mars 1984. Il y a tout de même 70 000
ménages de moins aujourd'hui qu'à cette époque,
c'est-à-dire une baisse de 17 % de la clientèle.
Cela étant dit, nous pourrions assister à une augmentation
du nombre de ménages à la sécurité du revenu si le
ralentissement économique se poursuit en même temps que se font
sentir certains effets de la réforme de l'as-surance-chômage,
notamment les règles plus sévères d'admissibilité
aux prestations. Il faut donc offrir à l'ensemble de la clientèle
apte au travail des mesures qui favorisent leur formation et leur
réinsertion en emploi. Le budget supplémentaire prévoit
à cette fin des dépenses additionnelles de 29 100 000 $.
De ces nouveaux crédits de 29 100 000 $, nous en réservons
en quelque sorte 8 400 000 $ pour le Programme d'aide à
l'intégration en emploi, le programme PAIE. À ce jour, plus de
6400 prestataires de la sécurité du revenu ont
décroché un emploi grâce à ce programme et nous
prévoyons que, d'ici à la fin de l'année
financière, près de 10 000 emplois auront été ainsi
créés à l'intention des clients de la
sécurité du revenu. Vous pouvez donc faire le compte, M. le
Président. 19 800 000 $ pour l'indexation des barèmes du
programme APTE, 12 700 000 $ pour les crédits de taxe de vente
élargie, 125 600 000 $ sous forme de prestations à un plus grand
nombre de clients de la sécurité du revenu et 29 100 000 $ pour
augmenter le budget des mesures favorisant l'intégration en emploi des
prestataires aptes au travail. Cela représente donc des crédits
additionnels de 187 000 000 $ appliqués au régime de la
sécurité du revenu. 187 000 000 $ sur 194 000 000 $.
Le solde des crédits supplémentaires est essentiellement
attribuable au versement des allocations de maternité et à
l'administration des allocations d'aide aux familles. Vous savez que le
programme d'allocations de maternité consiste maintenant à verser
aux femmes qui travaillent et qui se prévalent d'un congé de
maternité une allocation de 360 $ pour les deux semaines qui
précèdent l'admissibilité aux prestations
d'assurance-chômage.
Dans le discours sur le budget, le ministre des Finances a
annoncé que le montant de l'allocation de maternité passerait de
240 $ à 360 $. De plus, en comparaison avec la même période
l'an dernier, un plus grand nombre de travailleuses ont donné naissance
à un enfant au cours des derniers mois, M. le Président. Nous
prévoyons en effet verser des allocations de maternité à
51 594 Québécoises, alors que, l'an dernier, 44 583 femmes en
avaient bénéficié. L'effet conjugué de la hausse
des prestations et de l'augmentation très importante du nombre de femmes
qui se prévalent d'un congé de maternité accroît de
4 500 000 $ les besoins financiers du programme d'allocation de
maternité, d'ici le 31 mars prochain. (17 h 40)
Cette tendance qui révèle un certain relèvement du
taux de natalité est relativement nouvelle. En effet, dans les
années 1981 à 1985, le ministère versait des allocations
de maternité à environ 38 000 travailleuses. En 1987-1988, ce
chiffre a été porté à 42 000, puis à 44 500
les deux années subséquentes. Les observations de l'année
en cours, de l'ordre de 51 500, travailleuses semblent confirmer une
participation accrue de femmes actives sur le marché au défi de
l'augmentation du taux de natalité du Québec.
Pour en revenir aux crédits supplémentaires, un budget de
1 900 000 $ doit être ajouté aux prévisions
budgétaires initiales pour faire face à des dépenses
accrues à l'égard de l'administration des allocations d'aide aux
familles. En premier lieu, le gouvernement a annoncé, par le biais du
discours sur le budget, sa décision de bonifier l'allocation offerte
à la naissance d'un enfant. C'est ainsi que l'allocation versée
à l'égard du troisième enfant et de chacun des enfants
suivants est portée de 4500 $ à 6000 $, à raison de
versements trimestriels de 375 $ chacun. Concrètement, on prolonge d'une
année ces versements, ce qui a des incidences sur les frais
administratifs. Par ailleurs, le gouvernement a offert aux personnes qui
reçoivent des allocations d'aide aux familles le service de
dépôt direct des chèques. Cette possibilité offerte
sur une base volontaire améliore le service à la clientèle
tout en simplifiant les opérations liées à l'impression,
la manipulation, l'expédition des chèques par courrier, ce qui
conduit à des économies. Or, comme ce service a été
implanté plus tard que prévu, tout simplement parce que
l'Assemblée nationale a pris plus de temps que prévu pour
approuver les amendements législatifs requis, les économies
escomptées sont moins importantes que celles qui avaient
été initialement projetées. Il faut donc réajuster
le budget global prévu pour administrer le versement des allocations
d'aide aux familles d'un montant de 1 861 300 $. Je précise que ces
ajustements ne concernent que les frais administratifs et non pas le montant
des allocations d'aide aux familles. Les améliorations apportées
aux allocations à la naissance coûtent à elles seules 19
000 000 $, sur une base annuelle.
Enfin, aux crédits autorisés au début de
l'année financière en cours, il faut ajouter 390 000 $ pour
l'administration des régimes complémentaires de retraite. Vous
vous rappelez,
M. le Président, que, dans la foulée de la nouvelle Loi
sur les régimes complémentaires de retraite et du
règlement qui s'y rattache, nous avons prévu que les entreprises
assumeraient les coûts administratifs reliés à
l'enregistrement et à certains contrôles des régimes
privés de retraite. Or, le règlement est entré en vigueur
un peu plus tard que prévu, de sorte que la Régie des rentes du
Québec fait face à un manque à gagner par rapport aux
prévisions budgétaires initiales.
Voilà, M. le Président, les éléments des
crédits supplémentaires que nous sommes appelés à
étudier. Comme moi, vous vous doutez bien que nous ne nous en tiendrons
pas uniquement à ces crédits supplémentaires. A tout
événement, nous sommes disposés, bien sûr, à
répondre aux questions des membres de cette commission parlementaire. Je
vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Mme la
députée de Hochelaga-Maison-neuve, pour vos propres remarques
préliminaires.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, M. le Président. Nous souhaiterions que
le ministre puisse déposer à cette commission copie du discours
qu'il vient de lire, si c'est possible, pour que nous puissions
immédiatement en avoir copie.
Alors, M. le Président, je remercie le ministre d'avoir
élucidé les crédits apparaissant au livre des
crédits qui a été rendu public dernièrement puisque
les explications qu'il nous a données, en fait, viennent éclairer
les chiffres qui étaient assez incompréhensibles dans le livre
des crédits et qui faisaient état, au programme Soutien
financier, d'une augmentation de 105 500 000 $. Tel n'est pas le cas. On peut
comprendre, des chiffres que le ministre nous a transmis, qu'il y a 15 500
nouveaux ménages qui ont demandé une aide sociale et 125 000 000
$ de plus en prestations supplémentaires, compte tenu de l'augmentation
de ces nouveaux ménages.
M. le Président, j'écoutais le ministre et je me disais
que la situation ne doit pas être très enthousiaste à son
ministère. La réforme, en matière de
sécurité du revenu, est très fortement contestée
quant à l'impact qu'elle a, actuellement, sur l'aggravation des
conditions de pauvreté. Je pense, évidemment, entre autres,
à la coupure pour le partage du logement et je veux tout de suite
féliciter le ministère pour les excellents rapports statistiques
mensuels qui sont maintenant disponibles. Nous avons obtenu, cette semaine...
Le dernier, en fait, qui nous a été transmis et qui nous donne un
aperçu à partir du mois d'août. Alors, je comprends qu'il y
a toujours un certain décalage, mais c'est quand même un bon
éclairage qui nous permet, entre autres, de constater que 87 202
ménages sont soumis à cette coupure pour le partage du logement,
ce qui représente, en fait, une hausse, dit-on, de 52,9 % du nombre de
ménages qui étaient assujettis. Alors, 87 202 ménages
assujettis au partage du logement et il n'y en a que la moitié qui
bénéficie de l'allocation-logement, soit 48 865 familles. Si vous
voulez, il n'y a qu'une famille sur deux qui a une allocation-logement de 42 $,
mais il y a 89 familles qui sont coupées, au Québec, pour un
montant de 91 $, maintenant, parce que, évidemment, l'indexation s'est
tout de suite faite sur les coupures. Alors, cette indexation est venue
aggraver la situation de coupure pour le partage du logement.
D'autre part, non seulement y a-t-il aggravation des conditions de vie
et aggravation de la situation de la pauvreté, notamment quand on
constate qu'il y a 174 000 enfants qui vivent dans des familles
bénéficiaires de l'aide sociale au Québec, mais, d'autre
part, ça ne va pas mieux sur le plan de la formation professionnelle.
Quand on sait qu'en un an et demi le Québec a connu une chute, une
baisse de 53 000 étudiants adultes inscrits en formation
professionnelle, ça, comme constat d'échec, il n'y a pas pire,
d'une certaine façon, M. le Président, au moment même
où toute la société se rend compte de l'importance
stratégique de la qualification d'une main-d'oeuvre qui est de plus en
plus appelée à relever des défis en occupant des emplois
qui exigent de plus en plus des qualifications élevées. Comment
aller travailler dans une usine sans avoir, non pas une 11e année -
c'est même déclassé - sans avoir physique, chimie,
mathématiques, secondaire IV? On sait qu'un chômeur qui a perdu
son emploi récemment peut mettre - quoi? - plus d'un an avant non pas de
suivre un cours, mais avant de se faire inscrire à un cours. Simplement
un cours qui va lui permettre d'aller chercher les prérequis
académiques. On ne parle même pas de l'autre année pour
aller chercher un cours de formation professionnelle. Alors, c'est
évident qu'il y a, là, une sorte de constat d'échec qui
est assez dramatique.
Je n'en parie pas de gaieté de coeur parce que, pour moi,
ça représente des hommes et des femmes qui sont en situation
tragique et peut-être qu'il y a bien des gens en face de moi qui ne le
savent pas, mais quand on fait de la publicité en disant aux gens qu'ils
peuvent aller s'inscrire pour suivre des cours et que ça va leur
permettre d'avoir un meilleur emploi quand ils viennent de perdre celui qu'ils
occupaient avant et qu'ils se rendent compte que c'est un mirage et que plus
ils s'en rapprochent, plus ça s'éloigne, ces gens-là, ou
bien ils deviennent découragés, ou bien ils deviennent
résignés, ou ils deviennent bien indignés, bien
fâchés contre notre société, M. le Président.
Ce constat d'échec s'ajoute, évidemment, à celui des
négociations dans le secteur du rapatriement de la compétence du
Québec pour mettre en place une véritable politique de formation
professionnelle. (17 h 50)
Alors, c'est assez inquiétant, ce qui se passe, M. le
Président, et je voudrais demander immédiatement au ministre
comment il se fait que, des 257 932 ménages qui sont inscrits au
programme APTE, on ne compte - on ne comptait, du moins en date d'août
dernier - que 8 % de ces ménages inscrits comme participants à
des mesures d'employabilité et que l'on en retrouvait 40 % inscrits
comme non disponibles et 18 %... Je rappelle que non disponibles, M. le
Président, c'est constitué de tous ces gens qui ont soit un
certificat médical de moins d'un an prouvant un état de
santé déficient ou soit ayant la garde d'enfants de moins de six
ans ou, encore, ayant plus de 55 ans d'âge. Mais il y a 18 % des
ménages qui sont inscrits comme disponibles et qui n'attendent, comme
dans une antichambre, que le ministre et son gouvernement offrent une mesure de
participation, le rattrapage scolaire pour compléter son secondaire,
mesure que l'on appelle d'un nouveau nom, mais qui consiste à faire des
travaux communautaires ou à faire des stages.
Et comment se fait-il qu'on ne compte que 8 % des ménages? Je ne
parle pas des adultes. C'est pire encore, parce que le total des adultes nous
permet, dans le Rapport statistique du ministère, de constater qu'il y a
seulement 6,3 % des adultes - on retrouve ça à la page 11 du
Rapport statistique tout récent - qui sont inscrits à un des
programmes d'employabilité du ministère. Qu'est-ce que le
ministre et son ministère font pour remédier à cette
situation?
Le Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la
députée. M. le ministre.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Que c'est donc déprimant d'entendre parler la
députée de Hochelaga-Maisonneuve! Je dois dire, M. le
Président, qu'heureusement je n'ai pas à passer mes
journées complètes avec elle, parce que je pense que
j'abandonnerais rapidement le travail qui m'a été confié!
Elle a une facilité de présenter les choses dans une perspective
tellement pessimiste que je ne vois comment on peut évoluer à
travers la vie avec une mentalité semblable.
C'est sûr, M. le Président, que dans chaque dossier il y a
des problèmes. On est en politique, d'ailleurs, pour régler des
problèmes. Alors, il ne faut pas se surprendre. Mais, quand on analyse
un dossier, il faut le regarder dans sa globalité. Elle me dit que la
réforme de l'aide sociale, c'est un échec qui est critiqué
par tout le monde. Bien, vous m'excuserez, M. le Président, là,
vraiment, la députée de Hochelaga-Maisonneuve devrait sortir un
peu de sa coquille et regarder un peu l'appréciation qui est
accordée à la réforme de l'aide sociale par l'ensemble de
la société québécoise.
C'est sûr que les 90 % des citoyens du
Québec qui sont d'accord avec la réforme d'aide sociale,
on ne les entend pas le dire tous les jours et ils ne font pas de
pétitions. Ils ne signent pas des documents ou des lettres au ministre
pour dire qu'ils sont d'accord. Ces gens-là restent chez eux et ils sont
bien satisfaits de la réforme. Les observateurs et les
éditorialistes aussi ont louange le gouvernement à
l'unanimité pour avoir eu le courage... Mieux que ça, le chef de
l'Opposition, le député de L'Assomption, leur propre chef du
Parti québécois, M. Parizeau, a publiquement pris position en
faveur de la réforme d'aide sociale qui - vous vous en souvenez, M. le
Président - a été initiée par mon collègue,
le présent ministre de l'Environnement, le député de
Brome-Missisquoi, qui a été le grand-père de la
réforme. Moi, j'en suis le père adoptif, comme vous le savez, et
le chef de l'Opposition a publiquement vanté le gouvernement
libéral pour avoir eu le courage politique d'effectuer cette
réforme de l'aide sociale. Il s'est déclaré en faveur des
principaux éléments de la réforme, y compris la coupure
que nous administrons aux assistés sociaux qui refusent un emploi et
à qui, comme vous le savez, on administre ces coupures.
Ceci étant dit, M. le Président, je ne peux pas accepter
la prémisse à l'effet que la réforme de l'aide sociale est
un échec et qu'elle fait l'objet d'une large critique. Dans certains
milieux spécialisés, bien sûr, on entend des critiques. En
général, c'est les milieux de ceux qui sont les dirigeants du
Front commun des assistés sociaux, tout en notant que le principal
dirigeant est l'ancien attaché politique de la députée de
Hochelaga-Maisonneuve. Je ne le nommerai pas, mais on le connaît
bien.
Donc, on voit les liens qui peuvent exister entre le Front commun des
assistés sociaux et la députée de Hochelaga-Maisonneuve
via cet ancien attaché politique. Ceci étant dit, M. le
Président, je ne nierai pas qu'il puisse y avoir des problèmes.
Et je l'ai admis, d'ailleurs, ici même en cette Chambre à quelques
reprises, que la réforme de l'aide sociale, c'est une oeuvre qui est
à parfaire, qui, je pense, est déjà très bonne, qui
est même excellente, mais qui mérite d'être encore
améliorée. Et, au fur et à mesure que sont portés
à mon attention des problèmes qui peuvent arriver, se soulever
à travers le Québec, nous mettons immédiatement notre
machine administrative en marche pour tenter d'apporter des correctifs.
Ce n'est pas surprenant, M. le Président, nous avons, comme vous
voyez, 345 000 ménages à l'aide sociale qui comportent quelque
chose comme 540 000 personnes, incluant les enfants. Ces personnes-là
sont des gens qui sont pauvres, démunis, qui ont des problèmes,
et il peut fort bien arriver qu'à travers tout ce monde-là il y
ait des situations qui se présentent, qui n'étaient pas
prévues, et nous ne voulons pas pénaliser des gens pour des
situations qui n'étaient pas
prévues. Si ces situations-là se présentent - et
c'est ce qui arrive - nous analysons chaque cas et nous tentons d'apporter
immédiatement des remèdes. Nous l'avons fait au mois de juin
dernier en introduisant toute une série de mesures, soit des mesures qui
visaient à modifier la loi ou la réglementation pour corriger des
effets non prévus. Nous l'avons fait. J'ai dit et je redis à tous
les députés et, bien sûr, à la députée
de Hochelaga-Maisonneuve: Si vous êtes témoins de cas particuliers
qui n'ont pas été prévus, faites-moi signe et nous allons
immédiatement faire les efforts voulus pour que ce soit
corrigé.
Donc, M. le Président, en résumé, à l'aide
sociale, la réforme est sur les rails, elle s'enclenche bien. Nous
pensons qu'elle va obtenir les résultats escomptés. Je vous
signale, M. le Président, que la réforme de l'aide sociale vise
à faire en sorte d'inciter les clients de l'aide sociale aptes au
travail à retrouver leur dignité, leur confiance en eux par le
travail. Il n'est plus suffisant, maintenant, de rester chez soi et d'attendre
passivement son chèque quand on est apte au travail. Il faut faire un
effort et cet effort-là, dans la mesure où on le fait,
l'État, le gouvernement vous appuie, appuie les assistés sociaux,
les encourage et, même, les récompense. Dans la mesure,
également, M. le Président, où on ne veut rien faire,
aucun effort pour améliorer son employabilité ou pour se trouver
un emploi, à ce moment-là, on ne peut pas s'attendre à ce
que l'État fasse des miracles.
Pour ce qui est des autres dossiers, M. le Président, la
formation professionnelle, c'est un dossier complexe où il y a plusieurs
intervenants. Je l'ai dit à quelques reprises, le gouvernement du
Québec n'est pas le seul maître d'oeuvre dans le dossier; le
gouvernement fédéral aussi exerce un certain nombre de
responsabilités, et ça nous crée des problèmes.
Ça nous crée des problèmes parce que, finalement, on est
deux chauffeurs dans le même véhicule, M. le Président,
pour employer une expression bien connue, ou, encore mieux, disons qu'il y a
deux volants dans le même véhicule avec deux conducteurs et
ça fart en sorte que le véhicule ne s'en va pas toujours dans la
bonne direction ou, enfin, dans la direction où on voudrait aller.
Il y a un grand nombre de programmes qui sont pilotés par le
gouvernement fédéral, d'autres par le gouvernement du
Québec. Ces programmes-là parfois s'enchevêtrent, se
juxtaposent, se dédoublent, et il est temps de mettre de l'ordre dans ce
dossier-là, M. le Président. Je peux vous dire qu'avant longtemps
nous allons prendre des mesures pour tenter de faire en sorte qu'il y ait un
peu plus d'ordre dans ce dossier-là, de façon à nous
permettre d'atteindre les objectifs que nous nous sommes donnés,
c'est-à-dire rehausser la compétence de la main-d'oeuvre
québécoise pour faire en sorte que la main-d'oeuvre
québécoise ait la compétence pour faire face aux
défis nouveaux posés par le libre-échange, par la
mondialisation des marchés, et nous n'aurons de cesse que nous n'ayons
atteint, M. le Président, cet objectif: la main-d'oeuvre
québécoise doit devenir parfaitement compétente et
parfaitement capable de relever ces défis.
Mme Harel: M. le Président.
Le Président (M. Lefebvre): Oui, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Ça m'apparaît totalement irresponsable de
faire comme le ministre vient de le faire, de parler de travail en laissant
entendre que les gens qui sont à l'aide sociale sont finalement des
fainéants, des gens qui ne veulent pas travailler, quand 65 % des
bénéficiaires de l'aide sociale sont des hommes et des femmes en
chômage, qui ont perdu leur emploi. M. le Président, c'est
d'autant plus irresponsable que le ministre n'a pas répondu à la
question que je lui avais posée: Comment se fait-il qu'il y a simplement
6,3 % des adultes inscrits à l'aide sociale qui participent à des
mesures offertes par le ministère? C'est à la page 11 du Rapport
statistique. Comment se fait-il, M. le Président, qu'on peut continuer
à tenir un discours hypocrite quand, finalement, on n'offre rien? (18
heures)
M. Bourbeau: M. le Président, est-ce que le mot
"hypocrite" est un mot parlementaire?
Mme Harel: Je parle du discours, évidemment, M. le
Président. Je ne parle pas de la personne du ministre.
M. Bourbeau: Bien, le discours n'est pas prononcé seul, il
y a quelqu'un qui le prononce, que je sache.
Mme Harel: Alors, je retire le mot, M. le Président.
Le Président (M. Lefebvre): Alors, c'est
réglé.
Mme Harel: Alors, ceci dit, M. le Président, c'est
irresponsable, ça demeure irresponsable. Et le ministre, tantôt, a
dit n'importe quoi. Notamment, et je veux insister auprès de vous
là-dessus, M. le Président, quand le ministre invoque que le
coordonnateur du Front commun a travaillé avec la députée
de Hochelaga-Maisonneuve sur la réforme libérale en
matière d'aide sociale, je dois vous dire qu'il manque beaucoup moins
d'éthique... Il me semble que le ministre s'est porté responsable
d'un manque d'éthique quand il a conscrit son sous-ministre et le
personnel cadre de son ministère pour participer et faire un travail
politique à des émissions
d'affaires publiques comme celle de Droit de parole, à
Télé-Métropole. Moi, M. le Président, je dois vous
dire que je n'avais jamais vu ça en 10 ans de parlement, et je n'ai
jamais vu ça dans aucun autre ministère. et je ne peux pas
comprendre que le personnel se soit laissé conscrire pour jouer un
rôle politique comme celui-là. non, ce n'est pas vrai, ce que dit
le ministre. le chef de l'opposition a publiquement demandé le retrait
de la loi 37 et entend et continue à demander le retrait de la loi
37.
M. le Président, le ministre considère que tout va bien,
que ce sont mes propos qui sont déprimants. Malheureusement, c'est la
réalité des gens démunis dans notre société
qui est déprimante: 386 000 hommes et femmes en chômage, 355 000
ménages inscrits à l'aide sociale, au-delà de 800 000
personnes, sans compter les enfants. C'est 1 000 000 de personnes qui ont la
réalité d'être sans emploi, d'être en chômage,
dans notre société. Et le ministre continue à parler comme
si ces gens-là avaient le choix de travailler ou d'être paresseux.
C'est ce qui est irresponsable, complètement irresponsable.
Je demande au ministre comment il peut expliquer, puisqu'il nous dit
continuellement de lui apporter des dossiers, et c'est ce que je fais, en
Chambre... Le Protecteur du citoyen lui a remis un dossier où il lui
demande des amendements majeurs à sa réforme de l'aide sociale,
des amendements majeurs à l'égard, notamment, de la coupure qui
concerne 82 000 familles québécoises, qui lui demande des
modifications majeures. Alors, le ministre n'a pas à attendre qu'on lui
dépose le dossier des 82 000 familles sur son bureau. Ce qui lui est
proposé, c'est évidemment de corriger l'état de situation
qui est décrié dans le rapport que lui a transmis le Protecteur
du citoyen. Une augmentation de 60 % des plaintes des personnes
assistées sociales au Protecteur du citoyen, ce n'est pas rien. Ce n'est
évidemment pas rien et ça révèle certainement un
problème plus grave que le ministre consent à
reconnaître.
M. le Président, au mois d'octobre dernier, 11 y a à peine
deux mois, le ministre «annonçait que fa hausse du nombre de
personnes assistées sociales au québec allait coûter de 60
000 000 $ à 65 000 000 $ de plus au gouvernement. aujourd'hui, deux mois
plus tard, il nous dit qu'il s'agit de 125 000 000 $ de plus en prestations
supplémentaires. et nous avons, par ailleurs, obtenu cette étude
qui avait été réalisée par le ministère
quant à l'impact du resserrement des normes d'admissibilité
à l'assurance-chômage et quant à la diminution de la
durée des prestations, cet impact sur l'augmentation des
bénéficiaires de l'aide sociale. l'étude qui a
été réalisée au ministère évalue
à 96 000 000 $ l'impact combiné de ces changements intervenus
à la réforme de l'aide sociale, et selon, évidemment, un
niveau de chômage équivalent à 10 000 ménages. le
ministre nous parle de 15 500 ménages. peut-il nous indiquer à
combien il évalue l'impact du resserrement des normes à
l'assurance-chômage sur le budget de l'aide sociale? Est-ce que le
montant de 96 000 000 $ qui avait été évalué,
estimé par son ministère est déjà
dépassé, compte tenu que cette estimation était faite en
1988 et que, évidemment, le taux de chômage de 9 %, 9,5 % de cette
époque-là est bien loin de celui qu'on connaît à
11,7 % maintenant? À combien évalue-t-il le coût
engendré par la réforme fédérale de
l'assurance-chômage?
Le Président (M. Lefebvre): Oui. Merci, Mme la
députée. M. le ministre.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: M. le Président, je ne qualifierai pas la
façon de procéder de la députée de
Hochelaga-Maisonneuve qui prétend, avec un culot rare, que j'aurais
affirmé tout à l'heure que les assistés sociaux sont des
fainéants. Ça prend, M. le Président, vraiment du culot
pour venir à la face des gens, ici, prétendre que j'ai
affirmé ça quand les gens ont tous entendu ce que j'ai dit. M. le
Président, vous vous souvenez ce que j'ai dit tantôt, mes propos
étaient clairs, je n'ai en aucune façon, mais en aucune
façon employé une expression semblable à l'égard de
la clientèle de l'aide sociale que je respecte, M. le Président,
et pour qui j'ai beaucoup de compassion. Alors, M. le Président,
j'espère que les propos de la députée de
Hochelaga-Maisonneuve ont dépassé sa pensée.
M. le Président, pour ce qui est de l'augmentation des plaintes
chez le Protecteur du citoyen, on fait état d'une augmentation de 60 %
des plaintes. Il faut regarder les chiffres. Nous venons de mettre sur pied une
réforme qui est entrée en vigueur de façon
définitive le 1er août dernier, il y a à peine trois mois.
Il est tout à fait normal et régulier que, quand une
réforme entre en vigueur, ça dérange des gens et ce serait
bien étonnant qu'une réforme ne dérange pas des gens et ce
serait, M. le Président, non seulement étonnant, mais il faudrait
se poser de sérieuses questions si une réforme ne changeait pas
quelque chose. Donc, la réforme qu'on a apportée, elle change
quelque chose. Elle accorde des prestations accrues à certains
prestataires, par exemple les inaptes, les jeunes de moins de 30 ans, les
familles monoparentales par le Programme allocation-logement, etc., et elle
diminue les prestations de certains autres, notamment ceux qui ne veulent
participer à aucune mesure d'employabilité et ceux qui refusent
un emploi. Donc, il y a des changements. Ces changements-là
amènent nécessairement, M. le Président, des
perturbations. Et il est normal que des gens, voyant leurs prestations
diminuer, s'adressent au Protecteur du citoyen. Ça se fait dans tous les
cas, dès qu'on change quelque chose, il y a un certain nombre de
personnes qui sont dérangées et qui portent
plainte. Donc, c'est normal qu'il y ait une augmentation. D'autant plus,
que le Front commun des assistés sociaux a publiquement incité
les prestataires à se plaindre auprès du Protecteur du citoyen.
On a fait une campagne de publicité, disant: Plaignez-vous auprès
du Protecteur du citoyen. Alors, quand on vient me dire que le Protecteur du
citoyen a vu quelques centaines de plaintes de plus lui être
adressées, on parle de centaines de plaintes de plus, non pas de
dizaines de milliers, on parle de centaines de plaintes. Il n'y en avait pas
déjà beaucoup avant, il y en a quelques centaines de plus et
ça fait 60 % d'augmentation. On lance le chiffre de 60 % d'augmentation
quand on sait qu'on a 540 000 clients et je crois qu'il y a quelque chose comme
1200 ou 1600 plaintes. Alors, il faut remettre tout ça dans sa
perspective et arrêter d'agiter des épouvantails sur la place
publique.
Finalement, la députée de Hochelaga-Maisonneuve dit:
Comment se fait-il que vous aviez annoncé que les dépassements
seraient de l'ordre de 70 000 000 $ ou autour de 70 000 000 $? il y en a pour
125 000 000 $. M. le Président, là, il faut regarder les
chiffres. En début d'année, nous avions prévu une
diminution de la clientèle de 2 %. Comme on a une clientèle
d'à peu près 300 000 ménages, on pensait qu'il y aurait
une diminution de 6000 ménages. Et on avait un budget en
conséquence. Or, on se retrouve non pas avec une diminution de 2 %, mais
avec une augmentation d'à peu près 5,5 %; donc, environ 9500
ménages de plus que l'an dernier, mais 15 500 de plus que le budget.
Moi, quand j'ai parlé d'une augmentation de 70 000 000 $
anticipés, c'était par rapport à l'an dernier, par rapport
à la situation de l'an dernier. Les journalistes m'ont questionné
un bon jour et ils m'ont dit: C'est combien de plus à l'aide sociale?
J'ai dit: Par rapport à l'an dernier, c'est 70 000 000 $ et
j'étais tout à fait dans mon droit de dire ça, M. le
Président, et c'était la vérité. (18 h 10)
Par contre, si maintenant on étudie le budget qui, lui,
prévoyait une baisse de 6000 assistés sociaux, alors là,
il faut rajouter ces 6000 par-dessus les 70 000 000 $, ce qui est le plancher
de l'an dernier, de sorte qu'il faut ajouter sur les 70 000 000 $ dont j'avais
parlé la valeur des 6000 assistés sociaux qui étaient dans
le budget et on arrive à peu près à 125 000 000 $.
Voilà l'explication qui porte sur le fait que, par rapport au budget, on
doit augmenter les crédits de 125 000 000 $ pour une clientèle
prévue, augmentée de 15 500 ménages.
Pour le reste, je pense que j'ai répondu essentiellement aux
propos de la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Dans ce Rapport statistique qui fait le bilan de la
situation prévalant maintenant en matière de sans-emploi à
l'aide sociale, à la page 13, on retrouve un portrait qui finalement est
très révélateur des régions du Québec
où le taux de chômage est le plus élevé. On se rend
compte, M. le Président, qu'il y a 78 % des personnes qui, à
l'aide sociale, sont des chômeurs. On les appelle, dans le jargon du
ministre, des aptes au travail comme si ne les appelant plus chômeurs
mais devenant des aptes au travail, c'étaient eux qui devenaient
responsables de se trouver un travail ou de se créer un travail. On
oublie que ce sont des gens en recherche d'emploi et que, dans une
société, si on ne veut pas déplacer les
responsabilités sur des boucs émissaires, au lieu de sur les
épaules de qui elles doivent porter, sur les épaules du
gouvernement, du patronat, des syndicats, les épaules de ceux qui ont la
responsabilité de faire en sorte qu'il y ait une offre d'emploi dans la
société... On se rend compte qu'en Gaspésie et aux
Îles-de-la-Madeleine, dans le Montréal métropolitain qui
est en train d'avoir le championnat du chômage, qui devance Saint-Jean,
Terre-Neuve, imaginez-vous, M. le Président... En
Abitibi-Témiscamingue, c'est plus de 80 % des gens qui sont aptes, c'est
plus que la moyenne, si vous voulez, des personnes qui reçoivent de
l'aide sociale à travers le Québec qui sont aptes parce que
là il y a plus de chômage qu'ailleurs. S'il y avait besoin
d'illustrer le fait, c'est directement le chômage et c'est en s'attaquant
au chômage et non pas aux chômeurs qui sont sur l'aide sociale que
le ministre, son gouvernement et son ministère pourraient faire oeuvre
utile dans la société. S'il y a besoin de l'illustrer, c'est bien
par ce tableau qui nous révèle que les chômeurs à
l'aide sociale sont plus nombreux dans les régions où il y a plus
de chômage. Le ministre a fait état tantôt de presque 10 000
personnes qui seraient donc inscrites au programme PAIE. Alors, je l'invite
à regarder la page 16 de son Rapport statistique, regarder les chiffres
qui nous sont fournis par rapport à la participation au programme PAIE.
Là, il va falloir qu'il élucide pourquoi il y a une
différence aussi marquée entre les chiffres d'août, de
septembre qui sont estimés, d'octobre - octobre, vous voyez, les
derniers chiffres indiqués sont de 3686 participants - et là le
ministre nous parle de 10 000. Est-ce qu'il additionne ceux qui ne sont plus
à PAIE et qui l'ont été mais qui, au bout des six mois
complétés, ont simplement été renvoyés
à l'aide sociale comme on le craint le plus?
Le Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve. M. le ministre.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: M. le Président, je voudrais clarifier une
chose en commençant. La députée de Maisonneuve a dit
tantôt que la responsabilité de se trouver un emploi repose sur
les épaules du gouvernement. Ce n'est pas ce que dit la loi, M. le
Président. La responsabilité première de se trouver un
emploi repose chez l'individu. C'est lui qui doit être à la
recherche d'un emploi, et c'est tellement vrai qu'à l'article 28 de la
Loi sur la Sécurité du revenu on dit: "L'adulte apte à
occuper un emploi, s'il n'est pas visé aux articles 16 et 18, doit
entreprendre des démarches appropriées à sa situation afin
de trouver un emploi rémunéré et se conformer aux
instructions que peut lui donner le ministre à cette fin." Donc, M. le
Président, le principe de base, c'est que c'est l'individu qui doit
être à la recherche d'un emploi. Ça, c'est le principe de
base.
Maintenant, M. le Président, c'est évident que des
emplois, il n'y en a pas toujours partout et que, à ce moment-là,
la société doit faire des efforts pour lui venir en aide, et le
gouvernement le fait aussi. Il le fait de diverses façons; il le fait
d'abord en proposant des mesures d'employabilité, c'est-à-dire
des mesures qui permettent à un individu d'améliorer sa
capacité, sa compétence et, donc, ses chances de se trouver un
emploi. À ce sujet-là, contrairement à ce qu'a
affirmé la députée de Hochelaga-Maisonneuve, les mesures
d'employabilité que nous proposons connaissent un succès accru,
M. le Président, au cours de la présente année.
J'aimerais simplement donner quelques statistiques à ce
sujet-là. Les premiers mois d'activités de l'exercice 1990-1991,
l'année dans laquelle nous sommes, pointent des écarts positifs
par rapport aux périodes correspondantes des années
précédentes, écarts qui ne devraient cesser de s'accentuer
à l'automne, l'automne où nous sommes présentement, pour
nous permettre de terminer l'année 1990-1991 avec une progression
estimée à près de 70 % de la fréquentation
rapportée de l'année dernière. Nous prévoyons des
augmentations de 70 % dans l'année courante. Ça contredit pas
mal, M. le Président, les données, les prétentions de la
députée de Maison-neuve.
Maintenant, parmi les facteurs contributifs à cette hausse,
notons l'importance relative grandissante des 30 ans et plus dans la
fréquentation, due principalement à l'abolition de l'âge
comme critère d'admissibilité aux mesures, les obligations et
incitatifs financiers prévus dans la nouvelle loi pour favoriser la mise
en mouvement des prestataires aptes et l'augmentation de la clientèle
à la sécurité du revenu, en hausse de 4,8 % par rapport
à celle prévue au budget initial.
Maintenant, M. le Président, pour ce qui est du programme PAIE,
le programme, comme vous le savez, est venu en vigueur au printemps dernier. Je
peux vous donner le rapport le plus récent qui porte sur la situation au
23 novembre 1990; c'est donc un rapport très récent. M. le
Président, on peut observer que, depuis le début, 62 %... Le
programme PAIE, c'est un programme qui vise à inciter les employeurs
privés, municipalités ou organismes sans but lucratif à
engager des assistés sociaux, à leur donner un emploi pour une
période de six mois, moyennant quoi le gouvernement paie une partie ou
même la totalité du salaire; incitation, donc, à
procéder à l'engagement, à l'embauche d'assistés
sociaux. Or, M. le Président, 62 % des emplois qui ont été
trouvés jusqu'à maintenant ont été fournis par
l'entreprise privée, 3 % par les municipalités et 35 % par les
organismes à but non lucratif. Et combien de contrats ont
été signés? L'entreprise privée en a signé
4319, les municipalités 237, les OSBL 2415, pour un total de 6971,
presque 7000 emplois qui ont été créés.
Maintenant, M. le Président, parmi les gens qui ont
terminé les six mois, il y en a 1127, à peu près la
moitié dans le secteur privé, et la moitié dans les
organismes sans but lucratif. M. le Président...
Mme Harel: Le ministre peut-il déposer ce qu'il vient de
lire, M. le Président?
M. Bourbeau: De ces gens qui ont terminé leur
emploi...
Mme Harel: En vertu de notre règlement, je demande au
ministre de déposer ce qu'il vient de...
Le Président (M. Lefebvre): M. le ministre, est-ce que
vous pouvez déposer les documents auxquels...
M. Bourbeau: M. le Président, je vais terminer d'abord de
les utiliser parce que, si je vous les dépose, je ne pourrai pas
continuer...
Le Président (M. Lefebvre): Je comprends. M. Bourbeau:
...terminer mon exposé là.
Le Président (M. Lefebvre): Est-ce que vous pourrez les
déposer, les documents?
M. Bourbeau: Oui, M. le Président, il n'y a rien de
caché ici.
Le Président (M. Lefebvre): C'est ce que j'ai bien dit, M.
le ministre. Est-ce que vous pourrez déposer après usage les
documents que vous utilisez présentement? La réponse, c'est oui,
Mme la députée.
M. Bourbeau: O.K. Alors, M. le Président, je disais donc
qu'il y a 1127 prestataires de la sécurité du revenu ou des
clients d'aide sociale
qui ont terminé les six mois, donc, qui ont travaillé
pendant six mois, soit dans le secteur privé ou dans des organismes sans
but lucratif, ou des municipalités, avec des subventions du
ministère pour défrayer une partie ou la totalité du
salaire. M. le Président, j'ai l'excellente nouvelle à vous
annoncer, une très bonne nouvelle, c'est que, de ce nombre de 1127 qui
ont terminé, il y en a 502 qui ont vu leur emploi converti, à la
fin de la période, en un emploi permanent. C'est-à-dire que dans
la moitié des cas, pratiquement, 45 % des cas, l'employeur a
décidé, à la fin des six mois, de garder à son
emploi cet assisté social là, ce prestataire de la
sécurité du revenu qui avait passé six mois à son
emploi avec un salaire payé en partie par l'employeur et en partie par
une subvention du gouvernement, du ministère de ta Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle,
l'employeur étant satisfait que ce prestataire dorénavant
était bien formé et capable d'occuper un emploi.
M. le Président, c'est pour moi une grande source de satisfaction
que de voir que ce programme-là rencontre ses objectifs et permet
à 50 %, pratiquement, 45 % de ceux qui participent d'acquérir un
emploi permanent. Si, M. le Président, nous réussissons à
augmenter encore davantage la participation - présentement nous pensons
pouvoir créer 10 000 emplois au cours de l'année - et si nous
pouvions faire en sorte que ce nombre augmente dans une proportion de 45 %, il
semble que les emplois deviendraient des emplois permanents.
C'est donc une avenue extrêmement prometteuse pour l'avenir et je
suis convaincu que la députée de Hochelaga-Maisonneuve va se
réjouir avec moi du succès du programme PAIE. (18 h 20)
Mme Harel: Dans...
Le Président (M. Lefebvre): Je m'excuse, Mme la
députée. M. le ministre, j'aimerais qu'on profite de l'occasion
pour que vous puissiez déposer deux documents: votre discours
d'ouverture...
M. Bourbeau: Parfait, M. le Président.
Le Présdient (M. Lefebvre): Est-ce que c'est
déjà déposé?
M. Bourbeau: Le discours est déjà rendu.
Le Président (M. Lefebvre): Également les notes que
vous venez tout juste d'utiliser. Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Là, le ministre a comme fait des glissements
entre le nombre de participants qui a atteint 7000 maximum, et puis ce sont ses
propres chiffres qu'il contredit lui-même parce que, dans le Rapport
statistique qui nous a été transmis il y a deux jours, le
ministère parle, pour le mois d'octobre, de 3686. Alors, d'autre
part...
M. Bourbeau: À quelle date?
Mme Harel: ...c'est le 502. Là-dessus, il faut bien
comprendre, ce n'est pas 3686 emplois là, c'est pour six mois une
subvention. Et, quand le ministre parle de 502 emplois, c'est plus raisonnable.
Le ministre se contente de peu, finalement, parce qu'il a agité des
améliorations. J'ai l'impression qu'il s'est créé un
monde, un merveilleux monde de l'employabilité dans lequel il
évolue, mais la réalité, M. le Président, c'est
que, sur les 400 000 adultes inscrits à l'aide sociale, il y en a 25 000
qui participent à des mesures d'employabilité. C'est 6,3 %.
Alors, est-ce que c'est une augmentation par rapport à l'an
passé? Quand c'était quasiment rien et que ça augmente un
peu, si le ministre s'en dit satisfait au moment où il obligeait 200 000
nouveaux ménages à participer à ces mesures, il y a comme
une sorte d'énorme écart entre les ménages qui pourraient
avoir accès et l'offre qui en est faite.
M. le Président, tantôt le ministre essayait
maladroitement, mais il essayait de faire croire que, parce que c'était
écrit sur le papier de la loi, les gens étaient responsables de
se chercher un emploi. Mais vous le savez comme moi, je suis convaincue, dans
la région où, vous, vous évoluez, que ce n'est pas parce
qu'on cherche qu'on trouve et on peut chercher beaucoup. Mais, même si on
cherche, on va vous dire: Je regrette, tu n'es peut-être pas bien vieux,
tu as peut-être juste 30 ans ou 35 ans ou tu as peut-être
même juste 25 ans ou 40 ans, mais, nous, ce qu'on veut, c'est quelqu'un
qui a fini son cégep; nous, ce qu'on veut, c'est quelqu'un qui a
déjà sa physique, chimie ou mathématiques, secondaire IV
ou secondaire V. Quelqu'un peut chercher et se retrouver sur le carreau,
Gros-Jean comme devant, M. le Président, et en ayant cherché
autant qu'il le faut. Alors, qu'est-ce que le ministre va mettre en place pour
corriger la situation qui s'est aggravée l'an passé, où on
a vu la disparition de la moitié des étudiants adultes inscrits
en formation professionnelle? Ceux qui recherchent un diplôme. Que le
ministre ne me parle pas de ceux qui sont prêts à suivre des cours
pour améliorer leur situation. Qu'il me parle de ceux qui cherchent un
diplôme pour se faire engager, pour se faire embaucher.
Je voudrais également, M. le Président, profiter de
l'occasion pour demander au ministre où en est... Dans la
synthèse des opérations majeures que son ministère a
publiée en juin 1990, on retrouvait, pour le mois de décembre,
les objectifs suivants: conclure avec le gouvernement fédéral des
ententes permettant une
meilleure complémentarité des interventions et un partage
adéquat des rôles dans le domaine de la main-d'oeuvre, dans le
respect des compétences constitutionnelles du Québec et de ses
institutions. Et on parie, pour décembre 1990, de fin des
négociations portant sur les ententes
fédérales-provinciales en matière d'adaptation et de
formation professionnelle de la main-d'oeuvre. M. le Président, on ne
pourrait pas comprendre que le ministre ne profite pas du temps qui lui reste
pour nous dire où est-ce que ça en est.
Le Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la
députée. M. le ministre, en vous rappelant que nous disposons
encore de sept minutes.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: M. le Président, pour ce qui est des chiffres
qu'utilisait la députée de Hoche-laga-Maisonneuve et de ceux que
j'utilisais moi-même, la différence entre les deux, c'est que les
miens se situaient en date du 23 novembre 1990. La députée de
Hochelaga-Maisonneuve avait des chiffres qui dataient par rapport à
ceux-là, qui étaient pour une époque
précédente, enfin, plus loin dans le temps. C'est sûr que
les chiffres varient à tous les mois et, le programme étant en
implantation, il y a de plus en plus de monde, évidemment, qui y ont
participé. Et s'ajoutent, mois après mois, les nouveaux
arrivants. Donc, mes chiffres étaient exacts et je ne dis pas que ceux
de la députée de Hochelaga-Maisonneuve ne l'étaient pas
non plus, mais ils ne se présentaient pas par rapport à la
même époque.
Deuxièmement, les clientèles aux mesures de
développement de l'employabilité. La députée de
Hochelaga-Maisonneuve nous dit que c'est un échec. Il n'y a pas beaucoup
de gens qui y participent. M. le Président, j'ai devant moi un tableau
qui indique la participation des clientèles aux mesures de
développement de l'employabilité pour l'année
courante.
On a commencé l'année au mois d'avril 1990, avec une
clientèle totale dans les mesures: les mesures extra, les stages en
milieu de travail, le rattrapage scolaire, le retour aux études
postsecondaires, les mesures RADE, les SEMO, Jeunes volontaires et les autres
mesures. On a commencé avec 27 719 participations en avril 1990. Et
ça a augmenté pendant toute l'année, sauf,
évidemment, un fléchissement pendant la période estivale.
Et aujourd'hui, au mois de novembre, on est rendus à 35 320. On estime
qu'à la fin de mars 1991 on sera rendus à 38 687. Et, ça,
ça ne comprend pas le programme PAIE de tout à l'heure. Et on a
dit que pour le programme PAIE on finirait l'année avec 10 000.
Donc, M. le Président, on estime, quant à nous, qu'on
devrait finir l'année autour de 48 000 ou 49 000 participations. 49 000,
c'est loin des 25 000 dont parlait la députée de
Hochelaga-Maisonneuve tout à l'heure. En fait, c'est deux fois plus.
Encore là, M. le Président, je ne commenterai pas... Je
présume que la députée de Hochelaga-Maisonneuve ne l'a pas
fait de mauvaise foi. Disons qu'elle n'avait pas en main les bons chiffres. La
députée de Hochelaga-Maisonneuve me demande maintenant où
est-ce qu'on en est dans les discussions avec le gouvernement
fédéral. Et ce que je peux dire, c'est qu'on n'en est nulle part,
parce qu'on n'a pas encore commencé les discussions, M. le
Président. Nous avons l'intention de demander au gouvernement
fédéral très bientôt d'entamer avec nous des
discussions et j'aurai l'occasion, au cours des prochains jours, de faire
état publiquement de la position du gouvernement du Québec
relativement à la gestion et à l'administration des programmes de
main-d'oeuvre au Québec.
Il y a au Québec présentement - vous le savez, M. le
Président - deux niveaux de gouvernement qui s'occupent de la
main-d'oeuvre. La formation professionnelle, vous le savez comme moi, c'est une
responsabilité qui est dévolue exclusivement aux provinces mais
qui, malheureusement, est occupée aussi en partie par le gouvernement
fédéral. Cette juxtaposition de deux administrations sur le
terrain fait en sorte, comme je vous l'ai dit précédemment, qu'il
y a beaucoup trop de dédoublement et, à toutes fins pratiques, M.
le Président, les programmes sont enchevêtrés,
emmêlés, ce qui n'est pas dans l'intérêt des
travailleurs. Alors, nous allons bientôt discuter avec le gouvernement
fédéral dans le but d'en arriver à une solution simple,
pratique, de régler ces problèmes-là et j'aurai l'occasion
de faire connaître la position du gouvernement au cours des tout
prochains jours, je l'espère.
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Dans une déclaration récente, en date du
5 décembre, au journal La Presse, le ministre signalait que les
programmes de main-d'oeuvre et de formation qui proviennent du
fédéral seraient bientôt, et je cite, "exclusivement
financés par des cotisations des employeurs et des salariés". Je
veux simplement vérifier avec lui s'il a des informations à
l'effet que le fédéral entend se désengager par rapport
aux sommes que le gouvernement investissait, ou s'il entend rapatrier ces
sommes ou s'il considère que ce n'est plus la caisse de
l'assurance-chômage qui financera dorénavant les programmes de
main-d'oeuvre et de formation professionnelle.
Le Président (M. Lefebvre): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, je n'ai pas de certitude
absolue que. le gouvernement fédéral va se désengager
totalement du financement des programmes de main-d'oeuvre, mais il y a des
faits qui sont un peu troublants. Dans la réforme de
l'assurance-chômage, par exemple, le gouvernement fédéral
s'est donné le pouvoir de puiser jusqu'à 15 % du compte de
l'assurance-chômage pour financer des activités de formation.
Alors, 15 % du compte de l'assurance-chômage, ça équivaut
exactement au budget que le gouvernement fédéral consacre
présentement à même ses propres deniers à lui pour
les mêmes fins. Alors, s'il peut puiser à même le compte de
l'assurance-chômage des montants identiques, en quantité, à
ce qu'il dépense présentement, d'autant plus que la ministre n'a
pas voulu nous donner d'assurance pour l'avenir, M. le Président, j'en
conclus, quant à moi, que le gouvernement fédéral entend
se dégager progressivement du financement des programmes de
main-d'oeuvre et de formation et remplacer ces fonds-là par les fonds de
l'as-surance-chômage qui ne lui coûtent rien, bien sûr,
puisqu'ils sont payés en totalité par les employeurs et les
travailleurs.
Le Président (M. Lefebvre): Mme la députée
de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Est-ce à dire que cette réduction
progressive pourrait intervenir dès la fin des ententes reconduites
jusqu'au 31 mars 1991? C'est donc dire, par exemple, qu'en matière de
formation à l'établissement... Est-ce que le ministre a des
informations supplémentaires à celles qu'il communiquait cet
automne à l'effet que le fédéral avait cette intention de
se désengager pour ne plus financer la formation professionnelle dans
les maisons d'enseignement du Québec d'ici 1994? Est-ce que c'est
confirmé?
Le Président (M. Lefebvre): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, tout ce que je peux dire,
c'est que je n'ai pas de nouvelles informations, puisque les
négociations avec le gouvernement fédéral n'ont pas
commencé. Ce que je peux dire, c'est que nous n'avons pas de certitude,
mais nous observons la situation telle qu'elle se présente et nous
avons, bien sûr, les pires appréhensions à ce
sujet-là, compte tenu de ce que nous observons présentement,
à la suite de la réforme de l'assurance-chômage.
Le Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Cette
dernière intervention met fin à l'étude des crédits
supplémentaires du ministère de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle et, par le
fait même, également, la commission plénière met fin
à ses travaux. Je remercie ceux et celles qui y ont
participé.
Pour permettre à l'Assemblée nationale de poursuivre sa
séance, je prie toutes les personnes qui doivent se retirer de le faire
immédiatement.
(Suspension de la séance à 18 h 33)
(Reprise à 18 h 35)
Le Président: M. le président de la commission
plénière.
M. Lefebvre (président de la commission
plénière): Oui, M. le Président, j'ai l'honneur
de vous aviser que la commission plénière qui s'est réunie
pour étudier les crédits supplémentaires n° 1 pour
l'année financière se terminant le 31 mars 1991 n'a pas fini de
délibérer.
Le Président: Merci, M. le président de la
commission plénière. En conséquence les travaux de la
commission plénière sont ajournés. Je suspends les travaux
de l'Assemblée jusqu'à 20 heures ce soir.
(Suspension de la séance à 18 h 36)
(Reprise à 20 h 9)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Nous reprenons les travaux de l'Assemblée. Est-ce qu'on pourrait
m'indiquer avec quel article au feuilleton nous reprenons nos travaux?
M. Vallières: Oui, M. le Président, je vous
prierais d'appeler l'article 35 du feuilleton, s'il vous plaît.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
ministre.
Projet de loi 96
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Alors, M. le ministre responsable des Pêcheries propose de prendre
en considération le rapport du projet de loi 96, Loi modifiant la Loi
sur le crédit aux pêcheries maritimes.
Je suis prêt à entendre le premier intervenant, M. le
ministre.
M. Vallières: M. le Président, nous avons convenu
de part et d'autre qu'à cette étape il y aurait consentement pour
procéder immédiatement à l'adoption du rapport de la
commission, procéder à la troisième lecture et
procéder à l'adoption du projet de loi.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Suite à cette
entente entre les partis, est-ce que le rapport de la commission de
l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le
ministre.
M. Vallières: M. le Président, je vous prierais
d'appeler l'adoption du projet de loi.
Adoption
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, de consentement,
nous allons maintenant procéder à l'étape de l'adoption du
projet de loi 96, Loi modifiant la Loi sur le crédit aux pêcheries
maritimes. M. le ministre, je suis prêt à vous entendre.
M. Yvon Vallières
M. Vallières: Alors, je vous remercie, M. le
Président. Une étape importante ce soir pour qu'on puisse donner
suite à cette volonté du gouvernement de procéder à
l'adoption d'un projet de loi jugé comme étant indispensable au
secteur des pêches. Comme vous le savez, nous avons eu l'occasion, avec
mes collègues de Gaspé, plus particulièrement des
Îles-de-la-Madeleine, du Saguenay et d'autres directement visés
par le secteur des pêches, de même qu'avec le député
de Duplessis, d'échanger tout récemment sur le projet de loi 96,
lors de l'adoption du principe et de son étude article par article.
À la suite de ces deux exercices, l'Opposition s'est dite très
heureuse de voir l'action positive de notre gouvernement dans le secteur des
pêches. Encore cet après-midi, j'avais l'occasion, avec le
député de Duplessis, de voter, d'adopter des crédits
supplémentaires nous permettant de donner suite à certaines de
nos actions dans le cadre du programme de coopération pour l'avenir des
pêches.
M. le Président, je ne compte pas reprendre, dans son entier,
l'énoncé de tous les arguments favorables à ce projet de
loi. Vous me permettrez, par ailleurs, ici, tout simplement de
repréciser l'importance de ce montant de 4 000 000 $ qui permettra au
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation de
disposer d'un outil lui permettant de réaliser pleinement son mandat
dans le secteur des pêches et de l'aquiculture via le programme de
coopération pour l'avenir des pêches, en laissant une marge de
manoeuvre pour les autres secteurs bioalimentaires du ministère.
Par conséquent, le présent projet de loi nous permet
d'agir. Cela n'est un secret pour personne, le tout est lié à la
situation actuelle du secteur dont les principaux acteurs économiques
éprouvent des besoins importants et urgents sur le plan financier. Pour
l'instant, M. le Président, je me limiterai à rappeler que la
crise qui affecte le secteur, autant du côté de la ressource et
des approvisionnements d'usines que du côté des marchés et
des clients, avait amené mon prédécesseur aux
pêches, le député de Portneuf, à mettre en place un
important pro- gramme de restructuration.
Il est important de rappeler que, le printemps dernier, le gouvernement
du Québec annonçait le programme CAP, soit le programme de
coopération pour l'avenir des pêches, doté de
crédits de 50 000 000 $ sur cinq ans. Évidemment, ce programme
visait la rationalisation de la flotte de pêche et des usines de
première transformation, en même temps que le développement
de l'aquiculture et de la deuxième et troisième transformation.
Mais il fallait d'abord pallier aux situations urgentes et, afin
d'éviter l'effondrement du secteur, soutenir temporairement les
opérations des intervenants avant de mettre en place de
véritables scénarios de rationalisation.
J'ai eu l'occasion, au cours des dernières semaines, de visiter
les pêcheurs et producteurs en Gaspésie et aux
Îles-de-la-Madeleine, un premier contact qui fut d'ailleurs des plus
intéressants, ainsi que très motivateur de par la volonté
des gens du milieu de trouver des solutions aux problèmes que nous
rencontrons dans ce secteur d'activité. M. le Président, ces gens
ont une volonté ferme d'agir pour leur avenir et l'étude
annoncée sur la pêche côtière tout récemment
en fera état dans un avenir très rapproché. Cela n'est
plus une cachette pour personne, la situation est plutôt
désastreuse et c'est pourquoi il devient de plus en plus important de
maintenir l'application du principe de rationalisation et de consolidation de
ce secteur d'activité que sont les pêches au Québec.
Par le fait même, M. le Président, je tiens à
rassurer tout de suite l'Assemblée, la provision de 4 000 000 $ que nous
introduisons par ce projet de loi pour le secteur de l'aquiculture et des
usines de transformation des produits marins ne nuira aucunement aux
pêcheurs. Cette année, en raison de l'ampleur des besoins dans le
domaine des pêches et de l'aquiculture et suite à l'implantation
du plan quinquennal de 50 000 000 $, le secteur a accaparé une part
très importante du fonds de 8 000 000 $ réservé à
cette fin. En fait, en tenant compte des projets approuvés et de ceux
soumis pour approbation, ce fonds de 8 000 000 $ ne suffit pas à
répondre aux besoins. De plus, son utilisation massive aux seules fins
de l'industrie des pêches ne permet pas au ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation d'intervenir dans le
soutien et le développement des autres secteurs bioalimentaires au
Québec. En fait, cette année, seules quelques interventions en
acériculture et auprès des producteurs caprins ont
été réalisées. Je le mentionnais, d'ailleurs, M. le
Président, lors de l'adoption du principe du présent projet de
loi.
Ainsi donc, afin de doter le ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation d'un outil lui permettant de
réaliser pleinement le mandat que lui a confié le gouvernement
dans le secteur des pêches et de l'aquiculture via son programme de
coopération pour l'avenir des
pêches et afin de laisser une marge de manoeuvre pour les autres
secteurs bio-alimentaires, le présent projet de loi vous est
proposé.
En effet, tel que stipulé à l'article 7 de la loi
actuelle, le montant de 30 000 000 $ prévu annuellement dépasse
largement les besoins de la flotte. À preuve, l'utilisation de ce
montant de 30 000 000 $ s'est réduite considérablement au cours
des dernières années dans un contexte de surcapacité
structurelle de la flotte de pêche et de baisse conjoncturelle de la
ressource dans les principaux stocks de poissons et de crustacés et de
baisse généralisée des prix sur les marchés. Devant
cette situation, les projets de construction ont diminué de façon
importante. D'ailleurs, la flotte du Québec est actuellement moderne et
il faut en réduire la taille pour que sa capacité corresponde
à la disponibilité de la ressource.
Cette diminution récente de l'aide à la flotte est bien
illustrée par quelques données. En 1987-1988, sur un fonds annuel
de 30 000 000 $, nous avons consenti en prêts et garanties quelque 27 400
000 $. En 1988-1989, sur un même fonds de 30 000 000 $, nous avons
consenti des garanties et prêts pour 15 700 000 $. Pour l'année
1989-1990, pour ces mêmes 30 000 000 $, nous avons assisté
à des prêts et garanties pour 6 300 000 $ et, pour la
présente année, soit 1990-1991, sur une disponibilité de
30 000 000 $, nous avons consenti des prêts et garanties pour 7 600 000
$.
M. le Président, je le répète, les pêches
maritimes représentent néanmoins une industrie extrêmement
importante pour certaines régions du Québec. Une telle
affirmation peut, par ailleurs, sembler surprenante dans un contexte où
les débarquements québécois et la production
québécoise de produits marins n'atteignent que 10 % de ceux de
l'Atlantique canadien et où ce secteur ne représente qu'une
très petite partie de l'économie québécoise.
Toutefois, dans les régions maritimes de la Gaspésie, des
Îles-de-la-Madeleine, de la Côte-Nord et de la
Basse-Côte-Nord, l'industrie de la pêche est bel et bien la
principale assise économique. La population de ces régions
maritimes du Québec ressemble d'ailleurs par plus d'un trait à
celle des autres provinces maritimes. De l'ordre de 500 000 habitants, elle est
sensiblement égale à celle de la région maritime du
Nouveau-Brunswick et à celle de Terre-Neuve. Les emplois qu'elle occupe
dépendent en grande majorité, comme chez elles, du secteur de la
pêche. Enfin, cette population québécoise en région
maritime connaît un taux de chômage toujours trop
élevé. Nous ne pourrons pas rester les yeux fermés devant
cette situation. C'est pourquoi il faut continuer de mettre en place des moyens
d'action qui, sans être une rationalisation sauvage, permettront
très certainement au secteur des pêches de se consolider à
moyen terme. (20 h 20)
Mais, avant de terminer, je tiens à souli- gner qu'en plus de la
création de cette provision de 4 000 000 $ pour l'agriculture et la
transformation dont il est question aujourd'hui, d'autres changements à
la loi méritent, M. le Président, d'être abordés. Il
y a d'abord l'ajout d'un simple mot, mais qui a toute son importance. En effet,
cette loi ne s'appliquera plus dorénavant aux seules constructions et
réparations de bateaux, mais aussi à leur transformation. Ce mot
"transformation" est donc ajouté aux objets de la loi afin que, dans le
contexte actuel de surcapacité de la flotte, le MAPAQ soit en mesure,
conformément à l'un des objectifs de son programme de
coopération pour l'avenir des pêches, de rationalisation de la
flotte, de pouvoir soutenir les projets des pêcheurs de convertir un
bateau d'un type de pêche vers un autre.
Je veux ici, M. le Président, vous donner un exemple de
l'utilité de cette loi. Lorsqu'un bateau est retiré d'une
pêche où il y a surcapacité, par exemple un chalutier, le
ministère doit avoir la possibilité de soutenir le nouvel
acquéreur pour transformer le bateau en fonction d'un autre type de
pêche où il y a encore quelques vieux bateaux à remplacer.
Ce simple ajout du mot "transformation", en étendant l'objet du support
gouvernemental, est donc de première importance et parfaitement en
relation avec les orientations du Programme de coopération pour l'avenir
des pêches.
De plus, je souligne que les garanties de prêts qui pourront
être consenties à des aquicul-teurs et à des
transformateurs de produits marins le seront selon des modalités,
conditions et délais de remboursement propres à chacun des cas et
seront, évidemment, assujetties à l'approbation des
différentes autorités, dont le Conseil du trésor et le
Conseil des ministres. D'abord, les garanties offertes en vertu de l'article 19
de la Loi sur le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation ne le sont pas en vertu d'un règlement pour la bonne
raison qu'il faut une solution adaptée à chacun des cas,
très différents l'un de l'autre. C'est, d'ailleurs, je pense, une
des particularités du secteur de la pêche où il faut
éviter de présenter un moule qui s'applique à l'ensemble
du secteur, mais bien y aller de façon ad hoc, selon les besoins qui
nous sont présentés des différents intervenants.
De plus, il est nécessaire, en plus de cette flexibilité
à long terme, de viser l'efficacité à court terme.
L'élaboration d'un règlement complexe dans lequel entrerait la
majorité des cas serait longue et l'adoption d'un tel règlement
serait tardive par rapport aux besoins immédiats de ce secteur
d'activité au Québec. Enfin, il aurait fallu, de toute
façon, déroger au règlement, même complexe, dans de
nombreux cas. Somme toute, la solution retenue ici dans le projet de loi 96,
c'est-à-dire adopter par décret les conditions et
modalités adaptées a chacune des situations, se situe dans la
continuité des
actions du ministère dans le cadre de l'article 19 de la loi du
ministère et permet de s'assurer d'une solution appropriée dans
l'immédiat.
Enfin, dernier amendement à cette loi, une simple
précision de termes qui permet de lever toute ambiguïté
quant aux personnes qui peuvent bénéficier du support
gouvernemental. Il s'agira dorénavant de "pêcheurs ou d'autres
personnes" et non plus de "pêcheurs ou à des personnes",
expression péjorative qui pouvait, dans certaines situations, laisser
croire que les pêcheurs n'étaient pas des personnes, ce qui n'est
évidemment pas le cas. Si l'intention du législateur était
claire, il n'en reste pas moins qu'il faut éviter toute
possibilité d'interprétation péjorative.
En conclusion, M. le Président, l'amendement à la Loi sur
le crédit aux pêcheries maritimes que je vous présente
aujourd'hui s'inscrit entièrement dans les objectifs du programme de
coopération pour l'avenir des pêches. Ainsi, donc, j'en propose
l'adoption parce que, d'une part, il n'augmente pas la capacité du
ministère de l'Agriculture d'intervenir à même le fonds
consolidé du revenu; que, d'autre part, il permet de répondre aux
engagements du gouvernement en regard du programme de coopération pour
l'avenir des pêches de 50 000 000 $, et cela, sans nuire en aucune
façon aux besoins des pêcheurs en regard de la flotte. C'est
pourquoi ce projet de loi doit être sanctionné dans les plus brefs
délais pour répondre aux besoins du secteur des pêches. ce
projet, à mon avis, témoigne de notre écoute du milieu et
de l'intérêt du gouvernement libéral à la cause des
pêches au québec. j'en parlais tout à l'heure avec le
député de duplessis qui aura à s'exprimer
immédiatement après moi sur l'adoption en troisième
lecture et je serai tout ouïe parce que j'ai convenu avec le
député de duplessis que j'allais, avec beaucoup d'attention,
écouter le message qu'il a à nous livrer. je suis persuadé
qu'il va nous faire part de certains modèles qu'il connaît dans
d'autres pays, qui peuvent nous permettre, je pense, d'envisager que le secteur
des pêches, tout en reconnaissant qu'il est en difficulté majeure,
est un secteur avec lequel on peut se comporter, je pense, avec optimisme, un
secteur qui constitue un avenir pour le québec. et je pense que
ça a été témoigné avec mon
prédécesseur, de même qu'avec l'opposition, au fil des ans,
qu'il est possible, dans un secteur névralgique pour plusieurs
régions maritimes du québec, de faire en sorte que nous
puissions, comme élus en cette chambre, quel que soit le
côté de la chambre que nous occupions, unir nos efforts afin de
donner à ce secteur d'activité que sont les pêches au
québec une assise solide, lui permettant, d'une part, de se rationaliser
et surtout, d'autre part, de se consolider au cours des prochaines
années. alors, je vous remercie, m. le président. je laisserai la
parole, maintenant, à l'Opposition.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre
délégué aux Pêcheries. Je reconnais maintenant M. le
député de Duplessis, responsable de ce dossier du
côté de l'Opposition officielle. M. le député.
M. Denis Perron
M. Perron: Merci, M. le Président. Depuis que je suis
porte-parole de l'Opposition officielle en matière de pêcheries,
je me fais un devoir de prendre connaissance de tout article d'un journal ou
d'une publication québécoise qui pourrait, de près ou de
loin, toucher à ce domaine des pêcheries. Je dois dire que, depuis
1988, j'ai eu l'impression de lire un roman d'horreur qui aurait pu s'appeler
"Les tourments du pêcheur" ou encore "L'industrie qui
rétrécissait". Pour quelqu'un qui, comme moi, habite une
région maritime du Québec, il s'agit là d'un
divertissement dont j'aurais bien pu me passer. Hélas! Contrairement
à ces histoires entièrement issues de l'imagination fertile d'un
romancier, les exposés et les chiffres auxquels nous sommes
confrontés reflètent une situation bien réelle,
c'est-à-dire une situation en date d'aujourd'hui.
M. le Président, on ne comprend probablement qu'une partie de la
dureté avec laquelle des concitoyens et des concitoyennes du
Québec sont touchés dans leur vie quotidienne, dans leurs
aspirations, dans leur confiance même de pouvoir un jour profiter de la
richesse québécoise comme ils y ont droit. Comme cela a
déjà été souligné, on parle ici d'un secteur
ne représentant, somme toute, qu'une faible partie de l'ensemble de
l'économie québécoise, mais ses activités sont
à ce point concentrées qu'il s'agit, et de loin, d'une des
sources principales de revenus pour la Côte-Nord, la Gaspésie et
les Îles-de-la-Madeleine. Toute fluctuation dans le domaine des
pêches affecte de plein fouet ces régions qui ne disposent, au
demeurant, que de peu ou pas de protection efficace pour en amoindrir les
impacts néfastes.
Il est alors peu surprenant de voir les pêcheurs et les
travailleurs et travailleuses des industries afférentes réagir
avec de plus en plus d'énergie face à des nouvelles qui semblent
empirer de jour en jour. Qui plus est, on doit comprendre leur frustration bien
légitime de voir les comptes rendus de leurs déboires
systématiquement relégués à l'intérieur des
cahiers des journaux puisque la une semble réservée à des
conflits ou à des déclarations plus accrocheuses et surtout pas
à une litanie de statistiques augurant les derniers souffles d'une
industrie fort malade.
Le déclin qu'on a connu en 1987, bien qu'anticipé et
minutieusement homologué par Pêches et Océans Canada, se
révèle bien pire que tout ce qu'on croyait les pêcheries
capables
d'encaisser. Comme c'est souvent le cas, il aura fallu quelques
années avant que l'on ne prenne conscience de l'ampleur du
problème. L'optimisme du milieu des années quatre-vingt a
masqué, pour un temps, le début du processus qui nous a
amenés à la situation actuelle. On pourrait d'ailleurs citer ce
même optimisme comme une cause non négligeable du bourbier dans
lequel on se retrouve aujourd'hui puisqu'il a engendré l'ennemi n° 1
auquel nous faisons présentement face: la surcapacité de
certaines installations existantes due a un approvisionnement déficient,
très souvent voulu par les politiques canadiennes ou encore par les
politiques québécoises.
Un roman d'horreur, M. le Président? Je n'ai qu'à vous
citer quelques titres de journaux: "Les pêcheries
québécoises coulent à pic"; "1989: désastre pour
les pêches maritimes"; "Les pêcheurs québécois de
homards enregistrent des pertes désastreuses"; "La saison de pêche
hautu-rière aura été un désastre au Québec
en 1990". Je sens que nous commençons à déceler une
tendance, M. le Président. (20 h 30) "Les pêcheurs de crabe auront
perdu 29 000 000 $ en 1990". Tiens, on n'a pas le mot "désastre" dans ce
titre de journal, mais la nouvelle n'en est pas meilleure pour le moins.
D'ailleurs, qu'on dise "désastre", "calamité", "cataclysme",
"catastrophe", "fléau" ou "malheur", on ne le fera tout de même
que d'une position d'observateur. Le pêcheur québécois,
lui, ne parle pas de désastre, il le vit quotidiennement.
Tous les titres que j'ai cités sont accompagnés de
détails qui sont connus du gouvernement libéral mais sur lesquels
je crois important de revenir. Il faut cependant chercher à associer
à chacun des chiffres les effets concrets que subissent des gens comme
vous et moi. De 1987 à 1990, M. le Président, on a vu le total
des débarquements diminuer de 30 % et, les prix ayant chuté, on a
vu les sommes associées à ces débarquements passer de 126
000 000 $ à 68 500 000 $, un recul à peine croyable de 45 %.
Pendant la même période, la valeur des expéditions des
entreprises québécoises de transformation subissait une perte de
l'ordre de 40 %.
Toutes les espèces furent affectées. Aucun travailleur et
aucune travailleuse de l'industrie de la pêche ne fut à l'abri des
tristes retombées de ce déclin. À titre d'exemples, M. le
Président, Alipêche à Sept-îles, morue salée
en Basse-Côte-Nord, pêcheurs de homard des
Îles-de-la-Madeleine et j'en passe. Pour Alipêche Sept-îles,
M. le Président, je voudrais ici informer les membres de cette Chambre
et, en particulier, le ministre délégué aux
Pêcheries et lui rappeler certains faits. Purdel est intervenue dans le
dossier d'Alipêche sur la Côte-Nord pour la première fois
à Rivière-au-Tonnerre et, par la suite, dans le dossier
d'Alipêche de Sept-îles.
Je passe maintenant au dossier de Rivière-au-Tonnerre. Sur ce
dossier, aussitôt la prise en charge par Purdel, fermeture de l'usine et
vente des équipements à l'intérieur de l'usine
pièce par pièce, pour ne pas dire morceau par morceau. Quant
à la question de Sept-îles, fermée maintenant,
l'équipement fut dernièrement, c'est-à-dire en date de
jeudi dernier, transféré par Purdel directement à
Rivière-au-Renard.
En ce qui me concerne, sur un ensemble de 1200 kilomètres de la
Côte-Nord, dorénavant, à moins qu'on se grouille au niveau
du gouvernement et à moins qu'on continue à se grouiller, comme
on le fait actuellement dans le milieu, il n'y aura plus de transformation de
crevettes sur la Côte-Nord. Pourtant, le ministre et certaines personnes
de Purdel savent très bien que la question des trois machines de l'usine
Alipêche de Sept-îles était un argument majeur pour le
comité ad hoc pour attirer des investisseurs dans le but de la
réouverture de cette usine. Équipement transféré
à Rivière-au-Renard.
Quant à la crevette, M. le Président, je voudrais informer
aussi les membres de cette Chambre que l'ensemble des bancs de crevettes, et
ce, sans exception, est actuellement sur la Côte-Nord, dans le
comté de Saguenay et dans le comté de Duplessis. Je commence dans
le comté de Saguenay. Nous avons un banc de crevettes qui est
mercuré, dont on ne peut se servir pour des pêches commerciales,
qui est à l'embouchure de la rivière Tadoussac. Nous avons un
banc de crevettes dans le comté de Duplessis, ce qu'on appelle le banc
Sept-îles-Port-Cartier. Nous avons aussi un autre banc de crevettes dans
le comté de Duplessis, qui est situé dans le détroit de
Jacques-Cartier, entre l'île d'Anticosti et la Côte-Nord, toujours
dans le comté de Duplessis. Nous avons aussi, à la
frontière du Québec et du Labrador - en passant,
frontière, M. le Président, que je n'ai jamais reconnue
malgré la décision du Conseil privé de Londres, le 2 mai
1927; je parle de la frontière du Labrador - un autre banc de crevettes
qui peut être péché par des Québécois et
aussi par des Terre-Neuviens et d'autres personnes, d'autres pêcheurs de
l'extérieur, qui s'appelle le banc du chenail des Esquiman.
Donc, tous les bancs de crevettes sont chez nous. Ce qu'on voit
actuellement, c'est que toute la transformation de la crevette, ainsi que la
très grande majorité des permis pour crevettiers ne sont pas sur
la Côte-Nord, mais ça va se faire dorénavant sur la
Côte-Sud.
M. le Président, j'ai le regret de vous dire que je n'accepte pas
une telle décision de Purdel, qui semble éventuellement vouloir
être endossée par le gouvernement dans le cadre de sa
restructuration des pêches maritimes, surtout dans le domaine de la
transformation. Je considère donc comme dérisoire cette attitude
de Purdel et je suis assuré même, comme d'autres personnes le sont
dans le comté de Duplessis et ailleurs au Québec, que Purdel a
manigancé au détriment de la Côte-Nord et même de
certaines
personnes connues du gouvernement. Je demande au ministre de faire
certaines vérifications à ce sujet. Que le ministre
délégué aux Pêcheries vérifie donc le prix de
la crevette qui a été payé en 1990 à Matane,
Rivière-au-Renard et Alipêche Sept-îles pour faire la
comparaison des prix. Dans des cas, je peux apporter des informations à
l'effet qu'il y a même eu jusqu'à 20 cents la livre dans la
même journée de différence, c'est-à-dire en moins
pour la crevette qui était débarquée à
Sept-îles par rapport à celle qui était
débarquée sur la Côte-Sud. Donc, il y a une connivence qui
peut vraiment exister entre certaines personnes de certaines parties
concernées. Pourquoi les crevettiers vendent-ils sur la Côte-Sud
plutôt que de vendre sur la Côte-Nord? N'est-ce pas plutôt
à cause de la différence des prix payés sur la
Côte-Nord en rapport avec les prix payés sur la Côte-Sud? Je
demande donc que le ministre procède dans les plus courts délais
à une enquête interne pour vérifier ce qui se passe dans le
dossier Purdel versus Alipêche, versus Rivière-au-Renard et versus
l'ensemble du domaine de la crevette. Le ministre se rendra compte de certains
faits qui lui sont actuellement inconnus, mais qui pourraient être
éventuellement très connus de la part du public puisque ces faits
sont connus de certaines personnes de son entourage.
M. le Président, j'ai désigné tout à l'heure
la surcapacité des installations comme l'ennemi n° 1 à
combattre, à cause des approvisionnements manquants. Par installations,
j'entendais, bien sûr, les usines de première transformation, les
équipements de congélation et les autres infrastructures
nécessaires à l'entreposage et au traitement des produits marins.
Il faudrait, par extension, y inclure également les composantes de la
flotte de pêche québécoise. Tous ces beaux bateaux neufs
plus gros et mieux équipés, financés par le gouvernement
et achetés avec la promesse d'une prospérité sans cesse
grandissante, se retrouvent aujourd'hui comme autant de fauves luttant pour la
même souris.
Le ministre a raison lorsqu'il mentionne que le Québec est
doté d'une flotte amplement suffisante à la tâche tant en
quantité qu'en qualité. Il n'a pas parlé, mais je suis
sûr qu'il en est fier, de la compétence et de l'énergie de
tous les instants dont font preuve les équipages de ces bateaux. On peut
facilement imaginer la performance que l'on pourrait réaliser si les
stocks ne se montraient pas si cruellement pauvres. Mais, à l'heure
actuelle, on parle plutôt de mise au rancart des éléments
de la flotte jugés trop vieux et de la transformation d'une bonne partie
du reste de la flotte pour l'adapter à la pêche d'espèces
encore sous-exploitées et susceptibles d'apporter au moins un palliatif
au manque actuel.
Voilà qui signifie toutefois que des jours très sombres
guettent les constructeurs de bateaux du Québec. À preuve, la
valeur de leurs contrats pour cette année, c'est-à-dire en 1990,
atteint 350 000 $ contre 6 000 000 $ l'an passé, 10 000 000 $ pour
l'année précédente et 28 000 000 $ pour 1987. C'est une
chute vertigineuse qui, couplée au ralentissement économique que
nous vivons en ce moment, semble sonner le glas pour tout un secteur
directement relié aux pêcheries, et les employés qui y
oeuvrent vont en souffrir. Est-ce que tous ces artisans devront joindre le
nombre malheureusement trop élevé des chômeurs et
assistés sociaux? Si, comme Félix Leclerc l'a dit, "la meilleure
façon de tuer un homme, c'est de le payer à ne rien faire",
n'est-on pas en train de s'assurer d'une génération moribonde
malgré, et c'est là le drame, M. le Président, sa
volonté farouche de contribuer à l'avancement de la
société québécoise? Et Dieu sait combien nous avons
d'exemples sur cette question!
Vous trouverez sans doute ironique qu'après cette affirmation je
déplore maintenant que ces mêmes mesures, à savoir
l'assurance-chômage et l'aide sociale, se révèlent
totalement insuffisantes face à la problématique des
régions maritimes du Québec. Une série de facteurs ont
contribué à cet état de chose. Les réformes tant
à Québec qu'à Ottawa, qu'on nous justifie par la situation
économique, font en sorte que plus de gens disposent de moins d'argent
pendant moins de temps. Comme si ce n'était pas suffisant, l'état
lamentable de l'industrie de la pêche a pour résultat qu'un
très grand nombre de travailleurs et de travailleuses sont tout à
fait incapables de se conformer aux conditions imposées pour
l'admissibilité aux programmes en question. (20 h 40)
Le vide juridique créé par le blocus du Sénat
canadien dans le dossier de l'assurance-chômage n'a sûrement pas
aidé non plus. Et ce fameux Sénat est composé très
souvent de joueurs comme le sénateur Hébert qui se fout
éperdument des régions, qui se fout éperdument de
l'ensemble des problèmes qui sont vécus par différentes
personnes dans le domaine des pêches, puisqu'il ne connaît
même pas le dossier. Je voudrais lui dire: Non, merci, je ne veux pas de
ce genre de personnage qui s'occupe des affaires du Québec par les temps
qui courent.
M. le Président, dans un article du Devoir, daté du 17
novembre dernier, le journaliste Claude Turcotte nous relate que la loterie la
plus populaire en Basse-Côte-Nord, en Gaspésie et aux
Iles-de-la-Madeleine, est la 10/42. On fait évidemment
référence aux 10 semaines de travail nécessaires à
l'obtention de 42 semaines de prestations d'assurance-chômage lorsqu'on
est pêcheur. Maintenant, avec cette réforme contestée et
décriée, on devrait plutôt parler de la 10/37. Je ne parle
pas de la 6/49 de Loto-Québec puisque cette dernière n'est pas
admissible aux pêcheurs. Je parle d'assurance-chômage.
C'est un trait bien québécois de recourir à
l'humour, même un peu noir, dans les situations
qui ont tout pour décourager le monde en vie. Mais toute blague a
un fond implicite de vérité et je trouve très
inquiétant que, même sous un aspect moqueur, on ait tendance
à associer le droit à des mesures sociales à un jeu de
hasard. Il y a un désabusement, un sentiment d'être laissé
pour compte, qui pourrait bien être la pointe de l'iceberg. On demande
à tous ces gens de travailler avec enthousiasme et
sérénité, tout en leur laissant entendre qu'on ne peut
rien leur promettre, qu'ils ne peuvent compter sur quelque assurance que ce
sort advenant un coup dur. Le coup dur est bien arrivé. Maintenant,
qu'allons-nous faire?
M. le Président, il est absolument essentiel d'ajuster les normes
de nos programmes sociaux à la réalité des industries
saisonnières comme la pêche. N'y aurait-il pas lieu d'affecter une
partie des sommes promises pour la formation de la main-d'oeuvre aux
pêcheurs et aux travailleurs et travailleuses des pêcheries de la
Côte-Nord, des Îles-de-la-Madeleine ou encore de la
Gaspésie? Bien plus, il faut s'orienter franchement vers le
développement d'activités connexes aux pêcheries de
façon à régler, par des moyens fructueux, au moins une
part du manque à gagner de toute une population de travailleurs et
travailleuses fiers et responsables de l'être.
On démontre ces temps-ci une attention toute particulière
à la protection de la ressource marine. La manifestation la plus
évidente en a été la baisse drastique des quotas
alloués pour chacune des espèces majeures. Dans un certain sens,
on peut dire: Mieux vaut tard que jamais, car la baisse des stocks est telle
que les pêcheurs ne peuvent même pas obtenir suffisamment de
captures pour remplir les quotas en question. C'est principalement le cas de la
morue qui fait problème. Même si cette espèce ne
représente que 20 % des débarquements, elle donne de l'emploi
à un bon nombre de petits pêcheurs québécois et son
importance sur le plan économique ne peut et ne doit pas être
négligée.
Dans un autre cas précis, celui du saumon de l'Atlantique,
d'autres restrictions portant principalement sur les lieux de pêche ont
été imposées. La nécessité d'assurer la
disponibilité du poisson est évidente pour quiconque a un peu
à coeur le sort des pêcheries québécoises et
l'avenir des futures générations de pêcheurs et
pêcheuses et travailleurs et travailleuses de l'industrie maritime. Il
faut espérer que la situation se rétablira le plus rapidement
possible et qu'on aura appris notre leçon pour mieux faire nos
devoirs.
On peut cependant questionner certains aspects des méthodes
utilisées pour parvenir à cette fin. M. le Président, lors
de l'ouverture de la saison de pêche au saumon cette année, j'ai
reçu de nombreux appels de pêcheurs commerciaux ayant, pour la
plupart, hérité d'une tradition remontant à quelques
générations quant à leur emplacement et à leurs
quotas et m'ex- primant leur désarroi quant aux nouvelles
réglementations qu'ils se voyaient imposer. On les avait
transférés, sans, dans plusieurs cas, les en avertir ou encore
les consulter, de leur zone de pêche vers de nouvelles, tout juste
créées, et ils se voyaient attribuer des quotas fort
différents. Pour ajouter à la confusion, ajoutons que deux
ministères sont impliqués dans ce dossier. Le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec
émet les permis pendant que le ministère du Loisir, de la Chasse
et de la Pêche est responsable des directives à suivre.
La création de nouvelles zones, au nombre de 42, reflète
la volonté du MLCP d'assurer la gestion des permis de pêche
commerciale au saumon par territoire plutôt que par emplacement. Qu'on
soit d'accord ou non avec cette décision, il faut se rendre à une
évidence incontournable: elle va provoquer des attaques
immédiates et de source bureaucratique sur les droits de bon nombre de
pêcheurs, et c'est alors, M. le Président, que l'absence d'une
politique claire et juste quant au rachat des permis de pêche commerciale
au saumon se fera cruellement sentir.
Prenez le cas de la politique de rachat des permis. M. le
Président, il y a, dans le secteui des pêches commerciales, deux
genres de permis qui sont actuellement émis par le ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Je parle des
pêcheurs qu'on dit privilégiés, c'est-à-dire des
pêcheurs qui ont des droits qu relèvent de leurs ancêtres
parce qu'on rencontre encore aujourd'hui au Québec des pêcheurs
commerciaux qui reçoivent des permis parce que
l'arrière-grand-père ou l'arrière-grand-mère avail
déjà un permis et c'est de père en fils ou de mère
en fille que ces permis sont réémis d'année en
année. Donc, je demande au gouvernement de regarder la possiblité
qu'on établisse un programme cohérent pour le rachat de ces
permis, parce que, dans la grande majorité des cas, ce ne sont pas des
pêcheurs commerciaux, mais ce sont des personnes qui sont
déjà au travail et qui contribuent, par ce genre de droits
acquis, même au détriment de la pêche sportive et aussi de
la pêche commerciale pour les pêcheurs qui y gagnent leur vie
à l'année. Donc, je demande au gouvernement - et je
répète - de regarder la possibilité de rachat pour ce
genre de permis, dans un premier temps. Dans un deuxième temps, pour les
détenteurs de permis qui sont actuellement de vrais pêcheurs
professionnels, comme je le disais tout à l'heure, des pêcheurs
qui gagnent leur vie à l'année avec la pêche commerciale,
si quelques-uns d'entre eux ou quelques-unes d'entre elles veulent revendre au
gouvernement leur permis, ça sera au gouvernement d'établir aussi
de ce côté-là, dans une phase 2, un programme efficace pour
le rachat de ces permis pour faire en sorte que ces personnes ne perdent pas
les investissements qu'elles ont faits au
cours des années.
En somme, M. le Président, il s'agit d'abord et avant tout de
considérer les pêcheurs comme des individus plutôt que comme
des statistiques. Le ministre responsable des Pêcheries soulignait, lors
de son discours du 15 novembre dernier, qu'il était aux prises avec le
problème d'arrimer, rationalisation et développement. J'y
ajouterai le problème particulièrement aigu dans ce secteur de
concilier réglementation et individualités. Si on n'avait affaire
qu'à des entreprises commerciales, capables de planifier et de
répartir leurs activités selon les contraintes économiques
et physiques, la solution serait relativement simple à trouver et
à mettre en application. Mais tel n'est pas le cas au Québec, M.
le Président.
Heureusement, des mesures ont finalement été prises pour
redonner une certaine justice dans la distribution de la ressource entre tous
les intervenants, que leurs entreprises soient de petite ou de grande taille.
En effet, la nouvelle forme d'attribution des quotas, appliquée
dès cette année aux chalutiers, c'est-à-dire poissons de
fond, et aux crabiers semi-hauturiers, semble en voie de mettre fin au principe
du "premier arrivé, premier servi" qui . existait jusqu'alors et qui se
révélait désastreux pour les petits pêcheurs
côtiers, incapables de rivaliser avec des entreprises plus grosses et
encore mieux équipées. Le nouveau système, qui
paraît assez bien fonctionner jusqu'à maintenant, permettra
à tous et à toutes d'optimiser leur pêche de façon
à encourir le moins de frais possible. Ce ne sera vraiment pas un luxe
puisque l'on prévoit que la saison de pêche 1991 sera pire que
celle, pourtant catastrophique, que l'on vient de connaître en 1990.
Une autre façon d'aider le pêcheur québécois
et relevant du gouvernement fédéral a trait aux zones de
pêche qui sont allouées, de même qu'au coût des
permis. J'aurais le goût de faire le procès du
fédéralisme supposément rentable, mais ce gouvernement
arrive fort bien à se discréditer lui-même. Je dois,
cependant, dénoncer la disparité injustifiable faisant que les
Québécois et Québécoises doivent payer leurs permis
fédéraux entre 1500 $ et 1600 $, alors que ce montant n'est que
de 500 $ pour Terre-Neuve et de 100 $ pour les pêcheurs du
Nou-veau-Brunswick. C'est ce que je qualifie d'injustice totale envers les
pêcheurs et pêcheuses du Québec. (20 h 50)
L'élimination du principe concurrentiel arrive cependant trop
tard sous un point de vue bien précis et auquel j'ai fait allusion tout
à l'heure: la surcapacité des usines de transformation, toujours
à cause du manque d'approvisionnement. Il est clair que c'est l'effet
d'entraînement lié à cette compétition qui a
amené l'apparition de bateaux de plus en plus performants au niveau de
la pêche. On n'avait pas le choix; c'était, à ce moment, la
loi de la jungle. Tous ces bateaux arrivant aux usines avec des cargaisons
énormes ont provoqué le besoin de voir ces dernières
agrandies et entourées d'installations frigorifiques toujours plus
imposantes.
Le déclin brutal qu'a subi l'industrie de la pêche a
transformé la plupart de ces ensembles industriels en autant
d'éléphants blancs, un rappel presque cynique d'une époque
si prospère et, surtout, encore si fraîche à l'esprit de
tout le monde. Les quotas mieux répartis et rigoureusement
contrôlés, la concurrence étant sur le point d'être
reléguée au second plan, que faire de ces carcasses
sous-utilisées, mais entraînant toujours des coûts
considérables pour tous les contribuables québécois et
pour certains propriétaires? Qu'adviendra-t-il des milliers
d'employés dont l'occupation était déjà
précaire et qui sont les premiers touchés par cette crise dans le
domaine des pêches? Ce sont ces gens et leurs représentants et
représentantes, ceux-là et celles-là mêmes qui sont
directement dans la ligne de feu, qui doivent être consultés sur
tout projet global de rationalisation, transfert, fermeture, etc. Je le
répète, M. le Président: La dimension humaine ne doit pas
être engloutie dans un processus bureaucratique et arbitraire. J'ai bien
peur que de malheureux exemples soient déjà présents:
Alipêche, équipements, comités ad hoc en formation, avenir
de la crevette sur la Côte-Nord. je tourne cette sombre page pour un
instant, m. le président, et regardons un peu du côté de
l'avenir ou plutôt de ce qui pourrait être un avenir pour
l'industrie des pêches et pour les régions qui en
dépendent. il s'agit, bien sûr, de l'aquiculture. l'aquiculture
est, comme on le sait, un secteur, pour ne pas dire le seul secteur, fortement
en croissance dans le domaine des pêcheries. on estime que les produits
de l'aquiculture vont augmenter leur part des approvisionnements totaux de
poissons de 5 % par rapport à 1984 pour atteindre 15 % en 1992. certains
entrevoient même que cette part pourrait dépasser les 20 % en l'an
2000. au cours des 10 prochaines années, le marché
américain pour les produits aquicoles devrait croître de 35 % ou
encore de 500 000 tonnes par an. le ministère de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation a même déjà
évalué à 700 000 000 $ par année les revenus que
pourrait tirer le québec de l'aquiculture. ceci peut sembler
exagéré, mais un petit pays comme la norvège, avec une
population dépassant à peine 4 000 000 d'habitants, produisait
déjà, en 1986, plus de 50 000 tonnes métriques de produits
aquicoles, pour une valeur dépassant les 250 000 000 $, production qui
aurait atteint, en 1989, les 120 000 tonnes métriques. le potentiel de
croissance est, comme on peut le voir, phénoménal.
Or, le Québec ne semble pas avoir suivi le mouvement
jusqu'à présent puisque sa production aquicole ne
représente qu'environ 2 % du volume
des débarquements, soit environ 1500 tonnes métriques. De
plus, la production aquicole est orientée vers les besoins de la
pêche sportive plutôt que vers les besoins de la consommation.
Pourtant, le Québec est doté, en matière de production
aquicole, de ce qu'on appelle dans le langage des échanges
internationaux des "avantages comparatifs", c'est-à-dire que le
Québec dispose en abondance des ressources et des conditions qui peuvent
en faire un producteur important et compétitif sur la scène
mondiale ou encore internationale. Ainsi, nous avons au Québec les
volumes d'eau, tant de surface, souterrains que côtiers, qui sont
essentiels à l'aquiculture. Nous avons de l'énergie à bon
marché et l'expertise nécessaire pour mener à bien une
telle production. De plus, nous sommes situés près des
débouchés importants comme, par exemple, la côte-est
américaine.
Il faut donc chercher ailleurs les raisons du retard du Québec
à profiter de l'expansion mondiale de l'aquiculture, et le gouvernement
du Québec a certainement un rôle majeur à jouer dans
l'identification des problèmes et dans l'encadrement des solutions
à y apporter. Bien sûr, les fluctuations importantes des
conditions météorologiques forment un obstacle à
surmonter, mais pas un obstacle insurmontable. Certaines solutions relativement
simples et peu coûteuses existent actuellement et un soutien
gouvernemental adéquat pourrait permettre de les implanter rapidement et
efficacement sur le territoire québécois, en particulier dans les
territoires maritimes.
Le gouvernement peut aussi appuyer la formation des producteurs, tant au
niveau technique qu'au niveau de la gestion. À ce sujet, le gouvernement
doit appuyer l'acquisition de connaissances scientifiques relatives à
l'aquiculture et faciliter la diffusion de ces connaissances. Il peut encadrer
les efforts de mise en marché des produits aquicoles, ne serait-ce qu'en
rendant disponibles des études de marché et en coordonnant les
efforts des différents producteurs. Le gouvernement doit contribuer
à réduire le risque des institutions qui financent la production
aquicole, que ce soit indirectement en améliorant l'information dans le
secteur ou plus directement en offrant des garanties de prêts.
Finalement, le gouvernement doit lui-même faire sa part en simplifiant et
en intégrant son cadre réglementaire.
L'appui au développement de l'aquiculture au Québec doit
aussi s'accompagner d'un effort pour diversifier la production aquicole qui est
limitée à la truite, aux moules et au saumon et qui est surtout
orientée vers l'ensemencement pour la pêche sportive. Tant par la
recherche que par l'allégement du fardeau réglementaire, le
gouvernement doit appuyer le développement de la production aquicole de
nouvelles espèces destinées à la consommation, comme, par
exemple, l'omble chevalier, le flétan d'Atlantique ou encore certains
crustacés et mollusques comme le pétoncle géant. Bref, le
gouvernement du Québec doit épauler très vigoureusement le
développement de l'aquiculture, si l'on désire faire du
Québec ce que le premier ministre actuel a qualifié de
Norvège de l'Amérique du Nord. En d'autres mots, il faut que le
gouvernement se grouille et il faut que le gouvernement agisse dans de
très courts délais.
Quant à la question qui, tout à l'heure, a
été soulevée par le ministre délégué
aux Pêcheries concernant la mise en marché des produits marins,
cet après-midi, j'ai eu l'occasion, justement, de poser certaines
questions se rapportant à ce qu'on appelle au Québec Socomer qui,
en ce qui me concerne et en ce qui concerne l'Opposition, ressemble quelque
peu, pour ne pas dire pas mal, à un club paqueté par certains
industriels des pêches qui veulent monopoliser la mise en marché.
Et je me demande pourquoi les gouvernements, autant l'ancien que l'actuel,
n'ont pas vraiment et attentivement regardé la façon de
procéder qui existe actuellement en Islande par rapport à la
création d'une corporation de mise en marché des produits marins.
Il faut dire qu'en Islande il existe cette corporation qui est formée
non seulement des industriels de la pêche, mais aussi des pêcheurs,
des propriétaires de bateaux, ainsi que de l'ensemble des
représentants du domaine des pêches, ce qui fait en sorte que
c'est cette corporation, qui est chapeautée par le ministre des
Pêcheries et de l'Industrie et du Commerce de l'Islande, qui fixe les
prix de toute exportation, c'est-à-dire des produits qui sont
exportés vers le marché international. Et ce prix, il est
uniforme. Et toute la production, peu importe la provenance, peu importe
l'usine d'où cette production provient, est identifiée sur le
marché international sous une marque de commerce qui s'appelle Islandic.
Et c'est à partir de ce moment que l'Islande met sur le marché
international des centaines de milliers de tonnes métriques de produits
non pas semi-finis, mais de produits finis qui s'en vont sur les marchés
internationaux. Et j'invite le ministre à regarder attentivement cette
possibilité pour qu'au Québec nous ayons ce genre de corporation;
l'ensemble des intervenants des pêches, c'est-à-dire travailleurs,
travailleuses d'usines, pêcheurs, propriétaires dans l'industrie,
représentants gouvernementaux pourraient faire partie de cette
corporation et orienter la mise en marché dans le bons sens et avec des
produits de qualité. (21 heures)
M. le Président, puisque j'ai maintenant terminé avec
Socomer - et je répète que la considère toujours comme un
club paqueté - je voudrais terminer en vous disant ceci. Je voudrais
revenir sur un sujet qu'a abordé le ministre
délégué aux Pêcheries, lors de son discours sur
l'adoption de principe du projet de loi 96. Il s'agit de l'approche cas par cas
qui est adoptée pour décider du financement des
activités
aquicoles et de transformation, que ce soit en première,
deuxième ou troisième transformation. Je comprends la
nécessité d'une telle approche, mais il faut néanmoins
prendre conscience des abus qu'elle peut engendrer. Je dis ceci sans mettre en
doute la bonne foi des gens impliqués et sans mettre en doute la bonne
foi du ministre, mais c'est la nature même d'un système
discrétionnaire que de laisser une grande marge de manoeuvre aux
personnes responsables au niveau des ministères.
Je souhaite donc que l'attribution du financement se fasse dans les
conditions les plus justes possible et je crois de mon devoir de servir en tant
qu'instance d'appel au niveau de l'Assemblée nationale en quelque sorte,
afin d'éviter que quelque personne ou société soit
lésée dans son traitement par le gouvernement et de promettre la
plus grande vigilance à cet égard.
M. le Président, je crois qu'il faut donner à tout ce
dossier la dimension humaine qui en justifie l'urgence. Voyons derrière
chaque bateau subventionné, les pêcheurs qui le contrôlent,
derrière chaque tonne de débarquement, des efforts inlassables de
plusieurs personnes.
Les usines de transformation sont peuplées d'hommes et de femmes
ne demandant pas mieux que de gagner leur croûte. Il est certain qu'une
vision globale et rationnelle est nécessaire si l'on aspire à
quelque chance que ce soit de voir l'industrie de la pêche
québécoise retrouver la santé et assurer un avenir libre
des menaces comme celles qu'elle affronte présentement. Mais jamais, au
grand jamais, ne devraient la rationalisation, la restructuration ou la
réaffectation primer sur l'essentiel de tout le domaine des
pêcheries au Québec, c'est-à-dire primer sur le dos des
travailleurs et travailleuses qui y oeuvrent.
Et, M. le Président, je voudrais dire au ministre
délégué aux Pêcheries qu'en ce qui nous concerne,
nous acceptons ici, au niveau de l'Opposition, et ce, d'emblée, que ce
projet de loi soit voté en troisième lecture dans les plus courts
délais et sanctionné dans les plus courts délais afin que
toutes les personnes qui sont impliquées dans le domaine des
pêches au Québec puissent éventuellement en profiter, non
seulement profiter des crédits additionnels, mais profiter aussi des
programmes qui sont inhérents à ces budgets.
Alors, M. le Président, je voudrais remercier l'ensemble des
membres de l'Assemblée nationale qui ont écouté mon
allocution. Et le ministre peut être assuré de ma collaboration
dans toute direction qu'il entend prendre et qui sera conforme à
l'ensemble des voeux des pêcheurs, à l'ensemble des voeux des
industriels de la pêche et aussi à l'ensemble des voeux
exprimés par les travailleurs et travailleuses d'usines. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Duplessis. M. le ministre, pour votre droit de
réplique, en vous rappelant que vous disposez d'une période
maximale de 20 minutes. M. le ministre.
M. Yvon Vallières (réplique)
M. Vallières: Alors, M. le Président, je veux, en
premier lieu, remercier le député de Duplessis pour les propos
qu'il vient de tenir. Je pense qu'on a là, par ce projet de loi 96
devant nous, un bel exemple de la possibilité que les parlementaires en
cette Chambre, quel que soit le côté où nous nous situons,
ont de contribuer de façon positive à un débat. Ce n'est
pas parce que les problèmes manquent dans le secteur des pêches
qu'il eût été facile, pour l'Opposition entre autres, de
dresser ou de faire une espèce de procès du gouvernement actuel
dans ce secteur d'activité.
Je remarque beaucoup de sobriété dans les propos du
député de Duplessis, qui ne sont probablement pas
étrangers à la performance de notre gouvernement dans ce secteur.
Et même si le temps m'est très limité, M. le
Président, je tenterai, à l'intérieur des 20 minutes qui
me sont allouées, de revenir sur certains des propos qui ont
été tenus par le député de Duplessis, qui me
permettront, à l'occasion, de rectifier le tir et, à d'autres
occasions, de continuer à faire part à cette Chambre des
intentions de notre gouvernement à l'intérieur du projet de loi
96, mais aussi à l'intérieur des différentes politiques
qui nous ont inspirés depuis les cinq dernières années au
gouvernement du Québec dans le secteur des pêches.
Je débuterai par Alipêche parce que je sais que ça
tient beaucoup à coeur au député de Duplessis, c'est dans
son comté, pour lui indiquer qu'en autant que je suis concerné
face aux allégations dont il a fait preuve tantôt je ne peux
présumer des intentions de Purdel dans ce dossier, entreprise, dois-je
le rappeler, qui fait affaire au Québec et qui contribue à
créer dans cette région et dans d'autres régions du
Québec, dans le secteur du lait, en particulier, de nombreux emplois
à l'ensemble des Québécois et Québécoises.
Je veux également indiquer au député de Duplessis
qu'après avoir rencontré les gens du milieu, après avoir
écouté le comité de survie d'Alipêche, après
avoir rencontré le député de Duplessis, j'ai tenu compte
des représentations qui m'ont été faites et, dans la
mesure des pouvoirs qui me sont conférés, j'ai
décidé d'instaurer un moratoire sur le permis afin que le permis
existant à Alipêche soit littéralement gelé pour une
certaine période de temps, mais j'ai assorti ce gel du permis,
auprès des gens de Sept-îles, à une condition qui
était celle de présenter un dossier qui permettrait la relance du
projet d'Alipêche. J'ai posé quelques conditions. J'ai
exigé que ce qu'on allait me
présenter soit un projet dont la rentabilité serait
prouvée, un projet également qui, au niveau de la ressource,
devait démontrer la capacité des promoteurs de ne pas affecter
les autres entreprises dans le même secteur d'activité. Il serait
inutile, par exemple - je le cite ici, ce soir - de créer une nouvelle
entreprise qui viendrait littéralement siphonner la matière
première dans d'autres entreprises et les mettre en
difficulté.
J'ai également indiqué, M. le Président, que, suite
à ces efforts qui seront faits par le milieu, j'allais statuer sur
l'émission et l'attribution du permis qui demeure existant. Je pense que
celui qui vous parle a répondu aux attentes du milieu afin de donner le
temps au milieu de préparer un dossier étoffé, lui
permettant de mettre en oeuvre les différentes conditions qui pourraient
nous mener à la relance de cette entreprise à
Sept-îles.
Pour ce qui est de la bonne foi de Purdel, je vais laisser le
député de Duplessis au jugement qu'il en a porté. Il ne
m'apparaîl pas dans mes prérogatives ou dans mes
responsabilités de défendre cette entreprise qu'est Purdel dans
le présent dossier. Par ailleurs, je tiens à le
réitérer aux gens du milieu, la collaboration de celui qui vous
parle est acquise au milieu, dans ce dossier, de même qu'au
député de Duplessis.
Je le disais également récemment aux
Îles-de-la-Madeleine. Nous n'allons, par ailleurs, pas jouer au
Père Noël. Le secteur des pêches n'échappe pas
à la rigueur administrative du gouvernement du Québec. Les sommes
d'argent consenties doivent être des investissements, et, donc, la
rentabilité doit être démontrée, ce qui n'exclut pas
le risque, M. le Président, qui doit être un peu plus
partagé, un peu plus fort de la part du gouvernement du Québec,
entre autres, dans le secteur de l'aquiculture que je n'aurai pas le temps
d'aborder, mais dont a largement parlé le député de
Duplessis, un secteur d'avenir pour les pêches au Québec,
certainement l'aquiculture où le gouvernement du Québec se
prépare d'ailleurs, suite à ce que j'ai demandé, à
ce qu'on prenne largement notre responsabilité afin d'augmenter le
volume de production par le biais de l'aquiculture. (21 h 10)
Un deuxième point que je veux rapidement aborder, celui du rachat
de permis pour la pêche commerciale du saumon. Le député de
Duplessis y faisait allusion. J'ai fait une rapide vérification qui
m'indique que c'est quelque 45 permis qu'on a en Gaspésie et quelque 14
sur la Côte-Nord. Je veux immédiatement indiquer au
député de Duplessis que je suis ouvert à regarder cette
possibilité de rachat de permis. Je vais la faire regarder parce que,
comme lui, je suis très conscient que la pêche sportive du saumon
en termes de valeur ajoutée représente beaucoup plus pour le
Québec qu'au niveau de la pêche commerciale. Et je suis
persuadé, comme il l'indiquait avec jutesse, que même si le
secteur des pêches au Québec peut représenter une
très petite partie de notre économie au Québec, compte
tenu de sa concentration dans certaines régions ça devient
primordial, voire vital, pour l'économie de certaines régions
comme la Gaspésie, les îles, la Côte-Nord ou la
Basse-Côte-Nord.
C'est dans cette perspective que je suis prêt à
étudier des alternatives de cette façon. C'est dans cette
perspective également que je suis prêt à recevoir du
côté de l'Opposition des propositions qui pourraient être
intéressantes. On parlait tantôt d'une certaine expertise, de
certaines techniques qui existent dans d'autres pays, de certains
modèles qui existent. Je pense que c'est de notre devoir comme
parlementaires ici en cette Chambre de s'assurer de regarder au niveau de ces
pays si on ne pourrait pas emprunter des choses qui ont été
l'objet de décisions importantes dans d'autres gouvernements et qui ont
pu influencer ce secteur d'activité. Nous allons le faire, M. le
Président, avec l'ensemble des parlementaires en cette Chambre.
Le député de Duplessis nous indiquait qu'il y avait, comme
le rapportent à peu près tous les articles de presse que nous
lisons présentement, désastre dans le secteur des pêches.
Il y a certainement un problème majeur dans le secteur des pêches
qui ne date pas d'aujourd'hui, un problème que tout le monde
reconnaît, y inclus le gouvernement du Québec.
Je veux juste repréciser certaines données pour vous
témoigner de l'ampleur du problème auquel nous faisons face. Si
on prend 1987 comme année de référence - d'ailleurs
ça a été une très bonne année pour la
pêche au Québec - en termes de volume des débarquements, il
y avait quelque 97 000 tonnes de poisson débarquées au
Québec. Cette année, 67 000 tonnes mais plus quand on regarde la
valeur des débarquements. Pour la même année de
référence 1987, 126 000 000 $; pour la présente
année nous anticipons des débarquements de moins de 69 000 000 $.
Ce n'est pas un mince problème. Nous faisons actuellement face à
une problématique que tout le monde reconnaît: la rareté de
la ressource, la fluctuation des prix sur les marchés - on fait donc
preuve de vulnérabilité à ce niveau - la faiblesse de
l'industrie également, l'organisation de la production, l'organisation
de la transformation, le regroupement des pêcheurs et industriels,
indispensables à la relance de ce secteur d'activité et la mise
en marché de nos produits. Autant de phénomènes ou de
problèmes qui sont nettement identifiés et auxquels on doit
s'attaquer et auquel s'est attaqué le gouvernement du Québec. M.
le Président, je pense qu'il est possible, malgré ces
problèmes qu'on rencontre, d'envisager un avenir prometteur pour le
secteur des pêches au Québec. Ce n'est pas le seul secteur au
Québec qui a eu des problèmes majeurs. Je le
répétais aux gens que j'ai visités récemment
en Gaspésie, aux Îles-de-la-Madeleine. Je vais donner l'exemple de
chez nous, de chez vous, M. le Président, dans le secteur de l'amiante,
le secteur minier où il y a concentration de la production, dans des
villes comme Thetford Mines, comme Asbestos, où la perte de milliers
d'emplois dans l'espace de quelques mois est venue secouer une économie
régionale complètement. On se remet encore à peine de ces
congédiements massifs que nous avons eus dans le secteur de l'amiante.
Mais, M. le Président, vous le savez, quand les gens décident de
se mettre à la tâche, c'est possible de trouver des solutions
à ce type de problème à partir des ressources existantes
mais aussi à partir du développement d'autres ressources,
à partir du développement d'autres activités
créatrices d'emplois. Je pense que c'est à ça qu'il faut
s'attaquer dans des régions comme celles dont nous parlons, les
régions maritimes au Québec. Nous avons au Québec cette
possibilité, j'ose quasiment dire ce privilège, comme
parlementaires en cette Assemblée, de développer un nouveau
modèle d'intervention au Québec dans le secteur des pêches,
un modèle qui va permettre de dynamiser le secteur. Nous le savons, il
faut rechercher une meilleure adéquation entre la ressource existante,
notre capacité de capture et notre capacité de transformation.
Tout le monde le sait dans les différentes régions.
Je reviens aux propos du député de Duples-sis. Il nous
disait: II faut en arriver à mettre tout le monde du secteur à
une même table, aux mêmes tables, afin qu'on puisse trouver
ensemble des solutions pour ce secteur, et j'y crois, moi aussi, M. le
Président. À ce titre, il faut quand même indiquer que le
gouvernement du Québec a pris de nombreuses mesures. Je parlais
tantôt du programme de coopération pour l'avenir des pêches
au Québec, 50 000 000 $ d'argent neuf sur une base de cinq ans dans le
secteur des pêches au Québec; un autre montant de 53 000 000 $ -
je sais que le député de Duplessis n'en a pas parlé; il
n'est pas obligé d'en parler - qui vient du gouvernement
fédéral et qui va s'harmoniser très bien avec l'ensemble
de nos politiques. Autant d'argent qui va permettre de donner à ce
secteur l'oxygénation dont il a besoin. Qu'on pense, par exemple,
à une étude toute récente qu'on vient de commander, qui
est déjà en cours sur la pêche côtière et qui
rejoint un objectif que nous poursuivons, c'est-à-dire de faire
participer les pêcheurs eux-mêmes aux prises de décisions.
On m'a indiqué que c'est, au cours du présent hiver, quelque 11
000 heures de bénévolat qui vont être consenties par les
pêcheurs côtiers afin d'en arriver à nous proposer des
éléments de solution nous permettant de rationaliser ce secteur,
et, répétons-le, M. le Président, non seulement de le
rationaliser, mais de lui donner la stabilité dont il a besoin.
Pour un, M. le Président, je suis persuadé que ces
mesures, cet argent que nous injectons dans le secteur des pêches, comme
celles que nous retrouvons dans le projet de loi 96, sont de nature à
donner un nouvel élan à ce secteur. Également les
législations qu'on a passées, comme la loi 15 qui permet aux
producteurs de s'organiser au secteur des pêches en
général, de même qu'à ceux qui transforment le
poisson, de se donner des plans conjoints. Je sais qu'actuellement, il y a une
tentative qui est faite dans le secteur du homard, aux
Îles-de-la-Madeleine. Je l'ai d'ores et déjà
indiqué, je suis en faveur de ce plan. Je pense qu'on n'a pas d'autres
alternatives que de s'organiser dans le secteur des pêches, comme c'a
déjà été fait dans le secteur agricole, afin de
permettre une meilleure mise en marché de nos produits et d'assurer une
certaine stabilité des prix. On n'y échappe pas. Les gens devront
se décloisonner dans ce secteur, M. le Président, et agir
ensemble s'il veulent que ça réussisse dans le secteur des
pêches au Québec.
M. le Président, c'est à l'intérieur d'une
perspective de rentabilité de l'industrie et de durabilité de la
ressource pour les générations futures que j'envisage les
interventions du gouvernement du Québec et du ministère que je
représente à l'intérieur du secteur des pêches.
Stabilité du secteur, voilà ce que nous recherchons.
Privilégier, avec tous les gens en cette Chambre, tous les
parlementaires, une approche économique mais aussi humaine à
l'intérieur d'un secteur d'activité qui mérite qu'on s'y
penche. M. le Président, celui qui vous parle, par le projet de loi que
nous défendons en cette Chambre et qui sera adopté, j'en suis
persuadé, à l'unanimité, nous voulons faire, comme
parlementaires en cette Chambre, et je veux m'associer à tous les
parlementaires, à tous les parlementaires de ce côté-ci de
la Chambre, avec le gouvernement libéral, nous désirons faire des
pêcheries maritimes et de l'aquiculture au Québec un outil de
développement régional à fort potentiel, à
potentiel élevé. Et, si nous unissons nos efforts, conscients des
problèmes que nous avons à relever, des défis qui nous
attendent, et que, tous ensemble, on met l'épaule à la roue, je
suis persuadé que et l'Opposition et le parti ministériel seront
heureux, fiers des gestes que nous aurons posés à
l'intérieur des pouvoirs qui nous sont donnés en cette Chambre
afin d'aider un secteur qui le mérite largement. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Alors, cette dernière intervention met fin au débat relativement
à l'adoption du projet de loi 96. Alors, est-ce que le projet de loi 96,
Loi modifiant la Loi sur le crédit aux pêcheries maritimes, est
adopté?
Mme Juneau: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M.
le leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler
l'article 54 du feuilleton.
Motion de clôture de l'étude du projet de
loi 89
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 54 de
notre feuilleton, M. le leader du gouvernement, en vertu de l'article 251 de
notre règlement, propose la motion suivante: "Que la commission du
budget et de l'administration, à qui a été confiée
l'étude détaillée du projet de loi 89, Loi modifiant la
Loi concernant l'impôt sur la vente en détail et d'autres
dispositions législatives, mette fin à ses travaux quant à
ce mandat dès l'adoption de la présente motion et fasse rapport
au moment prévu de la période des affaires courantes de la
séance qui suit celle au cours de laquelle aura été
adoptée la présente motion." Je suis prêt à
reconnaître le premier intervenant. M. le leader adjoint du gouvernement.
(21 h 20)
M. Daniel Johnson
M. Johnson: M. le Président, ce que nous avons devant
nous, c'est une mesure relativement exceptionnelle dans notre système
parlementaire. Il s'agit ici de la motion qui est présentée, en
général au nom du gouvernement en vertu de l'article 251, qui
fait suite à un désaccord fondamental entre les deux groupes
parlementaires quant au déroulement de l'étude
détaillée d'un projet de loi.
Le projet de loi qui est devant nous et dont nous sommes saisis est le
projet de loi 89, projet de loi qui concerne l'impôt sur la vente au
détail, on le sait, qui vise, quant au gouvernement du Québec,
à faire en sorte que nous puissions nous harmoniser afin de simplifier
la vie des entreprises québécoises avec des dispositions d'ordre
fiscal qui ont été annoncées comme devant entrer en
vigueur par le gouvernement du Canada.
La taxe de vente du Québec, donc, devra subir, selon le
gouvernement, des modifications réelles, significatives, afin de donner
suite à ce voeu qui s'inscrit - et mon collègue du Revenu aura
très certainement l'occasion de le mentionner un peu plus tard - dans
cette volonté de faire en sorte que nous assurions des revenus
parfaitement légitimes au gouvernement du Québec afin de
rencontrer nos dépenses tout aussi légitimes et souhaitées
par nos concitoyens, que nous puissions assurer ces revenus dans un contexte
où nous facilitons la tâche à nos entreprises quant
à l'administration de la remise des impôts au gouvernement du
Québec, tout en facilitant - c'est ça le principe fondamental qui
fait que nous nous harmonisons - la "concurren- tialité" des entreprises
québécoises qui sauront, avec le temps - c'est ce qui est
derrière nos projets - affronter plus facilement, à cause de la
structure de coûts et la simplification que nous introduisons, la
concurrence, notamment à l'échelle internationale.
Nous avons donc saisi l'Assemblée de ce projet de loi par les
bons offices du ministre du Revenu, et ce projet de loi a été
étudié pendant six jours, l'étude du principe, ce qui
s'intitulait autrefois la deuxième lecture, et l'étude
détaillée en commission s'est déroulée le 29
novembre, les 3, 5, 6, 7 et 10 décembre. On pourrait prétendre
que ce n'est pas là une longueur indue de temps, compte tenu de
l'importance du sujet, mais il faut aller voir dans quel esprit les
parlementaires abordent l'étude de ce projet de loi afin de pouvoir
justifier l'introduction de cette motion en vertu de l'article 251 qui vise
à faire en sorte que la commission remette son rapport ici même
à l'Assemblée nationale dans les plus brefs délais.
En effet, les 37 heures de débat, soit une douzaine d'heures ici
à l'Assemblée nationale et plus d'une journée
complète, 25 heures, en commission parlementaire, soit celle du budget
et de l'administration, se sont déroulées, au cours desquelles,
autant à l'Assemblée nationale qu'en commission, l'Opposition a
eu recours à des moyens permis par notre règlement, je ne
conteste pas l'utilisation du règlement, mais je conteste les objectifs
poursuivis par l'Opposition en utilisant le règlement, sans prêter
beaucoup d'intentions. Je dirais, M. le Président, que nous avons eu
droit, d'abord ici à l'Assemblée nationale, à une
série de motions qu'on pourrait s'entendre comme étant de
caractère dilatoire, c'est-à-dire qui ne s'adressent pas au
principe même du projet de loi qui était devant nous. Motion de
report; demande de traiter du projet de loi plus tard, dans quelques mois;
motion d'ajournement du débat, comme si on n'avait pas suffisamment,
à ce moment-là, discuté de ce projet de loi, alors que -
et vous voyez déjà la contradition dans laquelle s'enferre
l'Opposition - pendant des heures, des heures et des heures, on a
traîné la majorité ministérielle en commission
parlementaire justement pour discuter longuement d'un sujet dont l'Opposition
souhaitait l'ajournement et la fin. Alors, on n'en est pas à la
première contradiction. Finalement, une motion de scission qui visait
à scinder en deux le projet de loi, un projet dont on ne voulait pas
parler. Autre contradiction, marque de commerce évidemment de
l'Opposition par les temps qui courent. C'est 25 % du temps consacré
à ce projet de loi qui a été utilisé, M. le
Président, sur des motions qui visaient à retarder la discussion,
retarder l'étude même du projet de loi. On peut reconnaître
que, dans certains cas, l'Opposition peut avoir raison et que le gouvernement,
entendant raison, se rend à ses arguments et peut accepter de discuter
plus long-
temps de mesures qui ont des effets non négligeables sur notre
société, mais ce qui est en cause ici, nous l'avons
expliqué, c'est d'abord et avant tout de simplifier le système et
d'assurer des revenus au gouvernement, revenus que nous devons assurer afin de
rendre des services à nos concitoyens. Ce que je demande
évidemment à nos collègues de l'Opposition, s'ils veulent
quitter pour un moment ce manteau de contradictions invraisemblables dont ils
s'enveloppent, c'est d'Indiquer quels sont les services publics qu'on devrait
abolir si on abolit des impôts comme ils semblent le souhaiter par le
traitement qu'ils font subir à la loi 89.
Au niveau de l'étude en commission - j'ai parlé des
motions qui ont été introduites ici à l'Assemblée
nationale - au niveau de l'étude même en commission, cinq membres
de cette Assemblée, tous députés de l'Opposition, ont fait
des remarques préliminaires, comme c'est leur droit, de 20 minutes
chacun. Alors, on est rendus à deux heures de débat où on
se dit: Bonjour, comment allez-vous, il fait beau, n'est-ce pas?, traitons
éventuellement si on a le choix, si on a le temps, du projet de loi qui
nous amène ici, une mesure d'intérêt fiscal, qui n'est pas
négligeable. Ils ont également présenté six motions
préliminaires qui, toutes, visaient à entendre des organismes,
comme si tout se déroulait en vase clos, M. le Président, alors
que de toute évidence, c'est depuis des mois, maintenant, que se discute
sur la place publique, de toutes sortes de façons, ce dossier de la taxe
de vente du Québec. Ceci, avant même d'étudier l'article 1,
avant même que de considérer l'article 1 du projet de loi. Lorsque
nos collègues de la majorité ministérielle ont, eux,
demandé que l'article 1 soft appelé et qu'on puisse donc
l'étudier, l'Opposition a présenté - je consulte les notes
historiques et le procès-verbal - deux amendements et un sous-amendement
à cette motion de considérer l'article 1 afin d'en retarder
l'étude. C'est assez Intéressant quand même de voir encore
une fois la contradiction et les paradoxes dans lesquels se confine
l'Opposition. L'étude de l'article 1, M. le Président, n'a
débuté qu'après 20 heures de débats, vendredi
dernier, 7 décembre, et donc, globalement, 80 % du temps de
l'étude détaillée du projet de loi a été
utilisé par des mesures dilatoires de toute nature. J'aurais
pensé que, compte tenu du nombre considérable de chemises, de
vestons et d'autres pièces de vêtement qu'a
déchirées l'Opposition, en privé et sur la place publique,
nous aurions éventuellement pu avoir, être les! témoins,
dis-je, d'un débat de fond, sur une mesure qui n'est pas
négligeable, je le répète, il s'agit de la taxe de vente
du Québec, une harmonisation à un nouveau système de taxe
sur les produits et services qui a été introduite par le
gouvernement du Canada, qu'à notre sens, nous avons décidé
de reconnaître comme une réalité à laquelle on doit
s'ajuster ou ne pas s'ajuster, ayant à l'esprit la simplification du
système, les réductions de coûts pour les entreprises qui
administrent ce système et, évidemment, la neutralité des
revenus que nous pouvons en tirer afin d'assurer une meilleure justice fiscale
pour nous concitoyens. C'est une mesure donc fondamentale, très
significative, et on aurait cru, je le répète, que l'Opposition
était Intéressée à en discuter, mais nous avons eu
droit.. (21 h 30)
M. le Président dans la mesure où nous sommes à la
télévision, je ne répéterai pas certaines des
allégations, des propositions qui ont été faites par
l'Opposition, parce que, vraiment, nos concitoyens seraient profondément
déçus et désespérés de la qualité des
débats qui émanent de gens qui ont été
envoyés ici à l'Assemblée nationale, si je
répétais les propos dilatoires dénués de toute
signification quant à la progression du débat qui ont
été le fait de certains députés de l'Opposition,
dont je tairai le nom, évidemment, M. le Président, afin de ne
pas les livrer en pâture à l'opprobre de nos concitoyens.
Je suis profondément convaincu, M. le Président,
profondément convaincu que des députés élus ici
à l'Assemblée nationale ont à c?ur de faire
progresser les débats. Qu'ils soient d'accord ou pas, en un sens,
ça n'a rien à voir, ce forum vise justement à provoquer
des débats, à les encadrer et, vous me permettrez de
prétendre, à les faire progresser. Mais si ces
députés avaient voulu faire progresser le débat, ils
auraient passé un peu plus que 20 % du temps, sur les 37 heures qui ont
été consacrées à l'étude de ce projet de
loi, ils auraient certainement consacré plus que 20 % du temps à
parler du fond, du principe et des détails d'application de cette loi.
Or, M. le Président, c'est moins d'une heure sur cinq, moins d'une
minute sur cinq, qui a été consacrée par les
députés de l'Opposition à la discussion de ce qui nous
amène ici à l'Assemblée nationale. On a
décidé de laisser traîner les choses, alors qu'on veut
discuter de mesures Importantes. On a décidé de plaider
l'ajournement du débat, alors qu'on prétend vouloir parler de ces
choses. On a voulu amener des gens ici pour redire ce qu'on sait pertinemment
quant à leurs positions, qui ont été
énoncées depuis de nombreux mois à ce sujet. Toutes des
mesures dilatoires que toutes les oppositions du monde, à un moment ou
à un autre, pour des raisons qui les concernent seules, peuvent vouloir
Invoquer, ont été effectivement invoquées par le
député de Pointe-aux-Trembles notamment, le bruyant - j'ai bien
dit le bruyant - député de Pointe-aux-Trembles, qui tente par
toutes sortes de moyens évidemment, comme il l'a déjà fait
dans une existence antérieure, de compliquer l'existence de tous ceux
qui l'entourent.
M. le Président, en conséquence, II est de la
responsabilité première du gouvernement de faire progresser les
travaux de l'Assemblée
nationale. À cette fin, le règlement permet d'invoquer,
comme je viens de le faire, un article qui nous mène, si
l'Assemblée en décidait ainsi par un vote majoritaire, à
requérir de la commission parlementaire qu'elle fasse rapport dans les
plus brefs délais, soit après la période des affaires
courantes demain, en l'occurrence, qu'elle fasse rapport donc sur l'état
de ses travaux, quels qu'ils soient, et que nous puissions conclure
éventuellement ce débat, qui aurait pu avoir lieu avec la
coopération de l'Opposition. 37 heures, près de 40 heures; 40
heures de discours, d'échanges, de débats, c'est énorme,
M. le Président, dans n'importe quelle organisation humaine; 40 heures
pour ne parler que d'une seule chose. Dans la mesure où nous
siégons ici normalement de 18 à 20 heures par semaine, qu'on
pourrait exclure la période de questions et d'autres motions sans
préavis, c'est littéralement comme si, presque tous les jours,
pendant deux semaines complètes et plus, nous ne parlions que d'un seul
sujet ici à l'Assemblée nationale, tous autant que nous sommes.
C'est littéralement la période de temps qui a été
mise à la disposition des députés jusqu'à ce
moment-ci, et nous en sommes toujours à vouloir, de notre
côté, requérir que l'article 1 soit, à tout le
moins, discuté.
M. le Président, vous me permettrez de prétendre que ce
n'est pas exagéré, dans les circonstances, de faire quelques
pressions afin que nous puissions discuter du fond des choses, que nous
puissions discuter en détail du projet de loi 89 et que nous puissions
éventuellement l'adopter dans quelque forme que pourrait décider
la commission parlementaire ou les parlementaires assemblés à
l'Assemblée nationale. Nous avons cette responsabilité, et c'est
avec beaucoup de sérénité que nous l'assumons, car elle
est dans l'intérêt des citoyens du Québec.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, sur cette
même motion du leader du gouvernement, je reconnais maintenant Mme la
députée de Johnson.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Avec le
tempéramment bouillant que j'ai, j'ai eu de la difficulté
à rester assise pendant que le leader adjoint a fait son
intervention.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Juneau: II faut absolument que je rétablisse des
faits, ça n'a pas de bon sens. Et venant de sa part à lui, c'est
encore pire. Franchement, ça n'a pas de bon sens. Premièrement,
il n'a pas écouté son collègue, le ministre
délégué aux pêches, qui a fait une belle
démonstration que, quand on veut, on peut. Quand on met de la bonne
volonté... Le ministre délégué aux pêches, le
député de Richmond, disait: Avec mon collègue de
l'Opposition qui est responsable du dossier des pêches, nous nous sommes
assis ensemble, nous avons discuté. Il a parlé même et il a
dit... Le député de Duplessis a dit: Tous les gens devraient
s'asseoir à une même table, les gens concernés dans la
situation ou dans le dossier des pêches devraient s'asseoir à la
même table et discuter pour en arriver à des accords, des
amendements. Il a dit: Moi aussi, je suis en faveur de ça. Aïe!
ça fait contraste avec ce qu'on vient d'entendre du leader adjoint.
Ça n'a pas de bon sens. Il a dit des énormités, et c'est
inacceptable. C'est inacceptable parce que l'Opposition a fait son travail
comme elle doit le faire. Elle a fait son travail comme elle doit le faire.
Ici dans notre Chambre, tous les parlementaires connaissent notre volume
de règles et de procédures. On a plusieurs articles, des
centaines d'articles, là-dedans, mais ce n'est pas suffisant. Le leader
du gouvernement est en train de mettre en place une nouvelle pratique, la
"guil-lotinerie", c'est ça, le bâillon. Le leader du gouvernement
est en train de mettre ça en place, et je vous explique pourquoi.
Ça fait un an que ce gouvernement-là est en place, qu'il a
été réélu. Depuis un an qu'il a été
réélu, ça fait la quatrième motion de bâillon
qu'on nous met. La quatrième, M. le Président. Pas une, pas deux,
pas trois, quatre. En l'espace de six mois, à peu près. Au mois
de juin, cette année, on a eu le plaisir d'en avoir trois. Ce n'est pas
une mince affaire, en l'espace de trois jours, trois motions de censure.
On en a eu une sur la loi 50, la Régie de l'assurance automobile,
au mois de juin: "Kaput!" On n'avait plus rien à dire. On était
en commission parlementaire, j'étais à la commission
parlementaire, on a eu même droit à des menaces du ministre
responsable, pour la loi 50, qui disait: Si vous n'arrêtez pas ce que
vous faites là, je vais savoir que, dans le comté de Johnson,
dans le comté de Lévis, dans l'autre comté, et ainsi de
suite, je vais m'en souvenir. Ce sont des menaces à peine
voilées. Et on a mis le bâillon sur la loi 50 pour nous faire
taire. Pourquoi? Parce que ça faisait mal, parce que ce qu'on apportait
ici, comme information ou comme amendement, ça faisait mal. On ne
voulait rien savoir. On avait déjà fait son lit, de l'autre
côté.
Deuxième motion de clôture, au mois de juin: les heures
d'affaires. C'était plein de monde ici. Les gens suivaient ça
parce que c'était une loi importante qui était pour modifier
l'ensemble de la situation des gens de commerce. C'était plein, dans les
galeries. Il y avait des gens, en commission parlementaire, qui ont suivi
ça de près. Qu'est-ce que ce gouvernement-là a fait, avec
l'arrogance qu'on lui connaît? Motion de clôture, encore une fois.
Bâillon. Taisez-vous, vous n'avez plus rien à dire. C'est
ça que ça veut dire, la motion de bâillon. Ça veut
dire:
L'Opposition, là, même si vous tentez de faire votre
travail comme vous devez le faire, il n'en est plus question, taisez-vous, nous
sommes, de par le nombre, les rois et maîtres, et vous allez vous taire,
c'est fini. (21 h 40)
Troisième motion, au mois de juin: la loi 69, la Loi sur
l'instruction publique. Troisième motion, en trois Jours. Et on viendra
me dire que ce n'est pas un nouveau système qu'on est en train
d'implanter ici. Franchement! Est-ce que le leader du gouvernement est trop
fatigué pour faire son travail jusqu'au bout? Est-ce que le leader
adjoint du gouvernement ne pourrait pas prendre la relève et faire en
sorte qu'on puisse discuter les projets de loi qui ont de l'importance et qui
vont changer l'ensemble de la situation des Québécois et des
Québécoises, comme celui sur lequel on vient de nous mettre le
bâillon, aujourd'hui, le projet de loi 89? L'ancien leader, M. Gratton,
dans quatre ans, avait fait six motions de clôture. On a un an de fait
avec vous autres, là. Écoutez bien ça, ceux qui sont
là. Il y en a quatre déjà, dans six mois, depuis la
trente-quatrième législature. Ça n'a pas de bon sens, M.
le Président. Il faut que les gens le sachent. Il faut que les gens
sachent ce qui se passe ici.
M. le Président, on ne sait pas ce qui se passe, on ne sait pas
si le leader du gouvernement s'y prend mal ou n'est pas intéressé
à faire son travail, quotidiennement, comme il doit le faire. Au
début des sessions, là, il y a un grand vide. Petit train va
loin. On va comme je te pousse, tu sais. Petit train va loin, là, on n'a
rien. Et, à la fin des sessions, ce qui se passe, là, les dates
finales pour le dépôt des lois, ça, c'est le 15 mai pour la
session du printemps et le 15 novembre pour la session de décembre.
Là, ça presse. On n'a rien fait, on n'a rien foutu pendant les
mois de mars et d'avril, et là, le 15 mai, ça presse, et le 15
novembre, ça presse aussi pour jusqu'au mois de décembre. On
dépose une avalanche de menus minceur parce que la plupart des lois ont
un ou deux articles, sauf qu'il y a quelques projets de loi qui en ont
plusieurs. Mais sur les projets de loi qui ont plusieurs articles, qui sont
contestés et qui sont des lois qui vont faire mal aux hommes et aux
femmes du Québec, sur ceux-là, M. le Président - je ne
vous apprendrai rien - le gouvernement a déjà fait son lit. Et
les membres du gouvernement savent exactement qu'on n'aura pas grand-chose
à dire. Et nous de l'Opposition, si on a le malheur de réagir, de
vouloir faire en sorte d'avoir plus d'éclairage et d'apporter des
amendements valables, houp! fini. Motion de clôture encore une fois.
Taisez-vous, vous n'avez plus rien à dire, nous sommes en nombre
important assez pour que, quand ça va passer à l'Assemblée
nationale, le vote, on va vous renverser, donc, taisez-vous, je ne veux plus
rien savoir. Mais, M. le Président, l'arrogance, quand ça
s'installe dans un gouvernement, ça ne fait pas vieux os. Ça, je
peux vous dire ça.
Quand le leader adjoint a fait son intervention, tout à
l'heure... Mon Dieu, rien qu'à l'entendre, on aurait cru que ça
faisait un an qu'on était sur le projet de loi. Mais, M. le
Président, ça n'a pas de bon sens, ce qu'il a dit. J'ai
hâte d'avoir le "verbatim" de son discours juste pour reprendre les
énormités qu'il a dites tout à l'heure. M. le
Président, savez-vous combien de temps on a été en
commission parlementaire pour le projet de loi 89? Je vous le donne en mille.
Je vais vous le donner en heures et en minutes: 22 heures et 58 minutes. Et
encore là, il y a eu 7 heures et 30 minutes et 13 secondes qu'on a
passées. Est-ce que c'est assez précis, ça? 7 heures et 30
minutes et 13 secondes. Ce n'est pas des jours et des jours comme le
député a dit tout à l'heure. C'a été
consacré à des questions de procédure. Puis, en raison des
manoeuvres et de la procédure, tu sais, pour empêcher les gens de
l'Opposition de parler, on a, pendant 7 heures et 30 minutes et 13 secondes,
fait en sorte que l'Opposition ne puisse pas parler. Et là, M. le
Président, quand on met une motion de bâillon, on était
habitués à ce que ça soit au bout de quelques semaines, on
était habitués de même. On disait: On va donner la chance
au coureur, on va donner la chance à l'Opposition de faire son travail
comme il faut, d'avoir les éclairages nécessaires pour être
en mesure d'avoir un projet de loi qui soit évalué dans tous les
sens du mot, M. le Président. C'est important. C'est ça, notre
travail. Bien là, ce n'est pas ça. C'est rendu que ce ne sont
plus des semaines, on peut parler en termes d'heures: 22 heures. "Fioul"
"Kaput!" 22 heures et c'était fini. Est-ce que le leader- du
gouvernement va arriver, la semaine prochaine - Noël s'en vient, là
- ou peut-être d'ici la fin de semaine... On en a eu trois, au mois de
juin, dans trois jours, on est capable d'en avoir une ou deux autres cette
semaine, là. Est-ce qu'il va nous arriver avec 10 heures de discussion,
puis c'est fini, ou 5 heures? Il peut le faire, vous savez. Il a tout ce
privilège-là. Ce qu'on a à faire, nous autres, c'est de se
taire puisqu'il utilise, comme il a dit, une motion exceptionnelle. Aïe!
Il m'a fait rire, là, hein? Une motion exceptionnelle. Quand c'est
exceptionnel, on prend ça une fois de temps en temps, pas une fois par
jour. Au mois de juin, c'était une fois par jour, une motion
exceptionnelle. Il me fait rire. C'est une motion pour nous faire taire. Point
à la ligne. Là, s'il en amène une demain et une autre la
semaine prochaine, bien, je vais vous dire quelque chose, que l'exceptionnel a
pris le bord pas mal.
M. le Président, ça n'a pas de bon sens, ça n'a
aucune espèce de bon sens de diriger avec des ministres pas plus
responsables que ça. On parle d'une loi qui va toucher tout le monde:
les industriels, les entreprises, les commerçants, les
consommateurs, tout le monde. On va aller chercher seulement dans la
poche des consommateurs, M. le Président, 500 000 000 $. Ce n'est pas
une mince affaire, ça. On ne chiale pas pour rien. C'est une loi
importante; on aurait voulu pouvoir en faire le tour tranquillement et poser
les bonnes questions, faire des suggestions valables. C'est ça qu'on
voulait. On ne voulait pas d'autre chose, M. le Président. Ça
touche à tout le monde. Donc, on voulait être en mesure de faire
un bon travail ici, à l'Assemblée nationale, et faire en sorte
que les gens soient plus éclairés, comprennent davantage. Les
gens ne savent pas ce qui va leur arriver. Ils ont peur, ils sont inquiets, et
c'est comprenable.
Mais, M. le Président, même le ministre du Revenu, qui est
le parrain de la loi, il est arrivé en commission parlementaire pour
l'étude du projet de loi 89 et puis il n'avait pas l'air au courant de
ce qui se passait. Je ne sais pas s'il était sur une autre
planète ou je ne sais pas, là, mais il n'avait pas l'air au
courant de ce qui se passait. Quand on a commencé à faire des
demandes, il semblait être en dehors de tout ça, lui, là,
il n'avait pas l'air de comprendre exactement ce qui se passait. Sauf que, M.
le Président, quand on touche à un projet de loi qui touche
à tant de monde, à tout le monde, finalement, on a le droit de
faire des demandes.
Le leader adjoint du gouvernement disait: Ils veulent recevoir les uns,
ils veulent recevoir les autres. Oui, c'est vrai. Oui, c'est vrai qu'on voulait
les recevoir, parce qu'on avait besoin de les entendre. Mais ça aurait
été aussi court, M. le Président, de nous laisser recevoir
l'Association des économistes du Québec. Il me semble qu'elle a
quelque chose à nous apprendre dans un projet de loi aussi crucial que
le projet de loi 89. On voulait recevoir la Fédération des
associations coopératives d'économie familiale. Il me semble que
ça aurait pu nous apporter un éclairage, et non seulement de ce
côté-ci de la Chambre, mais de ce côté-là
aussi. Ce n'est pas parce que vous êtes assis de l'autre bord que vous
allez rester assis de l'autre bord. Dans quelques années, vous allez
être assis de ce côté-ci.
Une voix: Le plus tôt possible.
Mme Juneau: Et, au pourcentage que vous avez dans les sondages
maintenant, je veux dire, le plus vite, c'est le plus possible, hein? Ça
serait peut-être important pour vous autres que vous puissez entendre les
gens qu'on a demandé d'entendre. On a demandé d'entendre le
Mouvement Desjardins. "Y a-tu" une force aussi considérable au
Québec et qui appartient aux Québécois que le Mouvement
Desjardins, à part la Caisse de dépôt qui est aussi quelque
chose d'important pour les Québécois et les
Québécoises? Le Mouvement Desjardins, ça nous appartient.
On est tous des sociétaires à la caisse, sauf quelques personnes
qui sont dans d'autres banques, mais très peu, très peu, M. le
Président. Donc, le Mouvement Desjardins nous aurait certainement
apporté un éclairage important.
On a demandé le Conseil du patronat. Ce n'est toujours pas des
gens de notre bord. Ce n'est pas des amis du Parti québécois, en
tout cas le président. M. le Président, il aurait pu les
éclairer, eux aussi. Mais non. Le ministre dit qu'on faisait des motions
dilatoires. Voyons donc! Voyons donc, M. le Président! La Chambre de
commerce de Québec représente tous les gens de commerce et elle a
une expertise valable, une expertise importante. Eux appellent ça des
mesures dilatoires. (21 h 50)
M. le Président, l'Union des artistes. Qu'est-ce que ça va
coûter au mois de janvier 1992 pour les spectacles? Qu'est-ce que
ça va coûter aux gens de la culture? Qu'est-ce que ça va
coûter aux loisirs, M. le Président? On est parvenus, grâce
au travail du député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, du
député de Labelle, même aux jeunes de votre parti - il y a
des "on" et des "ou", mais c'est ça - ou votre conseil
général... Ils sont venus à bout de renverser la vapeur
avec nous pour que le ministre des Finances retire la taxe sur les livres.
Voyons donc! On demande des gens qui sont capables de nous donner une expertise
valable, c'est ça qu'on veut avoir, pas d'autres choses. Mais le leader
adjoint du gouvernement appelle ça des motions dilatoires. Il sait tout,
il sait tout, lui. Il n'a pas besoin d'apprendre autre chose d'autres
associations ou d'autres mouvements ou d'autres fédérations, il
sait tout, il sait tout. Même l'article 249 pour la commission quand elle
a siégé, le leader a fait preuve, encore une fois, d'arrogance.
On n'avait même pas défini ici, en Chambre, les heures où
la commission siégerait. Est-ce que ça a du bon sens? Pourquoi?
Parce qu'on savait de ce côté-là de la Chambre, en tout
cas, pas nous, qu'il était pour y avoir une motion de bâillon, une
motion de clôture, une motion de guillotine, appelez-la comme vous
voulez. Mais c'est une motion qui fait taire l'Opposition, c'est ça. Ils
le savaient de l'autre côté. C'est pour ça qu'ils n'avaient
pas prévu faire siéger la commission. C'est simplement pour
ça. Ils sont fins, ils sont "smattes", ils n'ont pas besoin de
ça, eux autres. Mais quand le ministre du Revenu, parrain de la loi, est
arrivé en commission parlementaire en plus de ça -
écoutez-moi bien, vous ne me croirez pas parce que, vous, vous
étiez là, et, moi, j'étais en Chambre, mais il y a
d'autres collègues qui étaient en commission parlementaire - il a
dit: J'ai 36 heures à toffer. 36 heures à toffer, c'est ça
qu'il a dit. Mais il était content parce qu'il a eu juste 23 heures
à toffer parce qu'ils sont venus le relever en lui disant: Fini,
"kaput!", motion de clôture, motion de censure, c'est fini. C'est fini,
l'Opposition a fini de dire ce qu'elle avait à dire, puis
après
ça, moi, je ne veux plus rien savoir. m. le président,
quand ils lui ont demandé en plus de ça au ministre... quand ils
sont arrivés, ils ont demandé de voir l'article 25 pour la taxe
de vente et l'exemption des livres. ils ont demandé: est-ce que vous
pourriez nous fournir les amendements à l'article 25? croyez-le ou non,
m. le président, je suis certaine que je vous en apprends parce que vous
allez tomber de votre chaise, croyez-le ou non, ce ministre supposément
responsable a dit: je ne les ai pas lus, les amendements. je les ai eus ce
matin, je n'ai pas eu le temps de les lire, vous ne les aurez pas. donc, on n'a
pas eu les amendements, il ne les savait pas non plus parce qu'il ne les avait
pas lus. qu'est-ce qu'il va y avoir avec la motion de clôture? qu'est-ce
qui va arriver? c'est que tous les amendements, s'il y en a, vont être
déposés ensemble, tout d'un coup, ouf! comme ça. on n'aura
même pas eu le temps d'y jeter un coup d'oeil, même pas eu le temps
de l'analyser, même pas eu le temps de demander à des personnes
ressources de pouvoir nous informer sur les valeurs d'un amendement
apporté qui aurait certainement contribué à aider à
une meilleure compréhension et- à bonifier le projet de loi. il
ne les avait pas lus. aïe! il faut le faire! le ministre, parrain d'une
loi, qui arrive en commission parlementaire, qui n'avait pas lu ses
amendements. j'ai rarement vu ça. j'ai rarement vu ça et je suis
sûre que plusieurs personnes de son côté doivent être
atterrées d'entendre une chose comme celle-là. je sais pourquoi
il ne les a pas lus: premièrement, ce n'est pas lui qui les a
préparés et, deuxièmement, il savait qu'il y aurait une
motion de clôture, il savait qu'il y aurait un bâillon. donc, il
s'est dit: je ne me forcerai pas, je vais faire comme le ministre des finances,
je vais aller sur la vague; je m'en vais faire comme le ministre des finances
aussi, je ne me forcerai pas, je vais imiter le fédéral, et puis
je ne bougerai pas, je vais juste calquer ma loi sur celle du
fédéral, je ne ferai pas d'efforts. c'est ce qu'il a fait, il n'a
pas fait d'efforts. des amendements préparés par d'autres et
présentés par lui, sans les avoir lus, sans savoir ce qu'il
présentait. aïe! il faut le faire! et on appelle ça un
ministre responsable. c'est un ministre parrain, mais responsable là,
j'en doute, j'en doute, m. le président. m. le président, ce
qu'on aurait aimé de ce côté-ci de la chambre, ce qu'on
souhaiterait encore parce qu'on espère qu'avec les interventions qu'on
va faire de notre côté, on va être en mesure de pouvoir
faire comprendre à ce gouvernement que nous avons en face de nous la
possibilité de changer certains articles de la loi, d'apporter des
amendements et de retirer cette motion. qu'il retire cette motion. on n'est pas
d'accord. on ne peut pas être d'accord avec une motion comme
celle-là, m. le président.
J'ai parlé avec des collègues de l'autre côté
de la Chambre. J'ai parlé parce que je suis toujours en chambre et je
discute avec tout le monde. j'ai parlé avec eux autres. mais, m. le
président, il n'y a pas juste de ce côté-ci de la chambre
que les gens sont inquiets, de l'autre côté aussi. il y a des
collègues de l'autre côté de la chambre, des
collègues du ministériel qui sont d'accord avec nous, qui sont
inquiets, qui ont des pauvres gens dans leur comté, qui ont des usines
qui vont fermer et des gens qui vont se retrouver sur le carreau. ils en ont,
de l'autre côté. il n'y en a pas rien que dans mon comté,
il n'y en a pas rien que dans les comtés de l'opposition. il y a des
gens, de l'autre côté, qui auraient souhaité qu'on puisse
en discuter davantage, m. le président. mais non. au moment où on
se parle, en tout cas, je ne sens pas que le gouvernement est prêt
à faire une ouverture dans ce sens-là et je suis persuadée
que, si on faisait comme le député de richmond et ministre
délégué aux pêches l'a dit, dans sa réplique
tout à l'heure - il a fait une bonne réplique et il a reconnu
aussi que le travail du responsable de l'opposition était valable... il
a dit: le député de duplessis m'a apporté des ouvertures,
des éclairages, il a proposé une table de concertation, et je
suis d'accord avec ça. je suis d'accord qu'on s'assoie ensemble, qu'on
en parle et qu'on essaie de voir, tous ensemble, vous comme nous, de quelle
façon on pourrait bonifier notre projet. pas notre projet de loi, leur
projet de loi, le projet de loi calqué sur le fédérai, le
projet de loi sans effort du ministre des finances, présenté par
le parrain sans connaissance du projet de loi et sans connaissance des
amendements qu'il a apportés en commission parlementaire.
M. le Président, je vais tenter une dernière fois de faire
en sorte que le leader adjoint du gouvernement, qui a fait son intervention
tout à l'heure, puisse comprendre l'importance de ce qu'on essaie de lui
dire et que notre formation politique va tenter de lui dire. Il y avait
même d'autres personnes qui se sont inscrites, qui auraient voulu venir
parier, M. le Président. Chaque député, j'en suis
certaine, de l'autre côté, a aussi reçu des lettres de
l'Institut des manufacturiers de vêtements du Québec.
Des voix:...
Mme Juneau: Tout le monde en a reçu. Aïe! Ça
représente 60 000 emplois directs, M. le Président. Ils auraient
voulu qu'on les entende, qu'on les écoute parce qu'ils trouvent que
ça n'a pas de bon sens. 60 000 emplois directs et 100 000 en tout avec
les emplois indirects. Et le vêtement, on le sait, M. le
Président, ce n'était pas taxé et ça va
l'être.
En 1991, les biens mobiliers qui deviendront taxables: les meubles, les
cuisinières, les réfrigérateurs, les linges de maison, les
vêtements, les chaussures, les livres, les journaux. Les livres, eh bien
là, on a un "suspens", pour un an seulement.
Fournitures de classe, "c'est-u" assez indigne. Jusqu'aux fournitures de
classe qui vont être taxées, et là, on est obligé de
donner des gobelets de lait à des petits qui n'ont pas mangé le
matin, en plus de ça, et là, on va taxer les affaires de classe.
Le bois de chauffage, c'est l'hiver, là, on va taxer le bois de
chauffage, et les sièges d'auto pour enfants, les grignotines, jusqu'aux
sacs de "chips", M. le Président, les bonbons pour les enfants, il va
taxer tout ça.
Des voix:...
Mme Juneau: Rien de trop beau. Puis, en 1992...
Des voix:...
Mme Juneau: Ça vous fait mal, hein? Écoutez donc
à la place et essayez donc de nous aider à faire comprendre le
bon sens au gouvernement, aux membres de votre formation politique. Au lieu de
rouspéter, écoutez donc ce que je dis. Écoutez donc.
L'année prochaine, en 1992, les biens et immeubles, services de
transport, services personnels, services de loisirs, culture, ski,
conditionnement physique, billets de théâtre, alouette! M. le
Président, est-ce que tout ce que je viens de mentionner là et
tout ce que je n'ai pas dit, parce que, pendant que je faisais la lecture de
ça, le leader adjoint disait: Tout, tout, il avait l'air content. Tout,
tout, il avait l'air content. Écoutez-le rire! Il est content que le
projet de loi taxe tout. Et, en plus de ça, il ne veut rien savoir qu'on
lui dise que ça n'a pas de bon sens qu'il ne nous laisse pas faire notre
travail comme on doit le faire. (22 heures)
Une voix: C'est un "taxicomane".
Mme Juneau: M. le Président, on va tenter, je sais que je
me répète, mais on va tenter, M. le Président...
Des voix:...
Mme Juneau: ...parce que je l'ai dit tout à l'heure. M. le
Président, si on avait applaudi autant de fois tout à l'heure que
le leader adjoint du gouvernement a mentionné de fois que la commission
avait pris d'heures pour la loi 89, il n'aurait pas pu parler. Ça aurait
applaudi sans arrêt de l'autre côté parce que, pendant 15
minutes, je pense, il s'est répété 10 fois. Moi ça
fait la deuxième fois que je demande qu'on nous écoute et
qu'à ce moment-là le gouvernement va peut-être faire en
sorte de retirer... Elle n'est pas adoptée, la motion.
Tout à l'heure, il disait: Elle va être adoptée. Je
comprends. Its ont le nombre, seulement ça - je ne dirai pas ce que je
pense, M. le Président - le nombre seulement, qui va nous passer sur le
dos comme un rouleau com- presseur, comme vous avez fait avec les trois autres
motions de bâillon du mois de juin. Le nombre, seulement. Mais, si vous
étiez plus compréhensif par rapport aux gens qui sont dans votre
comté et qui sont inquiets, peut-être que vous retireriez votre
motion de censure et que vous laisseriez l'Opposition faire son travail comme
elle doit le faire.
En tout cas, c'est ce qu'on va tenter de vous faire comprendre durant
nos interventions et c'est regrettable à la fois - et je le
dénonce très clairement - que le ministre responsable de la loi
n'ait pas été au courant de ces amendements, qu'il n'ait pas
voulu les déposer parce qu'il ne les avait pas lus et puis qu'il soit
arrivé en disant: On va les toffer pendant 36 heures. M. le
Président, c'est indigne de la part d'un ministre qui est supposé
être responsable d'un projet de loi et je regrette, mais, de ce
côté-ci de la Chambre, c'est non. On ne sera pas d'accord pour
voter avec le gouvernement pour un projet de loi qui va nuire et qui va faire
du tort à tous et chacun.
Non, M. le Président, l'Opposition officielle ne s'acoquinera pas
avec le gouvernement pour faire une chose aussi basse que ça. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée. Alors, s'il vous plaît, à l'ordre! S'il
vous plaît, à l'ordre! Je suis prêt à
reconnaître un prochain intervenant. M. le ministre du Revenu.
M. Raymond Savoie
M. Savoie: Merci beaucoup, M. le Président. Merci, M. le
Président. M. le Président, vous comprendrez que je ne peux pas
laisser passer sous silence les déclarations à
l'emporte-pièce qu'a faites justement la répondante de
l'Opposition sur ce dossier. Lorsqu'elle parle de spectacle, il faudrait bien
savoir que les spectacles ne sont pas touchés par ce projet de loi. Il
va s'agir, si on doit le faire, d'un débat ultérieur sur un autre
projet de loi. Pour le moment, on ne touche que les biens.
Évidemment, il y a eu plusieurs déclarations. Je ne pense
pas qu'il est de mon devoir, ni de ma responsabilité de reprendre,
évidemment, les argumentations qu'elle a utilisées et qui sont
tout naturellement fausses par mauvaise information, par manque d'information
de sa part. On va tout simplement comprendre que, finalement, elle ne joue que
son rôle qui est de continuer le "filibuster" qui a été
introduit par l'Opposition sur ce projet de loi. Un "filibuster" qui a
été annoncé bien avant que le projet de loi soit
déposé sur une question tout simplement de principe. On s'est
dit: On ne participera pas à ce projet de loi malgré le fait,
malgré le fait - et ça, je pense que les Québécois
et Québécoises qui sont à l'écoute doivent en
être conscients - que le critique principal, le député
de
Labelle, soit d'accord avec le principe de l'harmonisation avec le
gouvernement fédéral, qu'il soit d'accord avec la grande ligne
que nous avons décidé d'adopter en ce qui concerne l'orientation
de l'harmonisation au niveau de la TPS, comme il l'a dit en commission
parlementaire, pour justement permettre aux entreprises de bien fonctionner
dans le cadre de ce réaménagement fiscal.
Et ça, pour des raisons qui sont évidentes. C'est que
c'est appuyé par tout le monde qui est au dossier. Tout le monde qui est
au dossier est d'accord avec les orientations. Sauf, évidemment, qu'il y
a toujours quelques exceptions, et je veux bien. De façon
générale, la population, contrairement à ce que
prétend le député de Pointe-aux-Trembles qui est
totalement faux, la population, le peuple, parce que, quand le Parti
québécois parle, M. le Président, il parle toujours avec
l'autorité du peuple... Ils me font penser à des pirates,
à de petits brigands qui tenaient des populations en otage et qui
disaient lorsqu'on les interrogeait: Eh bien, nous, on représente le
peuple! Sauf que-Justement, regardons qui appuie les mesures d'harmonisation.
J'ai ici une liste d'organismes ayant réclamé du gouvernement du
Québec l'harmonisation de la taxe provinciale et l'administration
conjointe des deux taxes. Là-dedans, il y a la Chambre de commerce de
Québec et la Chambre de commerce du Québec, qui regroupe
l'ensemble des chambres de commerce du Québec, de toutes les
municipalités et villes au Québec, est d'accord avec
l'orientation d'harmonisation et, eux, dans leurs mesures dilatoires, ils
arrivent et disent: On voudrait entendre la Chambre de commerce du
Québec, vous savez, pas parce que c'était réel, parce que
ce n'était pas réel, pas parce qu'ils étaient
intéressés, ils n'étaient pas intéressés,
mais parce qu'ils ont annoncé bien avant qu'on dépose ce projet
de loi par le biais du leader de l'Opposition qu'ils allaient tout mettre en
oeuvre pour "filibuster" ce projet de loi, ce qu'ils sont en train de faire et
on a dit: Bon, on en a assez. Nous, je pense, qu'on a été de
bonne foi, on s'est prêté au jeu parlementaire et on s'est dit: On
a répondu à leurs questions, on a échangé, on a
essayé de fournir l'information pour leur faire comprendre le bon sens,
par exemple, en leur présentant des lettres de la part, eh! bien, que ce
soit de la Fédération des entreprises, que ce soit du Conseil du
patronat, du Conseil canadien du commerce de détail, de l'Association
des manufacturiers, de l'institut CD. Howe, tous ces organismes, y compris la
Chambre de commerce, y compris l'Association des consommateurs du
Québec, y compris d'autres organismes de nature représentative
vraiment québécois, qui nous ont dit: On est d'accord avec
l'harmonisation. Même le député de Labelle, qui
était censé diriger le "filibuster" sur ce projet de loi, a
avoué en commission parlementaire et sans - et on peut le retrouver dans
les transcriptions, comme de quoi il dit qu'il est d'accord.
Ça, vous savez, c'est la politique. À un moment
donné, pour une raison quelconque, le leader, leur chef, décide:
bon, bien, là-dessus, on va faire un "filibuster", parce qu'on veut
bloquer les travaux législatifs de cette session pour toutes sottes de
raisons. Ils ont pris ce projet de loi. D'ailleurs, pour les gens qui sont mal
renseignés, qui connaissent moins bien le dossier que d'autres, on peut
aller les chercher ces gens-là, qui, finalement, n'ont pas suffisamment
d'information, en disant: Eh bien, ralliez-vous autour de nous du Parti
québécois parce qu'on s'oppose, en prétendant que c'est
peut-être là, quelque part, l'intérêt du
Québec et ça, je ne le comprends pas. Alors, on se prête
à ce jeu, on se prête à votre jeu et, là, c'a
duré assez longtemps, vous vous êtes suffisamment moqué des
procédures parlementaires, vous vous êtes suffisamment
moqué du travail qui doit être fait, vous vous êtes
suffisamment moqué des entreprises québécoises, du
consommateur québécois, vous vous êtes suffisamment
moqué de l'ensemble du bien-être des régions, des
entreprises québécoises pour dire: Bon, bien là, c'est
assez, on n'a pas le choix. C'est vrai que c'est une mesure qui est importante.
C'est vrai que c'est une mesure qui, finalement, n'est pas... on ne doit pas en
encourager l'utilisation, mais qui parfois est nécessaire, surtout au
mois de décembre, à l'Assemblée nationale, ou au mois de
juin, où on arrive en fin de session et qu'on cherche à faire nos
"jeu-jeu" d'opposition, en bout de piste, on est habitués à
ça, mais on n'a pas le choix. Malgré la gravité, je pense,
de la procédure, nous devons l'utiliser.
Nous avons été, je peux vous l'assurer, dans toute la
commission parlementaire, de bonne foi. Pendant 20 heures, on s'est
prêté à des échanges, on a modifié les
règles pour s'accommoder aux fluctuations d'humeur du
député de Labelle et d'autres, on a fourni les renseignements
qu'ils nous ont demandé. On a toujours joué, je pense, franc jeu
en donnant les réponses lorsque, effectivement, on croyait que oui,
à tel endroit, l'effet de cette taxe, ces modifications au niveau de la
taxe de vente pouvaient être particulièrement difficiles, d'autres
où ça pourra être bénéfique. Le fait qu'ils
ne cessent pas de chanter comme de quoi le gouvernement du Québec va
augmenter ses revenus, je leur ai répondu qu'on m'avait fourni des
documents, des renseignements qui stipulaient très clairement que, sur
une période de trois ans, le gouvernement du Québec perdrait 19
000 000 $ avec cette taxe de vente, sur une période de trois ans, M. le
Président, et ça, j'ai dit que ces renseignements-là, je
les avais vérifiés et que ça me semble effectivement
correct de faire cette affirmation-là et que ça semble
effectivement vrai de faire cette affirmation-là et ils ont
continué à chanter: Oui, mais vous allez chercher
un 200 000 000 $, 300 000 000 $, sans faire de preuve, sans faire de
démonstration. Tout simplement, en garrochant des chiffres dans les
airs, qu'ils prennent à gauche et à droite, comme bon leur
semble, allant chercher chez l'un ou chez l'autre, affirmant, comme ils peuvent
ou comme ils veulent, n'importe quelle donnée financière. (22 h
10)
M. le Président, je vous ai dit, à plusieurs reprises, que
cette mesure, oui, elle est historique; oui, elle est importante au niveau
démocratique; oui, ça crée en quelque sorte une
réorientation majeure quant à la philosophie des gouvernements
vis-à-vis du pouvoir de taxation que nous avons. Il y a là une
réorientation en profondeur; c'est le début, c'est le premier pas
dans cette direction-là. Ça va avoir des répercussions
intéressantes pour le citoyen, pour le fonctionnement de notre
système démocratique.
Nous devons malheureusement constater que, maigre notre bonne foi,
malgré notre volonté de bien fournir les renseignements, les
réponses aux questions de l'Opposition, elle est
déterminée à maintenir sa position quant à un
"filibuster". Je peux vous dire que je n'en veux pas particulièrement au
député de Labelle, qui s'apprête à faire son
discours. Lorsque vous l'écouterez, vous penserez que, finalement, il
n'agit pas de son propre gré, on lui donne l'ordre de le faire. On lui
dit de le faire: Tu vas faire un "filibuster" là-dessus, tu n'as pas le
choix. Malgré ce qu'il a dit en commission parlementaire, malgré
ce qu'il a dit en commission parlementaire. Et c'est vrai que ça fait un
peu drôle. On comprend pourquoi le député de Labelle rit,
ça fait un peu curieux, mais il l'a dit en commission parlementaire. Je
vais revenir et je vais vous citer la page et le texte des gallées,
où il indique effectivement: On n'avait pas le choix.
S'il n'y avait pas harmonisation, il y- aurait un coût additionnel
pour les entreprises québécoises qui se chiffre à 400 000
000 $ à 500 000 000 $ par année. Ça veut dire, ça,
qu'un commerçant au Québec devrait retenir des fonds pour le
gouvernement du Québec, retenir des fonds pour le gouvernement
fédéral, avoir un intervenant au niveau du gouvernement
fédéral et avoir un intervenant au niveau du gouvernement du
Québec, avoir des consignes qui, nécessairement, seraient
différentes, avoir peut-être une certaine confusion; les frais
administratifs auraient été incroyablement élevés.
En 1989, on a commencé à nous dire qu'il fallait qu'on
s'harmonise.
Pour le gouvernement du Québec, vous comprendrez que ça
présente des intérêts. Il n'y a qu'un intervenant au niveau
de toute cette mesure, c'est le gouvernement du Québec. C'est nous
autres qui dirigeons l'ensemble de l'opération, tant du
côté du gouvernement fédéral que de celui du
gouvernement du Québec. Un intervenant qui, donc, va permettre aux
entreprises d'être plus productives, qui va permettre aux entreprises du
Québec d'être certainement mieux orientées vers les
décisions administratives, que ce sort plus clair pour l'application sur
une base quotidienne, au niveau de l'administration de cette taxe. Donc, tout
simplement, le gros bon sens va s'appliquer, au niveau de l'administration de
la TVQ ou de la TPS.
Il s'agit d'une première étape, évidemment. Ce que
nous faisons avec le projet de loi, c'est que nous faisons des modifications
à la taxe de vente du Québec. D'abord, elle est réduite de
9 % à 8 %. Bien sûr, on l'étend à des endroits qui
n'étaient pas taxés auparavant, le meuble, le linge, et ça
crée des difficultés, on le reconnaît, dans ces deux
secteurs-là, mais pour l'ensemble de l'économie ça devrait
être des plus positif, ça devrait être même des plus
acceptable pour l'ensemble de l'économie québécoise. On
parle d'un impact inflationniste d'à peine 1 %.
Tout ça pour dire que, finalement, face à l'orientation
qu'a prise le gouvernement fédéral, l'initiative qu'il prend, on
la récupère à l'avantage de nos concitoyens et
concitoyennes, à l'avantage de l'entreprise québécoise
pour éviter, finalement, un certain cadre, une certaine dualité
au niveau de l'administration, une espèce de bicéphalisme au
niveau de l'administration de cette taxe de vente et de la TPS, en la gardant
uniquement sous le contrôle du Québec. Donc, il y a là
vraiment un intérêt pour nous.
Finalement, je pense que ce qu'il y a de plus significatif, c'est que
nous avons travaillé avec diligence au niveau de la préparation
de ce projet de loi, au niveau de nos orientations. J'ai
répété, à maintes reprises, à l'Opposition:
Si le gouvernement fédéral n'allait pas de l'avant avec son
projet de loi, s'il n'y avait pas introduction de la TPS au 1er janvier, notre
projet de loi n'entrerait pas en vigueur puisque le mécanisme
d'entrée en vigueur, c'est une proclamation, ce qui permet donc une
grande discrétion au niveau du gouvernement du Québec. On
maintient notre flexibilité. Si on va de l'avant avec la TPS, on est
prêts. Au niveau des régions, les tournées sont faites. La
sensibilisation a été faite à nos mandataires. Les gens
qui sont enregistrés sont au courant du fonctionnement. On a
créé les mécanismes pour que ceux qui ne sont pas au
courant se mettent au courant le plus rapidement possible. Les informations
sont là. Les gens sont renseignés. On est capable de
répondre à ce virement que je considère tout de même
de toute première importance pour l'histoire des taxes, au niveau du
Québec. Donc, de notre côté, je pense, une grande patience,
une grande bonne foi...
Mme Juneau: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de
règlement, Mme la députée de Johnson.
Mme Juneau: M. le Président, je m'excuse
de déranger mon collègue, mais j'avais cru, tout à
l'heure, que c'était le leader adjoint du gouvernement qui prenait le
temps le plus long sur la motion de censure. Et là, je me rends compte
que le ministre parrain fart autant de temps. Je voudrais qu'on m'explique ce
qui en est, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur la motion de
règlement, très rapidement, M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Johnson: Sur la question de règlement, par voie
d'explication. Le règlement prévoit que, d'une part, l'auteur de
la motion, en l'occurrence le leader ou le leader adjoint, et un ministre, qui
prend le temps du premier ministre, au sens de notre règlement, peuvent
tous deux exercer un droit de parole d'une demi-heure, et que le leader peut
revenir avec un droit de réplique de 10 minutes, ce qui,
évidemment, n'est pas le fait des membres de l'Opposition.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, juste pour
clarifier, je vais quand même lire l'article 209, deuxième
paragraphe: "Cependant, l'auteur d'une motion, le premier ministre et les
autres chefs de groupes parlementaires, ou leurs représentants, ont un
temps de parole d'une heure pour les motions de fond et de 30 minutes pour les
motions de forme." Donc, il s'agit d'une motion de forme, et c'est 30 minutes.
Vous pouvez poursuivre votre intervention.
Mme Juneau: Merci, M. le Président.
M. Savoie: Merci beaucoup, M. le Président. On comprendra
qu'évidemment la députée a fait son possible. Elle doit
voir à l'application des règles de cette Assemblée, et
elle l'a fait. Donc, c'est de bonne guerre. Il n'y a pas de mauvaise
volonté, je pense, de sa part, simplement une bonne application des
règles. Évidemment, ce qu'on constate surtout, de l'autre
côté de la Chambre, c'est qu'évidemment il y a une
volonté d'essayer de comprendre les réglementations, le
fonctionnement de cette Assemblée nationale, mais qu'il y a souvent une
difficulté au niveau de l'application, lorsqu'on comprend les motifs
réels. C'est-à-dire qu'un "filibuster" dort se faire lorsqu'il y
a vraiment un problème au niveau du fond.
Ce que je vous disais ici, c'est qu'il n'y a pas de problème au
niveau du fond. Ce qu'on a, c'est qu'au niveau de la forme, au niveau de la
perception qu'a le public de la TPS, l'Opposition s'est dit: Bon, bien, nous
autres, on peut peut-être jouer là-dessus, on peut peut-être
faire semblant de s'opposer en bloquant les travaux législatifs de cette
session, en disant aux citoyens et citoyennes qui comprennent mal le
fonctionnement de la TPS ou de la TVQ: Venez chez nous, nous autres, on
s'oppose à ça et on est là pour défendre vos
intérêts. Alors que, dans les faits, s'opposer aux modifications
que nous apportons actuellement, au niveau de la taxe de vente du
Québec, s'opposer aux orientations que nous donnons, en tant que mesures
d'harmonisation, c'est imposer, pour les Québécois et
Québécoises, un fardeau important additionnel au niveau du
fonctionnement de nos entreprises. Donc, les 400 000 000 $, 500 000 000 $ que
nous sauvons aux entreprises québécoises en faisant cette
harmonisation, évidemment, c'est le citoyen qui ne les paie pas, parce
que, normalement, il faut que quelqu'un les paie, ces mesures-là.
Là, on ne les paie pas.
Deuxièmement - et je pense que c'est des plus substantiel - M. le
Président, vous comprendrez que ce sont ces entreprises-là qui
nous demandent, qui exigent qu'on s'harmonise avec le projet de loi du
gouvernement fédéral, ce que nous devons faire pour respecter les
entreprises québécoises, pour respecter le consommateur
québécois et aussi pour respecter, finalement,
l'intégralité de l'administration d'une taxe sur le territoire du
Québec. Il peut paraître paradoxal, pour quelqu'un qui ne comprend
pas réellement la politique, d'arriver et de dire: Aujourd'hui, on va
administrer cet acte pour le gouvernement fédéral, au
Québec. En réalité, il y a là une croissance, une
bonne croissance de l'apport du gouvernement du Québec et du rôle
qu'il doit jouer au niveau des taxes à la consommation, au
Québec. Je trouve ça particulièrement intéressant.
Et je trouve, d'ailleurs, que le ministre des Finances, que le Conseil des
ministres a vu particulièrement clair lorsqu'il a décidé,
aux mois de juin, juillet, août, lors des discussions, lorsqu'il y a eu
orientation, de prendre cette mesure. Je pense que c'a été
très intéressant comme vision. Je pense que ça va donner
des retombées très fortes à long terme, très
bénéfiques pour la population québécoise. (22 h 20)
je voudrais vous lire, m. le président, si vous me le permettez, la page
des transcriptions, du 6 décembre - à 23 h 15, le soir - il faut
bien s'entendre - lorsqu'ils nous ont fait siéger jusqu'à minuit
tous les soirs, là-dessus, pour avancer à l'article 3, là,
la dernière séance... des trois à quatre heures.
là, ils nous ont fait avancer de quelques articles, très
rapidement. ça s'est tout fait dans les dernières minutes -
où on dit: nous voulons, sans couleur d'ajustement, modifier notre taxe
de vente du québec avec comme objectif, finalement, de la rendre la plus
semblable possible ou de l'intégrer le mieux possible à la tps.
donc, l'objectif d'harmonisation, j'en suis. il y a là les paroles du
député de labelle. oui, oui, et ce n'en est qu'une, là. m.
le député de labelle encore. les économistes ne sont pas
contre son projet. faut-il le lui rappeler? il est d'accord pour dire que oui,
il y a là, finalement, un ensemble d'intervenants
socio-économiques: l'association des consommateurs du
Québec, la Chambre de commerce, l'Association des manufacturiers,
le Conseil du patronat. Tout le monde est d'accord avec l'orientation
d'harmonisation parce qu'on est dans une situation difficile. Il est aussi
d'accord pour dire que bon, justement, il y a des bénéfices pour
le gouvernement du Québec à administrer la taxe de vente - la TPS
- sur son territoire. Il y a là vraiment un avantage majeur en prenant
le contrôle des deux et en permettant que ce soit dirigé par le
gouvernement.
Alors, finalement, je me suis posé la question: Pourquoi cette
insistance pour faire du "filibuster"? La réponse était assez
évidente. Même avant le dépôt du projet de loi,
l'Opposition a clairement fait sonner son intention sur la place publique. Le
leader de l'Opposition, sur la place publique, a dit:
Nous allons faire un "filibuster" sur ce projet de loi. Non pas
tellement parce qu'ils sont contre le projet de loi - il faut bien se rappeler
- c'est que la procédure parlementaire est intéressante lorsqu'on
veut bloquer tous les travaux d'une Législature. C'est-à-dire
qu'on prend un projet de loi, on l'amène à une des commissions
parlementaires et on fait un "filibuster". Lorsqu'on bloque chacune des
commissions parlementaires qui sont en fonction - comme c'est le cas
actuellement - il n'y a plus de travaux, il n'y a plus de lois qui peuvent se
présenter à l'Assemblée nationale. Et c'est dans ce plan
global que se situe la position de l'Opposition. C'est là qu'ils se
situent, ils disent: On bloque tout et là, ils ne pourront plus
présenter de projets de loi. Donc, ils ne seront plus capables de
légiférer, donc on est bien placés, à ce
moment-là, pour négocier ce qu'on veut, négocier des
petits échanges. Que ce soient des avantages, par exemple, au niveau de
son comté ou d'autres choses, d'autres projets de loi. C'est ce qu'ils
cherchent à faire et c'est... Moi, je ne pense pas que ça
respecte bien nos orientations parlementaires ni que ce soit bien
responsable.
Que voulez-vous? On est là-dedans, on ne se prête plus
à ce jeu, c'est ce qu'on vient leur dire. On prend cette mesure
extraordinaire qu'est la clôture, un peu à contrecoeur - je dois
l'avouer - un peu avec regret, qu'on est obligés d'introduire parce que,
à travers la commission parlementaire, nous avons quand même eu de
bons échanges, nous nous sommes quand même entendus sur certains
principes. Il y a eu de bons échanges. Il y a eu des moments, là,
ou il y a des choses, là, où on voyait que, finalement, il n'y
avait pas beaucoup de flexibilité à cause non pas d'une
volonté personnelle, mais de directives qui venaient d'ailleurs. Que
voulez-vous? C'est comme ça.
Alors, c'est ça, on est rendus là, M. le Président,
ce soir, à débattre la motion de clôture, une motion
extraordinaire. Oui, c'est vrai, c'est vrai que c'est un peu triste, c'est vrai
que ça me peine, je dois dire, parce que, comme parlementaire, ça
ne me fait pas plaisir. J'aurais aimé ça m'asseoir avec le
député de Labelle, échanger avec lui, voir si vraiment il
avait des questions spécifiques au niveau de certains articles. On ne
l'a pas faite, cette démarche-là. J'aurais aimé ça
aussi prendre le temps de voir l'ensemble des modifications qu'on est en train
de travailler au projet de loi - il y en a quelques-unes - prendre le temps de
les lire ensemble et d'échanger là-dessus. Mais, là,
finalement, tout ce mécanisme, on doit le mettre de côté,
compte tenu de l'attitude de l'Opposition, l'attitude de cette Opposition de
vouloir participer avec le gouvernement à l'adoption d'un projet de loi
qui est recherché par l'ensemble des commerçants, par l'ensemble
des organismes que je crois crédibles au niveau de la consommation au
Québec, par également tous ceux et celles qui sont bien au
courant de l'application de la TPS et de son impact sur l'économie
québécoise.
Dans un contexte comme ça, M. le Président, nous n'avons
pas le choix. Le député de Labelle, évidemment, le
comprend, il va nécessairement s'opposer pour des raisons qui sont
propres à son parti. Quand on est rendu là, M. le
Président, je trouve que c'est bien triste, c'est bien triste pour
l'Assemblée nationale et c'est bien triste pour notre système
parlementaire. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre.
Je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant. M. le
député de Labelle.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: M. le Président, d'abord, nous en
sommes là à cause d'une mauvaise planification parlementaire
à l'Assemblée nationale. Le gouvernement s'est
traîné les pieds, il a déposé ce projet de loi le 15
novembre alors qu'il aurait dû le déposer depuis fort longtemps,
quand on sait toutes les cachotteries qui ont entouré l'avènement
de ce projet de loi ici, à l'Assemblée nationale.
C'est un projet de loi très important. Je n'ai que 10 minutes
pour en parler, mais nous allons l'établir et nous reviendrons dans
d'autres débats. Mais, comparativement à ce qui a
été fait au gouvernement fédéral alors qu'on a
indiqué ses intentions il y a trois ans, en juin 1987, qu'on en discute
depuis ce temps, tant à la Chambre des communes qu'au Sénat, mais
surtout à la Chambre des communes, deux ans pratiquement, avec des
tournées à travers le pays, le gouvernement qui est ici devant
nous a mentionné, par la voix de son premier ministre, le 15 mars
dernier, qu'il ne privilégiait pas cette taxe parce qu'il la trouvait
régressive. Le ministre des Finances n'en a pratiquement pas
parlé dans son discours du budget et ce qu'il en a dit ne
laissait aucunement entendre qu'il l'amènerait ici, pour venir
à l'Assemblée nationale, dans une déclaration
ministérielle, à l'occasion du vote sur la loi 90 créant
la commission constitutionnelle, déclarer qu'il venait de signer un
protocole d'entente avec le gouvernement fédéral et qu'il voulait
adopter finalement une modification à la taxe de vente du Québec
qu'on peut appeler la TPS québécoise harmonisée.
Le projet de loi, par la suite, n'a été
déposé que le 15 novembre et les gens au ministère du
Revenu, comme aux Finances, je suppose, y travaillaient depuis le printemps
dernier et depuis même avant. Le 15 novembre, dans l'intention bien nette
de l'adopter avant Noël, en cachette, en faisant une utilisation abusive
des sessions intensives de l'Assemblée nationale. C'est ça qu'ils
font. Et ils veulent rejeter le blâme sur l'Opposition.
C'est vrai. Nous voulions entendre les gens du Québec qui avaient
des choses à dire sur la TPS québécoise. Nous voulions
entendre la Chambre de commerce, le Conseil du patronat, l'Association des
manufacturiers canadiens, l'Association coopérative d'économie
familiale, les marchands de meubles, le Mouvement Desjardins. C'est
là-dessus que nous avons fait les motions, parce que nous voulions
savoir ce qu'ils en pensaient. Et nous avons proposé d'entendre autant
les bénéficiaires, autant les victimes du système qu'on
veut nous mettre sur la tête.
Depuis qu'il n'y a plus de Conseil législatif ici, M. le
Président, qui a été aboli en 1968, il faut absolument
respecter le rôle des commissions parlementaires. Ce n'est que là
que la population du Québec peut se faire entendre devant
l'Assemblée nationale, qu'en commission parlementaire, parce que,
après, lorsque c'est passé à l'Assemblée nationale,
il est trop tard. Il faut que les gens viennent en commission parlementaire et
c'est pour ça que, par rapport à un projet de loi aussi
important, nous avons voulu demander à des groupes de venir. D'ailleurs,
certains le demandaient aussi; beaucoup même l'ont demandé. (22 h
30)
M. le Président, on nous reproche d'avoir fait 20 heures en
commission parlementaire. C'est pratiquement un record d'imposer un
bâillon après 20 heures en commission parlementaire. Là, ce
que le leader du gouvernement fait, c'est qu'il additionne le débat de
deuxième lecture avec la commission parlementaire. C'est grossier comme
calcul, M. le Président, grossier! C'est une législation de
dernière minute, un projet de loi qui va modifier les équilibres
des revenus fiscaux au Québec. Je veux juste vous montrer comment il y a
de la confusion par rapport à ce projet de loi, M. le Président.
Manchette ici, Normand Girard, dans le Journal de Montréal: "Les
effets de la TPS unifiée. Selon Gérard D. Levesque, les
entreprises paieront plus d'impôt et les citoyens moins". Ça,
c'est dans Le Journal de Montréal.
La Presse maintenant: "Avec la nouvelle TPS
québécoise, le fardeau fiscal des entreprises diminue de 1 500
000 000 $". M. le Président, c'est quoi, la confusion dans le public? Il
y en a un qui dit que le fardeau fiscal des entreprises baisse de 1 500 000 000
$ et l'autre dit qu'ils vont payer 500 000 000 $ de plus en impôt.
M. le Président, il faut savoir qu'il y a toutes sortes d'aspects
dans ce projet de loi et il faut savoir que le gouvernement, en l'apportant
ici, à la cachette, en fin de session, vient d'escamoter le débat
le plus fondamental qu'il devrait y avoir ici, au Québec, parce que,
quand on parle des revenus du gouvernement du Québec, on parle des 35
000 000 000 $ qu'il va chercher dans la poche des Québécois
chaque année. C'est de ça qu'on parle, et ils n'ont pas voulu
aborder le débat. Ils se cachent et, ce soir, avec une motion de
clôture, ils se cachent encore. C'est ça qu'ils font.
Ils n'ont pas voulu aborder, par exemple, l'hypothèse de revenir
à l'impôt sur les successions, alors que le fédéral,
en 1972, a donné à ceux qui avaient de grosses successions, 12
000 000 000 $, vérifié selon une étude du professeur John
Bossons, de l'Université de Toronto, 12 000 000 000 $. Dans le projet
qui nous occupe, les entreprises ont 1 500 000 000 $ et savez-vous pourquoi? Au
niveau du Canada, la TPS va donner aux entreprises, en remboursement
d'impôt, 9 000 000 000 $. Et savez-vous pourquoi le Conference Board
estime que les taux d'inflation vont augmenter à cause de la TPS
fédérale de 1,5 % et qu'au Québec on estime que
l'inflation va augmenter de 0,5 %? Est-ce que vous pensez qu'il s'agit, sur ce
plan-là, d'une augmentation de revenu, alors qu'ailleurs ils vont le
reprendre autrement? Non, M. le Président. Le Conference Board sait
très bien que les entreprises ne refileront pas le remboursement aux
consommateurs et donc que le prix des biens et services au Canada va augmenter.
C'est ça qui cause l'inflation.
Ce que nous faisons à l'heure actuelle, on est en train
d'augmenter le fardeau des consommateurs, actuellement. Le gouvernement du
Québec non seulement versera 1 500 000 000 $ aux entreprises, mais, en
plus, lui-même va se mettre dans la poche 362 000 000 $ de plus que ce
qu'il avait prévu, parce que les crédits d'impôt qu'il se
vante, M. le Président, attribuer pour 1991, il va les verser seulement
en 1992 et les crédits d'impôt de 1992, il va les verser en 1993,
de sorte que l'économie de caisse qu'il fait, elle est permanente pour
lui: 362 000 000 $ pris dans la poche des contribuables au moment même
où la récession se manifeste.
M. le Président, le gouvernement a évité aussi
d'aborder l'hypothèse de l'imposition sur la richesse comme, par
exemple, ça existe en Allemagne de l'Ouest. Et qu'est-ce que ça
veut dire, des impôts sur la richesse? La question aussi de l'impôt
sur les profits de capital. M. le
Président, c'est drôle qu'on n'ait jamais entendu parler,
dans cette Chambre, comme à la commission, par exemple, des profits de
capital qui sont importants. M. John Turner s'est acheté, en 1976, une
maison de 265 000 $ et, lorsqu'il a été nommé chef du
Parti libéral du Canada, il l'a revendue 900 000 $. Il a encaissé
un beau profit de capital de 635 000 $, non taxable, M. le Président,
parce que c'est un profit de capital sur une maison privée. Mais ce
qu'on ne dit pas et ce qu'on ne voit pas, c'est qu'un contribuable ordinaire,
qui a une maison qui vaut 75 000 $ ou 100 000 $, va réaliser, lui, un
profit de capital de 20 000 $ lorsqu'il va la vendre au bout de 8, 10 ans. Mais
un riche, lui, va réaliser un profit de capital de 10 fois autant, 20
fois autant. C'est ça dont on parie. Mais jamais ce gouvernement n'a
abordé cette hypothèse. Jamais il ne l'a abordée et, moi,
je pense qu'on est en train de camoufler ce débat. Ce dont on nous
parle, je trouve ça suave, M. le Président, on nous parle des
caisses enregistreuses où c'est très compliqué de faire
deux taxes, très compliqué d'en avoir une à taux
zéro et d'en avoir une autre à 7 %. C'est ça qu'on nous
met sur la table sans arrêt. Ils n'ont aucun intérêt pour la
culture, aucune pitié pour les consommateurs, mais ils en ont pour les
caisses enregistreuses.
Quand le ministre parle d'harmonisation, fort bien; nous ne voulons pas
compliquer la vie des commerçants, nous sommes d'accord. C'est pour
ça que je l'ai dit. Mais ce n'est pas le fond des choses, quand
même. C'est un aspect et puis je dirai, malgré le respect que j'ai
pour les commerçants, que ce n'est pas le plus important dans toute
l'affaire. Ils se cachent. Si leur projet est bon, qu'ils le défendent
sur la place publique. Qu'ils donnent aux citoyens le temps de se
manifester.
Alors, M. le Président, vous me faites signe depuis plusieurs
secondes que mon temps est terminé. Nous aborderons beaucoup d'autres
sujets, M. le Président. Nous verrons bien et, M. le Président,
j'espère que les Québécois se rendront compte de la
désinformation qu'ils subissent parce que l'un dit que, le fardeau
d'impôt des entreprises augmente, l'autre qu'il diminue de 1 500 000 000
$. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Labelle. Je reconnais le prochain intervenant, M. le
député de Verdun.
M. Henri-François Gautrin
M. Gautrin: Merci, M. le Président. Il y a toujours une
certaine difficulté pour ce côté-ci de la Chambre de voter
en faveur d'une motion de clôture. C'est un geste qu'un parlementaire
réprime à faire et qu'il ne faut pas faire à la
légère. C'est un geste important, mais sur lequel on doit pouvoir
agir en fonction de deux prin- cipes: y a-t-il urgence pour passer cette loi
et, deuxièmement, est-ce qu'on peut raisonnablement penser que le
mécanisme normal du fonctionnement des commissions parlementaires
pourrait satisfaire cette urgence?
Alors, M. le Président, j'ai participé, en partie, aux 25
heures de débat, sur ce projet de loi en commission parlementaire, 25
heures de débat qui ont été extrêmement
instructives. J'ai vu de magnifiques morceaux d'expérience oratoire de
la part de gens de l'Opposition, mais, en 25 heures de débat, M. le
Président, on était arrivé péniblement à
avoir étudié trois articles, ce qui veut dire, si vous faites un
peu d'arithmétique avec moi, 5 heures de débat par article. Ce
projet de loi comportant 62 articles, on pourrait normalement penser que si
nous avions continué avec la même célérité et
avec le même fonctionnement, ceci nous aurait pris 310 heures pour
étudier le projet de loi. (22 h 40)
Si on considère qu'on peut, en commission normalement, travailler
10 heures par jour, ça veut dire que ça nous prendrait 31 jours
pour étudier le projet de loi si nous continuions à fonctionner
avec la même célérité, 31 jours pour étudier
un tel projet de loi. Je comprends que les amis de l'Opposition voudraient
calquer le fonctionnement des sénateurs. Malheureusement, ce n'est pas
pour moi un exemple que je compte suivre. 31 jours pour étudier un
projet de loi alors qu'il y a une certaine urgence, M. le Président,
alors qu'il y a urgence d'adopter ce projet de loi avant la fin de
l'année. Et, parce qu'il y a urgence d'adopter ce projet de loi - et je
vais revenir le démontrer dans un instant -parce que le fonctionnement
de la commission parlementaire, à peu près à cinq heures
par article, nous amènerait, si on continuait comme cela, à ne
pas pouvoir adopter le projet de loi avant l'ajournement de Noël, M. le
Président, je pense que tout parlementaire responsable se doit de voter
en faveur de cette motion de clôture.
Pourquoi y a-t-il urgence d'adopter un tel projet de loi? Je pense qu'on
l'a expliqué moult fois dans le débat en deuxième lecture,
mais je veux encore essayer de l'expliquer une fois de plus. Le projet de loi
actuellement fait trois choses principales.
Premièrement, il veut harmoniser la taxe de vente du
Québec avec la TPS fédérale qui va passer incessamment. Le
coût de la non-harmonisation - et je pense qu'il faut bien en être
conscients - pour l'ensemble des commerces québécois, dans une
situation de récession, serait dramatiquement élevé: on a
pu l'estimer à plus de 50 000 000 $. Nous ne pouvons pas nous permettre
actuellement de ne pas harmoniser nos systèmes d'imposition.
Deuxièmement, M. le Président, il est important de
réaliser que cette loi vient diminuer - et, bon Dieu! je n'ai entendu
encore personne de l'Opposition dire cela - vient, je le
répète, diminuer la taxe de vente, progressivement, qui va
passer de 9 % à 8 % et, en 1992, à 7 %. M. le Président,
il y a là des économies substantielles pour les consommateurs que
nous ne pouvons faire attendre par des mesures dilatoires. Deuxièmement,
c'est vrai que le principe d'harmonisation va amener à devoir
étendre le champ de taxation à des produits qui, jusqu'à
maintenant, n'étaient pas soumis à la taxe de vente, mais, dans
l'ensemble, cette approche qui nous permet d'harmoniser notre système de
taxation avec le système de taxation fédéral ne va pas
coûter un sou de plus aux contribuables. Et, bon Dieu! j'attends, de la
part de l'Opposition, le moment où ils reconnaîtront qu'on est en
train de parler d'une diminution de la taxe de vente. J'attends cela de leur
part, je l'espère, parce qu'il y a, parmi eux, des gens que je respecte.
J'attends le moment où ils vont reconnaître qu'on est en train de
parler d'une diminution de la taxe de vente.
M. le Président, le troisième et dernier point de ce
projet de loi: il y a un mécanisme, à l'intérieur du
projet de loi, pour aider les familles les plus défavorisées qui
vont pouvoir recevoir une aide substantielle pour contrer les effets de la taxe
de vente, une aide sustantielle pour les familles qui gagneront moins de 30 000
$ comme revenu familial. Et il y a lieu de comprendre, M. le Président,
que, pour la majorité des familles à faibles revenus, ce projet
de loi va être bénéfique et va augmenter leur pouvoir
d'achat.
M. le Président, pour ces raisons-là, il est donc urgent
de passer, avant l'ajournement de Noël, le projet de loi 89. M. le
Président, si vous me permettez, je voudrais rappeler les points
importants. Oui, il y a urgence de passer le projet de loi 89 avant
l'ajournement de Noël. Oui, on pouvait décemment conclure, à
voir le fonctionnement de la commission qu'il aurait été
virtuellement impossible pour cette commission de faire son travail dans les
délais qui lui avaient été impartis et de pouvoir
étudier l'ensemble des 62 articles que contient ce projet de loi avant
l'ajournement des fêtes.
Dans ce sens, M. le Président, il est important de comprendre que
l'Opposition avait choisi - c'était parfaitement son droit - de
multiplier les mesures dilatoires en commission. Je dois dire qu'il y en a eu,
des mesures dilatoires, d'absolument magnifiques. Nous nous sommes bien
amusés, mais, malheureusement, nous n'avons pas travaillé. Nous
avons assisté à moult mesures dilatoires de toutes sortes de
choses en commission; nous n'avons jamais abordé l'étude
sérieuse, article par article, du projet de loi 89. Dans ce
sens-là, M. le Président, il était nécessaire de
passer une motion de clôture; à cause de l'urgence d'adopter la
loi 89, il était nécessaire aujourd'hui de devoir voter en faveur
d'une motion de clôture. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Verdun. Je reconnais maintenant le prochain
intervenant, M. le député de La Prairie. M. le
député, la parole est à vous.
M. Denis Lazure
M. Lazure: Merci, M. le Président. Nous avons devant nous
un gouvernement impatient, un gouvernement arrogant, un gouvernement qui tente
de poser des gestes importants en cachette. Le leader adjoint n'est pas
sérieux, quand il dit: Ce projet a été débattu
assez longtemps, une quarantaine d'heures. Il omet de préciser qu'en
commission parlementaire nous n'avons passé qu'à peine une
vingtaine d'heures. Quand je compare cela, M. le Président, au nombre
d'heures que nous passions en commission parlementaire lorsque le Parti
québécois était au pouvoir, je peux vous
énumérer plusieurs lois où nous avons passé des
douzaines et des douzaines d'heures, 100 heures et plus, en commission
parlementaire: la Loi sur la protection du territoire agricole, la Loi sur
l'assurance automobile, la loi 101, la Charte de la langue française,
où l'Opposition faisait de l'obstruction. Mais nous avons
été patients. Nous avons fait venir tous les groupes que
l'Opposition voulait faire venir. Dans les commissions parlementaires, le Parti
québécois, . lorsqu'il était au pouvoir, faisait preuve de
patience, de compréhension, de transparence. Si l'Opposition demandait
de faire venir la Chambre de commerce, nous la faisions venir, la Chambre de
commerce.
M. le Président, il s'agit d'un projet de loi qu'on a voulu
passer en sandwich. À l'occasion d'une session d'urgence, le ministre
des Finances nous fait part d'une mesure tout à fait exceptionnelle,
mais il le fait sur un ton tout à fait banal, comme si c'était
une petite nouvelle. Et c'est pour ça que, dans les jours qui ont suivi,
on a vu plusieurs titres dans les journaux, qui sont éloquents. Et ce
n'est pas le Parti québécois, ce n'est pas l'Opposition seulement
qui s'oppose à la façon dont le gouvernement a
procédé. Ici, l'éditorial de La Presse dit:
"Québec camoufle sa TPS derrière les barricades." En effet,
c'était une session spéciale qui avait été
convoquée pour discuter de la crise amérindienne, d'une part, et
pour créer la commission Bélanger-Campeau, d'autre part. Entre
les deux, l'ineffable ministre des Finances nous passe sa mesure, la TPS
québécoise. Ensuite, on a tardé, tardé,
tardé. Finalement, le nouveau ministre du Revenu nous a
déposé son projet de loi. Il y a un autre article de journal,
à l'époque, qui dit: "Québec nous a joué un tour
avec sa TPS." Un troisième dit: 'TPS, la transparence n'est pas le fort
du gouvernement Bourassa." (22 h 50)
Ce gouvernement, même s'il avait très peu de projets de loi
importants à présenter durant cette session, a quand même
très mal organisé
ses travaux parlementaires. On ne nous fera pas croire, M. le
Président, que 20 heures à peine en commission parlementaire,
c'est excessif. Il eût été normal de passer des douzaines
d'heures sur ce projet de loi, parce que c'est un projet de loi qui a
provoqué beaucoup, beaucoup de résistance dans la population. On
dirait que ce Parti libéral, ce parti gouvernemental a perdu contact
avec la population. On dirait qu'ils ne se rendent pas compte qu'il y a
plusieurs groupements qui voulaient venir nous rencontrer. Ils ont finalement
cédé devant les pressions de leur groupe, les jeunes
libéraux, lors du conseil général, et les pressions
considérables de l'Opposition avec la Coalition pour le livre, et ils
ont reculé. Le ministre des Finances a reculé. Ils ont fait une
exception. Alors, nous voulions, en commission parlementaire, recevoir d'autres
groupes qui auraient pu faire valoir, surtout dans l'industrie culturelle, que
l'exception faite pour le livre était applicable aussi aux
périodiques ou encore aux journaux.
Le journal Le Droit publiait tout récemment une annonce
qui disait: 'TPS: en 1991, ce journal sera taxable pour la première
fois." C'est ça que ce gouvernement n'a pas l'air de comprendre. C'est
un changement brutal, radical. Il y a un tas de choses qui n'avaient jamais
été taxées dans toute l'histoire du Québec: les
périodiques, les livres - bon, le gouvernement a reculé sur les
livres - les fournitures de classe - ça n'avait jamais été
taxé - ou encore des choses qui, depuis au-delà de 10 ans,
n'étaient plus taxées: les vêtements, les meubles, les
chaussures. Tout d'un coup, subitement, on dit: Tant pis! Ça n'a pas
été taxé, les gens ont pris l'habitude de ne pas payer de
taxes, mais nous, là, on a toute la connaissance, on a toute la science,
on sait que c'est bon pour eux autres, on sait que c'est bon pour le
Trésor public: nous mettons des taxes partout, mur à mur.
Alors, il y a des groupes, l'Association des manufacturiers de meubles,
l'Association des manufacturiers de chaussures, l'Association des
manufacturiers de vêtements, le Conseil du commerce du Québec, il
y a plusieurs groupements qui voulaient venir poser des questions, venir
exposer aussi à ce gouvernement insensible les répercussions que
cette taxe-là va avoir sur l'économie, le nombre de
chômeurs que ça va créer. Mais ce gouvernement-là
dit: Non, 20 heures de discussions, c'est assez, on procède. Remarquez
qu'ils n'ont pas grand-chose au menu, M. le Président. Comme menu
législatif, c'est mince. Mais ils sont pressés - je ne sais pas
pourquoi, on verra ça la semaine prochaine - pour aller se cacher,
encore.
Maintenant, le leader et d'autres disent: Tout le monde est d'accord.
Mais c'est curieux que personne de ce côté-là de la Chambre
n'ait parlé d'un homme qu'ils respectaient beaucoup, il n'y a pas si
longtemps, le député de Montmorency, ministre du Travail,
ministre du Revenu, qui était assis en avant, à une des
banquettes d'en avant, qui était une étoile montante dans le
gouvernement du Parti libéral. À bon droit, on reconnaissait son
talent. S'il y a quelqu'un, dans ce gouvernement-là, qui connaissait la
fiscalité, c'est lui; personne d'autre, sûrement pas le
député d'Abitibi-Est qui est devenu ministre du Revenu...
Des voix: Non, non, sûrement pas.
M. Lazure: ...sûrement pas le député de
Sainte-Anne, ministre du Travail.
Des voix: Non, non.
M. Léonard: Ses amendements n'étaient même
pas prêts.
M. Lazure: M. le Président, le député de
Montmorency, ex-ministre du Revenu, le seul qui connaissait cette taxe,
qu'est-ce qu'il en a dit, avant de démissionner en protestant contre
l'action de son gouvernement? Il a voulu se dissocier de son gouvernement. Il a
eu le courage de démissionner sur une question de principe. Et c'est
rare que ça arrive en politique, ça. Il faut lever son chapeau
devant un tel courage. Alors, il a dit ceci: A mon humble avis, la TPS ne sera
pas simple, équitable, neutre ou stimulante pour l'économie.
À mon avis, elle sera complexe, injuste, chère et dure pour
l'économie, surtout en cette période de récession. Je me
suis toujours battu pour une meilleure justice fiscale et pour redonner au
contribuable ordinaire confiance dans le système fiscal. Et il continue,
je pourrais en citer longuement, mais juste un dernier paragraphe, M. le
Président, sur l'entente, la fameuse harmonisation.
Le député de Verdun, qui ne connaît pas du tout le
problème, dit: Ça va sauver 50 000 000 $ au Québec. Ce
n'est pas vrai. Lui, le député de Montmorency, il connaissait
ça. Il dit: De plus, l'entente intervenue afin de confier
l'administration de la TPS fédérale à Revenu Québec
constitue, en pratique, un recul important sur le plan de l'autonomie fiscale.
Par exemple, dans le cas d'une entreprise qui veut utiliser la langue anglaise,
l'entente signée par le gouvernement du Québec avec Ottawa va
donner priorité à la Loi sur les langues officielles, la loi du
bilinguisme de M. Trudeau. La loi 101, il faudra la mettre de
côté.
M. le Président, non seulement ce gouvernement se cache,
camoufle, mais en plus il ne dit pas la vérité. C'est une taxe
injuste qui fait mal aux particuliers et qui avantage les entreprises. C'est
ça que le député de Montmorency a fait ressortir. Les bas
salariés souffriront plus des effets de la TPS. Tout le monde le dit,
ça. C'est un gouvernement qui n'est pas sensible au sort du particulier.
Le leader adjoint du gouvernement est beaucoup plus sensible aux petits
problèmes
ou aux gros problèmes des entreprises qu'à ceux des
particuliers.
M. le Président, c'est un gouvernement qui a perdu contact avec
la population, qui est déconnecté, qui est déphasé.
Il a abdiqué son autonomie fiscale. Au moment où, par exemple,
à la commission Bélanger-Campeau, tout le monde au Québec
dit: II faut rapatrier le plus de pouvoirs possible, même ceux qui sont
encore fédéralistes, au moment où tout le monde dit
ça, ce gouvernement libéral, lui, des pouvoirs que le
Québec avait depuis plusieurs années, il s'en va les remettre
à Ottawa. Il est à contre-courant, il est retardataire et, un
jour ou l'autre, il devra rendre compte à la population. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. M. le député de LaFontaine.
M. Jean-Claude Gobé
M. Gobé: Merci, M. le Président. Encore une fois,
ce soir, nous sommes à discuter de ce projet de loi qui apporte la TVQ.
Encore une fois, M. le Président, nous avons devant nous un spectacle,
je dirais, un peu désolant, si ce n'est pitoyable. Bien entendu, je
crois que les téléspectateurs, les citoyens, qui, à cette
heure-ci, nous regardent très nombreux, doivent se demander quel genre
de technique, quel genre de stratégie ou quel genre d'esprit de
responsabilité les gens de l'Opposition peuvent avoir, M. le
Président.
J'ai écouté le député de La Prairie. Le
député de La Prairie disait: Un gouvernement qui se cache, qui se
camoufle, qui ne dit pas la vérité. M. le Président, notre
gouvernement, bien au contraire, ne se cache pas car, depuis le 30 août,
le ministre des Finances a fait état de ses orientations et de son
intention de s'harmoniser avec la TPS fédérale. Je crois que nous
sommes aujourd'hui, pour encore quelques minutes, le 11 décembre et, du
30 août au 11 décembre, je vois une période de temps assez
longue pour ne pas qu'on puisse dire que nous nous sommes cachés. M. le
Président, nous ne camouflons rien. C'est devant le public, c'est aux
grandes heures d'audience et c'est depuis 22 heures que nous parlons de cette
taxe, 22 h 30, en cette Chambre. Moi-même, personnellement, j'ai eu
l'occasion d'en parler à deux reprises, à différentes
heures de la journée.
M. le Président, nous ne camouflons pas parce que nous aimerions
en parler, de cette taxe, mais nous ne pouvons pas. Depuis 22 heures, M. le
Président, les gens de l'Opposition, en face, n'ont absolument rien
abordé, n'ont abordé aucun article de ce projet de loi. Ils ont
même fait en sorte que nous n'allions pas en commission parlementaire,
alors qu'en commission parlementaire nous aurions pu l'étudier article
par article et recevoir leurs commentaires, s'ils en avaient, et que,
probablement, le ministre aurait été heureux de recevoir des
amendements pour, si c'était possible, bien que j'en doute, croyez-moi,
mais on ne sait jamais, bonifier ce projet de loi. Alors, qu'on ne dise pas, M.
le Président, que nous camouflons. Je crois que l'Opposition, au
contraire, fait en sorte que nous ne puissions pas débattre devant le
public ce projet de loi là article par article. C'est ça qui est
désolant, M. le Président.
Le député de La Prairie, encore, toujours lui, M. le
Président, l'ineffable député de La Prairie, disait: Un
gouvernement qui ne dit pas la vérité. Mais oui, nous la disons,
M. le Président, la vérité. Nous la disons depuis 1985.
Nous la disons depuis que nous sommes arrivés au pouvoir, M. le
Président. Nous disons à la population que, en 1975, lorsque
l'ancien gouvernement est arrivé, il y avait 2 500 000 000 $ de dettes
au Québec et, lorsqu'il est parti, en 1985, lorsque la population l'a
renversé, M. le Président, il n'y avait pas loin de 38 000 000
000 $ de dettes accumulées. Nous l'avons dite, la vérité,
c'est eux qui ne l'ont pas dite, M. le Président. (23 heures)
La dette qu'ils ont camouflée, M. le Président: 13 333 $
par travailleur québécois. Voilà ce qu'ils ne nous ont pas
dit, voilà ce qu'ils n'aiment pas qu'on leur dise, M. le
Président. Je crois que le député de La Prairie, avant
d'employer ce genre de qualificatif pour qualifier l'image de notre
gouvernement, devrait certainement repenser ce qu'il dit et faire en sorte
d'avoir peut-être un discours un peu plus, je dirais, responsable envers
la population. Il dit: Personne n'en veut de la TPS; les groupes ne veulent pas
l'avoir. M. le Président, regardez les journaux. Je regarde un
journal... M. Filion, dans Le Soleil: "Harmoniser les TPS offre des
avantages." Voilà, M. le Président. Un autre journal, M.
Gagné: 'TPS provinciale, une bonne décision". Un autre, Le
Soleil encore, M. Giroux: "Plongeon logique dans la TPS." On continue, M.
le Président: La solution québécoise. Malgré ses
limites - je vais vous le lire, c'est M. Juneau - la TPS fédérale
marque un incontestable progrès dans l'évolution du régime
fiscal canadien. Le Québec avait tout intérêt à
ajuster sa taxe sur la valeur de vente sur le modèle d'Ottawa. Il est
allé plus loin. Il a obtenu de percevoir lui-même la TPS
fédérale et sa taxe de vente. C'est une victoire, à moins
que M. Parizeau n'ait préféré que le gouvernement
fédéral collecte sa taxe du Québec.
M. le Président, pour des gens qui n'en veulent pas, pour des
groupes qui sont mécontents, il semble qu'il y ait une certaine
unanimité, M. le Président, dans les journaux, dans les gens qui
font les opinions, dans les édito-riaux. Un autre, M. le
Président, La Tribune, dans le comté du leader adjoint de
l'Opposition, M. Bilodeau...
M. Boulerice: Félicitations...
M. Gobé: Vous pouvez applaudir, M. le député
de Sainte-Marie-Saint-Jacques, vous allez voir qu'en effet ça vaut la
peine d'être applaudi. Bien oui, bien oui. Vous ne l'avez pas lu, vous
n'êtes pas au courant, vous ne regardez pas la population et vous parlez
de choses que vous ignorez, alors je vais vous les lire, comme ça, vous
saurez ce que les gens pensent et ce qu'ils disent.
Une voix:...
M. Gobé: M. Bilodeau dit, M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques: "En tout cas, on doit au moins espérer que
la démagogie du Parti québécois ne trompera personne.
À entendre M. Parizeau, le Québec vient de s'humilier
honteusement. Étrange logique qui voudrait que notre province se ferme
à tout progrès qui porte la marque du fédéral.
Petite politique pitoyable et absurde."
Voilà, M. le Président. Je pourrais citer beaucoup
d'autres journaux, il y en a plein ici, mais je pense qu'il y a des choses
peut-être un peu plus intéressantes à parler que de faire
cette revue de presse aux gens de l'Opposition qui ont fait perdre le temps non
seulement aux parlementaires, mais à l'ensemble de la population et qui
mettent certainement des entreprises québécoises dans une
situation un peu critique. Car vous n'êtes pas sans savoir, et je crois
que la population le sait, que le Québec exporte 40 % de sa production.
Et, avec l'application, l'imposition de la TPS, la taxe du manufacturier
fédéral de 13 % va tomber, ce qui permet à 40 % de la
production québécoise qui est vendue aux États-Unis, qui
est vendue en Europe, qui est vendue au Japon, à travers le monde, M. le
Président, qui permet à cette production d'être plus
compétitive, d'avoir un meilleur prix de vente, donc d'en vendre plus et
ça représente des centaines de milliers d'emplois, M. le
Président. Et, bien entendu, vous allez me dire: II parle de la taxe
fédérale, mais une fois que le fédéral a mis cette
taxe-là afin d'encourager le développement économique,
afin d'encourager nos exportations, nous devions, nous, au Québec, nous
ajuster. Pourquoi nous ajuster, M. le Président, car ça aurait
coûté peut-être 50 000 000 $, 60 000 000 $, 80 000 000 $
à nos commerçants, à nos hommes d'affaires pour collecter
deux taxes? Alors, il était de l'intérêt
général de s'y ajuster. Et, bien entendu, une fois de plus, les
esprits chagrins de l'Opposition s'y sont opposés, bien que, M. le
Président - et c'est là que je trouve ça un peu
irresponsable - ils disent qu'ils n'ont pas eu le temps, qu'ils n'ont pas eu le
temps d'en parler, la Chambre n'a pas siégé assez longtemps, il
n'y a pas de commissions parlementaires. Le 2 décembre, au conseil
général du Parti québécois, M. le Président,
le leader en
Chambre du Parti québécois, le député de
Joliette disait: Elle ne passera pas la TPS, la TVQ, on va la bloquer. Le 2
décembre, M. le Président, avant même qu'on commence
à en discuter en Chambre. C'était prémédité.
Il l'avait dit à la population qu'il ne voulait la placer. Il l'avait
dit qu'il ne voulait pas en discuter. Alors, tout ce qu'ils ont fait, c'est de
faire perdre le temps de l'Assemblée nationale, M. le Président,
un temps très précieux car, bientôt, nous allons arriver
à la fin de cette session. De nombreux projets de loi sont
bloqués à cause de cette tactique dilatoire employée par
le député de La Prairie et par tous ces gens, M. le
Président, qui n'ont d'autre but que de faire de la petite politique,
qui n'ont d'autre but que de gagner des votes.
Je le déplore et c'est dommage parce qu'il y a certainement dans
cette formation politique des gens qui ont du bon sens, des gens qui ont
intérêt à voir le Québec se développer, qui
ont intérêt à voir les emplois se créer dans l'est
de Montréal, et ces gens-là doivent, M. le Président,
subir lourdement les stratégies de leur parti qui leur dit: Vous allez
faire un "filibuster". On va bloquer ça. J'écoutais le ministre
du Revenu tout à l'heure qui en pariait; on assiste à du
marchandage: Tu me donnes un petit bout de route dans mon comté et je ne
ferai pas de "filibuster" sur ta TPS. En tout cas.
M. le Président, ceci étant dit, je dois déplorer,
je dois regretter profondément que nous n'ayons pas eu le temps d'aller
en commission parlementaire discuter de cette loi article par article et, s'il
y avait des irritants qui pouvaient nuire à la population, qui pouvaient
être ennuyeux, il nous aurait fait plaisir, M. le Président, en
commission parlementaire, de les étudier et d'essayer peut-être
d'y apporter des correctifs. Nous n'en avons pas vu comme équipe
gouvernementale, mais les commissions parlementaires sont là pour
ça, pour faire en sorte de bonifier les projets de loi. L'Opposition
nous a empêchés de faire notre travail de commission
parlementaire, et je crois, M. le Président, qu'elle devra en porter la
responsabilité, car c'est là un des manquements au processus
démocratique de l'adoption d'une loi.
M. le Président, je vois le critique officiel de l'Opposition qui
s'exclame, mais ça fait 22 heures qu'il nous fait perdre notre temps. Je
crois qu'il sait ce dont il parle et je crois, M. le Président, que la
population jugera dans l'avenir le comportement que ces gens-là ont eu
dans ce débat.
Une voix: 20 heures, 25 heures, 22 heures.
Le Vice-Président (m.
bissonnet): merci, m. le
député. le prochain intervenant sur cette motion, m. le
député de pointe-aux-trembles. m. le député.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, on a beau chercher, on ne
peut pas trouver de raisons logiques pour lesquelles le gouvernement qui est
déjà en perte de vitesse va s'en aller encore plus en perte de
vitesse avec une taxe qui est impopulaire, régressive, antisociale et
contraire aux intérêts bien compris de l'économie du
Québec. Rappelons-nous, M. le Président, que la seule raison pour
laquelle le Parti québécois n'est pas au pouvoir, les sondages le
montrent, c'est que le gouvernement ne se décide pas à
déclencher une élection. Si elle avait lieu demain matin, cette
élection, M. le Président, nous serions près d'une
centaine et, de l'autre côté, ils seraient moins de deux
douzaines.
M. le Président, on nous arrive avec une taxe qui est contraire
aux intérêts du Québec et, dans ce sens-là, le
député de Montmorency a bien fait d'être fidèle
à ses principes et de ne pas accepter ceux qui, comme le
président du Conseil du trésor, se comportent vis-à-vis
d'Ottawa comme Adélard Godbout l'a fait de 1939 à 1944. À
l'élection d'après, le peuple québécois a
rejeté cet homme qui aliénait nos droits par échange de
lettres, M. le Président.
Il y a des secteurs de l'industrie...
M. le Président, est-ce qu'il y a moyen que la basse-cour
libérale baisse un peu le ton parce que c'est moi qui ai le droit de
parole?
Il y a des secteurs entiers de l'économie du Québec, M. le
Président, qui vont être lourdement frappés par cette taxe.
Je pense au vêtement et, dans le nord-est de 111e de Montréal -
j'en profite pendant que le président du Conseil du trésor est
là, qu'il n'est pas à faire de la voile dans Vaudreuil-Soulanges,
pour lui dire que cette taxe va nuire aux 41 000 personnes qui travaillent dans
le vêtement. En clair, M. le Président, j'explique pour que le
député de Vaudreuil comprenne: sur le vêtement, il n'y
avait aucune taxe et, à partir du 1er janvier, son gouvernement en met
une de 8 % et le gouvernement fédéral, une de 7 %, donc 15,56 %
de plus sur le vêtement; c'est 41 000 emplois qui vont être
lourdement touchés, M. le Président. (23 h 10)
Pourquoi y a-t-il besoin de mettre une taxe au Québec, alors que
le Parti québécois au pouvoir avait exempté le
vêtement? On nous dit que c'est parce qu'Ottawa le fait. Mais quand 50
députés ont demandé, par pétition, de l'enlever sur
le livre, quand la ministre des Affaires culturelles s'est tenue debout, elle,
et a défendu les intérêts du secteur culturel à
l'égard de la taxe sur le livre, quand, au conseil général
du Parti libéral, M. le Président, il s'est trouvé du
monde pour dire au ministre des Finances: Est-ce que la société
distincte, c'est juste une question de caisse enregistreuse... et quand on se
remet au conseil général, M. le Président, il est
révélateur qu'à la seule place, au Québec,
où les gens ont voté, après avoir écouté les
élucubra-tions du ministre des Finances, eh bien, il s'est fait battre.
C'est pareil dans la'population.
Faites une élection, chers amis de l'autre côté, et
on verra ce que le monde pense d'une taxe où quelqu'un qui gagne 60 000
$ par année, sur un achat de 15 000 $, une voiture, par. exemple, paie
exactement la même taxe que quelqu'un qui gagne 30 000 $ par
année. C'est une taxe qui est régressive comme la taxe
foncière scolaire, M. le Président, qui a coûté des
sièges à de nombreux commissaires d'écoles libéraux
qui sont allés au front en gladiateurs, en avant pour sauver le Parti
libéral, à Québec, qui est allé chercher 300 000
000 $ dans les commissions scolaires.
M. le Président, les hebdos régionaux vont se voir charger
la taxe de vente parce qu'il y a un génie du ministère du Revenu,
presque aussi génial que le ministre du Revenu, que je n'avais vu
à l'oeuvre et que j'ai vu en commission parlementaire cette semaine ce
qui me faisait dire, M. le Président, que c'était le
Bérurier du gouvernement libéral, le ministre du Revenu, donc, le
ministre du Revenu, son ministère a décidé que - vous
savez, la loi parie, M. le Président - que les journaux et
périodiques vendus sont taxés puisque c'est une taxe de
vente.
Eh bien, nos journaux de quartier, nos journaux locaux, nos journaux
régionaux, il y a un génie qui a décidé que
l'imprimeur les vend à l'éditeur et que l'éditeur nous les
donne. Ils vont payer 4 000 000 $ de taxe de vente et ils sont en colère
contre le gouvernement libéral. Et Dieu sait qu'il y en a beaucoup
d'entre eux qui sont presque aussi rouges que les maires de
municipalités que vous avez "clenchées" également avec
votre désir de taxer tout le monde. Et, M. le Président, je sais
que le président du Conseil du trésor et d'autres aiment beaucoup
- et ça m'étonne, ce soir, q. 'il n'en ait pas parié -
dire qu'on a coupé les enseignants en 1982. Et je pense qu'à
l'époque on s'est attaqué à des gens qui étaient
nos meilleurs appuis.
Eh bien, dans les municipalités, dans les commissions scolaires
et, maintenant, dans les hebdos régionaux où vous allez taxer au
point que certains vont fermer, là, vous vous faites des ennemis parmi
votre clientèle naturelle. Et ce qu'on peut vous dire nous autres, avec
notre expérience, c'est qu'il y a un danger de s'asseoir sur une branche
et de la scier, M. le Président. À un moment donné, on
tombe quand on fait ça. C'est une taxe régressive qui va nuire
aux meubles et aux vêtements. Ces deux secteurs, M. le Président,
c'est au-delà de 100 000 emplois au Québec. Et on est en
récession, même le gouvernement le dit. S'ils le disent, ça
doit être vrai parce qu'ils l'ont nié pendant des mois.
Qu'est-ce qui arrive en période de récession, M. le
Président? C'est que les ménages se mettent à consommer
moins, ce qui contribue au
ralentissement économique. Et là, de plein fouet, le 1er
janvier... Et les libéraux qui participent au crime nous disent qu'ils
n'en tirent aucun profit. Là, on se dit: II y a quelque chose qui ne va
pas dans la tête, s'il y a juste des inconvénients et que
ça ne rapporte même pas plus qu'avant. Donc, au 1er janvier, M. le
Président, le meuble québécois et le vêtement
québécois vont être taxés de zéro que
c'était de taxes à 15,56 %, mais le taux, par exemple, a
baissé d'à peu près 4 % parce que, là, la taxe
fédérale qu'on a abolie s'appliquait.
Avez-vous remarqué, M. le Président, que, dans ce
système-là, ce qui est bon pour l'Ontario est bon pour le Canada?
Le seul secteur qui va profiter de ce qu'on fait là et du transfert de
fiscalité de 500 000 000 $ qui va des entreprises aux particuliers au
Québec, le seul secteur qui est destiné à gagner, c'est
l'Ontario avec son industrie automobile. Comme la concurrence est vive et qu'il
est vrai que les coûts vont diminuer, ça va être transmis
aux consommateurs et ça, ça va les aider. C'est le gouvernement
qu'on a, M. le Président: des taxes qui favorisent l'Ontario et
l'automobile au détriment des fabricants de meubles, des marchands de
meubles, des fabricants de vêtements et des marchands de vêtements
du Québec.
En terminant, M. le Président, j'implore le gouvernement, pour
une fois, de perdre son syndrome du deuxième mandat, d'écouter un
peu ce que dit la population et de nous éviter cette taxe qui arrive au
pire moment. Le chef de l'Opposition a dit: Attendez donc six mois,
l'économie ralentit déjà et, par ces taxes
régressives, on va la ralentir encore davantage. Et, en terminant, M. le
Président, mieux vaut être un producteur ontarien d'automobiles en
santé qu'une personne qui travaille dans le vêtement dans le nord
de Montréal ou ailleurs dans l'industrie du meuble où les
politiques libérales vont nous amener plus de récession, plus de
chômage et plus de problèmes économiques avec une taxation
injuste. Il est dommage que le conseil général du Parti
libéral n'ait pas pris l'ensemble du problème puis ramené
tous les ministres à la raison pour leur dire que ce n'est pas le temps
de faire ça, dans la situation actuelle de l'économie au
Québec.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Pointe-aux-Trembles. Sur la même motion, M. le
député de Louis-Hébert? M. le député de
Louis-Hébert.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: Merci, M. le Président. M. le Président,
vous avez entendu comme moi ce que l'Opposition vient de nous servir comme
argumentation. Et ce que vous avez entendu est probablement, comme
moi-même, de nature à vous décourager passablement. Mais
vous auriez dû être en commission parlementaire et souffrir les 20
heures qu'on a eu à souffrir, avec des motions dilatoires plus frivoles
les unes que les autres, une après l'autre, on n'a pas touché au
fond du projet de loi. M. le Président, ce que je pose comme question
à cette Assemblée, c'est: Que doit faire un gouvernement devant
une attitude semblable, qui n'est pas improvisée, mais planifiée,
annoncée clairement, dite d'avance, et à l'effet suivant: On va
vous bloquer votre projet de loi, on va prendre tous les moyens, on va prendre
toutes les motions qui sont à notre disposition, on va sous-amender les
amendements, le temps va passer, on va se retrouver à Noël, on va
se retrouver au 31 décembre, puis votre loi sur la TVQ n'aura pas
passé. Qu'est-ce qu'un gouvernement responsable doit faire? Faire mener
la minorité, dire à la minorité: C'est vous qui avez
raison, c'est vous qui allez conduire; même si la population nous a
donné le mandat de conduire, dire: C'est vous qui allez décider
parce qu'on reconnaît que vous êtes plus fins que nous, que la
population s'est trompée en nous donnant le pouvoir, elle aurait
dû vous le donner, puis on va s'écraser, et c'est vous qui allez
mener? Bien, je regrette beaucoup, on est plus responsables que ça.
Notre responsabilité est de prendre les mesures nécessaires pour
faire adopter un projet de loi qui doit être adopté, parce que
c'est un bon projet de loi.
L'Opposition essaie de nous faire accroire que c'est un projet de loi
qui va mettre l'économie du Québec à terre. Ce n'est tout
simplement pas vrai, simplement pas vrai. Deux exemples, M. le
Président, très brièvement. Une lettre très
récente, du 3 décembre, signée par le président du
Conseil du patronat. Il écrit au ministre des Finances. Que dit-il? M.
le Président, il dit ce qui suit - et je le lis textuellement.
Écoutez, ça va peut-être vous instruire, vous n'allez
peut-être pas retenir grand-chose, mais le petit peu que vous retiendrez,
c'est mieux que ce que vous avez dans le moment, je vous en passe un papier.
Que dit le président? Il dit: Nous tenons à vous féliciter
- il parle au ministre des Finances du Québec - d'avoir
négocié avec le gouvernement fédéral une entente
donnant au gouvernement du Québec la responsabilité de
l'administration de la TPS sur son territoire, tout en harmonisant
substantiellement les régimes fédéral et provincial de
taxe à la consommation. Paragraphe suivant: Vous-même, vos
fonctionnaires et le gouvernement du Québec avez mené très
bien ce dossier, dit-il. Nous sommes convaincus, comme vous, que la
décision du gouvernement est dans le meilleur intérêt des
entreprises et de l'économie québécoise. (23 h 20)
Est-ce que ça contredit, à votre goût, ce qu'on
vient d'entendre, il y a deux minutes, du député de
Pointe-aux-Trembles? Est-ce que lui, il connaît mieux l'économie
du Québec que le président du Conseil du patronat? Poser la
question, me direz-vous, c'est y répondre. Mais, autre
côté de la médaille, on dira: Oui, ça, c'est des
chefs d'entreprise, ils parlent pour leur poche, ils parlent pour leur
portefeuille; ils ne s'occupent pas du consommateur, ça ne les
intéresse pas. Ce qui les intéresse, c'est de faire des profits
et de mettre de l'argent dans leur poche. Détrompez-vous, M. le
Président, détrompez-vous illico parce que j'ai aussi une lettre,
qui m'est adressée par la présidente de l'Association des
consommateurs du Québec, en date du 5 décembre 1990, Mme Nicole
Laliberté. Que dit-elle? Je vous en instruis, M. le Président. Je
vous en instruis. "L'Association des consommateurs du Québec s'est
penchée sur les effets - Mme Laliberté qui parle - des mesures
fiscales pour l'ensemble des consommateurs. Comme dans le cas de notre position
sur la TPS fédérale, sur la base des critères
d'efficacité et d'équité - et d'équité -
nous sommes d'accord avec la modernisation du régime actuel de la taxe
de vente québécoise par une taxe à la consommation
à un taux plus faible s'appliquant sur une assiette plus large." La
présidente de l'Association des consommateurs qui parle. "C'est-u" assez
fort? Elle continue, elle va plus loin que ça.
Elle dit: "Nous sommes d'accord aussi avec l'élargissement des
crédits d'impôt pour taxe de vente en fonction du revenu des
contribuables et du nombre de dépendants." Merci beaucoup, madame. Elle
dit, en plus, M. le Président: "Nous sommes d'accord avec le principe
d'harmonisation de la TPS fédérale et de la taxe de vente
provinciale dans son administration et son application." Elle continue,
finalement, et c'est important: "Nous avons pu constater - dit-elle - par
exemple, qu'un couple - écoutez bien ça, ça va vous
instruire un peu - à double revenu totalisant 30 000 $ et ayant deux
enfants verra son fardeau fiscal diminuer de 1125 $ en 1992, suite à la
réforme des TPS fédérale et provinciale. Par ailleurs -
dit-elle - le fardeau fiscal d'un couple à double revenu totalisant 35
000 $ diminuera de 464 $."
Avez-vous besoin, M. le Président, d'arguments
supplémentaires devant un entêtement tel que celui dont fait
preuve actuellement l'Opposition? La meilleure preuve de cet
entêtement-là, M. le Président...
Il y a peut-être des gens qui nous écoutent encore à
la télévision, là, ne vous couchez pas tout de suite parce
que ces gens-là vont nous garder debout jusqu'à 4 heures du
matin, c'est écrit dans le ciel. À 4 heures, ils vont
probablement être assez fatigués et, à ce moment-là,
ils vont penser à nous envoyer nous coucher. Alors, c'est ça, M.
le Président. C'est comme ça que les choses vont se passer, on le
sait d'avance, on le savait en commission parlementaire, on le sait maintenant,
on ne se fait pas d'illusion, on sait que c'est comme ça que ça
marche. On se dit: Vous voulez jouer cette "game"-là? C'est votre choix,
on va la jouer à deux. Vous avez des armes, on en a aussi. Vous vous
servez de vos armes, on va riposter avec les nôtres. Ce n'est pas
correct, ça? Moi, ça me paraît parfaitement normal de jouer
ce jeu-là. Vous commencez la guerre, on va la jouer, nous autres aussi.
C'est comme ça que ça marche. Tu tires, tu prends le risque que
je tire aussi. Tu penses que tu as un bon moyen de m'énerver, j'en ai un
qui va encore t'agacer pas mal plus. Et c'est ça qu'on fait, on ne s'en
cache pas.
Si vous aviez voulu qu'on prenne l'article 1, qu'on le regarde
sérieusement, qu'on en discute, qu'on examine la situation et qu'on
passe aux autres articles, qu'on se rende au 64e article dans un délai
raisonnable, parfait, on est capables de faire ça. Mais ce qu'on
n'acceptera pas, par exemple, c'est que c'est vous autres qui décidiez
ce que le gouvernement va faire. Ça, ce n'est pas demain la veille,
hein! Ce n'est pas comme ça que ça va se passer encore. Parce que
ça ne marcherait pas non plus. Alors, vous ne seriez pas contents parce
que vous aimez ça, d'après ce que je peux voir, être dans
l'Opposition, ça fait qu'on veut vous garder là un petit bout de
temps. Vous n'avez pas, dans le moment, à prendre des
responsabilités pour lesquelles vous n'êtes pas prêts.
Ça fait qu'il ne faudrait pas mettre la charrue devant les boeufs.
Alors, tout simplement, le gouvernement prend la responsabilité,
agit en temps et lieu, en étant sûr qu'en faisant ça il y
va du bien de la population. Quand il y aura quelqu'un de l'autre
côté, M. le Président, malgré leurs ricanements,
malgré leurs sobriquets, quand il y aura quelqu'un qui me sortira une
lettre, M. le Président, de l'Association des consommateurs,
signée par Mme Nicole Laliberté, et qu'il m'en lira un texte qui
condamne d'une façon aussi claire la TPS et la TVQ que Mme
Laliberté l'approuve, on pourra se parler. En attendant, tenez-vous
tranquilles et regardez ce qui se passe. Quand vous aurez des lettres du
Conseil du patronat, comme je viens de vous en lire une, qui vous donnera
autant raison que cette lettre-là nous donne raison, on pourra vous
écouter avec une certaine attention. Mais c'est loin d'être le
cas. Vous élucubrez, de toute façon. Vous essayez toutes sortes
d'exemples qui ne tiennent pas debout.
Mais quand on fait une analyse globale de la situation, comme le
président du Conseil du patronat l'a faite, comme la présidente
de l'Association des consommateurs l'a faite, c'est quoi la conclusion de
ça? C'est que la TPS et la TVQ sont de bonnes mesures pour
l'économie québécoise, primo, et, non seulement ça,
ce sont de bonnes mesures pour le consommateur québécois.
Qu'est-ce qu'on veut de plus? À partir de là, on passe la loi.
C'est ça qu'on va faire, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Louis-Hébert. S'il vous plaît! S'il vous
plaît, il a terminé son allocution. Mme la députée
de Terrebonne, sur la motion.
Mme Jocelyne Caron
Mme Caron: Merci, M. le Président. Dix minutes pour
exprimer ma frustration, mon amertume et mon indignation devant cette motion de
clôture, c'est vraiment très court, M. le Président.
Surtout après l'intervention du député de
Louis-Hébert qui, le moins qu'on puisse dire, n'a pas été
très présent à cette commission parlementaire, M. le
Président. S'il avait été présent, il aurait
peut-être entendu certains commentaires, justement, de la
Fédération des ACEF, la Fédération des associations
coopératives d'économie familiale, qui ne regroupe pas que 3000
membres, comme l'Association des consommateurs du Québec, mais qui
regroupe 100 000 membres, 11 ACEF partout dans les régions, et qui s'est
opposée vertement à ce projet de loi que nous avons devant nous,
M. le Président, et qui l'a dénoncé très
fortement.
M. le Président, j'ai suivi avec assiduité le travail en
commission parlementaire, bien sûr, parce que ce sujet
m'intéressait particulièrement à titre de porte-parole de
l'Opposition officielle en matière de protection du consommateur et, si
les députés ministériels ont eu l'impression de perdre
leur temps, c'est qu'ils n'ont pas participé au débat, parce que
pour ce qui est des députés de l'Opposition, nous n'avons
aucunement perdu notre temps. Nous avons présenté des motions et,
à chaque motion que nous avons présentée, nous avons
discuté du fond du projet de loi 89. Nous avons donné
l'argumentation de tous ceux et celles qui s'y opposaient, M. le
Président, et ils sont nombreux. Ce que l'Opposition a tenté de
faire, M. le Président, c'est d'obliger le ministre du Revenu à
bien faire son travail.
M. Boulerice: M. le Président, question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
Vous avez raison. Je demanderais l'ordre, s'il vous plaît, en
arrière, à ma droite. S'il vous plaît! Je vous demanderais
votre collaboration. Article 32... S'il vous plaît! Madame, si vous
voulez poursuivre, je m'excuse de vous avoir dérangée.
Mme Caron: M. le Président, ce que l'Opposition a
tenté de faire, c'est d'obliger le ministre du Revenu à faire son
travail, le travail qu'il n'avait pas fait, c'est-à-dire à
prendre ses responsabilités et à consulter les regroupements. On
s'indigne, de l'autre côté, que leur travail aurait pu prendre 31
jours pour étudier ce projet de loi là - 31 jours! - alors que,
du côté fédéral, on prend 3 ans pour le même
projet et alors que le ministre lui-même nous a dit constamment, et il
l'a répété ce soir en cette Chambre, que c'était un
événement historique, qu'il n'y avait jamais eu des changements
aussi importants au niveau de la fiscalité. 31 jours, c'était
immense! Bien oui, M. le Président, on a arrêté
après 23 heures de débat. C'est un événement
historique, effectivement. Lorsqu'un ministre du Revenu décide de
démissionner parce qu'il est contre un projet de loi, oui, c'est un
événement historique et il a eu le courage de le faire, M. le
Président, probablement parce que c'était le seul fiscaliste du
côté du gouvernement et qu'il avait compris le projet de loi.
M. le Président, l'Opposition a eu aussi à subir, durant
ces débats en commission parlementaire, l'attitude désinvolte du
ministre du Revenu et je vous avoue que je suis très polie quand
j'utilise ces termes...
Des voix: Ah oui!
Mme Caron: ...parce que, si je donnais la véritable
attitude du ministre du Revenu tout au long de la commission parlementaire, je
vous avoue que j'aurais des propos sûrement antiparlementaires.
Des voix: Bravo! (23 h 30)
Mme Caron: Et si vous voulez une description exacte de son
attitude, je vous réfère aux galées de la commission,
parce que dans une de mes interventions je l'ai décrite
complètement, M. le Président. En plus, nous avons dû subir
l'ignorance des procédures parlementaires, des règles, du
règlement du ministre du Revenu parce qu'il ne le connaissait
aucunement. Nous avons dû, à de nombreuses reprises, expliquer le
règlement au ministre du Revenu. Nous avons même eu l'affront de
nous retrouver devant un ministre du Revenu qui n'avait même pas en sa
possession les amendements. On s'est targué, de l'autre
côté, qu'on exemptait le livre. Ça fait déjà
plusieurs jours qu'on nous a parlé de cette exemption-là. Eh
bien, M. le Président, on n'avait même pas encore, à la fin
des délibérations, hier, à 18 h 20, les amendements pour
l'exemption du livre. Probablement qu'ils étaient commandés au
ministre des Finances, parce que ce n'est pas évidemment le ministre du
Revenu qui fait ça. Ça devait être commandé au
ministre des Finances qui, lui, les avaient commandés à quelqu'un
d'autre. Et le ministre nous a avoué qu'il n'avait même pas lu les
amendements et c'est lui qu'on nous présente comme ministre responsable
de ce projet de loi là, M. le Président.
Ce que l'Opposition a demandé, c'était d'entendre
l'Association des économistes du Québec, parce qu'il y avait
plusieurs économistes qui ne partageaient pas le même avis sur ce
projet de loi là, et nous voulions entendre et les
pour, et les contre. J'avais même cité six
économistes au ministre du Revenu, Pierre Fortin, Alain Paquet, Yves
Rabeau, Diane Bellemare, Yves Létourneau et Clément Gignac, six
qui partageaient des opinions différentes et qu'il aurait
été important d'entendre. Nous voulions aussi, bien sûr, la
Fédération des ACEF. Je vous en ai parlé tantôt, M.
le Président.
L'Association des consommateurs, qui regroupe 3000 membres, avait
appuyé le principe, mais ce que le député de
Louis-Hébert a oublié de nous dire, c'est qu'elle avait
demandé trois recommandations et que son appui était aussi
assorti de trois recommandations, et ces trois recommandations-là ont
été refusées par le ministre du Revenu; les trois, une
après l'autre, M. le Président.
Nous voulions entendre le Mouvement Desjardins. Nous avions même
proposé d'entendre M. Alban D'Amours, ancien sous-ministre du Revenu,
qui avait sûrement les compétences pour nous parler de ce projet
de loi là. Nous voulions, bien sûr, entendre les manufacturiers du
vêtement et la Corporation des marchands de meubles qui, eux,
contrairement à ce que nous a dit le député de LaFontaine,
sont très inquiets au niveau des exportations et ne se sentent
aucunement favorisés par le projet de loi 89, bien loin delà.
Nous voulions également entendre les commerçants en
détail qui, eux aussi, avaient dénoncé en
conférence de presse le projet de loi, parce qu'ils nous disaient qu'ils
n'étaient pas prêts à l'appliquer techniquement. Ils ne
sont pas prêts à l'appliquer. Et, nous, nous le votons, sans
même l'étudier.
M. le Président, j'avais même fait une consultation dans
mon comté, auprès des citoyens de mon comté, et je vous
avoue que les gens n'étaient aucunement d'accord avec le projet de loi.
Les réponses que j'ai eues, ce n'était absolument pas ce qu'on
entend de l'autre côté de la Chambre. Le ministre nous a
avoué clairement, en commission parlementaire - et dans ma prochaine
intervention, sur la troisième lecture, je citerai le ministre - que la
classe moyenne, par le projet de loi 89, serait pénalisée. Il l'a
avoué, M. le Président. Pour ce qui est des plus démunis,
on nous parle beaucoup des crédits d'impôt foncier, sauf qu'on
oublie toujours de dire que plus de 60 % des plus démunis ne font
même pas de déclaration de revenu, donc Ils n'auront pas les
crédits d'impôt foncier. Ça, on ne le dit jamais, de
l'autre côté de la Chambre.
Ce qu'on oublie aussi de dire, c'est que ceux et celles qui
étaient d'accord avec le principe de l'harmonisation ont souvent
mentionné que ce n'était pas le bon moment pour le faire, que
nous étions en pleine récession, avec plus de 87 000
chômeurs de plus depuis un an - et je vais parier de ma région, la
région Lanaudière et la région Laurentides, puisque mon
comté touche au deux, 13,5 % de chômage et 13 % de chômage -
que ce n'était pas le moment de présenter un tel projet de
loi.
M. le Président, durant tout le travail en commission
parlementaire, nous avons dû subir un ministre qui n'écoutait
aucunement les revendications de l'Opposition et qui n'écoutait
aucunement les revendications de tous les groupes qui nous avaient
demandé de prendre leur défense. L'Opposition n'a pas fait
ça de son propre chef, M. le Président. Et, aujourd'hui, on nous
met une motion de clôture pour nous faire taire. Oui, on va pouvoir nous
faire taire d'ici quelques heures, mais on ne pourra pas faire taire la
population dans les années à venir. Merci, M. le
Président.
Le Président: Je cède maintenant la parole à
M. le député de Shefford.
M. Roger Paré
M. Paré: Merci, M. le Président. Moi aussi, je vais
prendre quelques minutes pour dénoncer, non pas le fond - on y reviendra
en troisième lecture - mais la façon de faire de ce gouvernement,
spécialement avec un projet de loi comme celui-là. Parce que de
quoi est-on en train de parler ici, ce soir? Du projet de loi 89, c'est la
fameuse TVQ. Ça, ce n'est pas une émission de
télévision, c'est des taxes, encore une fois, qu'on va imposer
aux Québécois.
Depuis un an, les Québécois ont vu leur fardeau fiscal,
par les taxes, par les impôts, par les permis, augmenter
déjà de plus de 1 000 000 000 $ et ce qu'on est en train de
faire, on s'en vient leur dire: À partir du 1er janvier prochain, comme
cadeau du Jour de l'an, Eh! bien, on va aller chercher 362 000 000 $ de plus
dans vos poches. C'est ça qu'on est en train de dire. Mais ce qu'on est
en train de faire, ici, à l'Assemblée nationale, ce soir, c'est
de dénoncer la guillotine, parce que le gouvernement veut nous
empêcher d'en parler, veut nous empêcher de le dire aux citoyens et
aux citoyennes du Québec qui vont devoir payer ces impôts, ces
taxes en surplus.
Si on reculait un peu dans le temps pour voir comment ce gouvernement a
agi d'une façon presque inqualifiable, tellement c'est immoral et
incorrect. La décision de cette taxe, elle est prise depuis le printemps
dernier et, probablement, qu'elle est prise depuis l'automne dernier. Ça
fait une année, parce qu'il ne faut jamais oublier que la
préparation du budget, ça se fait à l'automne, même
si c'est annoncé au printemps. Ça veut dire qu'il y a une
année, ce gouvernement avait déjà pris la décision
de ce qu'on est en train de voter ici. Il l'a annoncé d'une façon
hypocrite et cachée dans le budget, parce que le ministre avait
calculé les gains, mais il ne l'avait pas écrit et il ne l'avait
pas dit dans son discours sur le budget. On n'était pas capable de
percevoir cela, c'était caché. C'est une façon
inacceptable d'agir, par rapport non pas à
l'Assemblée nationale, mais par rapport à la population du
Québec.
Donc, on avait pris la décision il y a probablement une
année, lorsqu'on a préparé le budget. Dans le budget, on a
comptabilisé les gains dont on parle ici, ce soir, mais on ne l'a pas
dit. On nous a annoncé cela à la fin du mois d'août durant
la crise amérindienne, quand on a été convoqué
d'urgence ici, encore une fois d'une façon hypocrite,
antidémocratique et totalement inacceptable. On nous a amené
ça alors qu'on était convoqué seulement pour deux jours -
on s'amenait pour parler complètement d'autre chose - et non pas dans un
projet de loi, mais dans une déclaration ministérielle. Notre
beau "smart" de ministre des Finances s'est levé et nous a lu une
déclaration ministérielle pour nous annoncer la bonne nouvelle:
362 000 000 $ de plus que les Québécois vont devoir payer! On a
fait ça au mois d'août.
Et, là, ça prenait une loi. Il est arrivé quoi? Le
15 novembre dernier seulement, le gouvernement a déposé le projet
de loi. Pourquoi le 15 novembre? Pourquoi pas avant, puisqu'on siégeait
depuis le mois d'octobre? Si le gouvernement avait eu la volonté de nous
permettre d'en discuter convenablement, d'une façon ouverte et claire,
il n'avait seulement qu'à déposer le projet de loi au
début du mois d'octobre et à nous faire siéger depuis le
mois d'octobre, parce que vous vous rappellerez, M. le Président, qu'il
y a des journées où on devait siéger, ici, à cette
Assemblée, au cours du mois d'octobre et au début du mois de
novembre et qu'on a raccourci nos journées parlementaires, parce qu'il
n'y avait pas de projets de déposés, parce qu'il n'y avait pas
suffisamment d'ouvrage, parce que ce gouvernement ne voulait pas qu'on discute.
Donc, au lieu de terminer à des heures normales où on
siège habituellement, les travaux finissaient plus tôt, parce que
le projet de loi n'était pas déposé. On l'a
déposé à la dernière minute, selon notre
règlement, le 15 novembre seulement. C'est incroyable de vouloir nous
cacher la vérité comme ça. (23 h 40)
Je comprends l'autre côté, parce que c'est gênant de
taxer autant, c'est gênant de taxer d'une façon aussi hypocrite.
Donc, le mieux, c'est de dire: Bien, on va attendre à la toute
dernière minute, on va amener ça à la fin de session,
alors que les députés siègent de soir et de nuit -
effectivement, il est 23 h 40 - pendant que les gens travaillent demain matin,
pour la plupart, donc ils n'écouteront pas ce qu'on est en train de dire
ici, puis ça ne fera plus la manchette dans les journaux, et que les
gens magasinent pour leurs cadeaux des fêtes. Donc, ils ne nous
écouteront pas et, comme ça, la discussion ne se fera pas. Vous
ne me ferez pas accroire que ce n'est pas voulu quand ça fait un an que
vous le savez, quand, depuis le printemps, on l'a comptabilisé, quand on
l'a annoncé au mois d'août, puis quand c'est déposé
depuis le 15 novembre. Ce soir, on nous amène la guillotine, la motion
de censure qu'on appelle, pour empêcher l'Opposition de prendre tout le
temps nécessaire pour étudier tout le projet de loi. Et le comble
de l'insulte c'est qu'hier, alors qu'on a décidé de nous imposer
la guillotine, le ministre nous a dit, en commission parlementaire, qu'il va y
avoir des amendements de déposés, mais qu'il ne les a même
pas lus. Il nous fait discuter de quelque chose qu'il ne connaît
même pas lui-même. Il y a quelque chose d'indécent dans ce
comportement-là, c'est indigne. Quand un gouvernement est rendu
gêné et usé comme ça, je dois vous dire qu'il est
temps que ça change, parce qu'on ne veut même pas dire la
vérité, qu'on ne veut même pas permettre à
l'Opposition de parler sur les amendements et qu'on ne nous donne même
pas tout le temps nécessaire pour être capable d'étudier le
projet de loi.
Si le gouvernement avait voulu agir correctement, comme les autres
gouvernements lorsqu'on propose des changements aussi fondamentaux, le
gouvernement, après le discours sur le budget, aurait
déposé, dès le mois de juin, son projet de loi parce que,
comme je vous le disais, il le connaît depuis une année. Il aurait
déposé son projet de loi au mois de juin et il aurait
convoqué une commission parlementaire pour le mois d'août et le
mois de septembre. Les parlementaires auraient pu en discuter, la population
aurait été informée et les groupes
intéressés auraient pu se présenter en commission
parlementaire. C'est comme ça qu'on agit quand on veut amener des
changements qui sont importants dans la société et ils sont
importants, les changements. À preuve, j'écoutais tantôt le
ministre du Revenu dans son intervention. Le ministre a dit: II faut absolument
que cette loi passe, parce que c'est une loi majeure, c'est une loi importante
et, si elle est importante, c'est que, pour la société
québécoise, c'est un virage important qu'on est en train de
prendre. Il le reconnaît lui-même.
À partir de maintenant, au niveau de la taxation, au niveau de la
fiscalité, c'est un virage important, c'est un virage de
société qu'on est en train de prendre. Et, pourtant, on n'a pas
permis aux gens de se faire entendre. On ne permet pas à l'Opposition de
pouvoir critiquer le projet de loi et on ne nous permet même pas de
prendre connaissance des amendements qui sont déposés. C'est
incroyable, mais je vous dis tout de suite, cependant, les gens d'en face, les
gens du gouvernement: Vous pouvez, ce soir, essayer de nous cacher la
vérité, penser que, finalement, ça va passer sans que les
gens s'en aperçoivent, mais je dois vous dire que vous ne pourrez pas,
parce qu'à partir du 1er janvier prochain les gens vont commencer
à payer une taxe sur les meubles, les vêtements, les chaussures,
les revues, ce qu'ils ne payaient pas jusqu'à maintenant, parce qu'on
l'avait enlevée il
y a à peu près une dizaine d'années et un peu plus.
À partir du 1er janvier, à cause de cette loi, les
Québécois vont se mettre à payer plus.
Je conclus, M. le Président, parce que vous me dites que mon
temps est terminé, en disant que, contrairement à ce qu'on a
laissé entendre, c'est tout le monde qui va être
pénalisé, mais spécialement les plus pauvres, parce que
eux aussi vont devoir payer la taxe à partir du 1er janvier et que la
plupart ne seront pas remboursés parce qu'ils ne font pas de rapport
d'impôts. Donc, la plupart des pauvres vont être
pénalisés sans remboursement et ceux qui seront remboursés
le seront en 1992 seulement. Donc, c'est les plus pauvres aussi qui vont
financer les décisions de ce gouvernement durant une année de
temps.
Donc, sur le fond, c'est inéquitable, c'est malvenu, parce que
c'est en période de crise économique et l'effet direct de cette
décision, à partir du 1er janvier, ce sera un effet
inflationniste. Comment ce gouvernement peut-il faire semblant d'ignorer la
crise ' économique et de l'augmenter par l'inflation qu'il va
occasionner lui-même? Je dois vous dire que ce projet de loi est
dangereux pour l'économie, qu'il est dangereux pour les citoyens et
spécialement pour les plus démunis et que la façon de
procéder, M. le Président, est totalement inacceptable. Merci
beaucoup.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Duplessis. S'il vous plaît, je vous demanderais
votre collaboration et de l'ordre dans cette Chambre. S'il vous plaît! M.
le député de Duplessis.
M. Denis Perron
M. Perron: Merci, M. le Président. Je n'avais aucunement
l'intention d'intervenir sur cette motion du gouvernement, cette motion de
clôture, cette motion "bulldozer" qu'on appelle, qui fait en sorte qu'on
ne puisse étudier le projet de loi 89. Mais si je le fais, M. le
Président, c'est parce que, justement, j'ai entendu deux personnes en
cette Chambre, les deux valets du ministre des Finances, soit le
président du Conseil du trésor et le ministre du Revenu, qui, au
cours de leurs deux interventions, ont induit la Chambre en erreur, ont induit
la population du Québec en erreur, ont dit un paquet de balivernes
concernant certaines choses qui se passent actuellement...
M. Savoie: Question de règlement.
M. Perron: ...et ont dit à peu près n'importe quoi
concernant l'Opposition officielle, concernant la commission
parlementaire...
M. Savoie: Question de règlement.
M. Perron: ...ainsi que concernant le projet de loi. Si Raymond
"la taxe" veut parler, M. le Président, pas de problème...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
Question de règlement, M. le ministre du Revenu.
M. Savoie: Oui, M. le Président. Je vous demanderais
d'appeler le député de Duplessis à l'ordre. Il n'a pas le
droit de faire des déclarations comme il le fait, en nous accusant
d'avoir présenté des balivernes à cette Assemblée,
ni de nous présenter des propos, M. le Président, qui sont
antiparlementaires dans ses allégations.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
Je n'ai pas entendu le mot "intentionnel" et je considère ses propos
comme parlementaires. Si vous voulez poursuivre, M. le
député.
M. Perron: Merci, M. le Président. Je fais remarquer aux
membres de cette Chambre que vous avez, justement, reconnu que j'avais le droit
de dire ce que j'ai dit, et c'était pour ce que moi, j'appelle la
personne Raymond "la taxe". M. le Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez retirer
les derniers mots que vous avez utilisés, je considère que c'est
indigne d'un parlementaire. Si vous voulez les retirer, M. le
député.
M. Perron: Je vais retirer mes paroles, M. le Président,
mais je vais continuer de les penser.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous retirez vos
paroles, s'il vous plaît! Vous retirez vos paroles, c'est très
bien.
M. Perron: M. le Président, tout ça pour vous dire
que, lorsqu'on regarde la façon dont ce gouvernement agit envers
l'Opposition officielle, on est en droit de parler de ce gouvernement comme du
gouvernement qui a le plus taxé les Québécois et les
Québécoises depuis maintenant un an. M. le Président, nous
avons eu au cours de cette année, et en particulier depuis la
réélection du gouvernement libéral, trois augmentions de
taxes qui ont été annoncées par le discours sur le budget:
taxe sur les boissons alcooliques incluant la bière, pour aller chercher
133 000 000 $ dans les poches des citoyens et des citoyennes; les entreprises
ont également été touchées par une augmentation de
l'impôt sur les profits, ce qui donnera au gouvernement 104 000 000 $ en
1990-1991. Les trois augmentations rapporteront à ce gouvernement 1 200
000 000 $, de 1990 à 1993. Et là, M. le Président, on a
devant nous un gouvernement qui présente un projet de loi concernant la
TPS ou la TVQ, telle qu'on l'appelle actuellement, qui
va aller chercher dans les poches des concitoyens et des concitoyennes
du Québec 362 000 000 $. 362 000 000 $! M. le Président, je ne
comprends pas pourquoi ce gouvernement agit de cette façon, en fin de
session, à 23 h 50 le soir, pour nous empêcher d'entendre des
organismes en commission parlementaire, pour nous empêcher
d'écouter ce que les gens ont à dire, pour nous empêcher de
dire ce que les représentants et les représentantes de l'ensemble
du Québec ont à dire face à cette attitude
gouvernementale.
M. le Président, je continue au sujet de la taxation. Au cours de
l'année 1990-1991, ce gouvernement est allé chercher dans les
poches des citoyens et des citoyennes, au niveau de la scolarité, 52 000
000 $ pour 1990-1991 et 104 000 000 $ pour 1991-1992, et je continue parce que
la liste est longue. Au chapitre de l'augmentation des tarifs
d'hydroélectricité, au-delà de l'inflation, le
gouvernement est allé chercher 133 000 000 $ en 1990-1991, 200 000 000 $
annuellement par la suite. M. le Président, quant au financement des
commissions scolaires, le gouvernement s'empêche, en permettant aux
commissions scolaires de taxer les contribuables locaux, c'est-à-dire
dans des villes comme Sept-îles, Port-Cartier, Havre-Saint-Pierre,
Fermont et ailleurs à travers le Québec, d'aller taxer pour un
montant de 320 000 000 $ parce qu'il se départit de ses propres
responsabilités. (23 h 50)
En conclusion là-dessus, M. le Président, avec les permis
de conduire et les immatriculations, en plus d'aller chercher plusieurs
centaines de millions dans le fonds d'indemnisation de la Société
de l'assurance automobile, le gouvernement s'en va chercher un montant de 150
000 000 $ chez les automobilistes en 1990-1991 et, par la suite, plus de 250
000 000 $ par année.
C'est pour ça que je taxe ce gouvernement d'être le plus
taxeur qu'on n'ait jamais eu depuis les 25 dernières années. M.
le Président, un peu plus, et le gouvernement se taxerait
lui-même! Et, M. le Président, le député de Verdun
qui a parlé en cette Chambre... En passant, les libéraux, vous
devriez vous entendre entre vous autres concernant les heures passées en
commission parlementaire. Le président du Conseil du trésor a dit
20 heures. Le député de Verdun a parlé de 25 heures et le
député de LaFontaine a parlé de 22 heures. Bien, faites
votre idée entre vous autres au moins, là-dessus. Au moins, on va
savoir où est-ce que vous vous en allez. On va savoir exactement ce que
vous voulez. Mais il y a une chose, par exemple, qu'on sait que vous voulez
actuellement, vous voulez boucler ce que nous avons à dire, ici, en
cette l'Assemblée nationale, vous voulez nous boucler la bouche en
commission parlementaire et c'est ce que vous êtes en train de faire en
pleine fin de session.
M. le Président, quant à moi, le député de
Verdun qui disait - et il l'a dit à deux reprises - que le projet de loi
que nous avons en face de nous va diminuer l'imposition aux consommateurs et
consommatrices, il n'y a rien de plus faux. Comment le député de
Verdun, si tel est le cas, peut-il nous dire ce soir ce qu'il a dit et
m'expliquer comment se fait-il que les consommateurs et les consommatrices ne
paieront pas les fameux 362 000 000 $ dont je viens de parler?
Le gouvernement va aller chercher ça quelque part. Il va aller
chercher ça chez les consommateurs et les consommatrices. Il va aller
chercher ça chez des personnes qui très souvent ont des revenus
très bas et même en bas du seuil de la pauvreté. C'est
ça qu'il va faire, le gouvernement. Et quant à la motion de
clôture, ce gouvernement dit en d'autres mots: Au diable ceux et celles
qui veulent intervenir en commission! Au diable ceux et celles qui vont payer
la note de 362 000 000 $! Le gouvernement dit: Au diable, si le projet de loi
permet des taxes davantage élevées chez les consommateurs et les
consommatrices! Ce gouvernement dit: Au diable si on met une taxe de vente sur
le linge d'enfants, sur les bottines d'enfants, sur le textile, sur les
meubles, sur la bonneterie! Et j'en passe, M. le Président.
Ce gouvernement refuse d'entendre des représentants et
représentantes en commission parlementaire. On le demandait
nous-mêmes et avec force, à tour de bras. Et, rien à faire!
C'est l'arrogance, c'est le manque de transparence depuis maintenant plus de
cinq ans que ce gouvernement est au pouvoir et il fait toutes les choses
à la sauvette, toujours en fin de session. Et il faut faire ça
vite, surtout quand il s'agit de taxer les concitoyens et les concitoyennes.
Parce qu'il ne faut pas que ça paraisse, il va faire ça la
nuit.
M. le Président, là-dessus, je peux vous dire... C'est que
je voudrais le dire aux membres de ce gouvernement, aux membres du gouvernement
libéral: Ce n'est pas la démocratie, vous autres, qui vous
étouffe. Ça, je vous en passe un papier! Ce n'est pas la
démocratie qui vous étouffe, parce que toutes les occasions que
vous avez de "bulldozer" l'Opposition officielle, de "bulldozer" les
représentantes et les représentants des organismes à
travers le Québec, de "bulldozer" les petites gens à travers le
Québec, les hommes et les femmes et même les enfants, vous le
faites. Vous vous en chargez et vous vous applaudissez en plus de ça
entre vous. Vous vous applaudissez entre vous.
M. le Président, vous réalisez vous-même que ce
gouvernement n'a pas la vérité infuse. C'est vrai, il ne l'a pas.
Puis, quant à moi, mon plus grand souhait, c'est que les citoyens et les
citoyennes du Québec puissent se débarrasser, dans les plus
courts délais, de ce gouvernement libéral. Et je vous mets au
défi, avec ce projet
de loi, d'aller en élection devant la population du Québec
et vous allez réaliser une chose, vous allez vous faire passer au "bat",
puis ça ne sera pas long!
Une voix: Les élections!
M. Perron: Ça va être trois prises en ligne!
Une voix: Les élections!
M. Perron: Et, M. le Président, je voudrais conclure, en
disant que, quant à moi, le président du Conseil du trésor
peut continuer à agir comme il agit, parce qu'il nous aide, nous de
l'Opposition, à faire comprendre aux consommateurs et aux consommatrices
qu'il est là avec son rouleau compresseur, qu'il est là avec son
couperet et, régulièrement, et ce, depuis qu'il est
président du Conseil du trésor pour faire la job à nos
concitoyens et à nos concitoyennes du Québec. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (m.
bissonnet): merci, m. le
député de duplessis. je suis prêt à
reconnaître la prochaine intervenante, mme la députée de
marie-victorin.
Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: Merci, M. le Président. Nous vivons des
moments de camouflage, dans ce gouvernement depuis bientôt 1985, en fait,
depuis que ce gouvernement est au pouvoir, des opérations de camouflage.
Ce n'est pas la première fois qu'on arrive en fin de session et qu'on
nous met le bâillon, qu'on nous empêche, justement, d'exercer nos
droits en tant que parlementaires et de faire vraiment l'éclairage
nécessaire en ce qui concerne des projets de loi, d'autant plus un
projet de loi fondamental puisqu'il y va de problèmes de taxation dont
tous les consommateurs devront faire les frais, maintenant, avec cette nouvelle
réforme. Ça, ça touche tout le monde et c'est une nouvelle
orientation puisque, dorénavant, nous allons taxer la vente de biens qui
n'étaient pas taxables jusqu'à tout récemment. Ça
touche des gens dans leur quotidien. Ça touche plus
particulièrement les plus défavorisés de notre
population.
J'aimerais vous citer quelques chiffres à l'idée de
l'indice de pauvreté qui sévit dans le Québec,
actuellement. On dit que l'indice de pauvreté est passé de 14 %
à près de 19 %, ce qui fait que le tiers des pauvres du Canada
vivent au Québec, M. le Président. Ça, je trouve ça
inacceptable qu'un gouvernement, là où on parle de
récession, de difficultés pour ces gens-là, au niveau de
leur pouvoir d'achat, d'accéder à des biens de consommation, de
faire en sorte qu'on trouve un moyen de leur rendre encore la vie plus
difficile en les surtaxant. C'est pourquoi nous avons voulu prendre le temps
d'entendre tous ces gens, les gens les plus importants, qui sont
influencés par la consommation et qui doivent défendre les
intérêts des consommateurs, de les faire venir ici, en commission
parlementaire, au moment où on faisait l'étude du projet de loi
article par article, pour nous apporter des commentaires sur comment ces
gens-là pourront s'en sortir au moment où ils devront affronter
cette nouvelle taxe qui sera en vigueur à partir de janvier 1991.
Je pense que c'est tout à fait normal qu'on puisse vouloir
interroger ces gens puisque cette façon d'opérer de ce
gouvernement, de passer des taxes qui sont tout à fait ignobles,
laissez-moi passer l'expression, parce que ça s'est fait d'une
façon camouflée, ça s'est fait tout à fait en
sourdine, sans qu'on puisse s'en rendre compte... D'abord, un, on a toujours
dit que le gouvernement s'était toujours prononcé contre
l'harmonisation de la taxe fédérale, la TPS, avec une taxe au
niveau du Québec et on s'est aperçu, à un certain moment
donné, que ce n'était que pour le discours, mais au niveau du
discours, plus haut que le discours, en fait, quand on regardait au niveau des
équilibres financiers des années budgétaires 1990-1991,
1991-1992 et 1992-1993, on tenait compte de l'harmonisation des deux taxes.
Alors, M. le Président, est-ce qu'on va pouvoir croire encore
davantage ce gouvernement lorsqu'il fera un discours sur le budget? Parce que,
effectivement, on n'en parlait même pas au niveau du discours du budget.
C'est à l'analyse du Vérificateur général qu'on a
pu se rendre compte, effectivement, que tout ça était vraiment
bien comptabilisé et qu'on devrait en tenir compte. Là, on va
chercher plus de 1 000 000 000 $ dans les poches des contribuables par toutes
sortes de taxes indirectes, en tout cas, des taxes qu'on devra subir,
l'ensemble des consommateurs du Québec. Ça, c'est inadmissible,
M. le Président.
C'est pourquoi, avec le plus grand sérieux, nos collègues
qui participaient à la commission parlementaire pour faire
l'étude de ce projet de loi avaient préparé,
effectivement, des motions dont j'ai ici copie, des motions qui étaient
très bien préparées et qui permettaient à des
organismes tels que le Mouvement Desjardins, l'Association des consommateurs du
Québec, l'Association des fabricants de meubles du Québec,
l'Institut des manufacturiers du vêtement du Québec, l'Association
des manufacturiers de chaussures du Québec, le Conseil
québécois du commerce du détail, l'Association des
économistes du Québec, le Bureau de commerce de Montréal,
la Chambre de commerce du Québec, la Corporation des comptables
agréés, la Fédération des ACEF, de venir ici, en
commission parlementaire, pour pouvoir se prononcer sur cette nouvelle
orientation de taxer les Québécois et les
Québécoises et d'analyser les effets, à court terme, pour
une bonne partie de ces gens-là, (minuit)
Finalement, le gouvernement pour faire passer, dorer un peu plus la
pilule nous dit: Ce n'est pas bien grave parce que, de toute façon, ces
gens-là recevront des remboursements au niveau de leurs impôts.
Mais, il faut le dire, il faut dire les choses telles qu'elles sont, M. le
Président. On demande maintenant aux contribuables de financer
pratiquement l'État et c'est eux qui devront faire les frais et assumer
cette nouvelle taxation, parce qu'ils paieront cette taxation-là et
qu'ils devront attendre en 1992 pour avoir un retour d'impôt au niveau de
toutes ces taxes-là, M. le Président.
Ce qu'on ne dit pas, c'est que la grande majorité des
Québécois ne font pas de déclaration d'impôts.
Alors, pour tous ces gens-là... et c'est surtout les gagne-petit et les
gens qui ont de la difficulté ou les gens qui sont en bas du salaire
minimum qui ne font pas de déclaration d'impôts et c'est eux qui
seront les plus pénalisés par les frais de cette réforme,
parce que 15 % de taxes qu'on devra payer sur des vêtements, sur des
meubles, sur les articles scolaires, M. le Président, c'est
énorme pour le budget de ces gens-là, ça représente
énormément. Déjà, on sait que les personnes
âgées ont de la difficulté à pouvoir s'habiller
décemment et qu'il y a plusieurs personnes âgées qui ne
peuvent même pas sortir dehors l'hiver parce qu'elles ne peuvent pas se
vêtir. Imaginez-vous, avec une taxe de 15,5 %, ça va devenir
très onéreux pour ces personnes-là. Bien sûr, quand
on a de l'argent, on dit: 15,5 %, c'est à peine si c'est perceptible, si
c'est visible dans notre portefeuille, mais pour des gens à faibles
revenus, qui ne sont même plus des revenus modestes, c'est des revenus en
bas du seuil de la pauvreté, ces gens-là, oui, qui doivent
consommer comme tous les autres, M. le Président, seront durement
pénalisés, durement touchés. Et c'est pour ces
gens-là, oui, que nous faisons le débat, que nous voulons et que
nous avons demandé d'aller en profondeur dans l'étude de ce
projet de loi justement pour qu'on n'essaie pas de faire semblant et qu'on
n'essaie pas de passer pour des sépulcres blanchis face à cette
situation qui risque de toucher amèrement une grande partie de notre
population, M. le Président.
Je trouve ça tout à fait honorable de la part des gens qui
ont travaillé à cette commission parlementaire, de la part de
l'Opposition, de vouloir justement étudier ce projet de loi d'une
façon des plus constructive avec des gens qui sont des experts en la
matière et qui auraient pu bénéficier, en tout cas,
apporter au moins au ministre un éclairage, puisque lui-même, le
ministre, n'était pas au courant de certains amendements de sa propre
loi et qu'en ce qui concerne les amendements sur l'exemption du livre, M. le
Président, il ne les avait même pas déposés. Il les
a déposés seulement hier à la toute dernière
minute. Il n'en avait même pas pris connaissance, il ne les avait
même pas lus,
M. le Président. C'est incroyable de la part d'un ministre.
Et ils ont l'audace de venir ici, en cette Chambre, nous faire des
remontrances parce que nous voulons étudier un projet de loi, et nous
empêcher d'en faire une lecture approfondie et une étude
exhaustive qui permettrait de déceler à quel point les effets
pervers de cette taxation ont un impact considérable sur nos concitoyens
et, surtout, M. le Président, sur les plus petits salariés. Et,
malheureusement, au Québec, on doit constater, à l'heure
actuelle, qu'à cause de l'inertie du gouvernement de plus en plus de
gens souffrent et glissent vers la trappe de la pauvreté. Et, sans
vergogne, ce gouvernement, encore une fois, dans une situation
économique difficile, à un moment où il faudrait bien plus
favoriser une activité économique, non pas par des taxes, M. le
Président, mais par une recrudescence, en développant des moyens
pour faire en sorte que l'activité économique puisse vraiment se
développer à un rythme qu'on connaît dans une
récession, afin de permettre justement aux gens de pouvoir s'en
sortir... Mais, actuellement, on ne pourra quasiment plus respirer sans
être obligés de payer une taxe si ça continue avec ce
gouvernement-là. L'air pur va être vraiment taxable si ça
continue. On est même rendus que le gouvernement... et c'est le Bureau
d'assurance du Canada qui faisait cette remarque: C'est ainsi qu'indirectement
Québec taxera sa propre taxe, il parlait justement des taxes sur les
assurances, M. le Président. C'est peu dire. Ça veut dire que
tout ce qui bouge pourrait être taxé de la part de ce
gouvernement, M. le Président, et c'est pourquoi nous avons pris le
temps nécessaire et que nous le prendrons encore pour faire reculer ce
gouvernement vis-à-vis d'une taxe qui est ignoble pour l'ensemble des
concitoyens et des contribuables du Québec.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Marie-Victorin. Le prochain intervenant sur cette
motion, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: M. le Président, les commissions ne
siégeant plus, il y a absence de quorum.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, vous pouvez
poursuivre, M. le député.
M. Boulerice: Je regrette, M. le Président, l'absence de
la ministre des Affaires culturelles.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît,
question de règlement, M. le député de Berthier.
M. Houde: Je demanderais aux députés de prendre
leur place, s'il vous plaît.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, en
vertu de l'article 32, je demanderais aux députés,
à la demande du député de Berthier, en vertu de l'article
32, de prendre leurs places, s'il vous plaît. S'il vous plaît, s'il
vous plaît, messieurs, mes chers collègues, si vous voulez prendre
vos places. S'il vous plaît, madame. Veuillez prendre vos places.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député, la parole est à vous.
M. André Boulerice
M. Boulerice: M. le Président, je vous remercie.
Heureusement que nous vous avons en cette Chambre pour faire respecter les
droits de l'Opposition.
M. le Président, je me devais d'intervenir sur cette loi
scélérate, M. le Président. C'est un terme qu'employait M.
Pierre Tisseyre, qui est un personnage respecté dans ce pays. Loi
scélérate, M. le Président, et bâillon odieux. Ce
gouvernement nous impose sa propre TPS, M. le Président,
supposément pour s'harmoniser avec le gouvernement
fédéral. S'harmoniser, donc du mot "harmonie", M. le
Président. Or, ça ressemble un peu à un ancien slogan
d'une station radiophoni-que qui disait: Tout le monde le fait, fais-le donc.
J'ai l'impression que le fédéral aurait demandé, M. le
Président, d'aller se sacrer à l'eau et il l'aurait fait. Le
choeur de l'armée rouge essayant d'accorder ses violons avec la fanfare
conservatrice d'Ottawa, mais qui sonne malheureusement mal de ses trompettes.
On l'a vu. Son taux de popularité est à peu près semblable
au taux d'escompte de la Banque du Canada, et c'est d'ailleurs ce qui est en
train d'arriver au parti d'en face, M. le Président. Une taxe odieuse,
scélérate. J'entendais d'ailleurs un député
social-démocrate à la petite semaine, ancien candidat
néo-démocrate au niveau fédéral, M. le
Président, faire l'éloge de cette taxe. Lui, M. le
Président, qui est d'origine européenne devrait savoir ce que
c'est une TVA, une taxe sur la valeur ajoutée. Si le gouvernement avait
voulu nous proposer une taxe sur la valeur ajoutée, M. le
Président, on aurait probablement été
intéressés à en discuter, parce que vous savez comme moi,
M. le Président, qu'en Europe, en France, par exemple, une montre, c'est
28 % de taxe, de TVA. Mais il n'y a pas de TVA, il n'y a pas de taxe sur des
produits essentiels. Ici, on décide de niveler, M. le Président.
On va niveler tout le monde en taxes, M. le Président. Est-ce que c'est
socialement et économiquement justifiable? Non, M. le Président.
C'est tellement fou, cette loi, M. le Président, que quand vous allez
aller au supermarché, si par malheur vous achetez un sac d'arachides
salées, lui, il est taxé, c'est des confiseries. Prenez les non
salées, celles-là ne sont pas taxées. Vous voyez à
quel point ça peut être fou, cette loi, M. le Président. Je
veux dire, comme folie vraiment, plus fou que ça, on meurt. On meurt de
faim surtout.
Une voix: Une taxe sur... (0 h 10)
M. Boulerice: On meurt de faim, M. le Président. Une
taxe... Je ne sais pas par qui elle a été pensée, mais, de
toute façon, on se rend compte qu'elle a été pensée
par un gouvernement libéral, M. le Président, parce que plus
croche qu'une loi libérale, tu meurs encore, M. le Président. On
l'a vu depuis cinq ans, tu meurs. Toujours des lois toutes croches. On en a vu
un exemple. Les ministres nous sont toujours arrivés avec des
amendements. Cette fois-ci, on avait un ministre, M. le Président, qui,
dans sa grande naïveté, dans sa candeur, M. le Président,
n'avait même pas lu les amendements à sa propre loi. Aie! comme on
dit en bon québécois, c'est le bout du bout. Et c'est lui qui
doit aller chercher nos taxes. C'est à lui qu'on donne ça. Mais
je pense qu'il va avoir droit à une caricature du magazine Croc.
Il souffre de "taxicomanie". Il a besoin d'une cure dans un "duty-free".
Ça n'a pas d'allure. Et on va rajouter une taxe, M. le Président.
Je viens d'un comté qui n'est pas riche, vous le savez. On va taxer les
vêtements. Le ministre du Travail rit. Je comprends, quand tu es
ministre, que la taxe, ça ne t'inquiète pas. Mais quand tu restes
sur la rue Poupart, par exemple, et que tu habites un comté qui a le
plus fort taux de chômage, dans une ville qui s'appelle Montréal,
qui a plus de chômage que Terre-Neuve, c'est inquiétant, la taxe
qui s'en vient. Je ne rirais pas si j'étais à votre place, M. le
député de Sainte-Anne. En campagne électorale - ayez donc
le courage d'en faire une - je vais aller vous le rappeler dans votre
circonscription. J'irai. Cette taxe-Une voix: Moi, je n'irai pas chez
vous!
M. Boulerice: Non, ne venez pas chez moi, parce que c'est sans
effet. M. le Président, Mme Pelletier, de la rue Poupart, eh bien, elle
va être obligée de payer de la taxe sur les vêtements de ses
enfants. On va même lui faire payer de la taxe sur les cahiers
d'exercices de ses enfants qui vont à l'école. Par malheur, il va
lui manquer une chaise, parce qu'elle habite un petit logement modeste. Elle va
payer maintenant une taxe là-dessus. Pourquoi ne pas m'avoir taxé
à 28 %, si je voulais m'acheter une deuxième montre, mais l'avoir
exemptée, elle, d'une taxe aussi infâme, M. le Président,
quand on connaît les revenus qu'elle a, cette brave électrice de
ma circonscription qui reste sur la rue Poupart? Une loi complètement
anti-sociale, une loi scélérate qui nous a été
passée, c'est le cas de le dire, durant que toutes les caméras et
que toute l'attention étaient braquées sur la crise
amérindienne, sans aucun doute délibérément
provoquée par leur négligence. Ils savaient ce qui se
passait là-bas depuis bien longtemps. Ils ont essayé de camoufler
ça et là, ils ne veulent pas en discuter. Mais, si elle est si
bonne que ça, prenons le temps d'en discuter. Pourquoi ça vous
fait peur? C'est parce que les arguments qu'on sort à chaque minute, ils
vous font mal. M. le Président, on va taxer l'information dans ce pays.
Ce n'est pas étonnant. Avec un gouvernement qui bâillonne
l'Opposition, qu'il taxe l'information, ça, c'est tout à fait
normal, c'est dans la logique même libérale d'aller faire cette
chose.
Comme critique des Affaires culturelles, j'ai l'impression d'être
un réparateur de Maytag. Je suis le député qui a
probablement eu le moins de lois. La seule loi d'importance qui a
été votée dans le Parlement, ça a été
par la prédécesseure de la ministre actuelle qui,
malheureusement, n'est pas ici. J'aurais aimé ça qu'elle soit
là.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député.
M. Boulerice: J'ai dit malheureusement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député, vous ne pouvez pas impliquer qu'un député
ne soit pas en Chambre. Vous le savez très bien. M. le
député, je vous rappelle le règlement, la tradition que
nous avons ici, s'il vous plaît.
M. Boulerice: M. le Président, si vous voulez
empêcher un coeur d'aimer, tant pis pour vous. Mais il n'y a eu aucune
loi sur la culture qui se tienne. Il n'y a eu que le statut de l'artiste, mais
ce n'est qu'une statue. Et cette loi scélérate va détruire
toutes les entreprises culturelles de ce pays. La taxe sur le livre, elle
existe encore. On va juste la rembourser temporairement pour un an. On continue
à taxer les journaux et les périodiques culturels. Une taxe de 25
%, si on va au cinéma, si on va à la danse, si on va au
théâtre. Et, quand on lui en parle, elle dit: C'est
prématuré. Il y a danger de mort et elle dit: C'est
prématuré d'en payer, M. le Président.
Cette taxe, elle est scélérate. Il y a un vieux dicton
américain qui disait, au moment de la Révolution: "No taxation
without representation." Vous êtes allés dans la taxation, vous
allez voir votre représentation en Chambre la prochaine fois. Elle va
être égale au taux de taxe, 15 %; vous ne serez pas plus que 15 en
cette Chambre, parce que vous avez agi d'une façon honteuse, autant sur
le fond que sur la forme. Politiquement, c'est condamnable,
économiquement et socialement, c'est condamnable, M. le
Président. Le verdict populaire va se faire sentir très
bientôt là-dessus.
Je regrette que vous ne me laissiez pas plus de temps, parce qu'ils
mangeraient une raclée.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. Je suis prêt à reconnaître le prochain
intervenant sur cette motion, M. le député d'Ungava.
Une voix: Bravo!
M. Christian Claveau
M. Claveau: M. le Président, depuis déjà
cinq ans, ce gouvernement nous avait habitués à toutes
d'ignominies...
Une voix: Ha!
M. Claveau: ...à toutes sortes de situations
inacceptables. On n'a qu'à penser, par exemple, à la loi qui
amnistiait les illégaux. On n'a qu'à penser à un certain
nombre de lois contestables auxquelles ce gouvernement nous avait
habitués. Mais il a réussi, M. le Président, à bout
de souffle encore, à la limite, à faire pire que ce à quoi
il nous avait habitués. Il a réussi à modifier l'ensemble
de la structuration de notre système de taxation, sans même en
aviser la population, en cachette, en pleine nuit, M. le Président. Il
est minuit et quart et nous sommes en train de discuter d'un bâillon
après très exactement 22 h 58 min de discussion en commission
parlementaire sur un projet de loi tout aussi important, fondamental, que celui
qui modifie la taxation, la façon de percevoir des deniers pour
répartir des services à la population.
M. le Président, c'est quelque chose de fondamental, dans une
société telle que la nôtre. Je ne dis pas, si on
était en pleine dictature militaire, vous savez, on s'habitue à
des changements rapides. Tel gouvernement, telle Constitution, tel
gouvernement, tel régime de taxation. Tout le monde le sait. Il y a des
pays où, en 150 ans d'existence, des dictatures militaires ont
changé jusqu'à 121 fois, pour être très
précis, dans un cas...
Une voix: Bolivie.
M. Claveau: ...de Constitution. Alors, ça ne surprend plus
personne que l'on change du jour au lendemain de façon de taxer. Mais,
au Québec, M. le Président, on nous a habitués à
une certaine stabilité dans ce sens-là. Il y a une approche
graduelle, une approche, enfin, concertée avec ceux que l'on taxe, qui
nous permet, même si quelque taxe que ce soit n'est jamais populaire,
d'avoir un minimum de graduation dans notre façon de taxer, dans notre
approche de la taxation.
M. le Président, ce gouvernement a réussi ce que
sûrement aucun autre n'aurait été capable de faire,
à changer fondamentalement le système de taxation sans en parler
à personne, à la cachette, et il se vante d'être un
gouvernement transparent. C'est extraordinaire, quand même,
quand on est capable de tenir les deux discours en même temps. Il
faut le faire. C'est vraiment extraordinaire. Modifier fondamentalement la
structure de taxation d'une société sans en parler à
personne et, en même temps, aller se vanter d'être un gouvernement
transparent.
M. le Président, j'écoutais avec beaucoup
d'intérêt les collègues qui m'ont
précédé en cette Chambre, le député de
Saint-Jacques qui nous parlait de ses arachides salées, par exemple, et
il avait raison. Écoutez, je peux vous dire, pour en avoir fait
l'expérience moi-même pas plus tard qu'en fin de semaine, pour en
avoir discuté avec un commerçant, que le yogourt, imaginez-vous,
en petite quantité, en petit bocal, que l'on vend
généralement, quatre par quatre collés ensemble, si on en
achète un, c'est considéré comme un produit pouvant
être consommé sur place, H va être taxé, 16 %: 8 %
d'un bord, 8 % de l'autre. Si on achète les quatre petits gobelets de
yogourt collés ensemble, là ce n'est plus taxé parce qu'on
prétend qu'on ne peut pas le consommer sur place. C'est quand même
extraordinaire jusqu'où ça peut aller, M. le Président.
C'est phénoménal. Comment peut-on imaginer que l'on puisse
traiter différemment le même gobelet de yogourt, qu'on
l'achète individuellement ou qu'on l'achète quatre par quatre? (0
h 20)
Je vois des collègues qui semblent avoir un certain rictus sur le
visage, synonyme de jovialité. Eh bien, c'est probablement parce qu'ils
ne se sont jamais penchés sur le problème, mais c'est
effectivement le cas. Je les invite à aller vérifier. Si l'on
vend un yogourt à l'unité, c'est considéré comme
étant un produit de transformation consommable sur place, donc au
même titre que dans la restauration, et il devra être taxé
alors que, si l'on prend les mêmes gobelets de yogourt mais pris quatre
par quatre tels qu'ils sont normalement quand on les retrouve sur les
tablettes, à ce moment-là, ils ne seront pas taxés. Alors,
je me demande, moi, ce qui va se passer par exemple si je veux avoir quatre
gobelets de yogourt et que j'en veux un aux fraises, un aux framboises, un aux
pêches et un aux ananas. Est-ce que je devrai payer la taxe sur les
quatre, considérant que je les achète individuellement? La
question se pose, M. le Président. Comment allons-nous traiter, par
exemple, la pomme Mclntosh à l'unité? Moi, j'entre dans un
restaurant, je vois une belle pomme cirée, vernie comme on est capable
de les faire actuellement en industrie, j'en achète une et, par malheur,
je la croque avant d'arriver au "cash"; devient-elle taxable, M. le
Président? La question se pose et très honnêtement, parce
que ça devient un produit consommable sur place, ça devient un
produit de transformation au même titre que n'importe quel produit de
restauration que je peux consommer en dehors de ma résidence. Ça
se pose! M. le Président, on me parie ici de vol à
l'étalage. Je vous dirais que, si vous vous présentez, M. le
député des Îles-de-la-Madeleine, avec un coeur de pomme au
"cash", vous risquez de payer le même prix que si la pomme était
entière. L'important, c'est d'avoir la preuve que vous avez fait
l'achat.
M. le Président, vous voyez jusqu'à quel point la
situation peut être ridicule et c'est vraiment comme ça que
ça se passe dans le quotidien. J'entendais, ici, en Chambre, le ministre
des Finances nous dire: Écoutez, on ne peut pas détaxer les
livres, ce n'est pas possible, parce qu'il n'y a pas uniquement dans les
librairies où on vend des livres et donc il faudrait que ceux qui
vendent des livres en dehors des librairies aient deux systèmes dans
leur caisse enregistreuse. Il l'a dit ici même en cette Chambre. Il a
dit: Si on détaxe le livre, ça suppose que la petite
caissière ou le petit caissier qui travaille sur sa caisse enregistreuse
va devoir avoir un piton spécial, parce qu'il y aura des produits qui ne
seront pas taxés. On se souvient même, M. le Président,
qu'au conseil général du Parti libéral ça a fini
par la rigolade alors que des gens bien intentionnés sûrement sont
allés dire au ministre des Finances: Est-ce que notre
société distincte se résume à une question de
caisse enregistreuse? Ce ne sont pas des péquistes qui l'ont dit, du
moins quand je l'ai écouté aux nouvelles, ça ne venait pas
de la bouche de péquistes. Or, on vient dire aujourd'hui que ce n'est
pas vrai. Bien non, c'est ça que le ministre des Finances a dit. Alors,
moi, j'ai essayé, comme on dit en mathématiques, de faire la
preuve par l'absurde. Je suis allé voir des commerçants qui
vendent des produits alimentaires non taxés et je leur ai
demandé: Quand vous vendez, par exemple, il y a un certain nombre de
produits que vous avez sur vos étagères, des cuillères,
des "tea pot", des cafetières, toutes sortes de produits
d'accompagnement, des casseroles, etc., est-ce que c'est taxé? Ils m'ont
dit: Bien oui, c'est taxé. Alors, vous allez devoir avoir un piton
spécial sur votre caisse enregistreuse pour indiquer qu'il y a de la
taxe là-dessus. Ils ont dit: Bien oui, évidemment! Si ce n'est
pas vrai pour les livres, comment se fait-il que ça devient vrai pour
les gens qui sont dans le domaine de l'alimentation et qui vendent autre chose
que de l'alimentation? Le ministre des Finances ne nous a jamais répondu
à ça, encore moins le ministre du Revenu qui a carrément
refusé le débat. À la seule occasion que nous aurions eue
de consulter la population là-dessus, parce qu'on se souviendra que le
ministre l'a annoncé dans la période plutôt trouble que
nous avons vécue cet été et que nous n'avons jamais eu
l'opportunité d'en discuter avec qui que ce soit dans cette
société d'une façon publique, à la seule
opportunité que nous aurions eue, tout de suite le ministre du Revenu
s'est empressé de demander à ses collègues
ministériels d'arriver avec un bâillon le plus vite possible,
parce qu'il ne voulait pas en
discuter. C'était la seule chance que nous avions d'en discuter
réellement à fond, M. le Président, et nous voilà,
ce soir, parce que le ministre du Revenu se refuse à discuter du cas, eh
bien! devant un bâillon illégitime, un bâillon inacceptable,
un bâillon que l'ensemble de la population du Québec va reprocher,
et pour longtemps, à ce gouvernement, M. le Président, parce que,
lorsque l'on a une taxe de collée, c'est pour longtemps,
généralement. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député d'Ungava. La prochaine intervenante sur cette motion, Mme
la députée de Taillon. Mme la députée.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Merci, M. le Président. J'écoutais mon
collègue qui, tout en nous déridant, ne s'adressait pas moins
à des réalités qui risquent de toucher des milliers de
personnes au Québec. Mais j'ajouterais à ses propos que, non
seulement le gouvernement ne veut en parler à personne et ne veut
discuter avec personne de cette fameuse taxe, mais il n'en avait même pas
parlé à son ministre du Revenu avant de la déposer ici, M.
le Président, devant l'Assemblée nationale. On s'en souviendra,
c'a a coûté d'ailleurs la démission du ministre du Revenu,
c'a a coûté la démission devant son gouvernement parce
qu'il s'est dit en désaccord avec l'implantation de cette nouvelle taxe.
Alors, quand j'entends mes collègues, ici, dire que cette taxe va
être adoptée en catimini, à la fin d'une session,
c'était déjà bien engagé, M. le Président,
et depuis le début du débat en ce qui concerne la TPS.
Souvenez-vous, le projet a été déposé ici, devant
cette Assemblée, à l'occasion d'une convocation des membres de
l'Assemblée nationale qui devaient se pencher sur la crise autochtone,
M. le Président. C'était la raison de base de la convocation ici,
à cette Assemblée. Alors, non seulement on ne s'est pas
contentés de ne pas discuter d'abord - ça, c'est évident -
de la crise autochtone, on n'en a pas discuté, mais, en plus, on nous a
présenté un projet qui semblait, à toutes fins pratiques,
quelque chose de relativement secondaire, alors que ça allait
bouleverser tout notre système de taxation au Québec, M. le
Président.
Alors, on dépose ça à la fin de l'été
- mon collègue responsable du dossier comme critique le rappelait au
début de nos travaux ce soir - tout près du début de
l'automne, et, de façon systématique, on va finalement repousser
toutes les demandes que va faire l'Opposition pour entendre des points de vue
sur le nouveau système de taxation qui mériteraient d'être
entendus, M. le Président. Je peux vous dire qui mériteraient
à ce point d'être entendus qu'encore ce matin - en fait, hier,
puisqu'il est rendu presque minuit et demi - hier matin, on a logé un
appel à mon bureau de la part des marchands de meubles, M. le
Président, qui sont désespérés, une association que
l'on avait demandé à entendre, M. le Président, mais que
l'accélération du rythme d'adoption de la loi va
évidemment nous empêcher d'entendre. Or, j'avais
déjà posé la question, à plusieurs reprises,
d'abord au ministre des Finances: Quelle était son intention à
l'égard des marchands de meubles, des fabricants de meubles, des
fabricants de vêtements, parce que l'on sait que ces personnes, que cette
industrie avait pu bénéficier d'une "détaxe", à
toutes fins pratiques, puisqu'il n'y avait pas de taxe de vente sur les
produits du meuble, du vêtement et de la chaussure qui sont,
évidemment, des secteurs importants pour les emplois au Québec,
M. le Président? On m'a appelée, donc, je le disais, hier matin,
en catastrophe, en me disant: Qu'est-ce qu'on peut faire, Mme Marois, pour
faire valoir notre point de vue? J'ai dit: Vous savez, ce gouvernement est
insensible à votre point de vue, vous l'avez déjà vu, de
toute façon, au printemps dernier, au moment où on a
adopté la Loi sur les heures d'affaires, où on a
littéralement crié au gouvernement de ne pas adopter cette loi,
et il procède de la même façon cette fois-ci en ce qui
concerne le système de taxation. Il ne vous entendra pas davantage. Et
peut-être que la seule façon qu'il aura de vous entendre, c'est au
moment où on se retrouvera devant la population qui posera, elle, un
jugement quant au geste qu'aura posé le gouvernement, M. le
Président. (0 h 30)
Revenons donc aux gens du meuble. J'écoutais, encore hier
après-midi, les fabricants de meubles venir déposer un
mémoire devant la commission Bélanger-Campeau et, là
encore, ils faisaient état des milliers de pertes d'emploi qu'il y avait
eu dans leur industrie compte tenu de la récession dans laquelle le
Canada et le Québec sont plongés actuellement, M. le
Président.
Non seulement ils vivent actuellement les effets de la crise, de la
récession, mais on va ajouter en sus, pour le début janvier, une
taxe qu'on ne payait pas, que le consommateur ne payait pas sur leur produit,
M. le Président. Quand j'ai posé la question au ministre des
Finances en commission parlementaire pour lui demander, M. le Président,
quelle analyse a été faite au ministère des Finances pour
évaluer l'impact réel de cette nouvelle taxation sur ces
secteurs, il s'est empressé de nous sortir deux belles grandes feuilles
pour me dire qu'il ne se passait à peu près rien dans ce
secteur-là. Et c'est une analyse complètement théorique,
comme si on ne connaissait rien dans cette industrie-là, comme si on ne
savait absolument pas ce qui s'y passait. Je rappellerai au ministre des
Finances et au ministre du Revenu, M. le Président, que, si le fait de
mettre une taxe n'a pas d'effet, le fait de l'enlever en a eu un. Alors, il y a
quelque chose qui ne va pas. On ne doit pas
parler au même monde, on ne doit pas faire les mêmes
analyses, M. le Président.
Je relevais un article qui était paru au moment où la
décision de remettre, éventuellement, la taxe de vente sur le
meuble avait été questionnée, parce que, d'abord, notre
gouvernement avait enlevé cette taxe. Alors que l'actuel chef du parti
de l'Opposition était ministre des Finances, on avait enlevé
cette taxe. Et, évidemment, on s'était reposé la question
un an plus tard: Est-ce qu'il ne serait pas imaginable qu'on puisse la
réintroduire parce que c'est bien sûr, des fonds en moins pour le
gouvernement? Et, à ce moment-là, les gens du meuble nous avaient
dit: Vous savez, nos expéditions - et ça, c'était à
la fin des années soixante-dix, donc, avant les années
quatre-vingt - ont augmenté, ont été en hausse, sur
l'année précédente, de l'ordre de 11,7 %. Enlevons quelque
part l'inflation, il reste qu'il y avait une hausse nette dans la vente de ces
produits due au fait qu'il n'y avait pas de taxation, qu'on avait enlevé
la taxation.
Alors, si, lorsqu'on l'a enlevée, il y a eu un effet, j'imagine
qu'en la remettant, si on veut être un petit peu logique, ça va
avoir un effet aussi, mais un effet à l'inverse, à savoir qu'on
risque de vendre moins et donc de produire moins, M. le Président.
Alors, non seulement le ministre des Finances semblait absolument incapable
d'évaluer l'impact sur ces secteurs industriels, mais encore cette
semaine le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie et le
ministre du Revenu, à qui j'ai posé la question sous
différents angles, se sont trouvés bouche bée devant
l'incapacité qu'ils avaient d'agir d'une quelconque façon pour
corriger le tir et aider ces entreprises à se sortir du pétrin
dans lequel la taxe va encore les plonger, M. le Président.
Le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie nous a dit:
Même si le gouvernement fédéral rembourse une partie de la
taxe sur les inventaires, c'est-à-dire rembourse moins que ce que les
marchands auront payé sur leurs inventaires à la fin de
décembre, on va faire des représentations à Ottawa, mais
à date on n'a pas été entendus et on n'a pas l'intention
de compenser ou d'intervenir d'une autre façon. Mais là le
comble, c'est hier après-midi, M. le Président, que je l'ai eu,
quand le ministre du Revenu m'a dit: Ecoutez, oui, ça aura un impact,
cette taxe, sur les marchands de meubles qui exercent leur profession, qui
exercent leur commerce aux frontières parce que, auparavant,
évidemment, ils vendaient davantage en étant
détaxés alors que les provinces près desquelles ces
marchands se trouvaient, elles, avaient une taxe de vente, M. le
Président.
Mais, alors, là, de quoi parlons-nous? On vit dans quel monde?
C'est ce ministre du Revenu, M. le Président, qui actuellement nous
demande de voter sur cette loi après à peine quelques heures de
débat, après avoir refusé en commission parlementaire
d'entendre les représentants des personnes qui sont lourdement
touchées par cette taxe. Alors, à cet égard, il est
absolument inacceptable que tombe pour la xième fois - ma
collègue de Johnson le rappelait - une motion de clôture, alors
que le débat n'a pas eu lieu. M. le Président, merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée. Je reconnais le prochain intervenant, M. le
député de Rouyn-Noranda-Témis-camingue.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: M. le Président, il serait inacceptable qu'un
parlementaire ne se lève pas ce soir, à minuit trente, pour
protester officiellement contre ce bâillon, contre cette loi qu'on veut
nous imposer coûte que coûte. Ça va faire à peu
près au-delà de 13, 14 mois que je suis en cette Chambre, ce sera
la deuxième période avant les fêtes que nous passerons,
pour plusieurs d'entre nous, dans cette Assemblée nationale. Dès
la première session qui avait été convoquée
après les élections du mois de septembre 1989, nous avions eu
cette espèce d'exception d'imposer aux parlementaires un bâillon
parce que nous voulions faire accepter un projet de loi. Passe encore,
puisqu'il peut arriver, à l'occasion, les circonstances parlementaires
l'exigeant probablement, qu'on puisse dire: Nous allons mettre fin au
débat.
Ma surprise, pour une session normale, complète, celle de l'hiver
et du printemps 1990, ça a été d'arriver au mois de juin
et, là, de voir ce gouvernement de bons gestionnaires imposer à
cette Assemblée nationale, aux gens qui représentent la
population de tous les coins de la province, de tous les coins du
Québec, nous imposer trois fois le bâillon et dire, à trois
occasions, sur trois lois: Eh bien, voyez-vous, nous sommes obligés de
fermer la bouche de l'Opposition, nous devons faire en sorte que ces
gens-là ne disent pas au Québec, à la population, aux
hommes et aux femmes du Québec de quoi il en retrourne par les lois que
nous voulons adopter ici, à l'Assemblée nationale. Je comprends
facilement, parce que ce serait gênant. Mais trois fois, pour trois lois
qui apportaient des charges supplémentaires aux citoyens et aux
citoyennes du Québec, on dit: Chut! S'il vous plaît, tard la nuit,
ne parlez pas, ne dites pas la vérité; laissez-nous passer sous
silence ce que nous allons faire aux citoyens et aux citoyennes.
Alors, c'est un peu surprenant, pour un nouveau parlementaire, de
constater l'attitude de ce gouvernement envers la démocratie et surtout
son manque de respect pour les citoyens et citoyennes qui ont élu des
personnes à cette Assemblée nationale pour que ces personnes
puissent dire: Nous sommes en accord ou en
désaccord; ça a du bon sens ou ça n'a pas de bon
sens; on peut faire ou on ne peut pas faire; on peut procéder ou ne pas
procéder; n'allez pas dans cette direction parce que les gens, dans nos
comtés, les gens du Québec sont incapables de vous suivre, ils
sont incapables, ils n'ont pas suffisamment de souffle pour être capables
d'affronter la réalité que vous voulez leur imposer.
Mais, là, je n'étais pas au bout de mes surprises:
convoqués d'urgence pour contourner le problème de la crise
d'Oka, à la fin du mois d'août, contourner le problème
d'Oka ou de la crise amérindienne que nous avons tous douloureusement
vécue. On nous convoque pour, d'urgence, développer une autoroute
qui va nous permettre de contourner ce problème-là, tout en
continuant de ne pas nous en occuper après, c'est évident. On va
cacher encore une fois la réalité. Mais au même moment -
quelle surprise! - le ministre des Finances nous annonce, tout bonnement comme
cela, qu'à compter du 1er janvier 1991... Pour les gens qui nous
écoutent encore à cette heure-ci, devinez quel sera le cadeau du
Nouvel an en 1991. Vous n'en attendiez pas moins, les rouges vous font cadeau
d'une nouvelle taxe. Eh bien, tout le peuple s'est levé, les a
applaudis. (0 h 40)
Bien, voyons donc, ce n'est pas comme ça que ça se passe!
Les gens veulent que l'on discute honnêtement, ouvertement des sommes
d'argent qu'on va aller chercher dans leurs poches, des sommes d'argent qu'on
va retirer du portefeuille familial. Et ce n'est pas surprenant qu'après
l'avalanche, la pluie de taxes que nous avons eue depuis une année, et
un peu au-delà, de ce gouvernement des chroniqueurs comme Normand
Girard, du Journal de Montréal, puissent écrire un texte
qui soit titré "Gérard D. le taxeux".
Nous, ce que nous pourrions dire, M. le Président, et ce dont
tous les gens du Québec se rendent bien compte maintenant, c'est qu'on
dirait que ce gouvernement ne se nourrit que de nouvelles taxes. Et, là,
on peut en énumérer un certain nombre avant d'arriver à ce
cadeau du Nouvel an 1991. Ça va être bien triste, mais voici ce
qui nous est arrivé comme nouvelles taxes sur la tête, sous toutes
sortes de formes, déguisées, cachées. C'est pour ça
qu'un jour j'ai dit, M. le Président, que ce gouvernement était
un gouvernement d'aigrefins. C'est un gouvernement qui fait le tour, c'est un
gouvernement qui va par en arrière, c'est un gouvernement qui, sous des
dessous cachés, finit toujours par se glisser à la bonne place.
La bonne place pour ce gouvernement, c'est le portefeuille, c'est le
"portefeuillard" des citoyens et il finit toujours par en retirer une
somme.
Hydro-Québec. En juin 1991, ça vous coûtera
dorénavant 23 % de plus pour votre compte d'électricité.
Ah! ce ne sont pas des taxes, c'est de l'électricité, c'est un
service.
Allez donc! Le débat a été fait et on le sait que
c'est pour augmenter les redevances d'Hydro-Québec à ce
gouvernement de bons gestionnaires. Eh oui! Eh oui! Plus les mois se
rapprochent, plus la population du Québec a envie de faire son affaire
à ce bon gouvernement de gestionnaires parce que ce gouvernement de
gestionnaires gère surtout avec les affaires des autres.
Hydro-Québec.
Les frais de scolarité pour les étudiants. On
s'était donné un défi au Québec:
l'universalité et la gratuité scolaire du primaire à aller
jusqu'à l'université. On dit: Fini! À l'université,
on va vous faire grimper ça. Pourquoi? Parce qu'ils font ça comme
ça ailleurs au Canada, parce qu'ils font ça comme ça
ailleurs aux États-Unis. Alors, nous, il faut faire la même chose.
Augmentation: 140 %.
On nous annonce, dans le discours sur le budget de l'année en
cours, qu'il n'y aura pas d'augmentation d'impôts. Mais quelles autres
augmentations cachées! La Société de l'assurance
automobile, tout le monde a reçu son renouvellement de plaques, comme on
dit dans le langage populaire, tout le monde a reçu son avis de
renouvellement de permis de conduire. Augmentation jusqu'à 82 %
décrétée en plein été. Nouvelle taxe!
Gérard D. le taxeux! Gouvernement de taxeux! Les rouges taxeux!
Voilà ce que la population en retient. mais on n'était pas au
bout de nos surprises, m. le président. on a tous reçu nos
comptes de taxes scolaires. ah! bien, là, on disait: au moins, il y a un
gouvernement raisonnable dans ce québec. ce sont des gens qui sont
proches de nous. on connaît bien nos conseillers scolaires. alors, eux,
ils vont comprendre qu'on commence à manquer d'air, qu'on commence
à avoir de la difficulté à respirer, qu'on est en pleine
période de récession. eh non! 100 % d'augmentation! 100 %
d'augmentation de nos taxes scolaires parce que ce gouvernement a retiré
l'oxygène aux commissions scolaires.
Et là, qu'est-ce qu'on apprend? À la fin de
l'été, dans la série de taxes, dans une région
comme l'Abitibi-Témiscamingue, imaginez-vous, M. le Président, on
taxe les camps de chasse des chasseurs. Faut le faire! Il faut le faire! J'ai
déposé, ici, une pétition d'au-delà de 500
personnes de la région du Témiscamingue. Mais c'est maladif, M.
le Président. Imaginez, pour une location de terrain de 10 jours par
année, ce qui coûtait 52 $ auparavant, maintenant, ça va
vous coûter 200 $, tous les quatre ans, pour faire renouveler ce contrat,
135 $ par année pour faire inscrire ça au registre et toujours
les 52 $ pour assurer la location de votre camp de chasse sur votre terrain
dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue.
Les frais d'hôtellerie pour les personnes âgées et,
dès la semaine prochaine, nous allons aborder une loi qui veut
réformer le système de santé et de services sociaux.
Devinez ce qu'on va
taxer? Je conclus là-dessus, M. le Président. Devinez ce
qu'on va taxer? On va taxer les services qui sont payés par la
Régie de l'assurance-maladie du Québec. On va taxer les frais de
dentiste, on va taxer les médicaments, on va taxer les orthèses
et prothèses, on va taxer les frais d'optométrie.
Le bâillon, M. le Président, non jamais! S'il faut passer
la nuit, nous dirons ce que le Québec pense de cette taxe qu'on veut lui
imposer sur les souliers, sur les frigidaires, sur les meubles, et jamais nous
n'allons consentir à nous faire fermer là-dessus. Merci, M. le
Président.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. Je reconnais maintenant la prochaine intervenante sur
cette motion, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.
Mme la députée, la parole est à vous.
Mme Denise Carrier-Perreault
Mme Carrier-Perreault: M. le Président, c'est la
première fois cette session-ci, je veux bien croire, mais encore une
fois, on se retrouve, en tant qu'Opposition officielle, devant une motion de
bâillon, une motion de clôture qui, comme on le sait, nous applique
le bâillon. On ne peut plus parler, c'est fini. On nous a assez entendus
et on ne veut rien savoir de l'argumentation des groupes qu'on aurait
aimé entendre. On ne veut rien savoir non plus de l'argumentation de la
population.
On se rappelle que, lors de la dernière session, la mesure
exceptionnelle dont le leader adjoint du gouvernement nous parlait en
début de soirée, on se l'est fait appliquer trois fois. Alors,
c'est de moins en moins exceptionnel. Et, là, c'est la première
fois. À combien de motions de clôture aurons-nous droit cette
session-ci? Ça, on ne le sait pas encore. L'avenir nous le dira.
Au printemps, on a eu droit à la motion de clôture sur les
heures d'affaires. Les heures d'affaires, on le sait, c'est un sujet
très controversé. Les gens étaient ici pour assister aux
débats. Il y en avait partout dans les galeries. Il y en avait dans les
commissions parlementaires. Les gens s'opposaient fortement à ce projet
de loi. Et quand on a vu que l'Opposition était si forte et qu'il
fallait absolument, pour le gouvernement, que son idée passe, comme on
dit, eh bien, il nous a appliqué le bâillon.
Deuxièmement, la Société de l'assurance automobile.
J'étais sur cette commission-là, M. le Président, et,
comme Opposition, on s'est vraiment débattus. On a essayé de
faire comprendre que ça n'avait pas de bon sens. Encore une fois, on n'a
pas voulu nous entendre. On ne voulait pas nous écouter. On n'a pas
voulu, non plus, à ce moment-là, rencontrer les groupes
concernés.
On connaît maintenant les effets de la loi 50. On connaît
maintenant les augmentations qui sont arrivées par la suite et qu'on
avait prévues.
Puis est arrivée la loi 69, la loi 69 qui, on le sait aussi
maintenant, a eu comme effet de faire doubler et, dans certains cas, presque
tripler les comptes de taxes scolaires. Encore une fois, ces projets de loi ont
eu des effets tout à fait néfastes sur les contribuables
québécois. Pourtant, l'Opposition essayait tout simplement de
faire son travail. L'Opposition essayait tout simplement de donner la parole,
si on veut, aux gens, à la population qui n'était pas d'accord
avec le gouvernement à ce moment-là.
Là, nous sommes devant le projet de loi 89. On sait que le projet
de loi 89, c'est la TPS québécoise qui vient, en fait, harmoniser
notre système sur le système fédéral. D'ailleurs,
ce n'est pas encore tout à fait réglé au niveau
fédéral. Et, ici, de toute façon, il semble que les
dés en soient jetés et qu'on veuille nous faire avaler ce projet
de loi de force. Ça, peu importe si la population est inquiète,
peu importe si on est plus ou moins d'accord et si l'Opposition s'oppose
fermement à ce projet de loi.
Vous savez, M. le Président, j'entendais les gens, de part et
d'autre dans cette Chambre, ce soir, j'entendais les gens du côté
ministériel et j'entendais les gens chez nous. Tout le monde s'entend
pour dire, en fait, qu'une motion de clôture, ce n'est pas
intéressant et c'est désagréable. J'entendais même
le député de Verdun qui disait que, de ce
côté-là de la Chambre, du côté
ministériel, ils auraient de la difficulté à voter sur une
telle motion, mais qu'il semble, selon certains parlementaires du
côté ministériel, que l'Opposition emploie des mesures
dilatoires et qu'on ne puisse pas faire autrement.
Ce sont peut-être des mesures dilatoires aux yeux du gouvernement,
mais je trouve que c'est important que l'Opposition officielle fasse son
travail. Je pense que c'est le travail de l'Opposition de dire ce que les gens
pensent dans la population. C'est le travail de l'Opposition de surveiller le
gouvernement et d'essayer d'apporter les aménagements et les amendements
qui s'imposent à différents projets de loi. (0 h 50)
Effectivement, on ne s'est même pas rendus à l'étude
article par article, M. le Président. On nous l'a dit à plusieurs
reprises. On a dit: On n'a pas réussi à faire notre travail,
l'Opposition n'a pas collaboré; tout ce qu'elle a essayé de
faire, c'est rencontrer des groupes.
M. le Président, moi, je ne vois pas ce qu'il y a de mal à
demander à rencontrer des groupes, quand on a affaire à un projet
de loi aussi important. J'entendais le leader du gouvernement, j'entendais le
ministre du Revenu nous dire que c'était une réorientation
majeure, que c'est un projet de loi fort important qui va changer les
règles du jeu au niveau de l'impôt et de tout ça. Pourtant,
dans ce cas-là, on ne veut même pas
entendre, on ne veut pas se donner la peine de faire venir les groupes
concernés, les groupes qui ont beaucoup de choses à nous
apprendre et qui pourraient nous aider à faire quelque chose qui a du
bon sens. Pas du tout!
Moi, je suis membre de la commission parlementaire des affaires sociales
et, là, on sait que le ministre a déposé un projet de
réforme. Il a déposé sa réforme, son projet et,
pourtant, lors de la commission parlementaire au printemps dernier, on a, au
moins à ce moment-là, entendu plus de 250 groupes qui sont venus
nous parier, nous dire ce qu'ils pensaient et les améliorations à
apporter à l'avant-projet de loi de l'ancienne ministre de
l'époque. Le ministre de la Santé a, évidemment,
écouté avec beaucoup d'attention les recommandations des groupes.
Disons qu'on ne sait pas encore les effets de tout ça, on saura
ça plus tard, mais il reste que, là encore, on a affaire à
une réforme importante qui touche l'ensemble de la
société, l'ensemble des Québécois et on s'est
donné au moins la peine, dans un premier temps, d'entendre les gens pour
voir ce qu'ils avaient à dire.
Là, on arrive avec une réforme importante, qui touche,
évidemment, tous les contribuables québécois. On ne touche
pas seulement les entreprises et quelques commerçants, on touche tout le
monde, M. le Président, surtout aussi les contribuables qui ont des
moyens restreints, si on veut. Tout le monde paie des taxes, tout le monde paie
des impôts. Et, là, on trouve que c'est de trop de rencontrer des
groupes. Le projet de loi a été déposé le 15
novembre. C'est donc un projet de loi qui est très récent et qui
vient changer les règles, comme je le disais, à partir du mois de
janvier, si le gouvernement continue dans ses intentions et il a l'air d'avoir
la ferme intention de continuer. Bien, si ça continue comme ça,
à partir du mois de janvier, ça va être mis en application.
Pourtant, on a refusé complètement d'entendre les groupes qui
pouvaient venir nous donner un éclairage, à qui on aurait pu
poser des questions, avec qui on aurait pu améliorer ce genre de projet
pour que la situation soit moins inquiétante et moins alarmante pour les
Québécois.
Les groupes qui ont été demandés en commission
parlementaire, ce n'est pas des groupes qui n'ont pas rapport. C'est des gens
qui sont très impliqués au niveau économique au
Québec. On parlait de l'Association des économistes du
Québec. Est-ce que vous pensez sérieusement que ces gens ne
pouvaient rien nous apprendre sur un projet de loi comme celui-là? On a
parlé aussi de la Fédération des associations
coopératives d'économie familiale. Cette Fédération
s'est prononcée sur le projet. D'ailleurs, elle n'allait pas
nécessairement à rencontre du projet gouvernemental. Elle disait
qu'elle était d'accord, cette Fédération, mais elle avait
assorti aussi son accord de trois recommandations. D'ailleurs, la
députée de Terrebonne en a fait état tout à
l'heure, la porte-parole du dossier des consommateurs.
Il a aussi été demandé de rencontrer le Mouvement
Desjardins. Écoutez, c'est quand même sérieux, le Mouvement
Desjardins. Ce n'est pas futile. Il aurait pu sûrement nous donner un bon
éclairage, lui aussi, sur la façon d'appliquer une pareille taxe.
Le Conseil du patronat - on s'est évertués à nous dire, ce
soir, qu'il fallait sauver de l'argent aux entreprises, c'est pour ça
qu'il fallait harmoniser, tout ça, et que c'était très
important pour les entreprises, pour les commerces au Québec - mon Dieu!
il aurait fallu absolument savoir exactement le fond de sa pensée.
Est-ce que le projet de loi qui est en face de nous, de la façon dont il
est libellé et avec ce qu'il comporte comme tel, satisfait vraiment tout
le monde? La Chambre de commerce du Québec, l'Union des artistes, on a
parlé de groupes qui, éventuellement, seraient susceptibles
d'être touchés par cette taxe et de groupes aussi qui sont
intéressants à entendre. Alors, je ne vois pas en quoi c'est si
épouvantable de demander d'avoir de l'éclairage, de demander plus
d'information, quand on a affaire à un projet de loi comme ça,
qui vient changer au complet les règles, qui vient aussi chercher
beaucoup d'argent dans les poches des contribuables québécois,
les contribuables québécois qui ont eu plus que leur part de
taxes et d'impôts cette année.
On parlait tantôt de la loi 50 où on s'est fait
bâillonner, de la loi 69 où on s'est fait bâillonner aussi.
On se rend compte que les contribuables ont eu plus que leur lot en termes de
déboursés à faire cette année. Et, là, on
recommence et on va aller chercher dans leurs poches 362 000 000 $ comme
ça, tout de suite à partir de l'an prochain.
Écoutez, M. le Président, j'ai terminé oui. Tout ce
que je veux vous dire, c'est qu'une motion de clôture comme ça,
c'est inacceptable. Ce projet de loi là comme tel, l'Opposition
officielle va continuer de s'y opposer, pas pour le plaisir de le faire, M. le
Président, mais parce que c'est notre devoir de le faire et c'est notre
travail ici à l'Assemblée nationale. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée. M. le député de Limoilou.
M. Michel Després
M. Després: Merci, M. le Président. Intervenir
à cette heure-ci sur une motion de clôture, il aurait
été beaucoup plus agréable avec l'Opposition de pouvoir
discuter du projet de loi en commission parlementaire, comme nous étions
partis, mais après 20 heures de discussions ça devient
effectivement difficile lorsque vous avez réussi, après une
vingtaine d'heures, à faire trois articles, M. le Président.
C'est le droit, c'est le
privilège de l'Opposition d'essayer de retarder des projets de
loi, il faut l'avouer. On peut utiliser le règlement, on peut faire des
motions de report, des motions d'ajournement, sauf qu'un gouvernement qui est
en place, qui prend des décisions et qui doit gérer les finances
publiques du Québec doit prendre ses responsabilités.
Le gouvernement du Québec s'est fixé des objectifs pour
maintenir ses équilibres budgétaires, M. le Président, et
effectivement le projet de loi 89 vient instaurer et harmoniser avec le
gouvernement fédéral cette fameuse TPS, qu'on intitule la taxe
des produits et services, M. le Président, un régime qui ne
semble pas correspondre du tout à l'Opposition et on se doit ce soir de
déposer une motion de clôture, parce qu'il faut adopter avant la
fin de la session un certain nombre de projets de loi. Ce projet de loi est un
des projets que le gouvernement veut adopter et le gouvernement, M. le
Président, prend ce soir ses responsabilités. Si l'Opposition
avait voulu étudier tout au long, article par article, le projet de loi,
on ne serait pas là ce soir, M. le Président.
J'ai écouté les différentes interventions et on n'a
pas retenu beaucoup de choses très, très positives de ce que
l'Opposition a pu essayer de faire ressortir, M. le Président, ce soir.
À la discussion qu'on a déjà amorcée à
l'adoption de principe en deuxième lecture, le député de
Joliette nous suggérait d'adopter nos projets de loi en faisant des
sondages dans la population. Si le gouvernement commence à prendre des
décisions en fonction des résultats des sondages, ça va
devenir un gouvernement qui gère en fonction seulement de ce que
ça peut donner comme résultat électoral, M. le
Président, et non en fonction d'une saine gestion des finances
publiques.
Le député de Duplessis ce soir essayait de nous convaincre
que le gouvernement écrase ia population. Le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques traitait le gouvernement de "taxicoma-nie", M. le
Président. J'ai l'impression que ces gens-là ont la
mémoire très courte. Le chef de leur parti est l'ancien ministre
des Finances. S'il y a des gens qui ont taxé la population du
Québec, c'est bien ces gens-là de 1976 à 1985.
Année après année on a augmenté les taxes.
Ça, M. le Président, toujours en augmentant le déficit du
gouvernement. Puis le député de Duplessis est là depuis
1976, j'ai l'impression qu'il a la mémoire courte, M. le
Président, il ne se rappelle pas trop trop des taxes. Le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques est nouvellement
arrivé de 1985, mais j'ai l'impression que lui aussi a la mémoire
courte.
Le député de Pointe-aux-Trembles nous parlait du
député de Montmorency, le député de La Prairie nous
parlait aussi du député de Montmorency qui, effectivement, a pris
une décision; il a décidé de se retirer parce qu'il
n'était pas d'accord. Mais c'est drôle qu'ils ne nous ont pas
parlé d'un de leurs amis, l'ancien candidat du Parti
québécois dans le comté de Montmorency, M. Jean Filion. Et
je vois le député de Gouin; lui qui lit constamment les articles
de presse, je suis certain qu'il a lu cet article dans Le Soleil du 11
septembre 1990, sous le titre: "Harmoniser les TPS offre des avantages".
L'auteur de cet article, M. Jean Filion. Qui est M. Jean Filion? Un ancien
candidat du Parti québécois dans Montmorency. M. Jean Filion est
fiscaliste et demeure à Beauport, dans le comté de Montmorency,
et est probalement un futur candidat à la convention, M. le
Président, qui se dessinera dans le comté de Montmorency. (1
heure)
Je vais vous lire l'article, M. le Président, parce que c'est
intéressant. Premier paragraphe: "Le gouvernement du Québec,
ayant à vivre avec des problèmes qu'occasionne la taxe sur les
produits et services imposée par le gouvernement fédéral,
n'avait pas d'autre choix que celui d'harmoniser la taxe de vente provinciale
avec la nouvelle taxe sur les produits et services fédérale, et
ce, afin de simplifier l'application des taxes à la consommation
auprès des contribuables québécois." J'ai l'impression
qu'on ne trouve pas les bonnes gens dans les bons partis, M. le
Président. Je vais continuer, ce n'est pas fini. "D'ailleurs, ce geste
d'harmonisation s'inscrit dans la liste des gestes exécutés par
le ministre du Revenu depuis 1985 où il a cherché à
harmoniser davantage l'impôt sur le revenu provincial avec celui du
fédéral. Ces efforts d'harmonisation au niveau de l'impôt
sur le revenu n'avaient que pour principal objectif de simplifier davantage des
règles fiscales pour les contribuables québécois." Je
cite. C'est M. Filion qui a écrit l'article, M. le Président.
"Que l'on poursuive cette démarche d'harmonisation avec la taxe sur les
produits et services fédérale, cela n'a rien d'incohérent
avec la démarche entreprise depuis 1985 au niveau de l'impôt sur
le revenu." Je continue, M. le Président. "Que l'on soit contre la taxe
sur les produits et services fédérale est une chose, mais on ne
peut être contre son harmonisation avec la taxe de vente provinciale
lorsque l'objectif est de simplifier l'application des règles fiscales
au Québec."
C'est drôle, M. le Président, je n'ai pas entendu une fois
qu'on ait cité M. Filion, un spécialiste, fiscaliste, candidat
péquiste en 1985 et probablement bientôt candidat a la convention
péquiste dans le comté de Montmorency, M. le Président.
Ça s'en vient intéressant. J'espère qu'ils vont le
consulter, ce fiscaliste.
On n'a pas fini, M. le Président. Je continue et je cite toujours
M. Filion. Je veux être sûr... Je pense que je vais le lire
jusqu'à la fin, M. le Président. On va être sûrs
d'avoir toutes les informations.
Des voix:...
M. Després: Ça vous intéresse? Oui? Des
voix: Ah oui, oui!
M. Després: "D'ailleurs, un tel geste d'harmonisation qui
permettrait au Québec de percevoir la taxe sur les produits et services
pour le gouvernement fédéral est en soi une première qui
peut s'avérer très intéressante sur le plan de l'autonomie
fiscale du Québec, et ce, au sens qu'elle permet de contrôler sur
notre territoire la perception des deniers publics du gouvernement
fédéral." C'est toujours M. Filion qui parle, M. le
Président. Il faut se rappeler de ça. "En d'autres mots, cette
première entente d'harmonisation - la conclusion, M. le Président
- de la taxe sur les produits et services avec le gouvernement central est un
premier pas qui, s'il est bien exécuté, peut procurer aux
Québécois un plus grand contrôle des deniers publics
fédéraux et, par conséquent, un plus grand pouvoir de
négociations éventuelles pour favoriser une autonomie fiscale
plus grande aux Québécois, et ce, tout en recherchant de
façon constante une simplification de la vie fiscale des contribuables
québécois." J'ai l'impression que M. Filion, qui est un expert
spécialisé en fiscalité, étant associé
à un bureau de consultation, M. le Président... C'est son point
de vue, comme d'autres experts peuvent effectivement avoir leur point de vue.
Mais il y a une chose qui est certaine, c'est que ce M. Filion là est de
même philosophie politique que ces gens qui essaient de bloquer
constamment un projet de loi. On retrouve tout de même, M. le
Président, des gens qui ont effectivement un point de vue
différent.
Juste rappeler aux gens de l'Opposition que la volonté politique
du gouvernement libéral a toujours été, M. le
Président, la saine gestion des finances publiques. Au gouvernement du
Québec, M. le Président, notre prioriété a
été de constamment contrôler le déficit. Depuis que
nous sommes au pouvoir en 1985, M. le Président, nous avons
réussi à diminuer, à baisser, à contrôler le
déficit. Ces gens-là, pendant neuf ans, ont taxé
année après année, M. le Président, la population
du Québec, et cela, toujours en augmentant le déficit du
gouvernement du Québec. De 5 000 000 000 $ avant 1976, on a
réussi à accumuler 30 000 000 000 $ en 1985.
M. le Président, tout simplement pour vous dire en terminant que
l'objectif du gouvernement, qui est celui d'harmoniser la taxe sur les produits
et services, nous permettra de toujours maintenir cette saine gestion des
finances publiques, et cela, comme le disait le fiscaliste, M. Filion, pour
mieux permettre une saine fiscalité au Québec. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. Je reconnais maintenant sur cette motion M. le
député de Gouin. M. le député de Gouin, vous avez
la parole.
M. André Boisclair
M. Boisclair: M. le Président, j'interviendrai, d'une
part, sur la motion de clôture et, deuxièmement, sur le fond de la
question qui est celui de la TPS. D'entrée de jeu, j'aimerais dire au
député de Limoilou que, lorsqu'on est pris pour justifier les
gestes de l'actuel gouvernement à prendre ceux du gouvernement
antérieur, je peux vous dire que ce n'est pas très très
convaincant. Mais je suis convaincu que ceux qui nous écoutent ce soir
à la télévision, malgré l'heure tardive, ont
déjà rapidement compris la faiblesse de l'argumentation du
gouvernement. Parce que, lorsqu'on est pris pour invoquer les gestes du
gouvernement passé, pour invoquer les décisions qui sont prises
par l'actuel gouvernement, sans parler sur le fond, sans parier des
conséquences de la TPS sur des industries fragiles, celle du meuble,
celle du vêtement, celle des périodiques, celle des journaux, la
liste pourrait être longue, je peux vous dire que ce n'est pas
convaincant et que les gens ont rapidement compris l'opération de
maquillage et l'opération de camouflage auxquelles se livrent les
membres du gouvernement. On n'en a pas beaucoup parié, mais vous qui
siégez tous à cette Chambre... M. le Président, vous vous
en rappelez sûrement parce que vous étiez présent à
ce moment-là, on avait convoqué les parlementaires pour discuter
du prolongement de l'autoroute 30 à Kahnawake en pleine crise
amérindienne. On avait convoqué d'urgence aussi les
parlementaires pour discuter de la Commission sur l'avenir constitutionnel du
Québec. Et, oh! surprise! on nous apprend comme ça, à la
toute dernière minute, que le ministre des Finances fera une
déclaration ministérielle dans laquelle il va se livrer pieds et
mains liés devant le gouvernement fédéral. Il va laisser
tomber toute la marge d'autonomie que le gouvernement du Québec avait,
va se plier derrière la décision de son grand frère au
fédéral, va décider de s'harmoniser et de prendre les
mêmes règles et, dans le fond, les mêmes décisions
que le gouvernement fédéral a prises.
M. le Président, le député de Limoilou, tout
à l'heure, nous disait que Québec n'avait pas le choix. Qu'il
nous explique donc ça, Québec n'avait pas le choix. Est-ce que
vous êtes capable, M. le Président, ou vous, les membres
libéraux, les députés ministériels, de m'expliquer
comment ça se fait que le Québec est la seule province qui s'est
livrée aussi rapidement derrière le gouvernement
fédéral? Qu'est-ce qui s'est passé en Ontario? Le
député de Limoilou pourrait me répondre à
ça. Si je pouvais lui poser une question en fonction de notre
règlement, il me fera plaisir de le faire. Vous m'indiquez que non.
Hélas! je ne peux pas le faire.
Qu'est-ce qu'ils font en Ontario? Qu'est-ce qu'ils font en
Colombie-Britannique? Qu'est-ce qu'ils font au Manitoba? Qu'est-ce qu'ils font
en
saskatchewan? quelle autre province a décidé de
s'harmoniser? où est-elle, l'urgence, m. le président? où
est le problème? il n'y a personne dans cette chambre, il n'y a pas un
député ministériel qui a répondu à cette
question. mais ce qu'on sait, par exemple, c'est que le gouvernement a
décidé, sans consultation, en pleine crise amérindienne,
caché derrière les barricades, rapidement de s'harmoniser avec le
gouvernement fédéral. l'ineffable député de
vaudreuil et responsable du conseil du trésor me dit: ridicule. bien,
s'il trouve ça ridicule, il enverra une lettre ouverte à pierre
gravel de la presse. il enverra une lettre ouverte, il fera valoir son
point de vue. pierre gravel de la presse, m. le président: "le
moins qu'on puisse dire, c'est que ce n'est pas très courageux. trop
heureux de voir l'opinion publique concentrée sur le dossier autochtone,
m. levesque s'est caché derrière les barricades mohawks pour
annoncer une mesure impopulaire qui, dans ce contexte, prend à tort
l'allure d'une fraude. comme si le gouvernement, qui n'en avait pas vraiment
besoin, avait raffiné, au contact des warriors, sa propension au
camouflage." c'est m. gravel aussi qui est ridicule et bien d'autres
éditorialistes qui appuient le point de vue de l'opposition. et, encore
une fois, l'erreur des membres de ce gouvernement, c'est de croire qu'on est
les seuls à se battre, qu'on est les seuls à s'inquiéter
des conséquences de la tps, qu'on est les seuls à
s'inquiéter d'une harmonisation complète avec le gouvernement
fédéral. parce que, oui, m. le président, ça
n'aurait pas été simple que de faire un certain nombre de
distinctions en fonction de l'importance collective et sociale des
différents biens et services, oui, ça aurait suscité des
critiques, oui, ça aurait suscité, bien sûr, un certain
nombre de commentaires. mais si on avait eu un gouvernement qui avait eu le
courage de se tenir debout, qui avait eu le courage aussi de faire la part des
choses, de dire qu'on ne taxe pas un billet de théâtre de la
même façon qu'on taxe une automobile, qu'on ne taxe pas un livre
de la même façon qu'on taxe une maison et qu'on ne taxe pas non
plus un crayon ou une pomme de la même façon qu'on taxe un bateau
à moteur. (1 h 10)
II me semble, M. le Président, qu'il y a bien des gens qui ont
compris ça au Québec et qu'il y a bien des gens aussi qui se
demandent comment ça se fait que le gouvernement, lui, n'a pas compris
ça. La question de l'harmonisation n'est pas négligeable, M. le
Président, mais il aurait fallu faire preuve d'un peu de courage, d'un
peu de lucidité pour répondre à ces questions-là.
Et, en plus de ça, ce qui est le plus drôle, c'est que le
gouvernement l'a en partie compris. Qu'est-ce qu'ils ont fait de la taxe sur le
livre? Ils ne l'ont pas exemptée de façon très claire, ce
qu'ils font, c'est qu'ils vont l'imposer, la taxe, puis qu'ils vont la
redonner. On va avoir sur la petite facture, lorsque quelqu'un achètera
un livre 20 $: plus 7 %, plus 8 %, moins 8 %. alors, finalement, il ne se
trouvera pas à payer la taxe. si on l'a fait pour le milieu du livre,
pourquoi ne le ferait-on pas pour d'autres industries? qu'est-ce qui a
justifié qu'on donne une attention tout à fait
particulière au livre? soit! les gens de l'industrie, soit! les
québécois et québécoises se sont mobilisés
derrière cette industrie fragile, grâce à la
persévérance de l'actuelle ministre des affaires culturelles, de
la ministre de l'enseignement supérieur et de la vice-première
ministre qui ont toutes occupé le portefeuille du ministère des
affaires culturelles. nous avons décidé, à cette
assemblée nationale, d'exempter le livre. mais si on le fait pour le
livre, m. le président, les billets de théâtre, les
activités culturelles? notre grande propension, m. le président,
à constituer une société distincte, sur quoi repose-t-elle
si ce n'est sur notre dynamisme culturel, sur le rayonnement que nos
activités culturelles ont partout dans le monde, pas rien qu'à
montréal, pas rien que dans les régions, pas rien qu'à
québec, partout à travers le canada et à la grandeur du
monde? un billet de théâtre - la ministre des affaires culturelles
me regarde et m'écoute avec beaucoup d'attention - 25 % de taxe; 10 % de
taxe d'amusement, taxe municipale, 7 % plus 8 %, donc 25 %, m. le
président, pour 1992, 25 %. est-ce que quelqu'un peut m'expliquer, en
cette chambre, comment on a pu en arriver à cette
décision-là? comment on a pu en arriver à décider
de taxer à 25 % un billet de théâtre, alors qu'on taxe
l'essence, à quoi, 16 %, 17 %, 18 %? m. le président, 25 %, sur
un billet de théâtre, 25 % sur des billets de concert, 25 % sur
toutes les manifestations culturelles qui se tiendront. ça doit nous
laisser songeurs. je ne peux croire que les députés
ministériels vont se lever tout à l'heure et tous applaudir le
ministre lorsqu'on votera sur la motion que nous discutons ce soir, m. le
président. ça doit vous laisser songeurs, vous avez dû en
discuter entre vous. est-ce qu'il vous faut un autre conseil
général du parti libéral? est-ce qu'il vous faut un
caucus? qu'est-ce qu'il vous faut pour vous faire réfléchir sur
ces questions-là?
L'Opposition, M. le Président, a essayé, de façon
légitime, en utilisant les moyens parlementaires qui étaient
à sa disposition, de demander au ministre du Revenu de convoquer un
certain nombre de groupes. L'objectif, M. le Président, ce
n'était pas de retarder de façon indue les travaux de la
commission parlementaire du budget et de l'administration qui étudiait
le projet de loi 89. L'objectif, c'était d'illustrer et de faire
comprendre aux députés ministériels les
conséquences de leur choix d'imposer, sans distinction, la taxe de vente
du Québec. On nous a dit non, M. le Président. Après
quelque 20 heures de débat, on vient nous imposer un bâillon. Un
bâillon,' ça, ça veut dire, M. le Président, que
l'Opposition ne pourra plus s'exprimer, ne pourra plus faire valoir les
intérêts des Québécois et Québécoises
quant aux conséquences de ce projet de loi là. Le gouvernement,
soit!, M. le Président, a la responsabilité de prendre un certain
nombre de décisions. Nous, comme parlementaires, à la fois ceux
du gouvernement et ceux de l'Oppostion, nous avons la responsabilité de
légiférer. Nous avons aussi la responsabilité de
questionner les contenus des projets de loi. C'est pour ça qu'on a
été élus en cette Chambre, pas pour discuter sur des
motions de censure.
M. le Président, vous le savez comme moi et je suis convaincu que
si vous pouviez parler sur cette question-là, vous le feriez et vous
appuieriez l'Opposition. Parce que, vous, comme gardien des droits des
parlementaires, M. le Président, vous savez jusqu'à quel point
les motions de clôture, dans le passé, ont toujours
été appliquées avec parcimonie. Mais avec ce gouvernement,
M. le Président, ce qui était l'exception est devenu la
règle, ce qui devait être appliqué de façon
très limitée, une fois de temps en temps, lorsqu'il y avait un
besoin urgent, on l'applique, M. le Président, à toutes les
sauces. Au lieu d'affronter les critiques de l'Opposition, parce que ça
fait mal, M. le Président, c'est tannant pour un gouvernement de se
faire dire qu'il n'est pas bon et qu'il se trompe, au lieu d'affronter les
critiques, M. le Président, ils ont décidé de nous fermer
le bec: Vous ne direz plus un mot, vous ne direz plus un mot. C'est ça,
M. le Président, la réponse aux critiques que les
Québécois et Québécoises formulent. Et les
préoccupations étaient légitimes. Ma collègue, la
députée de Taillon, l'a bien fait valoir. Dans l'industrie du
meuble, dans l'industrie du vêtement, 10 000 emplois ont
été perdus, M. le Président; l'an dernier à
Montréal, 200 entreprises qui ont fermé.
M. le Président, dans les 30 secondes qui me restent, j'aimerais
tout simplement rappeler que nous sommes encore pris à discuter d'une
motion de clôture, nous sommes pris à essayer de nous
défendre en discutant à 1 h 15; parce que ça ne fait
l'affaire de personne d'être ici à 1 h 15. Nous le faisons parce
que nous sommes convaincus que nous avons raison. Je suis fier - je terminerai
là-dessus - de faire partie d'une équipe qui a
décidé de défendre bien des gens, de défendre des
gagne-petit, de défendre ceux et celles qui n'ont pas de voix, de
défendre ceux et celles qui seront les premiers touchés par cette
taxe injuste, cette taxe chère, cette taxe complète dont bien des
Québécois ne comprennent pas encore la portée.
Je terminerai en disant que l'arrogance a ses limites. Ma seule
consolation que j'ai, ce soir, c'est de voir les sondages parce que,
rapidement, les gens d'en face, ils ne seront pas 95, ils vont être 24.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Alors, n'ayant
pas d'autres interventions, je suis prêt à reconnaître M. le
leader adjoint du gouvernement sur son droit de réplique de 10
minutes.
M. Daniel Johnson (réplique)
M. Johnson: M. le Président, les dernières paroles
du député de Gouin sont à tout le moins
prématurées, c'est le moins que je pourrais dire sans
exagérer, mais elles ont eu le mérite, dans l'ensemble de son
intervention, de s'éloigner passablement des discours tonitruants
auxquels la première partie des 14 interventions a pu avoir donné
lieu. Le député de Duplessis et le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques ont eu des paroles antiparlementaires, on s'en
souvient, vous leur avez demandé de retirer leurs paroles, M. le
Président. Le député d'Ungava nous a fait une
démonstration par l'absurde de situations absurdes dont lui seul a le
secret. Le député de Pointe-aux-Trembles a été
particulièrement tonitruant, mais nous avons eu quand même droit
à certains discours qui ont prétendu s'adresser au fond
même de la question.
On peut avoir fait des erreurs de fait et de droit, et je vais les
relever, M. le Président, mais il y en a une qui a été
commise absolument par tout le monde: c'est cette prétention que le
gouvernement se cache pour légiférer, alors qu'on a permis 37
heures de débat pour n'en arriver qu'à 3 articles. Il me semble
qu'on n'est pas vraiment cachottiers lorsqu'on permet, à raison de 12
heures en moyenne par article, à l'Opposition de vouloir discourir d'un
projet de loi. À ce rythme-là, pour corriger ce que mon
collègue de Verdun disait, ce n'est pas 31 jours, mais plus proprement
quelque chose comme 70 jours de débats ininterrompus qui auraient pu
avoir lieu à ce rythme.
Les erreurs de fait qui ont été commises sont de deux
ordres. Le premier quant aux circonstances qui voudraient que nous
introduisions cette taxe sans véritablement avoir fait une analyse de
son impact. Je relève immédiatement à l'endroit du
député de Gouin une erreur de fait fondamentale qu'il a faite,
celle de se demander comment il se fait que le Québec est la seule
province à avoir aussi rapidement emboîté le pas au
gouvernement fédéral afin de simplifier, moderniser, le
système de perception de taxes à la consommation. Nous l'avons
fait pour deux raisons.
Première des choses, nous nous soucions, à un point qu'on
nous envie comme gouvernement, de simplifier la vie des entreprises
québécoises. Si on peut se targuer qu'il y a un gouvernement au
Canada qui comprend ce qu'est l'entreprise, quelle est sa force
concurrentielle, comment elle doit administrer et simplifier sa gestion afin
d'être davantage concurrentielle, c'est bien le
gouvernement du Québec. Dans des réunions
interprovinciales, j'ai eu l'occasion moi-même - mes collègues,
mes prédécesseurs ont eu le temps de faire ça -
d'expliquer à nos homologues ce que nous faisons pour les entreprises du
Québec, et c'est à ce titre, M. le Président, que nous
avons introduit cette mesure.
Deuxièmement, pourquoi? Parce que les entreprises
québécoises sont d'abord et avant tout plus que toute autre au
Canada exportatrices et que le régime de taxation de la taxe sur les
produits et services et de la taxe de vente du Québec, qui s'harmonisent
à la TPS, favorise encore davantage les exportations. Nous exportons 40
% de notre produit intérieur brut; c'est la plus grosse moyenne, la plus
grosse part d'exportation au Canada. Pourquoi est-ce qu'on se priverait d'un
outil qui facilite la création d'emplois, les investissements, les
exportations, donc l'importation de devises dans notre balance commerciale? Ce
sont là les erreurs de fait qui ont été commises
constamment de l'autre côté dans ce débat, et jamais
n'a-t-on voulu parler de ces choses absolument fondamentales. (1 h 20)
L'autre erreur de fait tient au moment où nous aurions introduit
la taxe de vente québécoise et son harmonisation avec la TPS.
L'erreur de fait la plus énorme serait que nous avons attendu, si on en
croit les gens de l'autre côté, qu'il y ait un soulèvement
des Amérindiens à Oka et à Kahnawake avant d'introduire
cette mesure. L'absurdité la plus complète - et là, je
laisse les intervenants de l'autre côté essayer de le
démontrer - aurait été de demander la permission aux chefs
indiens, enfin aux Amérindiens et aux autochtones, de bien vouloir
suspendre les hostilités sur le pont Mercier afin que nous puissions
présenter, pour faire plaisir à l'Opposition, à un autre
moment que celui où nous l'avons fait ou dans d'autres circonstances,
quelque chose qui est à l'avantage des entreprises
québécoises. Comme absurdité, j'ai rarement vu des
discours comme ceux qu'ont tenus nos vis-à-vis, M. le Président,
qui ont glissé ensuite dans les erreurs de droit.
Les erreurs de droit qu'ils voudraient nous faire avaler: que ce qui se
produit dans ce dossier, c'est que le Québec abandonne dans les mains du
gouvernement fédéral ses pouvoirs d'administrer des taxes sur son
territoire, alors que tous reconnaissent à l'échelle canadienne
que c'est précisément le contraire qui s'est produit, qu'à
partir du moment où nous nous sommes dotés, nous, au
Québec, contrairement aux neuf autres provinces, d'un système de
fiscalité original que nous contrôlons davantage que n'importe
quelle autre province - qui, là aussi, leur donne l'envie de nous
imiter, mais elles en sont incapables, liées qu'elles sont par des
ententes qui livrent effectivement au gouvernement fédéral ces
pouvoirs-là - que nous complétons cette marche d'autonomie
fiscale entre- prise il y a au moins 40 ans afin, à ce titre-là,
d'administrer, sur notre territoire, nos impôts et ceux du
fédéral à l'égard de la taxe sur les produits et
services. Si on ne comprend pas ça de l'autre côté, on ne
comprendra jamais rien, M. le Président.
Il est évident qu'à partir de ce moment-là, si on
ne voit même pas quels sont les faits et quel est le droit, on ne
constatera jamais que ce qui est en train de se produire par la loi 89, c'est
une modernisation, une simplification, du système fiscal
québécois dans un environnement qui est déterminé
également par d'autres, qu'il s'agisse, sur le continent
nord-américain, des tendances qu'on observe chez nos voisins du sud ou,
dans l'environnement canadien, des gestes décidés par le
gouvernement fédérai auxquels nous devons nous ajuster.
Comme l'a dit, absolument pertinemment, un presque collègue des
députés d'en face, un candidat péquiste, fiscaliste de
renom, je présume de la région de Québec, qui
prétend qu'effectivement il fallait harmoniser; dans
l'intérêt des entreprises québécoises, des
travailleurs québécois, des institutions
québécoises, des investissements au Québec, des
exportations qu'on fait, de notre expertise, donc, et de son rayonnement, que
nous devions, pour appuyer les entreprises québécoises, nous
harmoniser. Et, à partir de ce moment-là, M. le Président,
il est bien évident que, de l'autre côté, comme le disait
le député de Gouin, il se sent bien seul, parce qu'on est
toujours seul quand on mène des combats d'arrière-garde.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je vais mettre
aux voix la motion proposée par le leader du gouvernement en vertu de
l'article 251 du règlement: "Que la commission du budget et de
l'administration, à qui a été confiée
l'étude détaillée du projet de loi 89, Loi modifiant la
Loi concernant l'impôt sur la vente en détail et d'autres
dispositions législatives, mette fin à ses travaux quant à
ce mandat dès l'adoption de la présente motion et fasse rapport
au moment prévu de la période des affaires courantes de la
séance qui suit celle au cours de laquelle aura été
adoptée la présente motion." Est-ce que cette motion est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Mme Juneau: Vote nominal s'il vous plaît.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vote nominal. Qu'on
appelle les députés!
M. Perron: M. le Président, en vertu de l'article 226, une
question de règlement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Quelle est
votre question de règlement à ce moment-ci?
M. Perron: Le déroulement du vote se rapportant à
l'article 226 qui se lit comme suit: "Le président invite successivement
à se lever les députés favorables à la motion, ceux
qui s'y opposent et ceux qui s'abstiennent. "Les députés se
lèvent tour à tour. Le secrétaire général
communique le résultat au président, qui le proclame à
l'Assemblée."
M. le Président, j'inviterais votre présidence à
permettre que les gens d'en face, c'est-à-dire les libéraux,
puissent pratiquer un vote libre sur cette loi qui taxe les
Québécois et les Québécoises.
Des voix: Oh!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ce n'est pas une
question de règlement, M. le député. Alors, qu'on appelle
les députés!
Des voix: ...vote.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Qu'on appelle les
députés!
Je mets aux voix...
Une voix:...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît,
M. le député.
Je mets aux voix la motion proposée par le leader du
gouvernement...
M. Perron: Vote libre.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît,
M. le député de Duplessis.
M. Perron: Oui, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît,
je vous demande votre collaboration.
M. Perron: D'accord.
Mise aux voix de la motion de clôture
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je mets aux voix la
motion proposée par le leader du gouvernement, en vertu de l'article 251
du règlement, intitulée: "Que la commission du budget et de
l'administration, à qui a été confiée
l'étude détaillée du projet de loi 89, Loi modifiant la
Loi concernant l'impôt sur la vente en détail et d'autres
dispositions législatives, mette fin à ses travaux quant à
ce mandat dès l'adoption de la présente motion et fasse rapport
au moment prévu de la période des affaires courantes de la
séance qui suit celle au cours de laquelle aura été
adoptée la présente motion."
Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se
lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Port neuf), Mme
Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Dutil (Beauce-Sud), M.
Côté (Rivière-du-Loup), Mme Robic (Bourassa), M. Middlemiss
(Pontiac), Mme Frulla-Hébert (Marguerite-Bourgeoys), M. Cherry
(Sainte-Anne), M. Johnson (Vaudreuil), M. Cusano (Viau), M. Houde (Berthier),
M. Maltais (Saguenay), M. Savoie (Abitibi-Est), M. Beaudin (Gaspé), Mme
Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel (Sherbrooke), M. St-Roch
(Drummond), Mme Pelchat (Vachon), M. Paradis (Matapédia), M. Marcil
(Salaberry-Soulanges), M. Leclerc (Tas-chereau), M. Poulin (Chauveau), M.
Tremblay (Rimouski), M. Kehoe (Chapleau), M. Fradet (Vimont), M. Charbonneau
(Saint-Jean), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Gautrin (Verdun), M. Khelfa
(Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M.
Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), Mme Boucher Bacon (Bourget),
M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M.
Camden (Lotbinière), M. Brouillette (Champlain), M. Bradet (Charlevoix),
M. Després (Limoilou), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), Mme
Loiselle (Saint-Henri), M. La-frenière (Gatineau), M. Lafrance
(Iberville), M. MacMillan (Papineau).
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui
sont contre veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Perron (Duplessis), Mme Marois
(Taillon), Mme Juneau (Johnson), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette
(Marie-Victo-rin), M. Paré (Shefford), M. Claveau (Ungava), M. Boulerice
(Sainte-Marie-Saint-Jacques), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M.
Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue),
Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière).
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui
s'abstiennent veuillent bien se lever.
Le Secrétaire: pour: 46 contre: 13 abstentions: 0
Le Vice-Président (M. Bissonnet): La motion est donc
adoptée. M. le leader du gouvernement.
M. Perron: 46, 46, où sont les autres?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous
plaît!
M. Pagé: M. le Président, pourriez-vous demander au
député de Duplessis, s'il vous plaît, d'être un peu
plus serein?
M. le Président, je vous prierais d'ajourner nos travaux à
ce matin, 10 heures.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, suite à
votre motion, les travaux... Est-ce que la motion est adoptée?
Adopté. Les travaux sont ajournés à ce matin, 10
heures.
(Fin de la séance à 1 h 35)