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(Dix heures dix minutes)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Veuillez vous asseoir,
s'il vous plaît. Merci. M. le leader adjoint du gouvernement, nous
procédons aux affaires du jour. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Bélisle: Merci, M. le Président. Je vous
demanderais d'appeler l'article 36 de notre feuilleton, s'il vous
plaît.
Projet de loi 109 Reprise du débat sur
l'adoption
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 36,
l'Assemblée reprend le débat sur l'adoption du projet de loi 109,
Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du
Québec. Je suis prêt à reconnaître M. le ministre des
Finances en droit de réplique.
M. Gérard D. Levesque (réplique)
M. Levesque: M. le Président, comme vous le savez, au
moment d'exercer le droit de réplique, on peut faire en sorte,
étant donné qu'on a le dernier mot, de même provoquer les
gens de l'autre côté, qui devront rester silencieux. On peut
profiter de cette occasion-là, comme d'autres l'ont fait lorsqu'ils
étaient de ce côté-ci. Loin de moi l'idée, M. le
Président, de profiter de cette occasion privilégiée pour
confondre les gens de l'autre côté, mais ils le
mériteraient, M. le Président. Us mériteraient
d'être confondus, tellement ils ont abusé du droit de parole,
tellement ils ont abusé de mesquinerie, pour employer un mot le plus
parlementaire possible, vis-à-vis des gens qui sont reconnus pour leur
compétence et leur dévouement au Québec. Je songe en
particulier à celui qui a été désigné et qui
est confirmé par ce projet de loi comme président de la Caisse de
dépôt, président et chef de l'exploitation. Ce que nous
avons entendu de l'autre côté de certains opinants ne
relève pas la qualité des débats ni l'objectivité
qui doit présider à toute intervention en cette Chambre.
D'ailleurs, la réplique la plus dure et la plus directe vis-à-vis
des opinants vient du chef de l'Opposition lui-même lorsqu'il a
qualifié M. Savard d'homme honorable à tous égards. Je
cite le chef de l'Opposition dans le jugement qu'il a porté sur ce grand
serviteur de l'État. Je demande aux autres membres de l'Opposition qui
sont intervenus avec des discours où ils ont laissé transpirer
leur partisanerie à rendre cette dernière complètement
aveugle, je demande à ces gens de relire le discours de leur chef afin,
au moins, de rendre justice à celui qu'ils ont attaqué d'une
façon, encore une fois, aussi mesquine.
M. le Président, ceci étant dit, je n'ai pas l'intention
d'insister sur ce point. Simplement, nous célébrons cette
année, le 25e anniversaire de la Caisse de dépôt et
placement du Québec, une institution dont nous sommes fiers. Je me
rappelle au tout début, lorsque nous avons créé cette
institution, elle était évidemment modeste, mais elle
était promise aux plus grands espoirs.
Notre premier ministre, M. Jean Lesage, avait réussi,
particulièrement lors d'une conférence
fédérale-provinciale où j'avais eu l'honneur de
participer, à convaincre le gouvernement fédéral alors
dirigé par M. Pearson et à convaincre ses homologues de faire en
sorte que le Québec ait son propre régime de rentes. Et par la
suite, ayant obtenu gain de cause dans cette lutte difficile qu'il avait
menée, il pouvait, à ce moment-là, faire en sorte de
donner naissance en cette Assemblée à la Caisse de
dépôt et placement du Québec qui, partie de zéro,
est maintenant rendue à près de 40 000 000 000 $ d'actifs.
Pour le Québec, il s'agit là d'un levier économique
d'une importance extraordinaire. Il y avait dans cette loi qui donnait
naissance à la Caisse de dépôt et placement du
Québec un mandat à deux volets et ce mandat a été
respecté depuis, fidèlement et loyalement, par tous ceux qui ont
eu à diriger la Caisse: protéger l'épargne des
Québécois et stimuler le développement économique
du Québec.
Nous avons eu, au cours des années, des gens de grande
qualité qui ont travaillé à l'intérieur de la
Caisse et cet hommage que je rends à tous ceux qui ont
évolué dans cette institution, M. le Président, je le
rends à chacun, même à ceux qui ont été
nommés par le gouvernement antérieur, même à ceux
qui avaient occupé des fonctions partisanes à l'intérieur
du Parti québécois et qui se retrouvent, encore aujourd'hui,
à la Caisse de dépôt dans des fonctions très
élevées, supérieures. Jamais, de ce côté-ci
de la Chambre, même lorsque nous étions de l'autre
côté, nous n'avons mis en doute la compétence et la
sincérité de ces gens-là simplement sur le fait qu'ils
avaient milité à l'intérieur d'un autre parti. Pour nous,
il n'y a pas de robe nuptiale, il n'y a pas des gens qui sont bons et
compétents parce qu'ils appartiennent à une formation politique,
il n'y a pas des gens à ne plus tolérer parce qu'ils
appartiennent à la formation politique qui nous fait face. M. le
Président, ce genre d'examen, ce genre de conclusion à laquelle
on peut arriver est extrêmement dommageable pour ceux qui veulent se
conformer à nos lois, par exemple, à la Loi régissant le
financement des partis politi-
ques. de l'autre côté, on est bien fiers de rappeler que
l'ancien premier ministre du québec avait, à un moment
donné, demandé à cette assemblée de passer cette
loi sur le financement des partis politiques et, du moment qu'il y a quelqu'un
du parti libéral qui se conforme à cette loi, qui en suit toutes
les règles, à ce moment-là, on dit: ii n'est plus digne.
\i n'est plus digne de quoi? de servir le québec? de continuer de servir
le québec parce qu'il s'est conformé à une loi dont on se
dit très fiers de l'autre côté? m. le président, si
on continue dans ce sens-là, on arrivera à une situation
déplorable dans le sens de la démocratie au québec. soyez
très prudents, de l'autre côté, d'abuser de cela.
Je dirai, cependant, M. le Président, que ce projet de loi a
donné l'occasion à l'Opposition de montrer son vrai visage. Et je
regrette infiniment qu'on ait agi ainsi. On se plaint qu'il y ait eu
clôture, M. le Président. On se plaint qu'il y ait eu
clôture, parce qu'on n'a eu que six heures en commission. Six heures,
pourquoi? Pour un article, M. le Président. Un article! Les autres
articles de ce petit projet de loi n'étant que des articles de
concordance.
Il n'y avait qu'un article dans le projet de loi et qui disait
qu'à la place d'un président on en aurait deux. Un
président, chef de la direction et un président, chef de
l'exploitation. Comme ça se fait régulièrement. Et tous
les jours, vous allez voir que dans les grandes sociétés, dans
les grandes institutions financières, dans les banques, partout vous
allez retrouver les mêmes fonctions. On se surprend, on se scandalise et
pourtant, même dans ce cas, les deux fonctions ne sont pas semblables. Il
y a un président, chef de la direction et l'autre sous sa
responsabilité; sous la responsabilité de ce dernier se retrouve
le président, chef de l'exploitation. (10 h 20)
Et on fait tout un plat, M. le Président, parce que ça ne
concorde pas avec les vues de l'Opposition. Et je dis encore une fois,
l'Opposition devra se rendre compte qu'elle a son rôle à jouer -
je suis bien d'accord - mais il va falloir qu'elle comprenne également
qu'elle n'est pas responsable de l'administration. Depuis 1985, la population
du Québec a confié au gouvernement actuel la
responsabilité de l'administration de cette province et il faudrait
qu'ils comprennent que nous avons à assumer ces responsabilités.
Nous les assumons pleinement dans le meilleur intérêt de nos
institutions. Et c'est le premier ministre, M. Bourassa, qui a annoncé
ces décisions le printemps dernier, et ce projet de loi ne fait
qu'entériner ce qui a été annoncé il y a
déjà plusieurs mois.
On fait comme si on était surpris de l'autre côté.
Mais ce n'est pas surprenant. C'a été une décision qui a
été réfléchie, qui a été
annoncée et à laquelle on a donné suite. À un point
tel que, même avant que ce projet de loi ne soit adopté, ne soit
même présenté, le conseil d'administration de la Caisse, le
conseil d'administration lui-même avait déjà
entériné une grande partie de cette décision en attribuant
les fonctions de chef de la direction à l'un et vice-président
exécutif et chef de l'exploitation à l'autre, sous la
responsabilité du premier.
Et, dans les circonstances, ceci ne fait que confirmer ce qui a
été annoncé et ce qui se vit, en réalité,
depuis. Alors, dans les circonstances, M. le Président, je me plais
à croire qu'étant donné l'importance de cette institution,
la Caisse de dépôt et placement du Québec, nous aurons
l'unanimité de cette Chambre pour faire en sorte... et c'est un appel
que je fais à l'Opposition officielle. J'espère que, maintenant
que l'on s'est donné à coeur joie dans des discussions presque
sans fin, on puisse, à ce moment-ci, dans l'intérêt
même de l'institution, retrouver la belle unanimité qui doit
s'articuler autour d'une institution dont nous sommes fiers, d'un
côté comme de l'autre de la Chambre, la Caisse de
dépôt et placement du Québec. Et c'est cette
unanimité-là que je réclame dans le sens de la
responsabilité collective, qui doit être la nôtre, de faire
en sorte que nous faisions confiance ensemble à cette institution
québécoise et qu'ensemble, dans un vote unanime, nous donnions
notre appui à la direction de la Caisse de dépôt faisant,
en même temps, confiance à l'avenir de cette importante
institution québécoise. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre
des Finances. Ceci met fin au débat sur le projet de loi 109. Est-ce que
la motion du ministre des Finances, proposant l'adoption du projet de loi 109,
Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du
Québec, est adoptée?
M. Bélisle: M. le Président, je vais vous demander
de reporter le vote à la période de questions des affaires
courantes cet après-midi.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, une motion. Le
leader demande que le vote soit reporté à la prochaine
période des affaires courantes, aux votes reportés. C'est
reporté à ce moment. Ça va?
M. Bélisle: Ça va.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Bélisle: Merci, M. le Président. Je vous
demanderais maintenant d'appeler l'article 7 de notre feuilleton.
Projetdeloi 116 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 7, M.
le ministre des Finances propose l'adoption du principe du projet de loi 116,
Loi modifiant de nouveau la Loi sur l'administration financière. Est-ce
qu'il y a consentement pour déroger à l'article 237 du
règlement?
M. Qendron: II y a consentement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. Est-ce
qu'il y a un intervenant sur la question du principe, M. le ministre des
Finances.
M. Gérard D. Levesque
M. Levesque: M. le Président, je vais simplement lire les
notes explicatives pour qu'au moins on sache exactement ce dont il s'agit, si
on est d'accord. Alors, c'est pour rappeler, évidemment, le contexte
dans lequel on se retrouve, maintenant qu'on est passés à un
autre sujet.
Ce projet de loi modifie la Loi sur l'administration financière
pour confirmer le pouvoir du ministre des Finances d'acquérir des
options, des contrats à terme et d'autres instruments financiers
déterminés par le gouvernement, et pour rendre incontestables
devant les tribunaux les transactions ainsi visées. Il autorise le
ministre à disposer de ces instruments, permet au gouvernement de
désigner les personnes habiles à signer les documents relatifs
aux transactions à conclure, et assimile les charges et dépenses
encourues à celles relatives à la régie du fonds
consolidé du revenu. Enfin, il autorise le gouvernement à
établir un régime d'emprunt et habilite le ministre des Finances,
dans le cadre de ce régime d'emprunt, à conclure les transactions
qui y sont prévues.
En termes plus clairs, il y a deux amendements. Nous les avions
présentés en commission parlementaire. L'Opposition s'est
objectée, non pas sur le fond des questions, mais sur la
recevabilité de ces amendements, prétendant... Et j'essaie de
traduire exactement ce qui s'est passé. Le député veut le
dire lui-même, d'accord, mais je pense que je peux traduire sa
pensée en disant que le député de Labelle avait
prétendu que ces deux amendements, même s'ils étaient
acceptables, devaient se retrouver ailleurs que dans le projet de loi où
on les avait présentés un peu comme des papillons, parce que le
principe n'était pas tellement conforme au principe du projet de loi
lui-même. Nous en avons convenu, après une décision de la
présidence, et, dans les circonstances, nous avons
présenté un autre projet de loi, et c'est ce projet de loi, qui
est de nature très technique d'ailleurs. Je pense, comme on dit dans
certains termes, qu'on ne se battra pas dans le métro à ce
sujet-là.
Le premier amendement vise simplement une confirmation du pouvoir du
ministre des Finances relativement à certains échanges de
devises, ce qu'on appelle plus communément des "swaps". C'est simplement
la suite d'une jurisprudence récente et nous avons cru bon de confirmer
les pouvoirs du ministre des Finances dans ces transactions. Dans le second
cas, il s'agit tout simplement d'une autre question technique qui touche
à un nouvel instrument financier et où, à ce
moment-là, on doit faire des ajustements d'ordre technique. Dans les
deux cas, ça a été discuté en commission
parlementaire. Même si ça n'a pas été adopté
comme tel, je pense que je vais laisser le député de Labelle nous
dire brièvement ce qu'il en pense, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Labelle, sur la motion proposant l'adoption du principe
du projet de loi 116. M. le député.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: M. le Président, juste quelques mots
pour dire qu'au cours de l'étude du projet de loi 2, qui portait sur la
création d'un fonds d'investissement, de placement, le ministre des
Finances s'est amené avec deux amendements qui ne concordaient pas avec
le principe du projet de loi. En quelque sorte, ça élargissait
beaucoup et ça touchait le fonctionnement du ministère. Quant au
contenu, nous n'avions pas d'objection, nous avions des questions à
poser, pas d'objection de fond, mais, compte tenu de l'expérience du
ministre des Finances qui a déjà été leader du
gouvernement et leader de l'Opposition, et qui nous amène de tels
amendements qui ne concordent pas avec le principe, je trouve qu'il a
essayé de nous en passer une petite vite, tout simplement. J'ai dit, un
peu la main dans le sac. Peut-être qu'il trouve l'expression
exagérée, mais c'est un peu ça qui se passe.
Cela étant dit, M. le Président, nous sommes d'accord avec
le fond, ça va donner de la flexibilité au ministère quant
à l'administration de son régime d'emprunt, ça va lui
permettre aussi de mieux traiter avec des financiers européens, en
l'occurrence, mais je veux simplement dire que nous sommes d'accord quant au
contenu avec les explications que nous avons reçues. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. Est-ce que la
motion proposée par le ministre des Finances, proposant l'adoption du
principe du projet de loi 116, est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
Commission plénière
M. Bélisle: Oui, M. le Président.
Conformément à l'article 243, je fais donc motion pour que ledit
projet de loi 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur l'administration
financière, soit déféré en commission
plénière pour étude détaillée. Je vous
avise, M. le Président, que, conformément à une entente
intervenue avec l'Opposition, il y a consentement pour procéder aux
écritures. (10 h 30)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a
consentement pour procéder aux écritures?
M. Gendron: Consentement, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): II y a consentement.
Est-ce que la motion de M. le leader du gouvernement proposant que
l'Assemblée se constitue à partir de maintenant en commission
plénière est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. En
commission plénière, est-ce que chacun des articles de ce projet
de loi est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Est-ce
que le titre du projet de loi ainsi que le projet de loi lui-même sont
adoptés?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors, de
retour à l'Assemblée, est-ce que le rapport de la commission
plénière est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
Adoption
M. Bélisle: M. le Président, je fais motion pour
que nous procédions à l'étape de l'adoption du projet de
loi 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur l'administration
financière, en vertu de l'article 256 de notre règlement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a
consentement pour déroger à l'article 230 du règlement en
ce qui a trait à l'adoption?
M. Gendron: II y a consentement, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. Alors, M.
le ministre des Finances propose l'adoption du projet de loi 116, Loi modifiant
de nouveau la Loi sur l'administration financière. Est-ce que cette
motion est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: M. le Président, je vous prierais
d'appeler l'article 33 de notre feuilleton.
Projet de loi 2 Adoption
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 33,
M. le ministre des Finances propose l'adoption du projet de loi 2, Loi
modifiant la Loi sur l'administration financière et d'autres
dispositions législatives. M. le ministre des Finances.
M. Gérard D. Levesque
M. Levesque: M. le Président, nous en sommes à
l'étape de l'adoption du projet de loi 2 qui, comme on le sait, a pris
un certain temps pour parcourir toutes les étapes. Nous avons
commencé ce projet de loi quelque part à l'automne 1989, pour
arriver aujourd'hui à l'étape de l'adoption. Hier, j'ai eu
l'occasion, au moment de la prise en considération du rapport de la
commission parlementaire, de faire certains commentaires. Je me permettrai
aujourd'hui, au moment de l'adoption, peut-être de faire un bref
résumé de ce projet de loi qui vise à implanter un
processus permettant le regroupement des emprunts des établissements des
réseaux de l'éducation, de la santé et des services
sociaux, ainsi que de ceux de certaines sociétés d'État,
et cela, évidemment, représente un moyen bien adapté
d'accroître l'efficacité de la gestion financière du
secteur public.
Comme le savent les membres de cette Assemblée, le contrôle
du déficit budgétaire est une tâche difficile à
réaliser, mais nécessaire si l'on veut maintenir les finances
publiques saines, un fardeau fiscal qui demeure compétitif et être
à même de redéployer nos ressources pour faire face aux
besoins nouveaux et croissants de la population.
Les moyens de limiter le déficit du gouvernement sont
généralement contraignants. Soit qu'on augmente les impôts
ou les taxes, ce qui accroît le fardeau du contribuable, ou qu'on
réduise les dépenses, ce qui s'accompagne trop souvent d'une
réduction dans les services offerts à la population.
Dans notre approche de la réduction des
dépenses, on doit donc d'abord être créatifs et
s'assurer que les processus mis en place pour faire face à nos
responsabilités sont les plus efficaces possible. Or, le projet de loi
2, Loi modifiant la Loi sur l'administration financière, présente
justement un moyen de réduire les dépenses gouvernementales sans
affecter le niveau de services offerts à la population. Cette
économie est réalisable par une simple révision du
processus d'émission des emprunts des organismes qui nous sont
affiliés et dont le service de la dette affecte les résultats
financiers du gouvernement.
M. le Président, voilà des motifs qui m'ont amené
à proposer, dans le projet de loi 2, une nouvelle formule de financement
à long terme pour les réseaux - éducation, santé,
services sociaux - et les sociétés d'État autres
qu'Hydro-Québec. Hydro-Québec va continuer de faire son propre
financement avec la coopération du ministère des Finances du
Québec. Mais je songe aux autres intervenants comme les commissions
scolaires, comme les institutions du réseau de la santé et des
services sociaux, comme les organismes du gouvernement, par exemple la
Société québécoise d'assainissement des eaux.
Les objectifs visés par cette nouvelle formule sont les suivants:
d'abord, élargir, dans un contexte où les marchés
traditionnels changent rapidement, le marché des titres d'emprunt des
organismes dont le gouvernement paie d'ailleurs le service de la dette ou dont
les résultats sont consolidés dans les siens; puis diminuer le
service de la dette des organismes emprunteurs et, en conséquence, la
subvention ou la baisse de revenu net correspondant du gouvernement; ensuite,
ne pas créer une structure trop lourde à administrer; et,
finalement, conserver les responsabilités respectives des divers
intervenants, notamment à l'égard de leur endettement.
Pour atteindre ces objectifs, le meilleur moyen est de faire emprunter
le gouvernement lui-même, qui est très connu d'ailleurs sur les
marchés financiers, dont les titres sont très liquides et qui
jouit des meilleures conditions parmi les emprunteurs du service public
québécois. Les montants de ces emprunts seront avancés
à un fonds spécial à partir duquel ils seront
redristribués sous forme de prêts aux organismes emprunteurs,
à savoir les réseaux dont je vous parlais il y a un instant et
les sociétés d'État autres qu'Hydro-Québec.
Les avantages de cette formule sont un élargissement important
des marchés pour les emprunts de ces organismes et une diminution
maximale des coûts de financement. En effet, les titres émis
étant plus liquides, ils seront plus attrayants pour les investisseurs
institutionnels et commanderont donc des rendements moins élevés.
D'autre part, le regroupement permettra de gérer globalement la
structure de la dette qui affecte les résultats du gouvernement et
d'utili- ser aussi les marchés étrangers pour financer les
besoins des réseaux sans faire courir de risque de change
spécifique à chaque emprunteur.
Une partie du marché de détail - ce qui préoccupe
certains - est actuellement sollicitée et pourra être
récupérée pour le financement du gouvernement en recourant
à des produits d'épargne adaptés pour ce marché. Le
reste du marché de détail, actuellement attiré, le sera
par le financement municipal. Cela devrait contribuer, parce qu'on sait que
nous avons apporté un amendement qui exclut les municipalités des
effets de ce projet de loi, à réduire leurs propres coûts
d'emprunt, en plus de faire en sorte que le regroupement des emprunts n'ait pas
d'effets négatifs sur l'industrie québécoise des valeurs
mobilières. (10 h 40)
L'impact prévu de la nouvelle formule en termes de
réduction des dépenses - et je tiens à le rappeler - est
très important. A terme, lorsque tous les emprunts auront pu être
regroupés - on a fait, évidemment, une évaluation de ce
que ça pouvait dire comme épargne pour le gouvernement du
Québec, pour ses institutions, pour ses organismes,
éventuellement pour les contribuables - on estime à 60 000 000 $
annuellement les économies réalisables sur les emprunts des
réseaux et des sociétés d'État excluant
Hydro-Québec. C'est loin d'être négligeable.
Le député de Labelle disait hier que, même les
petites économies, il faut s'en occuper. Je pense que, lorsqu'on ajoute
plusieurs petites économies et qu'on projette cela dans le temps, on
arrive à une somme non négligeable, en effet, de 60 000 000 $,
selon les estimés du ministère des Finances.
Les coûts de gestion seront maintenus au minimum puisque ce sera
le ministère des Finances qui continuera de s'occuper des emprunts du
gouvernement et des emprunts qui transiteront par le nouveau fonds de
financement. Le regroupement des emprunts, loin de représenter une
contrainte, représentera une option avantageuse qui accroîtra la
flexibilité dont pourront bénéficier les opérations
de financement du secteur public, ce qui en permettra évidemment une
gestion plus optimale.
Ainsi, le gouvernement continue de rationaliser ses dépenses, en
augmentant l'efficacité de sa gestion, et de satisfaire les besoins de
la population en redéployant ses ressources et en éliminant les
dépenses improductives.
Je soumets donc, M. le Président, le projet de loi 2 à
l'Assemblée nationale pour son adoption. Je remercie tous ceux qui, au
cours, non pas des mois, mais des années, puisqu'on a commencé en
1989 et que nous sommes bientôt en 1991, se sont penchés sur ce
projet de loi et qui ont contribué à le bonifier, espérant
toujours cependant que l'expérience puisse nous aider dans l'avenir et
faire en sorte que nous puissions
arriver à des conclusions plus rapidement dans
l'intérêt des contribuables. Mais je remercie tout de même,
encore une fois, les membres de cette Assemblée et également les
membres de la commission parlementaire et tous ceux et celles, encore une fois,
qui ont eu à apporter leur contribution à l'étude de ce
projet de loi. Je formule le voeu que nous puissions atteindre les objectifs
que nous nous proposons et que nous pourrons voir se réaliser, dans
l'intérêt des contribuables du Québec, les économies
que nous avons estimées. Et même nous espérons que cela
dépassera les estimations du ministère des Finances afin, encore
une fois, d'aider davantage les contribuables du Québec.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre
des Finances. Alors, sur cette motion du ministre des Finances proposant
l'adoption du projet de loi 2, je suis prêt à céder la
parole au député de Labelle. M. le député.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: Merci, M. le Président. Alors, nous en
sommes à la dernière étape de l'adoption du projet de loi
2. Comme le ministre des Finances l'a souligné, il y a longtemps que ce
projet de loi est sur la planche à dessin, 13 mois, 1 an et 1 mois,
puisqu'il avait été le deuxième déposé lors
de la session qui a suivi l'élection.
Je dois dire que je suis sûr aussi que le ministre des Finances
peut nous savoir gré de l'avoir freiné dans ses appétits
parce qu'il a eu l'occasion de bonifier son projet de loi. Par exemple,
lorsqu'il a essayé d'introduire deux amendements qui ont
été jugés non recevables par le président, vous
voyiez que son appétit avait grandi au fur et à mesure que les
mois passaient et qu'il avait trouvé lui-même des modifications
à son projet de loi. Il y a eu d'ailleurs plusieurs autres amendements,
mais je dois dire que c'est à ça que cela sert, des commissions
parlementaires, à bonifier des projets de loi. Nous avons joué
notre rôle, rempli notre rôle correctement, et ceci se voulait dans
le respect des règles.
Je voudrais aussi dire que le ministre des Finances lui-même
aurait eu intérêt à consulter, et c'est ce que nous lui
avons souligné d'entrée de jeu lorsqu'il a déposé
son projet de loi, qu'il devrait consulter le milieu qui était
affecté par ce projet de loi. Effectivement, l'Union des
municipalités est intervenue pour dire qu'elle avait
développé son propre marché de financement. Le ministre
s'est rendu à son argumentation sous la pression de l'Opposition. Alors,
voilà un exemple où, finalement, je pense, l'Union des
municipalités avait raison et le ministre s'est détaché un
peu de ses fonctionnaires qui voulaient tout embrasser, aller chercher tous les
emprunts de toutes les institutions publiques et parapubliques au
Québec, et on lui a fait valoir que, non, il y avait des
inconvénients à cela. Il s'est rendu à l'argumentation de
l'Union des municipalités. Voyons au moins un avantage de gagné
là.
Deuxièmement, le Mouvement Desjardins aussi est intervenu. Il y a
eu des échanges de correspondance dont nous avons eu copie, et je pense
que le ministre, le sachant, ne pouvait pas passer sous le boisseau le fait
qu'il y avait des questions qui se posaient par rapport à ce projet de
loi de la part du Mouvement Desjardins. On a pu établir en tout cas que
le gouvernement n'interviendrait pas dans des emprunts à court terme, et
je pense que ceci a été de nature à rassurer le Mouvement
Desjardins. On ne peut pas savoir si le ministre ne voulait pas aussi mettre la
main sur les emprunts à court terme; ça pourrait très bien
se passer, l'appétit venant en mangeant. Mais, quoi qu'il en soit, nous
avons, à l'heure actuelle, des garanties que le gouvernement
n'interviendra pas dans les emprunts à court terme et que les caisses
populaires, qui sont toutes proches des institutions, des hôpitaux, des
commissions scolaires et de toutes les institutions qui empruntent, vont
pouvoir continuer à faire des prêts à court terme, à
financer, à "faire du bridge", comme on dit, donc, le gouvernement se
confinant aux emprunts à long terme.
Il y a une commission scolaire importante, qui était la
commission scolaire de IHe de Montréal, qui a demandé à
être exclue parce qu'elle fait des emprunts, non pas de 1 000 000 $ ou 2
000 000 $, mais des emprunts importants, massifs de l'ordre de plusieurs
dizaines de millions à la fois; je pense que le dernier emprunt qu'elle
a fait était de l'ordre de 50 000 000 $. Alors, elle a demandé
à être exclue, mais l'appétit du gouvernement étant
trop grand, il n'a pas voulu l'exclure. Je voudrais simplement souligner que le
décalage entre le coût des emprunts du gouvernement et celui de
ces commissions scolaires, de cette commission scolaire en particulier, avait
tendance à se rétrécir.
M. le Président, nous trouvons que, dans ce projet de loi - nous
le trouvons toujours - le gouvernement fait une opération de
centralisation majeure qui va venir miner tous les marchés secondaires
des emprunts au Québec. Même si le ministre dit non, la
réalité est celle-là et le Conseil scolaire de l'île
de Montréal l'a très bien démontré, les
municipalités l'ont très bien démontré et elles ont
convaincu le ministre. Il a lui-même fait référence
à cela tout à l'heure en disant: Nous allons laisser le
marché secondaire aux municipalités. Donc, il a admis en quelque
sorte, et c'est pour ça que nous trouvons ça malheureux parce
que, en faisant cela, nous allons perdre une expertise importante au plan des
institutions parapubliques au Québec, même
publiques, mais surtout parapubliques, nous allons perdre ces
marchés et ces institutions vont perdre leurs contacts avec les
emprunteurs locaux, parce que ça existe encore, la relation entre les
prêteurs locaux et leurs commissions scolaires ou leurs
municipalités, ce qu'il a admis, ou l'hôpital du coin. C'est
important qu'il y ait ces contacts. (10 h 50)
Et quand on fait des discours sur la décentralisation, comme je
l'entends faire à l'heure actuelle, surtout en ce qui concerne les
municipalités, je pense qu'il doit tirer des leçons de son propre
discours et l'appliquer aussi aux commissions scolaires à qui ils ont
ouvert, ce gouvernement, le champ de l'impôt foncier, rouvert, en quelque
sorte, le champ de l'impôt foncier. Et donc, à terme, les
commissions scolaires pourraient jouer un rôle beaucoup plus important
dans le financement de leurs propres affaires, de leurs bâtisses, de
leurs équipements.
Alors, M. le Président, c'est pour ça que sur le plan du
principe du projet de loi nous étions contre et nous le restons. Les
explications ne suffisent pas. Et je voudrais simplement dire qu'il a vraiment
vraiment admis une chose, et c'est l'objectif même du projet de loi,
c'est de regrouper tous les emprunts. On peut dire que, oui, on peut regrouper
les emprunts, tous les emprunts de ces institutions au Québec. Mais
forcer le regroupement, c'est une chose; ça, c'est aller beaucoup plus
loin. Si vraiment c'était si bas que cela, il pourrait aussi continuer
et avoir d'autres incitations.
Ce que cela fera, M. le Président, c'est que nous assisterons
à des opérations de financement qui vont être des
opérations de financement massif et que le gouvernement, devant la
rareté des fonds et des prêteurs au pays ici au Canada - et je
l'ai amené hier, cette nuit, à en reparler de cette affaire -
suite au problème du financement du déficit canadien, va
être amené à aller de plus en plus souvent sur les
marchés étrangers tant qu'il pourra y aller. Et ça, c'est
un facteur. Je veux bien qu'il dise que les emprunts des commissions scolaires
sont en moyenne de 38 points de base de plus élevés, à un
coût plus élevé que ceux du gouvernement, mais ça
peut être à court terme. c'est vrai que les coûts
d'intérêts sur les marchés internationaux sont plus faibles
à l'heure actuelle. mais qu'est-ce qui nous garantit que ça va
durer longtemps? justement à cause de la faiblesse de la
crédibilité du dollar canadien, ce qui fait qu'aujourd'hui on est
obligé d'emprunter à des taux d'intérêt mirobolants,
des taux réels qui sont de l'ordre de 8 % environ, présentement.
c'est extraordinaire. mais on voit très bien qu'au fond, le gouvernement
fédéral court après son déficit et qu'il l'augmente
chaque année - c'est une boule de neige qui grossit - mais, à un
moment donné, il va y avoir une minute de vérité.
Et lorsque le gouvernement canadien sera acculé à faire
une dévaluation du dollar canadien, le coût des emprunts pourrait
être considérable et ses 38 points de base vont s'évaporer
en fumée. Et tout ce qu'on aura fait dans tout cela, c'est qu'on aura
démoli les marchés internes d'emprunts. Quelles que soient les
garanties qu'il prend pour se protéger contre de telles
opérations, de tels événements, le ministre des Finances
ne peut pas les couvrir entièrement. Et je pense qu'il prend des risques
en faisant cela et puis qu'il démolit les marchés internes. Il
fait fi de l'expertise qui va disparaître très rapidement parce
qu'elle sera inutilisée. C'a été très bien
démontré par l'argumentation du Conseil scolaire de l'île
de Montréal que, finalement, à cause de la création de ce
fonds spécial, il n'aurait aucun intérêt à
continuer, non seulement il n'aurait pas d'intérêt, mais il
n'aurait plus la possibilité de continuer, et donc eux-mêmes
n'interviendraient plus sur les marchés financiers. Donc, c'est vers
cela que l'on se dirige.
Je voudrais aussi, M. le Président, parler de ce fonds, la
création d'un fonds spécial. Est-ce que c'est simplement un fonds
comptable? J'en doute parce que, là, on est en train d'"efferves-cer"
dans la création de structures. Quand il y a un président, on en
nomme deux. On fait ça en cachette la nuit; on se garde la
réplique le jour, comme il a fait ce matin, en ce qui concerne le projet
de loi 109 et la Caisse de dépôt et placement.
Alors, est-ce qu'il y aura deux présidents dans ce fonds: un
président responsable de la direction et un autre - je pose une question
sur ce projet de loi - président et chef de l'exploitation? En tout cas,
il n'a pas été très loquace sur la structure qu'il voulait
mettre pour administrer ce fonds. Je les vois rouspétant, chacun sur
leur siège, ces membres du gouvernement qui sont là ce matin. Je
dirai qu'on n'est pas à l'abri de surprises. Mais je vais dire quand
même une chose. Il y a au moins une chose qui est faite correctement, en
l'occurrence. C'est que le fonds est créé avant qu'on nomme des
gens. Il a été créé avant qu'on nomme des gens, ce
qui n'avait pas été le cas au mois de juin en ce qui concerne la
Caisse de dépôt et placement.
On pourra voir venir les coups un peu plus. Est-ce qu'il y aura des amis
qui vont revenir là? Possiblement. Je pense que quelqu'un qui a des
opinions politiques a droit à des nominations, à gagner sa vie
comme tout le monde. Je suis d'accord. Encore faut-il bien surveiller la
manière et qu'au moins, en ce qui concerne les institutions importantes,
on se préserve de l'apparence des conflits d'intérêts,
qu'on s'en préserve à tout le moins. Mais il faut voir que, dans
ce fonds, il y aura des milliards qui vont transiter par année, des
milliards. J'espère que ce n'est pas une façon d'aller scinder la
Caisse
de dépôt et placement encore une fois. On en a
divisé la tête en deux et on voulait diviser ses opérations
en deux. J'espère que, dans ce fonds, on n'est pas en train, par la
bande, de faire transiter des fonds qui autrement seraient allés
à la Caisse de dépôt et placement, de sorte qu'on ferait
indirectement ce qu'on n'a pas pu faire directement, ce qu'on n'a pas voulu
défendre politiquement directement.
M. le Président, je pense qu'il s'agit là d'un geste plus
important qu'on ne pense. Ce fonds sera un fonds spécial.
J'espère que le gouvernement prendra toutes les mesures pour en assurer
la transparence, qu'il indiquera bien clairement les coûts que cela
implique et qu'on verra révolution financière administrative du
fonds au cours des années, de sorte qu'on n'aura pas de mauvaise
surprise. Et j'espère bien que les rapports qui découleront de
l'administration de ce fonds devront se faire en plein jour, clairement, et non
pas la nuit, avec des répliques que le ministre réserve le matin,
comme nous avons vu au cours du débat sur le projet de loi 109 sur la
Caisse de dépôt et placement où toutes les interventions,
tous les débats se sont faits le soir, la nuit.
Hier, il a commencé à 10 h 30, et on a vu que, ce matin,
on s'est ramené pour répondre aux objections, alors que les
critiques avaient eu lieu en forçant un débat de nuit. Dans le
cas du projet de loi ici sur la structure de ce fonds, j'espère bien
qu'il n'y aura pas trop de créations de postes, trop de voyages à
l'étranger, qu'on ne voudra pas centraliser trop loin et qu'on va quand
même laisser la tête des institutions parapubliques et des
commissions scolaires surnager a la surface de l'eau, qu'elles ne seront pas
complètement entre les griffes du ministre des Finances.
M. le Président, c'est vrai que ce projet de loi a
été étudié assez longuement en commission
parlementaire, mais le ministre a eu l'occasion de se frotter à la
réalité beaucoup plus qu'il ne l'aurait fait autrement. Je pense
même qu'il a appris des choses au cours de ces débats. Il a appris
son métier de ministre des Finances un peu plus, dans des recoins qu'il
ne connaissait pas. Et je suppose qu'il y a gagné. Les
municipalités y ont gagné et tout le monde y a gagné, je
pense bien.
M. le Président, pour ces raisons que je viens d'évoquer,
en particulier pour cet aspect de la centralisation des emprunts, pour ce
minage que l'on fera du marché des emprunts secondaires par la
création de ce fonds spécial, nous sommes contre ce projet de
loi, mais nous allons laisser le gouvernement prendre ses
responsabilités. Il a pris la décision de le créer; il en
portera la responsabilité vis-à-vis des institutions publiques et
parapubliques. Nous espérons qu'il n'y aura pas de coups durs, mais nous
craignons que l'avenir ne nous donne raison. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Labelle. N'ayant pas d'autres intervenants, je suis
prêt à reconnaître M. le ministre des Finances en vertu de
son droit de réplique. M. le ministre. (11 heures)
M. Gérard D. Levesque (réplique)
M. Levesque: M. le Président, très
brièvement. Encore une fois, je réitère mes remerciements
à tous ceux qui ont participé à l'étude de ce
projet de loi. Je ne pouvais pas m'attendre à ce que le
député de Labelle change son vote, étant donné
qu'il a décidé, l'an dernier, de voter contre, même s'il a
pris plusieurs minutes pour indiquer comment il avait travaillé à
bonifier la loi, comment il en était fier, etc. Il ne peut plus,
maintenant, changer d'opinion. Il est pris avec son vote de l'an dernier. Que
voulez-vous, M. le Président? Il aimerait bien voter avec nous, mais que
voulez-vous? Il est mal pris.
La deuxième chose qui est intéressante, c'est qu'il a
parlé de tout, à part l'essentiel. L'essentiel de ce projet de
loi, c'est d'épargner de l'argent aux contribuables, c'est d'essayer de
faire en sorte qu'on arrive à pouvoir économiser une somme
annuelle de 60 000 000 $. Mais ça, ça ne l'a pas frappé.
C'est curieux, le bien des contribuables, les façons de faire face
à une situation difficile, alors qu'on préfère changer
certaines procédures pour épargner de l'argent aux contribuables
plutôt que d'augmenter les impôts ou de réduire les
services, par une loi qui fait preuve de réalisme et de
créativité, on réussit, à ce moment-là,
à travailler dans le sens du bien de la population, à diminuer le
fardeau fiscal. Ces gens-là vont se déchirer la chemise chaque
fois qu'il y aura une augmentation d'impôt, de taxes directes ou
indirectes, ils vont crier s'il y a un service de moins à la population,
mais voici une façon de trouver 60 000 000 $ sans affecter les services
à la population, sans déranger aucunement qui que ce soit dans la
population, et là, on passe ça sous silence.
M. le Président, moi, je me demande ce qu'on fait dans
l'Opposition à part, tout simplement, critiquer pour critiquer. Voici
qu'on se félicite d'avoir pris le temps de préparer tout cela,
d'avoir convaincu le ministre de telle ou telle chose qui est très
bonne, une bonne bonne chose, et on se dit: Voici, nous avons pris le temps
nécessaire pour étudier le projet de loi parce que nous sommes
arrivés à des fins dont nous nous félicitons. C'est
très beau, mais on arrive à la fin et on dit: Étant
donné qu'on a voté contre au début, bien, on est encore
contre. Voyez-vous cette belle transparence, M. le Président! C'est le
contraire qu'on aurait dû voir. On aurait dû voir un
député de Labelle se lever et dire: J'ai le courage de mes
convictions. L'an dernier, j'étais contre pour telle et telle
raison,
cette année, je me rends à l'évidence, nous avons
si bien travaillé et nous sommes arrivés à une conclusion
heureuse dans l'intérêt des contribuables du Québec, et je
suis heureux de vous annoncer, comme député de Labelle, et j'ai
même convaincu mes collègues de l'importance qu'il y avait de
faire l'unanimité autour d'un projet qui aidait tellement la population
que l'on représente. On n'a pas eu droit à ça, mais, tout
de même, à la veille de Noël, je vous dis: Vous avez bien
fait tout de même, vous avez fait votre boulot, vous n'êtes pas
capables de dire que le gouvernement a raison. Vous ne pouvez pas dire que vous
avez tort, vous êtes obligés de continuer à
persévérer dans votre erreur, mais je vous dis tout de
même: Joyeux Noël!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre
des Finances. Alors, est-ce que la motion du ministre des Finances proposant
l'adoption du projet de loi 2, Loi modifiant la Loi sur l'administration
financière et d'autres dispositions législatives, est
adoptée?
Des voix: Adopté.
M. Gendron: Adopté sur division avec nos voeux de bonne
année.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur
division. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Oui, M. le Président. Je vous
demanderais d'appeler l'article 8 de notre feuilleton, s'il vous
plaît.
Projet de loi 120 Reprise du débat sur
l'adoption du principe
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 8,
l'Assemblée reprend le débat sur l'adoption du principe du projet
de loi 120, Loi sur les services de santé et les services sociaux et
modifiant diverses dispositions législatives. Je suis prêt
à reconnaître le premier intervenant, M. le député
de Labelle.
Des voix: Encore!
M. Jacques Léonard
M. Léonard: Merci, M. le Président. Voilà
pourquoi je souris. C'est que tout le monde rit parce que tout le monde me voit
encore. Pourtant, ce n'est pas moi qui occupe le plus le parquet de
l'Assemblée nationale, mais cela se produit ainsi parce qu'il y en a qui
font de longs discours. Je voyais le ministre des Finances tout à
l'heure, avant que je parle, intervenir, puis faire son numéro - je dois
le dire comme cela, sans le faire de façon péjorative - se
donnant des fleurs parce qu'il regrettait que l'Opposition ne lui en ait pas
jeté tout un paquet. Alors, je voudrais simplement dire que cela se
produit ainsi.
M. le Président, j'interviens sur le principe du projet de loi
sur la réforme de la santé et des services sociaux qui a
été proposé par le ministre et député de
Charlesbourg. Je sais que c'est un projet de loi sur lequel il a
travaillé longtemps. Depuis l'élection, en quelque sorte, que
nous entendons dire que M. le ministre fait ses devoirs,
réfléchit, consulte, a fait le tour du Québec et qu'il a
été à l'écoute. J'en ai eu des échos, aussi,
qu'il écoutait sans répondre à toutes sortes
d'intervenants, et je le comprends, parce que cette question des services
sociaux et des services de santé est très importante pour les
Québécois. L'on sait qu'en ce qui concerne simplement le budget
il s'agit de presque le tiers du budget du Québec, 11 000 000 000 $ sur
un budget de 35 000 000 000 $, donc une somme très importante qui va
à ces services, surtout qu'au-delà des aspects financiers la
santé et les services sociaux sont une préoccupation
considérable de la population au Québec et qu'il faut le
reconnaître, cela touche les gens au plus haut point. la santé, au
fond, c'est une préoccupation qui concerne tout le monde et qui va nous
concerner tôt ou tard, qui nous concerne moins quand nous sommes en bonne
santé, mais qui nous concerne beaucoup plus quand, nous-mêmes,
nous avons des problèmes de santé et quand nos parents, nos
proches, nos enfants ont des problèmes de santé. donc, je crois
qu'il faut bien voir qu'il s'agit là d'une réforme qui va les
toucher, qui va nous toucher tous et chacun à un moment donné ou
l'autre. c'est pour cela que nous ne pouvons pas laisser passer
inaperçu, nous ne pouvons pas laisser de côté un tel sujet,
c'est pour cela que tous ceux de l'opposition, ici, sont intervenus et
interviendront sur ce projet de loi pour dire ce qu'ils en pensent et comment
ils voient la question. ça fait partie de la démocratie qu'il en
soit ainsi.
C'est aussi un sujet très complexe, à mon sens, parce que,
lorsqu'on pénètre dans cet univers, il y a tellement d'aspects.
Cela touche nos enfants, comme je le disais, à partir de leur naissance,
alors qu'ils naissent, disons, le plus souvent qu'autrement dans les
hôpitaux, actuellement. Même, justement sur ce sujet, il y a un
large débat en ce qui concerne les accouchements à la maison;
simplement pour mentionner que, dès le départ, il y a des
débats dans la société sur ces services. Donc, nous
partons de là et puis, ensuite, au cours des années, lorsque nous
grandissons, lorsque nous vivons, lorsque nous approchons de la fin de la vie,
nous avons à toucher à différents aspects de tout ce
système des services de santé. Ce n'est pas toujours dans la
gaieté que cela se passe, pas toujours, lorsque l'on parle de la
santé, et généralement pas dans
la gaieté. La naissance, cependant, c'est peut-être le
moment le plus gai, mais dans d'autres cas ce n'est pas le cas.
Dans le cas des services sociaux, il s'agit aussi de voir toute la prise
en charge que fait la société de gens qui ne peuvent pas subvenir
à leurs besoins pour différentes raisons, parce qu'ils sont
défaillants sur le plan de la santé. Je pense que nous devons
nous arrêter à toutes ces affaires et que, lorsqu'on essaie
d'introduire une réforme, on s'attaque à un morceau qui est
très gros. Dans toutes les sociétés, c'est un morceau
très gros. (11 h 10)
Je voudrais simplement dire que, depuis les années soixante, nous
avons fait, à mon sens, des progrès considérables dans nos
soins de santé et nos services sociaux. Je me rappelle les débats
des années soixante, du début des années soixante, alors
qu'il se produisait une grande insécurité chez les gens, surtout
dans la classe moyenne, quant à l'assurance qu'ils auraient d'obtenir
des soins de santé et de pouvoir se les payer au moment où ils en
auraient besoin. C'était une préoccupation constante de tous les
citoyens. C'est une préoccupation qui est disparue, dans les termes
dramatiques que l'on connaissait à l'époque, qui est disparue en
ce qui concerne la possibilité financière des gens, de la
population d'y avoir accès. Nous avions fait une réforme qui
s'exprimait en termes d'accessibilité, en termes de gratuité, en
termes d'universalité. Je pense que ces réformes ont
été réussies. Il y a des problèmes, je l'admets,
qui existent depuis toujours, mais ces réformes ont été
réussies.
On nous dit aujourd'hui que le coût en est trop
élevé. Le coût en est élevé. Mais, justement,
il y a quelques jours, à la commission Bélanger-Campeau, on nous
affirmait que le coût de tous ces services est quand même moins
élevé au Québec qu'il ne l'est aux États-Unis, par
exemple. Nous avons ici un système de santé public qui peut avoir
ses défauts, mais qui comporte ses avantages, et des avantages majeurs.
Aux États-Unis, les chiffres, si ma mémoire est bonne, le
coût des services de santé est de 11,5 %, alors qu'au
Québec il est de 9,6 %. On rectifiera si nécessaire, mais c'est
quand même admettre que nos services sont moins coûteux. Et je
pense pouvoir dire qu'ils sont meilleurs qu'ailleurs, en tout cas plus
intéressants.
J'ai toujours attaché une certaine signification au fait, par
exemple, que nos personnes âgées, qui vont passer un certain
nombre de mois à l'étranger alors qu'elles sont à la
retraite, revenaient et tenaient à leur citoyenneté et au fait
qu'elles demeurent résidentes ici, au Québec, parce que les
services de santé y sont plus disponibles, plus accessibles, plus
universels et, finalement, qu'elles vivaient moins dans
l'insécurité que lorsqu'elles sont ailleurs, notamment aux
États-Unis. Donc, il faut admettre qu'il y a là un bon
système, malgré toutes les défaillances.
La question, si je comprends bien, c'est une question d'adaptation, une
question de révision, une question de coût parce que,
peut-être bien que, même s'ils coûtent moins cher ici, c'est
encore trop pour les épaules de nos contribuables, possiblement. Mais je
pense quand même qu'il faudrait y faire attention à deux fois et
bien voir les justes perspectives de telles réformes que l'on pourrait
amener, qui viseraient à trop diminuer les coûts parce qu'il peut
y avoir, en contrepartie, d'autres coûts qui surviennent alors qu'on ne
les voit pas présentement parce que l'on vit dans le système que
nous avons.
M. le Président, les objectifs de la réforme visent
à rendre les services beaucoup plus proches du citoyen, et je crois que
j'en suis. Vous admettrez que, s'il y en a un, au Québec, qui a fait des
discours sur la décentralisation, c'est celui qui vous parie. J'en ai
fait. J'ai eu l'occasion de réfléchir sur cette question. Je ne
dis pas que j'ai toujours tiré les bonnes conclusions, mais on m'en
avait tiré un certain nombre. Aussi, je vois évoluer la
situation, présentement, et je pense que ça s'en va dans le sens
de la décentralisation. Je crois que, dans le projet de loi du ministre,
il y a des choses intéressantes quant à cette affaire, quant
à cette dimension.
Je crois que faire jouer un rôle à des conseils
d'administration qui soient proches des citoyens, c'est une attitude correcte
qui va nous mener à adapter davantage les services au citoyen. Parce
que, lorsqu'il y a des éléments qui ne fonctionnent pas dans un
système, lorsque des citoyens sont malheureux par rapport aux services
qu'ils ont d'organismes comme les hôpitaux, les CLSC - mettez-les tous -
les centres d'accueil, lorsqu'ils ont des gens à qui se
référer, à qui poser des questions, au moins, ils peuvent
parler à des gens proches de chez eux, dans l'hypothèse où
nous procédons dans le sens de la décentralisation. J'en serai
toujours, M. le Président.
Je voudrais peut-être faire quelques réflexions sur cet
aspect des choses au ministre. Il crée une régie régionale
et la seule question que je me suis posée, c'est: Qu'est-ce que
signifiait le mot "région" dans une telle hypothèse? Est-ce que
ce sont les grandes régions administratives? J'ai eu l'impression que
oui, parce qu'on y mettait les CRSSS, on y mettait un certain nombre de
représentants de toutes ces régions. Effectivement, il s'agit,
finalement, d'une subdivision du ministère des Affaires sociales, mais
les gens peuvent parler plus directement à ceux qui les dirigent, ces
CRSSS ou ces organismes ou ces régies régionales. Je pense que
nous verrons, au cours de l'étude en commission parlementaire, comment
le ministre voit les choses plus concrètement dans le détail et
nous pourrons apprécier à sa juste mesure.
Mais je veux quand même profiter de
l'occasion de cette prise de position sur le principe du projet de loi
pour lui dire que c'est toujours dangereux, des régies régionales
au sens des grandes régions du Québec. Parce qu'il peut
très bien se créer là un autre noyau de démocratie,
un autre noyau où les fonctionnaires bâtissent une structure
administrative très lourde, très imposante et qu'au fond on
risque de recréer en région des sous-ministères. La
question fondamentale que je vais poser sur cet aspect des choses, c'est: Quels
sont ceux qui vont être sur le conseil d'administration et qui vont
influer réellement sur les directions? Je me méfie de
délégations indirectes qui viennent là alors qu'elles sont
nommées pour autre chose et qu'elles viennent là comme
représentant d'un milieu. Ça peut être bon et ça
dépend aussi des gens qui le font. Vous pouvez avoir des membres sur des
conseils d'administration qui prennent l'intérêt de leur milieu,
qui comprennent les contraintes du gouvernement et qui essaient d'administrer
une telle structure dans le meilleur intérêt des concitoyens. Je
pense que nous assistons souvent à des preuves de
générosité, de service et de dévouement sur ces
conseils d'administration. Mais la question qu'il faut se poser, c'est: Est-ce
que la structure a une prise suffisamment bien branchée sur la
population pour qu'elle soit efficace?
Je voudrais souligner au ministre - et peut-être qu'il s'interroge
sur cette question - que, par exemple, aux États-Unis, lorsque les
Américains font des élections à la présidence des
États-Unis ou à tous les deux ans lorsqu'il y a des
élections au début de novembre, les Américains
élisent et votent pour beaucoup de ces personnes qui siègent sur
des conseils d'administration. Je voudrais que le ministre, à un moment
donné, puisse peut-être aller voir comment cela se fait aux
États-Unis pour élire des conseils régionaux comme ceux
qu'il veut mettre en place actuellement. À mon sens, il faudrait
regarder du côté des Américains pour voir comment on assure
la démocratie. Je ne dis pas que c'est un modèle parfait non
plus, aux États-Unis, mais je sais que les Américains prennent un
intérêt majeur aux élections, au Sénat, aux
élections de leurs chefs de police, aux élections de leurs juges,
aux élections de leur conseils d'administration, de ce qui est
l'équivalent des commissions scolaires ici, de leurs services sociaux,
de leurs hôpitaux. Je crois, M. le Président, que nous aurions
intérêt à voir ce système et puis à en tirer
les meilleurs éléments pour les appliquer ici. Voyez-vous, je
crois que nous devrons avoir une réflexion sur l'exercice de la
démocratie au plan local, régional au Québec. (11h20)
Je m'étonne, par exemple, pour parler d'un cas qui devrait aussi
avoir ses répercussions sur le domaine des affaires sociales, de voir
qu'on fasse des élections à des jours différents pour les
commissions scolaires et les municipalités. Pourquoi ne pas faire ces
élections le même jour? Et pourquoi ne pas profiter de ces
élections municipales pour faire des élections dans les
institutions d'affaires sociales et dans les structures comme celle que le
ministre nous propose actuellement? J'aimerais voir et je suppose qu'il
pourrait s'y adapter. Je constate, en tout cas, que le ministre a des
intentions d'aller dans le sens de la régionalisation, de la
décentralisation, mais, quand il emploie le mot
"décentralisation", ce dont je veux m'assurer, c'est qu'il ne s'agit pas
d'une simple déconcentration au niveau d'une grande région et
qu'il faut le faire au niveau d'une grande région seulement lorsqu'il y
a beaucoup d'homogénéité, que cela peut produire des
fruits concrets et que cela peut donner prise à un meilleur exercice de
la démocratie, à ce que les citoyens puissent avoir prise sur
leur conseil d'administration et sur la façon dont sont
gérées les institutions des affaires sociales.
M. le Président, je reviendrai sur un aspect de ce projet qui
fait que l'Opposition s'oppose actuellement, c'est cet aspect des revenus que
le ministre ou que le gouvernement veut aller tirer des coûts des
services sociaux. Je disais tout à l'heure que les coûts de notre
système sont ici moins élevés qu'aux États-Unis,
ils sont de 9,6 % au Québec et de 11,5 % aux États-Unis. Cela
indique que le système est déjà, à mon sens, assez
solide, qu'il économise les fonds des contribuables. Mais, là
où nous avons des réserves très sérieuses sur ce
projet de loi, c'est lorsqu'on introduit le fait que le citoyen qui va
bénéficier de services de santé dans certains secteurs, au
moment où nous nous parions, devra les ajouter à son revenu
imposable.
M. le Président, je sais et je constate malheureusement que le
ministre ouvre une porte qu'il aura de la difficulté à tenir
à demi ouverte. Donc, sur ce plan-là, le malheur, c'est
qu'aujourd'hui il nous annonce qu'il n'y a que quelques secteurs qui devront
être ajoutés au coût des soins de santé, mais
qu'à l'avenir rien ne nous garantit que, par exemple, l'an prochain il
n'élargira pas ses soins de santé, que i'an prochain il n'y a pas
un certain nombre d'opérations chirurgicales qui ne sont pas comprises
cette année dans cet impôt, que l'an prochain il n'élargira
pas cette porte, que des opérations chirurgicales ne s'y ajouteront pas,
que toutes sortes d'espèces de soins de santé dont le
contribuable a besoin ne seront pas incluses dans le revenu imposable du
contribuable. Nous trouvons ça malheureux et je le trouve, moi, cet
aspect très malheureux, parce qu'au fur et à mesure des besoins
financiers du gouvernement on va être porté à
élargir considérablement cette porte et à aller
récupérer chez les contribuables le coût des soins de
santé.
M. le Président, cela peut nous mener très, très
loin dans l'insécurité qui existait auparavant.
C'est là-dessus, je pense, que te gouvernement s'engage sur une
mauvaise voie, une voie qu'il aura beaucoup de difficultés à
éviter par la suite qui est que, finalement, dès que quelqu'un
aura des revenus, il ne sera plus un citoyen sur le même pied que
d'autres sur ce plan-là, il devra toujours payer, et on va retrouver
à terme ce qu'on trouve aux États-Unis parce que, si le citoyen
lui, paye, le réseau public, il va avoir tendance à aller se
chercher des soins strictement au privé. Donc, nous allons introduire un
système en concurrence et, lorsque, sur le plan public, on introduit
cette concurrence, on pourra voir diminuer la qualité des soins parce
que la structure mise en place va être de plus en plus lourde à
assumer alors qu'il y aura de moins en moins de contribuables qui y feront
appel. Ça, c'est vraiment un danger considérable. Je sais que
d'autres de mes collègues sont intervenus sur cet aspect des choses; je
crois que nous devons prendre garde de ne pas abolir à terme le
système que nous avons monté et dont nous sommes contents et dont
les citoyens, globalement, sont contents, je crois. Malgré les remarques
qu'ils font, malgré les critiques qu'ils font, je pense que les citoyens
trouvent que le système qui a été mis en place, en tout
cas, ceux qui se rappellent l'ancien système trouvent que le
système que nous avons, qui a été mis en place au cours
des années soixante-dix, est relativement satisfaisant, bien que nous
reconnaissions très bien que le ministre a fait une réflexion qui
s'imposait pour l'améliorer après les 20 ans qu'il
connaît.
M. le Président, pour ces raisons, comme l'ont dit mes
collègues et surtout pour cette question de l'accessibilité, de
l'universalité et de la gratuité des soins, nous allons voter
contre ce projet de loi en deuxième lecture. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): merci, m. le
député de labelle. toujours à l'étape de l'adoption
du principe du projet de loi 120, je cède la parole au
député d'arthabaska.
M. Jacques Baril
M. Baril: Oui, M. le Président. On m'a demandé de
parler sur le projet de loi 120, la réforme de la santé. Je vous
dirai tout de suite que, pour moi, depuis déjà plusieurs
années, le titre même est fou parce que tout notre régime
de santé au Québec, c'est plutôt un régime de soins
de la maladie et non un régime de soins de santé.
Plusieurs ministres ont passé et je l'ai dit à plusieurs
ministres, les budgets, l'enveloppe budgétaire du ministère de la
Santé, qu'on devrait appeler le ministère de la maladie, non pas
le ministère de la Santé, la grosse majorité de
l'enveloppe budgétaire de ce minlstère-là n'est pas
là pour prévenir la maladie, elle est là pour soigner la
maladie. C'est un des gros handicaps de la réforme qu'on a devant nous
actuellement parce que, dans les faits, cette réforme soi-disant majeure
ne corrigera absolument rien à ce que nous avons connu et à ce
que nous avons vécu depuis de nombreuses années. Plus on soigne,
plus on traite la maladie, évidemment, plus c'est payant pour les
professionnels soi-disant de la santé, mais plutôt les
professionnels de la maladie. Qui d'entre nous n'avons pas eu, malheureusement,
l'occasion d'aller soit à l'hôpital ou chez un professionnel
soi-disant de la santé et, quand tu arrives dans un cabinet de
médecin, souvent, tu n'as jamais le bon médecin et, lui, il t'en
recommande un autre, et, chaque fois que tu changes de médecin, il faut
que tu passes la carte. Donc, ce système de santé, qu'il faut
dire, tel qu'il est appelé, est beaucoup plus payant pour les
professionnels que pour les gens qui auraient besoin de prévention et
d'être beaucoup plus informés au niveau de la
prévention.
Le ministre de la Santé - je hais ça, je n'aime pas
ça dire le ministre de la Santé, mais il faut bien respecter le
titre de la loi - le ministre de la Santé nous a annoncé une
réforme majeure, mais qui ne répond pas à toutes les
attentes suscitées par ce projet de loi qu'il devait déposer. En
habile politicien, en habile vendeur, le ministre a donné un spectacle
beaucoup plus grand que la portée de son projet de loi en soi va avoir.
J'écoutais les commentaires d'une personne qui m'est proche, qui m'est
chère, mon épouse, qui était à la maison
lorsqu'elle a pris connaissance de la conférence de presse, si je peux
dire, du ministre Côté; elle-même a été
impressionnée, comme beaucoup d'autres, par l'attitude calme, l'attitude
dégagée du ministre, assis sur un petit banc durant trois heures
de temps, disant à ses commettants comment il pensait que la
réforme allait se faire. Tout au long de cette conférence, on
aurait facilement pu entendre voler une mouche, comme quoi les gens
étaient "captés" ou étaient en attente d'annonces
concrètes de la part du ministre. (11 h 30)
Plus on prend le temps d'analyser cette réforme, plus on
s'aperçoit qu'il y a des côtés négatifs à ce
projet de loi. C'est certain que ça doit être un peu, je ne sais
pas si on peut dire "décourageant"; je vais plutôt dire
"décevant" parce que je sais que le ministre n'est pas une personne
à se décourager facilement, mais ça doit sans doute
être un peu décevant parce que, nul doute, le ministre a
travaillé fort, il a dû travailler très fort pour arriver
à déposer cet avant-projet de loi. En prenant connaissance des
journaux dans les jours qui ont suivi cette annonce, je les ai pris au hasard,
M. le Président, on dit dans La Presse du 14 décembre:
"Médicaments: un retraité sur deux frappé par
l'impôt." Toujours dans La Presse du 11 décem-
bre: "Ottawa se refuse à taxer les malades." Ici, en passant,
ça devrait faire réfléchir le ministre lui-même
considérablement sur ses orientations politiques puisque, l'an
passé, il a été le premier à décrier
l'attitude du gouvernement fédéral dans le financement des
services de santé au Québec, puisque le gouvernement
fédéral s'était retiré de 157 400 000 $ exactement
pour la seule année fiscale 1990-1991.
Et la création d'un impôt-services, parce que cet
avant-projet de loi va créer un impôt-services, vise simplement
à compenser la perte de revenu à laquelle fait face le
réseau québécois avec le désengagement financier
croissant du gouvernement fédéral. Encore ici, M. le
Président, on vit un retrait progressif du gouvernement
fédéral face à ses responsabilités qu'il doit
prendre ou qu'il devrait prendre face aux Québécois et aux
Québécoises. Si, pour tous les fédéralistes qui
disent qu'on doit être, à travers ce beau et grand pays, le
Canada, traités tous sur un même pied d'égalité, on
pourrait, M. le Président, durant, j'allais dire, des heures et des
heures démontrer combien le Québec ou les Québécois
et les Québécoises sont traités inéqui-tablement
face à la volonté du gouvernement fédéral de se
retirer d'une multitude de champs d'activité, de coûts que
ça lui occasionne.
Et ce n'est pas pour rien qu'on s'aperçoit que, dans les
sondages, on est rendu à 65 %, 66 % de la population qui veut arriver
à la souveraineté du Québec, et je pense que le
fédéral a compris ça déjà depuis quelques
années, puisque, depuis quelques années, ce même
gouvernement se retire davantage de différents programmes d'aide ou de
support au développement en général, au Québec,
pour investir dans l'ensemble des autres provinces.
Dans le Journal de Québec du lundi 10 décembre: "La
réforme de la santé: au CLSC pour les petits bobos et à
l'hôpital pour les gros." Ici, en passant, je ne sais pas quelle sorte
d'aménagement physique il faudra qu'il soit fait au CLSC
Suzor-Côté, à Victoriaville, pour être capable de
dispenser une sorte - je ne sais pas si on peut l'appeler ainsi - d'urgence,
mais, en tout cas, tous les services. Les soins d'urgence devront être
dispensés par les CLSC et, physiquement, je ne sais pas comment on
pourra aménager un endroit pour établir un service d'urgence au
CLSC à Victoriaville, et quels en seront les coûts. Je crains que
ce soit uniquement qu'on déplace le problème de place, qu'au lieu
d'avoir un engorgement à l'Hôtel-Dieu d'Arthabaska on ait un
engorgement au CLSC Suzor-Côté. Donc, tu ne régleras pas le
problème et tu vas être obligé d'investir des sommes
d'argent considérables dans les immobilisations et l'aménagement
des équipements pour être capable de desservir une
clientèle. Si notre système d'urgence-santé, ou maladie,
au Québec était mieux structuré, mieux
réformé, on aurait pu sans doute encore davantage
améliorer la situation. dans le journal de québec
toujours: "les résidents et internes fourbissent leurs armes." dans
la presse du mercredi 12 décembre: "la réforme
côté escamote les services sociaux, déplorent les
travailleurs sociaux insatisfaits." dans le journal de québec:
"une réforme incomplète, selon la csn." dans le journal le
soleil du 14 décembre: "en attendant la réforme", et on peut
lire: "vingt ans après la loi sur le divorce, notre
société est profondément changée. elle n'a
cependant pas vraiment -pris les moyens de secourir les victimes des vents de
libéralisation qui ont balayé les vieilles valeurs protectrices -
ou répressives - de l'époque révolue. quand 40 % des
mariages finissent par un divorce, qu'arrive-t-il aux enfants issus de ces
unions? qui se préoccupe vraiment d'atténuer le mal qui leur est
fait? que signifient les statistiques d'échecs et d'abandon scolaire qui
révèlent que 37 % des filles et 45 % des garçons ne
franchissent pas la dernière étape du secondaire? qu'advient-il
des cas de ces 13 à 17 ans quand ils désertent l'école et,
souvent, le toit familial?" des ressources doivent pouvoir être
affectées à des interventions rapides et efficaces. et la
réforme côté semble beaucoup trop sur ses réserves
pour essayer de solutionner ces problèmes immédiats. et, au
niveau du suicide chez les jeunes, la situation économique actuelle ne
fait que rempirer la situation, le découragement des jeunes et, trop
souvent, nous avons à constater, dans notre milieu, qu'un jeune a mis
fin, malheureusement, à ses jours par découragement.
Et même la politique de réforme de l'aide sociale n'est pas
un encouragement à la vie de plusieurs de nos jeunes. Hier encore, une
personne de mon comté m'appelait parce qu'elle avait fini ses
études. Elle avait fini ses études, cette personne-là.
Elle avait tout suivi son cours de secrétariat et, avec le programme
d'aide de retour au travail, le programme PAIE, elle avait un emploi. Mais,
pour que l'employeur bénéficie du programme PAIE, il faut que tu
sois sur l'aide sociale. Il faut que tu sois au moins six mois, en plus, sur
l'aide sociale. Elle n'a jamais été sur laide sociale, parce
qu'elle a suivi ses cours qui prenaient fin dernièrement. Là
où elle est allée faire son stage comme étudiante,
l'employeur était intéressé à l'engager, mais le
fait qu'elle n'a pas droit à l'aide sociale, qu'elle n'a pas droit au
programme PAIE, elle n'est pas capable d'avoir cet emploi. Et pourquoi
n'a-t-elle pas droit à l'aide sociale? À cause de la
participation parentale, la contribution parentale. Elle est l'une des 2000
personnes, des 2000 jeunes au Québec, à peu près, qui sont
défavorisés à cause de cette fameuse contribution
parentale. Et, pourtant, le revenu familial est de 23 000 $, un petit peu plus
de 23 000 $. Comment voulez-vous, M. le Président, qu'une famille de
trois enfants, dont la plus vieille a 18 ans, que le parent ou les parents
puissent donner, selon les fameux barèmes d'aide sociale, allouer
à la plus vieille
de la famille 365 $ ou 370 $ par mois quand ils ont de la
difficulté à manger et à vivre eux-mêmes?
C'est une des aberrations du système. Et je reviens
là-dessus. Quand on parle du découragement de nos jeunes, cette
politique, cette réforme de l'aide sociale qui a été
décriée par tout le monde devrait être immédiatement
mise de côté ou révisée. On a fait un calcul tout
à fait comptable. On a fait un calcul comptable pour arriver à
ces barèmes-là. On ne s'est absolument pas soucié de
l'aspect humain des personnes et, dans la réforme actuelle de la
santé au Québec, c'est encore une étude comptable qu'on a
mise en place.
Et toujours dans le journal Le Soleil du 14 décembre, "Le
ticket orienteur inquiète le CRSSS de la région 03, entre autres.
Et malgré une perspective financière difficile, le gouvernement
devrait oublier le ticket orienteur et l'impôt-services. Car la
complexité administrative pour percevoir ce maigre 5 $ ne vaudra pas la
sensibilisation qu'il est censé donner aux citoyens d'aller aux CLSC
plutôt qu'à l'urgence de l'hôpital. L'impôt-services,
de son côté, risque fort d'empêcher une personne de
consommer un service de peur qu'il ne lui en coûte trop cher."
Dans le journal La Presse toujours du 14 décembre: "Les
organismes reliés à la santé s'inquiètent devant la
réforme proposée par Québec". Toujours dans La Presse
du samedi 8 décembre: "Avant les effets positifs, place aux effets
négatifs". Et on peut y lire un paragraphe: "Avant que les changements
ne soient visibles sur le terrain, il faudra attendre que les structures
bougent, que les règles du jeu changent, que l'on trouve de bons
entraîneurs et que les équipes augmentent leur performance. La
population pourrait bien ressentir les effets négatifs de la
réforme avant les effets positifs. Ainsi, elle aura à payer cette
fameuse taxe sur les médicaments et autres services avant même de
constater une amélioration dans les soins." (11 h 40)
Dans La Presse du samedi 8 décembre: "La réforme
Côté, un bulldozer chez les blouses blanches", comme titre. On
peut y lire: "Les monstres technocratiques que sont les CRSSS
disparaîtront au profit de nouvelles régies régionales, qui
se verront attribuer progressivement la gestion des services. Qui administrera
ces régies? Des représentants de divers milieux, choisis par des
assemblées régionales, dont les membres seront nommés par
le ministère - c'est un petit peu la forme des nominations au niveau des
CRSSS d'aujourd'hui - Ce modèle de semi-démocratie sera-t-il
fonctionnel? Ne risque-t-on pas de se retrouver avec les bureaucrates et
représentants d'intérêts divers déjà
familiers avec la mécanique des soins de santé?"
Sur ce, M. le Président, pour ce qui est de ma part, depuis que
j'entends parler de cette réforme, j'ai toujours été
très réticent sur la création de ces fameuses
régies régionales, parce que je considère que ça ne
changera absolument rien au problème. Pire, selon moi, ça va
l'aggraver, parce que ces régies régionales ne relèveront
pas du ministre, mais elles vont relever des assemblées
régionales. Donc, ce qui veut dire que le ministre n'aura aucun regard,
aucun pouvoir sur ces régies régionales. Pour être un
citoyen d'une sous-région, la région de Trois-Rivières,
comme on sait comment le centre régional de santé et de services
sociaux à Trois-Rivières a fonctionné depuis de nombreuses
années et continue à fonctionner encore, la majorité des
budgets en équipement ou en services vont du côté de la
rive nord ou sont maintenus du côté de la rive nord... Je peux en
témoigner parce que j'ai des copies ou des témoignages concrets
à vous fournir au niveau des centres d'hébergement pour les
personnes âgées, si je peux retrouver mes papiers. Ils sont
ici.
J'écrivais d'ailleurs au ministre Côté à ce
sujet, le 11 octobie dernier, parce que je pensais être capable de
régler le problème avec les gens du milieu. Je pensais être
capable de régler ce problème du sous-financement d'un foyer chez
nous, le foyer des Bois-Francs, un foyer de soins prolongés pour
personnes âgées. J'avais mis, pour une fois, ma confiance au
niveau du CRSSS régional qui, comme de raison, m'a prouvé, par
son geste de l'automne dernier, que son habitude se perpétuait
d'année en année. C'est pour cette raison que j'écrivais
au ministre, pour voir si on pouvait corriger la situation. Le
sous-financement, au niveau du foyer des Bois-Francs qui doit gérer
trois foyers, trois bâtisses, je dois dire, son budget de fonctionnement
est de 1 527 000 $ pour 35 postes et 61 places; sur la rive nord, le foyer
Monseigneur-Paquin, avec un budget de 1 950 000 $, 43 postes pour 63 places,
soit deux places de plus, 8 personnes ou 8 postes de plus, avec 350 000 $ de
plus. Voyez-vous où allait l'iniquité?
Le Centre d'accueil de Shawiniwan-Sud, avec un budget de 1 310 000 $, 32
postes, 43 employés. Voyez-vous encore une fois? Trois postes de moins
qu'à Plessisville, au foyer des Bois-Francs, avec tout près de 20
places de moins et un budget de même pas 200 000 $ de moins. On m'avait
assuré qu'au mois de septembre, au niveau de la région, une
augmentation des budgets, de l'enveloppe budgétaire leur serait
allouée, qu'on essaierait de corriger cette iniquité au niveau du
foyer. Et à ma grande surprise, quand est arrivé le mois de
septembre, le CRSSS a fait un calcul simple. Il a pris l'enveloppe
budgétaire divisée par tant d'établissements et il l'a
envoyée dans chacun de ces établissements. Donc, on n'a
absolument pas réglé le problème. Plus ça continue,
plus l'écart s'agrandit entre les différents foyers de la
région comparativement à celui de Plessisville. Pourtant,
quand les gens du CRSSS, et même de Québec, du
ministère, viennent visiter ces établissements qui
relèvent du foyer des Bois-Francs, c'est les grosses tapes dans le dos
et on dit: On ne peut pas comprendre comment vous faites pour administrer ces
établissements avec le peu de budget, avec le peu de postes que vous
avez; c'est extraordinaire, continuez comme ça, on va essayer de
corriger la situation.
Mais, M. le Président, tant les travailleurs et les travailleuses
de l'établissement que les parents des pensionnés n'en peuvent
plus et j'inviterais le ministre, avant que sa réforme ne soit en
application - parce qu'il a toujours un regard actuellement à faire au
niveau du CRSSS tandis que, quand les régies seront
créées, le ministre n'aura plus rien à dire - à
venir faire une petite tournée dans le comté d'Arthabaska et on
lui fera visiter ce foyer, le foyer des Bois-Francs à Plessisville.
M. le Président, me faites-vous signe que mon temps
achève?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.
M. Baril: Ce n'est pas long. J'aurais eu encore beaucoup de
choses à amener, mais je vais terminer en vous disant simplement qu'au
niveau du ticket modérateur et de ce fameux impôt qu'on
insère dans la réforme c'est un peu le bras dans le tordeur, et
le ministre va se faire bouffer par sa machine. C'est ça qui est un peu
triste, qui est un peu regrettable parce que, depuis quelques années, on
dirait que ce gouvernement se fait un malin plaisir à taxer et à
imposer les contribuables québécois.
Au niveau de différentes réformes, depuis un an, entre
autres, les Québécois ont au-delà de 1 000 000 000 $ de
taxes et d'impôts de plus à payer et le ministre des Affaires
municipales, encore une fois, tout dernièrement, annonçait lui
aussi sa réforme au niveau des municipalités pour retourner des
responsabilités aux municipalités. Je n'ai rien contre le retour
de ces responsabilités au niveau local, mais il faudrait que le ministre
ou que le gouvernement pense aussi, en même temps, non seulement à
donner des champs de taxation plus grands aux municipalités, mais
à se retirer de certains champs d'impôt, certains champs de
taxation. C'est toujours le contribuable qui paie. M. le Président, le
contribuable n'est plus capable de payer. Je ne sais pas quand ce gouvernement
va être capable de comprendre ça, d'arrêter de taxer et
d'imposer pour, au moins, être en mesure de faire respirer un peu les
contribuables.
J'aurais aimé, M. le Président, continuer. J'avais
d'autres chiffres comme quoi les familles sont moins à l'aise que dans
les années cinquante et soixante. Ça fait 30 ans. On est rendus
en 1990 et les familles sont moins à l'aise que dans les années
cinquante et soixante et le gouvernement continue à ignorer cette
situation en taxant davantage. mais vu que mon temps est écoulé,
m. le président, je vais m'arrêter ainsi et j'aurai sans doute
l'occasion de me reprendre à d'autres étapes de ce projet de
loi.
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député d'Arthabaska. Sur le même projet, je reconnais
maintenant M. le député de Gouin.
M. André Boisciair
M. Boisciair: Merci, M. le Président. J'interviendrai
quelques instants pour permettre au ministre de faire sa réplique. Ce
que j'aimerais tout simplement dire en débutant, M. le Président,
c'est jusqu'à quel point nous tenterons d'aborder le débat sur le
projet de loi 120 avec toute l'objectivité nécessaire lorsque
vient le temps d'étudier une réforme aussi importante que
celle-là.
Bien sûr, M. le Président, nous abordons l'étude de
ce projet de loi aussi avec fermeté. L'Opposition a fait valoir un
certain nombre de points de vue, particulièrement en ce qui a trait au
ticket orienteur, en ce qui a trait à l'impôt à rebours, en
ce qui a trait aussi au droit et à la protection des citoyens, un
certain nombre d'éléments où il nous apparaît
important d'aller plus loin ou, à tout le moins, remettre en question
les certaines prémisses qui ont servi à l'élaboration de
la réforme.
Cependant, M. le Président, je dois dire que le rôle de
l'Opposition n'est pas seulement non plus de s'opposer. Nous l'avons dit
à plusieurs reprises, il y a aussi plusieurs intervenants qui l'ont dit,
il y a des mesures qui, dans cette réforme, nous apparaissent
importantes à soutenir. Je crois qu'avant de faire la critique d'un
certain nombre de mesures il est important d'en soulever un certain nombre qui
nous apparaissent plus positives. D'abord, il faut le soulever, M. le
Président, cette réforme-là est l'aboutissement d'un long
processus qu'avait amorcé mon collègue, leader de l'Opposition,
M. Chevrette, et député de Joliette, alors qu'il était
ministre de la Santé. C'est donc dire que cette réforme aura
suivi plusieurs étapes avant, finalement, d'être débattue,
avant que, finalement, nous puissions en débattre au sein de
l'Assemblée nationale. (11 h 50)
M. le Président, effectivement, il y a un certain nombre de
mesures qu'il nous apparait important de soutenir. Entre autres, comme le
suggérait le rapport Rochon, l'esprit qui inspire la réforme et
qui vise à replacer le citoyen au centre des préoccupations du
réseau nous apparaît fondamental. Cependant, nous pourrions
débattre longtemps la notion de citoyen-payeur. Bien sûr, M. le
Président, aussi la reconnaissance des CLSC comme ressource de
première ligne et le rôle accru qui leur est
conféré. À cet égard,
par exemple, l'idée d'un service téléphonique
visant à répartir la clientèle 24 heures sur 24 et 7 jours
sur 7 est une heureuse initiative; et ça, je crois qu'il faut le
rappeler. Le corollaire de cette nouvelle orientation, soit l'implication
à la création des cabinets privés, devenait aussi, du
même coup, indispensable parce que, dans bien des cas, les CLSC ne sont
pas ouverts 24 heures et n'ont même pas les ressources pour accueillir
les gens. Alors, le corollaire entre les cabinets privés et les CLSC,
effectivement, devenait indispensable, et nous nous en félicitons.
La régionalisation et la décentralisation vers de
véritables régies régionales étaient des
recommandations majeures de la commission Rochon qu'avait endossées
aussi le Parti québécois dans son programme. Deux mises en garde,
cependant, s'imposent à ce niveau-ci: le partage des
responsabilités devra être énoncé très
clairement dans le texte de loi et il faudra éviter aussi
l'émergence d'une trop grande technocratie au sein de ces régies.
Je tiens aussi à soulever la façon assez originale avec laquelle
les gens seront nommés au sein de ces régies régionales,
le processus qu'on pourrait appeler de collège électoral, avec
une démocratie qu'on appelle directe, en ce sens que le ministre choisit
un certain nombre de personnes qui feront partie du collège
électoral, et ensuite, entre elles, elles s'éliront; ça
nous apparaît une formule qui sera respectueuse des intérêts
des différents intervenants dans le système de la santé et
des services sociaux.
Le financement des organismes communautaires sur une base triennale et
à partir d'enveloppes protégées. On se souviendra des
débats qui ont été faits à l'occasion de
l'étude en commission parlementaire de la politique
présentée par le ministre, soulevés par les organismes
communautaires. Alors, nous croyons que cette nouvelle attitude correspond
beaucoup mieux aux attentes du milieu. Par ailleurs, aussi, il ne faudrait pas
que la rédaction législative, la définition d'"organisme
communautaire" vienne contrecarrer les intentions du ministre.
Bien sûr, nous pourrions parler d'autres éléments
qui nous apparaissent positifs, par exemple, le rattrapage financier de la
deuxième génération des CLSC, la création d'un
poste de responsable de la santé publique, on parle aussi de
l'obligation des régies régionales de témoigner devant la
commission parlementaire des affaires sociales, à l'Assemblée
nationale, beaucoup d'autres éléments, entre autres, la lutte aux
foyers clandestins, qui est un problème grave, particulièrement
à Montréal, l'extension du service à domicile pour les
personnes âgées qui sont aussi en foyer privé ou en HLM,
donc, une série d'initiatives qui, effectivement, nous apparaissent
intéressantes. Et c'est sans gêne, M. le Président,
qu'à l'égard de ces dispositions il me fait plaisir de dire que,
oui, l'Opposition les appuie.
Cependant, M. le Président, j'aimerais insister, dans les
quelques minutes qui me restent, sur deux éléments. D'une part,
le ticket orienteur - certains l'ont appelé le ticket modérateur,
d'autres l'appellent le ticket orienteur, le ministre préfère
l'appeler le ticket orienteur - quant à nous, nous apparaît
inacceptable. Ce qu'il faut se rappeler, dans l'application de ce ticket
orienteur, c'est que quelqu'un qui se présentera dorénavant
à l'urgence, on aura à évaluer si ça vaut la peine,
effectivement, de le traiter à l'urgence ou si, plutôt, il ne
faudrait pas le réorienter vers d'autres services offerts par le
système de la santé et des services sociaux, que ce soit un CLSC,
que ce soit un cabinet privé. Dans la mesure où on estime que
cette personne ne devrait pas être traitée en urgence, elle pourra
payer 5 $ et se faire cependant toujours traiter à l'urgence.
Il y a un certain nombre de questions qui ont été
soulevées par mon collègue, le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue, concernant l'application de ces 5 $. D'une
part, il faut le souligner, et c'est important de le faire, c'est un accroc
grave au principe d'universalité qui a pourtant fait consensus au sein
de notre société. Mais, en plus de cela, je crois qu'il faut se
demander de quelle façon... C'est une solution qui créera deux
médecines, puisque ceux qui ont les moyens débourseront les 5 $
sans se poser de question et les autres seront refoulés vers les
services des CLSC. Comment, par exemple, les gens seront-ils à
même de juger leur état de santé? Un mal de ventre peut-il
cacher, par exemple, une appendicite? Qu'est-ce qui va faire, M. le
Président, que quelqu'un va décider de se diriger soit vers une
urgence, soit vers un CLSC? C'est sûr que, s'il estime que la situation
est assez grave, il se présentera à l'urgence; et, s'il a les 5
$, il pourra les débourser, sinon, il sera refoulé vers les CLSC.
Quant à nous, il s'agit là d'une situation et d'une solution
inacceptables au problème d'engorgement des urgences. Qui va
gérer, par exemple, la petite caisse? Qui va prendre la décision?
M. le ministre nous a souvent dit qu'il ferait preuve d'une grande souplesse
dans l'application de son ticket orienteur. Cependant, à ce jour, pour
avoir bien lu la réforme d'un bout à l'autre, d'un couvert
à l'autre, nous nous attendons toujours à un certain nombre de
mesures plus précises pour voir jusqu'à quel point on va
être capable d'appliquer cette disposition des 5 $. Qui va prendre la
décision quant à savoir s'il s'agit d'un cas d'urgence ou non?
Voici une question - et je me souviens encore du débat, à
l'occasion d'une période de questions la semaine dernière - le
ministre a un peu mis de côté cette question-là, nous ne
savons toujours pas, si ce n'est que le ministre dit qu'il fera preuve d'une
grande souplesse dans l'application de cette disposition-là, qui aura
à juger de la pertinence ou non de débourser ce frais de 5 $.
Aussi, M. le Président, je crois que c'est légitime
lorsqu'on tient compte de l'appétit vorace de ce gouvernement-là.
Qui nous dit, M. le Président, que ces 5 $, dans six mois, ne seront pas
devenus 10 $, ne seront pas devenus 20 $? Nous comprenons effectivement que
l'objectif des 5 $ n'est pas d'enrichir le système, n'est pas de le
financer d'une façon ou d'une autre. Nous comprenons bien que
l'administration de ces 5 $ va coûter, sans doute, des sommes importantes
et que, d'une façon générale, ce n'est pas une mesure qui
va favoriser le financement du système. Mais, cependant, qui nous dit
que, dans un an, dans deux ans, ça ne sera pas 10 $, ça ne sera
pas 20 $? C'est une ouverture, M. le Président - et je crois que mon
collègue, le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue,
l'a soulevé avec beaucoup de pertinence - qui, sans conteste,
amènera une remise en cause de la gratuité et qui se situe aussi
en ligne droite avec l'énoncé du ministre contenu aux pages 82
à 85 de son énoncé de politique.
En effet, M. le Président, plusieurs affirment, non seulement
l'Opposition officielle, mais plusieurs personnes qui ont eu l'occasion de
réagir récemment sur cette question-là, qu'il s'agit
là d'une épée de Damoclès qui est suspendue
au-dessus de la gamme des services assurés. Par exemple, M. le
Président, qui nous dit que, à l'occasion d'un débat en
Chambre ou à l'occasion d'une déclaration ministérielle,
le ministre ne nous annoncera pas une autre réduction des services aux
assurés? Peut-être qu'on pourrait redouter aussi un autre
coût semblable à celui de la TPS où, à la toute
dernière minute, le ministre nous annonçait, à l'occasion
d'une convocation spéciale en Chambre, l'orientation gouvernementale en
cette matière.
Alors, M. le Président, bien sûr, l'imposition d'un ticket
de 5 $ pourra modifier un certain nombre de comportements au niveau des gens.
Cependant, nous pouvons nous questionner jusqu'à quel point ce ticket
modérateur pourra régler les problèmes d'urgence puisque
ceux-ci sont essentiellement dus à la clientèle sur
civière et non à la clientèle déambulatoire. C'est
là l'un des constats d'une étude réalisée en 1985
pour le compte du ministère et réitérée dans le
rapport final du Groupe de recherche interdisciplinaire en santé et
remis au ministre en septembre 1989. Donc, voici un premier
élément, M. le Président, sur lequel il nous semblait
important de manifester une opposition.
Le deuxième, M. le Président, il s'agit maintenant de
l'impôt à rebours. Je prendrai quelques instants, parce que je
veux laisser le temps au ministre de faire sa réplique, mais il faut
quand même soulever qu'il y a une liste importante de nouveaux services
qui seront soumis à cette nouvelle mesure. Qu'il s'agisse des services
optométriques, qu'il s'agisse des services dentaires, qu'il s'agisse des
médicaments ou des services pharmaceutiques, des prothèses, d'ap-
pareils orthopédiques, dispositifs de fauteuil roulant ou autres
équipements, les aides visuelles, les aides auditives, les
prothèses mammaires externes - et on pourrait continuer, M. le
Président, pour citer plusieurs autres cas où cet impôt
à rebours sera imposé. Particulièrement, M. le
Président, ce que je voudrais souligner, c'est de dire jusqu'à
quel point il m'apparaît odieux d'imposer un impôt, par exemple,
à des personnes handicapées pour des prothèses. Il me
semble que ces gens-là, M. le Président, souffrent
déjà assez, dans la situation actuelle, de leur handicap sans
être pénalisés davantage par la société.
M. le Président, l'introduction d'un nouvel impôt à
rebours incitera aussi une dynamique viciée dans le système
puisqu'il aura un impact dissuasif sur les consultations préventives
telles que les examens dentaires pour enfants et les services
d'optométrie. Donc, d'un côté, on nous dit qu'effectivement
on veut favoriser la prévention, qu'on veut aller de plus en plus vers
des mesures préventives plutôt que vers des mesures curatives,
mais d'un autre côté, M. le Président, on adopte une
dynamique qui ne favorisera pas les énoncés contenus dans la
politique.
Donc, en conclusion, M. le Président, il y a bien d'autres
éléments sur lesquels j'aurai l'occasion de revenir, par exemple,
parler des personnes âgées, de la problématique de la
toxicomanie, revenir plus à fond sur la question de l'impôt
à rebours, mais je me limiterai, M. le Président, à ces
quelques remarques à l'occasion du débat de deuxième
lecture. Nous aurons, je présume, l'occasion de revenir avec le ministre
et nous attendons plus d'information à ce sujet. Mais, dès lors,
je crois qu'il est important de dire qu'il y a un certain nombre de mesures qui
nous apparaissent inacceptables. Évidemment, le plus grand danger pour
nous, c'est la remise en cause du principe de l'universalité et de la
gratuité des services de santé. (12 heures)
M. le Président, je conclurai sur l'énoncé de
politique qui remet formellement en question la gamme et l'étendre des
services assurés - c'est en page 82. Le ministre lève ainsi une
lourde hypothèque sur les acquis de la commission Rochon, que cette
même commission avait pourtant jugés intouchables. L'introduction
par surcroît d'un nouvel impôt, cet impôt à rebours,
est une mesure qui installe une dynamique viciée dans le système,
en ayant un impact dissuasif réel sur les consultations de type
préventif, tels les examens dentaires pour les enfants ou encore les
services d'optométrie.
M. le Président, il est aussi important de dire que nous
condamnons le choix du ministre qui refuse de déposer la politique de
santé et de bien-être avant que la nouvelle loi ne soit
étudiée. Ce non-sens, M. le Président, nous obligera
à forger l'outil sans savoir comment le gouvernement va l'utiliser.
Donc, il s'agit d'un certain nombre d'élé-
ments importants. Nous espérons avoir réponse à nos
questions et nous espérons aussi que le ministre conviendra avec
l'Opposition qu'il y a un certain nombre de bonifications à apporter
à sa réforme. Nous souhaitons, comme je le disais au début
de mon intervention, aborder l'étude de ce projet de loi avec toute la
sérénité et toute l'objectivité nécessaires,
mais aussi avec beaucoup de fermeté. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Gouin. Alors, je reconnais maintenant M. le ministre
pour lui permettre d'exercer son droit de réplique. J'ai besoin du
consentement, parce qu'on m'informe que vous disposeriez d'une période
de 30 minutes. Alors, est-ce qu'on a le consentement pour que M. le ministre
puisse exercer sa réplique pour une période de 30 minutes?
Des voix: Consentement.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre de la
Santé et des Services sociaux.
M. Marc-Yvan Côté
(réplique)
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. Évidemment, depuis presque deux jours et demi, nous
avons eu l'opportunité d'entendre plusieurs collègues du
gouvernement et de l'Opposition se prononcer sur les mérites et les
faiblesses, de leur point de vue, de la réforme qui a été
déposée le 7 décembre dernier et qui fait l'objet pour une
bonne partie d'une approbation par la loi 120. Trente minutes pour tenter de
ramasser l'ensemble des interventions, des affirmations, des interrogations,
c'est bien peu, M. le Président, mais déjà on sait que
nous serons en commission parlementaire à la fin de janvier ou au mois
de février, à tout le moins, pour être capables de
répondre à un certain nombre de ces questions.
En tout premier lieu, je veux vous dire que c'est possiblement la
période des fêtes qui m'amène à être plus doux
un peu dans mes propos puisque, à entendre certains commentaires,
à l'occasion, ça frisait la démagogie, mais à
d'autres occasions je retrouvais deux oppositions devant moi.
Je vais donc aborder de manière claire, très rapidement,
des points de convergence, des points sur lesquels il y a des interrogations et
des points de divergence pour qu'on puisse bien se comprendre.
D'abord, les points de convergence. Je veux remercier l'ensemble des
collègues qui sont intervenus, tant du gouvernement que de l'Opposition,
parce que chacun a bien pris soin, au début de son allocution, qu'il
soit de l'Opposition ou du gouvernement, de dire à la population: Oui,
il y a telle affaire qui est bonne, oui, il y a telle et telle affaire qui est
bonne. Je me rappelle du député de Masson qui a dit que
c'était un travail de titan qui avait été
réalisé, je l'en remercie. À peu près tout le monde
qui est intervenu a dit: Bon, c'est extraordinaire, il y a des mesures qui sont
très intéressantes, mais il y a d'autres mesures, pour nous,
compte tenu de nos objectifs et de nos principes, auxquelles on ne peut pas
souscrire. Possiblement - je fais peut-être une mauvaise
interprétation - s'il n'y avait pas eu le ticket orienteur et
l'impôt-services, l'Opposition se serait levée et n'aurait
même pas fait de discours. Elle aurait dit: Adopté, M. le
Président, c'est tellement bon, parce que c'est ça que ça
signifie, ce qu'on a entendu en termes de conversations.
Moi, d'entrée de jeu, M. le Président, parce que je
comprends que l'Opposition doit jouer son rôle d'opposition, c'est
normal, j'ai entendu des gens de l'Opposition citer des articles à
gauche et à droite. Un petit article qui fait son affaire, bien
sûr, sur quelqu'un qui à quelque part s'interroge sur une mesure
qu'il n'a pas comprise ou bien saisie, et c'est normal. C'est ça, la
démocratie où tout le monde peut s'exprimer.
En premier lieu, avec votre permission, je veux déposer devant
cette Assemblée ce qu'a été la réaction de
l'ensemble de la presse et des intervenants et vous vous apercevrez que ce
n'est pas les cinq ou six articles de journaux cités en particulier par
le député de La Prairie qui témoignent de ce qu'a
été dans l'ensemble du Québec l'accueil public de la
réforme; elle est très claire.
Une voix: Consentement.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À ce
moment-là, consentement au dépôt.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je
suis donc face à deux réactions possibles. Mes collègues
ont soulevé beaucoup de points positifs et certaines interrogations, ce
qui est tout à fait normal, mais, dans l'Opposition, il y a deux blocs
complètement distincts: ceux qui connaissent ça et ceux qui ne
connaissent rien ou à peu près. Et ça, c'a
été manifeste et très clair, très, très,
très clair.
M. le Président, lorsque j'ai revu, parce que je les ai
réécoutés, lorsque j'ai relu les discours prononcés
par des collègues, celui de Masson, celui de Laviolette, celui
d'Abitibi-Ouest, celui de Johnson, celui d'Arthabaska qui vient tout juste
d'être fait, celui de Gouin, pour certaines parties, et celui du
député de Joliette, je me suis dit: Ils ont déjà
administré quelque chose ou ils ont déjà été
dans un gouvernement qui avait l'obligation d'administrer quelque chose.
J'invite les citoyens à relire les discours de ces gens-là par
rapport aux autres parce qu'il y a une distinction très nette et
fondamentale sur le niveau d'appréciation de la réforme et le
sens de la mesure de leur intervention parce qu'eux
savent dans quoi on s'embarque lorsqu'on s'embarque dans une
réforme comme celle-là et ils reconnaissent qu'il y a un pas de
titan de franchi dans les propositions qu'il y a sur la table, qui sont
décidées et qui seront irrémédiablement
votées aujourd'hui, comme principes incontournables de la
réforme, que ça plaise ou que ça déplaise. Et c'est
ça qui va se passer cet après-midi, lorsqu'on abordera le vote;
de manière incontournable, irrémédiable, le "quoi" est
déterminé. Lorsque nous irons en commission parlementaire, M. le
Président, ce sera pour voir, dans le détail, si le projet de
loi, à la virgule ou au point-virgule, correspond au "quoi" qui a
été déterminé et qui aura été
voté par cette Assemblée.
Donc, oui, ces interventions ont démontré un certain
nombre de choses que je veux vous faire partager. Elles ont bien
démontré qu'ils ont compris le sens véritable de la
réforme, l'esprit de la réforme: le citoyen au centre. Et,
lorsqu'on fait l'analyse des critiques externes, de ceux qui se plaignent de la
réforme: Pourquoi, moi, on m'obligerait à aller travailler comme
médecin en région, on ne pense pas au citoyen. On pense, oui, au
citoyen, mais au citoyen producteur et c'est ça, le sens fondamental de
la réforme. J'ai beau relire et revoir toutes les critiques, lorsqu'on
met le citoyen au centre de nos préoccupations, on a compris
véritablement le point majeur du changement de cette réforme et
ça, l'ensemble de la population l'a compris.
La réforme est faite pour les citoyennes et les citoyens du
Québec, d'abord et avant tout, et le sera jusqu'au bout. Et c'est dans
cet esprit-là que nous allons aborder les discussions en commission
parlementaire. C'est un projet non pas du ministre de la Santé et des
Services sociaux, non pas du Parti libéral qui assume les
responsabilités gouvernementales; c'est et ce doit être un projet
de société qui a, d'ailleurs, démarré sous l'ancien
gouvernement et, si l'ancien gouvernement a décidé de
démarrer ce projet, c'est qu'il croyait qu'il y avait, à
l'intérieur du système, des choses qu'il fallait changer. On n'a
pas accepté d'investir 6 000 000 $ dans une commission qui s'appelle la
commission Rochon pour le simple plaisir de berner les électeurs en 1985
en leur disant: Oui, effectivement, il y a des problèmes dans les salles
d'urgence, oui, effectivement, il y a des problèmes à gauche et
à droite, pour avoir la belle pilule au moment de la campagne
électorale, en disant: Oui, on a confié ça à la
commission Rochon. J'imagine que l'intention de ceux qui sont dans l'Opposition
aujourd'hui, qui étaient au gouvernement à l'époque,
était une intention beaucoup plus noble, beaucoup mieux inspirée
et beaucoup plus crédible que celle de tenter de passer une étape
qui était l'étape électorale.
Donc, c'est un projet de société qui a
démarré sous leur gouvernement, qui demande une solidarité
gouvernementale puisque c'est pour le citoyen. Une réforme de la
santé et des services sociaux doit se faire avec l'ensemble des
intervenants et elle se fera donc avec l'ensemble des intervenants.
Fondamentalement - je vais le dire pour eux et c'est aussi l'objet de
conversations privées que nous avons avec certains députés
- ils partagent les buts fondamentaux de la réforme, c'est clair. Ils
les partagent puisqu'ils ont vécu le processus depuis 1985. (12 h
10)
Oui, et je veux en faire la démonstration, ils partagent les
principes majeurs de la réforme. Pas à moitié, pas au
quart, pas aux deux tiers. Mettons de côté l'impôt-services,
mettons de côté le ticket orienteur, c'est un appui massif
à l'ensemble des mesures qui, à l'occasion peuvent être
critiquées, je vais y revenir, sur le niveau d'intensité. Mais,
lorsqu'on parle d'intensité, que ce n'est pas assez intense, on partage
fondamentalement l'objectif de base, qui est celui d'approuver l'orientation
gouvernementale. Oui, c'est clair. La conclusion, après les avoir
entendus au complet, c'est ça, la lecture que j'en fais.
À titre d'exemple, l'Opposition est d'accord avec la
décentralisation proposée, le partage des fonctions entre le
central, le régional et le local. Même s'il y a des bémols
à mettre quelque part, on ne dit pas: On est contre la
régionalisation. On dit: On a peur de créer une bureaucratie
très importante au niveau régional qui décide tout et
qu'on ne se rende pas au niveau du local. On est donc pour l'orientation
fondamentale et, d'ailleurs, j'en serais totalement étonné s'ils
ne la partageaient pas, eux qui ont mis au monde les MRC, alors que la base
même de cette formation de régies régionales prend ses
racines à l'intérieur des territoires géographiques des
MRC.
Les mesures concernant la main-d'oeuvre médicale, dont la
régionalisation de l'enveloppe de la RAMQ. Je me souviens du
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue en commission
parlementaire, il avait dit: Nous n'accepterons jamais une réforme qui
ne régionalisera pas l'enveloppe de la Régie de
l'assurance-maladie du Québec. Ils n'ont pas dit le contraire durant le
débat. Ils ont dit: Oui, on est pour. Ils ont dit: Oui, on est pour des
médecins dans les régions du Québec, un peu partout
à travers le Québec, parce que nous aussi comme gouvernement on a
fait passer des décrets et des mesures pour permettre et forcer, dans
certains cas, les médecins à s'implanter dans les régions
du Québec.
Ils ne sont pas contre les mesures concernant les personnes
âgées. Ils ne sont pas contre les mesures visant les jeunes ou les
personnes handicapées. Ils sont pour et ils disent: On n'en fait pas
assez. Mais ça signifie fondamentalement qu'il n'y a pas assez de
quantum au niveau de l'argent, mais que les mesures sont bonnes et que,
fondamentalement, ils sont d'accord. C'est normal que l'Opposition, M. le
Président, évoque des réserves. C'est tout à fait
normal. J'ai été
dans l'Opposition et je sais ce que c'est. C'est normal, dans un
système parlementaire, quand on a la responsabilité de critiquer
le gouvernement en regard de mesures face aux jeunes, de trouver qu'il n'y en a
pas assez; il faut toujours en mettre de plus. Mais, il faut aussi, comme
Opposition, avoir le niveau de responsabilité que ce que tu prends dans
la poche du citoyen pour payer, tu dois aussi aller le chercher sur le plan des
impôts et des revenus. Il doit y avoir un équilibre entre ce que
tu dépenses et ce que tu reçois, sinon c'est la faillite.
L'Opposition est aussi d'accord avec la consolidation de la
première ligne, au niveau du CLSC, le virage du maintien à
domicile, les priorités que constituent les personnes âgées
et les jeunes, une meilleure reconnaissance et un meilleur soutien aux
organismes communautaires, l'équité dans l'allocation des
ressources, et j'en passe. L'Opposition reconnaît l'importance du virage
proposé à la population du Québec et c'est clair.
Ne faire que cette nomenclature d'accords avec le projet de loi, avec la
réforme, signifie très nettement qu'à mon humble point de
vue l'Opposition aurait dû voter pour, s'ils avaient des objectifs
fondamentaux à mettre en priorité afin d'être dans l'esprit
de la réforme. S'ils avaient compris le sens profond de la
réforme, qui est celui du citoyen au coeur de cette réforme, ils
auraient dû dire oui au principe du projet de loi 120. Mais c'est
d'autres perspectives et d'autres objectifs purement politiques qui ont
guidé le choix de l'Opposition de voter contre le projet de loi. Des
questions spécifiques, M. le Président, oui, il y en a eu. Et
c'est normal qu'il en ait eu dans un débat aussi large qui embrasse
autant, et que tout ne soit pas répondu, c'est aussi tout à fait
normal. Je l'ai dit à plusieurs reprises, il y a du "comment" qui reste
à déterminer et nous le ferons avec les différents
intervenants.
Plusieurs députés se sont posé la question, en
particulier le député de Joliette, sur la régionalisation.
Et le député de Joliette a dit, en particulier: Je ne voudrais
pas - comme c'était un peu le cas de l'intervention du
député d'Ar-thabaska - que l'on crée, au niveau
régional, une bureaucratie aussi importante que nous avons au central.
Oui, il faut être sensible à ces craintes et ce n'est pas de
l'irréel. Il faut être sensible à ces craintes et c'est
pour ça que, dans la réforme, on dit: II ne faut pas que
l'oxygène soit uniquement au niveau régional, mais il faut aussi
que l'oxygène se rende jusqu'au niveau local. C'est la raison pour
laquelle, dans la réforme, dans la continuité, on a défini
les pouvoirs et responsabilités du gouvernement, du pouvoir
régional et du pouvoir local, et c'est aussi très clair.
Malgré tout ça, oui, le message, je le prends. Il faut être
extrêmement vigilant et on aura l'occasion d'en discuter en commission
parlementaire et de faire le nécessaire à ce
niveau-là.
D'autres députés ont appuyé la
régionalisation de l'enveloppe de la Régie de l'assurance-maladie
du Québec, en se posant la question: Est-ce que ce seront les
mêmes enveloppes qu'aujourd'hui? Bien non, ce ne seront pas les
mêmes enveloppes qu'aujourd'hui, sinon, on continuerait de
perpétuer les mêmes injustices. Ce que nous avons dit, c'est que
l'enveloppe ne sera plus composée à partir de
l'élément important qu'est le nombre de producteurs, mais
davantage en fonction de la population actuelle et en devenir. C'a
été clair; c'est très clair. Donc, la réponse est
là et la réponse est claire.
Mme la députée de Johnson, qui questionnait les 200 000
000 $ et se disait heureuse des 200 000 000 $ sur cinq ans que nous allons
ajouter au maintien à domicile pour les personnes âgées,
s'interrogeait à savoir si le paiement des médecins qui feront
des visites à domicile allait être pris à même les
200 000 000 $. C'est non. C'est non, puisque les médecins se feront
toujours payer par la Régie de l'assurance-maladie du Québec pour
du support et du maintien à domicile. C'est donc en plus des 200 000 000
$ que ça se fera.
Mme la députée de Marie-Victorin a longuement
disserté sur les mesures en toxicomanie, elle qui proposait la
création d'une structure rémunérée, payée,
encore le vieux style d'investir de l'argent dans des structures centrales et
pas d'argent dans la base, au niveau du sol, donc la préoccupation du
citoyen lui-même. Je lui dis tout simplement: Vous avez manqué une
bonne occasion, puisque le rapport Mario Bertrand est un rapport
extrêmement important qui guide les choix du gouvernement quant aux
investissements. Nous avons annoncé 37 000 000 $ additionnels et le
ministère a aussi rendu publiques des orientations ministérielles
à l'égard de l'usage et de l'abus des psychotropes que je peux
déposer, M. le Président, et qui sera un document public et qui
l'est déjà, et qui...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Consentement?
M. Côté (Charlesbourg): Oui.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): J'ai le consentement.
Déposé, M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): ...démontre
très bien, M. le Président, que ce n'est pas de la poudre aux
yeux, mais de l'action claire, concrète, supportée par des sommes
d'argent et que nous continuerons, à ce niveau-là, à aller
chercher les sommes d'argent dont nous avons besoin.
Il y a des points de divergence - il y en a six - que j'ai tenté
de regrouper pour bien se comprendre. Des six, je vous dis tout de suite qu'il
y en a trois qui peuvent être facilement
éliminés si l'ouverture d'esprit de l'Opposition est
là, prête à comprendre et à accepter des
vérités qui sont là et qui sont présentes. Les six
points: politique de santé et bien-être avant la réforme;
deuxièmement, le secteur social qu'ils disent oublié - ils
reprennent des propos des journaux, ils n'ont pas lu la réforme, je vais
vous en faire la démonstration - financement qu'ils disent insuffisant -
trois points auxquels je vais donner des réponses maintenant -
quatrièmement, ticket orienteur; cinquièmement,
impôt-services et, sixièmement, la commission parlementaire. Il y
en a donc de trois niveaux.
Abordons d'emblée, M. le Président, les points que je
qualifie de non divergents quant à moi. Politique de santé et
bien-être. Merci. Merci d'en avoir parlé en 1990 et je vous dis en
même temps, vous qui avez été au pouvoir pendant neuf ans,
de 1976 à 1985, quelle sorte de préoccupation aviez-vous pour une
politique de santé et bien-être? Elle viendra, la politique de
santé et bien-être, sous notre gouvernement et c'est nous qui
serons les premiers au Canada à avoir une politique de santé et
bien-être au niveau des provinces. Mais qu'est-ce que vous avez fait
pendant neuf ans lorsque vous étiez au pouvoir? Est-ce que c'est
soudainement une très bonne idée, qui était bonne à
prendre, de dire: On aurait dû faire la politique de santé et
bien-être? Je partage donc avec vous, malgré tout cela, la
nécessité d'une politique de santé et bien-être, et
je l'ai dit à plusieurs reprises. (12 h 20)
Nous sommes donc, actuellement, à préparer la politique de
santé et bien-être, et c'est très clair. Pour ceux qui
veulent lire et qui veulent comprendre ce qui est écrit à la page
80 du document - on n'en a pas mis trop, on en a 90, au lieu de faire de la
romance, on a décidé de faire un document d'action - c'est clair,
M. le Président, c'est en caractères gras: Rendre publique,
dès avril 1991, une politique de santé et de bien-être qui
énoncera... Et c'est clair, ça se descend au niveau de la
politique qui est très claire. Ça veut dire quoi? Ça veut
dire qu'on doit tenir compte de trois facteurs importants au niveau d'une
politique de santé et bien-être.
Premièrement, je l'ai toujours dit et je le répète,
il faut centrer le réseau de la santé et des services sociaux sur
des objectifs de résultats, c'est-à-dire la solution de
problèmes spécifiques de santé et de bien-être. Le
réseau est actuellement centré sur la production de plus en plus
grande de services, de services de plus en plus sophistiqués et de plus
en plus coûteux. C'est comme si la production de services était
l'objectif final du réseau. Souvent, on en a presque oublié la
raison d'être de ces services qui est de solutionner les problèmes
de santé et de bien-être auxquels fait face la population du
Québec.
La deuxième raison, c'est que le réseau ne fait pas
suffisamment de place à la promotion et à la prévention.
L'emphase est principalement mise sur le curatif. En se demandant comment on
peut solutionner les problèmes de santé et de bien-être, on
va, bien sûr, insister avant tout sur les mesures qui vont
prévenir ces problèmes. Compte tenu que tous les problèmes
ne pourront être prévenus, on va aussi s'attaquer aux mesures les
plus efficaces pour les guérir, parce qu'il restera toujours du curatif,
qu'on le veuille ou non, et il y a de la place à l'intérieur de
notre réseau pour du curatif.
La troisième raison, c'est qu'en regardant comment on peut
résoudre des problèmes, on va se rendre compte que le
réseau n'est pas le seul à pouvoir contribuer à la
solution de ces problèmes. Il y a les individus eux-mêmes, il y a
aussi les familles et les communautés. Il y a enfin et possiblement
surtout les autres secteurs, que ce soit le travail, l'éducation, la
municipalité, le transport, l'environnement, et j'en passe. On va se
rendre compte que le ministère de la Santé et des Services
sociaux est souvent le ministère des conséquences des facteurs de
risque qui n'ont pas été prévenus par les autres secteurs.
Donc, oui, on est tout à fait d'accord avec une politique de
santé et bien-être.
Je ne partage pas du tout l'opinion de l'Opposition pour deux raisons.
Je l'ai dit clairement quand nous avons déposé le projet de loi
120, qu'il sera en commission parlementaire au mois de janvier et que nous
reviendrons au cours de mars, devant cette Assemblée, pour adopter la
troisième lecture du projet de loi 120. Nous serons à l'heure
où nous pourrons déposer, fin mars, début avril - et
ça a toujours été les propos que nous avons tenus - la
politique de santé et bien-être. Ce n'est donc pas la charrue
devant les boeufs! C'est totalement faux, c'est voulu ainsi. La politique de
santé et bien-être sera publique en avril 1991, avec tout ce que
ça comporte.
Mais, la deuxième raison fondamentale, qui est beaucoup plus
fondamentale que la première, il y a quatre déterminants pour la
santé et le bien-être de la population. Ce sont la biologie
humaine, les habitudes de vie et les comportements des individus,
l'environnement, qu'il soit physique, social ou économique, et
l'organisation des services. Les habitudes de vie, les comportements et
l'environnement seront traités plus spécifiquement par la
politique incluant le lien entre la pauvreté, les problèmes
sociaux et les problèmes de santé. La réforme s'attaque,
quant à elle, et c'est sa responsabilité, à ce
quatrième déterminant qu'est l'organisation des services.
Pensez-vous honnêtement que le fait de retenir comme
priorité le cancer ou les maladies cardio-vasculaires changera
drastiquement la nécessité de décentraliser le
réseau, comme le fait la réforme? Pensez-vous honnêtement
que le fait de mettre plus d'emphase sur la promotion ou la prévention
dans la politique changera la nécessité de donner plus de droits
aux usagers,
alors que le fait la réforme? Pensez-vous honnêtement que
le fait de reconnaître le rôle que les individus et les familles
peuvent jouer pour améliorer leur propre santé et bien-être
est contradictoire avec le fait de donner par la réforme plus de
pouvoirs aux citoyens et aux citoyennes de la base? M. le Président, je
reconnais le mérite d'exiger une politique de santé et
bien-être et nous aurons donc cette politique de santé et
bien-être.
Le deuxième point: secteur social oublié. Mais vous ne
savez pas lire ou vous ne savez pas compter, ou c'est autre chose que vous
visez. La part du secteur social dans la réforme, elle est
extraordinaire et elle prend la part du lion. Je ne vais vous donner que
quelques mesures. Personnes âgées: 200 000 000 $ pour le maintien
à domicile, au niveau de la réforme; 60 000 000 $ pour
l'alourdissement de la clientèle en centres d'accueil et
d'hébergement; 7000 places, au cours des prochaines années, pour
les personnes âgées. Les mesures pour les jeunes en
difficulté, pages 27 et 28, les mesures sont là et d'autres
viendront avec le comité qui nous fera ses recommandations pour la
politique de santé et bien-être. Pour les personnes
handicapées, des mesures. Pour les personnes alcooliques et toxicomanes,
des mesures. Les établissements sociaux: CLSC, première ligne,
consécration de la première ligne. Coudon! Venez-vous me dire
aujourd'hui que les CLSC sont devenus maintenant du secteur de la santé?
Les CLSC sont un instrument de première ligne au niveau des services
sociaux, avec les jeunes et un meilleur support aux jeunes dans le monde
scolaire. Les centres d'hébergement et de soins de longue durée.
Le communautaire? Êtes-vous après me dire que le communautaire
fait partie de la santé, que ça ne fait pas partie du social, le
communautaire? On y ajoute des mesures extraordinaires. La création
d'instituts universitaires dans le domaine social, ce que vous n'avez jamais
fait lorsque vous étiez au pouvoir; nous allons créer des
instituts universitaires, dans le domaine social. M. le Président, sur
le deuxième, la réponse est très rapide.
Évidemment, ce qui est sublime, après avoir vécu
certaines années de coupures comme on les a connues sous leur
régime, après avoir vécu depuis 1985 un effort
considérable de la part de mes collègues ministres, dans d'autres
ministères, pour donner la priorité à la santé et
aux services sociaux, où Mme Thérèse Lavoie-Roux, pendant
quatre ans, est allée chercher, chaque année, des sommes
fabuleuses dans une situation budgétaire pas toujours facile pour
maintenir la part du Québec au niveau du financement dans le domaine de
la santé et des services sociaux, c'est de venir nous dire aujourd'hui
qu'on n'en fait pas assez par rapport à ce qu'ils ont fait. Eux
reculaient; nous, on a avancé. Et on arrive avec la réforme et on
dit: Le budget actuel, plus IPC, plus 3 %. Ça signifie quoi, en termes
clairs?
Ça signifie que le budget du ministère est de 8 700 000
000 $, plus l'IPC, plus 3 %; les 3 % signifient 260 000 000 $, c'est ça
que ça signifie, par année. Qu'est-ce qu'on a prévu, dans
le plan, avec des mesures qui sont là, quantifiées,
identifiées? On a prévu 1 900 000 000 $, dont 1 100 000 000 $ en
budget récurrent et 800 000 000 $ au niveau du financement des
immobilisations. Ça, ça fait 190 000 000 $ par année,
pendant 10 ans, alors que l'IPC plus 3 % fait 260 000 000 $ par année.
Il y a une différence, oui, pour continuer de maintenir, au niveau de la
santé, le coût du système de santé qui, lui, est de
50 000 000 $. Alors, ne vous inquiétez pas, d'aucune manière, sur
toute la démagogie qui a pu être faite en ce qui concerne la
possibilité d'argent.
J'entendais le député de Dubuc, le nouveau, et l'ineffable
député d'Ungava qui a réussi à parler de routes,
qui a réussi à parler d'à peu près n'importe quoi,
qui a été égal à lui-même, beaucoup plus
sonore qu'un discours sensé et pensé. Et, évidemment, il
avait l'air de ce qu'il a l'air au naturel et il a été
très égal à lui-même, merci.
M. le Président, quant au ticket orienteur, le sacré
principe de l'universalité où on vient nous faire une belle
grande démonstration du ticket orienteur, où forcément on
est contre parce que le ticket orienteur est forcément... Et j'entendais
le député d'Arthabaska, tantôt, parler de ticket
modérateur. Vous pouvez vous le prêter, le dictionnaire, ça
se prête, pour être capables de voir les définitions telles
qu'elles sont. Le ticket orienteur est clair, et ça a toujours
été très clair. Il y a juste dans votre esprit
embrouillé qu'il y a des visées politiques et non pas des
visées qui visent le citoyen, à ce niveau-là. Le ticket
orienteur, c'est pour orienter les gens à la bonne place, c'est pour
éviter que des individus se retrouvent, demain matin, dans une salle
d'urgence à occuper des places qui doivent être occupées
par des gens qui ont des problèmes d'urgence, pour qu'ils puissent aller
ailleurs gratuitement, dans les CLSC, dans les cabinets privés. Et
ça, c'est 5 $, pas appliqués de manière aveugle. Je l'ai
dit et je répète l'objectif: Je serai content lorsqu'on ne
collectera pas un sou au niveau du ticket orienteur.
M. le Président, quant à moi, tout ce que j'ai entendu de
la part de l'Opposition sur le ticket orienteur, l'appui dans la population, on
a compris ce que ça voulait dire. Léger et Léger, vous
devez le connaître un petit peu, il doit être assez
crédible; il a ouvert ses lignes, dimanche dernier, et il a entendu les
gens qui ont appelé. Or, 81 % des gens ont dit oui au ticket orienteur,
ça a du bon sens. Alors, vous faites partie des 19 % qui continuent de
tenter d'ameuter la population.
Deuxièmement, M. le Président, l'impôt-services.
Oui, c'est une mesure qui est plus importante; l'impôt-services est une
mesure qui est
plus importante, mais je vais vous dire pourquoi on est aujourd'hui
rendu à l'impôt-services. Et vous avez plus de raisons
fondamentales de vous interroger sur l'impôt-services que de vous
interroger sur le ticket orienteur. Oui, M. le Président,
l'impôt-services est devenu une nécessité, pour la simple
et bonne raison que les citoyens du Québec n'ont plus les moyens,
globalement, de payer ce que sont les coûts et, deuxièmement,
parce que le Québec, le gouvernement lui-même, de par ses revenus,
n'en a plus les moyens non plus. C'est simple et c'est clair.
Pourquoi? Parce que dans le passé on a dépensé
au-delà de nos moyens. De 1976 à 1985, on est passé d'un
déficit de 5 000 000 000 $ à 20 000 000 000 $. Allez voir comment
ça se finance aujourd'hui à 10 % ou à peu près,
ça va vous donner un petit peu la mesure et nous n'aurions pas à
faire ça aujourd'hui. On est donc aujourd'hui obligés
d'être conséquents sur le plan administratif et d'être
capables d'avoir dans nos mains au moins assez d'argent pour être
capables de payer nos factures.
M. le Président, l'impôt-services, on aura l'occasion d'en
discuter très certainement. Je ne voudrais pas terminer sans dire des
mercis tout à fait sentis, y compris aux gens de l'Opposition, à
mes collègues députés et d'abord et avant tout aux
citoyens du Québec qui ont compris, eux, le sens profond de la
réforme et qui ont compris que c'était pour eux. Je leur dis
merci. Vous avez raison d'avoir confiance, on va continuer d'être
vigilants, continuer de livrer la marchandise.
Je dis à tous les parlementaires qui sont intervenus que vos
interventions seront des guides pour moi quant à la suite à
donner, y compris en commission parlementaire. Je veux dire à tous ceux
- à Rochon, à Mme Thérèse Lavoie-Roux - qui en
commission parlementaire et qui dans des séances plus intimes au
ministère ont donné de leur temps pour que ce soit une
réforme qui soit applicable: Merci. Je dis aussi de manière tout
à fait particulière à tous ces fonctionnaires du
ministère de la Santé et des Services sociaux qui ont
travaillé d'arrache-pied depuis cinq ans, et en particulier à
toute l'équipe d'André Dicaire et de Paul Lamarche: Merci
beaucoup pour l'effort que vous avez fait. Tout ce que je vous dis, vous avez
10 % de faits, il vous en reste encore maintenant 90 %.
Il s'agit de l'appliquer et tout le monde sera associé dans
l'application et dans la définition du comment, tous ceux qui auront
pour objectif le bien du citoyen, du citoyen consommateur, du citoyen
décideur et du citoyen payeur. Merci, M. le Président.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Votre réplique met fin au débat sur la motion d'adoption du
principe du projet de loi 120 que je vais maintenant mettre aux voix.
Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Oui, M. le Président. Étant
donné l'importance de ce projet de loi, je vais demander un vote nominal
enregistré. Je vous demande de reporter le vote à la
période des affaires courantes cet après-midi.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, vous me faites
deux demandes: vote nominal et vote reporté à la séance de
cet après-midi.
Il est 12 h 30, je suspends donc les travaux jusqu'à 14 heures,
cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 34)
(Reprise à 14 h 4)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Mmes et MM. les députés, s'il vous plaît. Alors, MM. les
députés!
Nous allons nous recueillir... Oui.
Une voix: ...95.
Le Président: Nous allons nous recueillir quelques
instants.
Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.
Nous allons entreprendre les affaires courantes.
Une voix: Sur vote.
Le Président: Déclarations ministérielles.
Je vais reconnaître, à ce moment-ci, M. le ministre des
Finances.
Annonce de certaines mesures fiscales M. Gérard
D. Levesque
M. Levesque: M. le Président, je désire tout
d'abord vous entretenir, si vous me le permettez, du soutien du gouvernement
à l'industrie cinématographique et télévisuelle.
Depuis plusieurs années, en effet, l'aide fiscale, tant
fédérale que québécoise, a été
basée sur un régime de déductions exceptionnelles
accordées aux investisseurs, lequel a contribué à
favoriser le développement rapide de cette industrie. Tout
récemment, toutefois, le développement de certains montages
financiers a provoqué une hausse importante des coûts.
C'est dans ce contexte que j'ai été amené à
examiner de plus près l'évolution de cette déduction
fiscale et a intervenir, vous vous le rappellerez, en décembre 1989,
afin d'en contrôler les coûts. De plus, lors de mon discours sur le
budget du 26 avril dernier, j'indiquais mon intention de réexaminer les
mesures fiscales relatives au secteur cinématographique et
télévi-
suel. À cet égard, un groupe de travail
interministériel a procédé, en consultation avec les
principaux milieux intéressés, à une analyse en profondeur
de l'aide fiscale actuelle. Ces travaux ont été conduits à
la lumière des principaux objectifs poursuivis par notre gouvernement
à l'égard de cette activité importante pour le
Québec.
Le premier objectif est de créer les meilleures conditions
possible afin que cette industrie puisse continuer à avoir accès
au capital nécessaire pour assurer son expansion, se renforcer et
élargir son marché.
Le deuxième objectif est de mieux cibler l'intervention du
gouvernement pour tenir compte du contexte difficile des finances publiques.
Or, les tout derniers résultats démontrent qu'une partie trop
importante du coût pour le gouvernement de cette aide fiscale ne
profitait pas directement à l'industrie cinématographique et
télévisuelle, puisque les frais d'intermédiation
financière, d'une part, et les bénéfices fiscaux des
investisseurs, d'autre part, étaient trop élevés par
rapport au risque que ces derniers supportaient effectivement. De plus, cette
situation ne facilitait pas la levée de capital dans les autres secteurs
pour lesquels les conditions étaient moins avantageuses.
M. le Président, je suis persuadé qu'il est possible de
faire encore mieux à des coûts moins élevés, tout en
atteignant plus adéquatement notre objectif principal qui est celui
d'appuyer cette activité. C'est pourquoi j'annonce le remplacement de la
déduction actuelle par un nouveau régime qui s'adressera
directement aux entreprises de production et qui, tout en étant plus
respectueux du contexte des finances publiques, sera mieux adapté aux
besoins de cette industrie et procurera à cette dernière une aide
plus importante.
La pierre angulaire du nouveau régime consiste en un
crédit d'impôt remboursable de 40 % des coûts de
main-d'oeuvre admissibles engagés dans la production d'un film
certifié québécois. Les coûts de main-d'oeuvre
pourront être admissibles jusqu'à concurrence de 45 % du budget
total d'une production qui consistera en un film, un documentaire, un
téléfilm, une série télévisuelle, une
mini-série ou une émission pour enfants. De plus, afin que cette
mesure soit mieux orientée vers les productions à fort contenu
québécois, les règles de certification seront
resserrées.
Le deuxième élément vise également à
favoriser la levée de capital de risque par l'élargissement du
programme des Sociétés de placements dans l'entreprise
québécoise, les SPEQ, aux corporations cinématographiques
et télévisuelles.
En troisième lieu, un programme de financement intérimaire
des crédits d'impôt remboursables sera offert par la SOGIC, la
Société générale des industries culturelles.
Finalement, des crédits budgétaires de 2 000 000 $ seront
ajoutés, et cela, au ministère des Affaires culturelles, pour un
nouveau fonds de soutien des variétés et magazines ayant valeur
de reprise, lequel sera administré par la SOGIC dans le cadre de son
programme d'aide à la production.
M. le Président, les mesures annoncées aujourd'hui, tout
en étant conciliables avec les contraintes budgétaires du
gouvernement, procureront 30 000 000 $ d'aide directe à cette industrie,
ce qui est plus substantiel que ce dont elle a bénéficié
dans les dernières années. De plus, je suis persuadé que
ce nouveau régime contribuera à l'établissement d'un
environnement stable et susceptible de renforcer ce secteur de notre
économie et permettra à ce dernier d'assurer son expansion.
Par ailleurs, M. le Président, lors du dernier discours sur le
budget, j'autorisais l'utilisation des montants accumulés dans les
régimes d'épargne-logement pour l'achat de meubles. J'ai le
plaisir d'annoncer que cette mesure bénéfique à
l'industrie du meuble sera prolongée d'une autre année,
c'est-à-dire pour les achats de meubles neufs effectués avant le
1er janvier 1992. L'écoulement des sommes détenues dans de tels
régimes en sera ainsi facilité.
Et dans un tout autre ordre d'idées, M. le Président,
j'annonce également que les exploitants de tourbières, tout comme
c'est actuellement le cas pour les agriculteurs et les exploitants miniers et
forestiers, pourront bénéficier, à compter de 1991, d'un
remboursement de la taxe payée sur les carburants utilisés dans
leur exploitation. Certaines régions que l'on connaît bien
profiteront de cette mesure.
Finalement, à l'égard des journaux distribués
gratuitement dont plusieurs hebdomadaires régionaux, j'annonce le
devancement au 1er janvier 1991 du remboursement de la taxe de vente du
Québec payée lors de l'acquisition de ces journaux. Cette mesure
devait d'ailleurs entrer en vigueur le 1er janvier 1992 dans le cadre de la
réforme des taxes à la consommation du Québec.
Le détail de ces modifications ainsi que d'autres mesures
fiscales apparaissent en annexe à la présente déclaration
ministérielle, laquelle annexe en fait partie intégrante. On y
retrouvera notamment des ajustements techniques à l'égard des
taxes à la consommation ainsi que des mesures d'harmonisation du
régime fiscal québécois au régime fiscal
fédéral, dont la mesure relative au nouveau régime
d'indemnisation fiscal des résidents des localités isolées
et du Nord. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président: Merci, M. le ministre. Je cède
maintenant la parole au représentant de l'Opposition officielle, le
député de Labelle, pour ses commentaires, suivant le
règlement.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: M. le Président, merci. Alors, nous
sommes en toute dernière minute de la session. Pour éviter tout
débat avant Noël, nous cvons une déclaration
ministérielle, comme en fin de vacances, par exemple. En annexe, 23
pages, M. le Président, accompagnent cette déclaration
ministérielle. Je pense que si le ministre avait pu, il aurait fait sa
déclaration ministérielle la nuit, en oiseau de nuit, comme les
projets de loi que nous venons de discuter cette semaine. la mesure sur
laquelle porte cette déclaration ministérielle touche l'industrie
cinématographique et télévisuelle. la ministre trouvait
que l'abri fiscal dont elle bénéficiait était trop large.
il a trouvé une hausse importante des coûts, dit-il, dans ce
secteur. il y avait aussi un blocage considérable depuis des mois en ce
qui concerne la certification des films. sa solution, c'est d'abolir la
déduction de 166 2/3 % à laquelle elle avait droit depuis
longtemps, en particulier en ce qui concerne le financement qui coûtait
au gouvernement 40 % du coût des films. et sa mesure maintenant, c'est de
financer les coûts de la main-d'oeuvre à 40 %, pour un maximum de
45 % du coût des films. le maximum que cela va lui coûter, c'est 18
% du coût des films comparativement à 40 % auparavant, 1870, et
plus probablement 8 % parce que les coûts de la main-d'oeuvre dans la
réalisation de films sont de 20 % en moyenne. donc, on passe de 40 %
à 8 % comme subvention du gouvernement. et, m. le président, en
ajoutant en plus des contrôles, parce que, auparavant, ils avaient
à contrôler la certification des films qui prenait des mois avant
de se faire, aujourd'hui, ils ajoutent aussi le contrôle sur
l'admissibilité des coûts de la main-d'oeuvre, m. le
président. nous aurons donc un programme apport dans le domaine des
industries cinématographiques et télévisuelles. tout le
monde sait que ça ne marche pas dans ce secteur-là. le ministre
ne s'est pas posé la question: quel sera l'impact sur le financement des
films? ça, c'est la vraie question et c'est pour cela qu'on
finançait des industries cinématographiques et
télévisuelles. on finançait ceux qui prenaient des risques
et, aujourd'hui, on se retrouve avec un programme de soutien seulement. et
lorsqu'il dit que les industries vont avoir ou procureront... ils auront 30 000
000 $ d'aide directe à cette industrie, remarquez bien le mot "aide
directe", parce que la déduction, pour ceux qui investissaient,
consistait en une aide indirecte. donc, nous n'avons aucune garantie que le
gouvernement va mettre des fonds additionnels, c'est plutôt le contraire.
le ministre trouvait que les coûts étaient trop
élevés et aujourd'hui, il veut réduire cet abri fiscal et
c'est ce qu'il fait dans la réalité, m. le président.
j'aimerais bien qu'il nous dise si cette réduction va être
déduite aussi du 1 % du budget du gouvernement pour le domaine de la
culture, M. le Président. Je pense que ça, on est en train de
reculer sur ce plan.
M. le Président, il y a, en plus, pour dorer supposément
la pilule, trois "mesurettes", mais qui sont là strictement pour
corriger des erreurs que le ministre a faites lorsqu'il a amené sa loi,
amendant la taxe de vente du Québec, M. le Président. Par
exemple, il utilise des sommes accumulées dans... Les gens qui auront
des régimes d'épargne-togement pourront utiliser les
résidus de ce qui leur reste dans leur régime pour acheter des
meubles. Un an de plus, M. le Président, c'est bien peu à peu de
contribuables et exclusivement à ceux qui ont des régimes
d'épargne-logement, comparativement au fait que les contribuables
québécois vont devoir payer la taxe de vente sur les meubles
à partir du 1er janvier, M. le Président. Voilà où
nous en sommes.
Il va rembourser la taxe sur les carburants aux exploitants de
tourbières. Enfin, parce que, depuis longtemps, ceux qui opèrent
dans l'industrie agricole en étaient exemptés, M. le
Président, dernière "mesurette", les journaux. Il va commencer
à rembourser la taxe de vente sur les journaux. C'est une erreur qu'il
avait faite parce que, sur ces journaux, les propriétaires de journaux
paieront la taxe de vente à partir du 1er janvier, donc il commence
à les rembourser maintenant au 1er janvier. Ce n'est que justice et
ça rend justice seulement en partie à mon collègue, le
député de Pointe-aux-Trembles, qui a dénoncé cette
situation par rapport aux journaux de quartier qui étaient
distribués gratuitement.
M. le Président, nous avons une mauvaise nouvelle à
annoncer. Le ministre a annoncé une mauvaise nouvelle pour l'industrie
cinématographique et télévisuelle. Il la dore de quelques
"mesurettes" qui ne sont que des corrections au projet de loi qu'il a
déposé. Et ce ne sont pas des "mesurettes" dont nous avons
besoin, c'est d'un plan de relance.
Le Président: Merci, M. le député de
Labelle. Je cède maintenant la parole à M. le ministre des
Finances pour l'exercice de son droit de réplique.
M. Gérard D. Levesque (réplique)
M. Levesque: M. le Président, ce sera très court,
étant donné que la critique a été très
faible, très légère. On a presque félicité
le gouvernement à un moment donné, mais on n'a pas le tour de le
faire.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Levesque: M. le Président, jamais l'industrie
cinématographique, jamais l'industrie télévisuelle
n'aurait été autant soutenue qu'à la
suite de la déclaration que je viens de faire. Le
député devrait savoir que cette décision annoncée
aujourd'hui l'a été après pleine consultation des
intéressés. Eux le savent, les intéressés, ce qui
est bon pour l'industrie. Le député de Labelle sait
peut-être ce qui est bon pour l'Opposition, mais ce qui nous
intéresse, c'est ce qui est bon pour l'industrie, ce qui est bon pour
l'industrie cinématographique et pour l'industrie
télévisuelle et ceux qui y travaillent. Et les mesures
annoncées touchent, justement, la main-d'oeuvre qui s'y trouve. C'est
là que le député de Labelle a manqué une belle
occasion de démontrer qu'il était solidaire vis-à-vis de
l'aide à apporter à cette industrie. (14 h 20)
Nous parlons de 30 000 000 $; jamais l'industrie n'a reçu autant.
C'est vrai qu'il y avait des coûts additionnels plus élevés
pour le gouvernement, mais ces coûts allaient aux investisseurs, d'une
part, et, d'autre part, aux intermédiaires financiers. Après
consultation, on s'est rendu compte de l'importance de modifier la formule afin
d'aider davantage l'industrie que l'on voulait aider. Et il y aura bien
d'autres occasions d'aider les autres qui circulent autour de cela. Mais chose
certaine, c'est que la déclaration que nous faisons aujourd'hui tient
compte à la fois du contexte des finances publiques et de
l'intérêt que nous portons à la culture au
Québec.
Quant aux autres sujets traités, je pense qu'ils répondent
également à des besoins. Que ce soit du côté du
Régime de l'épargne-logement, du côté du
développement régional et de l'aide que nous apportons à
ceux qui s'occupent de l'exploitation de tourbières, que ce soit dans la
question des journaux, des hebdomadaires produits gratuitement, donnés
ou distribués gratuitement, là encore, nous avons tenu compte de
l'importance d'aider particulièrement les hebdos régionaux. Tout
cela, M. le Président, fait en sorte que je crois que nous avons par
cette déclaration ministérielle, indiqué notre
intérêt à tous ceux et celles qui sont touchés
positivement et favorablement par ces mesures et nous avons en même temps
pris la mesure de l'Opposition. Merci, M. le Président.
Le Président: Merci, M. le ministre des Finances.
Nous allons maintenant passer à la présentation de projets
de loi.
Dépôt de documents, M. le ministre des Finances.
Annexe à la déclaration
ministérielle
M. Levesque: Peut-être, M. le Président, on me
permettra de déposer d'abord l'annexe à la déclaration
ministérielle.
Le Président: Ce document est déposé.
Comptes publics du gouvernement
et rapport financier du ministère des
Finances
M. Levesque: Qu'il me soit permis, M. le Président,
conformément à l'article 72 de la Loi sur l'administration
financière, de déposer, en deux copies, les comptes publics du
gouvernement pour 1989-1990. Par la même occasion, je dépose
aussi, en deux copies, le rapport financier préparé au
ministère des Finances pour la même année
financière.
Le Président: Ces documents sont
déposés.
M. Levesque: II y en a encore.
Le Président: Très bien, maintenant, M. le ministre
de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Rapport annuel de la Commission des courses de chevaux
du Québec
M. Picotte: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport annuel 1989-1990 de la Commission des courses de
chevaux du Québec. Merci.
Le Président: Ce document est déposé. M. le
ministre de l'Environnement.
Rapport annuel du ministère de
l'Environnement
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président,
conformément à notre règlement, je dépose le
rapport annuel 1989-1990 du ministère de l'Environnement du
Québec.
Le Président: Ce rapport est déposé. M. le
ministre de la Justice.
Rapports annuels du ministère de la
Justice,
de la Commission de protection des droits
de la jeunesse et de la Commission d'appel
en matière de lésions
professionnelles
M. Rémillard: Oui, M. le Président. J'ai l'honneur
de déposer le rapport annuel 1989-1990 du ministère de la
Justice, le rapport annuel 1989-1990 de la Commission de protection des droits
de la jeunesse de même que le rapport annuel 1989-1990 de la Commission
d'appel en matière de lésions professionnelles.
Le Président: Ces rapports sont déposés. Mme
la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.
Rapports annuels du ministère
de l'Enseignement supérieur et de la
Science et de l'Université du
Québec
et des établissements du réseau
Mme Robillard: Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de
déposer le rapport annuel 1989-1990 du ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science de même que le rapport
annuel 1989-1990 de l'Université du Québec et des
établissements du réseau.
Le Président: Ces rapports sont déposés. M.
le ministre responsable de l'application des lois professionnelles.
Rapports annuels de l'Ordre des
infirmières et infirmiers, de la
Corporation
professionnelle des inhalothérapeutes,
de la Corporation professionnelle des
médecins, de la Chambre des notaires,
de
l'Ordre des opticiens d'ordonnances et
de l'Ordre des chiropraticiens
M. Savoie: Oui, M. le Président, il me fait plaisir de
déposer les rapports annuels 1989-1990 des corporations suivantes:
l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec, la Corporation
professionnelle des inhalothérapeutes du Québec, le rapport
annuel de la Corporation professionnelle des médecins du Québec,
de la Chambre des notaires du Québec, de l'Ordre des opticiens
d'ordonnances du Québec et de l'Ordre des chiropraticiens du
Québec.
Le Président: Ces documents sont déposés.
Maintenant, M. le leader du gouvernement.
Réponses à des questions inscrites au
feuilleton
M. Pagé: M. le Président, encore aujourd'hui, comme
les mercredis précédents, je voudrais déposer de
nombreuses réponses qui ont été formulées et
déposées au feuilleton.
Je veux déposer la réponse du ministre de la Santé
et des Services sociaux à la question 16 du feuilleton de ce jour et
inscrite par M. le député de Joliette. Je dépose la
réponse du ministre de la Santé et des Services sociaux à
la question 37 du feuilleton et inscrite par Mme la députée de
Johnson. Toujours le ministre de la Santé et des Services sociaux qui
répond à la question 38 du feuilleton et inscrite par Mme la
députée de Johnson. C'est bien. J'apprécie votre
satisfaction très clairement exprimée. Je dépose toujours
la réponse du ministre de la Santé et des Services sociaux
à la question 39 de Mme la députée de Johnson et, enfin,
M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, en réponse
à la question 40 du feuilleton de M. le député de La
Prairie. Toujours le ministre de la Santé et des
Services sociaux à la question 59 qui donne une réponse
à cette question du feuilleton inscrite par Mme la députée
de Marie-Victorin. La réponse de Mme la ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science à la question 22 du feuilleton
inscrite par M. le député d'Abitibi-Ouest. Vous en avez presque
tous. La réponse du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation à la question 14 du feuilleton inscrite par M. le
député d'Arthabaska. Et voilà! Quelle performance!
Rapport complémentaire du Directeur
général des élections sur les
résultats
de l'élection partielle en Nunavik
Le Président: Ces documents sont déposés.
Maintenant, j'ai reçu du Directeur général des
élections le rapport complémentaire sur les résultats de
l'élection partielle du 26 juin 1990 en Nunavik, région de la
baie d'Hudson. Je dépose ce document.
Dépôt de rapports de commissions. M. le président de
la commission du budget et de l'administration et député de
Vanier.
Consultation et étude détaillée
du projet de loi 258
M. Lemieux: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui
a siégé le 19 décembre 1990 afin de procéder
à la consultation des intéressés et à
l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt
privé 258, Loi sur la compagnie American Realty Investors Corp. Le
projet de loi a été adopté.
Le Président: Alors, est-ce que ce rapport est
adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Toujours, M. le
président de la commission du budget et de l'administration.
Consultation et étude détaillée
du projet de loi 272
M. Lemieux: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui
a siégé le 19 décembre 1990 afin de procéder
à la consultation des intéressés et à
l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt
privé 272, Loi concernant la Compagnie de fiducie Guardian. Le projet de
loi a été adopté.
Le Président: Est-ce que ce rapport est adopté?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le député de
Vanier.
M. Lemieux: Un instant, M. le Président. Je pense que mon
collègue a égaré... Mon collègue, M. le
député de Vimont, avait égaré mon dossier, M. le
Président.
Des voix: Ha, ha, ha!
Étude détaillée du projet de loi
113
M. Lemieux: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui
a siégé le 18 décembre 1990 afin de procéder
à l'étude détaillée du projet de loi 113, Loi
modifiant certains régimes de retraite des secteurs public et
parapublic. Le projet de loi a été adopté avec des
amendements.
Le Président: Alors, ce rapport est déposé.
M. le président de la commission de l'aménagement et des
équipements et député de Lévis.
Étude détaillée du projet de loi
108
M. Garon: M. le Président, je dépose le rapport de
la commission de l'aménagement et des équipements qui a
siégé les 11, 12, 13, 14 et 18 décembre 1990 afin de
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 108, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et
d'autres dispositions législatives. Le projet de loi a été
adopté avec beaucoup d'amendements.
Le Président: Alors, ce projet de loi...
Des voix: Ha, ha, ha!
(14 h 30)
Le Président: Ce rapport est déposé.
Maintenant, au dépôt de pétitions, M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
Surseoir à la décision
d'effectuer
des coupures dans les suppléments
versés aux familles d'accueil
M. Trudel: Oui, M. le Président, je désire
déposer l'extrait d'une pétition adressée à
l'Assemblée nationale par 104 pétitionnaires, citoyens et
citoyennes du comté de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
Les faits invoqués sont les suivants, M. le Président:
"Considérant l'importance de la famille d'accueil en tant que ressource
du réseau de la santé et des services sociaux;
"Considérant l'implication de cette ressource dans l'accueil et
l'hébergement de personnes handicapées, soit les
déficients intellectuels, les handicapés physiques, les patients
psychiatriques, et de personnes âgées en perte d'autonomie;
"Considérant que la région de l'Abitibi-Témiscamingue
possède peu de ressources intermédiaires pour accueillir cette
clientèle et que la famille d'accueil se voit donc sollicitée
pour répondre à un éventail de plus en plus grand de
besoins; "Considérant que les règles actuelles fixées par
le décret entré en vigueur le 1er septembre 1990 prescrivent des
coupures dans les suppléments, ou les primes, versés aux familles
d'accueil;"
L'intervention réclamée se résume ainsi: "Que
l'Assemblée nationale intervienne auprès du ministère de
la Santé et des Services sociaux afin de surseoir à sa
décision d'effectuer des coupures dans les suppléments
versés à ces ressources intermédiaires".
Je certifie que la présente est conforme à l'original.
Le Président: Alors, cette pétition est
déposée.
Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de
privilège ou sur un fait personnel.
Je vous avise qu'après la période de questions il y aura
deux votes reportés, le premier sur la motion de M. le ministre des
Finances proposant l'adoption du projet de loi 109, Loi modifiant la Loi sur la
Caisse de dépôt et placement du Québec, et le
deuxième sur la motion de M. le ministre de la Santé et des
Services sociaux proposant l'adoption du principe du projet de loi 120, Loi sur
les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses
dispositions législatives.
QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES
Nous allons maintenant procéder à la période
régulière de questions et réponses orales des
députés et je reconnais, en première question principale,
Mme la députée de Taillon.
Aide aux entreprises québécoises
Mme Marois: Merci, M. le Président. En fait, on le sait
déjà, malheureusement, nos petites et moyennes entreprises ont un
urgent besoin d'aide car la situation se détériore rapidement.
Ceci se confirme mois après mois par les statistiques de faillites, M.
le Président. Nous en sommes, à ce moment-ci, à plus de 1
000 000 000 $ de dettes dans les faillites accumulées depuis le
début de l'année. Est-ce que le ministre de l'Industrie, du
Commerce et de la Technologie peut nous confirmer que, dans l'annonce de jeudi
dernier, il n'y a pas 60 000 000 $ d'argent neuf pour l'aide aux entreprises,
mais seulement 15 000 000 $ d'argent neuf, M. le Président?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie,
du Commerce et de la Technologie.
M. Tremblay (Outremont): Ciel! comme dirait le chef de
l'Opposition, on commence à parler de nos PME québécoises
qui ont besoin de soutien...
Une voix:...
M. Tremblay (Outremont): ...pas des événements
médiatiques, de l'aide à nos PME québécoises. Je
l'ai dit, en conférence de presse devant 125 personnes, qu'il s'agissait
bel et bien de 30 000 000 $ plus 15 000 000 $ ajoutés pour le fonds PME
emplois et également 15 000 000 $ pour le regroupement des entreprises,
ce qui totalise 60 000 000 $ de vrai argent disponible pour les PME
québécoises. Pas 500 000 000 $ hypothétiques qui vont
peut-être venir au mois de février ou au mois de mars si le
privé met 150 000 000 $. Pas des hypothèses. De l'action du
présent gouvernement pour les PME québécoises.
Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
Mme Marois: Est-ce que le ministre ne conviendra pas que, compte
tenu que ce sont des centaines d'entreprises qui faillissent, jour après
jour, et que les sommes qu'il a investies ne lui ont permis ou ne vont lui
permettre d'aider qu'une quarantaine d'entreprises, qu'il n'atteint pas son
objectif? Et est-ce qu'il peut surtout répondre à ma question, M.
le Président? Combien y a-t-il d'argent neuf dans ces 60 000 000 $
puisque à la lecture du discours sur le budget, j'évalue qu'il y
avait déjà 45 000 000 $ d'annoncés?
Le Président: M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): Lors de la conférence de presse
tenue hier, le chef de l'Opposition a dit qu'il n'y a pas un directeur ou un
propriétaire de PME qui appelle à 4 heures du matin. Il a dit
ça. Il dit: II n'y a pas de gens de PME qui vont se réveiller
à 4 heures parce que le banquier menace d'appeler ses garanties. Je dois
dire à cette Assemblée que, depuis la ligne 1-800-461-AIDE qui
permet...
Des voix: 1-800-461 -AIDE.
M. Tremblay (Outremont): C'est bien, c'est bien.
Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!
M. Tremblay (Outremont): ...Dans toutes les régions du
Québec, on a voulu aider toutes les régions du Québec.
1300 appels téléphoniques, 60 appels dimanche dernier, 24 heures
par jour, 7 jours par semaine. Mme la députée de Taillon, 60 000
000 $ pour les PME québécoises, 60 000 000 $ de disponibles pour
les PME québécoises. Pas 500 000 000 $ hypothétiques. On
ne fait pas, le présent gouvernement, des événements
médiatiques.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: Toujours en question
complémentaire.
Mme Marois: Combien d'argent neuf, M. le Président, et
est-ce qu'il va continuer à distribuer au compte-gouttes des sommes
misérables, alors que les entreprises ont besoin de sommes
considérables, M. le Président?
Des voix: Bravo! Bravo! Le Président: M. le
ministre.
M. Tremblay (Outremont): Au moins, le présent gouvernement
n'a pas besoin de ressusciter Rodrigue Biron pour revenir avec une proposition
incomplète, boiteuse, et non réaliste, qui, et je n'en reviens
pas, de l'Opposition qui prétend protéger les petits. On dit: On
va garantir les institutions financières traditionnelles, mais pas les
sociétés de capital de risque. Ça veut dire que tous ceux
qui ont investi leurs épargnes à la Caisse de dépôt,
tous ceux et celles qui ont investi dans le Fonds de solidarité des
travailleurs du Québec, ceux-là, on ne les garantit pas. Prenez
tous les risques vous autres, mais on va garantir les banques. C'est ça
que l'Opposition veut faire, garantir les institutions financières
traditionnelles?
Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Alors, en question... À l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il
vous plaît! Alors, en question complémentaire, Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: Est-ce que le ministre ne pourrait pas garantir des
emplois aux travailleurs et aux travailleuses du Québec, plutôt
que d'attaquer des propositions de l'Opposition, M. le Président?
Des voix: Ah! Ah!
Le Président: M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): 1-800-461-AIDE. Non, non, 24 heures par
jour, 7 jours sur 7, toutes les entreprises du Québec du secteur
manufacturier, tertiaire, moteur et du secteur touristique qui ont besoin de
ressources financières pour passer à travers une conjoncture
économique moins favorable auront le support du présent
gouvernement, parce que des emplois, nous, on connaît ça. On n'a
pas attendu, une perte de 142 000 emplois comme vous avez attendu en 1981 pour
aider le Québec.
Des voix: Bravo, Bravo!
Le Président: S'il vous plaît! Alors, en
deuxième question principale maintenant... S'il vous plaît! MM.
les députés, s'il vous plaît! Alors, en deuxième
question principale, M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
Formule de calcul de l'impôt-services
M. Trudel: Alors, on peut quitter la ligne des faillites,
là.
Le ministre de la Santé et des Services sociaux annonçait,
il y a quelques jours, un nouvel impôt sur les soins dentaires, les soins
optométriques, également sur les médicaments et les
prothèses pour les handicapés. Questionné hier sur le
coût de ce nouvel impôt, le ministre affirmait que c'est 100 000
000 $ de plus, qu'il veut aller chercher dans les poches des citoyens payeurs.
Quant à la formule, elle, pour réclamer ou
récupérer ces 100 000 000 $ chez les familles, les
handicapés et les personnes âgées, c'est le mystère.
Alors, je suis retourné au dictionnaire que le ministre a bien voulu
m'offrir hier...
Une voix: Le Petit Robert.
M. Trudel: ...et le dictionnaire, à la page 1250, nous
indique qu'un mystère, c'est l'obscurité volontaire dont on
entoure quelque chose, l'ensemble des précautions que l'on prend pour la
rendre incompréhensible et pour la cacher.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Trudel: Le ministre peut-il nous indiquer aujourd'hui la
mystérieuse formule qui a été employée pour obtenir
la réponse de 100 000 000 $ qu'il a décidé d'aller
chercher dans les poches des parents, des familles, des handicapés et
des personnes âgées?
Le Président: M. le ministre de la Santé et des
Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. Je vois que mon investissement aura été utile.
M. le Président, cette question-là revient et, dans sa propre
définition du mystère, c'est caché. Ce n'est pas
caché, M. le Président, c'est là-dedans. Et s'il pose la
question aujourd'hui, c'est parce que c'est là-dedans. Ça fait
partie des décisions. Il dit la formule, M. le Président. (14 h
40)
Une voix: II ne l'a pas lu.
M. Côté (Charlesbourg): D'abord, il faut aller voir
pourquoi. Pourquoi aujourd'hui le gouvernement du Québec a-t-il
l'obligation de demander aux citoyennes et citoyens du Québec de faire
davantage? C'est parce que la situation financière du Québec ne
peut plus, de un, absorber les transferts que le fédéral ne fait
plus et, de deux, qu'il doit d'abord et avant tout faire en sorte que les
budgets qu'il a soient dévolus au paiement de la dette que vous nous
avez laissée, qui est passée de 5 000 000 000 $ en 1976 à
25 000 000 000 $ en 1985. Et ça, ça signifie au-delà de 2
000 000 000 $ par année qu'il nous faut payer. Et si vous n'aviez pas
été inconscients à ce point, aujourd'hui nous ne serions
pas devant cette situation. C'était ça, le caché que vous
aviez à l'époque.
Le Président: En question complémentaire.
M. Trudel: le ministre peut-il confirmer que la formule n'a pas
encore été approuvée par son gouvernement et que le
résultat pourrait être bien supérieur à 100 000 000
$, ce qu'il irait chercher dans les poches des familles, des handicapés,
et des personnes âgées tout en répondant. quelle sera cette
formule qui va être utilisée pour aller chercher ces 100 000 000
$?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je
ne crois pas avoir affaire à quelqu'un qui a été recteur
d'une université, sur le plan de l'honnêteté
intellectuelle. C'est clair. Vous usez de démagogie en tentant d'apeurer
les personnes handicapées à travers le Québec, en tentant
d'apeurer les familles les plus pauvres, en tentant d'apeurer les personnes
âgées, alors que vous savez très bien que, sur le plan des
décisions et de ce qui est arrêté, les personnes à
faibles revenus seront exemptées. Commençons d'abord par
ça. Et quand on a déterminé que les personnes à
faibles revenus seront exemptées, la formule, après, vous le
savez, tiendra compte de deux choses: elle tiendra compte de la consommation
que vous ferez et deuxièmement, de votre capacité de payer. Si on
le fait en fonction de mon salaire, comme député de Charlesbourg
et ministre, je gagne un peu plus cher que le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue qui est un député, donc, dans
ces conditions-là, je paierais davantage que lui, et c'est normal.
Une voix: Bravo!
Le Président: En question complémentaire.
M. Trudel: En l'absence de réponse, inutile de passer aux
menaces, M. le Président. Le ministre peut-il confirmer que le vendredi
6 décembre, devant son public sur commande, il a invoqué un taux
d'imposition de 30 % à 40 %? Il
a invoqué lui-même un taux d'imposition de 30 % à 40
% dont pourraient être frappés les montants payés pour les
soins ou les services reçus chez le dentiste, l'optométriste, les
prothésistes, et chez le pharmacien pour les personnes
âgées. Est-ce le début de la révélation de la
formule mystérieuse du ministre?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, si
tous les présidents des 900 organismes ou conseils d'administration du
Québec, que ce soit un CLSC, un centre d'accueil, un centre hospitalier,
que ce soit tous les organismes, les 175, qui sont venus en commission
parlementaire, qui ont été invités... Ce n'est pas le 6
mais le 7 décembre. Si ça, c'est d'être son public, je suis
extrêmement fier d'avoir eu ces invités-là, parce qu'ils
représentent les citoyens au Québec, ce que ne fait pas le
député de Rouyn-Noran-da-Témiscamingue. Et dans ce
sens-là, oui, c'est un public qui était extraordinaire, oui, un
public extraordinaire, mais qui vient du réseau et qui, lui, a compris
que la réforme est, d'abord et avant tout, faite pour l'ensemble des
citoyens du Québec. Mais quand on parle de formule, si le
député de Rouyn-Noranda-Témis-camingue avait
l'honnêteté d'aller vérifier au complet et de transmettre
à cette Chambre l'hypothèse qui a été
évoquée, on a dit que c'était uniquement à titre de
référence et que le moment...
Une voix: II dit que c'est une décision.
M. Côté (Charlesbourg): Vous dites que c'est une
décision. C'est uniquement une hypothèse pour tenter d'illustrer
aux individus... M. le Président, voulez-vous rappeler à l'ordre
le député de Laviolette?
Le Président: Pour la bonne marche des travaux!... S'il
vous plaît! Alors, pour la bonne marche des travaux, je prierais chacun,
des deux côtés, effectivement des deux côtés, je
demanderais aux deux côtés de garder leurs commentaires. Si vous
avez des questions, vous vous lèverez en temps et lieu. D'accord? Alors,
rapidement, en conclusion, M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Oui, monsieur. En
conclusion, c'était, à titre d'hypothèse, pour tenter de
démontrer à la population que ceux qui sont les plus riches
devraient payer pour ceux qui sont les plus pauvres et c'est une des bases
fondamentales de notre système. C'est ça l'exemple qui a
été fourni devant le...
Le Président: En question principale, M. le
député de Jonquière.
Compensation tenant lieu de taxes pour les
municipalités
M. Dufour: Parmi toutes les mesures annoncées vendredi
dernier par le ministre, il en est une qui constitue un changement de cap
majeur. Alors que la réforme fiscale de 1980, fruit de vraies
négociations avec le monde municipal, voulait faire du gouvernement
québécois un contribuable à part entière, en
l'obligeant à payer ses taxes foncières sur les immeubles qui lui
appartiennent, voilà que le ministre ouvre une brèche
extrêmement dangereuse en retirant le réseau scolaire primaire et
scolaire des compensations tenant lieu de taxes, le ministre n'ayant comme seul
argument celui que le Québec doit absolument ressembler au reste du
Canada. Résultat: une perte de 80 000 000 $ pour les
municipalités.
Le ministre sait-il qu'en 1980, les municipalités ont
accepté de se départir de sources de revenus importantes,
notamment la taxe de vente, en échange d'un accroissement de leur part
de l'impôt foncier et du paiement à 100 % des compensations tenant
lieu de taxes?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Ryan: M. le Président, je suis évidemment au
courant des arrangements qui furent mis au point en 1979 et qui
donnèrent lieu à l'adoption de la loi 57. J'étais dans
cette Chambre lorsque la loi fut adoptée et j'avais prévenu le
gouvernement du temps que la manière dont il avait réglé
le problème sur le dos des commissions scolaires n'était pas une
solution durable et qu'il faudrait tôt ou tard revenir à la
recherche d'une équation qui tiendrait compte des trois facteurs
principaux, des trois intervenants majeurs: les municipalités, le
gouvernement et les commissions scolaires. Par conséquent, lorsqu'il
invoque le modèle de 1979, je lui dis que c'est un modèle
à deux pattes alors qu'il y a trois éléments qui doivent
être considérés.
Nous avons mis au point des éléments qui permettront d'en
venir à une nouvelle équation où tous ces facteurs seront
considérés. Je pense que jamais je n'ai entendu des
députés de l'autre côté de la Chambre regretter que
les commissions scolaires, par suite des politiques mises en oeuvre par le
gouvernement précédent, glissaient de plus en plus vers une
dépendance financière totale vis-à-vis du gouvernement. Ce
n'est pas notre conception du rôle des commissions scolaires. Nous
voulons qu'elles aient une part de financement qui leur donne une consistance
propre, un petit peu plus substantielle. Mais tout le reste est en discussion.
Nous avons soumis des propositions l'autre jour aux municipalités et je
suis assuré qu'à mesure qu'elles les examineront, elles nous
signaleront les difficultés réelles qui peuvent être
inhérentes à l'une ou à
l'autre. Nous leur avons dit que nous sommes prêts à
discuter, c'est pour ça que nous n'avons pas fait part de
décisions, mais de propositions.
Je reviens au point qui a été soulevé par le
député en ce qui touche les "en lieu" de taxes. Nous
améliorons la politique du gouvernement concernant les hôpitaux,
les collèges et les universités, en portant de 80 % à 100
% les "en lieu" de taxes qui seront versés sur ces immeubles. Pour le
reste, sans vouloir calquer absolument...
Le Président: M. le ministre, s'il vous plaît.
M. Ryan: Le reste, vous le savez déjà
d'ailleurs.
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
M. Dufour: Dans les échanges proposés, la ville de
Montréal perd 10 000 000 $. Sur quoi le ministre des Affaires
municipales se base-t-il pour affirmer que le gouvernement
fédéral acceptera spontanément de payer les 91 300 000 $
d"'en lieu" de taxes, et ce, même s'il le fait dans d'autres provinces?
Ce ne serait pas la première fois que le Québec jouirait d'un
statut privilégié quand vient le temps, au fédéral,
de payer.
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Ryan: Au Québec, la législation exempte les
immeubles publics de taxes et c'est pourquoi le gouvernement verse des
compensations tenant lieu de taxes. Mais dans les autres provinces, ces
immeubles-là ne sont pas exemptés de taxes. Avec les propositions
que nous avons faites, les immeubles publics fédéraux seraient
sujets à taxation comme les autres et c'est là-dessus que nous
nous appuyons pour conclure que des revenus additionnels de quelque 80 000 000
$ pourraient émaner de cette source.
Le Président: En complémentaire.
M. Dufour: Comme le ministre sait qu'on ne peut forcer le
gouvernement fédéral à payer des "en lieu" de taxe - c'est
lui qui décide, il est juge et arbitre - si le gouvernement
fédéral ne veut pas payer ces 91 300 000 $ réservés
pour le transport en commun, est-ce que le ministre est prêt à
s'engager à remplacer ces 91 000 000 $, à les payer à la
place du fédéral pour ne pas que le transport en commun ne soit
pas pénalisé d'un autre montant de 91 300 000 $
supplémentaire?
Le Président: M. le ministre.
(14 h 50)
M. Ryan: Non. Nous présumons jusqu'à nouvel ordre
que, si la loi est claire, le gouvernement fédéral voudra s'y
soumettre, comme il l'a fait à propos de beaucoup d'autres lois du
Québec. Et si jamais il fallait en venir là, on arriverait
à un carrefour très sérieux.
Le Président: En question principale, M. le
député de Dubuc.
Augmentation du coût des permis de
chasse
M. Morin: Merci, M. le Président. Pour demeurer dans le
domaine des taxes directes ou déguisées, le mois dernier, le
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche annonçait
d'importantes augmentations des tarifs pour l'achat des permis de chasse ainsi
que pour l'ensemble des activités qui se déroulent sur le
territoire dont il a la charge. Et, si l'on en croit les propos du
président du Conseil du trésor, ce n'est qu'un début. En
effet, ses récentes déclarations à Jean-Paul Gagné
de l'hebdomadaire Les Affaires n'ont rien pour rassurer les chasseurs
car si, actuellement, le permis de chasse pour le gros gibier est de 27,25 $,
eh bien, selon l'hypothèse du président du Conseil du
trésor, il pourrait passer à 100 $. Et une nouvelle taxe, elle
aussi de 100 $, devrait être défrayée par ceux qui auraient
une chasse dite fructueuse.
Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche peut-il nous
dire, et sans attendre qu'on lui souffle la réponse comme
avant-hier...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Morin: Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche peut-il nous dire s'il tient pour vraisemblables les
hypothèses soulevées par le président du Conseil du
trésor?
Le Président: M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de
la Pêche.
M. Blackburn: Je suis très heureux, M. le
Président, de redécouvrir mon critique en matière de
faune. Je dois dire que, durant cette présente session, il avait
été plutôt...
Des voix:...
M. Blackburn: ...au ralenti. M. le Président, il y a de
ces questions qui nous arrivent, qu'on voudrait qui nous soient posées
et qu'on est très heureux quand elles le sont, comme on dirait, des
questions plantées. Celle-là, je suis très heureux de
l'avoir aujourd'hui parce qu'elle me permettra de corriger une perception,
suite à un article qui a été écrit la semaine
dernière dans un journal très lu à travers le
Québec. Effectivement, il n'y a à aucun endroit, ni sur aucune
table de travail de quelque ministère que ce soit,
d'études de faites pour que les permis de chasse montent à
100 $; en aucune façon il n'en est question. Ce que je dis, c'est
qu'actuellement ce que mon collègue du Trésor a voulu faire -
j'en suis convaincu - c'était tout simplement de mettre en relief que la
pratique de l'activité de la chasse au Québec et les
activités qui touchent la faune sont des activités qui sont
très peu dispendieuses et très importantes à conserver,
bien sûr, conserver pour ceux qui les pratiquent actuellement, mais
conserver aussi pour nos générations futures. Les principes
d'équité, les principes d'accessibilité seront maintenus
pour toutes les Québécoises et tous les
Québécois.
Le Président: En question complémentaire.
M. Morin: Est-ce que le ministre, considérant qu'il ne nie
pas l'éventualité d'augmentations, de toute façon... Une
question en deux volets, M. le Président. Est-ce que le ministre ne
croit pas que l'éventuelle augmentation de taxes déguisée
ira carrément contre le principe de la tarification qui veut que soit
chargée aux utilisateurs une partie ou la totalité des
coûts reliés à la pratique de l'activité? Et
conséquem-ment, cette taxe abusive ne risque-t-elle pas de
réduire à néant les efforts de son
prédécesseur pour éliminer le braconnage? Voilà
pour le premier volet.
Le deuxième. Le ministre ne croit-il pas que son gouvernement
remet régulièrement en question l'accessibilité au
territoire pour tous les Québécois et Québécoises
et que seuls quelques privilégiés pourront désormais
s'adonner à la pratique des sports de la chasse ou de la
pêche?
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre.
M. Blackburn: M. le Président, j'ai eu l'occasion, pour ce
qui est de la première partie de la question du député de
Dubuc, de démontrer, au cours des dernières semaines, combien
nous étions préoccupés justement par ces activités
de braconnage, encore trop nombreuses à travers le territoire, et que
nous allions continuer de mettre tout notre effort, notre énergie pour,
bien sûr, contrer, de façon extrêmement dynamique à
travers tout le territoire, ces illégaux.
Pour ce qui est de l'autre question du député de Dubuc, je
veux juste lui rappeler que les revenus générés par la
vente de permis à travers le Québec, ça fait un revenu
brut de 33 000 000 $. Quand on considère que l'activité du
ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, pour ce qui est
du secteur faune, c'est d'environ 125 000 000 $, c'est donc dire que ça
représente à peu près 25 % de l'enveloppe totale du
ministère pour ce qui est de ce secteur d'activité. C'est donc
dire que nous assumons notre responsabilité de conservation, nous
assumons la responsabilité de maintenir ce principe
d'accessibilité pour, bien sûr, le plus de citoyens possible
à travers le Québec.
Le Président: En question principale, M. le
député de Jacques-Cartier.
Rapatriement des pouvoirs en matière
d'assurance-chômage
M. Cameron: Merci, M. le Président. Ma question est pour
le ministre de la Main-d'oeuvre. Le 13 décembre, à la
conférence de presse du ministre, on a demandé au ministre si le
rapatriement des pouvoirs en matière de formation professionnelle
était aussi une étape vers le rapatriement de toute
l'assurance-chômage. Le ministre n'a pas dit non exactement. Il a
remarqué qu'on ne peut pas faire un arrangement administratif;
l'assurance-chômage prendrait une modification constitutionnelle,
discutée dans une autre salle. Il a ajouté qu'on va attendre la
fin de ces discussions-là. Ma question est la suivante: Was the Minister
saying that, if a constitutional accord can be reached with Ottawa, it is the
objective of the Government of Québec to have the Québec
Unemployment Insurance Fund supported entirely by the contributions of
Québec workers alone?
Le Président: M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.
M. Bourbeau: M. le Président, lors la conférence de
presse dont parle le député de Jacques-Cartier, j'ai
annoncé l'intention du gouvernement de demander au gouvernement
fédéral le rapatriement de tous les pouvoirs en matière de
main-d'oeuvre et de formation professionnelle. J'ai également dit que le
gouvernement n'a pas l'intention de demander le rapatriement des pouvoirs en
matière d'assurance-chômage puisqu'il s'agit là d'une
compétence qui, selon la Constitution canadienne, appartient au
gouvernement fédéral et que nous ne pouvons pas, par simple
arrangement administratif, rapatrier un pouvoir qui est inscrit dans la
Constitution canadienne. Ce n'est donc pas maintenant qu'il faut discuter de ce
problème-là. Pour l'instant, le gouvernement, pour des raisons,
M. le Président, qui tiennent à la réalité des
marchés du travail québécois, le Québec en est
arrivé à la conclusion qu'il doit assumer entièrement les
responsabilités en matière de main-d'oeuvre et de formation
professionnelle.
Le Président: En question complémentaire.
M. Cameron: I recognize the Minister's point about professional
formation and I understand that having Québec control has broad
support in Québec; I followed the press conference. But that does
not really answer the question that I asked. The question I asked was:
Supposing that a constitutional agreement could be reached, is it then the
objective to have unemployment insurance contributions entirely paid by
Québec workers?
Le Président: M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, il n'y a pas d'erreur que le
gouvernement fédéral a lié, dans sa réforme de
l'assurance-chômage, l'assuran-ce-chômage avec la formation
professionnelle en dégageant quelque chose comme 800 000 000 $ de
l'assurance-chômage pour des fins de formation. Or, on sait que la
formation professionnelle, comme l'éducation, c'est des sujets de
compétence exclusivement provinciale et qu'en ce faisant, c'est le
gouvernement fédéral qui a lié l'assurance-chômage
et la formation professionnelle. Mais le gouvernement n'a pas pour autant
l'intention de demander le rapatriement du programme d'assurance-chômage.
Et, M. le Président, à ce sujet-là, il me fait plaisir de
me référer à ('editorial de la Gazette de
lundi de cette semaine qui fait en sorte de dire que le gouvernement du
Québec a raison de demander dès maintenant le rapatriement de
tous les pouvoirs de main-d'oeuvre, non pas après la conclusion des
travaux de la commission Bélan-ger-Campeau, mais dès maintenant,
parce que, justement, les ententes se terminent le 31 mars prochain. Je ne
comprends pas pourquoi la Gazette semble dire que nous voulons le
rapatriement de l'assurance-chômage quand j'ai spécifiquement dit
que nous ne le demandions pas. Merci.
Le Président: Une question additionnelle, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, comment le ministre entend-il
réagir à la demande de la Chambre de commerce du Québec
qui lui a été exprimée la semaine passée,
justement, de revendiquer l'ensemble du régime
d'assurance-chômage? Qu'entend-il faire étant donné la fin
de non-recevoir que lui a servie son homologue fédéral la semaine
passée quant à la simple demande de transfert de la formation
professionnelle? (15 heures)
Le Président: M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, je n'ai pas dit que le
gouvernement du Québec ne réclamerait jamais
l'assurance-chômage. J'ai dit que, dans le cadre actuel des choses, dans
la situation actuelle, étant donné que constitutionnellement le
Québec n'a pas ce pouvoir-là, on ne peut pas enclencher de
négociations constitutionnelles maintenant. Donc, on veut des
arrangements administratifs.
Maintenant le gouvernement fédéral, que je sache, n'a pas
répondu négativement à notre demande. Le premier ministre
du Canada a annoncé au cours des derniers jours qu'il y avait
possibilité de considérer des arrangements ou le rapatriement de
certains pouvoirs. Moi, M. le Président, je suis même optimiste
parce que, voyant les réponses extrêmement évasives du
premier ministre canadien et de la ministre fédérale et
l'encouragement très net du journal The Gazette dont on ne peut
pas dire qu'il est particulièrement souverainiste, je trouve que les
signes avant-coureurs sont prometteurs. Je vous remercie.
Le Président: Alors, en question principale maintenant,
Mme la députée de Chicoutimi.
Financement des hôpitaux à vocation
régionale
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. En novembre
dernier, le ministère de la Santé et des Services sociaux
acceptait le plan de redressement budgétaire de l'hôpital de
Chicoutimi, plan qui prévoyait, en plus de la fermeture de lits et la
coupure de services, l'imposition de 25 $ par jour pour les personnes logeant
à l'hôtellerie de l'hôpital pour y recevoir des traitements
de chimiothérapie, au cobalt ou de réadaptation. Ces personnes
viennent soit du Lac-Saint-Jean, de Chibougamau-Chapais ou de Sept-îles.
La durée de leur séjour peut être de deux ou trois
semaines, sur plusieurs périodes. Cette décision est
indécente et inhumaine, parce qu'elle affecte des personnes
cancéreuses dont la vie dépend de ces traitements. Ma question
s'adresse au ministre de la Santé et des Services sociaux. A-t-il
l'intention d'interdire l'imposition de tels frais à l'hôpital de
Chicoutimi et entend-il accorder aux hôpitaux à vocation
régionale un financement qui tienne compte des clientèles et qui
assure dans les faits le droit des personnes à des services de
santé?
Le Président: M. le ministre de la Santé et des
Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, la
semaine dernière lorsque nous avons étudié les
crédits supplémentaires du ministère, le
député de Joliette en particulier a soulevé la question
que soulève Mme la députée de Chicoutimi. On a
échangé sur les intentions qu'avait le ministère d'une
politique à ce niveau-là et de tenter d'en arriver à un
certain équilibre et à une certaine équité à
travers le Québec, puisque nous sommes aujourd'hui dans une situation
où, effectivement, les gens qui, par exemple, de l'Est du Québec
sont traités à l'Hôtel-Dieu de Québec et profitent
de l'hôtellerie n'ont à payer aucun sou, alors que dans le cas
présent à Chicoutimi les gens paient une partie. Est-ce que la
solution
réside dans l'effacement total pour l'ensemble des intervenants
du Québec du paiement? Je ne pense pas. Je suis plutôt de ceux qui
pensent, avec la Société canadienne du cancer, que nous devons
faire en sorte qu'il y ait trois groupes d'individus concernés par cela:
l'individu lui-même, le gouvernement et aussi l'établissement,
puisque c'est là une proposition qui vient de la Société
canadienne du cancer.
Le Président: En question complémentaire.
Mme Blackburn: M. le Président, est-ce que le ministre
sait d'abord que la décision est déjà en application?
Est-ce que le ministre sait que les personnes qui profitent de ces
services-là doivent parcourir - celles de Chibougamau, il y en a 4
actuellement - 400 kilomètres pour se rendre à l'hôpital de
Chicoutimi, 250 $ par semaine, que ces personnes perdent déjà du
revenu parce qu'elles sont malades? Est-ce qu'il trouve ça normal?
Est-ce que ça ne constitue pas une négation du droit des
personnes à obtenir des services de santé? Est-ce qu'il ne pense
pas qu'il devrait imposer un moratoire sur la décision?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): À la question,
à savoir si c'est normal, ce n'est pas normal lorsqu'on regarde ce qui
se passe à l'Hôtel-Dieu de Québec, dans la mesure
où, effectivement, on en arrive avec une politique qui est pour
l'ensemble du Québec, elle ne devrait pas être spécifique
à Chicoutimi, ni spécifique a l'Hôtel-Dieu de
Québec, mais elle devra être spécifique à l'ensemble
des régions du Québec, y compris à celle du
Saguenay-Lac-Saint-Jean. Je comprends le problème spécifique
soulevé par les gens qui viendraient de Chibougamau, de Mistassini ou
d'ailleurs, et qui ont... Je vais examiner. Je ne peux pas vous dire s'il y
aura un moratoire aujourd'hui, je vais examiner cela et je m'engage à
donner une réponse à Mme la députée avant la fin de
la session.
Le Président: En question principale, M. le
député de Pointe-aux-Trembles.
Accès des occasionnels de la fonction publique
à des postes permanents
M. Bourdon: Après avoir débrayé une heure
hier, les professionnels du gouvernement ont manifesté sur la colline
parlementaire aujourd'hui. Sans convention collective depuis un an, ils
réclament notamment que les 4200 postes permanents créés
récemment - c'est une décision judicieuse du Conseil du
trésor - soient octroyés en priorité aux occasionnels en
poste depuis trois ans. La commission parlementaire Lemieux-Lazure a
préconisé à l'unanimité une disposition
législa- tive afin de rendre justice aux personnes en cause,
principalement des jeunes et des femmes. Des centaines de ces personnes
risquent de se retrouver au chômage au moment précis où
leur poste précaire devient enfin permanent.
Au président du Conseil du trésor, le ministre entend-il,
avant les fêtes, donner suite à la recommandation unanime d'une
commission de ce Parlement?
Le Président: M. le président du Conseil du
trésor.
M. Johnson: M. le Président, je remercie le
député de sa question. Elle est plus dans les formes que ce que
j'en entendais de ses discours à l'heure du déjeuner, sous mes
fenêtres, en présence des professionnels du gouvernement.
Ceci étant dit, je lui ferai remarquer qu'autant la Commission de
la fonction publique que la commission parlementaire, dans les deux cas, dans
des rapports, on fait état d'un choix que le gouvernement pourrait
exercer, soit celui par voie législative de titulariser, donc de donner
carrément aux gens qui occupent les emplois occasionnels le titre
d'emploi régulier ou alors - et le député de
Pointe-aux-Trembles est passé, a glissé très rapidement
sur l'autre choix - d'ouvrir les concours à l'ensemble de la population
et de ne favoriser d'aucune façon les employés occasionnels en
poste. C'est très clair. Et la Commission de la fonction publique et la
commission parlementaire suggèrent ce choix.
Ce que j'ai fait, M. le Président, c'est tenter de concilier ces
deux extrêmes, dirions-nous, par lesquels nous pourrions passer, qui
visent à reconnaître le principe d'efficience, donc de faire appel
aux compétences qui s'exercent déjà et,
deuxièmement, de respecter le principe d'accès de tous à
des emplois de la fonction publique par l'ouverture de concours, d'où
les listes de concours réservés aux occasionnels de cinq ans;
c'est la façon, M. le Président, dont je conçois qu'on
peut atteindre l'équilibre recherché.
Le Président: En question complémentaire.
M. Bourdon: En deux volets, M. le Président. Le ministre
convient-il que le fait de titulariser, comme le propose la commission
parlementaire, les gens qui ont un certain nombre d'années toucherait a
peine le tiers des postes? Et, deuxième volet, le ministre croit-il
qu'il est juste et raisonnable qu'une occasionnelle occupant le même
poste depuis trois, quatre, cinq ou six ans se retrouve au chômage au
moment précis où son poste devient enfin permanent?
Le Président: M. le président du Conseil du
trésor.
M. Johnson: Sur le premier volet, je
rappelle que l'alternative sur laquelle, encore une fois, vient de
glisser le député, c'est celle d'ouvrir les concours absolument
à tout le monde, sans aucune préférence de quelque nature
que ce soit d'inscription, sur une liste de concours, de la part des
occasionnels de cinq ans.
Deuxièmement, ce que je veux faire remarquer sur le
deuxième volet, c'est qu'il faut bien se souvenir que, dans la mesure
où la Loi sur la fonction publique exige l'accès au poste
régulier par la voie du concours, donc du mérite - je devrais
plutôt dire du mérite, donc du concours - les occasionnels qui
occupent ces emplois ne sont pas entrés dans la fonction publique par ce
biais d'un concours. Nous tentons de corriger cette situation en reconnaissant
qu'à l'égard de certains d'entre eux ils devraient, dans la
mesure où il y a une liste réservée, se qualifier d'autant
plus facilement qu'ils occupent le poste déjà et que, à
partir de ce moment-là, le gestionnaire à l'intérieur du
ministère aura le choix, dans les faits, de titulariser ceux qui
occupent le poste ou, alors, d'avoir recours à d'autres listes
concurrentes.
Le Président: En question principale, M. le
député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition.
Aide financière aux étudiants
M. Gendron: Oui. Hier, je demandais à la ministre de
l'Enseignement supérieur si elle pouvait donner l'assurance que les
étudiants qui font les frais des ratés majeurs de l'entrée
en vigueur de la nouvelle loi sur l'aide financière aux
étudiants, puisqu'il y a 54 % des plaintes qui sont logées
auprès du Protecteur du citoyen, et qui sont toujours en attente de
leurs prêts et bourses, qu'un premier chèque leur serait
versé... Elle m'a répondu qu'elle avait traité le
même nombre de dossiers. Ce n'est pas ça le problème. La
question que je lui pose, c'est: Est-ce qu'elle peut donner la garantie
à cette Chambre que les étudiants qui n'ont eu ni prêt ni
bourse parce que leur dossier traîne peuvent avoir une réponse
avant les fêtes? C'est ça, la question.
Le Président: Mme la ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science. (15 h 10)
Mme Robic: M. le Président, suite à l'adoption de
la nouvelle loi et des règlements sur l'aide financière, suite
à l'implantation d'un nouveau système informatique - je le disais
hier et je le répète - je suis heureuse de constater que,
malgré ces contraintes nouvelles pour notre régime, à
l'heure où on se parle, on a exactement le même pourcentage de
réponses que l'an dernier avec l'ancien système. Ça veut
dire, au moment où on se parle, M. le député
d'Abitibi-Ouest, qu'on a, de fait, traité 98 % des demandes de
prêts. ça veut dire qu'on a seulement 2 % qui ne sont pas encore
traitées. alors, l'ensemble des prêts a été
traité. pour une certaine partie, nous attendons des informations
supplémentaires des étudiants pour terminer l'étude de
leurs dossiers. mais, dans 87 % des cas, les prêts sont
déjà émis, m. le président.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
M. Gendron: Deux mois plus tard, c'est exact, mais deux mois plus
tard, et ceux qui ne l'ont pas, ne l'ont toujours pas, et ils font face
à un abandon d'études ou pas. Deuxième question, en
additionnelle. Comment pouvez-vous expliquer, Mme la ministre, que les deux
bonifications les plus significatives de l'aide financière aux
étudiants, c'est-à-dire le comité de réexamen et de
révision des demandes, ou le comité d'appel - parce que, pour le
prédécesseur, ce n'était pas des farces, c'était le
comité d'examen - et, deuxièmement, la couverture par l'aide
sociale des besoins du conjoint qui n'est pas aux études, comment
pouvez-vous expliquer que, pour ces deux mesures-là, il n'y a absolument
rien de fait au moment où on se parle?
Une voix: C'est ça, le problème. Le
Président: Mme la ministre.
Mme Robillard: M. le Président, je pense que le
député d'Abitibi-Ouest est très mal informé. Mon
collègue de la Main-d'oeuvre a pris la décision. Elle est
déjà en vigueur. Et les conjoints inactifs sont couverts par le
ministre de la Main-d'oeuvre, et ce, rétroactivement au 1er mai 1990.
Alors, il n'y a aucun problème de ce côté-là.
Aucun.
Des voix: Ah! Ah!
Le Président: Alors, en question principale, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Négociation de la convention collective des
notaires et des avocats
Mme Harel: M. le Président, les 650 avocats et notaires de
la fonction publique sont sans contrat de travail, sans indexation, sans
ajustement salarial depuis décembre 1988. Malgré la proposition
plus que raisonnable d'accepter le statu quo, le syndicat attend, depuis le 10
décembre, des nouvelles du gouvernement. Certains d'entre eux sont parmi
nous dans les galeries. Et, M. le Président, je voudrais demander au
ministre de la Justice comment peut-il expliquer que l'offre du Conseil du
trésor à cause du plafonnement du système de rendement
sort moindre que le statu quo et retire, en 1991, 350 000 $ des poches
des avocats et des notaires de la fonction publique?
Une voix: Honte! Honte!
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Rémillard: M. le Président, tout d'abord, je
dois dire que nous avons réglé, il y a quand même quelques
jours maintenant, avec les substituts du Procureur général,
à la satisfaction de toutes les parties. Nous continuons nos discussions
avec les avocats et les notaires qui font un travail, je tiens à le dire
comme ministre de la Justice, tout à fait remarquable au service de
toute la fonction publique, au service de l'appareil gouvernemental. Ils sont
là et ça me fait plaisir de les saluer. Il y a des discussions
qui se continuent, de bonne foi. J'ai signé, juste avant de venir ici,
M. le Président, une lettre en réponse à certaines
affirmations qui ont été dites, que j'ai pu voir dans les
journaux aujourd'hui et qui m'ont été transmises aussi par
lettre, par Mme la présidente du syndicat. J'ai écrit une lettre
pour rectifier certains faits. Et, dans ce contexte-là, je crois que
nous pouvons nous asseoir et trouver une solution dans le contexte qui est le
nôtre et auquel on ne peut pas déroger en fonction de la
capacité de payer de l'État.
Le Président: En question complémentaire.
Mme Harel: De bonne foi, le ministre s'engage-t-il, au moins,
à demander à son gouvernement de verser une avance en forfaitaire
pour éviter aux avocats et notaires d'être
pénalisés, M. le Président, par un seul paiement
rétroactif imposable en une seule année fiscale, et tout cela,
à cause évidemment, de l'absence totale d'indexation depuis
1988?
Le Président: M. le ministre.
M. Rémillard: je m'engage, comme je l'ai toujours fait, m.
le président, à ce que les discussions puissent se faire le plus
librement possible et de bonne foi, de part et d'autre. c'est un sujet qui peut
être discuté afin qu'on voie ce qu'on peut faire. je le fais en
collaboration, bien sûr, avec mon collègue du conseil du
trésor qui voit à la chose de très près, comme vous
le savez. dans ce contexte-là, on peut voir ce qu'on peut faire.
Le Président: Alors, en question complémentaire,
Mme la députée de Terrebonne.
Mme Caron: Merci, M. le Président. Est-ce que le ministre
responsable de la protection du consommateur confirme les affirmations du
Syndicat des avocats et notaires de la fonction publique qui, contrairement
à la réponse du ministre le 13 décembre dernier en cette
Chambre, nous apprennent que le projet de loi sur la location des biens
mobiliers annoncé en octobre 1988 est retardé à cause de
cette grève du zèle des juristes?
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Rémillard: M. le Président, j'ai eu l'occasion
déjà de répondre et je maintiens la réponse que
j'ai faite. J'avais besoin simplement qu'on fasse d'autres consultations et ce
que je veux avoir, c'est un projet de loi qui pourra répondre le plus
possible aux attentes du milieu en fonction d'une situation qu'on doit
corriger. Si vous avez regardé un petit peu la réforme du Code
civil que nous avons, que j'ai déposée hier, vous allez voir,
vous voyez là que vous avez des principes qui sont inclus dans ce
nouveau Code civil, un meilleur équilibre justement entre le
consommateur, le fabricant, celui qui fournit un service, celui qui l'utilise.
Et c'est dans ce contexte-là, M. le Président, que je veux avoir
un projet de loi qui soit le meilleur possible. Alors, que je fasse des
consultations, je pense que Mme la députée ne me le reprochera
pas.
Le Président: Une toute dernière question
additionnelle, Mme la députée de Terrebonne.
Mme Caron: Est-ce que le ministre confirme que le Syndicat des
avocats et notaires de la fonction publique nous affirme que ce projet de loi
est maintenant retardé et qu'en plus, des statistiques démontrent
que l'organisme de l'Office de la protection du consommateur est affecté
dans tous ses résultats et même au niveau des poursuites
pénales?
Le Président: M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, ce projet de loi
sera présenté quand je considérerai, comme ministre
responsable de la protection du consommateur, qu'il répond aux besoins.
C'est moi, comme ministre, qui ai la responsabilité d'évaluer les
besoins. Je le fais en étroite collaboration avec l'Office de la
protection du consommateur qui fait un travail - j'en profite pour le dire - un
travail tout à fait exceptionnel, un très bon travail. Et dans ce
contexte-là, d'un commun accord, nous travaillons ensemble pour que le
projet de loi soit le plus susceptible de répondre aux besoins que nous
avons des consommateurs.
Le Président: Alors, ceci met fin à la
période régulière des questions sauf que M. le ministre de
la Santé et des Services sociaux a un complément de
réponse à donner à la question de M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. M. le ministre.
Réponse différée
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président,
c'est à Mme la députée de Chicoutimi.
Le Président: Je m'excuse, à Mme la
députée de Chicoutimi.
Financement des hôpitaux à vocation
régionale
M. Côté (Charlesbourg): Je suis allé aux
informations, M. le Président, pour le plus grand souci de donner les
réponses les plus exactes possible à l'Opposition et je suis
à même de confirmer que, suite aux échanges que j'ai eus
lors de l'étude des crédits avec le député de
Joliette sur le cas particulier soulevé par Mme la députée
de Chicoutimi, les officiers du ministère sont entrés en contact
avec les gens de l'hôpital de Chicoutimi et nous maintiendrons la
situation où il y a gratuité au niveau de l'hôpital de
Chicoutimi jusqu'à la fin mars 1991, donc dans l'exercice financier, et
les 44 000 $ ou à peu près qui étaient nécessaires
au niveau de l'équilibre financier concernant ces paiements-là de
manière spécifique ne sont plus sous le poids de l'hôpital
mais, au mois d'avril 1991, nous aurons une politique pour l'ensemble, plus
équitable à la fois pour ceux de Montréal, à la
fois pour ceux de Québec, de l'Est du Québec et pour l'ensemble
de toutes les régions du Québec.
Le Président: alors, pour une question
complémentaire, mme la députée de chicoutimi. (15 h
20)
Mme Blackburn: m. le président, le ministre peut-il nous
dire s'il est vrai que cette disposition, l'imposition de frais
d'hôtellerie, contrevient à la loi sur la santé et les
services sociaux et s'il veut changer le mode, est-ce qu'il devra aussi
modifier la réglementation à ce sujet-là à compter
d'avril prochain?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je
n'ai pas d'information, ni oui ni non que ça entrave la loi
fédérale. Je le vérifie à ce moment-ci. Quant au
reste, je le vérifierai. Ça fera partie de l'ensemble de la
politique que nous déposerons et qui sera applicable en avril.
Le Président: Alors, c'est la fin de la période des
questions. Je vais maintenant passer aux votes reportés. Veuillez
prendre place, s'il vous plaît.
Mise aux voix de la motion proposant l'adoption du
projet de loi 109
Alors, je mets maintenant aux voix la motion de M. le ministre des
Finances proposant l'adoption du projet de loi 109, Loi modifiant la loi sur la
caisse de dépôt et placement du québec. que celles et ceux
qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous
plaît.
Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Port neuf), Mme
Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M.
Levesque (Bonaven-ture), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argen-teuil), M.
Côté (Charlesbourg), M. Bourbeau (La-porte), M. Dutil
(Beauce-Sud), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Sirros
(Laurier), M. Vallières (Richmond), M. Vallerand (Crémazie), M.
Elkas (Robert-Baldwin), M. Tremblay (Outremont), M. Rémillard
(Jean-Talon), M. Rivard (Rosemont), Mme Robic (Bourassa), M. Middlemiss
(Pontiac), Mme Frulla-Hébert (Marguerite-Bourgeoys), M. Cherry
(Sainte-Anne), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Johnson (Vaudreuil), M.
Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinongé), M. Ciaccia (Mont-Royal), Mme
Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), Mme Bleau (Groulx), M. Houde
(Berthier), M. Maciocia (Vi-ger), M. Maltais (Saguenay), M. Savoie
(Abitibi-Est), Mme Trépanier (Dorion), M. Cannon (La Peltrie), M.
Philibert (Trois-Rivières), M. Beau-din (Gaspé), M. Chagnon
(Saint-Louis), M. Hamel (Sherbrooke), M. Doyon (Louis-Hébert), M.
St-Roch (Drummond), Mme Pelchat (Vachon), M. Paradis (Matapédia), M.
Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc
(Taschereau), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay
(Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Dauphin (Marquette),
M. Kehoe (Chapleau), M. Fradet (Vimont), M. Lemieux (Vanier), M. Messier
(Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Charbonneau (Saint-Jean),
Mme Bégin (Belle-chasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M.
Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Gautrin
(Verdun), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington
(Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M.
Borde-leau (Acadie), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Audet (Beauce-Nord), Mme
Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M.
Brouillette (Champlain), M. Bradet (Charlevoix), M. Després (Limoilou),
M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Forget (Prévost), Mme
Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance
(Iberville), M. MacMillan (Papineau).
M. Libman (D'Arcy-McGee), M. Holden (Westmount), M. Cameron
(Jacques-Cartier), M. Atkinson (Notre-Dame-de-Grâce).
Le Président: S'il vous plaît! Alors, que celles et
ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous
plaît.
Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), M. Perron
(Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Blais (Masson), Mme Marois
(Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hoche-
laga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), M.
Godin (Mercier), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure
(La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M.
Léonard (Labelle), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Paré
(Shef-ford), M. Claveau (Ungava), M. Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques), M.
Morin (Dubuc), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon
(Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Mme
Dupuis (Verchères).
Le Président: Est-ce qu'il y a des absentions? le
secrétaire: pour: 87 contre: 26 abstentions: 0
Le Président: La motion est donc adoptée et, en
conséquence, le projet de loi 109, Loi modifiant la Loi sur la Caisse de
dépôt et placement du Québec, est adopté.
Mise aux voix de la motion proposant l'adoption du
principe du projet de loi 120
Je mets maintenant aux voix la motion de M. le ministre de la
Santé et des Services sociaux. Je requerrais l'attention des
députés, s'il vous plaît. Je mets maintenant aux voix la
motion de M. le ministre de la Santé et des Services sociaux proposant
l'adoption du principe du projet de loi 120, Loi sur les services de
santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions
législatives. Que celles et ceux qui sont en faveur veuillent bien se
lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Portneuf), Mme
Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M.
Levesque (Bonaven-ture), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argen-teuil), M.
Côté (Charlesbourg), M. Bourbeau (La-porte), M. Dutil
(Beauce-Sud), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Sirros
(Laurier), M. Vallières (Richmond), M. Vallerand (Crémazie), M.
Elkas (Robert-Baldwin), M. Tremblay (Outremont), M. Rémillard
(Jean-Talon), M. Rivard (Rosemont), Mme Robic (Bourassa), M. Middlemiss
(Pontiac), Mme Frulla-Hébert (Marguerite-Bourgeoys), M. Cherry
(Sainte-Anne), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Johnson (Vaudreuil), M.
Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinongé), M. Ciaccia (Mont-Royal), Mme
Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), Mme Bleau (Groulx), M. Houde
(Berthier), M. Maciocia (Vi-ger), M. Maltais (Saguenay), M. Savoie
(Abitibi-Est), Mme Trépanier (Dorion), M. Cannon (La Peltrie), M.
Philibert (Trois-Rivières), M. Beau-din (Gaspé), M. Chagnon
(Saint-Louis), M. Hamel (Sherbrooke), M. Doyon (Louis-Hébert), M.
St-Roch (Drummond), Mme Pelchat (Vachon), M. Pa- radis (Matapédia), M.
Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc
(Taschereau), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay
(Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Dauphin (Marquette),
M. Kehoe (Chapleau), M. Fradet (Vimont), M. Lemieux (Vanier), M. Messier
(Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Charbonneau (Saint-Jean),
Mme Bégin (Belle-chasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M.
Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Gautrin
(Verdun), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington
(Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M.
Borde-leau (Acadie), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Audet (Beauce-Nord), Mme
Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M.
Brouillette (Champlain), M. Bradet (Charlevoix), M. Després (Limoilou),
M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Forget (Prévost), Mme
Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance
(Iberville), M. MacMillan (Papineau). M. Libman (D'Arcy-McGee), M. Holden
(Westmount), M. Cameron (Jacques-Cartier), M. Atkinson
(Notre-Dame-de-Grâce).
Le Président: Que celles et ceux qui sont contre cette
motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: M. chevrette (joliette), m. perron
(duplessis), mme blackburn (chicoutimi), m. blais (masson), mme marois
(taillon), m. garon (lévis)...
Le Président: Un instant, s'il vous plaît!
Le Secrétaire adjoint: Mme Harel
(Hoche-laga-Maisonneuve)...
Le Président: Je vais requérir la collaboration de
tous les députés, s'il vous plaît! (15 h 30)
Le Secrétaire adjoint: M. Jolivet (Laviolette), M. Baril
(Arthabaska), M. Godin (Mercier), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour
(Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M.
Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette
(Marie-Victorin), M. Paré (Shefford), M. Claveau (Ungava), M. Boulerice
(Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terrebonne), M.
Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel
(Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères).
Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions? le
secrétaire: pour: 87 contre: 26 abstentions: 0
Le Président: Alors, la motion est adoptée. M. le
leader du gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, je voudrais indiquer aux
collègues...
Des voix: ...la motion pour déférer...
Renvoi à la commission des affaires
sociales
M. Pagé: M. le Président, dans un premier temps, je
fais motion pour déférer le projet de loi 120 à la
commission des affaires sociales pour étude détaillée.
Le Président: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Des voix: Adopté. Le Président:
Adopté.
M. Pagé: M. le Président, aux motions sans
préavis, je voudrais indiquer aux collègues que nous serons
très certainement appelés à étudier, d'ici quelques
minutes, et à écouter trois motions, très certainement,
et, très probablement aussi, une quatrième motion qui viendrait
en fin d'exercice et qui commanderait un vote des deux tiers des membres de
l'Assemblée nationale. C'est possible, je suis en échange avec le
leader de l'Opposition sur le sujet. Donc, je vous propose d'appeler les trois
motions: une première que j'ai à présenter pour convoquer
la commission parlementaire de l'éducation; ensuite, c'est entendu entre
les deux groupes que M. le député des Îles-de-la-Madeleine
présentera une motion; M. le député de Mercier entend
présenter une motion aussi et, comme je l'indiquais, il n'est pas exclu,
dépendamment des échanges que j'aurai avec le leader de
l'Opposition d'ici quelques minutes, que je puisse demander à Mme la
vice-première ministre d'en présenter une quatrième. Donc,
je requiers et je souhaite que les députés demeurent attentifs
à nos échanges et à nos débats; un vote pourrait
être appelé d'ici à la fin de la séance.
Cela étant dit, M. le Président, qu'il me soit
permis...
Le Président: Aux motions sans préavis, maintenant.
Je vous reconnais.
Consultation générale sur la
réglementation en matière de publicité
M. Pagé: ...de déposer la motion à l'effet
que la commission de l'éducation se réunisse, pour la
durée d'une séance, le mardi 5 mars 1991, afin d'examiner la
réglementation que devront adopter les corporations professionnelles en
matière de publicité et que le ministre responsable de
l'application des lois professionnelles soit membre de ladite commission pour
la durée du mandat. Et ça, c'est le résultat
d'échanges, entre autres d'une requête provenant de l'Opposition
officielle. J'indique tout de suite que les groupes qui seront invités
à venir témoigner le 5 mars prochain seront invités ou
appelés suite aux dispositions de notre règlement et suite aussi
à une entente avec l'Opposition officielle.
Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour la
présentation de cette motion?
Des voix: Consentement.
Le Président: II y a consentement? Consentement pour la
présentation. Il y a consentement. Est-ce que cette motion est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: La motion est donc adoptée.
Toujours au niveau des motions sans préavis, en requérant
la collaboration de tous les collègues, s'il vous plaît, je vais
reconnaître M. le député des
Îles-de-la-Madeleine.
M. Farrah: m. le président, c'est avec beaucoup de
tristesse que je sollicite le consentement de l'assemblée nationale afin
que nous débattions la motion...
Le Président: Un instant, M. le député. J'ai
demandé, je pense, j'ai requis la collaboration de tous les membres de
l'Assemblée. Je ne pense pas l'avoir, alors je la requiers à
nouveau. Ceux qui ont des caucus, je vous prierais de les faire à
l'extérieur. Évidemment, tous les collègues qui doivent
quitter l'Assemblée... Je vais faire une mise au point immédiate.
Il y a une mauvaise habitude de faire les caucus derrière le trône
ou encore immédiatement derrière la porte. Je vous prierais
d'aller discuter dans le couloir. Parce que si vous demeurez derrière la
porte, juste en arrière du fauteuil, il est évident que des
bruits parviennent à l'Assemblée. Ça dérange
complètement ceux qui veulent écouter la motion et ça
dérange celui qui la présente. Alors, je requiers votre
collaboration à cet effet.
M. le député, je vous écoute.
M. Farrah: M. le Président, comme je le mentionnais, c'est
avec beaucoup de tristesse que je sollicite le consentement de
l'Assemblée nationale afin que nous débattions la motion
suivante: "Que cette Assemblée se joigne aux familles
éprouvées, suite au naufrage du Nadine, à Cap-aux-Meules,
dans la nuit du dimanche 17 décembre 1990, ainsi qu'à celui du
navire le Bout de ligne, au large de Gaspé, la semaine
dernière."
Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour la
présentation de cette motion?
Une voix: Un instant! Des voix: Consentement.
Le Président: II y a consentement. Oui, un instant. Ha,
ha, ha! Alors, au bon vent, maintenant, M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, moi, je voudrais demander
de suspendre ce consentement 30 secondes pour suggérer une chose au
leader adjoint, et c'est la suivante - au leader, excusez. Il y a une seule
commission, il y a la ville de Montréal qui, présentement, est en
audition. Et compte tenu qu'il y a trois motions sans préavis possibles,
je serais d'avis qu'on puisse donner l'avis que cette commission puisse
siéger. Les gens de Montréal attendent présentement.
Le Président: II y a consentement, donc, pour suspendre le
présent débat. Nous allons immédiatement aux avis touchant
les travaux des commissions. C'est ça? M. le leader du gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, j'ai beaucoup de
compassion pour le député de Joliette et leader parlementaire de
l'Opposition, un vrai Canadien dans le sens sportif du terme; j'ai beaucoup de
compassion pour lui aujourd'hui. Donc, je ne peux pas refuser. Si je ne l'ai
pas demandé... Parce que, quand je le demande, vous refusez. Voyez ma
délicatesse, j'accepte, je le donne.
Le Président: Donc, vous pouvez donner l'avis, M. le
leader du gouvernement.
M. Chevrette:...
M. Pagé: Allons! il faut avoir le sens de l'humour un peu,
c'est l'esprit des fêtes.
Le Président: Aux avis, M. le leader du gouvernement, s'il
vous plaît!
Avis touchant les travaux des commissions
M. Pagé: M. le Président, je rappelle à
cette Assemblée qu'aujourd'hui... Je peux toujours refuser... Je note
que le leader de l'Opposition n'est pas content. M. le Président, je
rappelle à cette Assemblée qu'aujourd'hui, après les
affaires courantes, à compter de maintenant jusqu'à 18 h 30 et,
si nécessaire, de 20 heures à minuit, à la salle
Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement et des
équipements entendra les intéressés et poursuivra
l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt
privé 268, Loi modifiant la charte de la ville de Montréal.
Le Président: Très bien. Je comprends que votre
avis, c'est à partir de maintenant jusqu'à 18 h 30 - c'est bien
ça? - et, si nécessaire, de 20 heures à minuit. Donc, cet
avis est maintenant donné et nous revenons aux motions sans
préavis et à la motion présentée par M. le
député des Îles-de-la-Madeleine.
Condoléances aux familles
éprouvées à la
suite du naufrage des navires Nadine, à Cap-aux
Meules, et le Bout de ligne, à Gaspé
M. Georges Farrah
M. Farrah: Merci, M. le Président. Aujourd'hui, aux
Îles-de-la-Madeleine, nous sommes tous en état de choc suite
à la mort de membres de l'équipage du Nadine résultant de
son naufrage survenu dans la nuit de dimanche. Une si petite communauté
comme la nôtre, M. le Président, ne peut faire autrement que de
ressentir encore plus cruellement les contrecoups d'une telle tragédie.
Tout le monde aux Îles-de-la-Madeleine connaît une ou plusieurs
personnes qui ont péri suite au naufrage du Nadine. M. le
Président, à ce stade-ci, le bilan de ce naufrage, c'est deux
survivants, cinq morts et trois personnes encore portées disparues.
alors, évidemment, m. le président, des interrogations
surgissent, des explications seront données sur les causes du drame,
mais une chose demeure impérissable, ces personnes étaient toutes
animées du même désir de participer ensemble à une
expédition de pêche, de déployer toutes ensemble leur
esprit de corps, de collaboration afin que le résutat final soit
couronné d'un franc succès. et ce qu'elles avaient réussi
à faire, elles revenaient d'un voyage fructueux dans des conditions
difficiles certes, mais heureuses d'avoir, encore une fois, accompli leur
mission. aujourd'hui, humblement, j'aimerais dire: elles ont réussi de
par leur exemple, leur courage et surtout leur générosité
à imprimer dans le coeur de tous et chacun un sentiment profond de
reconnaissance à leur endroit.
En terminant, M. le Président, je pense, c'est le tribut le plus
fort qu'il nous lègue de nous rappeler toute la précarité
de l'être humain devant le métier de pêcheur. Je vous
remercie, M. le Président.
Le Président: Sur cette même motion, je vais
maintenant reconnaître M. le député de Duplessis.
M. Denis Perron
M. Perron: Merci, M. le Président. Vous comprendrez avec
moi pourquoi je me lève aujourd'hui, pour endosser entièrement la
motion qui est faite actuellement par le député des
Îles-de-la-Madeleine, en vous exprimant que, pour la nième fois,
fa mer a encore englouti la vie de
personnes qui, jour après jour, année après
année, décennie après décennie, ont
travaillé au gagne-pain de leur famille respective. La population du
Québec doit aussi se rendre compte des dangers qui guettent l'ensemble
des pêcheurs commerciaux du Québec, ces derniers pratiquant un
métier extrêmement dur, dans des conditions extrêmement
difficiles, ayant à faire de longues heures de travail et, souvent, des
manoeuvres urgentes et ce, à la merci de dame nature.
Dans ce cas précis, le naufrage du Nadine est survenu dans la
nuit de dimanche. Les causes du naufrage sont toujours inconnues. C'est la pire
tragédie pour les Madelinots depuis l'échouage du chalutier La
Marie-Carole en 1964. C'est une tragédie non seulement pour la
population des Îles-de-la-Madeleine, une des populations les plus
isolées du Québec où l'esprit de solidarité est
extrêmement fort, mais aussi pour tous les pêcheurs
québécois et aussi pour toute la population du Québec en
entier. Ceci met en perspective, de façon dramatique, les risques pris
quotidiennement par ces travailleurs et travailleuses pour amener sur nos
tables des produits de la mer.
On se doit de souligner la force et le courage des deux survivants, le
capitaine Robert Poirier et son frère Serge Poirier. (15 h 40)
Au nom de l'Opposition officielle à l'Assemblée nationale,
je transmets nos condoléances aux familles des victimes suivantes:
Augustin Vigneau, 32 ans; Pierre Cyr, 31 ans; Emile Poirier, 23 ans; Jacquelin
Miousse, 36 ans et Gérard Vigneau, 30 ans, tout en appuyant, bien
sûr, les familles des disparus, soit les familles d'Estelle Laberge, 40
ans, de Mario Leblanc, 26 ans et de M. Lauréat Deveau, 40 ans.
D'autre part, M. le Président, je voudrais joindre ma voix
à celles des députés de cette Assemblée nationale
du Québec pour les appuyer et pour appuyer les familles
éprouvées à la suite du naufrage du Bout de ligne de
Gaspé où trois autres pêcheurs sont actuellement disparus.
Merci, M. le Président.
Le Président: Je cède maintenant la parole à
M. le ministre délégué à l'Agriculture, aux
Pêcheries et à l'Alimentation et au Développement
régional et responsable des Pêcheries.
M. Yvon Vallières
M. Vallières: Alors, je vous remercie, M. le
Président, en même temps que le député des
Îles-de-la-Madeleine qui nous permet aujourd'hui de nous exprimer sur la
tragédie survenue à la suite du naufrage du Nadine qui, encore
une fois, vient nous rappeler la fragilité de l'être humain devant
une nature souvent capricieuse et imprévisible.
Ce constat est d'autant plus véridique et implacable quand il
s'agit de pêcheurs qui sont quotidiennement confrontés aux
intempéries d'une mer dont ils ne peuvent et ne pourront jamais
déceler tous les secrets. C'est d'ailleurs ce qui a fait la force et le
courage de ces hommes et de ces femmes qui, pour l'amour de leur métier,
n'hésitent pas à faire fi des risques présents pour
atteindre des objectifs toujours supérieurs.
Pour l'équipage du Nadine, le sort a voulu que la tragédie
frappe au retour d'une pêche que d'aucuns qualifiaient de remarquable.
Tous les membres de l'expédition avaient déployé leur
habilité pour faire en sorte que la période de Noël en soit
une de réjouissances. Et c'est là que se situe l'immense
générosité de ces personnes dont la principale
préoccupation consistait à apporter à leur
communauté, à leur famille, à leurs proches, un
témoignage de fidélité indéfectible à leur
travail.
Je ne voudrais pas non plus passer sous silence la disparition des trois
membres de l'équipage du Bout de ligne, de Rivière-au-Renard.
Fidèles à la tradition gaspésienne, ils ont
fièrement porté le flambeau d'une génération
gagnée à l'amour de la pêche. Aujourd'hui, au nom du
gouvernement du Québec, je tiens à rendre hommage à ces
hommes et à cette femme qui, au prix de leur vie, ont toujours, avec
conviction et amour, été animés d'une ferveur sans cesse
renouvelée pour leur noble métier qu'est la pêche.
En terminant, je tiens à dire aux familles
éprouvées, à la communauté éprouvée
que nous partageons cette période de tristesse et que nous sommes
solidaires de leur deuil. M. le Président, je serai présent aux
Îles-de-la-Madeleine vendredi, en l'église de La Vernière
pour rendre un dernier hommage à ceux et celles que la mer a
rappelés. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président: Le débat étant terminé,
est-ce que cette motion de condoléances aux familles
éprouvées... Ah oui! je m'excuse, M. le député de
Gaspé, je m'excuse infiniment. Alors, je vous reconnais M. le
député de Gaspé.
M. André Beaudin
M. Beaudin: M. le Président, je m'associe, bien sûr,
de tout coeur, à cette motion qui veut que l'Assemblée nationale
du Québec se joigne moralement aux familles qui ont été
éprouvées suite au naufrage de deux bateaux importants de la
flotte de pêche du Québec.
Les deux dernières années ont été
particulièrement éprouvantes pour le secteur des pêches,
autant dans les provinces maritimes de l'Atlantique que particulièrement
ici, au Québec. Dame nature n'a épargné aucun aspect de ce
secteur d'activité. La fin de semaine dernière a
été d'une atroce fatalité pour plusieurs de nos amis
concitoyens et concitoyennes de la région de la Gaspésie et des
Îles-de-la-Madeleine.
M. le Président, le monde des pêches est un monde
difficile. C'est un défi continuel avec une concurrence qui est devenue
féroce. C'est une lutte constante avec les forces de la nature. Le monde
de la pêche est un univers dangereux à haut risque où une
forte résistance physique et une force morale exceptionnelle sont
essentielles. Et c'est pour ça, M. le Président, que c'est un
monde qui est caractérisé par la fierté et par le courage,
fierté et courage des gens qui en vivent, des gens qui y travaillent et,
parfois, malheureusement, des gens qui y laissent leur vie.
Dans le message que j'ai adressé aux familles
éprouvées, je leur rappelais justement ce courage et cette
fierté qui sont probablement l'unique force sur laquelle elles peuvent
compter pour passer à travers cette épreuve qui nous touche tous,
directement ou indirectement. Courage et fierté, voilà ce qui
doit nous animer aujourd'hui et voilà ce que doivent surtout retenir ces
familles éprouvées, ces gens qui restent avec un grand vide dans
leur coeur de mère, de père, de fils, de fille, d'époux et
d'épouse. Merci, M. le Président.
Le Président: II n'y pas d'autres interventions? Le
débat étant terminé, est-ce que cette motion de
condoléances aux familles éprouvées suite au naufrage du
Nadine à Cap-aux-Meules et à celui du navire le Bout de ligne, au
large de Gaspé, est adoptée?
M. Gendron: Adopté.
Le Président: Adopté. Maintenant, M. le
député de Mercier.
Félicitations au peuple haïtien à
l'occasion
de l'élection de M. Jean-Bertrand
Aristide
à la présidence du pays
M. Godin: M. le Président, ma motion se lirait comme suit:
"Que cette Assemblée adresse ses félicitations au peuple
haïtien qui a franchi une étape importante vers la
démocratie réelle en élisant de façon pacifique, il
y a quelques jours, M. Jean-Bertrand Aristide comme président
d'Haïti." M. le Président, la démocratie haïtienne
revient de loin.
Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour
débattre cette motion?
M. Pagé: Consentement.
Le Président: II y a consentement. Donc, vous avez la
parole, M. le député de Mercier.
M. Gérald Godin
M. Godin: II y a une trentaine d'années, en Haïti, le
pouvoir était entre les mains de Paul
Eugène Magloire, surnommé Paulo Whisky avec
dérision par les Haïtiens. Ensuite, vint Papa Doc Duvalier, suivi
de Jean-Claude Duvalier, fondateur du jean-claudisme. Et, enfin,
première apparence de démocratisation, les élections sont
déclenchées. Mais, toujours, elles furent marquées de
rafales de mitraillettes à la porte des bureaux de scrutin, comme si
quelqu'un, quelque part, avait dit ou disait en coulisses: On va leur faire
passer le goût du vote.
M. le Président, les Haïtiens, n'ont pas perdu le goût
du vote et la preuve en est qu'il y a quelques jours ils ont voté
fortement pour leur candidat à eux, le père Jean-Bertrand
Aristide qui a recueilli 70 % des votes des Haïtiens et qui, dans quelques
jours, sera inauguré comme président et qui pourra enfin
commencer à rebâtir Haïti avec l'aide de tous les pays qui
s'y sont engagés depuis quelques jours.
Il faut rappeler, M. le Président, que le Québec a
toujours été un ami d'Haïti, d'abord pour des raisons
religieuses. Le Québec fournissait chaque année une cohorte de
prêtres pour aider l'église haïtienne et c'est ainsi que
beaucoup de couples haïtiano-québécois se sont
formés, se sont mariés et ont eu des enfants qui vivent
présentement ou au Québec ou en Haïti, mais qui constituent
autant de nouveaux citoyens du Québec avec des racines
différentes des nôtres.
M. le Président, en plus de ces échanges de personnes,
chaque année, des stagiaires québécois vont travailler en
Haïti, soit comme médecins, comme ingénieurs ou tout autre
métier professionnel qui fait défaut en Haïti au point de
vue de la main-d'oeuvre. Et je crois qu'on peut s'engager dès
maintenant, au nom de cette Assemblée, à ce que le Québec
continue à tendre une main fraternelle à Haïti et continue
à l'aider pour que Haïti passe rapidement les étapes qu'il
faut pour enfin atteindre le stade du développement économique
réel, le stade de la production réelle et suffisante de biens
comestibles et surtout le stade du développement touristique avec l'aide
des touristes québécois. Et s'il y a un pays que nous devons
aider, c'est bien Haïti et c'est pourquoi il faut se réjouir avec
de plus en plus de satisfaction que Haïti entrevoie la lumière au
bout du tunnel entrevoit donc, au bout du tunnel fort long qu'ils viennent de
traverser depuis une dizaine d'années, une véritable
démocratie, une véritable élection, un véritable
président. Et surtout, un immense espoir que Haïti se sorte enfin
de sa misère, de son sous-développement et de ses
problèmes. M. le Président, c'est ma motion.
Le Président: Alors, sur la même motion, je vais
reconnaître M. le ministre délégué à la
Francophonie. (15 h 50)
M. Guy Rivard
M. Rivard: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir, au
nom du gouvernement du Québec, d'appuyer cette motion qui vient
d'être présentée par le député de Mercier.
Enfin, serions-nous tentés de dire, après plusieurs occasions
ratées, le peuple haïtien a enfin eu la chance de s'exprimer sur
son avenir. Et même si les résultats officiels semblent tarder au
moment où nous discutons de cette motion, il semble bien que le peuple
haïtien se soit exprimé, on ne peut plus clairement, et de
façon massive.
Par conséquent, la victoire décisive du père
Jean-Bertrand Aristide apparaît pour le moins probable et nous l'en
félicitons chaleureusement dès maintenant. Il s'agit, M. le
Président, d'une étape importante dans l'histoire de ce pays.
Mais la partie n'est pas gagnée. Les défis auxquels le
père Aristide devra faire face sont nombreux et les attentes à
son endroit sont élevées. Cependant, le nouveau président
pourra compter, de toute évidence, sur l'appui du peuple haïtien et
de sa diaspora.
Pour nos compatriotes d'origine haïtienne, il s'agit d'un jour
très attendu. Après des décennies de dictature, l'espoir
apparaît enfin pour ceux et celles qui ont dû quitter la terre
natale. Et je suis convaincu que de nombreux Québécois d'origine
haïtienne voudront s'impliquer, dans la mesure de leurs moyens et de leurs
talents, à la reconstruction de ce pays qui a tant souffert, et qui nous
est cher. Je suis d'ailleurs convaincu que le père Aristide, qui a
étudié à l'Université de Montréal, fera
appel à bon nombre d'entre eux lorsqu'il le jugera
nécessaire.
M. le Président, les mois qui viennent seront cruciaux pour
Haïti. Le Québec est sensible à ce qui se passe dans ce
pays. Le Québec souhaite exprimer sa solidarité, non seulement
parce que Haïti est un pays membre de la francophonie, non seulement parce
que le Québec compte une forte communauté d'origine
haïtienne, en particulier à Montréal, mais surtout parce que
le peuple haïtien a fait preuve d'une détermination et d'un courage
exceptionnel dans sa marche vers la démocratie. Maintenant, nous devons
examiner, avec les partenaires francophones, quels sont les meilleurs moyens
à notre disposition pour aider à la reconstruction de ce pays. Au
nom du gouvernement du Québec, j'offre mes plus sincères
félicitations à tout le peuple haïtien pour avoir
réussi, dimanche dernier, à tenir des élections dans le
calme et en toute légitimité. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Président: Je cède maintenant la parole à
M. le député de La Prairie.
M. Denis Lazure M. Lazure: Merci, M. le Président. Il me
fait plaisir d'appuyer la motion de mon confrère de Mercier et de dire
quelques mots suite aux événements heureux qui se sont
déroulés en Haïti récemment. J'ai eu la chance, il y
a plusieurs années, au début des années soixante, de
travailler pendant une année en Haïti comme directeur d'un nouvel
hôpital psychiatrique, le Centre de psychiatrie de Port-au-Prince. J'ai
eu la chance de découvrir le tempérament haïtien, le
caractère haïtien, la culture haïtienne, courage,
fierté, dignité, dévouement, loyauté,
hospitalité, et surtout de la part de la femme haïtienne. La femme
haïtienne, comme il arrive souvent dans les pays
défavorisés, joue un rôle extrêmement important dans
la société haïtienne, dans la famille haïtienne. Elle
travaille très fort.
Et ce n'est peut-être pas un accident que ce soit sous le
règne d'une présidente, et non pas d'un président, d'une
présidente qui était intérimaire, Mme Trouillot, que c'est
sous son court règne de quelques mois, de plusieurs mois que,
finalement, a pu s'instaurer une vraie élection et a pu se tenir un vrai
scrutin. Je veux rendre hommage au courage des Haïtiennes, des
Haïtiens qui se sont rendus voter. C'était dangereux. Eux et elles
le savaient puisque, quelques mois auparavant, on avait procédé
à de l'intimidation et à de l'intimidation sanglante.
Or, M. le Président, je pense qu'il faut féliciter le
peuple haïtien pour son grand courage, souhaiter bonne chance au
président Aristide. La religion joue un rôle très important
en Haïti, que ce soit la religion sous des formes très anciennes
qu'a pratiquée le peuple haïtien depuis le temps où il
habitait en Afrique, ce peuple, qui est venu d'Afrique, il y a plusieurs
siècles et aussi, sous des formes plus rapprochées de l'Occident,
dérivant plus directement de l'Occident. La religion catholique joue un
rôle très important auprès du peuple haïtien. Alors,
courage, fierté, dignité sont des qualités essentielles
à ce peuple. Je m'associe au député de Mercier et aux gens
du gouvernement, et je m'associe aussi à la joie des Haïtiennes et
Haïtiens de Montréal. Dans le domaine de la santé en
particulier, on rencontre beaucoup beaucoup d'Haïtiennes et
d'Haïtiens. Je pense qu'il faut que le gouvernement du Québec,
comme il l'a fait au cours de l'organisation électorale en
déléguant le Directeur général des
élections, M. Côté, je pense que le gouvernement du
Québec doit continuer son appui financier, son appui technique parce que
le peuple haïtien en aura grandement besoin. Alors nous, nous souhaitons
beaucoup de persistance et de courage dans le début d'une ère
nouvelle pour ce peuple courageux. Merci.
Le Président: Je reconnais maintenant M. le
député de LaFontaine.
M. Jean-Claude Gobé
M. Gobé: Merci, M. le Président.
C'est toujours un plaisir pour un homme politique de féliciter
quelqu'un pour avoir gagné ses élections et je crois,
particulièrement, lorsqu'on le connaît ou lorsqu'on est ami avec
lui. Cette fois-ci, je suis doublement heureux de me joindre non seulement au
député de Mercier, mais à mes collègues car j'ai la
chance et le plaisir de connaître le père Jean-Bertrand Aristide.
En effet, les liens qui m'unissent à la communauté haïtienne
de Montréal, particulièrement de Rivière-des-Prairies dans
le comté de LaFontaine, m'ont amené à connaître cet
homme qui est maintenant président de la république, qui
était à Montréal, il y a une quinzaine de jours, et que
j'ai rencontré lors d'un meeting où j'étais allé
l'appuyer dans son combat ou sa lutte pour l'accès à la
démocratie.
J'étais heureux de le faire, M. le Président, non
seulement à titre d'homme, de citoyen qui croit en ces
valeurs-là, mais aussi, M. le Président, à titre d'ami de
la communauté haïtienne, à titre d'ami de cette
communauté qui joue un rôle indéniable et de plus en plus
important dans notre collectivité montréalaise. Le père
Aristide me disait à cette occasion, il y a 15 jours, et c'était
le 9 - il n'y a pas 15 jours, il y a 11 jours presque maintenant, M. le
Président - il me disait: M. Gobé, vous savez, j'espère
avoir l'occasion de vous voir au mois de février lors de l'intronisation
dans mes fonctions de président. Mais il dit: Vous savez combien cela
est dur et combien cela est dangereux, cette position que je vais exercer et
que les citoyens, sans aucun doute, vont m'amener à exercer. Et on a vu
que, quelques jours après, à peine était-il rentré
à Port-au-Prince qu'il y avait à Pétion-Ville un attentat
qui était destiné contre lui et qui faisait sept morts. Et on
voit à la lumière de ce rappel le défi auquel il est
confronté, ce défi qui n'est pas seulement de s'installer comme
nous le faisons lorsque nous gagnons une élection dans nos sièges
de député ou de ministre ou d'administrateur, mais ce défi
qu'il a de réformer en profondeur la société
haïtienne, cette société qui, depuis 20 ans, 30 ans, a
été une société qui vivait constamment sous le
règne de la terreur, sous le règne de l'injustice et sous le
règne de gens qui mettaient le pays en coupe rasée sans aucune
préoccupation pour le bien-être des citoyens et des valeurs de
justice et de démocratie. (16 heures)
Je crois, M. le Président, que le père Jean-Bertrand
Aristide, pour le connaître, est l'homme qui est capable de relever ces
défis, capable de mener à bien ce redressement d'Haïti qui
est nécessaire pour le peuple haïtien. Mais tout seul, M. le
Président, il ne le pourra pas. Il a besoin - le ministre de la
Francophonie, tout à l'heure, notre collègue, le
député de Rosemont, le faisait valoir - de l'appui de tous les
peuples de la francophonie. Mais il a besoin aussi, M. le Président, et
particulièrement de l'appui des Montréalais et des
Québécois, car nous avons au Québec un grand nombre de
similitudes avec le peuple haïtien non seulement en termes de culture et
en termes de langue, mais aussi en termes de volonté de
développer notre territoire, en termes aussi de respect de la
démocratie et en termes de l'accueil, de la chaleur humaine, la
même joie de vivre, les mêmes espoirs pour l'avenir.
Je crois, M. le Président, qu'un des grands défis de notre
société - après avoir envoyé M. Pierre-F.
Côté qui a dirigé d'une main de maître les
élections en Haïti, tout le monde, internationalement, le
reconnaît; c'est le président des élections du
Québec, M. Pierre-F. Côté, qui a su assurer le bon
déroulement de ce processus - notre plus grand défi sera
d'essayer de mettre à la disposition d'Haïti non seulement des
ressources que la diaspora haïtienne montréalaise a aujourd'hui et
peut aller mettre, mais les énergies, les expériences et les
ressources, autant que possible, financières que notre
société québécoise pourrait dégager afin
d'aller aider le père Aristide à redresser Haïti et à
rétablir dans ce pays une qualité de vie, la démocratie et
les droits humains.
Merci, M. le Président. J'appuie avec grand plaisir cette motion.
Vive Haïti et vive le père Aristide!
Le Président: Le débat étant terminé,
est-ce que cette motion de félicitations au peuple haïtien pour
l'élection de M. Jean-Bertrand Aristide comme président
d'Haïti est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Il n'y a pas d'autres motions
sans préavis?
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le leader
adjoint de l'Opposition.
Renseignements sur les travaux de
l'Assemblée
M. Gendron: Oui, M. le Président. Je ne peux pas passer
sous silence le fait que nous sommes aujourd'hui le 19 décembre et que,
même si le leader du gouvernement a voulu faire son petit show pour la
troisième semaine d'affilée, il n'en demeure pas moins que nous
terminerons cette session avec au-delà de 75 questions sans
réponse inscrites au feuilleton. Et, manifestement, je suis
obligé de rappeler ce que je mentionnais hier, ça témoigne
là de l'irrespect du Parlement, du non-sérieux de ce
gouvernement-là de permettre que l'Opposition fasse son travail
convenablement. Je tiens à rappeler - c'est important de le faire - que
le règlement de cette
Chambre prévoit que certaines questions ne peuvent être de
nature orale et doivent être inscrites au feuilleton de
l'Assemblée nationale du Québec. Et si, dans le règlement,
on a prévu que cette démarche soit faite, c'est pour que le
gouvernement puisse nous donner des réponses. Et il le savait bien,
quand il s'est levé tantôt, qu'il n'y en aura plus de mercredi,
parce que nous terminerons probablement - et je le souhaite de tout coeur - la
présente session demain et il y aura au moins 75 questions au feuilleton
qui seront encore sans réponse. Dans ce sens-là, M. le
Président, c'est absolument inconvenant, parce que, si on avait affaire
à un gouvernement sérieux, il aurait fait tous les efforts
nécessaires pour que les ministres puissent nous donner les
éléments qui sont requis pour que nous puissions faire notre
travail convenablement. C'était mon rôle de le rappeler à
cet item à l'ordre du jour, aux renseignements sur les travaux de
l'Assemblée. Il me semble que les questions inscrites au feuilleton
devraient, avec plus de diligence, être fournies à l'Opposition
parce qu'il s'agit d'un matériel requis pour faire notre travail comme
il le faut.
Le Président: Sur cette question, M. le leader.
M. Pagé: M. le Président, concernant le
matériel requis auquel se réfère le député
d'Abitibi-Ouest, je lui indiquerai ceci. C'est 32 réponses à
autant de questions, évidemment, qui ont été
déposées depuis le début de la présente partie de
la session, c'est-à-dire depuis le 16 octobre dernier, dans un premier
temps. Je crois que vous auriez peut-être intérêt à
comparer notre performance en termes de réponses à ce que vous
faisiez pendant certaines années où vous étiez de ce
côté-ci de la Chambre. Deuxièmement, je me proposais de
déposer, compte tenu du fait que c'est la dernière journée
de la session demain, ce qui est prévu tout au moins, d'autres
réponses à moins qu'on ne m'en donne pas le consentement à
ce moment-là.
Une voix: II y aura consentement.
M. Pagé: Je prends note, M. le Président, que le
consentement est d'ores et déjà donné. Donc, votre
interrogation ne tient plus.
Le Président: alors, ceci met fin à la
période des affaires courantes. nous allons maintenant procéder
aux affaires du jour. m. le leader du gouvernement, si vous voulez m'indi-quer
l'objet de nos débats.
M. Pagé: M. le Président, je vous invite à
appeler l'article 21 du feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 97
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Président: À l'article 21 du feuilleton, nous
allons maintenant prendre en considération le rapport de la commission
des affaires sociales qui a procédé à l'étude
détaillée du projet de loi 97, Loi modifiant la Loi sur les
normes du travail et d'autres dispositions législatives, ainsi que les
amendements transmis par M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle en vertu de
l'article 252 du règlement. Ces amendements sont immédiatement
déclarés recevables en totalité. Donc, pour le
présent débat maintenant, je vais reconnaître M. le
ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la
Formation professionnelle.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. L'étape que
nous franchissons présentement fait suite au dépôt du
rapport de la commission des affaires sociales sur l'étude du projet de
loi 97, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions
législatives. Ce rapport fait état des travaux importants et
sérieux de cette commission qui a consacré, en 9 longues
séances, plus de 41 heures à l'étude de ce projet de
loi.
Je dois tout d'abord vous dire, M. le Président, combien j'ai
apprécié l'effort et la collaboration de chacun des membres de
cette commission. Chacun d'entre eux, y compris les membres de l'Opposition,
ont répondu aux attentes que j'avais exprimées au début de
l'étude article par article du projet de loi. Pour ma part, j'ai
été ouvert, comme je l'avais promis, à toute proposition
pouvant améliorer le projet de loi. Je remercie donc chacun des membres
de cette commission d'avoir contribué à une étude
rigoureuse de chacun des articles du projet de loi 97.
Qu'il me soit permis, M. le Président, d'insister à
nouveau sur l'importance de ce projet de loi et sur les objectifs que le
gouvernement s'est donnés avant d'entreprendre la révision de la
Loi sur les normes du travail. La Loi sur les normes du travail fixe les
conditions minimales de travail pour l'ensemble des personnes salariées
au Québec. En d'autres termes, elle détermine les normes du
travail en-deçà desquelles les conditions de travail pourraient
être jugées abusives ou encore, déraisonnables. Elle
constitue, en quelque sorte, une charte des droits en matière de
conditions de travail. C'est pourquoi cette loi prend une importance encore
plus considérable pour les personnes salariées qui ne sont pas
syndiquées ou qui ont un faible rapport de force.
Je rappelle, d'autre part, que la révision de
la Loi sur les normes du travail s'impose aujourd'hui puisqu'elle n'a
pas été modifiée depuis son adoption en 1979. Étant
donné que le monde du travail et la société en
général se sont transformés considérablement durant
les 10 dernières années, les objectifs suivants ont
été retenus: premièrement, faciliter la conciliation des
responsabilités familiales et professionnelles; deuxièmement,
mieux protéger la main-d'oeuvre occupant des emplois à temps
partiel; troisièmement, mieux tenir compte de la participation accrue
des femmes sur le marché du travail et de l'évolution des modes
de vie; quatrièmement, renforcer l'universalité des normes du
travail; cinquièmement, améliorer l'accessibilité aux
recours et aussi, bien sûr, leur efficacité; sixièmement,
améliorer certaines normes reliées à la qualité de
vie de l'ensemble de la main-d'oeuvre en emploi et, finalement, corriger ou
améliorer certaines normes au plan administratif et technique.
Le gouvernement du Québec devait, en tout premier lieu, axer la
révision des normes du travail sur les objectifs de son plan d'action en
matière de politique familiale. Il serait illusoire, en effet, de croire
qu'on puisse appliquer une politique familiale si on ne prend pas les moyens de
rendre le marché du travail plus flexible et de faire en sorte qu'il
tienne compte aussi des responsabilités parentales. Je suis très
conscient d'innover en matière de congés parentaux et de demander
ainsi aux employeurs une contribution particulière et essentielle
à la mise en oeuvre de notre politique familiale. Je suis tout aussi
conscient que nous devons le faire pour surmonter les difficultés
particulières que le Québec connaît au plan de la
natalité. Je dois dire, toutefois, qu'à la suite de l'adoption
récente de la loi C-21, concernant l'assurance-chômage, adoption
par le gouvernement fédéral, plusieurs provinces canadiennes ont
aussi l'intention de légiférer sur les congés parentaux.
Le gouvernement de l'Ontario a déjà déposé un
projet de loi en vue d'harmoniser sa Loi sur les normes du travail avec la loi
C-21 du gouvernement fédéral. (16 h 10)
J'aimerais maintenant, M. le Président, faire part à cette
Assemblée des principaux résultats des travaux de la commission
parlementaire tenue sur le projet de loi 97.
Les modifications apportées à la composition de la
Commission des normes du travail constituent le premier sujet d'importance.
Rappelons d'abord que le projet de loi initial proposait
d'accroître de 7 à 12 le nombre de membres en vue d'assurer la
présence de divers milieux intéressés du monde du travail,
soit la main-d'oeuvre syndiquée et celle non syndiquée, les
employeurs du milieu de la grande entreprise, ceux du milieu coopératif,
les femmes, les jeunes, la famille et les communautés culturelles.
À cet égard, la nouvelle version du projet de loi apporte
deux changements qui se complètent l'un l'autre. Le premier porte
à 13 au lieu de 12 la nouvelle composition de la Commission des normes
du travail, tandis que le second changement précise que les membres
autres que le président doivent provenir en nombre égal du milieu
des personnes salariées et du milieu des employeurs. Cette parité
de représentation créera, je l'espère, une nouvelle
dynamique face à l'administration et à l'application de la loi,
pour en optimiser son efficacité.
Le deuxième objet d'importance où' des
améliorations ont été apportées au projet de loi 97
vise à la détermination du nouveau congé du 1er juillet,
à titre de septième jour férié et
chômé accordé par la Loi sur les normes du travail.
Rappelons que ce nouveau jour de congé du 1er juillet, tel qu'il est
identifié dans le projet de loi, devait toujours tomber un vendredi ou
un lundi. comme telle, la loi sur les normes du travail ne posait pas
réellement de problème, puisque l'article 63 offre le choix aux
employeurs de verser une indemnité si une personne doit travailler l'un
des jours fixés par la loi ou bien de lui accorder un congé
compensatoire d'une journée dans les trois semaines
précédant ou suivant le jour férié en cause.
De plus, une convention collective ou un décret de convention
collective peut même prévoir une période plus
étendue que la plage de six semaines déjà offerte pour
accorder un congé. Néanmoins, deux changements au projet de loi
ont été apportés pour mieux prendre en compte, en
particulier, la réalité du secteur commercial.
Le plus important de ces changements est sans nul doute la modification
apportée à la Loi sur les heures et les jours d'admission dans
les établissements commerciaux, sort le chapitre 30 des lois de
1990.
Dorénavant, en vertu d'une modification proposée à
l'article 3 de cette loi, la fête du 1er juillet n'occasionnera pas la
fermeture des magasins ou des commerces à cette date ou au lendemain de
celle-ci, mais plutôt toujours le lundi le plus rapproché du 1er
juillet.
Ainsi, les établissements commerciaux n'auront plus, par exemple,
à fermer le vendredi pour rouvrir le samedi. Cela était aussi
vrai si la fête tombait entre le lundi et le vendredi.
Les deux lois se retrouveront ainsi complètement
harmonisées, puisque le choix entre le Vendredi saint et le lundi de
Pâques était déjà permis dans les deux lois.
Une autre section de la loi a aussi fait l'objet des travaux de la
commission parlementaire des affaires sociales. Il s'agit de la section portant
sur les vacances annuelles payées. Il en est résulté cinq
amendements.
Trois de ces amendements ont pour but d'assurer aux travailleurs et
travailleuses, principalement les non syndiqués, le droit de prendre
d'une manière continue la période de vacances à
laquelle ils ont droit.
Afin de permettre aux membres de cette Assemblée de mieux se
situer, je profite de l'occasion pour les informer que la loi actuelle, celle
qu'on va justement remplacer, accorde le droit à 2 semaines de vacances
après 1 année de service et à 3 semaines après 10
ans. Le projet de loi 97 propose, pour sa part, 3 semaines de vacances
après 5 ans au lieu de 10, accordées progressivement du 1er
janvier 1991 au 1er janvier 1995, en partant à 8 ans dès
l'entrée en vigueur de la loi et en diminuant d'un an par la suite les
années d'ancienneté requises.
Bref, le droit de prendre ses vacances de façon continue est
dorénavant reconnu et de façon explicite.
De plus, la loi précisera aussi que l'accord de l'employeur est
requis lorsqu'une personne salariée demande de fractionner ses vacances
annuelles en plus de deux périodes. Voilà donc un exemple, M. le
Président, démontrant qu'il est possible d'améliorer les
droits des travailleurs et travailleuses tout en minimisant les
difficultés de gestion de la main-d'oeuvre face aux contraintes de la
production des biens et des services. C'est pourquoi, je n'ai pas
hésité à retenir les propositions sur ce sujet
formulées par les membres de la commission parlementaire chargée
d'étudier le projet de loi 97.
D'ailleurs, j'ai même accepté de retirer un article du
projet de loi devant les pressions du député de Dubuc et pour ne
pas déroger au caractère d'ordre public de la loi qui est, en
fait, l'un des objectifs prioritaires du présent exercice de
révision des normes du travail.
En effet, l'article 24 du projet de loi 97 introduisait un amendement
à l'article 72 de la loi qui aurait pu permettre qu'une convention
collective ou un décret de convention collective contienne des
dispositions moins avantageuses que la loi relativement au droit d'une personne
salariée de connaître, au moins quatre semaines à l'avance,
la période de ses vacances annuelles. Cette norme prend son
caractère d'utilité principalement quand c'est l'employeur qui
fixe seul le calendrier des vacances annuelles.
Quant à la cinquième modification apportée aux
normes sur les vacances annuelles, elle est d'ordre plus technique puisqu'elle
vise à remplacer une expression par une autre pour mieux rendre
l'intention du législateur. En effet, le nouvel article 74.1 de la loi
introduit par l'article 26 du projet de loi et visant les personnes à
temps partiel utilise l'expression "mode de calcul" au lieu du terme
"pourcentage" pour l'appliquer à l'indemnité des vacances
annuelles.
Je rappelle simplement, comme je l'ai fait plus tôt, que cet
article 74.1 interdira dorénavant à un employeur de
réduire la durée du congé annuel d'une personne
salariée gagnant moins que le double du salaire minimum, ou de modifier
le mode de calcul de son indemnité de vacances par rapport à
d'autres salariés qui effectuent les mêmes tâches dans le
même établissement, pour le seul motif que la personne
salariée en cause travaille habituellement durant moins d'heures par
semaine.
Une telle clarification ne saura être que bénéfique,
surtout qu'il s'agit là d'une des deux dispositions les plus novatrices
du projet de loi 97, dont je suis particulièrement fier.
N'oublions pas que j'avais le défi de moderniser une loi faisant
l'objet de demandes de changement nombreuses et grandissantes au fil de ses 11
ans d'existence tout en évitant les effets négatifs sur
l'économie.
Permettez-moi, M. le Président, de profiter de l'occasion pour
signaler à cette Assemblée que le présent gouvernement a
déjà vécu une situation similaire en 1986 alors que le
salaire minimum avait été maintenu au niveau de 4 $ l'heure
durant cinq ans. Il n'était alors pas possible de rattraper d'un seul
coup tout le temps perdu, même en période de croissance
économique.
Maintenant, M. le Président, pour introduire un autre sujet, je
voudrais au préalable informer cette Assemblée que la commission
parlementaire a consacré tout le temps qu'elle méritait à
la section sur les congés, dorénavant appelée "Les
congés pour événements familiaux" à la suggestion
même de l'Association des usagers de la langue française,
association communément appelée l'ASULF. En effet, nous
retrouvons dans cette nouvelle section le volet le plus crucial, à mon
avis, des préoccupations à l'origine de cette mise à jour
de la Loi sur les normes du travail, soit les congés reliés
à la conciliation des responsabilités familiales et
professionnelles.
Relativement au congé de deux jours sans solde accordé
actuellement à chaque parent à l'occasion de la naissance ou de
l'adoption d'un enfant et porté à cinq jours dont deux seront
généralement rémunérés, la commission a
retenu les changements suivants: il est précisé que ce
congé peut être fractionné uniquement à la demande
d'une personne salariée; le droit à un congé de deux jours
sans solde sera maintenu pour la personne salariée qui adopte l'enfant
de son conjoint.
Quant à la réserve annuelle de cinq jours de congé
sans solde pour remplir des obligations parentales, elle a fait l'objet d'une
modification quant aux possibilités de fractionnement. Ce congé
demeurera fractionnable en journées, mais tout autre fractionnement
devra nécessiter le consentement de l'employeur. (16 h 20)
Le droit d'absence pour un examen médical relié à
la grossesse a aussi été bonifié de façon
intéressante grâce aux travaux de la commission parlementaire. En
effet, ce droit sera étendu à un examen relié à une
grossesse et effectué par une sage-femme dans le cadre du projet-pilote
déjà en cours 1990, chapitre XII des Lois du
Québec. Cette harmonisation législative rend encore plus
avant-gardistes les nouvelles normes québécoises en
matière de congé pour des événements familiaux.
M. le Président, une autre modification de mise à jour de
la loi, je dis bien de mise à jour, a aussi été retenue
concernant le droit au nouveau congé parental d'au plus 34 semaines
continues. En effet, dans le cas d'une adoption, le droit à ce
congé, non seulement sera-t-il effectif le jour où l'enfant
adopté est confié à ses parents mais aussi, dans le cas
d'une adoption internationale, à compter du jour où une personne
salariée doit s'absenter du travail afin de se rendre à
l'extérieur du Québec pour que l'enfant lui soit
confié.
De plus, j'ai également retenu une suggestion à l'effet de
permettre au gouvernement, par règlement, de réduire l'avis de 3
semaines normalement requis avant de partir en congé parental. En effet,
il faut se garder les moyens de prévoir certaines urgences telle, par
exemple, la nécessité pour le père de prendre subitement
un congé parental à la suite du décès de la
mère afin de s'occuper lui-même de son nouveau-né.
Je me dois aussi de signaler que les travaux de la commission
parlementaire ont permis de déterminer les avantages conservés au
retour d'un congé parental de plus de 12 semaines en précisant le
droit de bénéficier d'un régime de retraite ou d'assurance
au moins équivalent, le cas échéant.
Voilà donc, les principaux changements apportés aux divers
congés regroupés sous la section des congés pour
événements familiaux puisqu'il faut dorénavant l'appeler
par ce nom.
Relativement à l'information sur les normes du travail, le
pouvoir de la Commission sera encore accru puisqu'une nouvelle modification a
été apportée à l'article 87 de la loi.
En effet, la Commission pourra dorénavant obliger un employeur
non seulement à transmettre à son personnel un document
d'information sur les normes du travail qu'elle lui fournit, mais aussi
à afficher un tel document dans son établissement dans un endroit
qu'elle jugera approprié. La commission parlementaire des affaires
sociales a aussi porté une attention toute spéciale à la
section sur les recours en y apportant des changements, principalement sur le
droit d'absence en raison d'une maladie ou d'un accident, et sur les
délais pour porter plainte au commissaire général du
travail.
Relativement au droit d'absence en raison d'une maladie ou d'un accident
traité au nouvel article 122.2 de la loi, trois changements majeurs y
ont été apportés en vue d'en assouplir l'application par
les employeurs. D'abord, il est précisé que la durée
d'absence permise pour qu'un recours puisse s'appliquer à l'encontre
d'une pratique interdite par la loi ne devra pas excéder 17 semaines sur
une période de 12 mois. On se rappellera que le projet de loi 97 ne
précisait aucune période de référence et que cela
aurait pu causer des difficultés aux employeurs au niveau du
remplacement de la main-d'oeuvre.
Le deuxième amendement apporté à ce même
article apporte une latitude supplémentaire aux employeurs en
précisant que le caractère répétitif des absences,
au même titre que les conséquences d'une maladie ou d'un accident,
peut constituer un motif raisonnable pour l'employeur, dans certaines
circonstances, de congédier, de déplacer ou de suspendre une
personne salariée.
En effet, le droit d'être malade ne saurait conduire au droit de
conserver son emploi lorsque cela occasionne des difficultés majeures
pour une entreprise de fonctionner ou, encore, d'être rentable.
Le troisième amendement d'importance apporté à
cette nouvelle norme permettra à l'employeur, après une absence
dépassant 4 semaines, de réintégrer une personne
salariée dans un poste habituel ou encore de l'affecter à un
emploi comparable, selon les mêmes règles que pour un congé
parental de plus de 12 semaines. La personne salariée aura donc droit au
salaire auquel elle aurait eu droit si elle ne s'était pas
absentée de son travail et à un régime de retraite ou
d'assurances, le cas échéant, au moins équivalent à
celui auquel elle avait droit.
Il ne faut pas oublier, M. le Président, que cette nouvelle norme
quasi universelle et ce qu'elle comporte comme droit de recours est unique au
Canada et que l'on doit agir avec beaucoup de précaution pour
protéger la position concurrentielle du Québec et sa
vitalité économique.
Je crois qu'à cet égard nous avons relevé le
défi de garantir efficacement le droit d'être malade, comme on le
dit communément, tout en conservant la souplesse requise au niveau de la
gestion des ressources humaines.
Le second point d'intérêt des amendements apportés
aux recours consiste principalement dans l'allongement des délais pour
porter plainte à l'encontre soit d'une pratique interdite par la loi,
soit d'un congédiement sans cause juste et suffisante. Dans chacun de
ces cas, le délai est actuellement de 30 jours pour la personne
salariée. Dorénavant, il sera de 45 jours.
Évidemment, M. le Président, cette majoration de 50 % ne
rejoint pas les demandes à ce sujet, celles-ci allant même parfois
jusqu'à 6 mois. À mon avis, un délai trop long comporte
des désavantages autant pour une personne salariée que pour son
employeur.
D'autre part, la célérité d'un recours augmente les
chances de réintégration à l'emploi, elle
déjudiciarise les recours et, par voie de conséquence, elle
diminue les frais juridiques pour les deux parties en cause. D'autre part, plus
le délai est long, plus l'employeur est susceptible de payer une
indemnité importante, le cas échéant, pour les pertes de
salaire.
Je signale enfin sur ce sujet, M. le Prési-
dent, que d'autres modifications d'ordre technique ont été
apportées au projet de loi 97 en matière de recours, notamment
quant au mode de transmission des plaintes en vue de mieux protéger les
droits des personnes salariées en cause. Ces changements concernant les
articles 124 et 126 de la Loi sur les normes du travail de même que
l'article 77.1 du projet de loi ont été acceptés par la
commission.
Les dispositions transitoires constituent, M. le Président, le
dernier sujet et non le moindre sur lequel la commission parlementaire a
consacré son attention.
Vous constaterez notamment que l'article 72 a été
reformulé pour plus de précision et de clarté. De plus,
l'article 75.1 a été ajouté pour indiquer que la
Commission des normes du travail ne peut, au nom d'une personne
salariée, intenter une poursuite envers les administrateurs d'une
compagnie que pour du salaire dû après l'entrée en vigueur
de la loi amendée. L'article 77 a lui aussi fait l'objet d'une
reformulation pour déterminer les règles administratives à
respecter pour que la Commission des normes du travail puisse assumer
temporairement les honoraires des arbitres jusqu'à ce que le
ministère du Travail le fasse lui-même, soit à partir du 1
er juin 1991.
Quant au nouvel article 77.1, il a pour but d'éviter que le droit
de recours ne soit refusé à une personne salariée faisant
défaut de respecter le délai pour porter plainte, parce qu'elle
aurait demandé de déférer sa plainte à un arbitre
plutôt qu'à un commissaire du travail.
Cette partie de mon exposé complète, M. le
Président, les explications que je voulais fournir à cette
Assemblée relativement aux modifications apportées au projet de
loi 97 par la commission parlementaire des affaires sociales. Ce bilan est
très positif et il bonifie substantiellement le projet de loi.
M. le Président, les membres de l'Opposition officielle pourront
me reprocher d'avoir refusé un certain nombre de propositions ou
d'amendements en m'accusant d'avoir manqué d'ouverture, malgré
mon engagement à cet égard au début des travaux de la
commission.
Vous vous souviendrez que, dès le dépôt de
l'avant-projet de loi, j'ai affirmé que le gouvernement voulait
réviser la Loi sur les normes du travail en vue d'ajuster les conditions
de travail à la réalité économique et sociale
d'aujourd'hui tout en minimisant les impacts financiers et administratifs pour
les entreprises. J'ai gardé à l'esprit cette préoccupation
tout au long de l'exercice de révision, de sorte que les modifications
proposées l'ont été sous le signe du réalisme.
On m'a demandé d'inscrire dans le projet de loi une
réduction de la semaine de travail à 40 heures, la fixation
à 8 heures de la durée quotidienne du travail et enfin la
détermination d'une durée maximale pour la journée et la
semaine de travail.
Cette dernière proposition avait été
présentée dans le but d'introduire dans la loi le droit implicite
pour les salariés de refuser d'effectuer du temps supplémentaire
au-delà de la durée maximale. De tels changements ne feraient
qu'ajouter aux coûts engendrés par l'ensemble des modifications
faisant partie du projet de loi 97. (16 h 30)
Dans ce contexte et en prenant en compte la conjoncture
économique actuelle particulièrement difficile, il convient de
reporter tout ce débat sur la durée du travail et de l'appuyer
sur des études rigoureuses.
Un amendement a aussi été proposé par la
députée de Hochelaga-Maisonneuve relativement au salaire minimum.
Cette proposition visait à introduire dans la loi un mécanisme
d'indexation annuelle et automatique.
Il ne m'apparaît pas pertinent, M. le Président, de
modifier la pratique du gouvernement depuis 1986 de hausser annuellement le
salaire minimum après avoir considéré
systématiquement plusieurs options et leur pertinence face à la
situation économique prévalant à chaque année.
Évidemment, la progression des salaires de même que
l'évolution des prix sont des facteurs de première importance,
mais ils ne doivent pas pour autant être les seuls pris en compte.
Le 13 décembre dernier, à l'occasion du dépôt
du rapport de la commission des affaires sociales, j'ai transmis au
Secrétaire général de l'Assemblée nationale deux
amendements qui n'ont pu être discutés lors de la commission
parlementaire qui a fait l'étude article par article du projet de loi
97. Le premier amendement vise à donner suite à une
recommandation de l'Association des usagers de la langue française qui
nous a proposé de remplacer le mot "réinstaller" par le mot
"réintégrer". Je me plie, M. le Président, de bonne
grâce à cet amendement d'ordre terminologique.
Le deuxième amendement suggéré vise, pour sa part,
à compléter la disposition transitoire de l'article 79 du projet
de loi. Selon le paragraphe 4 de l'article 80 du projet de loi, les articles 13
et 26 du projet, qui introduisent respectivement les articles 41.1 et 74.1 de
la Loi sur les normes du travail, entreront en vigueur le 1er janvier 1992. Ces
derniers articles améliorent la protection des salariés à
temps partiel quant à leurs salaires et à leurs congés
annuels payés. L'article 79 du projet de loi permet déjà
au gouvernement, par règlement pris avant le 1er janvier 1992, de fixer
une date ultérieure d'application à l'égard des
catégories de salariés précisées dans ce
règlement.
L'amendement suggéré vient préciser que le
gouvernement pourra, par un règlement pris avant le 1er janvier 1992,
différer l'application de ces articles à l'égard des
catégories de salariés ou d'employeurs déterminées
dans ce règlement, particulièrement lorsqu'il n'est pas en
mesure de fixer la date où ces articles pourront leur être
applicables. Un règlement ultérieur pourra en tout temps fixer
une date d'application.
Le pouvoir réglementaire accordé au gouvernement par
l'amendement suggéré lui permettra de plus de déterminer,
pour certaines catégories de salariés, un ajustement progressif
des salaires et des vacances par rapport à ce qui est prévu aux
articles 41.1 et 74.1.
Le rattrapage est trop important dans certaines entreprises même
syndiquées pour qu'on puisse espérer procéder avec la
rapidité que je souhaiterais. Pour s'assurer que cette étape
puisse être franchie en tenant compte de la capacité
financière des employeurs concernés, le gouvernement doit avoir
un pouvoir réglementaire approprié.
Voilà, M. le Président, les propos que je voulais tenir et
le rapport que je voulais faire à cette Assemblée des travaux de
la commission parlementaire des affaires sociales qui a étudié le
projet de loi 97, projet de loi, M. le Président, dont,
évidemment, je recommande l'adoption à cette Assemblée. Je
vous remercie.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Toujours à la prise en considération du rapport de la commission
des affaires sociales sur le projet de loi 97, je reconnais maintenant Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve, en vous rappelant, Mme la
députée, que vous disposez d'un temps de parole de 30
minutes.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, M. le Président. Vous savez, M. le
Président, à ce temps-ci de l'année, nous avons, nous les
membres de l'Assemblée nationale, l'occasion de retourner dans nos
circonscriptions électorales durant les fins de semaine et d'y
rencontrer des bénévoles qui, activement, sont impliqués
dans l'organisation de dépouillement d'arbres de Noël pour des
enfants plus défavorisés ou impliqués aussi dans des repas
pour les personnes âgées.
J'ai eu l'occasion, la fin de semaine dernière, de rencontrer des
hommes et des femmes du bas de la ville de Montréal, du beau quartier de
Hochelaga-Maisonneuve, et l'une d'elle, ouvrière dans une usine du
quartier qui fabrique des bas de nylon sur la rue Hochelaga, usine, M. le
Président, où on n'est pas syndiqué, où les
travailleuses, en très grande majorité, des travailleuses
d'origine immigrante, sont encore payées au rendement, au boni,
où il n'y a toujours pas de cantine et où les travailleuses
doivent dîner sur leur machine... J'avais déjà eu
l'occasion d'ailleurs de les accompagner en apportant mes sandwichs pour les
manger avec elles et pour vérifier un certain nombre d'informations
qu'elles m'avaient transmises sur l'état non seulement de
vétusté, mais de délabrement des conditions de vie dans
lesquelles elles travaillaient. Et cette ouvrière de me demander si,
avec la nouvelle loi des normes, elle aurait pu refuser le vendredi
passé, à 16 h 30, lorsque son-patron est venu lui dire qu'il
exigeait qu'elle reste pour faire du temps supplémentaire - et elle n'a
pu quitter l'entreprise qu'à 19 h 30 le soir - elle me demandait si,
avec la nouvelle loi des normes, elle pourrait lui dire non, en lui expliquant
qu'elle avait ses deux enfants, des jumeaux de 11 ans, à la maison et
qu'ils l'attendaient pour qu'elle prépare évidemment le souper et
que son mari était lui-même pris, travaillant le soir lui aussi.
Alors, malheureusement, M. le Président, j'ai été
peinée d'avoir à lui expliquer que, malgré les
prétentions que certains peuvent avoir, cette nouvelle loi des normes,
le projet de loi 97, ne lui aurait pas permis de dire non, même en
connaissance de cause, puisque si tant est qu'elle avait dit ce non à
son patron à 16 h 30 pour pouvoir aller retrouver ses jumeaux de 11 ans,
M. le Président, elle aurait eu une telle preuve à faire.
Imaginez-vous, on retrouve ça à l'article 55 de la loi et
le motif là, parce que ce qu'elle aurait eu à plaider, c'est
qu'en refusant de travailler au-delà de ses heures habituelles, il
aurait fallu qu'elle puisse prouver que sa présence était
nécessaire pour remplir des obligations reliées à la
garde, à la santé ou à l'éducation de son enfant
mineur, bien qu'elle ait pris tous les moyens raisonnables à sa
disposition pour assumer autrement ses obligations.
Avez-vous idée de ce que ça veut dire, ça, M. le
Président? Ça et rien, c'est à peu près pareil
parce que tout ça, if ne faut pas oublier qu'il y aura une
présomption légale - que de mots savants - dans le projet de loi
lorsque la personne, la mère en question, travailleuse de son
état, sera suspendue, congédiée, l'objet de discrimination
et puis qu'elle aura porté plainte devant la Commission des normes.
Alors là, il y aura en sa faveur le fait que si c'est pour des
questions, des obligations reliées à la garde, à la
santé ou à l'éducation de son enfant mineur, si elle a
pris tous les moyens raisonnables à sa disposition et pour assumer
autrement ses obligations, là, elle aurait pu, dira-t-on, dire non. Mais
avez-vous idée du fardeau qui repose sur les parents, travailleurs et
travailleuses? M. le Président, ça ne sera pas surprenant si on
retient du projet de loi 97 essentiellement l'idée suivante: II donna
beaucoup de principes mais bien peu d'applications. (16 h 40)
Finalement, M. le Président, j'ai peu de temps à ma
disposition ce soir. Je sais que nous aurons l'occasion d'en débattre
également demain lors de l'étude en troisième lecture
devant l'Assemblée, mais je voudrais vous donner quelques exemples de
ces principes qui sont introduits dans le projet de loi mais pour lesquels
l'application est quasiment inexistante,
M. le Président, mais totalement insuffisante. Je reviens
à cet exemple de cette travailleuse, mère de jumeaux de 11 ans,
pour vous rappeler que si elle avait travaillé en Ontario elle aurait
eu, après huit heures de travail, le droit de refuser de faire du temps
supplémentaire. Huit heures par jour depuis déjà trois ans
permettent à des travailleuses et des travailleurs de l'Ontario de
justifier de cesser de faire du temps supplémentaire parce que les huit
heures sont faites. Huit heures, ce n'est pas trop mal, M. le Président.
Je sais bien qu'à ce moment-ci de notre activité parlementaire,
on en fait pas mal plus et on se plaint beaucoup aussi. On a quelques avantages
pécuniaires, une rémunération et des conditions qui
compensent. Mais ce n'est pas le cas pour ces travailleuses d'usine. Alors,
ici, là, l'application qu'on aurait pu donner justement pour prendre en
considération le fart que, sur le marché du travail, il y a de
plus en plus de femmes qui sont des mères de jeunes enfants.
Imaginez-vous, c'est 72 % exactement de travailleuses qui ont entre 20 et 35
ans, c'est-à-dire exactement l'âge où l'on procrée
dans notre société et où on a des responsabilités
parentales et familiales.
Eh bien, ces travailleuses, elles ne pourront pas invoquer cette
protection que la loi donne déjà depuis trois ans aux
travailleuses de l'Ontario. Elles ne pourront pas invoquer le refus de faire du
temps supplémentaire après huit heures dans leur journée.
Il y a là un bel exemple, finalement, de ce qu'on peut appeler une
coquille législative vide. Alors, on donne des droits à des gens,
mais on ne leur donne pas les moyens de les appliquer. Qu'est-ce que ça
vaut, ça, des droits sur papier? Entre autres, le droit de prendre un
congé maternité ou parental de 32 semaines pas payées. Et
ce droit-là, M. le Président... Là, je veux vraiment
mettre en garde les personnes qui pourraient nous écouter de croire que
ce droit-là leur assure une garantie de retour à leur emploi avec
les mêmes avantages après les 32 semaines ou après,
plutôt, les 34 semaines. Je m'excuse, M. le Président, en fart,
c'est 34 semaines. C'est simplement une protection qui dure 12 semaines en ce
qui concerne le droit d'être réinstallé dans son poste
habituel avec les mêmes avantages, y compris le salaire auquel on aurait
eu droit si on était resté au travail.
Il faut comprendre qu'après ces 12 semaines il n'y a plus la
même protection. Il n'y a plus, donc, la garantie de retour à son
emploi. Et surtout, il n'y a plus la même garantie des mêmes
avantages. Alors, c'est un congé pas payé qu'on prend à
ses risques, finalement.
Mais l'exemple sans doute le plus affligeant, c'est, évidemment,
celui du temps partiel et, en particulier, avec l'amendement que le ministre a
déposé dans cette Chambre et que vous avez jugé recevable
cet après-midi. Ainsi, donc, suite à toutes ces pressions qui
sont venues de tous les milieux de défense des droits des
non-syndiqués - parce que c'est d'eux dont il s'agit, évidemment
- c'est 81 % des travailleuses et des travailleurs du secteur privé. On
oublie parfois que c'est le secteur public et parapublic qui est
syndiqué et qui fait basculer le pourcentage des syndiqués au
Québec autour de 40 %. Mais, dans le secteur privé, c'est
simplement 19 % des travailleurs et travailleuses qui sont syndiqués et
c'est l'immense majorité, 81 %, qui n'auront comme conditions de travail
que ce que cette loi leur permettra. Et, en matière de temps partiel, il
faut comprendre que, là-dessus, des bouleversements ont eu lieu sur le
plan de l'emploi à temps partiel dans notre société. C'est
évidemment, M. le Président, absolument vertigineux, la
progression du travail à temps partiel. En l'espace de quelques
années, entre 1975 et 1988, vous voyez, à peine 13 ans, ça
a doublé, le pourcentage d'emplois à temps partiel dans notre
société. Essentiellement, ces emplois à temps partiel sont
occupés par des femmes, à 75 % par des femmes, et puis par des
jeunes. Finalement, ce sont surtout les femmes et les jeunes, qui sont
susceptibles d'être chefs de famille et d'avoir de jeunes enfants, qui
occupent les emplois les moins bien rémunérés, les emplois
précaires, ceux qui ne donnent pas de garantie, de permanence et
généralement, les moins bien payés.
Devant cette situation de la multiplication de l'emploi à temps
partiel, pensez que, depuis le début de l'année, il y a presque
40 % des emplois créés au Québec qui l'ont
été à temps partiel. Même la commission, je dirais
surtout la Commission jeunesse du Parti libéral est venue plaider, au
printemps dernier, devant la commission parlementaire des affaires sociales,
lors de l'étude de l'avant-projet, est venue plaider mais avec des
preuves à l'appui, est venue plaider en faveur d'une véritable
protection pour les employés à temps partiel, invoquant justement
que ce sont, pour la plupart, des jeunes en âge de fonder un foyer et qui
n'en ont pas les moyens, d'avoir des enfants, compte tenu qu'ils n'ont pas la
protection voulue au niveau de leur emploi, M. le Président, et qui sont
surtout venus plaider que l'on corrige les iniquités, les injustices qui
font qu'on peut engager, pour faire un travail équivalent, quelqu'un
à temps partiel, en le payant moins, que quelqu'un à temps
plein.
M. le Président, l'exemple du temps partiel, dans la loi 97, je
vous le dis, c'est accablant, c'est affligeant. Parce qu'une fois
énoncé le principe, dans un article du projet de loi - je vais
vous la faire la démonstration, on va la faire ensemble, la
démonstration - une fois énoncé le principe "qu'un
employeur ne peut accorder à un salarié un taux de salaire
inférieur à celui consenti aux autres salariés qui
effectuent les mêmes tâches dans le même établissement
pour le seul motif que ce salarié travaille habituellement moins
d'heures par semaine," une
fois le principe établi et en prenant en considération
que, dans sa formulation même, ce principe-là n'est pas conforme
à ce que souhaite la Commission des droits de la personne dans un avis
récent, un avis que le ministre a certainement reçu, comme je
l'ai reçu moi-même et qui est daté du 14 décembre,
donc, il n'y a même pas une semaine de ça, et dans cet avis, la
Commission dit, juste sur la formulation du principe, que ce n'est pas
satisfaisant parce que l'expression "mêmes tâches dans le
même établissement', c'est bien trop restreint. La Commission
demande: Qu'adviendra-t-il s'il n'y a pas d'employés à temps
plein qui accomplissent les mêmes tâches? Dans un
établissement où il y a des employés à temps plein
mais où on engage, par exemple, une seule réceptionniste et on
l'engage à temps partiel. Alors, s'il n'y a pas les mêmes
tâches consenties à des salariés à temps plein parce
qu'il n'existe pas un élément de comparaison, c'est donc dire que
le principe de l'équité salariale entre les temps partiel et les
temps plein, le principe qui est là, il n'existe pas, M. le
Président. On ne peut pas l'appliquer réellement. Il existe sur
papier et, quand les travailleuses et les travailleurs du Québec vont
vouloir l'utiliser, ça va leur fondre entre les mains. (16 h 50) ce que
la commission des droits de la personne recommande, c'est d'utiliser la
même expression que celle qu'on retrouve dans la charte
québécoise, c'est-à-dire: "l'obligation de verser un
salaire égal doit être faite pour un travail équivalent, au
même endroit - travail équivalent - et non pas pour un travail qui
est effectué par des salariés à plein temps qui
accomplissent les mêmes tâches. alors, je me serais attendue, cet
après-midi, à ce qu'il y ait un amendement, dans la foulée
de ceux que le ministre a apportés, non pas pour faire comme les
amendements qu'il apporte, c'est-à-dire encore plus réduire
l'application - et j'y arrive, m. le président - mais pour, au
contraire, corriger, remédier à ce qui est
considéré par la commission des droits de la personne comme
étant une protection insuffisante, même au niveau du principe qui
est énoncé. ,
Alors, ce principe est énoncé, dans son premier
paragraphe. Mais, dès le deuxième alinéa, le ministre
ajoute ceci: "Le premier alinéa - la protection des travailleurs
à temps partiel - ne s'applique pas à un salarié qui gagne
un taux de plus de deux fois le salaire minimum." Ah! on va dire: C'est normal,
il faut protéger les plus démunis, les plus
défavorisés. Et puis, ceux qui gagnent deux fois le salaire
minimum, ce sont des gras durs, pourraient peut-être prétendre les
gens d'en face. Pensons-y, M. le Président, ça donne quoi,
ça, exactement, deux fois le salaire minimum? Ça donne 10,60 $
l'heure. Mais là, il ne faut pas l'oublier, ça s'applique
à des personnes qui sont à temps partiel et qui font, en moyenne,
20 heures. Et 20 heures, à 10,60 $, ça donne quoi, comme revenu
hebdomadaire? Ça ne donne même pas 230 $ par semaine. Pensez-vous
qu'on peut faire vivre une famille ou un enfant avec un salaire pareil? Et
là, c'est terriblement inquiétant parce que même son
principe ne trouve plus application.
Alors, là, expressément, le ministre introduit dans la
loi, maintenant, le droit de discriminer un travailleur, un employé, une
employée à temps partiel parce qu'il est à temps partiel,
même s'il accomplit les mêmes tâches, dans le même
établissement; et ça, c'est extrêmement inquiétant.
D'ailleurs, la Commission des droits demande au ministre de biffer cet
alinéa qui nie totalement le principe du droit à un taux de
salaire égal en permettant aux employeurs d'accorder un taux de salaire
inférieur aux employés à temps partiel. la
conséquence est manifeste, ajoute la commission des droits, mais l'on
encourage le recours à des employés à temps partiel qui,
en plus de souffrir d'insécurité d'emploi, se verront octroyer un
salaire à un taux inférieur à celui des employés
à temps plein. si l'employeur engage un employé à temps
plein, il va devoir lui payer le plein montant. mais un employé à
temps partiel, si le taux de salaire est deux fois celui du salaire minimum, il
va pouvoir le discriminer. est-ce que ça a du bon sens d'introduire dans
une loi une disposition qui discrimine? et la commission donne un exemple, dans
son avis: "dans un métier où le taux horaire des travailleurs
à temps plein est de 30 $ l'heure, l'employeur ne verse, par exemple,
qu'un taux de 15 $ l'heure aux employés à temps partiel. une
telle inégalité salariale, un écart de 15 $ l'heure, soit
seulement 50 % du salaire à temps plein, est inéquitable."
Mais ce n'est pas tout, ça. Là, le ministre introduit des
amendements, aujourd'hui. Pensez-vous que c'est pour remédier, corriger,
bonifier et donner raison, finalement, à la majorité - à
la majorité, je ne parle pas du Conseil du patronat - des organismes qui
sont venus devant la commission, y compris la propre Commission jeunesse du
Parti libéral? Bien au contraire. Vous savez de quoi ils traitent, les
amendements? Ils disent essentiellement que les dispositions qui
prévoient qu'un taux de salaire comparable, équivalent doit
être offert pour un employé à temps partiel qui effectue
les mêmes tâches que pour un employé à temps plein,
Ça ne va pas être mis en vigueur maintenant. Les amendements
disent que ce sera au bon vouloir du gouvernement. Alors, le projet de loi
introduit un principe au premier alinéa, l'atténue, l'amoindrit
en deux au deuxième alinéa et ajoute, dans un autre article de la
fin, que, de toute façon, tout ça ne sera pas mis en vigueur
maintenant.
M. le Président, ce qu'il faut constater, c'est que, finalement,
il y a eu une absence de courage, il y a eu quelques corrections de forme,
mais, dans le fond, aucune modification de fond substantielle autre que
celles introduites suite aux représentations de Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine. M. le
Président, c'était manifeste, durant tout l'examen que nous avons
fait en commission parlementaire, que n'eussent été les pressions
réalisées par Mme la ministre déléguée
à la Condition féminine, nous aurions eu bien peu dans ce projet
de loi modifiant les normes du travail et d'autres dispositions
législatives.
Pour vous le prouver, je dois d'abord vous dire, M. le Président,
que les seules dispositions qui entrent en vigueur le 1er janvier sont celles
qui sont introduites par l'influence et les pressions de Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine et
concernent les congés parentaux et les congés de
maternité. Mais il faut comprendre que le ministre a acquiescé.
Oui, c'est vrai, il a acquiescé, mais il pouvait difficilement faire
autrement, parce que, M. le Président, depuis le 18 novembre, avec la
réforme de l'assurance-chômage intervenue à Ottawa, les
employés admissibles à l'assurance-chômage ont droit
à des prestations de congés parentaux et de congés de
maternité. Ils y ont déjà droit à ces prestations
qu'ils hésitent à prendre à cause des risques que
ça représente de retirer des prestations, c'est-à-dire de
prendre leur chèque de chômage soit pour 25 semaines de
congé de maternité et soit pour 10 semaines de congé de
paternité, mais ils craignent de le faire à cause du risque que
ça représente, n'ayant pas de protection dans le cas des
congés de plus de 18 semaines, n'ayant pas de protection au-delà
des 18 semaines ni pour le congé de maternité et n'ayant aucune
protection dans le cas du congé de paternité. Alors, c'est
évident que le risque fait en sorte que bon nombre d'employés
présentement qui y auraient droit ne prennent pas leur congé tant
que ces dispositions ne sont pas mises en vigueur pour leur garantir le retour
à leur emploi, suite a la réforme de
l'assurance-chômage.
M. le Président, il faut comprendre que, finalement, ce que le
ministre fait, c'est qu'il s'ajuste, il ajuste les dispositions qui existaient
en matière de congé, il les ajuste pour pouvoir donner effet,
pour permettre l'application de la loi fédérale, de la loi
canadienne en matière de congés familiaux en regard de
l'assurance-chômage. Tout le reste des autres dispositions, pensez-vous
que ça entre en vigueur au mois de janvier? Pas du tout. Ça va
entrer en vigueur au mois d'avril, sauf le temps partiel. Alors, là, M.
le Président, le temps partiel, c'était prévu, dans la
loi, entrer en vigueur le 1er janvier 1992. Le ministre disait donner un an
pour qu'il y ait des ajustements. Ça veut donc dire que,
présentement, il se paie des taux de salaire à temps partiel qui
ne se justifient pas en regard du même travail qui est effectué
par ces employés que par ceux à temps plein, mais il se paie des
salaires inférieurs. Là, le ministre disait vouloir donner un an
pour permettre aux employeurs de corriger la situation et de s'ajuster.
Pensez-vous qu'il est resté conséquent dans ce qui était
déjà contenu dans le projet de loi? Non, pas du tout, c'est
justement ce que ces amendements viennent changer, M. le Président. Ce
qu'ils disent, les amendements, c'est que ça ne sera pas le 1er janvier
1992 que l'ensemble des employés à temps partiel seront
traités comme les employés à temps plein. Non, pas du
tout. Ça va dépendre d'un règlement, parce que le
gouvernement se donne le droit, avec ces amendements d'adopter, avant le 1er
janvier 1992, une autre date pour reporter à plus tard l'application des
dispositions qui protègent les employés à temps partiel.
Il se donne même le droit de suspendre tout simplement l'application de
la protection, et il se donne même le droit de prévoir un
ajustement progressif du taux de salaire.
Alors, M. le Président, comprenez-vous qu'il a beau y avoir un
principe, ce principe-là, c'est comme de la poudre aux yeux qui est
jetée dans les médias et, si des hommes et des femmes de bonne
foi qui travaillent à temps partiel pensent qu'ils vont pouvoir, une
fois la loi adoptée, aller voir leur patron en lui demandant de corriger
une situation inéquitable étant donné qu'ils font le
même travail: deux secrétaires, deux réceptionnistes, deux
manutentionnaires qui font le même travail... L'un fait 40 heures par
semaine et l'autre 20 heures et ils ont parfois des taux horaires du simple au
double. Pensez-vous que ces employés vont pouvoir aller faire corriger
la situation avec l'adoption de la loi 97? Non, M. le Président. Ils ne
pourront même pas dire au patron: II faut que tu le fasses d'ici à
un an. Ça dépendra du bon vouloir du prince, M. le
Président. Le prince, c'est le gouvernement, en l'occurrence.
Vous comprendrez notre déception, oui, notre déception
profonde, non pas devant les principes qu'on retrouve dans le projet de loi,
mais devant l'absence totale de courage de ce gouvernement pour faire en sorte
que ces principes trouvent application. Je vous ai donné l'exemple de
l'absence totale de protection dans les cas de refus de faire du temps
supplémentaire. Vous vous rendez compte, à l'époque
où nous sommes là, au moment où finalement bon nombre de
conflits de travail ont lieu justement sur ces questions de durée, non
pas seulement de la journée mais durée de la semaine de travail
et durée des vacances annuelles. C'est maintenant un des thèmes,
un des sujets de préoccupation majeure dans les relations de travail, M.
le Président.
Pourtant, une loi sur les normes de travail, dans la philosophie d'une
loi semblable, c'est une loi qui vient assurer la paix sociale dans les
relations de travail. Cette paix sociale qui est si importante de part et
d'autre, des deux côtés. Rappelez-vous toutes ces grèves
que le Québec a connues il y a quelques années, par exemple,
il
y a 20 ans quand les travailleurs et les travailleuses devaient faire
des grèves pour qu'ils obtiennent un régime de retraite et un
fonds de pension. Après, il a fallu qu'ils fassent des grèves
pour obtenir des congés de maternité. Imaginez-vous que, souvent,
les travailleuses qui étaient enceintes étaient tout simplement
congédiées. Au fil des années, les législations
sociales ont été introduites pour rendre équitables des
conditions et les soustraire des rapports de force, les soustraire de
manière à ce que ça civilise le milieu du travail.
Malheureusement, je le dis avec peine, je pense, oui, toute la question de la
durée de travail est au coeur des relations de travail actuelles. C'est
l'objet de presque tous les conflits de travail auxquels on assiste.
Je dois vous dire que nous entendons, et nous en aurons certainement
l'occasion en troisième lecture, compléter cet examen que nous
faisons du projet de loi. S'il assure des principes, il n'assure
malheureusement pas l'application. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve. Est-ce qu'il y a d'autres
interventions à cette étape-ci? Est-ce que les amendements
proposés par M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle sont
adoptés?
Une voix: Sur division.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Sur division. Est-ce que
le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi 97, Loi
modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions
législatives, est adopté?
Une voix: Sur division.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Sur division. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Je vous prierais d'appeler l'article 34 de
notre feuilleton, M. le Président.
Projet de loi 71 Adoption
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 34 de
notre feuilleton, M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle propose
l'adoption du projet de loi 71, Loi modifiant la Loi sur la Commission des
affaires sociales. M. le ministre.
M. Bourbeau: Je le propose, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions? Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: M. le Président, est-ce que je peux vous
demander un ajournement d'une minute?
Une voix: Suspension.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Une suspension.
Mme Harel: Suspension. Une suspension.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, nous suspendons
les travaux pour une minute ou deux.
(Suspension de la séance à 17 h 6)
(Reprise à 17 h 7)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Est-ce que ça va, Mme la députée? Alors, nous en
sommes à l'adoption du projet de loi 71 et je suis prêt à
reconnaître Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve sur le
projet de loi 71.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Quelques mots,
M. le Président, pour signaler l'importance du projet de loi 71. C'est
une loi qui modifie la Loi sur la Commission des affaires sociales. S'agit-il,
M. le Président, d'une loi qui bonifie la Loi sur la Commission des
affaires sociales? Malheureusement, non. Et, à ce moment-ci, M. le
Président, où la Commission des affaires sociales connaît
des ratés importants en matière de délais, je vous
rappelle que l'ensemble des victimes d'accidents de la route, qui font appel
à la Régie de l'assurance automobile, ou encore celles qui font
appel à la CSST, la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, ou encore les retraités qui sont
admissibles à la Régie des rentes du Québec, et
également l'ensemble des personnes bénéficiaires de l'aide
sociale en vertu des lois sur la sécurité du revenu, l'ensemble
de ces personnes sont susceptibles, peuvent faire appel à la Commission
des affaires sociales, appel d'une décision prise par un organisme, une
régie, un conseil. Et, M. le Président, ce qu'il faut comprendre,
c'est que les délais d'attente, en 1990, à la Commission des
affaires sociales sont tellement longs que ça constitue un déni
de justice pour les justiciables. Un déni de justice, ça veut
dire qu'on a beau avoir un droit, mais quand ça devient tellement lourd,
tellement long, tellement compliqué de faire réaliser ce droit,
on finit par décourager les personnes et aussi on finit par
discréditer les institutions.
Et en matière de délais d'attente à la Commission
des affaires sociales, l'assurance automobile en regard des victimes
d'accidents d'automobile, ou de celles qui veulent surtout faire appel à
des décisions de la Régie de l'assurance automobile, il y a un
délai de 12 mois. En matière d'accident du travail, c'est un
délai de 30 mois; 30 mois, M. le Président, c'est deux ans et
demi. Deux ans et demi entre le moment où la demande d'appel est
déposée et où a lieu l'audition. En matière de
Régime de rentes, c'est de sept à hurt mois. Et en matière
de sécurité du revenu, c'est de quatre à six mois.
Ça reste long. En matière de sécurité du revenu, il
ne faut pas oublier que ce sont des personnes qui n'ont pas d'autre
subsistance. Quand elles font appel d'une décision, c'est
généralement parce qu'elles en sont à demander, à
recourir à l'assistance sociale, donc parce qu'elles ont
déjà épuisé tous les autres recours.
H ne faut pas oublier, M. le Président, que pendant ces
délais d'attente, les personnes ne reçoivent pas de prestations
parce que la plupart d'entre elles font appel à la Commission des
affaires sociales, justement, parce qu'il y a eu un refus soit de verser en
totalité ou en partie une prestation. Et, pendant tout ces délais
d'attente, elles n'ont pas ces prestations et il n'y a pas une indexation, il
n'y a pas un montant qui est versé pour tenir compte du fait qu'il y a
eu un délai d'attente. Pensez, deux mois et demi, deux ans et demi en
matière d'accident de travail!
M. le Président, malgré que cette situation-là
existe, donc, des délais d'attente absolument inacceptables, on n'est
pas, avec le projet de loi 71, devant une loi qui consiste à vouloir
améliorer la situation, la corriger, y remédier. Bien au
contraire, M. le Président, cette loi-là consiste à
prélever dans les caisses des commissions qui font l'objet d'un appel:
Régie des rentes du Québec, Régie de l'assurance
automobile, Commission de la construction, et encore, parce que la disposition
de la loi créant la Commission de la construction permettant d'aller en
appel devant la Commission des affaires sociales n'est même pas en
vigueur, M. le Président. Alors, on ne pouvait même pas aller en
appel devant la Commission des affaires sociales et, pourtant, le gouvernement,
sans doute le Conseil du trésor, gourmand, voulait déjà
aller prélever de l'argent de la Commission de la construction. De toute
façon, il y a aussi la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, et ces organismes, ces régies, ces
conseils vont maintenant être l'objet d'un prélèvement aux
fins d'un financement d'une partie de la Commission des affaires sociales.
Vous savez, d'abord, il y a un problème de fond, un principe qui
est en cause, évidemment, un principe important qui est celui de
l'indépendance des tribunaux administratifs. La Commission des affaires
sociales, c'est un tribunal. C'est un tribunal administratif, mais qui rend des
décisions quasi judiciaires et, une fois que vous êtes
allés en appel et que la décision est rendue, vous ne pouvez pas
aller devant des tribunaux supérieurs à moins que vous
n'invoquiez le pouvoir de surveillance et, là, c'est pour toutes sortes
d'autres raisons, mais ce n'est pas sur le fond. Ce serait parce que,
manifestement, il y aurait eu des questions de droit en cause. Mais c'est un
tribunal de dernière instance. Alors, c'est un tribunal qui rend justice
et ce tribunal rend justice entre un plaignant - habituellement un citoyen, un
contribuable qui a été victime d'un accident du travail ou d'un
refus de la rente, ou encore qui a été victime d'un accident
d'automobile ou qui se voit refuser l'aide sociale... Alors, le tribunal qui
est la Commission des affaires sociales rend justice entre un plaignant,
habituellement, donc, un citoyen, et la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, la Régie des rentes ou encore les
bureaux d'aide sociale, ou encore la Régie de l'assurance automobile. Et
là, il y a une partie de l'argent qui financera ce tribunal qui va
provenir du prélèvement des organismes en regard desquels la
Commission a à trancher. Le Protecteur du citoyen n'était
vraiment pas très content de ça, M. le Président. Bien au
contraire, il a envoyé au ministre et au Secrétaire
général du Conseil exécutif une lettre à cet effet.
J'en lis quelques passages. Cette lettre dit: La modification proposée
crée, à des fins budgétaires, un recul du principe de
l'indépendance apparente de tout tribunal administratif vis-à-vis
des ministères et organismes gouvernementaux dont il doit
apprécier les décisions. C'est assez inquiétant. On devait
obtenir cet automne une réforme majeure des tribunaux administratifs de
(a part du ministre de la Justice. Il l'avait d'ailleurs annoncée l'an
passé et il avait déjà, il y a deux ans, mis en place un
groupe de travail qui a remis son rapport. Et même le Conseil des
ministres a déjà, à maintes reprises, étudié
cette question, toute la question de la réforme des tribunaux
administratifs au Québec. Et là, on constate, avec le projet de
loi 71, que, passant complètement à côté de cette
réforme essentielle, le ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, sans
doute, évidemment, obligé par le Conseil du trésor, vient
ajouter à tout ce qui, actuellement, est remis en question à
l'égard des tribunaux administratifs un élément
supplémentaire qui est celui de mettre en doute leur indépendance
à cause même de leur mode de financement.
Et le Protecteur du citoyen, à cet égard, disait que les
tribunaux administratifs, ce qu'est la Commission des affaires sociales, sont
comme des labyrinthes où peuvent facilement s'égarer nombre de
citoyens. Ce qu'il ajoute, et c'est ce qui est peut-être le plus
important, c'est que le malaise à l'égard des tribunaux
administratifs - et le malaise sera évidemment beaucoup plus grave avec
l'adoption de la loi 71 - c'est ce
sentiment qu'ont les citoyens que le tribunal administratif est au
service de l'État. Le tribunal administratif ne devrait pas être
au service de tien d'autre que de déclarer en toute équité
le respect des droits. Ce que concluait le Protecteur du citoyen, c'est que,
contrairement à ce qu'on s'apprête à faire avec la loi 71,
il faut accentuer l'indépendance des juges administratifs pour dissiper
l'impression d'une tutelle par l'État. Alors, bien loin de s'approcher
de cette réforme indispensable, M. le Président, là, on
s'en éloigne. On s'en éloigne avec le projet de loi 71. Et non
seulement on s'en éloigne, mais, en plus, c'est que cet accroc à
l'indépendance d'un tribunal administratif qui aura à
apprécier les décisions des régies et des commissions qui
vont maintenant la financer... Mais ce n'est même pas compensé,
cet accroc à l'indépendance, par une amélioration à
laquelle servirait cet argent pour permettre à la Commission des
affaires sociales d'être plus efficace. Si le ministre disait cet
après-midi en Chambre: L'argent qu'on va prélever - il s'agit de
quelques millions, 5 000 000 $... C'est comme une taxe détournée,
il faut bien le comprendre, que ça s'ajoute aux autres taxes puisque le
gouvernement ne veut pas assumer le financement de la Commission des affaires
sociales et il va le faire assumer en partie du moins par ceux qui financent la
Commission de la santé et de la sécurité du travail, ou
ceux et celles qui financent la Régie des rentes, ou ceux et celles qui
financent la Régie de l'assurance automobile. C'est comme un
détournement de taxes. (17 h 20)
Et si, au moins, ça servait à améliorer le
fonctionnement de la commission des affaires sociales. Si le gouvernement nous
disait: C'est pour un bon motif qu'on s'apprête à faire ce qu'on
veut faire. C'est pour le motif de rendre plus efficace, plus
opérationnelle la Commission des affaires sociales, on va se fixer des
objectifs, on va réduire les délais d'attente. On va les
réduire. Évidemment, deux ans et demi pour un accidenté du
travail, ça n'a pas de bon sens. On se donne des objectifs. Bien, M. le
Président, peut-être qu'on aurait examiné cette
proposition-là en se demandant si, finalement, l'objectif poursuivi ne
valait pas la peine de faire ce qu'on entendait faire. Mais là, ce n'est
pas le cas. Non seulement il y a un accroc à l'indépendance
apparente de la Commission des affaires sociales, mais en plus de ça, ce
n'est pas pour améliorer le sort des gens qui attendent 30 mois dans le
cas des accidentés du travail, 12 mois dans le cas des victimes de la
route, 8 mois dans le cas des retraités.
Alors, pour toutes ces raisons, M. le Président, vous comprendrez
certainement que nous avons l'intention de voter contre le projet de loi 71. Je
vous remercie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci,
Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Est-ce qu'il y a
d'autres intervenants à cette phase-ci? M. le ministre, en vertu de
votre droit de réplique. M. le ministre de la Sécurité du
revenu.
M. André Bourbeau (réplique)
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai eu l'occasion de
préciser à cette Assemblée, à deux reprises,
l'objet du projet de loi 71, Loi modifiant la Loi sur la Commission des
affaires sociales. Je serai donc très bref. La Commission des affaires
sociales, c'est un organisme quasi judiciaire qui constitue une instance
d'appel des décisions ayant généralement une incidence
financière rendues par plusieurs organismes au ministère. La
plupart des organismes publics du gouvernement du Québec qui versent des
rentes, des indemnités de toute nature ou des prestations diverses
accordent à leurs clients respectifs le droit d'en appeler de leurs
décisions devant, justement, la Commission des affaires sociales. La
décision de la Commission devient alors exécutoire et, bien
sûr, sans appel.
Parmi ces organismes, il y a des régimes publics d'assurance,
c'est-à-dire des organismes financés à même les
cotisations des membres. Je pense ici à la Société de
l'assurance automobile du Québec, à la Régie des rentes du
Québec, à la Commission de la santé et de la
sécurité du travail, communément appelée la CSST,
pour n'en nommer que quelques-uns. Le projet de loi 71 prévoit
simplement que, dorénavant, ces organismes devront contribuer au
financement de la Commission des affaires sociales. Ils le feront en proportion
de la charge de travail qu'ils occasionnent à l'instance d'appel. Plus
les décisions d'un organisme font l'objet de contestations devant la
Commission des affaires sociales, plus cet organisme devra payer pour compenser
les frais encourus par la Commission pour entendre les causes et rendre des
décisions. Il y a donc, dans cette décision du gouvernement, une
invitation adressée aux organismes concernés à
améliorer leurs services à la clientèle. L'Opposition
officielle soulève le spectre de la perte de l'indépendance de la
Commission des affaires sociales. Je tiens à réfuter ces
prétentions parce qu'elles ne correspondent aucunement aux effets du
projet de loi et aussi, à nos intentions.
En effet, les crédits budgétaires de la Commission des
affaires sociales continueront de lui être attribués par le
gouvernement et non par les organismes dont les clients peuvent faire affaire
avec la Commission. La Commission des affaires sociales n'aura aucune
démarche à effectuer auprès de ces organismes pour assurer
son financement. En aucune manière, donc, l'indépendance ou
l'intégrité de la Commission des affaires sociales n'est remise
en cause. Nous tenons, dis-je, au contraire, à la préserver
scrupuleusement. Nous estimons simplement que les cotisants des régimes
privés d'assurance
devraient assumer l'ensemble des coûts administratifs de ces
régimes, y compris ceux qui découlent des procédures de
contestation devant un organisme d'appel comme la Commission des affaires
sociales. J'invite donc, M. le Président, les membres de cette
Assemblée, à voter en faveur du projet de loi 71, Loi modifiant
la Loi sur la Commission des affaires sociales, parce qu'il veut
établir, au fond, une règle d'équité. Je les
remercie d'avance pour leur appui. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre.
Est-ce que la motion du ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle proposant
l'adoption du projet de loi 71, Loi modifiant la Loi sur la Commission des
affaires sociales, est adoptée?
Des voix: Adopté. Mme Harel: Sur division.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur
division. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Je vous demanderais, à cette
étape de nos travaux, M. le Président, d'appeler l'article 35 de
notre feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 88 Adoption
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 35,
M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et
de la Formation professionnelle propose l'adoption du projet de foi 88, Loi
modifiant de nouveau la Loi sur les allocations d'aide aux familles. Je suis
prêt à reconnaître maintenant le premier intervenant, M. le
ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la
Formation professionnelle.
M. Bourbeau: oui, m. le président. alors, je propose
l'adoption du projet de loi 88, loi modifiant de nouveau la loi sur les
allocations d'aide aux familles.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur le même sujet,
M. le député de Rouyn-Noran-da-Témiscamingue.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: Oui, M. le Président. Rendu à la
dernière étape de l'adoption de ce projet de loi, le projet de
loi 88 qui porte sur les allocations aux familles, seulement quelques mots pour
préciser. Dans l'emballement du nombre de lois qu'on est obligés
de passer au mois de décembre, compte tenu de la performance du
gouvernement et du rythme de travail pendant le mois d'octobre et le mois de
novembre, il vaut la peine de rappeler aux gens qu'on n'est pas ici en face
d'une simple proposition du ministre de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu en ce qui concerne les familles, en ce qui
concerne l'ajustement, une nouvelle fois, de la Loi sur les allocations d'aide
aux familles.
Il est vrai que ce projet de loi vise à prolonger, en quelque
sorte, sur une année le versement d'une somme de 375 $ aux familles, par
mois, pour celles qui ont donné naissance à un troisième
enfant, et que cette mesure nataliste du gouvernement, si elle permet
évidemment d'aider les familles qui ont des enfants de troisième
rang, ne doit pas nous faire oublier ce qui se passe pour les familles, point,
pour les hommes et les femmes qui ont décidé d'avoir des enfants,
qui ont un ou deux enfants et qui, de par ce projet de loi, au niveau du
troisième enfant, recevront, à la naissance, ou pourront recevoir
pour la naissance du troisième enfant, une allocation sur quatre ans.
Alors, on ne peut pas être contre ce projet de loi qui permet de
bonifier, pour un certain nombre de familles, la contribution de l'État
au niveau des responsabilités que cela implique. Mais il ne faut pas
passer sous silence que ce projet de loi masque une certaine
réalité, une réalité beaucoup plus grande qui est
celle de la plupart des familles québécoises. Et à
l'occasion de la dernière étape, l'adoption de ce projet de loi,
qui va, en quelque sorte, légaliser, entre guillemets, le versement de
ces allocations, il faut rappeler l'état des familles et, surtout, faire
un certain nombre de mises au point sur l'effet de ces politiques par ce
gouvernement. À ne pas en douter, on va se faire rabâcher, on va
se faire rappeler encore, pendant un certain nombre de mois, que cette
politique sur laquelle tout le monde s'entend, que l'on appelle la politique
des bébés bonis, c'est vraiment une mesure qui, en soi, peut
paraître spectaculaire, puisqu'on dit: Pour faire face à la crise
de la dénatalité au Québec, pour faire face à la
crise démographique que nous vivons dans l'ensemble du Québec,
nous, on va mettre des primes à la naissance et, en particulier, une
superbe prime pour le troisième enfant, puisqu'on donne 6000 $.
Cependant, ce qu'il faut bien dire aux gens, c'est combien de personnes ou
combien de familles cela concerne, tout en retenant l'objectif. (17 h 30)
Le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu
et de la Formation professionnelle se souviendra certainement que je lui ai
posé un certain nombre de questions, à l'Assemblée
nationale, sur le résultat de cette politique des bébés
bonis et que c'est le ministre des Finances qui, en termes de rescousse, a
été obligé de parler de pourcentage et non pas de chiffres
réels d'augmentation. Alors, les enfants de troisième rang, au
Québec, à partir de 1987,
ils constituaient 12,1 % de l'ensemble de toutes les naissances au
Québec. Alors, ici, en 1987, on parlait de 9980 enfants qui
étaient les 3e de la famille. L'effort du gouvernement pour le faire
porter uniquement sur l'augmentation du nombre d'enfants dans la famille pour
faire face à la crise de dénatalité, ça a
donné, en 1988, 10 349 enfants, ce qui veut dire 469 enfants de
troisième rang de plus, sur un grand total de 86 600 enfants, et c'est
ça qu'il ne faut pas oublier. La mesure en 1988 a donc touché 469
familles qui ont donné naissance à un troisième enfant. Il
faut toujours se souvenir des quelque 76 000 autres familles. On pourrait
examiner les données sur la pauvreté dans quelques secondes pour
se rendre compte que cette mesure, que l'on veut bien présenter comme
spectaculaire, néglige aussi, parce qu'elle cache la
réalité des 76 000 autres familles au Québec en 1989. Et
il faudrait dire en termes de pourcentage aussi qu'en 1988 cela concernait
toujours 12,2 % de l'ensemble des naissances des 86 600 naissances au
Québec. Alors, l'ensemble de la politique pour 1988, elle nous tient
toujours, en termes de pourcentage d'augmentation, pardon, en termes de
proportion des enfants de troisième rang sur l'ensemble des naissances,
à 12 %.
En 1989, qu'est-ce qui s'est passé, M. le Président? Cette
politique devait avoir un effet, mais terrible, un effet extraordinaire et on a
vu au Québec, et les analystes de Statistique Canada ont bien saisi le
phénomène dans l'ensemble du Canada et dans l'ensemble du
Québec et ils nous ont fait part, en termes de résultats
d'analyses, qu'il y avait une certaine reprise du taux de natalité. Le
taux de natalité au Québec était tombé en 1987
à aussi bas que 1,4 enfant en moyenne par femme de 15 ans et plus en
voie de se reproduire, et avec la reprise non seulement au Québec, mais
dans l'ensemble canadien puisque c'est là que les statistiques sont
issues au niveau de Statistique Canada, eh bien maintenant, on peut parler
d'une augmentation de 0,2 %. Je le rappelle, partout dans l'ensemble du Canada,
et pour 1989, ça veut dire 1464 naissances sur les 91 300 naissances au
Québec. Quelle est fa proportion des enfants de troisième rang en
1989 par rapport à l'ensemble des naissances au Québec? Toujours
12,3 % de l'ensemble des naissances au Québec. Ce que cela veut dire et
c'est la question que j'ai posée au ministre de la Main-d'oeuvre et de
la Sécurité du revenu en commission parlementaire, lorsque nous
avons étudié article par article ce projet de loi il y a
maintenant quelques semaines, quelle est la somme que nous consacrons à
cette politique pour augmenter les enfants de troisième rang? Jamais,
mais jamais, de ce côté-ci, on ne va s'opposer à quelque
mesure que ce soit qui fasse en sorte qu'on puisse aider un bon nombre de
familles. Ce qu'on veut aussi, c'est qu'on veut aider l'ensemble des familles
du Québec et se donner une véritable politique familiale. Eh
bien, c'est 57 000 000 $ par année, M. le Président, que l'on
consacre à cette mesure-là et seulement pour avoir gagné
0,1 % au niveau de la proportion des enfants de troisième rang dans le
Québec, en oubliant et en faisant en sorte qu'on tente d'oublier la
réalité des quelque 80 000 autres familles qui ont donné
naissance à des enfants de premier rang ou des enfants de
deuxième rang.
Quand le ministre des Finances - et c'est ce que nous tentons de
légaliser, encore une fois, entre guillemets aujourd'hui, dans cette
Asssemblée - quand le ministre des Finances nous annonce cette mesure
spectaculaire pour les familles du Québec, c'est une bonne mesure, nous
allons l'appuyer pour les quelque 11 000 familles qui sont concernées
ici. Ce qu'il faut redire c'est que cela n'aura contribué d'aucune
façon à l'augmentation du pourcentage des enfants de
troisième rang dans l'ensemble des naissances au Québec, que ce
n'est pas la politique familiale ou les morceaux de politique familiale que
prétend vouloir se donner ce gouvernement qui fait en sorte qu'on a
connu une augmentation de 0,2 % dans les statistiques au niveau de
l'augmentation de la natalité au Québec.
Tout cela pour vous dire que cette mesure fait en sorte qu'on ignore la
véritable situation de l'ensemble des familles au Québec. Et on a
qu'à aller voir plutôt du côté des véritables
statistiques qui nous indiquent quel est l'état des familles au
Québec pour s'apercevoir que d'autres études produites par
Statistique Canada nous indiquent qu'en 1988 13,5 % des familles
québécoises vivaient en dessous du seuil de pauvreté en
déboursant plus de 58 % de leurs revenus pour s'alimenter, se loger et
s'habiller. Alors, ça, c'est la véritable réalité
de l'ensemble des familles du Québec: tout près de 15 % qui
vivent sous le seuil de la pauvreté. C'est ça que la mesure
gouvernementale permet de masquer, permet de cacher. Plus grave que cela, M. le
Président, chez les jeunes familles québécoises, et on
sait que c'est là un problème très grave... Le Conseil
permanent de la jeunesse, le Conseil des affaires sociales du Québec, le
Conseil du statut de la femme se sont unis, il y a bientôt quelques mois,
pour nous dire que d'être parents et jeunes, au Québec, ce sont
deux dimensions qui s'opposent et que les mesures de soutien à
l'ensemble des familles du Québec ce n'est pas tout à fait, et
loin de là, une politique qui incite à développer un
groupe familial, tout simplement à avoir des enfants, compte tenu du
contexte dans lequel nous vivons.
Chez les jeunes familles québécoises, M. le
Président, la détérioration des conditions de vie est
spectaculaire. Le taux de pauvreté des familles dont le chef avait entre
15 et 24 ans - c'est ça qu'on appelle les jeunes familles - qui avait
pourtant baissé de 21 % à 18 % en 1973-1977, c'est-à-dire
que le nombre de familles pauvres, dans les catégories des parents
qui ont entre 15 et 24 ans, était passé de 21 % à
18 %... En 1985, il était passé à 33 % et on a maintenu ce
cap des 30 % en 1986, puisque les dernières statistiques que l'on peut
analyser pour l'ensemble Québec-Canada, c'est le recensement de 1986.
Alors, entre 1973 et 1986, le taux des familles jeunes dans l'ensemble des
familles pauvres du Québec est passé de 5 % à 9,1 %.
Alors, être jeunes au Québec, et vouloir fonder une famille,
ça s'avère de plus en plus une épreuve, ça
s'avère de plus en plus difficile. Il y a de moins en moins de facteurs,
de moins en moins d'éléments dans l'environnement qui font en
sorte que l'on peut se permettre de dire non seulement nous formons un couple
mais nous voulons également former une famille avec enfants. Et la
situation de ces familles n'est absolument pas corrigée par la
politique, par le morceau de politique financière de support aux
familles ayant un troisième enfant qui nous est présenté
aujourd'hui. puisque c'est une réalité avec laquelle nous devons
vivre de plus en plus fréquemment, parlons également des familles
monoparentales. en 1973, les familles monoparentales dirigées par une
femme représentaient 19 % de l'ensemble des familles pauvres du
québec. en 1987, elles formaient 33,8 % des familles pauvres du
québec. ce qui veut dire aujourd'hui que, monoparentalité ou chef
de famille unique, ça égale tomber dans la pauvreté, se
retrouver dans des conditions matérielles, se retrouver dans des
conditions financières telles qu'on vit sous le seuil de la
pauvreté et qu'on doit consacrer entre 58 % et 75 % de ses maigres
revenus à se loger, à se vêtir, à s'alimenter et
ça, ça constitue l'essentiel. essayez de deviner les conditions
de vie qui s'apparentent à ces conditions pour une jeune famille ou pour
une famille qui devient dirigée par un seul et unique membre. le taux de
pauvreté des familles dont le chef comptait principalement sur l'aide
sociale pour subvenir à ses besoins atteignait 78 % en 1986. de 20 %
qu'il était en 1973, leur poids relatif au sein de l'ensemble des
familles pauvres du québec est passé à 43 %. (17 h 40)
Alors, c'est simplement pour illustrer, M. le Président,
qu'être jeune et parent au Québec, comme nous l'ont
confirmé les grands organismes qui conseillent le gouvernement, ce
gouvernement qui écoute très peu ces organismes, eh bien, de
l'avis de ces trois conseils, être jeune et parent au Québec,
c'est de plus en plus difficile. C'est sûr que c'est moins le cas des
gens qui sont dans cette Assemblée nationale, le cas des jeunes
familles. Dans le cas de votre humble serviteur de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue, ça fait déjà un bon
moment que les trois enfants de la famille... Vous voyez, demain, je
fêterai le 17e anniversaire de Mlle Maude. Alors, quand je suis
arrivé pour fonder une famille, eh bien, je pouvais compter, à ce
moment-là, sur une situation professionnelle, une situation de travail
qui me permettait de dire: Non seulement nous allons former un couple - qui
dure encore depuis 21 ans, M. le Président, ce qui est de plus en plus
rare, je le rappelle - mais nous avons les conditions professionnelles, les
conditions matérielles et les conditions d'emploi qui nous permettent
d'envisager de fonder une famille. Eh bien, c'est ça, la condition
essentielle qui n'est plus présente aujourd'hui. Et si, aujourd'hui, je
peux dire que je n'ai pas eu besoin, dans mon cas personnel et c'est le cas de
beaucoup de membres de cette Législature, de l'aide de l'État
pour un troisième enfant dans cette famille, eh bien, aujourd'hui, ce
que je souhaite, maintenant que la situation de l'emploi est extrêmement
difficile pour les jeunes, maintenant que la situation de la
précarité de l'emploi est de plus en plus grande chez les jeunes,
ce qu'il faut demander, c'est une véritable politique familiale, M. le
Président, qui permette aussi au député d'Abitibi-Est, qui
voudra sans doute, un jour, fonder une famille, d'avoir des conditions, d'avoir
des conditions qui permettront généralement à l'ensemble
des familles du Québec d'être dans des conditions
matérielles pour répondre aux besoins de ces enfants.
M. le Président, rapidement, deux conclusions. La politique des
bébés-bonis, ça n'a rien changé à la
proportion de l'augmentation des naissances de troisième rang au
Québec. La politique des bébés-bonis de 6000 $ pour le
troisième enfant, c'a fait juste suivre la courbe normale d'augmentation
des naissances au Québec. Tout ce que ça permet de cacher, c'est
la véritable réalité de 78 % des familles au Québec
qui ne recevront pas davantage d'aide avec le projet que nous allons adopter
dans quelques instants. Là-dessus, tout ce que je peux dire au ministre
de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, c'est: Soit, un
effort, mais un effort qui nous permet d'agrandir la couverte pour cacher la
très large majorité du problème et faire en sorte qu'on
puisse dire: Oui, nous allons aider davantage 12 % des familles du
Québec.
Moi, M. le Président, à la veille de Noël, je
voudrais que l'on pense aux autres 78 % des familles qui ont un ou deux enfants
et qu'on leur dise: Malheureusement, comme depuis de très nombreuses
années, eh bien, ça ira encore à l'an prochain. Et, comme
nous le rapportaient les journaux de ce matin, en espérant que le nombre
de familles qui devront aller quérir de la nourriture et qui devront
aller dans les refuges pour chercher de la nourriture aux fêtes sera le
plus petit possible, parce qu'elles devront attendre à plus tard pour
avoir leur tour au niveau de l'aide qu'on pourrait leur fournir, en vous
disant, M. le Président, que, pour les quelque 10 000 familles, nous
allons appuyer ce projet de loi.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M.
le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Est-ce
qu'il y a d'autres intervenants? M. le ministre, en fonction de votre droit de
réplique.
M. André Bourbeau (réplique)
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Comme j'ai eu
l'occasion de le mentionner précédemment, ce projet de loi vient
donner une assise légale à un engagement déjà
contracté par le ministre des Finances lors du discours sur le budget
d'avril dernier, engagement qui consistait à prolonger de trois à
quatre ans la période de paiement de l'allocation à la naissance
pour un enfant de troisième rang, ou de rangs suivants.
Rappelons, M. le Président, que cette allocation est
versée sous forme de paiement trimestriel de 375 $ chacun. En
prolongeant jusqu'à l'âge de quatre ans la période de
versement, nous avons porté de 4500 $ à 6000 $ le montant de
l'allocation à la naissance à l'égard du troisième
enfant et de chacun des enfants suivants. Cette disposition a pris effet depuis
le 1er mai 1990.
Une telle modification législative vient surtout accentuer un
régime déjà mis en place afin d'apporter aux familles
québécoises une aide encore plus substantielle. Au cours des
dernières années, les sommes versées aux parents en
allocations pour les aider à subvenir aux besoins de leurs enfants ont
déjà été passablement accrues. Elles ont plus que
doublé de 1987 à 1989, passant de 216 700 000 $ à 447 300
000 $, soit a près de 500 000 000 $ pour l'année
dernière.
Ces efforts ont d'ailleurs porté fruit, M. le Président,
puisqu'il y a eu, en 1989, une augmentation de 14,1 % des naissances chez les
troisièmes enfants et, pour la même année, une augmentation
moyenne de 6,2 % pour tous les nouveaux-nés. On peut parler d'un
revirement de tendance, car, au cours des 20 dernières années,
les naissances avaient accusé une baisse annuelle où elles
demeuraient stables. Les statistiques de la Régie des rentes du
Québec, pour l'année 1990, démontrent de plus que cette,
nouvelle tendance d'augmentation des naissances devrait se maintenir pour
l'année qui s'achève.
M. le Président, j'ai peine à comprendre les arguments que
nous a développés tout à l'heure le député
de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, qui nous a dit, si j'ai bien compris,
qu'il n'y avait eu aucune augmentation réelle plus importante pour les
naissances des troisièmes enfants et plus que pour les autres
naissances. M. le Président, je ne sais pas où le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue a fait ses
études en statistiques, mais, comme le disait si bien, mon
collègue, le député de Fabre: avant d'en arriver au
troisième enfant, il faut passer par le deuxième, et on ne peut
pas, M. le Président, mettre de côté les statistiques d'une
catégorie sans parler des autres.
Regardons-les, M. le Président, les statistiques, pour voir si le
député a raison. Je vous donne les statistiques de 1988 et,
après, la statistique de 1989. Prenons les enfants de premier rang. On
est passé d'une augmentation de 4,1 % à 5 %. Donc, augmentation
pour ce nombre d'enfants. Pour les enfants de deuxième rang, en 1988, on
avait eu une augmentation de 1,8 % par rapport à l'année
précédente, en 1989, 4,7 %. Augmentation importante pour les
enfants de deuxième rang. Prenons maintenant les enfants de
troisième rang. En 1988, on avait une augmentation de 3,7 % par rapport
à l'année précédente. En 1989, une augmentation de
14,1 %, M. le Président. C'est une explosion de joie, si je peux
m'exprimer ainsi, et je ne comprends pas que le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue, vienne prétendre que cette
augmentation-là de 14,1 % n'est pas plus importante que les autres.
Une voix: II a coulé son cours de statistiques.
M. Bourbeau: M. le Président, continuons. Prenons les
enfants de quatrième rang, parce que notre politique incite aussi
à faire des enfants au-delà du troisième rang, puisque les
6000 $, nous les donnons autant pour l'enfant de quatrième rang que de
troisième rang. Regardons les enfants de quatrième rang, M. le
Président. Je sais que ça vous intéresse, M. le
Président, vous êtes un père de famille aussi. Alors, pour
les enfants de quatrième rang, l'augmentation est passée de 3,8
%, en 1988, à 8,1 %, en 1989. Augmentation encore importante. M. le
Président, le championnat toutes catégories, cependant, revient
aux enfants de cinquième rang. Alors là, M. le Président,
on est passé de 14,3 % d'augmentation, en 1988, à 20,3 %, en
1989. Quel effort spectaculaire, M. le Président.
M. le Président, je vois que le député de
Mille-Îles est un de ceux qui applaudissent et je dois reconnaître
son mérite à ce sujet-là. C'est l'un de nos meilleurs
pères de famille au Québec. (17 h 50)
Finalement, M. le Président, les enfants de sixième rang
et plus, alors là, on est passé de 13,5 % à 10,5 %, un
léger fléchissement, M. le Président. Et vous conviendrez
qu'il y en a de moins en moins des enfants de sixième rang et plus, le
député de Mille-Îles, bien sûr, étant une
exception à la règle.
M. le Président, tout ça pour vous dire qu'il est faux de
mentionner que le pourcentage des enfants de troisième rang n'a à
peu près pas changé. En effet, le nombre des enfants de
troisième rang est en hausse de 1464 enfants entre 1988 et 1989, comme
je l'ai dit tantôt. Il est faux également de prétendre que
la reprise que l'on observe pourrait plutôt être attribuable au
fait que les femmes de la génération des "baby-boomers", aux
-environs de la trentaine,
choisiraient d'avoir un premier ou un deuxième enfant, comme on
l'a déjà dit. En effet, l'augmentation de la
fécondité observée entre 1988 et 1989 est présente
non seulement chez les femmes âgées de 30 ans ou plus, mais aussi
chez toutes les femmes, indépendamment de leur âge. En outre,
l'âge moyen de la mère au premier enfant a peu
évolué entre 1988 et 1989, passant de 25,85 % à 25,87 %.
On avouera, M. le Président, que c'est une modification qui n'en est pas
une.
M. le Président, il ne faut cependant pas en conclure que nos
objectifs sont atteints. C'est pourquoi nous devons prendre les dispositions
nécessaires, non seulement pour maintenir les acquis des
dernières années, mais pour chercher à atteindre un niveau
acceptable de la croissance démographique au Québec. À
cette fin, nous concentrons nos efforts là où les besoins sont
les plus sentis. À cette fin, nous concentrons nos efforts, comme je
l'ai dit, où les besoins sont les plus grands, c'est-à-dire chez
les familles les plus nombreuses. Le projet de loi 88 qui est soumis à
cette Chambre aujourd'hui représente un déboursé
additionnel de 20 000 000 $ par année pour le gouvernement du
Québec. Ce montant viendra s'ajouter aux 54 000 000 $ que les 44 000
familles de trois enfants ou plus ont touché en 1989 en allocation
à la naissance. Avec cet ajout, la somme totale qui sera versée
en allocation à la naissance l'année prochaine devrait
excéder les 125 000 000 $ dont plus de la moitié sera
destinée aux familles nombreuses. Nous croyons que ce soutien financier
accru constitue une des bonnes façons d'agir pour favoriser
l'augmentation du taux des naissances au Québec pour le
bénéfice de la société québécoise, de
nos familles et de nos enfants.
J'aimerais, en terminant, M. le Président, profiter de l'occasion
pour rappeler que l'allocation à la naissance qui a été
bonifiée à deux reprises n'est qu'une des quatre allocations dont
peuvent maintenant se prévaloir les familles québécoises.
En janvier 1989 entrait aussi en vigueur l'allocation pour jeunes enfants, pour
tout enfant de moins de six ans. Ces deux allocations sont ainsi venues
s'ajouter à l'allocation familiale de base et à l'allocation pour
enfants handicapés.
Soulignons également, M. le Président, qu'en mai 1988
notre gouvernement a aboli toute forme de récupération des
allocations familiales par l'impôt sur le revenu qu'avait imposée
l'ancien gouvernement. Le but ultime de cette aide financière croissante
aux familles et l'objectif global poursuivi, c'est d'assurer l'avenir de la
collectivité québécoise.
M. le Président, j'invite mes collègues de
l'Assemblée nationale, des deux côtés de la Chambre, y
compris le député de Rouyn-Noran-da-Témiscamingue, M. le
Président, et spécialement lui, bien sûr, puisqu'il est le
critique de l'Opposition, à témoigner leur appréciation
envers les parents qui ont accepté d'avoir des enfants en votant
à l'unanimité en faveur du projet de loi. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion du
ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la
Formation professionnelle proposant l'adoption du projet de loi 88, Loi
modifiant de nouveau la Loi sur les allocations d'aide aux familles, est
adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors, M.
le leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Merci, M. le Président. Je vous
prierais d'appeler l'article 24 de notre feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 100
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 24,
l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de
l'éducation sur le projet de loi 100, Loi modifiant le Code des
professions et diverses lois constituant une corporation professionnelle
concernant la publicité professionnelle et certains registres. M. le
ministre responsable de l'application des lois professionnelles.
M. Savoie: M. le Président, je propose l'adoption du
projet de loi 100.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je tiens à
informer M. le ministre que nous en sommes à la prise en
considération du rapport. Est-ce qu'il y a des intervenants sur la prise
en considération du rapport? Mme la députée de
Chicoutimi.
Mme Blackburn: Sur la prise en considération du rapport,
M. le Président, il n'y aura pas d'intervention. On réserve
l'intervention sur l'adoption en troisième lecture.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a
d'autres intervenants sur ce sujet? Est-ce que la motion proposant la prise en
considération du rapport de la commission de l'éducation sur le
projet de loi 100 est adoptée?
Une voix: Adopté.
Adoption
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
ministre responsable de l'application des lois professionnelles propose
l'adoption du projet de loi 100, Loi modifiant le Code des professions et
diverses lois constituant une corporation
professionnelle concernant la publicité professionnelle et
certains registres. Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à
l'article 230 du règlement? Il y a consentement. Alors, je suis
prêt à reconnaître le premier intervenant sur ce dossier.
Pas d'intervenant. Mme la ministre... Mme la députée de
Chicoutimi, je m'excuse.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Brièvement,
je pense que le projet de loi, même si nous avons accordé notre
consentement pour déroger aux règles habituelles qui ne nous
auraient pas permis d'adopter le projet de loi aujourd'hui en même temps
qu'on faisait la prise en considération du rapport de la commission
parlementaire qui a procédé à l'examen de ce projet de loi
article par article... Je pense que le projet de loi mérite quand
même un minimum de remarques que je me permets ici de faire. D'abord,
rappelons que le projet de loi fait suite à un jugement qui a
été rendu par la Cour suprême à l'effet qu'on ne
pouvait pas interdire la publicité aux professionnels. Et ce jugement
vient évidemment remettre en cause les règles qui
régissaient la publicité des professionnels au Québec.
Mais il faut en même temps se rappeler que ce projet de loi fait en
quelque sorte l'affaire d'un certain nombre de personnes au Québec.
Rappelons brièvement d'abord que le projet de loi vient modifier
la Loi sur le Code des professions et diverses lois constituant une corporation
professionnelle concernant la publicité professionnelle et certains
registres. Alors, pour ce qui est des registres, disons-le rapidement, nous
sommes tout à fait d'accord avec la disposition qui apparaît dans
ce projet de loi et elle vient tout simplement s'harmoniser avec la nouvelle
loi qui touche la Curatelle publique. Et ça nous apparaissait tout
à fait une réserve, une disposition tout à fait
souhaitable.
En ce qui a trait à la publicité des professionnels,
cependant, il était prévu par le Code des professions que tout
était interdit en matière de publicité pour les
professionnels sauf ce qui était nommément permis. Alors,
à la suite du jugement, le gouvernement a choisi, je dois dire, de se
réajuster en fonction de ce jugement. Je dis qu'il aurait pu
également choisir, plutôt que de modifier la loi, d'introduire la
clause "nonobstant". Il ne l'a pas choisi. Il a choisi de modifier la loi sur
la publicité professionnelle de manière à ce que tout soit
permis, sauf ce qui est exclu. Évidemment, ça n'a pas tout
à fait la même portée, mais ça n'a pas non plus la
même protection.
On se rappellera qu'en 1986 le gouvernement recevait ce qu'on appelle le
rapport Scowen sur la déréglementation qui touchait tout ce volet
de la déréglementation de la publicité professionnelle. Et
à l'époque, le rapport Scowen, du nom d'ailleurs d'un de vos
ex-collègues, M. le Président, député de
Notre-Dame-de-Grâce, proposait la réglementation de la
publicité des professionnels. Le ministre responsable des corporations
professionnelles d'alors et député d'Argenteuil s'objectait
à la déréglementation, disait-il, sauvage de la
publicité des professionnels parce qu'il ne souhaitait pas que nous
retrouvions au Québec dans la même situation qu'on connaît
aux États-Unis où l'absence de déréglementation sur
la' publicité professionnelle donne lieu à des publicités
professionnelles tapageuses, criardes, pas toujours véridiques et,
évidemment, à une espèce de surenchère où
tout est à peu près permis. (18 heures)
Tout le caractère professionnel dans ce type de rapports entre le
public et les cabinets professionnels que nous avions réussi à
protéger au Québec, nous ne souhaitions pas, le ministre d'alors
ne souhaitait pas que ce soit altéré, nous non plus. Le jugement
a été rendu, la loi est modifiée dans le sens où je
vous l'ai dit. Je pense qu'on conserve un certain nombre d'inquiétudes.
La première c'est que, compte tenu que dans le projet de loi il n'y a
pas de dispositions utilisant la clause dérogatoire ou "nonobstant", il
se pourrait qu'il y ait une contestation parce que le projet de loi, faut-il le
dire, encadre la publicité. Quelqu'un pourra venir contester le droit
d'encadrer la publicité. Ça, je pense que c'est une
première remarque. la seconde, c'est quel genre de publicité
ça va nous donner au québec? à quoi faut-il s'attendre? le
projet de loi ne pouvait pas tout nous dire, alors le ministre a
accepté, à la proposition de l'opposition, de tenir des audiences
publiques sur invitation, audiences qui devraient se tenir en mars prochain et
qui nous permettront, à cette occasion, de recevoir un certain nombre
d'organismes professionnels, mais aussi de consommateurs, m. le
président, pour venir nous dire quel est l'intérêt de la
publicité, quel sens ça devrait prendre, comment on devrait
éviter de tomber dans certains abus. à la lumière de cette
consultation, nous pourrons vraisemblablement, avec le ministre, dans le but de
mieux servir la population, envisager l'adoption d'un projet de loi qui puisse
préserver ce que j'appelle le caractère distinct du
québec. je vous remercie, m. le président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Chicoutimi. Droit de réplique, M. le
ministre.
M. Raymond Savoie (réplique)
M. Savoie: Très rapidement, M. le Président. Je
vais prendre quelques minutes seulement pour dire qu'effectivement nous avons
débattu les questions qu'a soulevées la députée.
Hier soir, en commission parlementaire, en examinant... Il y
avait une question d'urgence, compte tenu du jugement qui, finalement,
mettait fin à une certaine pratique en ce qui concerne les cas de
déontologie au niveau de la publicité, l'application au niveau de
la publicité plutôt, de façon que, finalement, nous sommes
intervenus. Justement, dans un contexte où nous devons empêcher
des abus à la pratique que nous acceptons actuellement, la pratique
courante au niveau de la publicité par les professionnels, nous avons
convenu ensemble, toutefois, M. le Président, d'entreprendre des
démarches. Des démarches, justement dans le but, d'abord, de
connaître l'opinion des consommateurs vis-à-vis de la
publicité professionnelle. Tout cela va déboucher, à court
terme, j'imagine, M. le Président, d'ici 12, 13 mois, sur une approche
beaucoup plus globale au niveau de la publicité professionnelle au
Québec. Dans ce sens-là, ce que nous faisons actuellement,
évidemment, on vise le court terme, on vise, évidemment, de
contrer les effets de l'arrêt Rocket.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre.
Est-ce que la motion proposée par le ministre responsable de
l'application des lois professionnelles, proposant l'adoption du projet de loi
100, Loi modifiant le Code des professions et diverses lois constituant une
corporation professionnelle concernant la publicité professionnelle et
certains registres, est-ce que cette motion d'adoption est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: L'article 23, M. le Président.
Projet de loi 99
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 23,
l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de
l'éducation sur le projet de loi 99, Loi modifiant la Loi sur la
pharmacie. Est-ce qu'il y a des intervenants? M. le ministre.
M. Savoie: Tout simplement pour dire, M. le Président, que
nous en avons discuté hier soir et comme je suis bien au courant que
nous sommes à l'étude, à la prise en considération
plutôt, du projet de loi, là comme pour l'autre, M. le
Président, je propose le plus rapidement possible son adoption.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion
proposant la prise en considération du rapport de la commission de
l'éducation sur le projet de loi 99, Loi modifiant... Oups! Je m'excuse.
Mme la députée, je m'excuse, je ne vous avais pas vue. Mme la
députée de Ter-rebonne.
Mme Jocelyne Caron
Mme Caron: Oui, M. le Président. Pour la loi 99, nous
avons clairement identifié que nous restions aujourd'hui à la
prise en considération du rapport et je voudrais intervenir sur cette
prise en considération du rapport. Merci, M. le Président. On
sait que ce projet de loi, qui ne compte que 11 articles, vient introduire un
nouveau pouvoir, un pouvoir de réglementation qui va permettre à
l'Office des professions du Québec d'établir, après
consultation, des catégories de médicaments et de
déterminer pour chacune, s'il y a lieu, et par qui, et suivant quelles
conditions et modalités de tels médicaments peuvent être
vendus.
Du côté de l'Opposition, il y avait beaucoup
d'inquiétude, beaucoup d'interrogations auxquelles, malheureusement, le
ministre responsable du Code des professions n'a pas donné de
réponse. On sait que les médicaments touchent un secteur
extrêmement important dans la vie des citoyens du Québec, puisque
les Québécois achètent annuellement pour 1 500 000 000 $
de médicaments sous ordonnance et en vente libre et que, l'an dernier
seulement, les pharmaciens ont livré plus de 66 000 000 d'ordonnances,
en excluant même les médicaments en vente libre. Donc,
c'était important de se poser certaines questions. On sait que ce
pouvoir appartenait autrefois au Bureau des pharmaciens et que c'est à
la demande de ce Bureau que nous retrouvons ce projet de loi. Sauf que la
question de l'Opposition était bien simple: Pourquoi confier ce pouvoir
à l'Office des professions du Québec? Et là, on n'a
vraiment eu aucune réponse. Même le ministre se posait des
interrogations à ce sujet-là.
Au moment où le ministre de la Santé et des Services
sociaux déposait une réforme de la santé, au moment
où, par cette réforme, il voulait définir les fonctions et
les responsabilités clairement, au moment où il voulait revoir
l'organisation de la santé publique, l'Opposition se demandait s'il n'y
aurait pas eu lieu de regarder qui pouvait le mieux prendre ce nouveau pouvoir,
plutôt que l'Office des professions.
Là-dessus, M. le Président, je pense que je vais vous lire
quelques réponses du ministre en commission qui vont vous
démontrer clairement qu'il partageait les inquiétudes de
l'Opposition. Alors, en commission parlementaire, le ministre nous a dit: "Vous
avez raison parce que c'est inquiétant, effectivement." Lorsqu'on lui a
demandé: Pourquoi donner ces pouvoirs à l'Office? il nous a
répondu: "Moi, aussi. Ça sonne faux, finalement, de transmettre
ces pouvoirs-là à l'Office." Je continue, M. le Président.
Il nous a répété une deuxième fois: "Ça
sonne faux, finalement, de transmettre ces pouvoirs-là à
l'Office des professions." Au moment où on lui demandait une
explication, à nouveau, sur le lieu de l'activité, il nous a dit:
"Bien oui, c'est ça. Ça cloche un peu, effectivement. On comprend
que ça cloche un peu, mais... Vous avez absolument raison. Sauf
qu'effectivement, comme je l'ai mentionné, on ne peut pas faire mieux."
Donc, on nous proposait une solution parce qu'on n'en avait pas d'autres, M. le
Président. Et lorsqu'on interrogeait le ministre sur l'urgence d'adopter
ce projet de loi, il nous disait: "Mais ça faisait longtemps qu'il
était préparé, mais je traînais sur ce
dossier-là. Alors, parce que moi aussi - et c'est là que c'est
important - j'avais de la difficulté avec ce projet de loi, dans ce sens
que ce soit l'Office des professions... un peu les questions que vous posez. Je
pense que c'est un peu normal, comme législateur, qu'on se pose ce genre
de questions là." Donc, M. le Président, je ne pense pas que le
ministre était très convaincu que le pouvoir devait être
donné à l'Office des professions du Québec. En tout cas,
il n'a vraiment pas réussi à se convaincre, ni à nous
convaincre.
Le deuxième point important, dans ce projet de loi là,
c'est le retrait de la notion de poison. Là aussi, il y avait quelques
interrogations du côté de l'Opposition parce que ce dont on
voulait s'assurer, c'est que l'intérêt du public était
vraiment protégé, bien sûr. Vous comprendrez qu'à
titre de porte-parole de l'Opposition officielle en matière de
protection du consommateur je m'inquiétais particulièrement de
cet aspect-là. On fait disparaître, dans le projet de loi 99,
toute la notion de poison. On l'enlève à tous les articles qui
existaient dans la loi précédente et on abroge également
l'article 22 qui, lui, déterminait le contrôle des poisons.
Suite aux interrogations de l'Opposition, tout ce qu'on a pu comprendre,
c'est que les pharmaciens avaient été dans l'incapacité
d'administrer ce concept-là, qu'ils n'avaient pas réussi à
établir une liste, qu'ils étaient incapables de l'établir.
Et donc, devant cette incapacité-là, on avait
décidé, tout simplement, d'abroger l'article, plutôt que de
confier ce mandat-là à quelqu'un d'autre qui aurait pu
établir cette liste-là et s'assurer que le consommateur serait
protégé. Et là-dessus, M. le Président, je vais
vous donner une brève réponse du ministre responsable de
l'application des lois professionnelles sur le sujet des poisons. Il nous dit,
tout simplement, que, si on a fait le retrait de cet article-là, "c'est
que l'Ordre devait établir une liste, il ne l'a jamais fait sa liste,
ça fait qu'on la fait sauter, la liste." (18 h 10)
M. le Président, lorsqu'un ministre nous présente un
projet de loi et qu'il n'arrive pas à nous donner d'arguments valables,
à nous présenter les raisons, les objectifs réels d'un
projet de loi, c'est tout simplement parce qu'on n'arrive pas à
l'établir, parce qu'on est incapable d'ac- complir le travail. Vous
comprendrez, M. le Président, que l'Opposition a de sérieuses
restrictions. Donc, considérant que le ministre n'a pas su nous
convaincre ni même se convaincre de la pertinence d'octroyer à
l'Office des professions cette responsabilité additionnelle plutôt
qu'à un autre organisme; considérant qu'il a été
incapable d'aplanir nos inquiétudes quant à toute la question des
poisons ni de nous assurer que l'intérêt du public serait
protégé, il ne nous a laissé d'autre choix, M. le
Président, que de nous opposer à ce projet de loi 99 qui a
été voté à la vapeur. Merci. M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? M. le ministre
responsable de l'application des lois professionnelles.
M. Raymond Savoie
M. Savoie: Oui, M. le Président. Tout simplement quelques
commentaires. Effectivement, je ne peux pas laisser passer sous silence la
représentation qui a été faite au niveau de la Loi sur la
pharmacie et la commission parlementaire qui a eu lieu hier soir, M. le
Président, où nous avons abordé la discussion de ce projet
de loi très tard dans la soirée.
M. le Président, il faut bien comprendre que ce qui a
soulevé le plus d'intérêt de la part de l'Opposition, c'est
effectivement le fait que l'Opposition puisse prendre en charge cette
préparation d'une liste de produits qui seraient soumis à des
contrôles, des produits pharmaceutiques, évidemment, qui seraient
soumis à des contrôles par le gouvernement. Évidemment,
comme vous le savez ou comme vous avez pu le constater, M. le Président,
à partir de l'explication qui a été fournie par la
députée de Ter-rebonne, c'a été, évidemment,
transféré à l'Office des professions. Et,
évidemment, il faut reconnaître - et je le répète
encore - que ça puisse sonner faux, que ça puisse paraître
curieux, que ça puisse paraître même un peu extraordinaire,
le fait que ce soit l'Office des professions qui soit chargé de
l'interprétation et de l'orientation au niveau de ces produits
pharmaceutiques. Sauf, M. le Président, qu'il faut bien se rappeler que,
par exemple, lorsqu'on parle de la Loi sur les podiatres, il y a des
médicaments qui sont utilisés, ça tombe sous la direction
de l'Office des professions. Lorsqu'on parle, par exemple, de médecine
vétérinaire, l'ensemble des médicaments est sous le
contrôle de l'Office des professions, parce que ça permet à
l'Office des professions de former un comité, puisqu'on parle d'une
interdisciplinarité, d'une multidisciplinarité, et ça
permet effectivement à plusieurs intervenants dans le dossier de
s'asseoir autour d'une table sous la direction de l'Office. C'est dans ce
sens-là que c'est sous le contrôle de l'Office.
J'ai cherché une secousse, j'ai cherché pendant un certain
temps une alternative à cette situation pour voir si, effectivement, il
était toujours dans l'intérêt de la société
québécoise que ce soit effectivement à l'Office des
professions de prendre le contrôle d'un tel dossier. Et, effectivement,
M. le Président, j'en suis arrivé à la conclusion que
c'était le meilleur choix possible dans les circonstances pour permettre
à l'Office des professions de continuer à jouer son rôle
particulièrement dans le contexte de ce projet de loi là. Donc,
je comprends un peu l'étonnement de l'Opposition, l'étonnement
vis-à-vis du fait que l'Office des professions soit nommé dans le
contexte de la Loi modifiant la Loi sur la pharmacie. Toutefois, je peux vous
dire que ça a été un choix éclairé et que,
finalement, après plusieurs études des articles ensemble,
plusieurs séances de travail, nous sommes arrivés à la
conclusion qu'effectivement il y avait là un intérêt pour
l'ensemble de la société québécoise, un
intérêt pour l'ensemble des milieux impliqués au niveau des
produits pharmaceutiques et qu'on doit prendre cette orientation. Les
consultations ont été très claires, que ce soit
auprès de l'Association des consommateurs ou d'autres groupes. Oui, ils
étaient prêts et voyaient même d'un bon oeil le cap sur
l'utilisation de l'Office des professions.
Donc, malgré une apparence de contradiction, malgré cette
présentation que nous avons, l'Office des professions a joué un
rôle depuis 17 ans au niveau des médicaments sur le territoire du
Québec et continue à jouer un rôle particulièrement
actif dans ce secteur. Là, avec cette modification que nous allons
adopter, je pense qu'il va continuer à jouer un rôle grandissant.
Dans ce sens, je propose que le rapport soit accepté, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion
proposant la prise en considération du rapport de la commission de
l'éducation sur le projet de loi 99, Loi modifiant la Loi sur la
pharmacie, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, ce rapport est
adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Oui, M. le Président. Je vous
demanderais d'appeler l'article 22 de notre feuilleton.
Projet de loi 98
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 22,
l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de
l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation sur le projet de loi
98, Loi modifiant la Loi sur les producteurs agricoles. Est-ce qu'il y a des
députés qui veulent intervenir? M. le ministre de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais
mentionner que c'est avec plaisir que nous en arrivons à cette
étape-ci de l'étude de notre projet de loi 98 concernant les
producteurs agricoles.
Je voudrais, bien sûr, remercier mes collègues de la
commission ainsi que mon collègue le critique de l'Opposition pour les
discussions fort constructives que nous avons eues ensemble dans le but
d'améliorer la qualité du syndicalisme agricole au Québec,
non pas que ce n'est déjà pas une qualité, car
effectivement je pense qu'il y a là une démocratie hors de
l'ordinaire avec des modèles vraiment particuliers.
On voulait faire en sorte que l'ajout depuis quelques années de
nombreuses femmes au niveau de la production agricole et des partenaires
d'entreprises... faire en sorte aussi que les jeunes, la relève agricole
qui arrive de plus en plus, soit sous forme de société, soit sous
forme... de quelque forme que ce soit, au point de vue association, fasse en
sorte que ces gens-là puissent être représentés au
niveau du syndicalisme agricole. Donc, nous avons modernisé certains de
ces éléments-là. Nous avons aussi eu à modifier le
projet de loi et à fournir à l'organisme qui s'appelle l'UPA, au
niveau provincial, la possibilité en modernisant cette loi de faire en
sorte que, à toutes fins utiles, ils puissent adopter dans les meilleurs
délais de nouveaux règlements pour permettre justement que les
jeunes ou les femmes qui sont de plus en plus présents en agriculture
puissent avoir des droits de vote, des droits de participation et des droits de
discussion à l'intérieur de tout ce qu'on appelle le syndicalisme
agricole. Donc, ce sont des modifications fort importantes. Je vous livre
uniquement les quelques principales améliorations.
Avant de terminer, j'ajoute que, sur la suggestion de mon
collègue le député d'Ar-thabaska qui aurait
souhaité que cette loi porte un titre différent,
c'est-à-dire qu'on dise Loi modifiant la Loi sur les producteurs, et
productrices agricoles du Québec, j'avais pris l'engagement de faire des
démarches auprès du Comité de législation et de
certaines autres instances au niveau gouvernemental pour savoir si
c'était possible de le faire à ce moment-ci.
Je dois malheureusement lui dire que ce n'est pas possible parce qu'il
aurait fallu repasser au Comité de législation, amender quelques
lois et faire en sorte que ce travail-là ne soit
pas fini, finalement, pour la fin de la présente session. Compte
tenu de l'urgence de la situation, j'ai dû, pour l'instant, mettre de
côté cette suggestion fort intéressante, à laquelle
je concourais d'ailleurs, du député d'Arthabaska. Mais je lui dis
tout simplement ceci: J'aurai, au mois de février, une discussion avec
le Comité de législation face à ça. Je regarderai
l'ampleur des modifications qui seront faites et possiblement que, comme ce
seront des modifications d'ordre mineur qui ne viendront pas affecter
l'ensemble de nos projets de loi, si tel est le cas, je demanderai à mon
collègue d'Arthabaska la possibilité d'arriver avec un nouveau
projet de loi qui viendrait amender à chacune des places.
Donc, ça sera sûrement des projets de loi qui parleront de
concordance et, si c'est facile à faire, nous pourrons peut-être
nous entendre pour que, au cours de la session du printemps, on puisse corriger
à la fois le titre et apporter justement la correction nécessaire
dans le but de donner pleinement la signification de ce qu'on veut apporter de
part et d'autre, à l'effet que, compte tenu qu'on parie de producteurs
et de plus en plus de productrices agricoles, on puisse faire cette
concordance-là. Donc, je vais, bien sûr, demander au
député d'Arthabaska la possibilité de patienter encore
quelques mois, mais je pense qu'il y a une volonté ferme de pouvoir
corriger cette situation-là, et je le remercie de m'en avoir fait la
suggestion. (18 h 20)
Je pense qu'il a constaté que nous étions sur la
même longueur d'onde à ce niveau-là et j'espère bien
convaincre les gens de la législation qu'il n'y a pas de correctifs
à apporter qui seraient vraiment d'une ampleur telle que ça
mobiliserait le Parlement pour deux, trois ou quatre jours de commission
parlementaire sans problème. Alors, on va essayer de le faire dans les
meilleurs délais et, encore une fois, merci, M. le Président,
à tous les membres de la commission, tant mes collègues de la
commission de l'agriculture au niveau du Parti libéral,
c'est-à-dire du gouvernement du Québec forcément, qui
m'ont donné un fier coup de main, à mon adjoint parlementaire, au
député de Berthier qui y a concouru, de même qu'à
l'Opposition et à ceux qui nous ont aidé à faire en sorte
que ce projet de loi soit adopté dans les meilleurs délais pour
permettre à l'organisation syndicale agricole au Québec de
continuer cet élan démocratique qu'elle a depuis
déjà fort longtemps et de moderniser ses règles et
coutumes pour permettre aux hommes, aux jeunes et aux femmes qui sont en
production agricole d'avoir le droit au chapitre maintenant dans leur
démocratie. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, sur le même
sujet, M. le député d'Arthabaska. La parole est à
vous.
M. Jacques Baril
M. Baril: Oui, M. le Président. Il me fait plaisir
de prendre la parole sur l'adoption du rapport, je crois. Je ne sais pas si le
ministre... Est-ce que le ministre a parlé sur les deux ou s'il va
revenir parler sur la loi comme telle? De toute façon, je vais parler
sur l'adoption.
J'apprécie la recherche que le ministre a faite pour essayer de
modifier ou d'amender le projet de loi, pour qu'il soit réellement
représentatif de la société agricole d'aujourd'hui. Le
ministre ne me surprend pas du tout que le Comité de législation
ait dit: Ce serait trop compliqué pour le moment et il faudrait
regarder, ça va chambarder plusieurs lois. Je le remercie et je le
félicite de son effort. Je ne doute nullement de sa volonté de
vouloir corriger la situation qui a été trop longtemps maintenue
dans le passé, comme de quoi on fait une loi sur les producteurs et
productrices agricoles... Et le titre, il ne parie juste que des producteurs
agricoles. Donc, il me semble que c'était le moment opportun pour
reconnaître réellement le travail efficace, l'implication de
toutes les femmes au niveau agricole, au niveau alimentaire et au niveau
syndical. et, quand on nous dit qu'il faut évaluer tous les impacts sur
d'autres lois et les modifier, est-ce qu'il va y en avoir plusieurs à
modifier? il me semble que ce beau parlement est rempli d'avocats qui sont
là pour faire des lois, justement, et il me semble que ça aurait
été facile de trouver un moyen rapide pour confirmer, dans le
titre de cette loi-là, l'implication de ces personnes qui ont
participé à amener l'agriculture à un niveau où on
la retrouve aujourd'hui. et, souvent, on voit ça, c'est-à-dire on
discute d'une loi, on vote une loi et on amende des lois qui ont
été votées il y a deux, trois ans, pour les rendre
conformes à celle qu'on a aujourd'hui.
Il me semble que, dans le futur - j'avais fait la proposition, la
suggestion au ministre -lorsqu'on aurait retouché les lois agricoles,
ça n'aurait pas changé grand-chose de dire: On va la rendre
conforme à la loi, justement, sur les producteurs et les productrices
agricoles, et ça n'aurait empêché personne de manger. Mais
ça aurait satisfait, il me semble, toute l'implication et la
reconnaissance que l'ensemble des femmes en agriculture accorde depuis de
nombreuses années.
Mais je souhaite, et je vais dire au ministre que je vais le surveiller,
je vais le suivre à la trace, que, le printemps prochain, on puisse d'un
commun accord être capable d'amender cette loi. Quand même ce
serait encore une loi avec juste un article, il me fera plaisir d'y concourir
pour en modifier le titre afin qu'il soit réellement
représentatif de la société agricole d'aujourd'hui.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député d'Arthabaska. Alors, est-ce que la
motion proposant l'adoption du rapport de la commission de
l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation sur le projet de loi
98, Loi modifiant la Loi sur les producteurs agricoles, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Adoption
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose
l'adoption du projet de loi 98, Loi modifiant la Loi sur les producteurs
agricoles. Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article
230 du règlement pour étudier cette motion d'adoption du projet
de loi 98? Consentement?
Une voix: Consentement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre de
l'Agriculture.
M. Picotte: Consentement, M. le Président. Les mêmes
remarques que j'ai faites s'appliquent, évidemment, à la
troisième lecture. Je veux tout simplement ajouter ceci: merci encore
à nos collègues de l'Assemblée pour l'ouverture d'esprit
et la diligence avec laquelle ils l'ont fait pour adopter ce projet de loi si
important pour l'Union des producteurs agricoles au Québec.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député d'Arthabaska...
M. Baril: Oui, M. le Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...sur le projet de loi
98.
M. Baril: ...très rapidement. Cette loi viendra mettre fin
à un débat qui persiste depuis quelques années à
chaque congres de l'Union des producteurs agricoles sur la cotisation que des
fermes de groupes ont à payer, soit sur un statut de compagnies ou sur
le statut de sociétés agricoles. On sait que les compagnies
avaient une cotisation à payer tandis que les sociétés
avaient une cotisation par sociétaire à payer. Et l'Union des
producteurs agricoles avait fait des comités pour savoir comment
régler ce problème-là et cette loi permettra à
l'Union des producteurs agricoles de définir, de déterminer
elle-même, par règlement, quel nombre de cotisations un corps
corporatif aura à payer ou une compagnie.
Aussi, ce projet de loi donnera un pouvoir à l'Union des
producteurs agricoles de fixer un taux d'intérêt sur des
cotisations non payées. On sait qu'il y a un certain, un très
petit pourcentage de producteurs qui, pour toutes sortes de raisons, ne veulent
pas payer leur cotisation obligatoire et ça traîne, ça
traîne et l'Union des producteurs agricoles est obligée d'aller
devant les tribunaux pour se donner justice et il n'y a aucun taux
d'intérêt de fixé pour le retard sur la cotisation, les
cotisations non payées. Aussi, ce projet de loi pourra également
réglementer le nombre de procurations par exploitant qu'ils pourront
obtenir pour aller à leur assemblée générale. J'ai
toujours trouvé ça un petit peu bizarre, M. le Président,
que des fois, dans certaines organisations, dans certains organismes, ils
peuvent partir et faire un rang et ramasser toutes les procurations du rang au
complet. Un part et il met ça dans sa poche et il s'en va à
l'assemblée générale et il vote au nom de 25 ou 30, etc.
Je trouve ça un petit peu pas trop démocratique et ce projet de
loi viendra corriger ça.
Je vais m'arrêter là-dessus. Nous sommes pour ce projet de
loi. Je pense qu'il va améliorer le fonctionnement du syndicalisme
agricole au Québec et c'est pour cette raison que nous concourrons
à son adoption.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député d'Arthabaska. Est-ce que la motion du ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation proposant l'adoption du
projet de loi 98, Loi modifiant la Loi sur les producteurs agricoles, est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Bélisle: Oui, je vous prierais d'appeler l'article 28
de notre feuilleton, M. le Président. Peut-être qu'on va
excéder de quelques minutes si-
Projet de loi 104
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a
consentement, M. le leader adjoint? Consentement pour dépasser un peu le
temps réglementaire pour permettre l'étude de l'article 28.
À l'article 28, l'Assemblée prend en considération le
rapport de la commission de l'agriculture, des pêcheries et de
l'alimentation sur le projet de loi 104, Loi modifiant la Loi sur les produits
agricoles, les produits marins et les aliments. M. le ministre de
l'Agriculture.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Merci. Je vais profiter de la circonstance pour
parler uniquement, une seule fois, sur la prise en considération et la
troisième lecture. M. le Président, ce que nous avons fait
finalement ensemble, qui a été bonifié par
l'Opposition et qui a été bonifié par les membres
de la commission, nous avons fait en sorte que la qualité de
l'alimentation au Québec soit encore quelque chose de primé et
d'amélioré. Alors, nous améliorons avec ce projet de loi
la qualité de nos aliments, la qualité de l'alimentation pour
faire en sorte que nos gens qui produisent des aliments soient de plus en plus
concurrentiels et offrent une meilleure qualité pour aller sur les
marchés extérieurs et vendre nos produits à
l'extérieur, ce qui est important. Nous avons fait en sorte aussi que,
pour des fins promotionnelles, on puisse assurer que des gens qui
dégustent dans des supermarchés de l'alimentation soient bien
protégés. Nous avons fait en sorte de permettre à des
oeuvres de charité d'obtenir des produits permettant de nourrir des gens
qui sont dans le besoin, donc, accepter que des vivres soient acheminés
vers Moisson Mauricie, par exemple, Les Artisans de la paix, La Table des amis,
enfin, des gens qui reçoivent des itinérants, donc, qu'on puisse
leur permettre de le faire en toute sécurité du côté
de la qualité des aliments.
Et nous avons aussi, en terminant, donné la possibilité au
ministre d'exempter certaines personnes de certains permis. Par exemple, M. le
Président, un agriculteur qui décide, au courant de la saison
estivale, de donner à son jeune la possibilité de vendre le long
des routes dans un kiosque des fruits et des légumes pour l'aider
à défrayer ses études, qu'on n'aille pas embêter ces
gens-là avec des permis possibles. Donc, le ministre a ce pouvoir
d'exemption là.
Finalement, M. le Président, c'est tout ça qu'on a fait.
Ça améliore la qualité des produits au Québec et
à l'extérieur du Québec quand on voudra les vendre. Et
c'est une façon de dire merci, bien sûr, en terminant, à
tous ceux et celles qui ont concouru à la bonification de ce projet de
loi là. Et je pense que ce sera bénéfique pour l'avenir de
l'alimentation au Québec. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur cette même
motion, M. le député d'Arthabaska.
M. Jacques Baril
M. Baril: Oui, M. le Président. Comme le ministre l'a dit
en commission parlementaire, ce dernier m'a rassuré sur certains points
qui, pour moi, étaient une préoccupation constante. Quand on
lisait le projet de loi sans explication - et on l'a éclairci en cours
de route aussi - ma préoccupation était de voir arriver à
toute heure du jour, pour ne pas dire de la nuit, un inspecteur avec sa licence
du gouvernement face à un pauvre monsieur, à une pauvre madame
qui vend des pommes, des fraises ou je ne sais trop quoi, du maïs sur le
bord du chemin, et en disant: Là, ta tablette, il lui manque six pouces
et elle est trop approchée du chemin; puis 50 affaires de même. On
sait comment souvent certains inspecteurs peuvent, je vais dire harceler, entre
parenthèses, de simples citoyens qui veulent gagner honorablement leur
vie. (18 h 30)
Aussi - le ministre et moi, je pense que, là-dessus, on
était sur la même longueur d'onde - il y a une affaire, une
situation que je déplore depuis un certain nombre d'années, c'est
au sujet de toutes les carcasses de gibier, surtout du chevreuil ou des
orignaux, qui sont saisies à cause du braconnage ou pour toute autre
raison. Aujourd'hui, les agents de conservation n'ont plus le droit de livrer
ou de donner cette quantité de viande à différentes
organisations, que ce soit à des restaurants populaires, à des
communautés religieuses ou je ne sais trop à qui. Question de
sécurité, d'inspection, etc., on gaspille une quantité de
viande quand on sait qu'il y a du monde, je ne dirai pas qui crève de
faim, mais, en tout cas, qui pourrait manger, déguster cette
quantité de viande, utiliser cette viande-là à bon
escient. Sur ce, le ministre, après explication, m'a dit que dans la
loi, justement, il s'est donné un pouvoir d'exempter de l'application de
la loi certaines parties ou certaines sections de vérification ou
d'inspection et ça couvrait, entre autres, cet item-là.
Aussi, le ministre, par le biais de cette loi-là, donne les
pouvoirs ou se donne les pouvoirs de pouvoir fixer des frais pour l'analyse et
le classement des produits. On avait ajouté aussi l'inspection.
Ça, ça me tracassait parce que, vous savez, aujourd'hui,
l'inspection c'est très vaste, c'est très large, c'est
très étendu. Je suis méfiant de nature, donc je me
méfiais de voir, demain matin, le gouvernement fixer des tarifs pour
l'inspection en général d'à peu près tout ce qui
touche au secteur alimentaire. Donc, le ministre a convenu d'enlever au moins
le mot "inspection" et, après sa précision, il nous a aussi
signalé que ces frais qui seront fixés, ce sera juste pour les
heures supplémentaires ou en dehors des heures régulières
de la fonction publique.
Donc, encore dans ce projet de loi, le projet de loi 104, il me fait
plaisir de concourir à son adoption pour avoir une qualité
d'aliments encore meilleure au Québec, qu'on puisse répondre
à des besoins toujours plus exigeants du consommateur et pour mieux
répondre aussi au niveau du marché international puisqu'on veut
davantage exporter, on veut davantage se conformer à des normes
nationales.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le
député d'Arthabaska. Est-ce que la motion proposant la prise en
considération du rapport de la commission de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation sur le projet de loi 104, Loi modifiant la
Loi sur les produits agricoles, les produits marins et les aliments, est
adoptée?
Une voix: Adopté.
Adoption
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose
l'adoption du projet de loi 104, Loi modifiant la Loi sur les produits
agricoles, les produits marins et les aliments. Est-ce qu'il y a consentement
pour déroger à l'article 230 du règlement?
M. Bélisle: Consentement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): II y a consentement?
Est-ce que la motion du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation proposant l'adoption du projet de loi 104 est
adoptée?
M. Baril: Adopté. M. Picotte: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: L'article 29, M. le Président, s'il
vous plaît.
Projet de loi 105
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 29,
l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de
l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation sur le projet de loi
105, Loi modifiant la Loi sur la Société québécoise
d'initiatives agro-alimentaires. M. le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: M. le Président, brièvement, parce
qu'on a convenu, tout le monde, en commission, que ce projet de loi là
ne changera pas le monde, bien sûr. Il vient tout simplement moderniser
la gestion de SOQUIA en donnant le titre de président au directeur
général - donc, ça deviendrait un P.-D.G. - pour qu'il
soit capable... Étant donné qu'il n'y a plus de
président... Il y a un président du conseil d'administration qui
était permanent et, maintenant, il ne l'est plus. Alors, le directeur
général devient P.-D.G. Donc, pour une meilleure modernisation de
la gestion de l'entreprise, et faire en sorte que les gens qui sont sur le
conseil d'administration, qui avaient des mandats de 10 ans, aient maintenant
des mandats de 5 ans, pour une meilleure gestion. Comme vous voyez, c'est tout
simplement moderniser la gestion de SOQUIA et ce n'est pas plus malin que
ça. Et j'espère, évidemment, qu'on aura l'occasion, dans
le futur, d'amener un projet de loi sur SOQUIA qui va permettre de faire
davantage. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je rappelle aux
membres de cette Assemblée que nous en sommes à la prise en
considération du rapport. M. le député d'Arthabaska, sur
cette prise en considération.
M. Jacques Baril
M. Baril: Oui, M. le Président, très
brièvement, moi aussi. C'est vrai que ce n'est pas un drame de voter
pour ce projet de loi parce que je pense qu'il a trois articles et le dernier,
évidemment, c'est la date où il va entrer en vigueur et le
premier détermine le titre. Comme le ministre l'a expliqué, de
toute façon, SOQUIA, c'est un instrument de développement
économique important pour le secteur agro-alimentaire. SOQUIA est
là pour assurer et renforcer la présence d'entreprises
québécoises dans le secteur agro-alimentaire au Québec et
SOQUIA est devenue un levier important pour le Québec. Et, en même
temps, SOQUIA... La loi aurait dû être adoptée avant la Loi
sur la Caisse de dépôt et placement du Québec et le
gouvernement aurait dû utiliser l'exemple de SOQUIA pour voter la Loi sur
la Caisse de dépôt et placement du Québec puisque celle-ci,
avec SOQUIA... Il y avait deux têtes avant. Il y avait un
président général qui était payé à
plein temps et il avait son bureau à côté du directeur
général qui lui aussi, évidemment, était
payé à plein temps. Donc, on a fusionné les deux postes
tandis que dans l'autre loi, la Loi sur la Caisse de dépôt et
placement du Québec, on a créé un autre poste. Et dans
SOQUIA, on dit qu'on enlève un poste pour qu'elle soit plus efficace. Et
je ne cloute pas qu'elle va être plus efficace, parce que deux patrons
dans la même boîte, ça ne doit pas être facile de
s'entendre et de s'en aller tous les deux dans la même direction. Donc,
encore une fois, si le secteur agro-alimentaire pouvait servir d'exemple
à d'autres secteurs, je souhaite ardemment qu'on revienne sur la
décision de créer deux administrations à la Caisse de
dépôt et placement, M. le Président. Et c'est pour
ça que je vais voter pour cette loi, pour enlever un poste qui, nous
dit-on, est inutile.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député d'Arthabaska. Alors, est-ce que la motion proposant la
prise en considération du rapport de la commission de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation sur le projet de loi 105, Loi modifiant la
Loi sur la Société québécoise d'initiatives
agro-alimentaires, est adoptée?
M. Bélisle: Adopté.
M. Baril: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors,
suite au consentement que nous avions eu pour poursuivre ces travaux, je
suspends les travaux de cette Assemblée jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 38) (Reprise à 20 h
6)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mmes et MM. les
députés, si vous voulez vous asseoir.
M. le leader du gouvernement, voulez-vous m'indiquer avec quel article
du feuilleton nous reprenons nos travaux, s'il vous plaît?
M. Pagé: M. le Président, je vous invite à
appeler l'article 27 du feuilleton.
Projet de loi 103
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 27 de
notre feuilleton, on nous propose de prendre en considération le rapport
de la commission du budget et de l'administration sur le projet de loi 103, Loi
modifiant la Loi sur le ministère des Approvisionnements et Services. Je
suis prêt, M. le leader du gouvernement, à entendre le premier
intervenant.
M. Pagé: M. le Président, il y a une entente comme
quoi le rapport sera adopté sans aucun débat.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion
d'adoption du rapport du projet de loi 103, Loi modifiant la Loi sur le
ministère des Approvisionnements et Services, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, je vous invite à
appeler l'article 31 du feuilleton d'aujourd'hui, s'il vous plaît, et je
veux vous indiquer, ce faisant, que nous avons convenu ensemble, l'Opposition
et nous, de convier chacun un intervenant - de chaque côté,
c'est-à-dire - pour la prise en considération du rapport. Il y
aurait consentement pour l'adoption, en même temps.
Projet de loi 110
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 31 de
notre feuilleton, on nous propose de prendre en considération le rapport
de la commission de l'aménagement et des équipements sur le
projet de loi 110, Loi modifiant diverses dispositions législatives
concernant les organismes intermunicipaux de l'Outaouais. Je suis prêt
à entendre le premier intervenant, M. le ministre des Affaires
municipales.
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, c'est avec beaucoup de
fierté que j'aborde avec vous et nos collègues cette
dernière phase de l'examen du projet de loi 110 grâce auquel
pourra être instituée dans la région de l'Outaouais une
communauté urbaine regroupant les cinq municipalités urbaines de
la région en un ensemble politique qui permettra à ces
municipalités de s'associer de manière permanente pour la
poursuite de certains objectifs communs. On avait, depuis déjà
plus d'une vingtaine d'années, dans l'Outaouais, la Communauté
régionale de l'Outaouais, dans laquelle se retrouvaient à la fois
les cinq municipalités urbaines: Hull, Aylmer, Gatineau, Masson et
Buckingham, en plus de sept municipalités rurales. Cette
Communauté a bien fonctionné pendant de nombreuses années
mais ces dernières années des difficultés avaient surgi
surtout entre les municipalités rurales, d'un côté, et les
municipalités urbaines, de l'autre. Les municipalités urbaines,
surtout à la suite d'un développement considérable qui
s'est produit au cours des deux dernières décennies, sentaient le
besoin de se doter d'une structure de regroupement et de coordination qui
serait créée en fonction de leurs besoins propres et de leurs
aspirations. C'est en fonction des représentations qui nous avaient
été faites et de consultations abondantes, fartes dans le milieu
de l'Outaouais, que le gouvernement a décidé d'instituer, d'un
côté, la Communauté urbaine de l'Outaouais dans laquelle
seront regroupées les cinq municipalités urbaines de la
région et une nouvelle MRC, la municipalité régionale de
comté des Collines-de-l'Outaouais dans laquelle seront regroupées
les sept municipalités rurales qui faisaient partie jusqu'à
maintenant de la Communauté régionale de l'Outaouais.
La Communauté urbaine de l'Outaouais aura ceci de particulier que
les cinq municipalités qui y seront regroupées auront chacune une
représentation basée sur leur population. La municipalité
de Gatineau, qui est la plus importante au point de vue numérique, aura
six voix à l'intérieur du conseil de la Communauté, la
municipalité de Hull en aura cinq, la municipalité d'Ayl-mer en
aura trois et les deux autres municipalités, une chacune. Parmi les
attributions de la Communauté urbaine, il y aura la plupart des
attributions qu'avait déjà la Communauté régionale,
en particulier l'évaluation foncière et la gestion des
déchets et aussi la gestion du schéma
d'aménagement régional.
La Communauté régionale était responsable du
transport en commun. Pour la gestion du transport en commun, nous avons
décidé d'instituer une société distincte qui sera
composée de représentants de toutes les municipalités
concernées et qui fonctionnera de manière autonome. La raison de
cette distinction est la suivante, c'est que la Société de
transport de l'Outaouais est appelée à desservir non seulement
les cinq municipalités urbaines, mais aussi les municipalités
rurales qui ont besoin de transport en commun et qui jouissent
déjà des services de la... Actuellement, c'est la Commission
régionale de transport de l'Outaouais; là, ce sera la
Société de transport de l'Outaouais. Pour permettre à ces
municipalités rurales de continuer à bénéficier des
services de la Société de transport et aussi d'y être
représentées dans les organes de direction, nous créons
une société distincte pour la gestion des affaires reliées
au transport.
Il existe un organisme dans l'Outaouais au sujet duquel plusieurs nous
ont interrogés. C'est la Société d'aménagement de
l'Outaouais. Elle ne fait pas partie, à proprement dit, de la
Communauté régionale de l'Outaouais parce que tous les membres de
la Société d'aménagement sont nommés par le
gouvernement et le budget est également fourni par le gouvernement. Mais
c'est une structure qui a rendu des services importants dans la région
de l'Outaouais, dont le rôle aujourd'hui est peut-être moins
nécessaire dans autant de domaines qu'autrefois.
Par exemple, autrefois la Société d'aménagement
s'occupait de parcs récréatifs, de lieux de camping et
d'installations comme celles-là. Aujourd'hui, ce n'est plus
nécessaire; il existe un organisme gouvernemental dont c'est la fonction
propre de gérer des installations comme celles-là. La
Société avait aussi acquis des terrains, des
propriétés à des fins de développement industriel.
Ces propriétés et terrains seront transférés aux
municipalités concernées au cours des prochaines années,
mais tout indique que la Société d'aménagement de
l'Outaouais pourrait être maintenue pendant un certain temps. Ce pourrait
être quelques années, nous ne le savons pas pour l'instant, mais
son rôle sera surtout un rôle de promotion économique,
commerciale et industrielle pour l'ensemble de la région. Le
gouvernement se penchera sur cet organisme au cours des prochains mois. Je veux
vous assurer que nous n'arrêterons aucune décision sans en avoir
délibéré d'abord avec les députés qui
représentent la région de l'Outaouais au sein de
l'Assemblée nationale.
J'ajoute un dernier point à propos de la Communauté
urbaine de l'Outaouais. Parmi les dispositions de transition, il en est une qui
prévoit la tenue obligatoire, d'ici le mois de mai, d'un
référendum dans les trois municipalités les plus
populeuses de la région, c'est-à-dire Hull, Gatineau et Aylmer,
afin de demander à la population de ces trois municipalités si
elle serait intéressée à se fusionner pour ne former
qu'une seule ville.
Ça fait partie d'une entente qui a été conclue
entre les autorités municipales des villes concernées. Et par une
disposition spéciale du projet de loi, il devra y avoir, au cours des
prochains mois, un référendum obligatoire dans ces trois villes
autour d'une question ou de questions qui seront arrêtées par les
autorités de chaque ville. Le résultat de ce
référendum ne sera pas astreignant. Ce sera un
référendum consultatif. Nous pouvons soupçonner d'ici que,
si le référendum allait produire un résultat fortement
favorable à la fusion, il serait très difficile d'échapper
à la fusion. Mais les populations seront laissées libres. Le
gouvernement n'interviendra en aucune manière dans le débat. Nous
laisserons la discussion se dérouler librement et, lorsque les
résultats seront connus, nous aviserons en temps utile.
Il y avait beaucoup de problèmes de transition à
régler, beaucoup de problèmes de disposition d'actifs, de
transfert de biens, de règlement de dépenses déjà
faites ou de comptes accumulés par l'une ou l'autre des
municipalités concernées. À peu près tous ces
problèmes ont été réglés de manière
satisfaisante dans le texte même de la loi. Il reste quelques
problèmes à régler, que nous pourrons régler par
les voies de la discussion à l'amiable, au cours des prochaines
semaines, j'espère bien. Mais tout a été prévu, M.
le Président, pour que la Communauté urbaine de l'Outaouais
commence à fonctionner régulièrement dès le 1er
janvier 1991, c'est-à-dire que, dans une douzaine de jours, la
population des cinq villes urbaines de la région de l'Outaouais sera
dotée d'une Communauté urbaine qui aura mandat pour voir aux
affaires communes de nature urbaine dans cette région-là.
En terminant, je voudrais remercier les autorités municipales de
la région de l'Outaouais de l'excellente collaboration qu'elles nous ont
apportée dans la préparation et le cheminement du projet de loi
110. Je voudrais remercier de manière toute particulière mes
collègues, les cinq députés des comtés de la
région de l'Outaouais, le député de Hull, le
député de Gatineau, le député de Pontiac qui est en
même temps ministre délégué aux Transports, le
député de Papineau et le député de Chapleau, qui
ont travaillé dans un esprit d'étroite concertation, ensemble
d'abord, avec le ministre responsable aussi et avec les municipalités
concernées. Je pense que c'est vraiment le fruit d'un travail
d'équipe que nous nous apprêtons à couronner ce soir.
Je ne voudrais pas terminer sans adresser un mot spécial de
remerciement au porte-parole de l'Opposition, le député de
Jonquière, dont la participation à nos travaux a
été éminemment constructive et, grâce à la
grande expérience qu'il possède des affaires municipales, il a
pu
suppléer, à bien des endroits, à
l'inexpérience relative du nouveau ministre des Affaires municipales.
J'ai essayé de lui passer un peu de mon expérience dans beaucoup
d'autres domaines en échange. Mais je crois que nous avons eu des
rapports empreints d'esprit constructif et de respect mutuel, et je le signale
en toute amitié parce que, très souvent, on garde des travaux de
la Chambre des images d'échanges verbaux souvent faits dans le
désordre et le bruit, mais on n'est pas assez conscient, dans le grand
public, que les trois quarts au moins du travail parlementaire s'accomplissent
dans un esprit de collaboration et de concorde. Je l'ai signalé souvent
dans cette Chambre, la plupart des projets de loi que nous adoptons sont
adoptés sur consensus, sur la base d'un accord qui intervient à
la faveur des discussions entre les deux partis.
Il y a certains sujets qui nous divisent. C'est bon d'un
côté, c'est regrettable de l'autre, mais ça fait partie de
la vie. Chaque fois que les députés des deux côtés
peuvent trouver un terrain d'entente qui leur permet d'arriver à des
conclusions communes, je pense que c'est un élément qui grandit
notre démocratie et nous en avons, je pense, un très bon exemple
avec le projet de loi 110, dont je suis particulièrement fier en raison
de ce facteur, entre autres. Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Lefebvre): merci, m. le
ministre des affaires municipales. sur le même sujet, je reconnais m. le
député de jonquière. m. le député.
M. Francis Dufour
M. Dufour: Merci, M. le Président. Effectivement, il est
vrai que nous avons eu à travailler à ce projet de loi.
Effectivement, on peut en être fier, je pense, d'un côté
comme de l'autre parce qu'il y a eu un travail important de fait pour, en fait,
les gens les plus intéressés, donc, les contribuables
concernés. Je pense que c'était le premier objectif. Ce n'est pas
parce que c'est l'esprit des fêtes, je ne le pense pas. J'ai toujours cru
que l'adoption de lois municipales n'avait pour but que d'améliorer la
façon de se comporter des citoyens dans une municipalité, et que
c'était important de leur donner les meilleures lois possible,
considérant que les municipalités sont des institutions et des
institutions, ça demande d'être traité avec beaucoup
d'égards. (20 h 20)
Lorsqu'on touche une loi municipale, il faut toujours tenir compte que
ça touche beaucoup, beaucoup d'individus, beaucoup de monde, autant dans
leur comportement que dans leur vie. Ce projet de loi couvre au-dessus de 200
000 habitants. Donc, ce n'est pas un petit territoire en géographie ou
en superficie, mais c'est aussi un territoire important du Québec, qui
est situé juste près d'Ottawa, ce qui fait que ce qui se passe
là ne peut nous laisser indifférents. Ces gens peuvent aussi se
sentir des fois, parfois et souventefois négligés puisqu'ils se
trouvent loin de Québec, mais ce sont des Québécois et
Québécoises vraiment partie prenante du Québec comme
tel.
Et c'est important que ces gens-là puissent se doter d'outils qui
leur permettent d'évoluer. Et, effectivement, ce projet de lui a subi
plusieurs étapes, dans le sens qu'on n'est pas arrivé là
directement avec un projet de loi tout cuit, mâchouillé et
prêt à adopter. Il a fallu que ça passe par des
étapes importantes. L'an dernier, j'ai eu l'occasion d'assister à
une table ronde organisée par Radio-Canada. Je ne sais pas si les
coupures auront des influences certaines sur ses comportements ou ses actions
futures, mais disons qu'il y a eu une table où beaucoup de gens, plus de
250 personnes étaient présentes et discutaient de l'avenir de
l'Outaouais. Plusieurs hypothèses ont été avancées,
mais il n'y en avait pas une plus qu'une autre qui a été retenue.
L'ex-ministre des Affaires municipales, le député de
Maskinongé, M. Picotte, a délégué un observateur ou
quelqu'un qui est allé sur place enquêter et examiner toutes les
possibilités. Cette personne est M. Jeremie Giles, il est commissaire
à la Commission municipale et ses recommandations sont effectivement
reconnues dans ce projet de loi, mais après un large consensus de tous
les gens concernés.
Nonobstant ce consensus ou le cheminement du dossier, nous avons cru bon
au départ de demander que des groupes particuliers soient entendus avant
qu'on puisse étudier la loi article par article. Le ministre des
Affaires municipales, bien sûr, a acquiescé à cette demande
et nous avons été heureux de rencontrer ces groupes au nombre de
quatre. On a eu l'occasion d'entendre les évaluateurs municipaux qui ont
apporté un éclairage différent de ce qui était
contenu dans le projet de loi, mais qui a permis tout de même d'arriver
à un consensus et à des amendements importants, à mes
yeux, qui ne changent pas la nature du projet de loi, mais qui sont de nature
à le bonifier. On a rencontré les représentants des
petites municipalités ou de la MRC des Collines-de-l'Outaouais. Ces sept
maires sont venus nous dire que, oui, ils étaient d'accord, que ce
n'était pas eux qui étaient à l'origine de leur
départ de la Communauté régionale de l'Outaouais, mais
qu'ils faisaient contre mauvaise fortune bon coeur.
Mais seulement, il y a le point qui a été soulevé
au cours de cette représentation et, aujourd'hui ou hier, je recevais de
la part de ces gens un extrait d'un procès-verbal d'une assemblée
du conseil de la Communauté régionale de l'Outaouais qui a
été tenue le 6 décembre 1990, qui demande au ministre des
Affaires municipales compensation financière. Je ne lirai pas tous
les
attendus, c'est clair qu'il y a des transferts qui se font, dont les
coûts de l'évaluation foncière. Il y a eu un adoucissement
d'apporté puisque deux municipalités, entre autres, ne paieront
pas la visite des maisons pour l'évaluation foncière pour cette
année. Tout de même, cette séparation, ça se
répercute dans les coûts, pour une augmentation d'environ 88 %.
Donc, au cours des débats ou des échanges qu'il y a eus... Je
pourrais garder cette partie-là sous silence parce que je sais, et le
ministre des Affaires municipales y a fait écho, qu'ils sont largement
représentés par des députés du parti
ministériel. Donc, j'imagine que les députés auront
à faire leurs représentations au ministre s'ils veulent qu'on
donne suite à cette résolution qui, en fait, est une demande de
subvention pour leur permettre de partir sur un meilleur pied.
Il y a aussi deux autres points qui sont soulevés par cette
résolution, qui sont les subventions de fonctionnement à la MRC,
qui sont aussi les montants nécessaires pour mettre en place le
schéma d'aménagement; deux raisons qui amènent ces
gens-là, par résolution, à demander au ministre des
Affaires municipales de se pencher sur ce cas. Et je ne lirai pas toute la
résolution puisque, déjà, cette lettre est adressée
au ministre des Affaires municipales et aussi aux cinq députés
concernés. il y a effectivement la future communauté de
l'outaouais qu'on met sur pied par ce projet de loi, où les maires ont
été entendus. il y avait un point où je voulais m'assurer,
par exemple, de la pertinence de tenir un référendum pour donner
suite à un voeu manifesté, qui a été l'objet de
discussions très fortes dans le milieu. c'est cette demande de
référendum. en fait, c'était là la question, si on
fait une communauté urbaine de l'outaouais, est-ce qu'il est
nécessaire, trois mois après, de tenir un
référendum pour savoir si ces trois municipalités de ville
pourraient se fusionner pour en faire une nouvelle? la réponse sur le
terrain, et c'est là que c'est difficile de conclure: il y a deux
municipalités sur trois, dont hull et aylmer, qui y consentent, une par
la voix de son maire, l'autre plutôt par personne interposée,
lorsqu'elle nous dit: ii y a 12 conseillers municipaux qui ne sont pas
favorables à la fusion. donc, je pouvais en conclure, à cause de
l'expérience que j'ai, bien sûr, dans ces dossiers-là, que
c'est très rare que les gens vont à l'encontre de leur conseil
municipal, surtout lorsqu'ils sont contre. l'expérience nous dit aussi
que ces gens-là pourraient aller contre la volonté du conseil si
le conseil disait qu'il est pour la fusion, mais, si le conseil se prononce
contre la fusion, à mes yeux, il y a 90 % de chances que le processus de
fusion soit interrompu et que le référendum ne soit pas
concluant.
Donc, à l'interrogation que je me posais à savoir, si je
connais d'une façon suffisamment sérieuse le résultat d'un
référendum éventuel, est-ce que je peux, selon mes
principes à moi, selon ma conscience, autoriser la tenue d'un
référendum qui va coûter entre 300 000 $ et 400 000 $ aux
citoyens? ma réponse était négative. Donc, je vous dis que
j'ai eu à voter et je me suis abstenu parce que, effectivement, je
considère que le gouvernement qui est en place, avec l'éclairage
qu'il a, a le droit de prendre les décisions importantes concernant le
devenir ou le futur de ces gens-là, mais il doit en assumer aussi la
responsabilité.
Il y a eu un point de soulevé à savoir si le
ministère des Affaires municipales pouvait s'impliquer au point de vue
des coûts pour aider la tenue du référendum, et je pense
que la réponse est venue assez claire de la part du ministre des
Affaires municipales. En période creuse comme on vit là, je ne
crois pas, en tout cas, à moins qu'il y ait un changement d'ici les
trois prochains mois, que le ministère des Affaires municipales
participera à la tenue de ce référendum. Donc,
voilà un autre point qu'on a essayé d'éclaircir à
travers ça.
Ce projet de loi, aussi, ramasse effectivement plusieurs dossiers.
Lorsqu'on décide de faire une Communauté urbaine de l'Outaouais,
par effet d'entraînement, ça nous oblige à créer une
municipalité régionale de comté, celle des
Collines-de-l'Outaouais. Ça oblige aussi la Société de
transport, qui était sous l'égide de la Communauté
régionale de l'Outaouais, à se former en société
qui va opérer avec les nouvelles coupures ou avec le transfert, non pas
de montants d'argent, mais avec le transfert de responsabilités. Avec
les montants d'argent qu'ils auront à collecter, je pourrais
peut-être leur souhaiter bonne chance et souhaiter que cette
Société de transport qui va donner suite à celle existante
n'ait pas de problèmes trop grands. Mais, encore là, ce seront
des voeux et on verra, dans le temps, si ça pourra se faire. (20 h
30)
II y a effectivement un autre dossier qui était exercé par
les entités complètes de la Communauté régionale de
l'Outaouais: c'était la régie des déchets. Donc, ça
peut être un sujet qui n'est pas tellement intéressant mais c'est
un sujet qui est excessivement important. Je vois mal une corporation, que ce
soit de ville ou rurale, ou une MRC une municipalité régionale de
comté... Que ce soit une communauté urbaine ou d'autres
entités, il faut bien que les déchets se ramassent. De plus en
plus, il y a des collectes sélectives qui se font. Donc, il y a
actuellement en place une entente intermunicipale qui a pour fonction de
gérer les déchets dans la région de Gatineau. Mais, encore
là, en composant ou en défaisant cette entité-là
pour en créer deux autres, il a fallu prévoir des
mécanismes qui vont permettre d'abord, un, de succéder à
cette entente concernant la régie des déchets. Mais il fallait
absolument ouvrir d'autres avenues comme prévoir l'intérim pour
savoir ce qu'il adviendra
de cette régie-là. Je souhaite, parce que ce n'est pas
prévisible dans la loi, actuellement, mais jusqu'en 1992, on peut dire
qu'ils devront essayer de s'entendre. On verra après si ces
gens-là vivront les problèmes qu'on vit ailleurs. Je sais qu'il y
a déjà des difficultés. Le législateur n'a pas cru
bon de réglementer dans l'immédiat ce qui adviendrait. On a fait
seulement, dans ce projet de loi, donner des moyens pour qu'ils puissent
s'arranger et qu'ils puissent aussi fonctionner. Souhaitons que cette belle
entente qu'on a vue ou à laquelle on a assisté durant toute la
préparation de ce projet de loi se continue et que, dans les faits,
ça se concrétise par une collaboration et aussi avec des actions
positives, il faut bien le dire.
Enfin, à l'étude article par article du projet de loi, je
pense que la démocratie y a gagné. Il y a un article
excessivement important, à mes yeux. C'était accordé
à la Communauté régionale de l'Outaouais, mais, à
la nouvelle Communauté urbaine, on a réussi, en tout cas
j'espère, à convaincre tous les membres de la commission, mais ce
qui est le plus important, c'est que le ministre s'est rendu à
l'argumentation à l'effet que, lorsqu'il y a une situation d'urgence,
dans une municipalité ou dans une communauté urbaine telle que
celle qu'on a devant nous, la Communauté urbaine de l'Outaouais, la
responsabilité des décisions et des engagements financiers va
reposer sur les élus. Voilà un élément que je
considère excessivement important dans le domaine municipal. Parce qu'on
a trop souvent tendance à se décharger de nos
responsabilités, les élus municipaux ont des fois tendance
à se débarrasser de leurs responsabilités pour les
transmettre à des fonctionnaires. Et quelle que soit la
hiérarchisation de ces fonctionnaires, je pense que l'administrateur
municipal doit être jaloux de ses prérogatives et de ses
pouvoirs.
C'est vrai, ça a été accordé, ça a
été accepté et, en cas d'urgence, ce sera, bien sûr,
le président de la Communauté urbaine de l'Outaouais qui aura la
première responsabilité. Parce que déterminer
l'état d'urgence et faire un rapport après, ce n'est pas comme
prendre des décisions en sachant qu'on est responsable de la
décision du départ jusqu'à la fin, et ça peut
enlever des motifs à friction. En tout cas, je me suis appuyé
là-dessus pour démontrer que, même au gouvernement du
Québec, lorsqu'un ministre part, il y en a un autre qui supplée
à son absence soit extérieure, par maladie ou autre, et, à
ce moment-là, il y a toujours une suite. Et dans une communauté
urbaine, tel qu'on a proposé, même si le territoire est assez
vaste, je ne vois pas de mal ou je voyais très mal qu'un directeur
générai ne puisse pas contacter son président, son adjoint
ou autre. Je pense qu'il y a moyen de trouver un moyen de fonctionnement, et
ça ne causera pas de problème. En tout cas, j'ai
été seulement 18 ans dans ce domaine-là et je ne pense pas
que, les situations d'urgence, on n'a pas pu y répondre, comme
élus municipaux; et je pense que les fonctionnaires doivent accepter
ça. Sans ça, le fonctionnaire peut prendre des décisions,
déterminer que c'est une situation d'urgence et jamais les élus
municipaux ne pourraient contrecarrer ces décisions, ce qui amène
des conflits. Et je pense que, dans une vraie situation d'urgence, quelle que
soit la loi qui nous régit, le directeur général prendra
des décisions. Et à ce moment-là, il n'aura pas à
les défendre; ce sera tellement évident que les gens
l'accepteront. Voilà, je pense, un point où la démocratie
y a gagné.
Un autre point sur lequel j'ai manifesté beaucoup de
réticence - mais encore là, il y a eu un cheminement, il y a eu
un échange par rapport à ça - c'était le droit que
les municipalités composant la Communauté urbaine de l'Outaouais
avaient de se retirer, bien sûr avec un avis d'un an de leur
système d'évaluation. Tout ce qui existe actuellement a tendance
à régionaliser le système d'évaluation. Il y a de
bonnes raisons, puisque les dépenses sont la plupart du temps en
fonction de l'effort fiscal, le potentiel fiscal. L'évaluation, c'est
toujours basé sur l'indice de richesse quelque part dans le paysage.
Donc, l'évaluation, dans une communauté urbaine, qui est faite
par l'organisme même a tendance a avoir les mêmes principes qui
s'appliquent sur la grandeur du territoire, donc il y a une
équité de justice, il y a la justice qui s'établit, et
toutes les propriétés étant évaluées par le
même système peuvent facilement avoir des moyens ou des points de
comparaison. Ce qui pourrait être différent si on changeait les
organismes, si on changeait la façon de faire. Même si on a des
lois qui déterminent comment on fait l'évaluation;
l'évaluation, c'est objectif, mais c'est aussi subjectif,
dépendant des gens qui le font. Je pense qu'il est important de retenir,
si on est dans le même véhicule, si tout le monde est jugé
de la même façon par les mêmes personnes, qu'il y a de
grandes chances que les coûts qui seront répartis le soient
équitablement, raisonnablement, avec la même mesure.
Ce droit de retrait, dis-je, a été balisé.
L'idéal, à mes yeux, ça aurait été qu'on
n'ait pas le droit de retrait. Mais il semblait que ça avait fait
consensus et que les gens avaient accepté cette méthode. Ce qu'on
a réussi à obtenir, avec la collaboration du ministre, il faut
bien le dire, parce qu'il aurait pu dire non à cette mesure-là
que je considérais importante. Oui, les municipalités pourront se
retirer, oui, il y a des coûts inhérents à ce
retrait-là, mais une troisième raison, avec cette mesure qui me
semblait importante, c'est que le gouvernement aura à se prononcer avant
que la municipalité puisse se retirer. Non seulement il y a des
coûts, mais il y a aussi une démarche importante et moi, je pense
et je crois que, quel que soit le gouvernement, avant de trouver, comme je dis
probablement, une façon de faire gagnante, il y a toujours de
l'hésitation, il y a certainement une recherche et le ministre
qui applique les lois, ces lois-là particulièrement, aura
sûrement à se garantir que cette action-là qu'il recommande
au gouvernement soit faite dans les normes et non pas sur un sentiment. Et
ça, ça me semblait une garantie importante. Voilà en gros
les bases sur lesquelles on s'est appuyé pour étudier ce projet
de loi.
Il y a d'autres points évidemment où on a fait certains
changements, mais, à mes yeux, les deux points les plus importants,
ça concernait l'évaluation, ça concernait le droit de
retrait pour l'évaluation. Il y a la façon de voter, il y a
toutes sortes d'éléments qu'on a pu apporter, et, en gros, je
crois que le projet de loi répond aux attentes. Je ne pense pas qu'on
ait changé les choses d'une façon radicale.
J'avais entendu, à un moment donné, le ministre des
Affaires municipales qui disait qu'il n'était pas en faveur de la
révolution, qu'il n'était pas un révolutionnaire,
peut-être qu'il ne l'est pas dans ce projet de loi, il l'est
peut-être dans les changements qui vont être apportés dans
la façon de ramasser ou de faire des changements dans la
fiscalité municipale. Mais dans ce projet de loi, je pense qu'il
n'était pas révolutionnaire, mais assez avant-gardiste tout de
même. Il faut juste se rappeler comment on a décrié les
communautés urbaines dans tout le Québec. On a vécu
l'expérience de la Communauté urbaine de Montréal
où tout le monde avait un mot à dire contre la Communauté
urbaine. Ça a tellement évolué qu'aujourd'hui, si on
voulait la défaire, je suis pratiquement convaincu que les mêmes
gens qui sont à l'intérieur s'opposeraient. La Communauté
urbaine de Québec, malgré ses faiblesses, malgré les
discussions que ça engendre, encore là, je suis convaincu de la
même vérité à l'effet que ce sont des organismes
avec un caractère qui couvrent des espaces plus grands et qui permettent
de faire une certaine partie de l'équité. (20 h 40)
Je ne pense pas que ce soit une question de justice égale pour
tout le monde. C'est un peu une question d'améliorer le système
pour se donner des services qui couvrent de plus grands territoires. Et
après 20 ans, voilà qu'une communauté régionale
demande de devenir une communauté urbaine. Je pense qu'il faut se
féliciter qu'on puisse permettre des changements comme tels et qu'on
puisse aussi cheminer de cette façon-là. Pour quelques-uns,
ça pourra être l'avant-projet qui permettra à la
Communauté urbaine de devenir une grande ville. La preuve, c'est
peut-être encore dans l'espoir. On permet tout de même dans ce
projet de loi que cinq municipalités, qui sont Aylmer, Hull, Gatineau,
Masson et Buckingham, c'est-à-dire que trois de ces villes puissent
permettre - les plus grosses que j'ai nommées, à l'exception de
Masson et Buckingham - de faire un référendum.
Là-dessus, je vous ai dit tout à l'heure que je
m'étais abstenu de voter, et il y avait une raison importante, parce
qu'on aurait pu aussi procéder différemment. Il semble que le
consensus était tellement large, que le consensus était tellement
ancré ou coulé dans le béton qu'on ne pouvait pas apporter
des amendements semblables. Le problème qu'on a, moi, j'aurais pu
l'aborder autrement. On aurait pu dire: D'abord, référendum.
Deuxièmement, si le référendum ne réussit pas,
à ce moment-là on fera une communauté urbaine. Si, au
référendum, on dit oui, ça fera une population d'environ
160 000 habitants, ça fera la quatrième plus grande ville au
Québec, presque aussi grosse que la ville de Québec. À ce
moment-là, je vois mal qu'une communauté urbaine puisse
travailler avec deux petites municipalités qui représentent
à peu près 10 000 ou 12 000 habitants, peut-être 14 000 ou
15 000 habitants. Il n'y a pas de poids équitable. Est-ce que ce serait
l'autre phénomène qui pourrait arriver, à l'effet que
cette fusion ferait en sorte qu'il n'y aurait plus de communauté
urbaine? À ce moment-là, il faudrait se poser d'autres questions
parce qu'on ne pourra pas... Il faudra toujours qu'il y ait des ententes ou
qu'il y ait des rapports les uns par rapport aux autres. La municipalité
régionale de comté des Collines-de-l'Outaouais, c'est clair que
ça ne fera pas une ville demain matin, même si on le voulait et si
on l'espérait. Mais la Communauté urbaine pourrait devenir, moi
je le souhaite en fait, les gens auront à le faire... Il y a des
avantages. Il y a surtout ce qui se passe sur tout le territoire parce qu'il y
a les fusions. Ça aussi, on devra peut-être un jour s'en parler.
Je crois qu'il n'y a jamais eu véritablement de politique de fusion au
Québec. Les politiques de fusion qu'on a eues, c'est des regroupements
volontaires, fusions forcées, fusions avec des petits "guidis-guidis",
là, des petits montants. On disait: Mariez-vous et, après
ça, multipliez-vous. Mais ça ne fait pas des fusions bien bien
fortes. Ce n'est pas comme ça. Moi, je pense que si, en Ontario, on a
réussi et on va réussir, en deux étapes, à diminuer
les municipalités de moitié... Vous allez dire que les Ontariens,
ce n'est pas correct. Moi, je ne veux pas copier sur l'Ontario, mais il y a
certainement des actions qu'ils posent qu'on peut regarder. Même si on
devenait souverainistes ou si on était souverains demain matin, si on
était indépendants, il faudrait bien regarder ce qui passe pareil
ailleurs. Ça ne nous empêcherait pas, on ne devient pas sourds,
aveugles, et muets parce qu'on devient indépendants. Je pense qu'au
contraire, il faut regarder encore plus. Et en Ontario, ils ont réussi
à diminuer les municipalités, dans un premier temps, de
moitié, c'est-à-dire devenir à 800 en partant d'environ
1500. Aujourd'hui, parce que, actuellement, il y a un projet de loi qui a
été adopté, je pense, parce que ça a
été annoncé comme une volonté du gouvernement, on
parle que les municipalités partent de 800 et baissent à 500, ce
qui est,
avec des municipalités, pas en bas, à moins d'exceptions -
il y aura toujours des exceptions - d'environ 5000 habitants. Il doit y avoir
une raison pour laquelle on fait ça. C'est parce qu'une
municipalité un peu plus grosse ou un peu plus grande peut exercer des
fonctions un peu plus importantes. Dans le contexte dans lequel on vit
aujourd'hui, c'est important que les municipalités puissent se doter
d'outils pour se défendre. En tout cas, une grosse municipalité
peut avoir des problèmes, mais ces problèmes d'informatique, ces
problèmes de gestion, ces problèmes d'aménagement de
territoire, ça se fait plus, ça se fait mieux quand on a un plus
grand territoire, quand on a de meilleures possibilités
financières. Ça, c'est correct. Et, au point de vue de la
coordination et au point de vue des demandes vis-à-vis du gouvernement
ou autre, quand on est plus gros, ça se présente mieux des fois,
ça se défend mieux. Ça ôte certaines
réticences entre voisins. Ça permet à des gens de
travailler en collaboration plutôt que de travailler en opposition. Dieu
sait si, dans certaines régions, et surtout dans des régions
frontalières comme on voit là, surtout quand on voit des
régions où il n'y a pas de grosses entités à
côté, donc il n'y a pas de compétition nouvelle qui va se
faire... On peut bien faire deux grosses villes, mais la compétition va
continuer.
Parce que ce n'est pas juste bon pour les municipalités qu'on
diminue le nombre de municipalités; ce serait bon aussi pour le
gouvernement. Et, si on le faisait, il faudrait bien qu'un jour quelqu'un
décide ici à Québec qu'on va se doter de politiques
véritables pour permettre qu'il y ait des fusions, pas que ça
repose juste sur le dos des individus; il va falloir qu'il y ait une
volonté politique qui démontre, avec une presque certitude, que
la fusion va amener des éléments nouveaux qui vont permettre de
faire face à des défis nouveaux. Les municipalités ont
beau nous demander: On veut faire de la promotion économique, on veut
faire de la promotion touristique et on veut avoir des pouvoirs, mais encore
faut-il qu'on ait les moyens de ces demandes. Et, malheureusement, les
municipalités ne possèdent pas tous ces pouvoirs-là, ni
surtout les ressources financières parce que, dans des groupes
homogènes, des groupes plus nombreux, des groupes où on s'entend,
on peut avancer beaucoup plus vite que quand il y en a un qui met le pied sur
le frein, l'autre sur l'accélérateur et que l'autre tient le
volant et va par en arrière. C'est un peu ça qu'on vit assez
souvent.
Je pense que c'est important que le gouvernement fasse une
réflexion là-dessus parce que, tantôt, pour le
Québec comme pour les autres, si on demande des pouvoirs, il faudra
qu'on soit capables de les exercer. Et moi je suis anxieux de voir le jour
où quelqu'un va se décider et va penser que les fusions, oui,
c'est bon pour le gouvernement et ça peut être bon pour les
municipalités. Mais il faut surtout qu'on ait une politique qui favorise
les fusions, pas des politiques qui disent qu'on met sur pied de grandes
entités et, qu'après ça, on les laisse aller. Ce n'est pas
comme ça. Je pense qu'il faut les protéger et il faut le faire.
Et je le dis sans aucune restriction, il n'y a jamais eu de véritable
politique de fusion ici au Québec. Le jour où on en aura une, il
s'agira qu'on puisse les orienter et le faire.
Voilà en gros, M. le Président, ce que j'avais à
dire sur ce projet de loi que je considère excessivement important et
qui, je l'espère, va donner les fruits escomptés. Ce qu'on a mis
là-dedans, tous les individus, les gens du milieu, les efforts qui ont
été mis à l'intérieur de ça, c'est un
avancement qu'on permet, et, cet avancement, c'est pour que la région
ait de meilleurs outils pour faire face à ce qui se passe actuellement.
On devrait se réjouir et on devrait leur souhaiter la meilleure des
chances possibles.
En terminant, moi aussi, je voudrais remercier l'entendement et la
compréhension du ministre des Affaires municipales et du gouvernement
dans ce dossier-là. Je l'ai apprécié parce que je l'ai eu
avec d'autres ministres, mais je pense que, pour ces questions-là, moi,
je suis très heureux d'avoir participé à l'adoption de ce
projet de loi. Merci.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Jonquière. Votre intervention met fin au
débat sur l'adoption du rapport de la commission de
l'aménagement, tel que convenu. Alors, est-ce que le rapport de la
commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de
loi 110, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les
organismes intermunicipaux de l'Outaouais, est adopté?
Des voix: Adopté.
Adoption
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Au même article 31
de notre feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption
du même projet de loi 110, Loi modifiant diverses dispositions
législatives concernant les organismes intermunicipaux de l'Outaouais.
J'ai besoin évidemment d'un consentement pour déroger à
l'article 230 de notre règlement de sorte que nous puissions
procéder à la présente étape. Est-ce que j'ai le
consentement, M. le leader adjoint de l'Opposition?
M. Gendron: Oui, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui. Alors, M. le
ministre. Pas d'intervention?
M. Pagé: M. le Président, le ministre propose
l'adoption en troisième lecture dudit
projet de loi, sans intervention.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que le projet de
loi 110, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les
organismes intermunicipaux de l'Outaouais, est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, je vous invite à
appeler l'article 16 du feuilleton, lequel projet fait l'objet d'une entente
à l'égard des interventions, soit un intervenant de chaque
côté. (20 h 50)
Projet de loi 55
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 16 de
notre feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du
rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 55, Loi
modifiant la Loi sur les permis d'alcool et d'autres dispositions
législatives. Alors, je suis prêt à reconnaître M. le
ministre de la Sécurité publique. M. le ministre.
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, je vous félicite de vous
être corrigé vous-même parce que j'allais apporter une
précision. J'interviens maintenant à titre de ministre de la
Sécurité publique. Mais, entre la fonction de ministre de la
Sécurité publique et celle de ministre des Affaires municipales,
vous verrez qu'il y a des liaisons de plus en plus intéressantes au
cours des mois à venir.
Une de mes attributions comme ministre de la Sécurité
publique consiste à faire en sorte que les permis d'alcool, qui sont
très nombreux sur le territoire du Québec, soient émis et
qu'on les applique et qu'on les gère d'une façon conforme
à l'éthique, aux normes saines de moralité publique et
dans des conditions qui assurent que l'alcool soit consommé de
façon raisonnable et en conformité avec des exigences que
j'appellerais civilisées. Vous savez, M. le Président, que nous
avons plus de 10 000 permis d'alcool en circulation à travers le
Québec. Il y a plus de 10 000, peut-être 12 000, 13 000, 14 000
endroits différents où l'on a des permis pour de la vente de
boissons alcooliques sous une forme ou l'autre. Il y a toutes sortes de lieux
où l'on vend des alcools. Je ne veux pas entrer dans les détails
de peur de faire des erreurs parce que ce n'est pas ma plus grande
spécialité. Mais c'est une industrie qui est très
importante chez nous, et nous avons, pour assurer la réglementation de
tout ce secteur d'activité économique, une Régie des
permis d'alcool du Québec. Cette Régie est un organisme peu
connu, mais j'ai remarqué, à l'occasion des travaux de la
commission parlementaire qui a étudié ce projet de loi, qu'elle
accomplit un travail très important et je félicite les
députés qui faisaient partie de la commission parlementaire de
l'intérêt qu'ils ont manifesté à l'endroit des
précisions que leur apportait le président de la Régie, Me
Laflamme.
M. Laflamme et son équipe nous avaient saisis d'un certain nombre
de points faibles dans le régime juridique actuel en matière
d'émission et de contrôle des permis. Ils nous avaient
proposé des modifications susceptibles d'améliorer notre
régime de permis d'alcool au Québec. Je pense qu'avec ce projet
de loi 55, nous apportons certaines modifications qui, à l'oeil nu,
peuvent paraître plutôt mineures, mais qui, en pratique,
entraîneront des améliorations appréciables. Je les
résume très rapidement.
Tout d'abord, la Régie des permis d'alcool se voit attribuer une
mission plus large en matière de contrôle de la publicité
des alcools, en matière d'éducation aussi en relation avec
l'alcool. Jusqu'à maintenant, on lui a confié un rôle
d'émission de permis, de vérification des qualifications des
détenteurs de permis, mais son rôle en matière
d'éducation s'est pratiquement borné à contrôler
négativement les messages publicitaires. On veut qu'elle fasse davantage
et que notre population devienne plus sérieusement éduquée
en fonction de l'alcool. Il existe malheureusement de trop nombreux abus
encore, actuellement. Et ce n'est pas la suppression ou l'élimination de
l'alcool qui sera la solution. C'est la formation des personnes de
manière qu'elles sachent user de l'alcool, qui est un bien en soi, d'une
manière raisonnable et modérée.
Alors, je l'ai dit en commission parlementaire et le
répète ce soir, j'espère que la Régie des permis
d'alcool se servira des nouvelles attributions, de la nouvelle mission qui lui
est confiée par le projet de loi 55, pour intervenir de manière
plus active et plus substantielle dans tout le domaine de l'éducation et
de l'orientation de la publicité concernant les produits d'alcool.
Un autre article de la loi actuelle limite à quatre le nombre
maximum de permis d'alcool que peut détenir une même personne.
Ça veut dire, ça, comme des boissons alcooliques sont
distribuées maintenant dans les épiceries du Québec, qu'un
épicier qui aurait de l'initiative, qui serait capable d'avoir cinq,
six, sept ou huit établissements, est limité à quatre en
matière de permis d'alcool, parce qu'on a adopté cette
norme-là il y a de nombreuses années pour empêcher dans le
temps que les chaînes de magasins d'alimentation n'aient accès aux
permis d'alcool. Mais il y a longtemps, nous le savons tous, que les grandes
chaînes distribuent des boissons alcooliques comme les petites
épiceries. Il y a bien des chaînes qui se sont organisées
pour acheter de
petites épiceries, elles faisaient l'acquisition du permis en
même temps, puis elles ont dépassé le nombre de quatre
depuis longtemps. Le petit entrepreneur individuel, lui, qui ne faisait pas
partie d'une chaîne et qui ne contrôlait pas une chaîne, se
voyait limiter à quatre. Alors, nous faisons tomber cette restriction
qui était devenue inutile.
On veut s'assurer, lorsque vous allez dans un établissement
où l'on vend de la boisson, que vous commandiez par exemple telle sorte
de boisson alcoolique, telle sorte de gin, ou telle sorte de cidre, ou telle
sorte de cognac, je ne sais pas trop... Vous vous dites: Je voudrais avoir un
cognac de telle marque. Il peut arriver, si vous laissez faire toutes les
choses en arrière dans une antichambre, qu'on vous apporte un faux
produit, qu'on vous apporte une portion qui soit bien inférieure
à ce pour quoi vous allez payer. Ça fait que, là, on veut
que l'établissement soit obligé de vous servir, qu'il ait le
contenant et qu'il l'ouvre en votre présence, de manière que vous
ayez le contrôle de ce qu'il fait et de manière aussi que le
gouvernement touche les redevances auxquelles il a droit, parce que chaque
contenant devra maintenant être accompagné d'un timbre émis
par la Société des alcools.
On a déjà ce timbre-là sur les bouteilles, mais les
fabricants et les distributeurs sont ingénieux, ils ont trouvé
à mettre au point toutes sortes de contenants qui ne sont pas des
bouteilles. Alors, comme la loi parlait seulement de bouteilles jusqu'à
maintenant, il y a beaucoup d'autres contenants qui échappaient au
contrôle et il peut arriver qu'on vende ces produits-là sans qu'il
y ait de timbre dessus. Ça veut dire que l'État
québécois, qui va chercher chaque année près de 400
000 000 $ en redevances sur les ventes d'alcool, se voyait privé de
revenus dont il a besoin pour financer les services de santé, les
routes, etc. Alors, nous corrigeons ces carences de la loi en instituant des
exigences beaucoup plus sévères et en faisant en sorte que ceux
qui aiment tricher l'État en passant en dessous de la porte quand
l'ouverture est trop grande, bien là, elle sera calfeutrée comme
il faut et il faudra entrer par la porte comme tout le monde.
Les dons de boissons, un autre petit point sur lequel je vais passer
très vite. Les fabricants ou les distributeurs de boissons, il arrive
qu'ils soient dans l'occasion de faire des dons de boissons. Disons que vous
organisez une fête, je ne dirai pas pour le Parti libéral ou le
Parti québécois, mais pour un Club Optimiste ou un Club Kiwanis,
à un moment donné vous allez voir votre fabricant ou votre
distributeur de boissons qui dit: Bien, moi, je vais te donner une caisse puis
tu pourras la vendre, je vais te donner ça gratis. C'est dangereux. Si
on laisse ces choses-là se faire sans contrôle, il peut arriver
qu'on achète des gens avec de faux cadeaux comme ça ou encore
qu'on distribue des produits frelatés. Les fabricants de vin ou des
embouteilleurs de boissons alcooliques, ils auront manqué leur coup dans
telle opération puis ils diront: Bien, on va envoyer ça au Club
Kiwanis, oui, ils ne s'en apercevront pas.
Alors, tout ça maintenant sera contrôlé de
manière beaucoup plus sévère que ce ne l'était. Il
faudra avoir un permis pour donner des boissons alcooliques, il faudra avoir un
permis spécial, une autorisation de la Régie des permis d'alcool,
même la Société des alcools. Dans la version qui m'a
été soumise au début - le député de
Jonquière s'en souviendra parce que nous étions d'accord
là-dessus, n'est-ce pas? - la Société des alcools aurait
eu la permission de distribuer gratuitement des cognacs ou des gins ou d'autres
formes de boissons alcooliques si elles n'étaient pas
embouteillées au Québec, ici. Nous avons dit: Tout le monde sur
un pied d'égalité, vous ne pourrez pas, pas plus vous autres,
surtout avec l'argent des contribuables, faire des cadeaux à gauche et
à droite, à moins d'avoir une autorisation en bonne et due forme
de la Régie des permis d'alcools. Nous mettons tout le monde sur un pied
d'égalité. Et un cadeau de cette nature-là, ce n'est pas
plus intéressant quand ça vient de la Société des
alcools que quand ça vient d'un entrepreneur privé, à
moins que ce ne soit autorisé en bonne et due forme par le seul
organisme qui soit habilité à prendre ce genre de
décision, et je veux parier évidemment de la Régie des
permis d'alcool.
Alors, voilà l'essentiel de ce projet de loi, M. le
Président. Je veux en terminant féliciter la Régie des
permis d'alcool de l'excellent travail qu'elle accomplit dans l'ensemble. Je
pense qu'elle accomplit un travail propre, un travail ordonné, un
travail méthodique, un travail qui procure des résultats
intéressants pour la société québécoise. Je
pense que nous devons souhaiter vigoureusement que la dimension
éducative de toute cette industrie soit beaucoup plus
développée qu'elle ne l'a été maintenant. (21
heures)
Et j'espère que les fabricants et les distributeurs de produits
se rendront compte que, dans la publicité qu'ils sont appelés
à faire, il y a moyen de faire appel à autre chose qu'aux
instincts les moins nobles de la nature humaine. Il y a moyen de faire autre
chose que de chercher simplement à plaire à ce qu'il y a de plus
facile. Je pense qu'on doit se rendre compte qu'on joue avec des
réflexes qui sont extrêmement sensibles et qu'à force de
flatter toujours ce qui va du côté plus facile on finit par
affaiblir une société au lieu de la renforcer et de l'habituer
à user des biens qui sont à sa disposition d'une manière
vraiment adulte, d'une manière qui témoigne d'une maîtrise
véritable. J'ai été frappé, en commission
parlementaire, de constater combien les députés des deux partis
qui
étaient présents à la commission ont insisté
sur cette importance de la dimension éducative dans tout ce qui touche
le commerce des boissons alcooliques. Je voudrais vous laisser sur cette note,
M. le Président, à la veille de la période des
fêtes. Je pense que l'idée d'équilibre, l'idée de
modération, l'idée de discipline, de contrôle personnel...
Les contrôles par une autorité extérieure, ça ne
vaut pas cher, c'est bon pour empêcher les accidents. Ça ne vaut
pas cher en longue période. Le contrôle par l'intérieur,
parce qu'on trouve qu'un comportement modéré, c'est ce qu'il y a
de mieux pour soi-même et pour les autres, je pense que si on peut
appliquer ces valeurs à la manière dont on utilise l'alcool, dont
on le distribue quand on le met en circulation, je pense qu'on grandira notre
société, on la renforcera au lieu malheureusement de l'affaiblir,
comme on l'a fait trop souvent dans le passé sous le seul
prétexte d'aller chercher des profits faciles. Ce n'est pas du tout
l'esprit de notre système de distribution des alcools au Québec
et j'espère qu'on le comprendra de mieux en mieux, grâce, en
particulier, à ce projet de loi 55.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Sur le même sujet, je cède la parole à M. le
député de Jonquière.
M. Francis Dufour
M. Dufour: Merci, M. le Président. Encore là, un
projet de loi qui a demandé une étude assez exhaustive, assez
particulière, à laquelle on a concouru et à laquelle aussi
on avait donné notre accord. Et pourquoi on avait beaucoup de
facilité à le faire, c'est que le régime de la grande
réforme qui a touché les permis d'alcool a été fait
sous un gouvernement du Parti québécois. Il y a eu un grand
nettoyage, en fait, de tout ce qui touchait cette partie-là, on l'a fait
et on vient, de temps en temps, y retoucher quelque peu. Mais, même si le
projet de loi n'a pas beaucoup d'articles, il faut bien constater que ça
s'adresse à 32 202 détenteurs de permis. C'est exactement
ça, le nombre de permis qu'il y a au Québec en 1988-1989, donc
beaucoup d'intervenants, ce qui veut dire aussi des contrôles. Je pense
qu'il ne faut pas avoir peur de le dire, une industrie qui... D'abord, c'est
une industrie et, deuxièmement, c'est un commerce. Qu'on puisse le
réglementer et qu'on doive le réglementer, il me semble que c'est
la normalité des choses.
Il y a effectivement quelques changements qui ont été
apportés - je ne reprendrai pas et je n'ai pas l'intention de parler
tout le temps qui m'est alloué - dans les épiceries - je ne sais
pas si j'ai bien écouté, je pense que le ministre ne l'a pas
soulevé - il y a de la dégustation qui sera permise dans les
épiceries, mais de la dégustation pour de la boisson que les
marchands ou les épiceries vendent. Ça, on s'est assuré
qu'il y aura un contrôle rigoureux là-dessus. Comme il n'y a pas
beaucoup de fabricants de ces boissons distribuées en
épiceries... Ça veut dire que les épiceries pourront faire
quelques dégustations durant l'année. Et ça va permettre
aussi, sans que ce soit illégal, que les jeunes puissent être sur
les lieux, parce que l'épicerie comme telle n'est pas un lieu où
les enfants ou les jeunes sont empêchés d'aller. On a ouvert aussi
un peu dans les fabriques ou dans les endroits où on fabrique la boisson
d'une façon artisanale. Encore là, les jeunes pourront être
sur les lieux, accompagnés de leurs parents, et ça ne mettra pas
l'artisan ou le fabricant dans l'illégalité. Je pense que
ça, c'est une bonification.
Ce qu'on constate aussi, c'est que cette loi-là aurait pu aller
beaucoup plus loin. On aurait pu aller corriger d'autres problèmes. Par
exemple, il n'y a pas beaucoup de gens qui savent que les restaurants n'ont pas
le droit de vendre de la bière en fût. Donc, c'est un vieux relent
de la loi passée où la bière en fût n'était
vendue qu'en taverne. Aujourd'hui, dans les restaurants, ils vont vous vendre
de la bière sous pression, mais ce n'est pas de la bière en
fût. Donc, il n'y a pas de bière en fût dans les
restaurants. Il faut bien le dire parce qu'il y aura peut-être des gens
qui voudront que ça corrige ce fait-là, mais il faudra qu'on
passe la loi pour le corriger.
Le point le plus important, à mon point de vue... Il faut
s'assurer qu'il n'y ait pas de produits frelatés, qu'on contrôle
le don de boissons, mais le point le plus important, effectivement,
était la publicité. On sait que, dans l'état actuel de la
situation, les brasseries, les fabricants, les vendeurs de boisson se sont
astreints à la discipline du corporatif. Autrement dit, ces gens se
réunissent régulièrement pour se soumettre, entre eux,
à certaines règles concernant la publicité qui s'adresse
via la télévision à l'ensemble de la population. Et ces
règles-là ou ce fonctionnement des organismes, c'est fait,
à mon point de vue, d'une certaine façon, volontairement, puisque
le fondement sur lequel on s'appuie... Au gouvernement du Québec, au
point de vue de la loi, ce n'était pas un gros gros article: il y a une
ligne qui parle du contrôle de la publicité. Et Dieu sait s'il y
en a de la publicité concernant la vente de boissons alcooliques ou pour
favoriser la vente de boissons alcooliques. Ce n'est pas seulement à la
télévision, c'est dans les stades sportifs, c'est vers les
jeunes, à travers les événements, à travers les
dons de boissons, sur les automobiles ou les véhicules qui circulent
dans le public. Tout ça fait que, bien oui, on vit avec ça, c'est
une réalité. Donc, les moyens qu'on se donne, c'est qu'on va
pouvoir faire de l'éducation, on va pouvoir obliger un peu plus.
Avant, on était régi par les règles du CRTC. Il
semble que le CRTC est assez com-préhensif par rapport à
ça; il permet qu'il y ait quelqu'un du Québec qui y assiste. Bon!
Il faut 11-
bien rendre à César ce qui est à César. Moi,
ça ne me rend pas malade. Il semble qu'il y avait une entente, mais il y
a une différence notoire avec la façon dont les gens des autres
provinces abordent la question de la boisson par rapport aux
Québécois. Ce qui m'a permis de dire, tout en badinant, qu'il y
avait deux façons de prendre un verre. Et ça, ce n'est pas pour
favoriser, c'est juste peut-être pour détendre un peu
l'atmosphère. C'est qu'au Québec on prend un verre pour s'amuser
et, ailleurs, c'est pour noyer sa peine ou son chagrin. C'est un peu la
différence mais, effectivement, il doit y avoir d'autres
différences que ça. Ça doit être un peu plus
fondamental, mais il demeure que les moyens qu'on s'est donnés pour
améliorer la publicité et pour la contrôler mieux et qu'on
puisse faire de l'éducation, effectivement, des deux côtés
de la Chambre, on concourt et on espère que ça va donner de bons
résultats.
C'est, en fait, à peu près les éléments que
j'avais à apporter concernant la prise en considération de cette
loi. J'espère qu'elle va donner de bons résultats, mais qu'elle
n'est que l'ouverture à des améliorations plus importantes, plus
sensibles, plus grandes concernant cette activité qui est une industrie
et qui est aussi un commerce. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Jonquière. Est-ce que le rapport de la
commission des institutions sur le projet de loi 55, Loi modifiant la Loi sur
les permis d'alcool et d'autres dispositions législatives, est
adopté?
Une voix: Adopté.
Adoption
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Au même article 16
de notre feuilleton, M. le ministre de la Sécurité publique et,
en même temps, ministre des Affaires municipales propose l'adoption du
projet de loi 55, Loi modifiant la Loi sur les permis d'alcool et d'autres
dispositions législatives. J'ai besoin du consentement pour
déroger à l'article 230 de notre règlement, M. le leader
adjoint de l'Opposition.
Une voix: II y a consentement.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): II y a consentement.
Est-ce qu'il y a des interventions?
Une voix: Non.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que le projet de
loi 55, Loi modifiant la Loi sur les permis d'alcool et d'autres dispositions
législatives, est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: alors, m. le président, je vous invite
à appeler l'article du feuilleton que je considère très
important: l'article 26, m. le président.
Projet de loi 102
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 26 de
notre feuilleton, le ministre de l'Éducation propose l'adoption du
rapport de la commission de l'éducation sur le projet de loi 102, Loi
modifiant la Loi sur l'instruction publique et la Loi sur l'enseignement
privé. Alors, je suis prêt à reconnaître le premier
intervenant, M. le ministre de l'Éducation. (21 h 10)
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président. Nous
amorçons une étape qui est importante dans l'adoption de ce
projet de loi, projet de loi qui a été déposé ici,
à l'Assemblée nationale, en octobre dernier et qui se
réfère à un certain nombre de modifications à la
loi 107. Le motif principal pour lequel le législateur est convié
à une telle démarche ce soir, c'est comme suite à l'avis
donné par la Cour d'appel du Québec. On se rappellera que, peu de
temps après l'adoption de la loi 107 par l'Assemblée nationale du
Québec, le Conseil des ministres jugeait opportun de
référer à la Cour d'appel du Québec, sous forme de
demande d'un avis, les dispositions du projet de loi 107 se
référant et portant sur la volonté du gouvernement, et qui
s'inspirent aussi d'une volonté de nos concitoyens et concitoyennes, qui
s'inspirent aussi des mutations de notre société, de changer, de
modifier nos commissions scolaires de confessionnelles à
linguistiques.
Dans cet avis demandé à la Cour d'appel, nous posions un
certain nombre de questions pour lesquelles on a eu des réponses. Mais,
dans son avis, la Cour d'appel du Québec indiquait ou pointait de
façon plus particulière certaines inquiétudes à
l'égard des dispositions de la loi actuelle. Ces inquiétudes, ces
interrogations formulées par l'avis de la Cour d'appel portaient entre
autres sur toute la question de l'exercice du droit pour des
collectivités locales d'exercer leur dissidence, portaient sur cet autre
sujet très important du droit d'intervention de la part de telles
commissions scolaires, dans leur adresse, dans leurs interventions pour les
milieux défavorisés notamment. Des interrogations étaient
formulées aussi en ce qui concerne la garantie ou des emprunts
contractés par les anciennes commissions scolaires représentant
ou s'appuyant
sur des territoires donnés, sujets à être
modifiés.
Le projet de loi 102 apporte les précisions nécessaires
pour donner une réponse exacte, complète aux interrogations
formulées par les honorables juges de la Cour d'appel. Je dois dire que
les échanges que j'ai eus avec les commissions scolaires autant
catholiques que protestantes me permettent de constater, entre autres, que ces
intervenants majeurs au niveau de notre mission éducative au
Québec... Ces gens-ià m'ont dit: M. le ministre, on est
conscients que vous apportez, par la "loi 102, des modifications qui vont dans
le sens des inquiétudes formulées. Ça n'enlève pas,
j'en conviens, le droit pour ces commissions scolaires de se porter en appel
devant la Cour suprême pour recevoir l'avis, la décision de la
Cour suprême. Et on aura l'occasion, évidemment, de faire entendre
la position du Québec et la position du gouvernement du
Québec.
Nous nous référons aussi, dans ce projet de loi, à
des modifications de concordance à être apportées. Nous
aurons constaté que, même si ce projet de loi parle bien,
même si ce projet de loi s'exprime bien... Ce projet de loi, dans son
texte français, représente très très
fidèlement l'intention du législateur. Cependant, on doit
constater que, dans le texte anglais, on se réfère davantage
à une traduction littérale, dans certains cas, qu'à
l'utilisation d'une véritable terminologie qui aurait été
plus appropriée. Donc, plusieurs des modifications, dans le projet de
loi 102, sont purement et simplement des modifications de texte qui ne changent
en rien le contenu dudit projet de loi. D'ailleurs, l'Opposition officielle a
collaboré étroitement à l'étude
détaillée de ce projet de loi, étude qui aura
été très intéressante, qui aura été
très constructive aussi.
Je dois, M. le Président, ouvrir une parenthèse à
ce moment-ci de mon intervention pour saluer, pour souligner la qualité
des échanges qui ont cours à la commission de l'éducation.
Je suis confiant et satisfait de voir un niveau d'échanges très
élevé, très noble, très digne à cette
commission. Je veux, entre autres, saluer la contribution de mes
collègues de la majorité, M. le Président, M. le
député de Verdun, M. le député de la région
d'Anjou aussi et saluer mes honorables collègues de l'Opposition, M. le
député d'Abitibi-Ouest qui, parfois, se veut un peu plus
affirmatif, un peu ronchon parfois même et qui est toujours
délicat, qui est toujours très sincère, très
honnête, très loyal aussi - ça, je dois le
reconnaître - et Mme la députée de Terrebonne qui,
quoiqu'elle a une expérience brève ici au Parlement, fait valoir
son point de vue et fait valoir le point de vue des parents de sa
région, de sa commission scolaire, etc.
M. le Président, ce projet de loi, aussi, prévoit d'autres
dispositions sur lesquelles on aura eu de nombreuses opportunités
d'échanger et, encore une fois, le gouvernement, par la voix du ministre
que je suis, a manifesté de l'ouver- ture, a accepté, somme
toute, en bonne partie les représentations de l'Opposition officielle,
et je me réfère notamment aux dispositions portant sur le droit
pour le ministre de l'Éducation et le gouvernement non pas d'obtenir,
parce qu'on les possède déjà, ces renseignements, mais
d'utiliser les renseignements nominatifs contenus au dossier des
élèves handicapés ou en difficulté d'adaptation et
d'apprentissage pour s'assurer que les 941 000 000 $ que nous dépensons
cette année, près de 1 000 000 000 $ qui sont investis, et c'est
tout à fait pertinent qu'ils le soient, le soient pour ces
élèves, ces fils et ces filles du Québec qui rencontrent
des problèmes d'adaptation et d'apprentissage. On veut être
certains que l'argent qu'on transfère dans nos commissions scolaires du
Québec serve bel et bien pour les fins auxquelles ces sommes sont
votées.
D'ailleurs, j'ai rendu public hier le document de consultation sur la
politique d'adaptation en milieu scolaire et, dans ce document, c'est
très clair, la position du gouvernement du Québec, elle est
claire, elle est connue, le gouvernement du Québec formule très
clairement sa position comme quoi notre société doit tout mettre
en oeuvre pour s'inscrire dans la foulée de la loi 107 qui
prévoit dans son préambule qu'on doit assurer un service
éducatif à chacun de nos enfants du Québec, et ce, quelle
que soit sa condition, quelle que soit sa capacité, quel que soit le
problème auquel il est confronté. Dans ce document qui est en
consultation, j'ai invité les parents... Parce qu'en vertu des
dispositions de l'article 47 du projet de loi les parents ont un rôle de
premier niveau à jouer dans la responsabilité que nous avons
comme société, comme réseau, comme commission scolaire,
comme ministère, pour être certain que chaque enfant en
difficulté d'adaptation ou d'apprentissage ou encore que chaque enfant
handicapé du Québec puisse se voir adresser exactement le
modèle et le cadre de formation, de dispensation et d'acquisition de
connaissances qui lui est particulier. Somme toute, ce que l'on vise, on vise
l'intégration dans nos classes régulières, tout au moins
dans nos écoles régulières, quitte à ce que ce
soit, à l'occasion, dans des classes spécialisées, du plus
grand nombre possible d'enfants et pour tous, évidemment, notre objectif
en est un d'insertion sociale plus poussée, mieux
développée, etc.
Alors, dans ces dispositions, en quoi le projet de loi 102 traite de ce
sujet? On a eu l'occasion d'en débattre. La Commission d'accès
à l'information, comme on le sait, dans un avis qu'elle a donné
à une commission scolaire qui en a formulé la demande, a
décidé que le ministère ne pouvait se prévaloir de
ces renseignements nominatifs pour des fins financières. J'ai
prévu une disposition comme quoi... J'ai été obligé
de le faire, ça n'a pas été de gaieté de coeur,
parce que la Commission d'accès à l'information... C'est une
législation qui suscite très certainement la
fierté de chacun et de chacune des parlementaires
québécois. Cependant, cette modification, j'en ai retardé
l'application au 1er juin prochain, convaincu qu'on peut pousser encore plus
loin de façon encore plus étroite et plus précise les
communications entre le ministère de l'Éducation et la Commission
d'accès à l'information. (21 h 20)
J'annonçais à mes collègues, dont le
député d'Abitibi-Ouest qui était très
intéressé par le sujet, mon intention que le ministère
puisse s'inscrire et déposer une requête pour obtenir un avis dans
lequel, il va de soi, nous allons tout faire, tout écrire ce qu'on peut
écrire pour sécuriser celles et ceux qui se préoccupent de
l'usage qui sera fait de ces renseignements nominatifs et confidentiels.
J'ai tous les motifs de croire que cette modification sera susceptible
de régler le problème, tout comme j'espère de tout coeur
que nous puissions en arriver à un avis, à être
formulé par la Commission d'accès, qui sécurisera le
ministère, parce que si on le fait ce n'est pas parce qu'on veut
être tatillon, ce n'est pas parce qu'on trouve ça restrictif ou
qu'on trouve ça problématique, c'est parce qu'on veut purement et
simplement une chose... Comme ministre de l'Éducation, c'est ma
responsabilité et je dois assumer cette responsabilité devant
cette Chambre et aussi devant nos concitoyens et concitoyennes. Le ministre de
l'Éducation se doit d'être constamment capable de vérifier
si les sommes versées pour ces enfants qui sont en difficulté ne
sont pas utilisées tantôt pour autre chose, au détriment de
celles et de ceux à qui cet argent s'adresse. C'est purement et
simplement ça l'objectif. Si on peut parvenir à obtenir, à
pouvoir se servir de tels renseignements que nous possédons dans nos
codes permanents, c'est très simple, je vais proposer à la
Chambre, comme je m'y suis engagé auprès de mes collègues
de l'Opposition et de la majorité, parce que les députés
de la majorité étaient tout aussi préoccupés,
soyez-en persuadés, messieurs dames, de déposer un amendement
dès l'ouverture de la Chambre, soit le 12 ou dans les premiers jours de
mars prochain, pour qu'on puisse purement et simplement retirer les
dispositions de cette loi, qui n'entrera en vigueur de toute façon
uniquement le 1er juin prochain.
À l'article 292, j'ai référé à ma
volonté très, très claire, d'étudier de
façon très sérieuse, très approfondie aussi toute
la question de la gratuité scolaire. C'est que nos réseaux
publics sont gratuits. On sait qu'est à la base même le concept de
gratuité et d'accessibilité pour tous, quelle que soit la
condition financière des parents. C'était le premier concept de
référence du législateur, ici, en 1964, les
premières années de cette Révolution tranquille qui a
marqué le Québec. C'était le concept de
l'accessibilité qui était le pivot de l'intervention
législative et qui, finalement, aura contribué à
bâtir tout ce réseau moderne, efficace, qui travaille bien
malgré certaines faiblesses - c'est normal - c'est-à-dire le
réseau de l'éducation au Québec.
J'ai donc mis sur pied ce comité en collaboration, suite à
des échanges que j'ai eus avec les parents qui s'en sont
préoccupés. Je les ai rencontrés ces gens-là. Ils
m'ont fait part de leurs préoccupations, de leurs inquiétudes. On
a porté à mon attention la question, qui est touchée plus
particulièrement ici, j'en conviens, des frais de garde dans les
commissions scolaires qui, dans certains cas, très limités quoi,
39 000 élèves seulement, chargent des frais pour assumer les
services de garde sur l'heure du dîner pour les enfants, entre autres, de
l'élémentaire. On se réfère à toute la
question des documents pédagogiques qui sont nécessaires au
cheminement de l'élève dans son année scolaire. On se
réfère aux activités parascolaires aussi et j'ai pris
l'engagement auprès de mes collègues de faire en sorte que la
réflexion et l'analyse de ce groupe de travail se fasse sans que ce soit
sous l'égide de la bousculade, mais que ça se fasse relativement
rapidement pour être en mesure de revenir devant cette Chambre
éventuellement et donner un cadre peut-être, je l'espère,
beaucoup plus précis, mieux défini de toute cette question de la
gratuité dans nos écoles.
Force m'a été cependant d'agir; d'agir dans un sens qui
peut sembler à contre-courant du précepte que je viens de
formuler. Je suis obligé dans le projet de loi 102 de préciser
les dispositions contenues dans l'article 292 de la loi 107 en raison de son
caractère imprécis, parce que ce texte disait: La commission
scolaire assure les services de garde le midi. Bon, point. Il n'était
pas précisé à quelles conditions ces services pouvaient
être assurés. J'avais une manifestation très clairement
formulée de la part de la Fédération des commissions
scolaires par la voix d'une de celles-ci comme quoi on allait demander un
jugement déclaratoire à la Cour suprême pour savoir ce qui
en était réellement et concrètement. Le risque
était énorme en ce qui me concerne, que la décision aille
dans un sens ou dans un autre. J'ai préféré soumettre
à l'adoption de la Chambre une disposition qui établit que la
commission scolaire est habilitée à définir, à
préciser et à établir les conditions financières
pour lesquelles les services de garde sont assumés. J'ai cependant
indiqué au député que ma volonté était de
faire en sorte que le tableau demeure le plus statique possible tout au moins,
c'est-à-dire que les commissions scolaires qui sont nombreuses, parce
que là, on réfère à quoi, à 330 000
élèves du primaire qui sont gardés le midi gratuitement
dans nos écoles, j'ai manifesté le voeu que ça demeure.
C'est d'ailleurs dans ce sens-là que M. Guy d'Anjou, le président
de la Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec, a communiqué avec ses membres pour les inviter à
ne pas s'associer à une démarche de bouleversement en cours
d'année, c'est-à-dire que
l'objectif est très simple: là où les services sont
gratuits, qu'ils le demeurent, premièrement.
Deuxièmement, j'ai signé personnellement hier une lettre
adressée à tous les présidents des commissions scolaires
du Québec leur demandant de ne pas changer du jour au lendemain les
règles, même si les dispositions de la loi s'appliquent, et j'ai
évidemment eu la même démarche auprès de
l'Association des commissions scolaires protestantes du Québec. J'ai
rencontré ces bonnes gens, je leur ai fait part de mon intention et j'ai
appuyé cette intention d'une lettre signée par moi, comme
ministre de l'Éducation, à chacune des commissions scolaires, et
nos partenaires se sont inscrits dans la même lignée par des
démarches auprès de leurs membres, elles aussi.
M. le Président, voilà l'essentiel du projet de loi. Deux
choses que je tiens à souligner aux députés et
particulièrement au député d'Abitibi-Ouest. J'avais
évoqué, au moment de l'étude du projet de loi article par
article, la possibilité qu'un amendement puisse être
apporté à ce moment-ci, avec comme objectif de permettre à
nos concitoyens et concitoyennes de payer leur compte de taxe scolaire de la
même façon, selon la même méthode qu'on peut le faire
au niveau municipal, c'est-à-dire par le paiement de deux versements, un
versement qui, généralement, vient à une période de
l'année et le deuxième versement, à une autre
période, pour les motifs que, un, c'est vrai que le compte de taxe
scolaire, dans un nombre important de commissions scolaires du Québec, a
augmenté... J'ai rencontré la difficulté suivante.
Vous savez, M. le Président, sur le territoire de 111e de
Montréal, on a le Conseil scolaire de 111e de Montréal qui
chapeaute les huit commissions scolaires de IHe, des commissions scolaires qui
ont des droits, des commissions scolaires qui ont des droits aussi en vertu de
la Constitution canadienne. Dans l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique de 1867, d'ailleurs, c'est très clair, les commissions
scolaires protestantes et catholiques, par leur structure, non pas parce
qu'elles sont protestantes ou catholiques, mais parce qu'elles sont des
commissions scolaires, se sont vu confier des droits, accorder des droits, des
droits fondamentaux. Ces commissions scolaires, au nombre de huit, acceptent
par leur loi constitutive de 1972, si ma mémoire est fidèle, que
le Conseil scolaire remplisse la responsabilité de recevoir l'argent
payé par les contribuables. Ce qui se fait là-bas est très
bien, en ce que les intérêts provenant des placements à
court terme du Conseil scolaire de lUe de Montréal, qui sont en quelque
sorte des revenus, sont redistribués pour des fins éducatives,
ça va de soi, mais avec une ventilation, une affectation de sommes qui
s'adresse plus particulièrement aux milieux défavorisés,
et c'est bien et c'est noble qu'il en soit ainsi.
Or, le problème auquel j'étais confronté
à
Montréal est très simple. Il y avait donc un risque de
diminution substantielle des revenus, dans un premier temps. J'ai
rencontré le président du Conseil scolaire de l'île de
Montréal, M. Mongeau, hier, d'ailleurs ici, au Parlement; il a
porté à mon attention certaines inquiétudes, et la
principale inquiétude du Conseil scolaire était très
simple. C'est que, tel que le projet d'amendement était
rédigé, ce projet de texte disait à peu près ceci:
Que toute commission scolaire pouvait décider, un, du principe: est-ce
que, chez nous, dans notre commission scolaire, on accepte que le compte de
taxe soit payé en deux versements ou si on maintient le statu quo, un
seul versement? Autre élément, la commission scolaire pouvait
elle-même décider du plancher de taxes à payer avant de
pouvoir le verser en deux versements. On sait que dans le monde scolaire, si ma
mémoire est fidèle, ça va à près de 300 $,
c'est-à-dire que ce qui est en bas de 300 $ doit être payé
en un seul versement. (21 h 30)
Alors, ce que le Conseil scolaire de IHe de Montréal m'a
indiqué, c'est très simple: M. le ministre, nous avons huit
commissions scolaires. Des commissions scolaires qui sont plus grosses les unes
que les autres, dans certains cas. Deux grosses commissions scolaires et un
certain nombre d'autres qui sont plus petites, mais tout aussi importantes. Si
une commission scolaire décide de faire payer en un versement,
c'est-à-dire de maintenir le statu quo, si une autre décide de
faire payer en deux versements à partir d'un barème donné
et qu'une troisième, elle, décide de faire payer en deux
versements mais à partir d'un autre barème, ça risque de
devenir complètement impossible à administrer.
J'ai donc étudié la possibilité de présenter
un amendement en vertu duquel, dans le cas spécifique de l'île de
Montréal, ce serait le Conseil scolaire lui-même, qui est
formé évidemment de représentants de ces huit commissions
scolaires et des représentants du gouvernement, comme on le sait, ce
serait le Conseil scolaire lui-même et uniquement lui qui serait
habilité à décider sur le fond de cette question et aussi
dans sa forme: est-ce que les comptes doivent être payés en un
seul ou en deux versements, premièrement, et, deuxièmement,
à partir de quel montant un citoyen peut-il payer en deux
versements?
Ça semblait la formule la plus intéressante, la plus
efficace. Sauf qu'après analyse juridique on constate qu'au lendemain de
l'adoption d'une telle mesure je suis persuadé que cette disposition
ferait l'objet d'une contestation devant les tribunaux parce que ça
viendrait enlever un droit qui, j'en conviens, jusqu'à maintenant,
était partiellement délégué au Conseil scolaire,
mais là qui serait purement et simplement enlevé et qui se
réfère à une question de fond.
Donc, voyant ça, l'autre alternative qui était possible -
j'ai eu l'occasion d'y référer
avec le député d'Abitibi-Ouest - c'était d'adopter
une mesure prévoyant le droit d'échelonner sur deux
périodes le paiement des taxes scolaires pour toutes les commissions
scolaires du Québec, sauf celles de 111e de Montréal. Sauf que,
M. le Président, je ne veux pas agir sur le coup de la
précipitation. Ça n'a jamais été ma façon de
faire. J'ai été saisi de cette possibilité-là
aujourd'hui seulement, à partir du moment où j'ai constaté
que mes avis juridiques étaient très clairs concernant
l'impossibilité de confier le tout au Conseil scolaire. J'ai
proposé privément et je réitère à mes
collègues, ce soir, et plus particulièrement au
député d'Abitibi-Ouest...
La session va ouvrir au mois de mars prochain, le 12, à moins que
je la convoque comme leader du gouvernement, au nom du premier ministre, d'ici
là. Mais notre calendrier prévoit qu'on reprend le 12 mars
prochain. Je vois, d'ailleurs, que certains de mes collègues vont
quitter la Chambre vendredi soir, ici, à minuit, avec beaucoup de
chagrin et on sera privés du plaisir d'échanger ensemble d'ici au
12 mars, tout au moins. Le 12 mars, on va ouvrir. Et, entre le 12 mars et le 21
juin, nous aurons le temps d'adopter...
C'est bien, le document que vous lisez, madame. Ce serait certainement
susceptible de vous inspirer, soit dit en passant. Et je ferme la
parenthèse. Pour le bénéfice de celles et ceux qui nous
écoutent, Mme la députée est en train de lire un article
qui me concerne.
Ceci étant dit, on aura le temps de la modifier, la loi. On aura
le temps d'apporter les modifications relatives aux dispositions concernant la
Commission d'accès à l'information parce que j'ai tous les motifs
de croire, et je l'espère très sincèrement, qu'on pourra
s'entendre autrement que par une disposition comme celle-là.
Deuxièmement, c'est avec beaucoup d'intérêt que, d'ici le
12 mars, on va regarder toute la question des comptes de taxes pour que ces
mesures puissent être votées par l'Assemblée nationale
avant le 1er juin parce que je sais pertinemment que les commissions scolaires
ont besoin d'être informées complètement au plus tard le
1er juin pour élaborer leur système et leur méthode pour
l'envoi des comptes de taxes, la perception des taxes scolaires.
Alors, M. le député de l'Opposition, M. le
Président, j'indique en ce faisant au député
d'Abitibi-Ouest: Soyez confiant. C'a bien été jusqu'à
date. Ça va continuer comme ça et je vous invite à voter
pour le projet de loi.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): merci, m. le ministre de
l'éducation. sur le même sujet, je cède la parole à
m. le député d'abitibi-ouest et leader adjoint de l'opposition
officielle.
M. François Gendron M. Gendron: Oui, M. le
Président. Je voudrais quand même indiquer à ce moment-ci
que nous en sommes à la discussion ou communément à ce
qu'on appelle l'adoption du rapport du projet de loi 102, projet de loi
concernant des modifications à la Loi sur l'instruction publique et
à la Loi sur l'enseignement privé. Lorsqu'on a à
apprécier un rapport provenant d'une commission, règle
générale, notre responsabilité parlementaire, c'est de
parler un peu de ce qui s'est passé en commission, peut-être moins
féliciter ceux qui n'ont pas ouvert la trappe. C'est de parler
véritablement de ce qui s'est discuté, des sujets sur lesquels on
a eu à faire des débats pour améliorer le projet de
loi.
Mais, pour nos auditeurs, parce que je sais qu'il y en a quelques-uns,
même si souvent on nous convie à des heures tardives par manque de
planification, absence de stratégie, absence de ligne de direction de ce
gouvernement-là, pour les gens qui nous écoutent, parler du
rapport de la commission sur le projet de loi 102, ça ne dit pas
grand-chose. Le projet de loi 102, il faut rappeler que, globalement, ça
ne vire pas le monde à l'envers, hein! Parce que, d'abord, ce serait
impossible, il vient de ce gouvernement-là. Alors, imaginez-vous, ce
n'est pas possible que ça change grand-chose. C'est des gens qui aiment
bien mieux ne pas bouger beaucoup, puis ne pas faire grand-chose. Donc,
première impossibilité, ça ne peut pas être des
changements fondamentaux dans l'ensemble de ces articles.
C'est un projet de loi qui, rapidement, là, sur un très
grand nombre d'articles, modifie le texte anglais pour l'adapter,
supposément mieux, à des définitions techniques. J'ai
laissé ça à nos amis d'Equality Party; eux autres,
ça les intéresse, ces questions-là; alors, je leur ai
laissé ça parce que, moi, 20 et quelques articles pour dire: Bon,
bien, là, le texte anglais, dorénavant, il va vouloir dire plus
précisément telle affaire plutôt que telle autre,
permettez-moi de vous indiquer que je n'ai pas beaucoup de temps à
mettre là-dessus.
Là où il fallait mettre un peu plus de temps parce que
c'était fondamental, c'est de regarder si c'est bien vrai
également qu'il y a une vingtaine d'articles qui se rapportent à
des sujets litigieux suite à des jugements de cour, parce que ces
gens-là aiment ça que la Cour Suprême décide de ce
qu'on fait au Québec. Ces gens-là aiment ça. D'ailleurs,
on vient nous rappeler encore la vieille Constitution d'il y a moult
années, pour ne pas rappeler l'époque, parce que ça
n'aurait pas de bon sens. Les gens ne nous croiraient pas que ça fait si
longtemps qu'on a une vieille Constitution qui n'a pas été
adaptée à notre réalité québécoise.
Mais, malheureusement, c'est bien ça, M. le Président, et il y a
un certain nombre d'articles qui vont dans la ligne continue de ce
gouvernement-là qui s'appelle la ligne logique, implacable du
gouvernement en matière de confessionnalité, en
matière de droits protégés par la vieille
Constitution.
J'entendais le ministre tantôt, il dit: S'ils sont
protégés, ce n'est pas parce qu'ils sont ci ou ça, c'est
parce qu'il y a des commissions scolaires. C'est gros. Je veux bien croire
qu'ils veulent abandonner le métro, mais des fois ils ont des grosses
images. Alors, c'est gros parce que ce n'est pas pour ça; c'est que dans
la vieille Constitution, effectivement, les droits protégés
étaient liés aux aspects confessionnels parce que, dans le temps,
il y avait des commissions scolaires catholiques, puis des commissions
scolaires protestantes. Il y avait des droits prescrits à la
Constitution pour les catholiques, puis il y avait des droits prescrits aux
protestants, puis, comme dans une société pluraliste tout
l'avènement des chartes doit protéger ce qu'on appelle le droit
à la dissidence, qui est un droit fondamental, bien, ça prend des
dispositions pour s'assurer que ceux qui voudraient être dissidents,
c'est-à-dire être ni d'une confession ni de l'autre, puissent
s'exprimer et il y a des dispositions là-dessus. Ça va, il n'y a
pas de drame là-dessus, il n'y a pas de problème.
Le ministre a été très peu volubile sur quatre
articles majeurs. Le projet de loi, dans le fond, il a trois noyaux de
résistance majeure et, même si j'ai entendu son aimable
invitation, à la fin, d'inviter notre formation politique à voter
en faveur, on ne pourra pas voter en faveur parce que, nous, on ne peut pas
voter pour des brimades aussi graves que celles qui existent dans le projet de
loi 102. Et, là, je veux parler plus spécifiquement, M. le
Président, des quatre articles qui viennent modifier la Loi sur
l'instruction publique, mais précisément au chapitre des abus et
des excès que le ministre veut commettre envers la loi d'accès
à l'information. Là, on est dans le très sérieux.
On est dans le très sérieux. (21 h 40)
Lors de l'étude article par article, on s'est rapidement rendu au
coeur du débat. On a rappelé notre position de principe sur les
deux aspects majeurs du projet de loi, à savoir - ça, c'est
important - un: est-ce que, oui ou non, nous, nous sommes d'accord avec des
dérogations à la Loi sur l'accès aux documents des
organismes publics et sur la protection des renseignements personnels?
Ça, ça veut dire les articles 8, 10, 55 et 56. Bien, je vais
expliquer ma réponse, mais rapidement, nous, on dit: Non, on n'est pas
d'accord. Parce que, quand un ministre est à peu près le seul
à avoir le pas, notre responsabilité à nous, c'est de lui
dire: Écoute, il doit y avoir un problème, parce qu'il y a juste
toi qui as le pas dans ce projet de loi là. C'a été
confirmé par les commissions scolaires; même des collègues
ministres - j'y reviendrai tantôt - pressent le ministre de
l'Éducation d'accepter un compromis sur le droit à la vie
privée des élèves.
Vous avez eu toute la ribambelle d'organis- mes crédibles, comme
la Ligue des droits de la personne, bien sûr, la Commission
d'accès, la CSN, la CEQ et une série d'autres organismes. Pas
plus tard que ce soir encore, M. le Président, je recevais un fax. Je
vous en lis juste un petit bout: "La table de concertation des services
éducatifs du Québec et des organismes de promotion de personnes
handicapées de la région de Montréal considère
qu'il pourrait être sans doute pertinent pour le ministre de
l'Éducation du Québec d'avoir accès à une banque de
renseignements nominatifs sur les élèves handicapés ou en
difficulté d'adaptation ou d'apprentissage." Mais regardez ce qu'ils
ajoutaient: "De notre point de vue, cependant, il faut surtout que le montant
rattaché à un élève handicapé ou en
difficulté soit transparent et nous permette d'identifier les services
mis en place au niveau de la commission scolaire pour répondre à
ses besoins." Et ils ajoutaient: "Nous ne pouvons être en accord avec
l'article 8 tel que formulé dans le projet de loi 102, lequel article
donne au ministre un pouvoir qui n'est pas suffisamment circonscrit, qui n'est
pas suffisamment balisé, qui n'est pas suffisamment
précisé, déterminé, et dont les effets sont
difficilement mesurables."
Là, ils donnaient la liste des membres du
télégramme. Moi, je prétends que, dans notre jargon, ce
qu'on appelle un telbec ou un fax, c'est l'équivalent d'un
télégramme dans la télégraphie moderne, dans le
monde moderne des télécommunications. Sont membres de la table de
concertation - ça, c'est pas mal plus large que le caucus du Parti
libéral, c'est pas mal plus grand que le Conseil des ministres:
l'Association de paralysie cérébrale du Québec, le
Regroupement de parents pour déficients mentaux, le Comité
régional des associations en déficience intellectuelle,
l'Association de Montréal pour la déficience intellectuelle,
l'Association québécoise du syndrome de RETT, le Regroupement
pour les aveugles et amblyopes du Québec, la Société
québécoise de l'autisme, chapitre de Montréal, la
Corporation L'espoir du déficient et la Solidarité de parents de
personnes handicapées physiques moteur. Bien, je n'ai pas eu le temps de
compter, mais je tiens à vous dire que tous ces organismes-là
représentent un très grand groupe de jeunes qui sont
concernés par les dispositions auxquelles le ministre veut se
soustraire.
Je vous disais que ces gens-là, M. le Président, vous
disent: On ne peut accepter le projet de loi 102 dans sa forme actuelle, en
particulier à l'article 8. Je ne suis pas sûr qu'il y ait beaucoup
de parlementaires qui savent ce qui est écrit dans l'article 8 et pas
plus les membres de la commission de l'éducation du côté
ministériel, parce qu'ils disaient qu'eux aussi avaient de profondes
inquiétudes. Moi, je n'ai rien contre ça, de profondes
inquiétudes, mais en autant qu'on les exprime. Alors, il n'y a personne
qui a dit un mot; j'étais là, il n'y a personne du
côté ministériel qui s'est ouvert la
trappe. Alors, pour des gens qui avaient de profondes
inquiétudes, je ne sais pas à quel endroit ils les ont
manifestées, sûrement pas à la commission. Là, on a
à discuter du rapport de la commission de l'éducation qui a
étudié le projet de loi. Imaginez-vous, M. le
Président!
L'article 8 dit ceci: "Malgré les articles 67.3 et 124 de la Loi
sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection
des renseignements personnels, le ministre détermine seul - le ministre
détermine seul - les règles et les conditions applicables
à un fichier de renseignements personnels contenant les renseignements
visés au deuxième alinéa." Les renseignements
visés, pour ceux qui ne le sauraient pas, c'est la communication de tout
renseignement nominatif. Il n'y a aucune restriction. Le ministre veut savoir
ce qu'il veut savoir. L'obligation, c'est de lui fournir ce renseignement.
Je tenais, M. le Président, à vous rappeler cet article 8
parce que je suis en train de vous dire que, nous, ça nous fait bien de
la peine, mais on ne pourra pas souscrire à des dérogations aussi
majeures que l'article 8, l'article 10, l'article 55 et l'article 56. Et je
vous dis que la communauté qui nous appuie est large. Des
éditoriaux aussi durs que des assauts contre la vie privée.
L'ombre du "Big Brother" plane sur deux projets de loi. Le "Big Brother", il
est peut-être plus petit que l'article le disait, mais c'est le
même personnage qui vient de faire son exposé. Selon un editorial
de Gilles Lesage, il disait ceci: On est d'accord que le ministre puisse
contrôler son enveloppe budgétaire, mais pas au mépris du
respect de la vie privée et de l'intrusion dans des dossiers
confidentiels. Le ministre s'apprête à faire d'intolérables
abus de pouvoir. Il ne faut pas laisser faire cet émule du "Big
Brother". Alors, en ce qui nous concerne, nous, c'est clair qu'on ne le
laissera pas faire. Et les journaux étaient pleins.
Le président de la Commission d'accès a dit: M. le
ministre, vous allez trop loin. Je voudrais juste vous lire quelques
éléments d'une lettre qu'il faisait parvenir publiquement sur ce
qu'on appelle le projet de loi 102: "Avis de la Commission d'accès
à l'information sur le projet de loi 102." Il disait ceci: "La
Commission d'accès à l'information alerte l'Assemblée
nationale." C'est rare que des lettres commencent comme ça. Alerter
l'Assemblée nationale, ça veut dire que c'est sérieux.
C'est grave quand on dit à tous les parlementaires: On vous alerte parce
qu'il se passe quelque chose de grave. Et, effectivement, le président
de la Commission d'accès continuait: Le ministre de l'Éducation
veut, par sa loi, que deux ministères, celui des Transports et celui de
l'Éducation, puissent se soustraire aux dispositions prévues
à la Commission d'accès. "Ces dérogations accorderaient
aussi aux mêmes ministères le droit absolu de régir l'usage
de ces renseignements nominatifs sans égard au pouvoir de surveillance
de la Commission d'accès."
Un peu plus loin, il disait ceci: "La Commission a établi que la
cueillette des renseignements nominatifs par le ministère
s'avérait conforme à l'article 64 de la Loi sur l'accès
uniquement pour l'évaluation des programmes offerts aux
élèves handicapés ou en difficulté d'apprentissage
ou d'adaptation. En conséquence, la Commission a statué que
seules les personnes du ministère, chargées de
l'évaluation des programmes offerts aux élèves en
difficulté d'apprentissage et aux élèves
handicapés, peuvent avoir accès à ces renseignements sous
forme nominative."
Il ajoutait: "Par contre, la Commission a jugé que ces
mêmes renseignements n'étaient pas nécessaires aux
opérations de vérification du ministère quant au
financement de ses programmes d'adaptation scolaire. À cet égard,
la Commission estime que si le ministère de l'Éducation
soupçonne que les commissions scolaires ne lui transmettent pas des
données fiables... Et, quand un ministre ou un ministère
soupçonne ses partenaires, il y a d'autres moyens qui sont prévus
pour faire la lumière sur les soupçons soulevés. "Quant
aux renseignements relatifs à l'enseignement moral et religieux, la
Commission est d'avis que rien dans la Loi sur l'instruction publique ne
justifie la nécessité pour le ministère de recueillir ces
renseignements sous forme nominative. Ce n'est pas parce que le
ministère a la charge d'une enveloppe budgétaire que ça
lui permet de recueillir des renseignements nominatifs aussi sensibles que ceux
concernant le handicap et la pratique religieuse."
Voilà l'essentiel de l'avis de la Commission d'accès. Et
ça a donné, cet avis - je l'ai mentionné tantôt: Des
ministres du gouvernement pressent Pagé d'accepter un compromis sur le
droit à la vie privée des élèves. Il a dit non.
Ça a donné: Les commissions scolaires demandent de retarder
l'étude du projet de loi 102. Bien, ça n'a sûrement pas
marché, on est en train d'en discuter, on est en train de l'adopter dans
une fin de session et, ils nous le demandent, rapidement, à la vapeur
et, autant que possible, unanimement. (21 h 50)
La Fédération des commissions scolaires doit
connaître un peu ses membres. Les commissions scolaires disent: On veut
retarder le projet de loi 102 spécifiquement aux articles 8, 10, 55 et
56. Les indiscrétions du ministre de l'Éducation soulèvent
la colère de la CEQ. Moi, la CEQ, je suis obligé - et je suis
obligé avec plaisir, ce n'est pas une obligation qui me
déplaît - de la respecter dans le monde de l'éducation,
parce qu'elle est en contact constant avec ses membres et elle sait un peu de
quoi elle parle. Et, sur ce sujet-là, elle trouve que le ministre va
trop loin. "Des assauts contre la vie privée", en editorial et, je l'ai
mentionné tantôt, la Ligue des droits et ainsi de suite. J'avais
d'ailleurs une
lettre de la Fédération: M. Pagé, M. le ministre de
l'Éducation - c'est dans la lettre de la Fédération - par
conséquent, je vous demande de retarder l'étude des articles 8 et
10 du projet de loi 102. La prétention de la Fédération
des commissions scolaires était à l'effet même que le
ministre dispose d'autres outils pour arriver aux mêmes fins. Il nous a
répondu qu'il ne voulait pas les regarder.
Alors, moi, M. le Président, sur les dispositions, je pourrais
faire une heure; le règlement ne me le permet pas. Alors, je ne peux pas
aller plus loin parce que j'ai d'autres questions à toucher. Mais je
tiens à vous indiquer que, sur ces aspects-là, c'est
évident que le ministre n'aura pas notre appui.
Je veux bien admettre qu'en commission parlementaire il a souscrit
à un amendement que nous avons sollicité, mais l'amendement qu'on
avait sollicité, il a été passablement charcuté.
Nous autres, c'était non à 8, 10, 55, 56 parce que tu peux
l'avoir autrement. L'amendement que le ministre a déposé, c'est
un amendement qui dit: Permettez-moi de faire mon travail comme ministre pour
ce qui va venir dans le temps. Moi, j'ai été renversé. Je
le savais, parce que j'avais communiqué - ça ne me gêne pas
de le dire publiquement - avec le président de la Commission
d'accès. Mais c'est en commission qu'on a appris que jamais le ministre
de l'Éducation n'avait fait une demande formelle à l'égard
de son projet de loi, à savoir la nécessité de recueillir
des informations sur les élèves handicapés, mais sur des
bases pour lesquelles il y aurait eu une discussion avec le président de
la Commission d'accès afin que ce type de renseignements soient
éventuellement donnés, mais avec un contrôle, avec des
dispositions très restrictives qui auraient sécurisé tous
les intervenants. Le ministre nous a dit: Non, laissez-moi faire, j'ai la
vérité révélée. Tous les gens sont contre,
mais faites-moi confiance. Il a dit, d'ailleurs, que, là, on va se
quitter probablement pour un bout de temps, mais qu'à la session de mars
il sera très ouvert pour regarder ça. Alors, en ce qui nous
concerne, sur ces dispositions-là, nous: pas question.
Le deuxième point que je voudrais toucher parce que je trouve
qu'il est important, c'est la question des frais de surveillance des
élèves sur l'heure du midi, à l'article 9. Nous autres,
notre position n'est pas compliquée sur les frais de surveillance. On
dit: Si, en 1990, un État, un Québec moderne n'a pas les moyens
d'assumer... On ne demande pas de payer gratuitement le dîner des
élèves, là; on demande d'assurer la surveillance pour ceux
qui veulent dîner à l'école et pour ceux qui n'ont pas le
choix, qui n'ont pas d'autre alternative. Parce qu'il y a un paquet
d'étudiants, de jeunes enfants, de jeunes élèves, au
Québec, qui n'ont pas d'autre alternative que de demeurer à
l'école sur l'heure du dîner. Et, là, on parlait du
coût du paiement de la surveil- lance. Et le ministre nous a dit: Allez
vous faire cuire un oeuf, il n'est pas question que les commissions scolaires
assument, pour ces élèves-là, le coût de la
surveillance.
Je ne pensais pas qu'on était en 1920. Je ne pensais pas qu'il
était d'accord avec les popotes roulantes, au niveau des écoles.
Moi, je pensais que c'était plus sérieux que ça,
l'éducation, au Québec, et qu'en conséquence il
était légitime que le gouvernement du Québec puisse au
moins payer, assumer les coûts de la surveillance des
élèves qui ont - je le répète - l'obligation de
demeurer à l'école. Et, à ce niveau-là, on
n'était pas les seuls à penser comme ça. La
Fédération des comités de parents disait: Nous, on exige
la gratuité de la surveillance du midi, et ils ajoutaient: Les parents
sont trahis par le projet de loi 102. Les parents devront payer pour la
surveillance à l'école le midi. Ça n'a pas de bon sens, M.
le Président. Ça n'a pas de bon sens et on ne peut pas marcher
là-dedans. Alors, c'est évident qu'à ce niveau-là
le ministre ne pourra pas avoir notre appui, parce que la surveillance du midi,
nous autres, on dit: Ça serait un minimum.
Il nous a dit: Je vais regarder ça. Je suis nouveau ministre.
J'ai commandé une étude sur la gratuité des services et,
là, il a tout brassé et il a dit: Je vais regarder ce qui peut
être gratuit. Là, écoutez, on pourrait s'en parier de la
gratuité à l'élémentaire, au secondaire, c'est
devenu une farce, hein? Pour ceux qui ne le sauraient pas, c'est devenu une
farce. Au collégial et à l'université, tout le monde le
savait, mais il y a encore du monde qui pense qu'au primaire et au secondaire,
c'est gratuit. Quand on regarde les cahiers d'exercice, quand on regarde les
coûts pour l'habillement, quand on regarde les coûts pour les
espadrilles et quand on regarde les coûts pour la tenue spécifique
pour les cours d'éducation physique, quand on ajoute la surveillance du
midi qui, dorénavant, sera assumée par les parents, si on parie
encore de gratuité, on est dans le domaine du rêve, on est dans le
domaine de l'imaginaire, on n'est pas dans le réel. Et, dans ce
sens-là, nous, on n'était pas d'accord.
Il y a également deux autres points sur lesquels je vais insister
moins longuement. On avait également indiqué au ministre qu'il
aurait dû profiter des modifications au projet de loi pour arriver avec
une proposition d'un régime pédagogique pour les
élèves adultes, parce que le régime pédagogique qui
existe pour les élèves du cours régulier n'a rien de
commun avec la demande légitime et constamment
répétée de plusieurs adultes qui sont en formation
continue d'avoir un régime pédagogique qui leur est propre. Le
ministre nous a dit qu'il n'était pas prêt, qu'il fallait regarder
ça. Écoutez, dans des conditions comme ça, on ne peut pas
faire un long plat et un long laïus. Le ministre a dit: Écoutez,
moi, je ne suis pas prêt à considérer ça
et je vais procéder par instruction, j'ai le droit de le faire.
Et la réponse, c'est oui; oui, il a le droit de le faire. Il va
continuer de le faire par instruction.
Un dernier point dont je voudrais parler, M. le Président, dans
les quelques minutes qui me restent, c'est toute la question des amendements
que le ministre avait indiqué qu'il nous proposerait. Contrairement
à ce qu'il a dit là-dessus, j'ai été très
surpris, mais il faut prendre la parole du ministre, quand il a dit: C'est
aujourd'hui que j'ai pris connaissance, que j'ai été saisi de
demandes de certaines commissions scolaires à l'effet que le paiement de
la taxe soit étalé en plus d'un versement. Ça ne se peut
pas. J'ai des telbecs, adressés au ministère de l'Education, par
l'Association des commissions scolaires de la région de
Laval-Laurentides-Lanaudière, il n'y a pas juste une commission scolaire
là-dedans. D'ailleurs, je vois une couple de collègues ici qui
viennent de cette région-là. Le même telbec qu'il m'a
envoyé, pensez-vous que le ministre ne l'a pas? Et la date, ce n'est pas
aujourd'hui, c'est le 11 du douzième mois; alors, le 11 du
douzième mois, ce n'est pas aujourd'hui. Donc, ce n'est pas vrai qu'il a
été saisi aujourd'hui seulement de cette demande-là. C'est
une demande qui est dans le portrait depuis une dizaine de jours. Ça ne
serait pas compliqué si on avait de temps en temps une vue autre que la
vue mur-à-mur de l'ensemble du Québec.
Il nous a expliqué que, pour le Conseil de l'île, il y
avait des inconvénients, et il a raison. Je lui donne raison,
j'étais d'accord. En commission parlementaire, quand il en a
été question et qu'il a déposé ses amendements,
nous en avons pris connaissance et, si on avait eu l'occasion d'en
débattre, on aurait indiqué au ministre: Ne procédez pas
de la même façon pour le Conseil de IHe que le reste des
commissions scolaires du Québec parce que ce n'est pas pareil. Nous, on
savait ça. Moi, comme critique, en tout cas, je sais ça depuis un
bon bout de temps, que le Conseil de lUe n'a pas les mêmes
responsabilités que les autres commissions scolaires et, en
conséquence, n'arrivez pas avec une disposition uniforme dans votre
projet de loi parce qu'il va y avoir des problèmes.
Là, le ministre dit: Non, moi je laisse tout tomber. Les
amendements qu'on a déposés, oublie ça, fais-moi
confiance, au mois de mars ou avril, on va regarder ça. Il a le droit,
encore là, d'agir comme ça, mais quand les devoirs sont bien
faits et qu'il y a des demandes qui nous sont faites pour modifier le projet de
loi dans le sens des revendications légitimes de certains intervenants,
moi, c'est ma responsabilité de le rappeler et c'est ma
responsabilité, dans les cas où je suis d'accord, de l'indiquer.
(22 heures)
Dernier commentaire. J'aurais souhaité que le ministre regarde
également la possibilité que certaines commissions scolaires -
parce que je pourrais en citer plusieurs ici qui l'ont demandé -
puissent permettre par entente que la perception des taxes scolaires, puisque
ce gouvernement-là a décidé de ne plus assumer ses
responsabilités en éducation et de pelleter dans la cour du champ
de la fiscalité municipale quelque 360 000 000 $ aux commissions
scolaires... Bien, dorénavant les commissions scolaires sont prises pour
collecter des taxes. Même si on est contre et qu'on trouve que ça
n'a pas d'allure qu'elles soient prises pour collecter des taxes, il devrait au
moins permettre à celles qui veulent le faire par entente avec d'autres
que ça devienne possible. Il n'a même pas regardé la
possibilité de ces amendements-là et il nous demande de voter en
faveur du projet de loi.
Alors, c'est évident, M. le Président, que, nous, on s'est
prononcés contre le principe parce que la brèche contre
l'accès est trop forte. De toute façon, quand un ministre, la
première fois qu'il sort un projet de loi là-dessus, dit: La
Commission soutiendra ce qu'elle voudra, nous irons de l'avant dès la
semaine prochaine avec le projet de loi 102 qui nous permettra d'accéder
à ces informations, je suis prêt à défendre mon
projet de loi n'importe où, ça signifie que de l'ouverture, il
n'en avait pas épais, il en avait pas mal mince. On l'a vu avec
l'amendement. L'amendement c'est: Je vais discuter avec eux autres et on
verra.
Alors, au niveau de ces dispositions-là, M. le Président,
c'est évident qu'on est contre et pour les motifs que je viens
d'expliquer en conclusion, quatre raisons pourquoi on est obligés de
voter contre: brèche trop importante au niveau de l'accès et pas
de conviction que le ministre a spécifiquement besoin de ces
informations-là pour du contrôle budgétaire. On n'a pas
cette garantie-là. Surveillance du midi: inadmissible que l'État
québécois n'assume pas la surveillance du midi pour au moins les
élèves qui ont l'obligation de demeurer à l'école.
Il n'y en a à peu près que 34 000. On ne me fera pas accroire
qu'on est assez pauvres et qu'on est dans une société tellement
ressemblant à des pays sous-développés pour ne pas assumer
la surveillance du ministre.
Troisième raison: Aucun amendement concernant des demandes
d'étalement à partir du moment où ils ont voulu que les
commissions scolaires aillent dans le champ de taxation municipal. Bien, ils
devraient permettre l'étalement. Dernier élément: On va
voter contre parce qu'on aurait souhaité également que les
commissions scolaires qui veulent le faire par entente puissent le faire;
ça ne semble pas, pour le moment, être envisagé.
Alors, pour ces motifs, M. le Président, et en étant
convaincus d'avoir l'appui de beaucoup d'organismes qui se sont
exprimés, dans la forme qu'il a, le projet de loi 102, même si
c'est exact qu'on a fait du bon travail en commission, on a fait du bon travail
en termes de gens sérieux,
honnêtes, objectifs, mais le contenu même du projet de loi,
dans sa facture essentielle, a la même apparence qu'il avait lorsqu'on
l'a étudié au niveau du principe et on a voté contre son
principe, en conséquence, on va voter contre le rapport.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition
officielle. Cette intervention met fin à notre débat sur la
présente étape. Est-ce que le rapport de la commission de
l'éducation sur le projet de loi 102, Loi modifiant la Loi sur
l'instruction publique et la Loi sur l'enseignement privé, est
adopté?
Des voix: Adopté.
Des voix: Adopté sur division.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Sur division. M. le
leader du gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, je reviens et je vous
invite à appeler l'article 17 du feuilleton.
Projet de loi 81
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 17 de
notre feuilleton, M. le ministre du Travail propose l'adoption du rapport de la
commission de l'économie et du travail sur le projet de loi 81, Loi
modifiant le Code du travail, ainsi que les amendements transmis par M. le
ministre du Travail en vertu de l'article 252 du règlement, amendements
déclarés recevables. Je suis prêt à entendre le
premier intervenant, M. le ministre du Travail.
M. Normand Cherry
M. Cherry: Merci, M. le Président. On se souviendra que,
le 12 décembre dernier, je sollicitais l'appui des membres de cette
Assemblée en vue de l'adoption du principe contenu dans le projet de loi
81, Loi modifiant le Code du travail, projet que mon prédécesseur
présentait à l'Assemblée nationale le 20 juin de cette
année.
Ayant reçu cet appui, nous avons débattu ce projet article
par article à la commission parlementaire de l'économie et du
travail le 14 décembre dernier. À cette occasion, de l'accord
unanime des membres présents, il nous a été donné
l'occasion d'entendre les représentants du Syndicat des professionnels
du gouvernement du Québec. Par ailleurs, pendant que nos travaux
progressaient, les principaux partenaires du milieu des relations de travail au
Québec réunis dans le cadre d'une rencontre du Conseil consul-
tatif du travail et de la main-d'oeuvre parvenaient à un accord unanime
sur un autre volet du projet de loi. Ce projet, je le rappelle, M. le
Président, comporte trois objets: premièrement, introduire une
modification à la définition de "salarié" au Code du
travail de manière à exclure de la portée de ce code les
fonctionnaires au courant de ce qu'on pourrait qualifier d'informations
privilégiées pour la gouverne de l'État oeuvrant au
ministère du Conseil exécutif. Les consultations que nous avons
tenues sur cette partie du projet de même que les représentations
du Syndicat des professionnels du gouvernement du Québec, lors de la
commission parlementaire, nous ont d'ailleurs permis d'apporter un amendement
au projet original. Nous y reviendrons en détail plus tard.
Deuxièmement, M. le Président, corriger les effets
négatifs, sur l'un des organismes dont j'ai la responsabilité,
nommément le bureau du commissaire général du travail,
d'une décision de la Cour suprême du Canada. On se souviendra, M.
le Président, que cette décision de décembre 1988 portait
gravement atteinte à la juridiction des commissaires et en appel des
juges du Tribunal du travail en regard de l'article 45 du Code du travail.
Troisièmement, d'étendre la notion de services publics aux
entreprises qui, sous contrat avec les municipalités ou les
régies intermunicipales, exploitent un système d'aqueduc,
d'égout, d'assainissement et de traitement des eaux et, enfin, aux
entreprises qui, aux mêmes conditions, procèdent à
l'incinération des déchets. De plus, le délai pendant
lequel le gouvernement peut, par décret, ordonner à un service
public de maintenir des services essentiels en cas de grève est
allongé. Ces deux dernières modifications, on l'aura compris, M.
le Président, permettront d'assujettir à l'obligation de maintien
des services essentiels des situations qui, bien que la protection du public
était en cause, ne pouvaient être assujetties à ce jour.
Voilà donc les principes à la base de ce projet de loi.
Reprenons dans l'ordre, pour bien en comprendre la portée et les
implications. L'article 1 du projet, M. le Président, tel que
modifié lors de nos travaux en commission parlementaire, introduit une
exclusion à la syn-dicalisation visant les fonctionnaires du
ministère du Conseil exécutif. Le résultat de nos
rencontres, entres autres avec le SPGQ, nous a incités à modifier
notre proposition afin que, par décret, l'exclusion ne s'applique qu'en
certaines circonstances. Historiquement, cette modification se justifie de la
manière suivante. On sait, M. le Président, que, depuis 1965, le
Code prévoit déjà une exclusion syndicale visant le
personnel du Conseil exécutif. Nous croyons qu'à cette
époque il était raisonnable de penser que les personnes au
courant d'informations privilégiées se retrouveraient toutes au
sein dudit Conseil. Ce n'est effectivement que beaucoup plus tard que prit
forme, comme on le connaît aujourd'hui, le ministère du
Conseil exécutif, là où personne n'ignore que circulent
pareilles informations. Or, nous disent certains, une décision rendue en
1975 par fe Tribunal du travail trancha pourtant que l'exclusion syndicale
visant le Conseil exécutif ne s'appliquait pas au ministère du
Conseil exécutif. Comment, dès lors, expliquer le silence du
législateur?
Il y a d'abord lieu de noter que, pendant les années qui
suivirent, il n'y eu aucune autre démarche particulière visant
à syndiquer le personnel de ce ministère. Le gouvernement,
percevant là un accord tacite entre les parties, le Code
prévoyant d'ailleurs lui-même la conclusion d'accords sur cette
question, n'a donc pas jugé à propos de modifier le Code pour
rétablir l'intention originaire du législateur de 1965.
Toutefois, une décision récente du Tribunal du travail, rendue
cette année dans le cadre d'une procédure visant à
syndiquer une partie du personnel professionnel oeuvrant au ministère du
Conseil exécutif, décision en principe favorable au syndicat,
force le gouvernement à modifier le Code en conséquence. (22 h
10)
On constatera, cependant, que l'article 1 du projet, tel que
déposé, a connu certaines modifications. Ces modifications ont
été apportées pour donner suite à une rencontre que
j'ai tenue avec le SPGQ et nos diverses discussions et aux remarques que j'ai
reçues lors de l'adoption du principe. En effet, conscient de
l'importance de signifier clairement que cette exclusion ne vise que les
personnes pouvant être au courant d'informations
privilégiées pour la gouverne de l'État, elle s'inscrit
dorénavant dans un nouveau sous-paragraphe distinct, article 1,
paragraphe I, sous-paragraphe 3.1, et laisse ouverte la possibilité que
par décret le gouvernement en réduise la portée.
En ce qui concerne, M. le Président, les deux autres volets de ce
projet de loi, permettez-moi d'insister sur le fait qu'ils ont fait l'objet
d'ententes des deux côtés de cette Assemblée. Le premier
volet, rappelons-le, concerne l'intervention du commissaire du travail dans le
contexte de changement de main d'une entreprise dont les travailleurs sont
syndiqués ou en voie de l'être. Cette intervention, on le sait, se
fonde sur (es articles 45 et 46 du Code du travail, tels qu'ils se lisent
maintenant. Jusqu'en 1988, année de la décision de la Cour
suprême du Canada, dans le dossier de la commission scolaire
régionale de l'Outaouais, tant le bureau du commissaire
général du travail, un organisme sous ma responsabilité,
qu'en appel, le Tribunal du travail croyait avoir autorité pour
définir les circonstances d'application de l'article 45. Or, M. le
Président, tel n'est plus le cas depuis la décision de la Cour
suprême. Comme le confirment, d'ailleurs, des décisions rendues
par les tribunaux du Québec depuis lors. C'est pourquoi j'entends par
l'article 2 de ce projet de loi restaurer les pouvoirs d'interpréter et
d'appliquer l'article 45 du Code du travail tel qu'il était selon ma
perception dévolu au commissaire du travail avant cette décision
de la Cour suprême. afin de m'assurer que cette modification
réponde adéquatement aux attentes du milieu des relations du
travail, j'ai procédé au cours des dernières semaines
à une consultation des principaux partenaires réunis au sein du
conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre. c'est avec beaucoup de
plaisir que j'ai reçu leur accord unanime, m. le président, que
j'ai concrétisé par le dépôt, et ce, en commission
parlementaire, d'un amendement au projet de loi initial. de la sorte, le texte
qui est maintenant soumis à l'approbation de cette assemblée
reflète fidèlement le consensus des partenaires en relations du
travail. cela garantit d'autant qu'il s'inscrit dans la mission du
ministère du travail de favoriser des rapports de travail harmonieux
entre ses partenaires pour le mieux-être économique du
québec.
Le second volet de ce bloc de modifications proposées par le
projet de loi s'intéresse au chapitre du Code du travail qui touche les
services essentiels. Deux modifications sont ici en cause, M. le
Président. La première modification suggérée vise
l'élargissement de la notion de service public de manière
à englober les entreprises qui, par sous-contrats avec les
municipalités ou les régies intermunicipales, exécutent
des travaux habituellement pris en charge par ces dernières. Tel est le
cas, par exemple, M. le Président, de l'exploitation ou de l'entretien
d'un système d'aqueduc, d'égout, d'assainissement ou de
traitement des eaux, ou encore de l'incinération des déchets. La
modification permettra, pour l'avenir, que ces entreprises soient assujetties,
au même titre que les villes elles-mêmes lorsqu'elles prennent en
charge ces activités, à l'obligation, par décret, de
maintenir des services essentiels en cas de conflit de travail. Quant à
elle, la seconde modification, et celle-là est purement administrative,
entend faire disparaître le délai de 15 jours pour la prise d'un
décret d'assujettissement à l'obligation de maintenir des
services essentiels. La disparition de cette contrainte assurera à la
population bénéficiant d'un service public qu'elle ne sera pas
privée des services essentiels lors d'un conflit du simple fait que le
décret aura été pris moins de quinze jours avant
l'acquisition du droit de grève. Pour l'avenir, il nous sera donc
possible d'assujettir un service public à l'obligation de maintien des
services essentiels en tout temps avant le dépôt d'une convention
collective. De plus, si, au moment du décret, une grève
était en cours, l'amendement proposé aura alors pour effet, tant
que l'association accréditée n'aura pas respecté les
obligations relatives aux services essentiels, de suspendre l'exercice du droit
de grève.
Comme nous l'évoquions, M. le Président, lors de
l'adoption du principe, le 12 décembre dernier, en cette même
Chambre, ce projet comporte des modifications significatives que l'on pourrait
même qualifier d'essentielles pour le maintien et le développement
de saines relations du travail au Québec. Nul doute que, par ricochet,
elles s'avéreront être un outil utile à l'essort
économique du Québec. Ces mesures ayant déjà
reçu l'assentiment de la commission parlementaire de l'économie
et du travail, je sollicite maintenant l'appui des membres de cette
Assemblée en vue de leur adoption finale.
En terminant, M. le Président, vous me permettrez de souligner
l'excellente collaboration tant de la part de mon collègue responsable
de ce dossier pour l'Opposition, le député de
Pointe-aux-Trembles, que de l'ensemble de nos collègues qui ont
participé aux travaux de la commission parlementaire. Le tout s'est fait
dans un excellent esprit de collaboration et je tenais, ce soir, à le
souligner de cette façon. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre du
Travail. Alors, sur la même motion de la prise en considération du
rapport, M. le député de Pointe-aux-Trembles.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, le ministre avait raison de
dire qu'en commission parlementaire il y a eu un débat fort
civilisé sur le projet de loi qui est devant nous. Il me permettra
cependant d'être en désaccord lorsqu'il dit que la loi qui est
devant nous est significative, voire essentielle, et qu'elle va être
bonne pour améliorer le climat des relations du travail et assurer
l'essor économique du Québec. Je pense que c'est un cas
d'inflation verbale là. Il s'agit d'un ramassis de dispositions, M. le
Président, qui touchent, par exemple, dans le cas des aqueducs, des
égouts et des usines d'épuration des eaux, sans oublier les
incinérateurs à déchets... Il s'agit d'un article de
concordance pour dire qu'évidemment il s'agit de services essentiels et
qu'ils sont assujettis à la loi sur les services essentiels que mon
parti a donnée au Québec, cette loi, et qui dit bien que le droit
de grève existe et doit être préservé, mais à
la condition de ne pas mettre en cause la santé ou la
sécurité du public ou un service essentiel, et, à cet
égard, je pense aux incinérateurs de déchets qui sont, de
toute évidence, un service essentiel. Donc, on est d'accord avec cette
disposition-là de même que pour le délai pour le
décret d'assujettissement. Là, il ne s'agit de rien qui porte
à conséquence, c'est une question de délai et il est
normal, de temps en temps, d'ajuster des délais. Il n'y a donc pas,
à cet égard, de grands changements dans le projet de loi qui est
devant nous.
Il reste en gros, M. le Président, deux choses. D'une part, les
articles 45 et 46 du Code qui réglementent ce qui doit arriver quand une
entreprise est vendue, cédée, aliénée d'une
façon complète, totale, partielle, et ce, suite au conflit du
Manoir Richelieu et de certains jugements de la Cour suprême du Canada.
Il y a, d'autre part, le caprice du prince, M. le Président, le
secrétaire du Conseil exécutif, de l'autre côté de
la Grande-Allée, ici, dans un immeuble qu'on appelle, à
Québec, tantôt le bunker, tantôt le calorifère. Le
secrétaire du Conseil exécutif n'aime pas les syndicats, n'aime
pas les syndiqués et il a décidé qu'il fallait modifier le
Code du travail pour dire que non seulement les employés du Conseil
exécutif... (22 h 20)
Le Conseil exécutif, pour tout un chacun et toute une chacune qui
nous regardent à la télévision, c'est le personnel du
premier ministre, de l'autre bord de la rue, dans le bunker. Un bunker, on sait
ce que c'était, là, sur la côte normande, les soldats
allemands attendaient les Canadiens, qu'on appelait à l'époque,
qu'on sacrifiait à Dieppe, par exemple, dans des bunkers. On a tous vu,
ceux qui ont un certain âge, comme le ministre et moi, des films
où on voyait Hitler dans son bunker, une grosse affaire de ciment.
Celui-là n'est pas souterrain, cependant, c'est un bunker à fleur
de sol. On dit aussi le calorifère, mais pas dans le sens des plinthes
électriques de nos jours; le calorifère, c'est dans le sens de
ces vieux calorifères en fonte avec toutes sortes de recoins qui font
que, dans l'édifice H - parce qu'administrativement c'est
l'édifice H - la lumière du jour ne rentre pas parce qu'il y a
ces espèces d'affaires qui imitent le calorifère et qui
empêchent le soleil d'entrer dans la bâtisse. Mais le ciment avait
des droits, à cette époque-là, et c'est dans le
bunker.
C'est là que trône le secrétaire du Conseil
exécutif, le plus haut fonctionnaire du Québec, le fonctionnaire
des fonctionnaires, le fonctionnaire par-dessus tous les autres fonctionnaires
du Québec. Lui a décidé que les tribunaux n'ont pas
d'affaire à statuer sur qui devrait être syndicable dans la
fonction publique. Le juge Paul Yergeau du Tribunal du travail a
décidé que le Conseil exécutif, c'est une chose, mais que
le ministère du Conseil exécutif, qui inclut le
Secrétariat à la famille, ou le Secrétariat à la
condition féminine ou le Conseil permanent de la jeunesse, ça, on
n'est plus dans le saint des saints, ce n'est plus le grand secret qui doit
entourer le pouvoir, le grand mystère. Il a décidé, le
juge Paul Yergeau du Tribunal du travail, que le Conseil exécutif,
c'était une chose, mais que ça n'allait pas jusqu'au
ministère du Conseil exécutif auquel on rattache l'organisme
qu'on voudra, M. le Président.
Un exemple, on pourrait rattacher, et c'est sans doute rattaché
au ministère du Conseil exécutif, un ministère aussi
essentiel que le
ministère délégué à la Francophonie.
C'est très important ça, dans l'avenir du Québec, le
ministre d'État à la Francophonie qui, on le sait, a un cabinet
de cinq personnes qui supervise un personnel de neuf. J'ai comme le sentiment
qu'il doit y avoir des attachés politiques du ministre
délégué à la Francophonie qui gardent les enfants
des employés du même ministère, parce qu'ils sont cinq pour
en encadrer neuf. Pour reprendre un terme que le ministre du Travail
connaît sûrement, ce ne sont pas les chefs qui manquent là,
ce sont les indiens. À cet égard, quand on entend dire, par
exemple, qu'il manque un attaché de presse à la
Délégation du Québec à Paris, on se dit: Que ne le
prenez-vous chez le ministre délégué à la
Francophonie, celui qui assure la présence du Québec dans
l'espace francophone mondial, d'Alexandrie à Montréal en
arrêtant à Bruxelles?
Bref, M. le Président, je reviens à mon propos principal,
l'article du projet de loi qui parle de mettre le ministère du Conseil
exécutif... C'est un caprice du prince, mais qui manifeste un assez
grand mépris pour les tribunaux, alors que le ministre de l'Industrie et
du Commerce s'obstine depuis des semaines à dire: Aïe,
écoutez, moi, je n'ai pas d'ordre à donner à la
Société des alcools, la Société des alcools va
respecter toutes les décisions des tribunaux, ce qui est une
façon de se soustraire à son obligation de faire respecter les
dispositions "antis-cabs" de la loi, les dispositions "antiscabs" que le Parti
québécois avait mises dans le Code du travail pour qu'elles
soient respectées. On a une société d'État qui les
viole impunément.
Mais, la, le ministre de l'Industrie et du Commerce, quand il ne nous
fait pas le numéro de téléphone où on peut appeler
quand on a une entreprise qui peut faire faillite... Et il nous le fait sur un
ton de commercial à peu près comme la demoiselle qui disait -
vous vous rappelez, il y a quelque temps, à la télévision
- "just like that". Bon! Et ils appellent là et ils font faillite
pareil. Mais, au moins, ils ont pu se confier. C'est une espèce de
Tel-Aide que le ministre de l'Industrie et du Commerce a, un centre
d'écoute pour dire: Vous faites faillite parce que le dollar canadien
vaut trop cher, que les taux d'intérêt sont trop
élevés; le gouvernement du Québec n'a pas d'argent
à vous donner pour passer à travers, ni à vous
prêter, mais on vous écoute, confiez-vous, parler pour parler,
pour les entreprises. Bref, le ministre de l'Industrie et du Commerce nous dit,
comme ça: Nous autres, les ordres des tribunaux, on respecte ça.
Et le secrétaire... Oui.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Laviolette, sur une question de règlement.
M. Jolivet: Oui, M. le Président. Je regarde et il me
semble que le quorum n'est pas ici.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vais vérifier,
M. le député.
Alors, qu'on appelle les députés, s'il vous
plaît.
Si vous voulez vous asseoir, s'il vous plaît.
Alors, nous poursuivons nos travaux sur la prise en considération
du rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de
loi 81. M. le député de Pointe-aux-Trembles, si vous voulez
poursuivre votre intervention.
M. Bourdon: Je disais donc que le ministre de l'Industrie et du
Commerce nous a dit à plusieurs reprises, depuis quelques semaines: Moi,
que la Société des alcools passe outre aux dispositions
"antiscabs", je n'en sais rien. Si un juge lui ordonne de faire une chose, elle
va la faire. Ça, c'est un comportement dont j'ai dit ce que je pensais.
Et, à côté, il y a le secrétaire du Conseil
exécutif, M. Benoît Morin, qui dit: Je n'aime pas la
décision du Tribunal du travail qui dit qu'on peut syndiquer le
ministère du Conseil exécutif. Ce n'est quand même pas le
saint des saints, sur Grande-Allée, de l'autre bord de la rue, dans un
immeuble qu'on appelle parfois le bunker et d'autres fois le calorifère.
or, ça dénote une assez triste mentalité, à deux
égards. d'une part, pourquoi le gouvernement ne se conforme-t-il pas
à une décision du tribunal du travail? le ministre du travail,
qu'est-ce qu'il dit, en pratique, dans ses discours et dans ses gestes? il dit
aux employeurs: respectez la loi. il dit aux syndicats: respectez les lois. et
là, il y a le gouvernement qui n'aime pas une décision d'un
tribunal en vertu du code du travail et il dit: ah! ah! non, nous autres, ce
n'est pas pareil, nous autres, on est des sno-reaux: quand on perd en cour, on
gagne en vertu de la loi. et c'est ce que j'appelle le caprice du prince. et
là, d'ici peu, la loi va être adoptée et ce sera comme dans
l'annonce à la télévision. quand le prince ne veut pas que
les gens soient syndiqués parce qu'au secrétariat à la
famille ou au secrétariat général à la condition
féminine ou au conseil permanent de la jeunesse il y aurait,
paraît-il, des secrets d'état, des choses terribles qu'un
syndiqué va nécessairement dévoiler, là, on passe
un petit amendement au code du travail. et c'est comme le commercial à
la télévision: on se débarrasse d'un syndicat "just like
that", comme disait l'annonce. je ne suis pas aussi bon que le ministre de
l'industrie et du commerce pour annoncer le numéro de
téléphone où les entreprises en faillite peuvent se
confier juste avant de faire faillite pareil.
M. le Président, nous allons donc voter contre cette loi. Parce
que le Syndicat des professionnels du gouvernement du Québec a
gagné en cour quant au ministère du Conseil exécutif, on
ne devrait pas faire un amendement à la loi sur mesure, juste pour le
priver de ce qu'il a gagné d'une façon régulière
devant le Tribunal du travail.
Par ailleurs, M. le Président, les articles 45 et 46 posent un
autre problème. L'article 46, suite à un jugement de la Cour
suprême, ça consiste à dire que le commissaire du travail,
lorsqu'une entreprise est vendue, a le pouvoir de rendre toute décision
pour que ça se fasse décemment. Et ça, je serais
tenté de voter la loi si je ne regardais que l'article 46. Mais on vient
de voir le caprice du prince pour ce qui est du ministère du Conseil
exécutif. Il faut voir que le problème, ce n'est pas l'article 46
principalement, c'est l'article 45. Suite au conflit du Manoir Richelieu la fin
d'un contrat d'un concessionnaire pour l'hôtel, la vente de l'hôtel
à des conditions ridicules à l'homme d'affaires Raymond
Malenfant, avec un homme aussi sans-coeur que Raymond Malenfant, c'a voulu dire
300 congédiements, un long conflit où il y a eu mort d'homme
suite à une intervention de la Sûreté du Québec. Et
ça, ça supposerait, pour empêcher que ça se
répète, qu'on amende l'article 45. Mais le Conseil du patronat ne
veut pas. Il a un droit de veto, le Conseil du patronat, sur ce que fait ce
gouvernement-là, apparemment. Donc, on ne touche pas à l'article
45 et on ne touche qu'à l'article 46. Je dois dire que le ministre, pour
ce qui est de l'article 46, s'est tenu en contact avec le Conseil consultatif
du travail et de la main-d'oeuvre - où il y a les patrons et les
syndicats - qu'il a tenu compte des avis du conseil, et de ça, je le
félicite. Je le félicite aussi d'avoir fait ce qu'il a pu avec le
prince. Il y a un amendement, là, qui dit que les employés du
ministère du Conseil exécutif... Par exemple, quelqu'un qui
s'occuperait des dossiers de la famille québécoise, qui est en
mauvais état à cause des taxes entre autres, on pourrait
décider que ce ne sont pas des secrets d'État - tout le monde le
sait qu'il y a des taxes et que ça touche la famille - et que,
là, on pourrait les syndiquer. Dans ce sens-là, le ministre a
fait son possible avec le prince. Je ne dis pas que le ministre ne fait pas son
possible, je dis que le gouvernement, par cette loi, enlève à un
syndicat, le Syndicat des professionnels du gouvernement du Québec, une
décision du Tribunal du travail à l'effet que le syndicat avait
gagné. Donc, ce n'est pas juste de lui enlever par une loi. Quant aux
articles 45 et 46, nous sommes plutôt d'accord avec l'article 46, mais il
ne se fait rien quant à l'article 45, et un drame comme celui du Manoir
Richelieu pourrait se répéter. Il y a de petites dispositions sur
les délais pour ce qui est des services essentiels et dire que ça
inclut les services essentiels, l'aqueduc, l'égout, la sous-traitance
dans ces matières-là, les usines d'épuration des eaux et
les incinérateurs de déchets, ça va. Mais il y a tellement
de mauvais dans cette loi-là, une faute d'action quant aux caprices du
prince de l'autre bord de la Grande Allée, d'omissions pour ce qui est
de l'article 45, que ça nous convainc de voter contre. Ce qui ne nous
empêche pas de trouver que le ministre a fait ce qu'il a pu dans le
gouvernement où il se trouve. Et peut-être que, comme son
prédécesseur, quand il aura assez vu les limites
inhérentes à ce gouvernement, à un moment donné...
On dit que le journalisme mène à tout pourvu qu'on en sorte. Je
dirai, en conclusion, M. le Président: Le gouvernement libéral
mène à tout pourvu qu'on en sorte.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'amendement
proposé par le ministre du Travail est adopté?
Des voix: Adopté sur division.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur
division. Le rapport, tel qu'amendé, est-il adopté?
Des voix: Adopté sur division.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur
division. Alors je vais suspendre pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 22 h 34) (Reprise à 22 h
37)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Veuillez prendre vos
places, s'il vous plaît. M. le leader du gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, je vous invite à
appeler l'article 32 du feuilleton.
Projetdeloi112
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 32,
l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission du
budget et de l'administration sur le projet de loi 112, Loi modifiant la Loi
sur les assurances et d'autres dispositions législatives. Je suis
prêt à reconnaître le premier intervenant sur ce projet de
loi. Mme la ministre déléguée aux Finances.
Mme Louise Robic
Mme Robic: Merci, M. le Président. À l'occasion de
la prise en considération du rapport de la commission du budget et de
l'administration, j'aimerais dresser un bref survol des diverses étapes
qui ont conduit à la présentation du projet de loi 112. Comme
vous le savez maintenant, au mois de juin dernier, j'ai déposé
devant cette Assemblée un premier Rapport quinquennal sur l'application
de la Loi sur les assurances. Le dépôt de ce rapport faisait suite
à
des consultations et des échanges soutenus que j'ai menés
auprès de l'industrie des assurances. Il avait pour objectif de faire le
point sur l'application de la Loi sur les assurances et de formuler des
énoncés de politique impliquant des modifications à la
loi.
Suite au dépôt de ce Rapport, M. le Président, une
commission parlementaire s'est tenue au mois de septembre, au cours de laquelle
j'ai pu constater avec satisfaction qu'il y avait consensus sur les
orientations proposées dans le Rapport quinquennal. J'ai alors
indiqué mon intention de mettre en oeuvre le plus tôt possible des
modifications nécessaires à la réalisation des objectifs
énoncés au Rapport. Le projet de loi 112, M. le Président,
se veut donc la dernière étape de ce processus. Il a d'ailleurs
fait l'objet d'une étude article par article en commission parlementaire
à l'occasion de laquelle des amendements y ont été
apportés pour en préciser la partie de certains articles et en
assurer une meilleure concordance entre les divers éléments de la
loi.
M. le Président, le projet de loi 112 que nous avons devant nous
s'articule sous les thèmes suivants, à savoir les liens
commerciaux des assureurs, les pouvoirs de placement, les transactions
intéressées, la propriété des assureurs
québécois, les non-résidents et la propriété
des assureurs, les accords des réseaux et l'amélioration du
régime de surveillance.
Au chapitre des liens commerciaux, M. le Président, le projet de
loi propose le maintien de la politique actuelle quant aux liens commerciaux en
amont et continue à permettre aux entreprises commerciales et
industrielles d'investir dans des compagnies d'assurances. Il s'agit, en fait,
M. le Président, de faire bénéficier nos entreprises
d'assurances d'un apport important et précieux pour leur
développement de capital extérieur.
Par ailleurs, M. le Président, la politique quant aux liens en
aval des assureurs est restreinte. Il est proposé que les seules
filiales non financières autorisées soient des compagnies dont
les activités sont considérées connexes à celles
des assureurs. Au chapitre des pouvoirs de placement, le projet de loi propose
qu'un assureur pourra détenir plus de 30 % des actions votantes d'une
corporation lorsque cette dernière évolue dans un champ
d'activité où l'assureur est autorisé à
détenir une filiale. Il s'agit ici, M. le Président, d'une
ouverture importante au bénéfice de nos assureurs, car le RCCAQ
actuel limite le placement à 30 % à moins que ce ne soit une
filiale où le placement est alors plus de 50 %. Par ailleurs, M. le
Président, le pouvoir d'un assureur d'investir dans des filiales, y
compris un holding en aval, sera remanié de sorte qu'il sera
limité à 25 % de son actif au lieu de 50 % comme il l'est
actuellement.
Sur ce point, M. le Président, il est important d'indiquer aux
membres de cette Assemblée que toutes les compagnies d'assurances moins
une, tant les assurances générales que les assurances de
personnes, qui se sont prononcées sur cet aspect, ont indiqué que
le pourcentage actuel contenu à la loi était trop
élevé et qu'il méritait qu'il soit rabaissé.
Au chapitre des transactions intéressées, le projet de loi
pose le principe que ces transactions sont permises, sauf celles qui sont
expressément interdites, et que celles qui sont permises doivent se
réaliser comme s'il s'agissait de parties concluant à distance
une transaction similaire. le projet de loi établit en outre, pour les
assureurs, un régime de transactions intéressées et de
conflits d'intérêts et, pour les administrateurs, des
règles d'éthique et de divulgation de leurs
intérêts. le projet de loi prévoit de plus un comité
de déontologie qui constituera une structure de gestion des conflits
d'intérêts et des transactions intéressées.
Au chapitre de la propriété des assureurs
québécois, les dispositions du projet de loi stipulent que les
règles contenues dans la Loi sur les assurances portant sur les
transferts et les attributions d'actions des assureurs sont étendues aux
corporations qui contrôlent directement ou indirectement (es assureurs.
m. le président, le projet de loi prévoit en outre des
dispositions au chapitre de la participation par des non-résidents au
capital des assureurs québécois. ainsi, la règle actuelle
des 10 % - 25 % applicable à l'attribution et au transfert d'actions
à des non-résidents sera abolie et remplacée par une
disposition prévoyant l'attribution ou le transfert d'actions à
des non-résidents jusqu'à 30 % des droits de vote. en outre, le
ministre pourra autoriser tout pourcentage supérieur à 30 % s'il
l'estime opportun, notamment dans l'intérêt de la compagnie
d'assurances et de son développement ainsi * que dans
l'intérêt de ses assurés.
Par ailleurs, M. le Président, il sera dorénavant permis
à des non-résidents d'incorporer au Québec une nouvelle
compagnie d'assurances. Au chapitre des accords de réseaux, le projet de
loi prévoit un pouvoir réglementaire ayant pour effet de
prescrire un ensemble de normes régissant ces accords et la
confidentialité des renseignements sur les clients.
Finalement, M. le Président, au chapitre de l'amélioration
du régime de surveillance, le projet de loi prévoit des
dispositions qui auront pour effet d'accroître le rôle du
vérificateur externe. De plus, le pouvoir de l'Inspecteur
général des institutions financières d'obtenir des
renseignements et des documents sera élargi.
M. le Président, ce projet de loi, en plus de moderniser des
règles applicables aux assureurs québécois et de les
harmoniser avec celles régissant les autres institutions
financières du Québec, assure une meilleure protection des
consommateurs par le raffermissement des pouvoirs de contrôle et de
surveillance. Comme
je l'ai indiqué précédemment, les orientations
qu'il sous-tend ont fait l'objet d'échanges soutenus auprès des
dirigeants d'assurances. Elles ont été, en outre, largement
débattues en commission parlementaire puis en étude article par
article. Elles se traduisent aujourd'hui par des dispositions
législatives, lesquelles tiennent compte des représentations qui
ont été formulées à leur endroit par le milieu.
M. le Président, en terminant, j'aimerais remercier tous les
membres de l'Assemblée nationale qui nous ont appuyés tout au
long de notre travail, les membres de la commission du budget et de
l'administration et également les membres de l'Opposition, tout
particulièrement le député de Gouin. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre
déléguée aux Finances. Sur cette motion de prise en
considération du rapport de la commission du budget et de
l'administration, je suis prêt à reconnaître le prochain
intervenant, M. le député de Gouin.
M. André Boisclair
M. Boisclair: M. le Président, à mon tour, j'aurais
bien aimé pouvoir remercier la ministre, mais je dois dire et je serais
quasiment tenté de demander au leader du gouvernement ce qui s'est
passé entre 18 heures et 23 heures. On nous apprenait que le projet de
loi devait être discuté seulement tard en soirée, et
là, c'est en catastrophe qu'on m'apprend à la toute
dernière minute, tout le monde en est surpris, qu'on appelle le projet
de loi 112. La ministre a été obligée, puisque c'est un
sujet quand même assez technique, de se référer,
elle-même, à des notes qu'on lui avait
préparées.
J'étais en train de préparer, M. le Président, mon
discours qui devait avoir lieu ce soir vers minuit, une heure, me disait-on. Au
bureau, bien tranquille, à préparer mes notes, et là,
soudainement, qui ne voit-on pas apparaître à la
télévision? La ministre déléguée aux
Finances qui vient nous parler du projet de loi 112. Si c'est la façon
dont ce gouvernement-là veut procéder pour obtenir le
consentement de l'Opposition, je dois vous dire, M. le Président, que je
suis loin d'être satisfait de cette attitude négligente, de cette
attitude méprisante...
M. Pagé: Question de règlement, M. le
Président.
M. Boisclair: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de
règlement, M. le leader du gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, sur l'ordre du jour qui
était prévu, je devais appeler l'étude du projet de loi
106 et l'étude du projet de loi 108, et j'ai été
informé par mon personnel, comme suite à des contacts avec le
bureau du leader de l'Opposition, comme quoi l'entente à l'effet...
Une voix:...
M. Pagé: Non, non. Vous m'avez demandé pourquoi
vous avez été appelé...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous
plaît!
M. Pagé: ...monsieur, dites-vous, en catastrophe. On va
vous répondre.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous
plaît!
M. Pagé: Et je termine. Je termine en disant que ce qui
devait être une adoption sans débat, on m'a fait part que
c'était maintenant une adoption avec débat et, comme le ministre
des Transports n'était pas disponible, on a appelé votre projet
de loi, M. le député. Ce n'est pas si compliqué que
ça.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le leader du
gouvernement. Si vous voulez poursuivre votre intervention.
M. Boisclair: M. le Président, je vous ferai tout
simplement remarquer que ce n'était pas une question de
règlement...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous
plaît!
M. Boisclair: Ce n'était certainement pas une question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît,
si vous voulez poursuivre votre intervention.
M. Boisclair: M. le Président, je voudrais tout simplement
vous demander de convenir avec moi qu'il ne s'agissait pas là d'une
question de règlement et qu'en aucune façon, je n'ai
interpellé le leader du gouvernement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît,
M. le leader de l'Opposition officielle.
M. Chevrette: Sur la question de règlement, M. le
Président. Il avait été convenu d'appeler les rapports sur
106 et 108. Il n'a été convenu en aucun temps qu'on arriverait
avec des amendements de dernière minute, que je viens à peine de
recevoir et que je n'ai pas fini de lire. Si on veut jouer les règles du
jeu, on va les jouer, mais qu'on ne joue pas à la vierge offensée
sur le changement de stratégie en cette Chambre. Il
y avait carrément une entente, mais on aurait pu nous dire hier
soir qu'il y avait des amendements. Il y en a, des amendements. On vient de les
recevoir. Je n'ai même pas terminé de les lire. Le critique n'est
même pas ici, M. le Président. Il n'a pas su qu'il y avait des
ententes de brisées, qu'il dise la vérité.
M. Pagé: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Rapidement, M. le leader
du gouvernement.
M. Pagé: Très clair, comme quoi ces deux projets de
loi devaient être adoptés sans débat, dans un premier
temps. Dans un second temps, il y avait des amendements, et les amendements
vous ont été-Une voix:...
M. Pagé: Mais je m'excuse! Les amendements vous ont
été adressés à 20 h 30 ce soir. À 20 h 30 ce
soir. Il est 22 h 50. C'est ce qu'on me dit ici.
M. Chevrette: M. le Président, je m'excuse...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
M. le leader de l'Opposition officielle.
M. Chevrette: ...je viens à peine, il y a 10 minutes, de
recevoir l'enveloppe des amendements ici, en cette Chambre à part
ça, par un page. "C'est-u" clair? Qu'on ne vienne pas dire autre chose
que la vérité. Et, hier soir, jamais, de mon siège il n'a
été question qu'il y aurait des amendements sur les deux lois. Et
je le fais de mon siège. "C'est-u" clair?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, ce que je veux
vous dire, à la présidence, ici, nous, on nous a demandé
d'appeler l'article 32, ce que nous avons fait. Et, en tant que
président de cette Assemblée, vu que le leader du gouvernement me
demande l'article 32, moi, je poursuis avec l'article 32. S'il y a eu des
ententes entre le leader du gouvernement et le leader de l'Opposition, je ne
suis pas au courant de ces ententes-là. Moi, je suis ici pour
présider les débats et, à ce moment-ci, nous sommes
à l'article 32, et je demanderais au député de Gouin de
poursuivre son intervention et de discuter de la prise en considération
du rapport de la commission du budget et de l'administration sur le projet de
loi 112. Merci, M. le député.
M. Boisclair: Merci, M. le Président. Je n'en veux
certainement pas à la ministre. Ce n'est pas sa faute. Elle aussi, j'en
suis convaincu, a dû être appelée à la
dernière minute, puisque, depuis cet après-midi, deux heures
avant la période de questions, M. le Président, il était
convenu qu'il y avait un certain nombre de projets de loi qui allaient
être adoptés...
Une voix:...
M. Boisclair: ...et en fonction...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît,
Mme la députée de Groulx! Vous n'avez pas la parole. M. le
député, si vous voulez poursuivre.
M. Boisclair: C'est très pertinent...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Et je vous demanderais,
M. le député, de poursuivre sur le projet de loi 112, la prise en
considération du rapport. (22 h 50)
M. Boisclair: Alors je vais revenir, M. le Président,
à la prise en considération du rapport, mais je veux tout
simplement souligner que cette façon de faire ne nous met certainement
pas dans de bonnes dispositions pour intervenir sur ce projet de loi. Il s'agit
d'un projet de loi extrêmement complexe. Je crois que la ministre
conviendra avec moi qu'il a nécessité l'intervention à
plusieurs reprises de l'Inspecteur général des institutions
financières pour obtenir des éclaircissements sur
différentes dispositions du projet de loi. Ce n'est pas le genre de
projet de loi où on peut se permettre d'arriver à la toute
dernière minute et faire une intervention un peu comme ça, en
ramassant un certain nombre de bribes d'information. On se doit, si on est le
moindrement respectueux de notre institution, M. le Président, de
préparer une intervention qui se tienne, et je regrette de ne pas avoir
eu le temps de préparer une intervention, M. le Président, qui
tienne compte des débats qui ont eu lieu en commission.
Je m'en tiendrais à un certain nombre de remarques que j'avais
formulées à l'occasion de la deuxième lecture du projet de
loi, M. le Président, en essayant de mettre en évidence un
certain nombre de discussions qui ont eu lieu à l'occasion de
l'étude article par article du projet de loi 112 à la commission
du budget et de l'administration. Premièrement, M. le Président,
il est important de rappeler dans quel contexte nous avons étudié
ce projet de loi. Effectivement, le projet de loi 112 fait suite au Rapport
quinquennal déposé par l'actuelle ministre
déléguée aux Finances et responsable des institutions
financières, en juin dernier, Rapport quinquennal sur les
assurances.
Un Rapport, d'ailleurs, c'est important de le souligner, que la ministre
se devait de déposer à cause d'une disposition qui est contenue
dans la Loi sur les assurances qui force une révision tous les cinq ans
du contenu de la Loi sur les assurances. Il s'agit là, M. le
Président, d'une
disposition quand même assez intéressante, assez
innovatrice, puisqu'elle permet de rajuster notre loi, puisqu'elle permet
d'adapter nos lois aux nouvelles conjonctures du marché, aux nouveaux
produits qui sont sur le marché, aux nouvelles réalités et
aussi, parfois, de corriger des erreurs qui auraient pu se glisser ou corriger
des interprétations que les tribunaux ont données au cours des
cinq années qui précèdent l'application de la loi.
Donc, en ce sens-là, M. le Président, après le
Rapport quinquennal, la ministre, tout à l'heure, j'ai eu l'occasion de
l'entendre quelques instants, faisait effectivement référence
à une consultation publique qui a eu lieu les 4 et 5 septembre dernier,
et la commission du budget et de l'administration, en à peu près
deux jours, a reçu une dizaine de mémoires, ce qui a permis de
faire entendre un certain nombre d'intéressés sur cette question.
M. le Président, la réforme que nous étudions aujourd'hui,
le projet de loi 112, a fait l'objet, effectivement, de plusieurs discussions.
La ministre a consulté sur ce Rapport quinquennal, qui contenait un
certain nombre de grandes orientations, il est important de le rappeler.
Un Rapport quinquennal qui ne faisait pas mention, cependant, de
politiques gouvernementales, qui soulevait plutôt un certain nombre
d'énoncés de principe, un certain nombre de questions floues sans
présenter de scénarios très précis aux
différents intervenants, sans présenter non plus d'orientations
claires. Il y a même des gens, M. le Président - et la ministre en
conviendra avec moi - qui sont venus témoigner en commission
parlementaire, qui disaient qu'on a de la difficulté à discerner
ce qui constitue une proposition du gouvernement, dans le Rapport quinquennal,
de ce qui pourrait constituer un énoncé de principe ou tout
simplement une intention.
Donc, dès le départ, M. le Président, ce qui est
important de souligner, c'est que les consultations se sont faites sur un
document qui était, aux yeux de bien des gens... Et là ce n'est
pas l'Opposition officielle qui le dit, ce sont des gens qui sont venus
témoigner en commission parlementaire, qui ont fait mention de
plusieurs, peut-être pas lacunes, M. le Président, mais, au niveau
de la rédaction du Rapport quinquennal, qu'on laissait plutôt
place à une relative interprétation de la part des gens qui
avaient à témoigner en commission parlementaire.
M. le Président, vous conviendrez que, lorsqu'un organisme, une
institution financière est appelée à venir
témoigner devant une commission parlementaire, la moindre des choses,
c'est qu'on puisse à tout le moins la questionner sur des
éléments précis, non pas sur des énoncés
flous, des politiques qui restent à déterminer, mais bien sur des
orientations claires. Et, à cet égard-là,
particulièrement en ce qui a trait aux acquisitions en aval, M. le
Président, bien des organismes auraient souhaité avoir des
positions beaucoup plus claires que celles présentées à
l'occasion du Rapport quinquennal.
Il est important, M. le Président, puisque l'Opposition
était soucieuse de vouloir corriger ces lacunes-là...
L'Opposition voulait s'assurer que le projet de loi reflète, autant que
possible et dans la plus grande majorité possible, les différents
intérêts qui ont été mis de l'avant devant la
commission parlementaire, tout en étant capable cependant, M. le
Président, de faire la part des choses entre des intérêts
privés, les compagnies et aussi les intérêts publics, les
intérêts de l'ensemble des épargnants
québécois et québécoises, en tenant compte aussi de
l'ensemble des intérêts pour les compagnies
québécoises. Mais, à tout le moins, M. le
Président, il y a un certain nombre de consensus clairs qui se sont
dessinés à l'occasion du Rapport quinquennal, dont certains n'ont
pas été retenus dans le projet de loi.
Nous avons essayé, M. le Président, à l'occasion de
la commission parlementaire, de demander à la ministre de venir faire
entendre, de venir faire témoigner un certain nombre d'organismes devant
les membres de la commission du budget et de l'administration. Toutes les
demandes que nous avons faites, après les remarques
préliminaires, avant de procéder à l'étude article
par article du projet de loi... On avait demander, entre autres, M. le
Président, de faire entendre la Société financière
des caisses Desjardins. On avait demandé, M. le Président, de
faire entendre la Corporation du Groupe La Laurentienne. On a demandé
aussi de faire entendre d'autres entreprises qui sont venues participer au
Rapport quinquennal dans un esprit de saine coopération et de
collaboration, M. le Président, non pas pour retarder l'adoption du
projet de loi. D'ailleurs, la ministre conviendra comme moi que nous n'avons
pas insisté outre mesure, lorsqu'on s'est aperçus rapidement que
la ministre n'était pas intéressée à faire entendre
des groupes en commission parlementaire. Rapidement, nous avons
décidé, dans le meilleur intérêt des gens qui sont
venus témoigner en commission parlementaire, M. le Président,
nous avons décidé de procéder immédiatement
à l'étude article par article du projet de loi 112.
Je dois dire, M. le Président, que dans sa très grande
majorité, le projet de loi a fait l'objet d'un certain nombre de
consensus. Il s'agit, M. le Président, d'un projet de loi, le projet de
loi 112, qui contient quand même un nombre important d'articles. Il
s'agit d'environ une cinquantaine d'articles qui sont contenus dans le projet
de loi. À la très grande majorité de ces articles, M. le
Président, je tiens à le soulever et à le souligner,
l'Opposition officielle a donné son consentement, parce que,
effectivement les dispositions contenues dans plusieurs des articles,
particulièrement ceux qui concernent la protection des
épargnants...
La ministre, tout à l'heure, rappelait aussi tout le débat
qui a lieu alentour des comités de déontologie qu'on veut
instaurer auprès des compagnies d'assurances, de leur mandat. La
ministre a eu raison aussi de soulever un certain nombre de dispositions
concernant l'amélioration de la protection des épargnants.
Effectivement, M. le Président, ces mesures ont fait l'objet d'un
consensus.
Cependant, M. le Président, et ce que j'aimerais essayer
d'illustrer dans le temps qu'il me reste, c'est parler des oppositions de fond
que l'Opposition a manifestées sur un certain nombre d'articles. Je
conviens rapidement avec la ministre qu'ils ne sont pas nombreux. Cependant,
ces articles touchent des questions de fond. Il ne s'agit pas là de
modifications techniques, il ne s'agit pas là de corriger des papillons
qui auraient pu se glisser au moment de l'adoption de la Loi sur les
assurances. Il s'agit de questions de fond et il serait intéressant, M.
le Président, qu'on puisse y revenir quelques instants. J'aimerais
d'abord retrouver les articles, M. le Président. Il s'agit de l'article
4, M. le Président, et vous me permettrez de prendre quelques instants
pour le retrouver puisque j'ai dû venir ici en catastrophe.
Premièrement, il s'agit effectivement de l'article 4 qui modifie
les articles 43, 44 et 45 de l'actuelle loi. Permettez-moi, de vous en faire la
lecture: "Sauf avec l'autorisation écrite du ministre, une compagnie
d'assurances ne peut attribuer ses actions avec droit de vote ou enregistrer un
transfert de ses actions avec droit de vote si cette attribution ou ce
transfert a pour effet..." Et là, on met un certain nombre de
conditions, entre autres "de conférer directement ou indirectement
à une personne et à celles qui lui sont liées 10 % ou plus
des droits de vote rattachés à ces actions si elles ne
contrôlent pas déjà la compagnie". 2° de porter
directement ou indirectement les droits de vote rattachés à ces
actions qu'une personne et celles qui lui sont liées possèdent
déjà à au moins 10 % ou à au moins un multiple de
10 % si elles ne contrôlent pas déjà la compagnie."
On fait état d'un certain nombre de contraintes, de conditions
pour lesquelles la ministre peut donner son autorisation.
Deuxième élément, M. le Président, l'article
44 modifié par l'article 4 contenu dans le projet de loi 112: "Sauf avec
l'autorisation écrite du ministre - encore là - une compagnie
d'assurances ne peut attribuer ses actions avec droit de vote ou enregistrer un
transfert de ses actions avec droit de vote si ce transfert ou cette
attribution a pour effet de permettre à des non-résidents et aux
personnes qui leur sont liées de détenir, directement ou
indirectement tout pourcentage de droits de vote supérieur à 30
%." Soit! qu'il y ait eu des discussions sur les 30 %, mais ce n'est pas
là, M. le Président, où je veux en venir.
L'article 46, M. le Président, un autre élément:
"Le ministre peut donner les autorisations visées à l'un des
articles 43 ou 44 s'il l'estime opportun notamment dans l'intérêt
de la compagnie d'assurances et de son développement ainsi que dans
l'intérêt de ses assurés. Le ministre doit être
satisfait que les personnes concernées ont des ressources
financières suffisantes pour fournir à la compagnie d'assurances
un soutien financier continuel dans ses opérations et dans son
développement. Le ministre doit également tenir compte de l'effet
de la transaction sur l'industrie de l'assurance au Québec." (23
heures)
M. le Président, soit! nous convenons qu'il est important que la
ministre puisse donner son autorisation sur des dispositions aussi importantes
que celles-là. On a vu trop de cas, dans le passé, où le
pouvoir législatif perdait tout contrôle sur un certain nombre de
transactions qui allaient à rencontre des intérêts des
Québécois et des Québécoises. Pas besoin de revenir
sur ces débats qui se sont faits voilà un peu plus d'un an.
Cependant, les libellés des articles 44, 45 et 46, à notre
avis, ne sont pas suffisamment clairs. Plusieurs cas et plusieurs intervenants
sont venus en commission parlementaire manifester leur opposition au contenu de
ces articles-là, en disant essentiellement que la ministre serait
appelée à porter un jugement de valeur et qu'on aurait
intérêt - soit, il y a des critères qui sont définis
à l'article 4 qui modifie l'article 46 de la Loi sur les assurances -
à préciser les critères que la ministre utiliserait pour
donner son autorisation, ou, à tout le moins ou peut-être, donner
son refus. "Dans ce contexte - écrivaient un certain nombre
d'intervenants - il serait utile de connaître ce qui pourrait amener ce
partenaire à refuser son consentement. Malheureusement - je lis des
représentations, M. le Président, ce n'est pas l'Opposition
officielle qui parle - la lecture du nouvel article 46 n'est d'aucun secours
à cet égard. Il est impossible d'imaginer une situation
concrète dans laquelle le libellé de cet article ne permettrait
pas au ministre de trancher, soit par l'affirmative, soit par la
négative. Autrement dit, l'article 46 ainsi rédigé fait de
ce pouvoir du ministre un pouvoir absolument arbitraire. Il s'agit là
d'une situation très dommageable pour l'industrie des assurances
à charte québécoise, puisqu'au moment d'amorcer les
négociations il nous sera impossible d'anticiper la réaction du
ministre. C'est un facteur d'incertitude de plus qui contribuera à
déprécier la valeur des sociétés d'assurances
à charte québécoise pour des partenaires éventuels
qui n'ont pas ce statut. Cela obligera également d'impliquer le
gouvernement dans les négociations préalables à toute
transaction significative, avec les inconvénients politiques
inévitables d'une telle situation,
puisque l'échec de la négociation pourra toujours
être imputé à la rigidité du gouvernement. Il y
aurait à ces maux un remède simple qui consiste à formuler
différemment l'article 46 - je comprends qu'il y a eu un certain nombre
d'amendements qui ont été apportés, mais qui ne
répondent en rien aux objections formulées, et permettez-moi de
continuer, M. le Président - de manière à indiquer
clairement les motifs de refus que pourrait invoquer le ministre. En effet, les
raisons pour lesquelles le ministre pourrait autoriser une transaction sont
sans intérêt. Seuls les motifs de refus devraient
préoccuper le législateur, s'il est intéressé
à instaurer autre chose qu'un régime arbitraire gouvernemental
absolu." Et ça, ce n'est pas l'Opposition officielle qui le dit, ce sont
des gens du milieu que la ministre a consultés, et la ministre est au
courant. La ministre me fait signe que c'est un. Bien un, c'est
déjà beaucoup, M. le Président. Et ce n'est pas parce que
d'autres personnes ne se sont pas opposées et ne se sont pas
intéressées à fond à cette question-là que
c'est négligeable. Non. C'est, dans le fond, très pertinent.
Sur le fond, tout ce que j'ai réussi à obtenir de la
ministre, c'est qu'il y avait effectivement une différence de point de
vue. Mais d'aucune façon n'a-t-elle été capable, en
commission parlementaire, de me donner des arguments de fond qui auraient
motivé son choix. Au lieu d'inclure des motifs de refus, comme bien des
gens l'ont demandé, elle a plutôt préféré
mettre les motifs d'acceptation. Et je crois avoir démontré
jusqu'à quel point ça peut être bien différent et
que les conséquences peuvent être importantes. Ce n'est pas
n'importe quoi, M. le Président. Lorsqu'on discute de nos
sociétés d'assurances, on ne discute pas d'un dépanneur du
coin, on ne discute pas non plus d'une entreprise familiale, on parle
d'institutions financières qui constituent un élément des
plus fondamentaux dans le développement économique
québécois. Ce sont elles qui ont une partie de la
responsabilité de la canalisation de l'épargne, de la gestion de
l'épargne des Québécois et Québécoises, qui
voient aussi à sa saine utilisation dans l'intérêt de la
majorité des Québécois et Québécoises. Et
dans ce sens-là, je crois qu'il ne faut pas passer à
côté de ces remarques. À tout le moins, si la ministre - et
j'espère qu'elle m'écoute lorsque je dis ça - avait eu le
courage de demander aux gens, malgré qu'il ne s'agisse que d'une seule
entreprise, de venir témoigner en commission parlementaire,
peut-être nous serions-nous rendus aux arguments de la ministre. Mais
d'aucune façon nous n'avons pu avoir un débat de fond sur cette
question-là avec la ministre. D'aucune façon on n'est venu
réfuter les arguments qui étaient là. La seule
réponse que nous avons eue - et avant de descendre en catastrophe ici,
je relisais les galées de la commission parlementaire - et tout ce que
la ministre a fait valoir comme point de vue sur cette question-là,
c'est essentiellement une différence de points de vue, sans justifier sa
décision, sans d'aucune façon la motiver, M. le Président.
À tout le moins, aurait-elle pu nous apporter un certain nombre des
arguments qui la motivent à faire un choix semblable à
celui-là. Mais nous n'avons pas eu réponse, M. le
Président, à ces questions-là.
Parmi les motifs de refus - continue-t-il -il me semble qu'on pourrait
retrouver la notion selon laquelle un nouvel actionnaire significatif ne serait
pas un actionnaire approprié pour une institution financière
où un haut niveau de probité, de confiance est requis. Il s'agit
du critère du "fit and proper" utilisé dans certaines
législations analogues. Par contre, la rédaction actuelle de
l'article 46 semble suggérer qu'un nouvel acquéreur significatif
pourrait être refusé pour la raison qu'il ne dispose pas de
ressources financières suffisantes pour soutenir le développement
de l'assureur dans l'avenir. Ceux-ci suggèrent que tout acquéreur
significatif d'une société dont les actions ne sont pas
transignées en Bourse assumerait, à cause de son statut, une
obligation contingente pour un montant inconnu. Il s'agit là d'une
façon subtile de décourager les placements privés de blocs
significatifs d'actions dans un assureur à charte
québécoise. Enfin, permettez-moi d'exprimer notre grande
déception pour la manière très étroite dont a
été envisagée la libéralisation des participations
étrangères dans le capital-actions des assurances
québécoises.
On pourrait revenir sur cet autre élément, mais, M. le
Président, sur le libellé de l'article 4, il ne s'agit pas d'une
simple opposition parce que l'Opposition décide de s'opposer. Il s'agit
là, M. le Président, d'une opposition de fond. Nous avons
pourtant donné à la ministre toutes les chances possibles de
faire valoir son point de vue. On a même demandé aux gens de La
Laure-ntienne, aux gens de la Société financière des
caisses Desjardins de venir témoigner en commission parlementaire et on
aurait pu avoir un débat de fond avec ces gens-là sur des
dispositions précises du projet de loi, pas sur des
énoncés de principe, pas sur des questions floues, pas sur des
scénarios multiples, mais sur des dispositions précises contenues
dans le projet de loi.
M. le Président, la ministre, à plusieurs reprises, nous a
fait part qu'elle avait tenu des consultations privées. Bravo pour elle!
C'est important qu'elle le fasse et je l'en félicite. Mais aujourd'hui,
ce qu'on demande, c'est à l'ensemble des parlementaires de cette
Chambre, M. le Président, de voter sur les dispositions contenues dans
le projet de loi 112. Il y a une différence, M. le Président, et
la ministre - et ça fait plus longtemps qu'elle est dans cette Chambre,
M. le Président - sait fort bien la différence qui existe entre
le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Aujourd'hui, ce
qu'on demande, c'est à l'ensemble des parlementaires de se prononcer sur
les dispositions de ce projet de loi. À tout le moins,
M. le Président, il aurait fallu entendre les gens qui
manifestent des oppositions de fond. Il y a une façon respectueuse, M.
le Président, dont on doit traiter nos institutions financières
et non pas les traiter de façon cavalière et rejeter les
arguments qu'elles mettent de l'avant en disant tout simplement: C'est un point
de vue qui se défend, sans le justifier d'aucune façon. donc, m.
le président, il s'agit d'une première opposition de fond.
j'aurais aimé qu'on puisse en débattre plus en détail avec
la ministre. j'aurais aimé qu'on puisse entendre le point de vue de ceux
qui s'opposent. si la ministre était si convaincue qu'elle avait raison,
elle se serait fait un plaisir de rappeler l'opposition à l'ordre en
disant: voyez, j'avais raison. voyez, m. le président, les gens qui
s'opposaient avant d'avoir plus de détails, maintenant, sont d'accord.
on aurait pu peut-être les convaincre ces gens-là du
bien-fondé des dispositions contenues à l'article 4 du projet de
loi. on aurait pu le faire, m. le président. c'est un risque que
l'opposition prenait en demandant à la ministre d'entendre des groupes
parce qu'effectivement elle a raison. la majorité des gens qui sont
venus témoigner sont d'accord, mais il y en a qui manifestent encore de
façon très claire leur opposition aux dispositions contenues dans
ce projet de loi là, m. le président. si la ministre était
si convaincue de la justesse de son point de vue, je suis persuadé que,
dans son intérêt, elle aurait pu facilement accepter de faire
témoigner des organismes en commission parlementaire, les convaincre de
la justesse de son point de vue et profiter de la même occasion pour
rappeler l'opposition à l'ordre, en nous disant - je la vois
déjà très bien: vous voyez, m. le président,
j'avais raison. elle a refusé de faire cette démarche-là,
nous en concluons donc qu'elle avait peur de faire le débat de fond sur
cette question sur la place publique, pas en privé, pas dans un salon,
pas dans son cabinet, m. le président, devant l'ensemble des
parlementaires qui, aujourd'hui, ont à se prononcer sur ce projet de
loi.
Et, faut-il rappeler aussi, M. le Président, qu'à la toute
dernière minute l'article 4 a été adopté. On nous a
apporté plus d'une douzaine de papillons ou d'amendements en commission
parlementaire, des amendements qui n'étaient quand même pas
insignifiants, qui étaient plutôt substantiels, dont le dernier
justement traitait de l'article 4. C'est donc dire, M. le Président, que
les discussions n'étaient pas terminées sur le contenu de cet
article. (23 h 10)
M. le Président, vous me faites signe qu'il me reste cinq
minutes. Ce n'est pas parce que je ne veux pas y aller plus longtemps, j'aurais
encore bien d'autres choses à dire, mais je vais essayer de ramasser en
cinq minutes.
L'autre élément fondamental qui a fait que l'Opposition
s'oppose à une autre disposition du projet de loi... Je n'arrive pas
à retrouver, parce qu'il me reste peu de temps, la disposition exacte
contenue dans le projet de loi, mais, essentiellement, on vient, dans des
dispositions du projet de loi, modifier la possibilité pour une
entreprise d'assurances ou une compagnie d'assurances de faire des acquisitions
en aval. Concrètement, ce que ça signifie, M. le
Président, c'est que, dorénavant, une compagnie d'assurances ne
pourra pas se doter d'un bras commercial et prendre des participations dans des
entreprises commerciales, à moins que les entreprises commerciales
fassent partie de celles qui sont définies dans les dispositions de
l'article qui m'échappe dans le projet de loi.
Essentiellement, une compagnie d'assurances pourra le faire à
condition qu'elle investisse dans une entreprise dont les activités
sont, dit-on, connexes et le projet de loi donne certains exemples et
définit un certain nombre d'activités connexes.
Sur cette question-là, M. le Président, la grande
majorité - et là, la ministre ne pourra pas me contredire
là-dessus - la grande majorité des entreprises qui sont venues
témoigner se sont opposées aux dispositions contenues dans le
Rapport quinquennal puisque, à leurs yeux et aux yeux de l'Opposition,
il s'agissait là d'un recul important par rapport à la loi de
1984 et qu'il n'y avait pas raison de s'inquiéter. La ministre a fait
valoir un point de vue que je respecte mais qui n'est pas le mien. La ministre
nous a parlé - et c'était bien clair déjà dans son
Rapport quinquennal - des problèmes pour la sécurité des
investisseurs, des tensions que de tels investissements pourraient créer
sur le capital. Effectivement, ce sont des problèmes qui ne sont pas
négligeables, mais, cependant, avec les outils qu'elle s'est
donnés, avec les normes de capitalisation dont on va bientôt
discuter avec le comité de déontologie qui sera adopté par
l'ensemble des entreprises qui oeuvrent dans le milieu des assurances, on en
fait maintenant l'obligation pour ces compagnies, une disposition novatrice que
l'Opposition salue, mais il aurait fallu faire preuve, à notre avis,
d'un peu plus de courage, continuer dans la même foulée que la loi
de 1984 et permettre aux entreprises de se doter d'un bras commercial tout
comme la Société financière Desjardins, le Mouvement
Desjardins l'a fait, par le biais de la Société d'investissement
Desjardins.
Je comprends très bien que la Loi sur les assurances ne viendra
pas affecter la Société d'investissement Desjardins. Je comprends
très bien ça. Mais parlons donc juste quelques instants d'un
exemple de succès. M. le Président, permettez-moi de citer un
extrait du mémoire du Mouvement Desjardins, de la Société
financière Desjardins, présenté à l'occasion du
Rapport quinquennal, et regardez bien: Par contre, nous sommes en
désaccord avec l'énoncé de politique à l'effet
d'établir une liste de filiales financières admissibles et de
limiter les placements de
capital, dans les autres types de filiales, à celles dont les
champs d'activité seront accessoires ou connexes au commerce
d'assurances.
En effet, le Mouvement Desjardins a toujours privilégié la
détention de filiales ou liens commerciaux en aval puisque les
institutions à contrôle démocratique, comme les
coopératives et les mutuelles, ne peuvent avoir que des liens
commerciaux en aval. C'est d'ailleurs pour cette raison que la nouvelle loi sur
les caisses d'épargne et placement et de crédit prévoit
que les confédérations de caisses d'épargne et de
crédit peuvent constituer des sociétés de portefeuille en
matière immobilière et commerciale.
De fait, le Mouvement Desjardins a des liens commerciaux en aval depuis
1974 par le biais de la Société d'investissement Desjardins. Ce
n'est pas l'Opposition; je lis le mémoire, Mme la ministre. Ces liens
furent des plus bénéfiques pour le développement du
Québec, sans nuire aucunement à la santé financière
du Mouvement et des caisses. Quant aux objections formulées par ceux qui
s'opposent aux liens commerciaux en aval, nous croyons que les risques qu'ils
invoquent, conflits d'intérêts, transactions
d'intéressés, risques d'insolvabilité, peuvent
disparaître ou s'atténuer sensiblement en ajoutant à la loi
des mécanismes à cette fin, par exemple, des normes de
capitalisation accrues - qu'on discutera dans un avenir prévisible -
création de comités de déontologie - c'est ce qu'on a fait
dans la loi, bravo! nous nous félicitons de cette disposition-là
- sanctions sévères en cas de non-respect des exigences de la loi
ou du Code de déontologie.
M. le Président, nous aurions pu fort bien permettre à nos
institutions financières, particulièrement à nos mutuelles
d'assurances qui ont de graves problèmes de capitalisation puisqu'elles
ont de la difficulté à avoir accès à des capitaux
externes... Leur marge bénéficiaire, ces dernières
années, à cause d'une grande concurrence internationale, a
énormément diminué, M. le Président, et, pour
plusieurs d'entre elles, la seule possibilité qu'il leur reste
maintenant, c'est une démutualisation, entre guillemets, à
l'exemple de La Laurentienne, alors que ces gens-là, comme ils le
faisaient voir de façon très claire dans le rapport Garneau qui a
été commandé par la ministre, ils croient en cette
possibilité, ils croient en cette structure démocratique qui est
une mutuelle et ils auraient bien voulu pouvoir bénéficier de
liens commerciaux en aval.
M. le Président, en conclusion, c'est un tour...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Rapidement, M. le
député. Votre temps est écoulé.
M. Boisclair: Rapidement, M. le Président. C'est un tour
rapide d'horizon. J'aurais aimé pouvoir aller plus à fond sur ces
dispositions-là. J'étais en train de préparer des notes,
M. le Président, lorsque, à la toute dernière minute, j'ai
dû venir ici...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure,
M. le député.
M. Boisclair: Je dirai tout simplement, M. le Président,
que, malgré le fait que l'Opposition ait donné son consentement
à la grande majorité des articles au moment de l'étude
article par article du projet de loi 112, il y a cependant des objections de
fond que nous avons manifestées à l'égard des deux
dispositions dont je viens de parler et c'est pour cette raison que nous ne
pourrons pas donner notre consentement à ce projet de loi.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, sur cette motion,
je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant, M. le
député de Labelle.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: Merci, M. le Président. J'interviens
dans ce projet de loi parce que j'ai eu, à un moment, la
responsabilité d'être le critique des institutions
financières, le ministre des Institutions financières, et je
voudrais rappeler, pour un secteur qui m'intéresse en particulier, celui
de ces institutions financières au Québec, qu'il y a eu en 1984
cette loi 75 qui avait été votée par l'ancien
gouvernement. Je pense qu'il faut le dire parce qu'il ne faut pas compter sur
les gens d'en face pour en parler trop fort. Mais il faut le dire. Je voudrais
simplement rappeler quelques citations sur cette loi qui disaient, par exemple,
en 1986: L'approche du Québec en 1984 semble avoir tracé la voie
puisque, tant au niveau du gouvernement fédéral que du
gouvernement de l'Ontario, les mesures annoncées au cours de
l'année 1986 en regard des pouvoirs dont devraient jouir les
institutions financières sont substantiellement celles du Québec.
Il en est de même des mécanismes de contrôle et de
surveillance des institutions financières.
Cette loi était évidemment importante et elle a
été votée, appliquée et elle a mis le Québec
en avance sur les autres provinces et sur le Canada, oui, le gouvernement
fédéral, en ce qui concerne le domaine des institutions
financières. On visait la déréglementation, mais aussi le
décloisonnement, qui sont deux choses différentes. Le
gouvernement, à l'époque, poursuivait des objectifs, le
développement de ces institutions financières. Il voulait
protéger l'épargne du public; il voulait favoriser la concurrence
entre les institutions; il voulait améliorer la qualité du
service offert au public et faire contribuer les institutions
financières au développement économique du Québec.
Donc, une vision très dynamique du Québec.
Les moyens, c'est le décloisonnement, c'était des pouvoirs
de placements accrus, c'était
aucune restriction à la propriété des institutions
financières et, surtout, ce qu'on avait en tête, avec tout cela,
globalement, généralement, c'était la création de
grandes institutions financières pour être capables de
concurrencer sur le pian international. Il y a eu des effets positifs, M. le
Président. Je ne veux pas reprendre tout ce qui a été dit
là-dessus, mais, déjà, le prédécesseur de la
ministre actuelle avait dit: À plusieurs égards, notre secteur
financier constitue une réalisation remarquable du génie
économique québécois attribuable au dynamisme des
dirigeants et propriétaires des institutions ainsi qu'à une
législation financière maintes fois innovatrice.
Alors, M. le Président, la loi de 1984 demandait qu'au bout de
cinq ans il y ait une révision pour introduire des corrections si cela
s'avérait nécessaire, compte tenu de l'expérience que nos
institutions financières auraient vécue au moment où on
atteindrait cinq ans. C'est dans ce contexte que, au début du mois de
septembre dernier, il y a eu une commission parlementaire pour étudier
un rapport quinquennal qui avait été déposé
à la fin de la session du printemps dernier pour faire le bilan et
indiquer les orientations de la ministre, parce que, entretemps, il y avait
différentes représentations qui avaient été faites
et surtout on demandait à la ministre d'aller plus loin et de
légiférer pour pouvoir aller davantage plus loin et permettre, en
particulier, aux entreprises d'assurances de pouvoir investir en aval. (23 h
20)
M. le Président, je voudrais simplement vous parler de cette
commission parlementaire à laquelle j'ai participé.
C'était la commission du budget et de l'administration qui s'est
réunie les 4 et 5 septembre et, pendant ces jours, nous avons pu prendre
connaissance et entendre 10 organismes qui sont venus nous voir. Je pense
qu'une des choses qu'il y avait à l'époque, par rapport à
cette consultation, c'était que le Rapport quinquennal comportait un
caractère flou, vague et il n'y avait que des principes lointains, en
fait, ce que nous ont fait remarquer les intervenants à cette
commission, et surtout les gens... Quant à moi, je m'inquiétais
de la volonté exprimée par la ministre d'harmoniser la
législation québécoise à la législation
fédérale, ce qui risquait de nous faire revenir en
arrière.
Pendant ces deux jours de consultation, donc, il y a plusieurs groupes,
dont le groupe Desjardins et La Laurentienne, qui ont soulevé les
mêmes points que nous. La Laurentienne allait même jusqu'à
dire que le Rapport quinquennal était si vague qu'elle avait peine
à distinguer l'orientation et, surtout, l'impact des mesures
annoncées pour peu qu'il était possible de faire la
différence entre les éléments de problématique et
de recommandations. Je veux juste vous dire jusqu'à quel point la
critique, quand même, était acerbe parce que, par rapport à
un rapport où l'on dit, après l'avoir lu, qu'on ne savait pas ce
qu'il voulait dire, il me semble que c'était particulièrement
grave envers la ministre. En fait, La Laurentienne se demandait si
l'introduction de chaque chapitre constituait une prise de position, une
politique ou non, et même, M. le Président, tout au long de cette
commission, nous avons demandé aux différents groupes qui sont
venus nous voir quel problème ils voyaient. En fait, ils nous ont dit
qu'ils ne voyaient pas de problème, aucun problème majeur,
surtout pas, et La Laurentienne est allée jusqu'à écrire
qu'elle avait trouvé plein de solutions dans ce rapport, mais qu'elle
cherchait le problème, que c'étaient des solutions à la
recherche d'un problème.
M. le Président, les groupes, à l'époque, ont fait
remarquer que ce rapport constituait un recul par rapport à 1984, que
les dispositions n'avaient pas eu le temps de faire leurs preuves et qu'en fait
ils étaient plutôt contents de ce qui s'était passé
et qu'ils demandaient, je pense, l'essentiel, un délai additionnel pour
appliquer davantage la loi et en tirer les conséquences. Avec un an de
retard, cependant, il y avait des choses à modifier sur cette
question.
Je passe vite, M. le Président, parce que je ne veux pas rappeler
tout ce qui a été traité sur ces affaires. Mais, par
exemple, en ce qui concerne les liens commerciaux en aval, qui étaient
un sujet particulièrement important dans la législation, c'a
été, en fait, le principal point d'intérêt de la
consultation publique de septembre dernier et c'est à l'unanimité
que les compagnies d'assurances à charte québécoise ont
dénoncé les propositions gouvernementales contenues dans le
Rapport quinquennal. Toutes ont souligné à la ministre qu'elle
proposait un recul par rapport à la loi actuelle sur cette question et
la volonté de la ministre de protéger le public, sa crainte de
voir se développer des conflits d'intérêts et sa croyance
que les liens commerciaux en aval ne représentent pas un moyen efficace
de contribuer à la capitalisation de nos compagnies n'ont pas fait le
poids face aux arguments de nos principaux intéressés. Ceux-ci
ont indiqué que les règles prévues à la loi 75
n'avaient entraîné aucune difficulté au Québec et
que les compagnies d'assurances québécoises avaient fait preuve
d'une très grande prudence depuis 1984, particulièrement à
l'égard des liens en aval, et ces entreprises ont indiqué
clairement que cette prudence ne signifiait nullement un
désintérêt. La ministre n'en a rien retenu dans son projet
de loi et on peut se demander à quoi a servi la consultation. Au fond,
il apparaît aussi que la question de la capitalisation des mutuelles,
à travers ce projet de loi, n'a pas été
réglée, malheureusement, et j'espère bien qu'on y arrivera
un jour.
M. le Président, le groupe de travail, par exemple,
présidé par M. Raymond Garneau et instauré par la ministre
elle-même indique clairement dans son rapport que les sept corn-
pagnies d'assurances québécoises qui sont des mutuelles
n'ont nullement l'intention de renoncer aux types de propriétés
en aval. Et tout le monde sait que, dans le cas des mutuelles, c'est essentiel
pour elles de pouvoir le faire, afin de capitaliser, de trouver du capital
nécessaire à leur développement.
M. le Président, je voudrais simplement rappeler qu'encore une
fois, dans ce projet de loi, la ministre se donne des pouvoirs
discrétionnaires et qu'au lieu de s'en tenir à une
autorité comme celle de l'Inspecteur général des
institutions financières, maintenant, la ministre va intervenir, encore
une fois. Dans tous les projets de loi, nous retrouvons les mêmes
dispositions. La ministre se donne, s'arroge des pouvoirs qui peuvent comporter
des difficultés considérables dans le temps.
Dernier point, M. le Président, que je veux toucher; il y a un
certain besoin d'harmonisation, et c'est un peu dans le sens du livre gris qui
avait été produit sur la réforme des institutions
financières. Mais, de là à restreindre les placements,
comme c'est le cas, il me semble qu'il y a une grande marge. Toutes les
compagnies québécoises ont indiqué leur désaccord
et on préférerait que la ministre parle davantage de
reconnaissances réciproques de législations que
d'harmonisation.
Au fond, je pense que la ministre devrait être très
prudente. Elle qui fait partie d'une formation politique en pleine
réflexion par rapport à l'avenir du Canada devrait aussi
réfléchir aux désavantages de faire une harmonisation trop
parfaite au moment où ces lois peuvent changer.
M. le Président, il resterait beaucoup à dire sur cette
loi. Nous allons nous opposer pour différentes raisons, surtout pour
celles qui ont été élaborées très largement
par mon collègue de Gouin.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Labelle. Sur ce même sujet, je suis prêt
à reconnaître la députée de Taillon.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: M. le Président, quand on veut qu'ils
accélèrent, ils ne font rien et, quand on veut qu'ils prennent le
temps, ils refusent. Alors, de toute façon, en toute espèce de
circonstances, on n'a jamais réponse aux propositions que l'on
dépose et que l'on fait. Je pense que mon collègue de Labelle et,
avant lui, mon collègue de Gouin ont fort bien explicité pourquoi
il apparaissait toujours pertinent aux membres de cette Assemblée que
certaines questions puissent être creusées davantage, que l'on
prenne le temps de consulter et de rencontrer des intervenants du milieu, M. le
Président. Et je pense qu'à cet égard-là, le
passé étant garant de l'avenir, le parti qui forme l'Opposition
officielle à l'heure actuelle a une certaine expérience en ce qui
concerne les institutions financières, puis je vais un peu le rappeler
dans mon intervention, M. le Président. Nous sommes
considérés - je ne dirais pas par le monde entier - au moins par
nos amis canadiens comme étant ceux et celles qui avons le plus fait
avancer le débat autour du décloisonnement des institutions
financières.
Nous sommes reconnus comme étant ceux qui avons été
les plus innovateurs, les plus progressistes, qui avons présenté
une vision articulée de ce qui nous semblait nécessaire pour que
nos institutions financières, d'une part, puissent occuper largement la
place qui leur revient, puissent mieux être interreliées les unes
avec les autres et puissent répondre aux normes
généralement reconnues à leur égard, quant à
leur saine gestion. Et, ça, c'est un gouvernement - et j'en suis
d'ailleurs très fier - du Parti québécois qui l'a fait, en
1982, on allait amorcer ce processus, M. le Président. En fait, c'est
une réforme majeure de toute la législation
québécoise en ce qui concerne les institutions
financières. Et on a laissé, à cet égard-là,
notre marque et c'est heureux, je crois, parce que vous allez voir - et je vais
y revenir - les résultats que cela a produit. (23 h 30)
D'abord, en 1982, on va procéder à une refonte de la Loi
sur les valeurs mobilières. Je pense que c'est important, parce que
ça vise toujours, ces lois, à mieux protéger le public,
à mieux informer le public, à mieux articuler les règles
d'encadrement en ce qui concerne, finalement, des éléments
majeurs de nos échanges commerciaux.
En 1983, le gouvernement d'alors, notre gouvernement, va procéder
à la création du poste d'Inspecteur général des
institutions financières et, un peu plus tard, en 1984, on va adopter la
Loi sur les assurances. Mon collègue en parlait, mais j'aimerais bien y
revenir à mon tour parce que, effectivement, l'approche qu'a retenue le
Québec... Et là, je peux citer un collègue qui nous a
suivis, qui est dans une autre formation politique, mais qui était
d'accord avec nous et qui est celui qui a précédé la
ministre actuellement responsable des institutions financières, qui,
dans un livre gris qui avait été publié concernant la
continuation de la réforme des institutions financières, disait:
"L'approche du Québec, en 1984, semble avoir tracé la voie,
puisque tant au niveau du gouvernement fédéral que du
gouvernement de l'Ontario, les mesures annoncées au cours de
l'année 1986, en regard des pouvoirs dont devraient jouir les
institutions financières sont substantiellement celles du Québec.
Il en est de même des mécanismes de contrôle et de
surveillance des institutions financières."
Quand je lis de telles choses, M. le Président, je me rappelle un
travail très important que nous avons fait au gouvernement du
Québec
à l'égard de toute la réforme des régimes
privés de rentes ou les régimes complémentaires de
retraite qui ont eu un effet d'entraînement majeur sur l'ensemble de la
législation canadienne. On s'est harmonisés avec le Québec
parce que le Québec était innovateur, parce qu'on a bien
identifié les problèmes que rencontraient les gens qui
étaient aux prises avec la constitution de régimes de retraite.
Après avoir analysé ces problèmes, je pense qu'on a
identifié des solutions qui sont venues vraiment régler en
profondeur ces problèmes. Alors, c'est intéressant de faire ce
parallèle. Dans les institutions financières, nous avions
procédé à de telles innovations qui ont eu des effets
d'entraînement. De la même façon, dans le cas des
régimes complémentaires, M. le Président, régimes
de rentes, nous avons eu un effet d'entraînement sur les autres
provinces, sur les législations des autres provinces.
Ce qui fait que le gouvernement qui nous a suivis a tenté, je dis
bien tenté, de poursuivre dans la même veine et dans la même
ligne. Cela étant dit, il semble qu'il ne réussit pas à
satisfaire complètement et totalement les besoins des institutions qui
sont concernées par une telle loi. Et celles-ci l'ont fait savoir
à différentes reprises, d'abord à mon collègue de
Labelle, qui a été le premier critique en cette matière au
sein de notre formation politique, comme membre de l'Opposition, et par la
suite au député de Gouin. Mais si j'ai bien compris tout le
débat qui nous anime ce soir et la raison qui fait que nous intervenons
sur ce projet de loi, c'est qu'on a considéré, comme d'habitude,
qu'on avait la vérité toute faite, qu'on n'avait pas besoin
d'aller savoir ce qu'en pensaient nos interlocuteurs, qu'il n'était pas
utile de procéder à une consultation plus en profondeur.
Pourtant, toute la perspective qui avait été
développée par le gouvernement, le gouvernement dont j'ai fait
partie, reste une perspective essentiellement saine et essentiellement utile
à nos institutions financières. Qu'est-ce qu'on poursuivait comme
objectif et qu'est-ce qu'on croit nécessaire de continuer à
poursuivre comme objectif? On voulait permettre le développement
d'institutions financières québécoises pour assurer, pour
affronter la concurrence étrangère. Je vais y revenir, vous allez
voir ce que ça a donné. On voulait, bien sûr - et
ça, c'est normal, correct, et un gouvernement qui ne s'en
préoccuperait pas ne serait pas un gouvernement responsable -
protéger l'épargne du public. On voulait aussi par contre - et je
pense que c'est un principe largement accepté dans nos économies
libérales - favoriser la concurrence entre les institutions
financières. Pas provoquer de situation monopolistique. On voulait
évidemment, et dans la même foulée que la protection du
public, assurer une meilleure qualité des services offerts au public.
Et, enfin, on voulait faire contribuer les institutions financières au
dévelop- pement économique du Québec.
Vous m'indiquez malheureusement qu'il me reste peu de temps, je termine.
Je termine d'ailleurs en citant un collègue d'en face, qui était
membre du gouvernement au moment où il l'a écrit et qui est
maintenant dans une institution importante au Québec, qui est maintenant
dans le Mouvement Desjardins et qui disait: À plusieurs égards,
notre secteur financier constitue une réalisation remarquable du
génie économique québécois - que ces mots sont
beaux! - attribuable au dynamisme des dirigeants et propriétaires des
institutions ainsi qu'à une législation financière maintes
fois innovatrice. Et la caractéristique majeure de notre système,
de notre organisation - et je termine là-dessus, M. le Président
- c'est sa quasi-invulnérabilité aux prises de contrôle.
Nos institutions financières nous appartiennent en propre, nous les
contrôlons et on peut difficilement venir s'en accaparer de
l'extérieur. Pensons à la Caisse de dépôt et
placement, pensons à Desjardins, une coopérative. On
n'achète pas ça, une coopérative, ça appartient
à ses sociétaires. Une personne, un vote, souvenez-vous du
principe.
On fête cette année le 50e anniversaire du Mouvement
Desjardins. Les banques, les mutuelles, l'Industrielle, l'Alliance qui est une
mutuelle, ce sont autant de sociétés qui sont
inaliénables, qui nous appartiennent en propre. À cet
égard-là, je suis persuadée que nous faisons l'admiration
de nos concitoyens canadiens, de nos concitoyens à l'extérieur du
Québec, canadiens, mais que nous faisons aussi sûrement
l'admiration de gens du monde entier qui sont intéressés par ce
qui se passe chez nous.
Ce que nous demandons à la ministre, c'est qu'elle soit attentive
au fait que l'on bonifie encore ce réseau d'institutions qui fait
maintenant notre fierté. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée. Sur cette même motion, la prise en
considération du rapport de la commission du budget et de
l'administration sur le projet de loi 112, je suis prêt à
céder la parole au député de Masson. M. le
député de Masson, vous avez la parole.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci beaucoup. M. le Président, dès que
nous touchons une loi sur les finances, la loi que nous étudions
présentement - c'est la Loi modifiant la Loi sur les assurances et
d'autres dispositions législatives où il y a beaucoup de finances
- on croirait que c'est résoudre le cube Rubik. Mais c'est plutôt
une loi qui nous arrive présentée par... C'est une loi de cube
Robic et je l'ai lue sur les quatre côtés.
Malgré que j'aie été administrateur pendant
longtemps, il y a beaucoup de choses, M. le
Président, que j'ai du mal à comprendre. Cependant, je
tiens à dire, comme ceux qui m'ont précédé, qu'en
1984 notre loi 75, je la comprenais très bien et je me souviens d'en
avoir parié longtemps en commission parlementaire à
l'époque, et ça allait très bien. Cependant, vu qu'on
s'adresse à cette heure-ci surtout à des gens
spécialisés dans le domaine des assurances, dans le domaine des
mutuelles, je suis persuadé que, si on leur dit: Ce projet de loi en soi
semble aride, pour qu'il tombe en terre fertile, Mme la ministre a eu la
gentillesse et la délicatesse de mettre des notes explicatives. À
la lecture de ces notes explicatives, M. le Président, et je suis
persuadé que, vous, vous n'étudiez pas à fond tous nos
projets de loi parce que votre charge est trop lourde, mais, en vous lisant les
notes explicatives, vous allez voir la simplicité, en fait, de ce projet
de loi parce que les notes explicatives nous ont été
jetées sur papier avec une telle clarté qu'à les lire nous
comprenons tout. (23 h 40) "Ce projet de loi a pour objet de modifier la Loi
sur les assurances afin d'introduire de nouvelles mesures visant à
assurer le contrôle de la propriété des assureurs
constitués au Québec." C'est facile à comprendre. C'est
pour ça que cette loi-là est là. Je ne pense pas qu'il y
ait d'explications même à donner sur cette phrase. Elle est un peu
longue. La verbalisation du côté français n'est pas
extraordinaire, mais le langage du législateur, de façon normale,
n'est pas d'un français très recherché.
Deuxième paragraphe: "II modifie, par ailleurs, les pouvoirs de
placements des assureurs en imposant notamment des limites aux investissements
dans des filiales et des sociétés en fonction des
activités exercées par ces dernières." Alors, ceux qui
sont considérés par ce paragraphe comprennent
immédiatement qu'il va y avoir une modification dans leur agir.
Troisièmement, "Ce projet assouplit les règles relatives
à l'immatriculation des dépôts, prêts et placements
d'un assureur." Ça, pour moi, c'est un peu plus nébuleux. J'y
reviendrai tantôt, M. le Président, pour expliquer, mais ceux qui
sont à point, les assureurs et tous ceux qui sont dans les mutuelles,
comprennent très bien ce que cet item veut dire. "Il rend applicable aux
assureurs..." Le paragraphe est un peu plus long, M. le Président. Je
vais essayer, avec les cours de diction que j'ai pris, de prendre la
respiration voulue pour les cinq lignes qui viennent et j'espère ne pas
trop bafouiller parce qu'il y a certains mots qui sont excessivement difficiles
à prononcer. Je vais y aller pour la bonne compréhension de ceux
qui nous écoutent à cette heure-ci. Nous savons qu'à cette
heure-ci on a entre 250 000 et 300 000 auditeurs et je voudrais absolument que
chaque personne perçoive très bien ce que je dis. "Il rend
applicable aux assureurs pratiquant l'as- surance de personnes la règle
qui interdit aux assureurs pratiquant l'assurance de dommages de
déclarer des dividendes ou des intérêts ou de distribuer
des surplus annuels si cela a pour effet de rendre leur actif non conforme." Il
n'y a rien de plus clair, il n'y a rien de plus clair! Il y a peut-être
le "non conforme" que certaines personnes ne comprendraient pas, mais vous
allez certainement me donner le temps, tantôt, pour expliquer ça.
J'ai toutes les explications voulues au cas où quelques personnes qui
nous écoutent ne puissent pas comprendre le "non conforme".
L'autre paragraphe, "II assujettit les assureurs à des
règles concernant l'éthique et les conflits
d'intérêts dont, notamment, l'obligation d'adopter un code de
déontologie et d'en surveiller l'application." Ça, c'est
merveilleux, M. le Président. Un code de déontologie dans tous
les métiers, c'est facile à comprendre, dans tous les
métiers du monde. Même nous, qui faisons les lois, avons nos
règles. Même nous! Mon Dieu! que, M. le Président, c'est
donc une chose que vous savez parce que de temps en temps, comme dans
l'entreprise privée, nous essayons, par intérêt partisan ou
politique, de déroger un peu à nos lois, à notre code de
déontologie. On lance des phrases qu'on ne devrait pas lancer et vous
êtes là pour nous surveiller, comme on va avoir dans cette loi, je
vais vous le dire un peu plus tard, un inspecteur général qui va
tout surveiller pour que le code de déontologie soit bien
appliqué. Ça, pour les consommateurs, c'est bien, comme titre,
comme explication. "il accorde à l'Inspecteur général..."
Voilà le président, en fait. L'Inspecteur général
des assurances, c'est un poste qui équivaut à votre
présidence. Vous, vous êtes là pour nous faire respecter
notre code de déontologie et, dans les assurances et les mutuelles, ils
ont un inspecteur, comme moi quand j'étais à la petite
école. On avait un inspecteur pour nous garder dans les règles et
la bonne marche, pour respecter le consommateur. C'est assez facile à
comprendre quand on amène ça à des choses tangibles et
palpables. Pourtant, on dit toujours que les règles des assurances,
c'est compliqué. Ça ne l'est pas. Il faut en parler, d'abord,
avec assurance, premièrement. C'est la première assurance pour
parler des assurances.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Blais: C'est d'être assuré soi-même, que ce
que l'on dit sera bien compris. C'est ça, la première
règle de l'assurance. Et en Chambre, M. le Président, la
première règle de déontologie, c'est de parler pour dire
des choses que l'on comprend. Ce que l'on conçoit bien s'énonce
clairement et les mots pour le dire arrivent aisément. Vous vous
souvenez de votre cours classique, M. le Président.
Une voix: Ce n'est pas certain.
M. Blais: Ah oui! Boileau! Des voix: Ha, ha, ha!
M. Blais: Boileau qui disait ça. Pour lui, Pégase
est doux et... Comment s'appelait-il l'autre cheval?
Une voix: Hélios. Hélios et Pégase.
M. Blais: Pour lui, Phébus est sourd et Pégase est
rétif. Voilà! Et, moi, je suis plutôt rétif, quand
je vois qu'on a de la difficulté à retrouver quelque chose comme
ça qu'on devrait avoir facilement à temps. En fart, le projet de
loi introduit de nouveaux pouvoirs réglementaires et comporte des
dispositions transitoires et de concordance. M. le Président, j'ai pris
quelques minutes - je sais que j'ai une heure - pour vous lire les dispositions
de la loi et ce que les notes explicatives voulaient bien nous donner.
Une fois cela dit, il y a eu consultation. Il y a 10 mémoires qui
ont été reçus en septembre, avant qu'on commence à
étudier la loi, pour connaître l'idée des gens du milieu.
Dans les 10 rapports, il y en a 8 qui ont dit qu'ils ne voulaient pas de
changement et 2 qui ont dit: On en voudrait peut-être un peu et, quand on
a fouillé, c'étaient 2 groupes de l'extérieur du
Québec. Alors, ce n'était pas tellement influent. Mais les 8 du
Québec ont dit non. Pourquoi n'en voulaient-ils pas de changement, M. le
Président? Je les résume très vite. Les groupes faisaient
remarquer que ce serait un recul par rapport à 1984, ce projet de loi
qu'on est après adopter aujourd'hui, que les dispositions de 1984,
à cet égard, n'avaient pas eu le temps de faire leurs preuves -
ils voulaient continuer, telles qu'elles étaient - qu'aucun
problème ne s'était manifesté au Québec depuis
l'adoption de la loi 75 en 1984, qu'aucune compagnie d'assurances
québécoise n'avait fait faillite au Québec, contrairement
à ce qui se passe aux États-Unis et dans le reste du Canada,
depuis la loi 75 passée en 1984 par le Parti québécois
dont je fais encore partie.
Bref, disent-ils, il n'y a pas lieu de revenir en arrière. Donc,
on voulait, malgré que la loi 75 qu'on a passée nous dise
qu'à tous les cinq ans on se doit de la regarder, de la réviser,
c'est une obligation de la regarder, mais on peut dire qu'il n'y a pas de
révision réelle à faire, parce qu'elle semble bien aller.
On ne brise pas quelque chose qui va bien. Eh bien, là, M. le
Président, on nous dit qu'on change des choses. Dans le code de
déontologie, par exemple, on retourne le fardeau de la preuve, ce qui
est contraire à nos codes habituels de juridiction. Voyons! On n'a pas
à prouver qu'on est coupable quand on l'est ou qu'on ne l'est pas. C'est
à l'accusateur à prouver qu'on est coupable. Vous tournez
ça au paragraphe 285.7 changeant le paragraphe 46. Et la corporation du
groupe La Laurentienne ne voulait absolument pas que vous changeassiez
ça.
Et, ici, j'ai à peu près 50 items. Je vais commencer par
le premier. Pardon, M. le Président, vous dites que mon temps
achève?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure,
votre temps est terminé, très rapidement!
M. Blais: Ah! il faut que je conclue? Je m'excuse très
humblement. Je pensais que j'avais une heure, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous savez très
bien, M. le député, que vous aviez 10 minutes.
M. Blais: Alors, je m'excuse humblement, M. le Président.
Je tiens à dire ceci, en terminant: II est malheureux que nous fassions
des changements de cette envergure à cette loi, parce que tous ceux qui
sont venus nous voir et qui nous ont écrit nous ont dit que la loi,
telle qu'elle l'était, aurait dû rester à peu près
comme elle était parce qu'elle fonctionnait très bien. Et je vous
remercie, M. le Président.
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. Sur cette même motion, je suis prêt à
reconnaître Mme la députée de Terrebonne.
Mme Jocelyne Caron
Mme Caron: Merci, M. le Président. Vous savez, ce qu'il
faut commencer par dénoncer ce soir, c'est la précipitation du
gouvernement à étudier ce projet de loi 112. Mais je pense que
cette session a bien démontré que c'est devenu une habitude de ce
gouvernement de se précipiter dès qu'un projet de loi suscite une
certaine opposition. Il a utilisé exactement la même technique
pour le projet de loi 89, la fameuse taxe de vente québécoise -
vous le savez, M. le Président - et la même technique aussi pour
le projet de loi 109 sur la Caisse de dépôt et placement du
Québec.
Dans les deux cas, on savait pertinemment qu'il y avait de l'opposition,
autant du côté des experts que du côté des
regroupements. Et, dans les deux cas, tout comme ce soir, on s'est
dépêché de déposer le projet de loi quand même
et, en commission parlementaire, on a refusé d'entendre les groupes qui
étaient concernés directement par ces sujets-là, et
ça, même si certains groupes, dès la consultation de
septembre, avaient manifesté, avaient demandé à ce
moment-là d'être entendus au moment du dépôt. Et on a
ici le mémoire de la Société financière des caisses
Desjardins qui, dès le 13 août 1990, disait: Nous
réitérons notre demande à l'effet que le gouvernement
soumette à une consultation publique les éventuels amendements
à la Loi sur
les assurances. Alors, la demande était là et pas
seulement du groupe de la Société financière des caisses
Desjardins, mais bien de plusieurs groupes. (23 h 50)
Donc, on a refusé de donner réponse à cette
demande, même si l'Opposition a fait la demande en commission
parlementaire. Donc, on s'est dépêchés de se rendre
à l'étape de la prise en considération du rapport,
malgré les opposants et malgré l'Opposition qui les
représente. Heureusement, on n'a pas fait tout à fait comme pour
les projets de loi 89 et 109, c'est-à-dire qu'on ne nous a pas mis
immédiatement un bâillon, une motion de clôture après
quelques heures d'étude, parce qu'il faut se rappeler que sur la loi 89
on a reçu un bâillon, une motion de clôture après 23
heures de débat, plus précisément 22 heures 58 minutes et,
pour la loi 109, après à peine 2 heures.
Vous savez, notre porte-parole en matière d'institutions
financières, le député de Gouin, et son
prédécesseur sur le dossier, le député de Labelle,
ont clairement exprimé, dans leur bref temps de parole, tantôt,
les deux oppositions majeures qui nous ont été soumises par les
différents groupes. Il s'agit, bien sûr, des liens commerciaux en
aval et du pouvoir discrétionnaire de la ministre. Ça aussi,
c'est une habitude du gouvernement, du gouvernement libéral, de se
donner des pouvoirs discrétionnaires. C'est coutume, surtout du
côté de la commission de l'éducation. C'était une
coutume que nous avons vue au cours des derniers mois, qui revenait
régulièrement, et même le nouveau ministre de
l'Éducation nous a dit, tout dernièrement, en commission
parlementaire, qu'il se doit de signer des piles de dossiers de
dérogation. Alors, à nouveau, on se retrouve aujourd'hui avec un
projet de loi, le projet de loi 112, qui donne un pouvoir
discrétionnaire, cette fois-ci, à la ministre
déléguée aux Finances.
Là-dessus aussi, les groupes se sont prononcés contre
cette mesure. Je vais vous lire la recommandation de la corporation du groupe
La Laurentienne sur ce pouvoir discrétionnaire de la ministre. On nous
dit: Le transfert de tout bloc d'actions de 10 % ou d'actions pouvant amener un
détenteur particulier à un tel bloc de participation devra
recevoir l'assentiment du ministre. Le ministre deviendra donc le partenaire
obligé de toute transaction commerciale dans la structure de
propriété d'un assureur ou d'une compagnie qu'il contrôle.
Dans ce contexte, il serait utile de connaître ce qui pourrait amener ce
partenaire à refuser son consentement. Malheureusement, la lecture du
nouvel article 46 n'est d'aucun secours à cet égard. Je vous
épargne plusieurs paragraphes, M. le Président, et je vais
immédiatement au résumé. On nous disait: En
résumé, nous croyons que la rédaction de l'article 46
devrait être reprise pour énoncer clairement les critères
de refus d'une transaction par le ministre. Donc, il est très clair que
la corporation du groupe La Laurentienne, tout comme les autres groupements,
avait des objections à ce pouvoir discrétionnaire et souhaitait
des éclaircissements et des précisions dans l'article 46.
On s'est opposés aussi, bien sûr, à ce dont on vous
a parlé tantôt, M. le Président, c'est-à-dire les
liens commerciaux en aval. Là-dessus, il y avait unanimité; tous
mes collègues l'ont dit. Toutes les compagnies québécoises
se sont opposées, sauf deux dont le siège social est en Ontario,
c'était unanime. Et je me demande toujours pourquoi ce gouvernement,
à chaque fois qu'il y a unanimité contre un article d'un projet
de loi ou contre l'ensemble de l'article... Je pense à la TVQ, je pense
à l'ensemble du projet de loi, immédiatement, vous pouvez
être assurés que vous allez retrouver cet article-là sans
amendement dans le projet de loi, dans chacun des projets de loi. Je pense,
entre autres, au projet de loi 102 sur lequel j'ai eu à travailler
à quelques reprises et sur les trois articles qui posaient
problème, où il y avait des oppositions de tous les groupes, il
n'y a eu aucun amendement. On était assurés de les retrouver tels
quels dans le projet de loi. C'est la même chose, ici, du
côté des liens commerciaux en aval et je ne vais vous lire que
quelques paragraphes, M. le Président. On nous a dit: C'est à
l'unanimité que les compagnies d'assurances à charte
québécoise ont dénoncé les propositions
gouvernementales. Toutes ont souligné à la ministre qu'elle
proposait un recul par rapport à la loi actuelle sur cette question.
Celles-ci ont indiqué à la ministre que les règles
prévues par la loi 75 de 1984 - loi qui avait été faite
par le Parti québécois, M. le Président - n'avaient
entraîné aucune difficulté au Québec et que les
compagnies d'assurances québécoises avaient fait preuve d'une
grande prudence depuis 1984, particulièrement à l'égard
des liens en aval. Ces entreprises ont indiqué clairement que cette
prudence ne signifiait nullement un désintérêt, mais la
ministre n'en a rien retenu. On peut même se demander à quoi a
bien pu servir cette consultation publique. Et, pour être certaine de ne
rien retenir à nouveau, elle s'est assurée cette fois-ci, bien
sûr, de ne pas entendre les groupes en commission parlementaire.
Il y avait eu d'autres points de dissidence du côté de la
corporation du groupe La Laurentienne, M. le Président, on
s'était prononcé également sur les pouvoirs de placements.
On s'était prononcé sur les dispositions, sur les administrateurs
et la déontologie. Là aussi, on avait certaines réserves,
M. le Président. On s'était prononcé également sur
la scission des mutuelles d'assurances, le statut des compagnies qui en
résulte, et je pense que l'étude qui avait été
présentée... Et cette lettre-là du groupe La Laurentienne
a été présentée à la ministre le 6
décembre, donc, c'est tout récent, M. le Prési-
dent. C'est une lettre qui suit la lecture du projet de loi 112. Donc,
ça ne vient pas avant les dépôts des mémoires du
mois d'août et du mois de septembre, c'est suite à la lecture du
projet de loi de la ministre. Donc, ce projet de loi n'est pas du tout
accepté par les experts, parce que, M. le Président, je ne
tenterai pas de vous faire accroire que je suis une experte des questions
financières, mais, lorsque c'est une question en laquelle nous ne sommes
pas experts, je pense qu'il faut se référer à ces
groupes-là, à ceux qui doivent vivre avec cette loi-là et
qui vont avoir régulièrement, au cours des années,
à vivre avec les amendements qui sont proposés par la ministre
déléguée aux Finances.
M. le Président, vous savez, dans mon comté, j'ai
commencé, cet automne, une opération consultation sur les divers
projets de loi qui ont été présentés au cours de la
session. J'avoue qu'il n'y avait pas beaucoup de projets de loi pour cette
session-ci, mais nous avons envoyé à 125 personnes de mon
comté un résumé de chacun des projets de loi. Et je vous
avoue que sur le projet de loi 112, effectivement, il y a eu beaucoup de
réticences. J'avais pris la peine d'adresser aussi, en dehors du groupe
qui avait demandé à participer à l'opération,
certaines lettres à certaines compagnies qui pouvaient être
intéressées plus particulièrement par ce sujet-là,
M. le Président. Et je vous avoue que, pour les compagnies de mon
comté, on a retrouvé exactement les mêmes objections, M. le
Président, les mêmes réticences que nous vous avons
présentées depuis le début des discours sur la prise en
considération du rapport. Je me dois donc, pour répondre aux
objections des gens de mon comté autant que des différents
groupes qui nous ont présenté certains mémoires, de
m'opposer à ce projet de loi 112. Merci, M. le Président.
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, mme la
députée de terrebonne. sur ce même sujet, je suis
prêt à céder la parole au député d'ungava. m.
le député d'ungava, la parole est à vous.
M. Christian Claveau
M. Claveau: Oui, M. le Président. La ministre
déléguée aux Finances qui vient de prendre ce poste
cherchait sûrement un moyen de ne pas se démarquer de ses
collègues, de faire en sorte que l'on sache bien que c'est un ministre
de ce gouvernement libéral qui prétend maintenir les cordeaux du
pouvoir depuis 1985, et il faut croire que le cheval a perdu sa bride, M. le
Président. Alors, qu'est-ce qu'elle a fait? Elle s'est dit: Que font mes
collègues, depuis 1985, qui pourrait servir de trait d'union, afin que
l'on puisse les reconnaître dans leur façon de fonctionner et quel
serait donc le moyen que je devrais prendre pour que les gens sachent que je
suis une ministre de ce gouvernement-là, parce que, depuis 1985, comme
ministre, on ne m'a pas beaucoup entendue, alors on ne sait pas si je suis
là? Après quelques efforts intellectuels, elle a fini par prendre
la voie de ses collègues, c'est-à-dire présenter un projet
de loi qui réussit à faire consensus contre lui, un projet de loi
qui va à rencontre des intérêts, des souhaits, des voeux de
ceux à qui il s'adresse et la preuve en est flagrante, M. le
Président, (minuit)
Depuis le début ce soir, mes collègues n'ont cessé
de démontrer par toutes sortes d'interventions, en utilisant des
citations venant des principaux intéressés, des compagnies
financières, des mutuelles d'assurances, que ce projet de loi là
ne correspondait pas à la réalité, que c'était un
projet de loi rétrograde, un projet de loi qui allait faire en sorte
d'encarcaner des institutions financières que l'on s'était
efforcé, en 1984, d'ouvrir sur le monde, des institutions
financières qui, enfin, pouvaient sortir du cadre restreint de leurs
activités traditionnelles pour devenir de véritables partenaires
du gouvernement dans le développement social et économique du
Québec. On avait donné à ces institutions-là les
marges de manoeuvre nécessaires pour qu'elles puissent vraiment
participer au développement et à l'avenir de la
société québécoise. Ça me semble assez
clair.
En 1984, au moment où le gouvernement du Parti
québécois a voté la loi 75 qui permettait le
décloisonnement des institutions financières, il y avait des
objectifs derrière ça. Ça se faisait à la suite
d'un consentement, d'un consensus qu'on avait développé dans la
population. On voulait, entre autres, s'assurer que les institutions
financières québécoises puissent affronter la concurrence
étrangère, aient les reins assez solides pour ne pas se faire
engloutir par les géants étrangers qui, un jour ou l'autre,
viendraient sûrement s'emparer du marché québécois.
On voulait aussi protéger l'épargne du public
québécois et faire en sorte que cette épargne-là
puisse générer des profits dans les activités ou les
opérations financières les plus lucratives, les plus
intéressantes, prendre le contrôle du marché sur ces
opérations-là avant que les autres de l'extérieur le
fassent à notre place, M. le Président. C'est facile à
comprendre. On voulait favoriser aussi une certaine concurrence entre ces
différentes institutions financières là. Vous savez, le
marché des assurances au Québec ou le marché financier
restreint, si on le regarde uniquement sous l'angle d'une activité
financière, est assez rapidement saturé, finalement. Avec 6 000
000 d'habitants et un territoire assez vaste, c'est évident que l'on a
vite saturé une opération financière en soi; que ce soit
de l'assurance de personnes, que ce soit de l'assurance sur les biens, que ce
soit du placement à terme, moyen terme, long terme, que ce soient
des activités boursières ou autres, on a vite atteint
notre niveau de saturation lorsqu'une institution est spécialisée
dans un seul domaine.
Alors, on a compris, en 1984, que, si on voulait développer une
saine concurrence et se servir de cet argent-là qui appartient aux
Québécois et qui restait, là, comme encarcané
à l'intérieur d'activités bien précises, si on
voulait donc s'en servir pour l'ensemble de la population du Québec pour
faire en sorte que cela devienne nos véritables assises
économiques, eh bien, il fallait décloisonner tout ça et
faire en sorte de développer une saine concurrence entre ces entreprises
financières là pour qu'elles puissent s'entrecroiser, j'oserais
dire, dans l'ensemble des activités de style financier qui gère
les biens et le devenir des Québécois. C'était une saine
activité et c'était aussi une sage décision que de faire
cela, M. le Président. Et ça, tout le monde l'a compris.
Alors, quels sont les moyens que le gouvernement s'est donnés
à ce moment-là, en 1984? Eh bien, ils sont de trois ordres
essentiellement et des moyens assez simples, des moyens auxquels on pouvait
s'accrocher, puis des moyens qui étaient facilement identifiables.
D'abord, on enlevait toute restriction à la propriété des
institutions financières. On décloisonnait les activités
de ces entreprises-là; donc, pouvait investir qui voulait, et
l'entreprise concernée pouvait, quant à elle, aller dans les
champs d'activité qu'elle jugeait les meilleurs, qu'elle jugeait les
plus lucratifs pour ses propriétaires, ses mutualistes, ses
actionnaires, dépendamment des cas, et qui, en même temps,
devenaient aussi des champs d'activité fondamentaux dans l'ensemble de
la dynamique économique du Québec. Et cela donnait en
troisième partie, comme troisième moyen, des pouvoirs de
placement accrus à l'ensemble des épargnants et des mutualistes
québécois.
C'était facile à comprendre. Ça allait bien et,
dans ce contexte-là, tout le monde se joignait les mains pour faire en
sorte de développer, en ce beau territoire du Québec, une emprise
financière qui, enfin, nous appartienne et qui fasse en sorte que l'on
connaisse, que l'on voie éclore ce qui arrive aujourd'hui, alors que les
gens disent: On a pris le contrôle de nos institutions
financières, on a établi notre emprise; maintenant, on sait qu'on
est capables de se gérer tout seuls et on n'a plus peur de faire
l'indépendance. L'indépendance, ce n'est plus une question de
tripes, ce n'est plus une question uniquement de langue, ce n'est pas seulement
une question de différence entre populations; c'est aussi une question
économique importante, parce qu'à force de travailler dans cette
démarche-là qui a été entreprise en 1984 les
entreprises financières se sont rendu compte, elles aussi, que, tant et
aussi longtemps que l'on resterait dans le cadre canadien, il n'y aurait pas de
possibilité de pouvoir vraiment s'épanouir tel qu'on aimerait le
faire et tel que l'on est capables de le faire.
On n'a qu'à regarder, par exemple, le mauvais oeil, j'oserais
dire, que la Bourse de Toronto jette sur la Bourse de Montréal, depuis
que la Bourse de Montréal a décidé de prendre son essor et
de s'imposer comme une véritable Bourse sur le marché boursier
nord-américain. Ça ne s'est pas fait tout seul. Il a fallu se
battre contre des gens comme on en trouve à la Bourse de Toronto. C'est
bien évident, parce qu'on devient un peu des empêcheurs de tourner
en rond dans le système canadien. Jusqu'à 1983-1984, avant qu'un
gouvernement du Parti québécois se décide à donner
aux institutions financières québécoises tous les moyens,
tous les leviers pour prendre leur place sur le marché
québécois, eh bien, ce sont les gens de l'Ontario qui
contrôlaient. C'est la Bourse de Toronto qui faisait ce qu'elle voulait.
Il n'y avait pas de contrepartie québécoise. Les petits
francophones du Québec s'amusaient avec leur folklore, ils
n'étaient pas dangereux sur le plan financier, mais, avec les outils
qu'on s'est donnés à partir de 1984, on est devenus dangereux
pour eux. On a pris conscience, quant à nous, de notre capacité
de faire tout seuls et on se retrouve aujourd'hui, à la Commission sur
l'avenir politique et constitutionnel du Québec, avec des gens qui
émanent du secteur financier et qui disent: Dans le fond, c'est vrai, on
est capables de marcher tout seuls. On n'a besoin de personne pour nous guider,
pour nous tenir par la main. Et maintenant, M. le Président, qu'on a
pris cette conscience-là, qu'on a réalisé cette
capacité-là qui nous appartient d'aller tout seuls, de se
développer, de s'épanouir, de prendre la place qui nous revient
sur les marchés financiers tant québécois
qu'étrangers, on a un gouvernement qui s'en vient mettre des
restrictions à ça à rencontre de tout ce que les
institutions financières québécoises souhaitent
d'ailleurs.
C'est l'ironie du sort, M. le Président. Un gouvernement qui
supposément est un gouvernement de libre entreprise, un gouvernement qui
devrait laisser voguer le bateau à sa guise s'en vient, pour des raisons
mesquines ou, pour le moins qui nous sont inconnues et qui sont sûrement
inconnues des institutions financières parce qu'elles ne comprennent pas
que le gouvernement prend cette position-là, ce gouvernement donc s'en
vient mettre des restrictions pour empêcher ces entreprises-là
dont nous devons être fiers et qui sont en fait les véritables
partenaires économiques du gouvernement du Québec dans le
développement de la société québécoise, de
continuer à se développer. On vient rétrécir leur
champ d'action, on vient imposer une décision ministérielle dans
le changement de main des actions des compagnies. On introduit des clauses
restrictives quant aux possibilités d'investir ou d'aller chercher les
investisseurs étrangers qui seraient prêts à
amener du capital neuf en territoire québécois. Enfin, M.
le Président, il n'y a plus rien à comprendre au fonctionnement
de ce gouvernement. (Oh 10)
En étant élu en 1985, M. le Président, ce
gouvernement nous a dit: Nous, nous allons enlever les règlements, nous
allons légiférer mieux et moins. Nous allons faire en sorte que
l'entreprise privée prenne la place qui lui revient en territoire
québécois. Nous allons faire en sorte que ce soit
dorénavant l'entreprise qui gère ses affaires et le gouvernement
ne s'en mêlera plus. Nous ne sommes pas de mauvais péquistes qui
interviennent dans les choses de l'entreprise. Nous, nous connaissons ça
et nous allons faire en sorte que l'entreprise se gère elle-même.
Et on se retrouve ce soir, M. le Président, avec un projet de loi qui
vient justement restreindre les capacités de l'entreprise de se
développer...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): C'est terminé, M.
le député d'Ungava.
M. Claveau: ...et des capacités qui leur avaient
été données par un gouvernement du Parti
québécois, M. le Président. Voilà pourquoi nous ne
comprenons pas la démarche de ce gouvernement et que nous ne pouvons,
à l'instar des entreprises concernées, faire autrement
qu'être contre un tel projet de loi. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député d'Ungava. Oui, monsieur. Alors, je reconnais maintenant
sur ce même projet de loi 112, à l'étape du rapport de la
commission, M. le leader de l'Opposition officielle, le député de
Joliette.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: M. le Président, quand on se
réfère au mémoire présenté par la
Société financière des caisses Desjardins à la
commission parlementaire, le Mouvement Desjardins disait à Mme la
ministre: "Nous souhaiterions vivement que le gouvernement soumette ses
intentions à une consultation publique après avoir fait
connaître les amendements qu'il entend apporter à la
législation actuelle." M. le Président, ' on sait que la ministre
a consulté sur le Rapport quin- . quennal, mais sur des questions
floues, évasives, ouvertes. Mais, fondamentalement, les institutions
n'ont pas eu la chance de s'exprimer sur les amendements législatifs. Et
c'était pourtant cela que le Mouvement Desjardins lui demandait.
Pourquoi? Sous toutes sortes de prétextes, en disant: J'ai
consulté. C'est dans tous les domaines. On consulte, on consulte
évasivement, on se surprend, quand on présente des projets de
loi, que les institutions, que les groupes ne viennent pas dire très
clairement, ou sont obligés, par la voie des journaux, de dire à
la ministre: Bien, ce que vous, avez déposé, ça ne marche
pas. Parce qu'on ne veut pas avoir les idées précises à
partir des intentions arrêtées, à partir des
décisions du gouvernement. Et, ça, c'est une façon de
faire, M. le Président, qui gêne le bon fonctionnement du
parlementarisme québécois, puis de la démocratie au
Québec. Pourquoi avoir peur de présenter des amendements
législatifs aux principaux intéressés? Je me demande bien,
moi, pourquoi s'obstiner. Ça aurait pris une journée et demie, au
maximum peut-être deux jours, pour connaître véritablement
ce que les institutions financières pensaient, M. le Président,
de ces amendements législatifs. Non, on préfère ça,
les fins de session, en bousculant tout, en pleine nuit, puis en nous disant:
Bon, qu'est-ce que vous pensez de ces amendements-là? M. le
Président, la lecture que l'on fait du projet de loi, c'est la suivante:
le gouvernement vient stopper, vient arrêter l'expansion des institutions
financières québécoises.
On se rappellera qu'en 1984 M. Parizeau avait donné cet
élan, M. le Président. Il croyait fondamentalement à la
capacité des institutions financières québécoises
d'occuper le plus large champ possible. Et, M. le Président, ça a
été adopté, ça aussi, par le Parti libéral.
M. Fortier est allé dans le même sens que M. Parizeau. Il croyait
en la capacité des institutions québécoises de prendre des
larges parts du marché québécois, de bâtir des
institutions fortes, des institutions concurrentes, des institutions qui
étaient capables de faire leur chemin et de montrer la force
québécoise. Mais, non, là on diminue, on restreint et,
plus encore, on se garde un pouvoir discrétionnaire. Je remarque
ça dans à peu près toutes les lois, M. le
Président, maintenant. On se garde des pouvoirs discrétionnaires.
On ne connaît pas les critères, on ne connaît pas sur quoi
on va se baser, mais on pourra donner des permissions. On empêche nos
institutions de se donner des bras commerciaux, M. le Président, . qui
pourraient avoir une retombée extrêmement positive sur l'ensemble
du Québec.
Ah, bien sûr, la ministre pourra nous répondre dans son
droit de réplique: Oui, mais j'ai le pouvoir! Mais oui, on le sait
qu'elle se donne le pouvoir, M. le Président. Mais, fondamentalement, ce
que les institutions veulent, ce n'est pas un pouvoir discrétionnaire;
ce que les institutions veulent, c'est avoir des critères
d'éligibilité, puis elle s'y conforment, c'est connu, c'est
discuté, c'est accepté. Je me demande, pourquoi, pourquoi, M. le
Président, à l'article 25, par exemple, de ce projet de loi
là, on vient limiter, à toutes fins pratiques... Et c'est
à cet article, fondamentalement, que l'Opposition s'est objectée,
la ministre le sait. Sur l'ensemble des autres amendements qui respectent les
intérêts du public, M. le Président, l'Opposition a
concouru à peu près à l'adoption
de tous les amendements, mais, fondamentalement, sur ce point
précis, nous nous sommes objectés et nous n'avons pas l'intention
de céder, bien sûr.
Aujourd'hui, ce sera le rapport et, demain, ce sera la troisième
lecture. On va revenir à la charge. On va prendre le temps qu'il faudra,
comme Opposition, pour manifester, au nom de ceux qui ne peuvent pas le faire
présentement, M. le Président... Parce que je suis sûr que,
si la ministre avait consulté ou avait tenu une commission
parlementaire, les groupes seraient venus lui dire exactement ce qu'on lui dit.
Les groupes seraient venus lui dire exactement ce que le député
de Gouin a répété au niveau de la deuxième lecture,
qu'il a répété en commission parlementaire et qu'il a
répété, ce soir, au niveau de l'adoption du rapport ou de
la prise en considération du rapport. Il me semble que la ministre
aurait pu, pour des sujets aussi importants, des sujets qui peuvent influencer
l'avenir économique du Québec, accepter de faire une consultation
particulière, si elle ne voulait pas faire une consultation
générale. Ça existe dans nos règlements, c'est
bâti précisément pour venir aider les parlementaires, les
éclairer pour qu'ils prennent des décisions qui correspondent le
plus aux réalités, M. le Président.
On aurait pu, je pense, ensemble, avec les groupes, dégager un
consensus, alors qu'au moment où on se parle beaucoup d'institutions, M.
le Président, nous disent très clairement: C'est inacceptable, ce
projet de loi là, et on préfère que ça ne soit pas
adopté. Et c'est un peu le rôle de l'Opposition de
refléter, M. le Président, un peu ce que les gens pensent. C'est
le rôle de l'Opposition aussi de souligner en cette Chambre les
oppositions qui se manifestent à l'extérieur. Sinon... M. le
Président, je m'excuse...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le leader de
l'Opposition officielle.
M. Chevrette: ...question de règlement. M. le
Président, quelle que soit l'heure en cette Chambre, je vous dis tout de
suite que je ne tolérerai pas ce qui vient de se produire, et vous savez
ce que je veux dire.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Continuez, M. le leader
de l'Opposition officielle.
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je conclus, M. le
Président, en vous disant ceci: Nous allons nous opposer à
l'adoption du rapport, nous allons nous opposer également fermement au
niveau de la troisième lecture parce que nous avons acquis la
conviction, M. le Président, que ce projet de loi là aurait
dû être soumis à une consultation, limitée s'il le
faut, mais à une consultation afin que l'on puisse continuer à
dynamiser nos institutions et non pas à éteindre leur motivation
et tous les efforts qu'elles ont faits pour bâtir des outils de
développement extraordinaires au Québec. Et, sur ça, je
pense que la ministre, il est encore temps qu'elle change d'idée,
qu'elle nous dise: En février, nous allons faire une consultation
particulière d'une dizaine de groupes et, en mars prochain, à la
reprise de la session, nous adopterons une loi qui sera désirée
par tout le monde. On n'est pas ici pour légiférer à
rencontre du développement et de l'expansion des compagnies, des
institutions financières, M. le Président; on est ici pour
dégager des consensus et légiférer dans le sens du
mieux-être économique de notre Québec. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Joliette et leader de l'Opposition officielle. Oui, Mme
la ministre, s'il n'y a pas d'autres intervenants, vous avez droit à une
réplique, à toutes fins pratiques, de cinq minutes. (0 h 20)
Mme Louise Robic
Mme Robic: Oui, M. le Président, il est vrai que le projet
de loi a été appelé plus rapidement que prévu. Et
j'avais certainement un avantage sur le député de Gouin puisque,
moi, j'étais en Chambre. M. le Président, ça me surprend
un peu que le député de Gouin soit pris au dépourvu.
D'ailleurs, dans sa réplique, puisque plusieurs des
députés de sa formation qui sont intervenus semblaient être
prêts, malgré qu'ils connaissaient très peu... Bien,
être prêts, c'est un grand mot, M. le Président, mais ils
ont pu intervenir là. Alors, ils semblaient être prêts pour
intervenir quoiqu'ils ne connaissaient pas grand-chose au projet de loi, c'est
vrai.
M. le Président, on m'accuse de ne pas avoir consulté. Eh
bien, M. le Président, Rapport quinquennal, commission parlementaire,
adoption de principe, consultations privées, étude article par
article, je pense que c'était le temps que le gouvernement prenne une
décision. M. le Président, le député de Labelle me
dit que mon rapport est vague. C'est drôle, en commission parlementaire,
il m'a dit que j'avais fait mon lit. Alors, il y a une légère
contradiction ici. Quant au député de Masson, lui, il s'est
amusé à lire les notes explicatives, il a cité une lettre;
d'ailleurs, tous les députés de l'Opposition citent toujours la
même lettre, M. le Président; une lettre, je vous ferai remarquer.
Et Mme la députée de Taillon, c'est bien sûr, elle fait
toujours du théâtre. Quant au député d'Ungava, M. le
Président, bien, je voudrais lui dire que je ne cloisonne pas les
institutions financières, que je suis très bien dans les
mêmes voies que mes prédécesseurs et c'est tellement vrai,
M. le Président, que le député de Gouin avoue
lui-même, dans son intervention, que la majorité est d'accord avec
ma politique.
Et ici, M. le Président, puisque l'Opposition a mentionné
à plusieurs reprises une lettre qu'ils ont reçue, je voudrais
vous mentionner quelques-unes des lettres que j'ai reçues. Je voudrais
vous mentionner ce que j'ai reçu du Regroupement des cabinets de
courtage d'assurance du Québec. Le Regroupement des cabinets de courtage
d'assurance du Québec me dit exprimer de façon
générale son soutien aux mesures proposées puisqu'elles
ont pour objet et auront également pour effet de favoriser la croissance
et la robustesse des assureurs québécois qui sont des agents
essentiels d'un "maîtres chez nous" économique.
M. le Président, la Société financière des
caisses Desjardins, dont on a parlé ce soir, m'a également
écrit pour me dire: La Société financière des
caisses Desjardins se déclare en accord avec la plupart des
énoncés de politique du Rapport quinquennal sur l'application de
la Loi sur les assurances. L'originalité et le leadership certain dont
faisait preuve le gouvernement du Québec à l'égard des
assureurs québécois en faisant adopter le projet de loi 75 en
1984 ne peuvent se maintenir sans un certain nombre d'ajustements qui tiennent
compte à la fois de l'évolution des assureurs
québécois et de la rapide transformation de l'environnement.
Il y a également, M. le Président, le Bureau d'assurance
du Canada qui me dit: Dans l'ensemble, les énoncés de politique
sont satisfaisants et nous félicitons la ministre qui réaffirme
la volonté du Québec de demeurer à l'avant-garde de la
législation relative aux institutions financières. Et,
finalement, M. le Président, le rapport de l'Association des
intermédiaires en assurance de personnes du Québec nous dit:
L'Association endosse les orientations du gouvernement qui visent à
instaurer un régime de normes souples marquées au coin de la
prudence et axées sur des institutions financières solides et
bien adaptées à leur environnement concurrentiel.
M. le Président, la ministre a un double
intérêt...
M. Boisclair: Question de règlement.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mme la ministre, je
m'excuse, j'ai une question de règlement. M. le député de
Gouin.
M. Boisclair: Je m'excuse d'interrompre la ministre, mais je
voudrais juste demander, en fonction de notre règlement, le
dépôt des quatre lettres que la ministre vient de citer. Le
président m'a indiqué qu'il fallait le demander
immédiatement après l'utilisation des documents et non pas
à la fin de l'intervention. Il m'aurait fait plaisir de le demander
à la fin de l'intervention pour éviter d'interrompre la ministre,
mais, puisque c'est notre règlement, M. le Président, je veux
tout simplement m'y confomer.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, pour qu'on puisse
se comprendre et pour permettre à tout le monde de bien comprendre et
qu'on sache de quoi on parle, à l'article 214, il est mentionné
que "lorsqu'un ministre cite, même en partie, un document, tout
député peut lui demander de le déposer
immédiatement - évidemment, après qu'on l'aura
utilisé - Le ministre doit s'exécuter, sauf s'il juge que cela
serait contraire à l'intérêt public."
Alors, Mme la ministre, si vous avez terminé la lecture des
documents que vous aviez en main, j'ai une demande de déposer les
documents en question. Mme la ministre.
Mme Robic: Ce sont des notes sur le Rapport quinquennal, M. le
Président. Je n'ai aucune objection à le déposer:
cependant, j'aimerais avoir des copies.
Le Vice-Président
(M. Lefebvre): déposez les
documents et on en fera des photocopies, mme la ministre. oui, m. leader du
gouvernement.
M. Pagé: Vous avez très bien compris l'empressement
du député de demander des copies des documents, mais vous
comprenez très certainement que Mme la ministre a le droit de terminer
sa référence audit document avant de le déposer.
Mme Robic: Je n'avais pas fini.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): évidemment,
évidemment. alors, continuez, mme la ministre, en vous rappelant que
vous disposez encore d'une trentaine de secondes.
Mme Robic: Alors, M. le Président, je finis pour vous dire
que j'ai un double intérêt en présentant ce projet de loi:
le premier, le développement de nos compagnies d'assurances et le
maintien de leur rôle moteur dans l'économie du Québec; et
le deuxième, M. le Président, et celui-là, M. le
Président, je n'ai pas du tout l'intention de le négliger, c'est
la protection des épargnants.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la ministre.
Oui, M. le député de Laviolet-te.
M. Jolivet: M. le Président, j'étais en haut, tout
à l'heure, et j'écoutais la ministre. Alors, comme elle a le
droit d'intervenir, lors de la prise en considération du rapport, cinq
minutes chaque fois, ça n'exclut pas que d'autres députés
puissent parler sur le projet de loi. Sur la prise en considération, M.
le Président...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader du
gouvernement?
M. Pagé: C'est très simple. Vous avez avez
vérifié s'il y avait d'autres intervenants et vous avez
invité Mme la ministre déléguée aux Finances
à procéder à sa réplique. La réplique est
complétée, M. le Président, je vous invite à passer
à l'adoption, j'appelle un vote nominal, M. le Président, s'il
vous plaît.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant! Un instant!
Oui, un instant!
M. Jolivet: M. le Président, sur la question de
règlement.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, allez-y, sur la
question de règlement.
M. Jolivet: M. le Président, le règlement est
clair. La ministre, à toute intervention qui est faite par des
députés, a droit à cinq minutes; la ministre ne les a pas
utilisées à d'autres occasions. Vous avez demandé si elle
voulait prendre ses cinq minutes, elle les a prises; j'ai donc le droit, M. le
Président, d'intervenir.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le
député de... Alors, j'ai vérifié tout à
l'heure s'il y avait d'autres intervenants; la ministre a utilisé ses
cinq minutes. J'ai qualifié les cinq minutes, pour qu'on se comprenne
bien, de réplique, mais évidemment, lorsqu'on discute du rapport
d'une commission, il n'y a pas de réplique et je pense que le
député de Laviolette est en droit d'exiger de faire un autre 10
minutes. Alors, M. le député de Laviolette, allez- y-
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je n'utiliserai pas
mes 10 minutes au complet, soyez assuré de ça, M. le
Président, mon but n'est pas là.
Une voix: On le sait.
M. Jolivet: Oui, je le sais. J'étais en haut,
j'écoutais mes collègues qui parlaient. J'ai entendu la ministre
utiliser ses premières cinq minutes de réplique et je dois dire
que j'ai été vraiment, si je peux employer le terme, pour ne pas
être antiparlementaire, ulcéré de la façon dont elle
a commencé sa réplique sur l'ensemble des discours qui ont
été prononcés. La ministre devra comprendre une chose, M.
le Président: nous avons le droit, au nom de l'ensemble de la population
qui nous le demande, de faire ce que nous sommes en train de faire. Nous avons
demandé à la ministre d'avoir des auditions particulières;
ce n'est pas la première fois qu'on le demande. La semaine
dernière, même mon collègue, le député de
Pointe-aux-Trembles, dans une commission parlementaire, l'a demandé au
ministre du Travail. Il a été correct, il l'a accordé, ce
qui a permis au Syndicat de professionnels du gouvernement du Québec de
venir parler à la commission pendant une heure et de faire en sorte de
situer le problème et, finalement, nous avons voté pour ou
contre, et on a encore discuté aujourd'hui du projet de loi du ministre
du Travail.
M. le Président, je peux vous rappeler encore une fois, pour la
connaissance du public, la connaissance des gens qui sont ici, que le ministre
de l'Éducation à l'époque, qui est maintenant le ministre
des Affaires municipales, avait accepté mon invitation - ça date
déjà d'un bout de temps, M. le Président - en 1985,
d'entendre, en auditions particulières, la commission scolaire du
Nouveau-Québec, laquelle commission scolaire avait vraiment des raisons
valables de demander ces audiences. Le ministre, après discussion avec
le leader à l'époque, M. Gratton, avait accepté une
audition particulière d'une heure et nous avons eu l'occasion de
clarifier la situation à tel point que le projet de loi de quatre
articles qui était devant nous est devenu un projet de loi de huit
articles. Comme nous étions en session intensive, le ministre a dû
avoir ma permission, comme membre de l'Opposition, parce que je voulais
modifier le projet de loi, l'améliorer. Ça a amené un
projet de loi qui, aujourd'hui, est en vigueur et qui a rendu justice à
tout le monde. Ce que nous avons demandé à la ministre, c'est
ça, M. le Président. Je ne comprends pas comment il se fait qu'en
commençant, la ministre, la seule chose qu'elle ait été
capable de dire, c'est d'insulter mes collègues. Et c'est ça qui
m'a ulcéré, M. le Président. Je suis incapable d'accepter
de la ministre... Si elle a des choses à dire sur le fond, qu'elle le
dise; si elle n'est pas capable de le dire, qu'elle ne nous insulte pas. Et
c'est ça qui m'a ulcéré, M. le Président. Je
voulais le dire. Vous, le député de Saint-Maurice, demandez la
parole au président et vous allez parier quand ce sera votre tour. Moi,
je dirai simplement, M. le Président, que la ministre a commencé
en insultant mes collègues pour toutes sortes de raisons; et ça,
je ne l'accepte pas, M. le Président. Vous lirez les minutes,
j'étais ici en haut.
Une voix:...
M. Jolivet: m. le président, demandez au
député de saint-maurice de se taire ou de prendre la parole
à son temps, sinon, je vais les prendre mes 10 minutes.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous avez eu ce que vous
vouliez, continuez M. le député de Laviolette.
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Donc...
M. Chevrette: M. le Président, sur la
question de règlement. Je m'excuse, ce n'est pas qu'un
député a eu ce qu'il a voulu. En cette Chambre, quand on en
appelle au règlement et qu'un député continue à
parler, je demande au président de l'Assemblée nationale, au
moment où il est assis là, je lui demande au président, M.
le Président, de faire respecter l'article 32 de nos règlements
en tout temps quand un député a la parole. S'il veut prendre la
parole, il doit se lever et vous la demander.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous avez raison, M. le
leader de l'Opposition officielle. Ce que j'ai dit: Vous avez eu le
résultat que vous souhaitiez et que vous étiez en droit de
demander. Vous avez indiqué au député de Saint-Maurice que
vous souhaitiez pouvoir continuer votre intervention sans qu'il vous interrompe
et, au moment où vous me l'avez demandé, c'est le résultat
que vous avez obtenu. Continuez.
M. Jolivet: M. le Président, j'étais en train de
dire que ça m'a ulcéré. Dans ce contexte-là, la
ministre doit comprendre que, de part et d'autre, on est capable de se parler
convenablement, de faire valoir nos points de vue convenablement. Mais, si la
ministre veut avoir son projet de loi, qu'elle accepte qu'on ait aussi, de
temps en temps, raison. Notre raison, c'est qu'on représente du monde,
ce monde-là veut être entendu, qu'elle le prenne et là, je
reviens à ce que j'ai dit dans d'autres discours, M. le
Président. Il commence à être temps qu'on en arrive ici,
à l'Assemblée nationale, peu importe ce qui s'est passé
avant, mais ce qui va se passer dans le futur, c'est ça qui est
important pour moi, qu'on en arrive à ce que nos projets de loi qui sont
déposés à la session d'automne ne soient pas
nécessairement adoptés à l'automne, mais puissent
être adoptés au printemps, qu'on ait le temps de rencontrer du
monde, leur faire valoir les points de vue. Je suis, comme beaucoup de gens au
Québec, M. le Président, qui considèrent que nous faire
passer des projets de loi à la vapeur, sans avoir la chance de
rencontrer du monde, ça devient indécent. Et c'est dans ce
sens-là, M. le Président, que je voulais intervenir. Donc, si la
ministre comprend le bon sens, elle va accepter que notre point de vue a aussi
le mérite d'être entendu et qu'on représente du monde.
Dans ce sens-là, M. le Président, au lieu de nous
insulter, parce qu'elle insulte les gens qu'on représente, elle devrait,
au moins, comprendre une chose, c'est que, si on le fait, c'est pour le
bien-être de l'ensemble de la population et pour avoir un projet de loi
qui soit valable comme celui qu'on a réussi, avec le ministre des
Forêts, à faire et à réaliser ensemble dans des
contextes de discussion normale et convenable, M. le Président. C'est ce
que je voulais dire.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Laviolette. Mme la ministre, vous disposez d'un temps
de cinq minutes. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Alors, le
débat...
M. Pagé: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: J'appelle un vote nominal, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui. Les documents sont
déposés. Est-ce que le rapport de la commission du budget et de
l'administration sur le projet de loi 112 est adopté?
Des voix: Adopté.
M. Pagé: Vote nominal.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vote nominal. Qu'on
appelle les députés! (0 h 35 - 0 h 40)
Mise aux voix du rapport
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je mets maintenant aux
voix l'adoption du rapport de la commission du budget et de l'administration
sur le projet de loi 112, Loi modifiant la Loi sur les assurances et d'autres
dispositions législatives. Que ceux et celles qui sont en faveur de
l'adoption de ce rapport veuillent bien se lever!
Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Portneuf), Mme
Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argenteuil), M. Côté
(Rivière-du-Loup), M. Vallerand (Crémazie), M. Elkas
(Robert-Baldwin), M. Tremblay (Outremont), Mme Robic (Bourassa), M. Cusano
(Viau), M. Blackburn (Roberval), Mme Bleau (Groulx), M. Houde (Berthier), M.
Maciocia (Viger), M. Maltais (Saguenay), M. Philibert (Trois-Rivières),
M. Chagnon (Saint-Louis), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel
(Sherbrooke), Mme Pelchat (Vachon), M. Paradis (Matapédia), M. Marcil
(Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc (Taschereau), M.
Poulin (Chauveau), M. Tremblay (Rimouski), M. Williams (Nelligan), M. Fradet
(Vimont), M. Lemieux (Vanier), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Richard
(Nicolet-Yamaska), M. Charbonneau (Saint-Jean), M. Gautrin (Verdun), M. Khelfa
(Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), M. LeSage (Hull), M. Bergeron
(Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Audet
(Beauce-Nord), M. Camden (Lotbinière), M. Forget (Prévost), Mme
Loiselle (Saint-Henri), M. MacMillan (Papineau).
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Que ceux et celles qui
sont contre l'adoption de ce même rapport veuillent bien se lever!
Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), Mme
Blackburn (Chicoutimi), M. Blais (Masson), Mme Marois (Taillon), Mme Harel
(Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), Mme Juneau (Johnson), M.
Lazure (La Prairie), M. Léonard (Labelle), M. Paré (Shefford), M.
Claveau (Ungava), M. Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques), Mme Caron
(Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel
(Rouyn-Noranda-Témisca-mingue).
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a des
abstentions?
Le Secrétaire: pour: 43 contre: 16 abstentions: 0
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, le rapport de la
commission du budget et de l'administration sur le projet de loi 112, Loi
modifiant la Loi sur les assurances et d'autres dispositions
législatives, est adopté. Oui, M. le leader de l'Opposition
officielle.
M. Chevrette: M. le Président, Mme la ministre,
tantôt, a signalé à cette Assemblée qu'elle citait
des lettres et elle a déposé des documents. M. le
Président, ce sont des mémoires et non pas des lettres. Est-ce
que c'est une erreur? C'est quoi?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mme la ministre.
Mme Robic: Oui, M. le Président, c'est juste. J'ai
mentionné des lettres. Ce sont les rapports qui m'ont été
soumis au moment du Rapport quinquennal, les premières feuilles de ces
rapports. C'est juste, M. le Président.
Une voix: Ce n'est pas des lettres, ça.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, je vous inviterais
à ce moment à appeler l'article 14 du feuilleton, s'il vous
plaît.
Projet de loi 108
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 14 de
notre feuilleton, M. le ministre des Transports propose l'adoption du rapport
de la commission de l'aménagement et des équipements sur le
projet de Loi 108, loi modifiant le Code de la sécurité
routière et d'autres dispositions législatives, et les
amendements transmis par le ministre, amendements qui ont été
déclarés recevables. Alors, je suis prêt à entendre
le premier intervenant, M. le ministre des Transports.
Je m'excuse, M. le ministre, avant de vous donner la parole
définitivement, j'ai besoin d'un consentement, M. le leader de
l'Opposition officielle pour que nous puissions procéder à
l'étape de ce projet de loi. Est-ce que j'ai le consentement?
Une voix: Oui ou non? M. Chevrette: Oui.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y, M. le
ministre.
M. Pagé: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: Le ministre n'a pas l'intention de faire
d'intervention.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je suis prêt
à reconnaître... Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Alors, il
n'y a pas d'intervention. Est-ce que le rapport de la commission de
l'aménagement et des équipements sur le projet de loi 108, Loi
modifiant le Code de la sécurité routière et d'autres
dispositions législatives, est adopté?
Des voix: Adopté.
M. Pagé: Les amendements.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Au préalable, je
m'excuse, est-ce que les amendements transmis par M. le ministre en vertu de
l'article 252 du règlement sont adoptés?
Des voix: Adopté. M. Pagé:
Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Ce même rapport
auquel j'ai fait référence tout à l'heure, est-ce que le
rapport est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader du
gouvernement?
M. Pagé: Alors, M. le Président, je vous invite
à appeler l'article 30 de notre feuilleton et je vous indique que nous
ne déposerons pas d'amendement, a ce moment-ici, concernant la Loi sur
le transport par taxi.
Projet de loi 106
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Lefebvre): à l'article 30 de
notre feuilleton, m. le ministre des transports propose l'adoption du rapport
de la commission de l'aménagement et des équipements sur le
projet de loi 106 loi modifiant la loi sur le transport par taxi. est-ce qu'il
y a des interventions? pas d'intervention. est-ce que le rapport de la
commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de
loi 106, loi modifiant la loi sur le transport par taxi, est adopté?
\
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, je vous invite à
appeler l'article 19 du feuilleton, s'il vous plaît.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 19 de
notre feuilleton, M. le ministre du Travail propose l'adoption du rapport de la
commission de l'économie et du travail.
M. Pagé: M. le Président, sur la feuille qu'on
m'indique - voulez-vous me passer le feuilleton, pour être certain - je
vous invite à appeler la prise en considération du rapport du
projet de loi 86.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, qui est le parrain
du projet?
Une voix: M. le ministre de l'Industrie et du Commerce.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Parce que ce n'est pas
indiqué ici, je m'excuse.
M. Pagé: Le projet de loi 86, au feuilleton d'aujourd'hui,
à l'article 19, Loi abrogeant la Loi sur l'Agence
québécoise de valorisation industrielle de la recherche.
Projet de loi 86
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui. Ça va, M. le
leader du gouvernement. Alors, le ministre de l'Industrie et du Commerce
propose l'adoption du rapport de la commission de l'économie et du
travail sur le projet de loi 86, Loi abrogeant la Loi sur l'Agence
québécoise de valorisation industrielle de la recherche, ainsi
que l'amendement transmis par m. le ministre, en vertu de l'article 252 du
règlement, amendement qui a été déclaré
recevable. alors, je suis prêt à entendre le premier
intervenant.
M. Pagé:...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Pas d'interventions du
côté ministériel? Pas d'interventions du côté
ministériel?
Une voix: Pas à ce moment-ci.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
Président, nous en sommes à l'étape de la prise en
considération du rapport sur le projet de loi 86, Loi abrogeant la Loi
sur l'Agence québécoise de valorisation industrielle de la
recherche. En termes clairs, ce que ça veut dire, M. le
Président, c'est tout simplement que l'Agence disparait. M. le
Président, à ceux et celles qui nous écoutent...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je m'excuse. S'il vous
plaît! Mme la députée de Chicoutimi, si vous voulez
attendre quelques instants, s'il vous plaît. MM. les
députés, si vous avez des discussions, je vous suggérerais
de les faire en dehors de l'Assemblée. Mme la députée de
Chicoutimi, si vous voulez continuer votre intervention. (0 h 50)
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
Président, je disais donc à ceux et celles qui nous
écoutent à cette heure-ci... C'est peu probable, parce que c'est
souvent ainsi, on adopte des projets de loi à la vapeur, en fin de
session, sans que les gens en soient véritablement informés.
Ce que je voulais leur dire c'est que ce projet de loi, le projet de loi
86, vient mettre fin, vient mettre un terme aux activités de l'Agence
québécoise de valorisation industrielle de la recherche.
Qu'est-ce qu'on avait en fait à reprocher à l'Agence
québécoise de valorisation industrielle de la recherche pour dire
que désormais son nom sera effacé des agences
québécoises pour soutenir la recherche industrielle au
Québec? Qu'est-ce qu'a fait cette agence pour qu'elle mérite un
sort tel que celui que lui réserve le ministre de l'Industrie, du
Commerce et de la Technologie?
M. le Président, l'Agence québécoise de
valorisation industrielle de la recherche est connue par un nombre important de
jeunes entrepreneurs de chez nous parce que cette Agence était
destinée à soutenir la mise en place d'entreprises à haute
teneur ou à haut
contenu technologique, des entreprises en démarrage. Les gens qui
nous écoutent - et je le disais tout à l'heure - ça me
surprendrait qu'à cette heure-là il y en ait beaucoup, mais quand
même il y en a certainement qui ont eu l'occasion de transiger avec
l'AQVIR. Il y en a un certain nombre pour lesquels ça a
été un succès, d'autres, un franc succès, pour
d'autres, un échec. Il est vrai de dire que l'Agence ne
réussissait pas dans 100 % des entreprises qu'elle soutenait, mais
même dans les entreprises pour lesquelles elle n'a pas obtenu le
succès qu'elle aurait souhaité, M. le Président, ce sont
des personnes, des hommes, des femmes, de jeunes entrepreneurs qui ont appris
à travers cette Agence, qui ont appris à fonctionner, qui ont
fait des expériences de mise en marché ou des expériences
de création d'entreprises, qui, même si elles n'ont pas toutes
été heureuses, ont certainement toutes été
formatrices. L'Agence constituait l'un des plus beaux fleurons du
développement de l'aide au démarrage des entreprises à
haut contenu technologique.
Au moment où j'ai appris par quelques entreprises que le ministre
envisageait la possibilité de mettre fin aux activités de
l'Agence je m'en suis inquiétée parce que nous avions
reçu, à cette époque, plusieurs lettres d'entreprises qui
avaient bénéficié des services de l'Agence nous disant:
Écoutez, l'expérience que nous avons vécue ça a
été vraiment d'un soutien et d'un support indispensables, pour
toutes sortes de bonnes raisons parce qu'il faudrait que je vous explique un
peu qu'est-ce que ça faisait l'Agence auprès de ces jeunes
entreprises.
D'abord, rappelons que l'Agence était destinée à
soutenir le démarrage d'entreprises dans les trois premières
années de sa création. Alors, il ne s'agissait pas de grandes
entreprises qui mettaient en route de grands projets d'innovation
technologique. Ces grandes entreprises, elles n'ont généralement
pas besoin du type de soutien dont on parle. Il s'agissait de petites
entreprises qui avaient une idée audacieuse qui permettait de faire
avancer le Québec. Cette agence a réussi à contribuer au
démarrage d'une centaine d'entreprises depuis 1984. Cent entreprises
avec un chiffre d'affaires d'à peu près 25 000 000 $. Selon les
rapports qui nous ont été remis, 50 % de ces entreprises ont
connu un succès, succès relatif, mais un succès viable; 20
% de ces entreprises, une réussite exceptionnelle et 30 %,
viabilité. Évidemment, il y a un 20 % d'échecs. Combien
a-t-on créé d'emplois avec ces petites entreprises qui ont pu
démarrer et progresser avec l'aide de l'Agence? On a créé
tout près de 1000 emplois; 1000 emplois, c'est comme deux projets
d'aluminerie, M. le Président, à la différence que les
1000 emplois créés dans les petites entreprises à haute
teneur technologique coûtent au Québec, environ, si vous incluez
tous les coûts reliés à l'Agence, soutien, démarrage
de prêts participatifs, ça coûte environ 25 000 $ par emploi
créé. La différence, cependant, 25 000 $ par emploi
créé, ça peut paraître beaucoup pour tout le monde
mais pour savoir ce que ça veut dire, pour créer un emploi dans
les grandes alumineries, ça varie entre 200 000 $ et 226 000 $ par
année par emploi créé; 200 000 $ à 226 000 $ par
emploi créé par année dans les alumineries, en raison des
avantages énergétiques qu'on leur consent, alors que les emplois
qu'on a créés dans ces entreprises, M. le Président, ce
sont des emplois mobilisateurs parce que, à haute teneur technologique,
et ce sont des emplois qui coûtent une fois 25 000 $, ça n'est pas
récurrent. Alors, c'est une différence énorme, M. le
Président.
Qu'est-ce qui différenciait l'Agence des activités, des
services offerts par la SDI, M. le Président? D'abord, je dirais que
c'est une espèce de philosophie, une culture. Elle s'adressait à
des entreprises à la fine pointe de la technologie, avec une approche
intégrée de développement, c'est-à-dire que,
lorsque l'Agence intervenait dans un dossier, elle avait à son service
une équipe multidisciplinaire, une petite équipe d'une douzaine
de personnes; il ne s'agit pas là d'un grand centre de recherche, mais
d'une douzaine de personnes qui étaient capables d'examiner sous tous
les angles, le dossier qui leur était soumis, et d'intervenir rapidement
en cas de besoin. m. le président, les témoignages que nous avons
reçus de la part des entreprises qui ont bénéficié
du soutien de l'agence sont particulièrement éclairants quant
à la qualité des interventions et quant à leur pertinence.
et, entre autres arguments, ce que nous disent ces entreprises, c'est que
l'avantage indéniable de cette petite équipe, c'était sa
capacité d'intervenir rapidement, par exemple, lorsque les
échéances financières arrivaient un peu vite et qu'il y
avait des redevances. alors, rapidement, elles pouvaient entrer en contact avec
l'agence, un coup de téléphone et, 24 heures après, le
chèque pouvait sortir. alors, quand vous tentez de faire ça avec
une grande entreprise comme la sdi, ce n'est pas faisable et tous les
témoignages qui nous ont été amenés nous rappellent
ces avantages considérables liés à la petite
entreprise.
Qu'est-ce qui restera de l'Agence, M. le Président? Rien. Le nom
disparaît. Vous savez ce que ça veut dire aussi, un nom. Tous ceux
qui ont plus ou moins travaillé à l'intérieur
d'entreprises savent d'abord deux choses. La première, c'est qu'il est
difficile de se faire un nom et que, une fois que vous vous êtes fait un
nom, c'a une valeur, c'est-à-dire que c'a une valeur marchande; c'est
une valeur de référence. Demain, les entreprises chercheront
l'AQVIR, mais l'AQVIR n'existe plus. Il y aurait eu différentes
façons, et j'y reviendrai, de maintenir l'Agence et peut-être de
rejoindre les objectifs que le ministre s'était donnés sous
prétexte de rentabilité.
L'Agence, donc, disparaît et cet outil qui était
particulièrement utile aux petites entreprises, évidemment,
disparaît dans un moment particulièrement critique de
l'économie du Québec. Vous savez, il faut se rappeler - et
là, je me permets de le rappeler, je vois ici qu'il y a encore quelques
députés-ministres du gouvernement - le discours que tenait le
ministre de l'Industrie et du Commerce, en cette Chambre, au moment où
il nous présentait ce projet de disparition de l'Agence. Il disait:
Voyez-vous - tout le monde connaît le ministre de l'Industrie et du
Commerce - j'ai un beau programme, un beau programme intégré de
recherche et développement. Regardez-moi aller! Regardez-moi aller, vous
allez voir, mon programme, ça fonctionne bien. Sauf que l'erreur, c'est
que ça fait exactement cinq ans que le gouvernement nous dit la
même chose et, effectivement, sur papier, c'est un beau programme. Mais,
à trois reprises, le ministre nous dit et vous dit: Mon programme, il
est beau, mais il ne marche pas. Mon programme est beau, mais il ne fonctionne
pas. Mon programme, il est généreux, mais personne ne s'en
prévaut, M. le Président. Et je peux le citer dans le texte,
à trois reprises, au cours du même discours, le ministre de
l'Industrie et du Commerce nous dit: Nous nous étions fixé comme
objectif, en 1990, d'atteindre 1,8 % du PIB en matière de recherche et
de développement. Et nous en sommes toujours, M. le Président,
à 1,3 % du PIB en recherche-développement. Mais je ne sais pas si
vous savez ce que ça veut dire, la différence entre 1,3 % et 1,8
%. Qu'est-ce que ça représente en dollars, ça, en
matière d'investissements en recherche-développement? La
différence entre l'objectif que le ministre s'était donné
et celui qu'il n'a pas atteint puisqu'il fait du surplace, comme il nous dit,
c'est 800 000 000 $. (1 heure)
Si le ministre avait atteint l'objectif que son gouvernement s'est
fixé en 1986 en matière de recherche-développement, il y
aurait eu cette année, au Québec, 800 000 000 $ de plus
d'investissements en recherche, M. le Président. Vous savez ce que
ça aurait représenté sur la capacité du
Québec de se sortir de la présente crise, M. le Président.
Parce que qui dit recherche-développement parle du levier principal en
matière de développement économique et de
développement de l'emploi. Le ministre nous dit à trois reprises:
Je n'ai rien réussi là-dedans. Nous faisons malheureusement du
surplace. Tenez-vous bien, sa solution, c'est de donner un peu plus de
dynamisme à l'AQVIR qui a été particulièrement
performante? Non, M. le Président, il la fait disparaître.
Il dit: Je fais du surplace. Ça ne fonctionne pas. On a 800 000
000 $ d'écart entre l'objectif qu'on s'était donné et ce
qu'on a atteint. Parce qu'il faut se rappeler que 1,3 % en 1988-1989, nous
étions à 1,37 % en 1985. Ça veut dire qu'il y a un
léger recul. Alors, la solution du ministre, M. le Président, ce
n'est pas d'investir en recherche-développement. La solution du
ministre, c'est de dire: On efface l'Agence de la carte, M. le
Président.
Qu'est-ce qu'il aurait fallu pour que l'Agence puisse effectuer de
façon plus efficace et plus complète la gamme des
activités nécessaires au soutien des petites entreprises, M. le
Président? Parce qu'il faut reconnaître que, pour qu'elle puisse
remplir parfaitement d'un bout à l'autre les activités
nécessaires au développement et au soutien des petites
entreprises, il aurait fallu qu'elle puisse faire l'aide à la
commercialisation et qu'elle puisse gérer le programme qu'on appelle
PARIQ.
Pour gérer l'aide à la commercialisation, gérer
également le prêt au démarrage et le programme PARIQ, M. le
Président, c'aurait demandé à l'agence cinq ou six
personnes. L'Agence aurait été parfaitement autonome et capable
de continuer sur la lancée qui était la sienne et qui
était particulièrement performante. Le ministre dit non. Il y a
longtemps que j'y pense, nous dit le ministre. J'étais
déjà président de la SDI que j'y songeais. Je l'ai
même par erreur annoncé. Je me suis fait désavouer par
l'ex-ministre de l'Industrie et du Commerce, M. MacDonald, qui a dit:
Pressez-vous pas. L'Agence, ça nous apparaît que c'est encore bon,
on la garde.
Mais, dès qu'il a pris la direction de ce ministère, il a
réalisé son rêve, c'est-à-dire de fusionner le
service de l'Agence à la SDI, M. le Président. Un vieux
rêve. Chacun a droit à ses rêves. Mais, je dis: J'ai droit
à mes rêves aussi longtemps que ces rêves ne nuisent pas au
développement économique, M. le Président. Aussi longtemps
que mes rêves ne viennent pas nuire au Québec, ou aux autres, M.
le Président, on peut toujours rêver. Mais ce
rêve-là, à mon avis, ça risque d'être un
mauvais rêve sinon un cauchemar parce qu'on avait un outil performant et
il l'efface.
M. le Président, le ministre aurait pu enrichir les
activités de l'AQVIR, je disais donc, particulièrement en lui
donnant la gestion du programme PARIQ et l'aide à la commercialisation
et, à défaut, il aurait pu choisir de créer une filiale de
la SDI. Ça n'aurait pas été beaucoup plus
compliqué, relativement simple. Ça aurait permis une certaine
rationalisation dans les activités, est-ce que je sais, peut-être
de téléphoniste, de réceptionniste? Peut-être. Mais,
en même temps, ça aurait permis à l'Agence de garder son
nom parce que, je le rappelle, l'AQVIR, c'a une signification chez les jeunes
entrepreneurs. C'est long, se créer une réputation. C'est long,
se faire un nom. L'Agence avait six ans, elle avait acquis cette
réputation qui faisait que les jeunes entrepreneurs s'adressaient
à cette Agence. On aurait pu, en en faisant une filiale de la SDI,
conserver son titre et atteindre
les mêmes objectifs.
Non, M. le Président. Le ministre, et particulièrement ce
ministre, je dois dire, n'est pas très réceptif aux idées
des autres, aux idées de façon générale,
lorsqu'elles ne viennent pas de lui. Je le dis pour le déplorer parce
qu'il me semble qu'en toute honnêteté, en toute
sincérité et avec le plus grand professionnalisme, je pense,
l'Opposition a tenté de lui faire entendre raison là-dessus. On a
essayé de faire un travail correct en lui faisant valoir les
difficultés que posait aux entreprises l'abolition de l'Agence, et de
cette Agence particulièrement performante.
M. le Président, qu'est-ce qui différencie,
fondamentalement, l'Agence de la SDI? L'Agence: je disais donc une douzaine
d'employés, une petite équipe souple, multidisciplinaire, capable
d'intervenir, une espèce de petit commando efficace. La SDI: 160
employés. Vous placez les employés de l'AQVIR, parce qu'ils sont
transférés à la SDI, dans une situation dans laquelle ils
ne peuvent être que mal à l'aise. Le ministre a géré
ce genre d'entreprises, il sait très bien que, plus vous avez de
personnel, plus vous êtes tenu à la réglementation; plus
vous avez de personnel, moins il n'y a de latitude laissée aux membres
du personnel; plus vous avez de personnel, plus vous êtes obligé
d'avoir des directives sur les interurbains, sur les déplacements, sur
l'utilisation d'informations, de recherches, par exemple.
On sait que l'AQVIR pouvait rapidement, pour avoir des informations, des
données statistiques sur le marché dans des secteurs dans
lesquels nous, on a peu d'expérience au Québec et où il
existe peu d'expérience d'entreprises au Canada, aller chercher ces
références ou ces données statistiques sur le potentiel du
produit créé aux États-Unis, en Europe. Elle pouvait se
permettre d'aller chercher ces données où elles existaient. Mais
savez-vous que, si vous êtes à la SDI, vous ne pouvez plus faire
ça. Vous ne pouvez plus faire ça parce que vous devez passer par
le Bureau de la statistique du Québec. C'est clair, la règle est
comme ça. C'est tellement vrai que j'ai eu besoin d'informations pour un
de mes concitoyens et qu'il a reçu une note de 90 $ ou 95 $ du Bureau de
la statistique du Québec. Et là, j'ai appris que le Bureau de la
statistique du Québec, d'abord, tous les organismes et ministères
sont obligés de passer par là pour avoir de l'information
statistique et que, dorénavant, depuis un an, on est obligé de
payer. On change l'argent de main, ce n'est pas grave, ça fait vivre du
monde, probablement - je n'ai pas trop compris le système. On est
obligé de payer. Mais les entreprises publiques sont tenues de passer
par le Bureau de la statistique, ce qui n'était pas le cas avec
l'Agence. Vous allez me dire: Ce n'est pas majeur. Ce n'est pas majeur, mais
ça peut être important parce que, du moment où vous
introduisez un nouvel interlocuteur, vous ralentissez la machine. Il me semble
que quelqu'un qui parle d'efficacité et de performance devrait
comprendre ce que ça veut dire lorsque vous n'avez pas les
données le plus rapidement possible et au moment où vous en avez
besoin.
M. le Président, fondre l'Agence dans la SDI, c'est fondre
l'Agence dans une entreprise qui fonctionne selon une toute autre philosophie,
qui est bonne. Elle est bonne, la philosophie de la SDI; ça, je n'en
doute pas. Mais elle est faite, elle est conçue, elle est pensée,
elle s'est exercée, elle s'est développée, elle a
développé son expertise sur la base des grandes entreprises.
Alors, la SDI, c'est une philosophie de banquier. C'est bon. Je n'ai rien
contre la philosophie de banquier, sauf que, lorsque vous voulez être
efficace, peut-être êtes-vous un petit peu plus à l'aise
avec votre caisse populaire du coin dont vous connaissez le gérant et le
conseil d'administration et qui, rapidement, est peut-être capable de
prendre des décisions. La philosophie de la SDI, c'est une philosophie
de banquier, avec une structure lourde, une hiérarchie
sclérosante. Parce que, c'est connu, je le rappelle, tous ceux qui ont
géré un peu de personnel le savent, on ne peut pas ne pas imposer
une certaine rigueur qui paralyse ou, en tout cas, qui ralentit la
capacité d'action dans des grosses structures. Et la SDI a une structure
qui est lourde et très hiérarchisée, et ça
entraîne une certaine lenteur, pour ne pas dire une certaine
sclérose. (1 h 10)
Donc, la SDI accepte difficilement les particularités
administratives. Curieusement, les témoignages que nous avons
reçus vont essentiellement en ce sens, M. le Président. Je me
permets ici d'en lire un, que je prends au hasard. Il nous vient d'une petite
entreprise, de Plessisville, le 8 août 1990, et c'est le Groupe Logestic
technologie.
L'objet du projet, c'était un projet de fusion entre la
Société de développement industriel et l'Agence
québécoise de valorisation industrielle de la recherche et
l'entreprise réagit à cette fusion. La lettre se lit ainsi:
"Monsieur - elle est adressée au ministre de l'Industrie et du Commerce
et de la Technologie - j'ai eu mon premier contact avec l'AQVIR le 24
décembre 1987 à 11 heures. Auparavant, aucun autre organisme
n'avait démontré d'intérêt pour mon projet, le
trouvant trop risqué ou même le comparant à d'autres
produits qui ne s'adressaient pas à la même clientèle."
Parce qu'il n'avait pas vraiment, pas par mauvaise volonté, les
connaissances pour évaluer la pertinence ou la qualité de ce qui
leur était offert.
Rappelons-le, lorsqu'on parle de nouvelles technologies, on parle de
choses avec lesquelles personne n'est vraiment familier, puisque c'est vraiment
nouveau comme produit ou comme approche. Il dit donc que personne n'avait
démontré d'intérêt pour son projet, le trouvant trop
risqué, ou même, le comparant à d'autres
produits qui ne s'adressaient pas à la même
clientèle. "L'AQVIR m'offrit et m'offre encore plusieurs services dont
un chargé de dossiers, qui est en communication constante avec moi
à travers toutes les difficultés rencontrées, une mise en
contact avec une firme d'ingénieurs pour surveiller le
développement physique de notre produit, une mise en contact avec le
CRIQ, le Centre de recherche industrielle du Québec, une mise en contact
avec le CNRC, le Conseil national de recherche du Canada, une
flexibilité incroyable mais, cependant, éclairée sur les
modifications de parcours, une gamme incroyable de professionnels, financiers
et promoteurs qui pourraient être intéressés par une
participation. "Selon mon expérience en ce domaine, je suis loin
d'être convaincu que d'autres organismes aillent aussi en profondeur que
l'AQVIR, lorsqu'on parle d'entreprise de démarrage. Je remercie toute
l'équipe de bien avoir pris le temps d'analyser mes chances de
succès, sans pour autant m'exiger une structure financière
d'initié."
Parce que là aussi existe la différence. On aide les
entreprises, même si les personnes ne leur semblent pas avoir une longue
expérience administrative. Et c'est ce dont ces personnes-là ont
besoin. "Alors, j'espère que le projet de fusion - dit-il - avortera,
car plusieurs entreprises comparables à la mienne ne verront pas le
lever du soleil." Il me semble qu'un ministre, qui a à coeur le
développement du Québec, et non pas de grossir une agence dont il
a déjà été le président, aurait pu prendre
au sérieux les différents avis qui lui sont venus de ce
milieu.
M. le Président, l'AQVIR et je disais donc la SDI, une
société plus lourde, qui a développé une expertise
dans des entreprises existantes qui font déjà de gros chiffres
d'affaires, une structure lourde, hiérarchisée, qui accepte
difficilement les particularités administratives dans la gestion des
dossiers et les interventions personnelles et les études de
marché. On aurait pu enrichir les activités de l'AQVIR, mais il
n'aurait pas été nécessaire de faire disparaître
l'Agencé. Le ministre nous a dit - j'ai trouvé ça
adorable, lorsque j'ai vraiment pris connaissance de tout le projet: Je vais
régionaliser, parce qu'il sait que c'est notre point sensible. Je vais
régionaliser. Alors, quand il parle de régionalisation,
évidemment, tout le monde dit: Attendons, examinons ce que ça
peut vouloir dire. Mais comment, M. le Président, régionaliser
une équipe de 12 personnes? Au total, on a à peu près 16
régions administratives, régions et sous-régions, il nous
manque quelques personnes. Et on viendrait dissoudre totalement l'équipe
de l'AQVIR parce qu'à l'AQVIR, il y a 12 personnes. Je comprends bien
qu'il y a des personnes qui ont peut-être le don d'ubiquité, mais
quand même! Alors, comment allons-nous régionaliser une petite
équipe de 12 personnes dans 16 régions? Mystère et boule
de gomme! Le ministre a certainement des secrets ou des capacités que
j'ignore, sans doute.
Je disais donc, et je le rappelle, M. le Président, que le
ministre aurait pu choisir de maintenir cette petite équipe efficace,
performante, qui a réussi à créer, en 6 ans, 1000 emplois
- je le rappelle, c'est l'équivalent de 2 alumineries de 500 emplois
chacune - à des taux beaucoup moins élevés, chaque emploi
créé coûtant environ 25 000 $, ce qui est peu. Pour ceux
qui ne connaissent pas ce que ça coûte, la création d'un
emploi, je le rappelle. Dans les alumineries, des chercheurs ont
évalué que ça nous coûtait entre 200 000 $ et 220
000 $ pour chaque emploi créé, par année, M. le
Président, parce que c'est le coût des avantages
énergétiques qu'on consent aux alumineries et, on le sait, les
alumineries, c'est énergivore et ça ne crée pas d'emplois
secondaires parce que les alumineries ne font pas de transformation au
Québec. Je vois le ministre, le député de Rober-val. Il
sait de quoi on parle parce qu'on est dans la même région. Il ne
se fait pas dé transformation d'aluminerie au Québec, M. le
Président. Le résultat, c'est que ça consomme beaucoup
d'électricité, ça coûte énormément
cher par emploi créé, mais ça n'a pas comme
possibilité de retombées de créer, de
générer d'autres emplois tandis que, à l'inverse, les
petites entreprises à haute teneur technologique sont créatrices
d'emplois. Il y a beaucoup de retombées et elles ont un potentiel
d'exportation extraordinaire, M. le Président, parce qu'elles entrent
dans des domaines inexplorés et, je le rappelle, à des
coûts extrêmement bas quand on parle de ce secteur
d'activité, environ 25 000 $ par emploi, une fois dans la vie de
l'entreprise et non pas tous les ans comme c'est le cas dans les entreprises
auxquelles on consent des avantages énergétiques.
M. le Président, le ministre nous dit - et je ne fais que
répéter ce qu'il nous a dit au moment où il
présentait son projet de loi en première lecture: J'ai
présenté ce projet de loi pour me donner un nouveau souffle en
recherche et développement. Il nous dit: Ça ne fonctionne pas,
mon projet de plan de développement de la RD, on fait du surplace, on a
quelque 800 000 000 $ d'écart entre l'objectif qu'on s'était
donné et celui qu'on a atteint, puisqu'on stagne, et vous allez vouloir
que je ne fasse rien. Voyons, l'Opposition, ça veut dire qu'il faut que
je fasse quelque chose. Il fait disparaître une des entreprises les plus
performantes en matière de création d'emplois. Alors, cherchez
l'erreur. Est-ce que c'est comme ça qu'on va augmenter l'investissement
en recherche et développement, M. le Président? J'en serais fort
étonnée. Je souhaite cependant, et très
sincèrement, que nous n'aurons pas à regretter ce geste, M. le
Président, parce que ça ne se recrée pas, une agence comme
ça, comme s'il n'y avait pas eu de rupture dans le temps. Une fois que
le
nom aura disparu de la circulation, une fois que le nom de l'Agence sera
effacé des services gouvernementaux, M. le Président, vouloir la
recréer, c'est reprendre en totalité la démarche
d'information, de sensibilisation, de réorientation des entreprises.
Là-dessus, M. le Président, inutile de vous dire que nous sommes
contre ce projet de loi. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée. Sur la prise en considération du rapport, je
reconnais maintenant M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: Merci, M. le Président. On croirait reculer
dans le temps puisque, à pareille date, il y a sept ans maintenant,
à l'occasion d'une discussion à l'Assemblée nationale,
nous adoptions un projet de loi qui visait à créer l'Agence
québécoise de valorisation industrielle de la recherche.
Très exactement, M. le Président, sept ans plus tard, nous sommes
obligés d'adopter le ton presque funèbre pour discuter de la mise
à mort d'une petite agence qui avait fait l'objet, il faut le rappeler -
je pense qu'il faut le rappeler au ministre de l'Industrie et du Commerce -
d'un vote unanime des parlementaires de l'Assemblée nationale qui
décidaient de doter le Québec, au moment où, à
travers le monde entier, nous abordions ce qu'on a appelé le virage
technologique dans beaucoup de milieux, d'un instrument pour assurer la
valorisation de la recherche industrielle. (1 h 20)
Et nous avons pu, grâce à l'adoption unanime de ce projet
de loi, le 19 décembre 1983 et dans les mois qui ont suivi, constituer
une petite équipe de chercheurs ou plus justement il faudrait dire
d'administrateurs de la recherche ou d'administrateurs de la valorisation
industrielle de la recherche. Et ma foi, au cours des 7 dernières
années, cette petite équipe - qui n'a jamais varié de
beaucoup plus que 12, 13, 14 ou une quinzaine de personnes au total - a fait un
travail sensationnel, a fait un travail assez exceptionnel. J'aimerais rappeler
encore une fois, parce que c'est important, parce qu'on est presque rendu
à 1 h 20 de la nuit pour présider à cette soirée
funèbre pour mettre à mort, puisque c'est l'expression, puisque
c'est le cas de l'Agence québécoise de valorisation industrielle
de la recherche, que cette petite agence avait donc eu une performance assez
extraordinaire au cours de ces 7 dernières années: 95 entreprises
et la création de 900 emplois.
Bien sûr, le ministre pourra répliquer encore une fois
qu'il n'est pas question de faire disparaître l'expertise que l'on
retrouve ou, plus justement dit, parce que je crois que le mot "expertise"
n'est pas français, l'expérience que l'on retrouve au sein de
cette agence québécoise qui, maintenant, se retrouvera, je pense
qu'il sera obligé d'employer le terme "disséminée"
à travers un ensemble beaucoup plus grand qui s'appelle le
Société de développement industriel du Québec.
Et, M. le Président, en matière de recherche, en
matière de valorisation industrielle des produits de la recherche, il
n'est pas inutile de rappeler quelques faits que nous avons vécus au
Québec et qui nous amènent à dire, de ce
côté-ci de la Chambre, que le ministre, qui a déjà
présidé, qui a déjà patronné, qui a
déjà vu aux destinées de cette grande
société qui s'appelle la Société de
développement industriel du Québec, bien sûr, a
peut-être envie, aujourd'hui, d'avoir plus de monde, d'avoir plus
d'instruments, d'avoir le maximum de ressources pour répondre à
des besoins qui sont manifestés à travers le Québec, en
particulier, au niveau du développement ou de la valorisation, au niveau
industriel, du résultat d'un certain nombre de recherches au
Québec, et tout cela, de le faire avec un instrument qui est plus grand,
qui est plus large et qui a une plus grande dimension.
Là-dessus, je rappellerai au ministre qu'on a un bon nombre
d'exemples, au Québec, de petites boites, de petites équipes, de
petits groupes que nous avons développés, partout à
travers le Québec, et qui font de l'excellent travail. Et ce n'est pas
la taille qui fait en sorte qu'on a des résultats qui produisent
davantage. Ce n'est pas parce qu'on a une grosse boîte qu'on peut
s'assurer d'un rendement plus élevé. Et, quand je regardais ce
projet de loi et que je me préparais à intervenir sur la prise en
considération de ce rapport à l'occasion du septième
anniversaire, que nous aurions fêté dans quelques jours, de
l'Agence québécoise de valorisation industrielle de la recherche,
je me souvenais toujours de l'aventure de la création d'une
université du Québec dans la région de
l'Abitibi-Témiscamingue. Et il me semblait retrouver dans quelques
interventions du ministre - je n'ai pas dit dans tous les mots - des
interventions que j'avais entendues à l'époque de la
création de cette université dans la région
d'Abitibi-Témis-camingue, parce que vous savez, pour beaucoup de gens
dans le domaine de la recherche, pour beaucoup de gens dans le monde du savoir
universitaire, point de salut hors des masses critiques, c'est-à-dire
qu'on ne peut pas penser que de petites équipes qui ne regroupent pas
suffisamment de cerveaux, qui ne regroupent pas suffisamment - j'allais dire,
de bactéries de la même catégorie - de gens qui parlent le
même langage puissent donner des résultats qui soient suffisants,
qui soient reconnus par les pairs de la discipline. Et, ça, c'est
généralement le discours que l'on récolte et c'est
généralement le discours que l'on entend de la part - bien
sûr, vous l'aurez deviné - de ceux et celles, parlant des
individus qui sont au sein des grandes institutions de haut savoir, qui nous
affirment qu'on ne
peut pas, en dehors de ces grandes institutions, produire ou faire en
sorte qu'il y ait développement du savoir de façon significative
et qu'on ne peut pas obtenir de résultat qui soit reconnu par la
communauté internationale ou par les pairs de la discipline
concernée.
Je me souviens donc, M. le Président, qu'au même moment, en
1983, quelques mois avant que l'on mette au monde cette Agence
québécoise de valorisation industrielle de la recherche, il y
avait eu tout ce discours, toute cette bataille, toute cette lutte pour la
création d'une petite université pour servir une population dans
une grande région comme l'Abitibi-Témiscamingue. Je me
souviendrai toujours, M. le Président, et je veux apporter ce
témoignage-là au ministre de l'Industrie et du Commerce, du
recteur de l'Université de Montréal, à l'époque,
qui, devant le ministre de l'Enseignement supérieur, mais s'était
montré scandalisé, mais purement scandalisé qu'on puisse,
au Québec, penser développer une université pour les gens
dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue. Bien, voyons donc!
Ça n'avait pas de bon sens! Écoutez, tout le monde savait,
à l'époque, ou, enfin, beaucoup l'affirmaient, que hors la
montagne du mont Royal et le haut lieu de savoir qu'on y retrouve,
l'Université du Québec à Montréal, et encore
quelques universités en régions, point de salut. On ne pouvait
pas penser développer de petites équipes...
Mme Juneau: Je m'excuse...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la
députée de Johnson.
Mme Juneau: Je remarque qu'on n'a pas quorum. Est-ce que vous
pourriez demander le quorum?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vais vérifier,
Mme la députée. Qu'on appelle les députés.
Très bien, M. le député. M. le député
de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, si vous voulez poursuivre votre
intervention.
M. Trudel: Merci, M. le Président. Je disais donc
qu'à cette époque on voulait mettre au monde une petite
équipe universitaire dans une région du Québec et on s'en
scandalisait dans les hauts lieux du savoir. On disait: C'est impossible qu'on
puisse obtenir un niveau de résultat qui fasse en sorte qu'on va
continuer à faire du développement et à élever le
niveau du développement scientifique et le niveau du
développement des individus qui vont fréquenter cette
université dans un si petit milieu.
Parce qu'il y a des gens progressistes au Québec, et ça
avait commencé en 1969 par l'adoption de la loi permettant de
créer l'Université du Québec et ses constituantes dans
toutes les régions du Québec, un ministre dont tout le monde
reconnaît qu'il était un être éminemment progressiste
au Québec, le ministre Camille Laurin, à l'époque, disait:
Malgré tous ces cancans, malgré toutes ces affirmations, la
réalité nous démontre qu'il y a des gens à
desservir et nous allons demander à cette petite équipe, dans
cette petite université, d'atteindre les mêmes standard, parce
qu'il n'y a pas deux lois dans le monde du savoir et du développement du
savoir, il y en a seulement une, celle de la reconnaissance de ses pairs et de
la comparaison avec des standard nationaux ou internationaux.
Si bien que cette petite équipe s'est mise à l'oeuvre et,
comme j'avais eu l'honneur de présider à la fondation de cette
université avec l'équipe que nous étions, à peu
près de la même grandeur que l'Agence québécoise de
valorisation industrielle de la recherche, une douzaine de personnes au niveau
de la direction, de l'administration, de l'enseignement et de la recherche,
nous nous sommes dit, vous vous en doutez bien, M. le Président: Quel
pourrait être le créneau spécifique que nous pourrions
adopter pour faire en sorte que nous puissions nous affirmer au niveau de
l'excellence du savoir, de l'enseignement, mais aussi de la recherche dans les
disciplines qui nous sont reconnues particulièrement pour servir la
population dans cette université, dans cette région de
l'Abitibi-Témiscamingue? Bien, compte tenu des forces que nous avions,
compte tenu de la petite équipe - huit professeurs, je me souviens
très bien, comme si c'était hier - dans le domaine des sciences
comptables, nous avons décidé de faire en sorte que, sur un plan
de quatre ans, cinq ans pour parler d'une façon plus réaliste,
nous atteignions les meilleurs standard.
Bien, voilà! En 1987, cette petite université a eu le
meilleur taux de réussite à l'examen uniforme des comptables
agréés du Canada. Sur 4000 individus qui se sont
présentés aux examens, bien, 5 parmi les 20 premiers au Canada -
c'était du jamais vu - se sont classés dans les premiers rangs et
ont obtenu des résultats hors pair, si bien que même la
Corporation des comptables avait demandé de faire enquête sur
cette université, parce que c'était un phénomène
tout à fait extraordinaire. Le résultat, c'était
simplement, M. le Président, que, dans les petites équipes, on
peut obtenir une meilleure motivation, les objectifs sont plus clairs, on peut
mettre notre monde au travail avec plus d'ardeur, comme à l'AQVIR
où nous avons obtenu de grands résultats pour une petite
boîte. Je souhaite vraiment que le ministre de l'Industrie et du Commerce
- il n'est pas trop tard, il est seulement 1 h 30 - puisse revenir sur sa
parole et faire en sorte qu'on garde ce petit bijou de famille parmi nous.
Merci, M. le Président. (1 h 30)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M.
ie député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Sur la
motion de prise en considération du rapport de la commission de
l'économie et du travail sur le projet de loi 86, je cède la
parole maintenant à Mme la députée de Taillon.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Merci, M. le Président. En fait, depuis le
début de nos débats, je cherche une expression pour qualifier
l'action du ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie à
l'égard de ce qu'il va faire de l'AQVIR et, comme il n'aime pas que je
dise qu'il maltraite les petites entreprises, je me suis dit qu'il était
peut-être préférable de dire qu'il n'aime pas ce qui n'est
pas gros. Dans ce sens-là, M. le Président, je crois que le
ministre a des talents de fossoyeur de ce qui n'est pas gros. L'AQVIR est un
bel exemple dans ce sens-là. On discutera sans doute, demain ou un peu
plus tard, d'un autre projet de loi que nous avons étudié en
commission parlementaire et qui va essentiellement dans le même sens, M.
le Président. Alors, c'est une autre façon; il n'aime pas
ça quand on dit qu'il veut mettre de côté les petits,
disons qu'il n'aime pas ce qui n'est pas gros. Alors, ça va être
une façon peut-être plus élégante que le ministre
acceptera davantage.
Je vais reprendre un peu la discussion à partir d'un article, M.
le Président, qui a paru dans La Presse il y a à peine
quelques semaines au moment où se débattait le projet de loi ici
à l'Assemblée et en commission parlementaire, qui concerne
l'Agence québécoise de valorisation industrielle de la recherche
que le ministre veut intégrer à la Société de
développement industriel faire disparaître ce qui est flexible, ce
qui est accessible, ce qui est bien identifié, pour l'intégrer
à ce qui est gros, à ce qui est bien sûr bien
identifié, mais comme une entreprise, comme une société
aidant à la capitalisation des entreprises, aidant les entreprises
à se trouver des fonds pour progresser. Je n'ai rien contre le fait
qu'il aide des entreprises à se procurer des fonds, mais ce que je lui
dis, c'est qu'il est en train de noyer l'expertise, de noyer la
possibilité d'agir d'une façon souple qu'avait l'AQVIR
auprès des entreprises en matière de recherche.
Alors, je vais prendre cet article de M. Picher et je vais le commenter,
M. le Président. Il dit: "Le projet de loi réserve un enterrement
de première classe à l'AQVIR." Donc, être fossoyeur, quand
j'utilisais ces mots, j'imagine que ce n'était pas
exagéré, puisque je traduis différemment ce que M. Picher
nous dit dans son article. Il dit: "Une des moins connues et des plus petites
sociétés d'État québécoises, son budget
d'opération dépasse à peine le million de dollars et elle
emploie seulement 12 personnes", M. le Président. Évidemment, le
ministre va nous dire, et il l'a déjà fait, j'ai ses
communiqués devant moi, j'en ai plus qu'il n'en faut, que ça va
rationaliser. Ça va rationaliser en faisant disparaître, M. le
Président. Est-ce que c'est bien l'objectif que poursuit le ministre?
"Créée il y a six ans - je reprends le texte de M. Picher -
l'agence a pour mandat de promouvoir l'innovation technologique et de
contribuer financièrement à la mise en valeur des
résultats de la recherche industrielle." D'abord, bravo, je suis
d'accord avec ce que dit M. Picher, bravo. Il ajoute: "Dans ce dossier, le
Canada arrive à la queue des pays industrialisés et le
Québec est encore plus poche que le Canada, et il dit, peut-être
en bonne partie parce que les budgets de recherche du fédéral
sont scandaleusement concentrés en Ontario." M. le Président, le
ministre devrait prendre ses énergies pour aller se battre à
Ottawa, faire des représentations et essayer d'imaginer un autre
modèle pour le développement et le progrès du peuple
québécois, plutôt que d'essayer de saper des initiatives
qui viennent aider ce même peuple québécois à se
donner des outils de restructuration. Parce que c'est de ça dont il
s'agit, M. le Président.
Alors, qu'il se tourne donc vers le gouvernement d'Ottawa, qui ne nous
donne jamais notre juste part en matière de recherche et
développement. Lors d'une intervention en Chambre, M. le
Président, le ministre, dans un même discours, à trois
reprises, M. le Président, a dit: Même si nous avons une politique
intégrée, qui a démontré hors de tout doute des
résultats positifs, le constat, c'est qu'après cinq ans d'efforts
- c'était son gouvernement, soit dit en passant - le pourcentage
d'investissements en matière de recherche et développement, par
rapport au produit intérieur brut, est demeuré sensiblement le
même au Québec, 1,3 %. Et il va répéter ça,
M. le Président, à trois reprises dans son discours. Alors, au
lieu de s'attaquer à l'AQVIR, qu'il s'attaque donc à Ottawa, pour
essayer d'aller rechercher les sommes qui nous sont dues et qui nous aideraient
à investir réellement dans la restructuration industrielle du
Québec. C'est à ça que le ministre devrait s'attaquer,
plutôt que de nous amener à éliminer tout ce qui peut avoir
un semblant d'intérêt pour la recherche au Québec, M. le
Président. Il dit: Seulement voilà - et je reprends ce que dit le
journaliste - l'AQVIR n'est pas seul dans le paysage, il y a d'autres
organismes, et il mentionne la puissante Société de
développement industriel. Le ministre aimant ce qui est gros, il aime
particulièrement la SDI. Vous allez comprendre d'ailleurs, pour d'autres
raisons, M. le Président, qu'il aime la SDI. Je ne lui en veux pas,
là, mais on va le constater ensemble. Mais les amateurs de petite
histoire savent que Gérald Tremblay, lors de son passage à la
présidence de la SDI a tenté de mettre le grappin sur l'AQVIR,
mais - et c'est moi qui ajoute le "mais" - refus du ministre de
l'époque, Pierre MacDonald, qui croyait, lui - j'ajoute le "lui"
-à la vocation particulière de la petite
Société.
Devenu ministre, M. Tremblay revient à la charge, M. le
Président. Alors là, c'est absolument de toute beauté - et
j'espère que ce sera une leçon un peu pour nous, a cet
égard-là, éventuellement, pour qu'on ne tombe pas dans les
mêmes panneaux - l'ancien président de la SDI devient ministre
responsable de la SDI, à titre de ministre de l'Industrie, du Commerce
et de la Technologie, et il réalise son vieux rêve de la SDI.
Une voix: Son rêve de Noël.
Mme Marois: Alors là, tout contrôler. Mettre toutes
les possibilités d'aide aux entreprises sous un même chapeau, dans
une espèce de grand "melting pot" qui va faire qu'aucune
particularité ne va être respectée, qu'on va se perdre dans
les dédales d'une administration qui va s'alourdir de plus en plus. Et
il faut fréquenter un tant soit peu, M. le Président, les gens
d'affaires pour savoir que - je le reconnais - malgré des efforts de la
SDI pour être efficace, pour répondre rapidement aux entreprises,
il y en a, et il y en a des méandres à travers lesquels il faut
traverser pour obtenir de l'aide de la Société de
développement industriel, M. le Président. Et là, on dit
à des gens qui ont une bonne idée, qui ont un petit projet,
qu'ils devront, eux, aller essayer de se démêler dans
l'espèce, pas d'imbroglio, M. le Président, ce serait
exagéré - et j'essaie de ne pas le faire, M. le Président
- mais qu'ils devront essayer de trouver la bonne porte pour faire valoir leur
projet. Et c'est amusant d'ailleurs, à cet égard-là, parce
que toujours notre ami M. Picher nous raconte un peu comment, finalement, ce
sont des entreprises, des gens qui sont - et j'utilise son expression - un peu
"crack". (1 h 40)
Vous savez, ce sont des gens qui ont de l'imagination, qui ont des
projets, qui se lèvent un bon matin et qui disent: Oui, peut-être,
essayons de commercialiser tout ça, essayons d'investir un petit peu, de
pousser plus loin.
Et là - je sais qu'il ne me reste pas de temps, M. le
Président, je termine - quelque part, existe une petite agence qui va
les recevoir, qui va leur offrir l'aide qu'il faut, qui va leur offrir
l'accueil qu'il faut. Mais non, M. le Président, les idées de
grandeur du ministre vont s'actualiser. On va se voir imposer, ce ne sera pas
nouveau, M. le Président, encore une fois les entreprises satisfaites
des services de l'AQVIR vont se voir imposer un changement qu'ils n'ont jamais
demandé. Tout ça est uniquement dans la tête du ministre,
M. le Président, et il pense, après cela, qu'on va
améliorer notre performance en recherche et développement.
J'espère seulement, M. le Président, que dans six mois d'ici,
dans un an d'ici, il ne répète pas devant cette Assemblée
qu'on n'a pas augmenté la part du PIB consacré à la
recherche et développement, parce qu'à ce moment-là, m. le
président, il n'aura qu'à invoquer sa propre turpitude. merci, m.
le président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Taillon. Sur le même sujet, je suis prêt
à reconnaître M. le député de Masson. M. le
député.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. En ce 20
décembre 1990, 1 heure 40, pendant, que d'autres festoient, qui, dans
une salle, les Therrien, les Poulin, les Maltais, qui, dans l'autre, les
Brassard, les familles quoi, se réunissent et fêtent. Ils
commencent déjà à préparer la Noël par des
festivités. On voit que, dans la vie, il y a certains rôles d'une
grande ingratitude. Nous sommes ici, M. le Président, par devoir. Dans
nos parlements démocratiques, il y a un parti qui prend le pouvoir
à une élection et un parti qui perd l'élection et qui est
dans l'Opposition. Malheureusement pour le peuple québécois, M.
le Président, ce n'est pas notre parti qui a eu le plus grand nombre de
sièges, même si nous avons les mêmes chiffres: 92 et 29. C'a
été inversé, 92 et 29, c'est pour ça qu'on est en
face, 29; si on en avait 92, on serait de l'autre côté.
M. le Président, j'ai bien examiné encore une fois l'arbre
de Noël. Dans le parlement, il est représentatif aussi de
l'Assemblée nationale: 92 boules et 29 lumières. Et c'est
pourquoi, M. le Président, par devoir et par souci de rendre service aux
citoyens et aux citoyennes du Québec, nous sommes là à
dire à ceux qui ont une majorité démocratiquement acquise,
que le geste qu'ils veulent faire par la loi 86, nous ne sommes pas d'accord
avec ça fait trois ou quatre fois que nous parlons en Chambre de cette
loi 86, M. le Président, qui prend une petite compagnie très
productrice, créatrice, qui permet à certains talents et à
certaines personnes qui ont acquis des connaissances technologiques et qui
manquent de moyens... Une petite compagnie est là pour les aider
à fabriquer un modèle et on l'appelle modèle prototype,
pour, enfin, mettre ce modèle de leur connaissance sur le marché.
Cette petite compagnie, M. le Président, a produit beaucoup beaucoup, et
le ministre qui était à la SDI avant le sait pertinemment. Et, un
peu comme le Québec dans le Canada, il veut la faire entrer dans la
constitution de la SDI malgré elle, pour en faire un grand tout comme le
tout canadien. D'ailleurs, on n'avait jamais demandé au Québec,
qui était un coin créateur, distinct, différent,
productif, plein de talent, d'entrer dans ce grand Canada, parce qu'on dit que,
s'il entre dans ce grand Canada, il va être étouffé par
l'ensemble. Que voulez-vous qu'il fît à 5 000 007, 6 000 000
contre 20 000 000,
22 000 000? Mais, malgré l'exemple qu'on a aujourd'hui, parce que
le Québec veut s'en sortir et que tout le monde le dit, le ministre,
contrairement au monde moderne, veut prendre cette petite compagnie productive
et l'entrer dans cette grande compagnie "accaparatrice, M. le Président,
contrairement à ce qu'on a fait en 1867 devant le Québec pour le
faire rentrer dans la constitution, on n'a pas demandé l'opinion des
Québécois en 1867 pour les entrer dans ce grand Canada. Mais
nous, par souci démocratique, nous avons demandé à l'AQVIR
si elle voulait rentrer dans la grande SDI. Voici, M. le Président, sa
réponse: La présente fait suite à votre demande, Mme la
députée de Chicoutimi, qui est responsable de notre
référendum à l'AQVIR. Vous faites allusion aux rumeurs -
parce que c'étaient des rumeurs à l'époque -
d'intégration de l'AQVIR à la SDI. Vous me demandez de vous faire
part de mes réactions. Elle parle à ce moment-là à
M. Claude Richard, ingénieur de l'AQVIR. Il est évident que,
lorsqu'on a consacré plusieurs années d'efforts à mettre
sur pied un moyen d'aide spécialisé dont les
bénéficiaires semblent reconnaître la pertinence et la
crédibilité, il est difficile d'applaudir à sa
disparition." Et ce sont les gens à l'intérieur qui disent
ça, M. le ministre.
Vous venez de ce milieu, SDI. Vous aviez l'oeil accapareur de vent
pendant que vous étiez à la SDI. Aujourd'hui, vous avez l'oeil
autoritaire. Mais pendant que vous aviez l'oeil gauche accapareur sur AQVIR,
dans le temps, vous n'avez pas pu réussir. Mais là, vous vous en
venez en Chambre ici et vous la regardez d'un autre oeil, avec l'oeil
autoritaire, et vous vous donnez votre petit bas de Noël. Cette loi 86
pourra emmener AQVIR dans le giron de la SDI. Et M. Richard vous avise bien,
pourtant, M. le ministre. Il est difficile d'applaudir à sa
disparition.
Mais je vais être juste, je vais citer toute la lettre. Elle est
très courte. "Par ailleurs, l'idée sous-jacente au projet du
ministre Tremblay - je cite la lettre, M. le Président - de regrouper
sous une même enseigne les compétences, l'expertise et les
programmes d'aide de l'AQVIR et de la SDI relatifs au développement
technologique dans l'entreprise afin d'impartir à ce dernier une
impulsion nouvelle présente sans aucun doute des avantages potentiels."
Parce qu'il faut qu'il soit un peu poli, quand même. Parce qu'il va aller
travailler sous votre férule. Il dit: C'est difficile d'applaudir
à sa disparition. Mais, en bon soumis, comme le Québec le fut en
1867, on dit: Ça peut peut-être apporter des avantages potentiels.
Mais, comme le Québec, ça sera prouvé que ça n'en
apportera pas. C'est ce qu'on vous dit aujourd'hui.
M. le Président, malgré les avertissements de l'AQVIR, le
ministre persiste dans sa voie. Je me souviens de la grammaire Ragon
nc 141 en bas de la page: perge quo coepisti, continue dans le
chemin où tu t'es engagé. Je ne vous dirais pas ça. Non
perge quo coepisti, "senor ministre". Ne restez pas dans la voie où vous
vous êtes engagé, vous faites fausse route. Votre route est
rocailleuse et remplie d'échecs et de fossés creux.
Et je vous disais, lors d'un moment d'étude, qu'il y avait le
Petit Patriote à Montréal, du côté artistique, et la
grande Place des Arts. Le Petit Patriote, tout petit, a fabriqué la
majeure partie des grandes vedettes d'aujourd'hui. Pourquoi? Les talents
venaient là où nous avions l'expertise. Nous décidions
vite et les gens s'exécutaient vite. Tandis que, dans la grande
compagnie de la Place des Arts, qui est la SDI de la finance que vous dirigez,
eux ne prennent que ceux qui sont déjà parvenus. C'est le
même exemple à Radio-Canada actuellement, la maison mère ne
prend que les gens parvenus, les gens qui ont exhibé leur talent et
qu'on a reconnus ailleurs. Quand on ferme les stations à travers le
Québec, dans toute la Gaspésie, la Côte-Nord, il n'y aura
plus de production, c'est l'AQVIR de la télévision, M. le
ministre. (1 h 50)
Et ça vous a vous-même révolté de voir
Radio-Canada le faire et vous vous apprêtez à faire le même
sacrilège avec l'AQVIR. M. le Président, d'où sors-je?
Qu'entends-je? Ça n'a aucun bon sens, M. le Président, ça
n'a aucun sens. Il faut que le ministre se ravise, qu'il révise sa
position et qu'il dise: Ce sont des choses à ce point différentes
qu'il faut que chacune, dans leur spécialité, vive et je les
appuierai chacune dans leur spécialité. C'est ce que nous vous
demandons et c'est notre devoir de le faire. Même s'il est tard, M. le
Président, c'est par devoir que nous vous le disons: Révisez
votre position. L'Opposition n'est pas d'accord, le peuple non plus et l'AQVIR
encore moins. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur le même sujet,
la prise en considération du rapport de la commission de
l'économie et du travail sur le projet de loi 86, je cède la
parole au député de Shefford. M. le député.
M. Roger Paré
M. Paré: Merci, M. le Président. Moi aussi, je
tiens à intervenir pour tenter de convaincre le ministre de revenir sur
sa décision parce qu'à mon avis, il s'agit effectivement d'une
erreur. Trop souvent, en politique, les erreurs, on s'en aperçoit
lorsqu'on en constate les effets. Je pourrais vous donner juste un exemple. Je
me rappelle, il y a quelques années, de l'autre côté, quand
on a décidé de faire des ventes de feu, de se débarrasser
des sociétés d'État payantes, nous, on
dénonçait ces gestes en disant: Vous n'avez pas le droit de
défaire, finalement, quelque chose qui s'est créé avec les
années, qu'on appelle le
bien collectif, et qui est productif et permet de créer des
emplois, de faire du développement régional, parce que vous
êtes en train de vendre, la maison et les meubles pour payer
l'épicerie. Un jour, vous allez payer pour, parce que, quand vous
n'aurez plus rien à vendre, vous n'arriverez plus dans vos budgets.
De l'autre côté, on ne nous a pas écoutés. On
a vendu les sociétés d'État, et, pendant deux ou trois
années, on avait des budgets qui regardaient bien. Ça avait l'air
de bien aller au Québec. Bien oui, on était en train de vendre
les meubles et la maison, les sociétés d'État, pour payer
le fonctionnement annuel, normal et régulier des services que
l'État donne. Maintenant qu'on n'en a plus à vendre et maintenant
qu'on a vendu les sociétés qui étaient productives et
payantes pour le Québec, c'est quoi, la situation financière du
Québec au moment où on se parle? C'est la catastrophe. Le
déficit augmente, et le gouvernement ne cesse d'augmenter les taxes, les
impôts et, comme c'est trop, il fait faire la job par les commissions
scolaires, par la Régie de l'assurance automobile, par les
municipalités, à coups de 500 000 000 $ et à coups de 1
000 000 000 $. On n'a plus rien à vendre, on a vendu ce qu'on
possédait qui faisait en sorte qu'on avait des revenus et qu'on faisait
du développement.
Là, on est en train de poser d'autres gestes qui vont dans le
même sens et ça nous inquiète, et on ne voudrait pas se
ramasser à l'Assemblée nationale, dans deux, trois, quatre ou
cinq ans, et venir dire, exactement comme pour les sociétés
d'État qu'on a vendues, les sociétés d'État ou les
organismes de développement économique qu'on a détruits,
que ça fait en sorte qu'il se fait moins de recherche, moins de
développement, moins de développement coopératif, moins de
développement régional. Pourquoi? Parce qu'on a
décidé par une loi ici à l'Assemblée nationale de
se départir d'organismes rentables, efficaces. C'est incroyable, ce
qu'on est en train de vivre en cette fin de session. On s'en prend au moins
à trois sociétés de développement majeures pour le
Québec. C'est à n'y rien comprendre. Comment se fait-il qu'on
décide comme gouvernement de s'en prendre à des formules
gagnantes?
Trois exemples, très rapidement, et c'est des lois qu'on est en
train de voter ici. La Caisse de dépôt et placement du
Québec, qui a une formule gagnante, de l'autre côté, on a
décidé de modifier. Comment se fait-il que, quand ça va
bien, on vient modifier? Normalement, lorsqu'on a une formule gagnante,
lorsqu'on a une société qui fait des profits, lorsqu'on a une
société qui est très efficace et qui sert même de
modèle à l'ensemble du territoire nord-américain, on
continue, on l'utilise davantage, on lui donne encore plus de moyens. Mais non,
on s'en vient modifier la Caisse de dépôt et placement. Ce dont on
est en train de parier, du projet de loi 86, l'AQVIR, l'Agence
québécoise de valorisation industrielle de la recherche, tout le
monde, y compris le ministre, lorsqu'il a fait son intervention en
deuxième lecture, est venu dire que c'était un succès
éclatant, que l'AQVIR avait rempli son mandat, qu'elle était
très efficace et très performante, tellement qu'on a
décidé de l'abolir en la fusionnant ou en en faisant tout
simplement un secteur de la Société de développement
industriel du Québec. Depuis quand, quand on a une formule gagnante, on
s'en vient la modifier? Ce n'est pas le temps de modifier des formules
gagnantes, ce n'est pas le temps d'amener des chambardements structurels quand
on est en période de récession économique comme celle
qu'on traverse présentement. Au contraire, on doit lui donner plus de
moyens, on doit l'utiliser davantage. Mais non, on s'en vient jouer dans les
structures, on s'en vient déranger des gens qui fonctionnent
déjà d'une façon très efficace et très
performante.
La loi qui va suivre dans je ne sais pas combien d'heures, en pleine
nuit, ça va venir toucher à la Société de
développement des coopératives; la même affaire, une autre
société performante et efficace, dont les résultats sont
admirables, on va venir en modifier les structures en période de
récession. Ce n'est pas le temps de jouer là-dedans, c'est le
temps de les encourager, de les aider et de les utiliser au maximum. Je ne
comprends pas, M. le Président. Quelle est cette idée, au lieu
d'avoir de bons plans de relance économique présentement, parce
que c'est de ça que le Québec a besoin pour faire face à
la crise économique et surtout au niveau de chômage
élevé qui s'en va vers les 12 %? C'est un plan de relance qu'on
devrait amener. Ça devrait être de ça qu'on discute et non
pas être en train de mettre la hache dans des structures efficaces qui
aident à la création d'emplois et au développement des
régions et des secteurs de l'économie qui ont besoin d'aide de
ces sociétés. C'est incroyable.
Et l'AQVIR, c'est un modèle, c'est unique en Amérique du
Nord, c'est une formule qui est flexible, qui est efficace, qui a les
qualités de souplesse et d'efficacité, exactement ce que nos
inventeurs, nos patenteux ont besoin, les innovateurs. Le rôle de
l'AQVIR, c'est justement de s'occuper d'innovation technologique, de prendre
une idée et d'en faire un produit, de le rendre jusqu'à la
commercialisation. De ce côté-là, je le sais, le ministre a
déjà utilisé un argument en disant que, malheureusement,
l'AQVIR ne se rend pas à la commercialisation; je suis d'accord avec
ça, j'en conviens. Sauf qu'il y a d'autres sociétés comme
la SDI qui fait un boulot extraordinaire, qui est une superstructure
très efficace aussi, mais qui est là justement pour prendre la
relève de la commercialisation. Mais si on trouve que le cheminement
doit être fait par les mêmes intervenants, donc l'innovation, le
prototype et la commercialisation, ce n'est pas compliqué,
qu'on modifie la loi constitutive de l'AQVIR en lui donnant la
responsabilité de la commercialisation. Ce n'est pas plus
compliqué que ça lorsqu'on a la volonté d'utiliser au
maximum les outils de développement économique qu'on
possède comme société. Je suis convaincu que c'est une
erreur qu'on est en train de faire, c'est pour ça que je tiens à
intervenir.
J'ai pris tantôt l'exemple des sociétés
d'État; bien, aujourd'hui, on a des sociétés d'État
qui sont fermées. Je pense à la Raffinerie de sucre du
Québec avec toutes les conséquences que ça a pour des
régions complètes du Québec, on ne produit plus de sucre
au Québec et tous les producteurs de betterave à sucre ont
été obligés de se transformer à coups de millions.
On est en train de faire la même chose maintenant avec des institutions
qui sont là pour aider le développement économique, pas
dans n'importe quel secteur avec l'AQVIR, dans le secteur de la technologie; il
faut être, de nos jours, compétitif comme société,
ça veut dire qu'il faut prendre le virage technologique. (2 heures)
Je me rappelle le discours que j'ai tenu en cette Chambre en 1983, de
l'autre côté, lors la création de l'AQVIR où on
disait que ça nous prend absolument une agence, une
société, une institution qui va être suffisamment souple
pour être capable d'être efficace et de répondre aux
besoins. Il ne faut pas oublier que chacune des sociétés a un
rôle et des responsabilités mais il y a aussi, et le ministre
connaît très bien ça pour avoir été à
la tête de la Société de développement industriel du
Québec, il y a, à l'intérieur de chacune des
sociétés, des différences fondamentales de culture. La
culture de la SDI c'est du financement, c'est de l'aide aux entreprises
moyennes et importantes. C'est une culture particulière et elle fait son
ouvrage d'une façon très efficace, mais l'AQVIR a sa culture qui
est d'être une petite entreprise, une équipe très
spécialisée, très efficace et très mobile et qui
est capable de répondre, grâce à sa flexibilité,
d'une façon rapide aux demandes. En faisant en sorte de les
intégrer l'une dans l'autre, on risque de lui enlever de cette souplesse
et de cette culture alors qu'on n'ajoute rien, M. le Président, ni
personnel, ni budget. Donc, on n'ajoute rien pour le développement
économique. Ce qu'on fait, à mon avis, on se pénalise et
ma crainte c'est que les conséquences on les voie au cours des prochains
mois et des prochaines années et il sera trop tard. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le^
député de Shefford. Sur ce même sujet, je reconnais Mme la
députée de Johnson.
Mme Juneau: M. le Président, comme je déteste
déranger les collègues pendant qu'ils font leur intervention, je
voudrais demander le quorum avant que mon collègue commence son
intervention.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Qu'on appelle les
députés. Je suis prêt à reconnaître le
prochain intervenant sur ce sujet. Nous avons quorum présentement. M. le
député de Laviolet-te.
M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je peux commencer,
oui?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous pouvez commencer,
M. le député.
M. Jolivet: O.K.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous
plaît.
M. Jolivet: J'attendais qu'on me... Le Vice-Président
(M. Bissonnet): Ça va. M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, M. le Président. J'ai eu l'occasion de
faire valoir certaines idées concernant la disparition d'un organisme
comme celui-là à une autre occasion lorsque, membre de la
commission parlementaire de l'économie et du travail, j'avais fait
valoir, avec ma collègue la députée de Taillon, la
disparition, par intégration à la Société de
développement industriel du Québec, des coopératives.
D'ailleurs, nous aurons l'occasion tout à l'heure de parler de la
Société de développement et des coopératives.
Nous voilà ici devant un projet de loi qui a pour but
d'intégrer, encore une fois à la Société de
développement industriel, l'Agence québécoise de
valorisation industrielle de la recherche. Ça m'a toujours
inquiété parce que ça me rappelle l'époque, je
devrais dire malheureuse, d'une certaine façon, de la
Société de développement industriel qui a un travail
important à faire; je dis "malheureuse", parce qu'à cette
époque, avec les gens du ministère de l'Industrie, du Commerce et
de la Technologie, en région, l'impression qu'on avait c'est que les
gens attendaient le miracle, d'une certaine façon. Ils attendaient
qu'arrivent à leurs bureaux des personnes qui s'en venaient dire:
Écoutez, M. le haut fonctionnaire, nous avons une idée
épatante qui va créer 500 à 600 emplois. Quand je fais
mention de ça, M. le Président, je fais mention de
l'époque malheureuse où on croyait que plus on intégrait
l'ensemble de tous les organismes qui étaient autour de nous autres,
mieux c'était. Lorsqu'on arrivait avec des petits projets, c'est
quasiment du revers de la main qu'on nous tassait. Alors, voilà qu'il y
a une agence qui s'occupait de valoriser, au niveau industriel, les bonnes
idées de ce qu'on peut appeler nos patenteux québécois. Il
y a des gens qui ont des bonnes idées,
mais qui, malheureusement, n'ont pas les moyens d'aller plus loin dans
la mise en marche de leurs idées, de façon industrielle, et,
à ce moment-là, on en arrive avec des gens qui se font, dans
certains cas, même, parce qu'ils n'ont pas la capacité de breveter
leurs inventions, quasiment voler leurs inventions et c'est d'autres qui en
profitent. Au point de vue monétaire, ce n'est jamais mauvais de pouvoir
penser inventer quelque chose et être capable de le mettre sur le
marché, mais, quand on en voit d'autres qui nous volent nos
idées, c'est parce qu'on n'a pas eu les moyens de mettre en place les
idées que nous avions.
Je donne juste un exemple qui se fait de plus en plus actuellement par
des gens qui réfléchissent à ça et qui essaient de
mettre ça en capacité industrielle, des gens qui parient de
ski-doo sur l'eau, mais pas de la façon dont on le pense, des skis qui
permettent de marcher sur l'eau. Je ne sais pas s'il y en a qui ont entendu
parler de ça, mais, actuellement, il y a des gens qui sont en train d'y
réfléchir. J'ai vu à la télévision, encore
dernièrement, la personne... Si on avait pensé un jour être
capable de mettre sur le marché la machine qu'on voit aux
États-Unis, dans bien des cas, sur des lacs maintenant au Québec,
des gens qui se promènent avec des sea-doo, ce qu'on a appelé les
ski-doo de l'eau... c'est qu'il y a des gens qui ont eu la chance d'être
aidés à prendre ce qu'ils ont dans la tête et à le
mettre sur un dessin, puis, du dessin, ensuite à aller le mettre en
capacité industrielle et, aujourd'hui, la personne qui a inventé
ça peut vivre convenablement.
Alors, nous avions une agence qui avait pour but de faire valoriser de
façon industrielle la recherche ou ce qu'on avait patenté comme
patenteux québécois. Qu'est-ce que le ministre dit là? Par
économie, j'ai l'intention de la ramener à la
Société de développement industriel, d'autant plus,
dit-il, que ça aura pour effet de régionaliser l'Agence
québécoise de valorisation industrielle de la recherche.
L'idée n'est pas bête au départ, mais est-ce que c'est
ça qui va se passer? Le ministre peut accepter, je l'espère,
c'est un homme avec qui on a la capacité de discuter et de faire valoir
nos idées en commission parlementaire, et j'en suis sûr, que je
sois d'un avis différent du sien, d'autant plus que le même
gouvernement avait décidé, avec le rapport Gobeil... Regardez au
fur et à mesure qu'on avance, ce qu'on avait dit du rapport Gobeil: Ce
n'est pas vrai, ça n'arrive pas demain matin, ça. Ça va
être mis de côté, vous allez voir. Non, non, c'est en train
de se faire morceau par morceau, tranquillement pas vite. À la faveur
d'une session intensive, on fait telle et telle décision et voilà
ce qu'on a l'intention de faire, mais, dans le fond, on est en train d'avoir
devant nous la mise en place du rapport Gobeil qui voulait faire
disparaître des choses comme celle-là en disant: Nous allons les
intégrer et nous allons sauver de l'argent. Mais quel argent allons-nous
sauver, M. le Président? Il y a des gens qui sont actuellement des
employés et le ministre, dans sa loi, dit: Ces employés-là
vont être transférés à la Société de
développement industriel. Je vais mettre une composante qui s'appelle
vice-présidence et cette composante de la Société de
développement .industriel à la vice-présidence pour la
valorisation industrielle de la recherche va se retrouver
agglomérée régionale-ment dans chacun des secteurs.
M. le Président, je suis sûr que le ministre pourra nous
dire, dans ses droits de réplique qu'il a le droit de prendre à
toutes les interventions, pendant cinq minutes... Il y a droit, en vertu du
règlement, on est en prise en considération. Toutes les fois que
chacun de notre bord parle, il pourrait prendre cinq minutes; s'il y avait
quelqu'un de son côté qui parlait, il pourrait prendre encore cinq
minutes. Il pourrait nous le dire, dans ces cinq minutes, parce que, s'il
attend à la fin, il n'aura peut-être pas la chance de
répondre à ma question, à mon interrogation. Il y a, dans
ce projet de loi, des gens qui vont être intégrés au niveau
régional et, s'ils sont intégrés au niveau
régional, à la Société de développement
industriel, M. le Président, vous allez comprendre que ça va
prendre des locaux de plus, ça va prendre des téléphones
de plus, ça va prendre des aménagements de plus. Donc, il va y
avoir nécessairement une addition des coûts par rapport à
la façon dont fonctionne l'agence actuellement. Donc, il ne peut pas
nier qu'il va y avoir des coûts. Il pourrait me dire: Oui mais, M. le
député, vos coûts que vous me donnez actuellement, c'est
les coûts qui vont être inhérents à la mise en place
de la régionalisation de l'agence dans la Société de
développement industriel et, à ce moment-là, M. le
député, vous comprendrez très bien qu'il y aura des effets
récurrents dans le futur, mais il va y avoir des coûts de base
dès le départ. Sauf que, quand il va me dire ça, M. le
Président, il ne pourra pas nier qu'en éparpillant d'une certaine
façon l'agence il va la diluer et, s'il la dilue, la crainte que nous
avons est du même genre que celle qu'on avait pour le soutien aux
initiatives-jeunesse, pour les groupes des Jeunes Promoteurs, qui, à un
moment donné, du niveau de l'ensemble gouvernemental ont
été envoyés au niveau, dans bien des cas, des
commissariats industriels. On a dit: Écoutez, on les agglomère
aux commissariats industriels, ils vont s'occuper des jeunes encore. Ils vont
s'occuper des Jeunes Promoteurs. Allez donc voir dans nos régions, M. le
Président, si c'est vrai ça. (2 h 10)
Moi, je dois vous dire que chez nous les jeunes ont de la
difficulté à se retrouver dans ça. Ce n'est pas long, M.
le Président, 10 minutes, mais il y avait tellement de choses. Mes
autres collègues vont avoir la chance de les faire
valoir, mais moi je voulais simplement saisir le ministre de ce
problème que je trouve profond, de ce problème qui va surgir et
qui, dans le fond, M. le Président, va avoir pour effet de diluer et non
pas de permettre une meilleure utilisation, même régionale
soit-elle, de l'Agence québécoise de valorisation industrielle de
la recherche. Ça, M. le Président, pour ces raisons, je ne peux
pas accepter l'argumentation du ministre. J'espère qu'il va profiter des
cinq minutes auxquelles il a droit pour voir à répliquer à
ce que je dis et à faire la même chose avec mes
collègues.
Parce que s'il attend à la fin de toutes nos interventions, M. le
Président, il va manquer de ces cinq minutes. Et, comme il n'a pas le
droit de prendre plus que cinq minutes, il ne pourra pas répondre
à nos questions... Et, s'il ne répond pas à nos questions,
on va avoir l'occasion de revenir en troisième lecture, comme on disait
autrefois, c'est-à-dire à l'adoption du projet de loi
lui-même et on fera valoir encore les points de vue jusqu'à ce que
le ministre nous dise qu'il a compris et qu'il est d'accord avec nous qu'il
faut faire des aménagements à son projet de loi tel quel. Merci,
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Laviolette. Sur le même sujet, je reconnais
maintenant M. le député d'Ungava, en vous rappelant, M. le
député d'Ungava, que vous disposez d'un temps maximum de 10
minutes.
M. Christian Claveau
M. Claveau: Merci, M. le Président. C'est bien peu de
temps, vous en conviendrez, pour essayer de convaincre le ministre qu'il fait
fausse route dans son projet de loi. Et à l'instar de ce qu'ont dit mes
collègues avant moi, je me dois d'essayer de faire comprendre au
ministre que ce n'est peut-être pas en intégrant toutes les
activités de recherche et développement, de développement
des coopératives, de développement ou d'aide aux patenteux, comme
on les appelle communément dans nos milieux, et, pour être plus
précis, en termes plus techniques, d'aide à la valorisation
industrielle de la recherche...
Ce n'est pas en intégrant tout ça que ça va aller
mieux, que les choses vont découler d'elles-mêmes. Vous vous
souviendrez, M. le Président, pour reprendre un peu de notre histoire -
parce que je pense qu'il faut tirer les leçons qui s'imposent de
l'histoire - qu'avec la Révolution tranquille on avait
décidé de construire d'immenses écoles à travers le
Québec, de regrouper tout l'enseignement dans des lieux immenses,
où l'étudiant devenait un numéro parmi tant d'autres. On
s'est retrouvés avec des polyvalentes démesurées, avec des
cégeps démesurés dans lesquels on ne se retrouvait plus,
avec tous les effets que c'a pu donner, M. le Président.
Je ne sais pas si on n'aurait pas dû rester un peu plus proche de
la petite école personnalisée, humanisée, devrais-je dire,
où la relation maître-étudiant se faisait d'une
façon directe, sans avoir à passer par tout un dédale
administratif, où on pouvait avoir, comme étudiant, le contact
nécessaire et le support souhaité de la part de nos professeurs.
Je crois que l'on a déshumanisé l'éducation, et c'a
créé tous les problèmes que l'on a aujourd'hui. Et, dans
bien des milieux, on souhaiterait pouvoir revenir à la petite
école où tout se fait de façon humaine, de façon
normale, devrais-je dire.
Par analogie, M. le Président, on peut rapprocher cet
exemple-là de ce qui se passe actuellement. Le ministre est en train de
redéfinir le rôle de la SDI. D'ailleurs, dans un document qui
accompagnait le communiqué de presse qu'il a émis tout
dernièrement - j'essaie de retrouver la date - le 25 octobre 1990, on
pouvait lire: "Nouveau rôle de la SDI, Société de
développement industriel, en matière d'aide au
développement technologique". On est en train de redéfinir la
SDI, mais sans le dire. On dit: Ah! la SDI, la Société de
développement industriel, restera la Société de
développement industriel. Sauf qu'on diminue les programmes ici, on
change les formes d'aide là, on introduit de nouveaux programmes, on y
annexe, on y intègre d'autres sociétés qui faisaient leur
boulot très bien, dans le milieu qui leur convenait, dans le
créneau qu'on leur avait désigné comme champ
d'intervention, au moment de leur fondation, de leur création.
D'une part, on dit aux sociétés de développement
des coopératives: Vous n'avez plus votre raison d'être, vous
êtes une patente un peu archaïque dans le décor, ça ne
fait plus très sérieux de parler de développement des
coopératives; il faut parler de développement industriel,
ça, ça a l'air du monde. Donc, on va intégrer le
développement des coopératives au développement
industriel. On dit: Parler d'aide à la recherche appliquée pour
en faire, finalement, une mécanique ou la base de développement
de nouveaux produits, ça commence à faire vieillot un peu, aussi.
Hein? Valorisation industrielle de la recherche, ce n'est peut-être plus
un thème qui colle aux temps modernes, ça fait archaïque.
Donc, parlons de développement industriel, tout simplement. Et on va
tout intégrer ça à la Société de
développement industriel. Mais, à force d'en mettre dans la
Société de développement industriel, une vache va y perdre
son veau, ce ne sera pas long. Vous comprenez qu'on s'en va vers une curieuse
de situation. Qui va pouvoir se retrouver là-dedans?
On nous dit, par exemple, à Hydro-Québec, qu'on ne peut
pas se spécialiser dans des champs d'intervention énormes ou
très diversifiés. On est, à Hydro-Québec, des
spécialistes des gros barrages, dans des grosses centrales, de grosses
productions, des mégaprojets. Les petits projets,
on va laisser ça aux autres, ça ne nous intéresse
pas. La production solaire? Non, non, ça, c'est de
l'électricité, mais c'est du solaire, on va laisser ça aux
autres. Hein? La biénergie: Bien non, on va laisser ça aux
autres. Nous, comme société d'État, nous dit-on à
Hydro-Québec, nous sommes les spécialistes des gros projets et
nous ne pouvons pas, pour des questions d'efficacité, nous diversifier,
parce que ça ne se fait pas. Si c'est vrai pour Hydro-Québec,
comment se fait-il qu'à l'inverse on vient essayer de nous faire
accroire que, si on intègre tout ce qui s'appelle aide au
développement des coopératives, de recherche, enfin, au niveau
industriel, grosses entreprises, petites entreprises, multinationales -
appelez-les comme vous voudrez - si on intègre tout ça à
l'intérieur d'une seule société qui s'appelle la
Société de développement industriel du Québec, la
SDI, ça va marcher? Ça va marcher, tout le monde va s'y
comprendre. Allez donc, M. le Président!
Il me semble que, bien au contraire, si on veut valoriser la recherche
appliquée, la recherche industrielle ou la recherche en vue
d'applications immédiates dans le domaine industriel, il faut lui donner
un corps, il faut lui donner une vie à elle-même, il faut lui
donner une vitrine, dans la société, qui fasse en sorte qu'on la
reconnaisse, cette recherche-là, qu'on lui donne tous les moyens
nécessaires, qu'on la valorise en soi. Et, pour ce faire, il faut qu'il
y ait un support, un véhicule, dans notre société, qui
fasse en sorte que, lorsqu'un patenteux, quelqu'un qui a une idée
nouvelle, un inventeur, comme on dit, a quelque chose de nouveau à
proposer à la société, eh bien, il sache où aller
et que sa démarche soit valorisée; pas qu'il se retrouve dans un
dédale de corridors, à travers une société ou
à l'intérieur d'une société qui est là pour
servir tout le monde, mais qui, en bout de piste, ne se sert
qu'elle-même. (2 h 20)
On est en train de recréer une espèce de monstre, à
l'instar de beaucoup d'entreprises ou de structures du secteur public, qui va
avoir une propension énorme à se reproduire elle-même et,
finalement, à justifier ses budgets pour ses propres moyens. Parce que
c'est ça qui arrive, malheureusement, lorsque l'on veut tout
intégrer, lorsque l'on veut passer par une espèce de guichet
unique pour donner des services quand on est un gouvernement. C'est qu'on
crée une machine qui finit par s'autosatisfaire, par se flatter le
nombril, à l'interne, en oubliant les objectifs qui sont à la
base de sa création. Pour rester efficace, il faut que ces
sociétés d'État restent proches de leur mandat initial,
que ça soit facile d'identifier leur champ d'intervention, que ça
soit facile, pour un intervenant dans le milieu, un intéressé, un
client potentiel, de s'identifier à cette structure-là. C'est
nécessaire, c'est normal, c'est humain, devrais-je dire. Parce que, dans
le fond, le rôle d'un gouvernement est d'abord et avant tout de donner
des services à sa population et de les donner sur la base la plus
humaine possible, la plus proche possible des besoins des individus et non pas
de créer d'immenses structures qui, dans le fond, deviennent des
monstres dans lesquels personne ne se reconnaît. Et c'est ça le
danger de l'approche du ministre actuellement. Je veux bien que le ministre
veuille s'enlever des problèmes, je veux bien que le ministre veuille se
simplifier la vie en disant: Dorénavant, je n'aurai à traiter
qu'avec un seul conseil d'administration qui va s'occuper de tous ces petits
problèmes là, qui va aller dans la recherche et
développement, qui va aller dans le développement des
coopératives, qui va aller dans le support à la petite
entreprise, qui va aller dans la PME...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À moins d'un
consentement, vous devez conclure votre intervention, M. le
député d'Ungava, vos dix minutes sont terminées. Quelques
secondes, M. le député d'Ungava.
M. Claveau: En conclusion, il est évident que, si on
regarde la chose avec un oeil un peu plus attentif et sans la moindre
partisanerie, le ministre aurait intérêt à réviser
son point de vue s'il ne veut pas, finalement, continuer la démarche
qu'il a entreprise et qui va mener à la destruction de tout ce support
nécessaire au développement de nos entreprises
québécoises. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député d'Ungava. Sur le même sujet, M. le
député de Labelle.
Mme Juneau: M. le Président, je m'excuse auprès du
député de Labelle, mais on n'a pas encore le quorum.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y, M. le
député de Labelle, on a le quorum maintenant.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: Merci, M. le Président, à mon
tour, je voudrais aussi intervenir sur ce projet de loi qui veut faire
disparaître cette agence québécoise de valorisation
industrielle. La recherche et développement, c'est évidemment un
secteur absolument important pour un pays moderne, pour un pays industriel, et
je pense que l'objectif du gouvernement d'essayer d'atteindre 1,8 % du PIB en
termes de recherche et développement, alors que nous en sommes seulement
à 1,3 % maintenant, justifie qu'on s'interroge sur ce que nous faisons
dans ces secteurs de recherche et développement. Effectivement, si le
Québec veut garder sa compétitivité dans le domaine
international, sous toutes sortes d'espèces d'industries et surtout dans
les secteurs de
pointe, il est évident qu'il doit investir en recherche et
développement.
Bien sûr, la question qui nous confronte, c'est celle d'une petite
agence, mais je dois simplement, avant d'aborder cette question, dire puis
admettre que, dans un pays comme le Québec, comme dans d'autres pays, il
y a différentes sortes de recherches et qu'il y en a, des recherches et
du développement, qui sont faits par la grande entreprise. Cela doit
rester, c'est bien sûr, et il y aura toujours de grandes équipes
dans de grandes entreprises qui vont faire des recherches dont les coûts
seront de l'ordre de dizaines de millions de dollars par année, quand ce
n'est pas plus. Et il faut comprendre que cela doit exister. Il y a même
des entreprises qui ne font que cela, de la recherche et développement,
et un pays moderne, industriel doit les maintenir et doit les encourager;
ça doit se faire.
Par ailleurs, il y a aussi de la recherche qui se fait dans les
universités. Généralement, c'est de la recherche
fondamentale que l'on retrouve dans les universités, c'est ça la
fonction première des universités, de la recherche là-bas,
parce qu'elles visent à essayer de voir le fond des questions où
l'on fait de la recherche puis qu'elles visent aussi à former des
étudiants de deuxième et troisième cycles qui vont
poursuivre et donner l'héritage de la recherche dans les pays ou dans
les universités... Donc, sur ce plan-là, il y a moins de
relations avec les entreprises, moins de relations aussi avec le concret, les
applications pratiques de la recherche, mais ça doit exister aussi, et
il y a aussi des relations avec les entreprises et il doit en exister. Mais
c'est une recherche un peu particulière, fondamentale. Il y a dans les
universités, comme ailleurs, partout dans la société, des
chercheurs beaucoup plus isolés. On les a appelés tout à
l'heure des inventeurs, des patenteux; d'autres les appellent parfois, pour en
rire un peu, des trouveurs lorsqu'ils réussissent et tous ces gens
existent, mais il faut voir aussi que, par rapport aux universités et
comme dans de petits milieux, de petites entreprises, il existe toute
espèce de structures qui touchent à la recherche. Il est normal
qu'il en soit ainsi. Il est impensable de vouloir encadrer, justement, ce qui
n'est pas encadrable parce qu'on ne l'a pas trouvé et on ne sait pas ce
que c'est et on fait de la recherche, justement, pour le déterminer. Et
donc, on ne peut pas tout mettre dans des structures et il faut avoir une
très grande flexibilité par rapport à l'administration et
aux structures que l'on donne à la recherche.
Alors, c'est ainsi que dans les universités on va trouver des
gros centres de recherche liés aux hôpitaux, par exemple, dans le
domaine médical, on va trouver des centres de recherche beaucoup plus
restreints, des centres interuniversitaires de recherche, on va trouver des
modules, on va trouver des équipes et on va trouver aussi des
professeurs qui font des recherches de façon absolument isolée,
sans même savoir au juste ce que font les autres et sans que les autres
ne sachent exactement ce sur quoi ils travaillent. et souvent même, ces
chercheurs sont en contact avec d'autres chercheurs dans les mêmes
domaines dans d'autres coins du monde entier; ils communiquent par lettre, ils
se rencontrent dans des colloques, des congrès de recherche.
voilà la diversité de la recherche. on pourrait en faire une
description: c'est un monde fascinant, extraordinaire. ce que nous voulions
combler lorsque nous avons créé l'aqvir, l'agence
québécoise, c'était le cas de jeunes chercheurs, beaucoup
pour leur part, qui avaient peu de moyens, qui avaient des idées
brillantes et qui ne savaient pas comment les mettre en pratique, qui avaient
fait un bout de chemin, qui avaient trouvé des choses qu'ils avaient
même fait patenter, puis qui ne savaient plus où aller par la
suite. à tel point que seulement 7 % des patentes enregistrées
par des chercheurs québécois trouvait le chemin de la
commercialisation. c'est vous dire qu'il y avait beaucoup, beaucoup de
trouvailles qui se perdaient dans la grande entreprise. je suis convaincu que
ce taux est beaucoup plus élevé.
Les recherches trouvent des applications pratiques rapidement, et les
Américains ont progressé sur le plan économique
très rapidement justement parce qu'ils se sont appliqués à
trouver des applications - excusez le pléonasme - à leur
trouvailles, à leurs patentes. Donc, ils ont progressé. Notre
problème, c'est que nous avions de l'imagination, nous avions des
trouveurs, mais les applications pratiques n'arrivaient pas au bout du compte.
Plus que ça, M. le Président, j'ai déjà
rencontré des gens, des jeunes, qui avaient fait des trouvailles, qui
avaient trouvé des marchés d'exportation et qui n'arrivaient pas
à combler les demandes d'exportation. Alors, nous avions inventé
l'AQVIR qui était une structure souple, d'une douzaine de personnes,
à qui on référait ces gens. (2 h 30)
Le ministre, voyant la réussite de cette Agence, parce que,
faut-il le dire, elle est victime de son succès, cette Agence, en
quelque sorte, le ministre trouve que l'idée est bonne, il en a fait un
constat, car elle a créé ou contribué à
créer 900 emplois, 93 entreprises ont été aidées,
et il veut maintenant que toute la SDI se transforme en une super AQVIR. Si je
comprends bien, régionaliser, très bien, ça peut
être très méritoire comme idée. Je pense que le
problème était plus à la SDI, et je ne veux pas critiquer
ici la SDI, mais le problème, c'est qu'on voulait réorienter, si
je comprends bien, beaucoup plus la SDI vers ses besoins que l'on
détectait, même sur une base régionale, mais en même
temps, on a aboli l'AQVIR.
Je ne suis pas sûr que sa décision soit la bonne, je pense
même qu'elle n'est pas bonne,
parce qu'il avait une équipe très
spécialisée, très souple, efficace et à qui on
pouvait diriger des jeunes, des gens comme ceux que nous avons décrits
tout à l'heure qui avaient peu d'expérience, peu de moyens, mais
qui avaient quelque chose dans le crâne, qui avaient trouvé et
qui, maintenant, voulaient commercialiser. Je pense que la recherche et le
développement, ça prend toute une foule de conditions pour bien
progresser dans un pays, dont l'une, c'est qu'on soit très attentifs aux
petites choses, aux petites trouvailles, celles qui, parfois, n'ont l'air de
rien, mais qui représentent des succès phénoménaux.
On n'a qu'à penser à l'invention du téléphone,
celui qui y a pensé y a pensé avec rien, mais aujourd'hui, c'est
une invention dont on ne pourrait plus se passer, toute la
société est basée sur les communications et cela vient de
l'invention du téléphone en très très grande
partie. Donc, il faut préserver différentes façons de
faire de la recherche. On a dit: "Small is beautiful", mais je dirai aussi que
la recherche se fait aussi dans de très grandes entreprises. Il les faut
toutes, ces façons de faire de la recherche, c'est ça qu'il faut
comprendre et les petites agences comme celles-là ont contribué
à créer du développement économique autant que la
grande entreprise. Les créations d'emplois se font beaucoup par des
petites entreprises et la recherche flexible, c'est justement celle-là
qui crée beaucoup d'emplois, qui rend les gouvernements, qui rend les
entreprises compétitives sur le plan international. Je pense que le
ministre devrait revenir sur son projet de loi et laisser l'AQVIR faire son
chemin et transformer la SDI plutôt que de faire ce qu'il fait
là.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Labelle. Oui, M. le leader de l'Opposition
officielle.
Motion d'ajournement du débat
M. Chevrette: Oui, M. le Président, en vertu de l'article
100, je propose l'ajournement du débat.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion
d'ajournement est adoptée?
M. Pagé: Non, M. le Président. M. Chevrette:
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le leader de
l'Opposition officielle.
M. Chevrette: Si j'ai bien compris, j'ai 10 minutes, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Sur le débat sur
l'ajournement, effectivement, M. le leader de l'Opposition officielle.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci. M. le Président, je voudrais proposer
l'ajournement du débat compte tenu de l'heure, il est 2 h 33. M. le
Président, je pense que ce type de projet de loi va d'ailleurs à
sens inverse, par rapport à ce qu'on a discuté en cette Chambre,
va dans le sens inverse, M. le Président, de ce qu'on nous a
imposé par bâillon, cette semaine, avant même que ne
débute le premier article de la Loi sur la Caisse de dépôt,
M. le Président, créant une bicéphalie, créant deux
voix. On nous arrive ce soir à sens inverse. On voudrait tout regrouper
sous une seule tête. Je pensais que c'était parce qu'on avait
encore une couple de "chums" à placer, M. le Président. Ça
a l'air qu'il y aura un vice-président éventuellement, M. le
Président. Je pense que c'est sérieux comme projet de loi. En
recherche et développement en particulier, M. le Président, je
pense que le ministre qui s'est plaint depuis au moins trois ans du fait qu'on
ne dépense pas suffisamment même, à même les fonds,
est en train de noyer le seul organe, le seul moyen qui est à sa
disposition, qui a travaillé au niveau de la recherche.
Je regardais, M. le Président, les statistiques et c'est assez
intéressant de voir jusqu'à quel point on a rendu service, au
moment où on a "signalé", M. le Président... Ça me
tente quasiment de demander au ministre de "signaler" 1-800-461-AIDE pour lui
rendre service. Il pourrait s'informer auprès de ceux qui ont
véritablement bénéficié des services de l'AQVIR, de
voir ce qu'il en retourne.
Cet après-midi, il nous racontait dans un scénario qu'il
avait monté, en ne répondant nullement aux questions cependant
qui lui étaient posées, en faisant un gros show, pour se faire
applaudir, que les lignes ne dérougissaient pas; la "hot line", si vous
voulez, des faillites au Québec.
Une voix: "Party line".
M. Chevrette: La "party line" des faillites au Québec. Et
là, il veut mettre dans une boîte, dans une structure qui est
déjà débordée. Aïe! ça sonne les fins
de semaine, ça sonne la nuit et il voudrait que la SDI s'occupe d'une
vocation spécifique à une structure dont le mandat était
clair. Je pense qu'à cette heure-ci du matin on se doit de demander
d'être sérieux et d'ajourner nos débats; la nuit porte
conseil. Il pourra aller surveiller sa "party line" justement, M. le
Président, pour les quelques heures qui vont rester avant la
période des questions ou avant la reprise de la Chambre. Il pourrait
peut-être régler quelques faillites qui sont sur le point
d'être déclarées plutôt que de discuter à
cette heure d'un projet de loi aussi sérieux qui se départit, qui
fait un délestage encore d'outils de développement au
Québec. Je vous dis que ces
gens-là, quand il s'agit de se départir d'une structure
qui fonctionne pas pire, ils sont champions; ils sont champions, M. le
Président!
On se rappellera Quebecair où on avait discuté, encore une
fois, de nuit à peu près de même. On avait vendu ça
pour 5 000 000 $. Les gens ont vendu les Boeing pour 15 000 000 $, 10 000 000 $
de profit, et on vient d'injecter de l'argent encore une fois. Ces
gens-là ont peu de scrupule, je pense qu'à cette heure-là
le projet de loi que nous discutons dans une conjoncture économique
extrêmement difficile... On a au-dessus de 3800 faillites au
Québec alors qu'ils en ont à peu près 2300 ou 2400 en
Ontario. On veut se départir d'un outil de développement, un
outil de soutien au développement économique, on veut incorporer
ça dans une structure qui est déjà déphasée
et dépassée au moment où on se parle, parce qu'elle ne
répond même pas, parce qu'il y a absence de programmes, qui ne
peut même pas répondre aux besoins de ce que l'industrie exige et
demande.
Donc, M. le Président, à toutes fins pratiques, c'est
rendre service au gouvernement que de lui demander d'être sérieux
à cette heure et tout simplement d'ajourner le débat sur cette
question, d'autant plus que, dans les jours à venir, nous pourrons
discuter sans doute d'un autre outil qu'on veut changer d'autorité,
qu'on veut incorporer encore. Vous savez, ça semble être la SDI
qui centralisera tout, là. Ça, je pense qu'on doit prendre le
temps d'en discuter. Ça prendra le temps qu'on voudra, on pourra nous
faire chanter dans les passages en disant qu'il faudra revenir le 26; on
reviendra le 26 s'il le faut, ça n'a pas d'importance. Les
maîtres-chanteurs, moi, ça ne m'impressionne pas 30 secondes,
ça ne m'impressionne même pas 10 secondes. Je vous dis tout de
suite qu'il faut prendre le temps, il faut prendre le temps
indépendamment des martres-chanteurs et de l'arrogance des attitudes. On
va prendre le temps de discuter ça très froidement et, de
grâce, on pourrait peut-être discuter le jour. Tout à coup
que les industriels, les gens de l'industrie au Québec pourraient
comprendre les motifs que le ministre invoque pour faire disparaître cet
outil qui était à leur service. Il y a des dossiers importants
qui ont été réglés. Ça a aidé les
Québécois, au moment où on se retrouve dans une dynamique
où la technologie et le développement priment partout, où
tout le monde en parle. On se promène à la commission
Bélanger-Campeau; tout le monde dit: II faut être à la
pointe de l'actualité au niveau du développement, au niveau de la
technologie. On a une structure en place, qui a une expertise pour
répondre à ces besoins. On fait ça de nuit, en cachette.
On veut mettre ça sous la tutelle de la SDI, sous le simple... pour des
motifs qui, à toutes fins pratiques, ne résistent même pas
à l'analyse, M. le Président. (2 h 40)
II me semble que de tels sujets, ça devrait être
débattu de jour. Il pourrait être intéressant de voir, M.
le Président, par exemple, ce que l'industrie ou le monde patronal en
pense. Ce serait intéressant de faire quelques consultations pour leur
dire: Voulez-vous que le ministre se départisse de cet outil qui est
à votre disposition? Ce serait intéressant de faire venir
quelques industries qui ont bénéficié de l'AQVIR et de
leur dire: Qu'est-ce que vous pensez des services qu'on vous a donnés,
des services qu'on vous a rendus? Il serait peut-être intéressant
de se faire dire par ces gens-là que c'a été un outil qui
les a sauvés et qui leur a même donné un nouveau souffle,
un nouvel élan, M. le Président. À 2 h 40, 2 h 39, M. le
Président, il me semble que ce serait le temps qu'on
réfléchisse un petit peu et qu'on prenne le temps d'aller se
reposer pour revenir discuter froidement du pourquoi, des vrais motifs, les
vrais vrais motifs, pas ceux qu'on lance dans un discours en Chambre pour se
faire applaudir, les vrais motifs qui poussent le ministère de
l'Industrie et du Commerce à se délester d'outils de
développement qui ont été fort appréciés au
Québec.
Je ne sais pas pourquoi on recherche les monstres, on cherche à
créer des monstres au niveau de l'outillage, M. le Président. Sur
le contrôle? Déjà, M. le Président, contrairement
à ce que le ministre dit en Chambre, et je pourrais lui donner des noms,
moi, contrairement à ce que le ministre dit en Chambre, la SDI est
débordée, M. le Président. Les gens qui ont appelé
à 1-800-461-AIDE, vous irez demander aux gens de l'Abitibi qui ont
appelé en fin de semaine passée. On lui donnera des noms. On
pourrait demander à certains types de la région de
Lanaudière qui ont appelé ce que ça leur a donné et
ce qu'ils reçoivent concrètement. Un paquet de papiers, au moment
où le gars a besoin de capitalisation s'il ne veut pas se ramasser en
faillite. M. le Président, le ministre, au lieu de perdre son temps
à vouloir détruire des instruments et des outils de
développement, serait peut-être mieux de consacrer tout son temps
et ses énergies à rechercher des programmes adaptés
à la conjoncture actuelle et qui répondent aux besoins de
l'industrie. Ce serait beaucoup plus profitable que d'essayer, en pleine crise
économique, de se départir d'outils qui ont fait leurs preuves,
d'outils qui correspondent aux moyens modernes, M. le Président,
d'outils qui correspondent à des besoins spécifiques, d'outils,
à mon point de vue, que, tout simplement, on veut noyer dans une
superstructure. Ils sont forts sur les superstructures, M. le Président,
ces gens-là. Ils aiment ça, des superstructures gonflées.
Je pense que la réalité nous commande de discuter cela en plein
jour. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le leader de
l'Opposition officielle. Sur cette
même motion d'ajournement, M. le leader du gouvernement.
M. Michel Pagé
M. Pagé: M. le Président, je prends bonne note de
la motion présentée par le leader de l'Opposition. Elle s'inscrit
d'ailleurs dans le cadre des procédures régulières en
semblables circonstances où le Parlement, en raison de problèmes
de compréhension entre le gouvernement et l'Opposition, ou
d'appréciations différentes à l'égard du traitement
à donner à certains projets de loi, c'est la coutume que le
leader ou un membre de l'Opposition présente une telle motion
d'ajournement de nos travaux. C'est d'ailleurs prévu aux
procédures et c'est régulièrement utilisé.
M. le Président, l'objectif que j'ai et que j'ai constamment eu,
et je crois l'avoir démontré jusqu'à maintenant, n'a
jamais été de faire en sorte qu'on siège la nuit comme
c'est le cas actuellement. Or, les circonstances et les échanges avec
l'Opposition officielle auront conduit à une situation où on se
retrouve effectivement, à 2 h 45, à traiter d'une partie du menu
législatif qui devait traverser certaines étapes dans cette
journée du 19 décembre. Maintenant, c'est devenu le 20,
effectivement, et c'est tout à fait pertinent, et c'est ce pourquoi je
me réfère au 19, c'est qu'on devait régler tout ça
le 19, et les circonstances auront fait en sorte que nous sommes encore
ici.
Ma responsabilité comme leader parlementaire du gouvernement,
c'est à partir d'un menu législatif qui est établi, dont
la loi à laquelle nous nous référons actuellement, qui est
présentée par le ministre de l'Industrie et du Commerce. Dans le
cas des échanges, il s'agit d'établir un menu que nous souhaitons
voir adopter et, évidemment, compte tenu des dispositions applicables en
période de session intensive, c'est tout à fait approprié.
Ce n'est pas nouveau. Je conviens que ce n'est pas fréquent, parce que
ça se produit, généralement, quoi, une ou deux
séances par fin de session.
Et j'ai tout fait, jusqu'à maintenant, depuis septembre 1989,
depuis octobre 1989, que j'ai à agir comme leader, pour éviter
ces séances nocturnes, qui, j'en conviens, ne sont pas très
reposantes qui, j'en conviens, ne constituent pas le moment le plus utile, le
plus intéressant dans notre quotidien pour échanger et
étudier les projets de loi. Alors, M. le Président, ce n'est
certainement pas de gaieté de coeur que je convie mes collègues
à une séance aussi prolongée, somme toute, puisqu'elle
s'est amorcée hier matin, à 10 heures, et elle peut se conduire
jusqu'à, par ailleurs ou presque, ce matin.
M. le Président, nous ne pouvons accepter la motion, quoique je
comprenne très bien les motifs invoqués par les
députés de l'Opposition. Je souhaite purement et simplement qu'on
puisse poursuivre nos travaux. On a un calendrier de travail. Ça ne
s'inscrit pas, mais pas du tout, sous l'égide du chantage, de la menace
ou autre. On va continuer, et on va adopter ce projet de loi. C'est ce
pourquoi, M. le Président, on refuse cette motion et on la
rejettera.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Toujours sur la
même motion d'ajournement, M. le député de Laviolette, vous
disposez également d'une période de 10 minutes sur cette
motion.
M. Jean-Pierre Jolivet
M. Jolivet: Merci, M. le Président. C'est peut-être
l'occasion que je recherche depuis fort longtemps de voir si le ministre
responsable de cette loi est d'accord avec moi. C'est peut-être le moyen
de le regarder, aujourd'hui. J'en ai fait mention dans bien des discours, et je
le répète. Je sais que le ministre est sensible à ce que
je vais dire. Nous lui donnons la chance de le prouver. La chance est la
suivante, M. le Président, c'est que nous arrivons souvent à des
fins de session comme celle-là. Le ministre responsable, comme leader,
peut nous dire qu'il a un menu législatif. Ça ne veut pas dire
que nous devons être d'accord avec son menu législatif. Ça
ne veut pas dire que nous sommes d'accord avec les moyens qu'il prend pour le
faire passer.
Quand nous nous retrouvons en fin de session de façon très
exceptionnelle, avec deux motions de clôture en trois jours, ce qui ne
s'est jamais vu, M. le Président, quand on voit que le leader du
gouvernement dit, dans sa décision: O.K., je vais passer cette loi et,
que l'Opposition le veuille ou ne le veuille pas, on prendra tous les moyens
pour le faire. Nous, en contrepartie, on fait valoir des points de vue et on
essaie d'utiliser ce que le règlement nous permet de faire pour,
justement, prouver que ce n'est pas ce que nous souhaitons et que des gens ne
souhaitent pas-Alors, le moment qui est privilégié à ce
moment-ci, de la part de mon collègue, le leader de l'Opposition, c'est
de dire au gouvernement: Arrêtons donc le débat sur
celui-là. On peut en reprendre d'autres, il y a peut-être d'autres
débats qui pourraient être faits, mais celui-là,
laissons-le tomber. On y reviendra plus tard. Le ministre, est-ce qu'il a une
urgence de le faire adopter actuellement? Est-ce que l'urgence, comme j'en
faisais mention dans mon discours tout à l'heure, est à ce point
que ça va amener des gains dans le contexte économique actuel,
des coûts moindres - plusieurs de mes collègues, jusqu'à
maintenant, et moi-même avons fait la preuve que, dans le contexte
actuel, le transfert de l'Agence québécoise de valorisation
industrielle de la recherche à la Société de
développement industriel du Québec, au lieu de sauver de l'argent
va en coûter plus.
M. le Président, c'est l'occasion rêvée de
demander au ministre responsable du ministère de l'Industrie, du
Commerce du Québec, qui est en même temps responsable de la
Société de développement industriel, de faire justement
cette preuve que nous pourrions peut-être prendre plus de temps,
arrêter le débat actuellement et revenir à la prochaine
session, c'est-à-dire quand nous reviendrons au mois de mars, et le
faire adopter en temps et lieu, quitte à ce qu'entre-temps on ait
l'occasion de rencontrer des gens qui nous fassent valoir leur point de vue,
pour ou contre, dans ce qu'on pourrait appeler des audiences
particulières, lesquelles audiences particulières pourraient
être déterminées entre les leaders et le ministre, et notre
collègue qui est la porte-parole du dossier, la députée de
Chicoutimi, pour regarder l'ensemble et aller plus loin dans le débat
qui nous amène ce soir, cette nuit, à être encore ici. (2 h
50)
Le ministre le sait très bien, quand on a fait l'appel, ce soir -
enfin, je devrais dire hier soir - son projet de loi devait passer à des
heures raisonnables. On est rendu à des heures, actuellement,
déraisonnables. Les raisons? Ce n'est pas nous qui sommes responsables.
Quand nous sommes arrivés, à 20 heures, ici, ce qui était
prévu entre les deux leaders - le député de Berthier n'est
pas au courant, mais moi, je peux le lui dire - c'est que ce n'était pas
le ministre des Affaires municipales qui devait parler. Le débat devait
commencer sur le dossier de la commission du budget et de l'administration, le
dossier Lazure-Lemieux; c'est de ça qu'on devait parler, à 20
heures, ce soir. Mais ce n'est pas de ça qu'on parle encore, hein.
Pourquoi? Parce qu'il y a eu des changements. Et comme ce n'est pas nous qui
amenons le menu, le leader du gouvernement l'a dit, c'est lui qui
l'amène, il veut nous passer, à des heures indues, des choses qui
auraient dû être faites à des heures correctes.
Nous sommes bien d'accord, nous, dans bien des circonstances, mais il y
a des choses que nous avons le goût de dire et que nous allons dire. Et
nous allons prendre tous les moyens. D'ailleurs, vous m'avez donné, M.
le Président, tout à l'heure, quand il a été
question de parler sur un autre projet de loi, le droit de parler, puisque nous
en sommes à la prise en considération des rapports et qu'en
conséquence, dans cette prise en considération, tout le monde
peut parler. Et la ministre ou le ministre a un droit de réplique
à tous les intervenants. Le ministre n'a pas décidé, dans
ce cas-là, de le prendre, mais nous, nous croyons qu'il y a quelque
chose là, je ne voudrais pas dire d'indécent, mais presque.
Nous sommes devant un projet de loi qui mérite une meilleure
attention, qui mérite un temps qui soit meilleur pour l'étudier,
qui nous permettrait de le regarder avec des yeux différents, si nous
avions l'occasion de rencontrer des gens. Donc, nous proposons au ministre
cette voie. Le ministre pourrait l'accepter. Il pourrait dire: Écoutez,
malgré ce que mon leader a dit tout à l'heure, je me lève
et je dis: Écoutez, je vais aller voir mon leader, je demande une
suspension, aller jaser de l'autre côté et revenir et dire:
Écoutez, les députés de l'Opposition ont raison, nous
allons reporter à plus tard l'étude de ce projet de loi. C'est ce
que nous demandons, M. le Président. Nous le demandons de bonne foi,
dans la mesure où je suis sûr que le ministre comprend notre
appel.
Le but recherché, c'est d'avoir le meilleur projet de loi. Nous
croyons que la disparition de l'Agence québécoise de valorisation
industrielle de la recherche, ce n'est pas bon. Ce n'est pas le moyen
recherché pour sauver de l'argent, actuellement. C'est, pour nous,
l'augmentation d'une structure déjà encombrée. Cette
structure encombrée, nous aurons l'occasion, si, malheureusement, on
nous y oblige - ma collègue, la députée de Taillon, aura
à parler de cela dans quelque temps - si nous sommes obligés d'y
arriver, de parler d'une autre structure que le gouvernement en place et le
ministre dont on parle actuellement ont l'intention de faire disparaître
en l'intégrant encore à la Société de
développement industriel, soit la Société de
développement des coopératives. Nous croyons avoir raison. Nous
voulons le faire valoir. Nous disons au ministre: Prenez donc ce
temps-là, ce n'est pas urgent. Est-ce que le ministre peut me dire
quelle urgence il a actuellement de faire disparaître ce qu'on appelle
l'AQVIR dans notre langage de sigles? Quelles sont ses obligations urgentes de
faire disparaître la Société de développement des
coopératives, soit la SDC, selon les sigles?
M. le Président, il n'y a pas d'urgence. S'il n'y a pas
d'urgence, pourquoi nous pressons-nous? Pourquoi le gouvernement, par
l'intermédiaire de son leader, presse-t-il l'Opposition au point de la
faire veiller à des heures impossibles, dans la mesure où nous
aurions pu, à ce moment-ci, être dans nos lits, tout le monde,
pour être en forme, ce matin, à 10 heures, à l'ouverture
des séances des commissions, même à 9 h 30, dans certains
cas, pour la Commission qui traite de l'avenir constitutionnel du
Québec, et nos commissions à nous et à 10 heures, ici
à l'Assemblée nationale? Qu'est-ce qui nous empêcherait de
partir dans deux minutes nous coucher pour être en forme, M. le
Président?. Ça n'a pas de bon sens. Le ministre, j'en suis
conscient, il est d'accord avec moi. Cependant, son leader lui a dit, je ne
sais pas pour quelle raison: On va leur passer dans la gorge ce
dossier-là. Nous disons non. Nous lui demandons, tout simplement,
à M. le ministre, de le regarder d'une autre façon. Si le
ministre se levait pour nous dire: M. le député de Laviolette,
MM., Mmes de l'Opposition, c'est vrai, vous avez raison, ce n'est pas urgent,
je peux attendre,
nous réglerions le problème rapidement. Est-ce que le
leader du gouvernement a fait des choix entre tels projets qu'il veut
absolument passer et d'autres qu'il ne veut pas passer? Est-ce que le choix
qu'il a fait, c'est d'essayer de tous les passer, à tel point qu'en
courant plusieurs lièvres il va tous les perdre. Est-ce que c'est
ça qu'on est en train de faire, M. le Président? Il y a des
choses qui demandent des études plus approfondies.
Mon collègue, le député de Joliette et leader de
l'Opposition, nous propose cette motion tout simplement pour permettre au
ministre de l'industrie et du Commerce de comprendre le bon sens - et je suis
assuré qu'il le comprend - et d'informer, à ce moment-là,
son leader en disant: Écoute, laisse donc tomber. J'aurai l'occasion d'y
revenir, j'aurai probablement la possibilité de te demander, à
l'intersession, entre le mois de janvier et le mois de mars qui viennent, en
1991, de le convoquer, après avoir fait, entre la critique de
l'Opposition, la porte-parole de l'Opposition et les deux leaders, une entente
à cet effet. Et, peut-être que le ministre, tant qu'à y
être, pourrait ajouter, en disant: II en sera de même pour la
Société de développement des coopératives. Ce n'est
pas difficile ce que je demande, M. le Président. Ce n'est pas difficile
ce que mon collègue, le député de Joliette et leader de
l'Opposition, demande; c'est le bon sens. Comme je le disais, pour m'amuser:
à un moment donné, M. le Président, j'ai eu l'occasion de
présider une commission, dont vous vous souvenez, la commission de la
Baie James. J'étais entouré de notaires et d'avocats chaque bord
et, de temps en temps, quand j'en avais assez, je disais au
député qui s'appelait - le député de Gatineau
à l'époque - M. Gratton: On va prendre le bon sens des gars de
taverne pour comprendre un peu quelque chose. Peut-être que c'est de
ça que le ministre aurait besoin, de comprendre tout simplement le bon
sens. M. le Président, j'appuie mon collègue qui, si je n'ai pas
convaincu le ministre, pourra prendre le temps qui lui est imparti par le
règlement pour essayer de le convaincre une dernière fois. Merci,
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Laviolette. M. le leader de l'Opposition officielle,
pour votre réplique sur votre propre motion, vous avez un maximum de
cinq minutes.
M. Guy Chevrette (réplique)
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je suis content de
voir que le leader du gouvernement reconnaît que c'est une motion tout
à fait régulière, tout à fait correcte dans le
cadre de nos règlements, M. le Président. Cependant, il y a un
point que je voudrais soulever dans son argumentation. Vous savez, quand on se
ramasse, le 20 décembre à 3 heures du matin, M. le
Président, à discuter de législation, alors qu'au
début d'octobre on ajournait la Chambre à 15 heures, à 16
heures, à 17 heures, qu'on ne siégeait pas... Pourtant, il y
avait des lois, comme la loi 2, qui traînait au feuilleton je ne sais pas
depuis quand, qu'on a réglée hier, un paquet de projets de loi
qui sont au feuilleton qui auraient pu être discutés dans les
premiers jours d'octobre pour donner du temps pour les nouvelles lois ou les
lois déposées avant le 15 novembre dernier, M. le
Président. Non. Et ça, on va venir dire à l'Opposition:
Nous avons tout fait pour éviter ces longues nuits. Je m'excuse, M. le
Président, je serais porté à faire un geste qui serait
très significatif, ce serait de déposer mon doigt en bas de mon
oeil, parce que je me souviens trop comment ça a commencé, M. le
Président. Je me souviens trop du temps qu'on prenait en commission
parlementaire, je dois dire que ça a travaillé fort, mais,
dès qu'on est retombé en Chambre, M. le Président, je
m'excuse, mais on aurait pu pertinemment adopter plusieurs lois et on aurait eu
du temps suffisamment pour discuter, de jour, de ce projet de loi important, M.
le Président. Nous jugeons que, transposer un outil de
développement économique à l'intérieur d'une
superstructure alors qu'elle avait une mission très spécifique,
ce n'est pas une bonne chose, on pense que ce n'est pas une bonne chose et on
se doit de le dire, mais nous aurions aimé le faire en toute
transparence, en plein jour. Nous aurions aimé le faire, M. le
Président, dans un cadre de travail beaucoup plus normal, beaucoup plus
humain, beaucoup plus intelligent à part ça. Quant à faire
un débat, il me semble qu'on doit le faire dans un climat beaucoup plus
détendu, M. le Président, que celui dans lequel on est en train
de le faire, ce débat-là. Il aurait été
intéressant, avec le ministre, de discuter carrément du rendement
de cette structure, M. le Président.
Je regardais des graphiques, je regardais le nombre de dossiers qui ont
été touchés, je regardais le nombre d'entreprises qui ont
été soutenues et je regardais également le nombre
d'industries qui se sont prévalues des services, de cette structure de
services. C'est très impressionnant quand on pense que, de 1984-1985
à 1990, c'est plus de 1000 demandes qui ont été
traitées, M. le Président. Quand on regarde qu'il y a eu des
conventions de signées d'une façon extraordinaire en ce qui
regarde les opérations, en ce qui regarde le financement, par exemple,
autorisé, en ce qui regarde les conventions signées, en ce qui
regarde les déboursés, en ce qui regarde les financements
autorisés, tout ça démontre, M. le Président, que
ça répond à un besoin. On faisait appel à cette
structure qui répondait véritablement aux besoins de l'industrie.
À ce compte-là, je pensais, je croyais pouvoir offrir
l'opportunité aux parlementaires de pouvoir faire ça dans un
climat beaucoup plus
serein, après les fêtes, entre noël et le jour de
l'an, ça importe peu, mais de faire ça dans un climat
détendu. c'est pour ça que j'invite les parlementaires à
bien y penser à ce qu'on a fait depuis octobre. on a convoqué la
chambre en plein mois d'août pour voter une tvq, pour se faire
présenter une tvq. on aurait peut-être pu travailler dans un
climat beaucoup plus intéressant que celui-là. merci, m. le
président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Cette dernière
intervention met fin au débat sur la motion d'ajournement que je vais
maintenant mettre aux voix. Est-ce que la motion d'ajournement du débat
sur l'adoption du rapport de la commission de l'économie et du travail
sur le projet de loi 86, Loi abrogeant la Loi sur l'Agence
québécoise de valorisation industrielle de la recherche, est
adoptée?
Une voix: Vote enregistré. Des voix:
Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, qu'on appelle les
députés. (3 h 2 - 3 h 8)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez vous
asseoir, s'il vous plaît! Alors, je mets aux voix la motion...
Des voix: Ha, ha, ha!
Mise aux voix de la motion d'ajournement
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
Je mets aux voix la motion d'ajournement du débat
présentée par le leader de l'Opposition officielle. Que ceux et
celles qui sont pour cette motion veuillent bien se lever!
Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), Mme
Blackburn (Chicoutimi), M. Blais (Masson), Mme Marois (Taillon), M. Garon
(Lévis), M. Jolivet (Laviolette), Mme Juneau (Johnson), M.
Léonard (Labelle), M. Paré (Shefford), M. Claveau (Ungava), Mme
Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Trudel
(Rouyn-Noran-da-Témiscamingue).
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui
sont contre cette motion veuillent bien se lever!
Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Portneuf), M. Dutil
(Beauce-Sud), M. Vallerand (Crémazie), M. Tremblay (Outremont), Mme
Robic (Bourassa), M. Cusano (Viau), Mme Bleau (Groulx), M. Houde (Berthier), M.
Maltais (Saguenay), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beaudin
(Gaspé), M. Chagnon (Saint-Louis), Mme Dionne
(Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel (Sherbrooke), M. Paradis
(Ma-tapédia), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M.
Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc (Taschereau), M. Poulin (Chauveau),
M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Fradet (Vimont), M.
Lemieux (Vanier), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska),
M. Gautrin (Verdun), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), M.
LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), Mme Boucher
Bacon (Bour-get), M. Audet (Beauce-Nord), M. Camden (Lotbi-nière), M.
Bradet (Charlevoix), M. Forget (Prévost), Mme Loiselle (Saint-Henri), M.
Lafrenière (Gatineau), M. MacMillan (Papineau).
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Y a-t-il des
députés qui s'abstiennent?
Le Secrétaire: pour: 13 contre: 39 abstentions: 0
Reprise du débat sur la prise en
considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude
détaillée
Le Vice-Président (m. bissonnet): la motion est donc
rejetée. alors, nous poursuivons l'étude de la motion pour la
prise en considération du rapport de la commission de l'économie
et du travail sur le projet de loi 86. je suis prêt à
reconnaître le prochain intervenant, m. le député de
gouin.
M. Boisclair: Merci, M. le Président. Le projet de loi que
nous avons à étudier...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît,
à l'ordre! M. le député de Gouin.
M. André Boisclair M. Boisclair: Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vais suspendre les
travaux si ça continue. S'il vous plaît, à l'ordre! M. le
député de Gouin.
M. Boisclair: M. le Président, j'essaierai d'intervenir
avec le plus de sérieux possible sur le projet de loi 86 qui,
essentiellement, a comme objectif, finalement, d'abolir l'AQVIR, l'Agence
québécoise de valorisation industrielle de la recherche.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît,
M. le leader de l'Opposition officielle.
M. Chevrette: M. le Président, l'article 32 de nos
règlements s'il vous plaît.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vais lire l'article
32 ici, là. Les députés doivent observer le
règlement et contribuer au maintien
du décorum de l'Assemblée. Ils occupent la place qui leur
a été assignée par le président et demeurent assis
et gardent le silence...
Des voix: Ha, ha, ha!
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...à moins d'en
avoir obtenu la parole, ils doivent s'abstenir de tout ce qui peut nuire
à l'expression d'au-trui.
Je suis prêt à reconnaître le député de
Gouin. Je vous demande votre collaboration, s'il vous plaît.
M. Boisclair: Merci, M. le Président. Ce que j'aimerais
tout simplement soulever, c'est, d'une part, l'importance du mandat et du
rôle qui étaient joués par l'AQVIR au cours des
dernières années. S'il y a une réalisation du Parti
québécois dont nous pouvons être fiers, c'est bien celle de
l'AQVIR qui avait fait l'objet d'un vote unanime en 1983 à
l'Assemblée nationale, autant nos amis d'en face, qui soudainement
semblent souffrir d'une grippe. On a proposé d'ajourner le débat;
s'ils tiennent à ce point à quitter, qu'ils le disent, qu'ils le
fassent, c'est...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur la question de
règlement, M. le leader de l'Opposition officielle.
M. Chevrette: vous pouvez manifester de plusieurs façons,
m. le président, en cette chambre. je pense qu'on a droit au silence le
plus complet.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous avez raison, M. le
député.
M. Chevrette: S'il est étouffé qu'il aille prendre
de l'eau.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
Je demande raison... Non. Écoutez, M. ie député! S'il vous
plaît! Ça s'adresse aux deux côtés.
M. le député de Gouin, la parole est à vous.
M. Boisclair: Merci, M. le député. J'essayais,
avant d'être interrompu, de rappeler l'importance du mandat que l'AQVIR a
joué au cours des dernières années et de rappeler tout
simplement que l'AQVIR, au moment de l'adoption du projet de loi qui lui a
donné naissance, avait fait l'objet d'un vote unanime à
l'Assemblée nationale; à la fois les membres du Parti
québécois et ceux du Parti libéral avaient appuyé
ce projet de loi.
M. le Président, le mandat de cette petite agence - il ne s'agit
pas d'une agence qui comporte plusieurs employés ni un budget faramineux
- est essentiellement celui de promouvoir l'évolution technologique et
l'innovation technologique, la mise en valeur aussi des résultats de
recherche dans les applications industrielles. Il s'agit d'une petite agence,
M. le Président, qui, au cours des années, a porté fruit
et que soudainement on veut abolir pour l'intégrer dans les rangs...
M. Chevrette: m. le président, je m'excuse, mais, sinon,
je vais vous demander d'autorité d'ajourner les débats. m. le
président, si on veut niaiser, là, pour les quintes de toux, on
peut aller à l'extérieur.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader de
l'Opposition officielle.
M. Chevrette: M. le Président, je m'excuse, je vais
continuer ce que j'ai à dire.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, allez-y, M. le
député.
M. Chevrette: M. le Président, s'il y en a qui ne sont pas
intéressés au débat, je m'excuse. Je n'irai pas plus loin
dans mes propos pour le moment, mais je vous avise qu'on est à
l'Assemblée nationale, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors... S'il vous
plaît! Vous avez raison, M. le député. Je vais être
excessivement sévère envers ceux qui contraignent l'ordre de
cette Assemblée. M. le député de Gouin, si vous voulez
poursuivre.
M. Boisclair: Merci, M. le Président. Ce que j'essayais
tout simplement de rappeler, M. le Président, c'est l'importance et le
mandat que l'AQVIR a joué au cours des dernières années.
Je voudrais tout simplement y aller sans ajouter à ce qui a
été dit par l'ensemble de mes collègues qui sont
intervenus sur le projet de loi auparavant, mais tout simplement rappeler
l'importance de la composition de cette Agence et de la souplesse qu'elle a pu
avoir au cours des dernières années.
M. le Président, j'ai eu l'occasion d'oeuvrer pendant plusieurs
années dans ce qui est convenu d'appeler les groupes de soutien aux
initiatives-jeunesse qui ont un mandat spécialisé de soutien
auprès des petites entreprises administrées en grande partie par
des jeunes qui décident de se créer leur propre emploi par le
biais d'une petite entreprise. Il s'agit, M. le Président, d'un concept
qui était quand même assez innovateur, qui répondait aux
besoins des gens qui s'adressaient aux services des groupes de soutien, qui ont
réussi finalement, M. le Président, au cours des dernières
années, à créer un nombre important d'emplois et à
générer des investissements de l'ordre de plusieurs millions de
dollars dans l'économie québécoise.
Si une agence aussi importante que celle des groupes de soutien a
réussi à avoir autant de résultats, c'est grâce
à sa souplesse et grâce aussi au cadre qui a été mis
de l'avant par...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît,
Mme la députée! M. le député, si vous voulez
poursuivre.
Mme Juneau: Donnez-y donc une pastille!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
M. le député.
M. Boisclair: M. le Président, vous comprenez que, dans la
situation actuelle, c'est plutôt difficile pour moi de faire un discours
qui puisse tenir compte des notes que j'avais préparées.
Ça fait à peu près la dixième fois que je suis
interrompu depuis le début de mon intervention et ce n'est sans doute
pas à cause des membres de l'Opposition officielle.
Ce que je voulais rappeler, M. le Président, c'est l'importance
d'un cadre souple qui soit capable de répondre aux besoins des gens qui
s'adressent à des organismes semblables à l'AQVIR. Je donnais
l'exemple, M. le Président, des groupes de soutien aux initiatives -
jeunesse. Il y a lieu de se questionner sur le mandat futur de ces
organismes-là quand on voit l'importance qu'on veut leur donner et le
lien qu'on veut faire avec les commissaires industriels,
particulièrement en région. Bien des gens s'inquiètent. On
aura l'occasion, tout à l'heure, de parler de la loi 87, si je ne me
trompe pas, où encore là il y a des visées importantes de
récupérées avec la SDI, et on le voit aujourd'hui, ce
soir, avec l'AQVIR.
M. le Président, essentiellement, l'article important du projet
de loi est l'article 2 qui dit que la Société de
développement industriel du Québec, constituée en vertu de
la Loi sur les sociétés de développement industriel du
Québec, acquiert les droits et assume les obligations de l'Agence
québécoise de valorisation industrielle de la recherche.
Essentiellement, M. le Président, ce qu'on va faire, c'est qu'on va
transférer les responsabilités et les obligations de l'AQVIR au
sein de la Société de développement industriel et, par le
fait même, enlever toute l'originalité de la souplesse et de
l'organisation de...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Matapédia, si vous n'êtes pas bien, je
vous demanderais de vous retirer de cette Assemblée, pour ne pas
déranger l'orateur. S'il vous plaît, je vous demande votre
collaboration.
M. le député de Gouin.
M. Paradis (Matapédia): M. le Président, j'aimerais
peut-être avoir une infirmière comme le député
d'Abitibi-Ouest. Mais enfin...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît,
M. le député! Soyez sérieux. M. le député de
Gouin, je m'excuse. (3 h 20)
M. Boisclair: Merci, M. le Président. Vous conviendrez
comme moi que ce n'est pas simple d'intervenir. Ce n'est pas mon plaisir moi
non plus d'être ici à 3 h 15 du matin. Je poursuis, M. le
Président.
Comment voulez-vous que je puisse intervenir de façon
cohérente, lorsque ça fait plus d'une dizaine de fois qu'on
m'interrompt? Ça me fait plaisir de me conformer au règlement, et
je vous demanderais tout simplement, M. le Président, de continuer
à appliquer le règlement, avec autant de rigueur, comme vous
l'avez fait dans le passé. M. le Président, ce que j'étais
à dire, c'est essentiellement qu'en transférant les
responsabilités qui étaient celles de l'AQVIR au sein de la
Société de développement industriel on peut se questionner
sur la nouvelle formule, sur la souplesse et sur l'efficacité qu'auront
les dirigeants de la Société de développement industriel
dans l'accomplissement de leurs nouvelles fonctions.
M. le Président, l'AQVIR - et il est intéressant de relire
son rapport annuel - a connu quand même des résultats
intéressants ces dernières années, sans disposer de
budgets faramineux. Au niveau des faits saillants du dernier rapport annuel, on
dit très bien qu'il y a une hausse du niveau d'activités entre
1989 et 1990 et un retour au rythme de croisière. On dit aussi que les
redevances payées à l'agence ont plus que doublé par
rapport à celles de l'an dernier; qu'une étude sur l'état
des entreprises financées par l'AQVIR révèle quelques
excellents succès, mais aussi, M. le Président, un besoin d'aide
additionnelle au niveau du démarrage et de la commercialisation.
J'aimerais revenir, tout à l'heure, sur cet aspect de la
commercialisation qui, effectivement, est un argument invoqué par le
ministre pour favoriser le transfert des responsabilités de l'AQVIR vers
celles de la Société de développement industriel.
Un deuxième élément, M. le Président, les
faits saillants. La formation originale du conseil d'administration de l'Agence
termine un mandat de cinq ans et a pu bénéficier des services
compétents et appréciés de huit membres du conseil
d'administration. Il s'agit de gens, M. le Président, qui ont
réussi à développer une expertise et ce n'est pas
n'importe qui qui composait le conseil d'administration: des gens qui
siègent au CRIQ, du département de génie industriel de
l'École polytechnique de Montréal, des gens du Centre de
recherche informatique de Montréal, des gens du groupe de technologie du
groupe SNC, des gens de l'Université de Sherbrooke et je pourrais
continuer à faire toute la
liste, M. le Président. Des gens qui ont réussi, au cours
des ans, à développer une expertise qui n'était pas
négligeable et qu'on a été capable de mettre au profit
d'entrepreneurs qui décidaient d'innover en mettant sur le marché
un nouveau produit qui nécessitait un certain niveau d'aide avant
d'être commercialisé.
M. le Président, le ministre - et je l'ai écouté
attentivement - évoque un certain nombre d'arguments qui favorisent et
qui, selon lui, justifient l'abolition de l'AQVIR et .invoque principalement la
double structure qui existe à l'heure actuelle et qui permet de faire
des économies; l'élimination de la double structure,
plutôt, pourrait permettre de faire un certain nombre d'économies
qui pourraient être réinvesties dans la recherche. Soit, ça
peut être intéressant comme argument, mais lorsque l'on constate,
que l'on regarde et qu'on approfondit les faits, on peut s'apercevoir, M. le
Président, qu'il ne s'agira pas là d'économies
substantielles puisque le budget de l'AQVIR n'est pas très important et
un certain nombre d'employés de l'AQVIR se retrouveront maintenant
à la Société de développement industriel.
Soit, il pourrait s'agir d'une certaine économie, mais ce sera
une économie, et tout le monde en a convenu à l'occasion de la
commission parlementaire, au moment de l'étude article par article, une
économie qui n'est pas vraiment substantielle. Et aussi, M. le
Président, deuxième élément, et celui-là a
peut-être plus de poids, fournir aux entreprises des services
intégrés, dont la commercialisation, puisque, M. le
Président, l'aide à cette dernière ne fait pas partie du
mandat de l'AQVIR. Effectivement, à l'heure actuelle, le mandat de
commercialisatiton n'est pas un des mandats qui est attribué à
l'AQVIR. Cependant, à la lecture du rapport annuel, on voyait que
l'AQVIR voulait se doter de ressources qui pouvaient justement venir
complementer celles qui existaient déjà. Et on faisait du besoin
de commercialisation une priorité.
M. le Président, on peut se questionner sur le besoin
véritable de l'abolition de cette agence, une agence qui a permis de
répondre aux besoins des gens. Lorsque je parlais de souplesse, M. le
Président, je prends au hasard une lettre parce qu'on en a reçu
plusieurs, le ministre les a reçues, ce sont des copies de lettres que
le ministre a reçues. Tout simplement en citer un extrait, M. le
Président, d'une lettre envoyée par l'agence, la compagnie
Presticom, une entreprise de Montréal, de Saint-Hubert, et qui dit:
"À titre d'ex-président de la SDI, vous êtes bien
placé pour saisir la différence fondamentale de culture des deux
organismes. L'AQVIR possède le langage et la flexibilité pour
s'adresser surtout aux dirigeants de type entrepreneur de la petite entreprise,
alors que la SDI possède l'infrastructure pour offrir plus
adéquatement les services aux dirigeants du type gestionnaire de la plus
grande entreprise."
M. le Président, ce n'est pas l'Opposition officielle qui parle,
ce n'est pas non plus la critique de l'Opposition officielle. Ce sont des gens
qui ont eu affaire avec à la fois la SDI et l'AQVIR. M. le
Président, je crois qu'il y a un principe fondamental. Lorsqu'une agence
a fait ses preuves, lorsqu'une agence aussi a réussi à
répondre aux besoins et a réussi aussi à livrer la
marchandise, on peut se questionner sur la justification de l'abolition de
cette agence.
Alors, je conclurai, M. le Président, que nous souhaitons que le
ministre revienne sur sa décision et puisse à tout le moins
justifier de façon plus concrète les motifs qui l'amènent
à abolir l'AQVIR. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, sur la même
motion, je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant,
M. le député de Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, c'est un plaisir pour moi
d'intervenir à 3 h 25. Dans quatre heures, à peu près, je
vais me faire la barbe. J'ai demandé aux gens, chez nous, de
préparer l'eau chaude.
On est dans un Parlement curieux. Moi, je pensais que le ministre de
l'Industrie et du Commerce, qui m'a toujours paru un homme sérieux,
n'embarquerait pas dans ces stratégies de fin de session, de faire du
travail en pleine nuit, comme si on était des taupes. Les taupes
travaillent la nuit parce qu'elles ne voient pas clair, mais ce n'est pas une
bonne façon de travailler que de travailler en plein milieu de la nuit,
d'autant plus que le projet de loi du ministre m'apparatt un aveu de
faiblesse.
Je ne sais pendant combien de temps j'ai vu des esprits simplistes, au
gouvernement, proposer le guichet unique, un peu comme à un moment
donné, dans l'armée, on a voulu faire faire l'habit unique. Mais
il y en avait qui marchaient sur leurs bas de pantalon et il y en avait
d'autres qui avaient les bas aux genoux. Des affaires uniques, ça n'a
jamais été extraordinaire. Et aujourd'hui, on veut faire un genre
de fourre-tout avec la SDI, mais on va faire un habit qui ne fera à
personne. Parce que dans la vie, quoi qu'on fasse, il y aura toujours des
petits, des moyens et des gros. Quand même on essaierait de faire l'habit
uniforme, ça ne marchera jamais. J'ai tellement entendu ça
souvent au gouvernement - ça fait quelques années que je suis
député - des gens qui essayaient de proposer toujours la solution
unique, le remède total, le doctorat global, en ne faisant rien qu'un
coup. Ça ne marche pas comme ça. Les choses sont plus
compliquées que ça.
Et à vouloir mettre dans la SDI des gens
qui prêtent de l'argent, des gens qui font de la recherche,
tantôt ceux qui s'occupent de la coopération, avec un autre projet
de loi qui va venir tout à l'heure, on se rendra compte qu'on ne
règle rien. Ça a l'air fin, ça a l'air solide. Le ministre
pourra se promener avec des barres dans le front, les épaules
voûtées, supportant le poids du monde. Mais je vais vous dire,
quand vous dites: On regroupe tout dans la même société, on
fait une loi, alors qu'on est dans une période de chômage
épouvantable, en pleine crise économique où aujourd'hui de
plus en plus de gens admettent qu'on s'en va vers une dépression qui va
concurrencer les années trente, et ça de plus en plus...
J'avais dit ça il y a quelques semaines, j'étais content,
M. Girard du Journal de Québec l'avait rapporté dans un
article. Je disais que la récession qu'on a commencée va se
transformer en dépression. Pourquoi? Parce qu'un ensemble de
phénomènes arrivent en même temps. Ce ne sera pas
l'époque, la période des solutions simplistes. Avec le Canada qui
a la plus grosse dette de tous les pays industrialisés, rendue à
400 000 000 000 $, qui maintient des taux d'intérêt trop
élevés pour intéresser les gens qui sont de moins en moins
intéressés à avoir des titres au Canada, alors que le plus
grand placeur d'argent de fonds de pension, Jarislowski, conseille à
tout le monde de placer dans des titres américains, disant que c'est une
question de temps, le dollar va s'effoirer.
Hier, j'ouvre la télévision; par hasard, j'entends Pierre
Péladeau qui dit: Le dollar canadien, ça ne vaut plus rien; avec
ces folies-là, il va s'effoirer et il va s'en aller vers 0,70 $, 0,75 $.
Et voilà qu'aujourd'hui de plus en plus de gens ne croient pas à
l'économie. Et on commence à dire, et les experts mêmes
viennent le dire devant la Commission Bélanger-Campeau qu'avant
longtemps, quand les Japonais vont décider de placer dans d'autres
devises, on verra ce que ça aura donné d'avoir à Ottawa
les farceurs qu'on a eus, des insignifiants de l'économie -
comprenez-vous - des gens qui ont une idée cinq fois par année et
assez souvent elle vient d'un autre. Alors, je vais vous dire que ce n'est pas
avec ça que ce pays-là, qui est déjà mal
organisé, mal foutu, avec des solutions simplistes comme celle qu'on lui
propose actuellement... Ce n'est pas comme ça que ça va se faire.
Les gens sont en droit d'attendre... (3 h 30)
On est rendu à 11 % de chômeurs. On a des taux de faillite
qui ont augmenté - on voyait ça dans le journal - de 59 %. Ce
n'est rien, là. Attendez janvier, les spécialistes de la TPS, les
gens qui voyaient la solution miracle. C'est évident, les gens qui ont
de l'argent vont vous conseiller la TPS, parce qu'ils savent que, plus les gens
qui ont un revenu petit ou moyen vont payer de la TPS, moins ils auront besoin
de payer de l'impôt sur le revenu. Ça ne m'impres- sionne pas
quand certains sénateurs comprenez-vous, nommés par les
conservateurs, vont appliquer la TPS, ils pensent à leurs poches quand
ils le font. Contons-nous pas d'histoires. Ça va arriver au mois de
janvier et attendons de voir les magasins en janvier qui vont fermer. Les
rumeurs sont toutes pires les unes que les autres, ce que vous entendez
actuellement. Pourquoi? Parce qu'on s'en va dans une situation
désastreuse avec un Canada qui est en train de nous tirer dans le fond
de la cale. Pourquoi? Parce que jamais le Canada n'a été pris
dans une si mauvaise situation. Puis, ne pensons pas que ceux qu'il y a
actuellement comme premiers ministres ou ceux qui aspirent à
l'être sont des gens qui ont la jarnigoine pour changer ça, hein!
C'est le concours total pour le prix de l'insignifiance économique.
Puis, en même temps, on a la Russie qui vient de se
désengager sur le plan militaire; ça veut dire que ceux qui
veulent faire des armements, il va falloir qu'ils se demandent avec qui ils
vont combattre. On peut bien entretenir temporairement la guerre du Golfe, je
vais vous dire que l'Irak ne peut pas faire face au monde longtemps. Et on
aura, en Amérique du Nord, une économie américaine qui
devra se convertir d'une économie de guerre en économie de paix,
avec des solutions qui vont être complexes à trouver, avec des
entreprises qui vont fermer parce qu'il n'y aura plus de canons à
produire, il n'y aura plus de chars d'assaut à produire, puis de camions
militaires parce qu'on s'en va vers une période de paix. Et des
économies de guerre qu'on doit transformer en économies de paix,
ça ne vire pas sur un trente-sous. Ça prend des solutions
imaginatives, pas le guichet unique; ce n'est pas ça qui va
régler le problème, hein!
Et vous remarquerez qu'actuellement les pays les plus prospères
dans le monde, ce sont deux pays qu'on a condamnés, imaginez-vous,
après la guerre de 39-45, à être des pays à
économies de paix. L'Allemagne et le Japon n'ont pas eu le droit de se
bâtir d'armements, puis d'armées. Alors, ils ont mis tous leurs
efforts dans la paix et aujourd'hui ce sont les gens les plus riches au monde.
Pensez-vous - ce n'est pas bête, hein? - que ce n'est pas quelque chose
qu'on devrait imiter? C'est quelque chose de significatif. Aujourd'hui, en
même temps que la Russie de désengage, il va y avoir tout le
défi extraordinaire de l'Europe de l'Est qui devra déterminer de
quelle façon elle va fonctionner vers une société de type
américain ou de type européen peut-être, en essayant de
trouver des solutions originales dans une économie de marché
qu'ils ont à mettre en place.
Et nous, pendant ce temps-là, surtout avec les échecs qui
se passent au GATT actuellement, on se retrouvera sans doute avec des
marchés compartimentés. Ceux qui parlaient de la mondialisation
de l'économie vont devoir réviser leurs
termes et parler sans doute de la continentalisa-tion de
l'économie. On aura le marché européen, on aura le
marché américain parce que M. Bush parle de plus en plus,
après le Canada et les États-Unis, d'embarguer le Mexique et
éventuellement le reste du continent. Si on lit la "littérature"
américaine, on se rend compte qu'on s'en va vers ça. En
même temps, bien, il y aura les pays asiatiques qui font leur propre
développement.
Et là, à ce moment-là, alors qu'il va falloir
chercher des solutions, alors qu'il va falloir bâtir dans deux secteurs
importants la formation professionnelle pour avoir la compétence et la
concurrence sur le plan des cerveaux, puis, en même temps, concurrencer,
sur le plan de la recherche technologique, technique, avec des organismes comme
l'Agence québécoise de valorisation industrielle de la recherche,
nous autres, on va l'envoyer dans le fourre-tout, comprenez-vous, de la
Société de développement industriel, comme si
c'était là l'avenir. Au contraire, il faudrait développer,
il faudrait appliquer un des éléments du programme du Parti
québécois qui était, sans doute, un des meilleurs lors de
la dernière campagne électorale. Pas les déductions
fiscales pour l'investissement dans la recherche, mais le 1 % pour obliger
à créer des pots, des fonds pour la formation
professionnelle.
Je vais vous dire une petite expérience. J'avais un fonds de
budget comme député en 1985. Il me restait quelques milliers de
dollars; j'ai engagé quelqu'un, puis je lui ai dit: Je vais te dresser
une liste, on va faire un projet ensemble et, dans mon comté, qui
était plus grand qu'aujourd'hui, il y a trois parcs industriels, j'ai
dit: Tu vas aller demander aux industriels ce qu'ils trouvent de plus important
- avec une grille que j'avais faite, qu'on avait faite ensembfe - dans les
années qui viennent. Je m'attendais à ce qu'ils disent qu'il
fallait corriger les taux d'intérêts. Je dois vous dire
qu'après avoir vu plusieurs dizaines d'industriels le résultat
était venu et j'avais été surpris du résultat. Je
ne l'attendais pas: 90 % des industriels des parcs industriels qu'il y a dans
mon comté, il y a plusieurs usines, avaient dit: Ce qui est le plus
important pour nous, c'est la formation professionnelle.
Je vais vous dire que, personnellement, même, je ne m'y attendais
pas. Puis, je ne l'attendais tellement pas que je peux vous dire que je n'ai
pas biaisé le sondage. Je n'attendais pas ça comme
réponse, je ne cherchais pas à avoir ça, je voulais
savoir. Je m'attendais plutôt qu'ils me disent les taux
d'intérêt et, à partir du sondage, j'aurais pu faire une
bataille sur les taux d'intérêt. Au contraire, on m'a dit,
à ce moment-là, que c'était la formation
professionnelle.
M. le Président, je termine là-dessus. Je pense que le
ministre, dans la période qu'on vit, doit mettre l'accent sur la
recherche et la formation, c'est-à-dire les cerveaux, la connaissance
technique. Ce sont deux piliers importants du développement
économique et on va en avoir besoin dans les prochaines années.
Je suis convaincu, dans cette perspective-là, que la solution qu'il
propose aujourd'hui n'est pas la bonne. Je vous remercie. le
vice-président (m. bissonnet): merci, m. le
député. alors, je suis prêt ' à connaître la
prochaine intervenante, mme la députée de johnson.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Il y a
à peine 10 minutes, avant que mon collègue de Lévis
débute son intervention, nous avons eu une belle démonstration
d'indiscipline, M. le Président. Pendant le vote, où ce n'est pas
permis de réagir en quoi que ce soit, on a eu trois fois des
applaudissements et, pendant que mon collègue, le député
de Gouin, essayait de faire son intervention, il y en a qui ont attrapé
une toux spéciale.
M. Pagé: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: ...force m'est de m'interroger et de vous
interroger si c'est une question de règlement, parce que ce n'est pas du
tout pertinent au sujet.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la
députée, je vous rappelle que nous sommes sur la prise en
considération du rapport de la commission de l'économie et du
travail sur le projet de loi 86, et je suis prêt à vous
écouter sur ce projet.
Mme Juneau: J'y arrivais, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée.
Mme Juneau: J'y arrivais. C'était simplement pour vous
dire que, de l'autre côté, on ne prend pas au sérieux ce
qu'on est en train de faire. Si c'est difficile pour eux d'être rendus
à cette heure-ci encore en train de faire des interventions ici,
ça l'est pour nous aussi. C'est quand même le 20 décembre
pour tout le monde, pour vous aussi, M. le Président, et pour toutes les
personnes qui travaillent avec nous, qui sont à la console, nos
recherchistes, le Secrétaire général, l'autre personne qui
est avec lui, qui travaille avec, Mathieu Proulx...
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Juneau: ...Me Proulx, qui est là. Ils sont là,
calmes, sereins, ils font leur travail. Mais, de l'autre côté, on
ne prend pas ça au sérieux, M. le Président. On a
dérangé tout le temps du vote et on a dérangé le
député de Gouin pendant qu'il faisait son intervention, toujours.
Pourquoi? Parce que c'est des gens irresponsables, c'est ça, la
vérité. Si nous sommes à discuter à cette heure-ci
d'un projet de loi, c'est donc que, nous, on ne voudrait pas qu'il passe. C'est
clair, c'est ça qu'on ne veut pas. On veut pas, parce qu'on trouve que
ça n'a pas de bon sens. Ça n'a pas de bon sens de faire le projet
de loi 86 et le ministre le sait très bien. Pourquoi il s'entête?
Je ne le sais pas. Par orgueil? Par dépit? Je ne le sais pas. Il a
essayé pendant qu'il était président de la SDI, de faire
en sorte que l'AQVIR devienne sous son joug, ça n'a pas marché.
Mais, avant d'être ministre, dans son av., il était
président de la SDI et, à ce moment-là, il avait
essayé. Mais, là, il est ministre, il est sur l'autre bord de la
clôture, il a dit: À présent, j'ai l'autorité qu'il
faut, je vais la ramasser, l'AQVIR.
Mais, si on demandait aux 95 entreprises qui ont vu le jour et aux 900 -
900 emplois, c'est beaucoup, surtout quand on est en crise économique -
personnes qui ont trouvé de l'emploi grâce à l'AQVIR, parce
que l'AQVIR leur avait fait confiance, elle avait fait confiance à des
Québécois qui avaient des idées - ils n'en ont pas, eux
autres, de ce temps-là - qui avaient mis au monde une petite entreprise,
parce que quelques personnes, quelques spécialistes, au niveau de
l'AQVIR, avaient décidé de leur donner leur chance... Ça
ne passait pas par un paquet de formulaires, et toutes sortes de chinoiseries;
ça passait simplement par la confiance que ces
spécialistes-là accordaient aux Québécois qui
avaient des idées, ça passait seulement par ça. (3 h
40)
Ce n'était pas un gros budget - qu'ils ne viennent pas me faire
rire en disant qu'ils voulaient économiser - un budget de 1 000 000 $,
et l'économie, mon oeil! Parce que les 12 spécialistes qui
travaillaient là, il les embauche à la Société de
développement industriel, puis il recrée un nouveau poste de
vice-président. C'est ça qu'il fait. Alors, là,
l'économie hein! À 4 heures du matin, l'économie, mon
oeil! Il n'en fait pas d'économie. C'est simplement par orgueil ou par
dépit qu'il fait en sorte que l'AQVIR va devenir, à
l'intérieur de la SDI, un petit morceau qui ne mènera pas de
train et sur qui lui va avoir l'autorité. C'est inacceptable, M. le
Président, et c'est inacceptable parce que ça n'a pas de bons
sens.
S'il s'était levé tout à l'heure pour nous dire:
Écoutez, je vais vous l'expliquer pourquoi je fais ça, je vais
vous le dire, peut-être qu'on aurait trouvé que c'avait un peu
d'allure. L'avez-vous vu se lever? Ça fait à peu près 15
personnes qui parlent de notre côté. L'avez-vous vu?
Pas moi, ni vous, ni personne parce qu'il ne s'est pas levé,
parce qu'il n'a rien à dire. Simplement pour ça.
M. le Président, ce n'était pas des subventions, à
part de ça, que l'AQVIR accordait, ce n'était pas des
subventions; c'était des prêts, des prêts à redevance
pour financer de la recherche et du développement. Mais des prêts
qui faisaient confiance, qui faisaient confiance parce qu'on sait que, quand tu
débutes, tu démarres une entreprise, ce n'est pas sûr que
ça va bien aller. Ce n'est pas sûr. Mais, quand tu as des
idées brillantes, ordinairement, tu mets tout en place pour être
capable de réussir à ce que ton entreprise fonctionne et l'AQVIR,
c'est ça qu'elle faisait. Elle faisait confiance quand il y avait des
bonnes idées. Ce n'était pas un paquet d'argent qui coûtait
très cher aux payeurs de taxes. La double tête à la Caisse
de dépôt va nous coûter plus cher que ça. Ça
va nous coûter plus cher que ça, M. le Président.
Pas l'AQVIR, parce que, quand elle dépensait quelques milliers de
dollars pour mettre au monde une entreprise, ça veut dire qu'il y avait
peut-être une cinquantaine de personnes qui se trouvaient de l'emploi,
donc qui n'étaient plus aux crochets de qui que ce soit. Et qui
s'achetaient des maisons, qui s'achetaient une voiture, qui achetaient des
vêtements, qui achetaient toutes sortes de choses, donc ils faisaient
tourner l'économie. Ça coûtait rien, l'AQVIR. Qu'il ne
vienne pas nous faire accroire que c'est une raison d'économie, c'est
faux. C'est faux, M. le Président.
Les nouvelles entreprises, c'a toujours une fragilité. Une
fragilité parce qu'on se dit: Est-ce que le marché va se
développer? Est-ce que mon idée, ma patente va être bonne?
C'est ça. Et l'AQVIR faisait en sorte de faciliter les choses pour que
l'entreprise prenne de l'expansion, l'aider à la comprendre, à
mettre le train sur les rails et faire en sorte que, finalement, l'entreprise
prenne de l'expansion et rajoute des emplois et puisse exporter non seulement
de son produit, mais de ses connaissances et de son intelligence.
Si on demandait à M. Seufert - je pense que c'est comme ça
que ça se prononce - qui est à l'instrumentation biologique je
pense, excusez-moi, à l'instrumentation biophysique pour voir s'il est
heureux pendant qu'il demande à l'honorable Gérald Tremblay - M.
le Président, je ne l'aurais pas nommé par son nom, je le lis sur
la lettre - ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, de
laisser l'AQVIR vivre. C'est quelqu'un qui en a profité et c'est
quelqu'un qui, aujourd'hui, va bien, se distingue parmi nos entreprises. Et, si
on demandait aux deux jeunes Québécois qui ont mis au monde
Nertec Design; ça allait tellement bien, M. le Président,
qu'Oerlikon l'a achetée.
Je pense que, si le ministre avait cru aussi fort que tous nous autres
on peut croire à
l'Agence québécoise de valorisation industrielle de la
recherche, il ne ferait pas en sorte de l'enterrer doucement à 4 heures
du matin. Il ne ferait pas ça. Il aurait songé plutôt
à augmenter ses budgets, si c'est nécessaire, à augmenter
son personnel, si c'est nécessaire, à faire en sorte qu'AQVIR
continue à desservir les hommes et les femmes qui ont des idées,
et ceux qui n'en ont pas devraient aller se coucher, M. le Président,
parce qu'il y en a ici qui sont très fatigués et qui sont
très fatigants. Ça fait que ceux qui sont fatigués, puis
fatigants, puis qui n'ont pas d'idées, puis que ce n'est pas des
patenteux devraient rentrer chez eux avec leur petite valise. C'est ça
qu'ils devraient faire, au lieu de faire ce qu'ils nous font ce soir pendant
qu'on essaie de discuter de choses importantes qui n'ont pas l'air de les
déranger, M. le Président. De toute façon, nous, on
souhaiterait que le ministre laisse de côté la loi 86 et laisse la
vie à l'AQVIR. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur cette motion?
Alors, je mets aux voix l'amendement proposé par M. le ministre de
l'Industrie, du Commerce et de la Technologie. L'amendement proposé par
M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie est-il
adopté?
M. Chevrette: Vote enregistré.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vote enregistré.
Qu'on appelle les députés. (3 h 47 - 3 h 53)
Mise aux voix de l'amendement proposé par le
ministre
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, Mmes et MM. les
députés, nous allons procéder au vote de la motion. Que
ceux et celles qui sont en faveur de l'amendement proposé par M. le
ministre de l'industrie, du Commerce et de la Technologie veuillent bien se
lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Port neuf), M.
Dutil (Beauce-Sud), M. Vallerand (Crémazie), M. Tremblay (Outremont),
Mme Robic (Bourassa), M. Cusano (Viau), Mme Bleau (Groulx), M. Houde
(Berthier), M. Maltais (Saguenay), M. Philibert (Trois-Rivières), M.
Beaudin (Gaspé), M. Chagnon (Saint-Louis), Mme Dionne
(Kamouraska-Témiscouata), M. Paradis (Matapédia), M. Marcil
(Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc (Taschereau), M.
Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M.
Williams (Nelligan), M. Fradet (Vimont), M. Lemieux (Vanier), M. Messier
(Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Gautrin (Verdun), M. Khelfa
(Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), M. LeSage (Hull), M. Bergeron
(Deux-Montagnes), M.
Bordeleau (Acadie), Mme Boucher Bacon (Bour-get), M. Audet
(Beauce-Nord), M. Camden (Lotbi-nière), M. Bradet (Charlevoix), M.
Forget (Prévost), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière
(Gatineau), M. MacMillan (Papineau).
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Que ceux et celles qui
sont contre le même amendement veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), Mme
Blackburn (Chicoutimi), M. Blais (Masson), Mme Marois (Taillon), M. Garon
(Lévis), M. Jolivet (Laviolette), Mme Juneau (Johnson), M.
Léonard (Labelle), M. Paré (Shefford), M. Claveau (Ungava), Mme
Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Trudel
(Rouyn-Noran-da-Témiscamingue).
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a des
abstentions? Pas d'abstentions.
Le Secrétaire: pour: 39 contre: 13 abstentions: 0
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, l'amendement
proposé par M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la
Technologie est adopté. Nous allons maintenant procéder au vote
sur le rapport. Est-ce que le rapport, tel qu'amendé, est adopté?
Oui, M. le leader du gouvernement?
M. Pagé: Un instant, M. le Président, il y a
d'autres députés qui vont rentrer.
Une voix: M. le député de Champlain.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le whip? Oui,
alors, allez-y. Un deuxième vote. S'il y a d'autres
députés, ils ont maintenant accès à
l'Assemblée, étant donné qu'il y a un deuxième
vote.
M. Pagé: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le leader. Alors,
si vous me le permettez, M. le leader, le rapport, tel qu'amendé, est-il
adopté?
M. Pagé: M. le Président, je propose le même
vote, en ajoutant le nom du député de Champlain.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, le rapport, tel
qu'amendé, est adopté. M. le leader du gouvernement, pouvez-vous
m'indiquer avec quel autre article du feuilleton nous allons continuer nos
travaux?
M. Pagé: M. le Président, je vous invite à
appeler l'article 25 du feuilleton.
Projet de loi 101
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 25 de
notre feuilleton, Mme la ministre déléguée aux Finances
propose l'adoption du rapport de la commission du budget et de l'administration
sur le projet de loi 101, Loi modifiant la Loi sur les valeurs
mobilières. Je suis prêt à entendre le premier intervenant,
Mme la ministre déléguée aux Finances.
Mme Louise Robic
Mme Robic: Oui. Merci, M. le Président. M. le
Président, ce projet de loi a reçu l'appui de l'Opposition et,
donc, je ne ferai aucun commentaire en ce moment. Tout simplement, M. le
Président, j'aimerais remercier les membres de la commission de leur
appui et remercier également le député de Gouin pour sa
collaboration et son appui.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, sur le même
sujet, M. le député de Gouin.
M. André Boisclair
M. Boisclair: M. le Président, je ne prendrai pas beaucoup
de temps pour faire le point sur ce projet de loi. Effectivement, comme la
ministre l'a souligné, il s'agit d'un projet de loi qui a fait le
consensus sur l'ensemble des articles proposés au projet de loi 101,
parce que, effectivement, il nous apparaissait que l'ensemble des dispositions
proposées convenait à la fois à la protection des
investisseurs et à la fois aussi aux gens qui ont à administrer
la Loi sur les valeurs mobilières et plus particulièrement aux
gens de la Commission des valeurs mobilières du Québec. Et je
crois que les explications que nous avons eu l'occasion d'obtenir par le
président de la Commission des valeurs mobilières, qui
accompagnait la ministre à l'occasion de l'étude article par
article, ont été des plus utiles.
J'aimerais peut-être revenir rapidement sur les dispositions
contenues dans le projet de loi, particulièrement - et ça, je
pense que nous devons être heureux de le souligner - sur le pouvoir
d'inspection de la Commission à l'égard des courtiers et des
conseillers qui sont inscrits en Bourse. L'organisme
d'autoréglementation dont on fait état dans le projet de loi est,
je crois, aussi un pas en avant de plus pour souligner jusqu'à quel
point la protection du public est importante. Donc, on pourra maintenant
compter sur de nouvelles dispositions pour améliorer cette
protection-là. Bien sûr, aussi, M. le Président - et
ça, c'est quand même assez novateur si on le compare à ce
qui se passe dans d'autres commissions de valeurs mobilières un peu
partout au Canada - on introduit des règles strictes pour
prévenir les conflits d'intérêt lors de l'octroi d'un visa
pour un prospectus. M. le Président, donc, c'est un ensemble de mesures
qui ont fait consensus, effectivement, entre les membres du gouvernement et les
membres de l'Opposition officielle, puisqu'elles nous apparaissent dans le
meilleur intérêt de la protection des épargnants. (4
heures)
Cependant, il y a un certain bémol que je voudrais rajouter, nous
aurions aimé avoir plus de détails en ce qui a trait au rapport
quinquennal qui avait été déposé par le
prédécesseur de la ministre déléguée aux
Finances et responsable des institutions financières, sur toute la
question, M. le Président, qui avait été soulevée,
et avec pertinence je crois, par le ministre Fortier, sur le soi-disant pouvoir
de directives que le ministre se gardait à l'égard de la
Commission des valeurs mobilières du Québec.
Le député de Vanier se souvient sûrement très
bien des débats qui ont eu lieu à la commission du budget et de
l'administration, qui avaient permis aussi de clarifier un certain nombre de
dispositions contenues dans le rapport quinquennal.
M. le Président, cette recommandation qui avait fait l'objet d'un
long débat entre les membres de la commission, qui avait
été débattue aussi publiquement, je tiens à le
rappeler, M. le Président, cette recommandation proposée à
l'époque par M. Fortier, ancien député d'Outremont et
ministre délégué aux Finances, proposait entre autres que
la Loi sur les valeurs mobilières soit modifiée afin d'inclure
une disposition reposant sur les propositions suivantes. Et là, je cite
un extrait d'un communiqué de presse publié au mois d'octobre
1988: "Le ministre responsable de l'application de la présente loi et le
président de la Commission doivent se consulter
régulièrement sur la politique touchant les valeurs
mobilières et sur les liens avec la politique économique
générale du gouvernement. Si malgré les consultations
prévues au paragraphe 1°, une divergence d'opinion surgissait entre
le ministre et la Commission concernant la politique à suivre, le
ministre peut, après consultation avec le président, et avec
l'approbation du gouvernement, donner à la Commission des directives
écrites visant cette politique, et la Commission devra s'y conformer".
Et on disait plus loin que toutes ces directives devaient être
publiées dans la Gazette officielle, et que le ministre pouvait,
avec l'accord du gouvernement, déclarer qu'une décision de la
Commission a une importance telle, qu'elle affecte la politique gouvernementale
ou constitue un énoncé de cette politique. À compter de
cette déclaration, la décision de la Commission est
annulée, et le pouvoir de la rendre est dévolu au ministre
responsable de l'application de la loi. Les dispositions du paragraphe
3°, dans le même communiqué M. le Président,
s'appliquent aussi à la décision du ministre responsable.
Il s'agissait donc, M. le Président, d'un certain nombre de
nouvelles dispositions que le ministre de l'époque voulait introduire
dans l'actuelle loi. La ministre nous a fait part de sa volonté
très claire de rejeter, pour le moment, ces dispositions-là, non
seulement pour le moment, mais je crois aussi pour les futures modifications de
la loi. La prochaine aura lieu je crois en 1993, lorsque nous étudierons
le prochain rapport quinquennal d'application de la Loi sur les valeurs
mobilières. Mais rappeler, à tout le moins, M. le
Président, qu'il aurait été intéressant d'aller
plus à fond dans ce débat-là. L'étude article par
article ne nous a pas permis de le faire, puisqu'il n'y avait pas de
dispositions contenues dans le projet de loi qui visaient cette mesure
particulière, mais je crois que c'est un débat qui a fait l'objet
de plusieurs discussions au sein des intéressés. Et il serait
intéressant peut-être de reprendre les conclusions du rapport de
la commission du budget et de l'administration qui proposait, en plus de ces
dispositions, d'autres dispositions, entre autres au niveau de l'administration
de la Commission des valeurs mobilières et de son pouvoir de
délégation. Certaines de ces dispositions ont été
retenues. Je fais référence particulièrement à la
possibilité qu'a maintenant la Commission des valeurs mobilières
du Québec de signer des ententes avec d'autres commissions de valeurs
mobilières, soit de pays étrangers ou d'autres provinces
canadiennes. C'est une proposition qui était contenue à
l'époque dans le rapport de la commission du budget et de
l'administration.
Mais, à tout le moins, M. le Président, souhaitons que,
rapidement, nous puissions reprendre le débat sur cette question
qu'avait mis de l'avant l'ancien ministre délégué aux
Finances, et que nous puissions peut-être faire d'autres modifications
à la loi.
Donc, en somme, M. le Président, je ne serai pas plus long que
ça. Il s'agit essentiellement de dispositions, de mesures et de
modifications très techniques à la Loi sur les valeurs
mobilières, qui ont fait l'objet d'un consensus, et je crois qu'elles
vont aussi dans le meilleur intérêt des Québécois et
Québécoises. Merci.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Gouin. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Est-ce
que le rapport de la commission du budget et de l'administration sur le projet
de loi 101, Loi modifiant la Loi sur les valeurs mobilières est
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, je vous invite à
appeler l'article 20 du feuilleton.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article...
M. Pagé: Une fois que l'article 20 du feuilleton sera
adopté, je pense bien d'ici quelques minutes, j'entends proposer
l'ajournement de nos travaux à ce matin 10 heures, ce qui fait que la
prise en considération du rapport de la commission du budget et de
l'administration qui a étudié la Loi sur la fonction publique, le
rapport qui a été déposé par M. le
député de Vanier et M. le député de La Prairie,
doit faire l'objet d'un débat restreint de deux heures. Et je vais vous
indiquer tout de suite, que j'entends faire en sorte, comme leader du
gouvernement, de proposer que ce débat puisse se tenir dans un cadre
plus régulier de nos travaux. Cependant, je tiens à ajouter...
Alors, ça ça veut dire, soit aujourd'hui, soit demain, vendredi,
le 21. Et même ce débat pourrait se tenir aussi à tout
autre moment et même au mois de mars prochain. Il n'y a pas de
délai imparti qui nous oblige à ce que ce débat soit
conduit immédiatement après le dépôt du rapport,
premièrement. Deuxièmement, M. le Président, parce que
c'est très différent des autres mesures qu'on a adoptées
cette nuit et ce soir, en ce que tout ce qui vient d'être adopté a
déjà été débattu dans le cadre de nos heures
plus régulières et tout ce qui a été adopté
ce soir et pendant cette première partie de la nuit sera susceptible
d'être débattu demain. Alors, ce n'est pas, et je termine
là-dessus, une législation, des lois qui sont passées
à la vapeur la nuit, ce sont des lois qui sont débattues en plein
jour et qui ont traversé une étape dans un cadre de retard de nos
travaux. Alors, M. le Président, ce sera le dernier point à
l'ordre du jour que j'appellerai et nous reprendrons en matinée.
Projet de loi 87
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 20 de
notre feuilleton, M. le ministre de l'Industrie et du Commerce propose
l'adoption du rapport de la commission de l'économie et du travail sur
le projet de loi 87, Loi sur l'aide au développement des
coopératives. M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): Ayant discuté en commission
parlementaire pendant quatre heures, ayant pris connaissance des positions des
différentes parties, j'aimerais déposer deux lettres: ma
réponse à M. Fernand Miron, le président de la
Conférence des coopératives forestières du Québec,
ainsi que ma lettre à M. Claude Béland, président du
Conseil de la coopération du
Québec, qui répondent...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Consentement pour le
dépôt de ces lettres, M. le leader de l'Opposition officielle?
Alors, déposez, M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): ...à certaines attentes du
milieu, et je suggère qu'on approuve le rapport de la commission le plus
rapidement possible.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de
Taillon?
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Certainement, M. le Président, qu'il y a
d'autres interventions. Ce n'est pas parce qu'on débat de ce projet la
nuit - je comprends que c'est dans le cadre régulier de nos travaux,
j'en conviens avec le leader - qu'on va s'abstenir d'émettre un point de
vue qu'il nous apparaît pertinent à ce moment-ci d'émettre,
M. le Président. Parce que, si le ministre nous dépose ce soir
des réponses à des intervenants dans le dossier, il ne prend pas
la peine cependant de nous rappeler en quoi consiste le projet de loi, et
ça m'inquiète un peu, M. le Président. Ça
m'inquiète parce qu'il peut répondre aux interlocuteurs, il peut
essayer d'atténuer un peu leurs craintes, mais, après
vérification de ma part sur le terrain, dans les organisations, il y a
une inquiétude, M. le Président, et elle est sérieuse. Il
y a une inquiétude et on est en désaccord, M. le
Président, avec la disparition d'une autre institution, la
Société de développement des coopératives, M. le
Président. Une autre institution qui ira joindre les rangs de la SOI, de
la Société de développement industriel. Ce sera la
deuxième dans la même session sem-ble-t-il, puisque ça
devrait être le cas de l'AQVIR, M. le Président. Et ça
inquiète très sérieusement plusieurs des intervenants dans
le monde des coopératives. C'est vrai que le ministre a commencé
à consulter au printemps, à rencontrer les organisations. Le
ministre a déposé un projet de loi cependant à la fin
d'octobre, ce qui n'est pas très long, on en conviendra. (4 h 10)
Je relisais son communiqué, c'était le 25 octobre. Ce
n'est pas très long. C'est à peine deux mois pour rayer de la
carte une organisation qui rendait de réels services aux personnes qui
voulaient s'organiser en coopératives, soit en coopératives de
travailleurs, de production, en coopératives de logement, en
coopératives de consommation. M. le Président, j'ai l'impression,
vraiment, d'être en face d'un maître de l'esbroufe qui essaie d'en
mettre plein la vue, qui essaie de nous éblouir avec de belles grandes
phrases, avec de beaux grands engagements, mais quand on creuse un peu, M. le
Président, on constate que ça va essentiellement à
l'encontre des intérêts de base d'un certain nombre de groupes
concernés par ce que veut faire le ministre. Et je vous donne un exemple
de ça; il y en a plusieurs, remarquez, dans les interventions du
ministre, de l'ordre de l'esbroufe. Je pense à hier, où il
n'arrivait pas à définir, à répondre à la
question que je lui posais quant à l'argent neuf qu'il allait proposer
aux entreprises en difficulté. Et, ne répondant pas, il admettait
ainsi qu'effectivement, son annonce de 60 000 000 $ n'était, en fait,
que la répétition d'une annonce déjà faite au
discours sur le budget, M. le Président, de l'ordre de 45 000 000 $.
Alors, le véritable argent neuf, M. le Président, c'était
15 000 000 $. C'est un bel exemple, en fait, de l'esbroufe qu'utilise le
ministre pour nous jeter de la poudre aux yeux.
Quand il a décidé qu'il allait liquider la SDC, il a
émis un communiqué dans lequel il va dire, et c'est absolument
mais estomaquant, M. le Président... Chaque fois que je relis ce
paragraphe-là, je me dis: Est-ce qu'il a bien pense, là, à
ce qu'il disait lorsqu'il a inscrit ça dans son communiqué? Il
dit: Je dépose le projet de loi 87 qui porte sur l'aide au
développement des coopératives, parce que, évidemment, il
y a une façon très élégante de faire
disparaître la Société de développement des
coopératives. Il fait disparaître la Société et il
adopte une loi d'aide au développement des coopératives.
Cependant, il n'y a rien dedans, que des voeux pieux, M. le Président.
Alors, il dit qu'il propose de placer la gestion du soutien technique aux
coopératives sous l'autorité d'un "sous-mi-nistériat"
adjoint au ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie;
la visibilité des coopératives de même que l'encadrement et
l'aide technique nécessaires à la concrétisation des
projets seront ainsi assurés. Mais de quoi parlons-nous? Ce n'est pas de
la visibilité que veulent les coopératives, c'est être
réelles, c'est de savoir que, quelque part, il y a un interlocuteur
à qui on peut s'adresser, qui aura développé et qui a
développé, M. le Président, une expertise, qui sait
comment ça fonctionne une coopérative, qui est souvent un mode de
distribution des services, un mode de production, qui n'est pas
nécessairement facile à mettre en place, M. le Président,
qui demande du support, un accompagnement, et, souvent, ça va être
un petit peu plus long à démarrer. Souvent, ça va
comporter des contraintes d'organisation. Ce n'est pas le capital qui est au
coeur d'une coopérative, c'est la personne. Une personne, un vote. Et,
évidemment, dans un contexte comme celui-là, ce n'est pas
nécessairement toujours évident au départ. Alors,
ça demande un soutien, je le répète, un accompagnement, M.
le Président. Et, souvent, ces coopératives qui peuvent devenir
très importantes un jour commencent
très petites. Et, comme je le disais lors d'une intervention
précédente, M. le Président, comme le ministre n'aime pas
ce qui n'est pas gros - parce que j'ai trouvé une nouvelle façon,
je vais peut-être expliquer ça à mes collègues ici,
à l'Assemblée - il n'aime pas vraiment ce qui est petit,
ça l'agace un peu, et il se dit: Ça prend beaucoup de temps,
c'est compliqué... Puis, chaque fois que je dis ça, le ministre
se fâche, et il dit que je ne comprends pas son attitude, que ce n'est
pas ça qu'il a dans la tête. Alors, j'ai trouvé une
nouvelle façon de dire ça: II n'aime pas ce qui n'est pas gros,
M. le Président. Alors, évidemment, la SDC, la
Société de développement des coopératives, ce n'est
pas une grosse institution. Ce n'est pas la SOI. Ça ne gère pas
des milliards, M. le Président. Je pourrais parler des sommes
autorisées qu'on mentionnait au rapport annuel, 6 470 600 $. Ce n'est
pas très gros. Si je devais relever ce qui se passe au niveau de la SDI,
ce sont des milliards qui sont concernés, des millions en termes d'aide,
mais qui ont trait à des investissements de l'ordre du milliard.
C'est à peine quelques dizaines d'employés. Quand on
compare à ce qui se passe à la SDI qui a, je pense, 165
employés, c'est gigantesque. Alors, il croit qu'il aura une certaine
économie d'échelle. Il pense que ça va être plus
efficace s'il intègre l'aide au développement des
coopératives à la SDI. Mais, ce faisant, par exemple - et je vais
vous expliquer ça parce qu'on a encore un peu de temps devant nous -
vous allez voir qu'au lieu de simplifier la vie de ces petites organisations,
il va la leur compliquer, et drôlement, M. le Président.
En plus de noyer évidemment toute la culture de l'organisation,
pas seulement à la Société de développement
industriel, il en envoie une partie du personnel au ministère de
l'Industrie, du Commerce et de la Technologie. Alors là, la meilleure
façon de tuer une organisation, de tuer son expertise, c'est de
procéder de la façon dont procède le ministre. Et
j'aimerais tellement tellement qu'il ait un tant soit peu de sensibilité
à ce que ça signifie pour une coopérative, pour des gens
qui veulent démarrer une coopérative, qui vivent
déjà dans le système coopératif, je voudrais
tellement qu'il soit sensible au fait que ce n'est pas facile pour ces petites
organisations de demander de l'aide, de définir leurs projets.
Alors là, ils avaient une institution à leur mesure. Pas
trop grosse, avec des outils bien pertinents, avec une équipe qui savait
un peu de quoi il en retournait et qui offrait ces services auxquels
s'attendent les coopératives. Alors là, on en envoie la
moitié au ministère, l'autre moitié à la
Société de développement industriel. On tue
l'organisation, on tue l'expertise, on la noie dans la grande entreprise.
Je disais dans une autre intervention, M. le Président, que le
ministre allait passer pour être le fossoyeur de ce qui n'est pas gros,
de la petite entreprise. Il nous propose de faire ça. Je dis bien "il
nous propose", parce que j'espère toujours qu'on pourra trouver une
autre avenue. Il l'a fait avec les groupes de soutien aux initiatives jeunesse
qu'il a intégrés dans les commissariats industriels.
L'AQVIR dont on a parlé, il propose de l'intégrer à
la SDI. Voyez-vous, il y a des gens qui, ailleurs, dans d'autres circonstances,
dans d'autres pays, dans d'autres contextes, ont cru aussi que de bâtir
de grosses organisations, ça amenait effectivement des économies
d'échelle, que ça allait être plus efficace. On s'est rendu
compte cependant que ça devenait de plus en plus lourd aussi en termes
de communication, de planification, de distribution de services. Et ça
devient des bureaucraties absolument ingouvernables. Le plus bel exemple de
ça, c'est l'Union des républiques socialistes soviétiques
où, ah oui!, on avait tout concentré les pouvoirs. C'était
parfait. C'était parfait, mais c'était en train de mourir, de
s'étouffer.
Bien, c'est ce qui risque aussi d'arriver à la SDI. On lui confie
des tâches, des responsabilités pour lesquelles elle a peu
d'expertise, des personnes avec lesquelles elle est peu habituée de
transiger, des entreprises avec lesquelles elle a peu l'habitude de travailler,
et on pense que ça va continuer de fonctionner pareil. (4 h 20)
Je peux vous dire, pour avoir consulté les gens du milieu, qu'ils
sont catastrophés, sauf que ce milieu-là n'est pas un milieu
organisé d'une façon très très structurée
sur le territoire. On est dans les coopératives forestières, on
est dans les coopératives de travailleurs, on est dans les
coopératives de consommation. Alors, avant que l'on finisse par pouvoir
réagir et faire entendre son point de vue, il risque d'être trop
tard, M. le Président. Et moi, ce que je demande au ministre, c'est
qu'il ait une oreille attentive pour ces craintes qui s'expriment dans le
milieu, M. le Président, et qui disent au ministre: Vous faites fausse
route. Il y a une coopérative de forestiers, une association de
coopératives forestières qui a même
démissionné, qui a laissé son siège au Conseil de
la coopération du Québec, parce que le Conseil n'avait pas
soutenu correctement à son point de vue, la défense de la
Société de développement des coopératives. Elle a
ainsi quitté le Conseil de la coopération du Québec. Et le
président du Conseil, M. Béland, lui-même, il y a à
peine quelques semaines, manifestait un grand nombre d'inquiétudes
à l'endroit du ministre. Bien sûr qu'il lui a répondu. Il
est poli. Il lui a répondu, M. le Président. Il a essayé
de le rassurer, mais il n'a pas résolu les problèmes que lui
soulignait le président du Conseil de la coopération qui, soit
dit en passant, est quand même président du Mouvement Desjardins,
qui est une grande institution, mais, à l'origine, une toute petite
coopérative d'épargne et de crédit.
Comme quoi, parfois, petite entreprise va loin. Et on a des exemples en
masse, je dirais, au Québec, en grand nombre, des gens qui ont eu des
idées neuves. Bombardier en est un bel exemple. Des gens qui ont
démarré quelque part, dans un petit atelier, quand ce
n'était pas dans leur garage, et, maintenant, ce sont les plus beaux
fleurons de l'économie québécoise. Mais le ministre est
insensible à cela. Lui, il sait comment il va faire tout ça; la
SDI, à laquelle il ajoute sans arrêt de nouvelles fonctions, va
être bonne pour tout faire ce qu'il lui demande de faire. Elle va pouvoir
développer toutes les cultures et toutes les approches, M. le
Président. Je m'excuse, mais s'il a un tant soit peu de formation au
niveau de la gestion, et je pense que c'est son cas, il sait très bien
et il sait parfaitement, M. le Président, que ce qu'il propose ne
s'avérera pas la solution aux problèmes qu'il croit pouvoir
solutionner, à moyen et à long terme.
Revenons maintenant, M. le Président, à cette fameuse
Société de développement des coopératives.
Qu'est-ce qu'elle fait cette société? Elle fournit aux
entreprises, en plus d'une aide financière, une aide technique
importante à la préparation de projets, qu'il s'agisse de
démarrage, qu'il s'agisse d'expansion. Elle fournit des outils de
gestion pour aider les entreprises à se développer. Elle aide les
entreprises à donner, les entreprises coopératives, ça
s'entend, des services de qualité à leurs membres. On dit que les
entreprises coopératives ont un taux de réussite et de survie qui
dépasse largement celui qu'on enregistre pour l'ensemble des
entreprises. Dans ce sens-là, la SDC joue un rôle conseil
auprès des dirigeants de coop. Elle augmente la qualité des
demandes d'aide et facilite le montage des dossiers par l'entreprise, ce qui
facilite par la suite, l'aide au financement.
En fait, avec de toutes petites sommes, la SDC a permis et permet
encore, puisqu'elle est toujours bien vivante, M. le Président, d'aider
des centaines d'entreprises. On a, en 1989-1990, reçu 99 demandes
d'aide. 41 ont été autorisées, on a suivi 151 entreprises,
115 sont en consultation. On a fait la révision financière de 410
entreprises, M. le Président. Alors, toute cette expertise, toute cette
qualité accumulée depuis des années d'efforts, tout ce
réseau établi avec l'ensemble des coopératives du
territoire, d'un revers de la main, on va dire: C'est terminé, allez
donc faire autre chose ailleurs, on va vous garder un "sous-ministériat"
au ministère de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, et, pour
le reste de l'équipe, allez vous installer à la SDI où on
va vous nommer un vice-président. Ce sera très bien, sans doute,
pour la visibilité, mais je ne suis pas certaine que ce sera très
bien pour l'aide à l'entreprise.
Maintenant, quand on regarde l'ancienne loi et quand on regarde le
projet de loi qui est devant nous, on se rend compte, ce qui est absolument
effarant, que non seulement on va obliger les coopératives à
aller s'inscrire à la SDI - et je ne reprends pas la
démonstration que je faisais tout à l'heure, M. le
Président, sur les méandres à travers lesquels il faudra
passer - non seulement cela, mais, en plus, qu'on ajoute des autorisations qui,
et on en a discuté, le ministre et moi, en commission parlementaire,
vont passer par le ministre, vont être transférées à
la SDI, le dossier va revenir au ministre et, finalement, la décision
pour aider ou non l'entreprise sera prise, M. le Président. Mais,
ça n'a aucune espèce de sens, une attitude et une approche comme
celle-là. Et il nous dit, M. le Président, et il le dit depuis le
début, qu'il veut faire ça parce qu'il veut être plus
efficace, parce que ça va être plus utile, M. le
Président.
J'aimerais ça que, pendant un moment, pendant quelques jours, le
ministre participe à la vie d'une coopérative, le ministre aille
répondre, s'installe dans un bureau. Il a l'habitude de dire: J'aime
bien ça, rencontrer les entreprises, discuter avec les gens d'affaires,
alors qu'il aille s'installer à la SDC quelques jours pour voir. Parce
qu'il pourra comparer, il a déjà été
président de la SDI. Il pourra comparer, à ce moment-là,
si le type de demandes qui était fait à la SDI, c'est le
même qui est fait à la SDC, M. le Président. Ça
pourra peut-être le confirmer dans sa décision. Moi, à mon
point de vue, ça va plutôt infirmer sa décision. Ça
va plutôt lui faire comprendre que le choix qu'il fait n'est pas le bon
choix, que l'orientation qu'il retient, n'est pas la bonne orientation, M. le
Président. Mais, évidemment, il n'a jamais eu à faire ce
type d'analyse dans ce type d'institutions pour de toutes petites entreprises
coopératives. Et, je le répète, parce que je l'ai dit
à d'autres moments, dans le fond, il réalise son vieux
rêve: vouloir tout contrôler, tout organiser...
Une voix: C'est ça.
Mme Marois: ...sous un prétexte absolument
généreux, sous un prétexte qui est assez
intéressant à envisager, quand on ne creuse pas davantage, sous
un prétexte de guichet unique; le fourre-tout. J'écoutais mon
collègue, le député de Lévis, tout à
l'heure, qui intervenait sur la question de l'AQVIR et qui disait: Voyez-vous,
c'est pas vrai que l'habit unique ça convient à tout le monde,
parce que tout le monde n'a pas la même taille: il y en a qui sont plus
grands, il y en a qui sont plus râblés, il y en a qui sont un peu
plus ronds. Alors, quand on fait le même habit, c'est évident
qu'il y en a qui ont l'air complètement perdus là-dedans et qu'il
y en a d'autres qui ont l'air tout étriqués. Ça ne va pas.
Bien là, c'est ce qu'il est en train de faire, de tailler un seul habit
qui devra faire à tout le monde.
Là, M. le Président, j'aurais aimé que le ministre
soit avec moi à la commission Bélanger-
Campeau il y a deux semaines. Nous avons reçu l'Association des
femmes d'affaires du Québec. Elle regroupe près de 4000 femmes,
M. le Président. Nous avons eu un débat fort intéressant
d'ailleurs sur la question constitutionnelle. Mais nous avons eu aussi un
débat avec elles sur la question de l'aide au financement de la petite
et de la moyenne entreprise. Et quand on dit petite, on parle de montants en
deçà de 50 000 $, donc c'est vraiment très petit; c'est du
commerce, c'est du service, de toutes petites entreprises. Et elles nous ont
dit, noir sur blanc, c'était écrit dans leur document, elles nous
l'ont répété de vive voix: II n'existe pas d'expertise,
d'outils et de capitaux pour ce type d'entreprises, M. le Président. Et,
moi, je dis au ministre ce soir: II n'en existe pas. Et, avec les gestes qu'il
compte poser à l'égard de la SDC, il en enlève, un des
outils, qui se dirigent et qui s'orientent vers ce type d'entreprises, qui ne
sont pas à propriétaire unique, j'en conviens, mais qui sont des
petites entreprises, de très petites entreprises. (4 h 30)
Et je rappelais qu'il avait fait la même chose avec les groupes de
soutien aux initiatives-jeunesse dont il avait fait disparaître, à
toutes fins pratiques, la vocation. Il élimine du champ de l'aide
à l'entreprise les outils nécessaires pour ceux et celles qui ne
transigent pas habituellement avec des gestionnaires de gros capitaux.
Cette semaine, j'étais à Montréal pour annoncer
avec le chef de l'Opposition ou proposer au ministre un projet d'aide à
l'entreprise qui soit un tant soit peu plus costaud que ce qu'il nous a
annoncé depuis déjà quelques mois et dont il
répète l'annonce, M. le Président. Nous avons
rencontré, à l'occasion, des gestionnaires de capitaux de risque,
qui venaient, probablement de cinq ou six institutions financières
différentes. Et, moi, je lui propose, à M. le ministre, qu'il
aille leur parler, à ces gens-là. Je le sais qu'effectivement il
aime le faire et qu'il va sûrement le faire. Mais qu'il la pose la
question pour savoir si quelque part, dans l'ensemble de nos institutions
financières et de nos outils de financement, il n'y a pas un trou, un
grand espace qui n'est pas couvert et qui fait que l'aide à la petite et
à la moyenne entreprise est négligée au Québec, M.
le Président.
Ce soir, je vous dirai qu'en remettant en question la SDC par le projet
de loi qui est devant nous il élimine une autre des institutions qui
pourraient venir aider ce type d'entreprises. J'espère que l'avenir me
donnera tort, mais malheureusement je crains que mes prédictions se
révèlent justes, que nous perdions l'expertise que nous avions
bâtie assez difficilement à certains moments, parce que ce n'est
pas facile de développer des modes d'analyse, des outils qui vont
être pertinents à un milieu de vie. Le ministre va sûrement
me répondre: Écoutez, on n'abolit pas les postes, ils seront tous
conservés, mais la moitié à un endroit, l'autre
moitié à un autre. La moitié dans une entreprise qui est
habituée à négocier avec de la grande entreprise, l'autre
moitié avec une institution qui est un ministère, qui est plus de
l'ordre de la technocratie, disons le bien, qui peut être très
efficace, mais qui n'offre pas les mêmes caractéristiques qu'une
petite société d'État toute flexible, M. le
Président.
Alors, évidemment, vous comprendrez qu'il n'est pas question pour
nous d'appuyer un tel projet. Nous sommes en profond désaccord avec ce
qu'il sous-tend comme philosophie. Je l'ai dit au ministre et j'ai
travaillé avec lui très fort sur l'étude article par
article du projet de loi. Mais j'ai bien prévenu le ministre, dès
le départ. J'ai dit: Je vais vous aider à bonifier au moins ce
qui est là, parce que, moi, je ne peux jamais nous souhaiter le pire.
Mais j'ai dit: À chaque fois j'aurai des objections, sur chacun des
articles, parce que vous me mettez sans arrêt en porte-à-faux,
compte tenu que je suis en désaccord avec le projet lui-même et
avec son orientation. Alors, on peut bien changer une virgule de place, on peut
bien ajouter un mot, on peut bien se dire: Si c'était fait comme
ça, ça serait un peu mieux, mais le mal sera fait quand
même. Alors, dans ce sens-là, je ne peux absolument pas, d'aucune
espèce de façon, donner mon aval au projet de loi qui est devant
nous, M. le Président. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée. Sur cette motion de prise en considération du
rapport, M. le député de Masson.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Il semblerait
que le parti au pouvoir a donné au ministre de l'Industrie, du Commerce
et de la Technologie tous ses avents pour qu'il devienne le poète des
chiffres. La littérature et l'industrie semblent, depuis quelque temps,
de l'autre côté, faire bon ménage. Ici, j'aimerais citer
que la SDI semble le Gargantua de la littérature dans l'industrie pour
le Parti libéral, une personne qui engouffre, selon Rabelais, tout ce
qui lui tombe sous la main. Mais, en y pensant de très près,
Gargantua était, selon Rabelais, un personnage extraordinaire, mais il
ne faut pas oublier La Fontaine non plus, "La grenouille et le boeuf: la
grenouille s'enfla si bien et tant qu'elle en péta. A trop absorber, on
éclate. De notre côté, nous soutenons que la SDI est la
grenouille industrielle du Québec, actuellement. Elle veut tout bouffer
sur son passage. D'ailleurs, le ministre actuel avait demandé, durant
qu'il était président de la SDI, au ministre de l'Industrie et du
Commerce de l'époque, M. MacDonald, de poser ce geste qu'il pose
aujourd'hui et M. MacDonald
lui avait dit que c'était impossible. En changeant de fonctions
et en devenant le titulaire ministériel de ces dossiers, il profite de
son autorité pour tout gaver.
M. le Président, je crois que nous devons rappeler aux
ministériels que la Société de développement des
coopératives a des qualités extraordinaires et elle a eu des
qualités extraordinaires durant les six ans et demi de
prospérité que nous venons de passer. Elle a acquis une
crédibilité auprès du milieu coopératif et des
divers agents socio-économiques, qui est indiscutable, en étant
autonome, seule, indépendante, souveraine. Les programmes de la SDC
continuent de répondre aux besoins des entreprises coopératives,
fussent-elles des travailleurs, des consommateurs ou des producteurs.
Intérêt grandissant de la part des travailleurs et des dirigeants
des PME pour la formule de coopérative des travailleurs actionnaires,
une autre note de noblesse acquise dans les dernières années par
la SDC. Les membres du conseil d'administration de la SDC sont issus du milieu
coopératif et connaissent bien les besoins spécifiques des
entreprises coopératives, ce qui contribue à la qualité
des interventions de la SDC, en période de prospérité
toujours, M. le Président.
L'existence d'une société autonome est la meilleure
façon d'assurer la qualité de l'aide apportée aux
entreprises coopératives et de leur assurer les meilleurs services qui
s'adressent à des connaisseurs, à des gens d'expérience et
à des gens qui depuis longtemps oeuvrent dans un milieu. C'est
certainement mieux comme expertise, quand on leur demande, que quelqu'un qui
veut faire Gargantua ou la grenouille de La Fontaine et tout gaver sur son
passage. L'argument des coûts reliés à la SDI peut
difficilement être invoqué puisque la Société
montrait, à la fin de l'exercice 1989-1990, un excédent de 1 538
570 $. Donc, ce n'est pas une raison financière. L'"accaparation" n'est
pas une raison financière, parce que, de façon autonome, la SDC
avait une gestion qui rendait service à ceux qui en avaient l'usufruit,
à ceux qui en profitaient; et, à la toute fin, en additionnant
dépenses et revenus, 1 538 570 $ de bénéfices. (4 h
40)
Mais, M. le Président, pis encore, dans ce début de
récession que nous connaissons... C'est sûr que c'est un
début de récession. La récession actuelle, M. le
Président, est de -0,5 %. Beaucoup d'emplois ont été
perdus au Québec, on se le fait rappeler et on vous le dit aussi. Et on
fait toujours, à ce moment-là, une comparaison avec la crise de
1981-1982 qui, elle, était de -5,3, presque 11 fois plus forte que la
crise d'aujourd'hui. Et, si on donne tout au même endroit, si les points
de décision donnent l'autorité dans un même point, si
Gargantua a une indigestion, c'est l'ensemble de ces trois choses-là que
vous accaparez qui fera souffrir l'ensemble des citoyens. Et la SDI
elle-même, comme la gre- nouille "accaparatrice", sera la première
à en péter, comme dit La Fontaine, et nous n'aimerions pas
ça.
Le contexte économique difficile actuel n'est pas difficile, M.
le Président, comme celui que nous avons connu en 1982-1983. Je vous ai
vu vous lever, cet après-midi, comme un ressort en disant: Vous avez
perdu 144 000 emplois. Oui, mais, un instant, la crise était 11 fois
plus forte: -0,5 actuellement et -5,3 en 1981-1982. Vous avez perdu beaucoup
plus que 14 000 emplois depuis un an. Et vous vous acharnez à tout
mettre dans le même giron. "Qui trop embrasse mal étreint", et
votre prédécesseur vous l'a dit. Mais, comme cadeau de Noël,
ils veulent tout accaparer. Dans votre bas de la SDI, comme ministre
responsable, vous y jetez l'AQVIR, la Société de
développement des coopératives et une SDI que vous croyez une
"mère veilleuse", même si à cette heure-ci il y a
peut-être quelques mères veilleuses qui nous regardent.
Nous, de notre côté, nous vous disons, et je crois que vous
devriez au moins avoir un tympan attentif à nos
réverbérations verbales: La grenouille s'enfla tant qu'elle en
péta. La Fontaine.
M. le Président, nous croyons pertinemment que M. le ministre
veut accaparer trop de choses, que c'est trop gros pour le portefeuille qu'il
détient et que c'est nuisible pour les petites industries qui gravitent
dans le domaine du développement économique du Québec. Je
vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Masson. Sur la même question, est-ce qu'il y a
d'autres intervenants? M. le député de Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, j'écoutais les propos du
député de Masson et je ne pouvais pas m'empêcher de me
rappeler une parole de i'Ecclésiaste qui disait, parole
célèbre, verset 1, chapitre, si ma mémoire est bonne,
onzième: Tous les fleuves vont à la mer, mais la mer n'est jamais
remplie.
Je me demande si la SDI ne fait pas partie de ces mers incroyables - ce
que le député de Masson appelle "les mères veilleuses" -
qui sont insatiables. En l'occurrence, la SDI va devenir encore une fois le
guichet unique universel. Moi, je pense que c'est une erreur, une erreur
fondamentale. Je suis un de ceux qui, il y a un certain nombre d'années,
alors qu'il était professeur à la Faculté de droit de
l'Université Laval, avait concouru, avec le président du
Mouvement Desjardins du temps, M. Alfred Rouleau, en suscitant un mouvement
pour que le Barreau inscrive les cours de droit des coopératives
à son programme. Pourquoi? Parce qu'on constatait que souvent des gens
qui voulaient former des
coopératives arrivaient à un bureau d'avocats; les avocats
n'avaient pas de formation en droit des coopératives et
suggéraient, à toutes fins pratiques, à leurs clients de
former une société sans but lucratif, parce qu'ils étaient
beaucoup plus familiers avec la procédure de la formation de
sociétés sans but lucratif, puis qu'ils ne savaient comment faire
une coopérative et, dans la plupart des cas, ils ne savaient pas ce que
c'était. M'étant rendu compte de ça, j'avais, avec le
président du Mouvement Desjardins, proposé au Barreau que
ça devienne une matière d'examen, pas nécesairement en y
ajoutant six mois d'études en droit des coopératives, mais au
moins qu'un avocat qui a le titre d'avocat ait pu suivre des cours en
matière de droit coopératif, passer des examens pour au moins
être capable de se débrouiller dans ce secteur-là, pour au
moins savoir quelle est la nature juridique d'une coopérative et comment
ça fonctionne.
Je vais vous dire que dans un des premiers groupes qui a corrigé
les premiers examens en droit des coopératives, il y avait Me
François Jobin qui a été un des avocats-experts, un des
rares qu'il y avait au sein du gouvernement. Il y avait Me Claude
Béland, qui était à ce moment-là conseiller aux
caisses d'économie et je participais également à la
correction des examens du Barreau en matière de droit des
coopératives. On a travaillé ensemble pour faire en sorte que les
avocats, au fond, puissent être familiers avec ce secteur-là.
Aujourd'hui, je me rends compte que, de plus en plus, dans le secteur des
coopératives, on voit les institutions tomber une par une et on a
l'impression de les voir tomber particulièrement la nuit.
Quand il y a eu la "démutualisation" de La Laurentienne,
ça s'est passé aussi en pleine nuit. Le ministre avait promis de
faire un chapitre sur la "démutualisation". Je remarque qu'à ce
moment-là l'ex-ministre des Finances du gouvernement - on ne m'accusera
pas de faire de la partisanerie politique - qui était M. Raymond
Garneau, avait suggéré - il avait été
cohérent d'ailleurs, il s'était engagé par la suite
là-dedans pour faire un rapport au gouvernement - que l'on ne
procède pas de cette façon-là. Si les coopératives,
si les mutuelles d'assurances avaient besoin de fonds, qu'on procède de
façon qu'on puisse faire une meilleure capitalisation des mutuelles;
mais qu'on n'essaie pas de "démutuali-ser" les mutuelles parce qu'elles
avaient besoin davantage de capitalisation. Un des ministres
précédents du gouvernement Bourassa avait commencé
à procéder en "démutualisant" les mutuelles d'assurances
du Québec. Je remarque que Raymond Garneau, comme ex-ministre des
Finances, avait fait des propositions au gouvernement pour qu'on essaie de
trouver des formules sui generis, des mesures particulières pour le
financement des mutuelles d'assurances parce que, essentiellement, encore
là, il s'agit de trouver des formules pour que les entreprises, les
institutions du secteur coopératif puissent avoir des formules qui leur
conviennent, qu'elles soient habillées sur mesure en fonction de leurs
besoins. Et de voir qu'aujourd'hui, encore une fois...
Pourtant, je comprends mal, le gouvernement. On a fêté
cette année, le 6 décembre dernier, la fondation de la
première caisse populaire à Lévis. J'ai l'impression que,
si, à ce moment-là, le ministre de l'Industrie et du Commerce
avait été au gouvernement, Alphonse Desjardins n'aurait pas pu le
faire. On aurait dit: Une petite binerie, il ramasse des dix-cents, ça
n'a pas de bon sens. C'est évident qu'à ce moment-là les
institutions financières du temps ont essayé de le faire crever,
mais il a réussi avec la confiance des gens du milieu à
Lévis, avec les prêtres du collège, même avec le
curé qui annonçait en chaire, en demandant aux citoyens d'aller
à la réunion de M. Desjardins, que c'était une bonne
oeuvre, en fournissant des locaux gratuitement et la caisse a
démarré. On a essayé de lui faire faire faillite et
ça n'a pas marché. Il était persévérant. La
deuxième, ça n'a pas été formé à New
York. La deuxième a été à côté de
Lévis, à Lauzon. Et, ensuite, graduellement, les caisses se sont
formées ici et là. Aujourd'hui, plus de 50 % des épargnes
des Québécois font partie des caisses populaires parties avec des
dix-cents qu'Alphonse Desjardins et sa femme Dorimène ramassaient sur la
table de la cuisine parce qu'ils n'avaient pas de locaux, ils n'avaient pas de
caisse organisée; ça se passait dans une cuisine. Ce
n'était pas gros, mais il y avait à la base un principe qui fait
la force des entreprises humaines beaucoup plus que l'efficacité,
beaucoup plus que la productivité, qui semblent être les seules
vertus du monde moderne. On se rend compte, surtout dans l'affaire du "savings
and loans" aux États-Unis, que ce n'est pas nécessairement dans
ces grandes institutions financières qu'on trouve les modèles de
vertu, qu'aujourd'hui le système financier américain est en
période difficile, en crise financière, et possiblement qu'il
précipitera avant longtemps une crise économique et
financière aussi importante que celle des années trente avec ce
qui se passe actuellement dans le domaine financier aux États-Unis.
On se serait attendu que, prenant l'exemple du modèle
québécois qui s'est développé, on conserverait les
institutions qui contribuent à créer ces institutions
québécoises typiques, basées sur la solidarité et
qui mettent ensemble des personnes qui veulent bâtir quelque chose. Au
contraire, malgré la lettre de Claude Béland, président,
aujourd'hui, du mouvement coopératif et président du Conseil de
la coopération, qui s'inquiète des transformations que veut
apporter le ministre qui veut mettre la hache dans la Société de
développement des coopératives, encore là, dans une
institution qui n'est pas propre au mouvement coopératif dont,
éventuellement, les
gens seront, sans doute, de formation générale comme dans
la Société de développement industriel, et, à ce
moment-là, le mouvement coopératif aura perdu une autre
institution...
Qu'on regarde ce qui s'est passé sous le gouvernement
précédent, alors qu'après les caisses populaires on a fait
confiance au secteur de l'habitation coopérative, le
développement fulgurant qu'il y a eu à la fin des années
soixante-dix et au début des années quatre-vingt dans le domaine
de l'habitation coopérative qui est une formule moderne, qui est sans
doute la formule la plus adaptée au monde moderne, qui recherche en
même temps qu'une efficacité économique une
préoccupation sociale. Il n'y a pas beaucoup d'institutions qui allient
les deux d'une façon aussi parfaite, les préoccupations
économiques et les préoccupations sociales. Je ne comprends pas
que le ministre veuille maintenant rattacher la Société de
développement des coopératives à la Société
de développement industriel qui n'aura pas d'âme
coopérative, pas de préoccupations coopératives, pas
d'environnement coopératif.
À ce moment-là, celui qui parlait tout à l'heure -
celui qui m'a précédé, je pense que c'est le
député de Shefford - de la culture coopérative, bien, il
n'y aura pas de culture coopérative et, finalement, ce sera une perte
considérable sur le plan des institutions pour le mouvement
socio-économique québécois. Je trouve ça de valeur.
J'ai l'impression que là, on est vraiment dans les autobus. C'est
"avançons par en arrière". Au lieu de progresser, d'aider au
développement d'une formule qui va correspondre de plus en plus au monde
moderne, qui veut allier l'économie et le social, on essaie au contraire
de dénaturer les institutions qui pouvaient encore jouer ce rôle
au Québec. Je trouve ça déplorable, mais il est encore
temps pour le ministre de retirer son projet de loi. Je pense qu'il est encore
temps. Ce n'est pas utile, ce que vous faites là. Je pense que les
préoccupations de ceux qui vous ont écrit...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): En conclusion, M. le
député.
M. Garon: ...je conclus là-dessus, M. le Président,
devraient suffisamment vous faire réfléchir pour, au moins,
mettre de côté le projet de loi et prendre quelques mois
additionnels de réflexion avant de faire une oeuvre qui va être
suicidaire et meutrière pour le mouvement coopératif. Je vous
remercie beaucoup.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Lévis. Est-ce que la motion proposée par
le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie proposant
d'adopter le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le
projet de loi 87, Loi sur l'aide au développement des
coopératives, est adoptée?
Des voix: Adopté sur division.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur
division. M. le leader du gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, je propose l'ajournement
de nos travaux à ce matin, 10 heures.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion
d'ajournement des travaux du leader du gouvernement est adoptée?
Adopté. Alors, les travaux de cette Assemblée sont
ajournés à ce matin 10 heures.
(Fin de la séance à 4 h 55)