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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mardi 19 mars 1991 - Vol. 31 N° 103

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Quatorze heures dix minutes)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Présence de l'ambassadeur de la République islamique d'Iran

J'ai le très grand plaisir de souligner la présence dans les tribunes de l'ambassadeur de la République islamique d'Iran, Son Excellence M. Mohammad Hussein Lavassani.

Nous allons maintenant procéder aux affaires courantes.

Il n'y a pas de déclaration ministérielle.

Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, je vous invite à appeler l'article b du feuilleton de ce matin.

Projet de loi 126

Le Président: À l'article b du feuilleton... je demanderais la collaboration des collègues s'il vous plaît. alors, à l'article b du feuilleton, m. le ministre délégué à l'administration et à la fonction publique, président du conseil du trésor, présente le projet de loi 126, loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les régimes de retraite des secteurs public et parapublic. m. le président du conseil du trésor.

M. Daniel Johnson

M. Johnson: M. le Président, ce projet de loi apporte diverses modifications aux régimes de retraite des secteurs public et parapublic afin de donner suite à certaines propositions formulées par le Comité de retraite et afin d'en faciliter l'administration.

C'est ainsi que le projet de loi modifie d'abord la Loi sur le régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics afin de permettre aux employés du gouvernement fédéral qui sont intégrés à une fonction visée par ce régime d'opter de participer à ce régime ou à un régime similaire à celui auquel ils participaient. Il modifie également cette loi afin de permettre la nomination d'un substitut à l'arbitre chargé de réexaminer en appel certaines décisions du Comité de retraite. Le projet de loi prévoit en outre que les décisions rendues par l'arbitre ou son substitut devront être écrites et motivées.

Cette loi est également modifiée, en ce qui a trait à la retraite anticipée, de façon à ne permettre l'ajout d'années de service qu'aux catégories ou sous-catégories de personnes déterminées par règlement et que si leurs conditions de travail le permettent. Le projet de loi modifie de plus cette loi à l'égard des employés de niveau non syndicable afin, d'une part, de permettre au Comité de retraite d'instituer un sous-comité chargé de réexaminer certaines décisions de la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances touchant ces employés et afin, d'autre part, d'instituer un comité de placement des fonds découlant des cotisations de ces employés lorsqu'ils participent au régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics. par ailleurs, le projet de loi accorde, dans le cadre du régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, du régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels, du régime de retraite des enseignants et du régime de retraite des fonctionnaires, le droit pour toute employée, qu'elle soit enseignante ou non, de faire créditer, sans cotisation et jusqu'à concurrence de 120 jours cotisables, les jours d'un congé de maternité qui était en cours le 1er juillet 1976 ou qui a débuté après cette date mais qui s'est terminé avant le 1er juillet 1983.

Enfin, le projet de loi modifie également le régime de retraite de certains enseignants, le régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels, le régime de retraite des enseignants et le régime de retraite des fonctionnaires afin d'y prévoir que le montant de la réduction de la pension payable en vertu de chacun de ces régimes ne peut excéder le montant de la rente versée en vertu d'un régime équivalent à celui établi en vertu de la Loi sur les régimes de rentes du Québec. Le projet de loi comporte d'autres modifications, principalement de nature technique ou de concordance.

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Maintenant dépôt de documents, M. le ministre des Finances.

Rapport annuel de la Caisse de dépôt

et placement du Québec, états financiers

et statistiques financières pour l'année 1990

M. Levesque: Alors, M. le Président, qu'il me soit permis de déposer le rapport annuel 1990 de la Caisse de dépôt et placement du Québec

ainsi que les états financiers et les statistiques financières pour la même année.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. M. le ministre des Approvisionnements et Services.

Rapport annuel du ministère des Approvisionnements et Services

M. Dutil: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1989-1990 du ministère des Approvisionnements et Services.

Décision du Bureau de l'Assemblée

Le Président: Alors, ce rapport est déposé. Je dépose moi-même maintenant la décision 427 du Bureau de l'Assemblée nationale. Le document est déposé.

Dépôt de rapports de commission, M. le président de la commission de l'aménagement et des équipements et député de Lévis.

Vérification des engagements financiers

M. Garon: M. le Président, je dépose le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé les 7 et 13 février 1991 afin de procéder à la vérification des engagements financiers du ministère des Affaires municipales pour les mois de juin 1990 à décembre 1990 et du secteur habitation pour l'année 1990.

Le Président: Donc, ce rapport est déposé. Maintenant, dépôt de pétitions. M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition.

Services de qualité pour le traitement du cancer réclamés

M. Gendron: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 1234 pétitionnaires, citoyens et citoyennes d'Abitibi-Témiscamingue.

Les faits invoqués sont les suivants: "Considérant le manque de ressources pour le traitement du cancer dans notre région, nous, soussignés, prions l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du ministre de la Santé et des Services sociaux afin de réclamer le droit pour la population de recevoir des services de qualité pour le traitement du cancer et d'appuyer les démarches entreprises pour le maintien et le développement des services rendus actuellement au centre hospitalier Rouyn-Noranda."

Je certifie que l'extrait est conforme aux règlements et à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée. Maintenant, Mme la députée de Marie-Victorin.

Demandes à l'Assemblée de constituer une commission parlementaire sur le logement

Mme Vermette: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 37 pétitionnaires membres du Regroupement des comités de logement et associations de locataires du Québec.

Les faits invoqués sont les suivants: "Considérant l'appauvrissement général des populations des régions éloignées et des grandes villes; "Considérant le nombre grandissant des sans-logis; "Considérant la part de plus en plus élevée de leur revenu que doivent consacrer les locataires au logement; "Considérant les problèmes de logement de plus en plus criants; "Considérant l'augmentation des besoins en logements sociaux; "Considérant l'absence de contrôle réel des hausses de loyer; "Considérant que plus de 14 000 personnes ont signé une pétition demandant de limiter les hausses de loyer à un taux maximum de 2 % par année pendant les cinq prochaines années et que plus de 300 organismes appuient cette demande; "Considérant l'augmentation grandissante des cas de harcèlement et d'intimidation à l'endroit des locataires; "Considérant la fermeture de bureaux de la Régie du logement; "Considérant la perte de crédibilité de la Régie du logement chez les locataires;

L'intervention réclamée se résume ainsi: "Nous, soussignés, demandons que l'Assemblée exige du ministre des Affaires municipales et responsable de l'Habitation la mise sur pied d'une commission parlementaire sur le logement au Québec qui aura pour mandat de faire état de la situation sur le logement au Québec et de faire les recommandations nécessaires au gouvernement."

Le Président: Cette pétition est déposée. Maintenant, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

M. Boulerice: M. le Président, à titre de député d'une circonscription dont le stock de logements est l'un des plus anciens à Montréal, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 71 pétitionnaires, membres du Regroupement des comités de logement et associations de locataires du Québec.

Les faits invoqués sont les suivants, M. le Président, et vous me permettrez de les rappeler: "Considérant l'appauvrissement général des populations des régions éloignées et des grandes villes dont Montréal; "Considérant le nombre grandissant de sans-

logis, notamment dans le centre-ville de Montréal; "Considérant la part de plus en plus élevée de leur revenu que doivent consacrer les locataires au logement; "Considérant les problèmes de logement de plus en plus criants; "Considérant l'augmentation des besoins en logements sociaux; "Considérant l'absence de contrôle réel des hausses de loyer; "Considérant que plus de 14 000 personnes ont signé une pétition demandant de limiter les hausses de loyer à un taux maximum de 2 % par année pendant les cinq prochaines années et que plus de 300 organismes - M. le Président - appuient cette démarche; "Considérant également l'augmentation grandissante de cas de harcèlement et d'intimidation à l'endroit des locataires; "Considérant la fermeture de bureaux de la Régie du logement; "Considérant la perte de crédibilité de la Régie du logement chez les locataires;

L'intervention souhaitée, M. le Président, est la suivante: "Nous, soussignés, demandons que l'Assemblée nationale exige du ministre des Affaires municipales et responsable de l'habitation - puisque ce ministère n'existe plus - la mise sur pied d'une commission parlementaire sur le logement au Québec qui aura pour mandat de faire état de la situation sur le logement au Québec et de faire les recommandations nécessaires au gouvernement." Merci, M. le Président.

Le Président: Votre pétition est déposée.

Il n'y a pas d'intervention portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

Nous allons donc procéder à la période de questions et de réponses orales. Je vais reconnaître en première question principale M. le député de Jonquière. (14 h 20)

QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES

Le fardeau fiscal additionnel imposé aux municipalités

M. Dufour: Oui, M. le Président. Le ministre des Affaires municipales doit se sentir soulagé aujourd'hui. En effet, 900 élus municipaux réunis en assemblée spéciale en fin de semaine ne l'ont pas blâmé, lui, personnellement. C'est tout son gouvernement qu'on a blâmé. L'opposition ne cesse de s'amplifier contre le projet de pelletage du gouvernement libéral. Même chez les députés ministériels, M. le Président, le mécontentement gronde et on comprend d'ailleurs très bien la colère de tout ce monde-là. Avec des hausses de taxes aussi aberrantes que 3 600 000 $ pour fa ville de Charlesbourg, dans le comté du même nom, ou encore 8 400 000 $ pour la ville de Longueuil, et aussi, dans mon comté, la municipalité du Lac-Kénogami, où chaque contribuable paiera 157 $ de plus annuellement, on saisit mieux, dans ce contexte, l'opposition farouche des élus municipaux. Le ministre me dira qu'il s'agit de cas particuliers. Je lui répondrai qu'avec sa réforme, c'est 1500 cas particuliers qu'il aura sur les bras.

Ma question. Le ministre peut-il nous indiquer concrètement, dans les réaménagements qu'il évoquait la semaine dernière, qu'est-ce qui fera baisser les hausses de taxes vertigineuses des contribuables de Charlesbourg, de Longueuil, de la municipalité du Lac-Kénogami et de toutes les autres municipalités du Québec?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Ryan: Tout d'abord, il me fait plaisir de communiquer à cette Chambre que j'ai eu le plaisir de rencontrer ce matin le président par intérim de l'Union des municipalités du Québec, M. Ralph Mercier. Nous avons fait le point sur les discussions des dernières semaines. M. Mercier m'a communiqué un certain nombre de choses dont je discuterai plus tard aujourd'hui avec le premier ministre et les autres collègues immédiatement concernés. Mais j'ai cru comprendre, par l'entretien que j'ai eu avec M. Mercier, que déjà le ton des échanges qu'il sera possible d'avoir différera sensiblement du ton alarmiste que continue d'emprunter le porte-parole de l'Opposition.

Il m'a été donné, en fin de semaine, de causer avec plusieurs maires également, autant de la région de Québec, que de la région de Montréal et du beau comté d'Argenteuil, et encore là, j'ai constaté que. même si des difficultés existent, on n'a pas du tout le même climat que celui que j'ai pu voir dans certaines déclarations faites à la télévision. J'ai entendu un maire particulièrement démagogue. Il m'a été donné de rencontrer ses voisins en fin de semaine et ils m'ont dit: II est toujours comme ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: Ceci étant dit, j'ai déclaré à M. Mercier, ce matin, que le gouvernement maintient la volonté de dialogue déjà exprimée à maintes reprises par le premier ministre, par moi-même et par mes collègues intéressés et soyez assurés qu'en tout ce qui touche l'application des propositions du gouvernement, le gouvernement est intéressé à des échanges avec les municipalités qui permettront de dissiper certaines aspérités et de doser la charge de responsabilités de manière qu'elles soient le plus équitables possible partout à travers le Québec.

Et j'ajoute que dans l'entretien que j'ai eu avec M. Mercier, j'ai noté que celui-ci s'est

montré conscient également des problèmes budgétaires auxquels fait face le gouvernement en raison des demandes très fortes que fait peser sur lui la population de tout le Québec et, par conséquent, la même population de toutes les municipalités à laquelle veut faire appel le député de Jonquière d'une manière qui m'apparaît quelque peu démagogique.

Le Président: En conclusion, M. le ministre, s'il vous plaît. En question complémentaire.

M. Dufour: J'espère que le ministre ne contestera pas le droit aux citoyens de choisir leur maire, qu'ils aient un maire à leur goût.

Le Président: Question, s'il vous plaît.

M. Dufour: Comment le ministre pense-t-il que la municipalité de Sutton, dans le comté du ministre de l'Environnement, pourra absorber 219 000 $, au seul chapitre de la voirie locale, ou encore celle de Grantham-Ouest, dans le comté de Drummond, qui devra assumer une facture de 536 000 $ seulement pour la police? Comment ces municipalités-là vont-elles s'en sortir?

M. Ryan: Les députés de Brome... Le Président: M. le ministre.

M. Ryan: II s'agit encore une fois de cas particuliers et je voudrais assurer le député de Jonquière que les députés concernés, c'est-à-dire les députés de Brome-Missisquoi, dans le cas de Sutton, et de Drummond, dans l'autre cas, sont bien mieux placés, bien mieux informés que lui pour discuter ces choses avec nous. Ils m'ont déjà fait des représentations et tous ces cas particuliers ont été l'objet de représentations nombreuses et souvent beaucoup plus compétentes que les simples allusions démagogiques qu'on entend ici et ce n'est pas l'endroit.

Le Président: En question principale. M. Jolivet: Non. Le Président: Complémentaire? M. Jolivet: Complémentaire.

Le Président: Complémentaire, M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Devant le taux de chômage de l'ordre de 12,4 % en Mauri-cie-Bois-Francs, est-ce que le ministre, pour justement répondre à mon collègue le député de Saint-Maurice, pourrait indiquer, devant ce qu'il nous dit jusqu'à maintenant, comment il se fait que la municipalité de Saint-Boniface-de-Shawi- nigan aura 161 $ de plus sur ses comptes de taxes, qu'au pays des filles de Caleb, à Saint-Tite, on aura 141 $ de plus de taxes? Et est-ce que le ministre n'accepterait pas, dans ces circonstances, de vrais dialogues, et ces dialogues-là, dans des assises Québec-municipalités?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Ryan: Je suis content de voir que le député de Laviolette s'intéresse au cas de ses municipalités, c'est la première fois qu'il m'en parle depuis que...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: C'est la première fois que vous m'en parlez depuis que les propositions du gouvernement ont été déposées, le 14 décembre. Si vous vouliez que nous nous réunissions, comme je l'ai fait avec de nombreux députés ministériels, pour examiner toutes les implications du projet pour les deux municipalités que vous avez mentionnées ou pour toute autre municipalité de votre comté, je le ferai avec grand plaisir. Quant à l'idée de tenir des assises Québec-municipalités, elle avait déjà été esquissée entre les deux unions et le gouvernement. C'est une idée qui reste très bonne en soi, mais qu'il ne serait pas opportun de réaliser dans l'immédiat.

Le Président: Une question additionnelle, M. le député de Dubuc.

M. Morin: Merci, M. le Président. Comment le nouveau titulaire du ministère des Affaires municipales pense-t-il justifier auprès des contribuables de la municipalité de Saint-Prime, qui fait partie du comté de Roberval, dont le député est son collègue le ministre de la Chasse et de la Pêche, l'augmentation prévue de 114 $ de taxes annuellement et, de plus, comment le ministre croit-il pouvoir faire accroire à la population de deux municipalités de mon comté, soit Saint-Honoré et Saint-Ambroise, que les augmentations annuelles de taxes de 146 $ et 186 $ respectivement ne seront en fait qu'un simple partage équitable des ressources, et cela, dans un contexte où le taux de chômage frôle les 18 %? Comment le ministre fera la démonstration qu'il s'agit d'un simple partage équitable?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Ryan: Ici encore, c'est la première fois que le député me donne signe de vie à propos des propositions qui remontent déjà à plus de trois mois. Je le félicite de s'être réveillé.

Des voix: Ha, ha, ha! Bravo!

M. Ryan: Dans au moins deux des cas... Des voix:...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît!

À l'ordre, s'il vous plaît! Je demande la collaboration de tous les députés, s'il vous plaît. Alors, M. le ministre.

M. Ryan: Alors, je crois comprendre que dans le dernier cas qu'il a cité, il s'agit d'une municipalité qui n'a pas de service de police actuellement et qui est invitée à prendre sa part raisonnable et équitable, comme toutes les autres municipalités du Québec. Si je me trompe, je serai volontiers ouvert à tout échange d'information avec le député à ce sujet. Il peut arriver...

Moi-même, en fin de semaine - je vais vous raconter un cas - j'ai tenu une rencontre avec le conseil d'une municipalité de mon comté. Ils sont allés au bureau régional de la Voirie. On leur attribuait tel nombre de kilomètres qui serait à la charge du ministère des Transports. Vérification faite, le bureau régional a dû admettre que le chiffre était erroné et que c'était la municipalité qui avait raison. Je leur ai dit: C'est la vérité qui prévaudra et non pas les erreurs que nous avons pu faire de notre côté. Voici un cas où on est allé à la source. On corrige le problème immédiatement et tout de suite les chiffres sont ramenés à des proportions raisonnables. Dans ce cas-ci, je ne le sais pas. Je dis au député: Qu'il me soumette les chiffres qu'il a reçus de ces municipalités dont il a parlé. Nous les examinerons et il aura une réponse claire en toute hypothèse.

Une voix:...

M. Ryan: Oui, mais ce sont des hypothèses.

Le Président: Alors, en question principale maintenant, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. (14 h 30)

Impact de la nouvelle fiscalité municipale sur la relance de l'économie de Montréal

Mme Harel: Alors, M. le Président, une question reste incontournable à laquelle le ministre des Affaires municipales ne peut échapper, c'est la question de la ville de Montréal. Le ministre a beau répéter ces moyennes vertueuses pour cacher l'injustice fiscale et les disparités de sa réforme, les Montréalais, qui sont déjà les plus lourdement taxés avec un exode continu vers la banlieue, avec un taux de chômage le plus élevé des villes canadiennes - les Montréalais constituent moins du sixième de la population du Québec - vont pourtant avoir à payer presque le tiers de la facture, soit 138 000 000 $.

Le déséquilibre fiscal, M. le Président, est aggravé par le désengagement de Québec à l'égard du transport en commun. Montréal est acculée à des choix douloureux, presque impraticables, une hausse de la carte du métro à 65 $ par mois, une hausse de 100 %, ou une moyenne de 18 % d'augmentation du secteur commercial et industriel avec 1500 entreprises commerciales et industrielles qui connaîtront une hausse de 100 %.

Est-ce que le ministre des Affaires municipales croit ainsi relancer l'économie de Montréal?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Ryan: d'abord, il y a un facteur que, dans sa question, la députée de hochelaga-maisonneuve a soigneusement évité de mentionner. si vous examinez l'impact des propositions gouvernementales sur le taux de taxation résidentielle, vous constatez que c'est l'un des plus bas de tout le québec. vous l'avez remarqué?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: alors, si on applique les propositions gouvernementales suivant les suggestions qui ont été faites, qui ne sont pas impératives à tout point de vue... c'est un point qui est important à mentionner. montréal, comme vous l'avez dit, c'est quand même le sixième de la population de tout le québec. ça vaut la peine de le mentionner. la ville de montréal pourra faire des équations de toute sorte. elle pourra demander une certaine contribution à l'usager qui, actuellement, paie à peu près 0,30 $ sur la piastre que coûte son passage dans le transport en commun. elle pourra demander une contribution du côté du résidentiel et arriver du côté du non-résidentiel à une charge qui sera peut-être un petit peu plus modérée que ce qui est envisagé. du côté du non-résidentiel, je pense que ce qui est envisagé, c'est à peu près 10 % à montréal, 9 %à10 %.

Maintenant, une chose qui m'étonne, je vais vous dire ça en toute simplicité, du côté de l'Opposition...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ryan: ...du côté de l'opposition, quand on a parlé des frais de scolarité universels, il n'y a pas tellement longtemps, vous n'avez cessé de répéter pendant des semaines qu'il fallait cesser de frapper l'étudiant et aller du côté des sociétés commerciales et industrielles que vous reprochiez au gouvernement d'ignorer et de traiter de manière favorisée. le maire de montréal a déjà présenté des demandes au ministère des affaires municipales, demandant que soit haussé le multiplicateur qui permet de déterminer

le rendement de la taxe sur la valeur locative. Nous avons dû refuser à ce moment-là parce que la requête n'apparaissait pas justifiée au moment où elle fut faite. Pourquoi cette requête à laquelle on croyait, il y a trois ans, serait-elle devenue pernicieuse aujourd'hui et tellement mauvaise? Mes confrères qui m'ont précédé au ministère des Affaires municipales s'en souviennent. Alors, il faut mettre tous les facteurs dans le débat...

Le Président: En conclusion, M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Ryan: ...et je suis heureux de compléter cette réponse, M. le Président, en disant que, lors d'une rencontre que j'ai eue avec lui, vendredi, le maire Jean Doré, de Montréal, m'a paru de plus en plus disposé à agir de manière que nous tenions compte ensemble de tous les facteurs, et je lui en sais gré.

Des voix: Bravo!

Le Président: En question complémentaire.

Mme Harel: Le ministre des Affaires municipales, qui l'est aussi de l'Habitation, reconnaît-il que 75 % des Montréalais sont des locataires, contrairement à la majorité des Québécois? Et sait-il que 75 % aussi des usagers du métro utilisent le métro pour aller travailler, dont 45 % qui n'ont pas d'auto? Pourquoi ne frappe-t-il pas également, puisqu'il parle de frapper les secteurs commercial et industriel... Pourquoi est-ce que c'est d'abord et surtout les secteurs commercial et industriel de l'île de Montréal et des banlieues avoisinantes qui vont avoir un déséquilibre fiscal plus grand à supporter?

Le Président: M. le ministre.

M. Ryan: Tout d'abord, à titre de Montréalais de naissance et de résident de la ville de Montréal, je suis parfaitement conscient du problème qui découle du grand nombre de locataires dans la ville de Montréal et c'est pourquoi, vendredi dernier, je me suis rendu à l'hôtel de ville en compagnie de M. Doré pour rendre public un programme qui permet la participation du gouvernement du Québec à un immense plan de rénovation des immeubles locatifs sur le territoire de la ville de Montréal. Le gouvernement a consacré à la ville de Montréal 35 % d'un budget de 55 000 000 $ qui a été annoncé par le premier ministre dans le cadre du programme de relance économique au début de l'année.

La députée a peut-être oublié de noter qu'à la même occasion, le gouvernement a décidé de confier à la ville de Montréal l'entière gestion de ce programme, ce qui est un précédent et qui va dans le sens des revendications que nous présentons souvent au gouvernement fédéral aussi. Nous avons un très bon protocole dont les autorités montréalaises sont très heureuses et nous aussi. Et, pour le reste, c'est vrai qu'il y a des points à examiner si on veut parler de certaines municipalités qui sont peut-être...

Une voix:...

Le Président: En conclusion, s'il vous plaît, M. le ministre.

M. Ryan: Très bien.

Le Président: Très bien, une autre question additionnelle.

Mme Harel: M. le Président, est-ce que le ministre des Affaires municipales n'est pas conscient qu'il va ainsi rechercher un effet qui est celui de l'exode urbain, du secteur commercial et industriel en dehors des territoires plus lourdement taxés et qu'il va contribuer ainsi au déclin qu'il faudrait plutôt corriger de la situation de Montréal? M. le Président, comment le ministre peut-il prétendre que l'augmentation du secteur commercial et industriel n'aura pas d'effet sur la situation manufacturière ou commerciale à Montréal?

Le Président: M. le ministre.

M. Ryan: D'abord, on pourrait peut-être rappeler certains chiffres. La charge fiscale totale du secteur commercial et industriel sur l'île de Montréal est de 4 500 000 000 $ par année. La charge additionnelle qui découlerait des propositions gouvernementales pour l'île de Montréal, plan commercial et industriel, encore une fois - si on suit les premières propositions du gouvernement - serait de l'ordre d'à peu 153 000 000 $, ce qui veut dire à peu près une augmentation de 3,4 % de l'ensemble de la charge fiscale. Alors, ramenée à ces propositions réalistes et en se souvenant de nombreux avantages dont ont bénéficié les entreprises au cours des derniers mois au plan fiscal, je pense que ça demeure fort raisonnable.

Le Président: En question principale, M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition.

Restrictions budgétaires prévues dans le secteur de l'enseignement

M. Gendron: Oui. Le monde de l'éducation est également profondément inquiet. Là comme ailleurs, on assiste à des messages pour le moins ambigus, pour ne pas dire contradictoires, mais ça a l'air à être une vertu que cultive bien ce gouvernement. Il y en a pour tout le monde,

pour toutes les tendances. Le 22 février, suite à la forte opposition des groupes d'éducation populaire, le ministre de l'Éducation répétait, haut et fort: Pas question de couper le programme d'éducation populaire. Intouchable, disait-il. Six jours plus tard, le 28 février, ce n'était plus pareil, c'était inexact de prétendre que seule l'éducation populaire écoperait. Il a dit: Tous les programmes vont écoper. Et le 2 mars dernier, le ministre de l'Éducation affirmait, toujours haut et fort, comme il sait le faire, qu'il ne s'agissait pas de coupures à l'éducation, mais bien de réaménagement de programmes actuels. Quel fouillis! Question: Au moment où l'alarme est sonnée partout à l'éducation et que la Fédération des commissions scolaires s'apprête, elle aussi, à livrer bataille et à prendre les grands moyens, dit-elle, est-ce que le ministre de l'Éducation, aujourd'hui, a toujours le culot d'affirmer qu'il s'agit de réaménagement plutôt que de coupure de 100 000 000 $?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Pagé: M. le Président, très brièvement, lorsque les crédits des dépenses du gouvernement du Québec seront déposés, incessamment, le député d'Abrtibi et porte-parole de l'Éducation du côté de l'Opposition, sera en mesure de constater que le budget du ministère sera à la hausse, cependant, à un rythme de croissance, évidemment, qui tient compte d'une situation financière qui est précaire non seulement pour le gouvernement mais pour l'ensemble des pays industrialisés, l'ensemble des provinces canadiennes et l'ensemble des concitoyens, de celles et ceux qui nous écoutent.

Je me ferai un plaisir de répondre à toutes les questions soulevées par l'honorable député lors de l'étude des crédits qui est prévue, si ma mémoire est fidèle, pour les 23 et 24 avril prochain.

Deuxièmement, c'est le cas que des réaménagements à l'intérieur des enveloppes budgétaires seront effectués. On aura l'opportunité de discuter de la ventilation, de la pertinence, etc.

Concernant le programme d'éducation populaire, comme vous le savez, il comporte trois volets: le volet d'aide aux syndicats, le volet d'aide aux organismes volontaires d'éducation populaire. J'ai indiqué très clairement, et, M. le Président, le député devrait me citer comme il faut, que pour les OVEP, c'était intouchable et ce ne sera pas touché. Point.

Le Président: En question complémentaire, M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Est-ce que le ministre de l'Éducation a sensibilisé le premier ministre au fait que même s'il vient de prétendre que, globalement, le budget de l'Éducation pourra augmenter au livre des crédits, il n'en demeure pas moins qu'il s'agira d'une coupure de 6 % aux clientèles recevant des services éducatifs? Est-ce que le ministre de l'Éducation a sensibilisé le premier ministre que ça serait une coupure réelle de 6 % aux clientèles de l'éducation?

Une voix: Ah!

Le Président: M. le ministre de l'Éducation. (14 h 40)

M. Pagé: M. le Président, je n'ai pas l'intention, comment dirais-je, de répondre au piège combien grand qui est tendu par le député qui cite des pourcentages. Bien voyons donc! On aura l'opportunité d'en discuter concrètement, programme par programme, de comparer ce qu'on fart à ce que avez effectivement fait quand vous étiez de ce côté-ci de la Chambre.

Deuxièmement, j'ai eu l'opportunité aussi d'établir... Pourriez-vous demander, M. le Président, au député de Jonquière d'être plus calme, de me laisser répondre?

Le Président: S'il vous plaît, s'il vous plaît! Alors, à la question, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Le processus de révision des affectations budgétaires s'est fait, inspiré par une très grande transparence avec nos partenaires, avec la Fédération des commissions scolaires. J'ai eu l'opportunité d'échanger avec eux dans le cadre de la commission de financement au moins à trois reprises. De nombreux échanges ont eu cours. Actuellement, mes fonctionnaires visitent chacune des régions pour valider, somme toute, la pertinence de nos propositions. Je rencontrerai la Fédération des commissions scolaires qui m'ont invité, en fin de semaine, à aller les saluer. Je peux vous confirmer, M. le député, que le premier ministre suit avec un très grand intérêt tout ce qui se passe en éducation. On a eu l'occasion d'en échanger ensemble. Ne soyez pas inquiet!

Des voix: Bravo!

Le Président: En question complémentaire.

M. Gendron: Si c'était exact, comment se fait-il que la Fédération des commissions scolaires, ne voyant plus de défenseur de l'éducation au Québec en votre personne, réclame une rencontre au bureau du premier ministre pour justement lui dire que la conséquence pour les clientèles, ça sera une coupure de 6 % et non votre beau discours? Est-ce que vous avez expliqué ça à la Fédération?

Le Président: M. le ministre.

M. Pagé: M. le Président, très clairement je réponds deux choses: La première: la Fédération

des commissions scolaires indique très clairement sa confiance dans le ministre de l'éducation actuel. deuxièmement, elle va rencontrer le premier ministre avec moi demain soir. bye, bye!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: En question complémentaire, M. le député d'Arthabaska.

M. Baril: En additionnelle, M. le Président. Est-ce que le ministre de l'Éducation peut confirmer les intentions de son ministère, qu'il a laissé couler, la semaine dernière, dans le milieu, à l'effet que son ministère veut abolir le plan de soutien de la formation agricole? Et comment le ministre de l'Éducation, qui est l'ancien ministre de l'Agriculture, peut-il seulement songer à abolir ce programme pendant que son collège à l'Agriculture, maintenant, exige la formation agricole pour l'obtention d'aide à l'établissement de nos jeunes agriculteurs et agricultrices?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Pagé: Je remercie le député d'Arthabaska de susciter chez moi une très certaine nostalgie du beau et grand ministère qu'est celui de l'Agriculture.

Ceci étant dit, la question que soulève le député est tout à fait, je crois, pertinente en ce que dans nos décisions on s'est appuyés sur un concept, un objectif que toute décision budgétaire susceptible de faire en sorte qu'on s'inscrive en moins à l'égard du support donné à l'équipe du ministère de l'Agriculture pour la formation ne vise pas et ne vienne pas limiter l'accès à la formation de la part de nos jeunes producteurs et productrices, et on aura l'occasion d'en discuter au budget. On vous attend.

Le Président: En question principale, M. le député de Lévis.

La politique fédérale de taxation des services de la Garde côtière

M. Garon: M. le Président, en juillet dernier le gouvernement . fédéral a annoncé une politique de taxation des services de la Garde côtière canadienne. Le Québec est le plus pénalisé par cette politique puisqu'il paiera 54 % des revenus totaux générés par les charges du fédéral alors que les coûts de la garde côtière au Québec sont de l'ordre de 20 %. Les Maritimes ne paieront que 2 % des revenus au fédéral, alors que leurs coûts représentent 36 % des coûts de la garde côtière. C'est neutre au Pacifique puisque c'est 19 % des coûts et 21 % des revenus. Le ministre des Transports a été très silencieux dans ce dossier. Ce n'est qu'une semaine avant la fin des consultations du gouvernement fédéral qu'il a fait connaître, par une lettre au ministre des Transports du fédéral, qu'il avait pris connaissance de cette politique et qu'il ne saurait y souscrire. On peut dire que dans ce dossier il s'est comporté beaucoup plus comme un wagon de queue que comme une locomotive.

Alors, ma question au ministre des Transports, c'est la suivante: Est-ce que le ministre peut nous dire si son ministère a évalué et chiffré les impacts de la politique fédérale sur les ports du Saint-Laurent, sur les emplois et sur l'avenir de l'ensemble de l'industrie maritime du Québec et notamment pour une compagnie comme Cast, par exemple, qui songe peut-être à s'en aller sur la côte de l'Atlantique plutôt que de rester dans les ports du Saint-Laurent?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Elkas: M. le Président, vous me permettrez de remercier le député de Lévis qui, pendant une commission parlementaire, m'a demandé de me rendre à Ottawa avec les poings sur la table et de faire le point sur le problème auquel on fait face. Il est vrai que j'ai essayé de rejoindre mon homologue, M. Lewis, à plusieurs occasions. Malheureusement, vous savez qu'on faisait face à une espèce de crise dans le Golfe et que tout le monde était assez occupé. J'ai rencontré ces gens, il y a deux semaines, j'ai fait le point; M. Lewis reconnaît fort bien les problèmes que le Québec subirait si on implantait un programme semblable. M. Lewis a accepté qu'on fasse une recommandation au gouvernement fédéral et, en plus, pour répondre aux questions qui ont été posées, des études d'impact vont être faites par le gouvernement fédéral répondant à nos demandes.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Lévis.

M. Garon: M. le Président, ce que j'ai demandé au ministre, c'est très simple au fond. Est-ce qu'il a demandé et reçu des études et des analyses à son ministère, de son ministère - son ministère ne devait pas être bien bien en guerre du Golfe - afin d'évaluer et de chiffrer les impacts de la politique du gouvernement fédéral? Comment peut-il défendre les dossiers du Québec à Ottawa si lui-même n'a pas de chiffres et qu'il dit aux autres: Faites les chiffres, moi, je n'en ai pas.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: en plus de ne pas en avoir, il avoue qu'il n'en a pas. est-ce qu'il a demandé quelque chose au moins à son ministère? il n'a pas dû tirer bien bien du canon pendant la guerre du golfe.

Le Président: Alors, M. le ministre des

Transports.

M. Elkas: M. le Président, oui, on a fait des demandes au ministère. On voit clairement que le coût pour le transport des "containers", par exemple, coûte beaucoup plus aux gens qui habitent Montréal ou même le secteur de Sept-îles qu'il coûterait ailleurs aux gens de Halifax, Vancouver ou des autres ports. Ça, ça a été assez clair, mais des études d'impact comme telles ont été commandées. On va voir exactement ce que le recouvrement des coûts pourrait faire, apporter à la société québécoise et non seulement aux gens qui utilisent la Voie maritime.

Le Président: En question complémentaire toujours, M. le député de Lévis.

M. Garon: Est-ce que le ministre se rend compte que toute la politique fédérale a pour but, au fond, d'avantager les Maritimes, en plus de nous faire payer les coûts des Maritimes, alors que les dépenses sont faites là. Est-ce qu'il a l'intention d'appuyer l'industrie maritime québécoise qui dit au fédérai de réduire les services chromés qui sont une forme, au fond, d'assistance sociale déguisée dans les Maritimes, des services chromés qu'après ça, on veut nous faire payer à nous? Est-ce qu'il a l'intention de dire au fédéral que, s'il a besoin d'argent, il coupe donc les services chromés dans les Maritimes? On se rappelle quand les bateaux...

Le Président: M. le député.

M. Garon: ...avaient passé au feu il y a quelques années à Rivière-du-Loup, il a fallu faire venir les hélicoptères de Summerside à...

Le Président: Alors, M. le ministre des Transports.

M. Elkas: Pour répondre au député de Lévis, oui, on a demandé au ministre Lewis de regarder, par exemple, la Garde côtière. Le Vérificateur général a fait des recommandations au fédéral, à savoir qu'il pourrait faire des épargnes à l'intérieur avant de venir nous passer la facture. Oui, ça a été fait.

Le Président: Alors, en question principale maintenant, M. le député de Louis-Hébert.

Fermeture de quatre écoles primaires à Sainte-Foy

M. Doyon: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre de l'Éducation, M. le Président. La commission scolaire des Découvreurs nous annonce sans trop de cérémonies qu'on est en train de fermer quatre écoles en même temps, des écoles primaires. Cette nouvelle a consterné les populations qui sont desservies par ces quatre écoles qui sont en bon état et parfaitement bien équipées. Est-ce que le ministre de l'Éducation pourrait nous indiquer ses intentions vis-à-vis de ces fermetures massives - quatre écoles quand même, ce n'est pas rien dans un seul comté, dans le même comté - et quelle sorte d'intervention il peut faire pour minimiser les dégâts, les effets négatifs de ces fermetures-là?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Pagé: M. le Président, pour répondre à la question du député de Louis-Hébert, je voudrais indiquer que lorsque j'ai, au nom du gouvernement, fait part et confirmé à la commission scolaire des Découvreurs des investissements importants, il y a quelques semaines, concernant la construction de deux écoles de premier cycle du secondaire et une école élémentaire, cela s'inscrivait dans une volonté, évidemment, de notre gouvernement de maintenir l'école le plus près possible de la famille. Or, à ma grande surprise, j'ai appris, comme tous les citoyens de la région hier, l'intention, dans le cadre du dépôt d'un document de développement triennal de la commission scolaire des Découvreurs, l'intention de la commission scolaire de fermer 4 écoles sur 22 d'ici 2 ans ou 3 ans, ce qui suscite évidemment inquiétude de la part des citoyens et, plus particulièrement, de la part des parents concernés. (14 h 50)

Je me limiterai à vous dire, premièrement, qu'il n'appartient pas au ministère de l'Éducation ni de localiser ni de décider pour et au nom des commissions scolaires. Cependant, ça m'apparart exorbitant, ça m'apparaît gros. L'autre élément, j'entends donc les rencontrer, j'entends voir avec eux ce qu'il est possible de faire pour maintenir nos écoles le plus près possible des familles et il m'apparart aussi exorbitant, cependant, la déclaration de la ville de Sainte-Foy par la voix de sa mairesse, comme quoi ceux-ci allaient s'interposer pour bloquer d'autres projets.

Alors, un, nous sommes informés. Je rencontrerai la commission scolaire et il me fera plaisir de rendre compte à la Chambre et à M. le député qui est très préoccupé par cette question.

Le Président: En question additionnelle, M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre, dans la même veine, pourrait nous donner la même réponse pour la rencontre qui pourrait avoir lieu avec les parents, le comité de parents, et la commission scolaire de Samuel-de-Champlain où, justement, il y a quatre fermetures d'écoles présentées?

Le Président: ce n'est pas une question additionnelle qui est reliée à la question principale. alors, en question principale, m. le député de jacques-cartier.

M. Cameron:

L'attitude de la Caisse de dépôt et placement au sujet de Noverco

Merci, M. le Président. Ma question est pour le ministre des Finances. L'année passée, le premier mai, j'ai demandé au ministre de clarifier la position du gouvernement sur le rôle de la Caisse de dépôt et de Canam-Manac dans Noverco. J'ai dit la chose suivante. Is it a settled policy of this Government and the Caisse to put at risk the retirement funds they hold in trust to save tottering companies from the possibility of being taken over by the menacing foreigners of Toronto, Ontario?

Le ministre nous a assurés que la Caisse a toujours raison. M. le Président, regardez la situation maintenant. Je cite le Montréal Gazette de vendredi: "Canam Manac unloads Noverco's stake." "Nothing is excluded", Caisse official Philippe Gabelier responded when asked whether companies from outside Québec, the rest of Canada, the United States and/or Europe will be invited to buy into the utility holding firm. "We hope the shares can be parcelled out by the July 1st exercise day" Gabelier added. "If not, the Caisse would be put..."

Le Président: m. le député. m. le député, s'il vous plaît. m. le député. m. le député. oui. je vous inviterais à y aller de votre question immédiatement.

M. Cameron: Ma question est la suivante. Is the minister still convinced that the Caisse always knows what it is doing?

M. Levesque: Yes, I do.

Le Président: En question complémentaire. S'il vous plaît. Alors, en question complémentaire, M. le député de Jacques-Cartier.

M. Cameron: will the government allow ownership in gaz métropolitain to go to those investors who offer the best price, no matter where they come from?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: M. le Président, j'ai eu l'occasion, il y a quelques minutes, de déposer le rapport annuel de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Je crois que, même si les résultats sont modestes, ils se comparent avantageusement avec la plupart des fonds de ce genre. Je dois donc conclure que l'administration est saine et, jusqu'à preuve du contraire, je dois réitérer la réponse que j'ai donnée en premier lieu.

Le Président: Question principale maintenant, M. le député de La Prairie.

Critiques de députés à l'endroit du ministre de l'Environnement

M. Lazure: Merci, M. le Président. Il n'y a personne dans cette Chambre, je pense, qui va contester la sagesse du ministre de l'Environnement lorsque, au lieu de démolir ses fonctionnaires, il commence à faire du yoga et de la méditation avec eux. En tout cas, comme psychiatre, je pense que c'est bon pour son stress et, en parlant de stress, M. le Président, à chaque fois que le ministre de l'Environnement veut jouer son rôle de protecteur de l'environnement, sa collègue de l'Énergie intervient. Elle est intervenue dans le cas de Grande-Baleine, elle a gagné. Elle est intervenue dans le cas de la cogénération d'électricité, elle a gagné.

Une voix: C'est Mme Gagné. Ha, ha, ha!

M. Lazure: Cette fois-ci, le ministre de l'Environnement va-t-il plier l'échiné devant celle qui a une place de choix dans le coeur du premier ministre? Si on se fie, M. le Président, aux déclarations de ses collègues, les collègues du ministre de l'Environnement, les gens du caucus de Laval, présidé par la ministre de l'Énergie et des Ressources et je cite-Une voix: Le député de Mille-Îles.

M. Lazure: Le député de Mille-Îles était porte-parole, qu'on m'a dit, mais...

Le Président: Un instant, s'il vous plaît. Sur un rappel au règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Je comprends que l'honorable député de La Prairie est très intéressant aujourd'hui, tant dans ses avis, ses opinions professionnelles, ses commentaires très gentils et très délicats à l'égard de mes deux collègues... Pourriez-vous en arriver à la question, s'il vous plaît?

M. Lazure: Oui, alors j'arrivais à la question.

Le Président: Alors, à la question. La question maintenant, M. le député.

M. Lazure: J'avais juste une ligne, la citation du député de Mille-Îles, qui disait ce matin, et je le cite...

Le Président: Votre question, M. le député.

M. Lazure: ...que le ministre de l'Environnement n'a pas à fourrer son nez là-dedans. Bon. Le ministre de l'Environnement peut-il nous assurer que, malgré les fortes pressions qui viennent du caucus de Laval, il va faire respecter la procédure normale d'évaluation des impacts, y compris des audiences publiques?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, vous me permettrez de remercier le député de La Prairie, qui agit bénévolement à titre de psychiatre en cette Chambre auprès du ministre de l'Environnement...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...pour ses sages conseils. je profite de l'occasion, étant donné que c'est sa première question depuis l'intersession, pour le féliciter de s'être présenté aux élections à l'exécutif du parti québécois, féliciter également le député de shefford, le député de joliette, et mme la députée de chicou-timi, d'avoir remporté ses élections.

Maintenant, pour en revenir à la question...

Des voix:...

Le Président: S'il vous plaît! Évidemment... S'il vous plaît!. S'il vous plaît! Vous comprendrez... S'il vous plaît! Vous comprendrez, M. le ministre, que vos derniers propos n'ajoutaient rien au débat. Je vous prierais d'arriver à la question.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je me rends à votre sage décision, M. le Président, ils étaient à peu près du même niveau que les premiers propos du député de La Prairie.

Le Président: Allez-y à la question, s'il vous plaît!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pour en revenir plus spécifiquement à la question posée par le député de La Prairie, je lui indiquerai que le rôle du ministre de l'Environnement est difficile. Il se doit de situer les dossiers en équilibre et, lorsqu'à 15 jours d'intervalle, un groupe environnemental réclame la démission du ministre de l'Environnement parce qu'il ne fait pas le poids au cabinet et qu'à l'intérieur de ces mêmes 15 jours, certains députés le dénoncent parce qu'il fait trop le poids, peut-être qu'il a atteint un poids équilibré. Merci.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de La Prairie.

M. Lazure: M. le Président, est-ce que le ministre veut que je le félicite pour sa course à la chefferie...

Le Président: Votre question, s'il vous plaît.

M. Lazure: ...pour sa tentative infructueuse...

Le Président: M. le député, s'il vous plaît. M. le député.

Une voix:...

Le Président: Oui. Une minute, s'il vous plaît. Alors, sur un rappel au règlement, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, je m'excuse, mais vous avez laissé personnellement aller le ministre dans tous ses commentaires au niveau de la réplique à un préambule qui n'avait même pas fait allusion à rien, et je pense qu'en toute équité dans cette Chambre, M. le Président, on doit donner chance à riposte.

Le Président: J'ai rappelé à l'ordre, le ministre, M. le leader de l'Opposition, justement pour ses propos, mais effectivement, si, à ce moment-là, il y a une incartade d'un côté, on en a une autre, on ne devrait pas avoir de commentaire dans une question ou dans une réponse. Je le répète, et j'espère que les deux côtés suivront le règlement là-dessus. Alors, une question directement, M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Est-ce que le ministre de l'Environnement, au lieu de demander des impacts sur le rapatriement des pouvoirs en environnement qu'il a demandés de façon tout à fait futile à son congrès, pourrait s'engager à ne pas utiliser l'article 31.6 de la loi qui lui permettrait de passer outre aux évaluations gouvernementales, comme lui demande le caucus de Laval? M. le Président, le caucus de Laval lui demande de passer outre. Est-ce qu'il va passer outre, oui ou non? Il n'a pas répondu encore.

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, très brièvement. Pour reprendre en partie le préambule du député de La Prairie, des études d'impact ont été commandées sur la possibilité d'un rapatriement de pouvoirs en matière environnementale et une partie de ces études a déjà été communiquée à la Commission Bélanger-Campeau. Les autres seront disponibles pour le Conseil des ministres et, par la suite, pour l'ensemble de la députation et de la population, avant que des décisions se prennent, comme il est sage de le faire dans ce domaine.

En ce qui concerne la question plus directe

du député de la prairie, il n'appartient pas au ministre de l'environnement d'invoquer l'article 31.2 ou 31.3. cela relève de l'autorité du conseil des ministres.

M. Lazure: M. le Président...

Le Président: Toujours en question complémentaire. (15 heures)

M. Lazure: ...est-ce qu'il va faire la recommandation, justement, de ne pas utiliser cet article-là? Deuxièmement, qu'est-ce qu'il pense, le ministre de l'Environnement, de la recommandation de ses collègues de Laval...

M. Pagé: Une question d'opinion.

M. Lazure: ...qui disent aux promoteurs...

Le Président: M. le député de La Prairie, j'ai un appel au règlement. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, je pense que c'est un exemple très, très, très flagrant, et je ne pense pas abuser de ces questions de règlement, où le député demande purement et simplement une question d'opinion: Qu'est-ce que t'en penses? Ce n'est pas une question, M. le Président, d'intérêt public.

Le Président: Sur la question, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: ii y avait une question beaucoup plus précise avant: va-t-il recommander, oui ou non, l'utilisation de la clause dérogatoire? oui ou non? c'est ça.

Le Président: Oui, d'accord.

M. Pagé: M. le Président, sur la question...

Le Président: Alors, la première... M. le leader, oui. Sur la question, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, je comprends que le député de La Prairie a un certain mérite d'essayer de poser des questions comme celles-là, mais il devrait profiter de l'exemple du leader de l'Opposition. Ça, c'était une vraie question. Si elle avait été posée comme ça, le ministre y aurait répondu et il n'y aurait pas eu de question de règlement.

Le Président: Très bien.

M. Pagé: Inspirez-vous du député de Joliette. Il fait bien ça, lui.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Alors, il y avait deux volets. S'il vous plaît! Il y avait deux volets à votre question complémentaire. La première question est admissible, il va de soi, mais si vous ne pouvez pas demander une question d'opinion, et vous le savez fort bien, reformulez votre deuxième question, s'il vous plaît.

M. Lazure: Qu'est-ce que le ministre de l'Environnement va faire comme recommandation au Conseil des ministres? Deuxièmement, qu'est-ce qu'il pense de la recommandation de ses collègues de Laval qui disent aux promoteurs: Allez devant les tribunaux pour contester la directive du ministre de l'Environnement? Qu'est-ce qu'il pense de ça? Est-ce qu'il peut nous répondre clairement?

Le Président: M. le député, votre première question est posée, mais une question d'opinion n'est pas admissible. Vous avez à nouveau l'exemple d'une question d'opinion. Alors, sur la première question, M. le ministre de l'Environnement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le , le ministre de l'Environnement est sujet à des pressions multiples qui peuvent provenir d'un côté comme de l'autre, soit du promoteur du dossier, soit des groupes écologiques qui peuvent s'opposer à un certain dossier. Le ministre de l'Environnement tente de demeurer en équilibre dans ce débat.

Vous auriez pu me soulever la question: Qu'est-ce que le ministre de l'Environnement pense de la déclaration du candidat du Parti québécois dans Montmorency qui nous recommande...

Le Président: M. le ministre, s'il vous plaît!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...de suspendre les procédures...

Le Président: M. le ministre. Alors, en question additionnelle. Mme la députée de Terrebonne, en question additionnelle.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Alors, en additionnelle au ministre des Transports. Comment le ministre des Transports compte-t-il remplir ses promesses, les promesses de son gouvernement, et répondre aux besoins réels de la population de la région de Laval et de la région de la MRC des Moulins?

Le Président: M. le ministre des Transports.

Une voix: Entendez-vous, l'autre bord, là!

Le Président: S'il vous plaît!

M. Elkas: M. le Président, si on fait

allusion au plan de transport qui avait été déposé par mon prédécesseur, M. Côté, j'y tiens. Je tiens aussi au projet de la 25 parce que je crois fermement au développement de l'est de la région de Montréal et je crois fermement à une vision pour Montréal qui comprend plus que la ville de Montréal et la Communauté urbaine de Montréal, mais Laval, la Rive-Sud et les régions qui vont aussi loin que Terrebonne, Saint-Jérôme et Granby aussi. Il faut préparer la région et c'est avec des projets semblables qu'on va pouvoir répondre aux besoins des gens.

Des voix: Bravo!

Le Président: En question additionnelle, encore.

Mme Caron: Connaissant la loi sur l'environnement, comment son gouvernement a-t-il pu s'engager à faire une telle promesse alors qu'il savait qu'il ne pourrait pas la respecter?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Elkas: M. le Président, il n'y a aucune question d'essayer de contourner la loi. On m'a envoyé une demande type qui arrive du ministère de l'Environnement. Je l'ai transmise à mon ministère et il est en train de répondre aux questions environnementales.

Le Président: En question principale? Mme Harel: Non, additionnelle.

Le Président: Aditionnelle, d'abord. Une question additionnelle, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre des Transports entend respecter le plan de transport et les priorités qui y étaient contenues à l'effet de parachever le boulevard Henri-Bourassa? Est-ce qu'il entend maintenir le calendrier...

Le Président: Mme la députée, s'il vous plaît. Évidemment, vous élargissez la question principale qui portait sur une question d'environnement sur un projet spécifique entre Montréal et Laval et, à ce moment-ci, cette question m'apparaît totalement inadmissible. ' sur ce, je dois vous informer que la période de questions est maintenant terminée.

Alors, il n'y a pas de vote reporté.

Maintenant, au niveau des motions sans préavis...

Je demanderais la collaboration des membres de l'Assemblée, s'il vous plaît. Alors, Mmes et MM. les députés. Mmes et MM. les députés, nous allons poursuivre les travaux dès maintenant aux motions sans préavis. MM. les députés, s'il vous plaît, juste devant moi... M. le député de Taschereau, M. le ministre des Transports, je vous invite à aller à l'extérieur, s'il vous plaît.

Alors, aux motions sans préavis, je vais reconnaître M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Souligner le courage et le dévouement

des militaires canadiens impliqués

dans la crise du golfe Persique

M. Atkinson: M. le Président, je demande le consentement de l'Assemblée nationale pour une motion sans préavis qui est la suivante: "Que l'Assemblée nationale du Québec souligne le courage et le dévouement de chacun des membres des Forces armées canadiennes impliqués dans la crise du golfe Persique." Merci.

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

Des voix: Consentement.

Le Président: II y a consentement. Alors, je laisse la parole en conséquence à M. le député de Notre-Dame-de-Grâce sur sa motion.

M. Gordon Atkinson

M. Atkinson: Merci, M. le Président. Le Canada fut l'un des premiers pays à contribuer, à transférer une force militaire au golfe Persique afin d'appuyer la résolution des Nations Unies, soit celle d'exiger le retrait immédiat et inconditionnel des forces armées irakiennes du territoire koweïtien.

That does not come as any surprise to any Canadian as our nation has been in the forefront of the fight for freedom and the preservation of that freedom wherever and whenever an over-agressive nation invades another peaceful sovereignty.

Les trois formations de notre ensemble militaire étaient présentes tout au long de ce conflit. Un corps expéditionnaire naval de deux destroyers et un navire d'approvisionnement étaient déjà présents en septembre dernier au port de Bahrein. Dès ce moment jusqu'au cessez-le-feu, l'ensemble du corps expéditionnaire naval canadien a accompli 1877 interceptions et pris l'abordage de 22 bâtiments ennemis. M. le Président, cela représente 25 % de toutes les interceptions effectuées par la force navale de la coalition.

Canada also provided one over-strength squadron of 26 CF-18 fighter planes along with the Boeing 707 air-to-air refueling aircraft for the Desert Storm operations. During the war in the Gulf, our pilots flow both sweep and escort missions as well as close air support for the multinational forces deployed.

Même si le Canada n'a pas pris part à

l'offensive terrestre, il est à souligner qu'il a contribué un des services hospitaliers les plus sophistiqués. En collaboration avec les Britanniques, nos médecins, infirmiers et infirmières ont traité à la fois des blessés de la coalition et ceux des troupes irakiennes. Voilà ce qu'est le dévouement des Forces armées canadiennes. Nous avons toujours été là quand le besoin se faisait sentir.

About 2500 men and women served with our Forces and that has been the case over the past century. They have come from every province, city and hamlet. We can take great pride in the service to the defeat of overt agression by those who served voluntarily from our Québec. We once again stood shoulder to shoulder with our comrades from some 30 other nations, ranging from Argentina to France, to Italy, Greece, Norway, Spain, Britain and the United States. It was a case of international solidarity unmatched, in military history, since World War II. (15 h 10)

Je me dois aussi de souligner la présence du Royal 22e Régiment. Ce régiment, qui s'est distingué à maintes reprises dans le passé, avait pour mission d'assumer la sécurité du Qatar. The spectrum of participation by our valued men and women was boundless. I have mentioned our participation only in broad strokes, for to list every single participation would take hours of detailed analysis. So, if I should just say, we were on the front end of the AWACS Squadron, flying special identification and reconnaissance patrols over enemy territory. We had a medical-surgical team on board the United States hospital ship, the U.S.N.S. Mercy. At the same time, Canadians served with other allied military forces, providing thirteen military personnel to the British Forces; another five to the American Forces. These Canadian officers were our contact with the development and deployment of the forces of war launched against the regime of Saddam Hussein.

I would, however, like to illustrate the kind of courage that has been part of our military heritage for generations upon generations. Deux jeunes pilotes canadiens, le major Dave Kendall et le capitaine Steve Hill, ont fait preuve d'une audace et d'une intrépidité que chaque militaire accepte comme inhérente à son devoir. While flying patrol with the Desert Cat Squadron over the Northern Arabian Gulf, on the 30th of January, two United States aircraft A-6 were forced to break off an attack on an Iraqi vessel because they were running low on fuel. Major Kendall and Captain Hill, hearing they were breaking off the attack, immediately responded by turning their jet fighters and entered the fray. These two pilots strafed the Iraqi warship, as well as launching one missile. The Iraqi ship had on board at least four Exocet missiles ready to fire. Our pilots' missile launch hit the Iraqi ship amidships. The Iraqi vessel, a captured

Kuwaiti TNC-45 missile attack craft capable of speeds up to 40 knots, eventually sunk the following morning. Nos pilotes, le major Dave Kendall et le capitaine Steve Hill ont été officiellement crédités pour avoir contribué à couler ce redoutable vaisseau.

Le courage et le dévouement des troupes canadiennes va bien au-delà de l'appel au devoir. Bravo et félicitations aux hommes et aux femmes des Forces armées canadiennes. Nous devons être fiers de ce qu'ils ont accompli. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): On vous remercie, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Toujours sur cette même motion, je reconnais maintenant M. le ministre des Affaires internationales.

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: M. le Président, je tiens tout d'abord à souligner l'appui du gouvernement du Québec à la motion présentée par le député de Notre-Dame-de-Grâce. Lui-même vétéran de la Deuxième Guerre, le député de Notre-Dame-de-Grâce porte une attention particulière aux questions touchant les Forces armées et c'est tout à son honneur. M. Atkinson, député de Notre-Dame-de-Grâce, n'est d'ailleurs pas le seul député en cette Chambre à s'intéresser à ces questions puisque le député d'Iberville, M. Yvon Lafrance, a lui-même participé à des opérations de maintien de la paix de l'ONU à Chypre. Comme tous les Québécois et tous les Canadiens, je suis très soulagé que les combats soient terminés et que la victoire de la coallition soit acquise dans le golfe Persique. Je tiens à souligner le courage des Québécois et des Québécoises qui ont contribué à cette victoire. Ils ont défendu, au risque de leur vie, les principes reconnus et promus par l'Organisation des Nations unies auxquels nous sommes profondément attachés. Heureusement, il n'y a pas eu de perte de vie parmi nos militaires, et leur retour auprès de leurs parents et amis s'effectue tel que prévu.

Tout au long de cette épreuve le gouvernement du Québec, en association avec les Québécois et les Québécoises, a voulu soutenir aussi l'action humanitaire menée par des équipes médicales et infirmières originant du Québec pour soulager les populations accablées par les affrontements armés dans la région du golfe Persique. À cette fin, une subvention de 100 000 $ fut versée à la Société canadienne de la Croix-Rouge, division du Québec.

Par ailleurs, lors du déclenchement des hostilités dans le golfe Persique et suite à l'annonce par le gouvernement du Canada de la participation des Forces armées canadiennes à la

libération du Koweït, le ministère des Affaires internationales établissait une ligne téléphonique gratuite afin de répondre aux questions de ceux et celles ayant des parents et amis dans les pays de la région du Golfe et pour aider les milieux d'affaires oeuvrant dans cette région du monde. Je veux souligner ici la parfaite coordination qui s'est établie entre nos services et les services du gouvernement fédéral des Forces armées canadiennes et aussi la collaboration obtenue du réseau des ambassades du Canada.

Le Koweït est maintenant libre et il peut reprendre sa reconstruction. Quelques semaines avant la fin du conflit, le ministère des Affaires internationales déléguait auprès des décideurs koweïtiens réfugiés à Washington, Londres et Genève des experts québécois représentant des entreprises dont l'expertise est recherchée pour son excellence et perçue par les autorités koweïtiennes comme un gage de qualité pour les travaux de reconstruction de leur pays.

Bien entendu, le gouvernement du Québec et le ministère des Affaires internationales poursuivront leurs efforts afin d'appuyer les entreprises québécoises qui sont susceptibles de contribuer par leur expertise à restaurer des conditions de vie acceptables dans cette région du monde. À cet effet, le ministère des Affaires internationales collabore avec l'exécutif du Conseil de commerce canado-arabe afin de déterminer la nature et l'étendue de l'implication des entreprises québécoises dans le programme de reconstruction du Koweït. À titre d'exemple, les secteurs québécois du génie-conseil, des télécommunications, des matériaux de construction, de l'informatique et bureautique et de l'industrie médicale pourraient présenter un intérêt pour (es intervenants koweïtiens. De plus, le ministère des Affaires internationales compte mettre sur pied une banque d'entreprises québécoises qui ont manifesté leur intention de postuler sur des projets au Koweit.

En terminant, je veux redire ici toute ma foi et mon espoir dans l'Organisation des Nations Unies et souligner particulièrement le travail incessant, difficile et trop souvent ingrat de son secrétaire général, M. Javier Pérez De Cuellar, que j'ai eu l'occasion de rencontrer lors de sa visite à Montréal. La communauté mondiale peut s'enorgueillir d'avoir à son service pour la défense de ses valeurs fondamentales un homme aussi exceptionnel dont l'option pour la paix est manifeste et irrévocable.

M. le Président, permettez que je me fasse le porte-parole des Québécois et Québécoises pour souligner avec enthousiasme l'excellente contribution des Forces armées canadiennes dans le cadre de la coalition de plus de 30 pays qui, pour l'Organisation des Nations Unies, s'est formée pour rétablir l'intégrité du territoire koweïtien et rechercher le retour à la paix dans cette région du monde. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Toujours sur cette motion du député de Notre-Dame-de-Grâce, je cède maintenant la parole à M. le député de Bertrand. M. le député.

M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir, au nom de l'Opposition officielle, d'appuyer cette motion parce qu'elle s'adresse avant tout à des individus qui n'ont pas choisi de faire la guerre, mais qui, de par leur situation, ont été appelés à faire leur devoir. Et à ce titre, ils méritent notre compréhension et notre affection. Ils s'appelaient Tremblay, Morin, Boisvert, Saint-Charles. Ils venaient d'un peu partout au Québec. Ils savaient à peine dans quelle région ils se dirigeaient, mais ils n'avaient qu'une idée en tête, revenir le plus rapidement possible, sains et saufs. (15 h 20)

Si les félicitations qu'adresse l'Assemblée nationale aujourd'hui sont dirigées aux membres des Forces canadiennes qui ont participé aux opérations dans le golfe Persique, elles s'adressent également aux familles de ces jeunes hommes et de ces jeunes femmes qui ont vécu, à leur façon, les mêmes angoisses en ne sachant pas quand les membres de leur famille reviendraient chez eux, dans quelle condition, surtout lorsque les articles des journaux leur racontaient qu'ils s'embarquaient sur des bateaux de qualité douteuse et sur des avions dont le record d'accidents avait été particulièrement élevé dans les années précédentes. Nous nous félicitons que la guerre soit terminée, mais nous nous félicitons avant tout que tous nos jeunes Québécois et toutes nos jeunes Québécoises soient revenus chez nous sains et saufs.

Mais, M. le Président, nous ne pouvons souligner le dévouement de nos jeunes gens sans souhaiter pour bientôt un règlement négocié qui amène, au Moyen-Orient, une paix durable. Nous ne pouvons souligner le courage de nos jeunes sans espérer que les marchands de canons qui vendent la mort à crédit ne prennent leçon de l'hécatombe qu'ils ont failli entraîner au Moyen-Orient pour que plus jamais, où que ce soit, la vie de jeunes Québécois et de jeunes Québécoises ne soit menacée dans des conflits qu'ils n'ont ni souhaités, ni voulus, ni choisis. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Bertrand. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Est-ce que la motion du député de Notre-Dame-de-Grâce, qui se lit comme suit: "Que l'Assemblée nationale du Québec souligne le courage et le dévouement de chacun des membres des Forces armées canadiennes impliqués dans la crise du golfe Persique" est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté.

Toujours aux affaires courantes, nous en arrivons aux avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Pagé: M. le Président, j'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, de 16 heures à 18 h 30, ainsi que de 20 heures à 22 heures, ainsi que demain, le mercredi 20 mars 1991, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papi-neau, la commission des affaires sociales procédera à l'étude détaillée du projet de loi 120, Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): c'est tout, m. le leader du gouvernement? à l'étape des renseignements sur les travaux de l'assemblée, m. le leader adjoint de l'opposition officielle, est-ce que vous avez des questions?

M. Gendron: bien, c'est parce que là, je veux juste vérifier. est-ce que le leader du gouvernement n'oublie pas deux autres avis concernant d'autres commissions? l'information qu'on avait, il devait y avoir la commission...

M. Pagé: C'est-à-dire que...

M. Gendron: Pardon?

M. Pagé: ...que nous aurons...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Le député anticipe, je reconnais là son enthousiasme à voir deux projets de loi inscrits cet après-midi être adoptés. C'est le cas et c'est mon intention de faire en sorte que la Chambre adopte, cet après-midi, le projet de loi 124, inscrit au nom du ministre des Relations internationales, ainsi que le projet de loi 123, inscrit au nom de Mme la ministre des Communautés culturelles. Une fois que ces deux projets de loi seront adoptés, ils seront déférés en commission parlementaire. J'avise les parlementaires que ces deux projets de loi sont susceptibles d'être étudiés ce soir.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Ça va, M. le leader adjoint de l'Opposition officielle?

M. Gendron: Oui.

Avis de sanction de projets de loi

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, j'ai l'avis suivant à donner. Je vous avise que, cet après-midi, il y aura sanction de projets de loi au cabinet du lieutenant-gouverneur.

Nous en arrivons maintenant aux affaires du jour, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, en vertu des dispositions prévues à l'article 263 du règlement, je vous inviterais à reconnaître M. le ministre des Finances du gouvernement du Québec.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre des Finances.

Message du lieutenant-gouverneur

M. Levesque: M. le Président, un message de Son Honneur le lieutenant-gouverneur du Québec, signé de sa main.

Dépôt du projet de loi 127

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, Mmes et MM. les députés, si vous voulez vous lever, s'il vous plaît. "L'Honorable lieutenant-gouverneur de la province de Québec transmet à l'Assemblée nationale le projet de loi 1 concernant les crédits provisoires pour l'année financière se terminant le 31 mars 1992, conformément aux dispositions de l'article 54 de la Loi constitutionnelle de 1867, et recommande ces crédits à la considération de l'Assemblée."

C'est signé: Martial Asselin, lieutenant-gouverneur du Québec.

Alors, M. le ministre des Finances, je vous cède la parole.

M. Pagé: Avant, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Après qu'on se sera assis, évidemment. Oui, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, si vous permettez. Les dispositions prévues à cet article permettent au ministre des Finances de proposer, dans le cadre d'une motion à l'Assemblée, un projet de loi qui, en vertu de la coutume, est généralement adopté à ses trois lectures dans la même séance. Et ce projet de loi, c'est très simple, il vise, comme il aura l'opportunité de vous en faire part tout à l'heure, à s'assurer qu'il y ait un douzième du prochain budget qui soit adopté pour permettre purement et simplement au gouvernement d'émettre les chèques pour celles et ceux qui sont récipiendaires et qui reçoivent, c'est-à-dire, des allocations, exemple concret, des allocations d'aide sociale, au 1er avril prochain, sachant que notre budget se termine le 31 mars.

Ceci étant dit, M. le Président, si on regarde le règlement, en 1985, un débat sur l'obligation de demander le consentement de l'Opposition a été soulevé. En 1986 le consentement a été donné. En 1987, selon les informa-

tions que je possède, un tel projet de loi a été adopté sans que le leader n'eut à demander le consentement de l'Opposition. M. le Président, pour être certain qu'on ne soit pas obligé de suspendre nos travaux, ce qui pourrait retarder nos travaux cet après-midi, pour être certain aussi de ne pas susciter la colère de l'Opposition, en m'adressant à vous, je leur demande ie consentement pour que nous puissions procéder, aujourd'hui même, à l'adoption du projet de loi présenté par le ministre des Finances, permettant d'aider celles et ceux qui, entre autres, sont dans une situation de besoin dans chacun de nos comtés respectifs. Et ce projet de loi vise uniquement à faire en sorte que les chèques d'aide sociale puissent être émis pour le 1 er avril.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader adjoint de l'Opposition officielle.

M. Gendron: M. le Président, très rapidement, je ne veux pas faire l'historique de comment on a procédé les autres années, mais il est exact - en tout cas selon notre perception des choses - qu'il s'agissait d'une disposition qui requiert le consentement de l'Opposition de cette Chambre et nous, nous l'accordons parce qu'il y a une disposition spécifique cette année. Compte tenu que le 1er avril est un jour férié, pour que les assistés sociaux puissent bénéficier des chèques à temps, il fallait, je pense, procéder aujourd'hui et l'Opposition est d'accord pour accorder son consentement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je comprends qu'il y a consentement, M. le leader du gouvernement et M. le leader adjoint de l'Opposition pour que nous puissions procéder à la présentation, à l'adoption du principe et à l'adoption du projet de loi 127, Loi n° 1 sur les crédits 1991-1992. Alors, il y a consentement?

Des voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre des Finances.

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque: M. le Président, ce projet de loi a pour objet d'autoriser le gouvernement à payer, sur le fonds consolidé du revenu, une somme de 236 881 875 $ représentant un douzième des crédits du programme "Sécurité du revenu" du ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, et un quart des crédits du programme "Sécurité du revenu des chasseurs et piégeurs cris" du même ministère. Cette somme apparaîtra au budget des dépenses du Québec pour l'année financière 1991-1992.

Alors, ayant procédé, M. le Président, à la présentation, je propose maintenant que nous puissions procéder, comme vous l'avez indiqué et que vous avez invité cette Chambre à le faire, à l'adoption du principe, en premier lieu et, en second lieu, à l'adoption du projet lui-même, projet de loi 127, Loi n° 1 sur les crédits 1991-1992.

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Pas d'autres interventions? Est-ce que le principe du projet de loi 127 est adopté.

Des voix: Adopté.

Adoption

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que le projet de loi 127, Loi n° 1 sur les crédits 1991-1992 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader du gouvernement, pouvez-vous m'indiquer avec quel article nous continuons nos travaux s'il vous plaît?

M. Pagé: Dois-je comprendre... M. le Président, le projet de loi sera sanctionné en soirée. Ça vous va?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui. M. Pagé: Tel que vous l'avez donné...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, oui. J'ai donné avis dans ce sens-là.

M. Pagé: D'accord. M. le Président, j'appelle, à ce moment-ci, l'article 7 du feuilleton.

Projet de loi 124 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 7 de notre feuilleton, m. le ministre des affaires internationales propose l'adoption du principe du projet de loi 124, loi modifiant la loi sur le ministère des affaires internationales concernant la constitution de fonds spéciaux. m. le ministre des affaires internationales. (15 h 30)

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. J'aimerais profiter de l'étude de ce projet de loi 124 modifiant la Loi sur le ministère des Affaires internationales pour vous exposer brièvement l'évolution des changements mondiaux depuis quelques années et l'importance du travail du ministère des Affaires internationales.

Le monde dans lequel nous évoluons change

rapidement. Les changements politiques, économiques et technologiques se multiplient à un rythme accéléré. Au cours de la dernière année, j'ai eu l'occasion d'effectuer plusieurs missions à l'étranger. J'ai pu voir, de première main, avec les chefs d'entreprise qui m'accompagnaient, comment ce changement se traduit de façon concrète partout dans le monde. Premièrement, une évolution générale vers l'économie de marché; deuxièmement, l'interdépendance accrue des marchés par le biais d'une croissance accélérée...

Consentement réclamé

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je m'excuse. Je m'excuse, M. le ministre. Je m'excuse, M. le ministre. J'ai besoin, M. le ministre, d'un consentement pour que nous puissions procéder à l'adoption du principe, étant donné qu'il ne s'est pas écoulé une semaine depuis la présentation du projet. Est-ce que, M. le leader adjoint de l'Opposition officielle, j'ai le consentement pour que nous puissions procéder à l'adoption du principe du projet de loi 124? Oui, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, si ma mémoire m'est fidèle, il n'est pas requis de consentement puisque le projet de loi a été déposé dans la première semaine où l'Assemblée a repris ses travaux, auquel cas un projet de loi - exemple concret - peut être déposé...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je pense qu'il a été déposé.

M. Pagé: ...aurait pu être déposé le mardi 12, qu'on amorce l'étude le jeudi 14. Ce projet de loi a été effectivement déposé par le leader adjoint du gouvernement au nom du ministre qui était à l'extérieur pour défendre les intérêts du Québec, jeudi dernier, le 14. Nous sommes tout à fait légitimés, en vertu des dispositions de notre règlement, d'en amorcer l'étude sans le consentement, quoique vous savez, M. le Président, vous connaissez ma gentilhommerie proverbiale qui commence à prendre de plus en plus racine ici. Je n'ai aucune hésitation à demander un consentement, si ça peut faire plaisir à l'Opposition, mais on n'en a pas besoin. 237.

M. Gendron: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le leader.

M. Gendron: Je ne pense pas que les règles sont faites... Les règles ici, en cette Chambre, ne sont pas faites pour faire plaisir à l'Opposition ou pas, elles sont faites si, effectivement, le règlement prévoit les dispositions. Dans le présent cas, selon nous, il ne s'agit pas d'une gentillesse du leader du gouvernement. Moi, je veux bien, quand il l'est, lui imputer les motifs. Mais, pour l'instant, pour nous, c'est un projet de loi qui va être appelé par le leader du gouvernement et il n'y avait pas nécessité, selon nous, d'accorder notre consentement pour l'étude du principe de ce projet de loi, à moins que vous nous appreniez, M. le Président, quelque chose qui nous aurait échappé. Ça, c'est possible parce que de ce côté-ci, on n'a pas la science infuse.

M. Pagé: Ah! Je n'ai pas la prétention qu'on a la science infuse de notre côté. M. le Président, je vous invite à lire avec moi l'article 237 de notre règlement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader du gouvernement, je m'excuse...

M. Pagé: Le débat sur le principe d'un projet de loi ne peut commencer moins d'une semaine après sa présentation. Ça veut donc dire qu'en principe, ce qui est prévu au premier paragraphe de l'article 237, on dépose un projet de loi; l'étude en deuxième lecture est appelée une semaine après normalement, sauf que cette disposition ne s'applique pas durant la semaine suivant le deuxième mardi de mars - nous y sommes - et le troisième mardi d'octobre ou lorsque sont tenues des séances extraordinaires.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je m'excuse. Le deuxième mardi de mars, c'était mardi dernier. Alors, si...

M. Pagé: La semaine suivant le deuxième mardi de mars.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): L'interprétation du paragraphe 2 de l'article 237 m'indique qu'on a besoin d'un consentement en prenant bonne note du contenu de l'ensemble de l'article 237 qui dit, au premier paragraphe: "Le débat sur le principe d'un projet de loi ne peut commencer moins d'une semaine après sa présentation." C'est le principe. Exceptionnellement, cette disposition ne s'applique pas durant la semaine suivant le deuxième mardi de mars, qui était mardi dernier, et non pas aujourd'hui. Alors, l'interprétation de l'article 237, paragraphe 1 et paragraphe 2, m'oblige à requérir le consentement de l'Opposition officielle.

M. Pagé: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Dans ce sens-là, je demande à l'Opposition officielle...

M. Pagé: M'est-il permis...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, oui.

M. Pagé: ...avant de porter l'élément suivant à votre attention?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Cette disposition ne s'applique pas durant la semaine suivant le deuxième mardi de mars. Si, lorsque, moi, j'ai participé, comme whip de l'Opposition à l'époque, à la refonte du règlement de l'Assemblée nationale, si on avait voulu faire en sorte que seulement la semaine de l'ouverture, le leader puisse appeler des projets de loi, même s'ils ont été déposés la veille, on aurait écrit purement et simplement: Cette disposition ne s'applique pas durant la semaine du deuxième mardi de mars. Purement et simplement. Or, ce n'est pas ça qu'on a écrit. On a écrit: Cette disposition ne s'applique pas durant la semaine suivant le deuxième mardi de mars. Mais, la semaine passée, est-ce que c'était la semaine suivant le deuxième mardi de mars? Pas du tout. C'était la semaine du deuxième mardi de mars. Et la semaine suivant le deuxième mardi de mars, je m'excuse à l'égard de quiconque en cette Chambre, mais, selon moi, c'est cette semaine.

Le Président: M. le leader adjoint.

M. Gendron: M. le Président, moi, j'ai été sensible à l'argumentation présentée par le leader du gouvernement, j'ai été également sensible à la vôtre. De ce côté-ci, M. le Président, ce que nous allons exiger, c'est qu'il nous importe que la présidence statue d'une façon définitive, par écrit, sur l'interprétation qu'elle fait de l'article que vous venez d'évoquer, M. le Président, qui, selon vous, nécessiterait, à ce moment-ci, le consentement de l'Opposition officielle. Moi, tout ce que je vous dis, pour ce qui est du projet de loi dont on discute, c'est que je n'ai pas d'objection à vous donner mon consentement, mais je ne le fais pas, M. le Président, sans avoir la garantie de votre part que vous allez nous donner une interprétation précise, définitive et par écrit, pour que nous sachions quelle est l'interprétation que la présidence fait des nouvelles dispositions, eu égard à ce dont on discute aujourd'hui. Dans ce sens-là, si on a cette garantie de votre part, là, je suis en mesure de répondre à la question que vous allez me poser.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, M. le leader du gouvernement et M. le leader adjoint de l'Opposition officielle, vous avez raison de demander à la présidence - je m'adresse particulièrement au leader adjoint de l'Opposition officielle - de rendre une décision qui préciserait la portée des articles 237 et 237-2. Mais ce que je retiens de votre intervention, c'est qu'il y a consentement pour qu'on puisse procéder à l'adoption du principe du projet de loi 124. Je retiens votre consentement et je vous donne l'assurance que je rendrai une décision dans les prochains jours, sinon aujourd'hui, sur l'article 237, paragraphe 1 et sur l'article 237, paragraphe 2. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, je réitère, premièrement, la demande de consentement; je retiens que je l'ai. Je réitère l'appel que je fais de l'article 7 du feuilleton pour que M. le ministre des relations internationales puisse continuer. je terminerai en vous invitant à une interprétation rigoureuse, stricte et au texte, et en ne citant qu'un seul exemple. est-il possible - exemple concret - que la semaine suivant la fête de la saint-sylvestre soit en décembre? selon moi, non; selon moi, c'est en janvier.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader du gouvernement, si j'en arrive à la conclusion que votre interprétation est la bonne, soyez assuré que je n'hésiterai pas à vous donner raison.

M. le ministre des Affaires internationales.

M. John Ciaccia (suite)

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Les règles internationales semblent être beaucoup moins difficiles à interpréter que les règles de cette honorable Assemblée. Je remercie l'Opposition officielle pour son consentement, de toute façon.

Or, comme je le disais, au cours de la dernière année, j'ai effectué plusieurs missions à l'étranger. J'ai pu constater des changements partout dans le monde dans l'évolution de l'économie, dans la croissance du commerce mondial, et enfin, un mouvement de fond vers la démocratisation des régimes politiques.

Il ne fait aucun doute que l'impulsion dominante actuellement sur la scène internationale est économique. La communauté économique internationale dont nous faisons partie évolue donc de plus en plus rapidement et l'impact sur chacun des acteurs est déterminant. L'émergence de blocs commerciaux régionaux en Amérique du Nord, en Europe et en Asie, définira non seulement une nouvelle façon de faire des affaires, mais aussi une nouvelle façon de penser. Ainsi, les frontières entre les pays sont en train de perdre leur signification traditionnelle, si on pense par exemple aux échanges commerciaux, à la recherche ou aux industries culturelles. À l'identité nationale se greffera désormais une identité continentale. Notre marché domestique est devenu maintenant le continent et, par extension, le monde. (15 h 40)

Sans entrer dans le détail de nos relations avec chaque partie du monde, vous me permettrez de faire quelques commentaires au sujet de l'émergence de ces blocs commerciaux, réalité désormais incontournable des affaires interna-

tionales. On n'a qu'à songer à l'Europe des Douze qui ne deviendra peut-être pas une forteresse commerciale, mais qui sera sûrement une force redoutable sur le plan mondial avec son marché de 350 000 000 de consommateurs, sa structure industrielle puissante, la libre circulation des biens et des personnes et son éventuelle union monétaire. Face à cette nouvelle réalité, nous ne pouvons nous contenter d'être des spectateurs passifs.

C'est pourquoi nous encourageons activement la création de nouveaux partenariats entre le Québec et l'Europe. En Europe de l'Est, des économies entières doivent être rapidement transformées. Ces pays ont besoin de nouvelles infrastructures et de nouvelles technologies. Ils nous fournissent également l'occasion de contribuer de façon significative à leur cheminement vers la démocratie. Dans cette partie du monde, nous avons aussi mis beaucoup d'efforts pour assurer une présence réelle et dynamique du Québec, pendant cette période de transition cruciale en termes de positionnement pour le Québec. L'esprit de collaboration qui règne entre le Québec et ses partenaires d'Europe de l'Est me laisse croire que nos efforts continueront de porter fruit dans un avenir rapproché.

Toujours au sujet des blocs commerciaux, l'émergence de puissances commerciales en Asie de l'Est ne peut nous laisser indifférents. À l'image du Japon et, bien souvent, avec son soutien, plusieurs pays de cette région sont désormais des acteurs de premier plan sur la scène internationale. Bien sûr, nous devons consolider nos relations avec le Japon, mais nous avons su développer des liens étroits avec des partenaires d'avenir tels la Corée du Sud.

Un peu à l'image de ce que nous tentons de faire en Europe de l'Est, nous croyons qu'il faut profiter du vent de changement qui souffle sur cette partie de la planète pour forger des liens durables avec des partenaires qui ont un bon potentiel de développement, au cours des prochaines années. C'est ainsi, par exemple, que nous examinons attentivement les possibilités de coopération avec le Vietnam.

Comme vous le voyez, M. le Président, nous tenons à travailler sur des relations avec des partenaires étrangers qui nous permettront d'atteindre des résultats à court terme, mais qui nous permettent aussi de positionner avantageusement le Québec à long terme sur des marchés moins traditionnels. On perçoit mieux, par conséquent, tout l'intérêt de l'accord de libre-échange qui permet au Québec de participer à la zone de libre-échange la plus ouverte jamais établie depuis la création du GATT. Non seulement cet accord nous permet-il un meilleur accès à notre plus important marché d'exportation, mais il permet aux entreprises québécoises de développer la compétitivité nécessaire pour s'attaquer aux marchés mondiaux. En autant que les conditions que nous posons soient respectées, un nouvel accord, comprenant le Mexique, viendra encore une fois élargir ce marché et multiplier ces opportunités.

Voilà donc notre défi: concilier cette tendance vers l'interdépendance accrue avec nos propres intérêts au Québec. Nous ne pourrons échapper à cette nouvelle réalité. Les pays qui s'adaptent le plus rapidement aux changements deviennent nos plus vigoureux concurrents. Cette concurrence s'exerce non seulement lorsque nous voulons percer de nouveaux marchés, mais aussi lorsqu'il s'agit de protéger ceux que nous avons déjà.

Si on considère que la valeur des exportations du Québec en 1990 était de 24 300 000 000 $, soit plus de 15 % du produit intérieur brut, on saisit immédiatement l'importance de s'adapter aux nouvelles réalités à ce monde en mutation car, ne nous trompons pas, l'accélération du changement fait désormais partie de la réalité de tous les jours, et notre plan d'action doit en tenir compte. Ceux d'entre nous, individus, entreprises ou gouvernement qui ne sommes pas ouverts à ces changements, qu'ils croient qu'ils ou elles peuvent survivre sans s'adapter à cet environnement en perpétuelle transformation, se préparent des surprises désagréables. Ces changements ont donc un impact important sur le Québec qui n'est pas un acteur majeur sur la scène internationale, mais qui y joue un rôle certain.

Nous avons plusieurs atouts dans notre jeu. Ceux qui en doutent n'ont qu'à constater par eux-mêmes le nombre de pays dans le monde qui souhaitent créer ou développer des liens avec nous. Nous ne pouvons offrir des produits et des services concurrentiels dans tous les domaines; aucun pays ne peut atteindre ce but, même pas le Japon. Cependant, si nous passons en revue nos entreprises et institutions les plus performantes, nous sommes en mesure de comprendre que le Québec est actif dans plusieurs secteurs. Les entreprises oeuvrant dans les secteurs des pâtes et papiers, l'aéronautique, le génie-conseil, l'énergie, les télécommunications, parmi d'autres, font preuve du dynamisme nécessaire pour réussir sur la scène internationale. C'est chez ces acteurs et chez d'autres que se trouve le noyau de la capacité concurrentielle du Québec d'aujourd'hui et de demain.

Limitées, dans un premier temps, par la dimension réduite du marché québécois, elles ont pu atteindre leur taille actuelle en s'ouvrant sur d'autres marchés, que ce soit en forgeant des alliances stratégiques ou en réalisant des fusions ou des copartenariats. Nous devons désormais imaginer de nouvelles formules permettant une collaboration entre ces entreprises, les petites et moyennes entreprises, et le gouvernement et ce, pour le plus grand bénéfice de tout le Québec. Mais, selon l'expression bien connue, l'homme ne vit pas seulement de pain; les relations institutionnelles et les échanges culturels et univer-

sitaires sont autant de moyens de faire comprendre à nos interlocuteurs du monde entier qui nous sommes, car, avant de faire des affaires ensemble, il faut se connaître, se comprendre et bâtir sur du solide.

Il y a aussi beaucoup de choses que nous pouvons faire seuls. C'est pourquoi nous attachons beaucoup d'importance à notre participation à la francophonie. Il est, en effet, évident que le rayonnement et l'utilisation de la langue française sur la scène internationale sont reliés à notre capacité de faire du français une langue partagée par le plus grand nombre de partenaires possible et ce, tant pour les échanges culturels que commerciaux et scientifiques.

Joueur actif depuis la création de la francophonie, le Québec a manifesté l'importance qu'il accorde à cette institution par la nomination d'un ministre délégué à la Francophonie. Au cours des prochains mois, j'ai l'intention d'examiner ces questions et d'autres encore afin de dégager une stratégie permettant à nos relations internationales de devenir un instrument majeur pour le développement du Québec. Ce travail est déjà commencé. En effet, dès mon arrivée au ministère, j'ai demandé que l'on analyse les changements qui se multiplient actuellement sur la scène internationale, d'en dégager les tendances lourdes et d'identifier les moyens de créer un climat propice au Québec afin que nous nous adaptions à ces mutations. Et le fruit de ces réflexions devrait me permettre de présenter des éléments d'une politique des affaires internationales au cours des mois qui viennent.

Cette politique d'affaires internationales devrait permettre au gouvernement du Québec d'avoir une vision cohérente de l'action internationale des partenaires gouvernementaux et non gouvernementaux. C'est à la lumière de cette toile de fond que j'ai maintenant...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader adjoint de l'Opposition officielle.

M. Gendron: Oui, je m'excuse sincèrement auprès du ministre des Affaires internationales. Je l'écoute assez attentivement, on a deux porte-parole qui veulent intervenir sur le projet de loi et je vous avoue bien franchement que j'invoque l'article sur la pertinence, mais pas par dé-sobligeance. Je veux savoir est-ce qu'à un moment donné vous allez nous entretenir quelques minutes sur la constitution des fonds spéciaux, des deux fonds prévus au projet de loi? (15 h 50)

Là, j'essaie de comprendre parce qu'on est sur l'adoption du principe du projet de loi et, dépendamment que le ministre nous donne quelques indications quant à la façon éventuellement d'apporter au moins une modification sur l'un des fonds, il y en a un qui ne nous pose pas de problème, mais l'autre fonds... C'est parce qu'il y a eu des discussions là-dessus et si le ministre ne nous en parle pas du tout, je veux juste vous indiquer que ça nous pose un problème, à nous autres, de conduite, de ce côté-ci de la Chambre, quant à nos intentions d'adopter ou pas le principe du projet de loi.

Et là je l'écoutais. C'est beau, c'est bien, ce qu'il nous dit, sauf que je ne suis pas capable de voir en quoi ça se rapporte au projet de loi 124 ou essentiellement si c'est un projet de loi pour constituer deux fonds spéciaux. Ça ne me dérange pas. Je veux juste savoir si le ministre va nous en parler quelques minutes quelque part dans son intervention sur le principe du projet de loi. Autrement, je vais devoir faire des consultations de ce côté-ci.

M. Ciaccia: M. le Président, je crois que...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre des Affaires internationales.

M. Ciaccia: ...le leader adjoint de l'Opposition a assez d'expérience dans les règles de cette Chambre pour savoir que dans un projet de loi où non seulement nous créons ce fonds, mais nous amendons la loi du ministère des Affaires internationales, avant de venir sur des détails du fonds qui sera créé, pour mieux vous faire comprendre comment le fonds va opérer, l'importance du fonds, toutes les modalités, il faut situer l'opération de ce fonds dans un contexte plus élargi du rôle, de la situation, brièvement - je crois que je l'ai fait assez brièvement - du ministère des Affaires internationales et de la situation internationale. Dans la question de commerce...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre.

M. Ciaccia: ...et tout le reste. Vous ayant donné ces éléments justement, si vous aviez eu deux minutes de plus de patience, j'arrive aux...

M. Gendron: Tu peux en parler.

M. Ciaccia: ...éléments du projet de loi 124, mais en vous donnant les éléments - je sais que vous n'êtes pas le porte-parole des affaires internationales...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre, je vous rappelle que vous êtes sur la question de règlement. Vous êtes sur la question de règlement.

M. Ciaccia: Oui.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, je comprends...

M. Ciaccia: Très bien.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): ...votre intervention sur la question de règlement est terminée.

M. Ciaccia: Oui.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je vous rappelle également que votre intervention peut durer une heure. Vous avez 20 minutes à peine. Alors, à l'article 239, M. le leader adjoint de l'Opposition officielle, la pertinence à l'article 239: Lorsqu'on est sur l'adoption du principe, la pertinence, c'est l'opportunité du projet de loi, sa valeur intrinsèque ou tout autre moyen d'atteindre les mêmes fins. Alors, M. le ministre des Affaires internationales, je vous demanderais de continuer votre intervention principale, s'il vous plaît.

M. Ciaccia: Alors, merci, M. le Président. Je suis persuadé que les éléments que je viens d'énoncer et cette information sur les Affaires internationales vont être très utiles au porte-parole officiel de l'Opposition, pour l'étude du projet de loi.

Alors, M. le Président, comme je le disais, c'est à la lumière de cette toile de fond que j'ai maintenant l'honneur de soumettre à cette Chambre le projet de loi 124 concernant la constitution de fonds spéciaux. Et la pertinence pour le Québec, parlons premièrement du fonds de la gestion des immeubles du Québec à l'étranger, et la pertinence pour le Québec de maintenir et de développer son réseau de représentation à l'étranger n'est plus à démontrer.

À cette époque de la globalisation des marchés où nous devons chaque jour faire preuve de notre compétitivité, nos délégations constituent un outil indispensable à notre action internationale. Que ce soit pour la promotion de nos produits et services, le développement des transferts technologiques, la prospection des investissements étrangers ou l'organisation de missions visant à percer de nouveaux marchés, les délégations jouent un rôle essentiel sur le terrain.

C'est donc pour fournir à nos délégations les meilleures conditions possible de fonctionnement que nous avons envisagé la création de ce fonds. Certains peuvent se poser la question: Pourquoi un fonds spécial? Je peux vous dire que le ministère des Affaires internationales a examiné sérieusement d'autres hypothèses. Le ministère a d'abord envisagé de continuer avec la situation actuelle. Après tout, cela fait quand même plusieurs années que nous fonctionnons ainsi. Le problème avec cette approche, c'est que le ministère des Affaires internationales ne peut continuer plus longtemps à financer à même ses budgets l'entretien de l'immeuble dont il est propriétaire.

Il ne peut pas, par exemple, aller à la banque emprunter sur l'hypothèque pour financer des travaux de rénovation. Il doit prendre les sommes requises à même son propre budget, ce qui est parfois un exercice périlleux. Or, les rénovations, elles, supportent mal d'être reportées année après année faute de budget. Ce qui est remis à plus tard coûte inévitablement plus cher à réaliser; et ici, je ne parle même pas des acquisitions.

Louer, c'est bien commode, mais cela coûte de plus en plus cher. On n'a qu'à songer à ce qu'il en coûte pour louer des bureaux dans des villes comme New York et Tokyo, dont le coût de la vie très élevé est légendaire. Sans compter que, lorsqu'on est propriétaire, la hausse de la valeur de la propriété à travers les années devient un acquis extrêmement important. À titre d'exemple, les bureaux du 66 rue Pergolèse, à Paris, ont été acquis en 1964 au coût de 3 000 000 de francs français, soit 1 500 000 $ canadiens, selon le taux de change en vigueur à l'époque. Ce même édifice est aujourd'hui évalué à 40 000 000 $.

Bien sûr, il ne s'agit pas pour le Québec d'acheter des immeubles partout où il souhaite être présent. Il faut néanmoins prendre des décisions judicieuses quand les occasions se présentent et surtout se donner les moyens de financer les acquisitions. Et c'est justement pour assurer le financement des coûts d'entretien et d'acquisition immobilière que le ministre des Affaires internationales a étudié l'hypothèse de la création d'une société d'État dont le mandat serait de gérer le patrimoine immobilier du Québec à l'étranger. Cette solution n'a pas été retenue parce qu'elle viendrait doubler le travail de la Société immobilière du Québec, sans apporter d'avantages importants. Cela aurait impliqué la création d'un nouvel organisme, ce qui n'est pas nécessaire actuellement, et aurait fait perdre des exemptions fiscales à certaines de nos délégations générales, dont celle de Paris, pour une somme de 2 000 000 $.

L'approche du fonds spécial comporte donc une souplesse de gestion, une formule d'autofinancement à même le loyer perçu du ministère des Affaires internationales et des autres usagers, une capacité de financement à plus long terme, tout ceci sans remettre en cause les privilèges fiscaux dont bénéficie le gouvernement du Québec.

Alors, voici l'état de la situation. On se souviendra que la Loi sur le ministère des Affaires internationales, sanctionnée par l'Assemblée nationale le 10 novembre 1988, prévoit, notamment à l'article 30, que, et je cite: "Le ministre fournit aux délégués généraux, aux délégués, aux personnes responsables de toute autre forme d'organisation et aux personnes affectées à l'étranger, les locaux, le personnel et les services requis pour l'exercice de leurs fonctions." Cette responsabilité qui m'est dévolue implique des interventions du ministère dans 30 villes situées dans 24 pays, sur 4 continents.

Globalement, les représentations du Québec à l'étranger occupent des espaces à bureaux totalisant plus de 12 000 mètres carrés, dont environ 2000 mètres carrés dans l'immeuble de la Délégation générale de Paris, seul immeuble à bureaux dont le gouvernement est propriétaire. Quant aux résidences de délégués généraux ou de délégués, le gouvernement est propriétaire de résidences à Bruxelles, Londres et New York, pour le réseau international.

Finalement, le gouvernement du Québec affecte en permanence à l'étranger quelque 90 Québécois pour des périodes de 2 à 4 ans. Pour ces fonctionnaires en poste à l'extérieur, le ministère des Affaires internationales verse des allocations de logement d'un montant annuel d'environ 4 000 000 $, visant à compenser le différentiel de coût d'habitation entre le Québec et les différentes capitales mondiales. Actuellement, 100 % de ces logements sont loués d'un tiers car le gouvernement ne possède ni ne loue à long terme aucun de ces logements.

Ce réseau de représentations du Québec ne date pas d'hier. À titre d'exemple, la Délégation générale de New York a récemment fêté son cinquantième anniversaire d'existence. Celle de Paris a été inaugurée il y a 30 ans cette année. (16 heures)

Depuis que je suis responsable de ce ministère, mes efforts ont porté autant sur la conservation des acquis des dernières décennies que sur le développement progressif et contrôlé de ce réseau essentiel au rayonnement économique et culturel du Québec dans le monde. Notre présence dans ces 30 villes étrangères implique cependant une problématique particulière, notamment au plan de la gestion immobilière des espaces occupés, qu'ils soient possédés ou en location. Ces représentations, pour bien assumer leur mandat, doivent être situées au coeur des diverses capitales mondiales, là où les coûts de location sont susceptibles de connaître les plus fortes hausses. Ceci est vrai tant pour les espaces à bureau que pour les résidences des employés affectés à l'étranger. Il importe donc de développer des façons de faire qui permettront au Québec de maintenir et même d'accroître sa présence à l'étranger sans pour autant grever substantiellement les budgets de l'État.

Personnellement, j'estime qu'il est temps de faire mieux avec ce que l'on a. J'en arrive ainsi au but poursuivi par ce projet de loi: gérer plus efficacement les immeubles du Québec à l'étranger en basant celle-ci sur un mode de financement adéquat, en réduisant les coûts liés à cette gestion.

Concernant le premier point, le fonds spécial permettra de financer sur un plus long terme les prochains travaux et de récupérer, aux fins de financement ultérieur, l'équité acquise au fil des ans par le gouvernement sur ses propriétés à l'étranger et qui totalise aujourd'hui 30 000 000 $. En ce qui concerne la réduction des coûts, je rappelle que les déboursés budgétaires directement reliés à la location des espaces commerciaux ou résidentiels dans le réseau des représentations du Québec à l'étranger totalisaient environ 8 300 000 $ en 1989-1990 et devraient, dans l'actuel mode de fonctionnement, atteindre 29 900 000 $ en 1999-2000 et plus de 119 000 000 $ en 2010 jusqu'en 2011. L'acquisition d'une partie du parc immobilier situé à l'étranger permettra, en vitesse de croisière, d'économiser environ 30 % de ces coûts. Enfin, il est important de souligner que cette mesure permettra de mettre progressivement sur pied un réel patrimoine immobilier québécois dans les principaux centres internationaux où le Québec intervient majoritairement.

En résumé, ce véhicule de gestion et de financement des activités de gestion immobilière à l'étranger fournira au ministère l'occasion d'acquérir et de financer, lorsque rentable, des espaces de logements ou de bureaux occupés à l'étranger. Ce financement s'effectuerait essentiellement par le biais de sources de financement du ministère des Finances du Québec. Il permettra de faire une meilleure planification des interventions en matière d'entretien, de rénovation et de réparation de ce parc immobilier de 12 000 mètres carrés d'espaces à bureau, de 5 résidences de délégués généraux et de quelque 90 logements de fonctionnaires. Finalement, il va permettre d'assurer un contrôle serré sur l'accroissement des coûts annuels d'occupation des espaces qui seraient grandement réduits compte tenu du fait que le gouvernement serait soit propriétaire, soit locataire à long terme de la majorité des espaces occupés.

Maintenant, parlons, deuxièmement, du Fonds de développement international. Quant au second fonds prévu par le projet de loi, il vise à fournir aux gestionnaires de projets de développement international, financés par des organismes comme l'Agence canadienne de développement international, un mécanisme de gestion plus souple et mieux adapté à des projets financés par des tiers. Depuis plusieurs années déjà, le ministère des Affaires internationales et les ministères qui l'ont précédé se sont impliqués dans la réalisation de projets de développement international financés par l'ACDI.

Cette implication prend deux formes: dans certains cas, le ministère agit comme mandataire, c'est-à-dire qu'il prend la responsabilité, par le biais d'une entente, de réaliser, au nom de l'ACDI, un projet donné dans un pays en voie de développement, et le financement est alors défrayé entièrement par l'Agence. Dans d'autres projets, le ministère participe conjointement avec le gouvernement fédéral et le pays bénéficiaire. Ce genre de projet donne lieu à une entente tripartite et chacun y contribue financièrement.

Dans un cas comme dans l'autre, les contributions de l'ACDI sont versées au fonds consolidé du revenu, conformément à l'article 29

de la Loi sur l'administration financière. Cette disposition de la Loi sur l'administration financière oblige toutefois le ministère à faire inscrire à son budget les crédits nécessaires dans le cadre du processus normal de budgétisation. Or, ce sont des activités qui n'ont pas à figurer comme telles au budget du ministère, puisque celui-ci agit comme mandataire et que le financement provient, en totalité ou majoritairement, d'un tiers. Ceci contribue à augmenter de façon indue les revenus et les dépenses du gouvernement. Il faut d'ailleurs se rappeler que l'implication du Québec dans des projets de cette nature repose sur deux motifs de recherche d'expertise particulière, dont le gouvernement dispose dans des secteurs donnés, et le désir de certains pays de transiger de gouvernement à gouvernement. Jusqu'à maintenant, c'est lorsque l'une ou l'autre ou ces deux conditions était remplis qu'une entente était conclue entre le ministère des Affaires internationales et l'ACDI.

Pour mieux comprendre la nature de ces projets et l'importance qu'ils revêtent pour le Québec, prenons l'exemple des six projets présentement en cours de réalisation. Le projet Petites et moyennes entreprises en Thaïlande est financé entièrement par l'ACDI pour une valeur de 5 500 000 $. Le ministère des Affaires internationales fournit deux experts chargés de mettre sur pied une agence gouvernementale, chargée de fournir du financement aux PME thaïlandaises. Deux projets au Zaïre permettent aux spécialistes québécois de former les cadres zaïrois dans le secteur agricole et de mettre au point un schéma d'aménagement dans la région du Kivu. Au Rwanda, le Québec est chargé de la formation dans le domaine de l'aménagement forestier. En Tunisie et au Sénégal, c'est notre savoir-faire dans le domaine agricole qui est mis à contribution.

Vous aurez constaté qu'il s'agit de secteurs (aide aux PME, agriculture, aménagement du territoire, aménagement forestier) où le Québec a fait ses preuves au cours des années. En mettant cette compétence à la disposition des pays moins avancés, il contribue au rayonnement du potentiel économique, technologique et culturel québécois. Les six projets en cours coûteront au total 16 100 000 $ et représentent, pour le prochain exercice financier, un budget de près de 4 000 000 $.

La création d'un fonds spécial permettrait de retirer les crédits votés, les sommes requises et de gérer dans un même fonds les revenus et les dépenses reliés à ces activités. En d'autres termes, les sommes payées par le gouvernement fédéral ou tout autre bailleur de fonds, au lieu d'être versées au fonds consolidé du revenu, serviraient directement aux activités pour lesquelles elles sont versées. Le fonds spécial permettrait également d'assouplir le processus de financement lorsque de nouvelles ententes interviennent en cours d'exercice. Actuellement, les crédits requis doivent être obtenus, soit par recours au fonds de suppléance, soit par réduction des compressions, ce qui entraîne un impact sur les équilibres gouvernementaux.

Par ailleurs, rien n'indique que la participation du Québec à des projets de cette nature puisse être moins importante dans l'avenir. En effet, cette participation tient davantage à sa capacité à dégager ses propres experts qu'à trouver des bailleurs de fonds, d'autres organismes offrant aussi des fonds de développement international. Par la création d'un fonds spécial, nous visons donc à donner aux gestionnaires de ces projets l'outil de gestion qui nous apparaît le plus approprié dans les circonstances pour administrer des activités de nature extrabudgétaire. (16 h 10)

En résumé, la création de ces deux fonds vise à améliorer l'efficacité de notre action internationale, tout en assurant que les mesures retenues respectent les règles de la bonne gestion. Dans ce sens, je me permets de souligner que l'ensemble des règles gouvernementales suivantes s'appliqueront à ces deux fonds, comme c'est le cas pour les autres fonds spéciaux. Premièrement, les engagements financiers des fonds spéciaux seront approuvés par l'Assemblée nationale; les états financiers de fonds spéciaux seront également déposés à l'Assemblée nationale; la vérification des livres sera effectuée par le Vérificateur général du gouvernement; les fonds spéciaux seront tenus de respecter les directives gouvernementales en matière d'octroi de contrats; et, finalement, le personnel qui sera appelé à gérer ces fonds spéciaux devra être nommé et rémunéré selon les dispositions de la Loi sur la fonction publique. Sur chacun de ces aspects et d'autres encore, l'action de ces fonds spéciaux est effectivement soumise à la réglementation de la Loi sur l'administration financière.

En conclusion, M. le Président, je suis convaincu que les mesures prévues dans ce projet de loi auront pour résultat un plus grand rayonnement du Québec à l'étranger ainsi qu'une amélioration de notre capacité concurrentielle sur les marchés mondiaux.

M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi et il en recommande l'étude à l'Assemblée. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre des Affaires internationales. Toujours sur l'adoption du principe du projet de loi 124, je reconnais maintenant M. le député de Bertrand. M. le député.

M. François Beaulne

M. Beaulne: merci, m. le président. pour le bénéfice de nos auditeurs, j'aimerais rappeler un peu de quoi nous discutons ici. il s'agit essentiellement de l'adoption du projet de loi 124, qui

a pour principal objet de créer deux fonds spéciaux au ministère des Affaires internationales. Le premier fonds, le fonds de la gestion des immeubles du Québec à l'étranger, pour la gestion et le financement des biens meubles et immeubles fournis par le ministère aux composantes du réseau de représentation du Québec à l'étranger et, deuxièmement, le fonds de développement international qui, de son côté, se rend responsable de la gestion et du financement de projets financés en tout ou partiellement par des organismes de développement international dans le cadre d'ententes internationales ou intergouvernementales.

Le projet de loi 124, il faut le souligner, s'inscrit dans la foulée des nouvelles dispositions de la Loi sur l'administration financière, à la suite de l'adoption du projet de loi en décembre dernier, qui proposait, entre autres, la mise sur pied du fonds de financement au ministère des Finances, destiné à financer les activités des organismes, et des fonds spéciaux prévus à l'article 69.6 de la Loi sur l'administration financière.

En créant le fonds de développement international pour le financement des projets réalisés par des organismes de développement international, il faut craindre désormais - et c'est notre point de vue du côté de l'Opposition - que l'ensemble des dépenses de transfert reliées au financement de projets spécifiques de coopération internationale par le ministère des Affaires internationales échappe au processus normal de vérification des engagements financiers. Inutile de reprendre devant cette Chambre les propos du Vérificateur général cette année, lorsqu'il soulignait que les parlementaires possèdent insuffisamment d'informations pour pouvoir passer des jugements adéquats et s'assurer d'une reddition de comptes efficace au niveau des engagements financiers du gouvernement du Québec.

Contrairement à la situation actuelle où chaque participation financière du ministère fait l'objet d'un engagement financier spécifique devant être soumis aux parlementaires, le budget des fonds spéciaux est vérifié de façon globale, sans préciser la liste des projets subventionnés consentis à chacun des projets.

Ainsi, le projet de loi 124, par la création de ce Fonds de développement international, privera les parlementaires de la possibilité d'un examen détaillé des projets de coopération internationale réalisés par des organismes non gouvernementaux avec l'aide financière du ministère des Affaires internationales.

Ce qui est à souligner ici, c'est que, contrairement à la situation des autres fonds spéciaux affectés essentiellement au financement de services entre ministères et organismes gouvernementaux, par exemple, la téléphonie, l'informatique, les placements médias, les services aériens, le Fonds de développement international implique des dépenses de transferts dévolues à des organismes tiers. C'est là que la différence est importante.

La particularité du Fonds de développement international justifie que les dépenses prévues dans le cadre de celui-ci continuent d'être soumises à la procédure habituelle de vérification des engagements financiers. C'est certainement un point sur lequel, lors de l'étude en commission de ce projet de loi, nous insisterons. Nous souhaitons donc que le ministre des Affaires internationales accepte d'amender, en ce sens, son projet de loi en l'assurant, s'il le fart, de notre entière collaboration.

J'aimerais profiter de cette occasion, M. le Président, pour revenir sur certains engagements que le ministre avait pris concernant l'élaboration d'une politique québécoise en matière de relations internationales. Tout à l'heure, en préambule, le ministre a fait un tour d'horizon, nous a, en quelque sorte, rendu compte de ses voyages qu'il a effectués récemment dans différentes parties du monde pour promouvoir le commerce québécois, entre autres.

J'aimerais cependant souligner que, le 23 mai dernier, lors de l'étude des crédits, le ministre s'était engagé auprès de mon collègue, à ce moment-là porte-parole en matière d'affaires internationales, le député de Lac-Saint-Jean, à rendre publique, pour l'automne dernier, une étude sur l'énoncé de politique générale du Québec en matière d'affaires internationales. Nous attendons toujours cet énoncé. Je profite de cette occasion pour demander au ministre quand il a l'intention de déposer cette politique.

Je me permettrai également de lui poser la question, à savoir s'il envisage une consultation publique sur ce sujet d'ici l'ajournement de juin ou au cours de l'automne, conformément à son engagement de tenir une telle consultation publique en commission parlementaire, comme je l'indiquais tout à l'heure.

Le ministre nous annonçait également, en mai dernier, la formation d'un comité consultatif en vue de préparer justement cet énoncé de politique. J'aimerais, ici, souligner que, malgré les questions en ce sens, de mon collègue à l'époque, le fameux comité en question, qui se veut représentatif et qui est composé de représentants du milieu des affaires et du milieu universitaire, ne compte aucun représentant des organismes non gouvernementaux, c'est-à-dire ce qu'on appelle communément les ONG. Je pense qu'il est tout à fait approprié de porter cette question à l'attention du ministre puisque le projet 124 prévoit, entre autres, la mise sur pied et la création d'un fonds, justement, qui impliquera les ONG. À ce chapitre, j'aimerais également connaître du ministre s'il compte modifier la composition de ce comité pour y ajouter une personne représentative du milieu des ONG.

Permettez-moi également de saisir cette occasion pour informer et sensibliser cette

Chambre à l'importance du rôle des ONG dans la représentation internationale du Québec, travail qui est souvent méconnu de nos parlementaires et du grand public en général. Je profite de l'occasion pour le faire d'autant plus que l'organisme qui, en quelque sorte, regroupe plusieurs de ces organismes non gouvernementaux, l'AQOCI, l'Association québécoise des organismes de coopération internationale, a déposé, auprès de la Commission Bélanger-Campeau, un mémoire qu'elle n'a malheureusement pas eu le privilège de défendre et de présenter.

Depuis une trentaine d'années, en effet, la société québécoise a connu une véritable explosion sur la scène internationale. L'intérêt pour les pays d'outre-mer a gagné les universités, le Mouvement Desjardins, les centrales syndicales, les entreprises d'ingénierie, Hydro-Québec, d'autres sociétés d'État, jusqu'au gouvernement du Québec lui-même. C'est dans ce vaste mouvement que les ONG ont contribué à élargir la participation et le rayonnement du Québec sur la place internationale. Aujourd'hui, les associations québécoises des organismes de coopération internationale regroupent 47 organismes au total, représentant quelque 400 employés, des milliers de bénévoles et environ 600 coopérants à l'étranger, une présence dans 110 pays, des budgets dépassant 110 000 000 $ pour 1988-1989. (16 h 20)

Malgré une si grande présence dans les pays du tiers monde, le gouvernement du Québec ne semble pas, malheureusement, manifester une attention suffisante aux activités et aux préoccupations des Québécois et de leurs organismes de coopération. Jusqu'ici, la priorité des programmes internationaux du ministère des Affaires internationales va avant tout à la promotion commerciale, et les questions de nature humanitaire et les questions de développement international, comme l'ont souligné les représentants de l'AQOCI dans leur mémoire à la Commission Bélanger-Campeau, semblent passer en second ordre dans les préoccupations du gouvernement du Québec.

Or, pour toutes les sociétés contemporaires, grandes ou petites, il devient chaque jour de plus en plus important d'être présent globalement dans le monde actuel, sous peine d'être dépassé par son évolution. Une politique d'envergure pour le Québec international doit s'appuyer sur les fondements les plus larges possible. Les communautés culturelles, par exemple, représentent autant d'atouts pour favoriser et élargir les échanges internationaux du Québec. D'autres forces sociales devraient également être associées à la définition et au développement d'une politique internationale du Québec. J'ai mentionné tout à l'heure le Mouvement Desjardins, les syndicats et même du côté des agriculteurs. Enfin, l'expérience et l'expertise de qualité des organismes de coopération internationale québécois qui rayonnent déjà à travers le monde devraient être mises davantage à contribution.

Le Québec, s'il doit exercer de plus grandes responsabilités internationales, ne doit pas compromettre les acquis des 30 dernières années, de peur de se couper d'une source de rayonnement importante. Devant une telle sensibilité aux affaires internationales et une si grande présence déjà dans les pays du tiers monde, on se serait attendu que le gouvernement du Québec, surtout depuis qu'il revendique une place propre sur la scène internationale, manifeste une attention spéciale aux activités et aux préoccupations des Québécois et de leurs organismes, particulièrement dans le secteur des organismes de coopération internationale et les assure de son appui. Or, c'est plutôt le contraire qui s'est produit.

Contrairement à ce qu'on peut constater dans des provinces comme l'Alberta, l'appui du Québec à ses propres organismes de coopération internationale se limite encore à une enveloppe dérisoire de quelque 300 000 $ et à une forme d'ignorance, à toutes fins pratiques, pour toute coopération qui n'est pas d'abord d'ordre commercial. Les effets de cette politique réductrice sont loin d'être négligeables. Le gouvernement canadien et l'Agence de développement international, l'ACDI, ont occupé le terrain et développé une expertise, même dans des domaines de juridiction provinciale: l'éducation, la santé, les ressources naturelles. En s'en tenant à une conception étroite des relations internationales, le gouvernement du Québec non seulement appauvrit sa politique, mais risque de condamner des entreprises d'ici à faire de moins bonnes affaires à l'avenir. On ne peut en effet séparer le commerce de la culture et des autres aspects de la vie des peuples. Encourager des pratiques financières qui appauvrissent un pays, par exemple, c'est perdre un client et un partenaire potentiel.

De 1981 à 1987, les exportateurs canadiens auraient perdu, selon un ancien président de l'ACDI, M. Marcel Massé, plus de 24 000 000 000 $ de ventes dans 17 pays endettés et ce déclin aurait coûté quelque 130 000 emplois au Canada. De même, M. le Président, négliger la santé ou l'éducation dans le tiers monde, c'est préparer des épidémies ou des conflits qui vont tôt ou tard se répercuter jusque dans notre société, et je crois qu'un exemple que nous avons tous vécu dans le golfe Persique récemment en témoigne éloquemment.

Au fond, ce que disent les organismes non gouvernementaux par la voix de l'AQOCI, c'est que la coopération internationale élargie à la mesure des défis du monde actuel fait partie intégrante de la personnalité internationale du Québec et que, par conséquent, elle doit être reflétée dans les priorités du ministère des Affaires internationales. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Bertrand. Toujours à l'étape de

l'adoption du principe du projet de loi 124, je reconnais maintenant M. le député de Berthier. M. le député.

M. Albert Houde

M. Houde: Merci, M. le Président. C'est avec très grand plaisir que j'interviens aujourd'hui dans le débat sur l'adoption du principe du projet de loi 124, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires internationales. Chacun a eu l'occasion de constater l'extraordinaire importance qu'ont pris, depuis quelques années, les Affaires internationales.

On parle beaucoup, de nos jours, de globalisation des marchés et de mondialisation de l'économie. Certains voient dans cette tendance une mesure pour le Québec. Ce n'est pas mon point de vue et ce n'est pas celui du gouvernement. Au contraire, l'internationalisation des échanges économiques fournit au Québec l'occasion d'asseoir sa propre économie sur des bases encore plus concurrentielles en misant sur ses atouts. Ceux-ci ne sont pas négligeables: des positions solides dans plusieurs secteurs de haute technologie, comme l'aéronautique, l'aérospatiale, l'informatique et l'énergie hydroélectrique, une main-d'oeuvre qualifiée et compétente, une proximité du marché américain, des ports dynamiques sur une voie maritime d'importance stratégique.

M. le Président, je pourrais continuer cette liste encore un bon moment, simplement pour souligner que le Québec est bien placé pour aller chercher sa part des marchés mondiaux. Dans ce sens, le fonds monétaire international prévoit que la valeur du commerce mondial s'accroîtra de 10 % en 1991, une hausse phénoménale. Exprimée en termes de volume, cette augmentation sera de 5,8 %. Cette mondialisation du commerce a des implications très importantes pour le Québec. La notion même de marché domestique tend de plus en plus à perdre sa signification. Des compétiteurs des entreprises québécoises se retrouvent aujourd'hui aux quatre coins du globe. Mais, de la même façon, les opportunités d'affaires pour les entreprises du Québec ne se limitent plus au seul marché québécois ou canadien.

Les entreprises d'ici doivent penser en termes globaux; elles doivent rechercher des partenaires et des clients sur les cinq continents. Pour les aider à conquérir de nouveaux marchés, les gens d'affaires d'ici doivent pouvoir compter, lorsque cela est nécessaire, sur les connaissances et l'expérience des spécialistes du gouvernement. À cet égard, le réseau de représentation du Québec à l'étranger constitue une source d'expertise exceptionnelle. Les délégations et bureaux du Québec à l'étranger travaillent à identifier des marchés, des partenaires potentiels et des opportunités d'affaires.

Le développement économique du Québec qui, comme vous le savez, demeure la priorité du gouvernement libéral, dépend donc en partie de la qualité du travail de nos représentants à l'étranger. Avec des enjeux et des défis de cette nature, vous comprendrez donc pourquoi je n'hésite pas à appuyer la création des deux fonds prévus dans le projet de loi que nous avons devant nous aujourd'hui.

En ce qui concerne le Fonds spécial de la gestion des immeubles du Québec à l'étranger, vous me permettrez de me réjouir devant le fait qu'enfin nous allons faire un pas important dans la formation d'un véritable patrimoine immobilier du Québec à l'étranger. Cela aurait dû être fait bien avant, non pas pour des raisons purement symboliques ou, encore, pour se donner un faux sentiment d'importance sur la scène internationale, simplement parce que cette initiative est fondée sur le bon sens, sur de solides principes de gestion qui ont fait leurs preuves. En nous donnant une vision globale de nos besoins immobiliers à l'étranger, nous nous donnons également les moyens d'une action cohérente. (16 h 30)

Comme l'a mentionné mon collègue, le ministre des Affaires internationales, le MAI a examiné sérieusement d'autres hypothèses lorsqu'il a examiné la question de la création d'un fonds spécial. Le ministre des Affaires internationales ne peut continuer plus longtemps à financer, à même son budget, l'entretien d'immeubles dont il est déjà propriétaire.

Pour ce qui est de la localisation, elle n'est pas toujours la formule la plus avantageuse. Bien sûr, il ne s'agit pas pour le Québec d'acheter des immeubles partout où il souhaite être présent. Il faut néanmoins prendre des décisions judicieuses quand les occasions se présentent et, surtout, se donner les moyens de financer les acquisitions. L'approche du fonds spécial comporte une souplesse de gestion, une formule d'autofinancement à même les loyers perçus du ministère des Affaires internationales et des autres usagers, une capacité de financement à plus long terme, tout ceci sans remettre en cause les privilèges fiscaux dont bénéficie le gouvernement du Québec.

Je souhaite également aborder, M. le Président, la question du fonds spécial pour la gestion des projets financiers par les organismes de développement international. Dans ce cas, on peut vraiment affirmer que le Québec est victime de son propre succès. En effet, depuis quelques années, le ministère des Affaires internationales assume la maîtrise d'oeuvre de projets financés notamment par l'Agence canadienne de développement international, l'ACDI. Les raisons en sont nombreuses. D'abord, le Québec possède des compétences dans plusieurs domaines où la demande est particulièrement forte dans les pays plus pauvres.

Qu'on songe, entre autres, à l'irrigation, l'exploitation agricole, l'aménagement du territoire, l'enseignement primaire, secondaire et

universitaire, les soins de santé, l'aide aux PME, la foresterie, la formation, etc. Dans ses projets, le gouvernement du Québec s'engage auprès de l'ACDI à gérer les fonds de façon à atteindre les objectifs fixés et à mettre à la disposition des pays hôtes, les experts québécois nécessaires. Une telle coopération est exemplaire. Elle permet au Québec de faire preuve de solidarité envers les pays moins favorisés.

En agissant ainsi, le Québec ne fait que son devoir, car tous les pays industrialisés viennent en aide aux autres pays par le biais de la coopération. Le Québec accroît aussi son rayonnement international et son image de marque, ce qui n'est pas négligeable. La création d'un fonds spécial mettra un terme à un problème qui perdure depuis déjà trop longtemps. Bien sûr, ce problème est interne parce qu'il touche la façon de comptabiliser les versements de l'ACDI dans le budget du ministère des Affaires internationales.

Mais, il a également des retombées externes puisque, dans la situation actuelle, les gestionnaires de projets sont soumis à une procédure administrative très lourde lorsqu'il s'agit de toucher les sommes réservées à leurs projets. Cette situation entraîne des retards importants au niveau de l'échéancier, ce qui se répercute dans les négociations entre l'ACDI et les pays bénéficiaires. Encore une fois, le fonds spécial apporte une solution souple, tout en respectant les règles de la bonne gestion.

En terminant, M. le Président, j'aimerais souligner à nouveau mon appui à ce projet de loi parce qu'il va dans le sens d'une plus grande présence du Québec sur la scène internationale, à une période de l'histoire où cette présence est d'une importance cruciale. Les deux fonds spéciaux permettent d'atteindre cet objectif en rendant notre action internationale plus efficace et mieux gérée. Merci, M. le Président.

Avis de débat de fin de séance

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Berthier. M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, avant de vous céder la parole, j'aimerais aviser les parlementaires de cette Chambre que j'ai reçu, en temps utile, un avis de débat de fin de séance requis par Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, demandant au ministre des Affaires municipales de compléter les réponses qu'il a données, tout à l'heure, relativement à la réforme de la fiscalité municipale et de son impact sur la ville de Montréal.

Projet de loi 124 Reprise du débat sur l'adoption du principe

M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, sur le projet de loi 124, adoption du principe. M. le député.

M. André Boulerice

M. Boulerice: Oui. M. le Président, je ne vous cacherai pas que j'étais très anxieux d'intervenir sur un projet de loi relevant du ministère des Affaires internationales, sauf que j'ai bien peur que s'il y a eu détournement de congrès, il y a détournement de projet de loi également. Je ne suis pas intervenu tantôt. Vous demandant de vérifier le quorum, je trouvais un peu insultant à l'égard du ministre des Affaires internationales que si peu de députés de la majorité viennent écouter un discours capital de sa part. Il y a un député qui dit: Ça n'a pas de bon sens. Moi, je trouve que ce que le ministre a dit, ça a beaucoup de bon sens. Je diverge d'opinion avec lui. Je ne vois pas du tout d'où lui vient cette agressivité envers son propre collègue. J'espère qu'il pourra s'expliquer un peu plus tard en Chambre.

M. le Président, on a changé l'appellation - tout le monde s'en rappelle - celle du ministère des Relations internationales avec celle du ministère des Affaires internationales. J'avais bien dit à l'époque qu'il fallait bien se garder d'avoir une vision "économissiste" des relations internationales. J'ai écouté le ministre très attentivement, dans son long préambule qui l'amenait à toucher les deux articles qu'on va traiter dans ce projet de loi, qui consistent en la création de deux fonds comme tels. Et le ministre, forcément, M. le Président, a dressé un portrait "économissiste" des affaires internationales, insistant sur l'Europe de 1992 qui, j'en conviens avec lui, va représenter une force économique importante avec laquelle l'Amérique du Nord devra composer, si nous voulons faire face à la force économique qui se développe dans le Sud-Est asiatique.

Je ne disconviens absolument pas du propos que tenait M. le ministre des Affaires internationales, sauf que le discours était un discours, il faut bien s'entendre, purement et simplement de commerce extérieur. Bon, il s'est rattrapé au fur et à mesure de la progression de son discours en y incluant le concept de notre distinction; et là, encore, on ne peut pas, M. le Président, le vieil adage le dit, être contre la vertu et la tarte aux pommes. Oui, on convient qu'effectivement, il nous faille assumer cette distinction qui est nôtre, qu'on nous refuse d'ailleurs, mais qui est quand même la nôtre.

Le ministre a fini par introduire des éléments d'ordre culturel dans nos relations avec les autres pays. Là encore, M. le Président, je ne pouvais pas m'inscrire en désaccord avec le ministre, puisque nous aurons la chance tous deux de coprésider un festival Dvorak organisé, d'une part avec le Québec, et avec la République fédérative tchèque et slovaque. Voir que le ministre apporte une certaine insistance au contenu culturel n'est quand même pas pour me déplaire, mais encore là, c'était bien mince

dans le discours. J'ai eu nettement l'impression, à un certain moment donné, lorsque le ministre a fait des rappels, d'assister - vous me permettrez l'expression américaine - à un "rerun" de certains téléjournaux qu'on a écoutés.

Oui, il y a eu des bouleversements en Europe de l'Est. Oui, il y a des bouleversements en Afrique. Oui, nous appartenons à la francophonie. Oui, nous allons célébrer la francophonie demain, quoique ça semble être un secret bien gardé, il n'y a pas eu tellement de publicité. Et je me serais nettement attendu, quand je suis arrivé hier soir à Québec, donc dans notre capitale, et qu'on m'a informé qu'il y aura un projet de loi, que le ministre nous parle de sa politique, parce qu'on est toujours en attente d'une politique de relations internationales au Québec. (16 h 40)

Le mercredi 23 mai 1990, dans le Journal des débats, le ministre nous l'annonçait pour très bientôt; il nous l'annonçait... Alors, je lis: "Premièrement, en ce qui concerne la politique elle-même, il y a déjà - je cite le ministre grâce au rapport analytique qu'on a de la commission - des éléments qu'on a commencés, qu'on a amorcés. J'y ai référé dans mes remarques préliminaires. La question de la programmation. Pour la première fois, nous avons analysé toutes les activités internationales du gouvernement, nous avons chiffré tous les montants - le ministre me permettra de lui dire que ce n'est pas tellement français d'employer cette expression "nous avons chiffré", mais enfin - qui sont dépensés à tous les différents ministères et nous avons établi... En analysant ces activités, nous avons pu constater qu'il y a certains éléments qu'on pouvait accentuer, qu'on pouvait porter plus d'attention à certains secteurs de nos activités, etc."

Alors, le ministre disait carrément qu'il regardait, qu'il pensait "chiffrer", pour employer son expression comme telle, mais le ministre disait: "En ce qui concerne la consultation, j'espère qu'on va pouvoir la faire à l'automne." Eh bien! l'automne 1990, malheureusement, est passé. L'hiver 1990-1991, dans un certain sens, est passé. Dans quelques heures, nous aborderons un printemps que nous souhaitons tous magnifique. Là, le ministre nous dit: Ce sera à l'automne. J'ose espérer, M. le Président, que le ministre, finalement, à l'automne, nous apportera ce projet de politique que nous attendons tellement, parce que vous allez convenir avec moi que des sujets de politique internationale, malheureusement, en cette Chambre, nous en avons peu, nous n'en avons guère, comme le dit une chanson célèbre. D'ailleurs, le Québec est totalement absent des grands débats politiques comme tels. Ça, il faut le regretter.

Dans le rapport qui est issu de son parti, le rapport Allaire, rapport qui, à mon point de vue, permet au gouvernement de perdre du temps et non pas d'en gagner, c'est tout à fait le con- traire. Une des demandes du gouvernement est que les relations internationales, donc les affaires étrangères, soient un pouvoir partagé. Mais encore faut-il, M. le Président, que... Si nous le partageons, ce pouvoir, eh bien, quelle sera notre opinion sur des grands sujets? Déjà, j'ai pu constater avec beaucoup de tristesse, depuis mon arrivée en cette Chambre il y a quand même quelques années, lorsque nous avons introduit des motions qui touchaient véritablement la politique étrangère, ce refus systématique du gouvernement de bien vouloir consentir à en faire un débat. Il est extrêmement - je cherche le mot le plus juste pour exprimer ma pensée - décevant - je crois que je vais employer le mot décevant - de voir qu'à un Québec qui dit: Oui, il faut affirmer notre distinction, eh bien, cette distinction ne s'exprime pas aussi par une voix forte, une voix claire, une voix intéressée, une voix éclairée lorsqu'il s'agit de discuter de grands enjeux au niveau international.

Donc, voilà, M. le Président, pour critiquer et je ne vois aucune raison pour laquelle l'Opposition aurait souffert d'une timidité excessive et se serait restreinte dans sa liberté d'expression et n'en aurait parlé. Je pense que nous devions, compte tenu de nos précédents, nous, en termes de gouvernement... et là, je suggérerais au ministre, puisqu'il est à faire une réflexion, une excellente lecture qui est celle d'un de ses prédécesseurs, M. Morin, ancien député de Louis-Hébert, où il traite justement des 20 ans d'efforts diplomatiques du Québec et qui s'appelait Mission impossible. Mission impossible, ce n'est pas compliqué, c'est parce que c'était très difficile et que le gouvernement fédéral a toujours mis les bâtons dans les roues au Québec lorsqu'il s'agissait de s'ouvrir au monde, d'aller vers le monde, de créer de nouveaux contacts, des liens extraordinaires. Donc, je lui suggérerais, très modestement, cette lecture. Je pense que le ministre y trouvera, à son profit, des éléments drôlement intéressants pour l'établissement d'une politique étrangère québécoise et, quant à y être, également renforcer - je ne dis pas qu'elle est faible; renforcer, dans le sens de bonifier - ce que nous sommes en train de nous donner et qui est une diplomatie; je parle en termes de carrière diplomatique. C'est quand même récent au Québec. Les grands pays, qui ont de grandes traditions, eh bien, en ont. Et nous, malheureusement, ce n'est que depuis 20 ans, 25 ans, peut-être 30 ans au maximum que nous pratiquons cet exercice. Et là, je pourrais peut-être le renvoyer à une autre lecture qui serait celle de Talleyrand. Je ne sais pas si c'est le meilleur livre de chevet à suggérer à mon collègue, député de Mont-Royal et ministre des Affaires internationales.

Et si l'on revient, M. le Président, à l'objet très précis du projet de loi comme tel, comme je vous le disais, il n'est pas question pour nous d'être contre la vertu et la tarte aux pommes. Je

pense que je ne vais pas, M. le Président, m'insurger en disant: Non, il ne faut pas créer un Fonds de gestion des immeubles du Québec à l'étranger. J'ai été capable, comme le ministre, de voir qu'effectivement les acquisitions que nous avons faites dans certaines capitales se sont trouvées... sont devenues, dis-je plutôt, compte tenu de l'évolution des marchés, compte tenu de leur localisation, de l'originalité des édifices comme tels, de véritables bonnes affaires, comme on dit. Au même titre qu'il y a quelques années, on avait acheté une maison qu'on avait payée 30 000 $, 40 000 $, on se retrouve aujourd'hui avec une magnifique propriété, et elle en vaut 250 000 $, 300 000 $. Je pense que c'est effectivement le cas pour la majorité des édifices que le Québec possède à l'étranger.

Je regarde effectivement notre délégation générale à Paris, notre première délégation générale sur le continent européen. Eh bien, je pense que cet édifice sur la rue Pergolèse... Effectivement, le montant qu'avançait le ministre est extrêmement pertinent quand on connaît le coût de l'immeuble à Paris. Quand on sait où est située notre délégation à Londres, Kensington, eh bien, ce n'est pas n'importe quel quartier à Londres; et c'est un édifice, d'ailleurs... malheureusement trop petit pour nous servir éventuellement d'ambassade. C'est ce que nous disait notre délégué général, M. le ministre. J'espère que vous en prenez note. Notre délégué général, M. Scowen, nous disait que les locaux à Londres seraient éventuellement beaucoup trop petits pour nous servir d'ambassade du Québec. Il faudrait peut-être les transformer en services consulaires et songer à acquérir ailleurs pour y loger l'ambassade comme telle. Puisque, vous, vous partagez l'opinion d'un pouvoir partagé au niveau des relations internationales, quant à nous, notre position est très claire depuis au-delà de 20 ans. Nous voulons tous les pouvoirs pour ce qui est des affaires étrangères, donc des affaires internationales.

Alors oui, connaissant également ce que la SIQ fait, je suis entièrement d'accord avec le ministre. On ne pouvait pas doubler les structures et les actions de la SIQ. Donc, il faudrait faire un fonds de gestion des immeubles du Québec à l'étranger et protéger ce patrimoine, en quelque sorte, en y effectuant les aménagements nécessaires, les réparations utiles et urgentes. Je pense que voilà effectivement une décision sage.

J'écoutais attentivement le député de Berthier qui disait: II n'est pas question de se lancer dans de grands achats. J'en conviens bien avec lui. Je ne pense pas que le Québec désire acheter l'Arc de triomphe, ni la tour de Pise, ni la tour Eiffel - quoique certains loustics la mettent régulièrement en vente et attrapent des poissons pour le faire - mais je pense que, quand on a décidé de se donner une politique au niveau des relations internationales - que nous attendons et qui viendront, j'en suis sûr - quand on a décidé de se donner une représentation dans de grandes capitales, eh bien, je crois qu'il n'est pas opportun de pratiquer le misérabilisme et d'agir comme tous les pays au monde - et bien des pays n'ont pas nos ressources et se logent mieux - d'avoir un immeuble bien situé, confortable, prestigieux puisque le prestige d'un État à l'étranger, sa première façade - c'est vraiment le cas de le dire - c'est l'ambassade, la délégation générale, les services consulaires, etc. (16 h 50)

Là où ça accroche, par contre, M. le Président, non pas sur le fond comme tel - ça, je voudrais que le ministre en soit conscient et le je répète - ce n'est pas sur le fond comme tel, mais bien plutôt sur certaines modalités et j'ose espérer qu'il va nous donner dans sa réplique, la réponse que nous attendons, que nous souhaitons, c'est le Fonds de développement international. Oui. Je pense qu'un ministère sérieux, un ministère qui veut agir, un ministère qui veut soutenir certains programmes, certaines activités, de lui-même, en partenariat, je pense qu'effectivement, je le dis et je le répète, un ministère sérieux a un fonds de développement international. Que le ministre nous arrive avec un projet de loi, moi, je dis oui, absolument, je pense qu'il faut le faire. Mais en créant le Fonds de développement international pour le financement des projets réalisés par des organismes de développement international, moi, j'ai la crainte, M. le Président, désormais, que l'ensemble des dépenses de transfert reliées au financement de ces projets spécifiques de coopération internationale par le ministère des Affaires internationales échappe au processus normal de vérification des engagements financiers. Je suis persuadé que tous les députés qui sont dans cette Chambre et qui, fidèles à la tradition parlementaire, écoutent ce qui se dit en cette Chambre, vont concourir.

Je pense que M. le député de Drummond, M. le Président, est d'abord et avant tout un parlementaire avant d'être un membre d'une formation politique. Au même titre, M. le Président, son collègue, M. le député de Prévost, est d'abord et avant tout un parlementaire et non pas un membre d'une formation politique. Donc, je suis persuadé qu'ils sont très intéressés, M. le Président, par mon propos puisqu'ils sont d'abord et avant tout des parlementaires. Je les vois d'ailleurs se faire signe que oui; donc, ils acquiescent à ce propos. Donc, ils devraient avoir avec moi cettre crainte, M. le Président, qu'il y ait malheureusement incapacité pour les parlementaires de vérifier les engagements financiers du ministère. Je regarde, M. le Président, les engagements financiers, eh bien nous aurons cet exemple où on voit "ministère des Communications: liste des engagements financiers, l'article 4: autres subventions. Subvention financière du ministère des Communications à même ses crédits de transfert prévus afin de pallier au déficit estimé

des opérations de fonds et ainsi permettre d'atteindre son équilibre budgétaire: 1 890 000 $." Bon, oui, d'accord. Mais moi, j'aimerais bien connaître la ventilation de ça afin, M. le Président - et je sais que vous me demandez de conclure - d'être capable de voir la ventilation, quels ont été les objets, les activités, etc., qui ont été subventionnés à même ces montants-là. Je pense que c'est le droit le plus strict d'un parlementaire de pouvoir exercer cette chose-là.

Là, je tiendrais, M. le Président - et ce sont les dernières remarques que je ferai - à mettre en garde le ministre de façon à éviter - donc en nous donnant les assurances - que, malheureusement, il arrive ici, au Québec, ce qui a été appelé en France l'affaire Nucci. J'étais présent au Palais-Bourbon et je dois vous avouer que ça a été passablement déchirant et passablement discréditant aussi pour un ministère d'importance comme le vôtre, M. le ministre. Donc, la question qu'on vous pose, c'est: Avons-nous des garanties que nous pourrons voir chacun des engagements financiers sous cette rubrique, de façon à éviter - comme vous m'invitez à conclure, M. le Président - qu'on se retrouve dans une situation que d'autres ont vécue et qui n'a pas été à l'honneur du ministère et de l'Assemblée dans laquelle les députés siégeaient. Je vous remercie, M. le Président. Bonne attention! Je suis persuadé que le ministre va prendre en considération mes remarques.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Je reconnais maintenant M. le ministre, qui procédera à son droit de réplique sur son propre projet de loi. M. le ministre.

M. John Ciaccia (réplique)

M. Ciaccia: M. le Président, les remarques du député de Bertrand et du député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, en ce qui concerne le contrôle par le Parlement sur le fonds de développement... Avant de leur donner la réponse, je voudrais juste répondre à certaines des remarques qu'ils ont faites sur la politique du ministère des Affaires internationales, les dates, le comité consultatif. Je les inviterais à une certaine cohérence sur cela de la part de l'Opposition officielle.

Quand on parle des lignes directrices de notre ministère, des projets, des activités, de la façon dont nous voyons la situation et des moyens que nous prenons, le leader adjoint de l'Opposition s'objecte parce qu'on n'est pas sur le sujet du projet de loi. Cependant, les députés de l'Opposition ont passé très peu de temps sur le projet de loi et même le peu de temps qu'ils ont passé sur le projet de loi, ils ont tous les deux posé des questions dont la réponse est contenue, soit dans le projet de loi, soit dans les remarques que j'ai faites. Alors, premièrement, je vais vous assurer, oui, puis je vais même vous donner l'article. vous allez être très à l'aise et vous allez être sécurisés en ce qui concerne les fonds qui seront dépensés par l'assemblée nationale ou par le ministère des affaires internationales.

Premièrement, en ce qui concerne la politique, oui, nous avons un comité consultatif. Nous avons fait des consultations. Nous voulons arriver à une politique globale qui réponde à tous les problèmes, aux attentes et aux besoins du Québec. Comme je l'ai dit dans mes remarques préliminaires, dans les prochains mois à venir, vous aurez l'occasion, quand ce sera rendu public, d'en prendre connaissance. Je peux vous assurer d'une chose. Je ne vous donnerai pas de date, mais cette politique va vraiment répondre aux besoins du Québec en ce qui concerne les matières d'affaires internationales pour son développement social, culturel, économique et son rayonnement à travers le monde entier. Soyez assurés de cela.

En ce qui concerne les ONG, peut-être qu'on peut discuter en commission parlementaire des montants que le gouvernement alloue aux ONG. Nous attachons de l'importance à ces organismes; nous les appuyons. Nous avons des budgets statutaires tous les ans que nous fournissons pour appuyer le travail des ONG.

En ce qui concerne le contrôle par l'Assemblée nationale, je voudrais vous référer à l'article 35,3 du projet de loi. Premièrement, si ce sont des fonds pour développement international qui viennent de l'ACDI, vous n'avez pas de contrôle à exercer. Ce ne sont pas vos fonds, ce ne sont pas nos fonds, mais on doit les gérer. Pour améliorer cette gestion, pour la rendre plus efficace, nous créons le Fonds de développement international pour ne pas que ça soit inclus dans nos budgets, pour ne pas que toutes les règles difficiles et contraignantes puissent s'appliquer, pour que ce soit plus facile de gérer les fonds que l'ACDI ou d'autres organismes internationaux peuvent nous fournir. Si ce sont des fonds que l'Assemblée nationale... Par exemple, s'il y a un projet... Jusqu'à date, ce sont des fonds de l'ACDI, mais supposons que le gouvernement fournit 10 %, 20 % ou un certain pourcentage du projet, je vous réfère à l'article 35.3 qui dit: "les sommes versées par le ministre des Affaires internationales et prélevées sur les crédits alloués à cette fin par le Parlement." Alors, à cette occasion, vous aurez toute l'opportunité de poser des questions, d'examiner, de voir comment elles sont dépensées. (17 heures)

Le Parlement, l'Assemblée nationale a le contrôle sur ces fonds. Alors, le fonds qui est créé aujourd'hui ne change pas les règles du jeu. Il rend plus efficace la façon dont ces fonds vont être gérés, mais ça n'enlève pas la responsabilité du Parlement. Et, si vous aviez porté un peu plus d'attention à mes remarques préliminai-

res et à la façon dont j'ai expliqué comment le fonds serait géré, je vous ai expliqué que l'ensemble des règles gouvernementales s'appliqueront à ces deux fonds, comme c'est le cas pour les autres fonds. Et, une de ces règles, c'est que les engagements financiers des fonds spéciaux seront approuvés par l'Assemblée nationale. Alors, j'espère que vous vous sentez plus sécurisé sur la façon dont les fonds vont être dépensés. Le but de ça, ce n'est pas d'enlever le contrôle de l'Assemblée nationale, c'est seulement de le rendre plus efficace.

Il me fera plaisir, M. le Président, durant l'étude article par article, de répondre aux questions plus spécifiques en ce qui concerne les ONG ou d'autres éléments plus particuliers sur la gestion des fonds et sur la façon dont le fonds est créé. En ce qui concerne tous les autres éléments, le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques a été déçu. Il a dit qu'il est arrivé hier et qu'il n'a pas vu une politique, il n'a pas entendu une politique internationale dans mon discours. Même si j'avais essayé, votre leader adjoint de l'Opposition m'aurait empêché de le faire, de le dire. Alors, entendez-vous entre vous. Cependant, ce n'était pas mon intention et le projet de loi ne porte pas sur la politique.

Alors, M. le Président, j'espère que l'on va appuyer la création de ce fonds et j'espère que nous aurons des discussions fructueuses sur la façon dont le fonds sera géré, et les règles du fonds, à l'étude article par article en commission parlementaire ce soir. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Est-ce que le principe du projet de loi 124, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires internationales concernant la constitution de fonds spéciaux, est adopté?

M. Gendron: Sur division.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Sur division.

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté sur division. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission des institutions

M. Pagé: Alors, M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi 124 soit déféré à la commission des institutions pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion de déférence est adoptée?

Une voix: Adopté.

M. Pagé: M. le Président, j'avise cette

Assemblée qu'aujourd'hui, de 20 heures à 22 heures, ainsi que demain, le mercredi, 20 mars, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif, la commission des institutions procédera à l'étude détaillée du projet de loi 124, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires internationales concernant la constitution de fonds spéciaux.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le leader du gouvernement. Pourriez-vous m'indi-quer avec quel article nous continuons nos travaux, M. le leader?

M. Pagé: J'appelle, M. le Président, l'article 6 du feuilleton d'aujourd'hui, s'il vous plaît.

Projet de loi 123 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 6 de notre feuilleton, Mme la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration propose l'adoption du principe du projet de loi 123, loi modifiant la loi sur le ministère des communautés culturelles et de l'immigration.

Dans le but, M. le leader du gouvernement, d'éviter toute confusion, je requiers le même consentement que celui que j'ai demandé tout à l'heure relativement à l'adoption du projet de loi 124. la décision que je rendrai disposera évidemment du problème dans les deux cas. est-ce qu'on a le consentement, m. le leader adjoint de l'opposition officielle?

M. Gendron: oui, m. le président, et je vous indiquerai que je n'ai pas eu le droit de parole, alors, vous avez le consentement, mais, comme vous l'avez mentionné...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui.

M. Gendron: ...il est important que nous ayons la même exigence, à savoir que vous rendiez une décision concernant l'interprétation de l'article que vous avez évoqué - parce qu'il s'agit d'un projet de loi de même nature - et qu'elle nous soit communiquée dans les meilleurs délais pour être certain que... Mais il y a consentement pour commencer l'étude du principe du projet de loi concernant l'immigration.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): alors, comme je viens tout juste de l'indiquer, m. le leader adjoint de l'opposition officielle, vous aurez compris que la décision que je rendrai disposera des deux questions dans les deux projets de loi. évidemment, c'est la même question qui a été soulevée. mme la ministre.

Mme Monique Gagnon-Tremblay Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Prési-

dent, M. le Président, le Québec est la seule province majoritairement francophone du Canada. Avec un taux de natalité qui n'assure plus le remplacement des générations, un solde migratoire négatif pour le plus clair de la dernière décennie et une perte de poids démographique au sein de la fédération, la province se préoccupe de son avenir démographique, linguistique et culturel. Elle compte, entre autres, sur l'immigration pour redresser la situation.

Étant donné l'importance que revêt l'immigration pour le développement de la société québécoise, le besoin d'élargir nos compétences et nos marges de manoeuvre est vite apparu évident. L'Accord Canada-Québec relatif à l'immigration et à l'admission temporaire des aubains que j'ai signé le 5 février dernier avec ma collègue fédérale de l'immigration, l'honorable Barbara McDougall, répond à ce besoin et constitue un ajout significatif aux responsabilités québécoises en matière d'immigration et d'intégration.

La mise en oeuvre de cet accord représente dès lors un défi considérable. Le Québec étant dorénavant le seul maître d'oeuvre sur son territoire de l'intégration des immigrants, il aura à assumer des responsabilités additionnelles et ce, très rapidement puisque les parties ont convenu que l'accord prendrait effet le 1er avril prochain.

Compte tenu des transferts d'activités que l'accord prévoit et de la complexité administrative que cela suppose, il s'agit là d'un délai extrêmement court. Certains des gestes à poser pour la mise en oeuvre de l'accord ont trait au transfert de ressources financières et humaines, à la dotation de ressources informatiques ainsi qu'à des modifications réglementaires et, même, législatives comme c'est ici le cas avec le présent projet de loi.

En effet, M. le Président, pour que nous puissions pleinement assumer toute l'étendue des nouveaux pouvoirs et des nouvelles responsabilités que nous donne cet accord, il nous faut, dès maintenant, modifier et ajouter certaines dispositions à la Loi sur le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration. La date d'entrée en vigueur de l'accord Canada-Québec étant le 1er avril 1991, il va de soi que ces dispositions devront prendre effet au même moment.

Le projet de loi dont nous entreprenons aujourd'hui le débat quant à l'adoption de principe contient principalement des dispositions qui intègrent dans la Loi sur le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration des mesures pour renforcer les pouvoirs de sélection du Québec. Un tribunal administratif, appelé "Bureau de révision en immigration", est aussi créé pour réviser certaines décisions. Enfin, pour donner suite au transfert des responsabilités en matière d'intégration, le projet de loi prévoit des dispositions qui sont nécessaires pour la gestion du programme d'intégration linguistique, de même que pour les programmes d'intégration socio- économique. D'autres dispositions y sont aussi prévues sur lesquelles je reviendrai un peu plus loin.

Mais, avant de vous exposer plus en détail quelles sont les modifications et nouveautés de ce projet de loi, j'aimerais prendre quelques instants pour expliquer, pour la première fois devant cette Assemblée, quelles sont les dispositions majeures de l'Accord Canada-Québec relatif à l'immigration et à l'admission temporaire des aubains. Nous serons ensuite mieux à même d'apprécier les raisons qui sous-tendent les modifications requises à la loi du ministère que je dirige.

M. le Président, l'accord Canada-Québec dont il est question ici est le fruit de longues négociations entreprises avec le gouvernement fédéral afin de fournir au Québec de meilleurs moyens de préserver son poids démographique au sein du Canada et d'assurer une intégration des immigrants, respectueuse du caractère distinct de la société québécoise. L'accord devrait plus particulièrement faciliter la réalisation des objectifs d'intégration linguistique des immigrants, présentés dans l'énoncé de politique gouvernemental en décembre dernier. Il s'inscrit également dans la foulée des trois accords précédents signés entre les deux paliers de gouvernement depuis la création du ministère québécois de l'Immigration en 1968. Il s'inscrit aussi dans la même logique de la récupération, par le gouvernement du Québec, des pouvoirs essentiels à son développement en fonction de ses objectifs propres.

Ainsi, en 1971, deux ans seulement après la création du ministère, était conclu un premier accord, connu sous le nom de Cloutier-Lang, du nom des ministres signataires, lequel accordait aux agents québécois à l'étranger un rôle d'informateur auprès des candidats désireux de s'établir au Québec. Le Québec pouvant ainsi informer les candidats à l'immigration de la spécificité de la société québécoise. (17 h 10)

Quatre années plus tard, cette entente administrative est remplacée par l'accord Bien-venue-Andras qui reconnaît au Québec un pouvoir de consultation sur les décisions relatives à la sélection des candidats à l'immigration. Bien que ne lui conférant pas de pouvoirs déterminants, cette entente, en donnant au Québec l'occasion de se prononcer systématiquement sur les candidatures, a permis l'élaboration des premiers éléments d'une politique de sélection proprement québécoise et l'articulation aussi d'un ensemble de critères nécessaires à la formulation des avis prévus dans l'entente. En ce sens, l'accord Bienvenue-Andras a pavé la voie et rendu plus aisée la mise en application de l'entente Couture-Cullen, signée en 1978 et entrée progressivement en vigueur de décembre 1978 à avril 1979.

Cette troisième entente occupe une place fondamentale dans le processus permettant au Québec de contrôler davantage son immigration.

Elle nous accordait un rôle prépondérant en matière de sélection, tout en permettant aux deux gouvernements de convenir de leurs responsabilités respectives dans ce domaine. L'entente Couture-Cullen prendra fin avec l'entrée en vigueur du nouvel accord, le 1 er avril prochain.

Je voudrais, à ce moment, M. le Président, souligner le travail de mes prédécesseurs qui ont permis au Québec de progresser constamment afin d'obtenir de plus en plus de pouvoirs, afin de répondre à ses objectifs démographiques, économiques, sociaux et culturels. L'accord Canada-Québec, relatif à l'immigration et à l'admission temporaire des aubains, conclu en décembre 1990 et signé il y a un peu plus d'un mois, pousse plus loin la responsabilité québécoise en matière d'immigration et d'intégration des immigrants, tout en reconnaissant la majeure partie des acquis hérités de l'entente Couture-Cullen. Il nous permet aussi d'obtenir des pouvoirs additionnels.

L'accord Canada-Québec couvre principalement la planification des niveaux d'immigration, la sélection des immigrants ainsi que leur accueil et leur intégration au sein de la société québécoise. Il y est stipulé qu'aucune des deux parties ne pourra y mettre fin de façon unilatérale, ce qui n'était pas prévu dans l'entente Couture-Cullen.

Examinons maintenant les modalités retenues pour chacun de ces champs d'intervention. En tout premier lieu, l'accord prévoit l'obligation du Canada de prendre avis du Québec avant d'établir ses niveaux d'immigration pour l'ensemble du pays. Le Canada doit également informer le Québec des options à l'étude. Le Québec a le souci d'éviter que l'immigration n'en vienne à représenter un facteur de minorisation de la population québécoise au sein de l'ensemble canadien. Cette préoccupation prend tout son sens au moment où le gouvernement fédéral se propose d'accueillir, au cours des prochaines années, des volumes d'immigration sans précédent dans l'histoire récente du pays.

Pour répondre à cette préoccupation, l'accord oblige le Canada à poursuivre une politique de niveaux qui permette au Québec de recevoir une part de l'immigration canadienne correspondant à son poids démographique. Il donne aussi au Québec la possibilité de dépasser ce chiffre de 5 % du total canadien, s'il le juge, bien sûr, à propos. Il s'agit là de dispositions nouvelles non prévues à l'entente Couture-Cullen. Ces dispositions sont importantes pour le Québec, puisqu'il pourra ainsi planifier son immigration en fonction de ses objectifs démographiques et de ses capacités d'accueil, en toute connaissance des objectifs canadiens.

En matière de sélection, l'accord Canada-Québec consacre l'exclusivité de l'intervention québécoise à l'égard des immigrants de la catégorie des indépendants. Ces personnes, principalement sélectionnées en raison de leur capacité de contribuer immédiatement à l'essor économique du Québec, représentent environ 60 % de l'immigration québécoise. Ce bassin constitue le réservoir privilégié permettant au Québec d'atteindre ses objectifs tant économiques que culturels. Il faut également noter que ce pouvoir exclusif de sélection est aussi valable sur le territoire du Québec, c'est-à-dire pour les demandes que le gouvernement fédéral accepte par dérogation de faire étudier sur place. Cette extension des pouvoirs du Québec en matière de sélection sur place, lui permet d'obtenir une possibilité d'intervention capitale sur un nombre de candidatures qui, au cours des années 1980, en est venue à représenter une proportion importante de l'immigration totale.

Rappelons que l'entente Couture-Cullen ne comportait pas de pouvoir de sélection pour le Québec à l'égard des candidatures traitées au pays même. De plus, dans le cas de la réunification familiale, le Québec pourra, s'il le souhaite, rencontrer à l'étranger ou sur notre notre territoire toutes les personnes désirant immigrer au Québec. Si le Québec a désormais les moyens d'utiliser l'immigration comme un des éléments de sa politique de développement économique, les pouvoirs nouveaux obtenus dans cet accord Canada-Québec lui procurent également la marge de manoeuvre indispensable pour accroître la proportion d'immigrants francophones admis annuellement. Ainsi, nous pourrons utiliser l'immigration afin d'atteindre les objectifs précisés dans l'énoncé de politique en matière d'immigration et d'intégration que le gouvernement québécois a déposé en décembre dernier et qui a été abondamment discuté en commission parlementaire ces dernières semaines.

Par ailleurs, le nouvel accord convient d'une répartition des rôles et responsabilités du Québec et du Canada qui conservent les acquis de l'entente Cullen-Couture. Il est conforme à l'article 95 de la loi constitutionnelle de 1867, qui prévoit que l'immigration est une compétence partagée entre les provinces et le fédéral. Ainsi, le Québec continuera de définir et de recevoir les engagements pris dans le cadre du programme de réunification familiale et de sélectionner à l'étranger les réfugiés qu'il accueillera dans le cadre de ses objectifs humanitaires. Concernant les séjours temporaires de travailleurs, étudiants ou personnes en quête de soins médicaux, le consentement préalable du Québec reste nécessaire.

Le gouvernement fédéral, pour sa part, conserve la responsabilité de déterminer les normes et objectifs nationaux ainsi que celles de l'admission de tout immigrant ou aubain. Il demeure seul responsable, par exemple, de refuser l'immigration à des personnes qui sont indésirables pour des motifs de criminalité ou de subversion. Le gouvernement fédéral continuera également de fixer les conditions d'attribution de la citoyenneté et d'accorder le statut de réfugié.

II reste un troisième champ couvert par l'accord Canada-Québec, c'est celui de l'accueil des immigrants et de leur intégration socio-économique et linguistique. J'estime que c'est dans ce domaine que les gains du Québec ont été les plus marquants et que se situe l'importance de l'entente actuelle par rapport à l'entente Cullen-Couture de 1978, laquelle était muette à ce sujet. En effet, en possédant la maîtrise d'oeuvre de ses programmes d'intégration, le Québec pourra mener une action spécifiquement québécoise auprès des nouveaux immigrants, des nouveaux arrivants, et ce, dans le sens que requièrent la sécurité linguistique et culturelle de notre société ainsi que son développement. À compter du 1er avril 1991, le Québec sera l'unique responsable des services d'accueil et d'intégration linguistique, culturelle et économique, spécifiquement offerts aux résidents permanents, c'est-à-dire aux immigrés en attente de leur citoyenneté.

Pour sa part, le fédéral s'engage à se retirer avec compensation financière desdits services, pourvu que le Québec les remplace par des services qui correspondent globalement à ceux offerts par le Canada dans le reste du pays. La compensation financière que le gouvernement fédéral s'est engagé à verser au Québec est de l'ordre de 72 000 000 $ en 1991-1992 et, pour les 3 années suivantes, de 82 000 000 $, de 85 000 000 $ et de 90 000 000 $; cela représentera 332 000 000 $ d'ici l'année financière 1994-1995. Une formule d'indexation prévue à l'accord sera ensuite appliquée. Le retrait fédéral avec juste compensation financière permettra au Québec de mettre en place une approche d'intégration cohérente qui respecte ses orientations et son identité, tout en évitant une duplication et une dispersion des efforts.

À titre d'exemple, mentionnons que, dans l'état actuel des choses, environ 40 % de la clientèle prévue par le programme fédéral est rejointe par les services de francisation. Avec le retrait fédéral qui lui assurera la maîtrise d'oeuvre de la formation linguistique des immigrants, et la compensation financière qui l'accompagne, le Québec pourra augmenter l'accessibilité aux cours de français, réduire les délais d'inscription pour les cours à temps complet et augmenter l'offre de services. Ayant fait reconnaître l'existence des besoins spécifiques du Québec en matière de formation linguistique, nous pourrons mettre en oeuvre l'un des objectifs importants de l'énoncé de politique gouvernemental, soit celui concernant l'apprentissage du français par les immigrants connaissant l'anglais. Le Québec aura également la responsabilité de verser des allocations aux personnes qui suivent des cours de formation et qui ont besoin d'une aide financière. (17 h 20)

L'accord récemment conclu en matière d'immigration était nécessaire pour la mise en place cohérente et diligente de plusieurs mesures essentielles au succès de la politique d'immigration et d'intégration du Québec. En effet, il faut comprendre, M. le Président, que la volonté persistante manifestée par le gouvernement du Québec en vue de signer cet accord ne reposait pas uniquement sur des principes, si fondamentaux soient-ils, mais également sur des impératifs éminemment concrets. En effet, c'est sans tarder qu'il faut redéfinir les orientations et le fonctionnement du réseau chargé, à l'étranger, de la sélection des immigrants qu'accueillera le Québec au cours des prochaines années. C'est immédiatement qu'il convient de mettre en place, en aéroport, des services d'accueil québécois qui puissent orienter ces nouveaux arrivants vers les différents services nécessaires à leur intégration. C'est sans délai qu'il faut trouver une solution permettant à ceux de ces immigrants qui en ont besoin d'apprendre le français sans devoir attendre plusieurs mois.

Compte tenu du très court délai qui nous est imparti entre le moment de la signature de l'accord et sa mise en vigueur, soit seulement deux mois, nous avons dû prévoir des scénarios nous permettant d'assumer nos responsabilités, tout en faisant en sorte que les immigrants, à qui nous dispenserons de nouveaux services, n'aient pas à souffrir de cette transition. Voilà pourquoi l'entrée en vigueur de l'accord, le 1er avril, nécessite de sous-traiter au gouvernement fédéral la fourniture de certains services dont le Québec prend charge à cette date. L'accord prévoit, en effet, que le Québec négocie des ententes pour le transfert du personnel impliqué dans la gestion directe des programmes transférés en vertu des conventions collectives et de la jurisprudence. Des préavis de plusieurs mois doivent être donnés. De plus, les systèmes du ministère ne peuvent pas être prêts, notamment en ce qui a trait à l'informatique, à prendre le relais à cette date.

Comme vous le voyez, M. le Président, il est donc nécessaire de conclure une entente de sous-traitance avec le gouvernement fédérai, visant à permettre que les programmes auxquels sont attachés des allocations, des subventions aux organismes partenaires ou au personnel destiné a être transféré, continuent, pendant une période estimée à un maximum d'un an, à être administrées selon les normes québécoises par les employés fédéraux.

L'autre étape de cette mise en place accélérée des mesures nous permettant d'assumer à plein toutes nos responsabilités, c'est la modification de la Loi sur le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration. Nous avons procédé aux changements les plus pressants dans la loi constitutive du ministère afin de rendre opérationnel l'accord Canada-Québec. Une loi sur l'immigration aux impacts plus fondamentaux ne pouvait être déposée à ce moment-ci, compte tenu du court délai avant la

mise en oeuvre de l'accord. De plus, l'énoncé de politique, que nous avons rendu public en décembre 1990 et dont nous avons discuté ces dernières semaines devant la commission parlementaire sur la culture, influencera sans aucun doute une loi sur l'immigration que nous pourrions déposer plus tard.

M. le Président, des modifications sont donc requises à l'actuelle Loi sur le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration pour exercer nos pouvoirs en matière de sélection, d'intégration linguistique, d'aide à l'adaptation, pour la création d'un véritable pouvoir d'enquête et d'infraction, de même que pour la mise en place d'un organisme de révision. Certains articles de la loi sont aussi nécessaires à titre de mesures transitoires ou autres.

Je souhaite à ce moment-ci, M. le Président, vous indiquer quels sont les principaux ajouts et modifications que je propose à la loi du ministère et quelles sont les raisons qui motivent ces changements. Le Québec obtient, dans le cadre du nouvel accord, des pouvoirs exclusifs de sélection, d'accueil et d'intégration qui accroissent ses responsabilités en ce domaine. L'exercice par le Québec de ces nouvelles responsabilités passe par le renforcement de ses pouvoirs lors de la sélection des immigrants ou lorsqu'une personne au Québec souhaite s'engager à aider l'établissement d'un ressortissant étranger.

Dans le domaine de la sélection des immigrants, les principales modifications que nous apportons à la loi nous donneront le droit d'annuler un certificat de sélection ou un certificat d'acceptation, d'enquêter sur la véracité des documents fournis, de créer des infractions spécifiques, de mettre sur pied un mécanisme de révision des décisions et de donner certains pouvoirs en matière d'aide à l'établissement. La loi actuelle ne permet pas au Québec d'annuler un certificat de sélection du Québec, un certificat d'acceptation ou un engagement et ce, même si les renseignements fournis pour établir la demande sont faux ou trompeurs, ou que les conditions qui ont prévalu lors de la sélection ou de l'engagement n'existent plus.

Le certificat de sélection étant désormais le seul document qui atteste de la sélection, les conséquences de toute fraude deviennent plus importantes qu'auparavant. Il nous faut donc remédier à cette situation, et c'est pour cette raison que le projet de loi propose que nous puissions assumer pleinement nos responsabilités en disposant du pouvoir d'annuler ces documents dans les cas précités. L'unique alternative à ce pouvoir - et vous comprendrez, M. le Président, que nous ne voulons pas l'envisager - serait de demander aux autorités fédérales de ne pas honorer nos décisions afin que le ressortissant étranger ne puisse compléter le processus d'immigration.

Autre limite de la loi actuelle, les pouvoirs du ministre en matière d'enquête ne permettent pas de vérifier les informations et les documents fournis par une personne qui désire obtenir un certificat ou souscrire un engagement. C'est une lacune d'autant plus grande que les pouvoirs du Québec en matière de sélection sont désormais exclusifs et, corollairement, les conséquences plus graves.

Pour nous permettre d'exercer avec discernement nos pouvoirs de sélection, la modification législative suggérée nous permettra de faire enquête, aussi bien sur les demandes de CSQ et de CAQ que sur la délivrance de ces documents, en vérifiant l'exactitude des renseignements donnés par un candidat, tant auprès de celui-ci que de tiers, par exemple, un employeur éventuel, dans le cas des immigrants travailleurs spécialisés.

Par ailleurs, la Loi sur le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration ne prévoit pas d'infraction spécifique à la suite de fausses déclarations ou de l'utilisation de moyens frauduleux à l'occasion de l'obtention d'un CSQ, d'un CAQ ou d'un engagement. Nous faisons face à de fausses déclarations et à des faux documents produits pour les seules fins de l'immigration. L'impunité relative à l'égard de ces gestes est connue et est source de problèmes. Afin de dissuader les fraudeurs, il nous est apparu nécessaire, M. le Président, de créer des infractions spécifiques par rapport à la délivrance d'un CSQ, d'un CAQ ou d'un engagement. Des infractions sont aussi prévues relativement à l'obtention des services d'intégration linguistique, d'allocations versées dans le cadre de ces programmes, de même qu'à l'occasion de prêts qui pourraient être versés en vertu de la loi.

Si le renforcement de notre pouvoir de sélection entraîne la mise en place de dispositions lui permettant d'enquêter, de prévoir des infractions et d'annuler un CSQ, un CAQ ou un engagement, nous avons par ailleurs, en toute justice, l'obligation de mettre sur pied un mécanisme de révision des décisions qui permettra aux personnes s'estimant lésées d'en appeler. Mais, au-delà de la recherche d'un tel équilibre, la recommandation de créer un bureau de révision est la conséquence de l'exclusivité des pouvoirs québécois. De plus, l'article 32 de l'annexe A de l'accord prévoit que le Québec doit offrir un mécanisme de révision de ses décisions. Actuellement, seul le refus d'autoriser un garant à s'engager pour subvenir aux besoins d'un immigrant est soumis à une procédure d'appel. Toutefois, c'est au gouvernement canadien qu'il incombe d'entendre les représentations par l'entremise de la section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Le Québec se doit d'assumer la responsabilité actuelle de ce tribunal fédéral.

Le Bureau de révision en immigration, dont la création est proposée par le présent projet de loi, propose de reconnaître un droit de révision dans deux cas. Il entendra les garants dont la

demande aura été refusée ou dont l'engagement aura été annulé ainsi que les personnes dont le certificat de sélection et le certificat d'acceptation auront été annulés. (17 h 30)

Compte tenu des principes de justice naturelle, il nous est apparu nécessaire, M. le Président, d'accorder aux ressortissants étrangers ou Québécois, selon le cas, le droit à une audition par une autorité impartiale et autonome par rapport au décideur. L'absence d'un tel recours forcerait les personnes à se présenter devant une instance judiciaire, soit la Cour supérieure du Québec, pour entendre leur cause. En outre, il n'existe pas de tribunal administratif pouvant, à court terme, entendre les appels sur un sujet aussi spécialisé. C'est la raison pour laquelle nous proposons la création de ce tribunal autonome qui aura le pouvoir de confirmer, d'infirmer ou de modifier une décision négative prise par le ministère.

Tribunal administratif jouissant d'une grande autonomie, le Bureau de révision en immigration sera dirigé par une personne nommée par le gouvernement québécois. Ses décisions seront finales et sans appel et les parties pourront prendre connaissance des motifs ayant conduit le Bureau à sa décision et les appelants qui seront au Québec pourront se présenter ou se faire représenter par un avocat devant le Bureau. Celles qui sont à l'extérieur pourront, outre bénéficier de l'assistance professionnelle d'un avocat, désigner un parent ou un organisme à but non lucratif pour les représenter, à condition que leur mandat soit gratuit. Le Bureau de révision en immigration aura son siège à Montréal, mais pourra se déplacer partout au Québec pour entendre les causes qui lui seront soumises.

Finalement, en matière de sélection, le projet de loi comprend certaines dispositions offrant la possibilité, pour une personne ou un groupe de personnes, de présenter une demande d'aide afin de favoriser l'établissement au Québec d'un proche parent ou d'une personne en situation de détresse. Le projet de loi permettra à un garant de souscrire un engagement écrit, de subvenir aux besoins essentiels de ce ressortissant étranger pour permettre sa venue en évitant qu'il devienne une charge publique.

La reconnaissance de cette possibilité n'est actuellement que mentionnée dans le pouvoir réglementaire prévu à la loi. Il s'agit pourtant d'un facteur essentiel dans l'immigration des proches parents. La modification législative proposée lui donnera une réelle existence. Le fait d'introduire l'engagement dans la loi permettra aussi de l'assujettir aux dispositions en matière d'infraction et d'annulation.

Comme on peut le constater, la volonté du législateur, en introduisant ces modifications, est de rendre le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration capable d'exercer complètement les nouvelles responsabilités en la matière dont il hérite dans le cadre de l'accord Canada-Québec. Qui dit responsabilités dit également devoirs et l'ensemble des dispositions du projet de loi touchant la sélection s'inscrit dans ce désir de rendre ce processus aussi efficace que possible, tout en offrant des garanties de transparence et d'équité.

Les modifications à la loi que nous désirons apporter ne se limitent pas aux seules dispositions entourant la sélection. Je vous signalais plus tôt, M. le Président, que les gains majeurs de l'accord Canada-Québec se situent principalement en matière d'accueil et d'intégration. Des dispositions du projet de loi concernent donc les programmes d'intégration linguistique, d'adaptation et d'autres mesures nous permettant d'assumer pleinement l'étendue de tous nos pouvoirs. L'un des acquis de l'accord est le retrait des autorités fédérales de la formation linguistique pour les immigrants. Le Québec aura maintenant la responsabilité du programme d'intégration linguistique fédéral qui vise les nouveaux arrivants se destinant au marché du travail et qui n'ont pas une connaissance suffisante du français. Les personnes éligibles reçoivent actuellement des allocations de subsistance comparables aux prestations d'assurance-chômage.

Le Québec offre, depuis 1988, son propre programme de formation en français, le programme québécois de formation des immigrants qu'on appelle PQFI. Les dispositions habilitantes de ce programme sont insuffisantes pour assurer nos nouvelles responsabilités à l'égard du programme fédéral transféré. Il nous faut donc modifier la loi du ministère, afin d'englober les nouveaux programmes de formation linguistique et d'allocation que nous avons obtenus du fédéral. Bien entendu, comme je le soulignais précédemment, nous recevrons également, à compter du 1er avril, les montants nécessaires pour assurer le maintien et le développement de ces programmes. Il nous faut, en outre, inscrire à la législation les infractions pénales prévues pour les personnes qui obtiendraient frauduleusement des services ou des allocations en vertu de ces nouveaux programmes.

Le projet de loi comprend donc des dispositions habilitant le ministère à offrir des programmes d'intégration linguistique ainsi qu'une assistance financière aux stagiaires. Par voie de règlement, nous stipulerons les catégories de personnes admissibles, les catégories de services offerts, la procédure d'évaluation et la nature et les barèmes d'assistance financière. De cette manière, nous pourrons atteindre l'un des principaux objectifs de l'énoncé de politique, soit d'offrir à tous ceux et celles qui en ont besoin des services de qualité en matière d'apprentissage du français et d'initiation à la vie québécoise. Nous pourrons aussi permettre l'accès, pour la clientèle connaissant l'anglais, à un programme à temps plein équivalant à celui dont bénéficient

les allophones se destinant au marché du travail. Enfin, nous continuerons à travailler à améliorer notre offre de service en français afin que les cours offerts soient de la plus haute qualité et rejoignent le plus grand nombre de personnes possible.

L'intégration des immigrants à la société québécoise est un des principaux objectifs contenus dans l'énoncé de politique intitulé "Au Québec pour bâtir ensemble". Il ne fait nul doute que cette intégration passe par une connaissance adéquate de la langue française, élément moteur d'une insertion complète à la vie économique, sociale, culturelle et politique du Québec. Les dispositions du projet de loi sont autant d'instruments qui nous permettront d'atteindre cet objectif fondamental.

Parmi les programmes hérités dans le cadre de Canada-Québec figure le Programme d'aide à l'adaptation qui permet aux personnes en situation de détresse, notamment les réfugiés, d'obtenir une aide financière pour leur transport et leur établissement, leur permettant ainsi de faire leurs premiers pas dans la société québécoise.

Le projet de loi donne suite à ce transfert de responsabilités. Il accorde au ministère la possibilité d'octroyer des prêts à cette clientèle, de même que le pouvoir de remettre ses dettes s'il n'est pas possible de les recouvrer. Ceci est conforme au programme fédéral qui est transféré.

La loi sur le ministère est silencieuse sur la possibilité d'échanger des informations qui sont pourtant nécessaires pour rencontrer nos objectifs d'immigration. Certaines informations nominatives sur la clientèle desservie dans le cadre des programmes fédéraux en matière d'intégration linguistique et d'adaptation qui nous sont transférés pourraient ne plus être accessibles à compter du transfert de ces programmes au Québec, à moins que des ententes à cet égard ne puissent être conclues. L'accord prévoit cet échange de renseignements.

Des dispositions contenues au présent projet de loi concernant les échanges d'information permettront aux fonctionnaires fédéraux qui, à compter du 1er avril, administreront des programmes sous juridiction québécoise selon les normes établies par le gouvernement du Québec, de continuer à pouvoir obtenir des informations nominatives en provenance d'Ottawa afin de gérer efficacement ces programmes. Par exemple, il est absolument essentiel que les fonctionnaires fédéraux, durant la période de transition, puissent obtenir des informations sur la situation des personnes demandant des allocations de formation afin d'établir leur admissibilité.

Il reste d'autres dispositions au projet de loi qui nous permettront d'exercer pleinement nos responsabilités. Permettez-moi, M. le Président, de m'y arrêter brièvement. Il y a d'abord les articles touchant le pouvoir réglementaire du gouvernement. Des modifications doivent être apportées à l'actuel pouvoir réglementaire prévu à la loi pour donner au gouvernement la possibilité d'édicter des règlements concernant l'engagement des garants, l'intégration linguistique, l'adaptation ainsi que les règles de preuve, de procédure et de pratique du Bureau de révision en immigration. D'autres concernent les mesures transitoires à compter du 1er avril 1992 et jusqu'au moment où les employés permanents actuellement à l'emploi du gouvernement fédéral qui sont touchés par les retraits de service seront intégrés à la fonction publique provinciale.

La Loi sur la fonction publique ne prévoit pas un cas comme celui-ci où nous intégrons entièrement un service du gouvernement canadien, tel le Centre d'emploi Canada-conseil et placement des immigrants. Les modalités du projet de loi prévoient donc la période transitoire de même que le processus d'intégration des employés qui désirent passer au service du gouvernement du Québec. Le projet de loi propose, en les adaptant, des dispositions similaires aux modalités de transfert des fonctionnaires fédéraux pour l'administration unifiée des taxes à la consommation fédérales et provinciales et la possibilité d'entente en matière de transfert de leur régime de retraite. (17 h 40)

Nous avons également prévu des pouvoirs de délégation à ces fonctionnaires afin de les habiliter à exercer les pouvoirs désormais exercés par le Québec à compter du 1er avril puisque, comme vous le savez, M. le Président, il ne sera pas possible, à cette date, de rendre tous les services actuellement offerts par le gouvernement fédéral sans recourir à la sous-traitance.

Finalement, le présent texte législatif prévoit une dérogation à la Loi sur les règlements pour assurer l'adoption de la réglementation nécessaire au 1er avril. Compte tenu de l'urgence d'adopter ces mesures pour que le Québec puisse assumer ses responsabilités nouvelles dès le moment où l'accord s'appliquera, il est prévu que les premiers règlements adoptés par le gouvernement, dans le cadre du présent projet de loi, pourront être édictés sans avoir fait préalablement l'objet d'une publication dans la Gazette officielle du Québec. Cette dérogation nous assurera que les règlements concernant la sélection, les programmes de formation linguistique, les procédures de prêt pour l'aide à rétablissement et les règles de pratique et de procédure du Bureau de révision de l'immigration pourront entrer en vigueur en temps utile.

M. le Président, je crois avoir fait le tour des principales dispositions du projet de loi soumis à l'approbation de l'Assemblée nationale. Celui-ci permet d'instrumenter le Québec pour qu'il puisse assumer l'entière responsabilité des pouvoirs qu'il hérite, avec l'entrée en vigueur de l'accord Canada-Québec relatif à l'immigration et à la mission des aubains. De plus, en apportant

les changements les plus pressants à la loi constitutive du ministère en regard de l'accord, le projet de loi 123 prépare en quelque sorte le terrain pour la présentation, dès l'automne, d'une véritable loi sur l'immigration.

M. le Président, ce projet de loi n'est qu'un moyen pour le gouvernement québécois de réaliser ses objectifs économiques, démographiques, culturels et politiques découlant des choix exprimés dans le cadre de son énoncé de politique en matière d'immigration et d'intégration et découlant des paramètres de l'accord Canada-Québec, et ce sont véritablement cet accord et cet énoncé de politique qui marquent de façon claire la vision de ce gouvernement en ce qui concerne l'immigration et l'intégration des nouveaux arrivants à la société québécoise.

Au delà des nouveaux pouvoirs que nous avons pu obtenir grâce à la signature de l'accord, je tiens à souligner que les travaux de la commission parlementaire de la culture sur l'énoncé de politique gouvernemental, "Au Québec pour bâtir ensemble", mettent une réalité particulière en évidence, celle que l'atteinte des objectifs poursuivis par la politique québécoise demeure largement tributaire, en bout de piste, de la collaboration, de la concertation de tous les acteurs sociaux. C'est donc à cette tâche prioritaire que nous entendons consacrer l'essentiel de nos efforts au cours de la prochaine année.

En terminant, M. le Président, je ne saurais taire le fait que les dernières semaines ont été plus que fertiles en développements pour le ministère que je dirige. Je réitère donc mes remerciements aux hommes et aux femmes qui oeuvrent à l'intérieur du ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration et qui partagent avec enthousiasme nos objectifs. Je sais que la somme de travail que nous avons exigée et que nous continuerons à demander de chacun d'eux est élevée, mais je suis persuadée qu'ils sont d'accord avec moi pour continuer à offrir ce qu'ils ont de meilleur en eux et en elles afin de répondre aux attentes de ceux et celles qui ont choisi le Québec, de ceux et celles qui ont choisi le Québec pour vivre et prospérer et qui comptent sur nous pour leur donner tous les moyens de réussir à faire de leur nouvelle terre d'accueil un véritable foyer. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la ministre. Toujours à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 123, je cède maintenant la parole à M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition officiel le.

M. Gendron: Oui, M. le Président, mais uniquement pour vous signaler...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui.

M. Gendron: ...au nom de la formation politique, comme leader adjoint, que notre critique en cette matière est toujours le député de Mercier et il sera le premier à exercer son droit de parole, mais le droit de réplique, tel qu'il est prévu selon notre règlement, pour ce qui est de l'adoption d'un projet de loi, sera exercé sur ce projet de loi la par le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, tout en reconnaissant comme premier intervenant le député de Mercier. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, tel qu'indiqué par le leader adjoint de l'Opposition officielle, je cède maintenant la parole à M. le député de Mercier. M. le député.

M. Gérald Godin

M. Godin: M. le Président, merci de me donner la parole, dans le cadre suggéré par le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition.

M. le Président, je constate avec plaisir que, petit à petit, l'oiseau fait son nid. Je constate que fa ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration est une excellente élève de mon ex-collègue Claude Morin, par rapport à l'étapisme; c'est-à-dire qu'on a vu sa pensée se développer au cours des derniers mois. On a même vu du désarroi, un sentiment de colère à certaines époques, qui confirmaient ma propre expérience dans le poste qu'elle occupe aujourd'hui. Ce qui me fait dire aujourd'hui que l'expérience du Québec en matière d'immigration est l'expérience de l'impuissance. Combien de fois me suis-je rendu à Ottawa rencontrer une ou un collègue de l'immigration fédérale, exposer devant lui ou elle, après les propos polis d'usage, évidemment - des félicitations sur la coiffure de la ministre et autres bla-bla sans importance - combien de fois ai-je vu le Québec présenter un dossier demandant que le fédéral nous délègue des pouvoirs ou des budgets pour que nous puissions avoir enfin une politique d'immigration digne et à l'échelle de nos besoins et de nos aspirations? Et combien de fois suis-je revenu les mains vides, M. le Président? D'autres diront, aux innocents les mains pleines; ce qui veut peut-être dire que je n'étais pas si innocent que ça parce que je ne suis jamais revenu les mains pleines. je voudrais dire à la ministre que je suis tout à fait heureux, comme ex-membre de l'équipe de l'immigration du québec, de voir qu'elle a réussi un coup extraordinaire qui concerne la construction d'un ministère de l'immigration au québec, qui portera enfin son nom. si l'on compare le canada et le québec à cet égard, on verra que le canada a une politique d'immigration, qu'il exerce une sélection très fouillée en matière de langue, par exemple, pour s'assurer que la majorité anglaise du canada

n'est pas mise en danger par des afflux trop grands de personnes d'autres langues. Donc, le Canada s'est bâti beaucoup, beaucoup, grâce à l'immigration et grâce à une politique d'immigration qui était sélective et qui était, certains l'ont dit à l'époque, presque raciste dans la mesure où on n'avantageait que les immigrants de pays anciennement anglophones ou anciennement anglais, anciennes colonies anglaises, de façon à ce que le Canada soit fort linguistique-ment et ne voie pas son équilibre linguistique menacé chaque semaine qui passe.

Je me suis toujours dit qu'un État adulte et digne de ce nom doit avoir des politiques d'immigration complètes et qui s'inscrivent dans la foulée de ses besoins et de ses aspirations. Je constate, d'après le discours de Mme la ministre de l'Immigration du Québec, que c'est là qu'elle s'en va. Elle a beaucoup insisté sur les aspirations du Québec et, également sur le respect de sa réalité culturelle et linguistique. Je pense qu'elle trace la voie de l'avenir comme, avant mon temps et son temps, l'avait fait M. Jacques Couture qui était... D'ailleurs, Mme la ministre, en toute générosité et intégrité intellectuelle, a bien mentionné ce que ce ministère-là et ce que cette loi actuelle là doivent à la loi ou à l'entente Canada-Québec qu'on a appelée Cullen-Couture.

Or, j'ai connu les deux ministres, Couture et Cullen. Je peux vous assurer que cette entente, à l'époque, fut signée surtout pour aider les démunis de la terre. Nous étions en pleine époque de "boat people" du Vietnam et d'ailleurs dans la région, à la suite de la guerre du Vietnam, et M. le ministre fédéral, M. Cullen, ayant vu comment le Québec se comportait et comment M. Couture était un ministre respectable à cet égard, a consenti, sans trop de discussions ou de "rechignage", d'hésitations et de haussements d'épaule inutiles, a consenti donc, à doter le Québec d'un début d'outil ou d'instrument pour que le Québec puisse enfin développer sa propre politique d'immigration. Le résultat s'est fait sentir. Le Québec a vu sa composition, sa mosaïque sociale et ethnique se modifier considérablement pour le bien du Québec et le bien des nouveaux Québécois.

Et des études, qui furent faites à l'époque par le ministère et par les démographes du ministère, ont démontré que l'immense majorité des immigrants choisis par le Québec et le Canada, parce qu'à l'époque les deux choisissaient la main dans la main, si on peut dire... Est-ce qu'on pourrait avoir, M. le Président, sans trop insister parce que c'est un vice commun aux jeunes députés... (17 h 50)

Une voix: ...trente-et-un...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, oui, alors, M. le député de Mercier, effectivement, vous avez droit à toute la quiétude nécessaire pour votre intervention, et j'inviterais les députés à être attentifs, sinon à ne pas déranger le député de Mercier. M. le député.

M. Godin: Merci beaucoup, M. le Président. Donc, on a bâti petit à petit - l'oiseau fait son nid - un ministère de l'Immigration au Québec qui est digne de ce que le Québec veut devenir, et je pense que tout ce qui a été acquis - c'est ça qui est merveilleux dans ce domaine-là - c'est comme une pyramide. Chaque pierre de la pyramide servira tôt ou tard, peu importe l'avenir du Québec, qu'il soit néo-fédéraliste, souverainiste, indépendantiste ou les deux... Je pense qu'on aura en main des instruments qui nous permettront de poursuivre dans la voie tracée par MM. Cullen et Couture et, maintenant, par la ministre actuelle, Mme Gagnon-Tremblay, si je peux la nommer sans me faire rappeler à l'ordre par le président.

Au fond, nous marchons dans le même sens, dans le même labour, si vous voulez, labourant toujours de plus en plus les pays où il y a une aspiration de venir en Amérique et souvent en Amérique française, quitte après - on pourrait faire des racines ici - à tenter de les refaire ailleurs sur le continent nord-américain. Donc, on ne peut que rendre hommage à la ministre. Je le fais sans vergogne, avec aucune hésitation et sans partisanerie, comme elle a fait d'ailleurs tout à l'heure le lien entre Couture-Cullen et maintenant Gagnon-Tremblay et McDougall. Et je pense qu'il faut lui rendre hommage de ce souci de la vérité historique parce que ça illustre un être intègre et elle est actuellement très honnête.

Maintenant, M. le Président, il y a un point sur lequel je me permets de chanter faux, dans le concert de louanges qu'on adresse à Mme la ministre; la question des réfugiés n'est pas résolue à ma satisfaction, M. le Président. S'il y a un domaine où le Québec a pu découvrir son impuissance, c'est bien par rapport aux réfugiés. Récemment, on l'a vu encore, on a vu des parents d'Amérique centrale menacer le gouvernement de faire des grèves de la faim pour que leurs enfants puissent enfin les rejoindre ici. Et quand on sait l'importance des enfants et de la famille pour ces peuples-là, dont c'est le seul espoir de voir leur pays se réincarner autre part dans le monde, également leur culture, leurs racines, c'était un drame presque invivable pour eux. D'ailleurs, certains d'entre eux ont menacé de se suicider en se jetant du haut du pont Jacques-Cartier pour bien faire connaître au monde et, en particulier, aux Québécois et aux Québécoises, à quel point il était important pour eux que leurs enfants viennent les rejoindre.

Et moi, j'ai souvent dit à la ministre qu'elle pourrait, en vertu des pouvoirs de réunification des familles qu'elle avait déjà à l'époque, agir avec audace et volonté politique. Là, je me rends compte qu'elle agissait, mais d'une autre manière,

sur la pointe des pieds, en marchant peut-être sur des oeufs parce que l'entente Couture-Cullen faisait partie de l'accord du lac Meech qu'il fallait institutionnaliser ou constitutionnaliser. Ça n'a pas abouti, mais, dès qu'elle l'a vu, elle a pris un détour, comme on le fait dans le bois, à North-Hatley, où elle fréquente et observe les oiseaux, j'imagine, comme tous les gens de la région, et elle nous arrive avec ce projet de loi qui est en tous points remarquable, dans la mesure où il donne au Québec des pas en avant et dans la mesure où il ne fait pas reculer le Québec. Moi, chaque fois qu'un gouvernement passe une loi dans ce Parlement - ou avant que j'y sois comme député - je me pose la question: Est-ce que ça fait avancer le Québec ou reculer le Québec?

Je dois dire à la ministre, avant de terminer, que ce projet de loi là fait avancer le Québec et fait avancer surtout l'avenir du Québec. On a les garanties que le Québec a de bonnes chances de rester fidèle à ses racines, à son passé, à sa culture, ce qui, pour moi, est essentiel; c'est la seule raison pour laquelle je suis ici. Des fois, on a des doutes quant aux autres d'en face, mais je me rends compte qu'au fond nous avons tous compris, par la force des choses, dans nos comtés, dans nos vies, que le Québec est beau comme il est et qu'il ne peut le rester qu'en développant ces beautés-là; et ça passe par une confirmation des racines du Québec et un affermissement de sa francité. Je pense que Mme la ministre se situe tout à fait dans la foulée des ministres, ici, qui ont travaillé dans ce sens-là et je me dois de la féliciter, au-delà de toute partisanerie, avec plaisir. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Mercier. Sur le même sujet, je cède maintenant la parole à M. le député de Richelieu.

M. Albert Khelfa

M. Khelfa: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir sur ce projet de loi, la loi 123, présentée par la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration au nom du gouvernement du Québec. Cette loi, ce projet de loi revêt un caractère important pour le Québec de demain que nous voulons bâtir ensemble. En effet, dans l'évolution et l'histoire des conférences fédérales-provinciales, le gouvernement québécois n'a cessé de revendiquer un pouvoir accru en matière d'immigration parce qu'il était convaincu de cette volonté de protéger la majorité francophone au sein du Canada, une caractéristique qui le suit depuis le début de son histoire.

Étant donné que le projet de loi 123 concerne la Loi sur le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration, il est pertinent de rappeler que c'est en 1968 ici, à l'Assemblée nationale, que le Québec a adopté la loi créant le ministère de l'Immigration. On était alors conscients de l'importance pour le Québec de légiférer dans un domaine dont l'influence sur son identité culturelle et sur son développement démographique et économique était indiscutable. Un des premiers mandats confiés au ministère consistait à informer, recruter et sélectionner les candidats à l'immigration. De plus, le ministère devait faciliter leur établissement au Québec et assurer leur intégration harmonieuse au sein de la société québécoise et, plus particulièrement, de la majorité francophone.

M. le Président, c'est en avril 1981 que le ministère de l'Immigration du Québec devint le ministère des Communautés culturelles et de l'immigration. Modifiée en juin 1981, sa loi constitutive précise que le ministre ou la ministre devient également responsable de la planification, de la coordination et de la mise en oeuvre des politiques gouvernementales relatives à l'épanouissement des communautés culturelles et à leur participation à la vie nationale. La ministre, comme on le sait, est également responsable des programmes qui visent à maintenir et à développer les cultures d'origine ainsi qu'à assurer les échanges et le rapprochement avec les communautés francophones. (18 heures)

Au cours des années soixante-dix, M. le Président, on sait qu'une entente est signée entre les ministres Bienvenue et Andras, en vertu de laquelle on prévoit une participation plus étroite du Québec aux mécanismes de recrutement et de sélection des candidats à l'immigration. En 1978, une importante entente est signée entre les ministres fédéral et provincial de l'Immigration, nommée entente Cullen-Couture, qui portait sur l'évaluation en matière d'immigration et sur la sélection des ressortissants étrangers qui souhaitaient s'établir au Québec à titre permanent ou temporaire.

Des ententes ultérieures seront signées entre les deux niveaux de gouvernement afin d'harmoniser la réglementation québécoise et canadienne. Plus près de nous, M. le Président, soit en décembre 1990, le gouvernement libéral rend public un énoncé de politique en matière d'immigration et d'intégration. Enfin, le 21 décembre 1990, un important accord est conclu entre le Canada et le Québec, relatif à l'immigration, en vertu duquel un certain nombre de pouvoirs sont cédés au Québec en matière d'immigration et une compensation financière lui sera versée en retour. L'accord - on l'appelle l'accord Gagnon-Tremblay-McDougall - est signé le 6 février 1991. Ainsi, le projet de loi 123 est conséquent à cet accord prévoyant le transfert au Québec de responsabilités fédérales. Des modifications et des ajustements doivent être apportés à la législation québécoise actuelle et ce, avant le 1er avril 1991, ce qui nous permettra de compléter l'implantation des services

informatiques avant de prendre totalement la relève. On doit également tenir compte du fait qu'il faudra augmenter le nombre de classes en COFI, ce qui implique de nouveaux locaux, l'embauche de professeurs et la revue complète des programmes québécois.

À cet égard, le présent projet de loi consiste en des modifications de l'actuelle Loi sur le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration ainsi que des dispositions en matière de sélection, d'intégration linguistique, d'assistance financière et de mesures transitoires. Sans passer en revue chacune des modalités du projet de loi 123, il m'apparaft important d'en souligner les points majeurs. Dans un premier temps, la sélection, qui est un élément important dans le processus d'ensemble de ce dossier, le projet de loi propose le renforcement des pouvoirs lors de la sélection des immigrants lorsqu'une personne au Québec souhaite s'engager à aider à l'établissement d'un ressortissant étranger. Deuxièmement, c'est au niveau de l'intégration linguistique et de l'aide à l'adaptation. Cette loi propose d'introduire les dispositions nécessaires pour la gestion du programme québécois de formation linguistique et de fournir une assistance financière aux stagiaires.

Le projet de loi donne suite aux responsabilités transférées au Québec en matière d'aide à l'adaptation. Concernant l'intégration linguistique, une variable passablement importante de la pleine participation des immigrants à ia vie collective, J'entente prévoit le retrait du gouvernement fédéral de tous les programmes d'intégration linguistique, culturelle et des services d'intégration économique spécifiquement offerts aux résidents permanents faisant du Québec le maître d'oeuvre en ces matières. Cette revendication ne date pas d'hier puisque chaque rencontre fédérale-provinciale fut une occasion pertinente donnée au Québec de revendiquer ce champ de juridiction. Le gouvernement canadien s'engage, tel que conclu dans cet accord, à se retirer de cette juridiction avec compensation desdits services, pourvu que le Québec les remplace par des services correspondant dans leur ensemble, à ceux offerts par le Canada dans le reste du pays.

Par ailleurs, en ce qui concerne la planification des niveaux d'immigration - autre objet d'un contentieux important entre les deux niveaux de gouvernement - aucune disposition législative n'est donc nécessaire à cet égard. Comme on le voit, M. le Président, les relations entre les gouvernements fédéral et provincial peuvent tout de même se dérouler dans un climat de cordialité, dans la mesure où les intérêts supérieurs du Québec sont mis en cause. Dans ce dossier, l'attitude, le comportement et les résultats obtenus par le gouvernement libéral ne font pas de doute et s'inscrivent dans ce contexte des intérêts supérieurs du Québec.

Un accord de cette envergure en matière d'immigration répond, non seulement à la situation objective et historique du Québec, mais est conforme à l'esprit et à la lettre des revendications dites traditionnelles du Québec, dont la manifestation la plus récente fut connue dans l'accord du lac Meech.

Enfin, on peut signaler sans se tromper qu'à la suite de l'accord Gagnon-Trem-blay-McDougall signé entre les deux niveaux de gouvernement, le Québec est pleinement en mesure d'assumer les responsabilités qui lui sont confiées, ou mieux, transférées du gouvernement canadien.

L'expertise en matière d'analyse, de sélection et de planification de l'immigration a atteint un taux de maturité que personne n'ose contester depuis plusieurs années. Je vois ici mon collègue de Sainte-Marie-Saint-Jacques; il est d'accord avec moi et j'espère qu'il va voter avec nous. En effet, le Québec est l'une des provinces qui offrent les services les plus complets à ceux et à celles qui choisissent le Québec comme terre d'accueil et lieu d'épanouissement et ce, dans le respect des collectivités autres que québécoises, en harmonie avec les objectifs de protection et de promotion du caractère francophone du Québec dans l'ensemble canadien et de l'Amérique du Nord.

Par conséquent, nous espérons recevoir un accueil favorable - j'en suis sûr - de la part de l'Opposition officielle à l'égard du projet de loi 123, tout en souhaitant que les différentes communautés culturelles déjà implantées au Québec applaudiront à une telle initiative qui fait suite à de nombreuses démarches et discussions avec le gouvernement canadien. Pour ma part personnelle, je souhaite féliciter la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration pour sa ténacité et pour avoir réussi à conclure cette entente. Pour notre part, comme groupe, nous estimons que le projet de loi 123 correspond à cet objectif d'ensemble de mieux maîtriser notre avenir et d'être libres de nos choix. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Richelieu. Sur le même sujet, je cède maintenant la parole à M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, en vous rappelant, M. le député, que vous agissez comme critique. Vous disposez donc, tel qu'indiqué tout à l'heure par le leader adjoint de l'Opposition officielle, d'une heure pour votre intervention. M. le député.

M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, je commencerai immédiatement par répondre à mon honorable collègue, député de Richelieu, en lui disant que, oui, l'Opposition a bien l'intention de concourir. Une de ses premières manifestations a été, pour ma part, M. le député, de ne pas

appeler le quorum puisqu'il n'y avait pas suffisamment de vos collègues pour écouter vos propos si élevés, et je le regrette. Quant à moi, je les ai bien appréciés.

Ceci dit, M. le Président, je voudrais, avant de commencer cette intervention, dire que c'est pour moi un immense honneur que d'intervenir après mon collègue, voisin et ami, le député de Mercier, ancien ministre des Communautés culturelles, dont tous ont reconnu, au cours de la commission parlementaire où nous siégeons actuellement - et vous en avez été témoin, M. le député de Richelieu - où tous ont reconnu - même si cela fait six ans qu'il n'exerce plus cette fonction ministérielle - et continuent de reconnaître sa grande générosité, son humanisme et son implication. Et j'aimerais, M. le Président, le remercier de m'associer à ce débat en faisant de moi une espèce d'adjoint parlementaire de lui-même, puisque nous avons cette belle et bonne habitude tous deux de nous épauler mutuellement dans la défense des dossiers que nous a confiés le chef de l'Opposition. J'apprécie toujours l'aide précieuse de mon collègue, le député de Mercier, lorsqu'il s'agit de la défense des dossiers de la culture, et j'espère qu'il appréciera ma modeste contribution dans le dossier qui le préoccupe, qui est le dossier de l'immigration. (18 h 10)

Ceci dit, M. le Président, s'il est un endroit en ce pays où la justice a ses droits, où la vérité a ses droits, je crois que c'est bien dans cette enceinte, en notre Assemblée nationale. C'est la raison pour laquelle, M. le Président, je vais apporter un bémol à ce que je vais qualifier d'euphorie affichée au sujet de l'accord Canada-Québec sur l'immigration et qui constitue - et j'emploie les mots qu'employaient le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes - une preuve que le fédéralisme canadien peut fonctionner. C'était là excès d'euphorie, à mon point de vue. il faut rappeler, m. le président, que l'accord cullen-couture, que l'accord, dis-je, qui est intervenu entre la ministre et mme mcdougall, son homologue fédéral, actualise, pour l'essentiel, les dispositions de l'entente cullen-couture de 1978 et que cet accord que la ministre a signé est un accord administratif ne comportant aucune garantie constitutionnelle. le québec ne possède donc aucune assurance, m. le président, quant à la pérennité des termes de l'accord administratif conclu entre ottawa et québec.

Je pense qu'il ne faudra pas perdre en considération ces propos d'introduction dans l'analyse de la loi. D'abord, il est bon de le rajouter, la compétence partagée en matière d'immigration demeure soumise à la règle de sept provinces, comptant 50 % de la population, et peut être modifiée sans l'accord du Québec, faute de garantie constitutionnelle, puisque je le répète, il s'agit simplement d'un acte administratif. L'accord sur l'immigration n'est pas à l'abri de contestations juridiques provenant d'autres provinces, notamment à l'égard du pourcentage d'immigrants dévolu au Québec.

Même si, M. le Président, à première vue, l'entente peut sembler quasi permanente que l'on peut y mettre fin sans le consentement des deux parties, il faut souligner cependant que la légalité constitutionnelle d'un tel engagement fédéral est douteux. En effet, il est généralement admis, M. le Président - et je sais que les choses constitutionnelles vous intéressent - que, juridiquement, un gouvernement ne peut s'engager à ne pas exercer une compétence que lui confère la Constitution, par rapport à l'enchâssement constitutionnel de l'entente Cullen-Couture, inclus comme l'une des cinq conditions minimales du Québec dans le défunt accord du lac Meech. L'accord administratif qui a été conclu entre la ministre et son homologue, ne s'avère être, à mon point de vue, qu'un prix de consolation pour le Québec. En dépit de cet accord, M. le Président, l'immigration continue de demeurer une compétence partagée entre le gouvernement fédéral et le gouvernement national du Québec, et j'insiste bien en disant "le gouvernement national du Québec."

Or, je sais, M. le Président, que dans la position constitutionnelle du parti ministériel, l'immigration continue d'être un pouvoir partagé. On ne veut pas que ce soit un pouvoir exclusif, ils ne le demandent pas! Mais moi, je me suis toujours rattaché à cette phrase verte d'un personnage célèbre de l'écriture d'Antonine Maillet, qui était la Sagouine, et j'aurais bien aimé que la ministre s'en inspire - je ne dis pas de la Sagouine, il va de soi; la ministre est, au contraire, d'une élégance et d'une délicatesse, M. le Président, et mon collègue le député de Mercier l'a souligné à juste titre, mais que la ministre s'inspire de la littérature - lorsque la Sagouine dit, "Je savions ce que je voulions, je voulions toute." J'aurais aimé que la ministre et sa formation politique - je lui offrais d'ailleurs des voeux à quelques heures de l'ouverture de son congrès, qui s'est terminé samedi soir, me dit-on, une journée avant - je lui souhaitais que l'on ait tout. "Je savions ce que je voulions, je voulions toute", disait la Sagouine.

Moi, ma position, elle est connue; celle de mon collègue le député de Mercier, elle est connue, M. le Président; celle de ma formation politique, elle est connue. Je pourrais en citer, des exemples. À la Centrale de l'enseignement du Québec, nous savions ce que nous voulions. Nous voulions tout. Nous voulons la pleine, entière et exclusive responsabilité de l'État québécois en matière d'immigration. Ceci dit, ce n'est pas ce qu'on a obtenu. Ce n'est pas ce qu'on a obtenu parce que ce n'est pas ce qu'on a demandé; et ce n'est pas, malheureusement, ce qu'on continue de demander.

Le rapport Allaire, désavoué par le chef du Parti libéral en disant qu'il était négociable, ne demande pas l'exclusivité des pouvoirs. Donc, Ottawa va continuer de détenir la responsabilité exclusive de déterminer les normes et les objectifs nationaux en matière d'immigration. Ottawa va conserver aussi les pleins pouvoirs à l'égard des réfugiés ainsi que son droit de veto pour des raisons de santé, pour des raisons de sécurité, alors que la sensibilité québécoise est autre sur tout immigrant sélectionné par le Québec. Ah! Une sanction sur une décision que nous aurions aimé prendre en toute liberté.

Ottawa maintient aussi tous ses pouvoirs au chapitre des dossiers de réunification familiale. Je pourrais vous en parler abondamment, M. le Président. Est-ce que la définition du mot "famille" doit être une définition puisée dans un dictionnaire québécois ou un dictionnaire canadien? Il se pourrait... Il y a sans aucun doute, M. le Président, une définition autre pour famille, dans un dictionnaire québécois - on pourrait regarder le Petit Robert - que dans un dictionnaire, M. le Président, qui est à l'usage du gouvernement fédéral canadien. Et près de 50 % des dossiers d'immigrants reçus au Québec continueront donc d'être gérés par Ottawa.

Le principal gain réalisé par l'accord, à savoir la prise en charge administrative par le Québec des programmes d'intégration assortie d'une compensation financière fédérale, peut sembler certes intéressant. Ça peut sembler intéressant, mais c'est aléatoire, M. le Président, dans la mesure où cette compensation est conditionnelle au respect, par les programmes québécois, de standards nationaux définis toujours par qui? Par le mon oncle d'Ottawa. C'est notre mon oncle à Ottawa. On n'est pas assez grands garçons et pas assez grandes filles, il faut que ce soit notre mon oncle d'Ottawa qui décide. Si mon oncle à Ottawa dit que c'est bon, eh bien! là, c'est parfait. Si mon oncle à Ottawa dit qu'on n'était pas bons, là, ça ne va pas, M. le Président.

De plus, le gouvernement fédéral, le mon oncle fédéral, invoquant - et, attention! attention! je serais malheureux d'être dans la situation, je vous l'ai dit, madame - des contraintes financières... parce que le mon oncle à Ottawa, eh bien il n'a pas grand-chose dans ses poches. C'est un mon oncle cassé, à Ottawa. Mon oncle à Ottawa, il n'a plus une cent, comme on dit en bon québécois; il n'a plus une cent. Il pourrait invoquer des contraintes financières relatives à la nécessité de réduire son déficit qui prend des proportions gigantesques et épouvantables. (18 h 20)

Le mon oncle d'Ottawa est en train de nous appauvrir nous, les neveux québécois, d'une façon incroyable. Alors, il pourrait, à cause de ces mesures financières, invoquant toutes les raisons et tous les prétextes possibles, réduire l'aide en disant: C'est parce qu'il faut que je réduise mon déficit, et mettre fin au mécanisme de compensation financière, laissant aussi au Québec la responsabilité entière d'assurer le financement des programmes d'intégration des immigrants sur son territoire. Il pourrait le faire. Il pourrait trouver toutes les voies détournées pour le faire. Vous me faites signe que non, Mme la ministre, et on en discutera plus à fond. Vous allez voir, le mon oncle d'Ottawa, vous le savez d'expérience, il a toujours bien des trucs dans son sac quand il s'agit de faire une belle passe au Québec.

Alors, l'accord - puisqu'il est convenu de l'appeler par son nom, M. le Président - Ga-gnon-Tremblay-McDougall, intervenu en décembre dernier fait que le gouvernement du Québec dépose - enfin, je dis dépose - dispose plutôt maintenant, effectivement, de certains pouvoirs en matière d'intégration et de sélection des immigrants. Et l'accord doit entrer en vigueur le prochain 1er avril, donc à quelques jours tout au plus. Les dispositions qui sont contenues, M. le Président, dans le présent projet de loi permettent, et j'en conviens, à la ministre d'exercer ses nouvelles responsabilités. Il contient certaines dispositions quant au transfert de fonctionnaires du gouvernement fédéral et il prévoit enfin la constitution d'un bureau de révision des décisions relatives à l'émission des certificats de sélection et des certificats d'autorisation.

Si on aborde le sujet de la sélection des immigrantes et des immigrants en vertu de l'entente Couture-Cullen, le Québec dispose depuis 1978 de certains pouvoirs en matière de sélection de certaines catégories d'immigrants. En gros, le Québec peut sélectionner les immigrants indépendants, c'est-à-dire ceux qui n'ont pas, au Québec, de parents ayant la citoyenneté canadienne. Puisque nous sommes soumis et soumises à la citoyenneté canadienne, nous n'avons pas encore de citoyenneté québécoise, d'où un problème d'identification pour les immigrants qui arrivent, ils arrivent au Québec, ils deviennent citoyens canadiens et prêtent serment d'allégeance à la reine d'Angleterre. Vous voyez que le décodage se passe bien. En plus d'un mon oncle, là, on vient d'avoir une ma tante. Une ma tante anglaise et un mon oncle canadien fédéral. Bon. Voilà.

Cette catégorie regroupe les immigrants gens d'affaires, qui est un programme, je n'en disconviens pas, intéressant, mais qui a subi de fortes pressions de la part des cousins du mon oncle fédéral. Les cousins du mon oncle fédéral de notre programme pour les immigrants investisseurs, les gens d'affaires ne l'aimaient pas trop trop. Et ça, la ministre est obligée de convenir avec moi, les cousins ontariens, les cousins "british columbian", les cousins manito-bains du mon oncle fédéral, ça les agaçait. Ce programme ingénieux qu'on avait au Québec des gens d'affaires, ça les a fatigués. Enfin.

Alors, cette catégorie, comme je vous disais, regroupe les immigrants gens d'affaires, les retraités et les autres indépendants. Ils sont sélectionnés en fonction de leur capacité à s'établir au Québec. Capacité, on pourrait épiloguer longtemps. Au total, en excluant les revendicateurs de statut de réfugié, cette catégorie représente depuis 1985 - et il est bon de le citer - environ 50 % de l'immigration québécoise. Avec la nouvelle entente, la double évaluation, l'une fédérale et l'autre provinciale, puisque nous sommes encore une province - aspirons à mieux que cela, j'ose l'espérer - ne s'appliquera plus. Le Québec sélectionnera à lui seul ses immigrants.

Ce gain du Québec ne modifie que très peu la pratique en vertu de l'entente Cullen-Couture qui interdisait au fédéral de donner une suite négative à la sélection du Québec, même si celle-ci ne répondait pas à la norme canadienne. Le changement le plus important par rapport à l'entente Cullen-Couture, c'est que le Québec peut maintenant opérer cette sélection sur son territoire.

C'est un gain. Je ne le nie pas. Mais "je savions ce que je voulions, je voulions toute." Donc, ce n'est qu'un gain. Ce n'est qu'un gain. Petit gain. Et le député de Richelieu disait: Ottawa nous a cédé. Quelle bonté! Le mon oncle fédéral nous a cédé des choses. Quelle bonté! Peuple à genoux, remercions-le de sa générosité! Les autres catégories d'immigration, que ce soit en vertu de l'entente Cullen-Couture ou de l'entente que nous conviendrons maintenant d'appeler Gagnon-Tremblay-McDougall, demeurent sous la responsabilité du gouvernement fédéral. Je le dis et je le répète, le mon oncle fédéral est encore là.

C'est toujours lui qui s'occupe des réfugiés, de la réunification des familles ainsi que de la catégorie des parents aidés. Et, je le répète, la sensibilité québécoise est bien différente de la sensibilité ontarienne, la sensibilité "nova-scotienne", si vous me permettez l'expression, la sensibilité, enfin, des neuf autres provinces canadiennes, de ses territoires et dépendances. C'est toujours lui qui s'occupe des réfugiés, de la réunification des familles et de la catégorie des parents aidés. Ces immigrants représentent l'autre 50 %. Et c'est là qu'intervient la mathématique; ça représente l'autre 50 % que le Québec accueille annuellement depuis 1985.

En cette matière, malgré ses prétentions, la ministre n'est pas allée plus loin que Jacques Couture qui négociait en 1978, dans un contexte tout à fait différent. "Je savions ce que je voulions, je voulions toute." Qu'avons-nous obtenu? Rien de bien bien plus. Même contexte. Même contexte, M. le Président. Et, Dieu seul sait que si la ministre, M. le Président... C'est vrai que, pour que la ministre agisse, elle aurait eu besoin de l'appui de son gouvernement, de son parti, mais le rapport Allaire ne le dit pas. La ministre aurait eu l'appui inconditionnel de l'Opposition. Mon collègue, le député de Mercier - je vois entrer ma collègue, députée de Hochelaga-Maisonneuve - votre humble serviteur auraient été ses plus loyaux alliés, de vrais zélotes, M. le Président. Et elle aurait eu, en plus, l'appui de puissants organismes au Québec: la centrale des enseignants du Québec... Mais, les immigrants, ça passe par l'école...

Une voix:...

M. Boulerice: Vous ne voulez pas de l'appui de la centrale des enseignants du Québec, nous dit M. le député de Papineau. Eh bien! je vous avoue, Mme la ministre, que je suis sidéré d'entendre un tel propos. Sidéré, M. le Président! Vous auriez eu l'appui de la FTQ, la puissante Fédération des travailleurs du Québec, vous auriez eu celle de la CSN, vous auriez sans doute eu celle des mouvements Desjardins, vous auriez eu... Et je vois que le président m'impose de conclure à cause-Une voix: Le bâillon.

M. Boulerice: Non, ce n'est pas un bâillon, ce n'est pas dans l'habitude de notre président, mais je sens que... Enfin, de toute façon, on va poursuivre demain. Mais si la ministre avait eu le même dicton que ce personnage de la Sagouine: "Je savions ce que je voulions, je voulions toute", eh bien, vous auriez obtenu tout parce qu'on aurait tous été avec vous. Vous n'avez pas voulu le faire, Mme la ministre, donc vous n'avez que le demi-pouvoir et on aura probablement - j'espère que non - des demi-résultats. Mais, de toute façon, on y reviendra demain, M. le Président, puisqu'il semble que l'horaire nous impose d'en faire un roman-feuilleton. Alors, on reviendra demain et on discutera plus à fond des impacts et de ce qui reste encore à ce que j'appelle le mon oncle fédéral qui continue à mettre ses doigts dans nos papiers de famille. Et l'immigration, c'est une chose qui nous appartient à nous. Je vous remercie et à demain matin, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Je comprends que vous avez l'intention de continuer votre intervention, puisque vous disposez encore de 35 minutes, de sorte que vous faites motion pour ajourner le débat.

M. Boulerice: Voilà! Motion d'ajournement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté. (18 h 30)

Débat de fin de séance

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, ceci met fin à nos travaux réguliers. Nous allons maintenant procéder, tel qu'indiqué, au débat de fin de séance requis par Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve et adressé à M. le ministre des Affaires municipales, débat de fin de séance qui portera sur la réforme de la fiscalité municipale et son impact sur la ville de Montréal. Alors, je vous indique, Mme la députée, que vous disposez de cinq minutes. M. le ministre, vous disposerez vous-même également d'une période de cinq minutes et, Mme la députée, vous aurez droit à une réplique de deux minutes. Alors, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve, je vous cède la parole. Mme la députée.

Impact de la réforme de la fiscalité municipale sur la ville de Montréal

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. J'ai relu avec attention l'échange que j'ai eu cet après-midi avec le ministre des Affaires municipales durant la période de questions et je voudrais, M. le Président, reprendre certains éléments qu'il mentionnait, d'autant plus qu'ils peuvent prêter à confusion. Je pense, entre autres, à cette référence, à la contribution de l'usager du transport en commun à Montréal qui, selon lui, s'évalue à près de trente-sous sur la piastre que paie le passager, trente-sous étant donné que sur le dollar qui est versé pour le financement du transport en commun... Mais je voudrais vous rappeler qu'il n'en reste pas moins que le ticket de métro vaut 1,25 $ aux jours d'aujourd'hui et que les éléments que le ministre envisageait pour permettre, disait-il, à la ville de Montréal d'aller chercher les sommes d'argent - on parle de 138 000 000 $, la facture que les Montréalais auront à payer de ce qu'il a apporté comme proposition...

Alors, le ministre envisageait, finalement, à la fois une hausse de tarif possible, à la fois une hausse de l'évaluation résidentielle possible et, disait-il, une hausse du secteur commercial et industriel, appelé le secteur non résidentiel, qu'il évaluait autour de 9 % à 10 %. Alors, en réexaminant tout ça, je me rends compte que le ministre n'a certainement pas reçu les messages des dirigeants de la Commission métropolitaine de transport et, en particulier, de ceux de la Société de transport de la Communauté urbaine de Montréal, à l'effet que les tarifs sont à un niveau au point où toute augmentation supplémentaire ne pourrait avoir qu'un effet de diminution de l'achalandage avec des coupures de service.

M. le Président, je vous rappelle que sur les 800 000 usagers du métro chaque jour à montréal, il y en a 75 % qui l'utilisent pour aller travailler et que 45 % de ces personnes n'ont pas d'automobile. faut-il rappeler la situation, évidemment particulière, de montréal? la population montréalaise, c'est aujourd'hui la plus vieille, la plus pauvre de l'ensemble du québec. c'est évidemment, également, la population qui doit absorber actuellement le fardeau fiscal le plus élevé. les données de statistique canada indiquent qu'à montréal, l'incidence de pauvreté est deux fois plus élevée dans la ville de montréal que dans tout le reste de la région métropolitaine, qu'il y a davantage de pauvres à montréal que d'habitants dans toute la population de la gaspésie et de la côte-nord réunies, que le revenu moyen des ménages de la ville de montréal est de 15 % plus bas que la moyenne du québec et de 20 % plus bas que la moyenne métropolitaine. ce que cette réalité cache, c'est une autre réalité sur l'incidence de la pauvreté dans certains quartiers de montréal qui atteint jusqu'à 40 %.

Là, on ne parle pas, évidemment, de cette réalité qui est celle des grandes villes nord-américaines avec des problèmes sociaux beaucoup plus graves, liés notamment à des situations particulières comme celle des familles monoparentales, des personnes âgées. Montréal a le double de la moyenne des personnes âgées du Québec et, dans ce contexte-là, M. le Président, ce que le ministre est venu nous dire cet après-midi, c'est: Alors, allez du côté de la hausse des taxes foncières pour le résidentiel. Ça veut dire quoi, ça, M. le Président, à Montréal? Ça veut dire ceci: II y a eu, oui, il y a eu un marché immobilier hyperactif entre les années quatre-vingt-six et quatre-vingt-huit et puis, ça a provoqué des fortes hausses de valeurs mobilières, mais, M. le Président, ça, ce sont des augmentations sur papier de la valeur de la propriété des maisons. Ça n'indique pas que les gens ont les moyens de s'acquitter de leurs hausses de taxes et, avec ce qu'on sait être les revenus à la baisse des Montréalais en comparaison avec tous ceux du Québec, là, on doit se rendre compte qu'il y a là, si ce sont des hausses de la valeur résidentielle, ce sont les locataires qui vont payer. 75 % des gens qui habitent à Montréal sont des locataires, contrairement au reste du Québec qui connaît maintenant une majorité de propriétaires.

Et c'est évidemment une difficulté qui va être encore accrue d'accès à la propriété à Montréal. L'écart fiscal est déjà très grand et, M. le Président, j'ai vérifié un certain nombre de chiffres. J'aurai l'occasion d'y revenir, évidemment, en conclusion de cet échange, mais actuellement, l'effet pervers le plus inquiétant, c'est de financer une sorte d'exode vers des secteurs limitrophes...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je vous demanderais de conclure, Mme la députée.

Mme Harel: ...même aux couronnes qui entourent Montréal, là où il n'y aura pas de hausse, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à M. le ministre des Affaires municipales. Vous avez droit à une intervention maximum de cinq minutes, M. le ministre.

M. Claude Ryan

M. Ryan: Oui, M. le Président. Je voudrais tout d'abord rappeler à la député de Maisonneuve que ce sujet doit être situé dans la perspective plus large de l'ensemble des finances publiques du Québec. De toutes les parties du Québec, on signifie présentement au gouvernement qu'on est trop taxés. Le gouvernement en est très conscient. Il a fait tout ce qui était humainement possible pour éviter de hausser le fardeau fiscal des contribuables et malgré ces efforts, nous en arrivons à la situation où il faut imposer des compressions budgétaires dans à peu près tous les secteurs.

Cet après-midi, l'Opposition a interrogé le ministre de l'Éducation sur les compressions qui ont été requises dans le secteur de l'éducation. C'est la même chose dans tous les secteurs du gouvernement. Alors, il faut bien se rendre compte, à ce moment-là, que les sources de revenus du gouvernement sont présentement utilisées au maximum. Avant de concevoir un accroissement du fardeau fiscal, il faut se demander où les exigences découlant de cet accroissement tomberont.

Or, nous constatons une chose quand nous examinons le fardeau fiscal des contribuables québécois, par comparaison avec celui des contribuables et des entreprises en Ontario, nous constatons qu'en ce qui touche les sources provinciales de revenus, le contribuable québécois, individuel et corporatif, est taxé à un niveau qui est 11,3 % supérieur à celui de l'Ontario, tandis que si nous regardons les taxes municipales et scolaires, nous constatons que le contribuable québécois est taxé à 17,3 % de moins que le contribuable individuel et corporatif de l'Ontario.

Si, par conséquent, une certaine perception additionnelle doit être envisagée, je pense qu'il est normal que le gouvernement regarde de ce côté où il existe un espace fiscal plus grand à l'heure actuelle. Et le gouvernement, quand il fait cette considération, n'adresse pas du tout un blâme aux municipalités. Bien au contraire, il reconnaît l'excellent travail qu'elles ont fait, mais il leur rappelle que nous faisons tous partie de la même famille fiscale, publique, la même famille appelée à se donner des services publics de qualité convenable, à un coût raisonnable, et moyennant des charges équitablement réparties entre les différents secteurs de la population.

En ce qui touche le secteur de Montréal, si nous appliquons intégralement la proposition gouvernementale du 14 décembre dernier, la hausse du fardeau fiscal qui en résultera pour l'impôt foncier général, comprenant à la fois le résidentiel et le non résidentiel, est de 0,8 %. C'est un des plus bas de tout le Québec. Pour l'ensemble de la communauté de ITIe de Montréal, la Communauté urbaine de Montréal, c'est 1,4 %. Si nous prenons maintenant uniquement le non résidentiel, l'impôt supplémentaire qui serait chargé au non résidentiel, nous arrivons à 13,9 %.

Comme je l'ai expliqué cet après-midi à la députée de Hochelaga-Maisonneuve, si nous considérons cette hausse dans la perspective de l'ensemble des charges fiscales que porte à Montréal le secteur non résidentiel, il s'agit d'une augmentation de l'ordre de 3,4 %. Or, je ne pense pas que ce soit exagéré. Je ne pense pas que ce sera de nature à éloigner, comme on le prétend, les citoyens de Montréal.

En ma qualité de ministre des Affaires municipales, je veux que la vie à Montréal soit de plus en plus appréciée et qu'on puisse y faire sa vie convenablement dans des circonstances qui attirent les gens à Montréal plutôt que de les éloigner vers la périphérie. (18 h 40)

Maintenant, ce que je disais cet après-midi, c'est qu'il y a trois sources possibles de financement pour compenser la disparition éventuelle des subventions gouvernementales: il y a le non-résidentiel dont nous avons parlé jusqu'à maintenant, il y a le foncier général et il y a la contribution de l'usager également. Je n'ai pas dit qu'il fallait augmenter la contribution de l'usager. Je n'ai pas dit qu'il fallait augmenter l'impôt foncier général. J'ai dit que ce sont des sources qu'on peut considérer et qu'on pourrait arriver à un mélange qui serait peut-être plus intéressant. Si, par exemple, au lieu de tout envoyer du côté du non-résidentiel, on partageait ça moitié-moitié, entre le général et le non-résidentiel, on arriverait à une hausse de 6 % pour le résidentiel et de 9,2 % pour le commercial et l'industriel. Et c'est une moyenne qui se compare fort bien avec celle qu'on observe ailleurs. J'ajoute une chose. Quand les investisseurs prennent la décision de situer leurs investissements à tel ou tel endroit, ils considèrent d'abord le fardeau fiscal au niveau provincial, pour le choix du pays au niveau fédéral, évidemment, et pour le choix de la province au niveau provincial et, pour le choix du lieu où ils iront, les considérations relatives aux impôts locaux sont secondaires parce que le volume de ces impôts est beaucoup moins élevé. Par conséquent, je pense qu'il faut envisager une nouvelle répartition des charges. Nous n'avons pas le choix, la seule autre avenue, c'est l'augmentation du déficit et de la dette et celle-là était tellement bien cultivée par le Parti québé-

cois quand il était au pouvoir qu'il ne reste absolument plus d'espace de ce côté. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve pour son droit de réplique de deux minutes.

Mme Harel: M. le Président, deux ou trois minutes?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Deux minutes, Mme la députée.

Mme Louise Harel (réplique)

Mme Harel: Je ne comprends pas que le ministre puisse continuer à parler encore d'équité quand il commente ses propositions, quand on regarde l'impact, par exemple, sur un commerce évalué à 500 000 $. Ce n'est pas énorme, M. le Président, 500 000 $ pour l'évaluation d'un commerce. Il y en a évidemment d'encore plus coûteux sur la rue Ontario ou sur Saint-Hubert et on voit très bien des augmentations de l'ordre, par exemple, à Montréal, de 3555 $, un pourcentage de 18 % qui va faire passer le taux de taxe actuel de 19 511 $ par année à 23 066 $.

Moi, M. le Président, je ne comprends pas que le ministre n'ait pas déjà pris connaissance des craintes exprimées par le professeur Bus-sières, qui est professeur à l'Institut national de la recherche scientifique. Et je ne comprends pas que juste l'évidence... On n'a pas besoin de lire des thèses pour se rendre compte que puisqu'à Repentigny, puisqu'à Terrebonne, puisqu'à Saint-Bruno, il n'y aura aucune augmentation de taxe, ce n'est pas difficile d'imaginer que, lorsqu'il y aura relocalisation... On est dans un phénomène de modernisation des entreprises et c'est à ce moment-ci, souvent, que des décisions de relocalisation se prennent. M. le Président, ce n'est pas compliqué de conclure qu'un bon nombre d'entreprises, autant commerciales qu'industrielles, peuvent vouloir aller s'installer juste à la frontière de là où ça ne coûte pas cher. Et ce n'est même plus la ceinture autour de Montréal; ça va être juste un petit peu plus loin. Et là, ça va entourer, évidemment, des coûts accrus pour l'ensemble de la société. Et c'est ça qui n'est pas évalué dans la réforme du ministre. C'est pourquoi l'UMQ concluait, d'ailleurs, à son caractère improvisé. Il n'y a pas eu, évidemment, l'évaluation de l'impact social d'une telle réforme, M. le Président, et je suis surprise de ne pas entendre les arguments habituels à l'effet qu'il y aurait encore matière puisque les villes auraient fait des dépenses somptuaires. M. le Président, j'ai vérifié: L'évolution des dépenses de la ville de Montréal depuis 10 ans atteint 6,3 %, huit dixièmes de moins que Québec...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mme la députée.

Mme Harel: ...qui se pose pourtant en modèle. J'ai vérifié un autre argument du ministre, celui de ne pas gérer la Société de transport et de ne pas vouloir la financer, étant donné qu'il ne la gère pas, et on me dit qu'on peut accommoder le ministre et qu'on peut faire des modifications à la composition du conseil d'administration de la STCUM...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je vous demanderais de conclure, Mme la députée.

Mme Harel: ...pour faire siéger Québec, si tant est que ça résout la question pour le faire payer, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée. Alors, cette dernière intervention met fin à nos travaux pour aujourd'hui, travaux que j'ajourne à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 45)

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