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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mardi 28 mai 1991 - Vol. 31 N° 129

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Quatorze heures sept minutes)

Le Président: Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants. Je vous remercie, veuillez vous asseoir.

Nous allons entreprendre nos travaux aux affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi.

Décision 444 du Bureau de l'Assemblée nationale

Dépôt de documents. Alors, je dépose la décision 444 du Bureau de l'Assemblée nationale. Le document est donc déposé.

Alors, en demandant, s'il vous plaît, l'attention de tous les collègues.

Dépôt de rapports de commissions. M. le président de la commission de la culture et député de Louis-Hébert.

Consultations particulières dans le cadre de l'étude du projet de loi 117

M. Doyon: Merci, M. le Président. J'ai un rapport à déposer, avec votre permission. Il s'agit du rapport de la commission de la culture qui a siégé les 16, 21, 22 et 23 mai 1991 afin de procéder à des consultations particulières dans le cadre de l'étude du projet de loi 117, Loi modifiant la Loi sur le cinéma.

Le Président: Alors, ce rapport est déposé. Maintenant, dépôt de pétitions. M. le député de Shefford.

Retirer la proposition de coupure dans les subventions publiques au transport en commun

M. Paré: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 1430 pétitionnaires, citoyens et citoyennes du Québec.

Les faits invoqués sont les suivants: "Considérant que la politique de coupure de subventions publiques du gouvernement à l'égard du transport en commun constitue une véritable atteinte à la survie même de ce service public auquel la population a droit; "Considérant que les victimes d'une détérioration du transport en commun seraient les personnes âgées, les jeunes, les plus démunis et la population en général, sans compter l'impact d'une telle mesure sur l'emploi, l'environnement et l'achalandage du réseau routier."

Et l'intervention réclamée se résume ainsi: "Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du ministre responsable et du gouvernement afin de retirer sa proposition de coupure dans les subventions publiques accordées au transport en commun."

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, merci, M. le député. Votre pétition est déposée.

Je vais demander, dès maintenant, la collaboration de tous les collègues, s'il vous plaît.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

Nous allons donc passer maintenant à la période de questions et réponses orales des députés et je reconnais, en première question principale, M. le chef de l'Opposition.

QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES

Définition de la souveraineté et perception du premier ministre

M. Parizeau: M. le Président, la définition de la souveraineté du Québec, la mienne, celle de mon parti, est exprimée par notre programme, de la façon suivante: La souveraineté du Québec signifie que tous les impôts perçus au Québec le seront par l'État québécois ou les administrations qui en dépendent. Toutes les lois qui s'appliquent aux citoyennes et citoyens québécois et sur le territoire québécois émaneront de l'Assemblée nationale du Québec. Tous les traités, conventions ou accords internationaux seront négociés par les représentants de l'État québécois et entérinés par l'Assemblée nationale.

La Commission Bélanger-Campeau a défini la souveraineté peut-être en termes plus élégants que ceux-là, mais ça revient exactement à la même chose, et le gouvernement nous a présenté un projet de loi qui définit la souveraineté de la façon suivante: "...la capacité exclusive du Québec - et je cite ici l'article 3 du projet de loi 150 - par ses institutions démocratiques, de faire ses lois, de prélever ses impôts sur son territoire et d'agir sur la scène internationale pour conclure toute forme d'accords ou de traités avec d'autres États indépendants et participer à diverses organisations internationales".

Donc, M. le Président, le premier ministre est parfaitement d'accord avec ma définition de la souveraineté. Sa définition de la souveraineté est la mienne. M'ayant imité, dans cette définition de la souveraineté, et très officiellement, pourquoi le premier ministre définit-il ma définition de la souveraineté comme étant - comme il l'a fait en fin de semaine - préhistorique et dogmatique? Puisqu'il m'a imité à cet égard, est-ce que je dois comprendre qu'il se définit lui-même comme paléolithique et doctri-

naire?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, je suis très heureux de retrouver le chef de l'Opposition à la suite de son voyage dans l'Ouest du Canada. Je n'ai pas d'objection à ce qu'il choisisse, comme objectif de ses voyages, l'horizon est-ouest plutôt que nord-sud parce qu'on s'aperçoit que la prime de l'incertitude est en train de disparaître à New York sur les obligations du Québec. Alors, je souhaiterais, pour quelque temps, qu'il s'en tienne à l'horizon est-ouest.

Des voix: Ha, ha, ha! Des voix: Bravo!

M. Bourassa: m. le président, ce qui est en cause c'est des centaines et des centaines de millions de dollars, comme on le sait, sur les taux d'intérêt.

Une voix: ...à la question.

M. Bourassa: À la question plus précisément, je crois que le chef de l'Opposition ne tient pas compte que, dans le même projet de loi, il y a l'établissement de commissions parlementaires qui ont pour objectif d'examiner le concept de la souveraineté, ses implications financières, sociales, culturelles et politiques, et on aura l'occasion d'en discuter quand aura lieu le débat sur la loi 150.

J'ai mentionné également, en fin de semaine, le problème du déficit démocratique que comporte la thèse du Parti québécois. Je ne veux pas élaborer davantage, mais on peut quand même dire que le chef de l'Opposition est assez familier avec la notion de déficit. Il va très bien comprendre que lorsque, d'un côté, il multiplie les pouvoirs en commun, comme il l'a fait en Alberta, la mise en commun des pouvoirs, c'est la monnaie, c'est les postes, c'est l'armée, c'est les transports, ce sont les communications. La liste s'allonge constamment. Et, dans ce contexte-là, se pose tout le problème de l'intégration politique et de l'intégration économique, ce dont on va pouvoir discuter à l'occasion de l'adoption de la loi 150. Alors, j'espère que ma réponse va satisfaire le chef de l'Opposition.

Le Président: Pour une question complémentaire, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: M. le Président, est-ouest, nord-sud, est-ce que le premier ministre va saisir un jour que tout est bon dans le poulet? Tout!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Parizeau: Pourquoi choisir?

M. le Président, puis-je aussi demander au premier ministre, quant aux citations qu'il fait de moi dans l'Ouest, d'attendre un rectificatif à cet égard de la Presse Canadienne qui devrait sortir d'ici peu. Et, finalement, j'en arrive à la poursuite de ma question. Puisque, M. le Président, le premier ministre et moi avons exactement la même définition de ce qu'est la souveraineté, exactement la même, moi dans le programme de mon parti, lui dans la loi qui a été déposée en Chambre, puisque nous avons la même définition, est-ce qu'il ne conviendra pas avec moi qu'il est injuste, très injuste dans le public qu'on le définisse, sur le plan de la définition de la souveraineté, comme impur et mou, alors que je serais pur et dur?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, je viens d'avoir l'occasion de répondre au chef de l'Opposition en disant qu'il semble s'écarter quelque peu de l'approche maximaliste qu'avait son parti vis-à-vis de la souveraineté en énumérant toute une série de pouvoirs communs. Il n'a pas besoin de demander un rectificatif à La Presse Canadienne pour, encore une fois, dire qu'il a été mal cité, quand il a lui-même, le 6 novembre dernier, je crois, annoncé qu'il était prêt à mettre en commun toute une série de pouvoirs.

Ce que je lui dis, c'est que, dans la loi 150 - il connaît bien le programme du Parti libéral qui a été adopté les 9 et 10 mars derniers, lequel programme ne se compare pas à celui du Parti québécois, il le sait fort bien, puisque nous parlons d'institutions politiques communes - mais précisément, dans la loi 150, nous avons la possibilité d'examiner toutes ces implications et l'actualisation, si on peut dire, de la souveraineté. Je lui ai dit très souvent que nous sommes à la fin du XXe siècle et non au début du XXe siècle. Il faut donc en tenir compte dans l'intégration économique qui est un objectif commun et j'étais heureux, à moins qu'il ne renonce et qu'il ne se démentisse, de constater que petit à petit il se trouvait à accepter dans cette mise en commun d'un plus grand nombre de pouvoirs une certaine logique néo-fédéraliste qui va favoriser l'union entre les deux parties.

Le Président: Toujours en complémentaire.

M. Parizeau: Est-ce que le premier ministre convient que la définition de la souveraineté, telle qu'elle apparaît dans son projet de loi, exclut toute forme de fédéralisme, néo ou paléo?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Parizeau: Lorsqu'il parle de néo-fédéralisme à partir de la définition qu'il donne lui-

même dans son projet de loi, il est en contradiction avec le projet de loi que lui-même a déposé en cette Chambre. Est-ce que le premier ministre peut accepter de sortir de l'espèce de brume dont il adore s'entourer et reconnaître que, si le Québec a tous les pouvoirs sur ses impôts, tous les pouvoirs sur ses lois et tous les pouvoirs sur ses traités qui l'unissent avec d'autres pays, ce dont il parle dans sa propre définition dans son projet de loi, c'est de l'indépendance du Québec?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, je suis obligé de répéter au chef de l'Opposition ce que je lui ai dit tantôt. C'est que nous avons déposé le projet de loi, qui contient plusieurs articles, qui contient évidemment une définition, mais qui est sujette à délibérations par les membres de l'Assemblée nationale. D'ailleurs, je le répète encore parce que c'est important, comme je le lui disais tantôt, c'est des centaines de millions qui sont en cause. On s'aperçoit que la prime que j'appelais tantôt, cette prime de l'incertitude politique au Canada et au Québec, qui nous valait un différentiel pour les emprunts d'Hydro-Qué-bec, notamment, qui se chiffrent, comme on sait, à plusieurs centaines de millions, est en train de disparaître. (14 h 20)

C'est peut-être qu'à l'extérieur, on fait confiance à la volonté de stabilité politique et de sécurité économique de la part du Québec et de la part du Canada, qui serait ouvert à des représentations légitimes du Québec. Et j'ajoute à cela que ceci a été un peu confirmé par la perception du discours du chef de l'Opposition, laquelle perception est basée non seulement sur son discours à Calgary, mais également sur d'autres interventions depuis quelques mois. Alors, on peut continuer a discuter entre nous sur la signification du concept de la souveraineté, du confédéralisme, du fédéralisme, de l'objectif communautaire. On sait que ce débat se retrouve également dans d'autres continents.

Mais ce qui est important, c'est que ce soit l'intérêt supérieur du Québec qui soit servi. De notre côté, c'est clair. Du côté de l'Opposition, c'est moins évident.

Le Président: Question additionnelle.

M. Parizeau: Dernière additionnelle, M. le Président. Puis-je demander au premier ministre si, alors qu'il soulève tellement d'hypothèses dans toutes directions, depuis quelques jours, il est toujours d'accord avec la définition de la souveraineté qui apparaît dans la loi 150, s'il est toujours d'accord sur le fait que la souveraineté du Québec tel qu'il l'a si bien exprimée dans son projet de loi, c'est tous les impôts, toutes les lois, tous les traités et qu'au point où il en est à l'heure actuelle, c'est ça, sa perception de la souveraineté?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, si j'ai employé au cours de la fin de semaine le qualificatif "préhistorique", c'est que le chef de l'Opposition, représentant probablement son parti, du moins dans la conjoncture, parce que plusieurs de ses collègues, dont celui qui est assis derrière lui, durant plusieurs années, optaient pour une autre option, mais il semble y avoir un ralliement conjoncturel à la thèse du chef de l'Opposition, c'est que le chef de l'Opposition s'en tient toujours à des traités. Il ne peut pas concevoir qu'il puisse y avoir une intégration politique comme son ami et collègue, Lucien Bouchard, est en train lui-même de l'accepter quand il parle de la Communauté économique européenne. Alors, je dis au chef de l'Opposition qu'il doit situer cet article dans le cadre de l'ensemble de la loi 150 et également du programme du Parti libéral du Québec. Dans ce contexte-là, je crois qu'il aura une compréhension plus réaliste de la situation.

Le Président: En question principale, M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition.

M. Brassard: M. le Président, puis-je rappeler au premier ministre qu'il fut un temps où son collègue de la Sécurité publique avait demandé aux Québécois de voter pour le Parti québécois. Oui, oui.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le député, s'il vous plaît!

M. Brassard: Mais non pas pour lui.

Le Président: À l'ordre! Je vous prierais d'en venir à votre question, s'il vous plaît.

M. Brassard: C'était à l'époque où Le Devoir était une véritable bible.

Le Président: Votre question, s'il vous plaît! Votre question, s'il vous plaît!

L'intention du premier ministre concernant le référendum sur la souveraineté

M. Brassard: M. le Président, Raymond Giroux, aujourd'hui, dans Le Soleil écrit ce qui suit: "M. Bourassa doit surmonter un problème majeur, son absence de vision d'avenir." On s'en rend compte de plus en plus. D'abord, le rapport Allaire, position de son parti, a pris le chemin de la poubelle puisqu'il n'est jamais devenu la position de son gouvernement. Ensuite, le rapport de la Commission Bélanger-Campeau est allé rejoindre le rapport Allaire dans le même

récipient puisque le premier ministre n'a ni le goût, ni la motivation, ni les convictions nécessaires pour tenir un référendum sur la souveraineté en 1992. C'est le bunker qui décide et qui cogite, et c'est le scénario suivant qui est retenu, selon deux conseillers proches du premier ministre. Si les offres du gouvernement fédéral sont acceptables, le gouvernement pourrait les faire siennes, vivre avec et les soumettre aux élections générales de 1993. Dans ces conditions, la loi 150, évidemment, est nulle et sans valeur.

Ma question très simple au premier ministre: Peut-il nous dire d'abord le nom des deux collaborateurs... Je dirais plutôt d'un collaborateur. Un, c'est sans doute Jean-Claude, probablement...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brassard: Mais, peut-il nous dire le nom des deux collaborateurs et peut-il admettre qu'ils ont agi avec sa bénédiction au mépris des militants de son propre parti qui s'imaginent à tort que leur chef a endossé le rapport Allaire et au mépris des commissaires de la Commission Bélanger-Campeau qui savent maintenant que le premier ministre n'a pas du tout l'intention de tenir un référendum sur la souveraineté?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, je vais me référer très très brièvement au début du préambule du député de Lac-Saint-Jean en disant tout simplement: À tout péché miséricorde.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourassa: Je veux dire au député de Lac-Saint-Jean, M. le Président, que j'ai des dizaines et des dizaines de collaborateurs. Les noms n'ont pas été mentionnés, je n'ai pas eu le temps de faire la vérification. Certains de ces collaborateurs ont un sens de l'humour assez développé et dont l'interprétation comporte certains risques, et je dois dire au député de Lac-Saint-Jean que la position du gouvernement, comme je l'ai dit en fin de semaine, se retrouve dans la loi 150 qui sera débattue et qui comporte, comme on le sait, et je le répète pour la quatrième fois cet après-midi, des commissions parlementaires qui auront à examiner différentes hypothèses. Que l'Assemblée nationale soit souveraine, je pense que tout le monde va être d'accord avec ça, c'est une vérité de La Palice que reconnaît surtout le chef de l'Opposition et député de L'Assomption, quand on connaît son respect exemplaire pour les institutions parlementaires. Alors c'est ce que reprend la loi 150. Sur le reste, du ouï-dire au deuxième degré, comme je le disais, par des collaborateurs anonymes, c'est assez difficile pour moi de pouvoir exprimer une réponse à la question du député de lac-saint-jean. j'aime mieux le référer à un projet de loi officiellement déposé par le ministre délégué aux affaires intergouvernementales canadiennes au nom du gouvernement et, à ce moment-là, il aura la position du parti libéral du québec.

Le Président: En question complémentaire.

M. Brassard: Est-ce que le premier ministre ne pourrait pas, pour une fois, cesser de finasser...

Des voix: Ah!

M. Brassard: Oui, oui.

Le Président: M. le député, votre question, s'il vous plaît!

M. Brassard: Est-ce qu'il ne pourrait pas reconnaître que le scénario dévoilé par ses proches est également le sien, c'est-à-dire qu'il est en train, actuellement, de traficoter avec Ottawa un brouillon d'offres, soi-disant de renouvellement du fédéralisme, qu'il va s'empresser d'accepter pour les soumettre ensuite au peuple à l'occasion d'élections, ce qui va lui éviter le fardeau de tenir un référendum sur la souveraineté, ce qu'il ne veut pas faire, de toute façon, manifestement?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, l'Opposition, à défaut de questions, est en train de fouiller dans mon subconscient pour voir s'il n'y aurait pas là des hypothèses qui pourraient contredire leur opinion. Je lui dis que nous sommes dans un système parlementaire. Je lui dis que la position du gouvernement s'exprime, dans notre système politique, par les lois, par les décisions officielles, pas par des propos qui peuvent être tenus en dehors de l'Assemblée nationale et d'une façon non officielle. Il me semble que le député de Lac-Saint-Jean a assez d'expérience pour ne pas accorder une importance définitive et déterminante, avec tout le sérieux des journalistes en cause, que je ne conteste pas, contrairement au chef de l'Opposition qui demande des rectificatifs constamment. Ce n'est pas notre attitude, nous. Nous avons un estomac moins fragile.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourassa: je dis au député de lac-saint-jean de se référer aux documents officiels du gouvernement qui seront discutés dans quelques jours.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Taillon.

Prêts accordés par la SDI sous le volet "aide touristique" et gardés secrets

Mme Marois: Merci, M. le Président. Comme on peut le constater, les pièces du casse-tête s'accumulent, mais le tableau reste encore incomplet. Le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie peut-il nous dire, parmi les 20 prêts accordés par la SDI dans le cadre du plan de relance, sous le volet "aide touristique", combien l'ont été en vertu de l'article 7 de la Loi sur la SDI et combien ont été tenus secrets?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie.

M. Tremblay (Outremont): Alors, sur les 20 prêts: 16 sur la nouvelle programmation des prêts participatifs de la SDI; aucun sur l'article 7; aucun décret n'a été différé pour publication. Sur la relance PME: quatre dossiers, incluant celui de M. Malenfant; aucun sur l'article 7, à l'exception du dossier Malenfant; aucun n'a été différé pour publication. (14 h 30)

Le Président: En complémentaire.

M. Tremblay (Outremont): Je ne sais pas si les gens ont compris la réponse, mais enfin... Est-ce qu'une partie... Est-ce que...

Des voix:...

Le Président: Alors, je vais demander la collaboration de tous les députés, s'il vous plaît. Évidemment, quand vous ajoutez une remarque, madame, à votre question, ça suscite des commentaires. C'est ce qu'il ne faut pas faire, en vertu du règlement. Donc, posez maintenant votre question.

Mme Marois: Est-ce qu'une partie du prêt de 2 900 000 $ de la SDI au Groupe Malenfant a été versée au Groupe Malenfant?

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Je pensais honnêtement, M. le Président, qu'après 120 minutes d'interpellation dans la Chambre, près de 40 minutes à répondre aux questions de tous les intervenants, entre autres celle-là... Je l'ai mentionné, c'est un prêt conditionnel à un montage financier. Le montage financier n'est pas encore complété; aucun montant d'argent n'a été déboursé. Je peux continuer si vous voulez. Levez-vous, posez-moi 22 000 fois les mêmes questions, mais vous allez toujours avoir les mêmes réponses, parce que j'ai appris dans la vie une chose: Quand on dit toujours la vérité, ça nous en fait moins à se rappeler.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: Alors, pour une question complémentaire, Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Alors, M. le Président, je voudrais savoir de la part du ministre si le versement de l'ordre de 2 900 000 $ est toujours conditionnel à l'obtention, de la part du groupe, d'un prêt hypothécaire de l'ordre de 42 000 000 $ de la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): alors, encore une fois, je vais répondre. je vais répondre, parce que ça fait quatre fois que je réponds à cette question.

Une voix: Elle n'a pas compris.

M. Tremblay (Outremont): Lorsque nous avons analysé le dossier Malenfant, au mois de février, il y avait un montage financier. Le Groupe Malenfant était en possession d'une lettre d'intention de la Caisse de dépôt pour un prêt de 42 000 000 $, à certaines conditions.

Lorsque nous avons adopté le décret, nous avons, à titre de référence, uniquement donné suite aux représentations du Groupe Malenfant, dont un prêt de 42 000 000 $. Le prêt de 42 000 000 $, il est conditionnel. J'ai mentionné que ce n'est pas pour créer des pressions sur la Caisse de dépôt et placement. La Caisse de dépôt et placement va prendre une décision d'affaire pour contribuer à sauver 2800 emplois et le réseau touristique du Groupe Malenfant. Si ce n'est pas la Caisse de dépôt et placement, ça pourrait être un autre prêteur hypothécaire. Savez-vous, Mme la députée de Taillon, je pense, des fois... Quand je vois les personnes de l'Opposition, ça me fait penser à certaines personnes qui se promènent avec des lanternes dans le dos pour éclairer le passé.

Des voix: Bravo!

Mme Marois: ...grand-chose à dire, hein!

Des voix: Bravo!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! En question complémentaire, s'il vous plaît. Si vous avez une question de règlement, M. le député de Laviolette, je vous invite à vous lever et à faire votre question de règlement.

M. Jolivet: M. le Président, pour être juste envers le monde, est-ce que vous êtes capable de faire le même commentaire sur le commentaire du ministre, comme vous l'avez fait pour notre

collègue?

Le Président: Alors, si vous avez une question de règlement, effectivement, je peux me lever et faire le même commentaire. Toute question et toute réponse ne doivent pas être faites de façon à susciter un débat et un tel commentaire peut susciter un débat. Alors, d'un côté comme de l'autre, je vous demande de respecter le règlement. Alors, votre question, Mme la députée.

Mme Marois: Est-ce que le ministre a enfin reçu les états financiers consolidés du Groupe Malenfant?

Le Président: M. le ministre.

Mme Marois: Oui ou non, c'est simple.

M. Tremblay (Outremont): Encore une fois, M. le Président, j'ai répondu à trois reprises à cette question. Nous avons, d'après les demandes de la Société de développement industriel du Québec, jusqu'au 30 juin 1991 pour recevoir tous les états financiers du groupe.

Le Président: En question principale ou complémentaire?

Une voix: En principale.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Verchères.

Possibilité d'implantation d'un casino au Manoir Richelieu

Mme Dupuis: Merci, M. le Président. À une question qui a été adressée au ministre du Tourisme en Chambre, à savoir s'il avait l'intention d'implanter des casinos dans Charlevoix, et de façon plus précise, au Manoir de Malenfant, le ministre a répondu, à ce moment-là, qu'il n'en était pas là. Cependant, en fin de semaine, le conseil national du Parti libéral a adopté une résolution...

Une voix: C'est général. Une voix: Puis après? Une voix: Général.

Le Président: S'il vous plaît. S'il vous plaît. Un instant, Mme la députée. Alors, allez-y avec votre question, Mme la députée de Ver-chères.

Mme Dupuis: Cependant, en fin de semaine, le conseil général du Parti libéral a adopté...

Des voix: Bravo!

Mme Dupuis: ...une résolution appuyant l'implantation d'un casino, et pas n'importe où, dans Charlevoix.

Une voix: Pour Raymond Malenfant!

Mme Dupuis: De toute évidence, les membres du Parti libéral ont dit tout haut ce que le gouvernement essaie de traficoter en cachette, sauver M. Malenfant en implantant un casino au Manoir Richelieu, et ce, sans audiences publiques, et ce, sans avoir établi auparavant des critères de sélection. Est-ce que le ministre du Tourisme va encore nier que son intention est d'implanter un casino au Manoir Richelieu, propriété de M. Malenfant?

Le Président: M. le ministre du Tourisme.

M. Vallerand: M. le Président, Mme la députée de Verchères fait des interprétations. Je pense qu'il est bien connu... La discussion, à mon avis, est largement publique au sujet de l'éventuelle possibilité d'établissement de casinos au Québec. J'ai dit et redit, devant cette Chambre, M. le Président, qu'il restait à faire certaines démonstrations d'opportunité sur les considérations de sécurité, sur les considérations socio-économiques plus larges, sur les considérations de rentabilité. J'en suis encore à l'examen de la démonstration de ces opportunités et dois-je retenir - parce que nous sommes une formation, nous, politique très démocratique - et la volonté de la base, la volonté des membres, telle que celle qui fut discutée au dernier conseil général et adoptée à l'unanimité, sera définitivement prise en considération... Mais j'aimerais rappeler à Mme la députée de Verchères, M. le Président, que non seulement cette résolution vise Charlevoix, mais elle s'ouvre également à d'autres régions.

Le Président: En question complémentaire.

Mme Dupuis: Est-ce que le ministre étudie d'autres sites pour Charlevoix? Et est-ce qu'il est conscient qu'en voulant sauver à tout prix M. Malenfant, en voulant l'aider à tout prix, il est en train de développer un préjugé défavorable pour Charlevoix qui, au moment venu, sera peut-être pénalisé à cause de cette manière de faire du ministre? (14 h 40)

Le Président: M. le ministre du Tourisme.

M. Vallerand: M. le Président, c'est déplorable, et je tiens à le dire hautement devant cette Assemblée, c'est déplorable ce genre de question qui vise à insinuer des choses qui ne collent absolument pas à la réalité. S'il y a quelqu'un aujourd'hui qui est à faire une démonstration au désavantage de la région de Charlevoix, c'est bien Mme la députée de Ver-

chères par ce type de question.

Le Président: Alors, pour une question de règlement, M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: d'aucune façon, m. le président, on ne peut accepter un tel jugement parce que, au contraire, si le ministre pouvait comprendre la finale de sa question...

Des voix:...

M. Gendron: Si le ministre prenait l'habitude de répondre à sa question...

Le Président: Votre question!

M. Gendron: Ma question de règlement, il n'a pas le droit de prêter des intentions et c'est ce qu'il est en train de faire.

Une voix: C'est ça. C'est lui qui...

Le Président: Je demande au ministre de conclure. Évidemment, la teneur de la réponse est dans le même sens que la question et je ne peux rien faire là-dessus. Alors, finalisez votre réponse, M. le ministre, s'il vous plaît!

M. Vallerand: M. le Président, il y a une chose, il y a une conclusion à laquelle j'arrive aujourd'hui, c'est que l'Opposition est manifestement contre Charlevoix et son désir d'obtenir un casino.

Des voix: Oui, oui! Bravo!

Le Président: Sur une question de règlement, M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: L'Opposition n'a rien contre Charlevoix. Elle a de quoi contre le "magouillage" que vous êtes train de faire.

Des voix: Ah! Bravo!

Le Président: s'il vous plaît! ce n'était manifestement pas une question de règlement. alors, une question complémentaire, m. le député de westmount.

M. Holden: Merci, M. le Président. Puisqu'on a parlé d'un préjugé défavorable envers Charlevoix, j'espère et je demande au ministre s'il a un préjugé favorable envers la ville de Montréal où c'est vraiment important de placer un casino pour l'industrie touristique.

Une voix: Non.

Le Président: M. le ministre du Tourisme.

M. Vallerand: Je dois dire, et je veux le répéter devant cette Chambre, que le ministre du Tourisme n'a qu'un seul préjugé favorable, celui des intérêts touristiques de tout le Québec.

Des voix: Bravo!

Le Président: En question principale, M. le député de Lévis.

Mesures pour relancer l'économie de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine

M. Garon: M. le Président, en fin de semaine, plus de 5000 - certains ont dit 7000 ou 8000 - personnes de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine se sont réunies à Chandler pour protester contre la situation lamentable de l'économie de leur région où le taux de chômage dépasse 25 % et le taux d'inoccupation dépasse 50 %, certains disent même 60 %. C'est la région qui détient le record du chômage au Canada. Triste record, mais c'est un record.

On sait qu'à deux ans et demi de la fin de l'entente Canada-Québec, seulement 65 800 000 $ des 820 000 000 $ prévus à l'entente ont été déboursés, soit simplement 8 %, et le ministre a affirmé lors de l'étude des crédits que 200 000 000 $ n'ont toujours pas été affectés à quelque programme que ce soit. Est-ce que le ministre pourrait nous dire pourquoi et s'il a l'intention d'utiliser les sommes de l'entente Canada-Québec, surtout ces 200 000 000 $, pour mettre en place des mesures pour relancer l'économie de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine?

Le Président: M. le ministre responsable du Développement régional.

M. Picotte: M. le Président, je pense que, s'il y a une chose que le député de Lévis ne peut pas reprocher à ce gouvernement, c'est de ne pas avoir établi des programmes particuliers spéciaux pour la région de la Gaspésie. Chaque année, depuis quelques années, différents ministères, en collaboration avec le ministre des Finances, font un programme spécial dans le but de venir en aide à la situation du chômage en Gaspésie.

De plus, quand on parle de sommet économique... Oui, on pourrait vous parler d'efficacité parce que je me rappelle de vos sommets économiques à vous autres, où on allait chercher 1 000 000 $ ou 2 000 000 $ pour les régions, alors que la dernière signature en collaboration avec les gens du milieu a été d'au-delà de 100 000 000 $, une légère différence de 90 000 000 $ avec les vôtres. Ça, c'est pas mal différent et pas mal plus efficace.

Des voix: Bravo!

M. Picotte: L'autre point, M. le Président,

et le député de Lévis le sait très bien, c'est que les ententes fédérales-provinciales qui existent sont toujours tributaires de gens dans le milieu qui veulent investir. Ce n'est pas l'OPDQ qui investit, ce ne sont pas les gouvernements qui investissent, mais ce sont surtout les gens du milieu qui décident d'investir et de présenter des projets. Or, à toutes les fois que nous avons signé une entente, la première année, les deux premières années même, dirais-je, ça prend un peu plus de temps à démarrer, mais, bien souvent, avant la fin de l'entente, on réussit à dépenser l'argent et j'ai l'impression que, dans cette région-là comme ailleurs, on réussira à dépenser l'entente fédérale-provinciale.

Le Président: En question complémentaire.

M. Garon: Est-ce que le ministre peut reconnaître que les secteurs où l'argent promis marche le moins vite, ce sont ceux où le gouvernement est le seul promoteur, notamment le ministère des Transports? Et est-ce que le ministre reconnaît la gravité de la situation économique en Gaspésie et aux Îles-de-la-Madeleine et ne croit-il pas que la gravité de la situation appelle des interventions urgentes et ponctuelles de sa part?

Le Président: M. le ministre.

M. Picotte: Je suis un peu surpris, M. le Président, que le député de Lévis invoque la lenteur au niveau surtout des transports quand lui-même, avec sa Loi sur la protection du territoire agricole, la plupart du temps, dans nos municipalités, a beaucoup extensionné les délais, ne serait-ce que pour satisfaire aux exigences de la CPTAQ, ne serait-ce que pour satisfaires aux exigences de l'environnement, et je trouve ça tout à fait normal. Mais faire justement allusion au fait que ça prend plus de temps dans les transports après avoir mis ces mécanismes-là, il faut le faire, M. le Président. Il faut le faire, ne pas s'en souvenir après un certain temps. Il faut le faire pour ne pas s'en souvenir.

La deuxième des choses, M. le Président, je pense que celui qui vous parle a mis en place un comité qui devrait lui faire rapport bientôt pour faire en sorte d'arriver avec une nouvelle formule du développement régional. Partout au Québec, en Gaspésie comme ailleurs, cette nouvelle formule devrait être intéressante pour venir en aide au chômage dans chacune des régions du Québec.

Le Président: Toujours en complémentaire, M. le député de Lévis.

M. Garon: M. le Président, est-ce que le ministre peut reconnaître au moins qu'il n'y a à peu près aucune zone agricole en Gaspésie? C'est l'endroit où il y en a le moins. Alors, faire des routes, ce n'est pas compliqué. Et est-ce que le ministre peut nous dire quelles mesures, comme ministre responsable du Développement régional, ministre de l'Agriculture, ministre des Pêcheries, donc le ministre à peu près le plus impliqué en ce qui concerne le développement économique de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine, il entend prendre - question générale, on ne peut pas plus générale que ça - entend mettre en oeuvre pour améliorer la situation économique en Gaspésie ou est-ce qu'il peut nous dire, s'il ne le sait pas, qu'il ne le sait pas?

Le Président: M. le ministre.

M. Picotte: M. le Président, j'ai l'impression que le député de Lévis a perdu la mémoire. Quand on a fait le zonage agricole au Québec, c'est celui-là même qui me pose la question qui a même zone les cimetières au Québec. Il a même zone les cimetières au Québec. Partout. C'était à la grandeur vert, M. le Président. Et, avec toutes les misères du monde...

Le Président: Un instant. S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre.

M. Picotte: Peut-être espérait-il, M. le Président, que les morts reviennent voter pour lui à l'élection de 1985. Évidemment, M. le Président, comme je l'ai mentionné, je pense que la nouvelle formule qui sera utilisée viendra faire en sorte d'aider les milieux défavorisés comme celui-là et comme d'autres parce que j'espère que le gouvernement adoptera une politique qui fera en sorte d'aider davantage les plus démunis, d'y aller avec une aide beaucoup plus accrue, de dépasser même de 75 % dans le cas où on est vraiment plus démunis dans certaines régions, ce qui viendrait drôlement améliorer la situation de chacune de ces régions-là.

Le Président: Question complémentaire.

M. Garon: Même si les cimetières disposent de droits acquis, est-ce que le ministre peut au moins admettre qu'il n'y a aucun projet de route dans un cimetière en Gaspésie? Et est-ce qu'il peut nous dire quelles mesures, concrètement, il entend prendre dans une région qui a le record du chômage au Canada? Qu'est-ce qu'il entend faire avec l'entente Canada-Québec où seulement 65 000 000 $ ont été déboursés sur 820 000 000 $, une entente qui arrive à deux ans de son échéance? Qu'est-ce qu'il entend faire? Est-ce qu'il peut nous dire quelque chose, n'importe quoi, mais qu'est-ce qu'il entend faire?

Le Président: M. le ministre.

M. Picotte: Je croyais que le député de Lévis avait compris que, s'il avait eu le culot de zoner des cimetières, à plus fortes raisons les

routes étaient doublement zonées. Je pensais qu'il avait compris ça. Bien non, il n'a pas saisi ça. Et quand le député de Lévis m'invite à faire n'importe quoi, c'est justement là que je n'embarque pas avec lui, parce qu'eux autres ont fait n'importe quoi, ils nous ont mis dans le marasme. On ne fera pas n'importe quoi. On veut essayer de faire des choses intelligentes avec la population. (14 h 50)

Des voix: Bravo! Bravo! Bravo!

Le Président: Alors, en question principale maintenant, M. le député de La Prairie.

Embauche de personnes handicapées dans la fonction publique

M. Lazure: Merci, M. le Président. À l'occasion de la Semaine d'intégration de la personne handicapée, qui a débuté ce matin par un rassemblement au restaurant du parlement, il est utile d'examiner la performance du gouvernement actuel en matière d'embauché de la personne handicapée dans la fonction publique.

L'Association de paralysie cérébrale disait tout récemment que les chiffres présentés par le Conseil du trésor sont trompeurs, et que le gouvernement tente d'embellir une réalité troublante, à savoir que les personnes handicapées, au vrai sens de la loi, ne représentent que 0,7 % des effectifs de la fonction publique. En intégrant dans ses calculs les employés ayant des handicaps non limitatifs, comme le Conseil le fait, il biaise les résultats en montant à 2,9 % le pourcentage alors que ceci est à l'encontre de l'esprit de la loi.

La réalité, M. le Président, c'est que la fonction publique a moins de personnes handicapées maintenant qu'en 1987. 508 en 1987, 461 en 1988, 427 en 1989 et 391 en 1990. La question au président du Conseil du trésor est la suivante: Est-ce qu'il reconnaît que son gouvernement n'a pas accordé toute l'importance voulue à l'embauche des personnes handicapées dans la fonction publique et quelles mesures entend-il prendre pour effectuer un rattrapage et atteindre l'objectif de 2 % qui avait été fixé en 1983?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Johnson: À la première question, la réponse est non, M. le Président. À la deuxième, je signale à l'attention du député deux facteurs. Le premier, c'est que, justement, nous indiquons et divulguons de façon très précise si les employés de la fonction publique ainsi dénombrés le sont en spécifiant si leur handicap est ou n'est pas limitatif. Ça permet au député, évidemment, de faire des discours, mais ça permet également de voir effectivement quelles sont les catégories, si on veut, de personnes qui sont visées.

Deuxièmement, je serais plutôt d'avis que les chiffres que nous publions sous-estiment - je l'ai déjà dit - le nombre de personnes handicapées visées par ces catégories pour une bonne raison, et ayant eu l'occasion d'en vérifier la teneur, je peux ici le réaffirmer. Les gens qui sont des employés de la fonction publique s'auto-identifient à titre de handicapés. Nous devons donc nous fier à ce que les gens pensent d'eux-mêmes, perçoivent d'eux-mêmes ou désirent indiquer en ce qui concerne leur condition.

Alors, à mon sens, les chiffres que nous avons peuvent démontrer ou bien que l'auto-ident'rfication a connu un certain progrès ou alors, et ça m'apparaît positif, que les personnes handicapées considèrent pour fins d'intégration qu'elles ne sont pas handicapées, même si, médicalement, le député le reconnaîtra, on pourrait peut-être en conclure différemment.

Le Président: En question complémentaire.

M. Lazure: M. le Président, est-ce qu'il n'est pas exact que les concours réservés, tenus en 1986, pour recruter les personnes handicapées à titre d'agents et agentes de bureau ont été abandonnés et qu'ils n'ont jamais été appliqués à d'autres corps d'emploi? Comment va-t-il pouvoir augmenter le nombre de personnes handicapées qui a diminué malgré tous les tours de passe-passe qu'il essaie de faire? Il a diminué le nombre de personnes handicapées dans la fonction publique. Comment va-t-il augmenter ce nombre-là alors qu'il vient d'imposer un gel de l'embauche dans la fonction publique?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Johnson: M. le Président, je vérifierai quant à l'allégation sur les concours réservés de 1986. Autrement, je réitère que les programmes d'embauché à l'endroit des personnes handicapées, l'atteinte des objectifs par ministère pour l'ensemble de la fonction publique font partie des attentes qui sont signifiées aux sous-ministres de tous les ministères et aux dirigeants de tous les organismes. C'est sur la foi de l'atteinte de ces objectifs que ces gens, ce personnel de niveau supérieur est jugé, et je n'ai, quant à moi, aucunement l'intention d'abandonner quelque effort que nous devions faire afin d'augmenter la place qui revient aux handicapés dans la fonction publique.

Le Président: Une dernière question additionnelle.

M. Lazure: Oui, M. le Président. Est-ce que le président du Conseil du trésor pourrait s'adjoindre l'aide de l'Office des personnes

handicapées, de la COPHAN, la Confédération des organismes provinciaux de personnes handicapées, des regroupements de personnes handicapées en région pour que le président du Conseil du trésor commence à examiner de plus près son propre ministère à lui? Au Conseil du trésor, le pourcentage de personnes handicapées, 0,2 %; le Conseil exécutif, 0,3 %; Énergie et Ressources, 0,2 %; Environnement, 0,2 %. Son propre Conseil du trésor est un des moins performants dans toute la machine gouvernementale, 0,7 %. Est-ce que le président du Conseil du trésor veut bien s'adjoindre des gens du domaine des personnes handicapées pour l'aider à faire son rattrapage?

Le Président: M. le ministre et président du Conseil du trésor.

M. Johnson: M. le Président, nous explorons tous les moyens possibles et si, parmi la gamme des moyens que nous avons à déployer, il s'avérait que nous devions maintenir des relations plus étroites avec les organismes mentionnés par le député, je n'ai aucune espèce de difficulté avec ça. Ce que j'indique, c'est que la volonté est toujours présente, que le risque que le député a à jouer avec les chiffres est double, d'une part. Je le répète, il y a un processus d'auto-identification. Est-ce qu'il va se rentrer ça dans la tête une fois pour toutes au lieu de pointer du doigt? Il y a une auto-identification et j'ai des exemples concrets à l'esprit, pour être responsable du dossier. Des gens cessent de s'identifier comme handicapés à l'occasion. Bon, ça existe, ces choses-là, quoi qu'en dise le député de La Prairie. Ça existe. Je comprends que sur sa planète, ça n'existe pas; sur la nôtre, ça existe. La deuxième chose, c'est que nous avons... Absolument!

Des voix: Ah!

Le Président: S'il vous plaît!

M. Johnson: La deuxième chose, c'est que nous entendons poursuivre nos efforts sachant que les pourcentages peuvent varier grandement, compte tenu du nombre, je l'admets, relativement restreint qui forme le dénominateur de la fraction.

Le Président: Alors, c'est la fin de la période de questions.

Il n'y a pas de votes reportés.

Maintenant, aux motions sans préavis. Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Je solliciterais le consentement... Non, je sollicitais, mais sans succès, le consentement du leader adjoint pour donner les avis touchant les travaux des commissions, mais je vois que ça ne fait pas l'affaire.

Le Président: M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: Non, non, écoutez, il est 15 heures. C'est des motions courtes. Je préférerais, aujourd'hui, qu'on fasse les motions sans préavis avant les avis touchant les travaux des commissions.

Le Président: Alors, très bien. Nous allons donc procéder aux motions sans préavis et je vais reconnaître M. le ministre du Tourisme.

Hommage à M. Gérard Delage et condoléances aux membres de sa famille

M. Vallerand: Merci, M. le Président. Je demanderais le consentement de cette Assemblée pour faire une motion sans préavis, eu égard au décès d'un grand personnage gastronomique touristique du Québec, Me Gérard Delage.

Le Président: Donc, il y a consentement pour débattre cette motion. Je vais donc céder la parole à M. le ministre du Tourisme.

M. André Vallerand

M. Vallerand: Merci, M. le Président. C'est avec beaucoup d'émotions que je tiens, aujourd'hui, à rendre un hommage particulier à M. Gérard Delage.

Pour moi, c'est non seulement l'industrie touristique qui est en deuil aujourd'hui, mais toute la société québécoise. M. Delage a été un instigateur de premier plan dans les domaines touristique et de la gastronomie. La société québécoise perd en lui un grand homme. L'héritage qu'il nous laisse, M. le Président, est inestimable.

Le secteur de l'hospitalité lui doit beaucoup pour avoir réussi à obtenir des règlements plus civilisés lui permettant d'exercer l'art de l'accueil dans les règles "du bien boire et du bien manger", contrairement au régime puritain et janséniste de la prohibition qui prévalait depuis toujours.

À ce niveau, il s'est opéré dans la société canadienne non seulement une évolution, mais une révolution. À titre de conseiller juridique de l'Association des hôteliers du Québec, il fut amené à jouer un rôle important avec les hôteliers du monde en devenant un des directeurs de l'American Hotel Association et représentant officiel des hôteliers du Canada au sein de l'Association internationale de l'hôtellerie pendant 20 ans. (15 heures)

Ses 40 ans d'activité au service de l'hospitalité furent soulignés dans un livre-souvenir publié lors d'une soirée organisée en son honneur au Reine Elizabeth où 1300 de ses amis lui rendaient un hommage mérité.

L'homme du tourisme et de la gastronomie est aussi important. De concert avec son rôle de conseilfer juridique des hôteliers, il a été un leader de la promotion touristique et un apôtre de la gastronomie. Président du Conseil du tourisme de la province de Québec pendant de nombreuses années, cet organisme chargé de conseiller le ministre du Tourisme a beaucoup fait au niveau du service de l'hôtellerie, des promotions régionales et de l'amélioration des services d'hospitalité. Mais il fut avant tout un ambassadeur tant au Québec qu'à l'étranger pour proclamer que le Québec était la terre d'Amérique où l'on mangeait le mieux et où la joie de vivre était proverbiale. Il a diffusé ce thème dans de nombreuses causeries et dans ses écrits, M. le Président. Comme gastronome, il a fondé plusieurs clubs gastronomiques parmi les plus prestigieux et il est reconnu comme un connaisseur avisé en vin.

L'Office national du film a produit un film sur la gastronomie où il fut le principal commentateur avec le chef de La Sapinière, Marcel Kretz. En 1965, il fut proclame Prince des gastronomes par toutes les confréries vineuses et gastronomiques du Québec.

La création de l'Institut de tourisme et de l'hôtellerie du Québec est l'une de ses plus belles réussites. Cet avocat, membre du Barreau, en aura été non seulement le créateur, mais aussi l'âme dirigeante durant plusieurs années. Grâce à ce prince des gastronomes, ce M. Tourisme ou tout simplement le grand Monsieur, l'Institut a donné naissance à une génération complète de grands chefs cuisiniers. Ces derniers, forts des compétences acquises à l'Institut, font maintenant honneur au Québec dans différents concours d'envergure internationale.

Son départ me chagrine beaucoup. Il était un homme à l'esprit vif, un excellent communica-teur. D'ailleurs, il l'a démontré une fois de plus lors du dernier gala des grands prix du tourisme du Québec. À la remise de son prix, il a su faire rire les gens présents dans la salle, tout en laissant un message sur l'importance de l'excellence et de la formation dans le domaine du tourisme.

Ses pairs et le milieu touristique n'auront pas attendu son départ avant de lui rendre hommage, en créant la Fondation Gérard Delage. Cette fondation, née il y a 10 ans, poursuivra les idéaux qui ont marqué sa vie, soit encourager et soutenir l'excellence et le perfectionnement en art culinaire et en gestion hôtelière.

Je me souviendrai, M. le Président, de M. Delage comme d'un grand homme avec une intelligence supérieure qui aura su marquer son époque. Je tiens au nom du gouvernement et en mon nom personnel, à offrir mes plus sincères condoléances à son épouse, à ses trois fils, Pierre, Yves et Michel, ainsi qu'à ses trois filles, Jocelyne, Niquette et Lison.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur cette même motion, Mme la députée de Verchères.

Mme Luce Dupuis

Mme Dupuis: Merci, M. le Président. D'abord, je dois aussi remercier le ministre du Tourisme d'avoir bien voulu accepter de présenter cette motion en Chambre, à l'Assemblée nationale, afin de rendre un dernier hommage à M. Gérard Delage pour son inestimable contribution dans le domaine touristique et gastronomique.

C'est avec, moi aussi bien sûr, une certaine émotion et beaucoup d'affection que je joins ma voix à celle du ministre du Tourisme pour offrir au nom de l'Opposition officielle mes plus sincères condoléances à la famille, à l'épouse et aux enfants de M. Delage.

M. Delage, ce prince de la gastronomie, comme on le surnommait, était en plus un homme profondément humain, respectueux des autres et un homme capable de gestes gratuits. M. Delage était l'incarnation du raffinement et je pense que c'est en tout premier lieu dans le développement de sa personnalité qu'on peut voir et retrouver le raffinement de cet homme, que moi je qualifie de créateur, d'artiste, d'innovateur et d'animateur. Sur sa facette artistique, on dit que l'art est un haut degré de raffinement. Comme je le disais tantôt, je pense qu'il a su le développer dans sa manière d'être, dans sa manière de faire et il a su reconnaître dans la gastronomie qu'elle pouvait devenir un art, tout comme d'autres formes d'art qui, parfois, sont plus reconnues.

C'était aussi un créateur, puisqu'il a innové. Il a créé un nombre que j'oublie... L'Union des artistes - dans ce sens-là, je dis que c'était un artiste - devient une association professionnelle reconnue par la loi, sous Gérard Delage. Il a créé l'Institut du tourisme et de l'hôtellerie du Québec. Il a aussi créé l'association des hôteliers du Québec, officiellement appelée l'association des hôteliers de la province de Québec. Il a fondé des clubs gastronomiques à Montréal. Toute cette action a donné naissance aussi à d'autres performances comme la naissance, au Québec, de grands chefs cuisiniers. De son vivant, il a eu le témoignage des siens, je pense, puisqu'on a créé la Fondation Gérard Delage. Cet être complet savait se faire plaisir et faire plaisir à ceux qui l'entouraient.

En conclusion, je pense que le décès de M. Gérard Delage est une perte pour le monde des arts. Le décès de Gérard Delage est une perte pour le monde du tourisme. Le décès de Gérard Delage est une perte pour le monde des créateurs également. Le décès de Gérard Delage est une perte pour le Québec qui ne peut demeurer insensible à l'apport considérable de ce Québécois aussi dévoué à la promotion de ce qui est le reflet même de l'âme d'un peuple, les arts et la création. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Verchères. En vertu de son droit de réplique, je reconnais maintenant le ministre du Tourisme.

M. André Vallerand (réplique)

M. Vallerand: En terminant, en conclusion, M. le Président, j'aimerais lire devant cette Assemblée et déposer, je pense, la dernière lettre manuscrite de Me Delage qui m'a été acheminée la journée de son décès et qui a été écrite le 21 mai. Avec votre permission, je la lirais. Elle se lit de la façon suivante: "Mon cher ministre, juste deux mots, le premier pour vous féliciter de l'éclatant succès de votre Gala national des grands prix du tourisme et le second, pour vous remercier de toutes vos gentillesses. Puis-je ajouter qu'il est inutile de faire enquête pour savoir que, sous votre égide, l'hôtellerie, la restauration et le tourisme sont aussi bien protégés que dans des régions beaucoup plus riches que la nôtre. De plus, selon plusieurs économistes, vous défendez l'important dossier des casinos avec une diplomatie et une fermeté qui sont tout à votre honneur. Comme disait un pauvre électeur au général de Gaulle qui venait de lui serrer la main: Je suis bien content de vous connaître."

Je dirais, M. le Président, aujourd'hui, à sa famille que je pourrai, avec fierté, humilité, modestie et réserve, me vanter en disant: II me connaissait.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Votre document est déposé. Ce document est déposé. Est-ce que la motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

Motion proposant de souligner la Semaine

Québec-Canada en forme et l'exploit de

M. Yves Laforest, premier Québécois

à gravir l'Everest

M. Blackburn: Merci, M. le Président. J'aimerais que cette Assemblée accepte de débattre la motion suivante: "Que cette Assemblée souligne la tenue de la Semaine Québec-Canada en forme qui a lieu du 24 mai au 2 juin et qu'elle souligne en même temps la performance de M. Yves Laforest, ce premier Québécois à gravir le mont Everest.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre cette motion?

Des voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Gaston Blackburn

M. Blackburn: Merci, M. le Président. C'est avec un vif plaisir que j'ai l'occasion, encore cette année, de souligner la Semaine Québec-Canada en forme qui a pris son envol la semaine dernière et qui se continue jusqu'au 2 juin. Avec comme thème "La joie de vivre", la Semaine Québec-Canada en forme veut inciter les Québécoises et les Québécois à prendre conscience de l'importance de l'activité physique sur leur santé en général. Mais aussi, nous voulons inviter la population à passer de la bonne volonté à l'action.

Il y a une quinzaine d'années maintenant, à peine 5 % des Québécoises et des Québécois disaient pratiquer une activité trois fois par semaine. Selon les statistiques de Kino-Québec, l'organisme chargé de la promotion de l'exercice au Québec, il appert que près de 18 % de la population s'engagent maintenant, de façon saine et régulière, dans une activité physique. (15 h 10)

L'an dernier, l'objectif de 1 000 000 de participants avait été dépassé, atteignant 1 200 000 personnes. Cette année, je suis persuadé que plus de 1 500 000 Québécoises et Québécois enfourcheront leur bicyclette, mettront leurs espadrilles et participeront aux centaines d'activités offertes sur tout le territoire.

Cette année, Kino-Québec a priorisé quatre activités qui sont: La Journée de l'espadrille, qui a eu lieu le 24 mai dernier, où la population était invitée à faire la connaissance de ses voisins dans une atmosphère de fête. "Vélos-y", avec Canadian Tire, qui vise, dans un premier temps, à encourager les travailleurs à se rendre à leur lieu de travail à bicyclette; dans un deuxième temps, les élèves des écoles primaires et secondaires sont invités à participer à des activités en vélo; enfin, le troisième volet touche l'ensemble de la population et met l'accent sur la sécurité et les randonnées à bicyclette en famille. "Marche spatiale 2000", qui s'adresse aux personnes de 50 ans et plus.

Finalement, "Chaque jour... pour la vie", un défi lancé à toutes les écoles afin que ces dernières intègrent des programmes d'activités physiques à l'intérieur de leurs classes pendant une semaine, un an et pour la vie.

Nul n'est besoin de préciser que d'autres activités ont lieu durant cette semaine.

J'ai eu le plaisir, jeudi dernier, de procéder au lancement officiel de la Semaine Québec-Canada en forme, à Montréal. À cette occasion, 150 fonctionnaires provinciaux et fédéraux se sont affrontés, dans un esprit de camaraderie, évidemment, à l'occasion du défi souque à la

corde. Malheureusement, les porte-couleurs québécois ont essuyé un deuxième revers en autant de tentative. Ce n'est que partie remise. Toutefois, vous conviendrez avec moi que la participation est encore plus importante, bien sûr, que les résultats.

M. le Président, lorsqu'on connaît tous les effets bénéfiques de la pratique d'activités sportives, d'activités physiques, on ne peut que soutenir une telle démarche.

Il nous faut donc continuer d'investir en milieu de travail et auprès des personnes âgées afin que la sédentarité ne cesse de diminuer.

Je tiens à souligner la collaboration de Kino-Québec, du ministère de la Santé et des Services sociaux et des 32 départements de santé communautaire qui proposent des centaines d'activités physiques à la population.

Qu'il me soit permis de mentionner le travail exceptionnel du DSC Saint-Jean-sur-le-Richelieu qui, via Kino-Québec, propose près de 300 activités à sa population.

Enfin, je profite de cette occasion pour souligner, de façon toute spéciale, la performance de M. Yves Laforest, ce premier Québécois à gravir le mont Everest. Nul doute que mon collègue du beau comté d'Iberville va épiloguer sur ses performances.

Je suis persuadé que l'exploit accompli par M. Laforest deviendra un exemple à suivre, un exemple de courage qui mérite toute notre appréciation et notre fierté. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Sur cette même motion, Mme la députée de Johnson.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci, M. le Président. Je commencerai par une citation de Martial qui dit: "Vivre, ce n'est pas être vivant, c'est se bien porter".

Il faut, bien sûr, féliciter M. Laforest pour cet exploit extraordinaire qu'est le fait de gravir le mont Everest parce que le mont Everest est quelque chose que, souvent, on emploie comme figure: on dit: On ne pourra jamais atteindre le mont Everest, parce qu'on trouve que la difficulté qu'on rencontre est tellement grande que ça serait difficile, mais lui, il l'a atteint; il a atteint vraiment le sommet du mont Everest. Donc, il faut le féliciter.

Bien sûr, vous comprendrez, M. le Président, que je porterai surtout mon intervention, aujourd'hui, pour la santé et le bien-être des personnes du troisième âge, nos aînés. Vous savez, on dit souvent...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Les députés, à ma droite, si vous vouiez discuter, vous avez un salon approprié pour le faire. Mme la députée de Johnson, si vous voulez poursuivre.

Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Les personnes du troisième âge disent souvent: On n'a pas l'âge de nos os, on a l'âge de notre coeur. On dit aussi: II faut avoir l'âge de sa tête et il faut avoir l'âge de sa volonté.

L'activité physique chez les aînés, c'est l'anti-âge, c'est l'anti-stress, c'est l'anti-ennui et c'est l'antidote aussi, parce que vous savez très bien que lorsqu'on fait un peu d'exercice physique, qu'on sort prendre une marche, qu'on fait du jardinage, qu'on pratique un certain sport, ça fait, à la fois, deux choses. Premièrement, ça nettoie notre organisme et, deuxièmement, nous revenons à la maison beaucoup plus joyeux, beaucoup plus heureux d'avoir participé a une activité physique et nous revenons plus de bonne humeur. Donc, il faut, je pense, analyser l'ensemble de ce que peut faire une petite activité physique et le bien-être que ça peut apporter à nos gens du troisième âge.

Vous savez, depuis un certain temps, nous allions surtout sur le curatif. Et quand on parle de curatif, on dit: On soigne des gens qui ne sont pas en santé. On les hospitalise. On les prive d'une alimentation régulière. On leur fait subir toutes sortes de traitements. C'est ça le curatif. On sait qu'on en a besoin, bien sûr. Mais si on allait surtout sur le préventif, sur l'activité physique, sur le fait de rechercher une condition physique saine, un esprit sain dans un corps sain, une condition essentielle pour être personnellement bien et heureux.

Comment atteindre cet état de santé idéal? M. le Président, je pense que la preuve de l'activité physique a été faite. Elle ralentit le processus de détérioration et comporte nombre de bienfaits dans une réduction de risques de maladies coronariennes, la prévention ou le ralentissement de la perte des capacités quotidiennes, une meilleure mobilité, une plus grande autonomie ainsi qu'un bien-être physique accru. Mais attention, il ne faut pas nécessairement attendre la mise en place de structures établies dans votre quartier pour agir. Faites aller votre imagination. Explorez les rues de votre quartier en compagnie d'une bonne amie. Inscrivez-vous à des cours différents les uns des autres, mais ceux qui vous font plaisir. Redécouvrez la flexibilité de vos muscles par des exercices simples et efficaces. Ainsi, vous atteindrez ce bonheur et ces joies que vous pouvez atteindre sans que ça ne vous coûte rien, juste un petit effort physique. Donc, chaussez très vite vos espadrilles et bonne marche pour cette semaine de l'activité physique. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Johnson. Alors, sur cette même motion, je reconnais M. le député d'Iberville. M. le député.

M. Yvon Lafrance

M. Lafrance: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de participer également à cette motion soulignant l'importance de l'activité physique.

M. le Président, voilà quelques jours, soit le 15 mai dernier, un résident de la municipalité d'Iberville, du comté du même nom que j'ai l'honneur de représenter ici, à l'Assemblée nationale, M. Yves Laforest, devenait le premier Québécois à fouler le sommet de l'Everest. C'est là, M. le Président, un exploit exceptionnel qui mérite, je pense, d'être souligné en cette Chambre, surtout en cette Semaine Québec-Canada en forme.

M. le Président, le mont Everest, comme on le sait, c'est la plus haute montagne du monde, culminant à 8848 mètres la chaîne de l'Himalaya. C'est donc, pour tout alpiniste sérieux et déterminé, le défi le plus difficile. Il faut en effet être sérieux et déterminé pour tout d'abord amasser les sommes importantes d'argent et fournir ensuite les efforts organisationnels nécessaires. Il en a pris cinq années à Yves Laforêt pour concrétiser son rêve.

En effet, plusieurs milliers de dollars furent nécessaires sur le plan organisationnel, ainsi que des centaines d'heures d'entraînement très coûteux. À cet égard, d'ailleurs, plusieurs efforts de financement sont toujours en marche. M. le Président, l'ascension de l'Everest est un des plus grands défis qui se posent à l'alpiniste, tous en conviendront. Réaliser cet objectif n'est pas une mince affaire: II demande plusieurs années de préparation pour constituer tout d'abord l'équipe, obtenir ensuite les permis officiels d'ascension du gouvernement népalais, planifier l'organisation matérielle et la stratégie d'ascension et surtout parfaire l'entraînement physique des alpinistes. Puis il faut se rendre de l'autre côté du globe, avec plusieurs centaines de kilos de marchandises: tentes, vêtements, matériel d'escalade, nourriture, etc. (15 h 20)

Ensuite, il faut compléter les achats de vivres sur place, en arrivant au Népal, et transporter le tout à dos d'homme jusqu'au camp de base, à plus d'une semaine de marche. Monter le camp de base à 5300 mètres d'altitude et tracer le meilleur chemin sur le glacier pour franchir les crevasses nécessitent ensuite plus de deux semaines. Après un mois, la phase proprement dite de l'ascension débute par l'installation de trois ou quatre camps supérieurs. Ces camps, comme des paliers de décompression, permettent l'acclimatation à l'air rarifié des hautes altitudes. En quelques semaines de montées et de descentes successives, le dernier camp supérieur est installé à environ 8100 mètres.

M. le Président, les deux plus grands ennemis qui affectent de façon constante et imperturbable tout alpiniste voulant vaincre l'Everest sont le vent et le froid. En effet, en plus, s'il va de soi de chercher et de faire son trajet à travers le roc et la glace, l'alpiniste doit endurer et souffrir des basses températures oscillant entre 0° C et -40° C et tenter de s'abriter et de se protéger de vents pouvant atteindre plus de 150 kilomètres à l'heure. "Je ne pensais pas que ce serait aussi difficile. À mi-chemin de l'expédition, je n'aurais pas gagé fort sur une réussite", a même avoué Yves Laforest.

M. le Président, depuis 1982, quelques Canadiens seulement ont atteint le sommet de l'Everest. Il faut reconnaître que les grimpeurs de l'Ouest canadien sont favorisés, car les montagnes Rocheuses peuvent fournir l'expertise nécessaire à l'ascension des plus hautes montagnes du monde. Par contre, l'expérience acquise par des Québécois en escalade de parois de rocher ou de glace facilite l'apprentissage de la très haute montagne. De plus, la réalisation d'expéditions hors Québec, entre autres dans la cordillère des Andes, est venue parfaire l'expérience d'Yves Laforest. L'expédition dont il faisait partie était la première québéco-américai-ne.

Il faut souligner, M. le Président, que dans le passé des dizaines d'expéditions se sont lancées à l'assaut de l'Everest et ont abandonné face à ce défi de la nature. Pourquoi celle-ci, dont faisait partie Yves Laforest, a-t-elle atteint l'objectif, même si elle fut forcée de surseoir à l'ultime ascension à quelques reprises à cause de la mauvaise température? Bien sûr, l'organisation est fondamentalement importante tout comme l'expérience et l'entraînement des membres de cordée. Mais, comme dans tout ce qu'on entreprend dans la vie, la différence réside bien souvent dans la détermination personnelle et le désir d'exceller. L'exploit qu'a accompli Yves Laforest, M. le Président, est remarquable sur le plan sportif et on peut facilement le comparer aux disciplines les plus difficiles et exigeantes des Jeux olympiques par lesquelles des athlètes se méritent des médailles d'or.

M. le Président, dans un désir de recherche et d'excellence, Yves Laforest a risqué beaucoup et je pense que son courage et sa détermination, qualités indissociables du succès qu'il a connu, se reflètent sur nous tous et nous toutes, Québécois et Québécoises. C'est pourquoi, M. le Président, nous devons reconnaître l'exploit publiquement et féliciter M. Yves Laforest, d'Iberville, d'avoir été le premier Québécois à fouler le sommet du mont Everest. Par son exploit, il contribue à mousser notre fierté nationale et à donner confiance à nos athlètes dans leurs qualités et capacités personnelles.

En cette Semaine Québec-Canada en forme, M. le Président, c'est là un bel exemple d'organisation, de discipline, de courage et de détermination, qualités fondamentales de l'excellence que tous les Québécois et Québécoises se doivent de rechercher.

M. le Président, en terminant, félicitations encore une fois à Yves Laforest, d'Iberville, premier Québécois à fouler le sommet de l'Everest, et à ses compagnons de cordée! Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Iberville.

Est-ce que la motion proposée par le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et qui se lit comme suit: "Que cette Assemblée souligne la tenue de la Semaine Québec-Canada en forme qui a lieu du 24 mai au 2 juin, et qu'elle souligne la performance de M. Yves Laforest, premier Québécois à gravir le mont Everest", est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis? Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve et présidente de la commission de l'éducation.

Motion proposant que l'Assemblée souligne le 30e anniversaire d'Amnistie internationale

Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, qu'il me soit permis de déposer la motion suivante: "Que cette Assemblée souligne le 30e anniversaire aujourd'hui de la création d'Amnistie internationale qui compte maintenant plus de 1 000 000 de membres bénévoles dans 150 pays."

Le Vice-Président (M. Bissonnet): est-ce qu'il y a consentement pour débattre cette motion proposée par mme la députée de hochelaga-maisonneuve?

Des voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Louise Harel

Mme Harel: m. le président, c'est aujourd'hui même, il y a 30 ans, qu'amnistie internationale était créée. après avoir lu un article d'un journal de londres faisant état de l'emprisonnement de deux étudiants portugais qui avaient porté un toast à la liberté en espagne, un juriste britannique du nom de peter berenson publiait un appel dans les journaux en faveur des étudiants portugais. en quelques jours, des milliers de lettres de support et de contribution répondaient à cet appel, et les bases d'amnistie internationale étaient lancées.

Il y a 30 ans maintenant, M. le Président, et cette année, Amnistie internationale comptait 1 100 000 membres à travers tout l'univers. Elle était implantée dans 150 pays, procédait à l'envoi de 922 délégations dans des dizaines de pays et prenait en charge le cas, durant ces 30 années, de 42 000 prisonniers pour lesquels elle demandait soit un procès équitable, des traitements décents, la liberté ou simplement des nouvelles.

Aujourd'hui même, dans une déclaration à l'occasion de ce 30e anniversaire, Amnistie internationale nous rappelle que deux personnes sur trois dans le monde sont sous la coupe d'un gouvernement qui torture et qui tue ses citoyens et que des opposants politiques sont mis en prison dans plus de la moitié des pays de la planète. Et Amnistie internationale, à cet effet, nous rappelle également que les gouvernements incriminés, le plus souvent, nient l'existence des violations ou essaient de les justifier en déclarant que les victimes ont eu ce qu'elles méritaient, que les problèmes socio-économiques qui pèsent sur leur pays sont prioritaires par rapport aux droits de la personne ou, encore, que la façon dont ils traitent leurs citoyens est une affaire purement interne.

M. le Président, cet appel que je fais cet après-midi en faveur d'Amnistie en soulignant son 30e anniversaire, c'est aussi une occasion d'inviter les parlementaires membres de cette Assemblée à devenir membres d'Amnistie internationale. Je le suis personnellement, M. le Président, depuis de très nombreuses années. J'ai l'occasion, comme certains de mes collègues, de participer à des campagnes d'appui à l'égard de prisonniers d'opinion sur presque tous les continents puisqu'à maintes occasions, Amnistie l'a rappelé, il s'agit de lutter contre les violations des droits de la personne et violations des droits à l'égard de personnes qui ne sont coupables que de délits d'opinion. C'est pour avoir brandi un drapeau, avoir chanté un hymne national, avoir fait connaître des opinions en faveur de la démocratie ou de la paix que ces personnes connaissent un sort douloureux; parfois, ce sort, évidemment, est aussi douloureux pour leurs proches et leurs familles. (15 h 30)

M. le Président, je pense que cet anniversaire est une occasion de sensibiliser la population, mais également l'Assemblée nationale à ces réalités qu'on préfère souvent garder sous silence et à l'urgence d'intervenir pour sauver des milliers de vies humaines. C'est évidemment le bon moment de nous rappeler notre responsabilité sur cette planète, qui se rapetisse. M. le Président, il vaut la peine de rappeler que, lorsque la liberté est bâillonnée, c'est tout l'univers qui respire moins bien, M. le Président, y compris nous, de ce côté de l'océan, qui jouissons assez largement de ces droits et libertés.

Je veux rendre hommage à Amnistie internationale, la section francophone, qui compte actuellement 33 000 membres. C'est assez exemplaire de se rendre compte qu'avec le quart de la population canadienne, la section francophone compte la moitié des membres des deux sections confondues. Cela indique certainement une très grande sensibilité dans l'opinion publique québé-

coise et canadienne-française, à l'égard de cette question de la protection des droits et libertés. 33 000 membres actifs d'Amnistie internationale, section francophone, participent à leurs différents comités. Et, M. le Président, je veux rendre hommage au travail qui se fait particulièrement dans le milieu scolaire. Depuis deux ans et demi, les sections locales dans les milieux scolaires ont connu une progression absolument vertigineuse; de 15 groupes qui existaient dans les écoles, il y a deux ans et demi, on en compte maintenant 160. C'est évidemment en grande partie grâce à l'implication et à l'expertise des agents d'éducation, mais aussi, disons-le, à (a collaboration d'organismes comme la Centrale de l'enseignement du Québec, qui, de concert avec Amnistie internationale, a rédigé un cahier pédagogique d'éducation aux droits et à la paix adapté a la réalité québécoise.

M. le Président, faut-il le rappeler, ce qui fonde et qui garantit l'impartialité d'Amnistie internationale est certainement son mode de subvention puisque l'indépendance de l'organisation est totalement acquise du fait qu'elle n'accepte aucune subvention des gouvernements. Mais ça nous donne autant de responsabilités de financer des sections locales, M. le Président, qui sont les seules, par leurs cotisations, à financer l'intervention d'Amnistie sur le plan international.

J'invite donc - je le souligne à nouveau - particulièrement toutes les personnes éprises de justice et de liberté dans notre société à devenir membre en contribuant à Amnistie internationale.

Je voudrais, à cette occasion, M. le Président, déplorer le dépôt qui a été fait à la Chambre des communes à Ottawa, la semaine dernière, d'un projet de loi visant à favoriser l'exportation d'armes dans le monde, y compris au Moyen-Orient. M. le Président, j'ai été scandalisée, je vous le dis bien simplement, lorsque, la fin de semaine dernière, je prenais connaissance, dans les journaux de Montréal, de ce projet de loi qui est actuellement discuté à Ottawa, et je me rappelais des déclarations pourtant récentes du premier ministre du Canada, en pleine guerre du golfe, qui dénonçait l'accumulation d'armes et qui annonçait l'intention du Canada de convoquer une conférence internationale sur ce sujet de la prolifération des armes.

Et je me rappelle les dures critiques qu'il avait formulées à l'égard des cinq pays membres du Conseil de sécurité de l'ONU, les rendant responsables de la grave menace à la paix que constituait la prolifération d'armes dans des régions de la planète, M. le Président, où l'on sait pourtant que les conflits sont permanents. Eh bien! je dois constater que ces déclarations vertueuses sont maintenant chose du passé, puisqu'un projet de loi a été introduit, il y a à peine une semaine maintenant, permettant à des entreprises ontariennes de réaliser des ventes de près de 1 000 000 000 $ d'armes notamment dans des régions, par exemple au Moyen-Orient, où l'on sait pourtant qu'il faudrait beaucoup plus travailler, M. le Président, à résoudre les conflits, qu'à les envenimer.

Et, je voudrais, M. le Président, souhaiter ce nouvel ordre économique qu'on nous avait pourtant promis, qu'on ne voit point poindre, n'est-ce pas, appeler à ce nouvel ordre politique économique fondé sur le respect des droits de la personne, M. le Président, et sur le respect de la justice entre les peuples. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Sur cette même motion, M. le ministre de la Justice.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir, au nom du gouvernement, de m'as-socier à Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve pour souligner le trentième anniversaire de la création d'Amnistie internationale. C'est le 28 mai 1961, grâce à l'acharnement d'un journaliste britannique, Peter Berenson, qu'un grand quotidien de Londres, The Observer faisait paraître PAppel pour l'amnistie 1961". Des milliers de personnes répondirent alors à cet appel, tant et si bien que, vers la fin de l'année, des groupes s'étaient formés dans une douzaine de pays. Amnistie internationale était née.

Il faut se rappeler, M. le Président, que cet important organisme de défense des droits de la personne, et plus particulièrement de défense des prisonniers et prisonnières d'opinion, fut créé dans un contexte politique extrêmement difficile. En effet, 1961 fut l'année de la construction du mur de Berlin, de triste mémoire. Le monde se trouvait alors dans la période la plus sombre de la guerre froide. La guerre d'Algérie faisait toujours rage. Alors que la décolonisation s'amorçait à peine en Afrique, la création d'Amnistie internationale, à ce moment, ne manquait certes pas de courage.

Le succès de cet organisme, M. le Président, qui compte maintenant plus de 1 000 000 de membres bénévoles à travers le monde et 30 000 pour la section francophone canadienne, dont le secrétariat est situé à Montréal, ce succès, dis-je, est éloquent. De plus, par leurs campagnes menées contre la torture, l'emprisonnement arbitraire et les disparitions d'opposants politiques, les membres d'Amnistie internationale ont non seulement pu communiquer avec ces personnes dont les droits fondamentaux sont violés, mais leur action soutenue a pu, dans certains cas, conduire à la libération de prisonniers politiques. Pensons, par exemple, à M. Nelson Mandela, un prisonnier d'opinion qui avait été adopté par des groupes membres d'Amnistie internationale et qui fut libéré. Pensons au poète cubain, Armando Velladares qui fut aussi libéré

après avoir passé près de 30 ans dans les prisons castristes.

Amnistie internationale jouit d'une réputation sans nulle autre pareille parmi les organismes qui, dans le monde, oeuvrent quotidiennement pour le respect des droits et libertés de la personne. Le prix Nobel de la paix qui lui fut remis en 1977 représente une reconnaissance tangible de son travail et de son importance.

Présente dans 151 pays, Amnistie internationale possède un statut d'observateur à l'ONU, à l'UNESCO et est présente au sein de divers organismes internationaux. Elle est donc, par sa nature même, par sa vocation, en contact permanent avec nombre d'institutions internationales.

Le rapport annuel qu'elle produit sur les violations diverses aux droits et libertés fondamentales dans encore trop de pays, représente une source de références précieuse pour des campagnes éventuelles, en même temps qu'il démontre tout le travail qu'il reste à accomplir.

Amnistie internationale apparaît en quelque sorte, M. le Président, comme la conscience de l'opinion publique internationale. En 1934, au début de l'hitlérisme, et au pire moment du stalinisme, le grand écrivain français André Gide disait, et je le cite: "C'est grâce à ce droit de regard sur la juridiction du voisin que l'idée d'une justice internationale commence à dominer celle d'une justice d'intérêt local".

Or, M. le Président, ce droit de regard, ce regard, c'est celui de l'opinion publique internationale. Car on ne peut rester insensible devant le sort des Kurdes ou devant le massacre de près de la moitié de la population cambodgienne sous Pol Pot. Et Amnistie internationale force les gens non seulement à réagir, mais à agir par des lettres personnelles envoyées aux prisonniers d'opinion, par ses campagnes de sensibilisation et par ses publications.

En cela, le travail accompli par Amnistie internationale comporte un message puissant, en même temps qu'il s'avère un avertissement à l'humanité. Nul ne peut rester insensible quand l'un de ses confrères ou consoeurs humains est injustement emprisonné, torturé, exécuté. Ce qu'Amnistie internationale nous dit, M. le Président, c'est qu'au-delà de nos différences raciales, linguistiques ou religieuses, nous sommes semblables en ce que nous aspirons tous à la liberté ainsi qu'au respect de nos droits et de notre intégrité physique et morale. (15 h 40) saint-exupéry, dans une oeuvre bouleversante d'humanité, "lettre à un otage", a écrit et je le cite: "si je diffère de toi, loin de te léser, je t'augmente". on pourrait ajouter à cela, m. le président, que toute violation des droits d'un seul être humain nous diminue en tant que membre de cette communauté humaine. par son action, amnistie internationale nous interpelle quotidiennement, et comme elle, nous souhaitons que l'action conjuguée et constante de la communauté internationale, de la pression de ce droit de regard, tel que l'appelait Gide, sera un jour si forte que plus aucun gouvernement, plus aucune autorité, ne violera plus jamais les droits et libertés des personnes. Cet espoir, c'est cet espoir qu'incarne Amnistie internationale et que nous partagerons toujours. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de la Justice. Est-ce que cette motion, proposée par Mme la députée de Hoche-laga-Maisonneuve, qui se lit comme suit: "Que cette Assemblée souligne le 30e anniversaire aujourd'hui de la création d'Amnistie internationale, qui compte maintenant plus de 1 000 000 de membres bénévoles dans 150 pays" est adoptée?

M. Bélisle: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Avis touchant les travaux des commissions, M. le leader adjoint du gouvernement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Bélisle: M. le Président, j'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes, jusqu'à 18 h 30, de 20 heures à 22 heures, ainsi que demain, mercredi le 29 mai 1991, de 9 h 30 à 12 h 30, en la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission des affaires sociales poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 120, Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives.

Après les affaires courantes, jusqu'à 18 h 30, et de 20 heures à 22 heures, en la salle du Conseil législatif, la commission du budget et de l'administration poursuivra l'étude détaillée des projets de loi suivants et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: projet de loi 134, Loi modifiant la Loi concernant la taxe sur les carburants; projet de loi 135, Loi modifiant la Loi concernant l'impôt sur le tabac.

Enfin, M. le Président, j'avise également cette Assemblée que demain, mercredi le 29 mai 1991, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif, la commission du budget et de l'administration poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 126, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les régimes de retraite des secteurs public et parapublic.

De 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, la commission des institutions procédera à l'étude détaillée du projet de loi 95, Loi abrogeant la Loi sur les timbres et modifiant diverses dispositions législatives.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci. Vos avis sont déposés. Je vous avise que

cet après-midi, de 15 h 30, de maintenant jusqu'à 18 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, la commission des institutions poursuivra sa séance visant, d'une part, à entendre de nouveau le Protecteur du citoyen, dans le cadre de l'examen du mandat, des orientations, des activités et de la gestion du Protecteur du citoyen et, d'autre part, à procéder à la vérification des engagements financiers relevant de sa compétence, pour la période de septembre 1989 à mars 1991.

Renseignements sur les travaux de cette Assemblée.

M. Gendron: II n'y en a pas, M. le Président.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors je vous avise que demain matin, lors des affaires inscrites par le député de l'Opposition, l'Assemblée débattra la motion inscrite par M. le whip de l'Opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean.

Cette motion se lit comme suit: "Que l'Assemblée nationale condamne la volonté inacceptable du gouvernement fédéral exprimée par le discours du trône, à l'effet de s'immiscer davantage dans les secteurs de l'éducation et de la formation de la main-d'oeuvre relevant de la compétence exclusive du Québec, notamment par la désignation d'un ministre responsable de la fixation d'objections pan-nationaux dans ces domaines et qu'elle demande au gouvernement du Québec de mettre en oeuvre tous les moyens nécessaires pour faire échec à cette ingérence."

Ceci termine les affaires courantes. Nous procédons maintenant aux affaires du jour. M. Le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Je vous demanderais d'appeler l'article 14 de notre feuilleton, M. le Président.

Projet de loi 145 Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors l'article 14, l'Assemblée reprend le débat sur l'adoption du principe du projet de loi 145, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les finances municipales. Et je suis prêt à reconnaître le premier intervenant. M. le ministre des Transports.

M. Sam L. Elkas

M. Elkas: Merci beaucoup, M. le Président. Il me fait plaisir aujourd'hui d'intervenir sur ce projet de loi afin de mettre les choses au clair et faire le point sur les fausses impressions que l'Opposition continue à tenir.

Un volet de cette réforme me concerne beaucoup, c'est le transport en commun. Et j'aimerais tout d'abord faire le point sur le principe et les motifs qui entourent cette réforme. Elle vise à établir un partage plus équitable des responsabilités entre le Québec et les municipalités. Avec cette réforme, le gouvernement pose un geste audacieux, logique et responsable. Il tient compte des intérêts du public en proposant des gestes qui visent une saine gestion des dépenses publiques. Il répond également à des revendications des gouvernements locaux qui demandaient depuis longtemps des pouvoirs décisionnels accrus. Je sais fort bien que c'est le cas puisque j'ai oeuvré longtemps dans ce milieu. Il répond aussi à des demandes qui avaient été faites par des municipalités, dans le temps, et où on avait "appointé" le président, d'ailleurs le chef de l'Opposition, M. Parizeau, à faire un rapport sur le sujet. L'Union des municipalités du Québec a approuvé à l'unanimité ce projet et l'a mis sur la tablette. Aujourd'hui, on se retrouve avec ce projet, les municipalités semblent être contre.

M. le Président, dans la pensée d'un gouvernement responsable, les pouvoirs décisionnels vont de pair avec les responsabilités financières. Les modifications à la proposition originale présentée par mon collègue, le ministre des Affaires municipales, permettront une réduction de 50 000 000 $ des charges financières transférées aux municipalités pour le transport en commun. Un droit additionnel de 30 $ perçu sur l'immatriculation des véhicules des citoyens résidant dans les territoires des neuf organismes publics de transport sera distribué à ces mêmes organismes. Je pense que cette perception de fonds auprès des automobilistes est tout à fait légitime. Ce sont eux qui profitent indirectement du transport en commun puisque l'achalandage sur les routes est réduit. De plus, les automobilistes continuent à augmenter la pollution atmosphérique et ils doivent donc assumer leur responsabilité sociale ainsi que les coûts qui s'y rattachent.

Depuis quelques mois, l'Opposition se sert de la proposition de la réforme des partages financiers entre le Québec et les municipalités pour répandre des faussetés quant au rôle du gouvernement dans le financement du transport en commun. Le présent projet de loi ne propose une réduction de subvention que dans un volet, celui de l'exploitation. Nous maintenons que le gouvernement du Québec n'a pas à assumer des responsabilités financières pour des décisions auxquelles il ne participe pas.

M. le Président, je ne pense pas qu'il relève du gouvernement du Québec et des contribuables d'éponger éternellement les déficits accumulés par les sociétés de transport. Si elles choisissent de vivre au-dessus de leurs moyens, elles devraient en assumer les responsabilités. Dans le cas où il y aura encore des doutes, j'annonce

aujourd'hui que l'éponge est remplie. Le temps exige maintenant que les sociétés de transport prennent les décisions qui s'imposent et qui leur permettront d'offrir un bon service efficace à leur clientèle, que ce soit sur le plan de l'amélioration de la productivité ou une révision en profondeur de chaque dépense.

Ce n'est certainement pas en faisant des projections d'achalandage basées sur l'optimisme, tel que qualifié par le président de la STCUM la semaine passée, ce n'est pas ça qui va permettre une saine gestion des dépenses publiques. Il ne faudrait pas que la STCUM blâme sa baisse d'achalandage sur la réforme proposée par le gouvernement du Québec. De façon systématique, la STCUM surestime toujours son achalandage, alors que ce dernier est à la baisse depuis quelques années. (15 h 50)

Quant à la déclaration de M. Perreault, la semaine dernière, en ce qui a trait au déficit résiduel des trains de banlieue, j'aimerais apporter les précisions suivantes. Le gouvernement, par le passé, a démontré sa ferme volonté d'encourager l'émergence des trains de banlieue au sein du système de transport en commun. En effet, le MTQ, le ministère des Transports du Québec, s'était engagé à assumer le déficit résiduel des trains de banlieue et ce, jusqu'à leur modernisation. Lorsque nous nous sommes engagés à assumer les frais, les règles du jeu étaient connues, étaient claires et elles n'ont pas changé. C'est donc à la STCUM de prévoir, dans son budget, les sommes nécessaires pour défrayer les coûts du déficit résiduel de la ligne de Rigaud. d'autre part, les décisions concernant les tarifs régionaux relèvent de la stcum et ont une implication directe sur le déficit. nous n'avons pas à en assumer les conséquences. de plus, la stcum songe à une régie intermunicipale de transport qui gérerait tous les trains de banlieue de la région métropolitaine. cependant, un comité du ministère des transports du québec travaille, actuellement, à l'élaboration de divers cadres de gestion pour les trains de banlieue. son rapport sera soumis bientôt et j'opterai alors pour le meilleur cadre dans l'intérêt de tous les usagers du transport en commun dans la grande région de montréal.

De plus, je ne sais pas de quelle façon M. Perreault arrive aux chiffres allégués la semaine dernière, de 277 000 000 $, comme manque à gagner, suite aux coupures dans le transport en commun. Selon nos calculs, l'impact de la réforme proposée ne sera que d'environ 100 000 000 $ pour la STCUM.

Même si le gouvernement propose de se retirer d'un champ d'activité, d'un champ d'activité de financement du transport en commun, il continue à maintenir son aide aux immobilisations par l'entremise de l'injection de capitaux importants et significatifs. Le gouvernement prévoit investir des sommes importantes durant les cinq prochaines années dans la région métropolitaine de Montréal en guise d'appui aux dépenses d'investissements dans le transport en commun. J'aimerais en mentionner une couple: pour la modernisation des trains de banlieue, 227 000 000 $; pour la construction de l'estacade et du terminus du centre-ville, 108 000 000 $; pour la rénovation des voitures de métro MR-63, 63 000 000 $; pour le renouvellement du parc d'autobus - 200 par année, en passant - 58 000 000 $, et le CMTC, le Conseil métropolitain de transport en commun, recevra 144 000 000 $ d'ici 1994.

De plus, le gouvernement du Québec continue à payer 100 % des coûts du métro, 75 % des coûts de construction de garages, terminus, abribus. Le ministère des Transports défraie aussi 100 % des coûts du terminus du centre-ville et on ajoute à ça 60 % des dépenses reliées à l'achat des autobus.

Comme l'Opposition le sait, puisqu'elle a pris connaissance d'un mémoire confidentiel, c'est-à-dire si elle a pris le temps d'analyser le document et non seulement les sections soulignées par son personnel, elle aura appris que ce que je propose à mes collègues, c'est une politique de financement du volet immobilisations du programme d'aide gouvernemental au transport en commun. La politique implique une augmentation de notre contribution dans les investissements en immobilisations du transport en commun au Québec. En proposant de bonifier les investissements dans le transport en commun, le gouvernement répond aux besoins les plus urgents manifestés par les sociétés de transport et nous permet de "prioriser" nos interventions en tenant compte de ces besoins.

Je propose donc au gouvernement une augmentation de la moyenne des déboursés annuels de l'ordre de 30 000 000 $, passant de 193 000 000 $, pour les huit dernières années, à 221 000 000 $ pour la prochaine décennie. Le plan de transport prévoit des investissements annuels atteignant 260 000 000 $ en 1991-1992 et 292 000 000 $ en 1992-1993 (Deux-Montagnes, Estacade, matériel roulant du métro MR-63). Ce sont là des projets déjà décidés et qui s'échelonnent sur plusieurs années.

D'autres projets, une fois validés par les études préliminaires et les coûts-bénéfices, et entérinés par le gouvernement, pourront s'ajouter à la liste des investissements envisagés, selon la capacité de payer du gouvernement.

En terminant, M. le Président, je me demande comment l'Opposition peut continuer à maintenir que le gouvernement se retire du financement du transport en commun puisque je viens de leur souligner les sommes importantes que nous envisageons investir dans les années à venir.

Ce projet de loi implique un effort de responsabiliser les organismes pour les décisions qu'ils prennent afin d'arriver à une meilleure

gestion des fonds publics. La loi permet aux sociétés une pleine autonomie en ce qui concerne le règlement des conventions collectives ainsi que la tarification. C'est donc tout à fait normal que ces mêmes administrateurs soient responsables de leurs gestes administratifs.

M. le Président, le transport en commun demeure en tête de nos priorités. C'est encore la façon la plus efficace, la plus économique et écologique de se déplacer dans les centres urbains. C'est pourquoi le gouvernement maintient son partenariat important dans les dépenses d'immobilisation. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre des Transports. Sur cette motion, l'adoption du principe du projet de loi 145, je reconnais maintenant, M. le chef de l'Opposition officielle.

M. Jacques Parizeau

M. Parizeau: M. le Président, nous allons longuement discuter, en cette Chambre, et en commission, du projet de loi qui est devant nous et j'ai pensé, parce que j'ai eu l'occasion de m'occuper de ces choses pendant des années, plutôt que de signaler ou de critiquer des mesures spécifiques que comporte le projet de loi gouvernemental - on l'a appelé pelletage de factures dans le champ municipal - de m'arrêter à l'évolution des rapports entre le gouvernement du Québec et les municipalités du Québec depuis un certain nombre d'années.

Vous savez, souvent, M. le Président, à la période de questions, quand de notre côté, nous essayons de faire notre travail et nous attaquons les choses qui ont été faites de l'autre côté ou qui n'ont pas été faites, la façon de se défendre, invariablement, c'est de dire: Peut-être est-ce que nous du gouvernement, nous ne faisons rien, mais c'est quand même mieux qu'à votre époque où vous faisiez rôtir à la broche des petits enfants. Là, j'ai l'occasion de revenir, oui, sur des choses que nous avons faites, sur l'évolution de ces rapports entre le gouvernement et les municipalités du Québec depuis un certain nombre d'années.

Le sujet est important, M. le Président, parce qu'on a l'habitude de dire - et tout à fait à juste titre - qu'il n'y a pas de gouvernement plus proche des citoyens que le gouvernement municipal. La qualité des services, une foule de services pour les citoyens va dépendre du fonctionnement des municipalités. Même si, dans les finances publiques, les sommes qui sont mises à la disposition des municipalités, les sommes qui correspondent à ce qu'elles taxent, ne représentent pas de très gros montants d'argent par rapport au budget du gouvernement du Québec ou au budget du gouvernement fédéral, il reste que c'est la caractéristique, c'est la condition essentielle, ces sommes d'argent, de la qualité que les municipalités vont être capables de rendre. (16 heures)

Pendant des années, les municipalités au Québec demandaient au gouvernement de changer le système, de faire en sorte que pour qu'elles soient véritablement responsables des services à leurs citoyens, il y ait une sorte d'équivalence entre les ressources fiscales qu'elles percevaient sur le territoire de leur municipalité et les dépenses qu'elles faisaient. Au fond, ce qu'on disait au gouvernement du Québec et ce qu'on dit depuis des années, c'est: Voulez-vous nous permettre de ramasser en taxes, en revenus de toute espèce, ce qu'il nous faut pour assurer nos responsabilités comme municipalité, chez nous?

C'était tout un changement, un changement en ce sens que ça voulait dire la fin de la plupart des subventions que les gouvernements donnaient aux municipalités. Pendant des années, pendant très longtemps, un bon maire, c'était qui? C'était quelqu'un qui allait se présenter chez ses concitoyens en disant: Écoutez, j'ai été téter à 12 portes de ministres, puis j'ai réussi à en avoir 3.

Une voix: Ça, c'est un bon lobbyiste.

M. Parizeau: C'était ça, un bon maire. Là, les maires demandaient: On ne veut plus de ça. Nous, être un bon maire, ça dit aux concitoyens: Vous voulez un nouveau service? Vous voulez un nouvel aréna? Vous voulez quelque chose comme ça? C'est 0,14 $ sur le compte de taxe. Tout le monde est d'accord? Ça va. On y va. On le fait. C'est ce qu'on a appelé la responsabilisation des conseils municipaux et des maires au Québec.

C'est ça qui a amené, en 1978, les premières discussions à la table Québec-municipalités, entre le gouvernement du Québec et les municipalités, pour essayer de réaliser ça. Ça voulait dire des changements majeurs. Vous vous souvenez qu'à ce moment-là, M. le Président, une partie du produit de la taxe de vente au Québec était réservée pour les municipalités; elles recevaient une pluie de subventions dont beaucoup étaient discrétionnaires. Les commissions scolaires occupaient une bonne partie du champ foncier et, donc, les municipalités en avaient moins, du champ foncier, pour payer leurs propres dépenses. On a tout rebrassé ça. On a complètement réorganisé ça. C'a duré des mois, M. le Président, mais ce qu'il y a de remarquable, c'est que ce qu'on a appelé, à juste titre, la grande réforme de la fiscalité municipale au Québec, s'est terminé par une entente générale. Les grandes unions étaient d'accord, le gouvernement était d'accord; nous avons tous signé. On n'a pas cherché, au gouvernement, à ce moment-là, à pelleter des factures à l'occasion dune négociation comme ça.

En fait, ça a coûté au gouvernement, ça. Il y a eu un transfert de ressources du gouvernement vers les municipalités, pas considérable, mais il y en a eu un. En somme, on n'a pas essayé, municipalités et gouvernement, de se flouer les uns les autres. Ça s'est fait dans un climat de confiance qui a été assaini au Québec, par la suite, pour 10 ans. Et si, jusqu'à récemment, entre les municipalités du Québec et le gouvernement, un certain climat de confiance s'était fait - qui est important quand il s'agit de fournir des services aux citoyens - c'est largement grâce à cette réforme et à la façon dont elle a été faite.

Elle a bien réussi, à bien des égards. Je vous rappelle, M. le Président, qu'il y a encore deux ou trois ans, 97 % de toutes les dépenses courantes des municipalités du Québec étaient défrayées par les impôts et les taxes perçues par les municipalités et levées par elles. On venait d'un peu partout en Amérique du Nord voir le système québécois parce que, effectivement, il était unique. Aucun gouvernement, d'État ou de province n'avait été aussi loin dans une réforme comme celle-là. On était considéré comme une sorte de modèle, et on y était arrivé ensemble. le gouvernement avait gardé deux grandes priorités cependant, deux grands systèmes de subvention: ii y en avait d'autres, mais il en avait deux grands. premièrement, la construction des usines d'épuration d'eau. le grand programme d'usine d'épuration restait la raponsabilité - pour ce qui a trait au paiement des intérêts sur les dettes encourues pour financer ça - restait largement la responsabilité du gouvernement, pour des raisons qui se comprenaient fort bien et que nos amis d'en face ont fini par comprendre après la boulette qu'ils ont faite, il y a quelques mois. c'est qu'on ne peut pas épurer les eaux de cinq villes dans un bassin de rivière et en laisser cinq autres pas épurées. on épure un bassin de rivière ou on ne l'épure pas. ça, ils ont "flagos-sé" un peu de l'autre côté pendant deux ou trois mois, avant de se rendre compte de ce principe élémentaire qu'on épure un bassin de rivière. pas une municipalité sur deux. alors ça, forcément, ça restait une responsabilité gouvernementale. la deuxième grande priorité, c'était le transport en commun qui, par définition même, recouvre le territoire d'un grand nombre de municipalités et présente un intérêt normalement pour toute la région. et ça peut être très grand, la région. la région de montréal, qu'est-ce que vous voulez, c'est pas loin de 45 % de la population du québec. à peu près 45 % de la population du québec vit dans un rayon de 40 kilomètres de peel et sainte-catherine. si vous voulez organiser des transports en commun, forcément, ce ne sera pas sur une base de chaque municipalité. on a donc gardé, dans le cas du transport en commun, une double responsabilité, celle de la construction et une partie des dépenses courantes d'exploitation, le gouvernement fournissant à peu près un tiers.

Il reste d'autres domaines de subventions. Comme, par exemple, il est resté des subventions aux bibliothèques publiques ou des choses comme ça, où on voulait insister. C'était ça, le sens fondamental de la réforme. Et à travers tout cela, il a été entendu que le gouvernement ne transférerait pas d'autres dépenses aux municipalités sans fournir des ressources du même ordre. Ça, ça a été une sorte de pacte entre le gouvernement et les municipalités. Une fois qu'on avait réorganisé nos choses, on s'est entendus pour ne pas transférer de responsabilités aux municipalités sans transférer des ressources additionnelles.

On a été très surveillés à cette époque. Je me souviens encore que lorsque nous avions posé un geste sans doute maladroit qui consistait à demander aux municipalités d'assumer les dépenses pour le contrôle de la qualité de l'eau, ce n'était pas une grosse dépense au niveau des budgets municipaux, mais on était tellement surveillés que les municipalités sont intervenues tout de suite en disant: Attention, là! Vous violez le pacte que nous avons passé. Et elles avaient raison. C'était tout petit, mais ça indique à quel point tout le monde croyait dans le système qu'on avait monté. Il n'était pas parfait, ce système-là. Il est certain qu'au moment où j'ai dirigé cette commission d'étude sur les municipalités, on ne pouvait pas faire autrement que de constater que - qu'est-ce que vous voulez - il y avait encore du chemin à faire. Du chemin à faire, oui. Bien sûr, par exemple, le gouvernement n'était pas encore le parfait contribuable qu'il devrait être. Si le gouvernement payait 100 % de ses taxes foncières sur ses propres immeubles, il ne payait que 80 % de ses taxes sur les immeubles de santé et encore, 40 %, montés à 50 %... on était quand même montés à 50 % avant de... même si on était en pleine récession en 1982, 50 % des taxes des immeubles scolaires.

D'autre part, la réforme de 1979 n'avait pas réglé ce qu'on a appelé vulgairement, mais c'est de façon très imagée, la question des trous de beigne. Je rappelle, M. le Président, au cas où vous auriez oublié le sens de cette image, encore que je n'en sois pas certain, ce que c'est que le problème des trous de beigne, des villes-centres qui sont tout équipées sur le plan des services et donc, où les taxes foncières sont relativement élevées, et des banlieues tout autour qui ne sont pas dotées de ces services, voient leurs citoyens aller souvent chercher les services dans la ville-centre et, parce qu'ils ne se dotent pas des mêmes services, ont évidemment des taux de taxation beaucoup plus faibles, ce qui fait qu'une foule de magasins, par exemple, ou de commerces se déplacent dans les villes de banlieue plutôt que dans les villes-centres parce que ça coûte beaucoup moins cher. Il y a un bon nombre des membres de cette Assemblée nationale qui, dans leur comté respectif, connaissent bien le phéno-

mène. Et il fallait corriger ça.

Une des façons des corriger la chose, c'était évidemment de faire en sorte que le gouvernement n'accentue pas le phénomène. On se rendait compte que, par exemple, le gouvernement fournissait, par le ministère des Transports, dans les zones très urbanisées de ces municipalités qui entouraient une ville-centre, des services gratuits d'entretien qui n'existaient pas dans la ville-centre elle-même. Il y avait des choses absolument paradoxales. La gratte de la voirie, comme on disait, qui, dans un quartier urbanisé d'une municipalité autre que la ville-centre, déblayait la neige, levait la gratte en entrant dans la ville-centre, traversait la ville-centre, reposait la gratte de l'autre côté et continuait le travail. (16 h 10)

II y avait manifestement à cet égard, à l'égard de la police, de la Sûreté du Québec, une accentuation du phénomène des trous de beigne par le gouvernement lui-même. Il fallait corriger les choses. Le problème n'était pas là et, au fond, on s'en est rendu compte à travers tous les travaux de cette commission d'étude sur les municipalités, commandée par les municipalités elles-mêmes, d'ailleurs, qu'il y aurait un certain nombre de gestes à poser et qu'au fond la réforme municipale n'était jamais terminée.

Bon. Et là, tout à coup, éclate cette décision du gouvernement actuel aux prises avec le choix d'avoir à taxer lui-même et que ça se voit ou bien d'amener d'autres à taxer à sa place et là ça se verrait moins. Ce gouvernement a la terrible tentation de céder, de faire en sorte que ce soit d'autres qui taxent à sa place. Il va se servir de prétexte comme ça. Le gouvernement fédéral pelleté des factures dans ma cour, dit-il, j'ai donc le droit de pelleter des factures dans la cour des municipalités. Attention, M. le Président, attention là! Dans ses projets originaux, le gouvernement, en envoyant les édifices scolaires dans les commissions scolaires et par sa réforme originale, qu'il appelait une réforme mais qui est un pelletage de 500 000 000 $ dans les municipalités, aurait provoqué 800 000 000 $ d'augmentation de taxes dans les commissions scolaires et dans les municipalités. Ça, c'est 10 % de leur budget, M. le Président.

Qu'est-ce que dirait le ministre des Finances ici si le gouvernement fédéral pelletait, en une seule année, 10 % du budget du Québec, c'est-à-dire 3 500 000 000 $ de factures? Mais il nous fait tous pleurer quand il perd 200 000 000 $ avec un budget de 35 000 000 000 $. Pensez-vous qu'il pensait qu'il ne ferait pleurer personne avec un transfert aux municipalités et aux commissions scolaires de 800 000 000 $, c'est-à-dire à peu près 10 % de leur budget? Ce n'est pas une raison. Ah non! On a dit: On peut faire ça parce que les taxes foncières au Québec sont moins élevées qu'en Ontario. Donc, oh peut y aller, n'est-ce pas? Les commissions scolaires, les municipalités peuvent augmenter les taxes. Oui, je comprends. C'était un choix.

Oui, effectivement, au Québec, les taxes foncières ont été établies à un niveau qui est inférieur à ce qu'il est ailleurs et on a choisi plutôt, choix absolument confirmé par le gouvernement jusqu'à maintenant, que l'impôt sur le revenu au Québec serait plus élevé qu'ailleurs. Oui, je veux bien qu'un propriétaire de maison, qui gagne 35 000 $, il paie moins ou if payait, enfin, jusqu'à maintenant là, moins de taxes foncières qu'en Ontario. Mais seulement, s'il est taxé comme célibataire, cet homme-là ou cette femme-là, il paie 1600 $ d'impôt sur le revenu de plus qu'en Ontario. Ça, on ne le dit jamais.

Oui, il y a un choix qui a été fait au Québec. On trouve que l'impôt sur le revenu c'est plus juste que la taxe foncière. Alors, chez nous, il y a un peu moins de taxes foncières et un peu plus d'impôt sur le revenu. Là, le gouvernement vient nous dire: Ah bien! je ne vous dirai pas que l'impôt sur le revenu au Québec est plus élevé. Ce que je vais vous dire, c'est que les taxes foncières sont moins élevées et que je peux les remonter. Toujours la même idée: faire taxer à sa place.

Il y a plus grave que ça en ce sens que cette augmentation de la taxation foncière dans les commissions scolaires, évidemment, réduit l'espace où, dans le même champ, les municipalités peuvent taxer. D'autre part, les augmentations de taxes qu'on va avoir, à toutes fins pratiques, ces augmentations de taxes n'ajoutent absolument rien comme services nouveaux dans les municipalités ou ne permettent aucune amélioration de services. On se comprend bien. C'est juste pour payer des factures du gouvernement.

Ne parlons pas de réforme, c'est ridicule. Ce n'est pas une réforme ça cette affaire-là. Le gouvernement veut faire payer ses factures par quelqu'un d'autre parce que, si quelqu'un d'autre paie ses factures, alors, il donnera l'impression lui, le gouvernement, de moins taxer. C'est du pur camouflage.

Ce qu'il y a de grave, M. le Président, dans la situation qui s'est produite, c'est que le gouvernement vient de rompre le climat de confiance qui est absolument nécessaire, dans une société comme la nôtre, à faire régner entre ce qu'on appelle les autorités locales et le gouvernement. Nous sommes tous des élus. Nous, au gouvernement, eux, les maires et les conseillers municipaux, nous sommes tous des élus. Nous avons tous des responsabilités à l'égard des citoyens qui nous ont élus. Nous ne pouvons pas fonctionner les uns avec les autres sans avoir au moins un certain sens de la confiance, de la correction, de la façon de mener les choses entre nous. Et, soit dit en passant, ça va devenir d'autant plus important quand le Québec va devenir un pays souverain. Parce que, là, il n'y

aura pas trois paliers de gouvernement, il va y en avoir deux, M. le Président. Ça va devenir absolument fondamental qu'entre le gouvernement des Québécois et les gouvernements locaux, dans chacune des municipalités, on puisse se comprendre et avoir confiance les uns dans les autres, parce que c'est comme ça que notre société arrivera à fonctionner correctement.

J'en veux à ce gouvernement d'avoir fait éclater cette confiance. J'en veux à ce gouvernement d'avoir fait sauter cette entente qui fonctionnait bien entre les gouvernements locaux et le gouvernement du Québec.

Il a commencé à reculer à l'égard des municipalités. Oui, bien sûr. Le Conseil des ministres a décidé de déplacer la taxation. Il y aura moins de taxation rigoureusement locale et il y aura d'autres formes de taxation comme l'enregistrement des véhicules, avec des transferts de fonds aux municipalités.

J'incite fortement le ministre des Affaires municipales et le président du Conseil du trésor à continuer dans la voie, au moins partielle, dans laquelle ils se sont engagés, c'est-à-dire d'annuler le pelletage de factures dans les municipalités, complètement. Et quant aux taxes, aux impôts dont ils croient qu'ils seraient nécessaires, est-ce qu'ils peuvent avoir au moins le sens des responsabilités de les imposer eux-mêmes et de dire à l'ensemble des citoyens du Québec: Nous augmentons les impôts, et voici pourquoi. Voilà, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): merci, m. le chef de l'opposition officielle. je reconnais maintenant le prochain intervenant sur l'adoption du principe du projet de loi 145, m. le député de saguenay.

M. Ghislain Maltais

M. Maltais: Merci, M. le Président. Je pense que c'est avec beaucoup de satisfaction, comme députés, que nous sommes aujourd'hui dans le débat de la loi 145. Satisfaction, puisque c'est l'occasion rêvée, je pense, pour un député, de ramener certaines choses dans le contexte du 14 décembre 1990, de faire finalement ressortir ce qui a été omis tout au long du débat depuis décembre: la vérité; la vérité toute simple, toute crue, toute simple.

M. le Président, le projet de loi 145 pourrait se résumer en deux petites phrases. Le ministre des Affaires municipales, le gouvernement du Québec, demandent à l'ensemble des élus municipaux de vivre selon nos moyens. Tout simplement ça; c'est aussi simple que ça, de vivre selon nos moyens. Et, M. le Président, ce n'est pas une question de transférer des responsabilités, des taxes, des ci, des ça, c'est que le Québec, l'ensemble des Québécois, comme société, n'a plus les moyens de vivre à crédit. Ce n'est pas compliqué. L'heure de passer à la caisse est arrivée, pour tout le monde, pour tous les paliers de gouvernement. Il n'y en a pas deux au Québec, des paliers de gouvernement, à ma connaissance, il y en quatre, encore. Il y a le gouvernement du Québec, les gouvernements municipaux, les gouvernements scolaires. Il ne faut pas les oublier ceux-là non plus, parce que la loi 57, eux s'en rappellent aussi. Il ne faut pas oublier non plus qu'il y a un autre gouvernement qui s'appelle le gouvernement fédéral. Juridiquement, il a encore sa place au Québec. (16 h 20)

Donc, à l'heure actuelle, il y a quatre gouvernements qui ont des responsabilités vis-à-vis l'ensemble des citoyens. Que ça plaise ou non, c'est quatre gouvernements. Pour moi, une commission scolaire c'est encore un gouvernement d'élus, ce sont des gouvernements locaux qui ont la responsabilité, M. le Président, de s'assurer que l'éducation au Québec est donnée d'une façon juste et équitable. Comme les élus municipaux ont cette responsabilité de s'assurer que l'ensemble de leurs citoyens, de leurs concitoyens et de leurs concitoyennes ont des responsabilités, ont besoin de services, on doit leur dispenser d'une façon juste et équitable.

M. le Président, je ne pense pas qu'il y ait une personne ici dans cette Assemblée qui oserait manquer de respect envers les élus municipaux. Au contraire, nous sommes tous des élus, que ce soit au niveau d'un maire, d'un échevin, d'un député, il n'y a pas grand-monde qui a des passes gratuites. Il y a bien des gens, tout le monde doit passer au cercle de la démocratie.

M. le Président, la réforme, fondamentalement, dit à l'ensemble de nos concitoyens que le gouvernement du Québec n'est plus la caisse, c'est l'ensemble des citoyens qui devront se doter des services selon leurs moyens. Qu'un gouvernement, à n'importe quel palier, taxe pour en desservir un autre, là tu parviens à un déséquilibre. Donc, je pense que le sens de la loi viendra dire: le gouvernement qui requiert des services à son niveau devra penser aussi que ces services-là, ça se paie. C'est là l'importance de la réforme.

On est tellement habitué au Québec... Dans le discours de l'Opposition depuis le 14 décembre, on n'a pas voulu apporter de correctifs, on a voulu tabler sur le sens électoraliste, là où ça faisait plaisir aux gens. Vous savez, vivre selon ses moyens, c'est endurer son vieux fauteuil, même s'il y a un petit ressort de cassé dedans parce que ça coûte 1000 $ en acheter un neuf, et que les 1000 $ on ne les a pas en poche. Eux prêcheraient d'emprunter à crédit et de changer de fauteuil alors que nous, on dit: Changeons le ressort. Ça va coûter peut-être 25 $ ou 50 $, mais on gardera notre vieux fauteuil parce que présentement, on n'a pas les moyens d'en avoir un neuf.

M. le Président, il faut avoir un certain

courage, il faut avoir un certain courage et une honnêteté. Je ne pense pas qu'il y ait personne au Québec, du moins en cette Chambre, qui pourrait venir contester l'honnêteté du ministre des Affaires municipales. S'il y en a un, qu'il se lève, tout simplement. Je ne pense pas que parmi la population du Québec, il n'y ait personne qui puisse venir contester l'honnêteté du ministre des Affaires municipales.

M. le Président, je pense qu'à partir du moment où c'est une question honnête qui est posée, il y a une réponse honnête. Moi, je suis un député de région, j'ai fait le tour à quatre reprises de mes deux MRC, j'ai rencontré tous les maires à plusieurs reprises. Nous les avons rencontrés, nous en avons discuté avec eux-autres. Ah, bien sûr, ils nous disaient oui, oui, la forme dans laquelle M. Ryan nous l'a présentée, on n'est pas de bonne humeur. Vous savez, on ne changera peut-être pas le personnage, mais il n'y a personne qui a dit que le ministre des Affaires municipales avait été malhonnête, comme les gens de l'Opposition le prétendent. Au contraire, avec la forme de sa présentation, on peut le contester, sur le fond, il a totalement raison. D'ailleurs, les maires de mon comté ont été les premiers à approuver la réforme du ministre des Affaires municipales. Je pense que c'est parce qu'ils l'ont bien comprise. Je pense qu'ils l'ont bien comprise.

Aux endroits où on doit avoir des pouvoirs, aux endroits où on veut exiger des services - un comté comme le mien qui a une trentaine de petites municipalités, dont quatre seulement ont de la sûreté municipale... Au niveau de la Sûreté du Québec, je pense bien que toutes les municipalités sont d'accord que se payer un service de police, un policier c'est déjà trop énorme pour une population de 2000. Donc, ils sont d'accord pour payer une certaine partie. Il n'y a personne qui a jeté les hauts cris là-dessus. Pourquoi? Ceux qui ont crié le plus fort, quels étaient leurs intérêts?

Je m'adresserai peut-être en particulier aux permanents des unions. Comme parlementaires, on a rencontré, je pense, dans tous nos comtés, nos élus municipaux, un à un, en groupe. Il n'y a pas eu de grandes démonstrations. Mais on avait intérêt, quelque part, au Québec, à faire se regrouper les maires contre le gouvernement. On avait des intérêts qui étaient cachés, des vrais intérêts cachés, des intérêts politiques. À preuve, on en a eu lorsque le ministre a rencontré les unions. Le ministre, étant reconnu pour son honnêteté, a déclaré en Chambre que les résultats de la rencontre avaient été positifs; il en a fait état. Le lendemain matin, on recevait un communiqué de presse des unions qui était tout à fait contraire à ce que le ministre nous avait dit. Moi, je prétends que les maires étaient de bonne foi. Je prétends encore qu'il n'y a personne dans cette Chambre qui va oser se lever pour dire que le ministre des Affaires municipales était mal- honnête, d'où la conclusion; tirez-la vous-mêmes.

Il y a des gens qui avaient intérêt à faire durer le débat, à le faire perdurer d'une façon fausse, et ces gens-là ne sont pas des élus. Ces gens-là sont des gens qui ont d'autres intérêts que le bien des élus municipaux. Ce sont des gens qui ont des intérêts cachés. J'espère qu'un jour on aura l'occasion, comme parlementaires, de les avoir en commission parlementaire et de leur poser la question: Quels sont vos véritables intérêts? Fondamentalement, dans tout projet de loi, on ne peut pas réfuter de a à z tout un projet de loi, c'est impossible. Ça fait quand même quelques années que je siège ici, M. le Président, j'ai été pour ou contre des projets de loi, mais au moins il y avait des articles qui faisaient notre affaire. Donc, quels étaient les véritables intérêts de ces gens-là? Ces gens-là, je vous le rappelle, M. le Président, n'étaient pas des élus municipaux.

Dans sa réforme, dans l'ensemble de la réforme et dans l'énoncé de principe du ministre du 14 décembre 1990, il avait aussi apporté un espoir que le précédent gouvernement, dans sa réforme de la loi 57, n'avait jamais osé mettre en force, et je parle de l'article 65.1. L'article 65.1 a une importance capitale pour une ville comme Baie-Comeau. C'est 6 000 000 $, 7 000 000 $ de taxes qui sont contestées, présentement. Je pense que c'est la première fois au Québec qu'il y a une ouverture de la part d'un ministre des Affaires municipales. Tout à l'heure, M. le chef de l'Opposition nous disait que ça s'était fait dans l'harmonie. Je ne suis pas sûr... Par exemple, des villes comme Arvida, des villes comme Jonquière, comme La Baie, Baie-Comeau et d'autres villes, d'autres grandes villes du Québec qui ont un problème de 6 000 000 $, 7 000 000 $ de taxes contestées présentement qui ne sera jamais corrigé si on n'a pas...

Oui, Mme la députée de Chicoutimi, j'ai rencontré le maire de Jonquière. J'ai rencontré le maire de la ville de La Baie. J'ai rencontré le maire de Chicoutimi. On se rencontre aussi parce que, de temps en temps, ils veulent avoir une autre version. Je pense que c'est tout à fait normal, on est dans un pays démocratique. De temps en temps, ils aiment ça avoir une autre version. Ces gens-là nous ont demandé d'insister auprès du ministre des Affaires municipales qui a dit, dans son énoncé, que, sans doute, à l'automne, il reviendrait pour corriger ce manque de courage de la part de l'ancien gouvernement d'exclure l'article 65.1. (16 h 30)

L'ancien ministre des Affaires municipales, le député de Rimouski du temps, avait dit... Il a fait une... Il avait décortiqué 65.1 pour ne jamais l'appliquer dans la loi, ce qui représentait - 65.1 - des millions de dollars pour une ville comme Baie-Comeau. Pour ceux qui veulent savoir, c'est tout simplement l'évaluation des

machineries à l'intérieur des usines. Ça comprend les papetières en particulier. Ça comprend les alumineries en particulier. Ça comprend les grosses entreprises de sciage en particulier. Dans les petites entreprises, dans les PME, où on manufacture des produits, des PME qui ont 10 ou 12 employés, la machinerie fixe est évaluée au sens du Code municipal, alors qu'eux ne sont pas évalués parce que l'ancien gouvernement les avait enlevés de la loi dans 65.1. C'était peut-être un traitement de faveur ou encore une peur de la réalité. C'est dans les intentions du ministre, dans son énoncé, de revenir à l'automne. Je serai sans doute l'un des premiers à intervenir là-dessus pour le remercier parce que c'est important qu'une loi ne crée pas d'autres iniquités, et c'est là l'intention du ministre.

Au cours des prochains mois, on vivra avec la loi 145. Je suis convaincu d'une chose, que l'ensemble des députés ici, à l'Assemblée nationale, qui ont été conscients de faire leur travail d'une façon professionnelle avec leurs élus municipaux... Là-dessus, je tiens peut-être à remercier le ministre des Affaires municipales qui n'a jamais refusé de rencontrer nos élus municipaux, que ce soit les préfets ou les maires, sans leur demander au préalable s'ils étaient pour ou s'ils étaient contre, pour discuter du problème fondamental. Je pense qu'une discussion aussi importante dans chacune de nos régions, dans lesquelles... On connaît les problèmes et les difficultés que les municipalités doivent passer, mais aussi, en contrepartie, elles doivent reconnaître que le gouvernement du Québec ne peut continuellement être celui qui bâtit le système de réseau d'aqueduc, celui qui paie pour l'assainissement des eaux, qui construit des centres communautaires, des arenas, etc. Je pense que le sens même de la première phrase de mon intervention se résumait au fait que le ministre des Affaires municipales demandait à l'ensemble des municipalités et des citoyens et citoyennes de vivre selon leurs moyens.

Le transport en commun, peut-être que vous allez nous dire que c'est une injustice tout à fait inéquitable, mais, si on calcule vite, moi, les gens de mon comté, les gens qui demeurent à Ragueneau, qui doivent aller travailler à l'usine de Reynolds, 45 kilomètres, soir et matin, il n'y a pas de transport en commun, ça prend une automobile. Une automobile, ça coûte 6000 $ par année en essence, en assurance, en coût d'amortissement et il n'y a pas de subvention pour ça. La personne est obligée de prendre de l'argent net sur sa paie pour se payer une automobile. Si l'ensemble des Québécois et des Québécoises, ça leur coûte 3000 $ ou 4000 $ pour aller travailler, ils ne seront pas pires, ils sont juste sur un pied d'égalité avec mes concitoyens de la Côte-Nord. Je n'ai rien contre ça, moi, qu'on ait le coût valable. Ceux et celles qui doivent utiliser le transport en commun, je ne vois pas pourquoi ça leur coûterait le 1/10 ou le 1/20 du prix d'un gars de la Côte-Nord qui doit aller travailler avec son auto.

M. le Président, vivre selon nos moyens, c'est responsabiliser nos élus municipaux face aux demandes effarantes souvent de leurs concitoyens et de leurs concitoyennes à qui, avant de les embarquer dans des projets parfois trop onéreux, ils ont avantage et auront avantage, dans l'avenir, à dire exactement les coûts et l'ensemble de la population décidera si oui ou non, tel ou tel édifice, telle ou telle amélioration, c'est nécessaire en période de crise et si ça ne va pas à l'inverse de la philosophie la plus intéressante qui est de vivre selon nos moyens. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Saguenay.

Alors, sur l'adoption du principe du projet de loi 145, je reconnais maintenant M. la présidente de la commission des affaires sociales et députée de Taillon. Mme la députée.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Je vous remercie, M. le Président, de me permettre d'intervenir, à ce moment-ci, sur le projet de loi 145. Je pense que le chef de l'Opposition a fait, à l'égard de ce projet, une mise en perspective qui m'apparaît particulièrement pertinente. J'aimerais appuyer cette mise en perspective qui me semblait nécessaire au moment où nous sommes à envisager des modifications majeures en ce qui concerne la fiscalité municipale et aussi en ce qui concerne, je dirais, les relations qui devraient être harmonieuses avec l'un des principaux partenaires du gouvernement en ce qui concerne, d'une part, l'aménagement du territoire, bien sûr, mais la distribution de services à nos concitoyens et à nos concitoyennes.

Le chef de l'Opposition faisait référence, évidemment, au projet que nous véhiculons, que nous proposons et qui, actuellement, va chercher l'appui, d'ailleurs, de la majorité de nos concitoyens et de nos concitoyennes, qui est le projet tellement exaltant pour un peuple que celui d'exercer sa souveraineté et que, dans ce contexte, ces partenaires que sont les municipalités auront un rôle de plus en plus important à jouer dans cette perspective-là. Or, actuellement, la façon dont a procédé ce gouvernement et, particulièrement, le ministre responsable des Affaires municipales, n'augure pas particulièrement positivement pour l'avenir.

Cela étant dit, avant d'aborder plus spécifiquement l'aspect de l'impact sur l'entreprise, parce que c'est particulièrement cela que je voudrais aborder, M. le Président, j'aimerais m'arrêter un petit peu sur l'impact que cela aura pour la région que je représente aussi. Je représente un comté, celui de Taillon, mais je suis députée de la région de la Montérégie et,

particulièrement, de la banlieue sud de Montréal, évidemment, dont les municipalités se sont regroupées, formant ainsi la Conférence des maires de la rive sud, dont le président est d'ailleurs le maire de la ville de Longueuil, M. Ferland.

Celui-ci, la semaine dernière, prononçait une conférence faisant un peu le point sur ce qui lui apparaissait inacceptable dans le projet qui est devant nous, identifiant un certain nombre de problèmes auxquels les gens de la rive sud allaient être confrontés et je le cite, M. le Président, il disait: "Au seul chapitre du transport en commun, les sept villes membres de la Société de transport de la Rive-Sud de Montréal devront absorber près de 18 000 000 $", ce qui représente 16 % du budget d'exploitation de la Société de transport de la Rive-Sud pour l'an prochain, M. le Président.

Et on a vu, d'ailleurs, à cet égard, des interventions de la part du président de la Société de transport, des membres de la Société de transport se désoler devant les mesures qu'ils pourraient être amenés à prendre. On a même abordé une possible privatisation. On va bien comprendre, M. le Président, que si on ne peut pas rendre actuellement le service sur tout le territoire, qu'une entreprise privée ne pourrait pas nécessairement le faire et sûrement pas le faire, non plus, M. le Président. Alors, rapidement, on s'est entendu qu'il fallait maintenir des services pour l'ensemble de la population de la rive sud. Mais il est évident que la façon dont ça s'est fait, que l'impact sur les budgets est assez catastrophique en ce qui concerne ces municipalités.

Je lisais un document préparé par un groupe de CLSC de la rive sud et qui identifiait les poches de pauvreté que l'on retrouve aussi dans cette région-là parce qu'on ne les retrouve pas, évidemment, qu'au centre de Montréal. Et, entre autres, M. le Président, on constatait qu'il y a un taux très élevé, par exemple, de bénéficiaires d'aide sociale dans la ville de Longueuil, plus élevé que ce qu'on constate dans les autres villes de la couronne sud, M. le Président. Et, encore là, ce sont des hausses très importantes qui seront imposées à des villes comme celle de Longueuil. Le maire Ferland, d'ailleurs, évidemment, avant que les adoucissements ne soient apportés, parlait, dans certains cas, d'une hausse pouvant atteindre 9,6 %, M. le Président.

Si on ajoute à ces hausses celles qu'ont déjà subies nos concitoyens et nos concitoyennes, par l'imposition des taxes à la consommation comme celle qu'a imposée le gouvernement du Québec, la taxe de vente du Québec, d'ailleurs, qui sera maintenue au taux de 8 % alors que le ministre des Finances s'était engagé, M. le Président, à ce que cette taxe soit diminuée, soit ramenée, pour le début de l'année 1992, à un taux de un point en deçà de ce qu'elle est... (16 h 40)

Cela étant dit, M. le Président, la TPS et cette taxe sont venues remplacer une taxe au manufacturier qui aurait pu améliorer la situation économique générale, sauf qu'on a imposé cette taxe dans des secteurs où il n'y en avait pas du tout, ni au manufacturier, ni à la consommation. C'est entre autres les secteurs, évidemment, du vêtement et du meuble. Donc, c'a eu un effet absolument catastrophique, en pleine récession. Je comprends qu'il y ait un bien-fondé au fait que l'on révise les anciennes taxes et, dans ce sens-là, ça peut être intéressant d'envisager certaines avenues, mais le moment, peut-on se le dire ensemble, M. le Président, était particulièrement mal choisi.

Revenons maintenant à l'impact de ces nouvelles taxes sur les entreprises québécoises, M. le Président, et particulièrement dans une période de récession, je le répète. D'ailleurs le ministre aura peut-être - et je le souhaite - une oreille attentive à la demande qui lui a été présentée par la Fédération canadienne des entreprises indépendantes, section Québec, qui représente 17 000... en fait, qui parle au nom de 17 000 entreprises québécoises, petites et moyennes. On sait qu'au Québec, les emplois sont particulièrement créés par la petite et la moyenne entreprises; donc, la Fédération souhaiterait être entendue, M. le Président, dans le cadre de l'étude du projet de loi qui est devant nous, pour faire valoir un point de vue différent qui est celui de l'impact de ce nouveau fardeau fiscal sur les entreprises québécoises.

J'aimerais d'ailleurs revenir à l'accumulation que ce gouvernement a fait subir aux entreprises, l'accumulation des nouvelles taxes, depuis le début de l'année 1989 où il a, à différentes reprises, soit par le discours sur le budget, par des réformes comme celle que propose le ministre des Affaires municipales, comment il a haussé, finalement, ce gouvernement, le fardeau de taxes des entreprises depuis 1989 M. le Président, de l'ordre de 16,6 %. Encore là, je vais convenir avec le gouvernement, qu'il y a sans doute matière à ce que l'on puisse faire une ponction au niveau des entreprises pour qu'elles contribuent à l'amélioration des services collectifs, mais là, on conviendra - et le chef de l'Opposition le rappelait tout à l'heure - qu'il n'y a aucune amélioration, M. le Président, à l'ensemble des services collectifs auxquels nous avons accès par la proposition qui est déposée par le ministre des Affaires municipales. Et non seulement cela, M. le Président, mais, quand on occupe, je dirais, le potentiel fiscal que l'on peut aller chercher chez les entreprises et qu'on le fait servir essentiellement aux fins de corriger les effets de la mauvaise gestion du gouvernement, M. le Président, on occupe ainsi un champ qui pourrait être utilisé à des fins beaucoup plus justifiées et beaucoup plus pertinentes pour améliorer la situation que vivent nos entreprises et que vivent nos travailleurs et nos travail-

leuses. Je m'arrête particulièrement à ces deux volets qui sont continuellement mentionnés, et à juste titre, en ce qui concerne l'investissement que nous devrions faire à ce niveau-là, entre autres en matière de formation professionnelle et en matière de recherche et développement, M. le Président.

Il y a un troisième élément que j'aimerais aborder ici. Plusieurs fois, j'ai posé la question au ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie qui, en plus de me dire la vérité, pourrait peut-être surtout répondre à mes questions. Je tenais pour acquis, d'ailleurs, qu'il me disait la vérité parce que ce serait quand même assez inacceptable que ce soit le contraire, n'est-ce pas, M. le Président? Il n'a jamais pu me dire quel était l'impact sur l'entreprise de chaque hausse d'un point de pourcentage du niveau de taxation, qu'il s'agisse d'une taxe sur les profits des entreprises, qu'il s'agisse de taxes sur la masse salariale - parce qu'il y a eu hausse de taxe sur la masse salariale - qu'il s'agisse de la taxe d'affaires, qu'il s'agisse, comme celle dont on parle, d'une taxe sur les stationnements, par exemple, des entreprises commerciales. Jamais le ministre ou un membre de son gouvernement - le ministre des Finances à qui j'ai posé exactement la même question lors de l'étude du budget, M. le Président, alors qu'il m'avait dit qu'il y avait, oui, des modèles lui permettant d'évaluer l'impact d'une telle taxe - n'a pu me donner les outils utilisés pour appliquer le modèle, d'une pan", et, d'autre part, répondre à ma question sur la façon dont on le faisait au ministère des Finances ou de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie.

Comment se fait-il, M. le Président, que ces mêmes ministres, régulièrement, se lèvent pour me dire combien ils auront créé d'emplois par leurs mesures? Trop peu d'ailleurs, beaucoup trop peu quand on constate le nombre d'entreprises qui ferment. on peut me dire, lorsqu'on intervient dans un sens, c'est-à-dire qu'on accélère des investissements, qu'on annonce un plan de relance, fort limité d'ailleurs, m. le président, mais on ne peut pas me dire, à l'inverse, lorsqu'on va ponctionner de l'argent chez les entreprises, on ne peut pas me dire l'impact que cela aura sur l'emploi, sur la capacité de l'entreprise de continuer à investir ou sur sa survie même, parce qu'en période de récession on sait - on débat actuellement le dossier, je pense qu'on ne va pas apprendre de nouvelle à personne - que certaines entreprises sont continuellement sur le bord du précipice, pas parce qu'elles ne sont pas des entreprises de qualité, pas parce qu'elles n'ont pas une saine gestion, pas parce qu'elles ne sont pas dans un bon créneau, mais parce que les difficultés économiques font que la demande est moins élevée, mais aussi, parce qu'on ponctionne des sources d'investissements par l'intermédiaire d'une taxe, argent que l'on pourrait investir ailleurs.

Je reviens à mon point principal à cet égard. Quel est l'effet d'une taxe nouvelle que l'on impose aux entreprises? Le ministre des Affaires municipales a évalué le potentiel maximum de chacun des champs auxquels il s'adresse par le projet de loi qui est devant nous. Qu'il s'agisse des taxes sur le stationnement, de la taxe d'affaires, qu'il s'agisse de la taxe aux industries, qu'il s'agisse de la taxe des droits sur les divertissements, sur les mutations immobilières, M. le Président, hein? On a vu que non seulement il n'avait pas atténué cette taxe-là, mais qu'il l'avait augmentée dans une proportion assez significative pour les transactions qui dépassent 250 000 $. Il a même fait passer cette taxe, si je ne m'abuse, à près de 77 000 000 $ alors qu'elle était un peu plus basse dans son projet initial.

Je trouve irresponsable de la part du gouvernement d'être incapable de répondre à ces questions que je soulève depuis déjà des semaines, depuis, d'ailleurs, que le ministre des Finances a annoncé dans ses discours sur le budget respectifs qu'il allait procéder à une hausse de taxes aux entreprises. Aucun des ministres qui est devant nous n'a pu répondre à ma question. Alors, je pense qu'à cet égard, c'est manquer effectivement de responsabilité quand on ne sait pas la portée des gestes que l'on pose. Si le ministre des Affaires municipales est capable d'évaluer le potentiel, il est aussi capable, j'imagine, avec les modèles économétriques qu'ils ont dans les différents ministères concernés, il devrait être capable de répondre à mes questions.

J'aimerais m'attarder à un article en particulier du projet de loi, à ce moment-ci, M. le Président. C'est l'article 285 qui va permettre aux entreprises qui ont procédé à de la location à l'égard d'autres entreprises, qui va donc, je disais, leur permettre d'ouvrir les baux, ce qui est assez inhabituel dans notre façon de procéder en affaires. Alors, il va donc permettre, si je ne m'abuse, c'est l'article 285, il va donc permettre, à cause de la surtaxe qu'il impose, que l'on ouvre, que l'on impose, que l'on modifie les conditions des baux commerciaux entre entreprises. C'est assez particulier, M. le Président, et nous aurons l'occasion de questionner en profondeur le ministre sur cet article de loi qui, à notre point de vue, sort un petit peu de ce que l'on connaît habituellement. (16 h 50)

On a vu dernièrement que les entreprises commerciales fermaient leurs portes les unes après les autres, le niveau de consommation ayant baissé d'une façon assez substantielle avec l'imposition de la TPS et de la TVQ. Je le disais au début de mon intervention. Alors, imaginons que cela ne viendra pas faciliter la vie des entreprises qui oeuvrent actuellement dans le commerce de détail. Comme on sait, évidemment, que ça risque d'être ce type d'entreprise qui soit

touché, pensons à la possibilité qu'auront les municipalités de taxer les stationnements. Alors, imaginons que les entreprises commerciales risquent d'être touchées assez sérieusement et donc, que ce sont ces entreprises-là qui verront leurs baux réouverts, et je ne suis pas certaine qu'un certain nombre d'entre elles seront capables d'assumer les coûts qu'elles pourront encourir, compte tenu de la situation économique que nous connaissons maintenant.

Parce que c'est dans ce contexte-là que le ministre propose sa réforme et, comme on constate, si on peut l'appeler réforme - d'ailleurs, M. le Président, je trouve que le mot est peut-être un peu surfait, que l'expression est peut-être un peu surfaite - imaginons qu'un projet de révision comme celui qui est devant nous se soit fait dans un contexte économique différent, et peut-être les questions que nous soulevons ici seraient-elles aussi différentes. Mais ce n'est pas le cas, M. le Président, et je considère donc que le ministre fait fausse route, qu'il risque de saccager davantage l'économie québécoise, sans pour autant ni lui ni ses collègues être capables de répondre à nos questions, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Taillon. Sur l'adoption du principe du projet de loi 145, je reconnais maintenant M. le député de Saint-Jean. M. le député de Saint-Jean, la parole est à vous.

M. Michel Charbonneau

M. Charbonneau: Merci, M. le Président. C'est pour moi un grand plaisir d'intervenir aujourd'hui dans le débat sur le projet de loi 145 concernant les finances municipales. En effet, notre gouvernement, par le biais de mon collègue, le ministre des Affaires municipales, a annoncé une diminution des charges foncières transférées aux municipalités. Concrètement, c'est une somme de 178 000 000 $ qui sera retranchée des 414 000 000 $ qu'aurait impliqué la proposition du 14 décembre dernier. Le montant des charges financières transférées aux municipalités est donc ramenée de 236 000 000 $.

Comme on peut voir, M. le Président, notre gouvernement a décidé d'apporter des assouplissements à sa proposition initiale, mais nous persistons à croire que la responsabilité première des décisions politiques dans des domaines comme la voirie locale, le transport en commun et la protection policière doit relever des autorités municipales, car, comme le disait le ministre des Affaires municipales, dans sa déclaration ministérielle du 14 mai dernier, là où le pouvoir de décision est surtout local, les moyens à prendre pour financer les décisions prises doivent relever surtout de l'autorité municipale.

J'aimerais, si vous me permettez, faire un petit retour en arrière et rappeler les principaux points concernant le partage de responsabilités que le gouvernement libéral avait proposé le 14 décembre dernier aux municipalités. Comme on le sait, le Québec assume depuis longtemps une large part des coûts reliés au fonctionnement des municipalités. Par exemple, jusqu'à maintenant, notre gouvernement finançait entièrement les services de protection policière dans la plupart des municipalités du Québec. Également, dans le cas de la voirie locale, Québec assumait depuis de nombreuses années la majeure partie du fardeau, mais il est évident que ces domaines relèvent prioritairement des municipalités. Un de nos rôles en tant que gouvernement est de favoriser et d'encourager cette autonomie municipale que plusieurs d'ailleurs réclament.

M. le Président, si l'on est d'avis que la voirie locale, le transport en commun et la protection policière doivent relever des municipalités, on doit également prétendre à l'autonomie financière des municipalités dans ces domaines. C'est d'ailleurs cette logique qui est à la base des fondements du nouveau partage des responsabilités entre le gouvernement et les différentes municipalités du Québec.

Au départ, la proposition de partage établissait le transfert à 477 000 000 $. Mais, il fallait soustraire de cette somme des recettes additionnelles de 63 000 000 $. L'impact financier total se chiffrait, comme je l'ai dit il y a quelques instants, à 414 000 000 $. C'est donc à ce montant que seront apportés les ajustements de 178 000 000 $, dont fait mention, d'ailleurs, le présent projet de loi. Et j'aimerais, M. le Président, vous en donner quelques détails.

Tout d'abord, les assouplissements touchent le secteur de la voirie locale. Les nouvelles sommes que les municipalités devront assumer seront portées à 22 300 000 $, en remplacement des 43 000 000 $ initialement prévus. Il s'agit donc d'une diminution de 21 000 000 $. En ce qui a trait aux modalités du transfert des responsabilités dans ce secteur, elles seront l'objet de consultations avec les municipalités. Cette partie de la réforme devrait entrer en vigueur le 1er avril 1993.

Le gouvernement libéral du Québec a choisi également de maintenir à leur niveau actuel les subventions gouvernementales tenant lieu de taxes sur les immeubles de la santé et des affaires sociales et de l'enseignement supérieur. Aussi, les compensations tenant lieu de taxes payées par le gouvernement à l'égard des écoles primaires et secondaires seront calculées, à compter du 1er janvier 1992, en fonction de 25 % du taux global de taxation de la municipalité. Présentement, ce taux est de l'ordre de 50 %. Le projet initial prévoyait, vous vous en souviendrez, la suppression de ce type de subvention sur deux ans.

Tout cela signifie, M. le Président, une réduction de 33 000 000 $ des charges financières transférées aux municipalités. La proposi-

tion du 14 décembre prévoyait des charges de 80 000 000 $. Elles seront désormais établies à 47 000 000 $.

Regardons maintenant, si vous le voulez bien, les ajustements concernant la protection policière. Le projet de loi 145 stipule que toute municipalité locale, peu importe sa taille, devra s'assurer que son territoire et sa population soient desservis par un corps de police. Cette disposition sera d'ailleurs mise en vigueur dès le 1er janvier prochain.

En détail, cette mesure signifie, pour les municipalités, que leur protection policière pourra être assurée, soit par leur propre service policier, soit par celui qu'elles se procurent par le biais d'une entente intermunicipale, ou soit par celui qu'offre la Sûreté du Québec. Dans ce cas-ci, la municipalité sera tarifée en conséquence pour compenser une partie des frais relatifs aux services policiers de base, fournis par la Sûreté du Québec. Également, cette tarification sera établie sur la base de la richesse foncière uniformisée de chaque municipalité et variera selon l'importance de sa population.

De plus, le ministre des Affaires municipales a annoncé, par le biais de son projet de loi, que la structure de tarification comporte un adoucissement pour les municipalités comptant plus de 3000 habitants. En effet, cet adoucissement aura un impact de 9 000 000 $ à l'échelle de la province. L'impact financier de cette mesure sera ainsi ramené à près de 70 000 000 $.

M. le Président, comme tout le monde le sait, la loi actuelle oblige les municipalités de plus de 5000 habitants à se doter d'un corps policier. Pourtant, 34 municipalités n'en possèdent toujours pas. Aussi la Sûreté du Québec dessert 1243 municipalités, sans que ces dernières ne versent en retour une compensation. Pourtant, les résidents des 140 municipalités de moins de 20 000 habitants disposant d'un corps policier doivent assumer un coût moyen de 97 $ per capita à chaque année pour des services policiers équivalents. Plusieurs municipalités ayant prié le gouvernement de corriger cette lacune, nous avons décidé d'agir en ce sens dès 1992. (17 heures)

L'évaluation du coût des services policiers de base dispensés aux municipalités par la Sûreté du Québec a été de l'ordre de 250 000 000 $ pour l'exercice financier terminé le 31 mars dernier. Et de ces 250 000 000 $, 135 000 000 $, soit près de la moitié, sont imputables aux municipalités ne disposant pas de service de police. C'est donc pour solliciter la participation financière de ces municipalités, dans une proportion de 52 % de ce montant, que le projet de loi a été élaboré.

M. le Président, comme je l'ai mentionné plus tôt, ce nouveau partage des responsabilités entre Québec et les municipalités a également un impact sur le transport en commun. Et cet impact se traduit, entre autres, par une réduc- tion de 50 000 000 $ des charges financières transférées aux municipalités. Ainsi, l'impact financier sur les 72 municipalités concernées par cette mesure est ramené de 266 000 000 $ à 216 000 000 $. C'est, entre autres, en reconnaissant la nécessité des systèmes de transport en commun, pour des raisons économiques, sociales et environnementales, que notre gouvernement a décidé de faire participer de façon accrue les bénéficiaires indirects que sont tous les automobilistes des six grandes régions urbaines.

En termes clairs, cela se traduit par l'application d'un droit additionnel de 30 $ par plaque d'immatriculation des véhicules de promenade dans les 194 municipalités des 6 régions métropolitaines de recensement où se retrouvent les 9 organismes publics de transport. Il s'agit des régions métropolitaines de Montréal, Québec, Hull, Sherbrooke, Chicoutimi et Trois-Rivières.

M. le Président, la formule que nous avons choisie a pour but de faire participer d'une façon concrète les automobilistes des zones périphériques des agglomérations à l'effort collectif. Les montants ainsi recueillis par la Société de l'assurance automobile du Québec à compter du 1er janvier 1992 seraient consignés dans un fonds spécial. Gérés par le ministère des Transports, ces montants seraient redistribués directement aux organismes de transport concernés. Il s'agit donc d'une source de financement qui vient s'ajouter aux deux autres contenues dans le projet du 14 décembre dernier.

En effet, notre gouvernement proposait alors de mettre un terme, dès janvier 1992, aux subventions à l'exploitation qu'il verse aux neuf organismes publics de transport en commun. Par ailleurs, les 2 sources de financement, soit une taxe sur le stationnement applicable à 72 municipalités, et une surtaxe spéciale sur les immeubles non résidentiels, étaient mises à la disposition des municipalités membres d'un organisme public de transport en commun.

Le projet de loi permettrait donc la coexistence de la nouvelle surtaxe avec l'actuelle taxe d'affaires, au choix de chaque municipalité. Aussi, le gouvernement conservera une participation importante dans les dépenses d'immobilisation des neuf organismes publics de transport en commun. L'investissement gouvernemental sera de l'ordre de 200 000 000 $ par année au cours des prochaines années.

M. le Président, notre gouvernement reconnaît le caractère démocratique et représentatif des institutions municipales. Également, nous sommes conscients que ces institutions sont le principal lieu d'intervention pour le citoyen. Les municipalités ont à jouer un rôle très important dans un système comme le nôtre. Elles ont a régler plusieurs problèmes reliés à la vie quotidienne des citoyens et citoyennes; elles interviennent dans des activités aussi diversifiées que les loisirs, l'entretien des routes, la collecte des ordures, etc. En somme, les municipalités

sont les témoins du développement de l'activité collective au plan local et sont, en conséquence, des institutions proches de la population. C'est en tenant compte de toutes ces réalités que le ministre des Affaires municipales a présenté sa réforme de la fiscalité des municipalités.

M. le Président, en présentant un tel projet, le gouvernement libéral du Québec a voulu sensibiliser les différentes municipalités à la solidarité collective. En ce moment, le Québec vit, nous l'espérons, les derniers soubresauts de la récession, mais les efforts demeurent nécessaires pour accélérer la reprise économique. La situation financière actuelle n'est certes pas facile, mais c'est en participant à l'effort de redressement que nous contribuerons à l'améliorer. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Saint-Jean. Sur cette même proposition d'adoption du principe du projet de loi 145, Mme la députée de Chicoutimi.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Quant au projet de loi 145, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les finances municipales, j'écoutais avec beaucoup d'attention les présentations qui ont été faites tant par la partie gouvernementale que par les députés de l'Opposition. Ce qui m'étonne beaucoup dans les discours que j'ai entendus, c'est qu'on fait appel à des sentiments nobles, et je m'en réjouis, cependant on ne semble pas réaliser - et je suis convaincue qu'ils sont aussi bien informés que je le suis - la lourdeur des taxes, impôt, tarification qui pèsent de plus en plus sur les citoyens.

Tous les jours - je suis certaine que c'est la même chose pour les députés du gouvernement - les citoyens viennent nous dire: On n'en peut plus. Je ne suis pas certain de pouvoir garder ma maison. Je ne suis pas certain de pouvoir continuer à nourrir correctement les enfants. Avec les taxes qu'on a sur les vêtements d'enfants, sur les couches, sur les bottines, je n'arrive plus à boucler mon budget. Les citoyens, quotidiennement, viennent nous dire ces choses, alors que ce gouvernement et les députés que j'ai entendus...

Le tout dernier disait: Le projet de loi fait appel à la solidarité collective. On peut être d'accord avec ça en autant qu'on soit consulté. Comment peut-on céder à un sentiment qui serait tout à fait légitime et normal, lorsqu'on informe des élus des difficultés qu'on éprouve et de la nécessité, peut-être, de revoir le partage des responsabilités? On peut parler de solidarité collective lorsqu'il y a de la consultation. Le projet de loi qui est déposé là et qui fait l'objet de cet examen a été imposé de force par un gouvernement libéral aux élus municipaux et sans consultation aucune. Ça ne se voit dans aucun gouvernement, qu'on ait cette façon aussi cavalière d'agir.

M. le Président, à peu près à la même époque l'an passé, on assistait au discours du ministre de l'Éducation d'alors, qui est devenu le ministre des Affaires municipales, qui défendait la réforme de la fiscalité en matière scolaire. Il disait alors qu'il voulait accroître les responsabilités et les pouvoirs des commissions scolaires. Cependant, au moment où on examinait ce projet de loi, on devait constater, comme les commissions scolaires d'ailleurs, qu'il ne s'agissait en aucune façon d'un accroissement des pouvoirs des commissions scolaires. Ça ne donnait pas davantage aux commissions scolaires le pouvoir de légiférer ou de prendre des décisions en matière pédagogique, absolument pas; en matière de programme, pas du tout; en matière de gestion des ressources humaines, pas davantage. Il s'agissait simplement de transférer aux commissions scolaires la responsabilité d'administrer et de restaurer les édifices scolaires. Vous savez, pour une commission scolaire, restaurer et administrer un parc immobilier, ça n'a rien de très valorisant, au plan pédagogique, vous le reconnaîtrez facilement avec moi.

Pour faire avaler la pilule aux municipalités, le ministre leur a dit alors que, dans un premier temps, ça devrait coûter environ, on irait chercher environ 75 000 000 $. La réalité est apparue lorsque a été déposé le budget, et ce n'était plus 75 000 000 $. D'ailleurs, une union municipale s'était dit: Bon, on ne peut peut-être pas trop être en désaccord avec ça. Mais en ouvrant la porte, c'était fait. Ce n'était plus 75 000 000 $, c'était 320 000 000 $. Ça a représenté, pour les propriétaires du Québec, une augmentation moyenne de 140 $ par année. Mais dans certaines municipalités, dans certaines commissions scolaires, ça a été beaucoup plus élevé. Dans la commission scolaire Valin, dans laquelle j'ai ma résidence, c'était 112 % d'augmentation. Mais dans certaines commissions scolaires, ça a été le double et même le triple. (17 h 10)

Encore une fois, le ministre de l'Éducation d'alors a procédé sans aucune consultation des municipalités. Il venait ici briser le pacte municipal. Et au moment où on discutait ce projet de loi, ce ministre, député d'Argenteuil, nous disait: Vous avez mal travaillé quand vous avez fait la réforme fiscale des municipalités en 1979 parce que vous l'avez faite sans consulter les commissions scolaires. Vous avez aboli le champ foncier des commissions scolaires sans consultation, de force et d'autorité. Il nous accusait - vous connaissez le ton qu'il est capable d'utiliser, je vous en fais grâce. Avec toute la sincérité apparente qu'on lui connaît, cependant, ce qu'il vient de faire, c'est un coup de force sans précédent pour des élus municipaux qui, au même titre que vous et moi, sont élus

par les citoyens et les contribuables.

Devant le tollé de protestations que la loi sur les commissions scolaires - venant élargir le champ foncier des commissions scolaires - avait provoqué dans les municipalités, le 29 juin, le gouvernement du Québec dépose à la table Québec-municipalités une proposition, et je cite: "Concernant une démarche de concertation". Le gouvernement disait alors vouloir s'engager dans une démarche de décentralisation avec les instances locales de manière à accroître l'efficacité et l'efficience dans la prestation des services publics par un transfert de responsabilités accompagné de sources de financement adéquates. Cette noble intention ne sera, on se le rappellera, que du vent. La démarche retenue par le gouvernement est à mille lieues de la concertation. D'aucune façon, cette promesse n'a-t-elle été retenue et respectée. C'est sans consulter que le ministre des Affaires municipales présentait la proposition du gouvernement, le 14 décembre dernier, proposition curieusement titrée: "Vers un nouvel équilibre". On pourrait davantage parler de déséquilibre que d'équilibre. En fait, il s'agit d'un véritable délestage financier.

En l'espace d'un peu plus d'une année, vous et moi, comme tous les contribuables du Québec, aurons vu les impôts fonciers scolaires et municipaux augmenter de plus de 700 000 000 $: 700 000 000 $ de nouvelles taxes. Mais voyons d'un peu plus près ce que ça représente pour une municipalité comme la ville de Chicoutimi. Il n'y a rien de tel que de voir les impacts concrets réels sur une municipalité pour mesurer l'impact et les effets d'une telle mesure. À Chicoutimi, par exemple, pour un budget de 60 000 000 $, ça représente un manque à gagner réel - le manque à gagner par rapport au transfert - de 2 200 000 $, environ 4,6 %. Mais sur les immeubles non résidentiels, ça va représenter une augmentation des taxes foncières d'environ 10 %, avec la possibilité qui est offerte là d'ouvrir les baux. Vous savez ce que ça veut dire, ouvrir les baux. Je pense aux édifices qui sont aux alentours du bureau que j'occupe. J'occupe un bureau de la caisse populaire Desjardins; peut-être que j'y échapperai, je ne suis pas certaine. Mais moi, dans le fond, votre bureau comme le mien, s'il y a une augmentation de 10 % des coûts de location de mon bureau, le gouvernement, par le biais d'une décision prise à l'Assemblée nationale, par le Bureau de l'Assemblée nationale, va ajouter ça dans nos budgets. Ce n'est pas trop fatigant, ça ne nous empêchera pas de dormir, vous et moi.

Mais le propriétaire d'un petit bureau de consultants, le propriétaire d'une petite boutique sur la rue principale, le propriétaire de boutiques plus importantes, le propriétaire d'un petit commerce, lui, 10 % d'augmentation, ça sera peut-être plus parce que, peut-être, que le propriétaire en profitera pour augmenter encore un peu plus que ce qui est prévu ou nécessaire en vertu de la nouvelle taxe. Ça veut dire une augmentation qui pourra excéder, chez nous, 10 %, peut-être 12 %, peut-être 15 %. Ce petit locataire, qui a déjà de la difficulté à joindre les bouts, c'est la faillite qui le menace. On ne semble pas être sensible à cette situation. Dans la ville de Chicoutimi, le chômage frise les 17 %; chez les jeunes, c'est 24 %. Est-ce qu'on réalise la situation qui prévaut dans les régions? Est-ce qu'on réalise le marasme économique dans lequel on est en train de s'enfoncer? Comment se fait-il qu'on n'ait pas été plus prudent lorsqu'il s'agit de proposer de telles dispositions qui viennent rendre encore plus périlleuse la situation, plus particulièrement dans le commerce.

Les "en lieu" de taxes à la ville de Chicoutimi, parce qu'on a plusieurs établissements scolaires, au primaire et au secondaire, ça représente un manque à gagner, en 1992-1993, qui va approcher les 800 000 $. Vous allez me dire: 800 000 $, ce n'est peut-être pas élevé, ce n'est pas peut-être pas élevé, mais tout dépend du budget. Mais ces 800 000 $, il va falloir aller les chercher quelque part. Mais saviez-vous - et j'imagine qu'il y a beaucoup de gens ici qui l'ignorent dans cette salle - qu'avant l'entrée au pouvoir de ce gouvernement, les immeubles excédentaires étaient offerts gratuitement aux municipalités? Et, en juillet 1986, un règlement du ministère de l'Éducation - adopté curieusement par le même ministre - décrétait que, dorénavant, les établissements scolaires excédentaires ne seraient plus donnés aux commissions scolaires, mais vendus au plus offrant. Une école ne sera plus donnée ni aux commissions scolaires avoisinantes, ni à la municipalité, mais vendue.

Donc, la municipalité, comme ça s'est passé dans la municipalité de Chicoutimi, qui veut se porter acquéreur de l'école Saint-François-Xavier, qui est classée dans les biens culturels, M. le Président, n'a pas pu le faire parce que la commission scolaire a été autorisée à la vendre au plus offrant. Heureusement, l'immeuble était classé. Ils n'ont pas pu le vendre pour qu'il soit démoli ou encore transformé, mais la municipalité n'a pas pu se porter acquéreur de cet immeuble.

À Chicoutimi, dans le secteur nord, même chose pour l'école Sainte-Marie. Il y a une association de personnes âgées qui veut ouvrir une espèce de centre de jour là. Même problème. Si vous voulez avoir accès à cette école, on vous la vend. On a fini par avoir une entente avec le ministre, avec la municipalité, avec la commission scolaire. L'immeuble était évalué à 125 000 $. On a recueilli les sommes et on a pu le faire acheter par la municipalité.

M. le Président, c'est ça la situation dans nos municipalités et c'est ça qui est inacceptable. Non, seulement là, on dit les "en lieu" de taxes, on les diminue de 50 % à 25 %, ce qui fait perdre à la ville de Chicoutimi quelque 800 000 $, mais en même temps, s'il y a des

immeubles excédentaires, vous devrez les acheter. Il y a quelque chose de tout à fait illogique, d'irrationnel, mais aussi de tout à fait inacceptable parce que ces immeubles sont payés par les contribuables du Québec.

En matière de transport en commun, il y a une communauté du transport en commun qui réunit les trois principales villes du Haut-Saguenay: Jonquière, Chicoutimi, La Baie. Pour la seule ville de Chicoutimi, ça représente un manque à gagner de 1 200 000 $, M. le Président, 1 200 000 $ pour un service de transport en commun qui est particulièrement déficient, disons-le, parce qu'en raison de l'étendue du territoire, en raison de la faible densité de la population, vous vous retrouvez avec des quartiers qui n'ont aucune desserte de transport en commun. Il n'y a pas de transport en commun, M. le Président, le dimanche à Chicoutimi. Saviez-vous ça? Le dimanche à Chicoutimi, si vous n'avez pas de voiture, vous restez chez vous. Évidemment, moi, ça ne m'affecte pas. Probablement que ça ne vous affecte pas beaucoup non plus. Vous avez votre voiture et il y en a peut-être même deux à la maison, des voitures. Mais ce n'est pas le cas des personnes les plus démunies. Elles ne peuvent même pas rendre visite à un parent à l'hôpital, à moins de le faire en taxi.

Alors, c'est déjà un transport en commun qui n'est pas très très efficient ou de qualité très accessible, et là, on vient obliger la municipalité à investir encore davantage dans un transport qui est déjà déficitaire. Qu'est-ce qui va arriver, M. le Président? On va finir par refuser d'organiser le transport en commun sur le territoire de cette municipalité. Ça veut dire que ça affecte non seulement les personnes démunies, mais toutes celles qui travaillent à temps partiel, qui travaillent le soir, qui travaillent la nuit, celles qui travaillent à petit salaire, particulièrement les femmes, évidemment, parce qu'elles sont à temps partiel et qu'elles ont besoin du transport en commun pour se déplacer de la résidence au lieu de travail. M. le Président, cette situation est particulièrement déplorable et regrettable.

En ce qui a trait aux routes rurales, Chicoutimi, on ne peut pas trop se plaindre. Il n'y en a pas beaucoup dans la municipalité. Il n'y en a pas beaucoup. Il reste quelques rangs, quelques agriculteurs, mais ça représente quand même 400 000 $. Pas énorme, M. le Président, par rapport à ce que ça représente dans les comtés où il y a plusieurs municipalités rurales, mais ça représente une somme extrêmement importante pour chacun des contribuables. (17 h 20)

M. le Président, en plus, évidemment, il y a les 30 $ pour les droits d'immatriculation des voitures. En une année, l'immatriculation de nos voitures, les coûts d'immatriculation auront crû de 118 %, M. le Président. 118 %, ça touche 70 % de la population du Québec propriétaire de voitures. M. le Président, le député de Saguenay suggérait tout à l'heure que les citoyens devaient apprendre à mesurer le coût des services qu'ils exigent de leur municipalité, ce avec quoi je pourrais être d'accord. Cependant, les services qu'il énumère ne peuvent pas être laissés à la seule responsabilité d'une municipalité.

Il pariait d'assainissement des eaux, M. le Président. Ce n'est pas vrai que l'assainissement des eaux, ça peut n'être laissé qu'à une municipalité compte tenu de l'étendue de leur territoire, et je sais que vous connaissez bien la situation. M. le Président, il disait également la même chose en ce qui a trait au transport en commun. Le transport en commun, compte tenu de l'étendue de nos territoires et de la faible densité de la population, on renonce complètement à l'organiser, ce qui pénalise lourdement les étudiants, ce qui pénalise lourdement les plus démunis et les personnes à petit revenu, M. le Président. Je veux bien qu'on assume une partie des services dans chacune de nos municipalités, lorsqu'il s'agit peut-être de services de loisir qui nous apparaîtraient peut-être un peu superflus, mais, lorsqu'il s'agit de choses aussi essentielles que l'assainissement des eaux et le transport en commun, je pense qu'il y a là une responsabilité collective, M. le Président. le gouvernement du parti québécois estime, et nous estimons toujours, que la façon la plus juste de répartir le coût des services qui nous apparaissent essentiels, m. le président, ça demeure l'impôt sur le revenu. c'est pourquoi, si l'impôt sur le revenu des québécois est plus élevé, c'est ce qui explique que nos impôts fonciers étaient un peu plus bas. je rencontre souvent, comme vous, sans doute, et comme les membres de cette assemblée, mes collègues tant du gouvernement que de l'opposition, de jeunes familles qui me déclarent: dans la situation actuelle, je ne pourrai jamais jamais être propriétaire de ma maison. augmentation de taxes scolaires, augmentation de taxes municipales et augmentation d'un peu plus de 27 % des tarifs d'hydro-québec, m. le président; dans une année, deux augmentations, une de 7 %, une de 7,25 % plus la tps, ça représente, je pense, 26,7 % d'augmentation. alors, ce que me disent les jeunes couples, les jeunes familles qui ont un, deux ou trois enfants ou qui voudraient fonder une famille, c'est qu'ils n'envisagent plus la possibilité d'avoir accès à la propriété. on va à nouveau revenir à cette situation d'un peuple de locataires, et nous le savons et vous le savez, le québec s'appauvrit actuellement. l'écart entre les plus démunis et les plus fortunés se creuse constamment et la classe moyenne disparaît progressivement, m. le président. tout le monde est en train de passer du côté des classes les plus défavorisées.

M. le Président, c'est une réforme bâclée, une réforme bâclée où le contribuable est

perdant. Le contribuable est perdant et tout cela se fait sans consultation aucune, M. le Président, et, il faut le dire, au mépris le plus total de personnes qui sont élues, au même titre que nous, par des contribuables, et ces contribuables qu'ils représentent se sentent lésés parce que la réforme se fait sans consultation. Les élus municipaux, ils sont élus au même titre que nous, pour gérer un gouvernement municipal, ils méritent notre respect à ce titre et on aurait dû les associer à cette réforme, M. le Président. C'est une réforme bâclée et le contribuable en fait les frais. Il n'y a, dans cette réforme, aucun principe, aucune vision. Si on avait pu déceler, dans cette réforme, une espèce de projet, de vision d'ensemble où, progressivement, on établit ce qui devient, au cours des années, des responsabilités municipales, des responsabilités collectives et des responsabilités plus générales, on aurait pu comprendre la réforme.

Mais est-ce qu'il s'agit vraiment d'une réforme? À mon avis, c'est lui donner beaucoup, lui faire beaucoup d'honneur que de parler d'une réforme. Il s'agit strictement d'une loi qui permet un délestage financier sur le dos des propriétaires du Québec et qui évite au gouvernement la responsabilité de prévoir lui-même ou d'imposer de nouvelles taxes. Il l'a fait par la commission scolaire, il l'a fait par les municipalités, il l'a fait par différentes formes de taxation. M. le Président, vous étiez en Chambre alors que le gouvernement du Parti québécois était au pouvoir. Vous vous rappelez la bataille rangée et sans commune mesure avec ce qui se passe actuellement par rapport à ses effets, alors que le gouvernement du Parti québécois imposait une taxe sur les assurances. C'était suffisant, à entendre dire l'Opposition, pour renverser un gouvernement. Ils s'engageaient à l'abolir. Elle n'a jamais été abolie et ses effets sont loin d'être aussi pernicieux. Cette taxe sur les assurances, bien que ce ne soit pas souhaitable, c'est loin d'être aussi pernicieux que cette nouvelle tarification et que cette réforme.

Voilà, M. le Président, pourquoi le gouvernement devrait aller en consultation avant de bulldozer toutes les municipalités du Québec. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Chicoutimi. Sur cette même adoption du principe du projet de loi 145, je reconnais maintenant M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Réal Gauvin

M. Gauvin: Merci, M. le Président. Le projet de loi 145 dont on débat ici à l'Assemblée nationale depuis déjà quelques heures sur la réforme de la fiscalité municipale constitue sûrement le partage le plus équitable des responsabilités entre le gouvernement du Québec et les municipalités. Cette nouvelle distribution des pouvoirs est l'aboutissement d'une réflexion rigoureuse sur la gestion du développement des municipalités et l'utilisation de l'argent des contribuables. Le développement de leurs régions aussi passe par cette réforme.

Je ferai valoir l'ampleur des efforts du gouvernement pour en arriver à un partage équitable des responsabilités entre les municipalités et l'État. J'aimerais revenir quelques minutes, quelques secondes sur ce qu'avançait la députée de Chicoutimi en rapport avec le manque de consultation. J'aimerais vous rappeler, M. le Président, que ça fait déjà plusieurs mois que le gouvernement du Québec a sensibilisé les municipalités à la venue de ce projet-là. Le ministre actuel des Affaires municipales a tenté à plusieurs reprises, d'avoir certaines rencontres avec les deux unions de municipalités et nos représentants municipaux... Mais, après plusieurs invitations, ces gens-là ne croyaient pas nécessaire de rencontrer le ministre parce que leur stratégie était plutôt de faire retirer le projet de loi. Dans leurs termes à eux autres, c'était de faire reculer le ministre sur le projet de loi.

Mais ce qu'on devrait considérer plutôt, c'est l'effort que le ministre des Affaires municipales a fait pour tenter, soit au niveau des municipalités, soit au niveau des unions, de recevoir de ces gens-là, de ces représentants municipaux, des propositions. Moi, je peux dire, comme membre de l'Assemblée nationale, comme collègue ici du ministre des Affaires municipales, l'effort qu'il faisait auprès de ses collègues pour aller chercher de l'information additionnelle sur la situation ou la perception que les élus municipaux avaient de ce projet de loi. Je vais tenter de démontrer aussi l'ouverture constante du ministre actuel dans mon allocution.

Donc, ce que je dirais, M. le Président, considérons d'abord les tendances en matière fiscale de notre époque pour montrer comment, en quoi notre réforme de la fiscalité municipale s'y inscrit et y participe pleinement.

Après avoir insisté pendant plusieurs décennies sur la redistribution de la richesse et, surtout, pris pour acquis sa production, nous avons découvert que sa production n'allait plus de soi. Nous avons découvert que la redistribution des richesses se faisait de plus en plus à crédit, hypothéquant l'avenir des jeunes générations moins nombreuses de Québécois et de Québécoises.

M. le Président, je veux démontrer en cette Chambre que le projet de loi 145 est indispensable pour le Québec puisqu'il donne aux municipalités plus de marge de manoeuvre au niveau de leur gestion et aussi la capacité financière pour soutenir leur développement. C'est aussi une réponse directe à la demande des élus municipaux de toute la province qui désirent une décentralisation de certains pouvoirs depuis déjà quelques années. Le gouvernement du Québec leur donne

la solution par leur implication dans les choix collectifs car ils connaissent bien les tenants et les aboutissants des décisions d'entretien et de développement de leurs territoires et biens municipaux. (17 h 30)

M. le Président, les municipalités pourront obtenir une utilisation maximale de leurs biens à un coût minimal. Les conséquences les plus évidentes de ce nouveau partage des responsabilités sont: une décentralisation des pouvoirs, tel que demandé par les élus municipaux, un meilleur rendement des équipements municipaux à un coût moindre des choix éclairés sur les priorités parce que identifiés par les élus municipaux eux-mêmes.

Renel Bouchard écrivait, dans Le Canada français du 22 mai dernier, et je cite: "II est vrai que les finances publiques avaient grandement besoin de se fonder sur un principe administratif sain, qu'elles avaient besoin de changement." C'est le but de la réforme Ryan, ces choix clairs qui répondent aux besoins des municipalités à des coûts raisonnables. C'est le but de cette réforme que de rendre aux municipalités des responsabilités qui par nature leur reviennent.

Déjà, au début des années quatre-vingt, le gouvernement de l'époque songeait à mettre en place ce genre de partage entre Québec et les municipalités. La raison en est bien simple. Il est indispensable et inévitable d'en arriver à un nouveau partage des municipalités pour tenter de donner de bonnes infrastructures routières et autres aux municipalités, à un coût moindre.

M. le Président, il faut tenir compte du fait que cette réforme s'inscrit également dans l'esprit de concertation mis en place dans les régions du Québec au cours des sommets économiques des dernières années. Dans cet esprit, les élus municipaux ont vécu l'expérience d'implication dans les choix déterminants pour leurs collectivités, un sentiment d'éloignement du citoyen des lieux de décision ayant des impacts directs dans sa vie quotidienne et le réel constat qu'un service offert par l'État est souvent plus coûteux et beaucoup plus que s'il était offert par d'autres paliers tels que les municipalités.

Cet effet constaté a trouvé un large écho auprès du monde municipal. Les représentants des municipalités ont transformé ces choix en revendications en faveur d'une plus grande autonomie. Du moins, ils ont servi à fonder davantage leurs revendications dites traditionnelles, des revendications en faveur d'un transfert de responsabilités qui serait assorti de pouvoirs de taxation pour les assumer.

Il est normal de devoir ajuster nos institutions et nos modes de gestion aux nouvelles réalités auxquelles le Québec doit faire face. Il est évident que la transition sera ardue, puisqu'il s'agit d'une modification du comportement administratif traditionnel au Québec. La décen- tralisation comme tendance est apparue en réaction à la grande centralisation qu'a connue le Québec au cours des décennies soixante et soixante-dix, en effet, qui fut une époque où l'on croyait que l'État pouvait assumer toutes les responsabilités, y compris, bien sûr, celles dévolues aux autres paliers de gouvernement.

L'État pouvait tout faire et tout assumer suivant cette croyance. C'était l'époque de l'État-providence. Un autre aspect important de cette réforme, c'est qu'elle contribue à contrer l'augmentation des dépenses publiques. Malgré les efforts déployés pour empêcher l'augmentation des dépenses de l'État, les résultats ne sont pas toujours ceux espérés. Les dépenses de l'État ont connu des augmentations de 8 % en 1990-1991, alors que le taux de l'inflation était de 4,5 %. Le gouvernement du Québec n'a plus les moyens d'assurer le même niveau de responsabilité et de faire face à de nouveaux besoins.

Il faut également éviter de compromettre le caractère concurrentiel de notre fiscalité, qui est essentiel pour maintenir la santé économique et la capacité de création d'emplois au Québec. Je dois insister sur la souplesse et la compréhension, comme je le mentionnais un peu tantôt, dont a fait preuve le ministre des Affaires municipales dans ses pourparlers avec les représentants des municipalités du Québec. Je veux vous rappeler que le ministre des Affaires municipales déposait, le 14 décembre, une proposition de transfert des responsabilités de l'ordre de 414 000 000 $.

Cette proposition est assortie de pouvoirs de taxation accrus. Elle fut l'objet de désaccords entre le ministre et les maires. Ils ont soulevé bon nombre d'objections. Mais M. le ministre avait bien déclaré en cette Chambre que cette réforme n'était pas coulée dans le béton et qu'il était disposé à rencontrer les maires pour discuter des points litigieux, afin d'en arriver à un accommodement satisfaisant pour toutes les parties impliquées. Par l'accommodement présenté le 14 mai dernier, nous constatons que le ministre s'est montré sensible aux représentations des élus municipaux. Ainsi, les charges transférées aux municipalités sont réduites de 178 000 000 $. Elles passent de 414 000 000 $, comme je le mentionnais, à 236 000 000 $.

Rappelons que le gouvernement ne se désengage pas vis-à-vis du monde municipal et qu'il continue de contribuer substantiellement, en s'appuyant sur l'expérience des dernières décennies. Le gouvernement en est venu à la conclusion qu'il sera plus responsabilisant pour les municipalités d'assumer elles-mêmes les services de transport en commun dont elles se sont dotées.

Le gouvernement a également prévu, dans le projet de loi 145, des dispositions en vertu desquelles les organismes de transport en commun se verront attribuer chaque année des revenus d'appoint de 50 000 000 $.

La même philosophie s'applique à la voirie locale. Qui est mieux placé que les localités pour administrer les routes locales? Toutefois, le ministre des Affaires municipales a prévu une classification des routes locales qui fera l'objet de consultations auprès des autorités municipales. Un inventaire par état des routes locales sera dressé par le ministère des Transports avant le transfert envisagé pour le 1er avril 1993. Le ministre a également annoncé que le coût d'entretien évalué à 3000 $ du kilomètre fait l'objet d'un nouvel examen et qu'il pourrait être augmenté.

M. le ministre des Affaires municipales nous a aussi informés, en cette Chambre, le 22 mai dernier, qu'il examine la possibilité d'instaurer une modulation des coûts qui permettrait de tenir compte des variations considérables de coûts que l'on observe d'une région à l'autre. Il envisage aussi, à la suite de l'allégement de 21 000 000 $ annoncé dernièrement, de réduire le niveau maximum de financement local que devront assurer les municipalités, soit un niveau de 0,20 $ de taxation par 100 $ d'évaluation foncière uniformisée.

Voilà des mesures qui rassurent les représentants municipaux, j'ose croire, face au défi d'adaptation que représente la réforme de la fiscalité municipale.

En terminant, M. le Président, je pense que, quoi qu'on ait pu entendre au cours des derniers mois, c'est le contribuable qui sort gagnant de cette réforme. C'est pourquoi j'ai l'intention de voter pour ce projet de loi qui tend vers un nouvel équilibre entre l'État et les municipalités. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Montmagny-L'Islet. Sur cette même motion, je reconnais maintenant M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Michel Bourdon

M. Bourdon: M. le Président, le député qui m'a précédé soulignait que, dans le dernier budget, les dépenses se sont accrues de 8 %, alors que l'inflation au Québec était de l'ordre, l'an dernier, de 4,5 %. Il y a là une réalité, je pense, avec laquelle il faut composer. Et je pense qu'à cet égard, comme notre parti peut être appelé et espère être appelé à former le gouvernement un jour, il faut s'astreindre, dans la discussion qui est devant nous, à un exercice de responsabilité budgétaire et fiscale.

M. le Président, je voudrais d'abord souligner qu'on ne m'a pas convaincu que l'État a éliminé toutes les sources de gaspillage dans son fonctionnement, puisqu'on sait maintenant que ce ne sont pas les salaires qui ont été un facteur d'inflation dans le budget du gouvernement du Québec. Il y a eu une perte de revenus attribua-ble à la récession, c'est évident, qui augmente les paiements de transferts sociaux, entre autres l'aide sociale qui augmente. Mais, malgré ça, il y a des dépenses qui ne sont pas salariales. Il y a des dépenses du gouvernement qui ne sont pas, non plus, des transferts vers les plus démunis et qui s'accroissent à un rythme trop accéléré. M. le Président, je dis d'entrée de jeu qu'à mon avis, il y a encore du gaspillage au gouvernement du Québec et qu'il y aurait moyen de faire une lutte systématique au gaspillage.

L'autre chose que j'ajoute, M. le Président, c'est qu'à l'évidence, le train de mesures compris dans le projet de loi qui est devant nous, n'est qu'un début. C'est la deuxième année qu'on le fait et on va recommencer l'an prochain, parce que l'État a de la misère à arriver, ce qui est une réalité fondamentale. (17 h 40)

M. le Président, je pense que la raison principale de ça, c'est qu'on s'est donné un filet social, un filet de couverture sociale de 1950 à 1971. La dernière mesure majeure sous un gouvernement libéral - ça ne me gêne pas du tout de le souligner - ça été l'assurance-maladie en 1971.

Mais dans ces 20 années, M. le Président, l'économie québécoise et canadienne connaissaient de facto le plein emploi. Je pense qu'on n'arrivera à rien si on ne reconnaît pas que le principal problème budgétaire que le gouvernement rencontre, le principal problème fiscal que l'on rencontre... M. le Président, je pense que ce problème fiscal, moi qui suis du comté de Pointe-aux-Trembles qui est un comté où habitent majoritairement des gens de la classe moyenne, il prend un caractère de plus en plus virulent. Les gens en ont assez de payer des taxes et de payer des impôts.

M. le Président, je souligne au ministre qui suit le débat, qu'à cet égard, le principal problème c'est qu'il y a près de 20 % de la population qui ne travaillent pas au Québec. Le forum pour l'emploi, qui est présidé par le président du Mouvement Desjardins, M. Claude Béland, a évalué les transferts vers les chômeurs, que ce soit l'aide sociale ou l'assurance-chômage, à près de 7 000 000 000 $ par année. D'autres économistes sérieux ont calculé que si le Québec connaissait une situation de plein emploi, non seulement on dépenserait 7 000 000 000 $ de moins de transferts vers les chômeurs et les bénéficiaires de l'aide sociale, mais les revenus de l'État seraient accrus de 10 000 000 000 $. Alors je pense qu'il y a là, M. le Président, matière à réflexion.

Ce qui m'inquiète dans le projet de loi qui est devant nous, c'est que je pense qu'il va dans la même optique que d'autres moyens que le gouvernement a trouvés d'accentuer toujours davantage les taxes régressives, et de laisser intact l'impôt sur le revenu qui, lui, est progressif. Ça, M. le Président, je pense que c'est injuste envers les particuliers et c'est injuste

envers les entreprises. Envers les entreprises, M. le Président, parce que l'impôt foncier impose aux entreprises un fardeau qui est fonction du nombre d'employés. Or la rentabilité d'une entreprise, le ministre le sait sûrement, n'est pas vraiment fonction de son nombre d'employés. Il y a des secteurs déclinants, comme le meuble, la chaussure, le vêtement, où il y a un grand nombre d'employés par entreprise qui occupe une grande superficie de plancher et qui paie des taxes foncières importantes.

M. le Président, je pense qu'au lieu d'augmenter l'impôt foncier, la justice fiscale nous demanderait de l'abolir par étapes. C'est un impôt qui est régressif, qui est injuste, et qui nuit au développement des villes.

M. le Président, il y a à Tétreaultville, dans mon comté, des retraités qui ont des pensions, qui ont des maisons qu'ils ont achetées dans les années 1950, libres d'hypothèque la plupart du temps, mais l'impôt foncier les égorge littéralement parce que la valeur d'une propriété ne donne pas la capacité de payer de la personne qui l'habite.

Récemment, M. le Président, je parlais avec une jeune femme qui s'est acheté un appartement en copropriété, dans le centre-ville de Montréal. Si les ministériels veulent écouter, je leur transmets ce message-là. Elle s'est acheté cet appartement il y a une dizaine d'années, à un coût très bas. Elle l'a rénové et l'appartement constitue maintenant une belle valeur sauf qu'elle vient de tomber en chômage. Puis le fait de se retrouver au chômage, M. le Président, implique que son revenu baisse de 40 %, mais sa taxe foncière, elle, va rester la même. Puis, elle se demande même si elle ne sera pas éventuellement forcée de vendre son appartement. La même chose pour les retraités.

M. le Président, les retraités de Ahuntsic par exemple, les retraités de la ville de Laval, les retraités d'un peu partout au Québec qui ont des pensions souvent insuffisantes, se retrouvent avec une taxe foncière qui augmente. Je vais donner un exemple simple, M. le Président, qui risque de convaincre le député de Mille-Îles. Supposez un ménage qui a un revenu de 70 000 $ puis une maison de 150 000 $. Sur IHe de Montréal, ça va leur coûter 3500 $ d'impôt foncier. À côté, il peut y avoir un célibataire qui occupe un condo à 75 000 $, et qui, par hypothèse, gagnerait autant que le ménage d'à côté, soit 70 000 $ par année. Il va payer carrément la moitié moins d'impôt foncier. Le pays d'Europe où la mentalité régressive qui est derrière la réforme qui est devant nous s'est appliquée avec le plus de rigueur, c'est la "poll tax", en Grande-Bretagne, avec une idéologue de droite vraiment très formée, Mme Margaret Thatcher. Pour les gens qui nous écoutent, M. le Président, j'explique un peu ce que c'est, la "poll tax". Ça, c'est le bout du bout. Ils ont dit: On prend le nombre de citoyens dans une municipalité; on divise les dépenses par le nombre de citoyens et chacun paie. Ça a fait des émeutes, en Grande-Bretagne. C'est quelque chose qui n'a pas de bon sens.

Or, les entreprises, leur capacité de payer n'est pas fonction de leur évaluation. Je répète que la Financière Power, par exemple, occupe un étage d'un immeuble à Montréal. La Caisse de dépôt et placement - on en parle à l'aise - a 300 employés et occupe un ou deux étages d'un immeuble à Montréal. Pensez-vous qu'elles ont moins les moyens de payer pour la municipalité de Montréal que, disons, dans le nord-est de la ville, les entreprises de vêtements que la ministre déléguée à la Condition féminine côtoie dans son comté de l'île de Montréal? Ce n'est pas partisan de le dire: l'impôt foncier est injuste, il est inéquitable et le gouvernement a décidé de le rendre de plus en plus onéreux, ce qui, pour les retraités, pour les gens dont les revenus diminuent, pour les entreprises aussi, est injuste.

Le ministre dit souvent, et avec raison, que, théoriquement, les 200 000 000 $ de transfert en matière de transport en commun qui s'en vont sur l'île de Montréal, les entreprises, à la rigueur, ce n'est qu'une hausse, dit-il, de 3,5 % de leur impôt foncier. Mais c'est en comparaison que c'est injuste. Une entreprise de Saint-Léonard et de ville d'Anjou - pour aller dans le milieu que vous connaissez le mieux, M. le Président - qui paie 25 000 $ d'impôt foncier, quand elle envisage de déménager à Repentigny, à Saint-Bruno ou à Terrebonne, en périphérie, elle se rend compte qu'au lieu de 25 000 $ d'impôt foncier, elle en paierait un gros 8000 $.

Je ne parle même plus, à cet égard, de la capacité de payer de l'entreprise. On vit en économie libérale et, pour une entreprise qui pourrait payer 8000 $ de taxes municipales au lieu de 25 000 $, c'est tentant d'accepter une offre à ville de Laval, loin, parce que Laval se retrouve maintenant comme Longueuil, comme Montréal, dans le même bateau. C'est pour ça qu'il y en a même qui proposent de faire un pont pour faciliter l'exode des entreprises.

Je voudrais ajouter que ce qui est clair dans le projet de loi qui est devant nous, c'est que ça va contribuer également à diminuer considérablement la qualité du transport en commun partout au Québec, mais particulièrement à Montréal, à Laval et sur la rive sud. La coupure brutale qui est faite à la STCUM, entre autres, c'est une coupure de 185 000 000 $ qui est faite pour délester le gouvernement du Québec, pas pour responsabiliser davantage les élus municipaux. Ça, c'est tout à fait inexact de se délester de responsabilités. C'est rendre les élus locaux plus responsables.

D'ailleurs, que font-ils quand ils sont de la rive sud et d'ailleurs? Ils disent: On va privatiser le transport en commun, peut-être qu'on va fermer. Est-ce que ce serait ça, les responsabiliser? Est-ce que ça donne des résultats, ce supposé processus de responsabilisation, quand

on entend le président de la Société de transport de la rive sud de Montréal dire: On va privatiser des secteurs du transport en commun pour revenir au bon vieux temps de Chambly Transport qui était une honte, des autobus qui tombaient en morceaux et qui transportaient les gens à un coût qui n'avait pas d'allure?

Une voix: Ça marchait, dans ce temps-là...

M. Bourdon: M. le Président, ça ne marchait pas, dans ce temps-là. C'était de la magouille et c'étaient des affaires invraisemblables. J'en ai un peu ras le bol d'entendre des députés de banlieue, qui représentent les contribuables, qui sont des déserteurs fiscaux, qui quittent le centre-ville et partent avec leur voiture en banlieue pour ne pas payer les taxes qu'ils causent. (17 h 50)

À cet égard, j'invite le député de Mille-Îles à réfléchir sur les propos du ministre des Affaires municipales à l'égard des 30 $ la plaque d'immatriculation qui, d'après le ministre, est un moyen de faire payer la banlieue pour le dégât qu'elle cause en ville. M. le Président, je suis de ceux qui disent que, bien sûr, à la surface du globe, la lutte des classes n'est plus un thème populaire et que la réalité de la lutte des classes, ce n'est plus une réalité qu'on vit. Mais ce qui est resté de la lutte des classes, c'est les 400 000 voitures de la grande banlieue de Montréal qui envahissent l'île de Montréal, où il y en a juste 150 000, et qui ne paient pas pour les rues qu'elles défont, les gens ne paient pas pour l'eau qu'ils boivent et ils ne paient pas pour les services de police qui sont là parce qu'ils existent. Ça, il y a matière à réflexion à cet égard et il y a matière à s'interroger sur la désertion fiscale que certains pratiquent.

Il y a un autre problème grave de transport en commun. Donc, on va affaiblir et appauvrir le transport en commun à Montréal, mais on est aussi dans une société où les régions périphériques ne se sentent pas concernées par la coupure sauvage que le ministre des Affaires municipales pratique dans le transport en commun à Montréal et ailleurs, de la même façon que le président Reagan a fait aux États-Unis. Ce n'est pas vrai qu'il n'y a pas de précédent à la politique qui est poursuivie de l'autre bord de la Chambre; la politique qui est poursuivie, c'est la politique "reaganienne". Le président Reagan avait coupé entièrement toute subvention au transport en commun dans les villes américaines, ce qui a eu des conséquences cauchemardesques et catastrophiques. Pour que les électeurs du comté de Mille-Îles puissent continuer à venir dans leur voiture climatisée au centre-ville, il faut toujours bien que le métro leur enlève un peu de voitures dans les rues. Ce serait dans leur intérêt que le transport en commun ait de l'allure. Ça, je le dis du député de Mille-Îles mais c'est vrai de tous les députés de banlieue, quelle que soit leur allégeance politique. À cet égard, ce qu'on peut voir au Québec, c'est qu'il n'y a pas de politique de transport. Ce qu'on a au Québec n'est pas une politique de transport.

M. le Président, brièvement, qu'est-ce qui reste des trains au Québec et au Canada? Est-ce que vous faites partie, M. le Président, de ces députés qui, à l'occasion, essaient le train Montréal-Québec? J'ai déjà essayé; je le fais encore de temps en temps. Quand on a beaucoup de temps à perdre, quand on a envie de dormir à bord du train, on le prend. Mais, M. le Président, vous êtes-vous déjà interrogé sur le fait que le train qui nous conduit de Montréal à Québec ou de Québec à Montréal est un train fait pour voyager à 160 kilomètres à l'heure? Le LRC, le léger rapide confortable de Bombardier qui nous transporte, il est fait pour faire 160 kilomètres à l'heure. Je ne sais pas si le député de Mille-Îles l'a déjà essayé, mais dans le bout de Drummondville, il fait 30 kilomètres à l'heure parce que la voie ferrée n'a jamais été faite pour aller avec le train, mais on a trouvé 400 000 000 $ pour faire l'autoroute de la rive nord, par exemple. Il y a des pays européens où on voit à ce qu'un train rapide, un train confortable, un train à l'heure se développe parallèlement aux autoroutes, alors qu'ici, vous savez... Il y a eu la période où on disait: Notre père qui êtes aux deux. Au Québec, comme ailleurs, c'est souvent: Notre auto qui est dans notre cour. L'auto prend une importance invraisemblable. Le gouvernement actuel n'est pas responsable du fait que le train est en train de disparaître comme moyen de transport en commun au Québec et au Canada, mais le gouvernement actuel nous a privatisé l'avion; il nous a remis à l'avion à hélices et ça coûte plus cher d'aller à Baie-Comeau que d'aller à Paris ou à Miami, Floride.

On a déréglementé dans ce domaine-là et les régions périphériques - j'insiste là-dessus, M. le Président - ne se sentent pas solidaires des Montréalais, par exemple, en matière de transport en commun parce que les citoyens des régions n'ont eux-mêmes aucun moyen de transport convenable. Il pourrait y avoir, entre Chicoutimi et Québec, un train qui a de l'allure; il n'y en a pas. La route, l'hiver, est dangereuse et trop étroite; les gens le disent avec raison. Le réseau routier n'est pas dans un bon état et nécessiterait pas mal d'argent pour être réparé et adapté convenablement. Quant à l'avion, ceux de mes collègues qui sont de l'Abitibi coûtent à l'État au-delà de 500 $ chaque semaine pour prendre l'avion pour Québec, c'est-à-dire plus cher que pour Miami ou pour Paris. Quel grand facteur de progrès social, c'a été d'avoir un gouvernement qui a mis la hache dans Quebecair, qui a aboli plusieurs centaines d'emplois. Il a dit: Le progrès pour les régions, c'est l'avion à hélices. C'est ça qui nous transporte, l'avion à hélices.

On n'a pas au Québec de politique intégrée de transport en commun qui ferait que tous les citoyens, d'où qu'ils soient sur le territoire, puissent être transportés à un coût raisonnable, à une vitesse raisonnable et à un niveau de confort raisonnable. Ça, M. le Président, je pense que c'est grave parce que, quand on parle en région du transport en commun à Montréal... Le maire de Val-d'Or disait à la radio, il y a deux ans: Bien, l'avion est à l'Abitibi ce que le métro est à Montréal. Et je ne peux pas lui répondre. Je pense qu'il a raison. L'avion est à l'Abitibi ce que le métro est à Montréal, un moyen de transport rapide, un moyen de transport qui a de l'allure.

Or, à cet égard, M. le Président, je résume. Le projet de loi qu'on a devant nous veut augmenter l'impôt foncier qui est régressif, veut diminuer considérablement l'argent que le gouvernement met en matière de transport en commun et, à cet égard-là, est un pas en arrière pour les usagers du transport en commun. Et, en terminant, M. le Président, je voudrais dire au ministre qu'il reste encore ceci de vrai. C'est que l'est de Montréal n'a même pas... L'est de ITle de Montréal, si on le compare à l'ouest de l'île de Montréal... il y a un constat qui reste: dans l'ouest, il y a deux trains de banlieue, l'autoroute 20, l'autoroute 40, le boulevard Hymus, le boulevard des Sources, l'autoroute 13, alouette! Il y a 50 kilomètres de ligne de métro. Et maintenant que l'ouest est desservi, on lit dans The Gazette que pour les francophones de l'est, le métro souterrain, c'est vraiment nettement trop cher et il y a des députés libéraux qui partagent ce point de vue-là.

Donc, M. le Président, le transport en commun va régresser avec ce qu'on a devant nous et, en terminant, je voudrais souligner une chose. Le transport en commun, c'est quelque chose de social, mais ça a aussi une incidence économique. Et pendant que le gouvernement diminue de 1 000 000 000 $ sur cinq ans sa contribution au transport en commun à Montréal et laisse tomber tout projet d'immobilisation... Parce que le métro n'ira pas à Laval, il n'ira pas sur le boulevard Pie IX et il n'ira pas à Rivière-des-Prairies, le métro ne va plus nulle part. La seule chose qui reste peut-être, c'est un pont parce que ça, un pont, ça veut dire des terrains et ça on est sensible à ça.

Mais, M. le Président, je tiens à dire, en terminant, que l'est de Montréal, au point de vue de transport routier, transport en commun, transport par train de banlieue, est défavorisé par rapport à l'ouest et qu'à cet égard-là la mesure qui est devant nous est régressive. Ça accentue un mode de fiscalité qui est régressif, ça abandonne le transport en commun à Montréal, après avoir abandonné le transport par avion en région et que le fédéral ait abandonné le train. Et donc, quant à moi, M. le Président, c'est un grand pas en arrière.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Pointe-aux-Trembles. Sur cette même motion, je reconnais M. l'adjoint parlementaire au ministre des Transports et député de Rousseau.

M. Robert Thérien

M. Thérien: Merci, M. le Président. C'est évidemment avec beaucoup de plaisir, surtout comme parlementaire, mais aussi comme ex-maire, de prendre la parole sur ce projet de loi qui est, en fait, beaucoup plus qu'un projet de loi, c'est une réforme de fond, M. le Président.

J'écoutais - si je peux me permettre de prendre quelques minutes - le député de l'Opposition et je suis convaincu, M. le Président, que les arguments amenés ne feront pas bouger le ministre parce que la faiblesse des arguments, depuis le début du débat, fait en sorte que ça donne raison, justement, au ministre de parler et d'avancer avec sa réforme au niveau de la fiscalité.

M. le Président, comme je le disais tantôt, c'est plus qu'une loi, c'est une réforme de fond dans le monde municipal qui a un but, un objectif: une recherche d'équité, M. le Président. Et ça, c'est fort important. Il n'y a aucune personne au Québec qui est élue qui ne recherche pas l'équité pour ses citoyens. C'est ce que recherche le gouvernement pour ses municipalités, une équité dans toutes les régions du Québec, M. le Président. Et ce n'est pas aujourd'hui qu'on recherche cette équité-là.

Quand on parle de la première réforme fiscale faite par l'ancien gouvernement, on cherchait aussi l'équité. On avait, dans cet objectif-là, un fascicule qui était le fascicule 5, qu'on s'est empressé de mettre sur les tablettes parce qu'on avait peur de parler de ce fascicule qui mettait de l'avant, justement, la voirie. M. le Président, le député d'Abitibi, j'en suis convaincu, va utiliser son droit de parole. Il l'utilisera tantôt, mais le fascicule 5, M. le Président, justement, mettait de l'avant ce que le ministre des Affaires municipales met de l'avant. Si on regarde la réforme qui a été proposée, il y a un mot qu'il faut retenir: partage des responsabilités, partage dans l'utilisation des services, dans l'identification de ceux qui utilisent les services et de ceux qui doivent payer justement les services utilisés. C'est ça, la réforme qui est mise de l'avant. Identifier ceux qui utilisent les services et faire payer ceux qui en bénéficient et non faire payer ceux qui ne les utilisent pas. C'est ça, la loi qui est présentée devant nous. (18 heures)

M. le Président, je laisserai mes autres collègues parler du transport en commun, mais je veux quand même ouvrir une parenthèse sur le transport en commun. Je pense qu'il n'y a pas une personne au Québec qui soit contre le fait que cette loi-là s'attaque aux déficits d'opéra-

tion. C'est ça que le gouvernement du Québec ne veut plus financer. On sait tous que le ministère des Transports va continuer à financer l'immobilisation, mais on dit non au déficit d'opération. Est-ce que quelqu'un de l'Abitibi, est-ce que quelqu'un des Laurentides, quelqu'un de Lanaudière va être contre le fait qu'on impose aux Québécois un déficit que d'autres personnes font en leur nom? M. le Président, c'est ça, l'équité qu'on met de l'avant.

Mais je m'attaquerai surtout, M. le Président, à la voirie locale. On a bien parlé de la voirie locale, qu'on était pour appauvrir nos régions, appauvrir nos petites municipalités. Il faut regarder les deux objectifs de cette réforme au niveau de la voirie tertiaire. Cette réforme est basée, une fois de plus, sur l'équité et elle est basée sur l'effort fiscal déjà entrepris par les municipalités. Quand je parle d'iniquité... justement, je le lui ai rappelé à quelques reprises, au député d'Abitibi. Je vous donne un exemple, M. le Président, la MRC d'Abitibi-Témiscamingue, 400 kilomètres de route au niveau de la MRC, 40 kilomètres seulement aux frais des municipalités, 360 kilomètres subventionnés par l'État, 360 kilomètres, M. le Président, avec une compensation pour les chemins d'hiver offerte depuis des années à l'Abitibi.

Dans mon comté, M. le Président, une seule municipalité, je vous la cite en exemple, Saint-Donat, 115 kilomètres de route, 85 kilomètres à la charge de la municipalité. Pourquoi la municipalité de Saint-Donat a à sa charge 85 kilomètres quand toute une MRC de l'Abitibi a seulement 40 kilomètres? C'est ça que le ministre veut replacer. C'est pour ça que le gouvernement dit que c'est inéquitable. Inéquitable, cette grandeur de routes que l'Abitibi avait, qu'elle avait de compensation que, chez nous... Chez nous, je vous le dis, M. le Président, dans mon comté, on ne pouvait pas en bénéficier. Vous avez un exemple tangible, 400 kilomètres, 360 aux frais de l'État versus mon comté, une municipalité, 115 kilomètres, 85 kilomètres aux frais de la municipalité. Pourquoi ça? Y a-t-il un maire au Québec qui va s'opposer à ce qu'on ramène l'équité? Est-ce qu'il y en a un? Il n'y en a pas, M. le Président. Moi, dès le début de la réforme, dès le début, comme ex-maire et comme parlementaire, j'ai appuyé cette réforme. Bien entendu, il y a eu des aménagements et je pense que c'est tout à fait normal. Le ministre, le gouvernement était prêt à discuter. Vous avez vu le contexte et je pense qu'on a pris nos responsabilités là-dessus, on est allé de l'avant, et on s'aperçoit que le climat redevient beaucoup plus favorable lorsqu'on comprend la loi.

Je vous cite un exemple, M. le Président, une petite histoire tout à fait vécue au Québec, dans une municipalité. Je reçois une lettre d'un des conseils de ville de mon territoire disant qu'il est contre la réforme dite Ryan, qu'il appuie les unions municipales. En regardant le tableau, je m'apercevais que la municipalité baissait de taxe. Je lui ai répondu, M. le Président, un accusé réception disant que j'accueillais sa demande d'appui, mais est-ce qu'il refusait la baisse de taxes du ministre dans sa propre loi parce qu'on ramenait l'équité parce que cette municipalité avait été trop imposée dans le passé. C'est ça qu'elle dit, la réforme, tout simplement.

Ce n'est pas d'aujourd'hui cette recherche d'équité. Au niveau de la voirie locale, on vient tout simplement concrétiser une démarche que le gouvernement avait entreprise en 1986 avec la loi 112. On avait voulu commencer à parler aux unions municipales pour rapatrier la voirie tertiaire. Nos voisins de l'Ontario l'on fait depuis 20 ans, et quand les gens nous citent que les routes sont plus belles en Ontario qu'au Québec, c'en est une des raisons. Mais ce qu'on a souvent oublié de dire dans le débat, M. le Président, c'est que deux budgets au niveau de la voirie locale ont été augmentés: un budget de compensation de 51 000 000 $, qui n'existait pas, pour ceux qui ont déjà fait un effort, ceux qui ont déjà participé à l'amélioration du réseau, et on double la subvention sur le réseau municipal.

M. le Président, on a souvent évité de parler des bons côtés de cette réforme-là. Et là, on vient justement d'abaisser le coût de 43 000 000 $ à environ 20 000 000 $ pour identifier qu'on ne veut pas, justement, approfondir les régions, les petites municipalités. On veut tout simplement donner les dus aux municipalités qui ont déjà contribué. Si c'est ça que l'Opposition conteste, l'iniquité qui existait dans le réseau, bien, il va falloir qu'ils l'expliquent avec des bons arguments. Ces arguments-là ne convainquent personne. Absolument personne.

M. le Président, je voudrais vous parler aussi d'un deuxième volet qui est, vous comprendrez bien, la contribution des services de police. Là aussi, il y avait une iniquité. Je peux vous dire une expérience passée. En 1980, il y a une loi qui a été déposée, la Loi de police, la loi 48, qui imposait un corps de police à toutes les municipalités d'au-delà de 5000 de population. Je peux vous dire le résultat: Aucune ville n'a suivi la loi imposée par le gouvernement à cette époque-ià. Je peux rappeler au député de Jonquière qui, à l'époque, était président de l'UMQ, qu'il a signé, conjointement avec le président de l'UMRCQ et conjointement avec le président du Comité des maires, qui était moi en l'occurrence, M. le Président, à l'effet d'enlever l'imposition de formation d'un corps de police pour payer la Sûreté du Québec. C'est exactement ça que la réforme dit. C'est exactement ça. Qu'on le rappelle, en 1981, le député maintenant de Jonquière a signé un document conjointement avec l'autre union et le représentant des maires qui disait qu'il fallait que ce soit plus équitable; pas seulement les municipalités qui ont en haut de 5000, c'est toutes celles qui ont des services.

Je vous ramène au point de départ de mon

allocution qui disait: II faut bien identifier les services que les gens utilisent et les faire payer aux utilisateurs. C'est bien entendu qu'il peut y avoir beaucoup de discussions sur le tarif, sur les modalités. Là-dessus, je pense que le ministre a très bien indiqué qu'on est capables de s'asseoir et d'écouter les interventions. Déjà, on en a écouté, des interventions, et en particulier celles des députés ministériels qui, sans cesse, ont été consultés par le ministre et qui ont pu faire modifier la tarification; et ce n'est pas encore fini.

On va être en commission parlementaire et j'espère que ça va être court. J'espère que les députés de l'Opposition vont arriver avec des suggestions qui vont venir modifier, bonifier cette recherche d'équité. C'est ça, M. le Président. Il faut se rappeler des gestes qui ont été posés dans le passé. Pourquoi taxer les municipalités d'en haut de 5000 de population en disant que c'est eux? Vous savez que les services de police, ce n'est pas nécessairement une question de population. C'est une question de criminalité, une question d'utilisateurs. Et on a un exemple tout à fait tangible. Il y a des municipalités qui sont à 3500 de population et, l'été, ils sont à 45 000, ils sont à 40 000. Ils utilisent quatre ou cinq fois plus la Sûreté du Québec que d'autres municipalités qui sont en haut de 5000. Heureusement que le Parti québécois, à l'époque, n'avait pas décidé de mettre de l'avant le projet de loi qui était tout à fait inconséquent. Et la preuve que c'était inconséquent, c'est qu'on ne l'a pas imposé et il n'y a pas une municipalité qui a suivi cette démarche.

Le ministre dit que tout le monde au Québec va payer, tout le monde va payer parce que tout le monde utilise la Sûreté du Québec. Et ce n'est pas juste une question - j'écoutais le député de Pointe-aux-Trembles - que le gouvernement du Québec n'arrive pas dans ses finances publiques et va puiser ça. Il y a bien des journalistes, M. le Président, qui disent que c'est une réforme de fond, c'est une réforme nécessaire. Je le rappelle, elle était amorcée aussi dans le fascicule 5 qui disait qu'il faut absolument... On l'a vu par le rapport Parizeau aussi; quand on parlait de la voirie, on parlait des utilisateurs, M. le Président.

Donc, nous dire que c'est une réforme bâclée, que c'est une réforme sans consultation, je pense, M. le Président, que c'est parler tout à fait à travers son chapeau. Une discussion, ça se fait quand quelqu'un est prêt à envisager les conséquences à ces discussions-là, à faire un pas de part et d'autre. Mais moi, je ramène le débat au principe de base, M. le Président. Il faut être équitable. Il faut que le citoyen du Québec paie ce qu'il utilise, et ne paie pas ce qu'un autre n'utilise pas. (18 h 10)

Bien entendu, il y a des services que tout le monde doit payer, que ce soit au niveau scolaire ou que ce soit au niveau des régions éloignées. Bien entendu, bravo! Mais je vous ramène aussi à l'exemple que je donnais. Pourquoi une région bénéficierait-elle de 360 kilomètres de compensation au niveau de l'argent pour l'ouverture de ses chemins d'hiver quand, chez nous, on ne l'aurait pas. Pourquoi ça? Il n'y a pas beaucoup de personnes qui sont capables de me dire pourquoi de l'autre côté.

C'est empirique. C'est tout à fait empirique et même historique, M. le Président. Moi, je vous dis: Plus la loi est connue, plus elle est comprise, M. le Président, plus elle est satisfaisante. Une réforme de base, on ne tombe pas en amour du jour au lendemain avec ça, M. le Président, mais on s'aperçoit à quel point c'est satisfaisant pour les petites municipalités. J'en ai trois dans mon comte qui n'ont pas de corps de police. Leurs comptes de taxes vont diminuer parce qu'elles payaient trop dans le passé. On est d'accord avec ça. On est d'accord pour que tout le monde bénéficie d'une même réglementation au Québec.

Donc, M. le Président, c'était une réforme nécessaire. Je l'ai dit dès le départ, j'ai eu l'occasion d'être au municipal. J'ai eu l'occasion, juste avant, de vivre ces iniquités qu'on ne réglait pas au niveau du fond, qu'on réglait de façon temporaire. Donc, M. le Président, j'ai appuyé cette loi lorsqu'elle a été déposée. Je vais continuer de l'appuyer. Je vais continuer de l'expliquer pour le bien des municipalités au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Rousseau. Mme la députée de Verchères.

Mme Luce Dupuis

Mme Dupuis: Merci, M. le Président. Compte tenu de l'heure, je croyais qu'on pourrait ajourner le débat, mais je pense que je vais profiter de la présence de M. le ministre en Chambre pour lui faire quelques commentaires. Je n'ai pas assisté à son dernier discours, mais j'ai fait sortir les galées, M. le Président, et j'ai étudié attentivement les commentaires du ministre, son discours et tout, et j'ai ressorti quelques points. Ressortir tous les chiffres, il n'en est pas question. Ils ont été sortis et ressortis et je pense que le Québec les connaît par coeur, maintenant.

Bien sûr, il y a un adoucissement de sa réforme. Je dis réforme, mais ça, permettez-moi de douter du mot si c'est une véritable réforme, mais même si on utilise le mot, il y a un adoucissement certain. Mais cependant, ce qui ressort de l'ensemble de cette réforme, c'est la responsabilisation au niveau municipal. Ce qui ressort aussi, c'est le contrôle des dépenses du gouvernement. Ce qui ressort aussi, c'est de vouloir, dans différents champs, remettre - comme je le

disais tantôt - des responsabilités aux municipalités.

Au niveau de la responsabilisation, le ministre de l'Éducation, l'ex-ministre de l'Éducation qui nous a toujours habitués à une certaine rigueur, pour ne pas dire à une rigueur certaine dans ses discours, dans sa manière de faire et tout, parle de responsabilisation. Est-ce qu'on peut parler de responsabilisation en remettant simplement une facture?

Reprenons un processus éducatif, puisque le ministre a déjà été en éducation. Est-ce qu'on peut responsabiliser quelqu'un ou un individu simplement en lui donnant la facture? Je ne le crois pas. C'est peut-être en lui disant: Tu vas payer pour tes choses, cependant, je vais te donner une capacité de payer aussi. Donc, on remet une facture aux municipalités, mais on déduit d'autant ce que les contribuables sont obligés de payer au gouvernement. Mais ce n'est pas ça qui se passe. Il remet la facture, mais il garde le montant de taxation qu'il recevait, lui, et les impôts n'ont pas baissé. Donc, responsabiliser, pour le ministre, c'est simplement redonner une facture à faire payer aux municipalités. Ça, c'est contestable.

Ce qui ressort aussi de la réforme, c'est que le gouvernement, bien sûr, veut contrôler les dépenses, M. le Président. Mais il veut plus que contrôler les dépenses. Il veut aussi baisser la dette. Mais, est-ce qu'il l'a baissée la dette? Il le dit très bien. "Malgré les effets, les mesures de compression très sévères - il le dit lui-même, je prends ses propres paroles - arrêtées par le gouvernement, nous allons, en 1991-1992 vers un déficit de 3 500 000 000 $." Ça ne baisse pas. Donc, on multiplie la taxation aux contribuables. On remet des factures généralement assumées par le gouvernement, on les remet aux municipalités et la dette ne baisse pas. En toute logique, je pense qu'on est en droit, sans vouloir être critique pour être critique, de s'interroger et de se dire: Mais qu'est-ce qu'il fait de notre argent, nom de Dieu? Les impôts ne baissent pas. La taxation, mais c'est incroyable la somme de taxes qu'on remet aux contribuables. Les taxes des municipalités, ça ne baisse pas; on devient... C'est logique d'arriver à la conclusion qu'on est mal administrés, M. le Président.

Mais il y a surtout une chose, une citation du ministre, qui m'a frappée et je pense que c'est la phrase qui m'a le plus frappée dans son discours: "Nul ne peut donner ce qu'il n'a pas". Quelle justesse de la part du ministre, je l'ai reconnu. Cependant, moi, je lui ferai la démarche inverse. Le contribuable non plus ne peut pas donner ce qu'il n'a pas. Le gouvernement dit: Je ne peux pas donner ce que je n'ai pas, donc je vais vous donner des factures. Ça, j'en ai, je vais vous en donner. Mais en bout de ligne, dans son processus, on dit: Le fédéral donne ses factures au provincial, le provincial les envoie aux municipalités. On dirait que le cheminement, le processus intellectuel, le raisonnement du ministre, ça s'arrête là. Il y a oublié le dernier bout, que la municipalité, elle, va donner la facture au contribuable et que le contribuable, il est étouffé de toutes parts. C'est la commission scolaire, ce sont les taxes sur... la TPS, la TVQ, le gaz qui remonte, sur tout, tout. Parce qu'on est taxés sur les produits. Les impôts n'ont pas baissé. Et là, les commissions scolaires taxent encore plus et les municipalités taxent. Là, ils envoient une facture... Le contribuable, il n'est plus capable de payer.

Alors j'ai envie de reprendre, et je reprends les mêmes phrases que lui: Nul ne peut donner ce qu'il n'a pas, mais pas au niveau du gouvernement, au niveau des contribuables. Et au moment ou le gouvernement veut responsabiliser les municipalités, il ne pense pas que, peut-être, les contribuables peuvent être portes à vouloir responsabiliser le gouvernement? Ils ne peuvent pas le faire tout de suite, mais j'ai comme l'impression que lorsque les élections vont arriver, les contribuables vont dire c'est notre... le moment est venu de responsabiliser le gouvernement. On va l'envoyer réfléchir chez lui un petit bout de temps. Ça pourrait peut-être ressembler à ça.

Et il continue; une autre chose qui m'a frappée, différentes petites choses... Il dit: Si le gouvernement doit mettre fin à certaines subventions parce qu'il a absolument besoin des sommes ainsi versées, il doit absolument les récupérer pour les employer à des fins plus directement reliées à ses responsabilités propres. Il continue; les revenus additionnels, et là, je vais vous lire quelques passages, et vous allez voir l'esprit avec lequel le ministre a fait sa réforme. Je dis bien, entre guillemets, sa réforme. Tout d'abord des revenus. Il permet... tu sais, il fait une faveur aux municipalités. Il dit: Je vous permets d'aller chercher de l'argent. Tout d'abord, des revenus additionnels de 147 600 000 $, 147 000 000 $ oui, et demi, se retrouveront dans les caisses des municipalités et des organismes publics de transport en commun sans que ces organismes aient à lever le petit doigt pour y avoir accès, et ce, dixit le ministre. (18 h 20)

Là, ça me dépasse, M. le Président. Vous avez le droit d'aller chercher de l'argent, je vous autorise à aller chercher de l'argent. Vous n'avez pas le petit doigt à lever. Mais ce qu'il oublie, c'est que les maires, les conseillers, les conseils municipaux, qui sont près de la population, M. le Président, qui les rencontrent a tous les jours, qui sont sensibles aux besoins de ces gens-là, qui sont sur le terrain avec eux pour recueillir les commentaires, vont leur dire que ça vient de leurs poches. Ils vont leur dire à leurs maires et puis a leurs conseillers, oui, on ne sera pas capables quand les comptes de taxes vont arriver. Et pensez-vous que les maires, lorsqu'ils ont contesté, et puis que l'Union des municipali-

tés a contesté... Une primeur au Québec, que des élus se permettent de venir sur la colline parlementaire pour contester d'autres élus d'un niveau supérieur. Ils le savent, les maires, ce qui va leur arriver.

J'étais à une sortie de comté en fin de semaine, et puis je rencontre un maire, en l'occurrence - j'ai 18 petites municipalités - qui me dit: Ça n'a pas de bon sens. Je ne vous dirai pas les mêmes paroles, ce n'est pas parlementaire. Ça veut dire... oui simplement, je veux vous dire, M. le Président, il a dit que ça n'avait pas de bon sens. Puis il dit que le pire, là, c'est que ce sont les citoyens... Ça n'est pas tout le monde qui suit ça, les débats politiques. Vous savez, les politiciens ont perdu tellement de crédibilité que ça n'est pas tout le monde qui suit ça. Il dit: C'est quand ils vont avoir la facture, dans deux ans, dans trois ans à peu près, là, toute la masse va arriver, puis, là, ils vont savoir exactement ce que... Il dit: Moi, je viens en élection cette année-là. Je suis fini, il dit. C'est de même qu'il m'a dit ça. Je suis fini, je suis brûlé... Bien oui, mais je lui dis, dis-leur que ce n'est pas toi. Dis-leur que c'est le gouvernement qui fait ça. Mais il dit, il faudrait les informer. J'ai dit: Fais donc ça, informe-les donc tout de suite.

C'est pour ça que je trouve ça complètement irresponsable lorsqu'il dit qu'ils n'auront peut-être pas à lever le petit doigt, lis n'auront peut-être pas à lever le petit doigt, sauf qu'ils vont voir la réaction sur le terrain tout de suite, par exemple. Ils vont la vivre, eux, cette réaction-là.

Tout ça m'amène à dire que je suis déçue, mais énormément déçue, pas de la réforme, mais du ministre qui nous avait habitués, on le convient tous, à énormément de rigueur intellectuelle. On disait qu'il faisait bien ses devoirs. C'est à ça qu'il nous avait habitués. Là, il a oublié complètement une étape de ses devoirs, il a oublié la réalité vécue sur le terrain. Et contrairement à ce que dit son collègue, le ministre de la santé, qui dit: Ma réforme de la santé est pour le citoyen... Il faudrait que le ministre de la santé, le ministre Côté dise ça à son collègue, le ministre des Affaires municipales parce que le ministre des Affaires municipales a complètement oublié le citoyen, en bout de ligne, il a oublié que c'était lui, le payeur de taxes.

Je pense que j'ai le temps de vous faire une "similitude". Ça me fait penser quand on arrive au niveau de la spécialisation en éducation et qu'un étudiant peut avoir trois ou quatre professeurs qui ont trois ou quatre matières différentes. On retrouve ça au secondaire, au cégep, à l'université. Je me souviens que les étudiants du secondaire, parce qu'à l'époque j'enseignais au secondaire - j'ai enseigné une couple d'années au secondaire, M. le Président, je vous fais des confidences - ils reprochaient quoi aux professeurs? Ils disaient: Ça n'a pas de bon sens, chacun nous donne des devoirs pour remplir notre soirée. Vous savez, ce qu'on disait, des devoirs. Ça me fait penser quand je disais que M. Ryan a mal fait ses devoirs. L'autre professeur fait la même chose et l'autre professeur fait la même chose et ils disent: Finalement, ça n'a pas de bon sens, on est débordés. Jusqu'à temps que les étudiants rassemblent leurs professeurs et leur disent: Écoutez, là, vous ne pourriez pas vous concerter un peu? Vous ne pourriez pas coordonner ça pour qu'en bout de ligne un sache les devoirs qu'il fait faire et la masse de travaux que l'étudiant aura à faire?

Je n'ai pas pu ne pas faire une "similitude" avec ce qui se passe là. La commission scolaire envoie son compte. Les municipalités vont envoyer leur compte. La TPS arrive par-dessus, les frais de scolarité. Mais en bout de ligne, c'est toujours le même contribuable qui paie. La masse devient tellement grosse qu'il ne sera plus capable de payer. On le sait très bien, M. le Président, la classe moyenne est en train de basculer dans la classe pauvre, avec un taux de chômage comme on a présentement. On le sait, il y aura de moins en moins de gens capables de les payer. La capacité de payer des contribuables est arrivée à son point de saturation. Si seulement le gouvernement avait fait la démarche inverse, en prenant la capacité de payer des contribuables, le niveau de taxation du Québec par rapport à d'autres provinces, par rapport à leur capacité de payer, peut-être qu'on serait arrivé à un gouvernement qui aurait fait un examen de conscience et qui aurait dit: Peut-être qu'on gaspille à certaines places ou peut-être qu'on gère mal. Peut-être que là, il remettrait en cause sa décision dans des projets comme HydroQuébec, et j'en passe.

Je finirai, je conclurai, M. le Président, en disant: Nul - j'invite le ministre à y réfléchir - ne peut donner ce qu'il n'a pas. Nous sommes arrivés à un point où le contribuable n'a plus la capacité de payer ce que le gouvernement et les différents corps municipaux lui demanderont de payer. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Verchères.

Alors, compte tenu de l'heure, j'ajourne les travaux de cette Assemblée à demain, le mercredi 29 mai, 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 27)

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