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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le lundi 3 juin 1991 - Vol. 31 N° 132

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Quatorze heures six minutes)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Présence du président de la section du Maine de l'AIPLF

J'ai le très grand plaisir de souligner la présence, dans les galeries, du président de la Chambre des représentants de l'État du Maine, président de la National Conference of State Legislatures et président de la section du Maine de l'AIPLF, M. John Martin.

Présence du ministre du Travail du Manitoba

Également, j'ai le très grand plaisir de souligner la présence du ministre du Travail, ministre responsable de la Fonction publique et président de la Commission des accidents du travail du Manitoba, M. Darren Praznik.

Nous allons maintenant procéder aux affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Alors, M. le Président, je vous invite à appeler l'article d du feuilleton de ce matin.

Projet de loi 207

Le Président: Alors, à l'article d du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi 207, Loi concernant la succession de Cora Frances Dunkerley. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport.

En conséquence, M. le whip en chef du gouvernement, au nom de M. le député de Sherbrooke, présente le projet de loi d'intérêt privé 207, Loi concernant la succession de Cora Frances Dunkerley. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission des institutions

M. Pagé: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des institutions et que M. le ministre de la Justice en soit membre.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Article h, M. le Président.

Projet de loi 270

Le Président: À l'article h du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi 270, Loi concernant la ville de Sept-îles. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport.

En conséquence, M. le whip de l'Opposition, au nom de M. le député de Duplessis, présente le projet de loi d'intérêt privé 270, Loi concernant la ville de Sept-îles. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Pagé: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements et pour que M. le ministre des Affaires municipales en soit membre.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Article i.

Projet de loi 280

Le Président: À l'article i du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi 280, Loi concernant la ville de Sherbrooke. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des

projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport.

En conséquence, M. le whip en chef du gouvernement, au nom de M. le député de Sherbrooke présente le projet de loi d'intérêt privé 280, Loi concernant la ville de Sherbrooke. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Pagé: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements et que le ministre des Affaires municipales en soit membre.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Article j.

Projet de loi 285

Le Président: À l'article j du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi 285, Loi concernant la ville de Saint-Hyacinthe. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport.

En conséquence, M. le whip en chef du gouvernement, au nom de M. le député de Saint-Hyacinthe, présente le projet de loi d'intérêt privé 285, Loi concernant la ville de Saint-Hyacinthe. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Pagé: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements et que le ministre des Affaires municipales en soit membre.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

Dépôt de documents.

Dépôt de rapports de commissions. M. le président de la commission du budget et de l'administration et député de Vanier.

Étude détaillée du projet de loi 126

M. Lemieux: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a siégé les 8 et 29 mai 1991 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 126, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les régimes de retraite des secteurs public et parapublic. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Le Président: Votre rapport est déposé. Dépôt de pétitions. M. le député de Lavio-lette.

Retirer la proposition de coupure dans les subventions publiques au transport en commun

M. Jolivet: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 1446 pétitionnaires, citoyennes et citoyens du Québec. Les faits invoqués sont les suivants: "Considérant que la politique de coupure de subventions publiques du gouvernement à l'égard du transport en commun constitue une véritable atteinte à la survie même de ce service public auquel la population a droit; "Considérant que les victimes d'une détérioration du transport en commun seraient les personnes âgées, les jeunes, les plus démunis et la population en général, sans compter l'impact d'une telle mesure sur l'emploi, l'environnement et l'achalandage du réseau routier."

L'intervention réclamée se résume ainsi: "Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du ministre responsable et du gouvernement afin de retirer sa proposition de coupure dans les subventions publiques accordées au transport en commun."

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Votre pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit, ou de privilège ou sur un fait personnel.

Je voudrais vous aviser qu'après la période de questions il y aura un vote reporté sur la motion de censure présentée par M. le leader de l'Opposition officielle et débattue le jeudi 30 mai dernier.

Nous allons maintenant procéder à la période de questions et réponses orales des députés. Je vais reconnaftre, en première question principale, M. le chef de l'Opposition.

QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES

L'objet des représentations du premier ministre au ministre fédéral Joe Clark

M. Parizeau: m. le président, le premier ministre rencontre cet après-midi m. joe clark, le ministre fédéral des affaires intergouvernementales canadiennes qui, si on fie aux déclarations de ce dernier, va chercher à convaincre le premier ministre du québec des bonnes intentions du reste du canada, en général, et du gouvernement fédéral, en particulier.

Le premier ministre a-t-il l'intention, à l'occasion de cette rencontre, de dénoncer les seuls signes concrets tangibles que nous ayons, à l'heure actuelle, des intentions du gouvernement fédéral, c'est-à-dire, depuis 15 jours, l'intrusion dans le domaine de l'éducation et de la formation professionnelle, l'intrusion dans le développement régionale et, s'il faut se fier au ministre délégué aux Forêts, maintenant l'intrusion dans les forêts?

Le premier ministre a-t-il l'intention, auprès de M. Joe Clark, de demander comme première manifestation de bonne volonté du gouvernement fédéral qu'il se retire des intrusions qu'il a annoncées dans ces trois Chambres?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, je serai très heureux d'accueillir M. Clark dont la nomination, d'ailleurs, a été soulignée positivement par les différents partis politiques, au Québec comme à l'extérieur. Je dirai à M. Clark ce qui est bien connu, c'est que nous avons mis l'accent, notamment, si je parle au nom de mon parti, sur le fédéralisme efficace. Nous ne pouvons plus accepter ce genre de fédéralisme compétitif que nous avons au Québec depuis un demi-siècle et qui a conduit le Canada dans une crise financière, avec comme conséquences des coupures brutales aux autres administrations en même temps que des taxes très élevées qui forcent également les autres administrations à taxer et à couper.

Donc, j'ai l'intention de lui souligner que la politique du gouvernement, c'est de rechercher non plus un fédéralisme compétitif, mais un fédéralisme efficace, de manière à pouvoir assainir les finances publiques de l'ensemble du pays.

Le Président: En question complémentaire, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: Tout en comprenant, M. le Président, que ces préoccupations du premier ministre l'honorent, est-ce qu'il pourrait nous dire s'il fera état devant M. Clark de cette proposition présentée par l'Opposition la semaine dernière, acceptée par ceux de son parti qui étaient sur les banquettes ministérielles, à l'effet que l'Assemblée nationale condamne la volonté inacceptable du gouvernement fédéral exprimée dans le discours du trône à l'effet de s'immiscer davantage dans les secteurs de l'éducation et de la formation professionnelle. Puisque l'Assemblée nationale a voté cela à la quasi-unanimité, le premier ministre a-t-il l'intention, au moins, de transmettre à M. Clark les voeux de l'Assemblée nationale?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Je croyais, M. le Président, que le chef de l'Opposition m'avait compris. J'ai bien spécifié que ce genre de fédéralisme où les deux niveaux de gouvernement sont en concurrence et surtout quand ça s'applique à des champs de juridiction provinciale, comme je l'ai dit la semaine dernière, n'est pas acceptable. Donc, je crois avoir répondu au chef de l'Opposition de manière à le rassurer sur les discussions que j'aurai avec M. Clark.

Le Président: En question complémentaire.

M. Parizeau: M. le Président, là encore, les intentions du premier ministre l'honorent, sauf qu'à l'occasion de ce vote, il n'était pas en Chambre, d'où ma question.

Des voix: Ha!

M. Parizeau: Je voulais quand même faire confirmer ça. Puis-je demander au premier ministre s'il a l'intention de manifester auprès de M. Clark la dénonciation de cette intrusion du gouvernement fédéral dans le développement régional qu'a si pesamment soulignée son ministre de la Justice et ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, je crois qu'il est un peu inélégant de la part du chef de l'Opposition...

Une voix: Oui, c'est exact!

M. Bourassa: ...et ce n'est pas un trait qui est caractéristique de sa personnalité de souligner mon absence mercredi dernier. Il sait fort bien que mercredi est une journée du Conseil des ministres, donc, c'est une journée plus exigeante pour le chef du gouvernement avec toutes les rencontres que ça suppose, avant comme après la réunion du Conseil des ministres.

Une voix: Jeudi, il n'était pas là!

M. Bourassa: Je ne vois pas pourquoi il

répète constamment cette absence de ma part mercredi dernier. J'essaie d'être présent au maximum possible. Ceci étant dit, à la suite de sa première question et à la suite de sa deuxième question, j'ai répété qu'il était important, actuellement, non seulement pour le Québec, mais également pour l'ensemble des provinces, de souligner l'importance d'un changement profond dans le fonctionnement du fédéralisme et j'ai autant d'opportunités à le faire dans cette rencontre avec M. Clark. Je crois que l'opportunité se présente de lui souligner cet objectif du gouvernement, en citant les exemples qu'il vient d'énumérer dans ses questions.

Le Président: Toujours en question complémentaire.

M. Parizeau: M. le Président, je veux demander au premier ministre: Est-il exact que le Conseil des ministres aurait, au début du mois de mai, accepté, par arrêté en conseil, certaines des caractéristiques principales de cette intrusion du gouvernement fédéral dans l'éducation et la formation de la main-d'oeuvre que la plupart d'entre nous avons stigmatisée en Chambre la semaine dernière?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Comme cette question s'adresse également au ministre de l'Éducation, je lui demanderais de répondre.

Le Président: Alors, M. le ministre de l'Éducation.

M. Pagé: M. le Président, pour répondre à la question du chef de l'Opposition, ce qui est arrivé est très simple et très clair et ça va dans le sens de la position du gouvernement du Québec. Essentiellement, certaines commissions scolaires au Québec, jusqu'à tout récemment, signaient elles-mêmes des ententes avec le ministère de l'Emploi et de l'Immigration du gouvernement canadien pour l'application de certains programmes en fonction de la formation et, plus particulièrement, de l'éducation des adultes, entre autres. C'était à un point tel que ça débordait même sur certains programmes pour l'aide au soutien à l'éducation, notamment aux décrocheurs.

Ce que le gouvernement du Québec a fait par sa décision du 1er mai, ça va dans le sens de la position du gouvernement, à savoir qu'à l'avenir, pour toute commission scolaire qui veut bénéficier d'un programme du gouvernement canadien, ça doit faire l'objet d'une entente entre le ministère de l'Éducation du Québec et le ministère de l'Emploi et de l'Immigration avec, évidemment, les autres ministres concernés, premièrement, et, deuxièmement, ça vient établir une règle comme quoi, à l'avenir, aucune com- mission scolaire ne pourra participer à un tel programme sans que le gouvernement du Québec y soit. Ça, c'est défendre les intérêts du Québec, M. le chef de l'Opposition. (14 h 20)

Le Président: M. le chef de l'Opposition, toujours en complémentaire.

M. Parizeau: Une dernière question, M. le Président, toujours dans le sens de ces intrusions, est-ce qu'il n'y a pas un arrêté en conseil passé depuis déjà plusieurs années qui interdit à un corps public québécois de traiter directement avec le gouvernement fédéral, sans obtenir l'approbation du ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: J'ai répondu la semaine dernière, je crois, au chef de l'Opposition qu'une loi avait été adoptée à cet égard-là. Donc, je ne vois pas en quoi le gouvernement du Québec aurait la possibilité de ne pas respecter les lois de l'Assemblée nationale. Donc, sa question est tout à fait inutile et insinuante, comme ça lui arrive.

Le Président: En question principale maintenant, M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition.

Le respect de la juridiction du Québec en matière de développement régional

M. Brassard: M. le Président, dans une charge à l'emporte-pièce, le mercenaire de Brian, Benoît Bouchard, ministre fédéral chargé du développement régional au Québec, accuse le ministre québécois des Affaires intergouvernementales canadiennes de faire de l'obstruction systématique dans le dossier et maintient son intention de faire ce qu'il veut, que le ministre québécois soit d'accord ou non: véritable déclaration de guerre. On est loin de la bonne entente, de l'harmonie et de la concorde que le ministre célébrait en juin 1988, lors de la signature de l'entente fédérale-provinciale sur le développement des régions. Fini les embrassades.

Or, à la guerre, il n'y a pas 36 façons de se comporter. La première, c'est qu'on la fait en prenant les moyens de la gagner; la deuxième, on renonce à combattre et on capitule, à moins qu'on ne se contente, comme le signalait l'article de L'actualité à propos du ministre, de passer toute sa vie à faire de la mise en scène, à monter de grands événements à l'allure savante où il campe, la plupart du temps, le rôle...

M. Pagé: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. Le député de Lac-Saint-

Jean. Alors, question de règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, je crois que vous venez d'assister à un très bel exemple du genre de question qui suscite des débats, qui entraîne des questions de règlement de la part de mon collègue, le leader parlementaire de l'Opposition et de moi-même. Venez-en donc à l'essentiel. Mettez de côté le caricatural et venez-en à l'essentiel, ça va bien aller.

Le Président: S'il vous plaît! Alors, je vous demanderais, M. le député de Lac-Saint-Jean, de poser immédiatement votre question.

M. Brassard: Je la pose immédiatement. Est-ce que je peux déposer? Non! Ma question est très simple. Avant toute chose, quelles sont les intentions réelles du gouvernement à l'égard de cette guerre qui vient d'éclater en matière de développement régional? A-t-il l'intention de poursuivre la guerre et de la gagner ou annonce-t-il, à court terme, une capitulation après s'être contenté de quelques escarmouches pour la galerie? Où est-ce qu'on s'en va?

Le Président: M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

M. Rémillard: M. le Président, tout d'abord, le député de Lac-Saint-Jean me permettra de dire que, non, ça ne soulèvera pas de débat, l'article de L'actualité auquel il se réfère. Il aurait pu se référer aussi à la caricature, mais il s'est limité au texte. D'ailleurs, il y a assez de matériel pour revenir à plusieurs reprises dans cet article-là, je lui fais confiance, il y en a, il y en a, il y en a! Je crois à la liberté de la presse, M. le Président, et je crois à l'intelligence aussi des lecteurs qui sont capables de faire la distinction entre un portrait et des règlements de compte. Alors, à ce niveau-là, M. le Président...

Des voix: Bravo!

M. Rémillard: ...on ne peut pas plaire à tout le monde et même à ses anciens collègues. Qu'est-ce que vous voulez? Enfin!

M. le Président, quant à la question elle-même, je devrais dire, tout d'abord, que ce que je retiens de M. Bouchard, de ses commentaires d'aujourd'hui, c'est qu'il reconnaît que le Québec n'a pas sa juste part. Ce qu'il nous dit: Bien, oui, je n'ai que 247 000 000 $. Je comprends que ce n'est pas assez, ce n'est pas suffisant, mais, au moins, travaillons à pouvoir dépenser ces 247 000 000 $. Je veux bien, mais, au moins, qu'il se mette à table avec nous et qu'on puisse avoir un développement coordonné entre les différents ministères qui veulent avoir sur le terrain, dans nos régions, un développement économique ordonné. Ce que nous voulons, M. le Président, c'est strictement de l'efficacité, ce n'est pas une guerre de drapeaux qu'on veut faire. Cependant, de la façon qu'Ottawa veut procéder, ils font en sorte qu'on ne peut, sous aucun prétexte, avoir un développement économique concerté parce qu'ils viennent s'immiscer dans des compétences provinciales. Et ça, il n'y a pas un seul gouvernement québécois qui a accepté que Québec procède de cette façon-là. Et nous, on ne l'acceptera pas non plus. M. le Président, qu'on compte sur nous, les pouvoirs du Québec, nous, on ne les abandonne pas.

Le Président: En question complémentaire.

M. Brassard: Est-ce que c'est exact que vous faites de l'obstruction systématique?

Le Président: M. le ministre.

M. Rémillard: II est exact, M. le Président, qu'on s'oppose systématiquement à ce que le Québec vienne s'immiscer dans des compétences exclusives du Québec. Il est exact qu'on s'oppose systématiquement que le fédéral...

Une voix: Ottawa.

M. Rémillard: Excusez-moi, j'ai fait un lapsus. On s'objecte à ce qu'on ne puisse pas avoir un développement économique qui serait garant d'une économie forte au Québec, et ça passe par les provinces. Il faut qu'il y ait une coordination, une concertation entre les deux niveaux de gouvernement. Notre seul objectif, c'est cette efficacité. Notre seul objectif, c'est d'avoir une coordination entre les deux niveaux de gouvernement, respectant les champs de compétence pour que, lorsqu'on dépense 1 $, il soit le plus rentable possible pour la population.

Le Président: Question complémentaire.

M. Brassard: M. le Président, quels sont les moyens juridiques, administratifs et politiques que vous entendez déployer pour tenter de remettre Ottawa à sa place et assurer ainsi le respect de la maîtrise d'oeuvre du Québec en matière de développement régional? Parce que le ministre doit être conscient qu'à défaut de moyens concrets, il a toutes les allures d'un général fantoche qui lance des armées fantômes à l'assaut.

Le Président: M. le ministre.

M. Rémillard: M. le Président, le député de Lac-Saint-Jean a l'image facile. Mais ça met quand même un peu de couleur. Des fois, il est intéressant. Il est bon...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rémillard: ...ça met un peu de... Ça met un petit peu... Ça vient... Mais, quelquefois, c'est meilleur que celle-là. Ce n'est pas sa meilleure. Mais dans ce contexte-là, M. le Président, on a différents moyens juridiques, oui, qui sont étudiés, mais avant tout, c'est au niveau politique qu'on peut le régler et j'ai été informé des discussions qu'il peut y avoir actuellement entre les fonctionnaires du Québec et les fonctionnaires d'Ottawa et il m'apparaît que, peut-être, il y a moyen de pouvoir trouver une façon de faire plus coordonnée et que, peut-être, les choses vont s'orienter mieux dans l'avenir. Je l'espère en tout cas.

Le Président: En question additionnelle toujours, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Si ça ne marche pas, si vous ne vous entendez pas, c'est quoi les moyens que vous entendez prendre? Est-ce que, comme vous l'avez indiqué à un journaliste, vous entendez contraindre les organismes qui relèvent du développement régional, qui s'occupent du développement régional, de ne pas faire affaire, de ne pas faire de transaction, de ne pas conclure d'entente avec le gouvernement fédéral?

Une voix: Comme le décret. Le Président: M. le ministre.

M. Rémillard: C'est une question hypothétique, M. le Président. Alors, laissons aller les choses. Des discussions peuvent avoir lieu, dans le contexte du respect des compétences exclusives du Québec. Voyons ce que les prochaines discussions peuvent nous amener. Et je peux vous assurer une chose, c'est qu'on ne cédera pas d'un pouce sur ce respect des compétences du Québec. Et je crois qu'il est possible d'établir cette coordination, cette concertation entre les deux niveaux de gouvernement, respectant l'esprit de l'EDER tel que négocié en 1984 et renégocié en 1988. Et c'est dans cet esprit-là qu'on pourra avoir la juste part du Québec parce que, actuellement, le Québec n'a pas sa juste part en ce qui regarde le développement économique régional et qu'on pourra travailler en étroite concertation avec le fédéral pour le développement économique de nos régions. On se souvient, M. le Président, que dans les auditions de Bélanger-Campeau, autant que tous les groupes qui sont venus devant la Commission Bélanger-Campeau, tous ces groupes ont demandé que le Québec puisse agir d'une façon exclusive en concertation avec Ottawa et c'est ce que nous allons faire.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

La notion de délai raisonnable dans les cas d'agression physique ou sexuelle

Mme Harel: Alors, M. le Président, après la décision de la Cour suprême dans l'affaire Askov, à l'effet de garantir à tout accusé le droit d'être jugé dans un délai raisonnable, le gouvernement ontarien réagissait rigoureusement et nommait notamment 27 nouveaux juges. Au Québec, des dizaines de personnes accusées de crimes graves, agressions sexuelles, vols à main armée, ont, depuis octobre dernier, été libérées, semant la consternation et la désapprobation dans toute la population. Il a fallu un tollé de protestation, vendredi dernier, pour que le ministre de la Justice porte enfin en appel la libération d'un accusé du viol d'une jeune fille de 16 ans. Le même jour, cette fois, à la fin d'un procès, un autre accusé était libéré de 14 accusations d'agression sexuelle contre quatre enfants. (14 h 30)

Le ministre de la Justice, en sa qualité de Procureur général, a-t-il l'intention de porter également en appel cet autre jugement de libération prononcé cette fois par la juge Dubreuil et entend-il systématiquement faire préciser cette fameuse notion de délai raisonnable, surtout dans les cas de violence physique ou sexuelle contre des personnes, petites ou grandes, M. le Président?

Le Président: M. ministre de la Justice.

M. Rémillard: Nous avons décidé vendredi, je l'ai annoncé comme Procureur général, d'aller en appel de certaines décisions en ce qui regarde ces délais déraisonnables. Donc, Mme la députée comprendra que je dois quand même être prudent, comme Procureur général. Je dois respecter la règle du sub judice. Cependant, ce que je peux lui dire, c'est que dans l'affaire Askov, dans son jugement même, la Cour suprême a bien mentionné que le Québec pouvait servir d'exemple quant aux délais et que le Québec était probablement le mieux préparé, la province la mieux préparée pour faire face à cette décision de la Cour suprême.

Il ne faut pas exagérer quand j'entendais, des dizaines de crimes de très grande importance. Il faut faire bien attention, ce n'est pas des dizaines de crimes de grand importance. Il y a eu, de fait, des causes qui se sont produites. Nous allons en Cour d'appel. On va faire préciser le jugement Askov de la Cour suprême. C'est pour nous extrêmement important. Maintenant, M. le Président, nous avons pris aussi les mesures qui s'imposaient à la suite de la décision Askov, et j'ai aussi ici devant moi un rapport qui démontre que, dans des endroits comme au palais de justice de Joliette où vous aviez en octobre 1990, 320 jours de délai, on se retrouve maintenant à 233. Vous aviez à Saint-Jérôme 240

jours de délai, on se retrouve à 45 jours de délai. À Valleyfield on est passé à 27 jours de délai, maintenant en mars 1991, parce qu'on a pris les moyens nécessaires, parce qu'on a ajouté de nouvelles salles aussi et parce que tout le monde y met la main.

Le Président: En question complémentaire.

Mme Harel: Alors, M. le Président, est-ce que le ministre de la Justice reconnaît que la diminution des délais dans les districts judiciaires de Saint-Jérôme et de Joliette est due au fait que des centaines, des centaines de dossiers ont simplement été annulés et que dans des cas graves - et je veux lui rappeler, est-ce que le ministre se rappelle ces cas d'agression sexuelle sur des enfants, ces cas de vol qualifié avec possession d'armes, de voies de fait qui ont été annulés dans les districts judiciaires de Joliette et de Saint-Jérôme, il y a à peine trois mois? Comment le ministre peut-il considérer que la situation s'est améliorée, M. le Président, puisque dorénavant ces districts assignent au district de Montréal les cas qui prennent beaucoup trop de temps?

Comment peut-il ne pas constater que le Québec a perdu sa réputation de ne pas allonger les délais déraisonnablement? Et entend-il - je lui repose la question - quant au jugement de la juge Dubreuil porter également en appel cette libération d'un accusé de quatorze voies de fait sur des jeunes personnes, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Rémillard: M. le Président, tout d'abord, les jugements qu'on doit porter en appel, on les portera en appel. J'en ai annoncé un, vendredi. D'autres pourront suivre. On verra. Mais je dois dire aussi qu'il ne faut pas exagérer la situation. Ça ne donne absolument rien d'exagérer la situation. Il y a eu des cas peut-être difficiles, oui, j'en conviens. On a pris les moyens pour y remédier. Et les statistiques que je donne ici sont quand même très intéressantes. De nouveaux juges seront nommés. Nous allons discuter, ce soir, en commission parlementaire, un projet de loi pour en nommer cinq nouveaux. Nous en avons, l'an dernier, en 1990, nommé six nouveaux.

Ce sont de nouveaux juges qui viennent porter main forte à l'ensemble des juges de la Cour du Québec. Alors, dans ce contexte-là, M. le Président, je peux dire qu'on prend les moyens pour faire face à la situation et aller en appel pour faire préciser le jugement Askov, et avoir les moyens et le matériel dans nos palais de justice, et aussi au point de vue du personnel tant au niveau des juges que des autres personnels nécessaires, pour faire respecter ces délais comme on peut le voir dans l'esprit du jugement Askov.

Le Président: Alors, en question complémentaire, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Dans le cas du district de Joliette précisément, n'est-il pas exact qu'il y a eu le renvoi de 150 causes précisément à cause de délais, dont une des causes est l'agression d'une jeune fille qui, elle, n'a jamais été portée en appel comme cause?

Le Président: M. le ministre.

M. Rémillard: M. le Président, je pourrai prendre avis de cette question. Je n'ai pas les informations ici devant moi, mais je pourrai prendre avis de la question et revenir au leader de l'Opposition un peu plus tard.

Le Président: Toujours en additionnelle, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Est-ce que le ministre de la Justice reconnaît que les nouvelles salles d'audience, notamment à Saint-Jérôme, sont restées vides faute de juges pour y siéger? Et comment peut-il expliquer qu'il a fait adopter des législations, la semaine dernière, sans considérer comme une priorité celle-là même qu'il veut nous faire adopter cette nuit concernant la nomination de nouveaux juges, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Rémillard: Je ne sais pas si je comprends vraiment le sens de la question de Mme la députée, mais je lui ai dit tout à l'heure qu'il y aurait cinq nouveaux juges de nommés et que nous aurons l'occasion, comme Assemblée nationale, de nous pencher en commission parlementaire sur cette loi en nommant cinq nouveaux juges. Dans ce contexte-là, donc, il y a des nouveaux juges aussi qui vont pouvoir porter main forte à Saint-Jérôme. Je suis allé à Saint-Jérôme, j'y suis allé il y a quelques semaines. Je suis allé faire trois visites à ce palais de justice. J'ai suivi les travaux de près et je suis encore allé d'une façon bien impromptue. J'étais dans les parages et je suis allé à Saint-Jérôme. Je suis allé voir. Je suis allé visiter chaque salle. Je suis allé voir comment ça se passait. J'ai eu les commentaires des gens. Je suis allé voir les juges et je peux vous dire que, de l'avis de tout le monde, la situation s'est très grandement améliorée. Bien sûr qu'il y a encore beaucoup à faire, nous allons compléter, mais il y a déjà beaucoup qui a été fait et les statistiques sont là pour le démontrer.

Le Président: Pour une dernière question additionnelle, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Harel: Est-ce que le ministre de la

Justice reconnaît qu'il manque toujours de juges, notamment à Saint-Jérôme et à Joliette? Et puisqu'il y est allé, a-t-il pris connaissance de cette demande expresse du juge coordonnateur des services de ces palais de justice qui réclame la nomination expresse de nouveaux juges, considérant que des salles d'audience restent vacantes du fait que des juges n'y sont pas pour y siéger?

Le Président: M. le ministre.

M. Rémillard: Écoutez, pendant que vous parliez avec le leader de l'Opposition, c'est exactement la question à laquelle j'ai répondu. Ce que j'ai dit, c'est qu'il y a cinq juges qu'on va pouvoir nommer à la suite de cette loi. Cinq! Alors, à partir de là... D'ailleurs, si nous avons cette loi prévoyant cinq juges, c'est parce qu'en concertation avec la magistrature, le juge en chef Gobeil que j'ai rencontré à plusieurs reprises, et les juges en chef, on est arrivé à la conclusion qu'avec cinq juges on pourrait faire face à la situation, toujours en vous rappelant que, l'an dernier, on en avait ajouté six et que la Cour suprême, dans l'affaire Askov, dit très bien que le Québec peut être cité en exemple quant au respect des délais. Alors, je crois que les travaux que nous allons faire ce soir, en acceptant ce projet de loi, cinq nouveaux juges vont nous permettre de faire face à la situation avec plus de célérité en plus des décisions que nous pourrons avoir pour faire préciser la réelle portée de l'affaire Askov. Nous allons avoir un tableau complet, donc, de la situation.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Taillon.

Fermeture éventuelle des installations de SNC à Valcartier

Mme Marois: Merci, M. le Président. Nous sommes informés depuis déjà quelques temps que la société SNC devrait fermer ses installations à Valcartier, risquant ainsi de mettre à pied plus de 300 travailleuses et travailleurs. Or, ces mises à pied seraient dues au fait que le fédéral ne respecte pas l'engagement qu'il avait pris à l'égard de l'entreprise quant au fait de contracter pour 600 000 heures-personnes d'emploi pour Valcartier. Est-ce que le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie a fait des interventions, comme le demandent d'ailleurs les travailleuses et les travailleurs de l'entreprise, pour qu'Ottawa respecte ses engagements à l'égard des travailleuses et des travailleurs de l'entreprise?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie.

M. Tremblay (Outremont): M. le Président, ça me rappelle un peu l'homme d'affaires qui avait des charrettes avec des animaux et qui continuait à faire beaucoup d'articles qui servaient ces charrettes-là, avec la conséquence qu'aujourd'hui la députée de Taillon me pose une question sur une entreprise qui n'a peut-être plus de marché à cause du gouvernement fédéral. La députée de Taillon le sait très bien. Les démarches ont été entreprises, le député de Chauveau, à plusieurs reprises, a rencontré les intervenants et la société SNC négocie avec le gouvernement fédéral soit le contrat, soit une compensation pour le manque de commandes pour assurer la réussite de ces entreprises. (14 h 40)

Le Président: Question complémentaire.

Mme Marois: Est-ce que le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie n'aurait pas une proposition de politique industrielle en matière de substitution? Parce qu'on sait qu'effectivement il y aura un certain nombre de problèmes dans le cas des armements et que ce qui concerne Valcartier risque de concerner plusieurs entreprises à travers le Québec. Est-ce qu'il a une proposition à faire à cet égard pour permettre une transformation de ce secteur industriel?

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): M. le Président, on dirait des fois que la députée de Taillon souhaiterait une autre guerre.

Une voix: Ah oui!

M. Tremblay (Outremont): Parce que c'est un secteur qui n'est pas voué à un avenir prometteur. Le député de Salaberry-Soulanges me parle souvent de la compagnie Expro. Des démarches ont été faites, à plusieurs reprises, au niveau du gouvernement fédéral, pour, dans un premier temps, renouveler un contrat qui peut assurer la rentabilité de l'entreprise.

Je vais aller plus loin, avec la députée de Verchères. Des rencontres ont eu lieu pour ICI pour essayer de trouver des solutions concrètes avec le gouvernement fédéral dans un premier temps, avec les propriétaires de l'entreprise dans un deuxième temps, avec les travailleurs et les travailleuses dans un troisième temps, pour favoriser la diversification de ces entreprises. Mais il faut que l'entreprise ait un marché. Alors, nous travaillons, mais s'il n'y a plus de marché, nous essayerons de diversifier avec les partenaires.

Le Président: Toujours en question complémentaire, Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: J'ai l'impression que le ministre ne comprend pas ma question. Est-ce

qu'il en a une proposition? Je suis d'accord avec son analyse, mais est-ce qu'il en a une proposition pour procéder à la reconversion de ce secteur industriel qui touche des dizaines de milliers d'emplois? On parle de 40 000 emplois dans ce secteur, M. le Président. Est-ce qu'il en a une stratégie concrète, précise à proposer à ce secteur industriel?

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Au même titre que les entreprises impliquées dans le secteur, par exemple, de la fabrication de cigarettes, ces entreprises, un certain nombre d'années, ont commencé à diversifier leurs opérations. Le présent gouvernement a identifié de façon très claire des secteurs clés et des créneaux d'excellence justement pour guider les politiques de diversification de ces entreprises. Et, dans cette optique, nous travaillons avec ces entreprises pour trouver des solutions concrètes au maintien des emplois des travailleurs et des travailleuses au Québec.

Le Président: En question principale, M. le député de Jacques-Cartier.

Faut-il modifier la loi régissant l'affichage commercial?

M. Cameron: Merci, M. le Président. My question is for the minister responsible for the Charter of the French Language. I am sure that the minister has noted, as have other members of the Government, the Southam poll that was published on the weekend. And I cite the The Gazette version. The story was headed "Quebecers prepare to pull plug on sign law for the right deal". I would ask the minister whether it is not time for him to consider, and for the Government to consider, that the present sign legislation is not, in fact, the defense of the French language, but a disaster for Québec and a disaster for Canada; and, at least, to consider possible changes in this legislation. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le ministre, allez-y.

M. Ryan: M. le Président, si mes souvenirs sont exacts, la loi qui apportait des modifications à la Charte de la langue française concernant l'affichage commercial fut adoptée par cette Chambre en décembre 1988 et elle prévoit une période de cinq ans pendant laquelle l'Assemblée nationale a décidé, dans l'exercice de sa souveraineté légale, de déroger à la Charte canadienne des droits et libertés, telle qu'interprétée par la Cour suprême dans ce cas-ci.

La période de dérogation doit normalement expirer, si je compte bien, en décembre 1993. Il reste plus de deux ans, période pendant laquelle je souhaite vivement que nous ayons un débat démocratique au cours duquel pourront être soulevés tous les problèmes, tous les points de vue possibles et à l'issue duquel l'Assemblée nationale serait invitée, en temps utile, à se prononcer, comme elle l'a fait la dernière fois, et selon la manière dont elle le jugera nécessaire à ce moment-là.

Le Président: En question complémentaire.

M. Cameron: Given the fact that the original decision of the Supreme Court certainly allowed Québec to legislate in matters of language, but also opposed the idea of suppression of a language, surely it would at least be possible for the Government to consider, in terms of the large possible constitutional changes that Canada and Québec are now facing, that this matter can be reconsidered?

Le Président: M. le ministre.

M. Ryan: C'est une question que certains se posent. J'ai vu l'article auquel le député de Jacques-Cartier fait allusion dans la Gazette de ce matin. À ma connaissance, il n'est aucunement question d'un changement d'orientation, pour le gouvernement, sur ce point précis dont a parlé le député de Jacques-Cartier.

Le Président: En question additionnelle, M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Libman: Merci, M. le Président. Au ministre des Affaires intergouvernementales. À la lumière de ce sondage intéressant, est-ce que le gouvernement pourrait aussi considérer incorporer dans la loi 150 une commission pour étudier les relations avec les anglophones, les allo-phones et les autochtones, une suggestion qui a été faite par les deux présidents de la Commission Bélanger-Campeau de leur initiative? Dans leur première initiative, leur première proposition, ils ont suggéré une telle commission. Est-ce que le gouvernement peut considérer incorporer dans la loi 150 une telle commission?

Le Président: M. le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes.

M. Rémillard: M. le Président, tout d'abord, vous me permettrez de rappeler que c'est le Québec qui a insisté pour qu'on puisse, dans l'entente du lac Meech, insérer le respect de la dualité canadienne. Donc, pour la première fois, on reconnaissait l'existence juridique constitutionnelle de la minorité anglophone, ici au Québec, comme des minorités francophones à l'extérieur du Québec. Bon, ça n'a pas marché. Très bien. Dans ce contexte-là, nous aurons ce projet de loi 150 que nous étudierons ici, dont le coeur et la formation de ces deux commissions

parlementaires, l'une pour étudier ce que pourrait comporter un fédéralisme profondément renouvelé et des offres qu'on pourrait retenir, qu'on pourrait avoir d'Ottawa et des autres provinces, et, d'autre part aussi, toutes les implications de la souveraineté et un partenariat économique qui pourrait nous être offert d'Ottawa en ce qui regarde la souveraineté. Dans ce contexte-là, M. le Président, je crois que la question que pose M. le député pourrait se comprendre et dans une commission et dans l'autre commission, sans avoir besoin de créer une commission spécifique sur ce sujet-là.

Le Président: En question principale maintenant, Mme la députée de Taillon.

Dossier de l'aide financière gouvernementale au groupe Malenfant

Mme Marois: Merci, M. le Président. Pour justifier un prêt gouvernemental de 2 900 000 $ à M. Malenfant et à son groupe, le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie a invoqué trois projets, soit celui du centre de ski de Pin rouge à New Richmond, le Plaza Universel de Sainte-Foy et l'hôtel Universel de Montréal. C'est lui-même qui le disait en cette Chambre. Il se trouve que le centre de ski de Pin rouge à New Richmond y a été installé à rencontre des recommandations des gens du milieu, du sommet économique, entre autres, qui favorisaient à l'unanimité le mont Saint-Joseph à Carleton. Une étude d'experts, d'ailleurs, commandée par le Conseil régional de développement, est arrivée à la conclusion que c'était aussi Carleton qui devait être choisie. Seule une intervention d'un membre de l'entourage du ministre des Finances, M. Levesque, a permis de renverser la décision. Est-ce donc que le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie a précisé, a informé ses collègues du Conseil des ministres du prêt, lorsqu'il a procédé et recommandé le prêt de 2 900 000 $? Est-ce qu'il les a informés, non seulement de cette situation, mais qu'en plus le groupe Malenfant avait reçu 3 000 000 $ pour le centre de ski de Pin rouge à titre de subvention, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie.

M. Tremblay (Outremont): Alors, je vois, M. le Président, que les questions se suivent et sans cohérence, parce que dans certains dossiers, on me reproche, on semble me reprocher de ne pas aider des entreprises qui ne sont pas, disons, vouées à un succès, mais, d'un autre côté, quand c'est le temps d'essayer de protéger des emplois, on essaie, encore une fois, de continuer à essayer de trouver quelque malentendu pour un entrepreneur québécois. C'est avec beaucoup d'intérêt que le leader de l'Opposition, je lisais dans le journal, on disait qu'il voulait mettre le premier ministre en pénitence à cause de la qualité de ses réponses. Alors, je lui suggérerais humblement de mettre la députée de Taillon en pénitence à cause de la non-qualité de ses questions, à cause de son traitement... (14 h 50)

Une voix: Bravo!

M. Tremblay (Outremont): ...incomplet et superficiel du dossier malenfant et surtout à cause de sa mémoire sélective à toutes les réponses que je lui ai déjà données.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Est-ce que le ministre pourrait me dire pourquoi il a privilégié le support de ces trois projets, en particulier, plutôt que le support de d'autres actifs du groupe Malenfant, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Pour la simple raison que c'étaient les actifs où il y avait une certaine plus-value, où on pouvait assurer la protection du prêt gouvernemental qui, en passant, n'a pas été déboursé. Alors, attendons donc les événements pour voir si oui ou non nous pouvons ensemble protéger 2800 emplois dans toutes les régions du Québec et je le répète, si jamais il arrivait quelque chose, vous irez dire à tous les employés dans ces hôtels, vous irez leur dire qu'ils ont peut-être, à court terme, perdu leur emploi.

Le Président: Toujours en complémentaire.

Mme Marois: Est-ce que le ministre, lorsqu'il a proposé qu'un tel prêt soit offert au groupe Malenfant, était au courant des arriérés dus aux municipalités du Québec par ce même groupe Malenfant, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): M. le Président, la députée de Taillon est en train de faire la démonstration...

Une voix: Qu'elle est incompétente.

M. Tremblay (Outremont): Non, je n'irais pas jusque-là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Tremblay (Outremont): Elle est en train de faire la démonstration que nous avions raison de différer la publication du décret.

Non, non. Je vois le chef de l'Opposition...

Ça ne sent pas bon? On va le voir si ça ne sent pas bon.

Le Président: M. le ministre, s'il vous plaît. Une voix: Oui.

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Sur une question de règlement, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, je pense que l'article 79 est clair. Je comprends qu'il puisse subir l'influence de son collègue de gauche et se prendre pour un autre, soit le mois prochain dans L'actualité.

Des voix: Ah!

Le Président: Évidemment, toujours sur la même question de règlement, M. le leader du gouvernement. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, je n'ai surtout pas l'intention de susciter un débat par la question de règlement, moi, sauf que dans le cas qui nous occupe actuellement, ça nous réfère encore une fois au fait que le règlement n'est pas respecté et, selon les informations que j'ai, ce qu'on a pu voir, c'est que le chef de l'Opposition aurait fait un commentaire déplacé. Vous suscitez les débats.

Le Président: Sur la question de règlement, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, le ministre, non seulement ne répond pas aux questions, conformément à l'esprit de l'article 79, mais il se permet de nous en adresser. Si vous voulez qu'on change de place, faites des élections et vous allez voir que ce ne sera pas long.

Le Président: oui. un instant, s'il vous plaît! à l'ordre, s'il vous plaît! alors, sur une question de règlement, m. le leader du gouvernement.

M. Pagé: permettez-moi, m. le président, de vous rappeler que le règlement ne permet pas de cracher en l'air. ne crachez pas trop vite, les amis, là.

Le Président: S'il vous plaît! Simplement, je demanderais que lorsqu'une question est posée, de répondre à ia question. On ne peut établir un dialogue des deux côtés. On s'adresse toujours à ia présidence pour les questions qui sont posées ou quand on pose une question également. Évidemment, sur une question de règlement, si on veut réprouver une façon de procéder, on ne fait pas soi-même une chose qui est réprouvée par le règlement.

Alors, vous complétez, M. le ministre; c'est complété, votre réponse? Question complémentaire, Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: Est-ce que dans les 2800 emplois que le ministre prétend sauver par ses interventions, nous sauvons aussi ceux de Winnipeg et ceux de la Floride, M. le Président?

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): M. le Président, je n'ai pas cité... Tout à l'heure, je n'ai pas posé de question à l'Opposition, je n'ai fait que citer le chef de l'Opposition. alors, j'aimerais faire le dépôt de deux documents: un premier document, pour démontrer... on avait mentionné qu'il y avait eu 21 prêts aux entreprises dans le secteur touristique totalisant 15 762 000 $ pour des projets de 64 168 000 $, protégeant 3078 emplois et/ou en créant 425. c'est drôle, j'entends le leader de l'opposition, il dit: ça n'a rien à faire. mais dans cette liste-là, j'ai été content de voir qu'il y avait un prêt de 1 734 000 $ à l'hôtel château joliette pour...

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Tremblay (Outremont): ...des emplois créés de 60. Il y en avait un autre à Rouyn-Noranda, en passant, pour 2 250 000 $ pour 300 emplois créés.

Des voix: Ah! Ah!

Le Président: À l'ordre! S'il vous plaît! Sur une question de règlement, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, ma question était précise, c'était sur le nombre d'emplois. À ce que je sache, M. le Président, au Château Joliette, ils n'ont pas demandé le huis clos, ils ne l'ont pas caché et ce n'était pas des "chums" intimes du ministre.

Le Président: J'apprécierais qu'on pose une question de règlement, mais sur un point précis, s'il vous plaît, sans aller à l'extérieur. Vous le savez fort bien, la latitude que vous avez et pas plus. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Je ne me suis pas objecté à ia question de règlement, j'étais convaincu que le député de Joliette allait nous remercier.

Le Président: C'est suffisant; ça suffit, s'il vous plaît. À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, j'invite le ministre à conclure rapidement.

M. Tremblay (Outremont): Je veux juste rappeler au leader de l'Opposition que la publica-

tion est faite uniquement après l'octroi du prêt.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement au dépôt de ce document? S'il vous plaît! Un instant, s'il vous plaît! Est-ce qu'il y a consentement au dépôt d'un document, ce document-là?

Une voix: Ah oui!

Le Président: Alors, consentement, le document est déposé. M. le ministre, s'il vous plaît, rapidement.

M. Tremblay (Outremont): ...à la question de la députée de Taillon, je dépose la déclaration du représentant de l'entreprise, M. Raymond Malenfant, qui démontre qu'au Québec, c'est 2500 emplois, au Canada, donc hors Québec, 245 et 50 à l'étranger. Donc, la très grande majorité des emplois, pour ne pas dire la totalité des emplois, c'est au Québec.

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a... Des voix: Bravo!

Le Président: Donc, il y a consentement au dépôt du document. Le document est déposé. C'est la fin de la période de questions.

Tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder au vote reporté. (15 heures)

Mise aux voix de la motion de censure proposant

que l'Assemblée blâme le gouvernement pour

son refus de prendre ses responsabilités face

à la récession économique qui frappe

les Québécoises et les Québécois

Alors, je requiers l'attention de tous les collègues, s'il vous plaît.

Alors, je mets aux voix la motion de censure présentée par M. le leader de l'Opposition officielle.

Cette motion se lit comme suit: "Que cette Assemblée condamne vigoureusement le gouvernement libéral pour son refus délibéré de prendre ses responsabilités face à la récession économique qui frappe cruellement les Québécoises et les Québécois, pour avoir lui-même jeté de l'huile sur le feu par l'imposition de plusieurs milliards de taxes directes et indirectes et pour avoir miné la crédibilité de nos institutions économiques, plus particulièrement Hydro-Québec et la Société de développement industriel, en manquant de transparence dans la gestion des fonds publics."

En requérant de nouveau la collaboration de tous les collègues, s'il vous plaît. MM. les députés, s'il vous plaît.

Alors, que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Parizeau (L'Assomption), M. Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Blais (Masson), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), M. Paré (Shefford), M. Claveau (Ungava), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terrebonne), M. Bois-clair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), M. Beaulne (Bertrand), M. Libman (D'Arcy-McGee), M. Cameron (Jacques-Cartier).

Le Président: Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Bourassa (Saint-Laurent), M. Pagé (Portneuf), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Levesque (Bonaventure), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Charlesbourg), M. Bourbeau (Laporte), M. Dutil (Beauce-Sud), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Sirros (Laurier), M. Vallières (Richmond), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Tremblay (Outremont), M. Rémillard (Jean-Talon), M. Rivard (Ro-semont), Mme Robic (Bourassa), M. Middlemiss (Pontiac), Mme Frulla-Hébert (Marguerite-Bour-geoys), M. Cherry (Sainte-Anne), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Johnson (Vaudreuil), M. Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinongé), Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), Mme Bleau (Groulx), M. Houde (Berthier), M. Maltais (Saguenay), Mme Trépanier (Dorion), M. Cannon (La Peltrie), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beaudin (Gaspé), M. Chagnon (Saint-Louis), M. Doyon (Louis-Hébert), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Leclerc (Taschereau), M. Poulin (Chauveau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Dauphin (Marquette), M. Kehoe (Chapleau), M. Fradet (Vimont), M. Lemieux (Vanier), M. Richard (Nicolet-Yamaska), Mme Bégin (Belle-chasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Gautrin (Verdun), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Bradet (Charlevoix), Mme Cardinal (Châteauguay), M. Després (Limoilou), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Forget (Prévost), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau).

Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions?

le secrétaire: pour. 25 contre: 69

Abstentions: Aucune

Le Président: Donc, la motion est rejetée.

Maintenant, motions sans préavis.

Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Pagé: M. le Président, j'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes et ce, jusqu'à 18 h 30, de 20 heures à 24 heures ainsi que demain, le mardi 4 juin 1991, de 10 heures à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission des affaires sociales poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 120, Loi sur les services de santé et les services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives.

J'avise de plus cette Assemblée que demain, le mardi 4 juin, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif, la commission de l'aménagement et des équipements entreprendra ses consultations particulières...

Le Président: Alors, je vais demander la collaboration des collègues. Je constate que certains collègues parient impunément alors que le leader du gouvernement donne des avis touchant les travaux des commissions. Ça m'ap-paraît essentiel que les collègues sachent exactement quelle commission siège. Ça évitera des questions inutiles à ce moment-là. Alors, M. le leader, veuillez poursuivre, s'il vous plaît.

M. Pagé: Merci, M. le Président. J'apprécie cette protection que vous voulez me donner, au plus haut point. Ceci étant dit, je reprends. J'avise cette Assemblée que demain, le mardi 4 juin, suivant un ordre de la Chambre, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif, la commission de l'aménagement et des équipements entreprendra des consultations particulières et tiendra des auditions publiques dans le cadre de l'étude du projet de loi 145, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les finances municipales. La liste des organismes à être entendus demain a été déposée, mercredi ou jeudi, dans cette Chambre.

Le Président: Merci, M. le leader du gouvernement.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Je vous rappelle que, tel que convenu, jeudi dernier, un débat de fin de séance est reporté à la fin de la présente séance. Il s'agit du débat entre M. le député de Labelle et M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique concernant les négociations collectives avec le Syndicat des constables spéciaux.

Ceci met fin à la période des affaires courantes.

Décision du président relative à la motion de scission du projet de loi 145

Maintenant, aux affaires du jour. Avant de procéder à l'appel de quelques sujets de discussion, je voudrais, à ce moment-ci, rendre la décision concernant la motion de scission présentée par M. le député de Lévis, à l'occasion du débat sur la motion d'adoption du principe du projet de loi 145, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les finances municipales.

Alors, à la séance du 29 mai dernier, le député de Lévis a proposé à la fin de son intervention, au cours du débat sur l'adoption du principe du projet de loi 145, une motion de scission.

Je vais demander à tous les collègues, s'il vous plaît, d'aller faire leurs caucus à l'extérieur de l'Assemblée. Mmes, MM. les députés, s'il vous plaît.

Je vais reprendre. À la séance du 29 mai dernier, le député de Lévis a proposé, à la fin de son intervention, au cours du débat sur l'adoption du principe du projet de loi 145, une motion de scission. Celle-ci visait à scinder le projet de loi 145 en trois projets de loi: un premier intitulé Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les finances municipales; un deuxième intitulé Loi modifiant la Loi sur le ministère des Transports et d'autres dispositions législatives concernant la constitution du Fonds des contributions des automobilistes au transport en commun; et un troisième, intitulé Loi modifiant la Loi de la police concernant des corps de police municipaux.

Le leader adjoint du gouvernement a soulevé alors le problème de la recevabilité de cette motion. J'ai entendu l'argumentation des deux leaders et j'ai ensuite pris cette question en délibéré.

La position du leader adjoint du gouvernement peut se résumer de la façon suivante: le projet de loi 145 serait indivisible puisque l'ensemble des lois modifiées le sont toutes dans le but ultime de pouvoir mettre en place et articuler tous les mécanismes nécessaires à l'application de la réforme du gouvernement visant un nouveau partage des responsabilités entre les municipalités et l'État. Enfin, toutes les modifications apportées aux diverses lois ne visent en fait qu'un seul et même objectif, soit les finances municipales.

Quant au leader de l'Opposition officielle, je résumerais sa position de la façon suivante: la motion vise à faire du projet de loi 145 trois

projets de loi autonomes. Il soutient qu'une fois scindé, le projet de loi 145 pourrait former trois projets de loi distincts ayant une existence propre, ce qui permettrait à l'Assemblée de procéder en pleine connaissance de cause à leur étude. De plus, un vote sur un des trois sujets n'entraînerait aucunement un vote automatique sur l'un des autres sujets. Enfin, la présidence doit analyser la question de la recevabilité avec largesse et ouverture, puisqu'il appartient à l'Assemblée d'en disposer à sa convenance.

Tels furent les principaux motifs soulevés quant à la recevabilité de la motion de scission du député de Lévis. Cette motion de scission est proposée en vertu de l'article 241 de notre règlement qui stipule, et je cite: "Lorsqu'un projet de loi contient plusieurs principes, il peut, avant l'adoption, faire l'objet d'une motion de scission. Si elle est adoptée, les projets de loi résultant de la scission doivent être réinscrits à l'étape de la présentation."

La jurisprudence a développé au fil des ans certains critères qui nous aident à appliquer cet article. Le premier est à l'effet qu'il est erroné de prétendre que chaque partie d'un projet de loi constitue une fraction d'un tout, le tout constituant le principe. Suivant ce critère, il est donc possible qu'un projet de loi contienne plusieurs principes. Est-ce le cas du projet de loi 145? Pour le déterminer, nous devons passer à l'étude de la notion, du mot "principe" énoncée dans un deuxième critère.

Ce critère pourrait s'énoncer comme suit: la notion de principe n'étant pas définie clairement, nous devons distinguer entre l'essence et les modalités pour déterminer si un projet de loi contient plusieurs principes. Le traité de procédure ne s'attardant pas à définir la notion de principe, il faut donc se référer au sens commun généralement reconnu à ce terme. Selon le dictionnaire Petit Robert, le mot principe se définit comme suit: élément constituant, proposition première. Quant au terme modalité, ce même dictionnaire le définit de la façon suivante: forme particulière, manière, particularité.

Si on parcourt le projet de loi 145, on y retrouve autant d'éléments constituants que de simples particularités. J'en arrive à la conclusion qu'il contient alors plus d'un principe. En effet, à ce chapitre, on peut difficilement considérer que des dispositions concernant une modification à la Loi de police et celles modifiant la Loi sur le ministère des Transports ne constituent que des modalités ou des dispositions législatives concernant les finances municipales.

Ainsi, même si le projet de loi 145 a pour toile de fond la modification de la Loi sur la fiscalité municipale, je ne peux m'empêcher d'y voir plus d'un principe. Toutefois, la scission proposée par le député de Lévis conduit-elle à regrouper des dispositions constituant des principes distincts? Je crois que oui. Le regroupement proposé comporte trois blocs, soit:

Premièrement, des modifications à certaines dispositions législatives concernant les finances municipales.

Deuxièmement, des modifications à la Loi sur le ministère des Transports et autres dispositions concernant la constitution d'un fonds de contribution des automobilistes au transport en commun.

Et, troisièmement, des modifications à la Loi de police concernant les corps de police municipaux.

Ces trois blocs m'apparaissent constituer des principes distincts pouvant former des projets de loi cohérents en eux-mêmes conformément à un troisième critère établi par la jurisprudence.

En conclusion, la motion de scission du projet de loi 145 proposée par le député de Lévis m'apparait recevable. La volonté de l'auteur du projet de loi de procéder à un réaménagement des responsabilités entre le palier provincial et le palier municipal apparaît manifestement tout au long de ce projet de loi. Cependant, je crois que, pour y parvenir, le projet de loi n'énonce pas que des modalités, mais bien plusieurs principes distincts également.

Et conformément à l'article 241, un tel projet de loi peut faire l'objet d'une proposition de scission sur laquelle les membres de l'Assemblée se prononceront.

Alors, ceci étant dit, je suis maintenant prêt à demander au leader du gouvernement de m'indiquer quel article du feuilleton il veut bien que nous appelions pour nos débats. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Alors, M. le Président, je vous invite à appeler l'article 14 et on va entendre le député de Lévis.

Débat sur la motion de scission

Le Président: Très bien. Donc, à l'article 14, à ce moment-ci, nous allons donc reprendre sur le projet de loi 145, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les finances municipales. Nous sommes à l'étape de l'adoption du principe et nous avons une motion de scission qui est recevable et que nous devons discuter immédiatement. Et pour procéder à cette discussion, cela se fait à l'intérieur d'un débat restreint suivant le règlement de l'Assemblée. Je vais donc suspendre quelques minutes, convoquer les deux leaders pour faire le partage du temps et nous reprendrons les travaux dans quelques minutes. Alors, nous suspendons quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 13)

(Reprisée 15 h 16)

Le Président: Un instant, s'il vous plaît! Au niveau de la discussion sur la motion de scission qui donne lieu à un débat restreint de deux heures, suite à une conférence avec les leaders, le temps sera réparti de la façon suivante: une heure sera accordée à l'Opposition officielle, une heure sera accordée au groupe ministériel. Il est convenu que le temps maximum d'une intervention à l'intérieur de l'enveloppe sera de 30 minutes. Également, il est convenu que le temps non utilisé par une formation politique pourra accroître à l'autre formation s'il y a lieu, si nécessaire, si les intervenants désirent prendre la parole. Donc, je suis prêt à reconnaître le premier intervenant sur cette motion de scission, et ce sera M. le leader de l'Opposition et député de Joliette. M. le leader de l'Opposition.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Nous avons voulu précisément scinder ce projet de loi pour permettre des débats nettement distincts les uns des autres. Nous avions la conviction que ce projet de loi constituait, à toutes fins pratiques, trois blocs extrêmement distincts.

Tout d'abord, bien sûr, il y a le bloc touchant le financement de la Sûreté du Québec par des factures qui seront dorénavant envoyées aux municipalités selon l'esprit de la réforme; le deuxième bloc, qui parle de voirie tertiaire, parce qu'on remettra à des municipalités la responsabilité et le devoir de payer pour leur voirie tertiaire; et il y aura un troisième bloc qui est une salade de taxes, à toutes fins pratiques, que l'on envoie à la municipalité. On enlève des "enlieu" de taxes. On leur dit: Vous pourrez taxer à tel champ plutôt que tel autre. Il y a la taxe qu'on appelle la taxe de récréation, dans certains milieux; on l'appelle la taxe d'amusement dans d'autres, etc. De sorte que le projet de loi que nous avons devant nous nous oblige à faire un débat sur les trois blocs, simultanément, alors que nous, on dit: Pourquoi ne pas traiter de trois choses distinctes l'une après l'autre, pour pouvoir discuter intelligemment?

Est-ce que ça a de l'allure, par exemple, dans le contexte actuel, qu'on envoie une facture à des municipalités qui n'auront même pas les services policiers, dont le service policier a diminué? On va leur envoyer une facture au même tarif, au même taux que les municipalités qui ont un service. Ça m'apparaît être un débat de fond, en soi.

Le deuxième débat de fond, c'est la voirie. On sait très bien que cette Assemblée nationale a voulu délibérément que, par la loi 90, on ait des milieux agricoles auxquels on ne toucherait plus. On voit, des fois, un cultivateur à tous les kilomètres, même aux kilomètres et demi, dans certains rangs, qui seront deux, trois, dans ce rang-là, pour payer. Et l'Assemblée nationale dit: Vous n'en construirez plus, de maisons, le long des routes, en plus, de sorte qu'on dit délibérément: On va vous punir, vous autres. Même si c'est nous autres qui avons décidé qu'il n'y aurait pas de densité domiciliaire dans les milieux agricoles, vous allez payer vos routes, dorénavant. Ça nous apparaît être un autre débat, en soi, qui est capable de se faire parce qu'on pourra proposer une banque de péréquation, on pourra proposer des choses intelligentes pour que les municipalités rurales et le monde rural ne soient pas pénalisés.

Et le troisième débat, c'est la salade de taxes. Je pense que, ça aussi, ça ferait un débat en soi. Est-ce qu'on est d'accord ou pas pour que les "en lieu" de taxes sautent sur les écoles élémentaires? Est-ce qu'on est d'accord ou pas avec cette possibilité de continuer à taxer? Même si je reconnais, M. le Président, que les trois blocs, les trois projets de loi que, nous, on voudrait voir discuter, au lieu d'un projet de loi global comme celui qui nous est présenté, nous, M. le Président, on dit, sur le fond de la réforme incluant ces trois blocs, qu'on est quand même en désaccord. Le gouvernement provincial, le gouvernement libéral, M. le Président, pellette son déficit dans la cour des municipalités et dit aux maires des municipalités, dit aux échevins des municipalités: Assumez donc nos dettes à nous. Prenez donc cette partie de dettes pour qu'on puisse dire aux contribuables québécois: Nous, on ne taxe pas trop. Taxez à notre place. Nous, on ne taxe pas trop. On va pouvoir dire, comme le ministre des Finances l'a dit: Écoutez, on n'augmente pas les impôts; bien non. Mais, M. le Président, on n'augmente pas les impôts, c'est 3 320 000 000 $ depuis l'élection de 1989. Ça commence à faire des "pinottes", ça, M. le Président. Le même ministre de la Sécurité publique et ministre des Affaires municipales, l'an passé, avait contribué à aller chercher dans le champ de taxation foncier 320 000 000 $ en augmentant les taxes scolaires. Ce même ministre arrive cette année avec 369 000 000 $, taxes municipales. Nous, on voudrait que ce soit discuté bloc par bloc et c'est pour ça, M. le Président, qu'on a déposé cette motion de scission, pour qu'on puisse discuter du cas de la police, pour qu'on puisse discuter de la voirie tertiaire et pour qu'on puisse discuter du cas de la salade des taxes que l'on met sur le dos des contribuables présentement, M. le Président.

Je suis content, M. le Président, que notre argumentation fort logique, basée sur la jurisprudence, ait reçu écho au niveau de la présidence, M. le Président. Je suis content parce que ça nous permettra, si, bien sûr, la majorité le veut dans cette Chambre, ça nous permettra de faire trois types de discussions extrêmement intelligentes. Parce que discuter dans un tout, M. le Président, on oppose les gens dans bien des cas. Il y a des députés qui sont carrément des

députés de ville, qui ne sont pas affectés du tout par la réforme, parce qu'ils disent: II y avait déjà une police. On est très peu affecté par les "en lieu" de taxes s'il y a correctifs. Mais il y a du monde, par exemple...

Je vois le député de Nicolet-Yamaska qui, lui, a des petites municipalités. Il y a des municipalités, par exemple, par rapport à la taxation sur la police qui seront touchées dans son comté, qui seront touchées très sérieusement dans son comté, M. le Président. Il serait peut-être bien plus à l'aise de voter contre un bloc que de voter pour un autre. C'est pour ça que la motion de scission a été acceptée, parce qu'en soi, chaque bloc constitue un tout. Comme un autre député peut être en accord, par exemple sur la partie de taxation au niveau de la voirie tertiaire et il serait en désaccord... Ou l'inverse: II serait en accord avec la Sûreté ou la police et il serait en désaccord avec la voirie tertiaire, M. le Président. Il y a des cironscriptions électorales qui ont des centaines de kilomètres de routes à entretenir et qui sont très peu comme population.

Comment vont-elles faire pour respirer? Comment vont-elles faire, M. le Président, pour payer la facture? Dans certains cas, le budget municipal va doubler carrément et on demande d'un coup sec à du monde d'avaler la pilule. C'est ça fondamentalement. Si l'Opposition veut se battre pour scinder précisément les blocs, c'est pour permettre de porter un jugement sur chacun de ces blocs qui est autonome et indépendant en soi, M. le Président. Un député peut être en faveur d'un bloc et être en désaccord avec deux; et ça, fondamentalement, M. le Président, si ce règlement a été adopté en cette Chambre, c'est nous permettre précisément de donner le vote le plus juste selon les idées que l'on a et dépendant des blocs. Moi, je suis entièrement d'accord, M. le Président, avec cette motion de scission qui a été présentée par le député de Lévis parce qu'elle permettra a tout l'ensemble des députés de cette Chambre de voter selon sa conscience en faveur ou contre un bloc.

Là, on force les députés, s'ils sont en désaccord profond avec un des trois blocs... Si je suis en profond désaccord avec la police, par exemple, avec la taxe sur la police, et que je suis d'accord avec les deux autres, je ne pourrais même pas m'exprimer en faveur des deux, il faudrait que je vote contre le projet de loi. Mais, M. le Président, soyez sans crainte, dans mon cas, je suis contre les trois blocs, je veux bien rassurer les gens. Mais c'est pour permettre, si on a fait cette motion, à l'ensemble des députés de pouvoir voter, selon leur conscience, à partir de chacune des dimensions que l'on retrouve dans ce projet de loi. Je rappelle, M. le Président, toute la dimension transport en commun que l'on retrouve dans le bloc de la salade; les gens de Montréal, les gens qui utilisent le transport en commun, les gens qui seront touchés par une taxe sur l'assurance automobile parce qu'ils entrent ou pénètrent dans le périmètre urbain montréalais, M. le Président, ou dans le périmètre du transport en commun, eh bien, il y en a qui sont en désaccord profond avec ça, mais qui pourraient être en accord avec une équité dans le service de police.

Tout ça nous amène, M. le Président, à inciter les députés, de quelque côté que ce soit de la Chambre, sans se faire d'illusion, bien sûr, sur ce que sera le verdict - parce qu'on le sait d'avance, mais c'est le rôle de l'Opposition en cette Chambre d'attirer l'attention des gens sur les gestes qu'ils posent - d'amener le gouvernement à réfléchir bien sérieusement avant de poser un geste, de lui faire comprendre qu'il y a des aspects de son projet de loi sur lesquels on est en profond désaccord, et, quand on est en profond désaccord sur l'ensemble du projet de loi, on prend les moyens qui nous sont donnés par le règlement, par le Parlement, pour se battre contre, et c'est ce qu'on fait, M. le Président.

Il s'agit carrément, pour nous, d'une lutte - oui, d'une lutte - pour amener le gouvernement libéral actuel à arrêter de taxer, M. le Président. Ça n'a pas de bon sens. Les gens nous disent: Où va notre argent? Où va notre argent? En scindant ainsi le projet de loi, parce qu'il faut demeurer sur le sujet, les gens sauront que les taxes qu'ils veulent nous imposer, un, c'est pour la police, deux, c'est pour le transport en commun, trois, c'est pour la voirie tertiaire. Les gens sauront que le compte de taxes municipales qu'ils recevront à compter de 1992, eh bien, c'est le gouvernement actuel, le gouvernement libéral qui aura décidé de taxer les populations, y compris - et je prends le cas de la police - les municipalités qui ont à peine un service, qui reçoivent la visite des policiers quand il y a un accident. J'en ai cité une liste, l'autre jour, de municipalités. Mon collège de Jonquière pourrait citer un nombre incalculable de municipalités dont les services policiers ont diminué, pour ne pas dire qu'ils sont inexistants dans plusieurs cas. Mon collègue pourrait aussi vous donner, parce qu'il est critique en matière municipale, une série de municipalités qui ont plusieurs dizaines, plusieurs cinquantaines même de kilomètres, d'entretien de routes, M. le Président, en voirie tertiaire et qui auront de la difficulté à boucler le budget, M. le Président, c'est clair, c'est évident, des municipalités peu populeuses, mais qui sont étendues sur des chemins de ligne, comme on le dit en bon québécois dans notre bout, qui ont une, deux ou trois maisons par rang, quatre maisons par rang, cinq maisons par rang, mais qui devront payer des gros sous pour l'entretien du réseau routier, M. le Président.

Il me semble, qu'on soit libéral, péquiste ou de n'importe quelle formation politique que ce

soit, comme députés qui représentons des citoyens... C'est du monde qui a voté pour nous autres. Moi, je ne me vois pas être en faveur d'un projet de loi qui va dire, par exemple, que ma municipalité de Saint-Charles-Borromée aura à payer 1 200 000 $ pour la police, 600 000 $ ou 500 000 $ pour Notre-Dame-des-Prairies. Mes municipalités qui ont plusieurs kilomètres de route n'ont pas encore de réponse sur le concret d'une banque de péréquation qui viendra balancer. On dit: Ça va venir, mais on ne le sait pas. Est-ce que ça tiendra compte de l'étendue? Est-ce que ça tiendra compte de la population? Est-ce que ça tiendra compte de l'évaluation municipale? Est-ce que ça... (15 h 30)

Ça va dépendre, bien sûr! Tout est discrétionnaire, si j'ai bien compris, et fera suite à une décision gouvernementale. Mais vous mettrez combien dedans? On ne le sait pas, et vous nous demandez de voter pour une législation dont on ne connaît pas complètement la facture globale et finale, M. le Président. C'est pour ça que mon collègue de Lévis a proposé de scinder ce projet de loi en trois unités bien précises, et j'espère que l'Assemblée nationale du Québec, M. le Président, sérieusement, en particulier le Parti libéral, permettra à ses députés de voter en faveur de cette motion de scission qui permettrait à l'ensemble des députés à ce moment-là de se prononcer en toute connaissance de cause, en toute conscience, dans le sens des intérêts des concitoyens que nous représentons. Je pense qu'on a le droit de pouvoir le faire, M. le Président, alors que la loi actuelle, telle que libellée, ne nous donne pas le choix. C'est une salade de taxes que nous n'acceptons pas, que nous allons continuer à combattre, nous de l'Opposition, et nous espérons cependant que le Parlement nous offrira l'opportunité de discuter des trois volets bien précis, trois volets qui étaient d'ailleurs acceptables puisque la présidence vient de le reconnaître, et, M. le Président, nous pourrons ainsi voter selon notre propre conscience. Merci.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le leader de l'Opposition officielle. Toujours sur le même sujet, à savoir la motion du député de Lévis proposant la scission du projet de loi 145, je cède maintenant la parole à M. le député de Louis-Hébert.

M. Réjean Doyon

M. Doyon: Merci, M. le Président, de me permettre de donner un point de vue qui va éclairer le débat d'une autre façon que celle que vient de faire M. le leader de l'Opposition. C'est parfaitement son droit, bien sûr, de parler dans le sens où il l'a fait, sauf que son argumentation est extrêmement faible, et elle oublie des points de toute première importance.

Il faut se souvenir, M. le Président, que l'Opposition prétend que, bien sûr, il faudrait discuter de trois principes séparément, regarder les choses une à une, une à la fois, disant: Bien, c'est nécessaire pour que nous puissions regarder à fond les problèmes qui sont soulevés. Évidemment, de notre côté, du côté ministériel, on ne peut pas prêter d'intention qui serait, par exemple, de laisser croire que la mesure est une mesure dilatoire, qui tend à retarder le débat, à le prolonger, et faire en sorte que le 22 ou le 23 juin nous tombe dessus sans que le projet de loi ait été adopté avec les conséquences qu'on connaît. ce n'est pas là mon propos, m. le président, mais j'aurais aimé savoir de la part du leader de l'opposition quel est le projet de loi, s'il avait été scindé en trois, pour lequel il aurait pu, possiblement, voter en faveur? il nous a même indiqué... il est allé au devant des coups un peu, en nous disant: ne vous inquiétez pas, il n'y en a aucun de ces trois là qui fait mon affaire et je voterais contre les trois. j'ai un peu la réponse, m. le président, qui me permet, sans faire d'accusation et de procès d'intention, de dire sans trop de risque de me tromper que c'est une mesure qui vise à retarder le débat, qui s'apparente à une mesure dilatoire, qui ne vise pas à aller au fond des choses mais plutôt à embarrasser le gouvernement.

Moi, M. le Président, quand je regarde ça, je me dis que si on avait séparé en trois parties différentes le projet de loi qui est devant nous, l'Opposition aurait probablement été en droit de nous faire des reproches, en disant: Le gouvernement n'a pas le courage nécessaire pour affronter la réalité et dire les choses telles qu'elles sont. L'Opposition nous aurait dit: Vous faites de la fiscalité, de la voirie, des forces policières, mais tout ça se fait à l'intérieur d'une attaque frontale, dirait-elle, contre les municipalités. Et, à ce titre-là, si vous aviez du courage, vous présenteriez un seul projet de loi. Et c'est comme ça que la transparence devrait vous obliger à agir. Moi, je vois très bien le gouvernement, le ministre des Affaires municipales par exemple, dire: Aujourd'hui nous allons présenter un projet de loi sur la fiscalité municipale proprement dite. Et j'entends le leader de l'Opposition dire: Allons au-delà de ça et regardons si, en arrière de la fiscalité municipale, il n'y a pas d'autres intentions concernant les forces policières. Est-ce qu'il n'y a pas d'autres intentions concernant le transport en commun, la voirie? Et à ce titre-là, dirait-il à ce moment-là, est-ce que le projet de loi ne devrait pas être unifié? Est-ce que la transparence, dont se targue le gouvernement, et ce serait son discours, cette transparence-là ne devrait pas obliger le gouvernement à présenter un seul projet de loi? Ce serait une argumentation fort

logique dans les circonstances. Eh bien! nous sommes allés au devant des coups, M. le Président, et c'est ce que nous faisons sans avoir à nous le faire demander par l'Opposition. Vous croiriez que nous en serons remerciés, qu'il y aura une sorte d'appréciation venant de l'autre côté de la Chambre pour la façon dont nous présentons les choses. L'ingratitude, M. le Président, dans ce cas-là, est flagrante. Au lieu de nous remercier d'être transparents, d'être courageux, de faire face à la musique, ils nous reprochent de le faire, M. le Président. Comme quoi il est très difficile de faire l'affaire de tout le monde et de son père. Quelque geste qu'on pose, on se le voit reprocher.

Il y a un principe unificateur de toute première importance. C'est le principe fondamental. Il s'agit de le voir, il s'agit de le considérer, il s'agit de faire un effort pour s'apercevoir que tout ça traite des responsabilités municipales et des moyens nécessaires pour y faire face. C'est ça, le principe unificateur. C'est ça le principe qui relie tous les aspects du projet de loi. Sans ce principe-là, le projet de loi comme tel n'existerait pas. Un principe unificateur de toute première importance, c'est-à-dire prise en charge par les municipalités de leurs responsabilités avec, en contrepartie, les moyens nécessaires pour assumer ces responsabilités-là.

M. le Président, c'est tellement vrai qu'on ne pourrait pas en toute logique agir autrement. Le leader de l'Opposition, tout à l'heure, nous blâmait et va continuer de nous blâmer, de taxer indirectement de cette façon-là, c'est-à-dire d'imposer des charges aux municipalités qui vont devoir aller chercher des revenus pour faire face à leurs responsabilités. C'est ça, le sens de l'autonomie municipale. Comment ne peut-on pas comprendre ça? C'est qu'avec le plaisir de dépenser doit venir l'odieux de taxer. Ça va ensemble. Si on a du plaisir à dépenser, on doit subir l'odieux de taxer. On ne peut pas séparer ça. C'est ce qu'on dit aux municipalités, c'est ce qu'on essaie de faire valoir.

M. le Président, je vais vous raconter une expérience personnelle. J'ai été, pendant plusieurs années, moi, secrétaire général de la Communauté urbaine de Québec. À ce titre-là, j'avais le privilège insigne d'assister du début à la fin des discussions au comité exécutif de la Communauté urbaine, qui siégeait tous les mardis matins - je pense que c'est encore la même affaire - de 8 heures du matin environ à 1 heure ou à 2 heures de l'après-midi. C'était toujours pareil. La première heure des travaux du comité exécutif consistait dans la prise de décisions, c'est-à-dire qu'est-ce qu'on fait avec l'incinérateur, qu'est-ce qu'on fait avec le transport en commun, qu'est-ce qu'on fait avec l'évaluation? Les décisions se prenaient dans environ une heure. Première heure de travail, la prise de décisions. Les quatre autres heures, qu'est-ce qui restait à faire? Comment on s'organise pour faire payer le gouvernement? C'était ça. On prenait les décisions dans une heure et les quatre autres, chacun y allait de sa suggestion comment on s'organise pour faire payer les autres. C'est-à-dire comment on va dépenser l'argent des autres sans avoir à aller chercher dans les poches des contribuables en faisant accroire que ça, ça vient de nulle part.

Ça, c'est une expérience que j'ai vécue et je n'étais pas n'importe où là et je n'avais pas n'importe quel rôle à jouer. C'est moi qui les faisais, les procès-verbaux. C'est moi qui les écrivais. J'étais privilégié. J'étais assis à côté du président de la Communauté urbaine de Québec qui me disait: Bon, bien, ça la résolution va être dans tel sens. La prise de décisions allait très bien. Très souvent, la décision était prise sous réserve de trouver un mode de financement qui n'imposerait pas aux municipalités d'aller chercher des taxes. "C'est-u" révélateur comme façon de faire? C'est révélateur. Une heure pour prendre des décisions, une heure pour savoir qu'est-ce qu'on va dépenser. Trois heures, quatre heures pour essayer de faire payer les autres.

Ça, c'est l'expérience d'un secrétaire général de la Communauté urbaine de Québec pendant plusieurs années. Je n'ai pas raison de croire que c'était différent à Montréal, pas raison de croire que c'est différent dans les municipalités, pas raison de croire que ce n'est pas comme ça que ça se passe.

À partir de là, M. le Président, moi, je dis le plaisir de dépenser; contrepartie, l'odieux de taxer. Je ne peux pas séparer ça. Et les municipalités qui réclament l'autonomie, quelle meilleure façon d'être autonome que de disposer de ses propres sources de revenus, d'être capable de dire: Je vais aller chercher une taxe sur le stationnement, je vais aller chercher une taxe sur la plus-value des édifices commerciaux, je vais aller chercher une taxe dans tel domaine. Et, à partir de là, une fois que j'ai l'argent, je vais pouvoir dépenser cet argent-là à mon gré, selon les nécessités, selon les besoins de la municipalité. (15 h 40)

Est-ce que ça, ce n'est pas plus valorisant, pour des élus municipaux, que de venir faire des pèlerinages chez le ministre des Affaires municipales et, ni plus ni moins, de quémander pour ne pas dire quêter? Est-ce que c'est ça l'autonomie municipale valorisante qui consiste à dire: On va faire de l'aqueduc, on va donner du transport en commun, on va faire ci, on va faire ça dans la municipalité, mais, avant, on va aller demander un coup de tête au ministre des Affaires municipales pour qu'il nous dise: Oui, je vais vous piloter quelque chose au Conseil du trésor. Est-ce que c'est ça une autonomie municipale valorisante? Est-ce que c'est ça l'autonomie municipale que désirent les élus municipaux? Moi, je dis non. Je dis que l'autonomie municipale, pour être valorisante, doit être forçante, pour être valori-

santé, elle doit être exigeante.

Quelqu'un qui est capable de dépenser doit être capable de justifier qu'il faut qu'il taxe et pourquoi il faut qu'il taxe. C'est trop facile autrement de mettre des autobus dans toutes les rues et de les laisser se promener à moitié vides. Et, là, on ne caricature pas. Je sais que c'est facile et que c'est éculé cet exemple-là, mais il est tellement connu de tout le monde que ne pas y faire référence, c'est passer à côté du sujet. Les autobus à Québec, les trois quarts du temps, plus ils sont gros, plus ils sont vides. C'est comme ça que ça marche. C'est ça l'espèce d'égalisation qui s'est faite, de facteur égalisa-teur. Est-ce qu'il n'y aura pas une différence à partir du moment où le gouvernement va cesser de subventionner le transport en commun à 75 % et est-ce qu'il n'y aura pas des questions qui vont se poser par les contribuables lorsque la réponse ne pourra plus être: De toute façon, c'est le gouvernement qui paye?

La réponse ne pourra plus être ça, parce que là on va aller chercher la taxe, au point de vue taxe foncière, au point de vue évaluation municipale, dans les poches des contribuables. Moi, j'en entends des contribuables qui vont dire: Là, ça va faire. Tant que c'était eux autres qui payaient, passe encore, mais maintenant que c'est nous autres, s'il vous plaît, soit vous rapetissez les autobus, soit vous vous arrangez pour qu'il y ait plus de monde dedans. Est-ce que ce n'est pas normal ça?

Est-ce que ce n'est pas normal que les gens qui profitent de forces policières, d'une protection de la sécurité publique qui est nécessaire paient pour? Pourquoi les gens de Sainte-Foy, pourquoi les gens de Cap-Rouge paieraient-ils alors que Saint-Augustin, à côté - c'est à deux minutes, on n'en a même pas connaissance quand on passe de Cap-Rouge à Saint-Augustin, on ne s'en aperçoit pas, mais... C'est dans le beau comté de La Peltrie, bien sûr. C'est dans le même comté, c'est voisin. On ne le sait même plus, à un moment donné, si on est dans Cap-Rouge ou dans Saint-Augustin. Pourquoi Cap-Rouge paie pour ses forces policières alors que Saint-Augustin ne paie pas? Trouvez-moi une seule raison pour ça. Je n'en vois pas de raison pour ça. La réforme Ryan, comme on l'appelle, fera en sorte que les gens de Saint-Augustin vont supporter leur part de la protection de la sécurité publique.

Est-ce qu'il y a quelque chose de plus parfaitement normal que ça? Comment peut-on, du côté de l'Opposition, s'élever contre ça, si ce n'est pas tout simplement par opportunisme électoral, pour faire accroire aux gens que, si le gouvernement continue de subventionner à la planche les municipalités comme il le fait depuis toujours, de cette façon-là, les gens vont s'exempter de taxes? D'aucune façon ça ne sera le cas, M. le Président. Moi, je prétends que c'est le contraire, je suis même sûr que c'est le contraire, que la meilleure façon de diminuer le compte de taxe des gens, c'est d'obliger ceux qui vont dépenser à taxer et de faire en sorte qu'ils ne puissent plus transmettre la facture au gouvernement.

Et, en bout de piste, les mêmes services vont coûter moins cher parce que le contrôle va être par celui qui dépense et par celui qui taxe qui va être le même organisme, la même municipalité, la même Communauté urbaine. Pourquoi ça c'est pas compris? Pourquoi on fait accroire au monde que, si le gouvernement continuait de subventionner comme auparavant, les gens épargneraient de l'argent? C'est aucunement le cas. Moi, je ne comprends pas l'Opposition qui nous reproche des déficits qui, bien sûr, sont trop élevés - on aimerait les voir plus bas, mais à comparer aux leurs c'est une rosée, il n'y a rien là - qui nous reproche en même temps de taxer trop et qui, en même temps, voudrait qu'on continue de subventionner les municipalités au même niveau qu'auparavant, ce qui aurait pour effet nécessaire, inévitable, soit d'augmenter le déficit, qu'ils nous reprochent déjà d'avoir mené à un niveau trop élevé soit d'augmenter les taxes qui, selon eux, sont trop élevées. En quoi, pour le contribuables de payer 100 $ à la municipalité qui va contrôler la dépense, ça fait plus mal que de payer 100 $ au gouvernement en impôt sur le revenu?

Est-ce que 100 $ payés au gouvernement, ça ne sort pas de la même poche que 100 $ payés à la municipalité avec le résultat que les 100 $ payés à la municipalité vont être contrôlés par ceux qui dépensent ces 100 $, alors que les 100 $ que le gouvernement va prélever dans les poches des contribuables vont être dépensés par la municipalité, mais pas contrôlés par la municipalité parce que ce n'est pas elle qui paie en l'occurrence, dans des cas semblables. c'est ça que j'aimerais qu'on m'explique une fois pour toutes. c'est une évidence, à mon point de vue. c'est que d'aller chercher 100 $ quelque part et de dire à celui qui va chercher ces 100 $: maintenant, tu vas nous dire ce que tu fais avec, plutôt que de dire au gouvernement: va chercher les 100 $, toi, et remets-nous les, de cette façon-là, on n'aura pas à rendre compte à personne des taxes qu'on a prélevées. est-ce que c'est ça que l'opposition voudrait qu'il continue de se faire? est-ce que c'est ça la solution au problème qu'on connaît actuellement? moi, je suis convaincu que non. je suis convaincu que les gens sont en train de s'apercevoir que la réforme ryan, finalement, c'est une réforme de bon sens, basée sur le grand principe unificateur que j'expliquais tout à l'heure.

C'est-à-dire l'autonomie municipale, qui est en même temps conjuguée aux moyens nécessaires pour y faire face. On sort des 500 000 000 $ et des 400 000 000 $. Le député de Jonquière est le spécialiste là-dedans. On dirait que du moment que les chiffres sont assez gros pour qu'il ne

puisse plus compter jusque-là, il peut les sortir et s'amuser avec. Il faudrait, à un moment donné, arrêter de se conter des peurs. Il n'est pas question d'étrangler personne. Il est question de permettre à ceux qui vont décider de se donner des services de voirie, de se donner des services de transport, qui vont décider de se donner des services de sécurité publique, d'avoir à supporter un fardeau qui va être à la hauteur des services qu'ils se donnent avec des moyens de taxation qui vont avec.

La fiscalité désincarnée, finalement, ne veut rien dire. Une fiscalité désincarnée, ce serait une fiscalité comme celle, malheureusement, qu'on a eue trop longtemps, c'est-à-dire une fiscalité qui permettait d'aller chercher de l'argent sans que cet argent-là, sans que ces fonds-là puissent être dépensés par ceux qui vont les chercher, qui vont taxer. Moi, j'aimerais que les élus municipaux, qui se plaignent actuellement, réalisent la frustration d'un député comme moi et d'autres députés ici, à l'Assemblée nationale, qui se font reprocher les taxes élevées qu'ils vont chercher chez les contribuables.

Bien sûr, elles sont trop élevées, mais est-ce qu'ils réalisent la frustration qui est la nôtre, quand il y a une grande partie des fonds qu'on va chercher qui est dépensée par d'autres selon leurs priorités, selon ce qu'ils pensent être les besoins, sans avoir à lever le petit doigt pour aller chercher cet argent-là, sauf le pèlerinage annuel ou biannuel chez M. le ministre des Affaires municipales. Est-ce qu'ils réalisent cette frustràtion-là? Est-ce qu'ils réalisent que la guerre qu'ils nous font actuellement, nous autres, si on s'était chauffé du même bois qu'eux, on aurait fait cette même guerre-là à eux parce qu'ils nous obligeraient à taxer pour leur donner le "fun" de dépenser.

Ça, ça ne peut plus marcher, c'est fini maintenant. L'Opposition voudrait que ça continue comme ça. Ça ne continuera pas comme ça. Je suis convaincu et j'ai confiance que les gens sont capables de comprendre ça. Les gens sont capables de comprendre ça, que quand il va se dépenser 100 $ dans le domaine municipal, ça va être parce qu'il va y avoir 100 $ de taxes municipales qui vont être entrés quelque part. Ce n'est pas parce qu'il va y avoir 150 $, parce qu'il y a du coulage quelque part, qui vont être entrés dans les poches du gouvernement pour qu'il puisse s'en dépenser 100 $ à la municipalité. C'est fini. On me signalait, tout à l'heure: on a sifflé la fin de la récréation.

C'est bien dommage, c'est ça. Il va falloir que ce soit compris. Je suis sûr que si c'est expliqué aussi simplement que je tente de le faire actuellement, M. le Président, ça va être compris et ça va être apprécié parce que le plus grand plaisir qu'un contribuable peut avoir, pour faire contrepartie à la douleur qu'il a de payer ses taxes, c'est de demander des comptes à ceux qui dépensent l'argent qu'il a payé en taxes. S'il n'est pas capable de faire ça, c'est la frustration épouvantable. Là, on donne les moyens au contribuable et c'est en faveur du contribuable qu'on fait la réforme. On donne les moyens au contribuable de demander des comptes aux bonnes personnes, de leur dire: Tu es allé chercher 100 $ dans ma poche pour faire du transport en commun, quelle sorte de transport en commun tu as fait avec ça? La réponse ne pourra plus être: Inquiète-toi pas! De toute façon, on est subventionné à 75 %, ça ne te coûte que 25 $, une aubaine. Ils ne l'auront plus cette réponse-là parce que la situation est en train d'évoluer et de changer. (15 h 50)

Moi, je suis scandalisé de voir la démagogie qui se fait du côté de l'Opposition avec ça. Je suis scandalisé parce que je ne pensais pas qu'en politique on pouvait tomber aussi bas que ça, que quelque chose qui est aussi évident, qui va autant de soi, puisse faire l'objet d'une levée de boucliers semblable alimentée par de la petite politique, par des visées électoralistes à courte vue...

Une voix: Vous avez raison.

M. Doyon: ...qui visent tout simplement à mettre le gouvernement dans l'embarras. C'est ça, M. le Président, il est dommage de voir des attitudes semblables. Quand on voit ça, M. le Président, on doit tout simplement constater qu'il est difficile d'avoir une collaboration, qu'il est difficile d'avoir une façon de travailler ensemble qui puisse être au-dessus de la politicaillerie. C'est regrettable de le dire, l'Opposition se nourrit de ça. Si ce n'était pas le cas - et, là, c'est patent, M. le Président - l'Opposition aurait fait des suggestions, aurait critiqué certains points, mais ne se serait pas opposée aux principes, ne tenterait pas de retarder les débats. Parfois, il y a des parties de discours qui nous éclairent sur ce que l'Opposition pense vraiment.

J'écoutais le leader de l'Opposition, tout à l'heure, dans son discours, qui nous expliquait que les gens devraient pouvoir voter - les députés - sur trois principes différents. Possiblement qu'ils seraient pour la fiscalité, mais ne pourraient pas être pour la voirie, le transport, et il échappait quelque chose. Il y a même des gens qui pourraient, disait-il être pour l'équité au point de vue des forces policières. Donc, il reconnaissait qu'il y avait une question d'équité là-dedans. C'est ça qui nous guide là-dedans. Le député, le leader de l'Opposition le reconnaissait en disant qu'il y a des gens qui peuvent être pour l'équité dans le domaine des forces policières, de la sécurité publique. C'est ça qui nous guide, l'équité, le désir d'assurer aux contribuables ;e meilleur "deal" possible, de s'organiser et que pour leur argent, ils en aient suffisamment, compte tenu des efforts qu'ils font

pour gagner cet argent-là.

Le meilleur moyen d'assurer ça, M. le Président, dans un projet de loi semblable qui vise à permettre aux responsables de défendre leurs dépenses, de défendre leur taxation, d'expliquer pourquoi ils taxent, pourquoi ils dépensent de telle façon, c'est comme ça que, finalement, la chose publique réussira à être de mieux en mieux administrée. Ce n'est pas en mélangeant tout ensemble, en mettant les affaires municipales et provinciales dans le même portefeuille, en disant: On va donner aux municipalités ce dont elles ont besoin et on va aller chercher de l'argent pour permettre de renflouer les coffres des municipalités. Le ministre des Affaires municipales a compris ça. Il a donné les responsabilités, c'est vrai, et en même temps, il a donné les capacités de taxation qui vont avec et je l'en félicite. Cette motion de scission, quant à moi, M. le Président, devrait être rejetée sans aucun doute.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Louis-Hébert. Toujours sur le même sujet, à savoir la motion de scission du député de Lévis du projet de loi 145, je cède la parole à Mme la députée de Johnson.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci. Merci beaucoup, M. le Président. J'ai écouté avec attention mon prédécesseur, le député de Louis-Hébert, je l'ai entendu discourir sur, supposément, la motion de scission. Il n'a pas parlé du tout pourquoi on voulait scinder le projet de loi. Il a parlé sur le fond. Il a dit tellement d'énormités que si je les reprenais seulement une par une, ce qu'il a dit, ses interventions, ses phrases, je dépasserais mon temps et encore un peu plus.

Vous comprendrez, M. le Président, quand il a décrit sa participation à la Communauté urbaine de Québec, pourquoi il a reçu son bleu, pourquoi on l'a mis dehors. Il dit: On avait une heure...

M. Doyon: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant! Un instant, madame!

M. Doyon: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Louis-Hébert, sur la question de règlement.

M. Doyon: M. le Président, vous avez été témoin des paroles que vient de prononcer la députée de Johnson. C'est totalement faux, M. le Président. C'est tellement faux. Question de privilège, M. le Président. Je vais vous expliquer pourquoi, là-dessus. C'est que j'ai été destitué de mes fonctions sous de faux prétextes. La Commission des droits de la personne a obligé la Communauté urbaine de Québec à me reprendre à mon poste, disant que j'avais été victime de discrimination, que j'avais été destitué sans aucune raison. Un instant, M. le Président, je vais tirer ça au clair, surtout avec la députée de Johnson qui ne comprend rien.

Une voix: Des excuses!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant! Un instant! Je veux juste vous indiquer, M. le député...

Des voix:...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant! M. le député de Louis-Hébert, c'est votre privilège, si vous prétendez que Mme la députée de Johnson a tenu à votre égard des propos irréguliers, d'en faire une question de fait personnel et vous devez, à ce moment-là, soulever cette question de fait personnel demain, à la période des affaires courantes. Alors, de deux choses l'une: vous vous en tenez à une question de règlement en invoquant certaines parties, certains paragraphes de l'article 35 ou vous faites purement et simplement, ce qui est votre droit, ce que je viens de dire, à savoir soulever une question de fait personnel.

M. Doyon: Question de règlement, M. le Président, tout simplement. Je ne veux pas faire trop d'honneur à la députée de Johnson, vous me comprendrez là-dessus. M. le Président...

Mme Juneau: Aïe! un instant!

M. Doyon: M. le Président, c'est mon choix de choisir la façon dont je veux intervenir...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, sauf que...

M. Doyon: ...sur la question de règlement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, Mme la députée de Johnson, vous avez une question de règlement.

Mme Juneau: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y.

Mme Juneau: ...dans son intervention, le député a, comme vous l'avez dit, le droit de reprendre ce que j'ai dit, mais il n'a pas le droit de m'insulter en Chambre, de dire quoi que ce soit du genre.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): À date, ça va. À date, ça va.

Mme Juneau: Qu'il défende ce qu'il a à défendre, mais qu'il laisse les autres tranquilles.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Non, non. Je m'excuse.

Mme Juneau: II l'a dit dans...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Non, non. Mme la députée de Johnson, à date, l'intervention du député de Louis-Hébert, je pense, respecte les dispositions quant aux propos parlementaires. Allez-y, M. le député Louis-Hébert, mais je vous rappelle ce que j'ai indiqué. Vous avez le choix entre 35, paragraphe 6 ou 7, ou ce que j'ai mentionné. Alors, ça vous oblige à faire vite si vous vous en tenez à la question de règlement.

M. Doyon: Très, très rapidement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, allez- y-

M. Doyon: M. le Président, ce genre d'attaque m'oblige à faire appel à vous. Il est connu, dans toute la région de Québec, que la destitution dont j'ai été victime a été un abus de pouvoir des dirigeants de la Communauté urbaine de Québec. Il y à eu une plainte qui a été portée à la Commission des droits de la personne. La Commission des droits de la personne a fait enquête - c'est public, M. le Président - a blâmé la Communauté urbaine de la destitution qui était sans motif, illégale, abusive, m'a remis dans mes fonctions; non seulement ça, m'a payé le salaire que j'avais perdu et m'a remis dans toutes les fonctions que j'avais. Trois mois après, c'était tellement peu cru par la population que j'ai été élu député de Louis-Hébert.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): je pense que l'intervention de m. le député de louis-hébert nous permet de continuer le débat. mme la députée de johnson, allez-y.

Mme Juneau: M. le Président, toutes les fois que le député de Louis-Hébert se lève en Chambre, c'est pour vomir sur quelqu'un, et il l'a fait...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Question de règlement! Question de règlement!

Mme Juneau: ...plusieurs fois.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant! Un instant!

Il y a une question de règlement qui est soulevée autant par le leader du gouvernement que par le député de Louis-Hébert. Mme la députée de Johnson, de toute évidence, vos derniers propos sont contraires à la règle et je vous demande de les retirer.

Mme Juneau: Mon propos n'a pas été un propos...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mme la députée de Johnson, non, un instant. C'est évident et... M. le député de Portneuf, leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, je sais que, dans cette Chambre, il arrive parfois que des paroles dépassent notre pensée et sont dites probablement sans méchanceté, mais elles ne peuvent être dites. M. le Président, je crois que le député de Louis-Hébert a très bien rétabli les faits en ce qui concerne un allégué qui a été porté le concernant. Je m'attendais, moi, à ce que Mme la députée de Johnson, dans le "fair-play" parlementaire qu'on lui connaissait - je dis bien qu'on lui connaissait - indique délicatement et calmement que ses paroles avaient dépassé sa pensée et qu'elle n'avait pas l'intention de tenir un propos tendancieux ou méchant à l'égard de l'honorable député de Louis-Hébert. Or, par surcroît, non seulement elle ne se convie pas à ce qui est régulier ici lorsque des paroles dépassent notre pensée, mais elle s'attaque à nouveau au député de Louis-Hébert par un langage qui est violent, un langage qui est inacceptable en cette Chambre. Et je lui demanderais, cette fois-ci, de retirer purement et simplement ses propos, au moins. (16 heures)

M. Brassard: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: M. le Président, si j'admets que le député de Louis-Hébert avait le droit de recourir aux dispositions de notre règlement pour rétablir un fait personnel, ce qu'il a fait, d'ailleurs, je me dois de reconnaître cependant que, dans ses propos, il a eu des remarques disgracieuses et malveillantes à l'égard de ma collègue de Johnson.

Une voix: Hah! Hah!

M. Brassard: Oui, oui, oui, effectivement. Il le sait très bien d'ailleurs. Je ne me suis pas levé pour rétablir les faits, quand il est intervenu, mais effectivement, dans ses commentaires, il a eu certaines remarques désobligeantes à l'égard de ma collègue de Johnson... Oui, oui, quand vous avez dit que vous mettiez en doute

sa capacité de comprendre les choses, ce sont des remarques malveillantes et désobligeantes.

M. Doyon: Vous faites ça continuellement.

M. Brassard: Bon. Alors, je vois que le député de Louis-Hébert ne comprend pas non plus et a une capacité de comprendre très limitée. Voilà.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Mme la députée de Johnson, j'ai une demande formelle du leader du gouvernement, avec laquelle, d'ailleurs, je suis d'accord, de retirer les derniers propos que vous avez utilisés à l'égard du député de Louis-Hébert.

Mme Juneau: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, je vous demanderais de le faire, Mme la députée de Johnson et de continuer après ça votre intervention.

Mme Juneau: Je ne sais pas quel mot je pourrais utiliser...

Une voix: Retire tes paroles.

Mme Juneau: ...pour dire la même chose que j'ai dite tout à l'heure, qui ne serait pas antiparlementaire. Je n'ai pas le goût de retirer ce que j'ai dit parce que, à chaque fois que le député de Louis-Hébert se lève, M. le Président, c'est toujours pour blâmer les autres.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je m'excuse. Il y a une différence entre ce que vous venez de dire et ce que vous avez mentionné tout à l'heure. Je vous demande... Je suis obligé de m'en tenir aux dispositions du règlement, Mme la députée de Johnson, et de vous demander pour une deuxième fois de retirer les propos que je considère non parlementaires, qui étaient, à toutes fins pratiques, la dernière phrase de votre intervention de tout à l'heure. Vous savez très bien ce à quoi je fais référence. Je vous demande de retirer ces propos-là et, après ça, vous pourrez continuer votre intervention. Blâmer quelqu'un tel que vous venez de le mentionner, ça, ça peut aller, mais ce n'est pas ce que vous avez dit tout à l'heure.

Mme Juneau: Je vous remercie, M. le Président, de me trouver un mot qui pourrait changer celui que j'ai dit tout à l'heure. Donc, le député de Louis-Hébert, à toutes les fois qu'il se lève ici, en Chambre, c'est pour blâmer...

M. Brassard: C'est ça qu'elle fait, là.

Mme Juneau: ...c'est pour blâmer les gens...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant. Non, non, un instant.

Mme Juneau: ...alors, M. le Président... M. Pagé: M. le Président...

Mme Juneau: ...je retire le mot "vomir" pour le remplacer par le mot "blâmer".

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y. Mme Juneau: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Continuez votre intervention.

Mme Juneau: M. le Président, comme j'ai dit tout à l'heure, le député de Louis-Hébert, dans son intervention, n'a pas parlé de la motion de scission, il a parlé sur le fond. Il nous a indiqué son profond mépris des élus municipaux en disant: Les municipalités vont comprendre que voyager les autobus vides, il faut que ça taxe. Et, ensuite, il a dit: Quand les municipalités vont prendre plaisir à dépenser, elles vont se rendre compte qu'il faut que quelqu'un paie pour ça, et ainsi de suite. Il a dit: La réforme Ryan, c'est le gros bon sens. C'est pour ça qu'ils sont 65 % aujourd'hui, selon le sondage IQOP dans Le Soleil, 65 % des Québécois sont insatisfaits du gouvernement Bourassa. Ça doit être à cause de ça, M. le Président.

M. le Président, jamais les municipalités n'ont eu une charge aussi importante, je dirais une charge épouvantable de dressée contre elles par ce gouvernement, le gouvernement libéral. Et comme on a tout mêlé dans un même projet de loi... Le leader de l'Opposition, le député de Lévis en a fait la démonstration clairement jeudi et aujourd'hui encore, ça pourrait facilement être trois projets de loi à l'intérieur de ce qu'on nous a présenté dans la loi 145, trois projets de toi tout à fait différents et tout à fait faciles pour pouvoir intervenir sur chacun d'eux; chacun d'eux, c'était...

M. le Président, le finances municipales, y a-t-il un gouvernement, à part celui qu'on a en face de nous, qui, en l'espace d'une année, a taxé les payeurs de taxes par des impôts fonciers et des taxes locales de 700 000 000 $ à l'intérieur d'une année? C'est la première fois qu'on voit ça. Moi, ça m'indigne une chose comme ça. Est-ce qu'il n'y en aurait pas suffisamment, dans ce premier indicatif des finances municipales, pour discuter d'un projet de loi à lui seul? Est-ce qu'on n'aurait pas, dans un deuxième temps, un autre projet de loi qui parlerait de la contribution des automobilistes au transport en commun? 194 municipalités vont payer 30 $ de plus par immatriculation, chaque personne qui a

une automobile, 30 $ de plus pour l'immatriculation de sa voiture, et ceci, M. le Président, représente 70 % de la population.

Moi, j'ai quatre municipalités dans mon comté. On ne l'a pas, le transport en commun. C'est un comté rural que j'ai. Quatre municipalités vont être obligées de payer. Les gens s'arrachent les cheveux. Ça n'a pas de bon sens. Ça n'a pas de bon sens de faire payer les gens. Le ministre Ryan, quand il est revenu sur cette décision-là, a dit: On va adoucir les décisions. On va adoucir l'équilibre dont il parlait. On va permettre aux municipalités de taxer certains de leurs contribuables qui possèdent des voitures pour aider le transport en commun. Même celles qui n'ont pas de transport en commun paient. J'en ai quatre chez nous qui paient et on n'en a pas. Qu'est-ce qui a fait... Quelle est l'idée? Quel critère le ministre des Affaires municipales a pris pour dire que quatre municipalités de mon comté contribueraient à payer le transport en commun de la région de Sherbrooke? Sur quoi il s'est basé? Je ne le sais pas. Je sais que les payeurs de taxes, qui sont des gens qui ont des voitures, chez nous, des quatre municipalités en question qui sont Stoke, Brompton canton, Bromptonville et Saint-Denis-de-Brompton... Pourquoi, elles sont obligées de payer? Vous ne pensez pas que, dans ces 194 municipalités, il y a des gens qui auraient voulu traiter de ce sujet-là en particulier? Donc, on aurait voulu que trois projets de loi soient faits dans le projet de loi 145.

Le troisième, le corps de police. Lorsque j'ai fait mon intervention la semaine dernière sur la loi 145, j'ai démontré clairement au ministre, au gouvernement libéral, combien ça coûterait aux municipalités de mon comté. J'ai quatre petites villes, 30 municipalités rurales. Ça va leur coûter une fortune. Une fortune! Puis moi, quand je paie, j'aime bien donner des ordres. Mais elles, elles n'auront pas à donner des ordres au corps de police. Elles les voient passer la nuit de temps en temps, sur un "shut down" à l'autre bout. Ça, ça arrive une fois de temps en temps dans les municipalités. Quand j'envoie quelqu'un à l'épicerie chercher mon épicerie, je lui dis ce que je veux. Mais là, ce n'est pas ça qui est arrivé. Le ministre a dit: Ça va coûter tant à toi, tant, tant et tant. C'est ça qu'il a dit. Donc, pas de possibilité de rouspéter, c'est des taxes qui leur arrive sur la tête comme ça. Elles sont obligées de payer et elles n'ont pas un mot à dire.

Motion d'ajournement du débat

M. le Président, je trouve inacceptable que, dans un seul projet de loi, tel que l'ont indiqué mes collègues, on puisse décider trois choses bien distinctes, bien différentes, auxquelles on aurait pu apporter des arguments pour chacun des trois projets de loi en question, pour chacun.

Pour cette raison, M. le Président, je trouve que la décision qui va être prise dans les minutes qui suivent ne fait pas du tout l'affaire de l'Opposition officielle, et, en ce sens, M. le Président, je voudrais apporter une motion: "Qu'en vertu des dispositions de l'article 100 du règlement de l'Assemblée nationale, le débat en cours sur la motion soit ajourné". Je propose, M. le Président, une motion d'ajournement de la motion de scission.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, déposez votre motion, madame. En vertu de l'article 100, Mme la députée de Johnson, votre motion donne ouverture au débat suivant: 10 minutes pour l'auteur de la motion et 10 minutes pour un représentant du parti ministériel. Vous aurez droit à une réplique, à votre tour, de 5 minutes.

Une voix: M. le Président, vous oubliez un 10 minutes ici.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un autre 10 minutes, je m'excuse. alors, de votre côté, mme la députée de johnson, vous avez droit à deux fois 10 minutes, 10 minutes du côté des ministériels et une réplique de l'auteur de la motion - à savoir vous-même, mme la députée - de 5 minutes. allez-y pour les premiers 10 minutes.

(16 h 10)

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Dans ma courte intervention, tout à l'heure, j'ai tenté de démontrer l'importance de séparer le projet de loi parce que les payeurs de taxes en ont plein le dos. Ils en ont ras le bol de voir ce qui se passe ici, à l'Assemblée nationale, et de n'avoir pas une seconde été consultés. Lorsque, au mois de juin dernier, on a permis à des commissions scolaires de s'introduire dans les taxes municipales, le premier ministre est intervenu en Chambre. Il a dit: C'est fini. La prochaine fois qu'on imposera d'autres taxes aux municipalités, elles seront consultées. 11 l'a dit avec un sourire, bien sûr, parce qu'il leur jouait un bon tour, parce qu'on ne leur en a pas parlé et on est revenu encore cette fois-ci avec la cerise sur le gâteau, si on peut appeler ça ainsi, avec des montants considérables de taxes à payer pour les contribuables du québec.

M. le Président, j'anticipe et j'extrapole peut-être, mais je sens bien que d'ici à ce qu'on ait terminé de discuter sur la motion de scission, à cause du nombre imposant qu'il y a de l'autre côté, j'ai bien peur que lorsqu'on prendra le vote, ce qui arrivera, c'est à cause du nombre, pas à cause du gros bon sens. À cause du nombre, on va rejeter la motion de scission. C'est ce qui m'a amené, M. le Président, à faire

cette motion d'ajournement.

Je souhaite, nous souhaitons, nous de l'Opposition, que le gouvernement libéral puisse prendre le temps de discuter sur le meilleur pour les contribuables, et le meilleur pour les contribuables, ce serait de séparer premièrement le projet de loi, et de consulter surtout, tel que le premier ministre en avait fait la promesse ici en Chambre. Mais ce n'est pas la première fois que des promesses se font de l'autre côté de la Chambre et qu'elles ne sont pas tenues. On a un document à peu près volumineux de cette ampleur-là, M. le Président, qui nous donne toutes les promesses non tenues de ce gouvernement. Donc, une de plus, une de moins, c'est ce qu'on croit comprendre, mais si le premier ministre s'est engagé devant cette Chambre vis-à-vis des municipalités, donc vis-à-vis des payeurs de taxes, à consulter, pourquoi ne faisons-nous pas aujourd'hui cet ajournement?

Pourquoi l'autre côté n'accepterait-il pas cette proposition-là de faire un ajournement, afin que les municipalités soient consultées, que l'Opposition soit consultée? Tous deux qui ont dit, dans les jours qui ont suivi, et là, je lis textuellement, M. le Président: "Ryan frappe trop vite. Les chambres de commerce demandent un moratoire". On n'est pas les seuls à demander un ajournement. Les chambres de commerce demandent un moratoire. Par contre, on dit: Fiscalité municipale: Ryan ne pliera pas. Le transport en commun et la réforme Ryan, c'est épouvantable. Les municipalités régionales de comté refusent de faire la job de bras. Tous les articles, M. le Président, je pourrais vous citer encore de nombreux articles qui disent: II faut que le gouvernement donne le temps de respirer aux payeurs de taxes, prenne le temps de discuter avec les municipalités et ne fasse pas comme le député de Louis-Hébert, nous exposer ce mépris des élus municipaux, tel qu'il l'a fait dans son exposé tout à l'heure.

C'est épouvantable, M. le Président d'entendre des choses comme celle-là, de dire que les gens vont finir par comprendre, que s'ils se donnent des services, il va falloir qu'ils les payent. Le député de Louis-Hébert a dit aussi à plusieurs reprises que l'automonie municipale, ce n'était pas ça, que les maires viennent brailler à Québec, montent à Québec pour le pèlerinage. Mais mon Dieu, M. le Président, qu'est-ce qu'il a fait, lui, après 1979? Est-il barré là? Depuis 1979, on n'en a plus de pèlerinage à Québec. C'était réglé, cette affaire-là. Je ne sais pas où il était depuis 1979 à aller jusqu'en juin 1990. Ça lui a échappé ça, là.

M. le Président, depuis 1979, vous le savez, le ministre des Affaires municipales, qui est ici depuis fort longtemps, et beaucoup d'autres personnes de l'autre côté le savent très bien, c'était réglé, cette histoire-là. Ça n'a pas de bon sens de dire des affaires de même. Comment voulez-vous qu'on ne soit pas un peu vexés, sinon beaucoup vexés d'entendre des propos aussi... En tout cas, je vais faire... méprisants de la part du député de Louis-Hébert? Un mépris des élus municipaux. C'est ça qu'il nous a démontré clairement.

Les élus municipaux - je vais lui dire pour sa gouverne - ont été élus par des hommes et des femmes qui croyaient que ces gens-là pouvaient diriger leur municipalité. Ils leur ont fait confiance, comme ils ont fait confiance à ce gouvernement de l'autre côté, et comme ils sont en train de retirer leur confiance. On l'a vu aujourd'hui. Aujourd'hui. 65 % des Québécois sont insatisfaits du gouvernement Bourassa. Bourassa perd du terrain. Ça, c'est ce qu'on dit aujourd'hui. C'est que les gens qui vous ont fait confiance aux dernières élections... Ça va faire deux ans au mois de septembre, puis je ne sais pas si vous êtes pareils dans vos comtés, si tout le monde est comme ça, mais les gens disent: Combien ça fait de temps qu'ils sont là, donc? Il me semble que ça fait donc longtemps. Quand on leur dit que ça ne fait même pas deux ans, ils trouvent ça effrayant. Ils disent que ça ne se peut pas, ça ne fait pas rien que deux ans. Ça va faire deux ans au mois de septembre. Ça ne se peut pas. Il me semble que ça fait donc longtemps qu'ils sont là. Ils sont fatigués de vous voir là. Ils sont fatigués parce que ça n'a plus de bon sens, parce que les payeurs de taxes sont criblés de taxes par votre faute.

J'ai même entendu dire qu'une de mes collègues avait dit au ministre, anciennement de l'Éducation: Vous auriez dû rester à l'Éducation. Aujourd'hui, on dit: Claude Ryan, le mal aimé du gouvernement Bourassa. Ça n'a pas de bon sens. Le plus mal aimé du gouvernement Bourassa! Il doit y avoir une raison pour ça. Il doit y avoir une raison. Ça doit être parce qu'il y a un petit peu d"'ambitionnage" sur les bords. C'est parce que ça n'a pas de bon sens, ce que vous avez fait, M. le ministre des Affaires municipales.

M. le Président, si le gouvernement veut témoigner de cette confiance que les gens lui ont donnée au mois de septembre 1989, bien, qu'il fasse un ajournement sur le projet de loi, qu'il arrête, qu'il discute avec les gens du milieu et, à ce moment-là, si éventuellement tout le monde est en accord sur ce qui est présenté, on reviendra. Ça ne presse pas comme une cassure. On reviendra à l'automne et on refera... Le ministre va avoir le temps de refaire ses devoirs. Le gouvernement va avoir le temps de penser à son affaire et là, à ce moment-là, on pourra voir, à l'automne prochain, si tout est conforme avec les volontés du peuple. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée de Johnson. Je cède maintenant la parole à M. le député de Rimouski, en vous rappelant, M. le député, que vous allez intervenir sur la motion d'ajournement de la motion de

scission et que vous disposez d'une période maximale de 10 minutes.

M. Michel Tremblay

M. Tremblay (Rimouski): Oui, M. le Président. Vous me permettrez d'ajouter ma voix à celle de la partie ministérielle contre la motion de scission, d'une part, et contre la nouvelle motion d'ajournement présentée par la députée de Johnson.

Quelle conviction ont-ils, cette Opposition? Quelle crédibilité ont-ils de vouloir scinder le projet de loi 145 en trois projets de loi? Si vraiment ils avaient la conviction de leurs avancées, s'ils avaient, à mon sens, la conviction qu'ils pourraient débattre d'une façon convaincante du principe de scinder ce projet de loi en trois, s'ils avaient la conviction de pouvoir gagner cette motion de scission ou encore, cette motion d'ajournement, je pense qu'ils pourraient la plaider d'une façon éloquente et d'une façon convaincante.

Cependant, ce qu'on fait, on essaie de faire de la diversion. On essaie de diviser, on essaie de convaincre le monde que le projet de loi 145 est un mauvais projet de loi et qu'il devrait être présenté en trois projets de loi différents. (16 h 20)

Voilà ce qui caractérise l'Opposition depuis toujours: Diviser pour mieux régner d'une part et, en même temps, faire une job à moitié. Nous, ce que nous faisons avec le projet de loi 145, c'est que nous voulons régler une fois pour toutes la question de la réforme fiscale des municipalités. Alors, la réforme municipale, dans son ensemble, tient compte des revendications souventefois exprimées par les deux unions municipales, l'Union des municipalités du Québec et l'Union des municipalités régionales de comté, qui ont demandé et toujours recommandé que les mesures fiscales vis-à-vis des municipalités soient repensées. Elles ont même engagé le chef de l'Opposition officielle, M. Parizeau, qui, dans son rapport, le rapport Parizeau, recommandait finalement, dans les grandes lignes, ce que nous retrouvons dans le projet de loi 145. Alors, comment voulez-vous qu'aujourd'hui, l'Opposition, avec le chef en tête, soit contre le projet de loi 145 quand on pense qu'il répond exactement à ce que le chef de l'Opposition a déjà recommandé dans son rapport, d'une part, et, en même temps, aux demandes formulées à moult reprises par les deux unions municipales?

Je comprends qu'il y a une addition, c'est-à-dire qu'il y a une augmentation des taxes prévue. Ça, on ne s'en est pas caché. On l'a dit. Au départ, on pensait avoir un virement de 518 000 000 $ qui, après négociation, s'est retrouvé une facture d'à peu près 360 000 000 $. C'est un virement qui tient compte, par contre, de la capacité de payer des citoyens et des citoyennes du Québec. Et nous donnons aux municipalités, également, parallèlement à ça, un pouvoir de taxation accru dans des champs de juridiction qu'elles avaient ou que nous allons augmenter. Nécessairement, les accommodements que nous avons faits depuis le dépôt de la réforme, depuis le 14 décembre dernier, il me semble, sont tout de même acceptables et convenables pour les municipalités.

Les municipalités, présentement, tant rurales qu'urbaines, sont relativement d'accord avec le principe de la réforme que nous proposons. Et le projet de loi 145 ne peut pas être scindé parce que, vouloir le scinder, c'est vouloir, à mon sens, reporter à plus tard une décision qui est tellement bien formulée dans le projet de loi 145, que nous ne pouvons pas reculer. Nous nous devons d'accepter ce projet de loi 145 puisqu'il répond, d'une part, aux besoins des municipalités et, en même temps, leur donne des sources de financement pour assurer pleinement leurs responsabilités municipales.

J'entendais le député de Joliette nous dire qu'il voudrait scinder le projet de loi pour inclure la voirie municipale. Il était complètement dans les... j'allais dire dans les patates, pour employer une expression populaire. La voirie municipale, on n'en parle même pas dans le projet de loi 145. On parle de la réforme municipale versus le transport en commun, les "en lieu" de taxes et la sûreté municipale ou sûreté provinciale, mais, nulle part, il n'est question de la voirie municipale. Alors, pourquoi demander, dans le projet de loi qu'on voudrait scinder, qu'on parle ou qu'on discute de la voirie municipale? La voirie municipale, ça sera discuté utlérieurement. Dans le projet de loi, si vous le regardez très bien, il n'est aucunement question de la voirie municipale.

Un autre domaine aussi dans lequel les municipalités retrouveront leur compte, c'est que, dans la réforme municipale que nous avons devant nous présentement, nous avons tenu compte de la capacité de payer des citoyens. Nous savons que cette réforme-là, elle a un coût, un coût monétaire que chacun et chacune devra assumer, dépendamment de l'endroit où il se situera.

Si je reviens au niveau des implications, surtout dans la partie rurale, nous avons tenu compte, également, de la capacité de payer. Nous avons une enlevoppe de péréquation, entre autres. La péréquation, nous avions, dans le passé, 30 000 000 $. Qu'est-ce qu'elle faisait la péréquation? Elle venait faire une espèce d'équilibre pour les municipalités qui étaient les plus démunies et qui n'avaient pas la capacité d'assumer pleinement les charges fiscales auxquelles elles avaient droit, pour lesquelles elles devaient charger des taxes. Alors, nous avions 30 000 000 $ d'assumés dans le passé. Maintenant, avec la réforme qui est présentement devant nous, nous allons ajouter 20 000 000 $ supplémentaires, ce qui aura comme effet de

minimiser l'impact négatif des taxes municipales et, en même temps, d'avoir un juste prix pour les municipalités rurales.

Les "en lieu" de taxes. Au départ, nous voulions que les "en lieu" de taxes soient réduits à zéro et, après consultation et après considération de l'ensemble de ce dossier, nous sommes revenus sur notre décision. Au lieu d'abolir totalement les "en lieu" de taxes pour les écoles élémentaires et secondaires, nous avons décidé de maintenir des "en lieu" de taxes équivalant à à peu près 25 % du taux de taxation prévu.

Alors, voilà une amélioration, à mon sens, sensible, et qui tient compte des écoles élémentaires et secondaires qui se trouvent partout dans les municipalités de la province de Québec. Alors, les "en lieu" de taxes, au lieu d'être complètement abolis, seront réduits de 50 % à 25 % pour l'année 1992. Il était dans notre intention et dans notre projet, déposé le 14 décembre dernier, de ne plus financer les MRC. Alors, plusieurs nous ont fait des revendications et les unions municipales de comté nous ont demandé de maintenir les subventions aux MRC.

Après réflexion, après consultation et en même temps après s'être consultés au sujet des possibilités financières du gouvernement, nous avons décidé, pour les trois prochaines années, de maintenir les subventions aux MRC. Voilà une autre amélioration qui vient diminuer, à mon sens, l'impact négatif de la réforme municipale. Tout compte fait, on peut dire que la réforme municipale, malgré les inconvénients et ce, nous en sommes bien conscients qu'il y a un coût à payer pour des services municipaux adéquats, mais nous donnons aux municipalités, parallèlement à ça, un pouvoir de taxation augmenté dans différentes juridictions, pour pouvoir leur donner des ressources financières nécessaires pour assumer les nouvelles responsabilités que nous leur transférons. Ce transfert que nous faisons aux municipalités tient compte de tous les intervenants, c'est-à-dire de toutes les possibilités que la municipalité aura pour pouvoir assumer cette responsabilité. que dire de la sûreté du québec? plusieurs nous diront: vous avez un revirement d'une facture nette de la sûreté du québec. la sûreté du québec assure un service de sécurité dans toutes les municipalités du québec, et c'est un coût gratuit présentement. ce que nous voulons, c'est charger un juste prix pour les municipalités qui bénéficient du service de la sûreté du québec. ce coût-là, finalement, il est établi à à peu près 25 % du coût réel parce que si nous devions charger le coût virtuel que la sûreté du québec nous coûte dans les différentes paroisses, dans les différentes municipalités du québec, ce serait une facture doublée à 100 %, c'est-à-dire au-delà de 250 000 000 $, tandis que le transfert net qui se fait, ce sont 71 000 000 $, ce qui est tout de même acceptable. nous tenons compte aussi des différentes catégories de municipalités, à savoir les municipalités de zéro à 3000, où ce sera 0,10 $ des 100 $ d'immobilisation.

Alors, M. le Président, soyez assuré que je voterai contre la motion de scission et contre la motion d'ajournement, compte tenu de l'importance du projet de loi, et qui tient compte aussi du désir des municipalités d'avoir une réforme fiscale qui se tient debout, une réforme fiscale qui tient compte de tous les paramètres. Et je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Rimouski. Sur le même sujet, à savoir la motion d'ajournement de la motion de scission, je reconnais maintenant M. le député de Laviolette.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: M. le Président, à entendre le député qui vient de me précéder, je n'ai aucunement voulu être désobligeant, mais vous avez remarqué qu'il a commencé par dire un tout petit mot sur la motion de ma collègue, qui a pour but d'ajourner le débat sur la motion de scission, il a terminé en disant qu'il voterait contre, mais tout le temps, non seulement il n'a pas parlé de la motion de scission, même s'il y a fait allusion un peu, il a parlé plutôt de son discours qu'il avait fait sur la motion principale, qu'il n'a pas eu encore le temps de faire et je vous garantis, M. le Président, que vous allez avoir une chance quand il aura parlé sur cette motion-là peut-être de reprendre son discours et de recommencer les 10 minutes, qu'il vient de faire et d'en ajouter encore 10 minutes pour simplement défendre encore une fois un projet de loi qui mérite d'être approfondi davantage et avoir un moment d'arrêt.

Ce que ma collègue a proposé, M. le Président, ça dénote justement le besoin que nous avons d'arrêter le débat qui est en cours et d'en discuter plus convenablement. Ça permettrait peut-être au député de Rimouski, M. le Président, d'aller relire le rapport dit rapport Pari-zeau. Peut-être qu'il n'aurait pas la même vision qu'il en a actuellement. (16 h 30)

De façon démagogique, ils vont dire: C'est lui qui l'a proposé, c'est les municipalités qui le demandaient. Mais ils en mettent justement juste une partie et ils oublient la deuxième partie. Toutes les fois qu'on a fait une réforme des affaires municipales, au niveau de la fiscalité municipale, on a toujours parlé du pouvoir de taxation, mais aussi des capacités de transfert du gouvernement quand il transfère ses pouvoirs, des transferts d'argent. Ce que le gouvernement est en train de faire dans le projet qui est devant nous, ce n'est pas de dire: Je donne des pouvoirs nouveaux aux municipalités et, en conséquence, si je leur donne ces pouvoirs-là, je vais leur donner, en contrepartie, les montants

d'argent pour pouvoir combler ces pouvoirs-là. Ce n'est pas ça qu'il dit. Il dit: Je leur donne des pouvoirs, qu'elles aillent taxer maintenant. Là, on comprendrait peut-être mieux, ce que ma collègue, la députée de Johnson, a dit du député de Louis-Hébert, qu'il ne comprend pas du tout le sujet dans lequel nous sommes. Quand il vient parler de la voirie municipale, là, il va falloir que ça concorde ce qu'ils disent.

Le député de Louis-Hébert nous disait, tout à l'heure, que ce n'était pas grave, qu'on remettait aux municipalités la voirie municipale et, qu'en conséquence, par le projet de loi, elles devront s'en occuper. Le député de Rimouski vient de nous dire que ce n'est même pas dans le projet de loi. Là, il y a quelque chose qui ne va pas. Il va falloir qu'on le lise le projet de loi. Prenons le temps, arrêtons, suivons le conseil de ma collègue et regardons le projet de loi. Deux députés de la même formation politique, devant nous, nous indiquent, l'un, que ça va remettre en responsabilité les municipalités devant la voirie municipale et qu'en conséquence, si elles veulent avoir des routes, elles vont taxer pour et elles auront les routes qu'elles pourront taxer. L'autre dit que ça ne touche pas du tout le sujet. Bien, là, il y a quelque chose qui ne va pas. C'est le temps d'arrêter le débat, là, d'aller s'asseoir. Qu'ils lisent à fond le rapport Parizeau et ils auront un autre discours. Qu'ils lisent la loi et ils verront justement que le gouvernement est en train de transférer, même si le ministre semblait être d'accord avec lui pour dire que ce n'était pas dans le projet de loi.

Un instant, M. le Président! Les principes sont là. Pourquoi le gouvernement, actuellement, par le ministère des Transports, est-il en train d'aller visiter toutes les MRC qui veulent bien à travers le Québec et toutes les municipalités à qui on indique: Tel chemin va vous être remis, tel autre ne vous sera pas remis et tel autre va l'être. Les municipalités sont en train de nous écrire pour nous demander que telles routes, si jamais elles étaient remises entre les mains des municipalités, soient considérées de zone 1 plutôt que de zone 2 ou de zone 3. C'est parce que quelqu'un, quelque part, a commencé à parler qu'on allait leur remettre les chemins.

Le député de Rimouski s'en vient nous dire: Bien ce n'est pas grave, ce n'est pas vrai, ça. Un instant! Un instant! Qu'il s'asseoit, là, qu'il prenne le temps, comme ma collègue le dit, et qu'il vienne le regarder comme il faut le projet de loi. Même, M. le Président, ce temps d'arrêt... Le ministre, là, c'est une personne qui est considérée comme étant une personne qui ne plie pas parce que s'il est le seul à avoir le pas, il serait content de l'avoir, les autres ne l'ont pas. Ces choses-là, M. le Président, peut-être que ça vaudrait la peine que le député de Rimouski vienne avec moi dans ces municipalités, s'il le faut, que le député de Louis-Hébert vienne dans nos municipalités, qu'il lâche un peu le secteur de Québec et des environs et qu'il vienne dans nos municipalités à nous. Il verrait, M. le Président, comme chez vous, comme tous les autres qui sont dans le secteur rural, que le monde ne la prend pas cette loi-là.

Alors, le moment d'arrêt demandé par ma collègue est donc important. S'il y avait, comme autrefois, M. le Président, des débats contradictoires, ce serait très intéressant. Il y aurait, je pense, de part et d'autre, la version des gens qui défendent le gouvernement malgré tout, malgré que ça va leur coûter peut-être des difficultés dans leur propre comté. Ces gens-là sont en train de vendre leur peau pour sauver celle du ministre, sauf que le ministre, quand on considère les sondages, les rencontres que nous avons, c'est celui qui est le plus mal aimé, le moins aimé, celui dont le monde dit qu'il est tellement tranchant qu'au bout de la course on ne sait pas ce qu'il va nous arriver. Il donne, des fois, d'autres impressions, mais dans le débat qui est là, il est intransigeant. Dans ce sens-là, peut-être que le ministre, s'il avait des échos plus corrects de la part de ses collègues, des échos que les gens pourraient aller chercher dans leur milieu, avec des députés de l'Opposition s'il le faut, peut-être qu'à ce moment-là, le ministre, au lieu d'être intransigeant, serait ce qu'on a été capable, des fois, de connaître chez lui, soit une personne qui, si on lui amène la preuve que ça n'a pas de bon sens, accepte de changer d'idée.

Là, je ne reviendrai pas sur le projet de loi auquel le ministre pense que je vais revenir. Il sait très bien qu'il a eu la chance de changer d'idée. Ça a été bon pour lui, ça a été bon pour son gouvernement. Pourquoi ne prenons-nous pas le temps, M. le Président, comme ma collègue le propose, d'arrêter le débat, d'aller dans la population, d'aller voir auprès de la population, d'aller voir auprès de la population ce que le projet de loi nous amène comme difficultés?

Ce n'est pas difficile d'arrêter, d'être, durant l'été, à l'écoute de la population, d'aller dans les centres d'achat, comme je le disais l'autre jour, sur une motion à peu près identique, sur un autre sujet. Avec le député de Saint-Maurice, ça ne me gênerait pas. À Labretèche, comme je le lui disais, ou encore au centre d'achats qui est dans notre sous-région, à Shawinigan, je suis sûr que, lui et moi, assis à la même table, devant le monde qui serait là, il y a du monde qui dirait à mon ami collègue, le député de Saint-Maurice, que ça n'a pas de bon sens ce qu'ils sont en train de faire. Ils sont en train de transférer à des municipalités de nouvelles obligations parce que, eux, comme gouvernement, ils n'ont pas le courage de taxer, parce que, eux, le gouvernement, ils n'ont pas le courage de dire aux gens: Écoute, si tu veux avoir tel service, ça va te coûter tant, je vais le mettre sur l'impôt général et je vais le taxer à mon niveau à moi. Mais non pas faire comme on

est en train de faire. Faire comme le député de Rimouski, qui essaie de nous faire gober maintenant que le système, tel que présenté, ne touche pas la voirie municipale. Il faut le faire, M. le Président.

Il y a des gens qui comprendraient que ce serait peut-être bon de demander aux municipalités régionales de comté et aux municipalités de l'Union des municipalités de venir ici, à l'Assemblée nationale, nous dire en commission parlementaire les difficultés qu'elles auraient. Le député de Rimouski nous dit: Écoutez, on avait l'intention de couper les subventions aux MRC, mais l'adoucissement a fait qu'on n'enlèvera pas ça. En même temps, le même gouvernement qui a signé avec le fédéral pour les zones dites en difficulté, ce qu'on appelle le programme PZD - programme des zones en difficulté - où la MRC de Mékinac se trouve, où la MRC du centre de la Mauricie se trouve, qu'est-ce qui fait? Ce programme-là, où il y avait 1 000 000 $ pour venir en aide à ces municipalités, d'une part, du Québec, et 1 000 000 $ venant du fédéral, on nous dit: C'est fini, ça, ça n'a pas de bon sens, il n'y en aura plus. Le fédéral mettra son argent, nous, on n'en mettra pas.

Je dois dire que j'espère que c'est faux, ce que j'ai entendu dire, parce que les gens, chez nous, ont réagi drôlement. Ils avaient un programme où il y avait 1 000 000 $ venant du Québec et 1 000 000 $ venant du fédéral, 2 000 000 $ pour venir en aide à ces municipalités en zone défavorisée, zones en difficulté, le programme PZD. Alors, on leur dit, d'un côté: On ne vous coupera pas ce qu'on vous avait dit, mais on va vous couper d'autre chose. Au bout de la course, c'est à peu près comme dire aux gens: Écoutez, on voulait vous passer le corps au complet au tordeur, mais on va en passer juste la moitié. Peut-être que ce sera la moitié du côté du coeur, ce sera peut-être la partie vitale.

Chose certaine, le gouvernement aurait intérêt à suivre ma collègue et à accepter qu'on prenne un temps d'arrêt, qu'on reprenne le débat après avoir rencontré les municipalités et qu'à l'automne, on puisse revenir avec le dossier, s'il est encore possible d'y revenir, à moins que le gouvernement ne consente à ne plus jamais y revenir. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): merci, m. le député de laviolette. mme la députée de johnson, sur votre propre motion, votre droit de réplique de cinq minutes.

Mme Carmen Juneau (réplique)

Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai aussi entendu le député de Rimouski et je n'en suis pas revenue. Il y a deux députés, de l'autre côté, qui sont intervenus. C'est complètement déboussolant. C'est déboussolant, c'est le vrai mot. Un nous a indiqué son mépris des élus municipaux, l'autre était complètement en dehors de la "track", ce n'est pas plus mêlant que ça. On lui a demandé de faire une intervention sur la motion d'ajournement. Il en avait une toute préparée - il ne s'attendait pas à ça - sur la motion de scission, alors il a dit: Bien, on va lâcher celle-là, c'est celle-là qu'on a préparée.

En parlant des routes, il dit: Si les gens veulent des routes, ils s'en paieront. Il pense que ce n'est pas dans le projet de loi. Ça n'a pas de bon sens, dire des insanités semblables. Dans mon comté - je vais prendre un dossier que je connais bien - les municipalités rurales se promènent dans la "bouette", c'est le mot. Au printemps, la boue, les camions de lait... Je l'ai dit plusieurs fois, mais c'est décevant. Il y a des municipalités qui vont payer le gros prix pour ça. Je pense à Stoke qui a beaucoup de chemins dans son comté, qui est une municipalité rurale. Comment pensez-vous que ces gens-là... Est-ce que c'est parce qu'ils veulent se faire plaisir, qu'ils veulent avoir des routes carrossables en 1991? Voyons donc! Ça n'a pas de bon sens, des routes carrossables... Si les gens qui ont la chance d'avoir des routes asphaltées et carrossables sont contents de l'avoir, je suis contente aussi. (16 h 40)

M. Tremblay (Rimouski): M. le Président, question de règlement, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y.

M. Tremblay (Rimouski): II faudrait demander la pertinence du débat. Elle est rendue dans la voirie municipale. Ce n'est même pas dans notre projet de loi, d'une part et, deuxièmement...

Une voix: Hah! Hah! Hah!

M. Tremblay (Rimouski): ...on parle d'une motion d'ajournement...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): alors, mme la députée de johnson, vous êtes en réplique sur votre propre motion. continuez votre...

Mme Juneau: je vous laisse juger, m. le président, de l'intervention impromptue du ministre... du député de rimouski; j'ai fait un lapsus pour le ministre, ouf! m. le président, le projet de loi qu'on a en face de nous, qu'on est en train de discuter et pour lequel on demande un ajournement, c'est parce que c'est un projet de loi où il n'y a eu aucun principe de suivi. il n'y a eu aucune vision par ce gouvernement; la seule vision qu'il a eue, c'est un cauchemar. c'est ça qu'il a eu, un cauchemar. il a dit: on a un déficit de 3 400 000 000 $. à qui va-t-on le garrocher? 3 400 000 000 $, le seul leitmotiv que ce gouvernement a eu, c'est: refilons nos

problèmes aux municipalités; dégageons-nous. Jouons à Ponce Pilate, lavons-nous les mains. On a un déficit de 3 400 000 000 $, il faut que quelqu'un paie et ça va sur le dos des contribuables, sur le dos des payeurs de taxes.

Nous, de l'Opposition, si, éventuellement, on croit ce que le député de Louis-Hébert a dit, que l'Opposition veut faire de la démagogie sur le projet de loi 145, M. le Président, si défendre les contribuables, si défendre les élus municipaux, si défendre les hommes et les femmes qui travaillent, qui sont en récession et qui perdent leurs emplois, ça s'appelle de la démagogie, j'aime bien être taxée de ça. J'aime bien ça, être taxée de ça. J'aime bien conter ce que l'Opposition fait de la démagogie, si c'est ça; si c'est ça, défendre ses contribuables, si c'est ça.

M. le Président, l'Opposition et tous les autres députés en cette Chambre se lèvent pour dire que ça n'a plus de bon sens, que le payeur de taxes n'est plus capable de suffire à la tâche. Pour la plupart d'entre eux, dans toutes les régions du Québec, M. le Président, il y a des fermetures d'usines, il y a des centaines et des centaines de personnes qui sont sur le chômage, sur l'aide sociale. M. le Président, ce qu'on demande, c'est un ajournement pour qu'on revienne plus tard avec un projet de loi qui soit plus en mesure de correspondre à ce que les payeurs de taxes sont capables de payer. C'est ça qu'on demande, l'Opposition officielle du Québec. C'est ça, M. le Président. Pas plus que ça. Qu'on fasse en sorte que le projet de loi soit convenable, qu'on fasse que le projet de loi n'écrase pas les personnes qui n'ont plus d'emploi, c'est simplement ça, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée de Johnson. Je vais maintenant mettre aux voix la motion de Mme la députée de Johnson qui se lit... Vote enregistré. Qu'on appelle les députés pour le vote sur la motion de Mme la députée de Johnson. (16 h 45 - 16 h 51)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mmes et MM. les députés, si vous voulez vous asseoir, s'il vous plaît! S'il vous plaît!

Mise aux voix

Est-ce que la motion de Mme la députée de Johnson qui se lit comme suit: "Qu'en vertu des dispositions de l'article 100 du règlement de l'Assemblée nationale, le débat en cours sur la motion de scission soit ajourné", est-ce que cette motion...

Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever!

Le Secrétaire: M. Chevrette (Joliette), Mme

Blackburn (Chicoutimi), M. Blais (Masson), Mme Marois (Taillon), Mme Harel (Hochelaga-Maison-neuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Artha-baska), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), M. Claveau (Ungava), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noran-da-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), M. Libman (D'Arcy-McGee).

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Que ceux et celles qui sont contre veuillent bien se lever!

Le Secrétaire: M. Pagé (Portneuf), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Ryan (Argen-teuil), M. Côté (Charlesbourg), M. Bourbeau (La-porte), M. Dutil (Beauce-Sud), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Middlemiss (Pontiac), M. Cusano (Viau), Mme Bleau (Groulx), M. Houde (Berthier), Mme Trépanier (Dorion), M. Cannon (La Peltrie), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beaudin (Gaspé), M. Chagnon (Saint-Louis), M. Hamel (Sherbrooke), M. Paradis (Matapédia), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Leclerc (Taschereau), M. Poulin (Chauveau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Dauphin (Marquette), M. Kehoe (Chapleau), M. Fradet (Vimont), M. Richard (Nicolet-Yamaska), Mme Bégin (Beilechasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Borde-leau (Acadie), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Bradet (Charlevoix), M. Després (Limoilou), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Forget (Prévost), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau).

M. Chevrette: Est-ce qu'il y avait des abstentions? M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Avec le consentement du leader du gouvernement, j'apprécierais qu'on permette au député de Lévis de voter.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader du gouvernement, est-ce qu'il y a consentement?

M. Pagé: M. le Président, comme quoi les consentements sont parfois utiles. Oui.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors... M. Pagé: Jean, viens-t'en.

Une voix: II arrive toujours en retard. Des voix: Bravo! Une voix: Bravo, Jean!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Si vous voulez enregistrer le vote de M. le député de Lévis. Pour ou contre, M. le député de Lévis?

Le Secrétaire: pour, m. garon (lévis). pour: 21 contre: 50

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, la motion d'ajournement de Mme la députée de Johnson est rejetée.

Reprise du débat sur la motion de scission

Nous retournons maintenant au débat sur la motion de scission. Un instant, M. le leader du gouvernement. Alors, les députés... Pour ceux qui veulent laisser l'enceinte de l'Assemblée, si vous voulez le faire en silence, s'il vous plaît.

Alors, s'il vous plaît! Je rappelle ce que je viens de mentionner, que nous revenons au débat sur la motion de scission et je cède la parole immédiatement à M. le député de Taschereau. M. le député.

M. Jean Leclerc

M. Leclerc: Merci, M. le Président. Il arrive, en ces sessions intensives, que, comme parlementaire, on est appelé à réagir à de drôles de situations. Évidemment, voir la députée de Johnson demander une motion d'ajournement sur une motion de scission présentée par son propre parti, c'est déjà quelque chose en soi.

Une voix: Oui.

M. Leclerc: Imaginez, M. le Président, on a dû voter pour avoir le droit de continuer de discuter d'une motion que l'Opposition a elle-même présentée. Il faut le faire! Il faut le faire, de présenter une motion de scission et, quelques minutes plus tard, de présenter une motion d'ajournement de la discussion de la motion de scission.

M. le Président, est-ce qu'on peut imaginer ensemble de plus belles mesures dilatoires? Est-ce qu'on peut imaginer ensemble des façons moins élégantes de faire perdre le temps à cette Assemblée, que de demander à l'Assemblée d'ajourner la discussion d'une motion qu'on présente soi-même? M. le Président, si le ridicule tuait, on ne serait pas beaucoup de l'autre côté.

Une voix: Oui, vous avez bien raison.

M. Leclerc: M. le Président, on assiste à des mesures dilatoires d'une Opposition qui demande au gouvernement, par une motion de scission, de présenter des mesures à la petite cuillère, de présenter des mesures à la population, qui n'ont pas une perspective globale comme celle de la réforme municipale que nous étudions. M. le Président, pas besoin d'être un grand légiste pour comprendre que lorsque l'on travaille dans le partage fiscal avec les municipalités, on n'est pas pour discuter des projets de loi à la graine, mais qu'il faut regarder ça dans sa perspective...

Une voix: C'est vrai.

M. Leclerc: ...dans sa globalité. C'est ça que le gouvernement fait par le projet de loi sur la réforme municipale.

Une voix: Bien non!

M. Leclerc: M. le Président, c'est admis dans nos coutumes en cette Assemblée qu'un projet de loi peut modifier un certain nombre de lois. C'est ça que fait le projet de loi sur la réforme municipale. Donc, c'est tout à fait usuel, c'est tout à fait normal, ce que nous faisons là. Il est évident que l'Opposition se sert de la motion de scission comme mesure dilatoire. Tant et si bien que si on essaie de voir quel est l'esprit du règlement sur les motions de scission, c'est d'empêcher le gouvernement de présenter un projet de loi à l'intérieur duquel il y aurait un certain nombre de principes qui feraient en sorte que l'Opposition soit mal prise dans le choix de son vote. (17 heures)

Exemple, un projet de loi contient deux mesures: une que l'Opposition partage, une que l'Opposition ne partage pas. Ceci dit, l'Opposition serait à ce moment-là légitimée de dire au gouvernement: Voulez-vous, je vous prie, en vertu de notre règlement, diviser ce projet de loi là, de sorte que nous puissions faire notre travail de parlementaires et appuyer la portion qui nous intéresse et voter contre celle pour laquelle nous nous opposons? Voilà l'esprit de la motion de scission d'une Opposition qui s'en servirait avec intelligence, disant au gouvernement: Votre projet de loi, si nous voulons en faire un examen approprié, un examen relatif avec toutes les considérations que l'on a pour les mesures que vous apportez, nous vous prions de le diviser en deux, de sorte que nous puissions exprimer à la population entière notre accord dans un certain nombre de mesures et notre désaccord pour un certain nombre de mesures. Mais étudions la motion actuelle, la motion de scission.

Étudions, à plus forte raison, l'argumentaire du député de Joliette qui dit: Écoutez bien là, notre réponse, ce n'est pas très compliqué: on est contre les trois. Faites votre motion de

scission, divisez-la, cette loi-là, comme on vous le demande, mais on vous dit d'avance qu'on vote contre. Et c'est ça qui fait que la motion de scission qui est proposée par l'Opposition ne respecte pas l'esprit du règlement, bien qu'elle puisse en respecter la lettre - et c'est pourquoi vous l'avez acceptée, vous l'avez reconnue conforme - mais elle ne respecte pas son esprit parce qu'elle ne permet pas de bonifier nos débats parce que l'Opposition, à l'avance, dit au gouvernement: Même si vous scindez en trois ce projet de loi-là, on vous le dit tout de suite: on est contre, tous. On est contre, tous. Ça ne change rien dans notre façon de voter.

Par conséquent, M. le Président, nous avons la démonstration, en clair et en net, que cette motion-là ne sert qu'à faire retarder les travaux que nous devons tenir le plus sérieusement possible sur les projets de loi qui sont déposés, et pour bonifier les projets de loi dans le meilleur intérêt de toute la population. Et qu'est-ce qu'on fait, M. le Président, pour bonifier un projet de loi? On discute du projet de loi et non de toutes sortes de motions dilatoires. Au lieu de parler du projet de loi, on se dépêche d'aller en commission parlementaire faire le travail article par article, là où l'on peut vraiment parler du fond du projet de loi, là où l'Opposition peut amener des solutions construc-tives, peut amener des bonifications construc-tives.

M. le Président, ça fait quand même cinq ans, comme bien d'autres, que je suis ici, comme vous. On sait très bien quand l'Opposition travaille sérieusement et quand l'Opposition ne travaille pas sérieusement. On sait très bien quand l'Opposition fait son vrai travail d'Opposition, en proposant des choses intelligentes pour améliorer les projets de loi, mais on sait également très bien parce qu'on les a souvent vus faire, qu'est-ce qu'ils font, l'Opposition, quand ils veulent faire perdre le temps de la Chambre. Et c'est exactement en présentant des motions de scission comme ils l'ont fait, en voulant ajourner leur propre motion de scission comme ils l'ont fait, qu'ils font perdre non seulement le temps des parlementaires du gouvernement, mais aussi de tous les parlementaires, parce que je suis certain que dans leur propre formation politique, il y a des députés qui auraient des choses intelligentes à dire sur le projet de loi que nous étudions et qui seraient intéressés à aller en commission parlementaire pour faire des propositions au ministre.

Ceci dit, M. le Président, c'est ce que j'avais à dire sur la motion de scission qui est présentée par l'Opposition. Il est bien évident qu'il va falloir, comme Assemblée, voter sur cette motion-là, la défaire le plus tôt possible, pour qu'on puisse revenir finalement discuter du fond du projet de loi. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Taschereau. M. le député de Mas-son, sur la motion de scission de votre collègue, M. le député de Lévis. Je vous rappelle que vous disposez d'un temps maximum de 30 minutes.

M. Yves Blais

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Je viens d'entendre la phrase suivante, que les gens du gouvernement ont hâte que l'Opposition fasse un vrai travail d'Opposition. Mais, M. le Président, je m'en excuse. Nous faisons exactement notre travail. D'ailleurs, les sondages le démontrent. Nous allons le faire jusqu'à la fin de la session.

M. le Président, nous voulons scinder ce projet en trois. Nous annonçons d'avance que si vous le scindez en trois, nous allons voter contre les trois. Bon. Et c'est vrai. On vient dire de l'autre côté que c'est une perte de temps. Absolument pas. Nous, nous sommes contre les trois, mais nous croyons qu'il y a des députés de l'autre côté qui seraient pour une partie et contre certaines autres, et c'est par condescendance envers les simples députés de l'autre côté, qui sont obligés de suivre une ligne de conduite sur un tout, pour qu'ils puissent s'exprimer et que leur vote prenne toute sa valeur.

Ce projet de loi, en soi, M. le Président, nous voulons le scinder en trois. Pourquoi? Parce qu'il y a une partie qui regarde l'imposition de la police ou de charges de police sur le territoire québécois, une autre partie qui remet aux municipalités une grande partie de la voirie locale et un troisième volet qui est une obligation faite aux municipalités de taxer à la place du gouvernement qui veut montrer un déficit plus bas cette année. Donc, il y a trois paliers - comme dans un escalier, parce qu'il y a d'autres projets de loi en escalier; la taxe est très très haute - c'est seulement les trois premiers paliers que nous voyons ici, aux Affaires municipales.

Nous le faisons, M. le Président - et je vous le dis très modestement, et l'Opposition le dit très modestement - nous voulons retarder l'adoption de ce projet de loi parce que nous croyons qu'il est fait en faisant fi des autorités municipales et, comme Opposition, c'est notre devoir d'agir ainsi. Notre droit et notre devoir. Nous devons le faire, M. le Président, justement parce qu'on appelle ça une réforme de la taxation municipale. Ici, M. le Président, j'adore les gens qui savent jouer avec les mots. J'ai toujours aimé ça. Savoir jouer avec les mots, c'est un signe d'intelligence vive. Mais là, en disant, par ce projet de loi, que c'est une réforme profonde de la taxation municipale, on ne joue pas avec les mots. On dit quelque chose qui serait contraire à la vérité. On ébauche dans ce projet de loi une vision, peut-être une vision future, d'imposition de responsabilités aux municipalités. Mais on le fait sans leur consensus.

ii me semble, m. le président, que les élus de ce parlement ont été élus pour gouverner et que nous sommes arrivés ici avec 50 % des pouvoirs - les autres 50 % étant à un parlement étranger, celui d'ottawa - nous avons 50 % de responsabilités. de ces 50 % de responsabilités, nous en avons transféré. en créant des municipalités, nous avons transféré en même temps des pouvoirs. si nous voulons aller jouer dans ce transfert de responsabilités et d'autorité que nous avons données à d'autres élus, il faudrait au moins que nous, ici, dans ce parlement, nous le fassions avec un consensus devant ces élus. c'est une question primaire. il faut qu'un élu, d'abord, ait le respect des autres élus. et là, dans ce projet de loi, nous ne voyons pas ça, d'aucune façon, m. le président. il y a mépris de l'autorité municipale dans ce projet de loi. et c'est à cause de ça, m. le président, que nous nous objectons de a à z à ce projet de loi.

Cependant, par devoir, pour permettre au gouvernement et au ministre le moins populaire de ce gouvernement de regarder une autre fois ce projet de loi afin que sa cote finisse de descendre, nous lui permettons un petit répit. Nous lui permettons de mettre un petit soupir dans sa taxation. Toujours, toujours et toujours envoyer des taxes sur les citoyens de façon directe ou de façon indirecte par ce projet de loi, vient un temps - comme le disait La Fontaine - le contribuable "n'en puit mais...". Autrement dit, il n'en peut plus. Assez, c'est assez. Là, M. le Président, nous voulons permettre un certain soupir aux contribuables en essayant de scinder ce projet de loi. Notre but visé, par devoir, est le suivant: c'est d'essayer de retarder le plus possible ce projet de loi de sorte qu'il ne passe pas à cette session. Il n'y a pas de cachette là-dedans.

Pourquoi? Pour beaucoup de raisons. Premièrement, on dit que ce projet de loi est là pour une meilleure équité. Quand on parle de la police... Parlons de la police d'abord. Une meilleure équité. Une meilleure équité, M. le Président, ça veut dire que les citoyens qui habitent le territoire québécois, que chacun et chacune des personnes qui habitent le Québec paie les mêmes redevances pour avoir une sécurité policière sur son territoire, sa ville, sa grande municipalité ou sur l'ensemble du territoire québécois. (17 h 10)

On dit: Beaucoup de villes ont des polices, d'autres n'en ont pas. Nous avons la police provinciale. Nous voulons faire une répartition dans ça. M. le Président, il faudrait tout d'abord commencer par regarder l'ensemble du Québec. Il y a deux provinces au Canada qui paient leur police. Il y a huit provinces au Canada qui ne paient aucun sou pour leur force constabulaire, aucun sou. La première équité, ce serait d'aller à Ottawa et de demander une rétribution. C'a commencé au début des années soixante-dix, le

Parti libéral le revendiquait, M. Choquette avait demandé 750 000 000 $ à Ottawa pour ce faire.

C'était au-delà de 1 000 000 000 $ au tout début de l'année 1976. Nous sommes rendus à près de 4 000 000 000 $ aujourd'hui que nous pouvons aller revendiquer. L'équité, si nous sommes encore dans ce pays géographique appelé Canada, c'est qu'il y a d'abord une équité entre les premiers paliers de gouvernement, celui qu'on subit, celui d'Ottawa, et celui dont nous sommes membres ici, l'Assemblée nationale du Québec.

Il faudrait d'abord demander notre part. On ne compte même pas la force constabulaire dans les péréquations envoyées aux provinces. Alors, il y a une iniquité pour le Québec là, et si on veut parler d'équité quand on parle de force constabulaire, M. le Président, il faudrait d'abord commencer par regarder l'équité entre les deux plus grands Parlements avant d'imposer à des municipalités, par loi que nous faisons ici en Chambre, de payer une force constabulaire, avant d'aller faire des réclamations où on devrait le faire d'abord, c'est-à-dire à Ottawa. Je pense que cette loi-là, si elle passe, ne sera applicable que le 1er avril 1993. C'est tout de même très loin.

Pourquoi y a-t-il urgence dans le foyer, là? Pourquoi? Pourquoi n'appelle-t-on pas ça, ce projet de loi, 911? C'est urgence là? Service d'urgence? On prévoit que les municipalités seront malades à cause de cette loi-là le 1er avril 1993. Où est l'urgence? Qu'on vienne nous dire ici qu'on veut retarder. Oui, on veut retarder, c'est notre devoir et c'est notre droit. On veut le faire. Les municipalités auraient le temps d'aller revendiquer. Tout d'abord, une meilleure compréhension de la part du ministre des Affaires municipales.

Deuxièmement, l'équité réelle dans le service de la police: que le ministre des Affaires municipales aille faire ses devoirs à Ottawa, et revendique les sommes que le Québec a - par la prétention de recevoir - l'obligation d'aller chercher, au moins d'essayer. Au moins d'essayer. Au moins d'essayer! Là, M. le Président, on viendra après ça...

Troisièmement, sur notre propre territoire, existe une loi depuis quelques années et certaines municipalités s'y sont conformées. Dans mon propre comté, M. le Président, j'entendais le député de Rousseau dire qu'il n'y avait aucune municipalité qui s'était conformée à cette loi-là, c'est-à-dire quand ils ont plus de 5000 de population, d'installer une force constabulaire.

Dans la ville où demeure le député de Rousseau, Sainte-Anne-des-Plaines, ils l'ont fait il y a un an. Il devrait savoir au moins que chez lui, il y a une ville qui l'a fait. Dans mon comté, il y en a deux, M. le Président, dont une depuis 1984, c'est la ville de Lachenaie; elle a dépensé près de 4 000 000 $ jusqu'à aujourd'hui pour sa force constabulaire. Si elle n'avait pas observé la loi... Il y en a quatre ou cinq au Québec qui

l'ont fait. Alors, pour l'équité, M. le Président, les villes qui ont observé la loi qui était là, l'article 64.1, je crois, de la Loi de police, eh bien, pour celles qui ont observé la loi, les citoyens ont donc été pénalisés d'avoir observé la loi.

Si on veut qu'il y ait équité, il faudrait absolument que le ministre, par cette loi, donne une compensation aux villes qui ont observé la loi avant de commencer à l'imposer à tout le monde. Les sommes qui ont été versées... Les municipalités qui n'ont pas observé la loi jusqu'à aujourd'hui, jusqu'au 1er avril 1993, ne sont pas pénalisées, ne paient aucune redevance ni aucune amende au gouvernement, mais à celles qui ont été légales, on ne donne aucun moyen de compensation.

J'aimerais absolument, M. le Président, que le ministre regarde ça avant de prendre une position définitive sur ce projet de loi. L'Opposition, ce n'est pas pour s'amuser qu'elle fait ça. Ce n'est pas pour gagner des votes, M. le Président. Nous sommes déjà à 53,1 % dans les sondages. Nous en avons amplement pour battre le gouvernement en place. Nous en avons amplement. Amplement! Ce n'est pas pour gagner des votes c'est par esprit de défense des droits des élus municipaux et pour une équité de l'ensemble des citoyens à travers le Québec.

M. le Président, l'équité, qui est censée être la base de formation que le ministre nous a donnée pour écrire ce projet de loi, j'ai l'impression qu'elle est atrophiée, au départ, et nous allons absolument, nous ici, voter contre ce projet de loi, même si vous acceptez de le scinder, parce que ce sera encore plus juste de voter trois fois contre un projet tel que celui-là. Et si nous le pouvons... C'est ce qu'on a appris comme Corneille, ici, avec Horace et Curiace: "Que voulez-vous qu'il fit contre trois?" On va toujours contre nous, trois à un. Qu'il mourût, dit-il, ou qu'un vain désespoir enfin le secourût, et ce vain désespoir, c'est l'émotion que nous faisons actuellement, et nous espérons toujours que quelques-uns d'entre vous verront la lumière. Je vous souhaite de rencontrer votre chemin, comme saint Paul l'a rencontré dans l'Évangile, M. le ministre des Affaires municipales. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Masson. Toujours à l'étape de la motion de scission présentée par M. le député de Lévis, je reconnais maintenant M. le ministre des Affaires municipales. Je vais vous rappeler, M. le ministre, que vous disposez encore d'une période de 30 minutes.

M. Claude Ryan

M. Ryan: Pour une rare fois, M. le Président, votre générosité m'intimide. La matière est tellement simple qu'à moins de vouloir épouser le jeu de l'Opposition et verser dans l'obstruction, je crains d'avoir de la difficulté à consacrer 30 minutes au sujet extrêmement limité qui a fait l'objet de la motion de l'Opposition. Vous verrez, avec la démonstration que je vous soumettrai, que le bon sens lui-même indique clairement la voie à suivre dans ce débat.

Tout d'abord, je souligne un point qui m'a bien frappé dans plusieurs interventions que j'ai entendues du côté de l'Opposition cet après-midi. Il y en a beaucoup qui ont parlé de scinder, dans le projet de loi, des éléments qui n'y sont même pas. Ça, il faut le faire. Il faut n'avoir pas eu beaucoup de temps pour lire le projet de loi pour en venir à des propositions aussi peu sensées. On a dit... Je me souviens encore d'avoir entendu le leader de l'Opposition le dire en toutes lettres cet après-midi: Donnez-nous le temps. Nous voulons l'étudier sérieusement. La partie qui regarde la voirie locale est une partie extrêmement importante du projet de loi. Donnez-nous un peu de temps, on va l'examiner à fond et on verra comment on votera. Chacun votera suivant sa conscience, mais pour voter suivant sa conscience, il faut commencer par apprendre à lire.

La première chose qu'on fait quand on est en face d'un projet de loi, on l'étudié. Si on trouve, après étude, que des motifs sérieux justifient telle ou telle proposition, c'est le devoir du gouvernement de les entendre, mais quand le gouvernement est saisi d'une proposition qui démontre à sa face même qu'on n'a même pas fait au projet de loi l'honneur de le lire, je pense qu'on est obligé de passer aux réponses plus rapides. Je pense qu'on est obligé de dire, dans ce cas-là: Retournez faire votre travail de base et, après ça, on pourra discuter de choses sérieuses. Je vous dis, M. le Président, que dans le projet de loi 145, il n'est pas question de la voirie locale. C'est clair. Donc, voici une partie qu'on ne peut pas scinder. Elle n'y est pas. Premier point.

Maintenant, il faut se demander... Le député de Jonquière veut-il me poser une question?

Une voix: Consentement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant! Je m'excuse. En vertu du règlement, vous pourrez, après l'intervention de M. le ministre, poser une question en vertu de l'article 213. Allez-y, M. le ministre!

M. Ryan: Très bien, mais je parle des interventions que nous avons entendues cet après-midi. Vous n'avez pas eu le temps de les préparer, les interventions. Je vous comprends.

Maintenant, j'examine... Je lui avais parlé avant son intervention et il a dit des choses, justement, il a rappelé quel est le principe du projet de loi. Nous en parlerons dans deux minutes. Première chose qu'il faut se dire, c'est

que le projet de loi 145, là, respecte l'avis du président de l'Assemblée. Je ne suis pas toujours obligé de le partager, je ne le mets jamais en cause au point de vue procédure. (17 h 20)

Au point de vue d'opinion, je pense que chacun peut garder son opinion. Il y a, je le soumets humblement, un principe directeur fondamental et unificateur qui donne son sens à toutes les parties du projet de loi. Ce principe est bien simple, c'est la recherche, la définition d'un équilibre plus juste dans le partage des responsabilités entre Québec et les municipalités, la définition d'un équilibre plus juste dans le partage des responsabilités entre Québec et les municipalités. Pour réaliser un équilibre plus juste dans le partage des responsabilités, il faut bien parler de plusieurs sujets. Si on parle seulement d'un sujet, on n'arrivera jamais à parler du principe du projet de loi. Or, c'est de la nature même du principe du projet de loi de commander qu'on examine différents aspects de la fiscalité et même des finances publiques municipales pour en arriver à proposer un équilibre qui sera plus intéressant au bout de la ligne, à tout le moins un équilibre qui engage le gouvernement et sur lequel on puisse faire un débat honnête et vigoureux, au besoin. Alors, je vous dis, le principe, ne cherchons pas midi à quatorze heures, il est inscrit dans ces quelques lignes que je viens d'essayer de résumer: Le projet de loi vise à créer un équilibre plus satisfaisant dans les rapports financiers entre le gouvernement et les municipalités.

Il y a un principe complémentaire qui dérive du premier, qui est son corollaire tout à fait logique. On dit: Pour arriver à un équilibre plus satisfaisant, il faudra que chacun commence à payer les choses dont il est responsable au lieu de les faire endosser par l'autre, et c'est le deuxième élément du projet de loi qui est directement relié au premier, encore une fois. On ne peut pas les séparer tous les deux. On vous dit: Si nous voulons arriver à un équilibre plus judicieux, il faudra qu'à l'avenir chacun porte ses responsabilités de manière plus directe et plus plénière.

Les trois exemples que nous donnons de manière préférentielle sont ceux qui ont retenu, à bien des reprises, l'attention des observateurs. Je mentionne, de manière toute particulière, les trois points suivants: tout d'abord, le transport en commun, deuxièmement, les "en lieu" de taxes sur les immeubles scolaires... Il est clair, celui-là aussi, les "en lieu" de taxes sur les immeubles scolaires. Le gouvernement dit aux municipalités: Nous ne pouvons plus verser les subventions au niveau où elles étaient versées, mais nous acceptons, cependant, qu'elles soient versées à un niveau qui reste supérieur à celui des dépenses encourues par les municipalités pour des services fournis aux immeubles scolaires. Alors, le principe est clair des deux côtés. Le gouver- nement dit aux municipalités: Vous fournissez des services à ces immeubles qui sont la propriété d'un réseau public provincial, nous allons vous payer cette chose-là. Mais sur le reste, nous allons vous payer suivant notre capacité, c'est-à-dire un léger surplus qui ne peut pas être aussi généreux qu'en d'autres périodes. Et là-dessus, nous demeurons encore à un niveau supérieur à la moyenne canadienne.

Le troisième terrain d'application, c'est la police. Il y a de nombreuses années que l'on discute ce sujet au Québec, que l'on se dit: II serait temps que chaque citoyen porte sa part de responsabilités dans le financement des services de protection policière auxquels il a droit et auxquels il a accès, dans 92 % des municipalités, par le truchement de la Sûreté du Québec. Le gouvernement a dit: Depuis quelques années, on "parlotait" là-dessus. Ça va bien, ça. Le chef de l'Opposition s'est payé le luxe d'être président d'une commission d'enquête financée par l'Union des municipalités du Québec, il y a quelques années à peine, il y a à peine quatre ou cinq ans. Vous lisez les conclusions de ce rapport de la commission Parizeau et il le dit en toutes lettres: II faudrait que les municipalités qui n'ont pas de corps de police soient facturées par la Sûreté du Québec pour les services qu'elles en reçoivent.

L'Union des municipalités du Québec a endossé, approuvé le rapport Parizeau à une réunion subséquente. Dans le temps, je pense que le député de Jonquière en était déjà partie. Je comprends qu'il n'a pas porté trop d'attention à cet aspect du rapport Parizeau, mais c'est écrit en toutes lettres dans le rapport Parizeau, ce que je dis et je le défie de me prouver le contraire.

Voilà les points, M. le Président. Si vous enlevez un élément... Il faut bien comprendre que c'est un tout qui se tient, ça. Nous avons dit: Pour le transport en commun, nous n'abandonnons pas les municipalités à leur sort de manière pure et simple. Nous leur disons: Nous mettons fin aux subventions de fonctionnement, mais, en retour, nous vous donnons accès à certaines sources de revenus additionnelles. Les trois sources auxquelles nous donnons accès sont les suivantes: d'abord, nous permettons d'instituer une surtaxe foncière sur les immeubles non résidentiels. Mais on nous dit: ce n'est pas suffisant. Une surtaxe foncière, il ne faut pas qu'on en abuse. On peut en faire un usage judicieux. Si on va au-delà d'un certain niveau, ça ne sera pas bon pour le commerce et l'industrie. Nous en sommes complètement. Alors, nous disons: en plus, nous allons fournir l'accès à d'autres sources de revenus. C'est là que nous avons la contribution qui est demandée aux automobilistes, aux propriétaires de véhicules de promenade; contribution spéciale pour le transport en commun.

Vous allez être étonnés d'entendre ça. Vous

allez être étonnés d'entendre ces explications. Je sais que des députés m'ont demandé... Ils ont dit: Moi, je suis dans un territoire qui n'est pas desservi par un office public de transport en commun. Vous demandez une contribution à mes automobilistes, propriétaires de véhicules de promenade. Oui, nous la demandons. Pourquoi? Parce que ces personnes demeurent dans des municipalités qui se trouvent dans une grande région métropolitaine de recensement. Une région métropolitaine de recensement, en font partie des municipalités dont la majorité des gagne-pain vont chercher leur revenu de travail professionnel dans le centre de l'agglomération. Je prends nos concitoyens de Mirabel, qui sont dans mon comté et que j'aurais bien préféré ne pas inviter à assumer cette charge de 30 S par véhicule de promenade. Je prends ceux du comté de Deux-Montagnes, dont le député est juste à mes côtés en ce moment. Nous aurions préféré ne pas leur demander ça, mais le député de Deux-Montagnes sait très bien que, chez les gens de Saint-Eus-tache, une grande majorité vient travailler dans le coeur de la région métropolitaine. Qu'on leur demande une contribution de 30 $ par véhicule, eux dont la grande majorité se rend à Montréal en véhicule personnel non seulement pour leur travail, mais pour toutes sortes de fins récréatives, qu'on leur demande 30 $ de contribution sur le financement du transport en commun, c'est une contribution extrêmement limitée, sauf pour quelques porte-parole qui ont parlé sans réfléchir.

L'automobiliste ordinaire se rend très bien compte qu'il a une part de responsabilité pour le bon fonctionnement de Montréal s'il demeure à Sainte-Thérèse, à Mascouche, à L'Assomption, à Saint-Bruno ou encore à Mirabel, à Saint-Eus-tache ou à Deux-Montagnes. Il ne faut pas être grand clerc pour savoir ça. Je pense que ce sont des choses qui sautent aux yeux. Il n'y a rien d'étouffant ni d'écrasant là-dedans. Qui viendra prétendre... Si nous sortons ça du projet de loi, tout le projet de loi n'a plus la même signification. Là, l'Opposition nous dira: Oui, vous refilez des dépenses de transport en commun aux municipalités, vous ne leur donnez pas de revenus en retour. On ne peut pas avoir les deux. Un de mes frères disait ça, moi, quand on était plus jeunes: On ne peut pas avoir un "char", être beau et rester en ville. Il faut choisir.

Si vous voulez qu'en retour des responsabilités que nous demandons aux municipalités d'assumer, nous leur donnions accès à des sources de revenus compensatoires, ne venez pas nous dire dans un mouvement de contradiction évident que vous ne voulez pas qu'on en parle dans le projet de loi. C'est l'un ou l'autre. Choisissez. Nous autres, nous choisissons la logique, la cohérence, le bon sens et l'équilibre dans les propositions. Alors ça, je pense que c'est assez clair, que ça se passe même de contestation, si on veut être sérieux. On a entendu, là... On nous l'a dit en toutes lettres cet après-midi, M. le Président, on nous l'a dit: On veut "staller" votre affaire; on veut la retarder, on veut la reporter aux calendes grecques.

Nous vous l'avons dit, ce que ça signifie. Si vous reportez ce projet de loi-ci à cette session-ci, ça veut dire que vous réussissez à l'envoyer aux calendes grecques parce que l'année prochaine, l'Opposition va nous parler en Chambre, pendant toute l'année, uniquement d'un référendum sur l'indépendance du Québec. Vous vous êtes préparés; il n'y a pas d'autre sujet dont vous parlez avec ferveur. Dans le cas de ce sujet-ci, on voit que c'est un travail imposé qui vous est donné; à part le député de Jonquière. Je pense que je peux le mettre à part parce qu'il est vraiment intéressé dans son sujet. Les autres viennent faire un travail plus ou moins de mercenaire. Ça paraît par le manque de préparation dans les interventions que vous faites. C'est ça qui est choquant pour l'esprit. Pour le sujet, moi, ça ne me dérange pas du tout parce que ça m'amuse, mais pour l'esprit, quelqu'un qui regarde ça, dit: Ils pourraient au moins lire les projets de loi avant d'en parler.

Je continue. Je fais l'examen du projet de loi. Il y a à peu près 315 articles dans le projet de loi, 325 je pense... il y en a 322. Vous allez jusqu'à l'article 236. Il n'y a aucun problème; ce sont des dispositions qui parlent. On va vous donner les sujets: Le rôle de l'évaluateur, les pouvoirs de l'évaluateur; le rôle de l'évaluation foncière dans une municipalité; les ententes intermunicipales en matière d'évaluation et d'envoi de comptes de taxe. (17 h 30)

II y a l'article 65.1 que nous voulons amender. Ça, c'est l'article qui traite de la taxation foncière sur les équipements des entreprises de pétrole. Il y a une éternité qu'on discute de ce sujet. Il y a une iniquité qui est inscrite dans le texte de la loi actuelle, que tout le monde nous a presque suppliés de modifier. Nous l'inscrivons ici. Ensuite, les questions de la surtaxe sur les immeubles non résidentiels, les questions d'une taxe sur le stationnement dont on peut discuter l'opportunité - on en discutera au mérite - mais dont personne ne peut contester la pertinence dans un projet de loi comme celui-ci. La, on est encore aux discussions sur la pertinence. On est autour du sujet; on tourne autour. Mais il n'y a personne qui peut contester sérieusement la pertinence d'un chapitre qui traite de ce sujet-là.

Ensuite, on parle de la richesse foncière uniformisée. S'il y a un sujet qui est central dans toute discussion sur la fiscalité municipale, c'est bien celui-là. Ensuite, on a les dispositions qui modifient la Loi sur les mutations immobilières pour ajuster les taux de taxation sur les mutations immobilières, les ventes d'immeubles,

les ventes de maisons, les ventes d'édifices commerciaux ou industriels sur le territoire d'une municipalité. Encore là, ça, ça fait partie directement de notre sujet. Il me semble que c'est absolument pertinent. Là, il y a un lien, M. le Président, que nous devons saisir. Si nous augmentons les droits sur les mutations immobilières, c'est pour fournir aux municipalités plus de revenus pour leur permettre de payer leur quote-part sur le déficit de fonctionnement du transport en commun.

Nous le disons en toutes lettres dans le projet de loi. Si nous allions enlever ces parties-là qui font le lien entre les revenus devant sortir de cette source de taxation et le financement du déficit du transport en commun, l'Opposition serait la première, et à juste titre, à nous dire: Vous enlevez des subventions aux municipalités, vous accroissez leur fardeau financier et vous ne leur donnez pas de source de revenus en retour. Nous vous disons encore une fois que nous prenons la partie a de la proposition, mais nous devons accepter également la partie b, autrement le scénario ne résiste pas à l'examen, ne tient pas debout.

La police, ce n'est pas un projet qui réorganise la police. On en reparlera de la police en temps utile. Nous avons des projets là-dessus. Nous vous en entretiendrons quand nous les aurons complétés. Mais, pour le moment, ce que nous vous disons, je pense bien qu'il n'y a personne qui conteste que la protection policière soit une responsabilité de l'autorité politique locale. C'est une des premières responsabilités de base de l'autorité municipale de voir à protéger la sécurité des personnes et des biens sur son territoire. Elle a cette responsabilité incontestable, inaliénable. Est-ce qu'elle doit l'exercer directement ou s'il n'est pas préférable que, dans bien des cas, elle l'exerce indirectement par le recours à un service compétent qui puisse s'acquitter de la tâche dans des conditions économiquement plus propices pour elle.

Vous me direz: Qu'on laisse donc les municipalités décider. On leur laisse la liberté de décision dans le projet de loi. On la leur laisse. Mais elles l'ont exercée depuis longtemps, cette liberté-là. Elles l'ont depuis toujours, M. le Président. Ce n'est pas une nouveauté d'aujourd'hui; elles l'ont depuis toujours. Il y a 92 % des municipalités au Québec qui ont décidé de l'exercer, cette liberté de décision dans le sens d'un recours aux services de la Sûreté du Québec. Ce n'est pas pour rien. Il y a deux raisons. D'abord, elles n'avaient pas les moyens de se payer un service de police local. Elles n'en avaient pas les moyens, ça coûte trop cher. Deuxièmement, elles étaient conscientes jusqu'à ces tout derniers temps, que la Sûreté du Québec leur accordait une protection fort convenable. Imaginez-vous un maire et un conseil municipal qui viendraient vous dire aujourd'hui: On n'est pas satisfait des services qu'offre la Sûreté du

Québec. Ça fait 10 ou 15 ans qu'ils seraient maire et échevins, dans certains cas, et ça aurait pris le projet de loi 145 pour qu'ils s'en aperçoivent. Vous voyez bien que ça ne tient pas debout. Ce sont des gens sérieux. Ils se font élire par la population, ils sont assermentés après avoir été élus. Il y en a des anciens maires, ici, dans l'Assemblée nationale, qui peuvent confirmer ceci. Ils le savent très bien en général.

Moi, j'en ai des maires dans mon comté; j'en ai 23 en tout. Il y en a cinq qui ont un service de police local, les autres recourent à la Sûreté du Québec depuis un temps immémorial. J'en rencontrais encore un hier, celui du canton de Chatham, avec qui j'ai eu le plaisir de participer à un événement public. Il reconnaît très bien qu'ils se servent de la Sûreté du Québec depuis longtemps. Il ne m'a aucunement parlé qu'il voudrait abandonner ce service pour s'en donner un lui-même parce qu'il se rend compte que c'est plus avantageux pour lui, mais encore une fois, nous respectons la liberté de décision des municipalités. Celles qui pensent qu'elles sont capables - de l'autre côté, il y en a beaucoup, c'est leur slogan: "on est capable" - qu'elles prennent leurs responsabilités et, après ça, elles transigeront avec la Fédération des policiers du Québec et avec d'autres organismes qui leur feront voir ce que ça comporte, des décisions prises sérieusement. Là, ça va bien. On décide et, après ça, c'est l'autre qui paie. Pas de problème.

Alors, à celles qui préfèrent continuer judicieusement, à mon point de vue, de recourir aux services de la Sûreté du Québec, nous disons: II est à peu près temps qu'on partage la facture. Nous ne leur demandons pas d'assumer le coût complet; nous leur demandons d'en assumer une partie. Où est-ce qu'on va mettre ça? On va aller faire un projet de loi séparé pour dire seulement ça? Ça fait partie de l'ensemble que nous sommes en train de discuter, M. le Président. C'est un nouvel équilibre de responsabilités que nous voulons établir. Il pourrait arriver, si nous avions un projet de loi séparé, que nous déciderions de le modifier sur tel ou tel point et ça pourrait modifier l'ensemble de l'équation.

C'est un programme complet, ça, qui comporte des transferts de responsabilités de l'ordre de 400 000 000 $ au moins. C'est peut-être un petit peu plus que 400 000 000 $ en tout, nous ne l'avons pas caché, mais pour que ça ait du sens, il faut absolument qu'on ajoute toutes sortes d'éléments. Je l'ai dit souvent en cette Chambre: le gouvernement, sur la facture initiale de 477 000 000 $, a assumé 78 000 000 $ directement. En plus, il fournit aux municipalités l'accès à des sources nouvelles de revenus pour plus de 160 000 000 $. Le reste, il leur dit: Vous irez le chercher à même les impôts que nous vous ouvrons, soit la surtaxe sur les immeubles non résidentiels, soit la taxe sur le stationne-

ment, soit encore le retour au droit sur les divertissements.

Si vous enlevez une partie, à supposer qu'on vienne... C'est comme une voiture à quatre roues, que vous enlevez une roue et que vous la mettez sur l'autoroute 20, elle ne marchera pas longtemps. Ça ne marchera pas longtemps. La Sûreté du Québec va venir voir le type: Tu n'as pas d'affaire ici. Nous autres, si on enlève l'une de ces parties-là, ce sont des parties qui se tiennent, c'est l'unité du projet qui perd son sens. C'est le principe même du projet de loi qui est compromis, cette définition d'un nouvel équilibre, le partage des responsabilités financières entre le gouvernement et les municipalités du Québec. Nous vous disons: Si nous allions renoncer à ce principe, si nous allions l'abandonner à l'improvisation que nous propose l'Opposition, je pense que nous manquerions à notre devoir de législateur responsable.

J'ajoute un dernier point: Si nous allions céder à la proposition de l'Opposition, ça veut dire que nous renvoyons ce projet de loi aux calendes grecques définitivement. J'ai commencé à le dire tantôt. Si nous ne l'adoptons pas à cette session-ci, ne comptez pas que nous nous reprendrons à l'automne. À compter de l'automne, il y a un autre momentum qui va s'établir dans nos travaux. Il y aura d'autres impératifs qui commanderont notre attention.

L'an prochain, nous serons pris avec des sujets beaucoup plus amples encore. Ensuite, ça sera la fièvre de l'élection qui s'emparera du Québec. Le temps - je pense que la députée de Taillon le sait très bien - qui est donné à un gouvernement pour agir efficacement sur des sujets importants est très limité. Il comporte au plus une couple d'années. Si vous laissez passer ces deux années de grâce, ça veut dire que vous ne faites rien pour porter des projets à plus tard et vous les reportez au gouvernement suivant. Moi, ce n'est pas parce que je tiens particulièrement à attacher mon nom à un projet comme celui-ci. J'aimerais bien mieux avoir d'autres sujets de préoccupation. On est capable de faire des compliments à la population; nous autres aussi, c'est facile, ça. C'est facile, vous savez.

Il y a des tâches difficiles à faire. Là, si nous reportions le projet, qu'est-ce qui arrive pour les finances publiques du Québec? On va jouer à la partie de remise continuelle, comme on a fait depuis une quinzaine d'années au Québec. On va dire encore une fois: On va aller encore voir nos banquiers, on va aller faire une excursion à New York. On va envoyer le ministre des Finances faire un pèlerinage. Je vais leur promettre que, dans deux ans, ça va être mieux, etc. On va encore se gargariser, augmenter la dette publique du Québec et refuser de faire face aujourd'hui à des devoirs qui commandent notre attention maintenant et pas demain. (17 h 40)

C'est ça qui est le sens du projet de loi.

Pas de manâna, comme on dit en Espagne, pas de lendemain. Toujours dire: À demain, à demain les choses dures, faisons les choses faciles aujourd'hui, on ne va nulle part avec ça. C'est ça qui est le message du projet de loi, pour le résumer brièvement. Si c'est ça qui est le message, si c'est pour être le même message en plus dans un an, en plus dur dans deux ans, en plus sévère dans trois ans et dans quatre ans, à ce moment-là, vous aurez peut-être un autre ministre à attaquer. Vous ne serez pas plus avancés. Si c'est pour être plus sévère dans un an, dans deux ans ou dans trois ans, M. le Président, je vous le demande en toute déférence, pourquoi ne pas le faire maintenant? Pourquoi ne pas mettre tout de suite notre population, notre Québec, nos municipalités sur la voie de la responsabilité directement, concrètement assumée, qui est la seule voie du progrès véritable pour une société dans le monde hautement concurrentiel où nous vivons désormais?

Autrefois, on pouvait se payer d'illusions pendant un temps. On pouvait se dire: On a de la marge. Il faut rendre hommage à nos gouvernants qui nous ont précédés, qui nous ont laissé une situation de crédit fort intéressante. Mais là, ensemble, vous autres de votre côté et nous autres de notre côté, pendant un certain temps, nous en avons usé, de cette marge-là, très généreusement. Aujourd'hui, il y a un mouvement du pendule qui nous ordonne de resserrer la discipline pour qu'on puisse être plus forts.

Voilà, M. le Président, le sens du débat que nous faisons et peut-être que l'Opposition ne s'en rendait pas compte quand elle a présenté cette suite ininterrompue de motions dilatoires. Mais je pense qu'on a fait la démonstration que ça ne conduit nulle part. Le plus tôt possible nous aurons disposé de cette motion pour revenir au fond du débat et entreprendre, en commission parlementaire, le travail qui nous attend, je pense que nous y gagnerons tous comme législateurs consciencieux.

J'ajoute ceci. Chaque heure que nous perdons actuellement en débats sur des motions dilatoires, c'est autant de temps qui nous est enlevé pour le travail très important qui doit être fait en commission parlementaire. Très important. Il y a une date obligatoire d'ajournement pour les travaux de l'Assemblée. Ça doit finir avant la fête de la Saint-Jean. Il faut que nous fassions ce travail-là consciencieusement et chaque article que nous n'aurons pas pu étudier à fond parce qu'il y aura trop de temps qui aura été perdu dans des débats interminables sur des abstractions, je pense que ce sera une responsabilité que nous aurons contractée à l'endroit de nos concitoyens.

Je termine, M. le Président, en disant que ce projet de loi n'a absolument rien de négatif, d'hostile ou de méfiant à l'endroit des municipalités. Au contraire, nous avons une profonde confiance dans l'aptitude des administrateurs

municipaux à s'acquitter de leurs responsabilités lorsque celles-ci sont clairement et nettement définies.

J'ai parlé avec les maires de mon comté à diverses reprises. Je les ai rencontrés dès le début de l'exercice, en janvier dernier, pour les mettre clairement en face des faits. Je vais les rencontrer prochainement pour examiner avec eux les dernières implications, pour chacune de mes municipalités, de tous les ajustements que nous avons apportés au projet de loi et je vous assure que, quand nous leur tenons le langage de la responsabilité, quand nous leur disons que c'est un exercice d'association avec le gouvernement du Québec, avec l'Assemblée nationale du Québec qui leur est proposé, non pas un exercice d'imposition, contrairement à tout ce qu'on a voulu laisser entendre... Dieu sait que nous les avons entendus, les arguments. Ça fait six mois que nous discutons, que nous étudions les représentations en provenance de partout.

Moi, je vous dis: Les maires et les conseillers municipaux sont parfaitement capables et tout à fait disposés à écouter ce message. Il est plus dur qu'un message facile qui leur dit: Faites donc ce que vous voudrez puis venez nous voir, on vous donnera les subventions. Votez pour nous autres et laissons le carrousel continuer, le carrousel des déficits. Ils sont capables de comprendre l'autre langage. Dans la mesure où nous allons le comprendre et l'assumer ensemble, que l'Opposition nous aide à améliorer le projet de loi, nous l'accueillerons avec toute la capacité d'écoute que nous avons démontrée à maintes reprises et que le député de Jonquière a reconnue lui-même à plusieurs reprises en toute équité, je dois le reconnaître. Qu'elle nous aide à améliorer le projet de loi et nous allons l'écouter au maximum. Si elle veut nous faire abandonner le projet de loi et nous faire dériver la voiture dans le fossé, je pense qu'on peut lui dire que nous ne la suivrons pas parce que c'est une voie trop dangereuse pour le Québec et pour nous tous. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre des Affaires municipales. Sur cette même motion de scission du député de Lévis, je cède la parole à M. le député de Jonquière.

M. Francis Dufour

M. Dufour: Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je vous rappelle, M. le député, que vous avez un temps de parole de 18 minutes.

M. Dufour: Merci. M. le Président, lorsqu'on écoute le ministre des Affaires municipales qui est, je dois l'admettre, un bon plaideur, qui veut nous parler de la responsabilité, il a une certaine autorité morale qu'on peut lui accorder jusqu'à un certain point, mais il ne peut pas tromper personne ou il ne peut pas induire personne en erreur dans le sens que ça demeure que ce sont des nouvelles taxes qu'on va imposer aux contribuables. C'est ça, le fondement de cette loi-là. Lorsqu'on parle de responsabiliser les contribuables, ce qu'on leur dit aux municipalités... On va responsabiliser les municipalités, mais de quelle façon? C'est en allant chercher des revenus chez les municipalités par le biais des contribuables.

Le gouvernement se déleste d'une responsabilité de 400 000 000 $. Le ministre des Affaires municipales serait beaucoup plus crédible s'il nous disait: D'un côté, je vais responsabiliser les municipalités pour 400 000 000 $, mais, d'un autre côté, je vais enlever 400 000 000 $ sur l'impôt sur le revenu, ça fait qu'à ce moment-là on aurait une cohérence parfaite entre les principes qu'on met en cause. Mais que je sache, est-ce que vous êtes capable de me démontrer clairement que les municipalités, en payant pour la police, vont être plus responsabilisées? Responsabiliser, ça ne veut pas simplement dire payer. Ça veut dire avoir le pouvoir de réglementer, de diriger. Et, dans la question de la police, c'est "niet". Les municipalités qui vont payer pour la police, la Sûreté du Québec, est-ce que vous pensez qu'elles vont avoir le droit d'aller dire à la police: Fais ton travail? J'ai un ensemble de témoignages de municipalités qui nous disent que l'affaire de payer la police ça ne donne rien de plus. Je veux juste parier de la municipalité de Natashquan. Voyez-vous, ils vont payer, eux autres, pour la Sûreté du Québec. Quand les gens vont se plaindre du vandalisme, les policiers viennent deux mois après. Pensez-vous que la police va aller plus vite parce qu'ils vont avoir payé leur quote-part?

Vous savez on a eu déjà... le gouvernement du Québec avait la loi de l'instruction... pas de l'instruction publique mais de la... En tout cas, c'était pour les gens qui étaient sur le bien-être social. Dans le temps, ce n'était pas la même chose, mais on taxait les municipalités pour la santé. Les gens qui n'avaient pas le moyen allaient... L'assistance publique. C'était la loi de l'assistance publique. Le gouvernement du Québec, à ce moment-là, percevait des droits chez les municipalités pour payer pour les gens qui touchaient de l'assistance publique et on a enlevé ça. Là, le gouvernement revient avec un même principe de faire payer les municipalités pour d'autres éléments. Ça a un danger, bien sûr, c'est que les municipalités n'auront pas nécessairement intérêt à être évaluées très, très élevé, à être évaluées à 100 % même si la loi le dit, parce que ça va être basé sur l'évaluation municipale. Donc, à ce moment-là, moins t'es évalué, moins tu vas payer. Ça fait qu'il y a des principes en cause qui sont importants là-dedans.

Je veux revenir à la motion de scission. Il

n'est aucunement question, bien sûr, dans la motion de scission de séparer la voirie municipale de ça. C'est évident que, dans le texte de la loi, on ne parle pas de la voirie municipale. On sait bien, par exemple, que les intentions sont claires et nettes. Les discussions sont vraiment engagées là-dessus. On ne peut pas se le cacher. Même si le projet de loi n'en parle pas, il faudrait être naïf pour penser qu'on va arrêter là en si bonne compagnie. Parce qu'on a eu une motion, voilà pas tellement longtemps, qu'on a votée cet après-midi, pour blâmer le gouvernement qui a taxé partout. Il peut bien nous accuser qu'on n'était pas des bons administrateurs, mais le déficit du gouvernement, même avec ce projet de loi, M. le Président, il est à 3 500 000 000 $. Ça n'a pas arrêté. Ça veut dire que le déficit serait à 4 000 000 000 $, demain matin si on n'avait pas le projet de loi. C'est ça que ça veut dire. Est-ce que ça veut dire que ce sont des bons administrateurs et qu'ils ont le sens de la responsabilité très développé? Bien non. C'est le sens de la taxation que ce gouvernement-là a. Et quand on demande de scinder c'est évident qu'il y a beaucoup de principes qui sont en cause. (17 h 50)

Revenons sur le fond de la motion de scission. Quand on regarde le point de vue de l'évaluation, quand on regarde les changements qu'on se propose dans la taxe d'affaires, où on pourra taxer de deux façons différentes pour arriver aux mêmes résultats, ou garder la façon qu'on a actuellement, c'est de nature à mélanger pas mal le monde.

Il y a juste le ministre des Affaires municipales qui rencontre des gens qui sont d'accord avec ce projet de loi, ou qui sentent qu'ils sont bien responsabilisés. Là, il vient de leur mettre l'épée sur la tête en leur disant: Vous allez accepter ça. Ce n'est plus des chevaliers, là. On n'est pas à cette époque-là. S'il y a des gens qui disent ça, le ministre des Affaires municipales, je lui dis: II ne visite pas le bon monde. Qu'il vienne chez nous, je vais lui en montrer. J'ai des lettres ici, et j'ai des gens qui s'opposent d'une façon très féroce au projet de loi. Je ne suis pas prêt à dire que c'est des gens irresponsables parce qu'ils ne partagent pas la vision gouvernementale.

Il y a des gens qui refusent fondamentalement de taxer pour les autres. Je vais juste vous donner Sainte-Marguerite-Marie; c'est une municipalité, ça, où iis disent que les propositions du ministre des Affaires municipales, ça va augmenter le compte de taxes de 25 %. Une petite municipalité. Les municipalités qui auront recours au cours des prochaines années... Le gouvernement du Québec les oblige à assumer un effort fiscal plus important dans le domaine de la voirie locale; ils en parlent, eux autres. Ils ne disent pas qu'elle l'a tout de suite... Donnant lieu, s'il y a une diminution de compensation gouvernementale, que les propositions gouvernementales risquent d'aggraver encore davantage, à des disparités entre les municipalités des régions périphériques et celles des régions centrales. Que l'intention d'assimiler les lois basées... O.K., ça, ça va faire la dilapidation accélérée du patrimoine forestier. Et les propositions gouvernementales représentent, pour la municipalité de Sainte-Marguerite-Marie, un pas de plus dans la pauvreté et dans le déclin socio-économique. Aïe, ce n'est pas drôle, ça, de se faire dire ça. Le ministre ne peut pas être insensible. Le gouvernement ne peut pas être insensible aux cris de ces gens-là qui disent que cette réforme ou ces propositions vont avoir pour effet un dépeuplement, vont leur enlever des marges de manoeuvre et vont, en même temps, pressurer des gens qui n'ont plus les moyens de payer. C'est ça qu'il faut dire.

C'est bien beau, là. On est correct ici, quand on discute et qu'on a l'air d'être au-dessus de tout ça. Mais ce ne sont pas tous des riches au Québec. Le taux de chômage n'a pas diminué, à ce que je sache. Et la relance économique dont on se gargarise de mots et qu'on dit: On va en faire... On va relancer l'économie. De quelle façon? En mettant de nouvelles taxes sur les propriétés? En enlevant aux jeunes l'espoir de pouvoir se construire ou d'être propriétaires d'une nouvelle maison? Et en taxant les entreprises d'une façon extraordinaire? Je vais vous en parler. J'ai justement un petit témoignage d'une entreprise où ils disent: "Nous protestons énergiquement contre ce projet d'extorsion Ryan et vous appuyons sans condition. Le gouvernement de la province est devenu à l'image du gouvernement fédéral, un gouffre sans fond." C'est ça que les entreprises nous disent. On est en train de les égorger. On est en train de les détruire.

Et dans la fiscalité qu'on nous propose, il s'agit de regarder les nouvelles formes de taxes qu'on va imposer, les taxes sur le stationnement. C'est un nouveau phénomène, ça. Ça n'a pas été fait... Ça vient de sortir comme d'un chapeau. On a beau en avoir parlé, mais dans les municipalités chez nous, en dehors de Montréal, on n'en a jamais entendu parler. Le ministre va dire: Ils ont le droit de le faire ou de ne pas le faire. Bien oui. On va donner un champ de taxation et on ne l'exploitera pas.

Les taxes d'amusement, ça va être une troisième taxe là-dessus. La TPS, la TVQ, plus la taxe municipale, 25 %. Il y a des changements importants. Les taxes scolaires, les "en lieu" de taxes, le ministre en a parlé. On en enlève, donc, on est en train de changer tout le système de taxation. Nous autres, on pense que ça peut faire l'objet ou la décision d'un projet particulier, d'autant plus qu'il faut se rappeler qu'en 1985, quand le gouvernement a pris le pouvoir, il nous a dit: Plus de bill omnibus. Pas question de bill omnibus. On fait des projets de loi. C'en

était presque de la folie furieuse.

Les projets de loi d'un article, deux arti-cfes, trois articles; on a vécu ça, et je vous invite à aller voir ce qui s'est passé au début de ce gouvernement-là. C'étaient des projets de loi - ça n'avait ni queue ni tête - on disait: Pourquoi ne mettez-vous pas ça ensemble? Pas question. On veut être transparents. On veut que ie monde soit capable de juger nos actes, de poser des jugements sur nos actions, sur nos décisions. Donc, pas de bill omnibus. Là, ils ont tout oublié ça. Ça, c'est fini. Là, on peut en cacher le plus possible, passer la nuit les fins de session, allons-y, Alonzo, on va y aller. C'est comme ça qu'on est en train d'administrer le Québec.

C'est comme ça qu'on dit, quand on demande un report, bien non, vous voulez jouer avec le monde et vous voulez étirer le temps. Voyons donc! Venant de gens comme vous autres, je me méfie. 275 heures en commission parlementaire pour la fusion de Baie-Comeau et de Hauterive, vous vous en rappelez? On n'invente pas ça. Et Schefferville que vous vouliez rouvrir; vous vouliez presque en faire la capitale du Nord, vous avez voulu la fermer. On vous a dit: Vous n'êtes pas capables. En tout cas, on en a perdu du temps. Ne nous parlez pas de pertes de temps, parce qu'on peut dire au ministre que s'il est prêt à siéger un peu plus longtemps que le 24 juin, on est prêts, nous autres. On l'a dit. Ça ne nous fatigue pas, nous autres, on est capables. On n'est pas si fatigués que ça, on va siéger après le 24 juin. On vous invite à le faire. Ne disons pas, là, que l'Opposition est en train de voler du temps et qu'elle va empêcher... On est prêts à discuter le projet de loi et on va en discuter pas mal longtemps. On va essayer de regarder ce qu'il y a dedans et vous allez voir qu'il y a des affaires qui sont difficilement acceptables. On va vous en parler des erreurs que vous faites dans les projets de loi de temps en temps. Laissons faire! On est prêts et le leader travaille avec son caucus, vous apprendrez ça.

Quand on parle du deuxième projet de loi où on veut scinder dans le transport en commun, quand on parle de transport en commun, le ministre dit: On va faire payer 30 $ à l'environnement parce qu'on va se baser sur le recensement fédéral. Mais ce n'est pas la bible, que je sache. Savez-vous qu'il y a des comtés où il y a des gens qui sont situés à égale distance de municipalités qui paient, qui vont payer par le projet de loi, et eux autres, sont exclus. Comment peut-on expliquer ça? Il n'y a pas grand recherche là-dedans, là. On prend copie conforme. Nous autres, on essaie, dans ce gouvernement-là, de copier sur l'Ontario et de copier sur le fédéral. C'est tout ce qu'on fait. On "pourrait-u" avoir de l'imagination un peu et savoir s'il y a autre chose à faire que ça? Quand on a dit: On ne paiera pas pour le transport en commun, bien, je vous invite à regarder ce qui se passe dans tous les pays au monde, ou à peu près. Les gouvernements centraux - provinciaux dans notre cas - paient pour le transport en commun. Allez en Ontario, allez voir s'il ne paie pas, le gouvernement de l'Ontario pour le transport en commun. Et on vient nous faire accroire qu'on ne paiera pas, là. Fini, on s'est désengagé. À cette heure qu'on vous a entré de force - le transport en commun - dans certains cas, vous avez la responsabilité de l'appliquer et de garder, par exemple, tout ce qu'on vous a imposé.

Mais, ça, ça ne me semble pas correct et on doit en faire, une discussion de fond là-dessus. Pourquoi le gouvernement du Québec dit-il: Je ne veux pas payer pour le transport en commun? Si, demain matin, à Montréal, vous ne payez pas et si la municipalité de Montréal dit: Je ne veux plus faire de transport en commun, que va faire le gouvernement? Qu'est-ce que vous allez faire de l'économie de Montréal? Pensez-vous que Montréal aurait le choix, demain matin, de ne pas avoir de transport en commun. Aïe! Là, je n'y crois pas, hein, et personne n'y croit. Mais supposons... Allons-y avec le raisonnement du ministre des Affaires municipales quant à la responsabilité. Donc, la responsabilité non seulement de faire payer, mais de décider. Demain, Montréal dit: Plus de transport en commun. Ça veut dire quoi? Bien, moi, je pense qu'on se préparerait de drôles de lendemains et le gouvernement du Québec, qui ne voudrait pas payer pour le transport en commun, serait peut-être obligé et sûrement obligé de payer pour des nouveaux ponts et des nouvelles routes. C'est ça que ça a pour effet. Le gouvernement se reprendrait peut-être autrement, parce qu'il dirait: On taxe l'essence, on va les faire payer un petit peu plus là-dessus et on pourrait avoir toutes les bonnes raisons du monde pour aller presser le citron encore plus fort.

Le transport en commun, le débat n'est pas fait. C'est un choix de société, et quand le ministre des Affaires municipales nous parle de la commission d'avenir qui a été présidée par le chef de l'Opposition officielle, M. Parizeau, je pense qu'il prend juste son affaire. Je voudrais bien qu'il ait la même connaissance qu'il a du milieu municipal... que le ministre des Affaires municipales ait autant de connaissances du milieu municipal qu'a M. Parizeau qui a parcouru la province. Il n'a pas juste rencontré les contribuables d'Argenteuil; il s'est promené dans tout le Québec. Il les a écoutés. J'ai été surpris, parce que le rapport ne parle pas du transport en commun, mais il ne faut pas savoir l'histoire pour savoir pourquoi il n'en parle pas. Moi, je le sais pourquoi il n'en parle pas de transport en commun. Les municipalités étaient satisfaites des échanges qu'il y avait entre les deux et quand on a fait le transport en commun, la politique et la loi sur le transport en commun, ça résultait d'une étude supplémentaire d'un an. Ce n'est pas

la même loi que la fiscalité municipale, c'est une loi séparée. Ça nous donne une bonne raison d'insister pour que le transport en commun soit inclus dans une loi spéciale, dans une loi différente de celle qu'on a à étudier actuellement, puisque le transport en commun a fait l'objet d'études, d'échanges et d'un cahier spécial entre le gouvernement et les municipalités. C'est de même que ça a été fait, le transport en commun. Il ne faudrait pas se surprendre qu'on revienne dans la même chose, décider de ne pas brasser la même recette et dire que c'est la même chose qu'on va faire.

Le troisième élément de tous ces projets-là, en fait, le transport en commun, la police. La police, on peut en parler parce que la police ne donnera pas ce que les gens ont bien voulu prétendre. On ne lui donnera pas une responsabilité supplémentaire. Au contraire, les municipalités qui vont payer et les contribuables qui vont payer pour les services de la Sûreté du Québec vont sûrement insister pour avoir de meilleurs services et, en même temps, une meilleure sécurité. Mais, en payant, les municipalités ne recevront pas ce service-là, puisqu'on a fait la démonstration, lors de l'étude des crédits, mon collègue de Joliette a fait la démonstration qu'il y a la moitié des postes de la Sûreté du Québec, à travers le Québec, qui ont une patrouille dans le jour et, le soir, une patrouille d'un homme seulement, la moitié des postes de la Sûreté. De cette moitié-là, il y en a plus de 50 % qui n'ont pas de patrouille ni le soir, ni la nuit.

Donc, c'est quoi, cette sécurité publique qu'on est en frais d'exercer? Elle n'existe pas. En fait, elle est factice et ce n'est pas en payant qu'on va en avoir plus. Comme c'est seulement une partie de la facture, et le gouvernement nous le rappelle régulièrement que c'est seulement une partie de la facture qu'on veut faire payer aux municipalités, les municipalités voient bien qu'on n'a pas vidé le sujet complètement. Il aura l'intention tôt ou tard d'aller jusqu'au bout de sa démarche, c'est-à-dire qu'il pourra multiplier par trois.

Quand on parle de la capacité de payer des municipalités, je voudrais juste vous parler de Maniwaki. Maniwaki est une municipalité qui, tout de même, a toujours eu une répartition à cause de sa pauvreté ou à cause de son manque de ressources. Alors, la réforme, elle va avoir pour effet cette année, pour 1993, d'augmenter de 12 %, et ça ne tient pas compte des taxes sur le coût de la vie. Donc, une indexation, 300 000 $ d'argent, c'est ça que ça veut dire pour les petites municipalités.

Bien sûr, le gouvernement, c'est fatigant pour lui de savoir que l'Opposition tient son bout dans ce dossier-là. Le ministre nous reproche, des fois, il reproche à certains de mes collègues de moins connaître le dossier. Je voudrais juste rappeler à un des anciens qui a parlé la semaine passée, le député de Rousseau, qui, ouvertement - je l'écoutais, j'étais dans mon bureau, mais je ne suis pas descendu, je ne voulais pas le confondre, face à face - disait, à ce moment-là: Le député de Jonquière, qui était président de l'Union des municipalités en 1980-1981... Je veux juste lui rappeler que j'ai été président de l'Union des municipalités en 1983-1984, pas en 1980-1981 que, quant à la question de la police, je n'ai jamais signé de document comme président de l'Union des municipalités. Il me semble que ce serait la moindre décence de savoir qu'il y a des gens, des fois... S'il y a des manques de connaissances de ce côté-ci, il y en a sûrement de l'autre côté, probablement plus, parce qu'on ne les entend pas parler souvent, ces gens-là.

Donc, M. le Président, la motion de scission était complètement bien fondée. Ça aurait été logique, à mon point de vue, que le gouvernement accepte cette motion de scission parce que, effectivement, j'ai essayé de le démontrer assez clairement, le transport en commun a fait l'objet d'une loi spéciale, donc différente de celle qu'on étudie là, et on les remet ensemble. La Loi sur la fiscalité municipale est un tout en soi. La Sûreté du Québec, la répartition des coûts de la police, ça fait un résultat ou ça a rapport à la Loi de police. Ça démontre hors de tout doute que notre motion était fondée, qu'elle était logique et correcte dans son libellé et aussi dans l'objectif visé. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Jonquière. Cette dernière intervention met fin au débat restreint sur la motion de scission du député de Lévis que je vais maintenant mettre aux voix.

Une voix: Vote enregistré.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vote enregistré. Alors, que l'on appelle les députés, s'il vous plaît. (18h5-18h9)

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Nous allons maintenant mettre aux voix la motion de scission de M. le député de Lévis, qui se lit comme suit: "Qu'en vertu de l'article 241 de l'Assemblée nationale, le projet de loi 145 soit scindé en trois projets: un premier intitulé Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les finances municipales, comprenant les articles 1 à 233, 235 à 254, 262 à 266, 269 à 302, 304 à 308 et 311 à 322; un deuxième intitulé Loi modifiant la Loi sur le ministère des Transports et d'autres dispositions législatives concernant la constitution du fonds des contributions des automobilistes au transport en commun, comprenant les articles 172 à 175, 234, 261, 267, 268 et 303 et un troisième intitulé Loi modifiant

la loi de police concernant les corps de police municipaux, comprenant les articles 255 à 260, 309 et 310."

Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion de scission du député de Lévis veuillent bien se lever!

Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Blais (Mas-son), Mme Marois (Taillon), Mme Harel (Hoche-laga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), M. Paré (Shefford), M. Morin (Dubuc), Mme Ca-ron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-No-randa-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), M. Beaulne (Bertrand).

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever!

Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Port neuf), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Charlesbourg), M. Bour-beau (Laporte), M. Dutil (Beauce-Sud), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Vallières (Richmond), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Rivard (Rosemont), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Johnson (Vaudreuil), M. Cusano (Viau), Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), Mme Bleau (Groulx), M. Houde (Berthier), M. Maltais (Saguenay), Mme Trépanier (Dorion), M. Cannon (La Peltrie), M. Philibert O"rois-Rivieres), M. Beaudin (Gaspé), M. Chagnon (Saint-Louis), M. Hamel (Sherbrooke), M. Doyon (Louis-Hébert), M. Paradis (Matapédia), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Leclerc (Tas-chereau), M. Poulin (Chauveau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Dauphin (Marquette), M. Fradet (Vimont), M. Richard (Nicolet-Yamaska), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFon-taine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbi-nière), M. Bradet (Charlevoix), M. Després (Limoilou), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Forget (Prévost), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau).

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a des abstentions?

Le Secrétaire: pour: 20 contre: 55 abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Lefebvre): La motion de scission de M. le député de Lévis est rejetée.

Reprise du débat sur l'adoption du principe du projet de loi

Nous revenons au débat de principe du même projet de loi 145, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les finances municipales. Je suis prêt à reconnaître le premier intervenant.

S'il vous plaît, MM. les députés! Je cède la parole à M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, on a entendu tout à l'heure beaucoup d'applaudissements à l'égard du ministre des Affaires municipales. C'était très chaleureux. La chaleur des applaudissements est en raison inverse de la cote de popularité du ministre.

M. le Président, je pense qu'il est peut-être important d'en parler un peu, des sondages. Ceux qui analysent ces sondages savent qu'il y a un élément essentiel dans n'importe quel sondage, c'est ce qu'on appelle le degré ou le taux de satisfaction. Le taux de satisfaction à l'égard du gouvernement libéral est à son plus bas, selon le dernier sondage paru dans Le Soleil. Il n'y a même pas un Québécois sur quatre qui est satisfait de la façon dont le gouvernement se comporte présentement: un taux d'insatisfaction de l'ordre de 65 % à l'égard du gouvernement, c'est du jamais vu depuis que les libéraux sont au pouvoir.

Ça se comprend facilement. Il suffit de mettre en ligne toutes les décisions prises par ce gouvernement à l'égard de je ne sais combien de catégories de la population, quand ce n'est pas toute la population dans son ensemble, décisions on ne peut plus négatives qui, entre autres, ont pour effet d'accroître démesurément le fardeau fiscal des contribuables québécois. On n'a qu'à regarder cet ensemble de décisions-là pour comprendre le ras le bol fiscal des contribuables. Les contribuables québécois en ont assez de ce gouvernement, de ses décisions et aussi de la façon dont il prend et dont il applique ses décisions, avec une arrogance méprisante à l'égard des intervenants, à l'égard des groupes, des organismes. Ça explique, je pense, le taux de satisfaction qu'on voit dans les sondages présentement.

C'est ce qu'on peut constater dans le domaine municipal. Les municipalités du Québec, tout le monde en conviendra, si on s'en tient strictement au plan légal, ce sont ce qu'on appelle des créatures du gouvernement ou des créatures de l'Assemblée nationale. C'est vrai. Et donc, le ministre peut ergoter longtemps sur les liens légaux de subordination entre les municipalités et le gouvernement ou l'Assemblée natio-

nale. Il a raison. Sauf que c'est une chose que la légalité et c'en est une autre que la réalité politique. Avec les municipalités qui sont des gouvernements locaux, la sagesse, la tradition aussi au Québec veulent que l'on établisse des relations de partenariat et qu'on n'insiste pas davantage ou qu'on ne mette pas trop l'accent, démesurément l'accent sur les liens de subordination. Est-ce qu'actuellement il existe, entre le gouvernement du Québec et les municipalités, des relations de partenariat? La réponse, c'est évidemment non. Elle est négative. S'il y avait des relations de partenariat entre les municipalités et le gouvernement pendant un certain nombre d'années, c'est fini tout ça. On est en face, actuellement, d'un gâchis, d'un véritable gâchis en termes de relations entre le gouvernement québécois et les municipalités.

On a détruit délibérément plus de 10 ans de collaboration et de coopération véritable entre l'État et l'ensemble du monde municipal. C'est maintenant chose du passé. Nous, il y a 11 ans - je pense qu'il est important de le rappeler, plusieurs de mes collègues l'ont fait - c'est à la suite de longues négociations sérieuses, au sein d'une instance qu'on avait créée de toute pièce à cette fin, la table Québec-municipalités, qu'on en est arrivé à une entente qui enclenchait une réforme en profondeur de toute la fiscalité municipale, de telle sorte qu'on a même utilisé l'expression de "pacte fiscal" entre les municipalités du Québec et le gouvernement du Québec pour vraiment mettre en relief le caractère solennel de ces négociations et de cette entente entre le monde municipal et le gouvernement. (18 h 20)

J'étais là, moi, à ce moment-là, j'étais député. Je suis député depuis 1976. J'ai donc connu les deux situations comme député. Quand on parle de pèlerinages à Québec avant la réforme fiscale, ce n'est pas de la fiction, ce n'est pas du roman, je le sais, j'étais député. J'ai été élu pour la première fois en 1976 et la réforme fiscale est entrée en vigueur quatre ans plus tard, en 1980. Donc, j'ai connu le moment où les municipalités étaient obligées de faire des pèlerinages à Québec parce qu'elles n'avaient pas suffisamment de revenus autonomes pour faire face à leurs responsabilités, ce qui avait obligé le gouvernement à mettre en place toute une série de programmes de subventions pour les aider à boucler leur budget. Mais pour avoir les subventions, il fallait faire des démarches. On commençait par le député. On allait voir le député pour avoir une subvention pour équilibrer le budget, pour avoir une subvention pour faire des travaux d'aqueduc, pour avoir une subvention pour construire des trottoirs, pour toutes sortes de motifs, toutes sortes de raisons.

Il y avait des programmes de subventions, il fallait faire de demandes. On allait voir le député et, là, on demandait au député: Est-ce qu'on ne pourrait pas voir le ministre ou, au moins, son directeur de cabinet ou le sous-ministre? Là, le député organisait des rencontres. C'était ça, la réalité; la réalité des pèlerinages à Québec, c'était ça. Le député était l'entremetteur. J'ai connu ça, j'étais député à cette époque-là. Je sais de quoi je parle. C'est parce que les municipalités n'avaient pas suffisamment d'autonomie fiscale. C'est pour cette raison, c'est pour mettre fin à cette situation-là que le gouvernement du Parti québécois d'alors a entamé des négociations avec le monde municipal pour mettre en place un nouveau régime de fiscalité qui éliminait ces fameux pèlerinages à Québec, qui étaient, à bien des égards, humiliants pour les élus municipaux. C'était humiliant pour les élus municipaux et c'était drôlement accaparant pour les députés. On passait une bonne partie de notre temps et on dépensait une bonne partie de notre énergie à organiser des rencontres entre les municipalités et le gouvernement du Québec. Quand on avait 18, 20 ou 25 municipalités, comme c'est le cas dans beaucoup de comtés, je vous assure qu'on consacrait beaucoup de temps et d'énergie à ça.

Ça s'est terminé, ça, en 1980. Fini. Parce que là, on a vu leur autonomie fiscale s'accroître considérablement et là, elles ont pu assumer leurs responsabilités avec des ressources financières autonomes. D'ailleurs, les élus municipaux n'avaient que des éloges à faire sur ce pacte conclu en 1979-1980. Il n'y avait pas d'opposition du tout. C'était le fruit d'une entente, d'abord, donc, il n'y avait aucune opposition. Tout le monde municipal était heureux de l'aboutissement de ces négociations-là. On a vécu pendant des années avec cette réforme-là et on en a bénéficié. On a connu les retombées bénéfiques de cette réforme.

Aujourd'hui, qu'est-ce qui se passe depuis quelques mois? Bien, c'est que le gouvernement libéral en place a entrepris une oeuvre de destruction de toute cette réforme-là. Il a entrepris d'abord de détruire la confiance qui existait entre le monde municipal et le gouvernement. Le chef de l'Opposition en a parlé avec beaucoup d'éloquence. Et ça, c'est un élément intangible, c'est-à-dire que ça ne se retrouve pas dans des dispositions de projet de loi, la confiance. Mais ça existait, la confiance entre les partenaires municipaux et le gouvernement. C'était bien réel, la confiance. Eh bien! en l'espace de quelques semaines, le gouvernement libéral a littéralement bousillé, détruit cet élément essentiel entre les partenaires, la confiance. Il n'y en a plus de confiance maintenant. Le monde municipal a totalement perdu confiance dans le gouvernement. C'est fini. Et on sait que ça prend du temps à revenir, ça, la confiance. Ça prend du temps à se rebâtir, la

confiance.

Le gouvernement a également entrepris une destruction du pacte lui-même. Le pacte de la réforme fiscale conclu en 1979-1980, le gouvernement en a entrepris la destruction d'éléments essentiels. Je donne juste un exemple, un exemple bien réel et bien important, les fameux "en lieu" de taxes. En 1979-1980, le gouvernement avait décidé, sous forme "d'en lieu" de taxes, de se comporter en contribuable responsable. Donc, sur ses immeubles, il payait aux municipalités des "en lieu" de taxes. L'idée, c'était d'en arriver le plus possible, progressivement, à ce que le gouvernement paie 100 % de l'équivalent des taxes foncières aux municipalités, là où il y avait des immeubles, des immobilisations. On n'a pas pu l'atteindre à l'époque, nous, parce qu'il y a eu la crise économique de 1981-1982. Ça a retardé la progression. Mais c'était l'objectif.

Là, on régresse. On recule. Dans les écoles primaires et secondaires ce n'est plus 50 % d'"en lieu" de taxes que les municipalités vont recevoir; c'est 25 %. On recule. On revient en arrière. Et Dieu sait que c'est important. J'ai 18 municipalités dans mon comté. C'est important, ces "en lieu" de taxes, pour les écoles primaires et secondaires parce que, dans beaucoup de petits villages, vous le savez comme moi, le seul immeuble gouvernemental, c'est l'école. Il n'y en a pas d'autre. Dans les villes plus importantes, tu as toutes sortes de services publics, gouvernementaux, mais dans les petits villages, c'est l'école. Et donc les 50 % d'"en lieu" de taxes que les municipalités recevaient, bien là, c'est important sur le plan du revenu. Là, ça ne sera plus 50 %, ça va être 25 %. Il y a donc une entreprise de destruction du pacte fiscal lui-même conclu en 1979-1980.

Et puis, troisièmement, le gouvernement libéral a entrepris la destruction des services publics. Ça aussi, c'a été maintes fois souligné par mes collègues, mais c'est important. Le résultat de ce projet de loi-là, de ce qui a été entrepris par le gouvernement libéral, ça va être une dégradation des services publics et des services publics essentiels, pas anodins, pas secondaires, essentiels, comme c'est le cas du transport en commun dans beaucoup de villes du Québec. Cette dégradation des services publics s'accompagne en plus d'une augmentation du fardeau fiscal du contribuable de l'ordre d'à peu près 700 000 000 $. Alors, M. le Président, vous me faites signe. Si vous permettez, on pourrait ajourner. Je reprendrais la parole à 20 heures, au moment de la reprise du débat.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): D'accord, M. le député de Lac-Saint-Jean. Alors, il est 18 h 30 et je suspends donc les travaux jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 18 h 26)

(Reprise à 18 h 29)

Débat de fin de séance

La situation des constables spéciaux de l'Assemblée nationale

Le Vice-Président (M. Lefebvre): La Chambre reprend ses travaux pour pouvoir tenir le débat de fin de séance. Si on veut m'apporter l'avis, s'il vous plaît. Si on peut m'apporter l'avis. Le débat de fin de séance entre M. le ministre délégué à l'administration et président du Conseil du trésor et M. le député de Labelle. Alors, M. le député de Labelle et M. le ministre, je vous rappelle les règles du débat de fin de séance.

Dans un premier temps, M. le député de Labelle a droit à une intervention de cinq minutes. M. le ministre, cinq minutes. M. le député de Labelle, vous avez droit à une réplique de deux minutes. M. le député de Labelle, s'il vous plaît, votre intervention de cinq minutes.

M. Jacques Léonard

M. Léonard: Merci, M. le Président. Ma question portait sur la situation des constables spéciaux, en particulier, ceux qui sont ici à l'Assemblée nationale. Ces personnes ont toujours fait preuve de bonne foi. À titre d'exemple, ils n'ont jamais usé de moyens de pression qui auraient pu affecter le travail qu'ils accomplissent. C'est reconnu de tous. Ces personnes ont respecté les lois et c'est dans ce cadre qu'ils ont accepté l'arbitrage de la même façon que le Conseil du trésor l'a accepté.

L'arbitre a rendu sa décision, à savoir, en particulier, un ajustement salarial de 2,5 % en 1990, et un autre ajustement salarial de même type, de 2,5 % en 1991. M. le Président, en réponse à ma question de la semaine dernière, le président du Conseil du trésor, à mon sens, a joué sur les mots pour affirmer qu'il respectait la décision de l'arbitre. Nous disons jouer sur les mots parce qu'il se conforme à la décision en ce qui a trait à l'année 1990, mais en 1991, ce qu'il accorde ce n'est pas un ajustement salarial, mais un forfaitaire qu'il désire lier à une étude de relativité salariale qui décidera si ces 2,5 % en 1991 seront maintenus pour les années suivantes.

Bref, dès 1992, on peut revenir en arrière et ces personnes, ces gens pourraient perdre ce qu'ils ont gagné en 1991. On comprend alors pourquoi ils refusent de signer maintenant. La question qui se pose est la suivante: Pourquoi a-t-on accepté d'aller en arbitrage si, une fois la décision rendue, le président du Conseil du trésor refuse d'appliquer la décision de l'arbitre comme elle a été libellée? Par ailleurs, le président du Conseil du trésor nous a parlé d'une

étude de relativité salariale qu'il avait effectuée. L'arbitre, aux pages 42 et 43 de son jugement, a relevé que cette étude n'était pas paritaire, qu'elle avait été commandée unilatéralement par le président du Conseil du trésor, alors qu'elle aurait dû être faite par les deux parties.

Notons aussi que l'arbitre, au terme de 19 journées d'audiences et de 5 mois de réflexion, a rejeté la défense du Conseil du trésor même appuyée par cette prétendue étude de relativité salariale. En bout de ligne, M. le Président, des personnes ont accepté de jouer le jeu, tel que le prévoit la loi, et elles sont allées en arbitrage. Or, c'est le président du Conseil du trésor qui, aujourd'hui, refuse d'aller au bout des règles du jeu et tente d'interpréter la décision en sa faveur. Je crois que le président du Conseil du trésor a l'obligation morale de respecter la décision de l'arbitre. Il peut respecter la décision de l'arbitre, c'est ça, et je pose donc la question au président du Conseil du trésor: A-t-il l'intention de se conformer à l'esprit et à la lettre de la décision de l'arbitre?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Labelle. Alors, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique, pour votre intervention de cinq minutes.

M. Daniel Johnson

M. Johnson: Oui, M. le Président. En cette Assemblée, devant un auditoire très intéressé à nos propos, étant donné que certains des membres du syndicat en cause nous écoutent ici, sont présents, je vais répondre tout de suite à deux questions que le député de Labelle a posées, qui traduisent une certaine connaissance incomplète du dossier. Par exemple, dit-il, pourquoi aller en arbitrage? Pourquoi aller en arbitrage? C'est parce que la Loi sur la fonction publique à l'article 64, prévoit qu'il s'agit d'un corps d'emploi qui n'est pas représenté par le Syndicat des fonctionnaires, qui, incidemment, n'a pas le droit de grève et l'article 75 prévoit qu'on va s'entendre avec eux sur un mode de règlement des différends et on a convenu qu'on allait en arbitrage. Alors, on en a convenu, là. C'est pour ça qu'on a fait ça.

La deuxième chose, l'étude de relativité salariale n'aurait pas été paritaire. Bien, c'est un fait. Les agents de la paix refusent, incidemment, de se livrer à un exercice de relativité salariale, comme les ingénieurs et, longtemps, comme les techniciens de la santé qui eux, finalement, ont accepté, avec nous, de tenir une étude de relativité salariale pour vraiment se ranger à la bonne place et pour longtemps, dans la mesure où les emplois ne changeront pas substantiellement à l'avenir, pour bien se ranger les uns par rapport aux autres. C'est ça l'idée.

Les agents de la paix, donc, je veux saluer ici la qualité de leur travail et le professionnalisme qu'ils ont démontré: pas de moyens de pression, un respect intégral de l'esprit et de la lettre de la loi, autant que je puisse en juger. Je n'ai pas eu de rapport contraire à ce sujet-là. Alors, ça, vraiment, c'est un gros plus. C'est un gros plus à l'intérieur d'un cadre assez contraignant: pas de droit de grève, ils ne sont pas représentés par le SFPQ, un comité paritaire. Dans le fond, on a, je dirais, une négociation permanente avec eux. Si on ne s'entend pas, on va devant l'arbitre qui fait une recommandation. Je regrette! Le député fait ça. C'est à caractère indicatif, la décision de l'arbitre, dans cette matière-là. Ce n'est pas comme les arbitrages dans les corps de police municipaux où tu es pris avec, point à la ligne. L'arbitre dit: C'est ça. C'est ça. Ça s'apparente à ce que c'est avec la Sûreté du Québec, c'est indicatif.

Le député de Labelle était membre d'un gouvernement qui a mis de côté une recommandation d'un arbitre, qui touchait la Sûreté du Québec; il s'en souvient. Ce sont des choses qui arrivent. L'arbitre a parlé de rattrapage, un rattrapage de 5 % versé à 2,5 %, 2,5 % pour l'an dernier, et cette année, sur échelle, qui s'ajoute aux 4 %, 5 % et 6 %. On se comprend, là. Si on donnait suite, ça veut dire: 4 % en 1989, 7,5 % d'augmentation de salaire en 1990 et 8,5 % en 1991. On conviendra que ce sont des grosses marches, ça, quand on regarde ce qui en est ailleurs.

Nous, nous disons, et c'est la position que j'ai exprimée: Allons voir comment on peut respecter la sentence arbitrale pour assurer à ces gens les revenus que l'arbitre a indiqués. Ce qu'il a indiqué, c'est 5 % de plus. 2,5 % dans l'échelle l'an dernier, pas de problème avec ça; les autres 2,5 %, on essaie de voir si on doit les valider, si on doit aller, justement, paritairement, regarder le contenu de l'emploi, l'enrichissement des tâches, la rotation qui a eu lieu. C'est ça qui est en cause. Je ne veux priver les agents de la paix d'aucune cent noire, compte tenu de la sentence arbitrale. 2,5 % plus 2,5 %, que ce soit sur échelle ou à forfait, ça fait 5 %. Et sur le T4 et les chèques, le déboursé, les "slips" de paie à tous les 15 jours, ça va respecter intégralement la sentence arbitrale. Mais je veux aller valider - c'est ce que je propose au gouvernement - les 2,5 % additionnels. On va aller le faire ensemble. S'ils y ont droit, ils vont l'avoir. S'ils n'y ont pas droit, on ne sera pas obligé de leur arracher l'échelle. C'est ça.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. M. le député de Labelle, pour votre réplique de deux minutes.

M. Jacques Léonard (réplique)

M. Léonard: M. le Président, on me parle de l'arbitrage. C'est le système, lorsqu'il n'y a pas

de droit de grève, qui est admis. Alors, on n'apprend rien de neuf ici. Ce que je voudrais dire au président du Conseil du trésor, c'est que l'arbitre a rendu une décision. Dans le cas qui nous occupe, ça prend de bonnes raisons pour ne pas la respecter et je n'en vois pas dans ce qu'il soulève à l'heure actuelle. Les constables spéciaux veulent une étude de relativité salariale, mais après qu'on aura appliqué la décision de l'arbitre parce que l'arbitre a statué quant aux circonstances actuelles et aux conditions d'emploi actuelles et il a donné 2,5 % en 1990 et 2,5 % en 1991 de rattrapage. Le président du Conseil du trésor ne peut pas venir parler de 7,5 % et de 8 %, 8,5 % maintenant, parce que cela comprend les autres augmentations et il faut toujours en rester aux 2,5 % de rattrapage. Les constables spéciaux acceptent l'étude de relativité salariale, mais après qu'on aura appliqué la décision de l'arbitre parce que c'est ça, le jugement.

M. le Président, je pense qu'encore une fois, on démontre... le président du Conseil du trésor démontre qu'il joue sur les mots parce que le deuxième 2,5 %, il en fait un forfaitaire au lieu de l'intégrer à l'échelle salariale, au lieu de le payer comme salaire, comme rattrapage salarial. C'est là que vous faites erreur et vous essayez de jouer, d'interpréter la décision de l'arbitre en votre faveur. C'est ça que vous faites. Ça leur est dû. Le deuxième 2,5 % leur est dû et, après, on pourra voir avec cette étude de relativité salariale. C'est ça, la question. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): merci, m. le député de labelle. nous suspendons cette fois-ci de façon claire nos travaux jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 18 h 40)

(Reprise à 20 h 5)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'ordre, s'il vous plaît! Mmes et MM. les députés, si vous voulez vous asseoir.

Projet de loi 145 Reprise du débat sur l'adoption du principe

Nous reprenons les travaux de l'Assemblée à l'étape des affaires du jour. À la suspension des travaux à 18 h 30 nous étions à discuter de l'adoption du principe du projet de loi 145, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les finances municipales. M. le député de Lac-Saint-Jean, c'est vous qui aviez ajourné le débat de sorte qu'on reprend avec vous. Je vous indique que vous disposez encore de huit minutes pour votre intervention.

M. Jacques Brassard (suite)

M. Brassard: Merci, M. le Président. Quand nous avons ajourné le débat à 18 h 30, nous en étions à parler de la dégradation des services publics qui résulterait de la mise en vigueur de ce qu'on appelle, à tort, la réforme Ryan. Il est évident qu'en pelletant dans la cour des municipalités des factures comme c'est le cas, comme on s'apprête à le faire, les municipalités vont devoir réduire la qualité et l'ampleur des services publics. C'est le cas dans les transports en commun. Je m'étais arrêté là-dessus, M. le Président. C'est évident qu'en se désengageant pour près de 266 000 000 $, la qualité des transports en commun va être durement affectée au Québec, dans les centres urbains. C'est d'ailleurs déjà commencé. Prévenant le coup, en quelque sorte, les hausses de tarifs sont maintenant connues. Ça va probablement s'aggraver encore. Des coupures de services également. Ce qui fait que le transport en commun va connaître une détérioration grave et dangereuse parce que ça risque d'avoir des impacts à plus long terme pour fort longtemps. Ça va entraîner une utilisation encore accentuée de la voiture automobile avec tous les inconvénients que ça comporte.

En plus, on accompagne tout ça de cette injustice tout à fait flagrante. On augmente de 30 $ les droits d'immatriculation pour les automobilistes qui vivent, qui habitent, qui sont domiciliés dans des territoires couverts par les sociétés de transport en commun. Sauf qu'il arrive à plusieurs reprises que des citoyens qui n'ont pas accès à des services de transport en commun vont se voir imposer les 30 $ supplémentaires. J'ai appris avec stupéfaction, par exemple, que des petites municipalités dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, qui n'ont aucunement accès aux services de transport en commun, qui se retrouvent dans les villes de Jonquière, Chicoutimi et La Baie, vont avoir à défrayer les 30 $ de droit d'immatriculation. C'est à n'y rien comprendre. Je ne vois pas où est la cohérence là-dedans.

J'ai une petite municipalité dans mon comté, qui s'appelle Larouche, qui est à une vingtaine de kilomètres, 25 kilomètres à peu près de Jonquière; tous les automobilistes de Larouche vont payer 30 $ de plus. Pourquoi? Je ne le sais pas. Ils n'ont pas accès au transport en commun, ça ne se rend pas là. C'est un transport en commun qui couvre Jonquière, qui est à 25 kilomètres, et ils vont payer les 30 $. Des automobilistes de Larouche sont venus à mon bureau me demander des explications et je n'ai pas pu leur en donner. Je n'ai pas réussi à comprendre la cohérence de la mesure gouvernementale. Donc, une dégradation des services.

Ça va être le cas en voirie locale aussi, M. le Président. Depuis six ans maintenant, le réseau dit tertiaire, c'est-à-dire la voirie rurale, les routes rurales, depuis six ans, ce réseau-là est

dans un état lamentable et il se détériore d'année en année parce qu'on n'y investit plus du tout depuis cinq ans au moins. Depuis cinq ans au moins, on n'investit plus dans le réseau tertiaire, dans le réseau des routes rurales; il ne se fait rien, alors le réseau se dégrade. Là, on veut en refiler la responsabilité aux municipalités sans en transférer, cependant, les ressources adéquates pour assumer cette responsabilité-là de restauration d'abord et d'entretien du réseau routier. Alors, on va se retrouver dans quelle situation? Les municipalités seront incapables d'assumer cette responsabilité-là. Elles n'auront pas les ressources suffisantes pour le faire et le réseau va continuer de se dégrader et de se détériorer davantage.

Alors, M. le Président, je pense que mon collègue de Jonquière avait parfaitement raison de signaler qu'on est en face d'un projet improvisé, bâclé, incohérent, imposé surtout unilatéralement, donc au détriment de toute forme de partenariat avec le monde municipal et uniquement fondé sur la logique comptable. Il faut trouver des moyens de réduire le déficit, il faut trouver des moyens de régler les problèmes financiers du gouvernement. C'est la logique comptable qui guide le gouvernement et, dans toutes ces mesures qu'on impose aux municipalités, dans tout ce fardeau fiscal qu'on impose aux contribuables, dont on afflige le contribuable, dans tout cela, il y a une logique, une seule logique, c'est la logique comptable d'essayer d'obtenir des équilibres financiers acceptables et un déficit qui augmente moins rapidement. C'est uniquement ce qui guide et ce qui motive le gouvernement. Ce n'est pas du tout la situation du contribuable, ce n'est, mais alors pas du tout, la décentralisation.

On prend prétexte qu'on veut décentraliser. Nous sommes d'accord, nous aussi, de ce côté, pour enclencher un processus de décentralisation vers les municipalités ou vers les MRC qui sont des instances tout à fait habilitées pour assumer de nouvelles responsabilités. Et je pense que le monde municipal a prouvé d'ailleurs qu'il souhaitait être, si vous voulez, le lieu d'accueil de nouvelles responsabilités de décentralisation. Je pense que le monde municipal n'est pas réfrac-taire du tout à ça.

Mais ce n'est pas de cela dont on parle dans cette soi-disant réforme. Ça, c'est un délestage sur le plan financier, c'est un pelletage de factures. C'est ça essentiellement le projet qu'on a devant nous. Si on avait vraiment voulu décentraliser, je pense que le monde municipal aurait accueilli avec empressement une véritable volonté de décentraliser. Moi-même, personnellement - et je pense que tous mes collègues sont d'accord pour examiner sérieusement tout le processus de décentralisation. Donc, redonner de nouvelles responsabilités aux municipalités ou aux MRC, tout le monde est d'accord là-dessus, à condition que ça s'accompagne de ressources adéquates, que ce ne soit pas un prétexte pour se débarrasser de responsabilités et surtout pour se débarrasser de responsabilités financières, les ressources n'accompagnant pas ce mouvement de décentralisation.

Donc, M. le Président, et je conclus là-dessus, on a, à plusieurs reprises, de ce côté-ci, par des motions d'ajournement, par des motions de scission, par des motions de report, tenté de convaincre le gouvernement qu'il fallait qu'il refasse ses devoirs. Ses devoirs étaient mal faits sur ce dossier-là, dans ce domaine-là. Il fallait qu'il refasse ses devoirs. Malheureusement, il n'a pas voulu entendre raison et il maintient sa ligne de force. D'ailleurs, c'est ce qui caractérise le ministre des Affaires municipales, qui a sans doute bien des qualités, mais on connaît son entêtement légendaire. Alors, il continue de s'entêter. Pour les ministériels, ça peut paraître comme une qualité, mais je pense que pour l'ensemble de la population, les contribuables et les municipalités, je ne pense pas qu'ils perçoivent ça comme une qualité. C'est ce qui fait d'ailleurs que, dans les sondages de la fin de semaine, le ministre des Affaires municipales a la cote de popularité la plus faible du gouvernement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Si vous voulez conclure, s'il vous plaît.

M. Brassard: Alors, je conclus, M. le Président. Je pense que nous avons suffisamment expliqué et mes collègues vont poursuivre encore, au cours de la soirée, pour montrer, expliquer pourquoi nous sommes opposés avec toute la vigueur possible à ce projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions? Oui, Mme la députée de Terrebonne, sur le même sujet.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. Vous savez, M. le Président, j'ai l'impression, en ce début du mois de juin, de retourner un an en arrière parce qu'on se retrouve devant le même style de projet de loi que le même ministre nous a déposé au mois de juin l'an dernier, c'est-à-dire la loi 69, qui avait le titre "Pour une plus grande responsabilisation." Cette fois-ci, M. le Président, la loi 145 porte le titre de "Partage des responsabilités Québec-municipalités, vers un nouvel équilibre." Une répitition, M. le Président.

Et ce qui est le plus étonnant, c'est qu'on nous parle d'un nouvel équilibre sans avoir consulté les municipalités, sans avoir négocié d'entente avec les municipalités. L'an dernier, M. le Président, les commissions scolaires ont cru, du moins une certaine partie des commissions scolaires, qu'elles auraient vraiment une plus grande responsabilisation. Mais elles se sont

retrouvées, finalement, avec une augmentation des devoirs à faire. Elles se sont retrouvées avec une augmentation de responsabilités qui s'est traduite par une augmentation de dépenses.

Et la facture de 320 000 000 $ s'est traduite, elle, pour les contribuables, par des comptes de taxes qui ont doublé ou triplé. Aujourd'hui, on nous arrive avec un transfert de 400 000 000 $. Or, c'est évident que ce transfert va se traduire pour les contribuables par des comptes de taxes qui, eux aussi, à nouveau, vont avoir des chiffres assez impressionnants. Et ce nouvel équilibre, on nous le présente sans respect, ni pour les élus municipaux, ni pour les contribuables. Ce qu'on nous donne aujourd'hui, c'est exactement la même chose que l'an dernier, c'est-à-dire une réponse à la commande du président du Conseil du trésor. C'est absolument ça, M. le Président, il n'y a pas d'autre raison.

Lorsque les députés ministériels accusaient l'Opposition de s'opposer tout simplement pour dénoncer, sans vraiment y croire, je pense qu'ils n'ont pas entendu les citoyens et les citoyennes dans leur comté, parce que, si on dénonce ce projet de loi aujourd'hui, c'est qu'on se fait les porte-parole des citoyennes et des citoyens du Québec qui n'ont pas d'autres moyens. Dans le système démocratique dans lequel on vit, la parole, pour les citoyens et les citoyennes, elle n'arrive qu'aux élections. Malheureusement, ce gouvernement n'a pas l'air pressé de parier d'élections, surtout avec les résultats des derniers sondages.

Donc, on se fait aujourd'hui les porte-parole des citoyens et des citoyennes du Québec. Personnellement, dans mon comté, ces citoyennes et ces citoyens ont signé des pétitions que j'ai déposées en cette Assemblée. Je vais expliquer le contenu de ces pétitions. Considérant la période de récession que nous traversons, comment ce gouvernement ne peut-il se rendre compte que nous sommes en période de récession, récession qui a été accélérée par les politiques du gouvernement fédéral et par les politiques du gouvernement provincial? La TPS fédérale n'a rien aidé et la TVQ, du côté du Québec, a ajouté à cette période de récession.

Nous nous sommes donc retrouvés avec 800 000 chômeurs, des pertes d'emplois de mois en mois, un taux de chômage de 12 %, alors que les jeunes de 15 à 24 ans se sont retrouvés avec un taux de chômage de 19 %; les faillites d'affaires, 1300 faillites d'affaires de janvier à mars 1991, donc 23 % d'augmentation des faillites d'affaires; une chute de 48 % par rapport à l'année dernière, pour le premier trimestre de 1991, des mises en chantier domiciliaires. Les ventes au détail aussi ont baissé dramatiquement, avec les deux taxes, les deux TPS, fédérale et provinciale; l'inflation, en avril, s'est retrouvée à un taux de 8,4 % au Québec et, en ce qui concerne le commerce extérieur, on se retrouve avec une chute de 3,1 % pour les exportations et une hausse de 7,1 % pour les importations. Donc, ce gouvernement ne peut contester que nous sommes en période de récession à cause de ses politiques et parce qu'il n'a pas su développer les moyens pour avoir une politique de plein emploi, une politique de lutte au gaspillage et trouver des moyens pour sortir les citoyens de cette crise. Non! On a ajouté des taxes par-dessus, donc on a accéléré le processus. (20 h 20)

Dans cette pétition, M. le Président, les citoyens avaient ajouté: "Considérant le nombre d'augmentations de taxes directes et indirectes subies au cours de la dernière année". Lors de l'étude du budget, j'avais clairement démontré qu'une famille de deux adultes et deux enfants avait subi cette année une augmentation minimum de 2000 $, uniquement sur les biens essentiels, sans ajouter autre chose que les taxes sur les biens essentiels, c'est-à-dire sur la nourriture, sur le permis d'immatriculation pour aller travailler, uniquement sur ce qu'il y a de plus essentiel, et les comptes de taxes, évidemment.

Le troisième point de cette pétition: "Considérant que tout transfert des responsabilités du gouvernement vers les municipalités se traduira par une hausse considérable des taxes municipales pour les citoyennes et les citoyens du Québec". Quand on regarde le projet de loi du ministre des Affaires municipales - qui a aussi taxé l'Opposition de ne pas le regarder, le projet de loi; c'est parce qu'on l'a lu, justement, qu'on s'y oppose - on nous parle d'une nouvelle augmentation de 30 $ pour le transport en commun. si je regarde les quatre municipalités de mon comté, seulement une municipalité a un transport en commun adéquat. dans les trois autres municipalités, le transport en commun est pratiquement inexistant, et tous les automobilistes de mon comté vont quand même devoir payer ces 30 $ pour un service qui n'existe pas. on nous ajoute également, dans ce projet de loi, toujours, que les compensations pour les taxes que le gouvernement doit payer pour les écoles primaires et secondaires: au lieu de 50 %, le gouvernement va payer 25 %. dans des comtés en pleine croissance démographique comme le mien, qui se retrouve avec 16 écoles, 14 au primaire, seulement 2 au secondaire, par exemple - c'est pas mal plus difficile d'avoir des écoles secondaires avec le gouvernement - donc, ça se traduit par des pertes d'argent. qui va payer cette facture? c'est évident que ce sont les contribuables. les municipalités vont devoir se retourner vers les contribuables.

Le quatrième point: "Considérant que ces augmentations n'apporteront aucune amélioration de la qualité des services". Lorsqu'on se promène un peu dans la population, ce que les gens nous disent: On est prêts à avoir des augmentations de taxes lorsqu'on est certains d'avoir une amélioration des services. Une taxe pour améliorer l'environnement. Si on a effectivement

quelque chose de concret à présenter pour l'environnement, on est d'accord, mais des taxes qui n'apportent aucune amélioration de services, au contraire, des diminutions de services, c'est tout à fait inacceptable. Personne ne peut accepter, M. le Président.

La pétition se terminait: "Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale du Québec d'intervenir auprès du ministre des Affaires municipales et auprès du président du Conseil du trésor pour mettre son projet de transfert de responsabilités en veilleuse, tant et aussi longtemps que les municipalités ne pourront obtenir du gouvernement les transferts financiers adéquats."

Donc, les motions de report, d'ajournement, de scission que nous avons présentées étaient parfaitement en ligne avec les demandes des citoyens et des citoyennes de mon comté, M. le Président.

Nous parlons également, bien sûr, au nom des municipalités. Les municipalités sont venues clairement dire au gouvernement libéral qu'elles n'acceptaient pas ce projet de loi. Est-ce qu'on va accuser les municipalités, les élus municipaux de ne pas avoir lu le projet de loi ou de ne pas le comprendre? Leur jugement a été extrêmement sévère, M. le Président. Je prendrai deux exemples de ma région. La MRC de Sainte-Thérèse-de-Blainville qui ne pouvait être plus claire, M. le Président, et je vais la citer: "Nous, maire et conseillers de la municipalité régionale de comté de Sainte-Thérèse-de-Blainville, vous faisons part de notre indignation face au projet gouvernemental de rejeter sur les municipalités des dépenses que Québec assumait jusqu'à présent. La réalisation de ce projet constituerait une rupture unilatérale du pacte fiscal de 1980."

Je fais une petite parenthèse, M. le Président. Effectivement, le Parti québécois avait respecté les élus municipaux en 1979 et avait pris le temps de négocier une entente. Le Parti québécois n'est pas contre tout renouveau, n'est pas contre un changement, mais un changement qui doit être le résultat d'une entente entre les parties. Je continue, M. le Président: "Les clauses de ce pacte, nous disaient les représentants de la MRC de Sainte-Thérèse-de-Blainville, qui sont favorables à Québec étant maintenues, et celles qui favorisent les municipalités étant rejetées, ce serait là un intolérable abus de pouvoir. Un tel comportement serait qualifié de malhonnête dans le secteur privé. L'intention manifeste du gouvernement est de décharger sur le dos des villes l'odieux de réclamer des millions supplémentaires aux contribuables."

On nous a parlé beaucoup, de l'autre côté, de l'importance de responsabiliser. Est-ce que le gouvernement pourrait donner l'exemple? Assumer, lui, sa part de responsabilité? Tout ce qu'il a voté comme loi jusqu'à maintenant, depuis un an et demi, ce sont des lois pour transférer l'odieux vers les commissions scolaires ou vers les municipalités, et tout ça pour ne pas avoir une augmentation d'impôt sur le revenu, alors qu'on sait très bien que toutes les augmentations du gouvernement correspondent à une augmentation d'impôt sur le revenu de 12 %. Donc, on s'est déchargé de cette responsabilité-là et on vient aujourd'hui, tout comme l'an dernier, pour les augmentations de taxes scolaires, nous parler de responsabilisation.

Je continue. Les responsables de la MRC de Sainte-Thérèse-de-Blainville nous disaient: "Nous qualifions d'irresponsable le projet de transférer une nouvelle charge fiscale dans le champ foncier, au moment où le marché immobilier est en décroissance de 30 % par rapport à l'an passé." Et ça continuait, M. le Président: "On ne peut vraiment accepter un tel projet."

Même chose du côté de la MRC des Moulins. Ce qu'on ressortait, c'est que, l'an dernier, suite à la crise scolaire du printemps 1990, le premier ministre s'engageait par décret, le 30 mai 1990, à tenir des assises Québec-municipalités. Attendu que ces assises devaient être l'occasion de discuter d'un nouveau partage des responsabilités avec les municipalités et de conclure avec elles les arrangements appropriés, notamment aux aspects financiers et fiscaux; attendu que le 14 décembre 1990, le gouvernement a manqué à son engagement en soumettant unilatéralement aux municipalités des factures. M. le Président, je pense que c'était très clair, autant du côté des citoyennes et des citoyens que du côté des municipalités.

Aujourd'hui, les députés ministériels semblent avoir oublié tout ça. C'est comme si uniquement l'Opposition dénonçait ce projet de loi. C'est sûr qu'on n'a pas d'autre moyen que d'arriver avec des motions et d'utiliser du temps pour vous expliquer et essayer de faire passer le message des citoyennes, des citoyens et des municipalités. Vous savez, au bout du compte, M. le Président, que les grands perdants, ce sont les contribuables et les élus municipaux aussi parce que les élus municipaux vont porter l'odieux.

Je me souviens très bien des élections scolaires de l'automne dernier et il ne faut pas se cacher que ce sont les élus du monde scolaire qui ont payé la note, l'automne dernier, sauf que, cette fois-ci, M. le Président - et les derniers sondages le démontrent - les citoyennes et les citoyens du Québec savent très bien que cette facture-là qu'on refile, c'est le gouvernement libéral qui leur refile cette facture et que toutes les augmentations de taxes qu'ils ont dû subir, c'est le gouvernement libéral qui les leur a imposées.

Là-dessus, M. le Président, je suis convaincue qu'ils sauront donner un avertissement très clair au gouvernement à la prochaine élection, élection que tout le monde - la députée de Johnson le rappelait si bien - espère très bientôt parce que les gens en ont plus qu'assez de ce gouvernement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): merci, mme la députée de terrebonne. pas d'autres interventions? m. le député de labelle, sur le même sujet.

M. Léonard: Oui.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): On vous écoute. (20 h 30)

M. Jacques Léonard

M. Léonard: Merci, M. le Président. Le projet de loi 145 est un projet de loi considérable, non seulement par le nombre d'articles, mais aussi par la- portée de ce qu'il y a dans ces articles.

D'abord, pour camper le sujet, M. le Président, il est important de savoir que le projet de loi 145 est amené par le gouvernement dans un contexte économique et fiscal particulier, mais qui s'est largement détériorié au cours des dernières années. Le gouvernement fédéral a accumulé les déficits, comme chacun sait. C'est un gouvernement pratiquement en faillite. Et, à cause de l'ampleur de ce déficit, des retombées économiques majeures se font sentir en termes de ralentissement, en termes de services offerts par le gouvernement, en termes de transferts qui sont coupés, mais surtout en termes de ralentissement économique à cause des hauts taux d'intérêt que nous avons connus.

Ceci a amené le gouvernement du Québec à faire des choix entre une fiscalité concurrentielle et un cadre financier qui est devenu de plus en plus insupportable. En d'autres termes, à cause d'une mauvaise gestion surtout au plan fédéral, le gouvernement du Québec a eu de plus en plus de difficultés à équilibrer ses budgets, en même temps qu'il s'était donné la tâche d'adopter une fiscalité concurrentielle. Il l'a interprétée au plan des revenus, du rendement de l'impôt sur le revenu en voulant baisser les taux de taxation sur l'impôt sur le revenu. C'est ce qui s'est passé au cours de l'année 1988, notamment, avec une certaine réforme de la fiscalité qu'il y a eu.

Ceci a amené le gouvernement à proposer que l'impôt foncier devait augmenter, alors qu'on ne voulait pas augmenter l'impôt sur le revenu de façon à garder le déficit à un niveau - le déficit québécois - que l'on voulait compatible avec les grands équilibres financiers qu'on s'était donnés. Mais, M. le Président, la réalité économique a rattrapé le gouvernement de façon cruelle et je dirais qu'il a été amené, à partir de l'automne 1989, à pelleter son déficit partout parce que lui-même ne voulait pas être pris au piège de devoir augmenter l'impôt sur le revenu. Alors, on a élaboré sur les différentes victimes de ces politiques. Mais celles qui sont touchées par le projet de loi 145 ce sont les municipalités, nous y sommes donc, parce qu'on a comparé la fiscalité foncière de l'Ontario et celle du Québec et que l'on trouvait qu'il fallait augmenter l'impôt foncier plutôt que l'impôt sur le revenu. Le ministre qui présente ce projet de loi était auparavant à l'Éducation et il a donc ouvert, réouvert le champ de l'impôt foncier aux commissions scolaires. Je dirai réouvert, entre guillemets, parce qu'il leur restait quelque 6 % de leur budget dans l'impôt foncier, mais la mesure qui a été adoptée à l'automne 1989 et à l'hiver 1990 a consisté à rouvrir de façon beaucoup plus large le champ de l'impôt foncier aux commissions scolaires, donc un concurrent aux municipalités.

Alors, M. le Président, dans le cas des municipalités, cette attitude fait particulièrement mal aux Québécois. Je voudrais rappeler le rôle des municipalités parce qu'à mon sens on n'a pas saisi ce qu'il était ou on a mal perçu ce qu'il était. Les municipalités ont été laissées pour compte en bonne partie durant la Révolution tranquille, parce que, de 1960 à 1970, il y a eu peu de mesures qui ont touché les municipalités. Et même après, même si on voulait ou si on a eu quelques velléités de faire des transformations profondes dans le monde municipal, on n'y est pas parvenu entre 1970 et 1976. Ce n'est qu'avec l'arrivée du gouvernement du Parti québécois que les choses ont changé. Les municipalités sont parties d'un état de fait politique où c'était la course aux subventions.

Et je me rappelle très bien qu'à notre arrivée au pouvoir, en 1976, nous avons dû traiter de subventions d'équilibre budgétaire parce que, lorsque des municipalités n'arrivaient pas à équilibrer leur budget, elles venaient voir le ministre des Affaires municipales et lui demandaient une subvention d'équilibre budgétaire aux simples fins d'équilibrer un budget d'opération où le gouvernement n'avait rien à voir. Qu'on se rappelle aussi les débats qu'il y a eu sur toutes ces subventions aux systèmes d'égout et d'aqueduc, sur ces bornes-fontaines qui poussaient dans des champs, sur ce qui se passait vis-à-vis du territoire agricole où des terres agricoles importantes, intéressantes dans la région de Montréal s'en allaient en pure perte pour des constructions domicilaires qui auraient pu se faire ailleurs que là.

Je voudrais rappeler, M. le Président, que les municipalités ne sont pas des corps intermédiaires, ce sont des institutions politiques et, dans tous les pays du monde où la civilisation a progressé, cela s'est fait avec le progrès des municipalités sur différents plans. L'histoire des grands pays s'est faite très souvent autour des municipalités. Très souvent, pour ne pas dire presque toujours, les grandes civilisations se sont construites sur la prospérité des grandes villes, et c'est encore vrai aujourd'hui.

Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, nous avons mis en place toute une série de mesures de façon à consolider, à faire comprendre aux citoyens, mais à consolider le rôle

des municipalités dans la vie des citoyens, dans la vie de tous les jours, et nous avons déposé des projets de loi de différentes venues pour améliorer le sort des municipalités. Qu'on se rappelle de toute une batterie de législations qui ont été adoptées à l'époque, les lois sur la démocratisation de la vie municipale, la période des questions au conseil municipal; c'a été inauguré sous le règne du Parti québécois. Les conseils municipaux, auparavant, siégeaient en toute bonne foi, mais siégeaient quand même presque en l'absence des citoyens. Ce n'était que dans des moments très importants ou des moments de lutte politique locale qu'il survenait des citoyens à la barre pour demander des explications. Les maires, les conseils municipaux de l'époque n'avaient pas à se justifier devant les citoyens, tout ce qu'ils faisaient, c'était siéger en public, point, sans avoir à répondre à leurs questions.

Nous avons apporté toute une série de mesures de démocratisation municipale et je dirais même que ce n'était pas fini, que ça ne devrait pas être fini. Nous avons légiféré sur la loi sur les élections municipales, et mon collègue à l'époque qui était député de Crémazie, Guy Tardif, a amené aussi toute une batterie de mesures pour faciliter la démocratisation municipale.

Nous avons aussi fait un large débat sur les pouvoirs de planification des municipalités. Ceci nous a amené, en particulier, à déposer la Loi sur l'aménagement qui a réformé les conseils de comté de l'époque qui existaient depuis 1840 et 1850, mais qui étaient devenus pratiquement inopérants parce qu'on ne les utilisait plus. C'est au début des années soixante-dix que, par la réforme de l'évaluation foncière, ces conseils de comté ont connu un regain de vie et qu'ils ont constitué l'assise politique sur laquelle nous avons construit la Loi sur l'aménagement.

Nous avions évidemment d'autres projets dont on a largement débattu, mais ce qui a été amené par cette loi, c'est que le pouvoir de planification était réservé aux municipalités, le pouvoir de l'aménagement du territoire était aux municipalités. De la même façon, le zonage agricole a constitué une mesure pour protéger les territoires agricoles, mais cela devait venir un jour à se faire en concertation avec les municipalités, donc une étape aussi dans la même direction, qui était la protection du territoire agricole. (20 h 40)

M. le Président, avec tout cela, une mesure fondamentale aussi qui était celle de la réforme de la fiscalité municipale, mesure majeure, importante qui donnait aux municipalités les moyens d'assumer leurs responsabilités. Ce qui était amené substantiellement par ce projet de loi, c'était un échange de champs d'impôt, de champs de revenus. En particulier, la taxe de vente retournait au gouvernement qui donnait en contrepartie des subventions aux commissions scolaires, qui évacuaient le champ de l'impôt foncier scolaire en très très grande partie et, en contrepartie générale, les municipalités acquéraient l'exclusivité ou la quasi-exclusivité du champ d'impôt foncier.

Alors, c'est dans ce contexte, M. le Président, que nous nous retrouvons aujourd'hui avec des municipalités dont l'objectif était de rapprocher l'administration politique des citoyens. C'est ça qui était visé par ces différentes mesures. Je crois qu'on doit admettre aujourd'hui que les municipalités se sont beaucoup mieux comportées financièrement, politiquement et démocratiquement avec cette batterie de mesures que nous avons mises en place.

Tout ceci s'est fait dans un certain climat. En particulier, le pacte fiscal a été négocié avec les municipalités lors de plusieurs rencontres majeures, lors de congrès généraux, ordinaires et lors de congrès spéciaux. Ceci, au fond, nous a permis d'aborder le sujet de la décentralisation qui consistait à ce que les municipalités prennent de plus en plus de responsabilités. C'était ça, le but visé.

Je pense qu'on ne peut pas ne pas se poser la question aujourd'hui entre ces deux discours de décentralisation que nous avions à l'époque et celui que nous entendons aujourd'hui. Ils sont très différents, mais vraiment très différents. À l'époque, il y avait une orientation de base qui était qu'on voulait consolider des institutions politiques locales qui étaient les municipalités, aussi cette table de concertation, la municipalité régionale de comté et les communautés urbaines. Nous avons refait la Loi sur la Communauté urbaine de Montréal, nous avons refait la Loi sur la Communauté urbaine de Québec, comme celle de la Communauté régionale de l'Outaouais. Ces trois communautés ont vu leur loi constitutive modifiée substantiellement à la lumière des lois dont nous avons parlé. J'y ai participé personnellement.

Aujourd'hui, le climat est très différent parce que l'orientation n'a pas l'air sérieuse. La politique du gouvernement, introduite par le projet de loi 145, origine strictement de besoins financiers du gouvernement. Strictement de là. Le gouvernement a des problèmes financiers. Il ne peut pas les régler lui-même. Alors, il les transmet aux municipalités.

Je comprends que le ministre essaie d'établir un dialogue. Je le comprends, mais le gouvernement est parti d'un mauvais pas. Il est parti d'un mauvais pas. Il a commencé par retirer la quasi-exclusivité du champ d'impôt foncier aux municipalités vers les commissions scolaires. C'était le geste de l'an dernier. Et, aujourd'hui, il renvoie un certain nombre de factures aux municipalités. Je pense que, dans le concept général, on pourrait admettre que les municipalités assument plus de pouvoirs, plus de responsabilités, qu'elles s'occupent davantage du

transport en commun, de voirie locale. Oui. Qu'elles discutent aussi de police, des sujets dont traite la loi 145. Mais le climat a été vicié au départ. Et là réside un grand problème du ministre, et du gouvernement surtout.

Je comprends que le ministre remplit une commande. Très bien. Il a 400 000 000 $ à aller chercher et c'est ce qu'il fait. Il a la main longue dans le sac des municipalités. C'est ce qu'il fait. Mais ceci, cependant, a des conséquences politiques majeures, à terme, parce que, comment peut-on tenir un discours sur la décentralisation, alors qu'à l'origine, au départ, on a statué que les municipalités devraient payer 400 000 000 $?

Le seul débat qui reste, c'est de savoir comment et jusqu'à quel point on va le payer? Comment on va le payer? Parce que le résultat final, il est clair. L'impôt foncier municipal va augmenter. C'est évident, le gouvernement ne veut plus assumer pour 400 000 000 $ de factures. Comment pourrait-on maintenant aborder le sujet? Je prends, par exemple, les différents sujets ou les différents domaines touchés par la loi 145. La police, les services de police. Dans un État, on pourrait dire, il y a trois niveaux de services de police ou trois niveaux de systèmes qui assurent la paix sociale.

Il y a la police locale, qui est chargée de faire respecter des règlements locaux, municipaux, des règlements à différents égards, qui sont le prolongement de lois adoptées à l'Assemblée nationale, mais qui doivent être édictés par les municipalités, en conformité avec des lois nationales. Bien. Il y a aussi une police qui s'occupe davantage de la criminalité à un niveau supérieur, qui s'occupe de la paix publique, mais peut-être pas des grands problèmes majeurs de l'État, et puis, enfin, il y a l'armée, qui est un troisième niveau.

Or, il y a des discussions qui devraient intervenir sur ce plan, M. le Président. Si l'on prend les municipalités ou les municipalités régionales de comté et la question des municipalités locales dans le Québec, on voit très bien, à l'heure actuelle, qu'il y a effectivement un problème important. Des petites villes sont obligées d'assumer des coûts de police importants, ce qui fait que, sur le plan de la fiscalité foncière, elles sont en position concurrentielle défavorisée par rapport à des municipalités locales.

Mais est-ce que la question ou est-ce que la solution, c'est d'envoyer une facture aux municipalités locales qui n'ont pas de corps de police? Ou bien, si ce serait de discuter de l'extension, par exemple, d'un service de police d'une petite ville locale vers des municipalités locales, celles qui n'en ont pas, mais qui doivent quand même assurer la paix chez elles. Ça, c'est le problème. C'est la question qui est posée.

Mais la solution a été de renvoyer une facture uniquement pour des questions financières ou, diraient certains, comptables, mais financières surtout, sans que les municipalités aient un mot à dire sur les services de police qu'il y aura dans leur municipalité, sans que les directives...

M. le Président, il me semble qu'il me reste encore au moins cinq minutes, mais sans qu'il y ait des directives de données...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je m'excuse, M. le député de Labelle, vous avez commencé votre intervention à 20 h 30. Vous avez droit à 20 minutes. Il reste une minute et quelques secondes.

M. Léonard: Alors, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): À moins qu'il n'y ait consentement.

Des voix:...

M. Léonard: Ça va, là. J'ai le temps qui me reste, M. le Président. Très bien. Alors, voilà un sujet dont on aurait pu débattre, les municipalités entre elles, à l'avantage du gouvernement, qui aurait fait que les services de police auraient été supérieurs, qui aurait fait que les élus municipaux aient un contrôle sur leurs services de police et puis que leurs services de police rendent davantage compte ou tiennent davantage compte de la situation particulière de chaque région. Voilà un point important non abordé.

Nous n'aurons pas l'occasion d'en discuter. Il n'y a qu'une facture qui ira vers les municipalités. Alors, nous sommes dans un débat de sourds où le ministre aura des difficultés majeures à faire adopter et apprécier, même les aspects positifs de son projet de loi dans le contexte politique où il se trouve, parce que les débats de fond n'auront pas été faits, pas plus que le débat de fond n'aura été fait dans ce gouvernement entre le poids respectif des différentes assiettes fiscales qui doivent composer ces revenus. Le débat n'a pas été fait. Il ne sera pas fait. (20 h 50)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Labelle. Sur le même sujet, à savoir l'adoption du principe du projet de loi 145, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les finances municipales, je reconnais maintenant M. le leader de l'Opposition officielle et député de Joliette.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Tout le monde aura remarqué, bien sûr, qu'on utilisera, comme Opposition officielle, tous les moyens que nous permet le règlement pour essayer de contrer cette réforme fiscale municipale. Nous avions une certaine relation relativement cordiale avec le monde municipal depuis 1979. Nous

pouvions discuter à la table Québec-municipalités, nous pouvions échanger, nous pouvions prendre des orientations. On s'était habitué à un dialogue très intéressant et on pouvait toucher des sujets aussi diversifiés que le loisir, le transport. On pouvait discuter concrètement avec eux et chercher des solutions à moyen et à long terme.

Du jour au lendemain, poussé non pas par un souci de réforme, poussé non pas par l'idée de changer des choses en termes de distribution de pouvoir, poussé par un besoin d'argent, on envoie le ministre des Affaires municipales leur faire une proposition qui, dans un premier temps, allait chercher quelque chose comme 500 000 000 $, pour ensuite baisser un peu, pensant que le monde municipal allait dire: Ouf! au lieu de 500 000 000 $, c'est au moins 300 000 000 $; ça nous a donné de quoi de nous battre. C'est un peu ça, la stratégie.

On est habitué, maintenant, avec le ministre des Affaires municipales, à ce genre de bataille. Il avait tenté l'expérience l'an passé avec le monde scolaire. Il leur avait fait croire qu'il leur donnerait de l'argent. Il faut dire que le monde scolaire a été d'une naïveté totale. Il pensait aller chercher 75 000 000 $, et je ne mens pas en disant ça. Il criait très fort qu'il voulait 75 000 000 $, minimum. Le ministre leur a coupé des subventions pour 307 000 000 $ et leur a permis d'en taxer 320 000 000 $. Il leur reste, provincialement, 13 000 000 $. Aujourd'hui, je vais vous le dire bien franchement, sur le plan politique, ils passent pour des grands naïfs, nos commissaires d'écoles, d'avoir accepté de se faire passer un sapin de 307 000 000 $ qui est allé, par le fait même, gruger dans le champ foncier qui était réservé au monde municipal.

Le premier ministre l'a trouvé tellement bon de leur avoir passé un tel sapin qu'il a dit: Maintenant, tu vas t'organiser, mon cher ministre des Affaires municipales. Je te nomme aux municipalités, maintenant. Tu as bien fait ça à l'Éducation, tu es allé nous chercher 307 000 000 $, tu vas aller nous chercher quelque 300 000 000 $ dans le monde municipal. Ils l'ont changé de ministère. Il a laissé l'Éducation après avoir fait rigoler un peu les commissaires, après avoir été gruger dans l'assiette fiscale foncière. Ils l'ont nommé pour accomplir une autre basse oeuvre, c'est-à-dire aller taxer le monde municipal, encore une fois.

Le monde municipal, présentement, au Québec, se voit paralysé dans beaucoup de projets. Ils devront débourser, dans certaines municipalités, des dizaines et des dizaines de milliers de dollars, des centaines de milliers de dollars à certains endroits, alors qu'ils s'apprêtaient, avec des projets, à donner des services additionnels à leurs citoyens. Mais dans des municipalités, ils devront verser 500 000 $, d'autres 1 000 000 $, d'autres 300 000 $, 400 000 $. D'autres, dont le budget est de 100 000 $, devront en verser 200 000 $, devront aller en chercher 200 000 $ dans la poche des concitoyens et ce, sans faire aucun projet de quelque nature que ce soit. La petite municipalité qui voulait se bâtir un terrain de loisirs ou qui voulait aménager un système d'aqueduc "réfec-tionné" devra aller chercher dans les poches des contribuables presque le double et n'aura rien fait de projets neufs. Leurs concitoyens seront taxés aux oreilles. Dans tout ça, ce sont des répercussions qu'il faut regarder.

M. le Président, dans ce genre de débat ou dans ce genre d'action... Je suis surpris, tout d'abord, de la part du ministre des Affaires municipales, d'une action de cette nature, sans qu'il y ait eu une discussion de fond. Je vais essayer d'expliquer ce que je veux dire. Les effets peuvent être catastrophiques pour plusieurs petites municipalités. Pour plusieurs petites municipalités, ça peut être catastrophique, purement et simplement. Déjà, plusieurs maires, plusieurs échevins disent: S'ils veulent nous voir disparaître, pourquoi ils ne nous le disent pas? Ils nous organisent pour qu'on porte tout l'odieux de la taxation et on ne pourra pas faire de projets. C'est ça que les maires nous disent. C'est ça que les conseillers nous disent dans plusieurs de nos municipalités. Ils auront à payer plus sans recevoir aucun service additionnel. Il n'y a même pas de garantie que là où le service policier est déficient, ils auront un meilleur service tout en payant une facture identique aux endroits où il y a un service de qualité, où il y a tout au moins un service acceptable.

Fondamentalement, cette réforme-là est venue purement et simplement régler un problème financier du gouvernement et ils l'ont fait accomplir par celui qui avait accompli son oeuvre au niveau de l'éducation, le même! Mais les citoyens dans ça nous disent: Oui, mais où va notre argent? Comment un gouvernement peut-il couper autant dans les subventions, autant dans le communautaire, autant dans le social, autant dans les programmes de toute nature et taxer en même temps? Ordinairement, quand on coupe, on a moins de dépenses, donc, on n'a pas besoin de taxer. Mais ce gouvernement-là coupe dans les programmes, coupe dans toutes les subventions et il taxe en plus. Les gens nous disent: Où va notre argent? Fondamentalement, on n'a pas accès aux comptes publics quotidiennement. Bien sûr qu'on a des pistes qui nous permettent de s'imaginer un peu où va notre argent.

Moi, quand je regarde le jeu des soumissions publiques présentement, des soumissions publiques faites par l'État, c'est quasiment devenu ridicule. On fait une soumission pour un centre hospitalier. Ça sort à 6 000 000 $; ça finit à 19 000 000 $: Notre-Dame-de-la-Merci de Montréal. On prend le petit Centre hospitalier de Lachine. Ça devait coûter 5 000 000 $, 6 000 000 $ ou 7 000 000 $; ça en a coûté 13 000 000 $. On prend l'autoroute Métropolitaine. Ça devait en coûter 7 000 000 $; ça finit à

12 000 000 $. on prend l'autoroute ville-marie. c'a commencé à 5 000 000 $ ou 6 000 000 $, les soumissions publiques; c'a fini à 12 000 000 $ ou 13 000 000 $. on s'en va où? ça, c'en est une façon de regarder où va notre argent.

M. Ryan: Est-ce que je peux poser une question au député?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant, M. le... Oui, M. le ministre.

M. Ryan: Est-ce que le député accepterait que je lui pose une question?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Non.

M. Chevrette: Ah oui, moi, ça ne me dérange pas!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Non. C'est-à-dire que vous pouvez, après l'intervention de M. le député, en vertu de l'article 213, M. le ministre, vous aurez le loisir à ce moment-là de poser une question, mais après l'intervention.

M. Ryan: M. le Président, c'est parce que j'ai mal compris le centre hospitalier. Avez-vous dit de Lachute ou de Lachine? Lachine?

M. Chevrette: Lachine. C'est Lachine. Une voix: ...Lachute.

M. Chevrette: Lachute? Non, non, je suis au courant de Lachute.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Ça va, M. le ministre. Allez-y, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Donc, M. le Président, voilà une certaine piste qui peut nous permettre de voir où va notre argent. Je pourrais parler des contrats ou des soumissions ouvertes à la Baie James, par exemple, où le plus bas soumissionnaire par rapport au deuxième est de 15 000 000 $ de différence et c'est donné au deuxième. Bien sûr, ce sont là des choses qui peuvent nous permettre de voir où peut aller l'argent, mais, fondamentalement, on ne peut pas couper autant dans les programmes, dans les subventions et taxer autant, sans qu'un citoyen se demande où va son argent. Dans tout cela, si ce n'était encore accompagné, si le budget n'avait parlé que de cette réforme...

Prenons un petit propriétaire qui, présentement, gagne environ 25 000 $, 27 000 $ ou 28 000 $. Il y en a beaucoup de cela, des gens qui, depuis six ou sept ans, ont économisé, se sont bâti une petite maison, de 50 000 $, de 45 000 $ ou ça jouait dans ça. Aujourd'hui, ce propriétaire-là, mettez-le avec deux enfants et essayez de vous imaginer, pendant quelques minutes, comment cette personne-là est aux prises avec de graves problèmes financiers. Mettez un remboursement sur hypothèque; mettez deux enfants. Il a vu sa taxe scolaire doubler - doubler, c'est du simple au double - l'an passé. Il verra sa taxe municipale, d'ici trois ans, augmenter presque du simple au double, également. Il a vu son compte d'électricité, à cause de la TPS et de la TVQ, augmenter, dans l'espace de 14 ou 18 mois, de 26 %; il a vu, s'il est un étudiant à l'université ou au cégep, ses frais de scolarité augmenter; son permis de conduire a augmenté; son immatriculation a augmenté. On est allé... (21 heures)

Ce n'est pas rare de voir un type qui travaille, qui gagne 26 000 $, 27 000 $, 28 000 $ ou 30 000 $, qui a une maison relativement modeste. Quand on voit le nombre de taxes sur lequel est tombé... Ce n'est plus une avalanche, c'est un cyclone de taxes, M. le Président. Quand on regarde toutes les taxes qui sont arrivées sur ses épaules, ce pauvre individu, M. le Président, il a une famille, il n'en peut plus et il crie au meurtre. Il nous dit: Arrêtez, vous nous étouffez, et il nous demande de passer le message ici à l'Assemblée nationale, M. le Président.

Moi, je regarde comment ces gens-là peuvent faire pour arriver, peuvent faire pour nourrir une famille quand, dans l'espace de deux ans, M. le Président, on a doublé tout ce qu'il y a d'à peu près essentiel pour lui. Il a besoin d'un réfrigérateur, ce qui n'était pas taxé antérieurement, M. le Président. Prenez un réfrigérateur de 1000 $, cet individu devra payer quelque chose comme 1156 $ dorénavant, alors qu'il en payait 1000 $ avant: 156 $ de plus. Il prend son auto pour aller travailler, c'est 0,02 $ du gallon de plus depuis le 1er janvier et 0,02 $ du gallon encore en juillet ou en septembre prochain, M. le Président.

Puis on parle de soutien à la famille, on dit qu'on ne l'impose pas. On n'impose pas son revenu. Une chance que vous n'avez pas imposé son revenu, s'il avait fallu! Si vous aviez augmenté les impôts sur le revenu, en plus, avec des taxes sur l'immatriculation, sur le permis de conduire, sur l'hydroélectricité, sur les frais de scolarité, avec la TVQ, avec la TPS, avec... Tout ce que vous avez fait en taxation scolaire et municipale, on s'en va où pour ce salarié moyen? On est en train de l'étouffer littéralement. Il est temps qu'on les lâche. C'est à eux qu'il faut penser quand on fait une législation. Il n'y a pas qu'une seule couche dans la société. Il n'y a pas que des gens qui gagnent 70 000 $ ou 80 000 $ en montant. Il faut penser à ce salarié moyen qui a économisé puis qui est devenu un petit propriétaire, puis qui n'a d'autre alternative que de penser de vendre sa maison. Tout ça, vous avez fait ça sur lui, sur son dos, dans l'espace d'un rien de temps. 3 320 000 000 $ de taxes depuis l'élection de 1989, ça ne fait même pas

deux ans complets.

On étouffe littéralement, M. le Président, les salariés moyens, les gagne-petit, et on les touche dans ce qu'il y a de plus essentiel. Ils se chauffent à l'électricité, ils s'éclairent avec leur électricité: 26 % dans l'espace d'un rien de temps, M. le Président. Le permis de conduire qui était à 50 $ est à 90 $. L'immatriculation qui était à 110 $ ou à 111 $ est à 170 $ ou 180 $. Ça continue, les frais de scolarité et tout.

M. le Président, ce que l'Opposition fait comme travail sur cette loi-là c'est qu'elle veut vous amener, vous, du pouvoir, les gens qui occupent les banquettes du gouvernement, M. le Président, à réfléchir pour qu'ils cessent d'imposer ces gens. C'est fait d'une façon, M. le Président, inacceptable. On ne tient pas compte du revenu. On taxe, général. Quelqu'un qui a une automobile, il faut bien qu'il la prenne son automobile pour aller travailler. Dans bien des cas, il n'y a pas de transport en commun, il n'y a pas d'alternative. Il faut qu'il prenne son auto pour y aller. C'est 0,04 $ du gallon. C'est au-delà de 200 $ par année, M. le Président, de plus pour un salarié qui prend son auto pour aller travailler. Avec l'accumulation des taxes en hydroélectricité, avec l'accumulation des taxes scolaires qui ont doublé, vous vous ramassez rapidement, M. le Président, avec des dépenses additionnelles de plus de 1000 $. Et là, vous n'avez pas compté, M. le Président, la TPS sur la consommation quotidienne. Ça représente quoi? Ça représente 10 % à 15 % du salaire de l'individu, dans bien des cas.

M. le Président, on s'en va où? On s'en va où? Les salaires sont gelés à peu près partout ou ils sont plafonnés. La moyenne d'augmentation des salaires, dans notre société québécoise, est de 4 % à peu près, alors que le coût de la vie, à cause de ces taxes scolaires, de ces taxes municipales, de ces taxes sur la consommation, M. le Président, l'inflation est à 8 %. Ça veut dire que, collectivement, les Québécois s'appauvrissent de 4 %. Ils ont une perte du pouvoir d'achat d'au moins 4 % puisque le salaire moyen augmente de 4 % et que l'inflation est de 8 %. Ça veut dire que les citoyens ont 4 % moins d'argent pour acheter par rapport à ce qu'ils avaient avant. C'est ça fondamentalement qu'il faut comprendre. Et ça se comprend, ça, M. le Président.

Et dans tout ça, M. le Président, la famille. Je veux en parler de la famille, M. le Président. Ce gouvernement a dit qu'il avait une sensibilité extrême pour la famille. Ils ont indexé certains petits programmes destinés à la famille, M. le Président, et seulement l'augmentation pour les frais en garderie élimine toutes les indexations que vous pouvez donner, que vous avez données. Ça s'en va où, M. le Président? Drôle de perception pour une politique familiale. Est-ce qu'une politique familiale, M. le Président, ce n'est pas de permettre, par exemple, à un père et à une mère de famille dont les revenus sont aux alentours de 28 000 $, 29 000 $, 30 000 $... Est-ce que ce n'est pas les égorger que de déplafonner, comme vous l'avez fait, les frais de scolarité? Est-ce que ce n'est pas décourager un père de famille de doubler sa taxe scolaire, de doubler ses taxes municipales, d'y aller avec une taxe sur la consommation, y compris sur les bottines d'enfants, les souliers d'enfants, les vêtements d'enfants, les accessoires ménagers, M. le Président? Il faut avoir un peu de coeur dans le corps pour penser à ça. Quand on élabore des politiques, on doit aussi penser, M. le Président, à ce pauvre monde que l'on taxe. Vous pouviez y aller d'une façon plus originale, il me semble, y aller sur des objets de luxe avec un peu plus d'imagination, essayer de penser à des formules qui n'étoufferaient pas ce salarié moyen.

M. le Président, je n'en reviens tout simplement pas de cette attitude d'insensibilité assez manifeste de ce gouvernement. M. le Président, quand on allait à la petite école et qu'on suivait des cours de catéchisme, des cours de morale, on nous disait souvent: Pensez donc aux pauvres; pensez donc aux pauvres dans notre société. Arrangez-vous donc pour permettre aux plus pauvres de vivre un peu. Je suis surpris de la part du ministre des Affaires municipales que ces discours qu'il nous faisait... Je me souviens qu'il m'en a fait à Val-d'Or, je me souviens d'avoir assisté à ses conférences à Joliette au moment où il faisait partie du mouvement de l'Action catholique qui nous faisait penser que, dans une société, il y avait du monde dont il fallait se préoccuper, qu'il ne fallait pas étouffer. Depuis un an en particulier, M. le Président, il frappe d'une façon inconsidérée en particulier sur ce monde-là qui, précisément, aurait besoin de notre attention, qui, précisément, aurait besoin qu'on ait une sensibilité face à lui, qui aurait besoin de sentir qu'à l'Assemblée nationale les gens ont du coeur vis-à-vis de la misère humaine. Je ne pense pas que ce soit le propre de ce gouvernement, M. le Président.

Pour toutes ces raisons, nous voterons contre, M. le Président, et nous allons prendre tous les moyens possibles et imaginables pour essayer de contrer cette réforme qui, à notre point de vue, ne mérite pas d'être votée à l'Assemblée nationale du Québec. Merci, M. le Président. (21 h 10)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Joliette et leader de l'Opposition officielle. Sur ce même projet de loi, l'adoption du projet de loi 145, je reconnais maintenant M. le député de Gouin. M. le député.

M. André Boisclair

M. Boisclair: Merci, M. le Président. J'aimerais d'abord dire, M. le Président, qu'en prenant connaissance des dispositions contenues au projet

de loi 145 - et elles sont quand même nombreuses, M. le Président, vous l'avez lu vous aussi, 322 articles, un projet de loi qui vient modifier en profondeur les règles qui, auparavant, ont régi la conduite des municipalités à l'égard du gouvernement et vice versa - il y a un mot qui m'est venu à la tête, M. le Président. Le mot est bien simple, c'est l'usure. Ce projet de loi, M. le Président, m'apparaît comme étant le reflet d'un gouvernement qui manque d'imagination, d'un gouvernement qui trouve toujours les mêmes solutions à des maux qui sont pourtant différents, d'un gouvernement qui ira administrer une médecine de cheval, qui ira, possiblement, par ses gestes, remettre en question non seulement des consensus qui ont été durement acquis, mais qui auront des conséquences importantes sur la façon dont nos infrastructures sont gérées.

M. le Président, j'aimerais vous parler de ma ville, Montréal. Je sais, que nous partageons ça en commun. Nous représentons tous les deux une circonscription de la ville de Montréal, tout comme la députée de Bourassa, d'ailleurs, ministre déléguée aux Finances, sûrement concernée au premier titre, lorsque vient le temps de discuter des dossiers montréalais. M. le Président, ma ville c'est la métropole du Québec. Montréal, c'est la seule ville qui est capable de réunir les capitaux physiques, les capitaux financiers, les capitaux humains pour vraiment faire du développement, pour s'assurer que le Québec, à sa façon, puisse compter sur un pôle de développement, un pôle de croissance important.

On aura beau admettre, M. le Président, que oui, il y a effectivement d'autres municipalités importantes, qui, au Québec, contribuent au développement et au rayonnement du savoir-faire québécois, il n'en demeure pas moins que nous avons une métropole, que nous avons une ville qui est capable de réunir à la fois le savoir-faire et l'imagination nécessaires pour rayonner à l'échelle internationale. Notre ville rayonne parce qu'elle a su, au cours des ans, développer et tisser les consensus pour faire particulièrement que dans le domaine tertiaire supérieur...

Pensons à nos industries de génie, pensons à tout le secteur du conseil, que ce soit par nos firmes d'avocats, nos firmes de professionnels, par ces firmes, par l'engagement de ce millier, de ce plus de 1 000 000 d'hommes et de femmes, nous avons pu bâtir une métropole et, un peu pour reprendre le slogan de la ville, M. le Président: Oui, nous avons pu bâtir une métropole dont les habitants peuvent être fiers. Cependant, dans un contexte où nos économies se mondialisent, où de plus en plus l'interdépendance entre les grands pôles s'accroît, on peut être plutôt soucieux et on peut s'inquiéter de l'avenir de notre métropole.

M. le Président, vous savez comme moi que Montréal est une ville qui compte aussi sur des infrastructures importantes. Le Stade olympique, il est à Montréal. Le Jardin botanique, il est à Montréal. L'Insectarium c'est à Montréal. La Place des arts, M. le Président, c'est à Montréal. Une ville qui a donc à supporter des infrastructures importantes, compte tenu aussi des besoins qui sont exprimés par la population. Avec une ville de plus de 1 200 000 d'habitants, M. le Président, vous savez qu'est-ce que ça peut causer comme pression sur l'administration publique.

Nous avons, par le passé, M. le Président, en étant capables d'établir un dialogue avec le gouvernement du Québec, nous, comme intervenants montréalais, nous avons été capables d'établir un dialogue qui nous a permis de bâtir un certain nombre de choses. Aujourd'hui, M. le Président, avec le projet de loi 145 qui vient concrétiser, dans le fond, l'arrogance du gouvernement, qui vient concrétiser ce manque de vision, qui vient concrétiser aussi, M. le Président, l'absence de vision, non seulement de façon générale, mais surtout à l'égard de notre ville, de notre métropole, nous nous retrouvons à mettre en question ces grands acquis, acquis qu'on a été chercher au prix de longues batailles.

C'est non seulement à l'égard du transport en commun que ce projet de loi aura des conséquences importantes. Québec, en se retirant du financement des infrastructures... Ce que ça veut dire, ça, M. le Président? Ce sont les autobus. C'est le métro. C'est le financement pour peut-être un agrandissement ou une amélioration du service offert à l'heure actuelle par la Société de transport de la Communauté urbaine de Montréal, en se retirant de ce service pourtant fondamental. Et ce n'est pas là, pour des gâteries, ce n'est pas pour se faire plaisir que le gouvernement du Québec, tout comme les usagers, tout comme les municipalités décident - et ils l'ont toujours fait dans le passé - de financer le transport en commun. C'est bien, M. le Président, parce que les gens qui utilisent le transport en commun à Montréal, 75 % d'entre eux le font pour se rendre au travail. 45 % de ces gens n'ont pas de véhicule. C'est donc dire l'importance d'un service qui est, dans le fond, fondamental, qui contribue, par sa présence, au soutien du développement économique de notre ville.

M. le Président, les choix qu'on envoie aussi aux gens sont parfois contradictoires et ce projet de loi, dans le fond, incarne cette contradiction, ces doubles messages que le gouvernement essaie de nous envoyer. Par exemple, à l'égard du développement économique, ce projet de loi viendra aussi - et j'essaierai de l'illustrer tout à l'heure - modifier considérablement les charges fiscales qui sont imposées à nos entreprises. Mais comment, M. le Président, peut-on, d'un côté - et le gouvernement du Québec le fait - financer le développement des corporations de développement économique, social et corn-

munautaire, les CDESC, comment peut-on encourager d'une main le développement économique local et communautaire et, d'une autre main, inciter ces entreprises à quitter la métropole vers les banlieues puisque la fiscalité municipale, M. le Président, ne sera plus concurrentielle? Je reviendrai, tout à l'heure, M. le Président, sur des chiffres et j'illustrerai mon propos par des exemples bien concrets.

Comment peut-on aussi, M. le Président, d'un côté - je reviens encore sur, dans le fond, l'incarnation contenue derrière le projet de loi 145 - inciter les municipalités à se regrouper, comme le gouvernement l'a fait au sein du Conseil métropolitain de transport, société qui regroupe l'ensemble des villes de la Communauté urbaine de Montréal avec certaines villes de banlieue pour essayer de favoriser une concertation sur le dossier du transport en commun? Comment peut-on, d'un côté, essayer de susciter la concertation avec ces différents intervenants soucieux du dossier du transport en commun et, d'un autre côté, par des dispositions contenues dans le projet de loi 145, exacerber différentes rivalités qui peuvent exister entre ces municipalités-là?

M. le Président, je vous disais que c'est une absence de vision. Je vous disais tout à l'heure qu'il y avait une absence de cohérence. Ce projet de loi illustre bien ces déséquilibres qui existent, ce manque de vision dans le fond et que bien des gens, d'ailleurs, ont compris, M. le Président. Vous avez vu, comme moi, les derniers sondages. Trois Québécois sur quatre sont insatisfaits du gouvernement, un taux de satisfaction de l'ordre de 29 % ou de 27 %...

Une voix: 27 %.

M. Boisclair: M. le Président, c'est du jamais vu, jamais vu. Il y a six ans et demi que ce gouvernement - plus de six ans, six ou sept ans - est au pouvoir. Ça fait seulement deux ans et demi - même pas deux ans et demi, un an... pas tout à fait deux ans, M. le Président, depuis la dernière élection - et déjà, les gens commencent à trouver le temps long. Déjà, M. le Président, les gens ont commencé à payer, pas tout à fait deux ans après le second mandat.

M. le Président, j'ai eu l'occasion de discuter aussi de ces questions-là. Ne vous imaginez pas que c'est moi qui, soudainement, décide parce qu'on m'a demandé de le faire, d'intervenir sur 145, que soudainement, je suis allé chercher ces chiffres un peu partout, ailleurs. M. le Président, ce qu'en disent les conseillers municipaux... J'ai eu l'occasion de consulter les différents intervenants de mon quartier. André Cardinal, conseiller municipal de Père-Marquette, permettez-moi de le citer: "L'an dernier, les résidents de notre quartier ont vu leur compte de taxes plus que doubler parce que le gouvernement Bourassa a transféré plus de 300 000 000 $ en dépenses aux commissions scolaires. Cette année, le même gouvernement veut transférer aux villes cette fois-ci près de 500 000 000 $. Les taxes municipales vont augmenter de manière importante. C'est inacceptable", dit M. Cardinal.

Diane Martin, conseillère municipale de Montréal, du district de Louis-Hébert: "Le gouvernement Bourassa demande à la ville de Montréal de taxer davantage les entreprises et les commerces pour payer la facture de 140 000 000 $ qu'il lui transfère. C'est plus de 20 % d'augmentation des taxes pour les commerces et les industries de notre quartier. Certains immeubles commerciaux vont voir leur compte de taxe plus que doubler. Le gouvernement Bourassa est irresponsable. Les difficultés économiques de Montréal, le chômage à Rosemont, la récession qui frappe et le commerce ne préoccupent pas ce gouvernement. Il faut lui faire comprendre qu'il fait fausse route, qu'il est dans l'erreur." Je pourrais continuer, M. le Président, tant qu'à y être.

Michel Lemay, conseiller municipal de Rosemont: "Le gouvernement Bourassa veut arrêter d'assumer la part qu'il a toujours assumée dans le transport en commun. Il veut obliger Montréal à payer 125 000 000 $ de plus à sa place. Deux ménages sur cinq dans notre quartier - M. le Président, vous le connaissez mon quartier, Rosemont et la Petite-Patrie - particulièrement dans Rosemont, deux ménages sur cinq dans notre quartier n'ont pas d'automobile. Le transport en commun est d'une première importance dans la vie économique de la ville de Montréal. Pour les gens de Rosemont, nous voulons maintenir les tarifs à un niveau acceptable. Le gouvernement Bourassa doit continuer à assumer ses responsabilités en matière de transport en commun. C'est un choix de société."

M. le Président, les conseillers municipaux de la région de Montréal se sont exprimés à l'unisson. Ensemble, ils se sont ligués derrière l'Opposition officielle qui tente, M. le Président - j'ai hâte de voir au vote tout à l'heure avec quel succès nous aurons réussi à le faire - de faire valoir le point de vue de milliers de citoyens et citoyennes qui nous disent constamment, quotidiennement, lorsqu'on les voit dans nos bureaux de comté: II faut avoir perdu la tête pour taxer comme ça. Voici ce qu'ils nous disent. (21 h 20)

M. le Président, nous aurons beau nous réfugier derrière des discours dogmatiques, derrière des discours philosophiques ou derrière de grands principes, il n'en demeure pas moins que la capacité des gens de payer a toujours une limite. Je ne pourrais pas dire, si c'était uniquement du dossier, du projet de loi 145, et du transfert de responsabilités de près de 400 000 000 $ qu'on ira pelleter dans le champ des municipalités, ce n'est pas rien que ce dossier, M. le Président, il faut regarder aussi

l'ensemble de la charge fiscale supplémentaire qu'on impose aux Québécois et aux Québécoises. J'en faisais le relevé tout à l'heure, M. le Président, avant de venir prendre la parole. Je dressais une liste partielle des contributions financières qu'a imposées le gouvernement libéral. Les taxes scolaires, les gens le savent bien, 960 000 000 $ de plus sur trois ans; les permis de conduire et immatriculation, 660 000 000 $ de plus sur trois ans; les frais de scolarité, 270 000 000 $ sur trois ans; la TPS, 362 000 000 $ sur trois ans, dont 324 000 000 $ cette année, M. le Président. Et l'ensemble des diverses taxes annoncées dans le budget, 864 000 000 $ de plus sur trois ans.

Je peux comprendre que la situation est difficile, je peux comprendre que nous avons à faire face à des impératifs, tant locaux et régionaux qu'internationaux, mais il faut comprendre une chose, c'est que l'élastique, on ne pourra pas l'étirer trop longtemps. Un jour, on tirera un millimètre de trop sur l'élastique et il va péter, M. le Président. Et il y aura des gens qui en seront responsables. Il y aura des gens qui, à un moment donné, auront à payer le prix parce que, qu'est-ce que vous voulez, nous ne pourrons plus continuer à cultiver cette culture de la pauvreté.

M. le Président, dans certains quartiers de mon comté, il y a 20 % de chômage. De génération en génération, l'espérance de vie à la naissance peut varier à Montréal de sept ans d'un quartier à l'autre. Est-ce que c'est dans ce genre de métropole que les gens vont vouloir vivre? On connaît particulièrement les pressions qui existent, hein? ce fameux phénomène d'étalement urbain. Le député de Mille-Îles sait ce dont je parle. Il en est même rendu, M. le Président, à demander un pont supplémentaire pour Laval. Il en est même rendu à demander ça. Certains ont parlé du métro. On va voir comment les rivalités entre la vice-première ministre et le ministre de l'Environnement, et peut-être le ministre des Transports, vont se régler. On a vu. Ça a fait les manchettes dans les journaux.

M. le Président, déjà, nous en sommes à créer des pressions pour, justement, financer des infrastructures et, on le voit, même le gouvernement n'est pas capable de s'entendre. Même les libéraux entre eux, derrière cette espèce de - permettez-moi le pléonasme - consensus consensuel, sont en train de se perdre. Le ministre des Transports nous l'a bien dit: Pas question de métro à Laval, pas avant 2010; il a bien d'autres priorités. Le ministre des Transports a raison. Je comprends très bien que la vice-première ministre et le député de Mille-Îles ne soient pas d'accord avec ça. Je comprends ça. Mais, M. le Président, si les députés libéraux de la région montréalaise s'exprimaient avec autant de clarté que le député de Mille-Îles le fait, sans doute que le projet de métro et le projet de pont seraient relégués aux oubliettes et peut- être que le député de LaFontaine serait content de dire à ses électeurs qu'on va finir par prolonger l'autoroute Henri-Bourassa.

Voici, M. le Président, compte tenu de la situation que nous impose à l'heure actuelle le gouvernement libéral, le genre d'arbitrage que nous sommes rendus à faire. C'est des arbitrages qui, j'en conviens très bien, ne sont pas faciles à faire. Mais cependant, nous ne sommes pas arrivés avec ce genre de problématique, avec ce genre de questionnement de façon abstraite. C'est parce qu'il y a une situation, parce qu'il y a un contexte et ce contexte, on l'a créé de toutes pièces.

M. le Président, plaider pour Montréal n'est pas toujours facile. Comprendre les implications... Je peux comprendre qu'il y ait des gens d'autres régions, du Saguenay, de Québec, de la Mauricie, des Bois-Francs, de l'Estrie, de l'Abitibi, de la Côte-Nord, des gens qui disent parfois que Montréal a tout, qu'il faudrait en enlever un peu à Montréal pour en donner dans les régions. Mais comprenons bien, M. le Président, qu'il n'y a qu'un seul pôle de croissance économique au Québec et c'est notre métropole. Montréal est au coeur de l'économie québécoise. C'est là, c'est à Montréal que se joue cet équilibre social, cet équilibre linguistique. C'est là que dans le fond, on retrouve ce lieu privilégié d'expression de notre culture. M. le Président, ce pivot essentiel à notre croissance qu'est Montréal constitue, dans le fond, la seule interface du Québec avec le monde. Pensons tout simplement à ses infrastructures par ses aéroports, par ses installations portuaires.

M. le Président, notre métropole, il y a lieu de la traiter de concert, et je vois le député de Mille-Îles qui va essayer de me mettre en contradiction avec mon collègue, le député de Bertrand. Le député de Bertrand et moi-même n'avons aucun problème à nous entendre, M. le Président. Nous avons rapidement compris que nous avions tout intérêt à développer une stratégie d'assistance mutuelle parce que les gens ont vite compris que, particulièrement... Et le député de Mille-Îles qui rit et qui salue les gens un peu partout sait fort bien que, par exemple, 40 % des emplois qui ont été créés sur l'île de Montréal, selon des données de la Communauté urbaine de Montréal, ne sont pas occupés par des gens de la ville. Ils sont occupés par des gens des banlieues. Et déjà, M. le Président - et j'espère que le député de Mille-Îles m'écoute - les gens des banlieues commencent à s'inquiéter et commencent à voir apparaître des phénomènes de pauvreté parce qu'ils savent très bien - et mon collègue, le député de Bertrand, pourra en témoigner - que, déjà, on voit apparaître des couches de pauvreté en banlieue, qui est un phénomène tout à fait nouveau.

Ce phénomène de classes qu'on appelle les "working poors", de plus en plus se développe en banlieue. C'est un phénomène tout à fait nouveau

et les gens qui connaissent un peu la façon dont se fait le développement économique ont rapidement compris que nous avons besoin d'une métropole forte, d'une métropole qui sera capable d'assurer en partie et en fonction de ses responsabilités la croissance d'une partie, M. le Président, du territoire d'Amérique.

M. le Président, les défis à relever sont nombreux. Nous avons espéré, que ces défis puissent être relevés dans un contexte de concertation, dans un contexte où on traiterait le maire de Montréal avec tous les égards qui lui sont dus, et non pas comme un vulgaire élu municipal qui a un point de vue à dire comme n'importe quel autre. M. le Président, le maire de Montréal représente la municipalité la plus importante au Québec. Le moins qu'on puisse s'attendre de notre gouvernement, ce que les gens, à tout le moins dans ma circonscription, que je rencontre de façon régulière me disent, c'est qu'à tout le moins ils espèrent que le gouvernement du Québec va écouter leurs élus locaux, eux qui sont conscients des arbitrages qu'ils ont à faire, eux qui sont conscients des pressions.

Le ministre des Affaires municipales nous dit: II y a du gras dans les budgets de 111e de Montréal. Il y aurait moyen qu'ils puissent aller couper ailleurs. Si on regardait, M. le Président, révolution des dépenses à la ville de Montréal comparativement à d'autres, au gouvernement du Québec, au gouvernement fédéral. Vous savez que, sur une base de cinq ans, c'est une augmentation des dépenses de 6,8 % qui est, M. le Président, nettement inférieure à ce que le gouvernement du Québec a connu comme augmentation de dépenses, qui est, par exemple, nettement inférieure à ce qu'a connu le gouvernement fédéral.

Notre ville, M. le Président, Montréal sera pénalisée parce que, justement, elle a su, en faisant des choses difficiles, en faisant des arbitrages difficiles, rationaliser ses dépenses de façon remarquable. Et justement parce qu'elle a fait ce genre d'arbitrage, elle est doublement pénalisée.

M. le Président, vous me faites signe qu'il ne me reste plus que deux minutes. Ce que je souhaiterais, c'est qu'il y ait des consensus qui parfois puissent se faire dans cette Chambre sur l'avenir de notre métropole. Je souhaiterais, M. le Président, entendre plus souvent les députés libéraux parler de Montréal.

Oui, j'entends le député de LaFontaine et il fait bien de me le rappeler. Il parle de la région de Montréal, mais il est le seul à nous parler du développement économique de l'est de Montréal, de la responsabilité, de l'importance plutôt de développer les réseaux de transport dans l'est. Il est le seul à le faire. Quand est-ce qu'on entend le député de Bourget nous parler de Montréal? Quand est-ce qu'on entend la députée de Henri-Bourassa et ministre déléguée aux Finances nous parler de l'avenir de Montréal? Une voix: Bourassa.

M. Boisclair: Quand est-ce qu'on entend - de Bourassa plutôt - M. le Président, la ministre des Affaires culturelles pourtant membre du comité interministériel de Montréal, ce fameux comité...

Une voix: Le député de Rosemont.

M. Boisclair: ...qu'est-ce qu'il a fait? Le député de Rosemont? Mon collègue voisin avec qui je partage le même journal de quartier; pas une fois, M. le Président, depuis que je suis élu je ne l'ai entendu parler de Montréal.

M. le Président, c'est une responsabilité que nous avons tous, comme parlementaires ici en cette Chambre, de s'inquiéter de l'avenir de notre métropole. Les enjeux sont cruciaux, les choix que nous aurons à faire se répercuteront dans l'avenir pour les 10, 15, 20 prochaines années. À un moment donné, il y aura cet équilibre à faire. Il faudra, à un moment donné, analyser, faire des bilans, des colonnes de chiffres, M. le Président, et dire qu'est-ce qui est le plus coûteux: penser à investir à long terme ou plutôt, M. le Président, par des solutions sans vision, par des solutions qui vont nous obliger à faire des arbitrages difficiles, remettre en question tout ce que Montréal a fait, M. le Président, depuis les 10 dernières années. C'est ça la réalité.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Gouin. Sur cette même question, je reconnais le prochain intervenant sur l'adoption du principe du projet de loi 145, M. le député de Bertrand. M. le député.

M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. L'an dernier, le gouvernement du Québec réorientait une partie des taxes municipales vers les commissions scolaires avec comme résultat une augmentation moyenne des taxes scolaires de 140 $ par famille à travers le Québec. Par la suite, le ministre des Affaires municipales présentait la position de son gouvernement, le 14 décembre 1990, dans un document qu'il intitulait et je cite: "Vers un nouvel équilibre". Ce document, qui se veut l'inspiration du projet de loi actuel, est loin de constituer un transfert de responsabilités - et je cite le document - "accompagné des sources de financement adéquates." En réalité, il s'agit d'un véritable délestage financier. (21 h 30)

Devant l'opposition soutenue - je dois dire, jusqu'à un certain point efficace - de l'Union des municipalités du Québec et de l'Union des

municipalités régionales de comté du Québec, le ministre consentait, le 15 mai dernier, à un ajustement mineur de 78 000 000 $, ce qui a fait en sorte que la facture refilée aux municipalités est de 400 000 000 $ au lieu de 477 500 000 $, comme elle l'était initialement. Qui plus est, le ministre annonçait qu'en même temps qu'il réduit le transfert unilatéral aux municipalités de 78 000 000 $, il augmenterait différentes taxes pour 100 000 000 $.

Au risque de paraître répétitif aux yeux de mes collègues du gouvernement, j'aimerais, pour le bénéfice de mes électeurs, exposer les principales mesures et les principaux services qui vont écoper de ce réaménagement majeur. En fait, les principaux services et les principales mesures qui vont être visés par ce réaménagement sont d'abord le transport en commun, la voirie locale, la police et les "en lieu" de taxes.

D'abord, le transport en commun. Mon collègue de Gouin a souligné avec justesse l'importance du transport en commun pour la ville de Montréal. Mais j'ajouterai, comme représentant d'un comté de la grande région métropolitaine de Montréal, qu'un réseau efficace de transport en commun nous concerne tous, puisque le développement de la métropole est lié intimement à celui de sa couronne, et vice versa. D'abord, parlons du transport en commun. Le gouvernement libéral mettra fin, à compter de 1992, aux subventions à l'exploitation et au financement des dépenses à l'égard du maintien des actifs. La facture totale est de 266 200 000 $.

Les sociétés de transport en commun s'estiment justement abandonnées. On entrevoit des hausses de tarif faramineuses et des coupures de services importantes. Déjà, dans ma propre ville de Boucherville, on a annoncé la coupure de certaines lignes d'autobus importantes. En fait, tout le monde va y goûter. D'abord, l'usager, qui verra les tarifs augmenter considérablement sans qu'il y ait amélioration du service, puis l'automobiliste demeurant dans une municipalité urbaine qui verra les droits d'immatriculation de son véhicule augmenter de 30 $. Pour les automobilistes, en moins d'un an, soulignons que les coûts d'immatriculation seront donc passés de 55 $ à 120 $, une hausse de 118 %. Enfin, les entreprises et les commerces, dans le contexte économique difficile que nous connaissons, seront taxés pour 248 000 000 $ supplémentaires. En effet, le gouvernement libéral instaure une taxe spéciale sur le non-résidentiel qui permettra de recueillir 168 000 000 $ et il oblige aussi les municipalités à taxer les stationnements non résidentiels, taxe qui devrait rapporter 80 000 000 $. Ces deux montants, c'est-à-dire les 168 000 000 $ et les 80 000 000 $ doivent servir, en principe, à compenser l'arrêt des subventions à l'exploitation et au maintien des actifs du transport en commun.

Quant à la voirie locale qui nous concerne particulièrement, nous qui habitons dans la région périphérique de Montréal, le gouvernement transférera, à partir de 1993, une partie de la responsabilité de l'entretien, la réparation et la construction du réseau routier local. Initialement, le coût de ce transfert était de 43 300 000 $. Cependant, devant les pressions, le ministre a réduit à 22 300 000 $ le coût de ce transfert, ce qui, aux yeux du monde municipal, demeure malgré tout inacceptable. Dans l'état actuel de notre réseau routier local, la somme de 22 300 000 $ est loin de refléter les coûts réels que les municipalités devront assumer. En fait, au bas mot, l'UMRCQ estime à 2 000 000 000 $ le montant nécessaire à la remise en état du réseau routier qui, comme il est facile de le constater pour la plupart d'entre nous, est dans un état pitoyable un peu partout. Le gouvernement a donc encore deux ans pour revenir à une position plus intelligente et censée au chapitre de la voirie locale. J'espère qu'il écoutera, cette fois-ci, les élus municipaux.

La police, maintenant. Pour toutes les municipalités qui ont recours aux services de la Sûreté du Québec et qui n'ont pas de corps policier municipal, le gouvernement mettra en place une grille de tarification afin de défrayer les coûts de la Sûreté du Québec. La dernière facture du gouvernement à cet égard est de 70 800 000 $ au lieu de 79 300 000 $, une bien mince consolation, en fait, pour les municipalités touchées, d'autant plus que cette réduction n'affectera que les municipalités de 3000 habitants et plus sans corps de police.

L'étude des crédits du ministère de la Sécurité publique a mis en lumière la diminution importante et surtout inquiétante des services offerts par la Sûreté du Québec en région: fermeture de postes, baisse des effectifs et des patrouilles, autant de conséquences des coupures. Pourtant, au même moment, on compte faire payer les municipalités pour un service amoindri et sur lequel elles n'auront aucun contrôle.

Quelques mots, maintenant, sur les "en lieu" de taxes. Principe fondamental de la réforme fiscale de 1979, le gouvernement s'engageait à payer, comme tout le monde, ses taxes foncières de façon graduelle. En 1983, sous le gouvernement du Parti québécois, nous avions d'ailleurs augmenté le paiement de nos "en lieu" de taxes scolaires de 40 % à 50 %, l'objectif étant, bien sûr, d'atteindre éventuellement les 100 %. Le manque à gagner des municipalités au chapitre de ces "en lieu" de taxes est d'environ 125 000 000 $ annuellement. Mais voilà que le gouvernement a décidé non seulement de ne pas payer tous ces "en lieu" de taxes, mais de réduire de 50 % à 25 % le paiement des "en lieu" de taxes sur les écoles primaires et secondaires: 47 000 000 $ en moins pour les municipalités, dont certaines et, en particulier, les plus petites, comptent beaucoup sur cette source de revenus.

Qui plus est, la révision du régime de la

taxe d'affaires ainsi que la taxe spéciale sur le non-résidentiel, qui auront pour effet d'augmenter les coûts à la charge d'un propriétaire non résidentiel, méritent d'être soulignées et obligeront ce dernier à augmenter le loyer de ses clients. Or, de façon spécieuse, le gouvernement autorisera ces propriétaires à faire fi des clauses contenues dans les baux afin d'augmenter les loyers en cours de baux. Je souligne ici cette disposition qui est particulièrement dangereuse pour le développement de nos municipalités en périphérie, puisqu'il suffit de se promener dans nos municipalités pour constater que bon nombre de commerces, petits et moyens, ferment leurs portes, faute de ne pouvoir respecter les baux qu'ils ont signés, suite, évidemment, à la récession et à la baisse de la demande pour leurs produits.

Quant aux droits sur les divertissements maintenant, le gouvernement voulait, le 14 décembre dernier, abolir complètement cette taxe d'amusement qui procure aux municipalités des revenus de 25 500 000 $ et qui les encourage souvent à s'impliquer dans les activités culturelles, récréatives et sportives. C'est, entre autres, sur la base des revenus provenant de cette taxe que la ville de Montréal acceptait de s'impliquer, il n'y a pas si longtemps, dans le maintien des Expos à Montréal. Le 15 mai dernier, le ministre modifiait sa proposition initiale et maintenait la taxe sur les divertissements, à un taux moindre cependant, puisque les municipalités en tireront 15 400 000 $, ce qui fera en sorte, compte tenu de la TPS et de la taxe de vente du Québec, que les activités culturelles, sportives et récréatives seront dorénavant triplement taxées.

Les droits sur les mutations immobilières nous concernent également dans nos villes périphériques de Montréal. Actuellement facultative, la soi-disant taxe de bienvenue deviendra obligatoire à partir de 1992. De plus, les taux seront déterminés par le gouvernement. Ainsi, pour une transaction inférieure à 50 000 $, le taux sera de 0,5 %, de 1 % pour une transaction se situant entre 50 000 $ et 250 000 $ et plus de 1,5 % pour les transactions supérieures à 250 000 $. Au départ, le ministre prévoyait des revenus de 43 100 000 $ provenant de cette taxe. Avec les ajustements du 15 mai dernier, le rendement sera porté à 77 600 000 $, une mesure qui, elle aussi, ajoutée à la TPS et à la taxe de vente du Québec sur les maisons neuves, n'est pas pour favoriser l'accès à la propriété et le soutien à l'habitation. (21 h 40)

Quant à la fiscalité industrielle, autre atout majeur de notre développement, sans jamais en avoir discuté publiquement auparavant, le ministre des Affaires municipales introduit discrètement un article concernant l'assiette fiscale des raffineries de pétrole qui, comme plusieurs autres types d'industries, constituaient, depuis 1980, une source de litige quant à savoir ce qui était imposable et ce qui ne l'était pas.

Sans connaître la portée d'un tel article, on peut se demander pourquoi le ministre n'a consulté personne avant de procéder à de pareilles modifications et surtout pourquoi il n'a pas profité de l'occasion pour préciser également quels immeubles rattachés à des alumineries, des papeteries, etc., peuvent être portés au rôle d'évaluation, et quelle est leur véritable valeur imposable. C'est donc dire, en fait, que plusieurs municipalités qui comptent sur leur territoire ce type d'industries - et j'en compte dans mon comté - ne verront pas leurs problèmes réglés, d'aucune façon. En fait, des millions de dollars sont en jeu ici.

Permettez-moi, M. le Président, de tirer certaines conclusions préliminaires, certains estimés préliminaires des retombées de ce réaménagement fiscal sur les municipalités de mon comté. En ce qui concerne la ville de Boucherville, le transfert brut résultant de la réforme fiscale se traduira par une augmentation de 2 500 000 $, en raison particulièrement du retrait du gouvernement du financement du transport en commun. Pour la ville de Saint-Amable, ce sera un montant additionnel de 450 000 $; pour la ville de Sainte-Julie, de 222 000 $ et, pour la ville de Varennes, de 327 000 $. Bien sûr, étant donné que le ministre a accepté le principe de pouvoir réduire de moitié les transferts qu'il avait auparavant envisagés, particulièrement dans le domaine de la voirie et de la police, et également dans le domaine des "en lieu" de taxes, ces estimés se traduiront, en fait, par des sommes moins élevées que les municipalités devront encourir. Il n'en reste pas moins qu'au chapitre du transport en commun rien n'est réglé et que le problème demeure entièrement sans solution pour le moment.

Ce qui est important, M. le Président, au fond, dans ce débat, ce ne sont pas les chiffres, les estimés ou les prévisons que l'on peut échanger de chaque côté de la Chambre. Au fond, ce qui est important dans ce réaménagement fiscal, c'est l'impact social qu'il aura. L'impact social, non seulement dans les grands centres urbains... Mon collègue de Gouin, tout à l'heure, a fait allusion à quelques-uns de ces impacts sur l'économie et sur la qualité de vie dans la grande ville de Montréal. J'aimerais attirer votre attention sur certains de ces impacts dans ma propre région. Le premier impact qu'ont vécu les contribuables a été l'augmentation des taxes scolaires. Je suis persuadé que mes collègues qui représentent d'autres districts, d'autres circonscriptions électorales, soit au nord ou au sud de Montréal, ont reçu, dans leur bureau de comté, plusieurs personnes et en particulier des jeunes couples et des personnes retraitées qui étaient fort inquiets de l'augmentation des taxes scolaires qui leur était imposée à ce moment-là. Loin de répondre

aux craintes de ces contribuables, le ministre, par son réaménagement de la fiscalité municipale et par son pelletage de responsabilités dans la cour des municipalités, vient ajouter à l'insécurité de ces personnes.

Quand nous nous promenons dans nos municipalités, nous constatons un nombre énorme de maisons qui sont mises en vente. Ce nombre énorme de maisons qui sont mises en vente résulte de deux facteurs principaux, d'abord attribuables à la récession du fait que la plupart des ménages ou la plupart de citoyens qui ont acheté ces maisons possèdent des hypothèques très élevées qui, la plupart du temps, exigent deux salaires pour rencontrer les paiements mensuels. Et lorsque, dans le contexte de la récession, un des deux conjoints perd son emploi, il devient de plus en plus difficile pour le ménage de soutenir les frais afférents à la maison. C'est une des réalités qui fait que l'on constate, dans nos municipalités de la couronne de Montréal, des maisons qui sont mises en vente en si grand nombre.

Il y a également, et il faut le souligner, les tensions familiales qui découlent des difficultés financières que traversent les ménages à l'heure actuelle. Au fond, on assiste à une sorte de cercle vicieux où les jeunes ménages, qui se sont endettés jusqu'au cou pour acheter les maisons qui sont de plus en plus chères, dépendent de deux salaires pour pouvoir soutenir ces maisons. Lorsque les tensions financières se font sentir dans le ménage, ça se traduit par des tensions au sein du couple, tensions qui, éventuellement, mènent à la séparation et au divorce. Dans nos municipalités - je suis sûr que c'est également le cas dans la région de Laval aussi bien que sur la rive sud de Montréal - bon nombre de ces propriétés qui sont mises en vente résultent, finalement, de la discorde familiale et des séparations, des divorces qui, eux, sont rattachés à la récession économique et aux difficultés financières que vivent les ménages qui les occupent.

Passons maintenant aux personnes qui sont à revenus fixes et particulièrement aux pensionnés et aux retraités. Ce groupe de personnes est fort inquiet de tout ce réaménagement fiscal aussi bien au niveau des taxes scolaires qu'au niveau des taxes municipales, puisque, si on additionne l'augmentation de l'ensemble des taxes directes ou indirectes qu'ont dû supporter les contribuables au cours de la dernière année, on s'aperçoit que le pourcentage d'augmentation des taxes, donc du fardeau financier du ménage typique québécois, augmente beaucoup plus vite que le pourcentage d'augmentation de son revenu familial. Et c'est là où se trouve le drame. Si l'on songe, en particulier, aux personnes retraitées, je suis sûr que la plupart de mes collègues ici ont vu défiler chez eux, dans leur bureau de comté, des personnes à la retraite qui ont indiqué un mécontentement et une crainte face à cette spirale ascendante de taxation à laquelle elles sont soumises du fait que les personnes, qui sont présentement à la retraite et qui occupent leur maison dans nos municipalités, se trouvent face au dilemme suivant, c'est-à-dire que les taxes augmentent de plus en plus alors que leurs revenus sont basés sur des pensions établies au cours des dernières années où ils travaillaient. Évidemment, les régimes de pension, dans plusieurs cas, n'étaient peut-être pas aussi généreux qu'ils le sont à l'heure actuelle, de sorte que notre population, à la fois de jeunes ménages qui veulent avoir accès à la propriété et qui doivent dépendre de deux salaires pour faire les paiements sur leur maison, d'une part, et, d'autre part, de personnes retraitées qui, elles, voient le fardeau fiscal et les charges fiscales augmenter démesurément par rapport à leurs revenus de pension, se trouvent dans une situation où, de plus en plus, l'écart devient difficile à combler.

Finalement, M. le Président, en conclusion, j'aimerais soulever cette hypothèse qui est la suivante. Chaque année, le Québec envoie au gouvernement fédéral de 22 000 000 000 $ à 24 000 000 000 $ sous forme de taxation de toutes sortes. Ne serait-il pas temps de rapatrier chez nous ces sommes d'argent de façon à ce que les différents paliers de gouvernement puissent avoir les sommes nécessaires aux responsabilités qui leur sont attribuées? C'est dans ce sens, indépendamment des échanges de chiffres auxquels on peut s'adonner des deux côtés de la Chambre, qu'il est important de remettre ça dans un contexte beaucoup plus vaste qui est celui du rapatriement de toutes nos ressources financières au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Bertrand. Sur l'adoption du principe du projet de loi 145, M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. M. le député.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président. Au moment où nous sommes à étudier, par ailleurs, dans d'autres salles à l'Assemblée nationale, un autre projet de loi qui va bouleverser aussi à bien des égards la vie des Québécois et des Québécoises, le projet de loi 120 sur la réorganisation des services de santé et des services sociaux, nous n'avons pas le droit également d'avoir une absence de préoccupation pour ce qu'on est en train de faire aux municipalités. (21 h 50)

Quand on représente un comté de la région de l'Abitibi-Témiscamingue, M. le Président, ce serait comme plaider coupable de ne pas intervenir au moment de l'adoption de principe du projet de loi 145 parce que toutes les petites collectivités - je dirais, à bien des égards,

surtout les petites collectivités - sont directement concernées parce qu'elles vont faire les frais, proportionnellement parlant, de ce qu'on a appelé cette réforme des finances municipales. Il faut avoir pris, au cours des trois dernières semaines, le temps de rencontrer, mais vraiment de rencontrer, les 38 municipalités du comté de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, de Témiscaming sur la frontière de l'Ontario à aller jusqu'au village de Cléricy en périphérie de Rouyn-Noranda, pour s'apercevoir de ce que ça peut vouloir dire dans la réalité ce qu'on s'apprête ici à transférer directement aux municipalités et en particulier aux municipalités rurales. Il y a des chiffres que ces gens-là peuvent regarder et comparer avec la réalité qu'ils vivent actuellement. C'est facilement compréhensible lorsqu'on décrit l'état de la situation comme étant un état de désarroi dans les nombreuses communautés rurales de la région de l'Abitibi-Témiscamingue.

Bien sûr, on peut en rire un peu, faire des gorges chaudes de cela et dire: Écoutez, on a trop de municipalités au Québec et la petite municipalité de 500, 600 ou 700 habitants à qui ça va coûter, 28 000 $, 30 000 $ ou 50 000 $ de plus pour ses citoyens et citoyennes qui sont dans ce milieu rural, bah, finalement, écoutez, il y a des problèmes beaucoup plus graves que ça dans la société québécoise. Finalement, on dit encore une fois, dans une loi qui est mur-à-mur et qui s'applique à tout le monde sur l'ensemble du territoire québécois: Bien coudon, il faut que ça fasse quelques victimes. Les petites municipalités, en particulier dans le milieu rural, bien, vous êtes dans la machine, vous êtes dans le moulin à viande et vous sortirez en saucisson à l'autre bout. On se soucie peu finalement de ce que ça veut dire comme conditions de vie au niveau des collectivités locales.

Des 38 municipalités que j'ai eu l'occasion de rencontrer, M. le Président, la réponse à ce qui est déposé devant nous aujourd'hui, c'est un refus unanime. C'est un refus unanime. Or, on nous dira: Trouvez-moi un gouvernement qui a imposé une nouvelle taxe, qui a imposé de nouvelles charges fiscales à une catégorie de citoyens, par quelque moyen que ce soit, où les gens se sont montrés d'accord. On a déjà vu, cependant, une planification de l'occupation du territoire et des charges qui sont demandées aux citoyens et aux citoyennes beaucoup mieux préparée et beaucoup mieux acceptée par la population. Quand on est dans cette deuxième partie du "Québec cassé en deux", dans le milieu rural, franchement, essayez de retrouver, avec ce qui va tomber sur la tête des municipalités rurales, où est l'espoir, où est la possibilité de développement. Ces gens-là vont être confrontés à un ensemble de charges parce que ce gouvernement-là a décidé que, compte tenu de la situation financière, de la résultante de sa gestion, d'avoir laissé aller les affaires pendant sept ans, pendant que ça roulait sur le principe de l'économie de marché et que l'économie de marché fonctionnait en faveur du développement et que les conditions le permettaient... Eh bien, c'est le résultat de sept années de croissance économique, de sept années aussi d'imprévoyance, de sept années où on n'a pas su se préparer à la récession qui allait inévitablement se pointer, parce que la première vertu des récessions, c'est qu'on peut les voir venir et qu'elles se terminent un jour. Bien, c'est ça le sens de la prévoyance pour un gouvernement.

Alors, quand vous vous promenez dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue et que vous: À compter du 1er avril 1993, on va vous remettre, à chacune de ces 38 municipalités, au total, 738 kilomètres de routes à entretenir, il y a de quoi frissonner pour l'ensemble de la collectivité de l'Abitibi-Témiscamingue. Comment penser qu'une population d'à peu près 70 000 personnes, répartie dans 38 petites municipalités, va entretenir 738 kilomètres de routes rurales sur son territoire? Essayons de penser un peu sérieusement à ce que ça veut dire pour ces collectivités, à ce que ça peut vouloir signifier, sinon de planifier d'abord la première réunion du conseil municipal où la première question qui va se poser, c'est: Qu'est-ce qu'on commence à fermer dans cette paroisse rurale de la région de l'Abitibi-Témiscamingue?

En somme, vous le savez, en 1970, une étude commandée par le gouvernement du Québec a été réalisée par deux ingénieurs qui s'appelaient - et c'est célèbre dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue - les ingénieurs Côté et Duvieusart. La conclusion du rapport Côté-Duvieusart de 1970, c'est: La région de l'Abitibi-Témiscamingue n'est pas une région qui est développable, à développement pour les prochaines années au Québec et nous devons entreprendre un mouvement de fermeture de cette région qui fournit des ressources naturelles à l'ensemble des autres régions du Québec. Et surtout, le jugement qu'on y portait, c'était de dire: Cette région ne peut finalement pas, comme région nordique du Québec, être une région d'agriculture, une région de production agricole.

On a eu des mouvements de populations au tournant des années soixante-dix et, finalement, au bout d'une année, les célèbres Côté et Duvieusart ont été obligés de rentrer chez eux avec leur petit baluchon parce que ces gens-là sont déterminés à continuer à articuler le développement sur leur territoire et que leurs ancêtres ne sont pas montés dans une région comme l'Abitibi-Témiscamingue pour se faire dire, 25, 30 ou 40 ans plus tard: Eh bien, on s'était trompé; ce que vous avez aimé, ce que vous avez défriché, ce que vous avez bâti, ce que vous avez développé dans chacune de vos communautés, eh bien, aujourd'hui, on fait table rase de cela. C'est ça dont les gens ont l'impression actuellement, avec le projet de réforme qui est devant eux, c'est qu'on veut faire indirectement

ce qu'on n'a pas été capables de faire directement. Quand vous rencontrez ces gens-là et qu'ils vous disent: M. le député, comment pensez-vous qu'on va prendre soin, nous autres, de façon intéressante et que ça va devenir un élément d'attraction, qu'on va avoir des facteurs d'attraction dans notre municipalité, quand on aura à entretenir un réseau qui, M. le Président, par rapport à l'ensemble du réseau routier rural au Québec, est le plus détérioré de toutes les régions du Québec? En moyenne, 52 % du réseau rural du Québec a fait l'objet d'interventions au cours des 25 dernières années et, dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue... Et ça, ce n'est pas votre humble serviteur qui fait la description des statistiques, c'est le rapport Middlemiss, au moment où le ministre actuel de la Santé et des Services sociaux avait commandé une série de rapports sur l'état du réseau routier québécois et de ce qu'il faudrait mettre en plan pour en assurer la rénovation et avoir une qualité de vie, au niveau des axes de circulation, qui soit intéressante à travers tout le Québec. Eh bien, les statistiques, c'est que, dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue, seulement 11 % de tout le réseau routier rural a fait l'objet d'interventions au cours des 58 dernières années.

Quand on regarde l'état des communautés rurales, ça veut dire que ce sont encore des routes de colonisation et qu'il n'y a pas eu d'intervention majeure sur ce réseau-là. Ce qu'on leur dit en 1991, c'est: Nous, on a eu de l'imprévoyance, parce que, finalement, ça ne nous fatigue pas bien, bien, l'Abitibi-Témiscamingue; ce n'est quand même, au total, que 2,8 % de la population et, de toute façon, le monde rural et les régions du Québec, ça ne nous intéresse pas. La manifestation de notre désintérêt pour ces régions, c'est que tout ce qui peut nous causer des problèmes, tout ce qui nous amènerait à travailler, à intervenir au niveau de la répartition, ça, ça ne nous intéresse pas. (22 heures)

On est un gouvernement centralisateur. Les régions, on n'a pas de préoccupation pour cela et, si vous voulez assurer votre pérennité, si vous voulez continuer à assurer votre vie ou plutôt votre survie, eh bien occupez-vous-en donc vous-mêmes; voilà le petit, la bassine, puis l'eau, et organisez-vous avec ce que vous aurez comme moyens du bord. Il faut les énumérer et je vais vous énumérer, je vais vous lire, M. le ministre, ce que chacun des maires a dit, ce que chacun des maires des deux municipalités régionales de comté, du comté de Rouyn-Noranda-Témiscamingue à la région de l'Abitibi-Témiscamingue, a déclaré au sujet de ce projet de transfert de taxes du gouvernement libéral vers les municipalités, vers les citoyens et les citoyennes.

Quant à la MRC de Rouyn-Noranda, la MRC place comme indication, au départ, que les petites municipalités en ont ras le bol. Bien, ça veut dire que pour une petite municipalité de 400 habitants comme Arntfield, on vient d'imposer 28 000 $ de plus de taxes à ses citoyens; à Beaudry, ça veut dire 44 000 $ de plus; dans le village de Bellecombe, 35 000 $; Cadillac, 44 000 $; Cléricy, 26 000 $ de taxes supplémentaires; à D'Alembert, 22 000 $ supplémentaires; Destor, 34 000 $ supplémentaires; la municipalité d'Evain, 196 000 $ supplémentaires; Granada, 122 000 $ supplémentaires; Lac-Dufault, 15 000 $ supplémentaires; une municipalité comme McWatters, qui suffit à peine à suffire au réseau public qu'elle s'est donné, au cours des dernières années, pour satisfaire aux normes, 39 000 $ de plus; Mont-Brun, 22 000 $; Rollet, 13 000 $; la ville de Rouyn-Noranda, 434 000 $. On vient de dire 1 300 000 $ de charges de plus pour ces municipalités.

Et là, je pourrais me faire l'interprète des maires de la municipalité, mais je vais vous lire ce qu'ils ont déclaré. Il y a des "brackets" partout. Partout, partout. Ce n'est pas le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue qui parle. Il y a des parenthèses. Le préfet de la municipalité régionale de comté de Rouyn-Noranda dit que, finalement, on veut faire payer aux petites municipalités la mauvaise gestion du gouvernement. Ah! Bien, écoutez, il est quand même juste préfet, il ne représente que 21 municipalités qui n'ont passé qu'un nombre incalculable d'heures à évaluer, à regarder, à analyser et à constater la situation du monde rural. Voilà ce que le maire d'Evain et préfet de la MRC de Rouyn-Noranda déclare.

Le maire de la petite municipalité de Rollet, lui, pense qu'on veut fermer nos petits villages. C'est ça, le sentiment qu'il vit. On ne pourra pas lui enlever ça de ses tripes. C'est ça qu'il vit. Il regarde ce que ça va lui coûter de plus. Lui, il a perdu son école au cours des trois dernières années. Lui, il a perdu également la possibilité de garder la petite entreprise de bois de sciage qu'il y avait dans sa municipalité. Maintenant, il va dire à ses gens du côté de Rollet: 15 000 $ de plus, s'il vous plaît, en taxes l'an prochain, pas de services de plus. C'est parce qu'on m'a transféré des factures. Il pense qu'on va fermer les petits villages.

Le maire de Granada, lui, dit qu'on est en train de monter une véritable révolte des contribuables municipaux. C'est ce que le maire déclare à ses concitoyens et à ses concitoyennes. Le maire de la municipalité de McWatters, lui, dit que, dans le fond, on veut fermer toutes les routes rurales, les rangs de nos municipalités rurales, parce qu'il sait qu'il ne sera pas capable d'entretenir les 38 kilomètres de routes rurales qu'il a et que les producteurs agricoles qu'il y a encore dans sa paroisse, il va falloir qu'il les taxe pour leur donner une voie de circulation qui soit potable parce qu'il pense qu'en étant producteurs ou productrices agricoles dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue on a droit à

des conditions de vie qui soient aussi raisonnables qu'ailleurs au Québec.

Et le maire de Montbeillard, lui, dit qu'il pense qu'on veut étouffer les propriétaires en milieu rural et le maire de Mont-Brun, Réjean Rodrigue, que le gouvernement libéral et M. Ryan ne pensent qu'à taxer les plus pauvres. Mais, évidemment, ce monde-là, c'est tout du monde qui pense tout croche, là. C'est du monde qui n'aurait pas compris. C'est tout du monde qui n'aurait pas compris le sens de la réforme ou du projet de transfert de factures. Ces gens-là doivent refléter un peu ce que leur population pense.

Je répète, je cite ce que ces maires ont déclaré. Mme la mairesse de Beaudry, elle, dit: II faut avoir perdu la tête pour taxer comme ce gouvernement. Parce qu'elle, elle a lu aussi, elle a regardé, depuis deux ans, même si ça lui paraît une éternité, que ce gouvernement est en place, et elle n'en finit plus d'énumérer la litanie de taxes nouvelles qui est tombée sur sa tête et sur celle des contribuables de sa municipalité. Puis le maire de Arntfield, qui n'est pas particulièrement un sympathisant péquiste, pas particulièrement un sympathisant péquiste pour les gens du milieu, dit, lui, que les contribuables municipaux en ont déjà assez. Ils en ont déjà assez au niveau des responsabilités et des charges fiscales qu'on leur impose. Et le maire de Lac-Dufault dit que c'est un coup de force inacceptable pour les payeurs de taxes.

Et finalement, le maire de Cléricy, une petite communauté rurale de 500 habitants, dit que, lui, il ne sait plus où les gens de Cléricy prendront leur argent pour payer ces nouvelles taxes. Quand on s'en va à l'autre bout du comté, qu'on s'en va dans la région du Témiscamingue et que là, il y a encore 17 municipalités qui vont se faire attraper pour 800 000 $ au total dans la réforme, ah! comme dirait le député de Mille-Îles, 800 000 $, 17 paroisses du Témiscamingue, je pense que, finalement, on devrait peut-être fermer tout ça. On devrait peut-être fermer tout ça et tout ramener ça à la ville de Laval ou tout ramener ça à Montréal. Ce serait encore plus simple.

Parce que ce gouvernement n'a aucune préoccupation au niveau de l'occupation du territoire. Il n'a aucune préoccupation au niveau des régions du Québec. Quand il s'agit de faire payer les factures, il transfère ça, comme dans le projet 145, aux municipalités, et c'est pour ça que le préfet représentant les 17 municipalités du Témiscamingue se fait leur porte-parole et il dit: Pour nous, un nouveau partage des responsabilités signifie la possibilité d'agir ensemble. Pour le développement socio-économique de nos communautés et la création d'emplois, nous n'avons reçu que des factures.

C'est quelqu'un qui est prêt, en concertation avec les autres niveaux de gouvernement, à faire sa part, à travailler, à articuler le dévelop- pement en région, à faire en sorte que les gens qui vivent sur le territoire non seulement subsistent, mais vivent sur ce territoire. Il dit: Tout ce qu'on a reçu, tout ce qu'on a conscience d'avoir reçu du gouvernement actuel, c'est que nous n'avons reçu que des factures. Ça, c'est le préfet Ronald Lafrenière, le maire de Laver-lochère et le préfet de la MRC du Témiscamingue.

Or, probablement que les 38 se sont trompés. Il y a seulement les gens d'en face qui pensent avoir raison et les 38 maires des 2 MRC du territoire du comté Rouyn-Noranda-Témis-camingue sont aussi bien d'aller se rhabiller. Dans le fond, ils ne perçoivent pas le discours juste, clair, du gouvernement actuel et c'est lui qui a raison, ce gouvernement. C'est tout le monde qui a tort. C'est tout le monde qui a tort. Écoutez, quand on a la moindre préoccupation de l'occupation de notre territoire national, quand on a la préoccupation des petites communautés rurales, oui, ça prend du temps. Oui, il faut être attentif, oui, il faut aborder des mécanismes particuliers, oui, il ne faut pas adopter de solution mur à mur qui s'applique autant à la municipalité de Témiscamingue-Sud qu'à la municipalité de Rouyn-Noranda ou la petite communauté de Destor.

Non, là, on va avoir des mesures qui vont s'appliquer partout dans ce territoire de MRC. Quand c'est les maires qui nous disent, comme représentants de leur population locale: "Nous, on pense, finalement, que ce gouvernement a fait son deuil des régions rurales", moi, je leur réponds toujours: Mais vous aurez une occasion prochaine de faire votre deuil de ce gouvernement et s'il continue à vouloir adopter cette attitude, eh bien, nous assisterons au service funèbre. Et c'est les maires des municipalités qui parlent et qui le disent. Ce sera bien chacun son tour à quelque part, puisqu'on n'accepte pas de ne plus être une communauté vivante, une communauté qui veut continuer à se développer, une communauté qui veut continuer à exister et contribuer aussi au développement économique et social du Québec. C'est pourquoi nous allons, bien sûr, être contre, au nom de ces municipalités, le principe de ce projet de loi, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Et sur cette même proposition, l'adoption du principe du projet de loi 145, je reconnais maintenant M. le député de Duplessis. M. le député, la parole est à vous. (22 h 10)

M. Denis Perron

M. Perron: Merci, M. le Président. S'il y a une chose qui est remarquable en cette Chambre, c'est de voir que le premier ministre du Québec,

lorsqu'il veut faire un travail, faire faire un travail de bras sur le terrain du Québec, sur le terrain régional, c'est qu'il demande toujours au député d'Argenteuil. On a vu cette chose se révéler en 1989, lorsque le premier ministre a décidé de modifier toute la fiscalité scolaire, en se servant du député d'Argenteuil qui était alors ministre de l'Éducation. Comme le premier ministre du Québec avait bel et bien l'intention avec, en tête, le ministre des Finances, avec, en tête, même le ministre actuel des Affaires municipales, de modifier substantiellement ce qui se passait au niveau de la fiscalité municipale, encore là, le premier ministre du Québec a décidé de mettre en place le député d'Argenteuil pour que ce dernier continue à faire la job de bras qu'il avait commencée en 1989 et qu'il avait terminée, au niveau scolaire, en 1990.

M. le Président, je trouve déplorable qu'on se serve d'une personne en particulier pour non seulement discréditer les municipalités, mais aussi discréditer l'ensemble des résidents et des résidentes du Québec qui paient des taxes, qui paient des taxes foncières. Qu'on se rappelle qu'en 1979, et ce, en particulier depuis 1979 jusqu'à l'an dernier, au printemps dernier en particulier, la paix régnait entre le gouvernement du Québec et les municipalités du Québec. La paix régnait entre le gouvernement du Québec, l'Union des municipalités régionales de comté et l'Union des municipalités du Québec. Il y avait des consultations qui étaient faites, et ce, régulièrement et de façon concrète entre le gouvernement du Québec et les unions concernées, dans le but de rendre des décisions gouvernementales qui étaient conformes aux besoins du milieu et qui étaient conformes aussi aux ententes qui étaient conclues entre Québec et les municipalités.

Tout à coup, on voit un nouveau ministre des Affaires municipales qui nous arrive et Québec décide de faire les choses sans consulter. Le 6 novembre 1989, qu'on se rappelle qu'il y avait un mandat qui avait déjà été donné à l'ancien ministre des Affaires municipales, le député de Maskinongé, de revoir l'ensemble de la fiscalité municipale; ça, ce n'était pas connu, ça a été connu seulement quatre mois plus tard. Qu'on se rappelle aussi que tout ça a été connu le 6 mars 1990, lorsqu'il y a eu une annonce qui a été faite par le gouvernement du Parti libéral concernant le réajustement de l'impôt foncier au niveau scolaire. Le résultat, à ce moment-là, était de l'ordre de 75 000 000 $ qui étaient grugés, dans le domaine de la fiscalité, aux municipalités, par le biais de l'impôt foncier.

Mais, tout à coup, en 1990, au printemps, on se rend compte, dans les crédits, que ce n'est plus un montant de 75 000 000 $ qui est grugé par le ministre de l'Éducation du temps - l'actuel ministre des Affaires municipales - mais bel et bien 320 000 000 $. Les 320 000 000 $ qui étaient remis, sous la responsabilité des commis- sions scolaires, ont fait quoi? Ils ont empêché les municipalités, au niveau local et au niveau régional, comme les MRC, par exemple, d'aller imposer, au niveau local et au niveau régional, pour faire avancer les choses au niveau des services et au niveau des dossiers.

Le résultat de tout ça, c'est que ça a eu une hausse moyenne, dans le temps, de 140 000 $ pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises qui paient des taxes scolaires. Dans le temps, c'était déjà grave. Il y a des résidents et des résidentes des régions du Québec et, très souvent, des régions extrêmement pauvres ou encore des sous-régions extrêmement pauvres, qui ont dû payer la note, tout comme les régions et certains endroits, certaines villes qui paient la note aujourd'hui, même si ces endroits-là sont riches. Mais tous les résidents et toutes les résidentes qui paient des taxes au niveau local se trouvent à payer pour les désengagements du gouvernement libéral.

Aujourd'hui, on se rend compte que nous avons en face de nous la loi 145 qui modifie substantiellement la fiscalité municipale. En ce qui me concerne, c'est encore le même ministre qui revient à la charge, mais sous un autre chapeau, et qui impose aux municipalités les vues de son propre gouvernement libéral. En somme, c'est une autre bebite libérale qui s'abat sur ces concitoyens et concitoyennes de nos régions et de nos localités du Québec.

En ce qui me concerne, M. le Président, c'est de l'irresponsabilité politique que d'agir en ce sens, faisant fi des élus municipaux et prenant des mesures qui font en sorte que les services locaux, régionaux et sous-régionaux écopent. Qu'on parle du transport en commun, qu'on parle de la voirie locale, qu'on parle de la police, qu'on parle des "en-lieu" de taxes qui vont être réduits, contrairement à ce qui avait été décidé en 1979 et continué d'être appliqué en 1983... En parlant des "en lieu" de taxes, qu'on se rappelle que ce gouvernement n'a jamais pris la décision de hausser à plus de 50 % les "en lieu" de taxes, c'est-à-dire les taxes foncières qui étaient payées pour les institutions appartenant au gouvernement du Québec, comme les écoles, etc. Ce gouvernement n'a jamais bougé à la hausse, mais, tout à coup, il nous arrive, tout dernièrement, et dit: Ah! Au lieu de 50 %, ça va être 25 %, et, dans des cas, c'est zéro. Alors, vous comprenez très bien que les services devant être donnés au niveau des localités et au niveau des régions, encore là, ce sont les résidents et les résidentes payeurs et payeuses de taxes, au niveau local, qui doivent supporter les décisions du gouvernement libéral. là, on en rajoute dans le cadre de cette réforme fiscale des municipalités: la révision de la taxe d'affaires, les droits sur les divertissements - grosse modification - les droits sur les mutations immobilières, la question concernant la fiscalité industrielle. tout ce qu'on peut

dire de ce gouvernement, c'est: des taxes, des taxes et encore des taxes. On sait très bien que. lorsque ce gouvernement déclare qu'il n'impose pas au niveau de l'impôt sur le revenu, il se sert de tous les mécanismes concernés qui sont à sa disposition pour faire justement de la taxation au niveau local parce qu'il se dit: Si on impose, si on taxe au niveau local et au niveau régional, ça va peut-être paraître moins. Lorsqu'on arrive et qu'on impose, on touche l'ensemble des concitoyens et concitoyennes du Québec au niveau de leurs propres revenus. Mais là, on le fait de façon indirecte. Ce qu'il y a de pire encore, c'est que le gouvernement, au lieu de le faire lui-même, il le fait faire non seulement par les commissions scolaires, mais il le fait faire aussi par les municipalités qui ont l'odieux et qui auront l'odieux, soit de diminuer les services, soit d'abolir les services, soit d'augmenter la taxe foncière municipale si les populations veulent maintenir les services qu'elles ont.

Ça commence à être grave, M. le Président, de voir ce gouvernement faire du tripotage systématique au niveau des revenus des municipalités du Québec, comme il l'a fait, d'ailleurs, il y a un an et demi passé, au niveau des commissions scolaires elles-mêmes. Ça commence à être grave. Je crois, tout comme d'autres personnes, en particulier dans le comté de Duplessis... J'invite le ministre des Affaires municipales à aller rencontrer les maires des municipalités du comté de Duplessis. Il va se rendre compte qu'il n'y a pas un maire qui est d'accord avec la réforme de la fiscalité qu'il est en train de faire. Il n'y a pas un conseiller municipal, actuellement, dans l'ensemble des municipalités du comté de Duplessis, qui est d'accord avec la façon et avec l'odieux qui est imposé par l'actuel ministre des Affaires municipales au nom de son gouvernement. Il n'y en a pas, je n'en ai pas rencontré. Dieu sait combien j'en rencontre dans le comté de Duplessis! Il n'y en a pas qui sont d'accord, de ces gens-là qui sont d'accord avec la réforme qu'il est en train d'imposer.

Tout ça pour vous dire, M. le Président, qu'encore une fois le gouvernement, au lieu de prendre des responsabilités de façon correcte, en expliquant bien la situation et en faisant lui-même le travail qui s'impose, se vire de bord, il s'en va taxer - en le faisant faire par personnes interposées, en plus - les résidents et les résidentes qui paient des taxes foncières au niveau local. Il s'en va les taxer en se servant des maires et des conseillers municipaux. C'est ça qui est grave dans cette situation-là. De plus, il le fait sans consultation ni avec l'Union des municipalités du Québec, ni avec l'Union des municipalités régionales de comté.

Donc, ce gouvernement, il impose ses vues. Ce gouvernement bafoue complètement les règles démocratiques qui, normalement, existent entre le Québec et l'ensemble des municipalités du Québec Ce gouvernement se sert de certaines décisions qu'il prend, d'une bonne partie de la mauvaise administration qu'il fait pour aller pelleter dans la cour des contribuables locaux, c'est-à-dire des concitoyens et des concitoyennes de chacune des municipalités du Québec, de chacune des localités du Québec pour aller pelleter ses problèmes financiers. On se doit de regarder attentivement l'évolution des dépenses gouvernementales qui ont été faites au cours des trois ou quatre dernières années. Au cours des prochains mois, il y a des citoyens et des citoyennes du Québec qui vont se rendre compte que, malgré le fait que ce gouvernement annonce, à grand renfort de publicité, qu'il est un bon gouvernement, moi, je doute fortement de tout ça. La preuve va en être faite et ce, très prochainement, au cours des prochains mois. (20 h 20)

M. le Président, lorsqu'on regarde la façon d'agir de ce gouvernement au niveau des commissions scolaires et au niveau des municipalités, il faut rappeler aussi que ce gouvernement se sert même du fédéral pour aller surtaxer les résidents et les résidentes du Québec. Qu'on se rappelle l'entente qui a été signée entre le ministre des Finances du Québec et celui du fédéral concernant la TPS. Qu'on se rappelle qu'en même temps, à la même période, ce gouvernement est allé aussi loin que taxer la TPS fédérale pour en arriver à avoir une taxe sur la taxe. Quand on va acheter des produits, aujourd'hui, qu'est-ce qui se passe? C'est que les produits sont taxés par le fédéral à 7 % et le gouvernement du Québec y va à 8 %, mais il y va à 8 % sur le prix de la marchandise plus les 7 %, ce qui fait un revenu de taxation de l'ordre de 15,56 %. Ça, ça commence à être grave aussi, M. le Président. Il y a des concitoyens et des concitoyennes de l'ensemble du territoire québécois qui commencent à réaliser que ce gouvernement est un gouvernement qui ne gère qu'à la petite semaine, un gouvernement qui prend des décisions qui favorisent surtout le système que lui-même veut établir et un gouvernement qui fait en sorte d'oublier complètement les régions du Québec, en particulier, les petites municipalités.

M. le Président, pour l'information des membres de cette Chambre, regardez un endroit, un village où le gouvernement libéral qui est en face de nous a contribué à fermer une usine de transformation des produits de la mer: Rivière-au-Tonnerre, plus de 150 emplois perdus. Aujourd'hui, au moment où on se parle, il y a 90 % de la population de Rivière-au-Tonnerre, plus de 300 familles, sur l'aide sociale ou l'assurance-chôma-ge. Lorsqu'on regarde le village d'à côté, Magpie, 96 % des gens ne travaillent pas, sont sur l'aide sociale en particulier. Le village de Rivière-Saint-Jean à côté de celui de Magpie, 85 % des gens ne travaillent pas, sont sur l'aide sociale. Lorsqu'on voit ces municipalités-là venir se faire imposer par une décision gouvernementale, comme

dans le cas de Rivière-au-Tonnerre, des ajouts, des taxes additionnelles de l'ordre de 28 000 $, dans le cas de Rivière-au-Tonnerre, pour payer la police, pour payer des "en lieu" de taxes que le gouvernement se refuse de payer, on doit se poser de sérieuses questions face à l'attitude de ce gouvernement.

Nous, dans nos coins de pays, on a raison de dire que ce gouvernement s'occupe beaucoup plus des riches qu'il ne s'occupe des pauvres. C'est ce qui fait que, dans nos régions du Québec, en particulier aux endroits éloignés et aux endroits isolés, comme dans le comté de Duplessis, comme dans l'Ungava, comme c'est le cas en Gaspésie et dans le Bas-Saint-Laurent, comme c'est aussi le cas en Abitibi-Témiscamin-gue, on se rend compte que le gouvernement est en train de littéralement bousiller l'ensemble de l'économie locale et l'ensemble de l'économie régionale. Depuis le début de la présence de ce gouvernement comme titulaire du Québec, depuis le 2 décembre 1985, les régions en prennent pour une claque. Ça, vous le savez. Les régions en prennent pour une claque.

M. le Président, je vois la députée de Mégantic-Compton qui, depuis que mon collègue de Rouyn-Noranda a parlé et depuis que je parle, passe son temps à chialer. Qu'elle aille donc à son siège, puis qu'elle aille donc dire ce qui se passe dans les municipalités de Mégantic-Compton. Qu'elle aille donc dire ce qui se passe dans ses municipalités, dans son propre comté de Mégantic-Compton. Qu'elle soit réaliste, qu'elle soit honnête et qu'elle aille directement dire ce qui se passe. Puis, quelles sont les opinions des maires de ses municipalités? Les libéraux dans cette Chambre sont trop gênés pour se lever puis donner les informations quant aux répercussions que ça donne au niveau de chacune de leurs municipalités, de chacune de leurs localités. C'est pour ça qu'on est à peu près les seuls à intervenir, l'Opposition, c'est parce qu'ils sont trop gênés pour se lever debout. Ils sont trop gênés pour donner l'heure juste des résidents et des résidentes qui paient des taxes dans les municipalités, qui paient des taxes au niveau des commissions scolaires. Ils sont bien trop gênés. Ils laissent passer ça puis ils essaient de faire en sorte que ça passe comme du beurre dans la poêle, pour donner raison au ministre des Affaires municipales, pour empêcher qu'il ne soit trop dénigré, au moins, par son propre parti et par les propres membres de son parti.

M. le Président, moi, je regrette, mais si ces gens-là veulent faire le jeu de l'autruche, si ces gens-là veulent faire le jeu de ne pas défendre les intérêts de leurs concitoyens et de leurs concitoyennes de l'ensemble du Québec, si ces gens-là veulent continuer à faire ce qu'ils font depuis certainement deux ans, un minimum de deux ans, pour cacher un paquet de choses aux résidents et aux résidentes des localités puis des municipalités, puis, à un moment donné, arriver avec le couteau, avec la massue puis leur sacrer ça sur la tête, puis leur dire: Dorénavant, c'est comme ça que ça marche, nous, on ne paie plus; c'est vous autres qui allez payer...

Tout ça pour vous dire, M. le Président, que si on continue d'agir de cette façon-là l'ensemble de l'économie régionale et l'ensemble de l'économie locale de beaucoup de municipalités du Québec vont en prendre pour un coup. Et il y a des citoyens et des citoyennes qui, aujourd'hui, paient des taxes foncières municipales et des taxes foncières scolaires qu'ils n'auront plus le moyen de payer. Vous allez voir, au cours des prochains mois et des prochains deux ou trois ans, les faillites et, vous autres, vous aurez été les responsables de tout ça, parce que les gens ne pourront pas payer des services que vous leur imposez. Les gens ne pourront pas payer pour faire la différence entre les subventions qui étaient d'ordre gouvernemental mais qui ne seront plus là et où ce sont les locaux, encore une fois, qui prendront les responsabilités, qui devront prendre la relève. il y a tout de même des limites, m. le président, à voir nos régions se faire déboussoler, se faire désorienter au niveau économique et ce, de toutes les façons possibles par un gouvernement qui se fout éperdument de ce qui se passe dans les petits centres et dans les régions du québec et, en particulier, dans des régions isolées et éloignées. vous irez voir les quelques municipalités de la basse-côte-nord du golfe saint-laurent entre kégaska et blanc-sablon qui sont complètement isolées du territoire québécois; aucune route, seul le transport maritime durant l'été, le printemps et l'automne; l'hiver, l'été et le reste de l'année, c'est vrai, le transport aérien, mais à quel coût, m. le président? vous irez voir ces pêcheurs, parce qu'il y a à peu près 80 % de la population qui vit de la pêche qui, depuis la présence de ce gouvernement-là, en passant, encore une fois, où on voit plus de 2000 emplois perdus dans les usines du québec depuis maintenant plus de cinq ans... près de 2000 emplois perdus au niveau des pêcheurs eux-mêmes et des aide-pêcheurs depuis les cinq ans de présence de ce gouvernement-là. mais quand vous arrivez dans une municipalité, que ce soit kégaska ou la tabatière qui vit seulement de pêcheries, où les gens devront payer des taxes que vous leur imposez vous autres mêmes et qui sont sur l'assurance-chômage au moment où on se parle parce qu'il n'ont pas commencé à pêcher et qui vont être sur l'aide sociale au cours de l'automne et peut-être avant l'automne, vous irez leur demander de payer des taxes foncières et des taxes sur les égouts et les aqueducs, vous irez leur demandez ça. vous leur demandrez aussi qui a pris la décision d'en arriver là. vous leur demanderez aussi de quelle façon vous allez régler leurs problèmes au niveau local, parce que ces gens-là ne seront pas capables de rencontrer les responsabilités qui

leur sont imposées par un gouvernement libéral, incapables de passer à travers. Ces gens-là vont perdre leur maison et je ne suis pas sûr que le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue n'avait pas raison tout à l'heure lorsqu'il parlait du fait que votre gouvernement avait l'intention de fermer certains villages, surtout des petits villages de certains territoires québécois. Je ne suis pas sûr qu'en arrière de votre tête vous ne voulez pas faire ce que vous avez fait sur la côte sud, avec Dignité 1, Dignité 2 et Dignité 3, rappelez-vous-en.

J'ai l'impression, tout comme le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, qu'il est possible qu'en arrière de votre tête, sans le dire à personne, vous ayez peut-être des intentions d'aller fermer certains villages, surtout des villages qui sont isolés et qui coûtent en quelque sorte des sous au gouvernement du Québec parce qu'il y a des services de transport qui sont désuets, parce qu'il y a des services routiers qui n'existent pas et où le gouvernement devra, éventuellement, faire en sorte de débourser les fonds nécessaires pour régler les problèmes de ces localités et des personnes qui y résident.

M. le Président, je voudrais conclure en disant que c'est avec plaisir que je voterai contre ce projet de loi. Et si je le fais, je ne le fais pas en mon nom personnel, mais je le fais au nom de l'ensemble des citoyens et des citoyennes du comté de Duplessis, n'en déplaise à n'importe quel député libéral de cette l'Assemblée nationale. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Duplessis. Nous sommes toujours sur la motion de l'adoption du principe du projet de loi 145, et je reconnais Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière. Mme la députée.

Mme Denise Carrier-Perreault

Mme Carrier-Perreault: Merci, M. le Président. Effectivement, nous en sommes à l'adoption du principe du projet de loi 145, le projet de loi qui modifie diverses dispositions législatives concernant les finances municipales. C'est effectivement le projet de loi qui vient concrétiser le projet déposé par le ministre, le 14 décembre dernier, intitulé "Partage des responsabilités Québec-municipalités: vers un nouvel équilibre", ce qu'on appelle communément aujourd'hui un peu partout, la réforme Ryan, M. le Président. C'était un beau titre, "Vers un nouvel équilibre". Cependant, quand on regarde le projet de loi et quand on regarde la façon dont c'est fait, on peut se poser beaucoup de questions sur cet équilibre justement dont il est question. (22 h 30)

J'ai entendu de mes collègues et, tout à l'heure, je l'entendais encore, plusieurs disent que le ministre des Affaires municipales est vraiment choyé par son premier ministre quand il s'agit de faire des jobs de bras, entre guillemets, quand il s'agit de faire le sale boulot comme on dit, de refiler la facture tant au niveau des commissions scolaires - on a vu l'an dernier, M. le Président - que ce qu'on voit cette année au niveau des municipalités. Or, j'ai entendu plusieurs personnes dire qu'au fond c'est dommage, le pauvre député d'Argenteuil, le pauvre ministre des Affaires municipales, en quelque sorte fait pitié, M. le Président.

Eh bien, je suis contente de voir qu'il y a des gens qui peuvent avoir autant de pitié si l'on veut pour le ministre, mais personnellement je regrette de ne pas partager ce sentiment parce que je suis convaincue que le ministre, le député d'Argenteuil, est un député senior, un ministre senior, qui a beaucoup d'influence au sein du Conseil des ministres. Je suis persuadée que, dans les décisions gouvernementales, le député d'Argenteuil a son mot à dire. Je suis persuadée qu'il les partage et qu'il influence justement aussi le Conseil des ministres. Quand je dis ça, M. le Président, ou si je me permets un jugement pareil sur l'influence possible du député d'Argenteuil au sein de son parti, au sein de son gouvernement, c'est que je regarde les événements du dernier congrès libéral que j'ai suivi. On a vu très clairement, à ce moment-là, M. le Président, l'influence importante du député d'Argenteuil, du ministre des Affaires municipales, pas seulement au Conseil des ministres, mais sur l'ensemble de son parti politique. Alors, moi, M. le Président, je conviens que le député d'Argenteuil, le ministre des Affaires municipales fait effectivement le sale boulot, mais je ne suis pas convaincue qu'il ne partage pas quand même l'opinion du gouvernement en ce qui a trait à ce genre de projet de loi.

Le projet de loi 145, c'est un fourre-tout. C'est une série de mesures qui viennent ouvrir des champs de fiscalité ou des surtaxes, des possibilités nouvelles aux municipalités d'aller chercher de l'argent pour pouvoir payer la facture qui leur est refilée par le gouvernement du Québec. En simple ou en clair, c'est à peu près ça. Des mesures qui sont disparates, toutes sortes de mesures un petit peu, quelquefois même, je dirais étonnantes. C'est ce projet de loi qui permet aux municipalités d'imposer une surtaxe sur les immeubles non résidentiels, sans pour autant abolir la taxe d'affaires qui va permettre d'aller chercher plus d'argent chez les gens d'affaires dans les municipalités.

Ce projet de loi instaure aussi une contribution des automobilistes au transport en commun, un montant de 30 $, une contribution qui sera perçue, évidemment, par la Société de l'assurance automobile à compter du 1er janvier auprès de ceux qui ont des voitures et qui ont à payer des droits d'immatriculation dont l'adresse est comprise dans la liste des villes qui est elle aussi en annexe du projet de loi. 194 municipalités au Québec, rien de moins, se voient ainsi,

pour les propriétaires de voitures, charger 30 $ supplémentaires pour combler les déficits ou les problèmes des sociétés de transport en commun. 194 municipalités qui totalisent 70 % de la population québécoise. Donc, la grosse majorité de la population québécoise, propriétaire de voitures aura à débourser 30 $ supplémentaires.

Moi, personnellement, je trouve ça assez surprenant de voir ce genre de mesure là qui nous arrive dans ce projet de loi, quand je pense, entre autres, à l'an dernier, au siphon-nage, bon, à la Régie de l'assurance automobile qui est devenue la Société de l'assurance automobile par le même fait, et on a vu que le gouvernement s'est empressé, durant l'été, d'augmenter les permis, les enregistrements, pour avoir plus de fonds, effectivement au niveau de la Régie. Au mois d'avril dernier, lors du dépôt du budget, le ministre des Finances était très heureux, M. le Président, de nous annoncer et d'annoncer aux contribuables - et je me souviens que dans cette Chambre les députés libéraux, les députés ministériels ont beaucoup applaudi la mesure, ont trouvé ça très intéressant, une très bonne mesure et le ministre était très content de l'annoncer - il nous disait que les contribuables québécois paieraient 14 $ de moins cette année.

Là on était au mois d'avril, M. le Président, au mois d'avril. Alors les gens ont dit: Bon, bien, ça va nous coûter 14 $ de moins. Et quelques semaines plus tard on dépose un projet de loi, projet de loi qu'on a en face de nous présentement, qui vient chercher... une augmentation de 30 $ chez 70 % de la population québécoise. On va augmenter ces frais-là, on va chercher 30 $ de contribution, récupérée, encore une fois, par la Régie pour mettre dans le transport en commun. C'est assez compliqué comme tricotage là et ça démontre une... En tout cas, moi, dans mon esprit, ça démontre une certaine improvisation. On augmente, on coupe et on réaugmente les frais. En tout cas, disons qu'à tout le moins c'est assez étonnant, et il n'y a pas eu comme une grosse réflexion à ce sujet-là parce qu'il me semble que c'aurait été plus simple d'oublier ces 14 $ au mois d'avril plutôt que de faire des affaires comme ça aux contribuables du Québec.

Dans ce projet de loi, comme je vous le disais tout à l'heure, on donne des moyens aux municipalités d'aller chercher l'argent que le gouvernement n'a pas eu le courage d'aller chercher lui-même pour payer les factures que le gouvernement, lui, par exemple, refile. On parle des routes. Il y a eu des choses, il y a eu des aménagements qui ont été faits, bien sûr, pour les transferts des routes parce qu'on sait que les routes au Québec, gros problème, ont été négligées et, maintenant, on voudrait transférer aux municipalités une grande partie, évidemment, de ces routes-là qui ont été négligées. Là, il y a eu des accommodements de faits; on a décidé de couper un peu la facture, mais il en reste encore pour un bon montant et ces routes-là sont toujours en aussi piteux état.

C'est un projet de loi qui permet aussi au gouvernement d'aller chercher de l'argent. Comme je vous le disais, on transfère des factures, alors on va chercher de l'argent par là aussi. On va chercher de l'argent au niveau des services policiers. On va faire payer les municipalités qui ont au-delà de 3000 de population. On va aussi couper des "en lieu" de taxes. Les écoles du Québec, il y en a partout, dans à peu près toutes les municipalités. On sait qu'avant, on donnait un montant et on coupe de moitié ce montant-là et c'est très clair, le projet de loi fait en sorte que les compensations tenant lieu de taxes payées par le gouvernement à l'égard des écoles primaires et secondaires soient, à compter du 1er janvier 1992, calculées en fonction de 25 % du taux global de taxation de la municipalité plutôt que 50 % de ce taux. Donc, coupure. On coupe en deux les revenus des municipalités dans ces revenus-là qui sont déboursés par le gouvernement. Gain net, encore une fois, du gouvernement.

On parle aussi des raffineries et là, au niveau des raffineries, on dit très clairement: Le projet de loi précise quels immeubles des raffineries de pétrole doivent être portés au rôle d'évaluation et quelle est la valeur imposable de telles raffineries. Des raffineries, M. le Président, au Québec, il n'y en a pas dans toutes les municipalités. Il y en a, je dirais même, dans très peu de municipalités. Cependant, dans le comté que je représente à l'Assemblée nationale, dans une ville qui est maintenant, en tout cas, qui a pris pas mal de place au niveau de l'opinion dans les derniers temps, je parle de Saint-Romuald, il y a une raffinerie. Je recevais justement une lettre de la municipalité de Saint-Romuald dénonçant justement ce fait-là. C'est un tout petit article. On vient jouer dans un article, l'article 65.1 et, dans cet article-là, la municipalité que je représente, la municipalité de Saint-Romuald, s'adressait au ministre, a demandé même d'être rencontrée, a fait des représentations auprès de l'Union des municipalités pour dénoncer le fait, justement, que cette mesure au niveau des raffineries aurait pour effet de faire perdre à la ville de Saint-Romuald près de 30 000 000 $, M. le Président, en évaluation et amènerait à très court terme une réforme en profondeur de l'article 65, obligeant le gouvernement à parsemer ici et là des mesures d'exemption fiscale dans le domaine industriel.

En fait... Et ça continue et, quand même, je pense que la ville de Saint-Romuald a expliqué très clairement le problème auquel elle fait face. C'est quand même important, une perte de 30 000 000 $ au niveau de l'évaluation. Je ne sais pas si... On pourra sûrement en discuter en commission parce qu'il y a d'autres municipalités, même si elles ne sont pas nombreuses, qui sont aux prises avec les mêmes problèmes. (22 h 40)

On dit: "En plus de proposer un nouveau partage fiscal que les municipalités du Québec ont, jusqu'ici, globalement rejeté, le ministre des Affaires municipales propose une modification en profondeur du régime fiscal des raffineries de pétrole, en traitant non seulement des immeubles qui doivent être portés au rôle, mais en fixant arbitrairement la valeur imposable des réservoirs." On peut s'interroger parce que, effectivement, pourquoi les raffineries de pétrole? Ça semble évident et il semble aussi évident aux citoyens de Saint-Romuald que si le gouvernement du Québec permet la réouverture d'un régime de taxation industrielle en commençant, comme il le fait par ce projet de loi, par les raffineries, il devra peut-être en faire autant avant longtemps pour les grands complexes, les autres grands complexes industriels du type papetières, sidérurgie, aciéries, alumineries et j'en passe, M. le Président.

Donc, ce petit article-là, tout simple, qui touche les raffineries, je conviens qu'il ne touche probablement pas l'ensemble de la population du Québec, mais touche de façon importante les citoyens de Saint-Romuald.

Quand je parlais tout à l'heure des 194 municipalités, j'ai regardé, moi aussi, les municipalités qui ont été touchées. Évidemment, la première chose qu'on fait, et j'imagine que la majorité des députés dans cette Chambre ont eu le même réflexe que moi, tout de suite, on va voir si nos contribuables sont touchés par cette mesure-là. C'est tout à fait légitime d'aller voir ça. Je me rends compte que les neuf municipalités du comté des Chutes-de-la-Chaudière, même s'il n'y a que trois municipalités qui ont le transport en commun, et je suis persuadée... J'ai regardé la liste des autres parce que je ne suis quand même pas si égoïste que ça, j'ai quand même feuilleté et j'ai regardé la liste assez exhaustive des municipalités. Je suis persuadée que ces gens-là n'ont pas de transport en commun, M. le Président. Pour une bonne partie de ces gens-là, on n'a pas de transport en commun.

Chez nous, dans le comté des Chutes-de-la-Chaudière, seulement trois municipalités ont le transport en commun: Charny, Saint-Romuald, Saint-Jean-Chrysostome, par rapport à la société de transport qui va aller chercher ces fonds-là par après qui vont lui être transférés, en fait, par la Régie de l'assurance automobile. Mais les autres municipalités du comté que je représente, celles qui ont un transport en commun, ont organisé chez elles un transport en commun privé. C'est eux autres qui font tourner leur transport en commun et qui déboursent pour ça. Ce n'est pas une société subventionnée de transport en commun.

Pourtant, M. le Président, la municipalité de Bernières qui n'a pas ce transport en commun, la municipalité de Saint-Nicolas, la municipalité de Saint-Rédempteur qui a un transport en commun privé comme Saint-Nicolas, la municipalité de Sainte-Hélène-de-Breakeyville, Saint-Lambert-de-Lauzon qui est la municipalité qui est en quelque sorte la plus rurale de mon comté, qui a 3000 habitants et qui devra, elle aussi, débourser 30 $ pour son immatriculation pour servir à combler les écarts au point de vue des budgets de la compagnie de transport en commun qui est subventionnée. Chez nous, chez le Réseau Trans-Sud ou la CITRSQ du côté de la rive nord. Et il y en a seulement huit de toute façon, c'est très clairement indiqué, qui auront ces redevances qui sont récoltées par la SAAQ, qui leur seront remises.

M. le Président, mon collègue de Duplessis, tout à l'heure, faisait état que les contribuables du Québec n'en peuvent plus de payer que les contribuables du Québec se sentent égorgés, se sentent étouffés par toute cette avalanche de taxes et d'impôts qui leur tombent sur les épaules, qui leur tombent sur le dos. Ils ne sont plus capables de boucler quasiment les budgets et, à chaque semaine, arrivent des nouveautés dans ce domaine-là, des nouvelles taxes. J'ai fait, moi aussi, quelques visites. Moi aussi, M. le Président, je trouvais ça important d'aller voir comment ça se vivait ailleurs parce qu'on a chacun notre comté, nous autres, ici à l'Assemblée nationale. On sait à peu près ce qui se passe dans nos comtés. Mais je pense que c'est important de faire le tour parce que ces mesures-là ne se vivent pas nécessairement de la même façon partout.

C'est un fait qu'en Gaspésie, - je suis allée à Matane - les gens vivent difficilement cette avalanche de taxes, n'ont pas d'emploi; le taux de chômage est très élevé. Le développement régional ne se fait pas. Est-ce que vous croyez que ce genre de mesure-là, ce genre de taxes qui vont leur arriver, cette fois-ci, par leur municipalité je veux bien croire, mais qui sont pelletées par le gouvernement provincial, on ne peut pas en sortir, ça va améliorer la situation dans ces régions-là où les gens ont de la misère à arriver? Moi, je suis convaincue que non.

Je pense que c'est un projet de réforme qui est inacceptable. Il remet en cause les principes mêmes de l'organisation sociale municipale, en plus de venir imposer un fardeau fiscal intolérable aux contribuables.

M. le Président, le ministre jouit d'une certaine crédibilité. C'est un ministre qui semble... En tout cas, beaucoup le trouvent intègre, pensent que c'est un ministre qui a un sens aigu de la démocratie. Moi-même, pour avoir travaillé dans le dossier de la fusion Saint-Romuald-Saint-Jean, j'ai pu constater que le ministre avait effectivement un sens aigu de la démocratie. Il a ordonné un référendum à Saint-Romuald, chez nous, parce que, justement, le ministre nous disait qu'il était enclin à favoriser ce dossier-là, mais qu'il avait remarqué qu'il y avait des foyers d'opposition et qu'il ne pouvait pas prendre une

décision comme celle-là. Il ne pouvait pas prendre la décision d'aller à l'encontre de certaines personnes. Il voulait être sûr de son coup, que le dossier fasse l'unanimité dans la population.

M. le Président, j'en suis, mais si le ministre veut garder cette crédibilité, cette réputation de personne très fortement démocratique et très intègre, je pense que le ministre devrait peut-être essayer de faire la même chose avec son projet de réforme. J'entendais qu'il y a eu des motions qui ont été déposées en Chambre. On a demandé une motion de report. J'entendais justement mon collègue de Laviolette qui disait l'autre fois: Le ministre devrait, effectivement, faire un référendum, demander à la population si elle est d'accord avec ce projet de loi, parce que ce n'est pas seulement les municipalités, M. le Président.

Les municipalités sont un outil dans ce projet de loi-là. Ce sont les contribuables qui auront à assumer la facture en bout de ligne. C'est toujours le contribuable qui paie. Alors, moi je pense que le ministre, s'il veut maintenir cette réputation de sens démocratique et d'intégrité, devrait en appeler à la population, parce que dans le cas qui nous intéresse, dans le cas du projet de loi 145, M. le Président, je suis persuadée que le ministre des Affaires municipales a sûrement constaté des foyers très très importants, M. le Président, d'opposition à son projet de réforme.

Et je pense qu'il pourrait aller plus loin et consulter l'ensemble des contribuables qui vont avoir à payer pour ce projet de loi qui est, effectivement, fortement décrié par la population. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière. Je reconnais maintenant le prochain intervenant, M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition officielle.

Une voix:...

M. Pagé: Pouvez-vous lui rappeler que la loi sur la fiscalité est passée au...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, la parole est à vous.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président. On va la prendre. Ça fait une arrivée quand même assez rapide. Mais très sérieusement, M. le Président, je pense qu'effectivement, c'est un projet de loi qu'on ne peut pas passer sous silence, compte tenu des principes qui sont mis en cause et je n'ai pas l'impression, à ce moment-ci, M. le Président, que je vais vous faire de très grandes révélations ou je vais faire de grandes révéla- tions parlementaires, mais je vais avoir au moins la prétention que, d'après moi, il y a quelques principes qui n'ont pas du tout été élaborés, qui n'ont pas du tout été abordés dans ce projet de loi là.

On pourrait bien revenir sur la bataille de chiffres, mais au-delà... Vous n'aurez pas l'orateur pour ça, pour des raisons de choix. On pourrait revenir sur la méthode qui a été privilégiée par ce gouvernement-là pour faire ce qu'il a fait avec les municipalités. Et encore là, je pense qu'on en a parlé tellement de fois. J'avais eu l'occasion, M. le Président, dès le dépôt des intentions du gouvernement et du ministre des Affaires municipales, d'écrire au ministre des Affaires municipales pour lui dire combien je trouvais qu'il s'agissait là d'une réforme qui avait semé consternation, déception, malaise, inquiétude dans les villes et les localités rurales à peu près de tout le Québec.

Il s'agit, M. le Président, au niveau de la méthode d'une façon impromptue, cavalière, irrespectueuse d'une vieille tradition d'échange normal avec les élus du monde municipal qui auraient voulu, effectivement, s'impliquer davantage dans cette réforme. Et ça adonne bien, je n'ai pas le temps, mais je pourrais juste regarder mon courrier... Sur l'avion, je le regardais et c'est la première en 15 ans... J'ai ça toutes les semaines, une série de pétitions de gens de petites communautés qui trouvent que c'est du sans précédent cette attaque, appelons les choses par leur nom, hypocrite, très irrespectueuse des élus, de ce gouvernement-là sans du tout pour une fois aborder les principes qui sont en cause.

Moi je ne peux pas vous parler longuement du transport en commun, pas parce que je ne veux pas, pas parce que je ne peux pas, mais j'aime mieux toucher deux autres aspects plus fondamentaux de la réforme, les coûts de police et les coûts de voirie tertiaire, et parler des iniquités que ça va créer, des injustices que ça va créer et de cette espèce de non-analyse de responsabilité qui a été faite par le gouvernement. (22 h 50)

Sur le transport en commun, je ne dirai que deux choses. Un gouvernement qui se désengage progressivement de ses responsabilités au niveau du transport en commun, c'est un gouvernement qui n'a pas compris son rôle, comme gouvernement. Se préoccuper de transport en commun, c'est une responsabilité de société, parce qu'il y a une ligne de direction dans l'encouragement ou le désencouragement du transport en commun. Quand on encourage des usagers à utiliser le transport en commun, c'est qu'on a acquis la conviction qu'il s'agit là d'un mode de transport plus écologique qui doit être encouragé pour contrer les effets nocifs de ce qu'on a toujours appelé l'étalement urbain.

Je vois le ministre de l'Éducation. On en vit, des problèmes d'étalement urbain ici même à

Québec, avec des fermetures d'écoles. On donne une subvention de 15 000 000 $ pour construire des écoles et on en ferme quatre. Avec la bataille de la population, on va peut-être bien en sauver deux et il y en a deux qui vont demeurer ouvertes. Si c'est faire du développement intelligent... Je pense que le monde rural a compris que ce n'était pas une façon de faire du développement intelligent. Donc, le transport en commun, moi, je pense qu'une société qui se sort de ça, c'est qu'elle donne le signal que, pour elle, la société versus son gouvernement, ce n'est pas une priorité, et je ne peux pas être d'accord avec un tel principe.

Je veux revenir sur les deux principes qui sont le plus mis en cause. Je suis étonné que le ministre des Affaires municipales, qui, en tout cas, jadis, était quelqu'un de principe, n'ait pas du tout abordé ces deux questions fondamentales d'injustice chronique pour les petites communautés. Première question: Est-ce qu'il aurait été logique de permettre de débattre la question du coût des services de sécurité publique qu'on appelle communément les services de police, aux petites communautés, en considérant que l'indice de criminalité n'est pas du tout le même dans des communautés de 100 âmes - comme j'en ai plusieurs - dans des municipalités de 500 de population, quand on sait qu'au Québec il y a à peu près 750 à 800 communautés qui ont moins de 800 de population? Moi, je voudrais surtout parler pour ces gens-là.

Encore là, s'il avait eu l'occasion de s'acquitter de toutes ses responsabilités et de suivre la commission Bélanger-Campeau, il aurait été obligé d'entendre le cri d'urgence du monde rural qui disait: Vous êtes en train, comme gouvernement, de nous empêcher de nous développer. Vous en train de fermer systématiquement des paroisses rurales au Québec, par vos politiques. Et ce qu'il y a de pire, c'est que c'est exact. C'est vrai, ce gouvernement-là est en train, systématiquement, de fermer des communautés rurales parce qu'il veut copier l'Ontario, mais n'a pas le courage de le faire ouvertement au vu et au su de tout le monde et de dire: Nous, on pense qu'il y a trop de municipalités rurales au Québec et, en conséquence, on doit en fermer.

Et là, je reviens à ce que je veux illustrer. Moi, une municipalité comme. La Reine, une municipalité comme Saint-Lambert, une municipalité comme Dupuis qui me dit: M. Gendron, croyez-vous qu'il est logique qu'on nous impute des coûts de police, alors qu'on n'a jamais eu l'occasion d'en discuter avec qui que ce soit? On est un élu, on est des autorités élues au même titre que vous, M. Gendron, au même titre que le ministre des Affaires municipales et jamais on n'a eu l'opportunité de discuter: Est-ce qu'il est logique, dans des petites communautés, d'assumer un coût de police au prorata ou per capita, de la tête de pipe, pour, disons, toutes les municipa- lités de 3000 et moins? On divise, on fait une opération comptable sous prétexte que ces gens-là aiment la comptabilité et savent balancer les colonnes, alors qu'on se rend compte que c'est archifaux. Plus ça va, pire c'est. On a un déficit de 3 500 000 000 $ sur des mauvais estimés; ça va être 4 500 000 000 $ parce qu'ils ont mal calculé toutes sortes d'affaires. En ne gérant pas et en laissant traîner des affaires, ça coûte cher; on l'a vu avec la crise autochtone, on le voit encore, avec des coûts de 50 000 $ par jour, mais ce n'est pas grave. Ce n'est pas grave, ce sont des balanceurs de colonnes et ils connaissent ça, eux autres, la gestion des affaires publiques. On n'a jamais vu un gouvernement aussi lamentable, sur le plan des décisions et sur le plan de la situation, de la crise, parce que ça éclabousse de partout.

Je reviens à mon exemple. Pensez-vous que c'est démocratique de dire aux petites communautés: Dorénavant, que tu en aies besoin au pas, que tu aies eu l'occasion de ne pas en discuter ou pas, voici la facture que tu vas recevoir par la tête pour payer les coûts de police, sans se poser la question: Est-ce qu'il appartient à l'État québécois de dire: Une des premières façons de développer le Québec, c'est d'abord d'occuper son territoire? Pensez-vous que les mesures, dans la réforme du ministre des Affaires municipales sont des mesures qui vont faciliter l'occupation du territoire rural? Si vous répondez à cette question-là et que votre réponse est oui, j'aimerais ça entendre vos arguments. Je suis convaincu que vous ne pouvez pas avoir d'arguments logiques pour conclure que c'est une réforme qui va dans l'esprit d'un développement de la ruralité au Québec, d'un accroissement de l'occupation du territoire québécois. Une des premières notions, comme je le disais tantôt, de développer et d'occuper son territoire, c'est d'être capable de voir les petites communautés grandir, se développer et y voir là une capacité de vivre, ce qui n'est pas le cas, parce qu'il n'y aurait pas eu urgence rurale en Gaspésie, il n'y aurait pas un cri d'alarme de l'Abitibi, il n'y aurait pas eu l'autre cri nouveau dans la région de Chandler en Gaspésie où 8000 personnes ont dit: Ça va faire, les folies, on n'est plus capable de vivre, on est écrasé de partout.

Dans la lettre que j'ai envoyée au ministre, pour laquelle je n'ai pas eu de réponse à date, mais c'est normal, il est pris par la réforme, je disais: "Votre proposition de délestage budgétaire, M. le ministre, auprès des municipalités produit le même effet, elle ébranle les solidarités naissantes entre les villes et les banlieues, entre les villes centres et les municipalités périphériques. Il s'agit, M. le ministre, d'un plan insidieux et déstabilisant, au bas duquel je n'aurais jamais osé penser que vous auriez apposé votre signature." Il faut dire que l'exemple vient de haut, il vient du fonctionnement

même du fédéralisme canadien puisque, endetté par-dessus la tête, le gouvernement fédéral se déleste sur le dos du Québec et, aux prises avec ses problèmes budgétaires, celui-ci rejette aussitôt le problème sur les municipalités et les commissions scolaires. Ne nous trompons pas, certaines parlent de la réforme du ministre des Affaires municipales, mais il n'y a rien là, il n'y a pas de réforme là-dedans, il y a un pelletage de factures, point, sous prétexte que ces gens-là ont la vérité révélée et qu'en conséquence, il est normal que tout le monde fasse sa part, comme si ces gens-là ne la faisaient pas au préalable.

Votre réforme indique davantage l'intention de votre gouvernement à gérer plutôt qu'à diriger. C'a été dit par d'autres, mais c'est important de revenir là-dessus. Ce n'est pas un gouvernement qui dirige, c'est un gouvernement qui gère le nez dans la vitre, à la petite semaine. Vous faites fi du processus démocratique en refusant un débat axé sur une véritable concertation, notion pourtant essentielle à toute politique ministérielle. La décentralisation administrative que vous invoquez dans votre réforme sert de prétexte à l'État québécois pour se désengager de ses responsabilités puisque les solutions préconisées ne tiennent pas compte - là, M. le ministre, j'aurais aimé ça vous entendre au moins une fois - d'aucune façon, des disparités réelles du territoire québécois et des multiples facettes du sous-développement auquel sont confrontées plusieurs municipalités rurales. J'ai déjà dit comme exemple...

Je prends l'exemple d'une municipalité dans mon comté, Palmarolle; elle ne trouve pas ça drôle, vos folies; elle ne trouve pas ça drôle, l'espèce de réforme qui n'en est pas une. Je suis convaincu que ça va passer; on connaît votre grande force du nombre, à part ça, vous êtes faibles, mais la force du nombre est forte, donc la réforme va passer. Est-ce que la municipalité de Palmarolle va passer à travers vos folies? Réponse: Oui. Est-ce que les municipalités de La Reine, de Dupuis, de Saint-Lambert, de Champneuf, de Despinassy vont réussir à passer à travers vos folies? Réponse: Non. La chance qui va leur arriver, elles, ça va être carrément de disparaître. C'est ça qui va leur arriver. Elles ne peuvent pas... Le ministre va dire: II y a des ajustements et ça va leur coûter moins cher. Les cantons, pour ceux qui ne le savent pas, ont tous 10 milles par 10 milles, 10 milles carrés. Un canton rural, ça a 10 milles par 10 milles.

Pour une municipalité, hériter de sa voirie tertiaire dans l'état lamentable dont les chemins sont dans certaines municipalités, ça va être absolument impossible pour 2 $, 10 $, 100 $ d'augmentation de taxes parce que les contribuables vont dire: Écoutez, à ce compte-là, on est obligé de changer de municipalité, ce n'est plus viable. Dans ce sens-là, il y a une iniquité sans précédent parce qu'on a considéré toutes les petites municipalités comme si elles étaient du même acabit pour ce qui est de la responsabilité de la voirie tertiaire. Première injustice.

Deuxième injustice grave, je l'ai dit tantôt, les coûts de criminalité n'ont jamais été analysés ni pris en compte pour voir si les coûts de police sont aussi justifiés dans une municipalité de 1500 âmes que dans une municipalité de 200 âmes. Est-ce que, dans une municipalité de 200 âmes, on a besoin de leur charger une facture per capita pour payer une partie des coûts de police? Moi, ma réponse, c'est: Non, M. le Président, parce qu'elles le font déjà à même le fonds consolidé via le niveau de taxation. (23 heures)

Si les contribuables de La Reine n'étaient pas taxés, je dirais au ministre qu'il a raison, mais ils sont taxés. Ils paient des impôts, ils paient la TPS et ils paient de l'impôt partout, sur les plaques qui ont triplé, quadruplé, quintuplé et les permis de toute nature et, en conséquence, il y a une partie de leur impôt qui est versée au fonds consolidé, qui assume les coûts de police de la Sûreté du Québec pour les 3 fois en 15 ans que la Sûreté est allée à La Reine. Mais là, avec la réforme, ce n'est plus ça. Ce n'est plus les trois fois qu'elle est allée à La Reine. Avec la réforme, dorénavant, les citoyens seront chargés au même titre que d'autres municipalités beaucoup plus à caractère urbain, avec un mini-centre-ville, alors qu'il y a certaines municipalités rurales qui n'ont pas du tout de périmètre urbain.

Qu'est-ce qui crée, règle générale, l'indice de criminalité? C'est des services de nature de milieu urbain concentré, donc, de nature de ville. Est-ce qu'on a fait ces distinctions-là? Pas du tout. Je disais au ministre: Expliquez-moi la logique de votre plan qui consiste, entre autres, à mettre fin à l'aide au financement des MRC, dans la lettre? Je disais: Je ne pense pas, M. le ministre, que les municipalités rurales accepteront une réforme faite à leur insu et qui va ironiquement à rencontre même du consensus national amorcé lors des États généraux du monde rural où l'on traçait la voie vers un nouveau projet de société. Comme gouvernement éteignoir d'orientations, c'est dur à battre parce que, au moment même où il y a un cri d'alarme du monde rural, au moment même où il y a une réflexion un peu plus poussée sur l'état d'urgence de faire quelque chose pour développer davantage les communautés rurales, ces gens-là s'inscrivent complètement à contre-courant avec une réforme qui aura comme conséquence d'écraser davantage le monde municipal et de lui rendre la vie impossible.

À titre de député d'un comté rural où j'ai 50 municipalités, je vous demande, M. le ministre, de reconsidérer votre réforme et d'orienter les démarches gouvernementales non pas vers un déplacement de responsabilités, mais plutôt vers la mise en place d'une concertation résolument orientée vers la consolidation des entités munici-

pales, afin de leur accorder une juste part des aides budgétaires pouvant permettre aux municipalités d'assumer des compétences décentralisées qui tiendraient compte de paramètres socio-économiques. Il faut de toute urgence favoriser l'occupation et le développement des territoires ruraux en faisant la promotion de nouveaux modèles de croissance économique dans le but que les régions rurales assurent leur propre richesse, avant de procéder à une réforme qui ne fera qu'accentuer le phénomène de déstructuration. Parce que c'est ça à quoi on va assister: à un phénomène de déstructuration du milieu rural, de dévitalisation, alors que tout le monde nous dit: On devrait revitaliser le monde rural, on devrait l'occuper davantage. Parce que jadis, M. le ministre des Affaires municipales, il y a des gouvernements qui ont pris des décisions et qui ont décidé de favoriser l'implantation de gens dans des communautés rurales, on a appelé ça des plans de colonisation, et ces gens-là sont en train de complètement défaire des orientations de société et de gouvernement.

Ça, il y a un coût à payer pour ça, M. le Président, et je suis convaincu que ces gens-là vont le payer. Il y a un coût politique à payer et ils doivent le payer et, moi, j'invite tous les maires de tout l'Abitibi-Témiscamingue, comme ça va être le cas, à faire payer cher le coût politique à ce gouvernement irresponsable, dénaturé, qui ne voit pas là une responsabilité de gouvernement de développer la ruralité. Parce que quand un gouvernement veut uniquement faciliter les concentrations urbaines, bon, on vit les problèmes que j'ai eu l'occasion de toucher de près à Montréal vendredi dernier, dans des poches de pauvreté grandissantes et c'est rendu qu'un ministre de l'Éducation est obligé d'annoncer des programmes d'alimentation pour s'assurer que les jeunes, avant d'aller acquérir des connaissances au niveau de l'intellect, bien, ils ont des problèmes de ventre et ils ne peuvent pas...

La connaissance ne rentre pas, parce qu'ils n'ont même pas déjeuné le matin, ils n'ont même pas dîné. Et là, le ministre de l'Éducation se déguise en ministre responsable d'une espèce de convoi d'alimentation avec de gros "kits", parce qu'on n'a pas vu comment ça va atterrir. C'est complètement aberrant comme société d'en être rendu là et ce gouvernement-là a le culot de dire aux petites municipalités: Disparaissez parce que, nous autres, ce qui nous intéresse, c'est le modèle de l'Ontario, le moins possible de municipalités, ne pas avoir le courage de le dire ouvertement, mais poser des gestes qui auront la même conséquence.

La conséquence dans quatre, cinq ans, c'est qu'il y a plusieurs petites municipalités qui n'auront plus de chemins, M. le Président, qui ne seront pas capables de payer les coûts de police qu'on leur impute et on va être obligé de hausser à nouveau les taxes comme si elles ne l'avaient pas été. Depuis un an et demi. Y a-t-il quelque chose qui a été haussé plus que les taxes de toute nature avec ce gouvernement-là? C'est peut-être le gouvernement le plus "taxeux" qu'on n'a jamais connu. C'est des millards de dollars de hausse d'impôt, contrairement à ce que le ministre des Finances disait: Nous autres, on n'a pas levé d'impôt additionnel chez le contribuable. Il faut être bien équipé pour dire des affaires de même. Tu sais, il faut vraiment être bien équipé. Il faut être équipé pour veiller tard pour dire des folies comme ça.

Une voix: II faut avoir un sens de l'humour profond.

M. Gendron: Oui, un sens de l'humour profond et il faut avoir une longévité presque indestructible en cette Chambre pour dire des choses comme ça et ne pas être reviré parce que tous les citoyens, tous les jours, ils se rendent compte que c'est complètement faux, erroné. Il s'agit d'acheter n'importe quoi et on est obligé de payer le double, le triple de ce que ça coûtait il n'y a pas longtemps.

Mais sur la réforme municipale, M. le Président... Je termine là parce que je sais qu'il y a beaucoup de choses qui ont été dites, mais il y a deux choses qui ne l'avaient pas été. Premièrement, le principe qu'il s'agit d'une responsabilité de gouvernement de redensifier les communautés rurales. Et là, ils sont en train de les "dédensifier", de dépeupler les communautés rurales et, en conséquence, l'État québécois a une responsabilité là-dedans qu'il devra payer un jour. J'espère que les élus municipaux et les élus ruraux lui feront payer comme c'est normal quand on est aussi irrespectueux d'une démarche qui avait été souhaitée par les élus municipaux d'une véritable politique de décentralisation, mais non pas l'irresponsabilité en disant: Bien, nous aussi, nos transferts diminuent, et ils continuent à défendre le régime fédéral. Mais même si les transferts fédéraux diminuent dans notre cour et au lieu d'avoir des politiques, ils se tournent de bord et disent aux municipalités: Voilà la facture que dorénavant vous devrez assumer, que ça fasse votre affaire ou non, qu'il y ait eu des débats ou non, voici le coût à payer. J'espère que les contribuables leur feront payer le coût de la facture. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition officielle. N'ayant pas d'autre intervenant, je reconnais maintenant M. le ministre des Affaires municipales en fonction de votre droit de réplique, s'il y a lieu.

M. Claude Ryan (réplique) M. Ryan: M. le Président, je serai très bref

parce que nous avons tous eu l'occasion d'entendre à peu près tous les arguments susceptibles d'être présentés au sujet de ce projet de loi. Mais, tout à l'heure, pendant que j'écoutais des discours qu'on prononçait, il m'arrivait, comme j'aime le faire chaque jour, de lire le New York Times d'aujourd'hui et je vous dirai que le premier article que je trouve dans la première page de l'édition d'aujourd'hui, à gauche, la première colonne de gauche, s'intitule ainsi: Une crise de liquidité oblige les municipalités aux États-Unis à couper les services. Là, l'article continue et je cite ceci pour qu'on apprenne à situer le débat que nous faisons dans le contexte plus large où il surgit. ce n'est pas vrai qu'on peut le comprendre seulement en regardant d'un oeil ou d'une lentille étroite les seuls problèmes immédiats auxquels nous faisons face. il faut voir le problème dans une perspective plus large. je lis ici: affaiblis par la récession et par les réductions radicales de l'aide gouvernementale fédérale et étatique, les cités et les comtés à travers tout le pays sont obligés de couper, de diminuer plusieurs des services qui les ont aidés à définir leur mission au cours des dernières décennies. on remarque que les réductions revêtent un caractère épidémique. les coupures de dépenses, un caractère d'épidémie! à honolulu, on est obligé de couper dans les réparations de chemins. à sacramento, on avait un beau projet de bibliothèque qu'on est obligé de mettre de côté. à houston, on est obligé de couper 111 lits d'hôpitaux réservés à des patients indigents. à south lake city, on est obligé de renoncer à bâtir une station de pompiers parce qu'il n'y a pas d'argent. à bridgeport, connecticut, on va être obligé de cesser de nettoyer des rues à compter du 1er janvier et on va peut-être être obligé de cesser d'avoir des gardiens sur les plages l'été prochain. pourquoi? parce qu'il y a un manque d'argent. et ce manque d'argent, il faut que vous vous mettiez dans la tête que ce n'est pas l'invention de quelque esprit pernicieux que ce soit ou de quelque méchant démon qui serait assis quelque part dans les officines gouvernementales.

Il y a un problème de contraction des chances économiques dans le monde aujourd'hui, qui sévit plus particulièrement dans les pays soit-disant développés parce qu'ils se sont donné un train de vie que leur productivité ne leur permet pas de maintenir dans les conditions actuelles. Et si ça s'applique pour les États-Unis qui sont la nation la plus puissante du monde, je pense bien qu'il faut qu'on se rende compte que ça va s'appliquer au Canada où nous ne sommes pas, et de loin, la nation la plus puissante du monde et où nous nous sommes donné dans bien des domaines, des services qui entraînent des coûts supérieurs à ceux des États-Unis. (23 h 10)

Nos coûts de main-d'oeuvre en particulier, les coûts de nos politiques sociales sont plus élevés que ceux des États-Unis, mais il faut bien se rendre compte qu'un jour ça se paie, ces choses-là. Vous avez fait, pendant des années, l'expérience de l'endettement. Nous avons hérité de votre succession. J'entendais quelqu'un, ce soir, dire - je pense que c'est le leader de l'Opposition, qui a fait un très bon discours par ailleurs - oui, mais où va cet argent-là?

Nous ne vous rappellerons jamais assez, à vous de l'Opposition, que 15 % du budget de l'année doivent aller pour payer la dette que vous avez accumulée pendant que vous étiez au gouvernement, 15 %. Si nous avions ces 15 %, nous ne serions pas obligés de procéder aussi rapidement que nous le faisons pour amener... Ce sont les faits et les chiffres, là. Vous pourrez vous lamenter, faire des plaisanteries à ce sujet-là, faire des portraits de Bonhomme Sept Heures tant que vous voudrez, mais vous ne pourrez pas effacer ces chiffres. Ils seront encore dans les annexes au discours sur le budget de l'an prochain et même si jamais vous êtes au pouvoir, ils seront encore là.

Une voix: Ils seront dans l'histoire.

M. Ryan: Alors, je vous invite à élargir vos horizons, à lire un petit peu plus la presse internationale et vous vous rendrez compte que les problèmes dont nous discutons ici, nous les avons en même temps que les autres. Nous n'avons pas le génie d'y avoir pensé, mais, au moins, on n'a pas été obligés d'attendre que les autres nous le disent, on le fait de notre propre motion, de notre propre initiative parce qu'on veut que notre société se renforce pendant qu'elle a les moyens de le faire. Alors, lisez cet article. Je pourrais continuer. Il cite le cas d'une ville aux États-Unis, Bangor, dans le Maine. Nous connaissons cette municipalité qui n'est pas tellement loin de la frontière québécoise. Il dit que, cette année, ils ont trois choix à Bangor, dans le Maine: le premier choix, augmenter les taxes foncières de 23 % et en même temps réduire les services de 800 000 $; le deuxième choix, augmenter la taxe foncière de 19,9 % et réduire les services de 1 600 000 $; le troisième choix, augmenter les taxes foncières de 13,9 % et couper les services de 3 000 000 $. Ça, c'est une ville qui a un budget de 43 000 000 $ en 1991, lequel passerait normalement à 46 000 000 $. Et j'entends le cri de la députée de Johnson cet après-midi: Là aussi, les gens en ont assez. Qu'est-ce que vous faites à ce moment-là? Vous n'avez pas dit ce que vous feriez. C'est ça qui a manqué dans les interventions du côté de l'Opposition. Pas un mot constructif.

Une voix: Ce n'est pas vrai. Moi, je l'ai dit.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'ordre!

M. Ryan: Qu'est-ce que vous avez dit?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'ordre! À l'ordre!

M. Ryan: Pardon?

Une voix: ...une proposition au ministre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Ryan: Moi, je n'en ai reçu aucune.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): s'il vous plaît! s'il vous plaît! m. le ministre, si vous voulez vous adresser à la présidence, s'il vous plaît! s'il vous plaît! s'il vous plaît!

M. Ryan: Je vous remercie de me rappeler à l'ordre, M. le Président. Alors, je vous donne l'exemple d'une ville américaine qui est très proche de nous, dont le niveau de vie se compare généralement au nôtre, mais où les coûts sont moins élevés. Ce n'est pas pour rien que les Canadiens vont faire leur marché aux États-Unis et qu'il y a des milliers de foyers canadiens qui vont faire leurs emplettes aux États-Unis le samedi et le dimanche. Pourquoi? Parce que ça coûte moins cher là-bas. Et même si ça coûte moins cher là-bas...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée, s'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Ryan: ...réagir avec vivacité, M. le Président.

Une voix: Ça leur fait mal.

M. Ryan: c'est ça, la réalité. ils vont acheter aux états-unis et aux états-unis, même s'ils sont relativement en meilleure posture que nous autres, ils sont obligés d'envisager des choix comme ceux que je viens de mentionner. vous avez compris les chiffres que j'ai mentionnés, soit 13 % d'augmentation de la taxe foncière, 19 % ou 23 % et, en même temps, des coupures de services. nous autres, qu'est-ce que nous demandons avec le programme qui est mis de l'avant, actuellement, par le gouvernement? qu'est-ce que nous demandons? nous demandons aux municipalités de prendre la responsabilité de services qui relèvent de leur compétence à n'en point douter - et personne de l'autre côté ne l'a mis en doute - pour une valeur qui représentera, tout compte fait, 3,5 % des dépenses totales des municipalités pour l'année 1991. c'est ça qui est la vraie dimension de la proposition gouvernementale. comparé à ce que je lisais dans le new york times aujourd'hui, bien, vous vous dites: c'est vrai qu'il y a une bande de chiâleux au québec, c'est vrai. il n'y a pas beaucoup de gens qui sont prêts à faire face à leurs responsabilités, surtout nous autres, les hommes et les femmes qui sommes en politique. Nous avons la responsabilité "tell it like it is", de dire les choses comme elles sont aux gens et les gens vont les comprendre. Moi je l'ai dit cet après-midi, j'ai fait l'expérience avec mes concitoyens, j'ai fait l'expérience avec les maires, de nombreux édiles municipaux dans le comté d'Argen-teuil qui sont aussi bons que ceux de n'importe où ailleurs, entre parenthèses. Quand on explique les choses clairement, au lieu de dresser des épouvantails comme j'ai entendu l'Opposition le faire, les gens disent: C'est vrai, c'est vrai. Est-ce qu'il y a quelqu'un de l'autre côté qui a dit une seule fois pendant le débat: Si les municipalités voulaient redresser leurs manches, se mettre à table avec le gouvernement pour prendre le problème des finances publiques au Québec, à bras-le-corps, dire: Ensemble, on va essayer de le résoudre... On n'a pas entendu ces choses-là, on n'a pas entendu ce langage-là. C'est un langage électoraliste qui s'applique à aller chercher des appuis faciles. Ils ne les trouveront pas quand arrivera le moment de vérité, quand arrivera le moment de faire face à la réalité directement. Les appuis ne seront plus là parce que les gens auront compris entre-temps que ce qui leur est demandé, c'est un effort civique, très élevé.

Des voix:...

Une voix: À l'ordre! À l'ordre!

M. Ryan: On dit qu'il n'y a pas eu de discussion. Ça fait six mois. On est rendu que ça fait sept mois. Les propositions gouvernementales pour le transport en commun, quand est-ce qu'elles ont été annoncées pour la première fois? Est-ce qu'on s'en souvient, de l'autre côté? Le 26 avril 1990. Je vois que vous avez manqué du temps. On respecte, je le sais et je ne vous accuse pas, mais je vous rappelle juste ça, l'histoire a continué pendant ce temps-là et la première fois que la proposition gouvernementale fut clairement et explicitement énoncée en cette Chambre, ce fut le 26 avril 1990 par le ministre des Finances. Que faisiez-vous aux temps chauds? Vous dansiez? Vous n'avez rien fait pour apporter des éléments de réponse au problème. Le temps a couru. S'il avait fallu vous écouter, on attendrait encore jusqu'à l'été prochain. L'été prochain, on se repose encore et après ça on passe à d'autre chose et on remet encore à l'autre année. Pendant ce temps-là, le Québec s'enlise tranquillement dans la dépendance, pendant que vous parlez d'indépendance. C'est ça qui est ridicule, profondément ridicule. Vous ne ferez jamais l'indépendance sérieuse tant que vous cultiverez une mentalité de dépendance chez les citoyens. C'est le premier mouvement vers la véritable indépendance ça, que les gens soient

maîtres de leur portefeuille, à commencer par les organismes publics.

Or, ce que nous demandons aux municipalités - j'ai donné les véritables dimensions et je défie qui que ce soit de l'autre côté, même des porte-parole du monde municipal, de prouver le contraire - ça équivaut à 3,5 % d'accroissement. Le fardeau de dépenses auquel font face, cette année, les municipalités, c'est 7 500 000 000 $ en tout. Je vais vous dire une chose: ça représente à peu près 20 % du budget total du gouvernement: 20 % du budget total du gouvernement. Et combien demandons-nous aux municipalités d'assumer directement? À peu près 250 000 000 $. Notre déficit, cette année, de combien est-il? Il est de 3 500 000 000 $. Alors, 250 000 000 $ sur 3 500 000 000 $, combien ça fait? Ça ne fait même pas 10 %. Ça fait à peu près 7 %. C'est ça qui est demandé. Et vous allez prétendre qu'il y a un scandale là-dedans? Vous allez prétendre qu'il y a toute une affaire qui dépasse toute proportion raisonnable? Voyons donc! Apprenez à compter. Apprenez que, quand il y a deux zéros, ce n'est pas quatre et, quand il y en a quatre, ce n'est pas deux non plus.

Des voix:...

M. Ryan: On a discuté, on a trouvé des éléments de solution...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre, veuillez vous adresser à la présidence. Ce n'est pas un débat entre les deux côtés. Je vous écoute. S'il vous plaît, madame.

M. Ryan: ...d'avoir manqué le bateau. Ils veulent embarquer dans le concert vers la fin...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le Président... M. le ministre - je vous appelais "M. le Président" - je m'excuse. Si vous voulez poursuivre votre intervention en droit de réplique.

M. Pagé: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Je trouve tout à fait pertinent que vous demandiez à mon honorable collègue le ministre des Affaires municipales de s'adresser au président. Je suis pleinement d'accord avec vous. Cependant, pourriez-vous indiquer aux membres de l'Opposition qu'ils ne doivent s'adresser à personne?

Des voix: II pose des questions, on lui répond.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député. M. le leader du gouvernement, le ministre doit s'adresser à moi, mais il ne faut pas susciter de débat, M. le ministre. Je suis prêt à entendre M. le ministre des Affaires municipales. Si vous voulez poursuivre votre intervention, en fonction de votre droit de réplique.

M. Ryan: M. le Président, on a affirmé - puis le député d'Abitibi-Ouest est un de ceux qui l'ont fait - que la réforme définie dans le projet de loi 145 aura des effets désastreux sur les petites municipalités. Attendons la fin de l'histoire. Nous avons annoncé des ajustements importants au cours des dernières semaines. Nous sommes en train de faire les dernières simulations qui permettront d'en mesurer les effets exacts sur chacune des 1500 municipalités de Québec. Et je vous assure que les effets, dans un très grand nombre de cas, ne seront pas du tout de l'ordre de grandeur que prédit l'Opposition. Il faudra, en plus, ajouter l'impact des mesures de péréquation. Dans les chiffres que nous avons mis en circulation jusqu'à maintenant par souci de transparence, que vous reconnaîtrez volontiers de l'autre côté, nous n'avons pas inclus les bienfaits de l'augmentation du programme de péréquation; nous l'avons fait à dessein parce que nous ne voulions pas faire de démagogie, mais nous vous avons réservé une surprise dont vous prendrez connaissance avant l'ajournement des travaux de la session. Et vous verrez, quand nous aurons complété l'exercice, que les effets sont beaucoup plus équilibrés, beaucoup mieux répartis que ne veut le soutenir une propagande qui s'inspire exclusivement des chiffres rendus publics en février dernier. On a dépassé ça, ça fait cinq mois déjà. Puis on a écouté, pendant ce temps-là, on a discuté, on a cherché, on a travaillé dans nos dossiers puis on arrivera avec des données sensiblement améliorées, comme c'est normal que ça se produise à l'issue d'un débat animé, comme celui auquel on a participé. Par conséquent, avant de crier à la tragédie, comme on l'a fait sans cesse au cours des derniers jours, qu'on attende de voir ces résultats puis, après ça, on se parlera de chiffres et non pas d'impressionnisme. (23 h 20)

On dit qu'on veut refiler un problème financier du gouvernement aux municipalités. Le fond va plus loin que ça, c'est que nous voulons que la responsabilité financière aille de pair avec la responsabilité des décisions. Ça, c'est un principe de fond. C'est ça qu'est le principe du projet de loi. Je ne comprends pas du tout l'opposition de nos amis d'en face de ce point de vue là parce que, sur le fond, je pense qu'ils sont d'accord avec nous. C'est une question de tactique, probablement.

Quand nous disons: Les chemins locaux, ça doit relever de l'autorité locale, est-ce qu'il y a quelqu'un, de l'autre côté, qui est sérieusement opposé à ce principe-là, sérieusement opposé au principe? Que vous me disiez que. pour certaines

régions excentriques, il faille une aide spéciale pour les aider à s'acquitter de leurs responsabilités, j'en conviens et, en matière de voirie, de nombreuses municipalités situées dans des contextes difficiles recevront l'aide du gouvernement, mais ça ne détruit pas le principe fondamental. Le principe fondamental, ce n'est pas l'aide du gouvernement, c'est la responsabilité que chaque municipalité doit avoir d'assurer les services de circulation sur son territoire, en dehors des artères nationales, provinciales ou régionales. Ce principe-là, quand on le regarde sérieusement, on est obligé de convenir qu'il est sain.

La protection policière, on en a parlé à maintes reprises. Quand on demande aux municipalités d'assumer une certaine partie des services locaux, des services de base qu'elles reçoivent de la Sûreté du Québec, ce n'est pas la même chose que des services spécialisés dont bénéficient toutes les municipalités, y compris les grandes, et pour lesquels tous les citoyens sont appelés à payer une contribution relativement égale, suivant les moyens de chacun. Mais nous disons que, pour les services locaux qui devraient normalement être sous la responsabilité des autorités locales, on vous demande de payer une partie; pas tout, une partie. On a fait des ajustements. Il y avait une escalade de coûts, de tarifs qui était peut-être un petit peu abrupte, on a fait des ajustements. Il y a peut-être encore certains ajustements qui peuvent être envisagés pour les petites municipalités, justement. J'ai de la sympathie pour les municipalités. Il y a des cas, en Abitibi, que j'ai dans l'esprit. Je pourrais en nommer au député d'Abitibi, qui les connaît comme moi. Des municipalités de village qui n'ont pas de route, qui ont seulement leurs chemins de village puis qui doivent écoper d'une contribution sensible au chapitre de la police ne bénéficieront pas des adoucissements accordés au chapitre de l'entretien des routes parce qu'elles n'en ont pas. Dans ces cas-là, l'effet des mesures proposées est plus aigu. On y pense. On va trouver une solution à ce problème-là aussi. On va réussir à tempérer les effets, de manière que le principe d'équité s'applique à peu près partout.

Je voudrais vous dire que pendant ces mois nous avons écouté avec une très grande attention tout ce qui s'est dit. J'ai lu tout ce qui m'a été adressé, y compris la lettre très sérieuse du député d'Abitibi-Ouest que j'ai vivement appréciée et nous allons faire le maximum pour tirer partie de ces réflexions de manière que la réforme soit la plus judicieuse possible pour que nous entreprenions le plus tôt possible cette nouvelle étape de notre cheminement collectif qui nous apparaît, à nous du gouvernement, comme une nécessité dans le contexte actuel des finances publiques de la révision des responsabilités gouvernementales à tous les paliers, et ce, non seulement au Québec, mais au Canada, aux États-

Unis et dans la très grande majorité des pays développés du monde. Par conséquent, nous ne sommes pas seuls, nous sommes dans un train où à peu près tout le monde est obligé d'embarquer et ceux qui refusent d'embarquer paieront un prix terrible sous l'angle de leur capacité compétitive. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, vous avez une question, M. le député d'Abitibi-Ouest?

M. Gendron: Oui, M. le Président. Conformément aux dispositions du règlement qui permet une question brève, je veux savoir si l'orateur qui vient de faire sa réplique me permet une question brève.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que M. le ministre des Affaires municipales permet une question en vertu de l'article 213, conditionnellement à ce qu'elle soit brève et que la réponse soit brève également? M. le ministre, ça va?

M. Pagé: Oui.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre des Affaires municipales, est-ce que vous permettez une question? Alors, M. le député d'Abitibi-Ouest, très brièvement.

M. Gendron: Une question très brève. Est-ce que le ministre des Affaires municipales accepte que, pour des petites municipalités, au niveau du principe pour ce qui est de la voirie tertiaire, il y ait également une responsabilité du gouvernement dans la perspective de faciliter l'occupation du territoire? Est-ce que vous êtes d'accord là-dessus ou si vous dites: Ça ne nous regarde pas?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, à cette question, M. le ministre des Affaires municipales.

M. Ryan: Ma réponse est nettement affirmative. Quand le député prendra connaissance de tout l'ensemble des ajustements qui sont apportés par le gouvernement, il verra que la réponse est affirmative, non seulement en principe, mais en fait.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le ministre. Est-ce que la motion proposée par le ministre des Affaires municipales proposant l'adoption du principe du projet de loi 145 est adoptée? Vote enregistré. Alors, qu'on appelle les députés.

(Suspension de la séance à 23 h 28)

(Reprise à 23 h 36)

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il vous plaît. Je mets aux voix la motion du ministre des Affaires municipales proposant l'adoption du principe du projet de loi 145, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les finances municipales.

Que ceux et celles qui sont pour cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Portneuf), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Charlesbourg), M. Dutil (Beauce-Sud), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Rémillard (Jean-Talon), Mme Robic (Bourassa), M. Cusano (Viau), Mme Robillard (Chambly), Mme Bleau (Groulx), M. Houde (Berthier), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Chagnon (Saint-Louis), M. Hamel (Sherbrooke), M. Doyon (Louis-Hébert), M. St-Roch (Drummond), M. Paradis (Matapédia), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Leclerc (Taschereau), M. Poulin (Chauveau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Dauphin (Marquette), M. Kehoe (Chapleau), M. Fradet (Vimont), M. Richard (Nicolet-Yamaska), Mme Bégin (Belle-chasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gautrin (Verdun), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bradet (Charlevoix), M. Després (Limoilou), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Forget (Prévost), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), M. Perron (Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Blais (Masson), Mme Marois (Taillon), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour (Jonquière), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), M. Paré (Shefford), M. Claveau (Ungava), M. Morin (Dubuc), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière).

M. Libman (D'Arcy-McGee).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des abstentions? Aucune abstention.

Le Secrétaire: pour: 49 contre: 24 abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Bissonnet): La motion est donc adoptée. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Merci, M. le Président. Je vous inviterais à appeler l'article 17 du feuilleton, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (m. bissonnet): à l'article 17, m. le ministre de la justice propose l'adoption du principe du projet de loi 148...

M. Pagé: M. le Président, si vous me le permettez...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Pagé: M. le Président, je me rappelais qu'un ordre de la Chambre a été donné la semaine dernière pour que la commission parlementaire puisse siéger à compter de demain. Cependant, il serait indiqué, je crois, de réitérer la motion de renvoi du projet de loi 145, maintenant que l'étude en deuxième lecture est terminée, à la commission de l'aménagement et des équipements et, évidemment, que le ministre des Affaires municipales, qui tient à répondre à toutes les questions et à formuler certaines annonces aussi, tel qu'il l'a indiqué précédemment, puisse en être membre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Alors, je vous invite à appeler l'article 17, soit l'adoption du principe du projet de loi 148.

Projet de loi 148 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, à l'article 17, M. le ministre de la Justice propose l'adoption du principe du projet de loi 148, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires. M. le ministre.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: Oui, M. le Président. Le projet de loi que je soumets aujourd'hui, M. le Président, pour l'adoption du principe modifie la Loi sur les tribunaux judiciaires afin d'augmenter le nombre de juges à la Cour du Québec. Il prévoit porter le nombre actuel de 285 juges à 290, de manière à répondre aux besoins les plus pressants identifiés à cette cour.

Comme vous le savez, M. le Président, les juges affectés à la chambre criminelle et pénale de la Cour du Québec exercent leur juridiction à l'égard des infractions commises à l'encontre des lois à caractère pénal, tant fédérales que provinciales. En ces matières, il est primordial que les procès soient tenus dans des délais raisonnables. Les victimes ont un intérêt spécial et de bonnes raisons d'espérer que les procès criminels auront lieu dans ces délais. Par ailleurs, les accusés, tant en vertu de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne que de la Charte canadienne des droits et libertés, ont le droit d'être jugés dans un délai raisonnable. En octobre 1990, la Cour suprême du Canada, dans un appel provenant de l'Ontario, est venue préciser la notion de délai raisonnable. Dans cette affaire de nature criminelle, un délai de deux ans s'était écoulé entre l'enquête préliminaire et le procès. La cour a décidé que l'accusé n'avait pas été jugé dans un délai raisonnable et a ordonné, donc, l'arrêt des procédures criminelles.

Cet arrêt de principe de la Cour suprême a eu un impact considérable dans l'ensemble du Canada. Ainsi, en Ontario, des poursuites criminelles ont été abandonnées où les juges ont mis fin à près de 32 000 dossiers, d'octobre 1990 à avril 1991, et on prévoyait que ce nombre allait atteindre environ 50 000 dossiers criminels. Les autorités ontariennes ont entrepris des efforts de redressement considérables afin de faire face à la situation en procédant, entre autres, à la nomination de juges additionnels. Il faut cependant préciser, M. le Président, qu'au Québec la situation paraissait, jusqu'à récemment, moins préoccupante qu'en Ontario, puisque les délais d'audition, en matière criminelle et pénale, sont en général moins longs que dans la province voisine.

On ne peut toutefois pas nier que le jugement de la Cour suprême, de même que des décisions ultérieures des tribunaux du Québec, a eu des impacts importants sur l'administration de la justice au Québec. On constate en effet que, depuis octobre 1990, les tribunaux québécois ont ordonné l'arrêt des procédures dans plusieurs dossiers criminels dans certains districts judiciaires. C'est pourquoi, M. le Président, il m'apparaît important que ces mesures soient prises dès maintenant.

Vous me permettrez donc, M. le Président, de faire état de la situation qui prévaut à la chambre criminelle et pénale du district judiciaire de Terrebonne. Le nombre de dossiers qui y sont ouverts a connu une augmentation de 23 % en matière criminelle et 24 % en matière pénale depuis les quatre dernières années. Les rôles d'audience, où sont portées les causes criminelles à chaque étape de la judiciarisa-tion - je parle de comparutions, d'enquêtes sur cautionnement, d'enquêtes préliminaires et de procès - traduisent cette forte augmentation des dossiers ouverts. Ainsi, les causes criminelles portées au rôle sont passées de 16 400, en 1987, à 28 300 en 1990, une hausse de 72 %. Quant aux causes pénales portées au rôle, de 11 500 qu'elles étaient en 1987, elles sont passées à 12 300 en 1990, une hausse de 7 %.

Malgré un effort considérable consacré à l'audition de ces causes par les intervenants depuis 1987, l'encombrement des rôles a entraîné une forte hausse des délais d'audition dans le district judiciaire de Terrebonne. Ainsi, en matière criminelle, le délai moyen prévu entre l'enquête préliminaire et le procès est passé de 3 mois au début de 1990 à 9 mois à la fin de la même année. Toutefois, des mesures exceptionnelles, telles que l'ajout de 3 salles d'audition au cours du premier trimestre de 1991 et l'affectation temporaire par le juge en chef de la Cour du Québec de juges résidant dans les districts limitrophes, ont permis de réduire ce délai moyen à 45 jours en mars 1991. Quant aux poursuites pénales, ce délai s'est maintenu à 9 mois durant l'année 1990.

La situation est également préoccupante à Joliette, chef-lieu du district judiciaire du même nom. De 1987 à 1990, les causes criminelles portées au rôle sont passées de 14 000 à 21 300. Quant aux causes pénales portées au rôle, elles sont passées, pendant la même période, de 8000 à 14 600. Il s'agit là, M. le Président, d'une augmentation de 52 % pour les causes criminelles et de 87 % pour les causes pénales. Cette augmentation du nombre de causes s'est évidemment traduite par une hausse des délais d'audition en 1990. Ainsi, en matière criminelle, ils sont passés de 9 mois à 10 mois, alors qu'en matière pénale on constate qu'ils sont passés de 9 à 12 mois. Encore ici, il me faut rappeler que les efforts exceptionnels de la magistrature par l'affectation temporaire de juges ont permis de réduire les délais en matière criminelle à moins de 8 mois, 233 jours, en mars 1991. On voit donc, M. le Président, qu'il devient impérieux de résorber les délais actuels devant la chambre criminelle et pénale de la Cour du Québec.

Je voudrais maintenant, M. le Président, faire état de la situation à la Chambre de la jeunesse de certains districts judiciaires. On sait que la Chambre de la jeunesse de la Cour du Québec a compétence en matière civile, dans les instances en protection de la jeunesse et en adoption. Elle a également compétence en matière criminelle et pénale lorsque la poursuite est

dirigée contre un adolescent qui a contrevenu aux lois fédérales ou provinciales à caractère pénal. Les juges qui y sont affectés exercent des fonctions fort délicates, compte tenu qu'ils peuvent être confrontés à des situations pénibles d'enfants abandonnés, maltraités, abusés sexuellement, ou d'adolescents manifestant des troubles de comportement.

Dans la région de l'Estrie, on a pu constater, M. le Président, qu'au cours des 4 dernières années les causes portées au rôle du chef-lieu du district de Saint-François, pour l'ensemble des matières relevant de la compétence de la Chambre de la jeunesse, se sont accrues de 52 %, passant de 2375 en 1987 à 3600 en 1990. Par ailleurs, les délais d'audition en matière de jeunesse contrevenante étaient de 35 jours à Sherbrooke et de 60 jours à Cowansville et à Lac-Mégantic à la fin de 1990. De même, en matière de protection, les délais étaient de 60 jours à Cowansville et à Lac-Mégantic. la région de la montérégie compte les points de service de longueuil, saint-jean, valleyfield, sorel et saint-hyacinthe. les dossiers qui ont été ouverts tant en matière civile que criminelle et pénale ont connu une hausse de 62 % au cours des 4 dernières années, passant de 1590 dossiers en 1987 à 2570 en 1990. de ce dernier nombre, 1960 dossiers concernaient les poursuites contre les jeunes contrevenants. quant aux causes portées au rôle, elles ont connu une croissance de 32 %, passant de 3970 en 1987 à 5230 en 1990. conséquence de cette augmentation, les délais d'audition se sont accrus et, en décembre 1990, s'établissaient, en ce qui a trait aux poursuites contre les jeunes contrevenants, à 37 jours à longueuil, 59 jours à saint-jean et 41 jours à valleyfield. (23 h 50)

On conviendra facilement, M. le Président, que les délais d'audition, difficilement acceptables lorsque les personnes impliquées sont des adultes, deviennent intolérables lorsqu'il s'agit d'enfants et d'adolescents. Il est donc essentiel de les réduire le plus possible si on veut atteindre la finalité première de ces instances. En vue de corriger les situations dont je viens de faire état, il s'avère indispensable d'augmenter le nombre de juges à la Cour du Québec. C'est pourquoi le projet de loi propose de porter de 285 à 290 le nombre de postes de juges à cette Cour. Ces 5 juges devraient être affectés par le juge en chef de la Cour du Québec à la Chambre criminelle et pénale ainsi qu'à la Chambre de la jeunesse. En effet, suivant la procédure que prévoit l'article 107 de la Loi sur les tribunaux judiciaires, l'affectation d'un juge à une chambre de la Cour du Québec est déterminée par le juge en chef de cette cour après consultation du juge en chef associé responsable de la division régionale concernée. On s'assurera ainsi que les six juges nommés seront affectés là où les besoins sont les plus importants et ce, en collaboration avec le juge en chef de la Cour du Québec.

M. le Président, cette augmentation du nombre de juges de la Cour du Québec devrait s'accompagner des mesures administratives nécessaires pour en assurer toute l'efficacité. Une demande est actuellement sous étude au Conseil du trésor afin d'augmenter le nombre des postes de substituts et le personnel de soutien qui permettront la mise en oeuvre harmonieuse du projet de loi 148. L'ensemble de ces mesures, M. le Président, devrait contribuer à la réduction des délais d'audition dont j'ai fait état tout à l'heure et, en conséquence, contribuer à une meilleure administration de la justice au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de la Justice. Sur ce projet de loi 148, je reconnais Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Mme la députée.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. L'appel de ce projet de loi, presque à minuit, ce 4 juin, manifeste, illustre, en quelque sorte, et trahit le désarroi du ministre de la Justice à l'égard des événements récents qui se sont produits, surtout dans la ville de Montréal. Je fais évidemment allusion à ces libérations d'accusés de délits graves qui sont survenues la semaine passée et qui ont provoqué un tollé de protestations dans l'opinion publique et dans l'ensemble des médias d'information. Quand je dis "trahit son désarroi", M. le Président, c'est que le projet de loi 148 a été déposé, comme l'ensemble des autres projets de loi émanant du ministère de la Justice, le 15 mai dernier, et le ministre aurait très bien pu appeler ces projets de loi à une heure plus raisonnable pour nos concitoyens, pour les justiciables du Québec, qui auraient pu, d'ailleurs, plus facilement que ce n'est le cas maintenant, prendre connaissance de cet ajout de nouveaux juges à la Cour du Québec et des motifs qui président à cette décision d'ajouter des nouveaux juges.

Ça n'a pas été le cas, M. le Président. La semaine dernière, le ministre de la Justice et son gouvernement ont plutôt décidé d'appeler des projets de loi qui faisaient rentrer des fonds au ministère de la Justice. Sur l'ensemble des projets de loi déposés le 15 mai, deux étaient appelés, d'une certaine façon, en priorité, la semaine passée, et recevaient un traitement accéléré ici même, devant cette Chambre, lors de l'étude en deuxième lecture et lors de l'étude article par article en commission parlementaire des institutions, par la suite. Et ces projets de loi, M. le Président, consistaient à constituer un fonds des registres au ministère de la Justice pour financer une partie de l'informatisation des registres d'état civil, et l'autre projet de loi qui

a été appelé presque en priorité consistait à remplacer les timbres judiciaires par un autre procédé d'enregistrement. Et, conséquemment, le ministre laissait entendre une augmentation assez substantielle des tarifs, il l'annonçait d'ailleurs rétroactrive au 1er janvier 1986, pour l'ensemble des tarifs de la justice et, évidemment, il énonçait l'hypothèse de doubler les tarifs en matière familiale.

M. le Président, évidemment, ce que le ministre annonçait d'une main, en matière d'augmentation des tarifs, il était bien loin, malheureusement, de nous l'annoncer en matière également d'indexation du seuil d'admissibilité des personnes en difficulté, et qui recourent à l'aide juridique. Ça, c'est on ne sait trop quand, et si c'était très urgent de passer ces deux lois, M. le Président, je ne comprends pas que le ministre de la Justice et son gouvernement n'aient pas cru bon d'appeler, dès la semaine passée, puisque nous avons siégé à deux occasions en commission parlementaire, ce projet de loi 148 qui, de toute façon, ne comporte qu'un seul article, se lit assez aisément et s'adopte aussi facilement, M. le Président, puisqu'il s'agit, à l'article 1, de prévoir l'augmentation du nombre de juges et, évidemment, de modifier à ce moment-là la Loi sur les tribunaux judiciaires pour compter 290 juges plutôt que 285 comme c'est le cas présentement.

M. le Président, on comprendra que si c'est à minuit ce soir... On m'a dit - je ne sais si c'est confirmé - que nous allons procéder immédiatement, suite à l'adoption en deuxième lecture, à l'adoption de cet article signifiant l'augmentation du nombre de juges. Nous allons procéder immédiatement en commission plénière pour que les juges puissent être nommés dès demain, ou après-demain peut-être. Et, M. le Président, je comprends que c'est un article... Je considère que cette loi s'imposait d'elle-même, dès sa présentation, le 15 mai dernier, et je ne comprends que l'on ait retardé ce type de législation à cette heure indue des travaux de la Chambre.

M. le Président. Oui, effectivement, le leader du gouvernement et député de Portneuf nous signale qu'il n'est jamais trop tard pour bien faire. Oui, je considère, d'une façon certaine, que la présentation va être "remédiatrice" d'une omission qui doit être corrigée, mais, évidemment, elle aurait dû avoir lieu bien avant cette nuit.

Il faut comprendre que le ministre de la Justice est aux prises avec un problème d'engorgement des tribunaux, ce qui provoque un certain nombre de décisions qui sèment la consternation et, je dois dire, la désapprobation dans l'opinion publique, M. le Président. Ces problèmes étaient à prévoir depuis longtemps. Ces problèmes étaient à prévoir dès la décision de la Cour suprême, intervenue en octobre dernier, de considérer que les délais entre la comparution et le procès ne devaient pas s'éterniser. Sans que la Cour suprême ait défini un chiffre magique, M. le Président, on peut comprendre que c'est autour d'un an que tout cela doit avoir lieu, pour garantir à tout accusé, en vertu des chartes, un droit à un délai raisonnable pour son procès. C'est déjà donc en octobre dernier qu'intervenait cette décision de la Cour suprême dans un arrêt dont on entend parler maintenant et qui s'appelle l'arrêt Askov.

Ce que je crains, c'est que la loi 148 que nous allons adopter rapidement, cette nuit, ne vienne pas vraiment régler le problème de fond qui s'est présenté suite à l'adoption de l'arrêt Askov. D'abord, je veux préciser que des libérations avaient eu lieu bien avant que l'arrêt ne soit adopté. Des libérations avaient commencé à avoir lieu suite aux engorgements des tribunaux bien avant octobre dernier.

M. le Président, ce que je crains, c'est que le projet de loi 148 ne vienne pas réellement corriger cette situation - et le ministre le sait - puisque dans le cas de la décision du juge Grenier, pour laquelle il a jugé nécessaire d'aller en appel, il ne s'agit pas d'un délai créé par une vacance au niveau des juges. Le ministre sait très bien qu'il va en appel d'une décision de libération d'une personne accusée du viol d'une jeune fille de 16 ans, parce que la libération a été décidée par le juge pour un premier motif que le procureur de la couronne, lui-même, ne s'était pas présenté lors de l'audition qui était prévue. Le ministre a commandé une enquête interne sur le "cafouillage" au bureau des procureurs de la couronne à Montréal. Ce que l'on peut souhaiter, c'est qu'il rende public ce rapport interne qu'il a demandé. L'administration de la justice ne peut pas se faire en privé, M. le Président. Et les procureurs et les substituts du procureur de la couronne ont besoin que leur réputation et leur travail reçoivent la sanction de l'opinion. Et dans la mesure où l'enquête interne demandée par le ministre resterait d'ordre privé, il faut s'inquiéter du sentiment qui se propage dans la population que la justice est malade, du sentiment de discrédit qui se propage dans la population sur ces décisions qui sont considérées comme des dénis de justice, (minuit)

M. le Président, ce que je crains, c'est que, bien loin de corriger la situation, le juge en chef a fait des demandes au ministre de la Justice qui vont bien au-delà des nominations que le projet de loi va permettre de faire, en l'occurrence, la nomination de cinq nouveaux juges. Parce que, voyez-vous, M. le Président, non seulement le nombre, le volume d'affaires criminelles augmente, mais pensez qu'avec la nomination de 24 nouveaux procureurs de la couronne, assignés spécifiquement à des dossiers de drogues et des dossiers de stupéfiants, il faut comprendre que ces assignations spécialisées de procureurs à ces dossiers vont définitivement faire augmenter le

nombre de dossiers devant les cours, devant les tribunaux.

M. le Président, le ministre sait très bien que ce n'est pas avec le projet de loi 148 qui est devant l'Assemblée ce soir, cette nuit, qu'il peut réellement et adéquatement et en profondeur corriger ce problème qui devient endémique de l'engorgement des dossiers devant les tribunaux. Le ministre a jugé nécessaire d'aller en appel d'un jugement, celui du juge Grenier. M. le Président, je considère qu'il est utile que nous puissions avoir une meilleure évaluation de ce qui est considéré comme un délai déraisonnable. Je considère, M. le Président, que le ministre a raison de souhaiter faire préciser cette fameuse notion de délai déraisonnable. Il m'indique qu'il va en appel dans le deuxième procès. Alors, je dois donc comprendre qu'il aurait décidé d'aller en appel quant au jugement rendu par la juge Dubreuil. Si c'est le cas, je crois que cela s'impose également, puisque ce jugement de libération est intervenu à la fin d'un procès, juste avant que les avocats procèdent aux plaidoiries.

Il faut certainement, M. le Président, à ce moment-ci où l'opinion publique est légitimement sensibilisée à la violence physique ou à la violence sexuelle qui est perpétrée à l'égard des enfants ou de toute personne, y compris évidemment des femmes puisque c'est là une réalité dont elles sont victimes plus souvent, faire préciser cette fameuse notion de délai déraisonnable et le faire systématiquement, M. le Président, parce qu'il ne faudrait certainement pas que cela devienne un moyen de défense des procureurs que d'invoquer les délais pour pouvoir faire libérer des accusés de crimes graves. Alors, c'est évident que nous allons concourir à l'adoption du projet de loi 148. Mais, je le répète, je crains encore que le ministre, à tort, s'illusionne sur la capacité, par la nomination de cinq juges, de régler ce problème qui, je le crains, se répète comme une épidémie.

Je le crains d'autant plus qu'il a cité notamment le district judiciaire de Terrebonne. Pour m'être rendue, M. le Président, il y à peine un mois, au palais de Justice de Saint-Jérôme, j'ai pu constater que le juge qu'il avait nommé l'an passé n'a jamais pu occuper ses fonctions, étant en congé d'une maladie très sérieuse, et qu'une salle d'audience, une quatrième salle d'audience pourtant nouvellement rénovée, n'a jamais pu fonctionner de façon normale. Je dois comprendre qu'à Saint-Jérôme comme à Joliette, puisque je m'y suis rendue également, la seule façon de réduire ces délais est, présentement, de renvoyer les causes de longue durée à Montréal. Alors, c'est une situation qui ne peut pas durer, M. le Président, parce que c'est dans le district judiciaire de Montréal que le problème d'engorgement va, à ce moment-là, s'aggraver, comme ce fut le cas la semaine passée. Alors, le ministre va devoir trouver des solutions permanentes. Et ces solutions permanentes passent, non seulement par la nomination de nouveaux juges, non seulement par la nomination de substituts du Procureur, et je prenais connaissance d'une déclaration du sous-ministre Bouchard à l'effet que le ministère de la Justice devait nommer de nouveaux substituts du Procureur général... Non seulement ces nominations s'imposent-elles, M. le Président, mais sans doute faut-il examiner, plus en profondeur toute la question de l'administration de la justice au Québec.

Quand on pense que les juges de la Cour fédérale jugent à peine, me dit-on, 1 % des causes criminelles et pénales, et que la Cour du Québec se trouve entièrement engorgée par l'augmentation des dossiers, alors, M. le Président, il faut que le ministre ait un certain courage pour regarder la réalité de l'administration de la justice en face, et y apporter les correctifs qui s'imposent.

Alors, M. le Président, je terminerai cette brève intervention en rappelant au ministre que dans l'intérêt de la justice, il serait souhaitable qu'il rende public le rapport de l'enquête interne qu'il a demandée sur le fonctionnement de la couronne à Montréal. Et il serait souhaitable également qu'il envisage, de façon plus urgente qu'il avait pensé le faire en reportant lors du sommet de la justice, dans six mois, l'examen de cette question, avant que ne se multiplient les libérations d'accusés de crimes graves comme cela s'est produit la semaine passée, qu'il envisage dès le retour de la session de l'automne, des mesures qui, en profondeur, pourraient venir apporter des solutions.

Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Vous avez le droit de réplique, M. le ministre.

M. Gil Rémillard (réplique) M. Rémillard: Oui, brièvement...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre de la Justice.

M. Rémillard: ...simplement pour dire qu'à la suite de l'affaire de l'arrêt Askov, donc au mois d'octobre dernier, nous avons immédiatement réagi et pris les moyens administratifs qui s'imposaient pour tenter de nous conformer à cette décision judiciaire de très grande importance, donc qui fixait les délais raisonnables selon les chartes. Et la Cour suprême, dans l'affaire Askov, mentionne bien que le Québec peut servir d'exemple en matière de délais. m. le président, nous allons en appel dans certaines causes, dans au moins deux causes. je ne les commenterai pas parce que c'est la règle

du sub judice, mais il est évident que cette décision de la Cour suprême extrêmement importante doit être précisée quant à sa portée. maintenant, m. le président, brièvement, en terminant, peut-être que si des téléspectateurs m'écoutent ce soir et qu'ils m'entendent dire que dans certains districts judiciaires, il y a eu 75 % d'augmentation des causes devant nos tribunaux, en matière criminelle et pénale, dans d'autres 35 %, 40 %, les gens se demandent souvent: mais dans quelle société vivons-nous? qu'est-ce qui se passe? est-ce que nous sommes rendus aussi mauvais que ça? ça n'a pas de bon sens!

Il faut bien comprendre, M. le Président, qu'on n'est pas plus mauvais qu'on l'était il y a quelques années. Mais je dirais qu'on est plus efficaces, parce que le genre de société que nous avons choisi d'avoir, société de justice, d'équité, a fait en sorte que ce qui n'était pas un crime il y a à peine quelques années est maintenant un crime. Et je me réfère par exemple à la violence conjugale, je me réfère à la violence faite aux femmes de façon générale, et les abus aux enfants. Je me réfère aussi à la conduite en état d'ébriété. Là aussi, c'est un aspect très important. Notre lutte face aux drogues. Alors, dans tous ces domaines, qui n'étaient pas des domaines où nous étions particulièrement actifs, il y a quelques années, et où nous sommes actifs maintenant avec beaucoup d'efficacité, le résultat est qu'il y a plus de gens qui sont devant les cours de justice.

Alors, c'est dans ce contexte-là, M. le Président, que ce projet de loi a pour objet d'ajouter cinq juges à la Cour du Québec, ce qui nous permettra, je crois, de répondre aux besoins du système judiciaire québécois.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le ministre.

Est-ce que la motion du ministre de la Justice proposant l'adoption du principe du projet de loi 148, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires, est adoptée?

M. Pagé: Adopté, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Alors, M. le Président, je ferais motion, en attendant ma collègue, Mme la député de Hochelaga-Maisonneuve, qui, j'en suis persuadé, va acquiescer à ma proposition, que nous procédions immédiatement aux écritures du projet de loi et qu'on passe à la troisième lecture pour adoption du projet de loi. (Oh 10)

Commission plénière

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, est-ce qu'il y a consentement pour procéder aux écritures? Est-ce que la motion de M. le leader du gouvernement proposant que l'Assemblée se constitue à partir de maintenant en commission plénière est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En commission pleinière, est-ce que chacun des articles de ce projet de loi est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, nous sommes de retour à l'Assemblée. Est-ce que le rapport de la commission pleinière est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Je propose l'adoption du projet de loi.

Adoption

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 230 quant à l'adoption du règlement du projet de loi 148? Consentement. Est-ce que le projet de loi 148 est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: M. le Président, vous comprendrez qu'avec la célérité avec laquelle l'Opposition a concouru à l'adoption du projet de loi, nous voulons manifester tout notre intérêt à ce que des mesures les plus immédiates possibles soient prises pour mettre fin à ces situations absolument inacceptables qui se sont produites la semaine passée.

Cependant, M. le Président, encore une fois, nous déplorons que le projet de loi n'ait pas été déposé comme il aurait dû l'être à l'examen de la commission parlementaire des institutions la semaine passée et nous réitérons notre volonté de voir le ministre de la Justice et son gouvernement en arriver à des mesures plus permanentes qui s'imposent, M. le Président, pour mettre fin à des situations qui ont, avec raison, soulevé l'indignation dans la population. Je vous remer-

cie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Est-ce que la motion proposant l'adoption du projet de loi 148, loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: M. le Président, je vous invite à appeler l'article 13 du feuilleton.

Projet de loi 144 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 13, M. le leader du gouvernement, M. le ministre de la Sécurité publique propose l'adoption du principe du projet de loi 144, Loi modifiant la Loi sur les permis d'alcool. Et je m'empresse de reconnaître M. le ministre de la Sécurité publique, M. le ministre.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, il me fait plaisir de voir que le député de Joliette et leader de l'Opposition fait son apparition. Nous avons eu l'occasion de discuter ensemble, en commission parlementaire, des circonstances qui nous amènent à considérer ce projet de loi 144 à l'Assemblée nationale. Il avait bien vaillamment indiqué, lors des travaux en commission parlementaire, qu'il comprenait les circonstances dont nous parlerons tantôt et qu'il se prêterait à l'examen par l'Assemblée nationale à cette session-ci d'un projet de loi. Je lui en exprime mon appréciation et je veux assurer tous les membres de cette Chambre que nous présentons ce projet de loi dans un esprit de collaboration et d'ouverture.

Voici de quoi il s'agit, M. le Président. La loi sur les permis d'alcool confère à la Régie des permis d'alcool du Québec des pouvoirs importants en ce qui touche l'émission de permis de vente ou de fabrication de boissons alcooliques au Québec. Et l'organisme qui se voit attribuer les pouvoirs en matière d'émission des permis, se voit également accorder les pouvoirs de révocation ou encore de suspension des mêmes permis. Ce sont des pouvoirs très importants affectant des milliers d'entreprises dont le chiffre d'affaires représente, évidemment, un montant considérable à chaque année. On estime à plus de 12 000 le nombre des établissements munis d'un permis de vente ou de distribution de boissons alcooliques au Québec, ce qui vous donne une idée de l'importance très grande de cette activité économique. Ça comprend les épiceries, ça comprend des bars, ça comprend des brasseries, toutes sortes d'autres endroits que certains d'entre nous fréquentent plus ou moins souvent. Mais ça fait partie de la réalité québécoise d'aujourd'hui et il est normal que s'exerce une activité régulatrice de l'État en ces choses. Cette activité est exercée par la Régie des permis d'alcool du Québec à laquelle j'ai déjà eu l'occasion d'exprimer mon appréciation pour l'excellent travail qu'elle accomplit.

Dans l'émission des permis ou dans toutes les décisions relatives à la révocation ou à la suspension des permis, la Régie doit s'inspirer d'un certain nombre de critères, en tête desquels figure le critère de la tranquillité publique. Pour émettre un permis, par exemple, pour un débit d'alcool, la Régie doit s'assurer qu'il n'y aura pas d'obstacles à la tranquillité publique découlant de la présence d'un endroit licencié ou muni d'un permis dans tel secteur donné du territoire d'une municipalité. Elle doit s'assurer que l'activité qui aura lieu à l'intérieur de cet établissement se déroulera suivant certaines normes de morale, certaines normes de tran-quilité publique, certaines normes de sécurité physique, par exemple, qui répondront aux exigences normales de la société.

Dans la loi actuelle, la Régie se voit conférer le pouvoir d'établir des règlements, se voit attribuer le pouvoir de définir par règlement les éléments dont elle devra tenir compte pour prendre des décisions au titre de la tranquillité publique. Et jamais, depuis de nombreuses années qu'elle détient ce pouvoir, la Régie ne l'a exercé. Dans le texte de la loi, c'est écrit: La Régie peut établir un règlement, etc. Elle n'a jamais exercé ce pouvoir. C'est donc dire qu'elle prend ses décisions relatives à la tranquillité publique en tenant compte de ses perceptions, en tenant compte de ses jugements. Elle affine sa jurisprudence de décision en décision, elle ne l'a jamais écrite dans un règlement. Pourquoi? Parce qu'un règlement - ceux qui ont dû participer à la rédaction de règlements savent de quoi il s'agit - exige d'être formulé dans des termes qui conduisent ou peuvent conduire à des vérifications presque arithmétiques.

Si, par exemple, on définit un règlement pour l'admission d'un élève à l'école anglaise, ça prend des critères très précis. Vous dites: II faut le certificat de naissance, il faut que l'enfant ait fréquenté l'école anglaise ou que ses parents aient fréquenté l'école anglaise pendant la majorité du temps qu'ils ont passé à l'école primaire, etc. Ça prend des critères précis, presque arithmétiquement vérifiables, sans quoi on risque d'être en présence d'un règlement qui sera débouté faute de pertinence ou de précision suffisante, il faut toujours éviter, dans un règlement, de donner plus de pouvoir au gouvernement ou au ministre que ne lui en attribue la loi. Alors, il s'est avéré, à l'essai, que la défini-

tion d'un règlement traitant de la tranquillité publique était une entreprise extrêmement difficile. La Régie avait préféré jusqu'à maintenant ne pas choisir cette voie, estimant que le mot "peut" qui est employé dans la législation actuelle lui donnait la faculté, soit d'établir un règlement, soit de n'en point établir.

Les tribunaux, jusqu'à récemment, avaient confirmé cette manière de voir de la Régie et, chaque fois que ses décisions avaient été mises en cause par des entreprises ou des particuliers qui étaient visés par ses décisions, les tribunaux avaient donné raison à la Régie. Par conséquent, tout allait normalement, les tribunaux comprenaient, en somme, que le concept de tranquillité publique doit être l'objet d'une interprétation souple, pragmatique, susceptible d'évoluer au gré des situations.

Je donne seulement un exemple qui justifiait cette attitude de la Régie. Prenez les développements formidables que nous avons connus depuis une quinzaine d'années en matière de commerce de la drogue, par exemple. C'est bien connu qu'un grand nombre d'établissements munis d'un permis de vente de boissons alcooliques sont en même temps des lieux où certains font le trafic de la drogue, ou l'utilisation de la drogue, d'une manière ou d'une autre. Personne n'eut pu prévoir l'ampleur que prendrait ce phénomène au cours des dernières années. C'est encore très difficile d'en mesurer l'étendue, l'ampleur et les effets avec précision et les manifestations ne sont pas toujours faciles à établir. (0 h 20)

C'est facile d'écrire des articles là-dessus. Mais mettez-vous à la place de la police ou de la Régie qui doivent prendre des décisions concrètes. C'est beaucoup plus difficile. Mais il est arrivé récemment que la Cour d'appel du Québec saisie d'une requête d'ordre plutôt théorique par une personne dont le permis avait été l'objet d'une décision négative de la part de la Régie, cette personne s'est présentée devant le tribunal et a mis en cause le principe de la non-réglementation. Elle a demandé au tribunal de se prononcer sur ce point. Le juge de la Cour supérieure a statué que la Régie avait le droit de procéder comme elle l'a fait, c'est-à-dire qu'elle n'était pas obligée de dicter un règlement. La Cour d'appel, nonobstant la jurisprudence en sens contraire qu'elle avait établie jusqu'à cette date, jusqu'au mois de - le jugement a été rendu, si mes souvenirs sont bons, il y a quelques mois, au cours du printemps, je le retrouverai tantôt... Pardon?

Une voix: Le 11 mars.

M. Ryan: Le 11 mars 1991. La Cour d'appel, dans un jugement rédigé par le juge Louis Lebel, a décidé de renverser sa position antérieure et elle a conclu que la Régie, de par la formulation du texte actuel de la loi, avait l'obligation et non pas simplement la faculté de dicter un règlement. Il a apporté de très bons arguments à l'appui de sa thèse, je ne veux pas la mettre en question aujourd'hui. Vous savez que le gouvernement a décidé de ne pas aller en Cour suprême. Par conséquent, si nous ne sommes pas allés en Cour suprême - les délais sont maintenant expirés d'ailleurs pour l'appel - nous acceptons, par conséquent, le jugement du tribunal et je n'entends pas le remettre en question aujourd'hui. Il s'agissait pour nous de décider des suites que nous allions apporter à ce jugement.

Alors, là, il y avait deux avenues qui s'ouvraient au gouvernement, étant exclu le recours à la Cour suprême qui eut pris beaucoup de temps et eut maintenu une incertitude considérable dans tout le secteur, de l'émission, de la suspension et de la révocation des permis de vente de boissons alcooliques. Il nous restait deux recours, soit de procéder à la mise au point d'un règlement, comme le veut la loi actuelle selon l'interprétation que vient d'en donner la Cour d'appel, ou soit de modifier la loi de manière que les critères dont doit tenir compte au premier chef la Régie pour l'émission de permis d'alcool soient inscrits dans le texte de la loi. Alors, le gouvernement a choisi la voie législative pour deux raisons. Tout d'abord, parce qu'il nous est apparu préférable d'inscrire dans le texte même de la loi, à l'état général, mais quand même avec des précisions qui répondent, je pense bien, aux attentes qu'avait formulées le jugement de la Cour d'appel, il nous est apparu préférable d'inscrire dans le texte même de la loi les principaux facteurs dont devra tenir compte la Régie dans l'établissement de ses décisions relatives à l'émission, à la suspension ou à la révocation des permis.

Si vous regardez le texte que propose le projet de loi 144, vous dites que la Régie, pour l'exercice de ses fonctions et pouvoirs mettant en cause la tranquillité publique, pourrait tenir compte notamment des éléments suivants: d'abord, tout bruit, attroupement ou rassemblement résultant ou pouvant résulter de l'exploitation de rétablissement, de nature à troubler la paix du voisinage; deuxièmement, les mesures prises par le requérant ou le détenteur du permis et l'efficacité de celles-ci afin d'empêcher dans l'établissement - là, il y a toute une série d'actes illégaux qui sont mentionnés - la possession, la consommation, la vente, l'échange ou le don, de quelque manière que ce soit, d'une drogue, d'un stupéfiant ou de toute autre substance pouvant être assimilée à une drogue; la possession d'une arme à feu ou de toute autre arme offensive; les gestes ou actes à caractère sexuel de nature à troubler la paix et la sollicitation y relative; les actes de violence, y compris le vol ou le méfait, de nature à troubler la paix des clients ou des citoyens du voisinage; les jeux de hasard, gageures, paris de nature à

troubler la paix; toute contravention à la présente loi ou à ses règlements; et toute contravention à une loi ou à un règlement relatif à la sécurité, l'hygiène ou la salubrité dans un lieu ou un édifice public.

Vous remarquerez une chose là, c'est bien marqué, le mot "notamment" est très important ici. Ce n'est pas une enumeration qui se prétend complète ou définitive. C'est une enumeration de base où chacun des éléments énumérés est induit de décisions déjà rendues par la Régie des permis d'alcool au cours des dernières années. Il y a eu des cas où c'était des armes à feu, d'autres cas où c'était des actes sexuels répré-hensibles en public; d'autres cas où c'était de la circulation de drogue; d'autres cas où c'était un excès de bruit ou d'attroupement dans le voisinage, etc. Tous les critères qui sont inscrits ici sont des critères induits de l'expérience et non pas inventés par le législateur pour s'impressionner à l'aide d'une enumeration qui pourrait avoir l'air d'être complète ou définitive.

Avec ceci, nous croyons que le gouvernement et l'Assemblée nationale répondent en tout point aux attentes formulées par le jugement de la Cour d'appel. Nous faisons disparaître cette espèce d'épée de Damoclès qui pesait sur la Régie, qui l'obligeait à faire un règlement, dont nous n'étions pas sûrs d'être capables de le rédiger dans les termes précis que requiert ce type d'exercice. Ça, c'est le premier motif.

Le deuxième motif, c'est que nous avions toute une série d'affaires en marche. Il y avait déjà plusieurs décisions de la Régie qui étaient contestées devant les tribunaux. Il y en a au moins une bonne douzaine qui sont déjà, soit devant la Cour d'appel ou devant la Cour supérieure et les tribunaux ont commencé à rendre des jugements sur ces décisions. Dans le sillage de la décision rendue par la Cour d'appel en mars dernier, c'est évident que nous allions vers une annulation, c'est-à-dire des chances de gagner du gouvernement, dans bien des causes qui étaient inscrites devant les tribunaux déjà. En plus, la Régie est saisie, je pense que c'est 80 demandes de permis ou de renouvellement de permis, sur lesquelles elle ne peut pas statuer parce que le critère principal, c'est le critère de la tranquillité publique. Aussi longtemps que cette affaire n'est pas réglée, la Régie ne peut pas fonctionner normalement. Si nous avions procédé uniquement par voie réglementaire, nous ne pouvions pas réglementer de manière rétroactive. Nous ne pouvions pas embrasser les causes qui sont déjà en marche.

Entre vous et moi, mettons-nous les pieds à terre, M. le Président, soyons réalistes. Disons que vous avez un débit de boisson où les enquêtes policières ont dûment établi, au cours des derniers mois, qu'il y avait là un commerce libre, ou une circulation libre de la drogue, allez-vous laisser ça se perdre en pure fumée, sous prétexte de respecter la lettre d'une loi ou si, comme législateurs responsables, nous n'avons pas l'obligation de ressaisir le ballon immédiatement et de dire: Vous ne jouerez pas avec la justice, ni avec le gouvernement aussi facilement que vous le pensez.

Avec le projet de loi, nous allons permettre, en vertu d'une disposition qui est contenue à un article du projet de loi, que soient validées les décisions rendues par la Régie des permis d'alcool du Québec avant la date de la sanction de la loi, dans la mesure où leur invalidité pourrait résulter de l'appréciation par la Régie de la tranquillité publique en l'absence de règlement qui a été dénoncée par le tribunal. Avec ça, on prévient aussi les appels... Imaginez que nous ne faisions rien. Ça veut dire qu'une personne qui a vu son permis révoqué il y a deux ans, elle peut dire: Moi, je ne suis pas plus bête que celui qui vient d'être avantagé par le jugement de la Cour d'appel en mars 1991. Je vais inscrire un appel, moi aussi, pour avoir justice. On va se trouver en pleine confusion, en pleine anarchie. il y a toutes sortes de conséquences. je pense que les conséquences sociales et morales, nous les voyons tous. et le moyen que nous avons arrêté après mûre réflexion, après étude de toutes les autres possibilités, c'est celui qui est proposé par le projet de loi 144, c'est-à-dire, l'insertion, dans le texte même de la loi, de dispositions précises qui définiront de manière satisfaisante le concept de tranquillité publique, de manière que les décisions déjà rendues par la régie soient assurées d'une parfaite validité juridique, que les affaires déjà inscrites devant la régie ou devant les tribunaux puissent connaître leur dénouement normal, sans qu'on s'expose à des décisions dont les effets risqueraient d'être très nocifs pour la société, et de manière aussi que pour ses décisions futures, la régie des permis d'alcool soit assurée de pouvoir agir avec toute la certitude normale, avec toute l'assurance légitime que doit posséder un organisme ayant cette vocation très difficile de voir à ce que tout le commerce des boissons alcooliques se fasse, au québec, dans le respect de l'ordre, dans le respect de normes de moralité publique élémentaires, dans le respect de la dignité des personnes, dans le respect des lois aussi.

Voilà l'objet du projet de loi 144 et j'ose espérer que les membres de l'Assemblée nationale voudront en reconnaître le bien-fondé et la pertinence. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le ministre de la Sécurité publique. Toujours à l'étude de l'adoption du principe du projet de loi 144, Loi modifiant la Loi sur les permis d'alcool, je reconnais maintenant le leader de l'Opposition officielle et député de Joliette. M. le député. (0 h 30)

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. M. le Président, le projet de loi est effectivement la réponse gouvernementale au jugement de la Cour d'appel qui a été rendu le 11 mars dernier et dans lequel cette dernière invalidait une décision de la Régie des permis d'alcool suspendant un permis de bar pour le motif que la Régie n'avait jamais défini par règlement le critère de tranquillité publique sur lequel elle s'était appuyée pour émettre cette suspension.

En ce faisant, M. le Président, eh bien, la Cour d'appel dérogeait soudainement, comme le disait le ministre tantôt, à sa propre jurisprudence ainsi qu'à celle de la Cour supérieure qui avait, à de nombreuses reprises, reconnu la validité de centaines de décisions de la Régie, qui avait rendu celles-ci en s'appuyant sur le non-respect du critère de la tranquillité publique contenu à l'article 41, paragraphe 1 de la Loi sur les permis d'alcool.

Inutile de dire que la soudaineté de cette décision avait plongé le milieu du commerce et de la vente de l'alcool dans un certain désarroi, surtout qu'après 12 ans de patiente jurisprudence la Régie avait réussi, je crois, à imposer sa crédibilité juridique et le respect et le consensus par rapport à ses décisions basées sur ce critère. Il fallait donc que le gouvernement agisse pour ne pas que l'incertitude juridique se prolonge indûment.

La notion de tranquillité publique sur laquelle la Régie base l'essentiel de sa compétence en matière d'émission, de suspension ou d'abolition de permis d'alcool constitue vraiment une des pierres d'assise de la nouvelle vocation conférée, en 1979, à la nouvelle Régie des permis d'alcool par la nouvelle loi moderne et axée sur le service aux citoyens qui était, à l'époque, la Loi sur les permis d'alcool. Le critère d'intérêt public était maintenu, mais celui de la tranquillité publique qui était ajouté symbolisait beaucoup mieux l'esprit de la réforme. Finis les délais indus, les refus d'accorder un permis parce que contraire à l'intérêt public, ce qui voulait dire à peu près n'importe quoi, fini le favoritisme, etc. Dorénavant, un requérant saurait à quoi s'en tenir. Fondamentalement, s'il respectait la tranquillité publique, il avait droit au permis et pouvait, s'il maintenait cette tranquillité, compter sur l'appui de la Régie.

C'est ainsi, par exemple, qu'au cours des années des regroupements de citoyens, des associations de quartier, des citoyens individuels ont appris à venir, sans crainte, devant la Régie pour exposer leurs motifs d'opposition à une demande de permis ou leur requête pour qu'un permis soit suspendu ou révoqué pour mauvaise conduite du détenteur. Il devenait donc impérieux - et, là-dessus, nous partagions le point de vue du ministre parce que, en commission parlementaire, nous en avons discuté - de protéger ce critère qui avait si bien servi au cours des années, surtout qu'en aucune façon la Cour d'appel n'avait remis en question la manière dont la Régie s'acquittait de sa tâche de le définir. La Cour d'appel en avait plus sur le principe que la Régie se devait maintenant d'abandonner le cas par cas et adopter une approche plus normative de la définition de la tranquillité publique en se servant, par exemple, de son pouvoir réglementaire sur le sujet prévu au paragraphe 8 de l'article 114 de la loi.

M. le Président, lors de l'étude des crédits budgétaires du ministère de la Sécurité publique le 24 avril dernier, le ministre nous avait alors exposé les trois avenues légales qui s'offraient à lui: aller en appel à la Cour suprême, faire en sorte que la Régie réglemente la notion de tranquillité publique ou modifier la loi pour étoffer, dans le corps même de celle-ci, la notion de tranquillité publique.

Le ministre a donc opté pour la troisième voie; c'est celle qu'il a retenue. On peut voir, par exemple, que la Régie sera habilitée à considérer comme étant une atteinte à la tranquillité publique le fait de permettre le trafic de drogues, la prostitution, de tolérer du bruit à un niveau trop élevé pour le voisinage, etc. Je ne vois pas comment on pourrait tolérer, en vertu d'un vide juridique, de telles activités chez un détenteur de permis d'alcool. Aussi, suis-je d'accord en principe pour remédier au problème de la manière proposée par le ministre. Par contre, j'aimerais avoir toutes les assurances - et au niveau de la réplique, j'espère que le ministre pourra me répondre - lors de l'étude détaillée, que cette méthode est meilleure que l'approche réglementaire proprement dite qui avait été suggérée par la Cour d'appel. J'aimerais aussi que la méthode que nous choisirons ne nous entraîne pas dans un autre chassé-croisé judiciaire qui nous mènerait encore une fois devant la Cour d'appel et nous obligerait à légiférer de nouveau. Il est primordial que nous choisissions la bonne méthode. J'ai remarqué d'ailleurs que tous ne partageaient pas le point de vue ministériel, puisque j'ai pu prendre connaissance d'un échange de correspondance sur ce sujet émanant d'un détenteur qui a eu sa part de problèmes avec la Régie.

Un autre point de vue sur lequel j'aimerais avoir des assurances du ministre lors de sa réplique, c'est le fait que la loi ne touche pas rétroactivement celui ou celle qui a obtenu gain de cause en cour. Je comprends la nécessité d'adopter, cependant, les articles 4 et 5 pour des motifs de sécurité juridique, mais je ne veux pas que l'adage "qui trop embrasse mal étreint" s'applique. Qu'arrive-t-il, par exemple, des personnes qui sont en évocation devant la Cour supérieure pour le même motif? J'apprécierais avoir des réponses lorsqu'on étudiera article par article, ou bien dans le droit de réplique du ministre, ou encore au niveau du discours en

commission parlementaire. Est-on bien sûr que les personnes qui ont gagné ne sont pas touchées par le libellé extrêmement large de l'article 4? Il m'apparaît que l'article est suffisamment large pour peut-être toucher même des personnes qui auraient gagné leur cause. J'aurai besoin de ces assurances, M. le Président, pour me prononcer de façon finale sur cette loi. Mais, dans l'ensemble, je comprends qu'il fallait agir, que ce soit par voie réglementaire, que ce soit par voie législative ou encore aller en appel à la Cour suprême pour cesser les effets de la décision de la Cour d'appel du Québec.

Donc, ceci dit, je voudrais offrir notre collaboration au niveau de l'étude article par article et je souhaite, si le ministre peut répondre ce soir ou au début de la commission parlementaire, qu'il puisse le faire afin qu'on puisse conserver, je pense, la crédibilité de la Régie. Essentiellement, c'est un point de convergence que nous avons. Je pense que la Régie, depuis 1979, a rendu de fiers services à tous les détenteurs de permis de vente parce qu'on doit reconnaître que ce n'est plus la question d'influence indue qui faisait qu'une personne perdait son permis ou pas. Le favoritisme a disparu. Il s'était dégagé une jurisprudence passablement intéressante au cours des années et je pense que c'a été une décision surprenante, je ne dis pas erronée, mais je dis surprenante, puisque la jurisprudence qui s'était créée, tant au niveau des cours supérieures qu'au niveau de la Cour d'appel elle-même, a été contredite, ce qui a eu pour effet de créer ce vide juridique dans lequel nous nous trouvons et qu'il fallait combler. Donc, je dis au ministre, suite aux explications qu'il pourra me donner ou la précision qu'on pourra apporter dans la définition des articles: L'Opposition entend concourir à l'adoption, à ce stade-ci au moins, au niveau du principe. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Joliette et leader de l'Opposition officielle. Je reconnais maintenant sur cette même motion, l'adoption du principe du projet de loi 144, le député de Chapleau.

M. John J. Kehoe

M. Kehoe: Merci, M. le Président. Suite au jugement rendu par la Cour d'appel dans cette cause, on sait très bien que la Régie des permis d'alcool était complètement paralysée. Il restait que le jugement rendu faisait en sorte que la notion de tranquillité publique, on ne savait pas ce que ça voulait dire justement. Il fallait qu'un règlement soit adopté par le gouvernement pour définir les termes, exactement ce que veulent dire les mots "tranquillité publique", et c'est justement le but du projet de loi 144, M. le Président. (0 h 40)

II convient à ce stade, M. le Président, de rappeler que la Régie a été instituée en vertu de la Loi sur les permis d'alcool et que son mandat consiste fondamentalement à s'assurer qu'une exploitation des débits d'alcool est exercée conformément aux lois et règlements dans le respect et la protection du public. Pour ce faire, le législateur a doté la Régie des outils nécessaires afin de lui permettre de bien remplir son rôle. Dans cette optique, il a inclus une notion clé dans la loi, soit celle de tranquillité publique. Nous pouvons sans doute affirmer qu'il s'agit de la clé de voûtes de l'ensemble de cette loi. Cette notion doit être étudiée et prise en considération par la Régie au moment de chaque demande de permis, au cours de l'exploitation et au moment d'une révocation en audition publique. C'est la seule notion que le législateur a demandé à la Régie de considérer au début et à la fin de son processus d'octroi et de retrait de permis. En vertu de la loi, la Régie a, notamment, pour fonction de contrôler l'exploitation de permis d'alcool qu'elle délivre. Par le passé, les permis d'un bon nombre d'établissements détenteurs de permis ont fait l'objet d'une suspension ou d'une révocation par la Régie en raison d'activités illicites qui s'y produisaient, notamment, pour en citer quelques-uns, la consommation et le trafic de stupéfiants, les actes indécents, le bruit, le tapage, la nuisance des voisins et j'en passe.

L'application des pouvoirs de suspension et de révocation de permis a nécessité, au cours de l'année 1989-1990, 107 révocations de permis, 91 révocations d'autorisation de danse, de présentation de spectacles ou de projection de films, 143 suspensions de permis et 155 suspensions d'autorisations, sur un total de 244 causes touchant de près ou de loin à la notion de tranquillité publique. Ces sanctions ont été, pour la plupart, prononcées pour le motif de nuisance à la tranquillité publique en vertu des articles 75 et 86.8° de la Loi sur les permis d'alcool. Le recours à ces derniers articles consistait un moyen efficace et rapide de sauvegarder l'intérêt public. N'ignorant pas les délais que connaissent les accusés pour être jugés dans notre système judiciaire, l'ampleur des problèmes qui surviennent dans rétablissement détenteur de permis ainsi que le taux de criminalité sans cesse croissant dans ces lieux, la Régie, forte des jugements antérieurs et confirmant la légalité de son intervention, basée sur la théorie de tranquillité publique, a souvent eu recours à ce critère, tout en respectant les principes de justice naturelle.

Depuis 1980, aucune décision de la Régie n'a été déclarée déraisonnable par les tribunaux sur la base de l'interprétation qu'elle a pu faire à la tranquillité publique. À l'heure actuelle, les opérations de la Régie concernant le contrôle des activités des détenteurs de permis sont sérieusement affectées. Concrètement, cela signifie que plusieurs dossiers, qui devraient faire l'objet

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Donc, les travaux de cette Assemblée sont ajournés à ce matin, 4 juin, à 10 heures.

(Fin de la séance à 0 h 56)

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