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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le lundi 16 décembre 1991 - Vol. 31 N° 178

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Quatorze heures huit minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Nous allons maintenant procéder aux affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi. Je voudrais simplement informer l'Assemblée à ce moment-ci que la décision de la présidence sur la question de la recevabilité du projet de loi 197, Loi sur la limitation des dépenses budgétaires, présenté par M. le député de Saint-Louis, sera rendue au moment des renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Dépôt de documents. M. le leader du gouvernement.

Dépôt de documents

Rapport annuel de la Commission consultative de l'enseignement privé

M. Pagé: M. le Président, comme ministre de l'Éducation, j'ai deux documents à déposer. Tout d'abord, je voudrais déposer le rapport annuel 1990-1991 de la Commission consultative de l'enseignement privé.

Rapport de l'enquête sur la gestion à la

Direction de la formation à distance du

ministère de l'Éducation et échange

de correspondance à ce sujet

Dans un deuxième temps, M. le Président, tel que je m'y étais engagé, je voudrais déposer le rapport de l'enquête sur la gestion a la Direction de la formation à distance du ministère de l'Éducation du Québec. De plus, M. le Président, toujours en fonction de ce rapport qui a été déposé vendredi soir, je voudrais déposer ici, en cette Assemblée, une lettre qui m'est adressée par le sous-ministre de l'Éducation, M. Michel Paquet, une lettre que j'ai adressée à M. André Vézina, sous-ministre adjoint à la planification, une lettre que j'ai adressée à Mme Thérèse Ouellet, sous-ministre adjointe à l'administration, une lettre que j'adresse à M. Jean-Noël Poulin, président à la Commission de la fonction publique, une lettre que j'adresse à M. Guy Breton, Vérificateur général par intérim, toujours sous ma signature, et une lettre que j'adresse à M. Jean K. Samson et une lettre que j'ai reçue aussi de M. Jean K. Samson, sous-ministre associé au ministère de la Justice.

Le Président: Merci, M. le ministre de l'Éducation. Tous ces documents sont donc déposés. Maintenant, M. le ministre du Tourisme.

Rapport annuel du ministère du Tourisme

M. Vallerand: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1990-1991 du ministère du Tourisme du Québec.

Le Président: Ce rapport est déposé. M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles.

Rapport annuel de la Corporation

professionnelle des orthophonistes et

des audiologistes du Québec

M. Savoie: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport des activités 1990-1991 de la Corporation professionnelle des orthophonistes et des audiologistes du Québec.

Le Président: Ce rapport est également déposé.

Maintenant, dépôt de rapports de commissions. M. le président de la commission des institutions.

Dépôt de rapports de commissions Étude détaillée du projet de loi 159

M. Dauphin: oui. merci, m. le président. j'ai donc l'honneur de déposer le rapport de la commission des institutions qui a siégé le 13 décembre 1991 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 159, loi modifiant le code civil du bas canada en matière de tutelle et de curatelle. le projet de loi a été adopté.

Le Président: Ce rapport est déposé. M. le président de la commission du budget et de l'administration et député de Vanier.

Étude détaillée du projet de loi 170

M. Lemieux: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a siégé les 3, 4, 5, 6, 10, 11 et 12 décembre 1991 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 170, Loi sur la taxe de vente du Québec et modifiant diverses dispositions législatives d'ordre fiscal. L'étude du projet de loi n'a pas été complétée.

Le Président: Ce rapport est déposé. M. le président de la commission de l'économie et du travail et député de Laval-des-Rapides.

Étude détaillée du projet de loi 186

M. Bélanger: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé les 11, 12 et 13 décembre 1991 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 186, c'est-à-dire la Loi modifiant la Loi sur le bâtiment et d'autres dispositions législatives. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Le Président: Ce rapport est déposé. Maintenant, Mme la vice-présidente de la commission de l'aménagement et des équipements et députée de Mégantic-Compton.

Consultation et étude détaillée du projet de loi 301

Mme Bélanger: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé le 13 décembre 1991 afin d'entendre les intéressés et de procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé 301, Loi concernant ville d'Anjou. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Le Président: Est-ce que ce rapport est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Mme la députée de Mégantic-Compton.

Consultation et étude détaillée du projet de loi 303

Mme Bélanger: M. le Président, j'ai aussi l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé le 13 décembre 1991 afin d'entendre les intéressés et de procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé 303, Loi concernant la ville de Saint-Hubert. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Le Président: Est-ce que ce rapport est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.

Dépôt de pétitions.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

Maintenant, je voudrais vous aviser qu'après la période des questions et réponses orales M. le ministre de la Santé et des Services sociaux répondra à une question posée le 12 décembre dernier par M. le député de Rouyn-Noranda-

Témiscamingue concernant les négociations avec les médecins résidents.

Ceci étant dit, nous allons maintenant procéder à la période de questions et réponses orales des députés. Je vais reconnaître, en première question principale, M. le député d'Ungava.

QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES

Solutions de rechange pour régulariser la situation à Kahnawake

M. Claveau: M. le Président, depuis plusieurs jours déjà, le ministre de la Sécurité publique laisse croire en cette Chambre qu'il n'aura que de bonnes nouvelles concernant la conclusion imminente d'une entente sur les Peacekeepers de Kahnawake. Il y a à peine une heure, le ministre de la Sécurité publique était en conférence de presse pour annoncer la rupture des négociations, et cela, pour un temps indéterminé qui risque d'être long, d'après ce qu'on a pu comprendre.

Devant cet échec, le ministre de la Sécurité publique peut-il nous dire quelles sont les alternatives qu'il a retenues afin de régulariser le plus tôt possible la situation dans le secteur de Kahnawake?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Ryan: D'abord, M. le Président, je voudrais souligner qu'à l'occasion d'une réunion tenue hier avec le conseil communautaire de Kahnawake, j'ai appris, à ma grande déception, que le conseil n'était pas en mesure de donner suite à un engagement dont il avait été convenu à une réunion tenue lundi dernier. Le gouvernement avait soumis une proposition écrite concernant le statut des Peacekeepers qui donnait lieu à un accord général. Il avait été entendu qu'avant de donner suite à ce document, chacune des deux parties devrait faire des actes concrets pour montrer, de manière tangible, sa volonté d'en venir à un règlement négocié de tout le litige policier à Kahnawake. Les actes concrets qui devaient être posés étaient les suivants: du côté du gouvernement, nous acceptions de réduire de manière sensible la présence policière sur les routes qui traversent la réserve; du côté du conseil des Mohawks, on devait enlever immédiatement les guérites qui bloquent l'entrée du village à cinq endroits différents depuis au-delà d'un an.

Nous sommes arrivés à la réunion hier et M. Norton a dû me faire part, au nom du conseil de Kahnawake, qu'il n'était pas en mesure de livre la marchandise. J'ai été profondément déçu. Si cette condition, qui avait fait l'objet d'échanges pendant de nombreuses semaines, ne pouvait pas être exécutée par le conseil mohawk,

ça remettait en question toute la négociation que nous avons eue au cours des derniers mois. Nous en sommes là ce matin. La réunion s'est terminée dans la correction, de manière courtoise. J'espère qu'ils auront l'occasion de repenser à la situation aujourd'hui et demain. Mais il est évident que ce changement d'attitude témoigne d'un rapport de forces à l'intérieur de la communauté sur lequel nous n'avons pas de contrôle dans l'immédiat et dont je souhaite qu'il finisse par se dénouer au profit de ceux qui veulent des solutions ordonnées, pacifiques et démocratiques. Pour le moment, nous maintenons la présence policière sur les routes qui traversent la réserve au même point où elle en était. Nous exerçons une vigilance particulière sur les incidents qui pourraient survenir. Au cours des jours et des semaines à venir, nous réexaminerons, évidemment, la stratégie suivie jusqu'à maintenant afin de voir si des ajustements seront nécessaires.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Claveau: M. le Président, est-ce que le ministre conviendra que ce n'est pas l'historique de la situation à Kahnawake que je lui ai posé comme question, ni à savoir s'il devait garder ou non les forces policières tel qu'il les a actuellement? C'est concernant les alternatives. Le ministre a-t-il des alternatives? La présence de forces policières autour de Kahnawake, ce n'est pas une alternative, c'est une solution transitoire, temporaire. Quelles sont les solutions à long terme que le ministre entend mettre de l'avant pour régler le problème une fois pour toutes, s'il n'y a plus de négociation?

Le Président: M. le ministre.

M. Claveau: D'abord, il n'est pas dit qu'il n'y aura plus de négociation. Il n'y en a pas à l'heure où nous nous parlons. Il peut arriver toutes sortes de choses dans les heures ou les jours qui suivront. Je ne le sais pas pour l'instant et je ne tire pas de conclusions radicales. Je voudrais simplement dire au député d'Ungava qu'hier matin, avant de rencontrer le conseil communautaire de Kahnawake, j'ai rencontré les maires de la MRC de Roussillon, qui étaient tous présents, pour leur faire part de la situation, recevoir leurs réactions et leurs conseils. Il y en a beaucoup qui ont parlé comme vous venez de parler, mais quand nous nous sommes expliqués, je pense qu'il y avait un climat de compréhension beaucoup plus grand.

Après mon départ, à mon insu, ils ont adopté une résolution dans laquelle ils disent que le conseil de la MRC, à l'unanimité, appuie les démarches du ministre de la Sécurité publique visant à solutionner les problèmes de sécurité publique, en particulier ceux sur les routes provinciales traversant la réserve de Kahnawake.

J'ai été très surpris de prendre connaissance de cette résolution, ce matin. Je veux exprimer aux maires de la région, en particulier à M. Bourcier, le maire de Châteauguay, et au préfet de la MRC et maire de Delson, M. Gagné, ma vive appréciation pour la compréhension qu'ils manifestent devant cette situation qui n'a pas de solution dans les 24 heures encore.

Le Président: En question complémentaire.

M. Claveau: Tous ces beaux mots ne changent rien au problème, M. le Président. À la suite de sous-entendus et de propos vagues tenus par le ministre lors de sa conférence de presse, tout à l'heure, pourrait-il être en cette Chambre un peu plus explicite sur le rôle et, éventuellement, sur la part de responsabilités du fédéral dans l'échec de ces négociations?

Le Président: M. le ministre. (14 h 20)

M. Ryan: Moi, j'ai veillé, pendant toute cette négociation qui a duré depuis plus d'un an, à tenir mon homologue fédéral, le Solliciteur général du Canada, informé du cheminement de la démarche. Parce que, au bout de la ligne, nous recherchons un accord tripartite dont seraient parties le gouvernement fédéral, le gouvernement du Québec et le conseil des Mohawks. Par conséquent, nous avons eu une relation qui, de notre côté, a été empreinte de franchise et de loyauté.

Maintenant, l'été dernier, M. Norton était venu me voir un jour. Nous lui avons soumis une proposition en juin; il est venu me voir en juillet pour me dire qu'il ne pouvait pas accepter la proposition. Je lui ai demandé pourquoi, parce qu'on nous avait donné toutes les indications qu'elle serait acceptée. Il m'a dit: Savez-vous, nous avons repensé à notre affaire; là, nous avons commencé à négocier une entente de caractère plus général avec le gouvernement fédéral et nous aimons mieux nous entendre avec eux qu'avec vous autres. Alors, moi, j'ai demandé tout de suite à mon homologue fédéral et au ministre des Affaires indiennes à Ottawa de ne pas faire une chose comme celle-là parce qu'il avait été convenu entre les deux gouvernements, au début de 1991, que nous réglions d'abord le problème de la police et qu'ensuite les autres questions pourraient être abordées. Et j'avais l'entier appui, à ce sujet, de mon collègue, le ministre délégué aux Affaires autochtones. Or, nous apprenions il y a quelque temps que le gouvernement fédéral s'apprêtait, au début de décembre, à signer quand même une entente et nous avons réussi à les en dissuader. Mais, finalement, ils l'ont signée vendredi. Je pense que c'est en complète violation de l'esprit des entretiens que nous avions eus ensemble au cours de l'année. Je le déplore profondément et je ne serais pas surpris qu'il y ait eu un certain

impact de ce geste que je considère comme un manque de solidarité à l'endroit du résultat des négociations.

Le Président: En question principale, M. le leader de l'Opposition et député de Joliette.

Branchement illégal sur le réseau

d'Hydro-Québec de certains postes de garde de Kahnawake

M. Chevrette: M. le Président, on apprenait, à la fin de novembre, qu'Hydro-Québec concluait des ententes secrètes avec les groupes autochtones pour récompenser les bons clients, 300 $ par bon client, et également confiait une subvention de l'ordre de 90 000 $ à 100 000 $ pour des projets communautaires qui ne sont même pas définis. Et, jusqu'à date, autant HydroQuébec que Mme la ministre de l'Énergie n'ont pas rendu cette entente publique. Tout ce qui est public, c'est qu'un jeune monteur de ligne, lui, a été suspendu. Il perdra 10 000 $ pour avoir osé utiliser son droit à la dissidence ou pour avoir dit publiquement ce que des centaines et des milliers de personnes pensaient.

Ce matin, la surprise est encore plus grande et là, on s'interroge vraiment sur ce qui se passe à Hydro-Québec. On apprend que plus de la moitié des guérites ou des postes de garde dont parlait le ministre de la Sécurité publique tantôt sont branchés illégalement sur Hydro-Québec et qu'on leur fournit le jus très agréablement. Vous voyez à quoi ça conduit. Est-ce que la ministre de l'Énergie peut nous dire si elle a rencontré Hydro-Québec sur ces dossiers et si elle entend carrément arrêter ces pratiques douteuses?

Le Président: Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.

Mme Bacon: M. le Président, sur la question des 300 $ qui ont été remis à ceux qui avaient payés des comptes - il faudrait quand même dire toute la vérité en cette Chambre comme à la population - ce sont des gens qui avaient payé des comptes de 1984 à 1991, d'autres ne l'ont pas fait et, comme le temps était prescrit de 1984 à 1986, les gens ont demandé un remboursement puisque les autres ne les payaient pas.

Je ne dis pas que je suis d'accord avec cette décision; c'est une décision purement administrative et non une décision politique. Je n'ai pas été consultée, M. le Président, et, si j'avais été consultée, ma réponse aurait été négative.

Quant au branchement illégal, si on écoutait le député, ce serait tout le monde qui serait branché illégalement, ce qui n'est pas la vérité. Selon les informations que j'ai, qui me sont fournies par Hydro-Québec, deux barricades qui étaient situées sur le territoire de la réserve sont branchées sur le réseau Hydro-Québec; celle qui s'appelle Adirondack a son propre compteur, lequel a été lu la semaine dernière, et le poste de Saint-Isidore sera lu demain, M. le Président.

Il y a effectivement une barricade qui s'appelle Old Malone Highway qui n'est pas officiellement branchée; elle nécessite un prolongement du réseau qui devra être défrayé par le conseil de bande - ce n'est pas Hydro-Québec qui va le payer - et la consommation à cette barricade sera estimée et la facture sera envoyée au conseil de bande.

Le Président: En question complémentaire.

M. Chevrette: M. le Président, je n'ai jamais dit que c'étaient tous les postes de garde et je n'ai pas dit que c'était tout le monde, j'ai dit que nos informations étaient à l'effet qu'il y en avait qui étaient branchés illégalement. Les guérites, il me semble que, je ne sais pas, ça doit être un peu surprenant, ça...

Le Président: Votre question, s'il vous plaît.

M. Chevrette: ...d'apprendre ça. Est-ce que la ministre considère que c'est normal, ça? Est-ce qu'Hydro-Québec applique pour eux les mêmes standards au point de vue gestion qu'elle applique à ceux qui font de même?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Bacon: Je dis, M. le Président, que ça nécessite un prolongement de réseau qui devra être défrayé par le conseil de bande; donc, le conseil de bande paiera la note pour le prolongement du réseau et, dès qu'un estimé sera fait du coût de la fourniture, du coût de la consommation, il y aura paiement de ce coût, M. le Président.

M. Chevrette: M. le Président... Le Président: En complémentaire.

M. Chevrette: Est-ce que Mme la ministre est en train de me dire qu'en autant que le conseil de bande paie pour le prolongement le Québec va s'organiser pour éclairer, fournir de l'électricité à du monde qui empêche la libre circulation des biens et des personnes? Est-ce qu'elle cautionne ça, oui ou non? C'est ça que je lui pose comme question.

Le Président: Mme la ministre.

Mme Bacon: Je n'ai pas besoin de déchirer mes vêtements, M. le Président, pour dire que je ne cautionne pas ça. Je dis tout simplement les faits tels qu'ils sont pour que les gens aient la vérité. Hydro-Québec prendra tous les moyens pour recouvrer son argent. C'est ce qu'elle va faire. S'il y a des coûts au prolongement du

réseau, ils seront défrayés par le conseil de bande et non par Hydro-Québec.

Le Président: Toujours en complémentaire.

M. Chevrette: M. le Président, je reviens en additionnelle. La question, ce n'est pas s'il y a des coûts pour le prolongement, ma question, c'est: Est-ce que la ministre et Hydro-Québec vont permettre un tel prolongement pour favoriser des structures qui empêchent la libre circulation des biens et des personnes? Ça n'a pas de bon sens. C'est là ma question. Ce n'est pas le fait de l'argent, dans ce cas-ci. L'argent, on va vous demander de déposer l'entente. C'est: Allez-vous favoriser, allez-vous aider ou vous allez empêcher qu'on prolonge des réseaux pour aider du monde qui empêche d'autre monde de circuler? Voilà la question.

Le Président: Alors, Mme la ministre.

Mme Bacon: Je pense que ni Hydro-Québec ni la ministre de l'Énergie ne favoriseront l'empêchement de circuler de la population, M. le Président, et ça, le député de Joliette le sait.

Le Président: Toujours en complémentaire.

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais savoir: Est-ce que la ministre va rendre publique l'entente secrète qu'il y a eu à Akwesasne pour qu'on puisse véritablement regarder ce qu'on a fait avec l'argent des actionnaires québécois qu'est l'ensemble de la population québécoise?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Bacon: M. le Président, une entente secrète se fait entre deux parties. Je pourrais avoir l'approbation d'Hydro-Québec, mais il me faut l'approbation de l'autre partie pour la rendre publique.

Le Président: Alors, en question principale... Pour une dernière question additionnelle, M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Oui, une petite additionnelle, M. le Président, au ministre de la Sécurité publique dont le poids est bien connu au Conseil des ministres. Est-ce qu'il entend intervenir auprès de la ministre de l'Énergie et des Ressources et d'Hydro-Québec afin d'empêcher, justement, que ne se fasse ce prolongement et afin que l'on collecte ce que lui-même entend faire disparaître et qui est à la base même de l'échec de ses propres négociations avec le conseil de bande, c'est-à-dire les guérites qui empêchent la circulation des populations et des biens entre la réserve et l'extérieur de la réserve?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Ryan: M. le Président, il est arrivé à plusieurs reprises au cours de la dernière année que la ministre de l'Énergie et des Ressources et les autorités d'Hydro-Québec sollicitent l'avis du ministre de la Sécurité publique quant à certains dangers pouvant résulter de situations sur l'une ou l'autre réserve. Les avis ont été donnés en toute franchise et, en générai, ils ont été respectés. Alors, si cette question demande qu'on l'examine, moi, je n'en étais pas au courant. Si on me demande mon avis, je le donnerai volontiers, c'est entendu.

M. Chevrette: Est-ce que le ministre de la Sécurité...

Le Président: Une courte dernière additionnelle.

M. Chevrette: Est-ce que le ministre de la Sécurité publique considère que les guérites, les postes de garde constitués, ne devraient pas plutôt faire l'objet d'une ordonnance de démolition ou de dérangement, plutôt que de s'interroger sur un éventuel prolongement du réseau électrique pour maintenir en place des choses qui devraient faire l'objet de démolition et de déplacement?

Le Président: M. le ministre. (14 h 30)

M. Ryan: II y a deux choses dans ceci. Il y a, d'abord, l'aspect proprement juridique sur lequel je verrai à obtenir une opinion détaillée d'ici à une couple de jours au plus. Il y a l'autre aspect que j'ai évoqué à maintes reprises en cette Chambre, c'est qu'une action de cette nature faite sur le territoire immédiat du village de Kahnawake entraîne une modification radicale par rapport à la ligne de conduite suivie depuis 1979-1980 par les gouvernements du Québec. Et, avant de le faire, il faut qu'on mesure toutes les implications, qu'on fasse le choix franchement et complètement, en toute lucidité, et nous n'en sommes pas là pour l'instant.

Le Président: En question principale, maintenant, M. le député de Bertrand.

Mesures pour assurer la survie de Pétromont

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Suite aux graves difficultés qui menacent l'avenir de Pétromont, le Conseil national du Parti québécois appuyait unanimement, en fin de semaine, la survie de Pétromont comme noyau de la pétrochimie québécoise.

Des voix:...

M. Beaulne: Pour satisfaire ses banquiers... Une voix:...

M. Beaulne: ...la compagnie doit procéder, d'ici à la fin du mois, à un refinancement majeur de 80 000 000 $, auquel sont appelés à contribuer les deux actionnaires, Union Carbide et la SGF, ainsi que la SOI et les travailleurs eux-mêmes. Le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie peut-il confirmer à cette Chambre que lui aussi entend assurer la survie de Pétro-mont et peut-il nous dire comment il entend s'y prendre puisque le temps presse?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie.

M. Tremblay (Outremont): Alors, le député de Bertrand comprend maintenant, lorsque je lui disais en cette Chambre, la semaine dernière, qu'il avait une connaissance superficielle et incomplète du dossier, avant qu'on soit interrompu par un joyeux loustic, que j'avais raison.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Tremblay (Outremont): Alors, nous analysons le dossier très sérieusement et nous allons prendre toutes les décisions nécessaires pour assurer la réussite de la pétrochimie à Montréal et, principalement, dans l'est de Montréal.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Beaulne: Le ministre se rend-il compte maintenant, suite à la fermeture d'Alcools de commerce, qu'il y avait un lien avec Pétromont et peut-il nous dire comment, de façon concrète, il compte s'assurer que Pétromont procède efficacement à son redressement financier d'ici au début de janvier, échéancier que lui ont établi ses propres banquiers?

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Alors, s'il y avait eu un lien entre Alcools de commerce et Pétromont, le problème de Pétromont serait relié à des marchés. Tout l'éthylène de Pétromont est vendu; ce n'est pas une question de marché, c'est une question de prix. Donc, il n'y a aucun lien entre Alcools de commerce, une entreprise qui a des problèmes à cause d'une décroissance du marché et de la concurrence hors Québec depuis 1984. Et, en ce qui concerne les discussions qui ont lieu présentement en partenariat avec les institutions financières traditionnelles, les travailleurs et les travailleuses de Pétromont, les cadres de Pétromont, la SGF et Union Carbide... Parce que ce que vous ne dites pas, c'est que Union Carbide est complice d'une démarche pour diminuer la pétrochimie au Québec. Je regrette, ils sont partenaires de Pétromont; ils vont injecter des fonds et il y a également une demande au niveau de la Société de développement industriel du Québec. Alors, je pense qu'on n'a pas besoin de l'Opposition, encore une fois, des événements médiatiques à un congrès, pour essayer de responsabiliser une équipe ministérielle. M. le Président.

Des voix:...

Le Président: Oui. S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! Alors, pour compléter, M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Je dirais que l'Opposition, M. le Président, se réveille. Depuis qu'on a publié la stratégie des grappes industrielles, ils lisent, en arrière, des documents, puis c'est marqué le statut...

Le Président: À la question, M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Tremblay (Outremont): ...ou le point. Alors, dans ce sens-là, on n'a pas besoin de votre information. On analyse ce dossier-là depuis maintenant cinq ans, puis l'équipe ministérielle est pleinement au courant de la situation de la pétrochimie au Québec.

Le Président: Alors, en question complémentaire toujours.

M. Beaulne: Si le ministre trouve que ça va si bien en matière de pétrochimie, ne sait-il pas qu'à peine 30 % de la production de Pétromont trouve preneur ferme à l'heure actuelle et que 70 % est vendue à contrat à terme sur le marché "spot"? Et peut-il nous garantir que, dans le contexte du refinancement, le partenaire à 50 % de Pétromont, Union Carbide, mettra le même montant que son partenaire québécois, la SGF?

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): en 1984, m. le président, on a hérité d'une situation dans la pétrochimie et c'est le présent gouvernement qui a redressé la situation...

Des voix:...

Le Président: Un instant, s'il vous plaît. Un instant. S'il vous plaît! S'il vous plaît! Alors, la question a été posée... S'il vous plaît! Alors, la question a été posée, je demanderais aux collègues de laisser le ministre répondre, s'il vous plaît. Si vous avez des interrogations, revenez en question additionnelle. Alors, M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Alors, comme je le disais, en 1984, c'est le présent gouvernement qui a redressé la situation de la pétrochimie.

Une voix: Vous n'étiez pas là.

Une voix: Vous avez été élus en 1985.

M. Tremblay (Outremont): Regardez les bénéfices de l'entreprise Pétromont depuis 1986, 1987, 1988 et 1989, premièrement. Deuxièmement, c'est évident que la transaction va être faite sur une base d'affaires. Nous sommes des partenaires 50-50 et la SGF va injecter le même montant que Union Carbide pour la relance et la réussite de Pétromont.

Le Président: Alors, en question principale maintenant, Mme la députée de Chicoutimi.

Certificat d'admissibilité à l'école anglaise

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le Président, nous apprenons que, depuis un an, 650 nouveaux écoliers ont utilisé une faille de la loi 101 combinée avec l'article 23 de la Charte canadienne des droits, la clause Canada, pour confirmer leur admissibilité...

Des voix:...

Le Président: Un instant, s'il vous plaît. Je vais demander la collaboration des collègues. Alors, allez-y, madame.

Mme Blackburn: ...pour confirmer leur admissibilité à vie à l'école anglaise même si, en principe, ils n'auraient pas tous dû y avoir droit. En mai dernier, il y a déjà sept mois, le ministre de l'Éducation avait promis de colmater cette brèche et ce, par souci d'équité, disait-il. Il était alors question d'agir sur deux fronts: dans un premier temps, l'application pour l'année scolaire 1991-1992 d'une nouvelle directive selon laquelle un élève, pour être inscrit à une école anglaise, devra au préalable obtenir du ministère un certificat d'admissibilité et, dans un deuxième temps, le ministre devait proposer au gouvernement une modification au règlement d'application de la Charte de la langue française, chapitre VIII de la loi 101, afin que les personnes immigrant au Québec de façon permanente ne puissent faire croire à un séjour temporaire pour inscrire leurs enfants à l'école anglaise.

Ma question au ministre de l'Éducation: Le ministre de l'Éducation peut-il nous dire ce qu'il attend pour corriger la situation puisque la formule qu'il a privilégiée, celle de l'émission des certificats d'admissibilité à l'école anglaise, connaît de sérieux ratés au plan de son application?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Pagé: M. le Président, j'apprécie la question de Mme la députée de Chicoutimi. Ça vt me permettre de resituer les choses dans leur véritable perspective. Effectivement, j'ai constaté qu'une brèche, qu'une porte était ouverte dans cette loi qui est importante au Québec, qui est la loi 101, et qui permettait à des gens, des étudiants, des élèves dont les parents, dans certains cas, se sont amenés chez nous en demandant un certificat de sélection, demandant d'être reçus comme immigrants... Cependant, quand ils se présentaient à la commission scolaire, ils se déclaraient en séjour temporaire.

Partant de là, j'ai, au mois de mai dernier, eu de nombreux échanges avec le ministère des Communautés culturelles pour être certain de pouvoir échanger entre les deux ministères les informations reçues de la part de celles et de ceux qui s'inscrivent pour demander un certificat d'admissibilité à l'école anglaise, premièrement. Deuxièmement, j'ai eu l'occasion d'avoir un nombre d'échanges assez significatif avec, notamment, les commissions scolaires de la région de Montréal, mais même avec l'ensemble du territoire. Entre autres, aussi, avec la commission scolaire Western Québec, dans la région de l'Outaouais, pour être certain de la mise en place de mécanismes qui doivent ou qui devaient nous conduire - si je me réfère à l'article, et je vais vous dire comment j'entends le traiter - à une situation clarifiée dès septembre 1991.

Cependant, compte tenu que ces règles administratives devaient être ratifiées par une modification réglementaire, j'ai déposé au sein des organismes centraux un projet de règlement modifiant les règles en fonction de l'objectif recherché de colmater ces brèches. Le projet de règlement a été adopté dans tous les organismes centraux. Lorsqu'il est arrivé au Conseil des ministres, le Conseil des ministres a jugé plus opportun d'attendre le rapport que j'ai demandé au comité présidé par Mme Chambers.

Ceci étant dit, nous sommes à vérifier... Bon, alors, je m'arrête, d'abord. Continuez, madame. Je vais vous répondre pour le reste tantôt.

Le Président: En question complémentaire.

Mme Blackburn: M. le Président, devant l'échec des mesures qu'il a mises en place, échec qu'il constate lui-même puisqu'il propose un règlement, quand va-t-il faire adopter ce règlement pour modifier le règlement d'application de l'article 8 de la loi 101? Quand?

Le Président: M. le ministre. (14 h 40)

M. Pagé: je crois que c'est nettement exagéré de parler d'échec. je viens de vous dire, en clair, que, malgré le fait que la disposition ne soit pas adoptée par règlement, j'ai la conviction qu'elle est déjà mise en oeuvre dans un certain

nombre de commissions scolaires au Québec. C'est le rapport que j'ai demandé, qu'on vérifie - je comprends que c'est exhaustif - chacune des inscriptions et qu'on puisse me fournir le rapport dans les meilleurs délais, même si c'est long et exhaustif. Il y a des commissions scolaires au Québec, commissions scolaires anglophones, qui m'ont dit: M. le ministre, on accepte ces règles, on va les appliquer en collaboration avec votre ministère, lequel travaille conjointement avec les communautés culturelles.

Je sais que ça s'est appliqué dans certaines commissions scolaires au Québec. Cependant, l'autre élément, pour répondre à votre question bien concrète, moi, je prévois et je me propose de redéposer le dossier sur la table du Conseil des ministres, d'ici à la fin de janvier, compte tenu que j'attends le rapport du groupe présidé par Mme Chambers d'ici là.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Libman: M. le Président, to the Minister of Education. Would he perhaps seize upon this occasion to remind the Member for Chicoutimi, who happens to be the co-president of the committee studying the futur of the anglophone community in Québec... Would he not remind her that what she is referring to is less than 1 % of the student population and perhaps an insignificant issue to make out of this?

Le Président: M. le ministre.

M. Pagé: M. le Président, je ne sais pas si je vais répondre. Comme leader parlementaire du gouvernement, je ne suis pas convaincu que la question additionnelle de l'honorable député doive s'inscrire comme question complémentaire, mais comme c'est la période des fêtes et qu'on se veut généreux, je vais tenter d'y répondre.

Effectivement, pour le député et pour certaines personnes au Québec, on se réfère à une problématique qui n'en serait pas une, compte tenu du nombre d'élèves, comparativement aux 1 400 000 élèves qui sont dans nos écoles. Cependant, M. le député, vous conviendrez avec moi qu'on a une loi qui doit être administrée et qui doit être respectée. Vous êtes d'ailleurs le premier en Chambre, régulièrement, à rappeler aux autres collègues l'obligation qu'on a de respecter les lois, et c'est ce que j'entends faire.

Deuxièmement, je retiens vos préoccupations à l'égard du comité coprésidé par Mme la députée de Chicoutimi et j'espère que vous allez nous féliciter pour le comité que j'ai mis en place, moi, présidé par Mme Chambers.

Le Président: En question principale, maintenant, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Gel des surplus d'actif dans les fonds de retraite

Mme Harel: M. le Président, en décembre 1988, après une cascade de scandales des fonds de pension, le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle décrétait un gel sur les surplus des caisses de retraite, annonçant pour 1989 une décision sur la propriété des 900 000 000 $. Malgré le gel, les caisses continuaient de se vider quand même, puisqu'il était permis aux employeurs, et ça, depuis trois ans, de prendre des congés de cotisation, alors que les fonds ne sont même pas suffisants parfois, ou ne permettent pas l'indexation au coût de la vie. 160 000 000 $ d'argent non versé par les employeurs, en 1988; 170 000 000 $ en 1989. Nous attendons les chiffres de ces congés de cotisation pour 1990. Même les travailleurs de Simonds qui ont pu aller devant les tribunaux avant le gel s'inquiètent encore aujourd'hui, malgré le jugement favorable qui est intervenu, de savoir si l'employeur ne va pas traîner en longueur en allant en appel.

M. le Président, question au ministre: Quand va-t-il enfin cesser de tourner en rond en matière de ces surplus de fonds de pension?

Le Président: M. !e ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.

M. Bourbeau: M. le Président, c'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai pris la peine, au cours de la fin de semaine, de lire le jugement de 160 pages de la Cour supérieure dans la cause de Simonds dont parle la députée de Hochelaga-Maisonneuve. C'est un jugement intéressant qui me semble bien fondé et susceptible de générer beaucoup d'espoir pour les travailleurs du Québec qui sont dans des situations semblables. On ne peut que s'en réjouir. Ça prouve que le gouvernement avait raison, en décembre 1988, d'imposer un moratoire ou un gel sur les surplus d'actif dans les fonds de pension, pour faire en sorte d'éviter que des employeurs peu scrupuleux ne puissent se sauver avec la caisse. Il ne faudrait quand même pas généraliser et présumer que ce jugement-là va régler tous les problèmes. Il s'agit de dossiers qui sont spécifiques, de cas d'espèce, et il va falloir trouver une solution qui va tenir compte, dans chacun des cas, de la particularité de chaque dossier. C'est ce que nous nous employons à faire.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

Mme Harel: Est-ce qu'il faut comprendre, dans la réponse que le ministre a apportée, que l'espoir qu'il laisse aux travailleurs du Québec, c'est celui d'aller devant les tribunaux? Recon-

naît-il que depuis le moratoire, ii y a trois ans, justement les travailleurs ne peuvent même pas aller devant les tribunaux? Comment entend-il permettre la négociation de gré à gré avec chacun des régimes, ce qui supposerait de lever le moratoire? Qu'est-ce que c'est, l'action que le gouvernement va prendre à partir de maintenant?

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, après la commission parlementaire du mois de mars dernier, j'ai décidé de retirer la proposition gouvernementale et de soumettre le dossier à la Conférence permanente sur la main-d'oeuvre qui s'est penchée sur ce dossier-là au cours des mois du printemps 1991 jusqu'à l'été. J'ai également demandé à M. Claude Castonguay d'agir à titre d'expert-conseil et de participer...

Le Président: S'il vous plaît!

M. Bourbeau: ...activement aux travaux du comité dont la coordination, bien sûr, est assurée par la Régie des rentes du Québec.

M. le Président, après avoir examiné les différentes solutions soumises et avoir entendu les parties, M. Castonguay a présenté un rapport au cours de l'automne, en proposant une solution qui lui est apparue la plus appropriée dans les circonstances J'ai l'intention, au cours des prochaines semaines, de faire le point sur ce dossier et de porter de nouveau le dossier à l'attention de la Conférence permanente sur la main-d'oeuvre à sa prochaine réunion, en début d'année 1992.

Une voix: Bravo, André!

Le Président: Toujours en question complémentaire.

Une voix: II a proposé moitié-moitié, lui.

Mme Harel: M. le Président, est-ce que le ministre reconnaît qu'après avoir déposé et retiré sa proposition après la tenue d'une commission parlementaire, après avoir confié à M. Claude Castonguay la négociation entre le patronat et les syndicats, après avoir annoncé une législation pour cet automne, il doit maintenant arbitrer le différend qui s'est présenté entre le patronat et les syndicats, il doit simplement avoir de la volonté politique de régler ce dossier-là?

Une voix: C'est ça.

Mme Harel: alors, comment entend-il arbitrer le différend qui est très connu? j'espère, m. le président, qu'il le connaît suffisamment maintenant pour savoir...

Le Président: Mme la députée.

Mme Harel: ...pour nous indiquer dans quelle direction il va le trancher?

Une voix: II est gelé, ii est gefé Le Président: M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, il s'agit d'un dossier extrêmement complexe qui met en cause des surplus d'environ 1 000 000 000 $ dans les fonds de pension privés. M. le Président...

Le Président: Je vais demander la collaboration des collègues. Je ne voudrais pas qu'on interfère. De toute façon, je pense que ça a même nui à Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve qui a de la difficulté à comprendre. Je demanderais la collaboration de tout le monde. M. le ministre, complétez votre réponse, s'il vous plaît.

M. Bourbeau: M. le Président, il y a trois ans, la Régie des rentes estimait le surplus à 900 000 000 $. Aujourd'hui, on l'estime à 1 000 000 000 $. Ça infirme un peu les prétentions de la députée de Hochelaga-Maisonneuve qui nous disait tantôt que la baignoire était en train de se vider. Selon les chiffres que j'ai, elle serait plutôt en train de se remplir que de se vider. Il y a plus d'argent, maintenant, dans les surplus qu'il n'y en avait il y a trois ans. Ça ne veut pas dire, ça, qu'on doive laisser la situation perdurer. C'est un dossier extrêmement complexe qui doit se régler, autant que possible, par une négociation entre les employeurs et les travailleurs. Il n'y a pas deux cas semblables. Ce n'est pas vrai que, dans tous les cas, les surplus appartiennent aux employeurs et ce n'est pas vrai non plus que, dans tous les cas, les surplus appartiennent aux travailleurs. Il faut regarder chaque cas, un par un. J'espère, M. le Président, qu'on va réussir à convaincre les deux parties de s'asseoir et de trouver unp ^lution équitable pour tout le monde.

Le Président: Alors, toujours en question complémentaire.

Mme Harel: M. le Président, les deux parties sont assises depuis huit mois, à la demande du ministre, avec un médiateur qui était Claude Castonguay. La question, c'est de savoir si la décision, finalement, quand l'arbitrage se fera, va se prendre en équité Est-ce que le ministre est prêt à soutenir que, dans la décision d'attribuer des surplus des caisses de retraite, les questions d'équité prévalent sur des questions de droit?

Le Président: M. le ministre. (14 h 50)

M. Bourbeau: M. le Président, voilà une question extrêmement intéressante et lourde de

conséquences. Je suis personnellement convaincu qu'on doit tenir compte de l'équité, on doit aussi tenir compte du droit et des contrats. Alors, à mon avis, on ne peut pas tenir compte que des contrats et on ne peut pas non plus ne tenir compte que de l'équité. Il faut que les deux éléments soient compris dans une décision, étant donné que les dossiers, parfois, ont évolué et que les contrats n'ont pas tous été interprétés de la même façon par tout le monde. Quant à moi, je trouverais déplorable que, dans tous les cas, on soit obligés d'aller en Cour supérieure, en Cour d'appel et en Cour suprême, et parfois même aux dépens de la caisse elle-même, et je souhaite, quant à moi, que les parties puissent convenir d'une façon de régler ces dossiers-là qui permettrait un règlement rapide de la situation en toute justice pour tout le monde.

Le Président: En question complémentaire... principale, je m'excuse...

M. Dufour: Principale.

Le Président: ...M. le député de Jonquière.

Refus d'approbation par le ministre des

règlements fusionnant les services entre

Deux-Montagnes et Sainte-Marthe-sur-le-Lac

M. Dufour: Dans un geste sans précédent, les autorités de la ville de Deux-Montagnes poursuivent le ministre des Affaires municipales devant la Cour supérieure. Elles exigent du ministre qu'il approuve les règlements fusionnant les services entre Deux-Montagnes et Sainte-Marthe-sur-le-Lac. La municipalité de Deux-Montagnes a, dans cette démarche, l'appui de l'Union des municipalités du Québec ainsi que celui du député de Deux-Montagnes. Rappelons également que la majorité des conseils municipaux de Deux-Montagnes et de Sainte-Marthe-sur-le-Lac a approuvé ces ententes. Or, le ministre des Affaires municipales, qui aurait bien accueilli ce projet d'entente au mois de juin 1991, l'a carrément rejeté le 9 octobre dernier, geste qu'a qualifié de volte-face du ministre le maire de Deux-Montagnes. Ma question au ministre des Affaires municipales: Malgré son discours répété sur la nécessité des fusions et des ententes intermunicipales, le ministre, par ce refus, n'indique-t-il pas aux élus qu'aucune demande ne pourrait être acceptée sans l'unanimité des conseils municipaux et des citoyens et qu'à l'avenir il faudra des référendums pour agir?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Ryan: Je ne veux pas toucher aux aspects qui ont été portés devant les tribunaux. Je pense qu'on peut s'abstenir de ça. Mais le problème est là, qui ne relève pas uniquement des tribunaux, cependant. Si le député de Jonquière était un petit peu mieux informé de ce qui est arrivé dans ces deux municipalités situées dans le comté que représente le député de Deux-Montagnes à cette Assemblée, il se rendrait compte que ce que nous avons fait repose sur des considérations de réalisme élémentaire. Lorsqu'un projet de fusion de services majeur ou encore de municipalités est soumis à mon attention et que des représentations me sont présentées par des citoyens à rencontre du projet, je m'emploie à faire enquête pour vérifier le degré d'appui dont jouit le projet dans la population. Et si je constate qu'il existe une mesure de résistance ou d'opposition donnant à penser que, peut-être, la majorité des citoyens ne serait pas favorable, surtout lorsque le projet m'est soumis dans une période où il y a une élection qui est assez prochaine, à ce moment-là, je n'ai pas d'hésitation à suggérer que l'on recoure d'abord à un référendum. On l'a fait à quelques reprises, notamment dans le cas de Saint-Romuald et de Saint-Jean-Chrysostome avec beaucoup de succès et à la satisfaction générale. Et j'ai dit à la ville de Sainte-Marthe...

Le Président: En conclusion, M. le ministre.

M. Ryan: parce que, du côté de Deux-Montagnes, il n'y avait pas de problème... J'ai dit à la ville de Sainte-Marthe que, s'ils voulaient faire un petit référendum pour s'assurer de l'appui de leur population, je serais le plus heureux des ministres de pouvoir acquiescer à leur désir. Et je crois comprendre qu'après avoir été informée de tout le contexte de ce dossier l'Union des municipalités du Québec en arrive à une position beaucoup plus modérée.

Le Président: En question complémentaire.

M. Dufour: Oui. Comme le ministre ne peut pas ignorer sa propre loi, pourquoi, à chaque fois qu'il y a quelqu'un qui s'oppose, est-il obligé de faire une enquête et en même temps décrète-t-il un référendum? Pourquoi ne le dit-il pas clairement et ne l'écrit-il pas dans une loi pour que les élus sachent à quoi s'en tenir?

Le Président: M. le ministre.

M. Ryan: Nous ne lisons pas la loi de la même manière. La loi ne dit aucunement que le ministre serait une espèce de pilote automatique qui devrait sortir sa signature dès que quelqu'un lui a fait signe quelque part. La loi postule que le ministre usera en plus de son jugement et il tient à le faire.

Le Président: En question complémentaire.

M. Dufour: Comme il est question toujours

d'ententes intermunicipales où les conseils municipaux doivent se prononcer au début, est-ce que le ministre, par son attitude et sa façon de voir les choses, se rend compte qu'il est en frais de miner l'autorité des élus municipaux et qu'il fait de ceux-ci ses marionnettes?

Le Président: M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, c'est tout le contraire.

Le Président: Pour une question principale, M. le député de La Prairie.

Audiences publiques sur le phénomène de l'incinération des déchets

M. Lazure: Merci, M. le Président. On sait que les projets d'incinération, soit de déchets dangereux, d'huiles usées ou de déchets domestiques, soulèvent beaucoup de controverses et d'inquiétudes dans la population. On peut le constater en ce moment dans le Grand Montréal, tant pour la ville qui vient de déposer sa politique de gestion des déchets domestiques, incluant la modernisation de l'incinérateur des Carrières au coût de 75 000 000 $, que pour la Régie intermunicipale, les 26 municipalités autres que Montréal, qui veut construire à Montréal-Est un incinérateur de 200 000 000 $. La question au ministre de l'Environnement, M. le Président: Compte tenu de l'intensité des débats entourant toute la question de l'incinération, compte tenu que même le gouvernement de l'Ontario en est venu, il y a un an, à interdire toute construction d'un nouvel incinérateur, est-ce que le ministre ne pourrait pas au moins s'engager à recourir à l'article 6.3 de sa loi et demander des audiences publiques sur le phénomène général de l'incinération au Québec?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, en ce qui concerne la Régie intermunicipale des déchets de Montréal, je crois qu'il serait approprié, dans les circonstances, de mentionner le travail exemplaire accompli au cours des dernières années par cette Régie. L'incinération n'a pas été la première approche de cette Régie intermunicipale de Montréal, même au moment où mon actuel collègue, le ministre des Transports, en avait la responsabilité. On s'est d'abord attardé à implanter un peu partout sur l'île de Montréal, à l'exception de deux municipalités, la ville de Montréal comme telle et la municipalité de Montréal-Nord, la collecte sélective. Cette collecte sélective s'implante graduellement. Année après année, c'est davantage de personnes qui habitent l'île de Montréal qui sont desservies par cette collecte sélective. Lorsqu'on peut récupérer du contenu des déchets domestiques les éléments que l'on peut revaloriser nous accomplissons là, sur le plan environnemental, des progrès auxquels souscrit le ministère de l'Environnement du Québec. Nous entendons continuer d'accorder notre appui à cette Régie pour ses activités de récupération et de recyclage pour qu'elle implante encore davantage de cueillette sélective sur le territoire de lUe de Montréal.

Le Président: En question complémentaire.

M. Lazure: M. le Président, puisque le ministre ne répond pas du tout à la question, je la répète: Est-ce qu'il veut s'engager à demander au Bureau d'audiences publiques des audiences sur le phénomène de l'incinération au Québec et, particulièrement, sur la construction et la modernisation de l'incinérateur des Carrières? Est-ce qu'il le veut, oui ou non?

Une voix: Oui ou non?

Le Président: M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, la première question du député de La Prairie touchait deux volets comme tels: un volet touchait l'activité de la Régie intermunicipale des déchets de Montréal et le projet d'implanter un incinérateur par cette Régie dans l'est de Montréal. Le deuxième aspect de la question touchait spécifiquement le programme de gestion des déchets que vient de déposer la ville de Montréal et qui, lui aussi, a un aspect incinération qui est la modernisation de l'incinérateur des Carrières, avec lequel nous avons éprouvé beaucoup de problèmes au cours des dernières années. Dans l'un et dans l'autre cas, la position première du ministère de l'Environnement, je la répète - et ça ne s'applique pas simplement au territoire de IHe de Montréal, ça s'applique, M. le Président, et vous avez raison de le souligner, également sur le territoire de la rive sud en périphérie de Québec - la première intervention du ministère de l'Environnement et des intervenants municipaux se doit d'être la collecte sélective: sortir des poubelles ce que l'on peut revaloriser comme tel.

Lorsqu'on en arrive, M. le Président, à la fin du processus, qu'on a sorti tout ce qu'on pouvait sortir des poubelles, il faut à ce moment-là disposer de ce qui reste. On peut le faire par différentes méthodes... M. le Président, s'il n'y a pas moyen...

Le Président: Écoutez... Minute! Minute! Je comprends que le ministre est un peu long. Je l'inviterais à conclure, mais il n'y a aucune raison... La seule façon de procéder, c'est le leader de l'Opposition qui l'a actuellement, il s'est levé sur une question de règlement. Je vais

l'écouter. Les autres, je vous demanderais simplement de vous conformer au règlement. Si vous voulez intervenir plus rapidement, levez-vous et faites une question de règlement. Question de règlement, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Mais, là, vous venez de me confirmer qu'à l'avenir il faudra que je me lève moi-même, vous ne le ferez pas.

Le Président: Non... J'avise toujours, M. le leader de l'Opposition, vous le savez fort bien. Quand je juge que le temps est suffisamment long, j'invite le ministre à conclure, comme parfois j'invite également celui qui pose la question, de la même façon. (15 heures)

En conclusion, rapidement, M. le ministre, quelques secondes.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. J'en venais donc à ce qui reste: une fois qu'on a valorisé l'essentiel des déchets, il faut trouver une formule de disposition finale. Certaines propositions qui sont acheminées au ministère de l'Environnement préconisent, M. le Président, l'incinération. Dans le cas de la Régie intermunicipale, nous avons reçu le projet, il y aura effectivement des audiences publiques tenues par le BAPE, si nous recevons des...

Le Président: M. le ministre, s'il vous plaît!

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...demandes à cet effet, des citoyens concernés.

Le Président: Alors, c'est la fin de la période de questions. M. le député de Pointe-aux-Trembles, s'il vous plaft! S'il vous plaît! Alors, tel qu'annoncé précédemment, il y a une réponse différée par le ministre de la Santé et des Services sociaux qui répondra à une question posée le 12 décembre dernier par M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, concernant les négociations avec les médecins résidents. M. le ministre.

Réponse différée

Négociations avec la Fédération des médecins résidents et internes du Québec

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. Effectivement, ce sont des négociations qui ont débuté en janvier 1990 et qui ont cours depuis. Depuis septembre dernier, les négociations se sont intensifiées jusqu'en octobre, le 31 dernier exactement, où la Fédération des médecins résidents et internes du Québec a décidé, dans un geste, d'informer les négociateurs patronaux qu'elle voulait soumettre à l'arbitrage l'ensemble des questions qui n'avaient pas obtenu satisfaction à la table de négociation.

Après une réflexion de sa part, le 5 décembre, elle est plutôt revenue à la table de négociation pour négocier, et nous lui avons demandé, le 12 décembre, des informations additionnelles sur les nouveaux dépôts qu'elle nous avait faits. Il y aura rencontre, jeudi prochain le 19, pour tenter de finaliser les négociations.

Il est évident que le sujet qui est au coeur de ces discussions, c'est la garde. Dans ce cas-ci, on se rappellera, et c'est la raison pour laquelle ça a négocié pendant si longtemps, quen décembre 1990 une décision du tribunal proposait de faire une expérience-pilote dans quatre hôpitaux universitaires, sur la garde. Cette expérience se terminera à la mi-janvier, et les vice-doyens aux facultés de médecine se réuniront le 9 janvier pour jeter un dernier coup d'oeil en termes d'évaluation de l'expérience-pilote; nous pourrons, par la suite, tenter de conclure ces négociations.

Une voix: Voilà!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue en question complémentaire.

M. Trudel: Effectivement, M. le Président, comme le principal point d'accrochage c'est 72 à 80 heures de travail par semaine, est-ce que le ministre peut s'engager à communiquer avec les établissements de santé au Québec pour leur demander, à tout le moins, d'être très prudents au niveau de l'organisation des horaires de travail, spécifiquement pendant la période des fêtes, parce que tout cela pourrait avoir pour effet d'exacerber les parties, en particulier la partie syndicale là, les médecins résidents qui sont partie à cette négociation, et que ça pourrait entraîner une certaine dégénération de la négociation? Est-ce que le ministre peut s'engager à communiquer aux établissements cette demande d'être souples et très attentifs à l'organisation des horaires pendant le temps des fêtes parce que cette période des fêtes s'y prête de façon particulière, compte tenu des éléments du conflit en cause?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, oui, je veux rappeler que l'expérience-pilote qui a été menée est une expérience qui, selon les informations préliminaires que nous possédons, a été une expérience positive et qu'elle devrait très largement inspirer la terminaison de la négociation et qu'elle devrait par le fait même, aussi éclairer ceux qui auront à faire les périodes de garde durant les fêtes.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Alors, nous continuons nos travaux à

l'étape des motions sans préavis. M. le ministre des Communications.

Motions sans préavis

Félicitations aux gagnants et gagnantes du 6e Gala des prix Gémeaux

M. Cannon: Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Chambre pour présenter une motion sans préavis qui se lit comme suit: "Que l'Assemblée nationale félicite tous les gagnants et gagnantes du 6e Gala des prix Gémeaux de l'Académie canadienne du cinéma et de la télévision."

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre cette motion?

Une voix: Oui, il y a consentement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Consentement. Alors, j'inviterais tous les collègues, pour ceux qui ont des travaux en commission, à bien vouloir quitter l'Assemblée de la façon la plus rapide possible. Alors, allez-y, M. le ministre des Communications.

M. Lawrence Cannon

M. Cannon: Merci, M. le Président. Le 6e Gala des prix Gémeaux présenté hier soir par l'Académie canadienne du cinéma et de la télévision a souligné, comme il se doit, l'excellence des artisans et des artisanes de l'industrie télévisuelle ainsi que les performances des artistes québécois et québécoises. Je tiens à joindre ma voix à celle du gouvernement du Québec pour présenter mes plus vives félicitations à toute personne honorée lors de ce gala.

Le monde de la télévision au Québec connaît certaines difficultés, nous en sommes tous conscients. Toutefois, l'industrie de la télévision québécoise ne souffre d'aucun complexe en ce qui a trait à sa créativité, à son dynamisme et à sa source inestimable de talents.

Aujourd'hui, M. le Président, je veux rendre hommage à la diversité et à l'excellence des artisans et des artisanes ainsi qu'à tous les artistes québécois qui, depuis longtemps, nous ont habitués à une télévision de très grande qualité.

M. le Président, je veux également profiter de l'occasion pour souligner l'excellente performance de la Société Radio-Québec qui, par la qualité de ses productions et surtout par la compétence et le talent des personnes qui oeuvrent dans son tourbillon, s'est méritée une quinzaine de trophées. Grâce aux performances de tous ces individus, Radio-Québec a pu s'acquitter de son mandat télévisuel avec brio. Bien que l'industrie de la télévision traverse une période mouvementée, Radio-Québec a démontré, une fois de plus, qu'il est possible de faire de la télévision de haut calibre et accessible à tous.

Le Gala des prix Gémeaux a ceci de particulier, M. le Président. Outre le fait qu'il nous permette de souligner les performances des artistes que l'on connaît et que l'on voit, il nous offre également la possibilité de rendre hommage à tous ceux et celles qui travaillent dans l'ombre. Par leur souci du détail et leur professionnalisme, les artisans et artisanes du milieu télévisuel permettent au talent de nos artistes d'éclater au petit écran pour notre plus grand bénéfice.

M. le Président, c'est à toutes ces personnes que je veux rendre hommage aujourd'hui, et je veux également leur exprimer toute ma reconnaissance pour les merveilleux moments qu'elles nous offrent. Félicitations à tous les récipiendaires et merci de nous offrir une diversification d'aussi grande qualité. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Sur cette même motion, je cède la parole à M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Michel Bourdon

M. Bourdon: M. le Président, je souscris entièrement à la motion qui est devant nous et j'offre, moi aussi, mes félicitations à tous ceux qui ont gagné des prix hier soir. C'est évident que, comme membres de l'Assemblée nationale, on ne peut que se réjouir des nombreux prix Gémeaux que Radio-Québec a remportés puisque c'est cette Assemblée-ci qui vote les budgets de Radio-Québec, qui est notre télévision nationale.

À cet égard, je me réjouis qu'un Gémeaux ait été accordé à la série "L'Amour avec un grand A", de Radio-Québec, pour une émission qui s'intitulait "L'amour qui tue" que j'ai eu l'occasion de voir et qui, encore une fois, manifestait chez Radio-Québec et Janette Bertrand le souci d'aborder des sujets autrement réputés tabous, mais qui sont des problèmes de civilisation qui se posent. Je voudrais également souligner, M. le Président, l'émission "Le Club des 100 watts" qui a remporté, dans la catégorie jeunesse, cinq Gémeaux dont celui du meilleur animateur, remis à Marc-André Coallier. Et ça illustre, M. le Président, que, quand Radio-Québec prend la peine de faire des émissions vraiment différentes de celles des autres télévisions, eh bien, notre télévision d'État remporte du succès.

Je voudrais également souligner, toujours dans la même ligne de pensée, le Gémeaux qui a été accordé à Gérard-Marie Boivin pour 'Téléservice", également une autre émission de Radio-Québec, et aussi, en collaboration avec Multiculturalisme Canada. J'aimerais mieux Intercul-turalisme Québec, mais c'est l'organisme qui

finançait un prix ex aequo accordé à "L'Amour et la différence" et à "Passe-Partout", encore deux productions de Radio-Québec.

En fait, M. le Président, Radio-Québec se distingue tellement qu'on se demande pourquoi le gouvernement actuel diminue constamment le budget réel de Radio-Québec et pourquoi on a fermé cinq des neuf organisations régionales de Radio-Québec. S'il n'y a rien qui réussit autant que la réussite, pourquoi pénaliser une société d'État qui réussit bien ce qu'elle fait et qui le réussit bien quand elle exprime nettement et clairement sa différence. Et, à cet égard, M. le Président, je voudrais dire au ministre que lorsqu'un jour le Québec aura la pleine juridiction en matière de télévision, ce dont apparemment le ministre rêvait en septembre, il faudra avoir deux chaînes: une nouvelle Radio-Québec qui inclurait Radio-Canada actuelle, une chaîne grand public qui existe déjà, et, aussi, M. le Président, Radio-Québec actuelle qui devrait rester une télévision éducative, culturelle et, je l'ajoute, régionale afin que les régions du Québec soient mieux représentées en matière de télévision. (15 h 10)

M. le Président, je ne peux non plus passer sous silence l'appel du comédien Jean Besré, qui a déploré l'absence de politique culturelle du gouvernement actuel et le peu d'intérêt du premier ministre pour les questions culturelles. M. le Président, bien sûr, Jean Besré avait raison de le souligner. Au Québec et au Canada combinés, les industries culturelles représentent un chiffre d'affaires de 10 000 000 000 $ par année. Le chiffre de 10 000 000 000 $ devrait intéresser le député de Mille-Îles et le calmer; puisque Noël s'en vient, qu'il se calme donc! Je sais que, lorsqu'il n'est pas question de pont et qu'on parle de culture, ça l'énervé. Mais la ministre des Affaires culturelles devrait lui expliquer que même lui aurait droit, un jour, à avoir accès à la culture si le gouvernement remplit son engagement de consacrer 1 % de son budget à la culture.

Je voudrais également dire, M. le Président, que le gala d'hier soir ne doit pas nous faire oublier les problèmes considérables que la télévision francophone du Québec rencontre du fait des décisions du fédéral. Là-dessus, j'aimerais que le ministre des Communications dise à son voisin qu'il ressort d'une réponse du ministre à une question que je lui posais, la semaine dernière, qu'on est sur la même longueur d'onde, c'est le cas de le dire. Le fédéral, depuis trois ans, a donné un blanc-seing total, une déréglementation totale en matière de publicité télévisée, faisant comme si, dans une économie de marché, on pouvait, par décret, décider des budgets publicitaires des entreprises. C'est ainsi, M. le Président, qu'on a successivement accordé un permis pour un nouveau réseau de télévision, Télévision Quatre Saisons, qui joue un rôle important dont personne ne devrait, je pense, contester la pertinence. Mais, en même temps, on permettait à Radio-Québec de vendre davantage de publicité, à Radio-Canada de passer de 8 à 12 minutes et à tous les canaux spécialisés de vendre de la publicité télévisée, ce qui est un comble, M. le Président, parce qu'on sait que les canaux télévisés tels le Canal-Famille ou Musique Plus ou Super Écran, c'est de la télévision à péage. Alors, on a dit: La télévision à péage pourra également compter sur des revenus publicitaires. Le résultat, M. le Président, c'est qu'il y a au moins un réseau privé de télévision francophone du Québec qui est menacé dans son existence même.

On retrouve là, M. le Président, tous les débats qui ont lieu au Québec et au Canada sur la société distincte puisqu'au Canada anglais, le problème principal, c'est que la grande audience se tourne vers la télévision américaine aux heures de pointe et même à CBC. Alors, l'approche du CRTC, M. le Président, pour le Canada anglais a été de dire: Si on veut résister à l'envahissement culturel américain, il faut multiplier presque sans limites les signaux horaires de télévision canadienne. On parlait en termes de marché, M. le Président, au Canada anglais, d'un marché de 22 000 000 de citoyennes et de citoyens. Au Québec, pour la télévision francophone, on parle d'un marché de 6 000 000. Alors, la recette qui, sans doute, est bonne pour le Canada anglais ne l'est pas pour le Québec. Or, qu'est-ce qui est arrivé récemment, M. le Président? C'est que le fédéral a fait un sommet sur la télévision, à l'issue duquel le vis-à-vis du ministre des Communications a résumé le supposé consensus en disant, et je le cite au texte, M. le Président: "En télévision, le téléspectateur est roi". Comme on dirait en chinois, M. le Président, "Big Deal"! Après avoir dit ça, il n'avait rien dit parce qu'au Québec, il y a un problème sérieux, qui est le suivant: Télé-Métropole qui a déjà réalisé des profits, après impôts, de 15 000 000 $ ou 16 000 000 $ par année a réalisé un déficit de 50 000 000 $ dans les trois dernières années.

Je lisais, ce matin, un communiqué de CFCF, qui a déjà été une machine à produire des profits, qui disait qu'à cause de Télévision Quatre Saisons, et malgré des coupures très substantielles, M. le Président, qu'ils auraient cette année une perte de 25 000 000 $. Or, à cet égard, M. le Président, il faut être clair. L'État réglemente la télévision parce que les ondes sont un bien public. Comme les ondes sont un bien public, il faut aussi réglementer la publicité télévisée. Sinon, si on fait comme si la publicité avait une capacité illimitée d'absorber tout ce qui est proposé comme canaux de publicité télévisée, on se retrouve avec Télé-Métropole déficitaire, Quatre Saisons déficitaire. Pour mal faire, le fédéral, en plus, a coupé les budgets de Radio-Canada et a dit à la Société: Vous manquez d'argent, eh bien vendez plus de publicité.

Ce à quoi on assiste, M. le Président, c'est à une véritable guerre des prix qui est suicidaire dans la télévision francophone du Québec. Il y a des chiffres éloquents à cet égard-là, M. le Président, que le ministre connaît, j'en suis sûr. La quantité de publicité télévisée par 1000 téléspectateurs qui coûte, à Montréal, 140 $ coûte 280 $ à Toronto. C'est exactement ce que le fédéral a fait, M. le Président, comme si on ouvrait quatre stations de service sur un coin de rue où il y a de la place pour une seulement.

C'est sûr qu'il y a une guerre des prix que ça occasionne, et c'est au détriment de la télévision. En terminant, M. le Président, je dirai que notre télévision privée a comme problème d'être déficitaire et que les régions vont écoper. Québec risque d'être la prochaine. On parle de fermer Télé-Capitale qui appartient à TVA, donc, à Télé-Métropole, et de n'avoir qu'une antenne dans la capitale. Pourquoi? Pas parce que TVA est mal disposée vis-à-vis de son public de Québec, mais parce que le CRTC a fait en sorte que nos télévisions privées, francophones du Québec ne sont plus viables.

En résumé, M. le Président, si on veut donner d'autres prix Gémeaux l'an prochain à des productions télévisées, il faudrait que le fédéral reconnaisse enfin qu'il a fait du dégât en télévision au Québec, surtout en matière publicitaire, et qu'il faut qu'il ramasse son dégât parce que, sinon, qui sait si un jour le ministre des Communications n'aura pas le O.K. pour demander davantage de pouvoirs quand on voit à quel point le fédéral utilise mal les pouvoirs qu'il possède en matière de télévision.

En terminant, j'assure le ministre que chaque fois qu'il va aller dans le sens des intérêts de la télévision québécoise, il aura l'appui de l'Opposition officielle.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Pointe-aux-Trembles. Sur cette même motion du ministre des Communications, je cède la parole à Mme la ministre des Affaires culturelles.

Mme Liza Frulla-Hébert

Mme Frulla-Hébert: merci, m. le président. vous me voyez très heureuse de me joindre à mon collègue, le ministre des communications, pour souligner l'excellence de la production télévisuelle québécoise et celle de chacun et de chacune de ses artisans. au-delà de tout cet hommage qu'on rend aux comédiens et aux comédiennes, aux créateurs aussi et aux créatrices dont on a reconnu aussi le travail individuel, exceptionnel, il faut retenir aussi que si toutes ces productions ont obtenu autant de succès, c'est grâce à ces artisans qui contribuent de près ou de loin à donner de la vigueur, de la richesse et du rayonnement aussi à cette industrie.

Je vais arrêter ici le discours et je vais reprendre un peu ce qui a été dit hier - parce que j'y étais, aux Gémeaux - et ce que M. le député de Pointe-aux-Trembles a affirmé aujourd'hui. Hier, un des lauréats a tout simplement accusé le gouvernement de n'avoir rien fait pour la culture et, évidemment, le député de Pointe-aux-Trembles a usé de démagogie, comme on le connaît, pour appuyer, justement, cette affirmation. Je tiens seulement à souligner que, depuis 1985, le budget des affaires culturelles a augmenté de 45 %, le budget du théâtre a augmenté de 52 %, que nous rejoignons maintenant, avec notre réseau de bibliothèques, 88 % de la population. Je tiens aussi à souligner que, cette année, nous avons aboli la TVQ sur le livre, 32 000 000 $. Nous avons institué, après le rapport sur le financement des arts, un comité, le groupe Arpin. Nous avons fait la plus grosse commission parlementaire jamais tenue en ces lieux pour élaborer une politique culturelle. La semaine dernière, nous avons sauvé l'Orchestre symphonique de Montréal en y injectant 1 250 000 $ récurrents sur trois ans et en mettant sur pied un fonds de dotation. Nous avons sauvé Lanaudière en faisant acheter l'amphithéâtre par la Place des Arts. Alors, si c'est ça, ne rien faire, M. le Président, bien, parfait! on ne fera rien.

Ceci dit, oui, on demande une politique culturelle; on a raison. Et parce que nous sommes un gouvernement responsable, nous allons livrer une politique culturelle. Pourquoi pas avant? Parce que ça fait 30 ans qu'on se développe et parce qu'on a la maturité, après 30 ans, tout simplement, d'en avoir une, politique culturelle. Ce que je demande maintenant au milieu, c'est, au lieu d'interpeller chaque fois la ministre, chaque fois qu'ils ont l'occasion, parce qu'ils ont un micro ou parce qu'ils sont devant 1 500 000 auditeurs et qu'on ne peut pas répondre... Je demande tout simplement une certaine solidarité du milieu. On a comparé notre milieu au milieu de l'économie. On a comparé notre milieu à ce que Gérald Tremblay a fait et à l'accueil que Gérald Tremblay a eu du milieu économique. C'est parce que le milieu économique a été mature, suffisamment mature pour réaliser que ce qu'on lui proposait était un plan d'avenir. Je demanderai maintenant cette maturité au milieu de la culture. ceci dit, m. le président, on est fiers de ce qu'on fait au québec, on n'a rien à envier à personne. on investit face à cette culture québécoise, et chaque sou investi pour la culture est un sou investi à notre survie comme peuple francophone en terre d'amérique. merci, m. le président. (15 h 20)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la ministre des Affaires culturelles. Sur cette même motion, toujours sur la motion de M. le ministre des Communications, je reconnais M. le député de Westmount.

M. Richard B. Holden

M. Holden: Merci, M. le Président. Je n'avais pas l'intention d'intervenir aujourd'hui, mais, hier soir, j'ai regardé les Gémeaux et j'ai trouvé les propos de M. Besré déplacés, et absolument pas la place pour faire un discours politique. Ça me faisait penser à des occasions où M. Marlon Brando envoyait des délégués de la communauté autochtone pour faire des discours politiques, dans le temps des Oscars où les gens font de la politique. Je peux assurer la ministre que, contrairement à ce qu'on peut penser, les 100 700 personnes qui ont regardé ça l'ont appuyée au lieu d'appuyer M. Besré. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Westmount. Je cède maintenant la parole à M. le ministre des Communications pour lui permettre d'exercer son droit de réplique.

M. Lawrence Cannon (réplique)

M. Cannon: Merci, M. le Président. Quelques réflexions à la suite de l'intervention du député de Pointe-aux-Trembles qui, évidemment, confirmait par ses propos qu'une gestion bien serrée, une gestion bien faite à Radio-Québec, même si elle n'a pas des montants d'argent qui pètent la banque, permet quand même à cette société d'État de bien performer et d'aller chercher des prix dans l'industrie de la télévision, et des prix qui, évidemment, sont de grande qualité.

Le député a pris une trentaine de minutes pour résumer la problématique dans l'industrie télévisuelle québécoise. Cependant, au passage, il s'est permis de faire des commentaires tout à fait gratuits, commentaires auxquels je ne souscris pas, et ma collègue, la ministre des Affaires culturelles, a eu l'occasion de fournir la réplique. Jamais, M. le Président, un gouvernement n'a fait autant pour la culture que l'actuel gouvernement qui est ici, à l'Assemblée nationale. Jamais une personne ne s'est souciée de l'avenir culturel des Québécois comme l'actuelle ministre des Affaires culturelles. Jamais personne comme la députée et ministre ne s'est soucié de ça... Elle se rend effectivement là où elle doit se rendre, elle a tenu des commissions parlementaires, elle a fait des consultations. À chaque moment, elle est présente dans le milieu pour régler les problèmes qui sont là. Ce qu'elle a demandé et ce qu'elle demande, c'est la solidarité dans cette industrie, c'est de faire en sorte que nous puissions, comme collectivité, nous serrer les coudes et, comme collectivité, arriver à développer une politique qui, comme elle l'a mentionné, va venir, parce que ça fait 30 ans qu'elle est en attente. Mais durant le régime du Parti québécois au pouvoir, on a eu, évidemment, de grands discours; on a eu de grandes déclarations, mais très peu d'action. Pour une fois, M. le Président, on a maintenant une personne qui est prête à livrer la marchandise, puisque la consultation est maintenant terminée et on va passer à l'action.

Alors, en conclusion, M. le Président, je suis d'accord et je suis très heureux de voir que mon collègue, le député de Pointe-aux-Trembles, m'appuie dans mes démarches pour que l'industrie télévisuelle québécoise soit forte, soit solide et économiquement stable. J'espère pouvoir compter encore sur son appui pour qu'on puisse défendre les intérêts du Québec dans ce secteur-là. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre des Communications. Est-ce que la motion de M. le ministre des Communications, qui se lit comme suit, "Que l'Assemblée nationale félicite tous les gagnants et gagnantes du 6e Gala des prix Gémeaux de l'Académie canadienne du cinéma et de la télévision", est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. Pas d'autres motions sans préavis.

À l'étape des avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Bélisle: Leader adjoint, M. le Président. J'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 h 30 et, si nécessaire, de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission des institutions procédera à l'étude détaillée des projets de loi suivants, et ce dans l'ordre ci-après indiqué: projet de loi 172, Loi concernant la Convention des Nations unies sur les contrats de vente internationale de marchandise, et le projet de loi 174, Loi modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires.

Après les affaires courantes jusqu'à 18 h 30, de 20 heures à minuit et, si nécessaire, demain, le mardi 17 décembre 1991, de 9 heures à 11 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFon-taine, fa commission de l'aménagement et des équipements poursuivra l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé 294, Loi modifiant la charte de la ville de Québec, et entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé 296, Loi modifiant la charte de la ville de Montréal.

Enfin, M. le Président, j'avise également cette Assemblée que demain, le mardi 17 décembre 1991, de 9 heures à 11 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission du budget et de l'administration entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé 305, Loi concernant la continuation de l'entreprise d'assurance de Les Coopérants, société mutuelle d'assurance-vie et le

maintien de l'existence de cette compagnie. Je dépose mes avis, M. le Président.

Le Président: Très bien, M. le leader adjoint. Est-ce qu'il y a consentement concernant le début des travaux des commissions à 9 heures dans les deux derniers cas? Il y a consentement? Consentement.

M. Bélisle: M. le Président, si vous me permettez...

Le Président: Oui, M. le leader adjoint.

M. Bélisle: ...un dernier avis à l'intention de tous nos collègues qui siègent ici, à l'Assemblée, bien entendu. À cause de la journée historique concernant le Bicentenaire, demain, l'Assemblée nationale et ses commissions commenceront à siéger à compter de 9 heures jusqu'à 11 heures, demain matin, plutôt qu'aux heures normales de 10heures à 12 h 30.

Le Président: Très bien, M. le leader adjoint du gouvernement.

Je voudrais vous aviser qu'aujourd'hui, le 16 décembre 1991, au Château De Maizerets, à Québec, la Commission d'étude des questions afférentes à l'accession du Québec à la souveraineté se réunira en séance publique de 15 h 30 à 17 h 30 et en séance de travail de 17 h 30 à 18 h 30.

Demain également, le 17 décembre 1991, de 11 heures à 12 h 30, à la salle louis-joseph-papineau, la commission du budget et de l'administration se réunira en séance de travail.

Demain, le 17 décembre, de 9 heures à 11 heures, au Château De Maizerets, à Québec, la Commission d'étude des questions afférentes à l'accession du Québec à la souveraineté se réunira en séance publique. Donc, il y a consentement, évidemment, à la dérogation concernant le début des travaux dans ce dernier cas. Consentement. (15 h 30)

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Décision du président sur la recevabilité du projet de loi 197

Le Président: maintenant, aux renseignements sur les travaux de l'assemblée, tel que je m'étais engagé tantôt, je vais maintenant rendre la décision sur la question que j'avais prise en délibéré.

Je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur la régularité du projet de loi 197, Loi sur la limitation des dépenses budgétaires, dont l'auteur est le député de Saint-Louis.

On se rappellera qu'à la séance de jeudi dernier, le 12 décembre, le leader et le leader adjoint de l'Opposition officielle ont soulevé la régularité de ce projet de loi avant que l'Assemblée ne puisse s'en saisir. On m'a fait part d'une abondante argumentation, tant du côté de l'Opposition que du côté ministériel. Je remercie les députés qui ont bien voulu intervenir sur cette question très importante. Ils ont ainsi contribué à donner à la présidence un meilleur éclairage sur la question complexe de l'initiative financière de la couronne.

En tant que législateur, vous savez sans doute que les prérogatives de la couronne en matière financière tirent leur source de la Loi constitutionnelle de 1867. Le préambule et les articles 9, 54, 58 et 90 de cette loi fondamentale établissent les assises de ces principes qui connaissent inévitablement leur prolongement dans la procédure parlementaire. Au Québec, nous retrouvons ces prolongements, mis à part le texte constitutionnel lui-même, à l'article 30 de la Loi sur l'Assemblée nationale et à l'article 192 du Règlement de l'Assemblée nationale.

Mais avant de m'engager dans le coeur de cette décision, j'aimerais attirer l'attention des députés sur quelques caractéristiques générales du processus budgétaire dans les divers Parlements du monde.

J'emprunterai ces quelques observations au traité intitulé "Les Parlements dans le monde", ouvrage volumineux et assez complet préparé par le Centre international de documentation parlementaire de l'Union interparlementaire. Je crois qu'elles nous aideront à mieux évaluer nos propres règles. Elles nous permettront également de vérifier si des compétences respectives des pouvoirs exécutifs et législatifs du Québec se distinguent considérablement de la situation prévalant dans d'autres pays qui sont dotés d'une institution parlementaire.

Tout d'abord, une première citation sur l'évolution et le développement de la compétence budgétaire au sein des États. "dans l'activité du parlement, les problèmes financiers, au premier rang desquels figure l'examen du budget de l'état, occupent une place à part qui résulte essentiellement de l'évolution historique du rôle du parlement. le droit financier étant couramment considéré, de nos jours, comme une branche accessoire du droit constitutionnel, on a tendance à perdre de vue qu'en réalité il en est la source. la compétence financière des assemblées représentatives a, en effet, précédé les prérogatives d'ordre politique. elle a constitué le noyau central autour duquel se sont progressivement fixées les institutions des régimes constitutionnels modernes. le parlement a donc puisé ses forces dans sa lutte pour protéger la nation contre les exactions financières des princes." fin de la citation.

On constate que dans la plupart des États du monde, la lutte pour le contrôle des finances publiques a déterminé le mode d'organisation de ces États et le partage des responsabilités au sein mêmes de ces États.

On lit encore dans le traité de l'Union interparlementaire: "La prépondérance de l'exécutif se manifeste d'une façon absolue dans la phase préliminaire du processus budgétaire. Dans tous les pays, une rare unanimité se dégage pour admettre que le gouvernement est seul compétent pour préparer le budget et le présenter au Parlement."

Et un peu plus loin: "II convient donc que l'exécutif ait toute latitude pour élaborer et déterminer, dans les moindes détails, ses modalités. "La compétence de l'exécutif s'explique en second lieu par des raisons d'ordre technique. Le gouvernement est seul à connaître les besoins des administrations publiques et les rendements possibles des recettes. "La complexité du budget est telle qu'un groupe restreint d'individus, particulièrement informés et compétents, est seul capable d'assumer actuellement la responsabilité de son élaboration. L'homogénéité essentielle n'est guère compatible avec l'intervention d'une assemblée ; législative nombreuse." Fin de la citation.

Dans le même ouvrage, sous la section ; intitulée "Le rôle des Parlements dans la préparation du budget", on y lit ce qui suit: "II est rare que le Parlement intervienne dans la phase de préparation de la procédure budgétaire. Dans presque tous les pays, le Parlement est privé du droit d'initiative en matière budgétaire. Il lui reste le droit d'amender le projet gouvernemental sous certaines conditions." Fin de la citation.

En terminant, j'aimerais mentionner un dernier extrait du traité publié par l'Union interparlementaire. On y précise ce qui suit: "le budget est donc une simple représentation chiffrée du programme du gouvernement et acquiert sa valeur juridique par le vote des assemblées parlementaires. en le sanctionnant, elles accordent à l'exécutif une double autorisation: d'abord, celle de recouvrer les recettes, ce qui suppose que les impôts ne peuvent être prélevés chaque année sans le consentement des représentants de la nation; ensuite, les assemblées, en approuvant le budget, autorisent l'exécutif à engager les dépenses. comme les impôts, les dépenses doivent être autorisées par le parlement." fin de cette dernière citation. | ces quelques extraits me paraissent indi- catifs et très révélateurs quant à la localisation de la détention du pouvoir d'initiative budgétaire j à travers les états du monde.

Avant d'aborder les règles qui régissent chez nous pareille matière, j'aimerais que les députés réalisent la position délicate où se trouve placé votre serviteur. Le président de l'Assemblée nationale en est son représentant. D'une part, il incarne par sa fonction le pouvoir, la dignité et l'honneur de la Chambre, comme le mentionne l'auteur Beauchesne dans la dernière édition de son traité. À ce titre, il doit, notam- ment, veiller à la protection et au maintien des droits et privilèges de l'Assemblée et de ses membres comme il y est précisé à l'article 2 de notre règlement.

D'autre part, votre président doit voir au respect de la procédure de l'Assemblée qui est régie, précisent les articles 179 et 180 de notre règlement, par la loi, par le règlement de l'Assemblée et ses règles de fonctionnement. On doit ajouter que la procédure de l'Assemblée est aussi régie par ses ordres spéciaux et, enfin, par ses précédents et ses usages.

La présidence de l'Assemblée nationale défendra toujours vigoureusement les responsabilités et prérogatives de cette honorable Assemblée. Elle concourra toujours avec empressement à toute initiative et même à toute loi venant accroître et favoriser l'exercice des responsabilités du député législateur et con-j trôleur. Ce faisant, toutefois, elle ne peut ignorer les règles de droit dont la stricte application lui incombe. On peut discourir longuement sur leur utilité ou opportunité, mais il demeure que, pour le moment, nous devons tous nous y soumettre.

Confronté à un problème mettant en cause la prérogative financière de la couronne, un ancien président de la Chambre des communes du Canada, M. Lucien Lamoureux, déclarait ce qui suit dans une décision rendue le 27 mars 1972, et je cite: "L'honorable député a affirmé que si effectivement la présidence jugeait que l'un des bills ou tous lésaient la prérogative de la couronne à cet égard, cette disposition du règlement devrait être considérée comme étant archaïque. L'honorable député comprendra sans doute que la présidence ne saurait passer outre à une règle aussi fondamentale. Si, à l'égard de l'un quelconque de ces bills, la présidence est persuadée que l'initiative financière de la couronne est vraiment en jeu, elle ne peut faire autrement que de les écarter. Voilà la conclusion que j'ai tirée à l'égard de trois des sept bills en cause." Fin de la citation.

Ce qui pouvait sembler archaïque et contraignant en 1972 ne l'est sans doute pas moins presque 20 ans plus tard. Pourtant, il s'agit là des fondements mêmes de notre régime politique. On doit donc s'en accommoder ou les changer. Quant au président, il n'a pas le choix de les faire respecter.

Venons-en maintenant aux faits. Le projet de loi 197 contrevient-il au principe de l'initiative de la couronne en matière financière? Au Québec et dans le reste du Canada, quels sont les contours de ce principe et qu'impliquent-ils? Je tenterai de les esquisser pour les appliquer au projet de loi 197.

Je rappelle aux députés que j'ai pris connaissance du contenu de ce projet de loi, bien qu'il ne soit pas encore distribué aux membres de l'Assemblée. En effet, en vertu de

l'article 232 du règlement, le député qui désire présenter un projet de loi doit en faire parvenir copie à la présidence avant le début de la période des affaires courantes. C'est ainsi que j'ai pu évaluer précisément l'implication de la mesure proposée sur la prérogative de la couronne.

Il est vrai que l'angle sous lequel se pose le problème est tout à fait inhabituel, je dirais même insolite. Le projet de loi propose de plafonner en quelque sorte les dépenses du gouvernement pour les prochaines années. Il cherche à contraindre d'une façon bien précise le gouvernement en matière d'équilibres financiers. Cette contrainte s'imposerait au gouvernement avant même que ne s'amorce le processus de préparation des crédits budgétaires. il ne s'agit donc pas d'un cas classique où l'on propose d'ajouter aux besoins financiers de l'État. En d'autres mots, il ne semble pas que cette initiative, pour être satisfaisante, impliquerait un déboursé à même les recettes du gouvernement du Québec. Cependant, je dois quand même m'assurer que cette contrainte ne constitue pas un empiétement sur les prérogatives de la couronne.

Abordons maintenant les règles qui régissent chez nous la prérogative de la couronne en matière financière. Dans la troisième édition du "Précis de procédure" de la Chambre des communes du Canada, on peut y lire ce qui suit, et je cite: "Les principes sur lesquels reposent les procédures financières en vigueur au Canada sont le produit de l'évolution du gouvernement de type parlementaire et de la Grande-Bretagne et des relations financières qui existaient entre la couronne et le Parlement. "pour comprendre tout le système par lequel r le gouvernement obtient les recettes nécessaires pour faire face à ses dépenses, il faut savoir que c'est la couronne qui demande des fonds et le parlement qui les octroie. autrement dit, les demandes de fonds doivent émaner de la couronne qui se fait conseiller par son cabinet." fin de la citation. (15 h 40)

La cinquième édition de Beauchesne est au même effet. Je crois utile de lire en entier aux députés le commentaire 539 de cet ouvrage, et je cite: "539. 1) Sur le plan financier, les principes qui régissent les rapports financiers entre la couronne et le Parlement sont les mêmes que ceux qui s'appliquent au Royaume-Uni. "2) Le pouvoir exécutif s'incarnant dans le Souverain, c'est ce dernier à qui on confie la gestion des recettes tout entières de l'État et des décaissements exigés par le service public. En conséquence, la couronne, sur avis conforme de ses ministres responsables, fait connaître aux Communes les besoins financiers du gouvernement. En contrepartie, les Communes votent les subsides nécessaires et, sous forme d'impôts ou autres prélèvements sur le Trésor public, donnent au gouvernement les "voies et moyens" nécessaires. Bref, la couronne demande de l'argent, les Communes le lui accordent et la Chambre des Lords avalise ces subsides. Il reste que les Communes ne votent pas de subsides si ceux-ci ne paraissent pas nécessaires au service public conformément à l'avis donné par la couronne, c'est-à-dire par ses conseillers constitutionnels." Fin de la citation.

L'une des règles budgétaires les plus fondamentales est à l'effet qu'aucun denier public ne peut être dépensé sans une autorisation parlementaire préalable. Cette règle, nous disent les auteurs Dussault et Borgeat, domine l'ensemble du processus budgétaire. Ils ajoutent à ce sujet, et je cite: "Plus qu'une simple formalité de procédure, l'adoption parlementaire du budget des dépenses répond à l'un des principes de base du parlementarisme. Elle repose en effet sur le principe de la suprématie parlementaire. Comme le dit Maurice Duverger, "le dernier mot revient au Parlement en matière budgétaire"." Fin de la citation.

Les mêmes auteurs abordent ensuite deux principes constitutionnels inhérents aux projets de loi à caractère financier: le droit d'initiative du gouvernement et le privilège de la Chambre basse. Sur le premier principe, ils s'expriment ainsi: "Dans un système parlementaire de type britannique, seule la couronne possède le privilège de proposer au Parlement des lois allouant des crédits ou levant des impôts. Ce privilège de l'Exécutif trouve son fondement juridique dans la Magna Carta. Traditionnellement, ce privilège avait pour but de garantir que le Parlement accorde au Souverain les deniers requis pour ses activités. Il se fondait aussi sur les appréhensions du Souverain, qui entretenait à l'égard des représentants du peuple une attitude méfiante et qui en aucun cas n'aurait accepté qu'ils puissent voter des lois à caractère financier sans son accord préalable. "Aujourd'hui, ce privilège de l'Exécutif est fréquent dans les principaux pays démocratiques, où la préparation du budget constitue une activité généralement attribuée à l'Exécutif plutôt qu'au Parlement. Cette situation s'explique par le fait que les parlementaires ne sont pas organisés pour élaborer les prévisions budgétaires du gouvernement; leur fonction est plutôt d'adopter ou non ce qui leur est proposé. En ce sens, la prérogative de la couronne concernant les lois de crédits a aujourd'hui pour effet d'assurer une meilleure planification et une meilleure cohésion des dépenses de l'État." Fin de la citation.

Le deuxième principe veut que seule la Chambre basse du Parlement est compétente pour proposer des projets de loi à incidence financière. Acquis de haute lutte dans un contexte

d'équilibre de pouvoirs entre les membres élus et les membres nommés du parlement, comme le j mentionnent les mêmes auteurs, ce principe n'est i pas en cause dans la présente situation. , au parlement britannique, l'initiative fi- / nancière de la couronne constitue l'une des : quatre règles de base de la procédure financière. l'ouvrage réputé de may fait état de ces quatre règles et les commente longuement. voici un i court extrait qui exprime bien toute l'importance \ de la règle nommée 'the financial initiative of the crown": "When, with the commencement of par-liamentary control over the Exchequer, the granting of Supply was differentiated into two functions - the voting of sums of money and the provision of revenue by taxation - it was accepted without question by the House of Commons that the rule applied to both of the now clearly distinguished functions of Supply and of Ways and Means, and to any business which belonged to either of theses classes. "In these matters the initiative is reserved to the Crown under constitutional practice and its exercise is implied in procedure rather than expressly asserted. An announcement that estimates will be laid before the House of Commons is contained in the Queen's speech at the opening of Parliament; they are presented "by command" of Her Majesty; and the resolutions by which they are voted make them in terms grants to the Queen." Fin de la citation.

La couronne demande donc les subsides et le Parlement les accorde. La couronne ou, si l'on veut, le gouvernement demande que le Parlement mette à sa disposition les crédits nécessaires pour le paiement des dépenses du gouvernement.

Une autre citation de l'auteur May décrit bien ce processus qui fonde et délimite des compétences exclusives entre la couronne et l'Assemblée sur les diverses étapes du processus budgétaire. Voici comment l'auteur l'explique, et je cite: 'The Sovereign, being the executive power, is charged with the management of all the revenue of the State, and with all payments for the public service. The Crown, therefore, acting with the advice of its responsible ministers, makes known to the Commons the financial requirements of the government; the Commons in return, grant such aids or supplies as are required to satisfy these demands; and they provide by taxes, and by the appropriation of other sources of the public income, the ways and means to meet the supplies which they have granted. Thus the Crown demands money, the Commons grant it and the Lords assent to the grant: but the Commons do not vote money unless it is required by the Crown, nor do they impose or augment taxes, unless such taxation is necessary for the public service, as declared by the Crown through its constitutional advisers." Fin de la citation.

II ressort de la lecture de certains auteurs traitant de cette question que la couronne et l'Assemblée ont chacune leurs prérogatives qui ne sauraient souffrir d'empiétement sans mettre en jeu l'équilibre de nos institutions. L'Exécutif et l'Assemblée exercent leurs prérogatives en toute suprématie dans les bornes qui leur sont réservées en propre.

Fixer le montant du déficit des opérations courantes du gouvernement pour les années à venir m'apparaît porter atteinte au principe de l'initiative de la couronne. Pareille mesure viendrait établir une contrainte sur les montants des prochaines recommandations de la couronne. Ceci m'apparaît aller bien au-delà de ce qui est permis en vertu de l'autorité reconnue à cette Assemblée. Ce n'est pas là que réside sa souveraineté.

Le contrôle de l'Assemblée ne s'exerce pas a priori ou, si l'on veut, au début du processus des prévisions budgétaires. Le champ d'intervention de l'Assemblée commence dès le dépôt des crédits budgétaires à l'Assemblée nationale. Il est vaste. C'est à ce moment que l'Assemblée peut diminuer ou refuser les montants réclamés par le gouvernement. C'est lors de cette étude des crédits budgétaires que l'Assemblée peut exiger l'élimination des déficits gouvernementaux au solde des opérations courantes.

Trois règles fondamentales consacrent l'emprise unique et le rôle majeur de l'Assemblée dans le processus budgétaire. Les auteurs Dus-sault et Borgeat les formulent comme suit, et je cite: "La règle de l'annualité budgétaire "Dans les lois sur les crédits, l'autorisation parlementaire accordée au gouvernement de prélever un montant d'argent sur le fonds consolidé du revenu est restreinte à une année financière. Inscrite dans les règles du parlementarisme britannique depuis le XIXe siècle, la règle de l'annualité budgétaire a été instituée pour assurer au Parlement un contrôle régulier des finances publiques. "La règle de la spécialité budgétaire "L'autorisation que donne annuellement le Parlement de prélever sur le fonds consolidé du revenu ce qui est requis pour couvrir les dépenses de l'administration n'est pas donnée en bloc, pour un seul montant global; elle est répartie en une multitude de programmes ou, le cas échéant, de postes budgétaires. Les crédits accordés à un programme doivent donc être utilisés aux seules fins de ce programme, étant donné que le Parlement a fixé dans la loi la part de chacun d'eux. "la règle de la limitation budgétaire "La limitation du montant des crédits alloués est à la fois la plus importante et la plus simple. Elle interdit de dépenser plus que les crédits autorisés: le montant des crédits votés annuellement constitue un maximum qui ne peut être dépassé." Fin de la citation.

En matière budgétaire, il est essentiel d'éviter toute méprise. L'Exécutif et l'Assemblée nationale sont des organes de l'État qui détiennent, dans le cadre du processus budgétaire, des fonctions spécifiques. Les deux participent d'une manière décisive à l'élaboration du budget annuel de l'État.

Notre règlement offre, en outre, une multitude d'occasions de contrôler les dépenses du gouvernement, à l'Assemblée comme dans les commissions parlementaires. Les députés y jouent un rôle irremplaçable, exigeant des membres du gouvernement qu'ils rendent compte de leur administration.

On peut également souligner la possibilité de proposer des mesures législatives d'une portée majeure comme s'en sont prévalu récemment nos 5^ collègues de Marie-Victorin et de Verdun.

Voilà autant de façons de contrôler les représentants du pouvoir exécutif, de leur faire savoir quelles devraient être leurs priorités et à quels programmes les crédits budgétaires devraient être affectés.

Pour les divers motifs précédemment énoncés, je dois déclarer le projet de loi 197 sur la limitation des dépenses budgétaires contraire au principe de l'initiative financière de la couronne. Je ne puis donc autoriser l'auteur de ce projet de loi a proposer que l'Assemblée nationale s'en saisisse.

Je vous remercie de votre attention. Ceci met donc fin à la période des affaires courantes. Nous allons maintenant procéder aux affaires du jour. Alors, M. le leader du gouvernement. (15 h 50)

M. Pagé: M. le Président, je vous invite à appeler l'article 4 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi 404 Adoption du principe

Le Président: À l'article 4 du feuilleton, M. le leader du gouvernement et ministre de l'Éducation propose l'adoption du principe du projet de loi 404, Loi modifiant la Loi sur les conditions de travail et le régime de pension des membres de l'Assemblée nationale et d'autres dispositions législatives. Donc, à ce moment-ci, je vais céder la parole à M. le leader du gouvernement et ministre de l'Éducation.

M. Michel Pagé

M. Pagé: Merci, M. le Président. L'honorable lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi et il en recommande l'étude à l'Assemblée.

M. le Président, c'est avec fierté que je présente ce projet de loi malgré quelques critiques qui ont été portées à mon attention comme leader parlementaire du gouvernement, malgré, aussi, entre guillemets, que l'opportunité d'amor- cer l'étude de ce projet de loi à ce moment ici a été questionnée ou formulée. Il est dans la normale des choses, compte tenu d'un processus qui a été amorcé ici même à l'Assemblée nationale par le Bureau, il est donc normal, explicable que le projet de loi soit appelé.

Avant d'amorcer l'analyse du contenu du projet de loi, vous me permettrez, M. le Président, de faire un bref historique, persuadé que celles et ceux qui nous écoutent vont comprendre la pertinence d'en arriver aujourd'hui à une telle législation. M. le Président, il y a une de ces perceptions dans le public, et j'espère être en mesure de rétablir certains faits dans le cadre de cet échange. Il y a une perception dans le public comme quoi les régimes de retraite applicables à celles et ceux qui ont le privilège et l'honneur de les représenter seraient des régimes très généreux, exorbitants, bon, etc. m. le président, j'entends donc dans le cadre de cette intervention, dans l'heure qui m'est allouée, j'entends donc tout faire pour véritablement resituer les choses dans leur c véritable perspective. c'est en1964, comme on le ' ' sait, que l'assemblée nationâtit pour la première fois, s'est dotée d'une législation devant régir les conditions de retraite des membres de l'assemblée nationale. ce régime s'est appliqué jusqu'en 1983. jusqu'en 1983, donc, en vertu de ce premier régime de retraite applicable à un certain nombre de parlementaires, en partie seulement... il faut convenir que la loi sur la législature prévoyait l'octroi d'une rente de retraite à tout député qui cessait d'être membre de l'assemblée nationale.

C'est donc dire que, de 1964 à 1983, toute personne qui avait siégé à l'Assemblée nationale, à certaines conditions, recevait une rente de retraite immédiatement après son départ. Les seules conditions qui étaient imposées pour avoir droit à cette rente étaient d'avoir accompli deux mandats totalisant une durée minimale de cinq ans. C'est donc dire qu'à venir jusqu'à 1983, toute personne qui était élue ici, peu importe son âge, cette personne, il suffisait qu'elle soit élue une première fois, elle devenait députée, elle était réélue et, en autant qu'elle avait siégé cinq ans, elle avait le droit immédiatement à une rente de retraite. L'âge du député, au moment où il quittait ses fonctions, n'était pas un facteur considéré. On ne prenait pas en compte l'âge du député.

Je me permettrai de vous dire, M. le Président que, personnellement, j'ai été élu à 23 ans. C'est donc dire qu'en vertu du régime applicable quand j'ai été élu, j'aurais pu être un retraité de l'État à l'âge de 28 ans, soit en 1978, cinq ans après avoir été élu. Ça, c'était le régime précédent qui ne s'applique plus. Donc, son âge n'était pas pris en compte, n'était pas un facteur considéré. Ainsi, un tout jeune député pouvait avoir droit à sa rente de retraite même s'il n'était pas à un âge où, normalement, on se

retrouve dans une telle situation. À cette époque, les députés versaient une cotisation représentant jusqu'à 10 % de leur traitement, et la rente qu'on leur accordait pouvait atteindre 75 % du montant desdites cotisations. C'est donc dire - parce que ça, il faut le dire - qu'il y a beaucoup de gens qui ne savent pas que les députés contribuent à leur régime de retraite pour un pourcentage représentant 10 % de leur revenu; 10 % de la paie s'en va au régime de retraite, sans compter l'impôt fédéral, évidemment, l'impôt provincial et les autres taxes comme tout autre citoyen. Ce régime permettait donc, après huit ans, huit ans complétés à l'Assemblée nationale, au député qui quittait d'obtenir une rente représentant 75 % de ses contributions, sans aucune déduction, peu importe l'âge qu'il ou qu'elle avait. Ça voulait dire quoi concrètement? Concrètement, ça voulait dire un régime coûteux, un régime qui n'était pas, mais pas du tout comparable aux autres régimes applicables dans la société québécoise, un régime où le taux de croissance du traitement était d'environ 7,5 % par année.

Alors, tantôt quand on parlera - pour celles et ceux qui nous écoutent - d'un enrichissement annuel passant de 3,5 % à 4 %, il faut se rappeler qu'entre 1964 et 1983, l'enrichissement annuel en termes de crédit de rente équivalait à 7,5 % du revenu par année, ce qui est beaucoup. La rente de retraite accordée à cette époque était aussi, il faut le dire... Le ou la députée qui prenait sa retraite avait une rente pleinement indexée. C'est donc dire qu'en 1981, 1982, 1983, où l'inflation, vers cette période, était dans certains cas - même je me rappelle une année, si ma mémoire est fidèle, c'était au-delà de 11 %... Ces gens qui avaient été élus, qui avaient siégé ici huit ans, avaient le droit à une rente de 75 % de leur contribution. Par surcroît, elle était totalement indexée au coût de la vie. Ça, c'est l'ancien régime.

De cet ancien régime, il y a 179 personnes au Québec qui reçoivent des prestations actuellement, des rentes. Sur les 179, pour ces personnes-là, la moyenne, dans un contexte de régime généreux qui s'accroissait de 7,5 % par année, est de 31 000 $ versés à ces femmes et ces hommes qui ont rendu service à l'État et qui ont été mandatés pour le faire par leur population.

En 1983, le régime a subi des modifications très importantes. Le taux d'accumulation de la rente de retraite est ramené de 7,5 % à 4 % du traitement annuel. Le taux de cotisation est cependant maintenu à 10 % de ce même traitement. Tant la cotisation que la rente sont ajustés pour tenir compte de la coordination - ça va de soi - avec le Régime des rentes du Québec. Les rentes accordées lors de la retraite, au lieu d'être indexées selon la pleine augmentation de l'indice des prix à la consommation, sont désormais indexées selon l'augmentation de cet indice, avec une réduction de 3 %.

Ça veut dire quoi concrètement? Ça veut dire que le taux d'accroissement annuel passe de 7,5 % pour être ramené à 4 % et la pleine indexation est mise de côté. Celles et ceux qui y sont depuis 1983, lorsque ces bonnes gens vont prendre leur retraite, ou encore celles et ceux qui ont quitté en 1985, qui se sont retirés, qui ont été défaits, ces gens ont une retraite et, s'ils sont admissibles à une retraite - parce que maintenant il y a un facteur d'âge aussi qui entre en ligne de compte; on ne bénéficie pas nécessairement de la rente de retraite immédiatement en quittant, et c'est prévu dans le même sens dans le projet de loi - au lieu d'avoir une pleine indexation, ils ont l'indice des prix à la consommation, moins 3 %.

Ça veut dire quoi concrètement, ça? Ça veut dire que le parlementaire élu après 1983 qui a pris sa retraite ou qui va la prendre, si l'indice des prix à la consommation augmente de 4 %, sa rente va augmenter uniquement, elle, de 1 %, comme c'est le cas dans la fonction publique. donc, si l'indice des prix à la consommation augmente de 5 %, la rente, elle, est indexée à 2 %.

(16 heures)

Les rentes de retraite aussi - ça, il faut le dire - à partir de 1983, deviennent payables à compter de l'âge de 60 ans, avec possibilité d'anticiper le paiement, avant cet âge, moyennant une réduction de la rente de 4 % par année d'anticipation. Cette réduction était sujette à un maximum de 33 et 1/3. Ça veut dire quoi concrètement? Ça veut dire que depuis 1983, pour une partie du régime - parce qu'il y a de nombreux régimes qui nous sont applicables et on va y revenir - pour ce qui est du régime applicable en 1983, les dispositions prévoyaient et prévoient toujours, jusqu'à l'adoption de la loi, que l'indice des prix à la consommation moins 3 %, 4 % en enrichissement par année, contribution de 10 % de notre salaire et âge de la retraite établi à 60 ans, et si on veut la prendre avant, le maximum de déficit, c'est 33 %.

C'est donc dire que si, depuis 1983, une rente représentant un montant de 21 000 $ était acquise pour un parlementaire à l'âge de 60 ans et qu'il décidait de la toucher, le déficit maximum qui pouvait s'appliquer, c'était le tiers, donc, une rente de 14 000 $ plutôt que 21 000 $. Mais pas un montant de 14 000 $ indexé à pleine indexation, un montant de 14 000 $ indexé à l'inflation, l'indice des prix à la consommation, moins 3 %.

Un ajustement additionnel, M. le Président, est aussi intervenu en 1988 - ça, c'est le troisième régime applicable - pour prévoir des conditions plus généreuses de mise en paiement d'une retraite anticipée. Cette amélioration a été financée par une réduction de la rente de retraite accordée annuellement, qui est passée de 4 % à 3,5 %. puis il faut se rappeler aussi qu'à l'époque, si en 1988 notre accroissement annuel

est passé de 4 % à 3, 5 %, c'est que les parlementaires québécois, comme les parlementaires des autres provinces, se sont vu signifier un avis du ministère du Revenu comme quoi ils pourraient, parce que, jusque-là, on n'avait pas le droit d'avoir un régime d'épargne-retraite parallèle, indépendant, personnel. On s'est fait dire par Revenu Canada, et confirmé par Revenu Québec, que nous, comme parlementaires, malgré que nous contribuions pour 10 % de notre salaire dans un régime d'épargne, un régime de retraite de l'Assemblée nationale, on s'est fait dire qu'on aurait le droit de participer à un régime parallèle.

De nombreux collègues - je ne peux pas savoir combien il y en a parmi nous, mais je sais qu'il y en a plusieurs - y ont participé. Je ne peux pas le savoir parce que je n'ai pas accès - et c'est normal qu'il en soit ainsi - aux rapports d'impôt des députés. C'est quand même confidentiel comme pour tous les citoyens. Cependant, je sais que de nombreux parlementaires se sont fait dire, après deux ans, tant par Revenu Canada que par Revenu Québec: Vous n'avez plus le droit d'y participer. Donc, ces bonnes gens ont dû escompter toucher les sommes d'argent qu'ils avaient versées, lesquelles ont été escomptées en une seule année plutôt que deux ans, alors que les années de contribution avaient été de deux ans pour certains. Ils ont dû payer de l'impôt là-dessus, sans compter qu'ils ont dû rembourser évidemment l'avantage fiscal qu'ils ou qu'elles avaient obtenu. en juin 1990, alors 1964 à 1983, 1983 à 1988... or, voilà qu'en 1990, le gouvernement fédéral adopte une loi. le gouvernement fédéral a adopté une nouvelle législation en matière fiscale qui redéfinit l'ensemble des règles qui concernent l'accumulation d'épargne-retraite. ces nouvelles règles s'appliquent à compter de janvier 1992. donc, l'application de ce projet de loi est à nos portes dans quelques jours.

Il s'avère donc important, et ça, ces dispositions s'appliquent à tous les régimes de retraite sans exception, qu'ils soient publics ou privés, à compter du 1er janvier 1992. Il s'avère donc important de revoir l'ensemble des dispositions du régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale pour nous assurer que les règles fiscales qui le régissent soient respectées et que l'enregistrement du régime soit maintenu.

D'ailleurs, en 1990, le Bureau de l'Assemblée nationale a chargé un comité extraparlementaire de revoir l'ensemble des dispositions des régimes de retraite, de faire l'analyse des dispositions, des besoins des participants aux régimes de retraite, c'est-à-dire de faire l'analyse des besoins des participants actuels et futurs et de faire des recommandations sur les modifications requises. Ces bonnes gens ont siégé, ils ont travaillé, ils ont étudié, ils ont analysé, puis ils ont fait un rapport. Les conclusions de ce rapport ont été présentées aux participants et discutées au cours des derniers mois.

Le projet de loi soumis à l'Assemblée nationale, celui que je propose actuellement, reflète les conclusions de ces discussions. Jusqu'à maintenant, les dispositions encadrant les régîmes de retraite au niveau fiscal se retrouvaient dans les directives émises par le gouvernement fédéral. Ces directives étaient appliquées avec une certaine rigueur à l'égard des régimes de retraite du secteur privé.

Par contre, il en était autrement en ce qui concerne les régimes établis par le gouvernement fédéral et par les divers régimes provinciaux, concernant non seulement les députés, mais concernant aussi les gouvernements provinciaux et les régimes de retraite applicables à leurs propres employés. Maintenant, les nouvelles règles fiscales sont incorporées directement dans la Loi de l'impôt sur le revenu et elles s'appliquent à tous les régimes de retraite au Canada sans exception.

Pour maintenir certains avantages, ou encore pour nous assurer de la garantie de certains acquis, il s'avère nécessaire de partager le régime de retraite en deux volets. Un premier permettra d'octroyer un niveau de prestationsconforme aux règles fiscales. Il sera enregistré et les cotisations des députés y seront totalement dirigées. Il maintiendra à l'égard des députés les avantages fiscaux liés à leur participation à un régime de retraite.

Un second volet ajoutera, sous forme de prestations supplémentaires, les montants requis pour atteindre le niveau de prestations retenues. Cette façon de procéder n'est pas particulière au régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale puisque, historiquement, un certain nombre d'entreprises du secteur privé y ont eu recours et utilisent encore aujourd'hui une telle approche. Il est même possible de prévoir que, suite à cette mesure fiscale, cette disposition dans la loi, cette disposition sera susceptible de s'appliquer de plus en plus à l'ensemble des régimes de retraite privés, du moins à l'égard des dirigeants d'entreprises.

Cette façon de procéder - et ça, il faut le dire - n'entraînera aucun coût additionnel ni pour les députés ni pour le gouvernement. Donc, dans le cadre de l'étude menée par le comité extraparlementaire, l'ensemble des participants ont souligné la complexité des dispositions actuellement en vigueur. En effet, comme je l'ai mentionné précédemment, plusieurs membres de l'Assemblée nationale participent actuellement à un régime de retraite dont les dispositions varient selon les années pendant lesquelles ils ont été députés. D'ailleurs, mon collègue, le député de Joliette, le leader parlementaire de l'Opposition, était pleinement d'accord avec moi sur le caractère complexe des nombreuses dispositions applicables à la même personne qui siège ici, à l'Assemblée nationale. Ainsi, le calcul du montant de la rente et la date possible de

retraite fluctuent selon que le service a été effectué avant 1983, entre 1983 et 1987, ou encore après 1987. Les prestations prévues, par exemple, lors de la retraite, du décès ou de la cessation de participation varient ainsi pour chacune des périodes. C'est donc dire que plutôt que d'avoir un régime de retraite, les parlementaires ont un régime de retraite qui s'applique sur les dispositions variables à trois niveaux, dépendamment, évidemment, du moment où ils ont siégé. Il y a 36 parlementaires sur 125 qui sont régis actuellement par des dispositions différentes d'un régime à l'autre. Même si le domaine de la retraite demeure un secteur complexe, je pense qu'il y a consensus pour que soit rapidement établie la nécessité de remplacer cet ensemble complexe de dispositions par un seul régime.

Un autre objectif du projet de loi, c'est évidemment le maintien de l'enregistrement au niveau fiscal. D'ailleurs, la majorité des modifications proposées s'inscrivent dans cette perspective.

Enfin, ce projet de loi vise aussi la correction de certaines inéquités par rapport au traitement accordé en vertu des régimes du secteur public, de même que le souci de répondre au besoin exprimé par les participants a également été pris en compte lors de la définition des dispositions du nouveau régime.

Les modifications, M. le Président, qui sont apportées au régime de retraite. Si on se réfère, dans un premier temps, aux cotisations, les nouvelles dispositions de la réforme fiscale prévoient que tout participant appelé à défrayer une partie du coût des prestations accordées ne peut verser sous forme de cotisation un montant supérieur à 9 % de sa rémunération. Il a donc fallu modifier légèrement la formule de cotisation pour prévoir désormais qu'un membre de l'Assemblée nationale verse une cotisation égale à ce même 9 %. Actuellement, les membres de l'Assemblée nationale versent, en moyenne, une cotisation égale à 9,4 %. L'application des nouvelles règles fiscales entraînera donc une réduction de la cotisation des participants de l'ordre de 0,4 % de la rémunération, et ce montant devra obligatoirement être assumé par le gouvernement; le 0,4 %, non pas les 9,4 %, mais le 0,4 %. Un tel réaménagement du coût découle directement des nouvelles règles fiscales adoptées par Ottawa. (16 h 10)

Deuxièmement, M. le Président, si on se réfère maintenant à l'admissibilité à la retraite, les critères d'admissibilité à la retraite ont varié de façon importante, au cours des années, de telle sorte que, selon l'année en cours au cours de laquelle une rente a été créditée, la date de mise en paiement peut être différente. Ainsi, un membre de l'Assemblée nationale peut recevoir, un an après la fin de son dernier mandat, la rente de retraite accumulée avant 1983. La rente accumulée durant la période de 1983 à 1987 est payable, elle, à l'âge de 60 ans alors que la rente accumulée depuis 1988 est payable entre l'âge de 50 ans et l'âge de 60 ans, selon le nombre total d'années à titre de membre de l'Assemblée nationale. Il en résulte donc une complexité pour le moins excessive et il convient maintenant de faire le ménage dans ces dispositions.

La solution retenue constitue un compromis par rapport à l'ensemble des règles actuelles. La rente de retraite pour l'ensemble des années depuis 1983 sera désormais payable à l'âge de 60 ans. De plus, il sera possible d'en anticiper le paiement moyennant une réduction qui sera en fonction de l'âge et de la durée de la période d'anticipation. Je pense, M. le Président, ne pas être abusif en disant qu'il est reconnu que les possibilités de trouver un nouvel emploi pour les députés comme pour l'ensemble des travailleurs et des travailleuses diminue avec l'âge.

Je pense aussi qu'il est reconnu, chez toutes celles et tous ceux qui voient un Parlement avec un minimum d'objectivité, que ce n'est pas toujours facile pour un ex-parlementaire de retourner sur le marché du travail au lendemain de son départ. M. le Président, je vous disais tantôt - ça fait, quoi, 18 ans déjà que je suis ici - que j'ai vu passer un certain nombre de députés, probablement près de 200, sinon plus. J'ai vu des gens arriver ici au milieu d'une carrière, à l'âge de 40 ans, 41 ans, 42 ans, au faîte d'une carrière, quitter à 50 ans, ayant quitté leur profession, leur bureau, leurs associés, pour qui c'est impossible pour un pourcentage très important de revenir dans la société où ils ou elles travaillaient ou encore y revenir, mais à des conditions telles de recyclage, etc., que c'est quasiment impossible.

D'autres collègues, j'en conviens, sont venus, ont quitté et ont repris l'emploi, compte tenu qu'ils avaient une sécurité d'emploi, soit dans le secteur public ou le parapublic. J'en ai vu d'autres aussi, M. le Président, pour qui c'a été très, très laborieux de retourner sur le marché du travail et ce, quel que soit le parti politique dans lequel nous sommes. Je pense que nos amis d'en face le savent probablement, comme nous. Par surcroît, si la personne subit une défaite dans son comté, si par surcroît son gouvernement est défait, les téléphones ne sonnent pas beaucoup, le lendemain d'une défaite.

Je comprends qu'il y a une prime de séparation qui permet au député de lui assurer une certaine transition, maximum d'un an de salaire. Pour le député qui n'a pas 60 ans dont le parti est défait, qui a passé un certain nombre d'années ici, je pense que ce n'est pas exagéré de dire que pour un pourcentage important, l'avenir ou, c'est-à-dire les lendemains d'une défaite, ne sont pas toujours des plus heureux, tant pour lui que pour sa famille, évidemment.

Alors, M. le Président, c'est ce pourquoi la

réduction actuarielle applicable à une rente de retraite anticipée doit tenir compte du fait que la recherche d'emploi, elle est plus prometteuse à 49 ans qu'elle peut l'être à 59 ans. Même si je peux paraître exagéré pour certains, c'est sans aucune hésitation que j'indique, M. le Président, que quelle que soit l'appartenance politique d'un député, quel que soit son parti, la fonction en elle-même commande un niveau de responsabilités, un niveau de quantité et un volume de travail qui impliquent - et ça, je le dis sans témérité - beaucoup plus que les 32 heures par semaine pour des milliers Bë Québécois^ et beaucoup plus que les 40 heures de travail pour d'autres milliers de Québécois. m. le président, je vous dirai, moi, que si les députés faisaient 40 heures par semaine uniquement, il n'y en a probablement pas - ou qui avaient fait 40 heures entre 1985 et 1989 - il n'y en a pas beaucoup qui auraient été réélus. je pense que c'est unanime. tous les gens qui ont le moindrement d'expérience, de connaissances à l'égard de cette fonction, ou encore même les gens dans nos comtés, qui sont en contact avec leur député, savent pertinemment que la somme et le volume de travail sont bien au-delà des 40 heures ou des 32 heures. souven-tes fois, ceux qui questionnent les 32 heures ou les 40 heures, ou ceux qui disent que ce n'est pas vrai que les députés travaillent tant que ça, ce sont celles et ceux qui gagnent trois fois plus cher; ça, je pense que c'est généralement reconnu.

Ceci étant dit, M. le Président, concernant la réduction actuarielle applicable, ma position comme leader, la position de notre équipe parlementaire, de l'équipe ministérielle, c'est la suivante: Compte tenu qu'il est beaucoup plus difficile pour un ex-député de l'Assemblée nationale qui a contribué de 10 % de son revenu pendant un nombre d'années donné... C'est évident que ce sera plus difficile pour cette personne, lorsqu'elle quittera la politique, de se trouver un emploi si elle a entre 55 ans et 60 ans, plutôt que si elle a entre 50 et 55 ans; tout comme, a fortiori, c'est clair que c'est beaucoup plus facile - malgré que ce n'est pas toujours facile d'avoir un emploi après - lorsqu'on a 45 ans, 46 ans que si on a 59 ans ou 58 ans. C'est ce pourquoi, dans le projet de loi, j'ai prévu une disposition comme quoi la réduction actuarielle applicable à une rente de retraite anticipée doit tenir compte du fait que ça peut être vraiment différent selon l'âge où on prend sa retraite. ainsi, pour chacune des cinq premières années d'anticipation avant l'âge de 60 ans, la réduction de la rente de retraite sera de 1 % par année. pour les cinq années suivantes, la réduction de la rente de retraite sera de 2 %, et cette réduction augmentera à 3 % pour chaque année additionnelle, c'est-à-dire: avant 50 ans, c'est 3 % par année de réduction actuarielle, sans limite, cette fois-ci.

J'ai indiqué tantôt que, depuis 1988, il y avait un maximum de 33 %, le maximum de 33 1/3 % étant... Ainsi, un député qui quitte l'Assemblée nationale à l'âge de 50 ans recevra 85 % de la rente de retraite accumulée à ce moment-là. Ça ne veut pas dire 85 % de son salaire, ça, mais 85 % de la rente accumulée à ce moment-là, de ce qu'il aura versé et qui sera en croissance de 4 % par année de son niveau de salaire. Cette modification au chapitre de l'admissibilité de la retraite entraîne une augmentation des engagements au 31 décembre 1991 de 2 100 000 $ s'appliquant de façon plus particulière aux prestations accumulées durant la période de 1983 à 1987. L'augmentation du coût du régime à l'égard des années futures représente 4,3 % de la masse salariale. la rente de retraite, maintenant. le montant de la rente accordée aux membres de l'assemblée nationale pour chaque année de participation au régime de retraite a fluctué énormément au fil des ans. ainsi, comme je l'indiquais tantôt, avant 1983, cette rente pouvait atteindre presque 7,5 % de la rémunération. comme je l'ai souligné plus tôt, en 1983, celle-ci a été ramenée à 4 %, puis à 3,5 % en 1988, en échange d'une libéralisation au chapitre de l'admissibilité. cette dernière libéralisation sera par ailleurs éliminée dans le cadre des modifications présentes. tout comme la cotisation, la prestation est, depuis 1983, coordonnée avec le régime de rentes du québec. une telle coordination implique que la cotisation est réduite d'un montant approximativement égal à la cotisation versée au régime de rentes du québec, et la prestation est également réduite pour tenir compte, du moins en partie, de la rente de retraite versée par ce même régime.

Dorénavant, tant en ce qui a trait à la cotisation qu'à la prestation, une telle coordination sera éliminée. La prestation, quant à elle, sera établie à 4 % de la rémunération reçue par un membre de l'Assemblée nationale. Celle-ci proviendra, comme nous l'avons vu antérieurement, en partie du volet enregistré et en partie du volet des prestations supplémentaires.

Cette modification du niveau des prestations accorde aux membres de l'Assemblée nationale une indemnité de remplacement de revenu permettant de répondre à leurs besoins au moment de la retraite. Il faut se rappeler la situation particulière des membres de l'Assemblée qui doivent quitter l'emploi qu'ils occupaient pour assumer leur charge de député. Comme on l'indique très clairement dans le rapport, souvent, ceux-ci vont perdre certains avantages liés au régime de retraite auquel ils participaient. Ces avantages perdus prennent la forme d'un montant de rente réduit et d'une admissibilité plus tardive au paiement de cette rente. (16 h 20)

II faut aussi tenir compte qu'au moment où ils quittent l'Assemblée nationale les députés

n'ont pas toujours atteint l'âge où l'on prend normalement sa retraite. Ils ne leur est pas toujours possible de trouver un emploi, tel que je l'indiquais précédemment. La durée moyenne de participation au régime pour les députés en poste, à la fin de 1990, s'établissait à 6,3 années, ce qui veut dire six ans et quatre mois, et la rente moyenne accumulée à la fin de 1990 représente 17 000 $. C'est donc dire que la rente moyenne acquise, nous qui y sommes, certains sont arrivés plus récemment, d'autres sont arrivés il y a plusieurs années, la moyenne d'âge est d'environ 43,5 ans, 44 ans, actuellement, ici, au Parlement, certains sont arrivés à 50 ans, d'autres sont arrivés à 28 ou à 30, globalement, si tout le monde, demain matin, on décidait de démissionner, c'est une rente moyenne de 17 000 $. 17 000 $ avec une réduction actuarielle, si on prend la moyenne d'âge qui est de 44 ans, ça veut donc dire que la rente de 17 000 $... Si, par surcroît, vous ajoutez les rentes de conjoint survivant, dites-vous bien que, si on décédait tous demain matin, la moyenne de rente de conjoint survivant serait d'environ 8500 $. C'est ça, après lecture.

Alors, quand celles et ceux soutiennent que c'est indécent, c'est cynique, c'est inacceptable, c'est trop généreux, je pense qu'on doit profiter de ce débat pour resituer certaines choses dans leur perspective: les 179 anciens députés qui sont actuellement à la retraite, qui recevaient, en moyenne, à la fin de 1990, 31 000 $ et 54 survivants d'anciens députés décédés qui recevaient, en moyenne, à cette même date, une rente de 14 900 $.

On constate donc que l'ensemble des rentes acquises, dans l'ensemble, les prestations se situent à un niveau fort raisonnable si, par surcroît, on tient compte du fait qu'il y a 10 % de notre traitement qui y sont versés. Les dispositions des régimes de retraite de la Législature des principales provinces canadiennes ou du gouvernement fédéral prévoient une formule de calcul de la rente supérieure à celle présentée dans l'actuel projet de loi; ce qui est un 4 % pour nous, c'est 5 % en Ontario. Vous me direz qu'ils sont plus riches que nous, ils ont 10 000 000 000 $ de déficit, cette année, et, nous autres, on en a 3 800 000 000 $. De plus, M. le Président, les prestations payées en vertu de ces autres régimes dans les autres provinces canadiennes sont, habituellement, pleinement indexées selon l'indice des prix à la consommation, sans la réduction prévue de 3 % comme nous on a ici, au Québec. Parce que je rappelle ce que je disais antérieurement, quand un député prend sa retraite maintenant, il n'a pas une pleine indexation. Si l'indice des prix à la consommation, si l'inflation est de 4 %, il a 4 % moins 3 %, ça donne 1 %. Dans les autres provinces, ils ne l'ont pas, ça, la très grande majorité d'entre elles.

Si on regarde, maintenant, M le Président les rentes totales, jusqu'en 1982, les dispositions du régime que j'indiquais prévoyaient qu'un membre de l'Assemblée nationale ne pouvait accumuler une rente de retraite supérieure au traitement maximum reçu durant sa carrière à l'Assemblée nationale. En 1982, cette limite a été baissée à 70 % du traitement moyen des trois meilleures années, ce qui correspondait aux exigences fiscales de l'époque. Dans sa réforme, le gouvernement fédéral a aboli cette exigence de 70 % touchant la rente totale. Ainsi, lors de l'étude des mesures prévues pour les régimes du secteur public, il a été décidé d'éliminer aussi cette exigence, notamment à l'égard des participants au régime de retraite des employés du gouvernement, où les 70 % sont éliminés, et des organismes publics, des juges de la Cour du Québec, des élus municipaux aussi.

L'abolition de la limite de 70 % a également été incorporée à l'actuel projet de loi au profit d'une disposition qui limitera, cependant, la rente totale, c'est-à-dire la rente maximale et totale pouvant être acquise. Ce projet de loi prévoit une disposition que la rente totale pourra être touchée uniquement au cours des 25 premières années de participation au régime.

Actuellement, à l'Assemblée nationale, il y a un seul député qui a le droit à sa rente totale sur 124; un seul député! Il faut, pour avoir sa rente totale, siéger à l'Assemblée nationale pendant 25 ans pour avoir sa rente totale, à 4 %, 25 ans. J'invite celles et ceux qui s'interrogent sur le caractère très généreux à répondre à la question suivante: Comme on a 6,6 ans et 4 ans d'expérience au Parlement - l'expérience moyenne, 6 ans et 4 mois, - qui peut sérieusement soutenir que tous les députés qui sont ici vont faire encore 17 ans et 8 mois? Je pense que poser la question c'est y répondre. Pour certains, c'est leur âge. Je ne parle pas de mon collègue, évidemment, de Westmount, qui pourrait devenir un patriarche de l'Assemblée. Je ne parle pas de mon collègue, le ministre de la Santé et des Services sociaux, qui est au midi de la quarantaine, environ. Évidemment, je ne voudrais pas parler au nom du député de Masson et encore moins de Mme la députée de Terrebonne. Cependant, Mme la députée de Terrebonne, je l'invite à réfléchir à ça. Pensez-vous vraiment que tous les députés qui sont ici vont siéger encore 17 ans et 8 mois? Pensez-vous vraiment que vous, vous allez siéger encore 17 ans et 8 mois? On ne peut pas dire non, mais on ne peut pas dire oui non plus.

M. le Président, c'est donc dire: 4 % de croissance, indexation moins 3 %, aucune limite à la réduction actuarielle - si elle est prise avant l'âge de 60 ans, ce sera 1 % entre 55 et 60, 2 % entre 50 et 55 et, avant ça, c'est 3 % sans limite. C'est donc dire que les jeunes députés - parce qu'il y a des jeunes députés qui se font élire maintenant, qui sont élus à 27, 28, 29 ans - après deux mandats, au lieu d'avoir 75 %

de leur contribution comme c'était le cas dans le cadre du régime applicable entre 1964 et 1982, ça serait uniquement, avec le déficit actuariel, quelques centaines de dollars par année, pas pleinement indexés, mais indexés à l'inflation moins 3 %.

M. le Président, habituellement, lorsque les régimes de retraite sont modifiés, les droits accordés aux participants avant la date de la modification ne sont pas remis en cause. Cette règle n'a cependant pas été respectée lors des modifications intervenues en 1987. En effet, alors qu'une disposition de la Loi sur la Législature prévoyait que les rentes de retraite accordées à l'égard des années antérieures étaient pleinement indexées en fonction de l'indice des prix à la consommation, cette indexation a été remise en cause et diminuée de 3 % par année pour tous les participants en poste à cette date.

Cette façon de faire n'a pas été retenue dans le cas du régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics et de plusieurs autres régimes en vigueur à l'égard des employés de l'État. En effet, lorsque le gouvernement, en juillet 1982, a réduit la formule d'indexation des rentes alors en vigueur, cette modification n'a pas affecté les rentes créditées avant la date de la modification. De plus, la Loi sur les régimes complémentaires de retraite qui encadre les régimes du secteur privé interdit la modification à la baisse des rentes déjà créditées à moins d'avoir reçu l'assentiment de tous les participants.

Donc, pour respecter les droits acquis de tous les participants, il est nécessaire de revoir les dispositions du régime actuel pour procurer aux députés à la retraite, pas celles et ceux d'entre nous qui sommes ici, pour les députés à la retraite de même qu'aux personnes en poste actuellement, la pleine indexation des rentes acquises avant le 1 er janvier 1983.

Il y a un volet remboursement. Mais c'est évident que celles et ceux qui siègent ici n'auront pas droit à ce volet remboursement. Cette modification permettant de maintenir l'équité au chapitre des droits acquis représente une augmentation de 2 300 000 $ des engagements actuels du régime, soit la valeur des droits perdus en 1987 en fonction de cette nesure. (16 h 30)

Comme dans les cas d'admissibilité à la retraite, les prestations payables en cas de décès varient actuellement en fonction des années au cours desquelles un membre de l'Assemblée nationale a participé au régime. Ainsi, le régime prévoit les prestations suivantes lorsqu'un participant à la retraite décède: 1° pour les années de services antérieures à 1983, son conjoint ou sa conjointe reçoit une rente égale à 50 % de la rente accumulée durant cette période, à moins qu'il ait fait le choix, au moment de sa retraite, d'accorder une rente égale à 100 % à son conjoint survivant. Le coût de cette option est financé à même une réduction de ia rente de retraite.

Pour ce qui est des années de participation depuis 1983, donc des dispositions avant 1983. depuis 1983, des dispositions applicables qui sont différentes. Pour ce qui est des années de participation depuis 1983, si le participant est à la retraite depuis moins de dix ans, son conjoint ou ses ayant-droit reçoivent la valeur des paiements à venir pour compléter cette période de dix ans. S'il est à la retraite depuis plus de 10 ans, aucune prestation de décès n'est accordée. Là encore, cette disparité dans les prestations est source d'incompréhension, de complexité inutile et ne répond pas aux besoins exprimés à ce chapitre par les membres de l'Assemblée.

De plus, au cours des dernières années, ie gouvernement a adopté une nouvelle loi sur les régimes complémentaires de retraite prévoyant que les régimes de rentes du secteur privé doivent accorder une rente au conjoint survivant égale à 60 % de la rente de retraite. Le nouveau régime incorpore une telle prestation, et ce, à l'égard de toutes les années de service effectuées par les personnes qui ont pris ou qui prendront leur retraite au cours des prochaines années. Une seule exception est prévue dans le cas des retraités qui ont déjà opté pour une rente de 100 % payable au conjoint survivant. On sait qu'on peut opter pour une rente payable de 100 % au conjoint survivant, mais avec une réduction actuarielle importante pour la période de paiement. enfin, comme c'est le cas actuellement pour le service antérieur à 1983, les enfants à charge des députés auront également droit à une rente égale à 10 % de la rente de retraite. cet ajustement, assurant la concordance avec les lois des régimes complémentaires de retraite, entraîne une augmentation des engagements au 31 décembre 1991 de 1 100 000 $ à l'égard de tous les députés et retraités du québec.

L'examen approfondi auquel nous nous sommes livrés nous a permis de constater également une autre situation où l'équité de traitement des participants ne nous semblait pas respectée intégralement. En effet, les modifications apportées en 1983 ont forcé certains députés à verser des cotisations au régime, même si ces cotisations ne leur ont pas permis de recevoir les prostations prévues lors de leur départ au cours des années suivantes.

C'est donc dire qu'il y a des personnes qui ont siégé à l'Assemblée nationale et qui ont quitté avant l'adoption de la loi en 1987 ou en 1988 plutôt, qui ont contribué sans qu'il n'y ait aucun enrichissement, aucun impact pour la contribution versée à ce chapitre. Des modifications apportées au régime de 1983 ont donc forcé certains députés à verser des cotisations au régime, même si ces cotisations ne leur ont pas permis de recevoir la prestation qui était prévue pour cette fin.

Pour redresser cette situation, il convient de procéder au remboursement de ces mêmes cotisations. La somme des montants en cause s'élève à 1 300 000 $ à l'égard de 39 anciens membres de l'Assemblée nationale qui étaient ici en 1983, mais qui ne l'étaient pas en 1988. Je pense qu'il est injustifiable, complètement injustifiable de s'approprier de telles sommes.

Depuis maintenant quelques années, M. le Président, les régimes de retraite doivent accorder à leurs anciens participants la possibilité de transférer dans un véhicule d'épargne-retraite la valeur correspondant aux prestations accumulées si, au moment de leur départ, ils ne sont pas admissibles à leur retraite. Une telle disposition permet aux personnes qui quittent relativement tôt leurs fonctions de cumuler dans un véhicule d'épargne-retraite des prestations acquises auprès d'anciens employeurs.

Dans le cas de la révision actuelle du régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale, une telle disposition répond aussi aux besoins d'un certain nombre de députés. Il serait donc possible dorénavant, lorsqu'un député quitte ses fonctions et qu'il ne reçoit pas une rente de retraite, de transférer la valeur des prestations du volet enregistré de son régime de retraite dans un compte de retraite immobilisé qui est le véhicule prévu pour la transférabilité à l'égard des participants des régimes de retraite, comme ça se fait ailleurs en semblable matière.

En ce qui concerne le volet des prestations supplémentaires, celles-ci demeureront à l'acquis du député et ne seront monnayables qu'au moment de la retraite, sous forme de rente. En effet, en vertu des nouvelles règles fiscales, les prestations supplémentaires ne pourront pas faire l'objet d'un transfert dans un véhicule d'épargne-retraite. Le droit à ces prestations sera maintenu, et ce, même si la valeur des prestations du volet enregistré a été transférée.

Il sera également possible pour un membre de l'Assemblée nationale qui revient en fonction après une période d'absence et qui a obtenu le transfert de ses acquis à la fin de son dernier mandat de remettre les sommes reçues avec les intérêts dans l'autre régime. Une telle mesure, une telle remise lui permettra alors de retrouver les prestations qu'il avait accumulées lors de son départ.

La transférabilité n'entraîne pas de coûts additionnels pour le régime, mais répond à une préoccupation maintes fois manifestée par les participants, surtout depuis qu'elle est devenue accessible aux travailleurs du secteur privé qui participent à un régime de retraite. Les mêmes choses s'appliquent dans le privé, et ça n'implique aucune charge additionnelle, évidemment, pour le gouvernement.

Historiquement, M. le Président, des dispositions spécifiques à l'égard des députés ont été inscrites dans les régimes de retraite offerts aux employés des secteurs public et parapublic. ces dispositions concernent les membres de l'assemblée nationale qui quittent leurs fonctions et qui avaient déjà participé, dans un emploi antérieur, à l'un de ces régimes. ces membres ont le droit de recevoir immédiatement la rente de retraite accumulée à titre d'employés des secteurs public et parapublic, même s'ils ne sont pas admissibles en vertu des critères réguliers de mise à la retraite prévus par ces régimes. les nouvelles règles de la réforme fiscale ne permettent plus le maintien de telles dispositions à l'égard des nouveaux membres de l'assemblée nationale élus après 1991. il s'avère donc nécessaire d'éliminer ces dispositions particulières des régimes en cause. ceci devrait entraîner à long terme une légère diminution du coût de ces mêmes régimes. d'autres modifications sont de concordance dans le projet de loi. ??

M. le Président, j'ai déposé ce projet de loi la semaine dernière. J'ai très clairement indiqué, au moment du dépôt du projet de loi, mon intention de faire en sorte que ce projet soit adopté après analyse, après étude, non pas à la vapeur. Ce n'est pas un projet de loi qui est déposé pour le passer rapidement avant les fêtes. C'est un projet de loi qui a été déposé, qui est étudié aujourd'hui. J'entends proposer l'étude du projet de loi en commission parlementaire les 30 et 31 janvier prochains, sous deux volets.

Une première journée où on entendra les membres du comité qui ont siégé, mandatés qu'ils l'ont été par le Bureau de l'Assemblée nationale dans sa décision du mois de septembre 1990. Ce comité sera entendu en commission parlementaire. Il sera en mesure aussi de donner les résultats de cette analyse, quand même exhaustive, auprès des collègues et anciens collègues, et de donner le pourquoi des recommandations qu'ils nous ont formulées.

J'entends, de plus, inviter les représentants de la Chambre des communes à Ottawa, qui ont à administrer les régimes de retraite. Celles et ceux qui vont suivre ces débats seront à même de constater que le régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale adopté par ce projet de loi va représenter, en termes de déboursés, bien moins, bien moins que ce qui est versé à Ottawa. D'ailleurs, si on se réfère à la contribution de l'employeur en vertu du régime fédéral, c'est au-delà de 50 %, alors qu'avec le régime tel que proposé par ce projet de loi, ce serait 9 % dont, évidemment, une partie qui est le 9 % se référera aux contributions des députés eux-mêmes, donc bien en-deçà de ce qui se fait à Ottawa.

L'autre journée, je prévois qu'on puisse amorcer l'étude du projet de loi article par article, lequel contient, comme on le sait, une dizaine d'articles qui se réfèrent à d'autres articles de la loi, ça va de soi. Puis on va revenir en Chambre, au mois de mars, et on va l'adopter. C'est tout. C'est comme ça que ça va se passer.

Donc, à visière levée, ouvertement, publiquement, non pas adopté à 4 heures du matin, en troisième lecture, après un débat-marathon. Non, non. Pourquoi on le fait? J'ai été questionné sur l'opportunité, j'en conviens. Un, je rappellerai que la loi fédérale a été adoptée et elle s'applique à compter du 1er janvier 1992. Deuxièmement, le gouvernement canadien a demandé que les Législatures respectent la loi, c'est normal. Les Législatures, les autres Parlements, pour un certain nombre, se sont engagés à l'adopter dans les six premiers mois de l'année 1992, avec une mesure rétroactive avant le 1er janvier. C'est ce qu'on va faire ici, comme ça se fait ailleurs. (16 h 40)

Autre élément aussi. Je tiens à rappeler en terminant qu'en vertu de ce régime, j'en conviens, nous passons d'un taux d'enrichissement de 3,5 % à 4 % par année. Je rappelle cependant qu'avant 1983, c'était un enrichissement de 7,5 % par année. Le principal motif pour lequel nous passons de 3,5 % à 4 % - revenir à ce que c'était entre 1983 et 1988 - c'est purement et simplement qu'à ce moment-là, on s'est fait dire qu'on aurait le droit de participer à un autre régime d'épargne-retraite personnel et privé. Puis, une fois que la partie a été établie, les règles du jeu ont été changées tant par le gouvernement canadien que par le Québec. Ça, c'est le principal motif. 4 % par année, ça veut dire quoi? ça veut dire qu'une rente totale, il faudra avoir siégé 25 ans à l'assemblée nationale du québec pour l'obtenir, la moyenne d'expérience étant, comme on le sait, actuellement de 6,5 années. les rentes qui, en vertu du régime, de 1963 à 1984, le régime qualifié de très généreux, étaient versées au moment du départ du député. je conviens qu'à l'époque, dans les années 1965-1966, c'était rare d'avoir des parlementaires élus dans la vingtaine; c'était très, très, très rare qu'ils étaient élus dans la vingtaine. à ma connaissance, il y a peut-être eu m. marcel masse, en 1966, qui a été élu à 29 ans si ma mémoire est fidèle et, si je me rappelle bien, avant lui, c'est m. paul sauvé qui a été élu en 1930, à sa première élection. il est né en 1907; il avait 23 ans. pour ce qui est des autres, c'est très, très rare. aujourd'hui, on doit tenir compte d'une texture d'individus, de personnes, d'un profil de personnes qui siègent ici, qui sont plus jeunes. c'est ce qui explique que les rentes se prendront à 60 ans et, avant ça, c'est une réduction actuarielle.

Autre élément aussi. Autre élément... J'invite les députés parce qu'il y a peut-être des députés qui ont des réserves. Il y a peut-être des députés qui ont des réserves, qui se questionnent. Je les invite à réfléchir au fait que, ailleurs, l'enrichissement de 5 % par année, notamment en Ontario, à Ottawa, c'est en quittant, comme ce l'était pour nous avant 1983. Mais, là-bas, dans la très grande majorité des provinces, lorsqu'on prend sa retraite, c'est pleine indexation alors qu'ici, l'indexation, c'est l'inflation évidemment, moins 3 %. Ça ne m'ap-paraît pas exorbitant.

Pour mon collègue, le député de Joliette, ça va apparaître inopportun. Je vous dirai, M. le député... Vous savez, autant les gens sont attachés à leur Parlement, et ils ont confiance dans leur Parlement, c'est une institution qui est souveraine, autant ils sont fiers de leurs députés - à preuve, ils nous réélisent, puis ils nous élisent - autant cependant, quand vient le temps de discuter des questions salariales, ça questionne. Puis, quand vient le temps d'appliquer des conditions de retraite... parce que là, on est obligé de le faire à cause de la loi fédérale, on s'y oppose. Ce n'est jamais opportun. La question salariale, on l'a réglée; le député est considéré comme étant un administrateur classe IV. Un administrateur classe IV, c'est une personne qui occupe une fonction... Puis, généralement, quand un député appelle dans un ministère pour défendre les intérêts de ses citoyens, c'est très rare qu'il parle à l'administrateur classe IV. Il parle plutôt, généralement, à un administrateur classe III ou classe II. Un administrateur classe III, ça gagne plus cher, évidemment, qu'un député. Mais ça, c'est réglé. Le Parlement n'a pas à juger année après année des augmentations de salaire de ses députés. C'est réglé. C'est définitif. Nous sommes considérés comme des administrateurs classe IV.

Pour ce qui est du régime de rentes, on doit l'adopter comme suite de la loi fédérale. Alors, pour moi, il n'y en a jamais de moment opportun, jamais. Il y a cependant, par contre, certaines opportunités et c'est là où j'en viens. C'est une opportunité qui est combien belle pour l'Opposition de s'y opposer. Puis, je pense que, de plus en plus, la perception à cet égard est le reflet d'une réalité. Quand les journalistes écrivaient: Vous savez, c'est de bonne guerre, ça fait partie des règles du jeu que l'Opposition s'oppose à un projet de loi prévoyant des modifications au régime de retraite, tout le monde sait que, finalement, même s'ils s'y opposent, ils vont pouvoir bénéficier des dispositions quand même.

M. le Président, je sais que l'Opposition va s'opposer alléguant que c'est inopportun. On va conduire le débat, on va adopter le projet de loi dans son principe, on va prendre le temps qu'il faut en commission parlementaire pour l'étudier et pour l'analyser. Je crois que, malgré les critiques que ça pourra susciter ici, sur le parquet, la très grande majorité des gens qui regarde ça sérieusement sera d'accord avec le fait qu'on est obligé de légiférer et que ce n'est pas exorbitant. D'ailleurs, c'est ce que les articles des journaux disaient: Ce n'est peut-être pas le meilleur "timing", mais il n'y a pas de scandale dans ça.

M. le Président, je suis fier, malgré le caractère délicat de la démarche, j'en conviens,

de présenter ce projet de loi au nom de l'ensemble de mes collègues de l'Assemblée nationale du Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le leader du gouvernement. Sur le même sujet, je cède la parole à M. le député de Joliette et leader de l'Opposition officielle.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. M. le Président, le gouvernement avait une obligation légale de modifier les fonds de pension à cause de la loi C-52 du fédéral. Et on l'a vu en cette Chambre. C'est ce qui a été fait pour tous les régimes de pension du secteur public et parapu-blic. On a vu dans cette Chambre un projet de loi qui est sur le point d'être adopté, concernant les juges. Il y a un projet de loi pour tout le parapublic, pour les considérer exactement comme... pour se conformer à la loi C-52 du fédéral, et également, on l'a vu pour les élus municipaux qui devront ajuster leurs fonds de pension en fonction de la loi C-52 du fédéral.

Mais fondamentalement, que disent ces trois projets de loi, M. le Président? Ces trois projets de loi qui ont été déposés en cette Chambre avant le 15 novembre, le 14 novembre plus précisément, disent carrément: Nous allons harmoniser notre projet de loi pour que les fonds de pension des juges, des élus municipaux et du secteur public et parapublic soient conformes avec la loi fédérale. Mais après qu'on ait dit cela, M. le Président, qu'on ait étudié les projets de loi, on se rend compte que l'équation entre ce que ça coûte présentement aux Québécois et ce que ça coûtera après les amendements pour la loi des juges, pour la loi des élus municipaux et pour la loi du public et du parapublic, le résultat net est nul. Le fonds de pension coûtait x millions, le fonds de pension coûtera exactement le même nombre de millions. C'est ce qu'on appelle des lois pour harmoniser les projets de loi des fonds de pension ou des régimes de retraite du Québec à cause de la loi du fédéral, M. le Président.

Qu'est-ce que fait le ministre, maintenant, en ce qui regarde les députés? Parce que c'est là la question, c'est là la grande différence. Il faut savoir qu'il y a une différence entre le projet de loi pour les députés puis les projets de loi qu'on a passés pour les juges, pour les élus municipaux et pour le parapublic. Le projet de loi des députés, contrairement au projet de loi des juges, des élus municipaux et de toute la fonction publique et parapublique, ce projet de loi-là, M. le Président, ce qu'il fait, c'est qu'il ne fait pas qu'harmoniser, il vient bonifier. Donc, ce n'est pas la même nature de projet de loi.

Nous, quand le projet de loi a été annoncé, c'est vrai qu'on a dit tout de suite au ministre, on lui a d'abord posé la question: Est-ce que ton projet de loi vient rendre conforme nos régimes de retraite à ceux des juges, des élus, etc., pour respecter la loi C-52, ou s'il fart autre chose? Et le ministre a avoué, a admis candidement que le projet de loi des députés, lui, non seulement il harmonisait comme les autres, mais il venait bonifier. Et c'est là que l'Opposition officielle, M. le Président, a dit: Nous, nous jugeons inopportun de se donner des bonifications ou de se voter des bonifications à la hausse alors qu'on vient d'harmoniser avec effets nuls dans tous les autres groupes. C'a été notre position et c'est toujours notre position, M. le Président, au moment où on se parle. (16 h 50)

Si je fais un peu l'historique des projets de loi, M. le Président, depuis 15 ans en cette Chambre - je pense que je suis rendu à mon cinquième, moi, dans mon cas, parce qu'on hérite des projets de loi antérieurs si on a été enseignants, si on a été fonctionnaires de la fonction publique - j'avais ce qu'on appelle le régime de retraite des enseignants, le RRE. M. le Président, je suis arrivé ici, c'était un projet de loi de député avec un autre qui changeait la nature de mon projet de loi antérieur. Et 1983, là, il y a eu vraiment un coup de hache assez magistral dans le régime de retraite existant depuis 1973 ou 1974. Effectivement, un coup de hache extraordinaire. Ce qu'il y a de pire, M. le Président, au moment où, en cette Chambre - puis je m'en rappelle comme si c'était hier - on mettait toute la hache dans les fonds de pension, on était quand même accusés, à l'époque, d'y aller à la hausse. Je peux vous dire que c'était à la baisse.

Au moment où le Parlement a également réduit de 6 % à 3 % l'augmentation salariale, à l'époque, on a passé pour des gens qui avaient augmenté nos salaires. Je me souviens très bien, j'ai vécu ces événements-là assez difficilement parce qu'on avait beau expliquer qu'on réduisait de 3 % nos salaires et que, dorénavant, le fonds de retraite ne serait pas touchable immédiatement, au départ, comme c'était le cas antérieurement... On a vécu ces événements-là en cette Chambre. En 1987, il y a eu un autre régime, donc RRE dans mon cas - 1974, 1983, 1987 - un autre fonds de pension. On arrive en 1991 avec l'obligation d'harmoniser, et le gouvernement dit: On va bonifier.

Donc, je suis rendu, dans mon cas, à cinq fonds de retraite. Ne me demandez pas de le calculer. Je ne le sais pas. Je ne sais pas comment ça se fait. Ils m'envoient une belle petite feuille annuellement. Je la regarde et je dis: Ah c'est ça. Comment ils sont arrivés à ça? Je ne le sais pas. Avec des rentes qui dorment dans les fonds. Je sais une chose, c'est que ça me coûtait un grand bout de temps 10 % de mon salaire. Mais ne me demandez pas comment le calculer. C'est complexe, avec des rentes qui dorment jusqu'à 60, une autre qui est active et

une autre qui remonte en 1960, alors que j'étais enseignant. Ne me demandez pas de le calculer. Je n'en suis pas capable.

C'est pour ça que je ne veux pas aujourd'hui, M. le Président, faire le débat sur les différents régimes. Je veux le faire sur l'opportunité de la loi parce qu'au moment où un Parlement se permet d'harmoniser tous les groupes du secteur public et parapublic - et lui-même ne se contente pas de s'harmoniser, mais il bonifie - c'est là qu'on arrive à l'inopportunité. Vous savez que dans cette Chambre, il y a eu une entente qui a été ratifiée par une loi du président du Conseil du trésor. Il y a quelque temps, le gouvernement était très heureux d'annoncer à cette Chambre, M. le Président, que la loi qu'il votait pour geler les salaires, c'était le fruit d'une entente.

En effet, on a négocié avec la fonction publique du Québec des ententes pour que, pendant six mois, je crois, il n'y ait aucune augmentation de salaire. Il n'y en a pas pendant six mois. Au moment où ce gel des salaires commencera à s'effectuer, nous, on annonce qu'on va bonifier nos fonds de pension. M. le Président, ça prend du culot. Je vous avoue que nous autres, qui nous faisions reprocher en 1983, alors qu'on baissait nos salaires de 3 %, qu'on "choppait", comme on dit en bon québécois, qu'on coupait dans le fonds de pension, on s'est fait accuser de s'en donner. Mais là, ce n'est pas ça qu'on fait. Là, on harmonise puis on s'en donne.

De quoi va-t-on être accusés? Je suis bien prêt à reconnaître - je suis prêt à reconnaître ça - que c'est rare, dans le Parlement, que c'est opportun où il y a une opportunité de regarder la question des traitements ou des salaires, des rentes ou des régimes de retraite. C'est vrai que c'est rare que des opportunités puissent se créer. Mais, M. le Président, plus particulièrement dans la conjoncture actuelle, la récession frappe très dur notre collectivité. Cette collectivité et, en particulier, cette classe moyenne ont été frappées par la récession, mais aussi par une avalanche de taxes et pas maigres, extrêmement graves, extrêmement grandes.

Elle est étouffée et elle ne comprendra pas qu'un Parlement qui est chargé précisément d'essayer de faire respirer tout le monde puisse considérer en pleine récession, où on est obligé d'imposer, nous dit-on, cette avalanche de taxes pour venir à bout de payer certaines factures gouvernementales... Comment expliquer au monde qu'on n'a pas d'argent pour assouplir leur quotidien, pour alléger leur quotidien, puis qu'on en a pour bonifier un régime de retraite?

M. le Président, on pourrait tout au moins attendre une certaine reprise économique avant de considérer ledit projet de loi. On pourrait attendre au moins une reprise économique pour penser la bonifier. Nous, on l'a dit au gouvernement. Si vous voulez harmoniser comme les autres, on est prêts - parce que ce ne sont que des ajustements juridiques. Mais les effets de l'harmonisation, c'est blanc bonnet, bonnet blanc; ça n'augmente pas les coûts à être versés à même les fonds publics. C'est ça, fondamentalement, notre argumentaire, il n'est pas compliqué.

Les gens nous disent: Oui, mais ils vont parler contre. Oui, on parle contre, et on le fait en toute décence. C'est notre option, c'est notre façon de voir les choses, de dire aux citoyens... Ce n'est pas qu'il y a des choses, dans ça, qui sont scandaleuses. On l'a lu dans les journaux. Moi aussi, j'ai lu La Presse. Mais, fondamentalement, en pleine récession économique, au moment où on dit aux autres: Vous autres, on ne fait que vous harmoniser, pas une cent de plus, pas une cent de moins non plus, on vous laisse au palier où vous êtes... C'est ça qu'on a dit au monde. C'est ça qu'on a voté à trois reprises, dans cette Chambre, depuis environ une quinzaine de jours. Là, la même logique, quand il s'agit du Parlement, elle ne s'applique plus. La même logique ne prévaut plus. Là, on trouve les moyens, quand c'est le Parlement, parce que c'est nous, de le faire. Entre vous et moi, c'est ça, évaluer une opportunité.

Moi, je ne crierai pas au scandale sur le salaire des députés parce que je sais, pour avoir tenté de recruter des personnes pour venir en vie politique, que ce n'est pas facile. Je sais ça. C'est pour ça que je ne suis pas un de ceux qui vont crier au scandale. Un salaire de 60 000 $, ou tout près, il y a des gens, dans l'entreprise privée, qui gagnent beaucoup plus que ça, effectivement. Il y a des gars qui ont des fonctions de haut fonctionnaire d'État qui ont bien plus que les députés. Je sais tout ça, mais ça ne me convainc pas, face à une population et, en particulier, au moment... Je vais insister là-dessus, M. le Président.

Moi, ce qui me fait le plus mal, ces temps-ci, c'est de voir les sondages paraître les uns après les autres, où les hommes et les femmes politiques sont à peu près au dernier rang. On est chanceux quand on est à l'avant-dernier, on est plutôt au dernier rang, au niveau de la crédibilité publique, et ça, ça fait mal. Quand tu travailles 80 heures ou 90 heures par semaine à régler des cas, à travailler comme un fou, à participer à la vie communautaire collective dans ton milieu et que tu vois ces résultats de sondage, ça fait mal. Mais, bonne mère du ciel! il faut prendre les moyens, à ce moment-là, pour rebâtir cette crédibilité-là. Cette crédibilité-là, elle va se bâtir comment? Elle va se bâtir d'abord et avant tout en ayant les mêmes réflexes pour nous comme pour les autres. C'est ça, fondamentalement.

Moi, je n'ai pas honte de ce que je touche, et je suis satisfait du devoir accompli, même si c'est lourd. Mais il me semble qu'on peut réfléchir collectivement, dans le Parlement, et dire ceci. Indépendamment du fait qu'on trouve certaines demandes raisonnables, certaines de-

mandes discutables, certaines demandes, peut-être, sur lesquelles on peut s'interroger assez longuement, est-ce que, au moment où on demande à une population, elle, d'uniquement s'harmoniser, au moment où on demande à une fonction publique québécoise de consentir à aucune augmentation de traitement, c'est opportun de déposer un tel projet de loi?

Nous, on pense qu'on aurait dû déposer, dans un premier temps, un projet de loi qui harmoniserait notre fonds de retraite avec C-52, la loi fédérale qui nous oblige à le faire. En passant, il y en a dans cette Chambre, sans doute, qui ont été pénalisés. On leur avait dit: Tu pourras prendre des régimes privés - pas de problème! - jusqu'à tant de mille dollars. Deux ans après les avoir laissés faire ça, rétroactivement, ils sont venus leur dire: Tu nous dois de l'argent. Ça, ce n'est pas correct. Je n'accepte pas ce que le fédéral a fait là-dessus.

Ceci dit, il y a moyen d'harmoniser ça avec une loi, comme on l'a fait pour les juges, comme on l'a fait pour les élus municipaux, comme on l'a fait pour le public et le parapublic. (17 heures)

M. le Président, le projet de loi dit plus que ça. Le projet de loi dit qu'à compter de son adoption, il y aura d'abord des bonifications sur l'accumulation annuelle. Il y aura des bonifications sur les pénalités actuarielles si tu n'as pas 60 ans, si j'ai bien compris le projet de loi. Il règle quelques vides juridiques; effectivement, il y en a un depuis 1983 et c'est un vide juridique. Il y a même des gens qui ne sont pas ici et qui ne peuvent pas toucher à leur argent qui ne leur rapportera jamais. Ça, on n'a pas le droit d'être injuste envers du monde. Garder l'argent du monde sans qu'il serve à quelque nature que ce soit... Je comprends que ça représente peu, mais il y a des individus qui sont touchés par ça et il faut corriger ça. Là-dessus, je pense bien qu'il n'y aura pas de chicane.

Mais moi, je voudrais attirer l'attention du gouvernement, et dire: On a un problème à régler. Le problème, il est quoi? Le problème, c'est l'harmonisation. Donc, pourquoi ne pas adopter - je vous garantis que ce n'est pas long, adopter la loi de l'harmonisation - la loi de l'harmonisation et, en toute transparence, au moment où la reprise économique reprendra, on déposera un projet de loi; on le discutera, visière levée. Il ne faut pas avoir peur de parler aux gens, d'interroger, de regarder ça.

Mais la conjoncture actuelle... J'espère qu'on est tous conscients de la conjoncture actuelle que nous traversons, M. le Président. J'espère qu'on est conscients que 400 000 chômeurs au Québec, c'est du monde, ça. J'espère qu'on est conscients que 620 000 personnes sur l'aide sociale... C'est 1 000 000 en tout; c'est une personne sur six, ça, qui n'a pas d'emploi, quelles que soient ces personnes. 1 020 000... Est-ce qu'on ne peut pas dans la conjoncture actuelle adopter, à ce moment-là, l'harmonisation et, visière levée, au grand jour, dès la reprise économique, on la regardera? On la regardera et on jugera comme formation politique. Mais parier d'opportunité à ce stade-ci, je vous avoue que je ne sais pas dans quel monde on vit, mais...

Même si je le méritais à 150 %, je me dis que ça n'a pas de bon sens. Je vais jusque-là, moi. Je suis convaincu qu'il y en a qui sont bien plus tiraillés que moi. Il y en a qui peuvent penser que, sur le fond, ça n'a pas d'allure. Mais moi, je ne m'interroge même pas sur le fond. Même si je le méritais, je me dis: Écoutez, on va toujours bien attendre que l'argent rentre dans les coffres. On dit qu'on en manque dans les coffres et on veut s'en donner. C'est ça, fondamentalement, c'est là la question qu'on se pose à ce stade-ci. Il n'y en a pas d'autres. Tant qu'à moi, il n'y en a pas d'autre.

C'est pour ça que même si je suis le critique de mon parti pour ce projet de loi, je ne parierai pas une heure parce que je n'ai pas fait l'analyse en fonction de: "C'est-u" juste? "C'est-u" raisonnable? Je "devrais-tu" en avoir? M. le Président, si c'était ça, je pense que n'importe lequel pourrait avoir des visions même différentes. On pourrait avoir des visions même différentes, peut-être au sein même de leur parti. Il y en a peut-être qui ne le voient pas du tout du même oeil qu'un autre. Il y a des gens pour qui ça constitue un principe et qui seraient prêts dans un vote libre, par exemple, de voter même contre le projet de loi, même s'il est de la formation ministérielle. De notre côté, si on avait à voter sur le fond, il y en aurait peut-être qui n'auraient pas les mêmes perceptions sur le fond des choses que moi. Moi, je respecte ça. D'ailleurs, sur ce genre de projets de loi qui font appel à l'évaluation personnelle, j'ai toujours compris que le Parlement, on était retardé là-dessus. On y va sous forme, bien souvent, de position ministérielle ou bien de position de parti politique, mais, fondamentalement, c'est une question d'évaluation.

Mais sur l'opportunité, quand on fait depuis trois mois - je vous donne des exemples... À chaque période de questions, on se lève, on apprend que les "shops" Angus sont fermées, la papeterie de Matane est fermée, Jonquière a de la misère, Aima tire la patte. Je pourrais faire le tour du Québec... Il y a une crise budgétaire très forte. Le déficit était prévu pour quelque chose comme quelque 2 000 000 000 $, mais il sera à tout près de 4 000 000 000 $.

À ce moment-là, M. le Président, on a beau dire qu'il n'y a pas d'opportunité, que ce ne sera jamais opportun, je m'excuse. Il y a eu quand même cinq, six ou sept années de prospérité économique. Là, on est en pleine récession et c'est dans ce contexte-là qu'il faut l'évaluer et non pas sur le fond au mérite. Dans ce cas-là, sur le fond au mérite, je vais vous en donner des exemples de lois qu'on adopterait spontané-

ment. Le surplus des caisses de retraite privées des employés, on en a parlé après-midi à la période de questions, M. le Président. Vous avez écouté ça. C'est de l'argent que les travailleurs attendent et ça ne coûte pas une cent à l'État. Le projet de loi n'est pas déposé et ça fait trois ans qu'ils le réclament. Ça ne coûte pas une cent ça, et on ne l'a pas donné.

L accessibilité à la justice. Il y a de plus en plus de monde qui n'ont même plus accès à la justice parce que les programmes sont dépassés. Ça, ça coûte de l'argent, mais on ne peut pas le donner présentement, pourquoi? Parce qu'on dit qu'il y a une crise budgétaire, M. le Président. Il faut penser à ces choses-là. Il faut penser à d'autres législations qui ne coûtaient rien et qui auraient pu passer au cours de la présente session. Mais mes collègues en parleront sans doute.

Fondamentalement, sur l'opportunité même, la discussion n'a pas été longue chez nous. Ah bien, seigneur, ils ont dit: Écoutez, on a l'air de quoi? On a l'air de quoi? Un groupe parlementaire qui, quotidiennement, harcèle le gouvernement pour aller chercher un petit peu plus d'argent dans un programme, pour avoir des programmes pour faire marcher l'entreprise. On n'a pas d'argent pour les programmes de relance de l'économie. On n'a pas d'argent pour la formation professionnelle. On n'a pas d'argent... Au contraire, on a même sabré, M. le Président, allègrement dans les programmes sociaux à part de ça. Je pourrais vous en donner une multitude d'exemples. Je n'ai pas l'intention de m'étendre longuement là-dessus.

Mais qu'est-ce qu'on a fait en cette Chambre? On a questionné régulièrement là-dessus. On a fait valoir régulièrement notre position. Quand on est arrivés, naturellement, pour donner l'heure juste sur le projet de loi, on a dit: Non. Nous, on pense qu'il faut s'harmoniser comme les autres parce qu'on n'a pas le choix juridiquement, mais l'effet de l'harmonisation doit être nul. Ça coûtait tant avant, ça coûte tant après, mais on se conforme à la loi fédérale. C'est tout ce qu'on disait. On va se comporter exactement comme les autres. S'il y a une reprise économique, si ça fonctionne, si l'argent rentre dans les coffres du gouvernement, on discutera au mérite du fond à ce moment-là. Le fond, on le regardera très sérieusement, M. le Président. Je le répète, sur le fond, je suis convaincu que des deux côtés de la Chambre, il y a des personnes qui n'ont pas les mêmes perceptions.

Moi, faire appel au rôle du député comme l'a fait le leader du gouvernement, sur sa capacité de travail, sur les heures qu'il y met, on n'est pas en désaccord là-dessus. Écoutez, ça fait 15 ans que je fais ce métier dans cette Chambre. Je sais jusqu'à quel point les semaines sont très longues. Je sais jusqu'à quel point, M. le Président, on a même des fins de semaine complètes d'amochées et de scrapées, comme on dit en bon québécois. bien, on l'a voulu, ça. on l'a voulu. si on est reconnus par nos concitoyens, c'est parce qu'aussi on a une cohérence. puis, je ne suis pas gêné, à ce moment-là, quand il arrive une décision, de me brancher. mais, actuellement, s'ils me demandaient: chevrette, le fonds de pension, qu'est-ce que t'en penses? moi, je dis: ce n'est pas opportun. c'est tout ce que je réponds. s'ils me disent: sur le fond, oui, mais ce n'est pas un scandale. ce n'est pas une question de scandale. le scandale, il peut être dans l'opportunité et pas nécessairement sur le fond. ça fait qu'au moment où tu demandes au monde de se serrer la ceinture et de faire trois, quatre tours, toi tu te donnes du "loose". c'est ça qui n'est pas correct. ça n'a pas d'allure. c'est là-dessus. je ne comprends pas que vous ne compreniez pas ça. c'était si simple pour moi de dire: on fait une loi d'harmonisation, et la bonification viendra dès la reprise économique. on s'en reparlera, on fera une commission parlementaire, on dialoguera, on parlera, et on discutera entre nous autres. là, à ce moment-là, les gens nous diront: bien... au moins, les gens ont compris, ils comprennent un peu ce qu'on vit. c'est ça.

C'est là le problème. C'est la division qu'on a entre les deux formations politiques, à ce stade-ci, M. le Président. Ce n'est quand même pas nous qui avons... Moi, j'ai transmis ces informations-là, dis-je, M. le Président, au leader du gouvernement avant même qu'il soit déposé. Je suis allé à ma formation politique, j'ai expliqué. Ils peuvent se lever et le dire. Le consensus général, ils ont dit: Sur l'opportunité, c'est non. Je vous transmets ce que le caucus a dit. Je suis surpris qu'on ne l'ait pas fait comme pour tous les autres groupes. Ça, ça aurait été, M. le Président, un des petits accents pour faire grimper un peu dans les sondages la crédibilité des hommes et des femmes publics. Je suis sûr de ça, moi. Ils auraient dit: Bien, ils tiennent compte des réalités, ils se conforment un peu... Ils se donnent les traitements qu'on donne à la collectivité. (17 h 10)

C'est malheureux qu'on ne soit pas arrivés à un consensus là-dessus quant à la démarche. La démarche, c'est un projet de loi sur l'harmonisation et, après ça, on verra évoluer l'économie, on verra comment ça fonctionne. Il y a d'autres sessions, on n'est pas à bout de souffle. On a la session de juin qui s'en vient; il y aura la session de l'automne encore, et l'économie, il faut espérer qu'elle reparte, j'espère. Je touche du bois et je prie tous les soirs pour que ça reparte, cette économie-là, parce que, vous savez, comment ça nous occasionne de travail. Plus il y a de chômeurs, plus il y a d'assistés sociaux, plus on fait du bureau de comté puis on essaie d'encourager et de stimuler.

Ça aussi, c'est à la lumière de ce qu'on vit

quotidiennement qu'on doit porter un jugement sur l'opportunité. Porter un jugement sur l'opportunité, M. le Président... Moi, je pense qu'à ce stade-ci, je me fais le porte-parole, bien sûr, de notre formation politique pour dire qu'on est contre le projet de loi. Oui, on est contre le projet de loi. On le trouve inopportun dans la conjoncture actuelle, M. le Président. On serait pour un projet de loi sur l'harmonisation, pour se rendre conforme et légal.

M. le Président, je dois vous avouer ici que le discours que je viens de transmettre très calmement sur l'opportunité... Je vous certifie que si j'avais sorti les discours de Fernand Lalonde de 1983 au moment où, dans cette Chambre, le parti au pouvoir amputait le régime de retraite, en enlevait... On va vous en citer pendant toute la nuit, si vous voulez. On pourrait vous servir les discours du leader actuel, à l'époque de 1983. On pourrait vous servir les discours de plusieurs députés en cette Chambre qui, en 1983, au moment où on coupait, nous parlaient d'opportunité.

Savez-vous pourquoi? Parce qu'à l'époque, il y avait le gel à 3 %, baisser de 6 % à 3 %, puis il y avait le fait d'amputer le régime de retraite en même temps dans le même projet de loi. Ils se sont battus pour scinder le projet de loi. Je m'en rappelle donc. M. le Président, je vais les ressortir. Je les ai lus la semaine dernière et je vais peut-être permettre à certains de mes collègues, au cours de la soirée, d'en citer certains extraits juteux pour démontrer, M. le Président, qu'on ne veut pas à ce stade-ci être hypocrite et dire pourquoi. Si j'étais hypocrite, je dirais: Je suis contre tout, y compris le fond. C'est tellement franc que je dis: Ce n'est pas le moment, quand on gèle du monde puis qu'on harmonise les autres, de s'augmenter. Ça "peut-u" être plus clair? Ce n'est pas hypocrite, c'est franc!

Sur le fond, par exemple, quand on arrivera au fond, on se parlera sur le fond. Sur le fond, M. le Président, j'aimerais ça que le gouvernement lui-même décrète un vote libre là-dessus pour permettre à n'importe qui en cette Chambre - puis je le dis, ça vaut sur les deux côtés - il y en a qui, pour des principes personnels - ils ont le droit et je les respecte...

D'ailleurs, ce n'est pas une loi entre vous et moi qui engage le gouvernement comme sur un budget, ça. Sur une loi où on fait appel à la conscience individuelle - puis Dieu sait si ce n'est pas facile, ça, je le reconnais, moi -d'avoir à sanctionner ses propres traitements et ses propres conditions marginales de travail. Ça, c'est un fait que ce n'est jamais facile. Mais il me semble qu'entre la difficulté qu'a à vivre un député en cette Chambre, déjà pour poser le geste, on ne lui rend sûrement pas la tâche facile quand on le place devant une situation où la conjoncture empire encore la situation. Là-dessus, M. le Président, je pense avoir été d'une clarté. Il n'y a pas de cachette.

On est unanimes, nous, de notre côté à dire: Harmonisation, oui, mais bonification, s'il vous plaît. Quand les gens respireront - on ne doit pas être dans ceux qui manquent le plus d'oxygène - quand les gens commenceront â respirer, si on veut se donner un peu d'oxygène, on le fera, le débat. Mais fondamentalement, ce n'est pas opportun de faire un débat où il manque d'oxygène, dans une conjoncture où il manque d'oxygène dans notre société, dans une conjoncture où la situation budgétaire est difficile, dans une conjoncture où la situation économique est difficile; difficile pour l'entreprise, difficile pour les travailleurs, difficile, encore plus, pour les chômeurs, M. le Président. Donc, c'est à partir de cela que nous, nous voterons contre ce projet de loi là, et nous manifesterons notre cohérence et notre logique au cours du débat. Il y aura des gestes de posés, bien sûr, qui indiqueront clairement quelle est notre position. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le leader de l'Opposition officielle et député de Joliette. Nous en sommes à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 404. Je reconnais M. le whip en chef du gouvernement et député du comté de Viau. M. le député.

M. William Cusano

M. Cusano: Merci, M. le Président. Il y a quelques jours, le leader du gouvernement, député de Portneuf et ministre de l'Éducation, déposait en cette Chambre le projet de loi 404. Ce dernier a pour but de modifier l'actuelle législation concernant les conditions de travail et le régime de pension des membres de l'Assemblée nationale.

Si vous me le permettez, M. le Président, je ne m'attarderai pas aux détails d'ordre technique. Je crois plutôt qu'il serait opportun d'élaborer les raisons qui ont amené notre gouvernement à mettre de l'avant un tel projet de loi. Évidemment, certains députés de l'Opposition - on vient d'entendre le leader de l'Opposition - au sein de leur formation politique, prétendent qu'il n'est pas opportun, à ce moment-ci, de présenter un projet de loi qui a pour but de s'harmoniser avec les règles du projet de loi C-52 du fédéral. Il a dit, je l'entendais - il vient de quitter; c'est de valeur, M. le Président, que le député de Joliette vienne de quitter - que ce n'est pas opportun à ce moment-ci de présenter un tel projet de loi sauf que, ce qu'il oublie de dire au moment où on se parle, c'est que je ne vois ici aucun d'entre nous qui va bénéficier de ce projet de loi demain matin. Il n'y a aucun d'entre nous qui va bénéficier du projet de loi, ici, demain matin. Ce ne sera pas avant l'automne 1993 pour ceux qui seront battus et même au printemps 1994.

C'est sûr qu'il n'y a jamais, jamais de moment propice pour toucher et améliorer les conditions, que ce soit salariales ou de régime de retraite au niveau de la deputation, ici à l'Assemblée nationale. Ça fait 11 ans que je siège ici et, au fil des ans, on a toujours parlé des conditions de travail, des salaires, du régime de pension. Chaque fois, on a de la difficulté parce que ce n'est pas facile pour nous, M. le Président, de se décréter ou de se déterminer un certain montant. Ce qui est arrivé, c'est qu'avec la loi C-52, loi adoptée au gouvernement fédéral, il était nécessaire de redéfinir l'ensemble de règles concernant l'accumulation d'épargne-retraite. Nous nous devions d'amender nos propres régimes pour les harmoniser et les rendre conformes. (17 h 20)

Vous vous souvenez sans doute, M. le Président, que c'est suite à l'adoption de cette loi qu'un comité indépendant et donc, non partisan, avait été mandaté par le Bureau de l'Assemblée nationale pour étudier toute cette question. Qui étaient les membres de ce comité? Le comité était formé par M. Richard Guay, exjournaliste. Une personne qui a occupé votre place, M. le Président, en tant que président de l'Assemblée nationale, un représentant de comté qui a représenté les électeurs de Taschereau pendant des années. Il y a eu le Dr Victor Goldbloom, médecin pédiatre de formation et ancien ministre au sein d'un gouvernement libéral, et aussi membre du comité. On avait invité M. Alain Baccigalupo, professeur d'administration publique à l'Université Laval. Le comité a ainsi obtenu le mandat d'étudier, d'analyser et de faire des recommandations quant au régime de retraite des députés.

Le projet de loi 404 reflète en grande partie les recommandations de ce comité et tend vers une simplification du régime de pension existant. Il me semble que c'est normal de le faire à ce moment-ci. Vous le savez, M. le Président, il y a quelques-uns d'entre nous ici, à l'Assemblée nationale, qui sont présentement régis par trois plans différents de régimes de pension et, avec l'harmonisation qui était nécessaire à cause de la loi C-52, plusieurs d'entre nous auraient été régis par quatre différents régimes de pension, M. le Président. C'est inacceptable, et je pense que la population aurait ri de nous en disant: "C'est-u" possible que les législateurs ne soient pas capables d'harmoniser tous ces régimes de pension en au moins un régime de pension? Et vous allez comprendre, M. le Président, que gérer, de la part de la CARRA, quatre régimes de pension aurait été un peu plus dispendieux que d'en gérer seulement un.

Ce comité d'étude extraparlementaire a donc suggéré non seulement des réaménagements pour se conformer aux nouvelles règles fiscales, mais aussi d'autres réajustements afin de répondre à certaines préoccupations des membres de l'As- semblée. Concrètement - et on parlait de coûts tout à l'heure - la facture de ce projet de loi se chiffre à moins de 1 000 000 $ par année. Et ça, ce n'est pas pour aujourd'hui, M. le Président, et ce ne sera pas pour demain. Ce coût-là sera engendré, on l'espère, seulement au plus tôt à l'automne 1992 et même au printemps 1993.

Je crois sincèrement, M. le Président, que le projet de loi n'est nullement exagéré parce que, à un certain moment, lorsqu'on a fait des modifications au régime de rentes, il était possible de la part des députés, qui étaient considérés comme des travailleurs autonomes, de contribuer 7500 $ par année dans un REER à titre de travailleurs autonomes. Ce qui s'est produit, M. le Président, c'est qu'il y a eu des modifications au niveau des lois fiscales du gouvernement fédéral, et les députés ont perdu ce droit de contribuer dans les REER; et non seulement ils ont perdu ce droit-là, mais ils l'ont perdu rétroactivement.

Alors, M. le Président, pour faire un peu le survol des différents régimes de pension qui existent, avant 1983, le montant de la pension versée représentait 7,5 % du traitement par année de participation, avec pleine indexation au coût de la vie. Ça, c'est ce à quoi on se réfère. Il y a beaucoup de députés, beaucoup de concitoyens qui se réfèrent à ce plan-là comme étant le plan de la grande Cadillac toute chromée. C'a été changé, M. le Président, et, entre 1983 et 1987, il équivalait à 4 % du traitement par année, assorti d'une indexation réduite de 3 %. C'est ce qui se produit un peu avec tous les plans de pension qui existent présentement au Québec. Après 1987, la pension versée était de 3,5 % du traitement et on maintenait la réduction de l'indexation. Avec le projet de loi 404, on accorde 4 % de la rémunération, avec maintien de la réduction. puis, en ce qui a trait à l'âge d'admissibilité à la pension, pour les années antérieures à 1983, la seule condition était que le député ait accompli deux mandats d'une durée minimale de cinq ans. de 1983 à 1987, on a établi l'âge de la retraite à 60 ans, assorti de la possibilité d'un paiement anticipé, mais réduit de 4 % par année jusqu'à une réduction maximale de 33 1/3 %. depuis 1987, un député peut prendre sa retraite s'il est âgé de 50 à 60 ans, dépendamment du nombre total d'années qu'il a consacrées à son travail de député. enfin, le projet de loi 404 établit l'âge de la retraite du député à 60 ans, m. le président, et il est aussi assorti d'une réduction actuarielle en cas de paiement par anticipation.

M. le Président, cela explique bien l'évolution et les modifications qui sont aujourd'hui apportées au régime de retraite des députés de l'Assemblée nationale. Par ailleurs, vous savez sûrement que le régime québécois demeure un des moins généreux au Canada. Effectivement, le régime qui prévaut au Parlement fédéral repré-

sente 5 % du salaire moyen des six meilleures années du député. À Terre-Neuve, ce sont 5 % de la moyenne des trois meilleures années. En ce qui a trait à l'île-du-Prince-Édouard, la pension représente 75 % des cotisations versées par les députés, sans excéder 50 % du plus haut salaire. En Ontario, elle représente 5 % des trois meilleures années, et enfin, en Colombie-Britannique, ce sont 5 % de la moyenne des quatre dernières années. Donc, M. le Président, on se rend bien compte que le projet de loi 404 n'apporte aucune exagération au traitement versé aux députés de l'Assemblée nationale du Québec. Si l'on compare avec les provinces que je viens de mentionner, le Québec demeure loin derrière en ce qui a trait aux conditions salariales de ses députés à la retraite.

M. le Président, vous avez été ici assez longtemps pour savoir que la moyenne du nombre d'années que les députés passent à l'Assemblée nationale est de 6,3 années. Cela réduit considérablement les possibilités de profiter de la rente maximale. De surcroît, 45 % des parlementaires accusent - et ça, c'est selon l'étude qui a été faite par le comité de M. Guay et de M. Baccigalupo - une perte de revenus lorsqu'ils arrivent en politique. Le régime de retraite des députés vise donc à combler de façon minimale cette perte. Il assure donc un faible revenu lorsque le député atteint sa retraite.

À ce stade-ci, M. le Président, j'aimerais rappeler certains faits que nous avons peut-être des fois tendance à oublier. C'est que le député paie pour son régime de retraite. À chaque paie, M. le Président, vous le voyez autant que moi, il y a une déduction qui est faite, justement, pour contribuer à votre régime de retraite, tout comme pour l'ensemble des travailleurs et des travailleuses au Québec qui bénéficient d'un tel régime. Et ça, c'est une chose qui est oubliée souvent, c'est que la population pense que le député ne contribue pas de ses propres poches à son fonds de pension. Il est important, M. le Président, de noter que le montant qui est contribué par le député est considérable.

M. le Président, vous êtes certainement au fait qu'il existe des compagnies qui paient entièrement le fonds de pension de leurs employés, mais ce n'est pas le cas pour l'ensemble de la deputation au Québec, et je pense qu'on doit le souligner. De plus, à chaque mandat, le député se fait évaluer; on se base sur les actions qu'il a posées lors de l'exercice de ses fonctions et, si la population juge qu'il n'a pas rempli adéquatement son mandat, il n'est tout simplement pas réélu au mandat suivant. Je sais que ce n'est pas votre cas, M. le Président. Vous avez été élu à trois occasions; ça veut dire que la population du comté de Jeanne-Mance est certainement très satisfaite du travail que vous faites. Le député qui est élu à l'Assemblée nationale, c'est une personne, je pense, dans la grande majorité des cas, d'un côté ou de l'autre de la Chambre, qui remplit bien son rôle pour bien représenter la population. Et si la population trouve que, peut-être, le député ne fait pas, comme on dit dans le bon jargon québécois, sa job comme il faut, le message se rend normalement aux élections. (17 h 30)

M. le Président, vous savez que le député participe au processus législatif qui est sa première préoccupation. Il est élu par les électeurs de sa circonscription et il exerce en réalité trois fonctions. Comme je le disais, il s'agit de sa fonction comme législateur, de contrôleur, mais aussi et surtout de représentant de la population. J'aimerais vous donner des exemples de situations que je rencontre, que tous les députés rencontrent dans leur comté, M. le Président. Le député devient un peu le lobbyiste, si vous voulez, pour aider l'entreprise dans son comté qui veut se prévaloir d'un programme d'aide pour sauver des emplois. Le député aussi exerce sa connaissance. Il est souvent un conseiller, il est souvent un travailleur social. Il est souvent la personne qui aide des électeurs et des électrices à faire leur chemin au niveau de différents organismes qui relèvent du gouvernement.

Le député aussi, vous le savez, M. le Président, peut, au nom de ses citoyens, apporter des projets de loi publics ou même parrainer des projets de loi d'intérêt privé. Cela exige beaucoup de temps, M. le Président, et je connais très peu de députés ici, d'un côté ou de l'autre de la Chambre, M. le Président, qui travaillent moins de 70 heures par semaine.

Une voix: II n'y en a pas gros.

M. Cusano: Non, il n'y en a pas gros. Vous avez absolument raison. C'est vrai, M. le député de Masson, et je suis d'accord avec lui que les députés ici, parmi les 125 députés d'un côté ou de l'autre qui travaillent moins que 70 heures par semaine, ils sont très rares, M. le Président. Alors, lorsqu'on arrive pour amener certains changements à un fonds de pension ou un fonds de retraite, appelons-le ce qu'on veut... C'est sûr, comme je vous disais tout à l'heure, qu'il n'y a jamais un moment propice, jamais. Mais il faut le faire parce qu'au fil des ans, il y a eu des modifications apportées de l'extérieur qui ont eu pour effet de modifier notre fonds de pension.

Alors, je pense qu'avec tout le respect qu'on se doit d'un côté ou de l'autre de la Chambre, M. le Président, c'est d'amener les changements qui s'imposent. Je n'ai pas l'intention de m'éterniser sur ce débat et j'aimerais seulement vous dire, en terminant, M. le Président, que depuis 11 ans maintenant que je suis ici à l'Assemblée nationale, depuis 11 ans qu'on parle, d'un côté ou de l'autre de la Chambre, que

le régime de retraite pour les députés était inacceptable. C'est sûr qu'au moment où on se parle, on est en train de traverser une récession, mais j'insiste pour le dire et j'aimerais bien que les députés de l'autre côté de cette Chambre le disent aussi, c'est que le député contribue lui-même au régime de pension.

Le député, à chaque paie, M. le Président, il verse lui-même dans son fonds de pension, M. le Président, oui, 0,8 % de son salaire qui est contribué. Ce n'est pas gratuit, ça ne vient pas du ciel, M. le Président. Ça vient de la poche du député. Deuxièmement, M. le Président, c'est que les coûts additionnels engendrés par ce projet de loi, ce n'est pas demain matin que le gouvernement aura à les défrayer. Ça va être, comme je l'ai dit, ce ne sera pas avant l'automne 1992 ou même au printemps 1993.

M. le Président, on peut bien, de l'autre côté, à ce moment-ci, peut-être être un peu démagogique et dire que ce n'était pas opportun, mais si ce n'est vraiment pas opportun, MM. les députés de l'autre côté, non seulement ayez le courage de voter contre, mais ayez le courage aussi de vous soustraire du projet de loi qui est ici présenté devant nous, M. le Président.

Des voix: Bravo!

M. Cusano: Parce que vous savez fort bien qu'une fois que le projet de loi va être adopté, et il sera adopté dans toute sa transparence, M. le Président. Ce n'est pas un débat qui se fait dans la nuit, comme il s'est fait quand vous avez présenté votre projet de loi en 1983, M. le Président.

J'étais ici, moi. Alors, vous nous contez toutes sortes d'histoires, mais en 1983, vous avez essayé de passer le projet de loi en plein milieu de la nuit. Ce qui est proposé ici par le leader du gouvernement, c'est un débat à des heures normales. Suite à ça, il y aura une commission parlementaire qui va discuter du projet de loi article par article. Amenez-en, des amendements à ce qui ne fait pas votre affaire, M. le Président, on va les considérer! Et au bout de la ligne, ayez au moins la conviction, soyez au moins assez francs pour dire si c'est vraiment un scandale d'amener les modifications qui sont apportées par le projet de loi! Ayez donc le courage de vous soustraire au projet de loi! Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Viau. Sur l'adoption du principe du projet de loi 404, je reconnais maintenant M. le leader adjoint de l'Opposition officielle et député d'Abitibi-Est.

M. Gendron: Ouest, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ouest. Excusez-moi.

M. François Gendron

M. Gendron: M. le Président, comme leader adjoint de l'Opposition officielle, je me dois, je pense, d'intervenir sur un projet de loi qui touche les questions de travail des parlementaires. Je suis un peu déçu de la finale du député de Viau, qui a versé dans la partisanerie un petit peu abusive parce que. sur la base de ce qu'on a déjà fait et de ce que vous avez déjà fait, ça ne peut pas rester bien, bien haut. Ce n'est pas dans ce sens-là que j'ai l'intention de faire les 20 minutes qui me sont prescrites par le règlement. Je veux tout simplement dire très sobrement, sereinement, calmement que moi, ça ne me gêne pas, contrairement à ce qu'on a dit. Et je vais y revenir. Est-ce que je suis gêné de débattre sur la place publique des questions qui nous regardent, comme celle-là? La réponse, c'est non, je ne suis pas gêné du tout. Oui, je sais qu'on est rémunérés à même les fonds publics, mais je n'ai aucune espèce de gêne à recevoir la rémunération qu'on m'attribue, aucune espèce de honte, et j'expliquerai pourquoi.

Mais je ne pense pas que c'est être incorrect, M. le Président, de dire d'entrée de jeu que le projet de loi qu'on a sur la table, c'est une loi qui modifie la Loi sur les conditions de travail et le régime de pension des membres de l'Assemblée nationale et d'autres dispositions législatives. Je ne vous lirai pas les notes explicatives, mais je vais vous en lire deux paragraphes. C'est un projet de loi qui apporte des modifications à la Loi sur les conditions de travail. C'est un projet de loi qui limite - ainsi de suite. C'est un projet de loi qui fixe. Et, à un moment donné, après trois paragraphes corrects, honnêtes, objectifs, on arrive avec quelque chose qui n'est plus correct, selon nous, mais objectivement. On dit: "Par ailleurs, le projet de loi introduit une disposition dans la Loi sur les conditions de travail et le régime de pension des membres de l'Assemblée nationale afin de permettre l'établissement d'un régime de prestations supplémentaires." Pas compliqué! Pas de cachette! Oui, c'est un projet de loi qui bonifie le régime de pension des députés de l'Assemblée nationale.

Il y a un journaliste qui a écrit récemment: "Quant à la façon de procéder du gouvernement, elle est cousue de fil blanc, elle est odieuse - je le cite. Elle s'apparente à du mépris pour l'intelligence publique." Moi, je ne veux même pas relever ça. Je veux juste dire qu'il y a des gens qui sont dans ces dispositions-là. Il y a des gens qui sont dans ces dispositions-là, qui pensent qu'on a trouvé le prétexte de l'harmonisation pour amener une bonification. Alors, moi, je prétends qu'effectivement, si le projet de loi dont nous discutons au niveau de son principe ne comportait que des mesures d'harmonisation avec le projet de loi fédéral, en vertu de la loi C-52, ce serait un projet de loi qui passerait comme du beurre dans la poêle.

Est-ce que nos régimes de retraite ont l'obligation d'être harmonisés? La réponse, c'est oui. Cependant, moi, je comprends mal le régime de deux poids, deux mesures. Pour l'instant, je ne suis pas encore sur l'opportunité. Pourquoi harmoniserait-on les régimes de retraite, ceux des juges, ceux des élus municipaux, ceux de tous les autres employés de l'État: fonction publique, péripublique, santé et services sociaux, éducation? La, on dit: C'est nécessaire, c'est requis d'harmoniser vos régimes de retraite. Mais pour nous, on dirait: On va, en même temps, en profiter pour le bonifier. Et j'y reviendrai dans quelques minutes. Moi, j'en suis juste là-dessus. Je prétends que ce n'est pas correct. Ce n'est pas correct dans le même projet de loi. Ce n'est pas pour rien que, nous aussi, on va en discuter visière levée. (17 h 40)

On a dit, dès le début de la session, au leader, quand il y a eu consultation là-dessus: Nous préférerions que vous présentiez deux projets de loi, un sur l'harmonisation, comme tout le monde et, le deuxième, nous, on ne veut pas l'avoir tout de suite. Mais ce n'est pas nous autres qui gouvernons, parce que la situation du Québec ne serait probablement pas comme elle est. On ne serait pas dans la merde jusqu'au cou, et il n'y aurait pas plus de 1 000 000 de personnes qui sont sans emploi. Écoutez, la réalité, c'est qu'on veut discuter d'une bonification quand il y a 1 200 000 sur quelque 6 000 000, enlève les enfants et enlève ceux qui ont des difficultés, enlève tous ceux qui n'ont pas le statut de travailleur actif, vous ne me ferez pas accroire que ça fait une société bien, bien productrice pour la période dans laquelle nous évoluons.

Ça, on a dit ça au gouvernement, et on a dit ça très clairement. Nous, on souhaiterait qu'il y ait deux projets de loi. Notre choix, c'est un sur l'harmonisation et c'est un autre, pas en fin de session... J'entendais le député de Viau... Ça, c'est de verser dans la petite démagogie, de dire: Nous autres, on est plus fins que vous autres parce qu'on le fait à moins vingt plutôt qu'à 11 heures le soir. Mais, on le fait quand même en fin de session, en décembre, quand on s'est traîné les savates - je parle du gouvernement, bien sûr - quand le gouvernement n'a à peu près rien fait comme planification des travaux. On n'avait rien à faire, pendant des semaines et des semaines. Est-ce que le leader du gouvernement aurait pu déposer ce projet de loi le 16 octobre? Réponse: Oui. Est-ce qu'il l'a déposé en octobre? Réponse: Non. Aurait-il pu le déposer en novembre, M. le Président? Réponse: Oui. L'a-t-il fait? Non. À quand a-t-il attendu pour le déposer? Après le conseil général du Parti libéral, pour donner au moins la vision que ces gens-là s'occupaient de la section des dépenses.

Avec la décision qui vient d'être rendue aujourd'hui, on a un peu démasqué leur hypocri- sie. Faire accroire que les députés sont très, très soucieux d'avoir des projets de loi publics, mais déposés par un député, alors que les ministres du gouvernement n'ont même pas le courage de porter leurs culottes ou leurs pantalons parce que ça appartient, dans un régime normal, aux membres du Conseil des ministres. Ça appartient aux membres du Conseil des ministres d'être porteurs d'un projet de loi à impact financier. Venir nous faire dire: On va contrôler juste l'aspect des dépenses, donc ça n'a pas d'impact financier, c'est un peu gros. C'était tellement gros que la présidence l'a vu et elle a dit: Je ne peux pas accepter ça, c'est trop gros. Il y a toujours un bout! Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise?

J'ai toujours pensé que, dans un bilan, il y avait un actif et un passif. Donc, on ne peut pas s'occuper juste d'un bord et dire que le reste, ça n'a pas d'importance. On a contrevenu à cette disposition d'irresponsabilité qui s'appelle le désengagement de l'Exécutif. Ils se désengagent. Les députés vont le déposer. Ça donne l'image qu'on s'en occupe, mais on sait bien que ça va mourir au feuilleton. Ça va mourir au feuilleton parce qu'on sait qu'on va proroger cette session.

Mais revenons sur le salaire des députés et sur les pensions. Est-ce qu'on serait pour l'harmonisation? Oui. Est-ce que le projet de loi a un contenu abusif? En ce qui me concerne, réponse: Non. Ce n'est pas compliqué, ces choses-là, et c'est franc. Est-ce que moi, j'estime que la fonction de député est une fonction distincte qui doit nécessairement conduire à des évaluations différentes d'autres secteurs? La réponse, c'est: Oui. Tout le monde l'a fait, toutes les études le prouvent, des études qui ne sont pas contestées. M. Michel David, dans un editorial qu'il a repris à deux reprises, a été sérieux sur cette question-là, selon mon évaluation et selon celle de plusieurs citoyens du Québec. Il a été sérieux. "Oui, la plupart des députés au Québec font du travail assez exigeant, ce qui fait que la moyenne - la moyenne, personne ne met ça en cause - c'est 65, 70 heures-semaine." Bon, je vais oublier ceux qui me parlent de 85 et 90 heures, 50 semaines par année. Moi, j'ai des doutes. Ça fait 15 ans que je le fais, et je suis un de ceux qui ne s'est pas ménagé. J'ai même payé pour assez sévèrement, je paie encore un peu pour assez sévèrement. Mais là, il ne faut pas tomber dans du larmoiement chronique. À ce que je sache, il n'y a pas personne qui nous oblige à être parlementaires, personne qui nous force et qui nous attache sur nos banquettes: Vous êtes obligés de rester là jour et nuit.

Par contre, est-ce que les députés donnent une prestation professionnelle importante et significative? La réponse, c'est: Oui. Est-ce qu'ils mettent beaucoup de temps les fins de semaine? Oui. Est-ce que c'est une fonction qui est différente de celle de beaucoup d'autres, où on ne peut pas regarder uniquement l'aspect rému-

nération en disant: Écoutez, c'est des gens qui sont à 70 000 $ par année. Tout compte fait, c'est un bon salaire, ils ont une sécurité d'emploi et ainsi de suite? Les réponses, on les a toutes là-dessus, M. le Président, c'est: Non. C'a été évalué par plusieurs professionnels. Il y a une quantité de professionnels qui se sont penchés sur ces questions-là, et ils ont tous convenu qu'il s'agissait d'une fonction distincte, exigeante, où les heures de travail sont plus grandes, où la question de l'employabilité par rapport à des défaites, des fois où on fait pour, mais inconsciemment, ou des fois des défaites inopportunes selon nous, inappropriées. Est-ce que les parlementaires, règle générale, sur une base historique, peuvent se replacer rapidement? La réponse, encore là, on l'a étudiée, c'est non, sauf pour ceux qui exercent des professions libérales. Est-ce qu'on veut réserver exclusivement le droit de venir occuper une banquette ici à l'Assemblée nationale à ceux qui détiennent, avant d'y arriver, une profession libérale? Moi, ma réponse, c'est, non. Ma réponse, c'est non. Il faut démocratiser l'accessibilité pour s'assurer que les gens qui viennent représenter ici leur électorat dans les circonscriptions correspondent à ceux et celles que la population veut désigner. Et, règle générale, si on n'occupe pas une profession libérale de médecin, notaire et avocat... Et encore là, à ces niveaux-là, ça présente des difficultés, mais pas de même nature que pour d'autres types de professions.

Après avoir fait 12 ans, 13 ans, 14 ans ou 10 ans - parce qu'en passant tout le monde le sait, contrairement encore là à ce qu'on véhicule, la moyenne de longévité à l'Assemblée nationale, ce n'est pas le Sénat, ce n'est pas le Sénat canadien, ce n'est pas 30 ans, ce n'est pas 25 ans, ce n'est pas 40 ans. Ce n'est pas parce qu'on en a un à 35, 36 ans - qu'on félicite d'ailleurs pour sa longévité - qu'on peut en faire un cas d'espèce. La moyenne de longévité, c'est 6,3 années dans les 40 dernières années. Donc, c'est inférieur à 7 ans, plus proche de 6 ans.

Alors, est-ce que la plupart des députés collent ici à vie? La réponse, c'est non. Est-ce qu'ils peuvent disposer d'une grande possibilité d'employabilité par après s'ils n'occupaient pas au préalable des fonctions professionnelles ou dites libérales? La réponse, c'est que ce n'est pas facile. Ce n'est pas parce que la réponse n'est pas facile, c'est parce qu'on l'a, la réponse. C'est difficle de se replacer après 10, 12 ans de vie parlementaire.

Alors, ce n'est pas pour ces raisons-là, M. le Président, qu'on a des problèmes. Je ne parlerai même pas d'hypocrisie, je vais parler de faits. Les faits, c'est qu'il y a deux mesures dans le projet de loi. Nous, on en veut une. On veut l'harmonisation. Moi, je suis en train de vous donner des exemples pour dire: Est-ce que je serais gêné de débattre ça, visière levée en commission parlementaire et expliquer à la population un régime de pension qui tiendrait compte davantage de la réalité de la fonction de député à l'Assemblée nationale, compte tenu des heures et compte tenu de la difficulté de l'employabilité? Ma réponse, c'est: Non, je ne suis pas gêné de discuter de ça. Est-ce que le projet de loi déposé, sur le fond, m'apparaît gargantuesque? M'apparaît abusif? M'apparaît traduire des appétits voraces? Ça va être clair, ma réponse, c'est non. Non, ça ne m'apparaît pas traduire ça. Ça ne traduit pas des appétits gargantuesques, voraces, d'une gourmandise exagérée.

Mais ça m'apparaît être teinté d'un moment d'inopportunité sans précédent. Quelqu'un m'a dit: Ça ne sera jamais opportun. C'est vrai. Je suis d'accord. Mais après qu'on dit ça, est-ce qu'il y a des moments où ça serait un peu plus opportun quand il y a 1 000 000 de chômeurs, qu'il y a 1 000 000 de personnes qui ont de la misère à arriver parce que l'économie est sur le derrière et que la plupart des régions sont complètement effoirées, témoignage corroboré par celui qui vous boude depuis cinq ou six jours?

Qu'est-ce qu'il vous a dit comme gouvernement, nos répondeurs en face? Il vous a dit: Écoutez, pour ce qui est du développement régional, vous faites dur en étoile! C'est ça qu'il vous a dit. C'est pour ça qu'il boude. Il dit: Les régions, ça n'a pas de bon sens! Si on ne veut pas avoir l'air fou toute notre vie - c'est le ministre de l'Agriculture et du développement régional qui parle, ce n'est pas moi, là... Il dit: On ne peut pas continuer à avoir l'air fou comme c'est le cas, là. Les régions s'effritent. C'est ce qu'il a dit. Et là, demain, vous allez annoncer votre show pour Montréal et il a dit: Ça n'a pas de bon sens que je n'aie rien à annoncer pour les régions. Vous ne pouvez pas annoncer, faire semblant quatre ans après que vous vous occupez de Montréal, où il ne reste à peu près plus rien. Là, vous allez annoncer un programme dans l'Est et vous allez avoir rien pour les régions. Il a encore assez de sens politique, le ministre de l'Agriculture, pour dire que ça n'a pas de bon sens. C'est ça, essentiellement, la chicane. Nous autres aussi on sait lire après 15 ans. (17 h 50)

Mais la réalité, aujourd'hui, c'est que vous nous demandez de faire abstraction de ça et vous dites à François Gendron, député d'Abitibi-Ouest: Oui, tu vas retourner dans ton comté pareil, même si les villes d'Amos et de La Sarre sont presque, entre parenthèses, fermées, compte tenu de la reprise qui ne reprend pas pantoute. Ne me parlez pas de reprise, il n'y en n'a pas, il n'y a aucune reprise. Et janvier n'est pas passé, M. le Président. Février n'est pas passé. Moi, je ne suis pas un prophète de malheur, mais j'ai des indications de ce qui va se passer. Ça va être loin d'être rose en janvier, février, quand je vais voir plus de papier brun dans les magasins qu'il

n'y en a en dedans des magasins. C'est le cas présentement. Il y a plus de papier brun dans les vitrines pour annoncer que c'est fermé, qu'il n'y a plus de magasin, qu'il y en a à l'intérieur des magasins. Là, on me dit: Ne t'occupe pas de ça; fais abstraction de ça parce que ça ne sera jamais opportun, et donne-nous ton accord pour une bonification de ton régime de retraite, individuellement, parce que c'est ça que ça veut dire.

Moi, je ne peux pas faire ça, M. le Président. Je ne peux pas faire ça, et ce n'est pas une question, je vous le jure, d'opportunisme et de gêne. Je ne suis pas gêné de dire que ce qui est prévu n'est pas excessif; c'est pour ça que je veux en parler en commission parlementaire, et je veux en parler avec M... l'ex-président de la Chambre. Les deux ex. Non, M. Goldbloom n'était pas président, mais peu importe. J'ai un blanc, ça va me revenir; un ancien député, président de la Chambre, M. Guay, M. Goldbloom et M. Bac-cigalupo, qui ont fait un travail qui m'apparart objectif, honnête, qui a été repris depuis, je pense, 40 ans.

Oui, on va en discuter en commission parlementaire en février et en mars et là, on regardera s'il y a un peu plus de signes de reprise, un peu plus mordants, et je ne suis pas prêt à dire que ça me prend ça, moi, en juin. Je n'ai jamais dit ça. Mais je dis au moins: On dira à tout le monde qu'on n'a rien à cacher. Moi, je voudrais avoir un projet de loi spécifique, parce que je suis en train d'essayer de vous faire une petite preuve que la fonction de parlementaire est plus exigeante, qu'elle doit être considérée davantage dans la fonction connexe à la rémunération, qui est le plan de pension, surtout qu'on s'est "clenches".

Est-ce qu'on a un plan de pension qui a de l'allure depuis qu'on l'a littéralement détruit en 1982? La réponse, c'est non. On n'a pas un plan de pension qui a de l'allure par comparaison avec d'autres professions. Est-ce que j'étais d'accord, moi, avec le plan de pension de 1976-1982? Réponse: Non. Est-ce que j'étais l'un de ceux qui étaient d'accord pour modifier les avantages excessifs que je trouvais dans l'ancien régime? Réponse: Oui. Est-ce qu'on a fait notre travail comme il faut en 1982? Non. Pourquoi n'a-t-on pas fait notre travail comme il faut? C'est parce que, dans une période de récession, on a voulu - je le dis comme je le pense - trop donner l'exemple. Ça n'a rien donné sur le plan politique - ça, il n'y a pas de cachette - on a été jugés comme des pourris, comme si on s'était empli les poches, alors que je me rappelle - et ça ne me gêne jamais de parler de ça parce que ce sont des faits; j'aime les faits - en 1981: augmentation de la masse salariale: 9 %; les députés: 0 %, on était gelés; en 1982: augmentation des députés: zéro, on était gelés.

Moi, je siégeais au Conseil du trésor, M. le Président. Je me rappelle le 10 juin 1982, je m'en souviendrai toute ma vie. Globalement, la masse salariale pour l'ensemble de la fonction publique et parapublique, une augmentation de 11,7 %, qu'on a prise en pleine récession; on l'a prise, on l'a encaissée. Là, on a dit: C'est notre monde, on va leur parler, on va leur dire: Remettez-nous ça, c'était fou braque! Ce n'est pas logique de penser qu'après avoir donné une augmentation à du monde, de discuter avec eux autres et de dire: Remettez-nous ça. Donc, évidemment, ça ne s'est pas passé de même. Là, il est arrivé tout ce que vous savez, dont ça ne me fait rien de parler. Mais la réalité, c'est que le temps qu'on était gelés, nous autres, en 1981 et en 1982 et qu'on avait zéro, il y a une... Quand je dis ça, ce n'est pas pour me lamenter, ' c'est pour parler de faits précis. Est-ce qu'on a abusé de ces questions-là ici, comme parlementaires? La réponse, c'est non. Bien justement, c'est parce que je veux que ça reste comme ça.

J'aurais aujourd'hui, sincèrement, en conscience, l'impression d'abuser si je disais: Je ne fais pas la distinction entre la bonification et l'harmonisation, et je m'arrangerai après pour l'expliquer. Je ne veux pas. Je ne veux faire qu'une chose aujourd'hui, je veux juste harmoniser le régime de retraite, parce que le projet de loi fédéral, effectivement, a créé l'obligation d'harmoniser les choses. Et on verra pour plus tard. C'est pour ça, M. le Président, qu'essentiellement aujourd'hui nous avons acquis la conviction que ce n'est pas opportun, que ce n'est pas le moment. Il faut faire ça à part, séparément, et on ne le fera pas avant Noël. Je n'en veux pas de cadeau de Noël de cette nature-là. C'"est-y" clair? Je ne veux pas de cadeaux de Noël de cette nature-là à ce moment-là. Et je verrai plus tard, parce que je ne suis pas prêt à dire que si ça ne reprend pas. j'en veux un aussi.

Moi, M. le Président, si, en mai et en juin 1992, l'économie est aussi malade qu'elle l'est actuellement et que j'ai la moitié de mes gens qui ne peuvent pas travailler, je veux marcher la tête haute dans mon coin, et je vais dire que ce n'est pas parce que la hausse qu'ils recommandaient était injustifiée, mais parce que je ne pouvais pas la prendre, en conscience. C'est pour tous ces motifs-là que je me voie dans l'obligation, comme leader adjoint, de dire: Écoutez, on ne peut discuter comme ça. Il faut poser des gestes concrets parce qu'on est conscients du geste qu'on doit poser.

Motion de report

Puis le geste que je dois poser, M. le Président, c'est la motion de report suivante: "Que la motion en discussion soit modifiée en retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant à la fin les mots "dans six mois", ce qui s'appelle communément une motion de report.

Ce n'est pas pour perdre mon temps C'est

pour dire: Si, au moins vous acceptiez de reporter l'étude du projet de loi puis en faire un projet de loi scindé - le leader peut toujours faire ça - il aurait notre consentement demain matin. Donc, j'ai déposé la motion de report.

Ma conclusion, c'est uniquement parce qu'il ne nous apparaît pas opportun, même si les motifs, le moment opportun, il n'y en a quasiment jamais, là, moi, j'espère qu'il y aura un peu plus d'opportunités un peu plus tard. L'économie étant un tant soit peu reprise et à tout le moins - et c'est ma conclusion - avoir au moins la garantie que si on a à en débattre, on ne débattra que de ça et ça ne sera pas deux jours - oui, je conclus - avant de partir pour la fin de session.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, cette motion de report est recevable. Je vais suspendre les travaux de cette Assemblée pour une rencontre entre les deux leaders. Oui.

M. Pagé: Je crois qu'on n'a pas besoin de conférence des leaders. La pratique a toujours voulu, dans le cadre des motions de report, que le partage du temps pour le débat sur la motion se faisait d'une certaine façon, à savoir un débat limité de deux heures, ça va de soi... 10 minutes sont accordées au groupe des députés indépendants, ce qui n'enrichit pas les autres formations politiques, si le temps n'est pas requis, n'est pas assumé c'est-à-dire. Le reste du temps est partagé également entre le parti ministériel et celui de l'Opposition, et la durée d'intervention d'un ministre au nom du gouvernement est de 30 minutes et celle d'un député de l'Opposition officielle est de 30 minutes.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, en vertu de l'article 210, oui, je vais vous entendre, M. le député Westmount.

M. Holden: Le leader a mentionné les indépendants. J'aimerais savoir combien de temps que les indépendants vont avoir.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je tiens à vous dire que lorsqu'il y a un débat restreint, c'est le président qui répartit le temps, suite à une conférence des leaders. Mais s'il y a consentement, il n'y a pas de problème. C'est le président qui le répartit suite à une rencontre avec les leaders, mais si l'Assemblée nationale a un consentement sur le temps de parole réparti, je n'ai aucune objection.

M. Pagé: Je vous écoute et je crois qu'il y a consentement dans cette Chambre. Il y a consentement. Le leader parlementaire adjoint de l'Opposition et moi, on s'entend sur le fait d'un partage du temps: 50-50 entre le groupe ministériel et le groupe de l'Opposition et 10 minutes aux députés indépendants. Je n'ai pas indiqué si c'était au pluriel ou au singulier, là. Les députés indépendants dans cette Chambre m'indiquent qu'ils seraient satisfaits de 10 minutes. Alors, vous le prendrez.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement?

Des voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. Alors, la présidence, suite à un consentement, répartit le temps de ce débat restreint à 50 minutes au groupe ministériel et 50 minutes au groupe de l'Opposition officielle, avec 10 minutes à l'auteur de la motion en droit de réplique et 10 minutes également aux députés indépendants. Alors, je suis prêt à entendre l'auteur de la motion.

M. Gendron: M. le Président, puisque je viens de... J'ai 10 minutes comme auteur de la motion. C'est bien ça?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non. Vous avez 30 minutes. Ou ça peut-être un autre intervenant aussi. Alors, vous ne pouvez pas intervenir.

M. Pagé: M. le Président, je crois que tous les motifs invoqués au soutien de sa motion, le député a eu l'occasion de les faire valoir. Donc, il n'y a absolument rien qui l'oblige à prendre tout le temps qui lui est alloué.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): D'ailleurs, vous ne pouvez pas... Juste un instant. Alors, l'auteur d'une motion de report n'a pas droit de parole lors du débat restreint auquel donne lieu cette motion. Ça a été jugé à plusieurs reprises, ça, en particulier par la présidence ici. Alors, je cède la parole à Mme la députée de Chicoutimi. Mme la députée.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Sur la motion de report touchant le projet de loi 404, Loi modifiant la Loi sur les conditions de travail et le régime de pension des membres de l'Assemblée nationale et d'autres dispositions législatives. (18 heures)

Au moment où le leader du gouvernement déposait ce projet de loi, il a longuement commenté les modifications proposées au régime de pension des députés membres de l'Assemblée nationale du Québec. Les raisons qui ont été invoquées par le leader du gouvernement peuvent être raisonnables, nous n'en disconvenons pas. Mais aujourd'hui, le 16 décembre 1991, cette loi

est inopportune, inacceptable, voire indécente, indécente alors que tant de gens se demandent comment ils vont se procurer le pain quotidien. Il me semble plutôt douteux de commencer à s'inquiéter si on va mettre du beurre sur le nôtre alors que nous serons retraités, M. le Président.

M. le Président, indécent parce que le gouvernement fait montre d'une insensibilité choquante, voire méprisante à l'endroit de centaines de milliers de familles québécoises qui, à la veille des fêtes, souffrent de ne pouvoir offrir aux leurs les douceurs qu'on voudrait bien leur donner à cette période-ci de l'année. Inacceptable, un gouvernement qui fait montre d'une insensibilité, je le rappelle, choquante et méprisante, alors que la récession frappe de plein front des dizaines et des dizaines de milliers de travailleurs et de travailleuses. Au Saguenay-Lac-Saint-Jean, dans ma région, selon les dernières données du ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, c'est 5000 travailleurs et travailleuses qui ont perdu leur emploi dans des secteurs manufacturiers majoritairement, des emplois bien rémunérés, M. le Président. C'est 5,6 % de plus de chômage que l'an passé. Le chômage actuel est de 13,8 %, mais ça ne prend pas en compte une diminution de ce qu'on appelle le taux d'activité. Si on ajoute le taux d'activité qui est diminué de 2,3 %, on atteint un chômage qui dépasse les 17 %, et ça ne prend pas en compte, évidemment, les assistés sociaux.

M. le Président, c'est Abitibi Price qui a mis des personnes dehors par centaines et par centaines. C'est l'Alcan. C'est Provigo qui s'apprête à faire, pour fins de rationalisation, des mises à pied chez nous, M. le Président. Dans l'ensemble du Québec, c'est 41 000 travailleurs et travailleuses qui ont perdu leur emploi au cours de la dernière année. Ces emplois ont été remplacés par des emplois précaires. Est-ce qu'il faut rappeler les chiffres? À temps partiel, on a 17 000 hommes de plus qui travaillent à temps partiel que l'an passé à la même date et 8000 femmes. Le temps partiel, l'emploi précaire affecte profondément les hommes, les femmes, mais les jeunes, les jeunes de 15 à 24 ans, 11,3 % de plus de travailleurs à temps partiel dans cette coupe d'âge, M. le Président.

Inopportun parce que ce gouvernement, M. le Président, a décrété un gel des salaires dans la fonction publique et, n'eût été des pressions de l'Opposition, il aurait aussi accepté le gel des salaires pour les employés municipaux. Inopportun parce qu'il y a des travailleurs et des travailleuses dans les entreprises privées, aujourd'hui, qui ont accepté de réduire, de geler leur salaire. Dans certains cas, de les réduire, dans d'autres cas, de travailler à temps partagé pour maintenir l'entreprise à flot, M. le Président.

M. le Président, inopportun, alors que les contribuables, jour après jour, voient leur pouvoir d'achat diminué de façon dramatique par l'effet conjugé des taxes, des tarifications et des impôts. Inopportun, M. le Président, parce que les familles québécoises bouclent de plus en plus difficilement les fins de mois. Les familles avec enfants, en particulier, ces familles qui souffrent comme toutes les autres d'une augmentation des taxes scolaires, d'une augmentation des taxes municipales, des tarifications, permis de conduire, immatriculation des voitures, des droits de scolarité. La TVQ et la TPS qui affectent particulièrement ces familles, je le rappelle. Quand on paie de la taxe sur les couches de bébé, sur les tétines, sur les biberons, sur les vêtements d'enfant, sur les bottines, sur les fournitures scolaires, M. le Président, les réfrigérateurs et les meubles, ça affecte lourdement le budget des familles. Quand, en plus, les droits de scolarité continuent d'augmenter au-delà ou au rythme de l'inflation alors que les salaires sont gelés, M. le Président, tout ça affecte lourdement la capacité des familles d'offrir aux leurs le minimum. Inopportun, pour ne pas dire indécent. Il s'est manifesté, selon nous, une insensibilité choquante à l'endroit de ceux et celles qui ont perdu leur emploi et qui travaillent dans des emplois précaires au moment où on se parle.

Les députés méritent un fonds de pension meilleur, je n'en disconviens pas. Je dis qu'il n'est pas le temps, quand il y a autant de personnes qui souffrent d'insécurité, de s'inquiéter de la nôtre quand nous serons à la retraite, M. le Président. Parce que, oui, les députés ont des fonctions exigeantes, oui, les députés travaillent de longues heures, oui, les députés vivent l'insécurité au moment où ils décident de sortir de la politique ou encore quand on décide qu'ils en sortent. Mais, M. le Président, les Québécois et les Québécoises également méritent, ils ont droit à un emploi décent, ils ont droit aussi à des fonds de pension honnêtes. Mais ces personnes ne peuvent pas, comme nous le faisons, nous, par le biais d'une législation, s'assurer d'un emploi demain matin, ou d'un fonds de pension honnête, M. le Président. Malheureusement, ces travailleurs et ces travailleuses, ces familles qui vivent la précarité ne peuvent pas régler leur situation en adoptant un projet de loi en Chambre. Il me semble indécent, inacceptable aujourd'hui, dans les circonstances économiques actuelles, de se demander, comme députés, je le rappelle, comment on pourra ajouter un peu de beurre sur notre pain alors qu'il y en a qui se demandent comment ils vont pouvoir se procurer du pain.

M. le Président, j'ai été, comme d'autres députés, affectée par l'absence d'harmonisation entre le programme d'impôt fédéral et provincial. J'avais contribué le maximum, 7500 $, deux années, 15 000 $; j'ai dû, comme beaucoup d'autres, le retirer, payer rétroactivement de l'impôt là-dessus, M. le Président. J'ai trouvé ça

désagréable et détestable. Je n'en disconviens pas parce que c'est long, les procédures sont longues, puis quand, le moindrement, vous avez placé ça à trois, quatre places, on n'en finit plus. Cependant, j'estime que mon problème est mineur au regard de ceux et celles qui, quotidiennement, s'inquiètent de savoir comment offrir le nécessaire à leur famille, M. le Président.

Je ne dis pas que ce n'est pas souhaitable. Je dis que c'est inopportun. Je souhaite, comme la plupart des députés, pour ne pas dire la totalité des députés ici, une harmonisation qui nous permettrait de ne pas recommencer ce que nous avons subi pour les années d'imposition 1989-1990, M. le Président. Mais l'harmonisation, ça n'est pas la bonification. L'harmonisation, c'est simplement nous permettre de s'harmoniser avec le programme canadien, M. le Président. Je pense qu'il est inopportun, au moment où nous nous parlons aujourd'hui, dans la conjoncture économique actuelle, d'améliorer le fonds de pension des députés de l'Assemblée nationale. Non pas parce qu'on ne le mérite pas. Ça ne me gêne pas de le dire. Je pense qu'effectivement il y a, dans plusieurs autres secteurs d'activité, des fonds de pension qui sont beaucoup plus généreux pour des fonctions beaucoup moins exigeantes. Mais ce n'est pas là la question. La question, c'est qu'il n'est pas opportun, au moment où on se parle, dans la conjoncture économique actuelle, de commencer à demander et à expliquer à nos concitoyens et à nos concitoyennes pourquoi nous accepterions, nous, d'améliorer notre fonds de pension alors qu'il y a tant de travailleurs et de travailleuses qui ne peuvent s'offrir de fonds de pension parce qu'ils sont sans emploi.

Alors voilà, M. le Président, pourquoi je m'oppose à ce que ce projet de loi soit adopté, discuté à ce moment ici, et j'endosse la motion de report déposée par le député d'Abitibi-Ouest. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Chicoutimi. Sur cette même motion, je reconnais M. le député de Shefford.

M. Roger Paré

M. Paré: Merci, M. le Président. Eh bien, tout comme ma collègue de Chicoutimi, moi aussi, je veux intervenir quelques minutes sur la motion de mon collègue qui veut que l'on reporte à six mois la discussion que nous sommes en train de faire ici, et je suis tout à fait d'accord avec cette motion. Je vais vous dire, il s'agit de regarder la séquence des événements, M. le Président, de regarder la réalité des choses aussi pour s'apercevoir qu'à voir les discussions que nous avons maintenant ici, dans cette Assemblée, c'est irrespectueux et c'est indécent par rapport aux citoyens du Québec, par rapport à la situation économique que nous traversons.

Je vais commencer par parler, pas nécessairement de l'historique mais de la démarche, plutôt, qui nous amène ici. Est-ce qu'il y a urgence à discuter ici, ce soir, de l'augmentation des pensions des députés? Et je parle bien d'augmentation, parce que de l'autre côté, en parlant d'harmonisation avec une loi fédérale - donc, encore une fois, on est contraints par des décisions prises ailleurs de venir légiférer ici pour faire des corrections - on utilise le discours de l'harmonisation pour amener une bonification. Et une bonification, ça veut dire une augmentation au bénéfice des députés, dans leur pension, dans leur régime de pension. L'harmonisation, ça n'a pas été décidé, il y a quelques heures ou il y a quelques jours, par Ottawa. C'est connu depuis plusieurs mois. De l'autre côté, il aurait été possible d'amener ce sujet bien avant qu'on ait le temps d'en discuter et de légiférer d'une façon honnête pour les citoyens, c'est-à-dire en prenant tout le temps nécessaire. En ayant le temps non seulement d'en parler ici tous et chacun pendant 20 minutes, mais d'en discuter dans nos comtés avec les citoyens pour leur expliquer le fond, pour voir s'ils sont d'accord, et si on n'est pas capables de les convaincre, bien, on en subira les conséquences si on décide de voter pour. (18 h 10)

Mais au moins qu'on ait l'occasion, l'opportunité et le temps d'en discuter. Donc, de l'autre côté, depuis des mois et des mois, on connaît cette obligation qui nous est faite par le gouvernement fédéral de venir harmoniser le régime de retraite des députés. Pourtant, on n'en a pas parlé au mois d'octobre. Pourtant, on n'en a pas parlé au mois de novembre et, selon le règlement de l'Assemblée nationale, on avait jusqu'au 15 novembre pour déposer le projet de loi 404, pour qu'il puisse être voté selon les normes, avec les délais normaux, les délais qui respectent la population pour qu'eux aussi aient le temps de le voir et de nous passer leurs commentaires. pourtant, le 15 novembre, le projet de loi 404 n'était toujours pas déposé à l'assemblée nationale. non, on a attendu au mois de décembre pour le déposer, en espérant le passer à la vapeur, à la cachette. et ça, ce n'est pas une façon de respecter les citoyens. ce n'est pas une façon de légiférer. donc, on l'a déposé en décembre seulement et là, on veut en discuter.

Ça veut dire qu'il y a des gens qui, dans leur salon, doivent se demander comment ça se fait. Comment ça se fait qu'on discute de l'augmentation des pensions des députés quand nous sommes en pleine crise économique? Quand on parle de fermeture d'usines, le seul discours qu'on entend de l'autre côté, c'est des coupures: coupures de budgets, coupures de services et augmentations de taxes et d'impôts pour les citoyens, parce qu'on dit que le gouvernement n'arrive plus.

Puis nous autres, on est ici en train de parler de nos augmentations de pension. Ça, c'est être complètement déconnecté de la réalité. Ce n'est pas opportun de discuter de ça présentement. C'est ça qu'on essaie de vous faire comprendre. Ce n'est pas le temps. C'est indécent et c'est inacceptable. On pourra en reparler peut-être quand ça ira mieux. Si c'est vrai que le fameux plan de relance dont vous parlez, ça va ramener l'économie, la prospérité, si vous réussissez, vous ramènerez le projet de loi et on en discutera. Mais pour le moment, est-ce que c'a du bon sens? Soyez un peu réalistes. Vous en reparlerez à vos concitoyens en fin de semaine dans vos comtés. Vous allez voir ce qu'ils vont vous dire.

Est-ce qu'on peut discuter présentement d'augmentations pour nous quand ça ne tient pas pour aucun autre citoyen au Québec? Regardez les nouvelles. De quoi parie-t-on, à part des fermetures? On demande aux citoyens qui sont syndiqués dans des usines d'accepter des gels de leurs salaires, d'accepter des gels et des prolongations de convention collective et, dans bien des cas, des conventions collectives à la baisse parce que l'économie est malade. À l'Assemblée nationale, je suis en train de me demander si c'est l'économie qui est malade ou si c'est le gouvernement, pour nous amener un projet de loi aussi inopportun à ce moment-ci.

Mais on l'a amené en retard pour qu'on le passe à la vapeur. Voyant que l'Opposition était contre, le gouvernement a décidé de le reporter au printemps. Il y aura commission parlementaire pour permettre d'entendre des gens et d'en discuter au mois de janvier. S'il pouvait y avoir discussion publique, si on était pour recevoir des gens spécialistes en la matière, en janvier, donc elle ne sera pas votée, de toute façon, en décembre. Pourquoi y a-t-il urgence qu'on en parle maintenant? On en parlera au mois de mars, lorsqu'on reviendra à la session, et que, nous aussi, on aura eu l'occasion, le privilège d'entendre les spécialistes. On aura une discussion, nous aussi, basée sur la connaissance totale du dossier. On n'est pas obligés d'en parler maintenant. Mettons ça de côté. De toute façon, elle ne sera pas votée avant le mois de mars. Le plus tôt où c'est possible qu'elle soit votée, c'est au mois de mars. C'est quoi l'urgence d'en parler maintenant? Soyons corrects avec nos concitoyens et nos concitoyennes. Reportons ça lorsque, nous aussi, on aura eu l'occasion d'avoir tout l'éclairage et toutes les informations, suite à la commission qui se tiendra au mois de janvier 1992. On ramènera le débat ensuite sur le principe, au mois de mars.

On nous dit, de l'autre côté: Oui, mais c'est le fédéral qui nous oblige, c'est l'harmonisation avec la nouvelle politique fédérale. De toute façon, la loi va être votée en mars, elle sera rétroactive. Elle va être rétroactive, donc, on pourra se conformer à la loi fédérale et, à ce moment-là, tout sera dans l'ordre des choses. Mais le débat aussi doit se faire au moment opportun. Ce n'est pas le temps maintenant, ce n'est absolument pas le temps, et ce n'est pas correct, comme je le disais tantôt. C'est indécent, ce n'est pas le moment.

Il y a bien d'autres sujets qui pressent plus que ça. Le vrai sujet, présentement, c'est la reprise économique, c'est le développement économique. Ce qu'on attend de l'autre côté, ce sont des politiques de développement économique, ce sont des programmes d'aide à nos entreprises, ce sont des programmes pour la formation professionnelle, la préparation de nos jeunes aux nouvelles technologies. Ce qui presse, de l'autre côté, aussi, c'est qu'enfin on se préoccupe de la pauvreté, pour la combattre. Est-ce qu'on a quelque chose à proposer à ceux qui ont de la difficulté à se nourrir? Est-ce qu'on ne serait pas censé être en train de discuter de la situation pénible de centaines de milliers de citoyens qui ont de la difficulté à se nourrir et à se vêtir, des gens qui ne sont pas capables de rencontrer leurs paiements? Pourtant, à ces gens-là, on leur dit quoi? Écoutez, il faut vivre selon nos moyens. Le gouvernement n'est plus capable, on n'a pas de ressources disponibles. On a de moins en moins de ressources parce qu'il y a de moins en moins de gens qui travaillent, donc, ils paient moins d'impôts. On n'a pas les moyens de vous en donner plus. Ceux qui ont de la difficulté présentement, le gouvernement vous dit: On n'a pas les moyens de vous aider, on est cassé. Mais, entre nous, ici, en décembre, le soir, on a les moyens de se dire: Si on augmentait nos pensions. On devrait être suffisamment préoccupés, présentement, de l'autre côté, de la situation pénible des plus pauvres pour ne pas penser à notre retraite, pour ne pas penser à autre chose qu'à aider nos concitoyens. De toute façon, qu'est-ce qu'il y a qui presse? Ce n'est pas l'harmonisation, je l'ai dit tantôt. Ça va être voté au mois de mars au plus tôt, et peut-être plus tard, ce sera rétroactif. Est-ce qu'il y a urgence? Est-ce que vous anticipez des élections précipitées? Les sondages vous inquiètent et vous voulez penser à vous protéger? Si ce n'est pas ça, c'est quoi, l'urgence? C'est quoi, l'urgence? Il n'y en a pas, d'urgence.

Des voix:...

M. Paré: De l'autre côté, vous n'avez pas besoin de crier. Ce que je dis, c'est la réalité. Ça peut bien faire mal, mais c'est la réalité. Il n'y a pas d'urgence à penser à nos pensions. Préoccupons-nous d'aider les citoyens et arrêtons le beau discours de dire... Vous l'utilisez tous, peu importe où vous vous trouvez, de l'autre côté. Soit les demandes pour les jeunes, soit les demandes pour les personnes âgées, soit pour les demandes des maisons de femmes, soit même pour les demandes pour le développement économi-

que - écoutez, on voudrait bien, mais on n'a pas les moyens, présentement. On entend ça tellement souvent. Il faut maintenant penser à faire du développement selon nos moyens.

Moi, je vous dis: Selon nos moyens, présentement, ce n'est pas le temps qu'on discute de ça, ce n'est pas opportun, on ne peut pas avoir deux discours. C'est pour ça que je suis d'accord avec la motion de report. Reportons ça en espérant - je le souhaite comme vous tous, de tout coeur - que la situation économique va se replacer et qu'on pourra dire oui aux demandes des plus pauvres de la société, et qu'on pourra se dire oui, peut-être, nous aussi, si on est capables de le justifier, mais quand on aura eu une bonne discussion, quand on aura écouté, nous aussi, comme tout le monde, la commission parlementaire qui va avoir lieu en janvier et qui va nous permettre d'en discuter en même temps que tout le monde, avec des spécialistes. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je reconnais maintenant M. le député de Westmount. (18 h 20)

M. Richard B. Holden

M. Holden: Merci, M. le Président. Mr. Speaker, there is never a good time for talking about parliamentarians' pensions, and there is no point in putting this off any longer. We have to decide now and we have to decide after looking at the facts. And I refer you, Mr. Speaker, to an editorial in the Montréal Gazette. They say, about editorialists, that they are the ones who come in after the battle and shoot the wounded. In the case of this editorial, they have not got a clue about what parliamentary life is all about. I must immediately declare my conflict of interest, because the age chosen for the pension under the new scheme is 60, and I am 60. So, that is my initial conflict of interest, but I will tell you this, Mr. Speaker, that most political people in this Chamber and those who run for election do not do it out of an anticipation of some kind of a large pension. I find it ludicrous that, at my age, having been elected and having given up a lucrative law practice and, perhaps, in the face of a defeat in the next election, that I should be deprived of what little pension is being offered to me because we are not as important, the political people in this life are not as important as, for instance, the executives of large corporations or the various people that are having pensions far larger that the ones that are being offered in the present package.

And when I see that the editorial says "The Government has to be without shame and it should be scrapped immediately, and that politicians do not deserve a pension", I asked the journalists who write these editorials, and the Gazette does not even have the courage to sign their editorial, so I do not know who wrote this editorial, but I do know that he or she could not get elected dogcatcher, and a lot of people who write about pensions for politicians do not seem to realize that in the first place, you have to get elected and in the second place, you have to go back and get your job reconfirmed every three or four years. Nothing is automatic in this world, including reelection. And I am sure that everybody in this House knows that better than I do. but to me, the ludicrous situation is that people look down on politicians these days. i consider political life to be as good a "métier" as being a lawyer - lawyers are not highly considered either - that it is an honorable profession, and it should be remunerated in accordance with the work that is done. the house leader described the immense numbers of hours that are spent by political people in this work and i think that the modest amounts that are being mentioned in the new bill are only justifiable and completely understandable if you understand that people are giving up much larger revenues in a great number of cases and that they are giving up, perhaps, advancement in their business careers.

All I can say to you, Mr. Speaker, is that I think this thing should be done once and for all. There is no good time for talking about pensions. There is no good time for talking about increasing salaries. I know the House of Commons puts it into the hands of a committee of outsiders who then recommend in the House... It looks as though they are not being as greedy as if it is done in House. But what I say to you, Mr. Speaker, is that this is a reasonable bill. It has been studied by a committee under Dr. Goldbloom. It is even less than what Dr. Gold-bloom's committee decided to endorse.

I submit to you, Mr. Speaker, that this motion should be defeated. This bill should be adopted and we should go on to much more important things like the economy of the country. Thank you, Mr. Speaker.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Westmount. Sur cette motion de report, M. le député de La Prairie.

M. Denis Lazure

M. Lazure: Merci, M. le Président. Je voudrais dire quelques mots pour appuyer la motion de mon collègue d'Abitibi-Ouest qui nous propose de reporter au mois de mars cette motion. On dit souvent que le pouvoir isole. Eh bien, ce que le gouvernement nous propose aujourd'hui est tout à fait symbolique et tout à fait typique de cet adage. Il faut qu'un gouvernement soit isolé, soit complètement hors de contact avec la réalité pour venir proposer une bonification du régime de rente des députés.

Moi, je suis d'accord avec le député de Westmount, que les députés méritent le salaire qu'ils ont actuellement, qu'ils méritent la pension qu'ils ont actuellement et probablement qu'ils mériteraient, de par leur travail considérable, les augmentations qui sont proposées. Mais ce n'est pas le temps, il faut leur dire bien haut et bien fort. Je pense qu'il faut être complètement dissocié de la réalité pour venir proposer cela à l'occasion d'une loi qui était nécessaire pour harmoniser avec la législation fédérale. Ce n'est pas le temps de venir bonifier ce plan-là, ce plan de pension des députés. Si on veut le faire, on le fera dans six mois, au printemps, à condition que la récession soit moins grave qu'elle ne l'est aujourd'hui, à condition que cesse la pluie de pertes d'emplois.

Dans le comté de La Prairie, il y a deux semaines: 400 emplois. Consumers Glass, qui a annoncé la fermeture pour le mois de mars. Les employés de Pétromont qui se font demander, il y a quelques jours: Acceptez donc de diminuer votre salaire de 10 %, de 15 %, si vous voulez que l'entreprise soit maintenue en vie. C'est comme ça chaque semaine. Comment un gouvernement peut-il avoir le culot de venir proposer, quelques jours avant Noël, un peu comme un cadeau de Noël, une augmentation du plan de pension des députés.

Je suis d'accord avec le député de Westmount que The Gazette est complètement dans l'erreur quand il est dit que les députés ne méritent pas leur plan de pension. Les députés le méritent largement. Il n'y a aucune honte à ce qu'il y ait un ajustement, un jour, quand les conditions économiques seront meilleures, M. le Président. Chaque semaine, le gouvernement nous dit: Ce n'est pas possible de continuer tel ou tel programme, il faut geler ces subventions-là.

M. le Président, vous savez que, depuis 1985, les subventions aux associations de personnes handicapées ont été gelées. Je vois le ministre responsable de l'Office ici. Il va me dire que là, ça vient d'être dégelé. Il y a une étude qui va amener un nouveau mode de financement, mais c'était comme ça un peu partout. Les groupes de bénévoles en environnement, leurs subventions ont été gelées de 1985 à 1991. On va enfin les augmenter un tout petit peu.

M. le Président, le taux de chômage augmente dans toutes les régions du Québec. La fermeture d'usines - grandes, petites, moyennes - nous est annoncée, semaine après semaine. Ici, à l'Assemblée nationale, dans un geste complètement irrationnel, on va venir profiter d'une loi qui était nécessaire pour harmoniser avec la loi fédérale, on va venir profiter de cette circonstance pour bonifier le régime de pension. C'est inacceptable, c'est inacceptable!

La motion de mon collègue d'Abitibi-Ouest est tout à fait raisonnable. Reportons au mois de mars et on verra. Si la conjoncture économique n'est pas meilleure, ce sera reporté à plus tard.

M. le Président, le même ministre de la Santé et des Services sociaux qui s'apprête à parler tantôt, il y a quelque temps nous disait: On va imposer un impôt-services. Je le vois qui commence à grommeler. Je m'attends à essuyer ses foudres tout à l'heure, même à avoir des menaces comme il m'en a déjà faites en Chambre. Il n'a jamais eu le courage de les faire en tête-â-tête cependant. Mais le ministre de la Santé et des Services sociaux nous annonce qu'il va revenir avec des impôts-services. On a demandé pour les sidéens que...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, je dois vous interrompre. Il est 18 h 30, et je dois suspendre les travaux de cette Assemblée à 20 heures.

Consentement. M. le député, si vous voulez poursuivre.

M. Lazure: J'allais conclure en disant: Ce n'est pas à une période où on nous demande de se serrer la ceinture chez les gens les plus démunis qu'on va venir profiter d'une occasion pour augmenter les plans de pension des députés. C'est mal venu, et il faut reporter ce projet de loi à plus tard. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. M. le député de La Prairie. Alors, les travaux de cette Assemblée, compte tenu de l'heure, sont suspendus jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 30)

(Reprise à 20 h 10)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre place. Alors, nous en sommes à la motion de report du député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition officielle. C'est une question... M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, sur une question de directive. Je sais qu'il y a toutes sortes d'interprétations du règlement qui circulent. Étant donné qu'il n'y a pas eu de conférence des leaders avant, que c'a été, comme on le dit en bon québécois, sur la gueule à l'Assemblée nationale, ce que je voudrais vous demander, c'est ceci. Le temps a été divisé. La seule entente, si je l'ai bien comprise, c'est 10 minutes pour les indépendants et 50-50 pour les partis du gouvernement et de l'Opposition, et le temps non pris s'accumule pour l'autre si jamais il n'est pas pris. Est-ce que j'ai bien compris?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, voici. C'est 10 minutes pour les députés indépendants, dont 5 minutes ont déjà été prises.

Une voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non, non. Vous n'avez pas de consentement pour le moment. Si vous avez besoin d'un consentement, on va vous en parler.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je m'excuse. Alors, le parti de l'Opposition officielle a pris 25 minutes; il leur reste 30 minutes sur 55. Le parti ministériel a 55 minutes et, selon l'entente, selon le consentement, si le parti ministériel n'utilise pas les 55 minutes, les minutes non utilisées vont s'accroître à l'Opposition officielle. Alors, le temps s'accroît, vu qu'il n'a pas été prévu de façon spécifique que le temps ne s'accroîtrait pas. Très bien. Alors, je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant sur cette motion de report, M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président. Nous avons étudié, parmi les députés de l'Opposition, d'abord, l'opportunité de déposer un projet de loi, suite à une étude qui avait été réalisée par un comité indépendant. C'est le premier élément de réponse auquel nous avons cherché à fournir des éléments pour nous positionner quant à l'opportunité, d'abord, que les députés de l'Assemblée nationale puissent se requestionner, analyser et en arriver possiblement à des conclusions différentes, compte tenu des éléments qui étaient contenus dans le rapport des experts qui avaient examiné ce et ces régimes de retraite pour les députés de l'Assemblée nationale et, éventuellement donc, en arriver à certaines modifications.

Je vous avoue que je me serais senti un peu coupable, M. le Président, si, aujourd'hui, comme représentant de la population d'une région comme l'Abitibi-Témiscamingue, je ne m'étais pas levé pour donner au moins ma vision des choses quant à l'opportunité de procéder au niveau du principe même de la loi 404 qui vise d'abord à harmoniser le régime de retraite des députés de l'Assemblée nationale des trois côtés de la Chambre, lorsqu'on compte les députés indépendants, et également - je devrais dire pour cette première dimension - pour en arriver à s'ajuster à la loi fédérale qui a été adoptée à la Chambre des communes en matière de régime de retraite au Canada. C'est également pour réviser le régime de retraite des députés de l'Assemblée nationale. Ça n'aurait pas été correct, M. le Président, que le député d'une région périphérique comme l'Abitibi-Témiscamingue ne vienne pas donner publiquement, largement ses impressions, ses intentions en matière de retraite des députés.

Aujourd'hui, ce à quoi nous faisons face actuellement, c'est à une simple demande, une demande au gouvernement actuel de reporter de six mois l'étude de ce projet de loi là, tout simplement sur la base de l'opportunité. Oui, M. le Président, quand je parcours de long en large ce grand comté de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, que j'y entends les impressions, les perceptions de la population, des citoyens, des citoyennes, des 38 municipalités de ce grand comté là, oui, j'ai nettement l'impression aujourd'hui que je ne serais pas correct avec ses électeurs et électrices si je procédais à la révision. Et je ne parle pas uniquement de l'harmonisation avec la loi fédérale ou en regard de la loi fédérale qui a été adoptée, mais à la révision du régime de retraite des députés de l'Assemblée nationale. À ce que j'entends, à ce que je vois, les éléments qui me sont soulevés comme problèmes qui sont vécus dans ce comté - et c'est la même chose pour bien d'autres régions du Québec - ce n'est pas de nature à supporter l'étude ou l'adoption du principe d'une loi visant non seulement à harmoniser, mais à réviser le régime de retraite des députés.

Je suis bien disposé, M. le Président, ce soir à dire, de tous les éléments de ce projet de loi qui nous a été soumis, qu'il y a des éléments qui sont valables, qui sont soutenables. Les gens doivent savoir qu'actuellement, dans les 125 membres - les 124 puisqu'il y a un siège vacant à Anjou, mais ça ne sera pas long, le 20 janvier, on va en ajouter un autre assis sur les banquettes à l'Assemblée nationale. Nous, on espère puis on souhaite, évidemment, et on est à peu près sûrs que ça va être quelqu'un qui va venir grossir pour l'instant la minorité de l'Opposition mais ça, c'est une question de laps de temps très court. Ce ne sera pas très long. Je pense qu'on devrait tous régler ça au Québec, ça ne devrait pas être un très gros problème.

Ce que je disais, M. le Président, c'est que, pour les 124 députés de l'Assemblée nationale, il y a actuellement trois régimes de retraite et, oui, il y a une certaine harmonisation. Et il y a certains éléments qui sont pénalisants dans cet actuel régime de retraite où on a de la difficulté à retrouver vraiment où sont les principes de justice, où sont les principes d'équité dans ces trois régimes qui, actuellement, intéressent trois catégories de membres de l'Assemblée nationale. sauf qu'il faut se poser la question aujourd'hui, m. le président. est-ce qu'il est opportun d'adopter le principe de l'étude de ce projet de loi 404? quand je regarde la situation, ça me rappelle souvent, m. le président - vous avez une expérience en matière juridique; il y a beaucoup d'hommes et de femmes ici, à cette assemblée nationale, qui ont une expérience du monde juridique - que le premier principe au niveau de l'exercice de la justice dans une société, c'est qu'on dit que notre système doit non seulement rendre justice, mais il doit y avoir également, de façon aussi importante, apparence de justice. il doit y avoir apparence de justice.

On pourrait énumérer ici, M. le Président,

probablement 20 à 25 bonnes raisons discutables, sur lesquelles on peut échanger, et qui sont fondées en matière d'équité et de justice pour le régime de pension, le fonds de retraite des députés. Mais il faut se poser aussi la question, comme représentants du public, comme représentants de l'Assemblée nationale, si tout ça servirait également l'intérêt de cette même population et de l'institution de l'Assemblée nationale. Tout comme la justice, il ne faut pas seulement qu'il y ait justice, il faut qu'il y ait apparence de justice. Bien, c'est la même chose dans le débat que nous avons à faire actuellement. S'il peut y avoir des éléments qui sont discutables et qui peuvent être soumis à la discussion en matière de régime de retraite des députés, le temps, la période que nous prendrions pour adopter le principe de cette loi et les discussions que nous aurions dans un deuxième temps, ce n'est pas opportun, c'est-à-dire que nous risquons également de causer un certain nombre de torts aux hommes et aux femmes, et surtout à l'institution qui s'appelle l'Assemblée nationale, parce que les conditions de vie de nos concitoyens et de nos concitoyennes sont actuellement beaucoup trop difficiles.

Des tenants, des représentants d'un autre groupe ici, à l'Assemblée nationale, diront: Écoutez, M. le député de Rouyn-Noranda-Témis-camingue, vous êtes ici depuis seulement deux ans et vous allez comprendre vite qu'il n'y en a jamais de temps opportun pour discuter de ces choses-là, parce qu'à l'Assemblée ultime, à l'Assemblée nationale, aux groupes qui représentent ultimement la nation, il n'y a jamais de bon moment pour regarder les conditions de travail et de retraite des membres de cette Assemblée. Oui, honnêtement, si ça peut être difficile de trouver le moment opportun pour en discuter, très certainement qu'on peut diagnostiquer qu'il y a d'autres moments qui sont particulièrement inopportuns. Si ça peut, par ailleurs, causer un certain nombre de difficultés à des députés qui siègent ici - de leur point de vue, bien sûr -depuis 35 ans, 30 ans, 15 ans, 5 ans, 2 ans, comme dans le cas de votre humble serviteur, oui, il pourrait y avoir des problèmes qui pourraient se discuter. Mais on ne peut pas prendre ça inconsidérément par rapport à la situation économique que vivent nos concitoyens et nos concitoyennes au Québec. C'est pourquoi il serait beaucoup plus sage d'adopter, sans entrer dans cette discussion, dans une partisanerie de mauvais aloi, à ce moment-ci des discussions, parce que nous avons tous lu, comme concernés, dans cette Assemblée nationale, les rapports qui nous ont été préparés par les comités d'experts... (20 h 20)

Alors, je dis que non seulement ce n'est pas opportun, mais, tout comme la justice, il faut qu'il y ait apparence de justice. C'est important que nos concitoyens et nos concitoyennes, que les gens de l'Abitibi-Témiscamingue, que les gens de toutes les municipalités puissent comprendre, quand je les verrai à l'époque des fêtes, que, s'il y a de grandes difficultés au plan du chômage, au plan de l'emploi, au plan des fermetures d'usines, au plan de la vie commerciale, leur représentant a l'Assemblée nationale n'a pas cautionné, ne serait-ce que l'adoption du principe pour discuter en commission parlementaire d'un projet de loi qui vise à harmoniser le régime de retraite des députés de l'Assemblée nationale et qui, dans certains cas, lorsqu'on arrivera à la phase 2, irait au-delà de l'harmonisation, et nous amènerait à bonifier ce régime pour certaines catégories de membres de cette Assemblée nationale, suite à des discussions, de façon méritée ou pas.

Non, je ne peux pas accepter cela, M. le Président. Je veux aussi être solidaire avec ma population. Je veux leur dire que, s'ils ont de la difficulté... Moi, je pense qu'il y a certaines iniquités à l'Assemblée nationale, comme membre siégeant à cette Assemblée, qui peuvent être examinées et que nous pourrions redresser, mais je trouve le temps tout à fait inopportun, mal choisi. Ça ferait mal à nos concitoyens, mal à l'institution, mal à d'autres institutions dans lesquelles les citoyens doivent avoir confiance. Je n'accepte pas cette position-là, je la refuse. C'est la même position que j'ai exprimée à l'intérieur du caucus des députés du Parti québécois, de l'Opposition, à l'Assemblée nationale. Je la répète ici devant cette Assemblée pour souhaiter que les autres membres, surtout de la majorité ministérielle, prennent cette opinion en compte, s'il vous plaît. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Sur cette même motion, M. le député de Saguenay.

M. Ghislain Maltais

M. Maltais: Merci, M. le Président. Nous avons en face de nous une motion de report présentée par le député d'Abitibi-Ouest sur le projet de loi 404 invoquant le moment inopportun de présenter un tel projet de loi.

Le projet de loi 404 n'arrive pas comme un cheveu sur la soupe à l'Assemblée nationale. Depuis 1990, un groupe non partisan travaille sur ce projet de loi, travaille sur des recommandations. Je ne referai pas le discours qu'a fait notre leader parlementaire, qu'a fait aussi le leader parlementaire de l'Opposition sur la technicalité de ce projet de loi, mais sur le moment opportun.

M. le Président, lorsqu'il s'agit, dans l'entreprise privée, ou qu'il s'agit ici, à l'Assemblée nationale, de regarder ce que valent les membres de l'Assemblée nationale, c'est toujours délicat, c'est toujours difficile. Tous les gouvernements qui nous ont précédés ont dû faire face, une fois ou l'autre dans leur mandat, à ce genre

d'exercice où il faut aller au-delà de la par-tisanerie, mais bien se fixer un sens d'équité. L'équité, où commence-t-elle et où se termine-t-elle? la proposition de report dit de reporter l'étude de six mois. j'aimerais bien ça savoir... m. le président, dans la présentation du projet de loi, le ministre de l'éducation et leader parlementaire a indiqué qu'il présentait au grand jour ce projet de loi, qu'il va y avoir une commission parlementaire en janvier, qu'il reviendrait au mois de mars, à la session de mars et avril, ce qui veut dire un délai de quatre mois et demi à cinq mois. on ne peut pas demander plus de transparence. on ne peut pas demander quelque chose de plus transparent, à savoir qu'à cause de c-52, bien sûr, l'assemblée nationale profitera pour regarder et ajuster, harmoniser trois fonds de pension existants par lesquels la très grande majorité des membres ici sont couverts, ce qui représente 0,5 %. cela peut-il apparaître aussi scandaleux qu'on veut nous le laisser croire, 0,5 %? j'aimerais ça savoir, que quelqu'un me dise dans cette assemblée ce que ça coûte aujourd'hui et ce que ça coûtera au 1er janvier 1992 à l'assemblée nationale. zéro, puisque c'est une bonification qui pourrait être accordée lorsqu'un député quittera l'assemblée nationale.

M. le Président, je me posais l'interrogation depuis cet après-midi, en regardant ce qui se passe un petit peu dans les autres provinces et au gouvernement fédéral. Et je m'interrogeais: Quelle est la conception des Québécois sur l'ensemble des députés? La valeur des députés? Par exemple, à Ottawa, un député gagne en moyenne 87 000 $ par année, alors qu'au Québec c'est 60 000 $. Au niveau des fonds de pension, c'est 5 % par année, cumulatifs, payables immédiatement après le départ. Ce qui veut dire qu'un député fédéral qui a fait huit ans a droit à 40 % de son salaire, indexé pleinement, retirable immédiatement et tant qu'il vivra. M. le Président, est-ce que, parce que nous avons choisi, comme Québécois, comme Québécoises, fiers de l'être, de siéger à l'Assemblée nationale du Québec, on vaut moins cher que quelqu'un qui a décidé d'aller servir à Ottawa? Est-ce que quelqu'un dans cette Chambre peut me l'indiquer? Est-ce que Benoît Bouchard, député de Lac-Saint-Jean, vaut plus que Christian Claveau, qui a choisi d'oeuvrer à l'Assemblée nationale? Est-ce qu'il devrait être traité différemment? Est-ce que les députés de l'Assemblée nationale... C'est la question qu'on doit se poser dans la motion de report du député d'Abitibi-Ouest qui, lui, je pense, indique que son travail à l'Assemblée nationale ne vaut pas celui d'un député fédéral. Et c'est là, à mon avis, une erreur grossière, une erreur que l'ensemble des Québécois et des Québécoises ne peuvent accepter, parce qu'on ne peut pas juger, parce qu'on a choisi de servir au Québec, on ne peut pas accepter de valoir moins que quelqu'un qui sert à Ottawa. Entre servir le peuple et l'ensemble d'un gouvernement qui couvre tout le pays, quelle est la différence?

Qui d'entre nos concitoyens, M. le Président, appelle à toutes les semaines son député fédéral? Qui, parmi nos concitoyens, est régulièrement au bureau du député fédéral? Alors que tous, entre nous, peu importe la formation politique dont nous sommes ici, nous sommes des serviteurs de l'ensemble des Québécois et des Québécoises et, les trois quarts du temps, M. le Président, on doit démêler nos concitoyens avec des dossiers provenant du fédéral. Qui, parmi les députés de l'Assemblée nationale, n'a pas eu à traiter un jour des cas d'assurance-chômage? Les gardiens de quai? Les pensions de vieillesse? Qui, parmi nous, n'a pas eu à faire ce travail qui était pourtant dévolu à nos collègues du gouvernement fédéral qui, pour des raisons lointaines, sont absents de nos comtés, qui, pour des raisons lointaines, n'ont pas la même disponibilité. Les citoyens, par amour peut-être, préfèrent faire affaire avec les députés québécois, les députés de chez eux, qu'ils ont toute l'année parmi eux, M. le Président. Peut-être qu'ils préfèrent faire affaire avec des gens qui connaissent leurs problèmes, et ils savent qu'ils auront une réponse. M. le Président, lorsque tous les députés, ici, reçoivent des téléphones dans nos bureaux de comté, même si on est à Québec, tous les soirs, on se fait un devoir de retourner nos appels. Ceux qui ne le font pas ne méritent pas de siéger ici à l'Assemblée nationale.

M. le Président, en vertu du travail que nos concitoyens nous demandent, en vertu de la valeur qu'ils accordent à nos représentations, comment peut-on, aujourd'hui, en toute logique, en toute équité, reconnaître par un report d'étudier ça, que la loi fédérale C-52 nous oblige... Comment reconnaître que nous ne valons pas le même prix, la même retraite que nos députés fédéraux? M. le Président, non seulement ce n'est pas ça qu'on demande, c'est beaucoup moindre, c'est beaucoup plus modeste. Je comprends l'Opposition, puisque c'est un dossier avec lequel on peut faire un petit chemin politique. Depuis quelques années que je siège ici, j'ai eu l'occasion de voir les deux côtés de la médaille. Bien sûr, on nous sortira des discours de 1983, de 1984, et la grande majorité des personnes qui les ont prononcés avaient le même objectif que vous avez aujourd'hui. (20 h 30)

M. le Président, on accuse souvent le gouvernement de passer des projets de loi à la vapeur, des projets de loi qui touchent l'ensemble de la deputation; c'est vrai que ça serait malhonnête si on le passait à 3 heures du matin, c'est vrai que ça serait malhonnête si on passait ça en vitesse, à la vapeur, en fin de session. Au contraire, le gouvernement du Québec a voulu le déposer, avoir une commission parlementaire, quatre mois pour l'étudier. Tous les éditorialistes,

tous les journalistes, tous ceux et celles qui sont contre vont le dire, le répéter. Ils vont dire et redire que ce n'est pas le bon moment.

M. le Président, lorsqu'on a un travail aussi épineux à faire, choisissez-moi le temps. En 1989-1990, lorsque le comité Goldbloom-Guay a été mis sur pied, la situation n'était pas ce qu'elle est aujourd'hui. En 1987, lorsque les députés ont accepté une diminution de 0,5 %, c'était tout simplement parce que le gouvernement fédéral permettait de prendre un régime de retraite additionnel. Aujourd'hui, en nous enlevant ce privilège-là, on doit revenir et ramener ce 0,5 %. Moi, je suis un de ceux à qui l'erreur du gouvernement fédéral a coûté 4300 $ en impôts et je n'en suis pas très fier. On nous a royalement induits en erreur. M. le Président, ce que les députés réclament aujourd'hui c'est ce que le gouvernement fédéral leur a enlevé. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Saguenay. Alors, nous en sommes sur la motion de report du député d'Abitibi-Ouest et je reconnais Mme la députée de Johnson.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Vous avez bien dit... Nous sommes en train de discuter sur une motion de report de six mois de mon collègue d'Abitibi-Ouest afin de donner une chance à la reprise économique, de donner un petit peu de lumière, un petit peu d'espoir à ceux qui sont mal pris dans le moment. C'est ça le but ultime de la demande de mon collègue d'Abitibi-Ouest.

J'ai bien écouté les propos du député de Saguenay. Il a dit à la Chambre - il ne m'a pas dit à moi personnellement, mais, comme je l'écoutais, j'avais l'impression qu'il me parlait à moi: Le projet de loi 404 n'arrive pas ici comme un cheveu sur la soupe. Ça fait quelque temps qu'on en discute. C'est vrai que ça fait quelque temps que le comité Guay, Goldbloom et Bac-cigalupo ont fait un travail pour évaluer les pensions des membres de l'Assemblée nationale, sauf que ce que l'on dit, c'est que vous auriez pu... Vous le saviez qu'au mois d'octobre le rapport avait été déposé. Vous saviez à ce moment-là ce qui était à l'intérieur du rapport. Si vous aviez l'intention de le déposer avant Noël, vous aviez toute la réglementation de la Chambre pour le faire au mois d'octobre ou au mois de novembre, avant le 15 novembre, pour le déposer et le faire adopter à l'intérieur de nos règles ici de l'Assemblée nationale.

Le député de Saguenay a parlé de transparence. Là, j'ai eu un peu de difficulté à regarder de quelle transparence il parlait. Je vous ferai remarquer, M. le Président, que ça a été déposé le 11, lundi dernier. La fin de semaine avant, il y avait eu le congrès général ou l'assemblée générale du Parti libéral - le conseil général du

Parti libéral - qui s'est tenu ici à Québec. Vous comprendrez qu'avec les discussions qu'il y avait eu à leur conseil général on a mis en évidence le rapport Poulin avec toutes les compressions quon voulait faire à l'intérieur du gouvernement pour enfin en arriver, selon ce qu'on a entendu ou ce qu'on a lu sur les journaux, à dégraisser de part et d'autre pour couper les dépenses afin que le déficit du gouvernement n'augmente pas. On va dire... Ça aurait été un peu gênant d'avoir déposé avant le Conseil général le projet de loi 404 qui définit qu'on aura une augmentation sur les pensions. Vous savez, lorsque notre leader en a parlé avec le leader du gouvernement, la volonté de l'Opposition officielle c'était de scinder le projet de loi 404. Pourquoi le scinder? Parce qu'on sait très bien qu'il fallait s'harmoniser avec le projet de loi C-52 du fédéral. On le savait très bien et on est très conscients que cette partie-là, on ne peut s'objecter à ça; il fallait le faire parce que, au fédéral, ils ne nous ont pas demandé la permission, eux autres, pour passer leur projet de loi C-52 et pour revenir un an en arrière pour aller rechercher ce qu'ils nous avaient donné et ce qui nous était légalement permis de faire, c'est-à-dire prendre des REER. Là, on allait chercher ça dans le projet de loi C-52 et il fallait obligatoirement harmoniser notre pension sur la loi nouvellement passée en janvier 1991.

Donc, on était conscients de ça, M. le Président. Mais le leader du gouvernement a refusé de scinder le projet de loi. Nous, on disait que c'était inopportun de présenter le projet de loi 404 avec une bonification au moment où on se parle. M. le Président, je me souviens très bien que le 16 octobre... D'ailleurs, j'ai fait un petit peu de recherche ici, et mon collègue, le député de Joliette, le 16 octobre - si vous souvenez bien, on venait juste de commencer la session - a passé une motion pour proroger la session, avoir un discours inaugural pour donner la chance d'avoir plus de discussions ici, à l'Assemblée nationale, et permettre au gouvernement de présenter des programmes pour remettre le train sur les rails.

C'est faux de croire que la récession est terminée, M. le Président. C'est faux de croire ça. En tout cas, si vous regardez dans vos comtés respectifs, il n'y a personne qui peut dire que la récession est terminée. Avec le nombre de pertes d'emplois qu'il y a dans chacun de nos comtés, c'est inacceptable, inopportun de présenter le projet de loi avec bonification au moment où se parle; on l'a dit, on l'a répété et on va le répéter encore. Seulement dans mon comté, M. le Président, en l'espace de quatre jours, la semaine dernière - d'ailleurs, j'en ai fait état ici, en Chambre - Domtar a mis 150 personnes à pied à Windsor, où je demeure, où je suis née. Dominion Textile, dans la région de Sherbrooke, a mis 150 personnes à pied. Puis les tapis Peerless, dans mon comté, ont raté le beau contrat d'au-dessus

de 1 000 000 $ d'Hydro-Québec qui a donné le contrat à une firme américaine puis, parce qu'elle a donné le contrat à une firme américaine, les tapis Peerless ont mis 275 personnes à pied, M. le Président. Je "peux-tu" vous en dire plus que ça? Ça, c'est seulement en l'espace d'une semaine dans le comté de Johnson. le 16 octobre, quand mon collègue de joliette a demandé une prorogation, j'ai fait une intervention pour dire qu'en estrie les vrais chiffres du chômage, c'était 20 %; si on calcule tous les petits emplois de 26 semaines, c'est 20 % de chômage et, depuis ce temps-là, il y a d'autres emplois qui ont été perdus, il y a d'autres entreprises qui ont été fermées et nos papetières sont en grandes difficultés financières. je dois vous dire que j'ai deux papetières dans mon comté. j'ai la kruger, à bromptonville, puis domtar, à windsor. pensez-vous que ces gens-là, qui ont perdu leur emploi à quelques jours de noël et qui ont tous des familles, sont heureux de voir que nous sommes en train de discuter, à deux jours, m. le président, de la fin de la session pour le congé de noël, qu'on va se donner une bonification dans un projet de loi pour les députés?

Il y a eu une ligne ouverte qui s'appelait Contact 63; M. le Président, j'aurais voulu que tout le monde entende ça, ici. Les gens appelaient; c'était à Sherbrooke, au poste de Sherbrooke; c'est Alain Campagna, le journaliste, qui fait ça. Si vous aviez entendu ce qui s'est dit là. C'était épouvantable d'entendre ça. Les gens disaient: Ça n'a pas de bon sens, pendant que tout le monde perd son emploi, pendant qu'il y a des fermetures d'usines, qu'on se bonifie un programme comme ça au niveau de la pension des députés.

Il y a eu, en plus de ça, je pense que c'est vendredi... Vous savez, chaque année, en Estrie, ça s'appelle les Paniers de l'espoir. C'est Rock Guertin, un ancien journaliste à CHLT, qui a parti ça en Estrie, puis tout le monde donne. Puis cette année, ils ont donné 1000 Paniers de l'espoir. Ce sont des paniers entre 75 $ et 100 $ pour les familles nécessiteuses. Ils en ont donné au-dessus de 1000, je pense, cette année, puis c'était le maximum, mais ils auraient pu en donner 2000, 3000. Les Paniers de l'espoir, ça veut dire des gens qui n'ont pas ce qu'il faut dans la maison pendant que nous autres, on va se donner une bonification.

On dit que ça n'a pas de bon sens, M. le Président. On dit que ce n'est pas le temps de faire ça. Peut-être que dans six mois... la demande de mon collègue de retarder de six mois cette partie-là... parce qu'on n'a pas besoin de l'harmoniser. Si on la sépare en deux, la loi, on va l'harmoniser avec la C-52, mais l'autre partie, qu'on attende en juin prochain, dans six mois, M. le Président, quand les gens auront recommencé à regagner confiance en l'économie, quand le travail aura repris, quand ça ne sera plus l'hiver puis que les gens n'auront plus de comptes à payer à cause du froid.

M. le Président, ça n'a pas de bon sens. En tout cas, on ne peut pas être d'accord qu'on ait une augmentation, une bonification dans le plan de pension, M. le Président, parce que le temps est inopportun et inacceptable. Merci. (20 h 40)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Johnson. Nous en sommes toujours à cette motion de report de M. le député d'Abitibi-Ouest sur l'adoption du principe du projet de loi 404, et je reconnais M. le député de Mille-Îles et leader adjoint du gouvernement.

M. Jean-Pierre Bélisle

M. Bélisle: M. le Président, sur cette motion de report, je dois souligner le ton et le contenu dans ce débat, qui est un ton très calme, un ton très posé, où on essaie de faire certaines nuances sans trop attiser la flamme quelquefois de la partisanerie qui nous envahit dans cette Chambre. Il me semble que, oui, c'est un moment tout aussi opportun que n'importe quel autre moment pour discuter du fonds de pension de ceux qui sont chargés par la loi et par la volonté du peuple de représenter les citoyens en cette Chambre.

La thèse de l'Opposition, la ligne d'argumentation de l'Opposition, M. le Président, est la suivante. Ils nous disent, d'une part, sur la motion de report: Nous allons reporter le projet de loi 404, mais nous sommes d'accord sur le fond. Ça, c'est le premier point. Nous sommes d'accord, nous convenons qu'il devrait y avoir une bonification du fonds de pension. Nous sommes d'accord là-dessus. Tous les intervenants que j'ai entendus à date, que ce soit le leader adjoint de l'Opposition et député d'Abitibi-Ouest, M. le Président, que ce soit le député de Joliette, le leader de l'Opposition, que ce soient les autres intervenants de l'Opposition, ils nous disent tous: Mais on est d'accord que le fonds de pension des députés de l'Assemblée nationale soit légèrement amélioré ou à tout le moins réajusté. Même le député d'Abitibi-Ouest a eu une honnêteté pour laquelle je l'en félicite. Il nous a dit tantôt, lors de son discours avant l'ajournement de six heures: On a fait une erreur, nous, le Parti québécois, en 1982. On a coupé d'une façon inconsidérée et on n'aurait pas dû le faire. Alors, la ligne d'argumentation de l'Opposition, le premier point, c'est de nous dire: On est tous d'accord avec le projet de loi 404. On est d'accord avec le projet de loi, on est d'accord avec l'amélioration. On est d'accord avec l'harmonisation à cause de la loi fédérale C-52 qui nous oblige à le faire.

Puis, il n'y a pas de cachettes à dire aux gens qui nous écoutent, M. le Président, que, de très bonne foi, plusieurs des membres de cette

Assemblée - ce ne sont pas tous les membres de cette Assemblée - on a suivi une directive de la présidence de l'Assemblée nationale quant à nos fonds de pension personnels et à nos fonds de pension qui étaient permis en vertu de la loi. De bonne foi, presque tout le monde a mis dans son fonds de pension personnel, son REER personnel, ce que la lettre de l'Assemblée nationale nous disait de mettre en 1989-1990, puis on a eu une triste surprise, tout le monde, on s'est fait collecter tout le monde par l'impôt. On s'est fait ramasser, envoie donc! Tu l'as mis dans un fonds de pension puis tu n'avais pas le droit de le faire. Alors que, M. le Président, je ne vous en fais pas un reproche, là, mais on a reçu une lettre avec l'en-tête de l'Assemblée nationale qui nous disait: Messieurs les députés, comme en 1985, comme en 1986, comme en 1987, vous avez le droit de le faire.

M. le Président, la ligne de pensée, la ligne d'argumentation de l'Opposition, elle va plus loin. Elle nous dit: Nous sommes d'accord sur le fond, mais elle ajoute que le fonds de pension n'a pas de sens. Le député de Joliette, le leader de l'Opposition, M. le Président, nous a dit: Le fonds de pension - les fonds de pension, je suis régi par cinq fonds de pension différents - il est totalement incompréhensible. Ce n'est pas nous, le Parti libéral du Québec, qui l'avons dit, c'est le député de Joliette, leader de l'Opposition.

Là-dessus, il a raison: le fonds de pension, il est totalement incompréhensible. Le député d'Abitibi-Ouest nous a dit également, M. le Président, qu'il était injuste. Ce n'est pas encore les membres du Parti libéral du Québec ou les députés ministériels qui pensent qu'il va y avoir une élection, qui veulent se sauver avec la caisse. Ce n'est pas ça dont il est question, ce soir. Les gens de l'Opposition nous disent: Sur le fond, on est d'accord. C'est injuste et incompréhensible, il faut changer ça. Sauf qu'ils ajoutent, comme petit obstacle... Au fait, ils sont entièrement d'accord sur ce qui est présenté dans le projet de loi 404. Ils disent: Mais, on est tous d'accord avec tout ça. C'est injuste. C'est incompréhensible comme fonds de pension, et il faut l'améliorer, il faut le bonifier. Mais ce n'est pas le bon moment.

Ce n'est pas le bon moment, ce n'est pas le bon "timing". M. le Président, quand quelqu'un s'attache seulement aux apparences, il ne récolte que les fruits de l'apparence. L'image publique, la perception que la population a d'un dossier, ce n'est pas ce qui devrait nous guider dans cette Chambre. C'est le fond et le bien-fondé du dossier. Ceux dans cette Chambre qui mettent comme premier critère l'apparence du dossier... J'entendais, tantôt, M. le Président, le député de Rouyn-Noranda qui nous disait: Les apparences, les apparences. Les apparences comptent très peu quand le dossier est bien fondé. Je vais vous dire, M. le Président, que je ne partage absolument pas, mais absolument pas, cette vision totalement superficielle de l'Opposition du Parti québécois qui vient en cette Chambre en nous disant: Nous sommes pour la bonification, nous sommes pour l'amélioration du régime de retraite, mais halte-là, vous savez, les apparences, l'accessoire, le superficiel, c'est plus important que le fond. Alors, on ne le fera pas. Des demi-vérités, M. le Président, on y a été habitués fort longtemps par les gens de ce parti, des demi-vérités. Souvenez-vous, M. le Président, des campagnes de publicité de 1980, 1981, 1983, 1984, 1985 par les gens du Parti québécois. C'a monté jusqu'à 27 000 000 $ par année de fonds gouvernementaux pour présenter des apparences, pour présenter l'accessoire, pour présenter une belle jambe au public du Québec et aux électeurs du Québec, mais sans jamais leur dire la vérité et le fond des dossiers.

La distinction qui existe, M. le Président... Les gens qui nous écoutent ce soir vont très bien la comprendre. Entre la position du Parti québécois qui nous dit, en cette Chambre: On est d'accord, il faut améliorer le fonds de pension, il faut le bonifier, mais ce n'est pas le bon "timing"... C'est que nous, on a la décence, lorsqu'il y a un problème avec une facette de la vie publique, de le mettre sur la table. On va en discuter ouvertement, on va le corriger, et on n'ira pas se cacher après pour en bénéficier. Certainement pas pour une question d'apparence. Certainement pas pour une question d'apparence. Moi, si j'étais un électeur qui écoutait le débat ce soir, M. le Président, à qui je ferais le plus confiance? À la personne qui attache de l'importance aux apparences, à l'accessoire, à la belle robe de quelqu'un, au bel habit de quelqu'un, à la forme de quelqu'un? Si j'accordais de l'importance ou si j'écoutais les gens qui parlent du fond des dossiers... Est-ce que je ferais plus confiance à quelqu'un qui accorde de l'importance à l'extérieur ou à quelqu'un qui parle... Vous me faites signe qu'il y a une minute, M. le Président. (20 h 50)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Prenez votre temps.

M. Bélisle: Vous me corrigerez. Je peux aller jusqu'à 30 minutes, M. le Président? Ça va?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Un des deux côtés.

M. Bélisle: D'accord. Je disais que je pense que, contrairement au propos populaire et à l'adage qui dit que toute vérité n'est pas bonne à dire - ça, c'est un adage que je ne partage pas, peut-être à cause de ce que ma mère m'a montré quand j'étais jeune - je pense qu'au contraire toute vérité est bonne à dire. Toute vérité est bonne à dire. Si tu as un dossier et s'il est bien fondé, présente-le devant le public et laisse le public juger. Ne te fie pas seulement,

effectivement, à ce que les autres pourraient dire à cause des apparences. Je vais le corriger, l'adage populaire. Lorsqu'on dit: Toute vérité n'est pas bonne à dire, je vais ajouter: sauf à celui qui refuse d'entendre. Et celui qui refuse d'entendre, c'est bien par son choix personnel qu'il refuse d'entendre. On peut lui laisser au moins cette possibilité-là et ce choix-là.

M. le Président, qui, dans cette Chambre, a corrigé d'une façon définitive la question des salaires des députés? Était-il opportun, lorsque nous avons introduit ce débat dans cette Chambre, en 1987, de tenir ce débat? Ce n'est pas le Parti québécois, sur ce dossier épineux. Non, pas du tout. Ce ne sont pas les regrets que M. Lévesque a laissés lorsqu'il a quitté, en disant à ses proches: La seule chose que je regrette, c'est que je n'ai pas pu, avant la fin du mandat du Parti québécois, en 1985, corriger et bonifier le fonds de pension des députés. Ce n'était peut-être pas opportun en 1985, mais M. Lévesque l'a regretté, et il l'a dit. Si je ne dis pas la vérité, que quelqu'un se lève de l'autre côté, et qu'il me le dise! Mais c'était tout aussi important, tout aussi opportun.

Qui a corrigé la question épineuse du salaire des députés? Le Parti québécois? Non. C'est le Parti libéral du Québec, de la même façon, en venant en Chambre, en proposant de mettre le salaire du député correspondant à une fonction d'emploi dans la fonction publique, pour éviter qu'on ait à décider de se voter des augmentations continuellement, pour éviter de nous placer dans une mauvaise position. C'est un dossier où il y avait un bien-fondé. Il fallait arrêter de faire ce que tous les autres gouvernements, depuis 35 ans, faisaient. Il n'y avait pas de bons ou de mauvais moments. Il fallait le faire, on l'a fait. Ce soir, sur le fonds de pension, on fait la même chose.

La théorie du Parti québécois, j'espère que ce n'est pas ça parce que je trouverais ça excessivement dommage, sur un sujet aussi important. Je vais expliquer pourquoi il est important, tantôt. J'espère que vous n'êtes pas en train de tenter de ramasser un petit capital politique. J'espère. Surtout pas là-dessus.

L'autre distinction qui me vient à l'esprit, c'est que je ne peux pas ne pas me souvenir de la théorie du double standard ou de la double mesure. Nos revenus, présentement, comme ceux de la fonction publique, à cause de ce que nous avons fait, nous, le Parti libéral du Québec, en 1987, n'augmenteront pas à partir du mois de janvier, ils sont gelés. M. le Président, vous le savez, ne regardez pas votre talon de chèque, vous allez avoir zéro. On va faire la même chose que tout le monde. C'est très bien qu'on fasse la même chose que tout le monde. Pas de double standard, pas de double mesure et pas de double langage.

M. le Président, est-ce qu'on se souvient de ce qui s'est passé en 1981-1982, lorsqu'il y a eu une augmentation des rémunérations de base et des salaires des députés et des ministres - c'était à pleine page de journal - alors que l'autre standard qu'on appliquait aux fonctionnaires de l'État, c'est qu'on les coupait, moins 20 %? Ce n'est pas ça qu'on est en train de faire. Moi, je dis, contrairement à ce que pense l'Opposition, qu'il est toujours opportun, approprié, que c'est toujours le bon moment de préparer l'avenir, pas l'avenir de ceux qui sont ici, non, non, non, ce n'est pas de ça qu'il est question ce soir; ce n'est absolument pas de ça. Ce dont il est question ce soir, M. le député de Masson, M. le Président, c'est de ceux qui, comme vous, M. le député de Masson, après vous, après moi, de ceux qui vont venir après nous. Parce que ce n'est pas facile la vie qu'on mène; il ne faut pas pleurer ici ce soir, mais ce n'est pas facile. Tantôt, lors du débat sur le fond, j'aurai l'occasion de citer abondamment le rapport préparé par l'ex-président de l'Assemblée nationale, M. Guay, M. Goldbloom, ancien ministre, et le professeur d'université, M. Baccigalupo, à la page 23, qui montre que c'est un cas très particulier, effectivement, que de faire le travail d'homme ou de femme publique, au Québec ou dans d'autres juridictions.

Je disais, M. le Président, que c'est une occasion de parler d'avenir, de ceux qui viendront après nous et de leur donner - ah mon Dieu! - une toute petite incitation correcte à se présenter en politique. Ça, ce n'est pas un avantage indu dont je parle, c'est aussi opportun que lorsque nous avons voté en cette Assemblée, l'année passée - je vois, M. le Président, que la députée de Terrebonne me regarde... L'an passé, le Parti québécois, l'Opposition et les députés de l'Opposition ont voté avec le parti ministériel, avec le Parti libéral du Québec, pour la bonification du fonds de pension des juges du Québec. L'année passée, ce n'était pas moins ou plus opportun de le faire, mais on l'a fait parce que le dossier était bien fondé et justifié. On leur a accordé 2,75 % de crédit de rente par année sur leur salaire non contributoire - non contributoi-re - pas un sou à mettre dans leur poche, non contributoire.

La motion de report nous dit: Bien non, pas tout de suite, on va attendre, ça va être mieux, les bons temps vont arriver, là il va falloir passer ça, puis ça va être justifié. C'est tout aussi opportun que quand on a voté... M. le Président, je suis convaincu que Mme la députée de Terrebonne va être d'accord avec moi parce que c'est une loi - qu'elle fouille attentivement - la Loi sur le Protecteur du citoyen... J'appellerais les députés de l'Opposition à vérifier l'article 8 de cette loi. Il faut la lire. L'article 8 de cette loi en 1968 ou en 1982, quand il a été amendé... 1982, ce n'était pas le moment le plus gai du Québec, hein? on était en pleine récession. Bien, à l'article 8: Le Protecteur du citoyen ou son adjoint, quand ils cessent

d'exercer leurs fonctions - je lis le texte de loi - après les avoir remplies pendant au moins cinq ans - cinq ans, pas d'élection, ils ne vont pas devant le peuple et je ne suis pas convaincu, effectivement, qu'ils siègent jusqu'à 4 heures la nuit, qu'ils travaillent sept jours par semaine et qu'ils ont de la difficulté à prendre deux semaines de vacances pendant l'année - ...avant l'expiration de cette période, ils ont droit à une pension annuelle égale au quart du traitement qu'ils recevaient au moment où ils ont cessé d'exercer leurs fonctions. Ayoye! Le quart, 5 % par année. Le quart! S'ils continuent, 10 ans, c'est un autre quart et, s'ils continuent 15 ans, l'article 8 dit que c'est 75 %, les trois quarts. Les trois quarts! On ne parle pas du tout de ce qui est devant la Chambre avec le projet de loi 404, ce n'est pas ça du tout; on parle de 4 % et c'est nous autres qui mettons jusqu'à 9 % de notre salaire dedans. (21 heures)

Le Protecteur du citoyen... ce n'est pas contributoire. Ce n'était pas opportun dans ce temps-là? Ce n'était pas le bon moment? Il y avait un problème en 1982 ou il n'y en avait pas? Pas opportun, opportun, inapproprié, pas le bon timing. Il y a quelque chose qui avait... C'était plus fondé ou c'était moins fondé? Vous vous sentez moins des protecteurs de citoyens que des députés? Est-ce que c'est ça là? Est-ce que c'est ça? Si c'est ça, M. le Président, c'est qu'on ne comprend pas la distinction fondamentale entre le principal et l'accessoire, entre le bien-fondé d'un dossier et les apparences d'un dossier. Et moi, je vous dis, M. le Président, sans aucune hésitation, sans aucune hésitation, que je ne serai jamais de ceux, des groupuscules... je ne ferai jamais partie d'un groupe parlementaire qui s'attache aux apparences au détriment du bien-fondé d'un dossier.

M. le Président, je vais voter contre la motion de report et j'ai bien hâte d'intervenir sur le fond du projet de loi parce que j'en ai long à dire lors de la deuxième lecture. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Alors, sur cette motion de report, M. le député d'Ungava.

M. Christian Claveau

M. Claveau: Oui, M. le Président. J'interviens sur cette motion de report parce que je pense qu'il est de mon devoir de parlementaire de le faire. M. le Président, en ce qui me concerne, je suis profondément déçu par le projet de loi qu'on a sur la table. Que l'on ait à discuter, à ce moment-ci, d'un projet de loi semblable, moi, ça me déçoit. Et puis je suis convaincu aussi qu'une vaste partie de la population du Québec est déçue par l'attitude de ce gouvernement, par l'attitude de certains par- lementaires en cette Chambre, membres de la formation ministérielle qui, au moment où le Québec se dégrade, où l'économie du Québec s'en va à l'abandon, au moment où on a au-delà de 1 000 000 de Québécois et de Québécoises, de gens sur le territoire du Québec qui vivent de prestations d'aide sociale et de prestations d'assurance-chômage, au moment, donc, où à peu près un sixième de la population du Québec ne retire, comme seule source de revenu, qu'une prestation d'aide sociale ou d'assurance-chômage, nous, on est ici en cette Chambre et on est en train de déblatérer sur notre fonds de pension. On est en train de se demander pourquoi on a été lésés et pourquoi... et ce n'est donc pas juste... et ça fait donc mal, on fait donc pitié et on va améliorer notre fonds de pension. Tiens, ça, ça en est une urgence nationale, M. le Président: améliorer le fonds de pension des députés au moment où la population du Québec est en train de croupir dans les difficultés, dans la misère dans bien des cas, au moment où l'économie s'effondre. Dans quel genre de monde vivons-nous, M. le Président? Est-il vraiment vrai que, lorsqu'on est parlementaire, que l'on est un député élu, on se retrouve dans une espèce de soucoupe volante qui nous dégage, qui nous déconnecte complètement de la réalité du quotidien, de ce qui se passe sur le terrain des vaches, comme on dit? Moi, en tout cas, comme député, je refuse de jouer cette game-là. Je refuse de jouer ce genre de jeu hypocrite pour la population.

J'écoutais le député de Mille-Îles nous parler des grandes intentions. Je l'entendais dire que l'Opposition avait une attitude hypocrite. M. le Président, moi, j'aimerais bien aller au fond des choses. J'aimerais bien... J'essaie de comprendre le fondement de l'urgence. Comment il se fait qu'alors qu'il n'y a rien qui marche au Québec, alors que les chômeurs, les assistés sociaux augmentent continuellement, que les usines ferment, que les investisseurs s'en vont, on ne trouve pas d'autres urgences que celle de se retarder en cette Chambre pour parler de notre misérable fonds de pension? Imaginez-vous si c'est important. Et, en bout de piste, je ne trouve qu'une seule raison à cette urgence-là, une seule, M. le Président. Je ne suis pas capable d'en trouver d'autres. Qui peut le plus profiter du fonds de pension au moment où on se parle? C'est la question que je me pose. S'il y a urgence, c'est parce qu'il y a des gens qui sentent l'importance d'améliorer leur sort au plus vite. Qui sont-ils? Avec un taux de satisfaction de 30 % dans la population, au moment ou on se parle, à mi-mandat, avec tout ce qu'on connaît comme problèmes qui s'en viennent ou comme problèmes qui existent et le manque de solution que ce gouvernement apporte à ces problèmes-là, moi j'en arrive à conclure que ce n'est pas surprenant que, comme gouvernement, ils ont hâte d'améliorer leur fonds de pension parce que,

s'il y en a ici qui risquent d'en profiter avant longtemps, ce sont eux et personne d'autre qu'eux-mêmes. C'est la seule raison que je trouve à l'urgence, M. le Président. Et j'irais même plus loin, j'irais même jusqu'à dire qu'il s'agit là probablement, peut-être, d'un bonbon, d'un incitatif que ce gouvernement a trouvé le moyen de donner à ses troupes afin d'empêcher peut-être des démissions avant longtemps, afin d'empêcher que des députés bien intentionnés se dissocient de l'attitude de négativisme et d'immobilisme du gouvernement qui nous dirige actuellement au Québec, M. le Président. Les seuls qui ont intérêt à ce que ce fonds de pension là soit amélioré au plus vite parce qu'ils risquent d'en avoir besoin très rapidement, ce sont les députés de l'aile ministérielle qui se promènent dans la population avec à peine 30 % de taux de satisfaction et qui voient approcher les prochaines élections avec une certaine crainte, il faut le dire. Il n'y a pas d'autre urgence.

M. le Président, je regarde le travail qu'on fait ici ce soir et je me dis qu'on ne pourrait pas faire mieux dans n'importe quelle république de bananes. Comment définit-on l'économie ou le fonctionnement économique dans ce que l'on appelle "les républiques de bananes" où il y a un petit groupe dominant, un petit groupe bien nanti, bien gras, bien nourri, qui dirige une population qui croupit dans la misère? Et ce petit groupe-là trouve toujours le moyen de se faire des lois qui vont continuer à l'avantager de plus en plus, indépendamment des intérêts de la population, indépendamment des conditions des travailleurs, indépendamment du contexte socio-économique dans lequel la vaste majorité de la population vit. Un petit groupe dominant qui trouve le moyen de se plaindre sur son sort et qui ne trouve, comme unique raison à son action, que de se comparer à mieux que soi. C'est certain qu'il y aura toujours du monde mieux que nous autres, c'est certain qu'il y en aura toujours des mieux payés, qui auront de meilleurs fonds de pension, de meilleures conditions de travail. C'est sûr que, si on se compare juste aux meilleurs, on va se trouver misérables. Mais comparons-nous donc, 30 secondes, à ceux qui sont moins bien que nous autres, à ceux qui vivent des problèmes, à ceux qui ont perdu leur emploi et qui n'en trouveront pas probablement avant bien des mois et bien des années, dans certains cas. Comparons-nous à ces gens-là et j'imagine que notre état de misérabilisme avancé - selon les propos de certains députés ministériels que l'on a entendus après-midi - de décrépitude chronique, on va le trouver peut-être plus agréable à vivre, si on se compare aux millions et millions de Québécois et Québécoises qui vivent dans une situation économique fragile, précaire, pratiquement inexistante, en bas du seuil de la pauvreté pour à peu près 40 % de la population de la grande région de Montréal.

Comparons-nous à ces gens-là de temps en temps. C'est ces gens-là qu'on représente, c'est eux qui nous font élire pour trouver des solutions à leurs problèmes. Ce sont eux que l'on doit défendre; ce sont leurs problèmes que nous nous devons de travailler.

Nous sommes payés pour ça, pour régler les problèmes de ceux qui en ont, pour trouver des solutions aux problèmes des gens qui nous ont fait élire en cette Chambre; c'est pour ça qu'on est payés. On n'est pas payés pour prendre des veillées entières à discuter sur l'aspect misérable de notre fonds de pension. Soit! que Ton en parle de notre fonds de pension, comme on a le droit de parler de nos conditions de travail; oui, je n'ai rien contre ça. Mais qu'on n'en fasse pas une priorité avant d'avoir réglé les vrais problèmes de la société. C'est là qu'est le problème, et c'est là, en ce qui me concerne, où le bât blesse. Je n'accepte pas, M. le Président, d'être associé à une démarche qui veut que nous qui, dans bien des esprits, nous situions dans la catégorie des bien nantis, lorsque l'on regarde les millions et millions de Québécois et Québécoises qui vivent des problèmes économiques graves et qui, dans bien des cas, n'auront même pas l'argent pour acheter la moindre petite étrenne à leurs enfants pour Noël, d'être associé, donc, à une démarche de ce genre-là, du genre de celle qui veut nous en donner encore plus alors que, dans l'opinion populaire, nous sommes déjà parmi les privilégiés dans cette société. (21 h 10)

C'est pour ça, M. le Président, que je m'associe à la motion de report pour que l'on en discute éventuellement dans un autre temps et si dans six mois ce n'est pas encore le temps d'en discuter, eh bien! on reportera encore, M. le Président. En ce qui me concerne, ça ne me dérange pas, je n'ai pas peur des prochaines élections. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, sur cette même motion de report, je ne vois pas d'intervenant du côté ministériel, donc je cède la parole au député de Masson.

M. Yves Blais

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Il y a une loi ici qu'on dépose pour faire une harmonisation avec une loi fédérale et, aussi, cette loi porte un deuxième volet pour améliorer le fonds de pension des députés.

Je tiens ici à dire, au tout départ, que je suis complètement détaché de ce discours, pour plusieurs raisons. Je vais en nommer seulement trois. Premièrement, du côté monétaire, ça va assez bien dans ma vie; deuxièmement, ma réélection, si je me présente à la prochaine, est passablement bien assurée; et, troisièmement, ce qui est plus important ici dans cette loi, j'ai plus de 60 ans. Donc, je ne me sens pas directement

touche et ce que je vais dire, ce ne sera pas des paroles égocentriques ou égoïstes. Je ne voudrais pas que ceux qui me regardent de l'autre côté ou d'ailleurs pensent que je tiens des propos égocentriques.

Ce projet de loi porte en soi des réminiscences du passé, que l'on veuille ou pas, et vous voyez bien qu'ici on essaie d'être excessivement délicats en en parlant. On demande, on dit: Une motion de report. Une motion de report, pourquoi? Pas parce qu'on veut cacher la vérité, comme semble nous dire le représentant de Laval, non, pour que la vérité soit faite dans son entier. Cette loi dit: Les députés devraient avoir, au lieu de 3 %, 4 % par année de fonds de pension. C'est ça. Et ça va s'appliquer à nous, pas juste à ceux qui viendront. Ça, ce n'est pas dire la vérité: À ceux qui viendront, mais pas à nous. Oui, à nous aussi. Mais voyons donc, quand même! Si on se pique de vouloir dire la vérité sous prétexte que nos parents nous ont dit: Toute vérité est bonne à dire - venant de la bouche d'un avocat, c'est dur à prendre - mais, si c'est ça qu'on veut dire, nous aussi ça va nous toucher, ça aussi ça va nous toucher, nous.

Moi, personnellement, je suis pour cette motion de report parce que je veux qu'on fasse la clarté totale là-dessus et qu'on prenne le temps en commission parlementaire de faire venir tout ce qui est intervenant là-dedans et que les comparaisons soient sur la table pour voir si nous méritons 3 %, 2 %, 4 % ou 5 % et, si, c'est bonifié par les gens qui viendront en commission parlementaire, on le bonifiera; si on nous demande de rétrograder nos demandes, on rétrogradera. Alors, est-ce qu'on peut se faire piquer de ce côté-ci de ne pas vouloir que toute la vérité se fasse? À moins d'être le fils du grand démagogue! La vérité, on la veut; c'est pour ça qu'on demande une motion de report.

Mais il y a cette petite ombre au tableau tout le temps. On se regarde avec des yeux de faïence un tout petit peu parce que, justement, le député de Mille-Iles a brandi une feuille en disant: En 1982, on disait que c'est nous; on disait que ce n'était pas opportun, etc. Mais attention là! En 1982, on est venus en Chambre, ici, et on a demandé de baisser nos salaires. Baisser! La loi disait que les députés, le 1er janvier de chaque année, avaient 6 % d'augmentation, 6 %. Et nous, à cause de la crise, de la récession de l'époque, on a connu ça, nous aussi, et une crise beaucoup plus difficile que celle que vous traversez et on l'a monnayée et on l'a guérie beaucoup plus vite... La crise de l'époque était de moins 5,4 % tandis que celle-ci est de moins 2,3 %, presque le double, et on en est sortis beaucoup plus vite. On avait fait des coupures chez nos fonctionnaires, nous aussi, comme vous l'avez fait. Cependant, on avait fait des coupures à certains de nos fonctionnaires, ceux qui étaient, disons, à l'époque, les mieux payés, et on avait donné des augmentations jusqu'à 12 % a ceux qui étaient moins bien nantis dans la fonction publique. Autrement dit. avec la poussière retombée sur ce cas-là, on se rend compte que le gouvernement, à cette époque, a fait son travail comme si c'était lui le responsable du syndicat et les syndicats ont fait un travail comme si c'étaient eux "l'establishment" patronal. C'est curieux quand même après le temps!

Nous, malgré les coupures et les augmentations... La masse salariale, à l'époque, était de près de 11 000 000 000 $. On a eu une augmentation; une fois soustraites les augmentations, les deux mises ensemble donnaient une augmentation de notre masse salariale de près de 600 000 000 $, donc, une augmentation générale de la masse salariale de la fonction publique de 5,8 %. Nous, nous devions avoir une augmentation de 6 %, le 1er janvier. On a voté une loi ici, dans cette Chambre, pour dire: Nous retardons notre augmentation de trois mois, ce qui nous donnait une diminution de 1,2 %. Donc, notre augmentation à nous était de 4,8 % pendant que la masse salariale de nos fonctionnaires était de 5,8 %. De l'autre côté, on criait: C'est inopportun. Ça n'a pas de sens. Vous augmentez pendant que vous coupez vos fonctionnaires. Eh bien, après près de 10 ans, il est bon que les choses soient rétablies. Nous avons fait notre devoir.

Est-ce que, par exemple, nous étions à blâmer d'avoir baissé le salaire des députés et le fonds de pension à l'époque? Après 10 ans, moi aussi, je dois reconnaître que, oui, on est blâmables de l'avoir fait parce qu'on a contribué, par ça, à discréditer le rôle des députés. Et là on vient essayer de faire un correctif et ce correctif, on demande de le reporter parce qu'on n'est pas sûrs que vous fassiez la correction valable. Si elle est trop basse, les gens nous diront en commission parlementaire: Pourquoi, à Ottawa, un député paie-t-il 50 % - 50 % sur son fonds de pension avec le gouvernement et reçoit-il 5 % par année quand il part? S'il a été là 20 ans, il reçoit 100 % de son salaire quel que soit son âge, à Ottawa; puis ils gagnent 87 000 $, en plus. Ils s'occupent de quatre affaires: les timbres, l'armée, les eaux puis l'aviation; toutes des affaires plates. Bon. Nous autres, on s'occupe de toutes les choses importantes pour la population, puis on en gagne 60 000 $. Puis on ne le mériterait pas? Cependant, à cause de la crise dans laquelle nous sommes, à cause de l'état dans lequel sont les gens pauvres, les gens moins nantis dans la population, il faut qu'on regarde ça avec un oeil complètement éclairé. C'est pour ça qu'on demande la motion de report, pour que l'on sache à quoi s'en tenir.

Nous demandons à tous les experts de venir nous voir et d'exposer au public ce que nous revendiquons puis on va demander aux gens: Est-ce que vous voulez qu'on nous augmente ou est-ce que vous voulez qu'on nous baisse? Mais il n'y a pas un homme sur terre... On ne prend pas

un gros risque. On sait qu'on mériterait une augmentation, mais c'est vrai que c'est inopportun. On demande de reporter de quelques mois pour avoir le temps de faire un éclaircissement.

Et vous, M. le Président, je vous connais personnellement, comme homme. Je sais que vous êtes en faveur d'une justice équitable dans toutes les classes de la société. Je sais que vous, votre salaire est de beaucoup plus élevé que le mien et que ça vous touche moins que ce soit 4 % ou 5 %. Mais je parle des simples petits du peuple dans cette enceinte. Je ne parle pas de ceux qui ont des gros salaires de ministre ou des adjoints parlementaires ou des présidents de commission, mais des simples députés à 60 000 $. C'est nous qui représentons le peuple ici, dans cette Assemblée. Nous ne sommes pas dans T'establishment" parlementaire. Et nous, ça nous affecte plus que celui qui a un plus gros salaire. Mais, indépendamment du salaire qui nous revient pour le travail que l'on fait, eh bien, on veut aller devant le peuple, devant la caméra, et j'aimerais que ce soit... J'ai une demande à faire à mon leader: que cette commission parlementaire soit télévisée pour que l'ensemble de la population regarde les experts qui viennent nous voir, et ce serait de bon aloi, M. le Président.

Il n'y a rien de plus beau au pays du Québec que d'éclairer les Québécois dans tous les domaines. On a tellement de misère du côté constitutionnel, de l'autre côté, de ces temps-ci, si on pouvait jeter une lumière dans d'autres domaines pour que la vérité sorte nue, claire, précise et qu'on vote après avec tous les arguments devant nous, ce serait, M. le Président, un des plus beaux cadeaux de Noël que le parti au pouvoir pourrait nous faire, d'accepter cette motion de report. On sait, M. le Président, qu'à cause des coupures il n'y a pas d'arbre de Noël, cette année, au Parlementaire. On ne peut plus dire qu'il y avait 99 boules et 30 lumières dedans, mais...

Une voix: 29.

M. Blais: 29 lumières... 30. On est 30. On ne peut pas dire ça cette année, mais il y a une chose que je tiens à vous dire: L'arbre de Noël de la vérité, avec toutes ses boules, tous ses reflets et toutes ses lumières, ce sera celui qui vous guide dans ce projet de loi et, M. le Président, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Masson.

Une voix: Vote enregistré.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur cette motion de report, il n'y a pas d'autres intervenants. Est-ce que la motion présentée par M. le député d'Abitibi-Ouest qui se lit comme suit: "Que la motion en discussion soit modifiée en retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant, à la fin, les mots "dans six mois", est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vote enregistré.

Une voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vote enregistré, M. le leader?

Une voix: Qu'on appelle les députés! M. Chevrette: Adopté sur vote enregistré.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, vote enregistré. Qu'on appelle les députés!

M. Bélisle: Vote enregistré, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Qu'on appelle les députés!

Une voix: Ah, mon Dieu!... (21 h 20 - 21 h 29)

Mise aux voix de la motion de report

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Qu'on appelle les députés. Si vous voulez prendre place. Alors, je mets aux voix la motion du député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition officielle, motion qui se lit comme suit: "Que la motion en discussion soit modifiée en retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant, à la fin, les mots "dans six mois".

Que ceux et celles qui sont pour cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), M. Blais (Masson), M. Jolivet (Laviolette), Mme Juneau (Johnson), M. Claveau (Ungava), M. Dufour (Jonquière), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Paré (Shefford), M. Morin (Dubuc), M. Filion (Montmorency), Mme Caron (Terrebonne), M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: Mme Bacon (Chome-dey), M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Charlesbourg), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Sirros (Laurier), M. Vallières (Richmond), M. Vallerand (Crémazie), Mme Robic (Bourassa), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Cusano (Viau), Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), M. Houde (Berthier), M. Maciocia (Viger), M. Maltais (Saguenay), M. Savoie (Abitibi-Est), Mme Trépanier

(Dorion), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beau-din (Gaspé), M. Chagnon (Saint-Louis), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel (Sherbrooke), M. Doyon (Louis-Hébert), Mme Pelchat (Vachon), M. Paradis (Matapédia), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc (Taschereau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Dauphin (Marquette), M. Kehoe (Chapleau), M. Fradet (Vimont), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gautrin (Verdun), M. Forget (Prévost), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Bradet (Charlevoix), M. Després (Limoilou), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Holden (Westmount).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des abstentions? Aucune abstention.

Le Secrétaire: pour: 13 contre: 57 abstentions: 0

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): La motion est rejetée. Nous poursuivons l'étude du projet de loi 404, à l'adoption du principe. Je vais permettre à ceux qui doivent se diriger dans des commissions parlementaires de le faire, en vous demandant, évidemment, votre collaboration. Alors, nous poursuivons l'adoption du principe du projet de loi 404, Loi modifiant la Loi sur les conditions de travail et le régime de pension des membres de l'Assemblée nationale et d'autres dispositions législatives, et je reconnais M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Marc-Yvan Côté

M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le Président. J'ai cru de mon devoir de me lever en cette Chambre pour appuyer le projet de loi 404 de manière non équivoque, de le faire parce que je suis l'un de ceux qui, en cette Assemblée, exception faite du député de Bonaventure, était au Parlement en 1974, assis à l'arrière, comme simple député, au moment où il y avait en cette Chambre six députés péquistes. Six, qui étaient ceux qui, à l'époque, avaient toutes les solutions à tous les problèmes du Québec, y compris aux salaires et au régime de pension des députés. Ils avaient la grâce puisqu'ils n'avaient jamais été au pouvoir.

Ils étaient ceux qui effectivement avaient à travers tout le Québec, sur tous les sujets, inventé des solutions, dirigés qu'ils étaient du haut de la tribune ou d'un conseil national, à l'occasion, et qui venaient en cette Chambre nous faire la leçon sur à peu près tout, M. le Président. J'étais un des 102 et on est revenu siéger entre Noël et le Jour de l'an, le 26 décembre, après avoir siégé jusqu'au 23 décembre sur un projet de loi, oui, sur un projet de loi qui avait fait l'objet, exactement comme aujourd'hui, d'un comité présidé par M. Jean-Charles Bonenfant, avec des gens des deux partis, qui avait soumis un rapport. Et nous avions, à ce moment-là, le consentement de tout le monde. Un comité neutre qui allait, une fois pour toutes, régler le problème du salaire des députés.

Et à partir du moment où nous allions prendre ce qu'il y avait comme recommandations et les mettre dans un projet de loi, nous aurions l'aval de tout le monde. Et il nous fallait, à ce moment-là, régler une fois pour toutes cette situation où les députés étaient eux-mêmes devant le fait qu'ils devaient eux-mêmes se voter des augmentations de salaire. C'est un peu pour ça, parce que sinon, je ne me serais jamais levé. Pas parce que je ne crois pas au projet de loi 404; au contraire. Et il est, M. le Président, d'une transparence absolument extraordinaire, contrairement à tout ce qui a été fait dans le passé, peu importent les partis politiques.

Le leader l'a introduit en Chambre, préparé par un comité de la même manière, déposé parce que nous avons des impératifs. Il est bon de se le rappeler: C-52, au fédéral, nous oblige à en faire une partie - c'a été reconnu par les députés de l'Opposition de manière assez claire - sur le plan de l'harmonisation.

M. le Président, il faut dire aux populations qui nous écoutent que ce qui est déposé aujourd'hui fait suite à un comité sur lequel siégeait M. Richard Guay, ex-président de la Chambre et député de Taschereau, le Dr Victor Goldbloom, ex-ministre de l'Environnement, député aussi de D'Arcy-McGee et M. Baccigalupo, qui n'en est pas à ses premières armes dans ce genre de comité.

Ils ont déposé un rapport mandaté par un comité de l'Assemblée nationale. Et aujourd'hui on se retrouve devant cette Assemblée avec le projet de loi 404, de manière très claire, déposé la semaine dernière. Pas déposé cette semaine ou hier et commencé à adopter aujourd'hui. Déposé la semaine dernière, visière levée, plein jour, transparence; ça me paraît être extrêmement important.

Nous en sommes aujourd'hui à adopter le principe, qu'on appelait communément, à l'époque, la deuxième lecture - j'ai encore mes revers - non pas pour adopter en commission parlementaire, cette nuit, article par article. Non. Pour aller, au mois de janvier 1992, faire le travail, entendre des gens qui vont venir, effectivement, dire - c'est ce que souhaitait le

député de Masson, tantôt - un certain nombre de choses qu'ils seront libres de dire, adopter article par article et revenir au mois de mars, donc dans quatre mois, pour l'adoption finale de ce projet de loi. Est-ce que c'est abusif? Non, pas du tout, contrairement à ce qui s'est toujours passé. On se rappellera d'un certain leader qui, à l'époque, pour passer un projet de loi, avait dit cette phrase célèbre à l'Opposition: Nous allons vous passer sur le corps. Ça a été célèbre, ça. Il faut se rappeler tout ça. Ce sont des choses que nous avons vécues ici.

Est-ce que l'attitude de notre leader est comme celle-là? Non, au contraire, il dit: Prenons le temps de faire en sorte qu'on soit dans une situation où tout se fera de manière normale. On serait porté à croire, aujourd'hui, en entendant quelques messagers - pas tous, certains sont prudents, de l'autre côté, certains messagers que j'ai entendus avant le souper principalement - que c'est quelque chose de révolutionnaire, ce que nous nous apprêtons à faire, que c'est quelque chose d'absolument révolutionnaire. Je n'ai pas à rappeler que nous sommes à faire le ménage dans un régime de pension qui a été changé en 1983 parce qu'il méritait d'être changé - on y reviendra tantôt - qui a été rechangé en 1987 et qui est aujourd'hui soumis à quatre régimes. Je n'ai quand même pas 30 ans dans cette Chambre, mais je suis soumis aux quatre régimes parce que j'ai siégé de 1973 à 1976, tout comme ma collègue de Chomedey. On n'est pas nombreux, et on se rappelle un certain nombre de choses. Vous nous permettrez, à tout le moins...

Nous sommes à changer un certain nombre de choses et à modifier un certain nombre de choses, dans la ligne de ce que nous ont recommandé Guay, Goldbloom et Baccigalupo. Il y a du monde raisonnable là-dedans. Il y a des gens qui ont vécu dans la politique et qui ont vécu en dehors de la politique, qui ont été à même d'apprécier ce que nous vivons lorsque nous sommes en politique et ce que l'on a à vivre aussi quand on est en dehors de la politique, et, en plus, un professeur d'université qui, lui aussi, voit un régime de l'intérieur de l'université. J'aurais aimé ça, moi, que le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, quand il est intervenu, nous parle de ses comparaisons, dans le réseau universitaire, sur le plan des régimes de pension, par rapport à celui des députés. Ce n'est certainement pas celui des députés qui l'a attiré en politique, j'en suis pleinement convaincu. J'aurais aimé ça. (21 h 40)

Une chose est certaine, M. le Président, il faut arrêter de faire croire au monde que c'est un régime qu'on ne paie pas. Les députés de cette Chambre paient 9 % de leur salaire dans ce régime de pension. Il faut arrêter de faire croire au monde que c'est l'État et qu'on puise dans les poches des citoyens pour être capable de se payer un régime de pension. Nous le payons par des cotisations prélevées sur chacune de nos paies, qui étaient de 9,4 % et qui seront de 9 % pour s'harmoniser avec ce que le fédéral souhaite. Oui, M. le Président, nous le faisons, et je le fais, moi, la tête haute, parce que je pense que nous le méritons. C'est clair, nous le méritons tous, comme parlementaires, que l'on soit un parlementaire de l'Opposition ou du gouvernement. Nous consacrons beaucoup d'heures à travailler, même si ce n'est pas toujours apparent, même si ce n'est pas toujours un succès phénoménal, nos affaires, qu'on soit dans l'Opposition ou au pouvoir.

M. le Président, oui, nous le méritons et ce n'est pas exagéré, non plus, ce que nous faisons. En pleine clarté, en plein jour, à la lumière, des 22 ou des 29 que j'entendais tantôt, des 29 lumières identifiant, par le fait même, les Québécois, le Parti québécois, alors qu'on est, nous, 99, disaient-ils, des boules, mais encore, des lumières, il y en a de toutes sortes d'intensité, de toutes sortes d'intensité! Il faut se rappeler ça.

Donc, ce n'est pas exagéré par rapport à ce qui se passe ailleurs. Ça ne veut pas dire qu'ailleurs il n'y a pas des régimes chromés qui mériteraient d'être abaissés. C'est clair. Mais, lorsqu'on compare au fédéral, à l'Ontario et à la Colombie-Britannique, les parlementaires du Québec qui siègent quand même passablement et qui travaillent pour faire avancer leur cause - Dieu sait qu'on pourrait juger l'un et l'autre des parlementaires - nous devons accepter que le Parlement, actuellement, soit le reflet de notre société et tant mieux; et tant mieux, avec chacune de nos qualités, chacun de nos défauts, on intervient ici pour faire en sorte de représenter nos populations.

M. le Président, sans faire insulte à personne, pourquoi serions-nous plus maltraités que ceux de la Sûreté du Québec? Les gens de la Sûreté du Québec, après 25 ans, ont droit à un régime de pension; ils vont occuper d'autres fonctions ailleurs. Ils ont ces régimes de pension qu'on leur a donnés, qui ont été négociés, et on le comprend. Ils les ont, on leur laisse, c'est à eux. Mais c'est une catégorie de travailleurs qui, bien sûr, de par leurs fonctions, prennent des risques dans leur vie; on leur donne des régimes de pension qui sont passablement avantageux par rapport aux autres gens du système.

Prenons les professeurs d'université. Prenons-les. Au risque de soulever l'ire de l'Opposition, je vais en prendre un au hasard, Claude Morin, seulement celui-là.

Des voix: Ha, ha, ha! Une voix: Le beau cas! Une voix: Au hasard.

M. Côté (Charlesbourg): Celui-là, par hasard.

Une voix: Le beau cas!

M. Côté (Charlesbourg): Le hasard fait bien les choses parce qu'il a été parlementaire, il n'a jamais pu être autre chose que ministre, lui.

Une voix: C'est déjà pas si mal.

M. Côté (Charlesbourg): C'est déjà pas si mal. Évidemment, vous n'avez pas eu cette chance-là encore, vous. Dans son cas, il est pensionné comme député, bien sûr; quelques jours après, il démissionnait. C'est aussi un professeur d'université, c'est aussi un haut fonctionnaire et c'est aussi, aujourd'hui, quelqu'un de l'ENAP. C'est donc quelqu'un qui, effectivement, est venu dans cette Assemblée, a côtoyé, semble-t-il, si on lit bien ses livres, plusieurs grands premiers ministres, tellement qu'il peut se permettre aussi d'écrire des livres aujourd'hui et d'en tirer certains avantages sur le plan financier. Donc, c'est un fait indéniable, mais c'était un de vos illustres représentants.

Il y a aussi, à l'intérieur du privé, des régimes de pension qui sont assez intéressants. Il ne faut pas l'oublier. Je n'ai donc aucune espèce de honte compte tenu du travail que je fais comme député et comme ministre, 80, 90 heures par semaine. Bien payé! Bien payé! Je suis un de ceux qui, de sa condition de professeur à l'époque, à devenir député et ministre, a augmenté ses revenus. Je n'ai pas peur de le dire. Je suis aussi un de ceux qui ont travaillé au Parlement à 14 400 $ par année pendant une certaine période, à partir du moment où je me suis fait battre en 1976, et je suis retourné faire mes devoirs parce que la démocratie, c'était ça, et ça m'obligeait à aller refaire mes devoirs. Je l'ai fait, je suis revenu, et je considère que la place que j'ai aujourd'hui, après cinq élections, ici, je ne l'ai pas volée, je l'ai gagnée et j'ai gagné le respect de mes électeurs. Et je les sers aussi, parce que ça fait partie de mon travail de représenter mes électeurs et de tenter, d'arrache-pied, de travailler, même si on ne réussit pas toujours, à faire en sorte qu'on fasse progresser la société québécoise sur tout, à tous les niveaux.

Mais, M. le Président, quand je prenais l'exemple de Claude Morin tantôt, c'est parce qu'il y a des limites à un moment donné à entendre un certain nombre de choses que je n'accepterai pas. Il y a des limites, et il faut, M. le Président, se méfier de ceux qui chantent aujourd'hui. Parce que, en 1974, j'étais là, moi aussi, et j'ai entendu, l'un après l'autre, jour après jour, avec toutes les mesures dilatoires, les Burns, les Morin, les Léger, les Bédard, les Lessard et les Charron, venir nous faire la leçon sur l'augmentation du salaire des députés de l'époque. Oui, j'ai entendu ça, moi, ici, assis en arrière. Oui, j'ai entendu ça à cette époque-là. Et qu'est-ce qu'on disait? Qu'est-ce qu'on disait? À peu près le même langage qu'on nous sert aujourd'hui: C'est inopportun. C'était inopportun aussi à l'époque, au mois de décembre 1974.

Et, M. le Président, j'écoutais la députée de Chicoutimi et je trouvais certaines ressemblances, sur le plan des propos, avec Jacques-Yvan Morin, sur le plan du message: On n'est pas trop trop contre le fond. On est pour, certains, pour d'autres, bien, si les spécialistes viennent nous dire de l'extérieur que ça a peut-être du bon sens, au-delà de Guay, Goldbloom et Baccigalupo, peut-être que ça sera plus acceptable au mois de mars, que ça sera plus opportun au mois de mars de le faire, ou plus tard. Mais, finalement, c'est mitoyen, ce n'est quand même pas si pire. On ne peut pas déchirer sa chemise parce qu'il n'y a pas d'abus, il n'y a pas de scandale, il n'y a pas d'exagération dans ce que nous nous apprêtons à faire.

Mais, M. le Président, c'est exactement la même chose sur "inopportun". Que s'est-il passé en 1974 et dans les jours qui ont suivi? Que s'est-il passé? Et, à l'époque, on dénonçait en même temps un certain nombre de choses sur le plan des régimes de pension. À juste titre d'ailleurs, et on disait: C'est inacceptable de penser qu'un député - et à l'époque on nommait celui de Drummond - puisse bénéficier de son régime de pension et se retrouver juge. Donc, double rémunération. On disait ça à l'époque. Et ceux-là qui le disaient se sont retrouvés exactement dans la même situation. Donc, un discours pour la Chambre, mais quand c'était le temps d'être sur la ligne de feu, on se retrouvait dans des situations qui étaient contraires. Et, effectivement, il n'y a pas grand monde en 1974 qui a refusé d'aller encaisser le chèque d'augmentation de salaire des députés. On a fait des beaux discours commandés par le conseil national, tenu l'Assemblée nationale dans un état de crise pendant un certain temps et fait en sorte qu'on se retrouve, M. le Président, avec un beau spectacle où on pouvait dire à la population du Québec, à ce moment-là: On a défendu, c'était absolument inacceptable, inopportun et même, dans certains cas, abusif. Allez voir aujourd'hui. Allez voir si chacun ne touche pas le régime dans lequel il était, (également, mais qui était très clair. Et je me dis, moi: Méfions-nous aujourd'hui de ceux qui viennent nous dire que c'est inopportun, parce qu'il faut l'étayer. Pourquoi c'est inopportun? Parce que la situation économique va mal. On dit: Ecoutez... Même dans les exemples, on disait: Matane. On a fermé l'usine de Matane. On a fermé celle de Port-Cartier. Est-ce que ce gouvernement-ci n'a pas investi des sommes absolument importantes dans le cas de Matane? Dans le cas de Port-Cartier? Port-Cartier, ça a été le premier dossier que nous avons réglé en arrivant au pouvoir en 1985, en prenant des risques financiers. Est-ce que ce

n'est pas le gouvernement actuel qui a pris des risques financiers pour effectivement faire en sorte qu'il y ait une usine à Matane? Et c'est nous qui payons les pots cassés aujourd'hui et qui assurons les financements de l'usine de Matane. (21 h 50) m. le président, quand on dit "c'est inopportun parce qu'on est dans une situation économique difficile", c'est vrai qu'on est dans une situation économique difficile. moi, comme d'autres, on en fait du bureau de comté aussi, on reçoit des gens qui se cherchent du travail, c'est clair. il faut être là, de manière très claire, prêts à faire face aux défis d'aujourd'hui et de demain. mais quand on disait - ça venait de mon collègue de joliette, pour qui j'ai beaucoup de respect et d'admiration, vous le savez, ce n'est pas d'aujourd'hui, je continue de l'avoir quand même - que c'est inopportun dans la situation actuelle, il ne faut pas laisser croire au monde que, dans la situation actuelle, à partir du moment où le projet de loi 404 sera voté, ça coûtera des sous demain matin. non, il n'y en aura pas, de sous, c'est clair; ça n'a aucun effet pour les députés en fonction puisque la retraite ne viendra pas avant les élections, pour ceux qui désireront la prendre. donc, demain matin... ce n'est pas dans six mois que cette situation-là va être améliorée, à moins que vos souhaits ne soient totalement comblés sur le plan d'une élection parce que de ce que je comprends, l'attitude change au fur et à mesure que progresse le temps nous menant à une élection. vous êtes de plus en plus sûr, puisque les sondages semblent vous conforter et vous dire que vous allez être gagnants et que vous vous croyez gagnants deux ans avant une élection... je me rappelle 1981, nous avions exactement la même attitude que vous. on était assurés d'être gagnants en 1981. le député actuel de saint-maurice, qui a été candidat en 1981, peut en témoigner, c'en était un des gagnants; il y en a d'autres aussi, m. le président. qu'est-ce qui est arrivé en 1981 sur le plan de l'élection? ça a viré, ça a eu le temps de virer et c'est à nous... dites-vous une chose: vous ne gagnerez pas la prochaine élection, on va la perdre. c'est nous qui allons décider si nous la perdons ou si nous la gagnons. et je peux vous dire une chose: quand j'entendais le député d'ungava dire tantôt que c'est un cadeau que nous voulons faire aux collègues députés pour être capables de se maintenir en poste jusqu'à la prochaine élection, je peux vous dire rien qu'une chose: ce n'est pas un régime de pension qui va tenir un député en chambre. c'est clair, chacun des députés a travaillé jusqu'à maintenant d'arrache-pied pour être capable de faire valoir son idée à l'intérieur du gouvernement, dans les commissions parlementaires et un peu partout avec un travail très honnête, d'un côté comme de l'autre, même si on ne partage pas toujours les mêmes opinions, pour faire en sorte qu'on puisse faire progresser des dossiers et les faire progresser à l'intérieur du cadre démocratique dans lequel nous sommes.

M. le Président, non je n'ai pas honte d'être debout aujourd'hui pour défendre le projet de loi 404 en plein jour, avec toute la procédure que nous connaissons, qui nous mènerait au mois de mars avec une adoption, ce qui fait, M. le Président, que je n'accepterai pas que des gens, aujourd'hui, viennent nous faire le même spectacle qu'on a connu en 1974 et qui, demain, pourront se retrouver dans une situation où, effectivement, si vous êtes sincères, messieurs, j'imagine, et que c'est inopportun... En commission parlementaire, vous aurez toute l'opportunité, y compris le député de Rouyn-Noran-da-Témiscamingue, qui est un grand prêcheur et un grand plaideur de toutes les bonnes causes... Je le mets au défi, M. le Président, de venir en commission parlementaire sur le projet de loi 404 et de déposer un amendement pour faire en sorte qu'il y ait une clause d'"opting out" et il sera peut-être le premier à l'utiliser. On verra la sincérité à ce moment-là.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Sur le même sujet, je reconnais Mme la députée...

Des voix:...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): ...de Terrebonne.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. M. le Président, le gouvernement du Parti libéral nous dépose aujourd'hui le projet de loi 404 non seulement pour harmoniser avec le projet de loi C-52, mais bien pour bonifier le régime actuel de pension des députés. M. le Président, je n'ai aucunement l'intention de parler du régime de pension comme tel parce que, personnellement, je suis absolument contre ce projet de loi, M. le Président, et ce n'est pas un spectacle que j'ai l'intention de faire, comme plusieurs députés du Parti libéral l'ont fait en 1982, mais je le fais par conviction, M. le Président.

Ce n'est pas une question de mérite. Depuis le début de la soirée, on nous parle de mérite, on tente de nous faire pleurer sur les conditions de travail des députés. On nous parle des nombreuses heures de travail des députés. Eh bien, M. le Président, c'est comme dans n'importe quel métier du monde. Effectivement, il y a des députés qui donnent du 100 %, il y a des députés qui donnent du 150 % et il y en a d'autres qui en donnent moins. C'est comme dans

tous les métiers du monde. Ce n'est pas un métier privilégié particulier.

On nous a beaucoup parlé de l'apparence et on nous a même fait des menaces, à la fin, d'une clause pour pouvoir se retirer. Eh bien, qu'on l'apporte, cette clause, M. le Président, et je n'aurai pas peur de la signer parce que, là-dessus, mon passé est garant de l'avenir. En 1982, je quittais le monde de l'enseignement. J'avais, à ce moment-là, un salaire de 30 000 $ par année, une sécurité d'emploi et je démissionnais en mettant de côté tous les privilèges que ça pouvait apporter. Je m'en allais comme attachée politique à 14 000 $ par année sans aucune sécurité d'emploi. Je l'ai fait, ce choix-là, et j'en ai supporté les conséquences. Lorsqu'on décide d'être député, on choisit les bonnes choses, mais aussi les mauvaises; les conditions de travail, on doit les accepter. Personne ici, en cette Chambre, n'a été obligé de se présenter comme député. Alors, qu'on cesse de nous parler du mérite ou du non-mérite et qu'on soit bien conscient qu'un jour, on a fait des choix.

Ce gouvernement, au niveau des procédures, avait à déposer ses projets de loi pour le 15 novembre. On a tenté de nous dire que c'était donc transparent. C'était important, la transparence. Si, ce projet de loi, vous le trouviez si transparent et si important, pourquoi ne pas l'avoir déposé en même temps que les autres projets de loi? Non, M. le Président. En date du 15 novembre, tout ce qu'on avait sur la table, c'était un menu diététique 1991; un menu qui n'avait que deux plats de résistance: le Code civil sur lequel on travaillait depuis le mois d'août et le projet de loi pour encore taxer les Québécois et les Québécoises, le projet de loi 170 qui ajoute la taxe de vente sur les services à partir du 1er juillet 1992. Ça, c'était important. C'était tellement important qu'on s'est dépêché de voter une motion de clôture, la semaine dernière, parce que les travaux n'allaient pas assez vite pour le gouvernement en place. Ça, c'était urgent; c'était important de taxer les citoyens.

Le 14 novembre l'Opposition officielle présentait une série de projets de loi qui auraient dû être déposés à cette session-ci. C'était important, c'était urgent. Gouverner, c'est être capable de faire des choix, de faire des priorités. Est-ce que les pensions des députés, c'est plus important, c'est plus urgent qu'une législation sur les surplus des caisses de retraite des travailleurs qui attendent depuis des années? Est-ce que les pensions des députés, c'est plus important et c'est plus urgent que plusieurs projets de loi au niveau de la santé?

J'entendais le ministre de la Santé et des Services sociaux tantôt. Est-ce que c'était plus important et plus urgent que la loi d'application de la réforme de la santé? Est-ce que c'était plus important que le débat sur la politique de santé et de bien-être promis par le ministre?

Est-ce que c'était plus important que le débat sur les médecines alternatives promis aussi par le ministre? Est-ce que les pensions des députés, c'est plus important que de hausser les critères d'admissibilité à l'aide juridique? Est-ce que c'est plus important que d'abolir la vente itinérante des préarrangements funéraires qui ne coûte rien au gouvernement? Est-ce que c'est plus important que de déposer un projet de loi pour la protection de la vie privée? Il faut se la poser, la question. Où est-elle, l'urgence?

Est-ce que c'est plus important qu'un projet de loi qui était pour créer le conseil des aînés? Est-ce que c'est plus important que de légiférer en matière d'équité salariale alors que, depuis que nous avons ce gouvernement, au niveau de l'équité salariale, les salaires des femmes, qui étaient rendus à 65 % de celui les hommes, sont tombés à 62 %? Est-ce que c'est plus important qu'une législation pour le régime des prêts et bourses accessibles aux élèves du secondaire professionnel, alors qu'on a des carences au niveau de la formation professionnelle et qu'on a 40 % de décrocheurs? Est-ce que c'est plus important que les débats sur l'énergie, alors qu'on ne cesse d'avoir des augmentations de taxes dans ce domaine? Est-ce que c'est plus important que l'état de l'économie, que ce qu'on a réclamé à grands cris tout au long de la session, une politique de création d'emplois? Il semble que oui, pour ce gouvernement. (22 heures)

Je suis tout à fait incapable de m'associer à la démarche du gouvernement dans la situation actuelle. Je trouve ça carrément indécent. Alors que les travailleurs et les travailleuses continuent de perdre leur emploi depuis le début de la récession, le leader du gouvernement, cet après-midi, tentait de nous faire pleurer sur les difficultés d'un député qui n'a plus son emploi, qui est battu dans une élection, M. le Président, comme c'est difficile de retrouver un emploi. Est-ce que c'est plus facile pour tous les travailleurs et les travailleuses qui ont perdu leur emploi cette année? Est-ce que c'est plus facile pour eux? Est-ce que c'est plus facile pour ces hommes et ces femmes de plus de 45 ans qui ont perdu leur emploi durant l'année? Non, M. le Président, ce n'est pas plus facile et eux ne peuvent pas se voter une loi pour améliorer leurs conditions.

Alors que les travailleurs et les travailleuses qui, eux et elles, ont conservé leur emploi ont dû accepter un gel de leur salaire et un gel de leurs conditions de travail, alors que les consommateurs subissent, depuis deux ans, des augmentations de taxes par ce gouvernement libéral en place, augmentation de taxes municipales, augmentation de taxes scolaires, augmentation d'Hydro-Québec, ajout de la taxe de vente sur les vêtements, les chaussures, les appareils électroménagers, les meubles, ajout de la taxe de vente sur les services à partir du 1er juillet

1992, est-ce qu'on a réussi, de ce côté-ci de la Chambre, M. le Président, à sensibiliser le gouvernement en place sur tous ces problèmes qui étaient vécus par les consommateurs et par les travailleurs? Non, M. le Président, et, pourtant, là, ils sont très sensibles aux pauvres conditions de travail des députés et aux problèmes des députés qui quittent leur emploi.

On n'a jamais réussi, M. le Président, à leur faire comprendre toutes les difficultés qui étaient vécues depuis les deux dernières années, pour les consommateurs, pour les contribuables, pour les travailleurs et les travailleuses; jamais, M. le Président, on a été sensibles là-dessus, absolument pas. Est-ce que c'est si urgent? Alors, que les personnes handicapées - le ministre de la Santé et des Services sociaux aurait pu nous en parler - du côté de l'OPHQ, on est en attente et que ces gens-là doivent attendre un an, un an et demi avant de recevoir des services, est-ce que c'est plus urgent, nos pensions, que les services à ces personnes-là? Alors que nos jeunes sont en difficulté, qu'ils ont des besoins réels et que le gouvernement ne trouve pas d'argent pour ces gens-là, c'est plus important, nos pensions? Alors que les aînés ne reçoivent pas tous les services auxquels ils ont droit, alors que les regroupements de femmes se voient coupés dans leurs services et que la violence ne cesse d'augmenter...

Lorsque je regarde tous ces faits qui sont une réalité, M. le Président, je dois vous dire que mes préoccupations actuelles sont bien loin de mes conditions de travail personnelles, très loin. Lorsque les contribuables québécois seront traités avec équité, nous pourrons prendre le temps d'examiner nos propres conditions. D'ici là, il y a beaucoup de chemin à faire, M. le Président, beaucoup!

Quand je regarde la situation actuelle, en juin 1991, on nous disait, du côté de l'ACEF, de l'Association des consommateurs québécois: Les gens n'ont plus de marge de manoeuvre. L'ACEF, dont la clientèle est composée de chômeurs, d'assistés sociaux temporaires et de travailleurs dont le revenu est inférieur à 25 000 $, prévoit de plus que, cette année, près d'une cinquantaine de ces cas de coupures d'électricité auront à être traités, trois fois plus que l'année dernière. Il y aurait peut-être eu urgence à regarder du côté des gens qui subissent des coupures d'électricité. C'aurait peut-être été plus urgent que de regarder nos fonds de pension. On ajoutait: Le niveau d'endettement des familles à moindre revenus est très élevé. Il n'est pas rare de voir chez nous quelqu'un ayant un salaire de 20 000 $ qui arrive à chaque mois et qu'il lui manque 200 $. Et, pendant ce temps-là, nous, on pleure sur nos conditions de travail.

Alors que le Conseil des affaires sociales était alarmé en juin 1991 par les 825 000 sans emploi et qu'on demandait un redressement sans précédent, qu'est-ce qu'on a fait, de ce côté-là pour améliorer les conditions? Rien, M. le Président. On n'a pas jugé bon d'apporter des mesures pour améliorer ces conditions. Au contraire, si on regarde notre législation de cette session, tout ce qu'on a, c'est un projet 170, M. le Président, pour augmenter les taxes, une augmentation de taxe de services, puis un beau projet pour les pensions des députés. Alors qu'on regarde partout au Québec et qu'on nous dit que, finalement, la misère a augmenté partout, principalement à Montréal... Et je repense à ma collègue de Johnson qui tantôt nous parlait des groupes qui étaient obligés d'organiser des services particuliers. Pas seulement dans sa région, M. le Président; dans le comté de Terrebonne, on a dû former un comité de dépannage. On a dû créer des cuisines collectives. Et, pourtant, on n'est pas supposés être dans un coin où c'est la grande misère au Québec. Et pourtant, dans Terrebonne, on se retrouve avec 18 % de familles sous le seuil de la pauvreté. Et on se retrouve ici, ce soir, en train de discuter de nos conditions. Je trouve ça carrément indécent, M. le Président.

En conscience, je suis vraiment incapable, mais tout à fait incapable d'appuyer un gouvernement qui ferme les yeux, parce que c'est ce qu'il fait, sur l'ensemble des problèmes vécus par les citoyennes et les citoyens du Québec et qui préfère légiférer sur son propre fonds de pension plutôt que de légiférer sur les besoins réels des gens qui les ont mis en place pour régler ces problèmes. Parce que c'est ça que les citoyens et les citoyennes font lorsqu'ils accordent leur confiance à un député ou à une députée. Ils lui demandent de légiférer pour venir régler les problèmes les plus criants qu'il y a au Québec.

Quels sont les problèmes les plus criants au Québec? Est-ce que ce n'est pas plutôt la création d'emplois, la formation professionnelle, l'éducation, la santé? Avec le peu de projets de loi qu'on a déposés, on aurait dû s'attendre à des projets de loi sur les besoins essentiels. Non, ce qu'on trouve à nous apporter, c'est le projet de loi sur les fonds de pension des députés. Mettez-vous deux minutes à la place du contribuable québécois. On sent partout la révolte qui gronde et je ne comprends vraiment pas que, de l'autre côté, on ne le sente pas. Il faut être tout à fait tourné sur soi-même pour ne pas le voir, M. le Président.

Nous sommes ici pour répondre aux besoins de la population. Si ce projet de loi était si opportun et si valable, pourquoi ce gouvernement, parce que c'est ce gouvernement qui était là de 1985 à 1989, en période de prospérité économique... Pourquoi ne l'avez-vous pas apporté, ce projet de loi? Vous étiez là de 1985 à 1989. Personne, de ce côté de la Chambre, n'a pensé à l'apporter, en période de prospérité. Pourquoi est-ce si urgent maintenant? Où est l'urgence? La seule véritable raison que je peux voir, M. le Président, c'est celle qu'évoquait

tantôt mon collègue d'Ungava. Ça ne peut pas être d'autres raisons, M. le Président.

Le projet de loi n'a pas été déposé avant le 15 novembre. Mais, depuis le 15 novembre, M. le Président, je peux vous dire qu'il y a eu des pressions, par exemple, du côté des députés ministériels. Les pressions ont été fortes sûrement pour le leader du gouvernement. Ce qu'on entendait en coulisse, les rumeurs dans les corridors, c'étaient uniquement les fonds de pension. Cette session-ci, personne ne se battait sur des sujets d'importance. Tout ce qu'on entendait comme rumeurs, c'étaient sur les fonds de pension. Est-ce que le projet sera appelé ou s'il ne sera pas appelé? C'est ce qu'on entendait. Les pressions ont été tellement fortes, M. le Président, que le leader l'a appelé. Donc, la seule véritable raison, c'est un intérêt immédiat, un intérêt qui urge devant l'arrivée prochaine d'une élection, et là on se dépêche. On ne l'a pas fait, de 1985 à 1989, en pleine prospérité, mais là, même s'il y a récession, même si les conditions sont tout à fait inacceptables, inadmissibles, là, M. le Président, on est prêt à le faire.

Et, de l'autre côté, on tente de nous parler des mérites, de l'importance d'une bonification et des traitements. Vous savez, M. le Président, le ministre de la Santé et des Services sociaux tantôt faisait des gorges chaudes avec les spectacles, il nous parlait de 1974, il nous parlait de 1982. Eh bien je peux l'assurer que certains de mes collègues lui rafraîchiront la mémoire et lui rappelleront certains propos de ses collègues en 1982 au sujet des conditions des députés. Peut-être qu'en écoutant, en revoyant ce qui s'est passé à ce moment-là, peut-être que le ministre de la Santé se rappellera un petit peu ce qui est arrivé, parce que là on semble l'avoir oublie complètement. En 1982, est-ce que le gouvernement, est-ce que les députés du Parti libéral, qui étaient à ce moment-là dans l'Opposition, étaient solidaires avec les députés du Parti québécois sur les mesures qui touchaient les députés? On pourra peut-être lire certains extraits de 1982. Je vais laisser ce soin à mes collègues. (22 h 10)

M. le Président, depuis le début, j'ai écouté toutes les interventions et je peux vous assurer que personne ne m'a convaincu de la nécessité et de l'opportunité de ce projet de loi. Et lorsqu'on nous dit qu'il va y avoir, que peut-être il y aurait une clause, eh bien oui, mettez-la, votre clause, et je n'ai absolument pas peur, et je vous avertis que je vais m'y soustraire si vous la mettez. Je vous le dis immédiatement. Et, là-dessus, mon passé est garant de l'avenir. Je n'ai aucun problème à vous annoncer ça, M. le Président. Et le député de Mille-Îles tantôt nous lançait ses grandes... Il nous faisait un spectacle, véritablement un spectacle, sur l'importance de cette bonification. Et, même, il interpellait les députés de ce côté-ci qui ne le regardaient même pas, mais peut-être parce qu'il souhaitait qu'on le regarde. Il nous disait: Les apparences... Les apparences, eh bien, s'il y a quelqu'un qui s'occupe de ses apparences, M. le Président, je pense que le député de Mille-Îles n'a absolument pas de leçon à faire à personne, en cette Chambre, là-dessus.

M. le Président, au moment où le Québec a besoin d'un gouvernement responsable, capable de prendre ses responsabilités, capable de donner au Québec une législation pour régler les problèmes que nous vivons, je trouve tout à fait inacceptable et inadmissible qu'on ose nous présenter aujourd'hui un projet de loi qui vient uniquement s'occuper des conditions de travail des députés alors qu'il y a tant à faire, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): merci, mme la députée de terrebonne. sur le même sujet, je cède maintenant la parole à m. le député de louis-hébert.

M. Réjean Doyon

M. Doyon: Merci, M. le Président. M. le Président, évidemment, le sujet que nous abordons ce soir est un sujet qui est délicat, qui peut, à première vue, paraître embarrassant, qui, si on écoutait l'Opposition qui fait tout pour que ce soit le plus embarrassant possible, ne devrait pas être devant cette Chambre. M. le Président, à écouter la députée de Terrebonne qui vient de parler, je dirais qu'elle a une approche tout simplement misérabiliste vis-à-vis de la société québécoise. Elle parle des chômeurs, elle parle des femmes qui sont battues, des femmes qui ont des enfants. M. le Président, on pourrait tenir ce discours-là et c'est tellement facile de le faire.

Ce à quoi on assiste, actuellement, M. le Président, de la part de l'Opposition, c'est tout simplement - et les propos de la députée de Terrebonne sont clairs à ce sujet-là - un règlement de comptes. L'Opposition règle ses comptes actuellement avec le Parti libéral par rapport à ce qui s'est passé en 1982. C'est très clair dans mon esprit, on attendait sa chance, du côté de l'Opposition, pour nous rendre la monnaie de notre pièce disant: Vous autres, on vous reprendra au détour. Et c'est aujourd'hui, comme on dit, qu'ils ont décidé de se payer la traite, qu'ils ont décidé que c'était à notre tour de payer. Et ils ont attendu depuis 1982, ça fait presque 10 ans.

Règlement de comptes pur et simple, M. le Président. Moi, la gageure que je fais actuellement, comme député de cette Assemblée nationale, c'est que la population du Québec est assez fière pour s'assurer que ses députés, ses représentants élus, ceux a qui elle a fait confiance, ceux à qui elle confie la responsabilité de son avenir, que la population du Québec est assez

fière pour que ces gens-là se trouvent bien payés, convenablement rémunérés avec des pensions qui ont de l'allure. Je pense que la population du Québec est assez mature pour ça, est assez mûre pour ça. La gageure que l'Opposition fait actuellement, c'est le contraire. C'est que la population du Québec est aussi mesquine que l'Opposition, qu'elle veut voir ses députés crever de faim et, si possible, quêter à la porte de l'église une fois qu'ils ne seront plus députés.

Moi, je ne pense pas que la population du Québec veuille ça. Je pense que la population du Québec est suffisamment fière, suffisamment honnête pour s'assurer que les députés, qui font un travail exigeant, un travail difficile, un travail qui demande de nombreuses heures, un travail qui exige, de la part des députés, une disponibilité à toute épreuve, à tout moment, que cette population du Québec est prête à rémunérer convenablement, sans abus, ses élus qu'elle a choisis. Moi, c'est ce que je pense. C'est l'opinion que j'ai de la population du Québec. C'est ce que je connais de la population de mon comté. Ce n'est pas une population mesquine, ce n'est pas une population envieuse, ce n'est pas une population jalouse, ce n'est pas une population qui méprise son député, c'est une population qui veut en être fière. Et, pour ça, la population est prête, bien sûr, à s'imposer un certain nombre de sacrifices; ça va ensemble.

Moi, je n'ai pas honte de me présenter devant la population et de tenir ce discours-là. Je ne suis pas en peine pour moi, M. le Président. J'écoutais le député de Masson qui disait: Moi, ça va très bien au point de vue des finances. Moi, les finances, c'est couci-couça, M. le Président, mais ce que je vous dirai, c'est que je ne suis pas en peine pour me trouver une job après, par exemple, parce que je l'ai déjà fait à plusieurs reprises. Je ne suis pas en peine pour ça. Si jamais les choses se produisaient dans ce sens-là, ce n'est pas parce que je suis en moyens, c'est parce que je considère que la capacité que j'ai va me permettre de me tirer d'affaire autrement qu'en étant député de l'Assemblée nationale. Ce discours-là, je le fais par souci d'honnêteté, par souci de dire à la population: Voici ce que nous vous proposons. Nous vous proposons de nous payer une pension qui va avoir un certain bon sens, qui va nous permettre de vivre convenablement.

Je dis aujourd'hui à la population qui me rencontre... M. Doyon, de toute façon, on espère que vous allez être élu - on me disait ça - mais si jamais le pire arrivait pour vous, ce n'est pas trop grave, avec votre fonds de pension, vous êtes correct. Vous êtes à votre deuxième mandat - on parle de la dernière élection - vous aurez bien 30 000 $, 35 000 $. C'est ça que vous aurez. Ça fait cinq ans, de toute façon, deux élections, on sait bien que c'est ça, le fonds de pension des députés. Je leur disais: Si je ne suis pas élu demain matin, je suis battu, savez-vous c'est quoi, ma pension, à moi? C'est 11 800 $ par année; c'est ça, ma pension. Ah! on ne savait pas ça! Comment ça se fait? On nous a toujours dit que c'étaient des pensions de cinq ans, deux élections, qu'on s'en allait avec 25 000 $, 30 000 $ dans les poches pour le reste de ses jours, pleine indexation, en sortant comme député. Comment ça se fait? moi, je suis heureux que ce projet de loi soit là aujourd'hui. quand bien même ce serait juste... il ne passerait pas, le projet de loi, que ça ne me ferait pas grand-chose, dans le fond, si ça permettait aux gens de réaliser que, finalement, le fonds de pension qu'ils pensent que j'ai, je ne l'ai pas, ni mes collègues qui sont à côté de moi, ils ne l'ont pas. ce n'est plus vrai: cinq ans, deux élections. ça a été comme ça du temps du pq et, une fois qu'ils ont eu fait leurs cinq ans, une fois qu'ils ont eu fait leurs deux élections, ils l'ont modifié, le fonds de pension, et la grosse fournée des députés qui profitaient de ça, c'étaient des députés péquistes. grand bien leur fasse! je ne suis pas jaloux d'eux autres. mais une fois que leur compte a été réglé, à eux autres, ils avaient fait leurs cinq ans, ils avaient leurs deux élections dans la poche, ils ont dit: merci beaucoup. les petits nouveaux comme toi, réjean doyon... tu repasseras, on va t'envoyer à 3,5 %, tu vas cotiser comme les fonctionnaires.

Mon espérance de vie, comme député, en moyenne, moi, c'est 6,6 ans, comme député dans cette Assemblée nationale. Un fonctionnaire, c'est quoi, sa durée de vie? C'est 30, 35 ans dans la fonction publique. Si on voulait faire les proportions, il faudrait tenir compte de ça quelque part. Moi, j'en ai 15 000, fonctionnaires, dans mon comté; ils vont me comprendre quand je vais leur expliquer ça, qu'eux autres ils font 25, 30, 35 ans dans la fonction publique - c'est bien correct, pas de problème avec ça - qu'ils se retirent avec 70 % de leur salaire - parfait, je suis bien content pour eux - mais que, moi, je me serais retiré, après deux mandats, et là j'étais au-dessus de la moyenne, avec 11 800 $. Ce n'est pas plus grave que ça, mais ça permet de le dire, ça permet d'expliquer ces choses-là. (22 h 20)

La différence qu'il y a entre le traitement qu'on fait actuellement et celui qu'on s'est fait faire en 1982, que vous nous reprochez, c'est que les avantages qui sont dans ce projet de loi là, et qui sont réels, vont être pour tout le monde ici, dans cette Assemblée. Il n'y a pas de privilégiés. Il n'y a pas un côté de la Chambre qui va souffrir pendant qu'un autre va s'engraisser. Ça, c'est une drôle de différence avec 1982. C'est une drôle de différence! Il faut expliquer ces choses-là à la population. Tout le monde, dans cette Assemblée, va profiter du projet de loi. Ceux qui ne sont pas contents, ceux qui n'en veulent pas, de ça, auront simplement à venir en commission parlementaire au mois de février, au

mois de mars, proposer un amendement permettant le retrait pour ceux qui ne veulent pas profiter du fonds de pension. Qu'ils viennent ici et qu'ils disent: Dans les 60 jours, un député a le droit d'informer le secrétaire général de l'Assemblée - c'est un article de trois lignes - qu'il n'entend pas se prévaloir des modifications au fonds de pension tel que prévu dans le projet de loi 404, et j'ai signé le député de. Proposez cette option de retrait là. Je suis sûr que vous n'aurez pas de misère à nous la faire accepter; nous autres, on va voter pour, on va l'accepter. Vous dites toujours que le gouvernement n'accepte jamais d'amendement, on vous le dit qu'il y en a un qu'on va accepter. Proposez-le. Si le député d'Abitibi-Ouest veut le faire, il le fera lui-même, il est leader, peut-être qu'il a plus de chances que les autres; il le fera. Mais je ne pense pas qu'il y en ait beaucoup d'amendements de ce type-là; je ne pense pas qu'il y en ait beaucoup parce que je sais à qui je parle quand je m'exprime de cette façon-là. Je sais à qui je parle et à qui je m'adresse.

La foi sans les oeuvres, vous savez comment ça continue? Eh bien, on en a de belles preuves ici. Ceux qui ne veulent pas du fonds de pension, vous le direz, vous viendrez en commission parlementaire, on vous en propose une commission parlementaire. C'est très simple. Qu'est-ce qu'il y a de tricheur là-dedans? Je ne peux pas voir, M. le Président, pourquoi un député à l'Assemblée nationale n'aurait pas des conditions de travail qui s'assimilent, à toutes fins pratiques, avec ce qui s'offre dans d'autres Parlements, que ce soit à Ottawa, que ce soit à Toronto. Il n'y a pas véritablement de raisons. Les responsabilités qui sont les nôtres se comparent, au moins, avec celles que ces gens-là peuvent avoir.

La députée de Terrebonne nous faisait tout un discours là-dessus, tout à l'heure, en nous disant: Pauvres chômeurs, pauvres petits enfants, pauvres femmes battues, pauvres itinérants, et là c'était la ribambelle, la litanie de tout le monde qui fait pitié sur la terre, et elle disait: Nous autres, les députés, regardez-nous ici, à côté de ce monde-là, on ne fait pas pitié, nous autres. Bien non! Mais, est-ce que le devoir d'un député, c'est de faire plus pitié que les gens qui font le plus pitié dans son comté? Est-ce que c'est ça? Est-ce qu'il faut encore faire plus pitié? Est-ce qu'on va aider plus le monde si on est encore plus pauvre que le plus pauvre de notre comté? Est-ce que c'est ça, l'objectif qui est visé? Moi, je dis que ce n'est pas ça que la population veut de son député. La population veut un député qui est heureux de faire son travail, qui est satisfait, qui fait son possible et qui considère que la rémunération qui est attachée au travail qu'il accomplit, c'est une rémunération qui est honnête, qui ne déborde pas la mesure, qui est comparable à d'autres travaux semblables.

M. le Président, je n'ai pas été député, et vous non plus, toute ma vie. On a déjà travaillé ailleurs. La plupart des députés ici, quand on se parle entre nous autres, on n'a pas grimpé dans l'échelle salariale. Je vous dirais, M. le Président, que moi, comme député de Louis-Hébert, en 1971, j'étais administrateur IV au ministère des Communications, comme directeur général de l'administration et chef du contentieux. Comme député de Louis-Hébert, je suis encore rémunéré comme administrateur IV, 20 ans après. J'ai grimpé et c'a été vite! C'a bien été, mon plan de carrière! 1971, administrateur IV, 33 ans, 53 ans, 1991, encore administrateur IV. Merci beaucoup! Je ne suis pas trop gêné, je n'ai pas sauté trop d'échelons. Mais ça, c'est la vérité. On s'imagine que c'est la fin du monde que d'être député.

Je voudrais que les fonctionnaires sachent, ici - il y en a plusieurs, il y en a 10 000, 15 000 dans mon comté - que le salaire des députés est basé sur la médiane des administrateurs IV au gouvernement. On n'est pas classé comme des administrateurs d'État, là, on n'est pas classé comme des administrateurs classés I; administrateurs iV, dans la médiane. Il n'y a pas d'abus là, alors que, nous, nous avons une responsabilité d'établir les lois, de les faire les plus justes possible, de contrôler les dépenses du gouvernement et que, jusqu'à un certain point, nous sommes - pas pour se prendre pour d'autres - les patrons de cette immense machine gouvernementale qu'est le gouvernement du Québec. C'est à nous que les gens confient la responsabilité. Toi, tu es mon député, fais donc attention pour que l'argent que tu viens chercher dans nos poches soit le mieux dépensé possible. C'est ça, notre travail. C'est ça, notre job. Alors qu'à écouter certains discours que j'entendais tout à l'heure du côté de l'Opposition, pour bien faire notre job, il faudrait être sous-payés, misérables, s'il y a un petit moyen malades en même temps et, là, on ferait tellement pitié qu'il n'y aurait personne qui voudrait de notre job et on serait certains d'être réélus. C'est une façon de voir les choses, mais disons que ce n'est pas la mienne, que ce n'est pas celle des libéraux.

Nous avons évalué la situation. Nous avons demandé à des sages - un péquiste, là-dedans, M. Richard Guay, qui était président de l'Assemblée nationale, un libéral, M. Victor Gold-bloom, ministre de l'Environnement et des Affaires municipales d'un gouvernement précédent, et un eminent spécialiste en sciences politiques, M. Baccigalupo - de regarder toute la situation, de comparer avec les autres Parlements, d'interroger les députés, d'aller voir ceux qui ne sont plus députés, en toute transparence, d'aller voir les femmes de députés qui sont décédés, d'aller voir comment elles vivaient, de comparer les chiffres et de dire: Faites-nous un rapport. Bien, le rapport, on l'a reçu et, maintenant, après l'avoir regardé, parce qu'on sait que la machine gouvernementale n'est pas aussi rapide qu'on le voudrait... Pour ne rien vous

cacher, M. le Président, là-dedans, on a espéré qu'on ferait comprendre le bon sens à l'Opposition. C'est pour ça que ça a retardé un peu. Moi, si on avait suivi mon idée là-dedans, on n'aurait pas trop perdu de temps là-dessus. On n'aurait pas trop perdu de temps. J'étais certain qu'ils seraient contre parce qu'ils ne pourraient pas se retenir de faire de la politique là-dessus. L'occasion est trop belle. Pas capables de se retenir une fois, de faire qu'il y ait une exception quelque part à la règle qui est la leur, c'est-à-dire de faire de la politique sur tout. Moi, je le savais qu'ils ne seraient pas d'accord, que, même si on retardait encore une semaine, on se retrouverait, on se buterait encore à une l'Opposition aussi bornée que celle qu'on a aujourd'hui devant nous.

Bien c'est ça qui se passe et, là, on s'est retrouvés dans des circonstances qui font qu'on est à la fin de la session. Mais il faut savoir là-dedans, M. le Président, que le vote qui va se prendre ce soir va tout simplement permettre à l'étude de se continuer au mois de février, au mois de mars en commission parlementaire où on va inviter des spécialistes, des experts à venir nous entretenir. Et si les députés de l'Opposition ont des inquiétudes, des questions à poser, ils les poseront à ce moment-là. Il n'y a pas de cachettes à faire là-dedans. S'ils ont des amendements de la nature de celui que je leur ai proposé de faire, bien ils viendront avec ces amendements-là. Ils seront sûrement les bienvenus. Et sachez, M. le Président, qu'au mois de mars, si jamais le projet de loi est adopté - parce qu'on n'est pas encore rendus là - il n'y a pas de dépense - et on l'a dit mais il faut le répéter - immédiate pour le gouvernement, pas de dépense immédiate. C'est simplement éventuellement, quand on prendra notre pension, nous, les députés, ici, à l'Assemblée nationale, et on ne part pas avec la caisse, on part avec 4 %, M. le Président. je vais juste vous faire une petite démonstration. regardez. on va accumuler 4 % par année, 4 % par année où on va avoir siégé à l'assemblée nationale. notre moyenne de vie ici, à l'assemblée nationale, n'est pas tout à fait de 7 ans. donc, à peu près 7 fois 4, 28 % du salaire. les fonctionnaires, dont la moyenne de vie dans la fonction publique est entre 30 et 35 ans, eux, ont 2 % par année, ça veut dire que, quand ils se retirent avec leur pension, ils se retirent avec 60 %. je suis content pour eux. 70 % est un maximum. mais, entre 60 % et 70 %, avec certaines pénalités qu'ils peuvent accepter, on considère que c'est quelque chose de raisonnable que de partir avec 60 %, 65 %, 70 % de son salaire. en moyenne, les députés partiront avec entre 25 % et 30 % de leur salaire quand ils cesseront d'être députés, en moyenne, si l'espérance de vie des députés se maintient. il n'y a pas de raison pour ne pas qu'elle se maintienne parce qu'on ne dure pas très longtemps comme députés. et on trouve ça exagéré. moi, je demande à la population, aux fonctionnaires qui m'écoutent: Vous en iriez-vous à votre retraite avec 28 % de salaire? Partiriez-vous à votre retraite avec 28 % de salaire? Bien c'est ce qu'on est en train de vouloir se voter actuellement. En moyenne, c'est 25 %, 27 %, 28 %, 30 % de salaire, comme pension, c'est ça qu'on est en train de se donner. C'est ça qu'on se donne alors que les fonctionnaires ont, grand bien leur fasse - content pour eux, je l'ai déjà été, fonctionnaire, 25 ans dans ma vie - eux autres, ils partent avec 60 %, 65 %, 70 % et on considère que c'est correct, ça, que c'est normal, qu'il n'y a pas d'abus là. A ce moment-là, comment se fait-il qu'il y aurait abus pour les députés de partir avec une pension entre 25 % et 30 %? Il me semble que le calcul est facile à faire. Ne pas vouloir reconnaître ça, M. le Président, c'est faire preuve soit de mauvaise foi ou d'ignorance, je ne sais pas laquelle choisir. Je ne sais pas quoi choisir. (22 h 30)

Moi, s'il y a une chose qui me fait de la peine aujourd'hui, c'est de voir l'attitude de l'Opposition sur un sujet comme celui-là. C'est tellement facile de tenter d'embarrasser le gouvernement, de le mettre dans ses petits souliers. En faisant ça, ceux à qui ils nuisent le plus, c'est à eux, parce que quelqu'un qui raisonne vraiment se dit: Pourquoi ces gens-là ne veulent-ils pas que ce changement-là s'effectue? Il y a peut-être une raison, M. le Président. C'est que peut-être ils savent qu'ils ne valent pas ça, eux, c'est peut-être ça. Je ne dis pas que c'est ça, j'essaie de trouver des explications. Moi, je considère que je vaux 30 % de mon salaire quand je ne serai plus député. Je ne suis pas gêné de ça. Je ne suis pas sûr qu'il va y avoir beaucoup de fonctionnaires dans le beau comté de Louis-Hébert qui vont me le reprocher. Je les connais trop pour ça. On me le reproche de l'autre côté, mais il n'y a pas beaucoup de fonctionnaires qui vont venir dire: M. Doyon, vous vous êtes voté une pension à 28 %, 30 %, ce qui est beaucoup trop élevé. Parce qu'eux autres, ils savent bien que celle qu'ils vont prendre, ça va être à 65 %, 70 %. Alors, je ne pense pas entendre beaucoup ce discours-là.

Mais la seule raison, c'est que la politique étant ce qu'elle est, le gouvernement est là pour recevoir des coups, pas parce qu'il en mérite, mais parce que l'Opposition est prête à en donner. Qu'est-ce que vous voulez, M. le Président? Ça fait partie de la vie qu'on doit mener ici. C'est sans aucune gêne que je considère ce projet de loi comme parfaitement justifié, comme étant un projet de loi qui amène l'adhésion totale de tout le monde, sauf de ceux qui se bouchent les yeux. Je suis sûr, M. le Président, qu'encore une fois le bon sens va triompher parce que ce qui importe - je termine là-dessus - c'est que la population réalise que ce qui se passe ici, c'est quelque chose de normal, c'est

quelque chose de convenable. Il n'y a pas d'abus, il n'y a rien d'abusif et je pense que la population est en train de réaliser ça.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Louis-Hébert. Sur le même sujet, je cède la parole à Mme la députée de Johnson. Je vous rappelle que vous disposez d'une période maximale de 20 minutes, Mme la députée.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais relever certaines choses que mes deux prédécesseurs du côté libéral ont dit dans leurs interventions. Pour commencer, le député de Charlesbourg et ministre de la Santé et des Services sociaux a parlé de mes valeureux collègues, les six petits députés du Parti québécois. Je dis "petits", parce qu'ils étaient en petit nombre, pas parce qu'ils n'étaient pas en forme. Il a donné un témoignage tout à l'heure de leur "vigoreusité". À six, ils ont tenu 102 députés en haleine, ils les ont fait revenir - c'est lui qui l'a dit dans son intervention - le 26 décembre pour discuter d'un projet de loi semblable.

M. le Président, j'étais là en 1981, le député de Charlesbourg et ministre de la Santé et des Services sociaux a sûrement fait exprès pour sauter par-dessus 1982. En 1982, on était de l'autre côté de la Chambre, lors de la récession de 1982, et les libéraux étaient de ce côté-ci de la Chambre, M. le Président. Il n'a pas parlé de ça, le député de Charlesbourg, dans son intervention de tout à l'heure, mais moi je vais lui en parler tout à l'heure des discours qui se sont faits à cette époque-là. Moi, j'étais là en 1982, M. le Président. Et aussi le député de Louis-Hébert a dit qu'en 1982, on s'était voté une loi qui n'était pas juste pour tout le monde, qui avait modifié grassement nos salaires. Mais pourquoi se sont-ils dépêchés de la changer en 1987, si c'était si bon que ça? Pourquoi le Parti libéral, qui était là depuis le 2 décembre 1985, est-il intervenu en 1987, et a changé le régime? Pourquoi? Parce qu'il était si bon que ça? Voyons donc! Voyons donc! Pourquoi l'avez-vous changé? Parce qu'il était si mauvais que ça ou si bon que ça?

Le Parti libéral, M. le Président, fait des discours, mais en réalité, ce n'est pas ça qui se passe.

Je vais vous lire ce qui s'est passé en 1982. Les éminents collègues du Parti libéral, le 13 décembre 1982, à quelques jours de ce qu'on est présentement; on est le 16 décembre, là... Le 13 décembre, M. Lalonde, c'est quelqu'un que vous connaissez, ça?

Une voix: Non.

Mme Juneau: Peut-être pas vous. Oui, vous étiez là.

Des voix: Ha. ha, ha!

Mme Juneau: Mais nous, on l'a bien connu, M. Lalonde. Oui, oui. On l'a bien connu, M. le Président. Il disait, au sujet du dossier en question: "M. le Président, ces considérations dites, nous croyons, nous, du Parti libéral du Québec qu'il est impensable que les députés se permettent une augmentation de salaire et ce, pour au moins un an. Je dis qu'il est indécent, dans les circonstances actuelles, que les députés se votent ici, à cause des pouvoirs qui nous sont impartis, une augmentation. Je ne referai pas les discours que les péquistes nous ont tenus en 1974; la démagogie dégoulinait de tous leurs propos... Imaginez donc! Ça, c'était M. Lalonde, Fernand Lalonde...

Une voix:...

Mme Juneau: C'est ça. C'est ça qu'il disait.

Une voix: Avocat eminent.

Mme Juneau: Puis il disait, en plus de ça, M. le Président... Ah! C'est beau à lire À la page 7135, 13 décembre 1982, Fernand Lalonde: "Le gouvernement étant dans la dèche - c'est quelque chose qui ressemble à ce qu'on vit aujourd'hui, je pense, hein? - comme il l'est actuellement - bien, on entrevoit 4 000 000 000 $ de déficit, c'est proche de la dèche, ça, hein? - et les contribuables québécois étant surtaxés... Ça "ressemble-tu" à ce qu'on vit aujourd'hui, ça, avec le bâillon sur la loi 170 qu'on a eu vendredi soir passé? La loi des taxes, 686 articles, M. le Président; on a eu le bâillon après le 132e article. C'est ça. C'est ça qu'on avait, les discours de Fernand Lalonde en 1982. "Il est impensable, dit-il, de faire autre chose que de dire notre non à toute augmentation de salaire pour l'année 1983."

Une voix: On se baissait.

Mme Juneau: Et on vient nous taxer de faire de la démagogie? On vient nous dire que ces gens-là sont transparents et qu'ils ne feraient jamais une chose semblable? Les paroles s'envolent, mais les écrits restent. Les écrits restent, M. le Président, et on peut, près de 10 ans après, s'en resservir.

Je pourrais vous en citer d'autres. On a un autre député qui est encore ici, M. Sirros. Excusez, j'aurais dû le nommer par son comté, mais, en 1982, ils l'ont nommé par son nom. "Vous savez ce que cela va faire, au moment où la conjoncture économique se gâte?" C'est déjà gâté! "Voulons-nous montrer que nous sommes au service des Québécois, des serviteurs du bien commun ou donner l'impression - et j'attire votre attention sur le mot "impression" - que nous pensons avant tout à nous-mêmes et passer

pour des sangsues collées aux fonds publics." Aïe! "C'était-u" beau, ça, un peu? Des sangsues collées aux fonds publics. (22 h 40)

M. le Président, comment voulez-vous qu'on puisse se réjouir ce soir que le gouvernement nous amène un projet de loi pour augmenter nos fonds de pension? Pendant qu'il y a 400 000 chômeurs au Québec, pendant qu'il y a 600 000 personnes qui reçoivent des chèques d'aide sociale, comment voulez-vous, en toute honnêteté, qu'on se réjouisse d'une bonification? Je ne dis pas qu'on ne la mérite pas. Je ne dis pas qu'on ne travaille pas. Je ne dis pas que les députés fédéraux ne gagnent pas plus cher que nous autres puis qu'ils ne le méritent pas plus que nous autres. Je ne dis pas ça. Je dis que ça n'a pas de bon sens dans un temps pareil. Ah bien, si le vigneron de la grappe industrielle de l'an 2000 nous promettait des récoltes pour juin, M. le Président, là je pourrais dire en toute confiance puis sans inquiétude et sans démagogie non plus que je serais contente, comme tous les députés ici en Chambre, qu'on puisse, nous aussi, toucher une augmentation de nos pensions. Mais il faudrait pour ça, M. le Président, qu'au bout du tunnel il y ait une toute petite lueur de fin de récession. Il aurait fallu pour ça, M. le Président, qu'un gouvernement responsable de l'autre côté mette en place, pendant qu'il était encore temps, des programmes pour que le Québec se relève d'une récession qui n'en finit plus. Il aurait fallu ça. Sauf qu'au printemps dernier, lorsqu'on était de plein fouet dans la récession, je me souviens que mon chef, M. Parizeau, a demandé au gouvernement de mettre sur pied un plan Biron 3 adapté aux années quatre-vingt-dix. Je me souviens. Et qu'est-ce que le ministre de l'Industrie et du Commerce a fait comme réponse? 1-800-461-AIDE. C'était le numéro miracle. Le numéro qu'il fallait tous et chacun rejoindre pour sortir du tunnel.

Tout à l'heure, M. le Président, j'ai parlé sur le report et je vous ai fait une description de gens de l'Estrie qui avaient perdu leur emploi. Et je pourrais vous en parler encore, encore et encore, M. le Président. Puis ça, c'est juste ma région. Il y a d'autres régions au Québec, la Gaspésie, entre autres, qui est touchée très gravement par le chômage. Et ça perdure. Je suis allée dans une tournée à Matane, à Rimouski, à Rivière-Ouelle. Ces gens-là, M. le Président, souffrent aussi d'un chômage chronique. Pensez-vous qu'on peut, en tant qu'élus du peuple, se réjouir du fait que, pendant que tout le monde a de la misère, on se paie une augmentation de notre plan de pension? Je pense, honnêtement, M. le Président, que les députés de l'autre côté doivent aussi entendre parler, chacun dans leur comté, que ça n'a pas de bon sens au moment où on se parle. Ce n'est pas parce qu'on ne vaut pas... Je l'ai dit tout à l'heure, ce n'est pas parce qu'on ne travaille pas.

Moi, personnellement, je fais 70 heures par semaine. J'ai un grand comté. Je ne me plains pas, j'aime mon travail et j'aime les gens que je représente. Mais ils ont besoin aussi qu'on les comprenne. Ils nous ont élus ici pour qu'on les défende, pour que, s'il y a un manque évident de travail dans chacun de nos comtés, on puisse faire en sorte, nous qui sommes les décideurs ici, de mettre des programmes de l'avant pour les sortir du trou plus vite qu'ils en sortent présentement. Mais, pour faire ça, il faut qu'il y ait une concertation, il faut que le gouvernement qui est en place prévoie, que ce ne sort pas un gouvernement qui dirige à la pièce. Il aurait fallu qu'il mette de l'avant certains programmes incitatifs pour que les gens puissent faire en sorte de remettre le train sur les rails. Mais, quand on taxe, quand c'est le seul moyen qu'on a, taxer les gens qui sont déjà surtaxés pour sortir le gouvernement de la dèche, eh bien, je ne trouve pas que c'est un moyen efficace, je ne trouve pas que c'est d'aider nos concitoyens.

M. le Président, si on avait eu un gouvernement qui regarde et qui arrête de taxer, qui s'assoit avec les élus municipaux au lieu de leur imposer une fiscalité municipale, qui s'assoit avec les gens de l'éducation et qui leur demande ce qu'il serait mieux de faire pour empêcher le décrochage scolaire, qui s'assoit avec les PME et qui leur demande: Qu'est-ce qu'il serait mieux de faire pour vous aider à recouvrer la santé de votre entreprise, qui est chancelante? C'est ça qu'il aurait fallu faire, M. le Président. Si la santé économique des Québécois et des Québécoises avait été en forme parfaite - parfaite, c'est peut-être dur à trouver, mais en tout cas mieux que c'est là, ce ne serait pas difficile - je pense qu'aucun député ici ne se serait formalisé de l'augmentation. Sauf que ce n'est pas le cas, M. le Président. On vit des heures difficiles et si vous regardez n'importe laquelle des coupures de journaux qui ont parlé de ce qui se passe ici, je vous assure qu'il n'y en a pas beaucoup qui trouvent que c'est très agréable, le moment que le gouvernement a choisi pour faire une augmentation des régimes de retraite des députés de l'Assemblée nationale.

Bien sûr, M. le Président, comme on nous l'a dit à maintes reprises, et je pense que tout le monde s'entend - que ce soit de ce côté-ci de la Chambre ou de l'autre côté - pour dire qu'on n'avait pas le choix de s'harmoniser avec le fédéral, qui nous a fait un coup dur, je pense. Mais, les juges se sont harmonisés, les élus municipaux se sont harmonisés. Pourquoi les députés, eux autres, s'augmentent-ils? C'est ça, la question qu'on se pose. On ne dit pas que les députés ne sont pas bons, que les députés ne le méritent pas. Les députés n'auraient pas dû faire ça pour que ce n'est pas le temps de le faire, parce qu'il y a trop de gens qui souffrent dans le moment. C'est ça le vrai problème. C'est ça,

M. le Président. Nous, on souhaiterait que, tant et aussi longtemps que la récession fera des ravages, comme elle en fait partout au Québec... Dans des régions, c'est pire que dans d'autres... M. le Président, à ce moment-là, c'est difficile d'aller aussi bravement que semblait l'indiquer le ministre de la Santé et des Services sociaux, aussi fièrement que semblait le crier le député de Louis-Hébert, dire à nos concitoyens: Bien, c'est bien de valeur, vous autres, vous n'avez pas de job, mais moi, je me paie une augmentation de mes plans de pension.

Je pense que ça doit être bien difficile d'affronter nos électeurs dans nos comtés respectifs, parce que, que ce soit de ce côté-ci de la Chambre ou de l'autre côté, le lundi, on rencontre nos électeurs quand on n'est pas ici, en session intensive. Et, c'est à ce moment-là, M. le Président, qu'on voit à quel point il y a de la misère, à quel point les gens en arrachent et à quel point ils étirent une piastre pour aller jusqu'en fin de semaine. Vous le savez très bien. C'est aussi grave dans votre comté, M. le Président, parce que les difficultés dans les mines, vos travailleurs miniers y ont goûté eux autres aussi. Je pense que ce n'est pas plus facile chez vous que ça peut l'être pour moi, avec mes papetières, que ça peut l'être pour les tapis Peerless, à Actonvale, où il y a 275 chômeurs quelques jours avant Noël; les gens de Domtar, chez nous, les 150 mises à pied. Et je parle juste des grosses entreprises. Combien de petites et de moyennes entreprises où il n'y a même plus un employé sur le plancher. Il n'y en a plus parce que les portes sont fermées. M. le Président, qu'on ait une reprise économique et, dans six mois d'ici, on pourra en reparler. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée de Johnson.

M. Paradis (Matapédia): M. le Président, en vertu de l'article 213.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): oui, m. le député de matapédia. alors, mme la députée de johnson, est-ce que vous acceptez de répondre à une question du député de matapédia?

Mme Juneau:...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): alors, je comprends que vous acceptez. une courte question et une courte réponse. m. le député, allez-y.

M. Paradis (Matapédia): Oui, M. le Président, rapidement, en vertu de 213, est-ce que la députée de Johnson voudrait présenter un amendement pour se soustraire au fonds de pension actuel, rétroactivement non seulement à 1983, mais depuis qu'elle est élue?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, Mme la députée de Johnson, une courte réponse.

Mme Juneau: Si j'ai bien compris le processus d'adoption du projet de loi 404, M. le Président, il semblerait que nous irons en auditions au mois de janvier ou février, qu'on rencontrera, à ce moment-là, les personnes qui ont produit le rapport et qu'il y aura possibilité d'entendre certains spécialistes. Donc, à ce moment-là, s'il y a des amendements à apporter, ce sera là, je crois, en deuxième lecture, qu'on pourra faire adopter certains amendements. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Fabre.

Des voix: Bravo! M. Joly: Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous disposez d'une période maximale de 20 minutes, M. le député.

M. Jean A. Joly

M. Joly: Merci, M. le Président. À écouter les derniers propos, on aurait quasiment pu donner un grand titre et appeler ça "Vengeance" en souvenir du passé. Dans le fond, c'est un petit peu ça, M. le Président, qu'on retrouve aujourd'hui en cette Chambre. Il faut quand même admettre que depuis déjà plusieurs heures que nous sommes à débattre du projet de loi 404, qui est un projet de loi qui a été quand même longuement travaillé, longuement réfléchi, aujourd'hui, en 1991, on en arrive à soumettre quelques amendements au projet de loi déjà existant, tout ceci pour une raison quand même assez particulière. C'est un peu ce qui va m'amener, M. le Président, à essayer de faire un petit retour sur le passé et à faire un bref historique de ce que nous avons connu au niveau des plans de pension, communément appelés régimes de retraite, dans le langage des affaires. (22 h 50)

L'historique comme tel nous suggère qu'il y avait déjà, avant que le projet de loi 404 soit adopté comme tel, trois plans de pension, en vigueur ici à l'Assemblée nationale, M. le Président. Et ces trois plans de pension qui couvrent les années 1964 à 1982, 1983 à 1987, 1988 à 1991, avaient chacun des particularités. Ces particularités faisaient en sorte qu'un député qui était à l'Assemblée nationale depuis bon nombre d'années se devait, dans le fond, de subir ce qu'on peut appeler, au moment de la retraite, des irritants. C'est là qu'on est arrivé avec la suggestion, avec l'idée précise d'harmoniser, bien sûr, avec le bill fédéral, le bill C-52, mais aussi avec l'idée

d'enlever les irritants qui existent comme tels dans les régimes de retraite. De ce fait, je vous souligne, M. le Président, que dans le plan de pension qui était en vigueur avant 1982, un député qui avait cinq années de service pouvait se retirer avec ce qu'on appelait l'âge 0, ce qui veut donc dire qu'il n'avait pas besoin de se qualifier avec un âge défini. Je pense qu'il est important de le souligner. Je pense que c'est de là qu'on a vu souvent dans la population les hauts cris se lancer, non sans raison, M. le Président, parce qu'il y avait quand même une forme d'abus à ce moment-là. Se retirer à n'importe quel âge avec une rente de retraite, il faut quand même admettre qu'une rente de retraite, ce n'est pas un salaire qui continue au moment où le public vous dit non, ou au moment où vous décidez pour des raisons personnelles de quitter la vie politique. Est arrivée en 1983, de 1983 à 1987, une autre formule qui amenait le député à pouvoir se retirer à l'âge de 65 ans, qui était le total de ses années de service plus son âge. Et si, nécessairement, il ne rencontrait pas ce cumul, et la condition première à respecter était d'avoir 60 ans, eh bien, à ce moment-là, il y avait une pénalité qui était chargée au député. Par après, en 1988, de 1988 à aujourd'hui, on a abaissé l'âge de la retraite à 50 ans, pour en arriver aussi à charger des pénalités si,... nécessairement, le cumul ne se faisait pas, de la même façon.

Aujourd'hui, on a ramené l'âge de la retraite, M. le Président, à 60 ans, mais avec la permission, si un député était dans une période difficile ou s'il avait un besoin quelconque des sommes d'argent qui sont là, qui sont accumulées, qui sont, dans le fond, les siennes... Il faut quand même le dire, et assez fort, M. le Président, le régime de rentes de retraite d'un député lui coûte 118 $ par semaine de sa poche. C'est ce que ça coûte, 118 $ par semaine. Donc, si vous faites le total, M. le Président, entre le moment où il est élu... On suppose qu'il fait deux mandats, deux termes, parce qu'on dit que la vie parlementaire d'un député est d'en moyenne 6,3 ans. On suppose qu'on va au bout du mandat et que ça fait 8 ans, à ce moment-là, le député aura contribué environ 50 000 $ plus les intérêts, ce qui l'amène à avoir dans son fonds, l'argent qu'il aura payé, environ 65 000 $. Si on prend 65 000 $ et qu'on l'investit, M. le Président, à un taux normal, un taux moyen qu'on a vu, bon an mal an, à travers les ans, ça amène un député à penser que son investissement pourrait lui rapporter environ 6500 $ par année. La différence entre ces 6500 $ par année et le régime de retraite, c'est d'environ 10 000 $. Ce qui veut donc dire qu'un député à sa retraite aura coûté à l'État, s'il a donné deux termes, s'il a donné 8 ans, disons, de sa vie, environ 10 000 $ par année. Je suis convaincu, s'il y a encore beaucoup de gens qui écoutent, qu'ils doivent se dire: Ce n'est pas possible. Parce que même des gens dans nos propres organisations, quand on a la chance de parler de ces bénéfices qui se rattachent aux fonctions et aux responsabilités d'un député, la plupart des gens nous disent: 35 000 $, 45 000 $, même il y en a qui disent jusqu'à 50 000 $ par année... Souvent, ils se servent d'expressions un petit peu exagérées en disant qu'on est gras dur, on part avec la caisse. C'est ce qu'on voit, même parmi les gens qui sont dans nos propres organisations. Mais, tout comme une majorité de gens qui vont en politique, ils s'intéressent très, très peu à ce que les bénéfices peuvent être, pour la simple et bonne raison que, quand on s'en va en politique, on s'en va en politique parce qu'on croit. On croit que le fait d'aller à une tribune privilégiée, ça peut enlever des injustices dans le système, corriger des iniquités et aussi faire avancer des causes. Donc, les conditions qui gravitent autour de la fonction d'un homme ou d'une femme publique sont souvent peu connues ou mal connues. Et je dois vous avouer, M. le Président, que je suis un de ceux-là qui, en 1985, a découvert, trois semaines avant l'élection, quelles étaient les conditions qui étaient garanties à un élu du peuple. Et j'ai découvert ça tout à fait par hasard, parce que j'étais un peu comme le grand public, je me fiais un peu à ce que les journaux véhiculaient. Des fois, on lisait en diagonale et on allait chercher un peu ce qui faisait notre affaire.

Vous avez remarqué, M. le Président, qu'à date, j'ai essayé de toucher le fond. J'ai essayé de toucher un peu c'est quoi le plan de pension comme tel des élus, mais je suis un petit peu chatouillé par le fait que... Je regarde un peu l'attitude de l'Opposition. Qu'ils votent pour, qu'ils votent contre, ils vont encore être bénéficiaires des bénéfices. Ils seront encore ceux qui retireront, malgré le fait que, pour se donner bonne conscience en apparence, mais surtout pour se donner bonne presse, il y en a, M. le Président, dans tout ça, qui s'imaginent que pour se faire une belle jambe ils se doivent d'aller aussi loin que d'avoir la cuisse légère. C'est un petit peu ça qu'on vit actuellement avec l'Opposition. Moi, j'aurais eu tendance à appeler leur intervention "le péché des autres". J'ai eu dernièrement le bonheur de tomber sur une revue, et un sujet qui m'a intéressé, c'est la réflexion de Mgr Robert Lebel, dans la revue Le Colombien, où lui-même citait... Et je me permets de vous le lire, M. le Président: "Les gens sans espérance, moins ils font attention à leurs propres péchés plus ils sont curieux des péchés d'autrui. Ils ne cherchent pas ce qu'ils vont corriger mais ce qu'ils vont critiquer." Et ma lecture m'amène aussi à découvrir, M. le Président, que ce n'est pas de Mgr Lebel, cette citation-là. Ces propos sont de saint Augustin, mort en l'an 430. Alors, quand on prend le spectacle qui nous est donné depuis 11 heures ce matin ou à peu près - non, je m'excuse, depuis

14 heures cet après-midi, M. le Président - eh bien, c'est à peu près ce qu'on vit. Et ça ne m'horripile pas plus qu'il faut, ça ne me choque pas plus qu'il faut, M. le Président, mais il faut quand même admettre une chose, la population n'est pas dupe, la population réalise qu'il y a des choses au niveau de l'État qui sont des dépenses et il y en a d'autres qui sont des investissements. Et, dans le cas d'un député qui travaille bien, qui travaille fort, qui travaille consciencieusement, je ne pense pas qu'il soit trop largement payé, je ne pense pas que les bénéfices qui sont rattachés à sa fonction et à sa responsabilité soient exagérés. (23 heures)

Je me permets, M. le Président, de vous citer un petit article de journal qui m'a frappé un petit peu, et ça, je pense que c'est aujourd'hui ou hier, je ne me souviens plus. C'est titré comme ceci: "22 000 cadeaux de Noël pour les députés italiens." Eh bien, quand un élu n'est pas bien traité, quand un élu n'est pas bien considéré, quand un élu n'est pas valorisé à l'intérieur de ce qu'il fait... Parce que la majorité des députés qui viennent ici à l'Assemblée nationale, M. le Président, ce ne sont pas tous des gens qui partent du salaire zéro; ce sont des gens qui, pour la majorité, ont bien réussi dans ce qu'ils entreprenaient avant d'être à l'Assemblée nationale. Ce qui laisse supposer, M. le Président, que ces hommes, ces femmes sont des gens qui gagnaient largement, qui gagnaient très bien leur vie. Ce qui fait que, quand ils arrivent ici, souvent la marche est haute, excessivement haute même dans bien des cas. Quand on quitte l'Assemblée nationale, après deux termes ou après la moyenne, après 6,3 ans, après 7 ans ou après 8 ans, la marche est encore haute, M. le Président. Mais ce qu'il est important de considérer, c'est que, si on veut continuer à avoir des législateurs, parce que c'est ce pourquoi l'homme public, la femme publique sont élus en premier lieu, pour être des législateurs... La deuxième responsabilité de l'élu, c'est de faire en sorte qu'on puisse être capable de protéger les finances publiques et la troisième, c'est de servir de trait d'union, de liaison, un peu d'ombudsman, si vous voulez, entre les problèmes du comté et nécessairement les solutions potentielles.

Donc, si on veut avoir une qualité d'individus, il faut nécessairement penser à l'avenir. Ce n'est pas vrai qu'on va avoir strictement une catégorie d'individus qui n'ont jamais rien à perdre, dans le sens qu'ils vont partir de la fonction publique, qu'ils vont se faire élire, qu'ils vont avoir la garantie d'emploi au moment où nécessairement ça ne fonctionnera plus au niveau de la deputation et on va retourner encore dans la fonction publique. Ce n'est pas vrai que c'est la sorte d'individus qu'on se doit d'avoir d'une façon massive à l'Assemblée nationale. On se doit d'en avoir quelques-uns, c'est bien sûr, pour faire en sorte que ça représente la mosaïque du Québec, parce que, dans le fond, c'est ça, un élu. C'est quoi? C'est de représenter ce que le Québec est, en fait. On se doit d'avoir des agriculteurs, on se doit d'avoir des professionnels, on se doit d'avoir des fonctionnaires, mais pas nécessairement une catégorie d'individus qui, eux, n'auraient rien à perdre.

Il faut penser qu'il y a encore des gens qui sont intéressés à faire avancer la cause du Québec, M. le Président. Mais il ne faut pas demander, non plus, que ça devienne de l'apostolat en plus. Si ça devient de l'apostolat, à ce moment-là, je dis à ceux qui sont contre: Signez une partie de votre chèque et donnez-le. Signez l'addition des bénéfices que vous allez recevoir et donnez-le. Donnez-le à l'oeuvre de votre choix, mais donnez-le. Donnez-le publiquement. Faites-en des amendements. Je vous respecterai davantage à ce moment-là, si tel est le cas. Mais je ne pense pas que ce soit la sorte d'amendement qui va nous être suggéré en commission parlementaire. Je penserais plutôt, M. le Président, que ce serait un amendement contraire, parce que ce que j'ai cru comprendre à travers la majorité des gens de l'Opposition, puis je ne vous dis pas que je dois condamner leurs demandes, leurs espoirs et leurs ambitions...

Je me souviens qu'il y a quelques mois, M. le Président, et c'est ce à quoi je veux en venir, on m'a dit: On va y aller dans le plan de pension, on va y aller dans le régime de retraite, conditionnel à ce que ça vaille la peine. On n'ira pas là pour des pinottes. C'est ce qu'on m'a dit. Il y en a un qui corrige et qui me dit: des cacahuètes. C'est vrai. Alors, c'est vrai que le plan de pension comme tel, ce n'est pas de partir avec la caisse, M. le Président. Le plan de pension comme tel donne environ 2500 $ de plus que ce que l'ancien plan donnait avant, ce que l'ancien régime garantissait: 2500 $ de plus.

La seule place, à mon sens, où il y a une amélioration qu'on peut considérer comme majeure, mais non exagérée, c'est l'amélioration de la pénalité entre l'âge de 60 ans et de 50 ans. C'est la seule place, M. le Président, puis Dieu sait que les chiffres, ça a été l'histoire de ma vie et j'ai eu à m'y pencher depuis deux ans sur ce régime de retraite. C'est pour, hors de tout doute, vous dire, M. le Président, que la transparence que nous vous montrons depuis quelques heures est toujours celle qui nous a animés, est toujours celle qui m'a animé pendant deux ans à la recherche d'une formule qui pouvait enlever les irritants, créer l'harmonisation avec le bill C-52 et faire en sorte que le public ne paie pas d'une façon indue ce que ça ne vaut pas. Je ne crois pas qu'aucun député soit parti avec la caisse.

Vous savez, on s'est fait accuser, M. le Président, au niveau de la transparence tantôt. Je ne voudrais quand même pas tomber dans la démagogie, mais je me suis permis, à travers les

nombreuses lectures que j'ai eu à faire dernièrement, de rencontrer un petit article qui soulignait la transparence d'un des anciens ministres de l'Agriculture, du Parti québécois, qui, au moment où il a eu à prendre une décision pour changer la quantité de lait dans les berlingots, a conservé le même berlingot, mais a diminué la quantité de lait dedans, pour laisser en apparence flotter le fait que c'était la même quantité de lait dedans. Alors, si on est prêts à tricher des enfants, si on est prêts à aller aussi loin que ça pour se dire transparents, je m'imagine ce qu'on peut dire sur un régime de pension, sur un régime de retraite. On semble crier, si on peut dire, le désarroi, crier l'horreur parce que c'est la caisse, semble-t-il qu'on est en train de voler, la caisse de l'État. Ce n'est pas ça, M. le Président, et je pense que, chacun à notre façon, on a réussi à vous démontrer que la transparence, ça existe, ça ne nous fait pas peur. Nous allons en commission parlementaire sous peu. Cette commission pourra faire la lumière, faire le jour. C'est sûr, quand on a parlé de lumières, on a fait mention que c'était plutôt le côté de l'Opposition, mais ce n'est pas tous des 100 watts, il y a des 2 watts aussi dans ça.

Alors, partant de là, je suis convaincu que les gens du côté ministériel vont être capables encore, hors de tout doute, de démontrer que tout ce que nous avons fait, c'est enlever des irritants, créer une harmonisation et faire en sorte aussi qu'on puisse respecter que, si, pour une raison quelconque, un individu, un élu, un homme, une femme, à l'âge de 50 ans, désire vendre à rabais son régime de retraite, il pourra le faire avec une pénalité raisonnable. D'ailleurs, on retrouve ça exactement avec le Régime de rentes du Québec; vous avez le droit - oui, j'achève, M. le Président - d'attendre à 65 ans pour retirer vos bénéfices, mais, si le coeur vous en dit, vous avez droit, à l'âge de 60 ans, de retirer un bénéfice moindre, un bénéfice à rabais. Donc, c'est un principe qui est largement défendu, largement endossé partout à travers l'Amérique du Nord et je ne pense pas que les députés pourraient faire exception à ce genre de principe. Je suis convaincu que la population, quand elle saura qu'un député se retire avec une rente de retraite de 16 000 $ à 17 000 $ par année, ce n'est pas exagéré et que même plusieurs diront: Dieu merci, vous nous avez éclairés, mais ce n'est pas vraiment ce qu'on pensait que vous aviez, ce n'est pas vraiment ce qu'on pensait que vous méritiez parce que vous mériteriez davantage. Et c'est sans doute ça que l'Opposition voudrait suggérer en commission parlementaire, que les chiffres soient beaucoup plus volumineux, beaucoup plus généreux et, si le coeur vous en dit, à ce moment-là, ça sera à vous, disons, de faire ces suggestions. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Fabre. Je veux vous rappeler que nous sommes à discuter de la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 404, Loi modifiant la Loi sur les conditions de travail et le régime de pension de membres de l'Assemblée nationale et d'autres dispositions législatives. Je cède maintenant la parole à M. le député d'Un-gava. Je vous rappelle que vous disposez d'une période maximale de 20 minutes, M. le député. (23 h 10)

M. Christian Claveau

M. Claveau: Oui, M. le Président. Avec les derniers discours que je viens d'entendre, on a l'impression qu'on est ici ce soir pour faire le procès du passé. Ça ne sera pas la teneur de mes propos parce que je pense que le présent et l'avenir sont beaucoup plus importants pour les Québécois et les Québécoises en général que le passé. C'est bien évident que, si on voulait s'attarder à faire le procès du passé, on pourrait peut-être parler de la gestion de la crise d'octobre, on pourrait peut-être parler de l'emprisonnement des leaders syndicaux du Front commun de 1972 dans la fonction publique, on pourrait peut-être parler du scandale de la viande avariée, on pourrait peut-être parler du saccage de la Baie James, on pourrait peut-être parler du scandale du Stade olympique, etc. Ça fait pas mal de choses, ça, qui se sont passées entre 1970 et 1976, lors de la première réincarnation du chef du gouvernement actuel. Il s'en est passé pas mal dans ce temps-là. Alors, si on voulait faire le procès du passé, on aurait de quoi s'amuser pendant longtemps, vous comprendrez. Mais j'aime mieux m'attarder au présent et au futur des Québécois et des Québécoises.

M. le Président, dans le présent, qu'est-ce qui se passe? Ça va mal au Québec, on est en pleine crise économique, en récession, en ralentissement, diraient certains. Ralentissement drôlement sérieux. Ça fait longtemps qu'on a les pieds collés sur le frein. À force de ralentir, on finit par arrêter. Or, ça fait déjà à peu près deux ans qu'on ne cesse de ralentir. On commence à ne pas aller très vite dans notre économie. On n'a qu'à regarder ce qui se passe autour. Toutes les semaines, on a des nouvelles de fermetures d'usines, de compagnies qui se retirent, d'investissements qui n'arrivent plus, de promesses qui ne se réalisent pas, continuellement.

Le gouvernement, M. le Président, a une responsabilité sociale à l'égard de l'ensemble des citoyens de son territoire. Quelque gouvernement que ce soit, dans quelque pays que ce soit, a des responsabilités sociales. Un gouvernement n'est pas élu, M. le Président, pour se regarder le nombril et pour voir si ses conditions de travail, ses conditions salariales et ses conditions de retraite sont comparables à ce qui se passe ailleurs. Ce n'est pas pour ça qu'on est élus et

j'ai bien l'impression qu'en regardant le programme électoral de tous et chacun d'entre nous il n'y a sûrement pas grand-chose qui pouvait porter sur le réajustement du fonds de pension une fois élus. C'est des choses dont on se garde bien de parier en campagne électorale. On aime mieux faire de la phraséologie sur la question économique et sur les belles promesses: promettre des routes, promettre des aéroports, promettre des écoles, promettre des stades, promettre des centres d'accueil pour femmes en difficulté, promettre des HLM pour personnes âgées, promettre aux jeunes, promettre à tout le monde. Mais c'est très rare qu'un député met dans son programme électoral qu'il va travailler à augmenter son salaire et à réajuster son fonds de pension s'il est élu.

Or, M. le Président, dans la session actuelle, on a l'impression que c'est là la seule raison de cette session-là, que c'est là le seul problème auquel on a à s'attaquer avec urgence, de réajuster notre fonds de pension. Imaginez-vous si ça fait sérieux! Qu'est-ce que l'on a comme projets de loi sur la table? De quoi avons-nous parlé depuis le début de la session, à part de quelques peccadilles ici et là? Avons-nous vraiment travaillé à des projets de loi fondamentaux, vitaux pour l'histoire du Québec? Un peut-être, un: la réforme du Code civil, qui s'est soldé avec au-delà de 1000 amendements, après un travail de plusieurs mois, incessant, un travail laborieux, fastidieux en commission parlementaire. Et je crois que, dans ce cas-là, on a à féliciter tous les parlementaires, de quelque côté qu'ils soient de la Chambre, pour la façon dont ils ont travaillé avec brio, avec intérêt, avec précision dans la refonte du Code civil.

Mais, en dehors de ça, qu'est-ce qu'on a sur la table? Des programmes de relance d'entreprises? Pas beaucoup. Des projets de loi pour aider les investisseurs? Des projets de loi pour permettre à des gens de faire mieux face à leur faillite personnelle ou aux faillites d'entreprises? Des projets de loi pour relancer l'exploration minière? Des projets de loi pour relancer l'industrie forestière? Des projets de loi pour aider l'industrie de la construction? Des projets de loi pour aider les agriculteurs? Rien de tout cela. Nulle part rien. Ah! certes, M. le Président, on a parlé de la Commission des transports. Oui. Je me suis dit: Peut-être bien qu'on va aider, là, les camionneurs à s'en sortir. Bien non, M. le Président, c'était pour leur mettre une taxe supplémentaire. C'était pour obliger les camionneurs à payer annuellement une taxe qui leur permet d'exploiter leur permis. Ah bon! Ça, ça aide encore! Ah! on a parlé de la Régie des alcools. Pourquoi faire? Pour nous dire qu'à partir de maintenant la Régie des alcools allait avoir la possibilité d'émettre des permis de production, de fabrication, de distillation, d'entreposage de vins et de boissons alcooliques de toutes sortes. Ah bon! Ça, ça aide l'économie, c'est bien évident! On nous a dit aussi qu'il était question de permettre de vendre de l'alcool 24 heures par jour, de la bière et du vin, pour le moins, dans les dépanneurs. Ça, ça relance une économie, M. le Président! Finalement, le ministre s'est trouvé tellement ridicule qu'il a décidé de reculer là-dessus. On a au moins gagné ça dans la session. On a conservé le statu quo sur la vente d'alcool dans les dépanneurs. Imaginez-vous quelle victoire!

On a eu un projet de loi sur les services correctionnels, parce que, maintenant, les services, au Québec, qui concernent les arrestations, l'emprisonnement de certains détenus de moins de deux ans, ça s'appelle les services correctionnels. On a changé le nom. Un avancement louable pour la cause de l'économie québécoise, c'est bien évident! On a légalisé la pratique du trou ou de l'isolement préventif dans les prisons. Ça, ça aide l'économie québécoise! Là, on a relancé l'économie! Ça valait la peine de discuter deçà!

Industrie forestière. Oui, on a présenté un projet de loi pour amender la Loi sur les forêt. C'était pour permettre au gouvernement de prélever des intérêts sur les retards non payés dans les droits de coupe. Ça, ça va aider encore l'industrie forestière substantiellement! Des dizaines et des dizaines de projets de loi semblables, M. le Président. Cette session d'automne passera probablement à l'histoire pour la plus ridicule de toutes les sessions de ce Parlement depuis 200 ans, puisqu'on fête demain le bicentaire du Parlement au Québec. Depuis 200, j'ai bien l'impression qu'on a rarement eu de session aussi peu copieuse, aussi peu intéressante, aussi délabrée, aussi loin des vrais besoins et des vrais intérêts de la population du Québec. Rien de substantiel.

Période de questions? De la rigolade, M. le Président! On pose une question sur l'économie et on nous répond sur la Constitution. On en pose sur la Constitution, on nous répond sur les pêcheries. On en pose sur la pêcheries, on nous répond sur les centres de ski. On pose une question sur les centres de ski, on nous répond sur l'industrie minière. C'a été du coq-à-l'âne tout le temps. Ça fait 18 mois que le dossier de la crise autochtone traîne dans le décor. Rien de réglé, M. le Président. Hydro-Québec. Qu'advient-il des 12 000 mégawatts qu'on devait vendre à qui voulait en acheter? Tout le monde, semble-t-il, voulait en acheter en 1985. Il n'y a encore rien ou à peu près rien de fait au moment où on se parle. On a reculé sur le projet de la Baie James avec la construction des centrales du complexe Grande-Baleine.

On s'en va nulle part. Il n'y a rien de nouveau, rien n'inventif. Ce gouvernement a détruit la lancée économique qui avait origine des politiques mises en place par le Parti québécois après la crise de 1982. On a tout démoli; on est en train de liquider l'OPDQ. On a liquidé les

programmes d'aide à l'industrie minière; on a liquidé une grande partie des programmes de la SDI dans la relance industrielle, le financement d'entreprises, les prêts participatifs. On a éliminé la société d'aide aux coopératives. Liquidation, faillites. C'est un gouvernement de faillites. On devrait le mettre entre les mains d'un syndic, ce gouvernement-là, M. le Président.

Mais, comme dans toute bonne faillite planifiée, il faut bien penser un peu à nous. Donc, avant de donner le gouvernement à un syndic, on va se voter un fonds de pension. Ça, ça presse! Ça, c'est urgent! Ça, c'est important! Ça, ça vaut la peine de passer la nuit là-dessus: se payer un fonds de pension! Je le disais tout à l'heure. Vers 21 heures ce soir, j'ai eu l'occasion de le dire en cette Chambre et je le répète, M. le Président. Après analyse, j'ai beau revirer ça de tous les bords, de tous les côtés, de fouiller dans les doublures, d'essayer de comprendre, je n'y arrive pas. À moins de partir de l'hypothèse que ceux qui ont vraiment besoin de ce fonds de pension là et qui ont à plaider l'urgence pour que ça se règle au plus vite, ce sont les élus de l'aile parlementaire gouvernementale qui voie approcher la prochaine élection avec une certaine terreur, parce que, avec 30 % des intentions de vote, c'est bien évident qu'il y a des chances d'y avoir des diminutions dans la représentation après les prochaines élections. (23 h 20)

À ce moment-là, on se dépêche de se passer un projet de loi pour faire en sorte de pouvoir sortir d'ici, sinon les pieds en avant, pour le moins avec un fonds de pension raisonnable. C'est ça qui se passe. Il n'y a aucune autre justification. Il n'y en a pas. Pourquoi plaider l'urgence? Pourquoi arriver en fin de session en nous déposant - ah oui! on est transparents, oui qu'on est transparents! - à la toute dernière minute, vendredi passé - ça ne fait pas deux mois que c'est déposé, ce projet de loi, ça fait trois ou quatre jours - un projet de loi alors que, selon le règlement, tout projet de loi devrait être déposé en cette Chambre avant le 15 novembre pour adoption dans la session? On a attendu à la toute dernière minute, quatre ou cinq jours avant la fermeture de l'ajournement des fêtes, pour nous amener un projet de loi sur les fonds de pension...

Une voix: Voyons donc!

M. Claveau: ...et on nous le fait plaider en pleine nuit. Ah oui! On a commencé en fin d'après-midi. C'est clair qu'on a commencé en fin d'après-midi, mais regardez l'heure qu'il est, là, et on se prépare à nous faire voter là-dessus et on va plaider la transparence de ce côté-là, M. le Président!

Il y a une aberration fondamentale. Il y a quelque chose d'incompréhensible dans l'attitude du gouvernement, de totalement inacceptable pour l'ensemble des québécois et des québécoises. moi, je le répète, je suis profondément attristé. je suis fondamentalement insulté par l'attitude du gouvernement. je regarde juste dans mon milieu. j'ai moi-même plaidé pendant des années pour un fonds de pension global dans l'industrie minière, qu'on appelle le fonds minier. on en a discuté avec ce gouvernement. le ministre du travail, qu'est-ce qu'il répond? ah! les travailleurs miniers, s'ils veulent avoir un fonds minier, ils ont juste à se négocier des fonds de pension avec les entreprises. les syndicats sont là pour ça. j'ai une lettre du ministre du travail, de 1987 ou 1988, qui dit ça textuellement.

M. le Président, si on n'est pas capable, comme gouvernement, de donner des fonds de pension à l'ensemble des travailleurs ou de trouver des mécanismes pour que l'ensemble des travailleurs et des travailleuses du Québec ait droit à des fonds de pension, pourquoi devrions-nous, en tant qu'élus et représentants de ces mêmes gens, nous donner ou améliorer notre fonds de pension? Notre rôle, M. le Président, ce n'est pas de venir ici pour s'autocongratuler, pour s'enrichir aux dépens de la population. Non. On a le droit, comme travailleurs, d'être bien payés, oui. On a le droit d'avoir des conditions raisonnablement acceptables. Oui, j'en suis. Je n'ai pas honte de mon salaire, M. le Président, parce que je pense que je le gagne et, chez nous, il n'y a jamais personne qui s'en est pris à mon salaire parce que, mon travail, je le fais et, en bout de piste, mon salaire est à peu près l'équivalent d'un salaire normal dans l'industrie primaire, que ce soit l'industrie de la construction, l'industrie minière, l'industrie forestière, les transports. C'est à peu près le salaire du travailleur normal dans l'industrie primaire de laquelle je viens, du milieu dans lequel je travaillais avant d'arriver ici. Il n'y a personne qui s'en prend à mon salaire. Il n'y a personne non plus, en bout de piste, qui s'en prend à mon fonds de pension, parce que je pense que la population accepte qu'on ait un fonds de pension. C'est normal, comme travailleurs, qu'on puisse avoir un fonds de pension, bien qu'il serait peut-être plus normal que tous les travailleurs de cette société aient droit, eux aussi, à des fonds de pension, ce qui n'est malheureusement pas le cas, M. le Président.

Mais là où le bât blesse, c'est qu'on améliore notre fonds de pension au moment où tout le monde perd sa job, au moment où les industries ferment, au moment où les investissements diminuent, au moment où il n'y a plus rien qui va, où on a au-delà de 1 000 000 de travailleuses et de travailleurs québécois, enfin, de citoyens du Québec sans travail, devrais-je dire, qui vivent sur l'aide sociale ou le chômage. Nous, la grande priorité, on se fait un petit cadeau de Noël: on va améliorer notre fonds de pension. On a l'air fins encore. On s'en fait une belle jambe,

oui. Je prends l'expression du député tout à l'heure. On est en train de s'en faire une belle jambe comme parlementaires. Pensez-vous qu'on a l'air sérieux dans la population?

Hier, j'avais un ami qui a veillé chez moi: 30 ans, sa femme est enceinte, soudeur de métier. Il est sur le chômage, il lui reste quelques semaines à peine avant de tomber sur l'aide sociale. Recherche d'emploi intense. Rien à l'horizon! Savez-vous qu'est-ce qu'il m'a dit? Vous n'avez pas d'argent au gouvernement pour nous aider, mais vous avez 2 000 000 $ pour envoyer des cartes de Noël, par exemple. Oh! C'est vrai. On a de l'argent pour mettre 2 000 000 $ en cartes de Noël comme parlementaires, mais on n'a pas d'argent pour aider le monde qui a des problèmes. Eh bien, ça permet de réfléchir. Il faut y penser, à ces affaires-là.

C'est ça l'opinion qui est véhiculée par la population, par le monde qui nous a élus. C'est ça qu'ils pensent. Pourquoi c'est important de mettre 2 000 000 $ en cartes de Noël en tant que députés et qu'en contrepartie on n'a pas d'argent pour faire un petit programme social de quelques centaines de mille piastres qui pourrait peut-être donner un bon coup de main à du monde? Je veux bien croire, moi, que ça peut être intéressant pour un assisté social ou pour un gars sur le chômage de recevoir une carte de Noël de son député, mais ça ne fait pas un gros programme de relance de l'emploi, ça! C'est ça qu'est le problème, M. le Président. C'est ça l'image, la perception dans la population.

On est là ce soir, à toutes fins pratiques, pour empêcher le gouvernement de faire une gaffe, pour l'empêcher de s'autodétruire ou de continuer à s'autodétruire. On dit: Écoutez, là, on a encore à vous "toffer" pendant quelque temps. On a encore quelques mois à vous endurer comme gouvernement, mais, s'il vous plaît, ne nous rendez pas à la limite, à l'extrême du ridicule, parce que, nous comme Québécois, on commence à en avoir assez de faire rire de nous autres là. On a vu même ce qui se passe jusqu'aux États-Unis, à New York où on publie des articles pour rire des Québécois. Alors, nous, on en a assez de faire rire de nous. Alors, on dit: Pour les quelques mois qui vous restent comme gouvernement, essayez donc d'avoir au moins un peu meilleure mine; au moins, cessez de faire en sorte de ridiculiser l'institution parlementaire que nous sommes et cessez de nous donner une image en tant que peuple, en tant que leaders de notre peuple qui soit loin de la réalité, de ce que l'on est vraiment. C'est ça qu'on vous dit.

En terminant, j'espère que l'ensemble des parlementaires de cette Chambre, au moment de voter, penseront à tous leurs commettants dans leur comté qui en arracheront le soir de Noël. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député d'Ungava. M. le député de Matapédia, oui.

M. Paradis (Matapédia): Oui, en vertu de l'article 213.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): alors, en vertu de l'article 213, vous pouvez poser une courte question si m. le député est disposé à accepter.

M. Claveau: Aucun problème, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Aucun problème. Allez-y, M. le député de Matapédia. Courte question, courte réponse.

M. Paradis (Matapédia): Oui, M. le Président, très brièvement. Est-ce que le député d'Ungava s'engage, en commission parlementaire qui aura lieu au printemps prochain et non pas dès décembre de cette année, à proposer des amendements qui pourraient permettre à certains députés, comme lui-même, de se soustraire à ce projet de loi qui semble trop généreux à leurs yeux? Et, contrairement à eux, M. René Léves-que demandait de bonifier le fonds de pension des députés, qui a été son plus grand regret en 1983.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, M. le député d'Ungava, à la question du député de Matapédia.

M. Claveau: Me donnez-vous un temps de réponse raisonnable, M. le Président, parce que ça demande un peu d'élaboration?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y, allez-y, je vais vous écouter puis... Courte réponse dans la même proportion que la question. (23 h 30)

M. Claveau: D'abord, je trouve la question facile de la part du député de Matapédia. Dans le fond, c'est un peu jouer à Ponce Pilate: je m'en lave les mains. Mais Pilate est passé à l'histoire non pas par sa bravoure, si je me souviens bien.

M. le Président, je vous le dis très honnêtement: S'il y a une telle clause, qu'on nous donne le droit de nous retirer globalement, totalement, entièrement du fonds de pension, qu'on nous redonne nos dus, tout ce qu'on a payé là-dedans, moi, en ce qui me concerne, si c'est ça qui est l'idée que je puisse me retirer totalement du fonds de pension de l'Assemblée nationale, que l'on me remette ce que j'ai mis là-dedans, que l'on me redonne mes 10 % que je paie continuellement et je m'en monterai un fonds de pension personnel. Je n'aurai sûrement pas besoin d'une loi votée par des libéraux en cette Chambre pour me monter un fonds de pension.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député d'Ungava. Est-ce qu'il y a d'autres interventions, M. le leader adjoint du gouvernement?

M. Bélisle: Non, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Pas d'autres interventions? Est-ce que la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 404, Loi modifiant la Loi sur les conditions de travail et le régime de pension des membres de l'Assemblée nationale et d'autres dispositions législatives, est adoptée?

M. Bélisle: M. le Président, je vais faire motion pour reporter le vote à demain, à la période des affaires courantes.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, je comprends que vous demandez le vote nominal...

M. Bélisle: Oui, nominal.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): ...et que vous faites motion pour...

M. Bélisle: Pour reporter le vote à demain.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): ...reporter ce même vote à demain, après la période des affaires courantes.

M. Bélisle: Oui, sur le projet de loi 404, M. le Président, pour l'adoption du principe.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Très bien. M. le leader adjoint du gouvernement, d'autres travaux à suggérer à l'Assemblée?

M. Bélisle: Oui, M. le Président. Tant qu'à y aller, nous allons continuer avec l'article 34, étant donné que le ministre de la Justice n'est pas encore arrivé. L'article 34 de notre feuilleton.

Projet de loi 196 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 34 de notre feuilleton, M. le député de Viau propose l'adoption du principe du projet de loi 196, Loi concernant le régime de rentes pour le personnel non enseignant de la Commission des écoles catholiques de Montréal. M. le député de Viau et whip en chef du gouvernement.

M. William Cusano

M. Cusano: Merci, M. le Président. Avant d'entrer dans le vif du sujet du projet de loi, je pense qu'il est nécessaire de donner un bref historique en ce qui concerne le projet de loi. Le Régime de rentes pour le personnel non enseignant de la Commission des écoles catholiques de Montréal est un régime complémentaire de retraite entré en vigueur le 1er juillet 1969. Le 1er juillet 1973, la Commission des écoles catholiques de Montréal est devenue un organisme assujetti à la Loi sur le régime de retraite des employés...

M. le Président, je demanderais au député d'Ungava, comme on a été très respectueux lorsqu'il parlait, d'au moins rendre à tout le monde la même chose.

Une voix: Je suis tout à fait d'accord.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le député d'Ungava.

M. Claveau: Je voudrais juste, pour le bénéfice de cette Chambre, vous signaler que c'est le député de Matapédia qui s'est permis de m'interpeller assez agressivement...

Des voix: Ah!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Non, non! Le député de Viau et whip en chef est à s'exprimer sur un projet de loi et vous reconnaîtrez avec moi qu'il est en droit de le faire en toute quiétude sans être interpellé et dérangé. Allez-y, M. le député de Viau.

Une voix: Ça n'a pas de bon sens!

M. Cusano: Merci, M. le Président. Je ne parlerai pas des cartes de Noël qu'il "présume" ne pas avoir envoyées, parce qu'il reprochait à tout le monde, il y a quelques minutes, justement que les députés envoyaient des cartes de Noël. Je présume que vous, M. le député d'Ungava...

Une voix: On va le vérifier demain.

M. Cusano: ...vous n'avez envoyé aucune carte de Noël.

Une voix: Demain, on va le vérifier.

M. Cusano: Alors, comme je le disais, M. le Président, le 1er juillet 1973, la Commission des écoles catholiques de Montréal est devenue un organisme assujetti à la Loi sur le régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics. Même si les employés de cet organisme avaient le choix, à ce moment-là, de transférer leurs prestations au Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, ils ont choisi de maintenir leur participation à leur propre régime. Toutefois, selon l'article 125 de la Loi sur le RREGOP, un tel régime complémentaire de retraite ne peut aujourd'hui être modifié sans l'autorisation

préalable de la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances, et toute modification qui est apportée doit être à la charge des employés, si elle augmente le coût de ce régime.

Le 1er janvier 1990 entrait en vigueur la Loi sur les régimes complémentaires de retraite. Cette loi a pour but premier d'assurer une plus grande protection des droits acquis pour les travailleurs qui participent à un régime privé de retraite. Elle fixe les règles qui régissent l'établissement des régimes, leur fonctionnement et leur administration. Elle prescrit aussi un ensemble de droits minimaux accordés aux participants et prévoit des mesures de contrôle et de surveillance du régime.

Le Régime de rentes pour le personnel non enseignant de la CECM est un régime de retraite soumis aux dispositions de cette loi. Il doit donc respecter les règles minimales qui y sont prévues. Le coût des modifications faisant l'objet du présent projet de loi a été établi par une firme d'actuaires. Celui-ci s'élève à environ 56 000 000 $. Cependant, le Régime dispose actuellement d'un surplus actuariel de plus de 67 000 000 $, M. le Président. Le coût des modifications proposées sera donc financé à même ce surplus. Dans les faits, ces modifications n'occasionnent aucune dépense pour le gouvernement et les participants au Régime.

Parmi les principales modifications qui ont été proposées par les administrateurs de ce régime de retraite, l'une revêt un caractère particulièrement important pour les retraités. En effet, le Régime de retraite du personnel non enseignant de la Commission des écoles catholiques de Montréal ne prévoit présentement aucune indexation des rentes versées. Ainsi, les personnes qui ont pris leur retraite il y a de cela plusieurs années ont vu, graduellement, la valeur de leur rente se détériorer au fil des ans. Un des amendements présentés permettra désormais, et ce, à compter du 1er janvier 1990, d'assurer une protection minimale du pouvoir d'achat de ces mêmes retraités. Leur rente sera désormais indexée selon l'augmentation des prix à la consommation, moins 3 %.

Par ailleurs, les conditions de participation des personnes du sexe féminin par rapport aux employés masculins ne sont pas uniformes. Ainsi, le taux de cotisation versée par certaines participantes est inférieur à celui des participants ayant les mêmes caractéristiques. De plus, les critères d'admissibilité à la retraite pour ces participantes prévoient une retraite plus hâtive que pour leurs collègues du sexe masculin. Suite aux discussions intervenues avec les représentants des employés, il a été convenu d'uniformiser l'ensemble de ces dispositions. Les groupes d'employés visés sont ceux engagés avant 1970.

Enfin, toute une série de modifications de nature technique ont été apportées pour répondre aux prescriptions de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite. Celles-ci touchent, notamment, l'intérêt crédité sur les cotisations des participants, les possibilités de remboursement ou de transfert et le droit à la rente de retraite différée. Enfin, il convient également de souligner que le projet de loi viendra concrétiser le fait que l'employeur s'engage à défrayer 50 % du coût des prestations qu'accorde le Régime.

Ceci, M. le Président, est un résumé des principaux éléments contenus dans le présent projet de loi. Celui-ci permettra au Régime de retraite du personnel non enseignant de la CECM de répondre aux prescriptions de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite et apportera des améliorations susceptibles d'assurer une meilleure protection aux retraités et d'éliminer les principaux éléments de discrimination qu'on y trouve actuellement.

En terminant, M. le Président, j'espère que l'Opposition, ainsi que les membres qui siègent à titre d'indépendants appuient ce projet de loi. J'ose espérer que l'on mette de côté toute partisanerie et que l'on consente à procéder rapidement à l'étude article par article en commission parlementaire, et à l'adopter d'ici la fin de la présente session, car les personnes qui sont visées par ce projet de loi, ce sont des personnes qui touchent des rentes minimes. Même avec les ajustements qui sont proposés, ces gens-là vont se trouver... À titre d'exemple, à partir du 1er janvier 1990, la moyenne des retraités, qui est présentement à 4884,11 $ par année, passera à 4972,02 $ par année. C'est des modifications qui, je pense, sont très équitables. J'ai rencontré moi-même l'ensemble du conseil d'administration des différents groupes qui sont couverts par ce régime. C'est unanimement que ces gens ont demandé que l'Assemblée nationale, par ce projet de loi, leur permette de procéder à des modifications et, même si c'est arrivé ici, à l'Assemblée nationale, de façon tardive, je pense qu'on se doit, en toute conscience, de procéder le plus rapidement possible à l'adoption non seulement du principe que nous discutons présentement, mais aussi de passer rapidement à l'étude article par article, ainsi qu'à son adoption d'ici la fin de la session. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Viau et whip en chef du gouvernement. Alors, nous en sommes à l'adoption du principe du projet de loi 196. Je reconnais M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition officielle. M. le député. (23 h 40)

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président. Je voudrais, comme porte-parole de l'Opposition officielle sur le projet de loi 196, indiquer aux

membres de cette Chambre et surtout aux bénéficiaires, parce que ce qui est important... C'est un projet de loi qui, comme par hasard, traite à peu près du même sujet qu'on a à débattre depuis cet après-midi, parce que c'est un projet de loi concernant le Régime de rentes pour le personnel non enseignant de la CECM. Effectivement, même s'il a un caractère public, j'estime qu'il s'agit d'un bon geste, qu'il s'agit d'une loi légitime, logique pour les bénéficiaires, avec le mérite pur de ne rien coûter aux contribuables québécois. Quand on a des projets de loi de cette nature qui ont comme avantage de rétablir une certaine équité, de redistribuer un peu mieux les fonds propres qu'ils se sont constitués à l'intérieur du régime, ce serait bien difficile de ne pas concourir à l'adoption du principe de ce projet de loi. Effectivement, c'est un projet de loi qui permettra à un certain nombre de retraités, au-delà de 1250, comme le député de Viau l'a bien exposé... Je pense qu'il a pris connaissance, lui aussi, des notes explicatives du projet de loi. C'est un projet de loi qui origine d'une volonté d'inclure au régime de rentes visé une clause d'indexation, de même que d'adapter certaines dispositions à d'autres régimes en vigueur.

En 1991, M. le Président, penser que des gens ont constitué un régime de retraite qui, au moment où on se parle, dispose d'un surplus accumulé de 75 000 000 $ sur un capital investi de 215 000 000 $ sans avoir l'équité d'une clause d'indexation parce qu'on a affaire à un régime fermé depuis 1973, c'est une disposition inéquitable. C'est une disposition qui n'a pas sa légitimité, qui ne trouve pas sa légitimité. Ce qu'on doit voir dans ce projet de loi, c'est une volonté de permettre que les bénéficiaires puissent avoir les bénéfices normaux dans un régime de rentes, quand on y a contribué pendant plusieurs années, mais que la valeur de l'argent, si elle n'est pas indexée, ne contribue pas du tout aux besoins anticipés. Dans ce sens-là, le projet de loi vient corriger cette lacune.

Nous, nous souscrivons à l'objectif, on n'a aucun problème. Je vais souscrire également à ce que le député souhaitait tantôt, que le projet de loi soit adopté correctement demain. Nous aurons l'occasion, en commission parlementaire, de questionner une disposition qui nous apparaît un petit peu douteuse. On aurait souhaité qu'on intègre au projet de loi une recommandation, pourtant unanime, émanant de leurs délibérations, à savoir l'introduction d'une clause d'accessibilité à la retraite après 32 ans de service. J'aimerais avoir des explications. On ne comprend pas ça, parce que le comité qui avait à apprécier ça - parce qu'il y a un comité de rente qui a géré ce dossier-là depuis un bout de temps, un comité de 13 personnes - unanimement, s'est entendu sur toutes les dispositions, y incluant celle que je trouve curieux de ne pas retrouver à l'inté- rieur du projet de loi. Sans doute, le député de Viau aura des explications. Je l'invite à ce que ce soit la bonne. On n'aura pas de problème s'il a une bonne explication pour dire pourquoi cette disposition-là n'est pas à l'intérieur du principe du projet de loi. Sur ce, M. le Président, je conclus en mentionnant que l'Opposition officielle est d'accord avec l'adoption du principe de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Est-ce que la motion du député de Viau, proposant l'adoption du principe du projet de loi 196, Loi concernant le régime de rentes pour le personnel non enseignant de la Commission des écoles catholiques de Montréal, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que ledit projet de loi 196 soit déféré à la commission de l'éducation pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion de déférence est adoptée?

M. Gendron: m. le président, je veux juste vérifier...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Une petite question, M. le leader adjoint de l'Opposition officielle.

M. Gendron: Oui, je voulais vérifier. On a laissé voir à une couple de reprises que ce serait de 9 heures à 11 heures. Moi, je veux que ce soit de 10 heures à 11 heures.

M. Bélisle: J'y viens, M. le Président. J'y viens.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Très bien. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Comme vient de vous le mentionner le leader adjoint de l'Opposition, bien entendu, j'avise cette Assemblée, je fais motion pour que demain, le mardi 17 décembre 1991, de 10 heures à 11 heures, pour combler le voeu et le souhait des parlementaires, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May, la commission de l'éducation procède à l'étude détaillée du projet de loi 196, Loi concernant le régime de rentes pour le personnel non enseignant de la Commission des écoles catholiques de Montréal. Également, M. le Président, je fais motion pour que le whip du gouvernement, le député de Viau, en soit membre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, pour les fins du procès-verbal, est-ce que la motion de déférence est adoptée?

Une voix: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Votre avis concernant la commission de l'éducation qui siégera demain est déposé. Il y a consentement pour que le whip en chef de l'Opposition en fasse partie? Très bien. Alors, votre avis est déposé. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Je vous demanderais d'appeler l'article 19 de notre feuilleton, M. le Président.

Projet de loi 125

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fart l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 19, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 125, le Code civil du Québec et je reconnais M. le ministre de la Justice.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: Oui, M. le Président, comme vous le savez, les travaux entourant l'adoption du Code civil du Québec revêtent un caractère historique. Historique du fait qu'ils assurent la réforme d'une loi adoptée il y a 125 ans et qui, tout au long de notre histoire, a constitué l'un des éléments les plus fondamentaux de la distinction du Québec. C'est donc avec honneur, M. le Président, et satisfaction que je recommande aujourd'hui l'adoption du rapport de la commission des institutions sur le projet de Code civil du Québec.

Il convient de rappeler que, pour les fins de l'étude du projet de loi 125, la commission des institutions confiait cette tâche à une sous-commission sous la présidence éclairée et efficace du député d'Iberville. La lecture de ce rapport révèle l'ampleur et le sérieux du travail consacré à l'étude article par article de ce projet de loi. En effet, il aura fallu près de 150 heures de séances de travail des membres de la sous-commission pour effectuer l'étude des 3144 articles initialement proposés dans le projet, auxquels se sont ajoutés de nombreux amendements. En outre, et pour les fins de leurs travaux préparatoires, les membres de la sous-commission ont pu bénéficier, de part et d'autre, de la compétence d'éminents professeurs de droit et de légistes du ministère de la Justice. De nombreuses heures ont été consacrées à ces travaux préparatoires.

Tout au long des travaux, je me permettais de rappeler à mes collègues de la sous-commission l'importance d'un consensus au-delà des partis politiques pour l'adoption de cette loi qui contient l'ensemble des règles devant régir les relations juridiques des Québécoises et Québécois dans leur vie quotidienne. M. le Président, je peux vous dire que cet objectif a été atteint.

Notre premier objectif était de faire un Code civil capable de refléter les réalités de notre société québécoise contemporaine en nous référant, en tout premier lieu, à la règle fondamentale du respect de la dignité humaine. Permettez-moi de vous citer, à titre d'exemple, l'adoption à l'unanimité des règles concernant le consentement des patients aux soins; de celles entourant l'application de la règle dite du bon Samaritain; de celles concernant la procréation médicalement assistée; ou encore de celles ayant trait à la protection de la vie privée et de celles favorisant la connaissance de ses origines biologiques. Il en est de même quant à celles régissant la copropriété, notamment, en ce qui a trait aux nouvelles exigences concernant la constitution d'un fonds de prévoyance et de celles visant à éviter la prise de contrôle de l'assemblée des copropriétaires par un promoteur.

À la suite de représentations de divers groupes ou associations, des amendements ont été apportés afin de clarifier le contenu du Code. En matière de contrat de consommation, par exemple, des précisions ont été ajoutées aux articles concernant les avis d'exclusion de responsabilité de manière à s'assurer que la formulation initiale respectait bien l'intention recherchée, sans pour autant en changer la substance.

D'autres articles ont, par ailleurs, été ajoutés pour tenir compte de certaines réalités juridiques. Je pense ici à l'introduction d'une possibilité d'option en matière de liquidation successorale. Je pense également à la reconnaissance de la gratuité de l'expérimentation pour celui qui accepte de s'y soumettre, à moins qu'il ne s'agisse d'une indemnité compensatoire pour des pertes et contraintes subies de ce fait.

De plus, M. le Président, d'autres règles ont été revues dans leur ensemble. Je pense à celles donnant ouverture à l'hypothèque légale en faveur des personnes ayant participé à la construction ou à la rénovation d'un immeuble. Suite à diverses interventions du milieu de la construction, cette priorité a été réinscrite de manière à adapter les règles actuelles, limitant le privilège à la plus-value acquise, à celles introduites par le projet de Code avec comme date de départ de calcul de ce droit celle correspondant à la notion de la fin des travaux.

Enfin, M. le Président, il m'apparaît important de souligner que l'hypothèque mobilière, sans dépossession, sur un bien spécifique sera introduite dans notre nouveau Code. Cependant, cette hypothèque sera reconnue, dans un premier

temps, à des fins d'entreprises. Quant à son ouverture en faveur des particuliers, bien que consacrée dans son principe dans le nouveau Code, elle ne sera possible que suite à l'adoption d'une loi spécifique prévoyant ses modalités d'application.

Tels sont donc, M. le Président, certains aspects couverts par les travaux effectués par la sous-commission des institutions depuis près de quatre mois. À la veille de l'adoption du projet de Code civil du Québec par l'Assemblée nationale, je peux vous assurer, M. le Président, que la sous-commission présidée par le député d'Iberville et composée du côté ministériel, outre du ministre de la Justice, du député de Chapleau et adjoint parlementaire au ministre de la Justice, du député de Sherbrooke et de la députée de Groulx, a fait un travail de rigueur remarquable pour en arriver aux résultats que nous vous présentons ce soir.

M. le Président, je me dois de souligner la participation tout à fait exceptionnelle de Mme la députée de Terrebonne et de Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve au nom de l'Opposition pour leur participation à la bonification du projet de départ et à l'élaboration du projet de loi que nous vous présentons aujourd'hui.

En effet, M. le Président, le principe même de la réforme du Code civil n'est plus discuté car sa nécessité a maintes fois été démontrée. Qu'il suffise de rappeler l'importance d'une adaptation de la loi à la vie contemporaine à laquelle s'ajoute la nécessité de répondre à de nouveaux besoins par l'adoption de lois particulières ou encore par des réformes partielles qui s'intègrent assez difficilement à un ensemble qui se veut cohérent et structuré. Essentiellement, l'objectif d'un projet de réforme du Code civil est de réajuster le Code à la vie de la société. Il ne s'agit pas de retourner à la case départ. Le passé est porteur de principes féconds qui ont traversé le temps en conservant toute leur vitalité. Ils constituent en quelque sorte le bagage héréditaire du nouveau Code qui va naître.

Par ailleurs, M. le Président, on ne peut ignorer les caractères évolutifs de notre société. L'avènement des chartes des droits et libertés en est un exemple auquel s'ajoute, entre autres, la place de plus en plus importante que prennent les nouvelles technologies dans le quotidien et les changements sociaux qui en découlent. Le nouveau Code aura son identité propre. La culture, les valeurs et la langue qui le structurent ont évolué depuis 1866. Le nouveau Code se veut le reflet de cette évolution. Dans ce contexte, M. le Président, je demeure confiant que nos travaux permettront à la société québécoise de se doter d'une loi aussi fondamentale qui réponde à ses besoins. C'est pourquoi je recommande à cette Assemblée l'adoption du rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi de Code civil du Québec.

Dépôt d'amendements

M. le Président, avant de procéder à l'adoption du rapport de la commission des institutions, je sollicite le consentement de la Chambre pour déposer et adopter quelques amendements techniques qu'il convient d'apporter au rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 125, Code civil du Québec.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que je peux avoir les copies d'amendements qui sont déposés, s'il vous plaît? Alors, je vais suspendre quelques instants pour transmettre une copie des amendements à l'Opposition officielle. La Chambre suspend pour quelques instants ses travaux.

(Suspension de la séance à 23 h 54)

(Reprise à 23 h 55)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, les amendements qui ont été déposés par M. le ministre de la Justice sont recevables. Est-ce qu'il y a consentement en vertu de l'article 252 de notre règlement, puisqu'ils n'ont pas été déposés dans les délais requis? Il y a consentement? Consentement. Donc, les amendements sont jugés recevables.

Alors, sur le rapport tel qu'amendé, je reconnais maintenant Mme la députée de Terrebonne.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. Je pense que ce projet de réforme du Code civil est un bel exemple que, lorsque nous décidons de travailler ensemble sur un projet qui est bénéfique pour l'ensemble de la population, nous sommes capables de le faire, contrairement à ce qu'on a essayé de nous démontrer depuis 16 heures cet après-midi, M. le Président, que l'Opposition s'opposait toujours au principe.

Comment vous décrire, M. le Président, les moments historiques que nous avons eu la chance de vivre en participant aux travaux de la sous-commission qui a procédé à l'étude article par article du projet de loi 125 qui donne naissance au nouveau Code civil du Québec? Le travail fut laborieux, certes, M. le Président: près de trois mois de séances en commission parlementaire, l'étude de 3145 articles et de plus de 1000 amendements, mais le climat de concertation que nous avons su établir a permis la réalisation de ce mandat. Personne n'a ménagé ses efforts ni ses énergies, autant les parlementaires de tous les côtés de la Chambre, les légistes, les experts et ceux et celles qui ont suivi attentivement nos travaux et nous ont donné certains conseils.

Je tiens à remercier ma collègue, la députée

de Hochelaga-Maisonneuve, pour la chance qu'elle m'a offerte en me demandant de participer, l'été dernier, à ces travaux.

Le but commun que nous nous sommes fixé, autant du côté ministériel que du côté de l'Opposition officielle, ainsi que le député indépendant de Westmount, notre but commun était d'offrir aux Québécois et aux Québécoises un Code civil qui tienne compte des réalités actuelles de la société québécoise, un Code civil véritablement adapté à nos besoins et à nos différences. Le peuple québécois est un peuple distinct, qui possède ses caractéristiques particulières et notre Code civil distinct reflète cette réalité.

Le Code civil est composé de 10 livres. Il est extrêmement difficile, M. le Président, de résumer plus de 3000 articles. J'ai donc décidé, à titre de porte-parole de l'Opposition officielle en matière de protection du consommateur, de relever les principaux articles de chacun des livres en tenant compte des améliorations qu'ils apportent pour les consommateurs de biens et de services québécois. En regardant le nouveau Code civil sous cet angle, il devient possible d'informer la population d'une manière plus simple et adéquate.

Le livre 1, M. le Président, touche les droits des personnes. Ce chapitre est évidemment essentiel puisque nous légiférons sur l'intégrité de la personne, la dignité de l'être humain autant durant sa vie qu'après sa mort, le droit d'accepter ou de refuser des soins et, à titre d'exemple, je citerai, bien sûr, l'article 11 qui nous dit: "Nul ne peut être soumis sans son consentement à des soins, quelle qu'en soit la nature, qu'il s'agisse d'examens, de prélèvements, de traitements ou de toute autre intervention. Si l'intéressé est inapte à donner ou à refuser son consentement à des soins, une personne autorisée par la loi ou par un mandat donné en prévision de son inaptitude peut le remplacer."

Les articles que nous avons votés concernant les soins relevaient de deux grands principes: le droit de décider des personnes et la nécessité d'assurer la protection des mineurs et des personnes inaptes. Mais nous avons également voulu donner davantage le droit de décision aux mineurs de plus de 14 ans et c'est pourquoi nous retrouvons des articles, comme l'article 14 et l'article 17, qui permettent aux mineurs de 14 ans et plus de consentir seuls à des soins. À moins qu'il n'y ait des risques graves pour la santé, à ce moment-là, on doit informer l'autorité parentale.

Dans ce livre premier Des personnes, nous avons également un chapitre, le chapitre troisième, sur le respect de la réputation et de la vie privée. Les articles 35 à 41 viennent donc jeter la base de la protection de la vie privée. Vous vous souviendrez, M. le Président, qu'au cours de cette session nous avons eu une commission qui traitait spécifiquement de la protection de la vie privée. Tous les mémoires qui ont été déposés ramenaient constamment les articles du Code civil et on souhaitait même qu'on puisse adopter ces articles le plus rapidement. Ces articles viennent donc jeter la première base, les premiers principes, pour qu'il y ait une reconnaissance dans le Code civil de la protection de la vie privée.

Parmi les grands changements, nous pouvons également souligner l'implantation d'un registre de l'état civil, un registre unique qui, lors de sa mise en application qui est prévue pour janvier 1993, pourra offrir aux consommateurs québécois un service téléphonique sans frais dans un délai de 48 heures, ou le jour même lorsqu'il y aura des urgences. Je pense que c'est une modification importante et intéressante. Ce registre vient modifier certaines habitudes de vie, bien sûr, mais devrait améliorer l'efficacité et la rapidité des services.

Il y a évidemment, aussi, tout ce qui a trait aux familles souches et à la généalogie et, à ce sujet, je pense que nous avons convenu, lors de l'étude article par article, que lors de l'étude de la loi d'application qui sera déposée en 1992 nous porterons une attention spéciale à ces deux regroupements qui ont effectivement besoin de vérifier certaines données dans les registres.

Le livre deuxième nous permet d'aborder les droits de la famille. Nous abordons ici, évidemment, les questions relatives au mariage, à la séparation ou à la dissolution du mariage, l'adoption, la procréation médicalement assistée, l'obligation alimentaire et l'autorité parentale. Les règles du patrimoine familial ne sont pas modifiées par le Code civil. Certains points pourront être étudiés par l'Institut québécois de réforme du droit qui sera créé par une loi qui a été déposée au cours de la session.

Je désire parler du principe de l'adoption, M. le Président, parce que ce principe est extrêmement important, et des représentations nous ont été faites par le Mouvement Retrouvailles, représentations qui étaient justifiées, il faut bien le dire. Le Mouvement Retrouvailles aurait souhaité que nous puissions aller beaucoup plus loin dans nos modifications, mais je pense que nous avons déposé certains amendements qui permettent une ouverture par rapport à la situation actuelle, et je me permets de vous donner les grandes lignes de ces amendements.

Par l'article 577, l'adopté majeur ou l'adopté mineur de 14 ans et plus a le droit d'obtenir les renseignements lui permettant de retrouver ses parents si ces derniers y ont préalablement consenti. Il en va de même des parents d'un enfant adopté si ce dernier, devenu majeur, y a préalablement consenti. L'adopté mineur de moins de 14 ans a également le droit d'obtenir les renseignements lui permettant de retrouver ses parents si ces derniers, ainsi que ses parents adoptifs, y ont préalablement consenti. Enfin, ces consentements ne doivent faire l'objet d'aucune

sollicitation. Un adopté mineur ne peut, cependant, être informé de la demande de renseignements de ses parents.

Et l'article 578, M. le Président, est extrêmement important parce que, s'il y a le moindre doute concernant un préjudice grave quant à la santé de l'adopté - et quand on parle de santé, on parle de santé autant physique que psychologique, M. le Président - à ce moment, l'adopté pourra obtenir les renseignements qui sont importants pour lui. Ce n'est donc pas tout ce que demandait le Mouvement Retrouvailles, mais c'est déjà un premier pas en avant.

Pour la procréation médicalement assistée, M. le Président, nous avons également apporté certaines modifications qui vont permettre quand même d'assurer à la mère une certaine protection, et c'est l'article 536.3: Celui qui, après avoir consenti à la procréation médicalement assistée ne reconnaît pas l'enfant qui en est issu, engage sa responsabilité envers cet enfant et la mère de ce dernier. Il y a quand même un engagement précis qui apparaît au Code civil. le livre troisième a trait, bien sûr, aux successions et à tout ce qui en découle évidemment: le testament, les droits des légataires, les devoirs du liquidateur de la successior le partage, etc. je désire attirer votre attention, m. le président, sur deux articles concernant la survie de l'obligation alimentaire, articles qui étaient demandés spécifiquement par certains regroupements de femmes. les articles 694.2 et suivants permettent de reconnaître le droit à une obligation alimentaire. ces deux articles étaient extrêmement techniques, m. le président, ce qui fait qu'on a réussi à se faire un petit tableau qui nous permet de dire que dans des cas où il y a ex-conjoint et conjoint et des héritiers qui sont différents des conjoints, la palette se répartira d'une manière assez équitable, c'est-à-dire que l'ex-conjoint peut recevoir une pension alimentaire pour un maximum de 12 mois ou un maximum de 10 %, le conjoint survivant un maximum de 16,5 %, les enfants se partagent 33 % et les héritiers désignés 40 %. donc, nous avons essayé d'être un petit peu équitable pour tous ceux qui pouvaient être concernés.

Un autre élément qui nous apparaissait important concerne le testament, et nous avions un certain problème puisque le Code ne permettait pas à une personne qui ne peut lire ni écrire de faire un testament devant témoin, puisqu'elle ne pouvait ni lire ni écrire. Et comme on sait qu'actuellement, au Québec, nous nous retrouvons avec plus de 25 % de la population qui est analphabète, nous avons pensé ajouter l'article 728 qui va permettre à une personne qui ne peut ni lire ni écrire de faire un testament devant témoins, à la condition que la lecture en soit faite au testateur par l'un des témoins en présence de l'autre. En présence des mêmes témoins, le testateur déclare que l'écrit lu est son testament et fait un signe particulier pour prouver qu'il approuve ce testament. Donc, M. le Président, nous avons tenu compte d'une réalité qui existe ici.

Le livre quatrième concerne les biens. Il faut dire, M. le Président, que ce livre est parmi les livres les plus techniques, ce qui fait que je me contenterai de vous dire que nous avons essayé de toucher à tout ce qui regarde les droits de propriété, les biens d'autrui, les droits de passage, tout ce qui touche la fiducie et tout ce qui touche, bien sûr, évidemment, les citoyens dans leur quotidien, autant du côté de leurs relations entre voisins que des autres conditions de droits de passage, M. le Président.

Le livre cinquième regroupe les articles qui touchent les obligations en général et les contrats. Je dois vous avouer que, ce chapitre ayant des conséquences particulières pour les consommateurs, j'y ai prêté évidemment beaucoup d'attention. Au début de l'étude de ce projet de loi article par article, nous avions dénoncé certains articles qui nous apparaissaient comme un recul majeur pour les consommateurs. Le ministre de la Justice a entendu nos revendications et a donné suite aux demandes que nous avons formulées. C'est pourquoi nous nous retrouvons avec des articles qui viennent maintenir ce que les consommateurs avaient et, dans certains cas, on ajoute une protection additionnelle.

Je pense, par exemple, à l'article 1376 qui touche les contrats d'adhésion et qui va donner une protection non seulement pour les consommateurs, mais l'article 1376 va surtout toucher aux petits commerçants, aux petites entreprises, aux gens qui ont des franchises et qui, parfois, se trouvaient lésés devant les grandes chaînes, aux petits boutiquiers qui sont dans les centres commerciaux et qui, parfois, ont de la difficulté à négocier avec les propriétaires de ces centres d'achats.

Donc, M. le Président, du côté des consommateurs, nous avons essayé de donner le maximum. Nous avons maintenu la responsabilité des fabricants, à la différence que ce sont les fabricants qui devront faire la preuve qu'ils ont vraiment tout fait pour mettre sur le marché un produit adéquat. Je pourrais parler de ce chapitre pendant des heures, M. le Président, mais je vais me limiter, soyez rassuré!

Un article qui me tenait particulièrement à coeur dans ce chapitre, M. le Président, c'est l'article 1963 qui permet à une personne âgée de résilier son bail lorsqu'elle décide d'aller habiter dans un centre pour soins prolongés ou si elle décide de changer de foyer d'hébergement. Nous partions d'un problème bien réel. Souvent, dans les foyers d'hébergement qui sont, pour la plupart, des foyers privés, les personnes âgées se voient dans l'obligation de signer un bail pour une durée d'un an. Dans ces résidences, il y a évidemment une chambre, mais on offre aussi le service de restauration. Souvent, les aînés se

retrouvent insatisfaits des services qu'ils ont et ils ne pouvaient briser le bail. C'était un bail auquel ils devaient donner suite et ils ne pouvaient quitter pour s'en aller dans un autre foyer d'hébergement. Donc, l'article 1963 vient régler ce problème. Il faut dire que le principe qui nous guidait constamment dans notre action, autant d'un côté de la Chambre que de l'autre, c'était vraiment d'assurer la protection des plus faibles.

Le livre sixième traite des priorités et des hypothèques. Je me limiterai ici a des commentaires sur l'hypothèque mobilière, je ne peux faire autrement, M. le Président. C'est vraiment le seul point majeur de discorde qui restait à la fin de nos travaux et ce fut un sujet que nous avons discuté longuement, autant en commission parlementaire qu'en séance de travail. La base est vraiment philosophique, je pense. De notre côté, nous jugions que l'hypothèque mobilière, pour les particuliers, ne ferait qu'accroître l'endettement. C'était d'ouvrir une porte davantage au crédit, donc de permettre aux gens d'avoir davantage de crédit et, donc, par le fait même, de s'endetter. Nous jugions qu'actuellement, dans la société québécoise, le taux d'endettement de nos familles était suffisamment élevé et qu'il n'était pas question de rajouter un moyen pour augmenter ce crédit. (0 h 10)

Nous nous retrouvons donc avec un article de compromis, qui est l'article 2666.1 qui nous dit: "À moins qu'elle n'exploite une entreprise et que l'hypothèque ne grève les biens de l'entreprise, une personne physique ne peut consentir une hypothèque mobilière sans dépossession que dans les conditions et suivant les formes autorisées par la loi." Comme, à l'heure actuelle, il n'y a pas de loi qui le permette, nous devrons donc retourner un jour en commission parlementaire pour entendre, en audiences particulières, tous les intervenants qui voudront se prononcer sur le sujet - là, je pense autant aux institutions financières qu'aux associations de consommateurs - et regarder objectivement, ensemble, ce que nous pouvons faire par rapport à cette hypothèque mobilière.

Les livres septième et huitième légifèrent respectivement sur la preuve et sur la prescription. Ces deux chapitres sont également extrêmement techniques, M. le Président. Pour ce qui est de la preuve, nous avons tenté de tenir compte des nouveaux moyens mis à notre disposition, ces moyens qui existent grâce à de nouvelles technologies et qui n'existaient aucunement lors de l'adoption du Code civil, il va sans dire, en 1866. Donc, les articles 2841, 2843 et 2844 permettront de déposer, comme preuves, certaines cassettes ou certains autres moyens techniques qui n'existaient pas. Évidemment, il y a des balises. C'est que ces documents doivent être authentiques et il y a des règles bien précises à suivre.

Le livre neuvième nous donne les règles qui vont toucher la publicité des droits. Ce chapitre du Code civil du Québec nous présente toutes les règles concernant le registre des droits personnels et réels mobiliers ou sur le registre foncier. Comme exemple, je citerai peut-être, M. le Président, l'article 2928 qui nous indique que: L'inscription d'un droit sur le registre des droits personnels, sur le registre des droits réels mobiliers ou sur le registre foncier emporte, à l'égard de tous, présomption simple de l'existence de ce droit. L'inscription sur le registre foncier d'un droit de propriété dans un immeuble qui a fait l'objet d'une immatriculation, si elle n'est pas contestée dans les 10 ans, emporte de même présomption irréfragable de l'existence du droit.

En termes faciles, M. le Président, ça veut dire qu'à partir du moment où nous allons immatriculer, dans le registre, un immeuble, après 10 ans, cet immeuble sera reconnu. On ne pourra contester. Alors, il sera extrêmement important, à mesure qu'il y aura des transactions au cours des années à venir, que cette transaction soit enregistrée dans le registre foncier et ce sera un enregistrement unique, c'est-à-dire qu'à chacune des autres transactions qui suivront sur cet immeuble les citoyens n'auront pas besoin de réenregistrer.

Enfin, le livre dixième vient établir les dispositions concernant le droit international privé. Ce chapitre vient donc doter le Québec d'une série de dispositions de droit nouveau. Ce chapitre nous apparaissait important, bien sûr, puisqu'il vient définir les règles du jeu de l'État québécois. Je retiens, principalement, trois articles, M. le Président, le premier étant l'article 3094 qui parle du contrat de consommation. Cet article est extrêmement clair. Il permet, finalement, au consommateur de pouvoir opter pour le contrat qui le favorise le plus, le contrat qui a été signé ici, au Québec, ou à l'extérieur. C'est vraiment une protection extrêmement importante qui est émise dans le Code civil à ce sujet. L'article qui suit, l'article 3095, qui traite du contrat de travail, offre également cette même protection aux travailleurs, M. le Président, et ça aussi, c'est important.

Je m'en voudrais de ne pas souligner un article qui a particulièrement attiré mon attention, c'est-à-dire l'article 3139.1, qui m'apparaft même essentiel dans un Québec souverain et je vais me permettre de vous le lire: "L'autorité du Québec reconnaît et sanctionne les obligations découlant des lois fiscales d'un autre État, où il en est ainsi pour les obligations découlant des lois fiscales du Québec." Donc, on pourra traiter d'égal à égal, M. le Président.

Je conclurai en disant que le travail a été fait sérieusement de part et d'autre, avec assiduité, avec beaucoup d'attention. Rien n'est parfait, bien sûr. Donc, l'Institut québécois de réforme du droit aura la tâche de compléter au fur et à mesure de l'évolution de notre société. C'est avec beaucoup de fierté que l'Opposition

officielle appuie ce projet de loi qui donne naissance à un nouveau Code civil du Québec après 125 ans. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci beaucoup, Mme la députée de Terrebonne. Nous en sommes à l'étape du rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 125, Code civil du Québec, et sur les amendements déposés par le ministre de la Justice. Je reconnais M. le député de Westmount. M. le député, la parole est à vous.

M. Richard B. Holden

M. Holden: Merci, M. le Président. J'ai regardé les Gémeaux l'autre soir et il y avait Dominique Michel qui disait que c'était peut-être un peu ennuyant pour les gens qui écoutaient, mais qu'il fallait remercier tous ceux et celles qui ont aidé à faire valoir les programmes de télévision. Dans le cas du Code civil, on parle de 35 ans de travail. Alors, il y a beaucoup de monde à remercier, à partir du ministre de la Justice qui a travaillé avec acharnement avec une équipe incroyable de légistes et qui a travaillé pendant des années depuis qu'il a accédé au poste de ministre de la Justice. Il faut remercier aussi les députés de l'Opposition, les députées de Hochelaga-Maisonneuve et de Terrebonne, et leur équipe aussi qui ont travaillé probablement même plus fort que l'équipe du ministre parce qu'ils étaient moins nombreux. Il faut remercier le Barreau du Québec qui a travaillé depuis je ne sais combien d'années, peut-être depuis M. Duplessis, parce que c'est déjà dans le temps de M. Duplessis qu'on avait décidé de faire une réforme du Code civil. L'équipe du Barreau a toujours été présente, l'équipe de la Chambre des notaires, les communautés de droit communautaire. Oui, c'est sûr que l'adjoint parlementaire au ministre de la Justice a travaillé avec brio dans ce dossier, comme on se souvient de l'ancien doyen de la Faculté de droit de McGill, M. Paul-André Crépeau, qui a déjà été président de la Commission de réforme du Code civil. En tout cas, il y a du monde qui a travaillé là-dessus depuis 35 ans, M. le Président, et je tiens à les féliciter toutes et tous.

When we started our detailed study of the Bill last August, I said that I hoped we would finish it by Christmas, by the Christmas break, and we actually did succeed in doing that. But I had my doubts last week because the Opposition decided to overly concentrate on the question of chattel mortgages. Chattel mortgages, Mr. Speaker, have been in existence for 150 years in the U.K. They are known throughout the world. There is nothing complicated about chattel mortgages. But the Opposition in this House seems to have a view that Big Brother should watch over everybody. It is a kind of welfare-State approach. In this case, it is not Big

Brother, it is Big Sisters, because we have the Members for Hochelaga-Maisonneuve and for Terrebonne being the Big Sisters. They were watching over as if, if we had a chattel mortgage in this Province, all of a sudden, all of the Quebeckers are going to go out and mortgage their household furniture to buy a lottery ticket. (0 h 20)

I do not know what the obsession was with the Opposition but, in any event, because we wanted to get the final law passed in this session, a legitimate compromise was made by the Government. The Government said: Well, let us put the principle of chattel mortgages into the Code, subject to passing a separate law to deal with the details. That is not unusual. Ontario has a law of chattel mortgages. I mean, this is not an unusual situation and perhaps it is because the Government had not really done all of its homework on chattel mortgages. So, we are going to have more hearings, public hearings, more discussions on chattel mortgages and the issue of chattel mortgages is kind of set aside in the Code. That was one of the big big changes that was meant to be brought into the new Code.

But let us go beyond... That was the only dispute that there was in this entire discussion over the Civil Code. The Civil Code, in my mind, is as important if not more important than the Constitution. It is the law which governs all of the activities from before you are born, Mr. Speaker, until after you are dead, and it governs everything that you do and say and how you conduct yourself in this world. To me, it is the most important law that there is in the Province and it is probably the law which makes us a distinct society, if you want to get into that whole constitutional debate, but we do not want to get into that tonight.

One of the points that I was preoccupied with, Mr. Speaker, was the fact that in the original Code, around 1860, 1870, a lot of it was drafted in both languages, English and French. This Code was drafted entirely in French with an English translation. Now, my friend, the Member from Chapleau, assures me that the translators have been working very hard on this. I have looked at some of the translation, I have not seen it all, but I think that... In the old days, we used to try to argue cases where we would look at both texts and compare them, and see what the Legislator originally meant. In this context, I believe now that we will only look at the French text and we will look to the English text not as a comparison in law, but as a comparison in translation, so that, in a sense... It is part of modern Québec, I mean, I am not arguing with the fact that the language of the Code now is French. I am not arguing...

Moi, je ne fais pas de chicane là-dessus, mais je signale à ceux et à celles qui vont essayer de comparer les deux textes, à l'avenir,

devant les tribunaux, que le texte français, c'est celui qui a été étudié par le législateur, et non pas le texte anglais.

Finalement, M. le Président, je vais dire que ça, c'est un Code qui a été étudié pendant 35 ans. Je suis sûr que c'est aussi bien, sinon mieux que le Code qu'on a actuellement. Moi, j'ai un peu de nostalgie du Code civil ancien parce que j'ai pratiqué le droit pendant 35 ans avec le vieux Code, mais je commence à m'habituer, après quatre ou cinq mois d'étude détaillée, à un texte différent. Je sais que, d'ici à un an, tous les avocats, tous les notaires, tous les gens du droit vont être obligés d'étudier le nouveau Code. Après, on va recommencer à pratiquer le droit. Il va y avoir des jugements qui vont nous surprendre, c'est sûr, M. le Président. À un moment donné, un article qu'on a pensé être très clair va être interprété par un juge qu'on va dire niaiseux, pour ne pas insulter la magistrature, mais il va nous donner une interprétation qui est totalement contraire à ce qu'on pensait faire. Mais c'est ça, l'avis juridique, c'est de savoir ce que le législateur a voulu dire. Alors, j'espère qu'on a été assez clairs pour qu'il n'y ait pas trop d'accrocs et que le monde vive avec le nouveau Code aussi bien, sinon mieux, qu'il a vécu avec l'ancien Code. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Westmount, de cette intervention. Je reconnais, sur ce même sujet, l'adjoint parlementaire de M. le ministre de la Justice et député du comté de Chapleau. M. le député.

M. John J. Kehoe

M. Kehoe: II est difficile de mesurer toute l'importance du projet de loi que nous avons devant nous. Adopter un nouveau Code civil du Québec, comme nous nous apprêtons à le faire, est une chose extrêmement importante. Son importance dépasse très largement tous les projets de loi que nous avons eu l'occasion de discuter en cette Chambre. Les projets de loi que nous discutons touchent sous divers angles la vie des citoyennes et citoyens de notre collectivité. Dans notre rôle de parlementaire, nous faisons le maximum pour traduire chacune des aspirations et les besoins des citoyens et citoyennes qui ont cru en nous en nous confiant la responsabilité d'assumer leur destinée.

Le projet de loi 125, qui franchit aujourd'hui une autre étape importante de notre processus législatif, dépasse très largement en importance la simple loi. Il concerne, en matière civile, la loi des lois. Il concerne le fondement de notre droit commun, le fondement de notre droit civil.

En effet, ce sont les fondements juridiques de notre vie civile qui sont interpellés par le projet de loi 125, donc tout ce qui régit en son fondement même la vie en société; la vie civile des hommes et des femmes qui est au centre de notre discussion aujourd'hui.

Il faut le souligner, l'occasion a quelque chose d'historique. Ce geste, aujourd'hui, fera date, car ce n'est pas tous les ans ni toutes les décennies que le gouvernement modifie aussi significativement une loi de cette importance en matière civile.

Si on cherche et remonte le cours du temps, on constate que, dans son ensemble, cette loi remonte à 125 ans, ce qui, c'est l'évidence même, donne toute sa singularité au geste que nous allons poser aujourd'hui. Il lui donne une portée historique sans précédent.

Ceci n'est sans doute pas sans lien avec le fait que le projet de loi 125 vient mettre un terme à une démarche amorcée voilà 35 ans par le juge Thibodeau Rinfret. Ce nouveau Code civil que nous nous apprêtons à adopter aujourd'hui est, en effet, l'aboutissement d'un travail et d'efforts qui ont débuté voilà maintenant 10 ans. Il n'est pas inutile de dire quelques mots sur la petite histoire de cette réforme de notre Code civil. J'ai dit "petite histoire" sans être vraiment certain que l'expression convienne. Il y a sans doute lieu de parier de l'histoire, tout au moins occupera-t-elle quelques chapitres de l'histoire de notre droit civil contemporain. (0 h 30)

On me permettra de rappeler les étapes qui ont marqué cette réforme. D'abord, il importe de souligner une chose, notre geste montre que la nécessité de l'actualisation de notre Code civil ne s'est jamais démentie au cours des 30 dernières années. En effet, si, à l'aube de la Révolution tranquille, la pertinence d'une actualisation de notre Code civil s'est imposée, cette pertinence n'a pas cédé à l'épreuve du temps. Au contraire, l'épreuve du temps l'a renforcée. Sa pertinence et son à-propos n'ont fait que grandir depuis lors et, il faut le souligner, en particulier depuis que le gouvernement a adopté la Charte des droits et libertés de la personne. La concordance et la conformité avec la Charte des droits et libertés, tel qu'il a été souligné à plusieurs reprises en commission parlementaire, interpelle notre conviction profonde dans les valeurs démocratiques. En effet, les sociétés démocratri-ques, depuis 1945, sont devenues extrêmement soucieuses d'avoir un droit commun conforme aux chartes des droits et libertés. Avec cette réforme, le Québec s'inscrit dans cette même orientation de révolution des démocraties.

M. le Président, il n'y a pas seulement la conformité et la concordance avec la Charte des droits et libertés qui sont à l'origine de cette révision de notre Code civil. Elle a été rendue nécessaire pour corriger l'inadéquation qui s'est manifestée entre notre époque et les règles du droit civil. Les choses ont connu des changements en 125 ans. Il y a de nombreuses transformations au niveau des rapports sociaux et familiaux. Le contexte économique, les valeurs et

les connaissances ont évolué et changé significa-tivement depuis une centaine d'années. Tout cela correspond, il est bien certain, à cette inadéquation dont j'ai parlé ainsi qu'à la nécessité de moderniser nos règles de droit civil. Cette réforme, que traduit le nouveau Code civil que nous avons devant nous, n'est pas une rupture avec le droit actuel. Le nouveau Code civil s'inscrit dans la continuité. Les modifications qui ont été apportées en constituent un développement, une bonification ainsi qu'une consolidation.

Vous n'ignorez pas, M. le Président, que le nouveau Code civil comporte quelque dix livres touchant diverses matières. Ces dix livres ont tous été, comme l'a souligné le ministre de la Justice à maintes reprises, présentés à la consultation publique. Je me permets de signaler que les quatre premiers livres ont fait l'objet d'une adoption et que les six premiers ont été produits sous forme d'avant-projet de loi. De plus, je signale également que les quatre premiers livres déjà adoptés sont relatifs au droit de la personne en 1987, au droit de la famille en 1981 et 1982, au droit des successions en 1987 et, enfin, aux droits des biens, en 1987 également. Quant aux six autres livres qui ont été présentés sous forme d'avant-projet de loi, ce sont le droit des obligations, le droit des sûretés réelles, le droit de la preuve, le droit de la prescription, la publicité des droits et le droit international privé. Ils ont, comme on l'a mentionné plusieurs fois lors de l'étude en commission, tous donné lieu à de nombreuses discussions de la part des juristes ou d'organismes. Ces discussions ont été réalisées sous la gouverne, comme le savent plusieurs d'entre vous, d'un comité spécial de consultation hautement considéré dans la détermination des directions générales, et ce, pour chacun des livres. C'est ce qui a permis de composer l'ensemble des six derniers livres non contenus, comme les quatre premiers, dans le nouveau Code civil que nous avons devant nous aujourd'hui.

En terminant, je suis conscient que ce que je viens d'évoquer est extrêmement modeste sur la nature de l'actualisation de nos règles de droit civil qu'introduit le nouveau Code. Enfin, je veux souligner que je suis extrêmement heureux d'être associé aujourd'hui à cet événement qui prendra place dans les annales du droit québécois. Plus de 35 ans d'efforts et de discussions continus trouvent aujourd'hui leur aboutissement dans ce nouveau Code civil que nous nous apprêtons à adopter. Je sais gré à tous ceux et celles qui ont contribué, au cours des années, à sa réalisation et à son aboutissement aujourd'hui.

May it be permitted for me to say, Mr. President, in just a few words that I wish to congratulate the Minister of Justice who, like many others before him, made promises that the whole of the Civil Code would be adopted. It was promised by many ministers of Justice in the past. But our present Minister of Justice, the present deputy for Jean-Talon has delivered the merchandise. He made the promise and because of his determination, his competence, his patience, his hard work over not only the three and a half months that we actually studied in parliamentary commission the different amendments and the different articles, article by article in the Civil Code, but over this period of time, the Minister showed that he was absolutely, beyond any doubt, determined to have this law adopted. I can assure you, Mr. President, that in the 10 years that I have been in this Parliament, to me, this is the most significant and the most enriching experience that I have had to go through. i wish to thank him and i wish to thank also the members of the opposition: the member for hochelaga-maisonneuve, by her questions and by her persistently asking questions to the minister, the member for terrebonne, the member for sherbrooke, the member for west-mount. each one participated in their own way, so that today, with a great deal of pride, with a great deal of satisfaction, we can say: work well done! and we present to you now... the actual code has been deposed and presented here in parliament for adoption within the next few days. thank you, mr. president.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Chapleau. Est-ce que les amendements proposés par le ministre au rapport de la commission des institutions sont adoptés? Vous voulez parler? Excusez-moi. M. le député de Sherbrooke.

M. André J. Hamel

M. Hamel: Merci, M. le Président. Vous comprendrez que c'est avec une très grande et légitime fierté que j'interviens aujourd'hui, le mardi 17 décembre, à minuit quarante, sur le projet de loi 125, le Code civil du Québec, dont la refonte et la présentation à cette Assemblée constituent un événement historique au Québec. J'interviendrai donc brièvement et de façon générale en soulignant simplement les quelques aspects particuliers qui m'ont permis de vivre une autre expérience parlementaire à la fois exigeante mais combien enrichissante.

M. le Président, depuis plus de 35 ans, de nombreux juristes travaillent à ce projet de refonte du Code civil du Québec et voilà qu'aujourd'hui c'est maintenant chose faite. Si le ministre de la Justice peut maintenant proclamer mission accomplie, c'est grâce à une équipe d'individus hautement qualifiés, bien sûr, mais aussi à des éléments particuliers qu'il m'apparaît important de souligner. ii faut d'abord noter l'exceptionnel climat de travail qui a entouré l'étude de ces quelque

3000 articles et plus de 1000 amendements de ce Code civil du Québec. En effet, M. le Président, les députés associés à l'étude de cette pièce législative ont démontré un esprit de collaboration exemplaire et, faisant abstraction d'attitudes partisanes improductives, ont permis d'achever cette oeuvre juridique essentielle à notre société québécoise contemporaine. (0 h 40)

II faut aussi rappeler, M. le Président, le très grand sens professionnel de nos légistes et experts invités à participer aux travaux de notre sous-commission qui, constamment, ont démontré leur souci profond de toujours rechercher l'esprit et la lettre les plus pertinents, les plus clairs afin de permettre l'interprétation juridique la plus simple et la plus limpide qui soit pour le plus grand bien de nos justiciables. Je souhaite donc que l'application du nouveau Code civil du Québec soit source de jugements équitables et qu'il démontre que la société québécoise, encore une fois, est à l'avant-garde. C'est donc une pièce législative majeure mettant à jour le droit actuel et rédigeant un droit nouveau correspondant à une réalité moderne de notre société québécoise.

Enfin, je veux remercier mon collègue, ministre de la Justice, de m'avoir invité à participer aux travaux de la sous-commission du Code civil et d'avoir acquis ainsi une expérience unique en exerçant activement mes fonctions de législateur, volet important de mon rôle de député.

En terminant, M. le Président, je veux surtout féliciter chaleureusement M. le ministre de la Justice et député de Jean-Talon, M. Gil Rémillard, d'avoir démontré une volonté politique claire et ferme de réaliser ce projet législatif attendu depuis si longtemps. C'est grâce à sa patience et à son inébranlable détermination qu'il a su diriger, avec un doigté remarquable, l'ensemble de ce travail législatif qu'a été le projet de loi 125, le nouveau Code civil du Québec. M. le Président, évidemment que j'appuierai ce projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Sherbrooke de votre intervention. Est-ce que les amendements proposés par le ministre au rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 125 sont adoptés? Adopté. Le rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi 125 tel qu'amendé est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 3 de notre feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi 187 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 3, M. le ministre du Revenu propose l'adoption du principe du projet de loi 187, Loi modifiant la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement. Je vais le reconnaître maintenant et je cède la parole au ministre du Revenu.

M. Raymond Savoie

M. Savoie: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. le Président, comme vous le savez, l'organisation des bingos au Québec est sous la direction de la Régie des loteries du Québec et ça, depuis mon Dieu, fort longtemps. La Régie, chaque année, émet plusieurs milliers de permis à travers tout le Québec qui permettent à un ensemble d'organismes à but non lucratif de tenir des activités de financement dans le contexte d'un bingo. Tout le monde, je pense, est bien familier avec l'impact de ces bingos au niveau des structures, par exemple, des paroisses, avec des activités de financement, surtout des organismes qui visent à intervenir auprès des gens défavorisés, des gens démunis, et ces activités-là ont beaucoup, beaucoup d'importance chez nous. Il y a une bonne participation de la part de la population, une bonne participation, je pense, d'une façon continue depuis plusieurs années.

Les permis sont émis par la Régie sous certaines conditions qui sont vérifiables. Il y a des inspecteurs qui vérifient et qui assurent un bon contrôle au niveau de l'ensemble de ces activités. Depuis plusieurs années, on connaît, à travers le Canada, et on a connu surtout au début des années soixante-dix beaucoup d'activités du côté des communautés autochtones, les communautés autochtones qui cherchaient d'une façon constante à s'impliquer dans le processus des bingos. Et, plus particulièrement au cours des dernières années, les communautés autochtones avaient des demandes d'une façon constante pour, effectivement, émettre leurs propres permis à des conditions qui, évidemment, pourraient leur être favorables. Il y a eu des échanges, des négociations avec le gouvernement du Québec et en particulier avec le ministre responsable du dossier autochtone depuis 1989, ayant exercé moi-même ce portefeuille de 1986 à 1989. Alors, avec le ministre responsable au niveau des questions autochtones, il a été examiné la possibilité d'en arriver à une entente qui permettrait à ces communautés autochtones, par le biais d'une structure du conseil de bande et suite à une entente intervenue avec le gouvernement du Québec, d'émettre elles-mêmes ces permis.

Cette question a été examinée par la Régie des loteries et par les officiers de la Régie. Nous croyons qu'il est certainement possible, dans un

contexte où il y a une entente qui doit être ratifiée, évidemment, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, par le Conseil des ministres, d'autoriser les conseils de bande à émettre des permis pour que, finalement, sur leur territoire de réserve, qui est un territoire fédéral, les autochtones puissent se livrer à des activités de bingos sous le contrôle d'un permis émis par le conseil de bande. Les conditions pour l'émission de ce permis doivent rencontrer nécessairement les conditions qui régissent l'ensemble des permis sur le territoire du Québec.

Alors, il n'est pas question de faire ici un cas spécifique qui va permettre, par exemple, la tenue de bingos extraordinaires sur les réserves. Il n'est pas question non plus de mettre de côté l'ensemble de la réglementation qui régit les activités de bingos sur le territoire du Québec, mais plutôt d'autoriser un conseil de bande à émettre ces permis-là; par exemple, on pense surtout au cas de Pointe-Bleue, à d'autres communautés montagnaises et également à des communautés algonquines ou même cries qui pourront se livrer à ce genre d'activité par l'émission d'un permis autorisé par leur conseil de bande.

Dans un contexte où on connaît beaucoup de difficultés aujourd'hui avec un groupe en particulier - on pense surtout aux Mohawks de Kahnawake et on connaît aussi l'intérêt des Mohawks du secteur d'Oka à tenir des bingos -il n'est pas question et il ne faudrait pas que ce soit perçu comme une autorisation, pour le conseil de bande, d'émettre des permis ipso facto. Il faudra, comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure, qu'un mémoire soit présenté au Conseil des ministres; évidemment, ce mémoire sera sujet à étude par moi-même et par les officiers de la Régie avant que le décret ne soit soumis au Conseil des ministres. Ce décret sera, bien sûr, négocié et certainement discuté entre les partenaires des communautés autochtones et le ministre responsable de la question autochtone; tout ça finalement pour en arriver à une entente qui va assurer un bon contrôle. Et si, un jour, les relations s'améliorent d'une façon acceptable avec les communautés mohawks de Kahnawake et d'Oka, à ce moment-là, ça pourra être examiné à la lumière des ententes qui seront intervenues avec le gouvernement du Québec.

Il y a une volonté de notre gouvernement dans ce contexte-ci et certainement une acceptation par la Régie de voir finalement une plus grande application, de rencontrer des demandes de la part de certaines communautés autochtones qui veulent participer pleinement, qui veulent respecter les lois du Québec, qui veulent s'assurer, finalement, qu'elles sont partenaires dans notre développement, dans nos institutions, dans nos sources de financement pour les organismes à but non lucratif, qu'elles puissent en quelque sorte se prendre en main, prendre les bénéfices de ces bingos et les orienter vers des organismes à but non lucratif ou des oeuvres charitables sur le territoire de la réserve à des fins qu'elles jugeront et qu'elles seront seules à juger, finalement. Tout ça dans le but, dans l'intérêt de démontrer notre volonté finalement de bien comprendre leur situation, aussi de démontrer une certaine sympathie vis-à-vis de ces communautés, de leurs structures, de leurs particularités. (0 h 50)

Je pense que ce qui nous a plus guidés peut-être, c'est de reconnaître que les communautés autochtones ont finalement une situation un peu privilégiée chez nous. Elles sont en quelque sorte très distinctes dans leurs coutumes, dans leur façon de vivre sur le territoire que nous partageons ensemble. Il faut bien penser, je crois, à un dicton d'Aristote qui dit que traiter d'une façon égale les inégalités donne naissance à des injustices. C'est un peu dans ce contexte-là que ce dossier a été approché, M. le Président, et c'est un peu avec une ouverture d'esprit, avec une volonté de travailler, de partager avec elles leurs aspirations, de rencontrer leurs obligations vis-à-vis de leur propre communauté que la Régie des loteries et moi-même, avec la bonne collaboration du ministre responsable du dossier autochtone, sommes arrivés à une espèce de consensus sur une façon de procéder qui est relativement simple, qui n'exclut pas ou qui n'enlève rien à l'autorité du Québec dans ce secteur-là. On connaît bien le jugement de la Cour suprême qui a sorti cet été, qui reconnaît de fait la préséance de la réglementation provinciale en ce qui concerne la tenue de bingos. Il s'agit tout simplement d'une entente de principe accordant de la part de la Régie, par un mécanisme qui est bien déterminé, à un conseil de bande le droit d'émettre ces permis-là.

Alors, je pense que ça va démontrer notre bonne foi vis-à-vis de ces communautés autochtones. Je pense également que ça va démontrer une certaine ouverture d'esprit, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, une certaine largesse vis-à-vis des obligations et des orientations que veulent bien se donner ces conseils de bande là. En conséquence, nous appuyons ce projet de loi et nous recommandons donc ce projet de loi pour adoption à l'Assemblée nationale, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre du Revenu. Sur cette même motion, à savoir la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 187, Loi modifiant la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement, je cède la parole à M. le député de Montmorency.

M. Jean Filion

M. Filion: Oui, M. le Président. Bien sûr, nous sommes face à un projet de loi qui, à toutes fins pratiques, n'est pas très volumineux.

On a environ... pas environ, mais bien six articles, six paragraphes à examiner pour voir à faire en sorte de permettre aux communautés autochtones d'avoir des permis pour tenir des bingos sur des réserves.

Bien sûr qu'à première vue ce projet de loi est relativement simple, mais en même temps il nous apporte certaines questions. Ce ne sont pas des questions dans un but effectivement de ne pas reconnaître notre bonne foi, etc., mais des questions, j'en suis sûr, que les gens en général vont se poser. Compte tenu de tout le climat et de tout ce qu'on entend dire depuis maintenant 18 mois au niveau des relations et des échanges avec des réserves autochtones, les gens vont se poser des questions, entre autres, sur la sécurité publique. Les gens vont se poser des questions, entre autres, également au niveau des contrôles fiscaux. On sait qu'il y a des réserves où ça fonctionne très bien; il y en a d'autres où on a certaines difficultés. Et le but, ce n'est pas, bien sûr, de remettre en question un projet de loi comme celui-là de façon à dire qu'effectivement le but recherché n'est pas louable ou n'est pas correct, mais le but recherché, je pense qu'il doit s'inscrire dans une façon de fonctionner où on va arriver à avoir des échanges équitables au niveau de la fiscalité et également des permis au niveau des loteries.

Alors, bien sûr que ce projet de loi mériterait qu'on s'y arrête davantage, qu'on puisse avoir plus d'information sur le fonctionnement que vont prendre de tels permis au niveau des réserves. Actuellement, le projet de loi est simple, il dit simplement: Écoutez, on va donner un droit aux communautés autochtones d'émettre des permis. Maintenant, comment ça va fonctionner? Quelle sorte d'entente on va signer? Tout le détail au niveau de la réglementation va survenir par la suite avec des ententes individuelles qu'on va avoir avec les différentes réserves.

À ce stade-ci, je pense que tout ce que l'on peut dire c'est que ce projet de loi devrait faire l'objet, M. le Président, d'une commission où on devrait entendre les différents intervenants et où on devrait en même temps se faire rassurer sur le fonctionnement que vont prendre de tels bingos à l'intérieur des réserves, s'assurer, également, que ces bingos-là vont satisfaire les exigences que l'on doit satisfaire au niveau des Québécois, en général, et je pense qu'on devrait, bien sûr, entreprendre une étude plus détaillée où on pourrait faire la lumière sur toutes les conséquences que peut avoir cette dérogation ou cet ajout à la loi régissant les loteries, au Québec.

Ce projet de loi là, encore une fois, nous est soumis en fin de session, à un moment où on se retrouve à étudier rapidement une série de projets de loi qui ont été soumis après le 15 novembre et moi, tout ce que je peux dire pour l'instant, M. le Président, c'est: J'aimerais qu'on étudie ce projet-là en commission, où différents intervenants viendraient nous parler des conséquences, des contrôles fiscaux et, également, des règles au niveau de la sécurité publique, pour que l'on puisse avoir une idée du fonctionnement interne au niveau des réserves. Alors, sûrement que, pour nous, M. le Président, ce projet-là va être adopté sur division. Alors, mes commentaires se limiteront uniquement à ce que je viens de dire, pour le moment. Nous aurons l'occasion d'en discuter abondamment en commission parlementaire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Montmorency. M. le député de Laurier et ministre délégué aux Affaires autochtones, je vous cède la parole. Je vous rappelle que vous disposez d'une période maximale de 20 minutes.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci beaucoup, M. le Président. M. le Président, j'aimerais bien reprendre quelques-unes des affirmations qui ont été faites ou des questionnements, plutôt, qui ont été faits. Après l'introduction qu'a faite mon collègue, le ministre du Revenu, M. le Président, j'aimerais reprendre une couple de choses qui vont, peut-être, répondre à quelques-uns des questionnements du député de Montmorency. Parce que je crains vraiment, M. le Président, qu'au lieu de prendre nos responsabilités et de vraiment examiner à fond les implications d'un projet de loi qui comporte six articles... Ça ne prendra pas une commission parlementaire à n'en plus finir pour le faire. On pourrait le faire, si on est de bonne foi, en Chambre, ici, et en commission parlementaire, demain, si vous consentez à aller de l'avant.

M. le Président, j'aimerais repréciser, d'abord, de quoi il s'agit. Il s'agit d'un projet de loi de six articles qui fait quoi? Qui dit, ni plus ni moins, que, quand il y a des communautés autochtones qui acceptent d'appliquer la même réglementation, les mêmes limites, les mêmes normes, les mêmes règles qui s'appliquent dans tout le reste du territoire du Québec, elles pourront, ces communautés-là, émettre un permis pour la tenue de bingos sur le territoire d'une réserve. Vous allez me dire, M. le Président, pourquoi faire ce genre de différenciation? Bien, mon collègue, le ministre du Revenu, a répondu en affirmant que, par exemple, Aristote disait que, s'il y a des différences, puis qu'on les traite de façon égale, on fait naître des injustices.

En 1983, M. le Président, il y a eu 15 principes adoptés par le Conseil des ministres de l'époque, repris par le présent gouvernement, qui devraient servir comme guide dans les relations avec les communautés autochtones. Je vais vous citer un de ces articles, de ces principes, M. le Président, qui dit que les nations autochtones - et je dis bien les nations autochtones, parce

que nous les avons aussi reconnues dans l'Assemblée nationale, en 1985, en tant que nation, en tant que peuple distinct - ont le droit, dans le cadre des lois du Québec, de se gouverner sur les terres qui leur sont attribuées. Alors, que vient faire le projet de loi, M. le Président, c'est donner chair, donner une âme, si vous voulez, à ce principe qui, quoique adopté en 1983, vient trouver ici la possibilité, pour les communautés autochtones, de se gouverner quant à un aspect bien délimité, à l'intérieur des cadres des lois du Québec, sur les terres qui leur sont attribuées, c'est-à-dire sur les réserves. Ce que ça fait, le projet de loi, c'est que ça crée la possibilité légale de conclure des ententes, ultérieurement, avec des communautés qui voudraient bien, comme je le disais tout à l'heure, accepter d'administrer les bingos sur leur réserve, sur leur territoire, avec les mêmes règles, les mêmes limites, les mêmes normes, les mêmes critères que ces bingos s'appliquent sur le reste du territoire. (1 heure)

Pourquoi, M. le Président? Parce qu'on est pleinement conscient, et bon nombre d'autochtones aussi, qu'on vit ensemble sur un territoire. On partage le même espace et le même temps et, dans ce sens, il faut tenir compte aussi de ce qui existe autour de ces terres qui sont attribuées aux autochtones. Donc, il y a des communautés qui sont tout à fait disposées à marcher en toute équité avec l'environnement, avec la société qui les entoure. Nous réclamons, disent-elles, de pouvoir décider sur le territoire d'une réserve quelle oeuvre, quel groupe à but non lucratif va être autorisé à tenir un bingo pour des fins communautaires, sur le territoire de la réserve; on voudrait bien être ceux qui décident de ça. Et on accepte d'appliquer les mêmes règles qui existent sur le reste du territoire. C'est ce que le projet de loi dit. Rien de plus. Ce n'est vraiment pas plus compliqué que ça.

Si on le lit objectivement, on va constater, par exemple, que ça dit en toutes lettres, à l'article 4, que les dispositions de la présente loi - Quelle loi? La loi sur la Régie des loteries et courses du Québec - "Les dispositions de la présente loi s'appliquent à l'organisation, l'administration, la conduite et le fonctionnement d'un bingo tenu en vertu d'une licence délivrée par un organisme local." Quel organisme local? L'organisme local de la communauté des autochtones sur la réserve. Alors, les dispositions de la loi sur la régie des loteries et courses s'appliquent même dans le cas d'une licence qui serait émise par un organisme local, c'est-à-dire un organisme autochtone. Donc, un projet de loi qui donne la possibilité de conclure ce genre d'entente.

Pourquoi? Parce que, dans le dossier autochtone - et on en a amplement discuté aujourd'hui; je vois mon collègue d'Ungava qui va probablement prendre la parole tout à l'heure, il était fort intéressé par ce dossier ce matin, M. le Président, j'espère qu'il continue de l'être - dans ce dossier, la chose principale à faire, c'est de s'efforcer de rebâtir la confiance qui doit exister entre les autochtones et le reste de la société québécoise, M. le Président. Comment est-ce qu'on va le faire? On va le faire en appuyant ce qui mérite d'être appuyé et en n'appuyant pas ce qui ne le mérite pas. Il ne s'agit pas ici de cautionner quelque illégalité que ce soit. Il ne s'agit pas ici, M. le Président, de permettre, par une reconnaissance législative, des différences qui conduisent à des inégalités ou des différences qui blessent, mais il s'agit de reconnaître que la différence peut être traitée de telle façon pour résoudre les problèmes, M. le Président.

Quelle est la différence? La différence, c'est qu'on dit ici - et on l'a dit - qu'il s'agit de 10 nations autochtones, plus les Inuit, ça fait 11 au Québec, M. le Président, qui réclament la possibilité de se prendre en charge, pour la plupart. Il s'agit pour nous, en tant que parlementaires, d'être assez matures pour faire la distinction entre les situations qui ne méritent pas d'être appuyées et celles qui méritent de l'être. Il s'agit d'avoir assez de maturité, de bonne volonté et de bonne foi pour faire la différenciation entre la situation des Warriors à Kahnawake et ce qui se passe ailleurs, M. le Président. Si on ne voudrait pas que la société québécoise soit jugée par quelqu'un qui aurait rendu visite à Parthenais, évitons de tirer des conclusions sur l'ensemble des autochtones par la lecture des journaux, sur la situation des Warriors à Kahnawake. Les Warriors, ce n'est pas l'ensemble des Mohawks; les Mohawks, ce n'est pas l'ensemble des peuples autochtones au Québec. Nous avons la responsabilité de faire ces distinctions, M. le Président, et, ce faisant, si on regarde ce projet de loi qui, oui, a été déposé après le 15 novembre et qui requiert, à ce moment-là, pour son adoption, le consentement de l'Opposition, on devrait être capable, M. le Président, de faire ce genre de distinction et de dire qu'il s'agit là d'un pas en avant dans le "rebâtissement" de la confiance entre les autochtones et le reste de la société québécoise. Dans ce sens-là, avec ces pas, petit à petit, on va la rebâtir. Il ne s'agit pas ici, comme je disais, de légaliser l'illégalité, mais il s'agit de donner les instruments à ceux, parmi les communautés autochtones, qui acceptent de travailler de bonne foi, en collaboration, dans le respect mutuel, de pouvoir avoir des instruments qui vont nous permettre d'avoir ce genre de relations. Des relations basées sur le respect mutuel, sur la reconnaissance de la spécificité de l'autre, quelque chose qui nous est cher au Québec, M. le Président, et qui est très cher pour les autochtones aussi, la reconnaissance de la spécificité, la reconnaissance qu'il s'agit de

peuples qui veulent avoir des instruments pour maintenir leur identité, leur culture. Ce n'est pas à travers les bingos, et ils ne réclament pas des différences pour administrer les bingos, mais ils voudraient bien être capables, M. le Président, sur un territoire, d'être ceux qui vont pouvoir choisir quels groupes, pour quelles fins ils vont pouvoir tenir ces bingos.

Ce projet de loi assure, entre autres, que les profits de ces bingos seront utilisés à des fins non lucratives et communautaires. Ce sont les seules fins que reconnaît la loi sur la régie des loteries et courses, M. le Président, et c'est cette loi qui va s'appliquer aussi, qui va être appliquée par une communauté locale. C'est une reconnaissance d'une certaine autonomie des communautés sur leur territoire, tirée directement du sixième principe adopté en 1983.

M. le Président, c'est effectivement très important d'encourager la confiance mutuelle, d'éviter d'utiliser ce dossier pour des fins partisanes. S'il y a des différences sur la façon dont on traite les choses, qu'on le dise. Mais il faudrait bien, quand il y a des choses qui marchent, M. le Président, qu'on soit capable de l'admettre aussi de l'autre côté. Et, dans ce sens, M. le Président, il y a là un modèle pour d'autres communautés.

J'ai eu de longs pourparlers avec la communauté de Mashteuiatsh, et le chef des Monta-gnais de Pointe-Bleue, M. Kurtness, en particulier. Nous avons, comme vous vous le rappellerez, mis sur pied il y a à peu près un an un groupe de travail pour examiner l'ensemble de la question du développement économique de la communauté et, entre autres, pour examiner le plan de gestion des bingos soumis par la communauté. Nous avons exploré ensemble une série de possibilités et nous avons annoncé tout récemment, entre autres, une entente qui est intervenue pour créer au-delà d'une trentaine d'emplois par la relance d'une scierie dans la communauté.

En même temps, la communauté a accepté d'appliquer ce que je viens de vous dire, M. le Président, en ce qui concerne les bingos, d'utiliser les mêmes règles qui s'appliquent dans tout le reste du territoire du Québec, mais c'est eux qui veulent les administrer et les appliquer, dans le sens des motions que nous avons déjà adoptées, dans le sens des principes que nous avons mis de l'avant à plusieurs reprises, M. le Président, de part et d'autre de cette Chambre. S'il y a des gens comme le chef Kurtness, comme les Montagnais de Pointe-Bleue et comme d'autres communautés qui sont prêts à marcher ensemble et à élaborer ensemble un projet qui nous permettra de rebâtir cette confiance qui nous fait défaut dans beaucoup de communautés, M. le Président, il me semble que nous avons un devoir de saisir ces occasions qui sont là et d'aller de l'avant. Il y a des possibilités qu'il y ait d'autres communautés qui puissent suivre le même modèle.

Ceux qui ne voudront pas respecter l'application de ces lois, ceux qui voudraient avoir des exceptions pour avoir des privilèges, la réponse c'est: non. Mais ceux qui veulent bien marcher, en "communalité", dans le respect de la spécificité de l'un et de l'autre, et avec l'acceptation que nous vivons effectivement sur le même territoire et que nous nous devons de trouver les interfaces qui vont nous permettre, d'une part, de reconnaître la prise en charge si chère aux autochtones pour qu'ils puissent sortir du marasme dans lequel ils se trouvent, bien, là, M. le Président, il faut qu'on les encourage.

Et parlons un peu de différence, parce qu'une différence sur laquelle se fondent beaucoup des frustrations qu'ont certains autochtones, c'est les différences socio-économiques que connaissent les autochtones. Parce que, même après toutes ces années où l'État a pris en charge le sort des autochtones, en tant que fiduciaire - et c'est le cas du gouvernement fédéral depuis maintenant le tout début - après toutes ces années on constate, quand on fait la lecture de la condition socio-économique des uns et des autres, M. le Président, que nous avons une situation qui équivaut au tiers monde pour la plupart. Et, encore une fois, il s'agit qu'on puisse, nous, en tant que parlementaires, insister pour que les gens fassent la distinction entre les cas extrêmes, les cas, comme je le disais, qui sont un peu à la marge, et ceux qui sont vraiment la majorité. (1 h 10)

II y a 43 communautés indiennes au Québec. Dans 42, il n'y a aucun problème de sécurité publique: il y en a une où ça fait défaut actuellement et on espère bien toujours pouvoir le régler, dans la paix et dans le respect, mais fermement, M. le Président. Mais il y en a 42 où ça marche. Je trouve aussi personnellement déplorable qu'on mêle carrément le dossier autochtone dans sa globalité avec celui de quelques Warriors et cela, c'est nocif pour notre société. Les paroles du leader de l'Opposition, M. le Président... J'espère qu'ils vont se rappeler, quand ils seront appelés à donner leur consentement pour l'adoption d'un projet de loi qui fait cette distinction entre les Warriors et les autres, j'espère bien qu'on évitera de laisser planer des doutes sur l'ensemble des communautés, comme l'a presque fait le député de Montmorency, et je dis bien "presque". Parce que, M. le Président, ça va être important que, dans le cheminement de ce dossier, on garde tous un certain calme. Et comme je disais tout à l'heure, il ne faudrait pas qu'on fasse à d'autres ce qu'on ne voudrait pas qu'on fasse chez nous. On ne voudrait pas que les gens tirent des conclusions sur le comportement des Québécois après une visite à Parthe-nais. Il ne faudrait pas qu'on tire des conclusions sur l'ensemble des communautés autochtones en regardant ce que quelques Warriors ont fait dans une communauté en particulier.

Alors, cela dit, M. le Président, j'aimerais remercier beaucoup mon collègue du Revenu pour son appui dans tout le cheminement de ce dossier. J'aimerais également remercier mon collègue, le ministre de la Sécurité publique, que j'ai consulté et avec lequel on a, ensemble, examiné de près ce dossier. Et je peux vous assurer d'une chose, la Sûreté du Québec et le ministère de la Sécurité publique ont aussi examiné ça et se sentent confortables avec le projet de loi tel qu'il est. Et, M. le Président, je ne peux que souhaiter que le prochain intervenant de l'Opposition nous annonce qu'ils seront prêts demain.... Le prochain, qu'il sera prêt demain à aller en commission parlementaire et à donner son consentement pour l'adoption de ce projet de loi pour qu'on puisse, sans attendre indéfiniment, M. le Président, conclure des ententes avec les communautés qui veulent bien, comme je disais tout à l'heure, marcher ensemble, appliquer les mêmes lois, les mêmes limites, les mêmes règles. Il y en a une qui attend, c'est le cas des Montagnais de Pointe-Bleue; ils ont hâte, M. le Président, de pouvoir prendre en charge l'administration des bingos sur la réserve de Mashteuiatsh, dans l'esprit de la loi, celle que je viens d'énoncer. Il y en a d'autres qui peuvent suivre aussi, et je souhaite que l'Opposition puisse nous donner l'instrument qu'on recherche pour continuer le travail qu'on a fait, quand on a conclu une entente avec les Algonquins de Lac-Barrière, par exemple, et quand, avant ça, on a conclu une entente avec la communauté d'Akwesasne pour les infrastructures de la communauté. C'est un dossier complexe et difficile, et on a besoin du concours de tout le monde, mais de tout le monde qui peut rester calme, objectif et faire la part des choses. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Sur le même sujet, je cède la parole à M. le député de Masson.

M. Yves Blais

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Nous étudions actuellement la loi 187, Loi modifiant la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement. Les notes explicatives sont très courtes; je vais les lire pour que les gens qui nous regardent - parce qu'on doit avoir, à cette heure-ci, au moins 200 000, 300 000 auditeurs et je ne voudrais pas qu'ils soient vexés de m'entendre parler sur un sujet dont ils ne sauraient pas exactement quel est le fond. Les notes explicatives, M. le Président, je suis persuadé que vous les savez par coeur, mais pour ceux qui ne les savent pas par coeur, je vais quand même les lire ici: "Ce projet de loi a pour objet de modifier la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement de façon à prévoir que le gouvernement peut désigner un organisme local pour la délivrance de licences de bingo sur le territoire d'une communauté autochtone avec laquelle il a conclu une entente relative à la constitution de cet organisme."

M. le Président, c'est un projet de loi de six articles qui, en soi, semble très anodin.

Je n'aime pas beaucoup, M. le Président, et ceci par nature, faire des charges à fond de train contre le gouvernement et le blâmer de façon radicale dans mes exposés. Cependant, dans ce cas-ci, sans aller à fond de train, je tiens à dire ceci en préambule. Nous avons, en 1985, quand nous étions au pouvoir, reconnu - reconnu! - que les autochtones formaient une des nations distinctes et qu'ils étaient dignes d'avoir ce qu'on appelle des "self-governments".

Ceci dit, il y a un peu plus de deux ans qu'actuellement les gens sont au pouvoir de l'autre côté. Sous cette prémisse que nous avons reconnue en 1985, c'est bien sûr que ce n'est pas facile, c'est sûr que c'est compliqué. Mais on arrive aujourd'hui avec un tout petit projet de loi qui origine des défenseurs des autochtones ici, en Chambre, via le ministre du Revenu, et dans le problème des autochtones que nous avons au Québec, c'est un petit cure-dents devant la grande forêt des problèmes que nous avons. Et on voudrait nous faire croire que ce petit cure-dents - et, encore, c'est discutable de voir si le cure-dents est de bon aloi - que ceci est suffisant pour calmer les esprits et les revendications de ceux avec qui nous discutons. C'est bien sûr, ils vont me dire que c'est facile, quand on est dans l'Opposition, de regarder le problème de cette façon. J'en conviens. Mais si nous étions au pouvoir, avec la fougue et les attaques acerbes que je vous connais, vous ne négligeriez aucune attaque.

Je tiens à vous dire ceci, M, le Président - via vous, parce qu'il faut que je vous parle à vous, bien sûr - ce projet de loi, en fait, donne à une minorité des privilèges que d'autres minorités n'ont pas. Ici, on veut régler un problème: permettre aux gens du Lac-Saint-Jean, Pointe-Bleue, aux autochtones là, de faire des bingos. C'est le seul groupe avec lequel on a eu une entente. Si on était arrivés ici, en Chambre, et avait dit: Nous faisons un projet et nous allons autoriser par ce projet les autochtones de Pointe-Bleue de faire leur propre bingo. Nous avons eu une entente avec eux. Cette loi-là le leur aurait permis. J'aurais cru et j'aurais peut-être convenu de dire oui de façon directe a ce projet de loi. Mais là, ce n'est pas ça, M. le Président.

Un, dans son essence et par ses principes, ce projet de loi fait différentes catégories de gens sur le territoire québécois. Deuxièmement, parmi les autochtones mêmes, on fait aussi des catégories de gens, ce qui est blâmable en soi. On permet à un groupe de le faire et on ne permet pas aux autres de le faire actuellement.

Alors, on considère dans les autochtones différents niveaux de personnes, ce que je n'accepte pas ici, parce que je suis trop pour l'égalité des peuples.

Et si les autochtones de Pointe-Bleue peuvent demander au ministre qui les représente en cette Chambre, comme minorité sur le territoire québécois et dire "nous voulons régler nos propres choses", pourquoi les Grecs ne demanderaient-ils pas la même chose? Pourquoi les Portugais ne demanderaient-ils pas la même chose? Pourquoi les Italiens ne demanderaient-ils pas la même chose? Pourquoi les francophones ne demanderaient-ils pas la même chose? De régler tous les problèmes de bingo sur leur territoire, de faire un rapport une fois par année et d'établir leurs propres règles à l'intérieur du coin de territoire qu'ils occupent. C'est de faire, parmi le peuple québécois, différents paliers de personnes qui ont ou pas des privilèges, selon la bonne volonté du ministre. Parce qu'ici nous n'avons comme explication que Pointe-Bleue. Et après, le ministre a carte blanche de donner à qui il veut l'autorisation de le faire.

Si les gens de l'autre côté avaient su régler les problèmes de façon déterminante, nous n'aurions aucune réticence. Mais on ne peut pas se fier aux gens de l'autre côté pour ce faire. On ne peut pas. Quoique fédéralistes de nature, par leur parti, ils ont même été dupés par le gouvernement qui est censé être leur complice à Ottawa pour essayer de régler les problèmes de Kah-nawake. Ils ne sont même pas capables de se fier à leurs interlocuteurs "ottawaïens". Ils ne sont pas capables de s'y fier, les outre-frontières. Ils ne sont pas capables de s'y fier. Ils viennent d'être dupés, là. À moins que le ministre de la Sécurité publique, devant son impuissance à régler le problème, se soit trouvé un bouc émissaire, et c'est Ottawa. C'est possible aussi. C'est fort possible. Tout peut être possible là-dedans.

Mais il y a une chose qui est très importante; il y a environ 1600 "voteurs" à Kahnawa-ke, à peu près. Et le ministre responsable des autochtones... Il y a aussi quelques Warriors qui tiennent ce peuple-là en esclavage à l'intérieur de leur propre territoire et, en même temps, nous rendent, nous, les 7 000 000 de Québécois, esclaves de leurs revendications et de leurs actes terrorisants. C'est bien sûr, je suis persuadé que les Mohawks, c'est une belle nation, une bonne nation, mais vous dites qu'il y a quelques Warriors. Mais vous attendez quoi? Ça fait deux ans. Ça fait un an et demi qu'ils ont fermé le pont. Ça nous a coûté 160 000 000 $; 25 000 000 $ supplémentaires cette année. Vous attendez quoi? C'est sûr qu'il faut être calme. C'est sûr, mais il y a une limite au calme. Il faut, un temps, prendre nos responsabilités, et je crois que, dans ce dossier-là, le gouvernement ne les prend pas, ses responsabilités. Est-ce qu'on laisserait les groupes à l'intérieur du reste du

Québec... Prenons comme exemple les Hell's Angels. Quand ils font un mauvais coup, est-ce qu'on les arrête? Oui. Les Warriors ne sont pas comparables? Bien oui! (1 h 20)

M. Sirros: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le député de Laurier et ministre des Affaires autochtones.

M. Sirros: La pertinence, c'est précisément ce que je pense qu'il ne faut pas faire.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je pense que, de façon générale, à date, l'intervention du député de Masson a respecté de façon globale et générale la pertinence telle que décrite dans nos règlements. Allez-y, M. le député de Masson.

M. Blais: M. le ministre, je sais que ce n'est pas plaisant d'entendre ce que je dis. Je le fais avec une grande délicatesse quand même, comme vous voyez. J'y vais avec délicatesse. J'ai tout le verbe pour être excessivement virulent, tonitruant, percutant, orageux, agaçant; je ne le ferai pas. Je ne fais qu'exposer les faits et vous demande, avec le responsable de la Sécurité publique, de faire quelque chose avant que les Blancs n'en viennent, un temps, à se faire un groupe de Warriors, eux aussi. Ce qu'on ne veut pas, ni de votre côté ni de notre côté de la Chambre.

Je trouve qu'il y a trop de complaisance. Vous voulez me montrer un article? Envoyez-moi-le par ...allez chercher l'article. M. le ministre voudrait me faire voir un article. Allez le chercher et je vais le regarder. Vous avez trop de complaisance. Complaisance du côté policier, complaisance du côté des comptes d'Hydro-Qué-bec. C'est trop! Et là, vous voulez emmener une troisième complaisance: leur permettre de diriger eux-mêmes leurs parties de bingo. Tandis que beaucoup d'autres personnes sur le territoire québécois, des associations à but non lucratif comme des villes, voudraient faire des bingos pour se bâtir un centre culturel, elles n'ont même pas le droit de diriger et de faire leurs propres règles. Alors, il y aurait des gens plus privilégiés, sur le territoire québécois, que d'autres? Bien voyons donc! Est-ce que, si on fait chanter les gouvernements et si on a une force de frappe qui terrorise un peu, on peut avoir à peu près n'importe quoi? C'est ça que ça veut dire? J'espère que ce n'est pas ça. J'espère que ce n'est pas ça que vous voulez dire. En tout cas, de ce côté-ci, on ne voudrait pas que ce soit ça. Et, personnellement, je ne voudrais pas non plus.

Les Mohawks, sur leur territoire, sont des gens terrorisés par les minorités qui habitent sur leur territoire et qui ont frontières ouvertes

vers les États-Unis. Et leur principal revenu, c'est la cigarette. 90 % à 95 % des cigarettes exportées aux États-Unis nous reviennent pour être vendues en contrebande ici. Essayez donc d'avoir une complaisance avec le gouvernement canadien. Qu'il empêche, au moins pour un certain temps, que des cigarettes canadiennes soient vendues aux États-Unis, par exemple. Est-ce que vous leur couperiez leurs vivres? Ce n'est pas une affaire violente, ça. Mais si 90 % à 95 % des cigarettes vendues aux États-Unis, de source canadienne, reviennent en contrebande sur le territoire canadien, est-ce qu'il n'y aurait pas une petite entente à faire avec Ottawa, afin qu'il y ait moins de contrebande et d'alimenter moins ceux qui sont un petit peu violents, disons, dans les minorités? Ah! Ça a l'air curieux. Ah oui! Mais, si on prend le mal à sa source, si c'est l'argent qui est la source de tous les malaises, si ce n'est pas ça, bien là, je me demande c'est quoi, là. C'est beau, le calme. Ah oui! c'est beau, et je suis un type qui aime le calme. Mais si ce n'est pas ça, c'est quoi? On protège qui, d'abord, là? On protège qui? Il y a une limite à la patience. Il y a une limite.

M. le Président, cette loi, à la rigueur, pour être acceptable, devrait être spécifique pour Lac-Saint-Jean-Pointe-Bleue. Deuxièmement, tous les autres groupes de minoritaires sur le territoire québécois, les Grecs ou les Portugais, devraient avoir ie droit de faire la même chose que les Mohawks, exactement pareil, si vous voulez que tout le monde soit égal. Les villes, les associations à but non lucratif devraient avoir le droit de faire des bingos comme bon leur semble après avoir signé des ententes avec vous et vous faire un rapport une fois par année, sinon, il y a deux catégories de gens sur le territoire québécois. C'est ce que je n'aime pas et c'est pour ça que cette loi-là en commission parlementaire, ça va lui prendre de grandes améliorations pour que le critique responsable vous dise oui. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Masson. Alors, sur le même sujet, je cède la parole à M. le député d'Ungava. Je vous rappelle que vous pouvez faire une intervention d'un maximum de 20 minutes, M. le député d'Ungava.

M. Christian Claveau

M. Claveau: Oui, M. le Président. Je prends la parole sur ce projet de loi là parce qu'il y a quelque chose là-dedans qui me semble foncièrement inadmissible au départ. C'est un projet de loi qui part d'un principe qui est, à mon sens, socialement inacceptable. D'abord, le ministre responsable des Affaires autochtones nous a présenté ce projet de loi avec pompe, avec un sérieux et avec, je dirais, même un orgueil personnel qui pourrait ressembler à celui qui vient de franchir l'Himalaya. On a l'impression, à l'entendre, qu'il vient d'aplanir toutes les montagnes de la terre et qu'il vient, par le biais d'un coup de baguette magique, de régler toute la question autochtone au Québec.

Il nous a dit: Nous sommes partis des 15 principes qui avaient été votés par le gouvernement du Parti québécois en 1984. Mon collègue de Masson dit: 1985. Je préfère croire mon collègue de Masson, donc, c'est 1985, le ministre ayant dit: 1984, tout à l'heure dans son discours. Alors, il a dit: Nous sommes partis de ces 15 principes-là, nous avons retenu, entre autres, le principe du droit de se gouverner sur son propre territoire, et c'est ce qui nous a amenés à régler l'immense, l'épineux, le traditionnel, la base du problème social des autochtones du Québec, la question des bingos. Vous comprendrez que je suis tombé de haut. J'ai pris toute une plonge quand je l'ai entendu. Essayer d'assimiler, essayer de faire accroire à la population du Québec qu'il s'agissait là d'une base, d'un pilier fondamental à la résolution de l'ensemble des problèmes autochtones au Québec, voyons donc! M. le Président, c'est mettre la charrue en avant des boeufs. C'est ça que le ministre fait actuellement, mettre la charrue en avant des boeufs, parce qu'on traite de problèmes précis, de technicalités avant d'avoir réglé ou d'avoir discuté de la plate-forme de base qui devrait soutenir l'ensemble de toutes ces technicalités.

Alors, on règle une question technique, la question des bingos, mais on n'a pas réglé le problème de base de l'autodétermination ou du pouvoir de se gouverner sur son territoire. Ce n'est pas en essayant de trouver une solution primaire au problème du bingo que l'on va régler l'ensemble des problèmes autochtones. Au contraire, on devrait d'abord, comme gouvernement responsable, négocier une plate-forme globale, une base solide de l'ensemble des interventions gouvernementales ou de la répartition des pouvoirs gouvernementaux et des pouvoirs des communautés autochtones dans l'administration de leur propre destinée. Et, à partir de là, une fois que l'on connaît cette base globale pour tout le monde, là on commence à monter les pièces du casse-tête, et la question des bingos peut être une de ces pièces-là. Mais la question des bingos n'est pas un socle, n'est pas une pierre d'assise pour débuter la construction de l'autodétermination ou de la capacité de se gouverner soi-même sur une réserve indienne. Ça n'a rien à voir. Ça n'a aucune commune mesure avec le problème auquel le ministre prétend s'être attaqué.

M. le Président, ça fait deux ans et demi que le ministre responsable des Affaires autochtones occupe ce poste, à peu près. Un an, me dit-il? Mettons-le à un an. C'est une bien piètre pitance après un an de négociations que de n'avoir rien d'autre à nous présenter en cette Chambre qu'un article de loi. Parce que le projet de loi 187, quoique ayant six articles, dans le

fond, en a cinq de concordance; il y a un article et c'est l'article 3. "L'article 34 de cette loi, modifié par l'article 32 du chapitre 46 des lois de 1990, est de nouveau modifie par l'addition, à la fin, de l'alinéa suivant." Tout le reste, c'est de la concordance. Les articles 1, 2, 4 - à 4 il y a un petit ajout qui est toujours relatif à l'application de cet article, de l'article 3 - 5 et 6, c'est de la concordance, de la date d'entrée en vigueur. Bien piètre pitance pour une année complète de négociations! Savez-vous que ça fait un article de loi qui revient cher la ligne! Si on considère tout ce que ça a pu coûter en salaires, déplacements, coûts des négociations, etc. Ça revient cher de la ligne pour essayer de régler le problème du gouvernement autochtone à partir de la question des bingos! (1 h 30)

Qui plus est, M. le Président, allons voir maintenant ce qu'il y a de fondamental dans ce projet de loi. Au départ, c'est un projet de loi qui émane d'un problème très précis, très localisé - le ministre l'a dit lui-même - à Pointe-Bleue. Il y a un problème avec les bingos. Ah! Il y a d'autres bingos qui se passent ailleurs, c'est clair. Sauf qu'il y a un problème spécifique par rapport au bingo de Pointe-Bleue. La communauté montagnaise, que je connais bien, d'ailleurs, et en laquelle j'ai plutôt tendance à avoir confiance... Je suis obligé de vous dire, M. le Président, que, à mon sens, Pointe-Bleue est un exemple. Pointe-Bleue est un des plus beaux sites, un des plus beaux villages, si vous me permettez l'expression, une des plus belles agglomérations du Saguenay-Lac-Saint-Jean. C'est une réserve montagnaise qui a su tirer son écu du jeu, qui a su se gagner la confiance régionale, qui a su collaborer avec les différents intervenants dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et qui, finalement, à mon sens, est devenue un exemple parmi l'ensemble des communautés autochtones. Je connais bien les Montagnais de Pointe-Bleue, du moins plusieurs d'entre eux, pour avoir, entre autres, passé mon enfance dans une zone qui était, qui est toujours d'ailleurs, parmi les territoires de chasse de Pointe-Bleue, dans le nord de la rivière Péribon-ka. Je peux vous dire qu'en principe, lorsqu'on regarde la question très précise de Pointe-Bleue, je n'aurais pas beaucoup de réticences à une approche semblable. C'est-à-dire que, suite à une négociation, on puisse s'entendre avec un organisme local qui aurait la responsabilité d'émettre des permis et de gérer, finalement, toutes les activités reliées au bingo sur le territoire de Pointe-Bleue ou sur tout autre lieu ou endroit - je reprends le terme même que l'on retrouve dans le projet de loi - sur tout autre établissement. Dans tout autre établissement qui peut être désigné - j'imagine à l'extérieur de la réserve même - mais comme étant un endroit où les autochtones, de Pointe-Bleue en particulier, pourraient tenir des activités de bingo.

Je n'ai pas de problème avec ça par rapport à Pointe-Bleue, mais, encore là, ça ne règle pas du tout le problème de Pointe-Bleue, pas plus que ça ne règle le problème des autochtones en général. D'autre part, ce n'est pas évident qu'une entente négociée avec les Montagnais de Pointe-Bleue soit nécessairement acceptable, transposa-ble, photocopiable, peut-être, ailleurs. Ce n'est pas du tout évident.

Je pense que, si on voulait vraiment être honnête dans cette approche, ce que l'on permettrait, disons, pour parler strictement des bingos - mes propos, d'ailleurs, ne sont pas en contradiction avec les propos de mon collègue de Masson, tout à l'heure, lorsqu'il parlait de la nécessité d'avoir une approche globale pour tout le monde, je suis tout à fait d'accord avec ce qu'il a dit. Sauf que cette approche globale doit se moduler aussi, d'une certaine façon. Alors, si on veut régler le problème spécifique de Pointe-Bleue à partir d'une entente que l'on doit transférer dans une loi pour la rendre applicable en vertu de la Loi sur les loteries et courses du Québec, bien, qu'on le fasse pour Pointe-Bleue. Qu'on ait une entente et, une fois que cette entente-là est négociée, qu'on sait à quoi s'en tenir, qu'il y a un contenu très précis, qu'on légifère pour légaliser l'entente tout en laissant la possibilité à toute autre réserve qui veut le faire, et je dirais même aussi à tout autre groupe dans la société qui voudrait faire une entente semblable, de pouvoir la faire et, après, qu'on légifère pour la légaliser.

Ce pourrait être une approche, et il me semble que cette approche-là aurait beaucoup plus de valeur ou beaucoup plus de possibilité d'être appliquée conformément à l'esprit de la loi qu'une approche globale où on dit: On va permettre, par le biais d'un amendement à la Loi sur les loteries, les concours publicitaires, les appareils d'amusement... On va amender la loi globalement pour permettre, après, de pouvoir signer des ententes avec les communautés autochtones. On précise d'abord que c'est uniquement avec les communautés autochtones. Moi, je dis que si on veut vraiment avoir une approche globale, ce n'est pas nécessairement un problème uniquement autochtone, le problème des bingos, à ce que je sache. Les bingos ne font pas énormément, ne font pas beaucoup partie de la culture ancestrale autochtone. Ce n'est pas une découverte de Christophe Colomb, ça, que d'avoir trouvé des bingos en territoire d'Amérique en arrivant. Les bingos, c'est quelque chose qui est apparu dans les activités des autochtones avec le temps, la même chose que les motonei-ges, la même chose que les moteurs hors-bord qui ont remplacé les rames de chaloupe dans les canots, la même chose que le fibre de verre a remplacé l'écorce dans la fabrication des canots, la même chose que les tentes ont été remplacées par des maisons, puis enfin...

Mais ce n'est pas nécessairement l'essence

de la culture autochtone ça, le bingo. Alors, j'imagine que lorsque l'on veut régler le problème du bingo par rapport aux autochtones, on peut s'imaginer aussi qu'il y a d'autres éléments, d'autres composantes de la société qui pourraient aussi bénéficier d'une approche semblable. Sans rien enlever aux autochtones. Sans nuire en rien à l'approche que le gouvernement peut avoir par rapport aux conditions autochtones. J'imagine, moi, qu'une association montréalaise qui voudrait bénéficier d'une espèce de droit d'autogérer des bingos afin de préparer des paniers de Noël pour les pauvres, par exemple, parce que le gouvernement est incapable de trouver des solutions au problème de la pauvreté à Montréal, eh bien, ça pourrait être tout aussi légitime que de permettre à Maliotenam de faire des bingos, et sans rien enlever pour autant aux Montagnais de Maliotenam. Il me semble que ça pourrait très bien aller ensemble.

Alors, pourquoi doit-on modifier la Loi sur les régies, concours publicitaires et appareils d'amusement uniquement en fonction de l'approche d'un problème autochtone? Quand, dans le fond, oui, ça peut être intéressant pour les autochtones. Mais oui, ça peut aussi être intéressant pour d'autres couches de la société, sans rien enlever et en ne nuisant d'aucune façon que ce soit aux droits ancestraux des autochtones.

Alors, pourquoi ne gardons-nous donc pas une ouverture beaucoup plus globale, beaucoup plus raisonnable et, je dirais, beaucoup plus responsable comme gouvernement à l'effet de dire: Oui, on peut négocier des ententes très spécifiques avec certaines communautés autochtones, ententes que l'on rendra par la suite légales ou applicables en vertu d'une loi. Mais la même chose peut être ouvert aussi à d'autres groupes de la société qui pourraient peut-être prendre le relais du gouvernement, là où le gouvernement est incapable de trouver des solutions à des problèmes, parce qu'il y a quand même pas mal de monde qui se servent des bingos à l'occasion pour financer des activités, charitables pour la grande majorité. L'Église catholique même a énormément financé, au cours des décennies, des activités à partir des bingos. Je ne serais même pas surpris que c'est de là que ça vient, la pratique du bingo dans les communautés autochtones. Alors, il n'y aurait rien de scandaleux, aucune anomalie à vouloir prôner le fait qu'une approche semblable puisse s'appliquer à d'autres communautés qu'aux communautés autochtones, et je suis convaincu qu'il n'y a pas un autochtone sur le territoire du Québec qui serait contre ça, dans la mesure où ça ne nuit en rien à l'approche traditionnelle des autochtones ni à la capacité de s'autogérer, de s'autogouvemer et de prendre des décisions dans leur propre destinée, par rapport à leur propre avenir. À ce que je sache - en tout cas, il faudra qu'on me fasse la preuve du contraire si on est capable de me le nier, mais, moi, je suis prêt à entendre qu'on me fasse la preuve du contraire - le bingo n'a jamais fait partie d'aucune revendication ancestrale des autochones, d'aucun droit ancestral. (1 h 40)

Et on prétend aujourd'hui qu'on va régler les problèmes des communautés autochtones et qu'on commence à établir les bases d'une nouvelle relation entre Blancs et autochtones à partir de droits uniques qu'on donnerait aux autochtones dans la gestion des bingos. Voyons donc! C'est de prendre un grain de sable pour l'Everest, M. le Président. Ça n'a aucune commune mesure. Ça n'a rien à voir, même, à la limite. C'est une mesure administrative que l'on reconnaît maintenant ou que l'on veut reconnaître aux autochtones ou à certains groupes autochtones tout en la niant à d'autres parties de la société qui pourraient aussi en bénéficier et en assimilant une mesure administrative de cet ordre-là à une revendication ancestrale sur les droits autochtones. Voyons donc! Je pense qu'un gouvernement qui se tient debout, un gouvernement responsable n'a tout simplement pas le droit de réagir ou de raisonner de cette façon-là. C'est aberrant comme approche, M. le Président. C'est inadmissible comme approche.

Nous ne sommes pas contre le fait, à la limite, qu'il puisse y avoir une certaine façon, chez les autochtones, de gérer un certain nombre de programmes différemment qu'ailleurs dans la société. D'ailleurs, dans le programme du Parti québécois, au dernier congrès, on a voté un certain nombre de mesures, justement, mais qui ont été discutées et négociées avec des représentants des communautés autochtones avant, un certain nombre de mesures qui établissent les plates-formes d'une véritable négociation globale. Et on ne le fait pas en cachette dans une fin de session. On l'a fait pendant un certain nombre de mois, au su et au vu de tout le monde, et puis après, on l'a voté dans un congrès, devant tous nos membres. Même s'il y avait des membres qui n'étaient pas d'accord, ils ont eu droit à la dissidence. Il n'y a rien de sorcier là-dedans. On est dans un système qui nous donne le droit à la dissidence. Et, moi, je respecte les opinions de certains de nos membres qui n'étaient pas d'accord avec ce qu'on a proposé, qui ont voté contre au congrès. Sauf que la majorité étant ce qu'elle est dans notre système démocratique, eh bien, c'est rentré dans notre programme.

On a là une approche globale intégrée de toutes les questions autochtones, de négociation d'une nouvelle approche, de nouveau consensus social pour les autochtones. J'ai participé à peu près à la totalité de ces débats-là durant l'été et l'automne 1990, jusqu'à un tout petit peu avant Noël, la dernière rencontre qu'on avait eue avec les représentants des communautés autochtones. Jamais, jamais, jamais il n'a été question des bingos comme faisant partie des revendications ancestrales des autochtones, comme faisant partie

de quelque chose d'inhérent au monde autochtone, comme faisant partie - j'oserais dire - de quelque chose d'indissociable au futur, au présent et au passé des autochtones.

Non, il n'a jamais été question de ça. Il y a des problèmes bien plus graves que ça, par exemple, auxquels on devrait s'attaquer, puis rapidement, avant que ça aille trop mal! Mais le gouvernement aime mieux s'amuser avec les feux follets, donner l'illusion de la lumière, alors que, dans le fond, c'est une onde vibratoire quelque part qui disparaît aussi vite, comme elle est apparue.

C'est ça qu'on a entre les mains actuellement, M. le Président. Et c'est ce qui fait que ce projet de loi devient totalement inacceptable dans son essence même. Pas que nous en ayons contre le principe, mais nous en avons énormément contre l'approche du gouvernement. D'où aussi la position de mon collègue de Montmorency qui dit: Écoutez, avant de nous faire voter sur quelque chose comme ça, passons donc en consultation. Allons vérifier avec le milieu autochtone. C'est quoi le véritable contenu? Qu'est-ce qu'il y a derrière tout ça?

Moi, il y a toujours une chose, M. le Président, qui me frappe à chaque fois qu'on est pris devant un projet de loi comme ça. C'est qu'on nous demande à nous, parlementaires, de faire notre boulot au meilleur de notre connaissance, dans le plus grand respect de l'intégrité de cette Chambre, du Parlement. Et là, on nous dit: Vous allez nous permettre de passer un projet de loi qui va rendre exécutoire une entente qu'on a prise avec Poirue-Bleue. Mais il n'y a personne qui est courant de ce qu'il y a dans cette entente-là, M. le Président.

On veut nous faire voter un projet de loi qui va permettre de légaliser une approche qui fait partie d'une entente, mais on refuse de nous montrer l'entente, on refuse de nous parler de la substance de la négociation. On refuse même de nous dire qui est assis à la table de négociation, à la limite, pour faire en sorte qu'on soit incapable d'aller chercher l'information. Qu'on nous la dépose, l'entente, qu'on nous montre ce qu'il y a là-dedans, qu'on nous donne les véritables intentions du gouvernement, le véritable contenu des discussions qui ont amené le gouvernement à prendre cette position. Là, peut-être qu'on pourra voter en toute âme et conscience, dans le respect de l'institution parlementaire que nous représentons, mais au moment où on se parle, c'est impossible. Comment voulez-vous qu'on vote là-dessus, dans le respect de notre institution, quand on ne sait même pas sur quoi on va voter. On donne un chèque en blanc au gouvernement pour négocier des choses dont on n'est même pas au courant, dont on ne connaîtra peut-être jamais le contenu, à moins de passer par la loi sur l'accès à l'information, à la limite, un de ces jours.

Alors, c'est pour ça, M. le Président, si le gouvernement veut qu'on aille de l'avant là-dedans, qu'il convoque une commission parlementaire qui permette aux responsables autochtones qui ont négocié des ententes, à date, avec le ministre, de venir s'expliquer, de venir voir le contenu de ça et, là, on verra, en toute connaissance de cause...

M. Savoie: Question de règlement, M. le Président.

M. Claveau: ...si ça vaut la peine de continuer dans ce genre d'approche. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député d'Ungava. Oui, M. le ministre.

M. Sirros: Ayant eu l'assentiment de mon collègue du Revenu, j'aimerais demander le consentement de l'Opposition pour faire la réplique, M. le Président.

M. Filion: II n'y a pas de consentement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): s'il n'y a pas d'autres interventions, je vais inviter le parrain de la motion, à savoir m. le ministre du revenu, à procéder à sa réplique.

Une voix: Vous ne me ferez pas accroire...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): pas de réplique. alors, est-ce que la motion de m. le ministre du revenu proposant l'adoption du principe du projet de loi 187, loi modifiant la loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la commission du budget et de l'administration

M. Bélisle: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que ledit projet de loi 187...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Pas sur division, ils ne l'ont pas dit.

M. Bélisle: ...soit déféré à la commission du budget et de l'administration pour étude détaillée, pour que le ministre du Revenu de même que le ministre délégué aux Affaires autochtones en soient membres.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion de déférence est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: L'article 5 de notre feuilleton, M. le Président.

Projet de loi 407 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 5 de notre feuilleton, M. le ministre du Revenu propose l'adoption du principe du projet de loi 407, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal. Je cède la parole à M. le ministre du Revenu.

M. Raymond Savoie

M. Savoie: Merci beaucoup, M. le Président. Je pense que vous comprendrez qu'il n'était pas nécessaire de faire de réplique au discours du député d'Ungava. Ça n'avait ni queue ni tête.

M. le Président, il me fait plaisir de présenter, pour adoption de principe, le projet de loi 407. Ce projet de loi modifie diverses lois fiscales et, plus particulièrement, la Loi sur les impôts afin de donner suite, principalement, au discours sur le budget du ministre des Finances du 2 mai 1991, à ses déclarations ministérielles du 19 décembre 1990 et du 24 octobre 1991, au document technique publié par le ministère des Finances le 13 février 1991 et intitulé 'Taxe de vente du Québec", ainsi qu'aux bulletins d'information 91-2 et 91-4 émis par ce ministère, respectivement le 5 juillet 1991 et le 4 octobre 1991.

En outre, M. le Président, le projet de loi apporte des modifications à l'assurance collective, au principe d'allégement du fardeau fiscal, à la hausse du crédit d'impôt remboursable pour la TVQ, à l'indexation des besoins essentiels qui est très attendue de la part des citoyens du Québec. Il y a également des provisions concernant l'aide aux productions télévisuelles et cinématographiques, des crédits d'impôt pour la recherche et le développement, de l'aide à la formation des travailleurs, des améliorations au programme REA, prolongation des parts permanentes des caisses, des crédits d'impôt à la formation de la main-d'oeuvre et, finalement, des modifications à la Loi sur le ministère du Revenu, M. le Président.

Alors, il s'agit de modifications très techniques aux différentes lois fiscales telles que modifiées dans les déclarations, les bulletins et les avis émis par le ministère des Finances. C'est un projet de loi, M. le Président, qui compte 249 articles qu'on aura l'occasion d'examiner lors des travaux de la commission du budget et de l'administration qui doivent avoir lieu, j'imagine, au mois de février.

Normalement, dans ce genre de projet de loi, compte tenu du fait que la majorité des prévisions sont déjà en application et étant donné qu'effectivement le monde des affaires, l'ensemble des citoyens du Québec profite déjà des bénéfices contenus dans les différentes déclarations, normalement, ce genre de projet de loi n'a pas besoin de longues discussions à ce moment-ci à l'Assemblée nationale. Il suffit d'en donner les grandes lignes et, par la suite, passer au niveau des travaux de la commission parlementaire, pour ensuite revenir en troisième lecture. Je pense qu'à ce moment-là on pourrait éclaircir les différentes orientations compte tenu du fait que la grande majorité, pour ne pas dire la totalité des articles ont déjà fait l'objet d'annonces. Comme je vous l'ai mentionné au tout début de mon discours, M. le Président, ces mesures sont déjà en vigueur à travers le Québec. Je vous remercie. (1 h 50)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre du Revenu. Alors, sur cette motion du ministre du Revenu, proposant l'adoption du principe du projet de loi 407, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal, je cède la parole à M. le député de Montmorency. Je vous rappelle que vous disposez d'une période maximale de 60 minutes, M. le député de Montmorency.

M. Jean Filion

M. Filion: M. le Président, ne soyez pas inquiet, je ne me rendrai pas à 60 minutes, pas à cette heure-ci. Alors, effectivement nous avons un autre projet de loi en matière fiscale, le projet de loi 407, qui ressemble un peu à celui qu'on vient d'étudier, 170 - une étude très partielle du projet de loi 170.

Le projet de loi 407 fait appel, encore une fois, à un volume assez impressionnant de mesures fiscales où on se retrouve avec 191 pages de texte qui viennent, à toutes fins pratiques, ajuster une foule de mesures techniques. Comme je l'ai fait pour le projet de loi 170, il va me faire plaisir à nouveau d'étudier minutieusement ce projet de loi, afin toujours d'apporter une critique constructive à la législation du Québec et de s'assurer, au meilleur de notre connaissance, que la loi va être modifiée afin qu'elle soit le plus lisible et compréhensible possible pour celui qui a à l'appliquer. Bien sûr, nous allons regarder le projet de loi paragraphe par paragraphe, toujours dans un but de comprendre d'où on vient et où on s'en va.

Vous savez, M. le Président, en matière fiscale, souvent on apporte un ajustement technique et il faut comprendre pourquoi, et même apporter des exemples à l'occasion pour

mieux saisir les conséquences de l'article de loi.

Le projet de loi 407, bien sûr, découle du budget du ministre des Finances du 2 mai 1991. Ce projet de loi, à toutes fins pratiques, au niveau des conséquences monétaires, représente plus ou moins de sommes d'argent compte tenu du fait qu'on a traité à travers les différents projets de loi cet automne, entre autres au niveau de la TVQ et également une mesure, je crois que c'est le projet de loi 120, au niveau des frais financiers sur garantie, des garanties de prêts par l'État, par exemple Hydro-Québec... Alors, les sorties de fonds de ce projet de loi représentent au net environ 19 000 000 $. On devait percevoir avec la fiscalité, selon le dernier budget, 1 316 000 000 $ et on en aura perçu, à travers la taxe de vente, les carburants, les boissons alcooliques, le tabac et les frais de garantie, environ 1 297 000 000 $. Ce projet de loi que l'on étudie, tout près de 200 pages, prévoit environ des deniers publics pour 19 000 000 $.

Inutile de vous dire que ce projet de loi est encore à saveur très technique; beaucoup d'ajustements techniques probablement, j'espère, pour boucher certains trous. On sait lorsqu'on les voit à la première lecture, nous on les adopte, les trous. Alors, je suppose que là on veut en corriger une couple et je serai sûrement en mesure de commenter davantage tout le projet de loi au fur et à mesure qu'on évoluera en commission parlementaire.

M. le Président, ce projet de loi, à toutes fins pratiques, va traiter beaucoup de sujets. Un sujet où je suis un peu surpris, c'est qu'on parle de l'indexation des besoins essentiels reconnus dans le régime d'imposition. M. le Président, je pensais qu'on l'avait oublié, qu'on avait oublié ça, les besoins essentiels, du côté du gouvernement. On avait commencé à taxer avec la consommation et on se foutait des besoins essentiels. Là, on nous les ramène au niveau de l'indexation de l'impôt sur le revenu. Dommage qu'il n'y ait pas d'harmonisation des besoins essentiels, l'impôt sur le revenu et la taxe de vente, ça va ensemble, ça. On reconnaît les besoins essentiels au niveau de l'impôt sur le revenu, mais au niveau de la taxe de vente, on dit que ce n'est pas important, mais c'est les mêmes besoins essentiels de vie. On n'aurait pas dû taxer les gens au niveau de la consommation, comme on veut éviter la taxation au niveau de l'impôt sur le revenu. Quand je fais ce parallèle-là, je pense aux chaussures, aux vêtements, aux appareils électriques qu'on taxe au niveau de la consommation et, de plein front, bien sûr, c'est toujours les petits, les gagne-petit et la classe moyenne qui écopent dans une taxe à la consommation. Alors, les besoins essentiels n'étaient pas importants pour la taxe à la consommation, mais je m'aperçois qu'au niveau de l'impôt sur le revenu, on maintient le cap. Le livre blanc sur la fiscalité semble toujours intéresser le gouverne- ment libéral; alors, peut-être que ça les guidera pour reconnaître les besoins essentiels aussi en matière de taxe de vente.

Bien sûr, on est face à un gouvernement qui taxe beaucoup, alors, il y aura majoration des taux d'imposition des corporations qu'on va examiner. On va apporter, également, certaines modifications aux techniques, l'assouplissement des règles relatives aux sociétés à capital de risques, de recherche et de développement. Est-ce qu'on parlera toujours de nos projets immoraux qu'on a vécus, cet automne, en matière de recherche et développement avec les universités? Peut-être qu'on trouvera les mesures qui vont combler et boucher le trou auquel on a assisté... Et effectivement, on se retrouvait dans des situations où c'était vraiment abusif de voir nos règles fiscales, comment elles étaient utilisées par les praticiens, et qu'on n'a même pas osé utiliser notre pouvoir de règles anti-évitement pour bloquer le projet. Alors, je suppose qu'on va nous apporter des règles à ce niveau-là pour bien encadrer les scénarios d'abris fiscaux au niveau de la recherche et du développement.

M. le Président, il est très clair qu'on va se retrouver, encore une fois, dans une commission où on va avoir à étudier des mesures très techniques, des mesures qui doivent être étudiées de façon détaillée. J'espère que, cette fois-ci, M. le Président, nous ne serons pas face à un bâillon où, encore une fois, on nous empêche de travailler et d'analyser correctement toutes ces mesures fiscales.

Alors, bien sûr, nous sommes contre l'adoption de ce projet de loi, compte tenu de plusieurs mesures lors du dépôt sur le budget avec lequel nous étions contre. Sans plus tarder, pour ce soir, effectivement, je veux simplement vous dire que nous serons très alertes, encore une fois, au niveau de ce projet de loi et qu'il va nous faire plaisir de l'étudier paragraphe par paragraphe en commission parlementaire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de montmorency. est-ce qu'il y a d'autres interventions? est-ce qu'il y a une réplique? est-ce que la motion du ministre du revenu proposant l'adoption du principe du projet de loi 407, loi modifiant de nouveau la loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal, est adoptée?

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'économie et du travail

M. Bélisle: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que ledit projet de loi 407 soit

déféré à la commission du budget et de l'administration pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion de déférence est adoptée?

M. Bélisle: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: À cette étape de nos travaux, M. le Président, je fais motion pour ajourner nos travaux au mardi 17 décembre 1991, à 9 heures.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Les travaux de l'Assemblée sont ajournés à ce matin, 17 décembre, à 9 heures.

(Fin de la séance à 2 heures)

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