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(Quatorze heures huit minutes)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Nous allons nous recueillir quelques instants.
Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.
Nous allons maintenant procéder aux affaires courantes.
Il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi. Je voudrais simplement informer
l'Assemblée à ce moment-ci que la décision de la
présidence sur la question de la recevabilité du projet de loi
197, Loi sur la limitation des dépenses budgétaires,
présenté par M. le député de Saint-Louis, sera
rendue au moment des renseignements sur les travaux de l'Assemblée.
Dépôt de documents. M. le leader du gouvernement.
Dépôt de documents
Rapport annuel de la Commission consultative de
l'enseignement privé
M. Pagé: M. le Président, comme ministre de
l'Éducation, j'ai deux documents à déposer. Tout d'abord,
je voudrais déposer le rapport annuel 1990-1991 de la Commission
consultative de l'enseignement privé.
Rapport de l'enquête sur la gestion à
la
Direction de la formation à distance du
ministère de l'Éducation et
échange
de correspondance à ce sujet
Dans un deuxième temps, M. le Président, tel que je m'y
étais engagé, je voudrais déposer le rapport de
l'enquête sur la gestion a la Direction de la formation à distance
du ministère de l'Éducation du Québec. De plus, M. le
Président, toujours en fonction de ce rapport qui a été
déposé vendredi soir, je voudrais déposer ici, en cette
Assemblée, une lettre qui m'est adressée par le sous-ministre de
l'Éducation, M. Michel Paquet, une lettre que j'ai adressée
à M. André Vézina, sous-ministre adjoint à la
planification, une lettre que j'ai adressée à Mme
Thérèse Ouellet, sous-ministre adjointe à
l'administration, une lettre que j'adresse à M. Jean-Noël Poulin,
président à la Commission de la fonction publique, une lettre que
j'adresse à M. Guy Breton, Vérificateur général par
intérim, toujours sous ma signature, et une lettre que j'adresse
à M. Jean K. Samson et une lettre que j'ai reçue aussi de M. Jean
K. Samson, sous-ministre associé au ministère de la Justice.
Le Président: Merci, M. le ministre de l'Éducation.
Tous ces documents sont donc déposés. Maintenant, M. le ministre
du Tourisme.
Rapport annuel du ministère du Tourisme
M. Vallerand: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de
déposer le rapport annuel 1990-1991 du ministère du Tourisme du
Québec.
Le Président: Ce rapport est déposé. M. le
ministre responsable de l'application des lois professionnelles.
Rapport annuel de la Corporation
professionnelle des orthophonistes et
des audiologistes du Québec
M. Savoie: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de
déposer le rapport des activités 1990-1991 de la Corporation
professionnelle des orthophonistes et des audiologistes du Québec.
Le Président: Ce rapport est également
déposé.
Maintenant, dépôt de rapports de commissions. M. le
président de la commission des institutions.
Dépôt de rapports de commissions
Étude détaillée du projet de loi 159
M. Dauphin: oui. merci, m. le président. j'ai donc
l'honneur de déposer le rapport de la commission des institutions qui a
siégé le 13 décembre 1991 afin de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 159, loi modifiant le
code civil du bas canada en matière de tutelle et de curatelle. le
projet de loi a été adopté.
Le Président: Ce rapport est déposé. M. le
président de la commission du budget et de l'administration et
député de Vanier.
Étude détaillée du projet de loi
170
M. Lemieux: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui
a siégé les 3, 4, 5, 6, 10, 11 et 12 décembre 1991 afin de
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 170, Loi sur la taxe de vente du Québec et modifiant diverses
dispositions législatives d'ordre fiscal. L'étude du projet de
loi n'a pas été complétée.
Le Président: Ce rapport est déposé. M. le
président de la commission de l'économie et du travail et
député de Laval-des-Rapides.
Étude détaillée du projet de loi
186
M. Bélanger: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail
qui a siégé les 11, 12 et 13 décembre 1991 afin de
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 186, c'est-à-dire la Loi modifiant la Loi sur le bâtiment et
d'autres dispositions législatives. Le projet de loi a été
adopté avec des amendements.
Le Président: Ce rapport est déposé.
Maintenant, Mme la vice-présidente de la commission de
l'aménagement et des équipements et députée de
Mégantic-Compton.
Consultation et étude détaillée
du projet de loi 301
Mme Bélanger: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des
équipements qui a siégé le 13 décembre 1991 afin
d'entendre les intéressés et de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt
privé 301, Loi concernant ville d'Anjou. Le projet de loi a
été adopté avec des amendements.
Le Président: Est-ce que ce rapport est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Mme la députée
de Mégantic-Compton.
Consultation et étude détaillée
du projet de loi 303
Mme Bélanger: M. le Président, j'ai aussi l'honneur
de déposer le rapport de la commission de l'aménagement et des
équipements qui a siégé le 13 décembre 1991 afin
d'entendre les intéressés et de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt
privé 303, Loi concernant la ville de Saint-Hubert. Le projet de loi a
été adopté avec des amendements.
Le Président: Est-ce que ce rapport est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
Dépôt de pétitions.
Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de
privilège ou sur un fait personnel.
Maintenant, je voudrais vous aviser qu'après la période
des questions et réponses orales M. le ministre de la Santé et
des Services sociaux répondra à une question posée le 12
décembre dernier par M. le député de Rouyn-Noranda-
Témiscamingue concernant les négociations avec les
médecins résidents.
Ceci étant dit, nous allons maintenant procéder à
la période de questions et réponses orales des
députés. Je vais reconnaître, en première question
principale, M. le député d'Ungava.
QUESTIONS ET RÉPONSES ORALES
Solutions de rechange pour régulariser la
situation à Kahnawake
M. Claveau: M. le Président, depuis plusieurs jours
déjà, le ministre de la Sécurité publique laisse
croire en cette Chambre qu'il n'aura que de bonnes nouvelles concernant la
conclusion imminente d'une entente sur les Peacekeepers de Kahnawake. Il y a
à peine une heure, le ministre de la Sécurité publique
était en conférence de presse pour annoncer la rupture des
négociations, et cela, pour un temps indéterminé qui
risque d'être long, d'après ce qu'on a pu comprendre.
Devant cet échec, le ministre de la Sécurité
publique peut-il nous dire quelles sont les alternatives qu'il a retenues afin
de régulariser le plus tôt possible la situation dans le secteur
de Kahnawake?
Le Président: M. le ministre de la Sécurité
publique.
M. Ryan: D'abord, M. le Président, je voudrais souligner
qu'à l'occasion d'une réunion tenue hier avec le conseil
communautaire de Kahnawake, j'ai appris, à ma grande déception,
que le conseil n'était pas en mesure de donner suite à un
engagement dont il avait été convenu à une réunion
tenue lundi dernier. Le gouvernement avait soumis une proposition écrite
concernant le statut des Peacekeepers qui donnait lieu à un accord
général. Il avait été entendu qu'avant de donner
suite à ce document, chacune des deux parties devrait faire des actes
concrets pour montrer, de manière tangible, sa volonté d'en venir
à un règlement négocié de tout le litige policier
à Kahnawake. Les actes concrets qui devaient être posés
étaient les suivants: du côté du gouvernement, nous
acceptions de réduire de manière sensible la présence
policière sur les routes qui traversent la réserve; du
côté du conseil des Mohawks, on devait enlever
immédiatement les guérites qui bloquent l'entrée du
village à cinq endroits différents depuis au-delà d'un
an.
Nous sommes arrivés à la réunion hier et M. Norton
a dû me faire part, au nom du conseil de Kahnawake, qu'il n'était
pas en mesure de livre la marchandise. J'ai été
profondément déçu. Si cette condition, qui avait fait
l'objet d'échanges pendant de nombreuses semaines, ne pouvait pas
être exécutée par le conseil mohawk,
ça remettait en question toute la négociation que nous
avons eue au cours des derniers mois. Nous en sommes là ce matin. La
réunion s'est terminée dans la correction, de manière
courtoise. J'espère qu'ils auront l'occasion de repenser à la
situation aujourd'hui et demain. Mais il est évident que ce changement
d'attitude témoigne d'un rapport de forces à l'intérieur
de la communauté sur lequel nous n'avons pas de contrôle dans
l'immédiat et dont je souhaite qu'il finisse par se dénouer au
profit de ceux qui veulent des solutions ordonnées, pacifiques et
démocratiques. Pour le moment, nous maintenons la présence
policière sur les routes qui traversent la réserve au même
point où elle en était. Nous exerçons une vigilance
particulière sur les incidents qui pourraient survenir. Au cours des
jours et des semaines à venir, nous réexaminerons,
évidemment, la stratégie suivie jusqu'à maintenant afin de
voir si des ajustements seront nécessaires.
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
M. Claveau: M. le Président, est-ce que le ministre
conviendra que ce n'est pas l'historique de la situation à Kahnawake que
je lui ai posé comme question, ni à savoir s'il devait garder ou
non les forces policières tel qu'il les a actuellement? C'est concernant
les alternatives. Le ministre a-t-il des alternatives? La présence de
forces policières autour de Kahnawake, ce n'est pas une alternative,
c'est une solution transitoire, temporaire. Quelles sont les solutions à
long terme que le ministre entend mettre de l'avant pour régler le
problème une fois pour toutes, s'il n'y a plus de
négociation?
Le Président: M. le ministre.
M. Claveau: D'abord, il n'est pas dit qu'il n'y aura plus de
négociation. Il n'y en a pas à l'heure où nous nous
parlons. Il peut arriver toutes sortes de choses dans les heures ou les jours
qui suivront. Je ne le sais pas pour l'instant et je ne tire pas de conclusions
radicales. Je voudrais simplement dire au député d'Ungava qu'hier
matin, avant de rencontrer le conseil communautaire de Kahnawake, j'ai
rencontré les maires de la MRC de Roussillon, qui étaient tous
présents, pour leur faire part de la situation, recevoir leurs
réactions et leurs conseils. Il y en a beaucoup qui ont parlé
comme vous venez de parler, mais quand nous nous sommes expliqués, je
pense qu'il y avait un climat de compréhension beaucoup plus grand.
Après mon départ, à mon insu, ils ont adopté
une résolution dans laquelle ils disent que le conseil de la MRC,
à l'unanimité, appuie les démarches du ministre de la
Sécurité publique visant à solutionner les
problèmes de sécurité publique, en particulier ceux sur
les routes provinciales traversant la réserve de Kahnawake.
J'ai été très surpris de prendre connaissance de
cette résolution, ce matin. Je veux exprimer aux maires de la
région, en particulier à M. Bourcier, le maire de
Châteauguay, et au préfet de la MRC et maire de Delson, M.
Gagné, ma vive appréciation pour la compréhension qu'ils
manifestent devant cette situation qui n'a pas de solution dans les 24 heures
encore.
Le Président: En question complémentaire.
M. Claveau: Tous ces beaux mots ne changent rien au
problème, M. le Président. À la suite de sous-entendus et
de propos vagues tenus par le ministre lors de sa conférence de presse,
tout à l'heure, pourrait-il être en cette Chambre un peu plus
explicite sur le rôle et, éventuellement, sur la part de
responsabilités du fédéral dans l'échec de ces
négociations?
Le Président: M. le ministre. (14 h 20)
M. Ryan: Moi, j'ai veillé, pendant toute cette
négociation qui a duré depuis plus d'un an, à tenir mon
homologue fédéral, le Solliciteur général du
Canada, informé du cheminement de la démarche. Parce que, au bout
de la ligne, nous recherchons un accord tripartite dont seraient parties le
gouvernement fédéral, le gouvernement du Québec et le
conseil des Mohawks. Par conséquent, nous avons eu une relation qui, de
notre côté, a été empreinte de franchise et de
loyauté.
Maintenant, l'été dernier, M. Norton était venu me
voir un jour. Nous lui avons soumis une proposition en juin; il est venu me
voir en juillet pour me dire qu'il ne pouvait pas accepter la proposition. Je
lui ai demandé pourquoi, parce qu'on nous avait donné toutes les
indications qu'elle serait acceptée. Il m'a dit: Savez-vous, nous avons
repensé à notre affaire; là, nous avons commencé
à négocier une entente de caractère plus
général avec le gouvernement fédéral et nous aimons
mieux nous entendre avec eux qu'avec vous autres. Alors, moi, j'ai
demandé tout de suite à mon homologue fédéral et au
ministre des Affaires indiennes à Ottawa de ne pas faire une chose comme
celle-là parce qu'il avait été convenu entre les deux
gouvernements, au début de 1991, que nous réglions d'abord le
problème de la police et qu'ensuite les autres questions pourraient
être abordées. Et j'avais l'entier appui, à ce sujet, de
mon collègue, le ministre délégué aux Affaires
autochtones. Or, nous apprenions il y a quelque temps que le gouvernement
fédéral s'apprêtait, au début de décembre,
à signer quand même une entente et nous avons réussi
à les en dissuader. Mais, finalement, ils l'ont signée vendredi.
Je pense que c'est en complète violation de l'esprit des entretiens que
nous avions eus ensemble au cours de l'année. Je le déplore
profondément et je ne serais pas surpris qu'il y ait eu un certain
impact de ce geste que je considère comme un manque de
solidarité à l'endroit du résultat des
négociations.
Le Président: En question principale, M. le leader de
l'Opposition et député de Joliette.
Branchement illégal sur le
réseau
d'Hydro-Québec de certains postes de garde de
Kahnawake
M. Chevrette: M. le Président, on apprenait, à la
fin de novembre, qu'Hydro-Québec concluait des ententes secrètes
avec les groupes autochtones pour récompenser les bons clients, 300 $
par bon client, et également confiait une subvention de l'ordre de 90
000 $ à 100 000 $ pour des projets communautaires qui ne sont même
pas définis. Et, jusqu'à date, autant HydroQuébec que Mme
la ministre de l'Énergie n'ont pas rendu cette entente publique. Tout ce
qui est public, c'est qu'un jeune monteur de ligne, lui, a été
suspendu. Il perdra 10 000 $ pour avoir osé utiliser son droit à
la dissidence ou pour avoir dit publiquement ce que des centaines et des
milliers de personnes pensaient.
Ce matin, la surprise est encore plus grande et là, on
s'interroge vraiment sur ce qui se passe à Hydro-Québec. On
apprend que plus de la moitié des guérites ou des postes de garde
dont parlait le ministre de la Sécurité publique tantôt
sont branchés illégalement sur Hydro-Québec et qu'on leur
fournit le jus très agréablement. Vous voyez à quoi
ça conduit. Est-ce que la ministre de l'Énergie peut nous dire si
elle a rencontré Hydro-Québec sur ces dossiers et si elle entend
carrément arrêter ces pratiques douteuses?
Le Président: Mme la ministre de l'Énergie et des
Ressources.
Mme Bacon: M. le Président, sur la question des 300 $ qui
ont été remis à ceux qui avaient payés des comptes
- il faudrait quand même dire toute la vérité en cette
Chambre comme à la population - ce sont des gens qui avaient payé
des comptes de 1984 à 1991, d'autres ne l'ont pas fait et, comme le
temps était prescrit de 1984 à 1986, les gens ont demandé
un remboursement puisque les autres ne les payaient pas.
Je ne dis pas que je suis d'accord avec cette décision; c'est une
décision purement administrative et non une décision politique.
Je n'ai pas été consultée, M. le Président, et, si
j'avais été consultée, ma réponse aurait
été négative.
Quant au branchement illégal, si on écoutait le
député, ce serait tout le monde qui serait branché
illégalement, ce qui n'est pas la vérité. Selon les
informations que j'ai, qui me sont fournies par Hydro-Québec, deux
barricades qui étaient situées sur le territoire de la
réserve sont branchées sur le réseau Hydro-Québec;
celle qui s'appelle Adirondack a son propre compteur, lequel a
été lu la semaine dernière, et le poste de Saint-Isidore
sera lu demain, M. le Président.
Il y a effectivement une barricade qui s'appelle Old Malone Highway qui
n'est pas officiellement branchée; elle nécessite un prolongement
du réseau qui devra être défrayé par le conseil de
bande - ce n'est pas Hydro-Québec qui va le payer - et la consommation
à cette barricade sera estimée et la facture sera envoyée
au conseil de bande.
Le Président: En question complémentaire.
M. Chevrette: M. le Président, je n'ai jamais dit que
c'étaient tous les postes de garde et je n'ai pas dit que c'était
tout le monde, j'ai dit que nos informations étaient à l'effet
qu'il y en avait qui étaient branchés illégalement. Les
guérites, il me semble que, je ne sais pas, ça doit être un
peu surprenant, ça...
Le Président: Votre question, s'il vous plaît.
M. Chevrette: ...d'apprendre ça. Est-ce que la ministre
considère que c'est normal, ça? Est-ce qu'Hydro-Québec
applique pour eux les mêmes standards au point de vue gestion qu'elle
applique à ceux qui font de même?
Le Président: Mme la ministre.
Mme Bacon: Je dis, M. le Président, que ça
nécessite un prolongement de réseau qui devra être
défrayé par le conseil de bande; donc, le conseil de bande paiera
la note pour le prolongement du réseau et, dès qu'un
estimé sera fait du coût de la fourniture, du coût de la
consommation, il y aura paiement de ce coût, M. le Président.
M. Chevrette: M. le Président... Le Président:
En complémentaire.
M. Chevrette: Est-ce que Mme la ministre est en train de me dire
qu'en autant que le conseil de bande paie pour le prolongement le Québec
va s'organiser pour éclairer, fournir de l'électricité
à du monde qui empêche la libre circulation des biens et des
personnes? Est-ce qu'elle cautionne ça, oui ou non? C'est ça que
je lui pose comme question.
Le Président: Mme la ministre.
Mme Bacon: Je n'ai pas besoin de déchirer mes
vêtements, M. le Président, pour dire que je ne cautionne pas
ça. Je dis tout simplement les faits tels qu'ils sont pour que les gens
aient la vérité. Hydro-Québec prendra tous les moyens pour
recouvrer son argent. C'est ce qu'elle va faire. S'il y a des coûts au
prolongement du
réseau, ils seront défrayés par le conseil de bande
et non par Hydro-Québec.
Le Président: Toujours en complémentaire.
M. Chevrette: M. le Président, je reviens en
additionnelle. La question, ce n'est pas s'il y a des coûts pour le
prolongement, ma question, c'est: Est-ce que la ministre et Hydro-Québec
vont permettre un tel prolongement pour favoriser des structures qui
empêchent la libre circulation des biens et des personnes? Ça n'a
pas de bon sens. C'est là ma question. Ce n'est pas le fait de l'argent,
dans ce cas-ci. L'argent, on va vous demander de déposer l'entente.
C'est: Allez-vous favoriser, allez-vous aider ou vous allez empêcher
qu'on prolonge des réseaux pour aider du monde qui empêche d'autre
monde de circuler? Voilà la question.
Le Président: Alors, Mme la ministre.
Mme Bacon: Je pense que ni Hydro-Québec ni la ministre de
l'Énergie ne favoriseront l'empêchement de circuler de la
population, M. le Président, et ça, le député de
Joliette le sait.
Le Président: Toujours en complémentaire.
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais savoir: Est-ce
que la ministre va rendre publique l'entente secrète qu'il y a eu
à Akwesasne pour qu'on puisse véritablement regarder ce qu'on a
fait avec l'argent des actionnaires québécois qu'est l'ensemble
de la population québécoise?
Le Président: Mme la ministre.
Mme Bacon: M. le Président, une entente secrète se
fait entre deux parties. Je pourrais avoir l'approbation d'Hydro-Québec,
mais il me faut l'approbation de l'autre partie pour la rendre publique.
Le Président: Alors, en question principale... Pour une
dernière question additionnelle, M. le député
d'Ungava.
M. Claveau: Oui, une petite additionnelle, M. le
Président, au ministre de la Sécurité publique dont le
poids est bien connu au Conseil des ministres. Est-ce qu'il entend intervenir
auprès de la ministre de l'Énergie et des Ressources et
d'Hydro-Québec afin d'empêcher, justement, que ne se fasse ce
prolongement et afin que l'on collecte ce que lui-même entend faire
disparaître et qui est à la base même de l'échec de
ses propres négociations avec le conseil de bande, c'est-à-dire
les guérites qui empêchent la circulation des populations et des
biens entre la réserve et l'extérieur de la réserve?
Le Président: M. le ministre de la Sécurité
publique.
M. Ryan: M. le Président, il est arrivé à
plusieurs reprises au cours de la dernière année que la ministre
de l'Énergie et des Ressources et les autorités
d'Hydro-Québec sollicitent l'avis du ministre de la
Sécurité publique quant à certains dangers pouvant
résulter de situations sur l'une ou l'autre réserve. Les avis ont
été donnés en toute franchise et, en
générai, ils ont été respectés. Alors, si
cette question demande qu'on l'examine, moi, je n'en étais pas au
courant. Si on me demande mon avis, je le donnerai volontiers, c'est
entendu.
M. Chevrette: Est-ce que le ministre de la
Sécurité...
Le Président: Une courte dernière
additionnelle.
M. Chevrette: Est-ce que le ministre de la Sécurité
publique considère que les guérites, les postes de garde
constitués, ne devraient pas plutôt faire l'objet d'une ordonnance
de démolition ou de dérangement, plutôt que de s'interroger
sur un éventuel prolongement du réseau électrique pour
maintenir en place des choses qui devraient faire l'objet de démolition
et de déplacement?
Le Président: M. le ministre. (14 h 30)
M. Ryan: II y a deux choses dans ceci. Il y a, d'abord, l'aspect
proprement juridique sur lequel je verrai à obtenir une opinion
détaillée d'ici à une couple de jours au plus. Il y a
l'autre aspect que j'ai évoqué à maintes reprises en cette
Chambre, c'est qu'une action de cette nature faite sur le territoire
immédiat du village de Kahnawake entraîne une modification
radicale par rapport à la ligne de conduite suivie depuis 1979-1980 par
les gouvernements du Québec. Et, avant de le faire, il faut qu'on mesure
toutes les implications, qu'on fasse le choix franchement et
complètement, en toute lucidité, et nous n'en sommes pas
là pour l'instant.
Le Président: En question principale, maintenant, M. le
député de Bertrand.
Mesures pour assurer la survie de
Pétromont
M. Beaulne: Merci, M. le Président. Suite aux graves
difficultés qui menacent l'avenir de Pétromont, le Conseil
national du Parti québécois appuyait unanimement, en fin de
semaine, la survie de Pétromont comme noyau de la pétrochimie
québécoise.
Des voix:...
M. Beaulne: Pour satisfaire ses banquiers... Une
voix:...
M. Beaulne: ...la compagnie doit procéder, d'ici à
la fin du mois, à un refinancement majeur de 80 000 000 $, auquel sont
appelés à contribuer les deux actionnaires, Union Carbide et la
SGF, ainsi que la SOI et les travailleurs eux-mêmes. Le ministre de
l'Industrie, du Commerce et de la Technologie peut-il confirmer à cette
Chambre que lui aussi entend assurer la survie de Pétro-mont et peut-il
nous dire comment il entend s'y prendre puisque le temps presse?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce
et de la Technologie.
M. Tremblay (Outremont): Alors, le député de
Bertrand comprend maintenant, lorsque je lui disais en cette Chambre, la
semaine dernière, qu'il avait une connaissance superficielle et
incomplète du dossier, avant qu'on soit interrompu par un joyeux
loustic, que j'avais raison.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Tremblay (Outremont): Alors, nous analysons le dossier
très sérieusement et nous allons prendre toutes les
décisions nécessaires pour assurer la réussite de la
pétrochimie à Montréal et, principalement, dans l'est de
Montréal.
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
M. Beaulne: Le ministre se rend-il compte maintenant, suite
à la fermeture d'Alcools de commerce, qu'il y avait un lien avec
Pétromont et peut-il nous dire comment, de façon concrète,
il compte s'assurer que Pétromont procède efficacement à
son redressement financier d'ici au début de janvier,
échéancier que lui ont établi ses propres banquiers?
Le Président: M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): Alors, s'il y avait eu un lien entre
Alcools de commerce et Pétromont, le problème de Pétromont
serait relié à des marchés. Tout l'éthylène
de Pétromont est vendu; ce n'est pas une question de marché,
c'est une question de prix. Donc, il n'y a aucun lien entre Alcools de
commerce, une entreprise qui a des problèmes à cause d'une
décroissance du marché et de la concurrence hors Québec
depuis 1984. Et, en ce qui concerne les discussions qui ont lieu
présentement en partenariat avec les institutions financières
traditionnelles, les travailleurs et les travailleuses de Pétromont, les
cadres de Pétromont, la SGF et Union Carbide... Parce que ce que vous ne
dites pas, c'est que Union Carbide est complice d'une démarche pour
diminuer la pétrochimie au Québec. Je regrette, ils sont
partenaires de Pétromont; ils vont injecter des fonds et il y a
également une demande au niveau de la Société de
développement industriel du Québec. Alors, je pense qu'on n'a pas
besoin de l'Opposition, encore une fois, des événements
médiatiques à un congrès, pour essayer de responsabiliser
une équipe ministérielle. M. le Président.
Des voix:...
Le Président: Oui. S'il vous plaît! À
l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! Alors, pour
compléter, M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): Je dirais que l'Opposition, M. le
Président, se réveille. Depuis qu'on a publié la
stratégie des grappes industrielles, ils lisent, en arrière, des
documents, puis c'est marqué le statut...
Le Président: À la question, M. le ministre, s'il
vous plaît.
M. Tremblay (Outremont): ...ou le point. Alors, dans ce
sens-là, on n'a pas besoin de votre information. On analyse ce
dossier-là depuis maintenant cinq ans, puis l'équipe
ministérielle est pleinement au courant de la situation de la
pétrochimie au Québec.
Le Président: Alors, en question complémentaire
toujours.
M. Beaulne: Si le ministre trouve que ça va si bien en
matière de pétrochimie, ne sait-il pas qu'à peine 30 % de
la production de Pétromont trouve preneur ferme à l'heure
actuelle et que 70 % est vendue à contrat à terme sur le
marché "spot"? Et peut-il nous garantir que, dans le contexte du
refinancement, le partenaire à 50 % de Pétromont, Union Carbide,
mettra le même montant que son partenaire québécois, la
SGF?
Le Président: M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): en 1984, m. le président, on a
hérité d'une situation dans la pétrochimie et c'est le
présent gouvernement qui a redressé la situation...
Des voix:...
Le Président: Un instant, s'il vous plaît. Un
instant. S'il vous plaît! S'il vous plaît! Alors, la question a
été posée... S'il vous plaît! Alors, la question a
été posée, je demanderais aux collègues de laisser
le ministre répondre, s'il vous plaît. Si vous avez des
interrogations, revenez en question additionnelle. Alors, M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): Alors, comme je le disais, en 1984,
c'est le présent gouvernement qui a redressé la situation de la
pétrochimie.
Une voix: Vous n'étiez pas là.
Une voix: Vous avez été élus en 1985.
M. Tremblay (Outremont): Regardez les bénéfices de
l'entreprise Pétromont depuis 1986, 1987, 1988 et 1989,
premièrement. Deuxièmement, c'est évident que la
transaction va être faite sur une base d'affaires. Nous sommes des
partenaires 50-50 et la SGF va injecter le même montant que Union Carbide
pour la relance et la réussite de Pétromont.
Le Président: Alors, en question principale maintenant,
Mme la députée de Chicoutimi.
Certificat d'admissibilité à
l'école anglaise
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
Président, nous apprenons que, depuis un an, 650 nouveaux
écoliers ont utilisé une faille de la loi 101 combinée
avec l'article 23 de la Charte canadienne des droits, la clause Canada, pour
confirmer leur admissibilité...
Des voix:...
Le Président: Un instant, s'il vous plaît. Je vais
demander la collaboration des collègues. Alors, allez-y, madame.
Mme Blackburn: ...pour confirmer leur admissibilité
à vie à l'école anglaise même si, en principe, ils
n'auraient pas tous dû y avoir droit. En mai dernier, il y a
déjà sept mois, le ministre de l'Éducation avait promis de
colmater cette brèche et ce, par souci d'équité,
disait-il. Il était alors question d'agir sur deux fronts: dans un
premier temps, l'application pour l'année scolaire 1991-1992 d'une
nouvelle directive selon laquelle un élève, pour être
inscrit à une école anglaise, devra au préalable obtenir
du ministère un certificat d'admissibilité et, dans un
deuxième temps, le ministre devait proposer au gouvernement une
modification au règlement d'application de la Charte de la langue
française, chapitre VIII de la loi 101, afin que les personnes immigrant
au Québec de façon permanente ne puissent faire croire à
un séjour temporaire pour inscrire leurs enfants à l'école
anglaise.
Ma question au ministre de l'Éducation: Le ministre de
l'Éducation peut-il nous dire ce qu'il attend pour corriger la situation
puisque la formule qu'il a privilégiée, celle de
l'émission des certificats d'admissibilité à
l'école anglaise, connaît de sérieux ratés au plan
de son application?
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Pagé: M. le Président, j'apprécie la
question de Mme la députée de Chicoutimi. Ça vt me
permettre de resituer les choses dans leur véritable perspective.
Effectivement, j'ai constaté qu'une brèche, qu'une porte
était ouverte dans cette loi qui est importante au Québec, qui
est la loi 101, et qui permettait à des gens, des étudiants, des
élèves dont les parents, dans certains cas, se sont amenés
chez nous en demandant un certificat de sélection, demandant
d'être reçus comme immigrants... Cependant, quand ils se
présentaient à la commission scolaire, ils se déclaraient
en séjour temporaire.
Partant de là, j'ai, au mois de mai dernier, eu de nombreux
échanges avec le ministère des Communautés culturelles
pour être certain de pouvoir échanger entre les deux
ministères les informations reçues de la part de celles et de
ceux qui s'inscrivent pour demander un certificat d'admissibilité
à l'école anglaise, premièrement. Deuxièmement,
j'ai eu l'occasion d'avoir un nombre d'échanges assez significatif avec,
notamment, les commissions scolaires de la région de Montréal,
mais même avec l'ensemble du territoire. Entre autres, aussi, avec la
commission scolaire Western Québec, dans la région de
l'Outaouais, pour être certain de la mise en place de mécanismes
qui doivent ou qui devaient nous conduire - si je me réfère
à l'article, et je vais vous dire comment j'entends le traiter -
à une situation clarifiée dès septembre 1991.
Cependant, compte tenu que ces règles administratives devaient
être ratifiées par une modification réglementaire, j'ai
déposé au sein des organismes centraux un projet de
règlement modifiant les règles en fonction de l'objectif
recherché de colmater ces brèches. Le projet de règlement
a été adopté dans tous les organismes centraux. Lorsqu'il
est arrivé au Conseil des ministres, le Conseil des ministres a
jugé plus opportun d'attendre le rapport que j'ai demandé au
comité présidé par Mme Chambers.
Ceci étant dit, nous sommes à vérifier... Bon,
alors, je m'arrête, d'abord. Continuez, madame. Je vais vous
répondre pour le reste tantôt.
Le Président: En question complémentaire.
Mme Blackburn: M. le Président, devant l'échec des
mesures qu'il a mises en place, échec qu'il constate lui-même
puisqu'il propose un règlement, quand va-t-il faire adopter ce
règlement pour modifier le règlement d'application de l'article 8
de la loi 101? Quand?
Le Président: M. le ministre. (14 h 40)
M. Pagé: je crois que c'est nettement
exagéré de parler d'échec. je viens de vous dire, en
clair, que, malgré le fait que la disposition ne soit pas adoptée
par règlement, j'ai la conviction qu'elle est déjà mise en
oeuvre dans un certain
nombre de commissions scolaires au Québec. C'est le rapport que
j'ai demandé, qu'on vérifie - je comprends que c'est exhaustif -
chacune des inscriptions et qu'on puisse me fournir le rapport dans les
meilleurs délais, même si c'est long et exhaustif. Il y a des
commissions scolaires au Québec, commissions scolaires anglophones, qui
m'ont dit: M. le ministre, on accepte ces règles, on va les appliquer en
collaboration avec votre ministère, lequel travaille conjointement avec
les communautés culturelles.
Je sais que ça s'est appliqué dans certaines commissions
scolaires au Québec. Cependant, l'autre élément, pour
répondre à votre question bien concrète, moi, je
prévois et je me propose de redéposer le dossier sur la table du
Conseil des ministres, d'ici à la fin de janvier, compte tenu que
j'attends le rapport du groupe présidé par Mme Chambers d'ici
là.
Le Président: En question complémentaire, M. le
député de D'Arcy-McGee.
M. Libman: M. le Président, to the Minister of Education.
Would he perhaps seize upon this occasion to remind the Member for Chicoutimi,
who happens to be the co-president of the committee studying the futur of the
anglophone community in Québec... Would he not remind her that what she
is referring to is less than 1 % of the student population and perhaps an
insignificant issue to make out of this?
Le Président: M. le ministre.
M. Pagé: M. le Président, je ne sais pas si je vais
répondre. Comme leader parlementaire du gouvernement, je ne suis pas
convaincu que la question additionnelle de l'honorable député
doive s'inscrire comme question complémentaire, mais comme c'est la
période des fêtes et qu'on se veut généreux, je vais
tenter d'y répondre.
Effectivement, pour le député et pour certaines personnes
au Québec, on se réfère à une problématique
qui n'en serait pas une, compte tenu du nombre d'élèves,
comparativement aux 1 400 000 élèves qui sont dans nos
écoles. Cependant, M. le député, vous conviendrez avec moi
qu'on a une loi qui doit être administrée et qui doit être
respectée. Vous êtes d'ailleurs le premier en Chambre,
régulièrement, à rappeler aux autres collègues
l'obligation qu'on a de respecter les lois, et c'est ce que j'entends
faire.
Deuxièmement, je retiens vos préoccupations à
l'égard du comité coprésidé par Mme la
députée de Chicoutimi et j'espère que vous allez nous
féliciter pour le comité que j'ai mis en place, moi,
présidé par Mme Chambers.
Le Président: En question principale, maintenant, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Gel des surplus d'actif dans les fonds de
retraite
Mme Harel: M. le Président, en décembre 1988,
après une cascade de scandales des fonds de pension, le ministre de la
Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle décrétait un gel sur les surplus des caisses de
retraite, annonçant pour 1989 une décision sur la
propriété des 900 000 000 $. Malgré le gel, les caisses
continuaient de se vider quand même, puisqu'il était permis aux
employeurs, et ça, depuis trois ans, de prendre des congés de
cotisation, alors que les fonds ne sont même pas suffisants parfois, ou
ne permettent pas l'indexation au coût de la vie. 160 000 000 $ d'argent
non versé par les employeurs, en 1988; 170 000 000 $ en 1989. Nous
attendons les chiffres de ces congés de cotisation pour 1990. Même
les travailleurs de Simonds qui ont pu aller devant les tribunaux avant le gel
s'inquiètent encore aujourd'hui, malgré le jugement favorable qui
est intervenu, de savoir si l'employeur ne va pas traîner en longueur en
allant en appel.
M. le Président, question au ministre: Quand va-t-il enfin cesser
de tourner en rond en matière de ces surplus de fonds de pension?
Le Président: M. !e ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.
M. Bourbeau: M. le Président, c'est avec beaucoup
d'intérêt que j'ai pris la peine, au cours de la fin de semaine,
de lire le jugement de 160 pages de la Cour supérieure dans la cause de
Simonds dont parle la députée de Hochelaga-Maisonneuve. C'est un
jugement intéressant qui me semble bien fondé et susceptible de
générer beaucoup d'espoir pour les travailleurs du Québec
qui sont dans des situations semblables. On ne peut que s'en réjouir.
Ça prouve que le gouvernement avait raison, en décembre 1988,
d'imposer un moratoire ou un gel sur les surplus d'actif dans les fonds de
pension, pour faire en sorte d'éviter que des employeurs peu scrupuleux
ne puissent se sauver avec la caisse. Il ne faudrait quand même pas
généraliser et présumer que ce jugement-là va
régler tous les problèmes. Il s'agit de dossiers qui sont
spécifiques, de cas d'espèce, et il va falloir trouver une
solution qui va tenir compte, dans chacun des cas, de la particularité
de chaque dossier. C'est ce que nous nous employons à faire.
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
Mme Harel: Est-ce qu'il faut comprendre, dans la réponse
que le ministre a apportée, que l'espoir qu'il laisse aux travailleurs
du Québec, c'est celui d'aller devant les tribunaux? Recon-
naît-il que depuis le moratoire, ii y a trois ans, justement les
travailleurs ne peuvent même pas aller devant les tribunaux? Comment
entend-il permettre la négociation de gré à gré
avec chacun des régimes, ce qui supposerait de lever le moratoire?
Qu'est-ce que c'est, l'action que le gouvernement va prendre à partir de
maintenant?
Le Président: Alors, M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, après la commission
parlementaire du mois de mars dernier, j'ai décidé de retirer la
proposition gouvernementale et de soumettre le dossier à la
Conférence permanente sur la main-d'oeuvre qui s'est penchée sur
ce dossier-là au cours des mois du printemps 1991 jusqu'à
l'été. J'ai également demandé à M. Claude
Castonguay d'agir à titre d'expert-conseil et de participer...
Le Président: S'il vous plaît!
M. Bourbeau: ...activement aux travaux du comité dont la
coordination, bien sûr, est assurée par la Régie des rentes
du Québec.
M. le Président, après avoir examiné les
différentes solutions soumises et avoir entendu les parties, M.
Castonguay a présenté un rapport au cours de l'automne, en
proposant une solution qui lui est apparue la plus appropriée dans les
circonstances J'ai l'intention, au cours des prochaines semaines, de faire le
point sur ce dossier et de porter de nouveau le dossier à l'attention de
la Conférence permanente sur la main-d'oeuvre à sa prochaine
réunion, en début d'année 1992.
Une voix: Bravo, André!
Le Président: Toujours en question
complémentaire.
Une voix: II a proposé moitié-moitié,
lui.
Mme Harel: M. le Président, est-ce que le ministre
reconnaît qu'après avoir déposé et retiré sa
proposition après la tenue d'une commission parlementaire, après
avoir confié à M. Claude Castonguay la négociation entre
le patronat et les syndicats, après avoir annoncé une
législation pour cet automne, il doit maintenant arbitrer le
différend qui s'est présenté entre le patronat et les
syndicats, il doit simplement avoir de la volonté politique de
régler ce dossier-là?
Une voix: C'est ça.
Mme Harel: alors, comment entend-il arbitrer le différend
qui est très connu? j'espère, m. le président, qu'il le
connaît suffisamment maintenant pour savoir...
Le Président: Mme la députée.
Mme Harel: ...pour nous indiquer dans quelle direction il va le
trancher?
Une voix: II est gelé, ii est gefé Le
Président: M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, il s'agit d'un dossier
extrêmement complexe qui met en cause des surplus d'environ 1 000 000 000
$ dans les fonds de pension privés. M. le Président...
Le Président: Je vais demander la collaboration des
collègues. Je ne voudrais pas qu'on interfère. De toute
façon, je pense que ça a même nui à Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve qui a de la difficulté
à comprendre. Je demanderais la collaboration de tout le monde. M. le
ministre, complétez votre réponse, s'il vous plaît.
M. Bourbeau: M. le Président, il y a trois ans, la
Régie des rentes estimait le surplus à 900 000 000 $.
Aujourd'hui, on l'estime à 1 000 000 000 $. Ça infirme un peu les
prétentions de la députée de Hochelaga-Maisonneuve qui
nous disait tantôt que la baignoire était en train de se vider.
Selon les chiffres que j'ai, elle serait plutôt en train de se remplir
que de se vider. Il y a plus d'argent, maintenant, dans les surplus qu'il n'y
en avait il y a trois ans. Ça ne veut pas dire, ça, qu'on doive
laisser la situation perdurer. C'est un dossier extrêmement complexe qui
doit se régler, autant que possible, par une négociation entre
les employeurs et les travailleurs. Il n'y a pas deux cas semblables. Ce n'est
pas vrai que, dans tous les cas, les surplus appartiennent aux employeurs et ce
n'est pas vrai non plus que, dans tous les cas, les surplus appartiennent aux
travailleurs. Il faut regarder chaque cas, un par un. J'espère, M. le
Président, qu'on va réussir à convaincre les deux parties
de s'asseoir et de trouver unp ^lution équitable pour tout le monde.
Le Président: Alors, toujours en question
complémentaire.
Mme Harel: M. le Président, les deux parties sont assises
depuis huit mois, à la demande du ministre, avec un médiateur qui
était Claude Castonguay. La question, c'est de savoir si la
décision, finalement, quand l'arbitrage se fera, va se prendre en
équité Est-ce que le ministre est prêt à soutenir
que, dans la décision d'attribuer des surplus des caisses de retraite,
les questions d'équité prévalent sur des questions de
droit?
Le Président: M. le ministre. (14 h 50)
M. Bourbeau: M. le Président, voilà une question
extrêmement intéressante et lourde de
conséquences. Je suis personnellement convaincu qu'on doit tenir
compte de l'équité, on doit aussi tenir compte du droit et des
contrats. Alors, à mon avis, on ne peut pas tenir compte que des
contrats et on ne peut pas non plus ne tenir compte que de
l'équité. Il faut que les deux éléments soient
compris dans une décision, étant donné que les dossiers,
parfois, ont évolué et que les contrats n'ont pas tous
été interprétés de la même façon par
tout le monde. Quant à moi, je trouverais déplorable que, dans
tous les cas, on soit obligés d'aller en Cour supérieure, en Cour
d'appel et en Cour suprême, et parfois même aux dépens de la
caisse elle-même, et je souhaite, quant à moi, que les parties
puissent convenir d'une façon de régler ces dossiers-là
qui permettrait un règlement rapide de la situation en toute justice
pour tout le monde.
Le Président: En question complémentaire...
principale, je m'excuse...
M. Dufour: Principale.
Le Président: ...M. le député de
Jonquière.
Refus d'approbation par le ministre des
règlements fusionnant les services
entre
Deux-Montagnes et Sainte-Marthe-sur-le-Lac
M. Dufour: Dans un geste sans précédent, les
autorités de la ville de Deux-Montagnes poursuivent le ministre des
Affaires municipales devant la Cour supérieure. Elles exigent du
ministre qu'il approuve les règlements fusionnant les services entre
Deux-Montagnes et Sainte-Marthe-sur-le-Lac. La municipalité de
Deux-Montagnes a, dans cette démarche, l'appui de l'Union des
municipalités du Québec ainsi que celui du député
de Deux-Montagnes. Rappelons également que la majorité des
conseils municipaux de Deux-Montagnes et de Sainte-Marthe-sur-le-Lac a
approuvé ces ententes. Or, le ministre des Affaires municipales, qui
aurait bien accueilli ce projet d'entente au mois de juin 1991, l'a
carrément rejeté le 9 octobre dernier, geste qu'a qualifié
de volte-face du ministre le maire de Deux-Montagnes. Ma question au ministre
des Affaires municipales: Malgré son discours
répété sur la nécessité des fusions et des
ententes intermunicipales, le ministre, par ce refus, n'indique-t-il pas aux
élus qu'aucune demande ne pourrait être acceptée sans
l'unanimité des conseils municipaux et des citoyens et qu'à
l'avenir il faudra des référendums pour agir?
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Ryan: Je ne veux pas toucher aux aspects qui ont
été portés devant les tribunaux. Je pense qu'on peut
s'abstenir de ça. Mais le problème est là, qui ne
relève pas uniquement des tribunaux, cependant. Si le
député de Jonquière était un petit peu mieux
informé de ce qui est arrivé dans ces deux municipalités
situées dans le comté que représente le
député de Deux-Montagnes à cette Assemblée, il se
rendrait compte que ce que nous avons fait repose sur des considérations
de réalisme élémentaire. Lorsqu'un projet de fusion de
services majeur ou encore de municipalités est soumis à mon
attention et que des représentations me sont présentées
par des citoyens à rencontre du projet, je m'emploie à faire
enquête pour vérifier le degré d'appui dont jouit le projet
dans la population. Et si je constate qu'il existe une mesure de
résistance ou d'opposition donnant à penser que, peut-être,
la majorité des citoyens ne serait pas favorable, surtout lorsque le
projet m'est soumis dans une période où il y a une
élection qui est assez prochaine, à ce moment-là, je n'ai
pas d'hésitation à suggérer que l'on recoure d'abord
à un référendum. On l'a fait à quelques reprises,
notamment dans le cas de Saint-Romuald et de Saint-Jean-Chrysostome avec
beaucoup de succès et à la satisfaction générale.
Et j'ai dit à la ville de Sainte-Marthe...
Le Président: En conclusion, M. le ministre.
M. Ryan: parce que, du côté de Deux-Montagnes, il
n'y avait pas de problème... J'ai dit à la ville de Sainte-Marthe
que, s'ils voulaient faire un petit référendum pour s'assurer de
l'appui de leur population, je serais le plus heureux des ministres de pouvoir
acquiescer à leur désir. Et je crois comprendre qu'après
avoir été informée de tout le contexte de ce dossier
l'Union des municipalités du Québec en arrive à une
position beaucoup plus modérée.
Le Président: En question complémentaire.
M. Dufour: Oui. Comme le ministre ne peut pas ignorer sa propre
loi, pourquoi, à chaque fois qu'il y a quelqu'un qui s'oppose, est-il
obligé de faire une enquête et en même temps
décrète-t-il un référendum? Pourquoi ne le dit-il
pas clairement et ne l'écrit-il pas dans une loi pour que les
élus sachent à quoi s'en tenir?
Le Président: M. le ministre.
M. Ryan: Nous ne lisons pas la loi de la même
manière. La loi ne dit aucunement que le ministre serait une
espèce de pilote automatique qui devrait sortir sa signature dès
que quelqu'un lui a fait signe quelque part. La loi postule que le ministre
usera en plus de son jugement et il tient à le faire.
Le Président: En question complémentaire.
M. Dufour: Comme il est question toujours
d'ententes intermunicipales où les conseils municipaux doivent se
prononcer au début, est-ce que le ministre, par son attitude et sa
façon de voir les choses, se rend compte qu'il est en frais de miner
l'autorité des élus municipaux et qu'il fait de ceux-ci ses
marionnettes?
Le Président: M. le ministre.
M. Ryan: M. le Président, c'est tout le contraire.
Le Président: Pour une question principale, M. le
député de La Prairie.
Audiences publiques sur le phénomène de
l'incinération des déchets
M. Lazure: Merci, M. le Président. On sait que les projets
d'incinération, soit de déchets dangereux, d'huiles usées
ou de déchets domestiques, soulèvent beaucoup de controverses et
d'inquiétudes dans la population. On peut le constater en ce moment dans
le Grand Montréal, tant pour la ville qui vient de déposer sa
politique de gestion des déchets domestiques, incluant la modernisation
de l'incinérateur des Carrières au coût de 75 000 000 $,
que pour la Régie intermunicipale, les 26 municipalités autres
que Montréal, qui veut construire à Montréal-Est un
incinérateur de 200 000 000 $. La question au ministre de
l'Environnement, M. le Président: Compte tenu de l'intensité des
débats entourant toute la question de l'incinération, compte tenu
que même le gouvernement de l'Ontario en est venu, il y a un an, à
interdire toute construction d'un nouvel incinérateur, est-ce que le
ministre ne pourrait pas au moins s'engager à recourir à
l'article 6.3 de sa loi et demander des audiences publiques sur le
phénomène général de l'incinération au
Québec?
Le Président: M. le ministre de l'Environnement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, en ce
qui concerne la Régie intermunicipale des déchets de
Montréal, je crois qu'il serait approprié, dans les
circonstances, de mentionner le travail exemplaire accompli au cours des
dernières années par cette Régie. L'incinération
n'a pas été la première approche de cette Régie
intermunicipale de Montréal, même au moment où mon actuel
collègue, le ministre des Transports, en avait la responsabilité.
On s'est d'abord attardé à implanter un peu partout sur
l'île de Montréal, à l'exception de deux
municipalités, la ville de Montréal comme telle et la
municipalité de Montréal-Nord, la collecte sélective.
Cette collecte sélective s'implante graduellement. Année
après année, c'est davantage de personnes qui habitent
l'île de Montréal qui sont desservies par cette collecte
sélective. Lorsqu'on peut récupérer du contenu des
déchets domestiques les éléments que l'on peut revaloriser
nous accomplissons là, sur le plan environnemental, des progrès
auxquels souscrit le ministère de l'Environnement du Québec. Nous
entendons continuer d'accorder notre appui à cette Régie pour ses
activités de récupération et de recyclage pour qu'elle
implante encore davantage de cueillette sélective sur le territoire de
lUe de Montréal.
Le Président: En question complémentaire.
M. Lazure: M. le Président, puisque le ministre ne
répond pas du tout à la question, je la répète:
Est-ce qu'il veut s'engager à demander au Bureau d'audiences publiques
des audiences sur le phénomène de l'incinération au
Québec et, particulièrement, sur la construction et la
modernisation de l'incinérateur des Carrières? Est-ce qu'il le
veut, oui ou non?
Une voix: Oui ou non?
Le Président: M. le ministre.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, la
première question du député de La Prairie touchait deux
volets comme tels: un volet touchait l'activité de la Régie
intermunicipale des déchets de Montréal et le projet d'implanter
un incinérateur par cette Régie dans l'est de Montréal. Le
deuxième aspect de la question touchait spécifiquement le
programme de gestion des déchets que vient de déposer la ville de
Montréal et qui, lui aussi, a un aspect incinération qui est la
modernisation de l'incinérateur des Carrières, avec lequel nous
avons éprouvé beaucoup de problèmes au cours des
dernières années. Dans l'un et dans l'autre cas, la position
première du ministère de l'Environnement, je la
répète - et ça ne s'applique pas simplement au territoire
de IHe de Montréal, ça s'applique, M. le Président, et
vous avez raison de le souligner, également sur le territoire de la rive
sud en périphérie de Québec - la première
intervention du ministère de l'Environnement et des intervenants
municipaux se doit d'être la collecte sélective: sortir des
poubelles ce que l'on peut revaloriser comme tel.
Lorsqu'on en arrive, M. le Président, à la fin du
processus, qu'on a sorti tout ce qu'on pouvait sortir des poubelles, il faut
à ce moment-là disposer de ce qui reste. On peut le faire par
différentes méthodes... M. le Président, s'il n'y a pas
moyen...
Le Président: Écoutez... Minute! Minute! Je
comprends que le ministre est un peu long. Je l'inviterais à conclure,
mais il n'y a aucune raison... La seule façon de procéder, c'est
le leader de l'Opposition qui l'a actuellement, il s'est levé sur une
question de règlement. Je vais
l'écouter. Les autres, je vous demanderais simplement de vous
conformer au règlement. Si vous voulez intervenir plus rapidement,
levez-vous et faites une question de règlement. Question de
règlement, M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: Mais, là, vous venez de me confirmer
qu'à l'avenir il faudra que je me lève moi-même, vous ne le
ferez pas.
Le Président: Non... J'avise toujours, M. le leader de
l'Opposition, vous le savez fort bien. Quand je juge que le temps est
suffisamment long, j'invite le ministre à conclure, comme parfois
j'invite également celui qui pose la question, de la même
façon. (15 heures)
En conclusion, rapidement, M. le ministre, quelques secondes.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. J'en
venais donc à ce qui reste: une fois qu'on a valorisé l'essentiel
des déchets, il faut trouver une formule de disposition finale.
Certaines propositions qui sont acheminées au ministère de
l'Environnement préconisent, M. le Président,
l'incinération. Dans le cas de la Régie intermunicipale, nous
avons reçu le projet, il y aura effectivement des audiences publiques
tenues par le BAPE, si nous recevons des...
Le Président: M. le ministre, s'il vous plaît!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...demandes à cet effet,
des citoyens concernés.
Le Président: Alors, c'est la fin de la période de
questions. M. le député de Pointe-aux-Trembles, s'il vous plaft!
S'il vous plaît! Alors, tel qu'annoncé précédemment,
il y a une réponse différée par le ministre de la
Santé et des Services sociaux qui répondra à une question
posée le 12 décembre dernier par M. le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue, concernant les négociations avec les
médecins résidents. M. le ministre.
Réponse différée
Négociations avec la Fédération
des médecins résidents et internes du Québec
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. Effectivement, ce sont des négociations qui ont
débuté en janvier 1990 et qui ont cours depuis. Depuis septembre
dernier, les négociations se sont intensifiées jusqu'en octobre,
le 31 dernier exactement, où la Fédération des
médecins résidents et internes du Québec a
décidé, dans un geste, d'informer les négociateurs
patronaux qu'elle voulait soumettre à l'arbitrage l'ensemble des
questions qui n'avaient pas obtenu satisfaction à la table de
négociation.
Après une réflexion de sa part, le 5 décembre, elle
est plutôt revenue à la table de négociation pour
négocier, et nous lui avons demandé, le 12 décembre, des
informations additionnelles sur les nouveaux dépôts qu'elle nous
avait faits. Il y aura rencontre, jeudi prochain le 19, pour tenter de
finaliser les négociations.
Il est évident que le sujet qui est au coeur de ces discussions,
c'est la garde. Dans ce cas-ci, on se rappellera, et c'est la raison pour
laquelle ça a négocié pendant si longtemps, quen
décembre 1990 une décision du tribunal proposait de faire une
expérience-pilote dans quatre hôpitaux universitaires, sur la
garde. Cette expérience se terminera à la mi-janvier, et les
vice-doyens aux facultés de médecine se réuniront le 9
janvier pour jeter un dernier coup d'oeil en termes d'évaluation de
l'expérience-pilote; nous pourrons, par la suite, tenter de conclure ces
négociations.
Une voix: Voilà!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue en question
complémentaire.
M. Trudel: Effectivement, M. le Président, comme le
principal point d'accrochage c'est 72 à 80 heures de travail par
semaine, est-ce que le ministre peut s'engager à communiquer avec les
établissements de santé au Québec pour leur demander,
à tout le moins, d'être très prudents au niveau de
l'organisation des horaires de travail, spécifiquement pendant la
période des fêtes, parce que tout cela pourrait avoir pour effet
d'exacerber les parties, en particulier la partie syndicale là, les
médecins résidents qui sont partie à cette
négociation, et que ça pourrait entraîner une certaine
dégénération de la négociation? Est-ce que le
ministre peut s'engager à communiquer aux établissements cette
demande d'être souples et très attentifs à l'organisation
des horaires pendant le temps des fêtes parce que cette période
des fêtes s'y prête de façon particulière, compte
tenu des éléments du conflit en cause?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre de la
Santé et des Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, oui,
je veux rappeler que l'expérience-pilote qui a été
menée est une expérience qui, selon les informations
préliminaires que nous possédons, a été une
expérience positive et qu'elle devrait très largement inspirer la
terminaison de la négociation et qu'elle devrait par le fait même,
aussi éclairer ceux qui auront à faire les périodes de
garde durant les fêtes.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Alors, nous continuons nos travaux à
l'étape des motions sans préavis. M. le ministre des
Communications.
Motions sans préavis
Félicitations aux gagnants et gagnantes du 6e
Gala des prix Gémeaux
M. Cannon: Merci, M. le Président. Je sollicite le
consentement de cette Chambre pour présenter une motion sans
préavis qui se lit comme suit: "Que l'Assemblée nationale
félicite tous les gagnants et gagnantes du 6e Gala des prix
Gémeaux de l'Académie canadienne du cinéma et de la
télévision."
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a
consentement pour débattre cette motion?
Une voix: Oui, il y a consentement.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Consentement. Alors,
j'inviterais tous les collègues, pour ceux qui ont des travaux en
commission, à bien vouloir quitter l'Assemblée de la façon
la plus rapide possible. Alors, allez-y, M. le ministre des Communications.
M. Lawrence Cannon
M. Cannon: Merci, M. le Président. Le 6e Gala des prix
Gémeaux présenté hier soir par l'Académie
canadienne du cinéma et de la télévision a
souligné, comme il se doit, l'excellence des artisans et des artisanes
de l'industrie télévisuelle ainsi que les performances des
artistes québécois et québécoises. Je tiens
à joindre ma voix à celle du gouvernement du Québec pour
présenter mes plus vives félicitations à toute personne
honorée lors de ce gala.
Le monde de la télévision au Québec connaît
certaines difficultés, nous en sommes tous conscients. Toutefois,
l'industrie de la télévision québécoise ne souffre
d'aucun complexe en ce qui a trait à sa créativité,
à son dynamisme et à sa source inestimable de talents.
Aujourd'hui, M. le Président, je veux rendre hommage à la
diversité et à l'excellence des artisans et des artisanes ainsi
qu'à tous les artistes québécois qui, depuis longtemps,
nous ont habitués à une télévision de très
grande qualité.
M. le Président, je veux également profiter de l'occasion
pour souligner l'excellente performance de la Société
Radio-Québec qui, par la qualité de ses productions et surtout
par la compétence et le talent des personnes qui oeuvrent dans son
tourbillon, s'est méritée une quinzaine de trophées.
Grâce aux performances de tous ces individus, Radio-Québec a pu
s'acquitter de son mandat télévisuel avec brio. Bien que
l'industrie de la télévision traverse une période
mouvementée, Radio-Québec a démontré, une fois de
plus, qu'il est possible de faire de la télévision de haut
calibre et accessible à tous.
Le Gala des prix Gémeaux a ceci de particulier, M. le
Président. Outre le fait qu'il nous permette de souligner les
performances des artistes que l'on connaît et que l'on voit, il nous
offre également la possibilité de rendre hommage à tous
ceux et celles qui travaillent dans l'ombre. Par leur souci du détail et
leur professionnalisme, les artisans et artisanes du milieu
télévisuel permettent au talent de nos artistes d'éclater
au petit écran pour notre plus grand bénéfice.
M. le Président, c'est à toutes ces personnes que je veux
rendre hommage aujourd'hui, et je veux également leur exprimer toute ma
reconnaissance pour les merveilleux moments qu'elles nous offrent.
Félicitations à tous les récipiendaires et merci de nous
offrir une diversification d'aussi grande qualité. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Sur cette même motion, je cède la parole à M. le
député de Pointe-aux-Trembles.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, je souscris
entièrement à la motion qui est devant nous et j'offre, moi
aussi, mes félicitations à tous ceux qui ont gagné des
prix hier soir. C'est évident que, comme membres de l'Assemblée
nationale, on ne peut que se réjouir des nombreux prix Gémeaux
que Radio-Québec a remportés puisque c'est cette
Assemblée-ci qui vote les budgets de Radio-Québec, qui est notre
télévision nationale.
À cet égard, je me réjouis qu'un Gémeaux ait
été accordé à la série "L'Amour avec un
grand A", de Radio-Québec, pour une émission qui s'intitulait
"L'amour qui tue" que j'ai eu l'occasion de voir et qui, encore une fois,
manifestait chez Radio-Québec et Janette Bertrand le souci d'aborder des
sujets autrement réputés tabous, mais qui sont des
problèmes de civilisation qui se posent. Je voudrais également
souligner, M. le Président, l'émission "Le Club des 100 watts"
qui a remporté, dans la catégorie jeunesse, cinq Gémeaux
dont celui du meilleur animateur, remis à Marc-André Coallier. Et
ça illustre, M. le Président, que, quand Radio-Québec
prend la peine de faire des émissions vraiment différentes de
celles des autres télévisions, eh bien, notre
télévision d'État remporte du succès.
Je voudrais également souligner, toujours dans la même
ligne de pensée, le Gémeaux qui a été
accordé à Gérard-Marie Boivin pour
'Téléservice", également une autre émission de
Radio-Québec, et aussi, en collaboration avec Multiculturalisme Canada.
J'aimerais mieux Intercul-turalisme Québec, mais c'est l'organisme
qui
finançait un prix ex aequo accordé à "L'Amour et la
différence" et à "Passe-Partout", encore deux productions de
Radio-Québec.
En fait, M. le Président, Radio-Québec se distingue
tellement qu'on se demande pourquoi le gouvernement actuel diminue constamment
le budget réel de Radio-Québec et pourquoi on a fermé cinq
des neuf organisations régionales de Radio-Québec. S'il n'y a
rien qui réussit autant que la réussite, pourquoi
pénaliser une société d'État qui réussit
bien ce qu'elle fait et qui le réussit bien quand elle exprime nettement
et clairement sa différence. Et, à cet égard, M. le
Président, je voudrais dire au ministre que lorsqu'un jour le
Québec aura la pleine juridiction en matière de
télévision, ce dont apparemment le ministre rêvait en
septembre, il faudra avoir deux chaînes: une nouvelle Radio-Québec
qui inclurait Radio-Canada actuelle, une chaîne grand public qui existe
déjà, et, aussi, M. le Président, Radio-Québec
actuelle qui devrait rester une télévision éducative,
culturelle et, je l'ajoute, régionale afin que les régions du
Québec soient mieux représentées en matière de
télévision. (15 h 10)
M. le Président, je ne peux non plus passer sous silence l'appel
du comédien Jean Besré, qui a déploré l'absence de
politique culturelle du gouvernement actuel et le peu d'intérêt du
premier ministre pour les questions culturelles. M. le Président, bien
sûr, Jean Besré avait raison de le souligner. Au Québec et
au Canada combinés, les industries culturelles représentent un
chiffre d'affaires de 10 000 000 000 $ par année. Le chiffre de 10 000
000 000 $ devrait intéresser le député de Mille-Îles
et le calmer; puisque Noël s'en vient, qu'il se calme donc! Je sais que,
lorsqu'il n'est pas question de pont et qu'on parle de culture, ça
l'énervé. Mais la ministre des Affaires culturelles devrait lui
expliquer que même lui aurait droit, un jour, à avoir accès
à la culture si le gouvernement remplit son engagement de consacrer 1 %
de son budget à la culture.
Je voudrais également dire, M. le Président, que le gala
d'hier soir ne doit pas nous faire oublier les problèmes
considérables que la télévision francophone du
Québec rencontre du fait des décisions du fédéral.
Là-dessus, j'aimerais que le ministre des Communications dise à
son voisin qu'il ressort d'une réponse du ministre à une question
que je lui posais, la semaine dernière, qu'on est sur la même
longueur d'onde, c'est le cas de le dire. Le fédéral, depuis
trois ans, a donné un blanc-seing total, une
déréglementation totale en matière de publicité
télévisée, faisant comme si, dans une économie de
marché, on pouvait, par décret, décider des budgets
publicitaires des entreprises. C'est ainsi, M. le Président, qu'on a
successivement accordé un permis pour un nouveau réseau de
télévision, Télévision Quatre Saisons, qui joue un
rôle important dont personne ne devrait, je pense, contester la
pertinence. Mais, en même temps, on permettait à
Radio-Québec de vendre davantage de publicité, à
Radio-Canada de passer de 8 à 12 minutes et à tous les canaux
spécialisés de vendre de la publicité
télévisée, ce qui est un comble, M. le Président,
parce qu'on sait que les canaux télévisés tels le
Canal-Famille ou Musique Plus ou Super Écran, c'est de la
télévision à péage. Alors, on a dit: La
télévision à péage pourra également compter
sur des revenus publicitaires. Le résultat, M. le Président,
c'est qu'il y a au moins un réseau privé de
télévision francophone du Québec qui est menacé
dans son existence même.
On retrouve là, M. le Président, tous les débats
qui ont lieu au Québec et au Canada sur la société
distincte puisqu'au Canada anglais, le problème principal, c'est que la
grande audience se tourne vers la télévision américaine
aux heures de pointe et même à CBC. Alors, l'approche du CRTC, M.
le Président, pour le Canada anglais a été de dire: Si on
veut résister à l'envahissement culturel américain, il
faut multiplier presque sans limites les signaux horaires de
télévision canadienne. On parlait en termes de marché, M.
le Président, au Canada anglais, d'un marché de 22 000 000 de
citoyennes et de citoyens. Au Québec, pour la télévision
francophone, on parle d'un marché de 6 000 000. Alors, la recette qui,
sans doute, est bonne pour le Canada anglais ne l'est pas pour le
Québec. Or, qu'est-ce qui est arrivé récemment, M. le
Président? C'est que le fédéral a fait un sommet sur la
télévision, à l'issue duquel le vis-à-vis du
ministre des Communications a résumé le supposé consensus
en disant, et je le cite au texte, M. le Président: "En
télévision, le téléspectateur est roi". Comme on
dirait en chinois, M. le Président, "Big Deal"! Après avoir dit
ça, il n'avait rien dit parce qu'au Québec, il y a un
problème sérieux, qui est le suivant:
Télé-Métropole qui a déjà
réalisé des profits, après impôts, de 15 000 000 $
ou 16 000 000 $ par année a réalisé un déficit de
50 000 000 $ dans les trois dernières années.
Je lisais, ce matin, un communiqué de CFCF, qui a
déjà été une machine à produire des profits,
qui disait qu'à cause de Télévision Quatre Saisons, et
malgré des coupures très substantielles, M. le Président,
qu'ils auraient cette année une perte de 25 000 000 $. Or, à cet
égard, M. le Président, il faut être clair. L'État
réglemente la télévision parce que les ondes sont un bien
public. Comme les ondes sont un bien public, il faut aussi réglementer
la publicité télévisée. Sinon, si on fait comme si
la publicité avait une capacité illimitée d'absorber tout
ce qui est proposé comme canaux de publicité
télévisée, on se retrouve avec
Télé-Métropole déficitaire, Quatre Saisons
déficitaire. Pour mal faire, le fédéral, en plus, a
coupé les budgets de Radio-Canada et a dit à la
Société: Vous manquez d'argent, eh bien vendez plus de
publicité.
Ce à quoi on assiste, M. le Président, c'est à une
véritable guerre des prix qui est suicidaire dans la
télévision francophone du Québec. Il y a des chiffres
éloquents à cet égard-là, M. le Président,
que le ministre connaît, j'en suis sûr. La quantité de
publicité télévisée par 1000
téléspectateurs qui coûte, à Montréal, 140 $
coûte 280 $ à Toronto. C'est exactement ce que le
fédéral a fait, M. le Président, comme si on ouvrait
quatre stations de service sur un coin de rue où il y a de la place pour
une seulement.
C'est sûr qu'il y a une guerre des prix que ça occasionne,
et c'est au détriment de la télévision. En terminant, M.
le Président, je dirai que notre télévision privée
a comme problème d'être déficitaire et que les
régions vont écoper. Québec risque d'être la
prochaine. On parle de fermer Télé-Capitale qui appartient
à TVA, donc, à Télé-Métropole, et de n'avoir
qu'une antenne dans la capitale. Pourquoi? Pas parce que TVA est mal
disposée vis-à-vis de son public de Québec, mais parce que
le CRTC a fait en sorte que nos télévisions privées,
francophones du Québec ne sont plus viables.
En résumé, M. le Président, si on veut donner
d'autres prix Gémeaux l'an prochain à des productions
télévisées, il faudrait que le fédéral
reconnaisse enfin qu'il a fait du dégât en
télévision au Québec, surtout en matière
publicitaire, et qu'il faut qu'il ramasse son dégât parce que,
sinon, qui sait si un jour le ministre des Communications n'aura pas le O.K.
pour demander davantage de pouvoirs quand on voit à quel point le
fédéral utilise mal les pouvoirs qu'il possède en
matière de télévision.
En terminant, j'assure le ministre que chaque fois qu'il va aller dans
le sens des intérêts de la télévision
québécoise, il aura l'appui de l'Opposition officielle.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Pointe-aux-Trembles. Sur cette même motion du
ministre des Communications, je cède la parole à Mme la ministre
des Affaires culturelles.
Mme Liza Frulla-Hébert
Mme Frulla-Hébert: merci, m. le président. vous me
voyez très heureuse de me joindre à mon collègue, le
ministre des communications, pour souligner l'excellence de la production
télévisuelle québécoise et celle de chacun et de
chacune de ses artisans. au-delà de tout cet hommage qu'on rend aux
comédiens et aux comédiennes, aux créateurs aussi et aux
créatrices dont on a reconnu aussi le travail individuel, exceptionnel,
il faut retenir aussi que si toutes ces productions ont obtenu autant de
succès, c'est grâce à ces artisans qui contribuent de
près ou de loin à donner de la vigueur, de la richesse et du
rayonnement aussi à cette industrie.
Je vais arrêter ici le discours et je vais reprendre un peu ce qui
a été dit hier - parce que j'y étais, aux Gémeaux -
et ce que M. le député de Pointe-aux-Trembles a affirmé
aujourd'hui. Hier, un des lauréats a tout simplement accusé le
gouvernement de n'avoir rien fait pour la culture et, évidemment, le
député de Pointe-aux-Trembles a usé de démagogie,
comme on le connaît, pour appuyer, justement, cette affirmation. Je tiens
seulement à souligner que, depuis 1985, le budget des affaires
culturelles a augmenté de 45 %, le budget du théâtre a
augmenté de 52 %, que nous rejoignons maintenant, avec notre
réseau de bibliothèques, 88 % de la population. Je tiens aussi
à souligner que, cette année, nous avons aboli la TVQ sur le
livre, 32 000 000 $. Nous avons institué, après le rapport sur le
financement des arts, un comité, le groupe Arpin. Nous avons fait la
plus grosse commission parlementaire jamais tenue en ces lieux pour
élaborer une politique culturelle. La semaine dernière, nous
avons sauvé l'Orchestre symphonique de Montréal en y injectant 1
250 000 $ récurrents sur trois ans et en mettant sur pied un fonds de
dotation. Nous avons sauvé Lanaudière en faisant acheter
l'amphithéâtre par la Place des Arts. Alors, si c'est ça,
ne rien faire, M. le Président, bien, parfait! on ne fera rien.
Ceci dit, oui, on demande une politique culturelle; on a raison. Et
parce que nous sommes un gouvernement responsable, nous allons livrer une
politique culturelle. Pourquoi pas avant? Parce que ça fait 30 ans qu'on
se développe et parce qu'on a la maturité, après 30 ans,
tout simplement, d'en avoir une, politique culturelle. Ce que je demande
maintenant au milieu, c'est, au lieu d'interpeller chaque fois la ministre,
chaque fois qu'ils ont l'occasion, parce qu'ils ont un micro ou parce qu'ils
sont devant 1 500 000 auditeurs et qu'on ne peut pas répondre... Je
demande tout simplement une certaine solidarité du milieu. On a
comparé notre milieu au milieu de l'économie. On a comparé
notre milieu à ce que Gérald Tremblay a fait et à
l'accueil que Gérald Tremblay a eu du milieu économique. C'est
parce que le milieu économique a été mature, suffisamment
mature pour réaliser que ce qu'on lui proposait était un plan
d'avenir. Je demanderai maintenant cette maturité au milieu de la
culture. ceci dit, m. le président, on est fiers de ce qu'on fait au
québec, on n'a rien à envier à personne. on investit face
à cette culture québécoise, et chaque sou investi pour la
culture est un sou investi à notre survie comme peuple francophone en
terre d'amérique. merci, m. le président. (15 h 20)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la ministre
des Affaires culturelles. Sur cette même motion, toujours sur la motion
de M. le ministre des Communications, je reconnais M. le député
de Westmount.
M. Richard B. Holden
M. Holden: Merci, M. le Président. Je n'avais pas
l'intention d'intervenir aujourd'hui, mais, hier soir, j'ai regardé les
Gémeaux et j'ai trouvé les propos de M. Besré
déplacés, et absolument pas la place pour faire un discours
politique. Ça me faisait penser à des occasions où M.
Marlon Brando envoyait des délégués de la
communauté autochtone pour faire des discours politiques, dans le temps
des Oscars où les gens font de la politique. Je peux assurer la ministre
que, contrairement à ce qu'on peut penser, les 100 700 personnes qui ont
regardé ça l'ont appuyée au lieu d'appuyer M.
Besré. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Westmount. Je cède maintenant la parole à
M. le ministre des Communications pour lui permettre d'exercer son droit de
réplique.
M. Lawrence Cannon (réplique)
M. Cannon: Merci, M. le Président. Quelques
réflexions à la suite de l'intervention du député
de Pointe-aux-Trembles qui, évidemment, confirmait par ses propos qu'une
gestion bien serrée, une gestion bien faite à
Radio-Québec, même si elle n'a pas des montants d'argent qui
pètent la banque, permet quand même à cette
société d'État de bien performer et d'aller chercher des
prix dans l'industrie de la télévision, et des prix qui,
évidemment, sont de grande qualité.
Le député a pris une trentaine de minutes pour
résumer la problématique dans l'industrie
télévisuelle québécoise. Cependant, au passage, il
s'est permis de faire des commentaires tout à fait gratuits,
commentaires auxquels je ne souscris pas, et ma collègue, la ministre
des Affaires culturelles, a eu l'occasion de fournir la réplique.
Jamais, M. le Président, un gouvernement n'a fait autant pour la culture
que l'actuel gouvernement qui est ici, à l'Assemblée nationale.
Jamais une personne ne s'est souciée de l'avenir culturel des
Québécois comme l'actuelle ministre des Affaires culturelles.
Jamais personne comme la députée et ministre ne s'est
soucié de ça... Elle se rend effectivement là où
elle doit se rendre, elle a tenu des commissions parlementaires, elle a fait
des consultations. À chaque moment, elle est présente dans le
milieu pour régler les problèmes qui sont là. Ce qu'elle a
demandé et ce qu'elle demande, c'est la solidarité dans cette
industrie, c'est de faire en sorte que nous puissions, comme
collectivité, nous serrer les coudes et, comme collectivité,
arriver à développer une politique qui, comme elle l'a
mentionné, va venir, parce que ça fait 30 ans qu'elle est en
attente. Mais durant le régime du Parti québécois au
pouvoir, on a eu, évidemment, de grands discours; on a eu de grandes
déclarations, mais très peu d'action. Pour une fois, M. le
Président, on a maintenant une personne qui est prête à
livrer la marchandise, puisque la consultation est maintenant terminée
et on va passer à l'action.
Alors, en conclusion, M. le Président, je suis d'accord et je
suis très heureux de voir que mon collègue, le
député de Pointe-aux-Trembles, m'appuie dans mes démarches
pour que l'industrie télévisuelle québécoise soit
forte, soit solide et économiquement stable. J'espère pouvoir
compter encore sur son appui pour qu'on puisse défendre les
intérêts du Québec dans ce secteur-là. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre des
Communications. Est-ce que la motion de M. le ministre des Communications, qui
se lit comme suit, "Que l'Assemblée nationale félicite tous les
gagnants et gagnantes du 6e Gala des prix Gémeaux de l'Académie
canadienne du cinéma et de la télévision", est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. Pas
d'autres motions sans préavis.
À l'étape des avis touchant les travaux des commissions,
M. le leader du gouvernement.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Bélisle: Leader adjoint, M. le Président.
J'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires
courantes jusqu'à 18 h 30 et, si nécessaire, de 20 heures
à minuit, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission des
institutions procédera à l'étude détaillée
des projets de loi suivants, et ce dans l'ordre ci-après indiqué:
projet de loi 172, Loi concernant la Convention des Nations unies sur les
contrats de vente internationale de marchandise, et le projet de loi 174, Loi
modifiant la Loi sur les tribunaux judiciaires.
Après les affaires courantes jusqu'à 18 h 30, de 20 heures
à minuit et, si nécessaire, demain, le mardi 17 décembre
1991, de 9 heures à 11 heures, à la salle
Louis-Hippolyte-LaFon-taine, fa commission de l'aménagement et des
équipements poursuivra l'étude détaillée du projet
de loi d'intérêt privé 294, Loi modifiant la charte de la
ville de Québec, et entendra les intéressés et
procédera à l'étude détaillée du projet de
loi d'intérêt privé 296, Loi modifiant la charte de la
ville de Montréal.
Enfin, M. le Président, j'avise également cette
Assemblée que demain, le mardi 17 décembre 1991, de 9 heures
à 11 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission du
budget et de l'administration entendra les intéressés et
procédera à l'étude détaillée du projet de
loi d'intérêt privé 305, Loi concernant la continuation de
l'entreprise d'assurance de Les Coopérants, société
mutuelle d'assurance-vie et le
maintien de l'existence de cette compagnie. Je dépose mes avis,
M. le Président.
Le Président: Très bien, M. le leader adjoint.
Est-ce qu'il y a consentement concernant le début des travaux des
commissions à 9 heures dans les deux derniers cas? Il y a consentement?
Consentement.
M. Bélisle: M. le Président, si vous me
permettez...
Le Président: Oui, M. le leader adjoint.
M. Bélisle: ...un dernier avis à l'intention de
tous nos collègues qui siègent ici, à l'Assemblée,
bien entendu. À cause de la journée historique concernant le
Bicentenaire, demain, l'Assemblée nationale et ses commissions
commenceront à siéger à compter de 9 heures jusqu'à
11 heures, demain matin, plutôt qu'aux heures normales de 10heures
à 12 h 30.
Le Président: Très bien, M. le leader adjoint du
gouvernement.
Je voudrais vous aviser qu'aujourd'hui, le 16 décembre 1991, au
Château De Maizerets, à Québec, la Commission
d'étude des questions afférentes à l'accession du
Québec à la souveraineté se réunira en
séance publique de 15 h 30 à 17 h 30 et en séance de
travail de 17 h 30 à 18 h 30.
Demain également, le 17 décembre 1991, de 11 heures
à 12 h 30, à la salle louis-joseph-papineau, la commission du
budget et de l'administration se réunira en séance de
travail.
Demain, le 17 décembre, de 9 heures à 11 heures, au
Château De Maizerets, à Québec, la Commission
d'étude des questions afférentes à l'accession du
Québec à la souveraineté se réunira en
séance publique. Donc, il y a consentement, évidemment, à
la dérogation concernant le début des travaux dans ce dernier
cas. Consentement. (15 h 30)
Renseignements sur les travaux de
l'Assemblée
Décision du président sur la
recevabilité du projet de loi 197
Le Président: maintenant, aux renseignements sur les
travaux de l'assemblée, tel que je m'étais engagé
tantôt, je vais maintenant rendre la décision sur la question que
j'avais prise en délibéré.
Je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur la
régularité du projet de loi 197, Loi sur la limitation des
dépenses budgétaires, dont l'auteur est le député
de Saint-Louis.
On se rappellera qu'à la séance de jeudi dernier, le 12
décembre, le leader et le leader adjoint de l'Opposition officielle ont
soulevé la régularité de ce projet de loi avant que
l'Assemblée ne puisse s'en saisir. On m'a fait part d'une abondante
argumentation, tant du côté de l'Opposition que du
côté ministériel. Je remercie les députés qui
ont bien voulu intervenir sur cette question très importante. Ils ont
ainsi contribué à donner à la présidence un
meilleur éclairage sur la question complexe de l'initiative
financière de la couronne.
En tant que législateur, vous savez sans doute que les
prérogatives de la couronne en matière financière tirent
leur source de la Loi constitutionnelle de 1867. Le préambule et les
articles 9, 54, 58 et 90 de cette loi fondamentale établissent les
assises de ces principes qui connaissent inévitablement leur
prolongement dans la procédure parlementaire. Au Québec, nous
retrouvons ces prolongements, mis à part le texte constitutionnel
lui-même, à l'article 30 de la Loi sur l'Assemblée
nationale et à l'article 192 du Règlement de l'Assemblée
nationale.
Mais avant de m'engager dans le coeur de cette décision,
j'aimerais attirer l'attention des députés sur quelques
caractéristiques générales du processus budgétaire
dans les divers Parlements du monde.
J'emprunterai ces quelques observations au traité intitulé
"Les Parlements dans le monde", ouvrage volumineux et assez complet
préparé par le Centre international de documentation
parlementaire de l'Union interparlementaire. Je crois qu'elles nous aideront
à mieux évaluer nos propres règles. Elles nous permettront
également de vérifier si des compétences respectives des
pouvoirs exécutifs et législatifs du Québec se distinguent
considérablement de la situation prévalant dans d'autres pays qui
sont dotés d'une institution parlementaire.
Tout d'abord, une première citation sur l'évolution et le
développement de la compétence budgétaire au sein des
États. "dans l'activité du parlement, les problèmes
financiers, au premier rang desquels figure l'examen du budget de
l'état, occupent une place à part qui résulte
essentiellement de l'évolution historique du rôle du parlement. le
droit financier étant couramment considéré, de nos jours,
comme une branche accessoire du droit constitutionnel, on a tendance à
perdre de vue qu'en réalité il en est la source. la
compétence financière des assemblées
représentatives a, en effet, précédé les
prérogatives d'ordre politique. elle a constitué le noyau central
autour duquel se sont progressivement fixées les institutions des
régimes constitutionnels modernes. le parlement a donc puisé ses
forces dans sa lutte pour protéger la nation contre les exactions
financières des princes." fin de la citation.
On constate que dans la plupart des États du monde, la lutte pour
le contrôle des finances publiques a déterminé le mode
d'organisation de ces États et le partage des responsabilités au
sein mêmes de ces États.
On lit encore dans le traité de l'Union interparlementaire: "La
prépondérance de l'exécutif se manifeste d'une
façon absolue dans la phase préliminaire du processus
budgétaire. Dans tous les pays, une rare unanimité se
dégage pour admettre que le gouvernement est seul compétent pour
préparer le budget et le présenter au Parlement."
Et un peu plus loin: "II convient donc que l'exécutif ait toute
latitude pour élaborer et déterminer, dans les moindes
détails, ses modalités. "La compétence de
l'exécutif s'explique en second lieu par des raisons d'ordre technique.
Le gouvernement est seul à connaître les besoins des
administrations publiques et les rendements possibles des recettes. "La
complexité du budget est telle qu'un groupe restreint d'individus,
particulièrement informés et compétents, est seul capable
d'assumer actuellement la responsabilité de son élaboration.
L'homogénéité essentielle n'est guère compatible
avec l'intervention d'une assemblée ; législative nombreuse." Fin
de la citation.
Dans le même ouvrage, sous la section ; intitulée "Le
rôle des Parlements dans la préparation du budget", on y lit ce
qui suit: "II est rare que le Parlement intervienne dans la phase de
préparation de la procédure budgétaire. Dans presque tous
les pays, le Parlement est privé du droit d'initiative en matière
budgétaire. Il lui reste le droit d'amender le projet gouvernemental
sous certaines conditions." Fin de la citation.
En terminant, j'aimerais mentionner un dernier extrait du traité
publié par l'Union interparlementaire. On y précise ce qui suit:
"le budget est donc une simple représentation chiffrée du
programme du gouvernement et acquiert sa valeur juridique par le vote des
assemblées parlementaires. en le sanctionnant, elles accordent à
l'exécutif une double autorisation: d'abord, celle de recouvrer les
recettes, ce qui suppose que les impôts ne peuvent être
prélevés chaque année sans le consentement des
représentants de la nation; ensuite, les assemblées, en
approuvant le budget, autorisent l'exécutif à engager les
dépenses. comme les impôts, les dépenses doivent être
autorisées par le parlement." fin de cette dernière citation. |
ces quelques extraits me paraissent indi- catifs et très
révélateurs quant à la localisation de la détention
du pouvoir d'initiative budgétaire j à travers les états
du monde.
Avant d'aborder les règles qui régissent chez nous
pareille matière, j'aimerais que les députés
réalisent la position délicate où se trouve placé
votre serviteur. Le président de l'Assemblée nationale en est son
représentant. D'une part, il incarne par sa fonction le pouvoir, la
dignité et l'honneur de la Chambre, comme le mentionne l'auteur
Beauchesne dans la dernière édition de son traité.
À ce titre, il doit, notam- ment, veiller à la protection et au
maintien des droits et privilèges de l'Assemblée et de ses
membres comme il y est précisé à l'article 2 de notre
règlement.
D'autre part, votre président doit voir au respect de la
procédure de l'Assemblée qui est régie, précisent
les articles 179 et 180 de notre règlement, par la loi, par le
règlement de l'Assemblée et ses règles de fonctionnement.
On doit ajouter que la procédure de l'Assemblée est aussi
régie par ses ordres spéciaux et, enfin, par ses
précédents et ses usages.
La présidence de l'Assemblée nationale défendra
toujours vigoureusement les responsabilités et prérogatives de
cette honorable Assemblée. Elle concourra toujours avec empressement
à toute initiative et même à toute loi venant
accroître et favoriser l'exercice des responsabilités du
député législateur et con-j trôleur. Ce faisant,
toutefois, elle ne peut ignorer les règles de droit dont la stricte
application lui incombe. On peut discourir longuement sur leur utilité
ou opportunité, mais il demeure que, pour le moment, nous devons tous
nous y soumettre.
Confronté à un problème mettant en cause la
prérogative financière de la couronne, un ancien président
de la Chambre des communes du Canada, M. Lucien Lamoureux, déclarait ce
qui suit dans une décision rendue le 27 mars 1972, et je cite:
"L'honorable député a affirmé que si effectivement la
présidence jugeait que l'un des bills ou tous lésaient la
prérogative de la couronne à cet égard, cette disposition
du règlement devrait être considérée comme
étant archaïque. L'honorable député comprendra sans
doute que la présidence ne saurait passer outre à une
règle aussi fondamentale. Si, à l'égard de l'un quelconque
de ces bills, la présidence est persuadée que l'initiative
financière de la couronne est vraiment en jeu, elle ne peut faire
autrement que de les écarter. Voilà la conclusion que j'ai
tirée à l'égard de trois des sept bills en cause." Fin de
la citation.
Ce qui pouvait sembler archaïque et contraignant en 1972 ne l'est
sans doute pas moins presque 20 ans plus tard. Pourtant, il s'agit là
des fondements mêmes de notre régime politique. On doit donc s'en
accommoder ou les changer. Quant au président, il n'a pas le choix de
les faire respecter.
Venons-en maintenant aux faits. Le projet de loi 197 contrevient-il au
principe de l'initiative de la couronne en matière financière? Au
Québec et dans le reste du Canada, quels sont les contours de ce
principe et qu'impliquent-ils? Je tenterai de les esquisser pour les appliquer
au projet de loi 197.
Je rappelle aux députés que j'ai pris connaissance du
contenu de ce projet de loi, bien qu'il ne soit pas encore distribué aux
membres de l'Assemblée. En effet, en vertu de
l'article 232 du règlement, le député qui
désire présenter un projet de loi doit en faire parvenir copie
à la présidence avant le début de la période des
affaires courantes. C'est ainsi que j'ai pu évaluer
précisément l'implication de la mesure proposée sur la
prérogative de la couronne.
Il est vrai que l'angle sous lequel se pose le problème est tout
à fait inhabituel, je dirais même insolite. Le projet de loi
propose de plafonner en quelque sorte les dépenses du gouvernement pour
les prochaines années. Il cherche à contraindre d'une
façon bien précise le gouvernement en matière
d'équilibres financiers. Cette contrainte s'imposerait au gouvernement
avant même que ne s'amorce le processus de préparation des
crédits budgétaires. il ne s'agit donc pas d'un cas classique
où l'on propose d'ajouter aux besoins financiers de l'État. En
d'autres mots, il ne semble pas que cette initiative, pour être
satisfaisante, impliquerait un déboursé à même les
recettes du gouvernement du Québec. Cependant, je dois quand même
m'assurer que cette contrainte ne constitue pas un empiétement sur les
prérogatives de la couronne.
Abordons maintenant les règles qui régissent chez nous la
prérogative de la couronne en matière financière. Dans la
troisième édition du "Précis de procédure" de la
Chambre des communes du Canada, on peut y lire ce qui suit, et je cite: "Les
principes sur lesquels reposent les procédures financières en
vigueur au Canada sont le produit de l'évolution du gouvernement de type
parlementaire et de la Grande-Bretagne et des relations financières qui
existaient entre la couronne et le Parlement. "pour comprendre tout le
système par lequel r le gouvernement obtient les recettes
nécessaires pour faire face à ses dépenses, il faut savoir
que c'est la couronne qui demande des fonds et le parlement qui les octroie.
autrement dit, les demandes de fonds doivent émaner de la couronne qui
se fait conseiller par son cabinet." fin de la citation. (15 h 40)
La cinquième édition de Beauchesne est au même
effet. Je crois utile de lire en entier aux députés le
commentaire 539 de cet ouvrage, et je cite: "539. 1) Sur le plan financier, les
principes qui régissent les rapports financiers entre la couronne et le
Parlement sont les mêmes que ceux qui s'appliquent au Royaume-Uni. "2) Le
pouvoir exécutif s'incarnant dans le Souverain, c'est ce dernier
à qui on confie la gestion des recettes tout entières de
l'État et des décaissements exigés par le service public.
En conséquence, la couronne, sur avis conforme de ses ministres
responsables, fait connaître aux Communes les besoins financiers du
gouvernement. En contrepartie, les Communes votent les subsides
nécessaires et, sous forme d'impôts ou autres
prélèvements sur le Trésor public, donnent au gouvernement
les "voies et moyens" nécessaires. Bref, la couronne demande de
l'argent, les Communes le lui accordent et la Chambre des Lords avalise ces
subsides. Il reste que les Communes ne votent pas de subsides si ceux-ci ne
paraissent pas nécessaires au service public conformément
à l'avis donné par la couronne, c'est-à-dire par ses
conseillers constitutionnels." Fin de la citation.
L'une des règles budgétaires les plus fondamentales est
à l'effet qu'aucun denier public ne peut être
dépensé sans une autorisation parlementaire préalable.
Cette règle, nous disent les auteurs Dussault et Borgeat, domine
l'ensemble du processus budgétaire. Ils ajoutent à ce sujet, et
je cite: "Plus qu'une simple formalité de procédure, l'adoption
parlementaire du budget des dépenses répond à l'un des
principes de base du parlementarisme. Elle repose en effet sur le principe de
la suprématie parlementaire. Comme le dit Maurice Duverger, "le dernier
mot revient au Parlement en matière budgétaire"." Fin de la
citation.
Les mêmes auteurs abordent ensuite deux principes constitutionnels
inhérents aux projets de loi à caractère financier: le
droit d'initiative du gouvernement et le privilège de la Chambre basse.
Sur le premier principe, ils s'expriment ainsi: "Dans un système
parlementaire de type britannique, seule la couronne possède le
privilège de proposer au Parlement des lois allouant des crédits
ou levant des impôts. Ce privilège de l'Exécutif trouve son
fondement juridique dans la Magna Carta. Traditionnellement, ce
privilège avait pour but de garantir que le Parlement accorde au
Souverain les deniers requis pour ses activités. Il se fondait aussi sur
les appréhensions du Souverain, qui entretenait à l'égard
des représentants du peuple une attitude méfiante et qui en aucun
cas n'aurait accepté qu'ils puissent voter des lois à
caractère financier sans son accord préalable. "Aujourd'hui, ce
privilège de l'Exécutif est fréquent dans les principaux
pays démocratiques, où la préparation du budget constitue
une activité généralement attribuée à
l'Exécutif plutôt qu'au Parlement. Cette situation s'explique par
le fait que les parlementaires ne sont pas organisés pour
élaborer les prévisions budgétaires du gouvernement; leur
fonction est plutôt d'adopter ou non ce qui leur est proposé. En
ce sens, la prérogative de la couronne concernant les lois de
crédits a aujourd'hui pour effet d'assurer une meilleure planification
et une meilleure cohésion des dépenses de l'État." Fin de
la citation.
Le deuxième principe veut que seule la Chambre basse du Parlement
est compétente pour proposer des projets de loi à incidence
financière. Acquis de haute lutte dans un contexte
d'équilibre de pouvoirs entre les membres élus et les
membres nommés du parlement, comme le j mentionnent les mêmes
auteurs, ce principe n'est i pas en cause dans la présente situation. ,
au parlement britannique, l'initiative fi- / nancière de la couronne
constitue l'une des : quatre règles de base de la procédure
financière. l'ouvrage réputé de may fait état de
ces quatre règles et les commente longuement. voici un i court extrait
qui exprime bien toute l'importance \ de la règle nommée 'the
financial initiative of the crown": "When, with the commencement of
par-liamentary control over the Exchequer, the granting of Supply was
differentiated into two functions - the voting of sums of money and the
provision of revenue by taxation - it was accepted without question by the
House of Commons that the rule applied to both of the now clearly distinguished
functions of Supply and of Ways and Means, and to any business which belonged
to either of theses classes. "In these matters the initiative is reserved to
the Crown under constitutional practice and its exercise is implied in
procedure rather than expressly asserted. An announcement that estimates will
be laid before the House of Commons is contained in the Queen's speech at the
opening of Parliament; they are presented "by command" of Her Majesty; and the
resolutions by which they are voted make them in terms grants to the Queen."
Fin de la citation.
La couronne demande donc les subsides et le Parlement les accorde. La
couronne ou, si l'on veut, le gouvernement demande que le Parlement mette
à sa disposition les crédits nécessaires pour le paiement
des dépenses du gouvernement.
Une autre citation de l'auteur May décrit bien ce processus qui
fonde et délimite des compétences exclusives entre la couronne et
l'Assemblée sur les diverses étapes du processus
budgétaire. Voici comment l'auteur l'explique, et je cite: 'The
Sovereign, being the executive power, is charged with the management of all the
revenue of the State, and with all payments for the public service. The Crown,
therefore, acting with the advice of its responsible ministers, makes known to
the Commons the financial requirements of the government; the Commons in
return, grant such aids or supplies as are required to satisfy these demands;
and they provide by taxes, and by the appropriation of other sources of the
public income, the ways and means to meet the supplies which they have granted.
Thus the Crown demands money, the Commons grant it and the Lords assent to the
grant: but the Commons do not vote money unless it is required by the Crown,
nor do they impose or augment taxes, unless such taxation is necessary for the
public service, as declared by the Crown through its constitutional advisers."
Fin de la citation.
II ressort de la lecture de certains auteurs traitant de cette question
que la couronne et l'Assemblée ont chacune leurs prérogatives qui
ne sauraient souffrir d'empiétement sans mettre en jeu
l'équilibre de nos institutions. L'Exécutif et l'Assemblée
exercent leurs prérogatives en toute suprématie dans les bornes
qui leur sont réservées en propre.
Fixer le montant du déficit des opérations courantes du
gouvernement pour les années à venir m'apparaît porter
atteinte au principe de l'initiative de la couronne. Pareille mesure viendrait
établir une contrainte sur les montants des prochaines recommandations
de la couronne. Ceci m'apparaît aller bien au-delà de ce qui est
permis en vertu de l'autorité reconnue à cette Assemblée.
Ce n'est pas là que réside sa souveraineté.
Le contrôle de l'Assemblée ne s'exerce pas a priori ou, si
l'on veut, au début du processus des prévisions
budgétaires. Le champ d'intervention de l'Assemblée commence
dès le dépôt des crédits budgétaires à
l'Assemblée nationale. Il est vaste. C'est à ce moment que
l'Assemblée peut diminuer ou refuser les montants réclamés
par le gouvernement. C'est lors de cette étude des crédits
budgétaires que l'Assemblée peut exiger l'élimination des
déficits gouvernementaux au solde des opérations courantes.
Trois règles fondamentales consacrent l'emprise unique et le
rôle majeur de l'Assemblée dans le processus budgétaire.
Les auteurs Dus-sault et Borgeat les formulent comme suit, et je cite: "La
règle de l'annualité budgétaire "Dans les lois sur les
crédits, l'autorisation parlementaire accordée au gouvernement de
prélever un montant d'argent sur le fonds consolidé du revenu est
restreinte à une année financière. Inscrite dans les
règles du parlementarisme britannique depuis le XIXe siècle, la
règle de l'annualité budgétaire a été
instituée pour assurer au Parlement un contrôle régulier
des finances publiques. "La règle de la spécialité
budgétaire "L'autorisation que donne annuellement le Parlement de
prélever sur le fonds consolidé du revenu ce qui est requis pour
couvrir les dépenses de l'administration n'est pas donnée en
bloc, pour un seul montant global; elle est répartie en une multitude de
programmes ou, le cas échéant, de postes budgétaires. Les
crédits accordés à un programme doivent donc être
utilisés aux seules fins de ce programme, étant donné que
le Parlement a fixé dans la loi la part de chacun d'eux. "la
règle de la limitation budgétaire "La limitation du montant des
crédits alloués est à la fois la plus importante et la
plus simple. Elle interdit de dépenser plus que les crédits
autorisés: le montant des crédits votés annuellement
constitue un maximum qui ne peut être dépassé." Fin de la
citation.
En matière budgétaire, il est essentiel d'éviter
toute méprise. L'Exécutif et l'Assemblée nationale sont
des organes de l'État qui détiennent, dans le cadre du processus
budgétaire, des fonctions spécifiques. Les deux participent d'une
manière décisive à l'élaboration du budget annuel
de l'État.
Notre règlement offre, en outre, une multitude d'occasions de
contrôler les dépenses du gouvernement, à
l'Assemblée comme dans les commissions parlementaires. Les
députés y jouent un rôle irremplaçable, exigeant des
membres du gouvernement qu'ils rendent compte de leur administration.
On peut également souligner la possibilité de proposer des
mesures législatives d'une portée majeure comme s'en sont
prévalu récemment nos 5^ collègues de Marie-Victorin et de
Verdun.
Voilà autant de façons de contrôler les
représentants du pouvoir exécutif, de leur faire savoir quelles
devraient être leurs priorités et à quels programmes les
crédits budgétaires devraient être affectés.
Pour les divers motifs précédemment énoncés,
je dois déclarer le projet de loi 197 sur la limitation des
dépenses budgétaires contraire au principe de l'initiative
financière de la couronne. Je ne puis donc autoriser l'auteur de ce
projet de loi a proposer que l'Assemblée nationale s'en saisisse.
Je vous remercie de votre attention. Ceci met donc fin à la
période des affaires courantes. Nous allons maintenant procéder
aux affaires du jour. Alors, M. le leader du gouvernement. (15 h 50)
M. Pagé: M. le Président, je vous invite à
appeler l'article 4 du feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 404 Adoption du principe
Le Président: À l'article 4 du feuilleton, M. le
leader du gouvernement et ministre de l'Éducation propose l'adoption du
principe du projet de loi 404, Loi modifiant la Loi sur les conditions de
travail et le régime de pension des membres de l'Assemblée
nationale et d'autres dispositions législatives. Donc, à ce
moment-ci, je vais céder la parole à M. le leader du gouvernement
et ministre de l'Éducation.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président. L'honorable
lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi et il en
recommande l'étude à l'Assemblée.
M. le Président, c'est avec fierté que je présente
ce projet de loi malgré quelques critiques qui ont été
portées à mon attention comme leader parlementaire du
gouvernement, malgré, aussi, entre guillemets, que l'opportunité
d'amor- cer l'étude de ce projet de loi à ce moment ici a
été questionnée ou formulée. Il est dans la normale
des choses, compte tenu d'un processus qui a été amorcé
ici même à l'Assemblée nationale par le Bureau, il est donc
normal, explicable que le projet de loi soit appelé.
Avant d'amorcer l'analyse du contenu du projet de loi, vous me
permettrez, M. le Président, de faire un bref historique,
persuadé que celles et ceux qui nous écoutent vont comprendre la
pertinence d'en arriver aujourd'hui à une telle législation. M.
le Président, il y a une de ces perceptions dans le public, et
j'espère être en mesure de rétablir certains faits dans le
cadre de cet échange. Il y a une perception dans le public comme quoi
les régimes de retraite applicables à celles et ceux qui ont le
privilège et l'honneur de les représenter seraient des
régimes très généreux, exorbitants, bon, etc. m. le
président, j'entends donc dans le cadre de cette intervention, dans
l'heure qui m'est allouée, j'entends donc tout faire pour
véritablement resituer les choses dans leur c
véritable perspective. c'est en1964, comme on le ' ' sait,
que l'assemblée nationâtit pour la première fois, s'est
dotée d'une législation devant régir les conditions de
retraite des membres de l'assemblée nationale. ce régime s'est
appliqué jusqu'en 1983. jusqu'en 1983, donc, en vertu de ce premier
régime de retraite applicable à un certain nombre de
parlementaires, en partie seulement... il faut convenir que la loi sur la
législature prévoyait l'octroi d'une rente de retraite à
tout député qui cessait d'être membre de l'assemblée
nationale.
C'est donc dire que, de 1964 à 1983, toute personne qui avait
siégé à l'Assemblée nationale, à certaines
conditions, recevait une rente de retraite immédiatement après
son départ. Les seules conditions qui étaient imposées
pour avoir droit à cette rente étaient d'avoir accompli deux
mandats totalisant une durée minimale de cinq ans. C'est donc dire
qu'à venir jusqu'à 1983, toute personne qui était
élue ici, peu importe son âge, cette personne, il suffisait
qu'elle soit élue une première fois, elle devenait
députée, elle était réélue et, en autant
qu'elle avait siégé cinq ans, elle avait le droit
immédiatement à une rente de retraite. L'âge du
député, au moment où il quittait ses fonctions,
n'était pas un facteur considéré. On ne prenait pas en
compte l'âge du député.
Je me permettrai de vous dire, M. le Président que,
personnellement, j'ai été élu à 23 ans. C'est donc
dire qu'en vertu du régime applicable quand j'ai été
élu, j'aurais pu être un retraité de l'État à
l'âge de 28 ans, soit en 1978, cinq ans après avoir
été élu. Ça, c'était le régime
précédent qui ne s'applique plus. Donc, son âge
n'était pas pris en compte, n'était pas un facteur
considéré. Ainsi, un tout jeune député pouvait
avoir droit à sa rente de retraite même s'il n'était pas
à un âge où, normalement, on se
retrouve dans une telle situation. À cette époque, les
députés versaient une cotisation représentant
jusqu'à 10 % de leur traitement, et la rente qu'on leur accordait
pouvait atteindre 75 % du montant desdites cotisations. C'est donc dire - parce
que ça, il faut le dire - qu'il y a beaucoup de gens qui ne savent pas
que les députés contribuent à leur régime de
retraite pour un pourcentage représentant 10 % de leur revenu; 10 % de
la paie s'en va au régime de retraite, sans compter l'impôt
fédéral, évidemment, l'impôt provincial et les
autres taxes comme tout autre citoyen. Ce régime permettait donc,
après huit ans, huit ans complétés à
l'Assemblée nationale, au député qui quittait d'obtenir
une rente représentant 75 % de ses contributions, sans aucune
déduction, peu importe l'âge qu'il ou qu'elle avait. Ça
voulait dire quoi concrètement? Concrètement, ça voulait
dire un régime coûteux, un régime qui n'était pas,
mais pas du tout comparable aux autres régimes applicables dans la
société québécoise, un régime où le
taux de croissance du traitement était d'environ 7,5 % par
année.
Alors, tantôt quand on parlera - pour celles et ceux qui nous
écoutent - d'un enrichissement annuel passant de 3,5 % à 4 %, il
faut se rappeler qu'entre 1964 et 1983, l'enrichissement annuel en termes de
crédit de rente équivalait à 7,5 % du revenu par
année, ce qui est beaucoup. La rente de retraite accordée
à cette époque était aussi, il faut le dire... Le ou la
députée qui prenait sa retraite avait une rente pleinement
indexée. C'est donc dire qu'en 1981, 1982, 1983, où l'inflation,
vers cette période, était dans certains cas - même je me
rappelle une année, si ma mémoire est fidèle,
c'était au-delà de 11 %... Ces gens qui avaient été
élus, qui avaient siégé ici huit ans, avaient le droit
à une rente de 75 % de leur contribution. Par surcroît, elle
était totalement indexée au coût de la vie. Ça,
c'est l'ancien régime.
De cet ancien régime, il y a 179 personnes au Québec qui
reçoivent des prestations actuellement, des rentes. Sur les 179, pour
ces personnes-là, la moyenne, dans un contexte de régime
généreux qui s'accroissait de 7,5 % par année, est de 31
000 $ versés à ces femmes et ces hommes qui ont rendu service
à l'État et qui ont été mandatés pour le
faire par leur population.
En 1983, le régime a subi des modifications très
importantes. Le taux d'accumulation de la rente de retraite est ramené
de 7,5 % à 4 % du traitement annuel. Le taux de cotisation est cependant
maintenu à 10 % de ce même traitement. Tant la cotisation que la
rente sont ajustés pour tenir compte de la coordination - ça va
de soi - avec le Régime des rentes du Québec. Les rentes
accordées lors de la retraite, au lieu d'être indexées
selon la pleine augmentation de l'indice des prix à la consommation,
sont désormais indexées selon l'augmentation de cet indice, avec
une réduction de 3 %.
Ça veut dire quoi concrètement? Ça veut dire que le
taux d'accroissement annuel passe de 7,5 % pour être ramené
à 4 % et la pleine indexation est mise de côté. Celles et
ceux qui y sont depuis 1983, lorsque ces bonnes gens vont prendre leur
retraite, ou encore celles et ceux qui ont quitté en 1985, qui se sont
retirés, qui ont été défaits, ces gens ont une
retraite et, s'ils sont admissibles à une retraite - parce que
maintenant il y a un facteur d'âge aussi qui entre en ligne de compte; on
ne bénéficie pas nécessairement de la rente de retraite
immédiatement en quittant, et c'est prévu dans le même sens
dans le projet de loi - au lieu d'avoir une pleine indexation, ils ont l'indice
des prix à la consommation, moins 3 %.
Ça veut dire quoi concrètement, ça? Ça veut
dire que le parlementaire élu après 1983 qui a pris sa retraite
ou qui va la prendre, si l'indice des prix à la consommation augmente de
4 %, sa rente va augmenter uniquement, elle, de 1 %, comme c'est le cas dans la
fonction publique. donc, si l'indice des prix à la consommation augmente
de 5 %, la rente, elle, est indexée à 2 %.
(16 heures)
Les rentes de retraite aussi - ça, il faut le dire - à
partir de 1983, deviennent payables à compter de l'âge de 60 ans,
avec possibilité d'anticiper le paiement, avant cet âge, moyennant
une réduction de la rente de 4 % par année d'anticipation. Cette
réduction était sujette à un maximum de 33 et 1/3.
Ça veut dire quoi concrètement? Ça veut dire que depuis
1983, pour une partie du régime - parce qu'il y a de nombreux
régimes qui nous sont applicables et on va y revenir - pour ce qui est
du régime applicable en 1983, les dispositions prévoyaient et
prévoient toujours, jusqu'à l'adoption de la loi, que l'indice
des prix à la consommation moins 3 %, 4 % en enrichissement par
année, contribution de 10 % de notre salaire et âge de la retraite
établi à 60 ans, et si on veut la prendre avant, le maximum de
déficit, c'est 33 %.
C'est donc dire que si, depuis 1983, une rente représentant un
montant de 21 000 $ était acquise pour un parlementaire à
l'âge de 60 ans et qu'il décidait de la toucher, le déficit
maximum qui pouvait s'appliquer, c'était le tiers, donc, une rente de 14
000 $ plutôt que 21 000 $. Mais pas un montant de 14 000 $ indexé
à pleine indexation, un montant de 14 000 $ indexé à
l'inflation, l'indice des prix à la consommation, moins 3 %.
Un ajustement additionnel, M. le Président, est aussi intervenu
en 1988 - ça, c'est le troisième régime applicable - pour
prévoir des conditions plus généreuses de mise en paiement
d'une retraite anticipée. Cette amélioration a été
financée par une réduction de la rente de retraite
accordée annuellement, qui est passée de 4 % à 3,5 %. puis
il faut se rappeler aussi qu'à l'époque, si en 1988 notre
accroissement annuel
est passé de 4 % à 3, 5 %, c'est que les parlementaires
québécois, comme les parlementaires des autres provinces, se sont
vu signifier un avis du ministère du Revenu comme quoi ils pourraient,
parce que, jusque-là, on n'avait pas le droit d'avoir un régime
d'épargne-retraite parallèle, indépendant, personnel. On
s'est fait dire par Revenu Canada, et confirmé par Revenu Québec,
que nous, comme parlementaires, malgré que nous contribuions pour 10 %
de notre salaire dans un régime d'épargne, un régime de
retraite de l'Assemblée nationale, on s'est fait dire qu'on aurait le
droit de participer à un régime parallèle.
De nombreux collègues - je ne peux pas savoir combien il y en a
parmi nous, mais je sais qu'il y en a plusieurs - y ont participé. Je ne
peux pas le savoir parce que je n'ai pas accès - et c'est normal qu'il
en soit ainsi - aux rapports d'impôt des députés. C'est
quand même confidentiel comme pour tous les citoyens. Cependant, je sais
que de nombreux parlementaires se sont fait dire, après deux ans, tant
par Revenu Canada que par Revenu Québec: Vous n'avez plus le droit d'y
participer. Donc, ces bonnes gens ont dû escompter toucher les sommes
d'argent qu'ils avaient versées, lesquelles ont été
escomptées en une seule année plutôt que deux ans, alors
que les années de contribution avaient été de deux ans
pour certains. Ils ont dû payer de l'impôt là-dessus, sans
compter qu'ils ont dû rembourser évidemment l'avantage fiscal
qu'ils ou qu'elles avaient obtenu. en juin 1990, alors 1964 à 1983, 1983
à 1988... or, voilà qu'en 1990, le gouvernement
fédéral adopte une loi. le gouvernement fédéral a
adopté une nouvelle législation en matière fiscale qui
redéfinit l'ensemble des règles qui concernent l'accumulation
d'épargne-retraite. ces nouvelles règles s'appliquent à
compter de janvier 1992. donc, l'application de ce projet de loi est à
nos portes dans quelques jours.
Il s'avère donc important, et ça, ces dispositions
s'appliquent à tous les régimes de retraite sans exception,
qu'ils soient publics ou privés, à compter du 1er janvier 1992.
Il s'avère donc important de revoir l'ensemble des dispositions du
régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale pour nous
assurer que les règles fiscales qui le régissent soient
respectées et que l'enregistrement du régime soit maintenu.
D'ailleurs, en 1990, le Bureau de l'Assemblée nationale a
chargé un comité extraparlementaire de revoir l'ensemble des
dispositions des régimes de retraite, de faire l'analyse des
dispositions, des besoins des participants aux régimes de retraite,
c'est-à-dire de faire l'analyse des besoins des participants actuels et
futurs et de faire des recommandations sur les modifications requises. Ces
bonnes gens ont siégé, ils ont travaillé, ils ont
étudié, ils ont analysé, puis ils ont fait un rapport. Les
conclusions de ce rapport ont été présentées aux
participants et discutées au cours des derniers mois.
Le projet de loi soumis à l'Assemblée nationale, celui que
je propose actuellement, reflète les conclusions de ces discussions.
Jusqu'à maintenant, les dispositions encadrant les régîmes
de retraite au niveau fiscal se retrouvaient dans les directives émises
par le gouvernement fédéral. Ces directives étaient
appliquées avec une certaine rigueur à l'égard des
régimes de retraite du secteur privé.
Par contre, il en était autrement en ce qui concerne les
régimes établis par le gouvernement fédéral et par
les divers régimes provinciaux, concernant non seulement les
députés, mais concernant aussi les gouvernements provinciaux et
les régimes de retraite applicables à leurs propres
employés. Maintenant, les nouvelles règles fiscales sont
incorporées directement dans la Loi de l'impôt sur le revenu et
elles s'appliquent à tous les régimes de retraite au Canada sans
exception.
Pour maintenir certains avantages, ou encore pour nous assurer de la
garantie de certains acquis, il s'avère nécessaire de partager le
régime de retraite en deux volets. Un premier permettra d'octroyer un
niveau de prestationsconforme aux règles fiscales. Il sera
enregistré et les cotisations des députés y seront
totalement dirigées. Il maintiendra à l'égard des
députés les avantages fiscaux liés à leur
participation à un régime de retraite.
Un second volet ajoutera, sous forme de prestations
supplémentaires, les montants requis pour atteindre le niveau de
prestations retenues. Cette façon de procéder n'est pas
particulière au régime de retraite des membres de
l'Assemblée nationale puisque, historiquement, un certain nombre
d'entreprises du secteur privé y ont eu recours et utilisent encore
aujourd'hui une telle approche. Il est même possible de prévoir
que, suite à cette mesure fiscale, cette disposition dans la loi, cette
disposition sera susceptible de s'appliquer de plus en plus à l'ensemble
des régimes de retraite privés, du moins à l'égard
des dirigeants d'entreprises.
Cette façon de procéder - et ça, il faut le dire -
n'entraînera aucun coût additionnel ni pour les
députés ni pour le gouvernement. Donc, dans le cadre de
l'étude menée par le comité extraparlementaire, l'ensemble
des participants ont souligné la complexité des dispositions
actuellement en vigueur. En effet, comme je l'ai mentionné
précédemment, plusieurs membres de l'Assemblée nationale
participent actuellement à un régime de retraite dont les
dispositions varient selon les années pendant lesquelles ils ont
été députés. D'ailleurs, mon collègue, le
député de Joliette, le leader parlementaire de l'Opposition,
était pleinement d'accord avec moi sur le caractère complexe des
nombreuses dispositions applicables à la même personne qui
siège ici, à l'Assemblée nationale. Ainsi, le calcul du
montant de la rente et la date possible de
retraite fluctuent selon que le service a été
effectué avant 1983, entre 1983 et 1987, ou encore après 1987.
Les prestations prévues, par exemple, lors de la retraite, du
décès ou de la cessation de participation varient ainsi pour
chacune des périodes. C'est donc dire que plutôt que d'avoir un
régime de retraite, les parlementaires ont un régime de retraite
qui s'applique sur les dispositions variables à trois niveaux,
dépendamment, évidemment, du moment où ils ont
siégé. Il y a 36 parlementaires sur 125 qui sont régis
actuellement par des dispositions différentes d'un régime
à l'autre. Même si le domaine de la retraite demeure un secteur
complexe, je pense qu'il y a consensus pour que soit rapidement établie
la nécessité de remplacer cet ensemble complexe de dispositions
par un seul régime.
Un autre objectif du projet de loi, c'est évidemment le maintien
de l'enregistrement au niveau fiscal. D'ailleurs, la majorité des
modifications proposées s'inscrivent dans cette perspective.
Enfin, ce projet de loi vise aussi la correction de certaines
inéquités par rapport au traitement accordé en vertu des
régimes du secteur public, de même que le souci de répondre
au besoin exprimé par les participants a également
été pris en compte lors de la définition des dispositions
du nouveau régime.
Les modifications, M. le Président, qui sont apportées au
régime de retraite. Si on se réfère, dans un premier
temps, aux cotisations, les nouvelles dispositions de la réforme fiscale
prévoient que tout participant appelé à défrayer
une partie du coût des prestations accordées ne peut verser sous
forme de cotisation un montant supérieur à 9 % de sa
rémunération. Il a donc fallu modifier légèrement
la formule de cotisation pour prévoir désormais qu'un membre de
l'Assemblée nationale verse une cotisation égale à ce
même 9 %. Actuellement, les membres de l'Assemblée nationale
versent, en moyenne, une cotisation égale à 9,4 %. L'application
des nouvelles règles fiscales entraînera donc une réduction
de la cotisation des participants de l'ordre de 0,4 % de la
rémunération, et ce montant devra obligatoirement être
assumé par le gouvernement; le 0,4 %, non pas les 9,4 %, mais le 0,4 %.
Un tel réaménagement du coût découle directement des
nouvelles règles fiscales adoptées par Ottawa. (16 h 10)
Deuxièmement, M. le Président, si on se
réfère maintenant à l'admissibilité à la
retraite, les critères d'admissibilité à la retraite ont
varié de façon importante, au cours des années, de telle
sorte que, selon l'année en cours au cours de laquelle une rente a
été créditée, la date de mise en paiement peut
être différente. Ainsi, un membre de l'Assemblée nationale
peut recevoir, un an après la fin de son dernier mandat, la rente de
retraite accumulée avant 1983. La rente accumulée durant la
période de 1983 à 1987 est payable, elle, à l'âge de
60 ans alors que la rente accumulée depuis 1988 est payable entre
l'âge de 50 ans et l'âge de 60 ans, selon le nombre total
d'années à titre de membre de l'Assemblée nationale. Il en
résulte donc une complexité pour le moins excessive et il
convient maintenant de faire le ménage dans ces dispositions.
La solution retenue constitue un compromis par rapport à
l'ensemble des règles actuelles. La rente de retraite pour l'ensemble
des années depuis 1983 sera désormais payable à
l'âge de 60 ans. De plus, il sera possible d'en anticiper le paiement
moyennant une réduction qui sera en fonction de l'âge et de la
durée de la période d'anticipation. Je pense, M. le
Président, ne pas être abusif en disant qu'il est reconnu que les
possibilités de trouver un nouvel emploi pour les députés
comme pour l'ensemble des travailleurs et des travailleuses diminue avec
l'âge.
Je pense aussi qu'il est reconnu, chez toutes celles et tous ceux qui
voient un Parlement avec un minimum d'objectivité, que ce n'est pas
toujours facile pour un ex-parlementaire de retourner sur le marché du
travail au lendemain de son départ. M. le Président, je vous
disais tantôt - ça fait, quoi, 18 ans déjà que je
suis ici - que j'ai vu passer un certain nombre de députés,
probablement près de 200, sinon plus. J'ai vu des gens arriver ici au
milieu d'une carrière, à l'âge de 40 ans, 41 ans, 42 ans,
au faîte d'une carrière, quitter à 50 ans, ayant
quitté leur profession, leur bureau, leurs associés, pour qui
c'est impossible pour un pourcentage très important de revenir dans la
société où ils ou elles travaillaient ou encore y revenir,
mais à des conditions telles de recyclage, etc., que c'est quasiment
impossible.
D'autres collègues, j'en conviens, sont venus, ont quitté
et ont repris l'emploi, compte tenu qu'ils avaient une sécurité
d'emploi, soit dans le secteur public ou le parapublic. J'en ai vu d'autres
aussi, M. le Président, pour qui c'a été très,
très laborieux de retourner sur le marché du travail et ce, quel
que soit le parti politique dans lequel nous sommes. Je pense que nos amis d'en
face le savent probablement, comme nous. Par surcroît, si la personne
subit une défaite dans son comté, si par surcroît son
gouvernement est défait, les téléphones ne sonnent pas
beaucoup, le lendemain d'une défaite.
Je comprends qu'il y a une prime de séparation qui permet au
député de lui assurer une certaine transition, maximum d'un an de
salaire. Pour le député qui n'a pas 60 ans dont le parti est
défait, qui a passé un certain nombre d'années ici, je
pense que ce n'est pas exagéré de dire que pour un pourcentage
important, l'avenir ou, c'est-à-dire les lendemains d'une
défaite, ne sont pas toujours des plus heureux, tant pour lui que pour
sa famille, évidemment.
Alors, M. le Président, c'est ce pourquoi la
réduction actuarielle applicable à une rente de retraite
anticipée doit tenir compte du fait que la recherche d'emploi, elle est
plus prometteuse à 49 ans qu'elle peut l'être à 59 ans.
Même si je peux paraître exagéré pour certains, c'est
sans aucune hésitation que j'indique, M. le Président, que quelle
que soit l'appartenance politique d'un député, quel que soit son
parti, la fonction en elle-même commande un niveau de
responsabilités, un niveau de quantité et un volume de travail
qui impliquent - et ça, je le dis sans témérité -
beaucoup plus que les 32 heures par semaine pour des milliers Bë
Québécois^ et beaucoup plus que les 40 heures de travail pour
d'autres milliers de Québécois. m. le président, je vous
dirai, moi, que si les députés faisaient 40 heures par semaine
uniquement, il n'y en a probablement pas - ou qui avaient fait 40 heures entre
1985 et 1989 - il n'y en a pas beaucoup qui auraient été
réélus. je pense que c'est unanime. tous les gens qui ont le
moindrement d'expérience, de connaissances à l'égard de
cette fonction, ou encore même les gens dans nos comtés, qui sont
en contact avec leur député, savent pertinemment que la somme et
le volume de travail sont bien au-delà des 40 heures ou des 32 heures.
souven-tes fois, ceux qui questionnent les 32 heures ou les 40 heures, ou ceux
qui disent que ce n'est pas vrai que les députés travaillent tant
que ça, ce sont celles et ceux qui gagnent trois fois plus cher;
ça, je pense que c'est généralement reconnu.
Ceci étant dit, M. le Président, concernant la
réduction actuarielle applicable, ma position comme leader, la position
de notre équipe parlementaire, de l'équipe ministérielle,
c'est la suivante: Compte tenu qu'il est beaucoup plus difficile pour un
ex-député de l'Assemblée nationale qui a contribué
de 10 % de son revenu pendant un nombre d'années donné... C'est
évident que ce sera plus difficile pour cette personne, lorsqu'elle
quittera la politique, de se trouver un emploi si elle a entre 55 ans et 60
ans, plutôt que si elle a entre 50 et 55 ans; tout comme, a fortiori,
c'est clair que c'est beaucoup plus facile - malgré que ce n'est pas
toujours facile d'avoir un emploi après - lorsqu'on a 45 ans, 46 ans que
si on a 59 ans ou 58 ans. C'est ce pourquoi, dans le projet de loi, j'ai
prévu une disposition comme quoi la réduction actuarielle
applicable à une rente de retraite anticipée doit tenir compte du
fait que ça peut être vraiment différent selon l'âge
où on prend sa retraite. ainsi, pour chacune des cinq premières
années d'anticipation avant l'âge de 60 ans, la réduction
de la rente de retraite sera de 1 % par année. pour les cinq
années suivantes, la réduction de la rente de retraite sera de 2
%, et cette réduction augmentera à 3 % pour chaque année
additionnelle, c'est-à-dire: avant 50 ans, c'est 3 % par année de
réduction actuarielle, sans limite, cette fois-ci.
J'ai indiqué tantôt que, depuis 1988, il y avait un maximum
de 33 %, le maximum de 33 1/3 % étant... Ainsi, un député
qui quitte l'Assemblée nationale à l'âge de 50 ans recevra
85 % de la rente de retraite accumulée à ce moment-là.
Ça ne veut pas dire 85 % de son salaire, ça, mais 85 % de la
rente accumulée à ce moment-là, de ce qu'il aura
versé et qui sera en croissance de 4 % par année de son niveau de
salaire. Cette modification au chapitre de l'admissibilité de la
retraite entraîne une augmentation des engagements au 31 décembre
1991 de 2 100 000 $ s'appliquant de façon plus particulière aux
prestations accumulées durant la période de 1983 à 1987.
L'augmentation du coût du régime à l'égard des
années futures représente 4,3 % de la masse salariale. la rente
de retraite, maintenant. le montant de la rente accordée aux membres de
l'assemblée nationale pour chaque année de participation au
régime de retraite a fluctué énormément au fil des
ans. ainsi, comme je l'indiquais tantôt, avant 1983, cette rente pouvait
atteindre presque 7,5 % de la rémunération. comme je l'ai
souligné plus tôt, en 1983, celle-ci a été
ramenée à 4 %, puis à 3,5 % en 1988, en échange
d'une libéralisation au chapitre de l'admissibilité. cette
dernière libéralisation sera par ailleurs éliminée
dans le cadre des modifications présentes. tout comme la cotisation, la
prestation est, depuis 1983, coordonnée avec le régime de rentes
du québec. une telle coordination implique que la cotisation est
réduite d'un montant approximativement égal à la
cotisation versée au régime de rentes du québec, et la
prestation est également réduite pour tenir compte, du moins en
partie, de la rente de retraite versée par ce même
régime.
Dorénavant, tant en ce qui a trait à la cotisation
qu'à la prestation, une telle coordination sera éliminée.
La prestation, quant à elle, sera établie à 4 % de la
rémunération reçue par un membre de l'Assemblée
nationale. Celle-ci proviendra, comme nous l'avons vu antérieurement, en
partie du volet enregistré et en partie du volet des prestations
supplémentaires.
Cette modification du niveau des prestations accorde aux membres de
l'Assemblée nationale une indemnité de remplacement de revenu
permettant de répondre à leurs besoins au moment de la retraite.
Il faut se rappeler la situation particulière des membres de
l'Assemblée qui doivent quitter l'emploi qu'ils occupaient pour assumer
leur charge de député. Comme on l'indique très clairement
dans le rapport, souvent, ceux-ci vont perdre certains avantages liés au
régime de retraite auquel ils participaient. Ces avantages perdus
prennent la forme d'un montant de rente réduit et d'une
admissibilité plus tardive au paiement de cette rente. (16 h 20)
II faut aussi tenir compte qu'au moment où ils quittent
l'Assemblée nationale les députés
n'ont pas toujours atteint l'âge où l'on prend normalement
sa retraite. Ils ne leur est pas toujours possible de trouver un emploi, tel
que je l'indiquais précédemment. La durée moyenne de
participation au régime pour les députés en poste,
à la fin de 1990, s'établissait à 6,3 années, ce
qui veut dire six ans et quatre mois, et la rente moyenne accumulée
à la fin de 1990 représente 17 000 $. C'est donc dire que la
rente moyenne acquise, nous qui y sommes, certains sont arrivés plus
récemment, d'autres sont arrivés il y a plusieurs années,
la moyenne d'âge est d'environ 43,5 ans, 44 ans, actuellement, ici, au
Parlement, certains sont arrivés à 50 ans, d'autres sont
arrivés à 28 ou à 30, globalement, si tout le monde,
demain matin, on décidait de démissionner, c'est une rente
moyenne de 17 000 $. 17 000 $ avec une réduction actuarielle, si on
prend la moyenne d'âge qui est de 44 ans, ça veut donc dire que la
rente de 17 000 $... Si, par surcroît, vous ajoutez les rentes de
conjoint survivant, dites-vous bien que, si on décédait tous
demain matin, la moyenne de rente de conjoint survivant serait d'environ 8500
$. C'est ça, après lecture.
Alors, quand celles et ceux soutiennent que c'est indécent, c'est
cynique, c'est inacceptable, c'est trop généreux, je pense qu'on
doit profiter de ce débat pour resituer certaines choses dans leur
perspective: les 179 anciens députés qui sont actuellement
à la retraite, qui recevaient, en moyenne, à la fin de 1990, 31
000 $ et 54 survivants d'anciens députés
décédés qui recevaient, en moyenne, à cette
même date, une rente de 14 900 $.
On constate donc que l'ensemble des rentes acquises, dans l'ensemble,
les prestations se situent à un niveau fort raisonnable si, par
surcroît, on tient compte du fait qu'il y a 10 % de notre traitement qui
y sont versés. Les dispositions des régimes de retraite de la
Législature des principales provinces canadiennes ou du gouvernement
fédéral prévoient une formule de calcul de la rente
supérieure à celle présentée dans l'actuel projet
de loi; ce qui est un 4 % pour nous, c'est 5 % en Ontario. Vous me direz qu'ils
sont plus riches que nous, ils ont 10 000 000 000 $ de déficit, cette
année, et, nous autres, on en a 3 800 000 000 $. De plus, M. le
Président, les prestations payées en vertu de ces autres
régimes dans les autres provinces canadiennes sont, habituellement,
pleinement indexées selon l'indice des prix à la consommation,
sans la réduction prévue de 3 % comme nous on a ici, au
Québec. Parce que je rappelle ce que je disais antérieurement,
quand un député prend sa retraite maintenant, il n'a pas une
pleine indexation. Si l'indice des prix à la consommation, si
l'inflation est de 4 %, il a 4 % moins 3 %, ça donne 1 %. Dans les
autres provinces, ils ne l'ont pas, ça, la très grande
majorité d'entre elles.
Si on regarde, maintenant, M le Président les rentes totales,
jusqu'en 1982, les dispositions du régime que j'indiquais
prévoyaient qu'un membre de l'Assemblée nationale ne pouvait
accumuler une rente de retraite supérieure au traitement maximum
reçu durant sa carrière à l'Assemblée nationale. En
1982, cette limite a été baissée à 70 % du
traitement moyen des trois meilleures années, ce qui correspondait aux
exigences fiscales de l'époque. Dans sa réforme, le gouvernement
fédéral a aboli cette exigence de 70 % touchant la rente totale.
Ainsi, lors de l'étude des mesures prévues pour les
régimes du secteur public, il a été décidé
d'éliminer aussi cette exigence, notamment à l'égard des
participants au régime de retraite des employés du gouvernement,
où les 70 % sont éliminés, et des organismes publics, des
juges de la Cour du Québec, des élus municipaux aussi.
L'abolition de la limite de 70 % a également été
incorporée à l'actuel projet de loi au profit d'une disposition
qui limitera, cependant, la rente totale, c'est-à-dire la rente maximale
et totale pouvant être acquise. Ce projet de loi prévoit une
disposition que la rente totale pourra être touchée uniquement au
cours des 25 premières années de participation au
régime.
Actuellement, à l'Assemblée nationale, il y a un seul
député qui a le droit à sa rente totale sur 124; un seul
député! Il faut, pour avoir sa rente totale, siéger
à l'Assemblée nationale pendant 25 ans pour avoir sa rente
totale, à 4 %, 25 ans. J'invite celles et ceux qui s'interrogent sur le
caractère très généreux à répondre
à la question suivante: Comme on a 6,6 ans et 4 ans d'expérience
au Parlement - l'expérience moyenne, 6 ans et 4 mois, - qui peut
sérieusement soutenir que tous les députés qui sont ici
vont faire encore 17 ans et 8 mois? Je pense que poser la question c'est y
répondre. Pour certains, c'est leur âge. Je ne parle pas de mon
collègue, évidemment, de Westmount, qui pourrait devenir un
patriarche de l'Assemblée. Je ne parle pas de mon collègue, le
ministre de la Santé et des Services sociaux, qui est au midi de la
quarantaine, environ. Évidemment, je ne voudrais pas parler au nom du
député de Masson et encore moins de Mme la députée
de Terrebonne. Cependant, Mme la députée de Terrebonne, je
l'invite à réfléchir à ça. Pensez-vous
vraiment que tous les députés qui sont ici vont siéger
encore 17 ans et 8 mois? Pensez-vous vraiment que vous, vous allez
siéger encore 17 ans et 8 mois? On ne peut pas dire non, mais on ne peut
pas dire oui non plus.
M. le Président, c'est donc dire: 4 % de croissance, indexation
moins 3 %, aucune limite à la réduction actuarielle - si elle est
prise avant l'âge de 60 ans, ce sera 1 % entre 55 et 60, 2 % entre 50 et
55 et, avant ça, c'est 3 % sans limite. C'est donc dire que les jeunes
députés - parce qu'il y a des jeunes députés qui se
font élire maintenant, qui sont élus à 27, 28, 29 ans -
après deux mandats, au lieu d'avoir 75 %
de leur contribution comme c'était le cas dans le cadre du
régime applicable entre 1964 et 1982, ça serait uniquement, avec
le déficit actuariel, quelques centaines de dollars par année,
pas pleinement indexés, mais indexés à l'inflation moins 3
%.
M. le Président, habituellement, lorsque les régimes de
retraite sont modifiés, les droits accordés aux participants
avant la date de la modification ne sont pas remis en cause. Cette règle
n'a cependant pas été respectée lors des modifications
intervenues en 1987. En effet, alors qu'une disposition de la Loi sur la
Législature prévoyait que les rentes de retraite accordées
à l'égard des années antérieures étaient
pleinement indexées en fonction de l'indice des prix à la
consommation, cette indexation a été remise en cause et
diminuée de 3 % par année pour tous les participants en poste
à cette date.
Cette façon de faire n'a pas été retenue dans le
cas du régime de retraite des employés du gouvernement et des
organismes publics et de plusieurs autres régimes en vigueur à
l'égard des employés de l'État. En effet, lorsque le
gouvernement, en juillet 1982, a réduit la formule d'indexation des
rentes alors en vigueur, cette modification n'a pas affecté les rentes
créditées avant la date de la modification. De plus, la Loi sur
les régimes complémentaires de retraite qui encadre les
régimes du secteur privé interdit la modification à la
baisse des rentes déjà créditées à moins
d'avoir reçu l'assentiment de tous les participants.
Donc, pour respecter les droits acquis de tous les participants, il est
nécessaire de revoir les dispositions du régime actuel pour
procurer aux députés à la retraite, pas celles et ceux
d'entre nous qui sommes ici, pour les députés à la
retraite de même qu'aux personnes en poste actuellement, la pleine
indexation des rentes acquises avant le 1 er janvier 1983.
Il y a un volet remboursement. Mais c'est évident que celles et
ceux qui siègent ici n'auront pas droit à ce volet remboursement.
Cette modification permettant de maintenir l'équité au chapitre
des droits acquis représente une augmentation de 2 300 000 $ des
engagements actuels du régime, soit la valeur des droits perdus en 1987
en fonction de cette nesure. (16 h 30)
Comme dans les cas d'admissibilité à la retraite, les
prestations payables en cas de décès varient actuellement en
fonction des années au cours desquelles un membre de l'Assemblée
nationale a participé au régime. Ainsi, le régime
prévoit les prestations suivantes lorsqu'un participant à la
retraite décède: 1° pour les années de services
antérieures à 1983, son conjoint ou sa conjointe reçoit
une rente égale à 50 % de la rente accumulée durant cette
période, à moins qu'il ait fait le choix, au moment de sa
retraite, d'accorder une rente égale à 100 % à son
conjoint survivant. Le coût de cette option est financé à
même une réduction de ia rente de retraite.
Pour ce qui est des années de participation depuis 1983, donc des
dispositions avant 1983. depuis 1983, des dispositions applicables qui sont
différentes. Pour ce qui est des années de participation depuis
1983, si le participant est à la retraite depuis moins de dix ans, son
conjoint ou ses ayant-droit reçoivent la valeur des paiements à
venir pour compléter cette période de dix ans. S'il est à
la retraite depuis plus de 10 ans, aucune prestation de décès
n'est accordée. Là encore, cette disparité dans les
prestations est source d'incompréhension, de complexité inutile
et ne répond pas aux besoins exprimés à ce chapitre par
les membres de l'Assemblée.
De plus, au cours des dernières années, ie gouvernement a
adopté une nouvelle loi sur les régimes complémentaires de
retraite prévoyant que les régimes de rentes du secteur
privé doivent accorder une rente au conjoint survivant égale
à 60 % de la rente de retraite. Le nouveau régime incorpore une
telle prestation, et ce, à l'égard de toutes les années de
service effectuées par les personnes qui ont pris ou qui prendront leur
retraite au cours des prochaines années. Une seule exception est
prévue dans le cas des retraités qui ont déjà
opté pour une rente de 100 % payable au conjoint survivant. On sait
qu'on peut opter pour une rente payable de 100 % au conjoint survivant, mais
avec une réduction actuarielle importante pour la période de
paiement. enfin, comme c'est le cas actuellement pour le service
antérieur à 1983, les enfants à charge des
députés auront également droit à une rente
égale à 10 % de la rente de retraite. cet ajustement, assurant la
concordance avec les lois des régimes complémentaires de
retraite, entraîne une augmentation des engagements au 31 décembre
1991 de 1 100 000 $ à l'égard de tous les députés
et retraités du québec.
L'examen approfondi auquel nous nous sommes livrés nous a permis
de constater également une autre situation où
l'équité de traitement des participants ne nous semblait pas
respectée intégralement. En effet, les modifications
apportées en 1983 ont forcé certains députés
à verser des cotisations au régime, même si ces cotisations
ne leur ont pas permis de recevoir les prostations prévues lors de leur
départ au cours des années suivantes.
C'est donc dire qu'il y a des personnes qui ont siégé
à l'Assemblée nationale et qui ont quitté avant l'adoption
de la loi en 1987 ou en 1988 plutôt, qui ont contribué sans qu'il
n'y ait aucun enrichissement, aucun impact pour la contribution versée
à ce chapitre. Des modifications apportées au régime de
1983 ont donc forcé certains députés à verser des
cotisations au régime, même si ces cotisations ne leur ont pas
permis de recevoir la prestation qui était prévue pour cette
fin.
Pour redresser cette situation, il convient de procéder au
remboursement de ces mêmes cotisations. La somme des montants en cause
s'élève à 1 300 000 $ à l'égard de 39
anciens membres de l'Assemblée nationale qui étaient ici en 1983,
mais qui ne l'étaient pas en 1988. Je pense qu'il est injustifiable,
complètement injustifiable de s'approprier de telles sommes.
Depuis maintenant quelques années, M. le Président, les
régimes de retraite doivent accorder à leurs anciens participants
la possibilité de transférer dans un véhicule
d'épargne-retraite la valeur correspondant aux prestations
accumulées si, au moment de leur départ, ils ne sont pas
admissibles à leur retraite. Une telle disposition permet aux personnes
qui quittent relativement tôt leurs fonctions de cumuler dans un
véhicule d'épargne-retraite des prestations acquises
auprès d'anciens employeurs.
Dans le cas de la révision actuelle du régime de retraite
des membres de l'Assemblée nationale, une telle disposition
répond aussi aux besoins d'un certain nombre de députés.
Il serait donc possible dorénavant, lorsqu'un député
quitte ses fonctions et qu'il ne reçoit pas une rente de retraite, de
transférer la valeur des prestations du volet enregistré de son
régime de retraite dans un compte de retraite immobilisé qui est
le véhicule prévu pour la transférabilité à
l'égard des participants des régimes de retraite, comme ça
se fait ailleurs en semblable matière.
En ce qui concerne le volet des prestations supplémentaires,
celles-ci demeureront à l'acquis du député et ne seront
monnayables qu'au moment de la retraite, sous forme de rente. En effet, en
vertu des nouvelles règles fiscales, les prestations
supplémentaires ne pourront pas faire l'objet d'un transfert dans un
véhicule d'épargne-retraite. Le droit à ces prestations
sera maintenu, et ce, même si la valeur des prestations du volet
enregistré a été transférée.
Il sera également possible pour un membre de l'Assemblée
nationale qui revient en fonction après une période d'absence et
qui a obtenu le transfert de ses acquis à la fin de son dernier mandat
de remettre les sommes reçues avec les intérêts dans
l'autre régime. Une telle mesure, une telle remise lui permettra alors
de retrouver les prestations qu'il avait accumulées lors de son
départ.
La transférabilité n'entraîne pas de coûts
additionnels pour le régime, mais répond à une
préoccupation maintes fois manifestée par les participants,
surtout depuis qu'elle est devenue accessible aux travailleurs du secteur
privé qui participent à un régime de retraite. Les
mêmes choses s'appliquent dans le privé, et ça n'implique
aucune charge additionnelle, évidemment, pour le gouvernement.
Historiquement, M. le Président, des dispositions
spécifiques à l'égard des députés ont
été inscrites dans les régimes de retraite offerts aux
employés des secteurs public et parapublic. ces dispositions concernent
les membres de l'assemblée nationale qui quittent leurs fonctions et qui
avaient déjà participé, dans un emploi antérieur,
à l'un de ces régimes. ces membres ont le droit de recevoir
immédiatement la rente de retraite accumulée à titre
d'employés des secteurs public et parapublic, même s'ils ne sont
pas admissibles en vertu des critères réguliers de mise à
la retraite prévus par ces régimes. les nouvelles règles
de la réforme fiscale ne permettent plus le maintien de telles
dispositions à l'égard des nouveaux membres de l'assemblée
nationale élus après 1991. il s'avère donc
nécessaire d'éliminer ces dispositions particulières des
régimes en cause. ceci devrait entraîner à long terme une
légère diminution du coût de ces mêmes
régimes. d'autres modifications sont de concordance dans le projet de
loi. ??
M. le Président, j'ai déposé ce projet de loi la
semaine dernière. J'ai très clairement indiqué, au moment
du dépôt du projet de loi, mon intention de faire en sorte que ce
projet soit adopté après analyse, après étude, non
pas à la vapeur. Ce n'est pas un projet de loi qui est
déposé pour le passer rapidement avant les fêtes. C'est un
projet de loi qui a été déposé, qui est
étudié aujourd'hui. J'entends proposer l'étude du projet
de loi en commission parlementaire les 30 et 31 janvier prochains, sous deux
volets.
Une première journée où on entendra les membres du
comité qui ont siégé, mandatés qu'ils l'ont
été par le Bureau de l'Assemblée nationale dans sa
décision du mois de septembre 1990. Ce comité sera entendu en
commission parlementaire. Il sera en mesure aussi de donner les
résultats de cette analyse, quand même exhaustive, auprès
des collègues et anciens collègues, et de donner le pourquoi des
recommandations qu'ils nous ont formulées.
J'entends, de plus, inviter les représentants de la Chambre des
communes à Ottawa, qui ont à administrer les régimes de
retraite. Celles et ceux qui vont suivre ces débats seront à
même de constater que le régime de retraite des membres de
l'Assemblée nationale adopté par ce projet de loi va
représenter, en termes de déboursés, bien moins, bien
moins que ce qui est versé à Ottawa. D'ailleurs, si on se
réfère à la contribution de l'employeur en vertu du
régime fédéral, c'est au-delà de 50 %, alors
qu'avec le régime tel que proposé par ce projet de loi, ce serait
9 % dont, évidemment, une partie qui est le 9 % se
référera aux contributions des députés
eux-mêmes, donc bien en-deçà de ce qui se fait à
Ottawa.
L'autre journée, je prévois qu'on puisse amorcer
l'étude du projet de loi article par article, lequel contient, comme on
le sait, une dizaine d'articles qui se réfèrent à d'autres
articles de la loi, ça va de soi. Puis on va revenir en Chambre, au mois
de mars, et on va l'adopter. C'est tout. C'est comme ça que ça va
se passer.
Donc, à visière levée, ouvertement, publiquement,
non pas adopté à 4 heures du matin, en troisième lecture,
après un débat-marathon. Non, non. Pourquoi on le fait? J'ai
été questionné sur l'opportunité, j'en conviens.
Un, je rappellerai que la loi fédérale a été
adoptée et elle s'applique à compter du 1er janvier 1992.
Deuxièmement, le gouvernement canadien a demandé que les
Législatures respectent la loi, c'est normal. Les Législatures,
les autres Parlements, pour un certain nombre, se sont engagés à
l'adopter dans les six premiers mois de l'année 1992, avec une mesure
rétroactive avant le 1er janvier. C'est ce qu'on va faire ici, comme
ça se fait ailleurs. (16 h 40)
Autre élément aussi. Je tiens à rappeler en
terminant qu'en vertu de ce régime, j'en conviens, nous passons d'un
taux d'enrichissement de 3,5 % à 4 % par année. Je rappelle
cependant qu'avant 1983, c'était un enrichissement de 7,5 % par
année. Le principal motif pour lequel nous passons de 3,5 % à 4 %
- revenir à ce que c'était entre 1983 et 1988 - c'est purement et
simplement qu'à ce moment-là, on s'est fait dire qu'on aurait le
droit de participer à un autre régime d'épargne-retraite
personnel et privé. Puis, une fois que la partie a été
établie, les règles du jeu ont été changées
tant par le gouvernement canadien que par le Québec. Ça, c'est le
principal motif. 4 % par année, ça veut dire quoi? ça veut
dire qu'une rente totale, il faudra avoir siégé 25 ans à
l'assemblée nationale du québec pour l'obtenir, la moyenne
d'expérience étant, comme on le sait, actuellement de 6,5
années. les rentes qui, en vertu du régime, de 1963 à
1984, le régime qualifié de très généreux,
étaient versées au moment du départ du
député. je conviens qu'à l'époque, dans les
années 1965-1966, c'était rare d'avoir des parlementaires
élus dans la vingtaine; c'était très, très,
très rare qu'ils étaient élus dans la vingtaine. à
ma connaissance, il y a peut-être eu m. marcel masse, en 1966, qui a
été élu à 29 ans si ma mémoire est
fidèle et, si je me rappelle bien, avant lui, c'est m. paul sauvé
qui a été élu en 1930, à sa première
élection. il est né en 1907; il avait 23 ans. pour ce qui est des
autres, c'est très, très rare. aujourd'hui, on doit tenir compte
d'une texture d'individus, de personnes, d'un profil de personnes qui
siègent ici, qui sont plus jeunes. c'est ce qui explique que les rentes
se prendront à 60 ans et, avant ça, c'est une réduction
actuarielle.
Autre élément aussi. Autre élément...
J'invite les députés parce qu'il y a peut-être des
députés qui ont des réserves. Il y a peut-être des
députés qui ont des réserves, qui se questionnent. Je les
invite à réfléchir au fait que, ailleurs, l'enrichissement
de 5 % par année, notamment en Ontario, à Ottawa, c'est en
quittant, comme ce l'était pour nous avant 1983. Mais, là-bas,
dans la très grande majorité des provinces, lorsqu'on prend sa
retraite, c'est pleine indexation alors qu'ici, l'indexation, c'est l'inflation
évidemment, moins 3 %. Ça ne m'ap-paraît pas
exorbitant.
Pour mon collègue, le député de Joliette, ça
va apparaître inopportun. Je vous dirai, M. le député...
Vous savez, autant les gens sont attachés à leur Parlement, et
ils ont confiance dans leur Parlement, c'est une institution qui est
souveraine, autant ils sont fiers de leurs députés - à
preuve, ils nous réélisent, puis ils nous élisent - autant
cependant, quand vient le temps de discuter des questions salariales, ça
questionne. Puis, quand vient le temps d'appliquer des conditions de
retraite... parce que là, on est obligé de le faire à
cause de la loi fédérale, on s'y oppose. Ce n'est jamais
opportun. La question salariale, on l'a réglée; le
député est considéré comme étant un
administrateur classe IV. Un administrateur classe IV, c'est une personne qui
occupe une fonction... Puis, généralement, quand un
député appelle dans un ministère pour défendre les
intérêts de ses citoyens, c'est très rare qu'il parle
à l'administrateur classe IV. Il parle plutôt,
généralement, à un administrateur classe III ou classe II.
Un administrateur classe III, ça gagne plus cher, évidemment,
qu'un député. Mais ça, c'est réglé. Le
Parlement n'a pas à juger année après année des
augmentations de salaire de ses députés. C'est
réglé. C'est définitif. Nous sommes
considérés comme des administrateurs classe IV.
Pour ce qui est du régime de rentes, on doit l'adopter comme
suite de la loi fédérale. Alors, pour moi, il n'y en a jamais de
moment opportun, jamais. Il y a cependant, par contre, certaines
opportunités et c'est là où j'en viens. C'est une
opportunité qui est combien belle pour l'Opposition de s'y opposer.
Puis, je pense que, de plus en plus, la perception à cet égard
est le reflet d'une réalité. Quand les journalistes
écrivaient: Vous savez, c'est de bonne guerre, ça fait partie des
règles du jeu que l'Opposition s'oppose à un projet de loi
prévoyant des modifications au régime de retraite, tout le monde
sait que, finalement, même s'ils s'y opposent, ils vont pouvoir
bénéficier des dispositions quand même.
M. le Président, je sais que l'Opposition va s'opposer
alléguant que c'est inopportun. On va conduire le débat, on va
adopter le projet de loi dans son principe, on va prendre le temps qu'il faut
en commission parlementaire pour l'étudier et pour l'analyser. Je crois
que, malgré les critiques que ça pourra susciter ici, sur le
parquet, la très grande majorité des gens qui regarde ça
sérieusement sera d'accord avec le fait qu'on est obligé de
légiférer et que ce n'est pas exorbitant. D'ailleurs, c'est ce
que les articles des journaux disaient: Ce n'est peut-être pas le
meilleur "timing", mais il n'y a pas de scandale dans ça.
M. le Président, je suis fier, malgré le caractère
délicat de la démarche, j'en conviens,
de présenter ce projet de loi au nom de l'ensemble de mes
collègues de l'Assemblée nationale du Québec. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le
leader du gouvernement. Sur le même sujet, je cède la parole
à M. le député de Joliette et leader de l'Opposition
officielle.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, M. le Président. M. le
Président, le gouvernement avait une obligation légale de
modifier les fonds de pension à cause de la loi C-52 du
fédéral. Et on l'a vu en cette Chambre. C'est ce qui a
été fait pour tous les régimes de pension du secteur
public et parapu-blic. On a vu dans cette Chambre un projet de loi qui est sur
le point d'être adopté, concernant les juges. Il y a un projet de
loi pour tout le parapublic, pour les considérer exactement comme...
pour se conformer à la loi C-52 du fédéral, et
également, on l'a vu pour les élus municipaux qui devront ajuster
leurs fonds de pension en fonction de la loi C-52 du fédéral.
Mais fondamentalement, que disent ces trois projets de loi, M. le
Président? Ces trois projets de loi qui ont été
déposés en cette Chambre avant le 15 novembre, le 14 novembre
plus précisément, disent carrément: Nous allons harmoniser
notre projet de loi pour que les fonds de pension des juges, des élus
municipaux et du secteur public et parapublic soient conformes avec la loi
fédérale. Mais après qu'on ait dit cela, M. le
Président, qu'on ait étudié les projets de loi, on se rend
compte que l'équation entre ce que ça coûte
présentement aux Québécois et ce que ça
coûtera après les amendements pour la loi des juges, pour la loi
des élus municipaux et pour la loi du public et du parapublic, le
résultat net est nul. Le fonds de pension coûtait x millions, le
fonds de pension coûtera exactement le même nombre de millions.
C'est ce qu'on appelle des lois pour harmoniser les projets de loi des fonds de
pension ou des régimes de retraite du Québec à cause de la
loi du fédéral, M. le Président.
Qu'est-ce que fait le ministre, maintenant, en ce qui regarde les
députés? Parce que c'est là la question, c'est là
la grande différence. Il faut savoir qu'il y a une différence
entre le projet de loi pour les députés puis les projets de loi
qu'on a passés pour les juges, pour les élus municipaux et pour
le parapublic. Le projet de loi des députés, contrairement au
projet de loi des juges, des élus municipaux et de toute la fonction
publique et parapublique, ce projet de loi-là, M. le Président,
ce qu'il fait, c'est qu'il ne fait pas qu'harmoniser, il vient bonifier. Donc,
ce n'est pas la même nature de projet de loi.
Nous, quand le projet de loi a été annoncé, c'est
vrai qu'on a dit tout de suite au ministre, on lui a d'abord posé la
question: Est-ce que ton projet de loi vient rendre conforme nos régimes
de retraite à ceux des juges, des élus, etc., pour respecter la
loi C-52, ou s'il fart autre chose? Et le ministre a avoué, a admis
candidement que le projet de loi des députés, lui, non seulement
il harmonisait comme les autres, mais il venait bonifier. Et c'est là
que l'Opposition officielle, M. le Président, a dit: Nous, nous jugeons
inopportun de se donner des bonifications ou de se voter des bonifications
à la hausse alors qu'on vient d'harmoniser avec effets nuls dans tous
les autres groupes. C'a été notre position et c'est toujours
notre position, M. le Président, au moment où on se parle. (16 h
50)
Si je fais un peu l'historique des projets de loi, M. le
Président, depuis 15 ans en cette Chambre - je pense que je suis rendu
à mon cinquième, moi, dans mon cas, parce qu'on hérite des
projets de loi antérieurs si on a été enseignants, si on a
été fonctionnaires de la fonction publique - j'avais ce qu'on
appelle le régime de retraite des enseignants, le RRE. M. le
Président, je suis arrivé ici, c'était un projet de loi de
député avec un autre qui changeait la nature de mon projet de loi
antérieur. Et 1983, là, il y a eu vraiment un coup de hache assez
magistral dans le régime de retraite existant depuis 1973 ou 1974.
Effectivement, un coup de hache extraordinaire. Ce qu'il y a de pire, M. le
Président, au moment où, en cette Chambre - puis je m'en rappelle
comme si c'était hier - on mettait toute la hache dans les fonds de
pension, on était quand même accusés, à
l'époque, d'y aller à la hausse. Je peux vous dire que
c'était à la baisse.
Au moment où le Parlement a également réduit de 6 %
à 3 % l'augmentation salariale, à l'époque, on a
passé pour des gens qui avaient augmenté nos salaires. Je me
souviens très bien, j'ai vécu ces
événements-là assez difficilement parce qu'on avait beau
expliquer qu'on réduisait de 3 % nos salaires et que, dorénavant,
le fonds de retraite ne serait pas touchable immédiatement, au
départ, comme c'était le cas antérieurement... On a
vécu ces événements-là en cette Chambre. En 1987,
il y a eu un autre régime, donc RRE dans mon cas - 1974, 1983, 1987 - un
autre fonds de pension. On arrive en 1991 avec l'obligation d'harmoniser, et le
gouvernement dit: On va bonifier.
Donc, je suis rendu, dans mon cas, à cinq fonds de retraite. Ne
me demandez pas de le calculer. Je ne le sais pas. Je ne sais pas comment
ça se fait. Ils m'envoient une belle petite feuille annuellement. Je la
regarde et je dis: Ah c'est ça. Comment ils sont arrivés à
ça? Je ne le sais pas. Avec des rentes qui dorment dans les fonds. Je
sais une chose, c'est que ça me coûtait un grand bout de temps 10
% de mon salaire. Mais ne me demandez pas comment le calculer. C'est complexe,
avec des rentes qui dorment jusqu'à 60, une autre qui est active et
une autre qui remonte en 1960, alors que j'étais enseignant. Ne
me demandez pas de le calculer. Je n'en suis pas capable.
C'est pour ça que je ne veux pas aujourd'hui, M. le
Président, faire le débat sur les différents
régimes. Je veux le faire sur l'opportunité de la loi parce qu'au
moment où un Parlement se permet d'harmoniser tous les groupes du
secteur public et parapublic - et lui-même ne se contente pas de
s'harmoniser, mais il bonifie - c'est là qu'on arrive à
l'inopportunité. Vous savez que dans cette Chambre, il y a eu une
entente qui a été ratifiée par une loi du président
du Conseil du trésor. Il y a quelque temps, le gouvernement était
très heureux d'annoncer à cette Chambre, M. le Président,
que la loi qu'il votait pour geler les salaires, c'était le fruit d'une
entente.
En effet, on a négocié avec la fonction publique du
Québec des ententes pour que, pendant six mois, je crois, il n'y ait
aucune augmentation de salaire. Il n'y en a pas pendant six mois. Au moment
où ce gel des salaires commencera à s'effectuer, nous, on annonce
qu'on va bonifier nos fonds de pension. M. le Président, ça prend
du culot. Je vous avoue que nous autres, qui nous faisions reprocher en 1983,
alors qu'on baissait nos salaires de 3 %, qu'on "choppait", comme on dit en bon
québécois, qu'on coupait dans le fonds de pension, on s'est fait
accuser de s'en donner. Mais là, ce n'est pas ça qu'on fait.
Là, on harmonise puis on s'en donne.
De quoi va-t-on être accusés? Je suis bien prêt
à reconnaître - je suis prêt à reconnaître
ça - que c'est rare, dans le Parlement, que c'est opportun où il
y a une opportunité de regarder la question des traitements ou des
salaires, des rentes ou des régimes de retraite. C'est vrai que c'est
rare que des opportunités puissent se créer. Mais, M. le
Président, plus particulièrement dans la conjoncture actuelle, la
récession frappe très dur notre collectivité. Cette
collectivité et, en particulier, cette classe moyenne ont
été frappées par la récession, mais aussi par une
avalanche de taxes et pas maigres, extrêmement graves, extrêmement
grandes.
Elle est étouffée et elle ne comprendra pas qu'un
Parlement qui est chargé précisément d'essayer de faire
respirer tout le monde puisse considérer en pleine récession,
où on est obligé d'imposer, nous dit-on, cette avalanche de taxes
pour venir à bout de payer certaines factures gouvernementales...
Comment expliquer au monde qu'on n'a pas d'argent pour assouplir leur
quotidien, pour alléger leur quotidien, puis qu'on en a pour bonifier un
régime de retraite?
M. le Président, on pourrait tout au moins attendre une certaine
reprise économique avant de considérer ledit projet de loi. On
pourrait attendre au moins une reprise économique pour penser la
bonifier. Nous, on l'a dit au gouvernement. Si vous voulez harmoniser comme les
autres, on est prêts - parce que ce ne sont que des ajustements
juridiques. Mais les effets de l'harmonisation, c'est blanc bonnet, bonnet
blanc; ça n'augmente pas les coûts à être
versés à même les fonds publics. C'est ça,
fondamentalement, notre argumentaire, il n'est pas compliqué.
Les gens nous disent: Oui, mais ils vont parler contre. Oui, on parle
contre, et on le fait en toute décence. C'est notre option, c'est notre
façon de voir les choses, de dire aux citoyens... Ce n'est pas qu'il y a
des choses, dans ça, qui sont scandaleuses. On l'a lu dans les journaux.
Moi aussi, j'ai lu La Presse. Mais, fondamentalement, en pleine
récession économique, au moment où on dit aux autres: Vous
autres, on ne fait que vous harmoniser, pas une cent de plus, pas une cent de
moins non plus, on vous laisse au palier où vous êtes... C'est
ça qu'on a dit au monde. C'est ça qu'on a voté à
trois reprises, dans cette Chambre, depuis environ une quinzaine de jours.
Là, la même logique, quand il s'agit du Parlement, elle ne
s'applique plus. La même logique ne prévaut plus. Là, on
trouve les moyens, quand c'est le Parlement, parce que c'est nous, de le faire.
Entre vous et moi, c'est ça, évaluer une opportunité.
Moi, je ne crierai pas au scandale sur le salaire des
députés parce que je sais, pour avoir tenté de recruter
des personnes pour venir en vie politique, que ce n'est pas facile. Je sais
ça. C'est pour ça que je ne suis pas un de ceux qui vont crier au
scandale. Un salaire de 60 000 $, ou tout près, il y a des gens, dans
l'entreprise privée, qui gagnent beaucoup plus que ça,
effectivement. Il y a des gars qui ont des fonctions de haut fonctionnaire
d'État qui ont bien plus que les députés. Je sais tout
ça, mais ça ne me convainc pas, face à une population et,
en particulier, au moment... Je vais insister là-dessus, M. le
Président.
Moi, ce qui me fait le plus mal, ces temps-ci, c'est de voir les
sondages paraître les uns après les autres, où les hommes
et les femmes politiques sont à peu près au dernier rang. On est
chanceux quand on est à l'avant-dernier, on est plutôt au dernier
rang, au niveau de la crédibilité publique, et ça,
ça fait mal. Quand tu travailles 80 heures ou 90 heures par semaine
à régler des cas, à travailler comme un fou, à
participer à la vie communautaire collective dans ton milieu et que tu
vois ces résultats de sondage, ça fait mal. Mais, bonne
mère du ciel! il faut prendre les moyens, à ce moment-là,
pour rebâtir cette crédibilité-là. Cette
crédibilité-là, elle va se bâtir comment? Elle va se
bâtir d'abord et avant tout en ayant les mêmes réflexes pour
nous comme pour les autres. C'est ça, fondamentalement.
Moi, je n'ai pas honte de ce que je touche, et je suis satisfait du
devoir accompli, même si c'est lourd. Mais il me semble qu'on peut
réfléchir collectivement, dans le Parlement, et dire ceci.
Indépendamment du fait qu'on trouve certaines demandes raisonnables,
certaines de-
mandes discutables, certaines demandes, peut-être, sur lesquelles
on peut s'interroger assez longuement, est-ce que, au moment où on
demande à une population, elle, d'uniquement s'harmoniser, au moment
où on demande à une fonction publique québécoise de
consentir à aucune augmentation de traitement, c'est opportun de
déposer un tel projet de loi?
Nous, on pense qu'on aurait dû déposer, dans un premier
temps, un projet de loi qui harmoniserait notre fonds de retraite avec C-52, la
loi fédérale qui nous oblige à le faire. En passant, il y
en a dans cette Chambre, sans doute, qui ont été
pénalisés. On leur avait dit: Tu pourras prendre des
régimes privés - pas de problème! - jusqu'à tant de
mille dollars. Deux ans après les avoir laissés faire ça,
rétroactivement, ils sont venus leur dire: Tu nous dois de l'argent.
Ça, ce n'est pas correct. Je n'accepte pas ce que le
fédéral a fait là-dessus.
Ceci dit, il y a moyen d'harmoniser ça avec une loi, comme on l'a
fait pour les juges, comme on l'a fait pour les élus municipaux, comme
on l'a fait pour le public et le parapublic. (17 heures)
M. le Président, le projet de loi dit plus que ça. Le
projet de loi dit qu'à compter de son adoption, il y aura d'abord des
bonifications sur l'accumulation annuelle. Il y aura des bonifications sur les
pénalités actuarielles si tu n'as pas 60 ans, si j'ai bien
compris le projet de loi. Il règle quelques vides juridiques;
effectivement, il y en a un depuis 1983 et c'est un vide juridique. Il y a
même des gens qui ne sont pas ici et qui ne peuvent pas toucher à
leur argent qui ne leur rapportera jamais. Ça, on n'a pas le droit
d'être injuste envers du monde. Garder l'argent du monde sans qu'il serve
à quelque nature que ce soit... Je comprends que ça
représente peu, mais il y a des individus qui sont touchés par
ça et il faut corriger ça. Là-dessus, je pense bien qu'il
n'y aura pas de chicane.
Mais moi, je voudrais attirer l'attention du gouvernement, et dire: On a
un problème à régler. Le problème, il est quoi? Le
problème, c'est l'harmonisation. Donc, pourquoi ne pas adopter - je vous
garantis que ce n'est pas long, adopter la loi de l'harmonisation - la loi de
l'harmonisation et, en toute transparence, au moment où la reprise
économique reprendra, on déposera un projet de loi; on le
discutera, visière levée. Il ne faut pas avoir peur de parler aux
gens, d'interroger, de regarder ça.
Mais la conjoncture actuelle... J'espère qu'on est tous
conscients de la conjoncture actuelle que nous traversons, M. le
Président. J'espère qu'on est conscients que 400 000
chômeurs au Québec, c'est du monde, ça. J'espère
qu'on est conscients que 620 000 personnes sur l'aide sociale... C'est 1 000
000 en tout; c'est une personne sur six, ça, qui n'a pas d'emploi,
quelles que soient ces personnes. 1 020 000... Est-ce qu'on ne peut pas dans la
conjoncture actuelle adopter, à ce moment-là, l'harmonisation et,
visière levée, au grand jour, dès la reprise
économique, on la regardera? On la regardera et on jugera comme
formation politique. Mais parier d'opportunité à ce stade-ci, je
vous avoue que je ne sais pas dans quel monde on vit, mais...
Même si je le méritais à 150 %, je me dis que
ça n'a pas de bon sens. Je vais jusque-là, moi. Je suis convaincu
qu'il y en a qui sont bien plus tiraillés que moi. Il y en a qui peuvent
penser que, sur le fond, ça n'a pas d'allure. Mais moi, je ne
m'interroge même pas sur le fond. Même si je le méritais, je
me dis: Écoutez, on va toujours bien attendre que l'argent rentre dans
les coffres. On dit qu'on en manque dans les coffres et on veut s'en donner.
C'est ça, fondamentalement, c'est là la question qu'on se pose
à ce stade-ci. Il n'y en a pas d'autres. Tant qu'à moi, il n'y en
a pas d'autre.
C'est pour ça que même si je suis le critique de mon parti
pour ce projet de loi, je ne parierai pas une heure parce que je n'ai pas fait
l'analyse en fonction de: "C'est-u" juste? "C'est-u" raisonnable? Je
"devrais-tu" en avoir? M. le Président, si c'était ça, je
pense que n'importe lequel pourrait avoir des visions même
différentes. On pourrait avoir des visions même
différentes, peut-être au sein même de leur parti. Il y en a
peut-être qui ne le voient pas du tout du même oeil qu'un autre. Il
y a des gens pour qui ça constitue un principe et qui seraient
prêts dans un vote libre, par exemple, de voter même contre le
projet de loi, même s'il est de la formation ministérielle. De
notre côté, si on avait à voter sur le fond, il y en aurait
peut-être qui n'auraient pas les mêmes perceptions sur le fond des
choses que moi. Moi, je respecte ça. D'ailleurs, sur ce genre de projets
de loi qui font appel à l'évaluation personnelle, j'ai toujours
compris que le Parlement, on était retardé là-dessus. On y
va sous forme, bien souvent, de position ministérielle ou bien de
position de parti politique, mais, fondamentalement, c'est une question
d'évaluation.
Mais sur l'opportunité, quand on fait depuis trois mois - je vous
donne des exemples... À chaque période de questions, on se
lève, on apprend que les "shops" Angus sont fermées, la papeterie
de Matane est fermée, Jonquière a de la misère, Aima tire
la patte. Je pourrais faire le tour du Québec... Il y a une crise
budgétaire très forte. Le déficit était
prévu pour quelque chose comme quelque 2 000 000 000 $, mais il sera
à tout près de 4 000 000 000 $.
À ce moment-là, M. le Président, on a beau dire
qu'il n'y a pas d'opportunité, que ce ne sera jamais opportun, je
m'excuse. Il y a eu quand même cinq, six ou sept années de
prospérité économique. Là, on est en pleine
récession et c'est dans ce contexte-là qu'il faut
l'évaluer et non pas sur le fond au mérite. Dans ce
cas-là, sur le fond au mérite, je vais vous en donner des
exemples de lois qu'on adopterait spontané-
ment. Le surplus des caisses de retraite privées des
employés, on en a parlé après-midi à la
période de questions, M. le Président. Vous avez
écouté ça. C'est de l'argent que les travailleurs
attendent et ça ne coûte pas une cent à l'État. Le
projet de loi n'est pas déposé et ça fait trois ans qu'ils
le réclament. Ça ne coûte pas une cent ça, et on ne
l'a pas donné.
L accessibilité à la justice. Il y a de plus en plus de
monde qui n'ont même plus accès à la justice parce que les
programmes sont dépassés. Ça, ça coûte de
l'argent, mais on ne peut pas le donner présentement, pourquoi? Parce
qu'on dit qu'il y a une crise budgétaire, M. le Président. Il
faut penser à ces choses-là. Il faut penser à d'autres
législations qui ne coûtaient rien et qui auraient pu passer au
cours de la présente session. Mais mes collègues en parleront
sans doute.
Fondamentalement, sur l'opportunité même, la discussion n'a
pas été longue chez nous. Ah bien, seigneur, ils ont dit:
Écoutez, on a l'air de quoi? On a l'air de quoi? Un groupe parlementaire
qui, quotidiennement, harcèle le gouvernement pour aller chercher un
petit peu plus d'argent dans un programme, pour avoir des programmes pour faire
marcher l'entreprise. On n'a pas d'argent pour les programmes de relance de
l'économie. On n'a pas d'argent pour la formation professionnelle. On
n'a pas d'argent... Au contraire, on a même sabré, M. le
Président, allègrement dans les programmes sociaux à part
de ça. Je pourrais vous en donner une multitude d'exemples. Je n'ai pas
l'intention de m'étendre longuement là-dessus.
Mais qu'est-ce qu'on a fait en cette Chambre? On a questionné
régulièrement là-dessus. On a fait valoir
régulièrement notre position. Quand on est arrivés,
naturellement, pour donner l'heure juste sur le projet de loi, on a dit: Non.
Nous, on pense qu'il faut s'harmoniser comme les autres parce qu'on n'a pas le
choix juridiquement, mais l'effet de l'harmonisation doit être nul.
Ça coûtait tant avant, ça coûte tant après,
mais on se conforme à la loi fédérale. C'est tout ce qu'on
disait. On va se comporter exactement comme les autres. S'il y a une reprise
économique, si ça fonctionne, si l'argent rentre dans les coffres
du gouvernement, on discutera au mérite du fond à ce
moment-là. Le fond, on le regardera très sérieusement, M.
le Président. Je le répète, sur le fond, je suis convaincu
que des deux côtés de la Chambre, il y a des personnes qui n'ont
pas les mêmes perceptions.
Moi, faire appel au rôle du député comme l'a fait le
leader du gouvernement, sur sa capacité de travail, sur les heures qu'il
y met, on n'est pas en désaccord là-dessus. Écoutez,
ça fait 15 ans que je fais ce métier dans cette Chambre. Je sais
jusqu'à quel point les semaines sont très longues. Je sais
jusqu'à quel point, M. le Président, on a même des fins de
semaine complètes d'amochées et de scrapées, comme on dit
en bon québécois. bien, on l'a voulu, ça. on l'a voulu. si
on est reconnus par nos concitoyens, c'est parce qu'aussi on a une
cohérence. puis, je ne suis pas gêné, à ce
moment-là, quand il arrive une décision, de me brancher. mais,
actuellement, s'ils me demandaient: chevrette, le fonds de pension, qu'est-ce
que t'en penses? moi, je dis: ce n'est pas opportun. c'est tout ce que je
réponds. s'ils me disent: sur le fond, oui, mais ce n'est pas un
scandale. ce n'est pas une question de scandale. le scandale, il peut
être dans l'opportunité et pas nécessairement sur le fond.
ça fait qu'au moment où tu demandes au monde de se serrer la
ceinture et de faire trois, quatre tours, toi tu te donnes du "loose". c'est
ça qui n'est pas correct. ça n'a pas d'allure. c'est
là-dessus. je ne comprends pas que vous ne compreniez pas ça.
c'était si simple pour moi de dire: on fait une loi d'harmonisation, et
la bonification viendra dès la reprise économique. on s'en
reparlera, on fera une commission parlementaire, on dialoguera, on parlera, et
on discutera entre nous autres. là, à ce moment-là, les
gens nous diront: bien... au moins, les gens ont compris, ils comprennent un
peu ce qu'on vit. c'est ça.
C'est là le problème. C'est la division qu'on a entre les
deux formations politiques, à ce stade-ci, M. le Président. Ce
n'est quand même pas nous qui avons... Moi, j'ai transmis ces
informations-là, dis-je, M. le Président, au leader du
gouvernement avant même qu'il soit déposé. Je suis
allé à ma formation politique, j'ai expliqué. Ils peuvent
se lever et le dire. Le consensus général, ils ont dit: Sur
l'opportunité, c'est non. Je vous transmets ce que le caucus a dit. Je
suis surpris qu'on ne l'ait pas fait comme pour tous les autres groupes.
Ça, ça aurait été, M. le Président, un des
petits accents pour faire grimper un peu dans les sondages la
crédibilité des hommes et des femmes publics. Je suis sûr
de ça, moi. Ils auraient dit: Bien, ils tiennent compte des
réalités, ils se conforment un peu... Ils se donnent les
traitements qu'on donne à la collectivité. (17 h 10)
C'est malheureux qu'on ne soit pas arrivés à un consensus
là-dessus quant à la démarche. La démarche, c'est
un projet de loi sur l'harmonisation et, après ça, on verra
évoluer l'économie, on verra comment ça fonctionne. Il y a
d'autres sessions, on n'est pas à bout de souffle. On a la session de
juin qui s'en vient; il y aura la session de l'automne encore, et
l'économie, il faut espérer qu'elle reparte, j'espère. Je
touche du bois et je prie tous les soirs pour que ça reparte, cette
économie-là, parce que, vous savez, comment ça nous
occasionne de travail. Plus il y a de chômeurs, plus il y a
d'assistés sociaux, plus on fait du bureau de comté puis on
essaie d'encourager et de stimuler.
Ça aussi, c'est à la lumière de ce qu'on vit
quotidiennement qu'on doit porter un jugement sur l'opportunité.
Porter un jugement sur l'opportunité, M. le Président... Moi, je
pense qu'à ce stade-ci, je me fais le porte-parole, bien sûr, de
notre formation politique pour dire qu'on est contre le projet de loi. Oui, on
est contre le projet de loi. On le trouve inopportun dans la conjoncture
actuelle, M. le Président. On serait pour un projet de loi sur
l'harmonisation, pour se rendre conforme et légal.
M. le Président, je dois vous avouer ici que le discours que je
viens de transmettre très calmement sur l'opportunité... Je vous
certifie que si j'avais sorti les discours de Fernand Lalonde de 1983 au moment
où, dans cette Chambre, le parti au pouvoir amputait le régime de
retraite, en enlevait... On va vous en citer pendant toute la nuit, si vous
voulez. On pourrait vous servir les discours du leader actuel, à
l'époque de 1983. On pourrait vous servir les discours de plusieurs
députés en cette Chambre qui, en 1983, au moment où on
coupait, nous parlaient d'opportunité.
Savez-vous pourquoi? Parce qu'à l'époque, il y avait le
gel à 3 %, baisser de 6 % à 3 %, puis il y avait le fait
d'amputer le régime de retraite en même temps dans le même
projet de loi. Ils se sont battus pour scinder le projet de loi. Je m'en
rappelle donc. M. le Président, je vais les ressortir. Je les ai lus la
semaine dernière et je vais peut-être permettre à certains
de mes collègues, au cours de la soirée, d'en citer certains
extraits juteux pour démontrer, M. le Président, qu'on ne veut
pas à ce stade-ci être hypocrite et dire pourquoi. Si
j'étais hypocrite, je dirais: Je suis contre tout, y compris le fond.
C'est tellement franc que je dis: Ce n'est pas le moment, quand on gèle
du monde puis qu'on harmonise les autres, de s'augmenter. Ça "peut-u"
être plus clair? Ce n'est pas hypocrite, c'est franc!
Sur le fond, par exemple, quand on arrivera au fond, on se parlera sur
le fond. Sur le fond, M. le Président, j'aimerais ça que le
gouvernement lui-même décrète un vote libre
là-dessus pour permettre à n'importe qui en cette Chambre - puis
je le dis, ça vaut sur les deux côtés - il y en a qui, pour
des principes personnels - ils ont le droit et je les respecte...
D'ailleurs, ce n'est pas une loi entre vous et moi qui engage le
gouvernement comme sur un budget, ça. Sur une loi où on fait
appel à la conscience individuelle - puis Dieu sait si ce n'est pas
facile, ça, je le reconnais, moi -d'avoir à sanctionner ses
propres traitements et ses propres conditions marginales de travail. Ça,
c'est un fait que ce n'est jamais facile. Mais il me semble qu'entre la
difficulté qu'a à vivre un député en cette Chambre,
déjà pour poser le geste, on ne lui rend sûrement pas la
tâche facile quand on le place devant une situation où la
conjoncture empire encore la situation. Là-dessus, M. le
Président, je pense avoir été d'une clarté. Il n'y
a pas de cachette.
On est unanimes, nous, de notre côté à dire:
Harmonisation, oui, mais bonification, s'il vous plaît. Quand les gens
respireront - on ne doit pas être dans ceux qui manquent le plus
d'oxygène - quand les gens commenceront â respirer, si on veut se
donner un peu d'oxygène, on le fera, le débat. Mais
fondamentalement, ce n'est pas opportun de faire un débat où il
manque d'oxygène, dans une conjoncture où il manque
d'oxygène dans notre société, dans une conjoncture
où la situation budgétaire est difficile, dans une conjoncture
où la situation économique est difficile; difficile pour
l'entreprise, difficile pour les travailleurs, difficile, encore plus, pour les
chômeurs, M. le Président. Donc, c'est à partir de cela que
nous, nous voterons contre ce projet de loi là, et nous manifesterons
notre cohérence et notre logique au cours du débat. Il y aura des
gestes de posés, bien sûr, qui indiqueront clairement quelle est
notre position. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le leader de
l'Opposition officielle et député de Joliette. Nous en sommes
à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 404. Je
reconnais M. le whip en chef du gouvernement et député du
comté de Viau. M. le député.
M. William Cusano
M. Cusano: Merci, M. le Président. Il y a quelques jours,
le leader du gouvernement, député de Portneuf et ministre de
l'Éducation, déposait en cette Chambre le projet de loi 404. Ce
dernier a pour but de modifier l'actuelle législation concernant les
conditions de travail et le régime de pension des membres de
l'Assemblée nationale.
Si vous me le permettez, M. le Président, je ne m'attarderai pas
aux détails d'ordre technique. Je crois plutôt qu'il serait
opportun d'élaborer les raisons qui ont amené notre gouvernement
à mettre de l'avant un tel projet de loi. Évidemment, certains
députés de l'Opposition - on vient d'entendre le leader de
l'Opposition - au sein de leur formation politique, prétendent qu'il
n'est pas opportun, à ce moment-ci, de présenter un projet de loi
qui a pour but de s'harmoniser avec les règles du projet de loi C-52 du
fédéral. Il a dit, je l'entendais - il vient de quitter; c'est de
valeur, M. le Président, que le député de Joliette vienne
de quitter - que ce n'est pas opportun à ce moment-ci de
présenter un tel projet de loi sauf que, ce qu'il oublie de dire au
moment où on se parle, c'est que je ne vois ici aucun d'entre nous qui
va bénéficier de ce projet de loi demain matin. Il n'y a aucun
d'entre nous qui va bénéficier du projet de loi, ici, demain
matin. Ce ne sera pas avant l'automne 1993 pour ceux qui seront battus et
même au printemps 1994.
C'est sûr qu'il n'y a jamais, jamais de moment propice pour
toucher et améliorer les conditions, que ce soit salariales ou de
régime de retraite au niveau de la deputation, ici à
l'Assemblée nationale. Ça fait 11 ans que je siège ici et,
au fil des ans, on a toujours parlé des conditions de travail, des
salaires, du régime de pension. Chaque fois, on a de la
difficulté parce que ce n'est pas facile pour nous, M. le
Président, de se décréter ou de se déterminer un
certain montant. Ce qui est arrivé, c'est qu'avec la loi C-52, loi
adoptée au gouvernement fédéral, il était
nécessaire de redéfinir l'ensemble de règles concernant
l'accumulation d'épargne-retraite. Nous nous devions d'amender nos
propres régimes pour les harmoniser et les rendre conformes. (17 h
20)
Vous vous souvenez sans doute, M. le Président, que c'est suite
à l'adoption de cette loi qu'un comité indépendant et
donc, non partisan, avait été mandaté par le Bureau de
l'Assemblée nationale pour étudier toute cette question. Qui
étaient les membres de ce comité? Le comité était
formé par M. Richard Guay, exjournaliste. Une personne qui a
occupé votre place, M. le Président, en tant que président
de l'Assemblée nationale, un représentant de comté qui a
représenté les électeurs de Taschereau pendant des
années. Il y a eu le Dr Victor Goldbloom, médecin pédiatre
de formation et ancien ministre au sein d'un gouvernement libéral, et
aussi membre du comité. On avait invité M. Alain Baccigalupo,
professeur d'administration publique à l'Université Laval. Le
comité a ainsi obtenu le mandat d'étudier, d'analyser et de faire
des recommandations quant au régime de retraite des
députés.
Le projet de loi 404 reflète en grande partie les recommandations
de ce comité et tend vers une simplification du régime de pension
existant. Il me semble que c'est normal de le faire à ce moment-ci. Vous
le savez, M. le Président, il y a quelques-uns d'entre nous ici,
à l'Assemblée nationale, qui sont présentement
régis par trois plans différents de régimes de pension et,
avec l'harmonisation qui était nécessaire à cause de la
loi C-52, plusieurs d'entre nous auraient été régis par
quatre différents régimes de pension, M. le Président.
C'est inacceptable, et je pense que la population aurait ri de nous en disant:
"C'est-u" possible que les législateurs ne soient pas capables
d'harmoniser tous ces régimes de pension en au moins un régime de
pension? Et vous allez comprendre, M. le Président, que gérer, de
la part de la CARRA, quatre régimes de pension aurait été
un peu plus dispendieux que d'en gérer seulement un.
Ce comité d'étude extraparlementaire a donc
suggéré non seulement des réaménagements pour se
conformer aux nouvelles règles fiscales, mais aussi d'autres
réajustements afin de répondre à certaines
préoccupations des membres de l'As- semblée. Concrètement
- et on parlait de coûts tout à l'heure - la facture de ce projet
de loi se chiffre à moins de 1 000 000 $ par année. Et ça,
ce n'est pas pour aujourd'hui, M. le Président, et ce ne sera pas pour
demain. Ce coût-là sera engendré, on l'espère,
seulement au plus tôt à l'automne 1992 et même au printemps
1993.
Je crois sincèrement, M. le Président, que le projet de
loi n'est nullement exagéré parce que, à un certain
moment, lorsqu'on a fait des modifications au régime de rentes, il
était possible de la part des députés, qui étaient
considérés comme des travailleurs autonomes, de contribuer 7500 $
par année dans un REER à titre de travailleurs autonomes. Ce qui
s'est produit, M. le Président, c'est qu'il y a eu des modifications au
niveau des lois fiscales du gouvernement fédéral, et les
députés ont perdu ce droit de contribuer dans les REER; et non
seulement ils ont perdu ce droit-là, mais ils l'ont perdu
rétroactivement.
Alors, M. le Président, pour faire un peu le survol des
différents régimes de pension qui existent, avant 1983, le
montant de la pension versée représentait 7,5 % du traitement par
année de participation, avec pleine indexation au coût de la vie.
Ça, c'est ce à quoi on se réfère. Il y a beaucoup
de députés, beaucoup de concitoyens qui se réfèrent
à ce plan-là comme étant le plan de la grande Cadillac
toute chromée. C'a été changé, M. le
Président, et, entre 1983 et 1987, il équivalait à 4 % du
traitement par année, assorti d'une indexation réduite de 3 %.
C'est ce qui se produit un peu avec tous les plans de pension qui existent
présentement au Québec. Après 1987, la pension
versée était de 3,5 % du traitement et on maintenait la
réduction de l'indexation. Avec le projet de loi 404, on accorde 4 % de
la rémunération, avec maintien de la réduction. puis, en
ce qui a trait à l'âge d'admissibilité à la pension,
pour les années antérieures à 1983, la seule condition
était que le député ait accompli deux mandats d'une
durée minimale de cinq ans. de 1983 à 1987, on a établi
l'âge de la retraite à 60 ans, assorti de la possibilité
d'un paiement anticipé, mais réduit de 4 % par année
jusqu'à une réduction maximale de 33 1/3 %. depuis 1987, un
député peut prendre sa retraite s'il est âgé de 50
à 60 ans, dépendamment du nombre total d'années qu'il a
consacrées à son travail de député. enfin, le
projet de loi 404 établit l'âge de la retraite du
député à 60 ans, m. le président, et il est aussi
assorti d'une réduction actuarielle en cas de paiement par
anticipation.
M. le Président, cela explique bien l'évolution et les
modifications qui sont aujourd'hui apportées au régime de
retraite des députés de l'Assemblée nationale. Par
ailleurs, vous savez sûrement que le régime
québécois demeure un des moins généreux au Canada.
Effectivement, le régime qui prévaut au Parlement
fédéral repré-
sente 5 % du salaire moyen des six meilleures années du
député. À Terre-Neuve, ce sont 5 % de la moyenne des trois
meilleures années. En ce qui a trait à
l'île-du-Prince-Édouard, la pension représente 75 % des
cotisations versées par les députés, sans excéder
50 % du plus haut salaire. En Ontario, elle représente 5 % des trois
meilleures années, et enfin, en Colombie-Britannique, ce sont 5 % de la
moyenne des quatre dernières années. Donc, M. le
Président, on se rend bien compte que le projet de loi 404 n'apporte
aucune exagération au traitement versé aux députés
de l'Assemblée nationale du Québec. Si l'on compare avec les
provinces que je viens de mentionner, le Québec demeure loin
derrière en ce qui a trait aux conditions salariales de ses
députés à la retraite.
M. le Président, vous avez été ici assez longtemps
pour savoir que la moyenne du nombre d'années que les
députés passent à l'Assemblée nationale est de 6,3
années. Cela réduit considérablement les
possibilités de profiter de la rente maximale. De surcroît, 45 %
des parlementaires accusent - et ça, c'est selon l'étude qui a
été faite par le comité de M. Guay et de M. Baccigalupo -
une perte de revenus lorsqu'ils arrivent en politique. Le régime de
retraite des députés vise donc à combler de façon
minimale cette perte. Il assure donc un faible revenu lorsque le
député atteint sa retraite.
À ce stade-ci, M. le Président, j'aimerais rappeler
certains faits que nous avons peut-être des fois tendance à
oublier. C'est que le député paie pour son régime de
retraite. À chaque paie, M. le Président, vous le voyez autant
que moi, il y a une déduction qui est faite, justement, pour contribuer
à votre régime de retraite, tout comme pour l'ensemble des
travailleurs et des travailleuses au Québec qui
bénéficient d'un tel régime. Et ça, c'est une chose
qui est oubliée souvent, c'est que la population pense que le
député ne contribue pas de ses propres poches à son fonds
de pension. Il est important, M. le Président, de noter que le montant
qui est contribué par le député est
considérable.
M. le Président, vous êtes certainement au fait qu'il
existe des compagnies qui paient entièrement le fonds de pension de
leurs employés, mais ce n'est pas le cas pour l'ensemble de la
deputation au Québec, et je pense qu'on doit le souligner. De plus,
à chaque mandat, le député se fait évaluer; on se
base sur les actions qu'il a posées lors de l'exercice de ses fonctions
et, si la population juge qu'il n'a pas rempli adéquatement son mandat,
il n'est tout simplement pas réélu au mandat suivant. Je sais que
ce n'est pas votre cas, M. le Président. Vous avez été
élu à trois occasions; ça veut dire que la population du
comté de Jeanne-Mance est certainement très satisfaite du travail
que vous faites. Le député qui est élu à
l'Assemblée nationale, c'est une personne, je pense, dans la grande
majorité des cas, d'un côté ou de l'autre de la Chambre,
qui remplit bien son rôle pour bien représenter la population. Et
si la population trouve que, peut-être, le député ne fait
pas, comme on dit dans le bon jargon québécois, sa job comme il
faut, le message se rend normalement aux élections. (17 h 30)
M. le Président, vous savez que le député participe
au processus législatif qui est sa première préoccupation.
Il est élu par les électeurs de sa circonscription et il exerce
en réalité trois fonctions. Comme je le disais, il s'agit de sa
fonction comme législateur, de contrôleur, mais aussi et surtout
de représentant de la population. J'aimerais vous donner des exemples de
situations que je rencontre, que tous les députés rencontrent
dans leur comté, M. le Président. Le député devient
un peu le lobbyiste, si vous voulez, pour aider l'entreprise dans son
comté qui veut se prévaloir d'un programme d'aide pour sauver des
emplois. Le député aussi exerce sa connaissance. Il est souvent
un conseiller, il est souvent un travailleur social. Il est souvent la personne
qui aide des électeurs et des électrices à faire leur
chemin au niveau de différents organismes qui relèvent du
gouvernement.
Le député aussi, vous le savez, M. le Président,
peut, au nom de ses citoyens, apporter des projets de loi publics ou même
parrainer des projets de loi d'intérêt privé. Cela exige
beaucoup de temps, M. le Président, et je connais très peu de
députés ici, d'un côté ou de l'autre de la Chambre,
M. le Président, qui travaillent moins de 70 heures par semaine.
Une voix: II n'y en a pas gros.
M. Cusano: Non, il n'y en a pas gros. Vous avez absolument
raison. C'est vrai, M. le député de Masson, et je suis d'accord
avec lui que les députés ici, parmi les 125 députés
d'un côté ou de l'autre qui travaillent moins que 70 heures par
semaine, ils sont très rares, M. le Président. Alors, lorsqu'on
arrive pour amener certains changements à un fonds de pension ou un
fonds de retraite, appelons-le ce qu'on veut... C'est sûr, comme je vous
disais tout à l'heure, qu'il n'y a jamais un moment propice, jamais.
Mais il faut le faire parce qu'au fil des ans, il y a eu des modifications
apportées de l'extérieur qui ont eu pour effet de modifier notre
fonds de pension.
Alors, je pense qu'avec tout le respect qu'on se doit d'un
côté ou de l'autre de la Chambre, M. le Président, c'est
d'amener les changements qui s'imposent. Je n'ai pas l'intention de
m'éterniser sur ce débat et j'aimerais seulement vous dire, en
terminant, M. le Président, que depuis 11 ans maintenant que je suis ici
à l'Assemblée nationale, depuis 11 ans qu'on parle, d'un
côté ou de l'autre de la Chambre, que
le régime de retraite pour les députés était
inacceptable. C'est sûr qu'au moment où on se parle, on est en
train de traverser une récession, mais j'insiste pour le dire et
j'aimerais bien que les députés de l'autre côté de
cette Chambre le disent aussi, c'est que le député contribue
lui-même au régime de pension.
Le député, à chaque paie, M. le Président,
il verse lui-même dans son fonds de pension, M. le Président, oui,
0,8 % de son salaire qui est contribué. Ce n'est pas gratuit, ça
ne vient pas du ciel, M. le Président. Ça vient de la poche du
député. Deuxièmement, M. le Président, c'est que
les coûts additionnels engendrés par ce projet de loi, ce n'est
pas demain matin que le gouvernement aura à les défrayer.
Ça va être, comme je l'ai dit, ce ne sera pas avant l'automne 1992
ou même au printemps 1993.
M. le Président, on peut bien, de l'autre côté,
à ce moment-ci, peut-être être un peu démagogique et
dire que ce n'était pas opportun, mais si ce n'est vraiment pas
opportun, MM. les députés de l'autre côté, non
seulement ayez le courage de voter contre, mais ayez le courage aussi de vous
soustraire du projet de loi qui est ici présenté devant nous, M.
le Président.
Des voix: Bravo!
M. Cusano: Parce que vous savez fort bien qu'une fois que le
projet de loi va être adopté, et il sera adopté dans toute
sa transparence, M. le Président. Ce n'est pas un débat qui se
fait dans la nuit, comme il s'est fait quand vous avez présenté
votre projet de loi en 1983, M. le Président.
J'étais ici, moi. Alors, vous nous contez toutes sortes
d'histoires, mais en 1983, vous avez essayé de passer le projet de loi
en plein milieu de la nuit. Ce qui est proposé ici par le leader du
gouvernement, c'est un débat à des heures normales. Suite
à ça, il y aura une commission parlementaire qui va discuter du
projet de loi article par article. Amenez-en, des amendements à ce qui
ne fait pas votre affaire, M. le Président, on va les considérer!
Et au bout de la ligne, ayez au moins la conviction, soyez au moins assez
francs pour dire si c'est vraiment un scandale d'amener les modifications qui
sont apportées par le projet de loi! Ayez donc le courage de vous
soustraire au projet de loi! Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Viau. Sur l'adoption du principe du projet de loi 404,
je reconnais maintenant M. le leader adjoint de l'Opposition officielle et
député d'Abitibi-Est.
M. Gendron: Ouest, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ouest. Excusez-moi.
M. François Gendron
M. Gendron: M. le Président, comme leader adjoint de
l'Opposition officielle, je me dois, je pense, d'intervenir sur un projet de
loi qui touche les questions de travail des parlementaires. Je suis un peu
déçu de la finale du député de Viau, qui a
versé dans la partisanerie un petit peu abusive parce que. sur la base
de ce qu'on a déjà fait et de ce que vous avez déjà
fait, ça ne peut pas rester bien, bien haut. Ce n'est pas dans ce
sens-là que j'ai l'intention de faire les 20 minutes qui me sont
prescrites par le règlement. Je veux tout simplement dire très
sobrement, sereinement, calmement que moi, ça ne me gêne pas,
contrairement à ce qu'on a dit. Et je vais y revenir. Est-ce que je suis
gêné de débattre sur la place publique des questions qui
nous regardent, comme celle-là? La réponse, c'est non, je ne suis
pas gêné du tout. Oui, je sais qu'on est
rémunérés à même les fonds publics, mais je
n'ai aucune espèce de gêne à recevoir la
rémunération qu'on m'attribue, aucune espèce de honte, et
j'expliquerai pourquoi.
Mais je ne pense pas que c'est être incorrect, M. le
Président, de dire d'entrée de jeu que le projet de loi qu'on a
sur la table, c'est une loi qui modifie la Loi sur les conditions de travail et
le régime de pension des membres de l'Assemblée nationale et
d'autres dispositions législatives. Je ne vous lirai pas les notes
explicatives, mais je vais vous en lire deux paragraphes. C'est un projet de
loi qui apporte des modifications à la Loi sur les conditions de
travail. C'est un projet de loi qui limite - ainsi de suite. C'est un projet de
loi qui fixe. Et, à un moment donné, après trois
paragraphes corrects, honnêtes, objectifs, on arrive avec quelque chose
qui n'est plus correct, selon nous, mais objectivement. On dit: "Par ailleurs,
le projet de loi introduit une disposition dans la Loi sur les conditions de
travail et le régime de pension des membres de l'Assemblée
nationale afin de permettre l'établissement d'un régime de
prestations supplémentaires." Pas compliqué! Pas de cachette!
Oui, c'est un projet de loi qui bonifie le régime de pension des
députés de l'Assemblée nationale.
Il y a un journaliste qui a écrit récemment: "Quant
à la façon de procéder du gouvernement, elle est cousue de
fil blanc, elle est odieuse - je le cite. Elle s'apparente à du
mépris pour l'intelligence publique." Moi, je ne veux même pas
relever ça. Je veux juste dire qu'il y a des gens qui sont dans ces
dispositions-là. Il y a des gens qui sont dans ces
dispositions-là, qui pensent qu'on a trouvé le prétexte de
l'harmonisation pour amener une bonification. Alors, moi, je prétends
qu'effectivement, si le projet de loi dont nous discutons au niveau de son
principe ne comportait que des mesures d'harmonisation avec le projet de loi
fédéral, en vertu de la loi C-52, ce serait un projet de loi qui
passerait comme du beurre dans la poêle.
Est-ce que nos régimes de retraite ont l'obligation d'être
harmonisés? La réponse, c'est oui. Cependant, moi, je comprends
mal le régime de deux poids, deux mesures. Pour l'instant, je ne suis
pas encore sur l'opportunité. Pourquoi harmoniserait-on les
régimes de retraite, ceux des juges, ceux des élus municipaux,
ceux de tous les autres employés de l'État: fonction publique,
péripublique, santé et services sociaux, éducation? La, on
dit: C'est nécessaire, c'est requis d'harmoniser vos régimes de
retraite. Mais pour nous, on dirait: On va, en même temps, en profiter
pour le bonifier. Et j'y reviendrai dans quelques minutes. Moi, j'en suis juste
là-dessus. Je prétends que ce n'est pas correct. Ce n'est pas
correct dans le même projet de loi. Ce n'est pas pour rien que, nous
aussi, on va en discuter visière levée. (17 h 40)
On a dit, dès le début de la session, au leader, quand il
y a eu consultation là-dessus: Nous préférerions que vous
présentiez deux projets de loi, un sur l'harmonisation, comme tout le
monde et, le deuxième, nous, on ne veut pas l'avoir tout de suite. Mais
ce n'est pas nous autres qui gouvernons, parce que la situation du
Québec ne serait probablement pas comme elle est. On ne serait pas dans
la merde jusqu'au cou, et il n'y aurait pas plus de 1 000 000 de personnes qui
sont sans emploi. Écoutez, la réalité, c'est qu'on veut
discuter d'une bonification quand il y a 1 200 000 sur quelque 6 000 000,
enlève les enfants et enlève ceux qui ont des difficultés,
enlève tous ceux qui n'ont pas le statut de travailleur actif, vous ne
me ferez pas accroire que ça fait une société bien, bien
productrice pour la période dans laquelle nous évoluons.
Ça, on a dit ça au gouvernement, et on a dit ça
très clairement. Nous, on souhaiterait qu'il y ait deux projets de loi.
Notre choix, c'est un sur l'harmonisation et c'est un autre, pas en fin de
session... J'entendais le député de Viau... Ça, c'est de
verser dans la petite démagogie, de dire: Nous autres, on est plus fins
que vous autres parce qu'on le fait à moins vingt plutôt
qu'à 11 heures le soir. Mais, on le fait quand même en fin de
session, en décembre, quand on s'est traîné les savates -
je parle du gouvernement, bien sûr - quand le gouvernement n'a à
peu près rien fait comme planification des travaux. On n'avait rien
à faire, pendant des semaines et des semaines. Est-ce que le leader du
gouvernement aurait pu déposer ce projet de loi le 16 octobre?
Réponse: Oui. Est-ce qu'il l'a déposé en octobre?
Réponse: Non. Aurait-il pu le déposer en novembre, M. le
Président? Réponse: Oui. L'a-t-il fait? Non. À quand
a-t-il attendu pour le déposer? Après le conseil
général du Parti libéral, pour donner au moins la vision
que ces gens-là s'occupaient de la section des dépenses.
Avec la décision qui vient d'être rendue aujourd'hui, on a
un peu démasqué leur hypocri- sie. Faire accroire que les
députés sont très, très soucieux d'avoir des
projets de loi publics, mais déposés par un député,
alors que les ministres du gouvernement n'ont même pas le courage de
porter leurs culottes ou leurs pantalons parce que ça appartient, dans
un régime normal, aux membres du Conseil des ministres. Ça
appartient aux membres du Conseil des ministres d'être porteurs d'un
projet de loi à impact financier. Venir nous faire dire: On va
contrôler juste l'aspect des dépenses, donc ça n'a pas
d'impact financier, c'est un peu gros. C'était tellement gros que la
présidence l'a vu et elle a dit: Je ne peux pas accepter ça,
c'est trop gros. Il y a toujours un bout! Qu'est-ce que vous voulez que je vous
dise?
J'ai toujours pensé que, dans un bilan, il y avait un actif et un
passif. Donc, on ne peut pas s'occuper juste d'un bord et dire que le reste,
ça n'a pas d'importance. On a contrevenu à cette disposition
d'irresponsabilité qui s'appelle le désengagement de
l'Exécutif. Ils se désengagent. Les députés vont le
déposer. Ça donne l'image qu'on s'en occupe, mais on sait bien
que ça va mourir au feuilleton. Ça va mourir au feuilleton parce
qu'on sait qu'on va proroger cette session.
Mais revenons sur le salaire des députés et sur les
pensions. Est-ce qu'on serait pour l'harmonisation? Oui. Est-ce que le projet
de loi a un contenu abusif? En ce qui me concerne, réponse: Non. Ce
n'est pas compliqué, ces choses-là, et c'est franc. Est-ce que
moi, j'estime que la fonction de député est une fonction
distincte qui doit nécessairement conduire à des
évaluations différentes d'autres secteurs? La réponse,
c'est: Oui. Tout le monde l'a fait, toutes les études le prouvent, des
études qui ne sont pas contestées. M. Michel David, dans un
editorial qu'il a repris à deux reprises, a été
sérieux sur cette question-là, selon mon évaluation et
selon celle de plusieurs citoyens du Québec. Il a été
sérieux. "Oui, la plupart des députés au Québec
font du travail assez exigeant, ce qui fait que la moyenne - la moyenne,
personne ne met ça en cause - c'est 65, 70 heures-semaine." Bon, je vais
oublier ceux qui me parlent de 85 et 90 heures, 50 semaines par année.
Moi, j'ai des doutes. Ça fait 15 ans que je le fais, et je suis un de
ceux qui ne s'est pas ménagé. J'ai même payé pour
assez sévèrement, je paie encore un peu pour assez
sévèrement. Mais là, il ne faut pas tomber dans du
larmoiement chronique. À ce que je sache, il n'y a pas personne qui nous
oblige à être parlementaires, personne qui nous force et qui nous
attache sur nos banquettes: Vous êtes obligés de rester là
jour et nuit.
Par contre, est-ce que les députés donnent une prestation
professionnelle importante et significative? La réponse, c'est: Oui.
Est-ce qu'ils mettent beaucoup de temps les fins de semaine? Oui. Est-ce que
c'est une fonction qui est différente de celle de beaucoup d'autres,
où on ne peut pas regarder uniquement l'aspect rému-
nération en disant: Écoutez, c'est des gens qui sont
à 70 000 $ par année. Tout compte fait, c'est un bon salaire, ils
ont une sécurité d'emploi et ainsi de suite? Les réponses,
on les a toutes là-dessus, M. le Président, c'est: Non. C'a
été évalué par plusieurs professionnels. Il y a une
quantité de professionnels qui se sont penchés sur ces
questions-là, et ils ont tous convenu qu'il s'agissait d'une fonction
distincte, exigeante, où les heures de travail sont plus grandes,
où la question de l'employabilité par rapport à des
défaites, des fois où on fait pour, mais inconsciemment, ou des
fois des défaites inopportunes selon nous, inappropriées. Est-ce
que les parlementaires, règle générale, sur une base
historique, peuvent se replacer rapidement? La réponse, encore
là, on l'a étudiée, c'est non, sauf pour ceux qui exercent
des professions libérales. Est-ce qu'on veut réserver
exclusivement le droit de venir occuper une banquette ici à
l'Assemblée nationale à ceux qui détiennent, avant d'y
arriver, une profession libérale? Moi, ma réponse, c'est, non. Ma
réponse, c'est non. Il faut démocratiser l'accessibilité
pour s'assurer que les gens qui viennent représenter ici leur
électorat dans les circonscriptions correspondent à ceux et
celles que la population veut désigner. Et, règle
générale, si on n'occupe pas une profession libérale de
médecin, notaire et avocat... Et encore là, à ces
niveaux-là, ça présente des difficultés, mais pas
de même nature que pour d'autres types de professions.
Après avoir fait 12 ans, 13 ans, 14 ans ou 10 ans - parce qu'en
passant tout le monde le sait, contrairement encore là à ce qu'on
véhicule, la moyenne de longévité à
l'Assemblée nationale, ce n'est pas le Sénat, ce n'est pas le
Sénat canadien, ce n'est pas 30 ans, ce n'est pas 25 ans, ce n'est pas
40 ans. Ce n'est pas parce qu'on en a un à 35, 36 ans - qu'on
félicite d'ailleurs pour sa longévité - qu'on peut en
faire un cas d'espèce. La moyenne de longévité, c'est 6,3
années dans les 40 dernières années. Donc, c'est
inférieur à 7 ans, plus proche de 6 ans.
Alors, est-ce que la plupart des députés collent ici
à vie? La réponse, c'est non. Est-ce qu'ils peuvent disposer
d'une grande possibilité d'employabilité par après s'ils
n'occupaient pas au préalable des fonctions professionnelles ou dites
libérales? La réponse, c'est que ce n'est pas facile. Ce n'est
pas parce que la réponse n'est pas facile, c'est parce qu'on l'a, la
réponse. C'est difficle de se replacer après 10, 12 ans de vie
parlementaire.
Alors, ce n'est pas pour ces raisons-là, M. le Président,
qu'on a des problèmes. Je ne parlerai même pas d'hypocrisie, je
vais parler de faits. Les faits, c'est qu'il y a deux mesures dans le projet de
loi. Nous, on en veut une. On veut l'harmonisation. Moi, je suis en train de
vous donner des exemples pour dire: Est-ce que je serais gêné de
débattre ça, visière levée en commission
parlementaire et expliquer à la population un régime de pension
qui tiendrait compte davantage de la réalité de la fonction de
député à l'Assemblée nationale, compte tenu des
heures et compte tenu de la difficulté de l'employabilité? Ma
réponse, c'est: Non, je ne suis pas gêné de discuter de
ça. Est-ce que le projet de loi déposé, sur le fond,
m'apparaît gargantuesque? M'apparaît abusif? M'apparaît
traduire des appétits voraces? Ça va être clair, ma
réponse, c'est non. Non, ça ne m'apparaît pas traduire
ça. Ça ne traduit pas des appétits gargantuesques,
voraces, d'une gourmandise exagérée.
Mais ça m'apparaît être teinté d'un moment
d'inopportunité sans précédent. Quelqu'un m'a dit:
Ça ne sera jamais opportun. C'est vrai. Je suis d'accord. Mais
après qu'on dit ça, est-ce qu'il y a des moments où
ça serait un peu plus opportun quand il y a 1 000 000 de chômeurs,
qu'il y a 1 000 000 de personnes qui ont de la misère à arriver
parce que l'économie est sur le derrière et que la plupart des
régions sont complètement effoirées, témoignage
corroboré par celui qui vous boude depuis cinq ou six jours?
Qu'est-ce qu'il vous a dit comme gouvernement, nos répondeurs en
face? Il vous a dit: Écoutez, pour ce qui est du développement
régional, vous faites dur en étoile! C'est ça qu'il vous a
dit. C'est pour ça qu'il boude. Il dit: Les régions, ça
n'a pas de bon sens! Si on ne veut pas avoir l'air fou toute notre vie - c'est
le ministre de l'Agriculture et du développement régional qui
parle, ce n'est pas moi, là... Il dit: On ne peut pas continuer à
avoir l'air fou comme c'est le cas, là. Les régions s'effritent.
C'est ce qu'il a dit. Et là, demain, vous allez annoncer votre show pour
Montréal et il a dit: Ça n'a pas de bon sens que je n'aie rien
à annoncer pour les régions. Vous ne pouvez pas annoncer, faire
semblant quatre ans après que vous vous occupez de Montréal,
où il ne reste à peu près plus rien. Là, vous allez
annoncer un programme dans l'Est et vous allez avoir rien pour les
régions. Il a encore assez de sens politique, le ministre de
l'Agriculture, pour dire que ça n'a pas de bon sens. C'est ça,
essentiellement, la chicane. Nous autres aussi on sait lire après 15
ans. (17 h 50)
Mais la réalité, aujourd'hui, c'est que vous nous demandez
de faire abstraction de ça et vous dites à François
Gendron, député d'Abitibi-Ouest: Oui, tu vas retourner dans ton
comté pareil, même si les villes d'Amos et de La Sarre sont
presque, entre parenthèses, fermées, compte tenu de la reprise
qui ne reprend pas pantoute. Ne me parlez pas de reprise, il n'y en n'a pas, il
n'y a aucune reprise. Et janvier n'est pas passé, M. le
Président. Février n'est pas passé. Moi, je ne suis pas un
prophète de malheur, mais j'ai des indications de ce qui va se passer.
Ça va être loin d'être rose en janvier, février,
quand je vais voir plus de papier brun dans les magasins qu'il
n'y en a en dedans des magasins. C'est le cas présentement. Il y
a plus de papier brun dans les vitrines pour annoncer que c'est fermé,
qu'il n'y a plus de magasin, qu'il y en a à l'intérieur des
magasins. Là, on me dit: Ne t'occupe pas de ça; fais abstraction
de ça parce que ça ne sera jamais opportun, et donne-nous ton
accord pour une bonification de ton régime de retraite,
individuellement, parce que c'est ça que ça veut dire.
Moi, je ne peux pas faire ça, M. le Président. Je ne peux
pas faire ça, et ce n'est pas une question, je vous le jure,
d'opportunisme et de gêne. Je ne suis pas gêné de dire que
ce qui est prévu n'est pas excessif; c'est pour ça que je veux en
parler en commission parlementaire, et je veux en parler avec M...
l'ex-président de la Chambre. Les deux ex. Non, M. Goldbloom
n'était pas président, mais peu importe. J'ai un blanc, ça
va me revenir; un ancien député, président de la Chambre,
M. Guay, M. Goldbloom et M. Bac-cigalupo, qui ont fait un travail qui
m'apparart objectif, honnête, qui a été repris depuis, je
pense, 40 ans.
Oui, on va en discuter en commission parlementaire en février et
en mars et là, on regardera s'il y a un peu plus de signes de reprise,
un peu plus mordants, et je ne suis pas prêt à dire que ça
me prend ça, moi, en juin. Je n'ai jamais dit ça. Mais je dis au
moins: On dira à tout le monde qu'on n'a rien à cacher. Moi, je
voudrais avoir un projet de loi spécifique, parce que je suis en train
d'essayer de vous faire une petite preuve que la fonction de parlementaire est
plus exigeante, qu'elle doit être considérée davantage dans
la fonction connexe à la rémunération, qui est le plan de
pension, surtout qu'on s'est "clenches".
Est-ce qu'on a un plan de pension qui a de l'allure depuis qu'on l'a
littéralement détruit en 1982? La réponse, c'est non. On
n'a pas un plan de pension qui a de l'allure par comparaison avec d'autres
professions. Est-ce que j'étais d'accord, moi, avec le plan de pension
de 1976-1982? Réponse: Non. Est-ce que j'étais l'un de ceux qui
étaient d'accord pour modifier les avantages excessifs que je trouvais
dans l'ancien régime? Réponse: Oui. Est-ce qu'on a fait notre
travail comme il faut en 1982? Non. Pourquoi n'a-t-on pas fait notre travail
comme il faut? C'est parce que, dans une période de récession, on
a voulu - je le dis comme je le pense - trop donner l'exemple. Ça n'a
rien donné sur le plan politique - ça, il n'y a pas de cachette -
on a été jugés comme des pourris, comme si on
s'était empli les poches, alors que je me rappelle - et ça ne me
gêne jamais de parler de ça parce que ce sont des faits; j'aime
les faits - en 1981: augmentation de la masse salariale: 9 %; les
députés: 0 %, on était gelés; en 1982: augmentation
des députés: zéro, on était gelés.
Moi, je siégeais au Conseil du trésor, M. le
Président. Je me rappelle le 10 juin 1982, je m'en souviendrai toute ma
vie. Globalement, la masse salariale pour l'ensemble de la fonction publique et
parapublique, une augmentation de 11,7 %, qu'on a prise en pleine
récession; on l'a prise, on l'a encaissée. Là, on a dit:
C'est notre monde, on va leur parler, on va leur dire: Remettez-nous ça,
c'était fou braque! Ce n'est pas logique de penser qu'après avoir
donné une augmentation à du monde, de discuter avec eux autres et
de dire: Remettez-nous ça. Donc, évidemment, ça ne s'est
pas passé de même. Là, il est arrivé tout ce que
vous savez, dont ça ne me fait rien de parler. Mais la
réalité, c'est que le temps qu'on était gelés, nous
autres, en 1981 et en 1982 et qu'on avait zéro, il y a une... Quand je
dis ça, ce n'est pas pour me lamenter, ' c'est pour parler de faits
précis. Est-ce qu'on a abusé de ces questions-là ici,
comme parlementaires? La réponse, c'est non. Bien justement, c'est parce
que je veux que ça reste comme ça.
J'aurais aujourd'hui, sincèrement, en conscience, l'impression
d'abuser si je disais: Je ne fais pas la distinction entre la bonification et
l'harmonisation, et je m'arrangerai après pour l'expliquer. Je ne veux
pas. Je ne veux faire qu'une chose aujourd'hui, je veux juste harmoniser le
régime de retraite, parce que le projet de loi fédéral,
effectivement, a créé l'obligation d'harmoniser les choses. Et on
verra pour plus tard. C'est pour ça, M. le Président,
qu'essentiellement aujourd'hui nous avons acquis la conviction que ce n'est pas
opportun, que ce n'est pas le moment. Il faut faire ça à part,
séparément, et on ne le fera pas avant Noël. Je n'en veux
pas de cadeau de Noël de cette nature-là. C'"est-y" clair? Je ne
veux pas de cadeaux de Noël de cette nature-là à ce
moment-là. Et je verrai plus tard, parce que je ne suis pas prêt
à dire que si ça ne reprend pas. j'en veux un aussi.
Moi, M. le Président, si, en mai et en juin 1992,
l'économie est aussi malade qu'elle l'est actuellement et que j'ai la
moitié de mes gens qui ne peuvent pas travailler, je veux marcher la
tête haute dans mon coin, et je vais dire que ce n'est pas parce que la
hausse qu'ils recommandaient était injustifiée, mais parce que je
ne pouvais pas la prendre, en conscience. C'est pour tous ces motifs-là
que je me voie dans l'obligation, comme leader adjoint, de dire:
Écoutez, on ne peut discuter comme ça. Il faut poser des gestes
concrets parce qu'on est conscients du geste qu'on doit poser.
Motion de report
Puis le geste que je dois poser, M. le Président, c'est la motion
de report suivante: "Que la motion en discussion soit modifiée en
retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant à la fin les mots "dans
six mois", ce qui s'appelle communément une motion de report.
Ce n'est pas pour perdre mon temps C'est
pour dire: Si, au moins vous acceptiez de reporter l'étude du
projet de loi puis en faire un projet de loi scindé - le leader peut
toujours faire ça - il aurait notre consentement demain matin. Donc,
j'ai déposé la motion de report.
Ma conclusion, c'est uniquement parce qu'il ne nous apparaît pas
opportun, même si les motifs, le moment opportun, il n'y en a quasiment
jamais, là, moi, j'espère qu'il y aura un peu plus
d'opportunités un peu plus tard. L'économie étant un tant
soit peu reprise et à tout le moins - et c'est ma conclusion - avoir au
moins la garantie que si on a à en débattre, on ne
débattra que de ça et ça ne sera pas deux jours - oui, je
conclus - avant de partir pour la fin de session.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, cette motion de
report est recevable. Je vais suspendre les travaux de cette Assemblée
pour une rencontre entre les deux leaders. Oui.
M. Pagé: Je crois qu'on n'a pas besoin de
conférence des leaders. La pratique a toujours voulu, dans le cadre des
motions de report, que le partage du temps pour le débat sur la motion
se faisait d'une certaine façon, à savoir un débat
limité de deux heures, ça va de soi... 10 minutes sont
accordées au groupe des députés indépendants, ce
qui n'enrichit pas les autres formations politiques, si le temps n'est pas
requis, n'est pas assumé c'est-à-dire. Le reste du temps est
partagé également entre le parti ministériel et celui de
l'Opposition, et la durée d'intervention d'un ministre au nom du
gouvernement est de 30 minutes et celle d'un député de
l'Opposition officielle est de 30 minutes.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, en vertu de
l'article 210, oui, je vais vous entendre, M. le député
Westmount.
M. Holden: Le leader a mentionné les indépendants.
J'aimerais savoir combien de temps que les indépendants vont avoir.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je tiens à
vous dire que lorsqu'il y a un débat restreint, c'est le
président qui répartit le temps, suite à une
conférence des leaders. Mais s'il y a consentement, il n'y a pas de
problème. C'est le président qui le répartit suite
à une rencontre avec les leaders, mais si l'Assemblée nationale a
un consentement sur le temps de parole réparti, je n'ai aucune
objection.
M. Pagé: Je vous écoute et je crois qu'il y a
consentement dans cette Chambre. Il y a consentement. Le leader parlementaire
adjoint de l'Opposition et moi, on s'entend sur le fait d'un partage du temps:
50-50 entre le groupe ministériel et le groupe de l'Opposition et 10
minutes aux députés indépendants. Je n'ai pas
indiqué si c'était au pluriel ou au singulier, là. Les
députés indépendants dans cette Chambre m'indiquent qu'ils
seraient satisfaits de 10 minutes. Alors, vous le prendrez.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a
consentement?
Des voix: Consentement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. Alors, la
présidence, suite à un consentement, répartit le temps de
ce débat restreint à 50 minutes au groupe ministériel et
50 minutes au groupe de l'Opposition officielle, avec 10 minutes à
l'auteur de la motion en droit de réplique et 10 minutes
également aux députés indépendants. Alors, je suis
prêt à entendre l'auteur de la motion.
M. Gendron: M. le Président, puisque je viens de... J'ai
10 minutes comme auteur de la motion. C'est bien ça?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non. Vous avez 30
minutes. Ou ça peut-être un autre intervenant aussi. Alors, vous
ne pouvez pas intervenir.
M. Pagé: M. le Président, je crois que tous les
motifs invoqués au soutien de sa motion, le député a eu
l'occasion de les faire valoir. Donc, il n'y a absolument rien qui l'oblige
à prendre tout le temps qui lui est alloué.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): D'ailleurs, vous ne
pouvez pas... Juste un instant. Alors, l'auteur d'une motion de report n'a pas
droit de parole lors du débat restreint auquel donne lieu cette motion.
Ça a été jugé à plusieurs reprises,
ça, en particulier par la présidence ici. Alors, je cède
la parole à Mme la députée de Chicoutimi. Mme la
députée.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Sur la motion de
report touchant le projet de loi 404, Loi modifiant la Loi sur les conditions
de travail et le régime de pension des membres de l'Assemblée
nationale et d'autres dispositions législatives. (18 heures)
Au moment où le leader du gouvernement déposait ce projet
de loi, il a longuement commenté les modifications proposées au
régime de pension des députés membres de
l'Assemblée nationale du Québec. Les raisons qui ont
été invoquées par le leader du gouvernement peuvent
être raisonnables, nous n'en disconvenons pas. Mais aujourd'hui, le 16
décembre 1991, cette loi
est inopportune, inacceptable, voire indécente, indécente
alors que tant de gens se demandent comment ils vont se procurer le pain
quotidien. Il me semble plutôt douteux de commencer à
s'inquiéter si on va mettre du beurre sur le nôtre alors que nous
serons retraités, M. le Président.
M. le Président, indécent parce que le gouvernement fait
montre d'une insensibilité choquante, voire méprisante à
l'endroit de centaines de milliers de familles québécoises qui,
à la veille des fêtes, souffrent de ne pouvoir offrir aux leurs
les douceurs qu'on voudrait bien leur donner à cette période-ci
de l'année. Inacceptable, un gouvernement qui fait montre d'une
insensibilité, je le rappelle, choquante et méprisante, alors que
la récession frappe de plein front des dizaines et des dizaines de
milliers de travailleurs et de travailleuses. Au Saguenay-Lac-Saint-Jean, dans
ma région, selon les dernières données du ministère
de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, c'est 5000
travailleurs et travailleuses qui ont perdu leur emploi dans des secteurs
manufacturiers majoritairement, des emplois bien
rémunérés, M. le Président. C'est 5,6 % de plus de
chômage que l'an passé. Le chômage actuel est de 13,8 %,
mais ça ne prend pas en compte une diminution de ce qu'on appelle le
taux d'activité. Si on ajoute le taux d'activité qui est
diminué de 2,3 %, on atteint un chômage qui dépasse les 17
%, et ça ne prend pas en compte, évidemment, les assistés
sociaux.
M. le Président, c'est Abitibi Price qui a mis des personnes
dehors par centaines et par centaines. C'est l'Alcan. C'est Provigo qui
s'apprête à faire, pour fins de rationalisation, des mises
à pied chez nous, M. le Président. Dans l'ensemble du
Québec, c'est 41 000 travailleurs et travailleuses qui ont perdu leur
emploi au cours de la dernière année. Ces emplois ont
été remplacés par des emplois précaires. Est-ce
qu'il faut rappeler les chiffres? À temps partiel, on a 17 000 hommes de
plus qui travaillent à temps partiel que l'an passé à la
même date et 8000 femmes. Le temps partiel, l'emploi précaire
affecte profondément les hommes, les femmes, mais les jeunes, les jeunes
de 15 à 24 ans, 11,3 % de plus de travailleurs à temps partiel
dans cette coupe d'âge, M. le Président.
Inopportun parce que ce gouvernement, M. le Président, a
décrété un gel des salaires dans la fonction publique et,
n'eût été des pressions de l'Opposition, il aurait aussi
accepté le gel des salaires pour les employés municipaux.
Inopportun parce qu'il y a des travailleurs et des travailleuses dans les
entreprises privées, aujourd'hui, qui ont accepté de
réduire, de geler leur salaire. Dans certains cas, de les
réduire, dans d'autres cas, de travailler à temps partagé
pour maintenir l'entreprise à flot, M. le Président.
M. le Président, inopportun, alors que les contribuables, jour
après jour, voient leur pouvoir d'achat diminué de façon
dramatique par l'effet conjugé des taxes, des tarifications et des
impôts. Inopportun, M. le Président, parce que les familles
québécoises bouclent de plus en plus difficilement les fins de
mois. Les familles avec enfants, en particulier, ces familles qui souffrent
comme toutes les autres d'une augmentation des taxes scolaires, d'une
augmentation des taxes municipales, des tarifications, permis de conduire,
immatriculation des voitures, des droits de scolarité. La TVQ et la TPS
qui affectent particulièrement ces familles, je le rappelle. Quand on
paie de la taxe sur les couches de bébé, sur les tétines,
sur les biberons, sur les vêtements d'enfant, sur les bottines, sur les
fournitures scolaires, M. le Président, les réfrigérateurs
et les meubles, ça affecte lourdement le budget des familles. Quand, en
plus, les droits de scolarité continuent d'augmenter au-delà ou
au rythme de l'inflation alors que les salaires sont gelés, M. le
Président, tout ça affecte lourdement la capacité des
familles d'offrir aux leurs le minimum. Inopportun, pour ne pas dire
indécent. Il s'est manifesté, selon nous, une
insensibilité choquante à l'endroit de ceux et celles qui ont
perdu leur emploi et qui travaillent dans des emplois précaires au
moment où on se parle.
Les députés méritent un fonds de pension meilleur,
je n'en disconviens pas. Je dis qu'il n'est pas le temps, quand il y a autant
de personnes qui souffrent d'insécurité, de s'inquiéter de
la nôtre quand nous serons à la retraite, M. le Président.
Parce que, oui, les députés ont des fonctions exigeantes, oui,
les députés travaillent de longues heures, oui, les
députés vivent l'insécurité au moment où ils
décident de sortir de la politique ou encore quand on décide
qu'ils en sortent. Mais, M. le Président, les Québécois et
les Québécoises également méritent, ils ont droit
à un emploi décent, ils ont droit aussi à des fonds de
pension honnêtes. Mais ces personnes ne peuvent pas, comme nous le
faisons, nous, par le biais d'une législation, s'assurer d'un emploi
demain matin, ou d'un fonds de pension honnête, M. le Président.
Malheureusement, ces travailleurs et ces travailleuses, ces familles qui vivent
la précarité ne peuvent pas régler leur situation en
adoptant un projet de loi en Chambre. Il me semble indécent,
inacceptable aujourd'hui, dans les circonstances économiques actuelles,
de se demander, comme députés, je le rappelle, comment on pourra
ajouter un peu de beurre sur notre pain alors qu'il y en a qui se demandent
comment ils vont pouvoir se procurer du pain.
M. le Président, j'ai été, comme d'autres
députés, affectée par l'absence d'harmonisation entre le
programme d'impôt fédéral et provincial. J'avais
contribué le maximum, 7500 $, deux années, 15 000 $; j'ai
dû, comme beaucoup d'autres, le retirer, payer rétroactivement de
l'impôt là-dessus, M. le Président. J'ai trouvé
ça
désagréable et détestable. Je n'en disconviens pas
parce que c'est long, les procédures sont longues, puis quand, le
moindrement, vous avez placé ça à trois, quatre places, on
n'en finit plus. Cependant, j'estime que mon problème est mineur au
regard de ceux et celles qui, quotidiennement, s'inquiètent de savoir
comment offrir le nécessaire à leur famille, M. le
Président.
Je ne dis pas que ce n'est pas souhaitable. Je dis que c'est inopportun.
Je souhaite, comme la plupart des députés, pour ne pas dire la
totalité des députés ici, une harmonisation qui nous
permettrait de ne pas recommencer ce que nous avons subi pour les années
d'imposition 1989-1990, M. le Président. Mais l'harmonisation, ça
n'est pas la bonification. L'harmonisation, c'est simplement nous permettre de
s'harmoniser avec le programme canadien, M. le Président. Je pense qu'il
est inopportun, au moment où nous nous parlons aujourd'hui, dans la
conjoncture économique actuelle, d'améliorer le fonds de pension
des députés de l'Assemblée nationale. Non pas parce qu'on
ne le mérite pas. Ça ne me gêne pas de le dire. Je pense
qu'effectivement il y a, dans plusieurs autres secteurs d'activité, des
fonds de pension qui sont beaucoup plus généreux pour des
fonctions beaucoup moins exigeantes. Mais ce n'est pas là la question.
La question, c'est qu'il n'est pas opportun, au moment où on se parle,
dans la conjoncture économique actuelle, de commencer à demander
et à expliquer à nos concitoyens et à nos concitoyennes
pourquoi nous accepterions, nous, d'améliorer notre fonds de pension
alors qu'il y a tant de travailleurs et de travailleuses qui ne peuvent
s'offrir de fonds de pension parce qu'ils sont sans emploi.
Alors voilà, M. le Président, pourquoi je m'oppose
à ce que ce projet de loi soit adopté, discuté à ce
moment ici, et j'endosse la motion de report déposée par le
député d'Abitibi-Ouest. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Chicoutimi. Sur cette même motion, je reconnais
M. le député de Shefford.
M. Roger Paré
M. Paré: Merci, M. le Président. Eh bien, tout
comme ma collègue de Chicoutimi, moi aussi, je veux intervenir quelques
minutes sur la motion de mon collègue qui veut que l'on reporte à
six mois la discussion que nous sommes en train de faire ici, et je suis tout
à fait d'accord avec cette motion. Je vais vous dire, il s'agit de
regarder la séquence des événements, M. le
Président, de regarder la réalité des choses aussi pour
s'apercevoir qu'à voir les discussions que nous avons maintenant ici,
dans cette Assemblée, c'est irrespectueux et c'est indécent par
rapport aux citoyens du Québec, par rapport à la situation
économique que nous traversons.
Je vais commencer par parler, pas nécessairement de l'historique
mais de la démarche, plutôt, qui nous amène ici. Est-ce
qu'il y a urgence à discuter ici, ce soir, de l'augmentation des
pensions des députés? Et je parle bien d'augmentation, parce que
de l'autre côté, en parlant d'harmonisation avec une loi
fédérale - donc, encore une fois, on est contraints par des
décisions prises ailleurs de venir légiférer ici pour
faire des corrections - on utilise le discours de l'harmonisation pour amener
une bonification. Et une bonification, ça veut dire une augmentation au
bénéfice des députés, dans leur pension, dans leur
régime de pension. L'harmonisation, ça n'a pas été
décidé, il y a quelques heures ou il y a quelques jours, par
Ottawa. C'est connu depuis plusieurs mois. De l'autre côté, il
aurait été possible d'amener ce sujet bien avant qu'on ait le
temps d'en discuter et de légiférer d'une façon
honnête pour les citoyens, c'est-à-dire en prenant tout le temps
nécessaire. En ayant le temps non seulement d'en parler ici tous et
chacun pendant 20 minutes, mais d'en discuter dans nos comtés avec les
citoyens pour leur expliquer le fond, pour voir s'ils sont d'accord, et si on
n'est pas capables de les convaincre, bien, on en subira les
conséquences si on décide de voter pour. (18 h 10)
Mais au moins qu'on ait l'occasion, l'opportunité et le temps
d'en discuter. Donc, de l'autre côté, depuis des mois et des mois,
on connaît cette obligation qui nous est faite par le gouvernement
fédéral de venir harmoniser le régime de retraite des
députés. Pourtant, on n'en a pas parlé au mois d'octobre.
Pourtant, on n'en a pas parlé au mois de novembre et, selon le
règlement de l'Assemblée nationale, on avait jusqu'au 15 novembre
pour déposer le projet de loi 404, pour qu'il puisse être
voté selon les normes, avec les délais normaux, les délais
qui respectent la population pour qu'eux aussi aient le temps de le voir et de
nous passer leurs commentaires. pourtant, le 15 novembre, le projet de loi 404
n'était toujours pas déposé à l'assemblée
nationale. non, on a attendu au mois de décembre pour le déposer,
en espérant le passer à la vapeur, à la cachette. et
ça, ce n'est pas une façon de respecter les citoyens. ce n'est
pas une façon de légiférer. donc, on l'a
déposé en décembre seulement et là, on veut en
discuter.
Ça veut dire qu'il y a des gens qui, dans leur salon, doivent se
demander comment ça se fait. Comment ça se fait qu'on discute de
l'augmentation des pensions des députés quand nous sommes en
pleine crise économique? Quand on parle de fermeture d'usines, le seul
discours qu'on entend de l'autre côté, c'est des coupures:
coupures de budgets, coupures de services et augmentations de taxes et
d'impôts pour les citoyens, parce qu'on dit que le gouvernement n'arrive
plus.
Puis nous autres, on est ici en train de parler de nos augmentations de
pension. Ça, c'est être complètement
déconnecté de la réalité. Ce n'est pas opportun de
discuter de ça présentement. C'est ça qu'on essaie de vous
faire comprendre. Ce n'est pas le temps. C'est indécent et c'est
inacceptable. On pourra en reparler peut-être quand ça ira mieux.
Si c'est vrai que le fameux plan de relance dont vous parlez, ça va
ramener l'économie, la prospérité, si vous
réussissez, vous ramènerez le projet de loi et on en discutera.
Mais pour le moment, est-ce que c'a du bon sens? Soyez un peu réalistes.
Vous en reparlerez à vos concitoyens en fin de semaine dans vos
comtés. Vous allez voir ce qu'ils vont vous dire.
Est-ce qu'on peut discuter présentement d'augmentations pour nous
quand ça ne tient pas pour aucun autre citoyen au Québec?
Regardez les nouvelles. De quoi parie-t-on, à part des fermetures? On
demande aux citoyens qui sont syndiqués dans des usines d'accepter des
gels de leurs salaires, d'accepter des gels et des prolongations de convention
collective et, dans bien des cas, des conventions collectives à la
baisse parce que l'économie est malade. À l'Assemblée
nationale, je suis en train de me demander si c'est l'économie qui est
malade ou si c'est le gouvernement, pour nous amener un projet de loi aussi
inopportun à ce moment-ci.
Mais on l'a amené en retard pour qu'on le passe à la
vapeur. Voyant que l'Opposition était contre, le gouvernement a
décidé de le reporter au printemps. Il y aura commission
parlementaire pour permettre d'entendre des gens et d'en discuter au mois de
janvier. S'il pouvait y avoir discussion publique, si on était pour
recevoir des gens spécialistes en la matière, en janvier, donc
elle ne sera pas votée, de toute façon, en décembre.
Pourquoi y a-t-il urgence qu'on en parle maintenant? On en parlera au mois de
mars, lorsqu'on reviendra à la session, et que, nous aussi, on aura eu
l'occasion, le privilège d'entendre les spécialistes. On aura une
discussion, nous aussi, basée sur la connaissance totale du dossier. On
n'est pas obligés d'en parler maintenant. Mettons ça de
côté. De toute façon, elle ne sera pas votée avant
le mois de mars. Le plus tôt où c'est possible qu'elle soit
votée, c'est au mois de mars. C'est quoi l'urgence d'en parler
maintenant? Soyons corrects avec nos concitoyens et nos concitoyennes.
Reportons ça lorsque, nous aussi, on aura eu l'occasion d'avoir tout
l'éclairage et toutes les informations, suite à la commission qui
se tiendra au mois de janvier 1992. On ramènera le débat ensuite
sur le principe, au mois de mars.
On nous dit, de l'autre côté: Oui, mais c'est le
fédéral qui nous oblige, c'est l'harmonisation avec la nouvelle
politique fédérale. De toute façon, la loi va être
votée en mars, elle sera rétroactive. Elle va être
rétroactive, donc, on pourra se conformer à la loi
fédérale et, à ce moment-là, tout sera dans l'ordre
des choses. Mais le débat aussi doit se faire au moment opportun. Ce
n'est pas le temps maintenant, ce n'est absolument pas le temps, et ce n'est
pas correct, comme je le disais tantôt. C'est indécent, ce n'est
pas le moment.
Il y a bien d'autres sujets qui pressent plus que ça. Le vrai
sujet, présentement, c'est la reprise économique, c'est le
développement économique. Ce qu'on attend de l'autre
côté, ce sont des politiques de développement
économique, ce sont des programmes d'aide à nos entreprises, ce
sont des programmes pour la formation professionnelle, la préparation de
nos jeunes aux nouvelles technologies. Ce qui presse, de l'autre
côté, aussi, c'est qu'enfin on se préoccupe de la
pauvreté, pour la combattre. Est-ce qu'on a quelque chose à
proposer à ceux qui ont de la difficulté à se nourrir?
Est-ce qu'on ne serait pas censé être en train de discuter de la
situation pénible de centaines de milliers de citoyens qui ont de la
difficulté à se nourrir et à se vêtir, des gens qui
ne sont pas capables de rencontrer leurs paiements? Pourtant, à ces
gens-là, on leur dit quoi? Écoutez, il faut vivre selon nos
moyens. Le gouvernement n'est plus capable, on n'a pas de ressources
disponibles. On a de moins en moins de ressources parce qu'il y a de moins en
moins de gens qui travaillent, donc, ils paient moins d'impôts. On n'a
pas les moyens de vous en donner plus. Ceux qui ont de la difficulté
présentement, le gouvernement vous dit: On n'a pas les moyens de vous
aider, on est cassé. Mais, entre nous, ici, en décembre, le soir,
on a les moyens de se dire: Si on augmentait nos pensions. On devrait
être suffisamment préoccupés, présentement, de
l'autre côté, de la situation pénible des plus pauvres pour
ne pas penser à notre retraite, pour ne pas penser à autre chose
qu'à aider nos concitoyens. De toute façon, qu'est-ce qu'il y a
qui presse? Ce n'est pas l'harmonisation, je l'ai dit tantôt. Ça
va être voté au mois de mars au plus tôt, et peut-être
plus tard, ce sera rétroactif. Est-ce qu'il y a urgence? Est-ce que vous
anticipez des élections précipitées? Les sondages vous
inquiètent et vous voulez penser à vous protéger? Si ce
n'est pas ça, c'est quoi, l'urgence? C'est quoi, l'urgence? Il n'y en a
pas, d'urgence.
Des voix:...
M. Paré: De l'autre côté, vous n'avez pas
besoin de crier. Ce que je dis, c'est la réalité. Ça peut
bien faire mal, mais c'est la réalité. Il n'y a pas d'urgence
à penser à nos pensions. Préoccupons-nous d'aider les
citoyens et arrêtons le beau discours de dire... Vous l'utilisez tous,
peu importe où vous vous trouvez, de l'autre côté. Soit les
demandes pour les jeunes, soit les demandes pour les personnes
âgées, soit pour les demandes des maisons de femmes, soit
même pour les demandes pour le développement économi-
que - écoutez, on voudrait bien, mais on n'a pas les moyens,
présentement. On entend ça tellement souvent. Il faut maintenant
penser à faire du développement selon nos moyens.
Moi, je vous dis: Selon nos moyens, présentement, ce n'est pas le
temps qu'on discute de ça, ce n'est pas opportun, on ne peut pas avoir
deux discours. C'est pour ça que je suis d'accord avec la motion de
report. Reportons ça en espérant - je le souhaite comme vous
tous, de tout coeur - que la situation économique va se replacer et
qu'on pourra dire oui aux demandes des plus pauvres de la
société, et qu'on pourra se dire oui, peut-être, nous
aussi, si on est capables de le justifier, mais quand on aura eu une bonne
discussion, quand on aura écouté, nous aussi, comme tout le
monde, la commission parlementaire qui va avoir lieu en janvier et qui va nous
permettre d'en discuter en même temps que tout le monde, avec des
spécialistes. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je reconnais
maintenant M. le député de Westmount. (18 h 20)
M. Richard B. Holden
M. Holden: Merci, M. le Président. Mr. Speaker, there is
never a good time for talking about parliamentarians' pensions, and there is no
point in putting this off any longer. We have to decide now and we have to
decide after looking at the facts. And I refer you, Mr. Speaker, to an
editorial in the Montréal Gazette. They say, about editorialists,
that they are the ones who come in after the battle and shoot the wounded. In
the case of this editorial, they have not got a clue about what parliamentary
life is all about. I must immediately declare my conflict of interest, because
the age chosen for the pension under the new scheme is 60, and I am 60. So,
that is my initial conflict of interest, but I will tell you this, Mr. Speaker,
that most political people in this Chamber and those who run for election do
not do it out of an anticipation of some kind of a large pension. I find it
ludicrous that, at my age, having been elected and having given up a lucrative
law practice and, perhaps, in the face of a defeat in the next election, that I
should be deprived of what little pension is being offered to me because we are
not as important, the political people in this life are not as important as,
for instance, the executives of large corporations or the various people that
are having pensions far larger that the ones that are being offered in the
present package.
And when I see that the editorial says "The Government has to be without
shame and it should be scrapped immediately, and that politicians do not
deserve a pension", I asked the journalists who write these editorials, and the
Gazette does not even have the courage to sign their editorial, so I do
not know who wrote this editorial, but I do know that he or she could not get
elected dogcatcher, and a lot of people who write about pensions for
politicians do not seem to realize that in the first place, you have to get
elected and in the second place, you have to go back and get your job
reconfirmed every three or four years. Nothing is automatic in this world,
including reelection. And I am sure that everybody in this House knows that
better than I do. but to me, the ludicrous situation is that people look down
on politicians these days. i consider political life to be as good a
"métier" as being a lawyer - lawyers are not highly considered either -
that it is an honorable profession, and it should be remunerated in accordance
with the work that is done. the house leader described the immense numbers of
hours that are spent by political people in this work and i think that the
modest amounts that are being mentioned in the new bill are only justifiable
and completely understandable if you understand that people are giving up much
larger revenues in a great number of cases and that they are giving up,
perhaps, advancement in their business careers.
All I can say to you, Mr. Speaker, is that I think this thing should be
done once and for all. There is no good time for talking about pensions. There
is no good time for talking about increasing salaries. I know the House of
Commons puts it into the hands of a committee of outsiders who then recommend
in the House... It looks as though they are not being as greedy as if it is
done in House. But what I say to you, Mr. Speaker, is that this is a reasonable
bill. It has been studied by a committee under Dr. Goldbloom. It is even less
than what Dr. Gold-bloom's committee decided to endorse.
I submit to you, Mr. Speaker, that this motion should be defeated. This
bill should be adopted and we should go on to much more important things like
the economy of the country. Thank you, Mr. Speaker.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Westmount. Sur cette motion de report, M. le
député de La Prairie.
M. Denis Lazure
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je voudrais dire
quelques mots pour appuyer la motion de mon collègue d'Abitibi-Ouest qui
nous propose de reporter au mois de mars cette motion. On dit souvent que le
pouvoir isole. Eh bien, ce que le gouvernement nous propose aujourd'hui est
tout à fait symbolique et tout à fait typique de cet adage. Il
faut qu'un gouvernement soit isolé, soit complètement hors de
contact avec la réalité pour venir proposer une bonification du
régime de rente des députés.
Moi, je suis d'accord avec le député de Westmount, que les
députés méritent le salaire qu'ils ont actuellement,
qu'ils méritent la pension qu'ils ont actuellement et probablement
qu'ils mériteraient, de par leur travail considérable, les
augmentations qui sont proposées. Mais ce n'est pas le temps, il faut
leur dire bien haut et bien fort. Je pense qu'il faut être
complètement dissocié de la réalité pour venir
proposer cela à l'occasion d'une loi qui était nécessaire
pour harmoniser avec la législation fédérale. Ce n'est pas
le temps de venir bonifier ce plan-là, ce plan de pension des
députés. Si on veut le faire, on le fera dans six mois, au
printemps, à condition que la récession soit moins grave qu'elle
ne l'est aujourd'hui, à condition que cesse la pluie de pertes
d'emplois.
Dans le comté de La Prairie, il y a deux semaines: 400 emplois.
Consumers Glass, qui a annoncé la fermeture pour le mois de mars. Les
employés de Pétromont qui se font demander, il y a quelques
jours: Acceptez donc de diminuer votre salaire de 10 %, de 15 %, si vous voulez
que l'entreprise soit maintenue en vie. C'est comme ça chaque semaine.
Comment un gouvernement peut-il avoir le culot de venir proposer, quelques
jours avant Noël, un peu comme un cadeau de Noël, une augmentation du
plan de pension des députés.
Je suis d'accord avec le député de Westmount que The
Gazette est complètement dans l'erreur quand il est dit que les
députés ne méritent pas leur plan de pension. Les
députés le méritent largement. Il n'y a aucune honte
à ce qu'il y ait un ajustement, un jour, quand les conditions
économiques seront meilleures, M. le Président. Chaque semaine,
le gouvernement nous dit: Ce n'est pas possible de continuer tel ou tel
programme, il faut geler ces subventions-là.
M. le Président, vous savez que, depuis 1985, les subventions aux
associations de personnes handicapées ont été
gelées. Je vois le ministre responsable de l'Office ici. Il va me dire
que là, ça vient d'être dégelé. Il y a une
étude qui va amener un nouveau mode de financement, mais c'était
comme ça un peu partout. Les groupes de bénévoles en
environnement, leurs subventions ont été gelées de 1985
à 1991. On va enfin les augmenter un tout petit peu.
M. le Président, le taux de chômage augmente dans toutes
les régions du Québec. La fermeture d'usines - grandes, petites,
moyennes - nous est annoncée, semaine après semaine. Ici,
à l'Assemblée nationale, dans un geste complètement
irrationnel, on va venir profiter d'une loi qui était nécessaire
pour harmoniser avec la loi fédérale, on va venir profiter de
cette circonstance pour bonifier le régime de pension. C'est
inacceptable, c'est inacceptable!
La motion de mon collègue d'Abitibi-Ouest est tout à fait
raisonnable. Reportons au mois de mars et on verra. Si la conjoncture
économique n'est pas meilleure, ce sera reporté à plus
tard.
M. le Président, le même ministre de la Santé et des
Services sociaux qui s'apprête à parler tantôt, il y a
quelque temps nous disait: On va imposer un impôt-services. Je le vois
qui commence à grommeler. Je m'attends à essuyer ses foudres tout
à l'heure, même à avoir des menaces comme il m'en a
déjà faites en Chambre. Il n'a jamais eu le courage de les faire
en tête-â-tête cependant. Mais le ministre de la Santé
et des Services sociaux nous annonce qu'il va revenir avec des
impôts-services. On a demandé pour les sidéens que...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député, je dois vous interrompre. Il est 18 h 30, et je dois
suspendre les travaux de cette Assemblée à 20 heures.
Consentement. M. le député, si vous voulez poursuivre.
M. Lazure: J'allais conclure en disant: Ce n'est pas à une
période où on nous demande de se serrer la ceinture chez les gens
les plus démunis qu'on va venir profiter d'une occasion pour augmenter
les plans de pension des députés. C'est mal venu, et il faut
reporter ce projet de loi à plus tard. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. M. le
député de La Prairie. Alors, les travaux de cette
Assemblée, compte tenu de l'heure, sont suspendus jusqu'à 20
heures.
(Suspension de la séance à 18 h 30)
(Reprise à 20 h 10)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre
place. Alors, nous en sommes à la motion de report du
député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition
officielle. C'est une question... M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, sur une question de
directive. Je sais qu'il y a toutes sortes d'interprétations du
règlement qui circulent. Étant donné qu'il n'y a pas eu de
conférence des leaders avant, que c'a été, comme on le dit
en bon québécois, sur la gueule à l'Assemblée
nationale, ce que je voudrais vous demander, c'est ceci. Le temps a
été divisé. La seule entente, si je l'ai bien comprise,
c'est 10 minutes pour les indépendants et 50-50 pour les partis du
gouvernement et de l'Opposition, et le temps non pris s'accumule pour l'autre
si jamais il n'est pas pris. Est-ce que j'ai bien compris?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, voici. C'est 10
minutes pour les députés indépendants, dont 5 minutes ont
déjà été prises.
Une voix:...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non, non. Vous n'avez
pas de consentement pour le moment. Si vous avez besoin d'un consentement, on
va vous en parler.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je m'excuse. Alors, le
parti de l'Opposition officielle a pris 25 minutes; il leur reste 30 minutes
sur 55. Le parti ministériel a 55 minutes et, selon l'entente, selon le
consentement, si le parti ministériel n'utilise pas les 55 minutes, les
minutes non utilisées vont s'accroître à l'Opposition
officielle. Alors, le temps s'accroît, vu qu'il n'a pas été
prévu de façon spécifique que le temps ne
s'accroîtrait pas. Très bien. Alors, je suis prêt à
reconnaître le prochain intervenant sur cette motion de report, M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: Merci, M. le Président. Nous avons
étudié, parmi les députés de l'Opposition, d'abord,
l'opportunité de déposer un projet de loi, suite à une
étude qui avait été réalisée par un
comité indépendant. C'est le premier élément de
réponse auquel nous avons cherché à fournir des
éléments pour nous positionner quant à
l'opportunité, d'abord, que les députés de
l'Assemblée nationale puissent se requestionner, analyser et en arriver
possiblement à des conclusions différentes, compte tenu des
éléments qui étaient contenus dans le rapport des experts
qui avaient examiné ce et ces régimes de retraite pour les
députés de l'Assemblée nationale et, éventuellement
donc, en arriver à certaines modifications.
Je vous avoue que je me serais senti un peu coupable, M. le
Président, si, aujourd'hui, comme représentant de la population
d'une région comme l'Abitibi-Témiscamingue, je ne m'étais
pas levé pour donner au moins ma vision des choses quant à
l'opportunité de procéder au niveau du principe même de la
loi 404 qui vise d'abord à harmoniser le régime de retraite des
députés de l'Assemblée nationale des trois
côtés de la Chambre, lorsqu'on compte les députés
indépendants, et également - je devrais dire pour cette
première dimension - pour en arriver à s'ajuster à la loi
fédérale qui a été adoptée à la
Chambre des communes en matière de régime de retraite au Canada.
C'est également pour réviser le régime de retraite des
députés de l'Assemblée nationale. Ça n'aurait pas
été correct, M. le Président, que le député
d'une région périphérique comme
l'Abitibi-Témiscamingue ne vienne pas donner publiquement, largement ses
impressions, ses intentions en matière de retraite des
députés.
Aujourd'hui, ce à quoi nous faisons face actuellement, c'est
à une simple demande, une demande au gouvernement actuel de reporter de
six mois l'étude de ce projet de loi là, tout simplement sur la
base de l'opportunité. Oui, M. le Président, quand je parcours de
long en large ce grand comté de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, que
j'y entends les impressions, les perceptions de la population, des citoyens,
des citoyennes, des 38 municipalités de ce grand comté là,
oui, j'ai nettement l'impression aujourd'hui que je ne serais pas correct avec
ses électeurs et électrices si je procédais à la
révision. Et je ne parle pas uniquement de l'harmonisation avec la loi
fédérale ou en regard de la loi fédérale qui a
été adoptée, mais à la révision du
régime de retraite des députés de l'Assemblée
nationale. À ce que j'entends, à ce que je vois, les
éléments qui me sont soulevés comme problèmes qui
sont vécus dans ce comté - et c'est la même chose pour bien
d'autres régions du Québec - ce n'est pas de nature à
supporter l'étude ou l'adoption du principe d'une loi visant non
seulement à harmoniser, mais à réviser le régime de
retraite des députés.
Je suis bien disposé, M. le Président, ce soir à
dire, de tous les éléments de ce projet de loi qui nous a
été soumis, qu'il y a des éléments qui sont
valables, qui sont soutenables. Les gens doivent savoir qu'actuellement, dans
les 125 membres - les 124 puisqu'il y a un siège vacant à Anjou,
mais ça ne sera pas long, le 20 janvier, on va en ajouter un autre assis
sur les banquettes à l'Assemblée nationale. Nous, on
espère puis on souhaite, évidemment, et on est à peu
près sûrs que ça va être quelqu'un qui va venir
grossir pour l'instant la minorité de l'Opposition mais ça, c'est
une question de laps de temps très court. Ce ne sera pas très
long. Je pense qu'on devrait tous régler ça au Québec,
ça ne devrait pas être un très gros problème.
Ce que je disais, M. le Président, c'est que, pour les 124
députés de l'Assemblée nationale, il y a actuellement
trois régimes de retraite et, oui, il y a une certaine harmonisation. Et
il y a certains éléments qui sont pénalisants dans cet
actuel régime de retraite où on a de la difficulté
à retrouver vraiment où sont les principes de justice, où
sont les principes d'équité dans ces trois régimes qui,
actuellement, intéressent trois catégories de membres de
l'Assemblée nationale. sauf qu'il faut se poser la question aujourd'hui,
m. le président. est-ce qu'il est opportun d'adopter le principe de
l'étude de ce projet de loi 404? quand je regarde la situation,
ça me rappelle souvent, m. le président - vous avez une
expérience en matière juridique; il y a beaucoup d'hommes et de
femmes ici, à cette assemblée nationale, qui ont une
expérience du monde juridique - que le premier principe au niveau de
l'exercice de la justice dans une société, c'est qu'on dit que
notre système doit non seulement rendre justice, mais il doit y avoir
également, de façon aussi importante, apparence de justice. il
doit y avoir apparence de justice.
On pourrait énumérer ici, M. le Président,
probablement 20 à 25 bonnes raisons discutables, sur lesquelles
on peut échanger, et qui sont fondées en matière
d'équité et de justice pour le régime de pension, le fonds
de retraite des députés. Mais il faut se poser aussi la question,
comme représentants du public, comme représentants de
l'Assemblée nationale, si tout ça servirait également
l'intérêt de cette même population et de l'institution de
l'Assemblée nationale. Tout comme la justice, il ne faut pas seulement
qu'il y ait justice, il faut qu'il y ait apparence de justice. Bien, c'est la
même chose dans le débat que nous avons à faire
actuellement. S'il peut y avoir des éléments qui sont discutables
et qui peuvent être soumis à la discussion en matière de
régime de retraite des députés, le temps, la
période que nous prendrions pour adopter le principe de cette loi et les
discussions que nous aurions dans un deuxième temps, ce n'est pas
opportun, c'est-à-dire que nous risquons également de causer un
certain nombre de torts aux hommes et aux femmes, et surtout à
l'institution qui s'appelle l'Assemblée nationale, parce que les
conditions de vie de nos concitoyens et de nos concitoyennes sont actuellement
beaucoup trop difficiles.
Des tenants, des représentants d'un autre groupe ici, à
l'Assemblée nationale, diront: Écoutez, M. le
député de Rouyn-Noranda-Témis-camingue, vous êtes
ici depuis seulement deux ans et vous allez comprendre vite qu'il n'y en a
jamais de temps opportun pour discuter de ces choses-là, parce
qu'à l'Assemblée ultime, à l'Assemblée nationale,
aux groupes qui représentent ultimement la nation, il n'y a jamais de
bon moment pour regarder les conditions de travail et de retraite des membres
de cette Assemblée. Oui, honnêtement, si ça peut être
difficile de trouver le moment opportun pour en discuter, très
certainement qu'on peut diagnostiquer qu'il y a d'autres moments qui sont
particulièrement inopportuns. Si ça peut, par ailleurs, causer un
certain nombre de difficultés à des députés qui
siègent ici - de leur point de vue, bien sûr -depuis 35 ans, 30
ans, 15 ans, 5 ans, 2 ans, comme dans le cas de votre humble serviteur, oui, il
pourrait y avoir des problèmes qui pourraient se discuter. Mais on ne
peut pas prendre ça inconsidérément par rapport à
la situation économique que vivent nos concitoyens et nos concitoyennes
au Québec. C'est pourquoi il serait beaucoup plus sage d'adopter, sans
entrer dans cette discussion, dans une partisanerie de mauvais aloi, à
ce moment-ci des discussions, parce que nous avons tous lu, comme
concernés, dans cette Assemblée nationale, les rapports qui nous
ont été préparés par les comités
d'experts... (20 h 20)
Alors, je dis que non seulement ce n'est pas opportun, mais, tout comme
la justice, il faut qu'il y ait apparence de justice. C'est important que nos
concitoyens et nos concitoyennes, que les gens de
l'Abitibi-Témiscamingue, que les gens de toutes les municipalités
puissent comprendre, quand je les verrai à l'époque des
fêtes, que, s'il y a de grandes difficultés au plan du
chômage, au plan de l'emploi, au plan des fermetures d'usines, au plan de
la vie commerciale, leur représentant a l'Assemblée nationale n'a
pas cautionné, ne serait-ce que l'adoption du principe pour discuter en
commission parlementaire d'un projet de loi qui vise à harmoniser le
régime de retraite des députés de l'Assemblée
nationale et qui, dans certains cas, lorsqu'on arrivera à la phase 2,
irait au-delà de l'harmonisation, et nous amènerait à
bonifier ce régime pour certaines catégories de membres de cette
Assemblée nationale, suite à des discussions, de façon
méritée ou pas.
Non, je ne peux pas accepter cela, M. le Président. Je veux aussi
être solidaire avec ma population. Je veux leur dire que, s'ils ont de la
difficulté... Moi, je pense qu'il y a certaines iniquités
à l'Assemblée nationale, comme membre siégeant à
cette Assemblée, qui peuvent être examinées et que nous
pourrions redresser, mais je trouve le temps tout à fait inopportun, mal
choisi. Ça ferait mal à nos concitoyens, mal à
l'institution, mal à d'autres institutions dans lesquelles les citoyens
doivent avoir confiance. Je n'accepte pas cette position-là, je la
refuse. C'est la même position que j'ai exprimée à
l'intérieur du caucus des députés du Parti
québécois, de l'Opposition, à l'Assemblée
nationale. Je la répète ici devant cette Assemblée pour
souhaiter que les autres membres, surtout de la majorité
ministérielle, prennent cette opinion en compte, s'il vous plaît.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue. Sur cette
même motion, M. le député de Saguenay.
M. Ghislain Maltais
M. Maltais: Merci, M. le Président. Nous avons en face de
nous une motion de report présentée par le député
d'Abitibi-Ouest sur le projet de loi 404 invoquant le moment inopportun de
présenter un tel projet de loi.
Le projet de loi 404 n'arrive pas comme un cheveu sur la soupe à
l'Assemblée nationale. Depuis 1990, un groupe non partisan travaille sur
ce projet de loi, travaille sur des recommandations. Je ne referai pas le
discours qu'a fait notre leader parlementaire, qu'a fait aussi le leader
parlementaire de l'Opposition sur la technicalité de ce projet de loi,
mais sur le moment opportun.
M. le Président, lorsqu'il s'agit, dans l'entreprise
privée, ou qu'il s'agit ici, à l'Assemblée nationale, de
regarder ce que valent les membres de l'Assemblée nationale, c'est
toujours délicat, c'est toujours difficile. Tous les gouvernements qui
nous ont précédés ont dû faire face, une fois ou
l'autre dans leur mandat, à ce genre
d'exercice où il faut aller au-delà de la par-tisanerie,
mais bien se fixer un sens d'équité. L'équité,
où commence-t-elle et où se termine-t-elle? la proposition de
report dit de reporter l'étude de six mois. j'aimerais bien ça
savoir... m. le président, dans la présentation du projet de loi,
le ministre de l'éducation et leader parlementaire a indiqué
qu'il présentait au grand jour ce projet de loi, qu'il va y avoir une
commission parlementaire en janvier, qu'il reviendrait au mois de mars,
à la session de mars et avril, ce qui veut dire un délai de
quatre mois et demi à cinq mois. on ne peut pas demander plus de
transparence. on ne peut pas demander quelque chose de plus transparent,
à savoir qu'à cause de c-52, bien sûr, l'assemblée
nationale profitera pour regarder et ajuster, harmoniser trois fonds de pension
existants par lesquels la très grande majorité des membres ici
sont couverts, ce qui représente 0,5 %. cela peut-il apparaître
aussi scandaleux qu'on veut nous le laisser croire, 0,5 %? j'aimerais ça
savoir, que quelqu'un me dise dans cette assemblée ce que ça
coûte aujourd'hui et ce que ça coûtera au 1er janvier 1992
à l'assemblée nationale. zéro, puisque c'est une
bonification qui pourrait être accordée lorsqu'un
député quittera l'assemblée nationale.
M. le Président, je me posais l'interrogation depuis cet
après-midi, en regardant ce qui se passe un petit peu dans les autres
provinces et au gouvernement fédéral. Et je m'interrogeais:
Quelle est la conception des Québécois sur l'ensemble des
députés? La valeur des députés? Par exemple,
à Ottawa, un député gagne en moyenne 87 000 $ par
année, alors qu'au Québec c'est 60 000 $. Au niveau des fonds de
pension, c'est 5 % par année, cumulatifs, payables immédiatement
après le départ. Ce qui veut dire qu'un député
fédéral qui a fait huit ans a droit à 40 % de son salaire,
indexé pleinement, retirable immédiatement et tant qu'il vivra.
M. le Président, est-ce que, parce que nous avons choisi, comme
Québécois, comme Québécoises, fiers de
l'être, de siéger à l'Assemblée nationale du
Québec, on vaut moins cher que quelqu'un qui a décidé
d'aller servir à Ottawa? Est-ce que quelqu'un dans cette Chambre peut me
l'indiquer? Est-ce que Benoît Bouchard, député de
Lac-Saint-Jean, vaut plus que Christian Claveau, qui a choisi d'oeuvrer
à l'Assemblée nationale? Est-ce qu'il devrait être
traité différemment? Est-ce que les députés de
l'Assemblée nationale... C'est la question qu'on doit se poser dans la
motion de report du député d'Abitibi-Ouest qui, lui, je pense,
indique que son travail à l'Assemblée nationale ne vaut pas celui
d'un député fédéral. Et c'est là, à
mon avis, une erreur grossière, une erreur que l'ensemble des
Québécois et des Québécoises ne peuvent accepter,
parce qu'on ne peut pas juger, parce qu'on a choisi de servir au Québec,
on ne peut pas accepter de valoir moins que quelqu'un qui sert à Ottawa.
Entre servir le peuple et l'ensemble d'un gouvernement qui couvre tout le pays,
quelle est la différence?
Qui d'entre nos concitoyens, M. le Président, appelle à
toutes les semaines son député fédéral? Qui, parmi
nos concitoyens, est régulièrement au bureau du
député fédéral? Alors que tous, entre nous, peu
importe la formation politique dont nous sommes ici, nous sommes des serviteurs
de l'ensemble des Québécois et des Québécoises et,
les trois quarts du temps, M. le Président, on doit démêler
nos concitoyens avec des dossiers provenant du fédéral. Qui,
parmi les députés de l'Assemblée nationale, n'a pas eu
à traiter un jour des cas d'assurance-chômage? Les gardiens de
quai? Les pensions de vieillesse? Qui, parmi nous, n'a pas eu à faire ce
travail qui était pourtant dévolu à nos collègues
du gouvernement fédéral qui, pour des raisons lointaines, sont
absents de nos comtés, qui, pour des raisons lointaines, n'ont pas la
même disponibilité. Les citoyens, par amour peut-être,
préfèrent faire affaire avec les députés
québécois, les députés de chez eux, qu'ils ont
toute l'année parmi eux, M. le Président. Peut-être qu'ils
préfèrent faire affaire avec des gens qui connaissent leurs
problèmes, et ils savent qu'ils auront une réponse. M. le
Président, lorsque tous les députés, ici, reçoivent
des téléphones dans nos bureaux de comté, même si on
est à Québec, tous les soirs, on se fait un devoir de retourner
nos appels. Ceux qui ne le font pas ne méritent pas de siéger ici
à l'Assemblée nationale.
M. le Président, en vertu du travail que nos concitoyens nous
demandent, en vertu de la valeur qu'ils accordent à nos
représentations, comment peut-on, aujourd'hui, en toute logique, en
toute équité, reconnaître par un report d'étudier
ça, que la loi fédérale C-52 nous oblige... Comment
reconnaître que nous ne valons pas le même prix, la même
retraite que nos députés fédéraux? M. le
Président, non seulement ce n'est pas ça qu'on demande, c'est
beaucoup moindre, c'est beaucoup plus modeste. Je comprends l'Opposition,
puisque c'est un dossier avec lequel on peut faire un petit chemin politique.
Depuis quelques années que je siège ici, j'ai eu l'occasion de
voir les deux côtés de la médaille. Bien sûr, on nous
sortira des discours de 1983, de 1984, et la grande majorité des
personnes qui les ont prononcés avaient le même objectif que vous
avez aujourd'hui. (20 h 30)
M. le Président, on accuse souvent le gouvernement de passer des
projets de loi à la vapeur, des projets de loi qui touchent l'ensemble
de la deputation; c'est vrai que ça serait malhonnête si on le
passait à 3 heures du matin, c'est vrai que ça serait
malhonnête si on passait ça en vitesse, à la vapeur, en fin
de session. Au contraire, le gouvernement du Québec a voulu le
déposer, avoir une commission parlementaire, quatre mois pour
l'étudier. Tous les éditorialistes,
tous les journalistes, tous ceux et celles qui sont contre vont le dire,
le répéter. Ils vont dire et redire que ce n'est pas le bon
moment.
M. le Président, lorsqu'on a un travail aussi épineux
à faire, choisissez-moi le temps. En 1989-1990, lorsque le comité
Goldbloom-Guay a été mis sur pied, la situation n'était
pas ce qu'elle est aujourd'hui. En 1987, lorsque les députés ont
accepté une diminution de 0,5 %, c'était tout simplement parce
que le gouvernement fédéral permettait de prendre un
régime de retraite additionnel. Aujourd'hui, en nous enlevant ce
privilège-là, on doit revenir et ramener ce 0,5 %. Moi, je suis
un de ceux à qui l'erreur du gouvernement fédéral a
coûté 4300 $ en impôts et je n'en suis pas très fier.
On nous a royalement induits en erreur. M. le Président, ce que les
députés réclament aujourd'hui c'est ce que le gouvernement
fédéral leur a enlevé. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Saguenay. Alors, nous en sommes sur la motion de report
du député d'Abitibi-Ouest et je reconnais Mme la
députée de Johnson.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Vous avez
bien dit... Nous sommes en train de discuter sur une motion de report de six
mois de mon collègue d'Abitibi-Ouest afin de donner une chance à
la reprise économique, de donner un petit peu de lumière, un
petit peu d'espoir à ceux qui sont mal pris dans le moment. C'est
ça le but ultime de la demande de mon collègue
d'Abitibi-Ouest.
J'ai bien écouté les propos du député de
Saguenay. Il a dit à la Chambre - il ne m'a pas dit à moi
personnellement, mais, comme je l'écoutais, j'avais l'impression qu'il
me parlait à moi: Le projet de loi 404 n'arrive pas ici comme un cheveu
sur la soupe. Ça fait quelque temps qu'on en discute. C'est vrai que
ça fait quelque temps que le comité Guay, Goldbloom et
Bac-cigalupo ont fait un travail pour évaluer les pensions des membres
de l'Assemblée nationale, sauf que ce que l'on dit, c'est que vous
auriez pu... Vous le saviez qu'au mois d'octobre le rapport avait
été déposé. Vous saviez à ce
moment-là ce qui était à l'intérieur du rapport. Si
vous aviez l'intention de le déposer avant Noël, vous aviez toute
la réglementation de la Chambre pour le faire au mois d'octobre ou au
mois de novembre, avant le 15 novembre, pour le déposer et le faire
adopter à l'intérieur de nos règles ici de
l'Assemblée nationale.
Le député de Saguenay a parlé de transparence.
Là, j'ai eu un peu de difficulté à regarder de quelle
transparence il parlait. Je vous ferai remarquer, M. le Président, que
ça a été déposé le 11, lundi dernier. La fin
de semaine avant, il y avait eu le congrès général ou
l'assemblée générale du Parti libéral - le conseil
général du
Parti libéral - qui s'est tenu ici à Québec. Vous
comprendrez qu'avec les discussions qu'il y avait eu à leur conseil
général on a mis en évidence le rapport Poulin avec toutes
les compressions quon voulait faire à l'intérieur du gouvernement
pour enfin en arriver, selon ce qu'on a entendu ou ce qu'on a lu sur les
journaux, à dégraisser de part et d'autre pour couper les
dépenses afin que le déficit du gouvernement n'augmente pas. On
va dire... Ça aurait été un peu gênant d'avoir
déposé avant le Conseil général le projet de loi
404 qui définit qu'on aura une augmentation sur les pensions. Vous
savez, lorsque notre leader en a parlé avec le leader du gouvernement,
la volonté de l'Opposition officielle c'était de scinder le
projet de loi 404. Pourquoi le scinder? Parce qu'on sait très bien qu'il
fallait s'harmoniser avec le projet de loi C-52 du fédéral. On le
savait très bien et on est très conscients que cette
partie-là, on ne peut s'objecter à ça; il fallait le faire
parce que, au fédéral, ils ne nous ont pas demandé la
permission, eux autres, pour passer leur projet de loi C-52 et pour revenir un
an en arrière pour aller rechercher ce qu'ils nous avaient donné
et ce qui nous était légalement permis de faire,
c'est-à-dire prendre des REER. Là, on allait chercher ça
dans le projet de loi C-52 et il fallait obligatoirement harmoniser notre
pension sur la loi nouvellement passée en janvier 1991.
Donc, on était conscients de ça, M. le Président.
Mais le leader du gouvernement a refusé de scinder le projet de loi.
Nous, on disait que c'était inopportun de présenter le projet de
loi 404 avec une bonification au moment où on se parle. M. le
Président, je me souviens très bien que le 16 octobre...
D'ailleurs, j'ai fait un petit peu de recherche ici, et mon collègue, le
député de Joliette, le 16 octobre - si vous souvenez bien, on
venait juste de commencer la session - a passé une motion pour proroger
la session, avoir un discours inaugural pour donner la chance d'avoir plus de
discussions ici, à l'Assemblée nationale, et permettre au
gouvernement de présenter des programmes pour remettre le train sur les
rails.
C'est faux de croire que la récession est terminée, M. le
Président. C'est faux de croire ça. En tout cas, si vous regardez
dans vos comtés respectifs, il n'y a personne qui peut dire que la
récession est terminée. Avec le nombre de pertes d'emplois qu'il
y a dans chacun de nos comtés, c'est inacceptable, inopportun de
présenter le projet de loi avec bonification au moment où se
parle; on l'a dit, on l'a répété et on va le
répéter encore. Seulement dans mon comté, M. le
Président, en l'espace de quatre jours, la semaine dernière -
d'ailleurs, j'en ai fait état ici, en Chambre - Domtar a mis 150
personnes à pied à Windsor, où je demeure, où je
suis née. Dominion Textile, dans la région de Sherbrooke, a mis
150 personnes à pied. Puis les tapis Peerless, dans mon comté,
ont raté le beau contrat d'au-dessus
de 1 000 000 $ d'Hydro-Québec qui a donné le contrat
à une firme américaine puis, parce qu'elle a donné le
contrat à une firme américaine, les tapis Peerless ont mis 275
personnes à pied, M. le Président. Je "peux-tu" vous en dire plus
que ça? Ça, c'est seulement en l'espace d'une semaine dans le
comté de Johnson. le 16 octobre, quand mon collègue de joliette a
demandé une prorogation, j'ai fait une intervention pour dire qu'en
estrie les vrais chiffres du chômage, c'était 20 %; si on calcule
tous les petits emplois de 26 semaines, c'est 20 % de chômage et, depuis
ce temps-là, il y a d'autres emplois qui ont été perdus,
il y a d'autres entreprises qui ont été fermées et nos
papetières sont en grandes difficultés financières. je
dois vous dire que j'ai deux papetières dans mon comté. j'ai la
kruger, à bromptonville, puis domtar, à windsor. pensez-vous que
ces gens-là, qui ont perdu leur emploi à quelques jours de
noël et qui ont tous des familles, sont heureux de voir que nous sommes en
train de discuter, à deux jours, m. le président, de la fin de la
session pour le congé de noël, qu'on va se donner une bonification
dans un projet de loi pour les députés?
Il y a eu une ligne ouverte qui s'appelait Contact 63; M. le
Président, j'aurais voulu que tout le monde entende ça, ici. Les
gens appelaient; c'était à Sherbrooke, au poste de Sherbrooke;
c'est Alain Campagna, le journaliste, qui fait ça. Si vous aviez entendu
ce qui s'est dit là. C'était épouvantable d'entendre
ça. Les gens disaient: Ça n'a pas de bon sens, pendant que tout
le monde perd son emploi, pendant qu'il y a des fermetures d'usines, qu'on se
bonifie un programme comme ça au niveau de la pension des
députés.
Il y a eu, en plus de ça, je pense que c'est vendredi... Vous
savez, chaque année, en Estrie, ça s'appelle les Paniers de
l'espoir. C'est Rock Guertin, un ancien journaliste à CHLT, qui a parti
ça en Estrie, puis tout le monde donne. Puis cette année, ils ont
donné 1000 Paniers de l'espoir. Ce sont des paniers entre 75 $ et 100 $
pour les familles nécessiteuses. Ils en ont donné au-dessus de
1000, je pense, cette année, puis c'était le maximum, mais ils
auraient pu en donner 2000, 3000. Les Paniers de l'espoir, ça veut dire
des gens qui n'ont pas ce qu'il faut dans la maison pendant que nous autres, on
va se donner une bonification.
On dit que ça n'a pas de bon sens, M. le Président. On dit
que ce n'est pas le temps de faire ça. Peut-être que dans six
mois... la demande de mon collègue de retarder de six mois cette
partie-là... parce qu'on n'a pas besoin de l'harmoniser. Si on la
sépare en deux, la loi, on va l'harmoniser avec la C-52, mais l'autre
partie, qu'on attende en juin prochain, dans six mois, M. le Président,
quand les gens auront recommencé à regagner confiance en
l'économie, quand le travail aura repris, quand ça ne sera plus
l'hiver puis que les gens n'auront plus de comptes à payer à
cause du froid.
M. le Président, ça n'a pas de bon sens. En tout cas, on
ne peut pas être d'accord qu'on ait une augmentation, une bonification
dans le plan de pension, M. le Président, parce que le temps est
inopportun et inacceptable. Merci. (20 h 40)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Johnson. Nous en sommes toujours à cette motion
de report de M. le député d'Abitibi-Ouest sur l'adoption du
principe du projet de loi 404, et je reconnais M. le député de
Mille-Îles et leader adjoint du gouvernement.
M. Jean-Pierre Bélisle
M. Bélisle: M. le Président, sur cette motion de
report, je dois souligner le ton et le contenu dans ce débat, qui est un
ton très calme, un ton très posé, où on essaie de
faire certaines nuances sans trop attiser la flamme quelquefois de la
partisanerie qui nous envahit dans cette Chambre. Il me semble que, oui, c'est
un moment tout aussi opportun que n'importe quel autre moment pour discuter du
fonds de pension de ceux qui sont chargés par la loi et par la
volonté du peuple de représenter les citoyens en cette
Chambre.
La thèse de l'Opposition, la ligne d'argumentation de
l'Opposition, M. le Président, est la suivante. Ils nous disent, d'une
part, sur la motion de report: Nous allons reporter le projet de loi 404, mais
nous sommes d'accord sur le fond. Ça, c'est le premier point. Nous
sommes d'accord, nous convenons qu'il devrait y avoir une bonification du fonds
de pension. Nous sommes d'accord là-dessus. Tous les intervenants que
j'ai entendus à date, que ce soit le leader adjoint de l'Opposition et
député d'Abitibi-Ouest, M. le Président, que ce soit le
député de Joliette, le leader de l'Opposition, que ce soient les
autres intervenants de l'Opposition, ils nous disent tous: Mais on est d'accord
que le fonds de pension des députés de l'Assemblée
nationale soit légèrement amélioré ou à tout
le moins réajusté. Même le député
d'Abitibi-Ouest a eu une honnêteté pour laquelle je l'en
félicite. Il nous a dit tantôt, lors de son discours avant
l'ajournement de six heures: On a fait une erreur, nous, le Parti
québécois, en 1982. On a coupé d'une façon
inconsidérée et on n'aurait pas dû le faire. Alors, la
ligne d'argumentation de l'Opposition, le premier point, c'est de nous dire: On
est tous d'accord avec le projet de loi 404. On est d'accord avec le projet de
loi, on est d'accord avec l'amélioration. On est d'accord avec
l'harmonisation à cause de la loi fédérale C-52 qui nous
oblige à le faire.
Puis, il n'y a pas de cachettes à dire aux gens qui nous
écoutent, M. le Président, que, de très bonne foi,
plusieurs des membres de cette
Assemblée - ce ne sont pas tous les membres de cette
Assemblée - on a suivi une directive de la présidence de
l'Assemblée nationale quant à nos fonds de pension personnels et
à nos fonds de pension qui étaient permis en vertu de la loi. De
bonne foi, presque tout le monde a mis dans son fonds de pension personnel, son
REER personnel, ce que la lettre de l'Assemblée nationale nous disait de
mettre en 1989-1990, puis on a eu une triste surprise, tout le monde, on s'est
fait collecter tout le monde par l'impôt. On s'est fait ramasser, envoie
donc! Tu l'as mis dans un fonds de pension puis tu n'avais pas le droit de le
faire. Alors que, M. le Président, je ne vous en fais pas un reproche,
là, mais on a reçu une lettre avec l'en-tête de
l'Assemblée nationale qui nous disait: Messieurs les
députés, comme en 1985, comme en 1986, comme en 1987, vous avez
le droit de le faire.
M. le Président, la ligne de pensée, la ligne
d'argumentation de l'Opposition, elle va plus loin. Elle nous dit: Nous sommes
d'accord sur le fond, mais elle ajoute que le fonds de pension n'a pas de sens.
Le député de Joliette, le leader de l'Opposition, M. le
Président, nous a dit: Le fonds de pension - les fonds de pension, je
suis régi par cinq fonds de pension différents - il est
totalement incompréhensible. Ce n'est pas nous, le Parti libéral
du Québec, qui l'avons dit, c'est le député de Joliette,
leader de l'Opposition.
Là-dessus, il a raison: le fonds de pension, il est totalement
incompréhensible. Le député d'Abitibi-Ouest nous a dit
également, M. le Président, qu'il était injuste. Ce n'est
pas encore les membres du Parti libéral du Québec ou les
députés ministériels qui pensent qu'il va y avoir une
élection, qui veulent se sauver avec la caisse. Ce n'est pas ça
dont il est question, ce soir. Les gens de l'Opposition nous disent: Sur le
fond, on est d'accord. C'est injuste et incompréhensible, il faut
changer ça. Sauf qu'ils ajoutent, comme petit obstacle... Au fait, ils
sont entièrement d'accord sur ce qui est présenté dans le
projet de loi 404. Ils disent: Mais, on est tous d'accord avec tout ça.
C'est injuste. C'est incompréhensible comme fonds de pension, et il faut
l'améliorer, il faut le bonifier. Mais ce n'est pas le bon moment.
Ce n'est pas le bon moment, ce n'est pas le bon "timing". M. le
Président, quand quelqu'un s'attache seulement aux apparences, il ne
récolte que les fruits de l'apparence. L'image publique, la perception
que la population a d'un dossier, ce n'est pas ce qui devrait nous guider dans
cette Chambre. C'est le fond et le bien-fondé du dossier. Ceux dans
cette Chambre qui mettent comme premier critère l'apparence du
dossier... J'entendais, tantôt, M. le Président, le
député de Rouyn-Noranda qui nous disait: Les apparences, les
apparences. Les apparences comptent très peu quand le dossier est bien
fondé. Je vais vous dire, M. le Président, que je ne partage
absolument pas, mais absolument pas, cette vision totalement superficielle de
l'Opposition du Parti québécois qui vient en cette Chambre en
nous disant: Nous sommes pour la bonification, nous sommes pour
l'amélioration du régime de retraite, mais halte-là, vous
savez, les apparences, l'accessoire, le superficiel, c'est plus important que
le fond. Alors, on ne le fera pas. Des demi-vérités, M. le
Président, on y a été habitués fort longtemps par
les gens de ce parti, des demi-vérités. Souvenez-vous, M. le
Président, des campagnes de publicité de 1980, 1981, 1983, 1984,
1985 par les gens du Parti québécois. C'a monté
jusqu'à 27 000 000 $ par année de fonds gouvernementaux pour
présenter des apparences, pour présenter l'accessoire, pour
présenter une belle jambe au public du Québec et aux
électeurs du Québec, mais sans jamais leur dire la
vérité et le fond des dossiers.
La distinction qui existe, M. le Président... Les gens qui nous
écoutent ce soir vont très bien la comprendre. Entre la position
du Parti québécois qui nous dit, en cette Chambre: On est
d'accord, il faut améliorer le fonds de pension, il faut le bonifier,
mais ce n'est pas le bon "timing"... C'est que nous, on a la décence,
lorsqu'il y a un problème avec une facette de la vie publique, de le
mettre sur la table. On va en discuter ouvertement, on va le corriger, et on
n'ira pas se cacher après pour en bénéficier. Certainement
pas pour une question d'apparence. Certainement pas pour une question
d'apparence. Moi, si j'étais un électeur qui écoutait le
débat ce soir, M. le Président, à qui je ferais le plus
confiance? À la personne qui attache de l'importance aux apparences,
à l'accessoire, à la belle robe de quelqu'un, au bel habit de
quelqu'un, à la forme de quelqu'un? Si j'accordais de l'importance ou si
j'écoutais les gens qui parlent du fond des dossiers... Est-ce que je
ferais plus confiance à quelqu'un qui accorde de l'importance à
l'extérieur ou à quelqu'un qui parle... Vous me faites signe
qu'il y a une minute, M. le Président. (20 h 50)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Prenez votre temps.
M. Bélisle: Vous me corrigerez. Je peux aller
jusqu'à 30 minutes, M. le Président? Ça va?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Un des deux
côtés.
M. Bélisle: D'accord. Je disais que je pense que,
contrairement au propos populaire et à l'adage qui dit que toute
vérité n'est pas bonne à dire - ça, c'est un adage
que je ne partage pas, peut-être à cause de ce que ma mère
m'a montré quand j'étais jeune - je pense qu'au contraire toute
vérité est bonne à dire. Toute vérité est
bonne à dire. Si tu as un dossier et s'il est bien fondé,
présente-le devant le public et laisse le public juger. Ne te fie pas
seulement,
effectivement, à ce que les autres pourraient dire à cause
des apparences. Je vais le corriger, l'adage populaire. Lorsqu'on dit: Toute
vérité n'est pas bonne à dire, je vais ajouter: sauf
à celui qui refuse d'entendre. Et celui qui refuse d'entendre, c'est
bien par son choix personnel qu'il refuse d'entendre. On peut lui laisser au
moins cette possibilité-là et ce choix-là.
M. le Président, qui, dans cette Chambre, a corrigé d'une
façon définitive la question des salaires des
députés? Était-il opportun, lorsque nous avons introduit
ce débat dans cette Chambre, en 1987, de tenir ce débat? Ce n'est
pas le Parti québécois, sur ce dossier épineux. Non, pas
du tout. Ce ne sont pas les regrets que M. Lévesque a laissés
lorsqu'il a quitté, en disant à ses proches: La seule chose que
je regrette, c'est que je n'ai pas pu, avant la fin du mandat du Parti
québécois, en 1985, corriger et bonifier le fonds de pension des
députés. Ce n'était peut-être pas opportun en 1985,
mais M. Lévesque l'a regretté, et il l'a dit. Si je ne dis pas la
vérité, que quelqu'un se lève de l'autre
côté, et qu'il me le dise! Mais c'était tout aussi
important, tout aussi opportun.
Qui a corrigé la question épineuse du salaire des
députés? Le Parti québécois? Non. C'est le Parti
libéral du Québec, de la même façon, en venant en
Chambre, en proposant de mettre le salaire du député
correspondant à une fonction d'emploi dans la fonction publique, pour
éviter qu'on ait à décider de se voter des augmentations
continuellement, pour éviter de nous placer dans une mauvaise position.
C'est un dossier où il y avait un bien-fondé. Il fallait
arrêter de faire ce que tous les autres gouvernements, depuis 35 ans,
faisaient. Il n'y avait pas de bons ou de mauvais moments. Il fallait le faire,
on l'a fait. Ce soir, sur le fonds de pension, on fait la même chose.
La théorie du Parti québécois, j'espère que
ce n'est pas ça parce que je trouverais ça excessivement dommage,
sur un sujet aussi important. Je vais expliquer pourquoi il est important,
tantôt. J'espère que vous n'êtes pas en train de tenter de
ramasser un petit capital politique. J'espère. Surtout pas
là-dessus.
L'autre distinction qui me vient à l'esprit, c'est que je ne peux
pas ne pas me souvenir de la théorie du double standard ou de la double
mesure. Nos revenus, présentement, comme ceux de la fonction publique,
à cause de ce que nous avons fait, nous, le Parti libéral du
Québec, en 1987, n'augmenteront pas à partir du mois de janvier,
ils sont gelés. M. le Président, vous le savez, ne regardez pas
votre talon de chèque, vous allez avoir zéro. On va faire la
même chose que tout le monde. C'est très bien qu'on fasse la
même chose que tout le monde. Pas de double standard, pas de double
mesure et pas de double langage.
M. le Président, est-ce qu'on se souvient de ce qui s'est
passé en 1981-1982, lorsqu'il y a eu une augmentation des
rémunérations de base et des salaires des députés
et des ministres - c'était à pleine page de journal - alors que
l'autre standard qu'on appliquait aux fonctionnaires de l'État, c'est
qu'on les coupait, moins 20 %? Ce n'est pas ça qu'on est en train de
faire. Moi, je dis, contrairement à ce que pense l'Opposition, qu'il est
toujours opportun, approprié, que c'est toujours le bon moment de
préparer l'avenir, pas l'avenir de ceux qui sont ici, non, non, non, ce
n'est pas de ça qu'il est question ce soir; ce n'est absolument pas de
ça. Ce dont il est question ce soir, M. le député de
Masson, M. le Président, c'est de ceux qui, comme vous, M. le
député de Masson, après vous, après moi, de ceux
qui vont venir après nous. Parce que ce n'est pas facile la vie qu'on
mène; il ne faut pas pleurer ici ce soir, mais ce n'est pas facile.
Tantôt, lors du débat sur le fond, j'aurai l'occasion de citer
abondamment le rapport préparé par l'ex-président de
l'Assemblée nationale, M. Guay, M. Goldbloom, ancien ministre, et le
professeur d'université, M. Baccigalupo, à la page 23, qui montre
que c'est un cas très particulier, effectivement, que de faire le
travail d'homme ou de femme publique, au Québec ou dans d'autres
juridictions.
Je disais, M. le Président, que c'est une occasion de parler
d'avenir, de ceux qui viendront après nous et de leur donner - ah mon
Dieu! - une toute petite incitation correcte à se présenter en
politique. Ça, ce n'est pas un avantage indu dont je parle, c'est aussi
opportun que lorsque nous avons voté en cette Assemblée,
l'année passée - je vois, M. le Président, que la
députée de Terrebonne me regarde... L'an passé, le Parti
québécois, l'Opposition et les députés de
l'Opposition ont voté avec le parti ministériel, avec le Parti
libéral du Québec, pour la bonification du fonds de pension des
juges du Québec. L'année passée, ce n'était pas
moins ou plus opportun de le faire, mais on l'a fait parce que le dossier
était bien fondé et justifié. On leur a accordé
2,75 % de crédit de rente par année sur leur salaire non
contributoire - non contributoi-re - pas un sou à mettre dans leur
poche, non contributoire.
La motion de report nous dit: Bien non, pas tout de suite, on va
attendre, ça va être mieux, les bons temps vont arriver, là
il va falloir passer ça, puis ça va être justifié.
C'est tout aussi opportun que quand on a voté... M. le Président,
je suis convaincu que Mme la députée de Terrebonne va être
d'accord avec moi parce que c'est une loi - qu'elle fouille attentivement - la
Loi sur le Protecteur du citoyen... J'appellerais les députés de
l'Opposition à vérifier l'article 8 de cette loi. Il faut la
lire. L'article 8 de cette loi en 1968 ou en 1982, quand il a été
amendé... 1982, ce n'était pas le moment le plus gai du
Québec, hein? on était en pleine récession. Bien, à
l'article 8: Le Protecteur du citoyen ou son adjoint, quand ils cessent
d'exercer leurs fonctions - je lis le texte de loi - après les
avoir remplies pendant au moins cinq ans - cinq ans, pas d'élection, ils
ne vont pas devant le peuple et je ne suis pas convaincu, effectivement, qu'ils
siègent jusqu'à 4 heures la nuit, qu'ils travaillent sept jours
par semaine et qu'ils ont de la difficulté à prendre deux
semaines de vacances pendant l'année - ...avant l'expiration de cette
période, ils ont droit à une pension annuelle égale au
quart du traitement qu'ils recevaient au moment où ils ont cessé
d'exercer leurs fonctions. Ayoye! Le quart, 5 % par année. Le quart!
S'ils continuent, 10 ans, c'est un autre quart et, s'ils continuent 15 ans,
l'article 8 dit que c'est 75 %, les trois quarts. Les trois quarts! On ne parle
pas du tout de ce qui est devant la Chambre avec le projet de loi 404, ce n'est
pas ça du tout; on parle de 4 % et c'est nous autres qui mettons
jusqu'à 9 % de notre salaire dedans. (21 heures)
Le Protecteur du citoyen... ce n'est pas contributoire. Ce
n'était pas opportun dans ce temps-là? Ce n'était pas le
bon moment? Il y avait un problème en 1982 ou il n'y en avait pas? Pas
opportun, opportun, inapproprié, pas le bon timing. Il y a quelque chose
qui avait... C'était plus fondé ou c'était moins
fondé? Vous vous sentez moins des protecteurs de citoyens que des
députés? Est-ce que c'est ça là? Est-ce que c'est
ça? Si c'est ça, M. le Président, c'est qu'on ne comprend
pas la distinction fondamentale entre le principal et l'accessoire, entre le
bien-fondé d'un dossier et les apparences d'un dossier. Et moi, je vous
dis, M. le Président, sans aucune hésitation, sans aucune
hésitation, que je ne serai jamais de ceux, des groupuscules... je ne
ferai jamais partie d'un groupe parlementaire qui s'attache aux apparences au
détriment du bien-fondé d'un dossier.
M. le Président, je vais voter contre la motion de report et j'ai
bien hâte d'intervenir sur le fond du projet de loi parce que j'en ai
long à dire lors de la deuxième lecture. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. Alors, sur cette motion de report, M. le
député d'Ungava.
M. Christian Claveau
M. Claveau: Oui, M. le Président. J'interviens sur cette
motion de report parce que je pense qu'il est de mon devoir de parlementaire de
le faire. M. le Président, en ce qui me concerne, je suis
profondément déçu par le projet de loi qu'on a sur la
table. Que l'on ait à discuter, à ce moment-ci, d'un projet de
loi semblable, moi, ça me déçoit. Et puis je suis
convaincu aussi qu'une vaste partie de la population du Québec est
déçue par l'attitude de ce gouvernement, par l'attitude de
certains par- lementaires en cette Chambre, membres de la formation
ministérielle qui, au moment où le Québec se
dégrade, où l'économie du Québec s'en va à
l'abandon, au moment où on a au-delà de 1 000 000 de
Québécois et de Québécoises, de gens sur le
territoire du Québec qui vivent de prestations d'aide sociale et de
prestations d'assurance-chômage, au moment, donc, où à peu
près un sixième de la population du Québec ne retire,
comme seule source de revenu, qu'une prestation d'aide sociale ou
d'assurance-chômage, nous, on est ici en cette Chambre et on est en train
de déblatérer sur notre fonds de pension. On est en train de se
demander pourquoi on a été lésés et pourquoi... et
ce n'est donc pas juste... et ça fait donc mal, on fait donc
pitié et on va améliorer notre fonds de pension. Tiens,
ça, ça en est une urgence nationale, M. le Président:
améliorer le fonds de pension des députés au moment
où la population du Québec est en train de croupir dans les
difficultés, dans la misère dans bien des cas, au moment
où l'économie s'effondre. Dans quel genre de monde vivons-nous,
M. le Président? Est-il vraiment vrai que, lorsqu'on est parlementaire,
que l'on est un député élu, on se retrouve dans une
espèce de soucoupe volante qui nous dégage, qui nous
déconnecte complètement de la réalité du quotidien,
de ce qui se passe sur le terrain des vaches, comme on dit? Moi, en tout cas,
comme député, je refuse de jouer cette game-là. Je refuse
de jouer ce genre de jeu hypocrite pour la population.
J'écoutais le député de Mille-Îles nous
parler des grandes intentions. Je l'entendais dire que l'Opposition avait une
attitude hypocrite. M. le Président, moi, j'aimerais bien aller au fond
des choses. J'aimerais bien... J'essaie de comprendre le fondement de
l'urgence. Comment il se fait qu'alors qu'il n'y a rien qui marche au
Québec, alors que les chômeurs, les assistés sociaux
augmentent continuellement, que les usines ferment, que les investisseurs s'en
vont, on ne trouve pas d'autres urgences que celle de se retarder en cette
Chambre pour parler de notre misérable fonds de pension? Imaginez-vous
si c'est important. Et, en bout de piste, je ne trouve qu'une seule raison
à cette urgence-là, une seule, M. le Président. Je ne suis
pas capable d'en trouver d'autres. Qui peut le plus profiter du fonds de
pension au moment où on se parle? C'est la question que je me pose. S'il
y a urgence, c'est parce qu'il y a des gens qui sentent l'importance
d'améliorer leur sort au plus vite. Qui sont-ils? Avec un taux de
satisfaction de 30 % dans la population, au moment ou on se parle, à
mi-mandat, avec tout ce qu'on connaît comme problèmes qui s'en
viennent ou comme problèmes qui existent et le manque de solution que ce
gouvernement apporte à ces problèmes-là, moi j'en arrive
à conclure que ce n'est pas surprenant que, comme gouvernement, ils ont
hâte d'améliorer leur fonds de pension parce que,
s'il y en a ici qui risquent d'en profiter avant longtemps, ce sont eux
et personne d'autre qu'eux-mêmes. C'est la seule raison que je trouve
à l'urgence, M. le Président. Et j'irais même plus loin,
j'irais même jusqu'à dire qu'il s'agit là probablement,
peut-être, d'un bonbon, d'un incitatif que ce gouvernement a
trouvé le moyen de donner à ses troupes afin d'empêcher
peut-être des démissions avant longtemps, afin d'empêcher
que des députés bien intentionnés se dissocient de
l'attitude de négativisme et d'immobilisme du gouvernement qui nous
dirige actuellement au Québec, M. le Président. Les seuls qui ont
intérêt à ce que ce fonds de pension là soit
amélioré au plus vite parce qu'ils risquent d'en avoir besoin
très rapidement, ce sont les députés de l'aile
ministérielle qui se promènent dans la population avec à
peine 30 % de taux de satisfaction et qui voient approcher les prochaines
élections avec une certaine crainte, il faut le dire. Il n'y a pas
d'autre urgence.
M. le Président, je regarde le travail qu'on fait ici ce soir et
je me dis qu'on ne pourrait pas faire mieux dans n'importe quelle
république de bananes. Comment définit-on l'économie ou le
fonctionnement économique dans ce que l'on appelle "les
républiques de bananes" où il y a un petit groupe dominant, un
petit groupe bien nanti, bien gras, bien nourri, qui dirige une population qui
croupit dans la misère? Et ce petit groupe-là trouve toujours le
moyen de se faire des lois qui vont continuer à l'avantager de plus en
plus, indépendamment des intérêts de la population,
indépendamment des conditions des travailleurs, indépendamment du
contexte socio-économique dans lequel la vaste majorité de la
population vit. Un petit groupe dominant qui trouve le moyen de se plaindre sur
son sort et qui ne trouve, comme unique raison à son action, que de se
comparer à mieux que soi. C'est certain qu'il y aura toujours du monde
mieux que nous autres, c'est certain qu'il y en aura toujours des mieux
payés, qui auront de meilleurs fonds de pension, de meilleures
conditions de travail. C'est sûr que, si on se compare juste aux
meilleurs, on va se trouver misérables. Mais comparons-nous donc, 30
secondes, à ceux qui sont moins bien que nous autres, à ceux qui
vivent des problèmes, à ceux qui ont perdu leur emploi et qui
n'en trouveront pas probablement avant bien des mois et bien des années,
dans certains cas. Comparons-nous à ces gens-là et j'imagine que
notre état de misérabilisme avancé - selon les propos de
certains députés ministériels que l'on a entendus
après-midi - de décrépitude chronique, on va le trouver
peut-être plus agréable à vivre, si on se compare aux
millions et millions de Québécois et Québécoises
qui vivent dans une situation économique fragile, précaire,
pratiquement inexistante, en bas du seuil de la pauvreté pour à
peu près 40 % de la population de la grande région de
Montréal.
Comparons-nous à ces gens-là de temps en temps. C'est ces
gens-là qu'on représente, c'est eux qui nous font élire
pour trouver des solutions à leurs problèmes. Ce sont eux que
l'on doit défendre; ce sont leurs problèmes que nous nous devons
de travailler.
Nous sommes payés pour ça, pour régler les
problèmes de ceux qui en ont, pour trouver des solutions aux
problèmes des gens qui nous ont fait élire en cette Chambre;
c'est pour ça qu'on est payés. On n'est pas payés pour
prendre des veillées entières à discuter sur l'aspect
misérable de notre fonds de pension. Soit! que Ton en parle de notre
fonds de pension, comme on a le droit de parler de nos conditions de travail;
oui, je n'ai rien contre ça. Mais qu'on n'en fasse pas une
priorité avant d'avoir réglé les vrais problèmes de
la société. C'est là qu'est le problème, et c'est
là, en ce qui me concerne, où le bât blesse. Je n'accepte
pas, M. le Président, d'être associé à une
démarche qui veut que nous qui, dans bien des esprits, nous situions
dans la catégorie des bien nantis, lorsque l'on regarde les millions et
millions de Québécois et Québécoises qui vivent des
problèmes économiques graves et qui, dans bien des cas, n'auront
même pas l'argent pour acheter la moindre petite étrenne à
leurs enfants pour Noël, d'être associé, donc, à une
démarche de ce genre-là, du genre de celle qui veut nous en
donner encore plus alors que, dans l'opinion populaire, nous sommes
déjà parmi les privilégiés dans cette
société. (21 h 10)
C'est pour ça, M. le Président, que je m'associe à
la motion de report pour que l'on en discute éventuellement dans un
autre temps et si dans six mois ce n'est pas encore le temps d'en discuter, eh
bien! on reportera encore, M. le Président. En ce qui me concerne,
ça ne me dérange pas, je n'ai pas peur des prochaines
élections. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, sur cette
même motion de report, je ne vois pas d'intervenant du côté
ministériel, donc je cède la parole au député de
Masson.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Il y a une loi
ici qu'on dépose pour faire une harmonisation avec une loi
fédérale et, aussi, cette loi porte un deuxième volet pour
améliorer le fonds de pension des députés.
Je tiens ici à dire, au tout départ, que je suis
complètement détaché de ce discours, pour plusieurs
raisons. Je vais en nommer seulement trois. Premièrement, du
côté monétaire, ça va assez bien dans ma vie;
deuxièmement, ma réélection, si je me présente
à la prochaine, est passablement bien assurée; et,
troisièmement, ce qui est plus important ici dans cette loi, j'ai plus
de 60 ans. Donc, je ne me sens pas directement
touche et ce que je vais dire, ce ne sera pas des paroles
égocentriques ou égoïstes. Je ne voudrais pas que ceux qui
me regardent de l'autre côté ou d'ailleurs pensent que je tiens
des propos égocentriques.
Ce projet de loi porte en soi des réminiscences du passé,
que l'on veuille ou pas, et vous voyez bien qu'ici on essaie d'être
excessivement délicats en en parlant. On demande, on dit: Une motion de
report. Une motion de report, pourquoi? Pas parce qu'on veut cacher la
vérité, comme semble nous dire le représentant de Laval,
non, pour que la vérité soit faite dans son entier. Cette loi
dit: Les députés devraient avoir, au lieu de 3 %, 4 % par
année de fonds de pension. C'est ça. Et ça va s'appliquer
à nous, pas juste à ceux qui viendront. Ça, ce n'est pas
dire la vérité: À ceux qui viendront, mais pas à
nous. Oui, à nous aussi. Mais voyons donc, quand même! Si on se
pique de vouloir dire la vérité sous prétexte que nos
parents nous ont dit: Toute vérité est bonne à dire -
venant de la bouche d'un avocat, c'est dur à prendre - mais, si c'est
ça qu'on veut dire, nous aussi ça va nous toucher, ça
aussi ça va nous toucher, nous.
Moi, personnellement, je suis pour cette motion de report parce que je
veux qu'on fasse la clarté totale là-dessus et qu'on prenne le
temps en commission parlementaire de faire venir tout ce qui est intervenant
là-dedans et que les comparaisons soient sur la table pour voir si nous
méritons 3 %, 2 %, 4 % ou 5 % et, si, c'est bonifié par les gens
qui viendront en commission parlementaire, on le bonifiera; si on nous demande
de rétrograder nos demandes, on rétrogradera. Alors, est-ce qu'on
peut se faire piquer de ce côté-ci de ne pas vouloir que toute la
vérité se fasse? À moins d'être le fils du grand
démagogue! La vérité, on la veut; c'est pour ça
qu'on demande une motion de report.
Mais il y a cette petite ombre au tableau tout le temps. On se regarde
avec des yeux de faïence un tout petit peu parce que, justement, le
député de Mille-Iles a brandi une feuille en disant: En 1982, on
disait que c'est nous; on disait que ce n'était pas opportun, etc. Mais
attention là! En 1982, on est venus en Chambre, ici, et on a
demandé de baisser nos salaires. Baisser! La loi disait que les
députés, le 1er janvier de chaque année, avaient 6 %
d'augmentation, 6 %. Et nous, à cause de la crise, de la
récession de l'époque, on a connu ça, nous aussi, et une
crise beaucoup plus difficile que celle que vous traversez et on l'a
monnayée et on l'a guérie beaucoup plus vite... La crise de
l'époque était de moins 5,4 % tandis que celle-ci est de moins
2,3 %, presque le double, et on en est sortis beaucoup plus vite. On avait fait
des coupures chez nos fonctionnaires, nous aussi, comme vous l'avez fait.
Cependant, on avait fait des coupures à certains de nos fonctionnaires,
ceux qui étaient, disons, à l'époque, les mieux
payés, et on avait donné des augmentations jusqu'à 12 % a
ceux qui étaient moins bien nantis dans la fonction publique. Autrement
dit. avec la poussière retombée sur ce cas-là, on se rend
compte que le gouvernement, à cette époque, a fait son travail
comme si c'était lui le responsable du syndicat et les syndicats ont
fait un travail comme si c'étaient eux "l'establishment" patronal. C'est
curieux quand même après le temps!
Nous, malgré les coupures et les augmentations... La masse
salariale, à l'époque, était de près de 11 000 000
000 $. On a eu une augmentation; une fois soustraites les augmentations, les
deux mises ensemble donnaient une augmentation de notre masse salariale de
près de 600 000 000 $, donc, une augmentation générale de
la masse salariale de la fonction publique de 5,8 %. Nous, nous devions avoir
une augmentation de 6 %, le 1er janvier. On a voté une loi ici, dans
cette Chambre, pour dire: Nous retardons notre augmentation de trois mois, ce
qui nous donnait une diminution de 1,2 %. Donc, notre augmentation à
nous était de 4,8 % pendant que la masse salariale de nos fonctionnaires
était de 5,8 %. De l'autre côté, on criait: C'est
inopportun. Ça n'a pas de sens. Vous augmentez pendant que vous coupez
vos fonctionnaires. Eh bien, après près de 10 ans, il est bon que
les choses soient rétablies. Nous avons fait notre devoir.
Est-ce que, par exemple, nous étions à blâmer
d'avoir baissé le salaire des députés et le fonds de
pension à l'époque? Après 10 ans, moi aussi, je dois
reconnaître que, oui, on est blâmables de l'avoir fait parce qu'on
a contribué, par ça, à discréditer le rôle
des députés. Et là on vient essayer de faire un correctif
et ce correctif, on demande de le reporter parce qu'on n'est pas sûrs que
vous fassiez la correction valable. Si elle est trop basse, les gens nous
diront en commission parlementaire: Pourquoi, à Ottawa, un
député paie-t-il 50 % - 50 % sur son fonds de pension avec le
gouvernement et reçoit-il 5 % par année quand il part? S'il a
été là 20 ans, il reçoit 100 % de son salaire quel
que soit son âge, à Ottawa; puis ils gagnent 87 000 $, en plus.
Ils s'occupent de quatre affaires: les timbres, l'armée, les eaux puis
l'aviation; toutes des affaires plates. Bon. Nous autres, on s'occupe de toutes
les choses importantes pour la population, puis on en gagne 60 000 $. Puis on
ne le mériterait pas? Cependant, à cause de la crise dans
laquelle nous sommes, à cause de l'état dans lequel sont les gens
pauvres, les gens moins nantis dans la population, il faut qu'on regarde
ça avec un oeil complètement éclairé. C'est pour
ça qu'on demande la motion de report, pour que l'on sache à quoi
s'en tenir.
Nous demandons à tous les experts de venir nous voir et d'exposer
au public ce que nous revendiquons puis on va demander aux gens: Est-ce que
vous voulez qu'on nous augmente ou est-ce que vous voulez qu'on nous baisse?
Mais il n'y a pas un homme sur terre... On ne prend pas
un gros risque. On sait qu'on mériterait une augmentation, mais
c'est vrai que c'est inopportun. On demande de reporter de quelques mois pour
avoir le temps de faire un éclaircissement.
Et vous, M. le Président, je vous connais personnellement, comme
homme. Je sais que vous êtes en faveur d'une justice équitable
dans toutes les classes de la société. Je sais que vous, votre
salaire est de beaucoup plus élevé que le mien et que ça
vous touche moins que ce soit 4 % ou 5 %. Mais je parle des simples petits du
peuple dans cette enceinte. Je ne parle pas de ceux qui ont des gros salaires
de ministre ou des adjoints parlementaires ou des présidents de
commission, mais des simples députés à 60 000 $. C'est
nous qui représentons le peuple ici, dans cette Assemblée. Nous
ne sommes pas dans T'establishment" parlementaire. Et nous, ça nous
affecte plus que celui qui a un plus gros salaire. Mais, indépendamment
du salaire qui nous revient pour le travail que l'on fait, eh bien, on veut
aller devant le peuple, devant la caméra, et j'aimerais que ce soit...
J'ai une demande à faire à mon leader: que cette commission
parlementaire soit télévisée pour que l'ensemble de la
population regarde les experts qui viennent nous voir, et ce serait de bon
aloi, M. le Président.
Il n'y a rien de plus beau au pays du Québec que
d'éclairer les Québécois dans tous les domaines. On a
tellement de misère du côté constitutionnel, de l'autre
côté, de ces temps-ci, si on pouvait jeter une lumière dans
d'autres domaines pour que la vérité sorte nue, claire,
précise et qu'on vote après avec tous les arguments devant nous,
ce serait, M. le Président, un des plus beaux cadeaux de Noël que
le parti au pouvoir pourrait nous faire, d'accepter cette motion de report. On
sait, M. le Président, qu'à cause des coupures il n'y a pas
d'arbre de Noël, cette année, au Parlementaire. On ne peut plus
dire qu'il y avait 99 boules et 30 lumières dedans, mais...
Une voix: 29.
M. Blais: 29 lumières... 30. On est 30. On ne peut pas
dire ça cette année, mais il y a une chose que je tiens à
vous dire: L'arbre de Noël de la vérité, avec toutes ses
boules, tous ses reflets et toutes ses lumières, ce sera celui qui vous
guide dans ce projet de loi et, M. le Président, je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Masson.
Une voix: Vote enregistré.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur cette motion de
report, il n'y a pas d'autres intervenants. Est-ce que la motion
présentée par M. le député d'Abitibi-Ouest qui se
lit comme suit: "Que la motion en discussion soit modifiée en
retranchant le mot "maintenant" et en ajoutant, à la fin, les mots "dans
six mois", est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vote
enregistré.
Une voix:...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vote enregistré,
M. le leader?
Une voix: Qu'on appelle les députés! M.
Chevrette: Adopté sur vote enregistré.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, vote
enregistré. Qu'on appelle les députés!
M. Bélisle: Vote enregistré, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Qu'on appelle les
députés!
Une voix: Ah, mon Dieu!... (21 h 20 - 21 h 29)
Mise aux voix de la motion de report
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Qu'on appelle les
députés. Si vous voulez prendre place. Alors, je mets aux voix la
motion du député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de
l'Opposition officielle, motion qui se lit comme suit: "Que la motion en
discussion soit modifiée en retranchant le mot "maintenant" et en
ajoutant, à la fin, les mots "dans six mois".
Que ceux et celles qui sont pour cette motion veuillent bien se
lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), M. Blais
(Masson), M. Jolivet (Laviolette), Mme Juneau (Johnson), M. Claveau (Ungava),
M. Dufour (Jonquière), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Paré
(Shefford), M. Morin (Dubuc), M. Filion (Montmorency), Mme Caron (Terrebonne),
M. Trudel (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), Mme Carrier-Perreault (Les
Chutes-de-la-Chaudière).
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui
sont contre cette motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: Mme Bacon (Chome-dey), M. Ryan
(Argenteuil), M. Côté (Charlesbourg), M. Côté
(Rivière-du-Loup), M. Sirros (Laurier), M. Vallières (Richmond),
M. Vallerand (Crémazie), Mme Robic (Bourassa), M. Bélisle
(Mille-Îles), M. Cusano (Viau), Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn
(Roberval), M. Houde (Berthier), M. Maciocia (Viger), M. Maltais (Saguenay), M.
Savoie (Abitibi-Est), Mme Trépanier
(Dorion), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beau-din
(Gaspé), M. Chagnon (Saint-Louis), Mme Dionne
(Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel (Sherbrooke), M. Doyon
(Louis-Hébert), Mme Pelchat (Vachon), M. Paradis (Matapédia), M.
Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Leclerc
(Taschereau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Williams
(Nelligan), M. Dauphin (Marquette), M. Kehoe (Chapleau), M. Fradet (Vimont), M.
Messier (Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Charbonneau
(Saint-Jean), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger
(Laval-des-Rapides), M. Gautrin (Verdun), M. Forget (Prévost), M. Khelfa
(Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly
(Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie),
M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger
(Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Bradet
(Charlevoix), M. Després (Limoilou), M. Farrah
(Îles-de-la-Madeleine), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Holden
(Westmount).
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des
abstentions? Aucune abstention.
Le Secrétaire: pour: 13 contre: 57 abstentions: 0
Reprise du débat sur l'adoption du
principe
Le Vice-Président (M. Bissonnet): La motion est
rejetée. Nous poursuivons l'étude du projet de loi 404, à
l'adoption du principe. Je vais permettre à ceux qui doivent se diriger
dans des commissions parlementaires de le faire, en vous demandant,
évidemment, votre collaboration. Alors, nous poursuivons l'adoption du
principe du projet de loi 404, Loi modifiant la Loi sur les conditions de
travail et le régime de pension des membres de l'Assemblée
nationale et d'autres dispositions législatives, et je reconnais M. le
ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Marc-Yvan Côté
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. J'ai cru de mon devoir de me lever en cette Chambre pour
appuyer le projet de loi 404 de manière non équivoque, de le
faire parce que je suis l'un de ceux qui, en cette Assemblée, exception
faite du député de Bonaventure, était au Parlement en
1974, assis à l'arrière, comme simple député, au
moment où il y avait en cette Chambre six députés
péquistes. Six, qui étaient ceux qui, à l'époque,
avaient toutes les solutions à tous les problèmes du
Québec, y compris aux salaires et au régime de pension des
députés. Ils avaient la grâce puisqu'ils n'avaient jamais
été au pouvoir.
Ils étaient ceux qui effectivement avaient à travers tout
le Québec, sur tous les sujets, inventé des solutions,
dirigés qu'ils étaient du haut de la tribune ou d'un conseil
national, à l'occasion, et qui venaient en cette Chambre nous faire la
leçon sur à peu près tout, M. le Président.
J'étais un des 102 et on est revenu siéger entre Noël et le
Jour de l'an, le 26 décembre, après avoir siégé
jusqu'au 23 décembre sur un projet de loi, oui, sur un projet de loi qui
avait fait l'objet, exactement comme aujourd'hui, d'un comité
présidé par M. Jean-Charles Bonenfant, avec des gens des deux
partis, qui avait soumis un rapport. Et nous avions, à ce
moment-là, le consentement de tout le monde. Un comité neutre qui
allait, une fois pour toutes, régler le problème du salaire des
députés.
Et à partir du moment où nous allions prendre ce qu'il y
avait comme recommandations et les mettre dans un projet de loi, nous aurions
l'aval de tout le monde. Et il nous fallait, à ce moment-là,
régler une fois pour toutes cette situation où les
députés étaient eux-mêmes devant le fait qu'ils
devaient eux-mêmes se voter des augmentations de salaire. C'est un peu
pour ça, parce que sinon, je ne me serais jamais levé. Pas parce
que je ne crois pas au projet de loi 404; au contraire. Et il est, M. le
Président, d'une transparence absolument extraordinaire, contrairement
à tout ce qui a été fait dans le passé, peu
importent les partis politiques.
Le leader l'a introduit en Chambre, préparé par un
comité de la même manière, déposé parce que
nous avons des impératifs. Il est bon de se le rappeler: C-52, au
fédéral, nous oblige à en faire une partie - c'a
été reconnu par les députés de l'Opposition de
manière assez claire - sur le plan de l'harmonisation.
M. le Président, il faut dire aux populations qui nous
écoutent que ce qui est déposé aujourd'hui fait suite
à un comité sur lequel siégeait M. Richard Guay,
ex-président de la Chambre et député de Taschereau, le Dr
Victor Goldbloom, ex-ministre de l'Environnement, député aussi de
D'Arcy-McGee et M. Baccigalupo, qui n'en est pas à ses premières
armes dans ce genre de comité.
Ils ont déposé un rapport mandaté par un
comité de l'Assemblée nationale. Et aujourd'hui on se retrouve
devant cette Assemblée avec le projet de loi 404, de manière
très claire, déposé la semaine dernière. Pas
déposé cette semaine ou hier et commencé à adopter
aujourd'hui. Déposé la semaine dernière, visière
levée, plein jour, transparence; ça me paraît être
extrêmement important.
Nous en sommes aujourd'hui à adopter le principe, qu'on appelait
communément, à l'époque, la deuxième lecture - j'ai
encore mes revers - non pas pour adopter en commission parlementaire, cette
nuit, article par article. Non. Pour aller, au mois de janvier 1992, faire le
travail, entendre des gens qui vont venir, effectivement, dire - c'est ce que
souhaitait le
député de Masson, tantôt - un certain nombre de
choses qu'ils seront libres de dire, adopter article par article et revenir au
mois de mars, donc dans quatre mois, pour l'adoption finale de ce projet de
loi. Est-ce que c'est abusif? Non, pas du tout, contrairement à ce qui
s'est toujours passé. On se rappellera d'un certain leader qui, à
l'époque, pour passer un projet de loi, avait dit cette phrase
célèbre à l'Opposition: Nous allons vous passer sur le
corps. Ça a été célèbre, ça. Il faut
se rappeler tout ça. Ce sont des choses que nous avons vécues
ici.
Est-ce que l'attitude de notre leader est comme celle-là? Non, au
contraire, il dit: Prenons le temps de faire en sorte qu'on soit dans une
situation où tout se fera de manière normale. On serait
porté à croire, aujourd'hui, en entendant quelques messagers -
pas tous, certains sont prudents, de l'autre côté, certains
messagers que j'ai entendus avant le souper principalement - que c'est quelque
chose de révolutionnaire, ce que nous nous apprêtons à
faire, que c'est quelque chose d'absolument révolutionnaire. Je n'ai pas
à rappeler que nous sommes à faire le ménage dans un
régime de pension qui a été changé en 1983 parce
qu'il méritait d'être changé - on y reviendra tantôt
- qui a été rechangé en 1987 et qui est aujourd'hui soumis
à quatre régimes. Je n'ai quand même pas 30 ans dans cette
Chambre, mais je suis soumis aux quatre régimes parce que j'ai
siégé de 1973 à 1976, tout comme ma collègue de
Chomedey. On n'est pas nombreux, et on se rappelle un certain nombre de choses.
Vous nous permettrez, à tout le moins...
Nous sommes à changer un certain nombre de choses et à
modifier un certain nombre de choses, dans la ligne de ce que nous ont
recommandé Guay, Goldbloom et Baccigalupo. Il y a du monde raisonnable
là-dedans. Il y a des gens qui ont vécu dans la politique et qui
ont vécu en dehors de la politique, qui ont été à
même d'apprécier ce que nous vivons lorsque nous sommes en
politique et ce que l'on a à vivre aussi quand on est en dehors de la
politique, et, en plus, un professeur d'université qui, lui aussi, voit
un régime de l'intérieur de l'université. J'aurais
aimé ça, moi, que le député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue, quand il est intervenu, nous parle de ses
comparaisons, dans le réseau universitaire, sur le plan des
régimes de pension, par rapport à celui des
députés. Ce n'est certainement pas celui des
députés qui l'a attiré en politique, j'en suis pleinement
convaincu. J'aurais aimé ça. (21 h 40)
Une chose est certaine, M. le Président, il faut arrêter de
faire croire au monde que c'est un régime qu'on ne paie pas. Les
députés de cette Chambre paient 9 % de leur salaire dans ce
régime de pension. Il faut arrêter de faire croire au monde que
c'est l'État et qu'on puise dans les poches des citoyens pour être
capable de se payer un régime de pension. Nous le payons par des
cotisations prélevées sur chacune de nos paies, qui
étaient de 9,4 % et qui seront de 9 % pour s'harmoniser avec ce que le
fédéral souhaite. Oui, M. le Président, nous le faisons,
et je le fais, moi, la tête haute, parce que je pense que nous le
méritons. C'est clair, nous le méritons tous, comme
parlementaires, que l'on soit un parlementaire de l'Opposition ou du
gouvernement. Nous consacrons beaucoup d'heures à travailler, même
si ce n'est pas toujours apparent, même si ce n'est pas toujours un
succès phénoménal, nos affaires, qu'on soit dans
l'Opposition ou au pouvoir.
M. le Président, oui, nous le méritons et ce n'est pas
exagéré, non plus, ce que nous faisons. En pleine clarté,
en plein jour, à la lumière, des 22 ou des 29 que j'entendais
tantôt, des 29 lumières identifiant, par le fait même, les
Québécois, le Parti québécois, alors qu'on est,
nous, 99, disaient-ils, des boules, mais encore, des lumières, il y en a
de toutes sortes d'intensité, de toutes sortes d'intensité! Il
faut se rappeler ça.
Donc, ce n'est pas exagéré par rapport à ce qui se
passe ailleurs. Ça ne veut pas dire qu'ailleurs il n'y a pas des
régimes chromés qui mériteraient d'être
abaissés. C'est clair. Mais, lorsqu'on compare au fédéral,
à l'Ontario et à la Colombie-Britannique, les parlementaires du
Québec qui siègent quand même passablement et qui
travaillent pour faire avancer leur cause - Dieu sait qu'on pourrait juger l'un
et l'autre des parlementaires - nous devons accepter que le Parlement,
actuellement, soit le reflet de notre société et tant mieux; et
tant mieux, avec chacune de nos qualités, chacun de nos défauts,
on intervient ici pour faire en sorte de représenter nos
populations.
M. le Président, sans faire insulte à personne, pourquoi
serions-nous plus maltraités que ceux de la Sûreté du
Québec? Les gens de la Sûreté du Québec,
après 25 ans, ont droit à un régime de pension; ils vont
occuper d'autres fonctions ailleurs. Ils ont ces régimes de pension
qu'on leur a donnés, qui ont été négociés,
et on le comprend. Ils les ont, on leur laisse, c'est à eux. Mais c'est
une catégorie de travailleurs qui, bien sûr, de par leurs
fonctions, prennent des risques dans leur vie; on leur donne des régimes
de pension qui sont passablement avantageux par rapport aux autres gens du
système.
Prenons les professeurs d'université. Prenons-les. Au risque de
soulever l'ire de l'Opposition, je vais en prendre un au hasard, Claude Morin,
seulement celui-là.
Des voix: Ha, ha, ha! Une voix: Le beau cas! Une voix:
Au hasard.
M. Côté (Charlesbourg): Celui-là, par
hasard.
Une voix: Le beau cas!
M. Côté (Charlesbourg): Le hasard fait bien les
choses parce qu'il a été parlementaire, il n'a jamais pu
être autre chose que ministre, lui.
Une voix: C'est déjà pas si mal.
M. Côté (Charlesbourg): C'est déjà pas
si mal. Évidemment, vous n'avez pas eu cette chance-là encore,
vous. Dans son cas, il est pensionné comme député, bien
sûr; quelques jours après, il démissionnait. C'est aussi un
professeur d'université, c'est aussi un haut fonctionnaire et c'est
aussi, aujourd'hui, quelqu'un de l'ENAP. C'est donc quelqu'un qui,
effectivement, est venu dans cette Assemblée, a côtoyé,
semble-t-il, si on lit bien ses livres, plusieurs grands premiers ministres,
tellement qu'il peut se permettre aussi d'écrire des livres aujourd'hui
et d'en tirer certains avantages sur le plan financier. Donc, c'est un fait
indéniable, mais c'était un de vos illustres
représentants.
Il y a aussi, à l'intérieur du privé, des
régimes de pension qui sont assez intéressants. Il ne faut pas
l'oublier. Je n'ai donc aucune espèce de honte compte tenu du travail
que je fais comme député et comme ministre, 80, 90 heures par
semaine. Bien payé! Bien payé! Je suis un de ceux qui, de sa
condition de professeur à l'époque, à devenir
député et ministre, a augmenté ses revenus. Je n'ai pas
peur de le dire. Je suis aussi un de ceux qui ont travaillé au Parlement
à 14 400 $ par année pendant une certaine période,
à partir du moment où je me suis fait battre en 1976, et je suis
retourné faire mes devoirs parce que la démocratie,
c'était ça, et ça m'obligeait à aller refaire mes
devoirs. Je l'ai fait, je suis revenu, et je considère que la place que
j'ai aujourd'hui, après cinq élections, ici, je ne l'ai pas
volée, je l'ai gagnée et j'ai gagné le respect de mes
électeurs. Et je les sers aussi, parce que ça fait partie de mon
travail de représenter mes électeurs et de tenter,
d'arrache-pied, de travailler, même si on ne réussit pas toujours,
à faire en sorte qu'on fasse progresser la société
québécoise sur tout, à tous les niveaux.
Mais, M. le Président, quand je prenais l'exemple de Claude Morin
tantôt, c'est parce qu'il y a des limites à un moment donné
à entendre un certain nombre de choses que je n'accepterai pas. Il y a
des limites, et il faut, M. le Président, se méfier de ceux qui
chantent aujourd'hui. Parce que, en 1974, j'étais là, moi aussi,
et j'ai entendu, l'un après l'autre, jour après jour, avec toutes
les mesures dilatoires, les Burns, les Morin, les Léger, les
Bédard, les Lessard et les Charron, venir nous faire la leçon sur
l'augmentation du salaire des députés de l'époque. Oui,
j'ai entendu ça, moi, ici, assis en arrière. Oui, j'ai entendu
ça à cette époque-là. Et qu'est-ce qu'on disait?
Qu'est-ce qu'on disait? À peu près le même langage qu'on
nous sert aujourd'hui: C'est inopportun. C'était inopportun aussi
à l'époque, au mois de décembre 1974.
Et, M. le Président, j'écoutais la députée
de Chicoutimi et je trouvais certaines ressemblances, sur le plan des propos,
avec Jacques-Yvan Morin, sur le plan du message: On n'est pas trop trop contre
le fond. On est pour, certains, pour d'autres, bien, si les spécialistes
viennent nous dire de l'extérieur que ça a peut-être du bon
sens, au-delà de Guay, Goldbloom et Baccigalupo, peut-être que
ça sera plus acceptable au mois de mars, que ça sera plus
opportun au mois de mars de le faire, ou plus tard. Mais, finalement, c'est
mitoyen, ce n'est quand même pas si pire. On ne peut pas déchirer
sa chemise parce qu'il n'y a pas d'abus, il n'y a pas de scandale, il n'y a pas
d'exagération dans ce que nous nous apprêtons à faire.
Mais, M. le Président, c'est exactement la même chose sur
"inopportun". Que s'est-il passé en 1974 et dans les jours qui ont
suivi? Que s'est-il passé? Et, à l'époque, on
dénonçait en même temps un certain nombre de choses sur le
plan des régimes de pension. À juste titre d'ailleurs, et on
disait: C'est inacceptable de penser qu'un député - et à
l'époque on nommait celui de Drummond - puisse bénéficier
de son régime de pension et se retrouver juge. Donc, double
rémunération. On disait ça à l'époque. Et
ceux-là qui le disaient se sont retrouvés exactement dans la
même situation. Donc, un discours pour la Chambre, mais quand
c'était le temps d'être sur la ligne de feu, on se retrouvait dans
des situations qui étaient contraires. Et, effectivement, il n'y a pas
grand monde en 1974 qui a refusé d'aller encaisser le chèque
d'augmentation de salaire des députés. On a fait des beaux
discours commandés par le conseil national, tenu l'Assemblée
nationale dans un état de crise pendant un certain temps et fait en
sorte qu'on se retrouve, M. le Président, avec un beau spectacle
où on pouvait dire à la population du Québec, à ce
moment-là: On a défendu, c'était absolument inacceptable,
inopportun et même, dans certains cas, abusif. Allez voir aujourd'hui.
Allez voir si chacun ne touche pas le régime dans lequel il
était, (également, mais qui était très clair. Et je
me dis, moi: Méfions-nous aujourd'hui de ceux qui viennent nous dire que
c'est inopportun, parce qu'il faut l'étayer. Pourquoi c'est inopportun?
Parce que la situation économique va mal. On dit: Ecoutez... Même
dans les exemples, on disait: Matane. On a fermé l'usine de Matane. On a
fermé celle de Port-Cartier. Est-ce que ce gouvernement-ci n'a pas
investi des sommes absolument importantes dans le cas de Matane? Dans le cas de
Port-Cartier? Port-Cartier, ça a été le premier dossier
que nous avons réglé en arrivant au pouvoir en 1985, en prenant
des risques financiers. Est-ce que ce
n'est pas le gouvernement actuel qui a pris des risques financiers pour
effectivement faire en sorte qu'il y ait une usine à Matane? Et c'est
nous qui payons les pots cassés aujourd'hui et qui assurons les
financements de l'usine de Matane. (21 h 50) m. le président, quand on
dit "c'est inopportun parce qu'on est dans une situation économique
difficile", c'est vrai qu'on est dans une situation économique
difficile. moi, comme d'autres, on en fait du bureau de comté aussi, on
reçoit des gens qui se cherchent du travail, c'est clair. il faut
être là, de manière très claire, prêts
à faire face aux défis d'aujourd'hui et de demain. mais quand on
disait - ça venait de mon collègue de joliette, pour qui j'ai
beaucoup de respect et d'admiration, vous le savez, ce n'est pas d'aujourd'hui,
je continue de l'avoir quand même - que c'est inopportun dans la
situation actuelle, il ne faut pas laisser croire au monde que, dans la
situation actuelle, à partir du moment où le projet de loi 404
sera voté, ça coûtera des sous demain matin. non, il n'y en
aura pas, de sous, c'est clair; ça n'a aucun effet pour les
députés en fonction puisque la retraite ne viendra pas avant les
élections, pour ceux qui désireront la prendre. donc, demain
matin... ce n'est pas dans six mois que cette situation-là va être
améliorée, à moins que vos souhaits ne soient totalement
comblés sur le plan d'une élection parce que de ce que je
comprends, l'attitude change au fur et à mesure que progresse le temps
nous menant à une élection. vous êtes de plus en plus
sûr, puisque les sondages semblent vous conforter et vous dire que vous
allez être gagnants et que vous vous croyez gagnants deux ans avant une
élection... je me rappelle 1981, nous avions exactement la même
attitude que vous. on était assurés d'être gagnants en
1981. le député actuel de saint-maurice, qui a été
candidat en 1981, peut en témoigner, c'en était un des gagnants;
il y en a d'autres aussi, m. le président. qu'est-ce qui est
arrivé en 1981 sur le plan de l'élection? ça a
viré, ça a eu le temps de virer et c'est à nous...
dites-vous une chose: vous ne gagnerez pas la prochaine élection, on va
la perdre. c'est nous qui allons décider si nous la perdons ou si nous
la gagnons. et je peux vous dire une chose: quand j'entendais le
député d'ungava dire tantôt que c'est un cadeau que nous
voulons faire aux collègues députés pour être
capables de se maintenir en poste jusqu'à la prochaine élection,
je peux vous dire rien qu'une chose: ce n'est pas un régime de pension
qui va tenir un député en chambre. c'est clair, chacun des
députés a travaillé jusqu'à maintenant
d'arrache-pied pour être capable de faire valoir son idée à
l'intérieur du gouvernement, dans les commissions parlementaires et un
peu partout avec un travail très honnête, d'un côté
comme de l'autre, même si on ne partage pas toujours les mêmes
opinions, pour faire en sorte qu'on puisse faire progresser des dossiers et les
faire progresser à l'intérieur du cadre démocratique dans
lequel nous sommes.
M. le Président, non je n'ai pas honte d'être debout
aujourd'hui pour défendre le projet de loi 404 en plein jour, avec toute
la procédure que nous connaissons, qui nous mènerait au mois de
mars avec une adoption, ce qui fait, M. le Président, que je
n'accepterai pas que des gens, aujourd'hui, viennent nous faire le même
spectacle qu'on a connu en 1974 et qui, demain, pourront se retrouver dans une
situation où, effectivement, si vous êtes sincères,
messieurs, j'imagine, et que c'est inopportun... En commission parlementaire,
vous aurez toute l'opportunité, y compris le député de
Rouyn-Noran-da-Témiscamingue, qui est un grand prêcheur et un
grand plaideur de toutes les bonnes causes... Je le mets au défi, M. le
Président, de venir en commission parlementaire sur le projet de loi 404
et de déposer un amendement pour faire en sorte qu'il y ait une clause
d'"opting out" et il sera peut-être le premier à l'utiliser. On
verra la sincérité à ce moment-là.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre de
la Santé et des Services sociaux. Sur le même sujet, je reconnais
Mme la députée...
Des voix:...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): ...de Terrebonne.
Mme Jocelyne Caron
Mme Caron: Merci, M. le Président. M. le Président,
le gouvernement du Parti libéral nous dépose aujourd'hui le
projet de loi 404 non seulement pour harmoniser avec le projet de loi C-52,
mais bien pour bonifier le régime actuel de pension des
députés. M. le Président, je n'ai aucunement l'intention
de parler du régime de pension comme tel parce que, personnellement, je
suis absolument contre ce projet de loi, M. le Président, et ce n'est
pas un spectacle que j'ai l'intention de faire, comme plusieurs
députés du Parti libéral l'ont fait en 1982, mais je le
fais par conviction, M. le Président.
Ce n'est pas une question de mérite. Depuis le début de la
soirée, on nous parle de mérite, on tente de nous faire pleurer
sur les conditions de travail des députés. On nous parle des
nombreuses heures de travail des députés. Eh bien, M. le
Président, c'est comme dans n'importe quel métier du monde.
Effectivement, il y a des députés qui donnent du 100 %, il y a
des députés qui donnent du 150 % et il y en a d'autres qui en
donnent moins. C'est comme dans
tous les métiers du monde. Ce n'est pas un métier
privilégié particulier.
On nous a beaucoup parlé de l'apparence et on nous a même
fait des menaces, à la fin, d'une clause pour pouvoir se retirer. Eh
bien, qu'on l'apporte, cette clause, M. le Président, et je n'aurai pas
peur de la signer parce que, là-dessus, mon passé est garant de
l'avenir. En 1982, je quittais le monde de l'enseignement. J'avais, à ce
moment-là, un salaire de 30 000 $ par année, une
sécurité d'emploi et je démissionnais en mettant de
côté tous les privilèges que ça pouvait apporter. Je
m'en allais comme attachée politique à 14 000 $ par année
sans aucune sécurité d'emploi. Je l'ai fait, ce choix-là,
et j'en ai supporté les conséquences. Lorsqu'on décide
d'être député, on choisit les bonnes choses, mais aussi les
mauvaises; les conditions de travail, on doit les accepter. Personne ici, en
cette Chambre, n'a été obligé de se présenter comme
député. Alors, qu'on cesse de nous parler du mérite ou du
non-mérite et qu'on soit bien conscient qu'un jour, on a fait des
choix.
Ce gouvernement, au niveau des procédures, avait à
déposer ses projets de loi pour le 15 novembre. On a tenté de
nous dire que c'était donc transparent. C'était important, la
transparence. Si, ce projet de loi, vous le trouviez si transparent et si
important, pourquoi ne pas l'avoir déposé en même temps que
les autres projets de loi? Non, M. le Président. En date du 15 novembre,
tout ce qu'on avait sur la table, c'était un menu
diététique 1991; un menu qui n'avait que deux plats de
résistance: le Code civil sur lequel on travaillait depuis le mois
d'août et le projet de loi pour encore taxer les Québécois
et les Québécoises, le projet de loi 170 qui ajoute la taxe de
vente sur les services à partir du 1er juillet 1992. Ça,
c'était important. C'était tellement important qu'on s'est
dépêché de voter une motion de clôture, la semaine
dernière, parce que les travaux n'allaient pas assez vite pour le
gouvernement en place. Ça, c'était urgent; c'était
important de taxer les citoyens.
Le 14 novembre l'Opposition officielle présentait une
série de projets de loi qui auraient dû être
déposés à cette session-ci. C'était important,
c'était urgent. Gouverner, c'est être capable de faire des choix,
de faire des priorités. Est-ce que les pensions des
députés, c'est plus important, c'est plus urgent qu'une
législation sur les surplus des caisses de retraite des travailleurs qui
attendent depuis des années? Est-ce que les pensions des
députés, c'est plus important et c'est plus urgent que plusieurs
projets de loi au niveau de la santé?
J'entendais le ministre de la Santé et des Services sociaux
tantôt. Est-ce que c'était plus important et plus urgent que la
loi d'application de la réforme de la santé? Est-ce que
c'était plus important que le débat sur la politique de
santé et de bien-être promis par le ministre?
Est-ce que c'était plus important que le débat sur les
médecines alternatives promis aussi par le ministre? Est-ce que les
pensions des députés, c'est plus important que de hausser les
critères d'admissibilité à l'aide juridique? Est-ce que
c'est plus important que d'abolir la vente itinérante des
préarrangements funéraires qui ne coûte rien au
gouvernement? Est-ce que c'est plus important que de déposer un projet
de loi pour la protection de la vie privée? Il faut se la poser, la
question. Où est-elle, l'urgence?
Est-ce que c'est plus important qu'un projet de loi qui était
pour créer le conseil des aînés? Est-ce que c'est plus
important que de légiférer en matière
d'équité salariale alors que, depuis que nous avons ce
gouvernement, au niveau de l'équité salariale, les salaires des
femmes, qui étaient rendus à 65 % de celui les hommes, sont
tombés à 62 %? Est-ce que c'est plus important qu'une
législation pour le régime des prêts et bourses accessibles
aux élèves du secondaire professionnel, alors qu'on a des
carences au niveau de la formation professionnelle et qu'on a 40 % de
décrocheurs? Est-ce que c'est plus important que les débats sur
l'énergie, alors qu'on ne cesse d'avoir des augmentations de taxes dans
ce domaine? Est-ce que c'est plus important que l'état de
l'économie, que ce qu'on a réclamé à grands cris
tout au long de la session, une politique de création d'emplois? Il
semble que oui, pour ce gouvernement. (22 heures)
Je suis tout à fait incapable de m'associer à la
démarche du gouvernement dans la situation actuelle. Je trouve ça
carrément indécent. Alors que les travailleurs et les
travailleuses continuent de perdre leur emploi depuis le début de la
récession, le leader du gouvernement, cet après-midi, tentait de
nous faire pleurer sur les difficultés d'un député qui n'a
plus son emploi, qui est battu dans une élection, M. le
Président, comme c'est difficile de retrouver un emploi. Est-ce que
c'est plus facile pour tous les travailleurs et les travailleuses qui ont perdu
leur emploi cette année? Est-ce que c'est plus facile pour eux? Est-ce
que c'est plus facile pour ces hommes et ces femmes de plus de 45 ans qui ont
perdu leur emploi durant l'année? Non, M. le Président, ce n'est
pas plus facile et eux ne peuvent pas se voter une loi pour améliorer
leurs conditions.
Alors que les travailleurs et les travailleuses qui, eux et elles, ont
conservé leur emploi ont dû accepter un gel de leur salaire et un
gel de leurs conditions de travail, alors que les consommateurs subissent,
depuis deux ans, des augmentations de taxes par ce gouvernement libéral
en place, augmentation de taxes municipales, augmentation de taxes scolaires,
augmentation d'Hydro-Québec, ajout de la taxe de vente sur les
vêtements, les chaussures, les appareils électroménagers,
les meubles, ajout de la taxe de vente sur les services à partir du 1er
juillet
1992, est-ce qu'on a réussi, de ce côté-ci de la
Chambre, M. le Président, à sensibiliser le gouvernement en place
sur tous ces problèmes qui étaient vécus par les
consommateurs et par les travailleurs? Non, M. le Président, et,
pourtant, là, ils sont très sensibles aux pauvres conditions de
travail des députés et aux problèmes des
députés qui quittent leur emploi.
On n'a jamais réussi, M. le Président, à leur faire
comprendre toutes les difficultés qui étaient vécues
depuis les deux dernières années, pour les consommateurs, pour
les contribuables, pour les travailleurs et les travailleuses; jamais, M. le
Président, on a été sensibles là-dessus, absolument
pas. Est-ce que c'est si urgent? Alors, que les personnes handicapées -
le ministre de la Santé et des Services sociaux aurait pu nous en parler
- du côté de l'OPHQ, on est en attente et que ces gens-là
doivent attendre un an, un an et demi avant de recevoir des services, est-ce
que c'est plus urgent, nos pensions, que les services à ces
personnes-là? Alors que nos jeunes sont en difficulté, qu'ils ont
des besoins réels et que le gouvernement ne trouve pas d'argent pour ces
gens-là, c'est plus important, nos pensions? Alors que les
aînés ne reçoivent pas tous les services auxquels ils ont
droit, alors que les regroupements de femmes se voient coupés dans leurs
services et que la violence ne cesse d'augmenter...
Lorsque je regarde tous ces faits qui sont une réalité, M.
le Président, je dois vous dire que mes préoccupations actuelles
sont bien loin de mes conditions de travail personnelles, très loin.
Lorsque les contribuables québécois seront traités avec
équité, nous pourrons prendre le temps d'examiner nos propres
conditions. D'ici là, il y a beaucoup de chemin à faire, M. le
Président, beaucoup!
Quand je regarde la situation actuelle, en juin 1991, on nous disait, du
côté de l'ACEF, de l'Association des consommateurs
québécois: Les gens n'ont plus de marge de manoeuvre. L'ACEF,
dont la clientèle est composée de chômeurs,
d'assistés sociaux temporaires et de travailleurs dont le revenu est
inférieur à 25 000 $, prévoit de plus que, cette
année, près d'une cinquantaine de ces cas de coupures
d'électricité auront à être traités, trois
fois plus que l'année dernière. Il y aurait peut-être eu
urgence à regarder du côté des gens qui subissent des
coupures d'électricité. C'aurait peut-être
été plus urgent que de regarder nos fonds de pension. On
ajoutait: Le niveau d'endettement des familles à moindre revenus est
très élevé. Il n'est pas rare de voir chez nous quelqu'un
ayant un salaire de 20 000 $ qui arrive à chaque mois et qu'il lui
manque 200 $. Et, pendant ce temps-là, nous, on pleure sur nos
conditions de travail.
Alors que le Conseil des affaires sociales était alarmé en
juin 1991 par les 825 000 sans emploi et qu'on demandait un redressement sans
précédent, qu'est-ce qu'on a fait, de ce
côté-là pour améliorer les conditions? Rien, M. le
Président. On n'a pas jugé bon d'apporter des mesures pour
améliorer ces conditions. Au contraire, si on regarde notre
législation de cette session, tout ce qu'on a, c'est un projet 170, M.
le Président, pour augmenter les taxes, une augmentation de taxe de
services, puis un beau projet pour les pensions des députés.
Alors qu'on regarde partout au Québec et qu'on nous dit que, finalement,
la misère a augmenté partout, principalement à
Montréal... Et je repense à ma collègue de Johnson qui
tantôt nous parlait des groupes qui étaient obligés
d'organiser des services particuliers. Pas seulement dans sa région, M.
le Président; dans le comté de Terrebonne, on a dû former
un comité de dépannage. On a dû créer des cuisines
collectives. Et, pourtant, on n'est pas supposés être dans un coin
où c'est la grande misère au Québec. Et pourtant, dans
Terrebonne, on se retrouve avec 18 % de familles sous le seuil de la
pauvreté. Et on se retrouve ici, ce soir, en train de discuter de nos
conditions. Je trouve ça carrément indécent, M. le
Président.
En conscience, je suis vraiment incapable, mais tout à fait
incapable d'appuyer un gouvernement qui ferme les yeux, parce que c'est ce
qu'il fait, sur l'ensemble des problèmes vécus par les citoyennes
et les citoyens du Québec et qui préfère
légiférer sur son propre fonds de pension plutôt que de
légiférer sur les besoins réels des gens qui les ont mis
en place pour régler ces problèmes. Parce que c'est ça que
les citoyens et les citoyennes font lorsqu'ils accordent leur confiance
à un député ou à une députée. Ils lui
demandent de légiférer pour venir régler les
problèmes les plus criants qu'il y a au Québec.
Quels sont les problèmes les plus criants au Québec?
Est-ce que ce n'est pas plutôt la création d'emplois, la formation
professionnelle, l'éducation, la santé? Avec le peu de projets de
loi qu'on a déposés, on aurait dû s'attendre à des
projets de loi sur les besoins essentiels. Non, ce qu'on trouve à nous
apporter, c'est le projet de loi sur les fonds de pension des
députés. Mettez-vous deux minutes à la place du
contribuable québécois. On sent partout la révolte qui
gronde et je ne comprends vraiment pas que, de l'autre côté, on ne
le sente pas. Il faut être tout à fait tourné sur
soi-même pour ne pas le voir, M. le Président.
Nous sommes ici pour répondre aux besoins de la population. Si ce
projet de loi était si opportun et si valable, pourquoi ce gouvernement,
parce que c'est ce gouvernement qui était là de 1985 à
1989, en période de prospérité économique...
Pourquoi ne l'avez-vous pas apporté, ce projet de loi? Vous étiez
là de 1985 à 1989. Personne, de ce côté de la
Chambre, n'a pensé à l'apporter, en période de
prospérité. Pourquoi est-ce si urgent maintenant? Où est
l'urgence? La seule véritable raison que je peux voir, M. le
Président, c'est celle qu'évoquait
tantôt mon collègue d'Ungava. Ça ne peut pas
être d'autres raisons, M. le Président.
Le projet de loi n'a pas été déposé avant le
15 novembre. Mais, depuis le 15 novembre, M. le Président, je peux vous
dire qu'il y a eu des pressions, par exemple, du côté des
députés ministériels. Les pressions ont été
fortes sûrement pour le leader du gouvernement. Ce qu'on entendait en
coulisse, les rumeurs dans les corridors, c'étaient uniquement les fonds
de pension. Cette session-ci, personne ne se battait sur des sujets
d'importance. Tout ce qu'on entendait comme rumeurs, c'étaient sur les
fonds de pension. Est-ce que le projet sera appelé ou s'il ne sera pas
appelé? C'est ce qu'on entendait. Les pressions ont été
tellement fortes, M. le Président, que le leader l'a appelé.
Donc, la seule véritable raison, c'est un intérêt
immédiat, un intérêt qui urge devant l'arrivée
prochaine d'une élection, et là on se dépêche. On ne
l'a pas fait, de 1985 à 1989, en pleine prospérité, mais
là, même s'il y a récession, même si les conditions
sont tout à fait inacceptables, inadmissibles, là, M. le
Président, on est prêt à le faire.
Et, de l'autre côté, on tente de nous parler des
mérites, de l'importance d'une bonification et des traitements. Vous
savez, M. le Président, le ministre de la Santé et des Services
sociaux tantôt faisait des gorges chaudes avec les spectacles, il nous
parlait de 1974, il nous parlait de 1982. Eh bien je peux l'assurer que
certains de mes collègues lui rafraîchiront la mémoire et
lui rappelleront certains propos de ses collègues en 1982 au sujet des
conditions des députés. Peut-être qu'en écoutant, en
revoyant ce qui s'est passé à ce moment-là,
peut-être que le ministre de la Santé se rappellera un petit peu
ce qui est arrivé, parce que là on semble l'avoir oublie
complètement. En 1982, est-ce que le gouvernement, est-ce que les
députés du Parti libéral, qui étaient à ce
moment-là dans l'Opposition, étaient solidaires avec les
députés du Parti québécois sur les mesures qui
touchaient les députés? On pourra peut-être lire certains
extraits de 1982. Je vais laisser ce soin à mes collègues. (22 h
10)
M. le Président, depuis le début, j'ai
écouté toutes les interventions et je peux vous assurer que
personne ne m'a convaincu de la nécessité et de
l'opportunité de ce projet de loi. Et lorsqu'on nous dit qu'il va y
avoir, que peut-être il y aurait une clause, eh bien oui, mettez-la,
votre clause, et je n'ai absolument pas peur, et je vous avertis que je vais
m'y soustraire si vous la mettez. Je vous le dis immédiatement. Et,
là-dessus, mon passé est garant de l'avenir. Je n'ai aucun
problème à vous annoncer ça, M. le Président. Et le
député de Mille-Îles tantôt nous lançait ses
grandes... Il nous faisait un spectacle, véritablement un spectacle, sur
l'importance de cette bonification. Et, même, il interpellait les
députés de ce côté-ci qui ne le regardaient
même pas, mais peut-être parce qu'il souhaitait qu'on le regarde.
Il nous disait: Les apparences... Les apparences, eh bien, s'il y a quelqu'un
qui s'occupe de ses apparences, M. le Président, je pense que le
député de Mille-Îles n'a absolument pas de leçon
à faire à personne, en cette Chambre, là-dessus.
M. le Président, au moment où le Québec a besoin
d'un gouvernement responsable, capable de prendre ses responsabilités,
capable de donner au Québec une législation pour régler
les problèmes que nous vivons, je trouve tout à fait inacceptable
et inadmissible qu'on ose nous présenter aujourd'hui un projet de loi
qui vient uniquement s'occuper des conditions de travail des
députés alors qu'il y a tant à faire, M. le
Président. Merci.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): merci, mme la
députée de terrebonne. sur le même sujet, je cède
maintenant la parole à m. le député de
louis-hébert.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: Merci, M. le Président. M. le Président,
évidemment, le sujet que nous abordons ce soir est un sujet qui est
délicat, qui peut, à première vue, paraître
embarrassant, qui, si on écoutait l'Opposition qui fait tout pour que ce
soit le plus embarrassant possible, ne devrait pas être devant cette
Chambre. M. le Président, à écouter la
députée de Terrebonne qui vient de parler, je dirais qu'elle a
une approche tout simplement misérabiliste vis-à-vis de la
société québécoise. Elle parle des chômeurs,
elle parle des femmes qui sont battues, des femmes qui ont des enfants. M. le
Président, on pourrait tenir ce discours-là et c'est tellement
facile de le faire.
Ce à quoi on assiste, actuellement, M. le Président, de la
part de l'Opposition, c'est tout simplement - et les propos de la
députée de Terrebonne sont clairs à ce sujet-là -
un règlement de comptes. L'Opposition règle ses comptes
actuellement avec le Parti libéral par rapport à ce qui s'est
passé en 1982. C'est très clair dans mon esprit, on attendait sa
chance, du côté de l'Opposition, pour nous rendre la monnaie de
notre pièce disant: Vous autres, on vous reprendra au détour. Et
c'est aujourd'hui, comme on dit, qu'ils ont décidé de se payer la
traite, qu'ils ont décidé que c'était à notre tour
de payer. Et ils ont attendu depuis 1982, ça fait presque 10 ans.
Règlement de comptes pur et simple, M. le Président. Moi,
la gageure que je fais actuellement, comme député de cette
Assemblée nationale, c'est que la population du Québec est assez
fière pour s'assurer que ses députés, ses
représentants élus, ceux a qui elle a fait confiance, ceux
à qui elle confie la responsabilité de son avenir, que la
population du Québec est assez
fière pour que ces gens-là se trouvent bien payés,
convenablement rémunérés avec des pensions qui ont de
l'allure. Je pense que la population du Québec est assez mature pour
ça, est assez mûre pour ça. La gageure que l'Opposition
fait actuellement, c'est le contraire. C'est que la population du Québec
est aussi mesquine que l'Opposition, qu'elle veut voir ses
députés crever de faim et, si possible, quêter à la
porte de l'église une fois qu'ils ne seront plus
députés.
Moi, je ne pense pas que la population du Québec veuille
ça. Je pense que la population du Québec est suffisamment
fière, suffisamment honnête pour s'assurer que les
députés, qui font un travail exigeant, un travail difficile, un
travail qui demande de nombreuses heures, un travail qui exige, de la part des
députés, une disponibilité à toute épreuve,
à tout moment, que cette population du Québec est prête
à rémunérer convenablement, sans abus, ses élus
qu'elle a choisis. Moi, c'est ce que je pense. C'est l'opinion que j'ai de la
population du Québec. C'est ce que je connais de la population de mon
comté. Ce n'est pas une population mesquine, ce n'est pas une population
envieuse, ce n'est pas une population jalouse, ce n'est pas une population qui
méprise son député, c'est une population qui veut en
être fière. Et, pour ça, la population est prête,
bien sûr, à s'imposer un certain nombre de sacrifices; ça
va ensemble.
Moi, je n'ai pas honte de me présenter devant la population et de
tenir ce discours-là. Je ne suis pas en peine pour moi, M. le
Président. J'écoutais le député de Masson qui
disait: Moi, ça va très bien au point de vue des finances. Moi,
les finances, c'est couci-couça, M. le Président, mais ce que je
vous dirai, c'est que je ne suis pas en peine pour me trouver une job
après, par exemple, parce que je l'ai déjà fait à
plusieurs reprises. Je ne suis pas en peine pour ça. Si jamais les
choses se produisaient dans ce sens-là, ce n'est pas parce que je suis
en moyens, c'est parce que je considère que la capacité que j'ai
va me permettre de me tirer d'affaire autrement qu'en étant
député de l'Assemblée nationale. Ce discours-là, je
le fais par souci d'honnêteté, par souci de dire à la
population: Voici ce que nous vous proposons. Nous vous proposons de nous payer
une pension qui va avoir un certain bon sens, qui va nous permettre de vivre
convenablement.
Je dis aujourd'hui à la population qui me rencontre... M. Doyon,
de toute façon, on espère que vous allez être élu -
on me disait ça - mais si jamais le pire arrivait pour vous, ce n'est
pas trop grave, avec votre fonds de pension, vous êtes correct. Vous
êtes à votre deuxième mandat - on parle de la
dernière élection - vous aurez bien 30 000 $, 35 000 $. C'est
ça que vous aurez. Ça fait cinq ans, de toute façon, deux
élections, on sait bien que c'est ça, le fonds de pension des
députés. Je leur disais: Si je ne suis pas élu demain
matin, je suis battu, savez-vous c'est quoi, ma pension, à moi? C'est 11
800 $ par année; c'est ça, ma pension. Ah! on ne savait pas
ça! Comment ça se fait? On nous a toujours dit que
c'étaient des pensions de cinq ans, deux élections, qu'on s'en
allait avec 25 000 $, 30 000 $ dans les poches pour le reste de ses jours,
pleine indexation, en sortant comme député. Comment ça se
fait? moi, je suis heureux que ce projet de loi soit là aujourd'hui.
quand bien même ce serait juste... il ne passerait pas, le projet de loi,
que ça ne me ferait pas grand-chose, dans le fond, si ça
permettait aux gens de réaliser que, finalement, le fonds de pension
qu'ils pensent que j'ai, je ne l'ai pas, ni mes collègues qui sont
à côté de moi, ils ne l'ont pas. ce n'est plus vrai: cinq
ans, deux élections. ça a été comme ça du
temps du pq et, une fois qu'ils ont eu fait leurs cinq ans, une fois qu'ils ont
eu fait leurs deux élections, ils l'ont modifié, le fonds de
pension, et la grosse fournée des députés qui profitaient
de ça, c'étaient des députés péquistes.
grand bien leur fasse! je ne suis pas jaloux d'eux autres. mais une fois que
leur compte a été réglé, à eux autres, ils
avaient fait leurs cinq ans, ils avaient leurs deux élections dans la
poche, ils ont dit: merci beaucoup. les petits nouveaux comme toi,
réjean doyon... tu repasseras, on va t'envoyer à 3,5 %, tu vas
cotiser comme les fonctionnaires.
Mon espérance de vie, comme député, en moyenne,
moi, c'est 6,6 ans, comme député dans cette Assemblée
nationale. Un fonctionnaire, c'est quoi, sa durée de vie? C'est 30, 35
ans dans la fonction publique. Si on voulait faire les proportions, il faudrait
tenir compte de ça quelque part. Moi, j'en ai 15 000, fonctionnaires,
dans mon comté; ils vont me comprendre quand je vais leur expliquer
ça, qu'eux autres ils font 25, 30, 35 ans dans la fonction publique -
c'est bien correct, pas de problème avec ça - qu'ils se retirent
avec 70 % de leur salaire - parfait, je suis bien content pour eux - mais que,
moi, je me serais retiré, après deux mandats, et là
j'étais au-dessus de la moyenne, avec 11 800 $. Ce n'est pas plus grave
que ça, mais ça permet de le dire, ça permet d'expliquer
ces choses-là. (22 h 20)
La différence qu'il y a entre le traitement qu'on fait
actuellement et celui qu'on s'est fait faire en 1982, que vous nous reprochez,
c'est que les avantages qui sont dans ce projet de loi là, et qui sont
réels, vont être pour tout le monde ici, dans cette
Assemblée. Il n'y a pas de privilégiés. Il n'y a pas un
côté de la Chambre qui va souffrir pendant qu'un autre va
s'engraisser. Ça, c'est une drôle de différence avec 1982.
C'est une drôle de différence! Il faut expliquer ces
choses-là à la population. Tout le monde, dans cette
Assemblée, va profiter du projet de loi. Ceux qui ne sont pas contents,
ceux qui n'en veulent pas, de ça, auront simplement à venir en
commission parlementaire au mois de février, au
mois de mars, proposer un amendement permettant le retrait pour ceux qui
ne veulent pas profiter du fonds de pension. Qu'ils viennent ici et qu'ils
disent: Dans les 60 jours, un député a le droit d'informer le
secrétaire général de l'Assemblée - c'est un
article de trois lignes - qu'il n'entend pas se prévaloir des
modifications au fonds de pension tel que prévu dans le projet de loi
404, et j'ai signé le député de. Proposez cette option de
retrait là. Je suis sûr que vous n'aurez pas de misère
à nous la faire accepter; nous autres, on va voter pour, on va
l'accepter. Vous dites toujours que le gouvernement n'accepte jamais
d'amendement, on vous le dit qu'il y en a un qu'on va accepter. Proposez-le. Si
le député d'Abitibi-Ouest veut le faire, il le fera
lui-même, il est leader, peut-être qu'il a plus de chances que les
autres; il le fera. Mais je ne pense pas qu'il y en ait beaucoup d'amendements
de ce type-là; je ne pense pas qu'il y en ait beaucoup parce que je sais
à qui je parle quand je m'exprime de cette façon-là. Je
sais à qui je parle et à qui je m'adresse.
La foi sans les oeuvres, vous savez comment ça continue? Eh bien,
on en a de belles preuves ici. Ceux qui ne veulent pas du fonds de pension,
vous le direz, vous viendrez en commission parlementaire, on vous en propose
une commission parlementaire. C'est très simple. Qu'est-ce qu'il y a de
tricheur là-dedans? Je ne peux pas voir, M. le Président,
pourquoi un député à l'Assemblée nationale n'aurait
pas des conditions de travail qui s'assimilent, à toutes fins pratiques,
avec ce qui s'offre dans d'autres Parlements, que ce soit à Ottawa, que
ce soit à Toronto. Il n'y a pas véritablement de raisons. Les
responsabilités qui sont les nôtres se comparent, au moins, avec
celles que ces gens-là peuvent avoir.
La députée de Terrebonne nous faisait tout un discours
là-dessus, tout à l'heure, en nous disant: Pauvres
chômeurs, pauvres petits enfants, pauvres femmes battues, pauvres
itinérants, et là c'était la ribambelle, la litanie de
tout le monde qui fait pitié sur la terre, et elle disait: Nous autres,
les députés, regardez-nous ici, à côté de ce
monde-là, on ne fait pas pitié, nous autres. Bien non! Mais,
est-ce que le devoir d'un député, c'est de faire plus
pitié que les gens qui font le plus pitié dans son comté?
Est-ce que c'est ça? Est-ce qu'il faut encore faire plus pitié?
Est-ce qu'on va aider plus le monde si on est encore plus pauvre que le plus
pauvre de notre comté? Est-ce que c'est ça, l'objectif qui est
visé? Moi, je dis que ce n'est pas ça que la population veut de
son député. La population veut un député qui est
heureux de faire son travail, qui est satisfait, qui fait son possible et qui
considère que la rémunération qui est attachée au
travail qu'il accomplit, c'est une rémunération qui est
honnête, qui ne déborde pas la mesure, qui est comparable à
d'autres travaux semblables.
M. le Président, je n'ai pas été
député, et vous non plus, toute ma vie. On a déjà
travaillé ailleurs. La plupart des députés ici, quand on
se parle entre nous autres, on n'a pas grimpé dans l'échelle
salariale. Je vous dirais, M. le Président, que moi, comme
député de Louis-Hébert, en 1971, j'étais
administrateur IV au ministère des Communications, comme directeur
général de l'administration et chef du contentieux. Comme
député de Louis-Hébert, je suis encore
rémunéré comme administrateur IV, 20 ans après.
J'ai grimpé et c'a été vite! C'a bien été,
mon plan de carrière! 1971, administrateur IV, 33 ans, 53 ans, 1991,
encore administrateur IV. Merci beaucoup! Je ne suis pas trop
gêné, je n'ai pas sauté trop d'échelons. Mais
ça, c'est la vérité. On s'imagine que c'est la fin du
monde que d'être député.
Je voudrais que les fonctionnaires sachent, ici - il y en a plusieurs,
il y en a 10 000, 15 000 dans mon comté - que le salaire des
députés est basé sur la médiane des administrateurs
IV au gouvernement. On n'est pas classé comme des administrateurs
d'État, là, on n'est pas classé comme des administrateurs
classés I; administrateurs iV, dans la médiane. Il n'y a pas
d'abus là, alors que, nous, nous avons une responsabilité
d'établir les lois, de les faire les plus justes possible, de
contrôler les dépenses du gouvernement et que, jusqu'à un
certain point, nous sommes - pas pour se prendre pour d'autres - les patrons de
cette immense machine gouvernementale qu'est le gouvernement du Québec.
C'est à nous que les gens confient la responsabilité. Toi, tu es
mon député, fais donc attention pour que l'argent que tu viens
chercher dans nos poches soit le mieux dépensé possible. C'est
ça, notre travail. C'est ça, notre job. Alors qu'à
écouter certains discours que j'entendais tout à l'heure du
côté de l'Opposition, pour bien faire notre job, il faudrait
être sous-payés, misérables, s'il y a un petit moyen
malades en même temps et, là, on ferait tellement pitié
qu'il n'y aurait personne qui voudrait de notre job et on serait certains
d'être réélus. C'est une façon de voir les choses,
mais disons que ce n'est pas la mienne, que ce n'est pas celle des
libéraux.
Nous avons évalué la situation. Nous avons demandé
à des sages - un péquiste, là-dedans, M. Richard Guay, qui
était président de l'Assemblée nationale, un
libéral, M. Victor Gold-bloom, ministre de l'Environnement et des
Affaires municipales d'un gouvernement précédent, et un eminent
spécialiste en sciences politiques, M. Baccigalupo - de regarder toute
la situation, de comparer avec les autres Parlements, d'interroger les
députés, d'aller voir ceux qui ne sont plus
députés, en toute transparence, d'aller voir les femmes de
députés qui sont décédés, d'aller voir
comment elles vivaient, de comparer les chiffres et de dire: Faites-nous un
rapport. Bien, le rapport, on l'a reçu et, maintenant, après
l'avoir regardé, parce qu'on sait que la machine gouvernementale n'est
pas aussi rapide qu'on le voudrait... Pour ne rien vous
cacher, M. le Président, là-dedans, on a
espéré qu'on ferait comprendre le bon sens à l'Opposition.
C'est pour ça que ça a retardé un peu. Moi, si on avait
suivi mon idée là-dedans, on n'aurait pas trop perdu de temps
là-dessus. On n'aurait pas trop perdu de temps. J'étais certain
qu'ils seraient contre parce qu'ils ne pourraient pas se retenir de faire de la
politique là-dessus. L'occasion est trop belle. Pas capables de se
retenir une fois, de faire qu'il y ait une exception quelque part à la
règle qui est la leur, c'est-à-dire de faire de la politique sur
tout. Moi, je le savais qu'ils ne seraient pas d'accord, que, même si on
retardait encore une semaine, on se retrouverait, on se buterait encore
à une l'Opposition aussi bornée que celle qu'on a aujourd'hui
devant nous.
Bien c'est ça qui se passe et, là, on s'est
retrouvés dans des circonstances qui font qu'on est à la fin de
la session. Mais il faut savoir là-dedans, M. le Président, que
le vote qui va se prendre ce soir va tout simplement permettre à
l'étude de se continuer au mois de février, au mois de mars en
commission parlementaire où on va inviter des spécialistes, des
experts à venir nous entretenir. Et si les députés de
l'Opposition ont des inquiétudes, des questions à poser, ils les
poseront à ce moment-là. Il n'y a pas de cachettes à faire
là-dedans. S'ils ont des amendements de la nature de celui que je leur
ai proposé de faire, bien ils viendront avec ces amendements-là.
Ils seront sûrement les bienvenus. Et sachez, M. le Président,
qu'au mois de mars, si jamais le projet de loi est adopté - parce qu'on
n'est pas encore rendus là - il n'y a pas de dépense - et on l'a
dit mais il faut le répéter - immédiate pour le
gouvernement, pas de dépense immédiate. C'est simplement
éventuellement, quand on prendra notre pension, nous, les
députés, ici, à l'Assemblée nationale, et on ne
part pas avec la caisse, on part avec 4 %, M. le Président. je vais
juste vous faire une petite démonstration. regardez. on va accumuler 4 %
par année, 4 % par année où on va avoir
siégé à l'assemblée nationale. notre moyenne de vie
ici, à l'assemblée nationale, n'est pas tout à fait de 7
ans. donc, à peu près 7 fois 4, 28 % du salaire. les
fonctionnaires, dont la moyenne de vie dans la fonction publique est entre 30
et 35 ans, eux, ont 2 % par année, ça veut dire que, quand ils se
retirent avec leur pension, ils se retirent avec 60 %. je suis content pour
eux. 70 % est un maximum. mais, entre 60 % et 70 %, avec certaines
pénalités qu'ils peuvent accepter, on considère que c'est
quelque chose de raisonnable que de partir avec 60 %, 65 %, 70 % de son
salaire. en moyenne, les députés partiront avec entre 25 % et 30
% de leur salaire quand ils cesseront d'être députés, en
moyenne, si l'espérance de vie des députés se maintient.
il n'y a pas de raison pour ne pas qu'elle se maintienne parce qu'on ne dure
pas très longtemps comme députés. et on trouve ça
exagéré. moi, je demande à la population, aux
fonctionnaires qui m'écoutent: Vous en iriez-vous à votre
retraite avec 28 % de salaire? Partiriez-vous à votre retraite avec 28 %
de salaire? Bien c'est ce qu'on est en train de vouloir se voter actuellement.
En moyenne, c'est 25 %, 27 %, 28 %, 30 % de salaire, comme pension, c'est
ça qu'on est en train de se donner. C'est ça qu'on se donne alors
que les fonctionnaires ont, grand bien leur fasse - content pour eux, je l'ai
déjà été, fonctionnaire, 25 ans dans ma vie - eux
autres, ils partent avec 60 %, 65 %, 70 % et on considère que c'est
correct, ça, que c'est normal, qu'il n'y a pas d'abus là. A ce
moment-là, comment se fait-il qu'il y aurait abus pour les
députés de partir avec une pension entre 25 % et 30 %? Il me
semble que le calcul est facile à faire. Ne pas vouloir
reconnaître ça, M. le Président, c'est faire preuve soit de
mauvaise foi ou d'ignorance, je ne sais pas laquelle choisir. Je ne sais pas
quoi choisir. (22 h 30)
Moi, s'il y a une chose qui me fait de la peine aujourd'hui, c'est de
voir l'attitude de l'Opposition sur un sujet comme celui-là. C'est
tellement facile de tenter d'embarrasser le gouvernement, de le mettre dans ses
petits souliers. En faisant ça, ceux à qui ils nuisent le plus,
c'est à eux, parce que quelqu'un qui raisonne vraiment se dit: Pourquoi
ces gens-là ne veulent-ils pas que ce changement-là s'effectue?
Il y a peut-être une raison, M. le Président. C'est que
peut-être ils savent qu'ils ne valent pas ça, eux, c'est
peut-être ça. Je ne dis pas que c'est ça, j'essaie de
trouver des explications. Moi, je considère que je vaux 30 % de mon
salaire quand je ne serai plus député. Je ne suis pas
gêné de ça. Je ne suis pas sûr qu'il va y avoir
beaucoup de fonctionnaires dans le beau comté de Louis-Hébert qui
vont me le reprocher. Je les connais trop pour ça. On me le reproche de
l'autre côté, mais il n'y a pas beaucoup de fonctionnaires qui
vont venir dire: M. Doyon, vous vous êtes voté une pension
à 28 %, 30 %, ce qui est beaucoup trop élevé. Parce qu'eux
autres, ils savent bien que celle qu'ils vont prendre, ça va être
à 65 %, 70 %. Alors, je ne pense pas entendre beaucoup ce
discours-là.
Mais la seule raison, c'est que la politique étant ce qu'elle
est, le gouvernement est là pour recevoir des coups, pas parce qu'il en
mérite, mais parce que l'Opposition est prête à en donner.
Qu'est-ce que vous voulez, M. le Président? Ça fait partie de la
vie qu'on doit mener ici. C'est sans aucune gêne que je considère
ce projet de loi comme parfaitement justifié, comme étant un
projet de loi qui amène l'adhésion totale de tout le monde, sauf
de ceux qui se bouchent les yeux. Je suis sûr, M. le Président,
qu'encore une fois le bon sens va triompher parce que ce qui importe - je
termine là-dessus - c'est que la population réalise que ce qui se
passe ici, c'est quelque chose de normal, c'est
quelque chose de convenable. Il n'y a pas d'abus, il n'y a rien d'abusif
et je pense que la population est en train de réaliser ça.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Louis-Hébert. Sur le même sujet, je
cède la parole à Mme la députée de Johnson. Je vous
rappelle que vous disposez d'une période maximale de 20 minutes, Mme la
députée.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais
relever certaines choses que mes deux prédécesseurs du
côté libéral ont dit dans leurs interventions. Pour
commencer, le député de Charlesbourg et ministre de la
Santé et des Services sociaux a parlé de mes valeureux
collègues, les six petits députés du Parti
québécois. Je dis "petits", parce qu'ils étaient en petit
nombre, pas parce qu'ils n'étaient pas en forme. Il a donné un
témoignage tout à l'heure de leur "vigoreusité". À
six, ils ont tenu 102 députés en haleine, ils les ont fait
revenir - c'est lui qui l'a dit dans son intervention - le 26 décembre
pour discuter d'un projet de loi semblable.
M. le Président, j'étais là en 1981, le
député de Charlesbourg et ministre de la Santé et des
Services sociaux a sûrement fait exprès pour sauter par-dessus
1982. En 1982, on était de l'autre côté de la Chambre, lors
de la récession de 1982, et les libéraux étaient de ce
côté-ci de la Chambre, M. le Président. Il n'a pas
parlé de ça, le député de Charlesbourg, dans son
intervention de tout à l'heure, mais moi je vais lui en parler tout
à l'heure des discours qui se sont faits à cette
époque-là. Moi, j'étais là en 1982, M. le
Président. Et aussi le député de Louis-Hébert a dit
qu'en 1982, on s'était voté une loi qui n'était pas juste
pour tout le monde, qui avait modifié grassement nos salaires. Mais
pourquoi se sont-ils dépêchés de la changer en 1987, si
c'était si bon que ça? Pourquoi le Parti libéral, qui
était là depuis le 2 décembre 1985, est-il intervenu en
1987, et a changé le régime? Pourquoi? Parce qu'il était
si bon que ça? Voyons donc! Voyons donc! Pourquoi l'avez-vous
changé? Parce qu'il était si mauvais que ça ou si bon que
ça?
Le Parti libéral, M. le Président, fait des discours, mais
en réalité, ce n'est pas ça qui se passe.
Je vais vous lire ce qui s'est passé en 1982. Les éminents
collègues du Parti libéral, le 13 décembre 1982, à
quelques jours de ce qu'on est présentement; on est le 16
décembre, là... Le 13 décembre, M. Lalonde, c'est
quelqu'un que vous connaissez, ça?
Une voix: Non.
Mme Juneau: Peut-être pas vous. Oui, vous étiez
là.
Des voix: Ha. ha, ha!
Mme Juneau: Mais nous, on l'a bien connu, M. Lalonde. Oui, oui.
On l'a bien connu, M. le Président. Il disait, au sujet du dossier en
question: "M. le Président, ces considérations dites, nous
croyons, nous, du Parti libéral du Québec qu'il est impensable
que les députés se permettent une augmentation de salaire et ce,
pour au moins un an. Je dis qu'il est indécent, dans les circonstances
actuelles, que les députés se votent ici, à cause des
pouvoirs qui nous sont impartis, une augmentation. Je ne referai pas les
discours que les péquistes nous ont tenus en 1974; la démagogie
dégoulinait de tous leurs propos... Imaginez donc! Ça,
c'était M. Lalonde, Fernand Lalonde...
Une voix:...
Mme Juneau: C'est ça. C'est ça qu'il disait.
Une voix: Avocat eminent.
Mme Juneau: Puis il disait, en plus de ça, M. le
Président... Ah! C'est beau à lire À la page 7135, 13
décembre 1982, Fernand Lalonde: "Le gouvernement étant dans la
dèche - c'est quelque chose qui ressemble à ce qu'on vit
aujourd'hui, je pense, hein? - comme il l'est actuellement - bien, on entrevoit
4 000 000 000 $ de déficit, c'est proche de la dèche, ça,
hein? - et les contribuables québécois étant
surtaxés... Ça "ressemble-tu" à ce qu'on vit aujourd'hui,
ça, avec le bâillon sur la loi 170 qu'on a eu vendredi soir
passé? La loi des taxes, 686 articles, M. le Président; on a eu
le bâillon après le 132e article. C'est ça. C'est ça
qu'on avait, les discours de Fernand Lalonde en 1982. "Il est impensable,
dit-il, de faire autre chose que de dire notre non à toute augmentation
de salaire pour l'année 1983."
Une voix: On se baissait.
Mme Juneau: Et on vient nous taxer de faire de la
démagogie? On vient nous dire que ces gens-là sont transparents
et qu'ils ne feraient jamais une chose semblable? Les paroles s'envolent, mais
les écrits restent. Les écrits restent, M. le Président,
et on peut, près de 10 ans après, s'en resservir.
Je pourrais vous en citer d'autres. On a un autre député
qui est encore ici, M. Sirros. Excusez, j'aurais dû le nommer par son
comté, mais, en 1982, ils l'ont nommé par son nom. "Vous savez ce
que cela va faire, au moment où la conjoncture économique se
gâte?" C'est déjà gâté! "Voulons-nous montrer
que nous sommes au service des Québécois, des serviteurs du bien
commun ou donner l'impression - et j'attire votre attention sur le mot
"impression" - que nous pensons avant tout à nous-mêmes et
passer
pour des sangsues collées aux fonds publics." Aïe!
"C'était-u" beau, ça, un peu? Des sangsues collées aux
fonds publics. (22 h 40)
M. le Président, comment voulez-vous qu'on puisse se
réjouir ce soir que le gouvernement nous amène un projet de loi
pour augmenter nos fonds de pension? Pendant qu'il y a 400 000 chômeurs
au Québec, pendant qu'il y a 600 000 personnes qui reçoivent des
chèques d'aide sociale, comment voulez-vous, en toute
honnêteté, qu'on se réjouisse d'une bonification? Je ne dis
pas qu'on ne la mérite pas. Je ne dis pas qu'on ne travaille pas. Je ne
dis pas que les députés fédéraux ne gagnent pas
plus cher que nous autres puis qu'ils ne le méritent pas plus que nous
autres. Je ne dis pas ça. Je dis que ça n'a pas de bon sens dans
un temps pareil. Ah bien, si le vigneron de la grappe industrielle de l'an 2000
nous promettait des récoltes pour juin, M. le Président,
là je pourrais dire en toute confiance puis sans inquiétude et
sans démagogie non plus que je serais contente, comme tous les
députés ici en Chambre, qu'on puisse, nous aussi, toucher une
augmentation de nos pensions. Mais il faudrait pour ça, M. le
Président, qu'au bout du tunnel il y ait une toute petite lueur de fin
de récession. Il aurait fallu pour ça, M. le Président,
qu'un gouvernement responsable de l'autre côté mette en place,
pendant qu'il était encore temps, des programmes pour que le
Québec se relève d'une récession qui n'en finit plus. Il
aurait fallu ça. Sauf qu'au printemps dernier, lorsqu'on était de
plein fouet dans la récession, je me souviens que mon chef, M. Parizeau,
a demandé au gouvernement de mettre sur pied un plan Biron 3
adapté aux années quatre-vingt-dix. Je me souviens. Et qu'est-ce
que le ministre de l'Industrie et du Commerce a fait comme réponse?
1-800-461-AIDE. C'était le numéro miracle. Le numéro qu'il
fallait tous et chacun rejoindre pour sortir du tunnel.
Tout à l'heure, M. le Président, j'ai parlé sur le
report et je vous ai fait une description de gens de l'Estrie qui avaient perdu
leur emploi. Et je pourrais vous en parler encore, encore et encore, M. le
Président. Puis ça, c'est juste ma région. Il y a d'autres
régions au Québec, la Gaspésie, entre autres, qui est
touchée très gravement par le chômage. Et ça
perdure. Je suis allée dans une tournée à Matane, à
Rimouski, à Rivière-Ouelle. Ces gens-là, M. le
Président, souffrent aussi d'un chômage chronique. Pensez-vous
qu'on peut, en tant qu'élus du peuple, se réjouir du fait que,
pendant que tout le monde a de la misère, on se paie une augmentation de
notre plan de pension? Je pense, honnêtement, M. le Président, que
les députés de l'autre côté doivent aussi entendre
parler, chacun dans leur comté, que ça n'a pas de bon sens au
moment où on se parle. Ce n'est pas parce qu'on ne vaut pas... Je l'ai
dit tout à l'heure, ce n'est pas parce qu'on ne travaille pas.
Moi, personnellement, je fais 70 heures par semaine. J'ai un grand
comté. Je ne me plains pas, j'aime mon travail et j'aime les gens que je
représente. Mais ils ont besoin aussi qu'on les comprenne. Ils nous ont
élus ici pour qu'on les défende, pour que, s'il y a un manque
évident de travail dans chacun de nos comtés, on puisse faire en
sorte, nous qui sommes les décideurs ici, de mettre des programmes de
l'avant pour les sortir du trou plus vite qu'ils en sortent
présentement. Mais, pour faire ça, il faut qu'il y ait une
concertation, il faut que le gouvernement qui est en place prévoie, que
ce ne sort pas un gouvernement qui dirige à la pièce. Il aurait
fallu qu'il mette de l'avant certains programmes incitatifs pour que les gens
puissent faire en sorte de remettre le train sur les rails. Mais, quand on
taxe, quand c'est le seul moyen qu'on a, taxer les gens qui sont
déjà surtaxés pour sortir le gouvernement de la
dèche, eh bien, je ne trouve pas que c'est un moyen efficace, je ne
trouve pas que c'est d'aider nos concitoyens.
M. le Président, si on avait eu un gouvernement qui regarde et
qui arrête de taxer, qui s'assoit avec les élus municipaux au lieu
de leur imposer une fiscalité municipale, qui s'assoit avec les gens de
l'éducation et qui leur demande ce qu'il serait mieux de faire pour
empêcher le décrochage scolaire, qui s'assoit avec les PME et qui
leur demande: Qu'est-ce qu'il serait mieux de faire pour vous aider à
recouvrer la santé de votre entreprise, qui est chancelante? C'est
ça qu'il aurait fallu faire, M. le Président. Si la santé
économique des Québécois et des Québécoises
avait été en forme parfaite - parfaite, c'est peut-être dur
à trouver, mais en tout cas mieux que c'est là, ce ne serait pas
difficile - je pense qu'aucun député ici ne se serait
formalisé de l'augmentation. Sauf que ce n'est pas le cas, M. le
Président. On vit des heures difficiles et si vous regardez n'importe
laquelle des coupures de journaux qui ont parlé de ce qui se passe ici,
je vous assure qu'il n'y en a pas beaucoup qui trouvent que c'est très
agréable, le moment que le gouvernement a choisi pour faire une
augmentation des régimes de retraite des députés de
l'Assemblée nationale.
Bien sûr, M. le Président, comme on nous l'a dit à
maintes reprises, et je pense que tout le monde s'entend - que ce soit de ce
côté-ci de la Chambre ou de l'autre côté - pour dire
qu'on n'avait pas le choix de s'harmoniser avec le fédéral, qui
nous a fait un coup dur, je pense. Mais, les juges se sont harmonisés,
les élus municipaux se sont harmonisés. Pourquoi les
députés, eux autres, s'augmentent-ils? C'est ça, la
question qu'on se pose. On ne dit pas que les députés ne sont pas
bons, que les députés ne le méritent pas. Les
députés n'auraient pas dû faire ça pour que ce n'est
pas le temps de le faire, parce qu'il y a trop de gens qui souffrent dans le
moment. C'est ça le vrai problème. C'est ça,
M. le Président. Nous, on souhaiterait que, tant et aussi
longtemps que la récession fera des ravages, comme elle en fait partout
au Québec... Dans des régions, c'est pire que dans d'autres... M.
le Président, à ce moment-là, c'est difficile d'aller
aussi bravement que semblait l'indiquer le ministre de la Santé et des
Services sociaux, aussi fièrement que semblait le crier le
député de Louis-Hébert, dire à nos concitoyens:
Bien, c'est bien de valeur, vous autres, vous n'avez pas de job, mais moi, je
me paie une augmentation de mes plans de pension.
Je pense que ça doit être bien difficile d'affronter nos
électeurs dans nos comtés respectifs, parce que, que ce soit de
ce côté-ci de la Chambre ou de l'autre côté, le
lundi, on rencontre nos électeurs quand on n'est pas ici, en session
intensive. Et, c'est à ce moment-là, M. le Président,
qu'on voit à quel point il y a de la misère, à quel point
les gens en arrachent et à quel point ils étirent une piastre
pour aller jusqu'en fin de semaine. Vous le savez très bien. C'est aussi
grave dans votre comté, M. le Président, parce que les
difficultés dans les mines, vos travailleurs miniers y ont
goûté eux autres aussi. Je pense que ce n'est pas plus facile chez
vous que ça peut l'être pour moi, avec mes papetières, que
ça peut l'être pour les tapis Peerless, à Actonvale,
où il y a 275 chômeurs quelques jours avant Noël; les gens de
Domtar, chez nous, les 150 mises à pied. Et je parle juste des grosses
entreprises. Combien de petites et de moyennes entreprises où il n'y a
même plus un employé sur le plancher. Il n'y en a plus parce que
les portes sont fermées. M. le Président, qu'on ait une reprise
économique et, dans six mois d'ici, on pourra en reparler. Merci
beaucoup.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la
députée de Johnson.
M. Paradis (Matapédia): M. le Président, en vertu
de l'article 213.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): oui, m. le
député de matapédia. alors, mme la députée
de johnson, est-ce que vous acceptez de répondre à une question
du député de matapédia?
Mme Juneau:...
Le Vice-Président
(M. Lefebvre): alors, je
comprends que vous acceptez. une courte question et une courte réponse.
m. le député, allez-y.
M. Paradis (Matapédia): Oui, M. le Président,
rapidement, en vertu de 213, est-ce que la députée de Johnson
voudrait présenter un amendement pour se soustraire au fonds de pension
actuel, rétroactivement non seulement à 1983, mais depuis qu'elle
est élue?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, Mme la
députée de Johnson, une courte réponse.
Mme Juneau: Si j'ai bien compris le processus d'adoption du
projet de loi 404, M. le Président, il semblerait que nous irons en
auditions au mois de janvier ou février, qu'on rencontrera, à ce
moment-là, les personnes qui ont produit le rapport et qu'il y aura
possibilité d'entendre certains spécialistes. Donc, à ce
moment-là, s'il y a des amendements à apporter, ce sera
là, je crois, en deuxième lecture, qu'on pourra faire adopter
certains amendements. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je suis prêt
à reconnaître le prochain intervenant, M. le député
de Fabre.
Des voix: Bravo! M. Joly: Merci.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous disposez d'une
période maximale de 20 minutes, M. le député.
M. Jean A. Joly
M. Joly: Merci, M. le Président. À écouter
les derniers propos, on aurait quasiment pu donner un grand titre et appeler
ça "Vengeance" en souvenir du passé. Dans le fond, c'est un petit
peu ça, M. le Président, qu'on retrouve aujourd'hui en cette
Chambre. Il faut quand même admettre que depuis déjà
plusieurs heures que nous sommes à débattre du projet de loi 404,
qui est un projet de loi qui a été quand même longuement
travaillé, longuement réfléchi, aujourd'hui, en 1991, on
en arrive à soumettre quelques amendements au projet de loi
déjà existant, tout ceci pour une raison quand même assez
particulière. C'est un peu ce qui va m'amener, M. le Président,
à essayer de faire un petit retour sur le passé et à faire
un bref historique de ce que nous avons connu au niveau des plans de pension,
communément appelés régimes de retraite, dans le langage
des affaires. (22 h 50)
L'historique comme tel nous suggère qu'il y avait
déjà, avant que le projet de loi 404 soit adopté comme
tel, trois plans de pension, en vigueur ici à l'Assemblée
nationale, M. le Président. Et ces trois plans de pension qui couvrent
les années 1964 à 1982, 1983 à 1987, 1988 à 1991,
avaient chacun des particularités. Ces particularités faisaient
en sorte qu'un député qui était à
l'Assemblée nationale depuis bon nombre d'années se devait, dans
le fond, de subir ce qu'on peut appeler, au moment de la retraite, des
irritants. C'est là qu'on est arrivé avec la suggestion, avec
l'idée précise d'harmoniser, bien sûr, avec le bill
fédéral, le bill C-52, mais aussi avec l'idée
d'enlever les irritants qui existent comme tels dans les régimes
de retraite. De ce fait, je vous souligne, M. le Président, que dans le
plan de pension qui était en vigueur avant 1982, un député
qui avait cinq années de service pouvait se retirer avec ce qu'on
appelait l'âge 0, ce qui veut donc dire qu'il n'avait pas besoin de se
qualifier avec un âge défini. Je pense qu'il est important de le
souligner. Je pense que c'est de là qu'on a vu souvent dans la
population les hauts cris se lancer, non sans raison, M. le Président,
parce qu'il y avait quand même une forme d'abus à ce
moment-là. Se retirer à n'importe quel âge avec une rente
de retraite, il faut quand même admettre qu'une rente de retraite, ce
n'est pas un salaire qui continue au moment où le public vous dit non,
ou au moment où vous décidez pour des raisons personnelles de
quitter la vie politique. Est arrivée en 1983, de 1983 à 1987,
une autre formule qui amenait le député à pouvoir se
retirer à l'âge de 65 ans, qui était le total de ses
années de service plus son âge. Et si, nécessairement, il
ne rencontrait pas ce cumul, et la condition première à respecter
était d'avoir 60 ans, eh bien, à ce moment-là, il y avait
une pénalité qui était chargée au
député. Par après, en 1988, de 1988 à aujourd'hui,
on a abaissé l'âge de la retraite à 50 ans, pour en arriver
aussi à charger des pénalités si,...
nécessairement, le cumul ne se faisait pas, de la même
façon.
Aujourd'hui, on a ramené l'âge de la retraite, M. le
Président, à 60 ans, mais avec la permission, si un
député était dans une période difficile ou s'il
avait un besoin quelconque des sommes d'argent qui sont là, qui sont
accumulées, qui sont, dans le fond, les siennes... Il faut quand
même le dire, et assez fort, M. le Président, le régime de
rentes de retraite d'un député lui coûte 118 $ par semaine
de sa poche. C'est ce que ça coûte, 118 $ par semaine. Donc, si
vous faites le total, M. le Président, entre le moment où il est
élu... On suppose qu'il fait deux mandats, deux termes, parce qu'on dit
que la vie parlementaire d'un député est d'en moyenne 6,3 ans. On
suppose qu'on va au bout du mandat et que ça fait 8 ans, à ce
moment-là, le député aura contribué environ 50 000
$ plus les intérêts, ce qui l'amène à avoir dans son
fonds, l'argent qu'il aura payé, environ 65 000 $. Si on prend 65 000 $
et qu'on l'investit, M. le Président, à un taux normal, un taux
moyen qu'on a vu, bon an mal an, à travers les ans, ça
amène un député à penser que son investissement
pourrait lui rapporter environ 6500 $ par année. La différence
entre ces 6500 $ par année et le régime de retraite, c'est
d'environ 10 000 $. Ce qui veut donc dire qu'un député à
sa retraite aura coûté à l'État, s'il a donné
deux termes, s'il a donné 8 ans, disons, de sa vie, environ 10 000 $ par
année. Je suis convaincu, s'il y a encore beaucoup de gens qui
écoutent, qu'ils doivent se dire: Ce n'est pas possible. Parce que
même des gens dans nos propres organisations, quand on a la chance de
parler de ces bénéfices qui se rattachent aux fonctions et aux
responsabilités d'un député, la plupart des gens nous
disent: 35 000 $, 45 000 $, même il y en a qui disent jusqu'à 50
000 $ par année... Souvent, ils se servent d'expressions un petit peu
exagérées en disant qu'on est gras dur, on part avec la caisse.
C'est ce qu'on voit, même parmi les gens qui sont dans nos propres
organisations. Mais, tout comme une majorité de gens qui vont en
politique, ils s'intéressent très, très peu à ce
que les bénéfices peuvent être, pour la simple et bonne
raison que, quand on s'en va en politique, on s'en va en politique parce qu'on
croit. On croit que le fait d'aller à une tribune
privilégiée, ça peut enlever des injustices dans le
système, corriger des iniquités et aussi faire avancer des
causes. Donc, les conditions qui gravitent autour de la fonction d'un homme ou
d'une femme publique sont souvent peu connues ou mal connues. Et je dois vous
avouer, M. le Président, que je suis un de ceux-là qui, en 1985,
a découvert, trois semaines avant l'élection, quelles
étaient les conditions qui étaient garanties à un
élu du peuple. Et j'ai découvert ça tout à fait par
hasard, parce que j'étais un peu comme le grand public, je me fiais un
peu à ce que les journaux véhiculaient. Des fois, on lisait en
diagonale et on allait chercher un peu ce qui faisait notre affaire.
Vous avez remarqué, M. le Président, qu'à date,
j'ai essayé de toucher le fond. J'ai essayé de toucher un peu
c'est quoi le plan de pension comme tel des élus, mais je suis un petit
peu chatouillé par le fait que... Je regarde un peu l'attitude de
l'Opposition. Qu'ils votent pour, qu'ils votent contre, ils vont encore
être bénéficiaires des bénéfices. Ils seront
encore ceux qui retireront, malgré le fait que, pour se donner bonne
conscience en apparence, mais surtout pour se donner bonne presse, il y en a,
M. le Président, dans tout ça, qui s'imaginent que pour se faire
une belle jambe ils se doivent d'aller aussi loin que d'avoir la cuisse
légère. C'est un petit peu ça qu'on vit actuellement avec
l'Opposition. Moi, j'aurais eu tendance à appeler leur intervention "le
péché des autres". J'ai eu dernièrement le bonheur de
tomber sur une revue, et un sujet qui m'a intéressé, c'est la
réflexion de Mgr Robert Lebel, dans la revue Le Colombien,
où lui-même citait... Et je me permets de vous le lire, M. le
Président: "Les gens sans espérance, moins ils font attention
à leurs propres péchés plus ils sont curieux des
péchés d'autrui. Ils ne cherchent pas ce qu'ils vont corriger
mais ce qu'ils vont critiquer." Et ma lecture m'amène aussi à
découvrir, M. le Président, que ce n'est pas de Mgr Lebel, cette
citation-là. Ces propos sont de saint Augustin, mort en l'an 430. Alors,
quand on prend le spectacle qui nous est donné depuis 11 heures ce matin
ou à peu près - non, je m'excuse, depuis
14 heures cet après-midi, M. le Président - eh bien, c'est
à peu près ce qu'on vit. Et ça ne m'horripile pas plus
qu'il faut, ça ne me choque pas plus qu'il faut, M. le Président,
mais il faut quand même admettre une chose, la population n'est pas dupe,
la population réalise qu'il y a des choses au niveau de l'État
qui sont des dépenses et il y en a d'autres qui sont des
investissements. Et, dans le cas d'un député qui travaille bien,
qui travaille fort, qui travaille consciencieusement, je ne pense pas qu'il
soit trop largement payé, je ne pense pas que les
bénéfices qui sont rattachés à sa fonction et
à sa responsabilité soient exagérés. (23
heures)
Je me permets, M. le Président, de vous citer un petit article de
journal qui m'a frappé un petit peu, et ça, je pense que c'est
aujourd'hui ou hier, je ne me souviens plus. C'est titré comme ceci: "22
000 cadeaux de Noël pour les députés italiens." Eh bien,
quand un élu n'est pas bien traité, quand un élu n'est pas
bien considéré, quand un élu n'est pas valorisé
à l'intérieur de ce qu'il fait... Parce que la majorité
des députés qui viennent ici à l'Assemblée
nationale, M. le Président, ce ne sont pas tous des gens qui partent du
salaire zéro; ce sont des gens qui, pour la majorité, ont bien
réussi dans ce qu'ils entreprenaient avant d'être à
l'Assemblée nationale. Ce qui laisse supposer, M. le Président,
que ces hommes, ces femmes sont des gens qui gagnaient largement, qui gagnaient
très bien leur vie. Ce qui fait que, quand ils arrivent ici, souvent la
marche est haute, excessivement haute même dans bien des cas. Quand on
quitte l'Assemblée nationale, après deux termes ou après
la moyenne, après 6,3 ans, après 7 ans ou après 8 ans, la
marche est encore haute, M. le Président. Mais ce qu'il est important de
considérer, c'est que, si on veut continuer à avoir des
législateurs, parce que c'est ce pourquoi l'homme public, la femme
publique sont élus en premier lieu, pour être des
législateurs... La deuxième responsabilité de
l'élu, c'est de faire en sorte qu'on puisse être capable de
protéger les finances publiques et la troisième, c'est de servir
de trait d'union, de liaison, un peu d'ombudsman, si vous voulez, entre les
problèmes du comté et nécessairement les solutions
potentielles.
Donc, si on veut avoir une qualité d'individus, il faut
nécessairement penser à l'avenir. Ce n'est pas vrai qu'on va
avoir strictement une catégorie d'individus qui n'ont jamais rien
à perdre, dans le sens qu'ils vont partir de la fonction publique,
qu'ils vont se faire élire, qu'ils vont avoir la garantie d'emploi au
moment où nécessairement ça ne fonctionnera plus au niveau
de la deputation et on va retourner encore dans la fonction publique. Ce n'est
pas vrai que c'est la sorte d'individus qu'on se doit d'avoir d'une
façon massive à l'Assemblée nationale. On se doit d'en
avoir quelques-uns, c'est bien sûr, pour faire en sorte que ça
représente la mosaïque du Québec, parce que, dans le fond,
c'est ça, un élu. C'est quoi? C'est de représenter ce que
le Québec est, en fait. On se doit d'avoir des agriculteurs, on se doit
d'avoir des professionnels, on se doit d'avoir des fonctionnaires, mais pas
nécessairement une catégorie d'individus qui, eux, n'auraient
rien à perdre.
Il faut penser qu'il y a encore des gens qui sont
intéressés à faire avancer la cause du Québec, M.
le Président. Mais il ne faut pas demander, non plus, que ça
devienne de l'apostolat en plus. Si ça devient de l'apostolat, à
ce moment-là, je dis à ceux qui sont contre: Signez une partie de
votre chèque et donnez-le. Signez l'addition des bénéfices
que vous allez recevoir et donnez-le. Donnez-le à l'oeuvre de votre
choix, mais donnez-le. Donnez-le publiquement. Faites-en des amendements. Je
vous respecterai davantage à ce moment-là, si tel est le cas.
Mais je ne pense pas que ce soit la sorte d'amendement qui va nous être
suggéré en commission parlementaire. Je penserais plutôt,
M. le Président, que ce serait un amendement contraire, parce que ce que
j'ai cru comprendre à travers la majorité des gens de
l'Opposition, puis je ne vous dis pas que je dois condamner leurs demandes,
leurs espoirs et leurs ambitions...
Je me souviens qu'il y a quelques mois, M. le Président, et c'est
ce à quoi je veux en venir, on m'a dit: On va y aller dans le plan de
pension, on va y aller dans le régime de retraite, conditionnel à
ce que ça vaille la peine. On n'ira pas là pour des pinottes.
C'est ce qu'on m'a dit. Il y en a un qui corrige et qui me dit: des
cacahuètes. C'est vrai. Alors, c'est vrai que le plan de pension comme
tel, ce n'est pas de partir avec la caisse, M. le Président. Le plan de
pension comme tel donne environ 2500 $ de plus que ce que l'ancien plan donnait
avant, ce que l'ancien régime garantissait: 2500 $ de plus.
La seule place, à mon sens, où il y a une
amélioration qu'on peut considérer comme majeure, mais non
exagérée, c'est l'amélioration de la
pénalité entre l'âge de 60 ans et de 50 ans. C'est la seule
place, M. le Président, puis Dieu sait que les chiffres, ça a
été l'histoire de ma vie et j'ai eu à m'y pencher depuis
deux ans sur ce régime de retraite. C'est pour, hors de tout doute, vous
dire, M. le Président, que la transparence que nous vous montrons depuis
quelques heures est toujours celle qui nous a animés, est toujours celle
qui m'a animé pendant deux ans à la recherche d'une formule qui
pouvait enlever les irritants, créer l'harmonisation avec le bill C-52
et faire en sorte que le public ne paie pas d'une façon indue ce que
ça ne vaut pas. Je ne crois pas qu'aucun député soit parti
avec la caisse.
Vous savez, on s'est fait accuser, M. le Président, au niveau de
la transparence tantôt. Je ne voudrais quand même pas tomber dans
la démagogie, mais je me suis permis, à travers les
nombreuses lectures que j'ai eu à faire dernièrement, de
rencontrer un petit article qui soulignait la transparence d'un des anciens
ministres de l'Agriculture, du Parti québécois, qui, au moment
où il a eu à prendre une décision pour changer la
quantité de lait dans les berlingots, a conservé le même
berlingot, mais a diminué la quantité de lait dedans, pour
laisser en apparence flotter le fait que c'était la même
quantité de lait dedans. Alors, si on est prêts à tricher
des enfants, si on est prêts à aller aussi loin que ça pour
se dire transparents, je m'imagine ce qu'on peut dire sur un régime de
pension, sur un régime de retraite. On semble crier, si on peut dire, le
désarroi, crier l'horreur parce que c'est la caisse, semble-t-il qu'on
est en train de voler, la caisse de l'État. Ce n'est pas ça, M.
le Président, et je pense que, chacun à notre façon, on a
réussi à vous démontrer que la transparence, ça
existe, ça ne nous fait pas peur. Nous allons en commission
parlementaire sous peu. Cette commission pourra faire la lumière, faire
le jour. C'est sûr, quand on a parlé de lumières, on a fait
mention que c'était plutôt le côté de l'Opposition,
mais ce n'est pas tous des 100 watts, il y a des 2 watts aussi dans
ça.
Alors, partant de là, je suis convaincu que les gens du
côté ministériel vont être capables encore, hors de
tout doute, de démontrer que tout ce que nous avons fait, c'est enlever
des irritants, créer une harmonisation et faire en sorte aussi qu'on
puisse respecter que, si, pour une raison quelconque, un individu, un
élu, un homme, une femme, à l'âge de 50 ans, désire
vendre à rabais son régime de retraite, il pourra le faire avec
une pénalité raisonnable. D'ailleurs, on retrouve ça
exactement avec le Régime de rentes du Québec; vous avez le droit
- oui, j'achève, M. le Président - d'attendre à 65 ans
pour retirer vos bénéfices, mais, si le coeur vous en dit, vous
avez droit, à l'âge de 60 ans, de retirer un
bénéfice moindre, un bénéfice à rabais.
Donc, c'est un principe qui est largement défendu, largement
endossé partout à travers l'Amérique du Nord et je ne
pense pas que les députés pourraient faire exception à ce
genre de principe. Je suis convaincu que la population, quand elle saura qu'un
député se retire avec une rente de retraite de 16 000 $ à
17 000 $ par année, ce n'est pas exagéré et que même
plusieurs diront: Dieu merci, vous nous avez éclairés, mais ce
n'est pas vraiment ce qu'on pensait que vous aviez, ce n'est pas vraiment ce
qu'on pensait que vous méritiez parce que vous mériteriez
davantage. Et c'est sans doute ça que l'Opposition voudrait
suggérer en commission parlementaire, que les chiffres soient beaucoup
plus volumineux, beaucoup plus généreux et, si le coeur vous en
dit, à ce moment-là, ça sera à vous, disons, de
faire ces suggestions. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Fabre. Je veux vous rappeler que nous sommes à
discuter de la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 404,
Loi modifiant la Loi sur les conditions de travail et le régime de
pension de membres de l'Assemblée nationale et d'autres dispositions
législatives. Je cède maintenant la parole à M. le
député d'Un-gava. Je vous rappelle que vous disposez d'une
période maximale de 20 minutes, M. le député. (23 h
10)
M. Christian Claveau
M. Claveau: Oui, M. le Président. Avec les derniers
discours que je viens d'entendre, on a l'impression qu'on est ici ce soir pour
faire le procès du passé. Ça ne sera pas la teneur de mes
propos parce que je pense que le présent et l'avenir sont beaucoup plus
importants pour les Québécois et les Québécoises en
général que le passé. C'est bien évident que, si on
voulait s'attarder à faire le procès du passé, on pourrait
peut-être parler de la gestion de la crise d'octobre, on pourrait
peut-être parler de l'emprisonnement des leaders syndicaux du Front
commun de 1972 dans la fonction publique, on pourrait peut-être parler du
scandale de la viande avariée, on pourrait peut-être parler du
saccage de la Baie James, on pourrait peut-être parler du scandale du
Stade olympique, etc. Ça fait pas mal de choses, ça, qui se sont
passées entre 1970 et 1976, lors de la première
réincarnation du chef du gouvernement actuel. Il s'en est passé
pas mal dans ce temps-là. Alors, si on voulait faire le procès du
passé, on aurait de quoi s'amuser pendant longtemps, vous comprendrez.
Mais j'aime mieux m'attarder au présent et au futur des
Québécois et des Québécoises.
M. le Président, dans le présent, qu'est-ce qui se passe?
Ça va mal au Québec, on est en pleine crise économique, en
récession, en ralentissement, diraient certains. Ralentissement
drôlement sérieux. Ça fait longtemps qu'on a les pieds
collés sur le frein. À force de ralentir, on finit par
arrêter. Or, ça fait déjà à peu près
deux ans qu'on ne cesse de ralentir. On commence à ne pas aller
très vite dans notre économie. On n'a qu'à regarder ce qui
se passe autour. Toutes les semaines, on a des nouvelles de fermetures
d'usines, de compagnies qui se retirent, d'investissements qui n'arrivent plus,
de promesses qui ne se réalisent pas, continuellement.
Le gouvernement, M. le Président, a une responsabilité
sociale à l'égard de l'ensemble des citoyens de son territoire.
Quelque gouvernement que ce soit, dans quelque pays que ce soit, a des
responsabilités sociales. Un gouvernement n'est pas élu, M. le
Président, pour se regarder le nombril et pour voir si ses conditions de
travail, ses conditions salariales et ses conditions de retraite sont
comparables à ce qui se passe ailleurs. Ce n'est pas pour ça
qu'on est élus et
j'ai bien l'impression qu'en regardant le programme électoral de
tous et chacun d'entre nous il n'y a sûrement pas grand-chose qui pouvait
porter sur le réajustement du fonds de pension une fois élus.
C'est des choses dont on se garde bien de parier en campagne électorale.
On aime mieux faire de la phraséologie sur la question économique
et sur les belles promesses: promettre des routes, promettre des
aéroports, promettre des écoles, promettre des stades, promettre
des centres d'accueil pour femmes en difficulté, promettre des HLM pour
personnes âgées, promettre aux jeunes, promettre à tout le
monde. Mais c'est très rare qu'un député met dans son
programme électoral qu'il va travailler à augmenter son salaire
et à réajuster son fonds de pension s'il est élu.
Or, M. le Président, dans la session actuelle, on a l'impression
que c'est là la seule raison de cette session-là, que c'est
là le seul problème auquel on a à s'attaquer avec urgence,
de réajuster notre fonds de pension. Imaginez-vous si ça fait
sérieux! Qu'est-ce que l'on a comme projets de loi sur la table? De quoi
avons-nous parlé depuis le début de la session, à part de
quelques peccadilles ici et là? Avons-nous vraiment travaillé
à des projets de loi fondamentaux, vitaux pour l'histoire du
Québec? Un peut-être, un: la réforme du Code civil, qui
s'est soldé avec au-delà de 1000 amendements, après un
travail de plusieurs mois, incessant, un travail laborieux, fastidieux en
commission parlementaire. Et je crois que, dans ce cas-là, on a à
féliciter tous les parlementaires, de quelque côté qu'ils
soient de la Chambre, pour la façon dont ils ont travaillé avec
brio, avec intérêt, avec précision dans la refonte du Code
civil.
Mais, en dehors de ça, qu'est-ce qu'on a sur la table? Des
programmes de relance d'entreprises? Pas beaucoup. Des projets de loi pour
aider les investisseurs? Des projets de loi pour permettre à des gens de
faire mieux face à leur faillite personnelle ou aux faillites
d'entreprises? Des projets de loi pour relancer l'exploration minière?
Des projets de loi pour relancer l'industrie forestière? Des projets de
loi pour aider l'industrie de la construction? Des projets de loi pour aider
les agriculteurs? Rien de tout cela. Nulle part rien. Ah! certes, M. le
Président, on a parlé de la Commission des transports. Oui. Je me
suis dit: Peut-être bien qu'on va aider, là, les camionneurs
à s'en sortir. Bien non, M. le Président, c'était pour
leur mettre une taxe supplémentaire. C'était pour obliger les
camionneurs à payer annuellement une taxe qui leur permet d'exploiter
leur permis. Ah bon! Ça, ça aide encore! Ah! on a parlé de
la Régie des alcools. Pourquoi faire? Pour nous dire qu'à partir
de maintenant la Régie des alcools allait avoir la possibilité
d'émettre des permis de production, de fabrication, de distillation,
d'entreposage de vins et de boissons alcooliques de toutes sortes. Ah bon!
Ça, ça aide l'économie, c'est bien évident! On nous
a dit aussi qu'il était question de permettre de vendre de l'alcool 24
heures par jour, de la bière et du vin, pour le moins, dans les
dépanneurs. Ça, ça relance une économie, M. le
Président! Finalement, le ministre s'est trouvé tellement
ridicule qu'il a décidé de reculer là-dessus. On a au
moins gagné ça dans la session. On a conservé le statu quo
sur la vente d'alcool dans les dépanneurs. Imaginez-vous quelle
victoire!
On a eu un projet de loi sur les services correctionnels, parce que,
maintenant, les services, au Québec, qui concernent les arrestations,
l'emprisonnement de certains détenus de moins de deux ans, ça
s'appelle les services correctionnels. On a changé le nom. Un avancement
louable pour la cause de l'économie québécoise, c'est bien
évident! On a légalisé la pratique du trou ou de
l'isolement préventif dans les prisons. Ça, ça aide
l'économie québécoise! Là, on a relancé
l'économie! Ça valait la peine de discuter
deçà!
Industrie forestière. Oui, on a présenté un projet
de loi pour amender la Loi sur les forêt. C'était pour permettre
au gouvernement de prélever des intérêts sur les retards
non payés dans les droits de coupe. Ça, ça va aider encore
l'industrie forestière substantiellement! Des dizaines et des dizaines
de projets de loi semblables, M. le Président. Cette session d'automne
passera probablement à l'histoire pour la plus ridicule de toutes les
sessions de ce Parlement depuis 200 ans, puisqu'on fête demain le
bicentaire du Parlement au Québec. Depuis 200, j'ai bien l'impression
qu'on a rarement eu de session aussi peu copieuse, aussi peu
intéressante, aussi délabrée, aussi loin des vrais besoins
et des vrais intérêts de la population du Québec. Rien de
substantiel.
Période de questions? De la rigolade, M. le Président! On
pose une question sur l'économie et on nous répond sur la
Constitution. On en pose sur la Constitution, on nous répond sur les
pêcheries. On en pose sur la pêcheries, on nous répond sur
les centres de ski. On pose une question sur les centres de ski, on nous
répond sur l'industrie minière. C'a été du
coq-à-l'âne tout le temps. Ça fait 18 mois que le dossier
de la crise autochtone traîne dans le décor. Rien de
réglé, M. le Président. Hydro-Québec. Qu'advient-il
des 12 000 mégawatts qu'on devait vendre à qui voulait en
acheter? Tout le monde, semble-t-il, voulait en acheter en 1985. Il n'y a
encore rien ou à peu près rien de fait au moment où on se
parle. On a reculé sur le projet de la Baie James avec la construction
des centrales du complexe Grande-Baleine.
On s'en va nulle part. Il n'y a rien de nouveau, rien n'inventif. Ce
gouvernement a détruit la lancée économique qui avait
origine des politiques mises en place par le Parti québécois
après la crise de 1982. On a tout démoli; on est en train de
liquider l'OPDQ. On a liquidé les
programmes d'aide à l'industrie minière; on a
liquidé une grande partie des programmes de la SDI dans la relance
industrielle, le financement d'entreprises, les prêts participatifs. On a
éliminé la société d'aide aux coopératives.
Liquidation, faillites. C'est un gouvernement de faillites. On devrait le
mettre entre les mains d'un syndic, ce gouvernement-là, M. le
Président.
Mais, comme dans toute bonne faillite planifiée, il faut bien
penser un peu à nous. Donc, avant de donner le gouvernement à un
syndic, on va se voter un fonds de pension. Ça, ça presse!
Ça, c'est urgent! Ça, c'est important! Ça, ça vaut
la peine de passer la nuit là-dessus: se payer un fonds de pension! Je
le disais tout à l'heure. Vers 21 heures ce soir, j'ai eu l'occasion de
le dire en cette Chambre et je le répète, M. le Président.
Après analyse, j'ai beau revirer ça de tous les bords, de tous
les côtés, de fouiller dans les doublures, d'essayer de
comprendre, je n'y arrive pas. À moins de partir de l'hypothèse
que ceux qui ont vraiment besoin de ce fonds de pension là et qui ont
à plaider l'urgence pour que ça se règle au plus vite, ce
sont les élus de l'aile parlementaire gouvernementale qui voie approcher
la prochaine élection avec une certaine terreur, parce que, avec 30 %
des intentions de vote, c'est bien évident qu'il y a des chances d'y
avoir des diminutions dans la représentation après les prochaines
élections. (23 h 20)
À ce moment-là, on se dépêche de se passer un
projet de loi pour faire en sorte de pouvoir sortir d'ici, sinon les pieds en
avant, pour le moins avec un fonds de pension raisonnable. C'est ça qui
se passe. Il n'y a aucune autre justification. Il n'y en a pas. Pourquoi
plaider l'urgence? Pourquoi arriver en fin de session en nous déposant -
ah oui! on est transparents, oui qu'on est transparents! - à la toute
dernière minute, vendredi passé - ça ne fait pas deux mois
que c'est déposé, ce projet de loi, ça fait trois ou
quatre jours - un projet de loi alors que, selon le règlement, tout
projet de loi devrait être déposé en cette Chambre avant le
15 novembre pour adoption dans la session? On a attendu à la toute
dernière minute, quatre ou cinq jours avant la fermeture de
l'ajournement des fêtes, pour nous amener un projet de loi sur les fonds
de pension...
Une voix: Voyons donc!
M. Claveau: ...et on nous le fait plaider en pleine nuit. Ah oui!
On a commencé en fin d'après-midi. C'est clair qu'on a
commencé en fin d'après-midi, mais regardez l'heure qu'il est,
là, et on se prépare à nous faire voter là-dessus
et on va plaider la transparence de ce côté-là, M. le
Président!
Il y a une aberration fondamentale. Il y a quelque chose
d'incompréhensible dans l'attitude du gouvernement, de totalement
inacceptable pour l'ensemble des québécois et des
québécoises. moi, je le répète, je suis
profondément attristé. je suis fondamentalement insulté
par l'attitude du gouvernement. je regarde juste dans mon milieu. j'ai
moi-même plaidé pendant des années pour un fonds de pension
global dans l'industrie minière, qu'on appelle le fonds minier. on en a
discuté avec ce gouvernement. le ministre du travail, qu'est-ce qu'il
répond? ah! les travailleurs miniers, s'ils veulent avoir un fonds
minier, ils ont juste à se négocier des fonds de pension avec les
entreprises. les syndicats sont là pour ça. j'ai une lettre du
ministre du travail, de 1987 ou 1988, qui dit ça textuellement.
M. le Président, si on n'est pas capable, comme gouvernement, de
donner des fonds de pension à l'ensemble des travailleurs ou de trouver
des mécanismes pour que l'ensemble des travailleurs et des travailleuses
du Québec ait droit à des fonds de pension, pourquoi
devrions-nous, en tant qu'élus et représentants de ces
mêmes gens, nous donner ou améliorer notre fonds de pension? Notre
rôle, M. le Président, ce n'est pas de venir ici pour
s'autocongratuler, pour s'enrichir aux dépens de la population. Non. On
a le droit, comme travailleurs, d'être bien payés, oui. On a le
droit d'avoir des conditions raisonnablement acceptables. Oui, j'en suis. Je
n'ai pas honte de mon salaire, M. le Président, parce que je pense que
je le gagne et, chez nous, il n'y a jamais personne qui s'en est pris à
mon salaire parce que, mon travail, je le fais et, en bout de piste, mon
salaire est à peu près l'équivalent d'un salaire normal
dans l'industrie primaire, que ce soit l'industrie de la construction,
l'industrie minière, l'industrie forestière, les transports.
C'est à peu près le salaire du travailleur normal dans
l'industrie primaire de laquelle je viens, du milieu dans lequel je travaillais
avant d'arriver ici. Il n'y a personne qui s'en prend à mon salaire. Il
n'y a personne non plus, en bout de piste, qui s'en prend à mon fonds de
pension, parce que je pense que la population accepte qu'on ait un fonds de
pension. C'est normal, comme travailleurs, qu'on puisse avoir un fonds de
pension, bien qu'il serait peut-être plus normal que tous les
travailleurs de cette société aient droit, eux aussi, à
des fonds de pension, ce qui n'est malheureusement pas le cas, M. le
Président.
Mais là où le bât blesse, c'est qu'on
améliore notre fonds de pension au moment où tout le monde perd
sa job, au moment où les industries ferment, au moment où les
investissements diminuent, au moment où il n'y a plus rien qui va,
où on a au-delà de 1 000 000 de travailleuses et de travailleurs
québécois, enfin, de citoyens du Québec sans travail,
devrais-je dire, qui vivent sur l'aide sociale ou le chômage. Nous, la
grande priorité, on se fait un petit cadeau de Noël: on va
améliorer notre fonds de pension. On a l'air fins encore. On s'en fait
une belle jambe,
oui. Je prends l'expression du député tout à
l'heure. On est en train de s'en faire une belle jambe comme parlementaires.
Pensez-vous qu'on a l'air sérieux dans la population?
Hier, j'avais un ami qui a veillé chez moi: 30 ans, sa femme est
enceinte, soudeur de métier. Il est sur le chômage, il lui reste
quelques semaines à peine avant de tomber sur l'aide sociale. Recherche
d'emploi intense. Rien à l'horizon! Savez-vous qu'est-ce qu'il m'a dit?
Vous n'avez pas d'argent au gouvernement pour nous aider, mais vous avez 2 000
000 $ pour envoyer des cartes de Noël, par exemple. Oh! C'est vrai. On a
de l'argent pour mettre 2 000 000 $ en cartes de Noël comme
parlementaires, mais on n'a pas d'argent pour aider le monde qui a des
problèmes. Eh bien, ça permet de réfléchir. Il faut
y penser, à ces affaires-là.
C'est ça l'opinion qui est véhiculée par la
population, par le monde qui nous a élus. C'est ça qu'ils
pensent. Pourquoi c'est important de mettre 2 000 000 $ en cartes de Noël
en tant que députés et qu'en contrepartie on n'a pas d'argent
pour faire un petit programme social de quelques centaines de mille piastres
qui pourrait peut-être donner un bon coup de main à du monde? Je
veux bien croire, moi, que ça peut être intéressant pour un
assisté social ou pour un gars sur le chômage de recevoir une
carte de Noël de son député, mais ça ne fait pas un
gros programme de relance de l'emploi, ça! C'est ça qu'est le
problème, M. le Président. C'est ça l'image, la perception
dans la population.
On est là ce soir, à toutes fins pratiques, pour
empêcher le gouvernement de faire une gaffe, pour l'empêcher de
s'autodétruire ou de continuer à s'autodétruire. On dit:
Écoutez, là, on a encore à vous "toffer" pendant quelque
temps. On a encore quelques mois à vous endurer comme gouvernement,
mais, s'il vous plaît, ne nous rendez pas à la limite, à
l'extrême du ridicule, parce que, nous comme Québécois, on
commence à en avoir assez de faire rire de nous autres là. On a
vu même ce qui se passe jusqu'aux États-Unis, à New York
où on publie des articles pour rire des Québécois. Alors,
nous, on en a assez de faire rire de nous. Alors, on dit: Pour les quelques
mois qui vous restent comme gouvernement, essayez donc d'avoir au moins un peu
meilleure mine; au moins, cessez de faire en sorte de ridiculiser l'institution
parlementaire que nous sommes et cessez de nous donner une image en tant que
peuple, en tant que leaders de notre peuple qui soit loin de la
réalité, de ce que l'on est vraiment. C'est ça qu'on vous
dit.
En terminant, j'espère que l'ensemble des parlementaires de cette
Chambre, au moment de voter, penseront à tous leurs commettants dans
leur comté qui en arracheront le soir de Noël. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député d'Ungava. M. le député de Matapédia,
oui.
M. Paradis (Matapédia): Oui, en vertu de l'article
213.
Le Vice-Président
(M. Lefebvre): alors, en vertu de
l'article 213, vous pouvez poser une courte question si m. le
député est disposé à accepter.
M. Claveau: Aucun problème, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Aucun problème.
Allez-y, M. le député de Matapédia. Courte question,
courte réponse.
M. Paradis (Matapédia): Oui, M. le Président,
très brièvement. Est-ce que le député d'Ungava
s'engage, en commission parlementaire qui aura lieu au printemps prochain et
non pas dès décembre de cette année, à proposer des
amendements qui pourraient permettre à certains députés,
comme lui-même, de se soustraire à ce projet de loi qui semble
trop généreux à leurs yeux? Et, contrairement à
eux, M. René Léves-que demandait de bonifier le fonds de pension
des députés, qui a été son plus grand regret en
1983.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, M. le
député d'Ungava, à la question du député de
Matapédia.
M. Claveau: Me donnez-vous un temps de réponse
raisonnable, M. le Président, parce que ça demande un peu
d'élaboration?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y, allez-y, je vais
vous écouter puis... Courte réponse dans la même proportion
que la question. (23 h 30)
M. Claveau: D'abord, je trouve la question facile de la part du
député de Matapédia. Dans le fond, c'est un peu jouer
à Ponce Pilate: je m'en lave les mains. Mais Pilate est passé
à l'histoire non pas par sa bravoure, si je me souviens bien.
M. le Président, je vous le dis très honnêtement:
S'il y a une telle clause, qu'on nous donne le droit de nous retirer
globalement, totalement, entièrement du fonds de pension, qu'on nous
redonne nos dus, tout ce qu'on a payé là-dedans, moi, en ce qui
me concerne, si c'est ça qui est l'idée que je puisse me retirer
totalement du fonds de pension de l'Assemblée nationale, que l'on me
remette ce que j'ai mis là-dedans, que l'on me redonne mes 10 % que je
paie continuellement et je m'en monterai un fonds de pension personnel. Je
n'aurai sûrement pas besoin d'une loi votée par des
libéraux en cette Chambre pour me monter un fonds de pension.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député d'Ungava. Est-ce qu'il y a d'autres interventions, M. le
leader adjoint du gouvernement?
M. Bélisle: Non, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Pas d'autres
interventions? Est-ce que la motion proposant l'adoption du principe du projet
de loi 404, Loi modifiant la Loi sur les conditions de travail et le
régime de pension des membres de l'Assemblée nationale et
d'autres dispositions législatives, est adoptée?
M. Bélisle: M. le Président, je vais faire motion
pour reporter le vote à demain, à la période des affaires
courantes.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, je comprends que
vous demandez le vote nominal...
M. Bélisle: Oui, nominal.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): ...et que vous faites
motion pour...
M. Bélisle: Pour reporter le vote à demain.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): ...reporter ce même
vote à demain, après la période des affaires
courantes.
M. Bélisle: Oui, sur le projet de loi 404, M. le
Président, pour l'adoption du principe.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Très bien. M. le
leader adjoint du gouvernement, d'autres travaux à suggérer
à l'Assemblée?
M. Bélisle: Oui, M. le Président. Tant qu'à
y aller, nous allons continuer avec l'article 34, étant donné que
le ministre de la Justice n'est pas encore arrivé. L'article 34 de notre
feuilleton.
Projet de loi 196 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 34 de
notre feuilleton, M. le député de Viau propose l'adoption du
principe du projet de loi 196, Loi concernant le régime de rentes pour
le personnel non enseignant de la Commission des écoles catholiques de
Montréal. M. le député de Viau et whip en chef du
gouvernement.
M. William Cusano
M. Cusano: Merci, M. le Président. Avant d'entrer dans le
vif du sujet du projet de loi, je pense qu'il est nécessaire de donner
un bref historique en ce qui concerne le projet de loi. Le Régime de
rentes pour le personnel non enseignant de la Commission des écoles
catholiques de Montréal est un régime complémentaire de
retraite entré en vigueur le 1er juillet 1969. Le 1er juillet 1973, la
Commission des écoles catholiques de Montréal est devenue un
organisme assujetti à la Loi sur le régime de retraite des
employés...
M. le Président, je demanderais au député d'Ungava,
comme on a été très respectueux lorsqu'il parlait, d'au
moins rendre à tout le monde la même chose.
Une voix: Je suis tout à fait d'accord.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le
député d'Ungava.
M. Claveau: Je voudrais juste, pour le bénéfice de
cette Chambre, vous signaler que c'est le député de
Matapédia qui s'est permis de m'interpeller assez agressivement...
Des voix: Ah!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Non, non! Le
député de Viau et whip en chef est à s'exprimer sur un
projet de loi et vous reconnaîtrez avec moi qu'il est en droit de le
faire en toute quiétude sans être interpellé et
dérangé. Allez-y, M. le député de Viau.
Une voix: Ça n'a pas de bon sens!
M. Cusano: Merci, M. le Président. Je ne parlerai pas des
cartes de Noël qu'il "présume" ne pas avoir envoyées, parce
qu'il reprochait à tout le monde, il y a quelques minutes, justement que
les députés envoyaient des cartes de Noël. Je présume
que vous, M. le député d'Ungava...
Une voix: On va le vérifier demain.
M. Cusano: ...vous n'avez envoyé aucune carte de
Noël.
Une voix: Demain, on va le vérifier.
M. Cusano: Alors, comme je le disais, M. le Président, le
1er juillet 1973, la Commission des écoles catholiques de
Montréal est devenue un organisme assujetti à la Loi sur le
régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes
publics. Même si les employés de cet organisme avaient le choix,
à ce moment-là, de transférer leurs prestations au
Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes
publics, ils ont choisi de maintenir leur participation à leur propre
régime. Toutefois, selon l'article 125 de la Loi sur le RREGOP, un tel
régime complémentaire de retraite ne peut aujourd'hui être
modifié sans l'autorisation
préalable de la Commission administrative des régimes de
retraite et d'assurances, et toute modification qui est apportée doit
être à la charge des employés, si elle augmente le
coût de ce régime.
Le 1er janvier 1990 entrait en vigueur la Loi sur les régimes
complémentaires de retraite. Cette loi a pour but premier d'assurer une
plus grande protection des droits acquis pour les travailleurs qui participent
à un régime privé de retraite. Elle fixe les règles
qui régissent l'établissement des régimes, leur
fonctionnement et leur administration. Elle prescrit aussi un ensemble de
droits minimaux accordés aux participants et prévoit des mesures
de contrôle et de surveillance du régime.
Le Régime de rentes pour le personnel non enseignant de la CECM
est un régime de retraite soumis aux dispositions de cette loi. Il doit
donc respecter les règles minimales qui y sont prévues. Le
coût des modifications faisant l'objet du présent projet de loi a
été établi par une firme d'actuaires. Celui-ci
s'élève à environ 56 000 000 $. Cependant, le
Régime dispose actuellement d'un surplus actuariel de plus de 67 000 000
$, M. le Président. Le coût des modifications proposées
sera donc financé à même ce surplus. Dans les faits, ces
modifications n'occasionnent aucune dépense pour le gouvernement et les
participants au Régime.
Parmi les principales modifications qui ont été
proposées par les administrateurs de ce régime de retraite, l'une
revêt un caractère particulièrement important pour les
retraités. En effet, le Régime de retraite du personnel non
enseignant de la Commission des écoles catholiques de Montréal ne
prévoit présentement aucune indexation des rentes versées.
Ainsi, les personnes qui ont pris leur retraite il y a de cela plusieurs
années ont vu, graduellement, la valeur de leur rente se
détériorer au fil des ans. Un des amendements
présentés permettra désormais, et ce, à compter du
1er janvier 1990, d'assurer une protection minimale du pouvoir d'achat de ces
mêmes retraités. Leur rente sera désormais indexée
selon l'augmentation des prix à la consommation, moins 3 %.
Par ailleurs, les conditions de participation des personnes du sexe
féminin par rapport aux employés masculins ne sont pas uniformes.
Ainsi, le taux de cotisation versée par certaines participantes est
inférieur à celui des participants ayant les mêmes
caractéristiques. De plus, les critères d'admissibilité
à la retraite pour ces participantes prévoient une retraite plus
hâtive que pour leurs collègues du sexe masculin. Suite aux
discussions intervenues avec les représentants des employés, il a
été convenu d'uniformiser l'ensemble de ces dispositions. Les
groupes d'employés visés sont ceux engagés avant 1970.
Enfin, toute une série de modifications de nature technique ont
été apportées pour répondre aux prescriptions de la
Loi sur les régimes complémentaires de retraite. Celles-ci
touchent, notamment, l'intérêt crédité sur les
cotisations des participants, les possibilités de remboursement ou de
transfert et le droit à la rente de retraite différée.
Enfin, il convient également de souligner que le projet de loi viendra
concrétiser le fait que l'employeur s'engage à défrayer 50
% du coût des prestations qu'accorde le Régime.
Ceci, M. le Président, est un résumé des principaux
éléments contenus dans le présent projet de loi. Celui-ci
permettra au Régime de retraite du personnel non enseignant de la CECM
de répondre aux prescriptions de la Loi sur les régimes
complémentaires de retraite et apportera des améliorations
susceptibles d'assurer une meilleure protection aux retraités et
d'éliminer les principaux éléments de discrimination qu'on
y trouve actuellement.
En terminant, M. le Président, j'espère que l'Opposition,
ainsi que les membres qui siègent à titre d'indépendants
appuient ce projet de loi. J'ose espérer que l'on mette de
côté toute partisanerie et que l'on consente à
procéder rapidement à l'étude article par article en
commission parlementaire, et à l'adopter d'ici la fin de la
présente session, car les personnes qui sont visées par ce projet
de loi, ce sont des personnes qui touchent des rentes minimes. Même avec
les ajustements qui sont proposés, ces gens-là vont se trouver...
À titre d'exemple, à partir du 1er janvier 1990, la moyenne des
retraités, qui est présentement à 4884,11 $ par
année, passera à 4972,02 $ par année. C'est des
modifications qui, je pense, sont très équitables. J'ai
rencontré moi-même l'ensemble du conseil d'administration des
différents groupes qui sont couverts par ce régime. C'est
unanimement que ces gens ont demandé que l'Assemblée nationale,
par ce projet de loi, leur permette de procéder à des
modifications et, même si c'est arrivé ici, à
l'Assemblée nationale, de façon tardive, je pense qu'on se doit,
en toute conscience, de procéder le plus rapidement possible à
l'adoption non seulement du principe que nous discutons présentement,
mais aussi de passer rapidement à l'étude article par article,
ainsi qu'à son adoption d'ici la fin de la session. Merci, M. le
Président.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Viau et whip en chef du gouvernement. Alors, nous en
sommes à l'adoption du principe du projet de loi 196. Je reconnais M. le
député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition
officielle. M. le député. (23 h 40)
M. François Gendron
M. Gendron: Oui, M. le Président. Je voudrais, comme
porte-parole de l'Opposition officielle sur le projet de loi 196, indiquer
aux
membres de cette Chambre et surtout aux bénéficiaires,
parce que ce qui est important... C'est un projet de loi qui, comme par hasard,
traite à peu près du même sujet qu'on a à
débattre depuis cet après-midi, parce que c'est un projet de loi
concernant le Régime de rentes pour le personnel non enseignant de la
CECM. Effectivement, même s'il a un caractère public, j'estime
qu'il s'agit d'un bon geste, qu'il s'agit d'une loi légitime, logique
pour les bénéficiaires, avec le mérite pur de ne rien
coûter aux contribuables québécois. Quand on a des projets
de loi de cette nature qui ont comme avantage de rétablir une certaine
équité, de redistribuer un peu mieux les fonds propres qu'ils se
sont constitués à l'intérieur du régime, ce serait
bien difficile de ne pas concourir à l'adoption du principe de ce projet
de loi. Effectivement, c'est un projet de loi qui permettra à un certain
nombre de retraités, au-delà de 1250, comme le
député de Viau l'a bien exposé... Je pense qu'il a pris
connaissance, lui aussi, des notes explicatives du projet de loi. C'est un
projet de loi qui origine d'une volonté d'inclure au régime de
rentes visé une clause d'indexation, de même que d'adapter
certaines dispositions à d'autres régimes en vigueur.
En 1991, M. le Président, penser que des gens ont
constitué un régime de retraite qui, au moment où on se
parle, dispose d'un surplus accumulé de 75 000 000 $ sur un capital
investi de 215 000 000 $ sans avoir l'équité d'une clause
d'indexation parce qu'on a affaire à un régime fermé
depuis 1973, c'est une disposition inéquitable. C'est une disposition
qui n'a pas sa légitimité, qui ne trouve pas sa
légitimité. Ce qu'on doit voir dans ce projet de loi, c'est une
volonté de permettre que les bénéficiaires puissent avoir
les bénéfices normaux dans un régime de rentes, quand on y
a contribué pendant plusieurs années, mais que la valeur de
l'argent, si elle n'est pas indexée, ne contribue pas du tout aux
besoins anticipés. Dans ce sens-là, le projet de loi vient
corriger cette lacune.
Nous, nous souscrivons à l'objectif, on n'a aucun
problème. Je vais souscrire également à ce que le
député souhaitait tantôt, que le projet de loi soit
adopté correctement demain. Nous aurons l'occasion, en commission
parlementaire, de questionner une disposition qui nous apparaît un petit
peu douteuse. On aurait souhaité qu'on intègre au projet de loi
une recommandation, pourtant unanime, émanant de leurs
délibérations, à savoir l'introduction d'une clause
d'accessibilité à la retraite après 32 ans de service.
J'aimerais avoir des explications. On ne comprend pas ça, parce que le
comité qui avait à apprécier ça - parce qu'il y a
un comité de rente qui a géré ce dossier-là depuis
un bout de temps, un comité de 13 personnes - unanimement, s'est entendu
sur toutes les dispositions, y incluant celle que je trouve curieux de ne pas
retrouver à l'inté- rieur du projet de loi. Sans doute, le
député de Viau aura des explications. Je l'invite à ce que
ce soit la bonne. On n'aura pas de problème s'il a une bonne explication
pour dire pourquoi cette disposition-là n'est pas à
l'intérieur du principe du projet de loi. Sur ce, M. le
Président, je conclus en mentionnant que l'Opposition officielle est
d'accord avec l'adoption du principe de ce projet de loi.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. Est-ce que la motion du député de Viau,
proposant l'adoption du principe du projet de loi 196, Loi concernant le
régime de rentes pour le personnel non enseignant de la Commission des
écoles catholiques de Montréal, est adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Oui, M. le Président. Je fais motion
pour que ledit projet de loi 196 soit déféré à la
commission de l'éducation pour étude détaillée.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion
de déférence est adoptée?
M. Gendron: m. le président, je veux juste
vérifier...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Une petite question, M.
le leader adjoint de l'Opposition officielle.
M. Gendron: Oui, je voulais vérifier. On a laissé
voir à une couple de reprises que ce serait de 9 heures à 11
heures. Moi, je veux que ce soit de 10 heures à 11 heures.
M. Bélisle: J'y viens, M. le Président. J'y
viens.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Très bien. Alors,
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Comme vient de vous le mentionner le leader
adjoint de l'Opposition, bien entendu, j'avise cette Assemblée, je fais
motion pour que demain, le mardi 17 décembre 1991, de 10 heures à
11 heures, pour combler le voeu et le souhait des parlementaires, à la
salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May, la commission de
l'éducation procède à l'étude
détaillée du projet de loi 196, Loi concernant le régime
de rentes pour le personnel non enseignant de la Commission des écoles
catholiques de Montréal. Également, M. le Président, je
fais motion pour que le whip du gouvernement, le député de Viau,
en soit membre.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, pour les fins du
procès-verbal, est-ce que la motion de déférence est
adoptée?
Une voix: Oui, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Votre
avis concernant la commission de l'éducation qui siégera demain
est déposé. Il y a consentement pour que le whip en chef de
l'Opposition en fasse partie? Très bien. Alors, votre avis est
déposé. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Je vous demanderais d'appeler l'article 19 de
notre feuilleton, M. le Président.
Projet de loi 125
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fart l'étude détaillée
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 19,
l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission
des institutions sur le projet de loi 125, le Code civil du Québec et je
reconnais M. le ministre de la Justice.
M. Gil Rémillard
M. Rémillard: Oui, M. le Président, comme vous le
savez, les travaux entourant l'adoption du Code civil du Québec
revêtent un caractère historique. Historique du fait qu'ils
assurent la réforme d'une loi adoptée il y a 125 ans et qui, tout
au long de notre histoire, a constitué l'un des éléments
les plus fondamentaux de la distinction du Québec. C'est donc avec
honneur, M. le Président, et satisfaction que je recommande aujourd'hui
l'adoption du rapport de la commission des institutions sur le projet de Code
civil du Québec.
Il convient de rappeler que, pour les fins de l'étude du projet
de loi 125, la commission des institutions confiait cette tâche à
une sous-commission sous la présidence éclairée et
efficace du député d'Iberville. La lecture de ce rapport
révèle l'ampleur et le sérieux du travail consacré
à l'étude article par article de ce projet de loi. En effet, il
aura fallu près de 150 heures de séances de travail des membres
de la sous-commission pour effectuer l'étude des 3144 articles
initialement proposés dans le projet, auxquels se sont ajoutés de
nombreux amendements. En outre, et pour les fins de leurs travaux
préparatoires, les membres de la sous-commission ont pu
bénéficier, de part et d'autre, de la compétence
d'éminents professeurs de droit et de légistes du
ministère de la Justice. De nombreuses heures ont été
consacrées à ces travaux préparatoires.
Tout au long des travaux, je me permettais de rappeler à mes
collègues de la sous-commission l'importance d'un consensus
au-delà des partis politiques pour l'adoption de cette loi qui contient
l'ensemble des règles devant régir les relations juridiques des
Québécoises et Québécois dans leur vie quotidienne.
M. le Président, je peux vous dire que cet objectif a été
atteint.
Notre premier objectif était de faire un Code civil capable de
refléter les réalités de notre société
québécoise contemporaine en nous référant, en tout
premier lieu, à la règle fondamentale du respect de la
dignité humaine. Permettez-moi de vous citer, à titre d'exemple,
l'adoption à l'unanimité des règles concernant le
consentement des patients aux soins; de celles entourant l'application de la
règle dite du bon Samaritain; de celles concernant la procréation
médicalement assistée; ou encore de celles ayant trait à
la protection de la vie privée et de celles favorisant la connaissance
de ses origines biologiques. Il en est de même quant à celles
régissant la copropriété, notamment, en ce qui a trait aux
nouvelles exigences concernant la constitution d'un fonds de prévoyance
et de celles visant à éviter la prise de contrôle de
l'assemblée des copropriétaires par un promoteur.
À la suite de représentations de divers groupes ou
associations, des amendements ont été apportés afin de
clarifier le contenu du Code. En matière de contrat de consommation, par
exemple, des précisions ont été ajoutées aux
articles concernant les avis d'exclusion de responsabilité de
manière à s'assurer que la formulation initiale respectait bien
l'intention recherchée, sans pour autant en changer la substance.
D'autres articles ont, par ailleurs, été ajoutés
pour tenir compte de certaines réalités juridiques. Je pense ici
à l'introduction d'une possibilité d'option en matière de
liquidation successorale. Je pense également à la reconnaissance
de la gratuité de l'expérimentation pour celui qui accepte de s'y
soumettre, à moins qu'il ne s'agisse d'une indemnité
compensatoire pour des pertes et contraintes subies de ce fait.
De plus, M. le Président, d'autres règles ont
été revues dans leur ensemble. Je pense à celles donnant
ouverture à l'hypothèque légale en faveur des personnes
ayant participé à la construction ou à la
rénovation d'un immeuble. Suite à diverses interventions du
milieu de la construction, cette priorité a été
réinscrite de manière à adapter les règles
actuelles, limitant le privilège à la plus-value acquise,
à celles introduites par le projet de Code avec comme date de
départ de calcul de ce droit celle correspondant à la notion de
la fin des travaux.
Enfin, M. le Président, il m'apparaît important de
souligner que l'hypothèque mobilière, sans dépossession,
sur un bien spécifique sera introduite dans notre nouveau Code.
Cependant, cette hypothèque sera reconnue, dans un premier
temps, à des fins d'entreprises. Quant à son ouverture en
faveur des particuliers, bien que consacrée dans son principe dans le
nouveau Code, elle ne sera possible que suite à l'adoption d'une loi
spécifique prévoyant ses modalités d'application.
Tels sont donc, M. le Président, certains aspects couverts par
les travaux effectués par la sous-commission des institutions depuis
près de quatre mois. À la veille de l'adoption du projet de Code
civil du Québec par l'Assemblée nationale, je peux vous assurer,
M. le Président, que la sous-commission présidée par le
député d'Iberville et composée du côté
ministériel, outre du ministre de la Justice, du député de
Chapleau et adjoint parlementaire au ministre de la Justice, du
député de Sherbrooke et de la députée de Groulx, a
fait un travail de rigueur remarquable pour en arriver aux résultats que
nous vous présentons ce soir.
M. le Président, je me dois de souligner la participation tout
à fait exceptionnelle de Mme la députée de Terrebonne et
de Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve au nom de l'Opposition
pour leur participation à la bonification du projet de départ et
à l'élaboration du projet de loi que nous vous présentons
aujourd'hui.
En effet, M. le Président, le principe même de la
réforme du Code civil n'est plus discuté car sa
nécessité a maintes fois été
démontrée. Qu'il suffise de rappeler l'importance d'une
adaptation de la loi à la vie contemporaine à laquelle s'ajoute
la nécessité de répondre à de nouveaux besoins par
l'adoption de lois particulières ou encore par des réformes
partielles qui s'intègrent assez difficilement à un ensemble qui
se veut cohérent et structuré. Essentiellement, l'objectif d'un
projet de réforme du Code civil est de réajuster le Code à
la vie de la société. Il ne s'agit pas de retourner à la
case départ. Le passé est porteur de principes féconds qui
ont traversé le temps en conservant toute leur vitalité. Ils
constituent en quelque sorte le bagage héréditaire du nouveau
Code qui va naître.
Par ailleurs, M. le Président, on ne peut ignorer les
caractères évolutifs de notre société.
L'avènement des chartes des droits et libertés en est un exemple
auquel s'ajoute, entre autres, la place de plus en plus importante que prennent
les nouvelles technologies dans le quotidien et les changements sociaux qui en
découlent. Le nouveau Code aura son identité propre. La culture,
les valeurs et la langue qui le structurent ont évolué depuis
1866. Le nouveau Code se veut le reflet de cette évolution. Dans ce
contexte, M. le Président, je demeure confiant que nos travaux
permettront à la société québécoise de se
doter d'une loi aussi fondamentale qui réponde à ses besoins.
C'est pourquoi je recommande à cette Assemblée l'adoption du
rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi de Code
civil du Québec.
Dépôt d'amendements
M. le Président, avant de procéder à l'adoption du
rapport de la commission des institutions, je sollicite le consentement de la
Chambre pour déposer et adopter quelques amendements techniques qu'il
convient d'apporter au rapport de la commission des institutions sur le projet
de loi 125, Code civil du Québec.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que je peux avoir
les copies d'amendements qui sont déposés, s'il vous plaît?
Alors, je vais suspendre quelques instants pour transmettre une copie des
amendements à l'Opposition officielle. La Chambre suspend pour quelques
instants ses travaux.
(Suspension de la séance à 23 h 54)
(Reprise à 23 h 55)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, les amendements
qui ont été déposés par M. le ministre de la
Justice sont recevables. Est-ce qu'il y a consentement en vertu de l'article
252 de notre règlement, puisqu'ils n'ont pas été
déposés dans les délais requis? Il y a consentement?
Consentement. Donc, les amendements sont jugés recevables.
Alors, sur le rapport tel qu'amendé, je reconnais maintenant Mme
la députée de Terrebonne.
Mme Jocelyne Caron
Mme Caron: Merci, M. le Président. Je pense que ce projet
de réforme du Code civil est un bel exemple que, lorsque nous
décidons de travailler ensemble sur un projet qui est
bénéfique pour l'ensemble de la population, nous sommes capables
de le faire, contrairement à ce qu'on a essayé de nous
démontrer depuis 16 heures cet après-midi, M. le
Président, que l'Opposition s'opposait toujours au principe.
Comment vous décrire, M. le Président, les moments
historiques que nous avons eu la chance de vivre en participant aux travaux de
la sous-commission qui a procédé à l'étude article
par article du projet de loi 125 qui donne naissance au nouveau Code civil du
Québec? Le travail fut laborieux, certes, M. le Président:
près de trois mois de séances en commission parlementaire,
l'étude de 3145 articles et de plus de 1000 amendements, mais le climat
de concertation que nous avons su établir a permis la réalisation
de ce mandat. Personne n'a ménagé ses efforts ni ses
énergies, autant les parlementaires de tous les côtés de la
Chambre, les légistes, les experts et ceux et celles qui ont suivi
attentivement nos travaux et nous ont donné certains conseils.
Je tiens à remercier ma collègue, la
députée
de Hochelaga-Maisonneuve, pour la chance qu'elle m'a offerte en me
demandant de participer, l'été dernier, à ces travaux.
Le but commun que nous nous sommes fixé, autant du
côté ministériel que du côté de l'Opposition
officielle, ainsi que le député indépendant de Westmount,
notre but commun était d'offrir aux Québécois et aux
Québécoises un Code civil qui tienne compte des
réalités actuelles de la société
québécoise, un Code civil véritablement adapté
à nos besoins et à nos différences. Le peuple
québécois est un peuple distinct, qui possède ses
caractéristiques particulières et notre Code civil distinct
reflète cette réalité.
Le Code civil est composé de 10 livres. Il est extrêmement
difficile, M. le Président, de résumer plus de 3000 articles.
J'ai donc décidé, à titre de porte-parole de l'Opposition
officielle en matière de protection du consommateur, de relever les
principaux articles de chacun des livres en tenant compte des
améliorations qu'ils apportent pour les consommateurs de biens et de
services québécois. En regardant le nouveau Code civil sous cet
angle, il devient possible d'informer la population d'une manière plus
simple et adéquate.
Le livre 1, M. le Président, touche les droits des personnes. Ce
chapitre est évidemment essentiel puisque nous légiférons
sur l'intégrité de la personne, la dignité de l'être
humain autant durant sa vie qu'après sa mort, le droit d'accepter ou de
refuser des soins et, à titre d'exemple, je citerai, bien sûr,
l'article 11 qui nous dit: "Nul ne peut être soumis sans son consentement
à des soins, quelle qu'en soit la nature, qu'il s'agisse d'examens, de
prélèvements, de traitements ou de toute autre intervention. Si
l'intéressé est inapte à donner ou à refuser son
consentement à des soins, une personne autorisée par la loi ou
par un mandat donné en prévision de son inaptitude peut le
remplacer."
Les articles que nous avons votés concernant les soins relevaient
de deux grands principes: le droit de décider des personnes et la
nécessité d'assurer la protection des mineurs et des personnes
inaptes. Mais nous avons également voulu donner davantage le droit de
décision aux mineurs de plus de 14 ans et c'est pourquoi nous retrouvons
des articles, comme l'article 14 et l'article 17, qui permettent aux mineurs de
14 ans et plus de consentir seuls à des soins. À moins qu'il n'y
ait des risques graves pour la santé, à ce moment-là, on
doit informer l'autorité parentale.
Dans ce livre premier Des personnes, nous avons également un
chapitre, le chapitre troisième, sur le respect de la réputation
et de la vie privée. Les articles 35 à 41 viennent donc jeter la
base de la protection de la vie privée. Vous vous souviendrez, M. le
Président, qu'au cours de cette session nous avons eu une commission qui
traitait spécifiquement de la protection de la vie privée. Tous
les mémoires qui ont été déposés ramenaient
constamment les articles du Code civil et on souhaitait même qu'on puisse
adopter ces articles le plus rapidement. Ces articles viennent donc jeter la
première base, les premiers principes, pour qu'il y ait une
reconnaissance dans le Code civil de la protection de la vie privée.
Parmi les grands changements, nous pouvons également souligner
l'implantation d'un registre de l'état civil, un registre unique qui,
lors de sa mise en application qui est prévue pour janvier 1993, pourra
offrir aux consommateurs québécois un service
téléphonique sans frais dans un délai de 48 heures, ou le
jour même lorsqu'il y aura des urgences. Je pense que c'est une
modification importante et intéressante. Ce registre vient modifier
certaines habitudes de vie, bien sûr, mais devrait améliorer
l'efficacité et la rapidité des services.
Il y a évidemment, aussi, tout ce qui a trait aux familles
souches et à la généalogie et, à ce sujet, je pense
que nous avons convenu, lors de l'étude article par article, que lors de
l'étude de la loi d'application qui sera déposée en 1992
nous porterons une attention spéciale à ces deux regroupements
qui ont effectivement besoin de vérifier certaines données dans
les registres.
Le livre deuxième nous permet d'aborder les droits de la famille.
Nous abordons ici, évidemment, les questions relatives au mariage,
à la séparation ou à la dissolution du mariage,
l'adoption, la procréation médicalement assistée,
l'obligation alimentaire et l'autorité parentale. Les règles du
patrimoine familial ne sont pas modifiées par le Code civil. Certains
points pourront être étudiés par l'Institut
québécois de réforme du droit qui sera créé
par une loi qui a été déposée au cours de la
session.
Je désire parler du principe de l'adoption, M. le
Président, parce que ce principe est extrêmement important, et des
représentations nous ont été faites par le Mouvement
Retrouvailles, représentations qui étaient justifiées, il
faut bien le dire. Le Mouvement Retrouvailles aurait souhaité que nous
puissions aller beaucoup plus loin dans nos modifications, mais je pense que
nous avons déposé certains amendements qui permettent une
ouverture par rapport à la situation actuelle, et je me permets de vous
donner les grandes lignes de ces amendements.
Par l'article 577, l'adopté majeur ou l'adopté mineur de
14 ans et plus a le droit d'obtenir les renseignements lui permettant de
retrouver ses parents si ces derniers y ont préalablement consenti. Il
en va de même des parents d'un enfant adopté si ce dernier, devenu
majeur, y a préalablement consenti. L'adopté mineur de moins de
14 ans a également le droit d'obtenir les renseignements lui permettant
de retrouver ses parents si ces derniers, ainsi que ses parents adoptifs, y ont
préalablement consenti. Enfin, ces consentements ne doivent faire
l'objet d'aucune
sollicitation. Un adopté mineur ne peut, cependant, être
informé de la demande de renseignements de ses parents.
Et l'article 578, M. le Président, est extrêmement
important parce que, s'il y a le moindre doute concernant un préjudice
grave quant à la santé de l'adopté - et quand on parle de
santé, on parle de santé autant physique que psychologique, M. le
Président - à ce moment, l'adopté pourra obtenir les
renseignements qui sont importants pour lui. Ce n'est donc pas tout ce que
demandait le Mouvement Retrouvailles, mais c'est déjà un premier
pas en avant.
Pour la procréation médicalement assistée, M. le
Président, nous avons également apporté certaines
modifications qui vont permettre quand même d'assurer à la
mère une certaine protection, et c'est l'article 536.3: Celui qui,
après avoir consenti à la procréation médicalement
assistée ne reconnaît pas l'enfant qui en est issu, engage sa
responsabilité envers cet enfant et la mère de ce dernier. Il y a
quand même un engagement précis qui apparaît au Code civil.
le livre troisième a trait, bien sûr, aux successions et à
tout ce qui en découle évidemment: le testament, les droits des
légataires, les devoirs du liquidateur de la successior le partage, etc.
je désire attirer votre attention, m. le président, sur deux
articles concernant la survie de l'obligation alimentaire, articles qui
étaient demandés spécifiquement par certains regroupements
de femmes. les articles 694.2 et suivants permettent de reconnaître le
droit à une obligation alimentaire. ces deux articles étaient
extrêmement techniques, m. le président, ce qui fait qu'on a
réussi à se faire un petit tableau qui nous permet de dire que
dans des cas où il y a ex-conjoint et conjoint et des héritiers
qui sont différents des conjoints, la palette se répartira d'une
manière assez équitable, c'est-à-dire que l'ex-conjoint
peut recevoir une pension alimentaire pour un maximum de 12 mois ou un maximum
de 10 %, le conjoint survivant un maximum de 16,5 %, les enfants se partagent
33 % et les héritiers désignés 40 %. donc, nous avons
essayé d'être un petit peu équitable pour tous ceux qui
pouvaient être concernés.
Un autre élément qui nous apparaissait important concerne
le testament, et nous avions un certain problème puisque le Code ne
permettait pas à une personne qui ne peut lire ni écrire de faire
un testament devant témoin, puisqu'elle ne pouvait ni lire ni
écrire. Et comme on sait qu'actuellement, au Québec, nous nous
retrouvons avec plus de 25 % de la population qui est analphabète, nous
avons pensé ajouter l'article 728 qui va permettre à une personne
qui ne peut ni lire ni écrire de faire un testament devant
témoins, à la condition que la lecture en soit faite au testateur
par l'un des témoins en présence de l'autre. En présence
des mêmes témoins, le testateur déclare que l'écrit
lu est son testament et fait un signe particulier pour prouver qu'il approuve
ce testament. Donc, M. le Président, nous avons tenu compte d'une
réalité qui existe ici.
Le livre quatrième concerne les biens. Il faut dire, M. le
Président, que ce livre est parmi les livres les plus techniques, ce qui
fait que je me contenterai de vous dire que nous avons essayé de toucher
à tout ce qui regarde les droits de propriété, les biens
d'autrui, les droits de passage, tout ce qui touche la fiducie et tout ce qui
touche, bien sûr, évidemment, les citoyens dans leur quotidien,
autant du côté de leurs relations entre voisins que des autres
conditions de droits de passage, M. le Président.
Le livre cinquième regroupe les articles qui touchent les
obligations en général et les contrats. Je dois vous avouer que,
ce chapitre ayant des conséquences particulières pour les
consommateurs, j'y ai prêté évidemment beaucoup
d'attention. Au début de l'étude de ce projet de loi article par
article, nous avions dénoncé certains articles qui nous
apparaissaient comme un recul majeur pour les consommateurs. Le ministre de la
Justice a entendu nos revendications et a donné suite aux demandes que
nous avons formulées. C'est pourquoi nous nous retrouvons avec des
articles qui viennent maintenir ce que les consommateurs avaient et, dans
certains cas, on ajoute une protection additionnelle.
Je pense, par exemple, à l'article 1376 qui touche les contrats
d'adhésion et qui va donner une protection non seulement pour les
consommateurs, mais l'article 1376 va surtout toucher aux petits
commerçants, aux petites entreprises, aux gens qui ont des franchises et
qui, parfois, se trouvaient lésés devant les grandes
chaînes, aux petits boutiquiers qui sont dans les centres commerciaux et
qui, parfois, ont de la difficulté à négocier avec les
propriétaires de ces centres d'achats.
Donc, M. le Président, du côté des consommateurs,
nous avons essayé de donner le maximum. Nous avons maintenu la
responsabilité des fabricants, à la différence que ce sont
les fabricants qui devront faire la preuve qu'ils ont vraiment tout fait pour
mettre sur le marché un produit adéquat. Je pourrais parler de ce
chapitre pendant des heures, M. le Président, mais je vais me limiter,
soyez rassuré!
Un article qui me tenait particulièrement à coeur dans ce
chapitre, M. le Président, c'est l'article 1963 qui permet à une
personne âgée de résilier son bail lorsqu'elle
décide d'aller habiter dans un centre pour soins prolongés ou si
elle décide de changer de foyer d'hébergement. Nous partions d'un
problème bien réel. Souvent, dans les foyers d'hébergement
qui sont, pour la plupart, des foyers privés, les personnes
âgées se voient dans l'obligation de signer un bail pour une
durée d'un an. Dans ces résidences, il y a évidemment une
chambre, mais on offre aussi le service de restauration. Souvent, les
aînés se
retrouvent insatisfaits des services qu'ils ont et ils ne pouvaient
briser le bail. C'était un bail auquel ils devaient donner suite et ils
ne pouvaient quitter pour s'en aller dans un autre foyer d'hébergement.
Donc, l'article 1963 vient régler ce problème. Il faut dire que
le principe qui nous guidait constamment dans notre action, autant d'un
côté de la Chambre que de l'autre, c'était vraiment
d'assurer la protection des plus faibles.
Le livre sixième traite des priorités et des
hypothèques. Je me limiterai ici a des commentaires sur
l'hypothèque mobilière, je ne peux faire autrement, M. le
Président. C'est vraiment le seul point majeur de discorde qui restait
à la fin de nos travaux et ce fut un sujet que nous avons discuté
longuement, autant en commission parlementaire qu'en séance de travail.
La base est vraiment philosophique, je pense. De notre côté, nous
jugions que l'hypothèque mobilière, pour les particuliers, ne
ferait qu'accroître l'endettement. C'était d'ouvrir une porte
davantage au crédit, donc de permettre aux gens d'avoir davantage de
crédit et, donc, par le fait même, de s'endetter. Nous jugions
qu'actuellement, dans la société québécoise, le
taux d'endettement de nos familles était suffisamment
élevé et qu'il n'était pas question de rajouter un moyen
pour augmenter ce crédit. (0 h 10)
Nous nous retrouvons donc avec un article de compromis, qui est
l'article 2666.1 qui nous dit: "À moins qu'elle n'exploite une
entreprise et que l'hypothèque ne grève les biens de
l'entreprise, une personne physique ne peut consentir une hypothèque
mobilière sans dépossession que dans les conditions et suivant
les formes autorisées par la loi." Comme, à l'heure actuelle, il
n'y a pas de loi qui le permette, nous devrons donc retourner un jour en
commission parlementaire pour entendre, en audiences particulières, tous
les intervenants qui voudront se prononcer sur le sujet - là, je pense
autant aux institutions financières qu'aux associations de consommateurs
- et regarder objectivement, ensemble, ce que nous pouvons faire par rapport
à cette hypothèque mobilière.
Les livres septième et huitième légifèrent
respectivement sur la preuve et sur la prescription. Ces deux chapitres sont
également extrêmement techniques, M. le Président. Pour ce
qui est de la preuve, nous avons tenté de tenir compte des nouveaux
moyens mis à notre disposition, ces moyens qui existent grâce
à de nouvelles technologies et qui n'existaient aucunement lors de
l'adoption du Code civil, il va sans dire, en 1866. Donc, les articles 2841,
2843 et 2844 permettront de déposer, comme preuves, certaines cassettes
ou certains autres moyens techniques qui n'existaient pas. Évidemment,
il y a des balises. C'est que ces documents doivent être authentiques et
il y a des règles bien précises à suivre.
Le livre neuvième nous donne les règles qui vont toucher
la publicité des droits. Ce chapitre du Code civil du Québec nous
présente toutes les règles concernant le registre des droits
personnels et réels mobiliers ou sur le registre foncier. Comme exemple,
je citerai peut-être, M. le Président, l'article 2928 qui nous
indique que: L'inscription d'un droit sur le registre des droits personnels,
sur le registre des droits réels mobiliers ou sur le registre foncier
emporte, à l'égard de tous, présomption simple de
l'existence de ce droit. L'inscription sur le registre foncier d'un droit de
propriété dans un immeuble qui a fait l'objet d'une
immatriculation, si elle n'est pas contestée dans les 10 ans, emporte de
même présomption irréfragable de l'existence du droit.
En termes faciles, M. le Président, ça veut dire
qu'à partir du moment où nous allons immatriculer, dans le
registre, un immeuble, après 10 ans, cet immeuble sera reconnu. On ne
pourra contester. Alors, il sera extrêmement important, à mesure
qu'il y aura des transactions au cours des années à venir, que
cette transaction soit enregistrée dans le registre foncier et ce sera
un enregistrement unique, c'est-à-dire qu'à chacune des autres
transactions qui suivront sur cet immeuble les citoyens n'auront pas besoin de
réenregistrer.
Enfin, le livre dixième vient établir les dispositions
concernant le droit international privé. Ce chapitre vient donc doter le
Québec d'une série de dispositions de droit nouveau. Ce chapitre
nous apparaissait important, bien sûr, puisqu'il vient définir les
règles du jeu de l'État québécois. Je retiens,
principalement, trois articles, M. le Président, le premier étant
l'article 3094 qui parle du contrat de consommation. Cet article est
extrêmement clair. Il permet, finalement, au consommateur de pouvoir
opter pour le contrat qui le favorise le plus, le contrat qui a
été signé ici, au Québec, ou à
l'extérieur. C'est vraiment une protection extrêmement importante
qui est émise dans le Code civil à ce sujet. L'article qui suit,
l'article 3095, qui traite du contrat de travail, offre également cette
même protection aux travailleurs, M. le Président, et ça
aussi, c'est important.
Je m'en voudrais de ne pas souligner un article qui a
particulièrement attiré mon attention, c'est-à-dire
l'article 3139.1, qui m'apparaft même essentiel dans un Québec
souverain et je vais me permettre de vous le lire: "L'autorité du
Québec reconnaît et sanctionne les obligations découlant
des lois fiscales d'un autre État, où il en est ainsi pour les
obligations découlant des lois fiscales du Québec." Donc, on
pourra traiter d'égal à égal, M. le Président.
Je conclurai en disant que le travail a été fait
sérieusement de part et d'autre, avec assiduité, avec beaucoup
d'attention. Rien n'est parfait, bien sûr. Donc, l'Institut
québécois de réforme du droit aura la tâche de
compléter au fur et à mesure de l'évolution de notre
société. C'est avec beaucoup de fierté que
l'Opposition
officielle appuie ce projet de loi qui donne naissance à un
nouveau Code civil du Québec après 125 ans. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci beaucoup, Mme la
députée de Terrebonne. Nous en sommes à l'étape du
rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 125, Code civil
du Québec, et sur les amendements déposés par le ministre
de la Justice. Je reconnais M. le député de Westmount. M. le
député, la parole est à vous.
M. Richard B. Holden
M. Holden: Merci, M. le Président. J'ai regardé les
Gémeaux l'autre soir et il y avait Dominique Michel qui disait que
c'était peut-être un peu ennuyant pour les gens qui
écoutaient, mais qu'il fallait remercier tous ceux et celles qui ont
aidé à faire valoir les programmes de télévision.
Dans le cas du Code civil, on parle de 35 ans de travail. Alors, il y a
beaucoup de monde à remercier, à partir du ministre de la Justice
qui a travaillé avec acharnement avec une équipe incroyable de
légistes et qui a travaillé pendant des années depuis
qu'il a accédé au poste de ministre de la Justice. Il faut
remercier aussi les députés de l'Opposition, les
députées de Hochelaga-Maisonneuve et de Terrebonne, et leur
équipe aussi qui ont travaillé probablement même plus fort
que l'équipe du ministre parce qu'ils étaient moins nombreux. Il
faut remercier le Barreau du Québec qui a travaillé depuis je ne
sais combien d'années, peut-être depuis M. Duplessis, parce que
c'est déjà dans le temps de M. Duplessis qu'on avait
décidé de faire une réforme du Code civil. L'équipe
du Barreau a toujours été présente, l'équipe de la
Chambre des notaires, les communautés de droit communautaire. Oui, c'est
sûr que l'adjoint parlementaire au ministre de la Justice a
travaillé avec brio dans ce dossier, comme on se souvient de l'ancien
doyen de la Faculté de droit de McGill, M. Paul-André
Crépeau, qui a déjà été président de
la Commission de réforme du Code civil. En tout cas, il y a du monde qui
a travaillé là-dessus depuis 35 ans, M. le Président, et
je tiens à les féliciter toutes et tous.
When we started our detailed study of the Bill last August, I said that
I hoped we would finish it by Christmas, by the Christmas break, and we
actually did succeed in doing that. But I had my doubts last week because the
Opposition decided to overly concentrate on the question of chattel mortgages.
Chattel mortgages, Mr. Speaker, have been in existence for 150 years in the
U.K. They are known throughout the world. There is nothing complicated about
chattel mortgages. But the Opposition in this House seems to have a view that
Big Brother should watch over everybody. It is a kind of welfare-State
approach. In this case, it is not Big
Brother, it is Big Sisters, because we have the Members for
Hochelaga-Maisonneuve and for Terrebonne being the Big Sisters. They were
watching over as if, if we had a chattel mortgage in this Province, all of a
sudden, all of the Quebeckers are going to go out and mortgage their household
furniture to buy a lottery ticket. (0 h 20)
I do not know what the obsession was with the Opposition but, in any
event, because we wanted to get the final law passed in this session, a
legitimate compromise was made by the Government. The Government said: Well,
let us put the principle of chattel mortgages into the Code, subject to passing
a separate law to deal with the details. That is not unusual. Ontario has a law
of chattel mortgages. I mean, this is not an unusual situation and perhaps it
is because the Government had not really done all of its homework on chattel
mortgages. So, we are going to have more hearings, public hearings, more
discussions on chattel mortgages and the issue of chattel mortgages is kind of
set aside in the Code. That was one of the big big changes that was meant to be
brought into the new Code.
But let us go beyond... That was the only dispute that there was in this
entire discussion over the Civil Code. The Civil Code, in my mind, is as
important if not more important than the Constitution. It is the law which
governs all of the activities from before you are born, Mr. Speaker, until
after you are dead, and it governs everything that you do and say and how you
conduct yourself in this world. To me, it is the most important law that there
is in the Province and it is probably the law which makes us a distinct
society, if you want to get into that whole constitutional debate, but we do
not want to get into that tonight.
One of the points that I was preoccupied with, Mr. Speaker, was the fact
that in the original Code, around 1860, 1870, a lot of it was drafted in both
languages, English and French. This Code was drafted entirely in French with an
English translation. Now, my friend, the Member from Chapleau, assures me that
the translators have been working very hard on this. I have looked at some of
the translation, I have not seen it all, but I think that... In the old days,
we used to try to argue cases where we would look at both texts and compare
them, and see what the Legislator originally meant. In this context, I believe
now that we will only look at the French text and we will look to the English
text not as a comparison in law, but as a comparison in translation, so that,
in a sense... It is part of modern Québec, I mean, I am not arguing with
the fact that the language of the Code now is French. I am not arguing...
Moi, je ne fais pas de chicane là-dessus, mais je signale
à ceux et à celles qui vont essayer de comparer les deux textes,
à l'avenir,
devant les tribunaux, que le texte français, c'est celui qui a
été étudié par le législateur, et non pas le
texte anglais.
Finalement, M. le Président, je vais dire que ça, c'est un
Code qui a été étudié pendant 35 ans. Je suis
sûr que c'est aussi bien, sinon mieux que le Code qu'on a actuellement.
Moi, j'ai un peu de nostalgie du Code civil ancien parce que j'ai
pratiqué le droit pendant 35 ans avec le vieux Code, mais je commence
à m'habituer, après quatre ou cinq mois d'étude
détaillée, à un texte différent. Je sais que, d'ici
à un an, tous les avocats, tous les notaires, tous les gens du droit
vont être obligés d'étudier le nouveau Code. Après,
on va recommencer à pratiquer le droit. Il va y avoir des jugements qui
vont nous surprendre, c'est sûr, M. le Président. À un
moment donné, un article qu'on a pensé être très
clair va être interprété par un juge qu'on va dire
niaiseux, pour ne pas insulter la magistrature, mais il va nous donner une
interprétation qui est totalement contraire à ce qu'on pensait
faire. Mais c'est ça, l'avis juridique, c'est de savoir ce que le
législateur a voulu dire. Alors, j'espère qu'on a
été assez clairs pour qu'il n'y ait pas trop d'accrocs et que le
monde vive avec le nouveau Code aussi bien, sinon mieux, qu'il a vécu
avec l'ancien Code. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Westmount, de cette intervention. Je reconnais, sur ce
même sujet, l'adjoint parlementaire de M. le ministre de la Justice et
député du comté de Chapleau. M. le
député.
M. John J. Kehoe
M. Kehoe: II est difficile de mesurer toute l'importance du
projet de loi que nous avons devant nous. Adopter un nouveau Code civil du
Québec, comme nous nous apprêtons à le faire, est une chose
extrêmement importante. Son importance dépasse très
largement tous les projets de loi que nous avons eu l'occasion de discuter en
cette Chambre. Les projets de loi que nous discutons touchent sous divers
angles la vie des citoyennes et citoyens de notre collectivité. Dans
notre rôle de parlementaire, nous faisons le maximum pour traduire
chacune des aspirations et les besoins des citoyens et citoyennes qui ont cru
en nous en nous confiant la responsabilité d'assumer leur
destinée.
Le projet de loi 125, qui franchit aujourd'hui une autre étape
importante de notre processus législatif, dépasse très
largement en importance la simple loi. Il concerne, en matière civile,
la loi des lois. Il concerne le fondement de notre droit commun, le fondement
de notre droit civil.
En effet, ce sont les fondements juridiques de notre vie civile qui sont
interpellés par le projet de loi 125, donc tout ce qui régit en
son fondement même la vie en société; la vie civile des
hommes et des femmes qui est au centre de notre discussion aujourd'hui.
Il faut le souligner, l'occasion a quelque chose d'historique. Ce geste,
aujourd'hui, fera date, car ce n'est pas tous les ans ni toutes les
décennies que le gouvernement modifie aussi significativement une loi de
cette importance en matière civile.
Si on cherche et remonte le cours du temps, on constate que, dans son
ensemble, cette loi remonte à 125 ans, ce qui, c'est l'évidence
même, donne toute sa singularité au geste que nous allons poser
aujourd'hui. Il lui donne une portée historique sans
précédent.
Ceci n'est sans doute pas sans lien avec le fait que le projet de loi
125 vient mettre un terme à une démarche amorcée
voilà 35 ans par le juge Thibodeau Rinfret. Ce nouveau Code civil que
nous nous apprêtons à adopter aujourd'hui est, en effet,
l'aboutissement d'un travail et d'efforts qui ont débuté
voilà maintenant 10 ans. Il n'est pas inutile de dire quelques mots sur
la petite histoire de cette réforme de notre Code civil. J'ai dit
"petite histoire" sans être vraiment certain que l'expression convienne.
Il y a sans doute lieu de parier de l'histoire, tout au moins occupera-t-elle
quelques chapitres de l'histoire de notre droit civil contemporain. (0 h
30)
On me permettra de rappeler les étapes qui ont marqué
cette réforme. D'abord, il importe de souligner une chose, notre geste
montre que la nécessité de l'actualisation de notre Code civil ne
s'est jamais démentie au cours des 30 dernières années. En
effet, si, à l'aube de la Révolution tranquille, la pertinence
d'une actualisation de notre Code civil s'est imposée, cette pertinence
n'a pas cédé à l'épreuve du temps. Au contraire,
l'épreuve du temps l'a renforcée. Sa pertinence et son
à-propos n'ont fait que grandir depuis lors et, il faut le souligner, en
particulier depuis que le gouvernement a adopté la Charte des droits et
libertés de la personne. La concordance et la conformité avec la
Charte des droits et libertés, tel qu'il a été
souligné à plusieurs reprises en commission parlementaire,
interpelle notre conviction profonde dans les valeurs démocratiques. En
effet, les sociétés démocratri-ques, depuis 1945, sont
devenues extrêmement soucieuses d'avoir un droit commun conforme aux
chartes des droits et libertés. Avec cette réforme, le
Québec s'inscrit dans cette même orientation de révolution
des démocraties.
M. le Président, il n'y a pas seulement la conformité et
la concordance avec la Charte des droits et libertés qui sont à
l'origine de cette révision de notre Code civil. Elle a
été rendue nécessaire pour corriger l'inadéquation
qui s'est manifestée entre notre époque et les règles du
droit civil. Les choses ont connu des changements en 125 ans. Il y a de
nombreuses transformations au niveau des rapports sociaux et familiaux. Le
contexte économique, les valeurs et
les connaissances ont évolué et changé
significa-tivement depuis une centaine d'années. Tout cela correspond,
il est bien certain, à cette inadéquation dont j'ai parlé
ainsi qu'à la nécessité de moderniser nos règles de
droit civil. Cette réforme, que traduit le nouveau Code civil que nous
avons devant nous, n'est pas une rupture avec le droit actuel. Le nouveau Code
civil s'inscrit dans la continuité. Les modifications qui ont
été apportées en constituent un développement, une
bonification ainsi qu'une consolidation.
Vous n'ignorez pas, M. le Président, que le nouveau Code civil
comporte quelque dix livres touchant diverses matières. Ces dix livres
ont tous été, comme l'a souligné le ministre de la Justice
à maintes reprises, présentés à la consultation
publique. Je me permets de signaler que les quatre premiers livres ont fait
l'objet d'une adoption et que les six premiers ont été produits
sous forme d'avant-projet de loi. De plus, je signale également que les
quatre premiers livres déjà adoptés sont relatifs au droit
de la personne en 1987, au droit de la famille en 1981 et 1982, au droit des
successions en 1987 et, enfin, aux droits des biens, en 1987 également.
Quant aux six autres livres qui ont été présentés
sous forme d'avant-projet de loi, ce sont le droit des obligations, le droit
des sûretés réelles, le droit de la preuve, le droit de la
prescription, la publicité des droits et le droit international
privé. Ils ont, comme on l'a mentionné plusieurs fois lors de
l'étude en commission, tous donné lieu à de nombreuses
discussions de la part des juristes ou d'organismes. Ces discussions ont
été réalisées sous la gouverne, comme le savent
plusieurs d'entre vous, d'un comité spécial de consultation
hautement considéré dans la détermination des directions
générales, et ce, pour chacun des livres. C'est ce qui a permis
de composer l'ensemble des six derniers livres non contenus, comme les quatre
premiers, dans le nouveau Code civil que nous avons devant nous
aujourd'hui.
En terminant, je suis conscient que ce que je viens d'évoquer est
extrêmement modeste sur la nature de l'actualisation de nos règles
de droit civil qu'introduit le nouveau Code. Enfin, je veux souligner que je
suis extrêmement heureux d'être associé aujourd'hui à
cet événement qui prendra place dans les annales du droit
québécois. Plus de 35 ans d'efforts et de discussions continus
trouvent aujourd'hui leur aboutissement dans ce nouveau Code civil que nous
nous apprêtons à adopter. Je sais gré à tous ceux et
celles qui ont contribué, au cours des années, à sa
réalisation et à son aboutissement aujourd'hui.
May it be permitted for me to say, Mr. President, in just a few words
that I wish to congratulate the Minister of Justice who, like many others
before him, made promises that the whole of the Civil Code would be adopted. It
was promised by many ministers of Justice in the past. But our present Minister
of Justice, the present deputy for Jean-Talon has delivered the merchandise. He
made the promise and because of his determination, his competence, his
patience, his hard work over not only the three and a half months that we
actually studied in parliamentary commission the different amendments and the
different articles, article by article in the Civil Code, but over this period
of time, the Minister showed that he was absolutely, beyond any doubt,
determined to have this law adopted. I can assure you, Mr. President, that in
the 10 years that I have been in this Parliament, to me, this is the most
significant and the most enriching experience that I have had to go through. i
wish to thank him and i wish to thank also the members of the opposition: the
member for hochelaga-maisonneuve, by her questions and by her persistently
asking questions to the minister, the member for terrebonne, the member for
sherbrooke, the member for west-mount. each one participated in their own way,
so that today, with a great deal of pride, with a great deal of satisfaction,
we can say: work well done! and we present to you now... the actual code has
been deposed and presented here in parliament for adoption within the next few
days. thank you, mr. president.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Chapleau. Est-ce que les amendements proposés
par le ministre au rapport de la commission des institutions sont
adoptés? Vous voulez parler? Excusez-moi. M. le député de
Sherbrooke.
M. André J. Hamel
M. Hamel: Merci, M. le Président. Vous comprendrez que
c'est avec une très grande et légitime fierté que
j'interviens aujourd'hui, le mardi 17 décembre, à minuit
quarante, sur le projet de loi 125, le Code civil du Québec, dont la
refonte et la présentation à cette Assemblée constituent
un événement historique au Québec. J'interviendrai donc
brièvement et de façon générale en soulignant
simplement les quelques aspects particuliers qui m'ont permis de vivre une
autre expérience parlementaire à la fois exigeante mais combien
enrichissante.
M. le Président, depuis plus de 35 ans, de nombreux juristes
travaillent à ce projet de refonte du Code civil du Québec et
voilà qu'aujourd'hui c'est maintenant chose faite. Si le ministre de la
Justice peut maintenant proclamer mission accomplie, c'est grâce à
une équipe d'individus hautement qualifiés, bien sûr, mais
aussi à des éléments particuliers qu'il m'apparaît
important de souligner. ii faut d'abord noter l'exceptionnel climat de travail
qui a entouré l'étude de ces quelque
3000 articles et plus de 1000 amendements de ce Code civil du
Québec. En effet, M. le Président, les députés
associés à l'étude de cette pièce
législative ont démontré un esprit de collaboration
exemplaire et, faisant abstraction d'attitudes partisanes improductives, ont
permis d'achever cette oeuvre juridique essentielle à notre
société québécoise contemporaine. (0 h 40)
II faut aussi rappeler, M. le Président, le très grand
sens professionnel de nos légistes et experts invités à
participer aux travaux de notre sous-commission qui, constamment, ont
démontré leur souci profond de toujours rechercher l'esprit et la
lettre les plus pertinents, les plus clairs afin de permettre
l'interprétation juridique la plus simple et la plus limpide qui soit
pour le plus grand bien de nos justiciables. Je souhaite donc que l'application
du nouveau Code civil du Québec soit source de jugements
équitables et qu'il démontre que la société
québécoise, encore une fois, est à l'avant-garde. C'est
donc une pièce législative majeure mettant à jour le droit
actuel et rédigeant un droit nouveau correspondant à une
réalité moderne de notre société
québécoise.
Enfin, je veux remercier mon collègue, ministre de la Justice, de
m'avoir invité à participer aux travaux de la sous-commission du
Code civil et d'avoir acquis ainsi une expérience unique en
exerçant activement mes fonctions de législateur, volet important
de mon rôle de député.
En terminant, M. le Président, je veux surtout féliciter
chaleureusement M. le ministre de la Justice et député de
Jean-Talon, M. Gil Rémillard, d'avoir démontré une
volonté politique claire et ferme de réaliser ce projet
législatif attendu depuis si longtemps. C'est grâce à sa
patience et à son inébranlable détermination qu'il a su
diriger, avec un doigté remarquable, l'ensemble de ce travail
législatif qu'a été le projet de loi 125, le nouveau Code
civil du Québec. M. le Président, évidemment que
j'appuierai ce projet de loi. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Sherbrooke de votre intervention. Est-ce que les
amendements proposés par le ministre au rapport de la commission des
institutions sur le projet de loi 125 sont adoptés? Adopté. Le
rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi 125 tel
qu'amendé est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: M. le Président, je vous demanderais
d'appeler l'article 3 de notre feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 187 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 3, M.
le ministre du Revenu propose l'adoption du principe du projet de loi 187, Loi
modifiant la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils
d'amusement. Je vais le reconnaître maintenant et je cède la
parole au ministre du Revenu.
M. Raymond Savoie
M. Savoie: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. le
Président, comme vous le savez, l'organisation des bingos au
Québec est sous la direction de la Régie des loteries du
Québec et ça, depuis mon Dieu, fort longtemps. La Régie,
chaque année, émet plusieurs milliers de permis à travers
tout le Québec qui permettent à un ensemble d'organismes à
but non lucratif de tenir des activités de financement dans le contexte
d'un bingo. Tout le monde, je pense, est bien familier avec l'impact de ces
bingos au niveau des structures, par exemple, des paroisses, avec des
activités de financement, surtout des organismes qui visent à
intervenir auprès des gens défavorisés, des gens
démunis, et ces activités-là ont beaucoup, beaucoup
d'importance chez nous. Il y a une bonne participation de la part de la
population, une bonne participation, je pense, d'une façon continue
depuis plusieurs années.
Les permis sont émis par la Régie sous certaines
conditions qui sont vérifiables. Il y a des inspecteurs qui
vérifient et qui assurent un bon contrôle au niveau de l'ensemble
de ces activités. Depuis plusieurs années, on connaît,
à travers le Canada, et on a connu surtout au début des
années soixante-dix beaucoup d'activités du côté des
communautés autochtones, les communautés autochtones qui
cherchaient d'une façon constante à s'impliquer dans le processus
des bingos. Et, plus particulièrement au cours des dernières
années, les communautés autochtones avaient des demandes d'une
façon constante pour, effectivement, émettre leurs propres permis
à des conditions qui, évidemment, pourraient leur être
favorables. Il y a eu des échanges, des négociations avec le
gouvernement du Québec et en particulier avec le ministre responsable du
dossier autochtone depuis 1989, ayant exercé moi-même ce
portefeuille de 1986 à 1989. Alors, avec le ministre responsable au
niveau des questions autochtones, il a été examiné la
possibilité d'en arriver à une entente qui permettrait à
ces communautés autochtones, par le biais d'une structure du conseil de
bande et suite à une entente intervenue avec le gouvernement du
Québec, d'émettre elles-mêmes ces permis.
Cette question a été examinée par la Régie
des loteries et par les officiers de la Régie. Nous croyons qu'il est
certainement possible, dans un
contexte où il y a une entente qui doit être
ratifiée, évidemment, comme je l'ai mentionné tout
à l'heure, par le Conseil des ministres, d'autoriser les conseils de
bande à émettre des permis pour que, finalement, sur leur
territoire de réserve, qui est un territoire fédéral, les
autochtones puissent se livrer à des activités de bingos sous le
contrôle d'un permis émis par le conseil de bande. Les conditions
pour l'émission de ce permis doivent rencontrer nécessairement
les conditions qui régissent l'ensemble des permis sur le territoire du
Québec.
Alors, il n'est pas question de faire ici un cas spécifique qui
va permettre, par exemple, la tenue de bingos extraordinaires sur les
réserves. Il n'est pas question non plus de mettre de côté
l'ensemble de la réglementation qui régit les activités de
bingos sur le territoire du Québec, mais plutôt d'autoriser un
conseil de bande à émettre ces permis-là; par exemple, on
pense surtout au cas de Pointe-Bleue, à d'autres communautés
montagnaises et également à des communautés algonquines ou
même cries qui pourront se livrer à ce genre d'activité par
l'émission d'un permis autorisé par leur conseil de bande.
Dans un contexte où on connaît beaucoup de
difficultés aujourd'hui avec un groupe en particulier - on pense surtout
aux Mohawks de Kahnawake et on connaît aussi l'intérêt des
Mohawks du secteur d'Oka à tenir des bingos -il n'est pas question et il
ne faudrait pas que ce soit perçu comme une autorisation, pour le
conseil de bande, d'émettre des permis ipso facto. Il faudra, comme je
vous l'ai mentionné tout à l'heure, qu'un mémoire soit
présenté au Conseil des ministres; évidemment, ce
mémoire sera sujet à étude par moi-même et par les
officiers de la Régie avant que le décret ne soit soumis au
Conseil des ministres. Ce décret sera, bien sûr,
négocié et certainement discuté entre les partenaires des
communautés autochtones et le ministre responsable de la question
autochtone; tout ça finalement pour en arriver à une entente qui
va assurer un bon contrôle. Et si, un jour, les relations
s'améliorent d'une façon acceptable avec les communautés
mohawks de Kahnawake et d'Oka, à ce moment-là, ça pourra
être examiné à la lumière des ententes qui seront
intervenues avec le gouvernement du Québec.
Il y a une volonté de notre gouvernement dans ce contexte-ci et
certainement une acceptation par la Régie de voir finalement une plus
grande application, de rencontrer des demandes de la part de certaines
communautés autochtones qui veulent participer pleinement, qui veulent
respecter les lois du Québec, qui veulent s'assurer, finalement,
qu'elles sont partenaires dans notre développement, dans nos
institutions, dans nos sources de financement pour les organismes à but
non lucratif, qu'elles puissent en quelque sorte se prendre en main, prendre
les bénéfices de ces bingos et les orienter vers des organismes
à but non lucratif ou des oeuvres charitables sur le territoire de la
réserve à des fins qu'elles jugeront et qu'elles seront seules
à juger, finalement. Tout ça dans le but, dans
l'intérêt de démontrer notre volonté finalement de
bien comprendre leur situation, aussi de démontrer une certaine
sympathie vis-à-vis de ces communautés, de leurs structures, de
leurs particularités. (0 h 50)
Je pense que ce qui nous a plus guidés peut-être, c'est de
reconnaître que les communautés autochtones ont finalement une
situation un peu privilégiée chez nous. Elles sont en quelque
sorte très distinctes dans leurs coutumes, dans leur façon de
vivre sur le territoire que nous partageons ensemble. Il faut bien penser, je
crois, à un dicton d'Aristote qui dit que traiter d'une façon
égale les inégalités donne naissance à des
injustices. C'est un peu dans ce contexte-là que ce dossier a
été approché, M. le Président, et c'est un peu avec
une ouverture d'esprit, avec une volonté de travailler, de partager avec
elles leurs aspirations, de rencontrer leurs obligations vis-à-vis de
leur propre communauté que la Régie des loteries et
moi-même, avec la bonne collaboration du ministre responsable du dossier
autochtone, sommes arrivés à une espèce de consensus sur
une façon de procéder qui est relativement simple, qui n'exclut
pas ou qui n'enlève rien à l'autorité du Québec
dans ce secteur-là. On connaît bien le jugement de la Cour
suprême qui a sorti cet été, qui reconnaît de fait la
préséance de la réglementation provinciale en ce qui
concerne la tenue de bingos. Il s'agit tout simplement d'une entente de
principe accordant de la part de la Régie, par un mécanisme qui
est bien déterminé, à un conseil de bande le droit
d'émettre ces permis-là.
Alors, je pense que ça va démontrer notre bonne foi
vis-à-vis de ces communautés autochtones. Je pense
également que ça va démontrer une certaine ouverture
d'esprit, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, une certaine
largesse vis-à-vis des obligations et des orientations que veulent bien
se donner ces conseils de bande là. En conséquence, nous appuyons
ce projet de loi et nous recommandons donc ce projet de loi pour adoption
à l'Assemblée nationale, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre du
Revenu. Sur cette même motion, à savoir la motion proposant
l'adoption du principe du projet de loi 187, Loi modifiant la Loi sur les
loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement, je
cède la parole à M. le député de Montmorency.
M. Jean Filion
M. Filion: Oui, M. le Président. Bien sûr, nous
sommes face à un projet de loi qui, à toutes fins pratiques,
n'est pas très volumineux.
On a environ... pas environ, mais bien six articles, six paragraphes
à examiner pour voir à faire en sorte de permettre aux
communautés autochtones d'avoir des permis pour tenir des bingos sur des
réserves.
Bien sûr qu'à première vue ce projet de loi est
relativement simple, mais en même temps il nous apporte certaines
questions. Ce ne sont pas des questions dans un but effectivement de ne pas
reconnaître notre bonne foi, etc., mais des questions, j'en suis
sûr, que les gens en général vont se poser. Compte tenu de
tout le climat et de tout ce qu'on entend dire depuis maintenant 18 mois au
niveau des relations et des échanges avec des réserves
autochtones, les gens vont se poser des questions, entre autres, sur la
sécurité publique. Les gens vont se poser des questions, entre
autres, également au niveau des contrôles fiscaux. On sait qu'il y
a des réserves où ça fonctionne très bien; il y en
a d'autres où on a certaines difficultés. Et le but, ce n'est
pas, bien sûr, de remettre en question un projet de loi comme
celui-là de façon à dire qu'effectivement le but
recherché n'est pas louable ou n'est pas correct, mais le but
recherché, je pense qu'il doit s'inscrire dans une façon de
fonctionner où on va arriver à avoir des échanges
équitables au niveau de la fiscalité et également des
permis au niveau des loteries.
Alors, bien sûr que ce projet de loi mériterait qu'on s'y
arrête davantage, qu'on puisse avoir plus d'information sur le
fonctionnement que vont prendre de tels permis au niveau des réserves.
Actuellement, le projet de loi est simple, il dit simplement: Écoutez,
on va donner un droit aux communautés autochtones d'émettre des
permis. Maintenant, comment ça va fonctionner? Quelle sorte d'entente on
va signer? Tout le détail au niveau de la réglementation va
survenir par la suite avec des ententes individuelles qu'on va avoir avec les
différentes réserves.
À ce stade-ci, je pense que tout ce que l'on peut dire c'est que
ce projet de loi devrait faire l'objet, M. le Président, d'une
commission où on devrait entendre les différents intervenants et
où on devrait en même temps se faire rassurer sur le
fonctionnement que vont prendre de tels bingos à l'intérieur des
réserves, s'assurer, également, que ces bingos-là vont
satisfaire les exigences que l'on doit satisfaire au niveau des
Québécois, en général, et je pense qu'on devrait,
bien sûr, entreprendre une étude plus détaillée
où on pourrait faire la lumière sur toutes les
conséquences que peut avoir cette dérogation ou cet ajout
à la loi régissant les loteries, au Québec.
Ce projet de loi là, encore une fois, nous est soumis en fin de
session, à un moment où on se retrouve à étudier
rapidement une série de projets de loi qui ont été soumis
après le 15 novembre et moi, tout ce que je peux dire pour l'instant, M.
le Président, c'est: J'aimerais qu'on étudie ce projet-là
en commission, où différents intervenants viendraient nous parler
des conséquences, des contrôles fiscaux et, également, des
règles au niveau de la sécurité publique, pour que l'on
puisse avoir une idée du fonctionnement interne au niveau des
réserves. Alors, sûrement que, pour nous, M. le Président,
ce projet-là va être adopté sur division. Alors, mes
commentaires se limiteront uniquement à ce que je viens de dire, pour le
moment. Nous aurons l'occasion d'en discuter abondamment en commission
parlementaire. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Montmorency. M. le député de Laurier et
ministre délégué aux Affaires autochtones, je vous
cède la parole. Je vous rappelle que vous disposez d'une période
maximale de 20 minutes.
M. Christos Sirros
M. Sirros: Merci beaucoup, M. le Président. M. le
Président, j'aimerais bien reprendre quelques-unes des affirmations qui
ont été faites ou des questionnements, plutôt, qui ont
été faits. Après l'introduction qu'a faite mon
collègue, le ministre du Revenu, M. le Président, j'aimerais
reprendre une couple de choses qui vont, peut-être, répondre
à quelques-uns des questionnements du député de
Montmorency. Parce que je crains vraiment, M. le Président, qu'au lieu
de prendre nos responsabilités et de vraiment examiner à fond les
implications d'un projet de loi qui comporte six articles... Ça ne
prendra pas une commission parlementaire à n'en plus finir pour le
faire. On pourrait le faire, si on est de bonne foi, en Chambre, ici, et en
commission parlementaire, demain, si vous consentez à aller de
l'avant.
M. le Président, j'aimerais repréciser, d'abord, de quoi
il s'agit. Il s'agit d'un projet de loi de six articles qui fait quoi? Qui dit,
ni plus ni moins, que, quand il y a des communautés autochtones qui
acceptent d'appliquer la même réglementation, les mêmes
limites, les mêmes normes, les mêmes règles qui s'appliquent
dans tout le reste du territoire du Québec, elles pourront, ces
communautés-là, émettre un permis pour la tenue de bingos
sur le territoire d'une réserve. Vous allez me dire, M. le
Président, pourquoi faire ce genre de différenciation? Bien, mon
collègue, le ministre du Revenu, a répondu en affirmant que, par
exemple, Aristote disait que, s'il y a des différences, puis qu'on les
traite de façon égale, on fait naître des injustices.
En 1983, M. le Président, il y a eu 15 principes adoptés
par le Conseil des ministres de l'époque, repris par le présent
gouvernement, qui devraient servir comme guide dans les relations avec les
communautés autochtones. Je vais vous citer un de ces articles, de ces
principes, M. le Président, qui dit que les nations autochtones - et je
dis bien les nations autochtones, parce
que nous les avons aussi reconnues dans l'Assemblée nationale, en
1985, en tant que nation, en tant que peuple distinct - ont le droit, dans le
cadre des lois du Québec, de se gouverner sur les terres qui leur sont
attribuées. Alors, que vient faire le projet de loi, M. le
Président, c'est donner chair, donner une âme, si vous voulez,
à ce principe qui, quoique adopté en 1983, vient trouver ici la
possibilité, pour les communautés autochtones, de se gouverner
quant à un aspect bien délimité, à
l'intérieur des cadres des lois du Québec, sur les terres qui
leur sont attribuées, c'est-à-dire sur les réserves. Ce
que ça fait, le projet de loi, c'est que ça crée la
possibilité légale de conclure des ententes,
ultérieurement, avec des communautés qui voudraient bien, comme
je le disais tout à l'heure, accepter d'administrer les bingos sur leur
réserve, sur leur territoire, avec les mêmes règles, les
mêmes limites, les mêmes normes, les mêmes critères
que ces bingos s'appliquent sur le reste du territoire. (1 heure)
Pourquoi, M. le Président? Parce qu'on est pleinement conscient,
et bon nombre d'autochtones aussi, qu'on vit ensemble sur un territoire. On
partage le même espace et le même temps et, dans ce sens, il faut
tenir compte aussi de ce qui existe autour de ces terres qui sont
attribuées aux autochtones. Donc, il y a des communautés qui sont
tout à fait disposées à marcher en toute
équité avec l'environnement, avec la société qui
les entoure. Nous réclamons, disent-elles, de pouvoir décider sur
le territoire d'une réserve quelle oeuvre, quel groupe à but non
lucratif va être autorisé à tenir un bingo pour des fins
communautaires, sur le territoire de la réserve; on voudrait bien
être ceux qui décident de ça. Et on accepte d'appliquer les
mêmes règles qui existent sur le reste du territoire. C'est ce que
le projet de loi dit. Rien de plus. Ce n'est vraiment pas plus compliqué
que ça.
Si on le lit objectivement, on va constater, par exemple, que ça
dit en toutes lettres, à l'article 4, que les dispositions de la
présente loi - Quelle loi? La loi sur la Régie des loteries et
courses du Québec - "Les dispositions de la présente loi
s'appliquent à l'organisation, l'administration, la conduite et le
fonctionnement d'un bingo tenu en vertu d'une licence délivrée
par un organisme local." Quel organisme local? L'organisme local de la
communauté des autochtones sur la réserve. Alors, les
dispositions de la loi sur la régie des loteries et courses s'appliquent
même dans le cas d'une licence qui serait émise par un organisme
local, c'est-à-dire un organisme autochtone. Donc, un projet de loi qui
donne la possibilité de conclure ce genre d'entente.
Pourquoi? Parce que, dans le dossier autochtone - et on en a amplement
discuté aujourd'hui; je vois mon collègue d'Ungava qui va
probablement prendre la parole tout à l'heure, il était fort
intéressé par ce dossier ce matin, M. le Président,
j'espère qu'il continue de l'être - dans ce dossier, la chose
principale à faire, c'est de s'efforcer de rebâtir la confiance
qui doit exister entre les autochtones et le reste de la société
québécoise, M. le Président. Comment est-ce qu'on va le
faire? On va le faire en appuyant ce qui mérite d'être
appuyé et en n'appuyant pas ce qui ne le mérite pas. Il ne s'agit
pas ici de cautionner quelque illégalité que ce soit. Il ne
s'agit pas ici, M. le Président, de permettre, par une reconnaissance
législative, des différences qui conduisent à des
inégalités ou des différences qui blessent, mais il s'agit
de reconnaître que la différence peut être traitée de
telle façon pour résoudre les problèmes, M. le
Président.
Quelle est la différence? La différence, c'est qu'on dit
ici - et on l'a dit - qu'il s'agit de 10 nations autochtones, plus les Inuit,
ça fait 11 au Québec, M. le Président, qui
réclament la possibilité de se prendre en charge, pour la
plupart. Il s'agit pour nous, en tant que parlementaires, d'être assez
matures pour faire la distinction entre les situations qui ne méritent
pas d'être appuyées et celles qui méritent de l'être.
Il s'agit d'avoir assez de maturité, de bonne volonté et de bonne
foi pour faire la différenciation entre la situation des Warriors
à Kahnawake et ce qui se passe ailleurs, M. le Président. Si on
ne voudrait pas que la société québécoise soit
jugée par quelqu'un qui aurait rendu visite à Parthenais,
évitons de tirer des conclusions sur l'ensemble des autochtones par la
lecture des journaux, sur la situation des Warriors à Kahnawake. Les
Warriors, ce n'est pas l'ensemble des Mohawks; les Mohawks, ce n'est pas
l'ensemble des peuples autochtones au Québec. Nous avons la
responsabilité de faire ces distinctions, M. le Président, et, ce
faisant, si on regarde ce projet de loi qui, oui, a été
déposé après le 15 novembre et qui requiert, à ce
moment-là, pour son adoption, le consentement de l'Opposition, on
devrait être capable, M. le Président, de faire ce genre de
distinction et de dire qu'il s'agit là d'un pas en avant dans le
"rebâtissement" de la confiance entre les autochtones et le reste de la
société québécoise. Dans ce sens-là, avec
ces pas, petit à petit, on va la rebâtir. Il ne s'agit pas ici,
comme je disais, de légaliser l'illégalité, mais il s'agit
de donner les instruments à ceux, parmi les communautés
autochtones, qui acceptent de travailler de bonne foi, en collaboration, dans
le respect mutuel, de pouvoir avoir des instruments qui vont nous permettre
d'avoir ce genre de relations. Des relations basées sur le respect
mutuel, sur la reconnaissance de la spécificité de l'autre,
quelque chose qui nous est cher au Québec, M. le Président, et
qui est très cher pour les autochtones aussi, la reconnaissance de la
spécificité, la reconnaissance qu'il s'agit de
peuples qui veulent avoir des instruments pour maintenir leur
identité, leur culture. Ce n'est pas à travers les bingos, et ils
ne réclament pas des différences pour administrer les bingos,
mais ils voudraient bien être capables, M. le Président, sur un
territoire, d'être ceux qui vont pouvoir choisir quels groupes, pour
quelles fins ils vont pouvoir tenir ces bingos.
Ce projet de loi assure, entre autres, que les profits de ces bingos
seront utilisés à des fins non lucratives et communautaires. Ce
sont les seules fins que reconnaît la loi sur la régie des
loteries et courses, M. le Président, et c'est cette loi qui va
s'appliquer aussi, qui va être appliquée par une communauté
locale. C'est une reconnaissance d'une certaine autonomie des
communautés sur leur territoire, tirée directement du
sixième principe adopté en 1983.
M. le Président, c'est effectivement très important
d'encourager la confiance mutuelle, d'éviter d'utiliser ce dossier pour
des fins partisanes. S'il y a des différences sur la façon dont
on traite les choses, qu'on le dise. Mais il faudrait bien, quand il y a des
choses qui marchent, M. le Président, qu'on soit capable de l'admettre
aussi de l'autre côté. Et, dans ce sens, M. le Président,
il y a là un modèle pour d'autres communautés.
J'ai eu de longs pourparlers avec la communauté de Mashteuiatsh,
et le chef des Monta-gnais de Pointe-Bleue, M. Kurtness, en particulier. Nous
avons, comme vous vous le rappellerez, mis sur pied il y a à peu
près un an un groupe de travail pour examiner l'ensemble de la question
du développement économique de la communauté et, entre
autres, pour examiner le plan de gestion des bingos soumis par la
communauté. Nous avons exploré ensemble une série de
possibilités et nous avons annoncé tout récemment, entre
autres, une entente qui est intervenue pour créer au-delà d'une
trentaine d'emplois par la relance d'une scierie dans la communauté.
En même temps, la communauté a accepté d'appliquer
ce que je viens de vous dire, M. le Président, en ce qui concerne les
bingos, d'utiliser les mêmes règles qui s'appliquent dans tout le
reste du territoire du Québec, mais c'est eux qui veulent les
administrer et les appliquer, dans le sens des motions que nous avons
déjà adoptées, dans le sens des principes que nous avons
mis de l'avant à plusieurs reprises, M. le Président, de part et
d'autre de cette Chambre. S'il y a des gens comme le chef Kurtness, comme les
Montagnais de Pointe-Bleue et comme d'autres communautés qui sont
prêts à marcher ensemble et à élaborer ensemble un
projet qui nous permettra de rebâtir cette confiance qui nous fait
défaut dans beaucoup de communautés, M. le Président, il
me semble que nous avons un devoir de saisir ces occasions qui sont là
et d'aller de l'avant. Il y a des possibilités qu'il y ait d'autres
communautés qui puissent suivre le même modèle.
Ceux qui ne voudront pas respecter l'application de ces lois, ceux qui
voudraient avoir des exceptions pour avoir des privilèges, la
réponse c'est: non. Mais ceux qui veulent bien marcher, en
"communalité", dans le respect de la spécificité de l'un
et de l'autre, et avec l'acceptation que nous vivons effectivement sur le
même territoire et que nous nous devons de trouver les interfaces qui
vont nous permettre, d'une part, de reconnaître la prise en charge si
chère aux autochtones pour qu'ils puissent sortir du marasme dans lequel
ils se trouvent, bien, là, M. le Président, il faut qu'on les
encourage.
Et parlons un peu de différence, parce qu'une différence
sur laquelle se fondent beaucoup des frustrations qu'ont certains autochtones,
c'est les différences socio-économiques que connaissent les
autochtones. Parce que, même après toutes ces années
où l'État a pris en charge le sort des autochtones, en tant que
fiduciaire - et c'est le cas du gouvernement fédéral depuis
maintenant le tout début - après toutes ces années on
constate, quand on fait la lecture de la condition socio-économique des
uns et des autres, M. le Président, que nous avons une situation qui
équivaut au tiers monde pour la plupart. Et, encore une fois, il s'agit
qu'on puisse, nous, en tant que parlementaires, insister pour que les gens
fassent la distinction entre les cas extrêmes, les cas, comme je le
disais, qui sont un peu à la marge, et ceux qui sont vraiment la
majorité. (1 h 10)
II y a 43 communautés indiennes au Québec. Dans 42, il n'y
a aucun problème de sécurité publique: il y en a une
où ça fait défaut actuellement et on espère bien
toujours pouvoir le régler, dans la paix et dans le respect, mais
fermement, M. le Président. Mais il y en a 42 où ça
marche. Je trouve aussi personnellement déplorable qu'on mêle
carrément le dossier autochtone dans sa globalité avec celui de
quelques Warriors et cela, c'est nocif pour notre société. Les
paroles du leader de l'Opposition, M. le Président... J'espère
qu'ils vont se rappeler, quand ils seront appelés à donner leur
consentement pour l'adoption d'un projet de loi qui fait cette distinction
entre les Warriors et les autres, j'espère bien qu'on évitera de
laisser planer des doutes sur l'ensemble des communautés, comme l'a
presque fait le député de Montmorency, et je dis bien "presque".
Parce que, M. le Président, ça va être important que, dans
le cheminement de ce dossier, on garde tous un certain calme. Et comme je
disais tout à l'heure, il ne faudrait pas qu'on fasse à d'autres
ce qu'on ne voudrait pas qu'on fasse chez nous. On ne voudrait pas que les gens
tirent des conclusions sur le comportement des Québécois
après une visite à Parthe-nais. Il ne faudrait pas qu'on tire des
conclusions sur l'ensemble des communautés autochtones en regardant ce
que quelques Warriors ont fait dans une communauté en particulier.
Alors, cela dit, M. le Président, j'aimerais remercier beaucoup
mon collègue du Revenu pour son appui dans tout le cheminement de ce
dossier. J'aimerais également remercier mon collègue, le ministre
de la Sécurité publique, que j'ai consulté et avec lequel
on a, ensemble, examiné de près ce dossier. Et je peux vous
assurer d'une chose, la Sûreté du Québec et le
ministère de la Sécurité publique ont aussi examiné
ça et se sentent confortables avec le projet de loi tel qu'il est. Et,
M. le Président, je ne peux que souhaiter que le prochain intervenant de
l'Opposition nous annonce qu'ils seront prêts demain.... Le prochain,
qu'il sera prêt demain à aller en commission parlementaire et
à donner son consentement pour l'adoption de ce projet de loi pour qu'on
puisse, sans attendre indéfiniment, M. le Président, conclure des
ententes avec les communautés qui veulent bien, comme je disais tout
à l'heure, marcher ensemble, appliquer les mêmes lois, les
mêmes limites, les mêmes règles. Il y en a une qui attend,
c'est le cas des Montagnais de Pointe-Bleue; ils ont hâte, M. le
Président, de pouvoir prendre en charge l'administration des bingos sur
la réserve de Mashteuiatsh, dans l'esprit de la loi, celle que je viens
d'énoncer. Il y en a d'autres qui peuvent suivre aussi, et je souhaite
que l'Opposition puisse nous donner l'instrument qu'on recherche pour continuer
le travail qu'on a fait, quand on a conclu une entente avec les Algonquins de
Lac-Barrière, par exemple, et quand, avant ça, on a conclu une
entente avec la communauté d'Akwesasne pour les infrastructures de la
communauté. C'est un dossier complexe et difficile, et on a besoin du
concours de tout le monde, mais de tout le monde qui peut rester calme,
objectif et faire la part des choses. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Sur le même sujet, je cède la parole à M. le
député de Masson.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Nous
étudions actuellement la loi 187, Loi modifiant la Loi sur les loteries,
les concours publicitaires et les appareils d'amusement. Les notes explicatives
sont très courtes; je vais les lire pour que les gens qui nous regardent
- parce qu'on doit avoir, à cette heure-ci, au moins 200 000, 300 000
auditeurs et je ne voudrais pas qu'ils soient vexés de m'entendre parler
sur un sujet dont ils ne sauraient pas exactement quel est le fond. Les notes
explicatives, M. le Président, je suis persuadé que vous les
savez par coeur, mais pour ceux qui ne les savent pas par coeur, je vais quand
même les lire ici: "Ce projet de loi a pour objet de modifier la Loi sur
les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement de
façon à prévoir que le gouvernement peut désigner
un organisme local pour la délivrance de licences de bingo sur le
territoire d'une communauté autochtone avec laquelle il a conclu une
entente relative à la constitution de cet organisme."
M. le Président, c'est un projet de loi de six articles qui, en
soi, semble très anodin.
Je n'aime pas beaucoup, M. le Président, et ceci par nature,
faire des charges à fond de train contre le gouvernement et le
blâmer de façon radicale dans mes exposés. Cependant, dans
ce cas-ci, sans aller à fond de train, je tiens à dire ceci en
préambule. Nous avons, en 1985, quand nous étions au pouvoir,
reconnu - reconnu! - que les autochtones formaient une des nations distinctes
et qu'ils étaient dignes d'avoir ce qu'on appelle des
"self-governments".
Ceci dit, il y a un peu plus de deux ans qu'actuellement les gens sont
au pouvoir de l'autre côté. Sous cette prémisse que nous
avons reconnue en 1985, c'est bien sûr que ce n'est pas facile, c'est
sûr que c'est compliqué. Mais on arrive aujourd'hui avec un tout
petit projet de loi qui origine des défenseurs des autochtones ici, en
Chambre, via le ministre du Revenu, et dans le problème des autochtones
que nous avons au Québec, c'est un petit cure-dents devant la grande
forêt des problèmes que nous avons. Et on voudrait nous faire
croire que ce petit cure-dents - et, encore, c'est discutable de voir si le
cure-dents est de bon aloi - que ceci est suffisant pour calmer les esprits et
les revendications de ceux avec qui nous discutons. C'est bien sûr, ils
vont me dire que c'est facile, quand on est dans l'Opposition, de regarder le
problème de cette façon. J'en conviens. Mais si nous
étions au pouvoir, avec la fougue et les attaques acerbes que je vous
connais, vous ne négligeriez aucune attaque.
Je tiens à vous dire ceci, M, le Président - via vous,
parce qu'il faut que je vous parle à vous, bien sûr - ce projet de
loi, en fait, donne à une minorité des privilèges que
d'autres minorités n'ont pas. Ici, on veut régler un
problème: permettre aux gens du Lac-Saint-Jean, Pointe-Bleue, aux
autochtones là, de faire des bingos. C'est le seul groupe avec lequel on
a eu une entente. Si on était arrivés ici, en Chambre, et avait
dit: Nous faisons un projet et nous allons autoriser par ce projet les
autochtones de Pointe-Bleue de faire leur propre bingo. Nous avons eu une
entente avec eux. Cette loi-là le leur aurait permis. J'aurais cru et
j'aurais peut-être convenu de dire oui de façon directe a ce
projet de loi. Mais là, ce n'est pas ça, M. le
Président.
Un, dans son essence et par ses principes, ce projet de loi fait
différentes catégories de gens sur le territoire
québécois. Deuxièmement, parmi les autochtones
mêmes, on fait aussi des catégories de gens, ce qui est
blâmable en soi. On permet à un groupe de le faire et on ne permet
pas aux autres de le faire actuellement.
Alors, on considère dans les autochtones différents
niveaux de personnes, ce que je n'accepte pas ici, parce que je suis trop pour
l'égalité des peuples.
Et si les autochtones de Pointe-Bleue peuvent demander au ministre qui
les représente en cette Chambre, comme minorité sur le territoire
québécois et dire "nous voulons régler nos propres
choses", pourquoi les Grecs ne demanderaient-ils pas la même chose?
Pourquoi les Portugais ne demanderaient-ils pas la même chose? Pourquoi
les Italiens ne demanderaient-ils pas la même chose? Pourquoi les
francophones ne demanderaient-ils pas la même chose? De régler
tous les problèmes de bingo sur leur territoire, de faire un rapport une
fois par année et d'établir leurs propres règles à
l'intérieur du coin de territoire qu'ils occupent. C'est de faire, parmi
le peuple québécois, différents paliers de personnes qui
ont ou pas des privilèges, selon la bonne volonté du ministre.
Parce qu'ici nous n'avons comme explication que Pointe-Bleue. Et après,
le ministre a carte blanche de donner à qui il veut l'autorisation de le
faire.
Si les gens de l'autre côté avaient su régler les
problèmes de façon déterminante, nous n'aurions aucune
réticence. Mais on ne peut pas se fier aux gens de l'autre
côté pour ce faire. On ne peut pas. Quoique
fédéralistes de nature, par leur parti, ils ont même
été dupés par le gouvernement qui est censé
être leur complice à Ottawa pour essayer de régler les
problèmes de Kah-nawake. Ils ne sont même pas capables de se fier
à leurs interlocuteurs "ottawaïens". Ils ne sont pas capables de
s'y fier, les outre-frontières. Ils ne sont pas capables de s'y fier.
Ils viennent d'être dupés, là. À moins que le
ministre de la Sécurité publique, devant son impuissance à
régler le problème, se soit trouvé un bouc
émissaire, et c'est Ottawa. C'est possible aussi. C'est fort possible.
Tout peut être possible là-dedans.
Mais il y a une chose qui est très importante; il y a environ
1600 "voteurs" à Kahnawa-ke, à peu près. Et le ministre
responsable des autochtones... Il y a aussi quelques Warriors qui tiennent ce
peuple-là en esclavage à l'intérieur de leur propre
territoire et, en même temps, nous rendent, nous, les 7 000 000 de
Québécois, esclaves de leurs revendications et de leurs actes
terrorisants. C'est bien sûr, je suis persuadé que les Mohawks,
c'est une belle nation, une bonne nation, mais vous dites qu'il y a quelques
Warriors. Mais vous attendez quoi? Ça fait deux ans. Ça fait un
an et demi qu'ils ont fermé le pont. Ça nous a coûté
160 000 000 $; 25 000 000 $ supplémentaires cette année. Vous
attendez quoi? C'est sûr qu'il faut être calme. C'est sûr,
mais il y a une limite au calme. Il faut, un temps, prendre nos
responsabilités, et je crois que, dans ce dossier-là, le
gouvernement ne les prend pas, ses responsabilités. Est-ce qu'on
laisserait les groupes à l'intérieur du reste du
Québec... Prenons comme exemple les Hell's Angels. Quand ils font
un mauvais coup, est-ce qu'on les arrête? Oui. Les Warriors ne sont pas
comparables? Bien oui! (1 h 20)
M. Sirros: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le
député de Laurier et ministre des Affaires autochtones.
M. Sirros: La pertinence, c'est précisément ce que
je pense qu'il ne faut pas faire.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je pense que, de
façon générale, à date, l'intervention du
député de Masson a respecté de façon globale et
générale la pertinence telle que décrite dans nos
règlements. Allez-y, M. le député de Masson.
M. Blais: M. le ministre, je sais que ce n'est pas plaisant
d'entendre ce que je dis. Je le fais avec une grande délicatesse quand
même, comme vous voyez. J'y vais avec délicatesse. J'ai tout le
verbe pour être excessivement virulent, tonitruant, percutant, orageux,
agaçant; je ne le ferai pas. Je ne fais qu'exposer les faits et vous
demande, avec le responsable de la Sécurité publique, de faire
quelque chose avant que les Blancs n'en viennent, un temps, à se faire
un groupe de Warriors, eux aussi. Ce qu'on ne veut pas, ni de votre
côté ni de notre côté de la Chambre.
Je trouve qu'il y a trop de complaisance. Vous voulez me montrer un
article? Envoyez-moi-le par ...allez chercher l'article. M. le ministre
voudrait me faire voir un article. Allez le chercher et je vais le regarder.
Vous avez trop de complaisance. Complaisance du côté policier,
complaisance du côté des comptes d'Hydro-Qué-bec. C'est
trop! Et là, vous voulez emmener une troisième complaisance: leur
permettre de diriger eux-mêmes leurs parties de bingo. Tandis que
beaucoup d'autres personnes sur le territoire québécois, des
associations à but non lucratif comme des villes, voudraient faire des
bingos pour se bâtir un centre culturel, elles n'ont même pas le
droit de diriger et de faire leurs propres règles. Alors, il y aurait
des gens plus privilégiés, sur le territoire
québécois, que d'autres? Bien voyons donc! Est-ce que, si on fait
chanter les gouvernements et si on a une force de frappe qui terrorise un peu,
on peut avoir à peu près n'importe quoi? C'est ça que
ça veut dire? J'espère que ce n'est pas ça.
J'espère que ce n'est pas ça que vous voulez dire. En tout cas,
de ce côté-ci, on ne voudrait pas que ce soit ça. Et,
personnellement, je ne voudrais pas non plus.
Les Mohawks, sur leur territoire, sont des gens terrorisés par
les minorités qui habitent sur leur territoire et qui ont
frontières ouvertes
vers les États-Unis. Et leur principal revenu, c'est la
cigarette. 90 % à 95 % des cigarettes exportées aux
États-Unis nous reviennent pour être vendues en contrebande ici.
Essayez donc d'avoir une complaisance avec le gouvernement canadien. Qu'il
empêche, au moins pour un certain temps, que des cigarettes canadiennes
soient vendues aux États-Unis, par exemple. Est-ce que vous leur
couperiez leurs vivres? Ce n'est pas une affaire violente, ça. Mais si
90 % à 95 % des cigarettes vendues aux États-Unis, de source
canadienne, reviennent en contrebande sur le territoire canadien, est-ce qu'il
n'y aurait pas une petite entente à faire avec Ottawa, afin qu'il y ait
moins de contrebande et d'alimenter moins ceux qui sont un petit peu violents,
disons, dans les minorités? Ah! Ça a l'air curieux. Ah oui! Mais,
si on prend le mal à sa source, si c'est l'argent qui est la source de
tous les malaises, si ce n'est pas ça, bien là, je me demande
c'est quoi, là. C'est beau, le calme. Ah oui! c'est beau, et je suis un
type qui aime le calme. Mais si ce n'est pas ça, c'est quoi? On
protège qui, d'abord, là? On protège qui? Il y a une
limite à la patience. Il y a une limite.
M. le Président, cette loi, à la rigueur, pour être
acceptable, devrait être spécifique pour
Lac-Saint-Jean-Pointe-Bleue. Deuxièmement, tous les autres groupes de
minoritaires sur le territoire québécois, les Grecs ou les
Portugais, devraient avoir ie droit de faire la même chose que les
Mohawks, exactement pareil, si vous voulez que tout le monde soit égal.
Les villes, les associations à but non lucratif devraient avoir le droit
de faire des bingos comme bon leur semble après avoir signé des
ententes avec vous et vous faire un rapport une fois par année, sinon,
il y a deux catégories de gens sur le territoire
québécois. C'est ce que je n'aime pas et c'est pour ça que
cette loi-là en commission parlementaire, ça va lui prendre de
grandes améliorations pour que le critique responsable vous dise oui. Je
vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Masson. Alors, sur le même sujet, je cède
la parole à M. le député d'Ungava. Je vous rappelle que
vous pouvez faire une intervention d'un maximum de 20 minutes, M. le
député d'Ungava.
M. Christian Claveau
M. Claveau: Oui, M. le Président. Je prends la parole sur
ce projet de loi là parce qu'il y a quelque chose là-dedans qui
me semble foncièrement inadmissible au départ. C'est un projet de
loi qui part d'un principe qui est, à mon sens, socialement
inacceptable. D'abord, le ministre responsable des Affaires autochtones nous a
présenté ce projet de loi avec pompe, avec un sérieux et
avec, je dirais, même un orgueil personnel qui pourrait ressembler
à celui qui vient de franchir l'Himalaya. On a l'impression, à
l'entendre, qu'il vient d'aplanir toutes les montagnes de la terre et qu'il
vient, par le biais d'un coup de baguette magique, de régler toute la
question autochtone au Québec.
Il nous a dit: Nous sommes partis des 15 principes qui avaient
été votés par le gouvernement du Parti
québécois en 1984. Mon collègue de Masson dit: 1985. Je
préfère croire mon collègue de Masson, donc, c'est 1985,
le ministre ayant dit: 1984, tout à l'heure dans son discours. Alors, il
a dit: Nous sommes partis de ces 15 principes-là, nous avons retenu,
entre autres, le principe du droit de se gouverner sur son propre territoire,
et c'est ce qui nous a amenés à régler l'immense,
l'épineux, le traditionnel, la base du problème social des
autochtones du Québec, la question des bingos. Vous comprendrez que je
suis tombé de haut. J'ai pris toute une plonge quand je l'ai entendu.
Essayer d'assimiler, essayer de faire accroire à la population du
Québec qu'il s'agissait là d'une base, d'un pilier fondamental
à la résolution de l'ensemble des problèmes autochtones au
Québec, voyons donc! M. le Président, c'est mettre la charrue en
avant des boeufs. C'est ça que le ministre fait actuellement, mettre la
charrue en avant des boeufs, parce qu'on traite de problèmes
précis, de technicalités avant d'avoir réglé ou
d'avoir discuté de la plate-forme de base qui devrait soutenir
l'ensemble de toutes ces technicalités.
Alors, on règle une question technique, la question des bingos,
mais on n'a pas réglé le problème de base de
l'autodétermination ou du pouvoir de se gouverner sur son territoire. Ce
n'est pas en essayant de trouver une solution primaire au problème du
bingo que l'on va régler l'ensemble des problèmes autochtones. Au
contraire, on devrait d'abord, comme gouvernement responsable, négocier
une plate-forme globale, une base solide de l'ensemble des interventions
gouvernementales ou de la répartition des pouvoirs gouvernementaux et
des pouvoirs des communautés autochtones dans l'administration de leur
propre destinée. Et, à partir de là, une fois que l'on
connaît cette base globale pour tout le monde, là on commence
à monter les pièces du casse-tête, et la question des
bingos peut être une de ces pièces-là. Mais la question des
bingos n'est pas un socle, n'est pas une pierre d'assise pour débuter la
construction de l'autodétermination ou de la capacité de se
gouverner soi-même sur une réserve indienne. Ça n'a rien
à voir. Ça n'a aucune commune mesure avec le problème
auquel le ministre prétend s'être attaqué.
M. le Président, ça fait deux ans et demi que le ministre
responsable des Affaires autochtones occupe ce poste, à peu près.
Un an, me dit-il? Mettons-le à un an. C'est une bien piètre
pitance après un an de négociations que de n'avoir rien d'autre
à nous présenter en cette Chambre qu'un article de loi. Parce que
le projet de loi 187, quoique ayant six articles, dans le
fond, en a cinq de concordance; il y a un article et c'est l'article 3.
"L'article 34 de cette loi, modifié par l'article 32 du chapitre 46 des
lois de 1990, est de nouveau modifie par l'addition, à la fin, de
l'alinéa suivant." Tout le reste, c'est de la concordance. Les articles
1, 2, 4 - à 4 il y a un petit ajout qui est toujours relatif à
l'application de cet article, de l'article 3 - 5 et 6, c'est de la concordance,
de la date d'entrée en vigueur. Bien piètre pitance pour une
année complète de négociations! Savez-vous que ça
fait un article de loi qui revient cher la ligne! Si on considère tout
ce que ça a pu coûter en salaires, déplacements,
coûts des négociations, etc. Ça revient cher de la ligne
pour essayer de régler le problème du gouvernement autochtone
à partir de la question des bingos! (1 h 30)
Qui plus est, M. le Président, allons voir maintenant ce qu'il y
a de fondamental dans ce projet de loi. Au départ, c'est un projet de
loi qui émane d'un problème très précis,
très localisé - le ministre l'a dit lui-même - à
Pointe-Bleue. Il y a un problème avec les bingos. Ah! Il y a d'autres
bingos qui se passent ailleurs, c'est clair. Sauf qu'il y a un problème
spécifique par rapport au bingo de Pointe-Bleue. La communauté
montagnaise, que je connais bien, d'ailleurs, et en laquelle j'ai plutôt
tendance à avoir confiance... Je suis obligé de vous dire, M. le
Président, que, à mon sens, Pointe-Bleue est un exemple.
Pointe-Bleue est un des plus beaux sites, un des plus beaux villages, si vous
me permettez l'expression, une des plus belles agglomérations du
Saguenay-Lac-Saint-Jean. C'est une réserve montagnaise qui a su tirer
son écu du jeu, qui a su se gagner la confiance régionale, qui a
su collaborer avec les différents intervenants dans la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean et qui, finalement, à mon sens, est devenue un
exemple parmi l'ensemble des communautés autochtones. Je connais bien
les Montagnais de Pointe-Bleue, du moins plusieurs d'entre eux, pour avoir,
entre autres, passé mon enfance dans une zone qui était, qui est
toujours d'ailleurs, parmi les territoires de chasse de Pointe-Bleue, dans le
nord de la rivière Péribon-ka. Je peux vous dire qu'en principe,
lorsqu'on regarde la question très précise de Pointe-Bleue, je
n'aurais pas beaucoup de réticences à une approche semblable.
C'est-à-dire que, suite à une négociation, on puisse
s'entendre avec un organisme local qui aurait la responsabilité
d'émettre des permis et de gérer, finalement, toutes les
activités reliées au bingo sur le territoire de Pointe-Bleue ou
sur tout autre lieu ou endroit - je reprends le terme même que l'on
retrouve dans le projet de loi - sur tout autre établissement. Dans tout
autre établissement qui peut être désigné -
j'imagine à l'extérieur de la réserve même - mais
comme étant un endroit où les autochtones, de Pointe-Bleue en
particulier, pourraient tenir des activités de bingo.
Je n'ai pas de problème avec ça par rapport à
Pointe-Bleue, mais, encore là, ça ne règle pas du tout le
problème de Pointe-Bleue, pas plus que ça ne règle le
problème des autochtones en général. D'autre part, ce
n'est pas évident qu'une entente négociée avec les
Montagnais de Pointe-Bleue soit nécessairement acceptable,
transposa-ble, photocopiable, peut-être, ailleurs. Ce n'est pas du tout
évident.
Je pense que, si on voulait vraiment être honnête dans cette
approche, ce que l'on permettrait, disons, pour parler strictement des bingos -
mes propos, d'ailleurs, ne sont pas en contradiction avec les propos de mon
collègue de Masson, tout à l'heure, lorsqu'il parlait de la
nécessité d'avoir une approche globale pour tout le monde, je
suis tout à fait d'accord avec ce qu'il a dit. Sauf que cette approche
globale doit se moduler aussi, d'une certaine façon. Alors, si on veut
régler le problème spécifique de Pointe-Bleue à
partir d'une entente que l'on doit transférer dans une loi pour la
rendre applicable en vertu de la Loi sur les loteries et courses du
Québec, bien, qu'on le fasse pour Pointe-Bleue. Qu'on ait une entente
et, une fois que cette entente-là est négociée, qu'on sait
à quoi s'en tenir, qu'il y a un contenu très précis, qu'on
légifère pour légaliser l'entente tout en laissant la
possibilité à toute autre réserve qui veut le faire, et je
dirais même aussi à tout autre groupe dans la
société qui voudrait faire une entente semblable, de pouvoir la
faire et, après, qu'on légifère pour la
légaliser.
Ce pourrait être une approche, et il me semble que cette
approche-là aurait beaucoup plus de valeur ou beaucoup plus de
possibilité d'être appliquée conformément à
l'esprit de la loi qu'une approche globale où on dit: On va permettre,
par le biais d'un amendement à la Loi sur les loteries, les concours
publicitaires, les appareils d'amusement... On va amender la loi globalement
pour permettre, après, de pouvoir signer des ententes avec les
communautés autochtones. On précise d'abord que c'est uniquement
avec les communautés autochtones. Moi, je dis que si on veut vraiment
avoir une approche globale, ce n'est pas nécessairement un
problème uniquement autochtone, le problème des bingos, à
ce que je sache. Les bingos ne font pas énormément, ne font pas
beaucoup partie de la culture ancestrale autochtone. Ce n'est pas une
découverte de Christophe Colomb, ça, que d'avoir trouvé
des bingos en territoire d'Amérique en arrivant. Les bingos, c'est
quelque chose qui est apparu dans les activités des autochtones avec le
temps, la même chose que les motonei-ges, la même chose que les
moteurs hors-bord qui ont remplacé les rames de chaloupe dans les
canots, la même chose que le fibre de verre a remplacé
l'écorce dans la fabrication des canots, la même chose que les
tentes ont été remplacées par des maisons, puis
enfin...
Mais ce n'est pas nécessairement l'essence
de la culture autochtone ça, le bingo. Alors, j'imagine que
lorsque l'on veut régler le problème du bingo par rapport aux
autochtones, on peut s'imaginer aussi qu'il y a d'autres
éléments, d'autres composantes de la société qui
pourraient aussi bénéficier d'une approche semblable. Sans rien
enlever aux autochtones. Sans nuire en rien à l'approche que le
gouvernement peut avoir par rapport aux conditions autochtones. J'imagine, moi,
qu'une association montréalaise qui voudrait bénéficier
d'une espèce de droit d'autogérer des bingos afin de
préparer des paniers de Noël pour les pauvres, par exemple, parce
que le gouvernement est incapable de trouver des solutions au problème
de la pauvreté à Montréal, eh bien, ça pourrait
être tout aussi légitime que de permettre à Maliotenam de
faire des bingos, et sans rien enlever pour autant aux Montagnais de
Maliotenam. Il me semble que ça pourrait très bien aller
ensemble.
Alors, pourquoi doit-on modifier la Loi sur les régies, concours
publicitaires et appareils d'amusement uniquement en fonction de l'approche
d'un problème autochtone? Quand, dans le fond, oui, ça peut
être intéressant pour les autochtones. Mais oui, ça peut
aussi être intéressant pour d'autres couches de la
société, sans rien enlever et en ne nuisant d'aucune façon
que ce soit aux droits ancestraux des autochtones.
Alors, pourquoi ne gardons-nous donc pas une ouverture beaucoup plus
globale, beaucoup plus raisonnable et, je dirais, beaucoup plus responsable
comme gouvernement à l'effet de dire: Oui, on peut négocier des
ententes très spécifiques avec certaines communautés
autochtones, ententes que l'on rendra par la suite légales ou
applicables en vertu d'une loi. Mais la même chose peut être ouvert
aussi à d'autres groupes de la société qui pourraient
peut-être prendre le relais du gouvernement, là où le
gouvernement est incapable de trouver des solutions à des
problèmes, parce qu'il y a quand même pas mal de monde qui se
servent des bingos à l'occasion pour financer des activités,
charitables pour la grande majorité. L'Église catholique
même a énormément financé, au cours des
décennies, des activités à partir des bingos. Je ne serais
même pas surpris que c'est de là que ça vient, la pratique
du bingo dans les communautés autochtones. Alors, il n'y aurait rien de
scandaleux, aucune anomalie à vouloir prôner le fait qu'une
approche semblable puisse s'appliquer à d'autres communautés
qu'aux communautés autochtones, et je suis convaincu qu'il n'y a pas un
autochtone sur le territoire du Québec qui serait contre ça, dans
la mesure où ça ne nuit en rien à l'approche
traditionnelle des autochtones ni à la capacité de
s'autogérer, de s'autogouvemer et de prendre des décisions dans
leur propre destinée, par rapport à leur propre avenir. À
ce que je sache - en tout cas, il faudra qu'on me fasse la preuve du contraire
si on est capable de me le nier, mais, moi, je suis prêt à
entendre qu'on me fasse la preuve du contraire - le bingo n'a jamais fait
partie d'aucune revendication ancestrale des autochones, d'aucun droit
ancestral. (1 h 40)
Et on prétend aujourd'hui qu'on va régler les
problèmes des communautés autochtones et qu'on commence à
établir les bases d'une nouvelle relation entre Blancs et autochtones
à partir de droits uniques qu'on donnerait aux autochtones dans la
gestion des bingos. Voyons donc! C'est de prendre un grain de sable pour
l'Everest, M. le Président. Ça n'a aucune commune mesure.
Ça n'a rien à voir, même, à la limite. C'est une
mesure administrative que l'on reconnaît maintenant ou que l'on veut
reconnaître aux autochtones ou à certains groupes autochtones tout
en la niant à d'autres parties de la société qui
pourraient aussi en bénéficier et en assimilant une mesure
administrative de cet ordre-là à une revendication ancestrale sur
les droits autochtones. Voyons donc! Je pense qu'un gouvernement qui se tient
debout, un gouvernement responsable n'a tout simplement pas le droit de
réagir ou de raisonner de cette façon-là. C'est aberrant
comme approche, M. le Président. C'est inadmissible comme approche.
Nous ne sommes pas contre le fait, à la limite, qu'il puisse y
avoir une certaine façon, chez les autochtones, de gérer un
certain nombre de programmes différemment qu'ailleurs dans la
société. D'ailleurs, dans le programme du Parti
québécois, au dernier congrès, on a voté un certain
nombre de mesures, justement, mais qui ont été discutées
et négociées avec des représentants des communautés
autochtones avant, un certain nombre de mesures qui établissent les
plates-formes d'une véritable négociation globale. Et on ne le
fait pas en cachette dans une fin de session. On l'a fait pendant un certain
nombre de mois, au su et au vu de tout le monde, et puis après, on l'a
voté dans un congrès, devant tous nos membres. Même s'il y
avait des membres qui n'étaient pas d'accord, ils ont eu droit à
la dissidence. Il n'y a rien de sorcier là-dedans. On est dans un
système qui nous donne le droit à la dissidence. Et, moi, je
respecte les opinions de certains de nos membres qui n'étaient pas
d'accord avec ce qu'on a proposé, qui ont voté contre au
congrès. Sauf que la majorité étant ce qu'elle est dans
notre système démocratique, eh bien, c'est rentré dans
notre programme.
On a là une approche globale intégrée de toutes les
questions autochtones, de négociation d'une nouvelle approche, de
nouveau consensus social pour les autochtones. J'ai participé à
peu près à la totalité de ces débats-là
durant l'été et l'automne 1990, jusqu'à un tout petit peu
avant Noël, la dernière rencontre qu'on avait eue avec les
représentants des communautés autochtones. Jamais, jamais, jamais
il n'a été question des bingos comme faisant partie des
revendications ancestrales des autochtones, comme faisant partie
de quelque chose d'inhérent au monde autochtone, comme faisant
partie - j'oserais dire - de quelque chose d'indissociable au futur, au
présent et au passé des autochtones.
Non, il n'a jamais été question de ça. Il y a des
problèmes bien plus graves que ça, par exemple, auxquels on
devrait s'attaquer, puis rapidement, avant que ça aille trop mal! Mais
le gouvernement aime mieux s'amuser avec les feux follets, donner l'illusion de
la lumière, alors que, dans le fond, c'est une onde vibratoire quelque
part qui disparaît aussi vite, comme elle est apparue.
C'est ça qu'on a entre les mains actuellement, M. le
Président. Et c'est ce qui fait que ce projet de loi devient totalement
inacceptable dans son essence même. Pas que nous en ayons contre le
principe, mais nous en avons énormément contre l'approche du
gouvernement. D'où aussi la position de mon collègue de
Montmorency qui dit: Écoutez, avant de nous faire voter sur quelque
chose comme ça, passons donc en consultation. Allons vérifier
avec le milieu autochtone. C'est quoi le véritable contenu? Qu'est-ce
qu'il y a derrière tout ça?
Moi, il y a toujours une chose, M. le Président, qui me frappe
à chaque fois qu'on est pris devant un projet de loi comme ça.
C'est qu'on nous demande à nous, parlementaires, de faire notre boulot
au meilleur de notre connaissance, dans le plus grand respect de
l'intégrité de cette Chambre, du Parlement. Et là, on nous
dit: Vous allez nous permettre de passer un projet de loi qui va rendre
exécutoire une entente qu'on a prise avec Poirue-Bleue. Mais il n'y a
personne qui est courant de ce qu'il y a dans cette entente-là, M. le
Président.
On veut nous faire voter un projet de loi qui va permettre de
légaliser une approche qui fait partie d'une entente, mais on refuse de
nous montrer l'entente, on refuse de nous parler de la substance de la
négociation. On refuse même de nous dire qui est assis à la
table de négociation, à la limite, pour faire en sorte qu'on soit
incapable d'aller chercher l'information. Qu'on nous la dépose,
l'entente, qu'on nous montre ce qu'il y a là-dedans, qu'on nous donne
les véritables intentions du gouvernement, le véritable contenu
des discussions qui ont amené le gouvernement à prendre cette
position. Là, peut-être qu'on pourra voter en toute âme et
conscience, dans le respect de l'institution parlementaire que nous
représentons, mais au moment où on se parle, c'est impossible.
Comment voulez-vous qu'on vote là-dessus, dans le respect de notre
institution, quand on ne sait même pas sur quoi on va voter. On donne un
chèque en blanc au gouvernement pour négocier des choses dont on
n'est même pas au courant, dont on ne connaîtra peut-être
jamais le contenu, à moins de passer par la loi sur l'accès
à l'information, à la limite, un de ces jours.
Alors, c'est pour ça, M. le Président, si le gouvernement
veut qu'on aille de l'avant là-dedans, qu'il convoque une commission
parlementaire qui permette aux responsables autochtones qui ont
négocié des ententes, à date, avec le ministre, de venir
s'expliquer, de venir voir le contenu de ça et, là, on verra, en
toute connaissance de cause...
M. Savoie: Question de règlement, M. le
Président.
M. Claveau: ...si ça vaut la peine de continuer dans ce
genre d'approche. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député d'Ungava. Oui, M. le ministre.
M. Sirros: Ayant eu l'assentiment de mon collègue du
Revenu, j'aimerais demander le consentement de l'Opposition pour faire la
réplique, M. le Président.
M. Filion: II n'y a pas de consentement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): s'il n'y a pas d'autres
interventions, je vais inviter le parrain de la motion, à savoir m. le
ministre du revenu, à procéder à sa réplique.
Une voix: Vous ne me ferez pas accroire...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): pas de réplique.
alors, est-ce que la motion de m. le ministre du revenu proposant l'adoption du
principe du projet de loi 187, loi modifiant la loi sur les loteries, les
concours publicitaires et les appareils d'amusement, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission du budget et de
l'administration
M. Bélisle: Oui, M. le Président. Je fais motion
pour que ledit projet de loi 187...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Pas sur division, ils ne
l'ont pas dit.
M. Bélisle: ...soit déféré à
la commission du budget et de l'administration pour étude
détaillée, pour que le ministre du Revenu de même que le
ministre délégué aux Affaires autochtones en soient
membres.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion
de déférence est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: L'article 5 de notre feuilleton, M. le
Président.
Projet de loi 407 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 5 de
notre feuilleton, M. le ministre du Revenu propose l'adoption du principe du
projet de loi 407, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts et
d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal. Je cède la
parole à M. le ministre du Revenu.
M. Raymond Savoie
M. Savoie: Merci beaucoup, M. le Président. Je pense que
vous comprendrez qu'il n'était pas nécessaire de faire de
réplique au discours du député d'Ungava. Ça n'avait
ni queue ni tête.
M. le Président, il me fait plaisir de présenter, pour
adoption de principe, le projet de loi 407. Ce projet de loi modifie diverses
lois fiscales et, plus particulièrement, la Loi sur les impôts
afin de donner suite, principalement, au discours sur le budget du ministre des
Finances du 2 mai 1991, à ses déclarations ministérielles
du 19 décembre 1990 et du 24 octobre 1991, au document technique
publié par le ministère des Finances le 13 février 1991 et
intitulé 'Taxe de vente du Québec", ainsi qu'aux bulletins
d'information 91-2 et 91-4 émis par ce ministère, respectivement
le 5 juillet 1991 et le 4 octobre 1991.
En outre, M. le Président, le projet de loi apporte des
modifications à l'assurance collective, au principe d'allégement
du fardeau fiscal, à la hausse du crédit d'impôt
remboursable pour la TVQ, à l'indexation des besoins essentiels qui est
très attendue de la part des citoyens du Québec. Il y a
également des provisions concernant l'aide aux productions
télévisuelles et cinématographiques, des crédits
d'impôt pour la recherche et le développement, de l'aide à
la formation des travailleurs, des améliorations au programme REA,
prolongation des parts permanentes des caisses, des crédits
d'impôt à la formation de la main-d'oeuvre et, finalement, des
modifications à la Loi sur le ministère du Revenu, M. le
Président.
Alors, il s'agit de modifications très techniques aux
différentes lois fiscales telles que modifiées dans les
déclarations, les bulletins et les avis émis par le
ministère des Finances. C'est un projet de loi, M. le Président,
qui compte 249 articles qu'on aura l'occasion d'examiner lors des travaux de la
commission du budget et de l'administration qui doivent avoir lieu, j'imagine,
au mois de février.
Normalement, dans ce genre de projet de loi, compte tenu du fait que la
majorité des prévisions sont déjà en application et
étant donné qu'effectivement le monde des affaires, l'ensemble
des citoyens du Québec profite déjà des
bénéfices contenus dans les différentes
déclarations, normalement, ce genre de projet de loi n'a pas besoin de
longues discussions à ce moment-ci à l'Assemblée
nationale. Il suffit d'en donner les grandes lignes et, par la suite, passer au
niveau des travaux de la commission parlementaire, pour ensuite revenir en
troisième lecture. Je pense qu'à ce moment-là on pourrait
éclaircir les différentes orientations compte tenu du fait que la
grande majorité, pour ne pas dire la totalité des articles ont
déjà fait l'objet d'annonces. Comme je vous l'ai mentionné
au tout début de mon discours, M. le Président, ces mesures sont
déjà en vigueur à travers le Québec. Je vous
remercie. (1 h 50)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre du
Revenu. Alors, sur cette motion du ministre du Revenu, proposant l'adoption du
principe du projet de loi 407, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les
impôts et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal, je
cède la parole à M. le député de Montmorency. Je
vous rappelle que vous disposez d'une période maximale de 60 minutes, M.
le député de Montmorency.
M. Jean Filion
M. Filion: M. le Président, ne soyez pas inquiet, je ne me
rendrai pas à 60 minutes, pas à cette heure-ci. Alors,
effectivement nous avons un autre projet de loi en matière fiscale, le
projet de loi 407, qui ressemble un peu à celui qu'on vient
d'étudier, 170 - une étude très partielle du projet de loi
170.
Le projet de loi 407 fait appel, encore une fois, à un volume
assez impressionnant de mesures fiscales où on se retrouve avec 191
pages de texte qui viennent, à toutes fins pratiques, ajuster une foule
de mesures techniques. Comme je l'ai fait pour le projet de loi 170, il va me
faire plaisir à nouveau d'étudier minutieusement ce projet de
loi, afin toujours d'apporter une critique constructive à la
législation du Québec et de s'assurer, au meilleur de notre
connaissance, que la loi va être modifiée afin qu'elle soit le
plus lisible et compréhensible possible pour celui qui a à
l'appliquer. Bien sûr, nous allons regarder le projet de loi paragraphe
par paragraphe, toujours dans un but de comprendre d'où on vient et
où on s'en va.
Vous savez, M. le Président, en matière fiscale, souvent
on apporte un ajustement technique et il faut comprendre pourquoi, et
même apporter des exemples à l'occasion pour
mieux saisir les conséquences de l'article de loi.
Le projet de loi 407, bien sûr, découle du budget du
ministre des Finances du 2 mai 1991. Ce projet de loi, à toutes fins
pratiques, au niveau des conséquences monétaires,
représente plus ou moins de sommes d'argent compte tenu du fait qu'on a
traité à travers les différents projets de loi cet
automne, entre autres au niveau de la TVQ et également une mesure, je
crois que c'est le projet de loi 120, au niveau des frais financiers sur
garantie, des garanties de prêts par l'État, par exemple
Hydro-Québec... Alors, les sorties de fonds de ce projet de loi
représentent au net environ 19 000 000 $. On devait percevoir avec la
fiscalité, selon le dernier budget, 1 316 000 000 $ et on en aura
perçu, à travers la taxe de vente, les carburants, les boissons
alcooliques, le tabac et les frais de garantie, environ 1 297 000 000 $. Ce
projet de loi que l'on étudie, tout près de 200 pages,
prévoit environ des deniers publics pour 19 000 000 $.
Inutile de vous dire que ce projet de loi est encore à saveur
très technique; beaucoup d'ajustements techniques probablement,
j'espère, pour boucher certains trous. On sait lorsqu'on les voit
à la première lecture, nous on les adopte, les trous. Alors, je
suppose que là on veut en corriger une couple et je serai sûrement
en mesure de commenter davantage tout le projet de loi au fur et à
mesure qu'on évoluera en commission parlementaire.
M. le Président, ce projet de loi, à toutes fins
pratiques, va traiter beaucoup de sujets. Un sujet où je suis un peu
surpris, c'est qu'on parle de l'indexation des besoins essentiels reconnus dans
le régime d'imposition. M. le Président, je pensais qu'on l'avait
oublié, qu'on avait oublié ça, les besoins essentiels, du
côté du gouvernement. On avait commencé à taxer avec
la consommation et on se foutait des besoins essentiels. Là, on nous les
ramène au niveau de l'indexation de l'impôt sur le revenu. Dommage
qu'il n'y ait pas d'harmonisation des besoins essentiels, l'impôt sur le
revenu et la taxe de vente, ça va ensemble, ça. On
reconnaît les besoins essentiels au niveau de l'impôt sur le
revenu, mais au niveau de la taxe de vente, on dit que ce n'est pas important,
mais c'est les mêmes besoins essentiels de vie. On n'aurait pas dû
taxer les gens au niveau de la consommation, comme on veut éviter la
taxation au niveau de l'impôt sur le revenu. Quand je fais ce
parallèle-là, je pense aux chaussures, aux vêtements, aux
appareils électriques qu'on taxe au niveau de la consommation et, de
plein front, bien sûr, c'est toujours les petits, les gagne-petit et la
classe moyenne qui écopent dans une taxe à la consommation.
Alors, les besoins essentiels n'étaient pas importants pour la taxe
à la consommation, mais je m'aperçois qu'au niveau de
l'impôt sur le revenu, on maintient le cap. Le livre blanc sur la
fiscalité semble toujours intéresser le gouverne- ment
libéral; alors, peut-être que ça les guidera pour
reconnaître les besoins essentiels aussi en matière de taxe de
vente.
Bien sûr, on est face à un gouvernement qui taxe beaucoup,
alors, il y aura majoration des taux d'imposition des corporations qu'on va
examiner. On va apporter, également, certaines modifications aux
techniques, l'assouplissement des règles relatives aux
sociétés à capital de risques, de recherche et de
développement. Est-ce qu'on parlera toujours de nos projets immoraux
qu'on a vécus, cet automne, en matière de recherche et
développement avec les universités? Peut-être qu'on
trouvera les mesures qui vont combler et boucher le trou auquel on a
assisté... Et effectivement, on se retrouvait dans des situations
où c'était vraiment abusif de voir nos règles fiscales,
comment elles étaient utilisées par les praticiens, et qu'on n'a
même pas osé utiliser notre pouvoir de règles
anti-évitement pour bloquer le projet. Alors, je suppose qu'on va nous
apporter des règles à ce niveau-là pour bien encadrer les
scénarios d'abris fiscaux au niveau de la recherche et du
développement.
M. le Président, il est très clair qu'on va se retrouver,
encore une fois, dans une commission où on va avoir à
étudier des mesures très techniques, des mesures qui doivent
être étudiées de façon détaillée.
J'espère que, cette fois-ci, M. le Président, nous ne serons pas
face à un bâillon où, encore une fois, on nous
empêche de travailler et d'analyser correctement toutes ces mesures
fiscales.
Alors, bien sûr, nous sommes contre l'adoption de ce projet de
loi, compte tenu de plusieurs mesures lors du dépôt sur le budget
avec lequel nous étions contre. Sans plus tarder, pour ce soir,
effectivement, je veux simplement vous dire que nous serons très
alertes, encore une fois, au niveau de ce projet de loi et qu'il va nous faire
plaisir de l'étudier paragraphe par paragraphe en commission
parlementaire. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de montmorency. est-ce qu'il y a d'autres interventions?
est-ce qu'il y a une réplique? est-ce que la motion du ministre du
revenu proposant l'adoption du principe du projet de loi 407, loi modifiant de
nouveau la loi sur les impôts et d'autres dispositions
législatives d'ordre fiscal, est adoptée?
Une voix: Sur division.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté sur
division. M. le leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'économie et
du travail
M. Bélisle: Oui, M. le Président. Je fais motion
pour que ledit projet de loi 407 soit
déféré à la commission du budget et de
l'administration pour étude détaillée.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion
de déférence est adoptée?
M. Bélisle: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: À cette étape de nos travaux, M.
le Président, je fais motion pour ajourner nos travaux au mardi 17
décembre 1991, à 9 heures.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Les travaux de
l'Assemblée sont ajournés à ce matin, 17 décembre,
à 9 heures.
(Fin de la séance à 2 heures)