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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le mercredi 1 avril 1992 - Vol. 32 N° 6

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

(Dix heures trois minutes)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mesdames et messieurs, si vous voulez prendre place. Merci.

Affaires du jour Affaires prioritaires

Nous ouvrons la séance d'aujourd'hui aux affaires du jour. Nous allons maintenant reprendre le débat sur le discours d'ouverture prononcé par M. le premier ministre, le 19 mars 1992, et sur les motions de censure de M. le chef de l'Opposition officielle, de M. le député de D'Arcy-McGee et de M. le député de Jonquière. Je cède la parole à M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

Reprise du débat sur le discours d'ouverture et sur les motions de censure

M. Yvon Picotte

M. Picotte: Merci, M. le Président. C'est la coutume en cette Chambre depuis plusieurs années, que ce soit lors du discours inaugural, M. le Président - parce qu'il n'y en a pas nécessairement à chaque année - ou lors du discours du budget, que les députés, les élus du peuple puissent avoir l'occasion d'apporter des commentaires soit à des politiques gouvernementales, soit à ce que le gouvernement souhaite faire pour le futur. J'ai eu l'occasion, inutile de vous le dire, depuis bientôt près de 20 ans de vie active en politique et de présence ici, en cette Chambre, de participer à beaucoup de discours, que ce soit au niveau du discours inaugural ou du discours du budget, pour faire en sorte de bien refléter ce que les gens et nos concitoyens, à toutes fins utiles, pensent non seulement de leur gouvernement, mais des actions gouvernementales.

Je me rappelle, M. le Président, il n'y a pas si longtemps - quand je dis «il n'y a pas si longtemps», on parle de deux décennies - il y a 20 ans - il y a 20 ans, ce n'est pas tellement loin, M. le Président, quand on regarde ça -lorsque j'ai fait mon entrée en politique. Je me rappellerai toujours que certains de nos collègues tels que M. Raymond Garneau, qui était alors ministre des Finances dans le gouvernement Bourassa, nous incitaient, comme parlementaires, à initier dans nos milieux des projets dans le but de faire en sorte que le gouvernement s'implique davantage dans le développement des régions. Quand on recule de 20 ans, M. le Président, on constate que le gouvernement du Québec était un gouvernement comme les autres gouvernements en Amérique du Nord, qu'on appelait un gouvernement-providence, parce que, dans le temps, on incitait le milieu à faire des projets et, en plus de l'inciter à présenter des projets, on disait: On peut payer ces projets-là, parce qu'il est important de développer les régions. Ça, c'est 20 ans en arrière. M. le Président, 20 ans en arrière, ce n'est pas si loin que ça.

On est obligés de constater qu'il s'est fait beaucoup de choses au Québec depuis 20 ans, mais aussi que la situation économique, la situation des gouvernements est différente de celle qui existait. On est passé rapidement, il y a 20 ans, d'un État-providence à un État-partenaire. Et ça, il n'y a pas de miracle à ça. Les gens qui font mine de ne pas savoir que, maintenant, on est rendu à un État-partenaire, ce sont probablement ceux qui l'ont créé, cet État-partenaire.

Je n'ai qu'à reculer en regardant le développement régional, le bureau de l'Est du Québec, le bureau d'aménagement, pour développer un seul coin. On dit: Si c'est bon pour l'Est, c'est bon un peu partout... On a formé l'OPDQ, puis on a fait tout ça, puis est arrivée la crise économique - là, on va reculer moins loin - est arrivée la crise économique de 1982. Tout le monde s'en rappelle, une des bonnes crises, une crise aiguë qu'a dû subir le gouvernement du Québec. Et quand je dis le gouvernement du Québec, par ricochet, je parle de ceux et celles qui le composent, parce qu'il n'y a pas de miracle à ça. Vous savez, toutes les fois qu'on parle de problèmes économiques, toutes les fois qu'on parle d'un problème d'argent ou monétaire au niveau d'un gouvernement, je pense qu'il ne faut pas chercher midi à quatorze heures. Ce n'est pas uniquement le gouvernement qui a ce problème monétaire, parce que le gouvernement, ce qu'il fait, il collecte des taxes puis il les redistribue. Il ne fait pas autre chose que ça. Il ne crée pas de piastres, il n'en imprime pas, puis il ne crée pas nécessairement d'autres richesses que celles qu'on connaît et qu'on est capables de créer dans des situations difficiles.

Donc, en 1982, le gouvernement qui nous a précédés, plus que quiconque, a compris que I État-providence, c'était terminé. Et ils ont dû prendre des décisions qui ne leur ont sûrement pas fait plaisir. Ça n'a pas été de gaieté de coeur que le gouvernement du Québec, en 1982, a pris la décision de sabrer dans les salaires de ses employés, unilatéralement. Ça n'a pas été de gaieté de coeur aussi qu'on a dû aller vendre dans les régions une nouvelle formule de développement régional, c'est-à-dire celle d'un État-partenaire, d'asseoir le gouvernement en avant puis d'asseoir les gens dans la salle, parce que qui dit partenaire dit participation.

On ne peut pas se comporter en partenaires sans questionner ceux et celles qui sont en face

de nous comme partenaires et leur dire: Est-ce que vous souhaitez qu'on fasse ça, puis de quelle façon souhaitez-vous qu'on le fasse? On ne peut pas être partenaires si on ne fait pas participer les gens à nos actions. Donc, est arrivée la vague de 1984, des sommets où l'État s'est assis en avant, avec des gens dans le milieu, pour dire: Qu'est-ce que vous souhaitez qu'on fasse dans vos régions en termes de partenaires? Ça n'a été qu'un début, bien sûr, mais ça a été un début important et, si ça n'avait pas été fait, il aurait fallu que quelqu'un le fasse et on serait peut-être en retard pour le faire si ces actions-là n'avaient pas été faites en 1983-1984.

Quand on connaît cette toile de fond, M. le Président, on est bien obligé de constater que, parfois, il faut avoir de la mesure dans les rêves qu'on peut avoir pour le futur. C'est bien plus facile, pour un gouvernement, de dire: On pourrait en faire plus. Moi, pour un, ayant participé à la fois dans l'Opposition et à la fois au pouvoir, c'est toujours un petit peu tentant, quand on est dans l'Opposition, de dire que ce n'est jamais assez et qu'on ne va jamais assez loin, mais il faut, M. le Président, prendre en compte le fait de la capacité de payer de nos concitoyens et de nos concitoyennes. (10 h 10)

Moi, je me promène dans les régions, présentement. Qu'est-ce que j'entends, des gens? Ça me fait toujours rire, à la fin d'une session, quand je vois l'Opposition se réunir avec les journalistes pour faire le bilan de la session: bilan minceur, bilan trop maigre, pas assez d'interventions gouvernementales, etc. Moi, c'est curieux, je me promène partout, dans mon comté, dans ma région, dans d'autres régions, et savez-vous ce que les gens nous disent parfois? Ils disent: Le gouvernement, arrêtez donc de vous immiscer dans tous les domaines. Arrêtez donc de venir nous compliquer la vie. Arrêtez donc de venir nous dire comment faire, quoi faire et de quelle façon le faire. C'est ça que les gens nous disent. C'est un petit peu un message contraire à ce que j'entends quand on dit: Le gouvernement ne fait pas assez. Il ne fait pas assez de lois. Ne vous fatiguez pas avec ça. Des lois, on en a peut-être bien beaucoup trop. On en fait peut-être bien beaucoup trop et on a un peu trop de règlements. Il faudrait peut-être bien commencer un peu à songer et à penser que les gens ont besoin d'oxygène et qu'ils ont besoin de respirer. Ça, c'est le message que j'entends.

C'est évident que quand on est dans l'Opposition, la seule tribune qu'on a, c'est l'Assemblée nationale. C'est un petit peu, M. le Président, la formule de «Parler pour parler» ou de jaser pour jaser. Si on n'a pas l'Assemblée nationale pour être en mesure d'avoir des projets de loi, bien, on ne peut pas jaser à notre goût. Mais ce n'est pas ça que le peuple souhaite nécessairement avoir. Maintenant, des rêves, on peut en avoir en masse. Est-ce qu'on est capable,

M. le Président, de demander à la population de défrayer le coût des grands rêves que chacun des parlementaires pourrait avoir? Parce qu'il faut réduire ça à sa plus simple expression.

Vous savez, c'est toujours compliqué, les finances publiques. Quand on laisse ça aux docteurs en finances et quand on laisse ça aux gens qui ont des gros diplômes là-dedans, on réussit assez bien à compliquer les affaires qu'on ne s'y comprend personne. Bien, il y a quelque chose de bien plus simple que ça à comprendre. Vous savez, le gouvernement du Québec, il collecte 33 000 000 000 $ de taxes dans vos poches. Je me promène partout, et les gens disent: Arrêtez de nous taxer, on n'est plus capables d'en prendre. On n'est plus capables d'en prendre, on n'est plus capables de prendre de taxes additionnelles.

Nous autres, comme gouvernement, on n'est plus capables de taxer non plus. Si les gens ne sont plus capables d'en prendre, je pense qu'on est fortement limités par notre capacité de taxer aussi. On collecte 33 000 000 000 $ de taxes, puis cette année on en a dépensé 37 000 000 000 $. Vous savez, quand on parle de milliards, c'est un petit peu compliqué. Puis si on ramène ça à sa plus simple expression, M. le Président, quand j'ai 33 $ dans mes poches puis que j'en dépense 37 $, je suis obligé d'aller bommer 4 $ à quelqu'un alentour de moi. Je suis obligé de faire ça. Si je me retrouve dans un grand hôtel puis qu'il me manque 4 $, je vais dire à mon «chum» à côté de moi: Me prêterais-tu 4 $? Je vais te remettre ça un jour. Si toutes les fois que je sors, j'emprunte 4 $ à tout le monde - mais je vais changer d'individu, évidemment, parce que ça va devenir tannant pour celui qui est à côté de moi - je vais me retrouver dans une grande salle avec des «chums», mais je n'aurai plus de «chums» alentour de moi, je vais faire le vide alentour de moi, puis je vais me faire une réputation d'un gars qui est toujours après bommer des piastres mais qui n'est jamais capable de les remettre. Puis quand je vais devoir 2000 fois 4 $, je vais avoir un sérieux problème, je ne serai même plus le bienvenu dans mes réunions, parmi les miens puis parmi ma famille. Même les gens de ma famille vont se sauver de moi.

Aujourd'hui, c'est un grand jour de deuil national pour les Québécoises et les Québécois, pour moi. C'est mon opinion. Vous êtes libres de ne pas la partager. C'est la seule journée de l'année où je pense à autre chose qu'à ma prière quand je me lève, le 1er avril, parce que c'est un jour de deuil, parce que tous les gouvernements - peut-être plus d'autres que le nôtre encore - ont réussi à accumuler une dette nationale et, le 1er avril au matin, des 33 000 000 000 $ qu'on va collecter dans vos poches, et vous n'êtes plus capables de donner une maudite cent de plus, on va prendre 4 500 000 000 $ de ces 33 000 000 000 $ pour

envoyer à ceux qui nous ont prêté de l'argent.

Je voudrais bien, demain matin, qu'on n'envoie pas ces intérêts-là à ceux qui nous ont prêté, puis j'aimerais ça prendre 1 000 000 000 $ sur les 4 500 000 000 $ qu'on envoie pour faire du développement régional. Le ministre des Transports aimerait ça prendre l'autre milliard des 4 500 000 000 $ qu'on envoie pour faire des routes au Québec. Ouais! Puis on pourrait prendre 1 000 000 000 $ de ces 4 000 000 000 $ qu'on n'enverrait pas aux emprunteurs en guise d'intérêts, à ceux qui nous ont prêté de l'argent, pour faire des rêves, M. le Président, en couleur, s'il vous plaît! Parce que là ils ont le moyen d'être colorés quand c'est 1 000 000 000 $. Mais là, on est obligés de rêver autrement le 1er avril au matin. On est obligés d'arrêter de rêver et puis de tomber dans la réalité, sur le plancher des vaches, comme disent les gens de l'agriculture. On est obligés de tomber sur le vrai plancher des vaches. On va remettre 4 500 000 000 $ d'intérêts sur les emprunts qu'on a faits, et on n'a pas encore remis une cent sur les intérêts. Et il y a pire que ça. L'année prochaine, c'est encore bien mieux, M. le Président. On se réveillera bien plus brutalement, l'année prochaine, parce que votre gouvernement aura réussi à faire encore 4 000 000 000 $ de déficit de plus et, l'année prochaine, 10 % des 4 000 000 000 $, il faudra ajouter 400 000 000 $, le 1er avril 1993, aux 4 500 000 000 $ qu'on paie en intérêts de la dette et on sera rendu à 5 000 000 000 $.

Les gens ne sont plus capables d'être taxés. Les gens n'ont plus les moyens d'en absorber, et on prend 5 000 000 000 $ de belles piastres improductives pour envoyer à ceux qui nous ont prêté parce qu'on a bommé de l'argent, au fil du temps, à gauche et à droite. C'est ça, la réalité. Il ne faut pas se compliquer la vie. Évidemment, si j'avais un doctorat en finances, je vous expliquerais ça tout d'une autre façon. Bien sûr. J'expliquerais ça d'une autre façon, et on trouverait le moyen de dire que ce n'est pas un déficit, à part de ça. On trouverait le moyen de dire que ce n'est pas un déficit. Mais la réalité n'est pas autre chose que ça.

Et ça, on doit tous en faire un mea-culpa. Ne jetons pas de blâme à qui que ce soit. Il faut peut-être commencer à demander au peuple de changer ses mentalités et de changer d'attitude, il faut peut-être bien commencer à leur dire que, toutes les fois que je vois mes amis d'en face déposer une pétition au nom de citoyens pour demander des choses, ils devraient au moins avoir le courage de leur dire: Toutes les fois que vous me faites déposer une pétition ou toutes les fois que je passe une pétition, moi, il faut que j'aie la main gauche dans les airs avec la pétition et il faut que j'aie la main droite dans la poche pour payer ce qu'ils demandent et ce qui va avec la pétition, parce qu'il n'y a pas de miracle à ça.

On aura beau vouloir développer quoi que ce soit, vous savez, c'est tentant. C'est bien tentant, en période économique difficile, d'ajouter encore au déficit. Ça, quand on manque de sérieux, c'est la première tentation qu'on a. Quand on n'est pas trop sérieux, on se fout un peu de ce qui nous suit. On se fout un peu de ce qu'on a de plus cher, dans le fond, nos enfants, parce que, demain matin, nos enfants vont hériter de ce qu'on va leur donner. Ils vont hériter de ce que, nous autres, on a planifié ou non planifié. Ils vont hériter de ce que, nous autres, on a eu de sérieux ou de ce qu'on n'a pas eu de sérieux. Ils vont probablement être obligés de payer nos rêves sans, eux autres, rêver et avec une réalité brutale. C'est ça, la réalité.

Il ne faut pas chercher midi à quatorze heures et il ne faut pas compliquer les choses, M. le Président. Il faut être juste en mesure de dire: Oui, ce serait intéressant de faire autre chose, mais on ne peut pas le faire. Comment peut-on maintenant être plus dans l'excellence? Quand je dis qu'il faut changer d'attitude, c'est peut-être le temps de commencer à penser un peu plus en fonction du développement économique. Je dis ça souvent dans mes régions.

Il y a des gens qui voudraient qu'on mette 1 000 000 $ dans une salle communautaire. Oui, M. le Président, c'est intéressant, une salle communautaire, pour la qualité de vie de nos concitoyens et nos concitoyennes, mais une salle communautaire, ça crée des emplois le temps de la bâtir. Après ça, on n'est même pas capable d'assumer le salaire du concierge sans venir voir les députés pour avoir une partie de leur argent de l'action bénévole pour payer le concierge. Quand arrive le temps de la réparer, on s'adresse encore au même gouvernement, aux mêmes payeurs de taxes pour la rénover. Bien sûr! Il y en a qui me disent: Avez-vous de quoi contre les salles communautaires? Bien non! Je n'ai pas de quoi contre les salles communautaires. Y aurait-il moyen que le 1 000 000 $ qu'on a à notre disposition pour faire quelque chose, qu'on crée de l'emploi avec? Et, tantôt, on va être plus de payeurs de taxes pour se bâtir une salle communautaire et pour payer le concierge. C'est juste ça, la différence. Elle n'est pas bien grande, la différence, mais la différence entre créer des emplois pour que le monde soit à l'ouvrage...

Ce qu'il manque au Québec, ce n'est pas compliqué, c'est plus de payeurs de taxes pour aider a défrayer nos actions. Ce n'est pas en bâtissant des salles communautaires qu'on va créer des payeurs de taxes. Peut-être qu'on va aider les joueurs de cartes, mais pas les payeurs de taxes. Je pense qu'il faut se le dire, même si ce n'est pas mauvais de jouer aux cartes, même si ce n'est pas mauvais pour la qualité de vie des concitoyens et des concitoyennes d'avoir une salle communautaire.

Est-ce qu'on pourrait être plus censés dans nos priorités maintenant parce qu'on n'a plus les moyens de se doter de n'importe quoi? On n'a plus le droit de dépenser 1 $, M. le Président, et qu'il y ait un cent là-dedans qui soit utilisé à mauvais escient. Avant, on dépensait 1 $ et, ce n'était pas compliqué, la philosophie, on disait: Si elle est mal placée, le gouvernement mettra une autre piastre. On n'a plus de piastres de remplacement. Ça veut dire que quand on décide de dépenser 1 $, il faut être bien certain qu'il est dépensé à la bonne place, au bon endroit, et qu'il va rapporter, qu'il va rapporter 1,05 $. C'est ça, la réalité. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? (10 h 20)

Et tous ceux et celles au Québec qui essaieront de vous faire miroiter quoi que ce soit, ce sont de fieffés menteurs. Tous ceux et celles qui disent qu'ils pourront, à un moment donné, accéder au pouvoir, que ce soit au Québec, au Canada ou n'importe où, dans les municipalités, et qu'eux autres, ils vont créer de la richesse et des piastres, ne croyez pas ça, c'est des marchands d'illusions. Je regrette, on pourrait même identifier des pères de l'endettement québécois ici, dans cette salle. Ça fait que là, il n'y a pas de miracle à faire. Quand ces gens-là n'étaient pas capables de faire de miracles au moment où c'était encore plus facile d'en faire, ils ne viendront pas me dire qu'ils vont en faire à partir de demain matin. Ils ne viendront pas me dire qu'ils vont en faire demain matin. Ils veulent simplement maquiller la vérité pour être en mesure, après ça, que leur visage dégouline davantage pour avoir l'air plus fou et plus bête. Ce n'est que ça, M. le Président.

Malheur à ceux qui vont se masquer et qui vont se maquiller pour tromper la population, ça va leur dégouliner dans la face; j'en ai connu, des gouvernements qui ont dégouliné pour n'être plus regardables à la fin de leur mandat. J'en ai connu. Il y en a, d'ailleurs, qui étaient tellement gênés, ils n'ont même pas fini leur mandat, ils ont sacré le camp avant, M. le Président.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Picotte: Ça fait que ce n'était pas compliqué. Ils n'étaient même plus capables de se regarder dans un miroir. Ça fait qu'on ne se contera pas de peurs ici à matin et on ne sera pas des marchands de bonheur et des marchands d'illusions.

M. le Président, je pense qu'il est temps que la société québécoise se discipline davantage. Il est temps qu'on cible mieux nos interventions. Il est temps qu'on dépense mieux, aux endroits où il faut dépenser. Et ça, ça fait appel à l'excellence, ça fait appel à des changements d'attitude et ça fait appel surtout à la responsabilité, non tellement des dirigeants, des dirigeantes du Québec et de tous les pays de l'Amérique du Nord - parce que c'est un problème qui est bien plus vaste que celui du Québec, ça dépasse les frontières - ça fait appel non seulement à la responsabilité de ceux et celles qui sont élus et qui doivent dire les vraies choses et les bonnes choses, mais ça fait appel aussi à la responsabilité de chacun des citoyens et des citoyennes. Et, bien sûr, ça veut dire qu'à ce moment-là, moi, comme citoyen, la journée où je dis, d'un côté, à mon gouvernement que je ne suis plus capable d'absorber de taxes, ça suppose qu'il faut que je sois assez responsable pour dire: Je ne suis plus capable d'avoir les mêmes exigences envers mon gouvernement. Parce que, si le discours ne suit pas, si c'est de parler des deux côtés de la bouche en même temps, M. le Président... J'ai vu trop de gens, depuis plusieurs années, en parlant des deux côtés de la bouche en même temps, qui se sont craché dans le dos et qui avaient l'air de ce qu'ils avaient l'air, M. le Président. Merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le ministre. Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes au débat sur le discours d'ouverture de la session, et je reconnais Mme la présidente de la commission des affaires sociales et députée de Taillon. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je me demande vraiment à quel gouvernement appartient le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation...

Des voix: Au bon gouvernement.

Mme Marois: ...pour sombrer dans le ridicule à ce point-là. Il nous dit: La priorité du gouvernement du Québec, cela devrait être le développement économique. Alors, regardons, au-delà des paroles, ce que sont les gestes que pose ce gouvernement. Ce gouvernement, M. le Président, augmente les interventions, au niveau de la mission économique, dans son budget de l'ordre de 0,2 %. Il dit: Arrêtons d'aider les personnes qui veulent se désennuyer - c'est un peu ça qu'il nous a dit - les personnes âgées qui voudraient avoir de l'aide. Cependant, dans la mission sociale, dans la mission éducative et culturelle, on constate une augmentation, de 3,6 % dans la mission sociale, de 6,7 % de dépenses de son gouvernement, M. le Président, qui explique les dizaines de milliards de dépenses auxquels on est confrontés. Alors, il dit: Priorité au développement économique. Mais mon gouvernement, moi, ne fait rien en ce sens-là, cependant. Et cette hausse d'à peine 0,2 %, alors qu'ailleurs, dans les autres missions, c'est de l'ordre de 3 % et de

4 %, elle va pour supporter des gestes passés de son gouvernement, qui ont été de mauvaises décisions, pour renflouer des prêts qui ont été faits, de l'intervention faite par la SDI pour renflouer effectivement une société qui en avait besoin et à qui ça a permis de maintenir de l'emploi, bien sûr - Marine Industrie, MIL Davie - mais ne propose rien pour l'avenir. À quel gouvernement appartient-il, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation pour venir nous dire de telles âneries? Je m'excuse, mais ça n'a aucun sens qu'on applaudisse son discours à tout rompre alors que, dans les faits, c'est complètement le contraire que fait son gouvernement. Il nous dit: Les gens doivent être considérés comme de vrais partenaires. Fini! l'État-providence.

D'abord, je pense que le ministre devrait savoir ce que veut dire l'État-providence, c'est qu'on n'a aucun contrôle et aucune capacité de décider de nous-mêmes, comme personne responsable, de ce qui va se passer avec notre budget. Donc, on dit: C'est un acte de Dieu. C'est la Providence qui décide à notre place. Ça a été une façon de dire qu'effectivement les États avaient décidé, généralement, dans le monde occidental, de se donner un certain nombre de services pour répondre aux besoins de leurs concitoyens en matière de santé, par exemple, et en matière d'éducation. Ce dont on s'est rendu compte, c'est que ça coûtait probablement trop cher actuellement, ces services-là, compte tenu de la capacité qu'on avait pour les supporter, mais ça ne veut pas dire cependant qu'on attend que Dieu, quelque part, ou que la Providence, quelque part, décide à notre place. Et être des partenaires dans le sens de ce que le ministre dit, M. le Président, ça signifie que les gens doivent être associés au débat sur les choix du gouvernement dans ces matières. C'est ça être des vrais partenaires, ce n'est pas ce qu'a fait le ministre des Affaires municipales, qui a décidé de remettre en question le pacte fiscal en envoyant 400 000 000 $ de nouvelles dépenses aux municipalités sans obtenir leur accord, sans avoir débattu réellement du projet et sans les avoir associées. Ça, ça aurait été les traiter en véritables partenaires. Ce n'est pas le cas du ministre des Finances.

Quand il nous dit «nos concitoyens n'ont pas la capacité de payer», il a raison, M. le Président. Mais qu'est-ce qu'a fait son gouvernement pour concrétiser ce geste-là? Son gouvernement, il a envoyé pour 2 400 000 000 $ de nouvelles taxes depuis 1989. C'est ça qu'il a fait. Alors, je pense que le ministre devrait retourner lire un peu ses documents, les documents que publie son ministre des Finances, que publie le président du Conseil du trésor, avant d'affirmer n'importe quoi à travers son chapeau qui contredit essentiellement les gestes qu'a posés son gouvernement depuis qu'il est là, depuis 1985, mais intensifiés depuis 1989. Parce que, entre autres, justement, son gouvernement s'est fait élire sur cette marque de commerce qu'il allait être habile à contrôler les dépenses publiques, qu'il allait mettre de l'ordre là-dedans, parce qu'il savait comment faire cela. Ce que vient de nous dire le ministre, ce matin, c'est que c'est un échec. C'est un échec lamentable, sa politique. Et, dans les faits, il a tout à fait raison. Je lui donne raison, M. le Président, parce que son budget de dépenses va augmenter de 5,8 %; 5,8 %, c'est très gros, M. le Président. On parle de 4 000 000 000 $ de déficit pour l'année en cours. C'est inacceptable!

Alors, je pense que le ministre devrait prendre la peine de regarder un peu les gestes que pose son gouvernement. Il nous affirme tout de go: Moi, je ne veux pas parler pour parler. Alors, où était-il, le ministre de l'Agriculture, lorsque le premier ministre et le lieutenant-gouverneur ont lu le discours inaugural? Parce que, là, je suis persuadée que tous les scriptes, toutes les personnes qui écrivent pour des émissions, à la télé, un peu partout, auraient été tout à fait inspirées par l'attitude qu'a eue le premier ministre, et qui aurait pu inspirer sûrement quelques scénarios de «Parler pour parler», justement, parce que c'est ce qu'il a fait. Et si le ministre de l'Agriculture avait bien entendu son premier ministre, il aurait tiré la même conclusion que moi, je tire à cet égard-là.

D'ailleurs, le lendemain du discours inaugural du premier ministre, un quotidien a titré: «Un catalogue d'intentions». Les gens qui savent ce qu'est un catalogue, et j'imagine qu'à peu près tout le monde ici sait ça... D'ailleurs, ça revient à la mode, les catalogues. Il y a une quinzaine d'années, une vingtaine d'années, et beaucoup plus longtemps pour un certain nombre d'entre nous, on se souviendra que la façon de faire ses achats, c'était par catalogue. Je suis certaine que vous avez connu ça, M. le Président, hein? On recevait des grandes chaînes, des grands magasins, des catalogues très épais, d'ailleurs, et dans lesquels on nous présentait les nouveaux produits de la saison pour se permettre de s'habiller et même de meubler la maison. On pouvait faire ça par catalogue. Et c'est une mode qui s'est un peu atténuée, puis elle revient actuellement. Elle revient probablement parce que les gens ont un peu moins de temps et que ça fait économiser du temps. Et un catalogue, ça voulait dire quoi? Ça voulait dire qu'on exposait toute la marchandise avec des photos pour permettre aux gens de savoir ce que l'entreprise avait à leur offrir. Et, à travers cela, évidemment, on choisissait quelques items à la mesure de nos besoins, à la mesure des besoins de notre famille. Et, souvent, d'ailleurs, nos parents faisaient des miracles pour essayer d'attacher les deux bouts et procurer à tous ce dont ils avaient besoin. On choisissait parmi une multitude d'articles. (10 h 30)

C'est exactement ce qu'a fait le premier ministre, M. le Président. D'abord, son discours était vide, absolument aucun projet mobilisant, aucun projet d'envergure pour permettre à nos concitoyens qui vivent actuellement des situations difficiles, des situations pénibles où ils ne voient pas le bout du tunnel... Cette semaine, on a encore eu des annonces d'entreprises qui ferment, des fermetures d'usines, des gens qui perdent leur emploi. Et le premier ministre, lui, discourt et nous présente sa liste, présente son catalogue. Il présente son catalogue et, à la fin du discours, ce qu'il ne dit pas et qu'il fera, cependant, M. le Président, c'est que, dans ce catalogue qui comprend des mesures fort disparates, mais jamais aucune de vraiment mobilisatrice, ce qu'il ne dit pas, c'est qu'il sélectionnera quelques éléments et cette attitude sera conforme, d'ailleurs, à l'attitude qu'il a depuis qu'il dirige ce gouvernement. Parce que si c'est le cafouillis au niveau des dépenses, malgré ce que peut en penser le ministre de l'Agriculture, c'est aussi le cafouillis au niveau des grandes politiques gouvernementales, et c'est inacceptable, M. le Président, qu'un chef d'État ait cette attitude à l'égard de ses concitoyens et de ses concitoyennes qui attendent de lui non pas qu'il les suive, mais qu'il trace un peu la voie, qu'il redonne un peu d'espoir aux Québécois et aux Québécoises qui ont besoin, oui, d'avoir des projets dans lesquels ils pourront s'engager, mais surtout d'avoir un emploi.

Le ministre disait, tout à l'heure: Le problème que nous avons, c'est que nous ne sommes pas assez nombreux à pouvoir payer pour les services que nous nous sommes donnés, non pas que quelqu'un, quelque part, a décidé de nous donner, mais que nous nous sommes donnés. Il a raison. Pour que nous soyons plus nombreux, M. le Président, il faut que nous puissions avoir un emploi, que nous puissions faire vivre nos familles, que nous puissions gagner notre vie et ainsi contribuer, comme l'ensemble de la population, aux services, au budget de l'État pour que nous payions les services qui nous semblent utiles, nécessaires pour l'éducation de nos enfants, pour nos soins de santé. Je pense que c'est essentiel que l'on puisse maintenir un niveau de qualité qui nous permette de nous réaliser.

D'ailleurs, la preuve en est qu'il y a des ratés au niveau de l'éducation, que nous en payons et que nous en paierons le prix. Nous en payons le prix au niveau de la formation professionnelle quand des gens d'affaires viennent nous dire que non seulement ils ont des problèmes au niveau de la formation de leurs gens, mais qu'ils ont des problèmes au niveau du français. Ils ont des problèmes au niveau de l'alphabétisation. Certains ont de la difficulté à lire même des instructions pour faire fonctionner des appareils, des machines. Il y a donc des ratés à des milliers d'endroits dans ce gouvernement. Effec- tivement, nous avons surtout un problème d'emplois, et le premier ministre ne propose rien, rien qui dit que l'on puisse entrevoir une lueur d'espoir pour nos concitoyens et nos concitoyennes.

Le ministre dit: Nous voulons que les citoyens du Québec soient des partenaires. Pourquoi ne pas proposer, à l'instar des gens des centrales, des gens d'affaires, un véritable débat sur la fiscalité québécoise, un véritable débat sur les finances publiques québécoises? Ce serait ça, M. le Président, traiter les gens en véritables partenaires. Ce serait ça, les associer aux orientations. Ce serait ça, un véritable questionnement sur les décisions que nous avons prises dans le passé, les projets que nous voulons maintenir, ceux que nous voulons remettre en question. Non pas que quelqu'un, quelque part, fasse comme le ministre des Affaires municipales, impose aux municipalités un fardeau de taxes sans qu'elles n'aient pu, effectivement, proposer ou contrepro-poser des avenues qui auraient mieux convenu au modèle dans lequel nous sommes engagés. Le même ministre qui vient de parler, qui est responsable du Développement régional... Un véritable cafouillis, M. le Président. Depuis 1986, en commençant par l'actuel ministre de la Santé et des Services sociaux, on se promène à travers le Québec avec des projets de politique, avec quelques idées. On a fait table rase. On a remis en question ce que l'ancien gouvernement avait fait, parce que ce n'était pas très bon, évidemment. Alors, on allait faire mieux, comme dans les dépenses publiques, M. le Président. On allait faire mieux. On allait tellement faire mieux que, huit ans plus tard, le ministre accouche d'une souris en matière de développement économique régional, sans plan d'ensemble. Pourquoi je vous dis qu'il n'y a pas de plan d'ensemble? C'est parce que lui arrive avec son projet, parce que le ministre de la Santé et des Services sociaux a déjà fait adopter une loi ici, à l'Assemblée nationale, portant sur la remise en question de l'organisation et de la distribution des services de santé et des services sociaux sur le territoire, parce que le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle est en train, à son tour, de proposer une autre formule. Elle a été tellement critiquée, peut-être la retirera-t-il, une autre formule de distribution des services qui s'adresse à la main-d'oeuvre sans vraiment régler le problème, évidemment, comme d'habitude, toujours les choses à moitié faites, M. le Président, parce qu'il dit: Moi, je vais m'occuper de la main-d'oeuvre et de la sécurité du revenu, mais, l'assurance-chômage, je vais la laisser à Ottawa.

C'est le morceau le plus important, c'est essentiel que l'on intègre les deux approches à l'égard des gens qui sont des bénéficiaires de l'aide sociale mais qui sont d'abord des chômeurs et les programmes d'assurance-chômage, mais il

dit: Non, non, non, ça ne m'intéresse pas, moi, de vraiment régler le problème. Je veux juste m'occuper de la moitié du problème, puis je pense que je vais être efficace. Non, il ne sera pas efficace comme il ne l'a pas été, M. le Président, comme ne l'a pas été ce gouvernement depuis huit ans, depuis sept ans qu'il est au pouvoir. Alors, un véritable cafouillis! le ministre du Développement régional, le ministre de la Santé, le ministre de la Main-d'oeuvre, puis le ministre des Affaires municipales à travers tout ça. Puis, comme si ça n'était pas suffisant, on a confié au président du Conseil du trésor, responsable de la grande région de Montréal, la mise en place d'un plan d'ensemble pour le Grand Montréal. Pour s'assurer que ça allait effectivement s'étioler, s'étirer et que ça n'allait finalement pas livrer la marchandise, on est allé jusqu'aux frontières de l'Ontario, du côté ouest, puis presque jusqu'aux frontières américaines, en incluant dans le plan d'organisation du Grand Montréal des régions qui ne se sentent absolument pas concernées. Ça, ça s'appelle l'art de noyer le poisson, M. le Président.

Alors, c'est ça, catalogue du premier ministre, mais cafouillis des ministres, absence de résultats de la part du gouvernement et de la part, entre autres, au premier chef, du ministre des Finances et du président du Conseil du trésor qui, eux, devaient être, à toutes fins pratiques, les sauveurs de la nation.

Ce que les citoyens et les citoyennes du Québec, M. le Président, attendent de leur gouvernement, c'est une vision claire, cohérente, des projets qui doivent être soutenus, proposés et défendus. Ils attendent de leur gouvernement de pouvoir participer avec lui aux débats qui concernent la distribution de leurs services, l'organisation de leurs finances publiques, l'organisation de leur fiscalité. Ils refusent, ils rejettent cette absence de cohérence qu'ils sentent chez leur premier ministre qui, un jour, leur dit qu'il n'y a rien à faire avec le reste du Canada, mais qui, le lendemain, leur dit que, oui, c'est le plus grand et le plus beau pays du monde, qui, un jour, leur dit et signe même un document et adopte même une loi qui leur dit qu'il va les consulter; le lendemain, il n'est pas tout à fait certain qu'il va le faire, M. le Président. Ils attendent de leur gouvernement; ils attendent de leur chef d'État de la cohérence, des projets, un sens de la décision, M. le Président, qui va faire en sorte qu'ils retrouvent de l'espoir. Ils attendent de ce gouvernement qu'il sache où il va, qu'il soit cohérent dans la façon dont il fera et posera ses gestes, qu'il résolve les problèmes en matière de décrochage scolaire, qu'il résolve les problèmes en matière de formation professionnelle, qu'il résolve les problèmes que vivent nos concitoyens et nos concitoyennes à l'égard de l'emploi, parce que c'est ça, le vrai défi auquel on devrait tous être conviés et auquel devrait, au premier chef, nous convier le chef de l'État du Québec plutôt que de nous lire une liste insipide de projets qui sont des répétitions, de toute façon, de ce que ses ministres ont annoncé et n'ont jamais fait. (10 h 40)

Ce n'est pas cela qu'on attend de notre premier ministre. On s'attend d'avoir une vision claire de ce que sera notre avenir. Un chef devrait être capable de proposer, de mobiliser et ce n'est pas, malheureusement, ce que je sens de la part de mon gouvernement, puisque c'est aussi mon gouvernement, M. le Président, et cela me désole. À travers tout ce cafouillis, il ne réussit même pas à livrer la marchandise, ce à quoi il s'était engagé à tous égards parce que, lui, devait être le plus habile d'entre tous pour gérer les finances publiques. Or, le résultat s'avère être, là aussi et malheureusement pour nous, et malheureusement pour la population québécoise, un échec lamentable.

Motion de censure

Et c'est dans ce sens, M. le Président, que je vais présenter la motion qui suit: «Que l'Assemblée nationale dénonce vigoureusement le gouvernement libéral pour son incapacité à rétablir une progression normale des dépenses de l'État québécois et ce, malgré un discours inaugural qui ne présente ni choix, ni mesures concrètes tant sur le plan social qu'économique.» M. le Président, merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Taillon. Votre motion est déposée.

M. Doyon: Avec votre permission, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Pardon?

M. Doyon: Avec votre permission, M. le Président, une question à la députée.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Louis-Hébert...

M. Doyon: Avec sa permission aussi, bien sûr.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Louis-Hébert...

M. Doyon: L'article 213.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...selon l'article 213, il demande si vous lui permettez de poser une brève question.

Mme Marois: Très certainement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, la

question doit être brève et également la réponse, M. le député de Louis-Hébert.

M. Doyon: Oui. M. le Président, je serais intéressé à savoir comment la députée peut-elle prétendre être crédible dans les circonstances après avoir perdu la course au leadership en 1985: elle accusait son propre chef de faillite économique en ce qui concerne son programme? Comment peut-on la prendre au sérieux et comment peut-elle nous expliquer que ses solutions d'aujourd'hui sont meilleures que celles qu'elle avait autrefois?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Louis-Hébert. Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: C'est avec beaucoup de plaisir, M. le Président, que je vais répondre à cette question-là parce que, effectivement, notre gouvernement avait engagé toutes les mesures avec les partenaires économiques et sociaux pour faire face à cet échec auquel on était confrontés comme gouvernement, qui était probablement pas mal moindre que l'échec auquel est confronté le gouvernement qui est devant nous ce matin, compte tenu du taux de chômage auquel ils arrivent après sept ans de croissance économique où ils ont été à la tête de ce gouvernement.

Alors, nous avions eu le courage, M. le Président, de poser les gestes, de faire les critiques nécessaires de telle sorte que, oui, nous proposions à nos concitoyens et nos concitoyennes des projets qui allaient leur permettre de retrouver l'espoir qu'ils n'ont plus maintenant, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Taillon. Alors, je vous rappelle, mes chers collègues, que nous en sommes toujours sur le discours d'ouverture de la session. Je reconnais M. le député de Richelieu.

M. Albert Khelfa

M. Khelfa: Merci, M. le Président. Après l'aveu de la députée de Taillon de leur échec lamentable, je vais intervenir sur le devoir du discours inaugural. Je suis heureux d'intervenir dans ce débat. Les intentions annoncées par le gouvernement dans le dernier discours renferment un volet qui est essentiel au développement économique du Québec, soit celui d'assurer un avenir prometteur pour les régions.

L'intérêt du gouvernement à l'égard du développement régional n'est pas nouveau. En 1988, notre gouvernement, le gouvernement libéral, avait annoncé un plan d'action visant à maximiser les ressources économiques, humaines et techniques de chacune des régions au Québec. Aujourd'hui, le temps est venu d'effectuer un virage qui a été amorcé en décembre dernier par l'annonce d'un pian d'action basé sur les conseils régionaux. À cette annonce, M. le Président, le responsable des questions régionales et député de Lévis avait répondu «que cette politique équivalait à un déluge de mots dans un désert d'actions».

En termes de déluge, l'ancien gouvernement du Parti québécois nous a gâtés et il a eu le courage après, pour ne pas dire le culot, d'avouer, par la voix de la députée de Taillon, que le gouvernement et ses actions étaient un échec. M. le Président, ce qu'il a annoncé, c'était du bidon dans à peu près tous les secteurs d'activité, le tout chapeauté dans des lignes d'action aussi imprécises qu'incohérentes. Le gouvernement libéral a, au contraire, choisi d'assumer ses responsabilités et de s'associer aux différents partenaires économiques et culturels en vue d'assurer l'avenir de nos régions.

C'est ainsi que le ministre responsable du Développement régional a annoncé ses couleurs, et il l'a fait dans la Montérégie à partir de Sorel le 16 mars dernier, pour annoncer les paramètres de la nouvelle politique du développement régional. En ce sens, chacune des 15 régions du Québec, à l'exception de la métropole, recevra un montant annuel moyen de l'ordre de 3 000 000 $. Quant à la régionalisation des budgets sectoriels, cette politique rendra disponible une somme d'environ 500 000 000 $ aux différentes régions du Québec. De façon cohérente, de façon concrète, les budgets spécifiques à chacune des régions proviendront d'une quinzaine de ministères et d'organismes différents. Je conviens que cette politique renferme un jargon quelque peu technique. Mais l'important, c'est de savoir que chacune des régions du Québec aura les moyens de s'assumer. Chacune des régions du Québec sera en mesure de relever les défis de demain, tout aussi exhaltants qu'efficaces sur le plan économique. Donc, chacune des régions du Québec possédera enfin les outils nécessaires à son plein développement et à son plein épanouissement.

M. le Président, la politique annoncée en décembre dernier constitue bel et bien le prolongement du plan d'action de 1988 en matière de développement régional. L'axe de développement en matière de développement régional tournera autour des activités des conseils régionaux. Ces conseils régionaux assureront la concertation des intervenants, d'une part, et pourront aviser le gouvernement sur la façon de dépenser les enveloppes budgétaires prévues à cette fin. Les conseils régionaux seront composés, pour un tiers, d'élus municipaux et, de plus, des agents de développement socio-économique. Bien sûr, les députés de chaque région seront d'office sur le conseil régional.

Ce qu'il faut savoir, M. le Président, c'est que cette démarche repose sur des notions d'accompagnement du dynamisme des régions de la part du gouvernement. C'est une ligne d'action

qui correspond aux nouvelles réalités budgétaires et économiques de tout gouvernement moderne.

M. le Président, vous allez me permettre de vous expliquer un terme auquel je pense depuis que je suis entré en cette Chambre, le terme «gérants d'estrade». Nos amis d'en face, je les ai qualifiés, depuis la première journée que je suis entré en cette Chambre, de gérants d'estrade. C'est eux autres qui disent, en regardant la partie: Je vais sortir tel joueur, je vais mettre un autre joueur, frappe la balle, frappe avec le bâton, recule, avance. Mais quand ils étaient au bâton, eux autres, leur moyenne était quoi? Leur moyenne n'était même pas la moitié de ce que nous faisons à l'heure actuelle. M. le Président, une chance que le ridicule ne tue pas; si le ridicule tuait, on aurait 32 sièges vacants ici, avec 32 élections partielles! (10 h 50)

M. le Président, en prenant le député de Lévis, qui nous répond sèchement que la stratégie du gouvernement donne un droit de parole aux intervenants régionaux, oui, mais n'enlève rien au pouvoir décisionnel du gouvernement. Mais j'espère bien, M. le Président, puisque, en bout de piste, si ce sont les intervenants régionaux qui doivent décider de leur propre avenir, il revient au gouvernement du Québec de s'assurer de la cohérence des actions à l'échelle de son territoire de même qu'il doit s'assurer de la saine gestion des deniers publics. Encore, le gérant d'estrade de Lévis nous avait habitués à peu de rigueur, mais, là, il a dépassé les limites de l'acceptable. Il ne préconise rien de moins que l'absence du gouvernement québécois sur le territoire dans la prise de décision en matière de développement régional. Quelle cohérence!

Le gouvernement libéral est un gouvernement responsable. C'est un gouvernement qui préconise, pour sa part, une responsabilité accrue en ce qui touche ses juridictions, mais un respect intégral des choix des régions. En d'autres termes, on laisse aux régions le soin de choisir leurs priorités, mais on exige du gouvernement qu'il définisse les lignes directrices du développement régional au Québec. On comprendra aussi que le gouvernement insiste sur la nécessité de poursuivre un dialogue constant avec ses partenaires municipaux et avec ses partenaires régionaux pour que soit assuré le succès de cette politique régionale.

Un autre secteur clé, M. le Président, du développement régional consiste à assurer l'avenir dans le domaine de l'agriculture et de l'alimentation. Depuis 1985, le gouvernement libéral s'est mis à la tâche pour redéfinir les grandes orientations et les lignes d'action en cette matière. Le problème venait du fait qu'au cours des dernières années un nombre accru de programmes avaient été élaborés et mis en place, lesquels n'étaient plus conformes aux réalités d'aujourd'hui et à la réalité de demain. Un vaste travail de réflexion a donc été entrepris par notre gouvernement. Par la suite, nous avons présenté et fait adopter la loi 46, ici en Chambre, en décembre 1987, qui visait à une simplification plus grande et à une plus grande rationalisation du régime de financement agricole.

Dans les budgets qui se sont succédé, le ministre québécois des Finances a annoncé, à plusieurs reprises, plusieurs mesures visant à aider les agriculteurs québécois. Nous avons particulièrement insisté sur les programmes d'aide à la production agricole et consolidé les programmes reliés au financement agricole. De même, nous avons agi de façon cohérente dans le secteur des assurances agricoles qui, comme on le sait, visait à protéger les exploitants agricoles contre les aléas naturels qui affectent le rendement de leurs récoltes. On sait également qu'il s'agit d'assurer un revenu décent pendant les cycles où l'agriculture subit des reculs.

Le gouvernement a également annoncé d'autres mesures pour soutenir l'agriculture au Québec. Dans son budget de 1991-1992, le ministre a annoncé des mesures concernant la commercialisation des produits bioalimentaires, la gestion des territoires agricoles et le développement des pêches. M. le Président, l'enjeu est de taille puisqu'il ne s'agit rien de moins que de léguer un patrimoine sain, un patrimoine durable pour les générations qui vont nous succéder. Il faut assurer, selon les politiques du gouvernement, selon les politiques du gouvernement libéral, un développement où l'utilisation des ressources et de l'environnement d'aujourd'hui ne remet pas en cause les perspectives d'utilisation future.

À cet égard, au cours de la présente session, les parlementaires seront appelés à se pencher sur des mesures économiques, concordantes avec la notion de développement durable. Par exemple, nous serons appelés à nous pencher sur une loi créant l'Office de protection de l'environnement qui veillera à tous les volets du développement économique durable.

M. le Président, j'aimerais maintenant m'at-tarder sur quelques bévues des gérants d'estrade d'aujourd'hui, accomplies par l'ancien gouvernement du Parti québécois, qui font leur référence en matière agricole. Le bilan n'est pas seulement particulièrement désastreux, mais c'est un bilan affreux. Je me souviens de l'époque où le gouvernement péquiste avait élaboré une politique d'ensemble sur la production porcine. Cette politique s'est avérée un véritable désastre, M. le Président, parce que le marché s'est affaissé alors qu'on avait lancé les producteurs de porc dans cette activité sans trop savoir les effets sur le marché. Et, aujourd'hui, ils viennent nous faire la morale: Vous ne faites rien. Qu'est-ce qu'ils ont fait, eux autres, quand ils étaient là, ces gérants d'estrade? Ils ont fait moins que rien. Ils ont endetté le Québec, ils ont endetté l'ensemble des Québécois et des Québécoises avec un taux effarant, et ils viennent nous faire la morale et

donner des leçons.

M. le Président, je veux me limiter à mon discours, qui est un discours positif. C'est cela qui caractérise notre gouvernement, le positivisme. Les gérants d'estrade rient, M. le Président. C'est bien.

Les résultats nets sont bien connus. Plusieurs producteurs ont dû déclarer une faillite à cause d'une analyse irrationnelle effectuée par le gouvernement péquiste, tandis que d'autres ont vu leur revenu net baisser d'une façon dramatique. C'est donc une faillite monumentale qui a caractérisé l'administration de l'ancien gouvernement du Parti québécois. Incapable de venir en aide à ceux et celles qui en avaient le plus besoin, l'ancien gouvernement péquiste a littéralement abandonné l'ensemble des régions du Québec, en passant par tous les secteurs d'activité économique, surtout celui de l'agriculture.

Le gouvernement libéral d'aujourd'hui tente, par tous les moyens possibles, de maintenir une marge de manoeuvre suffisante pour soutenir l'initiative des régions. Tout en venant en aide aux secteurs d'activité qui souffrent le plus, notre gouvernement responsable ajuste ses priorités en fonction des défis de demain, notamment en soutenant les secteurs de pointe et de haute technologie.

C'est une discipline budgétaire qui caractérise l'action du gouvernement libéral en matière de finances publiques. Si ce dernier agit de manière responsable, c'est qu'il veut s'assurer de pouvoir créer des programmes susceptibles d'aider les régions du Québec. Comme le précisait le premier ministre du Québec, le Québec doit pouvoir assumer la réalité de sa géographie, un principe qui s'appliquait pour le dossier constitutionnel, mais qui convient aisément au dossier régional. Ce qui compte, M. le Président, d'abord et avant tout, c'est que, pour l'avenir, l'ensemble des partenaires du monde agricole, du monde culturel, du monde économique fassent preuve de réalisme avant tout pour soutenir le gouvernement du Québec dans la poursuite de la saine gestion des finances publiques.

Du même coup, nous réussirons à relever un autre défi, soit celui du combat contre la pauvreté au Québec, car, il ne faut pas l'oublier, la pauvreté ne se retrouve pas uniquement dans les grands centres urbains, mais se vit tout autant dans les régions rurales et un peu partout autour de nous. C'est un combat de tous les instants que mène le gouvernement en privilégiant des actions d'ordre économique et social. (11 heures)

C'est un sens de réalisme profond qui devra marquer l'évolution du Québec pour relever les défis auxquels il sera confronté. En d'autres termes, M. le Président, le Québec devra poursuivre son action dans la perspective d'une qualité de production et de mise en marché des produits de la terre.

Le secteur du transport constitue un autre volet très important qui a été mentionné dans le discours inaugural et qui a une incidence directe sur le développement régional. À cet égard, le gouvernement entend poursuivre l'effort entrepris au chapitre de la conservation et de l'amélioration du réseau routier. Un projet de loi visant à moderniser la Loi sur la voirie et à préciser les responsabilités des municipalités dans ce domaine nous sera soumis.

Si vous me permettez, M. le Président, j'ouvrirai une petite parenthèse en disant que dans la tournée du ministre d'État responsable du Développement régional et ministre des Transports... Il est venu à Saint-Hyacinthe lundi dernier pour annoncer la nouvelle politique, et une nouvelle forme de partenariat avec les municipalités était accueillie très favorablement. À ce moment, on peut dire que nos partenaires sont sur le terrain. Les partenaires, c'est le monde des municipalités qui a décidé de relever le défi de l'amélioration du réseau routier.

Toujours dans le domaine du transport, des modifications seront proposées au Code de la sécurité routière pour améliorer la sécurité de l'ensemble des véhicules motorisés. Je n'oublie pas non plus qu'un travail sera effectué dans le cadre de la législation des secteurs du camionnage, du transport par taxi et des traversiers du Québec, laquelle législation sera améliorée. Comme vous le savez, M. le Président, et comme vous le voyez aussi, toutes ces mesures viseront essentiellement à améliorer la qualité de vie au Québec et contribueront à la prospérité de nos régions.

Dans le secteur du tourisme, M. le Président, des interventions majeures seront entreprises par le gouvernement afin d'aider l'industrie du tourisme par des mécanismes de concertation accrus pour permettre une intervention majeure.

Comme vous venez de me faire un signe, M. le Président, vous me mentionnez qu'il me reste une minute. Je ne peux pas oublier un secteur très important dans le discours inaugural, c'est de parier de mon comté, le comté de Richelieu, qui est un comté à la fois urbain et agricole, à la fois industriel et agricole. Nos industries, nos entreprises, elles sont à l'heure de la mondialisation des marchés. Elles vont décider de relever le défi à l'extérieur, puis, ça, c'est un volet qui a été mentionné à l'intérieur du discours inaugural. C'est tout à l'honneur de nos entreprises du comté de Richelieu et tout à l'honneur des entreprises de l'ensemble du Québec.

Compte tenu qu'il faut être à la fois prévoyant et travaillant, nous travaillons en même temps pour déterminer et ouvrir de nouveaux marchés dans le domaine de la globalisation des marchés. Puis j'aimerais vous dire, comme vous le mentionniez, que le défi que nous avons, autant au niveau du comté de Richelieu qu'à travers le Québec, c'est un défi majeur, puis je suis fier de le relever avec l'équipe libérale. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Richelieu. Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous sommes sur le débat du discours d'ouverture de la session, et je cède la parole à M. le whip en chef de l'Opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean. M. le député, la parole est à vous.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, quand on jette un coup d'oeil sur le front constitutionnel, on doit constater que le cloaque s'épaissit, que le fouillis constitutionnel s'aggrave et que la tour de Babel voit s'ajouter étage sur étage et monte vers le ciel. C'était remarqué et prévisible. Nous l'avions en quelque sorte annoncé, et il n'est pas besoin d'être prophète pour prévoir ce qui se passe présentement, c'est-à-dire qu'on se retrouve, sur le plan constitutionnel, dans un véritable désordre, un véritable fouillis, pour toutes sottes de raisons. D'abord, parce que la table s'est agrandie. Le nombre des convives a augmenté. On est passés maintenant à 16. On y a ajouté les 4 associations autochtones de même que les 2 territoires, ce qui fait, évidemment, que ça a eu pour effet de multiplier les comités et les forums et d'accentuer encore le désordre, un désordre, soit dit en passant, qui n'est pas créateur, mais qui est stérile, infécond. On a souvent l'habitude de dire qu'une certaine anarchie est créatrice. Dans ce cas-là, l'anarchie n'est pas créatrice. C'est vraiment le désordre infécond et stérile.

Puis s'ajoute à cela le braquage de certains premiers ministres du Canada anglais. Je vous rappellerai la déclaration tout à fait récente de M. Getty, le premier ministre de l'Alberta, qui a été on ne peut plus clair et ferme quant à la réforme du Sénat, et qui est tout aussi clair également quant à son refus d'accorder le moindre droit de veto au Québec. Même chose pour M. Wells, toujours relativement au droit de veto et aussi pour la réforme du Sénat. On tient mordicus à une réforme du Sénat triple «e», et M. Filmon est également du même avis. Donc, un bon nombre de premiers ministres du Canada anglais se sont carrément braqués dans le dossier constitutionnel et refusent farouchement toute concession le moindrement substantielle au Québec, particulièrement en ce qui concerne des revendications dites historiques du Québec.

S'ajoute à cela également un affaiblissement dramatique du pouvoir de négociation du gouvernement du Québec. On peut même dire qu'avec le message inaugural et les propos tenus, dans le message inaugural, par le premier ministre du Québec sur le dossier constitutionnel, on peut dire que, si le Québec conservait - ce qui n'est pas évident - un certain pouvoir de négociation, à partir du message inaugural du premier ministre, ce pouvoir de négociation a été réduit à néant. Il est devenu complètement nul, parce que le premier ministre l'a affirmé très clairement, son choix, c'est le Canada. On pourrait même dire que son seul choix, c'est le Canada, que son seul objectif, c'est de maintenir le Québec dans le Canada, et que les seuls propos qu'il a tenus sur la souveraineté sont des propos hostiles. D'ailleurs, je n'ai jamais entendu, au cours des 25, 30 dernières années, le premier ministre du Québec proférer un bon mot sur la souveraineté. Jamais! À chaque occasion, tous les propos qu'il a tenus sur la souveraineté ont été des propos hostiles, des propos négatifs.

Donc, c'est clair que le Canada anglais, le message qu'il a reçu venant de l'Assemblée nationale à l'occasion du message inaugural du premier ministre, il est on ne peut plus limpide. C'est que le gouvernement du Québec tient tellement à maintenir le Québec dans le Canada que cette histoire de référendum possible sur la souveraineté est désormais perçue comme un bluff et un mauvais bluff, un bluff qui est dévoilé en quelque sorte. L'épée de Damoclès que pensait constituer le référendum sur la souveraineté, bien, cette épée de Damoclès n'existe pas, parce que l'épée de Damoclès, M. le Président, était en bon acier trempé. Là, il ne s'agit pas du tout de l'épée de Damoclès au-dessus de la tête du Canada anglais, il s'agit d'une épée en caoutchouc mousse qui ne fera pas grand tort quand on coupera le fil. Si on coupe le fil, ça ne fera pas grand dégât une épée en caoutchouc mousse. Le couteau sur la gorge, dont parlait M. Léon Dion à une certaine époque, que constituerait un référendum sur la souveraineté, bien, c'est un couteau en caoutchouc mousse. Ça ne fera pas une contusion très majeure, ça ne fera pas saigner beaucoup le Canada anglais. (11 h 10)

Donc, c'est un mauvais bluff. Perte du pouvoir de négociation, pouvoir de négociation du Québec réduit à néant. Voilà le décor, M. le Président. C'est un fouillis, un désordre, une chatte n'y retrouverait pas ses petits. Il y a, d'un côté, un braquage très évident de plusieurs premiers ministres du Canada anglais, appuyés en cela par leur opinion publique, puis, de l'autre, il y a un gouvernement du Québec, évidemment, qui joue une mauvaise partie, qui bluffe de façon déplorable et qui voit ainsi son pouvoir de négociation réduit à néant. C'est ça, le décor constitutionnel actuellement, M. le Président.

Et le gouvernement fédéral dans tout cela, comment se comporte-t-il? Quelle est son attitude et quel est son comportement? Et bien, d'abord, il essaie maintenant, depuis plusieurs jours et même depuis plusieurs semaines, de jouer, d'influer sur le cadre temporel, dans ce sens que, par différentes manoeuvres, il s'efforce de modifier le processus qui est prévu dans la loi 150, le processus référendaire, de modifier le cadre temporel adopté dans la loi 150. C'est ainsi que, lors du dépôt du rapport Beaudoin-Dobbie, le gouvernement fédéral a dit: Les offres vont être rendues publiques à la fin avril. Bon. Je

vous rappellerai qu'auparavant, c'était prévu pour mars, mais là, le rapport Beaudoin-Dobbie tombant sur nos tables très tard, le gouvernement fédéral a reporté à la fin avril le dépôt d'offres formelles. Puis, comme ça n'allait pas très bien, à la conférence des premiers ministres qui a été convoquée à cet effet, là, le ministre Joe Clark a dit: Écoutez, c'est impossible fin avril, vous vous rendez bien compte; je repousse l'échéance, la date du dépôt des offres à la fin mai. Bon. Puis, vendredi dernier, le ministre Joe Clark a déclaré que c'était assez difficile fin mai, que ça pourrait fort bien être juin. Mul-roney, qui était en visite au Québec en fin de semaine dernière pour, d'abord, jouer au Bonhomme Sept Heures, mais tout en jouant au Bonhomme Sept Heures à Baie-Comeau dans son comté, il a, lui aussi, évoqué la possibilité que mai, c'est difficile et que même ça pourrait aller à l'été, en plein coeur de l'été.

Alors, vous voyez la tactique, vous voyez la manoeuvre, il s'agit de repousser constamment la date du dépôt des offres. Pourquoi? Pour une raison évidente. C'est clair que le gouvernement fédéral, en agissant ainsi, s'efforce de contraindre le gouvernement du Québec pour que ce dernier repousse, reporte l'échéance référendaire qu'on retrouve dans la loi 150, c'est-à-dire un référendum sur la souveraineté au plus tard le 26 octobre 1992. À partir du moment où la date du dépôt des offres est constamment repoussée dans le temps - d'abord avril, fin mai, juin, peut-être l'été, peut-être juillet, nous affirme le premier ministre fédéral - c'est clair qu'à ce moment-là cette manoeuvre a pour effet d'influer sur le gouvernement du Québec qui pourrait prendre prétexte de ce report incessant dans le temps de la date du dépôt des offres pour amender la loi 150 et repousser l'échéance référendaire.

J'affirmais, cette semaine, que ça pourrait très bien être l'objet d'un accord, d'un «deal» entre les deux, entre M. Mulroney et le premier ministre du Québec. On sait qu'ils conversent souvent, ils ont des entretiens téléphoniques fréquents. Ça pourrait très bien faire l'objet d'un accord: Tu repousses dans le temps la date du dépôt des offres, tellement loin dans le temps que ça m'oblige ou que ça me donne, en tout cas, un prétexte, ça me justifie de modifier la loi 150 et de repousser l'échéance référendaire. D'autant plus que l'on sait fort bien que le premier ministre du Québec n'a visiblement pas le goût, ni l'intention, ni les convictions de respecter cet engagement contenu dans la loi 150. Il pourrait là trouver un excellent prétexte pour le reporter, le référendum sur la souveraineté, en disant: Écoutez, le Canada n'est pas prêt. Ça fait 50 ans qu'on parle de constitution, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas lui accorder quelques mois de plus, au Canada anglais, pour qu'il puisse nous présenter des offres convenables. Soyons bons princes, soyons compréhensifs. C'est la dernière chance qu'on leur donne; alors, donnons-leur un peu le temps de la présenter, cette dernière chance. Et il demanderait aux Québécois de la compréhension: Soyez compréhensifs. Comprenez les choses. C'est une question de mois. Et c'est tellement conséquent, c'a tellement de conséquences qu'on peut se permettre de repousser l'échéance. Je vois déjà le discours, le discours qu'on tiendrait pour essayer de justifier cela devant les Québécois.

Il y en a qui se demandent: Comment se fait-il qu'on ait voté contre la loi 150 le printemps dernier? C'est pour ces raisons-là. Rappelez-vous les discours qu'on a faits à cette époque-là. On a voté contre parce qu'on a dit: Le gouvernement a introduit dans cette loi-là tellement d'échappatoires, de voies de sortie pour ne pas respecter l'engagement qui s'y trouvait de tenir un référendum sur la souveraineté, tellement d'échappatoires et de voies de sortie qu'on a conclu, nous, quant à nous, que ce n'était pas sérieux, que ce n'était pas un véritable engagement solide, ferme et qu'on ne pouvait pas cautionner une pareille attitude. C'est pour cette raison-là qu'on a voté contre. On voit là, avec les événements qui se produisent, que malheureusement on avait sans doute raison. Voilà ce qui peut se passer.

À partir du moment où le gouvernement fédéral aura réussi cette opération, c'est-à-dire aura réussi à convaincre ou à contraindre le gouvernement québécois de reporter l'échéance référendaire pour lui laisser plus de temps, le temps requis pour présenter des offres, formuler des offres, à partir de ce moment, là, le gouvernement fédéral pourra introduire son propre référendum, dont il est de plus en plus question ces jours-ci. Ce n'est pas pour rien que c'est réapparu sur la place publique, ça, le référendum pancanadien, dans le dossier constitutionnel. C'est réapparu avec force actuellement sur la place publique. Ce n'est pas pour rien. C'est parce que le gouvernement fédéral, une fois qu'il aura réussi à convaincre ou à contraindre le gouvernement québécois à repousser l'échéance de son propre référendum prévu dans 150, ça va être pour y mettre à la place son propre^ référendum pancanadien en vertu du principe: Ôte-toi de là que je m'y mette! C'est ce principe-là que le gouvernement fédéral est en train d'appliquer: Ôte-toi de là que je m'y mette! Enlève ton référendum, repousse-le pour que je mette le mien à la place. C'est ça qui est en train de se produire présentement. C'est ça, le scénario qui est en train de se produire.

Et ce référendum pancanadien, dont il est de plus en plus question, eh bien d'abord, non seulement il faut le condamner pour les raisons qu'on a souvent évoquées en cette Chambre, y compris le ministre responsable du dossier constitutionnel, c'est parce que c'est une négation pure et simple du droit à l'autodétermination des Québécois. Le ministre responsable du dossier

l'a souvent dit: Ce sont les Québécois eux-mêmes qui vont choisir leur avenir et ce sont seuls les Québécois qui ont le droit de choisir leur avenir. Le droit à l'autodétermination, c'est ça. Et à partir du moment où le choix de l'avenir du Québec est confié à toute la population «from coast to coast» dans un référendum pancanadien, c'est clair que ce droit à l'autodétermination des Québécois se trouve ainsi nié, foulé aux pieds. (11 h 20)

Et je m'étonne de voir Benoît Bouchard, député conservateur de Roberval, de ma région, M. le Président, ces jours-ci, considérer comme normal et acceptable un référendum pancanadien. Je trouve ça un peu curieux, un peu bizarre, parce que je me souviens très bien de certaines images du congrès conservateur de Toronto où l'on a vu ce même Benoît Bouchard sauter en l'air, les bras en l'air, sautant de joie, exultant parce que son congrès avait adopté le principe du droit des Québécois à l'autodétermination. La, je le vois, ces jours-ci, trouver acceptable, normal, comme étant un scénario envisageable, un référendum pancanadien. Drôle de cohérence, hein! Drôle de cohérence! Drôle de logique! Un référendum pancanadien étant purement et simplement une négation du droit à l'autodétermination des Québécois, droit accepté, de façon solennelle, par le congrès conservateur du parti de M. Bouchard, et là, soudainement, il trouve ça normal. Remarquez qu'il n'est pas à sa première incohérence près, ce monsieur, qui a l'habitude d'étaler ou d'exhiber ses états d'âme hebdomadairement, de mettre ses tripes sur la table de façon systématique.

Alors, voilà ce qui se prépare, présentement. Et sur quoi porterait ce référendum pancanadien? Sur quoi, pensez-vous? Bien, il porterait sur des offres. Quel genre d'offres? Bien, ce serait une espèce de mixture ou de ragoût composé d'éléments des propositions de septembre et de certains éléments du rapport Beaudoin-Dobbie. Ça ne peut pas être tellement différent de ça, hein! D'autant plus que le rapport Beau-doin-Dobbie, je rappelle que le premier ministre fédéral a jugé son contenu «les offres les plus généreuses qu'on n'ait jamais faites au Québec»; alors, ça me surprendrait qu'il aille plus loin que cela. Ça va être ça, ça va être cette mixture-là qu'on va offrir comme pâture, dans un référendum pancanadien, aux Canadiens comme aux Québécois.

Ce n'est pas acceptable pour le Québec, M. le Président. Le Québec ne peut pas accepter ça, d'abord à cause du contenu - les offres qui seront soumises à la population ne seront pas acceptables pour le Québec, seront à mille lieues des aspirations et des revendications du Québec - mais aussi parce que le processus n'est pas acceptable, puisque, par le biais d'un référendum pancanadien, il est évident que le gouvernement canadien sera tenté d'utiliser les résultats d'un tel référendum. On peut déjà les deviner, les résultats d'un tel référendum; ce serait une majorité très substantielle au Canada anglais, puis un certain pourcentage de Québécois, les Québécois fédéralistes qui, évidemment, voteraient aussi en faveur. Le gouvernement fédéral pourrait fort bien s'appuyer sur ces résultats pour justifier une opération de modification constitutionnelle sans le consentement du Québec et nous imposer des changements sans le consentement du Québec en invoquant, évidemment, le caractère démocratique de la consultation populaire qui aura été tenue et en invoquant la majorité très substantielle qui se serait dégagée de cet exercice.

Je termine en disant que le Québec doit éviter de tomber dans ce piège, parce que c'est un piège évident. Il doit éviter de tomber dans cette chausse-trappe, d'abord en refusant de modifier son calendrier, le calendrier qu'il a inclus dans la loi 150; il doit être ferme et très clair là-dessus, à ce sujet-là: un refus farouche, déterminé de modifier le calendrier. Deuxièmement, M. le Président, il doit aviser le fédéral, je pense, dans des termes clairs, limpides, que seuls les Québécois ont le droit de déterminer leur avenir et de choisir leur avenir, et que le gouvernement québécois ne peut pas accepter que le choix de l'avenir du Québec soit confié à une majorité au Canada anglais. Ce serait bafouer et violer le principe même du droit à l'autodétermination du peuple québécois, et il doit tout mettre en oeuvre, le gouvernement québécois, pour empêcher que soit mis en branle un processus référendaire pancanadien. C'est ça, la meilleure façon pour le gouvernement du Québec de défendre ce qu'il appelle constamment les intérêts supérieurs du Québec. Il y a là une occasion de défendre réellement les intérêts supérieurs du Québec, maintien du calendrier prévu dans 150 et refus catégorique de cautionner le moindrement un processus référendaire pancanadien qui serait une négation du droit des Québécois à choisir leur avenir. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean et whip en chef de l'Opposition officielle. Sur le même sujet, je cède la parole à M. le député de Louis-Hébert. Vous disposez d'une période maximale de 20 minutes, M. le député.

M. Doyon: Merci.

M. Brassard: M. le Président, on me permettra un oubli...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je m'excuse... Oui, allez-y.

M. Brassard: ...j'avais une motion à déposer.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y, M.

le député de Lac-Saint-Jean.

Motion de censure

M. Brassard: Alors, la motion se lit comme suit: «Que l'Assemblée nationale déplore la mollesse affichée par le premier ministre par sa profession de foi fédéraliste exprimée sans réserve à l'occasion du discours d'ouverture et condamne l'attitude du gouvernement libéral qui cherche par tous les moyens à se dégager de son obligation formelle de tenir un référendum sur la souveraineté, prévu au plus tard le 26 octobre prochain, en vertu de la loi 150.»

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Votre motion est déposée. Allez-y, M. le député de Louis-Hébert.

M. Réjean Doyon

M. Doyon: Oui, merci, M. le Président. L'occasion qui nous réunit ici est un événement d'une importance capitale. Nous avons l'occcasion d'entendre les allocutions, les propos des membres de l'Opposition qui sont en train, pensent-ils, de faire la preuve que le gouvernement rate son coup, que le gouvernement ne fait pas preuve d'imagination, que le gouvernement est à court de ressources, que le gouvernement devrait faire ci, que le gouvernement devrait faire ça.

M. le Président, il faut avoir la mémoire drôlement courte, particulièrement dans le cas de la députée de Taillon à qui j'avais l'occasion de poser une question tout à l'heure, qui nous afflige de tous les maux et qui en invente de nouveaux qui ne sont pas connus et qui nous met au défi de faire ci et de faire ça, de régler le chômage, d'augmenter l'emploi et d'implanter des industries, et qui demande qu'en même temps nous augmentions les crédits pour ci et pour ça.

J'ai en main, M. le Président, un article de journal qui permet de mettre en relief le double langage là-dedans. Vous déciderez vous-même, et la population en jugera, de la crédibilité de ces gens qui nous accusent, comme je le disais, de tous les maux. J'ai ici un article de journal paru dans Le Devoir du samedi 10 août 1985. Je lis le grand titre ici: «Marois fait le constat d'échec de son gouvernement». Je lis deux paragraphes, M. le Président, simplement pour éclairer un peu cette Assemblée et ceux qui nous font l'honneur de nous écouter. M. le journaliste Pierre O'Neill écrivait ce qui suit: «Ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, Mme Pauline Marois fait le constat d'échec de son gouvernement qui, reconnaît-elle, n'a pas pris les bons moyens pour combattre le chômage.»

Il continue de la façon suivante: «À l'occasion de l'ouverture officielle de son comité central d'organisation, rue Ontario, à Montréal, Mme Marois a déclaré que le taux de chômage de 12 % - 12 % en 1985 - est une preuve que les outils auxquels on a eu recours - elle parle de son gouvernement - dans la lutte au chômage n'ont pas donné les résultats escomptés.»

Je pourrais continuer l'article, M. le Président, et ça vous permettrait de vous faire une idée que le jugement que tente de porter sur le présent gouvernement la députée de Taillon doit être coloré, doit être nuancé avec l'autocritique qu'elle-même, dans un moment de lucidité, me di-rez-vous, temporaire, faisait à l'égard de son propre gouvernement. Dommage que cette lucidité, dont je suis prêt à la féliciter, n'ait pas duré plus longtemps et qu'elle ne l'ait pas amenée à faire un autre discours où elle aurait eu des propos différents de ceux qu'elle a eus. Malheureux, M. le Président, que les moments de lucidité soient aussi brefs et qu'ils ne permettent pas une cohérence dans le discours qui pourrait rattacher le discours de ce matin au discours qu'elle tenait le 10 août 1985, à Montréal, sur la rue Ontario. C'est dommage, M. le Président, que cette cohérence, ce fil conducteur se soit brisé quelque part. A-t-il été brisé par la partisanerie aveugle, par le désir, la soif du pouvoir? Là, je ne réponds pas à ces questions. Je constate les symptômes. Je laisse le diagnostic à d'autres, aux électeurs en particulier qui sont capables de comprendre qu'on ne peut pas dire noir aujourd'hui et blanc demain et avoir raison dans les deux cas. (11 h 30)

Les solutions toutes trouvées, ça n'existe pas. Nous pourrions faire de la diversion, nous pourrions nous contenter de mettre des cataplasmes; nous avons décidé d'aller au fond des choses, de trouver des remèdes qui auraient une durée dans le temps et qui ne seraient pas teintés du même défaut dont je blâme l'Opposition, c'est-à-dire de la partisanerie aveugle.

M. le Président, je conçois difficilement qu'un chef de parti, par exemple, en l'occurrence le chef de l'Opposition, le député de L'Assomption, dans les idées de grandeur qui le caractérisent, n'ait rien de mieux à faire dans la période que nous vivons, aujourd'hui, les premiers mois de 1992. Savez-vous de quoi se préoccupe le chef de l'Opposition, sur quoi il réfléchit, sur quoi il cogite? Quel est le problème immense qu'il est en train de solutionner pour la région de Québec? Qu'est-ce qui le tracasse le plus? Qu'est-ce qui l'empêche de dormir? Au sujet de quoi, en se couchant, se dit-il, «si je pouvais me lever avec la solution»? Qu'est-ce qui le tracasse? Qu'est-ce qui l'amène à avoir un peu de cheveux qui blanchissent tranquillement? Quelle est cette difficulté existentielle qui le mine? M. le Président, rien d'autre que ce qu'il annonçait dans le journal Le Soleil du lundi 24 février: C'est que les besoins administratifs auxquels devrait répondre la capitale d'un nouvel État souverain, c'est-à-dire Québec, ce serait de trouver une résidence officielle pour le chef d'État, qui pourrait, dit-il, être celle qui est

actuellement réservée au gouverneur général du Canada, c'est-à-dire la Citadelle de Québec. Je n'invente rien. Très grave problème à résoudre dans les moments difficiles que nous vivons: trouver une résidence pour le chef de l'État d'un Québec souverain. Et, dans un éclair de génie, se levant le matin, il a dit: J'ai réglé le problème, je le sais où on va mettre le chef de l'État, le président du Québec souverain: ça sera à la Citadelle de Québec. Quel soulagement pour le peuple, quel soulagement pour la population d'avoir trouvé la solution à ce problème existentiel, fondamental, s'il en fut un: où mettre le président de la république du Québec? Alors, on a trouvé, grâce au chef de l'Opposition, grâce au député de L'Assomption qui n'a épargné aucun effort de réflexion. Il a passé à travers toutes les solutions, a fait appel aux plus grands experts, et s'est levé un beau matin pour dire: Ça y est, ça sera la Citadelle, mes chers amis, merci beaucoup.

Moi, je pense qu'il faut essayer de caricaturer ces choses-là, M. le Président, pour mieux faire comprendre à la population la démesure, le manque de connexion avec la réalité du chef de l'Opposition. Ces constatations, M. le Président, doivent être faites quotidiennement, et je me dis: Si le chef lui-même n'est pas capable d'être en contact avec la réalité, comment peut-il emmener ses troupes dans ce contact? La question que je pose et que je voudrais que la population se pose, M. le Président, c'est: Dans les circonstances, peut-on prendre au sérieux un parti qui nous dit ni plus ni moins, par exemple, que... C'est M. Parizeau, M. le député de L'Assomption, le chef de l'Opposition qui dit clairement qu'advenant que dans un référendum... Soyons d'accord là-dessus: le référendum, s'il y en a un, c'est parce qu'il y a deux possibilités de réponse. Au moins deux possibilités de réponse. Si c'était clair et qu'il y avait parfaite unanimité dans la population, pourquoi en tiendrait-on un? Donc, il y a une possibilité que le référendum donne une réponse qui n'accorde pas au chef de l'Opposition son désir le plus cher, c'est-à-dire de devenir le président de la république du Québec et de pouvoir avoir sa résidence officielle à la Citadelle. Mais que dit le chef de l'Opposition devant cette possibilité? Il dit: Nous ne serons pas liés par un tel référendum parce qu'il y aura des élections et, au moment des élections, nous ferons bien ce que nous voulons faire, c'est-à-dire la souveraineté.

Une voix: Bravo!

M. Doyon: C'est un manque de respect... J'entends: Bravo! M. le Président. Je n'en crois pas mes oreilles. Je suis parfaitement scandalisé, parce que mon propos n'était pas de blâmer les députés de l'Opposition, les quelques-uns qui sont là, parce que les propos sont les propos du chef de l'Opposition. Je ne voulais pas leur mettre ça sur les épaules, M. le Président. J'ai trop d'honnêteté intellectuelle, de respect pour dire des choses semblables. Mais étant donné que j'entends «bravo!», ils prennent ces propos à leur compte.

M. le Président, se rend-on compte qu'un référendum donnant une réponse qui n'est pas favorable à l'option péquiste sera un référendum bidon, un référendum qui ne compte pas, un référendum qui pourra être défait à la prochaine occasion? Je vois la députée qui me fait signe que oui. Bien sûr, le grand sourire! Parfaitement scandalisant! Parfaitement antidémocratique! Mépris total! Mépris total de la décision que prendra la population!

Pourquoi le référendum qui donnera raison au PQ serait le bon et le vrai, le seul et l'unique? Pourquoi n'y aurait-il qu'un seul référendum qui pourrait donner la réponse attendue et que, là, par l'opération du Saint-Esprit qui aurait inspiré les Québécois, pour une fois, qui leur aurait inspiré la réponse désirée par la cohorte péquiste, pourquoi cette réponse qui ferait l'affaire de la cohorte péquiste serait-elle la seule bonne réponse, le seul bon référendum valide et valable, légitime et contraignant?

Moi, j'aimerais qu'on m'explique ces choses-là. Pourquoi un référendum pris au mois d'octobre, disons, ne serait-il plus valide dans six mois, dans un an d'ici, advenant que par impossible le Parti québécois prenne le pouvoir et que les Québécois ayant dit non à la souveraineté, six mois après, élisant, par après, par erreur ou tout simplement parce qu'un parti politique ayant fait un certain nombre d'années... Et c'est dans nos moeurs politiques, c'est dans notre régime politique, notre régime bipartisan est basé sur cette hypothèse du parti politique qui fait le remplacement. Pourquoi ce référendum, dis-je, ne serait-il pas valide à la première chance que le PQ aurait de mettre la main sur le pouvoir? C'est absolument incroyable! Je n'ai pas de mots, je suis à court d'expressions pour déplorer une attitude aussi antidémocratique. Mais j'aimerais que les gens, la population réalise ce que j'appelle cette duplicité, ce double langage, cette conviction intime qu'ils ont d'avoir raison et d'avoir les bonnes solutions.

M. le Président, nous avons passé par toutes les étapes. Le Parti québécois, par la voix de son chef, disait: Nous, nous allons faire l'indépendance par petites tranches. Moi, j'appelle ça la technique du salami: tranche par tranche, on vient à bout du saucisson. La tranche de la formation professionnelle, la tranche des affaires extérieures. Et on va, comme ça, procéder à une... la tranche des télécommunications et des communications. On va procéder tranche par tranche au rapatriement de tous les pouvoirs - c'était le discours du chef de l'Opposition - et nous tiendrons un référendum sur chacune de ces tranches. Nous demanderons aux gens: Voulez-vous que nous rapatriions tel pouvoir? Les gens

disant oui, nous le prenons et nous retournons en référendum.

Maintenant, ce n'est plus tout à fait le même discours. Maintenant, on dit: On va faire la souveraineté globale, dans son ensemble. Oui, la souveraineté globale, mais on va garder la monnaie canadienne. Bien sûr que oui, parce qu'il ne faudrait quand même pas inquiéter les gens. On va faire ça en douceur. On va garder la monnaie canadienne, ne vous inquiétez pas. Qu'est-ce qu'on pourrait bien garder à part ça que les gens aiment et auquel ils tiennent? Peut-être que la citoyenneté canadienne, le passeport canadien, c'est bien vu, ça. C'est commode d'avoir ça dans notre poche. C'est un petit document bleu qui nous permet de circuler de pays en pays et de traverser les frontières sans trop d'anicroches, sans trop de problèmes. Peut-être que les gens aimeraient ça le garder, ce petit document bleu. On va dire qu'on va garder la citoyenneté canadienne. Pourquoi pas? (11 h 40)

Et quel autre pouvoir pourrait-on aussi garder? On dit: Bon, on va garder l'espace économique. Bien sûr que oui. Il ne faudrait pas que les gens ne puissent pas exporter ou importer. Il faudrait que ce soit uniforme. On va aussi garder les ententes du GATT, on va garder tout ce qui se fait comme ententes. On va tout avoir, mais ne rien donner.

Il y a Lysiane Gagnon qui, dans un article de La Presse disait: Ça, ça me fait penser au fils, rendu à 22, 23, 24, 25 ans, qui dit: Papa et maman, moi, je m'en vais de la maison. Je ne veux plus rien savoir de vous autres. Je suis tanné de vous autres, mais vous allez continuer de me loger dans la maison. Vous allez continuer d'endurer ma musique «hard rock», vous allez continuer de me donner la priorité sur les programmes de télévision que j'aime et vous allez passer en deuxième. Vous allez aussi, bien sûr, me donner de l'argent de poche et vous allez me permettre d'inviter mes amis, dans la maison, quand c'est nécessaire. Mais à part ça, papa et maman, moi, je suis tanné de vous autres. Je ne veux plus rien savoir.

C'est un petit peu le «deal» que nous propose l'Opposition. C'est de quitter le Canada, mais en gardant les avantages du Canada. Moi, ce que je veux que la population réalise, c'est qu'on ne peut pas quitter la maison paternelle, la maison familiale et dire en même temps: Je vais venir dîner tous les midis, il faut que le réfrigérateur soit plein, et je veux aussi que ma musique, vous me laissiez mettre ça au bout, parce que j'aime ça fort, moi. À part ça, quand je voudrai écouter mes programmes de télévision, vous, vous lâcherez les vôtres et vous me permettrez de regarder les miens. C'est entendu que moi, je n'aime pas ça, la solitude. Je vais avoir des «chums», il faut qu'ils viennent à la maison et il faut les nourrir en plus.

Je me dis que quitter la maison familiale dans ces circonstances-là, c'est faire preuve d'immaturité. Moi, la gageure que je prends, c'est que les Québécois sont un peuple mature, mûr, qui sait que la décision qui devra être prise devra l'être en faisant les sacrifices qui s'imposent, en étant prêt au pire des scénarios si jamais il se produit. Il y a un vieux «motto» anglais qui dit: «If something can go wrong, it will go wrong.» Très souvent, dans les plans qu'on fait, s'il y a un accroc qui peut se faire quelque part; même si c'est la dernière des possibilités, malheureusement, ça arrive. moi, je dis aux gens de louis-hébert, aux gens du québec: méfiez-vous comme ulysse l'a fait. ulysse était un sage, un homme reconnu pour sa sagesse et ulysse s'est méfié. la chose dont il s'est méfié le plus, ça a été des sirènes. là, on a des sirènes, actuellement, qui tentent de nous charmer avec des bruits qui disent: non, non, ça ne fera pas mal. on a des sirènes péquistes, bien galbées, avec une belle voix douce qui nous disent: par ici! les récifs? ne vous inquiétez pas des récifs, vous allez pouvoir passer par-dessus ça. il n'y a aucun problème. le vieil ulysse, le vieux rusé ulysse, le héros de homère s'est méfié des sirènes et il a pu retourner, aller voir sa pénélope, retrouver son fils télémaque et avoir une vie normale avec eux après un long voyage. pourquoi? parce qu'il n'a pas cédé aux sirènes. il a évité les sirènes, les récifs, comme la peste, même s'il s'ennuyait de pénélope. c'était terrible. il avait hâte de retrouver pénélope. il avait fait des sacrifices. les sirènes péquistes nous convient à aller sur des récifs, sur des rochers. ne les écoutons pas! soyons capables de naviguer avec un gouvernail bien dirigé, avec des voiles que nous contrôlons. ce n'est pas tout d'avoir des voiles parce que, pour ça, le pq n'en manque pas de voiles. ils sont toutes voiles dehors, mais je vous assure qu'au point de vue gouvernail, ce n'est pas fort. alors, ça prend des voiles qu'on contrôle. ça prend un gouvernail tenu d'une main solide, il y a simplement un parti qui peut faire ça, m. le président, c'est le parti libéral, et je suis sûr que les gens ont réalisé ça depuis longtemps.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Louis-Hébert. Sur le même sujet, je cède la parole à M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Vous disposez de 20 minutes, M. le député.

M. André Boulerice

M. André Boulerice: m. le président, je vous remercie. j'ai écouté ou entendu avec étonnement le discours du député de louis-hébert et président de la commission de la culture. le député de louis-hébert, m. le président, a voulu nous faire la démonstration qu'il était un helléniste

averti, mais, dans sa grande enumeration des héros de la mythologie grecque, il semble qu'il ait oublié de s'identifier lui-même à un des personnages centraux de cette mythologie grecque qui est le Cyclope. Le député de Louis-Hébert ne voit que par un seul oeil, M. le Président. Il voit uniquement par l'oeil du passé. On l'a vu tantôt ressassant des déclarations de ministres antérieurs, d'une députée pour qui j'ai d'ailleurs le plus profond des respects, une grande amitié, ma collègue, la députée de Taillon. J'espère que, ce midi, à l'heure du déjeuner, au restaurant de l'Opposition... je m'excuse, j'ai complètement oublié, le restaurant, la salle à manger des députés ministériels qui sont la future opposition au Québec, il va de soi. J'espère que le député va pouvoir lire le menu. Il y a la phrase du jour qui se lit: «On finit par ne plus être capable de respirer à force de remuer le passé».

Donc, M. le Président, quand on écoute ce discours confus du député de Louis-Hébert et président de la commission de la culture, je dois le rappeler, on se serait attendu, de la part d'un tel personnage, à une certaine élévation, mais ça n'a pas été le cas. On se serait attendu à plus d'élévation dans un discours comme celui-ci; on se serait attendu à des énoncés, à une défense de ce discours d'ouverture. Je dois avouer qu'il est bien difficile de qualifier le vide et de quantifier l'absence, d'où la difficulté manifeste qu'avait le député de Louis-Hébert à parier du discours d'ouverture de son premier ministre. Il s'est borné, M. le Président, à des remarques typiques de la mesquinerie libérale et à cette volonté manifeste du parti ministériel de ratatiner les Québécois, en tentant de ridiculiser une hypothèse plausible et drôlement intéressante qui est celle d'utiliser le monument national qu'est la Citadelle pour en faire la résidence du chef de l'État. Mais c'est là, M. le Président, chers compatriotes, que l'on voit bien la différence entre le parti invertébré et l'Opposition officielle.

Nous, nous ne voulons pas d'un petit chef de gouvernement comme celui qu'on a actuellement. On trouve que le Québec mérite mieux en 1992, qu'il mérite un chef d'État et non pas un petit chef de gouvernement. Je pourrais reprendre cette déclaration du chanoine Grand'Maison à l'émission de Mme Bombardier où, s'interrogeant sur le flou actuel du Québec, il disait: Ce flou est-il, en définitive, un mou? Et le chanoine Grand'Maison y répondait lui-même en disant: Je crois que ce flou est beaucoup plus un mou, puisque nous avons à la tête de notre gouvernement le plus mou d'entre nous, M. le Président, et c'est le premier ministre actuel. (11 h 50)

J'écoutais, de plus, l'intervention du député de Richelieu, un député qui ne s'est jamais embarrassé de nuances, M. le Président, mais il y avait cette fois-ci, et je crois qu'il faut le souligner, une part de vérité dans son discours, uniquement par l'inclusion d'un mot. Il disait: Nous sommes un gouvernement responsable. Oui, il a entièrement raison, c'est un gouvernement responsable de l'écart grandissant entre les riches et les pauvres. Gouvernement responsable de cet écart qui ne cesse de grandir. Gouvernement responsable de la dégradation de la condition des plus démunis dans notre société. Gouvernement responsable de cette dégradation. Gouvernement responsable encore une fois, responsable de l'effritement de l'action communautaire au Québec parce que son gouvernement est responsable du sous-financement de ces organismes, responsable de l'abolition de certains de ces organismes et responsable par anticipation de la disparition de nombreux autres organismes qui oeuvrent pour le bien-être de nos concitoyens et qui, malheureusement, disparaîtront bientôt à cause des actions irresponsables de ce gouvernement responsable des conditions atroces dans lesquelles on vit.

Responsable d'une autre dégradation, M. le Président, responsable de la dégradation des conditions de logement dans des quartiers bien identifiables de notre capitale nationale, Québec, et de Montréal, notre métropole. Conditions dégradantes de logements pour nos aînés et pour ces jeunes couples qui aimeraient bien, comme tous, accéder à un logement convenable, y élever une famille et rester dans nos centres-villes. Gouvernement responsable de l'étalement urbain et du dépeuplement des centres-villes, ce qui va ajouter aux coûts énormes que nous avons déjà à payer pour cette incurie gouvernementale.

Gouvernement responsable en partenariat. Gouvernement coresponsable avec le grand frère fédéral. Je dis «le grand frère fédéral», M. le Président. Ce gouvernement est un peu la caricature d'une publicité télévisée particulièrement à Montréal, d'un commerce qui s'appelle Au bon marché - je vais leur faire une publicité gratuite - où on voit un des personnages s'écrier: «Oui, papa.» Papa a décidé quelque chose, les deux fils, les trois fils acquiescent. Le gouvernement fédéral dit à ce gouvernement: Vous n'aurez aucun pouvoir en communications. Il le dit dans une langue qu'ils connaissent bien. «No way». Ce gouvernement répond: Oui, papa.

Ce gouvernement a réagi, M. le Président. On a vu le député de La Peltrie et ministre titulaire des Communications s'élever, mais violemment, M. le Président, contre cette décision du fédéral et cette réponse: Votre demande est non avenue, vous, Québécois. On a vu le ministre titulaire des Communications réagir vigoureusement, M. le Président, quand Radio-Canada, émanation du pouvoir fédéral, responsable d'une grande part de la culture au Québec et de l'information, a décidé de fermer les antennes régionales. Je vois... Je ne la vois plus, malheureusement, elle a dû s'absenter de la Chambre, mais je voyais notre collègue en

Chambre - je dis «notre collègue» - Mme la députée de Matane, et Dieu seul sait que sa région souffre de cette décision dénoncée avec vigueur par le ministre des Communications.

Il y a quelques jours à peine... Je parlais de la dégradation des conditions de logement. On a vu, la semaine dernière, le ministre fédéral décider de sabrer dans les programmes d'habitation et priver le Québec de 65 000 000 $ pour des programmes d'habitation. On a vu le ministre de la Sécurité publique, ministre responsable de l'habitation, le député d'Argenteuil, M. Ryan, protester vigoureusement. Au lieu d'excommunier le ministre fédéral, il lui a dit: Allez et ne péchez plus! Quand mon collègue, le député de Shefford, préoccupé, lui, d'habitation, l'a questionné, on a eu comme réponse: Eh bien, ils se sont retirés. Ils se sont retirés! Je crois que c'est le ministre qui devrait se retirer s'il n'est pas capable de défendre convenablement les intérêts du Québec en matière d'habitation. Mais c'étaient de bons gestionnaires, de bons négociateurs avec le gouvernement fédéral puisqu'ils sont fédéralistes et lui, plus que tous, le ministre de la Sécurité publique, est plus fédéraliste que le premier ministre fédéral; autrement dit, il est plus catholique que le pape!

Mais qu'est-ce qui arrive? Recul, recul et recul dans tous les domaines. Quand avons-nous entendu le ministre de la Santé, parce qu'il y a une dégradation de nos services de santé, malgré la qualification des différents personnels qui travaillent dans nos hôpitaux... Je suis bien placé pour en parler parce que j'ai à la fois Notre-Dame, Saint-Luc, Jacques-Viger, je pourrais en énumérer plusieurs... Mais la dégradation de notre système de santé et les difficultés financières que nous avons à maintenir la qualité des services qui sont offerts, ça vient d'où? Ça vient du désengagement fédéral dans les programmes de transfert pour la santé. Est-ce que le ministre de la Santé et des Services sociaux, député de Charlesbourg, à qui la presse donne le nom de «matamore», a joué son rôle de matamore? Non! Il est resté, lui aussi, silencieux, coupable et responsable de la dégradation par omission.

Je pourrais peut-être faire une petite parenthèse. Alors que le député de Louis-Hébert glosait, M. le Président, sur l'hypothèse d'utiliser un immeuble historique occupé par le représentant d'une souveraine étrangère, le député a oublié les folies médiatiques de ce ministre: 600 000 $ confiés à une agence de publicité bien connue pour préparer son petit spectacle, ses petits tours de piste. 600 000 $, on peut créer des emplois dans une circonscription comme Sainte-Marie-Saint-Jacques; on peut construire du logement social dans le centre-sud; on peut aider des organismes communautaires sur le Plateau-Mont-Royal. Il n'a pas parlé de cela. Ce sont de bons gestionnaires. Il essayait de trouver des contradictions entre une déclaration datant de 1985 et la position actuelle. Mais je rappellerais au député de Louis-Hébert que qui ne change pas d'idée risque d'être mis en contradiction avec lui-même, d'abord, puisque le monde évolue, le monde change. (12 heures)

Je reviens au propos principal: Governement responsable. Oui, gouvernement responsable d'une détérioration de tous les secteurs de l'activité nationale, à un point tel que, quand je regarde les sondages - c'est là que le bât blesse pour le parti ministériel puisque la population du Québec les rejette catégoriquement - je me dis: Ma formation politique, revenant aux affaires de l'État, je serai sans aucun doute pris d'un certain vertige en reprenant les dossiers puisque j'ai le sentiment très intime que nous sommes, depuis 1985 à aujourd'hui 1992, en si peu de temps, revenus à la case départ dans le progrès du Québec.

C'est ça qui m'effraie, M. le Président. C'est ça qui m'effraie et c'est malheureusement ce que vivent je ne sais combien de milliers de mes compatriotes, de mes concitoyens et de mes concitoyennes du centre-sud et du Plateau-Mont-Royal: un gouvernement responsable de situations qu'il laisse dépérir, inconsciemment peut-être, volontairement sans doute. La devise du premier ministre est: II ne faut surtout pas prendre de décision, le temps pourrait arranger les choses. Je vais convenir qu'H se peut que le temps, quelquefois, arrange les choses, mais le temps peut empirer les situations. Les conditions peuvent tourner à notre désavantage. Le premier ministre ne fait rien et il en abuse à un point tel, M. le Président, que vous connaissez sans aucun doute cette blague qui circule sur la colline parlementaire où, tous les jours, une limousine vide arrive devant notre parlement et le premier ministre en descend. Ça, on l'entend dans la rue et ces traits d'humour sont toujours caractéristiques de la pensée d'une population. C'est dangereux car c'est l'image que notre premier ministre a auprès de la population.

Et les sondages le reflètent. Comme dit la députée de Groulx, M. le Président: À juste titre. Et à un point tel, les sondages le reflètent tellement que j'ai failli dire: La future ancienne députée de Groulx. Quoique je serais quand même attristé puisque j'ai de bons sentiments pour elle. Malgré tout, je l'aime bien. Je l'aime bien. Elle a eu quelquefois des points de convergence avec nous, mais je ne vais quand même pas les lui reprocher.

Touchons un domaine qui n'a malheureusement pas été abordé tantôt par le président de la commission de la culture, qui est l'action de ce gouvernement dans le domaine de la culture, dans le domaine des arts. Je vous ai parlé tantôt des communications. Ce n'est rien! Dans le domaine de la culture, eh bien, M. le Président, les crédits ont parlé. Ils ont parlé pour le discours du premier ministre. Une augmentation

de 35 000 000 $ dans le budget, M. le Président. 35 000 000 $ dans le budget. Mais si l'on décortique ces 35 000 000 $, 23 000 000 $ - on va faire une petite arithmétique, chers concitoyens - 35 000 000 $, 35 700 000 $, quelque chose comme cela: 20 300 000 $ iront aux grandes institutions d'État, service de la dette, 10 000 000 $ iront à des ententes, une aide à l'orchestre symphonique, aux Grands Ballets canadiens, élargissement du mandat de la Régie du cinéma, prise en charge de l'amphithéâtre du Festival d'été de Lanaudière, il ne reste donc - et je sais qu'il y a beaucoup d'artistes, de comédiens, de chanteurs dans ma circonscription qui vont être scandalisés - de l'augmentation qu'on fait miroiter, que 2 000 000 $ pour tous les autres organismes culturels et les artistes. Cela signifie: Les artistes, vous repasserez. Le 1 %, bien, voyez-vous, là aussi, vous repasserez. Et les régions - et j'ai hâte d'entendre les discours des députés régionaux du Parti libéral - bien, c'est: Vous repasserez, vous aussi.

Le livre des crédits, à toutes fins pratiques, était une chronique nécrologique pour les arts et la culture. Le livre des crédits, c'était, à toutes fins utiles: La fameuse grande politique culturelle est mort-née et l'avis de décès était dans ce cahier des crédits qu'a déposé le député de Bonaventure et soi-disant ministre des Finances du Québec. Gouvernement responsable? Gouvernement responsable de la dégradation de tous les secteurs de l'activité nationale, au Québec. C'est ça qu'il faut retenir. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. Il n'y a pas d'autres intervenants? Alors, je cède immédiatement la parole à M. le député de Crémazie et ministre du Tourisme.

M. André Vallerand

M. Vallerand: Merci, M. le Président. Je suis toujours un peu étonné d'écouter les propos de l'Opposition quand cette dernière tente d'attaquer le gouvernement, dont je suis, autant dans sa gestion quotidienne que dans sa gestion continuelle. À quel genre d'exercice nous convie le message inaugural? Après avoir entendu le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, il serait utile de rappeler, pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent, à quel type d'exercice nous sommes conviés lors d'un message dit inaugural.

Un message, M. le Président, c'est un chargé de dire. Un gouvernement, à la rigueur les partis d'Opposition, les groupes de pression ont une responsabilité d'expliquer à leurs commettants le bilan de leurs activités en termes de ce qu'ils ont fait, en termes de ce qu'ils envisagent de faire, en termes également de ce qu'ils ne peuvent pas faire. C'est un chargé de dire qui permet à ses commettants de juger du bilan de l'ensemble de ses activités, autant par le biais de ses ministères, des titulaires des ministères, des obligations dites ministérielles, des sociétés d'État, des organismes qui, de près ou de loin, dépendent de la responsabilité gouvernementale.

Inaugural, c'est une façon de situer l'action gouvernementale dans le temps. C'est une façon, pour l'État, de tenter de préjuger et de présager de l'avenir de sa collectivité de façon à mieux agir sur ce devenir et sur son avenir, et d'en façonner concrètement et positivement le résultat. C'est, en vérité, M. le Président, de la prévention. La qualité essentielle, je dirais même la quintessence d'un gouvernement responsable, c'est d'être capable de prévenir l'avenir de façon à mieux agir et façonner son devenir. (12 h 10)

Dans quel contexte s'est situé le dernier message inaugural du gouvernement? De l'avis de tous, M. le Président, ce message inaugural s'inscrit dans un contexte de changement, que nous n'avons pas connu dans le passé, ayant un effet aussi inquiétant, perturbateur sur l'ensemble des intérêts de notre collectivité. Cette particularité du contexte économique et social, à l'intérieur duquel s'insère le message inaugural, nous rappelle, M. le Président, dans l'exercice auquel nous sommes conviés à circonscrire des actions susceptibles d'agir positivement sur ces perturbations graves, eu égard aux intérêts qu'on se doit de protéger comme gouvernement du Québec.

De quelle façon peut-on, de façon responsable, sage, dans un discours intelligible, se donner l'assurance que nous aurons l'occasion de contrer les effets négatifs de ces changements rapides qui s'opèrent dans notre société? Dans ce message inaugural, nous avons pensé, modestement, donner l'exemple, en commençant par faire le ménage dans notre maison d'État, c'est-à-dire réviser l'ensemble des actions de l'administration publique ainsi que son financement. La situation économique que nous avons connue et le résultat de cette situation économique, en termes de résultats conjoncturels, ont amené les gouvernements à disposer de moins d'argent et de moins de moyens pour pouvoir agir aussi largement qu'ils voudraient le faire au sein de l'ensemble des problèmes auxquels sont confrontés les gens de notre société.

Il est impératif de repenser nos finances publiques. Il est tout aussi impératif de les assainir afin de pouvoir les utiliser de façon efficace et maximale dans le contexte actuel. Cette réflexion sur la rigueur dans l'administration de la chose publique nous a amenés à repenser avec beaucoup d'attention, avec beaucoup de préoccupation l'ensemble de notre système de santé au Québec, de réfléchir également sur notre système d'éducation, deux composantes de l'administration publique qui consti-

tuent des coûts importants dans le cadre de l'ensemble des efforts de financement public. Révision également, dans notre propre maison, de l'organisation et du fonctionnement de l'administration publique. Il nous faut et il nous fallait avoir le courage de questionner nos propres moyens avant d'inviter la population et la collectivité a questionner les leurs.

Évidemment, c'a permis à l'Opposition d'être en mesure de critiquer davantage le gouvernement mais, faut-il le rappeler, de critiquer le gouvernement dans sa gestion responsable de l'administration publique avec le courage qu'il a eu de se questionner dans ses moyens, dans sa gestion et dans la répartition de ces moyens aux affectations des plus nécessiteux, des plus en besoin de notre collectivité. C'est notre façon à nous de «prioriser» nos responsabilités.

Lorsque le gouvernement s'est interrogé sur sa propre gestion dans le contexte actuel, interrogation qui est comprise dans le message inaugural, le gouvernement fait également appel, dans son message, à l'entreprise privée, aux autres collectivités non publiques ou parapubli-ques parce que, que ça nous plaise ou non, les succès que nous pouvons anticiper pour contrer les effets négatifs de la situation économique passent par un redressement durable et prolongé de l'activité et de la prospérité économiques, au Québec. La pierre d'assise, le fondement même du succès d'un tel objectif passe obligatoirement par le rôle du secteur privé. En invitant le secteur privé à concourir aux objectifs de redressement économique contenus dans le discours inaugural, M. le Président, nous lui disons en premier lieu: Notre action portera sur l'amélioration du contexte concurrentiel au Québec. Nous examinerons de façon plus attentive, compte tenu des changements considérables qui se sont produits à l'intérieur de nos économies occidentales, nous analyserons davantage l'ensemble des moyens qui vous permettront de mieux concourir, de mieux améliorer votre facteur de compétitivité compte tenu d'une concurrence de plus en plus internationale.

Ça passe, évidemment, par des comparatifs fiscaux. Ça passe par une interrogation sur nos politiques de formation de la main-d'oeuvre, une des priorités du discours inaugural. Ça passe également par une préoccupation plus vive, plus sentie du développement économique régional. Nous l'avouons. Nous, du gouvernement libéral, avons toujours avoué que notre force économique, c'est l'addition de la somme des avantages comparatifs de nos régions, un accent particulier sur la grande région de Montréal. On se rappellera, M. le Président, qu'en 1981 le Parti québécois avait tenté de «démontréaliser» le Québec. Heureusement, je dois le dire, il s'est amendé lors du colloque économique du Grand Montréal, en 1982, pour dire: On s'excuse. Nous nous étions trompés. Montréal constitue le fer de lance de l'ensemble de l'activité québécoise. C'est un vecteur économique sur lequel il faut composer et c'est un vecteur économique qu'il ne faut pas affaiblir, mais, bien au contraire, dynamiser de sorte que son résultat se perpétue dans l'ensemble des autres régions économiques du Québec. C'est ce que nous appelons un pôle de croissance économique important, au Québec.

Dans cette compréhension, nous avons mis de l'avant un plan de relance durable de l'économie montréalaise, un plan concocté avec l'ensemble des principaux dirigeants économiques et sociaux de la région de Montréal de telle sorte que, lorsque mon collègue, le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor et ministre de la région de Montréal, a rendu public l'énoncé de politique pour revitaliser la grande région de Montréal, son message a reçu l'assentiment, l'aval de l'ensemble de la communauté, et les gens de la région de Montréal se sentent plus en mesure d'agir, d'intervenir sur le développement durable de cette importante région.

Également, M. le Président, nous avons, et c'est inclus dans le discours inaugural, fait référence à l'importance économique du tourisme. L'activité touristique n'est plus aujourd'hui perçue comme elle l'était antérieurement, comme une activité plus ou moins prise en compte dans les stratégies de développement économique des gouvernements, non seulement celui du Québec, mais également de l'ensemble des gouvernements des économies occidentales. On considère le tourisme maintenant comme une activité économique à part entière tout aussi importante, tout aussi motrice, tout aussi dynamique que l'activité économique des autres secteurs économiques, notamment du secteur manufacturier ou du secteur dit de la transformation.

Le tourisme a gagné ses lettres de noblesse et de reconnaissance comme activité économique majeure, principalement au Québec, principalement à cause du soutien du gouvernement, principalement à cause de l'action du ministère du Tourisme. Et, M. le Président, je le dis sans prétention, je m'en exclus, j'attribue la qualité du résultat de nos actions davantage à l'ensemble des fonctionnaires du ministère du Tourisme qu'à son titulaire que je suis. Mais cette persistance, cette vision de l'importance économique du tourisme, ces actions de sensibilisation auprès des autorités responsables ont fait en sorte que le tourisme est maintenant un «pris-en-compte» stratégique dans le développement économique du Québec. (12 h 20)

La preuve en est, M. le Président, que le titulaire de ce ministère que je suis rendait public, l'automne dernier... au début de cet hiver, pardon, un énoncé de politique, première dans l'histoire touristique du Québec. Même le critique de l'Opposition en qui je reconnais quelqu'un qui a une ouverture d'esprit, une certaine compréhension, des fois plus pointue que d'autres, a

lui-même félicité le titulaire du ministère du Tourisme, il s'est réjoui que, pour la première fois dans l'histoire du tourisme au Québec, on ait été saisi d'un énoncé de politique qui nous permettait de nous référer à des objectifs précis et également à un plan d'action pour soutenir les différents objectifs contenus à l'intérieur de l'énoncé de politique touristique.

Très brièvement, M. le Président, cet énoncé de politique touristique, que l'on retrouve à l'intérieur du discours inaugurai, met l'accent sur une redéfinition de notre participation, de nos actions aux efforts de promotion et de commercialisation du produit touristique. Essentiel. Le tourisme, en vérité, lorsque le consentement est acquis par l'industrie, c'est une opération qui se résume à vendre, de façon concurrentielle, le produit touristique québécois au travers des autres produits qui lui sont concurrents en termes de destination et en termes de consommation de produits et d'événements.

Requestionnement stratégique de ces moyens de promotion et de commercialisation, requestionnement stratégique de son positionnement générique sur les marchés qui sont les plus concurrentiels à l'intérieur des marchés à partir desquels on peut escompter les taux de croissance les plus accélérés. Également, le courage de questionner le produit touristique de façon comparative. Non seulement de s'enorgueillir de la qualité du produit touristique québécois tel qu'on le connaît, tel qu'on le voit, mais de comparer de façon à être plus à même de s'expliquer les différences de partage entre l'activité touristique au Québec, l'activité touristique dans l'ensemble canadien, la part de marche que le Québec va chercher à l'intérieur du marché américain et, également, sur les marchés européens.

Aussi, puisque le tourisme, comme activité économique, n'échappe pas aux perturbations des temps, aux changements radicaux auxquels nous sommes confrontés, avons-nous, dans l'énoncé de politique et dans son plan d'action, campé un objectif de formation de la main-d'oeuvre, pour mieux servir l'ensemble des entreprises que compose cet important secteur industriel et améliorer, ce faisant, sa qualité, son excellence et situer le produit touristique à l'intérieur des produits dont la reconnaissance de l'excellence et de la qualité la situe, cette industrie touristique du Québec, parmi les meilleures au monde. Les résultats des dernières années sont probants. Sur le plan de l'achalandage, sur le plan de la reconnaissance, à tous égards, le Québec se distingue à l'intérieur d'une industrie de plus en plus internationale de façon singulière, à la mesure de son potentiel, à la mesure de la qualité de ses principaux artisans, ces hommes et ces femmes qui oeuvrent à l'intérieur de l'industrie touristique du Québec.

Finalement, M. le Président, quand je faisais référence à l'exercice auquel nous sommes conviés lors d'un message inaugural, j'ai, bien sûr, fait allusion aux efforts que l'État va faire pour améliorer sa propre gestion, compte tenu des moyens limités et davantage limités que nous avons à cause du contexte économique actuel; j'ai fait référence aux préoccupations de redressement durable de l'économie, le seul moyen susceptible de nous garantir à court terme des résultats de telle sorte qu'on remette à nos collectivités locales, régionales et nationales des outils, des moyens pour enrichir leurs propres communautés.

À tous égards, les plus belles ambitions, aussi gouvernementales soient-elles, en matière de santé, en matière d'éducation, en matière de loisir, à tous égards, sont tributaires de nos succès économiques.

Également, M. le Président, en terminant, notre succès économique est, par ailleurs, tributaire de la stabilité et de la durabilité de nos institutions politiques. On ne peut pas imaginer de succès économique qui repose sur une instabilité de nos institutions politiques. À cet égard, je suis davantage surpris quand j'écoute les collègues de l'Opposition dans la défense de l'option constitutionnelle qui est la leur. J'entends, et je le déplore, par le discours, par l'argumentation, par l'image, des appels davantage à l'intolérance, une espèce de retour au manichéisme, le clan des bons et des pas bons, le clan des bons et des mauvais. C'est tranché très clairement. On oublie, dans notre responsabilité, que les défis de demain et même d'aujourd'hui sont davantage à l'enseigne de la diversité qu'à celle de l'homogénéité; davantage à l'enseigne de la diversité, qui, elle-même, est créatrice d'actions, d'innovations, en mettant en commun un ensemble d'idées provenant de gens qui ne nous ressemblent pas nécessairement sur le plan du dénominateur commun de la langue, qui ne nous ressemblent pas nécessairement sur le plan de l'origine, de la provenance, qui ne nous ressemblent pas nécessairement à d'autres égards culturels, mais c'est pour nous un enrichissement extraordinaire que de pouvoir nous inspirer à la source même de cette diversité.

À cet égard, M. le Président, et en terminant, j'aimerais rappeler à l'Opposition, que ça leur plaise ou non, que notre succès économique est tributaire de la stabilité de nos institutions politiques. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre du Tourisme et député de Crémazie. Cette dernière intervention met fin à nos travaux pour ce matin, travaux que je suspends jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 28)

(Reprise à 14 h 5)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants. Je vous remercie. Veuillez vous asseoir. Nous allons entreprendre dès maintenant les affaires courantes.

Affaires courantes

II n'y a pas de déclarations ministérielles. Présentation de projets de loi. Dépôt de documents. Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.

Dépôt de documents

Projets de loi de l'État du Massachusetts

Mme Bacon: M. le Président, suite à la période de questions d'hier, du mardi 31 mars, où j'ai pris l'engagement de faire parvenir au leader de l'Opposition les cinq projets de loi de l'État du Massachusetts, il me fait plaisir de les déposer en cette Chambre.

Le Président: Ces documents sont donc déposés.

M. le ministre des Transports.

Rapport annuel du Conseil de la recherche et du développement en transport

M. Elkas: J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1990-1991 du Conseil de la recherche et du développement en transport.

Prévisions budgétaires et rapport financier préliminaire du Directeur général des élections

Le Président: Ce document est déposé.

J'ai l'honneur de déposer les prévisions budgétaires 1992-1993 et le rapport financier préliminaire 1991-1992 du Directeur général des élections.

Prévisions budgétaires et rapport financier

préliminaire de la Commission de la

représentation électorale

J'ai également l'honneur de déposer les prévisions budgétaires 1992-1993 et le rapport financier préliminaire 1991-1992 de la Commission de la représentation électorale. Ces documents sont déposés.

Maintenant dépôt de rapports de commissions.

Dépôt de pétitions.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

Nous allons donc procéder à la période de questions et réponses orales des députés. Alors, je vais reconnaître, en première question principale, M. le whip de l'Opposition et député de

Lac-Saint-Jean.

Questions et réponses orales

Position du gouvernement sur la tenue d'un référendum pancanadien sur la Constitution

M. Brassard: Oui, M. le Président. Devant les difficultés de dégager un consensus des provinces sur les offres qu'il entend présenter, face au braquage de certains premiers ministres, comme M. Getty qui affirme: «Pas d'entente constitutionnelle sans Sénat triple "e"» - M. Wells, également - et invoquant le manque de temps, le premier ministre fédéral a indiqué, à maintes reprises depuis plus d'une semaine, qu'il envisage de recourir à un référendum pancanadien pour dénouer l'impasse constitutionnelle. Or, un tel référendum pancanadien nierait non seulement le droit des Québécois de choisir eux-mêmes les voies de leur avenir politique, mais permettrait surtout à Ottawa de se justifier d'imposer des changements constitutionnels sans le consentement du Québec.

Ma question au ministre responsable du dossier constitutionnel: Compte tenu que le référendum pancanadien constitue un véritable piège pour le Québec, qui pourrait aboutir à lui imposer des changements constitutionnels sans son consentement, est-ce que le ministre des Affaires intergouvemementales canadiennes maintient toujours cette position, comme il le déclarait le 28 novembre dernier, et je le cite: «Pas question pour nous d'accepter que le gouvernement fédéral décide de l'avenir des Québécois; c'est l'Assemblée nationale qui décidera de la question et de la façon dont sera mené le référendum»? Ou est-ce qu'à l'instar de l'ineffable ministre fédéral Benoît Bouchard et du caucus conservateur québécois il est prêt, maintenant, à accepter un référendum pancanadien pour dénouer l'impasse constitutionnelle?

Le Président: M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

M. Rémillard: M. le Président, hier, le premier ministre du Canada, M. Mulroney, et M. Clark, le ministre responsable du dossier constitutionnel, ont lancé un message très clair aux autres provinces. Ils leur ont dit: Vous devez accélérer le pas dans les discussions, les négociations en matière constitutionnelle pour qu'on puisse présenter des offres valables au Québec. C'est le message que M. Clark et M. Mulroney ont fait très clairement, hier, aux autres provinces. En ce sens, M. le Président, je trouve ça encourageant. Je trouve ça encourageant parce que ça démontre la volonté très claire d'Ottawa de respecter l'échéancier de la loi 150, de respecter la loi 150.

En ce qui regarde le gouvernement - on l'a mentionné à plusieurs reprises, le premier minis-

tre l'a mentionné à plusieurs reprises, je l'ai fait aussi - nous avons cette loi 150 et cette loi 150, pour nous, c'est ce qui nous guide dans son échéancier, dans ses composantes, avec les deux commissions parlementaires qui font leur travail. Alors, dans ce cadre-là, M. le Président, ce que je peux dire, c'est l'appel, le message clair qui a été fait par le premier ministre du Canada et par M. Clark hier, c'est la confirmation qu'Ottawa veut respecter l'échéancier de la loi 150, et on doit s'en réjouir.

Le Président: En question complémentaire. (14 h 10)

M. Brassard: M. le Président, le ministre pourrait-il nous dire pourquoi il escamote l'autre partie du message fédéral? Pourquoi s'en tient-il à cette seule partie du message qui consiste à accélérer le processus de négociations et pourquoi ignore-t-il l'autre partie du message fédéral qui dit que, s'il n'y a pas d'entente avec les premiers ministres, il y aura un référendum pancanadien? Comment peut-il escamoter cette autre partie du message qui est importante? En tenant compte de ce message-là, comment peut-il prétendre que le gouvernement fédéral respecte l'échéance de la loi 150 quand il est prêt à tenir un référendum pancanadien? Conciliez ça.

Le Président: M. le ministre.

M. Rémillard: M. le Président, dans la mesure où le premier ministre du Canada et le ministre responsable du dossier constitutionnel, tous les deux, disent aux provinces: «On doit accélérer nos travaux, on doit présenter des offres valables au Québec, en respectant l'échéancier voté par l'Assemblée nationale dans la loi 150», est-ce que le message peut être plus clair, M. le Président? Le message est très clair. Ça signifie qu'Ottawa veut respecter l'échéancier que nous avons, et on ne peut que s'en réjouir. Qu'Ottawa pense aux moyens qu'il veut, c'est son droit, mais pour nous, ce qui est important, c'est cet échéancier tracé, déterminé par la loi 150 votée par cette Assemblée nationale, loi, évidemment, que vous, vous n'avez pas voulu accepter; vous avez voté contre la loi 150, vous avez voté contre un référendum sur la souveraineté, vous avez voté contre la conclusion de Bélanger-Campeau. M. le Président, s'il y a un message qu'on doive escamoter, eh bien! je vais vous dire, c'est celui que vous avez donné quand vous avez voulu voter contre la loi 150.

Le Président: Une question complémentaire.

M. Brassard: M. le Président, le ministre pourrait-il cesser de faire preuve d'amnésie sélective? Pourquoi ignore-t-il l'intention avouée du gouvernement fédéral, appuyé par le caucus conservateur québécois, de tenir un référendum pancanadien sur le dossier constitutionnel s'il y a impasse, si l'impasse persiste, et si les premiers ministres ne réussissent pas à s'entendre? C'est ça, l'intention annoncée par le premier ministre Mulroney. Qu'est-ce qu'il compte faire devant cette intention-là, comme porte-parole du gouvernement? Est-ce qu'il est toujours en désaccord? Parce qu'il a exprimé son désaccord autrefois, l'automne dernier.

Le Président: M. le député...

M. Brassard: Est-ce qu'il est toujours en désaccord avec cette idée d'un référendum pancanadien ou est-ce que le processus psychologique de ramollissement bien connu de ce gouvernement a tellement fait son oeuvre-Le Président: M. le député, s'il vous plaît!

M. Brassard: ...qu'il est maintenant d'accord avec une telle idée?

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, M. le ministre.

M. Rémillard: Là encore, M. le Président, en votant contre la loi 150, vous avez voté contre une des dispositions de cette loi qui dit que c'est aux Québécoises et aux Québécois de décider de leur avenir politique. C'est dans la loi 150, c'est la loi que nous avons votée de ce côté-ci et que nous respectons. Dans la mesure où cette loi est respectée dans une de ses parties essentielles, qui est l'échéancier, M. le Président, en quoi pourrions-nous être contre ce message que nous donne Ottawa? Mais c'est aux Québécoises et aux Québécois qu'appartient cette volonté de décider de leur avenir politique. C'est clair dans la loi 150 et c'est une volonté qui doit s'exprimer très clairement.

Le Président: Alors, en question principale, M. le chef de l'Opposition.

Accès aux études des ministères sur

l'intégration des fonctionnaires fédéraux à la fonction publique québécoise

M. Parizeau: M. le Président, la commission d'étude sur les questions reliées à l'accession du Québec à la souveraineté avance ses travaux rapidement, et je comprends qu'elle doit produire son rapport au début du mois de mai. Parmi les questions qui ont été examinées, il y a celle, évidemment, de l'intégration des fonctionnaires fédéraux à la fonction publique du Québec.

La commission, d'abord, a reçu le rapport du professeur Saint-Germain à cet égard, puis le rapport du comité Beaudry mettant l'accent en particulier sur l'intégration des fonctionnaires fédéraux dans l'Outaouais, et, hier, elle a reçu l'étude du groupe Lalonde-Mallette démontrant

que l'intégration des fonctionnaires fédéraux est tout à fait possible, traçant un certain nombre de pistes à cet effet. Il apparaît cependant, comme Lalonde-Mallette le soulignait hier, que, maintenant, il faut que les ministères du Québec collaborent à l'exercice pour pouvoir entrer encore de façon plus précise dans ce processus d'intégration.

Est-ce que le premier ministre peut nous indiquer s'il est maintenant prêt à transmettre à la commission les études que le secrétaire du Conseil exécutif a commandées à chacun des sous-ministres au début des travaux de la commission Bélanger-Campeau à l'automne 1990 - ça date déjà d'un certain temps - est-ce que le premier ministre est prêt à compléter le dossier en déposant ces fameuses études dont on a d'abord - il s'en souviendra - nié l'existence, pour ensuite dire qu'elles n'étaient pas complétées puis, finalement, refuser de les rendre publiques? Je pense qu'il serait utile, M. le Président, et je le demande au premier ministre: Est-ce qu'il pourrait lever l'embargo sur ces études et permettre à la commission qui étudie l'accession du Québec à la souveraineté de pouvoir les examiner?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, pour ce qui a trait à la commission sur l'accession à la souveraineté, c'est évident que les conclusions ou le rapport de cette commission, ce sera un élément déterminant. D'ailleurs, ça fait partie d'un des aspects fondamentaux de la loi 150, comme le signalait le ministre responsable, il y a quelques instants.

Pour l'intégration des fonctionnaires, il y a la question qui est posée par le chef de l'Opposition, mais il y a également toute la logique qu'il avait exprimée lui-même: c'est qu'il fallait réaliser la souveraineté, entre autres raisons pour éliminer les chevauchements. Et, du même coup, il dit que tous les fonctionnaires qui travaillent au gouvernement fédéral seront intégrés en totalité dans l'administration québécoise. Alors, ça, c'est toujours la même logique pé-quiste que nous retrouvons: II ne faut pas de chevauchement, mais il faut intégrer tout le monde. Je signale ça en passant. C'est comme la question monétaire: le député de Lévis parle du dollar américain et son chef parle du dollar canadien.

Des voix: Ha, ha, ha! M. Bourassa: C'est vrai.

Le Président: Je vais demander la collaboration, s'il vous plaît. S'il vous plaît! En conclusion, M. le premier ministre, s'il vous plaît. S'il vous plaît!

Donc, en conclusion, M. le premier ministre.

M. Bourassa: Trois théories monétaires à votre gauche.

M. le Président, ce que je dis, c'est que nous allons - j'en ai discuté avec le secrétaire général du gouvernement de manière à accélérer la finalisation des études, pour voir que ça soit présenté... Le chef de l'Opposition s'agite à ce que je lui dis. J'ai communiqué avec le secrétaire général du gouvernement de manière à ce qu'on puisse rendre publiques les études ou les conclusions dans la mesure où l'intérêt public le justifie. Alors, je lui demande... Je suppose d'abord qu'il... Il devrait y avoir une interpellation dans un proche avenir...

Le Président: S'il vous plaît!

M. Bourassa: ...de la part de l'Opposition sur toutes ces questions. Il était plus pressé de faire des interpellations à l'automne qu'il ne l'est ce printemps. Alors, probablement qu'au moment opportun il y aura une interpellation du chef de l'Opposition. On pourra s'entendre sur les dates et on pourra discuter plus à fond de toutes ces questions à la fois.

Le Président: En question complémentaire.

M. Parizeau: Au milieu de toutes les incidentes du premier ministre, est-ce que je comprends bien le premier ministre quand il dit que les études, qui ont été faites à la demande du secrétaire du Conseil exécutif quant à l'intégration des programmes fédéraux et des fonctionnaires fédéraux dans le cadre québécois, vont être mises à la disposition de la commission? Est-ce que c'est ça qu'il a dit à travers l'espèce de déluge verbal que nous avons entendu?

Le Président: M. le premier ministre. (14 h 20)

M. Bourassa: Déluge verbal ou cassette ou quoi que ce soit, j'ai énoncé des choses très claires. Je me suis référé à une déclaration du député de Lévis la semaine dernière, jeudi dernier, je me suis référé aux prises de l'Opposition du chef de l'Opposition - il y en a d'autres qui viennent de s'ajouter - je me suis référé à une procédure de l'Assemblée nationale, l'interpellation, et là, on insulte maintenant le processus parlementaire en disant que c'est un déluge verbal. Alors, ce que je veux dire au chef de l'Opposition, c'est que je vais en discuter avec le secrétaire général et le ministre responsable des affaires canadiennes, comme il a lui-même répondu... Il a lui-même répondu à cette question-là alors que le député de Lac-Saint-Jean lui posait cette question. Alors, je réponds à la même question à laquelle a répondu le ministre responsable à la commission parlementaire sur l'accession à la souveraineté. Et je réfère le chef de l'Opposition à des réponses qui ont déjà été

données, sauf que le calendrier se resserre.

Le Président: Toujours en question complémentaire.

M. Parizeau: M. le Président, qu'est-ce qu'il veut dire, le premier ministre, exactement? Est-ce que les études vont être mises à la disposition de la commission ou si elles ne le seront pas? Oui ou non? Est-ce que la commission va pouvoir examiner ces études en temps utile pour remettre son rapport au début du mois de mai?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, j'ai répondu tantôt que...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourassa: Si le chef de l'Opposition écoute attentivement ce que je dis, c'est que nous rendrons disponible ce qui est dans l'intérêt public, il me semble que c'est ce qu'avait dit...

Une voix: La censure!

Le Président: S'il vous plaît!

M. Bourassa: Non, ce n'est pas la censure, M. le Président. Nous sommes à négocier...

Le Président: J'apprécierais, si quelque député que ce soit avait un commentaire a faire, qu'il le fasse sous forme de question. Je vous reconnaîtrai, M. le député. Si vous avez une question, ça me fera plaisir de vous reconnaître. M. le premier ministre, pour la conclusion.

M. Bourassa: M. le Président, la question des chevauchements est fondamentale. C'est l'un des arguments. On le sait, c'est l'un des arguments qui est présenté par les partisans de la souveraineté. On n'invoque pas la...

Une voix:...

Le Président: M. le député de Lévis, s'il vous plaît! Je vous rappelle à l'ordre une première fois. Je voudrais simplement que vous vous conformiez à la directive que j'ai donnée tantôt. Très bien. Alors, M. le premier ministre, vous avez la parole.

M. Garon: M. le Président.

Le Président: Vous avez une question de règlement?

Une voix: En vertu du règlement.

Le Président: Question de règlement. Je vous écoute.

M. Garon: C'est en vertu de notre règlement. C'est une période de questions et réponses.

Le Président: Vous savez fort bien, M. le député de Lévis, que votre dernière intervention est non conforme au règlement. C'est spécifique au règlement.

Une voix:...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, j'avais peut-être un peu provoqué le député de Lévis; il faut comprendre un peu sa réaction. Ce que je veux dire, c'est que les chevauchements sont un des arguments qui sont invoqués par les partisans de la souveraineté. On n'invoque plus l'union économique pour faire l'indépendance, on n'invoque pas la sécurité culturelle parce qu'on l'a, on n'invoque pas les symboles internationaux parce qu'on les possède en très bonne partie, donc, on invoque les chevauchements. Il faut faire la souveraineté pour les chevauchements.

Alors, ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est qu'il y a eu des études qui ont été faites par les différents ministères sur la question de l'intégration des fonctionnaires. J'ai l'intention de rencontrer M. Beaudry prochainement, qui a fait un excellent travail à cet égard-là, et je dis, en terminant, que nous allons examiner ça, comme l'a dit le ministre responsable, et que nous rendrons public ce qui est dans l'intérêt du débat et dans l'intérêt public, en ayant toujours le sens de l'État et non pas l'intérêt partisan pour nous guider.

Le Président: Toujours en question complémentaire.

M. Parizeau: Quand le premier ministre a-t-il l'intention de trancher sur l'intérêt public? Compte tenu du fait que la commission doit présenter son rapport le 1er mai, est-ce que le premier ministre envisage de réfléchir sur l'intérêt public pendant une semaine, un mois ou un an? Combien de temps ça peut lui prendre pour trancher sur l'intérêt public, M. le Président?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, tantôt, le ministre responsable des affaires canadiennes, celui qui représente le gouvernement à la commission, a dit que nous étions pour respecter l'échéancier de la loi. Si le député de Lac-Saint-Jean veut me poser une question, je n'ai pas d'objection. Alors, on a dit qu'on était pour respecter l'échéancier de la loi 150. Il me semble que c'est clair. On l'a dit. On rapporte que le chef de l'Opposition a dit: On pourrait attendre

un an ou deux ans. Je ne sais pas si c'est vrai. Il pourra probablement rectifier ça tantôt, mais le ministre a dit que nous étions pour respecter la loi 150. Donc, ça devrait le rassurer là-dessus. Le ministre vient de le dire.

Le Président: En question principale, M. le leader de l'Opposition.

Nomination de M. Billy Diamond à titre

de représentant du gouvernement au comité

d'évaluation environnementale de Grande-Baleine

M. Chevrette: M. le Président, on sait que la ministre de l'Énergie, avec le caractère et la fougue qu'on lui connaît, n'a pas mâché ses mots, hier, à l'endroit des Américains et de leur attitude par rapport aux contrats d'exportation d'Hydro-Québec. Elle s'en est prise plus particulièrement au lobby amérindien auquel elle impute la responsabilité de cette nouvelle tuile sur la tête d'Hydro-Québec. Elle a dit, et je la cite, M. le Président: «Assez, c'est assez. C'est inacceptable, pour des Québécois, de voir leur situation économique être mise en danger par les autochtones.» Et elle continue: «Nous ne pouvons pas accepter que les autochtones continuent à dénigrer le Québec et aux États-Unis et en Europe.»

Je voudrais demander à la vice-première ministre et à Mme la ministre de l'Énergie, qui incarne le même personnage, comment elle peut concilier ses propos d'hier - je suppose qu'elle reflète l'idée du Conseil des ministres - avec la décision en douce, la semaine dernière, de nommer M. Billy Diamond non seulement comme président du comité, mais comme représentant du gouvernement du Québec au sein du comité d'évaluation environnementale de Grande-Baleine?

Le Président: Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.

Mme Bacon: D'abord, M. le Président, j'aimerais dire au leader de l'Opposition que les qualificatifs qu'il m'accorde aujourd'hui, il ne les dirait pas à des collègues masculins. Peut-être que le double standard, on pourrait s'en passer dans cette Chambre, M. le Président, et, une fois pour toutes, nous accepter tels que nous sommes.

M. le Président, c'est vrai, hier, j'ai sonné la fin de la récréation. Et c'était ça mon but, hier, M. le Président. Nous avions eu des négociations en juin dernier avec le Grand Conseil des Cris, les chefs de bande du Grand Conseil et le chef du Grand Conseil, et nous avons aussi depuis essayé et multiplié les tentatives de reprendre les négociations avec eux puisqu'ils n'avaient pas donné suite à notre demande. Il y a eu des échanges de lettres avec eux depuis. Nous tentons de les ramener. C'est pour ça que j'ai sonné la fin de la récréation. Qu'ils cessent de se promener à travers le monde, qu'ils s'assoient à une table, qu'ils négocient avec nous.

Quant à la nomination de M. Billy Diamond, il y a l'alternance qui se fait. Si le leader de l'Opposition vérifiait un peu comment fonctionnent les tables sur les audiences publiques, il verrait qu'il y a des alternances qui se font dans les présidences. Je suis certaine que mon collègue, le ministre de l'Environnement, se fera un plaisir de compléter ma réponse et de lui expliquer en long et en large le pourquoi de la nomination de M. Diamond, M. le Président.

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président: Je vais reconnaître une question additionnelle à ce moment-ci. M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: ...je pensais que ça ferait plaisir à Mme la ministre que de lui dire qu'elle avait du caractère et de la fougue, mais je les retire, je pense. Voyant que ça lui déplaît, je les retire. C'étaient des compliments que je lui faisais, M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Donc, M. le Président, je voudrais demander à Mme la ministre de l'Énergie s'il n'est pas exact qu'en vertu de l'article 22.5.8 de la Convention de la Baie James il y a alternance effectivement et c'est parce qu'on sait qu'il y a alternance et que M. Billy Diamond finissait son mandat à la présidence que, pour contourner l'alternance, vous avez décidé de faire de M. Billy Diamond un représentant du gouvernement du Québec alors que M. Diamond siège sur ce comité à titre de représentant de la communauté des Cris?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Bacon: M. le Président, je voudrais dire au leader de l'Opposition que les ponts ne sont pas rompus avec les Cris. Nous avons au cours de cette année continué à négocier avec eux certaines ententes et nous en avons une qui est sur le point de se terminer avec un chef de bande et les gens de son village, M. le Président. Quant à la nomination de M. Billy Diamond, c'est un objectif de continuité qui a fait en sorte qu'on a nommé M. Diamond et je suis certaine que mon collègue de l'Environnement va se faire un plaisir de continuer et de compléter ma réponse, M. le Président.

Le Président: M. le ministre de l'Environnement. (14 h 30)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, dans le but d'ajouter aux propos de Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources

et d'éclairer le député de Joliette et cette Chambre, le processus d'évaluation environnementale au sud du 55e parallèle, en territoire cri, est commencé depuis plus de quatre mois maintenant. Le 1er avril est une date où l'alternance doit jouer sur les présidences de comités, vous avez raison de le souligner. Le gouvernement du Québec avait le choix de prendre le risque de changer le président au milieu du processus, donnant ouverture à de possibles attaques devant les tribunaux ou, possiblement, ralentissant le processus d'évaluation environnementale. Ce que le gouvernement du Québec a décidé de faire, c'est de ne pas prendre de chances sur le plan juridique et de continuer à maintenir un rythme accéléré d'évaluation environnementale. Pour ce faire, il a convenu avec les Cris que le chef Billy Diamond continuerait à présider le comité comme représentant du gouvernement du Québec et que les Cris accepteraient, en contrepartie, de nommer un fonctionnaire du gouvernement du Québec comme représentant des Cris. M. le Président, cela résume la position du gouvernement du Québec dans ce dossier.

Le Président: En question principale, M. le député de Salaberry-Soulanges.

Changements dans les formulaires d'impôt du Québec

M. Marcil: M. le Président, ma question porte sur la déclaration de revenus pour l'impôt. Or, certaines allusions ont été faites récemment en cette Chambre à l'effet que des personnes de moins de 60 ans ne pouvaient réclamer, à titre de revenu de retraite, leur déduction de 1000 $ puisqu'il n'y aurait aucun renseignement à cet égard dans le guide d'impôt ou dans le formulaire de 1990. Ma question, M. le Président, s'adresse au ministre du Revenu: Est-ce qu'il peut nous dire si la disparition, dans les guides de 1990 et 1991, de la grille de calcul C pour les montants de revenus de retraite peut effectivement avoir fait perdre des centaines de milliers de dollars aux contribuables québécois?

Le Président: M. le ministre du Revenu.

M. Savoie: Merci, M. le député. Effectivement, suite à des déclarations hier soir, après 18 h 30, ici, il pourrait y avoir certains contribuables qui sentent une certaine confusion au sujet de certaines allégations et il faut faire le point pour éviter toute confusion, M. le Président. En 1989, effectivement, il y avait trois grilles: la grille A, la grille B et la grille C. En 1990, la grille B et la grille C ont été fusionnées pour ne faire qu'une grille, la grille B. Le ministère du Revenu, afin de s'assurer que tous les contribuables puissent bénéficier pleinement de la déduction, a vérifié chacune des déclarations d'impôt...

Le Président: Un instant, s'il vous plaît. Je vais demander à tout le monde, s'il vous plaît, de collaborer. À l'ordre! Mmes, MM. les députés, s'il vous plaît. Alors, M. le ministre.

M. Savoie: Merci, M. le Président. Effectivement, pour s'assurer qu'il n'y ait pas eu d'erreurs en 1990, chacune des déclarations d'impôt utilisant la grille B a été vérifiée et, en conséquence, là où il y avait prise de déduction, c'a été ratifié et où il y a eu erreur, c'a été corrigé de façon à ce que, pour les contribuables québécois, il n'y ait aucune perte de déduction admissible. Et, en conséquence, pour le revenu du gouvernement du Québec les pertes sont de zéro sou.

M. le Président, je pense qu'il faudrait tenir compte du fait que, pour ce qui est de l'ensemble de cette déclaration, il y avait, comme nous l'avons mentionné hier, une entrée de ligne, la ligne 374, qui permettait d'aller chercher la déduction. Troisièmement, je pense que ce qui est plus significatif, M. le Président, c'est qu'en tout temps nous cherchons...

Le Président: En conclusion, M. le ministre, s'il vous plaît.

M. Savoie: ...à nous assurer, au ministère du Revenu, chaque fois qu'il y a modification à un formulaire ou à une grille, que le ministère du Revenu fasse ses vérifications pour s'assurer que tous les contribuables puissent aller chercher leur déduction.

Le Président: En question complémentaire.

M. Marcil: Merci, M. le Président. Est-ce que le ministre du Revenu peut nous dire quel contribuable québécois aurait pu se tromper en utilisant par erreur la déclaration simplifiée et, s'il avait le droit de réclamer des déductions pour le remboursement à l'égard des allocations familiales fédérales, que peut-il faire si c'est le cas?

Le Président: M. le ministre. M. Savoie: Au niveau...

Le Président: Un instant. Je vais demander encore une fois la collaboration des deux côtés de la Chambre. Ceux et celles qui sont intéressés à discuter, je vous invite simplement à le faire à l'extérieur de l'Assemblée. S'il vous plaît. Ça inclut tout le monde. M. le ministre.

M. Savoie: M. le Président, il s'agit de moins de la moitié de 1 % de la population du Québec qui avait droit à la déduction à la ligne 222, c'est pour ça qu'elle ne se trouvait pas dans le formulaire simplifié et c'est pour ça que ça se trouvait dans le formulaire détaillé. Si, effec-

tivement, on n'a pas pu lire le guide avant d'utiliser le formulaire simplifié, à ce moment-là, il ne s'agit que d'appeler au ministère du Revenu et d'aller chercher les formulaires permettant un amendement à son rapport d'impôt. À cet effet, M. le Président, j'aimerais déposer les documents qui pourraient clarifier les deux questions qui m'ont été soumises.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement au dépôt des documents...

M. Chevrette: Oui.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: J'aurais une question: Est-ce que vous pourriez déposer également ce que vous vous étiez engagé, hier, à déposer, pour clarifier le tout? On a relevé les textes, nous autres, et il a bel et bien dit ce qui...

Le Président: Alors, est-ce que vous... M. le ministre, oui.

M. Savoie: Oui. On a vérifié. Effectivement, on a pris contact avec le président et on ne peut pas déposer des galées à l'Assemblée nationale puisque c'est déjà une matière publique.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement au dépôt de ces documents?

Des voix: Oui.

Le Président: Consentement. Les documents sont donc déposés. En question principale, Mme la députée de Chicoutimi.

Reconduction du décret des travailleurs de l'industrie du verre plat

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le Président, depuis trois ans, le Comité paritaire du verre plat réclame la réouverture du décret et l'application des deux conventions collectives depuis lors signées. Dans le contexte économique actuel difficile pour certaines industries qui attendent toujours du gouvernement un plan de relance économique, certaines d'entre elles connaissent malgré tout, et malgré vous, je dirais, une croissance qui rassure. L'industrie du verre plat, c'est 8000 travailleurs, c'est près de 1000 entreprises, c'est une industrie compétitive qui a accru sa part du marché canadien de quelque 10 % depuis 1981 et, chose étonnante, cette industrie n'a pas connu de conflit de travail depuis 15 ans. L'inertie des trois ministres du Travail qui se sont succédé menace la stabilité de cette industrie. Ma question s'adresse au ministre du Travail: Qu'est-ce que le ministre du Travail attend pour signer et reconduire le décret du verre plat, tel que le demandent à l'unanimité les entrepreneurs et les syndiqués?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Cherry: Merci, M. le Président. Je remercie ma collègue de sa question, c'est d'actualité. J'ai reçu une délégation, ce matin, qui est venue me remettre une pétition concernant le sujet qui est traité. Dans un premier temps, et je pense qu'il est important de replacer les choses dans leur contexte, le 9 octobre 1991, il y a eu prépublication. Le délai légal, comme le veut la loi, 45 jours, se terminait le 25 novembre 1991. Il y a eu des objections, les objections viennent de gens qui s'occupent des unités scellées à l'intérieur de la fenêtre, dans le domaine de la fenestration. Et je tiens à rappeler à la députée de Chicoutimi, dans un premier temps, que, comme dans le décret du verre plat, ils sont syndiqués pour au-delà de 90 % et la signature du décret ne modifierait en rien leurs conditions salariales puisqu'ils gagnent tous au-delà de ce qui est inscrit dans le décret. Ça, c'est dans un premier temps.

Dans un deuxième temps, et pour l'information toujours de la députée de Chicoutimi, durant l'intersession, j'ai visité une douzaine d'industries, tant du verre plat que du bois ouvré, pour me familiariser avec l'ensemble du problème de ce secteur. J'ai convoqué les parties à une première réunion au mois de février dernier et on s'apprête prochainement à les reconvoquer pour chercher une solution permanente dans le secteur de la fenestration pour le mieux-être de l'ensemble de ce secteur d'activité économique extrêmement important au Québec.

Le Président: En question complémentaire.

Mme Blackburn: oui, m. le président. je veux bien reconnaître le zèle du ministre du travail; cependant, ça fait trois ans que le dossier traîne. c'est une industrie, comme le reconnaît le ministre, qui va bien. alors, veut-il me dire quel intérêt il défend quand il est en train de la saboter?

Des voix: Oh! Ohl Oh!

Le Président: M. le ministre.

M. Cherry: M. le Président, pour aider ma collègue de Chicoutimi à bien comprendre l'ensemble de ce problème-là, comme c'est la première fois qu'elle me pose une question dans ce dossier, je veux simplement, pour l'aider, lui décrire le comportement des individus dans ce dossier, pour qui, parfois, il est plus important de faire de la personnalité que de se préoccuper du mieux-être de l'ensemble de l'industrie. Lorsque j'ai convoqué les parties en février et qu'elles sont arrivées quelques minutes avant

l'heure prévue de la réunion, elles demandaient des salles d'attente séparées, tellement elles ne voulaient même pas se saluer de façon accessible, civilisée entre elles. Et ça, c'est la dimension du problème que j'ai, mais je passe au-delà de ça pour me préoccuper de l'ensemble du secteur de l'activité économique et on va trouver ensemble, avec les vrais intervenants, au-delà des personnalités, une solution permanente dans un secteur extrêmement important pour l'économie québécoise.

Le Président: En question principale, M. le député de Jacques-Cartier.

Position du ministre de l'Éducation face aux recommandations du rapport Chambers

M. Cameron: M. le Président, ma question est pour le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française. I would like to draw the attention of the Government, and the Assembly, to an article in today's Le Devoir and I cite: «L'école anglaise crie au secours. La clientèle scolaire diminue et les écoles ferment.» It begins: «Les diplômés de langue anglaise quittent le Québec, les écoles primaires et secondaires anglophones ferment, les ressources allouées à ce réseau se sont amoindries et dispersées au fil des ans, l'immigration ne comble plus, du côté anglophone, le vide laissé par la baisse des natalités.» (14 h 40)

M. le Président, the task force on English education has provided a report, a report that gained our support and that of all the groups that presented recommendations to it, to do something for the unhappy situation of the Anglophone community in Québec, especially in the education sector. The other recommendations are the particular concern of the Minister of Education, but the crucial recommendation is the first one which argues that all children of English mother tongue should be allowed education in the English language. Will the Minister responsible for the administration of the Charter of the French language be willing to act to support such a motion, since it will be absolutely necessary as a mere minimum for the preservation of the Anglophone community in Québec?

Le Président: M. le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française.

M. Ryan: Mr. Chairman, according to my reading of the law, it would be incumbent upon the Minister of Education to submit a recommendation to Cabinet upon this first recommendation of the Chambers task force. The Member will understand that I would wish to reserve my views for expression before Cabinet in the eventuality that my colleague submit a recommendation before I make them here.

Le Président: Une question complémentaire.

M. Cameron: Will the Minister recognize the possibility that a rejection of this first recommendation will be regarded as as great an injustice by the Anglophone community as the rejection of bilingual signs?

Le Président: M. le ministre.

M. Ryan: Well, we are headed for an open debate on these matters before the end of 1993 and we will have ample time to express our views on these two themes.

Le Président: En question principale, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

Subvention à l'institut Nazareth et Louis-Braille

M. Boulerice: M. le Président, est-ce que la ministre des Affaires culturelles pourrait nous dire à qui elle a confirmé la subvention de 80 000 $ à la bibliothèque Nazareth et Louis-Braille qu'elle promettait le 26 février dernier, lors de l'étude des engagements financiers de son ministère, sous quelle forme et à quelles fins?

Le Président: Mme la ministre des Affaires culturelles.

Mme Frulla-Hébert: M. le Président, je vais profiter de la question, d'ailleurs, pour faire certaines mises au point. C'est une question que j'attendais depuis un mois, depuis la fameuse démonstration ou parade que l'institut Nazareth et Louis-Braille avait organisée - évidemment, c'était devant les caméras. Alors, la question devait être imperative et demandée tout de suite; ça fait un mois de ça. Nous, ce qu'on a fait, c'est qu'on a pris les devants. Le 20 mars, nous avons rencontré les gens de l'institut Nazareth et Louis-Braille parce qu'il faut quand même savoir qu'il n'y a aucun projet qui nous a été soumis formellement, seulement un projet soumis sous forme de pétition le 4 décembre dernier. Nous les avons rencontrés, nous leur avons dit qu'il y aurait des mesures financières mises de côté dans le prochain exercice financier, mais qu'il fallait un projet. On s'est assis ensemble et nous allons les aider à formuler ce projet de telle sorte qu'il puisse y avoir bonification à ce qu'ils reçoivent déjà.

Le Président: En question complémentaire.

M. Boulerice: Est-ce que la ministre reconnaît, puisqu'elle leur a parlé, que l'aide en fonctionnement de 80 000 $ qu'elle annonçait le 26 ne répond pas aux besoins en équipement, que la bibliothèque a besoin de 250 000 $ et non pas de 500 000 $, comme elle le disait le 26 février?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Frulla-Hébert: Premièrement, je veux quand même le répéter, au niveau du financement de l'institut Nazareth et Louis-Braille, l'aide financière totale allouée par le ministère de la Santé, c'est une aide de 7 600 000 $. De ces 7 600 000 $, il y a 250 000 $ qui sont affectés par l'administration de l'institut pour financer la bibliothèque. Est-ce qu'ils ont des besoins supplémentaires? Oui. Est-ce qu'il y aura bonification? Oui. Mais il faut quand même avoir un projet.

Nous avons offert de nous asseoir avec eux justement pour avoir ce projet écrit et complété, et, en attendant, évidemment, j'ai des sommes allouées pour l'an prochain justement pour les aider. C'est un dossier qui est complexe, c'est certain. Évidemment, nous voulons assurer le meilleur service à ces gens qui ont une particularité qui n'est pas drôle.

Le Président: Pour une question complémentaire, M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Oui, M. le Président. Au ministre responsable de l'Office des personnes handicapées: Qu'est-ce qu'il compte faire pour aider sa collègue des Affaires culturelles à ramasser le plein montant auquel les personnes qui ont un handicap visuel ont droit pour faire fonctionner la bibliothèque Louis-Braille? Lui, qui peut ramasser facilement 600 000 $ pour lancer une politique de santé dans son comté, est-ce qu'il pourrait trouver le tiers de ce montant-là pour aider les personnes handicapées visuellement?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je passerai sous silence la partie partisane du député. Qu'il vive avec, comme moi, je vivrai avec les miennes. C'est le genre de choses dont on n'a pas besoin dans un débat aussi noble que celui-là.

M. le Président, oui, effectivement, j'ai même eu l'opportunité de visiter l'institut Nazareth et Louis-Braille il y a quelque temps et, à mon grand étonnement, lorsque ce débat est allé sur la place publique, personne, au moment de ma visite, ne m'avait parlé de ces problèmes particuliers. On m'a parlé d'autres sortes de problèmes que nous avons réglés en collaboration avec l'institut Nazareth et Louis-Braille, mais personne, pendant toute la demi-journée que j'ai passée là-bas, ne m'a fait mention de ces difficultés.

En ce qui concerne l'avenir, M. le Président, nous avons formé un comité conjoint avec ma collègue; nous travaillons sur le dossier et bien sûr que le ministre responsable de l'OPHQ va aussi parler au ministre de la Santé et des

Services sociaux, avec ma collègue, pour faire en sorte qu'on trouve une solution à ce problème.

Le Président: Alors, en question principale, Mme la députée de Taillon.

Accessibilité aux concours de l'Office des ressources humaines

Mme Marois: Merci, M. le Président. Dans la foulée du rapport Poulin qui proposait de fermer les écoles en janvier, il semble qu'une nouvelle méthode de gestion veuille s'instaurer à l'Office des ressources humaines. En effet, on semblerait vouloir limiter l'accessibilité aux concours visant à pourvoir, évidemment, les rares postes qui s'ouvrent à la fonction publique québécoise. On veut implanter un ticket modérateur et on songe même à une nouvelle méthode de sélection qui serait une «loto-emploi», à toutes fins pratiques. Pis encore, on constate que la qualité semble coûter cher, selon ce que dit l'Office, et, au moment où toute l'action gouvernementale devrait porter justement sur la qualité totale dont fait tant état le gouvernement, c'est un peu inquiétant d'entendre de tels propos. Alors, j'aimerais savoir, M. le Président, du ministre responsable de l'Office et de l'administration, s'il est prêt à désapprouver dès maintenant ce type de propos et ce type d'action qui est proposé par l'Office des ressources humaines?

Le Président: M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique.

M. Johnson: Oui, M. le Président. Je déplore le pâté chinois que vient de nous servir la députée, au titre des engagements que nous avons à respecter.

Des voix:... M.Johnson: Ah!

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Bon! Je cède la parole à M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique. (14 h 50)

M. Johnson: M. le Président, ce que la députée nous rapporte est un ramassis d'impressions, d'une part, et de mauvaises interprétations de ce que j'ai moi-même entendu, d'autre part. Ce que nous visons à faire, c'est nous assurer que, pour des emplois qui sont à vocation qu'on appelle interministérielle, qui ne requièrent pas des spécialités pointues, nous puissions, comme gouvernement administrant les fonds publics, trouver une formule qui soit équitable, donc qui donne la même chance à tous les Québécois d'accéder à un emploi comme le requiert la Loi sur la fonction publique et qui, en même temps, ne nous condamne pas à dépenser - corn-

me nous l'avons fait pour 130 postes récemment - 600 000 $, 4300 $ par poste, au titre de l'examen exhaustif de 32 000 candidatures à des postes de contrôleur routier, lorsqu'on cherchait 130 candidats.

L'Office des ressources humaines, M. le Président, est en train d'élaborer un projet qui vise à respecter la règle d'équité d'accès à la fonction publique et qui permet incidemment au ministre ou à l'Office des ressources humaines - éventuellement, il ne s'agit que d'un projet - de déterminer dans l'échantillonnage une surreprésentation de groupes cibles, comme les femmes ou les handicapés, afin de leur donner une meilleure chance d'accès à certains emplois. Il m'apparaît qu'il n'y a pas que des désavantages, il y a beaucoup d'avantages à considérer un projet comme celui-là, mais la décision reste à venir.

Le Président: Pour une question additionnelle, Mme la députée de Taillon.

Mme Marois: D'abord, est-ce que le ministre ne conviendra pas avec moi, s'il a entendu le même reportage que, moi, j'ai entendu, qu'effectivement on parlait de la question de la qualité sur laquelle on croyait qu'il y avait trop d'investissements qui étaient faits? Donc, à cet égard-là, il ne s'agit pas d'un salmigondis, M. le Président. Est-ce que le ministre est en train de nous dire qu'il serait d'accord avec les politiques de l'Office, soit en matière de ticket modérateur ou, effectivement en matière de choix, au hasard, essentiellement, M. le Président? Parce que c'est ça dont on parie quand on parle d'une loto, à moins que je ne comprenne pas les principes d'une loto, M. le Président. Alors, il me dit qu'il est d'accord avec cela, M. le Président. C'est ce qu'il me dit.

Le Président: En réponse, s'il vous plaît. M. Johnson: M. le Président...

Le Président: Un instant! S'il vous plaît! Alors, pour la réponse, M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, on a évoqué deux éléments de la part de l'Office des ressources humaines. D'abord, on a mentionné les mots «ticket modérateur» et on a ajouté les mots «c'est inacceptable». Je souscris à cette approche. Il n'a jamais été question de ticket modérateur et la députée fait de la démagogie à vouloir ressortir...

Des voix: Bravo!

M. Johnson: deuxièmement, s'il s'agissait d'une loterie, on pigerait au hasard dans les bottins téléphoniques le nom de candidats éventuels. ce n'est pas ce qui est en cause. ce qui est en cause, c'est la suggestion qui est faite et à l'égard de laquelle j'ai demandé qu'on s'assure de l'équité, respecter afin que tout le monde ait la même chance d'accéder à des emplois dans la fonction publique. C'est la constitution de façon scientifique, acceptée par la Commission de la fonction publique, d'un échantillonnage qui permet de répartir de façon correcte la source des candidatures afin, notamment - et je le répète parce que c'est important - de s'assurer qu'il y ait une représentation des groupes cibles de nos programmes d'accès à l'égalité qui véritablement reproduit leur proportion dans la population et nous permet d'atteindre des niveaux d'embauché de ces groupes cibles, comme les femmes, les handicapés et les communautés culturelles, qui sont les cibles gouvernementales et des programmes que nous avons l'intention d'atteindre.

Le Président: C'est la fin de la période régulière de questions. Maintenant, Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources m'avise qu'elle pourrait donner les réponses en différé aux questions posées par le leader de l'Opposition, hier. Puisque je n'ai pas reçu d'avis écrit en ce sens-là, est-ce qu'il y a consentement à une réponse différée?

M. Chevrette: Consentement. Le Président: Consentement? M. Chevrette: Oui.

Le Président: Donc, vous avez la parole, Mme la ministre.

Réponse différée

Projet de loi américain pour empêcher des obligations d'Hydro-Québec

Mme Bacon: Merci, M. le Président. Tel que je l'avais dit, hier, au leader de l'Opposition, je m'apprête à lui donner quatre réponses à autant de questions qu'il avait. La première, il demandait, par rapport au projet de loi du Massachusetts, si le projet de loi nommait Hydro-Québec. Le texte du projet de loi mentionne nommément Hydro-Québec, et je peux peut-être juste vous lire l'endroit où c'est mentionné. On dit: «After January 11, 1992, no public pension funds under the subsection shall remain invested in the stock securities or other obligations of Hydro-Québec, James Bay Development Corporation, James Bay Energy Corporation, or any other subsidiaries or affiliates».

Dans la deuxième question, le député me demandait si nous avions pris toutes les précautions nécessaires ou si nous devions rencontrer le gouverneur de l'État du Massachusetts. Je complète en disant que M. Guy Leblanc, qui est

notre délégué intérimaire à Boston, a écrit une lettre en date du 18 mars, qui était adressée aux parlementaires de l'État du Massachusetts, et je dois dire aussi qu'Hydro-Québec a recours, en ce moment, aux services d'une firme américaine de lobbying qui fait le suivi des projets de loi et qui conseille Hydro-Québec à ce sujet. HydroQuébec était présente le 24 mars dernier lors des audiences publiques sur les quatre projets de loi relativement à l'hydroélectricité.

La troisième question. Le député me demandait si j'avais fait des démarches élémentaires pour vérifier la portion de la dette d'Hydro-Québec qui est détenue par les fonds de pension. Alors, le volume des titres d'Hydro-Québec détenus dans le Massachusetts est très faible et se situe autour de 20 000 000 $, et pas plus que ça.

Dans la quatrième question, le député me demandait si nous avions un plan d'action pour que ça cesse, pour éviter de se faire charrier, comme il le disait lui-même. Alors, Hydro-Québec maintient des liens très étroits au niveau de l'information des maisons de courtage qui traitent des obligations. Et, en ce moment, il n'y a aucune fluctuation des prix et du volume des obligations d'Hydro-Québec. Donc, il ne doit pas y en avoir non plus. C'est pourquoi, oui, nous avons un plan d'action, mais nous avons, avant tout, un souci d'efficacité dans ce plan d'action. Et pour cette raison, je pense que révéler toute notre stratégie sur la place publique ferait en sorte de nous empêcher de mettre ce plan d'action en marche et ne servirait certainement pas les intérêts du Québec.

Dans cet objectif d'efficacité, nous sommes donc en mesure d'assurer le député et la population, par son intermédiaire, de notre détermination à défendre l'image du Québec d'une façon calme, sereine et efficace.

Une voix: Bravo!

Le Président: Tel que le prévoit le règlement, pour une question complémentaire.

M. Chevrette: M. le Président, dans un premier temps, vous me permettrez de remercier... J'ai reçu effectivement les projets de loi ce matin. Je voudrais demander à la ministre la question additionnelle suivante: Étant donné que ça se situe maintenant au niveau politique, parce que les projets de loi qui sont ainsi déposés constituent un message politique de la part des Américains, indépendamment du fait que ces projets de loi soient pilotés par des députés qui seront en élection, d'après ce que j'ai pu comprendre, en novembre prochain, et qui cherchent certaines tribunes pour répondre à certains courants, à partir de ce moment-là, est-ce qu'au niveau du plan d'action, sans en révéler les grandes lignes, il y a une action d'information soutenue et directe en regard des contrats ou des projets d'Hydro-Québec et de son plan de développement?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Bacon: Oui, c'est évident, M. le Président, que nous allons compléter l'information s'il y a des gens qui en ont encore besoin. On avait l'impression que nous avions suffisamment informé les différents États américains qui sont plus près de nous. Je dois dire que ce dépôt de projets de loi ressemble de plus en plus peut-être à un épisode - on en a connu plusieurs au cours des derniers mois - d'un vaste processus qui est bien planifié, qui est bien organisé et qui est un épisode de plus dans le dénigrement du Québec. Et c'est dans ce sens-là que notre action va être suivie.

Le Président: Alors, c'est la fin de la période de questions.

Il n'y a pas de votes reportés.

Aux motions sans préavis, M. le ministre des Affaires internationales. Un instant, M. le ministre. Je vais requérir la collaboration de tous les collègues.

S'il vous plaît! Pour une motion sans préavis, M. le ministre des Affaires internationales.

Motions sans préavis

Souligner la victoire du président Frederik De Klerk pour mettre fin à l'apartheid en Afrique du Sud

M. Ciaccia: M. le Président, je propose que l'Assemblée nationale souligne la victoire du président Frederik De Klerk et félicite la population pour l'appui accordé au processus de réforme devant conduire à l'abolition effective de l'apartheid en Afrique du Sud.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre cette motion?

Une voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Consentement. Allez-y, M. le ministre. (15 heures)

M. John Ciaccia

M. Ciaccia: M. le Président, les travaux parlementaires, la semaine dernière, ne m'ont pas permis de présenter cette motion. Cependant, l'événement mérite d'être souligné et je la présente aujourd'hui.

M. le Président, en obtenant un vote fortement majoritaire de 68,7 % à son référendum du 17 mars dernier, le président De Klerk a

obtenu un mandat net de son électorat blanc pour, comme il l'a si bien dit lui-même, mettre fin à l'apartheid dans son pays et ouvrir ainsi les portes du pouvoir aux Noirs de l'Afrique du Sud.

Le Québec souligne ces résultats spectaculaires et est heureux de constater que le processus démocratique en Afrique du Sud est engagé de façon définitive. Je demande aujourd'hui à l'Assemblée nationale de souligner cet acte courageux de M. De Klerk et le leadership qu'il a su exercer dans le processus de réforme politique en Afrique du Sud. La victoire du président De Klerk n'est pas sans nous rappeler la lutte de tous les instants que nous devons mener, ici comme ailleurs, pour que la démocratie, les droits et les libertés des peuples soient respectés.

Le Québec, tout comme le Canada, avait adopté, en 1986, un certain nombre de mesures politiques et économiques pour sanctionner la politique d'apartheid de l'Afrique du Sud. Tout comme nous avons vigoureusement réagi alors pour dénoncer cette politique, nous devons aujourd'hui nous réjouir des résultats historiques enregistrés par le président De Klerk au dernier référendum. J'aimerais souligner le courage politique du président qui, malgré une opposition des plus vives, a toujours maintenu la voie des réformes et des changements démocratiques qu'il avait lui-même dictée à la population de l'Afrique du Sud. Or, l'histoire a démontré à maintes reprises que c'est justement le genre de courage politique dont a fait preuve le président De Klerk qui élève un homme public au statut d'homme d'État.

L'arrivée au pouvoir du président Frederik De Klerk, en septembre 1989, a marqué la fin d'une époque, l'apartheid pur et dur, et le début d'un temps nouveau pour la majorité noire de l'Afrique du Sud. Elle a marqué la libération de certains des prisonniers politiques, dont Nelson Mandela, aujourd'hui président du Congrès national africain, l'ANC, la reconnaissance de partis politiques jusque-là interdits, l'abolition, en juin 1991, des grandes lois de l'apartheid, le début des négociations entre le gouvernement de Pretoria et les dirigeants de la majorité noire devant conduire à l'abolition effective de l'apartheid et à l'entrée des Noirs au gouvernement.

La politique d'ouverture du président De Klerk à l'égard de la majorité noire a eu des conséquences immédiates. À l'interne, les partis d'extrême droite, dont le Parti conservateur, s'opposent farouchement à tout changement politique et entretiennent, par leurs actions, les violences qui frappent l'Afrique du Sud. Ils ont mené et ils ont même réussi à forcer le président à organiser, le 17 mars, un référendum réservé à la population blanche sur sa politique de démocratisation. Presque 70 % d'entre eux ont appuyé le président et rejeté l'apartheid.

Au plan international, nombre de pays, dont plusieurs d'Europe et de l'Est, ont rétabli leurs relations diplomatiques avec l'Afrique du Sud alors que plusieurs grandes puissances industrielles, dont les États-Unis et le Japon, ont décidé de lever les sanctions économiques qu'elles avaient imposées à l'Afrique du Sud, il y a quelques années.

Le Canada, pour sa part, a adopté une politique de retrait graduel des sanctions. En novembre 1991, afin de favoriser le resserrement des liens culturels, universitaires et scientifiques avec l'Afrique du Sud, Ottawa levait les sanctions touchant directement la population et autorisait les contacts entre fonctionnaires canadiens et sud-africains à l'exclusion des contacts avec les organismes militaires, de police et de renseignements.

Le 9 janvier dernier, il levait, par ailleurs, certaines restrictions à l'exportation de produits relevant de technologies de pointe - ordinateurs, logiciels, avions, hélicoptères, matériel de télécommunications, etc. - a la condition que les ventes soient d'abord approuvées et que les marchandises ne soient pas destinées aux forces armées, à la police ou aux services spéciaux d'Afrique du Sud. La levée des autres sanctions devrait normalement s'effectuer au fur et à mesure que les réformes politiques et constitutionnelles seront adoptées par le gouvernement du président De Klerk. Je souligne que la récente victoire du président est une victoire historique des valeurs fondamentales que sont la démocratie et les droits et libertés de la personne.

C'est pourquoi nous devons persévérer à promouvoir ces valeurs fondamentales auprès des différents membres de la communauté internationale. Je rappelle que le gouvernement du Québec a depuis toujours âprement défendu les valeurs démocratiques et le respect de la dignité humaine. Il a ainsi été solidaire des positions adoptées par Ottawa et visant à condamner l'apartheid en Afrique du Sud. Je signale que le gouvernement du Québec donne son appui au gouvernement du président De Klerk et exprime le souhait que la démocratisation et les changements politiques amorcés par les résultats référendaires s'effectuent sans violence et en accord avec la volonté de la population de l'Afrique du Sud, tel que clairement exprimé lors du récent référendum.

Je souligne que le gouvernement du Québec a offert trois bourses d'excellence à des ressortissants de la majorité noire d'Afrique du Sud et souhaite participer à son mieux-être. Je formule le voeu que la population blanche d'Afrique du Sud continue d'appuyer le président De Klerk dans ses efforts de démocratisation pour que les conditions politiques soient bientôt réunies pour permettre à l'Afrique du Sud de rétablir complètement ses liens politiques, économiques et socioculturels avec le Canada et le Québec et avec l'ensemble des membres de la communauté internationale, et ce, pour le bien-être de la

population de l'Afrique du Sud. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre des Affaires internationales. Sur cette même motion du ministre, je cède la parole à M. le député de Bertrand.

M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. C'est avec espoir et satisfaction que nous apprenions la victoire du président De Klerk dans un référendum où 68 % des gens, c'est-à-dire plus des deux tiers de la population blanche d'Afrique du Sud, donnaient à son président le mandat d'amorcer le démantèlement du régime de ségrégation raciale érigé en politique officielle depuis plus d'un siècle. Cette victoire mérite d'être soulignée, d'autant plus qu'elle traduit la volonté des Sud-Africains de réintégrer la communauté internationale sur une base de normalité et de respect des droits élémentaires enchâssés dans la Charte des droits humains des Nations unies.

Cette victoire s'inscrit également dans la mouvance de vent de libéralisation qui souffle présentement sur tous les continents, entraînant sur son passage l'effondrement de régimes autoritaires et dictatoriaux. Comme l'ont démontré les événements des deux dernières années en Europe de l'Est et en URSS, toute période de transition vers la démocratie authentique, respectueuse des droits individuels et collectifs, se déroule généralement dans un climat d'incertitude, d'attente et de remise en question des structures traditionnelles qui la rendent vulnérable au moindre soubresaut de mécontentement ou de déception.

Conscients de la fragilité du processus de transition en profondeur dans lequel vient de s'engager de façon irréversible, nous l'espérons, le gouvernement d'Afrique du Sud, conscients également que l'ampleur de la majorité obtenue par le président De Klerk reflète la volonté de la population blanche de rétablir des liens politiques et commerciaux normaux avec les pays industrialisés, tous les pays de la Communauté économique européenne ainsi que les États-Unis ont levé l'embargo commercial qu'ils avaient imposé à l'Afrique du Sud sur la plupart des produits pour la forcer à mettre un terme à sa politique d'apartheid.

Le message a été reçu par la population blanche eligible à voter. Les sanctions commerciales ont produit leur effet. Il importe qu'à notre tour nous recevions le message de cette population qui demande à rétablir des liens normaux avec nous. Les enjeux pour le Québec sont importants. L'Afrique du Sud est notre principal partenaire commercial sur tout le continent africain, suivi de l'Algérie. Nos échanges avec l'Afrique du Sud, et ce, malgré l'embargo, représentent 45 % de tous nos échanges avec l'Afrique. À lui seul le Québec absorbe 65 % de l'ensemble des exportations sud-africaines au Canada. Parmi les principaux secteurs concernés, on retrouve les aciéries qui, comme vous le savez, traversent une période difficile. (15 h 10)

De son côté, l'Afrique du Sud vient d'indiquer son intérêt d'intensifier ses échanges avec le Québec en élevant sa représentation à Montréal au rang de consulat général. Soyons conscients qu'il ne suffit pas d'applaudir la victoire du président De Klerk pour que le processus de démocratisation suive son cours normal, comme par enchantement.

La ségrégation raciale a laissé, en Afrique du Sud, des séquelles que seuls le temps et plusieurs générations de bonne volonté réussiront à atténuer. Elle a également creusé un fossé économique béant entre Blancs et Noirs, fossé que le gouvernement sud-africain devra entreprendre de combler dans les meilleurs délais. Les sanctions commerciales ont réussi à faire plier la population blanche. Elles ont eu également un effet dévastateur auprès de la population noire où, par endroit, le taux de chômage atteint plus de 60 %. Comme vous le savez, la stabilité politique est intimement liée à la stabilité économique. Il s'avère d'autant plus opportun, par conséquent, de mettre à la disposition du président De Klerk les moyens qui lui permettront d'établir l'équité et l'égalité de fait entre Sud-Africains, Noirs ou Blancs.

Pour ces raisons, M. le Président, l'Opposition officielle est d'avis que le gouvernement canadien devrait, à court terme, poursuivre la levée partielle des sanctions commerciales, comme l'ont fait en particulier les États-Unis, étant bien entendu qu'advenant un blocage du processus de démantèlement de l'apartheid, il sera toujours possible de rétablir les sanctions appropriées. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Bertrand. Sur cette même motion, je cède la parole à M. le député de Jacques-Cartier.

M. Neil Cameron

M. Cameron: Merci, M. le Président. We also join in celebrating the large and decisive referendum result that recently took place in South Africa and look forward to its consequences in bringing about an end to an unjust, inequitable and increasingly unworkable political system.

It is the end of a long and complicated historical process in an immensely complicated society. The South Africans were a State created out of Dutch Calvinist settlers, English colonists, Zulu, Xhosa, East Indians, European Jews, racial intermixtures of all of these, disproportions between them, radically different religions, cultures, political habits and behaviour. In a way,

a State that calls on rather remarkable qualities of statesmanship, no matter what system of government it uses.

Apartheid was an attempt to provide one of those solutions. It should be remembered that, contrary to what many people might imagine, it is not something that goes right back to the foundations of the South African State. It did not exist, for example, in the era of Jan Chris-tiaan Smuts. It was actually brought in after the Second World War in its full form, only around 1948 or 1949. That is the full system of pass cards, restrictive labour codes and all the rest of that hateful apparatus that grew worse and worse every year.

That it could be gradually brought down is certainly due partly to the statesmanship of Mr. De Klerk, who deserves all due credit, but it is perhaps important to remember some of the other reasons why apartheid came to an end. One of them is that the existing South African State, however politically unjust and however socially inequitable, was economically successful enough to provide a higher standard of living and a higher standard of education for the Black population of Africa than existed in any of the other Black African States and, in fact, to build up a large, solid, stable Black middle-class which, in turn, helped give the White population the confidence that a major political change could be engineered without chaos.

In addition to that, the collapse of the world communist system outside China had very large implications for Africa because, before that took place, most of the members of White African society looked at the African National Council not merely as an alternative political leadership, or the representative voice of the Black people of South Africa, but essentially as the possibility of being one more communist dictatorship bringing all the wonderful treats that that usually brings and, therefore, even if they were lacking in racial prejudice, somewhat slowing down their enthusiasm for a new regime.

With the collapse of support from the Soviet Union for communist movements around the world and with the increasing disintegration of similar status governments in the rest of Africa, it became more and more clear to the most sensible elements in both the White and Black population that a new set of alternatives was possible. And we all hope this can be achieved peacefully, successfully and rapidly.

It is worth remembering otherwise, I think, that referenda, anywhere, are political devices best used only when there is no other alternative. They are not, in fact, a very good means of conducting the institutions of democratic government, and I believe this can be said with some neutrality because, for instance, if we take the case of our own society of Québec and if, for the sake of argument, we have a referendum on the date that we have much discussed it, then no matter what the outcome is, if there are, let us say, some 40 % on the other side, whether it happens to be in this group or in this group, I do not think that that will bode too well for a comfortable political future for Québec or for Canada. But in our case, as in the case of Canada as a whole and as in the case of South Africa, a referendum is sometimes the only method by which effective political leaders can get past an immense tangle of institutional constraints, existing prejudices and fashionable hogwash that prevent all of us from doing what we believe to be sensible and right. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Jacques-Cartier. Sur cette même motion, je cède la parole à M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Michel Bourdon

M. Bourdon: M. le Président, l'Opposition officielle va évidemment souscrire avec plaisir à la résolution qui est devant nous parce que nous pensons que le référendum tenu en Afrique du Sud a une grande importance historique pour ce pays, puisque l'apartheid représentait l'expression étatique d'une forme de racisme patent. Il faudrait rappeler, M. le Président, que sous le régime d'apartheid, la majorité noire d'Afrique du Sud n'a pas le droit de vote, a des restrictions quant à ses déplacements dans le pays; que, dans sa forme la plus virulente, la loi d'apartheid interdisait même les mariages interraciaux et divisait les gens sur un modèle de ségrégation.

Quand je dis que cette forme de discrimination raciale était intégrée aux pratiques d'un État et était érigée en loi, je veux dire par là que c'est fondamentalement différent de nos voisins des États-Unis où il y a eu des formes de ségrégation raciale. Il y a eu des expressions de discrimination à l'endroit de la minorité noire aux États-Unis, mais ce ne sont pas des choses que l'État a jamais approuvées et intégrées à ses lois fondamentales.

M. le Président, ce référendum fait suite à une longue lutte des Noirs d'Afrique du Sud pour la reconnaissance de leurs droits civiques. Et ça a impliqué notamment l'emprisonnement pendant plus d'un quart de siècle de Nelson Mandela, du Congrès national africain, dont nous avons salué ici, en Chambre, il y a deux ans, la libération de prison, ce qui a permis l'ouverture d'un dialogue entre les représentants de la majorité noire et les représentants du gouvernement actuel d'Afrique du Sud qui, on le sait, est porté au pouvoir exclusivement par le vote des Blancs. C'est un paradoxe de l'histoire, M. le Président, qu'une minorité jouissant d'un statut inéquitable vis-à-vis de la majorité... Dans cette Chambre, comme dans tous les parlements démocratiquement élus du monde, bien sûr que nous favorisons l'idée

d'une personne, un vote, et que les gens qui doivent conduire les affaires de l'État doivent être élus au suffrage universel. En Afrique du Sud, on parlait d'un gouvernement élu par un suffrage restreint, restreint sur la base de la race, sur la base de la couleur au lieu d'appliquer le principe fondamental d'une personne, un vote. (15 h 20)

Alors, M. le Président, je pense que c'est un pas en avant qui est franchi en Afrique du Sud, parce que le paradoxe, c'est que la minorité jouissant d'une emprise démesurée sur les affaires de la collectivité d'Afrique du Sud a accepté d'elle-même, par son seul vote, de changer ce système. Maintenant, l'apartheid n'est pas complètement démantelé. M. Mandela et les autres dirigeants du Congrès national africain ont émis des réserves d'enlever complètement le boycott dont l'Afrique du Sud faisait l'objet. Je suis d'accord avec mon collègue de Bertrand pour dire que, comme un pas a été fait par la minorité blanche d'Afrique du Sud, le Canada, comme d'autres pays, devrait faire un pas pour ce qui est de l'embargo économique, mais un pas. La fin totale de l'embargo devrait venir avec la fin de l'apartheid, avec la fin de ce régime de gouvernement qui est inéquitable pour les 27 000 000 ou 28 000 000 de Noirs qui forment l'immense majorité de la population de l'Afrique du Sud.

Donc, M. le Président, nous allons voter avec plaisir pour la résolution et notez que, dans les affaires du monde, il y a parfois des bonnes choses qui arrivent et que ce référendum est une bonne nouvelle pour l'ensemble; d'abord, pour les intéressés, la majorité noire de l'Afrique du Sud, mais aussi pour l'ensemble des démocrates du monde entier.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Pointe-aux-Trembles. Est-ce que la motion du ministre des Affaires internationales qui se lit comme suit: «Que l'Assemblée nationale souligne la victoire du président Frederik De Klerk et félicite la population pour l'appui accordé au processus de réforme devant conduire à l'abolition effective de l'apartheid en Afrique du Sud», est adoptée?

M. Bélisle: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. Il n'y a pas d'autres motions sans préavis.

Avis touchant les travaux des commissions

Avis touchant les travaux des commissions, M. le leader adjoint du gouvernement. Pas d'avis?

Alors, j'ai l'avis suivant à vous fournir: Demain, le jeudi 2 avril 1992, de 9 h 30 à 12 h 30 à la salle 1.38 de l'édifice Pamphie-Le May, la Commission d'étude des questions afférentes à l'accession du Québec à la souveraineté se réunira en séance de travail.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

M. Bélisle: Aucun.

Affaires du jour Affaires prioritaires

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Nous en arrivons à l'étape des affaires du jour et aux affaires prioritaires. Nous reprenons le débat sur le discours d'ouverture prononcé par M. le premier ministre le 19 mars 1992 et sur les motions de censure de M. le chef de l'Opposition officielle, de M. le député D'Arcy-McGee, de M. le député de Jonquière, de Mme la députée de Taillon et de M. le whip de l'Opposition officielle. Je cède immédiatement la parole à M. le député de Lévis, et je lui rappelle qu'il dispose d'une période maximale de 20 minutes.

Reprise du débat sur le discours d'ouverture et sur les motions de censure

M. Jean Garon

M. Garon: Je vous remercie, M. le Président. J'ai lu et relu le discours inaugural du premier ministre, et en le lisant, j'ai eu l'impression de la politique du perce-oreille: beaucoup de petits trous qui ne servent à rien, mais quand il y en a assez, la bûche est pourrie. M. le Président, quand on lit le discours inaugural, on se rend compte qu'il n'y a pas d'orientation et qu'il n'y a pas de politique. Quand on voit, comme cet après-midi, le président du Conseil du trésor qui est président d'un organisme responsable de la fonction publique et qui vous dit que c'est épouvantable. Il y a eu un concours pour le poste de contrôleur routier - il y avait 130 postes à combler - et il y a eu 32 000 applicants. Ça donne une idée à quel point il y a des gens qui n'ont pas d'ouvrage qui sont intéressés à travailler, mais qu'il n'y a pas d'emploi pour que 32 000 personnes appliquent sur 130 postes.

On disait également aux nouvelles aujourd'hui que le gouvernement veut faire une nouvelle loterie apparemment, la «loto job», pour voir ceux qui vont avoir le droit d'appliquer sur des concours. Pourquoi pas un «gratteux», ça va être meilleur marché? Vous pourrez avoir un «gratteux», 32 000 applicants, à chacun son «gratteux». On gratte, tu appliques ou tu n'appliques pas. On est rendus dans des drôles de politiques quand on est rendus à dire, aujourd'hui, que dans la politique de concurrence dans laquelle on est en train de se demander si on ne fera pas des loteries ou des façons de faire en sorte de choisir des candidats par échantillon-

nage plutôt que de trouver les meilleurs. D'autant plus qu'en 1991, on a perdu 24 % des emplois industriels du Québec; dans une seule année, 24 % des emplois industriels du Québec.

Je me rappelle quand le président du Conseil du trésor vous parlait des emplois temporaires lors de la crise de 1981-1982, mais jamais on n'a vu une année où le Québec a perdu le quart des emplois industriels qu'on trouve dans l'ensemble du Québec. C'est une situation épouvantable. On se retrouve dans une période comme dans la période des années trente. On se retrouve devant un discours inaugural où il n'y a rien, M. le Président.

Mais, en même temps, au lieu d'avoir un gouvernement qui aide à la reprise économique, on a un gouvernement qui essaie de tuer la reprise économique avec des taxes comme on n'en a jamais eues dans l'histoire du Québec; on n'a jamais eu autant de taxes. C'est pour ça qu'il y a des comités de citoyens, de bord en bord du Québec, qui se lèvent... et ils doivent se lever, parce que dans un régime démocratique, c'est le seul langage que n'importe quel gouvernement comprend. Des citoyens qui disent: On en a assez: TPS, TVQ.

Le 1er juillet, il y aura sans doute une taxe de 8 % sur les services. On a commencé à taxer les vêtements qu'on avait détaxés sous l'ancien gouvernement, taxer les appareils ménagers, taxer les meubles, comme si c'étaient des objets de luxe, M. le Président. Ah! évidemment, apparemment, on dit que, par ailleurs, la TPS fédérale ne s'applique pas sur le caviar.

M. le Président, la reprise économique est tuée parce que les gens n'ont pas d'argent. Les gens sont inquiets, sont insécures. Les gens qui sont inquiets et qui voient leur voisin qui a perdu son emploi, qui voient le nombre d'emplois qui disparaissent, qui voient ce qui était jusqu'à maintenant les piliers de l'économie québécoise, comme les compagnies de papiers ou encore Hydro-Québec, se retrouver en difficulté, ils se disent: Peut-être mon tour peut arriver. Dans l'insécurité, les gens se protègent; ils remettent la carapace. Ils essaient de tenir le temps pendant que la tempête passe, sauf que, pendant ce temps-là, l'économie ne peut pas reprendre.

La principale cause de l'absence de reprise de l'économie, c'est le gouvernement lui-même, le gouvernement de Québec et le gouvernement d'Ottawa, les deux qui, actuellement, imposent des taxes de façon démesurée. Aussi, le navire amiral de l'inflation au Québec qu'est HydroQuébec, qui aura augmenté, s'il y a l'augmentation de 5,8 % qui est demandée pour cette année, les tarifs, dans l'espace de deux ans, de 32,9 %, 32,9 % dans l'espace de deux ans, est-ce qu'on trouve ça normal? Si l'augmentation demandée, au lieu de 5,8 %, il y a seulement 2,9 %, bien, l'augmentation aura été de 30 % sur deux ans.

Pendant ce temps-là, on va dire aux gens: Serrez-vous la ceinture; serrez-vous la ceinture.

Tu n'en as pas beaucoup, serre-toi-la encore plus. Hydro-Québec devrait être la première à donner l'exemple. Je pense qu'il ne devrait même pas y avoir d'augmentation de l'inflation. Ça devrait être 0 % d'augmentation à Hydro-Québec sur les 5,8 % qu'elle demande... Pourquoi? Parce que c'est à elle à donner l'exemple. Actuellement, les gens n'en peuvent plus au point de vue fiscal, au point de vue des taxes, parce que, que ce soit au niveau des taxes scolaires qui ont plus que doublé, il y a deux ans, que ce soit les taxes municipales qui augmentent partout cette année, que ce soit au niveau provincial, que ce soit au plan fédéral, ces augmentations assomment les citoyens.

Il n'y aura pas de reprise économique si on ne fait pas des correctifs. Je rencontrais quelqu'un tantôt qui lisait, dans la revue Fortune... pas tantôt, mais il y a quelques jours, qui me disait: C'est fantastique. À Atlanta, il y a seulement 6 % d'impôt, 6 % de taxes pour quelqu'un qui reste à Atlanta. Il y a un développement fulgurant à Atlanta. Pourquoi? Les développements se font dans des endroits où les gens ont le choix d'aller. Les gens ne sont pas condamnés à rester à tel et tel endroit.

Je vois passer le député de Chauveau qui aurait voulu couper les dépenses, mais les dépenses ne sont pas coupées davantage. On a l'impression au gouvernement qu'actuellement, on a beau ouvrir la champlure des taxes à tour de bras, le tuyau qui est dans le fond du bain, quand on ne met pas le bouchon, il peut en prendre autant que la champlure peut couler. Je ne connais pas un seul bain, M. le Président, où même la champlure au bout, le tuyau dans le fond du bain n'est pas capable de le prendre. (15 h 30)

Aujourd'hui, quand on veut commencer à mettre du ménage dans la cabane, il faut commencer, d'abord, par mettre le bouchon dans le bain. Et là, à ce moment-là, on va pouvoir remplir le bain, même en réduisant la champlure, mais il faut commencer, d'abord, par mettre le bouchon dans le fond du bain. Je ne connais pas quelqu'un qui va régler le problème de perte d'eau s'il ne met pas, d'abord, le bouchon. On va me dire: Oui, mais le gouvernement fait attention. Voyons donc! Vous n'avez qu'à regarder la nomination du nouveau président-directeur général à la Société de l'assurance automobile du Québec. Conditions de travail, conditions salariales. Regardez ça pour le fun. En plus de lui fournir l'automobile, les dépenses d'automobile plus 800 $ par mois pour le transport, frais de séjour. Regardez le contrat. C'est le contrat le plus chromé que j'ai vu dans toute l'histoire du Québec. Le contrat d'engagement d'un haut fonctionnaire le plus chromé. Pas en 1950, pas en 1975, pas en 1986 ou 1987. En 1992, M. le Président. Pourquoi? Pas parce que ça marchait au ministère des Transports. On n'a jamais eu tant de routes pleines de craques et pleines de

trous. Pendant ce temps-là, on nous parie de la qualité totale et on n'a jamais eu des routes aussi épouvantables. Promenez-vous ce soir. Vous ne verrez même pas les barres blanches, il n'y en a plus. Il y a des trous, il y a des craques et il n'y a même plus de barres blanches, de sorte que vous ne savez plus si vous êtes sur une route à deux voies ou à trois voies, à moins de passer souvent. C'est quelque chose, M. le Président.

Là, les gens nous font de l'inflation verbale: De la qualité totale, mon cher ou ma chère! La qualité totale! Au ministère des Transports, c'est un concept inconnu, impossible, ridicule même. On est rendu au quatrième projet de loi sur l'affichage le long des routes, depuis 1986. Quatrième projet de loi, deux tournées du député de Rousseau. Dans une de ses tournées, il a fait 22 villes pour savoir comment les panneaux devaient être faits. Et n'oubliez pas, dans la quatrième version, dans le quatrième projet de loi, ils ont oublié que le panneau devait avoir une hauteur et pas seulement une largeur. Je vous dis qu'on est dans le règne de la qualité totale.

On est dans le règne de l'insignifiance totale, de l'incompétence totale, M. le Président. Et on nous dit qu'on va faire une reprise avec ça, un gouvernement comme ça! M. le Président, on s'en va chez le diable, puis sur un temps riche à part de ça. On s'en va chez le diable comme on n'a jamais été. Jamais, dans toute l'histoire du Québec, on n'a eu un tel ensemble d'incompétences. Tantôt, je voyais la ministre responsable de l'Enseignement supérieur. Ça fait partie du problème. Je l'ai vue récemment, quand quelqu'un demandait une antenne de cégep, répondre: Nous, nous n'avons pas, comme ministère de l'Éducation, quelque mandat que ce soit en matière de développement régional. Bien, je vais vous dire une chose: Elle n'a pas lu le rapport de son Conseil supérieur qui disait que la principale chose... Il y a deux ans, la publication du rapport du Conseil de l'enseignement supérieur, le Conseil de l'éducation disait quoi? Que la principale chose que devrait faire les ministères de l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science, c'est de se connecter sur le développement régional, d'avoir des perspectives de développement régional. Comme si l'éducation, c'était quelque chose de désincarné, comme si on envoyait seulement des missionnaires.

M. le Président, au Japon, ils ne se contentent pas de chanson. Au Japon, il n'y a pas d'électricité, il n'y a pas de pétrole, il n'y a pas de forêts, à toutes fins pratiques, il n'y a pas de terres agricoles, il n'y a pas de métaux, il n'y a pas de céréales. Les Japonais sont les premiers au monde. Il y a une ressource importante au Japon: il y a des Japonais. Et le Japon investit dans sa principale ressource naturelle: les quatre pouces que les Japonais ont au-dessus des sourcils. Et vous avez une ministre de l'Ensei- gnement supérieur qui dit: Moi, je n'ai aucune responsabilité en termes de développement économique régional. Ça ne fait pas partie de mes préoccupations. Je m'en fous. C'est écrit dans une lettre, M. le Président, que j'ai eue. M. le Président, c'est là, la source du problème.

C'est là, la source du problème, parce que dans le monde dans lequel on vit actuellement, la formation technique, la formation professionnelle, c'est ce qu'il y a de plus important. Quand on est rendu à 40 % de décrochage dans nos écoles secondaires, entre 35 % et 40 % de décrochage, ça nous en prend combien pour constater qu'il y a un problème? Est-ce qu'il faut qu'ils décrochent tous? Cette année, on va accorder un budget, 407 000 000 $ pour le transport scolaire. On bâtit... On manque d'argent pour les écoles, on a 407 000 000 $ pour les promener. Sur 10 ans, sans doute 5 000 000 000 $. Si on bâtissait les écoles moins grosses. Si, au lieu de faire des universités à 40 000 comme si on était 300 000 000 au Québec, si, au lieu de faire des cégeps à 4000 ou faire des polyvalentes à 3000 étudiants, on décidait d'avoir des écoles plus petites... La plupart d'entre nous ont fait leur cours classique dans une école où on faisait 8 ans et on était 500. Est-ce qu'on trouvait qu'on n'était pas assez à 500? On faisait 8 ans, M. le Président.

Aujourd'hui, non. L'inflation verbale, l'inflation bureaucratique, l'inflation administrative. Et on dit au citoyen: Paie, mon cave! Paie, mon cave! Aligne, puis on va te fournir des plumes si tu n'as pas de crayon. C'est comme dans toutes les réunions, on fournit les plumes, puis tout le monde les laisse là; c'est un gaspillage épouvantable. On va te fournir les plumes pour faire des chèques. Paie, mon cave! Mais, en attendant, M. le Président, on se retrouve avec une absence totale de politique.

Ce qu'on affronte actuellement, trompons-nous pas, on affronte une culture différente. Les Japonais qui ont misé sur la formation professionnelle, qui ont misé sur la compétence technique... Rappelez-vous, il y a 40 ans, quand quelqu'un achetait un petit appareil, un petit Kodak, une petite caméra japonaise, vous disiez: Ne prends pas trop de photos, elle ne durera pas longtemps. Ce n'était pas reconnu comme un produit de qualité. Aujourd'hui, les automobiles qui se vendent le plus dans le monde, ce sont les automobiles japonaises, qui ont pris le marché américain. L'automobile la plus vendue aux États-Unis maintenant, c'est la Honda Accord qui est en train de pénétrer le marché européen. On se rend compte que les télévisions, les appareils électroniques, de plus en plus, les ordinateurs, ils sont faits où? Au Japon. Pas parce qu'ils ont les ressources naturelles, mais parce qu'ils ont misé sur leur compétence technique. Nous, nous avons les ressources, puis on a les chômeurs.

M. le Président, pourquoi? Parce qu'on s'est embarqué dans un rapport Parent, qu'on ne l'a

pas critiqué. On a décidé de faire la formation des maîtres à l'université. On a fermé les écoles normales. Les écoles techniques, ce n'était pas bon. Aujourd'hui, on a moins d'étudiants à la formation professionnelle qu'on en avait en 1960. On a de plus en plus de chômeurs instruits. On a de plus en plus de gens qui ont des diplômes qui ne servent à rien, puis qui ne sont pas adaptés aux besoins du marché. Pendant ce temps-là, la ministre responsable de l'Enseignement supérieur dit: Moi, mon mandat n'est pas en matière de développement régional, il faut le faire, M. le Président! Il faut le faire!

Puis on brise des solidarités. Hier, je suis allé à une assemblée où le ministre responsable du Développement régional faisait son discours, un discours qui était assez long: une heure et demie. J'ai remarqué que son programme, il en a parlé dans les derniers cinq minutes. Le reste, c'était un peu un discours charismatique; il essayait de donner la foi aux gens. Pourquoi? Parce qu'il n'y a pas beaucoup de gens qui ont la foi. Là, j'ai remarqué qu'il a commencé à dire: «Si on buvait du jus de pomme plutôt que du jus d'orange. On produit des pommes puis on ne produit pas d'oranges.» Je lui disais: Ah bien! Il reprend le discours que je faisais il y a 15 ans, après avoir craché dessus pendant 15 ans. Ils ont craché sur le discours que j'ai fait sur l'autosuf-fisance alimentaire, sur la capacité du Québec de se nourrir, alors qu'on avait monté le taux d'autosuffisance alimentaire de 47 %, en 1976, à 75 % en 1985. On se nourrissait à 75 %, en 1985, ils ont dit: L'autosuffisance alimentaire, c'est bon à rien. Ça ne vaut rien. Il faut mettre ça de côté. Maintenant, on change tous nos programmes. On y est revenu après six ans, là, 1992. C'a pris sept ans, même six ans, au début de l'année: «On devrait peut-être bien boire du jus de pomme.» Grosse découverte! C'est comme si, aujourd'hui, il y avait un ministre qui se levait pour dire: «Peut-être bien qu'on devrait découvrir le feu.» Il a été découvert, le feu, il y a quelques milliers d'années, vous savez.

Puis, on a brisé nos solidarités. Rappelez-vous du débat sur le libre-échange. Qu'est-ce qu'on nous disait: Tu n'es pas bon. C'est bien de valeur, il faut que tu sois bon. On nous contait de la broue. Il fallait être efficace. On écoutait les discours de nos chambres de commerce, de notre gouvernement, puis on avait l'impression qu'on était en train d'envahir les États-Unis. Nos hommes d'affaires devenaient des Napoléon de la conquête économique des États-Unis. J'étais un de ceux qui doutaient. Je doutais parce que je me disais: On est en train de briser des mécanismes importants de solidarité. On est en train de dire: Ce qui est important, ce n'est pas la solidarité, c'est l'efficacité. Je ne dis pas qu'il ne faut pas être efficace, mais on brisait un mécanisme important. On a vu le résultat. Ce n'est pas nos gens d'affaires qui vendent à tour de bras aux États-Unis, c'est nos consommateurs qui se garrochent le plus vite possible pour aller acheter là parce que c'est meilleur marché; il y a moins de taxes. C'est ça, le résultat. (15 h 40)

La, on voit tranquillement les discours. Même le président du Mouvement Desjardins est rendu obligé de faire des discours dans les églises pour faire appel à quoi? À ces vertus qu'on a traitées avec tellement de mépris lors du débat sur le libre-échange. Il nous disait: L'efficacité, c'est la grande vertu théologale: la Foi, l'Espérance et l'Efficacité. C'est ça qu'on nous disait. Mais quel est le plan de l'efficacité? Aucun plan.

Quand je regarde... J'étais à New York récemment. J'ai pris la route 15 au sud de Montréal, et je dois vous dire que, comme route, pleine de craques et pleine de trous, on ne peut pas faire mieux. Si on est pour être dans le libre-échange avec les États-Unis, on pourrait bien avoir des routes qui ont du bon sens pour y aller. Quand je suis revenu, je suis revenu par la route en arrière de Sherbrooke; là, M. le Président, entre la frontière puis Sherbrooke, c'était la planche à laver. Ce n'était pas des trous puis des craques. Non, c'étaient des planches à laver. On s'en allait... J'étais avec mon épouse, et on disait: II reste juste à nous acheter un cheval; on a le «swing» maintenant. On avait fait 30 milles de planche à laver.

Là, on nous dit: On est dans le libre-échange, dans la qualité totale, il faut être efficace. On n'est même pas capable de faire des routes qui ont du bon sens pour aller vendre nos produits sur notre marché le plus près, et on fait de grands débats avec Ghislain Dufour. Avez-vous remarqué Ghislain Dufour, Claude Caston-guay? Avez-vous remarqué? Ils ne parlent plus du libre-échange, ils nous parlent de la Constitution, ces esthètes du fédéralisme. Ils nous parlent de la Constitution. Moi, Ghislain Dufour, je ne lui connais aucune compétence dans la Constitution, mais il dit qu'il est un représentant des hommes d'affaires. Comment vont-ils faire, les hommes d'affaires? Qu'ils nous disent donc comment ils vont vendre tous ces produits qu'ils devaient vendre au moment du libre-échange, qu'ils devaient vendre aux États-Unis? Plus un mot. Claude Beauchamp, plus un mot! Tous ces spécialistes de la vente aux États-Unis, ils sont tous déguisés en courant d'air, M. le Président. On ne les voit plus nulle part. Comme le gouvernement!

M. le Président, je comprends que les gens soient inquiets. Les gens sont inquiets parce qu'ils ne sont pas fous. Ils écoutent ça et ils disent: Ce n'est pas cohérent, ça n'a pas de bon sens, on a mis de côté... Vous savez, Desjardins, Alphonse Desjardins, il n'aurait jamais fondé une caisse populaire si on avait été dans le temps des discours qu'on vient de faire ou qu'on entend au Québec depuis quatre ou cinq ans. Jamais il n'y en aurait eu! Il a fondé une caisse populaire

avec des dix cents, en disant aux gens: si on se met ensemble - il faisait ses réunions dans les cuisines et dans les soubassements d'église parce que les salles étaient gratis - si on se met ensemble et on met des dix cents, un jour, on prendra la place des institutions financières qui nous écrasent et qui nous prêtent de l'argent à trop cher. et comme desjardins, lui, travaillait au parlement fédéral comme traducteur, celle qui tenait la caisse pendant la semaine, c'était dorimène. comme je vais vous dire, dans le temps, c'était la voiture à cheval, l'hiver, il venait en train et il ne venait pas à toutes les semaines. ceux qui voient sa vie, aujourd'hui, voient qu'il était souvent des semaines sans venir. la caisse populaire, au fond, c'était dorimène, dans la cuisine, qui ramassait les dix cents. imaginez-vous si on avait été dans les discours infatués qu'on entend aujourd'hui, des discours grandiloquents sur la qualité totale, sur l'efficacité à tour de bras. des dix cents à alphonse et à dorimène, je vais vous dire que le monde aurait dit: voyons donc, ça n'a pas de bon sens. pourtant, aujourd'hui, basé sur une seule valeur, la solidarité des gens, ces dix cents-là ont fait en sorte que plus de 50 % des épargnes des québécois sont dans des institutions qui leur appartiennent et que personne au monde ne peut acheter. «c'est-u» assez fort! parce que la valeur fondamentale sur laquelle il a misé, c'est la solidarité humaine.

M. le Président, je pense qu'au Québec on est mûr pour un vrai débat de société, un vrai discours de débat de société parce que, actuellement, les gens sont découragés et ils ont raison de l'être. On entend les nouvelles, c'est une catastrophe à tous les soirs. On peut dire: Ce soir, bien, écoutons quelle usine ferme. Il en ferme à tous les jours. C'est le marasme et, en même temps, les gens ne voient rien. On a l'impression, au gouvernement du Québec, d'être dans un navire sans capitaine, ou un capitaine qui dort, ou un capitaine qui est en vacances sur une mer démontée sur le plan économique alors que ça prend quelqu'un qui a la pogne solide pour tenir la barre de la roue, pour maintenir le cap dans la tempête. On a l'impression d'avoir un navire actuellement qui s'en va au gré des flots avec un capitaine totalement absent, qui n'a aucune orientation, aucune direction, qui flaire le vent et qui se laisse aller dedans.

M. le Président, les Québécois ont besoin d'autre chose et c'est pourquoi le discours inaugural que nous avons entendu la semaine dernière ne répond aucunement à leurs préoccupations et à leurs besoins. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): merci, m. le député de lévis. sur le même sujet, je cède la parole à m. le député de salaberry-soulanges. je vous rappelle que vous disposez d'une période de 20 minutes.

M. Serge Marcil

M. Marcil: Merci beaucoup, M. le Président. Vous savez, M. le Président, plus on écoute le député de Lévis, plus on entend toujours la répétition des six dernières années. Je n'ai pas vu de changement, je n'ai pas vu d'évolution dans son discours de 1985 à 1992. C'est toujours la même chose. On parle des routes, on parle de l'éducation, on parle du développement régional, on parle de l'investissement dans le domaine de la formation de la main-d'oeuvre, ça a toujours été ça. Et là, aujourd'hui, il a ajouté un élément nouveau dans son discours, il parle des autobus scolaires. Imaginez-vous donc! Je ne vois pas ce que ça vient faire dans notre discours aujourd'hui. Et là, il commence à parler également d'écoles, de commencer à construire plus d'écoles, mais les faire plus petites. Ce qui est bizarre, dans le fond, dans son intervention, c'est que, de 1976 à 1985... Ah! il est certain que les gens de l'Opposition disent: Bien, c'est vous autres maintenant qui êtes au pouvoir, qu'est-ce que vous faites? Mais il y a une histoire à tout ça, M. le Président, au Québec. Il y a une histoire qui est rattachée au système d'éducation, au Québec. Lorsque M. le député de Lévis parle du 40 % de décrochage au Québec, il me semble que de 1976 à 1985, il y a des gens, il y a des grands manitous dans ce gouvernement - qui étaient au pouvoir à l'époque et qui ont pensé à quelque chose. Ils ont pensé à certaines réformes dans le système d'éducation, dont les résultats - de ces réformes - on les a aujourd'hui. C'est 40 % de décrochage. Est-ce qu'on peut s'imaginer, surtout quand on est prof à l'université, qu'on puisse dire, tout bêtement, comme ça, en public, à l'Assemblée nationale, que parce qu'il y a eu un changement de gouvernement on a augmenté le décrochage scolaire au Québec?

Mais c'est tout à fait abominable d'entendre ça, plus particulièrement d'un professeur d'université qui occupe un poste à l'Assemblée nationale. J'aimerais bien ça, moi, qu'il se questionne sur ce que M. Laurin a fait de notre système scolaire de 1976 à 1985. Je ne sais pas s'ils sont déjà allés dans les écoles. Il y a une raison au décrochage présentement, et les raisons découlent de décisions que l'ancien ministre de l'Education du gouvernement péquiste a prises dans les années 1976 à 1985. On a décidé de modifier les régimes pédagogiques dans les écoles secondaires. D'abord, on a mis fin à plusieurs programmes. On a instauré le principe des programmes-cadres où n'importe qui, à partir de grandes lignes, de grands objectifs, n'importe quelle école, pour ne pas dire n'importe quel enseignant dans une école, pouvait bâtir son propre programme. Puis, à l'intérieur de la même école, deux ou trois professeurs de français du même niveau, français, programme 210, enseignaient souvent trois programmes différents puis avaient eux-mêmes le contrôle de leur propre

évaluation. Donc, on évaluait les élèves de façon différente, puis on arrivait à la fin de l'année, mais les gens ne correspondaient plus du tout aux grands objectifs qu'on s'était fixés au début.

Cet ancien gouvernement a formé un système d'éducation au secondaire, plus particulièrement l'ancien ministre Laurin. On a fait en sorte qu'à l'école secondaire au Québec, dans les écoles francophones, on puisse faire la différence entre les étudiants de l'école secondaire Vaudreuil par rapport aux étudiants de l'école polyvalente Baie-Saint-François, à Val-leyfield, et entre n'importe quelle polyvalente au Québec. Chacune de ces polyvalentes produisait des étudiants évalués de façon différente. C'a posé un problème lorsque ces étudiants sont entrés au collège. On recevait des étudiants de fin d'études, de secondaire V, et puis on s'apercevait qu'ils n'étaient pas rendus du tout au même endroit. Pourquoi? Ils ont décidé d'abolir les voies au niveau secondaire. On a décidé de faire en sorte que les étudiants qui avaient plus de potentiel et qui pouvaient apprendre plus rapidement que d'autres, on les empêche d'évoluer. On a nivelé par la base. On a maintenu des programmes faibles au niveau du français, des mathématiques et de l'anglais pour faire en sorte que les plus faibles dans l'école puissent réussir. Mais on savait que les moyens et les plus forts, eux autres, réussiraient bien trop rapidement.

Je serais curieux de connaître, dans les 40 % de décrocheurs au niveau secondaire, quelle est la catégorie d'étudiants qui décroche le plus. Je serais curieux de savoir si ce ne sont pas des étudiants qui ont un potentiel plus fort qu'on retrouverait en grande majorité dans les décrocheurs, plus ceux qui étaient très faibles, qui avaient des programmes adaptés. On appelait cette formation le professionnel court.

Le député de Gaspé, un ancien directeur d'école, sait de quoi je parle quand je parle de formation professionnelle courte. On a aboli ça également dans nos écoles. Vous aussi, le député de Laviolette. J'ai été 17 ans dans une école secondaire. J'ai été directeur d'une polyvalente de 1800 étudiants, puis c'est le drame qu'on a vécu pendant toutes ces années-là. On a cherché, à tous les ans, à savoir comment on était pour se restructurer. On a enlevé le professionnel court. Tantôt, on disait: Ah, il y a beaucoup de décrocheurs. Mais ces gens-là, ces étudiants-là, on les accroche à quoi? Quel intérêt on a créé dans les écoles? Quel intérêt on crée présentement dans les écoles secondaires pour les maintenir à l'école? Il n'y en a pas. Il n'y a pas de programmes qui sont faits pour ces gens-là. On a dévalué la formation professionnelle courte dans les écoles polyvalentes, à cause d'eux autres. On a aboli les voies également dans les programmes de français, de mathématiques et d'anglais, à cause d'eux autres. Puis, là, nos jeunes qui sont trop rapides, eux autres, à un moment donné, ils se tannent d'être à l'école parce qu'ils n'ont plus d'intérêt à y être. Mais pourtant, avant, on n'avait pas de décrochage. (15 h 50)

Aujourd'hui, ça s'amplifie, puis 40 % des jeunes du secondaire ne terminent pas leur secondaire V. C'est dramatique! Mais ça, ce n'est pas apparu, puis ça ne s'est pas créé... Ce problème-là n'est pas apparu en une journée. Un bon matin, on s'est réveillés puis on a commencé à compter les étudiants dans les écoles, puis on s'est dit: II en manque. Où sont-ils? Ça, c'est une culture qu'on a développée. Puis on a les résultats aujourd'hui. Puis au niveau de la formation professionnelle, c'a été la même chose. On n'a jamais été capable de faire l'arrimage entre la formation professionnelle au niveau secondaire avec les besoins du marché du travail. On ne l'a jamais fait.

Là, les gens... Bien oui, 40 % de décrochage. Mais c'est ça qu'on a dit, tantôt, dans le discours inaugural, quelles orientations, qu'est-ce qu'on va faire, nous autres, comme gouvernement, pour essayer de ramener les jeunes à l'école, créer des intérêts, leur faire connaître l'importance de terminer un secondaire V, l'importance d'avoir une base pour pouvoir être capables de s'adapter facilement au marché du travail. Donc, c'est pour ça qu'on a pris le virage au niveau de la formation professionnelle. Au niveau de la formation de la main-d'oeuvre, c'est la même chose. On a sorti, dans les budgets précédents, des dizaines et des dizaines de millions en recherche et développement pour inciter les entreprises, parce que c'est vrai que...

Ça, je suis d'accord avec le député de Lévis lorsqu'il dit qu'au Japon, on investit dans la matière grise. Ce n'est pas nécessairement le gouvernement qui investit dans la matière grise, c'est les entrepreneurs, c'est les investisseurs. Parce qu'eux, ils savent une chose, c'est que pour pouvoir produire un produit de qualité, il faut absolument qu'il y ait une main-d'oeuvre compétente, qualifiée. Donc, eux, ça fait longtemps qu'ils le font. Chez nous, on n'avait pas développé cette culture-là. On commence à le faire. En recherche et développement, des dizaines et des dizaines de millions. Plus que ça, on a même annoncé, dans notre budget de l'année passée, pour les individus qui veulent sortir de l'usine pour aller en formation personnelle, un congé sabbatique presque financé à 90 %.

On veut faire encore un pas supplémentaire. On parle de créer une Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre rattachée aux régions. C'est là qu'on se rattache au développement régional du Québec. On a lancé notre politique de développement régional: structures régionales. On parle de développer une société de formation de la main-d'oeuvre au Québec: structures régionales. On fait la même chose au niveau de la santé et des services de santé:

structures régionales. On s'est aperçu que c'est vers les régions que l'action se produit. Donc, il faut restructurer nos régions pour que les gens de la place puissent se prendre en main et se développer. C'est dans ce sens-là. C'est ça, notre discours, présentement. On n'invente rien, sauf qu'après avoir analysé pendant des années le problème québécois, parce que ce n'était pas un problème facile à cerner, aujourd'hui, on s'aperçoit que parler de formation de main-d'oeuvre, parler d'adaption de main-d'oeuvre, seulement en parler, on ne changera pas le problème, on va le perpétuer. On agit, on pose des actions concrètes.

Lorsque le député de Lévis parlait tantôt de ses routes, lorsqu'il faisait son «swingage», comme il dit, de Québec-Montréal ou de Montréal-Québec, ce qu'il a oublié de dire, c'est que de 1976... C'est vrai que c'est plate de revenir sur le passé, je comprends, d'essayer de mettre le blâme sur l'ancien gouvernement, mais c'est ça, M. le Président. On ne peut pas s'en sortir. Pas un sou, pas un demi-kilomètre d'autoroute qui a été construit au Québec de 1976 à 1985. Mais ce n'est pas des farces! On n'a pas investi dans ce domaine-là. On a essayé de maintenir ce qu'on avait. On a investi dans d'autres choses. On a pris l'argent pour l'investir dans d'autres choses, dans les communications.

On se ramasse dans les ministères, aujourd'hui, avec des services de communications de 50, 60, 70 personnes. Ça n'existait pas, ça, en 1976, mais eux, dans leur objectif d'atteindre l'indépendance du Québec, il fallait absolument faire en sorte qu'on puisse contrôler chacun des ministères, développer un plan, une stratégie et un message. Bien, là, ils ont paqueté les ministères, ils ont développé des services de communications. C'est là qu'ils ont mis l'argent. Là, on parle de dizaines et de dizaines de millions de dollars. On ne parle pas de milliers de dollars; on parle de dizaines et de dizaines de millions de dollars pendant neuf ans. Quand on se demande où va l'argent, ils l'ont mis là, dans leurs propres intérêts partisans. Ils ont voulu essayer de noyer l'information au Québec pour essayer de gagner les gens, leur faire accroire qu'un Québec indépendant, c'est le paradis sur terre. C'est ça qu'ils ont fait. C'est des dizaines et des dizaines de millions qu'on a pris dans la poche des gens pour faire ça.

M. le Président, Hydro-Québec, ça a été la même chose. Ils ont dévalisé la caisse d'Hydro-Québec par une loi que leur chef présentement, à l'époque où il était ministre des Finances, au Québec... Ils ont passé une loi pour aller chercher la caisse d'Hydro-Québec, de l'argent qu'ils avaient pour du développement hydroélectrique. Bien non. Ça n'a pas paru. Ça n'a pas paru parce qu'ils manquaient d'argent eux aussi. Ils se sont dit: La mine d'or, c'est Hydro-Québec. M. le Président, du moins pour ceux qui nous écoutent et qui écoutent ce discours-là qui dure des années, qui est toujours répétitif, ce n'est pas encourageant.

Lorsqu'il citait tantôt le Mouvement Desjardins, oui, c'est un mouvement communautaire, mais c'est cette pensée-là qu'il faut développer chez nous, une pensée communautaire. Il va falloir qu'on cesse de se battre sur la place publique pour des idées souvent futiles. Il va falloir que les gens commencent à travailler ensemble. Si on a un message positif à transmettre à notre population, bien, le message positif, il va falloir qu'il vienne de l'Assemblée nationale, des gens qui sont élus par la population, de l'élite québécoise, dans le fond, M. le Président, de nos leaders, des gens qui viennent représenter leur population. Mais, au lieu de passer leur temps à jouer un rôle qui est ingrat, probablement pour eux autres, ils devraient essayer de commencer à développer un message positif au Québec.

C'est vrai qu'on peut devenir aussi bon que les Japonais si on se donne la peine de le faire. C'est vrai qu'on peut devenir aussi bon que n'importe quel peuple sur terre, à une seule condition, à la condition qu'on se décide de travailler ensemble, à la condition qu'on se libéralise au niveau intellectuel également. Qu'on n'essaie pas de toujours, comment je pourrais dire, s'encarcaner, d'empêcher les gens de s'exprimer au Québec. C'est un petit peu ça.

On parle de l'enseignement de l'anglais, M. le Président. Durant leur règne, on a diminué je ne sais pas combien de minutes d'enseignement de l'anglais. On passe une loi 101 et on dit: Vous n'avez plus le droit de parler anglais au Québec. Oui, mais il dit: Comment on va faire, nous autres, les francophones, pour que nos enfants apprennent l'anglais? Dans le fond, la loi 101 encourageait les anglophones parce qu'un anglophone, une famille anglaise au Québec, lui, pouvait envoyer son enfant à l'école française. Donc, on lui donnait la chance de devenir bilingue. Moi, parce que mes parents ne sont pas allés dans une école anglophone, moi, je n'ai pas le droit d'envoyer mes enfants dans une école anglophone.

Mais c'est tout à fait stupide, M. le Président, une politique comme ça. On a fait en sorte que nos Québécois... Là, on s'est dit: Ce n'est pas grave, on va améliorer l'enseignement de l'anglais au secondaire. Allez donc voir dans les écoles secondaires comment on enseigne l'anglais aujourd'hui. Même dans le dernier régime qu'ils ont aménagé, on leur enlevait une heure par semaine en plus de ça d'enseignement de l'anglais. Mais c'est ça. C'est ces gens-là qui veulent gouverner le pays! On vous a vus pendant neuf ans, je pense que c'a été neuf ans de trop.

Dans le fond, c'a été bon pour l'ensemble des Québécois que vous ayez été au pouvoir au moins pendant neuf ans. On a vu exactement ce que vous étiez, ce que vous pouvez faire. Vous avez pris une dette de 5 000 000 000 $ en 1976,

vous l'avez montée à une trentaine de milliards en 1985. Dans l'espace de neuf ans, ce n'est pas grave ça. «The sky is the limit!». II n'y a rien là. On augmente les impôts, les taxes, et ils nous accusent d'augmenter les taxes et les impôts. Mais, s'il y a quelqu'un, M. le Président, s'il y a un gouvernement dans ce Québec qui a été à l'origine de ce pouvoir - de cette noyade, si on peut dire - de taxation, c'a été eux autres.

Aujourd'hui, on est obligé de réparer ces erreurs-là, tout en faisant en sorte de contrer le déficit parce qu'augmenter un déficit, si peu soit-il, c'est de prévoir des taxes pour ceux qui vont nous suivre. C'est ça qu'ils ont fait. Nous, il faut en même temps maintenir une qualité de services, faire en sorte qu'on puisse maintenir nos routes en bon état, faire en sorte de permettre à l'ensemble des Québécois et des Québécoises d'avoir accès à une foule de services, maintenir ça, il faut absolument, en même temps, contrer notre déficit. Ça, c'est un exercice qui n'est pas facile à réussir. Mais on réussit quand même, malgré tous les problèmes qu'on peut vivre, malgré la récession. Comme gouvernement, je crois qu'on a réussi à concentrer nos efforts sur le maintien d'une dette quand même assez basse. Mais, chaque fois qu'on va augmenter le déficit de 100 000 000 $, de 200 000 000 $, de 1 000 000 000 $, de 2 000 000 000 $, il y a des gens qui vont nous suivre et qui vont le payer. Ce n'est pas nous autres qui allons payer ça parce qu'on ne sera plus ici. Ce sont nos jeunes de tantôt qui vont travailler et c'est eux autres qui vont être taxés.

Ce gouvernement-là du temps a oublié de penser à ça. Il pensait... Mais c'est vrai que, dans leur philosophie, dans leur plan machiavélique, ils pensaient même imprimer de l'argent parce qu'ils voulaient faire la piastre québécoise. C'est facile. C'est le style à Caouette. On va imprimer de l'argent et on va payer nos dettes, sans connaître la valeur que le dollar canadien ou québécois aurait pu avoir à ce moment-là.

Tout ça, M. le Président, pour dire que les orientations, elles sont connues de la part de l'ensemble des Québécois. Autant au niveau du développement régional, il y a une politique qui est avancée, autant au niveau du développement de la main-d'oeuvre au Québec, il y a un énoncé de politique qui a été mis sur table, il y a eu une consultation publique, le projet de loi va suivre son cours. Autant au niveau du développement ou de la restructuration des services de la santé et des services sociaux au Québec, on a créé, M. le Président, par cette réforme, une société régionale également. (16 heures)

Le comité Poulin qui a été formé également d'un ensemble de députés: 17 députés du parti ministériel. On a fait un exercice en concertation avec nos collègues ministres. Je crois qu'avec les années - quand on parie d'années, on prend ça à très court terme - on va réussir à prendre le virage qui va faire en sorte que le Québec va reprendre la place qu'il était en train de perdre, malheureusement, parce qu'il a été mal guidé pendant un certain nombre d'années. Et ceux qui l'ont mal guidé, ce ne sont pas les gens qui sont de ce côté-ci de cette salle, M. le Président.

Parlons de la Constitution maintenant. À l'automne, c'est-à-dire à la session intensive d'automne, j'étais intervenu, justement, sur la cohérence de ce parti-là. À tout bout de champ, en Chambre, ils nous disent: Vous logez où sur le point de vue constitutionnel? C'est drôle, parce que le Parti libéral du Québec n'a jamais changé sa position constitutionnelle. On s'est toujours déclarés, et on l'est encore, un parti libéral du Québec dont l'option, c'est le fédéralisme renouvelé. C'est ça, notre option, et ça n'a pas changé.

Eux autres, ça a été la souveraineté-association avec, je ne sais pas comment il s'appelle, l'ancien qui... Je ne parie pas de l'ancien premier ministre, mais celui qui a contribué à la mise sur pied de ce mouvement-là... M. Gilles Grégoire. Après ce mouvement, souveraineté-association, ça a été la souveraineté association, sans trait d'union, avec trait d'union. Là, ils ont pris le pouvoir. Les Conservateurs sont arrivés sur la place publique, puis là ça a été «le beau risque.» Tout d'un coup, ils sont devenus fédéralistes. Mais là, ils se sont aperçus que ça n'allait pas trop bien. Ils ont fait toutes les démarches nécessaires pour faire en sorte d'évincer le premier ministre du temps, M. Lévesque. C'est eux autres qui l'ont mis dehors. N'oubliez pas ça.

Là, on a amené l'affirmation nationale, comme chef du parti. Tout le monde de l'autre côté l'applaudissait. L'affirmation nationale, ça a été tellement fort qu'ils l'ont congédié lui aussi. Ça a été ça. Et là, aujourd'hui, on arrive avec un autre. C'est la souveraineté, pas la souveraineté, l'indépendance du Québec. Mais là, dans l'indépendance du Québec, c'est avec le dollar québécois. Pas le dollar canadien. Bien, je ne le sais plus. Ça va probablement être l'écu, on ne le sait pas.

Une voix: Union monétaire.

M. Marcil: Union monétaire. Ensuite, ça a été la citoyenneté québécoise.

Une voix:...

M. Marcil: Non, non, on va garder notre passeport canadien. On veut être indépendant. Comme disait mon collègue qui est intervenu ce matin, on veut être indépendant, mais avoir tous les avantages de la Fédération et avoir tous les avantages d'être indépendant. Là, on ne sait plus sur quel bord... Tu sais, c'est comme celui et celle qui décident de se marier. Ils veulent être ensemble uniquement pour faire des enfants, mais pour les élever, il y en a un qui décide: Bon,

moi, je ne veux pas être là. Je suis le père ou je suis la mère, mais je ne veux pas participer à l'éducation de mes enfants. C'est un petit peu ça. C'est tout à fait loufoque, dans le fond, leur démarche.

Ça fait que dans le domaine constitutionnel, M. le Président, on met une commission, une super-commission sur pied. On accouche des recommandations, on dépose une loi avec un échéancier, la loi 150, octobre 1992. Ils votent contre. Ils s'en vont sur la place publique avec des pétitions pour nous obliger à faire le référendum. Comprenez-vous ça, là? Ils sont contre la loi 150 et ils s'en vont avec des petits papiers faire signer tout le monde en disant: Aïe! il faut dire au gouvernement qu'il respecte la loi 150, mais ils ont voté contre, M. le Président.

Donc, en conclusion, M. le Président, c'est décourageant de voir comme ça des élus qui peuvent faire des discours, si enflammés soient-ils, faire en sorte qu'on rend confus à peu près tout ce qui est possible au Québec. On n'est pas capable d'essayer de développer ensemble un discours avec une unité de pensée, avec une unité d'action. Moi, je crois que l'avenir du Québec et l'avenir du Canada - et on le voit, ce qui se passe entre les provinces également - ce sera une réussite totale la journée où les Québécois et les Québécoises et toutes les communautés qui composent cette société québécoise décideront de développer ensemble une unité de pensée et une unité d'action. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Salaberry-Soulanges. Sur le même sujet, je cède la parole à M. le député de Jacques-Cartier.

M. Neil Cameron

M. Cameron: Merci, M. le Président. To begin with, I must say as usual, I listen always with astonishment and admiration at the sheer enthusiasm with which the Member for Lévis makes his case. On the other hand, I think my colleague from Salaberry-Soulanges had more common sense in his argument. My own position and that of my political grouping, of course, is one that allows rather more latitude than either of the speakers for the Official Opposition or for the Government can take in looking closely at just what are the real problems of Quebec's society and Government right now.

So, rather than trying to make the largest number of partisan points I can, I will try to deal with some of those issues. I will do so with a hope, perhaps forlorn, but I hope not entirely so, that in at least a small way I can contribute to changing the climate of opinion. That is the real reason that we ran in the last election. We understood clearly that we would never have power; we understood clearly that we would not constitute a political formation attempting to do the same thing as either the Liberals or the Parti québécois. But we also believed, not only on issues touching on Anglophones, or on Bill 101, or matters of that kind, but on a great number of other matters, that the situation had now arisen where almost anyone who stood for the established political parties was boxed into a position of having to defend certain arguments, almost as if they were canonical doctrines of his Church, rather than in terms of their correspondence to the social and economic realities of Québec today.

I would say, as an example of this, that we can all see now that the present Québec Government is clearly one that has certain very capable people in it. After all, the senior Members of the Cabinet have between them probably more years of governmental experience than you can generally find in most governments at either the provincial or federal level. We all know that they are, as are their leading critics on the other side of the House, men and women of character and capacity and intelligence; their ability to direct their Ministry is not really as much up to question as the Official Opposition must pretend.

But we also know that the province today has very serious problems, some of them touching on the constitutional issue, but some of them long-term problems, which have been evolving over the whole last half century and are only tangentially connected with relations between Anglophones and Francophones and with the relationship between Québec and the rest of Canada. For example, it is surely clear by now that the prosperity and success of Québec, and of Canada as a whole to some extent, was tied closely to a particular stage in the development of a capitalist and industrial economy from the late 19th Century to about the 1960s.

It is no longer possible for Canadians as a whole, or for Quebeckers, to assume that we will be guaranteed that kind of prosperity in the future, that we will occupy the same role in terms of power, influence, wealth, comfort, social justice, what have you, in the future that we did in the past unless we make intelligent decisions, that we are facing types of competition and types of economic change that were never a really serious concern for Québec or Canada in the past and that, furthermore, we all suspect that we are not responding to these pressure very well.

Let us consider seriously some of the reasons why the Government of Québec is not responding too well or too successfully but, to be frank, I am very skeptical as to whether a Parti québécois government would constitute an improvement on many of these questions either.

One of them is the increasing importance

of what an American social thinker named Daniel Bell called «the cultural contradictions of capitalism», that is to say: we are living in a society where capitalism has given us more wealth and comfort than ever before in history but, also, is annihilating our traditional social institutions at almost the same rate. So, things tike families, communities, churches, neighborhoods, ethnic groupings, all kind of things that provided strength and assurance for individual citizens in their lives are boiled away by the sheer homogenizing force of things like worldwide capitalist products and services, the Cable News Network and all the rest of it.

(16 h 10)

That is difficult for all Western societies today. The Member for Lévis held up the Japanese as an interesting model for emulation with their celebrated social solidarity. The Japanese can be interesting beings to us, but let us face it, neither Québécois nor North Americans in general are very much like the Japanese. Frankly, I suspect that we could head into far worse economic circumstances than we are in now, more disastrous problems with our Government, more disastrous problems with our industry, and it would not lead to the ordinary man or woman of modern Québec, Anglophone or Francophone, Québécois «de souche» or immigrants suddenly transforming themselves into people something like the executives of the Honda Motor Works. I find this no more likely, offhand, than their converting themselves into a collection of Marxist-Leninist revolutionaries, or Latin American priests, or whatever you wish to choose as your analogy. We are stuck with the kind of people we are. And if we want to function efficiently in the economy of the 21st Century, we have to deal with the potentialities of our actual Government and our actual people.

What can we actually do anything about and what can the Government do something about? Well, the first thing that I think the Government can have a genuine influence on is in education. It cannot necessarily do the things that are as grand as we often hear said in this Assembly or in other public meetings, but it is true that it is possible, within the contraints even of a restricted budget or high deficits, for good decisions to be made on how the educational system will work. I hope that the Commission on Education, all of its members, including myself and members of both parties, are going to find instrumentalities to do this, but I would point out that the issues that are often made most of, in terms of public relations or fashionable interest, are not necessarily the most vital ones for the future.

For instance, the central focus of attention right now is on the dropout rate in Québec. The dropout rate is a serious problem, but it can be exaggerated. In the first place, it is hard to compare statistics from one place to another because the rules are so different on readmitting students to school, college, cegep or something of the sort. What constitutes a dropout is so hard to define in terms of whether people come back or are taking only a course or two, and because of the heterogeneous mixture of reasons they leave. I know since I teach young people every year. I check them out all the time as to which ones are dropping out and what reasons they have. They are all over the house, they are not a consistent pattern.

I do not know that the greatest successes in improving the situation for our young people will come through a greater expenditure and the creation of new bureaucrats to study the problems of dropping out. I think it is more important to look at things like the quality of instruction in the French and English languages right at the outset in the school system, and to move resources, if there is only a set amount of resources available, especially to the lower level of the educational sector. In my experience as someone who has generally taught in the secondary and postsecondary sector, if children are given a good foundation in their language and are given confidence in it, they can survive a really disastrous educational system later on, whereas if they are poorly founded at the outset, even if you put them in a good college or university, all they do is panic and disappear. So, I hope that will be kept in mind.

On the issue of economy, the greatest concern we obviously have is the level of debt. It seems to me that on this particular issue, both the Government and the Opposition spokesmen are required to be a bit disingenuous and highly hypocritical. Surely, it is the case that the overall level of public debt today and the deficits with which the Ministers have to deal with each year now are to some extent because of large errors made in the expansion of the public sector in the 1970s and in 1980s that were made by both the Liberals and the Parti québécois. I should also say, to be fair, those mistakes were to no small extent made by society at large as well. That is, we all underestimated how much we were going to get ourselves into trouble when we thought, only a decade or two ago, that we could simply keep spending more money to provide more generous services in health, more generous services in education, more generous services in welfare without really recognizing the full terrifying economic implications.

Now, I do not believe that any democratically elected government really wants to face the implications, because one of the implications - let us be blunt; I am perhaps the only person in the House who can mention this - is that you have to break union contracts, you have to fight the unions, you have to take the unions on, and you have to get into a head-on battle with all of them.

Nobody talks about this in politics anymore, but if we do not... And I grant the fact that the unions can quite honestly say: Well, there were undertakings made, word was given, contracts were signed, our expectations are reasonable, they are fair and, as a matter of fact, we are not even doing very well, we are getting no salary increases, we are getting no improvement in conditions, and so on down the line. But, as we all know, unfortunately, no matter how good their arguments are, this society - and it is not just Québec, the same situation is true for Ontario and the other provinces - does not know how to pay the amount of money necessary to maintain those contracts with all the built-in escalators they have for things like seniority and so on down the line. At some point, there will be a crack. So, it is a good idea at least for it to be mentioned in this House now.

Then, on other issues to do with the economy, perhaps I should say something about James Bay. Despite the fact that I was one of those who raised a number of protests, complaints and questions about James Bay II from when I first arrived here, particularly on the financing, the timetable, the advisability and so on, I wll admit I have an occasional bout of sympathy for the Government and even for the Minister of Resources in what is a ministry which now, I think, has to deal with an agonizing situation.

The problem is not, even though it gets the most publicity in the media, the relationship with the Crée. The problem is partly that all genuinely ambitious projects of this kind to develop power in modern North America are far scarier than they used to be by the combination of the fact that the technological advance gets more and more rapid, and so does the ability of protest groups of all kinds, veto groups, if you like, to oppose almost any kind of power throughout North America. The result is that if you set up anything with a long timetable plan, unless you have extremely low interest rates, in other words, unless the cost of money gets down below 6%, then, you are going to face some kind of danger even if you can make a very good case for your power project.

I hope the Government will recognize the fact that James Bay may be a hopeless case, no matter how many impressive arguments Mr. Drouin and others can make for it. I think its day is gone, I think it was gone several years ago. And I think that is true despite the fact that in the eyes of God, hydroelectric is in many ways a very good system of producing power.

On the constitutional issue, I do not know whether I should really add anything to what has been said by so many people already. I think the most important thing that I could say about it here is, of course, that in many respects, our position is not very far different from Members of the Government. We would like to see federa- lism maintained, we would like to see this country maintained. If that involves a federalism as it is so often put "profondément renouvelé", then, so be it.

I have a suspicion that a federalism "profondément renouvelé" may turn out to be a nightmare to actually administer. I wonder, for example, how many people, in the current arguments about the Constitution, when they start talking about the Senate, have really contemplated what a horrifying idea it is to have the Senate doing anything, except what it does now. That is, a genuinely ineffective Senate, I think, is a splendid idea. I wish people would remember Sir John A. Macdonald's own view of the Senate. He once said: «You have to have charities for everyone, including the rich.»

So, if we move instead into areas like a massive reconstruction of our entire system of government, in many cases, note, probably providing no special advantages for Québec or for French culture or for the French language or for many of the things that were supposed to have started this whole tangle in the first place, it is quite possible we will simply get a more misgoverned Canada. So, I think I would prefer just a little "renouvelé", not "profondément renouvelé".

However, if we get it, I would certainly support it and I believe all the Members of our political formation would, because I am less interested in the exact technical details by which this process is done than in the preservation of an economically, socially strong, united and free Canada of which Québec is a major and vital component. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): alors, je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. en vertu des règles de l'alternance, mme la ministre responsable des affaires culturelles, allez-y. (16 h 20)

Mme Uza Frulla-Hébert

Mme Frulla-Hébert: Merci, M. le Président. Je suis fière aujourd'hui de participer à ce débat sur le discours inaugural, précisément aussi après ce que j'ai entendu, notamment du député de Lévis, le député de Lévis, qui parlait d'inflation verbale, en parlant de ceux qui essaient d'apporter des éléments neufs et des éléments de solution qui sont aussi créateurs et qui sont là pour affronter les grands débats des années quatre-vingt-dix. Ce que j'ai entendu du député de Lévis, c'est plutôt une purge verbale, c'est-à-dire critiquer, critiquer, critiquer et ne pas apporter de solution neuve. Dans certains domaines, on a parlé des routes, oui, on a parlé d'éducation, on a critiqué le système d'éducation, mais je n'ai pas entendu certaines solutions qui pourraient faire en sorte que nos jeunes puissent

être intéressés à demeurer à l'école.

Une de ces solutions-là, M. le Président, c'est évidemment la culture. Vous me voyez venir, M. le Président. On peut bien parler de culture, on peut bien avoir un très beau discours, mais il faut aussi agir. Le gouvernement d'en face, à ce que je sache, a parlé de culture, mais, quand on reprend les dossiers, on s'aperçoit qu'il n'y a pas grand-chose qui a été fait, M. le Président. Alors, nous, nous avons décidé de prendre certaines initiatives, c'est-à-dire de - et ce n'est pas facile, M. le Président - développer une politique culturelle, pour la première fois au Québec, une politique qui se doit d'être définie et applicable. On est d'ailleurs, actuellement, à la rédaction de cette politique, une rédaction qui va s'inspirer des 264 mémoires qui ont été déposés en commission parlementaire l'automne dernier. C'est d'ailleurs un nombre record d'intervenants qui se sont fait entendre.

Ce qui est encourageant, M. le Président, c'est que tous étaient au rendez-vous et tous se sont prononcés sur la question, autant le milieu des arts et de la culture, autant le milieu des affaires, le milieu des municipalités et le milieu de l'éducation, le milieu syndical, le milieu ethnoculturel, pour ne nommer que ceux-là, M. le Président. Il s'agissait, et c'est encourageant de le voir, d'une véritable mobilisation. C'est pourquoi, M. le Président, j'invite aujourd'hui tous mes collègues, autant ceux de ce côté-ci de la Chambre que ceux d'en face, à s'associer à la réalisation d'un grand projet de société.

On parle de projet de société, M. le Président, on parle de manque d'imagination; on accuse et on s'accuse de part et d'autre, alors moi, je fais une invitation toute grande ouverte, M. le Président, à tous, à un projet de société puisque cette politique culturelle nous concerne tous. Elle concerne les créateurs, elle concerne les industries culturelles, elle concerne la population et elle concerne ceux qui forment le gouvernement, c'est-à-dire un projet qui, telle la commission parlementaire, est un projet qui fait appel à une mobilisation générale.

Maintenant, M. le Président, avant de parler de culture, avant même de parler d'industrie culturelle, avant même de parler de politique culturelle, il faut, d'abord et avant tout, parler de la matière première, M. le Président, et, nous, notre matière première, ce n'est pas les forêts, ce n'est pas les mines, ce n'est pas les routes, c'est la création, M. le Président. Ce sont les créateurs qui disent, chantent, interprètent et illustrent ce que nous avons été, ce que nous sommes profondément, ce par quoi nous nous reconnaissons et sommes reconnus distincts, M. le Président: notre culture.

Nos créateurs, eux, ont évolué à pas de géant. On se rappelle ce qu'il y avait il y a 30 ans; il n'y avait rien, M. le Président, et, maintenant, nos créateurs ont su réaffirmer d'ailleurs sans cesse notre identité, nous rappeler qui on était, une identité culturelle qui, à nous, nous est propre, une culture qui rayonne ici comme à l'étranger. Quand on pense à des Gratien Gélinas, Marie-Claire Biais, Robert Lepage, Edouard Lock, Louise Lecavalier, Michel Rivard, Borduas, et je vais aussi ajouter, M. le Président, quand on pense à Roch Voisine, en France, quand on pense à Céline Dion aussi, ces artistes ont et continuent de nous représenter chez nous et, maintenant, avec énormément de succès à l'étranger. Donc, notre culture, M. le Président, s'inscrit dans les grands courants internationaux.

Quand on pense aussi aux Grands Ballets canadiens, au musée des Beaux-Arts, à l'Orchestre symphonique de Québec, à celui de Montréal, au musée McCord, au Théâtre du Rideau vert, du Nouveau Monde, du Trident, au Cirque du Soleil, aux Opéras de Montréal et de Québec, on pense à nos industries culturelles qui ont su canaliser l'énergie créatrice, administrer des budgets, petits et grands, avec une compétence que le secteur économique pourrait facilement leur envier.

D'hier à demain, c'est la culture qui nous permet de communiquer dans l'espace et dans le temps, avec nos ancêtres comme aussi avec nos contemporains. Elle nous permet, à nous, de nous définir face à nous-mêmes et aussi face aux autres. Elle nous permet aussi de nous définir avec les autres, avec toutes les cultures qui viennent enrichir la nôtre. M. le Président, lorsque son unicité est forte, lorsque son identité est solide, la culture reçoit et la culture donne. Si on la respecte dans son originalité, dans ce qui la distingue, elle s'ouvre d'autant plus à ce qui se distingue d'elle.

La culture, M. le Président, c'est aussi notre langue. Elle est aussi le témoin de notre identité. Sans elle, nous ne sommes plus ce que nous sommes. Sans la culture québécoise, la société québécoise n'a plus d'empreintes digitales. Ça me surprend, M. le Président, qu'on n'en ait pas entendu parler plus, parce que c'est un secteur qui est si important pour ce que nous sommes et pour notre essence même.

Vous savez, M. le Président, notre culture a su transformer ses handicaps - parce qu'on n'est pas beaucoup - contre des atouts et, depuis le premier jour, le pouls culturel du Québec n'a jamais cessé de battre. L'État aussi a misé sur cette vitalité. Dans un premier temps, à l'égard du patrimoine, ce patrimoine qui trace notre histoire, véritable fil d'Ariane de notre mémoire. C'est ainsi que, M. le Président, nous avons, au Québec - ce n'est pas le fédéral, M. le Président, c'est ici, au Québec - rédigé les premières lois. En 1922, on assiste à la création de la Commission des monuments historiques; en 1933, à l'ouverture du Musée du Québec. L'État s'engage aussi dans la formation de nos jeunes créateurs. En 1942, la fondation du Conservatoire

de musique de Montréal; en 1954, la fondation du Conservatoire d'art dramatique de Montréal. L'État se préoccupe aussi de l'accessibilité de la culture en créant, en 1959, un premier service de bibliothèques publiques.

Fin des années cinquante, début des années soixante, là, il y a un courant mondial. Les sociétés démocratiques reconnaissent le besoin d'intervention de l'État en matière de culture. Évidemment, le Québec suit aussi le courant. C'est sous un gouvernement libéral, en 1961, qu'il y a la création du ministère des Affaires culturelles.

Comme vous le voyez, M. le Président, on est bien loin de l'Acte constitutionnel de 1867 où on ne retrouve aucune mention, même brève, sur la culture, ce qui ne facilite pas non plus notre débat constitutionnel. C'est à pas de géant que l'évolution s'est faite et c'est à pas de géant qu'elle continue de se faire. En 1962, création de l'Office de la langue française; 1963, inauguration de la Place des Arts; 1964, création du musée d'Art contemporain; 1967, création de la Bibliothèque nationale du Québec; 1971, ouverture du Grand Théâtre de Québec; 1988, ouverture du musée de la Civilisation.

C'est aussi en 1987-1988 que notre gouvernement, M. le Président, adopte les lois 90 et 78 par lesquelles on reconnaît un statut professionnel à nos artistes. Ces lois, M. le Président, étaient uniques au monde, elles étaient progressistes. C'est notre gouvernement, M. le Président, qui posait ce geste concret. Elles répondaient aux besoins réels des artistes d'être considérés comme des travailleurs autonomes et d'avoir aussi un statut professionnel. Ces lois ont été rendues possibles parce qu'il y avait déjà une collaboration entre le gouvernement et les milieux culturels. À ce jour, on peut se vanter de dire que 11 associations ont été reconnues, dont l'Union des artistes, la Guilde des musiciens, la Société des auteurs, l'Union des écrivains, le Conseil des métiers d'art et ce, pour n'en nommer que quelques-unes. Elles regroupent aussi et représentent plus de 15 000 membres. Elles sont le coeur de 100 organismes, corporations, troupes et autres structures qui, depuis maintenant des années - c'est-à-dire depuis 1985 - constituent la coalition du monde des arts et de la culture.

C'est sous le signe de la transparence, M. le Président, que mon ministère a développé ses relations avec le milieu des arts, des lettres et de la culture. C'est encore sous le signe de la transparence que nous développons notre politique culturelle, notre projet de société. Un projet de société où le soutien des arts mène à l'excellence de la création, où la seule élévation de l'esprit devient un dividende pour la société. Il est d'autant plus légitime d'en parler dans ces termes, M. le Président, que le secteur culturel connaît aujourd'hui un véritable impact sur le plan économique.

À ce titre, le gouvernement du Québec, M. le Président, et on s'en souvient - ce que le député de Lévis appelait «inflation verbale» - dévoilait, en décembre dernier, sa stratégie de développement industriel. 14 secteurs clés ont été identifiés de grappes industrielles. De ces 14 grappes, 5 sont perçues comme ayant déjà les reins assez solides pour être concurrentielles sur la scène mondiale. Les autres sont considérées comme stratégiques, c'est-à-dire qu'elles jouent déjà un rôle important dans le développement économique du Québec. Les industries culturelles constituent l'une de ces grappes, M. le Président, et nous en sommes fiers. C'est la première fois qu'un gouvernement reconnaît la véritable place de la culture au sein de l'économie. Voilà un constat que j'entends désormais rappeler haut et fort, dans un langage inspiré par la passion de nos artistes et par la certitude de nos gains économiques réels. (16 h 30)

L'industrie culturelle représente une activité économique de l'ordre de 3 500 000 000 $ par année. En fait, si on le compare à nos 22 secteurs manufacturiers, le secteur culturel arrive au neuvième rang quant à la valeur des livraisons. On estime qu'en 1990 les Québécois ont acheté des disques pour 345 000 000 $. Ils ont aussi assisté à des spectacles pour 105 000 000 $. Ils se sont procuré des livres pour 470 000 000 $. Pour cette même année, les bibliothèques publiques ont acheté, à elles seules, pour environ 20 000 000 $ de livres. Les gens ont dépensé 215 000 000 $ dans l'achat de films ou la location de vidéocassettes et 85 000 000 $ au cinéma.

En termes d'emplois, on retrouve plus de 25 000 emplois dans ce qu'on définit comme industries culturelles, c'est-à-dire des gens provenant des entreprises privées oeuvrant en production et en diffusion de films, émissions de télévision, vidéocassettes, disques, spectacles et livres. Si on ajoute à ça les autres emplois associés au secteur culturel global, c'est-à-dire musées et bibliothèques, on parle de 75 000 emplois. Et ces industries culturelles comptent sur plus de 2500 PME, et ce, réparties à travers toute les régions du Québec. Voilà les chiffres, M. le Président, dont on ne parle pas souvent, dont on n'a jamais parlé, mais qui, eux, parlent d'eux-mêmes.

Les produits culturels québécois peuvent non seulement véhiculer l'identité des Québécois, mais ils peuvent également jouer un rôle important, très important, au sein de l'économie. En 1991, le rapport Arpin nous proposait de faire une nouvelle synthèse et d'énoncer de nouvelles orientations en matière de culture. Vous vous rappelez, M. le Président, je vous disais tout à l'heure que nous avions invité tous les milieux à se prononcer en commission parlementaire. En effet, nous avons entendu, en plus des intervenants du milieu culturel, des représentants de

tous les autres milieux. Il y avait Alcan, Bell, Québécor, la ville de Montréal, la ville de Québec, l'Union des municipalités, l'Université Laval, l'Université du Québec, la Fédération des cégeps. Et je n'en nomme que quelques-uns, puisqu'on avait 264 mémoires et représentations. C'est une des commissions les plus importantes que le Québec n'ait jamais tenues. Et tous, sur les 264 représentations, sont arrivés à un consensus sur le fait que la culture doit être considérée au même palier que le social et l'économique, et qu'elle doit aussi se trouver des partenaires pour atteindre l'excellence.

La politique culturelle, c'est un projet si important pour notre société que plus de la moitié des ministères sont et seront concernés par elle. Plus de la moitié des ministères participent présentement à son développement et plus de la moitié des ministères deviendront des partenaires de la culture. Parmi nos partenaires, parmi nos alliés naturels... J'en parlais tantôt, M. le Président, et le député de Lévis y a fait référence, et d'autres députés y ont fait référence: on interpelle le milieu de l'éducation. Il faut accorder une plus grande place à la culture et à l'enseignement des arts dans les écoles. Pourquoi? Parce que c'est là que la notion de société commence à prendre son sens. C'est là principalement que l'avenir se projette. À l'école, on enseigne, on éduque et on forme. On peut former à écouter, à voir, à reconnaître le beau et le vrai. La littérature, la musique, le théâtre et la danse doivent prendre une place de premier plan dans les écoles. Il faut les ramener dans les écoles.

Lorsqu'on éduque le goût des enfants, on stimule aussi leur curiosité. Et, en effet, M. le Président, l'habitude de la lecture et les programmes scolaires axés aussi sur les arts entraînent - et c'est prouvé - une plus grande capacité de concentration qui transpire sur toutes les autres matières scolaires. Elle entraîne aussi une fréquentation plus assidue des salles de concert, de théâtre, de cinéma et des musées. Elle prévient aussi - et c'est prouvé, il y a des projets-pilotes - le décrochage. Elle répond à certains besoins sociaux dans des secteurs défavorisés. La culture et l'éducation sont des vases communicants, M. le Président, où le partenariat - et c'est prouvé maintenant - profite à tous.

En guise de conclusion, M. le Président, lorsqu'on examine la question dans son ensemble, on se doit de conclure à la nécessité d'une politique culturelle définie, développée et applicable. À l'aube de l'an 2000, nous devons nous tourner résolument vers l'avenir en misant sur notre atout exceptionnel. Il n'appartient qu'à nous, M. le Président, notre dynamisme culturel. Notre culture doit prendre sa place parmi les plus grandes cultures des plus grandes sociétés du monde. Cette politique culturelle survient à un moment crucial de notre histoire. En l'annon- çant, j'ai la conviction profonce qu'elle marquera une étape fondamentale du développement culturel de notre société, du rayonnement aussi de notre société à l'heure où on parle de globalisation et d'internationalisation.

M. le Président, nous avons ici, au Québec, un atout que personne n'a en Amérique du Nord, c'est-à-dire notre culture distincte. C'est un défi, c'est vrai, un grand défi, mais le Québec a tout le talent pour le relever et c'est pour ça que j'appelle cette politique culturelle un projet de société. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys et ministre des Affaires culturelles. Sur le même sujet, je cède la parole à M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Michel Bourdon

M. Bourdon: M. le Président, le discours inaugural auquel nous avons eu droit récemment était ce qu'il est convenu d'appeler une mer de paroles dans un désert d'idées. On a beau le lire et le relire, on ne trouve pas, dans ce discours, des idées susceptibles de mobiliser la population vers des objectifs qui soient attrayants.

M. le Président, c'est un gouvernement essoufflé, fatigué, divisé, partagé, dont la population est fatiguée, d'ailleurs. Il n'y a qu'à aller rencontrer les gens dans nos circonscriptions pour s'en convaincre. Il ne nous propose rien qui puisse pallier à ce que, moi, j'appelle, au Québec, un déficit d'espoir. Il y a trop de personnes, il y a trop de groupes dans la société québécoise qui ne trouvent plus de motifs d'aller de l'avant parce qu'on a un gouvernement qui n'a pas de leadership. On a un gouvernement qui se comporte en comptable et qui n'inspire pas la population.

La ministre des Affaires culturelles a fait un plaidoyer vibrant en faveur de la culture québécoise et je suis tout prêt à croire, M. le Président, qu'elle a la foi, mais il manque les oeuvres. Les oeuvres, ce serait une politique du gouvernement du Québec qui encourage la culture alors que, dans le passé récent, la seule chose que ce gouvernement ait trouvé à faire au sujet de la culture, c'est de la taxer à compter du 1er juillet en appliquant les 8 % de la TVQ à tous les concerts, à tous les spectacles, à toutes les pièces de théâtre, même aux films qu'on va voir et qui vont s'ajouter à deux autres taxes, M. le Président.

Je veux bien qu'on fasse un discours pour dire la fierté qu'on éprouve quand Roch Voisine chante en France ou quand Céline Dion chante à la cérémonie des Oscar, mais il faudrait qu'il n'y ait pas juste la foi, qu'il y ait les oeuvres, et qu'à compter du 1er juillet on ne dissuade pas les Québécois d'aller écouter Roch Voisine, Céline Dion ou d'autres de notre monde culturel

en ayant trois taxes: une de 10 % qui est la vieille taxe d'amusement que les municipalités ont depuis des décennies et avec laquelle Montréal finançait ses investissements dans la culture, plus les 7 % de la sempiternelle TPS que ce gouvernement imite et a l'intention d'administrer, parce qu'il est à genoux devant les fédéraux, et, finalement, à compter du 1er juillet, on veut appliquer les 8 % de la TVQ au monde culturel. C'est donc dire, M. le Président, 10 % plus 7 % plus 8 % composés, parce que les 8 % vont s'ajouter par-dessus les 7 %, lesquels s'ajoutent par-dessus les 10 %, on va arriver à 26,5 %. (16 h 40)

Alors, si la ministre est si fière des spectacles, des pièces de théâtre, des concerts qu'on peut entendre, pourquoi son gouvernement fait-il en sorte qu'il y ait de moins en moins de gens qui y aillent parce qu'il y a des taxes prohibitives dessus? Et ça, M. le Président, je pense que c'est le vieux problème de la foi versus les oeuvres. Il y a le dogme qu'on met de l'avant, mais au plan des oeuvres... Vous avez vu, M. le Président, ce que ce gouvernement a dit récemment. Il est prêt à renoncer à la taxe d'amusement parce qu'elle n'est pas à lui. Voilà un bel exemple d'abnégation, un gouvernement qui dit: La culture est trop taxée, on va enlever la taxe des municipalités. C'est généreux de faire un don à même le butin des autres, en ayant une petite compensation insuffisante pendant quelques années. Donc, M. le Président, c'est un gouvernement qui a de la misère à avoir non pas seulement la foi, mais aussi les oeuvres.

Et puisque la ministre a parié de la culture, je voudrais parier, M. le Président, des communications, puisque la radio et la télévision, au Québec comme ailleurs, sont le principal moyen de divertissement, d'information et de culture de la population. Or, au plan des communications, M. le Président, ça va très mal. On l'a vu encore récemment ici, dans la capitale, à Québec, quand on a vu le maire de Québec, M. Jean-Paul L'Allier, à la tête d'un groupe important d'organisations de la capitale, un regroupement qui en plus du maire de Québec comprend 11 organisations comme l'Université Laval, le ConseH de concertation et de développement de Québec, la Communauté urbaine de Québec, et le Conseil de la culture de la région de Québec, s'opposer à la demande de Télé-Métropole, tête de pont du réseau TVA, de réduire la programmation de la région de Québec via la station de Québec, CFCM, qui est affiliée à TVA.

M. le Président, je comprends le maire de Québec et on comprend aussi les autres organismes d'être inquiets quand on voit qu'en 1986 le gouvernement actuel a aboli la présence de Radio-Québec dans la capitale nationale à Québec et que la même année, CFCM, qui appartient au réseau TVA, donc, à Télé-Métropole, a diminué sa programmation dans la région de Québec de 30 à 21 heures, et maintenant est devant le CRTC, l'organisme fédéral qui réglemente la radio et la télévision, pour passer de 21 à 10 heures. Donc, en à peine cinq, six années, une programmation régionale pour et par les gens de Québec passe de 30 à 21 heures, puis à 10 heures.

M. le Président, il n'y a pas que le réseau TVA qui est en cause dans la région de Québec. Radio-Canada diffuse un maigre 12 heures par semaine dans la région de Québec. De son côté, télévision Quatre-Saisons a le championnat à la baisse avec à peine 9 heures par semaine de télévision dans la région de Québec. C'est dire, M. le Président, que la région de Québec, qui recouvre un bassin de presque 1 000 000 de population, quand on regarde les régions avoisi-nantes desservies par les mêmes stations de télévision, se trouve privée d'une production régionale qui est essentielle notamment en matière d'information, que ce soit les nouvelles ou que ce soit les affaires publiques.

Donc, en plus du maire de Québec, de l'Université Laval et de bien d'autres groupes de la région de Québec, il y a la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, qui regroupe 1100 journalistes, et qui se préoccupe d'éthique professionnelle, de déontologie et également du droit du public à l'information, qui disait, et je cite, M. le Président: «La région de Québec où siège pourtant le gouvernement du Québec vit actuellement une situation désastreuse en matière d'information locale, particulièrement, du côté de la presse télévisuelle.» Un peu plus loin, dans le même communiqué, la Fédération professionnelle des journalistes disait: «La FPJQ tient à rappeler qu'à chaque recul de l'information locale, c'est la capacité des citoyens d'exercer leurs droits démocratiques qui s'érode». Fin de la citation.

Or, M. le Président, le gouvernement fédéral est au coeur du dépérissement de la télévision en région, au Québec. Il n'y a pas que la région de Québec qui soit touchée. On se rappelle, il y a à peine un an et demi, la fermeture, par Radio-Canada, de ses stations régionales à Rimouski, Matane et Sept-îles. Cela a eu un impact sur la télévision de Radio-Canada à Québec puisqu'on lui a donné le mandat de couvrir l'ensemble de l'Est du Québec, ce qui a réduit l'information pour la région de Québec proprement dite.

M. le Président, on se rappelle, il y a un an et quelques mois, que les gens des régions comme la Côte-Nord, le Bas-Saint-Laurent-Gas-pésie et le Bas-du-Fleuve voyaient un soir, à la télévision de Québec de Radio-Canada, un reportage sur les canons à neige au mont Sainte-Anne et, en même temps, pas un mot de la tempête de neige qui leur donnait presque un mètre de neige sur la Côte-Nord, le Bas-Saint-Laurent-Gaspésie et le Bas-du-Fleuve. Et ce n'est pas la faute des artisans de Radio-Canada à Québec, M. le Président. Leur syndicat des journalistes en tête, ils ont vertement, fréquemment protesté contre la fermeture des stations

de Radio-Canada à Matane, Rimouski et Sept-îfes. Mais Québec, l'Est du Québec et la Côte-Nord en particulier dépérissent au plan de la télévision, pour quelle raison? C'est que le gouvernement fédéral, M. le Président, a coupé le financement de Radio-Canada et a dit à Radio-Canada: Fermez des stations de télévision, ça va vous épargner quelques sous.

Mais ce n'est pas la seule chose néfaste que le fédéral ait fait en matière de télévision. Le fédéral, par son CRTC, a mis la télévision francophone du Québec en crise, M. le Président. Et ça, ça s'est fait de la façon suivante: alors qu'en 1987 il y avait de disponible, pour l'ensemble de la télévision francophone du Québec, 21 minutes de commerciaux à l'heure, on est rendus, 5 ans plus tard, à 70 minutes de commerciaux disponibles à l'heure. Qu'est-ce que ça a fait, M. le Président? Les réseaux, les stations de télévision ont perdu des revenus publicitaires parce que ce n'est pas magique, la publicité. On ne triple pas les budgets publicitaires d'entreprises parce qu'on a triplé l'offre de publicité télévisée. Ça a eu comme conséquence, M. le Président, de mettre notre télévision en crise, la télévision francophone, au Québec. Et je ne suis pas le seul à le dire. Le ministre des Communications dit la même chose, que les interventions du fédéral ont fait qu'on a un problème pour notre télévision, au Québec.

M. le Président, la déréglementation de la publicité télévisée a permis, par exemple, à des canaux à péage, sur le câble, d'avoir, en plus du péage payé par les abonnés, de la publicité. Ça a fait que Télé-Métropole, par exemple, qui avait toujours été une machine à produire des profits, a perdu 50 000 000 $ dans les trois dernières années. Et il faut voir dans ces pertes la raison qui fait que Télé-Métropole, vis-à-vis de CFCM-TV de Québec, propose de réduire la programmation locale. Je ne suis pas en train de dire que ça se justifie, M. le Président, mais ça s'explique, parce que le fédéral a mis l'ensemble de notre télévision, au Québec, en difficulté. et ce n'est pas la seule chose que le fédéral ait fait, m. le président. en plus, il a réduit le budget de radio-canada en disant: bien, vendez plus de publicité, ça compensera pour le financement qu'on ne vous procure pas. ce n'est pas dit souvent, m. le président, mais il y a un problème politique, au québec et au canada, au sujet de radio-canada, qui est le suivant: au québec, en français, radio-canada rejoint 40 % de l'écoute de télévision; 40 % de la population, en moyenne, qui regarde la télévision, regarde radio-canada, alors qu'au canada anglais, la proportion passe de 40 % à 10 %. (16 h 50)

C'est dire, M. le Président, qu'encore une fois les deux peuples s'opposent parce que les hommes politiques du Canada anglais et, notoirement, les députés d'arrière-ban conservateurs à Ottawa se soucient très peu de la CBC parce que ce n'est malheureusement pas Radio-Canada de langue anglaise, CBC, que les Canadiens anglais regardent le plus massivement.

À cet égard, M. le Président, le fédéral a, en télévision, une politique qui est absolument néfaste pour le Québec, qui vise à ajouter continuellement des réseaux de télévision, des canaux spécialisés sur le câble, alors qu'au Canada anglais, c'est peut-être plus faisable, pour deux raisons: premièrement, c'est la télévision américaine qui est regardée massivement au Canada anglais et, deuxièmement, le marché, au Canada anglais, est de 21 000 000 d'habitants et, au Québec, il est de 7 000 000 d'habitants.

Donc, on a donné des coups à notre télévision qui ont eu des conséquences. Les réseaux centralisés à Montréal, c'est vrai, ont eu tendance à couper la production régionale pour récupérer de l'argent. Ils ont aussi coupé dans les frais de production, donc dans la qualité des émissions qu'on regarde. À cet égard, le fédéral n'a pas l'air repentant. Le ministre des Communications du Québec a eu raison de dénoncer la loi C-62 qui, en télécommunications, établit encore plus que c'est le fédéral qui donne le ton, que c'est le fédéral qui dirige. C'est un autre exemple de ce que le premier ministre a appelé récemment le fédéralisme autoritaire qui prévaut au Canada.

À cet égard, je peux dire que, si on veut une télévision régionale vigoureuse au Québec, il va falloir rapatrier au Québec les pouvoirs pour se donner des politiques sensées en télévision qui reconnaissent que, d'une part, le marché publicitaire n'est pas illimité, qu'un marché, ça ne se décrète pas par décision d'un organisme comme le CRTC, peut-être revoir la concentration des stations de télévision entre quelques mains seulement et revoir aussi la réglementation de la publicité télévisée pour permettre que notre télévision se porte mieux.

À cet égard, M. le Président, le discours inaugural nous disait une phrase laconique que je cite textuellement: «Le gouvernement entend compléter l'élaboration d'une politique intégrée des communications.» J'espère que le ministre des Communications va être enfin autorisé à faire des demandes, enfin autorisé à dire que le Québec en a assez qu'Ottawa, en télévision, fasse du gâchis.

À cet égard, on ne dit pas assez à quel point c'est méprisant pour nous, Québécois francophones, le fait que, depuis quatre ans, Radio-Canada anglais, la CBC, opère sur le câble un réseau d'information continue, un équivalent canadien de CNN; mais, c'est exclusivement en anglais, ce réseau. Il n'y a pas d'émissions pour les francophones du Canada ou la majorité québécoise francophone. Les gens ne s'en rendent peut-être pas compte, mais toutes les personnes abonnées au câble contribuent 0,10 $ par mois pour faire vivre News World qui n'est disponible qu'en anglais, mais payé par les francophones. Je

trouve ça une situation anormale. C'est un francophone, M. Veilleux, de Radio-Canada, qui est allé au CRTC, à Toronto, il y a deux semaines, dans un mémoire soumis uniquement en anglais au CRTC, demander que News World reçoive une cotisation à la source des Québécois francophones, de 0,15 $ par mois au lieu de 0,10 $. Le service n'est pas disponible en français, mais on fait en sorte qu'il coûte 50 % plus cher. Alors, là, la société distincte, à l'égard de News World... On est distinct dans le sens qu'on est bafoué dans notre langue et on est juste bon à payer. Alors, il faudrait, à un moment donné, que ça cesse.

En terminant, M. le Président, sur un tout autre sujet, je voudrais déplorer le fait que ce gouvernement fasse en sorte, en parlant de fermer l'Hôtel-Dieu de Montréal sans rien mettre pour remplacer l'Hôtel-Dieu de Montréal, que le projet insensé du gouvernement retarde la construction nécessaire d'un hôpital à Rivière-des-Prairies, dans le nord-est de Montréal.

M. le Président, le leader adjoint peut dire ce qu'il voudra, le projet est insensé. Imaginez, on va déménager l'hôpital que Jeanne Mance a fondé et on projette de construire à la place un hôpital où il n'y aura ni obstétrique, ni pédiatrie, mais il y aura le centre québécois des grands brûlés qu'on déménagerait du centre-ville à Rivière-des-Prairies. Or, il y a bien plus de chances dans Pointe-aux-Trembles, dans Rivière-des-Prairies et dans Montréal-Nord, parce que ce sont des jeunes familles qui sont dans ces quartiers, qu'une femme accouche dans l'année que de devenir une grande brûlée. C'est ce projet que des députés libéraux d'arrière-ban poussent de l'avant au détriment, et de la population de Rivière-des-Prairies, et des gens du centre-ville de Montréal.

Bref, M. le Président, je pense qu'on a assez vu ce gouvernement. On a hâte que l'occasion soit donnée à la population de se prononcer sur l'avenir du Québec et de voir le premier ministre respecter sa signature sur le rapport Bélanger-Campeau, respecter sa loi 150 et tenir le référendum. On a hâte aussi que l'occasion soit donnée aux Québécois de mettre à la place un autre parti pour poursuivre une autre politique.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Pointe-aux-Trembles. Sur le même sujet... Oui, M. le leader.

M. Bélisle: En vertu de l'article 213, est-ce que le député de Pointe-aux-Trembles me permettrait une courte question?

M. Bourdon: Sûrement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, courte question, courte réponse. Allez-y, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisie: M. le Président, je comprends, d'après ce qu'il vient de nous dire, qu'il est opposé à la construction d'un hôpital dans l'est de Montréal. Alors, je me pose la question suivante: Est-ce que ce n'est pas égoïste, de la part d'un député de l'est de Montréal, de penser et d'oublier les gens qui demeurent dans l'est de Laval, les gens qui demeurent à Terrebonne, à Mascouche, à Lachenaie, dans toute la portion est de Montréal, et qui n'ont pas d'hôpital? Est-ce que ce n'est pas totalement non fondé et ne pas penser à ses propres électeurs et aux gens des autres comtés environnants qui ont besoin d'un hôpital dans le secteur de l'est de Montréal...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, la question est posée. La réponse...

M. Bélisle: ...et du Grand Montréal métropolitain?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): ...M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Bourdon: M. le Président, je suis entièrement en faveur d'un hôpital dans le nord-est de Montréal, à Rivière-des-Prairies, pour les besoins de la population de Montréal-Nord, de Rivières-des-Prairies et du nord-est de Montréal. Je suis contre un projet qui leur donnerait un centre des grands brûlés, mais pas d'obstétrique pour les femmes qui accouchent et pas de pédiatrie pour les enfants des familles dans ce coin-là. Oui, je suis pour un hôpital, mais pas votre projet de Mirabel hospitalier.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci. Alors, Mme la députée de Mégantic-Compton, je vous rappelle que vous disposez d'une période maximale de 20 minutes. Allez-y.

Mme Bélanger: Merci, M. le Président. Des voix: Bravo!

Mme Madeleine Bélanger

Mme Bélanger: M. le Président, il est déconcertant d'entendre qualifier le discours inaugural par le député de Pointe-aux-Trembles d'une mer de paroles dans un désert d'idées, que le gouvernement est essouflé et divisé. À mon avis, le député de Pointe-aux-Trembles a sûrement entendu le discours inaugural, mais il n'a rien compris, et personne, du côté du gouvernement, ne lui en tiendra rigueur. Les gens, devant le petit écran, ont sûrement compris, tout comme nous ici en Chambre, que la mer de paroles et le désert d'idées étaient ici incarnés et démontrés dans l'intervention du député de Pointe-aux-Trembles, qui n'a proposé aucune solution aux problèmes auxquels sont confrontés les Québécois

et les québécoises. (17 heures)

Ceci étant dit, il me fait grand plaisir d'intervenir aujourd'hui dans le cadre du discours inaugural prononcé par le premier ministre le 19 mars 1992. Rappelons-le, M. le Président, le discours inaugural est le discours qui détermine l'orientation du gouvernement, l'orientation de l'action politique, sociale et économique du gouvernement. Il faut bien le dire, l'action de notre gouvernement, pour la nouvelle session, se traduit en 98 mesures qui ne marquent aucune rupture avec les politiques prises par notre gouvernement du Parti libéral depuis le 2 décembre 1985.

Je veux donc exprimer toute ma satisfaction, en tant que députée ministérielle, face au contenu du discours inaugural. Le gouvernement actuel fait preuve encore une fois, dans ses énoncés de politique et dans ses orientations, d'un réalisme qui traduit bien les préoccupations constantes de la population québécoise.

M. le Président, le Québec, comme toutes les sociétés occidentales, a été frappé par un ralentissement économique depuis maintenant plus de deux ans. Cela démontre aujourd'hui la pertinence d'une politique de gestion rigoureuse des dépenses pratiquée dans les années de croissance économique. Notre gouvernement assume ses responsabilités et prend les mesures les plus adéquates pour délimiter l'impact du ralentissement économique.

Comme le disait le premier ministre du Québec dans le discours inaugural, nous avons agi avec de nombreuses mesures. Une des mesures, c'est le programme Mon taux, mon toit. On le sait, au Québec, on dit que, quand le bâtiment va, tout va. Par la suite, le plan d'accélération des investissements publics: 600 projets ont été devancés. Plusieurs centaines de projets ont été facilités avec Relance PME de la Société de développement industriel, le développement d'une concertation économique entre patrons, travailleurs et gouvernement.

M. le Président, l'application rigoureuse de la politique de contrôle des dépenses du gouvernement de 1986-1987 à 1989-1990 a entraîné un redressement significatif des finances publiques du Québec. Il en est résulté virtuellement un équilibre du solde des opérations courantes en 1989. Les contribuables québécois ont pu bénéficier d'une réduction de leur fardeau fiscal. Cependant, il ne faut pas oublier que la croissance des dépenses peut difficilement être contenue en période de ralentissement économique. Encore aujourd'hui, le Québec est tributaire d'une conjoncture économique difficile et le gouvernement doit faire face à une masse considérable de dépenses incompressibles. Malgré ce contexte défavorable, le gouvernement a maintenu ses efforts de contrôle, a appliqué des mesures de réduction des dépenses très importantes et les nouveaux crédits ont été limités aux activités de soutien de l'économie et aux priorités les plus urgentes.

L'objectif du gouvernement libéral en matière de finances publiques demeure toujours de maintenir un équilibre acceptable entre les coûts des services publics et la capacité financière des contribuables. La structure actuelle des programmes de dépenses crée des pressions réelles sur le niveau de déficit. De plus, il faut continuer à manifester toute la rigueur dans les efforts de réduction des dépenses afin d'éviter le recours aux augmentations d'impôt et, à cet égard, la situation actuelle est problématique.

M. le Président, il est essentiel, pour le gouvernement, d'adopter une attitude à la fois prudente et dynamique en matière de gestion des deniers publics. Ceci est primordial pour permettre au Québec de mieux supporter les conséquences du ralentissement économique et pour lui permettre de bien se positionner dans un marché concurrentiel. Les progrès du Québec sont donc substantiels, mais nous devons rester vigilants car le paysage économique mondial, le taux de chômage encore trop élevé, le retard en matière de technologies de pointe de même que les disparités régionales constituent des préoccupations qui s'ajoutent aux défis que le Québec devra relever avec succès.

M. le Président, l'effort soutenu du gouvernement se poursuivra par la mise en place d'outils stratégiques de développement économique. Comme premier outil, le gouvernement a proposé une stratégie de développement industriel, une stratégie économique axée sur le relèvement de la compétitivité. Notre réussite collective passe aujourd'hui par la transition rapide d'une économie de production de masse à une économie à valeur ajoutée. Basée sur le concept des grappes industrielles, elle vise à accroître la compétitivité des industries québécoises et à renforcer le partenariat. Une grappe industrielle, c'est l'expression consacrée qui représente un ensemble d'industries d'un même secteur d'activité qui interagissent, se regroupent et se concurrencent entre elles pour accroître leur compétitivité et accélérer leur croissance. Dans un monde de plus en plus compétitif, le succès ne sera jamais plus le fruit d'efforts individuels déployés pour atteindre des objectifs à court terme, mais il découlera dorénavant de la mise en commun de nos efforts. C'est sur cette prémisse que repose la stratégie des grappes industrielles.

M. le Président, le maintien et l'amélioration de notre qualité de vie dépendent de notre volonté de changer les choses le plus rapidement possible. Le gouvernement libéral compte sur la concertation économique, le partenariat, la paix industrielle qui s'est établie dans les relations de travail pour faire accéder le Québec à une économie de valeur ajoutée.

Un deuxième outil pour accroître la productivité et la compétitivité de la main-d'oeuvre est

fondé sur une plus grande réussite scolaire et une formation accrue de la main-d'oeuvre. Le gouvernement annoncera un plan d'action pour augmenter de 3 % par an pendant cinq ans le taux de diplomation au secondaire. Voilà, M. le Président, un autre indice d'un gouvernement empreint de réalisme et de responsabilité. Pour mieux répondre à une économie en mutation, aux impératifs de la compétitivité, aux besoins changeants du marché du travail, le développement des compétences devient une exigence incontournable. Pour continuer à prospérer, le Québec n'a d'autre choix que d'investir davantage dans le développement de la main-d'oeuvre. Le dépôt du projet de loi créant les sociétés régionales de développement de la main-d'oeuvre démontre la volonté gouvernementale de soutenir fermement le développement et l'essor économique des régions.

Un troisième outil est basé sur une nouvelle stratégie en matière de développement régional. Ainsi, cette nouvelle stratégie gouvernementale adoptée par le Conseil des ministres consiste à appuyer et à accompagner le dynamisme des régions du Québec. Le gouvernement du Québec a choisi de devenir de plus en plus un État accompagnateur s'appuyant davantage sur le dynamisme des milieux régionaux en matière de développement économique. Cette nouvelle approche vient consolider la prise en charge par le milieu de son propre développement. Elle favorisera la régionalisation de certains budgets sectoriels pouvant atteindre 500 000 000 $ par année. Elle rendra la gestion plus sensible aux véritables besoins régionaux. Rappelons-nous que le comité Bernier avait été chargé en février dernier d'élaborer des éléments de politique en matière de développement régional. C'est donc cette avenue qui a été retenue par le gouvernement du Québec comme une démarche logique pouvant mener, à plus ou moins long terme, à une plus grande autonomie des régions du Québec.

Un quatrième outil repose sur une nouvelle politique en matière d'affaires internationales. Ainsi, afin de répondre aux défis nouveaux engendrés par des mutations profondes sur la scène mondiale, notre ministre des Affaires internationales proposait en septembre dernier une politique en matière d'affaires internationales intitulée: Le Québec et l'interdépendance: le monde pour horizon. Tout cela pour dire, M. le Président, que tous les gouvernements sont de plus en plus obligés de définir et d'adapter leur politique interne en fonction de l'environnement international. Ils sont conduits à agir à la fois pour définir les règles qui encadrent ces échanges et pour développer différentes sortes de collaborations avec les pays étrangers.

La clé de l'avenir réside dans notre capacité de nous adapter à ces nouvelles exigences et de saisir les opportunités immenses qu'offre l'ouverture sur le monde. Le Québec devra développer ses activités internationales autour de deux pôles majeurs: l'Amérique, qu'il faut apprendre à considérer comme notre marché domestique, et l'Europe, avec laquelle il faut privilégier l'établissement d'alliances dans tous les domaines. Également l'on visera à établir des rapports plus substantiels et équilibrés avec certains pays d'Asie. (17 h 10)

Par ailleurs, dans le cadre multilatéral, on accordera une priorité au développement de la francophonie qui représente des enjeux vitaux pour le Québec. M. le Président, ce que je retiens également dans ce message inaugural, c'est la vision, n'en déplaise au député de Pointe-aux-Trembles, de notre premier ministre tout comme celle de notre parti qui supporte ses orientations. C'est cette vision qui vise a assurer le maintien du dynamisme économique du Québec.

Le Parti québécois a pris le pouvoir en 1976. Il a quitté en 1985. Pendant cette période, il a réussi à multiplier la dette par cinq. Un beau succès! Nous en sommes les héritiers. Nous vivons aujourd'hui avec ce triste et lourd héritage. Comme le disait le ministre délégué à l'Administration et président du Conseil du trésor, dans le cadre du 48e congrès de l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec, le 16 janvier dernier, tous les lundis matin, M. le Président, le ministère des Finances règle une facture spéciale d'intérêts de l'ordre de 50 000 000 $, une facture d'intérêts sur des emprunts contractés pour financer des dépenses courantes. Une facture d'intérêts qui se finance à même les impôts de cette année pour payer des services reçus dans les années antérieures. C'est ça, la gestion du Parti québécois, M. le Président.

M. le Président, s'il est exact d'affirmer, comme M. Johnson, que des déficits occasionnels peuvent être de faible conséquence et s'avérer appropriés pour soutenir l'économie en période de ralentissement économique, on voit maintenant combien néfaste peut s'avérer un recours systématique au déficit pour financer des opérations courantes tel que l'a pratiqué le gouvernement péquiste. Ceux qui réclament aujourd'hui des augmentations de dépenses sans hausses d'impôt ou même avec des baisses d'impôt nous demandent d'emprunter un chemin qui ne mène nulle part. Comme le disait le premier ministre dans son discours inaugural, ils prennent un risque énorme avec leur crédibilité.

En terminant, M. le Président, permettez-moi de féliciter notre gouvernement qui a à coeur de ne pas endetter le Québec pour les générations futures. L'avenir appartient davantage aux jeunes, et c'est en leur donnant les moyens de se réaliser pleinement qu'ils seront en mesure de relever les défis de l'an 2000. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci,

Mme la députée de Mégantic-Compton. Je cède la parafe à M. 1e député d'Anjou. Vous disposez d'une période maximale de 20 minutes. M. le député, allez-y.

M. Pierre Bélanger

M. Bélanger (Anjou): Je vous remercie, M. le Président. Alors, comme vous savez, M. le Président, je suis le dernier député à avoir été élu en cette Chambre, à l'issue de cette défaite victorieuse du 20 janvier dernier du Parti libéral du Québec. Donc, depuis le 10 mars dernier, je siège ici parmi vous. Donc, c'est un peu avec cet esprit du citoyen ordinaire que j'attendais ce discours inaugural qui allait être prononcé. On m'avait averti, on m'avait dit: Tu vas voir, c'est des choses vraiment importantes, c'est l'orientation du gouvernement qui va être annoncée dans ce discours qui est très important.

Donc, je m'attendais à beaucoup. Je m'attendais à beaucoup, surtout que je sors, M. le Président, d'une élection qui m'a mis en contact continu avec les électeurs, des électeurs qui m'ont parlé, qui m'ont dit qu'ils étaient en colère, qu'ils étaient déçus de ce gouvernement. Qu'est-ce qu'on ressentait aussi chez ces gens? C'est un sentiment de morosité qui est à la fois causé par la situation économique et à la fois par cette situation constitutionnelle dans laquelle on est embourbés présentement. Ce qu'on lisait aussi chez les gens, c'est ce désespoir. Ce désespoir, on a peine à voir la lumière au bout du tunnel. De plus, ces citoyens se sentent écrasés, écrasés par les taxes, écrasés par la dette, écrasés par cette incertitude aussi qui plane sur la situation présente.

Donc, surtout après le message du 20 janvier par lequel les gens du comté d'Anjou m'ont élu, je m'attendais à une réaction de la part de ce gouvernement. J'ai dit: Ce n'est pas possible. J'ai dit: Ils vont réagir, ils vont donner un coup de barre, ils vont annoncer quelque chose pour tenter de répondre à ce cri, finalement, que les citoyens d'Anjou leur ont envoyé. Je peux vous dire, M. le Président, qu'il y a bien des électeurs du Québec qui auraient voulu être à la place des électeurs d'Anjou et qui auraient voulu avoir une urne devant eux pour pouvoir justement déposer un bulletin de vote et envoyer un message à ce gouvernement.

Donc, M. le Président, j'ai écouté attentivement ce discours d'ouverture, j'ai pris des notes. De prime abord, on annonce beaucoup de choses: projet de loi de ci, projet de ci, projet de ça. J'ai été impressionné, j'ai pris des notes. Alors, la première chose que j'ai faite, M. le Président, après avoir entendu ce discours, je suis, évidemment, allé voir les recherchistes pour comparer ce qui était annoncé par rapport à ce qui avait été annoncé lors des précédents discours, puisque je n'avais pas entendu ces précédents discours. Qu'est-ce que je constate,

M. le Président? Des vieux discours, des vieux projets de loi dont on nous parle depuis plusieurs années qui n'ont jamais abouti, qui n'ont jamais vu le jour.

On vit dans le passé. Ça serait peut-être le qualificatif que je pourrais emprunter pour dépeindre ce discours inaugural. On parle de ce qui a été fait au cours des années. J'ai entendu tout à l'heure la députée de Mégantic-Compton parler de ce qu'on aurait pu faire en 1976 ou en 1980, c'est quand même bien. Elle remonte uniquement à 1976 ou 1980. J'ai entendu d'autres députés qui remontaient jusqu'à 1960 et 1966, M. le Président. En 1960, je venais au monde, et, en 1966, j'avais 6 ans. Alors, vous pouvez imaginer l'effet que ça me fait quand on me sort des arguments comme ça. Ça ne me fait pas un grand effet. Je pense que ça fait à peu près le même effet à la population en général quand on sort des vieilles antiquités comme ça, de ce qui a pu se faire en 1960. On dirait que ces gens cherchent à se féliciter pour ce qui aurait pu être fait dans le passé, comme un peu pour constater leur impossibilité d'agir sur la situation présente.

C'est le temps d'agir, M. le Président. C'est maintenant que les gens la vivent, la récession. Ce n'était pas il y a 10 ans, ce n'était pas il y a 20 ans, c'est maintenant qu'ils la vivent, c'est maintenant qu'ils s'attendent à quelque chose de ce gouvernement. Et qu'est-ce qu'on voit? Rien. Absolument rien! Au contraire, dans le discours du premier ministre, on cherche à expliquer pourquoi on est dans une récession. Ça ne prenait pas un discours inaugural pour nous apprendre que, tout simplement, les États-Unis vivent une récession importante, qu'on est à une époque de globalisation des marchés. Ça, on le savait. Ça ne prend pas une tête à Papineau pour vraiment comprendre ça, et encore moins un discours inaugural, M. le Président.

Alors, on assiste plutôt aux bases d'un genre de gestion du laisser-aller. Le système va se remettre à fonctionner par lui-même, par l'opération du Saint-Esprit. Attendons que les forces extérieures cessent d'agir et l'étincelle va jaillir, l'économie va se remettre à fonctionner, l'emploi va revenir. Ça me fait penser un peu à certaines politiques que le président Reagan avait essayées, dans les années quatre-vingt, et qui ont, je pense, montré qu'elles étaient tout à fait inefficaces. On appelait ça les «Reaganomics», M. le Président. Autant, je pense, on a fait la preuve que le communisme ne fonctionne pas dans ce bas monde, autant on a fait la preuve que le capitalisme intelligent, c'est-à-dire celui qui règle tout uniquement par ses forces, sans aucune intervention de l'État, n'existe pas. Le gouvernement se doit d'agir avec leadership et de donner des directions à cette économie s'il veut que la situation s'améliore et s'il veut donner un changement à cette situation.

J'entendais aussi des gens qui accusaient systématiquement notre parti de demander des

augmentations d'impôt ou d'accumuler le déficit tout simplement pour financer des projets. Ce n'est pas ça qu'on demande. Je pense que les gens d'en face, ou ils entendent mal, ou ils écoutent mal, ou ils ne veulent pas comprendre. Nous, ce qu'on leur dit, c'est que, souvent, uniquement le fait de mieux gérer ce qu'ils ont pourrait donner des résultats. Gérons donc mieux ce qu'on a et, une fois que ça sera mieux fait, eh bien, à ce moment-là, peut-être qu'on aura des résultats et on n'en sera pas tout simplement à faire des constats, des constats d'échec, des constats d'immobilisme.

Je peux vous dire, M. le Président, que dans le comté d'Anjou il y a des choses qui auraient pu être faites et qui n'ont pas été faites. Le comté d'Anjou fait partie de l'est de Montréal et vit cette récession d'une façon, je dirais, peut-être deux fois plus difficile encore que les autres régions du Québec, et je m'explique. C'est-à-dire qu'au moment où l'est de Montréal sortait de cette récession économique elle avait encore peine à se remettre d'un genre de transition de son économie, car elle passait d'une économie basée sur l'industrie lourde à une nouvelle industrie de haute technologie. Donc, juste comme on sortait de cette première récession, M. le Président, la deuxième vint nous frapper de plein fouet. (17 h 20)

Donc, on peut comprendre que l'impact de cette deuxième récession soit d'autant plus grand pour les gens d'Anjou. On a un parc industriel qui a une certaine vigueur et qui, je pourrais même dire, par rapport à certains parcs industriels, se comporte très bien, mais on a quand même de sérieux problèmes avec le parc industriel si on veut le développer. En effet, il y a le prolongement de l'autoroute 25 qu'on demande depuis longtemps. Et, là, je vois le leader adjoint qui réagit suite à ces propos.

Une voix: Bientôt, bientôt.

M. Bélanger (Anjou): Le prolongement de la 25 qu'on nous annonce pour bientôt, enfin.

Une voix: Bientôt.

M. Bélanger (Anjou): Enfin! On le demande. On nous l'a promis en 1985, on nous l'a promis en 1989 et, là, ça a l'air qu'en 1993, 1994, 1995 ou 1996 - en tout cas, avant l'an 2000, j'espère - on va l'avoir. Tant mieux! J'entendais un ministre qui nous disait: On ne relance pas l'économie en construisant des routes. Ah non? Bien, je pense que ce ministre oublie quelque chose. Un des critères primordiaux pour une entreprise pour s'installer dans un parc industriel est la facilité de pouvoir faire transiter matériel et main-d'oeuvre. Or, si on a des voies rapides, proches du parc industriel, mais qu'on a peine à avoir accès à ces voies rapides, je peux vous dire quelque chose: Ça va être très difficile d'attirer des nouveaux investisseurs et de continuer vraiment un développement durable de l'économie d'Anjou et de son parc industriel. Le prolongement de la 25, ce serait facile. Le prolongement de Henri-Bourassa, ce serait très facile. On en parte, on en parle et, là, on nous l'annonce. Tant mieux! Tant mieux, mais j'ai hâte de la voir. Les gens d'Anjou ont hâte de la vivre.

On attendait aussi une politique de décontamination des terrains. Vous savez, l'est de Montréal est tributaire un peu de son passé de l'industrie lourde. Il a des terrains contaminés qui font en sorte que c'est très difficile de prévoir un développement rapide de certaines zones de l'est de Montréal. Alors, on s'attendait à un plan de décontamination ou, au moins, à une politique gouvernementale, avec des échéanciers clairs, précis, vérifiables. Absolument rien dans le discours inaugural, M. le Président.

Un autre dossier qui me tient à coeur, M. le Président, c'est celui de l'aide juridique. J'ai pu pratiquer le droit pendant les neuf dernières années et, durant les cinq premières années de ma pratique, au moins, j'ai participé régulièrement au régime de l'aide juridique. Je pense que le régime de l'aide juridique est un peu la pierre angulaire de tout le principe d'accessibilité de la justice aux citoyens. Alors, j'ai cherché dans le discours un message ou, pour reprendre une expression de la députée de Mégantic-Compton, une orientation du gouvernement. J'ai trouvé cette phrase qui, vous allez le constater avec moi, est magnifique: «L'admissibilité à l'aide juridique des Québécois économiquement défavorisés fera l'objet de modifications.» Bravo! Bravo! Avec ça, on est servis. On est vraiment servis, mais il n'y a aucune annonce là-dedans. Où est l'orientation? Est-ce qu'on va vers une plus grande accessibilité? Va-t-on restreindre l'accessibilité? Va-t-on baisser, hausser les seuils d'admissibilité? Questions sans réponse.

Au moins, le ministre de la Justice avait eu le courage, lors du dernier sommet de la justice, de présenter des paramètres d'un nouveau régime d'aide juridique. Il faut dire que tous les intervenants se sont mis à lever les boucliers quand ils ont vu ce nouveau régime d'aide juridique proposé, mais, au moins, il avait le courage de présenter quelque chose. Il va falloir retourner au travail. Il va falloir travailler ce nouveau régime, mais, au moins, c'est une orientation. On ne peut pas en dire autant du discours inaugural du premier ministre. Il n'y a rien là-dedans, absolument rien qui puisse me permettre d'espérer ou d'entrevoir ce qui va arriver du système de l'aide juridique. Pourtant, c'est depuis 1985 qu'il ne s'est rien passé dans le dossier de l'aide juridique. Il y a eu une petite modification des barèmes en 1985, mais, globalement, c'est depuis 1982 qu'il n'y a pas eu de modification du régime de l'aide juridique. Il y a des gens qui attendent,

et c'est les gens les plus démunis de la société qui sont touchés par ça.

Alors, dans ce discours, c'est toute la volonté d'un gouvernement responsable qui est absente. Aucune audace qui pourrait se traduire par des projets concrets de relance; aucune vision qui pourrait orienter les gens vers un avenir optimiste; aucun courage qui pourrait se traduire par des prises de position dans des dossiers.

Peut-être que l'aspect le plus décevant de ce discours, M. le Président, ça a été le long et vibrant plaidoyer du premier ministre en faveur du fédéralisme. Au moins, un bon aspect de ce discours a été de nous révéler le vrai visage de notre premier ministre. Il y en a dans mon comté qui pensaient que le premier ministre pourrait être celui qui mènerait le Québec à la souveraineté. Bien, maintenant, ils ont leur réponse: La souveraineté, non merci. C'est le fédéralisme! Le fédéralisme à genoux, debout, on ne le sait pas encore, mais un fédéralisme, de toute façon. On y est condamné. Et, dans le discours inaugural, de toute façon, on a eu droit à une belle démonstration. On est enclavé, on n'a pas le choix, on est condamné. C'est ça. Alors, là-dessus, il n'y a plus d'ambiguïté possible, et je vois mal maintenant comment le premier ministre, une fois acculé au pied du mur, en attendant toujours ces offres qui tardent à venir, pourrait changer d'orientation et essayer de nous montrer un visage souverainiste. Il n'en a pas, de visage souverainiste. Il en a eu un uniquement quand il était mal pris, il était dans une position délicate. Mais son vrai visage et son coeur, ils sont fédéralistes.

Moi, je respecte ça, M. le Président. Je respecte ça qu'il soit fédéraliste. Moi, après tout, je suis un souverainiste. Alors, quand j'entends, des fois, certaines personnes qui vont nous traiter, ici, de séparatistes ou de souverainistes, moi, ça ne m'insulte pas. Je suis souverainiste. Je suis séparatiste. Et ça me fait un peu penser, M. le Président, à une certaine remarque qu'avait faite le premier ministre lors de mon entrée à cette Assemblée nationale. Il me disait que je me sentirais peut-être mal à l'aise de me retrouver parmi certains de mes collègues dans ce parti après un recul, une absence, après avoir quitté mon parti. Mais je pense que le premier ministre est assez mal placé pour pouvoir me faire un reproche là-dessus. En effet, je regarde dans les notes biographiques des députés; en 1976, on voit que M. Bourassa, le premier ministre, a amorcé une période d'étude et de réflexion. On peut maintenant comprendre que le premier ministre est revenu à son parti après cette période d'étude et de réflexion. Alors, je vois mal comment on pourrait essayer de me faire un reproche là-dessus, ou essayer de porter un blâme là-dessus.

M. le Président, je me sens bien dans ce parti parce qu'on a toujours eu un seul discours, celui de la souveraineté du Québec. C'est la souveraineté du Québec qui nous tient à coeur; c'est la souveraineté du Québec pour laquelle on va travailler. Et ce discours a toujours été tenu par notre parti et par notre chef, c'est pourquoi je m'y sens bien. Puis je me sens bien parmi mes collègues députés parce que, dès le début, ils m'ont épaulé, ils m'ont impliqué dans les dossiers qui touchaient l'avenir du Québec. Et ils ont fait en sorte que je me suis senti tout de suite partie intégrante de cette équipe de députés.

Mais ce qui m'embête le plus, comme je vous le disais, dans ce discours, M. le Président, ce n'est pas nécessairement ce genre de credo du fédéralisme, c'est peut-être le moment choisi pour faire un tel discours. On est à une étape cruciale des relations fédérales-provinciales, ou un genre de négociation de la dernière chance, comme pourraient l'appeler mes collègues fédéralistes. Alors que, normalement, on devrait montrer notre force derrière une position ferme quand on veut négocier, le premier ministre expose sa faiblesse et celle du Québec, laissant entendre un peu que la position du Québec est un genre de bluff, qu'on est prêt à..., que ce n'est pas dans le ciment; il n'y a rien dans le ciment; la loi 150, ce n'est pas dans le ciment. Et, on supplie, finalement, le Canada de nous faire des offres. S'il vous plaît, faites-moi des offres, je suis mal pris. C'est un peu le message qu'on fait. Et je peux vous dire quelque chose, dans le Canada anglais, c'a été perçu comme ça. C'a été perçu comme si on laissait tomber les gants. Est-ce qu'on s'attend, avec une telle attitude, vraiment, qu'on va avoir des offres bonifiées du fédéral? Est-ce qu'on s'attend réellement à ça? Je pense que c'est vraiment faire preuve d'un manque de clarté que d'imaginer ça.

Mais, il y a un peu de tout. Il y en a un petit peu pour tout le monde dans ce discours, M. le Président. On voit, à un moment donné, peut-être pour plaire à certains souverainistes qu'il pourrait encore y avoir dans le parti, le Parti libéral, s'il y en a: «La fierté du peuple québécois ainsi que sa dignité ne sont pas négociables». Ah! Beau principe! Beau principe, mais, maintenant, il va falloir voir de quelle façon on va pouvoir appliquer ce principe après avoir laissé tomber la défensive, après avoir abandonné notre position. (17 h 30)

En terminant, M. le Président, j'espère sincèrement que le Québec va sortir le plus rapidement possible de cette récession qui l'étouffé et qui l'empêche de progresser. J'espère aussi qu'il va sortir de ce marasme constitutionnel pour prendre une option claire vers la souveraineté. Mais si le Québec sort de cette récession, je peux vous dire quelque chose, ce ne sera certainement pas grâce aux mesures annoncées dans le discours inaugural de ce gouvernement. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député d'Anjou. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Est-ce que le député d'Anjou me permettrait une courte question, en vertu de l'article 213?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député d'Anjou, en vertu de l'article 213, vous pouvez ou non consentir à répondre à une question que veut vous poser le leader adjoint du gouvernement. Est-ce que vous y consentez?

M. Bélanger (Anjou): Si elle porte sur mon discours, oui.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Elle doit nécessairement porter sur votre discours. Courte question, courte réponse. Allez-y, M. le leader.

M. Bélisle: Comment, M. le Président, le député d'Anjou peut-il concilier sa position favorable au prolongement de la 25 et du pont dans l'est de Montréal avec la position exprimée par tous les députés péquistes de l'est de Montréal - Pointe-aux-Trembles, Hochelaga-Maison-neuve, Mercier - qui s'y opposent? Est-il la seule exception à la ligne de parti du régiment péquiste, énoncée lors d'une conférence de presse à Montréal en 1991?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député d'Anjou, votre réponse, s'il vous plaît.

M. Bélanger (Anjou): Je pense que le député de Mille-Îles aurait eu intérêt à lire ma plateforme électorale et à lire les déclarations que j'ai faites pendant ma campagne électorale; je pense que ça aurait mis toute la lumière sur cette question. Quand j'ai parlé du prolongement de la 25, jamais vous ne m'avez entendu parler du pont. La priorité, pour le comté d'Anjou, ce n'est pas un pont vers Laval. Le pont pour Laval, je crois que c'est un des enjeux ou une des priorités pour les gens de Laval, qui l'ont demandé.

Ce que j'ai toujours demandé - parce que je suis conscient, justement, des limites de payer de ce gouvernement, des limites budgétaires - c'est un prolongement, par étapes, de l'autoroute 25 jusqu'au boulevard Henri-Bourassa. C'est ça que j'ai demandé. Alors, ne me demandez pas ma position par rapport au pont. Le pont, ce n'est pas un dossier d'Anjou. Moi, le dossier que j'ai défendu dans ma campagne électorale, que je continue à défendre, c'est le prolongement de la 25 au moins jusqu'à Henri-Bourassa.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci...

M. Bélanger (Anjou): Quand on arrivera au pont, on arrivera au pont.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député. Sur le même sujet, je cède maintenant la parole à M. le député de Fabre. Vous disposez de 20 minutes, M. le député.

M. Jean A. Joly

M. Joly: Merci, M. le Président. J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt, je pourrais dire, un des premiers discours de notre jeune député d'Anjou. À le voir arriver ici, en Chambre, cet après-midi, armé de sa liste d'épicerie, nous disant, en contrepartie, qu'il comprend que la capacité de payer d'un gouvernement est quand même limitée, à ce moment-là, je me suis demandé qui avait pu l'influencer dans le choix de son discours ou dans les déclarations qu'il nous a faites. Mais ça se doit de commencer quelque part. Souvent, on est influencé, comme je le disais, par certains modèles. J'espère qu'il n'a pas été influencé par le député de Lévis, le postier de la couronne, qui a toujours prêché la transparence mais qui, lui, pendant quand même une certaine période, s'est promené avec un chèque du gouvernement, qu'il devait remettre à ses commettants qui attendaient le chèque. Et, durant ce temps-là, les intérêts couraient, mais pas au bénéfice des récipiendaires. Alors, si c'est les modèles qui l'inspirent, je pense qu'il fait déjà fausse route. Je tiens à lui dire aussi que, des fois, dans Anjou comme ailleurs, des erreurs de parcours, ça arrive. Alors, peut-être que, dans son cas, c'est justement le reliquat d'une erreur de parcours.

Il faudrait aussi qu'il pense et qu'il réalise qu'on vit actuellement un climat économique qui n'est pas propre au Québec, qui est quand même, je dirais, passé la frontière, même nord-américaine, et que, la situation étant conjoncturelle, il n'y a pas tellement autre chose à faire que, tout comme lui, espérer que la récession se termine. Parce que, quand c'est conjoncturel, des fois, on n'a pas beaucoup de contrôle sur ça. Si c'est structurel, là, c'est différent. Et c'est là que le gouvernement libéral embarque. La preuve, c'est que vous avez eu, tout dernièrement, un rapport qui a été déposé, qui est le rapport Poulin, qui nous parle justement de structures et qui nous parle d'implications gouvernementales.

Alors, M. le Président, il me fait plaisir, moi aussi, à mon tour, aujourd'hui, d'intervenir sur le discours inaugural prononcé par notre premier ministre, M. Bourassa, le premier ministre du Québec, homme de grande valeur - je pense que je n'ai pas à le dire, c'est déjà confirmé, et confirmé depuis de nombreuses années - qui nous a livré un discours inaugural, qui, d'après l'Opposition, ne dénote pas ou ne démontre pas, d'une façon claire, les orientations de notre formation, de notre gouvernement. Eh bien, je pense, autant pour le député d'Anjou

que pour le député de Lévis qui nous disent que c'est vide de sens, qu'il y a sûrement des choses qu'ils n'ont pas comprises. Ils n'ont pas compris notre orientation, qui n'est pas une orientation à la pièce, mais plutôt une orientation globale qui vise à favoriser des mesures qui, nécessairement, demandent ce qu'on appelle un investissement dans le temps et non pas une dépense dans le temps. Ce n'est pas un gouvernement de cataplasme, comme on disait. Ce n'est pas un gouvernement de ruban sur une jambe de bois. C'est un gouvernement qui a une vision beaucoup plus étendue et qui pense, en retour, à aller dans ce qu'on appelle des politiques qui vont nous rapporter autant à moyen qu'à long terme.

D'ailleurs, dans le discours inaugural, M. le Président, on a quand même soumis 98 points ou 98 mesures qui démontrent, sans équivoque, sans ambiguïté d'aucune façon, que dans notre gouvernement il y a ce qu'on appelle une continuité. Pourquoi? En 1985, on a fait l'inventaire de l'héritage qu'on prenait. On pensait qu'on avait une marge de manoeuvre. On pensait vraiment qu'on avait une marge de manoeuvre, mais, par contre, il y avait eu des petites cachettes. Nécessairement, quand on a levé ou soulevé le couvercle, on s'est aperçu que la vérité n'était peut-être pas tout à fait ce qu'on pensait et on a réalisé que la marge de manoeuvre avait été estompée par le déficit. On l'a soulevée plusieurs fois, la question du déficit, mais il faut quand même se le rappeler. Il faut quand même ne pas oublier qu'en 1976 le déficit de l'année était de 750 000 000 $ - le déficit de l'année, en 1976. En 1985, 9 années après, près de 4 000 000 000$, M. le Président. 4 000 000 000 $! Si on additionne ces 4 000 000 000 $ pour l'année 1985 et les déficits des années antérieures, on s'est ramassé avec un budget de 35 000 000 000 $, passant de 5 000 000 000$ à 35 000 000 000$.

Ça veut dire quoi, ça, dans le concret, dans le quotidien? Ça a été dit, M. le Président. Ça, ça veut dire qu'à tous les jours de la semaine, le gouvernement actuellement en poste se doit de payer 7 000 000 $ d'intérêts sur la dette accumulée. Dieu merci! M. le Président. En 1985, la population a vu clair et a dit: C'est fini! C'est fini la mascarade! Ce n'était pas une récréation, c'était une mascarade. On avait un masque. On marchait sur un nuage et on créait des attentes pour cette population qui ne demandait pas mieux que de se faire dire une forme de vérité. Mais quand on n'est pas là, quand on n'est pas en arrière du rideau et qu'on ne sait pas ce qui se passe, bien, c'est exactement ça qui est la situation d'aujourd'hui qui fait que le gouvernement, depuis 1985, s'évertue à rembourser une dette qui a été créée par des gens qu'on peut appeler «des rêveurs». Vous savez, des fois, on qualifie certaines gens d'hommes et de femmes de lettres. Il en faut, mais ça prend aussi des hommes et des femmes de chiffres. Alors, ça, ça n'existe pas, du moins, semble-t-il, avec la formation du PQ. (17 h 40)

Donc, des promesses, des attentes qu'on crée, des engagements qu'on prend à gauche et à droite et qu'on ne respecte pas.

M. le Président, j'écoutais le jeune député d'Anjou qui disait: Pourquoi revenir aux années soixante? Pourquoi revenir à l'année 1966? C'est facile à comprendre quand on veut y voir clair et qu'on veut voir qu'en cours de route on se doit de se comparer avec des modèles. Et le modèle du temps, c'était le Parti libéral. Le parti des grandes réalisations. On a commencé avec ce qu'on peut appeler «la Révolution tranquille».

M. Lesage est arrivé et a dit: On fait un ménage. On s'attelle en avant de la charrue et on va faire arriver des choses. Vous savez, M. le Président, au risque de me répéter, je dis toujours qu'il y a trois sortes ou trois catégories d'individus ou de gens: ceux qui font arriver des choses; ceux qui regardent arriver les choses, et ceux qui se demandent ce qui arrive. Alors, on a connu ça trop longtemps, des gens qui se demandaient ce qui arrivait et qui venaient en réaction. Donc, gouvernement des grandes réalisations en débutant avec l'ère de M. Lesage, c'est pour ça qu'on y revient, M. le Président.

Tout le système d'éducation, c'a commencé où? Pour avoir nécessairement été hypothéqué en chemin par le fait qu'on a pris de mauvaises décisions et qu'aujourd'hui on récolte, nécessairement, ce que j'appelle la formation de transit, qui s'est accrochée en cours de route un peu par accident, par erreur, qui a nécessairement changé le système, aujourd'hui on récolte au-delà de 35 % de décrocheurs. Alors, l'ère de M. Lesage, l'éducation, un système de santé, c'est encore un gouvernement libéral.

Quand on regarde la Société générale de financement, quand on regarde la Caisse de dépôt, quand on regarde l'hydroélectricité, vous êtes allés là pour couper des rubans. La seule idée qu'ils ont eue en neuf ans, et qui semble leur coller à la peau, c'est la séparation, la souveraineté. Des idées neuves, des idées nouvelles, on n'en voit pas. C'est une formation qui est à la remorque. Comme on dit, M. le Président, en termes un peu loufoques: Ils aiment ça, accrocher leurs grelots en arrière de quelqu'un qui a des idées, ils vont chercher les crédits, mais l'action, ce n'est pas eux autres qui la mettent de l'avant.

Alors, vous savez, M. le Président, je ne veux pas qu'on se glorifie avec toutes ces mesures qu'on a mises de l'avant et tous ces succès que le Parti libéral a mis de l'avant avec toutes ses grandes réalisations et ses grandes idées. Oui, je pense, M. le Président, que la population réalise qu'actuellement, c'est une situation difficile. On a fait appel plusieurs fois à sa bonne foi, à sa bonne volonté et à sa compréhension. Ce n'est pas sorcier à comprendre, quand vous avez un budget de 37 000 000 000 $ et qu'il y a 41 000 000 000 $

de dépenses, et qu'on ramène ça à une proportion plus terre à terre, c'est un peu comme quelqu'un qui a 37 $ dans ses poches et qui en dépense 41 $. Alors, c'est bien sûr qu'il y a un manque à gagner quelque part. Mais, là, on parle de plusieurs zéros. Alors, c'est ce qui fait qu'étant dans une situation un petit peu plus difficile, avec un chômage qui a pris la vedette, il ne faut quand même pas se le cacher, mais, comme je dis, qui n'est pas propre au Québec... Ça a transféré de l'autre côté de la frontière et même on pourrait dire que c'est une situation quasi mondiale.

On parle du négatif, M. le Président. J'écoutais un député de l'autre formation de l'autre côté qui parlait de la fermeture d'usines. Il parlait nécessairement de chômage. C'est bien sûr, mais c'est l'aspect négatif d'une mauvaise nouvelle qui se doit quand même d'être publiée, qui se doit d'être dite. Ce qu'on oublie de dire, c'est qu'il s'en ouvre des usines, c'est qu'il s'en ouvre des industries un peu partout à travers la province. Je parlais dans la région de la Mauri-cie... dans la région, disons, du Cap-de-la-Madeleine. On me faisait mention, par exemple, de Le Culottier, 250 emplois. C'est fait, c'est réglé. Ça, on n'en parle pas. On ne parie pas non plus des 1100 emplois, M. le Président, sous la responsabilité de CP, encore là dans la grande région de la Mauricie. Encore ce matin, on voyait que Honda vient investir au Québec. Alors, ça, ça fait souvent la petite manchette, mais ce qui fait la grosse manchette, c'est toujours l'aspect négatif. C'est pour ça que M. Bourassa, à travers sa déclaration ou, si on peut dire, son discours comme tel, nous a amenés à réaliser que, dans le quotidien, il y a un paquet de choses qui peuvent se dire, il y a un paquet de choses qui peuvent se faire, mais si on n'a pas une vision globale de ce qu'on a comme objectifs, bien, c'est certain qu'en cours de route on va aussi être jugé à la pièce comme gouvernement, et ce n'est pas notre lot parce que c'est justement cette vision globale qui a été établie depuis 1985.

M. le Président, de façon à ne pas manquer à ce qui a été dit par M. le premier ministre, j'aimerais quand même vous lire quelques-uns des objectifs et quelques-unes des façons, disons, d'en arriver à régler ces objectifs pour les prochaines années, objectifs qui ont été quand même concertés via toute la deputation du côté ministériel. Ceci est le fruit, M. le Président, d'une consultation à travers chacun des comtés de la province. Alors, si la population nous dit clairement c'est quoi les besoins, c'est quoi les problèmes, eh bien, maintenant, c'est a nous d'imaginer les solutions et de faire ensemble qu'on puisse y travailler.

Alors, M. Bourassa disait: «Favoriser l'investissement par une fiscalité concurrentielle». Ça veut dire quoi, ça? Ça, ça veut dire que si ici, au Québec, il se paie plus d'impôts que dans une autre province, bien, à ce moment-là, notre main-d'oeuvre qualifiée peut peut-être avoir intérêt à s'en aller ailleurs parce qu'elle va payer moins d'impôts. Ça, c'est la logique.

Le PQ, le parti de l'Opposition, voudrait nécessairement qu'on baisse les taxes, qu'on fasse des investissements, qu'on crée des emplois, qu'on baisse le déficit, qu'on n'augmente pas les impôts, mais ils vont la prendre où, la piastre? Je commence à croire qu'ils ont été influencés dans le temps du régime Caouette et que, partant de là, ils y ont assez cru que tout ce qu'ils ont fait, c'est qu'ils ont changé le nom de leur formation puis ils ont mis une étiquette de plus: «péquiste», «indépendantiste», «séparatiste», parce qu'au Québec on n'est pas bien. C'est l'anarchie; il n'y a pas de paix, il n'y a pas, disons, de liberté d'action, il n'y a pas de respect.

Alors, c'est ça qu'ils se sont dit. À n'importe quel prix, on coupe les liens parce que nous autres, on l'a, la vérité. Ils l'avaient, la vérité, quand ils avaient Quebecair qui était dans les airs, M. le Président. 110 000 000 $ de perte, même pas un emploi de créé. Alors, si c'est ça qu'on veut avoir comme leaders pour diriger le Québec et administrer pratiquement ou au-delà de 40 000 000 000 $ par année, M. le Président, je suis drôlement inquiet.

Je ne pense pas qu'on puisse élire un gouvernement strictement sur une option, sur une orientation ou simplement sur une idée qu'ils font la leur, bien sûr, mais ils ne disent pas toute la vérité à la population. Quand ils disent que ça ne coûte rien, quand ils disent que ça va être facile, plus facile de rapatrier tout ce monde-là et de les replacer, ça me fait penser à Dukakis, dans l'État du Massachusetts. Pour bien paraître, ce qu'il avait fait, M. le Président, il y avait un taux de chômage de 2 %, il avait mis tout le monde sur le «payroll» de l'État. Bien, aujourd'hui, le Massachusetts, ils sont dans la misère. Ils sont dans la misère puis dans la misère noire.

Vous savez, il y a deux sortes de gouvernements, M. le Président: être et paraître. Bien, moi, j'aime mieux qu'on soit moins flamboyant, qu'on soit moins à spectacle, parce que je me souviens très bien qu'il y a quelques années, afin d'être à spectacle et d'être publicise, on se servait des fonds de l'État. On a été obligé, M. le Président - peut-être que vous n'en croirez pas vos oreilles - de passer une loi au cas où quelqu'un d'autre aurait les mêmes idées en cours de route, puis que ça passe inaperçu, puis qu'on dépense l'argent de l'État pour publiciser ses orientations politiques. Ça, je pense que c'était absolument aberrant et indécent. (17 h 50)

Vous savez, quand on parle de transparence, on pourrait en parler longtemps. Puis le député de Lévis, ça, c'est un député à spectacle, un député dans la tradition, la bonne vieille tradition des premières années du gouvernement du

temps. Puis c'est lui qui va servir de modèle au jeune député d'Anjou. Ça m'inquiète, M. le Président! Ça m'inquiète vraiment. Vous savez, des fois, ce n'est pas parce qu'on diverge d'opinion au niveau des formations politiques... Des fois, on a de la bonne semence dans notre jeunesse. Et, avant de la mettre en terre, on est en train de la pourrir. Puis, ça, c'est inquiétant. C'est inquiétant. Puis on ne peut pas blâmer un jeune qui arrive, parce qu'il croit que c'est la vérité absolue, parce que ça vient d'un grand maître qui sait comment faire, qui sait comment dire, qui a le verbe facile, M. le Président. Sauf que, je vais lui faire la même recommandation que j'ai déjà faite à quelqu'un d'autre: à la vitesse qu'il parie, son maître, il ne peut pas penser à tout ce qu'il dit. Ça, c'est important.

Alors, compte tenu de tout ça, M. le Président, je vous ai juste parié d'un des éléments qui ont été cités par M. Bourassa. Vous me faites mention qu'il me reste trois minutes; il me semble que je viens à peine de commencer, M. le Président.

On parie de réduire les dépenses publiques en augmentant l'efficacité de la fonction publique; le rapport Poulin, c'est ça que ça veut dire. Faire en sorte que ceux qui, nécessairement, vont prendre leur retraite ne soient pas remplacés dans la fonction publique, et demander à tout le monde de se serrer les coudes un peu plus, et de donner encore un plus grand rendement, tout ceci parce qu'on est au service de la population et que c'est la population qui paie, M. le Président. Oeuvrer à l'amélioration de la productivité, bien, ça, c'est faire en sorte qu'on puisse investir un petit peu partout dans ce qu'on peut appeler les aspects techniques, et ainsi de suite. Alors, ça aussi, il faut en parier.

Développer la formation professionnelle et procéder à des ajustements dans notre système d'éducation afin d'améliorer la compétence. Ça, on en a parié. On en a largement parié. Le député de Salaberry-Soulanges a fait un très beau plaidoyer dans ce sens-là pour démontrer ce qui s'était passé. Mais quand on parie de développer la formation professionnelle, c'est faire en sorte qu'aujourd'hui on redonne à notre population, on redonne à nos jeunes le goût de s'identifier au travail. Ça, je pense aussi que c'est important.

Développer le partenariat. Le gouvernement ne peut pas agir tout seul. Le gouvernement se doit de s'associer, s'associer avec le patronat, s'associer avec les syndicats. Ça, je pense que c'est un défi de taille, c'est un défi qu'on est en train de relever. Alors, ça, je pense que c'est important aussi de le dire.

M. le Président, lorsqu'on parie aussi de régions, chez nous, Laval, c'est une région; c'est une grande région, comme Montréal est une grande région, comme d'autres régions ont chacune leur particularité. Qu'est-ce que le gouvernement libéral s'est appliqué à faire depuis 1985? Juste pour vous mettre un peu dans le contexte de ce qui se vit chez nous, M. le Président, chez nous, nous avons réussi à avoir une association touristique régionale; nous avons réussi à avoir la SDI, Société de développement industriel; nous avons réussi à avoir la Régie régionale de la santé, la Justice; nous avons, en fait, ce qu'on appelle l'OPDQ, l'Office de planification et de développement du Québec, régional, qui s'en vient chez nous, comme dans les autres régions. Donc, ce qui est propre à Laval est propre à toutes les régions.

C'est la vision de notre gouvernement, M. le Président. C'est ce à quoi on travaille, c'est ce à quoi on s'applique, c'est ce que nous allons réussir. Et nous n'avons pas besoin de nous «enrichir d'un pays». Nous sommes déjà riches, nous avons déjà notre pays. C'est à nous de développer ensemble cette concertation et qu'on puisse, dans l'unité, dans l'unisson, faire en sorte que nos objectifs soient réalisables et réalisés. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Fabre. Sur le même sujet, je cède la parole à M. le député d'Ungava.

M. Christian Claveau

M. Claveau: Oui, M. le Président, c'est avec un peu de nostalgie que je viens de perdre 20 minutes de ma journée en écoutant le député de Fabre nous parier de ce que son gouvernement n'a pas fait, ou de ce que son gouvernement aurait peut-être dû faire.

M. le Président, je comprends que le député de Fabre soit très intéressé par son fonds de pension parce que, au rythme où ça va là, il va en avoir besoin avant longtemps. Ce n'est pas avec des gens qui ont une vision semblable qu'on va gouverner le Québec bien longtemps, et puis, étant à l'image de son parti, j'ai l'impression qu'il va disparaître aussi vite que les siens aux prochaines élections.

M. le Président, on aura beau dire ce qu'on voudra dans la salle, dans cette Assemblée, il y a des choses qui doivent être dites clairement, comme elles sont. Et puis on va arrêter de jouer avec des beaux mots, et puis le verbe facile, et puis de la démagogie à trente sous pour essayer de faire accroire au monde ce qui n'est pas en réalité, M. le Président.

J'écoutais le député de Fabre parier pendant 20 minutes de mon collègue d'Anjou. Il faut croire que leur défaite dans Anjou leur a fait drôlement mal pour qu'il s'acharne pendant la moitié de son discours à parier de notre nouveau collègue élu dans Anjou. C'est un signe des temps, M. le Président, l'élection dans Anjou. Ça leur fait mal. Bien, ils vont avoir à vivre avec. Et puis, ils vont avoir à vivre avec encore bien plus de malheurs que ça dans les semaines et les mois qui viennent s'ils continuent sur leur lancée

de ne rien faire, et avec des discours vagues comme celui qu'on a eu au moment du discours inaugural du premier ministre. Tout ce qu'il a réussi à faire, c'est d'essayer de se moquer un peu du chef de l'Opposition, sans jamais amener quelque mesure que ce soit qui soit neuve, positive, constructive, innovatrice pour le peuple du Québec, M. le Président.

Ce n'est pas avec ça qu'on va bâtir le Québec, ce n'est pas vrai. Puis des discours, de la démagogie à 25 cents, on en a soupe au Québec. Le député de Fabre vient de nous en faire encore une des plus belles démonstrations du genre de démagogie dont ces gens-là sont capables. Je le comprends d'ailleurs, parce que, dans le fond, il n'a qu'à suivre l'exemple de son premier ministre alors qu'il répond aux questions en cette Chambre. Il ne peut pas faire mieux que ce qu'il a fait là. Ça, c'est clair, M. le Président.

M. le Président, parlons-en, des outils de développement économique du Québec. Depuis 1985, qu'est-ce qui s'est passé? Souvenons-nous, M. le Président, du premier mandat, du début du premier mandat 1985-1986, 1986-1987. On a démantelé, au nom du sacro-saint principe que c'était la libre entreprise qui devait contrôler l'économie et que le gouvernement ne devait pas intervenir dans l'économie, on a démantelé, ce gouvernement, y compris le député de Fabre qui a voté pour ces lois, on a démantelé tout ce qu'on avait comme structures de base de développement économique dans les régions du Québec. Je n'en donnerai que quelques petits exemples, M. le Président.

Rappelons-nous SOQUEM. On a vendu, à un prix minable, on a donné pratiquement les meilleurs actifs de SOQUEM pour former une société qui s'appelle Cambior qui, aujourd'hui, investit à l'étranger, a investi aux États-Unis, a investi en Alaska, a investi dans les Guyanes. Elle investit partout à l'étranger mais, au Québec, bien, on fait bien attention pour ne pas trop investir parce que c'est payant à l'étranger plus qu'ici au Québec. C'est ça qu'on a fait avec les actifs de SOQUEM, M. le Président. Aujourd'hui, SOQUEM doit se référer au Conseil du trésor à toutes les fois qu'elle veut faire un petit projet. SOQUEM n'est qu'un paravent dans nos milieux, elle n'a plus de marge de manoeuvre pour opérer comme telle parce que tous ses actifs ont été, à toutes fins pratiques, donnés, des actifs importants, intéressants. Les actifs rentables ont été donnés pour former une compagnie comme Cambior qui, à mon sens, ne joue pas le rôle qu'elle devrait jouer dans le développement minier au Québec au moment où on se parle, M. le Président.

On a vendu Quebecair. Ah oui! Quebecair avait 2 000 000 $ de déficit; ça, c'était grave. 300 000 000 $ de déficit avec le métro à Montréal, ça, ce n'est pas grave, mais 2 000 000 $ de déficit chez Quebecair, ça, c'est grave. Qui a acheté Quebecair? Un groupe d'hommes d'af- faires, Leblanc et compagnie, y compris le frère du ministre là, député de Beauce-Sud, qui ont mis la patte sur Quebecair. Pour faire quoi? Ils ont vendu les meilleurs avions de Quebecair dès le départ pour se rembourser sur ce que ça leur avait coûté pour l'achat, puis, après ça, ils ont opéré tant bien que mal, cahin-caha pendant une couple d'années. Ils sont revenus au gouvernement pour demander une subvention. Ça leur a été refusé. Ils ont liquidé Quebecair.

Puis, aujourd'hui, vous vous promenez dans les régions du Québec... Ça coûte une fortune pour vous promener dans les régions du Québec. Pourquoi? Parce qu'on s'était donné, ou on voulait se donner, au Québec, un outil de développement régional qui permettrait aux gens des régions de pouvoir voyager à un coût raisonnable, pour avoir accès aux grands centres du Québec. On avait formé la société Quebecair dans cette idée-là. Bien non. Il y avait trois ou quatre gars là, peut-être un peu plus fins fins que les autres au Québec, qui voulaient mettre la patte sur leur propre petite compagnie d'aviation. Puis, finalement, ils se sont arrangés avec le gouvernement, ils ont racheté Quebecair sous prétexte que ça coûtait cher au gouvernement. Aujourd'hui, ça ne coûte peut-être plus rien au gouvernement, mais Quebecair n'existe plus! Puis, les gens des régions du Québec sont dépendants de grosses compagnies comme Canadian et Air Canada pour se voyager. On en paie le coût, je vous en passe un papier. Ceux qui n'ont pas à prendre l'avion dans les régions, ils s'en sacrent bien, ce n'est pas leur problème à eux. Mais, nous, qui vivons dans les régions éloignées et puis qui avons à voyager en avion, on sait ce que c'est que de payer des billets d'avion. C'est ça.

Madelipêche. Rappelons-nous Madelipêche. Ah oui! Ça coûtait cher d'avoir des usines de pêche aux îles-de-la-Madeleine pour relancer l'économie des Îles-de-la-Madeleine. Ça, ça coûtait cher. Ah! Madelipêche, ça ne va pas pire! On va vendre ça à l'entreprise privée. Maintenant, l'entreprise privée est capable de l'opérer. Ça a donné quoi, vous^ pensez? Allez voir le taux de chômage aux Îles-de-la-Madeleine au moment où on se parle. Allez voir où on en est rendu dans les négociations des quotas de pêche. Allons voir où en sont les usines de pêche au Québec actuellement, depuis que le gouvernement, toujours à partir du sacro-saint principe qu'on ne devait pas intervenir dans l'économie pour laisser l'entreprise privée fonctionner à sa guise, eh bien! on a détruit l'industrie de la pêche au Québec. Allons nous promener dans les villages de pêcheurs. Qu'est-ce qui leur reste au-delà du chômage et du B.S. pour pouvoir vivre? Vous pensez que c'est comme ça qu'on va monter une économie au Québec? Ce n'est pas comme ça. (18 heures)

On a démoli, on a enlevé le programme des actions accréditives. On a fait croire que ce

n'était pas bon. Aujourd'hui, où on en est dans l'industrie minière, M. le Président? Je vais vous en donner juste un petit exemple, moi. On parle de création d'emplois. Je vais vous donner des chiffres précis de ce qui se passe chez nous. Vous m'excuserez des noms anglais, M. le Président; c'étaient des compagnies étrangères qui avaient les mines et les noms des puits sont tous en anglais. Mais je vais tous vous les nommer un par un, des puits qui étaient opérationnels quand ce gouvernement a pris le pouvoir, M. le Président, juste dans la région de Chibougamau et de Chapais. Juste à Chibougamau et Chapais, on avait le puits Springer 1, le puits Perry, le puits Cook, à Chapais; on avait le puits Anderson 1, Anderson 2, le projet S-3 qui a ouvert un petit peu après; il n'a pas été très long, vous me direz. Il y a Cedar Bay, à Chibougamau; la mine Bachelor, à Desmaraisville; la mine du lac Short, qui relevait de la mine Opemiska de Chapais. C'étaient toutes des mines qui étaient en opération quand ce gouvernement-là est arrivé au pouvoir, et qui avaient toutes au-delà de 100 à 150 employés chacune, sinon 200 et 300 dans certains cas. C'est tout fermé aujourd'hui; il n'y en a plus. Il reste trois mines, trois puits en opération dans toute la belle région minière de Chibougamau et Chapais. Je vais vous les nommer, pour être bien sûr que tout le monde comprend. Il reste le puits Copper-Rand et le puits Portage qui appartiennent tous les deux à la compagnie Westminer et il reste le puits Meston qui appartient à la compagnie Meston, qui est une mine d'or. C'est les trois seuls puits qui restent dans toute cette région-là. Toute la liste que je vous ai donnée avant, tout est fermé. Il n'y en a plus. Et on nous parle de création d'emplois, et on nous parle de relance de l'économie.

Qu'est-ce que j'ai entendu, moi, dans le discours du premier ministre, au moment de faire son discours inaugural, pour nous montrer qu'il allait faire quelque chose pour les pauvres diables, pour tous les gens qui travaillaient dans cette industrie minière et qui se retrouvent, comme on dit - vous me passerez l'expression, j'espère qu'elle est parlementaire - le cul sur la paille, M. le Président. C'est deux mots qui se trouvent dans le dictionnaire. Ces gens-là, ils ont le cul sur la paille à cause de ce gouvernement qui n'est pas capable de prendre ses responsabilités et qui n'a rien fait pour la population du Québec, pour ces gens-là et pour nombre d'autres.

Regardons dans l'industrie forestière, M. le Président. Comptons les moulins à scie, les scieries qui sont fermées depuis 1985. Ça n'a pas de sacré bon sens, ça n'a pas d'allure!

Une voix: Du bran de scie!

M. Claveau: Ils peuvent bien nous parler de bran de scie, oui, ils connaissent ça, eux autres.

Imaginez-vous! Le ministre des Forêts a fait sa campagne électorale en 1985, et encore en 1989, en promettant une troisième machine à papier à Rivière-du-Loup, dans son propre comté. Il y en avait deux quand il a été élu en 1985; il en promettait une troisième. Aujourd'hui, il y en a une. Ça valait la peine de l'élire. Au lieu d'augmenter la capacité, il l'a coupée en deux. Il n'en reste plus rien qu'une, dans son propre comté de Rivière-du-Loup, M. le Président.

Ils ont fait rêver les gens de la Gaspésie avec la papeterie de Matane. On n'a pas le droit, M. le Président, de se moquer du monde comme ces gens-là l'ont fait avec la papeterie de Matane, où ils ont laissé croire à la population de la Gaspésie qu'il y avait de la place pour une autre papeterie au Québec. On a obligé l'investissement de Matane. Ça a coûté des centaines de millions aux contribuables de tout le Québec pour bâtir une papeterie à Matane, qui était liée à toute la question de la vente - voyons, la papetière, vous devez vous en souvenir - de Donahue. On a obligé la construction d'une papeterie à Matane. On a fait rêver la population de Matane. Ça n'a même pas opéré pendant un an, c'est fermé. Et je suis prêt à vous passer un papier que ça n'ouvrira pas demain matin.

On a fait rêver, avec l'argent de tous les Québécois, la population de cette région-là qui, aujourd'hui, se retrouve dans une situation pire que ce qui était avant, parce que, à la suite de ce beau rêve, les gens ont dit: On bâtit une papeterie chez nous, on va avoir de l'ouvrage pendant de nombreuses années. On s'endette, finalement; on a une marge de crédit, on rénove nos maisons, on se bâtit des maisons neuves, on s'achète des voitures neuves, on repart, quoi. Le gouvernement vient de nous bâtir notre papeterie qu'on attendait depuis si longtemps. Donc, on n'a pas de raison de croire que ça ne marchera pas. Les gens se sont endettés, ils ont cru dans la parole de ce gouvernement qui leur disait: Endettez-vous, allez, il n'y a pas de problème, on relance l'économie, on vous bâtit une papeterie; ça va être beau. Ça n'a même pas marché un an. Mais, par exemple, les gens qui se sont acheté des maisons, les gens qui se sont acheté des voitures, les gens qui se sont rééquipés de toutes sortes de façons sur la base que la promesse du gouvernement allait tenir, eux, ils sont encore pris avec leurs problèmes, par exemple, et il n'y a personne pour les aider. Eux, ils sont pris avec leurs problèmes.

M. le Président, c'est inacceptable. C'est des façons de faire qu'un gouvernement honnête, un gouvernement correct n'a pas le droit d'avoir, M. le Président. Et c'est ça, la base de la relance économique des régions que ces gens-là nous promettent. Comment voulez-vous aller plus loin? Regardez ce qui s'est passé au Lac-Saint-Jean avec l'investissement de Normick-Perron dans l'usine de panneaux-particules de Chambord. La même affaire, le même scheme de pensée, la

même structure! On a fait rêver le monde, là-bas. On a bâti une usine de panneaux qui a coûté des dizaines de millions. On a dit au monde: C'est beau, c'est parfait. Du jour au lendemain, ça n'a même pas opéré un an encore, dans ce cas-là, que c'est refermé; la clé dans la porte, dans la boule-à-mites, et on se prépare à démolir l'usine. On a fait encore rêver le monde de ce beau coin de pays et, aujourd'hui, les gens sont pris avec leurs problèmes économiques.

Le gouvernement a une attitude de je-m'en-foutisme. Il s'en sacre bien; ce n'est plus son problème. Ce n'est tellement plus son problème qu'il n'est même pas capable de payer ses comptes lui-même: 442 167 584 $ de transferts de factures aux municipalités, à toutes les municipalités du Québec. Parce que, après avoir mis le monde dans une situation invivable, après avoir fait du Québec un vaste champ d'assistés sociaux et de chômeurs qui pataugent tant bien que mal pour essayer de se trouver de l'ouvrage, sans aucune norme, sans aucune orientation, sans aucune vision de leur gouvernement pour les aider, eh bien, on leur dit: On n'en a pas assez de vous avoir mis le cul sur la paille, on va aller vous enlever la paille qui reste avec...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député d'Ungava, je m'excuse!

Une voix:...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je m'excuse! M. le député d'Ungava!

Une voix: Oui.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je veux vous rappeler les dispositions des paragraphes de l'article 35, particulièrement le paragraphe 8, qui se lit comme suit: «Les députés ne peuvent... Le député qui a la parole ne peut employer un langage grossier ou irrespectueux envers l'Assemblée.» Alors, que je le laisse passer une fois, à partir du moment où vous m'indiquez même que vous croyez que c'est plus ou moins parlementaire... Je vous rappelle que c'est une expression qui, selon les prescriptions de l'article 35.8 que je viens de vous lire, n'est pas acceptable à l'Assemblée nationale.

M. Claveau: M. le Président, avec tout le respect que je vous dois, ce n'est pas contre l'Assemblée que j'en ai et ce n'est surtout pas à l'Assemblée nationale que je donnerais ce qualificatif, mais à certains membres de cette Assemblée qui forment le supposé gouvernement qui, normalement, devrait administrer le Québec et qui, malheureusement, siègent avec nous et donnent l'image que l'on connaît du Québec actuel.

Donc, ceci étant dit, on enlève la paille en dessous du c... et on refile à tout ce beau monde une facture de 442 000 000 $ que les municipalités devront aller chercher via les taxes foncières, sous prétexte qu'on ne peut plus payer, pour diminuer le déficit, soit dit en passant, de plus de 4 000 000 000 $, cette année, et ça, avec les nouvelles formules comptables que ce gouvernement s'est bien empressé de rentrer dans ses livres en 1985, incluant les bénéfices d'Hydro-Québec, de Loto-Québec, de la Société des alcools, enfin, de tout le monde. On met tous les bénéfices de toutes les sociétés d'État et on a encore 4 000 000 000 $ de déficit. On en avait peut-être 4 000 000 000 $ en 1985, mais on ne comptait pas les bénéfices des sociétés d'État. On avait au moins ça de louable, d'honnête, de correct, c'est qu'on ne comptabilisait pas les chiffres des sociétés d'État pour diminuer notre déficit. Ce n'est pas 4 000 000 000 $ qu'il y aurait, c'est autour de 6 000 000 000 $, si ce gouvernement avait la même comptabilité qu'on avait en 1985.

Ça fait que ne jouons pas trop sur les mots. Mettons les chiffres tels qu'ils sont et comparons les oranges avec les oranges. Le premier ministre aime bien ça. Il faisait des farces, cet après-midi, à l'Assemblée, en disant: On parle du dollar américain et ils parlent du dollar canadien. Bien, parions des mêmes mesures, des mêmes normes comptables que ce que nous, on avait en 1985, comparé à ce qu'il y a aujourd'hui. À partir des mêmes normes, ce n'est pas 4 000 000 000 $, c'est à 6 000 000 000 $ et plus que serait le déficit du gouvernement du Québec, au moment où on se parle.

De fins gestionnaires, M. le Président! Aussi fins gestionnaires que bons négociateurs, d'ailleurs! Moi, je m'en souviens. Si eux, ils ont de l'amnésie générale, moi, je m'en souviens, en 1985, ils ont fait leur campagne électorale en disant: Nous, vous savez, négocier avec le fédéral, on connaît ça. Les péquistes ne sont pas bons là-dedans, les péquistes ne savent rien faire. Bien, nous, on va aller négocier avec le fédéral et vous allez voir qu'on va vous montrer qu'on est de fins négociateurs.

De fins négociateurs, oui! Le cul-de-sac dans lequel on se trouve - «cul-de-sac» étant une expression, j'imagine, très bien connue et non vulgaire utilisée partout par le ministère des Transports - sur le plan constitutionnel, ce n'est pas le PQ qui l'a fait, c'est eux, de fins négociateurs! Fins négociateurs! Ils connaissaient ça. Ils allaient diminuer, ils allaient anéantir, annuler, réduire, faire disparaître, faire passer aux oubliettes le déficit du Québec, M. le Président. Avec eux, il n'y en aurait plus de déficit. (18 h 10)

Ils nous ont parié de marge de manoeuvre. Oui, la marge de manoeuvre, parions-en! Le député de Fabre, encore, tantôt, se gargarisait avec ça. Ça a été encore un coup monté, aux élections de 1985, pour montrer qu'eux, s'ils arrivaient au gouvernement, ils étaient capables

d'opérer, ils avaient une marge de manoeuvre. Voyons donc! Il y a deux raisons pour lesquelles ils nous ont dit qu'ils avaient une marge de manoeuvre aux élections de 1985. La première, c'est qu'ils mentaient carrément à la population en sachant qu'il n'y en avait pas, mais ils faisaient accroire qu'ils en avaient. La deuxième, c'était qu'ils n'avaient pas fait leur job dans l'Opposition. S'ils avaient fait leur job comme députés de l'Opposition au lieu de compter leur fonds de pension, probablement qu'ils se seraient rendu compte que la situation financière du Québec ne dégageait pas de marge de manoeuvre. Alors, ils ont fait accroire à la population du Québec, en 1985, durant toute la campagne électorale, qu'eux, ils avaient une marge de manoeuvre et qu'ils pourraient appliquer des programmes. Soit qu'ils ont menti à la population ou qu'ils n'ont pas fait leur job dans l'Opposition, il n'y a pas d'autres raisons.

Aujourd'hui, le député de Fabre vient nous dire: On ne connaissait pas l'état de l'économie. Ils nous en avaient caché. Voyons donc! Il y a une chose que je sais, moi, par exemple, c'est que ces gens-là nous ont promis, en 1985, qu'avec eux il n'y aurait plus de déficit, au Québec. À partir des mêmes normes comptables qu'on avait en 1985, le déficit, aujourd'hui, serait au-delà de 6 000 000 000 $. Ah! ils connaissent ça. De fins gestionnaires, parlons-en!

M. le Président, on a refilé 442 000 000 $ là-dessus. Ce n'est pas assez d'avoir comptabilisé les bénéficies des sociétés d'État comme HydroQuébec, etc., mais on a refilé, en plus, 500 000 000 $ de factures aux municipalités et on a encore au-delà de 4 000 000 000 $ de déficit. Parlons-en de la gérance de ces gens-là! Parlons-en de leurs connaissances techniques! Ils peuvent bien se moquer du PQ. Je comprends, ça leur fait mal. D'ailleurs, M. le Président, quand il ne nous reste plus rien qu'à se moquer des autres pour se défendre, on ne vaut pas cher. J'aurais bien mieux aimé entendre le premier ministre nous annoncer des vraies mesures concrètes dans son discours inaugural plutôt que de faire de la démagogie à 25 cents, à l'exemple de ce que vient de nous faire le député de Fabre tout à l'heure.

Vous me dites que mon temps est fini?

Une voix: Oui.

M. Claveau: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député d'Ungava. Sur le même sujet, je reconnais maintenant M. le député de Gatineau.

M. Réjean Lafrenière

M. Lafrenière: M. le Président, pour de la démagogie, le député d'Ungava et le député de Lévis se partageraient la palme aujourd'hui. Je ne voudrais pas commenter ou me mettre à commenter ce genre de discours parce que je pense que je perdrais mes 20 minutes, moi aussi.

M. le Président, le dernier discours inaugural a visé à définir les grandes orientations du gouvernement au cours des prochains mois. Les priorités sont d'ordre économique, social, culturel et éducationnel. C'est ce qu'on appelle, M. le Président, avoir une vision globale du développement d'un Québec moderne, qui devra affronter les défis à la fois économiques, techniques et humains à l'aube de l'an 2000.

L'Opposition officielle se dit déçue de ce discours. On n'en attendait pas moins d'une formation politique qui a fait preuve d'une mauvaise gestion des fonds publics entre 1976 et 1985. M. le Président, je sais que nous dirigeons les destinées du Québec et que le Parti québécois n'aime pas qu'on revienne en arrière, surtout pour critiquer sa gestion, mais vous comprendrez que nous avons, à titre de contribuables, à payer 50 000 000 $ par semaine pour assumer l'hypothèque qu'il nous a léguée. Non seulement le gouvernement du Parti québécois n'avait-il pas vu venir la crise économique qui allait poindre au début des années quatre-vingt, mais il s'en trouva fort dépourvu, puisqu'il n'avait plus cette marge de manoeuvre suffisante pour venir en aide à ceux et celles qui en avaient le plus besoin.

D'ailleurs, les effets se sont vite fait sentir, puisqu'on comptait par milliers le nombre des chômeurs dans toutes les régions du Québec. Dans certaines d'entre elles, on dépassait les 20 %. M. le Président, qui ne se souvient de l'aventure du trou de 500 000 000 $ dans le secteur de l'éducation? C'est le Vérificateur général qui en a découvert l'ampleur et constaté les écarts de coûts considérables en raison de l'inexactitude des données disponibles au ministère de l'Éducation, comme la clientèle et les effectifs enseignants.

L'ancien ministre québécois des Finances et actuel chef de l'Opposition officielle n'avait découvert ce trou qu'en fin de mandat. On se demandait alors comment un grand maître comme l'ancien ministre québécois des Finances pouvait prétendre n'avoir décelé en aucun moment l'anarchie dans les méthodes de calcul du nombre d'enseignants ou d'élèves au Québec. Méthodes qui ont résulté en un trou de 500 000 000 $.

M. le Président, en ce qui a trait aux éventuels changements politiques qui pourraient survenir au niveau constitutionnel, j'aimerais rappeler aux membres de cette Chambre que la région de l'Outaouais serait la plus affectée au Québec. On a souvent dit par le passé que l'Outaouais était une région choyée par le gouvernement fédéral et qu'en définitive on s'y plaignait le ventre plein. C'est une fausse vérité, M. le Président. Il convient de rappeler que tous les gouvernements, de quelque formation politique que ce soit, qui se sont succédé à Québec ont

incité les gens de l'Outaouais à se battre pour obtenir ce qu'il convenait d'appeler la juste part des emplois du gouvernement fédéral. Nous y avons cru et nous nous sommes battus pour prendre cette part.

C'est une situation qui a bien sûr joué à notre avantage sous certains aspects, mais qui s'est aussi révélée un handicap en d'autres domaines. M. le Président, quelle que soit l'ampleur du rapatriement des pouvoirs qui découlera des négociations actuelles, c'est des milliers d'emplois qui sont en jeu chez nous. M. le Président, nous ne croyons pas, en Outaouais, que notre région ait à payer pour avoir suivi le mot d'ordre que nous lançait l'ensemble des leaders francophones du Québec et du Canada.

Le gouvernement libéral dont je fais partie s'est d'ailleurs montré sensible à cette question en créant un comité chargé d'étudier les impacts, sur la région de l'Outaouais, d'un éventuel transfert de pouvoirs. L'une des recommandations du comité en question vise à permettre à l'Outaouais de diversifier son économie dans différents domaines, que ce soit le domaine manufacturier, le secteur des forêts ou la haute technologie. Pour ce faire, M. le Président, le gouvernement du Québec sera appelé à jouer un rôle majeur en Outaouais avec des programmes spéciaux et exclusifs à cette région, que ce soit sous forme d'avantages fiscaux auprès des promoteurs ou d'autres incitatifs destinés à attirer des promoteurs majeurs en région. Ces mesures spéciales devront prévaloir jusqu'à ce que la région de l'Outaouais ait récupéré l'équivalent des emplois perdus dans la fonction publique. Au niveau des programmes gouvernementaux incitatifs, il est de notoriété publique qu'on a longtemps considéré que l'Outaouais ne constituait pas un choix intéressant pour l'implantation d'industries majeures. Cela était d'autant plus vrai lorsque cette industrie générait des salaires qui se situaient au-dessus de la moyenne.

Le Québec affichait alors un écart d'environ 10 % avec l'Ontario au niveau de l'impôt personnel, si bien que plusieurs élisaient tout simplement domicile chez nos voisins d'Ottawa. Grâce au gouvernement libéral, cette différence n'existe pratiquement plus. Comme je l'indiquais précédemment, M. le Président, certains estiment que l'Outaouais a profité d'une situation privilégiée. Dans les faits, c'est souvent le reste du Québec qui a profité de ce que pouvait sembler une situation privilégiée. Qu'il suffise de rappeler, à titre d'exemple, que le gouvernement du Québec dispose d'une entente avec la Commission de la capitale nationale dont le territoire couvre une bonne partie de l'Outaouais québécois. Cette entente prévoit que le gouvernement fédéral participera, et participe, à 50 % des coûts pour la construction du réseau routier.

Je suis certain, M. le Président, que le ministre des Transports aurait envie de me rappeler ici que la participation du fédéral à ces travaux est versée au fonds consolidé de la province et que ce n'est pas son ministère directement qui en profite, et il aurait raison. effectivement, ces sommes ont servi jusqu'à maintenant à financer toutes sortes de programmes à la grandeur de la province. on pourrait dès lors penser que l'outaouais dispose d'un meilleur réseau routier qu'ailleurs en province. mais c'est loin d'être le cas. même avec 50 % défrayés par le fédéral, pour la majorité des grands travaux routiers, l'outaouais a le triste record du plus mauvais réseau routier de la province. ce n'est pas moi qui le dis, m. le président, mais une étude faite par le ministère des transports, et qui en arrive à ces conclusions. en 1992, il nous faut encore passer par l'ontario pour nous rendre par autoroute à montréal ou à québec. m. le président, l'autoroute 50 devra faire partie des incitatifs spéciaux que le gouvernement devra inscrire au cahier de charge afin que nous ayons tous les outils nécessaires à la diversification de notre économie.

M. le Président, de 1976 à 1985, le précédent gouvernement a complètement fermé les yeux sur cette entente, pourtant avantageuse pour le Québec. Fort heureusement, notre gouvernement a remis cette entente en vigueur dès son arrivée, en 1985, mais il faudra aller plus loin, parce que l'Outaouais est aussi purement québécoise que les autres régions du Québec. Il y va non seulement de la qualité de vie d'une génération de Québécoises et de Québécois mais d'un départ pour un Québec meilleur qui aura à affronter des défis importants à l'aube des années deux mille.

Voici, M. le Président, l'essentiel de mes remarques en regard du dernier discours inaugural qui m'apparaît encourageant sur les plans économique, social et culturel, pour une meilleure maîtrise de notre avenir. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Gatineau. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. M. le député de Bertrand.

Une voix: Je demanderais un ajournement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous demandez l'ajournement du débat? Alors, est-ce que cette motion d'ajournement du débat est adoptée? La motion d'ajournement du débat est adoptée. Il est 18 h 22. Dans les circonstances, j'ajourne les travaux de l'Assemblée à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 22)

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