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(Dix heures trois minutes)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mesdames et messieurs,
si vous voulez prendre place. Merci.
Affaires du jour Affaires prioritaires
Nous ouvrons la séance d'aujourd'hui aux affaires du jour. Nous
allons maintenant reprendre le débat sur le discours d'ouverture
prononcé par M. le premier ministre, le 19 mars 1992, et sur les motions
de censure de M. le chef de l'Opposition officielle, de M. le
député de D'Arcy-McGee et de M. le député de
Jonquière. Je cède la parole à M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Reprise du débat sur le discours d'ouverture et
sur les motions de censure
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Merci, M. le Président. C'est la coutume en
cette Chambre depuis plusieurs années, que ce soit lors du discours
inaugural, M. le Président - parce qu'il n'y en a pas
nécessairement à chaque année - ou lors du discours du
budget, que les députés, les élus du peuple puissent avoir
l'occasion d'apporter des commentaires soit à des politiques
gouvernementales, soit à ce que le gouvernement souhaite faire pour le
futur. J'ai eu l'occasion, inutile de vous le dire, depuis bientôt
près de 20 ans de vie active en politique et de présence ici, en
cette Chambre, de participer à beaucoup de discours, que ce soit au
niveau du discours inaugural ou du discours du budget, pour faire en sorte de
bien refléter ce que les gens et nos concitoyens, à toutes fins
utiles, pensent non seulement de leur gouvernement, mais des actions
gouvernementales.
Je me rappelle, M. le Président, il n'y a pas si longtemps -
quand je dis «il n'y a pas si longtemps», on parle de deux
décennies - il y a 20 ans - il y a 20 ans, ce n'est pas tellement loin,
M. le Président, quand on regarde ça -lorsque j'ai fait mon
entrée en politique. Je me rappellerai toujours que certains de nos
collègues tels que M. Raymond Garneau, qui était alors ministre
des Finances dans le gouvernement Bourassa, nous incitaient, comme
parlementaires, à initier dans nos milieux des projets dans le but de
faire en sorte que le gouvernement s'implique davantage dans le
développement des régions. Quand on recule de 20 ans, M. le
Président, on constate que le gouvernement du Québec était
un gouvernement comme les autres gouvernements en Amérique du Nord,
qu'on appelait un gouvernement-providence, parce que, dans le temps, on
incitait le milieu à faire des projets et, en plus de l'inciter à
présenter des projets, on disait: On peut payer ces projets-là,
parce qu'il est important de développer les régions. Ça,
c'est 20 ans en arrière. M. le Président, 20 ans en
arrière, ce n'est pas si loin que ça.
On est obligés de constater qu'il s'est fait beaucoup de choses
au Québec depuis 20 ans, mais aussi que la situation économique,
la situation des gouvernements est différente de celle qui existait. On
est passé rapidement, il y a 20 ans, d'un État-providence
à un État-partenaire. Et ça, il n'y a pas de miracle
à ça. Les gens qui font mine de ne pas savoir que, maintenant, on
est rendu à un État-partenaire, ce sont probablement ceux qui
l'ont créé, cet État-partenaire.
Je n'ai qu'à reculer en regardant le développement
régional, le bureau de l'Est du Québec, le bureau
d'aménagement, pour développer un seul coin. On dit: Si c'est bon
pour l'Est, c'est bon un peu partout... On a formé l'OPDQ, puis on a
fait tout ça, puis est arrivée la crise économique -
là, on va reculer moins loin - est arrivée la crise
économique de 1982. Tout le monde s'en rappelle, une des bonnes crises,
une crise aiguë qu'a dû subir le gouvernement du Québec. Et
quand je dis le gouvernement du Québec, par ricochet, je parle de ceux
et celles qui le composent, parce qu'il n'y a pas de miracle à
ça. Vous savez, toutes les fois qu'on parle de problèmes
économiques, toutes les fois qu'on parle d'un problème d'argent
ou monétaire au niveau d'un gouvernement, je pense qu'il ne faut pas
chercher midi à quatorze heures. Ce n'est pas uniquement le gouvernement
qui a ce problème monétaire, parce que le gouvernement, ce qu'il
fait, il collecte des taxes puis il les redistribue. Il ne fait pas autre chose
que ça. Il ne crée pas de piastres, il n'en imprime pas, puis il
ne crée pas nécessairement d'autres richesses que celles qu'on
connaît et qu'on est capables de créer dans des situations
difficiles.
Donc, en 1982, le gouvernement qui nous a précédés,
plus que quiconque, a compris que I État-providence, c'était
terminé. Et ils ont dû prendre des décisions qui ne leur
ont sûrement pas fait plaisir. Ça n'a pas été de
gaieté de coeur que le gouvernement du Québec, en 1982, a pris la
décision de sabrer dans les salaires de ses employés,
unilatéralement. Ça n'a pas été de gaieté de
coeur aussi qu'on a dû aller vendre dans les régions une nouvelle
formule de développement régional, c'est-à-dire celle d'un
État-partenaire, d'asseoir le gouvernement en avant puis d'asseoir les
gens dans la salle, parce que qui dit partenaire dit participation.
On ne peut pas se comporter en partenaires sans questionner ceux et
celles qui sont en face
de nous comme partenaires et leur dire: Est-ce que vous souhaitez qu'on
fasse ça, puis de quelle façon souhaitez-vous qu'on le fasse? On
ne peut pas être partenaires si on ne fait pas participer les gens
à nos actions. Donc, est arrivée la vague de 1984, des sommets
où l'État s'est assis en avant, avec des gens dans le milieu,
pour dire: Qu'est-ce que vous souhaitez qu'on fasse dans vos régions en
termes de partenaires? Ça n'a été qu'un début, bien
sûr, mais ça a été un début important et, si
ça n'avait pas été fait, il aurait fallu que quelqu'un le
fasse et on serait peut-être en retard pour le faire si ces
actions-là n'avaient pas été faites en 1983-1984.
Quand on connaît cette toile de fond, M. le Président, on
est bien obligé de constater que, parfois, il faut avoir de la mesure
dans les rêves qu'on peut avoir pour le futur. C'est bien plus facile,
pour un gouvernement, de dire: On pourrait en faire plus. Moi, pour un, ayant
participé à la fois dans l'Opposition et à la fois au
pouvoir, c'est toujours un petit peu tentant, quand on est dans l'Opposition,
de dire que ce n'est jamais assez et qu'on ne va jamais assez loin, mais il
faut, M. le Président, prendre en compte le fait de la capacité
de payer de nos concitoyens et de nos concitoyennes. (10 h 10)
Moi, je me promène dans les régions, présentement.
Qu'est-ce que j'entends, des gens? Ça me fait toujours rire, à la
fin d'une session, quand je vois l'Opposition se réunir avec les
journalistes pour faire le bilan de la session: bilan minceur, bilan trop
maigre, pas assez d'interventions gouvernementales, etc. Moi, c'est curieux, je
me promène partout, dans mon comté, dans ma région, dans
d'autres régions, et savez-vous ce que les gens nous disent parfois? Ils
disent: Le gouvernement, arrêtez donc de vous immiscer dans tous les
domaines. Arrêtez donc de venir nous compliquer la vie. Arrêtez
donc de venir nous dire comment faire, quoi faire et de quelle façon le
faire. C'est ça que les gens nous disent. C'est un petit peu un message
contraire à ce que j'entends quand on dit: Le gouvernement ne fait pas
assez. Il ne fait pas assez de lois. Ne vous fatiguez pas avec ça. Des
lois, on en a peut-être bien beaucoup trop. On en fait peut-être
bien beaucoup trop et on a un peu trop de règlements. Il faudrait
peut-être bien commencer un peu à songer et à penser que
les gens ont besoin d'oxygène et qu'ils ont besoin de respirer.
Ça, c'est le message que j'entends.
C'est évident que quand on est dans l'Opposition, la seule
tribune qu'on a, c'est l'Assemblée nationale. C'est un petit peu, M. le
Président, la formule de «Parler pour parler» ou de jaser
pour jaser. Si on n'a pas l'Assemblée nationale pour être en
mesure d'avoir des projets de loi, bien, on ne peut pas jaser à notre
goût. Mais ce n'est pas ça que le peuple souhaite
nécessairement avoir. Maintenant, des rêves, on peut en avoir en
masse. Est-ce qu'on est capable,
M. le Président, de demander à la population de
défrayer le coût des grands rêves que chacun des
parlementaires pourrait avoir? Parce qu'il faut réduire ça
à sa plus simple expression.
Vous savez, c'est toujours compliqué, les finances publiques.
Quand on laisse ça aux docteurs en finances et quand on laisse ça
aux gens qui ont des gros diplômes là-dedans, on réussit
assez bien à compliquer les affaires qu'on ne s'y comprend personne.
Bien, il y a quelque chose de bien plus simple que ça à
comprendre. Vous savez, le gouvernement du Québec, il collecte 33 000
000 000 $ de taxes dans vos poches. Je me promène partout, et les gens
disent: Arrêtez de nous taxer, on n'est plus capables d'en prendre. On
n'est plus capables d'en prendre, on n'est plus capables de prendre de taxes
additionnelles.
Nous autres, comme gouvernement, on n'est plus capables de taxer non
plus. Si les gens ne sont plus capables d'en prendre, je pense qu'on est
fortement limités par notre capacité de taxer aussi. On collecte
33 000 000 000 $ de taxes, puis cette année on en a
dépensé 37 000 000 000 $. Vous savez, quand on parle de
milliards, c'est un petit peu compliqué. Puis si on ramène
ça à sa plus simple expression, M. le Président, quand
j'ai 33 $ dans mes poches puis que j'en dépense 37 $, je suis
obligé d'aller bommer 4 $ à quelqu'un alentour de moi. Je suis
obligé de faire ça. Si je me retrouve dans un grand hôtel
puis qu'il me manque 4 $, je vais dire à mon «chum» à
côté de moi: Me prêterais-tu 4 $? Je vais te remettre
ça un jour. Si toutes les fois que je sors, j'emprunte 4 $ à tout
le monde - mais je vais changer d'individu, évidemment, parce que
ça va devenir tannant pour celui qui est à côté de
moi - je vais me retrouver dans une grande salle avec des «chums»,
mais je n'aurai plus de «chums» alentour de moi, je vais faire le
vide alentour de moi, puis je vais me faire une réputation d'un gars qui
est toujours après bommer des piastres mais qui n'est jamais capable de
les remettre. Puis quand je vais devoir 2000 fois 4 $, je vais avoir un
sérieux problème, je ne serai même plus le bienvenu dans
mes réunions, parmi les miens puis parmi ma famille. Même les gens
de ma famille vont se sauver de moi.
Aujourd'hui, c'est un grand jour de deuil national pour les
Québécoises et les Québécois, pour moi. C'est mon
opinion. Vous êtes libres de ne pas la partager. C'est la seule
journée de l'année où je pense à autre chose
qu'à ma prière quand je me lève, le 1er avril, parce que
c'est un jour de deuil, parce que tous les gouvernements - peut-être plus
d'autres que le nôtre encore - ont réussi à accumuler une
dette nationale et, le 1er avril au matin, des 33 000 000 000 $ qu'on va
collecter dans vos poches, et vous n'êtes plus capables de donner une
maudite cent de plus, on va prendre 4 500 000 000 $ de ces 33 000 000 000 $
pour
envoyer à ceux qui nous ont prêté de l'argent.
Je voudrais bien, demain matin, qu'on n'envoie pas ces
intérêts-là à ceux qui nous ont prêté,
puis j'aimerais ça prendre 1 000 000 000 $ sur les 4 500 000 000 $ qu'on
envoie pour faire du développement régional. Le ministre des
Transports aimerait ça prendre l'autre milliard des 4 500 000 000 $
qu'on envoie pour faire des routes au Québec. Ouais! Puis on pourrait
prendre 1 000 000 000 $ de ces 4 000 000 000 $ qu'on n'enverrait pas aux
emprunteurs en guise d'intérêts, à ceux qui nous ont
prêté de l'argent, pour faire des rêves, M. le
Président, en couleur, s'il vous plaît! Parce que là ils
ont le moyen d'être colorés quand c'est 1 000 000 000 $. Mais
là, on est obligés de rêver autrement le 1er avril au
matin. On est obligés d'arrêter de rêver et puis de tomber
dans la réalité, sur le plancher des vaches, comme disent les
gens de l'agriculture. On est obligés de tomber sur le vrai plancher des
vaches. On va remettre 4 500 000 000 $ d'intérêts sur les emprunts
qu'on a faits, et on n'a pas encore remis une cent sur les
intérêts. Et il y a pire que ça. L'année prochaine,
c'est encore bien mieux, M. le Président. On se réveillera bien
plus brutalement, l'année prochaine, parce que votre gouvernement aura
réussi à faire encore 4 000 000 000 $ de déficit de plus
et, l'année prochaine, 10 % des 4 000 000 000 $, il faudra ajouter 400
000 000 $, le 1er avril 1993, aux 4 500 000 000 $ qu'on paie en
intérêts de la dette et on sera rendu à 5 000 000 000
$.
Les gens ne sont plus capables d'être taxés. Les gens n'ont
plus les moyens d'en absorber, et on prend 5 000 000 000 $ de belles piastres
improductives pour envoyer à ceux qui nous ont prêté parce
qu'on a bommé de l'argent, au fil du temps, à gauche et à
droite. C'est ça, la réalité. Il ne faut pas se compliquer
la vie. Évidemment, si j'avais un doctorat en finances, je vous
expliquerais ça tout d'une autre façon. Bien sûr.
J'expliquerais ça d'une autre façon, et on trouverait le moyen de
dire que ce n'est pas un déficit, à part de ça. On
trouverait le moyen de dire que ce n'est pas un déficit. Mais la
réalité n'est pas autre chose que ça.
Et ça, on doit tous en faire un mea-culpa. Ne jetons pas de
blâme à qui que ce soit. Il faut peut-être commencer
à demander au peuple de changer ses mentalités et de changer
d'attitude, il faut peut-être bien commencer à leur dire que,
toutes les fois que je vois mes amis d'en face déposer une
pétition au nom de citoyens pour demander des choses, ils devraient au
moins avoir le courage de leur dire: Toutes les fois que vous me faites
déposer une pétition ou toutes les fois que je passe une
pétition, moi, il faut que j'aie la main gauche dans les airs avec la
pétition et il faut que j'aie la main droite dans la poche pour payer ce
qu'ils demandent et ce qui va avec la pétition, parce qu'il n'y a pas de
miracle à ça.
On aura beau vouloir développer quoi que ce soit, vous savez,
c'est tentant. C'est bien tentant, en période économique
difficile, d'ajouter encore au déficit. Ça, quand on manque de
sérieux, c'est la première tentation qu'on a. Quand on n'est pas
trop sérieux, on se fout un peu de ce qui nous suit. On se fout un peu
de ce qu'on a de plus cher, dans le fond, nos enfants, parce que, demain matin,
nos enfants vont hériter de ce qu'on va leur donner. Ils vont
hériter de ce que, nous autres, on a planifié ou non
planifié. Ils vont hériter de ce que, nous autres, on a eu de
sérieux ou de ce qu'on n'a pas eu de sérieux. Ils vont
probablement être obligés de payer nos rêves sans, eux
autres, rêver et avec une réalité brutale. C'est ça,
la réalité.
Il ne faut pas chercher midi à quatorze heures et il ne faut pas
compliquer les choses, M. le Président. Il faut être juste en
mesure de dire: Oui, ce serait intéressant de faire autre chose, mais on
ne peut pas le faire. Comment peut-on maintenant être plus dans
l'excellence? Quand je dis qu'il faut changer d'attitude, c'est peut-être
le temps de commencer à penser un peu plus en fonction du
développement économique. Je dis ça souvent dans mes
régions.
Il y a des gens qui voudraient qu'on mette 1 000 000 $ dans une salle
communautaire. Oui, M. le Président, c'est intéressant, une salle
communautaire, pour la qualité de vie de nos concitoyens et nos
concitoyennes, mais une salle communautaire, ça crée des emplois
le temps de la bâtir. Après ça, on n'est même pas
capable d'assumer le salaire du concierge sans venir voir les
députés pour avoir une partie de leur argent de l'action
bénévole pour payer le concierge. Quand arrive le temps de la
réparer, on s'adresse encore au même gouvernement, aux mêmes
payeurs de taxes pour la rénover. Bien sûr! Il y en a qui me
disent: Avez-vous de quoi contre les salles communautaires? Bien non! Je n'ai
pas de quoi contre les salles communautaires. Y aurait-il moyen que le 1 000
000 $ qu'on a à notre disposition pour faire quelque chose, qu'on
crée de l'emploi avec? Et, tantôt, on va être plus de
payeurs de taxes pour se bâtir une salle communautaire et pour payer le
concierge. C'est juste ça, la différence. Elle n'est pas bien
grande, la différence, mais la différence entre créer des
emplois pour que le monde soit à l'ouvrage...
Ce qu'il manque au Québec, ce n'est pas compliqué, c'est
plus de payeurs de taxes pour aider a défrayer nos actions. Ce n'est pas
en bâtissant des salles communautaires qu'on va créer des payeurs
de taxes. Peut-être qu'on va aider les joueurs de cartes, mais pas les
payeurs de taxes. Je pense qu'il faut se le dire, même si ce n'est pas
mauvais de jouer aux cartes, même si ce n'est pas mauvais pour la
qualité de vie des concitoyens et des concitoyennes d'avoir une salle
communautaire.
Est-ce qu'on pourrait être plus censés dans nos
priorités maintenant parce qu'on n'a plus les moyens de se doter de
n'importe quoi? On n'a plus le droit de dépenser 1 $, M. le
Président, et qu'il y ait un cent là-dedans qui soit
utilisé à mauvais escient. Avant, on dépensait 1 $ et, ce
n'était pas compliqué, la philosophie, on disait: Si elle est mal
placée, le gouvernement mettra une autre piastre. On n'a plus de
piastres de remplacement. Ça veut dire que quand on décide de
dépenser 1 $, il faut être bien certain qu'il est
dépensé à la bonne place, au bon endroit, et qu'il va
rapporter, qu'il va rapporter 1,05 $. C'est ça, la
réalité. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? (10 h
20)
Et tous ceux et celles au Québec qui essaieront de vous faire
miroiter quoi que ce soit, ce sont de fieffés menteurs. Tous ceux et
celles qui disent qu'ils pourront, à un moment donné,
accéder au pouvoir, que ce soit au Québec, au Canada ou n'importe
où, dans les municipalités, et qu'eux autres, ils vont
créer de la richesse et des piastres, ne croyez pas ça, c'est des
marchands d'illusions. Je regrette, on pourrait même identifier des
pères de l'endettement québécois ici, dans cette salle.
Ça fait que là, il n'y a pas de miracle à faire. Quand ces
gens-là n'étaient pas capables de faire de miracles au moment
où c'était encore plus facile d'en faire, ils ne viendront pas me
dire qu'ils vont en faire à partir de demain matin. Ils ne viendront pas
me dire qu'ils vont en faire demain matin. Ils veulent simplement maquiller la
vérité pour être en mesure, après ça, que
leur visage dégouline davantage pour avoir l'air plus fou et plus
bête. Ce n'est que ça, M. le Président.
Malheur à ceux qui vont se masquer et qui vont se maquiller pour
tromper la population, ça va leur dégouliner dans la face; j'en
ai connu, des gouvernements qui ont dégouliné pour n'être
plus regardables à la fin de leur mandat. J'en ai connu. Il y en a,
d'ailleurs, qui étaient tellement gênés, ils n'ont
même pas fini leur mandat, ils ont sacré le camp avant, M. le
Président.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Picotte: Ça fait que ce n'était pas
compliqué. Ils n'étaient même plus capables de se regarder
dans un miroir. Ça fait qu'on ne se contera pas de peurs ici à
matin et on ne sera pas des marchands de bonheur et des marchands
d'illusions.
M. le Président, je pense qu'il est temps que la
société québécoise se discipline davantage. Il est
temps qu'on cible mieux nos interventions. Il est temps qu'on dépense
mieux, aux endroits où il faut dépenser. Et ça, ça
fait appel à l'excellence, ça fait appel à des changements
d'attitude et ça fait appel surtout à la responsabilité,
non tellement des dirigeants, des dirigeantes du Québec et de tous les
pays de l'Amérique du Nord - parce que c'est un problème qui est
bien plus vaste que celui du Québec, ça dépasse les
frontières - ça fait appel non seulement à la
responsabilité de ceux et celles qui sont élus et qui doivent
dire les vraies choses et les bonnes choses, mais ça fait appel aussi
à la responsabilité de chacun des citoyens et des citoyennes. Et,
bien sûr, ça veut dire qu'à ce moment-là, moi, comme
citoyen, la journée où je dis, d'un côté, à
mon gouvernement que je ne suis plus capable d'absorber de taxes, ça
suppose qu'il faut que je sois assez responsable pour dire: Je ne suis plus
capable d'avoir les mêmes exigences envers mon gouvernement. Parce que,
si le discours ne suit pas, si c'est de parler des deux côtés de
la bouche en même temps, M. le Président... J'ai vu trop de gens,
depuis plusieurs années, en parlant des deux côtés de la
bouche en même temps, qui se sont craché dans le dos et qui
avaient l'air de ce qu'ils avaient l'air, M. le Président. Merci.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le
ministre. Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes
au débat sur le discours d'ouverture de la session, et je reconnais Mme
la présidente de la commission des affaires sociales et
députée de Taillon. Mme la députée, la parole est
à vous.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Merci, M. le Président. Je me demande vraiment
à quel gouvernement appartient le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation...
Des voix: Au bon gouvernement.
Mme Marois: ...pour sombrer dans le ridicule à ce
point-là. Il nous dit: La priorité du gouvernement du
Québec, cela devrait être le développement
économique. Alors, regardons, au-delà des paroles, ce que sont
les gestes que pose ce gouvernement. Ce gouvernement, M. le Président,
augmente les interventions, au niveau de la mission économique, dans son
budget de l'ordre de 0,2 %. Il dit: Arrêtons d'aider les personnes qui
veulent se désennuyer - c'est un peu ça qu'il nous a dit - les
personnes âgées qui voudraient avoir de l'aide. Cependant, dans la
mission sociale, dans la mission éducative et culturelle, on constate
une augmentation, de 3,6 % dans la mission sociale, de 6,7 % de dépenses
de son gouvernement, M. le Président, qui explique les dizaines de
milliards de dépenses auxquels on est confrontés. Alors, il dit:
Priorité au développement économique. Mais mon
gouvernement, moi, ne fait rien en ce sens-là, cependant. Et cette
hausse d'à peine 0,2 %, alors qu'ailleurs, dans les autres missions,
c'est de l'ordre de 3 % et de
4 %, elle va pour supporter des gestes passés de son
gouvernement, qui ont été de mauvaises décisions, pour
renflouer des prêts qui ont été faits, de l'intervention
faite par la SDI pour renflouer effectivement une société qui en
avait besoin et à qui ça a permis de maintenir de l'emploi, bien
sûr - Marine Industrie, MIL Davie - mais ne propose rien pour l'avenir.
À quel gouvernement appartient-il, le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation pour venir nous dire de telles
âneries? Je m'excuse, mais ça n'a aucun sens qu'on applaudisse son
discours à tout rompre alors que, dans les faits, c'est
complètement le contraire que fait son gouvernement. Il nous dit: Les
gens doivent être considérés comme de vrais partenaires.
Fini! l'État-providence.
D'abord, je pense que le ministre devrait savoir ce que veut dire
l'État-providence, c'est qu'on n'a aucun contrôle et aucune
capacité de décider de nous-mêmes, comme personne
responsable, de ce qui va se passer avec notre budget. Donc, on dit: C'est un
acte de Dieu. C'est la Providence qui décide à notre place.
Ça a été une façon de dire qu'effectivement les
États avaient décidé, généralement, dans le
monde occidental, de se donner un certain nombre de services pour
répondre aux besoins de leurs concitoyens en matière de
santé, par exemple, et en matière d'éducation. Ce dont on
s'est rendu compte, c'est que ça coûtait probablement trop cher
actuellement, ces services-là, compte tenu de la capacité qu'on
avait pour les supporter, mais ça ne veut pas dire cependant qu'on
attend que Dieu, quelque part, ou que la Providence, quelque part,
décide à notre place. Et être des partenaires dans le sens
de ce que le ministre dit, M. le Président, ça signifie que les
gens doivent être associés au débat sur les choix du
gouvernement dans ces matières. C'est ça être des vrais
partenaires, ce n'est pas ce qu'a fait le ministre des Affaires municipales,
qui a décidé de remettre en question le pacte fiscal en envoyant
400 000 000 $ de nouvelles dépenses aux municipalités sans
obtenir leur accord, sans avoir débattu réellement du projet et
sans les avoir associées. Ça, ça aurait été
les traiter en véritables partenaires. Ce n'est pas le cas du ministre
des Finances.
Quand il nous dit «nos concitoyens n'ont pas la capacité de
payer», il a raison, M. le Président. Mais qu'est-ce qu'a fait son
gouvernement pour concrétiser ce geste-là? Son gouvernement, il a
envoyé pour 2 400 000 000 $ de nouvelles taxes depuis 1989. C'est
ça qu'il a fait. Alors, je pense que le ministre devrait retourner lire
un peu ses documents, les documents que publie son ministre des Finances, que
publie le président du Conseil du trésor, avant d'affirmer
n'importe quoi à travers son chapeau qui contredit essentiellement les
gestes qu'a posés son gouvernement depuis qu'il est là, depuis
1985, mais intensifiés depuis 1989. Parce que, entre autres, justement,
son gouvernement s'est fait élire sur cette marque de commerce qu'il
allait être habile à contrôler les dépenses
publiques, qu'il allait mettre de l'ordre là-dedans, parce qu'il savait
comment faire cela. Ce que vient de nous dire le ministre, ce matin, c'est que
c'est un échec. C'est un échec lamentable, sa politique. Et, dans
les faits, il a tout à fait raison. Je lui donne raison, M. le
Président, parce que son budget de dépenses va augmenter de 5,8
%; 5,8 %, c'est très gros, M. le Président. On parle de 4 000 000
000 $ de déficit pour l'année en cours. C'est inacceptable!
Alors, je pense que le ministre devrait prendre la peine de regarder un
peu les gestes que pose son gouvernement. Il nous affirme tout de go: Moi, je
ne veux pas parler pour parler. Alors, où était-il, le ministre
de l'Agriculture, lorsque le premier ministre et le lieutenant-gouverneur ont
lu le discours inaugural? Parce que, là, je suis persuadée que
tous les scriptes, toutes les personnes qui écrivent pour des
émissions, à la télé, un peu partout, auraient
été tout à fait inspirées par l'attitude qu'a eue
le premier ministre, et qui aurait pu inspirer sûrement quelques
scénarios de «Parler pour parler», justement, parce que
c'est ce qu'il a fait. Et si le ministre de l'Agriculture avait bien entendu
son premier ministre, il aurait tiré la même conclusion que moi,
je tire à cet égard-là.
D'ailleurs, le lendemain du discours inaugural du premier ministre, un
quotidien a titré: «Un catalogue d'intentions». Les gens qui
savent ce qu'est un catalogue, et j'imagine qu'à peu près tout le
monde ici sait ça... D'ailleurs, ça revient à la mode, les
catalogues. Il y a une quinzaine d'années, une vingtaine
d'années, et beaucoup plus longtemps pour un certain nombre d'entre
nous, on se souviendra que la façon de faire ses achats, c'était
par catalogue. Je suis certaine que vous avez connu ça, M. le
Président, hein? On recevait des grandes chaînes, des grands
magasins, des catalogues très épais, d'ailleurs, et dans lesquels
on nous présentait les nouveaux produits de la saison pour se permettre
de s'habiller et même de meubler la maison. On pouvait faire ça
par catalogue. Et c'est une mode qui s'est un peu atténuée, puis
elle revient actuellement. Elle revient probablement parce que les gens ont un
peu moins de temps et que ça fait économiser du temps. Et un
catalogue, ça voulait dire quoi? Ça voulait dire qu'on exposait
toute la marchandise avec des photos pour permettre aux gens de savoir ce que
l'entreprise avait à leur offrir. Et, à travers cela,
évidemment, on choisissait quelques items à la mesure de nos
besoins, à la mesure des besoins de notre famille. Et, souvent,
d'ailleurs, nos parents faisaient des miracles pour essayer d'attacher les deux
bouts et procurer à tous ce dont ils avaient besoin. On choisissait
parmi une multitude d'articles. (10 h 30)
C'est exactement ce qu'a fait le premier ministre, M. le
Président. D'abord, son discours était vide, absolument aucun
projet mobilisant, aucun projet d'envergure pour permettre à nos
concitoyens qui vivent actuellement des situations difficiles, des situations
pénibles où ils ne voient pas le bout du tunnel... Cette semaine,
on a encore eu des annonces d'entreprises qui ferment, des fermetures d'usines,
des gens qui perdent leur emploi. Et le premier ministre, lui, discourt et nous
présente sa liste, présente son catalogue. Il présente son
catalogue et, à la fin du discours, ce qu'il ne dit pas et qu'il fera,
cependant, M. le Président, c'est que, dans ce catalogue qui comprend
des mesures fort disparates, mais jamais aucune de vraiment mobilisatrice, ce
qu'il ne dit pas, c'est qu'il sélectionnera quelques
éléments et cette attitude sera conforme, d'ailleurs, à
l'attitude qu'il a depuis qu'il dirige ce gouvernement. Parce que si c'est le
cafouillis au niveau des dépenses, malgré ce que peut en penser
le ministre de l'Agriculture, c'est aussi le cafouillis au niveau des grandes
politiques gouvernementales, et c'est inacceptable, M. le Président,
qu'un chef d'État ait cette attitude à l'égard de ses
concitoyens et de ses concitoyennes qui attendent de lui non pas qu'il les
suive, mais qu'il trace un peu la voie, qu'il redonne un peu d'espoir aux
Québécois et aux Québécoises qui ont besoin, oui,
d'avoir des projets dans lesquels ils pourront s'engager, mais surtout d'avoir
un emploi.
Le ministre disait, tout à l'heure: Le problème que nous
avons, c'est que nous ne sommes pas assez nombreux à pouvoir payer pour
les services que nous nous sommes donnés, non pas que quelqu'un, quelque
part, a décidé de nous donner, mais que nous nous sommes
donnés. Il a raison. Pour que nous soyons plus nombreux, M. le
Président, il faut que nous puissions avoir un emploi, que nous
puissions faire vivre nos familles, que nous puissions gagner notre vie et
ainsi contribuer, comme l'ensemble de la population, aux services, au budget de
l'État pour que nous payions les services qui nous semblent utiles,
nécessaires pour l'éducation de nos enfants, pour nos soins de
santé. Je pense que c'est essentiel que l'on puisse maintenir un niveau
de qualité qui nous permette de nous réaliser.
D'ailleurs, la preuve en est qu'il y a des ratés au niveau de
l'éducation, que nous en payons et que nous en paierons le prix. Nous en
payons le prix au niveau de la formation professionnelle quand des gens
d'affaires viennent nous dire que non seulement ils ont des problèmes au
niveau de la formation de leurs gens, mais qu'ils ont des problèmes au
niveau du français. Ils ont des problèmes au niveau de
l'alphabétisation. Certains ont de la difficulté à lire
même des instructions pour faire fonctionner des appareils, des machines.
Il y a donc des ratés à des milliers d'endroits dans ce
gouvernement. Effec- tivement, nous avons surtout un problème d'emplois,
et le premier ministre ne propose rien, rien qui dit que l'on puisse entrevoir
une lueur d'espoir pour nos concitoyens et nos concitoyennes.
Le ministre dit: Nous voulons que les citoyens du Québec soient
des partenaires. Pourquoi ne pas proposer, à l'instar des gens des
centrales, des gens d'affaires, un véritable débat sur la
fiscalité québécoise, un véritable débat sur
les finances publiques québécoises? Ce serait ça, M. le
Président, traiter les gens en véritables partenaires. Ce serait
ça, les associer aux orientations. Ce serait ça, un
véritable questionnement sur les décisions que nous avons prises
dans le passé, les projets que nous voulons maintenir, ceux que nous
voulons remettre en question. Non pas que quelqu'un, quelque part, fasse comme
le ministre des Affaires municipales, impose aux municipalités un
fardeau de taxes sans qu'elles n'aient pu, effectivement, proposer ou
contrepro-poser des avenues qui auraient mieux convenu au modèle dans
lequel nous sommes engagés. Le même ministre qui vient de parler,
qui est responsable du Développement régional... Un
véritable cafouillis, M. le Président. Depuis 1986, en
commençant par l'actuel ministre de la Santé et des Services
sociaux, on se promène à travers le Québec avec des
projets de politique, avec quelques idées. On a fait table rase. On a
remis en question ce que l'ancien gouvernement avait fait, parce que ce
n'était pas très bon, évidemment. Alors, on allait faire
mieux, comme dans les dépenses publiques, M. le Président. On
allait faire mieux. On allait tellement faire mieux que, huit ans plus tard, le
ministre accouche d'une souris en matière de développement
économique régional, sans plan d'ensemble. Pourquoi je vous dis
qu'il n'y a pas de plan d'ensemble? C'est parce que lui arrive avec son projet,
parce que le ministre de la Santé et des Services sociaux a
déjà fait adopter une loi ici, à l'Assemblée
nationale, portant sur la remise en question de l'organisation et de la
distribution des services de santé et des services sociaux sur le
territoire, parce que le ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle est en
train, à son tour, de proposer une autre formule. Elle a
été tellement critiquée, peut-être la retirera-t-il,
une autre formule de distribution des services qui s'adresse à la
main-d'oeuvre sans vraiment régler le problème,
évidemment, comme d'habitude, toujours les choses à moitié
faites, M. le Président, parce qu'il dit: Moi, je vais m'occuper de la
main-d'oeuvre et de la sécurité du revenu, mais,
l'assurance-chômage, je vais la laisser à Ottawa.
C'est le morceau le plus important, c'est essentiel que l'on
intègre les deux approches à l'égard des gens qui sont des
bénéficiaires de l'aide sociale mais qui sont d'abord des
chômeurs et les programmes d'assurance-chômage, mais il
dit: Non, non, non, ça ne m'intéresse pas, moi, de
vraiment régler le problème. Je veux juste m'occuper de la
moitié du problème, puis je pense que je vais être
efficace. Non, il ne sera pas efficace comme il ne l'a pas été,
M. le Président, comme ne l'a pas été ce gouvernement
depuis huit ans, depuis sept ans qu'il est au pouvoir. Alors, un
véritable cafouillis! le ministre du Développement
régional, le ministre de la Santé, le ministre de la
Main-d'oeuvre, puis le ministre des Affaires municipales à travers tout
ça. Puis, comme si ça n'était pas suffisant, on a
confié au président du Conseil du trésor, responsable de
la grande région de Montréal, la mise en place d'un plan
d'ensemble pour le Grand Montréal. Pour s'assurer que ça allait
effectivement s'étioler, s'étirer et que ça n'allait
finalement pas livrer la marchandise, on est allé jusqu'aux
frontières de l'Ontario, du côté ouest, puis presque
jusqu'aux frontières américaines, en incluant dans le plan
d'organisation du Grand Montréal des régions qui ne se sentent
absolument pas concernées. Ça, ça s'appelle l'art de noyer
le poisson, M. le Président.
Alors, c'est ça, catalogue du premier ministre, mais cafouillis
des ministres, absence de résultats de la part du gouvernement et de la
part, entre autres, au premier chef, du ministre des Finances et du
président du Conseil du trésor qui, eux, devaient être,
à toutes fins pratiques, les sauveurs de la nation.
Ce que les citoyens et les citoyennes du Québec, M. le
Président, attendent de leur gouvernement, c'est une vision claire,
cohérente, des projets qui doivent être soutenus, proposés
et défendus. Ils attendent de leur gouvernement de pouvoir participer
avec lui aux débats qui concernent la distribution de leurs services,
l'organisation de leurs finances publiques, l'organisation de leur
fiscalité. Ils refusent, ils rejettent cette absence de cohérence
qu'ils sentent chez leur premier ministre qui, un jour, leur dit qu'il n'y a
rien à faire avec le reste du Canada, mais qui, le lendemain, leur dit
que, oui, c'est le plus grand et le plus beau pays du monde, qui, un jour, leur
dit et signe même un document et adopte même une loi qui leur dit
qu'il va les consulter; le lendemain, il n'est pas tout à fait certain
qu'il va le faire, M. le Président. Ils attendent de leur gouvernement;
ils attendent de leur chef d'État de la cohérence, des projets,
un sens de la décision, M. le Président, qui va faire en sorte
qu'ils retrouvent de l'espoir. Ils attendent de ce gouvernement qu'il sache
où il va, qu'il soit cohérent dans la façon dont il fera
et posera ses gestes, qu'il résolve les problèmes en
matière de décrochage scolaire, qu'il résolve les
problèmes en matière de formation professionnelle, qu'il
résolve les problèmes que vivent nos concitoyens et nos
concitoyennes à l'égard de l'emploi, parce que c'est ça,
le vrai défi auquel on devrait tous être conviés et auquel
devrait, au premier chef, nous convier le chef de l'État du
Québec plutôt que de nous lire une liste insipide de projets qui
sont des répétitions, de toute façon, de ce que ses
ministres ont annoncé et n'ont jamais fait. (10 h 40)
Ce n'est pas cela qu'on attend de notre premier ministre. On s'attend
d'avoir une vision claire de ce que sera notre avenir. Un chef devrait
être capable de proposer, de mobiliser et ce n'est pas, malheureusement,
ce que je sens de la part de mon gouvernement, puisque c'est aussi mon
gouvernement, M. le Président, et cela me désole. À
travers tout ce cafouillis, il ne réussit même pas à livrer
la marchandise, ce à quoi il s'était engagé à tous
égards parce que, lui, devait être le plus habile d'entre tous
pour gérer les finances publiques. Or, le résultat s'avère
être, là aussi et malheureusement pour nous, et malheureusement
pour la population québécoise, un échec lamentable.
Motion de censure
Et c'est dans ce sens, M. le Président, que je vais
présenter la motion qui suit: «Que l'Assemblée nationale
dénonce vigoureusement le gouvernement libéral pour son
incapacité à rétablir une progression normale des
dépenses de l'État québécois et ce, malgré
un discours inaugural qui ne présente ni choix, ni mesures
concrètes tant sur le plan social qu'économique.» M. le
Président, merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Taillon. Votre motion est déposée.
M. Doyon: Avec votre permission, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Pardon?
M. Doyon: Avec votre permission, M. le Président, une
question à la députée.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Louis-Hébert...
M. Doyon: Avec sa permission aussi, bien sûr.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Louis-Hébert...
M. Doyon: L'article 213.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...selon l'article 213,
il demande si vous lui permettez de poser une brève question.
Mme Marois: Très certainement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, la
question doit être brève et également la
réponse, M. le député de Louis-Hébert.
M. Doyon: Oui. M. le Président, je serais
intéressé à savoir comment la députée
peut-elle prétendre être crédible dans les circonstances
après avoir perdu la course au leadership en 1985: elle accusait son
propre chef de faillite économique en ce qui concerne son programme?
Comment peut-on la prendre au sérieux et comment peut-elle nous
expliquer que ses solutions d'aujourd'hui sont meilleures que celles qu'elle
avait autrefois?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Louis-Hébert. Mme la députée de
Taillon.
Mme Marois: C'est avec beaucoup de plaisir, M. le
Président, que je vais répondre à cette question-là
parce que, effectivement, notre gouvernement avait engagé toutes les
mesures avec les partenaires économiques et sociaux pour faire face
à cet échec auquel on était confrontés comme
gouvernement, qui était probablement pas mal moindre que l'échec
auquel est confronté le gouvernement qui est devant nous ce matin,
compte tenu du taux de chômage auquel ils arrivent après sept ans
de croissance économique où ils ont été à la
tête de ce gouvernement.
Alors, nous avions eu le courage, M. le Président, de poser les
gestes, de faire les critiques nécessaires de telle sorte que, oui, nous
proposions à nos concitoyens et nos concitoyennes des projets qui
allaient leur permettre de retrouver l'espoir qu'ils n'ont plus maintenant, M.
le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Taillon. Alors, je vous rappelle, mes chers
collègues, que nous en sommes toujours sur le discours d'ouverture de la
session. Je reconnais M. le député de Richelieu.
M. Albert Khelfa
M. Khelfa: Merci, M. le Président. Après l'aveu de
la députée de Taillon de leur échec lamentable, je vais
intervenir sur le devoir du discours inaugural. Je suis heureux d'intervenir
dans ce débat. Les intentions annoncées par le gouvernement dans
le dernier discours renferment un volet qui est essentiel au
développement économique du Québec, soit celui d'assurer
un avenir prometteur pour les régions.
L'intérêt du gouvernement à l'égard du
développement régional n'est pas nouveau. En 1988, notre
gouvernement, le gouvernement libéral, avait annoncé un plan
d'action visant à maximiser les ressources économiques, humaines
et techniques de chacune des régions au Québec. Aujourd'hui, le
temps est venu d'effectuer un virage qui a été amorcé en
décembre dernier par l'annonce d'un pian d'action basé sur les
conseils régionaux. À cette annonce, M. le Président, le
responsable des questions régionales et député de
Lévis avait répondu «que cette politique équivalait
à un déluge de mots dans un désert d'actions».
En termes de déluge, l'ancien gouvernement du Parti
québécois nous a gâtés et il a eu le courage
après, pour ne pas dire le culot, d'avouer, par la voix de la
députée de Taillon, que le gouvernement et ses actions
étaient un échec. M. le Président, ce qu'il a
annoncé, c'était du bidon dans à peu près tous les
secteurs d'activité, le tout chapeauté dans des lignes d'action
aussi imprécises qu'incohérentes. Le gouvernement libéral
a, au contraire, choisi d'assumer ses responsabilités et de s'associer
aux différents partenaires économiques et culturels en vue
d'assurer l'avenir de nos régions.
C'est ainsi que le ministre responsable du Développement
régional a annoncé ses couleurs, et il l'a fait dans la
Montérégie à partir de Sorel le 16 mars dernier, pour
annoncer les paramètres de la nouvelle politique du développement
régional. En ce sens, chacune des 15 régions du Québec,
à l'exception de la métropole, recevra un montant annuel moyen de
l'ordre de 3 000 000 $. Quant à la régionalisation des budgets
sectoriels, cette politique rendra disponible une somme d'environ 500 000 000 $
aux différentes régions du Québec. De façon
cohérente, de façon concrète, les budgets
spécifiques à chacune des régions proviendront d'une
quinzaine de ministères et d'organismes différents. Je conviens
que cette politique renferme un jargon quelque peu technique. Mais l'important,
c'est de savoir que chacune des régions du Québec aura les moyens
de s'assumer. Chacune des régions du Québec sera en mesure de
relever les défis de demain, tout aussi exhaltants qu'efficaces sur le
plan économique. Donc, chacune des régions du Québec
possédera enfin les outils nécessaires à son plein
développement et à son plein épanouissement.
M. le Président, la politique annoncée en décembre
dernier constitue bel et bien le prolongement du plan d'action de 1988 en
matière de développement régional. L'axe de
développement en matière de développement régional
tournera autour des activités des conseils régionaux. Ces
conseils régionaux assureront la concertation des intervenants, d'une
part, et pourront aviser le gouvernement sur la façon de dépenser
les enveloppes budgétaires prévues à cette fin. Les
conseils régionaux seront composés, pour un tiers, d'élus
municipaux et, de plus, des agents de développement
socio-économique. Bien sûr, les députés de chaque
région seront d'office sur le conseil régional.
Ce qu'il faut savoir, M. le Président, c'est que cette
démarche repose sur des notions d'accompagnement du dynamisme des
régions de la part du gouvernement. C'est une ligne d'action
qui correspond aux nouvelles réalités budgétaires
et économiques de tout gouvernement moderne.
M. le Président, vous allez me permettre de vous expliquer un
terme auquel je pense depuis que je suis entré en cette Chambre, le
terme «gérants d'estrade». Nos amis d'en face, je les ai
qualifiés, depuis la première journée que je suis
entré en cette Chambre, de gérants d'estrade. C'est eux autres
qui disent, en regardant la partie: Je vais sortir tel joueur, je vais mettre
un autre joueur, frappe la balle, frappe avec le bâton, recule, avance.
Mais quand ils étaient au bâton, eux autres, leur moyenne
était quoi? Leur moyenne n'était même pas la moitié
de ce que nous faisons à l'heure actuelle. M. le Président, une
chance que le ridicule ne tue pas; si le ridicule tuait, on aurait 32
sièges vacants ici, avec 32 élections partielles! (10 h 50)
M. le Président, en prenant le député de
Lévis, qui nous répond sèchement que la stratégie
du gouvernement donne un droit de parole aux intervenants régionaux,
oui, mais n'enlève rien au pouvoir décisionnel du gouvernement.
Mais j'espère bien, M. le Président, puisque, en bout de piste,
si ce sont les intervenants régionaux qui doivent décider de leur
propre avenir, il revient au gouvernement du Québec de s'assurer de la
cohérence des actions à l'échelle de son territoire de
même qu'il doit s'assurer de la saine gestion des deniers publics.
Encore, le gérant d'estrade de Lévis nous avait habitués
à peu de rigueur, mais, là, il a dépassé les
limites de l'acceptable. Il ne préconise rien de moins que l'absence du
gouvernement québécois sur le territoire dans la prise de
décision en matière de développement régional.
Quelle cohérence!
Le gouvernement libéral est un gouvernement responsable. C'est un
gouvernement qui préconise, pour sa part, une responsabilité
accrue en ce qui touche ses juridictions, mais un respect intégral des
choix des régions. En d'autres termes, on laisse aux régions le
soin de choisir leurs priorités, mais on exige du gouvernement qu'il
définisse les lignes directrices du développement régional
au Québec. On comprendra aussi que le gouvernement insiste sur la
nécessité de poursuivre un dialogue constant avec ses partenaires
municipaux et avec ses partenaires régionaux pour que soit assuré
le succès de cette politique régionale.
Un autre secteur clé, M. le Président, du
développement régional consiste à assurer l'avenir dans le
domaine de l'agriculture et de l'alimentation. Depuis 1985, le gouvernement
libéral s'est mis à la tâche pour redéfinir les
grandes orientations et les lignes d'action en cette matière. Le
problème venait du fait qu'au cours des dernières années
un nombre accru de programmes avaient été élaborés
et mis en place, lesquels n'étaient plus conformes aux
réalités d'aujourd'hui et à la réalité de
demain. Un vaste travail de réflexion a donc été entrepris
par notre gouvernement. Par la suite, nous avons présenté et fait
adopter la loi 46, ici en Chambre, en décembre 1987, qui visait à
une simplification plus grande et à une plus grande rationalisation du
régime de financement agricole.
Dans les budgets qui se sont succédé, le ministre
québécois des Finances a annoncé, à plusieurs
reprises, plusieurs mesures visant à aider les agriculteurs
québécois. Nous avons particulièrement insisté sur
les programmes d'aide à la production agricole et consolidé les
programmes reliés au financement agricole. De même, nous avons agi
de façon cohérente dans le secteur des assurances agricoles qui,
comme on le sait, visait à protéger les exploitants agricoles
contre les aléas naturels qui affectent le rendement de leurs
récoltes. On sait également qu'il s'agit d'assurer un revenu
décent pendant les cycles où l'agriculture subit des reculs.
Le gouvernement a également annoncé d'autres mesures pour
soutenir l'agriculture au Québec. Dans son budget de 1991-1992, le
ministre a annoncé des mesures concernant la commercialisation des
produits bioalimentaires, la gestion des territoires agricoles et le
développement des pêches. M. le Président, l'enjeu est de
taille puisqu'il ne s'agit rien de moins que de léguer un patrimoine
sain, un patrimoine durable pour les générations qui vont nous
succéder. Il faut assurer, selon les politiques du gouvernement, selon
les politiques du gouvernement libéral, un développement
où l'utilisation des ressources et de l'environnement d'aujourd'hui ne
remet pas en cause les perspectives d'utilisation future.
À cet égard, au cours de la présente session, les
parlementaires seront appelés à se pencher sur des mesures
économiques, concordantes avec la notion de développement
durable. Par exemple, nous serons appelés à nous pencher sur une
loi créant l'Office de protection de l'environnement qui veillera
à tous les volets du développement économique durable.
M. le Président, j'aimerais maintenant m'at-tarder sur quelques
bévues des gérants d'estrade d'aujourd'hui, accomplies par
l'ancien gouvernement du Parti québécois, qui font leur
référence en matière agricole. Le bilan n'est pas
seulement particulièrement désastreux, mais c'est un bilan
affreux. Je me souviens de l'époque où le gouvernement
péquiste avait élaboré une politique d'ensemble sur la
production porcine. Cette politique s'est avérée un
véritable désastre, M. le Président, parce que le
marché s'est affaissé alors qu'on avait lancé les
producteurs de porc dans cette activité sans trop savoir les effets sur
le marché. Et, aujourd'hui, ils viennent nous faire la morale: Vous ne
faites rien. Qu'est-ce qu'ils ont fait, eux autres, quand ils étaient
là, ces gérants d'estrade? Ils ont fait moins que rien. Ils ont
endetté le Québec, ils ont endetté l'ensemble des
Québécois et des Québécoises avec un taux effarant,
et ils viennent nous faire la morale et
donner des leçons.
M. le Président, je veux me limiter à mon discours, qui
est un discours positif. C'est cela qui caractérise notre gouvernement,
le positivisme. Les gérants d'estrade rient, M. le Président.
C'est bien.
Les résultats nets sont bien connus. Plusieurs producteurs ont
dû déclarer une faillite à cause d'une analyse
irrationnelle effectuée par le gouvernement péquiste, tandis que
d'autres ont vu leur revenu net baisser d'une façon dramatique. C'est
donc une faillite monumentale qui a caractérisé l'administration
de l'ancien gouvernement du Parti québécois. Incapable de venir
en aide à ceux et celles qui en avaient le plus besoin, l'ancien
gouvernement péquiste a littéralement abandonné l'ensemble
des régions du Québec, en passant par tous les secteurs
d'activité économique, surtout celui de l'agriculture.
Le gouvernement libéral d'aujourd'hui tente, par tous les moyens
possibles, de maintenir une marge de manoeuvre suffisante pour soutenir
l'initiative des régions. Tout en venant en aide aux secteurs
d'activité qui souffrent le plus, notre gouvernement responsable ajuste
ses priorités en fonction des défis de demain, notamment en
soutenant les secteurs de pointe et de haute technologie.
C'est une discipline budgétaire qui caractérise l'action
du gouvernement libéral en matière de finances publiques. Si ce
dernier agit de manière responsable, c'est qu'il veut s'assurer de
pouvoir créer des programmes susceptibles d'aider les régions du
Québec. Comme le précisait le premier ministre du Québec,
le Québec doit pouvoir assumer la réalité de sa
géographie, un principe qui s'appliquait pour le dossier
constitutionnel, mais qui convient aisément au dossier régional.
Ce qui compte, M. le Président, d'abord et avant tout, c'est que, pour
l'avenir, l'ensemble des partenaires du monde agricole, du monde culturel, du
monde économique fassent preuve de réalisme avant tout pour
soutenir le gouvernement du Québec dans la poursuite de la saine gestion
des finances publiques.
Du même coup, nous réussirons à relever un autre
défi, soit celui du combat contre la pauvreté au Québec,
car, il ne faut pas l'oublier, la pauvreté ne se retrouve pas uniquement
dans les grands centres urbains, mais se vit tout autant dans les
régions rurales et un peu partout autour de nous. C'est un combat de
tous les instants que mène le gouvernement en privilégiant des
actions d'ordre économique et social. (11 heures)
C'est un sens de réalisme profond qui devra marquer
l'évolution du Québec pour relever les défis auxquels il
sera confronté. En d'autres termes, M. le Président, le
Québec devra poursuivre son action dans la perspective d'une
qualité de production et de mise en marché des produits de la
terre.
Le secteur du transport constitue un autre volet très important
qui a été mentionné dans le discours inaugural et qui a
une incidence directe sur le développement régional. À cet
égard, le gouvernement entend poursuivre l'effort entrepris au chapitre
de la conservation et de l'amélioration du réseau routier. Un
projet de loi visant à moderniser la Loi sur la voirie et à
préciser les responsabilités des municipalités dans ce
domaine nous sera soumis.
Si vous me permettez, M. le Président, j'ouvrirai une petite
parenthèse en disant que dans la tournée du ministre
d'État responsable du Développement régional et ministre
des Transports... Il est venu à Saint-Hyacinthe lundi dernier pour
annoncer la nouvelle politique, et une nouvelle forme de partenariat avec les
municipalités était accueillie très favorablement.
À ce moment, on peut dire que nos partenaires sont sur le terrain. Les
partenaires, c'est le monde des municipalités qui a décidé
de relever le défi de l'amélioration du réseau
routier.
Toujours dans le domaine du transport, des modifications seront
proposées au Code de la sécurité routière pour
améliorer la sécurité de l'ensemble des véhicules
motorisés. Je n'oublie pas non plus qu'un travail sera effectué
dans le cadre de la législation des secteurs du camionnage, du transport
par taxi et des traversiers du Québec, laquelle législation sera
améliorée. Comme vous le savez, M. le Président, et comme
vous le voyez aussi, toutes ces mesures viseront essentiellement à
améliorer la qualité de vie au Québec et contribueront
à la prospérité de nos régions.
Dans le secteur du tourisme, M. le Président, des interventions
majeures seront entreprises par le gouvernement afin d'aider l'industrie du
tourisme par des mécanismes de concertation accrus pour permettre une
intervention majeure.
Comme vous venez de me faire un signe, M. le Président, vous me
mentionnez qu'il me reste une minute. Je ne peux pas oublier un secteur
très important dans le discours inaugural, c'est de parier de mon
comté, le comté de Richelieu, qui est un comté à la
fois urbain et agricole, à la fois industriel et agricole. Nos
industries, nos entreprises, elles sont à l'heure de la mondialisation
des marchés. Elles vont décider de relever le défi
à l'extérieur, puis, ça, c'est un volet qui a
été mentionné à l'intérieur du discours
inaugural. C'est tout à l'honneur de nos entreprises du comté de
Richelieu et tout à l'honneur des entreprises de l'ensemble du
Québec.
Compte tenu qu'il faut être à la fois prévoyant et
travaillant, nous travaillons en même temps pour déterminer et
ouvrir de nouveaux marchés dans le domaine de la globalisation des
marchés. Puis j'aimerais vous dire, comme vous le mentionniez, que le
défi que nous avons, autant au niveau du comté de Richelieu
qu'à travers le Québec, c'est un défi majeur, puis je suis
fier de le relever avec l'équipe libérale. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Richelieu. Je rappelle aux membres de cette
Assemblée que nous sommes sur le débat du discours d'ouverture de
la session, et je cède la parole à M. le whip en chef de
l'Opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean. M. le
député, la parole est à vous.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, quand on jette un coup
d'oeil sur le front constitutionnel, on doit constater que le cloaque
s'épaissit, que le fouillis constitutionnel s'aggrave et que la tour de
Babel voit s'ajouter étage sur étage et monte vers le ciel.
C'était remarqué et prévisible. Nous l'avions en quelque
sorte annoncé, et il n'est pas besoin d'être prophète pour
prévoir ce qui se passe présentement, c'est-à-dire qu'on
se retrouve, sur le plan constitutionnel, dans un véritable
désordre, un véritable fouillis, pour toutes sottes de raisons.
D'abord, parce que la table s'est agrandie. Le nombre des convives a
augmenté. On est passés maintenant à 16. On y a
ajouté les 4 associations autochtones de même que les 2
territoires, ce qui fait, évidemment, que ça a eu pour effet de
multiplier les comités et les forums et d'accentuer encore le
désordre, un désordre, soit dit en passant, qui n'est pas
créateur, mais qui est stérile, infécond. On a souvent
l'habitude de dire qu'une certaine anarchie est créatrice. Dans ce
cas-là, l'anarchie n'est pas créatrice. C'est vraiment le
désordre infécond et stérile.
Puis s'ajoute à cela le braquage de certains premiers ministres
du Canada anglais. Je vous rappellerai la déclaration tout à fait
récente de M. Getty, le premier ministre de l'Alberta, qui a
été on ne peut plus clair et ferme quant à la
réforme du Sénat, et qui est tout aussi clair également
quant à son refus d'accorder le moindre droit de veto au Québec.
Même chose pour M. Wells, toujours relativement au droit de veto et aussi
pour la réforme du Sénat. On tient mordicus à une
réforme du Sénat triple «e», et M. Filmon est
également du même avis. Donc, un bon nombre de premiers ministres
du Canada anglais se sont carrément braqués dans le dossier
constitutionnel et refusent farouchement toute concession le moindrement
substantielle au Québec, particulièrement en ce qui concerne des
revendications dites historiques du Québec.
S'ajoute à cela également un affaiblissement dramatique du
pouvoir de négociation du gouvernement du Québec. On peut
même dire qu'avec le message inaugural et les propos tenus, dans le
message inaugural, par le premier ministre du Québec sur le dossier
constitutionnel, on peut dire que, si le Québec conservait - ce qui
n'est pas évident - un certain pouvoir de négociation, à
partir du message inaugural du premier ministre, ce pouvoir de
négociation a été réduit à néant. Il
est devenu complètement nul, parce que le premier ministre l'a
affirmé très clairement, son choix, c'est le Canada. On pourrait
même dire que son seul choix, c'est le Canada, que son seul objectif,
c'est de maintenir le Québec dans le Canada, et que les seuls propos
qu'il a tenus sur la souveraineté sont des propos hostiles. D'ailleurs,
je n'ai jamais entendu, au cours des 25, 30 dernières années, le
premier ministre du Québec proférer un bon mot sur la
souveraineté. Jamais! À chaque occasion, tous les propos qu'il a
tenus sur la souveraineté ont été des propos hostiles, des
propos négatifs.
Donc, c'est clair que le Canada anglais, le message qu'il a reçu
venant de l'Assemblée nationale à l'occasion du message inaugural
du premier ministre, il est on ne peut plus limpide. C'est que le gouvernement
du Québec tient tellement à maintenir le Québec dans le
Canada que cette histoire de référendum possible sur la
souveraineté est désormais perçue comme un bluff et un
mauvais bluff, un bluff qui est dévoilé en quelque sorte.
L'épée de Damoclès que pensait constituer le
référendum sur la souveraineté, bien, cette
épée de Damoclès n'existe pas, parce que
l'épée de Damoclès, M. le Président, était
en bon acier trempé. Là, il ne s'agit pas du tout de
l'épée de Damoclès au-dessus de la tête du Canada
anglais, il s'agit d'une épée en caoutchouc mousse qui ne fera
pas grand tort quand on coupera le fil. Si on coupe le fil, ça ne fera
pas grand dégât une épée en caoutchouc mousse. Le
couteau sur la gorge, dont parlait M. Léon Dion à une certaine
époque, que constituerait un référendum sur la
souveraineté, bien, c'est un couteau en caoutchouc mousse. Ça ne
fera pas une contusion très majeure, ça ne fera pas saigner
beaucoup le Canada anglais. (11 h 10)
Donc, c'est un mauvais bluff. Perte du pouvoir de négociation,
pouvoir de négociation du Québec réduit à
néant. Voilà le décor, M. le Président. C'est un
fouillis, un désordre, une chatte n'y retrouverait pas ses petits. Il y
a, d'un côté, un braquage très évident de plusieurs
premiers ministres du Canada anglais, appuyés en cela par leur opinion
publique, puis, de l'autre, il y a un gouvernement du Québec,
évidemment, qui joue une mauvaise partie, qui bluffe de façon
déplorable et qui voit ainsi son pouvoir de négociation
réduit à néant. C'est ça, le décor
constitutionnel actuellement, M. le Président.
Et le gouvernement fédéral dans tout cela, comment se
comporte-t-il? Quelle est son attitude et quel est son comportement? Et bien,
d'abord, il essaie maintenant, depuis plusieurs jours et même depuis
plusieurs semaines, de jouer, d'influer sur le cadre temporel, dans ce sens
que, par différentes manoeuvres, il s'efforce de modifier le processus
qui est prévu dans la loi 150, le processus référendaire,
de modifier le cadre temporel adopté dans la loi 150. C'est ainsi que,
lors du dépôt du rapport Beaudoin-Dobbie, le gouvernement
fédéral a dit: Les offres vont être rendues publiques
à la fin avril. Bon. Je
vous rappellerai qu'auparavant, c'était prévu pour mars,
mais là, le rapport Beaudoin-Dobbie tombant sur nos tables très
tard, le gouvernement fédéral a reporté à la fin
avril le dépôt d'offres formelles. Puis, comme ça n'allait
pas très bien, à la conférence des premiers ministres qui
a été convoquée à cet effet, là, le ministre
Joe Clark a dit: Écoutez, c'est impossible fin avril, vous vous rendez
bien compte; je repousse l'échéance, la date du
dépôt des offres à la fin mai. Bon. Puis, vendredi dernier,
le ministre Joe Clark a déclaré que c'était assez
difficile fin mai, que ça pourrait fort bien être juin. Mul-roney,
qui était en visite au Québec en fin de semaine dernière
pour, d'abord, jouer au Bonhomme Sept Heures, mais tout en jouant au Bonhomme
Sept Heures à Baie-Comeau dans son comté, il a, lui aussi,
évoqué la possibilité que mai, c'est difficile et que
même ça pourrait aller à l'été, en plein
coeur de l'été.
Alors, vous voyez la tactique, vous voyez la manoeuvre, il s'agit de
repousser constamment la date du dépôt des offres. Pourquoi? Pour
une raison évidente. C'est clair que le gouvernement
fédéral, en agissant ainsi, s'efforce de contraindre le
gouvernement du Québec pour que ce dernier repousse, reporte
l'échéance référendaire qu'on retrouve dans la loi
150, c'est-à-dire un référendum sur la souveraineté
au plus tard le 26 octobre 1992. À partir du moment où la date du
dépôt des offres est constamment repoussée dans le temps -
d'abord avril, fin mai, juin, peut-être l'été,
peut-être juillet, nous affirme le premier ministre fédéral
- c'est clair qu'à ce moment-là cette manoeuvre a pour effet
d'influer sur le gouvernement du Québec qui pourrait prendre
prétexte de ce report incessant dans le temps de la date du
dépôt des offres pour amender la loi 150 et repousser
l'échéance référendaire.
J'affirmais, cette semaine, que ça pourrait très bien
être l'objet d'un accord, d'un «deal» entre les deux, entre
M. Mulroney et le premier ministre du Québec. On sait qu'ils conversent
souvent, ils ont des entretiens téléphoniques fréquents.
Ça pourrait très bien faire l'objet d'un accord: Tu repousses
dans le temps la date du dépôt des offres, tellement loin dans le
temps que ça m'oblige ou que ça me donne, en tout cas, un
prétexte, ça me justifie de modifier la loi 150 et de repousser
l'échéance référendaire. D'autant plus que l'on
sait fort bien que le premier ministre du Québec n'a visiblement pas le
goût, ni l'intention, ni les convictions de respecter cet engagement
contenu dans la loi 150. Il pourrait là trouver un excellent
prétexte pour le reporter, le référendum sur la
souveraineté, en disant: Écoutez, le Canada n'est pas prêt.
Ça fait 50 ans qu'on parle de constitution, je ne vois pas pourquoi on
ne pourrait pas lui accorder quelques mois de plus, au Canada anglais, pour
qu'il puisse nous présenter des offres convenables. Soyons bons princes,
soyons compréhensifs. C'est la dernière chance qu'on leur donne;
alors, donnons-leur un peu le temps de la présenter, cette
dernière chance. Et il demanderait aux Québécois de la
compréhension: Soyez compréhensifs. Comprenez les choses. C'est
une question de mois. Et c'est tellement conséquent, c'a tellement de
conséquences qu'on peut se permettre de repousser
l'échéance. Je vois déjà le discours, le discours
qu'on tiendrait pour essayer de justifier cela devant les
Québécois.
Il y en a qui se demandent: Comment se fait-il qu'on ait voté
contre la loi 150 le printemps dernier? C'est pour ces raisons-là.
Rappelez-vous les discours qu'on a faits à cette
époque-là. On a voté contre parce qu'on a dit: Le
gouvernement a introduit dans cette loi-là tellement
d'échappatoires, de voies de sortie pour ne pas respecter l'engagement
qui s'y trouvait de tenir un référendum sur la
souveraineté, tellement d'échappatoires et de voies de sortie
qu'on a conclu, nous, quant à nous, que ce n'était pas
sérieux, que ce n'était pas un véritable engagement
solide, ferme et qu'on ne pouvait pas cautionner une pareille attitude. C'est
pour cette raison-là qu'on a voté contre. On voit là, avec
les événements qui se produisent, que malheureusement on avait
sans doute raison. Voilà ce qui peut se passer.
À partir du moment où le gouvernement
fédéral aura réussi cette opération,
c'est-à-dire aura réussi à convaincre ou à
contraindre le gouvernement québécois de reporter
l'échéance référendaire pour lui laisser plus de
temps, le temps requis pour présenter des offres, formuler des offres,
à partir de ce moment, là, le gouvernement fédéral
pourra introduire son propre référendum, dont il est de plus en
plus question ces jours-ci. Ce n'est pas pour rien que c'est réapparu
sur la place publique, ça, le référendum pancanadien, dans
le dossier constitutionnel. C'est réapparu avec force actuellement sur
la place publique. Ce n'est pas pour rien. C'est parce que le gouvernement
fédéral, une fois qu'il aura réussi à convaincre ou
à contraindre le gouvernement québécois à repousser
l'échéance de son propre référendum prévu
dans 150, ça va être pour y mettre à la place son propre^
référendum pancanadien en vertu du principe: Ôte-toi de
là que je m'y mette! C'est ce principe-là que le gouvernement
fédéral est en train d'appliquer: Ôte-toi de là que
je m'y mette! Enlève ton référendum, repousse-le pour que
je mette le mien à la place. C'est ça qui est en train de se
produire présentement. C'est ça, le scénario qui est en
train de se produire.
Et ce référendum pancanadien, dont il est de plus en plus
question, eh bien d'abord, non seulement il faut le condamner pour les raisons
qu'on a souvent évoquées en cette Chambre, y compris le ministre
responsable du dossier constitutionnel, c'est parce que c'est une
négation pure et simple du droit à l'autodétermination des
Québécois. Le ministre responsable du dossier
l'a souvent dit: Ce sont les Québécois eux-mêmes qui
vont choisir leur avenir et ce sont seuls les Québécois qui ont
le droit de choisir leur avenir. Le droit à l'autodétermination,
c'est ça. Et à partir du moment où le choix de l'avenir du
Québec est confié à toute la population «from coast
to coast» dans un référendum pancanadien, c'est clair que
ce droit à l'autodétermination des Québécois se
trouve ainsi nié, foulé aux pieds. (11 h 20)
Et je m'étonne de voir Benoît Bouchard,
député conservateur de Roberval, de ma région, M. le
Président, ces jours-ci, considérer comme normal et acceptable un
référendum pancanadien. Je trouve ça un peu curieux, un
peu bizarre, parce que je me souviens très bien de certaines images du
congrès conservateur de Toronto où l'on a vu ce même
Benoît Bouchard sauter en l'air, les bras en l'air, sautant de joie,
exultant parce que son congrès avait adopté le principe du droit
des Québécois à l'autodétermination. La, je le
vois, ces jours-ci, trouver acceptable, normal, comme étant un
scénario envisageable, un référendum pancanadien.
Drôle de cohérence, hein! Drôle de cohérence!
Drôle de logique! Un référendum pancanadien étant
purement et simplement une négation du droit à
l'autodétermination des Québécois, droit accepté,
de façon solennelle, par le congrès conservateur du parti de M.
Bouchard, et là, soudainement, il trouve ça normal. Remarquez
qu'il n'est pas à sa première incohérence près, ce
monsieur, qui a l'habitude d'étaler ou d'exhiber ses états
d'âme hebdomadairement, de mettre ses tripes sur la table de façon
systématique.
Alors, voilà ce qui se prépare, présentement. Et
sur quoi porterait ce référendum pancanadien? Sur quoi,
pensez-vous? Bien, il porterait sur des offres. Quel genre d'offres? Bien, ce
serait une espèce de mixture ou de ragoût composé
d'éléments des propositions de septembre et de certains
éléments du rapport Beaudoin-Dobbie. Ça ne peut pas
être tellement différent de ça, hein! D'autant plus que le
rapport Beau-doin-Dobbie, je rappelle que le premier ministre
fédéral a jugé son contenu «les offres les plus
généreuses qu'on n'ait jamais faites au Québec»;
alors, ça me surprendrait qu'il aille plus loin que cela. Ça va
être ça, ça va être cette mixture-là qu'on va
offrir comme pâture, dans un référendum pancanadien, aux
Canadiens comme aux Québécois.
Ce n'est pas acceptable pour le Québec, M. le Président.
Le Québec ne peut pas accepter ça, d'abord à cause du
contenu - les offres qui seront soumises à la population ne seront pas
acceptables pour le Québec, seront à mille lieues des aspirations
et des revendications du Québec - mais aussi parce que le processus
n'est pas acceptable, puisque, par le biais d'un référendum
pancanadien, il est évident que le gouvernement canadien sera
tenté d'utiliser les résultats d'un tel référendum.
On peut déjà les deviner, les résultats d'un tel
référendum; ce serait une majorité très
substantielle au Canada anglais, puis un certain pourcentage de
Québécois, les Québécois fédéralistes
qui, évidemment, voteraient aussi en faveur. Le gouvernement
fédéral pourrait fort bien s'appuyer sur ces résultats
pour justifier une opération de modification constitutionnelle sans le
consentement du Québec et nous imposer des changements sans le
consentement du Québec en invoquant, évidemment, le
caractère démocratique de la consultation populaire qui aura
été tenue et en invoquant la majorité très
substantielle qui se serait dégagée de cet exercice.
Je termine en disant que le Québec doit éviter de tomber
dans ce piège, parce que c'est un piège évident. Il doit
éviter de tomber dans cette chausse-trappe, d'abord en refusant de
modifier son calendrier, le calendrier qu'il a inclus dans la loi 150; il doit
être ferme et très clair là-dessus, à ce
sujet-là: un refus farouche, déterminé de modifier le
calendrier. Deuxièmement, M. le Président, il doit aviser le
fédéral, je pense, dans des termes clairs, limpides, que seuls
les Québécois ont le droit de déterminer leur avenir et de
choisir leur avenir, et que le gouvernement québécois ne peut pas
accepter que le choix de l'avenir du Québec soit confié à
une majorité au Canada anglais. Ce serait bafouer et violer le principe
même du droit à l'autodétermination du peuple
québécois, et il doit tout mettre en oeuvre, le gouvernement
québécois, pour empêcher que soit mis en branle un
processus référendaire pancanadien. C'est ça, la meilleure
façon pour le gouvernement du Québec de défendre ce qu'il
appelle constamment les intérêts supérieurs du
Québec. Il y a là une occasion de défendre
réellement les intérêts supérieurs du Québec,
maintien du calendrier prévu dans 150 et refus catégorique de
cautionner le moindrement un processus référendaire pancanadien
qui serait une négation du droit des Québécois à
choisir leur avenir. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Lac-Saint-Jean et whip en chef de l'Opposition
officielle. Sur le même sujet, je cède la parole à M. le
député de Louis-Hébert. Vous disposez d'une période
maximale de 20 minutes, M. le député.
M. Doyon: Merci.
M. Brassard: M. le Président, on me permettra un
oubli...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je m'excuse... Oui,
allez-y.
M. Brassard: ...j'avais une motion à déposer.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y, M.
le député de Lac-Saint-Jean.
Motion de censure
M. Brassard: Alors, la motion se lit comme suit: «Que
l'Assemblée nationale déplore la mollesse affichée par le
premier ministre par sa profession de foi fédéraliste
exprimée sans réserve à l'occasion du discours d'ouverture
et condamne l'attitude du gouvernement libéral qui cherche par tous les
moyens à se dégager de son obligation formelle de tenir un
référendum sur la souveraineté, prévu au plus tard
le 26 octobre prochain, en vertu de la loi 150.»
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Votre motion est
déposée. Allez-y, M. le député de
Louis-Hébert.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: Oui, merci, M. le Président. L'occasion qui nous
réunit ici est un événement d'une importance capitale.
Nous avons l'occcasion d'entendre les allocutions, les propos des membres de
l'Opposition qui sont en train, pensent-ils, de faire la preuve que le
gouvernement rate son coup, que le gouvernement ne fait pas preuve
d'imagination, que le gouvernement est à court de ressources, que le
gouvernement devrait faire ci, que le gouvernement devrait faire ça.
M. le Président, il faut avoir la mémoire drôlement
courte, particulièrement dans le cas de la députée de
Taillon à qui j'avais l'occasion de poser une question tout à
l'heure, qui nous afflige de tous les maux et qui en invente de nouveaux qui ne
sont pas connus et qui nous met au défi de faire ci et de faire
ça, de régler le chômage, d'augmenter l'emploi et
d'implanter des industries, et qui demande qu'en même temps nous
augmentions les crédits pour ci et pour ça.
J'ai en main, M. le Président, un article de journal qui permet
de mettre en relief le double langage là-dedans. Vous déciderez
vous-même, et la population en jugera, de la crédibilité de
ces gens qui nous accusent, comme je le disais, de tous les maux. J'ai ici un
article de journal paru dans Le Devoir du samedi 10 août 1985. Je
lis le grand titre ici: «Marois fait le constat d'échec de son
gouvernement». Je lis deux paragraphes, M. le Président,
simplement pour éclairer un peu cette Assemblée et ceux qui nous
font l'honneur de nous écouter. M. le journaliste Pierre O'Neill
écrivait ce qui suit: «Ministre de la Main-d'oeuvre et de la
Sécurité du revenu, Mme Pauline Marois fait le constat
d'échec de son gouvernement qui, reconnaît-elle, n'a pas pris les
bons moyens pour combattre le chômage.»
Il continue de la façon suivante: «À l'occasion de
l'ouverture officielle de son comité central d'organisation, rue
Ontario, à Montréal, Mme Marois a déclaré que le
taux de chômage de 12 % - 12 % en 1985 - est une preuve que les outils
auxquels on a eu recours - elle parle de son gouvernement - dans la lutte au
chômage n'ont pas donné les résultats
escomptés.»
Je pourrais continuer l'article, M. le Président, et ça
vous permettrait de vous faire une idée que le jugement que tente de
porter sur le présent gouvernement la députée de Taillon
doit être coloré, doit être nuancé avec
l'autocritique qu'elle-même, dans un moment de lucidité, me
di-rez-vous, temporaire, faisait à l'égard de son propre
gouvernement. Dommage que cette lucidité, dont je suis prêt
à la féliciter, n'ait pas duré plus longtemps et qu'elle
ne l'ait pas amenée à faire un autre discours où elle
aurait eu des propos différents de ceux qu'elle a eus. Malheureux, M. le
Président, que les moments de lucidité soient aussi brefs et
qu'ils ne permettent pas une cohérence dans le discours qui pourrait
rattacher le discours de ce matin au discours qu'elle tenait le 10 août
1985, à Montréal, sur la rue Ontario. C'est dommage, M. le
Président, que cette cohérence, ce fil conducteur se soit
brisé quelque part. A-t-il été brisé par la
partisanerie aveugle, par le désir, la soif du pouvoir? Là, je ne
réponds pas à ces questions. Je constate les symptômes. Je
laisse le diagnostic à d'autres, aux électeurs en particulier qui
sont capables de comprendre qu'on ne peut pas dire noir aujourd'hui et blanc
demain et avoir raison dans les deux cas. (11 h 30)
Les solutions toutes trouvées, ça n'existe pas. Nous
pourrions faire de la diversion, nous pourrions nous contenter de mettre des
cataplasmes; nous avons décidé d'aller au fond des choses, de
trouver des remèdes qui auraient une durée dans le temps et qui
ne seraient pas teintés du même défaut dont je blâme
l'Opposition, c'est-à-dire de la partisanerie aveugle.
M. le Président, je conçois difficilement qu'un chef de
parti, par exemple, en l'occurrence le chef de l'Opposition, le
député de L'Assomption, dans les idées de grandeur qui le
caractérisent, n'ait rien de mieux à faire dans la période
que nous vivons, aujourd'hui, les premiers mois de 1992. Savez-vous de quoi se
préoccupe le chef de l'Opposition, sur quoi il réfléchit,
sur quoi il cogite? Quel est le problème immense qu'il est en train de
solutionner pour la région de Québec? Qu'est-ce qui le tracasse
le plus? Qu'est-ce qui l'empêche de dormir? Au sujet de quoi, en se
couchant, se dit-il, «si je pouvais me lever avec la solution»?
Qu'est-ce qui le tracasse? Qu'est-ce qui l'amène à avoir un peu
de cheveux qui blanchissent tranquillement? Quelle est cette difficulté
existentielle qui le mine? M. le Président, rien d'autre que ce qu'il
annonçait dans le journal Le Soleil du lundi 24 février: C'est
que les besoins administratifs auxquels devrait répondre la capitale
d'un nouvel État souverain, c'est-à-dire Québec, ce serait
de trouver une résidence officielle pour le chef d'État, qui
pourrait, dit-il, être celle qui est
actuellement réservée au gouverneur général
du Canada, c'est-à-dire la Citadelle de Québec. Je n'invente
rien. Très grave problème à résoudre dans les
moments difficiles que nous vivons: trouver une résidence pour le chef
de l'État d'un Québec souverain. Et, dans un éclair de
génie, se levant le matin, il a dit: J'ai réglé le
problème, je le sais où on va mettre le chef de l'État, le
président du Québec souverain: ça sera à la
Citadelle de Québec. Quel soulagement pour le peuple, quel soulagement
pour la population d'avoir trouvé la solution à ce
problème existentiel, fondamental, s'il en fut un: où mettre le
président de la république du Québec? Alors, on a
trouvé, grâce au chef de l'Opposition, grâce au
député de L'Assomption qui n'a épargné aucun effort
de réflexion. Il a passé à travers toutes les solutions, a
fait appel aux plus grands experts, et s'est levé un beau matin pour
dire: Ça y est, ça sera la Citadelle, mes chers amis, merci
beaucoup.
Moi, je pense qu'il faut essayer de caricaturer ces choses-là, M.
le Président, pour mieux faire comprendre à la population la
démesure, le manque de connexion avec la réalité du chef
de l'Opposition. Ces constatations, M. le Président, doivent être
faites quotidiennement, et je me dis: Si le chef lui-même n'est pas
capable d'être en contact avec la réalité, comment peut-il
emmener ses troupes dans ce contact? La question que je pose et que je voudrais
que la population se pose, M. le Président, c'est: Dans les
circonstances, peut-on prendre au sérieux un parti qui nous dit ni plus
ni moins, par exemple, que... C'est M. Parizeau, M. le député de
L'Assomption, le chef de l'Opposition qui dit clairement qu'advenant que dans
un référendum... Soyons d'accord là-dessus: le
référendum, s'il y en a un, c'est parce qu'il y a deux
possibilités de réponse. Au moins deux possibilités de
réponse. Si c'était clair et qu'il y avait parfaite
unanimité dans la population, pourquoi en tiendrait-on un? Donc, il y a
une possibilité que le référendum donne une réponse
qui n'accorde pas au chef de l'Opposition son désir le plus cher,
c'est-à-dire de devenir le président de la république du
Québec et de pouvoir avoir sa résidence officielle à la
Citadelle. Mais que dit le chef de l'Opposition devant cette
possibilité? Il dit: Nous ne serons pas liés par un tel
référendum parce qu'il y aura des élections et, au moment
des élections, nous ferons bien ce que nous voulons faire,
c'est-à-dire la souveraineté.
Une voix: Bravo!
M. Doyon: C'est un manque de respect... J'entends: Bravo! M. le
Président. Je n'en crois pas mes oreilles. Je suis parfaitement
scandalisé, parce que mon propos n'était pas de blâmer les
députés de l'Opposition, les quelques-uns qui sont là,
parce que les propos sont les propos du chef de l'Opposition. Je ne voulais pas
leur mettre ça sur les épaules, M. le Président. J'ai trop
d'honnêteté intellectuelle, de respect pour dire des choses
semblables. Mais étant donné que j'entends «bravo!»,
ils prennent ces propos à leur compte.
M. le Président, se rend-on compte qu'un référendum
donnant une réponse qui n'est pas favorable à l'option
péquiste sera un référendum bidon, un
référendum qui ne compte pas, un référendum qui
pourra être défait à la prochaine occasion? Je vois la
députée qui me fait signe que oui. Bien sûr, le grand
sourire! Parfaitement scandalisant! Parfaitement antidémocratique!
Mépris total! Mépris total de la décision que prendra la
population!
Pourquoi le référendum qui donnera raison au PQ serait le
bon et le vrai, le seul et l'unique? Pourquoi n'y aurait-il qu'un seul
référendum qui pourrait donner la réponse attendue et que,
là, par l'opération du Saint-Esprit qui aurait inspiré les
Québécois, pour une fois, qui leur aurait inspiré la
réponse désirée par la cohorte péquiste, pourquoi
cette réponse qui ferait l'affaire de la cohorte péquiste
serait-elle la seule bonne réponse, le seul bon référendum
valide et valable, légitime et contraignant?
Moi, j'aimerais qu'on m'explique ces choses-là. Pourquoi un
référendum pris au mois d'octobre, disons, ne serait-il plus
valide dans six mois, dans un an d'ici, advenant que par impossible le Parti
québécois prenne le pouvoir et que les Québécois
ayant dit non à la souveraineté, six mois après,
élisant, par après, par erreur ou tout simplement parce qu'un
parti politique ayant fait un certain nombre d'années... Et c'est dans
nos moeurs politiques, c'est dans notre régime politique, notre
régime bipartisan est basé sur cette hypothèse du parti
politique qui fait le remplacement. Pourquoi ce référendum,
dis-je, ne serait-il pas valide à la première chance que le PQ
aurait de mettre la main sur le pouvoir? C'est absolument incroyable! Je n'ai
pas de mots, je suis à court d'expressions pour déplorer une
attitude aussi antidémocratique. Mais j'aimerais que les gens, la
population réalise ce que j'appelle cette duplicité, ce double
langage, cette conviction intime qu'ils ont d'avoir raison et d'avoir les
bonnes solutions.
M. le Président, nous avons passé par toutes les
étapes. Le Parti québécois, par la voix de son chef,
disait: Nous, nous allons faire l'indépendance par petites tranches.
Moi, j'appelle ça la technique du salami: tranche par tranche, on vient
à bout du saucisson. La tranche de la formation professionnelle, la
tranche des affaires extérieures. Et on va, comme ça,
procéder à une... la tranche des télécommunications
et des communications. On va procéder tranche par tranche au
rapatriement de tous les pouvoirs - c'était le discours du chef de
l'Opposition - et nous tiendrons un référendum sur chacune de ces
tranches. Nous demanderons aux gens: Voulez-vous que nous rapatriions tel
pouvoir? Les gens
disant oui, nous le prenons et nous retournons en
référendum.
Maintenant, ce n'est plus tout à fait le même discours.
Maintenant, on dit: On va faire la souveraineté globale, dans son
ensemble. Oui, la souveraineté globale, mais on va garder la monnaie
canadienne. Bien sûr que oui, parce qu'il ne faudrait quand même
pas inquiéter les gens. On va faire ça en douceur. On va garder
la monnaie canadienne, ne vous inquiétez pas. Qu'est-ce qu'on pourrait
bien garder à part ça que les gens aiment et auquel ils tiennent?
Peut-être que la citoyenneté canadienne, le passeport canadien,
c'est bien vu, ça. C'est commode d'avoir ça dans notre poche.
C'est un petit document bleu qui nous permet de circuler de pays en pays et de
traverser les frontières sans trop d'anicroches, sans trop de
problèmes. Peut-être que les gens aimeraient ça le garder,
ce petit document bleu. On va dire qu'on va garder la citoyenneté
canadienne. Pourquoi pas? (11 h 40)
Et quel autre pouvoir pourrait-on aussi garder? On dit: Bon, on va
garder l'espace économique. Bien sûr que oui. Il ne faudrait pas
que les gens ne puissent pas exporter ou importer. Il faudrait que ce soit
uniforme. On va aussi garder les ententes du GATT, on va garder tout ce qui se
fait comme ententes. On va tout avoir, mais ne rien donner.
Il y a Lysiane Gagnon qui, dans un article de La Presse disait:
Ça, ça me fait penser au fils, rendu à 22, 23, 24, 25 ans,
qui dit: Papa et maman, moi, je m'en vais de la maison. Je ne veux plus rien
savoir de vous autres. Je suis tanné de vous autres, mais vous allez
continuer de me loger dans la maison. Vous allez continuer d'endurer ma musique
«hard rock», vous allez continuer de me donner la priorité
sur les programmes de télévision que j'aime et vous allez passer
en deuxième. Vous allez aussi, bien sûr, me donner de l'argent de
poche et vous allez me permettre d'inviter mes amis, dans la maison, quand
c'est nécessaire. Mais à part ça, papa et maman, moi, je
suis tanné de vous autres. Je ne veux plus rien savoir.
C'est un petit peu le «deal» que nous propose l'Opposition.
C'est de quitter le Canada, mais en gardant les avantages du Canada. Moi, ce
que je veux que la population réalise, c'est qu'on ne peut pas quitter
la maison paternelle, la maison familiale et dire en même temps: Je vais
venir dîner tous les midis, il faut que le réfrigérateur
soit plein, et je veux aussi que ma musique, vous me laissiez mettre ça
au bout, parce que j'aime ça fort, moi. À part ça, quand
je voudrai écouter mes programmes de télévision, vous,
vous lâcherez les vôtres et vous me permettrez de regarder les
miens. C'est entendu que moi, je n'aime pas ça, la solitude. Je vais
avoir des «chums», il faut qu'ils viennent à la maison et il
faut les nourrir en plus.
Je me dis que quitter la maison familiale dans ces
circonstances-là, c'est faire preuve d'immaturité. Moi, la
gageure que je prends, c'est que les Québécois sont un peuple
mature, mûr, qui sait que la décision qui devra être prise
devra l'être en faisant les sacrifices qui s'imposent, en étant
prêt au pire des scénarios si jamais il se produit. Il y a un
vieux «motto» anglais qui dit: «If something can go wrong, it
will go wrong.» Très souvent, dans les plans qu'on fait, s'il y a
un accroc qui peut se faire quelque part; même si c'est la
dernière des possibilités, malheureusement, ça arrive.
moi, je dis aux gens de louis-hébert, aux gens du québec:
méfiez-vous comme ulysse l'a fait. ulysse était un sage, un homme
reconnu pour sa sagesse et ulysse s'est méfié. la chose dont il
s'est méfié le plus, ça a été des
sirènes. là, on a des sirènes, actuellement, qui tentent
de nous charmer avec des bruits qui disent: non, non, ça ne fera pas
mal. on a des sirènes péquistes, bien galbées, avec une
belle voix douce qui nous disent: par ici! les récifs? ne vous
inquiétez pas des récifs, vous allez pouvoir passer par-dessus
ça. il n'y a aucun problème. le vieil ulysse, le vieux
rusé ulysse, le héros de homère s'est méfié
des sirènes et il a pu retourner, aller voir sa pénélope,
retrouver son fils télémaque et avoir une vie normale avec eux
après un long voyage. pourquoi? parce qu'il n'a pas cédé
aux sirènes. il a évité les sirènes, les
récifs, comme la peste, même s'il s'ennuyait de
pénélope. c'était terrible. il avait hâte de
retrouver pénélope. il avait fait des sacrifices. les
sirènes péquistes nous convient à aller sur des
récifs, sur des rochers. ne les écoutons pas! soyons capables de
naviguer avec un gouvernail bien dirigé, avec des voiles que nous
contrôlons. ce n'est pas tout d'avoir des voiles parce que, pour
ça, le pq n'en manque pas de voiles. ils sont toutes voiles dehors, mais
je vous assure qu'au point de vue gouvernail, ce n'est pas fort. alors,
ça prend des voiles qu'on contrôle. ça prend un gouvernail
tenu d'une main solide, il y a simplement un parti qui peut faire ça, m.
le président, c'est le parti libéral, et je suis sûr que
les gens ont réalisé ça depuis longtemps.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Louis-Hébert. Sur le même sujet, je
cède la parole à M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques. Vous disposez de 20 minutes, M. le
député.
M. André Boulerice
M. André Boulerice: m. le président, je vous
remercie. j'ai écouté ou entendu avec étonnement le
discours du député de louis-hébert et président de
la commission de la culture. le député de louis-hébert, m.
le président, a voulu nous faire la démonstration qu'il
était un helléniste
averti, mais, dans sa grande enumeration des héros de la
mythologie grecque, il semble qu'il ait oublié de s'identifier
lui-même à un des personnages centraux de cette mythologie grecque
qui est le Cyclope. Le député de Louis-Hébert ne voit que
par un seul oeil, M. le Président. Il voit uniquement par l'oeil du
passé. On l'a vu tantôt ressassant des déclarations de
ministres antérieurs, d'une députée pour qui j'ai
d'ailleurs le plus profond des respects, une grande amitié, ma
collègue, la députée de Taillon. J'espère que, ce
midi, à l'heure du déjeuner, au restaurant de l'Opposition... je
m'excuse, j'ai complètement oublié, le restaurant, la salle
à manger des députés ministériels qui sont la
future opposition au Québec, il va de soi. J'espère que le
député va pouvoir lire le menu. Il y a la phrase du jour qui se
lit: «On finit par ne plus être capable de respirer à force
de remuer le passé».
Donc, M. le Président, quand on écoute ce discours confus
du député de Louis-Hébert et président de la
commission de la culture, je dois le rappeler, on se serait attendu, de la part
d'un tel personnage, à une certaine élévation, mais
ça n'a pas été le cas. On se serait attendu à plus
d'élévation dans un discours comme celui-ci; on se serait attendu
à des énoncés, à une défense de ce discours
d'ouverture. Je dois avouer qu'il est bien difficile de qualifier le vide et de
quantifier l'absence, d'où la difficulté manifeste qu'avait le
député de Louis-Hébert à parier du discours
d'ouverture de son premier ministre. Il s'est borné, M. le
Président, à des remarques typiques de la mesquinerie
libérale et à cette volonté manifeste du parti
ministériel de ratatiner les Québécois, en tentant de
ridiculiser une hypothèse plausible et drôlement
intéressante qui est celle d'utiliser le monument national qu'est la
Citadelle pour en faire la résidence du chef de l'État. Mais
c'est là, M. le Président, chers compatriotes, que l'on voit bien
la différence entre le parti invertébré et l'Opposition
officielle.
Nous, nous ne voulons pas d'un petit chef de gouvernement comme celui
qu'on a actuellement. On trouve que le Québec mérite mieux en
1992, qu'il mérite un chef d'État et non pas un petit chef de
gouvernement. Je pourrais reprendre cette déclaration du chanoine
Grand'Maison à l'émission de Mme Bombardier où,
s'interrogeant sur le flou actuel du Québec, il disait: Ce flou est-il,
en définitive, un mou? Et le chanoine Grand'Maison y répondait
lui-même en disant: Je crois que ce flou est beaucoup plus un mou,
puisque nous avons à la tête de notre gouvernement le plus mou
d'entre nous, M. le Président, et c'est le premier ministre actuel. (11
h 50)
J'écoutais, de plus, l'intervention du député de
Richelieu, un député qui ne s'est jamais embarrassé de
nuances, M. le Président, mais il y avait cette fois-ci, et je crois
qu'il faut le souligner, une part de vérité dans son discours,
uniquement par l'inclusion d'un mot. Il disait: Nous sommes un gouvernement
responsable. Oui, il a entièrement raison, c'est un gouvernement
responsable de l'écart grandissant entre les riches et les pauvres.
Gouvernement responsable de cet écart qui ne cesse de grandir.
Gouvernement responsable de la dégradation de la condition des plus
démunis dans notre société. Gouvernement responsable de
cette dégradation. Gouvernement responsable encore une fois, responsable
de l'effritement de l'action communautaire au Québec parce que son
gouvernement est responsable du sous-financement de ces organismes, responsable
de l'abolition de certains de ces organismes et responsable par anticipation de
la disparition de nombreux autres organismes qui oeuvrent pour le
bien-être de nos concitoyens et qui, malheureusement, disparaîtront
bientôt à cause des actions irresponsables de ce gouvernement
responsable des conditions atroces dans lesquelles on vit.
Responsable d'une autre dégradation, M. le Président,
responsable de la dégradation des conditions de logement dans des
quartiers bien identifiables de notre capitale nationale, Québec, et de
Montréal, notre métropole. Conditions dégradantes de
logements pour nos aînés et pour ces jeunes couples qui aimeraient
bien, comme tous, accéder à un logement convenable, y
élever une famille et rester dans nos centres-villes. Gouvernement
responsable de l'étalement urbain et du dépeuplement des
centres-villes, ce qui va ajouter aux coûts énormes que nous avons
déjà à payer pour cette incurie gouvernementale.
Gouvernement responsable en partenariat. Gouvernement coresponsable avec
le grand frère fédéral. Je dis «le grand
frère fédéral», M. le Président. Ce
gouvernement est un peu la caricature d'une publicité
télévisée particulièrement à
Montréal, d'un commerce qui s'appelle Au bon marché - je vais
leur faire une publicité gratuite - où on voit un des personnages
s'écrier: «Oui, papa.» Papa a décidé quelque
chose, les deux fils, les trois fils acquiescent. Le gouvernement
fédéral dit à ce gouvernement: Vous n'aurez aucun pouvoir
en communications. Il le dit dans une langue qu'ils connaissent bien. «No
way». Ce gouvernement répond: Oui, papa.
Ce gouvernement a réagi, M. le Président. On a vu le
député de La Peltrie et ministre titulaire des Communications
s'élever, mais violemment, M. le Président, contre cette
décision du fédéral et cette réponse: Votre demande
est non avenue, vous, Québécois. On a vu le ministre titulaire
des Communications réagir vigoureusement, M. le Président, quand
Radio-Canada, émanation du pouvoir fédéral, responsable
d'une grande part de la culture au Québec et de l'information, a
décidé de fermer les antennes régionales. Je vois... Je ne
la vois plus, malheureusement, elle a dû s'absenter de la Chambre, mais
je voyais notre collègue en
Chambre - je dis «notre collègue» - Mme la
députée de Matane, et Dieu seul sait que sa région souffre
de cette décision dénoncée avec vigueur par le ministre
des Communications.
Il y a quelques jours à peine... Je parlais de la
dégradation des conditions de logement. On a vu, la semaine
dernière, le ministre fédéral décider de sabrer
dans les programmes d'habitation et priver le Québec de 65 000 000 $
pour des programmes d'habitation. On a vu le ministre de la
Sécurité publique, ministre responsable de l'habitation, le
député d'Argenteuil, M. Ryan, protester vigoureusement. Au lieu
d'excommunier le ministre fédéral, il lui a dit: Allez et ne
péchez plus! Quand mon collègue, le député de
Shefford, préoccupé, lui, d'habitation, l'a questionné, on
a eu comme réponse: Eh bien, ils se sont retirés. Ils se sont
retirés! Je crois que c'est le ministre qui devrait se retirer s'il
n'est pas capable de défendre convenablement les intérêts
du Québec en matière d'habitation. Mais c'étaient de bons
gestionnaires, de bons négociateurs avec le gouvernement
fédéral puisqu'ils sont fédéralistes et lui, plus
que tous, le ministre de la Sécurité publique, est plus
fédéraliste que le premier ministre fédéral;
autrement dit, il est plus catholique que le pape!
Mais qu'est-ce qui arrive? Recul, recul et recul dans tous les domaines.
Quand avons-nous entendu le ministre de la Santé, parce qu'il y a une
dégradation de nos services de santé, malgré la
qualification des différents personnels qui travaillent dans nos
hôpitaux... Je suis bien placé pour en parler parce que j'ai
à la fois Notre-Dame, Saint-Luc, Jacques-Viger, je pourrais en
énumérer plusieurs... Mais la dégradation de notre
système de santé et les difficultés financières que
nous avons à maintenir la qualité des services qui sont offerts,
ça vient d'où? Ça vient du désengagement
fédéral dans les programmes de transfert pour la santé.
Est-ce que le ministre de la Santé et des Services sociaux,
député de Charlesbourg, à qui la presse donne le nom de
«matamore», a joué son rôle de matamore? Non! Il est
resté, lui aussi, silencieux, coupable et responsable de la
dégradation par omission.
Je pourrais peut-être faire une petite parenthèse. Alors
que le député de Louis-Hébert glosait, M. le
Président, sur l'hypothèse d'utiliser un immeuble historique
occupé par le représentant d'une souveraine
étrangère, le député a oublié les folies
médiatiques de ce ministre: 600 000 $ confiés à une agence
de publicité bien connue pour préparer son petit spectacle, ses
petits tours de piste. 600 000 $, on peut créer des emplois dans une
circonscription comme Sainte-Marie-Saint-Jacques; on peut construire du
logement social dans le centre-sud; on peut aider des organismes communautaires
sur le Plateau-Mont-Royal. Il n'a pas parlé de cela. Ce sont de bons
gestionnaires. Il essayait de trouver des contradictions entre une
déclaration datant de 1985 et la position actuelle. Mais je rappellerais
au député de Louis-Hébert que qui ne change pas
d'idée risque d'être mis en contradiction avec lui-même,
d'abord, puisque le monde évolue, le monde change. (12 heures)
Je reviens au propos principal: Governement responsable. Oui,
gouvernement responsable d'une détérioration de tous les secteurs
de l'activité nationale, à un point tel que, quand je regarde les
sondages - c'est là que le bât blesse pour le parti
ministériel puisque la population du Québec les rejette
catégoriquement - je me dis: Ma formation politique, revenant aux
affaires de l'État, je serai sans aucun doute pris d'un certain vertige
en reprenant les dossiers puisque j'ai le sentiment très intime que nous
sommes, depuis 1985 à aujourd'hui 1992, en si peu de temps, revenus
à la case départ dans le progrès du Québec.
C'est ça qui m'effraie, M. le Président. C'est ça
qui m'effraie et c'est malheureusement ce que vivent je ne sais combien de
milliers de mes compatriotes, de mes concitoyens et de mes concitoyennes du
centre-sud et du Plateau-Mont-Royal: un gouvernement responsable de situations
qu'il laisse dépérir, inconsciemment peut-être,
volontairement sans doute. La devise du premier ministre est: II ne faut
surtout pas prendre de décision, le temps pourrait arranger les choses.
Je vais convenir qu'H se peut que le temps, quelquefois, arrange les choses,
mais le temps peut empirer les situations. Les conditions peuvent tourner
à notre désavantage. Le premier ministre ne fait rien et il en
abuse à un point tel, M. le Président, que vous connaissez sans
aucun doute cette blague qui circule sur la colline parlementaire où,
tous les jours, une limousine vide arrive devant notre parlement et le premier
ministre en descend. Ça, on l'entend dans la rue et ces traits d'humour
sont toujours caractéristiques de la pensée d'une population.
C'est dangereux car c'est l'image que notre premier ministre a auprès de
la population.
Et les sondages le reflètent. Comme dit la députée
de Groulx, M. le Président: À juste titre. Et à un point
tel, les sondages le reflètent tellement que j'ai failli dire: La future
ancienne députée de Groulx. Quoique je serais quand même
attristé puisque j'ai de bons sentiments pour elle. Malgré tout,
je l'aime bien. Je l'aime bien. Elle a eu quelquefois des points de convergence
avec nous, mais je ne vais quand même pas les lui reprocher.
Touchons un domaine qui n'a malheureusement pas été
abordé tantôt par le président de la commission de la
culture, qui est l'action de ce gouvernement dans le domaine de la culture,
dans le domaine des arts. Je vous ai parlé tantôt des
communications. Ce n'est rien! Dans le domaine de la culture, eh bien, M. le
Président, les crédits ont parlé. Ils ont parlé
pour le discours du premier ministre. Une augmentation
de 35 000 000 $ dans le budget, M. le Président. 35 000 000 $
dans le budget. Mais si l'on décortique ces 35 000 000 $, 23 000 000 $ -
on va faire une petite arithmétique, chers concitoyens - 35 000 000 $,
35 700 000 $, quelque chose comme cela: 20 300 000 $ iront aux grandes
institutions d'État, service de la dette, 10 000 000 $ iront à
des ententes, une aide à l'orchestre symphonique, aux Grands Ballets
canadiens, élargissement du mandat de la Régie du cinéma,
prise en charge de l'amphithéâtre du Festival d'été
de Lanaudière, il ne reste donc - et je sais qu'il y a beaucoup
d'artistes, de comédiens, de chanteurs dans ma circonscription qui vont
être scandalisés - de l'augmentation qu'on fait miroiter, que 2
000 000 $ pour tous les autres organismes culturels et les artistes. Cela
signifie: Les artistes, vous repasserez. Le 1 %, bien, voyez-vous, là
aussi, vous repasserez. Et les régions - et j'ai hâte d'entendre
les discours des députés régionaux du Parti libéral
- bien, c'est: Vous repasserez, vous aussi.
Le livre des crédits, à toutes fins pratiques,
était une chronique nécrologique pour les arts et la culture. Le
livre des crédits, c'était, à toutes fins utiles: La
fameuse grande politique culturelle est mort-née et l'avis de
décès était dans ce cahier des crédits qu'a
déposé le député de Bonaventure et soi-disant
ministre des Finances du Québec. Gouvernement responsable? Gouvernement
responsable de la dégradation de tous les secteurs de l'activité
nationale, au Québec. C'est ça qu'il faut retenir. Je vous
remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Je suis prêt à
reconnaître le prochain intervenant. Il n'y a pas d'autres intervenants?
Alors, je cède immédiatement la parole à M. le
député de Crémazie et ministre du Tourisme.
M. André Vallerand
M. Vallerand: Merci, M. le Président. Je suis toujours un
peu étonné d'écouter les propos de l'Opposition quand
cette dernière tente d'attaquer le gouvernement, dont je suis, autant
dans sa gestion quotidienne que dans sa gestion continuelle. À quel
genre d'exercice nous convie le message inaugural? Après avoir entendu
le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, il serait utile de
rappeler, pour le bénéfice de ceux qui nous écoutent,
à quel type d'exercice nous sommes conviés lors d'un message dit
inaugural.
Un message, M. le Président, c'est un chargé de dire. Un
gouvernement, à la rigueur les partis d'Opposition, les groupes de
pression ont une responsabilité d'expliquer à leurs commettants
le bilan de leurs activités en termes de ce qu'ils ont fait, en termes
de ce qu'ils envisagent de faire, en termes également de ce qu'ils ne
peuvent pas faire. C'est un chargé de dire qui permet à ses
commettants de juger du bilan de l'ensemble de ses activités, autant par
le biais de ses ministères, des titulaires des ministères, des
obligations dites ministérielles, des sociétés
d'État, des organismes qui, de près ou de loin, dépendent
de la responsabilité gouvernementale.
Inaugural, c'est une façon de situer l'action gouvernementale
dans le temps. C'est une façon, pour l'État, de tenter de
préjuger et de présager de l'avenir de sa collectivité de
façon à mieux agir sur ce devenir et sur son avenir, et d'en
façonner concrètement et positivement le résultat. C'est,
en vérité, M. le Président, de la prévention. La
qualité essentielle, je dirais même la quintessence d'un
gouvernement responsable, c'est d'être capable de prévenir
l'avenir de façon à mieux agir et façonner son devenir.
(12 h 10)
Dans quel contexte s'est situé le dernier message inaugural du
gouvernement? De l'avis de tous, M. le Président, ce message inaugural
s'inscrit dans un contexte de changement, que nous n'avons pas connu dans le
passé, ayant un effet aussi inquiétant, perturbateur sur
l'ensemble des intérêts de notre collectivité. Cette
particularité du contexte économique et social, à
l'intérieur duquel s'insère le message inaugural, nous rappelle,
M. le Président, dans l'exercice auquel nous sommes conviés
à circonscrire des actions susceptibles d'agir positivement sur ces
perturbations graves, eu égard aux intérêts qu'on se doit
de protéger comme gouvernement du Québec.
De quelle façon peut-on, de façon responsable, sage, dans
un discours intelligible, se donner l'assurance que nous aurons l'occasion de
contrer les effets négatifs de ces changements rapides qui
s'opèrent dans notre société? Dans ce message inaugural,
nous avons pensé, modestement, donner l'exemple, en commençant
par faire le ménage dans notre maison d'État, c'est-à-dire
réviser l'ensemble des actions de l'administration publique ainsi que
son financement. La situation économique que nous avons connue et le
résultat de cette situation économique, en termes de
résultats conjoncturels, ont amené les gouvernements à
disposer de moins d'argent et de moins de moyens pour pouvoir agir aussi
largement qu'ils voudraient le faire au sein de l'ensemble des problèmes
auxquels sont confrontés les gens de notre société.
Il est impératif de repenser nos finances publiques. Il est tout
aussi impératif de les assainir afin de pouvoir les utiliser de
façon efficace et maximale dans le contexte actuel. Cette
réflexion sur la rigueur dans l'administration de la chose publique nous
a amenés à repenser avec beaucoup d'attention, avec beaucoup de
préoccupation l'ensemble de notre système de santé au
Québec, de réfléchir également sur notre
système d'éducation, deux composantes de l'administration
publique qui consti-
tuent des coûts importants dans le cadre de l'ensemble des efforts
de financement public. Révision également, dans notre propre
maison, de l'organisation et du fonctionnement de l'administration publique. Il
nous faut et il nous fallait avoir le courage de questionner nos propres moyens
avant d'inviter la population et la collectivité a questionner les
leurs.
Évidemment, c'a permis à l'Opposition d'être en
mesure de critiquer davantage le gouvernement mais, faut-il le rappeler, de
critiquer le gouvernement dans sa gestion responsable de l'administration
publique avec le courage qu'il a eu de se questionner dans ses moyens, dans sa
gestion et dans la répartition de ces moyens aux affectations des plus
nécessiteux, des plus en besoin de notre collectivité. C'est
notre façon à nous de «prioriser» nos
responsabilités.
Lorsque le gouvernement s'est interrogé sur sa propre gestion
dans le contexte actuel, interrogation qui est comprise dans le message
inaugural, le gouvernement fait également appel, dans son message,
à l'entreprise privée, aux autres collectivités non
publiques ou parapubli-ques parce que, que ça nous plaise ou non, les
succès que nous pouvons anticiper pour contrer les effets
négatifs de la situation économique passent par un redressement
durable et prolongé de l'activité et de la
prospérité économiques, au Québec. La pierre
d'assise, le fondement même du succès d'un tel objectif passe
obligatoirement par le rôle du secteur privé. En invitant le
secteur privé à concourir aux objectifs de redressement
économique contenus dans le discours inaugural, M. le Président,
nous lui disons en premier lieu: Notre action portera sur l'amélioration
du contexte concurrentiel au Québec. Nous examinerons de façon
plus attentive, compte tenu des changements considérables qui se sont
produits à l'intérieur de nos économies occidentales, nous
analyserons davantage l'ensemble des moyens qui vous permettront de mieux
concourir, de mieux améliorer votre facteur de
compétitivité compte tenu d'une concurrence de plus en plus
internationale.
Ça passe, évidemment, par des comparatifs fiscaux.
Ça passe par une interrogation sur nos politiques de formation de la
main-d'oeuvre, une des priorités du discours inaugural. Ça passe
également par une préoccupation plus vive, plus sentie du
développement économique régional. Nous l'avouons. Nous,
du gouvernement libéral, avons toujours avoué que notre force
économique, c'est l'addition de la somme des avantages comparatifs de
nos régions, un accent particulier sur la grande région de
Montréal. On se rappellera, M. le Président, qu'en 1981 le Parti
québécois avait tenté de
«démontréaliser» le Québec. Heureusement, je
dois le dire, il s'est amendé lors du colloque économique du
Grand Montréal, en 1982, pour dire: On s'excuse. Nous nous étions
trompés. Montréal constitue le fer de lance de l'ensemble de
l'activité québécoise. C'est un vecteur économique
sur lequel il faut composer et c'est un vecteur économique qu'il ne faut
pas affaiblir, mais, bien au contraire, dynamiser de sorte que son
résultat se perpétue dans l'ensemble des autres régions
économiques du Québec. C'est ce que nous appelons un pôle
de croissance économique important, au Québec.
Dans cette compréhension, nous avons mis de l'avant un plan de
relance durable de l'économie montréalaise, un plan
concocté avec l'ensemble des principaux dirigeants économiques et
sociaux de la région de Montréal de telle sorte que, lorsque mon
collègue, le ministre délégué à
l'Administration et à la Fonction publique et président du
Conseil du trésor et ministre de la région de Montréal, a
rendu public l'énoncé de politique pour revitaliser la grande
région de Montréal, son message a reçu l'assentiment,
l'aval de l'ensemble de la communauté, et les gens de la région
de Montréal se sentent plus en mesure d'agir, d'intervenir sur le
développement durable de cette importante région.
Également, M. le Président, nous avons, et c'est inclus
dans le discours inaugural, fait référence à l'importance
économique du tourisme. L'activité touristique n'est plus
aujourd'hui perçue comme elle l'était antérieurement,
comme une activité plus ou moins prise en compte dans les
stratégies de développement économique des gouvernements,
non seulement celui du Québec, mais également de l'ensemble des
gouvernements des économies occidentales. On considère le
tourisme maintenant comme une activité économique à part
entière tout aussi importante, tout aussi motrice, tout aussi dynamique
que l'activité économique des autres secteurs économiques,
notamment du secteur manufacturier ou du secteur dit de la transformation.
Le tourisme a gagné ses lettres de noblesse et de reconnaissance
comme activité économique majeure, principalement au
Québec, principalement à cause du soutien du gouvernement,
principalement à cause de l'action du ministère du Tourisme. Et,
M. le Président, je le dis sans prétention, je m'en exclus,
j'attribue la qualité du résultat de nos actions davantage
à l'ensemble des fonctionnaires du ministère du Tourisme
qu'à son titulaire que je suis. Mais cette persistance, cette vision de
l'importance économique du tourisme, ces actions de sensibilisation
auprès des autorités responsables ont fait en sorte que le
tourisme est maintenant un «pris-en-compte» stratégique dans
le développement économique du Québec. (12 h 20)
La preuve en est, M. le Président, que le titulaire de ce
ministère que je suis rendait public, l'automne dernier... au
début de cet hiver, pardon, un énoncé de politique,
première dans l'histoire touristique du Québec. Même le
critique de l'Opposition en qui je reconnais quelqu'un qui a une ouverture
d'esprit, une certaine compréhension, des fois plus pointue que
d'autres, a
lui-même félicité le titulaire du ministère
du Tourisme, il s'est réjoui que, pour la première fois dans
l'histoire du tourisme au Québec, on ait été saisi d'un
énoncé de politique qui nous permettait de nous
référer à des objectifs précis et également
à un plan d'action pour soutenir les différents objectifs
contenus à l'intérieur de l'énoncé de politique
touristique.
Très brièvement, M. le Président, cet
énoncé de politique touristique, que l'on retrouve à
l'intérieur du discours inaugurai, met l'accent sur une
redéfinition de notre participation, de nos actions aux efforts de
promotion et de commercialisation du produit touristique. Essentiel. Le
tourisme, en vérité, lorsque le consentement est acquis par
l'industrie, c'est une opération qui se résume à vendre,
de façon concurrentielle, le produit touristique québécois
au travers des autres produits qui lui sont concurrents en termes de
destination et en termes de consommation de produits et
d'événements.
Requestionnement stratégique de ces moyens de promotion et de
commercialisation, requestionnement stratégique de son positionnement
générique sur les marchés qui sont les plus concurrentiels
à l'intérieur des marchés à partir desquels on peut
escompter les taux de croissance les plus accélérés.
Également, le courage de questionner le produit touristique de
façon comparative. Non seulement de s'enorgueillir de la qualité
du produit touristique québécois tel qu'on le connaît, tel
qu'on le voit, mais de comparer de façon à être plus
à même de s'expliquer les différences de partage entre
l'activité touristique au Québec, l'activité touristique
dans l'ensemble canadien, la part de marche que le Québec va chercher
à l'intérieur du marché américain et,
également, sur les marchés européens.
Aussi, puisque le tourisme, comme activité économique,
n'échappe pas aux perturbations des temps, aux changements radicaux
auxquels nous sommes confrontés, avons-nous, dans l'énoncé
de politique et dans son plan d'action, campé un objectif de formation
de la main-d'oeuvre, pour mieux servir l'ensemble des entreprises que compose
cet important secteur industriel et améliorer, ce faisant, sa
qualité, son excellence et situer le produit touristique à
l'intérieur des produits dont la reconnaissance de l'excellence et de la
qualité la situe, cette industrie touristique du Québec, parmi
les meilleures au monde. Les résultats des dernières
années sont probants. Sur le plan de l'achalandage, sur le plan de la
reconnaissance, à tous égards, le Québec se distingue
à l'intérieur d'une industrie de plus en plus internationale de
façon singulière, à la mesure de son potentiel, à
la mesure de la qualité de ses principaux artisans, ces hommes et ces
femmes qui oeuvrent à l'intérieur de l'industrie touristique du
Québec.
Finalement, M. le Président, quand je faisais
référence à l'exercice auquel nous sommes conviés
lors d'un message inaugural, j'ai, bien sûr, fait allusion aux efforts
que l'État va faire pour améliorer sa propre gestion, compte tenu
des moyens limités et davantage limités que nous avons à
cause du contexte économique actuel; j'ai fait référence
aux préoccupations de redressement durable de l'économie, le seul
moyen susceptible de nous garantir à court terme des résultats de
telle sorte qu'on remette à nos collectivités locales,
régionales et nationales des outils, des moyens pour enrichir leurs
propres communautés.
À tous égards, les plus belles ambitions, aussi
gouvernementales soient-elles, en matière de santé, en
matière d'éducation, en matière de loisir, à tous
égards, sont tributaires de nos succès économiques.
Également, M. le Président, en terminant, notre
succès économique est, par ailleurs, tributaire de la
stabilité et de la durabilité de nos institutions politiques. On
ne peut pas imaginer de succès économique qui repose sur une
instabilité de nos institutions politiques. À cet égard,
je suis davantage surpris quand j'écoute les collègues de
l'Opposition dans la défense de l'option constitutionnelle qui est la
leur. J'entends, et je le déplore, par le discours, par l'argumentation,
par l'image, des appels davantage à l'intolérance, une
espèce de retour au manichéisme, le clan des bons et des pas
bons, le clan des bons et des mauvais. C'est tranché très
clairement. On oublie, dans notre responsabilité, que les défis
de demain et même d'aujourd'hui sont davantage à l'enseigne de la
diversité qu'à celle de l'homogénéité;
davantage à l'enseigne de la diversité, qui, elle-même, est
créatrice d'actions, d'innovations, en mettant en commun un ensemble
d'idées provenant de gens qui ne nous ressemblent pas
nécessairement sur le plan du dénominateur commun de la langue,
qui ne nous ressemblent pas nécessairement sur le plan de l'origine, de
la provenance, qui ne nous ressemblent pas nécessairement à
d'autres égards culturels, mais c'est pour nous un enrichissement
extraordinaire que de pouvoir nous inspirer à la source même de
cette diversité.
À cet égard, M. le Président, et en terminant,
j'aimerais rappeler à l'Opposition, que ça leur plaise ou non,
que notre succès économique est tributaire de la stabilité
de nos institutions politiques. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre du
Tourisme et député de Crémazie. Cette dernière
intervention met fin à nos travaux pour ce matin, travaux que je
suspends jusqu'à 14 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 28)
(Reprise à 14 h 5)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir
quelques instants. Je vous remercie. Veuillez vous asseoir. Nous allons
entreprendre dès maintenant les affaires courantes.
Affaires courantes
II n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi. Dépôt de documents. Mme la
ministre de l'Énergie et des Ressources.
Dépôt de documents
Projets de loi de l'État du
Massachusetts
Mme Bacon: M. le Président, suite à la
période de questions d'hier, du mardi 31 mars, où j'ai pris
l'engagement de faire parvenir au leader de l'Opposition les cinq projets de
loi de l'État du Massachusetts, il me fait plaisir de les déposer
en cette Chambre.
Le Président: Ces documents sont donc
déposés.
M. le ministre des Transports.
Rapport annuel du Conseil de la recherche et du
développement en transport
M. Elkas: J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel
1990-1991 du Conseil de la recherche et du développement en
transport.
Prévisions budgétaires et rapport
financier préliminaire du Directeur général des
élections
Le Président: Ce document est déposé.
J'ai l'honneur de déposer les prévisions
budgétaires 1992-1993 et le rapport financier préliminaire
1991-1992 du Directeur général des élections.
Prévisions budgétaires et rapport
financier
préliminaire de la Commission de la
représentation électorale
J'ai également l'honneur de déposer les prévisions
budgétaires 1992-1993 et le rapport financier préliminaire
1991-1992 de la Commission de la représentation électorale. Ces
documents sont déposés.
Maintenant dépôt de rapports de commissions.
Dépôt de pétitions.
Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de
privilège ou sur un fait personnel.
Nous allons donc procéder à la période de questions
et réponses orales des députés. Alors, je vais
reconnaître, en première question principale, M. le whip de
l'Opposition et député de
Lac-Saint-Jean.
Questions et réponses orales
Position du gouvernement sur la tenue d'un
référendum pancanadien sur la Constitution
M. Brassard: Oui, M. le Président. Devant les
difficultés de dégager un consensus des provinces sur les offres
qu'il entend présenter, face au braquage de certains premiers ministres,
comme M. Getty qui affirme: «Pas d'entente constitutionnelle sans
Sénat triple "e"» - M. Wells, également - et invoquant le
manque de temps, le premier ministre fédéral a indiqué,
à maintes reprises depuis plus d'une semaine, qu'il envisage de recourir
à un référendum pancanadien pour dénouer l'impasse
constitutionnelle. Or, un tel référendum pancanadien nierait non
seulement le droit des Québécois de choisir eux-mêmes les
voies de leur avenir politique, mais permettrait surtout à Ottawa de se
justifier d'imposer des changements constitutionnels sans le consentement du
Québec.
Ma question au ministre responsable du dossier constitutionnel: Compte
tenu que le référendum pancanadien constitue un véritable
piège pour le Québec, qui pourrait aboutir à lui imposer
des changements constitutionnels sans son consentement, est-ce que le ministre
des Affaires intergouvemementales canadiennes maintient toujours cette
position, comme il le déclarait le 28 novembre dernier, et je le cite:
«Pas question pour nous d'accepter que le gouvernement
fédéral décide de l'avenir des Québécois;
c'est l'Assemblée nationale qui décidera de la question et de la
façon dont sera mené le référendum»? Ou
est-ce qu'à l'instar de l'ineffable ministre fédéral
Benoît Bouchard et du caucus conservateur québécois il est
prêt, maintenant, à accepter un référendum
pancanadien pour dénouer l'impasse constitutionnelle?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Affaires intergouvernementales canadiennes.
M. Rémillard: M. le Président, hier, le premier
ministre du Canada, M. Mulroney, et M. Clark, le ministre responsable du
dossier constitutionnel, ont lancé un message très clair aux
autres provinces. Ils leur ont dit: Vous devez accélérer le pas
dans les discussions, les négociations en matière
constitutionnelle pour qu'on puisse présenter des offres valables au
Québec. C'est le message que M. Clark et M. Mulroney ont fait
très clairement, hier, aux autres provinces. En ce sens, M. le
Président, je trouve ça encourageant. Je trouve ça
encourageant parce que ça démontre la volonté très
claire d'Ottawa de respecter l'échéancier de la loi 150, de
respecter la loi 150.
En ce qui regarde le gouvernement - on l'a mentionné à
plusieurs reprises, le premier minis-
tre l'a mentionné à plusieurs reprises, je l'ai fait aussi
- nous avons cette loi 150 et cette loi 150, pour nous, c'est ce qui nous guide
dans son échéancier, dans ses composantes, avec les deux
commissions parlementaires qui font leur travail. Alors, dans ce
cadre-là, M. le Président, ce que je peux dire, c'est l'appel, le
message clair qui a été fait par le premier ministre du Canada et
par M. Clark hier, c'est la confirmation qu'Ottawa veut respecter
l'échéancier de la loi 150, et on doit s'en réjouir.
Le Président: En question complémentaire. (14 h
10)
M. Brassard: M. le Président, le ministre pourrait-il nous
dire pourquoi il escamote l'autre partie du message fédéral?
Pourquoi s'en tient-il à cette seule partie du message qui consiste
à accélérer le processus de négociations et
pourquoi ignore-t-il l'autre partie du message fédéral qui dit
que, s'il n'y a pas d'entente avec les premiers ministres, il y aura un
référendum pancanadien? Comment peut-il escamoter cette autre
partie du message qui est importante? En tenant compte de ce message-là,
comment peut-il prétendre que le gouvernement fédéral
respecte l'échéance de la loi 150 quand il est prêt
à tenir un référendum pancanadien? Conciliez
ça.
Le Président: M. le ministre.
M. Rémillard: M. le Président, dans la mesure
où le premier ministre du Canada et le ministre responsable du dossier
constitutionnel, tous les deux, disent aux provinces: «On doit
accélérer nos travaux, on doit présenter des offres
valables au Québec, en respectant l'échéancier voté
par l'Assemblée nationale dans la loi 150», est-ce que le message
peut être plus clair, M. le Président? Le message est très
clair. Ça signifie qu'Ottawa veut respecter l'échéancier
que nous avons, et on ne peut que s'en réjouir. Qu'Ottawa pense aux
moyens qu'il veut, c'est son droit, mais pour nous, ce qui est important, c'est
cet échéancier tracé, déterminé par la loi
150 votée par cette Assemblée nationale, loi, évidemment,
que vous, vous n'avez pas voulu accepter; vous avez voté contre la loi
150, vous avez voté contre un référendum sur la
souveraineté, vous avez voté contre la conclusion de
Bélanger-Campeau. M. le Président, s'il y a un message qu'on
doive escamoter, eh bien! je vais vous dire, c'est celui que vous avez
donné quand vous avez voulu voter contre la loi 150.
Le Président: Une question complémentaire.
M. Brassard: M. le Président, le ministre pourrait-il
cesser de faire preuve d'amnésie sélective? Pourquoi ignore-t-il
l'intention avouée du gouvernement fédéral, appuyé
par le caucus conservateur québécois, de tenir un
référendum pancanadien sur le dossier constitutionnel s'il y a
impasse, si l'impasse persiste, et si les premiers ministres ne
réussissent pas à s'entendre? C'est ça, l'intention
annoncée par le premier ministre Mulroney. Qu'est-ce qu'il compte faire
devant cette intention-là, comme porte-parole du gouvernement? Est-ce
qu'il est toujours en désaccord? Parce qu'il a exprimé son
désaccord autrefois, l'automne dernier.
Le Président: M. le député...
M. Brassard: Est-ce qu'il est toujours en désaccord avec
cette idée d'un référendum pancanadien ou est-ce que le
processus psychologique de ramollissement bien connu de ce gouvernement a
tellement fait son oeuvre-Le Président: M. le
député, s'il vous plaît!
M. Brassard: ...qu'il est maintenant d'accord avec une telle
idée?
Des voix: Bravo!
Le Président: Alors, M. le ministre.
M. Rémillard: Là encore, M. le Président, en
votant contre la loi 150, vous avez voté contre une des dispositions de
cette loi qui dit que c'est aux Québécoises et aux
Québécois de décider de leur avenir politique. C'est dans
la loi 150, c'est la loi que nous avons votée de ce côté-ci
et que nous respectons. Dans la mesure où cette loi est respectée
dans une de ses parties essentielles, qui est l'échéancier, M. le
Président, en quoi pourrions-nous être contre ce message que nous
donne Ottawa? Mais c'est aux Québécoises et aux
Québécois qu'appartient cette volonté de décider de
leur avenir politique. C'est clair dans la loi 150 et c'est une volonté
qui doit s'exprimer très clairement.
Le Président: Alors, en question principale, M. le chef de
l'Opposition.
Accès aux études des ministères
sur
l'intégration des fonctionnaires
fédéraux à la fonction publique
québécoise
M. Parizeau: M. le Président, la commission d'étude
sur les questions reliées à l'accession du Québec à
la souveraineté avance ses travaux rapidement, et je comprends qu'elle
doit produire son rapport au début du mois de mai. Parmi les questions
qui ont été examinées, il y a celle, évidemment, de
l'intégration des fonctionnaires fédéraux à la
fonction publique du Québec.
La commission, d'abord, a reçu le rapport du professeur
Saint-Germain à cet égard, puis le rapport du comité
Beaudry mettant l'accent en particulier sur l'intégration des
fonctionnaires fédéraux dans l'Outaouais, et, hier, elle a
reçu l'étude du groupe Lalonde-Mallette démontrant
que l'intégration des fonctionnaires fédéraux est
tout à fait possible, traçant un certain nombre de pistes
à cet effet. Il apparaît cependant, comme Lalonde-Mallette le
soulignait hier, que, maintenant, il faut que les ministères du
Québec collaborent à l'exercice pour pouvoir entrer encore de
façon plus précise dans ce processus d'intégration.
Est-ce que le premier ministre peut nous indiquer s'il est maintenant
prêt à transmettre à la commission les études que le
secrétaire du Conseil exécutif a commandées à
chacun des sous-ministres au début des travaux de la commission
Bélanger-Campeau à l'automne 1990 - ça date
déjà d'un certain temps - est-ce que le premier ministre est
prêt à compléter le dossier en déposant ces fameuses
études dont on a d'abord - il s'en souviendra - nié l'existence,
pour ensuite dire qu'elles n'étaient pas complétées puis,
finalement, refuser de les rendre publiques? Je pense qu'il serait utile, M. le
Président, et je le demande au premier ministre: Est-ce qu'il pourrait
lever l'embargo sur ces études et permettre à la commission qui
étudie l'accession du Québec à la souveraineté de
pouvoir les examiner?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, pour ce qui a trait à
la commission sur l'accession à la souveraineté, c'est
évident que les conclusions ou le rapport de cette commission, ce sera
un élément déterminant. D'ailleurs, ça fait partie
d'un des aspects fondamentaux de la loi 150, comme le signalait le ministre
responsable, il y a quelques instants.
Pour l'intégration des fonctionnaires, il y a la question qui est
posée par le chef de l'Opposition, mais il y a également toute la
logique qu'il avait exprimée lui-même: c'est qu'il fallait
réaliser la souveraineté, entre autres raisons pour
éliminer les chevauchements. Et, du même coup, il dit que tous les
fonctionnaires qui travaillent au gouvernement fédéral seront
intégrés en totalité dans l'administration
québécoise. Alors, ça, c'est toujours la même
logique pé-quiste que nous retrouvons: II ne faut pas de chevauchement,
mais il faut intégrer tout le monde. Je signale ça en passant.
C'est comme la question monétaire: le député de
Lévis parle du dollar américain et son chef parle du dollar
canadien.
Des voix: Ha, ha, ha! M. Bourassa: C'est vrai.
Le Président: Je vais demander la collaboration, s'il vous
plaît. S'il vous plaît! En conclusion, M. le premier ministre, s'il
vous plaît. S'il vous plaît!
Donc, en conclusion, M. le premier ministre.
M. Bourassa: Trois théories monétaires à
votre gauche.
M. le Président, ce que je dis, c'est que nous allons - j'en ai
discuté avec le secrétaire général du gouvernement
de manière à accélérer la finalisation des
études, pour voir que ça soit présenté... Le chef
de l'Opposition s'agite à ce que je lui dis. J'ai communiqué avec
le secrétaire général du gouvernement de manière
à ce qu'on puisse rendre publiques les études ou les conclusions
dans la mesure où l'intérêt public le justifie. Alors, je
lui demande... Je suppose d'abord qu'il... Il devrait y avoir une
interpellation dans un proche avenir...
Le Président: S'il vous plaît!
M. Bourassa: ...de la part de l'Opposition sur toutes ces
questions. Il était plus pressé de faire des interpellations
à l'automne qu'il ne l'est ce printemps. Alors, probablement qu'au
moment opportun il y aura une interpellation du chef de l'Opposition. On pourra
s'entendre sur les dates et on pourra discuter plus à fond de toutes ces
questions à la fois.
Le Président: En question complémentaire.
M. Parizeau: Au milieu de toutes les incidentes du premier
ministre, est-ce que je comprends bien le premier ministre quand il dit que les
études, qui ont été faites à la demande du
secrétaire du Conseil exécutif quant à
l'intégration des programmes fédéraux et des
fonctionnaires fédéraux dans le cadre québécois,
vont être mises à la disposition de la commission? Est-ce que
c'est ça qu'il a dit à travers l'espèce de déluge
verbal que nous avons entendu?
Le Président: M. le premier ministre. (14 h 20)
M. Bourassa: Déluge verbal ou cassette ou quoi que ce
soit, j'ai énoncé des choses très claires. Je me suis
référé à une déclaration du
député de Lévis la semaine dernière, jeudi dernier,
je me suis référé aux prises de l'Opposition du chef de
l'Opposition - il y en a d'autres qui viennent de s'ajouter - je me suis
référé à une procédure de l'Assemblée
nationale, l'interpellation, et là, on insulte maintenant le processus
parlementaire en disant que c'est un déluge verbal. Alors, ce que je
veux dire au chef de l'Opposition, c'est que je vais en discuter avec le
secrétaire général et le ministre responsable des affaires
canadiennes, comme il a lui-même répondu... Il a lui-même
répondu à cette question-là alors que le
député de Lac-Saint-Jean lui posait cette question. Alors, je
réponds à la même question à laquelle a
répondu le ministre responsable à la commission parlementaire sur
l'accession à la souveraineté. Et je réfère le chef
de l'Opposition à des réponses qui ont déjà
été
données, sauf que le calendrier se resserre.
Le Président: Toujours en question
complémentaire.
M. Parizeau: M. le Président, qu'est-ce qu'il veut dire,
le premier ministre, exactement? Est-ce que les études vont être
mises à la disposition de la commission ou si elles ne le seront pas?
Oui ou non? Est-ce que la commission va pouvoir examiner ces études en
temps utile pour remettre son rapport au début du mois de mai?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, j'ai répondu
tantôt que...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourassa: Si le chef de l'Opposition écoute
attentivement ce que je dis, c'est que nous rendrons disponible ce qui est dans
l'intérêt public, il me semble que c'est ce qu'avait dit...
Une voix: La censure!
Le Président: S'il vous plaît!
M. Bourassa: Non, ce n'est pas la censure, M. le
Président. Nous sommes à négocier...
Le Président: J'apprécierais, si quelque
député que ce soit avait un commentaire a faire, qu'il le fasse
sous forme de question. Je vous reconnaîtrai, M. le député.
Si vous avez une question, ça me fera plaisir de vous reconnaître.
M. le premier ministre, pour la conclusion.
M. Bourassa: M. le Président, la question des
chevauchements est fondamentale. C'est l'un des arguments. On le sait, c'est
l'un des arguments qui est présenté par les partisans de la
souveraineté. On n'invoque pas la...
Une voix:...
Le Président: M. le député de Lévis,
s'il vous plaît! Je vous rappelle à l'ordre une première
fois. Je voudrais simplement que vous vous conformiez à la directive que
j'ai donnée tantôt. Très bien. Alors, M. le premier
ministre, vous avez la parole.
M. Garon: M. le Président.
Le Président: Vous avez une question de
règlement?
Une voix: En vertu du règlement.
Le Président: Question de règlement. Je vous
écoute.
M. Garon: C'est en vertu de notre règlement. C'est une
période de questions et réponses.
Le Président: Vous savez fort bien, M. le
député de Lévis, que votre dernière intervention
est non conforme au règlement. C'est spécifique au
règlement.
Une voix:...
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous
plaît! M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, j'avais peut-être un
peu provoqué le député de Lévis; il faut comprendre
un peu sa réaction. Ce que je veux dire, c'est que les chevauchements
sont un des arguments qui sont invoqués par les partisans de la
souveraineté. On n'invoque plus l'union économique pour faire
l'indépendance, on n'invoque pas la sécurité culturelle
parce qu'on l'a, on n'invoque pas les symboles internationaux parce qu'on les
possède en très bonne partie, donc, on invoque les
chevauchements. Il faut faire la souveraineté pour les
chevauchements.
Alors, ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est qu'il y a eu des
études qui ont été faites par les différents
ministères sur la question de l'intégration des fonctionnaires.
J'ai l'intention de rencontrer M. Beaudry prochainement, qui a fait un
excellent travail à cet égard-là, et je dis, en terminant,
que nous allons examiner ça, comme l'a dit le ministre responsable, et
que nous rendrons public ce qui est dans l'intérêt du débat
et dans l'intérêt public, en ayant toujours le sens de
l'État et non pas l'intérêt partisan pour nous guider.
Le Président: Toujours en question
complémentaire.
M. Parizeau: Quand le premier ministre a-t-il l'intention de
trancher sur l'intérêt public? Compte tenu du fait que la
commission doit présenter son rapport le 1er mai, est-ce que le premier
ministre envisage de réfléchir sur l'intérêt public
pendant une semaine, un mois ou un an? Combien de temps ça peut lui
prendre pour trancher sur l'intérêt public, M. le
Président?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, tantôt, le ministre
responsable des affaires canadiennes, celui qui représente le
gouvernement à la commission, a dit que nous étions pour
respecter l'échéancier de la loi. Si le député de
Lac-Saint-Jean veut me poser une question, je n'ai pas d'objection.
Alors, on a dit qu'on était pour respecter l'échéancier de
la loi 150. Il me semble que c'est clair. On l'a dit. On rapporte que le chef
de l'Opposition a dit: On pourrait attendre
un an ou deux ans. Je ne sais pas si c'est vrai. Il pourra probablement
rectifier ça tantôt, mais le ministre a dit que nous étions
pour respecter la loi 150. Donc, ça devrait le rassurer
là-dessus. Le ministre vient de le dire.
Le Président: En question principale, M. le leader de
l'Opposition.
Nomination de M. Billy Diamond à titre
de représentant du gouvernement au
comité
d'évaluation environnementale de
Grande-Baleine
M. Chevrette: M. le Président, on sait que la ministre de
l'Énergie, avec le caractère et la fougue qu'on lui
connaît, n'a pas mâché ses mots, hier, à l'endroit
des Américains et de leur attitude par rapport aux contrats
d'exportation d'Hydro-Québec. Elle s'en est prise plus
particulièrement au lobby amérindien auquel elle impute la
responsabilité de cette nouvelle tuile sur la tête
d'Hydro-Québec. Elle a dit, et je la cite, M. le Président:
«Assez, c'est assez. C'est inacceptable, pour des
Québécois, de voir leur situation économique être
mise en danger par les autochtones.» Et elle continue: «Nous ne
pouvons pas accepter que les autochtones continuent à dénigrer le
Québec et aux États-Unis et en Europe.»
Je voudrais demander à la vice-première ministre et
à Mme la ministre de l'Énergie, qui incarne le même
personnage, comment elle peut concilier ses propos d'hier - je suppose qu'elle
reflète l'idée du Conseil des ministres - avec la décision
en douce, la semaine dernière, de nommer M. Billy Diamond non seulement
comme président du comité, mais comme représentant du
gouvernement du Québec au sein du comité d'évaluation
environnementale de Grande-Baleine?
Le Président: Mme la ministre de l'Énergie et des
Ressources.
Mme Bacon: D'abord, M. le Président, j'aimerais dire au
leader de l'Opposition que les qualificatifs qu'il m'accorde aujourd'hui, il ne
les dirait pas à des collègues masculins. Peut-être que le
double standard, on pourrait s'en passer dans cette Chambre, M. le
Président, et, une fois pour toutes, nous accepter tels que nous
sommes.
M. le Président, c'est vrai, hier, j'ai sonné la fin de la
récréation. Et c'était ça mon but, hier, M. le
Président. Nous avions eu des négociations en juin dernier avec
le Grand Conseil des Cris, les chefs de bande du Grand Conseil et le chef du
Grand Conseil, et nous avons aussi depuis essayé et multiplié les
tentatives de reprendre les négociations avec eux puisqu'ils n'avaient
pas donné suite à notre demande. Il y a eu des échanges de
lettres avec eux depuis. Nous tentons de les ramener. C'est pour ça que
j'ai sonné la fin de la récréation. Qu'ils cessent de se
promener à travers le monde, qu'ils s'assoient à une table,
qu'ils négocient avec nous.
Quant à la nomination de M. Billy Diamond, il y a l'alternance
qui se fait. Si le leader de l'Opposition vérifiait un peu comment
fonctionnent les tables sur les audiences publiques, il verrait qu'il y a des
alternances qui se font dans les présidences. Je suis certaine que mon
collègue, le ministre de l'Environnement, se fera un plaisir de
compléter ma réponse et de lui expliquer en long et en large le
pourquoi de la nomination de M. Diamond, M. le Président.
M. Chevrette: M. le Président...
Le Président: Je vais reconnaître une question
additionnelle à ce moment-ci. M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: ...je pensais que ça ferait plaisir à
Mme la ministre que de lui dire qu'elle avait du caractère et de la
fougue, mais je les retire, je pense. Voyant que ça lui
déplaît, je les retire. C'étaient des compliments que je
lui faisais, M. le Président.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chevrette: Donc, M. le Président, je voudrais demander
à Mme la ministre de l'Énergie s'il n'est pas exact qu'en vertu
de l'article 22.5.8 de la Convention de la Baie James il y a alternance
effectivement et c'est parce qu'on sait qu'il y a alternance et que M. Billy
Diamond finissait son mandat à la présidence que, pour contourner
l'alternance, vous avez décidé de faire de M. Billy Diamond un
représentant du gouvernement du Québec alors que M. Diamond
siège sur ce comité à titre de représentant de la
communauté des Cris?
Le Président: Mme la ministre.
Mme Bacon: M. le Président, je voudrais dire au leader de
l'Opposition que les ponts ne sont pas rompus avec les Cris. Nous avons au
cours de cette année continué à négocier avec eux
certaines ententes et nous en avons une qui est sur le point de se terminer
avec un chef de bande et les gens de son village, M. le Président. Quant
à la nomination de M. Billy Diamond, c'est un objectif de
continuité qui a fait en sorte qu'on a nommé M. Diamond et je
suis certaine que mon collègue de l'Environnement va se faire un plaisir
de continuer et de compléter ma réponse, M. le
Président.
Le Président: M. le ministre de l'Environnement. (14 h
30)
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, dans le
but d'ajouter aux propos de Mme la ministre de l'Énergie et des
Ressources
et d'éclairer le député de Joliette et cette
Chambre, le processus d'évaluation environnementale au sud du 55e
parallèle, en territoire cri, est commencé depuis plus de quatre
mois maintenant. Le 1er avril est une date où l'alternance doit jouer
sur les présidences de comités, vous avez raison de le souligner.
Le gouvernement du Québec avait le choix de prendre le risque de changer
le président au milieu du processus, donnant ouverture à de
possibles attaques devant les tribunaux ou, possiblement, ralentissant le
processus d'évaluation environnementale. Ce que le gouvernement du
Québec a décidé de faire, c'est de ne pas prendre de
chances sur le plan juridique et de continuer à maintenir un rythme
accéléré d'évaluation environnementale. Pour ce
faire, il a convenu avec les Cris que le chef Billy Diamond continuerait
à présider le comité comme représentant du
gouvernement du Québec et que les Cris accepteraient, en contrepartie,
de nommer un fonctionnaire du gouvernement du Québec comme
représentant des Cris. M. le Président, cela résume la
position du gouvernement du Québec dans ce dossier.
Le Président: En question principale, M. le
député de Salaberry-Soulanges.
Changements dans les formulaires d'impôt du
Québec
M. Marcil: M. le Président, ma question porte sur la
déclaration de revenus pour l'impôt. Or, certaines allusions ont
été faites récemment en cette Chambre à l'effet que
des personnes de moins de 60 ans ne pouvaient réclamer, à titre
de revenu de retraite, leur déduction de 1000 $ puisqu'il n'y aurait
aucun renseignement à cet égard dans le guide d'impôt ou
dans le formulaire de 1990. Ma question, M. le Président, s'adresse au
ministre du Revenu: Est-ce qu'il peut nous dire si la disparition, dans les
guides de 1990 et 1991, de la grille de calcul C pour les montants de revenus
de retraite peut effectivement avoir fait perdre des centaines de milliers de
dollars aux contribuables québécois?
Le Président: M. le ministre du Revenu.
M. Savoie: Merci, M. le député. Effectivement,
suite à des déclarations hier soir, après 18 h 30, ici, il
pourrait y avoir certains contribuables qui sentent une certaine confusion au
sujet de certaines allégations et il faut faire le point pour
éviter toute confusion, M. le Président. En 1989, effectivement,
il y avait trois grilles: la grille A, la grille B et la grille C. En 1990, la
grille B et la grille C ont été fusionnées pour ne faire
qu'une grille, la grille B. Le ministère du Revenu, afin de s'assurer
que tous les contribuables puissent bénéficier pleinement de la
déduction, a vérifié chacune des déclarations
d'impôt...
Le Président: Un instant, s'il vous plaît. Je vais
demander à tout le monde, s'il vous plaît, de collaborer. À
l'ordre! Mmes, MM. les députés, s'il vous plaît. Alors, M.
le ministre.
M. Savoie: Merci, M. le Président. Effectivement, pour
s'assurer qu'il n'y ait pas eu d'erreurs en 1990, chacune des
déclarations d'impôt utilisant la grille B a été
vérifiée et, en conséquence, là où il y
avait prise de déduction, c'a été ratifié et
où il y a eu erreur, c'a été corrigé de
façon à ce que, pour les contribuables québécois,
il n'y ait aucune perte de déduction admissible. Et, en
conséquence, pour le revenu du gouvernement du Québec les pertes
sont de zéro sou.
M. le Président, je pense qu'il faudrait tenir compte du fait
que, pour ce qui est de l'ensemble de cette déclaration, il y avait,
comme nous l'avons mentionné hier, une entrée de ligne, la ligne
374, qui permettait d'aller chercher la déduction. Troisièmement,
je pense que ce qui est plus significatif, M. le Président, c'est qu'en
tout temps nous cherchons...
Le Président: En conclusion, M. le ministre, s'il vous
plaît.
M. Savoie: ...à nous assurer, au ministère du
Revenu, chaque fois qu'il y a modification à un formulaire ou à
une grille, que le ministère du Revenu fasse ses vérifications
pour s'assurer que tous les contribuables puissent aller chercher leur
déduction.
Le Président: En question complémentaire.
M. Marcil: Merci, M. le Président. Est-ce que le ministre
du Revenu peut nous dire quel contribuable québécois aurait pu se
tromper en utilisant par erreur la déclaration simplifiée et,
s'il avait le droit de réclamer des déductions pour le
remboursement à l'égard des allocations familiales
fédérales, que peut-il faire si c'est le cas?
Le Président: M. le ministre. M. Savoie: Au
niveau...
Le Président: Un instant. Je vais demander encore une fois
la collaboration des deux côtés de la Chambre. Ceux et celles qui
sont intéressés à discuter, je vous invite simplement
à le faire à l'extérieur de l'Assemblée. S'il vous
plaît. Ça inclut tout le monde. M. le ministre.
M. Savoie: M. le Président, il s'agit de moins de la
moitié de 1 % de la population du Québec qui avait droit à
la déduction à la ligne 222, c'est pour ça qu'elle ne se
trouvait pas dans le formulaire simplifié et c'est pour ça que
ça se trouvait dans le formulaire détaillé. Si, effec-
tivement, on n'a pas pu lire le guide avant d'utiliser le formulaire
simplifié, à ce moment-là, il ne s'agit que d'appeler au
ministère du Revenu et d'aller chercher les formulaires permettant un
amendement à son rapport d'impôt. À cet effet, M. le
Président, j'aimerais déposer les documents qui pourraient
clarifier les deux questions qui m'ont été soumises.
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Il y a
consentement au dépôt des documents...
M. Chevrette: Oui.
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: J'aurais une question: Est-ce que vous pourriez
déposer également ce que vous vous étiez engagé,
hier, à déposer, pour clarifier le tout? On a relevé les
textes, nous autres, et il a bel et bien dit ce qui...
Le Président: Alors, est-ce que vous... M. le ministre,
oui.
M. Savoie: Oui. On a vérifié. Effectivement, on a
pris contact avec le président et on ne peut pas déposer des
galées à l'Assemblée nationale puisque c'est
déjà une matière publique.
Le Président: Est-ce qu'il y a consentement au
dépôt de ces documents?
Des voix: Oui.
Le Président: Consentement. Les documents sont donc
déposés. En question principale, Mme la députée de
Chicoutimi.
Reconduction du décret des travailleurs de
l'industrie du verre plat
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
Président, depuis trois ans, le Comité paritaire du verre plat
réclame la réouverture du décret et l'application des deux
conventions collectives depuis lors signées. Dans le contexte
économique actuel difficile pour certaines industries qui attendent
toujours du gouvernement un plan de relance économique, certaines
d'entre elles connaissent malgré tout, et malgré vous, je dirais,
une croissance qui rassure. L'industrie du verre plat, c'est 8000 travailleurs,
c'est près de 1000 entreprises, c'est une industrie compétitive
qui a accru sa part du marché canadien de quelque 10 % depuis 1981 et,
chose étonnante, cette industrie n'a pas connu de conflit de travail
depuis 15 ans. L'inertie des trois ministres du Travail qui se sont
succédé menace la stabilité de cette industrie. Ma
question s'adresse au ministre du Travail: Qu'est-ce que le ministre du Travail
attend pour signer et reconduire le décret du verre plat, tel que le
demandent à l'unanimité les entrepreneurs et les
syndiqués?
Le Président: M. le ministre du Travail.
M. Cherry: Merci, M. le Président. Je remercie ma
collègue de sa question, c'est d'actualité. J'ai reçu une
délégation, ce matin, qui est venue me remettre une
pétition concernant le sujet qui est traité. Dans un premier
temps, et je pense qu'il est important de replacer les choses dans leur
contexte, le 9 octobre 1991, il y a eu prépublication. Le délai
légal, comme le veut la loi, 45 jours, se terminait le 25 novembre 1991.
Il y a eu des objections, les objections viennent de gens qui s'occupent des
unités scellées à l'intérieur de la fenêtre,
dans le domaine de la fenestration. Et je tiens à rappeler à la
députée de Chicoutimi, dans un premier temps, que, comme dans le
décret du verre plat, ils sont syndiqués pour au-delà de
90 % et la signature du décret ne modifierait en rien leurs conditions
salariales puisqu'ils gagnent tous au-delà de ce qui est inscrit dans le
décret. Ça, c'est dans un premier temps.
Dans un deuxième temps, et pour l'information toujours de la
députée de Chicoutimi, durant l'intersession, j'ai visité
une douzaine d'industries, tant du verre plat que du bois ouvré, pour me
familiariser avec l'ensemble du problème de ce secteur. J'ai
convoqué les parties à une première réunion au mois
de février dernier et on s'apprête prochainement à les
reconvoquer pour chercher une solution permanente dans le secteur de la
fenestration pour le mieux-être de l'ensemble de ce secteur
d'activité économique extrêmement important au
Québec.
Le Président: En question complémentaire.
Mme Blackburn: oui, m. le président. je veux bien
reconnaître le zèle du ministre du travail; cependant, ça
fait trois ans que le dossier traîne. c'est une industrie, comme le
reconnaît le ministre, qui va bien. alors, veut-il me dire quel
intérêt il défend quand il est en train de la saboter?
Des voix: Oh! Ohl Oh!
Le Président: M. le ministre.
M. Cherry: M. le Président, pour aider ma collègue
de Chicoutimi à bien comprendre l'ensemble de ce
problème-là, comme c'est la première fois qu'elle me pose
une question dans ce dossier, je veux simplement, pour l'aider, lui
décrire le comportement des individus dans ce dossier, pour qui,
parfois, il est plus important de faire de la personnalité que de se
préoccuper du mieux-être de l'ensemble de l'industrie. Lorsque
j'ai convoqué les parties en février et qu'elles sont
arrivées quelques minutes avant
l'heure prévue de la réunion, elles demandaient des salles
d'attente séparées, tellement elles ne voulaient même pas
se saluer de façon accessible, civilisée entre elles. Et
ça, c'est la dimension du problème que j'ai, mais je passe
au-delà de ça pour me préoccuper de l'ensemble du secteur
de l'activité économique et on va trouver ensemble, avec les
vrais intervenants, au-delà des personnalités, une solution
permanente dans un secteur extrêmement important pour l'économie
québécoise.
Le Président: En question principale, M. le
député de Jacques-Cartier.
Position du ministre de l'Éducation face aux
recommandations du rapport Chambers
M. Cameron: M. le Président, ma question est pour le
ministre responsable de l'application de la Charte de la langue
française. I would like to draw the attention of the Government, and the
Assembly, to an article in today's Le Devoir and I cite:
«L'école anglaise crie au secours. La clientèle scolaire
diminue et les écoles ferment.» It begins: «Les
diplômés de langue anglaise quittent le Québec, les
écoles primaires et secondaires anglophones ferment, les ressources
allouées à ce réseau se sont amoindries et
dispersées au fil des ans, l'immigration ne comble plus, du
côté anglophone, le vide laissé par la baisse des
natalités.» (14 h 40)
M. le Président, the task force on English education has provided
a report, a report that gained our support and that of all the groups that
presented recommendations to it, to do something for the unhappy situation of
the Anglophone community in Québec, especially in the education sector.
The other recommendations are the particular concern of the Minister of
Education, but the crucial recommendation is the first one which argues that
all children of English mother tongue should be allowed education in the
English language. Will the Minister responsible for the administration of the
Charter of the French language be willing to act to support such a motion,
since it will be absolutely necessary as a mere minimum for the preservation of
the Anglophone community in Québec?
Le Président: M. le ministre responsable de l'application
de la Charte de la langue française.
M. Ryan: Mr. Chairman, according to my reading of the law, it
would be incumbent upon the Minister of Education to submit a recommendation to
Cabinet upon this first recommendation of the Chambers task force. The Member
will understand that I would wish to reserve my views for expression before
Cabinet in the eventuality that my colleague submit a recommendation before I
make them here.
Le Président: Une question complémentaire.
M. Cameron: Will the Minister recognize the possibility that a
rejection of this first recommendation will be regarded as as great an
injustice by the Anglophone community as the rejection of bilingual signs?
Le Président: M. le ministre.
M. Ryan: Well, we are headed for an open debate on these matters
before the end of 1993 and we will have ample time to express our views on
these two themes.
Le Président: En question principale, M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
Subvention à l'institut Nazareth et
Louis-Braille
M. Boulerice: M. le Président, est-ce que la ministre des
Affaires culturelles pourrait nous dire à qui elle a confirmé la
subvention de 80 000 $ à la bibliothèque Nazareth et
Louis-Braille qu'elle promettait le 26 février dernier, lors de
l'étude des engagements financiers de son ministère, sous quelle
forme et à quelles fins?
Le Président: Mme la ministre des Affaires
culturelles.
Mme Frulla-Hébert: M. le Président, je vais
profiter de la question, d'ailleurs, pour faire certaines mises au point. C'est
une question que j'attendais depuis un mois, depuis la fameuse
démonstration ou parade que l'institut Nazareth et Louis-Braille avait
organisée - évidemment, c'était devant les caméras.
Alors, la question devait être imperative et demandée tout de
suite; ça fait un mois de ça. Nous, ce qu'on a fait, c'est qu'on
a pris les devants. Le 20 mars, nous avons rencontré les gens de
l'institut Nazareth et Louis-Braille parce qu'il faut quand même savoir
qu'il n'y a aucun projet qui nous a été soumis formellement,
seulement un projet soumis sous forme de pétition le 4 décembre
dernier. Nous les avons rencontrés, nous leur avons dit qu'il y aurait
des mesures financières mises de côté dans le prochain
exercice financier, mais qu'il fallait un projet. On s'est assis ensemble et
nous allons les aider à formuler ce projet de telle sorte qu'il puisse y
avoir bonification à ce qu'ils reçoivent déjà.
Le Président: En question complémentaire.
M. Boulerice: Est-ce que la ministre reconnaît, puisqu'elle
leur a parlé, que l'aide en fonctionnement de 80 000 $ qu'elle
annonçait le 26 ne répond pas aux besoins en équipement,
que la bibliothèque a besoin de 250 000 $ et non pas de 500 000 $, comme
elle le disait le 26 février?
Le Président: Mme la ministre.
Mme Frulla-Hébert: Premièrement, je veux quand
même le répéter, au niveau du financement de l'institut
Nazareth et Louis-Braille, l'aide financière totale allouée par
le ministère de la Santé, c'est une aide de 7 600 000 $. De ces 7
600 000 $, il y a 250 000 $ qui sont affectés par l'administration de
l'institut pour financer la bibliothèque. Est-ce qu'ils ont des besoins
supplémentaires? Oui. Est-ce qu'il y aura bonification? Oui. Mais il
faut quand même avoir un projet.
Nous avons offert de nous asseoir avec eux justement pour avoir ce
projet écrit et complété, et, en attendant,
évidemment, j'ai des sommes allouées pour l'an prochain justement
pour les aider. C'est un dossier qui est complexe, c'est certain.
Évidemment, nous voulons assurer le meilleur service à ces gens
qui ont une particularité qui n'est pas drôle.
Le Président: Pour une question complémentaire, M.
le député de La Prairie.
M. Lazure: Oui, M. le Président. Au ministre responsable
de l'Office des personnes handicapées: Qu'est-ce qu'il compte faire pour
aider sa collègue des Affaires culturelles à ramasser le plein
montant auquel les personnes qui ont un handicap visuel ont droit pour faire
fonctionner la bibliothèque Louis-Braille? Lui, qui peut ramasser
facilement 600 000 $ pour lancer une politique de santé dans son
comté, est-ce qu'il pourrait trouver le tiers de ce montant-là
pour aider les personnes handicapées visuellement?
Le Président: M. le ministre de la Santé et des
Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je
passerai sous silence la partie partisane du député. Qu'il vive
avec, comme moi, je vivrai avec les miennes. C'est le genre de choses dont on
n'a pas besoin dans un débat aussi noble que celui-là.
M. le Président, oui, effectivement, j'ai même eu
l'opportunité de visiter l'institut Nazareth et Louis-Braille il y a
quelque temps et, à mon grand étonnement, lorsque ce débat
est allé sur la place publique, personne, au moment de ma visite, ne
m'avait parlé de ces problèmes particuliers. On m'a parlé
d'autres sortes de problèmes que nous avons réglés en
collaboration avec l'institut Nazareth et Louis-Braille, mais personne, pendant
toute la demi-journée que j'ai passée là-bas, ne m'a fait
mention de ces difficultés.
En ce qui concerne l'avenir, M. le Président, nous avons
formé un comité conjoint avec ma collègue; nous
travaillons sur le dossier et bien sûr que le ministre responsable de
l'OPHQ va aussi parler au ministre de la Santé et des
Services sociaux, avec ma collègue, pour faire en sorte qu'on
trouve une solution à ce problème.
Le Président: Alors, en question principale, Mme la
députée de Taillon.
Accessibilité aux concours de l'Office des
ressources humaines
Mme Marois: Merci, M. le Président. Dans la foulée
du rapport Poulin qui proposait de fermer les écoles en janvier, il
semble qu'une nouvelle méthode de gestion veuille s'instaurer à
l'Office des ressources humaines. En effet, on semblerait vouloir limiter
l'accessibilité aux concours visant à pourvoir,
évidemment, les rares postes qui s'ouvrent à la fonction publique
québécoise. On veut implanter un ticket modérateur et on
songe même à une nouvelle méthode de sélection qui
serait une «loto-emploi», à toutes fins pratiques. Pis
encore, on constate que la qualité semble coûter cher, selon ce
que dit l'Office, et, au moment où toute l'action gouvernementale
devrait porter justement sur la qualité totale dont fait tant
état le gouvernement, c'est un peu inquiétant d'entendre de tels
propos. Alors, j'aimerais savoir, M. le Président, du ministre
responsable de l'Office et de l'administration, s'il est prêt à
désapprouver dès maintenant ce type de propos et ce type d'action
qui est proposé par l'Office des ressources humaines?
Le Président: M. le ministre délégué
à l'Administration et à la Fonction publique.
M. Johnson: Oui, M. le Président. Je déplore le
pâté chinois que vient de nous servir la députée, au
titre des engagements que nous avons à respecter.
Des voix:... M.Johnson: Ah!
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous
plaît! Bon! Je cède la parole à M. le ministre
délégué à l'Administration et à la Fonction
publique. (14 h 50)
M. Johnson: M. le Président, ce que la
députée nous rapporte est un ramassis d'impressions, d'une part,
et de mauvaises interprétations de ce que j'ai moi-même entendu,
d'autre part. Ce que nous visons à faire, c'est nous assurer que, pour
des emplois qui sont à vocation qu'on appelle interministérielle,
qui ne requièrent pas des spécialités pointues, nous
puissions, comme gouvernement administrant les fonds publics, trouver une
formule qui soit équitable, donc qui donne la même chance à
tous les Québécois d'accéder à un emploi comme le
requiert la Loi sur la fonction publique et qui, en même temps, ne nous
condamne pas à dépenser - corn-
me nous l'avons fait pour 130 postes récemment - 600 000 $, 4300
$ par poste, au titre de l'examen exhaustif de 32 000 candidatures à des
postes de contrôleur routier, lorsqu'on cherchait 130 candidats.
L'Office des ressources humaines, M. le Président, est en train
d'élaborer un projet qui vise à respecter la règle
d'équité d'accès à la fonction publique et qui
permet incidemment au ministre ou à l'Office des ressources humaines -
éventuellement, il ne s'agit que d'un projet - de déterminer dans
l'échantillonnage une surreprésentation de groupes cibles, comme
les femmes ou les handicapés, afin de leur donner une meilleure chance
d'accès à certains emplois. Il m'apparaît qu'il n'y a pas
que des désavantages, il y a beaucoup d'avantages à
considérer un projet comme celui-là, mais la décision
reste à venir.
Le Président: Pour une question additionnelle, Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: D'abord, est-ce que le ministre ne conviendra pas
avec moi, s'il a entendu le même reportage que, moi, j'ai entendu,
qu'effectivement on parlait de la question de la qualité sur laquelle on
croyait qu'il y avait trop d'investissements qui étaient faits? Donc,
à cet égard-là, il ne s'agit pas d'un salmigondis, M. le
Président. Est-ce que le ministre est en train de nous dire qu'il serait
d'accord avec les politiques de l'Office, soit en matière de ticket
modérateur ou, effectivement en matière de choix, au hasard,
essentiellement, M. le Président? Parce que c'est ça dont on
parie quand on parle d'une loto, à moins que je ne comprenne pas les
principes d'une loto, M. le Président. Alors, il me dit qu'il est
d'accord avec cela, M. le Président. C'est ce qu'il me dit.
Le Président: En réponse, s'il vous plaît.
M. Johnson: M. le Président...
Le Président: Un instant! S'il vous plaît! Alors,
pour la réponse, M. le ministre.
M. Johnson: M. le Président, on a évoqué
deux éléments de la part de l'Office des ressources humaines.
D'abord, on a mentionné les mots «ticket modérateur»
et on a ajouté les mots «c'est inacceptable». Je souscris
à cette approche. Il n'a jamais été question de ticket
modérateur et la députée fait de la démagogie
à vouloir ressortir...
Des voix: Bravo!
M. Johnson: deuxièmement, s'il s'agissait d'une loterie,
on pigerait au hasard dans les bottins téléphoniques le nom de
candidats éventuels. ce n'est pas ce qui est en cause. ce qui est en
cause, c'est la suggestion qui est faite et à l'égard de laquelle
j'ai demandé qu'on s'assure de l'équité, respecter afin
que tout le monde ait la même chance d'accéder à des
emplois dans la fonction publique. C'est la constitution de façon
scientifique, acceptée par la Commission de la fonction publique, d'un
échantillonnage qui permet de répartir de façon correcte
la source des candidatures afin, notamment - et je le répète
parce que c'est important - de s'assurer qu'il y ait une représentation
des groupes cibles de nos programmes d'accès à
l'égalité qui véritablement reproduit leur proportion dans
la population et nous permet d'atteindre des niveaux d'embauché de ces
groupes cibles, comme les femmes, les handicapés et les
communautés culturelles, qui sont les cibles gouvernementales et des
programmes que nous avons l'intention d'atteindre.
Le Président: C'est la fin de la période
régulière de questions. Maintenant, Mme la ministre de
l'Énergie et des Ressources m'avise qu'elle pourrait donner les
réponses en différé aux questions posées par le
leader de l'Opposition, hier. Puisque je n'ai pas reçu d'avis
écrit en ce sens-là, est-ce qu'il y a consentement à une
réponse différée?
M. Chevrette: Consentement. Le Président:
Consentement? M. Chevrette: Oui.
Le Président: Donc, vous avez la parole, Mme la
ministre.
Réponse différée
Projet de loi américain pour empêcher des
obligations d'Hydro-Québec
Mme Bacon: Merci, M. le Président. Tel que je l'avais dit,
hier, au leader de l'Opposition, je m'apprête à lui donner quatre
réponses à autant de questions qu'il avait. La première,
il demandait, par rapport au projet de loi du Massachusetts, si le projet de
loi nommait Hydro-Québec. Le texte du projet de loi mentionne
nommément Hydro-Québec, et je peux peut-être juste vous
lire l'endroit où c'est mentionné. On dit: «After January
11, 1992, no public pension funds under the subsection shall remain invested in
the stock securities or other obligations of Hydro-Québec, James Bay
Development Corporation, James Bay Energy Corporation, or any other
subsidiaries or affiliates».
Dans la deuxième question, le député me demandait
si nous avions pris toutes les précautions nécessaires ou si nous
devions rencontrer le gouverneur de l'État du Massachusetts. Je
complète en disant que M. Guy Leblanc, qui est
notre délégué intérimaire à Boston, a
écrit une lettre en date du 18 mars, qui était adressée
aux parlementaires de l'État du Massachusetts, et je dois dire aussi
qu'Hydro-Québec a recours, en ce moment, aux services d'une firme
américaine de lobbying qui fait le suivi des projets de loi et qui
conseille Hydro-Québec à ce sujet. HydroQuébec
était présente le 24 mars dernier lors des audiences publiques
sur les quatre projets de loi relativement à
l'hydroélectricité.
La troisième question. Le député me demandait si
j'avais fait des démarches élémentaires pour
vérifier la portion de la dette d'Hydro-Québec qui est
détenue par les fonds de pension. Alors, le volume des titres
d'Hydro-Québec détenus dans le Massachusetts est très
faible et se situe autour de 20 000 000 $, et pas plus que ça.
Dans la quatrième question, le député me demandait
si nous avions un plan d'action pour que ça cesse, pour éviter de
se faire charrier, comme il le disait lui-même. Alors,
Hydro-Québec maintient des liens très étroits au niveau de
l'information des maisons de courtage qui traitent des obligations. Et, en ce
moment, il n'y a aucune fluctuation des prix et du volume des obligations
d'Hydro-Québec. Donc, il ne doit pas y en avoir non plus. C'est
pourquoi, oui, nous avons un plan d'action, mais nous avons, avant tout, un
souci d'efficacité dans ce plan d'action. Et pour cette raison, je pense
que révéler toute notre stratégie sur la place publique
ferait en sorte de nous empêcher de mettre ce plan d'action en marche et
ne servirait certainement pas les intérêts du Québec.
Dans cet objectif d'efficacité, nous sommes donc en mesure
d'assurer le député et la population, par son
intermédiaire, de notre détermination à défendre
l'image du Québec d'une façon calme, sereine et efficace.
Une voix: Bravo!
Le Président: Tel que le prévoit le
règlement, pour une question complémentaire.
M. Chevrette: M. le Président, dans un premier temps, vous
me permettrez de remercier... J'ai reçu effectivement les projets de loi
ce matin. Je voudrais demander à la ministre la question additionnelle
suivante: Étant donné que ça se situe maintenant au niveau
politique, parce que les projets de loi qui sont ainsi déposés
constituent un message politique de la part des Américains,
indépendamment du fait que ces projets de loi soient pilotés par
des députés qui seront en élection, d'après ce que
j'ai pu comprendre, en novembre prochain, et qui cherchent certaines tribunes
pour répondre à certains courants, à partir de ce
moment-là, est-ce qu'au niveau du plan d'action, sans en
révéler les grandes lignes, il y a une action d'information
soutenue et directe en regard des contrats ou des projets d'Hydro-Québec
et de son plan de développement?
Le Président: Mme la ministre.
Mme Bacon: Oui, c'est évident, M. le Président, que
nous allons compléter l'information s'il y a des gens qui en ont encore
besoin. On avait l'impression que nous avions suffisamment informé les
différents États américains qui sont plus près de
nous. Je dois dire que ce dépôt de projets de loi ressemble de
plus en plus peut-être à un épisode - on en a connu
plusieurs au cours des derniers mois - d'un vaste processus qui est bien
planifié, qui est bien organisé et qui est un épisode de
plus dans le dénigrement du Québec. Et c'est dans ce
sens-là que notre action va être suivie.
Le Président: Alors, c'est la fin de la période de
questions.
Il n'y a pas de votes reportés.
Aux motions sans préavis, M. le ministre des Affaires
internationales. Un instant, M. le ministre. Je vais requérir la
collaboration de tous les collègues.
S'il vous plaît! Pour une motion sans préavis, M. le
ministre des Affaires internationales.
Motions sans préavis
Souligner la victoire du président Frederik De
Klerk pour mettre fin à l'apartheid en Afrique du Sud
M. Ciaccia: M. le Président, je propose que
l'Assemblée nationale souligne la victoire du président Frederik
De Klerk et félicite la population pour l'appui accordé au
processus de réforme devant conduire à l'abolition effective de
l'apartheid en Afrique du Sud.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a
consentement pour débattre cette motion?
Une voix: Consentement.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Consentement. Allez-y, M.
le ministre. (15 heures)
M. John Ciaccia
M. Ciaccia: M. le Président, les travaux parlementaires,
la semaine dernière, ne m'ont pas permis de présenter cette
motion. Cependant, l'événement mérite d'être
souligné et je la présente aujourd'hui.
M. le Président, en obtenant un vote fortement majoritaire de
68,7 % à son référendum du 17 mars dernier, le
président De Klerk a
obtenu un mandat net de son électorat blanc pour, comme il l'a si
bien dit lui-même, mettre fin à l'apartheid dans son pays et
ouvrir ainsi les portes du pouvoir aux Noirs de l'Afrique du Sud.
Le Québec souligne ces résultats spectaculaires et est
heureux de constater que le processus démocratique en Afrique du Sud est
engagé de façon définitive. Je demande aujourd'hui
à l'Assemblée nationale de souligner cet acte courageux de M. De
Klerk et le leadership qu'il a su exercer dans le processus de réforme
politique en Afrique du Sud. La victoire du président De Klerk n'est pas
sans nous rappeler la lutte de tous les instants que nous devons mener, ici
comme ailleurs, pour que la démocratie, les droits et les
libertés des peuples soient respectés.
Le Québec, tout comme le Canada, avait adopté, en 1986, un
certain nombre de mesures politiques et économiques pour sanctionner la
politique d'apartheid de l'Afrique du Sud. Tout comme nous avons vigoureusement
réagi alors pour dénoncer cette politique, nous devons
aujourd'hui nous réjouir des résultats historiques
enregistrés par le président De Klerk au dernier
référendum. J'aimerais souligner le courage politique du
président qui, malgré une opposition des plus vives, a toujours
maintenu la voie des réformes et des changements démocratiques
qu'il avait lui-même dictée à la population de l'Afrique du
Sud. Or, l'histoire a démontré à maintes reprises que
c'est justement le genre de courage politique dont a fait preuve le
président De Klerk qui élève un homme public au statut
d'homme d'État.
L'arrivée au pouvoir du président Frederik De Klerk, en
septembre 1989, a marqué la fin d'une époque, l'apartheid pur et
dur, et le début d'un temps nouveau pour la majorité noire de
l'Afrique du Sud. Elle a marqué la libération de certains des
prisonniers politiques, dont Nelson Mandela, aujourd'hui président du
Congrès national africain, l'ANC, la reconnaissance de partis politiques
jusque-là interdits, l'abolition, en juin 1991, des grandes lois de
l'apartheid, le début des négociations entre le gouvernement de
Pretoria et les dirigeants de la majorité noire devant conduire à
l'abolition effective de l'apartheid et à l'entrée des Noirs au
gouvernement.
La politique d'ouverture du président De Klerk à
l'égard de la majorité noire a eu des conséquences
immédiates. À l'interne, les partis d'extrême droite, dont
le Parti conservateur, s'opposent farouchement à tout changement
politique et entretiennent, par leurs actions, les violences qui frappent
l'Afrique du Sud. Ils ont mené et ils ont même réussi
à forcer le président à organiser, le 17 mars, un
référendum réservé à la population blanche
sur sa politique de démocratisation. Presque 70 % d'entre eux ont
appuyé le président et rejeté l'apartheid.
Au plan international, nombre de pays, dont plusieurs d'Europe et de
l'Est, ont rétabli leurs relations diplomatiques avec l'Afrique du Sud
alors que plusieurs grandes puissances industrielles, dont les
États-Unis et le Japon, ont décidé de lever les sanctions
économiques qu'elles avaient imposées à l'Afrique du Sud,
il y a quelques années.
Le Canada, pour sa part, a adopté une politique de retrait
graduel des sanctions. En novembre 1991, afin de favoriser le resserrement des
liens culturels, universitaires et scientifiques avec l'Afrique du Sud, Ottawa
levait les sanctions touchant directement la population et autorisait les
contacts entre fonctionnaires canadiens et sud-africains à l'exclusion
des contacts avec les organismes militaires, de police et de
renseignements.
Le 9 janvier dernier, il levait, par ailleurs, certaines restrictions
à l'exportation de produits relevant de technologies de pointe -
ordinateurs, logiciels, avions, hélicoptères, matériel de
télécommunications, etc. - a la condition que les ventes soient
d'abord approuvées et que les marchandises ne soient pas
destinées aux forces armées, à la police ou aux services
spéciaux d'Afrique du Sud. La levée des autres sanctions devrait
normalement s'effectuer au fur et à mesure que les réformes
politiques et constitutionnelles seront adoptées par le gouvernement du
président De Klerk. Je souligne que la récente victoire du
président est une victoire historique des valeurs fondamentales que sont
la démocratie et les droits et libertés de la personne.
C'est pourquoi nous devons persévérer à promouvoir
ces valeurs fondamentales auprès des différents membres de la
communauté internationale. Je rappelle que le gouvernement du
Québec a depuis toujours âprement défendu les valeurs
démocratiques et le respect de la dignité humaine. Il a ainsi
été solidaire des positions adoptées par Ottawa et visant
à condamner l'apartheid en Afrique du Sud. Je signale que le
gouvernement du Québec donne son appui au gouvernement du
président De Klerk et exprime le souhait que la démocratisation
et les changements politiques amorcés par les résultats
référendaires s'effectuent sans violence et en accord avec la
volonté de la population de l'Afrique du Sud, tel que clairement
exprimé lors du récent référendum.
Je souligne que le gouvernement du Québec a offert trois bourses
d'excellence à des ressortissants de la majorité noire d'Afrique
du Sud et souhaite participer à son mieux-être. Je formule le voeu
que la population blanche d'Afrique du Sud continue d'appuyer le
président De Klerk dans ses efforts de démocratisation pour que
les conditions politiques soient bientôt réunies pour permettre
à l'Afrique du Sud de rétablir complètement ses liens
politiques, économiques et socioculturels avec le Canada et le
Québec et avec l'ensemble des membres de la communauté
internationale, et ce, pour le bien-être de la
population de l'Afrique du Sud. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre des
Affaires internationales. Sur cette même motion du ministre, je
cède la parole à M. le député de Bertrand.
M. François Beaulne
M. Beaulne: Merci, M. le Président. C'est avec espoir et
satisfaction que nous apprenions la victoire du président De Klerk dans
un référendum où 68 % des gens, c'est-à-dire plus
des deux tiers de la population blanche d'Afrique du Sud, donnaient à
son président le mandat d'amorcer le démantèlement du
régime de ségrégation raciale érigé en
politique officielle depuis plus d'un siècle. Cette victoire
mérite d'être soulignée, d'autant plus qu'elle traduit la
volonté des Sud-Africains de réintégrer la
communauté internationale sur une base de normalité et de respect
des droits élémentaires enchâssés dans la Charte des
droits humains des Nations unies.
Cette victoire s'inscrit également dans la mouvance de vent de
libéralisation qui souffle présentement sur tous les continents,
entraînant sur son passage l'effondrement de régimes autoritaires
et dictatoriaux. Comme l'ont démontré les
événements des deux dernières années en Europe de
l'Est et en URSS, toute période de transition vers la démocratie
authentique, respectueuse des droits individuels et collectifs, se
déroule généralement dans un climat d'incertitude,
d'attente et de remise en question des structures traditionnelles qui la
rendent vulnérable au moindre soubresaut de mécontentement ou de
déception.
Conscients de la fragilité du processus de transition en
profondeur dans lequel vient de s'engager de façon irréversible,
nous l'espérons, le gouvernement d'Afrique du Sud, conscients
également que l'ampleur de la majorité obtenue par le
président De Klerk reflète la volonté de la population
blanche de rétablir des liens politiques et commerciaux normaux avec les
pays industrialisés, tous les pays de la Communauté
économique européenne ainsi que les États-Unis ont
levé l'embargo commercial qu'ils avaient imposé à
l'Afrique du Sud sur la plupart des produits pour la forcer à mettre un
terme à sa politique d'apartheid.
Le message a été reçu par la population blanche
eligible à voter. Les sanctions commerciales ont produit leur effet. Il
importe qu'à notre tour nous recevions le message de cette population
qui demande à rétablir des liens normaux avec nous. Les enjeux
pour le Québec sont importants. L'Afrique du Sud est notre principal
partenaire commercial sur tout le continent africain, suivi de
l'Algérie. Nos échanges avec l'Afrique du Sud, et ce,
malgré l'embargo, représentent 45 % de tous nos échanges
avec l'Afrique. À lui seul le Québec absorbe 65 % de l'ensemble
des exportations sud-africaines au Canada. Parmi les principaux secteurs
concernés, on retrouve les aciéries qui, comme vous le savez,
traversent une période difficile. (15 h 10)
De son côté, l'Afrique du Sud vient d'indiquer son
intérêt d'intensifier ses échanges avec le Québec en
élevant sa représentation à Montréal au rang de
consulat général. Soyons conscients qu'il ne suffit pas
d'applaudir la victoire du président De Klerk pour que le processus de
démocratisation suive son cours normal, comme par enchantement.
La ségrégation raciale a laissé, en Afrique du Sud,
des séquelles que seuls le temps et plusieurs générations
de bonne volonté réussiront à atténuer. Elle a
également creusé un fossé économique béant
entre Blancs et Noirs, fossé que le gouvernement sud-africain devra
entreprendre de combler dans les meilleurs délais. Les sanctions
commerciales ont réussi à faire plier la population blanche.
Elles ont eu également un effet dévastateur auprès de la
population noire où, par endroit, le taux de chômage atteint plus
de 60 %. Comme vous le savez, la stabilité politique est intimement
liée à la stabilité économique. Il s'avère
d'autant plus opportun, par conséquent, de mettre à la
disposition du président De Klerk les moyens qui lui permettront
d'établir l'équité et l'égalité de fait
entre Sud-Africains, Noirs ou Blancs.
Pour ces raisons, M. le Président, l'Opposition officielle est
d'avis que le gouvernement canadien devrait, à court terme, poursuivre
la levée partielle des sanctions commerciales, comme l'ont fait en
particulier les États-Unis, étant bien entendu qu'advenant un
blocage du processus de démantèlement de l'apartheid, il sera
toujours possible de rétablir les sanctions appropriées.
Merci.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Bertrand. Sur cette même motion, je cède
la parole à M. le député de Jacques-Cartier.
M. Neil Cameron
M. Cameron: Merci, M. le Président. We also join in
celebrating the large and decisive referendum result that recently took place
in South Africa and look forward to its consequences in bringing about an end
to an unjust, inequitable and increasingly unworkable political system.
It is the end of a long and complicated historical process in an
immensely complicated society. The South Africans were a State created out of
Dutch Calvinist settlers, English colonists, Zulu, Xhosa, East Indians,
European Jews, racial intermixtures of all of these, disproportions between
them, radically different religions, cultures, political habits and behaviour.
In a way,
a State that calls on rather remarkable qualities of statesmanship, no
matter what system of government it uses.
Apartheid was an attempt to provide one of those solutions. It should be
remembered that, contrary to what many people might imagine, it is not
something that goes right back to the foundations of the South African State.
It did not exist, for example, in the era of Jan Chris-tiaan Smuts. It was
actually brought in after the Second World War in its full form, only around
1948 or 1949. That is the full system of pass cards, restrictive labour codes
and all the rest of that hateful apparatus that grew worse and worse every
year.
That it could be gradually brought down is certainly due partly to the
statesmanship of Mr. De Klerk, who deserves all due credit, but it is perhaps
important to remember some of the other reasons why apartheid came to an end.
One of them is that the existing South African State, however politically
unjust and however socially inequitable, was economically successful enough to
provide a higher standard of living and a higher standard of education for the
Black population of Africa than existed in any of the other Black African
States and, in fact, to build up a large, solid, stable Black middle-class
which, in turn, helped give the White population the confidence that a major
political change could be engineered without chaos.
In addition to that, the collapse of the world communist system outside
China had very large implications for Africa because, before that took place,
most of the members of White African society looked at the African National
Council not merely as an alternative political leadership, or the
representative voice of the Black people of South Africa, but essentially as
the possibility of being one more communist dictatorship bringing all the
wonderful treats that that usually brings and, therefore, even if they were
lacking in racial prejudice, somewhat slowing down their enthusiasm for a new
regime.
With the collapse of support from the Soviet Union for communist
movements around the world and with the increasing disintegration of similar
status governments in the rest of Africa, it became more and more clear to the
most sensible elements in both the White and Black population that a new set of
alternatives was possible. And we all hope this can be achieved peacefully,
successfully and rapidly.
It is worth remembering otherwise, I think, that referenda, anywhere,
are political devices best used only when there is no other alternative. They
are not, in fact, a very good means of conducting the institutions of
democratic government, and I believe this can be said with some neutrality
because, for instance, if we take the case of our own society of Québec
and if, for the sake of argument, we have a referendum on the date that we have
much discussed it, then no matter what the outcome is, if there are, let us
say, some 40 % on the other side, whether it happens to be in this group or in
this group, I do not think that that will bode too well for a comfortable
political future for Québec or for Canada. But in our case, as in the
case of Canada as a whole and as in the case of South Africa, a referendum is
sometimes the only method by which effective political leaders can get past an
immense tangle of institutional constraints, existing prejudices and
fashionable hogwash that prevent all of us from doing what we believe to be
sensible and right. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Jacques-Cartier. Sur cette même motion, je
cède la parole à M. le député de
Pointe-aux-Trembles.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, l'Opposition officielle va
évidemment souscrire avec plaisir à la résolution qui est
devant nous parce que nous pensons que le référendum tenu en
Afrique du Sud a une grande importance historique pour ce pays, puisque
l'apartheid représentait l'expression étatique d'une forme de
racisme patent. Il faudrait rappeler, M. le Président, que sous le
régime d'apartheid, la majorité noire d'Afrique du Sud n'a pas le
droit de vote, a des restrictions quant à ses déplacements dans
le pays; que, dans sa forme la plus virulente, la loi d'apartheid interdisait
même les mariages interraciaux et divisait les gens sur un modèle
de ségrégation.
Quand je dis que cette forme de discrimination raciale était
intégrée aux pratiques d'un État et était
érigée en loi, je veux dire par là que c'est
fondamentalement différent de nos voisins des États-Unis
où il y a eu des formes de ségrégation raciale. Il y a eu
des expressions de discrimination à l'endroit de la minorité
noire aux États-Unis, mais ce ne sont pas des choses que l'État a
jamais approuvées et intégrées à ses lois
fondamentales.
M. le Président, ce référendum fait suite à
une longue lutte des Noirs d'Afrique du Sud pour la reconnaissance de leurs
droits civiques. Et ça a impliqué notamment l'emprisonnement
pendant plus d'un quart de siècle de Nelson Mandela, du Congrès
national africain, dont nous avons salué ici, en Chambre, il y a deux
ans, la libération de prison, ce qui a permis l'ouverture d'un dialogue
entre les représentants de la majorité noire et les
représentants du gouvernement actuel d'Afrique du Sud qui, on le sait,
est porté au pouvoir exclusivement par le vote des Blancs. C'est un
paradoxe de l'histoire, M. le Président, qu'une minorité
jouissant d'un statut inéquitable vis-à-vis de la
majorité... Dans cette Chambre, comme dans tous les parlements
démocratiquement élus du monde, bien sûr que nous
favorisons l'idée
d'une personne, un vote, et que les gens qui doivent conduire les
affaires de l'État doivent être élus au suffrage universel.
En Afrique du Sud, on parlait d'un gouvernement élu par un suffrage
restreint, restreint sur la base de la race, sur la base de la couleur au lieu
d'appliquer le principe fondamental d'une personne, un vote. (15 h 20)
Alors, M. le Président, je pense que c'est un pas en avant qui
est franchi en Afrique du Sud, parce que le paradoxe, c'est que la
minorité jouissant d'une emprise démesurée sur les
affaires de la collectivité d'Afrique du Sud a accepté
d'elle-même, par son seul vote, de changer ce système. Maintenant,
l'apartheid n'est pas complètement démantelé. M. Mandela
et les autres dirigeants du Congrès national africain ont émis
des réserves d'enlever complètement le boycott dont l'Afrique du
Sud faisait l'objet. Je suis d'accord avec mon collègue de Bertrand pour
dire que, comme un pas a été fait par la minorité blanche
d'Afrique du Sud, le Canada, comme d'autres pays, devrait faire un pas pour ce
qui est de l'embargo économique, mais un pas. La fin totale de l'embargo
devrait venir avec la fin de l'apartheid, avec la fin de ce régime de
gouvernement qui est inéquitable pour les 27 000 000 ou 28 000 000 de
Noirs qui forment l'immense majorité de la population de l'Afrique du
Sud.
Donc, M. le Président, nous allons voter avec plaisir pour la
résolution et notez que, dans les affaires du monde, il y a parfois des
bonnes choses qui arrivent et que ce référendum est une bonne
nouvelle pour l'ensemble; d'abord, pour les intéressés, la
majorité noire de l'Afrique du Sud, mais aussi pour l'ensemble des
démocrates du monde entier.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Pointe-aux-Trembles. Est-ce que la motion du ministre
des Affaires internationales qui se lit comme suit: «Que
l'Assemblée nationale souligne la victoire du président Frederik
De Klerk et félicite la population pour l'appui accordé au
processus de réforme devant conduire à l'abolition effective de
l'apartheid en Afrique du Sud», est adoptée?
M. Bélisle: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. Il n'y a
pas d'autres motions sans préavis.
Avis touchant les travaux des commissions
Avis touchant les travaux des commissions, M. le leader adjoint du
gouvernement. Pas d'avis?
Alors, j'ai l'avis suivant à vous fournir: Demain, le jeudi 2
avril 1992, de 9 h 30 à 12 h 30 à la salle 1.38 de
l'édifice Pamphie-Le May, la Commission d'étude des questions
afférentes à l'accession du Québec à la
souveraineté se réunira en séance de travail.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.
M. Bélisle: Aucun.
Affaires du jour Affaires prioritaires
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Nous en arrivons à
l'étape des affaires du jour et aux affaires prioritaires. Nous
reprenons le débat sur le discours d'ouverture prononcé par M. le
premier ministre le 19 mars 1992 et sur les motions de censure de M. le chef de
l'Opposition officielle, de M. le député D'Arcy-McGee, de M. le
député de Jonquière, de Mme la députée de
Taillon et de M. le whip de l'Opposition officielle. Je cède
immédiatement la parole à M. le député de
Lévis, et je lui rappelle qu'il dispose d'une période maximale de
20 minutes.
Reprise du débat sur le discours d'ouverture et
sur les motions de censure
M. Jean Garon
M. Garon: Je vous remercie, M. le Président. J'ai lu et
relu le discours inaugural du premier ministre, et en le lisant, j'ai eu
l'impression de la politique du perce-oreille: beaucoup de petits trous qui ne
servent à rien, mais quand il y en a assez, la bûche est pourrie.
M. le Président, quand on lit le discours inaugural, on se rend compte
qu'il n'y a pas d'orientation et qu'il n'y a pas de politique. Quand on voit,
comme cet après-midi, le président du Conseil du trésor
qui est président d'un organisme responsable de la fonction publique et
qui vous dit que c'est épouvantable. Il y a eu un concours pour le poste
de contrôleur routier - il y avait 130 postes à combler - et il y
a eu 32 000 applicants. Ça donne une idée à quel point il
y a des gens qui n'ont pas d'ouvrage qui sont intéressés à
travailler, mais qu'il n'y a pas d'emploi pour que 32 000 personnes appliquent
sur 130 postes.
On disait également aux nouvelles aujourd'hui que le gouvernement
veut faire une nouvelle loterie apparemment, la «loto job», pour
voir ceux qui vont avoir le droit d'appliquer sur des concours. Pourquoi pas un
«gratteux», ça va être meilleur marché? Vous
pourrez avoir un «gratteux», 32 000 applicants, à chacun son
«gratteux». On gratte, tu appliques ou tu n'appliques pas. On est
rendus dans des drôles de politiques quand on est rendus à dire,
aujourd'hui, que dans la politique de concurrence dans laquelle on est en train
de se demander si on ne fera pas des loteries ou des façons de faire en
sorte de choisir des candidats par échantillon-
nage plutôt que de trouver les meilleurs. D'autant plus qu'en
1991, on a perdu 24 % des emplois industriels du Québec; dans une seule
année, 24 % des emplois industriels du Québec.
Je me rappelle quand le président du Conseil du trésor
vous parlait des emplois temporaires lors de la crise de 1981-1982, mais jamais
on n'a vu une année où le Québec a perdu le quart des
emplois industriels qu'on trouve dans l'ensemble du Québec. C'est une
situation épouvantable. On se retrouve dans une période comme
dans la période des années trente. On se retrouve devant un
discours inaugural où il n'y a rien, M. le Président.
Mais, en même temps, au lieu d'avoir un gouvernement qui aide
à la reprise économique, on a un gouvernement qui essaie de tuer
la reprise économique avec des taxes comme on n'en a jamais eues dans
l'histoire du Québec; on n'a jamais eu autant de taxes. C'est pour
ça qu'il y a des comités de citoyens, de bord en bord du
Québec, qui se lèvent... et ils doivent se lever, parce que dans
un régime démocratique, c'est le seul langage que n'importe quel
gouvernement comprend. Des citoyens qui disent: On en a assez: TPS, TVQ.
Le 1er juillet, il y aura sans doute une taxe de 8 % sur les services.
On a commencé à taxer les vêtements qu'on avait
détaxés sous l'ancien gouvernement, taxer les appareils
ménagers, taxer les meubles, comme si c'étaient des objets de
luxe, M. le Président. Ah! évidemment, apparemment, on dit que,
par ailleurs, la TPS fédérale ne s'applique pas sur le
caviar.
M. le Président, la reprise économique est tuée
parce que les gens n'ont pas d'argent. Les gens sont inquiets, sont
insécures. Les gens qui sont inquiets et qui voient leur voisin qui a
perdu son emploi, qui voient le nombre d'emplois qui disparaissent, qui voient
ce qui était jusqu'à maintenant les piliers de l'économie
québécoise, comme les compagnies de papiers ou encore
Hydro-Québec, se retrouver en difficulté, ils se disent:
Peut-être mon tour peut arriver. Dans l'insécurité, les
gens se protègent; ils remettent la carapace. Ils essaient de tenir le
temps pendant que la tempête passe, sauf que, pendant ce temps-là,
l'économie ne peut pas reprendre.
La principale cause de l'absence de reprise de l'économie, c'est
le gouvernement lui-même, le gouvernement de Québec et le
gouvernement d'Ottawa, les deux qui, actuellement, imposent des taxes de
façon démesurée. Aussi, le navire amiral de l'inflation au
Québec qu'est HydroQuébec, qui aura augmenté, s'il y a
l'augmentation de 5,8 % qui est demandée pour cette année, les
tarifs, dans l'espace de deux ans, de 32,9 %, 32,9 % dans l'espace de deux ans,
est-ce qu'on trouve ça normal? Si l'augmentation demandée, au
lieu de 5,8 %, il y a seulement 2,9 %, bien, l'augmentation aura
été de 30 % sur deux ans.
Pendant ce temps-là, on va dire aux gens: Serrez-vous la
ceinture; serrez-vous la ceinture.
Tu n'en as pas beaucoup, serre-toi-la encore plus. Hydro-Québec
devrait être la première à donner l'exemple. Je pense qu'il
ne devrait même pas y avoir d'augmentation de l'inflation. Ça
devrait être 0 % d'augmentation à Hydro-Québec sur les 5,8
% qu'elle demande... Pourquoi? Parce que c'est à elle à donner
l'exemple. Actuellement, les gens n'en peuvent plus au point de vue fiscal, au
point de vue des taxes, parce que, que ce soit au niveau des taxes scolaires
qui ont plus que doublé, il y a deux ans, que ce soit les taxes
municipales qui augmentent partout cette année, que ce soit au niveau
provincial, que ce soit au plan fédéral, ces augmentations
assomment les citoyens.
Il n'y aura pas de reprise économique si on ne fait pas des
correctifs. Je rencontrais quelqu'un tantôt qui lisait, dans la revue
Fortune... pas tantôt, mais il y a quelques jours, qui me disait:
C'est fantastique. À Atlanta, il y a seulement 6 % d'impôt, 6 % de
taxes pour quelqu'un qui reste à Atlanta. Il y a un développement
fulgurant à Atlanta. Pourquoi? Les développements se font dans
des endroits où les gens ont le choix d'aller. Les gens ne sont pas
condamnés à rester à tel et tel endroit.
Je vois passer le député de Chauveau qui aurait voulu
couper les dépenses, mais les dépenses ne sont pas coupées
davantage. On a l'impression au gouvernement qu'actuellement, on a beau ouvrir
la champlure des taxes à tour de bras, le tuyau qui est dans le fond du
bain, quand on ne met pas le bouchon, il peut en prendre autant que la
champlure peut couler. Je ne connais pas un seul bain, M. le Président,
où même la champlure au bout, le tuyau dans le fond du bain n'est
pas capable de le prendre. (15 h 30)
Aujourd'hui, quand on veut commencer à mettre du ménage
dans la cabane, il faut commencer, d'abord, par mettre le bouchon dans le bain.
Et là, à ce moment-là, on va pouvoir remplir le bain,
même en réduisant la champlure, mais il faut commencer, d'abord,
par mettre le bouchon dans le fond du bain. Je ne connais pas quelqu'un qui va
régler le problème de perte d'eau s'il ne met pas, d'abord, le
bouchon. On va me dire: Oui, mais le gouvernement fait attention. Voyons donc!
Vous n'avez qu'à regarder la nomination du nouveau
président-directeur général à la
Société de l'assurance automobile du Québec. Conditions de
travail, conditions salariales. Regardez ça pour le fun. En plus de lui
fournir l'automobile, les dépenses d'automobile plus 800 $ par mois pour
le transport, frais de séjour. Regardez le contrat. C'est le contrat le
plus chromé que j'ai vu dans toute l'histoire du Québec. Le
contrat d'engagement d'un haut fonctionnaire le plus chromé. Pas en
1950, pas en 1975, pas en 1986 ou 1987. En 1992, M. le Président.
Pourquoi? Pas parce que ça marchait au ministère des Transports.
On n'a jamais eu tant de routes pleines de craques et pleines de
trous. Pendant ce temps-là, on nous parie de la qualité
totale et on n'a jamais eu des routes aussi épouvantables. Promenez-vous
ce soir. Vous ne verrez même pas les barres blanches, il n'y en a plus.
Il y a des trous, il y a des craques et il n'y a même plus de barres
blanches, de sorte que vous ne savez plus si vous êtes sur une route
à deux voies ou à trois voies, à moins de passer souvent.
C'est quelque chose, M. le Président.
Là, les gens nous font de l'inflation verbale: De la
qualité totale, mon cher ou ma chère! La qualité totale!
Au ministère des Transports, c'est un concept inconnu, impossible,
ridicule même. On est rendu au quatrième projet de loi sur
l'affichage le long des routes, depuis 1986. Quatrième projet de loi,
deux tournées du député de Rousseau. Dans une de ses
tournées, il a fait 22 villes pour savoir comment les panneaux devaient
être faits. Et n'oubliez pas, dans la quatrième version, dans le
quatrième projet de loi, ils ont oublié que le panneau devait
avoir une hauteur et pas seulement une largeur. Je vous dis qu'on est dans le
règne de la qualité totale.
On est dans le règne de l'insignifiance totale, de
l'incompétence totale, M. le Président. Et on nous dit qu'on va
faire une reprise avec ça, un gouvernement comme ça! M. le
Président, on s'en va chez le diable, puis sur un temps riche à
part de ça. On s'en va chez le diable comme on n'a jamais
été. Jamais, dans toute l'histoire du Québec, on n'a eu un
tel ensemble d'incompétences. Tantôt, je voyais la ministre
responsable de l'Enseignement supérieur. Ça fait partie du
problème. Je l'ai vue récemment, quand quelqu'un demandait une
antenne de cégep, répondre: Nous, nous n'avons pas, comme
ministère de l'Éducation, quelque mandat que ce soit en
matière de développement régional. Bien, je vais vous dire
une chose: Elle n'a pas lu le rapport de son Conseil supérieur qui
disait que la principale chose... Il y a deux ans, la publication du rapport du
Conseil de l'enseignement supérieur, le Conseil de l'éducation
disait quoi? Que la principale chose que devrait faire les ministères de
l'Éducation, de l'Enseignement supérieur et de la Science, c'est
de se connecter sur le développement régional, d'avoir des
perspectives de développement régional. Comme si
l'éducation, c'était quelque chose de désincarné,
comme si on envoyait seulement des missionnaires.
M. le Président, au Japon, ils ne se contentent pas de chanson.
Au Japon, il n'y a pas d'électricité, il n'y a pas de
pétrole, il n'y a pas de forêts, à toutes fins pratiques,
il n'y a pas de terres agricoles, il n'y a pas de métaux, il n'y a pas
de céréales. Les Japonais sont les premiers au monde. Il y a une
ressource importante au Japon: il y a des Japonais. Et le Japon investit dans
sa principale ressource naturelle: les quatre pouces que les Japonais ont
au-dessus des sourcils. Et vous avez une ministre de l'Ensei- gnement
supérieur qui dit: Moi, je n'ai aucune responsabilité en termes
de développement économique régional. Ça ne fait
pas partie de mes préoccupations. Je m'en fous. C'est écrit dans
une lettre, M. le Président, que j'ai eue. M. le Président, c'est
là, la source du problème.
C'est là, la source du problème, parce que dans le monde
dans lequel on vit actuellement, la formation technique, la formation
professionnelle, c'est ce qu'il y a de plus important. Quand on est rendu
à 40 % de décrochage dans nos écoles secondaires, entre 35
% et 40 % de décrochage, ça nous en prend combien pour constater
qu'il y a un problème? Est-ce qu'il faut qu'ils décrochent tous?
Cette année, on va accorder un budget, 407 000 000 $ pour le transport
scolaire. On bâtit... On manque d'argent pour les écoles, on a 407
000 000 $ pour les promener. Sur 10 ans, sans doute 5 000 000 000 $. Si on
bâtissait les écoles moins grosses. Si, au lieu de faire des
universités à 40 000 comme si on était 300 000 000 au
Québec, si, au lieu de faire des cégeps à 4000 ou faire
des polyvalentes à 3000 étudiants, on décidait d'avoir des
écoles plus petites... La plupart d'entre nous ont fait leur cours
classique dans une école où on faisait 8 ans et on était
500. Est-ce qu'on trouvait qu'on n'était pas assez à 500? On
faisait 8 ans, M. le Président.
Aujourd'hui, non. L'inflation verbale, l'inflation bureaucratique,
l'inflation administrative. Et on dit au citoyen: Paie, mon cave! Paie, mon
cave! Aligne, puis on va te fournir des plumes si tu n'as pas de crayon. C'est
comme dans toutes les réunions, on fournit les plumes, puis tout le
monde les laisse là; c'est un gaspillage épouvantable. On va te
fournir les plumes pour faire des chèques. Paie, mon cave! Mais, en
attendant, M. le Président, on se retrouve avec une absence totale de
politique.
Ce qu'on affronte actuellement, trompons-nous pas, on affronte une
culture différente. Les Japonais qui ont misé sur la formation
professionnelle, qui ont misé sur la compétence technique...
Rappelez-vous, il y a 40 ans, quand quelqu'un achetait un petit appareil, un
petit Kodak, une petite caméra japonaise, vous disiez: Ne prends pas
trop de photos, elle ne durera pas longtemps. Ce n'était pas reconnu
comme un produit de qualité. Aujourd'hui, les automobiles qui se vendent
le plus dans le monde, ce sont les automobiles japonaises, qui ont pris le
marché américain. L'automobile la plus vendue aux
États-Unis maintenant, c'est la Honda Accord qui est en train de
pénétrer le marché européen. On se rend compte que
les télévisions, les appareils électroniques, de plus en
plus, les ordinateurs, ils sont faits où? Au Japon. Pas parce qu'ils ont
les ressources naturelles, mais parce qu'ils ont misé sur leur
compétence technique. Nous, nous avons les ressources, puis on a les
chômeurs.
M. le Président, pourquoi? Parce qu'on s'est embarqué dans
un rapport Parent, qu'on ne l'a
pas critiqué. On a décidé de faire la formation des
maîtres à l'université. On a fermé les écoles
normales. Les écoles techniques, ce n'était pas bon. Aujourd'hui,
on a moins d'étudiants à la formation professionnelle qu'on en
avait en 1960. On a de plus en plus de chômeurs instruits. On a de plus
en plus de gens qui ont des diplômes qui ne servent à rien, puis
qui ne sont pas adaptés aux besoins du marché. Pendant ce
temps-là, la ministre responsable de l'Enseignement supérieur
dit: Moi, mon mandat n'est pas en matière de développement
régional, il faut le faire, M. le Président! Il faut le
faire!
Puis on brise des solidarités. Hier, je suis allé à
une assemblée où le ministre responsable du Développement
régional faisait son discours, un discours qui était assez long:
une heure et demie. J'ai remarqué que son programme, il en a
parlé dans les derniers cinq minutes. Le reste, c'était un peu un
discours charismatique; il essayait de donner la foi aux gens. Pourquoi? Parce
qu'il n'y a pas beaucoup de gens qui ont la foi. Là, j'ai
remarqué qu'il a commencé à dire: «Si on buvait du
jus de pomme plutôt que du jus d'orange. On produit des pommes puis on ne
produit pas d'oranges.» Je lui disais: Ah bien! Il reprend le discours
que je faisais il y a 15 ans, après avoir craché dessus pendant
15 ans. Ils ont craché sur le discours que j'ai fait sur
l'autosuf-fisance alimentaire, sur la capacité du Québec de se
nourrir, alors qu'on avait monté le taux d'autosuffisance alimentaire de
47 %, en 1976, à 75 % en 1985. On se nourrissait à 75 %, en 1985,
ils ont dit: L'autosuffisance alimentaire, c'est bon à rien. Ça
ne vaut rien. Il faut mettre ça de côté. Maintenant, on
change tous nos programmes. On y est revenu après six ans, là,
1992. C'a pris sept ans, même six ans, au début de l'année:
«On devrait peut-être bien boire du jus de pomme.» Grosse
découverte! C'est comme si, aujourd'hui, il y avait un ministre qui se
levait pour dire: «Peut-être bien qu'on devrait découvrir le
feu.» Il a été découvert, le feu, il y a quelques
milliers d'années, vous savez.
Puis, on a brisé nos solidarités. Rappelez-vous du
débat sur le libre-échange. Qu'est-ce qu'on nous disait: Tu n'es
pas bon. C'est bien de valeur, il faut que tu sois bon. On nous contait de la
broue. Il fallait être efficace. On écoutait les discours de nos
chambres de commerce, de notre gouvernement, puis on avait l'impression qu'on
était en train d'envahir les États-Unis. Nos hommes d'affaires
devenaient des Napoléon de la conquête économique des
États-Unis. J'étais un de ceux qui doutaient. Je doutais parce
que je me disais: On est en train de briser des mécanismes importants de
solidarité. On est en train de dire: Ce qui est important, ce n'est pas
la solidarité, c'est l'efficacité. Je ne dis pas qu'il ne faut
pas être efficace, mais on brisait un mécanisme important. On a vu
le résultat. Ce n'est pas nos gens d'affaires qui vendent à tour
de bras aux États-Unis, c'est nos consommateurs qui se garrochent le
plus vite possible pour aller acheter là parce que c'est meilleur
marché; il y a moins de taxes. C'est ça, le résultat. (15
h 40)
La, on voit tranquillement les discours. Même le président
du Mouvement Desjardins est rendu obligé de faire des discours dans les
églises pour faire appel à quoi? À ces vertus qu'on a
traitées avec tellement de mépris lors du débat sur le
libre-échange. Il nous disait: L'efficacité, c'est la grande
vertu théologale: la Foi, l'Espérance et l'Efficacité.
C'est ça qu'on nous disait. Mais quel est le plan de
l'efficacité? Aucun plan.
Quand je regarde... J'étais à New York récemment.
J'ai pris la route 15 au sud de Montréal, et je dois vous dire que,
comme route, pleine de craques et pleine de trous, on ne peut pas faire mieux.
Si on est pour être dans le libre-échange avec les
États-Unis, on pourrait bien avoir des routes qui ont du bon sens pour y
aller. Quand je suis revenu, je suis revenu par la route en arrière de
Sherbrooke; là, M. le Président, entre la frontière puis
Sherbrooke, c'était la planche à laver. Ce n'était pas des
trous puis des craques. Non, c'étaient des planches à laver. On
s'en allait... J'étais avec mon épouse, et on disait: II reste
juste à nous acheter un cheval; on a le «swing» maintenant.
On avait fait 30 milles de planche à laver.
Là, on nous dit: On est dans le libre-échange, dans la
qualité totale, il faut être efficace. On n'est même pas
capable de faire des routes qui ont du bon sens pour aller vendre nos produits
sur notre marché le plus près, et on fait de grands débats
avec Ghislain Dufour. Avez-vous remarqué Ghislain Dufour, Claude
Caston-guay? Avez-vous remarqué? Ils ne parlent plus du
libre-échange, ils nous parlent de la Constitution, ces esthètes
du fédéralisme. Ils nous parlent de la Constitution. Moi,
Ghislain Dufour, je ne lui connais aucune compétence dans la
Constitution, mais il dit qu'il est un représentant des hommes
d'affaires. Comment vont-ils faire, les hommes d'affaires? Qu'ils nous disent
donc comment ils vont vendre tous ces produits qu'ils devaient vendre au moment
du libre-échange, qu'ils devaient vendre aux États-Unis? Plus un
mot. Claude Beauchamp, plus un mot! Tous ces spécialistes de la vente
aux États-Unis, ils sont tous déguisés en courant d'air,
M. le Président. On ne les voit plus nulle part. Comme le
gouvernement!
M. le Président, je comprends que les gens soient inquiets. Les
gens sont inquiets parce qu'ils ne sont pas fous. Ils écoutent ça
et ils disent: Ce n'est pas cohérent, ça n'a pas de bon sens, on
a mis de côté... Vous savez, Desjardins, Alphonse Desjardins, il
n'aurait jamais fondé une caisse populaire si on avait été
dans le temps des discours qu'on vient de faire ou qu'on entend au
Québec depuis quatre ou cinq ans. Jamais il n'y en aurait eu! Il a
fondé une caisse populaire
avec des dix cents, en disant aux gens: si on se met ensemble - il
faisait ses réunions dans les cuisines et dans les soubassements
d'église parce que les salles étaient gratis - si on se met
ensemble et on met des dix cents, un jour, on prendra la place des institutions
financières qui nous écrasent et qui nous prêtent de
l'argent à trop cher. et comme desjardins, lui, travaillait au parlement
fédéral comme traducteur, celle qui tenait la caisse pendant la
semaine, c'était dorimène. comme je vais vous dire, dans le
temps, c'était la voiture à cheval, l'hiver, il venait en train
et il ne venait pas à toutes les semaines. ceux qui voient sa vie,
aujourd'hui, voient qu'il était souvent des semaines sans venir. la
caisse populaire, au fond, c'était dorimène, dans la cuisine, qui
ramassait les dix cents. imaginez-vous si on avait été dans les
discours infatués qu'on entend aujourd'hui, des discours grandiloquents
sur la qualité totale, sur l'efficacité à tour de bras.
des dix cents à alphonse et à dorimène, je vais vous dire
que le monde aurait dit: voyons donc, ça n'a pas de bon sens. pourtant,
aujourd'hui, basé sur une seule valeur, la solidarité des gens,
ces dix cents-là ont fait en sorte que plus de 50 % des épargnes
des québécois sont dans des institutions qui leur appartiennent
et que personne au monde ne peut acheter. «c'est-u» assez fort!
parce que la valeur fondamentale sur laquelle il a misé, c'est la
solidarité humaine.
M. le Président, je pense qu'au Québec on est mûr
pour un vrai débat de société, un vrai discours de
débat de société parce que, actuellement, les gens sont
découragés et ils ont raison de l'être. On entend les
nouvelles, c'est une catastrophe à tous les soirs. On peut dire: Ce
soir, bien, écoutons quelle usine ferme. Il en ferme à tous les
jours. C'est le marasme et, en même temps, les gens ne voient rien. On a
l'impression, au gouvernement du Québec, d'être dans un navire
sans capitaine, ou un capitaine qui dort, ou un capitaine qui est en vacances
sur une mer démontée sur le plan économique alors que
ça prend quelqu'un qui a la pogne solide pour tenir la barre de la roue,
pour maintenir le cap dans la tempête. On a l'impression d'avoir un
navire actuellement qui s'en va au gré des flots avec un capitaine
totalement absent, qui n'a aucune orientation, aucune direction, qui flaire le
vent et qui se laisse aller dedans.
M. le Président, les Québécois ont besoin d'autre
chose et c'est pourquoi le discours inaugural que nous avons entendu la semaine
dernière ne répond aucunement à leurs
préoccupations et à leurs besoins. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): merci, m. le
député de lévis. sur le même sujet, je cède
la parole à m. le député de salaberry-soulanges. je vous
rappelle que vous disposez d'une période de 20 minutes.
M. Serge Marcil
M. Marcil: Merci beaucoup, M. le Président. Vous savez, M.
le Président, plus on écoute le député de
Lévis, plus on entend toujours la répétition des six
dernières années. Je n'ai pas vu de changement, je n'ai pas vu
d'évolution dans son discours de 1985 à 1992. C'est toujours la
même chose. On parle des routes, on parle de l'éducation, on parle
du développement régional, on parle de l'investissement dans le
domaine de la formation de la main-d'oeuvre, ça a toujours
été ça. Et là, aujourd'hui, il a ajouté un
élément nouveau dans son discours, il parle des autobus
scolaires. Imaginez-vous donc! Je ne vois pas ce que ça vient faire dans
notre discours aujourd'hui. Et là, il commence à parler
également d'écoles, de commencer à construire plus
d'écoles, mais les faire plus petites. Ce qui est bizarre, dans le fond,
dans son intervention, c'est que, de 1976 à 1985... Ah! il est certain
que les gens de l'Opposition disent: Bien, c'est vous autres maintenant qui
êtes au pouvoir, qu'est-ce que vous faites? Mais il y a une histoire
à tout ça, M. le Président, au Québec. Il y a une
histoire qui est rattachée au système d'éducation, au
Québec. Lorsque M. le député de Lévis parle du 40 %
de décrochage au Québec, il me semble que de 1976 à 1985,
il y a des gens, il y a des grands manitous dans ce gouvernement - qui
étaient au pouvoir à l'époque et qui ont pensé
à quelque chose. Ils ont pensé à certaines réformes
dans le système d'éducation, dont les résultats - de ces
réformes - on les a aujourd'hui. C'est 40 % de décrochage. Est-ce
qu'on peut s'imaginer, surtout quand on est prof à l'université,
qu'on puisse dire, tout bêtement, comme ça, en public, à
l'Assemblée nationale, que parce qu'il y a eu un changement de
gouvernement on a augmenté le décrochage scolaire au
Québec?
Mais c'est tout à fait abominable d'entendre ça, plus
particulièrement d'un professeur d'université qui occupe un poste
à l'Assemblée nationale. J'aimerais bien ça, moi, qu'il se
questionne sur ce que M. Laurin a fait de notre système scolaire de 1976
à 1985. Je ne sais pas s'ils sont déjà allés dans
les écoles. Il y a une raison au décrochage présentement,
et les raisons découlent de décisions que l'ancien ministre de
l'Education du gouvernement péquiste a prises dans les années
1976 à 1985. On a décidé de modifier les régimes
pédagogiques dans les écoles secondaires. D'abord, on a mis fin
à plusieurs programmes. On a instauré le principe des
programmes-cadres où n'importe qui, à partir de grandes lignes,
de grands objectifs, n'importe quelle école, pour ne pas dire n'importe
quel enseignant dans une école, pouvait bâtir son propre
programme. Puis, à l'intérieur de la même école,
deux ou trois professeurs de français du même niveau,
français, programme 210, enseignaient souvent trois programmes
différents puis avaient eux-mêmes le contrôle de leur
propre
évaluation. Donc, on évaluait les élèves de
façon différente, puis on arrivait à la fin de
l'année, mais les gens ne correspondaient plus du tout aux grands
objectifs qu'on s'était fixés au début.
Cet ancien gouvernement a formé un système
d'éducation au secondaire, plus particulièrement l'ancien
ministre Laurin. On a fait en sorte qu'à l'école secondaire au
Québec, dans les écoles francophones, on puisse faire la
différence entre les étudiants de l'école secondaire
Vaudreuil par rapport aux étudiants de l'école polyvalente
Baie-Saint-François, à Val-leyfield, et entre n'importe quelle
polyvalente au Québec. Chacune de ces polyvalentes produisait des
étudiants évalués de façon différente. C'a
posé un problème lorsque ces étudiants sont entrés
au collège. On recevait des étudiants de fin d'études, de
secondaire V, et puis on s'apercevait qu'ils n'étaient pas rendus du
tout au même endroit. Pourquoi? Ils ont décidé d'abolir les
voies au niveau secondaire. On a décidé de faire en sorte que les
étudiants qui avaient plus de potentiel et qui pouvaient apprendre plus
rapidement que d'autres, on les empêche d'évoluer. On a
nivelé par la base. On a maintenu des programmes faibles au niveau du
français, des mathématiques et de l'anglais pour faire en sorte
que les plus faibles dans l'école puissent réussir. Mais on
savait que les moyens et les plus forts, eux autres, réussiraient bien
trop rapidement.
Je serais curieux de connaître, dans les 40 % de
décrocheurs au niveau secondaire, quelle est la catégorie
d'étudiants qui décroche le plus. Je serais curieux de savoir si
ce ne sont pas des étudiants qui ont un potentiel plus fort qu'on
retrouverait en grande majorité dans les décrocheurs, plus ceux
qui étaient très faibles, qui avaient des programmes
adaptés. On appelait cette formation le professionnel court.
Le député de Gaspé, un ancien directeur
d'école, sait de quoi je parle quand je parle de formation
professionnelle courte. On a aboli ça également dans nos
écoles. Vous aussi, le député de Laviolette. J'ai
été 17 ans dans une école secondaire. J'ai
été directeur d'une polyvalente de 1800 étudiants, puis
c'est le drame qu'on a vécu pendant toutes ces années-là.
On a cherché, à tous les ans, à savoir comment on
était pour se restructurer. On a enlevé le professionnel court.
Tantôt, on disait: Ah, il y a beaucoup de décrocheurs. Mais ces
gens-là, ces étudiants-là, on les accroche à quoi?
Quel intérêt on a créé dans les écoles? Quel
intérêt on crée présentement dans les écoles
secondaires pour les maintenir à l'école? Il n'y en a pas. Il n'y
a pas de programmes qui sont faits pour ces gens-là. On a
dévalué la formation professionnelle courte dans les
écoles polyvalentes, à cause d'eux autres. On a aboli les voies
également dans les programmes de français, de
mathématiques et d'anglais, à cause d'eux autres. Puis,
là, nos jeunes qui sont trop rapides, eux autres, à un moment
donné, ils se tannent d'être à l'école parce qu'ils
n'ont plus d'intérêt à y être. Mais pourtant, avant,
on n'avait pas de décrochage. (15 h 50)
Aujourd'hui, ça s'amplifie, puis 40 % des jeunes du secondaire ne
terminent pas leur secondaire V. C'est dramatique! Mais ça, ce n'est pas
apparu, puis ça ne s'est pas créé... Ce
problème-là n'est pas apparu en une journée. Un bon matin,
on s'est réveillés puis on a commencé à compter les
étudiants dans les écoles, puis on s'est dit: II en manque.
Où sont-ils? Ça, c'est une culture qu'on a
développée. Puis on a les résultats aujourd'hui. Puis au
niveau de la formation professionnelle, c'a été la même
chose. On n'a jamais été capable de faire l'arrimage entre la
formation professionnelle au niveau secondaire avec les besoins du
marché du travail. On ne l'a jamais fait.
Là, les gens... Bien oui, 40 % de décrochage. Mais c'est
ça qu'on a dit, tantôt, dans le discours inaugural, quelles
orientations, qu'est-ce qu'on va faire, nous autres, comme gouvernement, pour
essayer de ramener les jeunes à l'école, créer des
intérêts, leur faire connaître l'importance de terminer un
secondaire V, l'importance d'avoir une base pour pouvoir être capables de
s'adapter facilement au marché du travail. Donc, c'est pour ça
qu'on a pris le virage au niveau de la formation professionnelle. Au niveau de
la formation de la main-d'oeuvre, c'est la même chose. On a sorti, dans
les budgets précédents, des dizaines et des dizaines de millions
en recherche et développement pour inciter les entreprises, parce que
c'est vrai que...
Ça, je suis d'accord avec le député de Lévis
lorsqu'il dit qu'au Japon, on investit dans la matière grise. Ce n'est
pas nécessairement le gouvernement qui investit dans la matière
grise, c'est les entrepreneurs, c'est les investisseurs. Parce qu'eux, ils
savent une chose, c'est que pour pouvoir produire un produit de qualité,
il faut absolument qu'il y ait une main-d'oeuvre compétente,
qualifiée. Donc, eux, ça fait longtemps qu'ils le font. Chez
nous, on n'avait pas développé cette culture-là. On
commence à le faire. En recherche et développement, des dizaines
et des dizaines de millions. Plus que ça, on a même
annoncé, dans notre budget de l'année passée, pour les
individus qui veulent sortir de l'usine pour aller en formation personnelle, un
congé sabbatique presque financé à 90 %.
On veut faire encore un pas supplémentaire. On parle de
créer une Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre rattachée aux régions.
C'est là qu'on se rattache au développement régional du
Québec. On a lancé notre politique de développement
régional: structures régionales. On parle de développer
une société de formation de la main-d'oeuvre au Québec:
structures régionales. On fait la même chose au niveau de la
santé et des services de santé:
structures régionales. On s'est aperçu que c'est vers les
régions que l'action se produit. Donc, il faut restructurer nos
régions pour que les gens de la place puissent se prendre en main et se
développer. C'est dans ce sens-là. C'est ça, notre
discours, présentement. On n'invente rien, sauf qu'après avoir
analysé pendant des années le problème
québécois, parce que ce n'était pas un problème
facile à cerner, aujourd'hui, on s'aperçoit que parler de
formation de main-d'oeuvre, parler d'adaption de main-d'oeuvre, seulement en
parler, on ne changera pas le problème, on va le perpétuer. On
agit, on pose des actions concrètes.
Lorsque le député de Lévis parlait tantôt de
ses routes, lorsqu'il faisait son «swingage», comme il dit, de
Québec-Montréal ou de Montréal-Québec, ce qu'il a
oublié de dire, c'est que de 1976... C'est vrai que c'est plate de
revenir sur le passé, je comprends, d'essayer de mettre le blâme
sur l'ancien gouvernement, mais c'est ça, M. le Président. On ne
peut pas s'en sortir. Pas un sou, pas un demi-kilomètre d'autoroute qui
a été construit au Québec de 1976 à 1985. Mais ce
n'est pas des farces! On n'a pas investi dans ce domaine-là. On a
essayé de maintenir ce qu'on avait. On a investi dans d'autres choses.
On a pris l'argent pour l'investir dans d'autres choses, dans les
communications.
On se ramasse dans les ministères, aujourd'hui, avec des services
de communications de 50, 60, 70 personnes. Ça n'existait pas, ça,
en 1976, mais eux, dans leur objectif d'atteindre l'indépendance du
Québec, il fallait absolument faire en sorte qu'on puisse
contrôler chacun des ministères, développer un plan, une
stratégie et un message. Bien, là, ils ont paqueté les
ministères, ils ont développé des services de
communications. C'est là qu'ils ont mis l'argent. Là, on parle de
dizaines et de dizaines de millions de dollars. On ne parle pas de milliers de
dollars; on parle de dizaines et de dizaines de millions de dollars pendant
neuf ans. Quand on se demande où va l'argent, ils l'ont mis là,
dans leurs propres intérêts partisans. Ils ont voulu essayer de
noyer l'information au Québec pour essayer de gagner les gens, leur
faire accroire qu'un Québec indépendant, c'est le paradis sur
terre. C'est ça qu'ils ont fait. C'est des dizaines et des dizaines de
millions qu'on a pris dans la poche des gens pour faire ça.
M. le Président, Hydro-Québec, ça a
été la même chose. Ils ont dévalisé la caisse
d'Hydro-Québec par une loi que leur chef présentement, à
l'époque où il était ministre des Finances, au
Québec... Ils ont passé une loi pour aller chercher la caisse
d'Hydro-Québec, de l'argent qu'ils avaient pour du développement
hydroélectrique. Bien non. Ça n'a pas paru. Ça n'a pas
paru parce qu'ils manquaient d'argent eux aussi. Ils se sont dit: La mine d'or,
c'est Hydro-Québec. M. le Président, du moins pour ceux qui nous
écoutent et qui écoutent ce discours-là qui dure des
années, qui est toujours répétitif, ce n'est pas
encourageant.
Lorsqu'il citait tantôt le Mouvement Desjardins, oui, c'est un
mouvement communautaire, mais c'est cette pensée-là qu'il faut
développer chez nous, une pensée communautaire. Il va falloir
qu'on cesse de se battre sur la place publique pour des idées souvent
futiles. Il va falloir que les gens commencent à travailler ensemble. Si
on a un message positif à transmettre à notre population, bien,
le message positif, il va falloir qu'il vienne de l'Assemblée nationale,
des gens qui sont élus par la population, de l'élite
québécoise, dans le fond, M. le Président, de nos leaders,
des gens qui viennent représenter leur population. Mais, au lieu de
passer leur temps à jouer un rôle qui est ingrat, probablement
pour eux autres, ils devraient essayer de commencer à développer
un message positif au Québec.
C'est vrai qu'on peut devenir aussi bon que les Japonais si on se donne
la peine de le faire. C'est vrai qu'on peut devenir aussi bon que n'importe
quel peuple sur terre, à une seule condition, à la condition
qu'on se décide de travailler ensemble, à la condition qu'on se
libéralise au niveau intellectuel également. Qu'on n'essaie pas
de toujours, comment je pourrais dire, s'encarcaner, d'empêcher les gens
de s'exprimer au Québec. C'est un petit peu ça.
On parle de l'enseignement de l'anglais, M. le Président. Durant
leur règne, on a diminué je ne sais pas combien de minutes
d'enseignement de l'anglais. On passe une loi 101 et on dit: Vous n'avez plus
le droit de parler anglais au Québec. Oui, mais il dit: Comment on va
faire, nous autres, les francophones, pour que nos enfants apprennent
l'anglais? Dans le fond, la loi 101 encourageait les anglophones parce qu'un
anglophone, une famille anglaise au Québec, lui, pouvait envoyer son
enfant à l'école française. Donc, on lui donnait la chance
de devenir bilingue. Moi, parce que mes parents ne sont pas allés dans
une école anglophone, moi, je n'ai pas le droit d'envoyer mes enfants
dans une école anglophone.
Mais c'est tout à fait stupide, M. le Président, une
politique comme ça. On a fait en sorte que nos
Québécois... Là, on s'est dit: Ce n'est pas grave, on va
améliorer l'enseignement de l'anglais au secondaire. Allez donc voir
dans les écoles secondaires comment on enseigne l'anglais aujourd'hui.
Même dans le dernier régime qu'ils ont aménagé, on
leur enlevait une heure par semaine en plus de ça d'enseignement de
l'anglais. Mais c'est ça. C'est ces gens-là qui veulent gouverner
le pays! On vous a vus pendant neuf ans, je pense que c'a été
neuf ans de trop.
Dans le fond, c'a été bon pour l'ensemble des
Québécois que vous ayez été au pouvoir au moins
pendant neuf ans. On a vu exactement ce que vous étiez, ce que vous
pouvez faire. Vous avez pris une dette de 5 000 000 000 $ en 1976,
vous l'avez montée à une trentaine de milliards en 1985.
Dans l'espace de neuf ans, ce n'est pas grave ça. «The sky is the
limit!». II n'y a rien là. On augmente les impôts, les
taxes, et ils nous accusent d'augmenter les taxes et les impôts. Mais,
s'il y a quelqu'un, M. le Président, s'il y a un gouvernement dans ce
Québec qui a été à l'origine de ce pouvoir - de
cette noyade, si on peut dire - de taxation, c'a été eux
autres.
Aujourd'hui, on est obligé de réparer ces
erreurs-là, tout en faisant en sorte de contrer le déficit parce
qu'augmenter un déficit, si peu soit-il, c'est de prévoir des
taxes pour ceux qui vont nous suivre. C'est ça qu'ils ont fait. Nous, il
faut en même temps maintenir une qualité de services, faire en
sorte qu'on puisse maintenir nos routes en bon état, faire en sorte de
permettre à l'ensemble des Québécois et des
Québécoises d'avoir accès à une foule de services,
maintenir ça, il faut absolument, en même temps, contrer notre
déficit. Ça, c'est un exercice qui n'est pas facile à
réussir. Mais on réussit quand même, malgré tous les
problèmes qu'on peut vivre, malgré la récession. Comme
gouvernement, je crois qu'on a réussi à concentrer nos efforts
sur le maintien d'une dette quand même assez basse. Mais, chaque fois
qu'on va augmenter le déficit de 100 000 000 $, de 200 000 000 $, de 1
000 000 000 $, de 2 000 000 000 $, il y a des gens qui vont nous suivre et qui
vont le payer. Ce n'est pas nous autres qui allons payer ça parce qu'on
ne sera plus ici. Ce sont nos jeunes de tantôt qui vont travailler et
c'est eux autres qui vont être taxés.
Ce gouvernement-là du temps a oublié de penser à
ça. Il pensait... Mais c'est vrai que, dans leur philosophie, dans leur
plan machiavélique, ils pensaient même imprimer de l'argent parce
qu'ils voulaient faire la piastre québécoise. C'est facile. C'est
le style à Caouette. On va imprimer de l'argent et on va payer nos
dettes, sans connaître la valeur que le dollar canadien ou
québécois aurait pu avoir à ce moment-là.
Tout ça, M. le Président, pour dire que les orientations,
elles sont connues de la part de l'ensemble des Québécois. Autant
au niveau du développement régional, il y a une politique qui est
avancée, autant au niveau du développement de la main-d'oeuvre au
Québec, il y a un énoncé de politique qui a
été mis sur table, il y a eu une consultation publique, le projet
de loi va suivre son cours. Autant au niveau du développement ou de la
restructuration des services de la santé et des services sociaux au
Québec, on a créé, M. le Président, par cette
réforme, une société régionale également.
(16 heures)
Le comité Poulin qui a été formé
également d'un ensemble de députés: 17
députés du parti ministériel. On a fait un exercice en
concertation avec nos collègues ministres. Je crois qu'avec les
années - quand on parie d'années, on prend ça à
très court terme - on va réussir à prendre le virage qui
va faire en sorte que le Québec va reprendre la place qu'il était
en train de perdre, malheureusement, parce qu'il a été mal
guidé pendant un certain nombre d'années. Et ceux qui l'ont mal
guidé, ce ne sont pas les gens qui sont de ce côté-ci de
cette salle, M. le Président.
Parlons de la Constitution maintenant. À l'automne,
c'est-à-dire à la session intensive d'automne, j'étais
intervenu, justement, sur la cohérence de ce parti-là. À
tout bout de champ, en Chambre, ils nous disent: Vous logez où sur le
point de vue constitutionnel? C'est drôle, parce que le Parti
libéral du Québec n'a jamais changé sa position
constitutionnelle. On s'est toujours déclarés, et on l'est
encore, un parti libéral du Québec dont l'option, c'est le
fédéralisme renouvelé. C'est ça, notre option, et
ça n'a pas changé.
Eux autres, ça a été la
souveraineté-association avec, je ne sais pas comment il s'appelle,
l'ancien qui... Je ne parie pas de l'ancien premier ministre, mais celui qui a
contribué à la mise sur pied de ce mouvement-là... M.
Gilles Grégoire. Après ce mouvement,
souveraineté-association, ça a été la
souveraineté association, sans trait d'union, avec trait d'union.
Là, ils ont pris le pouvoir. Les Conservateurs sont arrivés sur
la place publique, puis là ça a été «le beau
risque.» Tout d'un coup, ils sont devenus fédéralistes.
Mais là, ils se sont aperçus que ça n'allait pas trop
bien. Ils ont fait toutes les démarches nécessaires pour faire en
sorte d'évincer le premier ministre du temps, M. Lévesque. C'est
eux autres qui l'ont mis dehors. N'oubliez pas ça.
Là, on a amené l'affirmation nationale, comme chef du
parti. Tout le monde de l'autre côté l'applaudissait.
L'affirmation nationale, ça a été tellement fort qu'ils
l'ont congédié lui aussi. Ça a été
ça. Et là, aujourd'hui, on arrive avec un autre. C'est la
souveraineté, pas la souveraineté, l'indépendance du
Québec. Mais là, dans l'indépendance du Québec,
c'est avec le dollar québécois. Pas le dollar canadien. Bien, je
ne le sais plus. Ça va probablement être l'écu, on ne le
sait pas.
Une voix: Union monétaire.
M. Marcil: Union monétaire. Ensuite, ça a
été la citoyenneté québécoise.
Une voix:...
M. Marcil: Non, non, on va garder notre passeport canadien. On
veut être indépendant. Comme disait mon collègue qui est
intervenu ce matin, on veut être indépendant, mais avoir tous les
avantages de la Fédération et avoir tous les avantages
d'être indépendant. Là, on ne sait plus sur quel bord... Tu
sais, c'est comme celui et celle qui décident de se marier. Ils veulent
être ensemble uniquement pour faire des enfants, mais pour les
élever, il y en a un qui décide: Bon,
moi, je ne veux pas être là. Je suis le père ou je
suis la mère, mais je ne veux pas participer à l'éducation
de mes enfants. C'est un petit peu ça. C'est tout à fait
loufoque, dans le fond, leur démarche.
Ça fait que dans le domaine constitutionnel, M. le
Président, on met une commission, une super-commission sur pied. On
accouche des recommandations, on dépose une loi avec un
échéancier, la loi 150, octobre 1992. Ils votent contre. Ils s'en
vont sur la place publique avec des pétitions pour nous obliger à
faire le référendum. Comprenez-vous ça, là? Ils
sont contre la loi 150 et ils s'en vont avec des petits papiers faire signer
tout le monde en disant: Aïe! il faut dire au gouvernement qu'il respecte
la loi 150, mais ils ont voté contre, M. le Président.
Donc, en conclusion, M. le Président, c'est décourageant
de voir comme ça des élus qui peuvent faire des discours, si
enflammés soient-ils, faire en sorte qu'on rend confus à peu
près tout ce qui est possible au Québec. On n'est pas capable
d'essayer de développer ensemble un discours avec une unité de
pensée, avec une unité d'action. Moi, je crois que l'avenir du
Québec et l'avenir du Canada - et on le voit, ce qui se passe entre les
provinces également - ce sera une réussite totale la
journée où les Québécois et les
Québécoises et toutes les communautés qui composent cette
société québécoise décideront de
développer ensemble une unité de pensée et une
unité d'action. Merci, M. le Président.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Salaberry-Soulanges. Sur le même sujet, je
cède la parole à M. le député de
Jacques-Cartier.
M. Neil Cameron
M. Cameron: Merci, M. le Président. To begin with, I must
say as usual, I listen always with astonishment and admiration at the sheer
enthusiasm with which the Member for Lévis makes his case. On the other
hand, I think my colleague from Salaberry-Soulanges had more common sense in
his argument. My own position and that of my political grouping, of course, is
one that allows rather more latitude than either of the speakers for the
Official Opposition or for the Government can take in looking closely at just
what are the real problems of Quebec's society and Government right now.
So, rather than trying to make the largest number of partisan points I
can, I will try to deal with some of those issues. I will do so with a hope,
perhaps forlorn, but I hope not entirely so, that in at least a small way I can
contribute to changing the climate of opinion. That is the real reason that we
ran in the last election. We understood clearly that we would never have power;
we understood clearly that we would not constitute a political formation
attempting to do the same thing as either the Liberals or the Parti
québécois. But we also believed, not only on issues touching on
Anglophones, or on Bill 101, or matters of that kind, but on a great number of
other matters, that the situation had now arisen where almost anyone who stood
for the established political parties was boxed into a position of having to
defend certain arguments, almost as if they were canonical doctrines of his
Church, rather than in terms of their correspondence to the social and economic
realities of Québec today.
I would say, as an example of this, that we can all see now that the
present Québec Government is clearly one that has certain very capable
people in it. After all, the senior Members of the Cabinet have between them
probably more years of governmental experience than you can generally find in
most governments at either the provincial or federal level. We all know that
they are, as are their leading critics on the other side of the House, men and
women of character and capacity and intelligence; their ability to direct their
Ministry is not really as much up to question as the Official Opposition must
pretend.
But we also know that the province today has very serious problems, some
of them touching on the constitutional issue, but some of them long-term
problems, which have been evolving over the whole last half century and are
only tangentially connected with relations between Anglophones and Francophones
and with the relationship between Québec and the rest of Canada. For
example, it is surely clear by now that the prosperity and success of
Québec, and of Canada as a whole to some extent, was tied closely to a
particular stage in the development of a capitalist and industrial economy from
the late 19th Century to about the 1960s.
It is no longer possible for Canadians as a whole, or for Quebeckers, to
assume that we will be guaranteed that kind of prosperity in the future, that
we will occupy the same role in terms of power, influence, wealth, comfort,
social justice, what have you, in the future that we did in the past unless we
make intelligent decisions, that we are facing types of competition and types
of economic change that were never a really serious concern for Québec
or Canada in the past and that, furthermore, we all suspect that we are not
responding to these pressure very well.
Let us consider seriously some of the reasons why the Government of
Québec is not responding too well or too successfully but, to be frank,
I am very skeptical as to whether a Parti québécois government
would constitute an improvement on many of these questions either.
One of them is the increasing importance
of what an American social thinker named Daniel Bell called
«the cultural contradictions of capitalism», that is to say: we are
living in a society where capitalism has given us more wealth and comfort than
ever before in history but, also, is annihilating our traditional social
institutions at almost the same rate. So, things tike families, communities,
churches, neighborhoods, ethnic groupings, all kind of things that provided
strength and assurance for individual citizens in their lives are boiled away
by the sheer homogenizing force of things like worldwide capitalist products
and services, the Cable News Network and all the rest of it.
(16 h 10)
That is difficult for all Western societies today. The
Member for Lévis held up the Japanese as an interesting model for
emulation with their celebrated social solidarity. The Japanese can be
interesting beings to us, but let us face it, neither Québécois
nor North Americans in general are very much like the Japanese. Frankly, I
suspect that we could head into far worse economic circumstances than we are in
now, more disastrous problems with our Government, more disastrous problems
with our industry, and it would not lead to the ordinary man or woman of modern
Québec, Anglophone or Francophone, Québécois «de
souche» or immigrants suddenly transforming themselves into people
something like the executives of the Honda Motor Works. I find this no more
likely, offhand, than their converting themselves into a collection of
Marxist-Leninist revolutionaries, or Latin American priests, or whatever you
wish to choose as your analogy. We are stuck with the kind of people we are.
And if we want to function efficiently in the economy of the 21st Century, we
have to deal with the potentialities of our actual Government and our actual
people.
What can we actually do anything about and what can the
Government do something about? Well, the first thing that I think the
Government can have a genuine influence on is in education. It cannot
necessarily do the things that are as grand as we often hear said in this
Assembly or in other public meetings, but it is true that it is possible,
within the contraints even of a restricted budget or high deficits, for good
decisions to be made on how the educational system will work. I hope that the
Commission on Education, all of its members, including myself and members of
both parties, are going to find instrumentalities to do this, but I would point
out that the issues that are often made most of, in terms of public relations
or fashionable interest, are not necessarily the most vital ones for the
future.
For instance, the central focus of attention right now is
on the dropout rate in Québec. The dropout rate is a serious problem,
but it can be exaggerated. In the first place, it is hard to compare statistics
from one place to another because the rules are so different on readmitting
students to school, college, cegep or something of the sort. What constitutes a
dropout is so hard to define in terms of whether people come back or are taking
only a course or two, and because of the heterogeneous mixture of reasons they
leave. I know since I teach young people every year. I check them out all the
time as to which ones are dropping out and what reasons they have. They are all
over the house, they are not a consistent pattern.
I do not know that the greatest successes in improving the
situation for our young people will come through a greater expenditure and the
creation of new bureaucrats to study the problems of dropping out. I think it
is more important to look at things like the quality of instruction in the
French and English languages right at the outset in the school system, and to
move resources, if there is only a set amount of resources available,
especially to the lower level of the educational sector. In my experience as
someone who has generally taught in the secondary and postsecondary sector, if
children are given a good foundation in their language and are given confidence
in it, they can survive a really disastrous educational system later on,
whereas if they are poorly founded at the outset, even if you put them in a
good college or university, all they do is panic and disappear. So, I hope that
will be kept in mind.
On the issue of economy, the greatest concern we obviously
have is the level of debt. It seems to me that on this particular issue, both
the Government and the Opposition spokesmen are required to be a bit
disingenuous and highly hypocritical. Surely, it is the case that the overall
level of public debt today and the deficits with which the Ministers have to
deal with each year now are to some extent because of large errors made in the
expansion of the public sector in the 1970s and in 1980s that were made by both
the Liberals and the Parti québécois. I should also say, to be
fair, those mistakes were to no small extent made by society at large as well.
That is, we all underestimated how much we were going to get ourselves into
trouble when we thought, only a decade or two ago, that we could simply keep
spending more money to provide more generous services in health, more generous
services in education, more generous services in welfare without really
recognizing the full terrifying economic implications.
Now, I do not believe that any democratically elected
government really wants to face the implications, because one of the
implications - let us be blunt; I am perhaps the only person in the House who
can mention this - is that you have to break union contracts, you have to fight
the unions, you have to take the unions on, and you have to get into a head-on
battle with all of them.
Nobody talks about this in politics anymore, but if we do not... And I
grant the fact that the unions can quite honestly say: Well, there were
undertakings made, word was given, contracts were signed, our expectations are
reasonable, they are fair and, as a matter of fact, we are not even doing very
well, we are getting no salary increases, we are getting no improvement in
conditions, and so on down the line. But, as we all know, unfortunately, no
matter how good their arguments are, this society - and it is not just
Québec, the same situation is true for Ontario and the other provinces -
does not know how to pay the amount of money necessary to maintain those
contracts with all the built-in escalators they have for things like seniority
and so on down the line. At some point, there will be a crack. So, it is a good
idea at least for it to be mentioned in this House now.
Then, on other issues to do with the economy, perhaps I should say
something about James Bay. Despite the fact that I was one of those who raised
a number of protests, complaints and questions about James Bay II from when I
first arrived here, particularly on the financing, the timetable, the
advisability and so on, I wll admit I have an occasional bout of sympathy for
the Government and even for the Minister of Resources in what is a ministry
which now, I think, has to deal with an agonizing situation.
The problem is not, even though it gets the most publicity in the media,
the relationship with the Crée. The problem is partly that all genuinely
ambitious projects of this kind to develop power in modern North America are
far scarier than they used to be by the combination of the fact that the
technological advance gets more and more rapid, and so does the ability of
protest groups of all kinds, veto groups, if you like, to oppose almost any
kind of power throughout North America. The result is that if you set up
anything with a long timetable plan, unless you have extremely low interest
rates, in other words, unless the cost of money gets down below 6%, then, you
are going to face some kind of danger even if you can make a very good case for
your power project.
I hope the Government will recognize the fact that James Bay may be a
hopeless case, no matter how many impressive arguments Mr. Drouin and others
can make for it. I think its day is gone, I think it was gone several years
ago. And I think that is true despite the fact that in the eyes of God,
hydroelectric is in many ways a very good system of producing power.
On the constitutional issue, I do not know whether I should really add
anything to what has been said by so many people already. I think the most
important thing that I could say about it here is, of course, that in many
respects, our position is not very far different from Members of the
Government. We would like to see federa- lism maintained, we would like to see
this country maintained. If that involves a federalism as it is so often put
"profondément renouvelé", then, so be it.
I have a suspicion that a federalism "profondément
renouvelé" may turn out to be a nightmare to actually administer. I
wonder, for example, how many people, in the current arguments about the
Constitution, when they start talking about the Senate, have really
contemplated what a horrifying idea it is to have the Senate doing anything,
except what it does now. That is, a genuinely ineffective Senate, I think, is a
splendid idea. I wish people would remember Sir John A. Macdonald's own view of
the Senate. He once said: «You have to have charities for everyone,
including the rich.»
So, if we move instead into areas like a massive reconstruction of our
entire system of government, in many cases, note, probably providing no special
advantages for Québec or for French culture or for the French language
or for many of the things that were supposed to have started this whole tangle
in the first place, it is quite possible we will simply get a more misgoverned
Canada. So, I think I would prefer just a little "renouvelé", not
"profondément renouvelé".
However, if we get it, I would certainly support it and I believe all
the Members of our political formation would, because I am less interested in
the exact technical details by which this process is done than in the
preservation of an economically, socially strong, united and free Canada of
which Québec is a major and vital component. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): alors, je suis prêt
à reconnaître le prochain intervenant. en vertu des règles
de l'alternance, mme la ministre responsable des affaires culturelles, allez-y.
(16 h 20)
Mme Uza Frulla-Hébert
Mme Frulla-Hébert: Merci, M. le Président. Je suis
fière aujourd'hui de participer à ce débat sur le discours
inaugural, précisément aussi après ce que j'ai entendu,
notamment du député de Lévis, le député de
Lévis, qui parlait d'inflation verbale, en parlant de ceux qui essaient
d'apporter des éléments neufs et des éléments de
solution qui sont aussi créateurs et qui sont là pour affronter
les grands débats des années quatre-vingt-dix. Ce que j'ai
entendu du député de Lévis, c'est plutôt une purge
verbale, c'est-à-dire critiquer, critiquer, critiquer et ne pas apporter
de solution neuve. Dans certains domaines, on a parlé des routes, oui,
on a parlé d'éducation, on a critiqué le système
d'éducation, mais je n'ai pas entendu certaines solutions qui pourraient
faire en sorte que nos jeunes puissent
être intéressés à demeurer à
l'école.
Une de ces solutions-là, M. le Président, c'est
évidemment la culture. Vous me voyez venir, M. le Président. On
peut bien parler de culture, on peut bien avoir un très beau discours,
mais il faut aussi agir. Le gouvernement d'en face, à ce que je sache, a
parlé de culture, mais, quand on reprend les dossiers, on
s'aperçoit qu'il n'y a pas grand-chose qui a été fait, M.
le Président. Alors, nous, nous avons décidé de prendre
certaines initiatives, c'est-à-dire de - et ce n'est pas facile, M. le
Président - développer une politique culturelle, pour la
première fois au Québec, une politique qui se doit d'être
définie et applicable. On est d'ailleurs, actuellement, à la
rédaction de cette politique, une rédaction qui va s'inspirer des
264 mémoires qui ont été déposés en
commission parlementaire l'automne dernier. C'est d'ailleurs un nombre record
d'intervenants qui se sont fait entendre.
Ce qui est encourageant, M. le Président, c'est que tous
étaient au rendez-vous et tous se sont prononcés sur la question,
autant le milieu des arts et de la culture, autant le milieu des affaires, le
milieu des municipalités et le milieu de l'éducation, le milieu
syndical, le milieu ethnoculturel, pour ne nommer que ceux-là, M. le
Président. Il s'agissait, et c'est encourageant de le voir, d'une
véritable mobilisation. C'est pourquoi, M. le Président, j'invite
aujourd'hui tous mes collègues, autant ceux de ce côté-ci
de la Chambre que ceux d'en face, à s'associer à la
réalisation d'un grand projet de société.
On parle de projet de société, M. le Président, on
parle de manque d'imagination; on accuse et on s'accuse de part et d'autre,
alors moi, je fais une invitation toute grande ouverte, M. le Président,
à tous, à un projet de société puisque cette
politique culturelle nous concerne tous. Elle concerne les créateurs,
elle concerne les industries culturelles, elle concerne la population et elle
concerne ceux qui forment le gouvernement, c'est-à-dire un projet qui,
telle la commission parlementaire, est un projet qui fait appel à une
mobilisation générale.
Maintenant, M. le Président, avant de parler de culture, avant
même de parler d'industrie culturelle, avant même de parler de
politique culturelle, il faut, d'abord et avant tout, parler de la
matière première, M. le Président, et, nous, notre
matière première, ce n'est pas les forêts, ce n'est pas les
mines, ce n'est pas les routes, c'est la création, M. le
Président. Ce sont les créateurs qui disent, chantent,
interprètent et illustrent ce que nous avons été, ce que
nous sommes profondément, ce par quoi nous nous reconnaissons et sommes
reconnus distincts, M. le Président: notre culture.
Nos créateurs, eux, ont évolué à pas de
géant. On se rappelle ce qu'il y avait il y a 30 ans; il n'y avait rien,
M. le Président, et, maintenant, nos créateurs ont su
réaffirmer d'ailleurs sans cesse notre identité, nous rappeler
qui on était, une identité culturelle qui, à nous, nous
est propre, une culture qui rayonne ici comme à l'étranger. Quand
on pense à des Gratien Gélinas, Marie-Claire Biais, Robert
Lepage, Edouard Lock, Louise Lecavalier, Michel Rivard, Borduas, et je vais
aussi ajouter, M. le Président, quand on pense à Roch Voisine, en
France, quand on pense à Céline Dion aussi, ces artistes ont et
continuent de nous représenter chez nous et, maintenant, avec
énormément de succès à l'étranger. Donc,
notre culture, M. le Président, s'inscrit dans les grands courants
internationaux.
Quand on pense aussi aux Grands Ballets canadiens, au musée des
Beaux-Arts, à l'Orchestre symphonique de Québec, à celui
de Montréal, au musée McCord, au Théâtre du Rideau
vert, du Nouveau Monde, du Trident, au Cirque du Soleil, aux Opéras de
Montréal et de Québec, on pense à nos industries
culturelles qui ont su canaliser l'énergie créatrice, administrer
des budgets, petits et grands, avec une compétence que le secteur
économique pourrait facilement leur envier.
D'hier à demain, c'est la culture qui nous permet de communiquer
dans l'espace et dans le temps, avec nos ancêtres comme aussi avec nos
contemporains. Elle nous permet, à nous, de nous définir face
à nous-mêmes et aussi face aux autres. Elle nous permet aussi de
nous définir avec les autres, avec toutes les cultures qui viennent
enrichir la nôtre. M. le Président, lorsque son unicité est
forte, lorsque son identité est solide, la culture reçoit et la
culture donne. Si on la respecte dans son originalité, dans ce qui la
distingue, elle s'ouvre d'autant plus à ce qui se distingue d'elle.
La culture, M. le Président, c'est aussi notre langue. Elle est
aussi le témoin de notre identité. Sans elle, nous ne sommes plus
ce que nous sommes. Sans la culture québécoise, la
société québécoise n'a plus d'empreintes digitales.
Ça me surprend, M. le Président, qu'on n'en ait pas entendu
parler plus, parce que c'est un secteur qui est si important pour ce que nous
sommes et pour notre essence même.
Vous savez, M. le Président, notre culture a su transformer ses
handicaps - parce qu'on n'est pas beaucoup - contre des atouts et, depuis le
premier jour, le pouls culturel du Québec n'a jamais cessé de
battre. L'État aussi a misé sur cette vitalité. Dans un
premier temps, à l'égard du patrimoine, ce patrimoine qui trace
notre histoire, véritable fil d'Ariane de notre mémoire. C'est
ainsi que, M. le Président, nous avons, au Québec - ce n'est pas
le fédéral, M. le Président, c'est ici, au Québec -
rédigé les premières lois. En 1922, on assiste à la
création de la Commission des monuments historiques; en 1933, à
l'ouverture du Musée du Québec. L'État s'engage aussi dans
la formation de nos jeunes créateurs. En 1942, la fondation du
Conservatoire
de musique de Montréal; en 1954, la fondation du Conservatoire
d'art dramatique de Montréal. L'État se préoccupe aussi de
l'accessibilité de la culture en créant, en 1959, un premier
service de bibliothèques publiques.
Fin des années cinquante, début des années
soixante, là, il y a un courant mondial. Les sociétés
démocratiques reconnaissent le besoin d'intervention de l'État en
matière de culture. Évidemment, le Québec suit aussi le
courant. C'est sous un gouvernement libéral, en 1961, qu'il y a la
création du ministère des Affaires culturelles.
Comme vous le voyez, M. le Président, on est bien loin de l'Acte
constitutionnel de 1867 où on ne retrouve aucune mention, même
brève, sur la culture, ce qui ne facilite pas non plus notre
débat constitutionnel. C'est à pas de géant que
l'évolution s'est faite et c'est à pas de géant qu'elle
continue de se faire. En 1962, création de l'Office de la langue
française; 1963, inauguration de la Place des Arts; 1964,
création du musée d'Art contemporain; 1967, création de la
Bibliothèque nationale du Québec; 1971, ouverture du Grand
Théâtre de Québec; 1988, ouverture du musée de la
Civilisation.
C'est aussi en 1987-1988 que notre gouvernement, M. le Président,
adopte les lois 90 et 78 par lesquelles on reconnaît un statut
professionnel à nos artistes. Ces lois, M. le Président,
étaient uniques au monde, elles étaient progressistes. C'est
notre gouvernement, M. le Président, qui posait ce geste concret. Elles
répondaient aux besoins réels des artistes d'être
considérés comme des travailleurs autonomes et d'avoir aussi un
statut professionnel. Ces lois ont été rendues possibles parce
qu'il y avait déjà une collaboration entre le gouvernement et les
milieux culturels. À ce jour, on peut se vanter de dire que 11
associations ont été reconnues, dont l'Union des artistes, la
Guilde des musiciens, la Société des auteurs, l'Union des
écrivains, le Conseil des métiers d'art et ce, pour n'en nommer
que quelques-unes. Elles regroupent aussi et représentent plus de 15 000
membres. Elles sont le coeur de 100 organismes, corporations, troupes et autres
structures qui, depuis maintenant des années - c'est-à-dire
depuis 1985 - constituent la coalition du monde des arts et de la culture.
C'est sous le signe de la transparence, M. le Président, que mon
ministère a développé ses relations avec le milieu des
arts, des lettres et de la culture. C'est encore sous le signe de la
transparence que nous développons notre politique culturelle, notre
projet de société. Un projet de société où
le soutien des arts mène à l'excellence de la création,
où la seule élévation de l'esprit devient un dividende
pour la société. Il est d'autant plus légitime d'en parler
dans ces termes, M. le Président, que le secteur culturel connaît
aujourd'hui un véritable impact sur le plan économique.
À ce titre, le gouvernement du Québec, M. le
Président, et on s'en souvient - ce que le député de
Lévis appelait «inflation verbale» - dévoilait, en
décembre dernier, sa stratégie de développement
industriel. 14 secteurs clés ont été identifiés de
grappes industrielles. De ces 14 grappes, 5 sont perçues comme ayant
déjà les reins assez solides pour être concurrentielles sur
la scène mondiale. Les autres sont considérées comme
stratégiques, c'est-à-dire qu'elles jouent déjà un
rôle important dans le développement économique du
Québec. Les industries culturelles constituent l'une de ces grappes, M.
le Président, et nous en sommes fiers. C'est la première fois
qu'un gouvernement reconnaît la véritable place de la culture au
sein de l'économie. Voilà un constat que j'entends
désormais rappeler haut et fort, dans un langage inspiré par la
passion de nos artistes et par la certitude de nos gains économiques
réels. (16 h 30)
L'industrie culturelle représente une activité
économique de l'ordre de 3 500 000 000 $ par année. En fait, si
on le compare à nos 22 secteurs manufacturiers, le secteur culturel
arrive au neuvième rang quant à la valeur des livraisons. On
estime qu'en 1990 les Québécois ont acheté des disques
pour 345 000 000 $. Ils ont aussi assisté à des spectacles pour
105 000 000 $. Ils se sont procuré des livres pour 470 000 000 $. Pour
cette même année, les bibliothèques publiques ont
acheté, à elles seules, pour environ 20 000 000 $ de livres. Les
gens ont dépensé 215 000 000 $ dans l'achat de films ou la
location de vidéocassettes et 85 000 000 $ au cinéma.
En termes d'emplois, on retrouve plus de 25 000 emplois dans ce qu'on
définit comme industries culturelles, c'est-à-dire des gens
provenant des entreprises privées oeuvrant en production et en diffusion
de films, émissions de télévision, vidéocassettes,
disques, spectacles et livres. Si on ajoute à ça les autres
emplois associés au secteur culturel global, c'est-à-dire
musées et bibliothèques, on parle de 75 000 emplois. Et ces
industries culturelles comptent sur plus de 2500 PME, et ce, réparties
à travers toute les régions du Québec. Voilà les
chiffres, M. le Président, dont on ne parle pas souvent, dont on n'a
jamais parlé, mais qui, eux, parlent d'eux-mêmes.
Les produits culturels québécois peuvent non seulement
véhiculer l'identité des Québécois, mais ils
peuvent également jouer un rôle important, très important,
au sein de l'économie. En 1991, le rapport Arpin nous proposait de faire
une nouvelle synthèse et d'énoncer de nouvelles orientations en
matière de culture. Vous vous rappelez, M. le Président, je vous
disais tout à l'heure que nous avions invité tous les milieux
à se prononcer en commission parlementaire. En effet, nous avons
entendu, en plus des intervenants du milieu culturel, des représentants
de
tous les autres milieux. Il y avait Alcan, Bell, Québécor,
la ville de Montréal, la ville de Québec, l'Union des
municipalités, l'Université Laval, l'Université du
Québec, la Fédération des cégeps. Et je n'en nomme
que quelques-uns, puisqu'on avait 264 mémoires et
représentations. C'est une des commissions les plus importantes que le
Québec n'ait jamais tenues. Et tous, sur les 264 représentations,
sont arrivés à un consensus sur le fait que la culture doit
être considérée au même palier que le social et
l'économique, et qu'elle doit aussi se trouver des partenaires pour
atteindre l'excellence.
La politique culturelle, c'est un projet si important pour notre
société que plus de la moitié des ministères sont
et seront concernés par elle. Plus de la moitié des
ministères participent présentement à son
développement et plus de la moitié des ministères
deviendront des partenaires de la culture. Parmi nos partenaires, parmi nos
alliés naturels... J'en parlais tantôt, M. le Président, et
le député de Lévis y a fait référence, et
d'autres députés y ont fait référence: on
interpelle le milieu de l'éducation. Il faut accorder une plus grande
place à la culture et à l'enseignement des arts dans les
écoles. Pourquoi? Parce que c'est là que la notion de
société commence à prendre son sens. C'est là
principalement que l'avenir se projette. À l'école, on enseigne,
on éduque et on forme. On peut former à écouter, à
voir, à reconnaître le beau et le vrai. La littérature, la
musique, le théâtre et la danse doivent prendre une place de
premier plan dans les écoles. Il faut les ramener dans les
écoles.
Lorsqu'on éduque le goût des enfants, on stimule aussi leur
curiosité. Et, en effet, M. le Président, l'habitude de la
lecture et les programmes scolaires axés aussi sur les arts
entraînent - et c'est prouvé - une plus grande capacité de
concentration qui transpire sur toutes les autres matières scolaires.
Elle entraîne aussi une fréquentation plus assidue des salles de
concert, de théâtre, de cinéma et des musées. Elle
prévient aussi - et c'est prouvé, il y a des projets-pilotes - le
décrochage. Elle répond à certains besoins sociaux dans
des secteurs défavorisés. La culture et l'éducation sont
des vases communicants, M. le Président, où le partenariat - et
c'est prouvé maintenant - profite à tous.
En guise de conclusion, M. le Président, lorsqu'on examine la
question dans son ensemble, on se doit de conclure à la
nécessité d'une politique culturelle définie,
développée et applicable. À l'aube de l'an 2000, nous
devons nous tourner résolument vers l'avenir en misant sur notre atout
exceptionnel. Il n'appartient qu'à nous, M. le Président, notre
dynamisme culturel. Notre culture doit prendre sa place parmi les plus grandes
cultures des plus grandes sociétés du monde. Cette politique
culturelle survient à un moment crucial de notre histoire. En l'annon-
çant, j'ai la conviction profonce qu'elle marquera une étape
fondamentale du développement culturel de notre société,
du rayonnement aussi de notre société à l'heure où
on parle de globalisation et d'internationalisation.
M. le Président, nous avons ici, au Québec, un atout que
personne n'a en Amérique du Nord, c'est-à-dire notre culture
distincte. C'est un défi, c'est vrai, un grand défi, mais le
Québec a tout le talent pour le relever et c'est pour ça que
j'appelle cette politique culturelle un projet de société. Merci,
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la
députée de Marguerite-Bourgeoys et ministre des Affaires
culturelles. Sur le même sujet, je cède la parole à M. le
député de Pointe-aux-Trembles.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, le discours inaugural auquel
nous avons eu droit récemment était ce qu'il est convenu
d'appeler une mer de paroles dans un désert d'idées. On a beau le
lire et le relire, on ne trouve pas, dans ce discours, des idées
susceptibles de mobiliser la population vers des objectifs qui soient
attrayants.
M. le Président, c'est un gouvernement essoufflé,
fatigué, divisé, partagé, dont la population est
fatiguée, d'ailleurs. Il n'y a qu'à aller rencontrer les gens
dans nos circonscriptions pour s'en convaincre. Il ne nous propose rien qui
puisse pallier à ce que, moi, j'appelle, au Québec, un
déficit d'espoir. Il y a trop de personnes, il y a trop de groupes dans
la société québécoise qui ne trouvent plus de
motifs d'aller de l'avant parce qu'on a un gouvernement qui n'a pas de
leadership. On a un gouvernement qui se comporte en comptable et qui n'inspire
pas la population.
La ministre des Affaires culturelles a fait un plaidoyer vibrant en
faveur de la culture québécoise et je suis tout prêt
à croire, M. le Président, qu'elle a la foi, mais il manque les
oeuvres. Les oeuvres, ce serait une politique du gouvernement du Québec
qui encourage la culture alors que, dans le passé récent, la
seule chose que ce gouvernement ait trouvé à faire au sujet de la
culture, c'est de la taxer à compter du 1er juillet en appliquant les 8
% de la TVQ à tous les concerts, à tous les spectacles, à
toutes les pièces de théâtre, même aux films qu'on va
voir et qui vont s'ajouter à deux autres taxes, M. le
Président.
Je veux bien qu'on fasse un discours pour dire la fierté qu'on
éprouve quand Roch Voisine chante en France ou quand Céline Dion
chante à la cérémonie des Oscar, mais il faudrait qu'il
n'y ait pas juste la foi, qu'il y ait les oeuvres, et qu'à compter du
1er juillet on ne dissuade pas les Québécois d'aller
écouter Roch Voisine, Céline Dion ou d'autres de notre monde
culturel
en ayant trois taxes: une de 10 % qui est la vieille taxe d'amusement
que les municipalités ont depuis des décennies et avec laquelle
Montréal finançait ses investissements dans la culture, plus les
7 % de la sempiternelle TPS que ce gouvernement imite et a l'intention
d'administrer, parce qu'il est à genoux devant les
fédéraux, et, finalement, à compter du 1er juillet, on
veut appliquer les 8 % de la TVQ au monde culturel. C'est donc dire, M. le
Président, 10 % plus 7 % plus 8 % composés, parce que les 8 %
vont s'ajouter par-dessus les 7 %, lesquels s'ajoutent par-dessus les 10 %, on
va arriver à 26,5 %. (16 h 40)
Alors, si la ministre est si fière des spectacles, des
pièces de théâtre, des concerts qu'on peut entendre,
pourquoi son gouvernement fait-il en sorte qu'il y ait de moins en moins de
gens qui y aillent parce qu'il y a des taxes prohibitives dessus? Et ça,
M. le Président, je pense que c'est le vieux problème de la foi
versus les oeuvres. Il y a le dogme qu'on met de l'avant, mais au plan des
oeuvres... Vous avez vu, M. le Président, ce que ce gouvernement a dit
récemment. Il est prêt à renoncer à la taxe
d'amusement parce qu'elle n'est pas à lui. Voilà un bel exemple
d'abnégation, un gouvernement qui dit: La culture est trop taxée,
on va enlever la taxe des municipalités. C'est généreux de
faire un don à même le butin des autres, en ayant une petite
compensation insuffisante pendant quelques années. Donc, M. le
Président, c'est un gouvernement qui a de la misère à
avoir non pas seulement la foi, mais aussi les oeuvres.
Et puisque la ministre a parié de la culture, je voudrais parier,
M. le Président, des communications, puisque la radio et la
télévision, au Québec comme ailleurs, sont le principal
moyen de divertissement, d'information et de culture de la population. Or, au
plan des communications, M. le Président, ça va très mal.
On l'a vu encore récemment ici, dans la capitale, à
Québec, quand on a vu le maire de Québec, M. Jean-Paul L'Allier,
à la tête d'un groupe important d'organisations de la capitale, un
regroupement qui en plus du maire de Québec comprend 11 organisations
comme l'Université Laval, le ConseH de concertation et de
développement de Québec, la Communauté urbaine de
Québec, et le Conseil de la culture de la région de
Québec, s'opposer à la demande de
Télé-Métropole, tête de pont du réseau TVA,
de réduire la programmation de la région de Québec via la
station de Québec, CFCM, qui est affiliée à TVA.
M. le Président, je comprends le maire de Québec et on
comprend aussi les autres organismes d'être inquiets quand on voit qu'en
1986 le gouvernement actuel a aboli la présence de Radio-Québec
dans la capitale nationale à Québec et que la même
année, CFCM, qui appartient au réseau TVA, donc, à
Télé-Métropole, a diminué sa programmation dans la
région de Québec de 30 à 21 heures, et maintenant est
devant le CRTC, l'organisme fédéral qui réglemente la
radio et la télévision, pour passer de 21 à 10 heures.
Donc, en à peine cinq, six années, une programmation
régionale pour et par les gens de Québec passe de 30 à 21
heures, puis à 10 heures.
M. le Président, il n'y a pas que le réseau TVA qui est en
cause dans la région de Québec. Radio-Canada diffuse un maigre 12
heures par semaine dans la région de Québec. De son
côté, télévision Quatre-Saisons a le championnat
à la baisse avec à peine 9 heures par semaine de
télévision dans la région de Québec. C'est dire, M.
le Président, que la région de Québec, qui recouvre un
bassin de presque 1 000 000 de population, quand on regarde les régions
avoisi-nantes desservies par les mêmes stations de
télévision, se trouve privée d'une production
régionale qui est essentielle notamment en matière d'information,
que ce soit les nouvelles ou que ce soit les affaires publiques.
Donc, en plus du maire de Québec, de l'Université Laval et
de bien d'autres groupes de la région de Québec, il y a la
Fédération professionnelle des journalistes du Québec, qui
regroupe 1100 journalistes, et qui se préoccupe d'éthique
professionnelle, de déontologie et également du droit du public
à l'information, qui disait, et je cite, M. le Président:
«La région de Québec où siège pourtant le
gouvernement du Québec vit actuellement une situation désastreuse
en matière d'information locale, particulièrement, du
côté de la presse télévisuelle.» Un peu plus
loin, dans le même communiqué, la Fédération
professionnelle des journalistes disait: «La FPJQ tient à rappeler
qu'à chaque recul de l'information locale, c'est la capacité des
citoyens d'exercer leurs droits démocratiques qui s'érode».
Fin de la citation.
Or, M. le Président, le gouvernement fédéral est au
coeur du dépérissement de la télévision en
région, au Québec. Il n'y a pas que la région de
Québec qui soit touchée. On se rappelle, il y a à peine un
an et demi, la fermeture, par Radio-Canada, de ses stations régionales
à Rimouski, Matane et Sept-îles. Cela a eu un impact sur la
télévision de Radio-Canada à Québec puisqu'on lui a
donné le mandat de couvrir l'ensemble de l'Est du Québec, ce qui
a réduit l'information pour la région de Québec proprement
dite.
M. le Président, on se rappelle, il y a un an et quelques mois,
que les gens des régions comme la Côte-Nord, le
Bas-Saint-Laurent-Gas-pésie et le Bas-du-Fleuve voyaient un soir,
à la télévision de Québec de Radio-Canada, un
reportage sur les canons à neige au mont Sainte-Anne et, en même
temps, pas un mot de la tempête de neige qui leur donnait presque un
mètre de neige sur la Côte-Nord, le
Bas-Saint-Laurent-Gaspésie et le Bas-du-Fleuve. Et ce n'est pas la faute
des artisans de Radio-Canada à Québec, M. le Président.
Leur syndicat des journalistes en tête, ils ont vertement,
fréquemment protesté contre la fermeture des stations
de Radio-Canada à Matane, Rimouski et Sept-îfes. Mais
Québec, l'Est du Québec et la Côte-Nord en particulier
dépérissent au plan de la télévision, pour quelle
raison? C'est que le gouvernement fédéral, M. le
Président, a coupé le financement de Radio-Canada et a dit
à Radio-Canada: Fermez des stations de télévision,
ça va vous épargner quelques sous.
Mais ce n'est pas la seule chose néfaste que le
fédéral ait fait en matière de télévision.
Le fédéral, par son CRTC, a mis la télévision
francophone du Québec en crise, M. le Président. Et ça,
ça s'est fait de la façon suivante: alors qu'en 1987 il y avait
de disponible, pour l'ensemble de la télévision francophone du
Québec, 21 minutes de commerciaux à l'heure, on est rendus, 5 ans
plus tard, à 70 minutes de commerciaux disponibles à l'heure.
Qu'est-ce que ça a fait, M. le Président? Les réseaux, les
stations de télévision ont perdu des revenus publicitaires parce
que ce n'est pas magique, la publicité. On ne triple pas les budgets
publicitaires d'entreprises parce qu'on a triplé l'offre de
publicité télévisée. Ça a eu comme
conséquence, M. le Président, de mettre notre
télévision en crise, la télévision francophone, au
Québec. Et je ne suis pas le seul à le dire. Le ministre des
Communications dit la même chose, que les interventions du
fédéral ont fait qu'on a un problème pour notre
télévision, au Québec.
M. le Président, la déréglementation de la
publicité télévisée a permis, par exemple, à
des canaux à péage, sur le câble, d'avoir, en plus du
péage payé par les abonnés, de la publicité.
Ça a fait que Télé-Métropole, par exemple, qui
avait toujours été une machine à produire des profits, a
perdu 50 000 000 $ dans les trois dernières années. Et il faut
voir dans ces pertes la raison qui fait que
Télé-Métropole, vis-à-vis de CFCM-TV de
Québec, propose de réduire la programmation locale. Je ne suis
pas en train de dire que ça se justifie, M. le Président, mais
ça s'explique, parce que le fédéral a mis l'ensemble de
notre télévision, au Québec, en difficulté. et ce
n'est pas la seule chose que le fédéral ait fait, m. le
président. en plus, il a réduit le budget de radio-canada en
disant: bien, vendez plus de publicité, ça compensera pour le
financement qu'on ne vous procure pas. ce n'est pas dit souvent, m. le
président, mais il y a un problème politique, au québec et
au canada, au sujet de radio-canada, qui est le suivant: au québec, en
français, radio-canada rejoint 40 % de l'écoute de
télévision; 40 % de la population, en moyenne, qui regarde la
télévision, regarde radio-canada, alors qu'au canada anglais, la
proportion passe de 40 % à 10 %. (16 h 50)
C'est dire, M. le Président, qu'encore une fois les deux peuples
s'opposent parce que les hommes politiques du Canada anglais et, notoirement,
les députés d'arrière-ban conservateurs à Ottawa se
soucient très peu de la CBC parce que ce n'est malheureusement pas
Radio-Canada de langue anglaise, CBC, que les Canadiens anglais regardent le
plus massivement.
À cet égard, M. le Président, le
fédéral a, en télévision, une politique qui est
absolument néfaste pour le Québec, qui vise à ajouter
continuellement des réseaux de télévision, des canaux
spécialisés sur le câble, alors qu'au Canada anglais, c'est
peut-être plus faisable, pour deux raisons: premièrement, c'est la
télévision américaine qui est regardée massivement
au Canada anglais et, deuxièmement, le marché, au Canada anglais,
est de 21 000 000 d'habitants et, au Québec, il est de 7 000 000
d'habitants.
Donc, on a donné des coups à notre
télévision qui ont eu des conséquences. Les réseaux
centralisés à Montréal, c'est vrai, ont eu tendance
à couper la production régionale pour récupérer de
l'argent. Ils ont aussi coupé dans les frais de production, donc dans la
qualité des émissions qu'on regarde. À cet égard,
le fédéral n'a pas l'air repentant. Le ministre des
Communications du Québec a eu raison de dénoncer la loi C-62 qui,
en télécommunications, établit encore plus que c'est le
fédéral qui donne le ton, que c'est le fédéral qui
dirige. C'est un autre exemple de ce que le premier ministre a appelé
récemment le fédéralisme autoritaire qui prévaut au
Canada.
À cet égard, je peux dire que, si on veut une
télévision régionale vigoureuse au Québec, il va
falloir rapatrier au Québec les pouvoirs pour se donner des politiques
sensées en télévision qui reconnaissent que, d'une part,
le marché publicitaire n'est pas illimité, qu'un marché,
ça ne se décrète pas par décision d'un organisme
comme le CRTC, peut-être revoir la concentration des stations de
télévision entre quelques mains seulement et revoir aussi la
réglementation de la publicité télévisée
pour permettre que notre télévision se porte mieux.
À cet égard, M. le Président, le discours inaugural
nous disait une phrase laconique que je cite textuellement: «Le
gouvernement entend compléter l'élaboration d'une politique
intégrée des communications.» J'espère que le
ministre des Communications va être enfin autorisé à faire
des demandes, enfin autorisé à dire que le Québec en a
assez qu'Ottawa, en télévision, fasse du gâchis.
À cet égard, on ne dit pas assez à quel point c'est
méprisant pour nous, Québécois francophones, le fait que,
depuis quatre ans, Radio-Canada anglais, la CBC, opère sur le
câble un réseau d'information continue, un équivalent
canadien de CNN; mais, c'est exclusivement en anglais, ce réseau. Il n'y
a pas d'émissions pour les francophones du Canada ou la majorité
québécoise francophone. Les gens ne s'en rendent peut-être
pas compte, mais toutes les personnes abonnées au câble
contribuent 0,10 $ par mois pour faire vivre News World qui n'est disponible
qu'en anglais, mais payé par les francophones. Je
trouve ça une situation anormale. C'est un francophone, M.
Veilleux, de Radio-Canada, qui est allé au CRTC, à Toronto, il y
a deux semaines, dans un mémoire soumis uniquement en anglais au CRTC,
demander que News World reçoive une cotisation à la source des
Québécois francophones, de 0,15 $ par mois au lieu de 0,10 $. Le
service n'est pas disponible en français, mais on fait en sorte qu'il
coûte 50 % plus cher. Alors, là, la société
distincte, à l'égard de News World... On est distinct dans le
sens qu'on est bafoué dans notre langue et on est juste bon à
payer. Alors, il faudrait, à un moment donné, que ça
cesse.
En terminant, M. le Président, sur un tout autre sujet, je
voudrais déplorer le fait que ce gouvernement fasse en sorte, en parlant
de fermer l'Hôtel-Dieu de Montréal sans rien mettre pour remplacer
l'Hôtel-Dieu de Montréal, que le projet insensé du
gouvernement retarde la construction nécessaire d'un hôpital
à Rivière-des-Prairies, dans le nord-est de Montréal.
M. le Président, le leader adjoint peut dire ce qu'il voudra, le
projet est insensé. Imaginez, on va déménager
l'hôpital que Jeanne Mance a fondé et on projette de construire
à la place un hôpital où il n'y aura ni obstétrique,
ni pédiatrie, mais il y aura le centre québécois des
grands brûlés qu'on déménagerait du centre-ville
à Rivière-des-Prairies. Or, il y a bien plus de chances dans
Pointe-aux-Trembles, dans Rivière-des-Prairies et dans
Montréal-Nord, parce que ce sont des jeunes familles qui sont dans ces
quartiers, qu'une femme accouche dans l'année que de devenir une grande
brûlée. C'est ce projet que des députés
libéraux d'arrière-ban poussent de l'avant au détriment,
et de la population de Rivière-des-Prairies, et des gens du centre-ville
de Montréal.
Bref, M. le Président, je pense qu'on a assez vu ce gouvernement.
On a hâte que l'occasion soit donnée à la population de se
prononcer sur l'avenir du Québec et de voir le premier ministre
respecter sa signature sur le rapport Bélanger-Campeau, respecter sa loi
150 et tenir le référendum. On a hâte aussi que l'occasion
soit donnée aux Québécois de mettre à la place un
autre parti pour poursuivre une autre politique.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Pointe-aux-Trembles. Sur le même sujet... Oui, M.
le leader.
M. Bélisle: En vertu de l'article 213, est-ce que le
député de Pointe-aux-Trembles me permettrait une courte
question?
M. Bourdon: Sûrement.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, courte question,
courte réponse. Allez-y, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisie: M. le Président, je comprends,
d'après ce qu'il vient de nous dire, qu'il est opposé à la
construction d'un hôpital dans l'est de Montréal. Alors, je me
pose la question suivante: Est-ce que ce n'est pas égoïste, de la
part d'un député de l'est de Montréal, de penser et
d'oublier les gens qui demeurent dans l'est de Laval, les gens qui demeurent
à Terrebonne, à Mascouche, à Lachenaie, dans toute la
portion est de Montréal, et qui n'ont pas d'hôpital? Est-ce que ce
n'est pas totalement non fondé et ne pas penser à ses propres
électeurs et aux gens des autres comtés environnants qui ont
besoin d'un hôpital dans le secteur de l'est de Montréal...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, la question est
posée. La réponse...
M. Bélisle: ...et du Grand Montréal
métropolitain?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): ...M. le
député de Pointe-aux-Trembles.
M. Bourdon: M. le Président, je suis entièrement en
faveur d'un hôpital dans le nord-est de Montréal, à
Rivière-des-Prairies, pour les besoins de la population de
Montréal-Nord, de Rivières-des-Prairies et du nord-est de
Montréal. Je suis contre un projet qui leur donnerait un centre des
grands brûlés, mais pas d'obstétrique pour les femmes qui
accouchent et pas de pédiatrie pour les enfants des familles dans ce
coin-là. Oui, je suis pour un hôpital, mais pas votre projet de
Mirabel hospitalier.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci. Alors, Mme la
députée de Mégantic-Compton, je vous rappelle que vous
disposez d'une période maximale de 20 minutes. Allez-y.
Mme Bélanger: Merci, M. le Président. Des voix:
Bravo!
Mme Madeleine Bélanger
Mme Bélanger: M. le Président, il est
déconcertant d'entendre qualifier le discours inaugural par le
député de Pointe-aux-Trembles d'une mer de paroles dans un
désert d'idées, que le gouvernement est essouflé et
divisé. À mon avis, le député de
Pointe-aux-Trembles a sûrement entendu le discours inaugural, mais il n'a
rien compris, et personne, du côté du gouvernement, ne lui en
tiendra rigueur. Les gens, devant le petit écran, ont sûrement
compris, tout comme nous ici en Chambre, que la mer de paroles et le
désert d'idées étaient ici incarnés et
démontrés dans l'intervention du député de
Pointe-aux-Trembles, qui n'a proposé aucune solution aux
problèmes auxquels sont confrontés les
Québécois
et les québécoises. (17 heures)
Ceci étant dit, il me fait grand plaisir d'intervenir aujourd'hui
dans le cadre du discours inaugural prononcé par le premier ministre le
19 mars 1992. Rappelons-le, M. le Président, le discours inaugural est
le discours qui détermine l'orientation du gouvernement, l'orientation
de l'action politique, sociale et économique du gouvernement. Il faut
bien le dire, l'action de notre gouvernement, pour la nouvelle session, se
traduit en 98 mesures qui ne marquent aucune rupture avec les politiques prises
par notre gouvernement du Parti libéral depuis le 2 décembre
1985.
Je veux donc exprimer toute ma satisfaction, en tant que
députée ministérielle, face au contenu du discours
inaugural. Le gouvernement actuel fait preuve encore une fois, dans ses
énoncés de politique et dans ses orientations, d'un
réalisme qui traduit bien les préoccupations constantes de la
population québécoise.
M. le Président, le Québec, comme toutes les
sociétés occidentales, a été frappé par un
ralentissement économique depuis maintenant plus de deux ans. Cela
démontre aujourd'hui la pertinence d'une politique de gestion rigoureuse
des dépenses pratiquée dans les années de croissance
économique. Notre gouvernement assume ses responsabilités et
prend les mesures les plus adéquates pour délimiter l'impact du
ralentissement économique.
Comme le disait le premier ministre du Québec dans le discours
inaugural, nous avons agi avec de nombreuses mesures. Une des mesures, c'est le
programme Mon taux, mon toit. On le sait, au Québec, on dit que, quand
le bâtiment va, tout va. Par la suite, le plan
d'accélération des investissements publics: 600 projets ont
été devancés. Plusieurs centaines de projets ont
été facilités avec Relance PME de la Société
de développement industriel, le développement d'une concertation
économique entre patrons, travailleurs et gouvernement.
M. le Président, l'application rigoureuse de la politique de
contrôle des dépenses du gouvernement de 1986-1987 à
1989-1990 a entraîné un redressement significatif des finances
publiques du Québec. Il en est résulté virtuellement un
équilibre du solde des opérations courantes en 1989. Les
contribuables québécois ont pu bénéficier d'une
réduction de leur fardeau fiscal. Cependant, il ne faut pas oublier que
la croissance des dépenses peut difficilement être contenue en
période de ralentissement économique. Encore aujourd'hui, le
Québec est tributaire d'une conjoncture économique difficile et
le gouvernement doit faire face à une masse considérable de
dépenses incompressibles. Malgré ce contexte défavorable,
le gouvernement a maintenu ses efforts de contrôle, a appliqué des
mesures de réduction des dépenses très importantes et les
nouveaux crédits ont été limités aux
activités de soutien de l'économie et aux priorités les
plus urgentes.
L'objectif du gouvernement libéral en matière de finances
publiques demeure toujours de maintenir un équilibre acceptable entre
les coûts des services publics et la capacité financière
des contribuables. La structure actuelle des programmes de dépenses
crée des pressions réelles sur le niveau de déficit. De
plus, il faut continuer à manifester toute la rigueur dans les efforts
de réduction des dépenses afin d'éviter le recours aux
augmentations d'impôt et, à cet égard, la situation
actuelle est problématique.
M. le Président, il est essentiel, pour le gouvernement,
d'adopter une attitude à la fois prudente et dynamique en matière
de gestion des deniers publics. Ceci est primordial pour permettre au
Québec de mieux supporter les conséquences du ralentissement
économique et pour lui permettre de bien se positionner dans un
marché concurrentiel. Les progrès du Québec sont donc
substantiels, mais nous devons rester vigilants car le paysage
économique mondial, le taux de chômage encore trop
élevé, le retard en matière de technologies de pointe de
même que les disparités régionales constituent des
préoccupations qui s'ajoutent aux défis que le Québec
devra relever avec succès.
M. le Président, l'effort soutenu du gouvernement se poursuivra
par la mise en place d'outils stratégiques de développement
économique. Comme premier outil, le gouvernement a proposé une
stratégie de développement industriel, une stratégie
économique axée sur le relèvement de la
compétitivité. Notre réussite collective passe aujourd'hui
par la transition rapide d'une économie de production de masse à
une économie à valeur ajoutée. Basée sur le concept
des grappes industrielles, elle vise à accroître la
compétitivité des industries québécoises et
à renforcer le partenariat. Une grappe industrielle, c'est l'expression
consacrée qui représente un ensemble d'industries d'un même
secteur d'activité qui interagissent, se regroupent et se concurrencent
entre elles pour accroître leur compétitivité et
accélérer leur croissance. Dans un monde de plus en plus
compétitif, le succès ne sera jamais plus le fruit d'efforts
individuels déployés pour atteindre des objectifs à court
terme, mais il découlera dorénavant de la mise en commun de nos
efforts. C'est sur cette prémisse que repose la stratégie des
grappes industrielles.
M. le Président, le maintien et l'amélioration de notre
qualité de vie dépendent de notre volonté de changer les
choses le plus rapidement possible. Le gouvernement libéral compte sur
la concertation économique, le partenariat, la paix industrielle qui
s'est établie dans les relations de travail pour faire accéder le
Québec à une économie de valeur ajoutée.
Un deuxième outil pour accroître la productivité et
la compétitivité de la main-d'oeuvre est
fondé sur une plus grande réussite scolaire et une
formation accrue de la main-d'oeuvre. Le gouvernement annoncera un plan
d'action pour augmenter de 3 % par an pendant cinq ans le taux de diplomation
au secondaire. Voilà, M. le Président, un autre indice d'un
gouvernement empreint de réalisme et de responsabilité. Pour
mieux répondre à une économie en mutation, aux
impératifs de la compétitivité, aux besoins changeants du
marché du travail, le développement des compétences
devient une exigence incontournable. Pour continuer à prospérer,
le Québec n'a d'autre choix que d'investir davantage dans le
développement de la main-d'oeuvre. Le dépôt du projet de
loi créant les sociétés régionales de
développement de la main-d'oeuvre démontre la volonté
gouvernementale de soutenir fermement le développement et l'essor
économique des régions.
Un troisième outil est basé sur une nouvelle
stratégie en matière de développement régional.
Ainsi, cette nouvelle stratégie gouvernementale adoptée par le
Conseil des ministres consiste à appuyer et à accompagner le
dynamisme des régions du Québec. Le gouvernement du Québec
a choisi de devenir de plus en plus un État accompagnateur s'appuyant
davantage sur le dynamisme des milieux régionaux en matière de
développement économique. Cette nouvelle approche vient
consolider la prise en charge par le milieu de son propre développement.
Elle favorisera la régionalisation de certains budgets sectoriels
pouvant atteindre 500 000 000 $ par année. Elle rendra la gestion plus
sensible aux véritables besoins régionaux. Rappelons-nous que le
comité Bernier avait été chargé en février
dernier d'élaborer des éléments de politique en
matière de développement régional. C'est donc cette avenue
qui a été retenue par le gouvernement du Québec comme une
démarche logique pouvant mener, à plus ou moins long terme,
à une plus grande autonomie des régions du Québec.
Un quatrième outil repose sur une nouvelle politique en
matière d'affaires internationales. Ainsi, afin de répondre aux
défis nouveaux engendrés par des mutations profondes sur la
scène mondiale, notre ministre des Affaires internationales proposait en
septembre dernier une politique en matière d'affaires internationales
intitulée: Le Québec et l'interdépendance: le monde pour
horizon. Tout cela pour dire, M. le Président, que tous les
gouvernements sont de plus en plus obligés de définir et
d'adapter leur politique interne en fonction de l'environnement international.
Ils sont conduits à agir à la fois pour définir les
règles qui encadrent ces échanges et pour développer
différentes sortes de collaborations avec les pays étrangers.
La clé de l'avenir réside dans notre capacité de
nous adapter à ces nouvelles exigences et de saisir les
opportunités immenses qu'offre l'ouverture sur le monde. Le
Québec devra développer ses activités internationales
autour de deux pôles majeurs: l'Amérique, qu'il faut apprendre
à considérer comme notre marché domestique, et l'Europe,
avec laquelle il faut privilégier l'établissement d'alliances
dans tous les domaines. Également l'on visera à établir
des rapports plus substantiels et équilibrés avec certains pays
d'Asie. (17 h 10)
Par ailleurs, dans le cadre multilatéral, on accordera une
priorité au développement de la francophonie qui
représente des enjeux vitaux pour le Québec. M. le
Président, ce que je retiens également dans ce message inaugural,
c'est la vision, n'en déplaise au député de
Pointe-aux-Trembles, de notre premier ministre tout comme celle de notre parti
qui supporte ses orientations. C'est cette vision qui vise a assurer le
maintien du dynamisme économique du Québec.
Le Parti québécois a pris le pouvoir en 1976. Il a
quitté en 1985. Pendant cette période, il a réussi
à multiplier la dette par cinq. Un beau succès! Nous en sommes
les héritiers. Nous vivons aujourd'hui avec ce triste et lourd
héritage. Comme le disait le ministre délégué
à l'Administration et président du Conseil du trésor, dans
le cadre du 48e congrès de l'Association des constructeurs de routes et
grands travaux du Québec, le 16 janvier dernier, tous les lundis matin,
M. le Président, le ministère des Finances règle une
facture spéciale d'intérêts de l'ordre de 50 000 000 $, une
facture d'intérêts sur des emprunts contractés pour
financer des dépenses courantes. Une facture d'intérêts qui
se finance à même les impôts de cette année pour
payer des services reçus dans les années antérieures.
C'est ça, la gestion du Parti québécois, M. le
Président.
M. le Président, s'il est exact d'affirmer, comme M. Johnson, que
des déficits occasionnels peuvent être de faible
conséquence et s'avérer appropriés pour soutenir
l'économie en période de ralentissement économique, on
voit maintenant combien néfaste peut s'avérer un recours
systématique au déficit pour financer des opérations
courantes tel que l'a pratiqué le gouvernement péquiste. Ceux qui
réclament aujourd'hui des augmentations de dépenses sans hausses
d'impôt ou même avec des baisses d'impôt nous demandent
d'emprunter un chemin qui ne mène nulle part. Comme le disait le premier
ministre dans son discours inaugural, ils prennent un risque énorme avec
leur crédibilité.
En terminant, M. le Président, permettez-moi de féliciter
notre gouvernement qui a à coeur de ne pas endetter le Québec
pour les générations futures. L'avenir appartient davantage aux
jeunes, et c'est en leur donnant les moyens de se réaliser pleinement
qu'ils seront en mesure de relever les défis de l'an 2000. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci,
Mme la députée de Mégantic-Compton. Je cède
la parafe à M. 1e député d'Anjou. Vous disposez d'une
période maximale de 20 minutes. M. le député, allez-y.
M. Pierre Bélanger
M. Bélanger (Anjou): Je vous remercie, M. le
Président. Alors, comme vous savez, M. le Président, je suis le
dernier député à avoir été élu en
cette Chambre, à l'issue de cette défaite victorieuse du 20
janvier dernier du Parti libéral du Québec. Donc, depuis le 10
mars dernier, je siège ici parmi vous. Donc, c'est un peu avec cet
esprit du citoyen ordinaire que j'attendais ce discours inaugural qui allait
être prononcé. On m'avait averti, on m'avait dit: Tu vas voir,
c'est des choses vraiment importantes, c'est l'orientation du gouvernement qui
va être annoncée dans ce discours qui est très
important.
Donc, je m'attendais à beaucoup. Je m'attendais à
beaucoup, surtout que je sors, M. le Président, d'une élection
qui m'a mis en contact continu avec les électeurs, des électeurs
qui m'ont parlé, qui m'ont dit qu'ils étaient en colère,
qu'ils étaient déçus de ce gouvernement. Qu'est-ce qu'on
ressentait aussi chez ces gens? C'est un sentiment de morosité qui est
à la fois causé par la situation économique et à la
fois par cette situation constitutionnelle dans laquelle on est
embourbés présentement. Ce qu'on lisait aussi chez les gens,
c'est ce désespoir. Ce désespoir, on a peine à voir la
lumière au bout du tunnel. De plus, ces citoyens se sentent
écrasés, écrasés par les taxes,
écrasés par la dette, écrasés par cette incertitude
aussi qui plane sur la situation présente.
Donc, surtout après le message du 20 janvier par lequel les gens
du comté d'Anjou m'ont élu, je m'attendais à une
réaction de la part de ce gouvernement. J'ai dit: Ce n'est pas possible.
J'ai dit: Ils vont réagir, ils vont donner un coup de barre, ils vont
annoncer quelque chose pour tenter de répondre à ce cri,
finalement, que les citoyens d'Anjou leur ont envoyé. Je peux vous dire,
M. le Président, qu'il y a bien des électeurs du Québec
qui auraient voulu être à la place des électeurs d'Anjou et
qui auraient voulu avoir une urne devant eux pour pouvoir justement
déposer un bulletin de vote et envoyer un message à ce
gouvernement.
Donc, M. le Président, j'ai écouté attentivement ce
discours d'ouverture, j'ai pris des notes. De prime abord, on annonce beaucoup
de choses: projet de loi de ci, projet de ci, projet de ça. J'ai
été impressionné, j'ai pris des notes. Alors, la
première chose que j'ai faite, M. le Président, après
avoir entendu ce discours, je suis, évidemment, allé voir les
recherchistes pour comparer ce qui était annoncé par rapport
à ce qui avait été annoncé lors des
précédents discours, puisque je n'avais pas entendu ces
précédents discours. Qu'est-ce que je constate,
M. le Président? Des vieux discours, des vieux projets de loi
dont on nous parle depuis plusieurs années qui n'ont jamais abouti, qui
n'ont jamais vu le jour.
On vit dans le passé. Ça serait peut-être le
qualificatif que je pourrais emprunter pour dépeindre ce discours
inaugural. On parle de ce qui a été fait au cours des
années. J'ai entendu tout à l'heure la députée de
Mégantic-Compton parler de ce qu'on aurait pu faire en 1976 ou en 1980,
c'est quand même bien. Elle remonte uniquement à 1976 ou 1980.
J'ai entendu d'autres députés qui remontaient jusqu'à 1960
et 1966, M. le Président. En 1960, je venais au monde, et, en 1966,
j'avais 6 ans. Alors, vous pouvez imaginer l'effet que ça me fait quand
on me sort des arguments comme ça. Ça ne me fait pas un grand
effet. Je pense que ça fait à peu près le même effet
à la population en général quand on sort des vieilles
antiquités comme ça, de ce qui a pu se faire en 1960. On dirait
que ces gens cherchent à se féliciter pour ce qui aurait pu
être fait dans le passé, comme un peu pour constater leur
impossibilité d'agir sur la situation présente.
C'est le temps d'agir, M. le Président. C'est maintenant que les
gens la vivent, la récession. Ce n'était pas il y a 10 ans, ce
n'était pas il y a 20 ans, c'est maintenant qu'ils la vivent, c'est
maintenant qu'ils s'attendent à quelque chose de ce gouvernement. Et
qu'est-ce qu'on voit? Rien. Absolument rien! Au contraire, dans le discours du
premier ministre, on cherche à expliquer pourquoi on est dans une
récession. Ça ne prenait pas un discours inaugural pour nous
apprendre que, tout simplement, les États-Unis vivent une
récession importante, qu'on est à une époque de
globalisation des marchés. Ça, on le savait. Ça ne prend
pas une tête à Papineau pour vraiment comprendre ça, et
encore moins un discours inaugural, M. le Président.
Alors, on assiste plutôt aux bases d'un genre de gestion du
laisser-aller. Le système va se remettre à fonctionner par
lui-même, par l'opération du Saint-Esprit. Attendons que les
forces extérieures cessent d'agir et l'étincelle va jaillir,
l'économie va se remettre à fonctionner, l'emploi va revenir.
Ça me fait penser un peu à certaines politiques que le
président Reagan avait essayées, dans les années
quatre-vingt, et qui ont, je pense, montré qu'elles étaient tout
à fait inefficaces. On appelait ça les «Reaganomics»,
M. le Président. Autant, je pense, on a fait la preuve que le communisme
ne fonctionne pas dans ce bas monde, autant on a fait la preuve que le
capitalisme intelligent, c'est-à-dire celui qui règle tout
uniquement par ses forces, sans aucune intervention de l'État, n'existe
pas. Le gouvernement se doit d'agir avec leadership et de donner des directions
à cette économie s'il veut que la situation s'améliore et
s'il veut donner un changement à cette situation.
J'entendais aussi des gens qui accusaient systématiquement notre
parti de demander des
augmentations d'impôt ou d'accumuler le déficit tout
simplement pour financer des projets. Ce n'est pas ça qu'on demande. Je
pense que les gens d'en face, ou ils entendent mal, ou ils écoutent mal,
ou ils ne veulent pas comprendre. Nous, ce qu'on leur dit, c'est que, souvent,
uniquement le fait de mieux gérer ce qu'ils ont pourrait donner des
résultats. Gérons donc mieux ce qu'on a et, une fois que
ça sera mieux fait, eh bien, à ce moment-là,
peut-être qu'on aura des résultats et on n'en sera pas tout
simplement à faire des constats, des constats d'échec, des
constats d'immobilisme.
Je peux vous dire, M. le Président, que dans le comté
d'Anjou il y a des choses qui auraient pu être faites et qui n'ont pas
été faites. Le comté d'Anjou fait partie de l'est de
Montréal et vit cette récession d'une façon, je dirais,
peut-être deux fois plus difficile encore que les autres régions
du Québec, et je m'explique. C'est-à-dire qu'au moment où
l'est de Montréal sortait de cette récession économique
elle avait encore peine à se remettre d'un genre de transition de son
économie, car elle passait d'une économie basée sur
l'industrie lourde à une nouvelle industrie de haute technologie. Donc,
juste comme on sortait de cette première récession, M. le
Président, la deuxième vint nous frapper de plein fouet. (17 h
20)
Donc, on peut comprendre que l'impact de cette deuxième
récession soit d'autant plus grand pour les gens d'Anjou. On a un parc
industriel qui a une certaine vigueur et qui, je pourrais même dire, par
rapport à certains parcs industriels, se comporte très bien, mais
on a quand même de sérieux problèmes avec le parc
industriel si on veut le développer. En effet, il y a le prolongement de
l'autoroute 25 qu'on demande depuis longtemps. Et, là, je vois le leader
adjoint qui réagit suite à ces propos.
Une voix: Bientôt, bientôt.
M. Bélanger (Anjou): Le prolongement de la 25 qu'on nous
annonce pour bientôt, enfin.
Une voix: Bientôt.
M. Bélanger (Anjou): Enfin! On le demande. On nous l'a
promis en 1985, on nous l'a promis en 1989 et, là, ça a l'air
qu'en 1993, 1994, 1995 ou 1996 - en tout cas, avant l'an 2000, j'espère
- on va l'avoir. Tant mieux! J'entendais un ministre qui nous disait: On ne
relance pas l'économie en construisant des routes. Ah non? Bien, je
pense que ce ministre oublie quelque chose. Un des critères primordiaux
pour une entreprise pour s'installer dans un parc industriel est la
facilité de pouvoir faire transiter matériel et main-d'oeuvre.
Or, si on a des voies rapides, proches du parc industriel, mais qu'on a peine
à avoir accès à ces voies rapides, je peux vous dire
quelque chose: Ça va être très difficile d'attirer des
nouveaux investisseurs et de continuer vraiment un développement durable
de l'économie d'Anjou et de son parc industriel. Le prolongement de la
25, ce serait facile. Le prolongement de Henri-Bourassa, ce serait très
facile. On en parte, on en parle et, là, on nous l'annonce. Tant mieux!
Tant mieux, mais j'ai hâte de la voir. Les gens d'Anjou ont hâte de
la vivre.
On attendait aussi une politique de décontamination des terrains.
Vous savez, l'est de Montréal est tributaire un peu de son passé
de l'industrie lourde. Il a des terrains contaminés qui font en sorte
que c'est très difficile de prévoir un développement
rapide de certaines zones de l'est de Montréal. Alors, on s'attendait
à un plan de décontamination ou, au moins, à une politique
gouvernementale, avec des échéanciers clairs, précis,
vérifiables. Absolument rien dans le discours inaugural, M. le
Président.
Un autre dossier qui me tient à coeur, M. le Président,
c'est celui de l'aide juridique. J'ai pu pratiquer le droit pendant les neuf
dernières années et, durant les cinq premières
années de ma pratique, au moins, j'ai participé
régulièrement au régime de l'aide juridique. Je pense que
le régime de l'aide juridique est un peu la pierre angulaire de tout le
principe d'accessibilité de la justice aux citoyens. Alors, j'ai
cherché dans le discours un message ou, pour reprendre une expression de
la députée de Mégantic-Compton, une orientation du
gouvernement. J'ai trouvé cette phrase qui, vous allez le constater avec
moi, est magnifique: «L'admissibilité à l'aide juridique
des Québécois économiquement défavorisés
fera l'objet de modifications.» Bravo! Bravo! Avec ça, on est
servis. On est vraiment servis, mais il n'y a aucune annonce là-dedans.
Où est l'orientation? Est-ce qu'on va vers une plus grande
accessibilité? Va-t-on restreindre l'accessibilité? Va-t-on
baisser, hausser les seuils d'admissibilité? Questions sans
réponse.
Au moins, le ministre de la Justice avait eu le courage, lors du dernier
sommet de la justice, de présenter des paramètres d'un nouveau
régime d'aide juridique. Il faut dire que tous les intervenants se sont
mis à lever les boucliers quand ils ont vu ce nouveau régime
d'aide juridique proposé, mais, au moins, il avait le courage de
présenter quelque chose. Il va falloir retourner au travail. Il va
falloir travailler ce nouveau régime, mais, au moins, c'est une
orientation. On ne peut pas en dire autant du discours inaugural du premier
ministre. Il n'y a rien là-dedans, absolument rien qui puisse me
permettre d'espérer ou d'entrevoir ce qui va arriver du système
de l'aide juridique. Pourtant, c'est depuis 1985 qu'il ne s'est rien
passé dans le dossier de l'aide juridique. Il y a eu une petite
modification des barèmes en 1985, mais, globalement, c'est depuis 1982
qu'il n'y a pas eu de modification du régime de l'aide juridique. Il y a
des gens qui attendent,
et c'est les gens les plus démunis de la société
qui sont touchés par ça.
Alors, dans ce discours, c'est toute la volonté d'un gouvernement
responsable qui est absente. Aucune audace qui pourrait se traduire par des
projets concrets de relance; aucune vision qui pourrait orienter les gens vers
un avenir optimiste; aucun courage qui pourrait se traduire par des prises de
position dans des dossiers.
Peut-être que l'aspect le plus décevant de ce discours, M.
le Président, ça a été le long et vibrant plaidoyer
du premier ministre en faveur du fédéralisme. Au moins, un bon
aspect de ce discours a été de nous révéler le vrai
visage de notre premier ministre. Il y en a dans mon comté qui pensaient
que le premier ministre pourrait être celui qui mènerait le
Québec à la souveraineté. Bien, maintenant, ils ont leur
réponse: La souveraineté, non merci. C'est le
fédéralisme! Le fédéralisme à genoux,
debout, on ne le sait pas encore, mais un fédéralisme, de toute
façon. On y est condamné. Et, dans le discours inaugural, de
toute façon, on a eu droit à une belle démonstration. On
est enclavé, on n'a pas le choix, on est condamné. C'est
ça. Alors, là-dessus, il n'y a plus d'ambiguïté
possible, et je vois mal maintenant comment le premier ministre, une fois
acculé au pied du mur, en attendant toujours ces offres qui tardent
à venir, pourrait changer d'orientation et essayer de nous montrer un
visage souverainiste. Il n'en a pas, de visage souverainiste. Il en a eu un
uniquement quand il était mal pris, il était dans une position
délicate. Mais son vrai visage et son coeur, ils sont
fédéralistes.
Moi, je respecte ça, M. le Président. Je respecte
ça qu'il soit fédéraliste. Moi, après tout, je suis
un souverainiste. Alors, quand j'entends, des fois, certaines personnes qui
vont nous traiter, ici, de séparatistes ou de souverainistes, moi,
ça ne m'insulte pas. Je suis souverainiste. Je suis séparatiste.
Et ça me fait un peu penser, M. le Président, à une
certaine remarque qu'avait faite le premier ministre lors de mon entrée
à cette Assemblée nationale. Il me disait que je me sentirais
peut-être mal à l'aise de me retrouver parmi certains de mes
collègues dans ce parti après un recul, une absence, après
avoir quitté mon parti. Mais je pense que le premier ministre est assez
mal placé pour pouvoir me faire un reproche là-dessus. En effet,
je regarde dans les notes biographiques des députés; en 1976, on
voit que M. Bourassa, le premier ministre, a amorcé une période
d'étude et de réflexion. On peut maintenant comprendre que le
premier ministre est revenu à son parti après cette
période d'étude et de réflexion. Alors, je vois mal
comment on pourrait essayer de me faire un reproche là-dessus, ou
essayer de porter un blâme là-dessus.
M. le Président, je me sens bien dans ce parti parce qu'on a
toujours eu un seul discours, celui de la souveraineté du Québec.
C'est la souveraineté du Québec qui nous tient à coeur;
c'est la souveraineté du Québec pour laquelle on va travailler.
Et ce discours a toujours été tenu par notre parti et par notre
chef, c'est pourquoi je m'y sens bien. Puis je me sens bien parmi mes
collègues députés parce que, dès le début,
ils m'ont épaulé, ils m'ont impliqué dans les dossiers qui
touchaient l'avenir du Québec. Et ils ont fait en sorte que je me suis
senti tout de suite partie intégrante de cette équipe de
députés.
Mais ce qui m'embête le plus, comme je vous le disais, dans ce
discours, M. le Président, ce n'est pas nécessairement ce genre
de credo du fédéralisme, c'est peut-être le moment choisi
pour faire un tel discours. On est à une étape cruciale des
relations fédérales-provinciales, ou un genre de
négociation de la dernière chance, comme pourraient l'appeler mes
collègues fédéralistes. Alors que, normalement, on devrait
montrer notre force derrière une position ferme quand on veut
négocier, le premier ministre expose sa faiblesse et celle du
Québec, laissant entendre un peu que la position du Québec est un
genre de bluff, qu'on est prêt à..., que ce n'est pas dans le
ciment; il n'y a rien dans le ciment; la loi 150, ce n'est pas dans le ciment.
Et, on supplie, finalement, le Canada de nous faire des offres. S'il vous
plaît, faites-moi des offres, je suis mal pris. C'est un peu le message
qu'on fait. Et je peux vous dire quelque chose, dans le Canada anglais, c'a
été perçu comme ça. C'a été
perçu comme si on laissait tomber les gants. Est-ce qu'on s'attend, avec
une telle attitude, vraiment, qu'on va avoir des offres bonifiées du
fédéral? Est-ce qu'on s'attend réellement à
ça? Je pense que c'est vraiment faire preuve d'un manque de
clarté que d'imaginer ça.
Mais, il y a un peu de tout. Il y en a un petit peu pour tout le monde
dans ce discours, M. le Président. On voit, à un moment
donné, peut-être pour plaire à certains souverainistes
qu'il pourrait encore y avoir dans le parti, le Parti libéral, s'il y en
a: «La fierté du peuple québécois ainsi que sa
dignité ne sont pas négociables». Ah! Beau principe! Beau
principe, mais, maintenant, il va falloir voir de quelle façon on va
pouvoir appliquer ce principe après avoir laissé tomber la
défensive, après avoir abandonné notre position. (17 h
30)
En terminant, M. le Président, j'espère sincèrement
que le Québec va sortir le plus rapidement possible de cette
récession qui l'étouffé et qui l'empêche de
progresser. J'espère aussi qu'il va sortir de ce marasme constitutionnel
pour prendre une option claire vers la souveraineté. Mais si le
Québec sort de cette récession, je peux vous dire quelque chose,
ce ne sera certainement pas grâce aux mesures annoncées dans le
discours inaugural de ce gouvernement. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député d'Anjou. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: Est-ce que le député d'Anjou me
permettrait une courte question, en vertu de l'article 213?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le
député d'Anjou, en vertu de l'article 213, vous pouvez ou non
consentir à répondre à une question que veut vous poser le
leader adjoint du gouvernement. Est-ce que vous y consentez?
M. Bélanger (Anjou): Si elle porte sur mon discours,
oui.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Elle doit
nécessairement porter sur votre discours. Courte question, courte
réponse. Allez-y, M. le leader.
M. Bélisle: Comment, M. le Président, le
député d'Anjou peut-il concilier sa position favorable au
prolongement de la 25 et du pont dans l'est de Montréal avec la position
exprimée par tous les députés péquistes de l'est de
Montréal - Pointe-aux-Trembles, Hochelaga-Maison-neuve, Mercier - qui
s'y opposent? Est-il la seule exception à la ligne de parti du
régiment péquiste, énoncée lors d'une
conférence de presse à Montréal en 1991?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le
député d'Anjou, votre réponse, s'il vous plaît.
M. Bélanger (Anjou): Je pense que le député
de Mille-Îles aurait eu intérêt à lire ma plateforme
électorale et à lire les déclarations que j'ai faites
pendant ma campagne électorale; je pense que ça aurait mis toute
la lumière sur cette question. Quand j'ai parlé du prolongement
de la 25, jamais vous ne m'avez entendu parler du pont. La priorité,
pour le comté d'Anjou, ce n'est pas un pont vers Laval. Le pont pour
Laval, je crois que c'est un des enjeux ou une des priorités pour les
gens de Laval, qui l'ont demandé.
Ce que j'ai toujours demandé - parce que je suis conscient,
justement, des limites de payer de ce gouvernement, des limites
budgétaires - c'est un prolongement, par étapes, de l'autoroute
25 jusqu'au boulevard Henri-Bourassa. C'est ça que j'ai demandé.
Alors, ne me demandez pas ma position par rapport au pont. Le pont, ce n'est
pas un dossier d'Anjou. Moi, le dossier que j'ai défendu dans ma
campagne électorale, que je continue à défendre, c'est le
prolongement de la 25 au moins jusqu'à Henri-Bourassa.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci...
M. Bélanger (Anjou): Quand on arrivera au pont, on
arrivera au pont.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député. Sur le même sujet, je cède maintenant la
parole à M. le député de Fabre. Vous disposez de 20
minutes, M. le député.
M. Jean A. Joly
M. Joly: Merci, M. le Président. J'ai écouté
avec beaucoup d'intérêt, je pourrais dire, un des premiers
discours de notre jeune député d'Anjou. À le voir arriver
ici, en Chambre, cet après-midi, armé de sa liste
d'épicerie, nous disant, en contrepartie, qu'il comprend que la
capacité de payer d'un gouvernement est quand même limitée,
à ce moment-là, je me suis demandé qui avait pu
l'influencer dans le choix de son discours ou dans les déclarations
qu'il nous a faites. Mais ça se doit de commencer quelque part. Souvent,
on est influencé, comme je le disais, par certains modèles.
J'espère qu'il n'a pas été influencé par le
député de Lévis, le postier de la couronne, qui a toujours
prêché la transparence mais qui, lui, pendant quand même une
certaine période, s'est promené avec un chèque du
gouvernement, qu'il devait remettre à ses commettants qui attendaient le
chèque. Et, durant ce temps-là, les intérêts
couraient, mais pas au bénéfice des récipiendaires. Alors,
si c'est les modèles qui l'inspirent, je pense qu'il fait
déjà fausse route. Je tiens à lui dire aussi que, des
fois, dans Anjou comme ailleurs, des erreurs de parcours, ça arrive.
Alors, peut-être que, dans son cas, c'est justement le reliquat d'une
erreur de parcours.
Il faudrait aussi qu'il pense et qu'il réalise qu'on vit
actuellement un climat économique qui n'est pas propre au Québec,
qui est quand même, je dirais, passé la frontière,
même nord-américaine, et que, la situation étant
conjoncturelle, il n'y a pas tellement autre chose à faire que, tout
comme lui, espérer que la récession se termine. Parce que, quand
c'est conjoncturel, des fois, on n'a pas beaucoup de contrôle sur
ça. Si c'est structurel, là, c'est différent. Et c'est
là que le gouvernement libéral embarque. La preuve, c'est que
vous avez eu, tout dernièrement, un rapport qui a été
déposé, qui est le rapport Poulin, qui nous parle justement de
structures et qui nous parle d'implications gouvernementales.
Alors, M. le Président, il me fait plaisir, moi aussi, à
mon tour, aujourd'hui, d'intervenir sur le discours inaugural prononcé
par notre premier ministre, M. Bourassa, le premier ministre du Québec,
homme de grande valeur - je pense que je n'ai pas à le dire, c'est
déjà confirmé, et confirmé depuis de nombreuses
années - qui nous a livré un discours inaugural, qui,
d'après l'Opposition, ne dénote pas ou ne démontre pas,
d'une façon claire, les orientations de notre formation, de notre
gouvernement. Eh bien, je pense, autant pour le député
d'Anjou
que pour le député de Lévis qui nous disent que
c'est vide de sens, qu'il y a sûrement des choses qu'ils n'ont pas
comprises. Ils n'ont pas compris notre orientation, qui n'est pas une
orientation à la pièce, mais plutôt une orientation globale
qui vise à favoriser des mesures qui, nécessairement, demandent
ce qu'on appelle un investissement dans le temps et non pas une dépense
dans le temps. Ce n'est pas un gouvernement de cataplasme, comme on disait. Ce
n'est pas un gouvernement de ruban sur une jambe de bois. C'est un gouvernement
qui a une vision beaucoup plus étendue et qui pense, en retour, à
aller dans ce qu'on appelle des politiques qui vont nous rapporter autant
à moyen qu'à long terme.
D'ailleurs, dans le discours inaugural, M. le Président, on a
quand même soumis 98 points ou 98 mesures qui démontrent, sans
équivoque, sans ambiguïté d'aucune façon, que dans
notre gouvernement il y a ce qu'on appelle une continuité. Pourquoi? En
1985, on a fait l'inventaire de l'héritage qu'on prenait. On pensait
qu'on avait une marge de manoeuvre. On pensait vraiment qu'on avait une marge
de manoeuvre, mais, par contre, il y avait eu des petites cachettes.
Nécessairement, quand on a levé ou soulevé le couvercle,
on s'est aperçu que la vérité n'était
peut-être pas tout à fait ce qu'on pensait et on a
réalisé que la marge de manoeuvre avait été
estompée par le déficit. On l'a soulevée plusieurs fois,
la question du déficit, mais il faut quand même se le rappeler. Il
faut quand même ne pas oublier qu'en 1976 le déficit de
l'année était de 750 000 000 $ - le déficit de
l'année, en 1976. En 1985, 9 années après, près de
4 000 000 000$, M. le Président. 4 000 000 000 $! Si on additionne ces 4
000 000 000 $ pour l'année 1985 et les déficits des années
antérieures, on s'est ramassé avec un budget de 35 000 000 000 $,
passant de 5 000 000 000$ à 35 000 000 000$.
Ça veut dire quoi, ça, dans le concret, dans le quotidien?
Ça a été dit, M. le Président. Ça, ça
veut dire qu'à tous les jours de la semaine, le gouvernement
actuellement en poste se doit de payer 7 000 000 $ d'intérêts sur
la dette accumulée. Dieu merci! M. le Président. En 1985, la
population a vu clair et a dit: C'est fini! C'est fini la mascarade! Ce
n'était pas une récréation, c'était une mascarade.
On avait un masque. On marchait sur un nuage et on créait des attentes
pour cette population qui ne demandait pas mieux que de se faire dire une forme
de vérité. Mais quand on n'est pas là, quand on n'est pas
en arrière du rideau et qu'on ne sait pas ce qui se passe, bien, c'est
exactement ça qui est la situation d'aujourd'hui qui fait que le
gouvernement, depuis 1985, s'évertue à rembourser une dette qui a
été créée par des gens qu'on peut appeler
«des rêveurs». Vous savez, des fois, on qualifie certaines
gens d'hommes et de femmes de lettres. Il en faut, mais ça prend aussi
des hommes et des femmes de chiffres. Alors, ça, ça n'existe pas,
du moins, semble-t-il, avec la formation du PQ. (17 h 40)
Donc, des promesses, des attentes qu'on crée, des engagements
qu'on prend à gauche et à droite et qu'on ne respecte pas.
M. le Président, j'écoutais le jeune député
d'Anjou qui disait: Pourquoi revenir aux années soixante? Pourquoi
revenir à l'année 1966? C'est facile à comprendre quand on
veut y voir clair et qu'on veut voir qu'en cours de route on se doit de se
comparer avec des modèles. Et le modèle du temps, c'était
le Parti libéral. Le parti des grandes réalisations. On a
commencé avec ce qu'on peut appeler «la Révolution
tranquille».
M. Lesage est arrivé et a dit: On fait un ménage. On
s'attelle en avant de la charrue et on va faire arriver des choses. Vous savez,
M. le Président, au risque de me répéter, je dis toujours
qu'il y a trois sortes ou trois catégories d'individus ou de gens: ceux
qui font arriver des choses; ceux qui regardent arriver les choses, et ceux qui
se demandent ce qui arrive. Alors, on a connu ça trop longtemps, des
gens qui se demandaient ce qui arrivait et qui venaient en réaction.
Donc, gouvernement des grandes réalisations en débutant avec
l'ère de M. Lesage, c'est pour ça qu'on y revient, M. le
Président.
Tout le système d'éducation, c'a commencé
où? Pour avoir nécessairement été
hypothéqué en chemin par le fait qu'on a pris de mauvaises
décisions et qu'aujourd'hui on récolte, nécessairement, ce
que j'appelle la formation de transit, qui s'est accrochée en cours de
route un peu par accident, par erreur, qui a nécessairement
changé le système, aujourd'hui on récolte au-delà
de 35 % de décrocheurs. Alors, l'ère de M. Lesage,
l'éducation, un système de santé, c'est encore un
gouvernement libéral.
Quand on regarde la Société générale de
financement, quand on regarde la Caisse de dépôt, quand on regarde
l'hydroélectricité, vous êtes allés là pour
couper des rubans. La seule idée qu'ils ont eue en neuf ans, et qui
semble leur coller à la peau, c'est la séparation, la
souveraineté. Des idées neuves, des idées nouvelles, on
n'en voit pas. C'est une formation qui est à la remorque. Comme on dit,
M. le Président, en termes un peu loufoques: Ils aiment ça,
accrocher leurs grelots en arrière de quelqu'un qui a des idées,
ils vont chercher les crédits, mais l'action, ce n'est pas eux autres
qui la mettent de l'avant.
Alors, vous savez, M. le Président, je ne veux pas qu'on se
glorifie avec toutes ces mesures qu'on a mises de l'avant et tous ces
succès que le Parti libéral a mis de l'avant avec toutes ses
grandes réalisations et ses grandes idées. Oui, je pense, M. le
Président, que la population réalise qu'actuellement, c'est une
situation difficile. On a fait appel plusieurs fois à sa bonne foi,
à sa bonne volonté et à sa compréhension. Ce n'est
pas sorcier à comprendre, quand vous avez un budget de 37 000 000 000 $
et qu'il y a 41 000 000 000 $
de dépenses, et qu'on ramène ça à une
proportion plus terre à terre, c'est un peu comme quelqu'un qui a 37 $
dans ses poches et qui en dépense 41 $. Alors, c'est bien sûr
qu'il y a un manque à gagner quelque part. Mais, là, on parle de
plusieurs zéros. Alors, c'est ce qui fait qu'étant dans une
situation un petit peu plus difficile, avec un chômage qui a pris la
vedette, il ne faut quand même pas se le cacher, mais, comme je dis, qui
n'est pas propre au Québec... Ça a transféré de
l'autre côté de la frontière et même on pourrait dire
que c'est une situation quasi mondiale.
On parle du négatif, M. le Président. J'écoutais un
député de l'autre formation de l'autre côté qui
parlait de la fermeture d'usines. Il parlait nécessairement de
chômage. C'est bien sûr, mais c'est l'aspect négatif d'une
mauvaise nouvelle qui se doit quand même d'être publiée, qui
se doit d'être dite. Ce qu'on oublie de dire, c'est qu'il s'en ouvre des
usines, c'est qu'il s'en ouvre des industries un peu partout à travers
la province. Je parlais dans la région de la Mauri-cie... dans la
région, disons, du Cap-de-la-Madeleine. On me faisait mention, par
exemple, de Le Culottier, 250 emplois. C'est fait, c'est réglé.
Ça, on n'en parle pas. On ne parie pas non plus des 1100 emplois, M. le
Président, sous la responsabilité de CP, encore là dans la
grande région de la Mauricie. Encore ce matin, on voyait que Honda vient
investir au Québec. Alors, ça, ça fait souvent la petite
manchette, mais ce qui fait la grosse manchette, c'est toujours l'aspect
négatif. C'est pour ça que M. Bourassa, à travers sa
déclaration ou, si on peut dire, son discours comme tel, nous a
amenés à réaliser que, dans le quotidien, il y a un paquet
de choses qui peuvent se dire, il y a un paquet de choses qui peuvent se faire,
mais si on n'a pas une vision globale de ce qu'on a comme objectifs, bien,
c'est certain qu'en cours de route on va aussi être jugé à
la pièce comme gouvernement, et ce n'est pas notre lot parce que c'est
justement cette vision globale qui a été établie depuis
1985.
M. le Président, de façon à ne pas manquer à
ce qui a été dit par M. le premier ministre, j'aimerais quand
même vous lire quelques-uns des objectifs et quelques-unes des
façons, disons, d'en arriver à régler ces objectifs pour
les prochaines années, objectifs qui ont été quand
même concertés via toute la deputation du côté
ministériel. Ceci est le fruit, M. le Président, d'une
consultation à travers chacun des comtés de la province. Alors,
si la population nous dit clairement c'est quoi les besoins, c'est quoi les
problèmes, eh bien, maintenant, c'est a nous d'imaginer les solutions et
de faire ensemble qu'on puisse y travailler.
Alors, M. Bourassa disait: «Favoriser l'investissement par une
fiscalité concurrentielle». Ça veut dire quoi, ça?
Ça, ça veut dire que si ici, au Québec, il se paie plus
d'impôts que dans une autre province, bien, à ce moment-là,
notre main-d'oeuvre qualifiée peut peut-être avoir
intérêt à s'en aller ailleurs parce qu'elle va payer moins
d'impôts. Ça, c'est la logique.
Le PQ, le parti de l'Opposition, voudrait nécessairement qu'on
baisse les taxes, qu'on fasse des investissements, qu'on crée des
emplois, qu'on baisse le déficit, qu'on n'augmente pas les impôts,
mais ils vont la prendre où, la piastre? Je commence à croire
qu'ils ont été influencés dans le temps du régime
Caouette et que, partant de là, ils y ont assez cru que tout ce qu'ils
ont fait, c'est qu'ils ont changé le nom de leur formation puis ils ont
mis une étiquette de plus: «péquiste»,
«indépendantiste», «séparatiste», parce
qu'au Québec on n'est pas bien. C'est l'anarchie; il n'y a pas de paix,
il n'y a pas, disons, de liberté d'action, il n'y a pas de respect.
Alors, c'est ça qu'ils se sont dit. À n'importe quel prix,
on coupe les liens parce que nous autres, on l'a, la vérité. Ils
l'avaient, la vérité, quand ils avaient Quebecair qui
était dans les airs, M. le Président. 110 000 000 $ de perte,
même pas un emploi de créé. Alors, si c'est ça qu'on
veut avoir comme leaders pour diriger le Québec et administrer
pratiquement ou au-delà de 40 000 000 000 $ par année, M. le
Président, je suis drôlement inquiet.
Je ne pense pas qu'on puisse élire un gouvernement strictement
sur une option, sur une orientation ou simplement sur une idée qu'ils
font la leur, bien sûr, mais ils ne disent pas toute la
vérité à la population. Quand ils disent que ça ne
coûte rien, quand ils disent que ça va être facile, plus
facile de rapatrier tout ce monde-là et de les replacer, ça me
fait penser à Dukakis, dans l'État du Massachusetts. Pour bien
paraître, ce qu'il avait fait, M. le Président, il y avait un taux
de chômage de 2 %, il avait mis tout le monde sur le
«payroll» de l'État. Bien, aujourd'hui, le Massachusetts,
ils sont dans la misère. Ils sont dans la misère puis dans la
misère noire.
Vous savez, il y a deux sortes de gouvernements, M. le Président:
être et paraître. Bien, moi, j'aime mieux qu'on soit moins
flamboyant, qu'on soit moins à spectacle, parce que je me souviens
très bien qu'il y a quelques années, afin d'être à
spectacle et d'être publicise, on se servait des fonds de l'État.
On a été obligé, M. le Président - peut-être
que vous n'en croirez pas vos oreilles - de passer une loi au cas où
quelqu'un d'autre aurait les mêmes idées en cours de route, puis
que ça passe inaperçu, puis qu'on dépense l'argent de
l'État pour publiciser ses orientations politiques. Ça, je pense
que c'était absolument aberrant et indécent. (17 h 50)
Vous savez, quand on parle de transparence, on pourrait en parler
longtemps. Puis le député de Lévis, ça, c'est un
député à spectacle, un député dans la
tradition, la bonne vieille tradition des premières années du
gouvernement du
temps. Puis c'est lui qui va servir de modèle au jeune
député d'Anjou. Ça m'inquiète, M. le
Président! Ça m'inquiète vraiment. Vous savez, des fois,
ce n'est pas parce qu'on diverge d'opinion au niveau des formations
politiques... Des fois, on a de la bonne semence dans notre jeunesse. Et, avant
de la mettre en terre, on est en train de la pourrir. Puis, ça, c'est
inquiétant. C'est inquiétant. Puis on ne peut pas blâmer un
jeune qui arrive, parce qu'il croit que c'est la vérité absolue,
parce que ça vient d'un grand maître qui sait comment faire, qui
sait comment dire, qui a le verbe facile, M. le Président. Sauf que, je
vais lui faire la même recommandation que j'ai déjà faite
à quelqu'un d'autre: à la vitesse qu'il parie, son maître,
il ne peut pas penser à tout ce qu'il dit. Ça, c'est
important.
Alors, compte tenu de tout ça, M. le Président, je vous ai
juste parié d'un des éléments qui ont été
cités par M. Bourassa. Vous me faites mention qu'il me reste trois
minutes; il me semble que je viens à peine de commencer, M. le
Président.
On parie de réduire les dépenses publiques en augmentant
l'efficacité de la fonction publique; le rapport Poulin, c'est ça
que ça veut dire. Faire en sorte que ceux qui, nécessairement,
vont prendre leur retraite ne soient pas remplacés dans la fonction
publique, et demander à tout le monde de se serrer les coudes un peu
plus, et de donner encore un plus grand rendement, tout ceci parce qu'on est au
service de la population et que c'est la population qui paie, M. le
Président. Oeuvrer à l'amélioration de la
productivité, bien, ça, c'est faire en sorte qu'on puisse
investir un petit peu partout dans ce qu'on peut appeler les aspects
techniques, et ainsi de suite. Alors, ça aussi, il faut en parier.
Développer la formation professionnelle et procéder
à des ajustements dans notre système d'éducation afin
d'améliorer la compétence. Ça, on en a parié. On en
a largement parié. Le député de Salaberry-Soulanges a fait
un très beau plaidoyer dans ce sens-là pour démontrer ce
qui s'était passé. Mais quand on parie de développer la
formation professionnelle, c'est faire en sorte qu'aujourd'hui on redonne
à notre population, on redonne à nos jeunes le goût de
s'identifier au travail. Ça, je pense aussi que c'est important.
Développer le partenariat. Le gouvernement ne peut pas agir tout
seul. Le gouvernement se doit de s'associer, s'associer avec le patronat,
s'associer avec les syndicats. Ça, je pense que c'est un défi de
taille, c'est un défi qu'on est en train de relever. Alors, ça,
je pense que c'est important aussi de le dire.
M. le Président, lorsqu'on parie aussi de régions, chez
nous, Laval, c'est une région; c'est une grande région, comme
Montréal est une grande région, comme d'autres régions ont
chacune leur particularité. Qu'est-ce que le gouvernement libéral
s'est appliqué à faire depuis 1985? Juste pour vous mettre un peu
dans le contexte de ce qui se vit chez nous, M. le Président, chez nous,
nous avons réussi à avoir une association touristique
régionale; nous avons réussi à avoir la SDI,
Société de développement industriel; nous avons
réussi à avoir la Régie régionale de la
santé, la Justice; nous avons, en fait, ce qu'on appelle l'OPDQ,
l'Office de planification et de développement du Québec,
régional, qui s'en vient chez nous, comme dans les autres
régions. Donc, ce qui est propre à Laval est propre à
toutes les régions.
C'est la vision de notre gouvernement, M. le Président. C'est ce
à quoi on travaille, c'est ce à quoi on s'applique, c'est ce que
nous allons réussir. Et nous n'avons pas besoin de nous «enrichir
d'un pays». Nous sommes déjà riches, nous avons
déjà notre pays. C'est à nous de développer
ensemble cette concertation et qu'on puisse, dans l'unité, dans
l'unisson, faire en sorte que nos objectifs soient réalisables et
réalisés. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Fabre. Sur le même sujet, je cède la
parole à M. le député d'Ungava.
M. Christian Claveau
M. Claveau: Oui, M. le Président, c'est avec un peu de
nostalgie que je viens de perdre 20 minutes de ma journée en
écoutant le député de Fabre nous parier de ce que son
gouvernement n'a pas fait, ou de ce que son gouvernement aurait peut-être
dû faire.
M. le Président, je comprends que le député de
Fabre soit très intéressé par son fonds de pension parce
que, au rythme où ça va là, il va en avoir besoin avant
longtemps. Ce n'est pas avec des gens qui ont une vision semblable qu'on va
gouverner le Québec bien longtemps, et puis, étant à
l'image de son parti, j'ai l'impression qu'il va disparaître aussi vite
que les siens aux prochaines élections.
M. le Président, on aura beau dire ce qu'on voudra dans la salle,
dans cette Assemblée, il y a des choses qui doivent être dites
clairement, comme elles sont. Et puis on va arrêter de jouer avec des
beaux mots, et puis le verbe facile, et puis de la démagogie à
trente sous pour essayer de faire accroire au monde ce qui n'est pas en
réalité, M. le Président.
J'écoutais le député de Fabre parier pendant 20
minutes de mon collègue d'Anjou. Il faut croire que leur défaite
dans Anjou leur a fait drôlement mal pour qu'il s'acharne pendant la
moitié de son discours à parier de notre nouveau collègue
élu dans Anjou. C'est un signe des temps, M. le Président,
l'élection dans Anjou. Ça leur fait mal. Bien, ils vont avoir
à vivre avec. Et puis, ils vont avoir à vivre avec encore bien
plus de malheurs que ça dans les semaines et les mois qui viennent s'ils
continuent sur leur lancée
de ne rien faire, et avec des discours vagues comme celui qu'on a eu au
moment du discours inaugural du premier ministre. Tout ce qu'il a réussi
à faire, c'est d'essayer de se moquer un peu du chef de l'Opposition,
sans jamais amener quelque mesure que ce soit qui soit neuve, positive,
constructive, innovatrice pour le peuple du Québec, M. le
Président.
Ce n'est pas avec ça qu'on va bâtir le Québec, ce
n'est pas vrai. Puis des discours, de la démagogie à 25 cents, on
en a soupe au Québec. Le député de Fabre vient de nous en
faire encore une des plus belles démonstrations du genre de
démagogie dont ces gens-là sont capables. Je le comprends
d'ailleurs, parce que, dans le fond, il n'a qu'à suivre l'exemple de son
premier ministre alors qu'il répond aux questions en cette Chambre. Il
ne peut pas faire mieux que ce qu'il a fait là. Ça, c'est clair,
M. le Président.
M. le Président, parlons-en, des outils de développement
économique du Québec. Depuis 1985, qu'est-ce qui s'est
passé? Souvenons-nous, M. le Président, du premier mandat, du
début du premier mandat 1985-1986, 1986-1987. On a
démantelé, au nom du sacro-saint principe que c'était la
libre entreprise qui devait contrôler l'économie et que le
gouvernement ne devait pas intervenir dans l'économie, on a
démantelé, ce gouvernement, y compris le député de
Fabre qui a voté pour ces lois, on a démantelé tout ce
qu'on avait comme structures de base de développement économique
dans les régions du Québec. Je n'en donnerai que quelques petits
exemples, M. le Président.
Rappelons-nous SOQUEM. On a vendu, à un prix minable, on a
donné pratiquement les meilleurs actifs de SOQUEM pour former une
société qui s'appelle Cambior qui, aujourd'hui, investit à
l'étranger, a investi aux États-Unis, a investi en Alaska, a
investi dans les Guyanes. Elle investit partout à l'étranger
mais, au Québec, bien, on fait bien attention pour ne pas trop investir
parce que c'est payant à l'étranger plus qu'ici au Québec.
C'est ça qu'on a fait avec les actifs de SOQUEM, M. le Président.
Aujourd'hui, SOQUEM doit se référer au Conseil du trésor
à toutes les fois qu'elle veut faire un petit projet. SOQUEM n'est qu'un
paravent dans nos milieux, elle n'a plus de marge de manoeuvre pour
opérer comme telle parce que tous ses actifs ont été,
à toutes fins pratiques, donnés, des actifs importants,
intéressants. Les actifs rentables ont été donnés
pour former une compagnie comme Cambior qui, à mon sens, ne joue pas le
rôle qu'elle devrait jouer dans le développement minier au
Québec au moment où on se parle, M. le Président.
On a vendu Quebecair. Ah oui! Quebecair avait 2 000 000 $ de
déficit; ça, c'était grave. 300 000 000 $ de
déficit avec le métro à Montréal, ça, ce
n'est pas grave, mais 2 000 000 $ de déficit chez Quebecair, ça,
c'est grave. Qui a acheté Quebecair? Un groupe d'hommes d'af- faires,
Leblanc et compagnie, y compris le frère du ministre là,
député de Beauce-Sud, qui ont mis la patte sur Quebecair. Pour
faire quoi? Ils ont vendu les meilleurs avions de Quebecair dès le
départ pour se rembourser sur ce que ça leur avait
coûté pour l'achat, puis, après ça, ils ont
opéré tant bien que mal, cahin-caha pendant une couple
d'années. Ils sont revenus au gouvernement pour demander une subvention.
Ça leur a été refusé. Ils ont liquidé
Quebecair.
Puis, aujourd'hui, vous vous promenez dans les régions du
Québec... Ça coûte une fortune pour vous promener dans les
régions du Québec. Pourquoi? Parce qu'on s'était
donné, ou on voulait se donner, au Québec, un outil de
développement régional qui permettrait aux gens des
régions de pouvoir voyager à un coût raisonnable, pour
avoir accès aux grands centres du Québec. On avait formé
la société Quebecair dans cette idée-là. Bien non.
Il y avait trois ou quatre gars là, peut-être un peu plus fins
fins que les autres au Québec, qui voulaient mettre la patte sur leur
propre petite compagnie d'aviation. Puis, finalement, ils se sont
arrangés avec le gouvernement, ils ont racheté Quebecair sous
prétexte que ça coûtait cher au gouvernement. Aujourd'hui,
ça ne coûte peut-être plus rien au gouvernement, mais
Quebecair n'existe plus! Puis, les gens des régions du Québec
sont dépendants de grosses compagnies comme Canadian et Air Canada pour
se voyager. On en paie le coût, je vous en passe un papier. Ceux qui
n'ont pas à prendre l'avion dans les régions, ils s'en sacrent
bien, ce n'est pas leur problème à eux. Mais, nous, qui vivons
dans les régions éloignées et puis qui avons à
voyager en avion, on sait ce que c'est que de payer des billets d'avion. C'est
ça.
Madelipêche. Rappelons-nous Madelipêche. Ah oui! Ça
coûtait cher d'avoir des usines de pêche aux
îles-de-la-Madeleine pour relancer l'économie des
Îles-de-la-Madeleine. Ça, ça coûtait cher. Ah!
Madelipêche, ça ne va pas pire! On va vendre ça à
l'entreprise privée. Maintenant, l'entreprise privée est capable
de l'opérer. Ça a donné quoi, vous^ pensez? Allez voir le
taux de chômage aux Îles-de-la-Madeleine au moment où on se
parle. Allez voir où on en est rendu dans les négociations des
quotas de pêche. Allons voir où en sont les usines de pêche
au Québec actuellement, depuis que le gouvernement, toujours à
partir du sacro-saint principe qu'on ne devait pas intervenir dans
l'économie pour laisser l'entreprise privée fonctionner à
sa guise, eh bien! on a détruit l'industrie de la pêche au
Québec. Allons nous promener dans les villages de pêcheurs.
Qu'est-ce qui leur reste au-delà du chômage et du B.S. pour
pouvoir vivre? Vous pensez que c'est comme ça qu'on va monter une
économie au Québec? Ce n'est pas comme ça. (18 heures)
On a démoli, on a enlevé le programme des actions
accréditives. On a fait croire que ce
n'était pas bon. Aujourd'hui, où on en est dans
l'industrie minière, M. le Président? Je vais vous en donner
juste un petit exemple, moi. On parle de création d'emplois. Je vais
vous donner des chiffres précis de ce qui se passe chez nous. Vous
m'excuserez des noms anglais, M. le Président; c'étaient des
compagnies étrangères qui avaient les mines et les noms des puits
sont tous en anglais. Mais je vais tous vous les nommer un par un, des puits
qui étaient opérationnels quand ce gouvernement a pris le
pouvoir, M. le Président, juste dans la région de Chibougamau et
de Chapais. Juste à Chibougamau et Chapais, on avait le puits Springer
1, le puits Perry, le puits Cook, à Chapais; on avait le puits Anderson
1, Anderson 2, le projet S-3 qui a ouvert un petit peu après; il n'a pas
été très long, vous me direz. Il y a Cedar Bay, à
Chibougamau; la mine Bachelor, à Desmaraisville; la mine du lac Short,
qui relevait de la mine Opemiska de Chapais. C'étaient toutes des mines
qui étaient en opération quand ce gouvernement-là est
arrivé au pouvoir, et qui avaient toutes au-delà de 100 à
150 employés chacune, sinon 200 et 300 dans certains cas. C'est tout
fermé aujourd'hui; il n'y en a plus. Il reste trois mines, trois puits
en opération dans toute la belle région minière de
Chibougamau et Chapais. Je vais vous les nommer, pour être bien sûr
que tout le monde comprend. Il reste le puits Copper-Rand et le puits Portage
qui appartiennent tous les deux à la compagnie Westminer et il reste le
puits Meston qui appartient à la compagnie Meston, qui est une mine
d'or. C'est les trois seuls puits qui restent dans toute cette
région-là. Toute la liste que je vous ai donnée avant,
tout est fermé. Il n'y en a plus. Et on nous parle de création
d'emplois, et on nous parle de relance de l'économie.
Qu'est-ce que j'ai entendu, moi, dans le discours du premier ministre,
au moment de faire son discours inaugural, pour nous montrer qu'il allait faire
quelque chose pour les pauvres diables, pour tous les gens qui travaillaient
dans cette industrie minière et qui se retrouvent, comme on dit - vous
me passerez l'expression, j'espère qu'elle est parlementaire - le cul
sur la paille, M. le Président. C'est deux mots qui se trouvent dans le
dictionnaire. Ces gens-là, ils ont le cul sur la paille à cause
de ce gouvernement qui n'est pas capable de prendre ses responsabilités
et qui n'a rien fait pour la population du Québec, pour ces
gens-là et pour nombre d'autres.
Regardons dans l'industrie forestière, M. le Président.
Comptons les moulins à scie, les scieries qui sont fermées depuis
1985. Ça n'a pas de sacré bon sens, ça n'a pas
d'allure!
Une voix: Du bran de scie!
M. Claveau: Ils peuvent bien nous parler de bran de scie, oui,
ils connaissent ça, eux autres.
Imaginez-vous! Le ministre des Forêts a fait sa campagne
électorale en 1985, et encore en 1989, en promettant une
troisième machine à papier à Rivière-du-Loup, dans
son propre comté. Il y en avait deux quand il a été
élu en 1985; il en promettait une troisième. Aujourd'hui, il y en
a une. Ça valait la peine de l'élire. Au lieu d'augmenter la
capacité, il l'a coupée en deux. Il n'en reste plus rien qu'une,
dans son propre comté de Rivière-du-Loup, M. le
Président.
Ils ont fait rêver les gens de la Gaspésie avec la
papeterie de Matane. On n'a pas le droit, M. le Président, de se moquer
du monde comme ces gens-là l'ont fait avec la papeterie de Matane,
où ils ont laissé croire à la population de la
Gaspésie qu'il y avait de la place pour une autre papeterie au
Québec. On a obligé l'investissement de Matane. Ça a
coûté des centaines de millions aux contribuables de tout le
Québec pour bâtir une papeterie à Matane, qui était
liée à toute la question de la vente - voyons, la
papetière, vous devez vous en souvenir - de Donahue. On a obligé
la construction d'une papeterie à Matane. On a fait rêver la
population de Matane. Ça n'a même pas opéré pendant
un an, c'est fermé. Et je suis prêt à vous passer un papier
que ça n'ouvrira pas demain matin.
On a fait rêver, avec l'argent de tous les
Québécois, la population de cette région-là qui,
aujourd'hui, se retrouve dans une situation pire que ce qui était avant,
parce que, à la suite de ce beau rêve, les gens ont dit: On
bâtit une papeterie chez nous, on va avoir de l'ouvrage pendant de
nombreuses années. On s'endette, finalement; on a une marge de
crédit, on rénove nos maisons, on se bâtit des maisons
neuves, on s'achète des voitures neuves, on repart, quoi. Le
gouvernement vient de nous bâtir notre papeterie qu'on attendait depuis
si longtemps. Donc, on n'a pas de raison de croire que ça ne marchera
pas. Les gens se sont endettés, ils ont cru dans la parole de ce
gouvernement qui leur disait: Endettez-vous, allez, il n'y a pas de
problème, on relance l'économie, on vous bâtit une
papeterie; ça va être beau. Ça n'a même pas
marché un an. Mais, par exemple, les gens qui se sont acheté des
maisons, les gens qui se sont acheté des voitures, les gens qui se sont
rééquipés de toutes sortes de façons sur la base
que la promesse du gouvernement allait tenir, eux, ils sont encore pris avec
leurs problèmes, par exemple, et il n'y a personne pour les aider. Eux,
ils sont pris avec leurs problèmes.
M. le Président, c'est inacceptable. C'est des façons de
faire qu'un gouvernement honnête, un gouvernement correct n'a pas le
droit d'avoir, M. le Président. Et c'est ça, la base de la
relance économique des régions que ces gens-là nous
promettent. Comment voulez-vous aller plus loin? Regardez ce qui s'est
passé au Lac-Saint-Jean avec l'investissement de Normick-Perron dans
l'usine de panneaux-particules de Chambord. La même affaire, le
même scheme de pensée, la
même structure! On a fait rêver le monde, là-bas. On
a bâti une usine de panneaux qui a coûté des dizaines de
millions. On a dit au monde: C'est beau, c'est parfait. Du jour au lendemain,
ça n'a même pas opéré un an encore, dans ce
cas-là, que c'est refermé; la clé dans la porte, dans la
boule-à-mites, et on se prépare à démolir l'usine.
On a fait encore rêver le monde de ce beau coin de pays et, aujourd'hui,
les gens sont pris avec leurs problèmes économiques.
Le gouvernement a une attitude de je-m'en-foutisme. Il s'en sacre bien;
ce n'est plus son problème. Ce n'est tellement plus son problème
qu'il n'est même pas capable de payer ses comptes lui-même: 442 167
584 $ de transferts de factures aux municipalités, à toutes les
municipalités du Québec. Parce que, après avoir mis le
monde dans une situation invivable, après avoir fait du Québec un
vaste champ d'assistés sociaux et de chômeurs qui pataugent tant
bien que mal pour essayer de se trouver de l'ouvrage, sans aucune norme, sans
aucune orientation, sans aucune vision de leur gouvernement pour les aider, eh
bien, on leur dit: On n'en a pas assez de vous avoir mis le cul sur la paille,
on va aller vous enlever la paille qui reste avec...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le
député d'Ungava, je m'excuse!
Une voix:...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je m'excuse! M. le
député d'Ungava!
Une voix: Oui.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je veux vous rappeler les
dispositions des paragraphes de l'article 35, particulièrement le
paragraphe 8, qui se lit comme suit: «Les députés ne
peuvent... Le député qui a la parole ne peut employer un langage
grossier ou irrespectueux envers l'Assemblée.» Alors, que je le
laisse passer une fois, à partir du moment où vous m'indiquez
même que vous croyez que c'est plus ou moins parlementaire... Je vous
rappelle que c'est une expression qui, selon les prescriptions de l'article
35.8 que je viens de vous lire, n'est pas acceptable à
l'Assemblée nationale.
M. Claveau: M. le Président, avec tout le respect que je
vous dois, ce n'est pas contre l'Assemblée que j'en ai et ce n'est
surtout pas à l'Assemblée nationale que je donnerais ce
qualificatif, mais à certains membres de cette Assemblée qui
forment le supposé gouvernement qui, normalement, devrait administrer le
Québec et qui, malheureusement, siègent avec nous et donnent
l'image que l'on connaît du Québec actuel.
Donc, ceci étant dit, on enlève la paille en dessous du
c... et on refile à tout ce beau monde une facture de 442 000 000 $ que
les municipalités devront aller chercher via les taxes foncières,
sous prétexte qu'on ne peut plus payer, pour diminuer le déficit,
soit dit en passant, de plus de 4 000 000 000 $, cette année, et
ça, avec les nouvelles formules comptables que ce gouvernement s'est
bien empressé de rentrer dans ses livres en 1985, incluant les
bénéfices d'Hydro-Québec, de Loto-Québec, de la
Société des alcools, enfin, de tout le monde. On met tous les
bénéfices de toutes les sociétés d'État et
on a encore 4 000 000 000 $ de déficit. On en avait peut-être 4
000 000 000 $ en 1985, mais on ne comptait pas les bénéfices des
sociétés d'État. On avait au moins ça de louable,
d'honnête, de correct, c'est qu'on ne comptabilisait pas les chiffres des
sociétés d'État pour diminuer notre déficit. Ce
n'est pas 4 000 000 000 $ qu'il y aurait, c'est autour de 6 000 000 000 $, si
ce gouvernement avait la même comptabilité qu'on avait en
1985.
Ça fait que ne jouons pas trop sur les mots. Mettons les chiffres
tels qu'ils sont et comparons les oranges avec les oranges. Le premier ministre
aime bien ça. Il faisait des farces, cet après-midi, à
l'Assemblée, en disant: On parle du dollar américain et ils
parlent du dollar canadien. Bien, parions des mêmes mesures, des
mêmes normes comptables que ce que nous, on avait en 1985, comparé
à ce qu'il y a aujourd'hui. À partir des mêmes normes, ce
n'est pas 4 000 000 000 $, c'est à 6 000 000 000 $ et plus que serait le
déficit du gouvernement du Québec, au moment où on se
parle.
De fins gestionnaires, M. le Président! Aussi fins gestionnaires
que bons négociateurs, d'ailleurs! Moi, je m'en souviens. Si eux, ils
ont de l'amnésie générale, moi, je m'en souviens, en 1985,
ils ont fait leur campagne électorale en disant: Nous, vous savez,
négocier avec le fédéral, on connaît ça. Les
péquistes ne sont pas bons là-dedans, les péquistes ne
savent rien faire. Bien, nous, on va aller négocier avec le
fédéral et vous allez voir qu'on va vous montrer qu'on est de
fins négociateurs.
De fins négociateurs, oui! Le cul-de-sac dans lequel on se trouve
- «cul-de-sac» étant une expression, j'imagine, très
bien connue et non vulgaire utilisée partout par le ministère des
Transports - sur le plan constitutionnel, ce n'est pas le PQ qui l'a fait,
c'est eux, de fins négociateurs! Fins négociateurs! Ils
connaissaient ça. Ils allaient diminuer, ils allaient anéantir,
annuler, réduire, faire disparaître, faire passer aux oubliettes
le déficit du Québec, M. le Président. Avec eux, il n'y en
aurait plus de déficit. (18 h 10)
Ils nous ont parié de marge de manoeuvre. Oui, la marge de
manoeuvre, parions-en! Le député de Fabre, encore, tantôt,
se gargarisait avec ça. Ça a été encore un coup
monté, aux élections de 1985, pour montrer qu'eux, s'ils
arrivaient au gouvernement, ils étaient capables
d'opérer, ils avaient une marge de manoeuvre. Voyons donc! Il y a
deux raisons pour lesquelles ils nous ont dit qu'ils avaient une marge de
manoeuvre aux élections de 1985. La première, c'est qu'ils
mentaient carrément à la population en sachant qu'il n'y en avait
pas, mais ils faisaient accroire qu'ils en avaient. La deuxième,
c'était qu'ils n'avaient pas fait leur job dans l'Opposition. S'ils
avaient fait leur job comme députés de l'Opposition au lieu de
compter leur fonds de pension, probablement qu'ils se seraient rendu compte que
la situation financière du Québec ne dégageait pas de
marge de manoeuvre. Alors, ils ont fait accroire à la population du
Québec, en 1985, durant toute la campagne électorale, qu'eux, ils
avaient une marge de manoeuvre et qu'ils pourraient appliquer des programmes.
Soit qu'ils ont menti à la population ou qu'ils n'ont pas fait leur job
dans l'Opposition, il n'y a pas d'autres raisons.
Aujourd'hui, le député de Fabre vient nous dire: On ne
connaissait pas l'état de l'économie. Ils nous en avaient
caché. Voyons donc! Il y a une chose que je sais, moi, par exemple,
c'est que ces gens-là nous ont promis, en 1985, qu'avec eux il n'y
aurait plus de déficit, au Québec. À partir des
mêmes normes comptables qu'on avait en 1985, le déficit,
aujourd'hui, serait au-delà de 6 000 000 000 $. Ah! ils connaissent
ça. De fins gestionnaires, parlons-en!
M. le Président, on a refilé 442 000 000 $
là-dessus. Ce n'est pas assez d'avoir comptabilisé les
bénéficies des sociétés d'État comme
HydroQuébec, etc., mais on a refilé, en plus, 500 000 000 $ de
factures aux municipalités et on a encore au-delà de 4 000 000
000 $ de déficit. Parlons-en de la gérance de ces gens-là!
Parlons-en de leurs connaissances techniques! Ils peuvent bien se moquer du PQ.
Je comprends, ça leur fait mal. D'ailleurs, M. le Président,
quand il ne nous reste plus rien qu'à se moquer des autres pour se
défendre, on ne vaut pas cher. J'aurais bien mieux aimé entendre
le premier ministre nous annoncer des vraies mesures concrètes dans son
discours inaugural plutôt que de faire de la démagogie à 25
cents, à l'exemple de ce que vient de nous faire le député
de Fabre tout à l'heure.
Vous me dites que mon temps est fini?
Une voix: Oui.
M. Claveau: Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député d'Ungava. Sur le même sujet, je reconnais maintenant
M. le député de Gatineau.
M. Réjean Lafrenière
M. Lafrenière: M. le Président, pour de la
démagogie, le député d'Ungava et le député
de Lévis se partageraient la palme aujourd'hui. Je ne voudrais pas
commenter ou me mettre à commenter ce genre de discours parce que je
pense que je perdrais mes 20 minutes, moi aussi.
M. le Président, le dernier discours inaugural a visé
à définir les grandes orientations du gouvernement au cours des
prochains mois. Les priorités sont d'ordre économique, social,
culturel et éducationnel. C'est ce qu'on appelle, M. le
Président, avoir une vision globale du développement d'un
Québec moderne, qui devra affronter les défis à la fois
économiques, techniques et humains à l'aube de l'an 2000.
L'Opposition officielle se dit déçue de ce discours. On
n'en attendait pas moins d'une formation politique qui a fait preuve d'une
mauvaise gestion des fonds publics entre 1976 et 1985. M. le Président,
je sais que nous dirigeons les destinées du Québec et que le
Parti québécois n'aime pas qu'on revienne en arrière,
surtout pour critiquer sa gestion, mais vous comprendrez que nous avons,
à titre de contribuables, à payer 50 000 000 $ par semaine pour
assumer l'hypothèque qu'il nous a léguée. Non seulement le
gouvernement du Parti québécois n'avait-il pas vu venir la crise
économique qui allait poindre au début des années
quatre-vingt, mais il s'en trouva fort dépourvu, puisqu'il n'avait plus
cette marge de manoeuvre suffisante pour venir en aide à ceux et celles
qui en avaient le plus besoin.
D'ailleurs, les effets se sont vite fait sentir, puisqu'on comptait par
milliers le nombre des chômeurs dans toutes les régions du
Québec. Dans certaines d'entre elles, on dépassait les 20 %. M.
le Président, qui ne se souvient de l'aventure du trou de 500 000 000 $
dans le secteur de l'éducation? C'est le Vérificateur
général qui en a découvert l'ampleur et constaté
les écarts de coûts considérables en raison de
l'inexactitude des données disponibles au ministère de
l'Éducation, comme la clientèle et les effectifs enseignants.
L'ancien ministre québécois des Finances et actuel chef de
l'Opposition officielle n'avait découvert ce trou qu'en fin de mandat.
On se demandait alors comment un grand maître comme l'ancien ministre
québécois des Finances pouvait prétendre n'avoir
décelé en aucun moment l'anarchie dans les méthodes de
calcul du nombre d'enseignants ou d'élèves au Québec.
Méthodes qui ont résulté en un trou de 500 000 000 $.
M. le Président, en ce qui a trait aux éventuels
changements politiques qui pourraient survenir au niveau constitutionnel,
j'aimerais rappeler aux membres de cette Chambre que la région de
l'Outaouais serait la plus affectée au Québec. On a souvent dit
par le passé que l'Outaouais était une région
choyée par le gouvernement fédéral et qu'en
définitive on s'y plaignait le ventre plein. C'est une fausse
vérité, M. le Président. Il convient de rappeler que tous
les gouvernements, de quelque formation politique que ce soit, qui se sont
succédé à Québec ont
incité les gens de l'Outaouais à se battre pour obtenir ce
qu'il convenait d'appeler la juste part des emplois du gouvernement
fédéral. Nous y avons cru et nous nous sommes battus pour prendre
cette part.
C'est une situation qui a bien sûr joué à notre
avantage sous certains aspects, mais qui s'est aussi
révélée un handicap en d'autres domaines. M. le
Président, quelle que soit l'ampleur du rapatriement des pouvoirs qui
découlera des négociations actuelles, c'est des milliers
d'emplois qui sont en jeu chez nous. M. le Président, nous ne croyons
pas, en Outaouais, que notre région ait à payer pour avoir suivi
le mot d'ordre que nous lançait l'ensemble des leaders francophones du
Québec et du Canada.
Le gouvernement libéral dont je fais partie s'est d'ailleurs
montré sensible à cette question en créant un
comité chargé d'étudier les impacts, sur la région
de l'Outaouais, d'un éventuel transfert de pouvoirs. L'une des
recommandations du comité en question vise à permettre à
l'Outaouais de diversifier son économie dans différents domaines,
que ce soit le domaine manufacturier, le secteur des forêts ou la haute
technologie. Pour ce faire, M. le Président, le gouvernement du
Québec sera appelé à jouer un rôle majeur en
Outaouais avec des programmes spéciaux et exclusifs à cette
région, que ce soit sous forme d'avantages fiscaux auprès des
promoteurs ou d'autres incitatifs destinés à attirer des
promoteurs majeurs en région. Ces mesures spéciales devront
prévaloir jusqu'à ce que la région de l'Outaouais ait
récupéré l'équivalent des emplois perdus dans la
fonction publique. Au niveau des programmes gouvernementaux incitatifs, il est
de notoriété publique qu'on a longtemps considéré
que l'Outaouais ne constituait pas un choix intéressant pour
l'implantation d'industries majeures. Cela était d'autant plus vrai
lorsque cette industrie générait des salaires qui se situaient
au-dessus de la moyenne.
Le Québec affichait alors un écart d'environ 10 % avec
l'Ontario au niveau de l'impôt personnel, si bien que plusieurs
élisaient tout simplement domicile chez nos voisins d'Ottawa.
Grâce au gouvernement libéral, cette différence n'existe
pratiquement plus. Comme je l'indiquais précédemment, M. le
Président, certains estiment que l'Outaouais a profité d'une
situation privilégiée. Dans les faits, c'est souvent le reste du
Québec qui a profité de ce que pouvait sembler une situation
privilégiée. Qu'il suffise de rappeler, à titre d'exemple,
que le gouvernement du Québec dispose d'une entente avec la Commission
de la capitale nationale dont le territoire couvre une bonne partie de
l'Outaouais québécois. Cette entente prévoit que le
gouvernement fédéral participera, et participe, à 50 % des
coûts pour la construction du réseau routier.
Je suis certain, M. le Président, que le ministre des Transports
aurait envie de me rappeler ici que la participation du fédéral
à ces travaux est versée au fonds consolidé de la province
et que ce n'est pas son ministère directement qui en profite, et il
aurait raison. effectivement, ces sommes ont servi jusqu'à maintenant
à financer toutes sortes de programmes à la grandeur de la
province. on pourrait dès lors penser que l'outaouais dispose d'un
meilleur réseau routier qu'ailleurs en province. mais c'est loin
d'être le cas. même avec 50 % défrayés par le
fédéral, pour la majorité des grands travaux routiers,
l'outaouais a le triste record du plus mauvais réseau routier de la
province. ce n'est pas moi qui le dis, m. le président, mais une
étude faite par le ministère des transports, et qui en arrive
à ces conclusions. en 1992, il nous faut encore passer par l'ontario
pour nous rendre par autoroute à montréal ou à
québec. m. le président, l'autoroute 50 devra faire partie des
incitatifs spéciaux que le gouvernement devra inscrire au cahier de
charge afin que nous ayons tous les outils nécessaires à la
diversification de notre économie.
M. le Président, de 1976 à 1985, le
précédent gouvernement a complètement fermé les
yeux sur cette entente, pourtant avantageuse pour le Québec. Fort
heureusement, notre gouvernement a remis cette entente en vigueur dès
son arrivée, en 1985, mais il faudra aller plus loin, parce que
l'Outaouais est aussi purement québécoise que les autres
régions du Québec. Il y va non seulement de la qualité de
vie d'une génération de Québécoises et de
Québécois mais d'un départ pour un Québec meilleur
qui aura à affronter des défis importants à l'aube des
années deux mille.
Voici, M. le Président, l'essentiel de mes remarques en regard du
dernier discours inaugural qui m'apparaît encourageant sur les plans
économique, social et culturel, pour une meilleure maîtrise de
notre avenir. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Gatineau. Je suis prêt à reconnaître
le prochain intervenant. M. le député de Bertrand.
Une voix: Je demanderais un ajournement.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous demandez
l'ajournement du débat? Alors, est-ce que cette motion d'ajournement du
débat est adoptée? La motion d'ajournement du débat est
adoptée. Il est 18 h 22. Dans les circonstances, j'ajourne les travaux
de l'Assemblée à demain matin, 10 heures.
(Fin de la séance à 18 h 22)