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(Dix heures deux minutes)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mmes et MM. les
députés, si vous voulez vous asseoir, s'il vous plaît!
Affaires du jour
Nous entreprenons les travaux de l'Assemblée nationale, ce
mercredi 20 mai, à l'étape des affaires du jour, aux affaires
prioritaires.
Affaires prioritaires
Débat sur la motion du ministre des Finances
proposant que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du
gouvernement
L'Assemblée débute le débat sur la motion de M. le
ministre des Finances proposant que l'Assemblée nationale approuve la
politique budgétaire du gouvernement. En conséquence,
conformément à l'article 273 de notre règlement, je
cède immédiatement la parole au représentant de
l'Opposition officielle en cette matière, à savoir M. le
député de Labelle. Je vous rappelle, M. le député,
que, conformément à notre règlement, vous disposez d'une
période maximale de deux heures. M. le député de
Labelle.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: Merci, M. le Président. Dans
l'introduction de son discours sur le budget, le ministre des Finances a bien
décrit les préoccupations et les attentes de la population
à l'égard de ce budget. D'abord, les Québécois ne
peuvent pas supporter une augmentation des impôts et des taxes qui
montent, après trois ans, à quelque 3 500 000 000 $, depuis la
dernière élection. Taxes de toutes sortes, camouflées,
directes, indirectes, nous en parlerons tout à l'heure. Le chômage
demeure encore aujourd'hui très élevé - 12,5 % - et la
situation des entreprises reste précaire dans tout le paysage
économique du Québec. Les Québécois, quant à
eux, sont soucieux de l'avenir économique du Québec à
moyen et à long terme, pour ne pas parler du court terme. Ils se posent
des questions sur les accords du GATT, sur l'Accord de libre-échange,
sur la concurrence internationale, bref, sur la mondialisation des
marchés, et ils se demandent comment le Québec tirera son
épingle du jeu. Les Québécois souhaitent voir le
gouvernement du Québec s'attaquer à ces problèmes et ne
pas rester inactif par rapport à cette conjoncture.
Je crois, M. le Président, que l'analyse du ministre des Finances
est juste. Malheureusement, la suite du discours sur le budget n'a pas
respecté ces prémisses. Nous avons eu un budget sans perspective,
sans initiative, désespérant. Pour reprendre ce que dit Richard
Desjardins, «en raison de la récession, le gouvernement a
décidé de fermer la lumière au bout du tunnel».
M. le Président, je voudrais traiter de trois points majeurs: le
premier, qui concerne le fardeau fiscal des Québécois; le
deuxième, la situation financière du gouvernement et, un
troisième, les mesures de relance économique.
Quant au premier point, c'est-à-dire le fardeau fiscal des
Québécois, le ministre des Finances commence toujours ses
discours sur le budget en insistant sur le fait qu'il n'annoncera aucune
nouvelle hausse d'impôt pour les particuliers, et le budget de jeudi soir
n'a pas fait exception. Mais depuis l'élection de septembre 1989, les
bonnes nouvelles s'arrêtent là. Parce qu'il faut bien comprendre
ce qu'il affirme. Il s'agit de l'impôt sur le revenu des particuliers,
point à la ligne, et rien de plus. La suite, après l'impôt
sur le revenu des particuliers, ce sont les taxes pour les particuliers, les
impôts et les taxes pour les sociétés, et le discours
prononcé jeudi soir n'a pas fait exception là encore.
Depuis 1989 jusqu'à jeudi soir, il y a eu une foule de taxes qui
ont été imposées. Nous l'avons mentionné au cours
des deux années précédentes, mais il faut quand même
y revenir. L'an dernier, j'avais fait le bilan de ces nouvelles taxes directes,
indirectes et cachées. Je le refais brièvement, M. le
Président, parce que c'est le bilan qu'il faut faire, parce que,
au-delà de l'énoncé touchant l'impôt sur le revenu
des particuliers, il y a quelque chose comme 3 500 000 000 $ de nouvelles taxes
et de taxes déjà annoncées dont on n'a pas parlé
jeudi soir.
Je rappelle ces taxes, M. le Président, celles qui sont
imposées directement par le gouvernement: des surtaxes sur les boissons
alcoolisées, portée annuelle, 166 000 000 $; surtaxe sur les
tabacs, 289 000 000 $; surtaxe sur l'essence, 326 000 000 $; hausse des
impôts des entreprises, 19 000 000 $, et les effets de la TPS
québécoise ou de la taxe de vente du Québec et de sa
réforme auraient coûté 1 016 000 000 $ aux contribuables,
aux consommateurs. Nous y reviendrons, à l'occasion, un peu plus
loin.
Maintenant, il y a eu toutes les taxes indirectes annoncées par
des organismes interposés. L'augmentation des frais de scolarité
pour les étudiants dans les universités: 104 000 000 $;
Hydro-Québec, au-delà de l'inflation: 359 000 000 $, somme
considérable; la hausse des taxes scolaires: 320 000 000 $ et une
ponction du gouvernement, à la Société de l'assurance
automobile du Québec, de 153 000 000 $. C'est le minimum que nous
estimons là-dessus.
Maintenant, il y a des taxes qui ont dû être imposées
par des organismes politiques en dehors du gouvernement, comme les
municipalités qui
ont été forcées d'augmenter leur impôt
foncier ou de réduire leurs dépenses et de comprimer en quelque
sorte leur budget. Cela a coûté aux municipalités 369 000
000 $ et donc aux contribuables, par l'impôt foncier, 369 000 000 $
au-delà des hausses de taxes scolaires. Il y a des impôts à
rebours au ministère de la Santé et des Services sociaux; nous y
reviendrons aussi. Nous les avions estimés, l'an dernier, à 100
000 000 $; nous verrons qu'ils seront portés à 135 000 000 $.
M. le Président, voilà un tableau qui révèle
que, dans les annonces des derniers budgets avant celui de jeudi, il y avait
quelque 3 300 000 000 $ de taxes additionnelles sur le dos des
Québécois depuis septembre 1989. C'est considérable!
Considérable! (10 h 10)
L'an dernier, l'augmentation de ce fardeau fiscal était
portée à 2 400 000 000 $. Cela a été repris et
c'est acquis, dans la presse qui traite de ces questions, que l'augmentation du
fardeau fiscal, en 1991-1992, a été de l'ordre de 2 400 000 000
$. Il y a aussi une autre façon de mesurer la hausse du fardeau fiscal,
c'est de faire le rapport entre les revenus autonomes du gouvernement du
Québec et le produit intérieur brut du Québec. Nous y
voyons des choses assez sensationnelles. Je donne ces chiffres pour bien situer
la question. Pour l'année financière 1989-1990, le produit
intérieur brut du Québec était de 149 652 000 000 $ et le
gouvernement du Québec, par ses revenus autonomes, y exerçait une
ponction de 24 316 600 000 $, soit 16,2 % du PIB. Le gouvernement du
Québec prenait 16,2 % du PIB. En 1990-1991, sa part a été
portée à 16,8 %, soit 25 991 400 000 $ sur un PIB de 154 066 000
000 $. C'est 16,2 % en 1989-1990, 16,8 % en 1990-1991. Maintenant, en
1991-1992, ce pourcentage est porté à 17,8 %. C'est 27 190 500
000 $ sur un PIB de 156 180 000 000 $. C'est 17,8 %. Voyez la gradation: 16,2
%, 1989-1990; 16,8 %, 1990-1991; 17,8 % en 1991-1992. C'est une mesure
significative de l'augmentation du fardeau fiscal des Québécois
en pleine période de récession.
À notre connaissance, le taux de 17,8 % enregistré en
1991-1992 représente le plus haut niveau depuis au moins 1979-1980. On
pourrait aussi dire qu'en termes bruts, incluant l'inflation, le PIB
québécois a augmenté de 2 052 000 000 $ et que le
gouvernement s'en est accaparé de 87 % puisque les revenus autonomes ont
augmenté, eux, de 1 799 000 000 $, 1 800 000 000 $, en quelque sorte, en
1991-1992. C'est vous dire la part que le gouvernement va chercher, la part
additionnelle sur l'augmentation du PIB: il se l'accapare presque en entier.
C'est ça, la réalité: l'augmentation du fardeau fiscal des
Québécois.
M. le Président, dans le budget qui a été
présenté, il y a toutes ces taxes qu'on a déjà
annoncées, mais qu'on n'a pas mentionnées auparavant. Il y a bien
sûr le lot de taxes additionnelles, dont celle de 4 % sur les services,
mais il est bon de rappeler que le budget de l'année dernière
contenait aussi un bon nombre de dispositions dont l'effet se fera plus
cruellement sentir cette année. Rappelons-en deux de ces mesures.
D'abord, la taxe sur les carburants. Je rappelle que le dernier budget avait
établi une hausse de 0,45 $ le litre. Cette hausse a été
étalée dans le temps: 0,02 $ le 3 mai dernier, le 1er septembre
0,02 $ aussi et le 1er janvier 1992 un autre 0,005 $, de sorte que son impact,
cette année, sera entier. Alors, l'impact de la hausse de la taxe sur
l'essence, en 1991-1992, a été de 248 000 000 $. Mais en
1992-1993, parce qu'il s'agit d'une année complète, l'impact sera
de 339 000 000 $. En somme, la hausse annoncée l'année
dernière coûtera aux automobilistes 91 000 000 $ de plus cette
année.
Autre exemple: les frais de garantie sur les emprunts
d'Hydro-Québec. L'année dernière, le ministre a
décidé qu'à compter de 1992 les sociétés
d'État, et on sait tous que c'est HydroQuébec qui est
visée essentiellement, devraient payer des frais de 0,5 % sur les
emprunts qu'elles font et qui sont garantis par le gouvernement. En quelque
sorte, le gouvernement augmente les taux d'intérêt payés
par Hydro-Québec de 0,5 de 1 %. En 1992, cela coûtera à
HydroQuébec 143 000 000 $. Qu'est-ce que représente ce montant
pour les contribuables? C'est une augmentation de tarif de 4 % que les
Québécois doivent payer depuis le 1er mai dernier; 4 %
d'augmentation, au-delà des autres augmentations.
Ces deux mesures, à elles seules, représentent pour les
consommateurs une hausse de leur fardeau fiscal de 234 000 000 $, par rapport
au fardeau qu'ils ont supporté en 1991-1992, sans qu'il en soit fait
mention, même dans le budget, parce que ces mesures ont été
annoncées l'an dernier et qu'elles portent toutes leurs
conséquences cette année; 234 000 000 $ de plus,
évidemment, que le ministre n'en a pas parlé.
Maintenant, M. le Président, parlons des taxes de ce budget
1992-1993, de ces augmentations de taxes. D'abord, la TVQ sur les services.
Bien sûr, le ministre a tenté de nous faire passer une
augmentation de taxe pour une diminution de taxe - il a tenté. Mais les
contribuables qui auront à la payer, à partir du 1er juillet
prochain, sauront que les taxes ont augmenté de 4 %.
M. le Président, cette taxe soulève de nombreuses
Interrogations, d'abord sur la présentation de l'information
financière qui y est relative, surtout parce que le ministre, à
l'annexe A47 de son budget, présente cette nouvelle taxe non pas comme
un alourdissement du fardeau fiscal, mais comme un allégement de
celui-ci. Je pense, M. le Président, que c'est un summum de l'art du
maquillage: personne ne s'y laisse prendre, mais tous les tableaux sont
truqués à partir de là. Tous les tableaux que l'on
retrouve dans ce document «Discours sur le budget» sont
truqués.
Ce qui se produit, c'est que, malgré tout ce
qui a été dit sur le sujet, le ministre des Finances n'a
jamais révélé l'impact réel de cette
réforme. Ainsi, avant le discours sur le budget, personne ne savait
exactement ce que rapporteraient la taxe sur les services, celle sur
l'habitation et la valeur du remplacement de la taxe sur les intrants. Au fond,
il a fait une réforme sans explications ni débat public dans la
population, sans consultation de la population parce que cette réforme a
été imposée et, évidemment, sans implication de la
population. Quels en sont les effets? D'abord, pour les consommateurs,
l'application de la taxe de 4 % sur les services et sur l'habitation
représente une charge fiscale de 740 000 000 $ en 1992-1993, soit une
période de neuf mois. Pour une année complète, ce n'est
rien de moins que 1 035 000 000 $. La taxe sur les services coûtera aux
consommateurs québécois 1 035 000 000 $ sur une base annuelle.
c'est ce que rapportera cette taxe au gouvernement l'an prochain. c'est ce que
les consommateurs devront payer en plus.
(10 h 20)
Je voudrais rappeler, M. le Président, que les
députés libéraux, les députés du parti
ministériel ont appuyé l'adoption de la loi 170 en
décembre dernier. Mieux encore, ces députés étaient
tellement enthousiastes qu'ils ont même appuyé l'imposition d'un
bâillon. On a suspendu les règles ordinaires,
régulières de l'Assemblée nationale pour faire passer
cette loi. Faut-il rappeler que la loi 170 prévoyait que cette taxe
allait s'appliquer à un taux de 8 % à l'époque? C'est donc
dire que ces députés ont voté en faveur d'un projet de loi
qui imposait une taxe de 1 480 000 000 $ pour 1992-1993 et de 2 070 000 000 $
sur une pleine année financière. ils ont suspendu les
règles avant noël pour le faire. ils ont écourté les
débats. pour une fois qu'il commençait à y en avoir un, on
l'a écourté. j'ai bien hâte de voir ce que ces
députés auront à dire à leurs commettants, à
leurs électeurs pour expliquer le geste qu'ils ont posé.
M. le Président, pour les consommateurs, cette taxe
représente une augmentation de leur fardeau de 740 000 000 $ cette
année et de 1 035 000 000 $ l'an prochain. Mais il y a aussi des impacts
importants pour les entreprises. On se souviendra qu'au moment où le
ministre des Finances a annoncé la réforme des taxes à la
consommation, il avait indiqué que cette réforme
bénéficierait principalement aux entreprises. Ainsi, disait-on,
le remboursement de la taxe payée sur leurs intrants,
c'est-à-dire sur leurs achats qui entrent dans leurs produits
fabriqués, se traduirait par un gain de plus de 1 000 000 000 $ sans
qu'on sache exactement les estimations produites par le ministère des
Finances.
Aujourd'hui, la réalité nous . apparaît tout autre.
Dans le discours sur le budget, le ministre des Finances a d'abord
réduit la valeur du remboursement de la taxe sur les intrants, sur les
achats. Ce remboursement ne vaudrait plus que 850 000 000 $ annuellement. Et en
retour de cet avantage, M. le Président, les entreprises ont vu
s'accroître leurs autres charges fiscales.
Ainsi, dans le budget 1990-1991, dont les équilibres tenaient
compte de l'harmonisation, les impôts des sociétés
étaient augmentés de 128 000 000 $ pour l'année
financière 1992-1993. Lors de la déclaration
ministérielle, le ministre des Finances annonçait une nouvelle
hausse des impôts des sociétés. Et pour 1992-1993, cette
hausse équivalait à 436 000 000 $, toujours en
échange.
Le budget 1991-1992 contenait, lui aussi, de mauvaises nouvelles pour
les sociétés. Les mesures de ce budget représentaient une
augmentation, pour 1992-1993 toujours, de leur fardeau fiscal de 19 000 000 $
et, enfin, le budget de cette année hausse à nouveau les charges
fiscales des entreprises de 175 000 000 $ en 1992-1993. C'est donc dire que,
pendant la phase d'implantation de la réforme, les charges fiscales des
sociétés ont été augmentées de 758 000 000
$. D'un avantage de plus de 1 000 000 000 $, il n'en reste donc que 92 000 000
$, mais cet avantage n'est pas encore pour cette année. Pour 1992-1993,
il s'agit d'une perte. Le remboursement de la taxe sur les achats ne
débutera que le 1er juillet prochain et, puisque ce remboursement global
a une valeur de 850 000 000 $ par année, c'est donc dire qu'en
1992-1993, en appliquant une simple règle de trois, ce remboursement,
dis-je, ne vaut que 638 000 000 $, et le fardeau fiscal des
sociétés sera, par conséquent, plus grand en 1992-1993
qu'en 1989-1990 de 120 000 000 $. Le ministre aura l'occasion de
préciser ce fait en commission parlementaire.
Nous avons aussi une perte pour 1990-1991 et 1991-1992,
c'est-à-dire pour le passé. Avant qu'elles ne puissent profiter
du remboursement de la taxe sur les achats, les sociétés ont
dû supporter un fardeau fiscal augmenté, durant tout ce temps.
Ainsi, si on compare les charges fiscales des entreprises par rapport à
la situation de 1989-1990, on constate que celles-ci ont augmenté de 104
000 000 $ sur la période 1990-f in 1992.
M. le Président, le ministre des Finances prétend
qu'à terme la réforme permettra la création de 17 000
emplois. Ce gain doit normalement résulter du remboursement de la taxe
sur les achats, qui doit se traduire par une compétitivité
accrue. Or, comme nous venons de le voir, pour les années 1990-1991,
1991-1992 et 1992-1993, les entreprises supportent un fardeau fiscal plus
élevé qu'en 1989-1990. Cette situation s'est donc traduite par
une perte de la capacité concurrentielle et, donc, par des pertes
d'emploi, ce qui s'est effectivement produit. L'hypothèse du ministre
selon laquelle la réforme créera 17 000 emplois nous
apparaît totalement sans fondement, à moins que l'on dise que l'on
part de la situation d'aujourd'hui et qu'on oublie les
emplois qui ont été perdus depuis 1989-1990.
Au fond, M. le Président, compte tenu de l'impact de la
réforme sur la consommation, il nous apparaît plus juste de parler
globalement de pertes d'emploi, et c'est exactement ce que disait le Conseil
économique du Canada, qu'introduire cette réforme au moment
où les gouvernements l'ont fait, soit au fédéral, soit
à Québec, équivaudrait à bloquer l'économie.
C'est ce qui s'est fait. Qu'on dise que maintenant, par suite du remboursement
des intrants, cela va repartir, c'est repartir d'un point beaucoup plus bas que
lorsqu'on a affirmé une telle chose.
M. le Président, il y a plus dans cette réforme, nous
l'avons déjà souligné, mais il est important de le
rappeler parce que cette vérité commence à percer en
public, de plus en plus. La réforme des taxes à la consommation
annoncée le 30 août 1990, en plein été, est
marquée du sceau de l'improvisation, du maquillage et de
l'insouciance.
Improvisation, d'abord, parce que la nature ou l'essence même de
cette taxe, de cette réforme a considérablement changé en
cours de route. Le ministre a fait cette déclaration
ministérielle. Nous en avons débattu. Nous avons eu quelques
chiffres; un certain nombre n'étaient pas précis et d'autres, sur
lesquels nous avons posé des questions, n'ont jamais été
révélés très clairement. Mais à la suite de
cette déclaration ministérielle de 1990, il y a eu beaucoup de
changements. En décembre 1990, le ministre des Finances revenait sur sa
décision de taxer les livres. L'Opposition y a joué un
rôle, mais c'est surtout le monde de l'édition qui est intervenu
pour indiquer à quelle catastrophe on allait si on appliquait cette taxe
de vente du Québec sur les livres. Donc, décembre 1990, le
ministre recule là-dessus.
Dans le budget de l'année dernière, le ministre des
Finances a annulé la baisse du taux de 9 % à 7 % qui était
prévue pour l'année 1992, et il en est resté à 8 %.
Encore là, il est allé chercher, par cette mesure, des centaines
de millions additionnels. Il a, de plus, annulé les baisses de taxes sur
l'essence, l'alcool et le tabac qui faisaient partie de la réforme
originale; encore des centaines de millions de dollars. Au mois d'octobre 1991,
il décidait de reporter de six mois la phase II de la réforme,
à savoir l'élargissement de l'assiette de la taxation aux
services et le remboursement de la taxe de vente payée par les
entreprises sur leurs achats. En quelque sorte, ce sont les entreprises qui ont
fait les frais de ce report de six mois et non pas le gouvernement.
Enfin, dans le budget de jeudi soir dernier, il a fixé la taxe
sur les services à 4 % plutôt que 8 % et a décidé de
réduire la valeur de la taxe sur les intrants, sur les achats d'au moins
20 %. Encore une fois, les entreprises ont dû payer. M. le
Président, le résultat net de tout cela, vous l'avez à la
page A47 du budget. Le résultat net aura peut-être
coûté quelque 97 000 000 $ au gouvernement, en tout ou seulement
97 000 000 $, mais en 1993-1994, le gouvernement, dans l'ensemble de cette
réforme, sera allé chercher 7 000 000 $. En d'autres termes,
l'annonce qui a été faite jeudi soir dernier ne coûte rien
au gouvernement sur une base annuelle. Au contraire, elle lui rapportera 7 000
000 $. Le tableau de la page A47 est clair là-dessus. (10 h 30)
Improvisation tout le long. Depuis pratiquement deux ans maintenant, il
y a eu des changements de cap à tout bout de champ, des
réajustements, de sorte que, maintenant, cette réforme de la taxe
de vente n'est plus celle qui avait été annoncée.
Il y a aussi dans ce dossier du maquillage qui a été fait
pour diverses raisons... Peut-être que le ministre pourra s'expliquer
là-dessus. Mais ce qu'on peut dire, c'est que dès le
départ, cette réforme a été camouflée dans
les équilibres budgétaires de 1990-1991. Elle était
incluse dans ces équilibres budgétaires, mais aucune mention n'en
était faite. On a préféré faire l'annonce de cette
réforme à l'été, en plein été, alors
que les événements d'Oka retenaient l'attention et que
l'Assemblée nationale était réunie de façon
exceptionnelle pour adopter la loi créant la commission
Bélanger-Campeau.
Donc, en plein été, alors que personne ne s'y attendait,
on est venu ici en déclaration ministérielle annoncer une
réforme fondamentale qui a donné lieu à une commission
parlementaire de quelques heures seulement alors qu'au fond, il s'agissait d'un
bouleversement du comportement des consommateurs que l'on visait et que l'on
affectait d'une taxe sur les services qui n'était pas là
auparavant.
Maquillage aussi, parce que le ministre n'a jamais voulu indiquer
clairement quels seraient les effets de cette réforme sur les
consommateurs, sur les entreprises, et quelle serait la valeur de cette taxe
sur les services sur l'habitation. Nous n'avons jamais eu de chiffres
précis, concrets, réels ou estimés.
Maquillage encore, qu'on a vu jeudi soir encore, alors que le ministre
tente de faire croire à la population qu'une taxe additionnelle de 4 %
sur les services représente un allégement du fardeau fiscal.
Vraiment, c'était le maximum.
M. le Président, insouciance enfin dans tout ce dossier, dans
toute cette réforme, parce que le ministre a bêtement
calqué sa réforme sur le modèle fédéral sans
tenir compte des particularités de l'économie
québécoise. Insouciance parce qu'il a appliqué cette
réforme brutalement, sans modulation, en pleine récession,
contribuant ainsi à augmenter, à créer du chômage
additionnel. Insouciance parce qu'il a accepté l'intrusion du
fédéral dans un champ fiscal réservé aux provinces
jusqu'à l'introduction de la taxe fédérale sur les
produits et services. Il l'a acceptée en
signant en particulier l'entente sur l'harmonisation. Et je rappelle que
le ministre du Revenu de l'époque a démissionné pour
démontrer son désaccord quant à l'harmonisation de la taxe
de vente du Québec sur celle du fédéral et quant à
l'introduction, finalement, de cette taxe sur les services. Il a eu l'occasion
à plusieurs reprises de s'en expliquer, et je crois que le public
québécois a très bien compris ce dont il s'agissait. Ils
ont perdu un ministre. Et c'est aussi effectivement la seule province qui s'est
harmonisée; toutes les autres ont bien vu venir le coup et ne l'ont pas
fait.
Nous avions indiqué quant à nous en 1987, lors de
l'annonce des intentions fédérales, alors que le
député de Lévis était le porte-parole de
l'Opposition, que cela avait pour conséquence de mettre l'odieux de ces
taxes sur les provinces et qu'éventuellement celles-ci devraient se
retirer progressivement. Nous en voyons les effets aujourd'hui alors que le
Québec, dans un champ où il était le seul maître, a
de la difficulté à surtaxer. Et tout le monde le comprendra. Il
ne peut pas surtaxer les consommateurs. Et ce qui s'est passé, c'est que
le gouvernement le plus mal administré s'est servi le premier. S'est
servi le premier. C'est ça la réalité.
Cela apparaît particulièrement évident, vrai dans le
domaine culturel. C'est le meilleur exemple qu'on puisse trouver.
Jusqu'à la venue de la taxe sur les produits et services, la taxe
fédérale, le gouvernement fédéral était
à toutes fins utiles absent de ce champ de taxation, comme le
Québec d'ailleurs. Ce sont les municipalités qui occupaient ce
champ. Et l'on comprendra que ce sont les municipalités qui avaient un
intérêt premier à s'occuper de culture parce qu'elles
étaient proches des citoyens, qu'il s'agit d'activités qui se
passent sur les lieux, et que leur donner un champ fiscal relatif à des
activités qui sont aussi décentralisées, aussi proches des
gens, c'était l'art du bon sens, le premier geste à poser,
c'était évident.
Donc, les municipalités occupaient ce champ: 10 % de taxes
d'amusement. Personne ne s'en plaignait, tout le monde était content, et
tous les députés ici en cette Chambre savent très bien
que, pour susciter des activités culturelles, les municipalités
étaient au premier rang parce que cela leur rapportait un minimum de
revenus qui compensaient les efforts qu'elles mettaient à susciter des
activités culturelles. C'est ça la réalité.
Aujourd'hui, nous nous retrouvons dans une situation complètement
inversée. Les municipalités ont été exclues de ce
champ fiscal, d'un revenu de 10 % qu'elles avaient sur certaines
activités. Ce sera dorénavant zéro. Donc, elles n'auront
plus aucun intérêt à se préoccuper de la culture,
à organiser des activités culturelles. Le Québec, lui,
occupera une place de second rang. Il n'y était pas auparavant,
pratiquement pas; aujourd'hui, il y sera pour 4,28 %. Parce que, encore
là, il va composer sur la taxe fédérale de 7 %. En
réalité, maintenant, c'est le gouvernement fédéral
qui ira chercher 7 % des activités culturelles qui seront
organisées localement. C'est l'aberration que l'on peut trouver,
l'inadéquation profonde qu'il y a entre des responsabilités
dévolues tout naturellement aux municipalités et les sources de
revenus qui maintenant se retrouveront au plan du gouvernement
fédéral, le gouvernement le plus loin. Et Dieu merci, on
espère qu'il n'enverra pas des fonctionnaires essayer d'organiser des
manifestations théâtrales, culturelles ou de loisirs dans les
municipalités. Il me semble que cela va de soi. Alors, c'est une
distorsion majeure que l'on retrouve sur le plan culturel.
M. le Président, je voudrais simplement souligner que, par
ailleurs, on prétendait vouloir donner au Québec la
souveraineté culturelle, il y a quelques années. Le premier
ministre actuel en a même dans les années soixante-dix, en effet,
fait son cheval de bataille constitutionnel. Rappelons-nous le grand slogan de
la souveraineté culturelle. C'est maintenant le fédéral
qui va tirer des revenus du domaine culturel alors que les municipalités
qui en exerçaient les responsabilités en sont exclues.
Ce que l'on voit dans le domaine culturel est le prélude à
ce qui se passera ailleurs puisqu'on le voit, le champ des services
étant occupé par Ottawa, les provinces et le Québec
devront s'en retirer à la moindre difficulté, à la moindre
pression. Dès que l'on verra que la concurrence, d'ailleurs
particulièrement, jouera sur le plan des services, la pression sera
considérable. (10 h 40)
On pourrait parler dans ce secteur du domaine du tourisme. C'est un
secteur névralgique pour le Québec, une des plus grandes
industries du Québec. Maintenant, le fédéral y est
à 7 %: taxe à la consommation à 7 %. Le Québec se
contentera de 4 %. Ça devrait être au moins l'inverse. En
réalité, le Québec, pour de saines considérations
économiques, aurait dû en rester à zéro, par exemple
dans le domaine de l'hébergement. Dans toute cette confrontation de la
concurrence, c'est le Québec qui sera en position difficile,
délicate et, au bout de la ligne, intenable. C'est vrai dans le domaine
culturel, c'est vrai dans le domaine touristique; ce sera vrai dans d'autres
domaines, dès que la concurrence sera sévère.
M. le Président, la conclusion, dans cette question de la
réforme de la taxe de vente du Québec, c'est que nous la voyons
très nettement, en termes constitutionnels, en termes de pouvoirs pour
le Québec, de diminution de pouvoirs pour le Québec. Le premier
ministre de l'Union Nationale du temps, M. Maurice Duplessis, était
allé récupérer, chercher le champ de l'impôt sur le
revenu des particuliers. Et ceux qui s'en souviennent se rappelleront la
bataille considéra-
ble qui avait été faite, avec l'appui de la population,
avec l'appui des élites du temps. Le premier ministre libéral du
début des années soixante, M. Jean Lesage, avait augmenté
ce champ de l'impôt sur le revenu des particuliers et des entreprises de
façon considérable.
Nous nous retrouvons avec un champ d'impôt sur le revenu des
particuliers et des entreprises à 50 %, en gros: la moitié
occupée par le fédéral, la moitié occupée
par le gouvernement du Québec. Tout le monde, toute la population a
toujours considéré que c'était un gain pour les
Québécois, un gain en termes d'autonomie, un gain en termes de
meilleure administration, puisqu'on s'occupait de façon plus directe des
biens des citoyens. Mais ce qu'on a fait maintenant, par cette réforme
de la taxe de vente, par cette harmonisation qu'on a acceptée, par le
fait qu'on a accepté l'intrusion du fédéral dans le champ
de la taxe de vente, en quelque sorte, c'est qu'on a cédé les
pouvoirs du Québec, on a cédé le droit du Québec
à ce champ qui était du domaine exclusif du Québec,
auparavant. M. le Président, je pense que c'est un constat majeur que
nous faisons là, et ce gouvernement doit en porter la
responsabilité.
Dans ces questions du domaine fiscal, un dernier point que je veux
toucher, M. le Président, touche la façon, encore une fois. On a
vu qu'il y a, en suspens, une question de privilège sur les droits de
l'Assemblée, question très importante et où, finalement,
le président de l'Assemblée nationale a reconnu que les droits
des parlementaires avaient été lésés. On ne
respecte plus ces droits des parlementaires. Il y aura un débat à
ce sujet. Mais dans le domaine de la santé, notamment, on a
annoncé, avant le budget, des mesures qui ont des impacts
budgétaires de l'ordre de 135 000 000 $, au mépris même des
droits de ces parlementaires.
M. le Président, je vais simplement citer quelques extraits, sur
ce sujet, d'un editorial paru ce matin dans Le Devoir, un editorial
signé de Gilles Lesage, qui commence comme suit: «Le gouvernement
québécois en prend de plus en plus à son aise avec les
règles séculaires qui, dans notre régime parlementaire,
déterminent la présentation, la discussion et la mise en oeuvre
du budget.» Le vendredi 8 mai, il y a eu un premier bris de ces
règles parlementaires: six jours avant l'annonce du budget, on annonce
des décisions gouvernementales importantes sur une somme de 135 000 000
$ qui devrait, qui aurait dû être annoncée par le ministre
des Finances.
M. le Président, je pense qu'on a là, en synthèse,
la démarche qui a été suivie en ce qui concerne la
réforme de la taxe de vente du Québec. Camouflage, improvisation
et, finalement, insouciance des droits profonds du Québec, c'est le
constat que nous devons faire, sans compter tous les effets nocifs,
désagréables et pernicieux de cette réforme de la taxe de
vente.
M. le Président, je voudrais maintenant aborder cette question de
la situation financière du gouvernement. On constate d'abord qu'à
partir de révolution des perspectives triennales il se produit une
dégradation constante de la santé financière du
Québec. Je voudrais simplement, sur ce plan, citer quelques chiffres
qui, à mon sens, ont leur importance. On se souviendra tous avec quelle
emphase le ministre des Finances a annoncé, jeudi soir dernier, qu'il
avait réussi à réduire le déficit de 405 000 000 $
par rapport au niveau de 1991-1992. M. le Président, cela ressemblait
fort à une déclaration jovialiste - et c'est un terme très
doux pour la traduire - d'autant plus que, derrière cette manière
qui est employée, se cache une réalité encore moins
emballante, celle d'une dégradation très importante de la
santé financière du gouvernement du Québec sous
l'administration libérale.
D'abord, l'évolution du déficit budgétaire depuis
l'élection générale de septembre 1989: en 1989-1990, pour
cette année-là, le déficit a été de 1 659
000 000 $; l'année suivante, il est passé à 2 825 000 000
$, une augmentation de 70 % du déficit; en 1991-1992, il atteint 4 195
000 000 $ et, maintenant, ce qu'on nous annonce pour 1992-1993, c'est 3 790 000
000 $. Je vais noter au passage, M. le Président, que le déficit
de 4 195 000 000 $ constitue un record de tous les temps au Québec, 4
195 000 000 $ et, déjà, comme on le voit, le portrait n'est pas
reluisant.
Allons plus loin sur les intentions et les réalisations. Si l'on
prend, en particulier, les prévisions triennales du solde des
opérations budgétaires, on verra une constante
dégradation. Par exemple, dans le discours sur le budget de 1989-1990,
les prévisions pour les trois années, 1989 à 1992,
étaient de 4 575 000 000 $ de déficit. C'était ça,
les prévisions, une certaine stabilisation du déficit autour de 1
500 000 000 $. Budget 1990-1991, changement encore là, mais quand
même on en reste dans des prévisions, je dirais, jovialistes
effectivement, on n'admettait pas la récession qui était en train
de se manifester, on ne voulait pas la voir, malgré les indices
très clairs de ce qui se passait. On prévoyait toujours que les
déficits totaux des trois années, 1990 à 1992-1993,
atteindrait 4 750 000 000 $. Le budget 1991-1992, l'an dernier, subitement, on
rajuste. Les prévisions budgétaires de déficit dans ce
budget 1991-1992, pour les trois années y compris la première,
passaient à 7 500 000 000 $ et, finalement, le budget qui vient de nous
être déposé estime que le déficit budgétaire
de 1992-1993 et des deux années suivantes passera à 9 800 000 000
$. (10 h 50)
Quels sont les constats que l'on fait entre ce qui avait
été annoncé, 1989-1990, pour les trois années, 1989
jusqu'à 1991-1992? Le déficit prévu était de 4 575
000 000 $ sur ces trois années, le déficit réel a
été de 8 679 000 000 $, le double pratiquement de ce qui avait
été prévu, 8 679 000 000 $. Nous avons d'annoncé un
défi-
cit, pour 1991-1992, de 4 195 000 000 $. Peut-être sera-t-il un
peu plus élevé, comme l'an dernier, de quelques dizaines de
millions, mais de l'ordre de 4 200 000 000 $. On était parti d'une
prévision de 3 480 000 000 $. Alors, cette année, en partant, on
prévoit un déficit de 3 790 000 000 $; le déficit le plus
élevé qui n'ait jamais été annoncé par un
gouvernement du Québec, il faut bien le voir.
Cette prévision de déficit repose sur une hypothèse
de péremption de crédits de 753 000 000 $. C'est pratiquement la
totalité de tout ce qui a été périmé durant
l'année dernière et l'année est à peine
amorcée. L'année est à peine amorcée! C'est dire
qu'il s'agit d'une commande d'importance donnée aux ministères et
que, déjà, les crédits dont nous avons terminé
l'étude hier sont amputés, de façon globale, d'une somme
de 753 000 000 $ par le ministre des Finances.
Et que faut-il ajouter, M. le Président? C'est que ce
résultat de 1992-1993 repose sur la hausse du fardeau fiscal qui a
été annoncée, sur des tranferts fédéraux qui
sont très élevés cette année parce qu'ils
comportent des corrections sur les années antérieures qui ne se
produiront qu'une fois, parce que ces transferts fédéraux
diminueront à partir de l'an prochain.
Donc, en 1989-1990, le ministre des Finances prévoyait, pour les
trois années suivantes, un déficit total de 4 575 000 000 $. La
réalité, 8 670 000 000 $, deux fois plus, et les quatre
dernières prévisions triennales du ministre des Finances montrent
une progression constante de l'endettement du gouvernement du Québec. Il
s'agit de voir jusqu'à quel point, lorsqu'on fait ces moyennes
triennales, on est en train de s'aligner sur des déficits de 10 000 000
000 $ sur des périodes de trois ans au moins, qui ont même
atteint, de 1991-1992 à 1993-1994, 11 245 000 000 $.
La réalité dépasse toutes les prévisions, a
dépassé toutes les prévisions et les deux périodes
de trois ans, allant de 1990-1991 à 1992-1993, qui sont de 10 809 000
000 $ de déficit et, de 1991-1992 à 1993-1994, de 11 245 000 000
$ sont les deux plus mauvaises performances d'un gouvernement du Québec
de toute l'histoire. Ce sont des déficits considérables,
considérables.
Qu'on arrête de faire le retour sur le passé, alors qu'en
pleine période de prospérité économique, de
1986-1987 à 1988-1989, on accumulait, encore là, 6 800 000 000 $
de déficit et les années suivantes, on tourne toujours autour de
6 000 000 000 $ pour maintenant atteindre les 10 000 000 000 $, 11 000 000 000
$. Je souligne que l'année dernière le ministre prévoyait
un retour vers l'équilibre budgétaire au rythme de 1 000 000 000
$ par année. Aujourd'hui, dans ses prévisions, ce rythme est
réduit de moitié.
La conclusion qu'il faut en tirer, c'est que la situation
budgétaire est non seulement très difficile, mais qu'en plus elle
ne cesse de se détériorer malgré toutes les
déclarations que veut bien faire le ministre des Finances. Bien
sûr, ce gouvernement pourra dire, à l'occasion, qu'il s'agit des
déficits antérieurs. Mais je lui dirai qu'il pourrait d'abord
faire le procès du fédéral, alors que le
fédéral a procédé à un désengagement
constant, notamment à l'égard du financement de la santé,
que nous avons vu à travers tous les transferts fédéraux
dans les dernières années, et il y a eu des études
là-dessus, mais qu'il y a eu aussi un abandon du principe de
l'universalité pour ses programmes à lui, alors qu'il impose
l'universalité pour les programmes du Québec. Donc, il a
transféré ses responsabilités.
On a vu qu'au cours des dernières années le
fédéral s'est sorti du financement de la caisse de
l'assurance-chômage, qu'il s'est sorti des grands programmes, qu'il a
désindexé les pensions de vieillesse pour ceux dont la pension
dépassait les 50 000 $ par année. Alors, on voit très bien
qu'au cours de ces périodes le fédéral, qui s'est mal
administré, a reporté et reporte de plus en plus le fardeau de
son financement, du financement de son énorme dette sur le dos des
provinces et, en particulier, sur le dos du Québec.
M. le Président, je pense que dans tout le débat qui
s'engage en ce qui concerne la Constitution, en ce qui concerne le statut futur
du Québec, il ne faudra jamais oublier que c'est en bonne partie le
gouvernement fédéral qui est la cause des difficultés
économiques du Québec, sans compter la mauvaise administration de
ceux qui sont en face. Ces deux facteurs à eux seuls sont d'une
importance capitale: les problèmes du système et les
problèmes de la mauvaise gestion des gens d'en face.
M. le Président, un troisième point que je veux aborder,
c'est celui des mesures de relance économique. La situation est
pratiquement intenable et, pourtant, le gouvernement ne fait rien, pratiquement
rien. Quelle est la situation économique actuelle? D'abord, le produit
intérieur brut du Québec a reculé de 0,1 % en 1990, et de
1,1 % en 1991. Le PIB a diminué. La production totale du Québec a
diminué. C'est un fait considérable qui indique très bien
que nous sommes en récession. Le recul du PIB a commencé en 1990
- a commencé en 1990 - alors que le gouvernement niait la
réalité de la récession. Le taux de chômage atteint
12,5 % - 12,5 %! Considérable! - et on ne voit pas de perspective
prometteuse. On ne voit pas de correction à cette situation. Le niveau
d'emploi a diminué constamment au cours des six derniers mois. Mois
après mois, les emplois diminuent: 73 000 emplois perdus au cours de ces
six derniers mois. Il y a de plus en plus d'adultes aptes au travail qui ont
perdu l'espoir de trouver un emploi. Il y en a 600 000 de ces personnes, au
Québec, qui se cherchent un emploi. Les entreprises sont en
difficulté, dans un état précaire. Et, en particulier, le
président de l'Association des manufacturiers
du Québec le souligne, et il a raison, les
entreprises sont dans une situation absolument précaire après
tout ce qui leur est tombé sur la tête et, notamment, le fardeau
fiscal additionnel imposé par ce gouvernement.
Dans cette conjoncture, le gouvernement avait la
responsabilité d'agir. Qu'est-ce qu'il a fait? Très peu,
pratiquement rien, et c'est ça le drame, il a l'air content de n'avoir
rien fait. Il faut absolument relancer l'emploi. La production
intérieure brute augmentera si l'emploi augmente, si les gens sont au
travail. Or, qu'a fait le gouvernement pour remettre les gens au travail? On
dira que la première mesure qu'il a employée, ça a
été de réduire la consommation et, donc, de réduire
le nombre d'emplois. Il en est le premier responsable. Que fait-il? Il y avait,
en particulier quant à une mesure, un programme de relance PME. Il le
reprend cette année, il le corrige, et il le remplace par un autre
programme. (11 heures)
II est étonnant de souligner que le ministre de
l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, qui se vantait d'avoir
changé les anciens programmes qui avaient été mis en
place, en est maintenant réduit à utiliser la même nature
de programmes, parce qu'il revient aux garanties de prêt, ce qui avait
été mis en place par un de ses prédécesseurs, M.
Rodrigue Biron. Mais c'est moins généreux. On revient à
cette formule, mais en en limitant l'application de façon significative.
On verra, par exemple, que ce programme offrira une garantie de prêt aux
institutions financières lorsque ces dernières financeront un
projet d'investissements effectués par une entreprise.
Ce qu'on dit un peu plus loin, c'est que ces projets, pour
être admissibles, doivent avoir pour objet l'investissement ou le
regroupement d'entreprises, incluant des dépenses de formation à
la recherche et au développement et de fonds de roulement. Il ne s'agit
pas de protection d'entreprises qui existent déjà; il s'agit
d'une nouvelle sorte d'entreprises. Donc, c'est sûr que ce programme
n'aura pas la même extension que celui qui avait déjà
été mis en place à cet égard. Il s'agira de
quelques entreprises et non pas de milliers d'entreprises. Même si
ça peut être louable, dans ce domaine, de le faire, il reste quand
même, au fond, qu'on ne résout pas le problème majeur des
entreprises qui est de les protéger, de leur donner un filet de
sauvetage en pleine période de récession, loin de là.
D'ailleurs, les prévisions budgétaires indiquent qu'il n'y aura
que 60 000 000 $ de mis dans ce programme. C'est donc un petit programme par
rapport aux besoins immenses des entreprises à l'heure actuelle.
Que fait-on dans le domaine de la rénovation
domiciliaire? On reconduit la mesure de l'année dernière. Je
dirais que c'était l'une des seules mesures valables du plan de
l'année dernière. On la reconduit, mais on doit noter, au
passage, la disparition du programme Mon taux, mon toit. Donc, sur ce plan, il
s'agit d'un désengagement du gouvernement plutôt que d'un
accroissement de son activité dans le secteur, parce qu'il y a un
programme sur deux qu'on ne reconduit pas sur ce plan-là, dont Mon taux,
mon toit. Important.
On annonce un super programme de 35 000 000 $ pour la
voirie locale. M. le Président, il faut lire de quoi il s'agit pour bien
comprendre que ce montant de 35 000 000 $, injecté en 1992-1993, a pour
effet d'améliorer l'état de certaines routes avant qu'on en
transfère la responsabilité aux municipalités. Or, pour
qui connaît le dossier, l'on sait que 35 000 000 $ dans le réseau
routier local qu'on veut remettre aux municipalités, c'est une goutte
d'eau dans un océan. C'est loin de faire face aux responsabilités
du gouvernement, absolument loin. On est devant un rien par rapport à
des besoins immenses. On se rappellera que le gouvernement, au cours des cinq
ou six dernières années, a considérablement
négligé l'entretien de ses routes. Mon collègue de
Lévis y a fait référence à plusieurs reprises, et
je suis sûr qu'il pourrait le démontrer encore de façon
plus détaillée que je ne peux le faire ici.
Le gouvernement s'engage dans un programme de 100 000 000 $
pour les routes, condition-nellement à la participation
fédérale, alors qu'il n'a même pas dépensé
les fonds de l'entente actuelle. Il veut rendre son action conditionnelle
à la participation fédérale et, lorsqu'on connaît
les méandres des négociations entre le Québec et le
gouvernement fédéral, on peut savoir qu'il n'y aura rien de fait
cette année sur ce plan-là. C'est une façon de lancer un
montant de 100 000 000 $ dans l'air, qui n'aura aucun résultat concret
sur les routes nationales. D'ailleurs, dans ses prévisions
budgétaires, le ministre ne prévoit aucun impact financier.
M. le Président, le gouvernement a trouvé le
tour de faire la mouche du coche dans les sociétés
régionales d'investissement. Les sociétés
régionales d'investissement sont une excellente initiative du milieu
bien avant d'être une initiative du gouvernement. Il s'agit d'une
initiative de la Caisse de dépôt et placement du Québec, de
la Banque Nationale, du Mouvement Desjardins et du Fonds de solidarité
des travailleurs du Québec. Ce sont ces institutions qui sont à
l'origine de cette initiative et, en particulier, de la financière des
Coopérants qui est maintenant intégrée à la Banque
Laurentienne.
Ces initiatives s'y retrouvent dans des fonds de l'ordre de
100 000 000 $. Que fait le gouvernement? Il va contribuer à
l'administration de ces programmes pour étendre les subventions, pour
étendre cette initiative, pardon. Donc, 1 800 000 $ par année,
c'est ça son implication sur des fonds de 100 000 000 $.
Je dirai, M. le Président, qu'une mesure a retenu
mon attention en ce qui concerne le
soutien à l'innovation technologique et à
l'automatisation, où il y a quelques millions de dollars effectivement.
Je crois que le meilleur côté de ce programme consiste en ce que
les entreprises comme le gouvernement, mais surtout les entreprises, devront
travailler avec les collèges, le réseau des cégeps. Ceci
m'apparaît prometteur, mais il semble bien, cependant, qu'on ait
fractionné ces millions en toutes sortes de petits fonds où l'on
risque fort de se perdre dans les méandres administratifs. Maintenant,
si la volonté y est, peut-être bien qu'on peut souligner cette
initiative actuellement. Elle est mince, M. le Président, très
très mince. Et si l'on en juge par le succès des anciennes
mesures que le gouvernement a instaurées dans ce domaine, je pense qu'on
ne peut pas être très optimiste parce que, par exemple, le Fonds
de développement technologique du Québec ne dépense
toujours pas les fonds qu'on lui a attribués. Il ne dépense
toujours pas les fonds qu'on lui a attribués.
Enfin, le ministre revient avec son programme d'emplois forestiers.
À chaque année, on y met quelques millions. Ce n'est pas un
programme nouveau; on le continue. Quelque 6 000 000 $, 7 000 000 $. Il s'agit
encore une fois de quelques sommes, quelque argent, des grenailles
insuffisantes et, au fond, il s'agit d'une annonce que l'on fait à
chaque année pour ne pas oublier de parler des forêts au
Québec qui constituent l'une des grandes industries du Québec.
Mais le gouvernement n'y met rien de significatif, rien de concret, à
toutes fins pratiques. Je pense que le ministre devrait convaincre son
collègue, le président du Conseil du trésor, d'en faire un
programme permanent. C'est ça qu'il devrait faire. C'est de la nature
des choses. Il devrait y revenir plutôt que de faire un petit paragraphe
à chaque budget pour toujours dire la même chose.
Je dirais aussi qu'il en est de même pour les sommes qui sont
distribuées à la Gaspésie et aux
îles-de-la-Madeleine. À chaque année ça revient dans
le budget, mais le ministre veut se donner le beau rôle d'annoncer encore
des sommes qui devraient, de toute façon, venir au budget du
Québec.
M. le Président, j'ai bien vu un programme sur lequel on donne
foule de détails. Sans argent, mais une foule de détails. Il
s'agit de la participation des travailleurs à l'amélioration des
résultats de l'entreprise. Quatre pages dans le discours sur le budget
là-dessus, M. le Président. Je vais cependant vous en lire
quelques extraits, parce qu'il s'agit de programmes assez curieux. D'abord, ce
programme est basé sur le concept de la qualité totale. Tout le
monde en est, tout le monde désire la qualité totale, tout le
monde désire améliorer la productivité des travailleurs,
et les travailleurs eux-mêmes veulent le faire, bien évidemment.
Au bas de la page A75, M. le Président, je vous lirai ceci:
«Aussi, pour inciter les employés et les employeurs à agir
ensemble pour relever la compétitivité de leur entreprise, un
incitatif fiscal est introduit pour appuyer la mise en place de régimes
d'intéressement des travailleurs aux résultats de l'entreprise
lorsqu'ils s'inscrivent à l'intérieur d'une démarche de
qualité totale.» Et surveillez bien la démarche, M. le
Président.
La démarche de la qualité totale. D'abord,
«l'implantation d'une démarche de qualité totale est un
processus continu qui s'échelonne sur une période de trois
à cinq ans. Pour attester qu'il a effectivement entrepris une
démarche de qualité totale, l'employeur devra faire la
démonstration qu'il a réalisé des étapes
préliminaires à une telle démarche soit, notamment:
«la nomination d'un coordonateur de la qualité; «la
sensibilisation des employés par des cours d'initiation à la
qualité totale; «l'élaboration de procédures
écrites permettant d'instaurer un programme d'assurance-qualité;
«la formation d'un comité bipartite (employés-employeur) de
gestion de la qualité; «la mise en place de cercles de
qualité.»
Ça, c'était la première étape, M. le
Président, dans l'entreprise. (11 h 10)
Maintenant, il y a l'émission d'un visa. Pour l'obtenir, une
entreprise admissible devra soumettre sa demande accompagnée de tous les
documents pertinents au bureau du ministère de l'Industrie, du Commerce
et de la Technologie de sa région. Le dossier relatif à la
demande devra notamment contenir: «un plan d'amélioration de la
qualité; «une déclaration signée par l'employeur et
par un travailleur mandaté par les employés à l'effet que
les étapes préliminaires à la démarche de
qualité totale ont été réalisées; «une
description du régime d'intéressement des travailleurs; et
«une déclaration signée par l'employeur et par un
travailleur mandaté par les employés attestant que le
régime d'intéressement a été offert à
l'ensemble des employés et qu'une majorité d'entre eux l'ont
accepté,» ce qui, évidemment, implique une élection
ou un vote. «Le ministère de l'industrie, du Commerce et de la
Technologie fera connaître sous peu les modalités de la
procédure d'émission du visa - parce qu'on n'en reste pas
là, on vient de compliquer les choses - ainsi que les conditions
détaillées que devront satisfaire les formules
d'intéressement et la démarche de qualité totale pour
rencontrer les exigences de la présente mesure.» Alors, je pensais
que c'était détaillé, mais non, il y a des conditions
encore plus détaillées que ce que je viens de lire.
Pour couronner le tout, M. le Président, après
s'être adressé au ministère de l'Industrie, du Commerce et
de la Technologie, on doit aller maintenant au ministère du Revenu.
«Le ministère
du Revenu est habilité à établir la
réglementation relative à l'enregistrement des régimes
d'intéressement visés par cette mesure fiscale. «Dans le
cadre de la politique générale de tarification, la demande
d'enregistrement au ministère du Revenu comportera des frais de 200 $
pour les entreprises.» Rien de moins, M. le Président.
Finalement, M. le Président, pour bien comprendre que le
gouvernement n'est pas prêt à appliquer cette mesure, «les
régimes d'intéressement des travailleurs enregistrés au
ministère du Revenu du Québec après le 31 décembre
1992 et avant le 1er janvier 1996 seront admissibles à cette
mesure.»
M. le Président, je croyais comprendre que la qualité
totale devait être un souci d'abord à l'intérieur de
l'entreprise. Ce qu'on en fait actuellement, c'est une mesure administrative
qui touche le ministère de l'Industrie, du Commerce et de la
Technologie, qui touche le ministère du Revenu et, à toutes fins
pratiques, lorsque les entreprises vont s'embarquer dans un tel processus,
elles ne sauront jamais quand en sortir.
M. le Président, on alourdit ce qui doit être une
intention, ce qui doit être une préoccupation, ce qui doit
être une philosophie à l'intérieur de l'entreprise. Le
gouvernement s'en mêle et cela a l'air - vous m'excuserez de faire cette
comparaison parce qu'elle n'est pas... il me semble qu'elle est
péjorative, mais, au fond, elle est enfantine par rapport aux besoins
des entreprises. Enfantine.
M. le Président, on revient maintenant avec la bonification du
crédit d'impôt à la formation des travailleurs. Alors
là, je pense qu'il faut constater que le gouvernement
révèle un échec dans ses politiques concernant la
formation dans l'entreprise.
D'abord, en ce qui concerne la formation professionnelle. Ce qui a
été annoncé, c'est la reconduction du programme
annoncé en 1990-1991, simplement la reconduction. Mais ce programme
coûtait, selon les prévisions de 1990-1991, 100 000 000 $ par
année. On voulait y mettre 100 000 000 $ par année. Ce
crédit d'impôt devait coûter 100 000 000 $ et je pourrais
vous montrer le document, l'annexe A15 du budget de l'année
antérieure, 1991-1992, qui est exactement la même annexe
reproduite dans le budget de cette année, exactement la même
annexe, avec une différence, cependant, dans les prévisions
budgétaires, M. le Président. Il s'agit du budget de 1990-1991
qui est le même aussi qu'en 1992-1993. La différence, M. le
Président, c'est que, dans le budget de 1990-1991, on avait prévu
dépenser, l'an dernier, 100 000 000 $ et dépenser, en 1992-1993,
108 000 000 $. Quels sont les crédits qui sont attribués cette
année? À la page 118 de l'annexe A, on voit que ces ambitions ont
été réduites à 30 000 000 $ par année. De
100 000 000 $, deux ans après, on baisse à 30 000 000 $. C'est un
constat d'échec lamentable, mais vraiment lamentable. On ne peut pas y
couper, le gouvernement a failli à sa tâche sur ce plan-là.
Échec lamentable en ce qui concerne la formation professionnelle. Une
chance que le ridicule ne tue pas parce qu'il serait mort là-dessus.
Autre programme d'aide à la formation individuelle des
travailleurs. Ce programme a aussi été annoncé l'an
dernier. L'aide à la formation individuelle des travailleurs, cela
devait bénéficier à 5000 travailleurs; aucun n'en a
bénéficié. Radio-Canada en a fait une manchette, mercredi
soir dernier. C'est zéro, dans ce programme, il n'est pas encore
démarré. Et le ministre des Finances nous l'annonce une
deuxième fois, en disant, en espérant qu'il va être mis en
pratique dans les semaines qui viennent. Mais c'est zéro. Sans compter
que, dans l'autre programme, on n'a même pas dépensé les
sommes qui avaient été allouées. On est réduit,
maintenant, à quelque 30 000 000 $ par année. Conclusion: c'est
un échec lamentable du gouvernement en ce qui concerne la formation
professionnelle. Recherche-développement, on n'en parle même plus.
Le gouvernement ne fait plus rien.
De toutes ces mesures que je viens d'énu-mérer par rapport
au budget de jeudi dernier, le gouvernement devra y mettre 71 000 000 $. Cela
coûte 71 000 000 $ au gouvernement; c'est ça, son effort quant
à la reprise économique. Une goutte d'eau dans l'océan,
bien sûr, et, de ce montant, une bonne partie ne concerne que la
reconduction de certaines mesures en place depuis plusieurs années.
Certaines de ces mesures démontrent qu'elles ne répondent pas aux
attentes, comme dans la formation professionnelle. D'autres n'auront qu'un
impact en 1993-1994, pourvu qu'elles fonctionnent, ce qu'on doit
espérer. Le ministre des Finances devrait avoir honte de
présenter ces mesures comme un plan de relance.
D'autres mesures affectent les contribuables, tant le citoyen que les
entreprises, par exemple, la taxe sur le capital. Il s'agit de l'inclusion,
dans le capital des entreprises, des acceptations bancaires, donc dans le
capital versé. Je pense qu'on doit être d'accord sur le principe,
dans la mesure où les entreprises visaient à ne pas payer la taxe
sur le capital, sur du capital qu'elles utilisaient de façon pratique,
de façon permanente. Il leur en coûtera 33 000 000 $ de plus. En
termes de compétitivité, on peut encore se poser la question.
Mais nous devons souligner que la mesure a un caractère
rétroactif parce qu'elle touche des entreprises dès le soir du
dépôt du budget, pour toutes celles dont l'année
financière finit à partir du 15 mai dernier.
Le gouvernement augmente la tarification un peu partout; ça
consiste à aller chercher 89 000 000 $. Encore une fois, augmentation du
fardeau fiscal.
Le gouvernement fait encore une opération
de «siphonnage» de la Société de l'assurance
automobile du Québec: 275 000 000 $. Mon collègue a eu
l'occasion, en interpellation, de faire ressortir l'aspect probablement
illégal de cette opération, sur lequel le gouvernement aura
à se défendre puisque la réserve de stabilisation
appartient aux assurés et n'appartient pas aux contribuables en tant que
tels, qu'elle devrait servir à améliorer les services,
plutôt qu'augmenter les fonds du gouvernement, elle devrait servir
à réduire les primes. (11 h 20)
Le gouvernement récupère les surplus des fonds
spéciaux: 25 000 000 $ qu'il va chercher là. Il s'agit, en effet,
d'activités gouvernementales, M. le Président, mais je dois dire,
toutefois, que l'on doit considérer que toutes ces opérations
commencent à ressembler, là aussi, à du camouflage;
l'ensemble des fonds spéciaux représente des sommes, des budgets
de fonctionnement de l'ordre de 500 000 000 $. Il y a 18 ministères et
organismes dont le budget annuel est moindre que ces 500 000 000 $ et qui
doivent venir en Chambre défendre leurs crédits annuels, alors
que ces 500 000 000 $ ne sont pas vus par l'Assemblée nationale. Encore
une façon, on échappe au contrôle parlementaire, M. le
Président.
Il y a enfin, M. le Président, une ponction additionnelle dans la
fonction publique: 2 % de réduction des effectifs permanents, auxquels
on ajoute 2 % additionnels chez ces employés. Je souligne l'effet
démoralisateur chez les employés de l'État. Jusqu'à
présent, d'ailleurs, ces mesures n'ont pas servi à réduire
le nombre de fonctionnaires, mais plutôt à dégager des
ressources pour les affecter à d'autres activités.
M. le Président, les difficultés budgétaires du
gouvernement ne justifient pas la paralysie du gouvernement. À court
terme, le gouvernement avait la responsabilité de stimuler la relance et
l'on doit considérer, souligner que les investissements dans le secteur
public, qui sont financés par le service de la dette, étaient
envisageables. On a préféré réduire ces
investissements alors que nous sommes toujours en récession et qu'il
faut le constater.
Je donne simplement quelques chiffres, M. le Président. L'an
dernier, dans le budget du gouvernement, on avait prévu des
investissements publics de l'ordre de 1 888 000 000 $, publics et parapublics,
au total, 1 888 000 000 $; on en aura dépensé, au livre des
crédits 1992-1993, 1 608 000 000 $ sur l'année 1991-1992. Donc,
on a laissé sur la table une somme de 280 000 000 $ l'an dernier. L'an
dernier, donc, on a investi, réellement dépensé, 1 608 000
000 $. Quel est le programme du gouvernement pour l'année qui vient? 1
429 000 000 $, une diminution de presque 200 000 000 $ dans les investissements
publics, finançables par le service de la dette, donc qui n'affectent
pas les équilibres budgétaires courants du gouvernement.
M. le Président, dans une période de récession,
c'est bien connu, le gouvernement doit réaliser des investissements
publics. Il fait le contraire, il se désengage, il se comporte comme si
la récession était terminée. Elle n'est pas
terminée, loin de là: six mois consécutifs de baisse de
l'emploi, c'est un indicateur qui ne trompe pas, M. le Président.
M. le Président, le gouvernement devait aussi présenter un
plan de financement des entreprises. S'il ne voulait pas utiliser les plans
Biron I et Biron II, parce qu'ils avaient été faits sous l'ancien
gouvernement, il aurait pu, au moins, en calquer l'essentiel, la nature et les
appeler par un autre nom. Il ne l'a pas fait, il n'a rien mis en place et il
n'a pas mis de fonds. Les mesures qu'il avance sont des
«mesurettes», sont des grenailles, rien de plus. Au fond, le
gouvernement fait face à des difficultés budgétaires qui
auraient sûrement été moindres s'il n'avait pas
amplifié lui-même la récession par ses mesures fiscales
absurdes, venues au mauvais moment, et par son inaction depuis 1990-1991,
moment auquel il était évident que nous tombions en
récession.
À long terme, le gouvernement doit investir en priorité
dans la recherche et développement et la formation professionnelle. Tout
le monde le dit, tout le monde le sait, mais ce n'est pas ce que fait le
gouvernement. Au chapitre de la formation professionnelle, l'utilisation de la
fiscalité, comme le fait le gouvernement, est inefficace. C'est connu
et, dans ce domaine, tous les intervenants sont d'accord: le Québec
devrait être souverain, devrait rapatrier tous les pouvoirs, en
particulier ceux qu'il y a au fédéral, devrait coordonner toute
l'opération, ce qu'il ne fait pas, et il est condamné à
l'impuissance là-dessus.
Quant à la recherche et au développement, encore
là, les crédits d'impôt ne fonctionnent pas; ils suscitent
de nombreuses inquiétudes quant à leur efficacité, et je
les réfère, encore une fois, au constat du Conseil de la science
et de la technologie. C'est inefficace, ça ne marche pas, et il y a
maintenant les années antérieures pour le prouver. Inefficace,
impossible d'avancer! Et, là encore, le gouvernement
fédéral réduit l'efficacité des crédits que
l'on accorde ici, puisque 39 % des crédits québécois se
retrouveront dans les coffres du gouvernement d'Ottawa; 39 %! Alors, même
ce qu'il donne qui est inefficace s'en va pour 40 % directement dans les
coffres du gouvernement fédéral.
M. le Président, si le ministre des Finances avait bien
identifié les préoccupations de la population et les attentes de
celle-ci, il a malheureusement choisi de les ignorer, de poursuivre sa
politique de laisser-faire. Et cette année, le ministre des Finances a
échoué dans son mandat exigeant de relancer l'économie. Il
n'a rien fait. C'est pourquoi, M. le Président, je désire
présenter la motion suivante qui se lit comme suit:
Motion de censure
«Que l'Assemblée nationale blâme très
sévèrement le gouvernement libéral qui a ignoré les
préoccupations de la population en choisissant à nouveau de
relever le fardeau fiscal, notamment par l'introduction d'une taxe de 4 % sur
les services, et en refusant de présenter des mesures de relance
susceptibles de redonner espoir aux agents économiques, et qu'il soit
condamné pour la piètre qualité de l'information
financière contenue dans le budget et pour avoir facilité
l'intrusion fédérale dans le champ des taxes à la
consommation». Merci.
Des voix: Très bien. Bravo!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, merci, M. le
député de Labelle. Votre motion a été
déposée. Avant de poursuivre... Je m'excuse. M. le leader adjoint
du gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais une
suspension de quelques instants afin que nous puissions convenir de la
détermination du temps de parole pour le reste du débat.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, je suspends les
travaux quelques minutes.
(Suspension de la séance à 11 h 29)
(Reprise à 11 h 31)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Nous continuons les
travaux de l'Assemblée, et nous sommes à débattre la
motion de M. le ministre des Finances proposant que l'Assemblée approuve
la politique budgétaire du gouvernement.
Avant de poursuivre le présent débat, je vous rappelle que
le discours sur le budget et le débat qui s'ensuit durent au plus 25
heures et se déroulent en trois étapes: une première
étape de 13 h 30 à l'Assemblée nationale; une
deuxième étape de 10 heures à la commission du budget et
de l'administration et une troisième étape de 1 h 30 à
l'Assemblée nationale, comprenant une intervention de 30 minutes du
critique financier de l'Opposition et une réplique d'une heure de M. le
ministre des Finances.
Pour la première étape, d'une durée de 13 h 30, une
période de 6 h 15 est réservée au groupe
ministériel, incluant le discours sur le budget, qui a duré 1 h
18. Il reste donc 4 h 57 au groupe formant le gouvernement. Une période
de 6 h 15 est réservée au groupe de l'Opposition officielle,
incluant le discours que vient de prononcer le représentant de
l'Opposition officielle, M. le député de Labelle, et les 10
minutes de commentaires qu'il a faits jeudi soir dernier.
Une période de 1 heure est réservée à
l'ensemble des députés indépendants.
Le temps de parole accordé à chaque député
sera d'une durée maximale de 20 minutes. Toutefois, il sera permis au
chef de l'Opposition officielle ou son représentant, de même qu'au
premier ministre ou son représentant, d'intervenir pour une durée
maximale d'une heure. Enfin, le temps non utilisé par un groupe
parlementaire pourra être utilisé par l'autre groupe
parlementaire.
Alors, je suis prêt à entendre le prochain intervenant. M.
le président du Conseil du trésor.
M. Johnson: Oui.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je m'excuse. Est-ce que
vous intervenez comme représentant du premier ministre ou...
M. Johnson: Au sens de l'article 209, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, vous disposez, tel
que je viens de l'indiquer, M. le président du Conseil du trésor,
d'une durée maximale de 60 minutes.
Une voix: II n'est pas obligé de les prendre! M. Daniel
Johnson
M. Johnson: Je vous remercie, M. le Président. Et comme je
viens de l'entendre, ce n'est pas obligatoire d'utiliser toute l'heure qui
m'est impartie. Je vous remercie, M. le Président.
Nous avons eu, jeudi dernier, la lecture d'un discours sur le budget qui
marque une autre étape, déterminante celle-là à
plus d'un égard, dans la suite de la gestion des finances publiques du
gouvernement du Québec depuis que le député de Bonaventure
occupe le poste de ministre des Finances. Le discours sur le budget doit
absolument contenir, pour répondre à un test de vraisemblance,
des lignes directrices qui permettent de définir les objectifs que nous
avons à atteindre, à poursuivre, à continuer à
poursuivre comme gouvernement si nous voulons maintenir la
crédibilité qui est essentielle à toute l'action
gouvernementale. Ce test, c'est celui de la persistance dans la poursuite
d'objectifs légitimes, clairs, bien définis; c'est celui de la
cohérence des actions, dans la mesure où tous les
éléments du discours doivent s'additionner les uns aux autres,
tous dans la poursuite des objectifs que nous avons définis, et il en
résulte, dans un exercice de discours sur le budget comme
celui-là, la certitude qu'une vision claire de l'avenir se dégage
des propos du gouvernement, du ministre des Finances en l'occurrence.
M. le Président, je vous soumets que le discours sur le budget de
jeudi dernier répond exactement à ce test de persistance, ce test
de cohérence, ce test de vision de l'avenir du
Québec qui est celui que le gouvernement a mis de l'avant H y a
déjà plus de six ans.
Le discours sur le budget est essentiellement l'occasion de
démontrer comment les grands éléments qui expliquent
l'activité financière d'un gouvernement réagissent les uns
par rapport aux autres. C'est l'occasion privilégiée d'indiquer
quels choix fiscaux nous faisons, quel ordre de dépenses nous
désirons soutenir et quels sont, évidemment, à ce
moment-là, les modes de financement de ces dépenses. Nous avons,
à l'occasion du discours sur le budget, à nous remémorer
cette équation qui veut que la fiscalité et le fardeau fiscal
sont des parties intimement liées au développement
économique de notre société, qu'ils présument de
choix de société par les objectifs qui ont été
retenus, par les formes de financement qui seront utilisées, par le
niveau du financement auquel nous avons recours. C'est cet équilibre,
dans ces différentes dimensions de l'action gouvernementale, qui doit se
retrouver dans un discours sur le budget, et qui se retrouve dans le discours
sur le budget du député de Bonaventure.
L'équilibre repose essentiellement, M. le Président, sur
l'équation qu'on doit établir entre les besoins des citoyens et
les dépenses publiques destinées à combler ces besoins, et
la capacité de nos concitoyens de se donner à eux-mêmes ces
services. Autrement dit, le niveau des dépenses publiques doit
être tel qu'il n'entache pas la capacité concurrentielle de
l'ensemble de la société québécoise à se
mesurer à son environnement. Nous avons à tenir compte du niveau
des besoins observés tout en ayant à l'esprit notre
capacité financière de rencontrer ces niveaux de besoin.
Au titre de la capacité financière, nous avons
également à régler un autre problème de
déséquilibre, qu'on doit éviter, entre le financement
courant des dépenses courantes et le financement reporté des
dépenses courantes ou, évidemment, d'investissement,
c'est-à-dire les dépenses à long terme.
C'est-à-dire que chaque fois, chaque année, je dirais chaque jour
nous avons à décider si nous levons des impôts sur
l'activité économique du Québec afin de doter nos
concitoyens de certains services ou si nous empruntons l'argent quelque part
afin de payer pour ces services. Le véritable test du respect de
l'équilibre financier, et donc le respect de la capacité de payer
de nos contribuables, tient à ces choix que nous faisons entre les
emprunts et les impôts levés sur une base courante.
J'ajouterais que nous avons un autre choix à faire au titre des
impôts que nous levons, c'est-à-dire que nous avons à
décider si ce sont des impôts plus ou moins visibles auxquels nous
aurons recours, comme gouvernement, afin de rencontrer les dépenses
publiques. Donc, cette équation, ces différents
éléments, celui des dépenses et leur niveau, celui du
déficit et des impôts comme source alternative, dans certains cas,
du financement des dépenses. Ce que nous avons maintenant depuis de
nombreuses années, depuis 1986, est la poursuite ininterrompue par le
gouvernement et par le ministre des Finances d'un objectif qui consiste
à réduire les impôts et à réduire le recours
aux emprunts. Il y a, évidemment, une seule façon de le faire,
c'est de réduire la croissance des dépenses publiques. On ne peut
ni réduire les impôts ni réduire les déficits,
évidemment, si on augmente, par ailleurs, les dépenses publiques.
(11 h 40)
M. le Président, tous les chiffres publiés à ce
jour - et on comprend que le député de Labelle ne s'y est pas
attardé - tous les chiffres publiés à ce jour
démontrent que nous avons réussi comme gouvernement à
réduire le rythme de croissance des dépenses, que nous avons
réussi à réduire notre dépendance sur les emprunts
pour financer les programmes et que nous avons atteint un des objectifs que
nous poursuivions, soit faire en sorte que les familles
québécoises soient les moins taxées au titre de
l'impôt sur le revenu des particuliers et des taxes à la
consommation de tout le Canada. Nous avons atteint ces objectifs. Ça
s'écrit, ça se dit, ça se publie et ça se comprend,
parce que la persistance, la cohérence et la vision du
développement du Québec à travers des décisions de
finances publiques ont été la marque de commerce des sept
derniers discours sur le budget qu'il nous a été donné
d'entendre ici même, à l'Assemblée nationale, et dont nos
concitoyens ont pu prendre connaissance.
Au titre des dépenses publiques, je ne m'attarderai pas, M. le
Président. Ma fonction de président du Conseil du trésor
m'a amené, aussi récemment qu'hier, à redire comment nous
avons tenté de réduire la croissance des dépenses,
comment, dans une conjoncture économique passablement difficile, nous
avions heureusement la capacité d'augmenter certains programmes de
dépenses, notamment pour relancer l'emploi et l'économie ou alors
pour protéger les clientèles plus affectées par le
ralentissement économique, et ce, de plusieurs centaines de millions de
dollars dans les crédits que j'avais déposés. Et on voit
encore ce souci de relance économique: 250 000 000 $ au seul titre des
travaux d'ici à trois ans dans nos centres d'accueil et
d'hébergement pour personnes âgées, plus de 135 000 000 $,
excluant une participation fédérale éventuelle, donc un
autre quart de milliard en tout, au titre du développement et de
l'amélioration de notre réseau routier. Sur une seule
année, on parle facilement de 350 000 000 $, et je n'ai pas encore
parlé des injections ici et là dans les régions
minières, les régions-ressources, dans le
Bas-Saint-Laurent-Gaspésie, de programmes de soutien à l'emploi
de plusieurs millions de dollars dans chaque cas.
Mais l'actualité m'amène quand même, M. le
Président, à donner des exemples précis dont
nous concevons qu'il n'y a pas de petites économies. Nous avons
déjà fait des démonstrations sur certains grands
programmes de dépenses quant à la façon dont nous avons
réduit les dépenses gouvernementales. J'en ai parié hier,
au titre de la sécurité du revenu, de l'insistance que nous
avons, avant de débourser du soutien au revenu, à ce que les
bénéficiaires puissent se remettre dans des activités
d'employabilité ou de formation additionnelle. Nous serons toujours
là avec des sommes additionnelles pour soutenir ces activités.
Deuxièmement, au titre des transferts vers les entreprises, nous
privilégions la responsabilisation de l'entreprise, le prêt
participatif qui fait en sorte que nous aidons un projet à
démarrer et que nous recevrons éventuellement, nous aussi, comme
représentants des contribuables - le gouvernement, c'est ce qu'il
représente, c'est l'argent des contribuables - une partie de la
rentabilité d'un projet qui marcherait bien.
Mais, dans l'actualité, la députée de Taillon a
soulevé hier en conférence de presse une ribambelle - il n'y a
pas d'autres mots - d'exemples, dit-elle, de gaspillage éhonté de
fonds publics. Je n'en relèverai que trois, M. le Président, pour
démontrer combien à côté de la voie s'est
retrouvée hier la députée de Taillon. Premier exemple
d'une accusation: la députée de Taillon tombe à bras
raccourcis sur les frais de voyage et de séjour à la CSST. La
CSST, M. le Président, n'est pas financée par l'argent des
contribuables, premièrement. La CSST est financée par les
cotisations des employeurs, des entreprises, des compagnies de construction qui
paient l'équivalent de primes d'assurance-accidents pour couvrir les
maladies professionnelles de leurs employés. La CSST est
constituée, pour son administration, d'un conseil d'administration
où on retrouve paritairement des employeurs, le Conseil du patronat, des
chambres de commerce, d'une part, et la FTQ et d'autres représentants
des travailleurs, d'autre part. Si ces gens-là, les travailleurs de la
construction et les entreprises, veulent gaspiller leur argent avec des
dépenses de voyage, qu'ils le fassent, mais encore faudrait-il savoir -
parce que c'est évident qu'à ce titre-là, ce sont des
dépenses qui, d'une façon ou d'une autre, pèsent sur
l'économie du Québec -ce qu'il y avait dans ces 6 200 000 $. Je
me suis entretenu spécifiquement avec mon collègue, le ministre
du Travail, pour savoir si la députée de Taillon lui avait au
moins demandé ce qu'il y avait dans les 6 200 000 $, si, d'aventure, il
n'y aurait pas des voyages d'un accidenté de la Basse-Côte-Nord
qui viendrait à Québec se faire soigner. On paie ça, oui.
La CSST paie ça.
Est-ce que la députée de Taillon est en train de nous dire
que ça n'a aucun sens de payer les frais de voyage des accidentés
qui s'en vont suivre des traitements spéciaux, suite à un
accident de travail? Est-ce qu'on pourrait au moins, de la part de
l'Opposition, demander au ministre responsable qu'il s'enquière du
contenu de ces 6 000 000 $? Peut-être découvrirons-nous que les
gens voyagent trop, beaucoup, pour rien. Là, à la rigueur, la
députée de Taillon aurait fait oeuvre utile en mettant sur la
place publique une dépense sans savoir, de sa part, ce que c'est mais,
à l'examen, on verrait peut-être que les employeurs du
Québec ne contrôlent même pas leur propre cotisation au
régime de santé et de sécurité au travail.
Alors, si les employeurs du Québec veulent hurler contre le
gouvernement, qu'ils commencent donc à se regarder eux-mêmes, ces
entreprises et ces employeurs, afin de voir qui contrôle à la
CSST. Parce que le contrôle à la CSST n'est pas un contrôle
gouvernemental, c'est un contrôle paritaire au niveau du conseil
d'administration de la CSST.
Deuxième exemple, celui de la publicité gouvernementale.
La députée, je ne sais pas où elle a pris ses chiffres
présumément, elle pourra les publier, mais tous les chiffres
connus publiés dans les livres des crédits, ceux dont les
articles de journaux parlent depuis 10 ans, sont les suivants: Jusqu'en
1985-1986 et pour les quatre années précédant notre
accession au pouvoir, le gouvernement qui nous a précédés
n'a jamais dépensé moins de 21 000 000 $ en publicité.
Jamais! Depuis que nous sommes arrivés, en décembre 1985, jamais
n'avons-nous dépassé 19 000 000 $. On a littéralement
coupé la publicité gouvernementale en deux. Diminution de 50 % au
printemps 1986, en arrivant. On est passé de 24 000 000 $ à 12
000 000 $. Et, depuis ce temps-là, ça s'est tenu entre 12 000 000
$ et 18 000 000 $, avec presque 19 000 000 $ l'an prochain, et une demande des
ministères - c'est ça, la prévision qu'il y a dans les
crédits - de quelque 21 000 000 $ pour cette année, demande qui -
on est seulement au mois de mai - sera traitée incessamment par le
Conseil du trésor.
Et je ferai remarquer deux choses à cet égard. D'une part,
que la demande des ministères est inférieure aux dépenses
réelles du gouvernement du Parti québécois, il y a sept
ans. La demande est inférieure aux dépenses réelles d'il y
a sept ans. Deuxièmement, à chaque fois que les programmes
gouvernementaux ont été soumis au Conseil du trésor pour
examen depuis sept ans, 1s ont été réduits par rapport
à la demande.
Alors, que la députée de Taillon fasse des cas
extraordinaires sur la place publique avec ça, je lui dis de
vérifier ses chiffres parce que ça va lui sauter dans le visage,
comme c'est en train de lui arriver, il me semble.
Troisième exemple qu'elle a donné, le nombre
d'attachés politiques. Il serait passé de 300 à quelque
500. Incroyable! La seule source qui parle de 300 attachés politiques,
au début de 1986, c'est un article dans La Presse, au mois de
mars 1986. Les sources réelles, les comptes administrés par
l'Office des ressources humaines et la liste de paie démontrent qu'alors
qu'il y a
eu le record mondial et de tous les temps en 1981-1982 de la part des
péquistes, à presque 600 attachés politiques, on est
passé à 443 en arrivant, et aujourd'hui, c'est 534. Une
augmentation de 20 %, 22 % depuis sept ans.
Il n'y a rien là. Augmentation de la feuille de paie des masses
des cabinets politiques de 5,8 %, comme l'ensemble du secteur public l'an
dernier. Où la députée a-t-elle pris ses quelque 10 %? Je
n'en sais rien. Mais l'Office des ressources humaines, qui fait les
chèques de paie, a additionné les chèques pour cette
année et l'an dernier et il y a eu une augmentation de quelque 5 %. (11
h 50)
Alors, M. le Président, vous savez, je comprends qu'il n'y a pas
de petites économies, et je l'ai dit et redit. C'est pour ça que,
quant à moi, au grand déplaisir des fonctionnaires de la
région de Québec et de Montréal, j'ai aboli les
subventions au stationnement. Pendant que le gouvernement finance une partie,
certainement les immobilisations en matière de transport en commun, je
trouvais ça un petit peu gros de charger 38 $, à Place
Ville-Marie et à Place Victoria, à Montréal, pour le
stationnement d'un membre du secteur public, d'un fonctionnaire, un petit peu,
un petit peu beaucoup, quand on sait que les prix du marché sont 150 $
à 200 $. C'est le genre de chose auquel on a mis fin.
J'ai fait étudier, avec mon collègue des
Approvisionnements et Services, l'ensemble des locaux gouvernementaux et des
normes qui régissent la façon dont on se loge, comme entreprise,
pour constater qu'il y a du potentiel - c'est le moins qu'on puisse dire - pour
des réductions allant jusqu'à 20 % des espaces occupés par
le gouvernement, avec des économies de loyer. À mesure qu'on va
renouveler les baux, qu'on va déménager, y compris le Conseil du
trésor au mois de juin, ce sont des économies de loyer qui vont
aller entre 40 000 000 $ et 50 000 000 $ par année. Il faut regarder ces
choses-là.
L'administration des voyages, l'administration de l'achat de produits
informatiques, autant de choses qui ont fait l'objet de décisions
spécifiques du Conseil du trésor depuis avril dernier, mettant
ainsi fin à des explosions de dépenses dans certains champs,
notamment dans les technologies de l'information. Sans être contre
l'informatisation des lieux de travail, il faut se rendre compte que la
décision que j'ai prise l'an dernier a fait en sorte qu'au lieu d'avoir
une croissance de 15 % on a plutôt eu une croissance de 3 % dans les
achats d'ordinateurs, d'imprimantes, de logiciels de toutes sortes, sans que
les services publics, à ma connaissance, ne s'en ressentent ou, à
tout le moins, on ne me l'a pas démontré.
Deuxièmement - on a parlé des dépenses, M. le
Président - du côté du déficit, je veux rappeler une
évidence qui ne passe pas toujours la rampe, qui ne la passe pas de
façon constante, qui ne la passe peut-être pas bien. Le
déficit, ce n'est pas autre chose que les impôts de demain. Le
déficit, c'est un emprunt qu'on fait et qu'on doit un jour remettre ou,
de toute façon, sur lequel on doit payer tous les ans ou tous les jours
de l'intérêt. C'est des impôts déguisés, le
déficit, M. le Président, et ça a permis, notamment au
Canada, pendant une quinzaine d'années, de faire croire à
l'ensemble des contribuables qu'on pouvait recevoir 25 % plus de programmes
gouvernementaux que ce qu'on payait en impôt direct et indirect.
Littéralement, en 1984, dans le budget fédéral, il y avait
des dépenses de programmes - donc des choses qu'on reçoit comme
contribuables - il y en avait pour 23 % de plus, en dollars, que les
impôts qu'on a payés cette année-là. D'où
pensez-vous que c'est venu, la différence? Des emprunts. Et aujourd'hui,
on est pris avec un déficit fédéral de plus de 400 000 000
000 $ sur lequel ça coûte 35 000 000 000 $ à 40 000 000 000
$ - milliards, pas millions, là; on perd le fil quand on est rendu dans
des chiffres comme ça -40 000 000 000 $ d'intérêts. Pour
financer quoi? Pour financer les programmes qu'on nous donnait
littéralement, 25 % plus de services que ce qu'on payait en impôt.
Fais ça pendant 15 ans; la première chose que tu sais, tu as 400
000 000 000 $ de déficit. Mais je dois dire, à la décharge
du gouvernement fédéral actuel, et il serait intéressant
de voir les chiffres, que le déficit fédéral depuis cinq
ans, six ans, n'a pas été plus élevé que le dernier
budget du gouvernement qui l'avait précédé. C'est assez
intéressant de voir la façon dont ces choses-là se font.
Et on peut, à tout le moins, si on transfère ça sur la
scène québécoise, se vanter d'avoir évité -
les chiffres sont là - les sommets inconsidérés d'emprunt
et de déficit de ceux qui nous ont précédés et qui
font en sorte aujourd'hui qu'on est obligés de dépenser tous les
lundis matin 50 000 000 $ à 60 000 000 $ de plus qu'autrement,
simplement pour payer l'intérêt sur la dette accumulée,
pour payer des dépenses courantes d'autrefois; pas pour construire des
routes, pas pour construire des écoles, des hôpitaux, des centres
d'accueil ou quoi que ce soit, pour payer des salaires, faire des tranferts aux
individus, etc., du temps du député de L'Assomption, lorsqu'il
était ministre des Finances. C'est aussi simple que ça. 50 000
000 $ à 60 000 000 $ par année!
Je disais tout à l'heure que le ministre des Finances, au titre
du développement économique, a injecté - je parlais de 350
000 000 $ tout à l'heure, et je n'avais pas fini de compter -350 000 000
$ de nouveaux investissements afin de soutenir l'économie du
Québec. Imaginez-vous, si ce n'était pas de
l'intérêt sur la dette qu'on est obligés de payer! Le
ministre des Finances pourrait annoncer ça huit fois par année,
il pourrait annoncer huit fois par année qu'il met
350 000 000 $ dans l'économie du Québec ou, alors, il
pourrait annoncer qu'il réduit les impôts de 2 000 000 000 $ ou 2
500 000 000 $. Alors, non contents d'être les moins taxés au
Canada, comme on pourrait le démontrer tout à l'heure, on serait
probablement quelque part les moins taxés en Amérique du Nord.
Mais on ne peut pas faire ça, parce que ceux qui nous ont
précédés ont emprunté pour nous faire croire que
les services gouvernementaux ne coûtaient rien. Ça, c'est une
réalité avec laquelle on vit toujours.
L'autre choix qu'on a fait, M. le Président, si on ne recourt
pas, évidemment, à l'emprunt - c'est un choix de ne pas recourir
à l'emprunt - ça a été de recourir à des
taxes qui elles étaient visibles le plus souvent possible. On peut
entendre le député de Labelle déchirer sa chemise sur la
TVQ, etc., le député de Jonquière et d'autres nous
blâmer d'avoir transféré des dépenses sur le dos des
municipalités et des commissions scolaires. Je veux rappeler, encore une
fois, que les citoyens et contribuables deviennent passablement plus exigeants
à l'endroit des dépenses publiques lorsqu'ils
s'aperçoivent quotidiennement ou sur une facture spécifique de
leur municipalité ou de leur commission scolaire que les services
publics coûtent quelque chose. On pourrait ajouter, incidemment, qu'il en
serait de même, à la mesure qu'on achète des
médicaments et qu'on est âgé de plus de 65 ans et que
ça coûte 2 $ chaque fois qu'on va s'approvisionner. On se demande
tout d'un coup comment ça se fait qu'on se fait prescrire des
médicaments toutes les semaines. Quand on n'est pas confus, parfaitement
tout à soi, on se dit: II me semble que je suis capable de gérer
mes propres médicaments pendant un mois ou deux. Comment ça se
fait que, tout d'un coup, j'ai un semainier? Toutes les semaines, il faut que
j'aille à la pharmacie? Toutes les semaines, une prescription? Toutes
les semaines, on verse des honoraires à des professionnels de la
santé qui font des nouvelles prescriptions. C'est drôle comme les
gens ont un comportement extrêmement logique dans tous les sens: si on
rémunère chaque fois qu'il y a une ordonnance ou une
prescription, ça se peut qu'il y ait beaucoup d'ordonnances ou de
prescriptions, mais si on insère, dans les finances publiques et dans
les dépenses, un petit drapeau, jaune foncé, qui signale que
ça coûte quelque chose, les services publics, que ça
coûte des centaines de millions, des médicaments, et que, chaque
fois qu'il y a une dépense ou un geste, il y a un petit 2 $ qui se
montre la tête, c'est assez extraordinaire comment les gens vont dire:
Ah! oui, c'est vrai, je n'avais pas pensé à ça; comment
est-ce que je pourrais me comporter pour minimiser les coûts et minimiser
les coûts du gouvernement, évidemment?
M. le Président, c'est le genre de chose qu'on a fait, des taxes
visibles. On a, grâce à ces différents choix, M. le
Président - je me réfère ici simplement à l'annexe,
aux documents qui sont devant nous, qui sont absolument complets, afin de
donner une image parfaitement cohérente de l'action gouvernementale, de
voir l'évolution des déficits budgétaires et des besoins
financiers nets.
Le discours sur le budget, pour ceux qui veulent s'en donner la peine,
regorge de tableaux, de graphiques qui donnent une image extrêmement
claire, instantanée de certains des progrès que le gouvernement
actuel a faits au titre des finances publiques. À ce titre,
j'évoquais le déficit budgétaire et les besoins financiers
nets. À l'annexe B, page 9, lecture obligatoire, à mon sens, pour
qui veut voir ce qui s'est fait ici, au gouvernement du Québec, depuis
six ans. La même chose est vraie du solde des opérations
courantes, à l'annexe B, page 12, pour véritablement aller
mesurer les progrès considérables que le gouvernement actuel, le
ministre des Finances et le contrôle des dépenses publiques ont
réalisé afin de diminuer cette dépendance sur les emprunts
pour aller financer des dépenses courantes.
Une fois qu'on a fait le tour, M. le Président, des
éléments de cette équation des équilibres
financiers, je m'en voudrais de ne pas développer davantage l'un des
choix fondamentaux qu'a effectués le ministre des Finances depuis
décembre 1985, au titre de la fiscalité. Six ans et demi
ininterrompus du député de Bonaven-ture aux commandes du
ministère des Finances ont fait en sorte qu'aujourd'hui on peut dire, on
peut lire, on peut comprendre que les familles québécoises sont
les plus avantagées au point de vue fiscal de tout le Canada. Ce sont
des choses qui sont reconnues dans d'autres provinces. La dernière
source connue de cette réalité, c'est le budget et les documents
budgétaires du gouvernement de la Saskatchewan. Alors, on n'accusera
personne ici d'avoir inventé des chiffres. Le budget de la Saskatchewan
a été déposé, on le sait, il y a quelques semaines
et, à l'occasion de ce budget, le ministère des Finances d'une
province canadienne a dressé justement la liste des impôts
à payer des familles canadiennes, en les divisant selon les
différentes provinces, pour voir quels sont les gouvernements
provinciaux les plus et les moins voraces au titre de la fiscalité dans
la mesure où elle frappe les familles. (12 heures)
Le ministre des Finances et député de Bonaventure - et
c'est là qu'on voit un test de persistance, de cohérence et de
vision - a décidé de retenir le soutien à la famille
québécoise comme une des pierres d'assise du développement
économique et social du Québec. C'est un choix qui a
été fait par un individu qui en a convaincu, évidemment,
ses collègues et l'ensemble de la deputation et qui le présente
à la population maintenant pour la septième fois. Les seuils
d'imposition, ce montant de revenu à partir duquel les gens paient
maintenant des impôts, a évolué de la façon
suivante, M. le Président,
depuis 1985. Et là aussi je convie nos auditeurs et
lecteurs à tourner la page à l'annexe A, page 13 du document
«Discours sur le budget», source claire, inévitable,
précise du progrès qu'on a réalisé.
Un couple qui n'a qu'un seul revenu de travail et deux
enfants, compte tenu du budget qui a été déposé,
paiera de l'impôt à partir de 26 428 $. le premier 26 428 $ de
revenu est exempt d'impôt sur le revenu des particuliers au
québec, pour une famille qui a deux enfants et un seul revenu de
travail. c'était 10 000 $ il y a sept ans. ne me dites pas que c'est
l'inflation qui a pris le 10 000 $ et qui l'a transformé en 26 000 $.
c'est une augmentation, ça, de 160 % en 7 ans; 160 %. m. le
président, c'est plus que l'inflation, ce sont des décisions
précises, volontaires du ministre des finances et du gouvernement
à cet égard. nous avons d'autres illustrations de ce choix en
faveur des familles québécoises et des familles avec enfants.
Toujours dans le «Discours sur le budget», M.
le Président, au titre du soutien financier du gouvernement du
Québec à l'égard des enfants, je vous invite à
prendre connaissance du tableau, toujours à l'annexe A, à la page
28. On y découvre, pour des niveaux de revenu différents, de 30
000 $ ou de 50 000 $, l'évolution de l'impôt à payer pour
des gens qui sont à ce niveau de 30 000 $ ou de 50 000 $ depuis 1985,
pour constater qu'en 1985, l'impôt à payer au niveau de 30 000 $
était de 3843 $ et est maintenant de 904 $; 3000 $ de moins
d'impôt à payer depuis ces années.
On peut faire le calcul pour toutes les classes de revenu
possibles et imaginables de zéro à l'infini, et toutes les
classes de revenu du Québec, lorsqu'elles complètent leur rapport
d'impôt sur le revenu des particuliers... Cette année,
comparativement au même niveau de revenu d'il y a quelques années,
en 1985, toutes les classes de revenu au Québec vont trouver une
économie. Ce n'est pas compliqué: avec enfants, sans enfant,
à 26 000 $, à 126 000 $, à 226 000 $, tout le monde. Avec
cette caractéristique que nous valorisons encore davantage l'importance,
pour des gens qui travaillent, d'avoir une famille, donc des enfants, car
au-delà de pouvoir distinguer ce que ça signifie de payer moins
d'impôt sur le revenu des particuliers, ce que nous devons
également examiner, c'est l'influence sur le revenu disponible que
représente l'ensemble des gestes que nous avons posés au titre du
soutien financier aux familles. Et là, c'est encore plus spectaculaire.
C'est encore plus spectaculaire, M. le Président. De 520 $ que pouvait
représenter le soutien financier à une famille avec 2 enfants, en
1985, ce soutien financier est passé à 2700 $. Multiplié
par 5! Augmentation de 400 %! C'est ça, ici, qui est en cause, M. le
Président, c'est un choix constant, continu, cohérent de soutenir
les familles québécoises.
C'est également, M. le Président, inscrit
à l'intérieur d'une politique fiscale qui demeure progressive. Je
ne veux pas que les gens disent: Ah oui! les gens qui font des fortunes ont
bénéficié d'un énorme soutien financier, au titre
de leurs enfants, contrairement à ceux qui ont des moyens plus modestes.
C'est précisément le contraire qui est en cause et qui s'est
produit. Les décisions de fiscalité à l'égard des
familles demeurent progressives. Autrement dit, si je prends des exemples qui
apparaissent à la page 29 de l'annexe a, c'est public, connu... il faut
faire exprès, comme le député de labelle, pour faire un
discours de une heure trente minutes et ne même pas parler de ça.
c'est absolument extraordinaire! on parle de 2 500 000 000 $. on parle d'un
nombre extraordinaire, et faire un discours de une heure trente minutes sans
même parler de l'aide aux familles, depuis 7 ans, dans les budgets
successifs du ministre des finances, ça demande passablement
d'habileté rhétorique. je vais donner crédit au
député de labelle, il a réussi à faire
ça.
Le soutien financier du gouvernement du Québec
à l'égard des enfants. Pour des gens qui gagneraient, par exemple
- on va prendre l'exemple de tout à l'heure - 30 000 $, si les gens ont
3 enfants, le soutien financier que nous leur accordons représente 5600
$; si les gens gagnent 40 000 $, ça représente 5250 $; si les
gens gagnent 60 000 $, ça représente 4450 $. On voit que le
soutien financier est plus important pour les gens à faibles revenus.
C'est donc à l'intérieur d'une fiscalité qui demeure
progressive. Progressive à tel point que la seule qualification que je
donnerais à mon affirmation que les familles québécoises
sont les moins taxées au Canada, c'est qu'à l'égard de
ceux qui gagnent plus de 70 000 $, ce n'est pas encore vrai. C'est mieux que
c'était, mais on n'est pas encore les champions canadiens, au titre du
fardeau fiscal, pour les familles avantagées par les choix fiscaux que
nous avons faits. Il y a eu des améliorations, je le dis, au titre de
toutes les classes de revenus, mais il y a encore des progrès à
faire, et c'est pour ça que nous continuons à tenter de
réduire les dépenses pour pouvoir réduire les impôts
sur les épaules de nos concitoyens.
Ce qu'il y avait également à souligner, autre
exemple frappant - je le donne pour faire bonne mesure - c'est que quelqu'un
qui gagnait 30 000 $, une famille, un revenu de travail de 30 000 $ en 1985, 2
enfants, qui, aujourd'hui, gagne 40 000 $... là, on ne dira pas que
c'est une exagération, une augmentation de 30 % sur 6 ans, 5 % par
année. disons que c'est un syndiqué du secteur public qui gagnait
30 000 $ il y a 5 ans et qui gagne, aujourd'hui, 40 000 $; 10 000 $ de revenu
brut de plus. au québec, combien d'impôt sur le revenu des
particuliers de plus croyez-vous que cette personne-là paie? m. le
président, je vous donne la réponse tout de suite, vous la
devinez, c'est 400 $; 400 $ d'impôt
de plus pour un revenu brut qui a augmenté de 10 000 $ en 5 ans.
Un taux marginal d'imposition, pour ceux qui suivent ça de cette
façon-là, de 4 %. Est-ce qu'il y a beaucoup d'endroits où
l'augmentation de salaire depuis 5 ans est taxée à 4 %? Il n'y en
a pas. Et ça, c'est d'autant plus vrai dans les classes de revenus
modestes. (12 h 10)
C'est une démonstration qui est un peu moins probante à
mesure qu'on monte la classe des revenus, mais pour les gens à revenus
modestes, c'est absolument renversant de voir le soutien financier. Il
représente, M. le Président, cette année, 2 300 000 000 $
par rapport à ce qui existait autrefois, dont un montant de 1 500 000
000 $ qui est spécifique, unique, au Québec. Des décisions
du ministre des Finances et député de Bonaventure ont fait en
sorte qu'en matière fiscale, de soutien financier aux familles, le
Québec est déjà une société distincte. Je
dirais que lorsqu'on parle de 1 500 000 000 $ d'aide aux familles au titre des
crédits d'impôt pour les enfants à charge, du fait que nous
n'allons pas rechercher les revenus fiscaux que nous obtenions sur l'imposition
des allocations fédérales... Les allocations familiales
fédérales étaient taxables pour toutes sortes de raisons
techniques. Là, ce ne sont plus des allocations, ce sont des
crédits. Ça nous coûte, entre guillemets, 70 000 000 $ de
revenus que le ministre des Finances a remis aux familles
québécoises. Il n'est pas allé essayer de se compenser
pour cette perte de revenus de 70 000 000 $ sur le dos des familles
québécoises.
Réduction d'impôt à l'égard des familles de
313 000 000 $. Des mesures de soutien financier spécifiques qui ne sont
pas des mesures purement fiscales - le programme APPORT, l'augmentation des
allocations familiales de base, les allocations pour les jeunes enfants, les
allocations à la naissance qui ont encore été
augmentées, les crédits d'impôt pour les études
postsecondaires, l'allocation de maternité - il y en a pour 659 000 000
$, pour un total, de ce que je viens d'énumérer, de 1 500 000 000
$. Il y en a à peine pour 800 000 000 $... À peine, ce n'est pas
rien. Il y a pour 800 000 000 $, par ailleurs, de soutiens financiers qui ne
sont pas uniques, au Québec, qui peuvent exister dans d'autres
provinces, comme l'accès à la propriété,
l'allocation-logement, les déductions pour les frais de garde,
évidemment. Les niveaux peuvent varier et, dans la plupart des cas, nous
avons des niveaux extrêmement généreux, mais la nature
même de ces programmes n'existe pas en dehors du Québec; 1 500 000
000 $. Donc, les deux tiers - c'est un peu plus là - du soutien que nous
accordons aux familles sont spécifiques, sont attribuables à des
décisions du ministre des Finances depuis qu'il occupe ce poste.
Il m'apparaîl, M. le Président, qu'on ne peut passer sous
silence, à l'occasion du discours sur le budget, une mesure qui se
rattache au soutien que nous accordons aux familles québécoises
et que le ministre des Finances... J'y reviens, parce que c'est lui qui se
lève à chaque fois et qui le dit, qui l'annonce, et nous faisons
tous d'agréables découvertes à chaque fois que le
député de Bonaventure lit son discours sur le budget parce qu'il
a, cette année encore, avec une touche d'originalité et de
générosité, reconnu un autre phénomène qu'on
est en train de vivre un peu partout, d'ailleurs, dans le monde
industrialisé, alors que nous vivons un vieillissement de notre
population. C'est cette réalité que de plus en plus de familles
sentent, la pression que peut représenter au point de vue financier le
nombre croissant et l'âge de plus en plus avancé de nos parents et
de nos grands-parents, ce qui amène des familles à prendre en
charge, en tout ou en partie, les soins que ces personnes âgées
peuvent requérir, au titre de leur logement, au titre de toutes sortes
de services que, évidemment, leur état, leur âge
même, peut amener.
M. le Président, à ma connaissance, c'est le seul endroit
au Canada ou au Québec où il y a une allocation spécifique
aux familles qui accueillent, hébergent et s'occupent de leurs parents
ou grands-parents. Une mesure qui visera l'an prochain, pour une pleine
année, environ 50 000 personnes; 50 000 personnes prises en charge au
sein de leurs familles, lesquelles bénéficieront d'un
crédit d'impôt remboursable de 440 $ qui est l'équivalent
d'une déduction de plus de 2000 $ pour chacun de ces parents
hébergé chez eux.
M. le Président, c'est une décision qui vient encore
confirmer le souci spécifique qu'éprouvent le
député de Bonaventure et ministre des Finances et le gouvernement
du Québec à l'endroit de cette clientèle. Ce que je trouve
extraordinaire dans cette mesure, quant à moi, outre le fait que,
déjà, comme députés nous avons des commentaires
d'un peu tout le monde, des gens dans nos comtés qui disent: C'est une
excellente idée, c'est une reconnaissance d'une réalité
démographique que nous sommes en train de vivre, c'est que, maintenant,
ça fait partie des finances publiques, ça fait partie des
programmes de soutien dont les familles peuvent bénéficier, et il
n'est pas encore né le ministre des Finances qui va l'abolir, ce
programme-là. Le ministre des Finances, le député de
Bonaventure, tant et aussi longtemps qu'il va être là, j'en suis
convaincu, et tous ceux qui peuvent lui succéder un jour, tout aussi
longtemps qu'on peut voir, auront, à l'intérieur des programmes
de soutien financier aux familles, un élément qui vise à
valoriser l'accueil chez soi de ses parents ou de ses grands-parents. Ils
n'auront d'autre choix, les ministres des Finances et les gouvernements, sous
la pression démographique toujours croissante, que d'améliorer ce
programme plutôt que de l'abolir. Une prédiction qui a l'air un
peu téméraire, M. le Président, mais il me semble que
c'est là une mesure qui mérite d'être enrichie, au
fur et à mesure qu'on aura les moyens de le faire. Là, la
boucle est bouclée, le ministre des Finances a toujours réussi
à nous amener des budgets qui sont équilibrés, dans le
sens qu'il y a toujours ce respect de la capacité de payer des
contribuables.
Nous avons fait des choix, il y a des cibles qui ont été
privilégiées pour des allégements. Les familles
québécoises sont allégées, ont un fardeau fiscal
plus léger, plus supportable qu'il ne l'était autrefois. Il y a
eu un choix qui a été fait à l'égard de centaines
de millions de dollars, pour ne pas dire des milliards, de rendre les taxes
plus visibles, afin de faire en sorte que nous signalions aux contribuables,
que nous signalions à nous tous comme citoyens, que les projets
gouvernementaux, les activités gouvernementales, les programmes d'aide
aux citoyens et aux entreprises coûtent quelque chose. Et ça nous
amènera à être plus disciplinés, à être
plus compréhensifs, à être plus réalistes dans la
définition de nos besoins. Ce budget, M. le Président, regroupe
tous les éléments, comme je le disais tout à l'heure, qui
permettent de dire que le test du temps est positif à l'endroit des
budgets successifs du ministre des Finances. Il y a cette persistance dans la
recherche de l'équilibre entre les dépenses et le financement des
finances publiques, recherche constante de l'équilibre qui fait que nous
n'empruntons pas plus que ce qu'on a les moyens d'emprunter.
Lorsque j'entends le député de Labelle qui nous annonce
que la situation financière du Québec s'est constamment
détériorée, tout ce que je remarque, c'est que, depuis six
ans, les cotes de crédit ont été maintenues. Il y a
même une maison, Moody's, qui a donné un petit «plus»
au Québec, que nous n'avions pas il y a six ans. Alors, prétendre
qu'on s'est détérioré pendant que tout le monde pense
qu'on s'améliore, je suis obligé de dire que le
député de Labelle pense qu'il est le seul à avoir le pas.
La réalité est tout autre.
Nous avons réussi encore une fois, comme gouvernement, comme l'a
interprété le ministre des Finances dans son discours sur le
budget, à garder le cap sur des objectifs essentiels pour notre
société: contrôle des dépenses publiques,
allégement du fardeau fiscal, visibilité du financement des
services publics, allégement des familles québécoises au
titre de certaines pressions démographiques que nous subissons. D'autres
que moi discuteront des grandes pistes pour l'avenir que nous continuons
à explorer, c'est-à-dire aller renforcir la capacité des
entreprises québécoises et des travailleurs
québécois de se donner des outils de développement et de
formation qui leur permettent de mieux affronter la concurrence internationale.
(12 h 20)
Des centaines de millions à terme au titre de l'aide à la
formation dans les entreprises ou à la formation que les individus
eux-mêmes pren- nent en charge et décident de se donner. La
même chose est vraie de l'éducation, avec un plan de plus de 40
000 000 $, au titre du décrochage scolaire, pour contrer ce
phénomène, qui est plus qu'un phénomène, qui est
une bombe à retardement dans notre capacité de former les
travailleurs qui, eux aussi, peuvent affronter la concurrence
étrangère. Et, évidemment, des interventions au titre de
soutien à l'économie, à l'emploi, à l'occasion de
la récession sûrement, mais également à long terme.
En mettant sur pied des outils de développement dans toutes les
régions du Québec, qui leur permettent, à elles aussi, de
se prendre en main.
M. le Président, il me semble que, dans ces circonstances - je me
permets de me faire l'interprète de mes collègues, dans la mesure
où je suis le premier à lancer ce débat suite au discours
du ministre des Finances et à la réplique du représentant
de l'Opposition officielle - nous voterons contre toutes les motions de
blâme que le député de Labelle et ses troupes voudront bien
nous amener. Nous aurons l'occasion, lorsque les 25 heures de débat
seront terminées, de redire notre confiance au ministre des Finances, de
réaffirmer que les objectifs qu'il poursuit sont ceux que le
gouvernement doit poursuivre, évidemment, et que c'est dans
l'intérêt et des citoyens et des entreprises et de toutes les
régions du Québec.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
président du Conseil du trésor. Nous poursuivons le débat
sur le discours du budget et je reconnais Mme la présidente de la
commission des affaires sociales et députée de Taillon. Mme la
députée.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Je vous remercie, M. le Président. Je vais
commencer mon intervention et mes propos en me servant d'une expression
utilisée par nos collègues d'en face, qui était
tirée du titre d'un editorial, et je vais la compléter, cette
phrase: Le charme discret de la persistance dans les erreurs de
prévision. Parce que c'est de cela dont il s'agit aussi. Je vais
aborder, d'abord - un - effectivement, ces prévisions qui
s'avèrent toujours erronées, et cela, depuis au moins les quatre
derniers budgets ou prévisions, les quatre dernières
prévisions qui nous ont été faites par le ministre des
Finances. Je vais aborder aussi la vérité des chiffres. Je vais
répondre, bien sûr, au président du Conseil du
trésor qui s'inquiète du fait que j'aie utilisé des
données qui auraient été erronées. Alors, je le
rassure immédiatement. Et je vais répondre techniquement à
ses questions, dans le cours de mon intervention.
Il posera la question à ses collègues, puisque
l'information dont je me suis servie pour dénoncer soit la mauvaise
gestion, soit le laxisme
gouvernemental provient essentiellement de données que m'ont
fournies ses propres collègues. Alors, si ses collègues avaient
menti, dans le cadre de l'étude des crédits, ce dont je doute,
évidemment, le président du Conseil du trésor pourrait
avoir raison. Mais je crois que ses collègues m'ont dit la
vérité, ont dit la vérité à mes amis qui ont
étudié les crédits. Donc, qu'il se tourne vers sa propre
équipe pour lui poser des questions, tant sur les dépenses de
publicité gouvernementale que pour les cabinets. Et j'y reviendrai, M.
le Président. abordons donc les prévisions faites par le ministre
des finances. en 1989-1990, dans le discours du budget, le ministre des
finances va nous dire qu'il y aura un déficit de 1 500 000 000 $. les
résultats réels, un an et quelques mois plus tard: 1 659 000 000
$. erreur de prévision! plus tard, le ministre, en 1990-1991, va nous
faire une prévision de 1 750 000 000 $. résultat réel: 2
825 000 000 $, soit 1 000 000 000 $ d'erreur, en termes prévisionnels.
Continuons donc. En 1991-1992, le ministre des Finances va prévoir un
déficit de 3 480 000 000 $. Résultat réel: 4 195 000 000
$. Alors, si cela était pour les trois dernières années,
qu'en sera-t-il pour la quatrième qu'il vient de nous présenter,
M. le Président? Je présume qu'on doit un peu s'appuyer sur les
résultats du passé pour dire: Les résultats du futur
risquent d'être comparables. Alors, à chaque fois, M. le
Président, ce sont des prévisions qui ont été
erronées.
À quoi devrait s'attaquer, M. le Président, le ministre
des Finances? Le ministre des Finances le dit lui-même, il dit: Le
Québec et les Québécoises et les Québécois
ne peuvent supporter une augmentation des impôts et des taxes. Qu'est-ce
qu'il fait? Il envoie une flopée de nouvelles taxes. Il est en train de
nous faire croire qu'il ne nous taxe pas, parce qu'il annonce que la TVQ sur
les services, la taxe de vente du Québec sur les services, au lieu
d'être aux 8 % prévus, serait de 4 %; bien, elle sera 4 % de plus
que ce qu'on paie maintenant, M. le Président, à ce que je sache.
Et ça, j'imagine que ça doit être une hausse de taxes.
Peut-être que le ministre des Finances et moi n'avons pas le même
dictionnaire, mais c'est du moins, moi, l'interprétation que j'en fais,
de ce résultat auquel tout le monde sera confronté,
malheureusement, au Québec.
Le chômage demeure encore aujourd'hui élevé, c'est
ce que nous dit le ministre des Finances. La situation des entreprises reste
précaire, on va l'illustrer, M. le Président. Saviez-vous qu'aux
données d'avril, dans les indicateurs économiques, on savait que
le taux de chômage dessaisonalisé était, au Québec,
de 12,5 %? La perte d'emplois depuis avril 1990 a été de 126 000;
126 000 personnes de moins en emploi, M. le Président -
c'est-à-dire d'emplois perdus, pas de personnes non en emploi - c'est-
à-dire de postes qui ont disparu dans l'ensemble de notre
économie. 476 000 chômeurs, M. le Président, donnée
non dessaisonalisée, c'est-à-dire réelle, là,
ça donnait 14,3 % de chômage. C'est à cela que le ministre
des Finances doit répondre. C'est ça, les véritables
problèmes auxquels est confronté le Québec, auxquels sont
confrontés nos concitoyens et nos concitoyennes.
C'est quoi, maintenant? Puisqu'on regarde les personnes, les familles,
tournons-nous du côté des entreprises. En 1990, on avait
enregistré le record de faillites, soit 5 % de plus que la pire crise
qu'on avait vécue en 1982. En 1991, malgré que 1990 ait
été un record, on a encore augmenté le nombre de faillites
de 11 %, M. le Président. Et en 1992, selon les données que nous
possédons, le nombre des faillites d'affaires est encore en hausse par
rapport à ce qu'on avait connu dans les années passées, et
particulièrement au début des années quatre-vingt. C'est
à cela que doit s'attaquer le ministre des Finances.
Qu'est-ce que c'est sa réponse à ce problème de
chômage, à ce problème de faillites des entreprises,
à ce problème de formation des personnels dans l'ensemble de nos
secteurs industriels et commerciaux? Cela fait des années que l'on
identifie clairement, sans aucune espèce de nuance, l'ampleur du
problème en matière de formation professionnelle. (12 h 30)
Qu'est-ce que nous propose le ministre des Finances dans son charme
discret de la persistance? Il nous propose un certain nombre de mesures de
relance. Le président du Conseil du trésor, tout à
l'heure, faisait état de sommes assez importantes - 300 000 000 $, 350
000 000 $ - en disant: Ce sont des mesures qui auront un impact sur
l'économie. Ce qu'il faut dire, M. le Président, c'est que, bien
sûr, dans le budget régulier de fonctionnement normal des
ministères il y a un certain nombre d'activités qui sont
prévues et qui se réalisent, et qui sont dans la foulée de
celles qui se réalisaient les années précédentes,
et qui sont dans le budget régulier des ministères. Ce qu'on
demande au ministre des Finances, parce que nous sommes dans une situation
catastrophique, ce n'est pas qu'il nous dise: Je fais comme je faisais par le
passé. Les sommes que j'investissais, je continue à les investir;
les dépenses d'immobilisation que je faisais, je continuerai à
les faire au même rythme. Ce que nous voulons savoir de lui, c'est: Que
fera-t-il de plus qu'il ne faisait dans le passé, compte tenu que la
situation est en dessous de tout et qu'elle est catastrophique? Alors,
là, on se tourne vers, évidemment, un ensemble de mesures que le
ministre a proposées dans son discours du budget: Relance PME... Je ne
reviendrai pas dans le détail, parce que mon collègue, le
député de Labelle et critique en ces matières, a assez
bien détaillé chacun de ces éléments. Je vais juste
les énumérer pour compléter la démonstration.
Alors, qu'on reprenne donc chacun de ces programmes: Relance PME,
rénovation domiciliaire, voirie locale, 100 000 000 $ pour les routes,
à condition, évidemment, que le fédéral participe,
mais le ministre des Finances ne prévoit aucun impact budgétaire.
Alors, on peut douter un petit peu de la volonté qu'il a effectivement
d'y aller et si ça ne ressemblera pas à une foule d'autres
mesures qu'on nous annonce maintenant et dont la réalisation se fera
dans un an, dans un an et demi - la mise en place - et dont l'impact
réel aura lieu dans deux ans. Le plus bel exemple, M. le
Président, c'est, entre autres, du côté de la formation
professionnelle, j'y reviendrai.
Programme de création d'emplois forestiers,
sociétés régionales d'investissement, bon, etc., etc.
Crédit d'impôt aux entreprises pour la formation professionnelle.
Ça, évidemment, c'est absolument innommable - innommable! -
finalement, parce qu'on avait prévu, alors que tout le monde crie au
secours partout, 100 000 000 $ en crédit d'impôt. Non seulement
ils ne seront pas dépensés, mais on prévoit pour
l'année à venir 30 000 000 $. Alors, la preuve est faite que la
mesure n'est pas fonctionnelle, ne répond pas aux besoins
identifiés par les travailleuses et les travailleurs et par les
entreprises. Que le ministre passe à autre chose. Quant à la
formation individuelle des travailleurs, bien là, c'est ridicule, c'est
à se rouler par terre, M. le Président. Aucune personne n'a
bénéficié du programme, alors qu'on avait prévu que
5000 personnes, 5000 travailleuses et travailleurs y auraient accès.
Quand on additionne ces nouvelles mesures, pas quand on fait le point
sur les 40 000 000 000 $ de budget de dépenses, quand on fait le point
sur ces mesures, ce que l'on constate, c'est que c'est 71 000 000 $ qui sont
des initiatives nouvelles permettant de relancer un peu l'économie. Mais
on rit de nous, M. le Président. On se moque littéralement de
nous. On se moque des gens qui, actuellement, sont dans des situations
absolument catastrophiques et désastreuses. Ce n'est pas ça que
l'on attendait de notre ministre des Finances. Quand il nous dit: Je n'impose
pas, c'est-à-dire je n'augmente pas le fardeau fiscal, M. le
Président, il augmente le fardeau fiscal, pas directement sur le salaire
des individus nécessairement et des personnes, mais il l'augmente par
toute espèce de tarification de taxes directes et indirectes. Alors, on
' peut regarder du côté des tarifications qui s'adressent aux
personnes, mais, quand on regarde du côté des entreprises, si on
croit que c'est 70 000 000 $ d'initiatives qui auront un impact quant à
la relance économique et qu'en même temps on parle de 800 000 000
$ de nouvelles taxes sur trois ans qui s'adresseront aux entreprises, bien, on
prend d'une main ce que l'on donne de l'autre. Mais ce qu'il faut dire, c'est
que l'on prend davantage d'une main que ce que l'on remet de l'autre pour
relancer l'économie.
Alors, plutôt que de nous annoncer des mesurettes qui n'ont pas
d'effets, qui n'ont pas de résultats, qui ne restent que des voeux pieux
et qui ne restent qu'au niveau du discours, peut-être devrait-il regarder
du côté du respect des engagements pris à l'égard
des entreprises, justement, qui, elles, sont créatrices d'emplois. Alors
qu'il leur avait dit qu'il détaxerait, qu'il rembourserait la taxe
payée sur les intrants - ce que ça coûte à une
entreprise pour produire - la taxe qu'elle doit payer sur les produits qui lui
servent à bâtir, soit des outils ou à rendre des services,
le ministre dit: Non, je reviens sur la parole donnée, je reviens sur
l'engagement pris, savez-vous, je vais en rembourser seulement une partie.
Alors, je n'augmente pas vos taxes, mais j'avais dit que ça vous
coûterait moins cher et ça va vous coûter plus cher. Moi,
quelque part, là, je me dis que c'est l'augmentation des taxes.
Je me rends compte que le temps passe, M. le Président. Je
pourrais continuer comme cela dans le musée des horreurs des nouvelles
ponctions que l'on fait auprès de l'ensemble de la population. 275 000
000 $ puisés dans les réserves de la Société de
l'assurance automobile du Québec. Nous croyons même que cela
contrevient à la loi. Nous sommes en train de faire des recherches
à cet égard. On augmentera des tarifs dans différents
ministères éparpillés et saupoudrés un peu partout,
de l'ordre de 24 000 000 $. On puisera dans ces fameux fonds spéciaux
sur lesquels nous n'avons pas suffisamment d'informations pour poser un
jugement un tant soit peu significatif, M. le Président. On ira
ponctionner là 33 000 000 $. Et s'ajoutent nos 172 000 000 $ que le
ministre de la Santé et des Services sociaux a eu la malencontreuse
idée d'annoncer avant que le discours du budget ne soit prononcé,
allant à rencontre de nos règles de fonctionnement, et allant
à rencontre de l'esprit même qui anime cette institution, M. le
Président.
On parle de 800 000 000 $, de 900 000 000 $ de ponctions. Puis, le
ministre des Finances nous dit, avec un grand sourire: Mais voyons! Je n'impose
pas de nouvelles taxes, je n'augmente pas le fardeau fiscal des contribuables
du Québec. Mais de qui se moque-t-il, M. le Président? Qu'il ait
au moins la décence de lire correctement les données que tout le
monde a bien comprises et rapidement.
Là, je vais aborder, M. le Président, cette fameuse
question du déficit sur lequel, évidemment, le président
du Conseil du trésor revient toujours en nous disant: Vous savez, si ce
gouvernement qui a été là avant nous ne nous avait pas
amenés dans une situation absolument abominable, nous n'en serions pas
là. Alors, j'ai lu, moi aussi - puisqu'il nous a invités à
le faire, je l'ai fait - les annexes du Discours sur le budget. Et, entre
autres, dans les annexes du discours du budget, il y a un tableau fort
intéressant, à l'annexe B, à la page 20 de cette
annexe, où on nous donne la dette totale à la fin de
l'année financière du gouvernement du Québec, la dette
directe, et ensuite, la dette totale tenant compte des régimes de
retraite. Si cela était si pire, si dramatique, si épouvantable
pendant les années 1975 à 1980, comment se fait-il que le
pourcentage du produit intérieur brut, qui est un indice de mesure
évidemment majeur, oscillait, bon an mal an: 1976-1977, 12,7 %;
1977-1978, 13,6 %; là, pendant deux années, 14 %; 17 %, 17 %...
Maintenant, en 1987-1988, on est à 20,7 % du PIB. Comment se fait-il
qu'en 1986-1987 on est à 21,8 %? Comment se fait-il qu'en 1991-1992 on
sera à 21,2 %, M. le Président? C'est eux qui étaient
là pendant toutes ces années.
Et puis là, évidemment, si on prend la dette totale en
pourcentage du PIB, mais en tenant compte des régimes de retraite, c'est
évident qu'on se retrouve avec des sommes beaucoup plus importantes, en
termes de proportion du PIB. Alors, je veux bien entendre le président
du Conseil du trésor, mais peut-être aussi aurait-il
intérêt à aller consulter les documents que le ministre des
Finances met à notre disposition. Ça permet de relativiser un
petit peu les jugements que l'on peut poser.
Je vais terminer, M. le Président, avec une réponse aux
inquiétudes du président du Conseil du trésor quant
à la qualité des données dont je me suis servie pour
dénoncer certaines dépenses gouvernementales qui nous
apparaissent, effectivement, exagérées dans ces temps de
récession. (12 h 40)
Alors, M. le Président, je veux bien qu'il doute de mes
données, mais il va s'adresser à ses collègues, parce que
moi, ma formation politique a adressé, et j'ai adressé des
demandes de renseignements généraux à tous les
ministères et organismes du gouvernement en vue d'étudier le
budget de dépenses du gouvernement du Québec. Cela est de
tradition, dans notre travail parlementaire que, pour mieux étudier les
crédits, nous dépassions évidemment les documents
très généraux qui nous sont remis par le président
du Conseil du trésor, cela va de soi. Et, normalement, les
ministères ne posent pas de difficultés. Certains nous apportent
les données un peu tard, mais nous les avons. Or, je les ai eues, M. le
Président, et si le président du Conseil du trésor veut le
savoir, c'est à la question 4, la liste des dépenses en
publicité, les sommes dépensées pour l'exercice 1991-1992
et les prévisions pour 1992-1993. J'ai tout simplement pris les sommes
dépensées, les sommes prévues, je les ai
additionnées, petit calcul très simple, soit dit en passant, et
ça m'a donné 15 688 000 $ pour 1991-1992 et, pour les
prévisions de 1992-1993, 23 748 000 $. Alors, voilà!
Maintenant, je vais passer à l'autre question, qui est la
question 18. Ce n'est pas d'un article de journal dont je me suis servi, M. le
Président, pour comparer le personnel dans les cabinets et les masses
salariales. Nous avons procédé de la même façon.
Nous avons demandé aux cabinets de nous fournir - et c'était la
question 18b - le nombre total d'employés au cabinet, le montant des
salaires et honoraires versés par le cabinet pour l'exercice 1991-1992,
et cela nous a donné une hausse - là, ce sont des données
réelles et non pas des prévisions - entre 1990-1991 et 1991-1992,
de l'ordre de 10 %, le nombre de personnels de cabinets étant celui que
j'ai rendu public, soit 552, ien hausse de 200 par rapport à ce que nous
avions à la fin de l'année 1985. Alors, voilà, M. le
Président. Qu'il s'adresse à ses collègues. Si ses
collègues ont d'autres informations qu'ils doivent lui donner et qu'ils
ne m'ont pas données, ça veut dire qu'ils auront menti aux
membres de l'Assemblée nationale, et je ne présume pas qu'ils
l'ont fait, absolument pas, M. le Président. Alors, je crois que de
telles mises au point nous permettent de replacer les choses dans leur juste
perspective.
Motion de censure
Je sais que je dois terminer. Je vais donc déposer une motion
à l'effet que l'Assemblée nationale dénonce le
gouvernement libéral pour le laxisme dont il fait preuve dans le
contrôle de ses dépenses au moment où il impose aux
contribuables de nouvelles charges fiscales, et pour l'absence de transparence
qui résulte des changements majeurs apportés aux crédits
par le discours sur le budget, notamment par la péremption de 753 000
000 $ de dépenses qui dénature le sens de l'étude des
crédits à l'Assemblée nationale, M. le Président.
Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, Mme la
députée de Taillon, votre motion de censure est
déposée. Merci. Nous poursuivons le débat sur le discours
sur le budget et je reconnais M. le président du caucus du parti du
gouvernement et député de Sauvé.
M. Marcel Parent
M. Parent: M. le Président, j'écoutais
attentivement les remarques, suite au discours du budget, faites par ma
collègue, la députée de Taillon, et je me demandais dans
quel gouffre, dans quel piège, dans quel milieu infernal nous a
plongés le ministre des Finances en annonçant un tel budget!
J'écoutais le député de Labelle, un peu avant,
j'écoutais la députée de Taillon, et c'est à se
demander si ces gens-là ont de la mémoire. C'est à se
demander si ces gens-là ne sont pas victimes d'une frustration
collective devant un si bon budget présenté par un grand ministre
des Finances.
Le budget 1992-1993, M. le Président, est un exemple de la prise
en charge, par le gouver-
nement libéral, des intérêts des
Québécoises et des Québécois. Les mesures incluses
dans ce budget ont été pensées et élaborées
dans un but précis, soit celui de répondre le plus
adéquatement possible aux besoins de la population du Québec.
Toutefois, M. le Président, vous conviendrez avec moi que ce n'est pas
un objectif nouveau pour notre gouvernement. En effet, depuis 1985,
année où nous avons repris le pouvoir, nous poursuivons dans la
même voie, c'est-à-dire celle de la rationalisation des
dépenses, de la non-augmentation des impôts, du déficit
zéro et des taxes à la consommation. Samedi dernier, dans le
journal La Presse, je lisais la chronique financière qui nous
illustrait très bien que la famille québécoise est,
actuellement, la famille qui paie le moins d'impôt parmi les autres
provinces canadiennes. Alors, je pense qu'un gouvernement comme le nôtre,
malgré la récession difficile à l'intérieur de
laquelle nous vivons, qui a réussi à maintenir le niveau
d'impôt le plus bas de toutes les provinces canadiennes, pour la famille
canadienne, je pense que ce gouvernement mérite des
félicitations.
Mais, parallèlement à ces principales lignes d'action que
nous avons élaborées ces dernières années, nous
avons décidé de fournir une aide plus que substantielle à
ce qui constitue la cellule de base de notre société, la famille,
et je cernerai mon intervention sur deux thèmes: la famille, cellule de
base de la société du Québec, et l'éducation,
l'avenir de la jeunesse du Québec, l'avenir des
Québécoises et des Québécois. Comme on peut le
constater, le gouvernement du Parti libéral se préoccupe
grandement des besoins essentiels de la famille québécoise. Nous
n'avons qu'à examiner le dernier budget du ministre des Finances pour
nous en apercevoir.
M. le Président, vous serez certainement d'accord avec moi qu'en
matière familiale un gouvernement voit son intervention limitée.
En effet, aucun gouvernement ne peut s'immiscer dans la vie privée des
gens et décider pour eux du nombre d'enfants qu'ils auront. Qu'un couple
ait décidé d'avoir des enfants ou, à l'inverse, de ne pas
en avoir, cela relève de la vie privée, et il s'agit par le fait
même d'une question fort délicate. Mais à partir du moment
où le couple a fait le choix d'avoir un ou plusieurs enfants, nous, du
Parti libéral, sommes d'avis que l'action du gouvernement dans cette
matière se traduit et devra se traduire par un soutien financier. C'est
donc dans cette optique que nous avons élaboré, depuis 1986, une
politique d'aide aux familles québécoises qui se traduit dans le
budget de cette année par une augmentation des revenus disponibles aux
particuliers et aux familles de l'ordre de 345 000 000 $. De ce montant, 258
000 000 $ iront directement aux familles ayant des enfants. Je suis donc
très fier de faire partie de ce gouvernement qui se soucie des besoins
de la population et qui, avec le budget de cette année, accorde aux
familles un soutien qui atteindra 2 300 000 000 $, dont 1 500 000 000 $ par des
mesures uniques au Québec, puisqu'il est devenu une tradition pour notre
formation politique et notre gouvernement de venir en aide aux familles.
Vous me permettrez de citer rapidement, M. le Président, quelques
mesures, lesquelles, à mon sens, méritent une attention
particulière. Ainsi, les familles québécoises seront
heureuses d'apprendre que le ministre des Finances, le grand ministre des
Finances, l'honorable Gérard D. Levesque, annonçait, jeudi
dernier, dans cette Assemblée, dans son huitième budget, le
maintien du plein montant des crédits d'impôt pour enfants. En
effet, contrairement aux autres provinces canadiennes et au gouvernement
fédéral, nous allons continuer de reconnaître, pour toutes
les familles, les charges financières occasionnées par leurs
enfants. Ces mesures, M. le Président représentent une autre
somme de 467 000 000 $ pour les familles québécoises.
D'autre part, notre gouvernement a jugé bon d'harmoniser la
fiscalité du Québec à deux modifications présentes
dans le budget du ministre Don Mazankowski. Tout récemment, ce dernier
annonçait un relèvement de 3000 $ à 5000 $, au maximum,
des déductions pour frais de garde d'enfants en fonction de leur
âge. Et c'est ainsi que, pour harmoniser nos mesures à celles du
fédéral, nous allons augmenter nos propres déductions dans
ce domaine. Concrètement, nous allons davantage tenir compte du
coût des frais de garde et appuyer des parents qui sont sur le
marché du travail. Ensuite, étant donné que le
gouvernement fédéral va bientôt adopter des dispositions
visant à accorder au conjoint de fait le droit au crédit pour
personne mariée, nous avons décidé d'adopter la même
politique. En termes clairs, les régimes fédéral et
québécois seront, à cet égard, complètement
harmonisés. Puis, en ce qui a trait à l'allocation pour un
troisième enfant - écoutez bien ça, M. le Président
- le gouvernement du Québec est fier d'annoncer que cette allocation
sera portée, pour le troisième enfant, de 7500 $ à 8000 $,
chose qui n'existe pas ailleurs, nulle part au Canada ni en Amérique du
Nord. (12 h 50)
D'autre part, notre gouvernement a voulu aussi bonifier les mesures
accordées aux personnes âgées. Étant conscient de
leurs besoins et de leurs attentes, nous avons décidé d'abaisser
l'âge d'admissibilité au programme Logirente de 60 ans à 55
ans. Cette mesure aidera les gens âgés de 55 ans et plus, qui ont
un logement dont le coût dépasse 30 % de leurs revenus, à
le conserver. Enfin, voulant sans cesse innover, notre gouvernement est fier
d'annoncer la mise en place de nouveaux crédits d'impôt
remboursables aux personnes qui prennent en charge, à leur domicile,
leurs parents lorsque ceux-ci sont âgés de 70 ans ou plus. Ce
crédit se traduit par une exemption annuelle de 2200 $ par parent, et
sera
disponible à l'égard des parents ayant 60 ans ou plus,
lorsqu'ils sont atteints d'une invalidité grave. Je pense que cette
politique, M. le Président, est cohérente avec la tradition
québécoise qui a toujours voulu que, chez nous, au Québec,
nous prenions soin de nos parents et que nous renforcions et continuions de
vivre longtemps cette tradition de la cellule familiale. Alors, M. le
Président, comme on peut le constater, le gouvernement libéral du
Québec se soucie grandement du bien-être et des besoins de la
population âgée du Québec.
En tant que gouvernement responsable, nous connaissons les effets du
vieillissement de la population que le Québec vit actuellement et qu'il
sera appelé à vivre dans les prochaines années. Nous
savons également que l'autonomie de cette clientèle est à
préserver. C'est donc pour toutes ces raisons, et pour bien d'autres
encore, que notre gouvernement a cru bon d'élaborer les mesures que je
viens d'énumérer, il y a quelques instants.
Nous connaissons le rôle important et primordial que les personnes
âgées ont eu à jouer dans le passé. C'est elles qui
ont franchi, avec nous, les barrières imposées par le temps et
les époques pour nous donner une société
développée et industrialisée à l'image du
Québec d'aujourd'hui. Elles ont été, ces personnes
âgées, celles et ceux qui ont bâti la
génération des Québécois d'aujourd'hui, celles et
ceux à qui nous devons ce que nous sommes aujourd'hui. Nous sommes
heureux, dans notre budget, de leur rendre hommage par la prise de mesures pour
répondre à leurs besoins.
Mais, si nous voulons conserver ces acquis, nous devons faire en sorte
que les enfants d'aujourd'hui, ces adultes de demain, puissent relever les
défis qui s'offrent à eux. C'est dans cette optique, M. le
Président, que notre gouvernement a décidé de relever le
défi de l'éducation au Québec, puisque la qualité
d'un système d'enseignement est l'une des principales
responsabilités du gouvernement, et ce, au même titre que la
santé et la paix sociale. Nous ne sommes pas sans savoir que le
Québec a besoin d'une main-d'oeuvre hautement qualifiée. C'est en
comptant sur des citoyens capables d'assumer leurs responsabilités, tant
sociales que personnelles et familiales, que nous pourrons relever ce
défi.
Alors, M. le Président, nous savons tous, en tant que
Québécois et Québécoises, que le
développement des connaissances et du savoir-faire se situe à la
base de notre économie. C'est une réalité que nous ne
pouvons pas contourner. Puisque la préparation des ressources humaines
de demain est un défi pour le monde de l'éducation, le
gouvernement libéral du Québec a décidé d'inclure
dans son dernier budget une mesure prévoyant une allocation de 42 000
000 $ aux commissions scolaires. Comme l'a affirmé le ministre des
Finances jeudi dernier, dans son discours prononcé ici, préparer
les ressources humaines de demain constitue un défi pour le monde de
l'éducation.
Mais, malgré cette réalité, on constate,
malheureusement, que près de 4 jeunes Québécoises ou
Québécois sur 10 quittent l'école secondaire avant d'avoir
obtenu leur diplôme. De plus, un certain nombre d'emplois qui se
créeront dans l'avenir exigeront une scolarité minimale de niveau
secondaire. La qualité des emplois que se trouveront les
décrocheurs sera donc peu intéressante, surtout au niveau de la
rémunération. C'est sans compter ceux qui, parmi eux, se
retrouveront sans emploi, au chômage ou à l'aide sociale. On
comprend donc pourquoi le ministre des Finances a qualifié de gaspillage
inacceptable de ressources humaines ce grave problème qu'est le
décrochage scolaire.
M. le Président, vous vous rappellerez sans doute que le ministre
de l'Éducation a récemment lancé un mouvement de
mobilisation. L'objectif fixé par ce vaste mouvement est que, d'ici
à 5 ans, une proportion de 80 % des étudiantes et des
étudiants du Québec obtiennent leur diploma-tion.
Vous vous rappellerez également qu'une consultation a eu lieu
dans toutes les régions du Québec, à laquelle ont
participé environ 10 000 personnes provenant de tous les coins, de tous
les milieux. C'est d'ailleurs ce qui a initié le plan d'action triennal
du ministre, lequel précise les correctifs à apporter, en plus de
faire l'objet d'un large consensus parmi les partenaires du monde de
l'éducation.
M. le Président, nous convenons tous aisément qu'il faut,
sans plus tarder, apporter une aide efficace, rapide et personnalisée
à tous les élèves québécois qui connaissent
des difficultés, qu'elles soient scolaires ou familiales. C'est donc
dans cette optique que le gouvernement libéral accordera cette
année cette somme de 42 000 000 $ aux commissions scolaires et ce,
dès la prochaine année scolaire. Cette somme servira à
mettre en oeuvre les premières mesures pour s'attaquer à ce
problème majeur qu'est le décrochage scolaire.
D'ailleurs, à cet effet, le ministre de l'Éducation rendra
publiques des dispositions retenues et fera connaître son plan de relance
incessamment. M. le Président, comme on peut le constater, le budget de
cette année renferme, une fois de plus, des mesures destinées
à lutter contre des problèmes de nature économique et
sociale. Ce n'est pas facile, vous en conviendrez avec moi, d'élaborer
un budget dans la conjoncture économique actuelle. Notre gouvernement a
eu à faire des choix parfois difficiles, mais des choix qui vont dans le
sens des intérêts supérieurs du Québec.
Ce que désirent les Québécoises et les
Québécois, c'est un gouvernement qui se préoccupe de
l'état de l'économie. C'est un gouverne-
ment qui puisse mener à terme le redressement des finances
publiques qu'il a entrepris. C'est un gouvernement qui puisse doter les
régions du Québec d'instruments qui pourront servir de bougie
d'allumage aux initiatives de développement. C'est un gouvernement, M.
le Président, qui accorde une aide substantielle aux familles et, enfin,
c'est aussi un gouvernement qui a du coeur et qui a à coeur les besoins
de toute la population, des enfants en bas âge jusqu'aux personnes
âgées.
Je suis heureux d'affirmer que notre gouvernement répond aux
exigences des Québécoises et des Québécois. Et
à titre d'exemple, j'aimerais simplement vous dire que le
déficit, pour l'année 1992-1993, devrait atteindre 3 790 000 000
$, en baisse de 405 000 000 $ par rapport à l'an dernier, en pleine
période de récession. C'est donc un budget réaliste, un
budget équilibré que nous a livré le ministre des
Finances. Avec un déficit contrôlé, nous pouvons dire tout
haut que le Québec est sur la bonne voie, mais plus encore que le
gouvernement dont je fais partie poursuit inlassablement sa lutte aux
problèmes économiques et que ses efforts en cette matière
donnent des résultats.
Et soyez certain, M. le Président, que je m'opposerai et que je
voterai contre toutes les motions de censure apportées par l'Opposition
devant un tel budget, un budget réaliste, un budget à la mesure
du Québec, et un budget qui répond aux besoins et aux exigences
des Québécoises et des Québécois. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Sauvé. Mme la députée de
Johnson.
Mme Juneau: M. le Président, je voudrais vous demander
l'ajournement du débat, s'il vous plaît.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la
députée de Johnson propose l'ajournement du débat. Est-ce
que cette motion d'ajournement du débat est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Compte
tenu de l'heure, je suspends les travaux de cette Assemblée
jusqu'à 15 heures.
(Suspension de la séance à 12 h 58)
(Reprise à 15 h 7)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mmes et MM. les
députés, nous allons nous recueillir quelques instants, si vous
le permettez. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.
Présence du haut-commissaire du Royaume-Uni de
Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord
J'ai le très grand plaisir de souligner la présence dans
les tribunes du haut-commissaire du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande
du Nord, Son Excellence M. Nicholas Bayne.
Affaires courantes
Nous entreprenons maintenant les travaux de l'Assemblée à
l'étape des affaires courantes.
Déclarations ministérielles. Aucune.
Présentation de projets de loi. Aucune.
Dépôt de documents.
M. le ministre responsable de l'Application des lois
professionnelles.
Dépôt de documents
Rapport annuel de l'Ordre des architectes du
Québec
M. Savoie: Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de
déposer le rapport annuel 1990-1991 de l'Ordre des architectes du
Québec.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
ministre.
Rapports de commissions.
Mme la présidente de la commission de l'éducation et
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Dépôt de rapports de commissions
Étude détaillée du projet de loi 413
Mme Harel: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission de l'éducation qui a
siégé le 13 mai 1992 afin de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 413, Loi modifiant la
Loi sur l'optométrie. Le projet de loi a été adopté
avec des amendements.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, rapports de
commissions, également.
M. le président de la commission de l'aménagement et des
équipements et député de Lévis.
Étude détaillée du projet de loi
3
M. Garon: M. le Président, je dépose le rapport de
la commission de l'aménagement et des équipements qui a
siégé le 14 mai 1992 afin de procéder à
l'étude détaillée du projet de loi 3, Loi modifiant la Loi
sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Le projet de loi a
été adopté avec des amendements.
Étude détaillée du projet de loi
417
Je dépose également, M. le Président, le rapport de
la commission de l'aménagement et
des équipements qui a siégé lé 13 mai 1992
afin de procéder à l'étude détaillée du
projet de loi 417, Loi modifiant de nouveau la Loi sur la publicité le
long des routes. Le projet de loi a été adopté avec un
amendement au titre.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, vos deux rapports
sont déposés, M. le député de Lévis.
Pétitions.
M. le chef de l'Opposition officielle et député de
l'Assomption. (15 h 10)
Dépôt de pétitions
Respecter l'engagement de tenir
un référendum sur la
souveraineté
au plus tard le 26 octobre 1992
M. Parizeau: M. le Président, je dépose l'extrait
d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par
50 426 pétitionnaires, citoyennes et citoyens du Québec.
Les faits invoqués sont les suivants: «L'incertitude
constitutionnelle freine le développement du Québec.
«À la suite du rapport de la commission Bélanger-Campeau,
le gouvernement québécois s'est engagé, en faisant adopter
la loi 150 par l'Assemblée nationale, à tenir un
référendum sur la souveraineté du Québec au plus
tard le 26 octobre 1992. «La souveraineté donnera au Québec
le contrôle exclusif de tous ses impôts, de tous ses traités
et de toutes ses lois, tel qu'il est précisé dans la loi 150.
«La population du Québec doit pouvoir se prononcer par
référendum sur la souveraineté. C'est à elle et
à elle seule de choisir son avenir constitutionnel.»
L'intervention réclamée se résume ainsi: «En
conséquence, nous demandons à l'Assemblée nationale
d'exiger du gouvernement du Québec qu'il respecte cet engagement et
qu'il tienne un référendum sur la souveraineté au plus
tard le 26 octobre 1992.»
Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à
l'original de la pétition.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Toujours à
l'étape du dépôt de pétitions, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Maintenir le statut actuel de la Clinique
communautaire de Pointe-Saint-Charles
Mme Harel: Je dépose l'extrait d'une pétition
adressée à l'Assemblée nationale par 2020
pétitionnaires.
Les faits invoqués sont les suivants: «Nous, citoyens et
citoyennes de Pointe-Saint-Charles et personnes sympathisantes de la clinique,
voulons manifester notre appui à la Clinique communautaire de
Pointe-Saint-Charles. «Considérant que le ministre
Côté affirme lui-même que les principes qui guident sa
réforme dans le cadre de la loi 120 sont: «une prise de
décision le plus près possible de l'action; «des citoyens
au coeur de la prise de décision; «des citoyens imputables de
leurs décisions; «Considérant que ce sont des citoyens qui
dirigent la clinique depuis près de 25 ans; «Considérant
qu'ils s'assurent qu'elle offre des services qui répondent aux besoins
des gens du quartier et ils rendent des comptes de leur gestion;»
L'intervention réclamée se résume ainsi:
«Nous demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir
auprès du ministre Côté pour qu'il exerce son pouvoir de
dérogation dans le but de: «maintenir le statut actuel de la
clinique comme organisme communautaire avec un mandat public de CLSC;
«reconnaître les pouvoirs de l'assemblée de quartier
décisionnelle et du conseil d'administration démocratiquement
élu.»
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la
députée. Mme la députée de Groulx.
Favoriser des négociations avec la CEQ, une
politique de plein emploi, une commission
d'enquête sur la fiscalité et une
révision du régime de négociation du secteur
public
Mme Bleau: M. le Président, je dépose l'extrait
d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par
259 pétitionnaires du Syndicat de l'enseignement des régions de
Deux-Montagnes et de Groulx.
Les faits invoqués sont les suivants: «Considérant
qu'il y a des problèmes urgents à régler en
éducation, notamment l'échec et l'abandon des études;
«Qu'il y a des solutions urgentes à trouver dans le secteur de la
santé et des services sociaux, notamment dans le cadre de l'implantation
de la loi 120; «Que nous avons largement contribué à
réduire les dépenses de l'État depuis les décrets
de 1982 et en acceptant, en toute bonne foi, les ententes de 1991 avec le
gouvernement du Québec; «Que la solution financière du
Québec nous semble devoir passer par une politique de plein emploi et
une révision du régime fiscal; «Notre refus des
propositions Johnson du 14 février 1992; «Que les propositions que
nous avons déposées sont limitées et
raisonnables;»
L'intervention réclamée se résume ainsi:
«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée
nationale d'intervenir en faveur: «d'une véritable
négociation avec la CEQ, sans délai; «d'une politique de
plein emploi; «de la mise sur pied d'une commission d'enquête sur
la fiscalité; «d'une révision du régime de
négociation du secteur public.»
Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à
l'original de la pétition.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la
députée de Groulx. M. le député de Fabre.
M. Joly: Merci, M. le Président. Je dépose
l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée
nationale par 542 pétitionnaires du Syndicat de l'enseignement de
Laval.
Les faits invoqués sont les suivants: «Considérant
qu'il y a des problèmes urgents à régler en
éducation, notamment l'échec et l'abandon des études;
«Qu'il y a des solutions urgentes à trouver dans le secteur de la
santé et des services sociaux, notamment dans le cadre de l'implantation
de la loi 120; «Que nous avons largement contribué à
réduire les dépenses de l'État depuis les décrets
de 1982 et en acceptant, en toute bonne foi, les ententes de 1991 avec le
gouvernement du Québec; «Que la solution financière du
Québec nous semble devoir passer par une politique de plein emploi et
une révision du régime fiscal; «Notre refus des
propositions Johnson du 14 février 1992; «Que les propositions que
nous avons déposées sont limitées et
raisonnables;»
L'intervention réclamée se résume ainsi:
«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale
d'intervenir en faveur: «d'une véritable négociation avec
la CEQ, sans délai; «d'une politique de plein emploi; «de la
mise sur pied d'une commission d'enquête sur la fiscalité;
«d'une révision du régime de négociation du secteur
public.»
Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et
l'original de la pétition. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Fabre. M. le député de Verdun.
Maintenir le statut actuel de la Clinique
communautaire de Pointe-Saint-Charles
M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je dépose
l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée
nationale par 2000 pétitionnaires de la
Clinique communautaire de Pointe-Saint-Charles du comté de
Sainte-Anne.
Les faits invoqués sont les suivants: «Nous, citoyens et
citoyennes de Pointe-Saint-Charles et personnes sympathisantes de la Clinique,
nous voulons manifester notre appui à la Clinique communautaire de
Pointe-Saint-Charles. «Étant donné que le ministre
côté affirme lui-même que les principes qui guident sa
réforme dans le cadre de la loi 120 sont: «une prise de
décision le plus près possible de l'action; «des citoyens
au coeur de la prise de décision; «des citoyens imputables de
leurs décisions; «Étant donné que ce sont des
citoyens qui dirigent la Clinique depuis près de 25 ans;
«Considérant qu'ils s'assurent qu'elle offre des services qui
répondent aux besoins des gens du quartier et ils rendent des comptes de
leur gestion au ministère.»
L'intervention réclamée se résume ainsi:
«Nous demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir
auprès du ministre Côté pour qu'il exerce son pouvoir de
dérogation dans le but de: «maintenir le statut actuel de la
clinique comme organisme communautaire avec un mandat public de CLSC;
«reconnaître les pouvoirs de l'assemblée de quartier
décisionnelle et du conseil d'administration démocratiquement
élu.»
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Verdun. Dernière pétition, Mme la
députée de Saint-Henri.
Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Je dépose
l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée
nationale par 2000 pétitionnaires du comté de Sainte-Anne.
Les faits invoqués sont les suivants: «Nous, citoyens et
citoyennes de Pointe-Saint-Charles et personnes sympathisantes de la clinique,
voulons manifester notre appui à la Clinique communautaire de
Pointe-Saint-Charles. «Étant donné que le ministre
Côté affirme lui-même que les principes qui guident sa
réforme dans le cadre de la loi 120 sont: «une prise de
décision le plus près possible de l'action; «des citoyens
au coeur de la prise de décision; «des citoyens imputables de
leurs décisions; «Étant donné que ce sont des
citoyens qui dirigent la clinique depuis près de 25 ans et qu'ils
s'assurent qu'elle offre des services qui répondent aux besoins des gens
du quartier et ils rendent des comptes de leur gestion au
ministère.»
Et l'intervention réclamée se résume ainsi:
«Nous demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir
auprès du ministre Côté pour qu'il
exerce son pouvoir de dérogation dans le but de: «maintenir
le statut actuel de la clinique comme organisme communautaire avec un mandat
public de CLSC; «de reconnaître les pouvoirs de notre
assemblée de quartier décisionnelle et de notre conseil
d'administration démocratiquement élu.»
Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à
l'original de la pétition. Merci, M. le Président. (15 h 20)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la
députée.
Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de
privilège ou sur un fait personnel.
Nous en arrivons maintenant à l'étape des questions et
réponses orales, et je reconnais en première question principale
M. le chef de l'Opposition officielle.
Questions et réponses orales
Exigences du Québec dans le cadre d'une entente
constitutionnelle
M. Parizeau: M. le Président, pour le premier ministre du
Québec, l'accord du lac Meech a déjà
représenté, à une certaine époque, les conditions
les plus minimales, disait-il, qu'un gouvernement du Québec n'ait jamais
formulées. Depuis quelque temps, le premier ministre a réduit ses
exigences à la substance de Meech. Il est même allé dans
l'Ouest à la recherche de cette substance de Meech, et il ne l'a pas
trouvée.
Aujourd'hui, ce qu'on apprend, c'est que le premier ministre est
allé dire hier à ses collègues, au Ritz-Carlton, à
Montréal: Ce n'est plus Meech, ce n'est même plus la substance de
Meech; la première chose qui est importante, c'est d'avoir la
volonté d'en arriver à une entente.
Des voix: Ah!
M. Parizeau: M. le Président, s'il y a une personne
à qui on ne peut pas reprocher de ne pas avoir la volonté d'en
arriver à une entente, n'importe quelle entente, c'est bien le premier
ministre du Québec. Enfin! J'aimerais demander au premier ministre si
c'est l'échec de son voyage dans l'Ouest qui l'amène à
diminuer ses exigences, à faire en sorte de dire ce qu'il a dit hier
soir à ses collègues: L'important, c'est la volonté d'en
arriver à une entente. Pourquoi le premier ministre n'aurait-il pas,
hier, au Ritz-Carlton, parlé de ses exigences ou des exigences du
Québec?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le premier
ministre.
M. Bourassa: M. le Président, le chef de l'Opposition sait
fort bien le contexte dans lequel s'est déroulée la rencontre,
c'était à un cocktail de courtoisie. Je crois que le chef de
l'Opposition ne peut pas nous reprocher d'être courtois ou civil dans
cette situation-là. Ça se tenait à Montréal. On a
vu, en fin de semaine, que Montréal s'est révélée,
avec les manifestations de plusieurs centaines de milliers de
Montréalais, comme l'une des grandes villes les plus civilisées
du monde et, pour rester dans cet esprit, nous avons accueilli les
représentants de toutes les provinces du Canada avec courtoisie et
civilité.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): En question
additionnelle, M. le chef de l'Opposition officielle.
M. Parizeau: II me semblait que le premier ministre soulignait
cependant, hier, la volonté d'en arriver à une entente, et se
félicitait qu'elle y soit. Est-ce que le premier ministre
considère que M. Benoît Bouchard fabule quand il dit qu'il se
sent, lui, très loin d'un accord pour le 1er juin, quand il dit que ce
qui intéresse le Québec, en fait, commence à peine ou
n'est pas commencé? Est-ce que le premier ministre du Québec va
être obligé de retenir M. Benoît Bouchard parce qu'il
deviendrait, quoi, trop défenseur des intérêts du
Québec?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le premier
ministre.
M. Bourassa: Je constate, M. le Président, que le chef de
l'Opposition se rapproche de M. Benoît Bouchard.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourassa: Est-ce qu'il s'éloigne, en même temps,
de l'autre Bouchard? C'est à voir, M. le Président. Encore une
fois, je lui dis que c'était une rencontre où j'accueillais. Il
n'y avait pas de discours de prononcé. Je répondais à des
questions des journalistes, et il n'y a pas de nouvelle politique du
Québec. C'est toujours la même que j'ai énoncée
à plusieurs reprises. Je constate, comme je l'ai dit hier, une
volonté croissante, si je peux dire, de la part de nos partenaires
canadiens-anglais d'arriver à une entente, comme je constate aussi qu'au
Québec une majorité de Québécois souhaitent que
nous puissions arriver à une entente. Le chef de l'Opposition
présentait, tantôt, une pétition pour ce qui a trait
à un vote sur la souveraineté, sur la loi 150. Je ne sais pas
s'il va participer à la manifestation, dimanche prochain.
Des voix: Où?
M. Bourassa: Pourquoi vous tenez votre
conseil national à Hull si vous voulez participer à la
réunion qui se tient à Montréal? Je ne sais pas...
Des voix:...
M. Bourassa: Ah! C'est l'autre semaine, M. le
Président.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourassa: M. le Président, mes services d'information
auprès du Parti québécois ne sont pas ceux qui pouvaient
exister.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourassa: M. le Président...
Des voix:...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): S'il vous plaît!
S'il vous plaît! S'il vous plaît!
M. Bourassa: Je dis au chef de l'Opposition que le point de vue,
la politique du gouvernement du Québec demeure la même. Nous
l'avons toujours dit. Je crois que quand on dit que nous tenons à la
substance de l'accord du lac Meech, c'est quand même... Si on prend le
dictionnaire, la substance, c'est la réalité, c'est la même
portée de l'accord du lac Meech. Je ne vois pas pourquoi on devrait
exiger le même libellé à une virgule près.
Souvenez-vous de ce qui est arrivé à votre livre bleu, avec vos
23 demandes ou 22 demandes. Alors, on dit: On s'en tient à la substance
de l'accord du lac Meech. Il n'y a pas de changement dans... plus, plus, et on
a dit également: Étant donné que nous faisons face
actuellement à une ronde Québec en même temps qu'à
une ronde Canada, nous voulons également un partage des pouvoirs qui
réponde aux priorités, aux revendications traditionnelles du
Québec.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): En question
additionnelle, M. le chef de l'Opposition officielle.
M. Parizeau: M. le Président, pour répondre
à la question que le premier ministre me posait, je répondrai
que, oui, je participerai à la manifestation du 24 mai, et avec
fierté, M. le Président.
Des voix: Bravo! Bravo!
M. Parizeau: Comment, M. le Président, peut-il y avoir
cette volonté d'entente dont le premier ministre parlait au Ritz-Carlton
hier et qu'il vient de réitérer quand il vient de se faire dire
non dans l'Ouest et que les premiers ministres de l'Ouest ont tenu une
réunion de trois jours la semaine dernière en prédisant,
disaient-ils, les pires catastrophes si leurs demandes qui sont inacceptables,
le premier ministre le sait bien, pour le Québec ne sont pas
agréées? Mais où voit-il une volonté d'entente dont
il se targuait hier soir et qu'il a réitérée
aujourd'hui?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le premier
ministre.
M. Bourassa: M. le Président, un mot d'abord sur le
préambule de la question additionnelle du chef de l'Opposition. Il dit
qu'il accepte avec fierté de participer à la manifestation.
Est-ce qu'il accepterait également d'être accompagné du
député de D'Arcy-McGee qui disait ce matin qu'il insiste, lui
aussi, pour un vote sur la souveraineté?
Des voix: Ha, ha, ha! Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): S'il vous plaît!
S'il vous plaît!
M. Bourassa: M. le Président, l'objectif du gouvernement
du Québec, c'est de protéger l'avenir du Québec. Alors,
vous pouvez vous associer au Parti Égalité, si vous voulez. Nous,
notre guide, c'est la défense des intérêts du Québec
à court terme et à long terme.
Pour répondre au chef de l'Opposition, je veux lui dire
qu'à la suite de mes rencontres avec les premiers ministres des quatre
provinces de l'Ouest, je suis venu à la conclusion qu'il y avait
plusieurs points communs. Il reste encore des divergences, ou des divisions,
sur la question de la réforme du Sénat. On sait que, depuis la
stratégie adoptée il y a une dizaine d'années, le
Québec a perdu son droit de veto, politique à tout le moins, sur
la réforme du Sénat, en raison de cette tristement
célèbre stratégie, adoptée en avril 1981. Alors,
depuis cette époque-là, nous devons tenter de
récupérer le droit de veto sur la réforme du
Sénat.
Donc, sauf sur ce point-là, sur la question des quatre autres
points de l'accord du lac Meech, de la pertinence d'un nouveau partage des
pouvoirs, sur la question de la charte sociale, de l'union économique,
il y avait beaucoup plus de consensus, ou de convergence avec les provinces de
l'Ouest qu'il n'y avait de points de divergence.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Autre question
additionnelle, M. le chef de l'Opposition officielle.
M. Parizeau: M. le Président, pour répondre
à nouveau à la question que me posait le premier ministre, je
dirai que, le chef du Parti Égalité, s'il veut participer avec
nous tous à une mani-
festation en faveur d'un référendum sur la
souveraineté le 26 octobre, il sera le bienvenu. Et je souhaite que le
premier ministre l'accompagne. (15 h 30)
Ma question, maintenant, et non pas ma réponse: Pourquoi le
premier ministre, dans le tour des questions problématiques qu'il vient
de nous tracer, n'a-t-ii pas mentionné que, dans l'Ouest, on lui a
défini la société distincte comme Beaudoin-Dobbie et d'une
façon dont il a dit, le 3 mars, qu'elle était inacceptable?
N'est-ce pas un peu la substance de Meech, ça, M. le
Président?
Pourquoi est-ce que le premier ministre n'a pas indiqué que, si
vous me passez l'expression un peu vulgaire, quant au droit de veto dans
l'Ouest, il a cogné un noeud? Où est la substance de Meech dans
tout ça?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le premier
ministre.
M. Bourassa: M. le Président, j'ai eu l'occasion de
répondre, à l'occasion de la discussion de mes crédits,
sur le point soulevé par le chef de l'Opposition. Je lui ai dit que,
pour ce qui a trait à la Cour suprême, ça ne créait
pas de problème. Tout le monde admet que nous avons un système
légal qui est différent. Pour ce qui a trait au pouvoir de
dépenser également, on semblait d'accord, et on l'a dit à
plusieurs reprises, sur la définition qui est incluse dans l'accord du
lac Meech. Pour ce qui a trait à l'immigration aussi.
Il reste le droit de veto sur les institutions, principalement sur le
Sénat, j'en ai parlé tantôt, et il reste la
définition de la société distincte. J'ai dit que le texte
de l'accord du lac Meech nous était tout à fait acceptable et
nous paraissait le point de référence par excellence de la
situation qui prévaut au Canada et au Québec, puisqu'on parie
dans le texte de la dualité linguistique comme caractéristique
fondamentale. Il y a eu des propositions qui ont été faites pour
modifier le texte avec la commission Beaudoin-Dobbie. J'ai dit qu'on
était prêts à l'examiner, mais que nous
préférions le texte de l'accord du lac Meech. Donc, sur quatre
points, je le répète au chef de l'Opposition, sur quatre points,
il y a convergence ou des chances très très bonnes d'avoir une
convergence. Il reste la question du Sénat qui, pour l'instant,
paraît la pierre d'achoppement à une entente rapide.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Question additionnelle,
M. le chef de l'Opposition.
M. Parizeau: Étant donné l'importance de ce que le
premier ministre vient de dire, je voudrais simplement le lui faire confirmer,
parce que c'est tout un virage possiblement. Est-ce que je comprends bien le
premier ministre quand il nous dit qu'il y a actuellement convergence entre la
définition de la société distincte, telle qu'elle
était dans Meech, et ce qui est en train d'être examiné et
ce qui est proposé à l'heure actuelle à ces assises
fédérales-provinciales, qu'il y a convergence entre la
définition de la société distincte dans Beaudoin-Dobbie et
celle de Meech? Le 3 mars, il avait dit que c'était incompatible. Est-ce
qu'il nous dit qu'il y a convergence à l'heure actuelle, dans son
esprit?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le premier
ministre.
M. Bourassa: Si le chef de l'Opposition m'écoute
attentivement, il va constater que j'ai répété ce que je
lui ai dit à l'occasion de la discussion de mes crédits. Je lui
ai dit, à ce moment-là, que le texte de l'accord du lac Meech...
Je me suis référé au fait que dans l'accord du lac Meech
on présente la dualité linguistique comme une
caractéristique fondamentale dans le rapport Beaudoin-Dobbie. Je ne
parle pas des tables. Le chef de l'Opposition sait fort bien que le
gouvernement du Québec ne participe pas à la table
constitutionnelle. Nous respectons l'engagement, M. le Président, que
nous avons pris il y a 23 mois. On ne peut pas dire qu'on n'a pas
respecté cet engagement-là. Ça n'empêche pas les
rencontres bilatérales. Et je ne vois pas pourquoi le chef de
l'Opposition me reprocherait d'avoir des rencontres bilatérales;
lui-même a essayé d'en obtenir, notamment lorsqu'il est
allé en Alberta.
Alors, ce que je lui dis, M. le Président, et je ne vais pas plus
loin - je procède par allusions diplomatiques, on le sait, non pas par
un style de confrontation - je dis au chef de l'Opposition qu'il n'y a pas de
virage, il n'y a pas de changement dans la position du gouvernement, mais nous
constatons que sur quatre points il y a des chances solides d'arriver à
une entente. Le chef de l'Opposition n'est pas d'accord, mais je lui dis que je
suis confiant sur ces quatre points. Mais il reste la réforme du
Sénat.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je reconnais maintenant,
en deuxième question principale, M. le député de Joliette
et leader de l'Opposition officielle.
Négociation sur l'achat de certains barrages
appartenant à AbKibi-Price
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Pendant que l'empire
Olympia & York, qui détient 82 % du capital-actions d'Abitibi-Price
titube présentement et que les finances chancelantes de cette
dernière la force à vendre quatre de ses filiales au coût
de 340 000 000 $, le gouvernement serait en train, selon les informations que
nous avons, de renégocier ou
des baux ou l'achat de certains barrages appartenant à
Abitibi-Price, afin de permettre à cette dernière de renflouer
les coffres d'Olympia.
Ma question d'abord a la vice-première ministre et à la
ministre de l'Énergie: Est-ce qu'on négocie sur l'achat de
certains barrages appartenant à Abitibi-Price ou si on négocie
sur le renouvellement des baux qui traînent d'ailleurs depuis 1973? On le
sait, certains baux ont été échus, d'autres le seront
prochainement. Mais sur quels points négocie-t-on
présentement?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mme la
vice-première ministre et ministre de l'Énergie et des
Ressources.
Mme Bacon: Je pense, M. le Président, que nous
négocions sur l'achat de certains barrages et la revente de cette
électricité à Hydro-Québec par la suite. J'ai
exprimé, le 9 décembre, aux gens d'Abitibi-Price les attentes du
gouvernement du Québec quant à une transaction possible. J'ai
exprimé aussi, dans ces attentes du gouvernement du Québec, dans
cette vente, le souhait de conserver les emplois à nos travailleurs. Et,
en même temps, les investissements devront être faits dans les
régions. Je pense qu'Abitibi-Price est consciente que nous avons des
balises dans cette négociation; la preuve, c'est que nous n'avons rien
fait depuis le 9 décembre, sauf négocier. C'est parce que nous
n'arrivons pas aux attentes que nous avions que nous continuons de
négocier. Je dois dire, pour sécuriser le député de
Joliette et leader de l'Opposition officielle, que nous allons continuer
à négocier tant et aussi longtemps que ça ne
répondra pas aux attentes du gouvernement et tant et aussi longtemps que
cette négociation-là ne sera pas favorable et aux travailleurs et
aux régions dans lesquelles les investissements doivent être
faits.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Question additionnelle,
M. le leader de l'Opposition officielle.
M. Chevrette: M. le Président, est-ce qu'il n'est pas
exact que, dans un premier temps, on a tenté de négocier l'achat
mais, compte tenu de la faible valeur des barrages actuels, on a plutôt
préféré négocier des baux, ce qui permettait,
à ce moment-là, à Abitibi-Price de pouvoir revendre
à d'autres compagnies à des coûts plus acceptables pour
eux? Parce que sans baux, à toutes fins pratiques, leurs barrages ne
valent pas grand-chose. Est-ce que ce n'est pas plutôt sur le
renouvellement des baux qu'on travaille, au lieu de l'achat des barrages?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mme la ministre.
Mme Bacon: En fait, M. le Président, c'est le dossier de
la vente du réseau d'Abitibi-Price.
Évidemment, comme nous sommes en pleine négociation, je ne
veux pas négocier sur la place publique, mais je veux juste donner les
balises que nous avons données à ce moment-là, le 9
décembre, quand je les ai rencontrés, et qui continuent dans la
négociation, qui sont toujours les mêmes balises: c'est de
sécuriser nos emplois et de sécuriser aussi les investissements
qui doivent être faits au Québec.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Deuxième question
additionnelle, M. le député le leader de l'Opposition
officielle.
M. Chevrette: Oui. M. le Président, si j'ai posé la
question, et je la repose à la ministre, c'est que ça a quand
même une importance, parce que, si on achetait... Est-ce que la ministre
est consciente que, si on achetait le réseau, on permettrait donc
à Abitibi-Price d'injecter des millions dans Olympia, et ce serait
extrêmement dangereux, précisément, pour les emplois
à Abitibi-Price? Parce que, dans certaines usines, il nous faut
absolument des investissements majeurs, si on veut continuer à
être compétitifs; c'est ce que je comprends entre les lignes.
Est-ce qu'il n'est pas exact qu'il y a eu un volte-face au niveau de la
négociation et qu'on négocierait plutôt le renouvellement
des baux, dans le contexte actuel?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mme la ministre.
Mme Bacon: II n'y a pas de volte-face, et les balises, comme je
le disais tantôt, sont les mêmes qu'elles étaient en
décembre. Je pense que je n'ai pas à donner les détails
des discussions que nous avons eues depuis le 9 décembre. Le leader de
l'Opposition officielle va comprendre que ces négociations-là ne
peuvent pas se faire sur la place publique. Mais les balises sont telles que
nous voulons protéger les emplois des Québécois et nous
voulons que des investissements majeurs se fassent dans les différentes
régions.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, en
troisième question principale, je reconnais Mme la députée
de Hochelaga-Maisonneuve. (15 h 40)
Crédit d'impôt remboursable à la
formation
Mme Harel: M. le Président, dans son discours du budget,
le ministre des Finances annonçait, la semaine passée, la
reconduction avec les mêmes modalités du crédit
d'impôt remboursable à la formation. Déjà, avec un
enthousiasme débordant, dans le discours du budget de 1990, le ministre
des Finances prévoyait un impact fiscal de 67 000 000 $ en 1990-1991, de
100 000 000 $ en 1991-1992, et de
108 000 000 $ en 1992-1993. Pourtant, dans le budget de la semaine
passée, on ne retrouve plus que 30 000 000 $ sur les 108 000 000 $
déjà annoncés pour l'année 1993, pendant que les
rapports d'activité des ministères concernés font
état de dépenses de formation remboursables d'environ 8 500 000 $
sur les 67 000 000 $ déjà annoncés pour 1990-1991 et de 17
500 000 $ sur les 100 000 000 $ de 1991-1992. Compte tenu de ces piètres
résultats, le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité
du revenu et de la Formation professionnelle entend-il donner suite à la
résolution, adoptée par le conseil général du Parti
libéral lors de sa réunion des 21 et 22 mars dernier, en faveur,
et je cite, M. le Président: «de l'instauration d'une
réglementation pour amener les entreprises à investir un minimum
de 1 % de leur masse salariale dans la formation ou à être
taxées du même taux, si les sommes ne sont pas investies»?
En cette période de mondialisation des marchés et de
compétitivité, le ministre va-t-il plutôt attendre que le
Québec ait définitivement manqué la partie en
matière de formation professionnelle?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre de la
Main-d'?uvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle.
M. Bourbeau: M. le Président, un des premiers objectifs de
la politique de main-d'oeuvre que j'ai déposée au nom du
gouvernement, au mois de décembre, visait à faire en sorte
d'instaurer une véritable culture de la formation dans les entreprises
québécoises. À cet effet, nous avons annoncé
l'intention du gouvernement de continuer à promouvoir le crédit
d'impôt à la formation dans les entreprises, de façon
à ce que cette culture puisse s'implanter le plus rapidement possible.
C'est un nouveau programme qui a été mis en place il y a à
peine un an et demi, au début de l'automne 1990, et on sait que, les
nouveaux programmes de ce type, ça prend un bon bout de temps avant que
les entreprises deviennent familières avec les programmes, commencent
à s'en servir et que les résultats soient connus.
Or, on sait que, les résultats, on les connaîtra quand les
entreprises auront déposé leur rapport d'impôt à la
fin des années fiscales. Alors, des entreprises qui commencent une
année fiscale en janvier 1991, par exemple, la fin de l'année
fiscale n'est pas avant le 31 décembre 1991. On a six mois pour faire
les rapports d'impôt. Il est trop tôt pour tirer des conclusions.
Tout ce que je peux dire, c'est que certaines informations indirectes qui nous
parviennent nous laissent présager que ce programme est en train
présentement de connaître une bonne popularité
auprès des entreprises - oui, vous pouvez rire, vous pouvez rire, oui -
il est en train de pénétrer présentement dans les
entreprises québécoises pas mal plus que vous ne pensez. à
mon avis, on va atteindre le rythme de croisière qui était
prévu par le ministre des finances d'ici à un an ou deux, vous
allez être surpris!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Une question
additionnelle, Mme la députée. Allez-y!
Mme Harel: M. le Président, puisqu'il est trop tôt,
selon le ministre de la Main-d'oeuvre, pour tirer des conclusions de rapports
préliminaires, comment peut-il expliquer que ces rapports
d'activité aient quand même servi et inspiré le
ministère des Finances de manière à ce que les projections
à la baisse que l'on retrouve portent de 108 000 000 $ à 30 000
000 $ seulement les crédits d'impôt remboursables à la
formation pour 1993?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, le programme de
crédit d'impôt remboursable à la formation, c'est un
programme ouvert. On peut bien marquer dans les budgets 150 000 000 $, on peut
marquer 125 000 000 $, on peut marquer ce que l'on veut. C'est un programme
où on va payer ce que ça va coûter, un peu comme l'aide
sociale. Alors, il n'y a pas de limites à ce qu'on peut dépenser.
Si les entreprises québécoises décident de se mettre
à la formation, ce que nous souhaitons tous de ce côté-ci
de la Chambre, en tout cas, on va payer ce que ça va coûter. Et
tant mieux si ça coûte 100 000 000 $, tant mieux si ça
coûte 200 000 000 $; c'est que les entreprises québécoises
seront en train de former leurs travailleurs. Pour l'instant, on a fait des
prévisions basées sur certains éléments qu'on peut
avoir présentement. S'il apparaît, comme je pense qu'il va
apparaître, que les entreprises sont en train de s'y mettre beaucoup plus
sérieusement que vous ne pensez, bien, ça nous coûtera plus
cher et on sera content, tout le monde.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Deuxième question additionnelle, Mme la députée.
Mme Harel: M. le Président, le ministre est-il conscient
que, pendant ce temps-là, le Québec est en train de manquer
définitivement la partie de la formation professionnelle, qui est le
plus important défi à relever à l'aube du XXIe
siècle? Comment le ministre peut-il expliquer qu'il attende encore,
après trois ans maintenant, avant de donner suite à la
résolution adoptée par le conseil général de son
parti qui, à la vue de ces piètres résultats, lui demande
d'agir en faisant en sorte que les entreprises soient tenues d'investir des
sommes dans la formation professionnelle?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, la députée de
Hochelaga-Maisonneuve a pris l'habitude, au cours des dernières
semaines, d'annoncer des mauvaises nouvelles à cette Chambre, soit ici,
à la Chambre, ou en dehors, et elle a eu parfois à s'en mordre
les pouces. Pensons à sa déclaration d'il y a deux semaines quand
elle a annoncé que les prestations d'aide sociale ne seraient pas
indexées pour la prochaine année; le ministre des Finances l'a
vraiment fait mal paraître dans les jours qui ont suivi.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Bourbeau: Alors, il faut faire attention, là!
Là, elle vient de nous annoncer que le Québec est en train
de manquer la partie de la formation de la main-d'oeuvre. Je nie
carrément ces choses-là, M. le Président. Le Québec
n'est pas en retard sur les sociétés occidentales
présentement en ce qui concerne l'adaptation de la main-d'oeuvre. Nous
ne sommes pas en avant et nous ne sommes pas en retard; nous sommes au
même niveau que les autres provinces canadiennes ou que les États
américains.
Ce que je peux dire, c'est que nous avons pris des mesures pour faire en
sorte de prendre les devants, en déposant une politique de main-d'oeuvre
au mois de décembre dernier et en proposant récemment la
formation d'une société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre qui va faire en sorte de donner au
Québec les instruments dont il a besoin pour assurer son avenir dans ce
domaine-là.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci. Alors, autre
question principale, M. le député d'Abitibi-Ouest et leader
adjoint de l'Opposition officielle.
Fermeture d'écoles francophones à la
commission scolaire Jérôme-Le Royer
M. Gendron: Oui, M. le Président. Faisant fi des
recommandations du rapport d'enquête sur son administration, rendu public
en octobre dernier, la commission scolaire Jérôme-Le Royer
continue de faire preuve de laxisme et d'irrationalité dans ses
décisions, tant financières qu'administratives. La liste
étant trop longue, je me contenterai d'illustrer un exemple concret,
à savoir la recherche du rationnel et les procédures
utilisées qui ont conduit à la fermeture de deux écoles
primaires francophones de cette commission scolaire, soit les écoles Pie
XII et Saint-Jean-Eudes.
On sait qu'aucune étude sérieuse d'impact ne fut
présentée aux commissaires lorsqu'ils ont eu à
décider du sort de ces deux écoles et que cette décision
aura, bien sûr, des conséquences au niveau de la dispersion des
clientèles, deux écoles pourtant reconnues parmi les plus
performantes de la commission scolaire. On peut sérieusement mettre en
doute le bien-fondé d'une telle décision presque
incompréhensible.
Ma question très simple au ministre: Le ministre de
l'Éducation peut-il nous indiquer s'il a l'intention de donner suite
à la demande des parents de l'école Pie XII qu'il rencontrait
encore hier, qu'il est allé rencontrer en leur disant que la nuit
porterait probablement conseil? Alors, ma question très simple: Est-ce
que la nuit a porté conseil, et avez-vous l'intention de vous impliquer
dans quelque chose qui mériterait que vous vous impliquiez?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre de
l'Éducation.
M. Pagé: M. le Président, suite au rapport
d'enquête déposé à l'automne 1991 et concernant la
commission scolaire Jérôme-Le Royer, l'enquêteur avait
formulé une recommandation comme quoi la commission devait se
questionner sur l'opportunité de maintenir des écoles avec des
classes excédentaires. Partant de là, la commission scolaire a
procédé à un véritable redéploiement de ses
clientèles au sein de certains secteurs de la commission scolaire et,
notamment, dans le secteur concerné, à la ville d'Anjou.
Ceci étant dit, M. le Président, il nous est apparu, parce
que ça fait quand même un certain temps qu'on a été
sensibilisés à ce dossier-là, que le processus de
consultation avait été suivi. Cependant, après avoir
rencontré les parents, après avoir pris connaissance de
différentes informations relatives à la gestion de ce dossier et
au processus de décision qui a été engagé, j'ai
demandé hier soir au directeur régional du ministère de
l'Éducation de faire parvenir le message suivant, sous forme de lettre,
aux dirigeants de la commission scolaire: O.K., d'accord, vous avez
procédé ou vous entendez procéder au redéploiement
de vos clientèles; pourriez-vous me donner, pourriez-vous informer le
ministre de l'Éducation et le ministère de l'Éducation de
l'analyse en termes d'impact pédagogique pour la qualité des
services éducatifs aux élèves, l'analyse que vous avez
probablement effectuée, si une telle étude et analyse a
été faite? Si oui, nous la recevrons, on l'analysera, et je me
suis engagé envers les parents d'aviser en conséquence, dans les
meilleurs délais, après que j'aurai reçu la réponse
de la commission scolaire. (15 h 50)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Question additionnelle,
M. le député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Est-ce que le ministre de l'Éducation va
accepter de regarder d'autres situations qui font que dans presque toutes
les
décisions de cette commission scolaire, comme par hasard, c'est
toujours le secteur francophone qui écope? Ça ne vous fatigue
pas, comme ministre de l'Éducation, le favoritisme éhonté
en faveur des anglophones à Jérôme-Le Royer?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre de
l'Éducation.
M. Pagé: Vous savez, M. le Président, je crois que
c'est un peu téméraire de la part du député
d'Abitibi-Ouest de faire de telles affirmations ici. Vous savez, il ne faut pas
rapporter tout ce qu'on lit; il ne faut pas nécessairement rapporter
tout le temps ce qu'on entend. Je vais vous dire ceci: Les décisions qui
ont été prises... D'abord, vous savez que c'est une commission
scolaire qui a très peu de tradition, au niveau politique, autour de la
table des commissaires. Deux partis politiques sont là, deux partis
politiques qui s'inscrivent plus souvent qu'autrement en dualité, en
opposition, en affrontement. Or... Psst! Psst! Pourriez-vous
écouter?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Pagé: M. le Président... Ah! Bien, oui. M. le
Président, il ne m'écoute pas, il parle aux autres pendant ce
temps-là.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y, allez-y,
allez-y.
M. Pagé: Je voulais vous dire... Je voudrais vous dire
ceci: II y a deux partis politiques là-bas qui sont toujours en
dualité et en affrontement. Dans ce dossier-ci, les partis politiques
ont voté ensemble à 14 contre 5. Alors, avant d'affirmer, avant
de formuler des affirmations aussi gratuites que celle-là, d'être
aussi téméraire, je vous invite à un peu plus de prudence.
Et même, communiquez avec les gens de l'opposition à la commission
scolaire Jérôme-Le Royer. Plusieurs d'entre vous connaissent bien
ces gens-là. Plusieurs d'entre vous les connaissent bien. Communiquez
avec eux, et ils vont vous le confirmer: L'unanimité des partis, le
consensus des partis moins cinq commissaires qui étaient des deux
partis.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le
député d'Abitibi-Ouest, deuxième question
additionnelle.
M. Gendron: Oui. Sur l'écoute, M. Gagnon, il trouve que
j'écoute pas mal plus que vous. C'est vous qui êtes ministre de
l'Éducation.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Votre question.
M. Gendron: Est-ce que le ministre... Oui. Si M. le ministre ne
sait pas qui est M. Gagnon, c'est parce qu'il ne regarde pas son courrier. Une
lettre de sept pages, où c'est rempli de faits.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Votre question.
M. Gendron: Oui, ma question, très claire: Est-ce que le
ministre de l'Éducation, hier, en rencontrant les parents, a
discuté de l'ensemble des faits qui sont soulevés dans des
écrits et dans des lettres qui témoignent - et je le
répète, je n'ai pas peur, je suis capable de porter ce que je dis
- que depuis des années il y a un favoritisme éhonté en
faveur des anglophones à Jérôme-Le Royer? Vous, comme
ministre, est-ce que ça vous dérange ou si ça ne vous
dérange pas? C'est ça, ma question.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): m. le ministre de
l'Éducation.
M. Pagé: M. le Président, le document qui a
été acheminé par les parents, on en a pris connaissance.
Il se réfère non seulement à la question des
écoles, il se réfère à l'ensemble de la gestion de
la commission scolaire. J'ai eu l'occasion, hier, de rencontrer les parents.
Les parents se sont montrés beaucoup plus préoccupés par
toute la question de la pédagogie, de l'impact du déplacement des
élèves dans d'autres écoles, de l'impact pour ces
élèves et ces enfants beaucoup plus que par le questionnement
soulevé sur la gestion. Je leur ai fait part que, premièrement,
j'entendais voir jusqu'où la démarche pédagogique - ou la
qualité des services pédagogiques - était susceptible
d'être affectée comme suite de ce redéploiement de
clientèle. Deuxièmement, concernant les autres questions
relatives à la gestion de la commission scolaire, nous sommes à
étudier et à analyser chacun des éléments qui ont
été apportés à notre attention.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Autre question
additionnelle, M. le député de Pointeaux-Trembles.
M. Bourdon: M. le Président, le ministre convient-il que,
depuis le rapport de l'enquêteur, pour ce qui est de l'iniquité
que les francophones, à la fin du primaire, aient reçu 200 heures
de cours de moins, que la commission scolaire et le groupe qui domine la
commission scolaire n'ont rien fait et entendent ne rien faire pour redresser
cette situation inéquitable dénoncée par son propre
enquêteur?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre de
l'Éducation.
M. Pagé: M. le Président, lorsqu'une école
est fermée ou lorsqu'une commission scolaire manifeste l'intention de
fermer une école, ça
suscite toujours de l'inquiétude dans le milieu, et ce, peu
importe dans quelle commission scolaire au Québec. Cependant, il faut
convenir que c'est une responsabilité de la commission scolaire. Dans le
dossier qui nous occupe... J'apprécierais, M. le Président, si le
député de Pointe-aux-Trembles pouvait nous écouter
puisqu'il a posé la question. Je m'adresse à vous. J'ai dit, M.
le Président, que j'apprécierais qu'il écoute quand il
pose une question...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y.
M. Pagé: ...au moins la réponse.
M. le Président, le rapport de l'enquêteur a
été déposé. La commission scolaire a
manifesté l'intention... Elle a très clairement indiqué sa
volonté d'y donner suite. Vous attendez, et le député...
Le représentant de l'Opposition officielle, le député
d'Abitibi-Ouest, et son collègue attendent que les parents aient
manifesté du mécontentement face à la fermeture de
certaines écoles pour se lever ici à l'Assemblée nationale
et revenir sur le dossier de Jérôme-Le Royer. Je vais vous dire:
premièrement, les enfants sont retournés à l'école.
J'ai demandé aux parents, hier, de faire en sorte que leurs enfants
retournent à l'école. C'est le cas. Je vous ai indiqué que
j'attendais de la commission scolaire son analyse concernant les services
éducatifs. Lorsque je recevrai le rapport, j'aviserai en
conséquence.
Deuxièmement, concernant les autres éléments
soulevés par le député d'Abitibi-Ouest et la lettre de M.
Gagnon à laquelle il se réfère - qu'on a lue, ne soyez pas
inquiet là-dessus -je vous ai fait part que tout ce qui concerne la
gestion, nous sommes en train de l'analyser.
Troisièmement, je considère comme téméraire,
non fondée et questionnable une affirmation aussi gratuite se
référant aux services aux anglophones par rapport aux
francophones. Vous devez vous rappeler, et je termine là-dessus, M. le
Président, j'invite les collègues à se rappeler que le
motif pour lequel davantage de services en capital humain étaient
accessibles au réseau anglophone, c'est en particulier en raison d'un
surnombre de professeurs dans le secteur anglophone de la commission scolaire
qui étaient mis en disponibilité. Et plutôt que de les
payer chez eux, la commission scolaire a affecté ces personnes à
une responsabilité éducative dans la commission scolaire.
C'était dans le rapport. Soyez donc un peu plus judicieux dans vos
appréciations et vous aurez l'occasion de me revenir quand j'aurai
à rendre publics les résulats des analyses.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Additionnelle. Allez-y,
M. le député d'Anjou, en question additionnelle.
M. Bélanger (Anjou): Merci, M. le Président.
Puisque le ministre de l'Éducation a rencontré les parents
à l'école Pie XII, le ministre peut-il nous indiquer ce qu'il
entend faire, précisément, quant à l'école
Saint-Jean-Eudes puisqu'il n'a pas encore donné suite à la
rencontre des parents de cette école avec sa sous-ministre et qu'il
n'est pas sans savoir que ces derniers ont déjà entrepris des
démarches judiciaires qui pourraient être très
coûteuses?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre de
l'Éducation.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Là-dessus,
M. le Président, il y a eu des échanges entre les parents de
l'école Saint-Jean-Eudes et les représentants de mon
ministère. Ça, je présume que le député en
est informé.
Une voix:...
M. Pagé: On ne le comprend pas très bien tout le
temps. Ça va venir. Ceci étant dit, M. le Président, le
député doit savoir aussi que l'association ou le comité de
parents de Saint-Jean-Eudes a présenté une requête devant
la Cour supérieure, une requête qui a été
refusée, qui n'a pas été acceptée. Et, dès
le lendemain, les parents ont formulé l'intention, ont
déclaré très clairement qu'ils entendaient se
prévaloir d'une autre requête devant la Cour supérieure du
Québec dans un échéancier assez rapproché. Partant
de là, M. le député, vous comprendrez qu'à partir
du moment où les parents décident de choisir la voie des
tribunaux pour régler un problème qui les concerne le ministre de
l'Éducation a pris sa responsabilité par la rencontre que ces
bonnes gens ont eu avec ma sous-ministre. Le dossier en est à cette
étape-là.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Alors, en question additionnelle... Je m'excuse. M. le député La
Prairie en question principale.
Projet de site d'enfouissement sanitaire à
Saint-Alban de Portneuf
M. Lazure: Merci, M. le Président. Les plus
récentes informations concernant le projet de site d'enfouissement de
Waste Management à Saint-Alban de Portneuf font état d'un projet
encore plus gigantesque que prévu. En effet, ce qui devait être 30
000 000 de pieds carrés est devenu 45 000 000 de pieds carrés,
donc un terrain non plus pour 3000 résidences, mais pour 4500
résidences, pour une population d'une ville d'environ 15 000 personnes.
On apprend aussi que les promoteurs ont conclu un accord avec un agriculteur
pour construire une route de 3,2 kilomètres reliant le site
d'enfouissement avec les bretelles de l'autoroute 40 qui vont relier Lauralco
à Deschambault. Et, enfin, la rumeur
veut que la voie ferrée abandonnée du CN reprenne du
service non seulement pour Lauralco à Deschambault, mais aussi pour
conduire les déchets au site d'enfouissement. La question au ministre
qui, il y a deux semaines, a répondu: «Bien, je n'ai pas encore de
demande officielle», la question que je lui pose aujourd'hui: Est-ce
qu'il attend que le trou soit creusé avant de s'intéresser de
plus près à ce projet? Et est-ce qu'il ne croit pas que le temps
est venu de décréter un moratoire sur l'ouverture de nouveaux
mégasites d'enfouissement ou l'agrandissement de sites existants et de
permettre ainsi au Bureau d'audiences publiques de mener une enquête
publique pour que tous les faits soient connus, un peu comme le BAPE l'a fait
pour les déchets dangereux? (16 heures)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre de
l'Environnement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, bien
que nous n'ayons pas, au ministère de l'Environnement, reçu de
demande de certificat d'autorisation pour l'opération du site
d'enfouissement sanitaire auquel a fait référence le
député de La Prairie, nous suivons le dossier quotidiennement
pour nous assurer qu'aucun travail n'est effectué concernant comme tel
l'aménagement d'un site d'enfouissement sanitaire. Après avoir
vérifié encore sur l'heure du midi avec la direction
régionale responsable, je peux assurer le député de La
Prairie que des travaux comme tels sur l'emplacement, quant à
l'aménagement d'un site, ne sont pas débutés et je peux
également l'assurer qu'il n'y a pas de dossier ouvert au
ministère de l'Environnement, la compagnie ou le promoteur
éventuel n'ayant pas encore adressé au ministère une
demande de certificat d'autorisation.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): En question
additionnelle, M. le député La Prairie, allez- y-
M. Lazure: Est-ce que le ministre peut nous dire s'il a eu des
représentations de son collègue de l'Éducation, le
député de Portneuf, qui, lui, exprime publiquement ses
inquiétudes quant aux impacts sur l'environnement? Est-ce que le
ministre peut nous dire aussi combien de ces projets de mégasites sont
actuellement en marche pour l'ensemble du Québec?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre de
l'Environnement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Bien avant que le
député de La Prairie ne s'intéresse au dossier, le
député du comté de Portneuf m'a fait des
représentations.
M. Brassard: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le
député de Lac-Saint-Jean, en question principale. Allez-y.
Front commun de cinq provinces en faveur d'un
Sénat élu, efficace et égal
M. Brassard: M. le Président, le ministre responsable du
dossier constitutionnel accompagnait le premier ministre, hier, au cocktail,
à Montréal, regroupant tous les ministres impliqués dans
le dossier constitutionnel. Je ne sais pas s'il a pu prendre connaissance de la
constitution - c'est ce qu'on apprend il y a à peine deux minutes - d'un
front commun regroupant cinq provinces afin d'obtenir l'adoption d'un
Sénat triple «e», soit un Sénat élu, efficace
et égal. Alors, je sais bien qu'il ne négocie pas là, mais
11 a des oreilles pour entendre et des yeux pour voir. est-ce qu'hier, au
cocktail, il a pu prendre connaissance ou est-ce qu'on l'a informé de la
mise en place, de la création d'un front commun de cinq provinces pour
obtenir un sénat triple «e»? est-ce que c'est ça, la
manifestation de la bonne volonté dont parlait le premier ministre?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre
délégué aux Affaires intergouvernementales
canadiennes.
M. Rémillard: Oui. Merci, M. le Président. M. le
Président, c'était, de fait, une belle réception, je
crois, qui a été fort appréciée, une
réception qui a montré l'hospitalité dont nous sommes
capables. Nous ne sommes pas à la table, mais, quand même, nous
avons montré que nous avions un grand intérêt dans cette
procédure qui est suivie. Il faut quand même se rappeler, M. le
Président, que c'est probablement la première fois, dans toute
l'histoire du Canada, qu'il y a autant d'efforts mis en commun, de la part de
toutes les provinces et du gouvernement central, pour en arriver à une
entente constitutionnelle, 12 semaines de réunions lorsqu'ils auront
terminé à toronto, la semaine prochaine. alors, il faut quand
même rendre hommage au ministre joe clark, à m. bouchard et
à tous les collègues qui travaillent aussi fort à vouloir
trouver une solution. le québec n'est pas là. on a offert une
réception, je pense, qui a été appréciée,
mais je veux simplement dire au député de lac-saint-jean: non, on
ne m'a pas informé d'un front commun.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Cette dernière
réponse met fin à la période des questions et
réponses orales.
Il n'y a aucun vote reporté.
À l'étape des motions sans préavis, je reconnais M.
le ministre délégué à l'Administration et à
la Fonction publique et président du Conseil du trésor.
Motions sans préavis
Souligner le 350e anniversaire de la fondation de la
ville de Montréal
M. Johnson: m. le président, je fais la motion suivante:
«que cette assemblée souligne le 350e anniversaire de la fondation
de la ville de montréal».
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a
consentement pour débattre cette motion? Oui?
M. Gendron: Oui.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y, M. le
président du Conseil du trésor.
M. Daniel Johnson
M. Johnson: Oui, M. le Président. C'est le 18 mai 1642 que
le père Barthélémy Vimont, un jésuite, missionnaire
de Nouvelle-France, célébrait la messe de fondation de
Ville-Marie en présence du sieur de Maisonneuve...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
M. le président du Conseil du trésor. Merci de votre
collaboration. M. le président du Conseil du trésor, sur votre
motion.
M. Johnson: Oui, M. le Président. Ce que j'indiquais,
c'est que c'était en mai, le 18 mai 1642, qu'un jésuite
missionnaire en Nouvelle-France, le père Vimont, célébrait
la messe de fondation de Ville-Marie, en présence et sous la gouverne de
Paul de Chomedey, le sieur de Maisonneuve. C'est en effet le vocable sous
lequel cette agglomération ou ce village était connu, à
l'époque, et ce n'est qu'en 1726 qu'on commencera à parler de
Montréal.
Il m'apparaît important et pertinent de souligner ici ce que le
père Vimont disait, une prévision, sans doute, et je cite:
«Ce que vous voyez n'est qu'un grain de moutarde, mais il est jeté
par des mains si pieuses et animées de l'esprit de la foi et de la
religion que, sans doute, il faut que le ciel ait de grands desseins, puisqu'il
se sert de tels ouvriers. Et je ne fais aucun doute que ce petit grain ne
produise un grand arbre, ne fasse un jour des merveilles».
C'est un plaisir, évidemment, de se remémorer une telle
phrase, lorsqu'on voit aujourd'hui le profil des gratte-ciel de
Montréal, de même que certaines de ses avenues qu'on pourrait
qualifier de somptueuses, telle l'avenue McGill College. Quel chemin parcouru
depuis que les premiers arrivants, colons et dignitaires de la Nouvelle-France
qui ont foulé son sol, en compagnie de Paul de Chomedey de Maisonneuve
et de Jeanne Mance, en mai 1642! Sans compter que Montréal fut la
capitale du Canada de 1844 à 1849. On l'a affublée de nombreux
vocables et de nombreux épithètes: Montréal
l'industrielle, la ville aux 100 clochers, Montréal, ville olympique, la
ville de l'Expo 67, Montréal culturelle, Montréal souterraine et,
de plus en plus, Montréal, ville internationale.
Au XVIIIe siècle, déjà Montréal
s'érige comme un important village fortifié qui se
développe autour de son port. Maintenant, à l'aube du XXIe
siècle, Montréal figure parmi les grandes villes du monde. Elle
compte quatre universités, de grandes écoles, cultive les
cerveaux des scientifiques, le génie des créateurs, le talent des
artistes et l'«entrepreneurship».
Aujourd'hui, son développement économique, social et
culturel s'appuie sur son ouverture à la différence et tire le
plus grand profit de cette capacité d'intégrer les influences les
plus diverses. Ses échanges avec l'extérieur sont étendus
et intenses. Montréal est tout de même l'une des plus anciennes
villes de l'Amérique du Nord, aussi jeune soit-elle comparée
à ses ascendants européens.
Jamestown, Québec, Trois-Rivières sont nées avant
elle. Mais Chicago, Pittsburg et Nouvelle-Orléans ont été
fondées par des explorateurs et des aventuriers montréalais
accompagnés, la plupart du temps, ou guidés par leurs
alliés amérindiens. Montréal est pavée de symboles
qui démontrent son passé historique sans pareil. L'un de ceux-ci
remonte au tout début de son histoire. Telle ainsi cette visite de
Jacques Cartier, en 1535, qui a été guidé au sommet du
mont Royal qu'il a baptisé et où on retrouve, plus de 100 ans
plus tard, Paul de Chomedey de Maison-neuve qui y porte lui-même une
croix, symbole qui y brille évidemment toujours.
Source d'innovation et de progrès, c'est à Montréal
qu'on crée également au Canada la première banque, les
premiers chemins de fer, les premières bourses, les premiers canaux, la
première chambre de commerce, le premier gratte-ciel et la
première station de radio. Lieu d'épanouissement de deux grandes
culture, francophone et anglophone, la petite Ville-Marie a rapidement
développé l'âme d'une métropole. C'est à
partir de Montréal que les premiers explorateurs et les
commerçants ont développé les grands réseaux de
transport qui sillonnent aujourd'hui le continent.
Au fil des ans, des générations d'immigrants sont venues
à Montréal y élire demeure et ont contribué, par
leurs connaissances, leurs talents, leur énergie, au
développement et au rayonnement de notre société. Cette
diversité de cultures que l'on retrouve à Montréal ajoute
à sa qualité de vie et très certainement à son
caractère de métropole.
Montréal fête ses 350 ans d'histoire et le gouvernement du
Québec est heureux de se joindre à tous ceux qui tiennent
à souligner cet anniversaire. Cet événement d'envergure
marque une étape importante dans l'histoire de notre
métropole qui constitue un pôle de développement qui
nous permettra de participer activement aux grands débats du monde
entier.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): merci, m. le ministre et
président du conseil du trésor. sur cette motion, je reconnais m.
le député de sainte-marie-saint-jacques. m. le
député, la parole est à vous. (16 h 10)
M. André Boulerice
M. Boulerice: M. le Président, à l'occasion du 350e
anniversaire de la fondation de Montréal, j'ai lu avec un plaisir
indicible un livre, sans doute romancé mais combien passionnant, sur les
hommes et les femmes qui fondèrent Montréal. Vous comprendrez que
je fais allusion à «Maisonneuve: le testament du gouverneur»
de Louis-Bernard Robitaille. Je voudrais tant que cet anniversaire nous donne
le goût de connaître les personnages de légende que sont
Chomedey De Maisonneuve, Jeanne Mance et tous les autres, le goût de
partager leurs joies, leurs peines, leur esprit d'entreprise et leurs
convictions pour mieux nous en inspirer.
Nous aurons une multitude d'occasions de nous rassembler puisqu'il y
aura, à Montréal, bals, festivals populaires, spectacles son et
lumière, etc., à l'initiative d'organismes communautaires de tous
les quartiers, et je les félicite d'avance. Nous avons aussi l'occasion
unique de nous rappeler le destin singulier de cette ville qui est la
nôtre et que nous aimons, les hauts et les bas de cette grande ville
francophone, porte d'entrée des immigrants au visage cosmopolite et
coloré.
Mme Émond, dans le journal Le Devoir, écrivait - et
nul mieux qu'elle ne résume l'atmosphère de cette première
journée de festivités - «C'est par grappes de centaines de
milliers que les Montréalais ont pris d'assaut leur ville et ses
activités de carnaval, gonflés par l'enthousiasme bon enfant
typique de cette métropole du plaisir, pour l'excitation pure et simple
de prendre la rue à plusieurs après un hiver impitoyablement long
et rude. Si on ne trouve pas le temps de fêter ses 350 ans, quand le
prendra-t-on? Et la lune de printemps accrochée au ciel de nuit, le
soleil en cadeau d'anniversaire le jour, les Montréalais
déguisés en touristes, en badauds, en flâneurs, en
festivaliers, en amoureux des musées et des amuseurs ont joui de leur
ville à s'en fendre l'âme.»
Montréal, c'est, en plus des femmes et des hommes qui la
fondèrent, les femmes et les hommes qui l'habitent. Montréal est
une ville attachante, M. le Président. Montréal, c'est une
rangée de maisons en briques rouges dans un quartier ouvrier, avec, au
coin de la rue, le dépanneur et le triporteur. C'est les riches demeures
bourgeoises de la rue Saint-Hubert que l'on rénove sur le
Plateau-Mont-Royal. Montréal, ce sont les édifices historiques de
sa vieille partie, son port, l'église Notre-Dame - sans doute l'une des
plus belles d'Amérique du Nord -le château Ramezay, le
marché Bonsecours, Au Pied-du-Courant et la pendaison des Patriotes.
C'est la modernité de son centre-ville et de sa ville souterraine. C'est
la montagne, c'est le parc Maisonneuve, c'est le parc Lafontaine, c'est la
verdure, c'est les fleurs. C'est les nouveaux quartiers des parties est et
ouest, c'est le fleuve au sud et c'est la rivière des Prairies au nord.
C'est ses théâtres, ses musées, sa vie culturelle
trépidante et féconde. Montréal, c'est une histoire,
d'abord; durant 200 ans, une histoire de France aux noms prestigieux: Chomedey
de Maisonneuve, Lambert Closse, Des Groseilliers, Dollard Des Ormeaux, Louis
Joliet, donc des racines auxquelles doivent s'identifier celles et ceux qui
sont venus après. Pour apprécier la continuité de
l'histoire, il faut savoir reconnaître ses débuts et en faire
siens les faits antérieurs.
Parlant de ceux qui sont venus après et d'ailleurs, c'est parler
du Montréal Pool Room, institution nationale sur la «Main»,
comme on dit en langage populaire. C'est les meilleurs bagels au monde. Ce sont
les souvlakis du restaurateur grec, les fleurs du Coréen, le couscous
qui n'a rien à envier à celui que l'on peut manger à
Marrakech. C'est le marché Jean-Talon et les restaurants de cuisine
familiale italiens.
Montréal, c'est blanc, M. le Président. Montréal,
c'est jaune. Montréal, c'est noir. Montréal, c'est beau.
Montréal, c'est un français parlé avec l'accent asiatique
ou sud-américain. C'est une population accueillante. C'est une des
villes les plus propres du monde, une des plus secures du monde.
Montréal, M. le Président, c'est ma ville. Montréal, c'est
notre métropole à nous, Québécois. La fêter,
cette métropole, c'est nous fêter, nous, Québécois.
Venez donc fêter avec nous. Nous vous attendons.
Un écrivain dont j'ai oublié le nom, disait: «J'ai
vu de nombreuses villes, toutes suffisamment belles pour que j'aie le
goût de les revoir. Aucune, toutefois, ne l'était suffisamment
pour m'empêcher de revenir dans la mienne. Montréal, on revient
toujours vers toi.» Bonne fête, Montréal!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Très bien, M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Sur cette même
motion, M. le ministre des Affaires municipales.
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, la vie du Québec gravite
depuis déjà trois siècles autour de deux pôles
principaux. Il y a d'abord la ville de Québec, qui est la ville la plus
ancienne, la
première ville du Canada. Elle fut le siège du premier
diocèse catholique qui est encore le siège où loge le
primat de l'Eglise canadienne, le siège de la première
université française en Amérique, dont le rayonnement
continue d'ailleurs de dépasser largement les frontières de
Québec, le siège du gouvernement du Québec,
l'Assemblée nationale où nous avons l'honneur de siéger
ensemble, le point de gravitation de la vie économique, sociale et
culturelle de plus de la moitié des territoires québécois.
Les régions comme le Saguenay-Lac-Saint-Jean, Charlevoix, la rive nord
du Saint-Laurent, le Bas-du-Fleuve, Portneuf, Montmagny, une bonne partie de la
Mauricie gravitent autour de Québec. Leur point naturel de gravitation,
c'est Québec. C'est pourquoi, quand nous voulons parler du Québec
dans toute son intégrité, nous ne pouvons faire autrement que de
penser d'abord à la ville de Québec. Mais, fort heureusement, il
y a un autre pôle très important qui a toujours marqué le
développement de la vie collective du Québec, c'est
Montréal.
Montréal est née quelques années à peine
après Québec, a connu un développement très
différent, mais, avec les années, Montréal s'est
affirmée comme un centre religieux missionnaire de premier plan. On n'a
qu'à rappeler l'action inoubliable du cardinal Léger, par
exemple, pour comprendre combien, par son aspect religieux, Montréal
s'est située à l'avant-garde de la vie humaine au cours du
siècle actuel. Montréal est également un centre financier,
commercial et industriel de toute première importance. Je parlerai
tantôt des problèmes qui l'affligent aujourd'hui, mais ça
reste une caractéristique de Montréal. On n'a qu'à
descendre dans le bas de la ville à Montréal, comme de nombreuses
personnes l'ont fait en fin de semaine, pour se rendre compte de tout le
dynamisme que recèle encore la métropole du Québec.
Montréal est un centre de vie intellectuelle unique avec ses
quatre universités, ses trois journaux quotidiens, ses très
nombreuses stations de radio et de télévision, ses innombrables
publications de toutes sortes. Montréal est un centre de vie culturelle
et intellectuelle unique au Québec et, de ce point de vue-ci, un centre
plus complet et plus large que Québec. Il faut bien le dire en toute
vérité.
Je pense que la grande caractéristique de Montréal, c'est
qu'à cause de la diversité extrême de la vie des
idées dans la métropole, toute pensée d'unanimisme doit
être exclue. Il y a toujours des rêveurs qui voudraient que nous
soyons tous semblables, que nous ayons tous les mêmes
caractéristiques, les mêmes opinions politiques, les mêmes
opinions religieuses. La présence d'une métropole dans notre
société rend ça impossible parce que, dans une
métropole, il y a toujours quelqu'un qui peut dire: Je ne pense pas
comme la majorité, et être capable de le dire impunément
à cause de l'extrême diversité qui existe dans la
métropole. C'est très important de le signaler. Montréal,
malgré tous les apports qu'elle a su accepter au cours des
générations, est demeurée une ville française, est
une ville à très forte prépondérance
française, mais, en même temps, une ville diversifiée.
Je remarquais dimanche, j'écoutais les discours aux
célébrations du 350e anniversaire, puis c'est comme si certains
orateurs avaient peur de mentionner qu'il y a un caractère anglais dans
la ville de Montréal. Il y a un filon anglais dans la tradition
montréalaise qui a été présent pendant tout le
XVIIIe siècle, pendant tout le XIXe siècle, qui est une
donnée fondamentale de notre tradition historique, il faut le
mentionner. À cet élément anglophone sont venus s'ajouter,
plus particulièrement au XXe siècle, des éléments
venus d'à peu près toutes les communautés humaines qu'on
compte sur la planète, y compris au cours des dernières
années, des éléments qui nous ont apporté un
enrichissement très substantiel en provenance de l'Asie, de l'Afrique,
de l'Amérique latine. (16 h 20)
La richesse de Montréal a continué de s'accuser. Il n'y a
rien que j'apprécie, moi, aujourd'hui, comme d'entrer dans une boutique
qui est tenue par un Cambodgien ou un Vietnamien d'origine, par exemple. Nous
pouvons tous apprécier la propreté, la discipline, le dynamisme
avec lequel ces entreprises sont conduites. Ça ajoute
énormémemnt à la richesse du paysage. Puis, aujourd'hui,
quelqu'un qui veut être heureux à Montréal doit être
capable de vivre avec toute cette diversité, puis, non seulement de
vivre avec, mais de s'en imprégner. C'est ça qu'est le
véritable esprit de Montréal. De ne pas penser qu'on est tout
seul, qu'on se suffit à soi-même, mais d'accepter d'être
influencé, d'être mué, d'être changé
continuellement par l'ouverture qu'on a dans le contact avec les autres.
Montréal est une ville internationale d'excellente
qualité. Le genre même de vie qu'on pratique à
Montréal constitue un attrait pour l'activité internationale. La
présence de quatre universités dans la seule ville de
Montréal attire des ressources intellectuelles en provenance du monde
entier. La présence d'un grand nombre de sièges sociaux est
également un facteur d'attraction très important. La
présence d'organisations internationales comme l'OACI, par exemple, nous
apporte à Montréal des réunions, des formes
d'activités de toutes sortes qui sont vraiment intéressantes.
Alors, il y a toutes sortes de raisons d'être fiers, pour les
Montréalais d'origine comme le sont plusieurs d'entre nous, pour les
Montréalais d'adoption, pour les Montréalais de passage. Il y en
a de toutes les sortes, mais tout ça fait partie de Montréal, et
puis il n'y a personne qui en est le propriétaire ou le
représentant exclusif.
Maintenant, ces dernières années, Montréal a connu
des problèmes très sérieux. Puis, je
pense qu'on ne serait pas vrai en omettant de les signaler
à l'occasion d'une motion comme celle que présente mon
collègue, le président du Conseil du trésor,
député de Vaudreuil. À cause de l'étalement urbain
que les gouvernements ont laissé se pratiquer sans presque aucune forme
de contrôle, la vie s'est développée dans toutes les
directions. Elle s'est étalée sur le territoire d'une
manière telle qu'aujourd'hui, on a une population relativement peu
nombreuse, qui est dispersée sur un territoire considérable. Le
maintien de services de base pour ces populations entraîne des frais
considérables qui contribuent sans doute à l'extrême
lourdeur des coûts publics dans une société comme la
nôtre. Les citoyens se demandent souvent: Comment se fait-il que
ça coûte si cher pour vivre au Québec? Comment se fait-il
qu'on a des impôts aussi élevés? Bien, quand ils prennent
la décision de partir d'un centre urbain pour aller s'établir un
petit peu plus loin, ils pensent faire une décision économique.
Dans l'immédiat, ça leur coûte moins cher de taxes,
ça leur coûte moins cher en responsabilités
financières de toutes sortes. Mais, à la longue, il faut leur
construire des égouts, il faut leur construire des écoles, des
hôpitaux, des centres sociaux, pendant que les mêmes services se
dépeuplent au coeur des centres urbains. On n'est pas surpris que
ça coûte deux fois plus cher, parce qu'on donne deux fois plus de
services par rapport à ce qu'on peut supporter.
Mais, ça, une fois qu'on l'aura compris comme il
faut, je pense qu'on se rendra compte qu'il y a des redressements à
faire pour que la ville principale, la ville de Montréal, occupe toute
la place qu'elle doit occuper, puis soit l'objet de notre sollicitude et de
notre attention constante dans les décisions que nous sommes
appelés à prendre.
Je mentionne aussi la dispersion du pouvoir politique. Je
ne veux pas faire de politique partisane ici, mais, seulement sur le territoire
de l'île de Montréal, on a 29 municipalités. Il faut se
poser des questions. Il faut se demander si c'est la meilleure façon
pour la région métropolitaine de faire face aux défis qui
nous attendent au XXIe siècle. C'est dans cette perspective que le
gouvernement, tout d'abord sous la direction du président du Conseil du
trésor, a produit récemment un plan de développement
économique pour Montréal et la région qui l'entoure, un
plan qui est centré sur les fonctions les plus modernes possible,
c'est-à-dire les fonctions les plus susceptibles de produire une
activité qui contribuera au relèvement du niveau de vie et
à l'amélioration de la qualité de vie de la
population.
Je voudrais rendre hommage à mon collègue, le
président du Conseil du trésor, pour l'excellente qualité
de ce rapport qui nous fixe des objectifs très exigents et pour la
réalisation desquels le gouvernement a déjà
commencé à poser des gestes significatifs, en particulier par le
dépôt du projet de loi qui créera la Société
Innovatech. De notre côté, aux Affaires municipales, nous avons
constitué récemment un groupe de travail sur Montréal et
sa région. Puis, vous remarquerez, M. le Président, que nous
avons intitulé ce groupe: «Groupe de travail sur Montréal
et sa région». Nous n'avons pas dit la région
métropolitaine ou la région de Montréal, nous avons dit
Montréal, qui est la ville principale, la ville première, la
métropole, puis, la région qui l'entoure également, en vue
de préciser la nature des rapports qui devront s'établir entre
ces entités diverses, de manière que la force qui doit
résider dans la métropole reste centrée dans la
métropole et rayonne vers toute la région d'une façon
ordonnée et productive.
Alors, je compte beaucoup que ce comité sur lequel
nous avons nommé des personnes représentatives de tous les
secteurs d'activité, des personnes de haute qualité pourra nous
aider à débroussailler ces problèmes énormes qui
ont beaucoup contribué à ralentir le progrès de
Montréal et de sa région au cours des dernières
années.
Je pense, M. le Président, que Montréal a
également été affectée par le climat d'incertitude
constitutionnelle, linguistique et autre qui a plané sur le
Québec depuis une vingtaine d'années. Je dis souvent à des
amis de langue anglaise qui me demandent si on va le régler, une fois
pour toutes, le problème de ne pas rêver en couleur. Je pense que
ça fait partie de la tradition de Montréal aussi. Je me rappelle
toujours, quand on a créé la Confédération
canadienne, en 1864, un vote a été pris au Parlement des deux
Canadas, et les délégués du Bas-Canada - je le dis
à l'intention du député de Jacques-Cartier et du
député de Westmount - ont voté en faveur du projet de
Confédération dans une proportion - les chiffres, je ne m'en
souviens pas avec toute la précision voulue - à peu près
28 à 24. Si on calcule qu'il y avait au moins 6, 7 anglophones parmi la
majorité, c'est un peu le cas comme aujourd'hui, ça veut dire que
les francophones eux-mêmes étaient divisés en deux camps
à peu près égaux pour l'édification de nos amis de
l'opposition, je souligne que ça, ça remonte à 1864 et que
le rêve d'unanimité qu'ils formulent souvent ne semble pas
prêt de se réaliser. puis, nous autres, ne le souhaitons pas outre
mesure de notre côté parce que nous avons appris depuis longtemps
à vivre avec l'inspiration que procure une opposition vigoureuse et
substantielle. je pense que c'est ça, l'esprit de montréal aussi.
on est capable de s'affronter en ayant des positions assez fortement
opposées, pourvu que chacun les défende franchement de
manière claire et directe. ; ceci ne m'empêche pas de souligner
que le climat de morosité constitutionnelle dans lequel nous avons trop
baigné a contribué à ralentir le progrès de la
cité. Le plus tôt possible, nous
prendrons des décisions claires, laissant l'avenir ouvert - les
générations futures s'en occuperont de l'avenir - mais des
décisions qui nous permettront de prendre d'autres décisions
extrêmement importantes en matière routière, en
matière aéroportuaire, en matière portuaire, en
matière de développement scientifique, industriel et commercial.
Je pense que tous les intervenants ont le droit d'exiger des décideurs
politiques qu'ils sachent se brancher pour une période au moins
satisfaisante et souhaitent vivement, quant à moi, que nous en venions
en ces matières à un régime de convivance
démocratique et civilisé, qui nous permettra, tout en nous
respectant les uns les autres de continuer à développer notre vie
politique dans un climat de très grande liberté et de grande
responsabilité, également.
Je termine, M. le Président, en signalant que Montréal,
par sa situation géographique extraordinaire, est magnifiquement
placée pour jouer un rôle de premier plan dans la vie du
Québec, dans la vie canadienne, dans la vie nord-américaine, et
je dirais même dans la vie internationale, et cela, tant au plan
économique qu'au plan culturel et au plan social. Mais il y faut
certaines conditions qui ont peut-être fait défaut ces
dernières années et qui ont été abondamment
soulignées, dimanche dernier, par les orateurs qui sont intervenus aux
cérémonies d'ouverture des fêtes du 350e anniversaire
auxquelles j'avais le plaisir d'être présent, accompagné de
plusieurs députés et collègues du gouvernement.
Parmi ces conditions qu'on a signalées, il faut d'abord que
Montréal s'accepte elle-même dans sa réalité
intégrale, et je pense qu'on est capable d'être d'accord, des deux
côtés de la Chambre, là-dessus. Il faut,
deuxièmement, que Montréal ait foi en son destin. Il faut aussi
qu'elle puisse compter sur des gouvernements supérieurs, autant à
Québec qu'à Ottawa, qui comprennent sa réalité, qui
comprennent les difficultés auxquelles elle fait face et qui soient
capables de l'aider et de la soutenir pour qu'elle puisse reprendre cette place
qu'à certains égards elle avait quelque peu perdue en raison de
l'évolution économique qui a beaucoup favorisé Toronto au
cours des 25 dernières années. (16 h 30)
Je termine cette fois-ci pour vrai, M. le Président, en adressant
des félicitations chaleureuses au maire de Montréal, M.
Doré, au président du comité des fêtes du 350e
anniversaire, M. Patrick Kenniff, à tous les membres de ce
comité, tous les dirigeants de la ville de Montréal, pour la
persévérance dont ils ont fait preuve dans la préparation
des fêtes du 350e anniversaire et surtout pour l'excellente façon
dont ils ont conçu ces fêtes dont nous avons pu avoir la
première manifestation en fin de semaine. Il y a longtemps que je
n'avais pas vu, à Montréal, une fête où on pouvait
circuler librement, autant des péquistes que des libéraux, autant
des fédéraux que des provinciaux, sans se faire engueuler par des
concitoyens, sans se faire dire qu'on était des traîtres, des
vendus ou des vauriens, en se faisant dire: Bonjour, monsieur, ça me
fait plaisir de vous voir, je ne vous avais pas vu depuis longtemps, on est
content de se rencontrer tous ensemble.
Ça a été une journée, la journée de
dimanche en particulier, au cours de laquelle il n'y a pas eu de ces incidents
désagréables qui sont venus tellement souvent brouiller nos
célébrations collectives, autour des dernières
années. On n'avait pas l'impression que c'étaient des
péquistes qui dominaient, que c'étaient des libéraux ou
des conservateurs. Tout ce monde-là était ensemble, s'acceptant
réciproquement. Je pense que si on peut maintenir cet esprit et ensuite
le traduire dans les autres secteurs de l'activité collective, nous
aiderons Montréal à augmenter sa force, à renforcer sa
vitalité, à devenir vraiment, dans tous les sens du terme, cette
métropole dynamique, vivante, vigoureuse et énergique dont nous
rêvons pour tout le Québec et, de ce côté-ci de la
Chambre, pour tout le Canada. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre
des Affaires municipales. M. le député de Jacques-Cartier.
M. Neil Cameron
M. Cameron: Merci, M. le Président. I am very happy to
join with the President of the Treasury Board and other speakers in saluting
Montréal on its 350th birthday. It seems a good occasion for people to
look at the city again in the light of history, and it is a city with a
remarkable history and a city that can scarcely be understood without its place
in history.
It is startling to think now how much the world has changed since the
founding of Montréal. In 1642, when Maisonneuve founded it, Armand du
Plessis, better known as Cardinal Richelieu, was just finishing his great work
of constructing the French Bourbon State, England was about to enter a civil
war, Isaac Newton had just been born and politics was a very dangerous affair.
If you dissatisfied the crowds in the streets of the great cities of Europe and
your coach was caught by one of those crowds, you were quite likely to be torn
limb from limb. We are usually rather more fortunate even when we produce
displeasure among our constituents.
If you walk through the City of Montréal, you see constant
visible signs of its history, not just archaic remnants or devices that would
fascinate an antiquarian, but much more powerful indications of the extent to
which very, very powerful influences of the past still shape the modern city. A
journalist friend of mine likes pointing out as a classic instance Dominion
Square. It has a nice concentration of a great
deal of what Montréal is all about in one place. On the one hand,
you can see Mary Queen of the World Church with its symbol of Catholicism and
that tremendous role the Church played in the tradition of Montréal and
Québec. On another side, there is the Sun Life Insurance Company, Anglo
commerce; just a little distance away, Windsor Station, the great station of
the days of steam railways; and a military monument in the park. On the whole,
that gets a great deal of what Montréal has been about through the
years.
I think, although the Member for Argen-teuil, the Minister for Municipal
Affairs, was kind enough to say several important things about the role of the
English-speaking population in Montréal, that it would only be fitting
for me to add a few points in the same line. I might note that while
Montréal had a solid history as a developing city from 1642 through to
Confederation, it only grew modestly throughout all that period, and it was
still little more than a provincial town when Canada went through Confederation
and when several American cities had already grown to a substantial size.
The really large change came in the last third of the 19th century and
the first third of this century when the combination of things like - largely
Anglo, but to some extent, Francophone as well - commercial development and the
tremendous effectiveness of the Canadian Pacific Railway and the world of
steamships made Montréal an entrepôt of staggeringly important
dimensions, the second most important port in the entire Eastern seaboard after
New York, running ahead of Boston and other major ports, a city that had jumped
to a population of a third of a million by the beginning of this century, and a
city that already had a university then, McGill, which was achieving a world
reputation through things like the quality of its medical school and the
brilliant atomic research that was carried out in the Macdonald Physics
Laboratory by Ernest Rutherford. By the First World War and the 1920s,
Montréal was one of the great cities of the world.
Today, I think it still holds that distinction, not by size but by the
quality of life there. It is probably important to admit, however, that there
are certain attractive things about Montréal that depend too much on
looking to the past rather than the present or the future. There are many
cities in the world that are still beautiful places and still loved by their
citizens, but where everyone has the feeling that their golden age is behind
them. Imagine what it feels like to be a Florentine or a Venetian, for example,
and we certainly have seen more and more alarming evidence that New Yorkers are
beginning to feel that way. Montréal has something of the same
possibility, that is, of continuing to exist, even continuing to grow, even
experiencing some economic prosperity, but somehow, lacking the sense of the
importance, the dynamism, the special significance that we feel it had in the
past.
I think even that is avoidable, that Montréal can play the same
kind of role in Québec and in Canada that it has in the past. But if it
is to do so, it will have to do so with a full recognition that it is an
essentially cosmopolitan city, a city of the French and the English and of
other groups of people, a city in which the French language, the English
language, sometimes a rather ghastly «franglais», bilingualism,
unilin-gualism, new languages, all mingle. And the most important thing about
it is not just that, but they mingle successfully, they mingle harmoniously,
they mingle productively in a couple of million people, if one stretches out to
the suburbs, 3 000 000 people, who on the whole work together happily and
cooperatively and I believe will continue to do so. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Jacques-Cartier. Sur cette même motion, je
reconnais maintenant M. le député de Jonquière.
M. Francis Dufour
M. Dufour: Oui, merci, M. le Président. Il me fait plaisir
avec mes prédécesseurs de joindre ma voix pour vanter, ou pour
donner notre appréciation sur une ville qui a marqué toute
l'époque du Québec en particulier et qui a marqué aussi
l'histoire de l'Amérique.
Vous savez, c'est 350 ans d'histoire, mais c'est 350 ans où
Montréal s'est située comme une forme de premier gouvernement ou
de première administration. C'est là où les premiers sont
arrivés ici au Québec, il y a 350 ans, et même presque 400
ans. Si l'on regarde Québec avec 1608, il y a 34 ans de
différence. (16 h 40)
Donc, on peut dire que les premières organisations que les gens
ont rencontrées en arrivant ici au Québec, ça a
été ces villes, ces municipalités, qui ont commencé
par des bourgades, des gens qui sont partis de France ou d'ailleurs, qui sont
venus s'établir sur les bords du Saint-Laurent et qui, avec beaucoup de
courage, de ténacité ont réussi à bâtir un
milieu de vie et aussi à grandir. Il n'y a pas beaucoup de gens qui
savent qu'au début de nos institutions parlementaires, en 1790, pour la
première fois, Montréal est devenue plus populeuse que la ville
de Québec. C'était la première fois qu'on constatait que
sa population était plus grande et, en même temps, on se dotait
d'institutions un peu différentes.
Je voudrais citer un extrait du livre «La démocratie
naissante», vu qu'on fête nos institutions parlementaires cette
année; il y a un petit passage qui est intéressant puisqu'on dit
que,
pour les gens de l'époque, les Montréalais demeurent
toujours des loups et les Québécois, des moutons, pour reprendre
l'expression d'un voyageur français de la fin du XVIIe siècle.
L'explication était que les Montréalais, vivant plus près
des Amérindiens, avaient hérité de leur esprit de
liberté, alors que les Québécois, plus près de
l'administration, se comportaient comme des moutons.
C'est intéressant de regarder, au point de vue historique,
comment s'est développée, d'un côté, notre capitale
qui s'appelle Québec et, de l'autre côté, pas tellement
loin, Montréal. Effectivement, Montréal, c'est une ville de
commerce, c'est une ville d'industrie, c'est une ville de culture, c'est une
ville où il y a une activité débordante sur le monde,
à l'extérieur; c'est aussi une ville de régions. Tout
à l'heure, le ministre des Affaires municipales faisait allusion au fait
que Québec était alimentée ou vivait avec
i'arrière-pays qu'on appelle Charlevoix, le Saguenay, le Bas-du-Fleuve,
mais on peut dire que Montréal s'est nourrie de toutes les
régions du Québec. Il s'agit juste de se promener à
Montréal pour rencontrer des gens, soit de la Gaspésie, soit du
Saguenay, soit de la région de Charlevoix. C'est l'addition des
régions qui fait une partie de la richesse de la ville de
Montréal. C'est intéressant de le faire puisque chacun s'y
reconnaît, chacun s'y retrouve chez lui. C'est important qu'on ait des
endroits où on puisse s'identifier, où on puisse faire
l'unanimité. On ne fait pas encore l'unanimité sur notre pays,
mais on peut dire que, pour les Québécois et les
Québécoises, on fait l'unanimité sur la valeur et sur la
qualité de la ville de Montréal. C'est important d'être
capable de se rencontrer et de se reconnaître dans une institution. C'est
déjà un commencement de pays que d'avoir un sentiment
d'appartenance à quelqu'un ou à quelque chose, et
Montréal, les Québécois et les Québécoises
s'y identifient. On est fier de ses réalisations puisqu'elle rayonne.
Elle est reconnue comme une grande ville du patrimoine mondial; c'est une
grande ville, c'est une ville qui a performé, et les gens savent
qu'à Montréal il y a une ouverture pour toutes les races, pour
toutes les populations.
Il y a aussi une qualité intrinsèque ou qui appartient
peut-être un peu plus à Montréal qu'ailleurs au
Québec. Je voudrais souligner l'apport des femmes dans le
développement du milieu montréalais, qui a débordé
aussi sur le Québec. Je veux juste en nommer quelques-unes. Je vais
parier surtout de celles qui sont disparues parce que, des contemporaines, il y
en a tellement que je ne voudrais pas faire injure en les oubliant. Je voudrais
juste souligner l'apport important de Jeanne Mance, fondatrice de
l'Hôtel-Dieu, l'hôpital. Bien oui! Puis, en plus, notre
président de l'Assemblée est aussi très près de ce
comté. Donc, c'est important tout ce qu'elle a pu faire chez nous.
Marguerite Bour- geoys est aussi une autre femme qui a marqué notre
milieu, qui a marqué sa congrégation et qui a réussi aussi
à se faire reconnaître dans la sainteté. Madeleine de
Verchères aussi est une femme qui a défendu, jusqu'à un
certain point, les valeurs qui existaient et qui existent toujours: la valeur
de la propriété, la valeur des racines qu'on veut ancrer dans
notre milieu. Plus près de nous, qui ne se souvient pas des luttes de
Thérèse Casgrain concernant la valeur du vote des femmes?
J'aurais le goût de nommer des personnes qui sont vivantes
actuellement, mais, comme je vous l'ai dit, M. le Président, elles sont
tellement nombreuses que je ne voudrais pas faire injure en en oubliant
quelques-unes parce que, en voulant en nommer, je vais en oublier
sûrement. J'en oublie déjà, même dans celles qui sont
disparues. Je voulais surtout marquer celles qui, à mes yeux, pour
l'ensemble du Québec - et d'ailleurs, on peut les reconnaître dans
des mouvements très forts - ont fait avancer la cause de l'ensemble de
notre civilisation, mais aussi qui ont marqué particulièrement
Montréal et le Québec. C'est important de souligner l'apport de
ces gens-là qui ont travaillé à faire avancer, soit la
démocratie, soit les valeurs humaines, soit les valeurs morales, parce
que c'est dans ce sens-là que je veux témoigner
spécialement envers les femmes.
C'est évident, M. le Président, que Montréal est
aussi un moteur pour les régions, un moteur pour le Québec. Qui
ne se reconnaît pas dans ses réalisations extraordinaires? On aura
beau critiquer ce qui s'est fait à Montréal, mais on critiquerait
encore plus fort ce qui ne s'est pas fait, parce que Montréal a
été tout de même, au point de vue de l'ensemble des
municipalités du Québec, un exemple. Il y a beaucoup d'endroits
où Montréal a innové, a marqué l'ensemble des
municipalités du Québec.
Les premières habitations pour les classes sociales
défavorisées ont été construites à
Montréal, ce qui a amené et on l'appelait le plan Dozois. C'est
à partir de ça qu'on a réussi, ailleurs, à faire
des habitations à loyer modique, ce qui a permis à d'autres
démunis de pouvoir se loger. Le transport en commun est aussi l'endroit
où ça a commencé. Ça aussi, ça a
marqué le Québec. Il y a un autre élément ou une
autre activité importante qui existe actuellement, qui s'appelle
Loto-Québec, qui est une source intarissable de revenus pour le
gouvernement du Québec, qui a commencé par la volonté, un
peu, de la ville de Montréal, d'abord pour elle-même, mais qui a
été, après ça, prise au profit du gouvernement du
Québec. Là encore, je pense que Montréal a marqué
des points ou a marqué son époque.
Au point de vue de l'organisation municipale dans son entier, je suis
convaincu qu'on n'a pas cherché tellement longtemps pour voir ce que
Montréal a pu apporter et a pu donner aux
autres municipalités. C'est important qu'on ait des exemples sur
lesquels on puisse se guider. Vous savez, le problème majeur qu'on a, au
Québec, actuellement, c'est qu'on sent qu'on n'a pas de guide. C'est
ça, le problème fondamental du Québec dans son entier.
Ça, c'est pour le citoyen ordinaire, mais pour l'ensemble des
municipalités du Québec, j'ai l'impression que toutes les
municipalités ont les yeux tournés vers ce qui se passe à
Montréal et ce qui s'y fait. Quand j'entends parler de villes et
villages fleuris, c'est parce que Montréal a décidé
d'embellir sa ville, et c'est comme ça qu'on a pu le donner à
l'ensemble de nos municipalités, ce goût de vouloir s'embellir et
de se fleurir. Les réalisations dynamisantes ou dynamiques, assez
souvent, ont commencé à cet endroit.
Bien sûr, il n'y a pas seulement que des belles choses qui se font
à Montréal. Dans toute société, il y a des choses
qui sont belles et des choses moins belles, mais il faut aussi admettre
qu'à travers tout ça il faut souligner les belles choses qui se
font et, au point de vue de la culture, c'est vraiment à Montréal
qu'on trouve ces choses-là. Quand on parle du Jardin botanique, il n'y a
pas beaucoup de Québécois et de Québécoises qui ne
sont pas fiers de parler de leur Jardin botanique. Ça, c'est dû,
bien sûr, au frère Marie-Victorin, mais c'est dû aussi
à des administrateurs municipaux qui ont accepté de travailler
avec des groupes et des organismes pour pouvoir se doter d'un
élément aussi structurant et aussi important.
Donc, M. le Président, c'est évident qu'il y a beaucoup de
choses à dire, et j'aurais le goût d'en dire encore beaucoup
puisque, pour moi, même si on n'est pas de Montréal, j'ai
l'impression que ça fait partie de notre patrimoine. J'ai l'impression
aussi que, le fait que je sois allé souvent à Montréal,
c'est devenu une partie de moi-même aussi, et c'est pour ça que je
me sens chez nous. Je ne me sens pas dépaysé à
Jon-quière... À Jonquière! À Montréal. Je ne
me sens pas... ni à Jonquière, ni à Montréal. M. le
Président, c'est un lapsus, mais on peut corriger ça facilement.
Je ne me sens pas dépaysé à Jonquière. Je ne me
sens pas, non plus, dépaysé à Montréal. Je me sens,
dans un endroit comme dans l'autre, chez moi. (16 h 50)
J'ai l'impression que la population de Montréal, c'est une
population qui a de l'ouverture parce qu'il y a des gens qui l'ont conduite
depuis de nombreuses années, qui avaient de l'ouverture non seulement
sur le monde, mais, ce qui est le plus important, sur les leurs, ceux et celles
qui l'habitent. C'est comme ça que, moi, je vois cette métropole.
J'espère qu'elle pourra solutionner ses problèmes et que non
seulement on pourra en parler pour lui souhaiter bonne fête mais que, de
temps en temps, Montréal se sente moins oubliée de la part du
gouvernement.
Je pense bien que si on a parlé de ville industrielle, il faut
l'aider pour prendre le tournant du XXIe siècle. Ça, elle ne le
fera pas seule. Elle le fera à la condition qu'il y ait une
volonté de la part de son gouvernement et ça, ça me semble
un élément important. C'est un virage qu'on fait lentement. Il
faudra aussi qu'on regarde les plus démunis parce qu'il y a une symbiose
de toutes les classes de notre société dans cette
ville-là. Il faudra aussi que nos gouvernements puissent aider les
administrations municipales à régler leurs problèmes.
Mais, si on veut continuer à faire partie du bataillon des gens à
i'avant-garde, des gens qui se projettent vers l'avenir, il faut que
Montréal, comme métropole et comme ville, continue à
rayonner et que, nous, on lui donne les instruments pour l'aider à ce
faire.
M. le Président, en terminant, je voudrais souhaiter à
tous les Montréalais et Montréalaises, aux autorités
municipales, mes meilleurs voeux de bonne fête et que le 350e soit le
prélude à de nombreuses, nombreuses autres années de
succès continuels. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Jonquière, de votre intervention. Je rappelle
aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à
l'étude de la motion qui se lit comme suit: «Que cette
Assemblée souligne le 350e anniversaire de la fondation de la ville de
Montréal». Je reconnais M. le député de LaFon-taine.
M. le député, la parole est à vous.
M. Jean-Claude Gobé
M. Gobé: Merci, M. le Président. C'est avec
plaisir, aujourd'hui, que je me joins à mes collègues de
l'Assemblée nationale pour souligner le 350e anniversaire de la
création de la ville de Montréal. Si nous avons, aujourd'hui, une
pensée pour Maisonneuve, pour Jeanne Mance, nous devons avoir aussi des
pensées pour tous ces gens, tous ces artisans, tous ces grands
Montréalais qui ont bâti Montréal que nous connaissons
aujourd'hui.
J'écoutais notre collègue, le président du Conseil
du trésor, qui nous parlait de Montréal l'industrielle,
Montréal l'internationale, Montréal la ville de la culture. Je ne
pourrai m'empêcher de parler de Montréal l'internationale sans
souligner deux grands événements qui ont marqué d'une
façon irrémédiable et pour longtemps la vie
montréalaise et son développement, soit l'Expo de 1967 et les
Jeux olympiques. À cet effet, M. le Président, vous me permettrez
de rendre hommage, aujourd'hui, à Son Excellence, M. Drapeau, qui fut
maire de Montréal pendant très longtemps et qui a marqué
le développement de la ville d'une façon indélébile
et pour longtemps.
Il y a aussi, M. le Président, Montréal la région,
car il ne serait y avoir Montréal comme il y a 350 ans, intra-muros,
petite bourgade recueillant un hôpital, une garnison, une
église
et, plus tard, quelques autres. Il y a Montréal Laval, il y a
Montréal Rivière-des-Prairies, Montréal
Pointe-aux-Trembles, Montréal Repen-tigny, Montréal Longueuil,
Montréal West-Island. Montréal, M. le Président, c'est
maintenant une très grande agglomération, une
agglomération de dimension internationale. On ne saurait passer sous
silence cette croissance qui est due, comme chacun le sait, à tout le
développement industriel et à la qualité de vie que les
gens recherchaient, cherchant là à s'établir de plus en
plus dans des banlieues où ils pouvaient s'installer avec leurs familles
dans une maison confortable et y jouir d'une qualité de vie, loin
quelquefois des endroits un peu plus centraux des villes où la pollution
était là, où le bruit était là.
Je crois, M. le Président, que c'est la nouvelle
réalité de Montréal avec laquelle nous devons maintenant
composer. C'est celle que les prochaines décennies verront encore se
développer. Il y a eu aussi, M. le Président, ces derniers jours,
des fêtes à Montréal, des fêtes populaires, des bals,
des musées, des expositions... C'est très bien, ça permet
justement de rappeler cette fondation et de divertir les populations.
Je crois qu'il ne faut pas oublier, non plus, M. le Président,
l'autre Montréal. S'il y a le Montréal lumineux, le
Montréal qui est la lumière de la culture française en
Amérique, n'oublions pas que Montréal est la plus grande ville
francophone, française d'Amérique du Nord et d'Amérique du
Sud aussi, d'ailleurs. Je crois que son rôle est très important
pour la promotion et le développement de cette culture française
car, pour faire une image, c'est peut-être sur les falaises de
Montréal que vient se briser l'élan de la culture anglophone.
Elle résiste très bien jusqu'à ce jour, M. le
Président, et on le doit à l'ensemble des partis politiques, des
gouvernements qui se sont succédé, ainsi qu'à la
volonté des Montréalais de résister et de conserver cette
spécificité française, francophone, qui fait de
Montréal une des rares cités en Amérique du Nord avec
quelque chose de différent des autres cités, M. le
Président.
L'autre Montréal dont je parlais un petit peu avant, c'est le
Montréal de la pauvreté, le Montréal des gens de l'aide
sociale, le Montréal des quartiers défavorisés, le
Montréal de l'immigration, de l'intégration, de la violence. Car,
ne nous cachons pas derrière ces fêtes et ces festivités,
nous ne pouvons l'ignorer. Autant Maisonneuve, Jeanne Mance et Marguerite
Bour-geoys ont relevé des défis pour bâtir et construire
Montréal, autant le maire Drapeau l'a fait, autant, M. le
Président, nous, dans les futures générations, notre
défi sera celui de faire en sorte que ces classes de pauvreté,
ces gens qui sont défavorisés dans Montréal, ces quartiers
qui sont un peu, maintenant, en difficulté, retrouvent la qualité
de vie, retrouvent la joie de vivre et la dignité pour leurs habitants,
dont tout citoyen et toute population ont besoin.
Aussi, c'est vrai que les feux d'artifice ont été
tirés, et je crois qu'une fois qu'ils sont retombés nous devons
tous nous pencher sur les problèmes et les solutions à trouver,
qui concernent des centaines de milliers de Montréalais qui ont des
difficultés actuellement. Je crois, M. le Président, que si nous
ne le faisions pas, nous manquerions gravement à notre devoir
d'élus, de dirigeants, et nous ne serions point dans la lignée
des Maisonneuve, Jeanne Mance, Marguerite Bourgeoys, Jean Drapeau, Camilien
Houde et autres grands personnages qui ont marqué l'histoire de
Montréal et de son développement.
Personnellement, M. le Président, je suis arrivé ici il y
a 20 ans, et j'ai choisi Montréal comme ville pour y vivre. Vous savez,
lorsqu'on arrive d'une ville comme la région parisienne, une grande
ville comme Paris et qu'on choisit Montréal, à 20 ans, c'est
parce qu'on est attiré par quelque chose. J'ai été
attiré, M. le Président, par la diversité de
Montréal, par l'ensemble des groupes ethniques qui étaient
là, par la gentillesse et l'accueil des Montréalais d'origine. Et
c'est ça qui m'a fait rester à Montréal car, vous savez,
on a quelquefois des difficultés à s'adapter et, sans cet
accueil, sans cette joie de vivre, sans cette gentillesse et cette aide que
j'ai reçue, peut-être n'y serais-je point resté.
Aussi, des millions de gens l'ont fait avant moi. Depuis 350 ans,
Montréal s'est peuplée d'immigrants et certains y ont fait
souche. D'autres sont partis ailleurs à travers l'Amérique et, M.
le président du Conseil du trésor le mentionnait
précédemment, un grand nombre d'aventuriers ou de
découvreurs montréalais sont à l'origine de villes comme
Saint-Louis, San Francisco. On se rappellera que le premier maire de San
Francisco était un Montréalais d'origine. C'est là, M. le
Président, certainement la force que Montréal, porte
d'entrée de l'Amérique du Nord pour les gens qui venaient
d'Europe, a su donner à tout ce continent.
Dans notre Assemblée, M. le Président, un fort contingent
d'élus de la région de Montréal est issu de groupes
ethniques. Il y en a qui viennent d'Italie, de Grèce, de France, d'un
peu partout, M. le Président. Il y en a qui viennent de régions
plus anglophones, et c'est là la diversité montréalaise.
Elle est représentée en cette Assemblée
particulièrement sur les banquettes du parti gouvernemental, car les
Montréalais ont toujours su envoyer des gens pour les représenter
qui correspondaient à la réalité ethnique et
régionale. Il me fait plaisir, M. le Président, de saluer cette
qualité que les Montréalais ont eue, cette ouverture d'esprit de
vouloir envoyer à l'Assemblée nationale des gens non pas issus
seulement du groupe francophone d'origine mais de toutes les diversités
qui la composent, de toute la mosaïque qui la compose. C'est là
certainement la grande leçon que nous pourrons donner à beaucoup
de villes dans le
monde, car il y a peu de villes dans le monde - peu de pays dans le
monde aussi comme le Québec - où la diversité culturelle
se fait autant sentir dans une Assemblée nationale, car les gens votent
sans distinction de race, de couleur ou d'origine ethnique, mais ils votent
pour la qualité des gens qui vont les représenter.
En terminant, j'aimerais me joindre, au nom de tous mes collègues
ministériels de la ville de Montréal, les députés,
à cette motion de félicitations et de bonne fête pour le
350e anniversaire de la ville de Montréal. Au nom de tous les
députés libéraux de Montréal, je dis: «Bonne
fête, Montréal!»
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de LaFontaine. Sur cette même motion, je reconnais
maintenant M. le député de Pointeaux-Trembles. M. le
député, la parole est à vous.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, je suis né, j'ai
été élevé et j'habite Montréal. C'est ma
ville, et c'est une ville que j'aime depuis toujours. Un peu comme dans la
chanson de Renée Claude, j'ai comme envie de la chanter; mais, n'ayez
crainte, je ne chanterai pas sa si belle chanson «Sais-tu que je t'aime
depuis longtemps?»
Moi, je suis né sur la rue Mentana, à Montréal,
bien avant que ça devienne chic de dire que ça fait partie du
Plateau Mont-Royal. Le monde disait: On est de la paroisse
Saint-Louis-de-France dans le quartier Saint-Jacques. Qu'on ait élu des
gens comme Paul Dozois, sous un autre gouvernement, et qu'on ait
été collés sur Sainte-Marie, pour les Montréalais,
le petit gars de Sainte-Marie, c'était Camilien Houde. Ça a
été la tradition de Montréal, qui a produit de grands
tribuns comme Médéric Martin, comme Camilien Houde et, dans la
période contemporaine, Jean Drapeau et son successeur, Jean Doré,
qui appartiennent plus à la classe moyenne qu'au milieu ouvrier de
Montréal dont je suis issu. (17 heures)
J'aime ma ville parce qu'elle est sans pareil. À cet
égard-là, d'autres l'ont dit, mais j'aime beaucoup la
diversité de Montréal, son caractère cosmopolite et,
à cet égard, je suivais bien l'intervention du ministre des
Affaires municipales et de la Sécurité publique qui disait, et je
l'ai déjà entendu en cette Chambre le dire: Montréal n'est
pas uniforme, Montréal n'est pas complètement souverainiste ou
fédéraliste. Elle n'a jamais été
complètement protestante ou catholique. Montréal a bien des
couleurs. Il y a des gens de toutes nationalités qui s'y trouvent et qui
cohabitent, somme toute, d'une façon très harmonieuse, ce qui ne
nie pas les problèmes réels dont je parlerai plus loin. Mais
c'est une ville qui, au plan géographique, est magnifiquement
située sur une He, avec une montagne et donc des atouts d'ordre physique
qui sont très importants.
Je pense aussi que Montréal a une tradition de tolérance
à l'endroit de toutes les minorités et je pense, M. le
Président, que c'est le propre des métropoles de tous les pays,
parce que vous savez, quand, dans une petite localité, on appartient
à un groupe minoritaire, on est 4. Quand on appartient à un
groupe minoritaire et marginal à Montréal et qu'on est 4000, on
se sent plus fort à 4000 qu'à 4.
Ce n'est pas un effet du hasard si, même sous Duplessis,
Montréal, la frondeuse, refusait, dans la plupart de ses partis, de
voter pour le régime en place, sauf dans les comtés du bord de
l'eau, du sud-est à l'est de Montréal, qui votaient bleu pour ne
pas voter rouge. C'est dit en toute amitié pour mes collègues de
cette Assemblée qui appartiennent au Parti libéral.
Moi, je suis un élu d'un comté du bord de l'eau. Quand
j'étais adolescent, on ne disait pas le centre-sud de Montréal.
Ce n'était pas sophistiqué comme ça. On disait: Ton oncle,
qui travaille au bord de l'eau, qui habite un comté du bord de l'eau. Il
était débardeur ou II travaillait dans un élévateur
à grains. Moi, je suis un gars du bord de l'eau et j'habite encore au
bord de l'eau, dans Tétreaultville, pas loin de la promenade Bellerive,
qui est un parc splendide. Dans l'est, c'est, à mon avis, le plus beau,
parce qu'il est au bord du fleuve sur deux kilomètres. Ça a
été une idée de génie de faire du remplissage pour
relier quatre parcs de Tétreaultville, pour en faire un parc
linéaire au bord du fleuve. Je soulignerai avec ironie que, là,
on voudrait faire du remplissage sur 40 mètres carrés à
Montréal-Est pour améliorer, mais que là, les
fonctionnaires de l'Environnement sont rendus anti tous les remplissages. Vous
savez ce que c'est quand une machine part d'un bord, elle part de ce
bord-là.
Donc, la promenade Bellerive, deux kilomètres de parc au bord du
fleuve où j'ai eu le plaisir de fêter la Saint-Jean,
l'année dernière, puis où j'avais commencé... Les
députés ici l'ont tous lu dans le programme. C'était
marqué: Discours patriotique de 15 minutes. Moi, j'ai dit aux gens:
Premier cadeau, je vais parler cinq minutes. Ils ont dit: Là, ça
regarde mieux déjà. Je disais: Si on se tournait tous vers le
fleuve, puis on se parlait. Les 2000 se sont tournés, puis c'est une
splendeur, le fleuve Saint-Laurent, à Montréal, notamment la
promenade Bellerive.
Mon comté, c'est aussi le quartier de Pointe-aux-Trembles, qui
fête cette année ses 10 ans dans une ville de 350 ans. On oublie
trop vite que Pointe-aux-Trembles est une des plus anciennes
municipalités de l'île et qu'en 1909 Pointe-aux-Trembles
était desservie au point de vue de l'électricité -
tenez-vous bien, le nom va vous faire sourire - par la Pierrefonds Light, Heat
and Power, parce qu'à l'époque, si tu avais une entreprise
importante, tu lui donnais un nom
anglais. Je lisais ça dans l'excellent livre de Paul-André
Linteau, «L'histoire de Montréal depuis la
Confédération», puis je disais: Ça se peut-il? Mon
collègue de LaFontaine le sait. Dans le quartier Pointe-aux-Trembles,
Pierre-fonds, ce n'est pas à la porte, et c'était la Pierrefonds
Light, Heat and Power qui nous desservait.
J'ai l'honneur, dans le quartier Pointe-aux-Trembles, de compter la
deuxième église qui a été fondée sur I Ile
de Montréal, l'église Saint-Enfant-Jésus, après la
querelle où la paroisse Notre-Dame voulait être la seule paroisse
de Montréal. Ça rejoint quasiment le ministre, quand il disait
que les tentatives d'uniformiser Montréal ont toujours
échoué.
Je pense aussi qu'on ne peut pas parler de Montréal sans parler
des Anglo-Québécois de Montréal, sans parler de la
communauté anglophone de Montréal, parce qu'elle en fait partie,
cette communauté-là, d'une façon intime, et c'est à
Montréal qu'on cohabite, et je souhaite qu'on cohabite, francophones et
anglophones, de plus en plus harmonieusement à Montréal. Je l'ai
dit, M. le Président, à un conseil national de mon parti à
Sainte-Anne-de-Bellevue, quand on a ouvert le dialogue avec nos compatriotes
anglophones, qu'on l'a ouvert sans complaisance, en invitant Don Johnston, le
président du Parti libéral du Canada, puis il est venu, ce qui
est assez magnifique, Robert Keaton, d'Alliance Québec, David Payne, M.
Joseph Rabinovitch, à nous dire sans détour ce qu'ils pensaient
des politiques linguistiques, entre autres au Québec.
Je le disais, M. le Président, et je le ressens encore, dans mon
adolescence de Montréalais, quand j'allais dans les grands magasins du
centre-ouest de la ville, j'en revenais souvent humilié, parce
qu'à cette époque on avait de la misère à se faire
servir en français dans notre ville. Mais, ça, c'est du
passé. Ça vaut d'être mentionné pour savoir
d'où on vient, mais ça n'indique pas qu'on a fait un chemin
considérable. Les francophones à Montréal sont d'une
vigueur remarquable. Dans le livre de Linteau, je notais qu'en 1911 il y avait
61 % de francophones sur IHe de Montréal, puis, en 1992, 81 ans plus
tard, on a baissé à 60 %. Alors, s'il y a un désastre qui
s'en vient, il s'en vient, ma foi, très lentement et très
graduellement. Je pense qu'on est florissants à cet
égard-là, parce qu'il ne faut pas regarder ça, la question
des francophones, anglophones, par la couleur de la peau ou l'origine. Les
parlant français sont les personnes qui parlent français, et les
parlant anglais aussi.
J'ai rencontré récemment, au cours d'une journée
portes ouvertes à mon parti, lors de la semaine du rapprochement
interculturel, j'ai rencontré notamment une jeune
Québécoise dont les parents étaient d'origine
haïtienne et qui racontait, de façon très humoristique,
qu'elle, elle a eu un problème d'identité, même si elle est
née à Montréal-Nord, parce qu'à un temps elle se
demandait à quelle communauté elle appartenait. Son histoire a
fini en nous disant: À l'Université McGill, où
j'étudie, dans ma faculté, il y a 40 % de francophones. Puis,
elle a dit: J'ai trouvé ma réalité. Elle dit: Je suis une
Québécoise francophone, j'ai la peau noire, mais je ne parle pas
créole et je n'aime pas la cuisine créole. Je suis née
à Montréal, je suis une Québécoise comme tous les
autres. (17 h 10)
Je pense que, M. le Président, dans la solution du débat
constitutionnel actuel - et je ne m'étendrai pas sur l'option de mon
parti - ce qui est en cause dans les rapports Québec-Canada, c'est le
refus du Canada anglais de reconnaître notre différence. Le
défi des Québécois dans la souveraineté, ça
va être de reconnaître de façon tangible la
différence des anglophones, notre minorité nationale, historique,
qui partage le territoire avec nous depuis plus d'un siècle, et aussi
avec les communautés culturelles et avec les autochtones. Je pense que,
quand je mentionne que je suis fier de Montréal, je suis fier de
l'Université McGill autant que de l'Université de Montréal
ou de l'UQAM. Quand je regarde les personnages historiques qui ont
marqué Montréal, il y a, bien sûr, Chomedey de Maisonneuve,
mais, à égalité, à mon humble avis, Jeanne Mance
qui était une femme d'un dynamisme incroyable. On peut dire, à
cet égard, que l'hôpital que Jeanne Mance fonda... C'est une
très grave erreur de penser que les Montréalais, qu'ils soient du
quartier de Rivière-des-Prairies, du quartier de Pointe-aux-Trembles -
qui ne fait partie de Montréal que depuis 10 ans - de Cartierville ou de
n'importe où ailleurs, vont accepter d'être
dépossédés de l'hôpital que Jeanne Mance fonda.
À cet égard, je reviens à l'idée qu'il y a
des Montréalais de langue anglaise, des Anglo-Québécois,
qui ont donné et qui donnent encore énormément à ma
ville. Par exemple, Phyllis Lambert nous a donné le Centre canadien
d'architecture qui est un édifice splendide, tant dans son architecture
que dans son contenu. Dans les luttes de Mme Lambert pour protéger le
patrimoine urbain, on retrouve la fougue, le dynamisme et la vigueur d'une
Jeanne Mance. Moi, je pense que l'appartenance à ce pays et à sa
métropole, ça se vérifie au lieu de résidence.
Quant à moi, ce n'est pas par des prises de sang qu'on définit
qui est Québécoise ou Québécois. Est
Québécoise et Québécois quiconque vit au
Québec, aime assez le Québec pour y habiter. Montréal est
un exemple à cet égard-là.
Quand j'ai appris, récemment, que l'extraordinaire
aménagement intérieur du Biodôme qu'avec d'autres
députés j'ai eu l'occasion de visiter est attribuable, entre
autres, à une firme d'architectes-paysagistes anglophones, j'ai
été fier de ces Montréalais comme moi qui ont
préparé ce qui va être un choc pour les Montréalais
et les Québécois, l'extraordinaire Biodôme
que les autorités du Jardin botanique ont pensé, ont
imaginé et, je dirais même, ont rêvé.
Je pense que Pierre Bourgault avait raison lorsqu'il disait, dans mon
comté de Pointe-aux-Trembles: Les plus belles sociétés
sont des sociétés métissées. Montréal est
une ville du métissage par excellence. Ça lui donne son
dynamisme, sa ferveur et son enthousiasme. M. Parizeau a dit un jour: Se fermer
aux gens d'autres origines et à notre minorité, notre
communauté de langue anglaise, ce serait revenir à il y a 40 ans.
Je ne sais pas s'il y en a d'aussi vieux que moi dans cette Chambre pour se
rappeler l'émission «Nazaire et Barnabe», à CKAC. M.
Parizeau disait - et ça montre ce qui est dans l'ethnocentrisme qu'on
voit parfois se manifester au Québec. C'est quand Nazaire disait: II
fait chaud, ça pue, on est bien! Moi, je pense que Montréal est
une ville ouverte, cosmopolite. Ce n'est pas à New York... Je donne
l'exemple d'une très grande métropole. Ce n'est pas parce
qu'à New York il y a des quartiers où on entend parler espagnol
et italien plus qu'anglais que New York est une ville moins majoritairement et
très majoritairement anglophone. Ce n'est pas parce qu'à
Montréal il y a des communautés culturelles et qu'il y a notre
très importante minorité anglophone... Montréal reste une
ville majoritairement française quand même, mais pas exclusivement
française, parce que c'est une ville cosmopolite, multiethnique, une
ville d'Amérique du Nord qui est le contact du Québec avec les
autres nations et qui est aussi une ville moderne. Les immigrants, on le sait,
malgré les efforts que la ministre a commencé à
déployer pour les attirer en région, viennent surtout à
Montréal, tout comme, dans la société américaine,
ils vont surtout à New York et à San Francisco parce qu'il y a
là des gens de même origine qu'eux, et ça constitue comme
une société d'accueil dans la société d'accueil. Il
faut encourager ceux qui veulent aller en région, mais il reste que
Montréal a encore ça.
Moi, il y a 15 ans, j'ai eu l'occasion de passer un week-end dans la
grande banlieue, et c'était francophone à 99 %, comme on dit. Je
dois dire, M. le Président, et c'est dit en toute amitié pour
ceux qui avaient eu la gentillesse de me passer leur maison, je m'y suis
ennuyé parce que je trouvais que les gens avaient tous le même
âge, ils achetaient au même magasin, ils avaient à peu
près le même revenu, les hibachis au gaz propane étaient
à peu près de la même année, et les enfants avaient
à peu près le même âge. C'était du monde
heureux, et ils ont tout mon respect, mais, moi, je préfère le
centre-ville et une terrasse de la rue Saint-Denis où on voit passer un
krisna et un homme d'affaires avec un habit de 1000 $, puis toutes sortes de
gens qui colportent toutes sortes de choses, parce que c'est ça, une
grande ville, et c'est ça qui est, je pense, Montréal.
J'ai plus de plaisir à me trouver chez
Schwartz un dimanche matin, à manger un «smoked meat»
qui est le meilleur au monde... Je peux le dire, il n'y a pas un
Montréalais qui va discuter ça. C'est presque aussi sûr que
l'infaillibilité du ministre des Affaires municipales et de la
Sécurité publique, le fait que Schwartz fasse le meilleur
«smoked meat» au monde. Bien, j'aime mieux ça que le
«smoked meat» en enveloppe qu'on mange ailleurs parce que ça
fait partie de ma ville. Et le métissage dont je parle, on l'a vu dans
l'après-guerre, M. le Président, se faire en cuisine. Il y a
autant sinon plus de restaurants italiens à Montréal que de
restaurants français. Pourquoi? Parce que les Québécois
aiment la cuisine italienne. Ça fait partie des acquis culturels.
Il y a quelques mois, M. le Président, j'entendais un des leaders
de la communauté haïtienne de Montréal, M. Jean-Claude
Icart, parler de l'intégration des communautés culturelles
à la société québécoise. Et il avait dit,
bien sûr, que l'intégration, ce n'est pas l'assimilation. Ce n'est
pas parce que des francophones, en Amérique, l'ont subie qu'il faut la
faire subir à quiconque. Et il disait, avec beaucoup de sens
poétique, M. le Président: «Bien sûr, la
rivière se jette dans le fleuve, mais de quelque manière elle
modifie le fleuve.»
Je suis donc heureux de parler de ma ville cet après-midi, dans
cette Assemblée, de dire que le quartier de Pointe-aux-Trembles et le
quartier de Tétreaultville - le quartier de Tétreaultville,
depuis fort longtemps, et le quartier de Pointeaux-Trembles, depuis à
peine 10 ans - sont heureux d'être des quartiers de cette magnifique
ville de plus de 1 000 000 d'habitants qu'est Montréal. Je suis heureux
d'entendre le ministre des Affaires municipales et de la Sécurité
publique dénoncer l'étalement urbain, et j'ai confiance qu'avec
le prestige dont il jouit dans son parti il va convaincre tantôt le
député de Mille-Îles, tantôt le député
de LaFontaine. Tout le monde va convenir que ce n'est pas par des ponts qu'on
développe une ville harmonieusement, c'est avec les gens qui sont
déjà dedans, et qu'il y a, sur l'île de Montréal, de
la place pour encore 200 000 personnes qui pourraient s'y construire des
maisons. À Laval, dans la partie développée, il y a encore
de la place pour un bon 75 000, 100 000 personnes. Donc, il faut combattre
l'étalement urbain. Mais je veux dire «M.
Montréal»... M. le Président...
Une voix: M. Montréal! (17 h 20)
M. Bourdon: Oui. Je ne dirai pas «M.
Montréal», mais M. le Président, que je suis né,
j'ai été élevé et j'habite Montréal, et je
l'aime non seulement passionnément mais je dirais
«farouchement», et que je suis heureux de voir aujourd'hui qu'on
est plusieurs à avoir cette passion-là en commun. Le 350e
anniversaire de Montréal mérite qu'on dise à toute la
population
de Montréal et à son maire, Jean Doré - celui dont
le nom finit par «ré», accent aigu - de lui souhaiter un
joyeux anniversaire et de souhaiter à sa, ma, notre ville un avenir
brillant et un avenir prospère comme métropole d'un Québec
qui, j'espère, va, à un moment donné, cesser d'être
une province pour être un pays.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Pointe-aux-Trembles. Nous sommes toujours à
discuter de la motion sans préavis proposée par M. le ministre et
président du Conseil du trésor et responsable de la région
de Montréal, qui se lit comme suit: «Que cette Assemblée
souligne le 350e anniversaire de la fondation de la ville de
Montréal.» Je cède maintenant la parole à M. le
député de D'Arcy-McGee.
M. Robert Libman
M. Libman: Merci, M. le Président. M. le Président,
c'est un honneur de suivre le député de Pointe-aux-Trembles, mon
collègue, mon ami, mon allié, mon coquébécois,
comontréalais, qui parlait beaucoup des anglophones, qui parlait des
architectes de Montréal. Il a touché plusieurs sujets qui
m'intéressent, et j'aimerais continuer sa discussion peut-être
dans le même contexte, son apparent appui au bilinguisme pour la ville de
Montréal.
It is an honour, Mr. Speaker, to join my voice to support the motion
underlining the 350th anniversary of Montréal. I think many Montrealers
had goose bumps this past weekend as we followed the celebrations, as we
watched the parade, for those of us who did partake in the parade. A lot of us
had goose bumps and we were all excited about the celebration, the excitement
about our own city. I think we have to recognize the mammoth task that was
handled not only with vigor, but with great talent and ability. All the people
who organized to put these celebrations forward, I think we have to salute them
and their chief, the Mayor of Montréal, Jean Doré.
Celebrating the 350th anniversary of Montreal provides us with the
opportunity to examine those characteristics that make Montréal unique.
It is apparent to anyone in this Assembly who has ever vacationed in Canada or
in the United States that when the traveler is asked that perennial question of
where they are from, and he or she responds «Montréal»,
there is always a positive reaction by the person who asked. The characteristic
that is always commented upon is that Montréal is a cosmopolitan city.
We are a city of French speakers. We are a city of English speakers and
numerous ethnic groups. It is as if a European city is available to us and
sitting right there in the heart of North America for all of us to enjoy. This
cosmopolitan quality is to our advantage. It enables us to draw upon the
strengths of diverse cultures and language groups so that personal and
collective growth is maximized.
In following along the lines of what the député de
Pointe-aux-Trembles was mentioning, I want to make reference to a book,
«The Re-conquest of Montréal», written by American historian
Marc Levine, who begins his introduction by stating that Montréal has
been a bilingual city composed of French and English speakers ever since French
Canada was conquered by the English in 1760. In fact, he goes on to say that
for the period between 1830 and 1850, Montréal experienced an
English-speaking majority.
I think there is no one in this room that will deny the contribution of
the English-speaking community to Québec: the development of
institutions, whether it be health care institutions, whether it be
universities, such as McGill University, such as the Royal Victoria Hospital,
Montréal General Hospital, the Jewish General Hospital, hospitals that
have done research into cancer treatment, into AIDS and various other diseases,
research that does not speak a language, research that has benefited every
single person who has walked on the soil of Montréal since its
beginning. I think we also cannot deny the contribution of universities such as
McGill University that has now as a quarter of its population French-speaking
Quebeckers, a university that has provided vocation and education for millions
of Montrealers over the years, and for millions of people from countries across
the globe.
However, another reality is that North America has experienced a
phenomenon with worldwide effects, and that is the globalization of trade. At
an unprecedented rate, barriers have broken down between nations so that
people, capital, goods and services can move more freely across borders. In the
words of Montréal economist Robert Blohm, Quebeckers cannot ignore the
fact that their financial future is greatly intertwined with the ebb and flow
of the global economy.
The globalization of communication has become, with this trade,
revolution. In fact, the communication revolution predates globalization of
trade by at least a decade. As much as Canada and Québec may want to
resist, trade and communication globalization is a reality that will not go
away and that must be embraced. This globalization of communication has brought
with it an international language of business, culture and the arts, and that
international language is English.
For Montréal to prosper, to compete and to thrive, it will have
to come to terms, as will the Government of Québec and Official
Opposition, with this reality. And I propose to you that Montréal will
have to embrace the English language in a way that it has not since the
advent of some of the language legislation in Québec since the
1970's. Globalization demands that we can attract foreign capital as investment
to Québec so that the economy grows and jobs are created. But
globalization is not only about attracting capital. Part of this process means
that we have to attract the highly skilled and highly educated individuals
necessary in order to help us compete. This is the human resource factor that
is as much if not more important a factor of the means of production as is
capital.
There are 20 000 000 English-speaking Canadians and 250 000 000
English-speaking Americans outside Quebec's borders, highly educated and
skilled that are available for Québec and Montréal to draw upon.
In order to attract these people, these institutions, such as the
municipalities and institutions of Montréal, must become officially
bilingual. These people must feel welcome here, and this goes for tourists as
well.
Jean Doré, recently, has recognized the importance of
Montréal as a bilingual city. Jean Corbeil, who is the federal Minister
responsible for the Island of Montréal, also recognized the proud
heritage of Montréal as a bilingual city. We must embrace this heritage.
We must make Montréal an officially bilingual city to be able to attract
the quality, the globalization that is necessary.
Another thing to mention, M. le Président, is that many people
from my generation have left Montréal to go to Ontario or other places
in Canada. They have left for specific reasons - economic, political, social
reasons - but each and everyone of them that I have spoken to since they have
left Montréal long for Montréal. It is not only the smoked meat
that the M.N.A. for Pointe-aux-Trembles mentioned. It is not only the bagels
that seem to be unique for Montréal. But there is a joie de vivre, a
special intensity that belongs only to Montréal and is not common in any
other city in Canada, is not common in any other city in North America. People
always complain about Toronto being a dull city, having to roll its sidewalks
up at night. There is not one person who has left Montréal that does not
long for that special quality that still exists in Montréal and still
must exist forever in this city.
Mr. Speaker, in conclusion, I was born in Montréal. I was raised
in Montréal. I have been educated in Montréal. I went to McGill
University for five years, which is in downtown Montréal. I practiced as
an architect in Montréal for four years and it is my distinct pleasure
and honour to celebrate along with my colleagues in this National Assembly the
350th birthday of the greatest city in the world. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de D'Arcy-McGee. Sur la même motion, je cède
maintenant la parole à M. le député de Gouin.
M. André Boisclair
M. Boisclair: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir
de m'associer au ministre responsable de Montréal et président du
Conseil du trésor ainsi qu'à l'ensemble des membres de cette
Assemblée qui, récemment, soulignaient par une motion, qui est
bien la façon privilégiée, pour nous, les parlementaires,
M. le Président, de souligner un événement particulier, de
cette fois-ci s'associer derrière une motion qui souligne de
façon toute particulière le 350e anniversaire de Montréal.
Je pense qu'il est important que les membres de cette Assemblée prennent
le temps qu'il faut, pour une fois, pour porter un commentaire sur
l'appréciation que nous puissions avoir à l'égard de notre
métropole, mais aussi pour essayer de tracer quelques pistes pour
l'avenir en essayant d'identifier un certain nombre d'enjeux qui certainement
intéressent les Montréalaises et Montréalais, mais surtout
les interpellent, et ce, de façon tout à fait marquée
à l'occasion de ces célébrations du 350e anniversaire de
Montréal. (17 h 30)
M. le Président, je vous le disais, une fête, c'est
l'occasion, bien sûr, de faire le point; c'est l'occasion de se
réjouir des bons coups qui ont marqué l'histoire de
Montréal, mais c'est aussi l'occasion de regarder vers les perspectives
d'avenir, vers l'avenir, les défis qui nous interpellent. Lorsqu'on
parle de Montréal, vous aurez rapidement compris qu'on parle de ses
quartiers, de ses arrondissements, de ses paroisses. Et c'est peut-être
parfois étrange pour certaines personnes, certains membres de cette
Assemblée, mais il faut le rappeler: Montréal, c'est aussi le
Montréal des paroisses. Lorsqu'on se promène pour rencontrer nos
électeurs, on s'identifie par nos paroisses. Je suis de la paroisse
Saint-Ambroise. Je me présente comme de la paroisse Saint-Ambroise.
Tout, encore, dans plusieurs de nos quartiers, gravite alentour de
l'organisation des paroisses, alentour de l'organisation de nos quartiers. Il
ne faut pas être surpris, même si, parfois, nos collègues
d'autres régions ne sont pas familiers avec cette réalité
de voir encore les organisations s'identifier à leurs paroisses. Il faut
bien connaître nos quartiers de Montréal pour savoir que ce qui
les identifie, c'est essentiellement la présence du clergé
catholique, c'est la présence non loin de l'église d'une caisse
populaire qui porte le nom de la paroisse, c'est aussi la présence d'une
école primaire identifiée elle aussi au nom de la paroisse.
Donc, Montréal, c'est bien sûr le Montréal de ses
arrondissements, c'est le Montréal aussi de ses quartiers, comme celui
que j'ai le plaisir de représenter à l'Assemblée
nationale, le quartier de Rosemont, le quartier de Petite-
Patrie, et j'y reviendrai tout à l'heure de façon plus
particulière. Mais c'est aussi la ville des 100 clochers, la ville,
finalement, des paroisses. Montréal, bien sûr, c'est la ville qui
doit vivre aussi avec ses contradictions; c'est la ville où se
côtoient à la fois une vie vibrante, une vie culturelle, une vie
économique qui n'a pas d'égal ailleurs au Québec, M. le
Président, mais qui, fréquemment, a à affronter des
problèmes qui la confrontent de façon toute particulière,
des problèmes comme celui de la pauvreté, comme celui de
l'isolement, comme celui du déchirement du tissu urbain. Donc, à
la fois, c'est la ville des contradictions, la ville de la richesse, la ville
de l'exubérance, mais c'est aussi, dans ce qu'il y a parfois de plus
triste, la ville des gens laissés pour compte et la ville des gens
seuls.
Le 350e anniversaire de Montréal doit nous permettre, M. le
Président, de réconcilier ces contradictions. Il doit nous
permettre de célébrer de façon unanime, de façon
solidaire, cette institution qu'est notre ville, de célébrer, M.
le Président, les gens qui représentent les Montréalais et
les Montréalaises. Mais c'est aussi l'occasion de souligner le courage
et la détermination des Montréalais et des Montréalaises
sans qui notre ville ne serait pas ce qu'elle est à l'heure
actuelle.
Vous savez, nous avons entendu bien des discours sur Montréal.
J'ai eu l'occasion d'entendre, ce week-end, le premier ministre du Canada qui
s'interrogeait sur l'avenir de Montréal. Nous avons entendu aussi le
premier ministre du Québec, nous avons entendu différents
parlementaires, différents membres, aussi, du corps consulaire qui sont
venus nous offrir leurs bons voeux. Mais, Montréal, faut-il le rappeler,
c'est certainement cette ville qui, grâce au courage, grâce
à la détermination, sera capable de, finalement, souligner de
façon tout à fait concrète le lien qui nous unit
derrière cette grande ville.
M. le Président, malgré bien des vicissitudes,
malgré bien des problèmes dont les médias font souvent
écho, devant toutes sortes de manchettes, faut-il rappeler, comme je
vous le disais tout à l'heure, que c'est bien le courage et la
fierté des Montréalais et des Montréalaises qui fait de
Montréal ce qu'elle est? Parce que, M. le Président, bien plus
que le Montréal des paroisses, le Montréal des quartiers, le
Montréal des arrondissements, Montréal, c'est aussi, faut-il le
rappeler, notre métropole, la métropole du Québec.
Montréal, c'est la seule ville qui, au Québec, est capable de
réunir - et mon collègue de D'Arcy-McGee le rappelait tout
à l'heure - à la fois les capitaux physiques et les capitaux
financiers nécessaires au rayonnement d'une ville comme
Montréal.
Qu'est-ce qui fait la réputation internationale d'une ville, M.
le Président? Bien sûr, une vie culturelle tout à fait
vibrante, tout à fait en vie, tout à fait dynamique; bien
sûr, les
Montréalais et les Montréalaises qui savent, par leur
accueil généreux, par leur chaleur, par leur joie de vivre qui
est maintenant devenue une expression consacrée, lui donner un
caractère tout à fait particulier. Mais c'est aussi le
Montréal économique, le Montréal des services, le
Montréal, finalement, qui oeuvre dans le tertiaire supérieur, la
ville de nos grandes firmes d'ingénierie, la ville de nos
cabinets-conseils. C'est la ville de notre Bourse, lieu
privilégié des échanges économiques. Le
Montréal économique, c'est aussi le Montréal et le
dynamisme de ses chambres de commerce, de ses représentants, de ses
porte-parole qui, de façon quotidienne, eux, ont accepté de
relever ce défi du développement.
Je vous disais donc, M. le Président, que Montréal, c'est
aussi... et je peux, on peut l'illustrer par un certain nombre de choses, le
Montréal des contradictions, le Montréal des gens qui
travaillent, des gens qui ne travaillent pas, le Montréal, finalement,
de sa vie au grand jour et le Montréal de sa vie dans les sous-sols,
dans ces souterrains qui nous permettent de nous promener d'une
extrémité - pratiquement du centre-ville - à une
autre.
M. le Président, Montréal, c'est, bien sûr aussi, sa
vie économique. C'est aussi sa vie universitaire qui nous permet, je
crois, de faire rayonner cette ville, parce que la réputation, je crois,
d'une ville comme celle de Montréal repose bien sur ses institutions et
aussi sur ses citoyens et ses citoyennes.
M. le Président, j'ai l'occasion, le plaisir et l'honneur de
représenter un quartier de Montréal, celui de Rosemont et celui
de la Petite-Patrie, parfois des quartiers méconnus des dirigeants,
méconnus des décideurs, mais peut-être là où
se vit le Montréal solidaire. Le Montréal solidaire, M. le
Président, ce n'est pas le Montréal tricoté serré.
Le Montréal solidaire, c'est le Montréal de tous ceux et celles
qui ont décidé de faire de Montréal leur ville et qui
contribuent à son développement.
Nous avons le plaisir, nous, comme parlementaires, de
représenter, et comme parlementaires de Montréal, de
représenter des gens, bien sûr, qu'on appelle des francophones de
souche, même si je n'affectionne pas de façon particulière
cette expression, mais des Québécois francophones, des
italophones, des Québécois de souche italienne, des
Québécois de souche hispanique, des Québécois de
souche laotienne, vietnamienne, et la liste pourrait s'allonger, et,
particulièrement dans mon cas, des Québécois d'origine
italienne, des Québécois d'origine hispanique. Ces gens qui
réussissent, malgré ce que les spécialistes peuvent en
dire, malgré ce que nous, les politiciens, pouvons en dire, à
faire de cette cohabitation un exercice utile, un exercice qui permet,
finalement, d'assurer le développement d'une ville.
Mon collègue de Pointe-aux-Trembles, tout à l'heure, le
rappelait, l'avenir des grandes
villes - et c'est Bourgault qui le rappelait lui aussi - appartient
à celles qui sont capables d'assurer le défi, finalement, des
sociétés métissées. Nos grandes villes sont celles
qui ont été capables d'assurer une concertation, une
cohabitation, quoique le mot puisse sembler un peu fort, mais des relations
harmonieuses entre ces différents partenaires. Donc, Montréal,
c'est bien sûr ses Montréalais et ses Montréalaises, ces
gens de toutes les origines qui, ensemble, sont capables de relever l'ensemble
des défis, je crois, qui se posent à une ville moderne comme
celle de Montréal.
Nous avons aussi eu le courage, pas nécessairement le courage,
mais le plaisir de rappeler l'initiative et l'esprit d'aventure qui ont
amené Jeanne Mance, cofondatrice, parce qu'on l'a reconnue, au grand
plaisir, je crois, des Montréalais et Montréalaises... Le maire
Doré, à l'occasion d'un discours qu'il faisait à la
Pointe-à-Callières, a présenté Jeanne Mance comme
une des cofondatrices de Montréal, aussi accompagnée, bien
sûr, de Maisonneuve. Ces deux personnages politiques qui ont
réussi, qui ont relevé le défi de ce qu'on appelait
à l'époque cette folle entreprise. Maisonneuve qui,
lui-même, dans des textes qu'on aurait apparemment retrouvés,
disait: Même si j'y retrouve autant d'Iroquois que j'y retrouve d'arbres,
je ferai de cette ville une grande ville, et les grains de sénevé
que nous y aurons semés, à cause de l'agilité des mains
qui les façonneront, seront certainement promis à un avenir
prometteur.
Donc, c'est souligner ce courage et cet esprit d'initiative, parce que
se déplacer, faire de Montréal une ville qui, bien sûr,
elle ne peut y échapper à cause de sa situation
géographique, était sans doute promue à un avenir
intéressant. Mais souligner l'esprit d'initiative, le courage, le
dynamisme de ces gens sans qui Montréal, je crois, ne serait pas ce
qu'elle est aujourd'hui. Donc, je pense qu'il était à propos de
souligner le courage, l'esprit d'initiative, l'esprit d'aventure de ceux et
celles qui ont fondé Montréal. Je crois qu'il était tout
à fait pertinent aussi de leur faire les hommages qui sont dus, lorsque
vient le temps de célébrer un anniversaire comme le 350e
anniversaire d'une ville. (17 h 40)
Montréal, c'est aussi la ville des défis, des défis
de la concertation qui, je crois, nous amènent à regarder
Montréal, oui, comme un pôle de développement
économique important, comme le pôle de développement
économique sans doute le plus important au Québec, capable de
réunir, comme je vous le disais, les capitaux physiques et financiers
nécessaires pour assurer son développement. Mais Montréal
doit aussi relever le défi de la concertation en acceptant le rôle
et les responsabilités de chacun, en acceptant et en reconnaissant que
Montréal est la métropole économique du Québec, en
reconnaissant qu'on doit lui accorder un statut tout à fait particulier,
en reconnaissant les responsabilités qui sont celles d'une
métropole et qui échappent à toute autre ville, qu'elle
soit du Grand Montréal ou pas, qu'elle soit des banlieues ou pas.
M. le Président, le défi de la concertation amène,
bien sûr, le défi de la reconnaissance. Nous aurons beau pavoiser,
nous aurons beau faire de grands discours sur l'avenir de Montréal, nous
nous devons, nous, comme parlementaires, chaque fois que l'occasion nous en est
donnée, de souligner le caractère particulier d'une
métropole, de souligner l'importance qu'une institution comme une ville
semblable à celle de Montréal joue dans le développement
économique du Québec. Sans Montréal, qu'on a
appelée, sans doute avec beaucoup de pertinence, le poumon
économique du Québec, sans Montréal, sans son port, sans
son réseau routier, sans les gens qui y oeuvrent, sans doute, le
Québec ne serait pas ce qu'il est aujourd'hui.
Mais ce défi de la reconnaissance, il doit se faire. Il doit se
faire en partenariat avec nos gens des banlieues qui sont les premiers
interpellés par le développement de Montréal. Il doit se
faire aussi en relation avec les autres régions. Trop souvent, on a
tenté d'opposer le développement de Montréal à
celui des régions. Je pense que ces luttes stériles ne nous
mèneront nulle part. Oui, les ressources sont rares. Oui, les besoins
sont illimités. Mais, dans ces ajustements et ces arbitrages que nous
devons faire, nous devons toujours nous rappeler le caractère
particulier de notre métropole.
Le défi de Montréal, c'est aussi le défi de
l'affirmation: affirmer que Montréal, bien sûr, est notre ville;
affirmer, bien sûr, que Montréal, cette ville, nous l'aimons assez
pour l'habiter, pour représenter ses citoyens, pour collaborer avec ses
élus, pour essayer finalement de voir à ce qu'elle
prospère. Mais le Montréal de l'affirmation passe, lui aussi, par
la reconnaissance d'un statut particulier pour Montréal. Je pense que ce
serait peut-être l'occasion de souligner, à l'occasion du 350e
anniversaire de Montréal, qu'il serait pertinent de reconnaître ce
statut particulier pour Montréal. Bien sûr, nous le faisons, en
subventionnant un certain nombre d'équipements importants qui ne
sauraient se retrouver ailleurs qu'à Montréal. Nous l'avons fait,
et le gouvernement l'a fait, en accordant des subventions importantes à
ce qui sera sans doute un des équipements qui fera parler encore pendant
bien des années, ici au Québec, mais aussi à
l'étranger, en acceptant de créer ce qui, bientôt, sera la
Biodôme, accessible à l'ensemble des Montréalais et
Montréalaises et à l'ensemble de ceux et celles qui viennent
visiter cette ville. Nous l'avons fait alentour d'un certain nombre d'autres
institutions, que ce soient des institutions culturelles, que ce soient des
institutions économiques. Mais ce défi, je crois, qui nous
interpelle de façon particulière à l'Assemblée
nationale, j'espère que nous serons capables de lui donner sa
véritable valeur.
M. le Président, Montréal, c'est aussi le défi de
la représentation, parce que nous ne pourrions parler de l'avenir de
Montréal sans rappeler la place que Montréal occupe ici dans
cette enceinte, dans ce salon bleu, la place que Montréal, la ville,
occupe au sein de la Communauté urbaine de Montréal, sans
rappeler la place que Montréal joue dans l'ensemble de ces organismes de
concertation qui l'amènent à discuter avec ses collègues
de banlieues. On peut parler de façon particulière du Conseil
métropolitain de transport. Le défi de la représentation,
c'est d'accepter de dire que Montréal a des besoins particuliers qui ne
sont pas meilleurs ni pires que les besoins des banlieues, mais qui sont tout
simplement différents. Reconnaître la spécificité de
Montréal, reconnaître la spécificité d'un pôle
économique important, majeur, c'est parler au nom des
intérêts supérieurs du Québec, c'est parler au nom
d'intérêts supérieurs qui devraient guider et qui ont
guidé, parfois avec un certain nombre de lacunes... Tout le monde, de ce
côté-ci de cette Chambre, a souligné l'erreur que constitue
le déménagement de l'Hôtel-Dieu. Nous avons souligné
aussi un certain nombre d'erreurs, mais rappeler au-delà de ces
vicissitudes, au-delà de ces erreurs pour lesquelles les gens qui ont
pris ces décisions paieront le prix, pour lesquelles, M. le
Président, je pense qu'il faut avoir... En toute honnête, en toute
franchise, en toute simplicité, il faut reconnaître, finalement,
ce caractère particulier et reconnaître la réalité
particulière de Montréal.
M. le Président, avant de venir m'adresser à vous, j'avais
l'occasion de lire les propos du président de la Communauté
urbaine de Montréal, M. Hamelin, qui s'inquiétait de voir
Montréal perdre trois comtés dans cette Assemblée
nationale à l'occasion d'une réforme de la carte
électorale qui est prévue à nos lois et règlements.
Ce n'est certes pas, M. le Président, en agissant de la sorte, en
reconnaissant que Montréal, à cause de sa composition, à
cause de son caractère ethnique, à cause de sa situation
linguistique... M. le Président, il est nécessaire de
reconnaître ces réalités. Ce n'est pas parce qu'il y a des
problèmes particuliers qu'il faille, en utilisant des critères
souvent arbitraires qui ne tiennent pas compte de cette réalité,
pénaliser Montréal. Montréal, au contraire de ce que bien
des gens pourraient penser, ne compte pas une diminution de sa population,
mais, bien au contraire, la population de Montréal augmente
d'année en année. C'est ce que nous apprenait, tout
récemment, les derniers chiffres que publiait Statistique Canada,
chiffres obtenus à la suite du grand recensement que nous avons connu
l'an dernier.
Donc, M. le Président, la population de Montréal augmente,
mais nous pouvons nous demander, lorsque vient le temps de discuter du
défi de la reconnaissance et de la représentation de
Montréal, ce qui peut pousser des gens à faire ce genre
d'anticipation qui amène Montréal à perdre trois de ses
circonscriptions. Peut-être que les Montréalais sont victimes de
leur propre succès. Si, par exemple, venait le temps d'enlever trois
comtés dans le Bas-du-Fleuve, vous comprendriez le tollé de
protestations que les gens manifesteraient, mais lorsque vient le temps
d'enlever trois comtés à Montréal, c'est à peine,
M. le Président, si les partenaires, nos collègues,
nous-mêmes dans cette Assemblée nationale, les journaux, et les
médias y ont accordé une quelconque attention. M. le
Président, peut-être que nous sommes victimes de nos propres
succès, mais ce défi de la représentation en est un qui,
je crois, est tout à fait essentiel dans le contexte actuel.
M. le Président, lorsque nous parlons de Montréal... J'ai
eu l'occasion, et mes collègues l'ont fait tout à l'heure aussi,
de rappeler l'apport de l'ensemble des communautés qui fait de
Montréal cette ville que nous aimons tant et que nous apprécions
tant. Et permettez-moi, ici, de prendre quelques instants pour souligner
l'apport de la communauté anglophone. Je pense qu'il faut rendre
à César ce qui revient à César, et si
Montréal est ce qu'elle est, c'est, bien sûr, parce qu'il y a des
Montréalais de souche anglophone, de souche francophone qui ont
contribué à son développement. Oui, nous pouvons
être fiers. Oui, mon collègue, le député de
Pointe-aux-Trembles, avait raison tout à l'heure. Oui, nous sommes fiers
d'institutions comme l'Université McGill, comme le Jewish General
Hospital, comme le Royal Victoria, ces institutions qui ont
façonné Montréal et qui continueront toujours, peu importe
le statut politique qui est réservé à Montréal, qui
est réservé au Québec, de façonner cette grande
ville.
En conclusion, si on me permettait un voeu, M. le Président,
ça serait, finalement, d'affirmer haut et fort que nous souhaitons,
nous, de ce côté-ci de cette Chambre, que ce même dynamisme,
que ce même courage, que cette même volonté, cette
même détermination qui ont animé Maisonneuve à
l'occasion de la fondation de Montréal, qui ont animé Jeanne
Mance à l'occasion aussi de la fondation de Montréal, que ce soit
ce même courage, cette même détermination et cette
même volonté qui vont permettre et qui vont faire des
Montréalais et des Montréalaises des gens fiers d'habiter cette
ville, et que, peut-être, ce même courage, cette même
détermination, cette même volonté nous permettront, si nous
sommes capables de nous en inspirer, de faire de Montréal la
métropole du Québec, d'une province, mais aussi, nous le
souhaitons, Montréal, la métropole d'un Québec
souverain.
Soyez assuré que nous, de ce côté-ci de
cette Chambre, déjà, par le biais de nos formations politiques,
par le biais des structures démocratiques auxquelles nous participons,
nous
nous sommes mis à cette tâche, et nous sommes convaincus,
M. le Président, que c'est rapidement que nous serons capables de mettre
nos projets à exécution. Merci, M. le Président. (17 h
50)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Gouin. Il n'y a pas d'autres interventions? Est-ce que
la motion proposée par M. le président du Conseil du
trésor et ministre responsable de la région de Montréal,
qui se lit comme suit: «Que cette Assemblée souligne le 350e
anniversaire de la fondation de la ville de Montréal», est
adoptée?
Une voix: Adopté, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. Est-ce
qu'il y a d'autres motions sans préavis?
Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader adjoint du
gouvernement.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Bélisle: Merci, M. le Président. M. le
Président, j'avise cette Assemblée que demain, le jeudi 21 mai
1992, de 10 heures à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau,
la commission de l'aménagement et des équipements
procédera à l'étude détaillée du projet de
loi 1, Loi modifiant la Loi sur la Communauté urbaine de Québec.
Je rappelle également à cette Assemblée que demain, le
jeudi 21 mai 1992, de 10 heures à 12 h 30, à la salle
Louis-Hippolyte-LaFontaine, la commission du budget et de l'administration
entendra les intéressés et procédera à
l'étude détaillée des projets de loi
d'intérêt privé suivants, et ce, dans l'ordre
ci-après indiqué: le projet de loi 282, Loi concernant La
Société médicale de Montréal inc., et le projet de
loi 215, Loi concernant Club de golf Le Portage inc. Je dépose les avis,
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le leader
adjoint du gouvernement. J'ai moi-même l'avis suivant à vous
transmettre. Je vous avise qu'aujourd'hui, le 20 mai, après la
période des affaires courantes jusqu'à 18 h 30, la commission de
l'éducation se réunira afin d'entendre les représentants
du groupe de travail pour les jeunes sur le rapport «Un Québec fou
de ses enfants».
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Mme la
députée de Chicoutimi.
Renseignements sur les travaux de
l'Assemblée
Mme Blackburn: Oui, M. le Président. Au sujet du projet de
loi 35, Loi modifiant la Loi sur les accidents du travail et les maladies
professionnelles, la Loi sur la santé et la sécurité du
travail et la Loi sur l'assurance-maladie, loi qui déçoit plus
qu'elle ne fait d'adhésion, est-ce que le gouvernement a l'intention de
tenir une consultation? Et, si oui, quand a-t-il l'intention de convoquer une
commission parlementaire consultative sur ce projet de loi?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Bélisle: M. le Président, je ne pense pas que ce
soit le bon moment, effectivement, de poser la question au leader du
gouvernement. Je pense que Mme la députée a amplement le temps,
à la période de questions, d'adresser cette question au ministre
concerné. Cependant, pour être courtois, je vais m'informer, mais
il ne m'appartient pas de répondre au nom des ministres sectoriels de
leurs intentions dans chacun de leurs champs de compétence.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci.
Mme Blackburn: Sur ce projet de loi, M. le
Président...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, Mme la
députée de Chicoutimi.
Mme Blackburn: ...sur lequel projet de loi le leader du
gouvernement s'était engagé à nous apporter une
réponse, le projet de loi 185, Loi modifiant la Loi sur les relations du
travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans
l'industrie de la construction, projet de loi qui a été
présenté par le ministre du Travail le 13 novembre 1991, principe
adopté le 27 novembre 1991, renvoyé à la commission de
l'économie et du travail, rapport de consultation déposé
le 10 décembre 1991 et le 10 mars 1992, et lequel projet de loi le
ministre s'était engagé à faire adopter dès le
début des travaux de la Chambre en mars, on attend toujours ce projet de
loi. Le monde du travail l'attend également, tant les travailleurs de la
construction que les employeurs. Alors, qu'est-ce que le gouvernement attend
pour faire adopter ce projet de loi? Est-ce qu'on l'aura dans les prochains
jours?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Bélisle: M. le Président, tout simplement, je
vais me répéter. Même réponse qu'à la
question précédente. C'est d'adresser, encore une fois, sa
question ou ses questions demain, à la période de questions, au
ministre sectoriel concerné, soit au ministre du Travail, qui va se
faire un plaisir de lui répondre concernant les intentions et la
démarche qu'il suit dans son dossier. Je ne suis pas responsable de la
démarche des ministres sectoriels dans leur champ de compétence.
Je pense que Mme la députée devrait avoir suffisamment
d'expérience parlementaire pour savoir que ce n'est pas comme ça
qu'on procède.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le leader
adjoint du gouvernement.
Nous arrivons maintenant à l'étape des affaires du jour.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Bélisle: L'article 1, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 1 de
notre feuilleton, l'Assemblée reprend le débat sur la motion de
M. le ministre des Finances proposant que l'Assemblée approuve la
politique budgétaire du gouvernement, ainsi que sur les motions de
censure présentées par M. le député de Labelle et
Mme la députée de Taillon. Mme la députée de
Johnson, je vous cède la parole.
Mme Juneau: M. le Président, compte tenu de l'heure,
est-ce que vous voulez m'accorder l'ajournement des travaux, s'il vous
plaît?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, vous demandez,
dans un premier temps, l'ajournement du débat?
Mme Juneau: Oui.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette
motion... Oui?
M. Bélisle: Bien entendu, M. le Président, pour
accommoder la députée de Johnson, je n'ai pas d'objection
étant donné qu'elle demande l'ajournement du débat
à un autre moment.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, la motion
d'ajournement du débat est adoptée. Il est 18 heures moins
quelques minutes. Dans les circonstances, j'ajourne les travaux de
l'Assemblée à demain après-midi, à 14 heures.
(Fin de la séance à 17 h 55)