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(Dix heures onze minutes)
Le Président: Mmes, MM. les députés, nous
allons nous recueillir quelques instants.
Je vous remercie, veuillez vous asseoir.
Affaires courantes
Nous allons entreprendre les affaires courantes.
Il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.
Présentation de projets de loi
M. Pagé: M. le Président, je vous invite à
appeler l'article b, s'il vous plaît, du feuilleton.
Projet de loi 218
Le Président: Alors, à l'article b du feuilleton,
j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet
de loi 218, Loi concernant Club de curling de Montréal-Ouest inc. Le
directeur de la législation a constaté que les avis ont
été faits et publiés conformément aux règles
de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je
dépose donc ce rapport.
En conséquence, Mme la députée de Saint-Henri
présente le projet de loi d'intérêt privé 218, Loi
concernant Club de curling de Montréal-Ouest inc. Alors, est-ce que
l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?
Des voix: Oui.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
Renvoi à la commission du budget et de
l'administration
M. Pagé: M. le Président, je fais motion pour que
le projet de loi d'intérêt privé soit
déféré à la commission du budget et de
l'administration pour étude détaillée et pour que Mme la
ministre déléguée aux Finances en soit membre.
Le Président: Est-ce que cette dernière motion est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: L'article d, M. le Président.
Projet de loi 217
Le Président: À l'article d du feuilleton, j'ai
reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de
loi 217, Loi concernant Consolidated Bowling Ltd. Le directeur de la
législation a constaté que les avis ont été faits
et publiés conformément aux règles de fonctionnement des
projets de loi d'intérêt privé. Je dépose donc ce
rapport.
En conséquence, M. le député de Saint-Louis
présente le projet de loi d'intérêt privé 217, Loi
concernant Consolidated Bowling Ltd. Est-ce que l'Assemblée accepte
d'être saisie de ce projet de loi?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
Renvoi à la commission du budget et de
l'administration
M. Pagé: M. le Président, je fais motion pour
déférer le projet de loi d'intérêt privé
à la commission du budget et de l'administration, encore une fois, pour
étude détaillée et pour que Mme la ministre
déléguée aux Finances en soit membre.
Le Président: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: Je vous invite à appeler l'article a.
Projet de loi 225
Le Président: À l'article a du feuilleton, j'ai
reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de
loi 225, Loi concernant Restaurant Belle-Ville inc. La Direction de la
législation a constaté que les avis ont été faits
et publiés conformément aux règles de fonctionnement des
projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport
et, en conséquence, M. le député de Lévis
présente le projet de loi d'intérêt privé 225, Loi
concernant Restaurant Belle-Ville inc.
Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet
de loi?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. M. le leader du
gouvernement.
Renvoi à la commission du budget et de
l'administration
M. Pagé: M. le Président, je fais motion pour
déférer le projet de loi d'intérêt privé
à la commission du budget et de l'administration pour étude
détaillée et pour que Mme la ministre
déléguée aux Finances en soit membre.
Le Président: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Maintenant, au
dépôt de documents, M. le ministre de la Justice.
Dépôt de documents
Rapport annuel du Secrétariat aux affaires
intergouvernementales canadiennes
M. Rémillard: m. le président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport annuel 1990-1991 du secrétariat aux affaires
intergouvernementales canadiennes.
Le Président: Ce rapport est déposé. M. le
ministre des Transports, maintenant.
Rapport d'activité du contrôle du
transport routier de la Société de l'assurance automobile
M. Elkas: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport d'activité 1991 du contrôle du transport
routier de la Société de l'assurance automobile du
Québec.
Rapport de la Commission de la
représentation
électorale du Québec sur la
délimitation
des circonscriptions électorales
Le Président: Ce rapport est également
déposé. Et moi-même j'ai l'honneur de déposer le
rapport du président de la Commission de la représentation
électorale du Québec concernant la délimitation des
circonscriptions électorales. Donc, ce rapport est
déposé.
Maintenant, dépôt de rapports des commissions. M. le
président de la commission des institutions et député de
Marquette.
Dépôt de rapports de commissions
Étude détaillée du projet de loi 406
M. Dauphin: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. J'ai
donc l'honneur de faire rapport que la commission des institutions a
siégé les 18 décembre 1991 et 28 mai 1992 afin de
procéder à l'étude détaillée du projet de
loi 406, Loi sur l'Institut québécois de réforme du droit.
Le projet de loi a été adopté avec des amendements.
Le Président: Alors, ce rapport est déposé.
Maintenant, dépôt de pétitions. M. le député
d'Arthabaska.
Dépôt de pétitions
Fournir gratuitement les médicaments
et le matériel prescrit par un
médecin
aux diabétiques de 50 ans et plus
M. Baril: Oui, M. le Président. Je dépose l'extrait
d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par
1537 pétionnaires, citoyens et citoyennes du Québec.
Les faits invoqués sont les suivants: «Considérant
que le ministère de la Santé et des Services sociaux
défraie déjà les seringues pour les toxicomanes;
«Considérant que la pauvreté chez les femmes de 50 à
64 ans vivant seules n'a pas changé depuis 1979, avec un taux de plus de
50 % et de 80 % chez les 65 ans et plus; «Considérant que plus de
60 % des retraités et préretraités vivent au-dessous du
seuil de la pauvreté;»
L'intervention réclamée se résume ainsi:
«Nous, de l'Association québécoise pour la défense
des droits des retraités...»
Le Président: Oui, M. le député, très
bien. Je vais demander aux collègues, s'il vous plaît, leur
collaboration. MM. les députés et Mmes les
députées. Mmes et MM. les députés, s'il vous
plaît. Vous pouvez poursuivre, M. le député
d'Arthabaska.
M. Baril: Donc, je reprends.
L'intervention réclamée se résume ainsi:
«Nous, de l'Association québécoise pour la défense
des droits des retraités et retraitées - au féminin -
section de Granby, demandons à l'Assemblée nationale de demander
au ministre de la Santé et des Services sociaux que tous les
médicaments et le matériel individuel prescrit par un
médecin soient fournis gratuitement à tous les diabétiques
de 50 ans et plus au Québec.»
Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à
l'original de la pétition.
Le Président: Merci, M. le député. Votre
pétition est déposée. Alors, j'en appelle encore une fois
à tous mes collègues, s'il vous plaît, pour qu'on puisse
procéder dans l'ordre, s'il vous plaît. À l'ordre, s'il
vous plaît! Alors, mesdames, messieurs, s'il vous plaît.
Alors, M. le leader du gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, pour le
bénéfice de celles et ceux qui nous écoutent, ce n'est
pas
que la Chambre soit perturbée ce matin, c'est que vous venez
effectivement de déposer un document important, la carte
électorale du Québec. Vous comprendrez que chaque collègue
a les yeux rivés sur la carte. Ils ne veulent pas la perdre. Alors, M.
le Président, soit qu'on suspende trois minutes ou que vous invitiez les
collègues à retirer leur carte et on en prendra connaissance un
peu plus tard.
Le Président: Oui, eh bien, écoutez, je pense que
c'est la volonté des collègues aussi que les documents importants
déposés soient distribués immédiatement.
J'apprécierais qu'on le regarde avec les yeux et non pas avec la bouche;
ça serait plus simple pour tous ceux qui ont une intervention à
faire.
Alors, M. le leader adjoint de l'Opposition.
M. Gendron: m. le président, ça a un lien entre les
deux. si on disparaît... après avoir constaté qu'on
disparaît, peut-être bien que ça va nous fermer plus
vite.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: Une dernière intervention, M. le
leader du gouvernement.
M. Pagé: Alors, qu'on poursuive, mais on retient que le PQ
a peur de disparaître.
Le Président: Très bien. Alors, j'en appelle
maintenant à la collaboration de tous les collègues, s'il vous
plaît. Au niveau du dépôt de pétitions, nous
continuons avec M. le député de Shefford. Alors, M. le
député de Shefford.
Surseoir au projet de relocalisation
de l'Hôtel-Dieu de Montréal dans
le
quartier Rivière-des-Prairies
M. Paré: Oui, merci, M. le Président. Je
dépose l'extrait d'une pétition adressée à
l'Assemblée nationale par 169 pétionnaires, citoyens et
citoyennes de Montréal.
Les faits invoqués sont les suivants: «Attendu que M.
Marc-Yvan Côté, ministre de la Santé et des Services
sociaux, a publiquement annoncé récemment au conseil
d'administration de l'Hôtel-Dieu qu'afin de doter la région
nord-est de Montréal d'un hôpital il favoriserait la
relocalisation de l'Hôtel-Dieu de Montréal dans le quartier
Rivière-des-Prairies, alors que les immeubles actuels seraient convertis
en 90 lits de soins de longue durée pour personnes âgées,
en condominiums et en bureaux; «Attendu que l'Hôtel-Dieu, dont la
fondation par Jeanne Mance remonte aux débuts de Ville-Marie, a grandi
avec Montréal et demeure une institution implantée au coeur de
Montréal qui dispense, encore aujourd'hui, des soins de haute
qualité à un nombre considérable d'usagères et
d'usagers; «Attendu que, selon des sources bien informées, les
responsables du ministère, afin de privilégier la relocalisation
de l'Hôtel-Dieu, auraient cavalièrement écarté
d'autres projets qui auraient l'avantage de maintenir l'hôpital où
il se trouve présentement; (10 h 20) «Attendu que le débat
sur les soins de santé de la région de Montréal n'a pas
été fait avec les bénéficiaires, la population et
les groupes syndicaux qui oeuvrent en santé; «Attendu que
l'ensemble des intervenants conviennent qu'il existe un besoin de soins de
santé dans le nord-est de Montréal et que les sommes de 350 000
000 $ annoncées par le ministre pourraient servir à la
rénovation des locaux actuels de l'Hôtel-Dieu tout en comblant les
besoins de santé de la population du nord-est de
Montréal;»
Et l'intervention réclamée se résume ainsi:
«II est résolu de demander à l'Assemblée nationale:
«1° de signifier au ministre de la Santé et des Services
sociaux et aux autres instances du gouvernement Bourassa, ainsi qu'à
celles des villes intéressées, notre vive opposition au projet de
relocalisation de l'Hôtel-Dieu actuellement situé rue Saint-Urbain
et avenue des Pins; «2° d'inviter fortement le ministre de la
Santé et des Services sociaux à surseoir audit projet et à
accorder aux citoyennes et citoyens concernés l'occasion d'examiner
objectivement le dossier et de proposer des solutions alternatives.
«Nous, soussignés, appuyons la pétition de la Coalition
pour le maintien de l'Hôtel-Dieu au centre-ville, de sa vocation actuelle
et de son statut universitaire.»
Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à
l'original de la pétition.
Le Président: Votre pétition est
déposée.
Il n'y a pas d'intervention portant sur une violation de droit ou de
privilège ou sur un fait personnel.
Nous allons donc procéder à la période de questions
et réponses orales et je vais reconnaître, en première
question principale, M. le chef de l'Opposition.
Questions et réponses orales
Réaction du gouvernement aux textes d'entente
à la conférence constitutionnelle
M. Parizeau: M. le Président, depuis plusieurs jours et
encore hier, le premier ministre fait grand état du fait qu'il n'est pas
au courant des documents, des textes d'entente à la conférence
constitutionnelle et, dans ces conditions, se sert de ce prétexte pour
ne pas commenter ce qui se passe à la table constitutionnelle.
Nous apprenons qu'hier quatre, dit-on, de
ses principaux conseillers constitutionnels sont allés à
Ottawa justement chercher les textes. C'est peut-être pour cette raison
que le premier ministre soulevait hier «un risque sérieux
d'impasse», disait-il, parce que toujours, dit-on dans les journaux,
«la réaction de ces quatre conseillers constitutionnels du premier
ministre serait défavorable.»
Est-ce que je peux demander au premier ministre s'il a l'intention,
puisque maintenant, il les a, les textes, de faire une déclaration en
cette Chambre pour mettre l'Assemblée nationale et le public
québécois en général au courant de ce qui se passe,
d'ici... enfin, rapidement, quoi, d'ici quelques jours? Aujourd'hui, si c'est
possible. Pourquoi le premier ministre, maintenant qu'il a tout ça en
main, refuse-t-il de faire le point?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, j'ai mentionné, hier,
que les textes ou les ententes ou les principes sur lesquels on était
tombé d'accord, à Toronto, étaient examinés par les
différents gouvernements. Ce ne sont pas des décisions
définitives, elles n'ont pas été rendues publiques.
Ça n'empêche pas des rencontres entre fonctionnaires comme il y en
a régulièrement. Ce n'est pas la première fois que les
conseillers constitutionnels du gouvernement ou du ministre
délégué aux Affaires intergouvemementales canadiennes
rencontrent des hauts fonctionnaires du gouvernement fédéral.
C'est normal, alors, ils le font. Mais de là à dire que les
propositions dont parle de chef de l'Opposition sont finales, sont
définitives, ont fait l'objet de discussions des différents
gouvernements ou du gouvernement fédéral, ça, c'est une
tout autre question.
Nous aurons à nous prononcer. Encore une fois, je le
répète. Hier, je l'ai dit, le gouvernement fédéral
a accepté les principes, l'échéancier, la
stratégie, si on peut dire, de la loi 150. C'est pour ça qu'il a
amorcé toute une série de discussions et de rencontres à
travers tout le Canada de manière à pouvoir faire des offres
selon la loi 150, de manière qu'on puisse, comme je le mentionnais et
comme le mentionne implicitement la loi 150, avoir un référendum
sur des offres. Alors, ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est que, tant
qu'on n'a pas les discussions, qu'on n'a pas le point de vue des gouvernements
- là on avait le point de vue des ministres responsables à
Toronto - je ne vois pas en quoi j'aurais à commenter des textes
préliminaires, qui ne sont pas des textes définitifs.
Le Président: En question complémentaire, M. le
chef de l'Opposition.
M. Parizeau: M. le Président, est-ce que je comprends bien
le premier ministre qu'en somme il envoie des gens à Ottawa relever les
textes, relever les ententes partielles qu'il peut y avoir? Il
téléphone, sans arrêt, ou il reçoit des
téléphones, à longueur de journée, si on le
comprend bien ou certains de ses ministres, mais tout ça va être
caché. Personne ne saura rien. On laissera, là, les gens
«effervescer», les journalistes poser des hypothèses...
Oui, oui, je suis toujours à ma question. Est-ce que je comprends
bien le premier ministre quand il dit: Bavardez, bavardez, dans les journaux,
faites des hypothèses, moi, je sais ce qui se passe, mais je ne vous le
dirai pas? C'est ça, la position du premier ministre?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, le chef de l'Opposition dit
que je suis constamment au téléphone et que les conversations
téléphoniques sont secrètes ou sont discrètes. Je
veux dire, je ne vois pas en quoi du moins sauf si je me trompe ou si je suis
mal informé, les conversations téléphoniques entre
premiers ministres devraient être rendues publiques. À moins qu'on
n'ait les moyens de vérifier...
Alors, ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est: D'abord, je ne suis
pas constamment au téléphone. J'ai retourné, à
l'occasion, des appels téléphoniques de certains de mes
collègues, et je le fais encore, pour discuter de questions
constitutionnelles ou même de questions économiques. Ça,
c'est normal. C'est dans la nature des choses, dans la nature de mes fonctions.
Mais ce que je lui dis, c'est que les rencontres qui ont lieu font suite
à d'autres rencontres.
C'est évident que mes hauts fonctionnaires - j'aurai l'occasion
d'en discuter avec eux au cours des prochains jours - reçoivent des
informations, c'est clair, sur les éléments d'entente qui ont pu
avoir lieu, au niveau ministériel, à Toronto. Mais je dis au chef
de l'Opposition que je ne vois pas en quoi je devrais faire des commentaires
définitifs, dire telle et telle chose - je réponds sur des points
précis qui sont demandés - mais que je devrais donner un avis
définit sur des textes qui sont encore l'objet de discussions. C'est
ça que je réponds au chef de l'Opposition. Il me semble qu'il ne
devrait pas en être étonné.
Le Président: Toujours en question
complémentaire.
M. Parizeau: Au cas où ça pourrait
intéresser les Québécois, est-ce que le premier ministre
pourrait nous dire, alors, sur quoi il se basait pour affirmer, hier, qu'il y a
un risque sérieux d'impasse? Il se base sur quoi pour dire
ça?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Si j'avais répondu qu'il n'y avait aucun
risque d'impasse, le chef de l'Opposition aurait dit: Sur quoi il se base pour
dire ça?
Le Président: Pour une question principale, maintenant, M.
le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition.
Référendum pancanadien sur la question
constitutionnelle
M. Brassard: M. le Président, la guillotine fait son
oeuvre, à Ottawa, sur le projet de loi C-81 relatif à un
référendum pancanadien sur la question constitutionnelle, dont le
premier ministre connaît sûrement bien le contenu aujourd'hui. Il
en a sûrement profité, même si va vite à Ottawa pour
envoyer des émissaires, pour prendre connaissance du projet de loi. Le
fax n'existe pas à son bureau.
En dépit d'amendements loufoques, le projet de loi C-81 demeure
une escroquerie planifiée, un véritable détournement de la
démocratie fondé sur la loi de la jungle et qui ne peut conduire
qu'à un débat faussé et inéquitable, qu'à
une immense opération de manipulation de l'opinion des
Québécois, ce qui est d'ailleurs déjà
commencé. (10 h 30)
Question au premier ministre: Maintenant qu'il connaît bien le
projet de loi C-81, comment le premier ministre peut-il accepter que se tienne
sur le territoire québécois, sur une question aussi cruciale que
l'avenir politique des Québécois, ce qu'un éditorialiste
du Soleil a qualifié de «partouse»
référendaire, une opération antidémocratique qui
constitue un véritable sabotage du droit des Québécois de
décider de leur avenir? Comment peut-il, maintenant qu'il connaît
le texte de loi, accepter que se tienne au Québec une pareille
supercherie de la démocratie?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, admettons, au départ,
qu'une consultation populaire n'est pas antidémocratique. Ça, on
peut admettre ça de principe. Admettons, au départ, qu'une
consultation populaire n'est pas antidémocratique. Quant aux
modalités, il y a eu des amendements. Je veux dire, si ça regarde
le Parlement fédéral, ça ne regarde pas l'Assemblée
nationale. C'est pourquoi j'ai répondu la semaine dernière - le
député de Lac-Saint-Jean me repose la même question que la
semaine dernière, dans les mêmes termes - que le premier ministre
du Canada a toujours dit que ce n'était pas son intention, et il l'a
répété, de se substituer à la volonté de
l'Assemblée nationale. J'ai répondu au député de
Lac-Saint-Jean que notre référence - il peut y avoir des
débats juridiques à cet égard-là - sur
l'application de la loi ou les modalités référendaires,
c'est la loi québécoise. Il me semble que j'ai répondu
à cet égard-là, d'une façon très claire, la
semaine dernière au député de Lac-Saint-Jean.
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
M. Brassard: M. le Président, Tartuffe n'aurait pas dit
mieux. Oui, c'est une véritable «tartufferie».
Le Président: Votre question, s'il vous plaît.
M. Brassard: Le premier ministre pourrait-il avoir la
dignité élémentaire et un minimum de courage politique
pour dire carrément non. Ça doit se dire de sa part? Dire
carrément non à l'initiative fédérale et refuser de
cautionner cette caricature grossière de la démocratie. Un peu de
courage, M. le premier ministre! Dites non à ce que prépare le
gouvernement fédéral et la Chambre des communes. Dites non!
Le Président: Alors, M. le premier ministre.
M. Bourassa: Je cherche dans Molière, M. le
Président, un personnage qui pourrait ressembler au député
de Lac-Saint-Jean.
Des voix:...
M. Bourassa: On avisera. M. le Président, dans la loi qui
est soumise au Parlement fédéral, je dois souligner au
député de Lac-Saint-Jean que, dans l'article 3, si ma
mémoire est bonne - je ne veux pas commenter une loi d'un autre
Parlement; c'est aux députés à assumer leurs
responsabilités, dans la mesure où la loi de l'Assemblée
nationale prévaut - on dit que le référendum ne pourra
s'appliquer qu'à certaines provinces, donc laissant clairement la
possibilité - et ce n'est pas contradictoire avec les
déclarations qui ont été faites par les autorités
fédérales - au Québec de tenir son
référendum selon ses propres lois. De toute évidence, le
député de Lac-Saint-Jean n'a pas lu l'article 3 de la loi
fédérale.
Le Président: Toujours en question
complémentaire.
M. Brassard: M. le Président, il y a aussi Scapin dont on
connaît les fourberies.
Une voix: Trop de culture.
M. Brassard: Oui.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Brassard: Ma question, M. le Président,
au premier ministre: Si la loi fédérale prévoit
justement que certaines provinces soient exclues, pourquoi, dès
maintenant, aujourd'hui même à l'Assemblée nationale et au
peuple québécois, le premier ministre ne dit-il pas au
gouvernement fédéral que son référendum ne pourra
pas et n'aura pas lieu sur le territoire québécois? Ce n'est pas
difficile à dire, ça! Si ça le permet, dites-le donc!
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Le député de Lac-Saint-Jean, je
l'admets volontiers, s'affirme avec beaucoup de brio dans le rôle de
saltimbanque.
Des voix: Ha,ha, ha!
M. Bourassa: M. le Président, je n'ai pas invoqué
Molière. J'invoque le dictionnaire.
Des voix: Ha,ha, ha!
M. Bourassa: J'ai répondu au député de
Lac-Saint-Jean, la semaine dernière, que nous voulions... J'ai
invoqué le premier ministre du Canada, qui le comprenait et qui avait
affirmé qu'il n'avait pas l'intention de se substituer aux
Québécois dans leur volonté de décider de leur
avenir - je ne pouvais pas être plus clair que cela - que notre objectif,
c'était dans la loi 150. Nous voulions le respect de la loi 150. Que
veut de plus le député de Lac-Saint-Jean, qui est maintenant
converti à la loi, qui la défend partout, dans les
manifestations, dans toutes les occasions? Maintenant que le
député de Lac-Saint-Jean, avec tous ses collègues, est
converti au respect de la loi 150, en permettant, évidemment, selon
l'esprit de la loi, des amendements si les offres fédérales sont
faites, tel qu'annoncé...
M. le Président, ces gens-là, qui veulent garder des liens
avec le reste du Canada, à ce qu'ils disent, est-ce que le gouvernement
fédéral et tous nos partenaires canadiens se seront
rencontrés un grand nombre de fois, à discuter durant des jours
et des jours, pour préparer des offres au gouvernement du Québec,
puis, une fois qu'on aurait reçu des offres, on dirait: On n'en tient
pas compte? Est-ce que c'est ça que vous voulez qu'un gouvernement
responsable fasse, M. le Président?
On dit à nos partenaires canadiens: Nous attendons des offres.
C'est dans le texte de la loi 150. Admettons qu'ils font des efforts
considérables pour faire ces offres, et là le Parti
québécois voudrait qu'on dise: Au diable! Au diable les offres,
après tous ces efforts qui sont faits. Non, quand même, soyons
réalistes. Soyons réalistes, M. le Président.
Le Président: En conclusion.
M. Bourassa: Alors, j'ai dit au député de
Lac-Saint-Jean, il y a deux semaines, la semaine dernière - je le
lui répète aujourd'hui - que notre objectif est le respect de la
loi 150 dans son esprit et dans sa lettre.
Le Président: Pour une question additionnelle.
M. Brassard: Est-ce que je dois comprendre que, dans les
nombreuses conversations téléphoniques qu'il a eues avec son ami
Brian, c'est ça qu'il lui a dit? Est-ce que vous lui avez dit, à
M. Mulroney, que, quant au Québec, la loi fédérale ne
s'appliquerait pas et que ce qui s'appliquerait, c'est la loi 150, le
référendum sur la souveraineté, conformément aux
traditions, aux coutumes et aux législations en matière de
référendum au Québec? Est-ce que c'est ça que vous
lui avez dit, carrément, directement et précisément,
à l'occasion de vos nombreuses conversations
téléphoniques?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: J'ai répondu que les conversations
téléphoniques, normalement, entre chefs de gouvernement, ce sont
des conversations privées. Si vous avez des complices qui peuvent vous
informer sur le contenu de ces conversations-là, c'est votre
problème.
Le Président: En question principale, M. le
député de Laviolette.
Protocole entre le ministère des Forêts
et la Société sylvicole de l'Outaouais
M. Jolivet: Merci, M. le Président. La
Société sylvicole de l'Outaouais a été
fondée en 1979. De 1979 à 1991, tout allait bien entre le
ministère des Forêts et cette Société. Cependant,
malheureusement, en 1991, la Société a refusé une
allocation de plants à reboiser parce qu'elle considérait que
c'était au-delà de ses capacités. Depuis ce refus, la
Société se sent victime de représailles de la part des
représentants du ministère des Forêts en région, qui
lui imposent des coupures injustifiées pour ses travaux. Pour 1991-1992,
c'est une perte de 18 000 $, puisque le protocole n'a finalement
été signé qu'au mois de septembre 1991, et pour 1992-1993
le protocole n'a pas encore été signé. (10 h 40)
J'aimerais savoir de la part du ministre des Forêts s'il peut
m'indiquer quand le protocole 1992-1993 sera signé entre le
ministère des Forêts et la Société sylvicole de
l'Outaouais.
Le Président: M. le ministre des Forêts.
M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le
Président, grâce à l'entente
fédérale-provinciale que nous avons signée
dernièrement, les budgets de toutes
les sociétés sylvicoles, les organismes de gestion en
commun à travers le Québec seront augmentés
légèrement et, ceci, avec une programmation pour les trois
prochaines années, en plus. Nous devrions finaliser cette semaine, M. le
Président, la répartition des budgets de chacune des
sociétés et de chacun des organismes de gestion en commun.
Le Président: En question complémentaire.
M. Jolivet: Afin de faire cesser le harcèlement dont se
dit victime la Société sylvicole de l'Outaouais, le ministre
possède-t-il les moyens pour obliger ses fonctionnaires à
respecter ce protocole qu'il va signer bientôt?
Le Président: M. le ministre des Forêts.
M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le
Président, je serais bien surpris que les fonctionnaires utilisent du
harcèlement envers quelque société que ce soit et, si
ça se produisait, soyez assurés que je prendrai des mesures pour
corriger la situation.
Le Président: Toujours en complémentaire.
M. Jolivet: Est-ce que le ministre peut m'indiquer quels sont les
recours qui appartiennent à une société comme celle de
l'Outaouais lorsqu'elle se sent victime de coupures injustifiées de la
part des fonctionnaires en région?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le
Président, je pense bien que la Société a comme recours de
faire poser une question à l'Assemblée nationale par le
député de Laviolette...
Une voix: Entre autres.
M. Côté (Rivière-du-Loup): ...entre autres.
d'un autre côté, si ce cas est porté à mon attention
personnelle, je me ferai un devoir de l'examiner et, comme je l'ai dit
précédemment, de corriger la situation s'il y a lieu.
Le Président: En question complémentaire.
M. Jolivet: Est-ce que le ministre, à part la
réponse qu'il me donne, peut m'indiquer s'il est possible, de la part
des fonctionnaires en région, de couper un montant d'aide
financière chez un propriétaire pour se rembourser des sommes
qu'eux, les fonctionnaires, estiment être dues pour des travaux faits
chez un autre propriétaire? Est-ce que c'est possible, ça?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Rivière-du-Loup): Écoutez, M.
le Président, si les travaux n'ont pas été
exécutés, je pense bien que les fonctionnaires sont en droit de
réclamer l'argent qui aurait été versé, mais si les
travaux ont été exécutés, je ne pense pas qu'on
puisse agir de cette façon-là. Si le député de
Laviolette veut me donner le cas précis, ça me fera plaisir de
l'examiner, M. le Président.
Le Président: En question principale, Mme la
députée de Johnson.
Restrictions budgétaires limitant le nombre
d'implantations de prothèses
Mme Juneau: Merci, M. le Président. On apprenait, hier,
que par souci d'économie plusieurs hôpitaux du Québec
limitent l'implantation de prothèses de la hanche et du genou. Tous
savent que les personnes âgées sont les premiers
bénéficiaires de ces implantations. Ainsi donc, encore une fois,
les gens âgés font les frais des restrictions budgétaires
du gouvernement. Les médecins orthopédistes dénoncent
vertement cette situation et ils ont d'ailleurs prévu une marche
symbolique, samedi prochain, à Québec, afin de sensibiliser le
ministre de la Santé et des Services sociaux. Est-ce que le ministre
responsable de la Condition des aînés a l'intention, dans les plus
brefs délais, de corriger cette situation inquiétante pour
plusieurs personnes âgées en attente d'une prothèse de la
hanche ou du genou?
Le Président: Alors, M. le ministre de la Santé et
des Services sociaux, responsable de la Condition des aînés.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, j'ai
reçu un téléphone du Dr Girard, qui est un
orthopédiste de l'Hôtel-Dieu de Québec et qui est à
l'origine de cette marche symbolique qui se déroulera samedi prochain,
à Québec, comme partout ailleurs à travers le Canada. Ce
n'est pas un phénomène qui est unique à Québec,
c'est dans l'ensemble du Canada, et il visait à me sensibiliser, M. le
Président, à cette problématique vécue. Ce qui est
extrêmement intéressant, c'est que ce médecin, en
particulier, a oeuvré à Matane pendant un certain nombre
d'années et il est donc pleinement conscient de cette
problématique des régions de tout le Québec,
lui-même ayant été inspiré par son travail en
région et desservant maintenant, de l'Hôtel-Dieu de Québec,
les gens de l'Est du Québec en particulier.
Il y a une problématique qui est là, avec des coûts
de plus en plus élevés et qui fait l'objet d'une analyse à
la demande des orthopédistes au niveau du ministère.
Évidemment, on est toujours face à des contraintes sur le plan
budgétaire qui sont réelles et auxquelles nous devons faire face
chaque jour, avec des coûts assez substantiels. Évidemment, nous
réussirons à
trouver une solution à nos problèmes pour peu que nous
fassions, nous, l'effort du côté du ministère, mais que les
orthopédistes aussi se mettent à la tâche pour faire des
choix, des choix qui ne sont pas toujours faciles pour nous, comme
ministère, mais qui ne seront pas faciles non plus au niveau des
orthopédistes quant au choix qui s'offrira à eux,
éventuellement.
Dans ce sens-là, nous allons continuer de travailler avec eux
pour tenter de donner le meilleur service possible à l'ensemble des
clientèles à travers le Québec, y compris aux personnes
âgées, parce que ce n'est pas un problème spécifique
aux personnes âgées, de manière plus évidente et
plus importante au niveau des personnes âgées, mais on va examiner
le dossier à son mérite.
Le Président: En question complémentaire.
Mme Juneau: est-ce que le ministre est prêt à
s'engager à rencontrer les orthopédistes afin qu'ils l'informent
des conséquences néfastes que peuvent entraîner ces
restrictions au niveau des prothèses du genou ou de la hanche?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, j'ai
promis au docteur qui m'a contacté, parce qu'il y en a un qui m'a
contacté au téléphone, de le rencontrer et de discuter
avec lui dès que j'aurai un peu de temps disponible. Vous comprendrez
que les occupations qui m'amènent en Chambre de ce temps-là, avec
plusieurs dossiers, sont assez accaparentes, merci. Mais dès que j'aurai
pu, à la fin de la session, libérer un peu de temps, c'est avec
plaisir que je le rencontrerai, et particulièrement lui, venant des
régions, de la même manière que j'ai pu contacter dans mon
voyage en Abitibi, à Amos en particulier, des médecins
orthopédistes qui ont évoqué certaines
problématiques à ce niveau-là. De la même
manière, le problème de Québec, le problème d'Amos
et le problème d'autres régions du Québec font en sorte
que plus on en desservira dans les régions du Québec, moins des
hôpitaux comme l'Hôtel-Dieu de Québec ou de Montréal
seront engorgés, et ça évitera aux gens de se
déplacer un peu partout à travers le Québec aussi.
Ça aussi, c'est un autre aspect.
Le Président: Question complémentaire.
Mme Juneau: Est-ce qu'on peut espérer que les quotas qui
sont imposés au moment où on se parle puissent prendre fin le
plus tôt possible?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Ce n'est pas une question de
quotas, M. le Président, c'est une question d'argent. Non, ce n'est pas
une question de quotas, c'est une question d'argent. Vous, Mme la
députée de Johnson, est-ce que vous dépensez plus que vous
n'en gagnez? Non! C'est une question d'administration pure et simple. Est-ce
qu'on peut demander à l'État de dépenser plus qu'il ne le
fait maintenant, alors qu'on a même un déficit de plus ou moins 4
000 000 000 $? Est-ce qu'on peut demander aux citoyens du Québec de
payer plus que les 12 700 000 000 $ actuellement? On a dit que nous avions
atteint nos capacités de payer.
En termes clairs, il y a aussi des choix à faire pour les
dispensateurs de services, et ils devront être de la partie pour faire
ces choix de manière collective, et aussi sur le plan individuel. Des
quotas, je ne suis pas intéressé à en avoir. Tout ce
à quoi je suis intéressé, c'est qu'on puisse respecter la
capacité des citoyens du Québec de payer. Dans ce sens-là,
nous allons examiner la situation pour voir si, comme on l'a fait en
cardiologie, comme on l'a fait en hémodynamique, comme on l'a fait dans
d'autres domaines, on peut effectivement tenir compte de certaines
particularités en termes de services à dispenser à la
population avec la collaboration de ceux qui dispensent ces services-là,
et très certainement pas de manière isolée au
ministère.
Le Président: Une autre question
complémentaire.
Mme Juneau: Une dernière complémentaire, M. le
Président. Est-ce que les choix qui sont faits présentement ne
pourraient pas être d'autres choix que ceux qui sont encore
imposés aux personnes âgées?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je
connais la générosité de Mme la députée de
Johnson, elle est proverbiale. Dans ce sens-là, je lui dirai
qu'évidemment je suis ouvert à toutes les suggestions qui peuvent
nous permettre de faire des choix encore plus judicieux que nous ne le faisons
maintenant, à l'intérieur des paramètres financiers que
nous avons et à l'intérieur de notre capacité de payer. Si
vous avez des bonnes suggestions quant aux choix à faire à
l'intérieur de ces enveloppes, je suis très très
ouvert.
Mme Juneau: Merci.
Le Président: En question principale, M. le
député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
Implantation du système Clawson de triage des
appels à Urgences-santé
M. Trudel: Le ministre de la Santé et des Services sociaux
annonçait hier de nouvelles directives pour la Corporation
d'urgences-santé
de Montréal, pour faire en sorte de remettre sur les rails, si
cela peut se faire, tout le système préhospitalier de transport
ambulancier dans la région de Montréal et de la ville de Laval.
Le ministre a de plus annoncé qu'il donnait le feu vert à
l'implantation d'un nouveau système de triage des appels dans la
région de Montréal, le système Clawson. Par ailleurs, les
infirmières qui jusqu'à maintenant effectuent ce travail de
triage des appels urgents à la Corporation d'urgences-santé
menacent de débrayer à tout moment et de ne plus faire le travail
de réception et de triage des appels. (10 h 50)
Ma question au ministre de la Santé et des Services sociaux:
Finalement, peut-il nous dire quand va être implanté le nouveau
système Clawson de triage des appels urgents pour les ressources
ambulancières dans la région de Montréal, et peut-il nous
dire s'il a pris toutes les dispositions nécessaires pour faire en sorte
qu'il n'y ait pas de perturbation du service, pour répondre aux appels
urgents pour des ressources ambulancières dans la région de
Montréal et de Laval?
Le Président: M. le ministre de la Santé et des
Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président,
comme vous le savez, le dur dossier d'Urgences-santé est un dossier qui
a été très largement discuté devant cette
Assemblée et sur la place publique depuis 1989 et même 1988, et
même avant, mais de manière plus importante et plus intensive
depuis ce temps-là par des commissions parlementaires, par des
sous-commissions de l'Assemblée nationale. Et j'ai entendu, et nous
avons entendu comme Assemblée à peu près tous les
intervenants, que ce soient des techniciens, des répartiteurs, des
infirmières, les dirigeants d'Urgences-santé. M. le
Président, il est clair que nous avons pris un certain nombre de
décisions qui ont été déposées hier, qui
sont donc publiques, et qui sont un ajustement aux directives
expédiées au mois de juin 1991.
M. le Président, il est clair que ça implique une
dissociation d'Info-Santé, et ce sont en particulier des
infirmières. Il est clair que nous avons dit oui à Clawson et,
dès que nous aurons signé le contrat, je me suis engagé
à déposer le contrat Clawson, je vais le faire. Dans ce
sens-là, M. le Président, il reste quelques petites
négociations à terminer sur le plan des
échéanciers, mais il est évident que, dans la directive
que vous avez entre les mains, nous avons dit: Dissociation d'Info-Santé
d'ici à deux mois, donc deux mois, maximum, et avec toutes les
conséquences que ça peut supposer.
Ce que je peux souhaiter, et c'est très connu, c'est qu'il n'y
ait pas de perturbation du service. Nous avons effectivement pris un certain
nombre de mesures pour tenter d'éviter une perturbation du service.
Mais, M. le Président, si des gens à l'intérieur
décident de perturber le service, il sera toujours loisible à eux
de le faire, mais, évidemment, ils se mettront devant des faits: que la
loi 160 est toujours là, qu'elle s'appliquera avec la
sévérité qu'on lui connaît aujourd'hui, avec toutes
les conséquences que ça impose à ceux qui iraient à
l'encontre de ces directives.
Le Président: En question complémentaire.
M. Trudel: Puisque le ministre invoque lui-même la
possibilité de déposer ici le contrat avec Medical Priority
Consultants, peut-il, finalement, indiquer à l'Assemblée
nationale quel est le prix d'acquisition de ce système de triage des
appels? Et peut-il nous garantir qu'avec ce système les ressources
ambulancières dans la région de Montréal seront
suffisantes pour répondre aux appels, avec ce nouveau système de
triage des appels, et s'il n'y aura pas de nouvelles dépenses qui seront
engagées, parce que le système va générer beaucoup
plus de demandes, de réponses et de ressources dans la région de
Montréal?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président,
c'est un petit peu étonnant, à l'occasion, d'avoir à
entendre à nouveau ces questions alors qu'on a passé une
multitude de temps, et pas uniquement le ministre, des spécialistes dans
le domaine qui sont venus expliquer un certain nombre de choses, des
spécialistes comme le Dr Frechette qui est un spécialiste reconnu
et qui préside le comité de préhospitaliers à
travers le Québec...
Quand on dit: Peut-il nous assurer qu'il y aura suffisamment - on va le
dire en termes clairs - d'ambulances et de techniciens de disponibles pour
répondre au nouveau système Clawson? M. le Président, il y
a une chose qui est claire et évidente et que tout le monde a pu
constater. Lorsqu'on compare le système que nous avons à
Montréal avec le nombre d'ambulances, à peu près tout le
monde en arrive à la conclusion qu'il y a trop d'ambulances pour ce que
nous avons besoin. Et de venir poser une question, aujourd'hui: Y aura-t-il
suffisamment d'ambulances sur le territoire de la Communauté urbaine et
de Laval pour desservir les demandes? M. le Président, c'est oui, pour
peu que chacune des personnes, que ce soit à la réception des
appels, que ce soit au triage, que ce soit à la répartition,
fasse son travail de la manière dont elle doit le faire. Et, dans la
mesure, M. le Président, où on serait dans une situation
où il y aurait une ambulance - parce que c'est ça, la crainte -
qu'il y ait une ambulance qui soit envoyée à un endroit où
il n'y en a pas besoin, M. le Président, je préfère qu'il
y ait une ambulance qui revienne avec personne qu'une ambulance qui ne se rende
pas à temps. C'est ça,
le principe de Clawson. Et, à ce n.oment-là, on sera en
sécurité et on a les ambulances qu'il faut pour être
capable de répondre à la demande.
Le Président: En question complémentaire.
M. Trudel: Sur la première partie de la question, le
ministre peut-il informer l'Assemblée nationale du coût, du prix
d'acquisition de ce nouveau système de triage des appels qui risque,
comme il le dit lui-même, de nous amener à un appel, une
ressource, une ambulance, malgré le type de ressources que nous avons
actuellement et le risque de manque de ressources que nous avons dans la
région de Montréal?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président,
qu'est-ce que le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue
veut de plus, lorsque je lui dis que je vais déposer le contrat devant
l'Assemblée nationale? Ça fait trois fois que je lui dis, M. le
Président: Devant l'Assemblée nationale aussitôt qu'il sera
signé. En voulez-vous plus? Il faut au moins qu'il se signe, avant de le
déposer - vous devez comprendre ça - puis convenir d'un prix!
Ça doit être compréhensible même par un
député de l'Opposition!
Deuxièmement, lorsqu'il insiste, et même c'est presque de
l'acharnement à souhaiter que le système ne fonctionne pas, c'est
un peu ça que sous-tend la question... C'est un souhait caché que
le système ne fonctionne pas, M. le Président, alors que tout le
monde a dit qu'il fallait remettre Urgences-santé sur les rails. C'est
ce que nous avons fait et que nous allons continuer de faire, malgré le
fait que vous continuiez à supporter et à prétendre des
choses qui sont fausses et que vous souhaitiez secrètement que des
problèmes arrivent alors que, nous, on souhaite régler des
problèmes.
Des voix: Bravo!
Le Président: Pour une autre question
complémentaire.
M. Trudel: Au lieu de prêter des motifs à des
membres de l'Assemblée nationale sur les intentions de ses
parlementaires, pourquoi le ministre tient-il tellement à cacher le
nombre de millions de dollars qu'il va investir dans un nouveau système
de triage des appels à Montréal sans en connaître
l'efficacité, pour une région comme Montréal, et compte
tenu des ressources qui sont déjà en place? Qu'est-ce qu'il a
à cacher en ne révélant pas le prix d'acquisition de ce
système-là? Pourquoi ne veut-il pas le mentionner à
l'Assemblée nationale?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): Vous voyez, M. le
Président, toute la quintessence de la logique du député
dans cette question. M. le Président, il se lève et dit: Le
ministre ne peut pas imputer des motifs au député qui se
lève. En se levant, il dit: Qu'est-ce que le ministre a à cacher
en ne voulant pas rendre public... alors que ça fait trois fois que je
lui dis que je vais déposer le contrat avec le prix. Voyons donc! Soyez
un peu plus sérieux.! Ça ne cache strictement rien, autrement que
de régler des problèmes qui sont en voie d'être
réglés à Urgences-santé et que vous ne souhaitez
pas, d'ailleurs, qu'ils soient réglés. Ils vont l'être, les
problèmes, malgré vous!
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le député de
D'Arcy-McGee.
Admission à l'école anglaise des enfants
d'immigrants venant de pays anglophones
M. Libman: Merci, M. le Président. M. le Président,
sur les questions linguistiques, trop souvent au Québec des personnages
se prennent pour le baromètre de l'opinion publique, prétendant,
à tort, qu'ils parlent au nom de la majorité des
Québécois. Le référendum de Rosemère
était l'un de ces exemples, de même que plusieurs sondages qui ont
toujours démontré qu'une majorité de
Québécois sont prêts à accepter une plus grande
accessibilité aux écoles anglaises pour les immigrants de langue
anglaise.
Le ministre de l'Éducation du Québec a
démontré beaucoup de courage et de tolérance,
récemment, dans sa volonté de s'attaquer au déclin
démographique dramatique du secteur des écoles anglophones, un
déclin qui est même reconnu dans le rapport du groupe de travail
du Parti québécois sur la communauté anglophone, qui sera
rendu public bientôt.
Ma question s'adresse au ministre responsable de l'application de la
Charte de la langue française. By delaying the implementation of
recommendation number one of the Chambers Report, does he not recognize that
not only is he taking away thousands more students every year from an already
diminishing school system, but by putting everything off until next year, he is
creating a linguistic time bomb instead of clarifying to the majority of
Quebeckers that the implementation of the first recommendation of the Chambers
Report has a minimal, has a négligeable impact on the majority of
Quebeckers, on the French school system in Quebec? Should that not be his
preoccupation, telling Quebeckers that the first recommendation of Chambers has
a négligeable impact on the French school system?
Le Président: M. le ministre responsable de
l'application de la Charte de la langue française.
M. Ryan: Tout d'abord, le député de D'Arcy-McGee
m'impute une responsabilité qui ne m'appartient pas. Ainsi que je l'ai
dit à maintes reprises, il incombera au ministre de l'Éducation,
qui a la responsabilité du chapitre 8 de la Charte de la langue
française, de présenter en temps utile les recommandations
appropriées au Conseil exécutif et éventuellement à
l'Assemblée nationale sur la question soulevée par le
député de D'Arcy-McGee. Et le ministre de l'Éducation, en
bon homme d'équipe, consulte ses collègues qui ont des
intérêts ou des implications dans la question dont traite le
député de D'Arcy-McGee. Nous en traitons ensemble. Je pense que
le député de D'Arcy-McGee conviendra que, dans une question aussi
importante, le gouvernement peut légitimement se soucier des
répercussions de cette question particulière sur d'autres
questions également actuelles qui se posent dans le secteur
linguistique. (11 heures)
Je mentionnerai, à titre d'exemples, la question du statut de
villes comme Rosemère, la question de l'affichage, aussi de nature
commerciale. Je pense que nous regardons ces questions dans une perspective
d'ensemble pour voir les liens qu'elles ont entre elles, les implications
qu'elles pourraient avoir sur l'ensemble de l'équilibre linguistique, et
il me semble que cette façon d'agir est plus responsable que celle qui
consisterait à courir après votre prochain congrès pour
essayer de vous faire plaisir à tout prix.
Des voix: Ha,ha, ha!
Le Président: En question complémentaire.
M. Libman: II n'a pas répondu à ma question, M. le
Président. Does he not admit that by delaying this decision, he is
taking thousands of potential students out of an already dwindling school
system? And should he not inform the public that this recommendation will have
the most négligeable of impacts on the French school system? One percent
is what the Chambers Report says. Does he at least confirm this statistic that
it will only affect 1 % of the French school system?
Le Président: Alors, M. le ministre.
M. Ryan: I must repeat, in English this time, that this matter is
not my responsibility, but that of the Minister of Education.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Libman: Alors, est-ce que le ministre de l'Éducation
confirme le portrait statistique dans le rapport chambers que, si on accepte la
première recommandation de ce rapport, l'impact sur le réseau
scolaire francophone sera seulement de 1 %, 1 %, et que c'est ça qui
devrait être leur responsabilité, d'informer le public que cet
impact sera minime sur le secteur francophone?
Le Président: Alors, M. le ministre de
l'Éducation.
M. Pagé: M. le Président, j'ai indiqué
très clairement et je me suis référé à la
diminution des inscriptions dans le réseau d'enseignement anglophone du
Québec, passant de quelque 230 000 à 109 000 en moins de 15 ans.
J'ai fait part de l'intérêt du ministère sur cette
question, guidé et animé par une volonté de maintenir la
qualité des services éducatifs dans ce réseau, qui est
important et qui se réfère à un des peuples fondateurs du
Québec.
Ceci étant dit, M. le Président, nous étudions
actuellement différentes hypothèses. Chacune des
hypothèses que nous étudions, non seulement elles sont
analysées en fonction de leur impact, mais j'ai demandé à
mon équipe de sous-ministres et de fonctionnaires de me donner le profil
de ce que ça aurait été d'appliquer une telle mesure
pendant cinq ans, aujourd'hui. Alors, l'ensemble de ces questions va être
soumis à l'attention de mes collègues, au premier chef,
évidemment, le ministre responsable de l'application de la Charte de la
langue française, et ensuite les autres collègues indirectement
concernés. Ces éléments-là sont donc pris en
compte. Ça va être sérieusement étudié,
analysé, et nous déciderons en conséquence, en temps
opportun, tel que je l'ai indiqué.
Le Président: Alors, dernière question
additionnelle.
M. Libman: Je demande au ministre de l'Éducation s'il
confirme ce qui était marqué sur la page 5 du rapport Chambers,
que la première recommandation va diminuer le réseau scolaire
francophone de 1 %; seulement 1 %, c'est un impact négligeable. Est-ce
qu'il confirme cette donnée qui est à la cinquième page du
rapport Chambers?
Le Président: M. le ministre.
M. Pagé: M. le Président, je n'ai aucun motif de
croire, de retenir ou de conclure que les statistiques prévues dans le
rapport Chambers sont erronées. C'est une statistique parmi d'autres,
qui sera prise en compte dans l'analyse du dossier.
M. Chevrette: M. le Président, est-ce que le ministre
responsable...
Le Président: ...question additionnelle, M. le leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: ...de l'application de la Charte de la langue
française peut assurer cette Chambre qu'une politique linguistique n'est
pas basée sur des pourcentages de participation scolaire, mais bien sur
des volontés politiques et des buts bien précis?
Le Président: M. le ministre responsable de l'application
de la Charte de la langue française.
M. Ryan: C'est évident qu'une politique linguistique doit
tenir compte d'un grand nombre de facteurs. Il y a certains principes de base,
il y a des objectifs politiques, il y a également des données
socio-économiques et culturelles dont on ne saurait faire
abstraction.
Une voix: Additionnelle.
Le Président: Une question additionnelle, M. le
député d'Abitibi-Ouest, leader adjoint de l'Opposition.
M. Gendron: Oui. Est-ce que la ministre de l'Immigration peut
confirmer en cette Chambre qu'effectivement, elle aussi, dans sa
responsabilité ministérielle, elle connaissait exactement le
portrait qualifié de statistique par le député de
D'Arcy-McGee et, en conséquence, la ministre maintient-elle la position
qu'elle a défendue hier, à savoir qu'elle ne peut pas livrer deux
messages discordants à l'immigration à l'étranger?
Le Président: Mme la ministre des Communautés
culturelles et de l'Immigration.
Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je ne peux pas
infirmer ou confirmer les statistiques du rapport Chambers. Cependant, ce que
je peux dire, c'est qu'il y a une volonté de la part du gouvernement
libéral, de même que du ministre de l'Éducation et de la
personne qui vous parle, de trouver des solutions pour que la communauté
anglophone puisse continuer à s'épanouir, qu'on puisse avoir une
communauté forte, une communauté dynamique qui puisse aider
à bâtir un Québec meilleur. La communauté anglophone
est une richesse, au Québec, tout comme les autres communautés
culturelles au Québec.
Cependant, ce qui est important maintenant, c'est de se poser la
question: Quels sont les meilleurs moyens pour que la communauté
anglophone puisse maintenir son poids démographique au sein de la
société québécoise? Est-ce que c'est en envoyant
les enfants à l'école anglaise? J'ai émis des
réserves que je maintiens aujourd'hui. Est-ce que c'est en retenant le
plus possible nos jeunes de la communauté anglophone au Québec?
Alors, tout près d'une vingtaine de recommandations ont
été faites dans le rapport Chambers au ministre de
l'Éducation. Ce dernier, comme il l'a bien mentionné,
évaluera chacune de ces recommandations, soumettra au Conseil des
ministres des recommandations, et nous nous baserons sur ces recommandations
pour prendre les décisions finales.
Le Président: C'est la fin de la période des
questions.
Il n'y a pas de vote reporté.
Motions sans préavis.
M. le leader adjoint du gouvernement. Pour une motion sans
préavis, M. le leader adjoint du gouvernement.
Motions sans préavis
Motion proposant la nomination
de commissaires suppléants pour
entendre les appels interjetés devant
la Commission de la fonction publique
M. Johnson: M. le Président, permettez-moi de
présenter la motion suivante au nom du premier ministre et
conformément à l'article 122 de la Loi sur la fonction publique:
Qu'il soit constitué une liste de commissaires suppléants pour
entendre les appels interjetés devant la Commission de la fonction
publique, en vertu de l'article 33 de cette loi, pour une période d'une
année, à compter des présentes et que,
consé-quemment, soit nommé Me Marc Boisvert...
Le Président: M. le leader adjoint, si vous voulez
poursuivre.
M. Johnson: M. le Président, excusez-moi, en vertu d'un
précédent qui a déjà été fixé
ici, j'ai cru faire quatre motions, une pour chacune des personnes, mais je
crois comprendre que des deux côtés de la Chambre il y aurait
intérêt à ce que nous nous prononcions sur la liste qui
comporterait les suivants, donc que soient nommés: Mes Marc Boisvert,
François Fortier, André Ladouceur et Jean-Guy Ménard.
Le Président: Je vous remercie. Je vous informe que pour
être adoptée cette motion doit, en vertu de l'article 106 de la
Loi sur la fonction publique, être approuvée par au moins les deux
tiers des membres de l'Assemblée. Elle sera donc suivie d'un vote par
appel nominal. Donc, qu'on appelle les députés.
Mmes, MM. les députés, veuillez prendre place, s'il vous
plaît! Veuillez prendre place, s'il vous plaît! Je vais mettre aux
voix la motion présentée par le ministre
délégué à la Fonction publique et président
du Conseil du trésor au nom du premier ministre.
(Suspension de la séance à 11 h 5)
(Reprise à 11 h 10)
Le Président: Veuillez prendre place, s'il vous
plaît!
Mise aux voix
Je vais mettre aux voix la motion présentée par le
ministre délégué à la Fonction publique et
président du Conseil du trésor, au nom du premier ministre,
motion qui se lit comme suit: «Que, conformément à
l'article 122 de la Loi sur la fonction publique, il soit constitué une
liste de commissaires suppléants pour entendre les appels
interjetés devant la Commission de la fonction publique en vertu de
l'article 33 de cette loi, pour une période d'une année à
compter des présentes, et que cette liste comprenne les noms suivants:
Me Marc Boisvert, Me François Fortier, Me André Ladouceur et Me
Jean-Guy Ménard.»
Alors, que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent
bien se lever, s'il vous plaît.
Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Port neuf), Mme
Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M.
Levesque (Bonaven-ture), M. Ryan (Argenteuil), M. Côté
(Charles-bourg), M. Bourbeau (Laporte), M. Dutil (Beauce-Sud), M.
Côté (Rivière-du-Loup), M. Vallières (Richmond), M.
Vallerand (Crémazie), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Tremblay
(Outremont), M. Rémillard (Jean-Talon), M. Rivard (Rosemont), Mme Robic
(Bourassa), M. Middlemiss (Pontiac), Mme Frulla-Hébert
(Marguerite-Bourgeoys), M. Johnson (Vaudreuil), M. Cusano (Viau), M. Pi-cotte
(Maskinongé), Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), Mme
Bleau (Groulx), M. Houde (Bert hier), M. Maciocia (Viger), M. Maltais
(Saguenay), M. Savoie (Abitibi-Est), Mme Trépa-nier (Dorion), M. Cannon
(La Peltrie), M. Philibert (T rois-Rivières), M. Chagnon (Saint-Louis),
M. Hamel (Sherbrooke), M. Doyon (Louis-Hébert), M. St-Roch (Drummond),
Mme Pelchat (Vachon), M. Paradis (Matapédia), M. Marcil
(Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. Poulin (Chauveau), M.
Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M.
Williams (Nel-ligan), M. Dauphin (Marquette), M. Kehoe (Cha-pleau), M. Fradet
(Vimont), M. Lemieux (Vanier), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Charbonneau
(Saint-Jean), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger
(Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Chenail
(Beauharnois-Huntingdon), M. Gautrin (Verdun), M. Forget (Prévost), M.
Gobé (LaFontaine), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron
(Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Au-det
(Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger
(Mégantic-Compton), M. Bradet (Charle-voix), Mme Cardinal
(Châteauguay), M. Després (Limoilou), Mme Loiselle (Saint-Henri),
M. Lafre- nière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan
(Papineau).
M. Chevrette (Joliette), M. Perron (Duples-sis), Mme Blackburn
(Chicoutimi), Mme Marois (Taillon), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril
(Ar-thabaska), Mme Juneau (Johnson), M. Dufour (Jonquière), M. Gendron
(Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme
Vermette (Marie-Victorin), M. Paré (Shefford), M. Morin (Dubuc), M.
Filion (Montmorency), Mme Caron (Terrebonne), M. Trudel
(Rouyn-Noran-da-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), M.
Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière),
M. Bélanger (Anjou).
M. Libman (D'Arcy-McGee).
Le Président: Donc, que les députés qui sont
contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît. Y a-t-il
des abstentions?
Le Secrétaire: pour: 94 contre: 0 abstentions: 0
Le Président: En conséquence, la motion est
adoptée.
Toujours au niveau des motions sans préavis, maintenant. Je vais
demander aux collègues qui doivent quitter de le faire le plus
rapidement possible.
Mmes, MM. les députés, s'il vous plaît, le plus
rapidement possible.
A l'ordre, s'il vous plaît! Je vais reconnaître, au niveau
des motions sans préavis, maintenant, M. le ministre
délégué à la Réforme électorale. M.
le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je
ne sais pas si vous interpellez le ministre de la Santé et des Services
sociaux, responsable des personnes handicapées, ou si vous interpellez
le ministre à la Réforme électorale.
Le Président: Le ministre délégué
à la Réforme électorale.
Motion proposant de confier au Directeur
général des élections le mandat
de préparer
un rapport de faisabilité de
l'informatisation
des listes électorales provinciales,
municipales et scolaires
M. Côté (Charlesbourg): Excusez-moi, M. le
Président, je ne vous avais pas compris. Il me fait plaisir de
déposer la motion suivante que vous me permettrez de lire, y compris les
attendus, compte tenu de l'implication de cette motion. «Attendu
qu'à plusieurs reprises, dans le passé, les membres de
l'Assemblée nationale ont manifesté le désir de
rationaliser les opérations et les coûts relatifs à la
préparation des listes électorales et leur utilisation pour la
tenue des
élections provinciales, municipales et scolaires; «Attendu
que le Directeur général des élections, les
municipalités et les commissions scolaires ont des besoins
spécifiques en regard des listes électorales...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre, mes
chers collègues, vous le savez, nous avons toujours besoin de votre
collaboration. M. le ministre, si vous voulez poursuivre.
M. Côté (Charlesbourg): Au cas où ça
aurait échappé, M. le Président, je vais reprendre le
deuxième attendu. «Attendu que le Directeur général
des élections, les municipalités et les commissions scolaires ont
des besoins spécifiques en regard des listes électorales et qu'il
y a lieu de procéder à une étude de faisabilité en
termes de qualité et de coût de l'informatisation des listes
électorales provinciales, municipales et scolaires; «Attendu que,
suite à la demande du ministre délégué à la
Réforme électorale, il y a lieu de confier ce mandat au Directeur
général des élections; «Attendu qu'en vertu des
dispositions de l'article 485 de la Loi électorale l'Assemblée
nationale peut confier tout mandat au Directeur général des
élections; «Attendu que le Directeur général des
élections doit, pour pouvoir remplir un tel mandat, être
habilité à consulter les organismes municipaux et scolaires;
«Attendu qu'il y a lieu d'assurer au Directeur général des
élections la collaboration des autorités gouvernementales et des
intervenants concernés aux différents paliers pour recueillir les
données et renseignements requis pour la réalisation de ce
mandat; «Attendu que le Directeur général des
élections devra conclure toute entente qu'il jugera utile avec les
organismes concernés aux fins de sa consultation;» «II est
ordonné, sur recommandation du ministre délégué
à la Réforme électorale: «Que soit confié au
Directeur général des élections, conformément aux
dispositions de l'article 485 de la Loi électorale, le mandat de
procéder à une analyse de faisabilité la plus
étendue possible, en termes de qualité et de coût de
l'informatisation des listes électorales provinciales, municipales et
scolaires; «Qu'aux fins de la réalisation de ce mandat le
Directeur général des élections soit habilité:
à consulter les organismes municipaux et scolaires visés;
à requérir l'aide, l'assistance et la collaboration de toute
personne ou de tout ministère ou service gouvernemental; à
recueillir toutes les données pertinentes et jugées
indispensables à l'étude; à conclure toute entente
nécessaire avec les organismes. «Que le préambule fasse
partie de la présente résolution; «Qu'au plus tard, le 31
mars 1993, le Directeur général des élections remette au
président de l'Assemblée nationale un rapport sur la
faisabilité de l'informatisation des listes électorales
provinciales, municipales et scolaires, comprenant des données relatives
aux coûts et aux bénéfices; «Que le président
de l'Assemblée nationale dépose ce rapport devant
l'Assemblée nationale dans les 15 jours de sa réception si elle
siège ou, si elle ne siège pas, dans les 15 jours de l'ouverture
de la session suivante ou de la reprise de ses travaux.»
Je joins à cela, M. le Président, le devis, le document de
travail qui accompagne cette proposition.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre,
de votre intervention. Sur cette même motion...
Une voix: Consentement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement.
M. Marc-Yvan Côté
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président,
très brièvement...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Votre droit de
réplique.
M. Côté (Charlesbourg): ...après avoir
travaillé en collaboration avec tous les parlementaires de cette
Assemblée, avec les partis politiques pour faire en sorte qu'on puisse
moderniser notre Loi électorale, notre Loi sur le financement des partis
politiques, notre loi référendaire, il est apparu
extrêmement important de faire en sorte que l'on puisse, au niveau de la
loi sur le recensement, mettre en marche un comité impartial
dirigé par le Directeur général des élections et
qui a pour but, comme vous l'avez entendu tantôt, de nous faire un
rapport très substantiel sur la faisabilité et les coûts
que pourrait encourir la réalisation d'une liste informatisée
impliquant à la fois le scolaire, le municipal et le provincial et la
rendant disponible, au besoin, pour des élections
fédérales.
Il y a très certainement des coûts qui sont reliés
à l'implantation d'une telle liste, mais il y a aussi des
économies assez appréciables puisque, comme vous le savez, sur la
plan scolaire, on fait des listes, sur le plan municipal, on fait des listes,
sur le plan provincial, on fait des listes, toujours avec des personnes
différentes. Ce mandat demande au Directeur général de
faire en sorte qu'on puisse avoir une liste unique et, par le fait même,
suffisamment utilisable à tous les niveaux, donc à ces trois
niveaux.
Ce que nous souhaitons, c'est obtenir pour le 31 mars 1993 ces
résultats, de telle sorte
qu'on puisse, par la suite, saisir l'Assemblée des modifications
nécessaires, dans la mesure où c'est abordable comme coût,
et donc procéder et finaliser l'ensemble de ce travail qui est
amorcé depuis déjà quelques années. Je remercie
cette Chambre d'être unanime devant cette proposition.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre,
de votre intervention, qui n'était pas votre droit de réplique,
je m'en excuse. M. le leader de l'Opposition officielle et député
de Joliette.
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Nous... (11 h
20)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader, s'il vous
plaît! M. le sergent d'armes, est-ce qu'on pourrait avoir un peu d'ordre
en arrière, s'il vous plaît? M. le député, si vous
voulez poursuivre.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Merci surtout de
votre grande compréhension vis-à-vis de mon droit de parole.
Je voudrais, M. le Président, me joindre à cette motion et
dire que nous la partageons. Nous serons d'accord, bien sûr, d'autant
plus que je me souviens qu'en 1982 le Parti québécois avait fait
une motion du genre ou une suggestion du genre, et je ne voudrais pas faire
subir au ministre délégué à la Réforme
électorale ce qu'il nous avait fait subir il y a environ 10 ou 12 ans de
cela.
Une voix: C'est généreux, ça.
M. Chevrette: Au contraire, je pense que les idées ont
mûri, elles ont évolué et, de plus en plus, on se rend
compte que les opérations pompiers à la veille d'une campagne
électorale, ça pourrait être très bien
corrigé par une liste permanente, d'autant plus que de plus en plus de
corps municipaux et scolaires utilisent des listes. On fait des
référendums en double, en triple, on dépense de gros sous,
et je pense qu'on pourra sans doute, je l'espère - je le souhaite, en
tout cas - conclure une économie d'échelle sur le plan
monétaire et faire en sorte que ces listes-là puissent servir aux
différents corps constitués qui ont des élections et qui
pourront véritablement bénéficier de ce service permanent,
M. le Président, pour permettre enfin d'avoir une liste qui ne demande
pas d'être remise en cause de fond en comble, s'il y a un
référendum ou une élection.
Donc, M. le Président, je me joins au ministre et je vous dis que
cette motion, quant à nous, est adoptée à
l'unanimité.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, en vertu de votre
droit de réplique, M. le ministre de la réforme
électorale.
M. Marc-Yvan Côté
(réplique)
M. Côté (Charlesbourg): Oui. Juste une petite
correction, M. le Président. De mon point de vue, ce n'était pas
en 1982, c'est davantage en 1978 ou 1979, puisque le porte-parole de
l'Opposition, à l'époque, était l'ex-président de
la Chambre, M. Jean-Noël Lavoie, et il a quitté en 1981. Il me
paraissait important de remettre ça... Ça fait donc encore plus
de temps.
Évidemment, vous aurez compris très facilement que, par
les propos du député de Joliette, il voulait signifier au peuple
tout entier que le Parti libéral s'était ravisé, avait
évolué. Évidemment, je pense qu'un parti qui
n'évolue pas est un parti condamné à rester dans
l'Opposition. C'est ce que nous avons fait, dans ce cas-là, et je suis
très heureux de souscrire à cette étude, qui nous
permettra de prendre une décision finale, et des économies.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, est-ce que cette
motion est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté à
l'unanimité.
Alors, nous en sommes encore aux motions sans préavis. M. le
ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Côté (Charlesbourg): Et responsable des personnes
handicapées, M. le Président, puisque c'est à ce
titre...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Et responsable des
personnes handicapées.
M. Côté (Charlesbourg): ...que je vous propose la
motion suivante:
Souligner la Semaine nationale pour
l'intégration des personnes handicapées
«Qu'au cours de cette Semaine nationale pour l'intégration
des personnes handicapées, qui se déroule cette année du
1er au 7 juin, l'Assemblée souligne la volonté et la
capacité de ces personnes de contribuer au bien-être de leur
communauté et qu'elle réitère la nécessité,
pour tous les acteurs de la société de faire en sorte que, dans
le champ où elles exercent leurs responsabilités, les personnes
handicapées puissent s'intégrer dans le respect de leurs
différences.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, est-ce qu'il y a
consentement?
Des voix: II y a consentement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement pour
débattre cette motion. M. le ministre, si vous voulez poursuivre.
M. Marc-Yvan Côté
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. La carte du monde se transforme sous nos yeux chaque jour.
Chaque jour, nous avons des reportages, concernant la cause environnementale,
qui nous parviennent de Rio - tantôt de l'espace... Maintenant, c'est
devenu une habitude presque chaque mois. Mais personne n'aurait pu
prévoir, il y a 10 ans, l'ensemble des mutations auxquelles nous avons
pu assister. De même, la réalité des personnes
handicapées, leur degré d'intégration ainsi que les moyens
mis à leur disposition pour favoriser cette intégration ont connu
des transformations en profondeur. Cette année encore, j'aimerais
m'associer aux organismes de promotion pour souligner la Semaine nationale pour
l'intégration des personnes handicapées, qui se déroule du
1er au 7 juin 1992.
Cet événement est une occasion privilégiée
pour rappeler aux membres de cette Assemblée ainsi qu'à tous nos
concitoyens que l'intégration sociale des personnes handicapées
est un objectif qui nous concerne tous, et ce, tout au long de l'année.
La Confédération des organismes provinciaux des personnes
handicapées, COPHAN, a choisi le thème «L'accès,
c'est un droit» pour inciter les gens à poser des gestes concrets
pour permettre aux personnes handicapées de participer à tous les
aspects de la vie québécoise. Au cours des prochains jours, les
organismes promoteurs de la Semaine veulent faire comprendre à toute la
population que la création d'une société accessible aux
personnes handicapées relève de la responsabilité de
tous.
L'intégration des personnes handicapées n'est pas le fruit
du hasard. Elle est, en tout premier lieu, le résultat des efforts et de
la volonté de ces personnes et de leurs proches, qui sont les premiers
concernés. Elle est aussi le résultat de la contribution d'une
foule d'autres citoyens, organismes et institutions. Sans eux, ce
véritable changement social n'aurait pas été rendu
possible. Pour sa cinquième édition, cet événement
coïncide avec la décennie des personnes handicapées,
proclamée par l'Organisation des Nations unies. Décennie fertile
en changements, que nous avons d'ailleurs soulignée hier matin, en
compagnie des membres de cette Assemblée, dans ce qui est
communément appelé le «salon rouge».
Qui aurait pu se douter, il y a 10 ans, au Québec, de l'essor que
prendrait la cause des personnes handicapées? Qui aurait pu
prévoir l'effet de certaines modifications au niveau de
l'accessibilité architecturale, de l'éducation, des transports,
des services de réadaptation, de l'hébergement institutionnel sur
la vie de tous les jours des personnes handicapées? Qui aurait pu
mesurer l'impact de ces changements, de plus en plus visibles parmi nous? C'est
à une véritable transformation des mentalités et des
programmes que nous avons assisté au cours des dernières
années. De quelques initiatives dispersées, nous sommes
passés à des efforts collectifs. Des lois ont été
adoptées, des orientations et des politiques ont été
définies, des attitudes ont commencé, M. le Président, et
ont beaucoup évolué. Nous trouvons de plus en plus normal de voir
vivre et évoluer les personnes handicapées parmi nous.
À leur tour, ces personnes prennent confiance en elles, se
sentant plus audacieuses et repoussent encore les limites qui paraissaient leur
être imposées. Bien sûr, il reste encore beaucoup
d'obstacles à franchir et de chemin à parcourir avant que les
personnes ayant des incapacités ne vivent plus de restrictions dans le
cours normal de leur vie. Divers organismes de promotion, dont ceux qui sont
responsables de la Semaine nationale pour l'intégration des personnes
handicapées, expriment des attentes encore nombreuses dans
différents secteurs dont, notamment, les transports, le logement,
l'emploi, l'éducation et les loisirs. Dans chacun de ces secteurs, ils
veulent inciter des décideurs à évaluer le niveau
d'accessibilité des services, à rendre le public plus conscient
des obstacles physiques et sociaux auxquels les personnes handicapées
sont confrontées et à prendre des mesures concrètes pour
minimiser ces obstacles.
Dans un contexte de contraintes budgétaires et de
réaménagements, il m'apparaît encore plus important de se
brancher sur les bonnes valeurs, de se rappeler que c'est l'amélioration
de la qualité de vie de ces personnes dont il est question. Il y a
toujours lieu de convier l'ensemble des acteurs et des réseaux de
services à mobiliser tout le savoir, l'énergie et le dynamisme de
leur organisation pour produire, au cours des années futures, une
nouvelle vague de changements différente, adaptée aux besoins des
années quatre-vingt-dix. J'ai confiance, M. le Président, en la
capacité de tous les partenaires d'y parvenir.
Merci bien!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, sur la même
motion, M. le député de Rouyn-Noran-da-Témiscamingue et
vice-président de la commission des institutions. M. le
député. (11 h 30)
M. Rémy Trudel
M. Trudel: Merci, M. le Président. C'est avec plaisir que
l'Opposition va joindre sa voix à celle du ministre de la Santé
et des Services sociaux et du gouvernement pour appuyer cette motion qui veut
souligner la volonté et la capacité des personnes
handicapées de contribuer au bien-être de leur communauté
et de réitérer la nécessité, pour tous les acteurs
de la société,
de faire en sorte que, dans leur champ respectif de
responsabilité, ces acteurs puissent contribuer à la
réussite de l'intégration des personnes handicapées,
malgré leurs différences perceptibles ou non perceptibles,
suivant les différents handicaps qui affectent les personnes
concernées. Il est important, M. le Président, que
l'Assemblée nationale manifeste, prenne note des progrès qui ont
été accomplis au cours des 10 dernières années dans
ce secteur... Et c'est avec fierté que, évidemment, je peux
rappeler ici, M. le Président, que c'est le gouvernement du Parti
québécois qui avait procédé à la
création de l'Office des personnes handicapées du Québec,
office dont le mandat de base est la défense et la promotion des droits
des personnes handicapées. Également, au cours de l'histoire, cet
organisme, l'OPHQ, a été chargé de dispenser un certain
nombre de programmes en vue de faciliter l'intégration des personnes
handicapées dans la société québécoise.
La maturité d'une société, M. le Président -
et le ministre y touchait lui-même il y a quelques secondes - se mesure
souvent à l'ampleur des moyens que nous mettons à la disposition
de la collectivité pour que les personnes vivant avec une
différence puissent s'intégrer harmonieusement à cette
société et aussi puissent, de façon efficace, contribuer
au bien-être des personnes et au développement de cette
société elle-même. Au cours des 10 dernières
années, le développement d'un réseau de centres de travail
adapté, par exemple, et d'une politique ou d'éléments de
maintien à domicile pour ces personnes, d'intégration au
marché du travail, de développement d'un service de transport
adapté pour ces personnes, aura permis, sans l'ombre d'un doute, M. le
Président, avec cette volonté, au moment de la création de
l'OPHQ au Québec, la volonté des Québécois et des
Québécoises, de compter avec ces personnes qui ont une
différence avec une autre majorité de personnes dans notre
société et de reconnaître qu'elles peuvent avoir une
contribution, ces personnes, inestimable dans notre société. Dans
ce sens-là, l'ampleur des mesures que nous pouvons prendre dans notre
société est une marque d'évolution de cette
société, de la grandeur de cette société et du fait
que nous plaçons au premier rang de nos priorités la santé
et le bien-être des personnes, peu importe qu'elles vivent avec une
différence, à un titre ou à un autre, au niveau de leur
vie personnelle.
M. le Président, il faut également reconnaître,
à l'occasion de cette motion et à la fin de cette décennie
sur l'intégration de la personne handicapée qui a
été promulguée par l'Organisation des Nations unies, le
travail assez exceptionnel accompli par le mouvement associatif des personnes
handicapées au Québec. En particulier, il faut rappeler
très particulièrement le travail accompli par la COPHAN, la
Confédération des organismes provinciaux de personnes
handicapées du Québec, qui est toujours sur la brèche pour
défendre et faire en sorte que la promotion des droits des personnes
handicapées puisse s'exercer dans notre société. C'est un
travail qui, souvent, s'est fait et continue à se faire dans des
conditions matérielles difficiles. C'est sur une base du communautaire,
de la volonté de faire en sorte qu'on fasse progresser la cause de
l'intégration des personnes handicapées au Québec que la
COPHAN, au cours des dernières années, au cours des 10
dernières années, a accompli son boulot, a accompli son travail
avec un dévouement, dans certains cas, peut-être, pour certains
politiciens, avec un peu trop d'acharnement. Mais il faut féliciter,
justement, ce regroupement d'associations et les associations de personnes
handicapées d'avoir et de continuer à lutter avec acharnement
pour le développement non seulement des droits, mais de l'application de
politiques en vue de l'exercice des droits de ces personnes dans notre
société.
J'avais le bonheur, M. le Président, pas plus tard que lundi
dernier, bien sûr, avec cette Semaine nationale pour l'intégration
des personnes handicapées dans notre société, de
participer à une table ronde dans la région de
l'Abitibi-Témiscamingue avec des représentants de ces
associations et des représentants d'un certain nombre
d'établissements de santé ou de services sociaux qui sont
chargés, en particulier, de dispenser un certain nombre de services pour
ces personnes, en vue, toujours, de faciliter leur intégration à
la société. J'ai pu, M. le Président, tout en constatant
les efforts énormes qui sont accomplis à plusieurs niveaux dans
notre société, constater qu'il y a encore beaucoup de
progrès à réaliser dans certains secteurs. Je
soulignerais, pour les régions du Québec, les secteurs ruraux en
particulier, où toute la question du transport adapté souffre
encore d'énormes carences. Le législateur, le gouvernement, les
parlementaires doivent s'attacher au fait que l'intégration de la
personne handicapée au Québec, peu importe où elle se
situe sur le territoire, ça doit être leur responsabilité.
Il ne faut pas qu'à l'intérieur de cette catégorie des
personnes handicapées il y ait deux catégories de citoyens, deux
catégories de personnes, suivant que l'on demeure dans le milieu rural
ou dans le milieu urbain, et que l'on supporte davantage, M. le
Président, quant à moi, en particulier les municipalités
au niveau de l'organisation du transport adapté au Québec dans
l'ensemble des régions du Québec.
Je veux souligner aussi, M. le Président, parce qu'on me le
rappelait à l'occasion de cette table ronde, tout en constatant le
travail accompli, que les personnes handicapées sont encore souvent,
dans bien des occasions, dans bien des situations, victimes de discrimination
et que la quantité de ressources que nous mettons à leur
disposition est souvent insuffisante pour réaliser une
intégration harmonieuse dans notre société et contribuer
au développement de cette société.
En particulier, au niveau des services externes de main-d'oeuvre, de
placement en milieu de travail ou d'aide au placement en milieu de travail pour
les personnes handicapées, on se rend compte que, dans certaines
régions, il y aurait une différence de règles
d'application par rapport aux personnes normales qui ont, au cours de leur
carrière, à faire appel à de l'assistance professionnelle
pour se dénicher un travail, et ainsi, encore une fois, contribuer ou
participer à l'évolution de la société.
À cet égard, je veux souligner, en dernier lieu, le
travail accompli par la Commission consultative sur la situation des personnes
handicapées au Québec, qui a été mise sur pied par
la Confédération des organismes provinciaux de personnes
handicapées du Québec, et qui nous a déposé
récemment un ensemble de recommandations. Je souhaite que le
gouvernement en prenne bonne note et qu'un plan d'action soit effectivement mis
au point pour répondre aux préoccupations de ces personnes qui
ont fait l'analyse de la situation des personnes handicapées au
Québec. Et je souhaite qu'à l'occasion de la fin de cette
décennie et de la Semaine nationale pour l'intégration des
personnes handicapées nous donnions d'autres signes d'espoir à
cette catégorie de personnes, M. le Président, qui souhaitent
vivement contribuer à l'évolution de notre société
et qui peuvent, avec les moyens dont elles disposent, effectivement contribuer
de façon significative à son amélioration, à faire
en sorte que notre société et l'environnement dans lequel elles
vivent s'améliorent, parce qu'elles ont des capacités qu'il faut
non seulement reconnaître en théorie, mais reconnaître en
pratique. Et je souhaite que tous les employeurs du Québec puissent
également contribuer au fait qu'un milieu de travail valorisant, c'est
souvent une des façons de réaliser l'intégration de la
personne handicapée et de surmonter les difficultés avec
lesquelles doivent vivre ces personnes.
M. le Président, je conclus tout simplement en disant qu'il nous
faut continuer à intensifier notre action en faveur des personnes
handicapées. Il faut souhaiter que l'Office des personnes
handicapées du Québec reprenne, en quelque sorte, aussi une
vigueur, qu'on a peut-être perdue au cours des dernières
années, pour la question de la défense et de la promotion des
droits des personnes handicapées, et que les différents
programmes que nous avons mis au point au Québec pour supporter
l'intégration des personnes soient dotés de fonds suffisants pour
en arriver à une intégration harmonieuse de ces personnes et
qu'elles puissent effectivement contribuer au développement
intégral de notre société québécoise. Merci,
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): La motion
proposée par le ministre responsable de la Condition des
aînés, qui se lit comme suit: «Qu'au cours de cette Semaine
nationale pour l'intégration des personnes handicapées, qui se
déroule cette année du 1er au 7 juin, l'Assemblée souligne
la volonté et la capacité de ces personnes de contribuer au
bien-être de leur communauté et qu'elle réitère la
nécessité pour tous les acteurs de la société de
faire en sorte que, dans le champ où elles exercent leurs
responsabilités, les personnes handicapées puissent
s'intégrer dans le respect de leurs différences», est-elle
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Nous en
sommes maintenant rendus aux avis touchant les travaux. M. le leader du
gouvernement.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Pagé: J'attendais que vous me reconnaissiez, M. le
Président. Alors, M. le Président, j'avise cette Assemblée
qu'aujourd'hui, à compter de maintenant jusqu'à 13 heures, de 15
heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle
Louis-Hippolyte-LaFontaine, la commission des affaires sociales
procédera à l'étude détaillée du projet de
loi 15, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant
l'application de la Loi sur les services de santé et les services
sociaux et modifiant diverses dispositions législatives. (11 h 40)
J'avise de plus que, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures
à minuit, à la salle du Conseil législatif, la commission
de l'économie et du travail procédera à l'étude
détaillée du projet de loi 35, Loi modifiant la Loi sur les
accidents du travail et les maladies professionnelles, la Loi sur la
santé et la sécurité du travail et la Loi sur
l'assurance-maladie. Et voilà, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. Vos avis sont
déposés.
M. Gendron: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui? M. le leader
adjoint de l'Opposition.
M. Gendron: Si vous le permettez, sur les avis. Je voudrais juste
m'assurer... Est-ce que le leader du gouvernement vient d'annoncer que, pour ce
qui est du projet de loi 35, à la commission de l'économie et du
travail, il n'est pas question d'entendre en consultation particulière
les intervenants sur lesquels il y avait eu une entente? Est-ce à dire
qu'on laisse tomber...
M. Pagé: Si vous permettez, je vais vous répondre
et vous pourrez...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le leader du
gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, nous retenons, des
nombreux échanges qui ont eu cours cette nuit sur le sujet, que nous
vous avons offert, le ministre et le leader parlementaire du gouvernement ont
offert à l'Opposition officielle la possibilité de
déférer le projet de loi en commission parlementaire,
premièrement; deuxièmement, de procéder à des
auditions qui nous auraient permis d'entendre, entre autres, les syndicats
concernés et les associations. Vous nous avez demandé qu'en plus
il y ait une commission d'enquête ou une commission publique pour
étudier la CSST, que c'était un tout. On vous a dit, nous, que,
d'une part, nous étions prêts à convier, pendant un certain
temps donné, limité dans le temps prévu, établi
entre nous, la semaine prochaine ou même, dès cette semaine, entre
autres, la CSN, la FTQ, bon, etc. Vous avez dit non. Ce qu'on veut, en plus,
c'est une espèce de commission d'enquête, de commission rogatoire
ou de commission publique. C'était à prendre ou à laisser.
Alors, on a dit non. On a conduit la deuxième lecture du projet de loi.
La deuxième lecture a été conduite à terme. Le
projet de loi est maintenant à l'étude article par article. Il
n'y a pas d'auditions. C'est tout. On vous l'a proposé, et ça a
été non.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Une dernière
question, oui.
M. Gendron: Bien, je veux dire, là-dessus: Est-ce que le
leader du gouvernement ne convient pas que c'était suite au refus de
faire comparaître, dans les consultations particulières, la CSST
comme telle pour venir s'expliquer? Là, devant le refus du ministre,
oui, c'est exact qu'on a demandé un certain nombre de groupes, plus une
commission indépendante qui ferait l'évaluation. Mais est-ce
à dire que le leader du gouvernement vient de changer cette
situation-là? Effectivement, en convoquant la commission parlementaire
sur l'étude article par article, ça nous permettra, nous autres,
de faire une série de motions préliminaires qui vont nous amener
à exiger la convocation de ces mêmes intervenants-là. Vous
savez ça et vous procédez pareil article par article
aujourd'hui.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, M. le leader du
gouvernement, rapidement.
M. Pagé: Nous avons eu de nombreux échanges sur le
sujet, il y a eu négociation entre nous, cette nuit, et ce qu'on a... La
lecture qu'on doit en faire, nous vous avons offert formellement d'entendre, la
semaine prochaine, les nombreux syndicats qui font le tour des bureaux de
députés, puis qui sont venus nous voir, qui vous ont
rencontrés, qui sont venus chez nous. C'est neuf groupes. On vous a dit:
On va ouvrir la commission parlementaire pour neuf groupes. Vous avez dit: Neuf
groupes, ce n'est pas suffisant. Il faut, en plus de ça, la CSST
elle-même et, en plus de ça, on demande, nous demandons, nous
avez-vous dit, une commission d'enquête publique.
Moi, je vous dis ceci. La réponse a été: C'est
ça qu'on vous offre. Vous avez dit: Non, on veut plus. Alors, là,
on a dit: Non, on procède à la deuxième lecture. C'est ce
qu'on a fait. On a voté. En clair, quand on demande un cheval pour avoir
un lapin, il arrive parfois qu'on n'a ni l'un, ni l'autre.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ceci met fin à
cet échange.
Renseignements sur les travaux. Est-ce qu'il y a des questions sur les
renseignements sur les travaux? Il n'y a pas d'information. Alors, ceci met fin
à la période des affaires courantes. Nous en sommes maintenant
aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.
Affaires du jour
M. Pagé: M. le Président, je vous invite à
appeler l'article 12 du feuilleton.
Projet de loi 19 Reprise du débat sur
l'adoption du principe
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 12,
l'Assemblée reprend le débat sur l'adoption du principe du projet
de loi 19, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant
les affaires régionales. Je suis prêt à reconnaître
un prochain intervenant, M. le leader adjoint du gouvernement et
député d'Abitibi-Ouest.
M. François Gendron
M. Gendron: Oui. Je vous remercie, M. le Président. Il
s'agit là d'un projet de loi qui m'intéresse au plus haut point,
compte tenu de la région d'où je proviens et, également,
compte tenu des anciennes responsabilités gouvernementales que j'ai
exercées avec beaucoup de conviction, au moment où on m'a
confié la responsabilité de ministre délégué
à l'Aménagement et au Développement régional,
responsable de l'Office de planification et de développement du
Québec, organisme que, dans la loi du ministre, on fait
disparaître, on fait sauter sans trop savoir pourquoi.
Nous avons, M. le Président, à évaluer, à
apprécier le principe du projet de loi 19, intitulé Loi modifiant
diverses dispositions législatives concernant les affaires
régionales. Alors, j'ai rarement vu un projet de loi aussi flou, aussi
ambigu, aussi peu significatif, qui ne nous apprend à peu près
rien des intentions du
gouvernement. D'ailleurs, si on avait la chance de prendre une minute
les notes explicatives, ce qui, normalement, à sa face même, pour
un profane, permet à quelqu'un de se retrouver, ça dit ceci:
«Ce projet de loi introduit dans la Loi sur le ministère du
Conseil exécutif une section relative aux affaires régionales -
un charabia indescriptible. Il prévoit que le ministre responsable de
l'application de cette section élabore, propose et met en oeuvre une
politique en matière de développement régional.»
Donc, c'est une loi qui nous indique qu'un jour un ministre aura la
responsabilité de faire quelque chose, mais sur le comment, pas un mot.
On n'a pas une phrase sur comment ça va s'opérationnaliser,
comment ça va fonctionner - et j'y reviendrai dans quelques minutes -
donc, un projet de loi plein de trous qui ne règle rien. On ne sait pas
comment sera géré l'argent, on ne sait pas ce qui va arriver au
personnel - et il y a du personnel qui est concerné. On sait, par
contre, qu'à l'article 7 tout ce qui va suivre sera
déterminé par décret et on nous demande d'adopter le
principe d'un tel projet de loi.
Ce que j'indique, M. le Président, d'entrée de jeu, c'est
que nous, on ne peut pas vraiment être contre le principe d'un projet de
loi qui ne nous dit absolument rien sur ce que sera le contenu du projet de
loi. On ne peut pas vraiment être contre, parce que contre le
néant, c'est pas fort, on n'a pas beaucoup d'arguments. Mais je voudrais
prendre quelques minutes pour quand même placer ça dans son
contexte.
Où est l'orientation? On ne le sait pas. Où est le
ministère? On ne le sait pas. Où est le livre vert? Il n'y en a
pas eu. Où est le débat public? Il n'y en a pas eu. À un
moment donné, ce qu'on sait, c'est que le gouvernement libéral a
constaté qu'il s'en allait nulle part avec la façon dont il
conduisait ce que j'appelle les différentes orientations en
matière de développement régional. Il faut partir de ce
constat-là, M. le Président, et faire la preuve - et je vais
essayer de la faire dans les quelques minutes qui me sont imparties - que ce
n'est pas un gouvernement qui a vraiment une bonne compréhension des
régions du Québec, ce n'est pas un gouvernement qui a le souci
des régions du Québec et ce n'est surtout pas un gouvernement qui
a le goût de faire ce que j'appelle de la planification
stratégique dans les régions du Québec, qui aurait comme
conséquence de les redynamiser, de les relancer, de les
redéployer.
Ce n'est pas pour rien que si on place ça dans son contexte, on
titrait, il y a à peu près... Le 23 février 1991, on
titrait ceci: «L'impasse du développement régional. Les
sommets socio-économiques ont été victimes de leur propre
succès.» On indiquait, M. le Président, d'une façon
très claire, que, essentiellement, les conférences
socio-économiques qu'on avait instaurées avaient
été lancées dans la foulée des grands sommets
lancés par le Parti québécois lors du premier mandat et,
essentiellement, l'objectif, c'était de permettre aux
représentants régionaux de dégager des orientations de
développement, de dégager des créneaux ou des
priorités sur lesquels le gouvernement devrait agir d'une façon
plus particulière, plus spécifique. Je voudrais juste citer une
phrase, dans cette évaluation-là, d'un document très bien
fait - je suis sûr que le ministre responsable des Affaires
régionales dans le futur en a pris connaissance: «Comme elles
procédaient d'une large mobilisation de la population et qu'elles
impliquaient étroitement députés et ministres des
régions, les conférences se sont vite transformées en
événements politiques majeurs, et même en spectacles,
là où la télévision et la radio en assuraient la
transmission.»
Je pense que c'est un article qui reflète la
réalité. Cette tendance s'est accrue constamment à partir
de 1986. On sait ce qui est arrivé avec l'élection du 2
décembre 1985. Effectivement, à partir de 1986, c'est devenu un
show politique bien mené par l'ex-ministre responsable du
Développement régional, ce responsable politique du Parti
libéral qui en profitait pour venir faire une démonstration bien
plus de visibilité politique, de force de bras, sans beaucoup de respect
des priorités du développement régional. (11 h 50)
Mais je vais être très, très précis. Partons
de ce qui s'est passé. C'est un constat d'échec de la politique
libérale de l'ex-ministre responsable et du ministre actuel, et,
à un moment donné, le ministre actuel décide d'enclencher
une réforme importante. Et, pour enclencher sa réforme, il
indique, à l'automne 1991, qu'il ne veut pas pénaliser les
régions, qu'il faut procéder rapidement et il prend l'engagement
de déposer un projet de loi rapidement. Est-ce que ça s'est
passé de même, M. le Président? La réponse est non.
On s'est traîné les pieds volontairement. On n'a pas bougé
grand-chose, et tout l'argument pour faire ce que je vous indique était
que les régions ne soient pas pénalisées par le budget
1992-1993, le budget dans lequel nous sommes, qui a été
adopté dernièrement. Or, nous sommes au mois de juin 1992. On est
en train de discuter de la loi. Elle est pleine de trous quant à sa mise
en vigueur, quant aux modalités d'application, quant au transfert du
personnel, et même les régions qui se sont activées le
plus... Et je cite, à ce titre, l'exemple de
l'Abitibi-Témis-camingue qui est une région qui pratique la
concertation depuis plusieurs années, où je pense qu'il y a une
seule table de concertation qui a au-delà de 1000 membres, M. le
ministre. C'est la seule région qui a une table de concertation - qu'on
appelait le CRD dans le temps et qui a été transformé,
mais c'est toujours la même chose - qui a au-delà de 1000 membres
sur une base volontaire. Et je pense que la concertation en
Abitibi-Témiscamingue a été longuement
pratiquée avec des effets bénéfiques.
Je viens de vous indiquer que c'est probablement la région qui
est la plus avancée dans le cheminement de la nouvelle mise en place de
ce que le ministre appelle la politique concernant les affaires
régionales. Et les concernés indiquent qu'au mieux il sera
impossible de fonctionner avant l'automne 1992, avant la fin de novembre 1992,
dans ce qu'on appelle le plan de mise en vigueur de la planification
stratégique.
Si je vous indique ça, M. le Président, c'est uniquement
pour faire savoir comment ce gouvernement-là, au cours de la
présente année, aura réussi, par du tâtonnement, par
une politique mal faite, mal préparée, sans trop d'objectifs
précis, à sauver sur le dos des régions au-delà de
100 000 000 $. C'est ça, la réalité! Et si je reviens
à l'article de Juneau, à un moment donné, quand il parlait
de l'impasse du développement régional, il y avait quand
même une phrase très «conséquentielle»:
«Le ministre actuel a omis complètement de signaler le facteur le
plus important qui a poussé le Québec à modifier son
attitude, à savoir l'impasse budgétaire très grave dans
laquelle se trouve le gouvernement. Le Trésor est a sec...» Et
là il parle du gouvernement libéral actuel, de ces
supposés bons «balanceurs» de colonnes, de ces
super-gestionnaires qui ont un déficit d'au-delà de 4 000 000 000
$ et, grâce au fédéral, pour 1 000 000 000 $, ils ont
été capables d'en camoufler un autre milliard. Donc, la raison
principale pour laquelle on perd un an, on perd une année
complète de mise en place, puis les régions sont
pénalisées d'une somme équivalente - à peu
près 100 000 000 $ au cours de l'année - c'est justement pour
renflouer les coffres du Trésor sur le dos des régions du
Québec. Et c'est notre responsabilité de le dire.
Le ministre responsable du projet de loi nous présente un projet
de loi où, effectivement, ça fait le constat de l'échec de
la politique de développement régional de son gouvernement. Cette
réforme - et c'est peut-être ça qu'il est le plus important
de toucher, parce que 20 minutes, ça passe rapidement - ne contient
aucune décentralisation des pouvoirs. Et, moi, j'aime bien prendre les
choses, dans la vie, M. le Président, pour ce qu'elles sont. Je suis
capable de constater que le ministre responsable des Affaires régionales
a quand même offert aux régions du Québec une table de
concertation où, pour la première fois, il dit à cette
table de concertation: Je vous offre de vous entre-déchi-rer pour
partager un gâteau qui est de plus en plus petit, et je vais vous
permettre dorénavant de faire une ventilation d'une somme de 3 000 000
$. Il laisse voir qu'enfin, pour la première fois, arriverait dans
chacune des régions une somme d'argent importante pour relancer des
activités significatives sur du développement régional
bénéfique pour ces régions, structurantes et non toutes
sortes de projets qui cultivent la dépendance chronique des
régions, dans le genre de ce que, gouvernement après
gouvernement, et en particulier le fédéral et les libéraux
ont fait avec la belle Gaspésie du ministre jubilaire, fêté
à répétition - avec raison cependant; on est toujours
d'accord pour le fêter, parce que c'est tellement exceptionnel, 36 ans -
mais ça donne une Gaspésie avec 40 % de chômage permanent,
un ministre pendant 36 ans en Gaspésie. C'est ça que ça
donne! Et c'est une dépendance chronique. Allez voir le monde, allez
voir les jeunes, vous allez constater que c'est vrai. Ce n'est pas très
structurant. On arrive constamment avec un nouveau programme, un nouveau
projet, mais on tombe toujours dans le même résultat: quatre ou
cinq mois d'emploi par année au maximum, sauf, bien sûr, pour les
employés de la fonction publique et parapublique, que je ne blâme
pas... Sans compter le dossier du Pin rouge...
Mais là, je ne veux pas me perdre dans toutes sortes de
considérations. Donc, j'ai dit: Le ministre a donné suite, entre
autres, à ce que j'avais appelé... La première
réflexion majeure sur le développement régional du
Québec s'est appelée le choix des régions. Effectivement,
le choix des régions, que j'avais eu l'occasion de rendre public comme
ministre responsable du Développement régional, a
été la première réflexion un peu d'envergure autour
des années 1981 et 1982. La table de concertation qui veut le mettre en
vigueur, c'est exactement le CRCI, le Conseil régional de concertation
et d'intervention, que j'avais préconisé à
l'époque. Mais là, on est en 1992 et c'est pour ça que je
prétends que le ministre a manqué 10 ans. Le gouvernement du
Parti libéral a sauté 10 ans. Il a oublié que, dans les 10
dernières années, la concertation a débouché dans
les régions sur plus de responsabilités
décentralisées. S'agit-il d'une politique de
décentralisation, M. le Président? La réponse, c'est non.
Il n'y a rien de décentralisation là-dedans. Y a-t-il de l'argent
neuf? Non. Y a-t-il des programmes plus performants qui leur permettront
d'avancer, ces régionaux? La réponse, c'est non, encore. Il n'y a
rien de neuf. On a changé PECEC, un programme qui marchait, pour PRECEP,
qui ne marche pas, sans argent et, cette année, on va avoir eu une
décision qui va coûter, au bas mot, 100 000 000 $ aux
régions du Québec. On nous demande d'être de grands
défenseurs de ce projet de loi. Moi, je serais un grand défenseur
d'une vraie politique de développement régional
décentralisé, qui probablement devrait atterrir au niveau des MRC
du Québec, au moins sur le plan du territoire, parce que la
région communautaire d'appartenance dans le futur, c'est la MRC. Et si,
dorénavant, on privilégiait, comme lieu d'atterrissage, une
véritable politique de décentralisation qui dirait, au niveau des
élus de la MRC pour certaines affaires, au niveau du territoire pour
d'autres: Voilà le partage que la société
québécoise est en
train de faire pour que, dorénavant, les régionaux qu'on
appelle, le milieu local, puissent prendre davantage de décisions qui
tiennent compte de ce que vous êtes et de vos particularités, il y
aurait, de ce côté, en tout cas en ce qui me concerne, un
défenseur acharné parce que, là, on parlerait
véritablement d'un début d'une vraie politique de
décentralisation. Je pense que les régions sont mûres pour
assumer des responsabilités réelles.
Par contre, est-ce qu'on peut envisager une espèce de
fiscalité directe au niveau de la grande région? La
réponse, c'est non. Parce qu'il n'y a pas de fiscalité directe,
ne parlons pas de décentralisation, parlons de concertation,
d'orientation et de dégagement de priorités. Moi, en ce qui me
concerne, j'estime que les régions du Québec devront toujours
jouer cette responsabilité-là. Mais on ne peut pas hypocritement
leur faire accroire qu'elles ont des responsabilités autres que celles
qu'il y a dans le projet de loi. Dans le projet de loi, je vous l'ai dit
tantôt, M. le Président, c'est un projet de loi centralisateur qui
dit: Dorénavant, je vais mettre une somme d'argent sur la table et,
à 50 autour de cette table-là, essayer de vous attribuer quelles
sont les priorités. Et moi, je reste le grand responsable,
dorénavant, avec une structure branchée sur l'exécutif,
donc le bureau du premier ministre. On sait ce que ça donne pour le
Conseil permanent de la jeunesse. On sait ce que ça donne pour les
jeunes du Québec, je veux dire, un taux de chômage effarant. Quand
le premier ministre, en plus de l'ensemble de ses responsabilités, a
trois ou quatre autres responsabilités... Et c'est un
secrétariat, ça n'a pas du tout le même degré
d'efficience et de support que celui que l'Office de planification et de
développement du Québec pouvait donner aux régions du
Québec. Enlevez l'OPDQ dans les 15 dernières années et
essayez de me dire ce qui s'est fait comme développement réel
dans les régions du Québec, vous allez voir que la liste va
être courte. Ce n'est sûrement pas les ministères sectoriels
et ce n'est sûrement pas... Quand le ministre fait miroiter... Parce que
je l'ai entendu quand il est venu dans les régions du Québec:
Dorénavant les ministères sectoriels auront une somme -
écoutez le montant - de 500 000 000 $ à se partager pour tenir
compte des particularités régionales. 500 000 000 $ provenant des
ministères sectoriels. Allez-y voir! D'abord, est-ce que ça va
avoir cours en 1992? Réponse: Non. La réforme va être trop
tard. Tous les crédits budgétaires des ministères
sectoriels sont votés. Tout est articulé. Pensez-vous qu'en
novembre, quand les quelques tables de concertation dans la nouvelle structure
proposée seront en exercice, ils pourront infléchir les
orientations budgétaires d'il y a quatre mois, cinq mois, six mois?
L'exercice budgétaire du gouvernement du Québec a commencé
le 1er avril 1992, M. le Président. Donc, il y aura six mois d'argent de
dépensé. Les orientations seront prises et il ne restera
sûrement pas de crédits à orienter sur des
problématiques régionales. (12 heures)
Autre élément que je voudrais toucher, c'est le magnifique
résultat, comme mon collègue responsable du dossier l'avait
adéquatement souligné. À 15 mois de la fin de l'entente
Canada-Québec, seulement 21 % des sommes prévues ont
été déboursés au niveau de l'entente de
développement régional. J'entendais le ministre qui nous parlait
des autres ententes sectorielles. Ce n'est pas de ça qu'on a
parlé, nous. On a parlé de l'entente-cadre de
développement régional. Il y a seulement 21 % des sommes qui sont
dépensés.
Donc, on ne peut pas envisager, avec un tel succès qui
correspond, en ce qui nous concerne, à un échec lamentable au
niveau des régions du Québec, qu'à partir du moment
où on va revérifier le modèle administratif,
dorénavant les ententes-cadres vont mettre en évidence une vraie
vision et une vraie stratégie gouvernementale en matière de
développement régional. Vous ne pensez pas que ça va
être le cas.
Moi, j'estime, M. le Président, que le ministre veut avoir les
mains complètement libres dans son projet de loi. Le projet de loi va
lui permettre à peu près de faire exactement ce qu'il veut, et on
n'a aucune réponse, aucune réponse quant à ce qui va
arriver au personnel. Comment ça va fonctionner? Qu'est-ce qui va
arriver de l'argent résiduel? Parce que même si le ministre a
affirmé, à quelques reprises: Oui, mais, moi, je vous donne la
garantie que l'argent ne sera pas dépensé... Je le cite,
là. Le ministre affirme que la partie de l'enveloppe non utilisée
d'une année sera ajoutée à celle de l'année
suivante. Or, le ministre a admis en commission parlementaire qu'il ne
s'agissait que d'un engagement du gouvernement et non d'une obligation. Un,
est-ce que c'est dans la loi? Bien non, ce n'est pas dans la loi. Comment le
ministre pourrait-il - j'aimerais ça que, dans sa réplique,
à un moment donné, il réponde à ça - comment
peut-il prétendre que l'argent qui, selon la Loi sur l'administration
financière, n'est pas affecté ne sera pas versé dans ce
qu'on appelle les crédits périmés? C'est la règle
de la Loi sur l'administration financière. Pour être capable de
croire en ce qu'il nous a dit, il aurait fallu une disposition
réglementaire dans la loi pour dire: Bon, bien, pour ce qui est des
crédits de 3 000 000 $ dans les régions du Québec, si les
crédits ne sont pas dépensés, effectivement, pour ce type
de législation, compte tenu qu'on est des défenseurs des
régions du Québec, il y a une modification à la Loi sur
l'administration financière et les crédits périmés
- on a vérifié - les crédits périmés ne
s'appliqueront pas à la règle de la Loi sur l'administration
financière.
De tout temps, M. le Président... Il connaît les
règles, avec l'expérience qu'il a du Conseil du
trésor... Pourquoi il y a un fonds consolidé? Pourquoi il
y a, à chaque année, vers la fin de septembre, octobre, des
crédits périmés? C'est pour répondre directement
à la politique budgétaire de ce gouvernement-là. Quand le
gouvernement du Québec fait connaître les crédits
budgétaires, il y a toujours un certain nombre de crédits qui
sont prévus dans les crédits périmés. C'est la
règle de la Loi sur l'administration financière. S'il n'y a pas
de disposition qui nous le garantit, on ne peut pas croire de telles
dispositions.
Essentiellement, moi, M. le Président, j'aurais aimé
ça, sincèrement, appuyer un projet de loi qui nous aurait permis
de voir et de lire une véritable politique de décentralisation
articulée sur les régions, qui aurait permis de les ren-forcir,
de les développer davantage et, surtout, de leur faire confiance. Moi,
j'estime que, oui, il y a un niveau de solidarité, il y a un niveau de
conscience régionale assez fort dans l'ensemble des régions du
Québec pour aller plus loin que le statu quo, pour aller plus loin que
ce que la plupart vivent depuis 1980, 1981. Après avoir
arrêté la formule des sommets, un moratoire, après avoir
mandaté un groupe de travail pour réfléchir
là-dessus, conclusion, on arrive avec quoi? On arrive avec l'abolition
de la seule instance qui a fait véritablement quelque chose de positif
pour les régions du Québec, qui s'appelle l'OPDQ. On dit:
Dorénavant, ça sera greffé à un secrétariat
et on va vous inviter à partager une somme ridicule de 3 000 000 $. Il
n'y a pas d'argent neuf, pas de programmes nouveaux. Donc, il y a trop de
questionnement. Il y a trop de doutes pour être emballé, M. le
Président, par un tel projet de loi.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député d'Abitibi-Ouest de votre intervention. Alors, je rappelle
aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à
l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 19. Je reconnais M.
l'adjoint parlementaire au ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle et
député de Trois-Rivières. M. le député, je
vous cède la parole.
M. Paul Philibert
M. Philibert: Merci, M. le Président. Alors, il me fait
extrêmement plaisir de m'adresser à mes collègues de la
Chambre sur le projet de loi 19, Loi modifiant diverses dispositions
législatives concernant les affaires régionales. Ce projet de loi
est important. Il est la traduction législative de notre politique en
matière de développement régional. C'est cette politique
que je me propose d'aborder dans la première partie de mon
exposé. Ensuite, M. le Président, j'aborderai plus
spécifiquement le projet de loi 19 et les articles qu'il contient.
M. le Président, notre politique de développement
régional a été élaborée à la suite
d'une analyse de toutes les questions régionales. Le
développement régional est, comme on le sait, complexe, et
à plus d'un niveau. Il va de soi qu'il ne peut être question ici
d'en faire entièrement le tour. Tout au plus, j'en relèverai les
grands traits.
M. le Président, des problèmes que connaissent les
régions actuellement, il est possible de dégager trois constats
majeurs. Le premier est relatif à l'effritement progressif des secteurs
d'activité économique sur lesquels reposait l'emploi dans
plusieurs régions du Québec. Le deuxième est
conséquent du premier et a trait à la fuite dans les grands
centres des gens les plus instruits des régions. Enfin, le
troisième a trait à la nature des interventions gouvernementales
dans le domaine du développement régional depuis une trentaine
d'années.
Je crois utile de dire un mot sur chacun de ces constats majeurs.
Commençons par l'effritement progressif des secteurs d'activité
économique sur lesquels reposait l'emploi dans plusieurs régions
du Québec. Il est bien connu que ces secteurs étaient
reliés aux activités primaires de notre économie,
c'est-à-dire au secteur des ressources naturelles. Du début du
siècle jusqu'au tournant des années soixante en passant par le
boom de l'après-guerre, l'exploitation des ressources naturelles a
été un gage de prospérité pour toutes les
régions du Québec. Elle permettait à ces régions de
vivre convenablement et d'assurer un niveau de vie décent à leur
population.
Au milieu des années soixante, les choses ont commencé
à changer. Les assises économiques de plusieurs régions
ont été ébranlées. On a vu, notamment, l'industrie
des pêches en Gaspésie connaître des difficultés
importantes. On a vu également des régions mono-industrielles
traverser une période extrêmement difficile. On se rappellera que
ce sont ces difficultés qui sont à l'origine, d'ailleurs, de
l'intervention du gouvernement dans le domaine du développement
régional, avec la création de l'Office de planification et de
développement du Québec, qui est, comme vous le savez, hautement
concerné par le projet de loi 19 que nous avons devant nous aujourd'hui
et sur lequel je reviendrai plus avant dans mon allocution.
Mais, pour l'instant, revenons à cet effritement
économique de certaines de nos régions. M. le Président,
je vais vous donner un exemple récent, celui de l'industrie de la
forêt et en particulier de notre industrie des pâtes et papiers.
Nous avons occupé des parts importantes du marché mondial. Les
pâtes et papiers ont figuré longtemps au premier rang de nos
exportations. Ce secteur d'activité comptait, à son sommet,
près de 50 000 travailleurs dans toutes les régions du
Québec, et du même coup, a constitué le pilier de
l'économie de plusieurs de
nos localités régionales.
Aujourd'hui, on est pleinement conscient qu'une partie importante de
notre industrie n'est plus concurrentielle. La récession qui
s'achève a démontré que nous avons failli dans la
modernisation de nos entreprises et que les difficultés
inhérentes à la récession étaient plus profondes,
et que, donc, les difficultés n'étaient pas conjoncturelles mais
structurelles, tant et si bien qu'aujourd'hui les populations de plusieurs de
nos régions sont confrontées à des situations
extrêmement difficiles. Les entreprises ferment et d'autres envisagent de
le faire. Le secteur des pâtes et papiers, M. le Président, n'est
qu'un exemple, et on pourrait allonger la liste pour illustrer ce
phénomène d'effritement économique de certaines
régions du Québec. Tel est, M. le Président, le premier
constat de la problématique du développement régional, et
je voudrais maintenant aborder le second. (12 h 10)
Ce deuxième constat a trait à ce qu'on pourrait appeler la
fuite de nos cerveaux dans les grands centres, celle des jeunes qui ont
quitté les régions pour poursuivre des études
supérieures et qui, à la fin de celles-ci, ont
décidé de s'installer dans la périphérie ou dans
les grands centres. Cette émigration n'a pas été sans
effet sur les régions. Elle les a privées d'un potentiel
inestimable dans la perspective de leur développement économique
et même de leur survie économique. Il s'agit là d'une
tendance lourde qui a contribué également à l'effritement
des économies de certaines de nos régions. M. le
Président, toutes les actions en matière de développement
régional des trente dernières années ont visé et
visent encore à contrer ces tendances lourdes qui affectent plusieurs de
nos régions.
Ceci m'amène maintenant à considérer le
troisième constat majeur, qui porte sur les interventions
gouvernementales en matière de développement régional. Il
est bien connu, M. le Président, qu'au milieu des années
quatre-vingt nous avons amorcé, chez nous, une réflexion
substantielle sur l'efficacité de l'intervention gouvernementale dans
plusieurs domaines, y compris dans celui du développement
régional. La rareté des ressources financières, à
laquelle le gouvernement a été confronté, a
généré une foule de questions sur l'efficacité de
son action: maximiser les effets des deniers publics de plus en plus rares et,
en même temps, favoriser un usage judicieux de ces deniers publics moins
abondants. En fait, faire plus avec moins.
C'est dans cette perspective que nous avons été conduits
à réexaminer l'intervention gouvernementale en matière de
développement régional. Le projet de loi 19 que nous avons devant
nous résulte précisément de cet examen, un examen qui a
révélé un certain nombre de choses que l'on juge,
aujourd'hui, extrêmement importantes pour l'avenir des régions,
des économies de nos régions. Cet examen a d'abord montré
que l'intervention gouvernementale avait quelquefois omis de considérer
l'importance des dynamismes locaux et régionaux. Cette analyse a
également démontré que la spécificité et la
singularité des régions avaient été trop souvent
ignorées.
M. le Président, nous avons décidé de corriger
cette situation, en tenant compte du bilan de l'intervention de l'État
dans le développement régional. À cette fin, notre
formation politique a développé une approche que l'on retrouve,
notamment, exposée dans le programme de notre formation politique,
intitulée «S'ouvrir à demain». Notre approche
contient un certain nombre d'orientations majeures, contenues dans le projet de
loi 19 que nous avons devant nous. Ce projet de loi indique qu'il faut miser
sur l'«entrepreneurship» local. M. le Président, il faut
miser sur l'«entrepreneurship» local et régional pour
asseoir notre intervention en matière de développement
régional.
Les gens des régions, entrepreneurs, dirigeants locaux, sont,
à notre point de vue, les plus aptes à orienter le
développement économique de leur région, et ce, pour
plusieurs raisons. La première est fort simple, M. le Président.
Les gens de nos régions sont ceux qui ont le plus foi dans l'avenir
économique de leur coin de pays. Ils sont aussi les plus au fait des
forces et des faiblesses de leurs économies locale et régionale,
et surtout, ils sont les plus au fait des potentialités
exploitées, mais aussi de celles inexploitées de leur
région. Une autre orientation majeure est la volonté ferme de
rapprocher les citoyens des décisions, du pouvoir décisionnel,
pour uniformiser les actions en vertu des spécificités de chacune
des régions. À cet égard, notre action a consisté
notamment - on s'en souviendra, M. le Président - à moduler
l'action du gouvernement en fonction des besoins des régions. Cette
modulation a donné, dans plusieurs cas, des résultats enviables
et a permis une meilleure adaptation des interventions gouvernementales aux
réalités régionales.
Récemment, notre gouvernement franchissait un autre pas en
présentant une nouvelle stratégie en matière de
développement régional. Le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation et responsable du Développement
régional a, en effet, annoncé, à la fin de l'année
1991, un plan d'action visant la régionalisation des moyens financiers
dont disposait jusqu'à maintenant l'Office de planification et de
développement du Québec, mieux connu sous le nom de OPDQ, pour
décentraliser, donc, en faveur d'instances régionales et donner
à ces instances les moyens d'une implication plus soutenue dans leur
développement, et les inciter à une présence plus
marquée et plus impliquée dans l'essor économique local et
régional.
M. le Président, le projet de loi que nous avons devant nous
établit, en quelque sorte, les
assises juridiques de cette intervention régionalisée du
gouvernement en matière de développement régional. Ce
projet de loi fait suite à une volonté souventefois
exprimée par le ministre et par le gouvernement. Au cours de sa
tournée provinciale, notre collègue et ministre titulaire du
développement régional a été à même de
constater que le milieu était extrêmement réceptif à
notre politique de développement régional. Actuellement,
plusieurs des régions sont prêtes à signer les lettres
patentes avec le ministre. Ce projet de loi montre que notre gouvernement est
sensible aux besoins des régions, agit pour impliquer les régions
au processus de décision et favorise l'essor de leur économie
locale et régionale.
Le geste que nous nous apprêtons à poser aujourd'hui avec
le projet de loi traduit un virage très significatif au niveau du
développement régional. Il traduit, en quelque sorte, la fin
d'une époque. Il est révolu, le temps où le gouvernement
se substituait aux régions pour faire des choix. Ce sont
dorénavant les régions qui feront les choix, les choix qui leur
apparaissent les plus judicieux pour améliorer leur qualité de
vie et leur développement économique et prendre en charge leur
avenir.
C'est une nouvelle ère qui s'ouvre en matière de
développement régional. De plus, le gouvernement a raison de
rapprocher, comme il le fait, les décisions des citoyens des
régions. Dans plusieurs de nos régions, il y a des citoyens et
des citoyennes qui sont extrêmement dynamiques et solidaires dans leurs
efforts en vue d'améliorer la qualité de vie de leur population.
C'est pour cela, M. le Président, que je suis convaincu que notre
gouvernement emprunte la bonne voie en matière de développement
régional. À mon avis, l'intervention gouvernementale, qui mise
sur la force du dynamisme local et sur la force des solidarités
régionales, a toutes les chances d'être extrêmement
bénéfique pour les régions et d'assurer le
développement économique de ces régions.
En conclusion, M. le Président, je tiens à
réaffirmer que notre gouvernement, avec ce projet de loi, emprunte une
voie porteuse d'avenir pour les régions du Québec. Cette loi
permettra à plusieurs de nos régions qui ont été
éprouvées par l'effritement partiel ou entier des secteurs
traditionnels d'activité économique de renouveler leurs bases
économiques et industrielles avec force et dynamisme. Notre
démarche en matière de développement régional
correspond aux attentes du milieu et en est l'expression. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): merci, m. le
député. alors, nous en sommes toujours à l'adoption du
principe du projet de loi 19. je cède la parole à ma
collègue, mme la députée de terrebonne. mme la
députée. (12 h 20)
Mme Jocelyne Caron
Mme Caron: Merci, M. le Président. Je trouve ça
vraiment déplorable, regrettable qu'encore une fois on ait manqué
le bateau. On avait tout en main pour vraiment se doter d'une véritable
politique régionale, mais on n'a pas pu la traduire dans les faits. Le
député de Trois-Rivières nous disait que le projet de loi
19 est la traduction de notre politique régionale; je pense qu'il a
peut-être lu ou entendu les discours du ministre, il a peut-être lu
les textes de la réforme, mais il n'a sûrement pas lu le texte du
projet de loi qu'on a devant nous. Parce que si c'est la traduction de la
politique régionale, il n'y a rien dans le projet de loi 19. La plupart
des articles nous annoncent uniquement l'abolition de l'OPDQ. C'est ça,
une politique régionale, l'abolition de l'OPDQ!
L'autre élément, si c'est la traduction de la politique
régionale, ça démontre que, pour le gouvernement
libéral, une politique régionale, ça ne se fait pas en
concertation avec le milieu. On impose une politique régionale. Et,
ça, ça m'ap-paraît tout à fait aberrant. On ne peut
pas faire du développement régional sans faire de la
concertation; c'est l'élément de base. Il faut commencer par
interroger les gens du milieu, demander ce qu'ils veulent et, ensuite,
présenter un projet de loi qui traduise les volontés du
milieu.
Non! On a décidé de ne pas faire de concertation.
Pourtant, nous avions tous les éléments pour le faire. Je
reviendrai tantôt sur les échecs économiques des sommets
socio-économiques. Mais il y a eu un grand succès au niveau des
sommets socio-économiques, c'est la concertation. Peu de
résultats financiers, mais, effectivement, les régions ont appris
à se parler. Elles ont réussi à communiquer entre elles.
Si je pense, par exemple, aux deux régions que je représente,
Laurentides et Lanaudière, c'était une nouvelle forme
d'expression qui s'est traduite par des actions bien concrètes. Les gens
se rencontraient régulièrement et il aurait été
vraiment facile pour le ministre de rencontrer les tables de concertation qui
étaient là par les sommets socio-économiques et, avec
elles, d'élaborer une véritable politique.
On se souviendra que, lors des audiences de la commission
Bélanger-Campeau, tous les intervenants des divers milieux
étaient venus parler de l'avenir du Québec. Mais, lorsqu'on pense
aux intervenants des régions, ils démontraient surtout la
préoccupation qu'ils avaient de la place que les gouvernements feraient
aux régions, dans un Québec souverain. Cet
élément-là, on ne l'a pas retenu non plus. Tous les
intervenants des régions, et de toutes les régions du
Québec, sont venus dire à la commission Bélanger-Campeau:
Nous voulons occuper une place importante dans cet avenir du Québec. La
place qu'on leur donne, M. le Président, elle se résume à
se concerter
sur un mince budget de 3 000 000 $ par région. Est-ce qu'on peut
vraiment parler de politique régionale?
Évidemment, je suis de celles qui disent toujours qu'il faut
commencer au moins par faire un premier pas. Devant le constat d'échec
du plan d'action qui avait été déposé par le
ministre Marc-Yvan Côté, en 1988, il fallait évidemment
faire quelque chose. Et c'est le seul petit bout de mon discours, M. le
Président, où je vais me permettre de rappeler les
éléments de l'échec du plan d'action de 1988.
On sait que le programme PRECEP a remplacé le PECEC, qui
était un programme beaucoup plus avantageux. Deux ans d'existence, les
budgets de PRECEP ont diminué. Enfin, on abandonne le programme le 1er
avril 1992. À 15 mois de la fin de l'entente Canada-Québec,
seulement 21 % des sommes prévues étaient
déboursés. On n'avait pas réussi a dépenser des
sommes d'argent dans les régions. Les ententes-cadres de
développement régional ne marchent pas, il y a un moratoire sur
les sommets économiques. Je veux rappeler que ces sommets
économiques avaient quand même permis une concertation, et
ça, cet élément-là, il ne faut pas le
négliger.
La modulation des programmes gouvernementaux, toujours attendue. Le 31
décembre 1991, le programme d'aide aux 15 MRC les plus
défavorisées n'a effectué aucun déboursé.
C'est évident que le plan de 1988, c'est un échec.
Le ministre - je ne doute absolument pas de sa bonne foi et je pense que
le premier geste qu'il fallait faire, c'est évidemment celui-là -
créait, en février 1991, un groupe de travail chargé
d'examiner les mesures et de faire des propositions. Ce groupe de travail
admet, évidemment, l'échec des sommets socio-économiques
parce que, dans ces sommets, c'est évident que ce qu'on peut voir...
Pour avoir participé au dernier sommet Lanaudière, en avril 1990,
c'était très clair que ce n'était pas un projet collectif
que les gens présentaient. On avait certains projets qui auraient pu se
retrouver dans n'importe quel programme du gouvernement. Ce n'étaient
vraiment pas des éléments pour le développement d'une
région. L'aspect économique était vraiment un
échec. Mais les gens avaient au moins appris à se parler, et
c'est de là qu'il faut partir.
Le ministre dépose sa réforme, et j'avoue qu'au moment
où il a présenté cette réforme le
député de Trois-Rivières nous disait: Les milieux
étaient réceptifs. Bien, c'est évident, M. le
Président. Lorsque vous êtes assoiffé, dans le
désert, et qu'on vous promet un petit peu d'eau, c'est évident
que tout le monde est très réceptif et a vraiment hâte de
participer à cette réforme. Les gens se sont mis vaillamment
à la tâche et ont essayé de se rencontrer et de s'entendre
sur une table de concertation, essayé de proposer de bonne foi une
structure.
C'est là que la concertation a commencé à
être un petit peu difficile, M. le Président, parce que les
espoirs étaient tenements grands... Ils s'attendaient à une
véritable décentralisation, donc les pouvoirs étaient
très forts, et on a senti beaucoup de tiraillements entre les personnes
qui avaient le pouvoir au niveau des municipalités et les personnes qui
avaient du pouvoir du côté des groupes socio-économiques.
Et les tiraillements étaient majeurs, jusqu'au moment où ils se
sont aperçus que, finalement, des tiraillements pour une enveloppe de 3
000 000 $, des tiraillements pour une réforme qui, finalement, ne leur
donnait pas une véritable décentralisation, c'était
peut-être un peu futile. Et, évidemment, de bonne foi, les gens
ont monté les structures et les structures continuent à se
monter. Et ils continuent à espérer qu'on va leur donner une
véritable politique de développement régional. On
était en lieu de s'attendre que le projet de loi 19 vienne
répondre à ces demandes-là parce que les structures vont
être prêtes. Eh bien, non.
Si j'examine vraiment le projet de loi 19, c'est évident que,
dans la plupart des articles, ce qu'on nous annonce, c'est uniquement
l'abolition de l'OPDQ. Lorsqu'on fait une réforme, il ne
m'apparaît pas nécessaire de détruire les seuls
éléments qui sont positifs. Parce que l'OPDQ, c'était un
élément positif dans nos régions; c'était
dynamique, on obtenait des réalisations. Et il y aurait peut-être
eu lieu de renforcer la participation de nos fameux conseils régionaux
qui vont être mis sur place avec l'OPDQ plutôt que de repartir, de
détruire cet élément-là, qui était quand
même en place depuis plusieurs années et qui avait donné
des résultats. Abolir un office pour se retrouver, finalement, avec un
conseil régional qui sera, bien sûr, sous la direction, et
ça, c'est un petit peu inquiétant et ça prouve,
évidemment, qu'il n'y a pas de véritable
décentralisation... On confie le développement régional au
ministère du Conseil exécutif et le ministère du Conseil
exécutif est présidé par le premier ministre. Le
secrétaire général est d'office le sous-ministre du
ministère et il possède, évidemment, des pouvoirs
énormes. Ça me fait penser un petit peu, cette
réforme-là, M. le Président, à la réforme de
la santé qui a suscité exactement les mêmes espoirs. Sous
la théorie d'une décentralisation, on se retrouve avec des
structures, mais des structures sans pouvoir et un pouvoir encore plus
centralisateur au niveau du gouvernement. C'est exactement le même
principe, et on le retrouve dans la réforme de la santé comme
dans le développement régional.
L'utilisation des mots, M. le Président, c'est toujours
extrêmement important. Lorsque j'ai regardé le projet de loi 19,
je n'ai pas pu m'empêcher de déplorer qu'on nous parle d'une loi
modifiant diverses dispositions législatives concernant les affaires
régionales. Parler de
développement régional, c'est parier d'un projet
d'envergure auquel tout le monde peut s'associer et c'est, effectivement, jeter
un regard vers l'avenir. Parler des affaires régionales, bien, c'est
parier des affaires courantes, comme on parie de toutes les affaires, les
affaires municipales... C'est déjà une vision restrictive. Mais,
lorsqu'on regarde les pouvoirs qu'on a remis au conseil régional, c'est,
évidemment, plutôt d'affaires régionales qu'il va s'occuper
et non pas de véritable développement régional. Donc, en
ce sens, ça répond peut-être plus véritablement
à l'action qui va être posée dans les régions. (12 h
30)
Le député de Trois-Rivières nous disait que la
fuite de nos cerveaux, dans les régions... les cerveaux avaient fui vers
les grands centres. Bien, j'avoue, M. le Président, que j'aimerais
beaucoup que nos cerveaux au Québec fonctionnent davantage et,
principalement ici, dans ce Parlement. Pour avoir une véritable
politique de développement régional, il faut être
imaginatif, il faut être à l'écoute des gens et il faut ne
pas avoir peur de mettre des choses en place, de passer à l'action et
non de se contenter de certaines petites mesures qui ne viennent absolument
rien régler, au contraire, qui vont susciter, dans les années
à venir, de la frustration, parce que les conseils régionaux
n'auront pas de véritables pouvoirs. On nous pariait du programme
politique «S'ouvrir à demain». Un programme, il faut qu'il
se traduise dans l'action, il faut qu'il se traduise dans le projet de loi. Il
ne se traduit toujours pas dans le projet de loi.
M. le Président, je pense que, dans les différentes
réformes qu'on nous a présentées, que ce soit à
l'éducation, à la santé, au développement
régional, depuis trois ans, ce gouvernement démontre qu'il n'a
aucune vision globale positive pour l'avenir du Québec. C'est normal, je
pense, puisqu'ils n'ont pas en tête, pour notre avenir collectif, un
véritable projet de société. Le Parti
québécois, dont je fais partie, a effectivement une vision
globale, puisque nous voulons un véritable projet de
société, nous voulons la souveraineté du Québec.
Lorsqu'on veut la souveraineté du Québec, c'est évident
qu'on ne peut s'empêcher de penser au rôle que les régions
du Québec devront jouer dans ce Québec souverain. Leur rôle
sera encore plus important, M. le Président.
Donc, notre réflexion là-dessus, elle se fait, elle se
fait depuis plusieurs années et elle se poursuit, et elle doit se
poursuivre dans le milieu, avec les intervenants qui sont concernés.
Lorsqu'on a un projet de société, on ne peut pas ignorer les
régions. On sait à quel point les différentes
régions du Québec sont dynamiques. On nous dit, de l'autre
côté, qu'elles sont dynamiques, mais on n'utilise pas ce
dynamisme. On ne l'utilise aucunement, M. le Président, parce que, si on
l'avait utilisé, on serait vraiment arrivé avec un projet de loi
qui nous aurait proposé une véritable réforme.
Décider que le développement régional, ça se
limite aux affaires régionales, c'est déjà avouer
l'échec de cette nouvelle réforme, et ça, c'est vraiment
très regrettable, M. le Président, parce que tous les milieux
étaient effectivement réceptifs, ils étaient prêts,
ils étaient prêts à collaborer, ils étaient
prêts à agir en concertation, ils n'avaient besoin que d'une
écoute attentive du côté du gouvernement et que d'une
volonté politique, que le résultat de cette écoute se
traduise dans l'action. Dans toutes les réformes qu'on nous a
présentées, il y a toujours eu cet échec, le
problème entre le discours et l'action, de beaux principes, oui, mais la
volonté d'agir ne se rend jamais jusqu'à la véritable
action.
Dans les deux régions que je représente, Laurentides et
Lanaudière, les gens du milieu sont venus nous faire part de leurs
doléances, et je suis convaincue qu'à la lecture du projet de loi
19, parce qu'à ce moment-là ils n'avaient pas pris connaissance
du projet de loi 19, leur déception va être encore beaucoup plus
grande. Les sommets socio-économiques avaient permis et, principalement
dans les régions qui entourent, qui constituent la couronne de
Montréal, parce qu'on sait que ce sont des régions un peu
particulières... Ce ne sont pas des régions qu'on peut
considérer comme ce qu'on appelle, par exemple, si je pense à la
Gaspésie ou à l'Abitibi, des régions naturelles. Ce sont
des régions qui se sont formées à partir de personnes qui
ont quitté le centre-ville de Montréal et qui ont
décidé de venir habiter dans des régions urbaines ou
semi-urbaines et de se développer différemment.
La concertation dans nos milieux était plus difficile au
début, M. le Président. Elle ne pouvait pas se faire facilement
parce que les intérêts étaient divergents, parce que vous
retrouviez dans une même région des besoins extrêmement
différents, et certaines luttes - il faut le dire, au début -
entre le nord et le sud de certaines régions, puisque certaines
régions, dans le passé, avaient réussi à se
développer et que les nouvelles régions qui, elles,
possédaient beaucoup plus de clientèle, se retrouvaient, elles,
sans services.
Si je prends l'exemple de la région de Lanaudière, nous
retrouvons, au nord, tous les services, mais de moins en moins de population;
au sud, une croissance démographique explosive avec très peu de
services. Et, malgré ces divergences, les dernières années
ont permis à la région de Lanaudière de s'entendre sur des
projets, ont permis à la région de Lanaudière de vouloir
créer une véritable région d'appartenance, ce qui
n'était pas le cas au tout début, et nous ont permis de regarder
une véritable politique de développement. C'est évident
que le sommet socio-économique d'avril 1990 a semé le
désespoir
et la déception. Ce sommet s'était traduit par quelques
projets, mais très peu de projets, M. le Président, et des
projets qui sont loin d'être réalisés. À peine 15 %
des projets promis sont réalisés deux ans après la tenue
du sommet socio-économique.
Mais, malgré cet échet financier, nous avons
décidé de continuer à travailler ensemble. Il y a deux
semaines, les membres du Sommet économique permanent de
Lanaudière se sont réunis et ont voté - et ce sera
entériné à l'assemblée générale - sur
le conseil régional qui pourra mettre en place la réforme. C'est
évident que lorsque nous assisterons à cette assemblée
générale, M. le Président, les membres pourront se rendre
compte à quel point le ministre n'a pas rempli ses promesses, à
quel point la réforme qu'il avait annoncée par le projet de loi
19 se traduit par bien peu de choses.
Je résume. Un pouvoir davantage centralisé au niveau du
contrôle, l'abolition de l'OPDQ - on ne sait toujours pas ce qui va
advenir de ces gens, M. le Président - et, enfin, un mince 3 000 000 $
par région à se partager. Et ce n'est pas avec 3 000 000 $ par
région qu'on va pouvoir véritablement doter chacune des
régions d'une véritable politique de développement
régional. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Terrebonne. Nous en sommes toujours à
l'adoption du principe du projet de loi 19, Loi modifiant diverses dispositions
législatives concernant les affaires régionales. Je reconnais Mme
la vice-présidente de la commission de l'aménagement et des
équipements et députée de Mégantic-Compton. Mme la
députée, la parole est à vous.
Mme Madeleine Bélanger
Mme Bélanger: Merci, M. le Président. Parler des
régions est pour moi un plaisir, plus qu'un plaisir, étant
représentante de l'un, sinon du plus beau comté de la province:
Mégantic-Compton. Étant représentante régionale, je
suis à même de constater le dynamisme et le potentiel qu'on
retrouve en région. Mais, parallèlement à ce dynamisme, je
constate, et ce, de plus en plus, que les régions ne cessent
d'évoluer.
Vous savez comme moi que ce phénomène n'est pas
récent, mais on peut tout de même affirmer qu'il s'accentue
davantage avec le temps. Un exemple qui peut facilement illustrer mon propos
est sans doute la volonté de plus en plus grande des régions de
se prendre en main et de décider de leur avenir économique. Cela,
M. le Président, le gouvernement libéral l'a compris. La preuve,
c'est le projet de loi 19 dont nous discutons le contenu en ce moment. (12 h
40)
Pendant les minutes qui suivent, M. le Président, vous me
permettrez donc de donner les grandes lignes de ce projet de loi mis de l'avant
par le ministre délégué au développement
régional, un projet de loi qui saura, j'en suis certaine,
répondre aux attentes les plus vives de toutes les régions du
Québec. Mais avant d'aller plus loin, vous me permettrez d'expliquer les
raisons qui ont encouragé mon gouvernement à aller de l'avant
dans sa nouvelle stratégie en matière de développement
régional.
En premier lieu, M. le Président, nous avons vu naître,
depuis quelque temps déjà, une affirmation de plus en plus claire
des dynamismes régionaux. Effectivement, nous avons décelé
une volonté très nette des régions d'assumer davantage
leurs responsabilités en ce qui a trait à leur
développement économique. Puis, en second lieu, nous avons pris
conscience que le rôle de l'État avait, lui aussi,
évolué. Par le passé, on se souviendra que l'État
était appelé à jouer un rôle très
présent, un rôle qui a marqué, d'une façon
particulière, toute une époque. Mais vous conviendrez avec moi
qu'il y a quelques années, à l'époque de
l'État-providence, les ressources financières de l'État
n'étaient pas ce qu'elles sont devenues aujourd'hui. Nous assistions
alors à l'édification d'un État entrepreneur et
interventionniste. Aujourd'hui, les choses ont changé. Nous devons
concevoir le rôle de l'État comme celui d'accompagnateur en raison
de la rareté des ressources financières.
Ainsi donc, M. le Président, le gouvernement du Québec a
décidé d'adopter une stratégie qui consiste à
centrer les activités de l'État sur ses fonctions fondamentales.
En d'autres termes, nous voulons responsabiliser les régions dans un
contexte de concertation et de partenariat. M. le Président, cette
stratégie d'action dont il est question dans le projet de loi 19
nécessite, tant de la part du gouvernement qu'au niveau des
régions, des aménagements importants. Avant de les
énumérer, je ferai un petit retour en arrière pour
rappeler les objectifs de la reforme.
C'est ainsi qu'en février 1991 le ministre responsable du
Développement régional a annoncé un moratoire sur les
sommets socio-économiques régionaux. Ce moratoire a permis
d'entamer un processus de réflexion sur les éléments d'une
politique globale de développement régional. Cette
réflexion, M. le Président, à laquelle a participé
un groupe de travail composé de hauts fonctionnaires des
ministères concernés par le développement des
régions, a été menée de main de maître. C'est
d'ailleurs à la lecture des recommandations de ce groupe de travail que
des évaluations et des consultations ont été menées
quelques mois plus tard et qui ont permis au ministre responsable du
Développement régional de soumettre au Conseil des ministres,
à l'automne 1991, des propositions visant le renouvellement de notre
stratégie en matière de développement régional.
Cette nouvelle stratégie, M. le Président, je vous en
présente à l'instant les grandes lignes.
Comme je le disais il y a quelques instants, la démarche
d'accompagnement du dynamisme des régions nécessite des
réaménagements, et le premier de ceux-ci est certes la mise sur
pied de conseils régionaux de développement. Ce conseil est
formé par les députés de la région, les élus
municipaux, les agents socio-économiques de même que des
représentants des organismes du milieu, et ces conseils régionaux
de développement seront institués dans chaque région du
Québec.
Concrètement, M. le Président, ces conseils devront
assurer la coordination du développement régional en partenariat
avec le gouvernement du Québec. Entre autres fonctions, ces conseils
auront la responsabilité d'assurer la concertation des intervenants et
de donner des avis au gouvernement. Ils devront également définir
une stratégie de développement, c'est-à-dire identifier
les priorités régionales et déterminer des axes de
développement. Les conseils devront aussi assurer la coordination et le
suivi d'actions et de programmes de développement sur leur territoire et
gérer, conjointement avec le ministre délégué aux
Affaires régionales, un fonds de développement qui sera
attribué par le gouvernement à chacune des régions.
M. le Président, cette nouvelle stratégie de
développement régional est également basée sur une
importante régionalisation de 45 000 000 $, en voici d'ailleurs les
détails. En appuyant notre volonté de responsabiliser davantage
les régions du Québec, le ministre responsable du dossier a
décidé que la majeure partie des budgets gérés
jusqu'ici par l'Office de planification et de développement du
Québec, l'OPDQ, seront déployés en faveur des
régions du Québec. Ainsi, chaque région du Québec
recevra un montant annuel moyen de 3 000 000 $. Quand la députée
de Terrebonne disait qu'on avait aboli le PRECEP, les 3 000 000 $ vont
être divisés comme ceci. Il y aura 300 000 $ pour le budget de
concertation, pour tous les intervenants concernés dans le conseil de
développement et 700 000 $ seront dévolus à l'aide aux
industries, jumeau du programme PRECEP. Si les régions décident
de se servir de ces 3 000 000 $ pour faire du PRECEP, le ministre a dit en
commission parlementaire que les gens de la région pourront se servir
des 3 000 000 $ pour faire du PRECEP. C'est ça, la
décentralisation.
Ainsi, sur les 54 000 000 $ qui étaient gérés par
l'OPDQ, le gouvernement régionalise donc 45 000 000 $ en faveur des
instances reconnues dans les différentes régions du
Québec. Le nouveau secrétariat aux affaires régionales
disposera, quant à lui, d'un budget de 9 000 000 $. Cette somme servira
à répondre à des besoins conjoncturels et permettra au
ministre délégué aux Affaires régionales de
réagir à des situations particulières dans les
régions connaissant plus de difficultés. Il s'agit donc, vous
conviendrez avec moi, d'une importante organisation des moyens financiers, afin
d'optimiser les ressources dont dispose l'État pour le
développement des régions.
Par ailleurs, à partir de l'exercice budgétaire 1992-1993,
les ministères directement concernés par le développement
régional seront ainsi appelés à identifier à leur
budget un programme ou élément de programme sous l'appellation
budget régionalisé. Cette régionalisation des
crédits des ministères vise à atteindre, en période
de croisière, 500 000 000 $ annuellement. Le député
d'Abitibi-Ouest ridiculisait cette participation des ministères
sectoriels. C'est évident que ça ne sera pas le mois prochain,
mais on dit que, en période de croisière, ces 500 000 000 $
seront gérés par les régions ou décidés par
les régions, la façon de les dépenser... L'affectation de
ces ressources financières relèvera donc du ministère
sectoriel concerné, en concertation avec chacun des conseils
régionaux de développement et ce, dans le contexte de la
signature d'une entente-cadre dont l'une des annexes consignera l'affectation
des crédits des ministères.
Par ailleurs, ces budgets spécifiques proviendront de plus d'une
quinzaine de ministères et organismes différents et contribueront
ainsi à créer un plus grand impact sur le développement
régional intégré des régions concernées.
Enfin, dans le cadre de la nouvelle stratégie de
développement régional, mon gouvernement est fier d'annoncer que
des délégués au développement régional
représenteront le gouvernement du Québec dans les régions
administratives. Ainsi, ces délégués directement
rattachés au ministère du Conseil exécutif assureront la
coordination interministérielle des activités de notre
gouvernement. Ils relèveront directement du secrétaire
général associé aux affaires régionales, ce qui
démontre que nous, du gouvernement libéral du Québec,
voulons inscrire les régions dans le processus décisionnel du
ministère du Conseil exécutif. (12 h 50)
Entre autres fonctions, les délégués
régionaux auront pour mandat d'harmoniser l'action des divers
ministères en région. Cette fonction sera assumée par le
biais de conférences administratives régionales. Ces
dernières réuniront dans chaque région les
représentants des ministères ou des organismes gouvernementaux.
Par ailleurs, en plus d'être, en quelque sorte, des interlocuteurs
officiels de l'administration gouvernementale, ces
délégués auront à assurer la préparation et
le suivi des ententes-cadres de développement. En effet, ces
dernières continueront à être négociées et
signées entre le gouvernement du Québec et les conseils
régionaux. Les délégués auront ainsi à
appuyer la démarche de concertation régionale,
particulièrement en ce qui a trait à la définition d'axes
de développement pouvant soutenir le développement de chacune des
régions du Québec.
M. le Président, ce nouveau rôle des
délégués doit principalement viser à
responsabiliser davantage les instances régionales et non à se
substituer à elles. Alors, le principe d'une démarche
d'accompagnement des dynamis-mes régionaux sera appliqué, ce qui
entraînera une régionalisation de certains programmes d'aide
financière.
Voilà, M. le Président, qui résume l'essentiel de
la nouvelle stratégie de notre gouvernement en matière de
développement régional. M. le Président, si nous avons
élaboré cette stratégie, cela ne veut pas dire pour autant
que nous ne nous préoccuperons plus du développement
régional au sens large, loin de là, car pour nous, du
gouvernement libéral, le développement économique du
Québec passe inévitablement par le développement des
régions. Alors, le gouvernement continuera d'être un intervenant
économique important dans les économies régionales.
Cependant, le rôle qu'il exercera sera celui d'un partenaire des agents
économiques. Il sera un allié. Ainsi, la démarche que l'on
retrouve dans le projet de loi 19 vise purement et simplement à
responsabiliser les régions dans un contexte de partenariat, car qui
n'est pas mieux placé que les régions pour savoir et
connaître leurs besoins.
En définitive, M. le Président, on peut affirmer haut et
fort que ce projet de loi répond aux demandes des régions du
Québec. Il y répond en ce sens qu'il les encourage dans leur
démarche vers une plus grande autonomie, mais il y répond
également parce qu'il fait en sorte que les sommes d'argent
affectées par l'État et les intervenants régionaux soient
de plus en plus utilisées de manière à combler les besoins
des régions. C'est ça, M. le Président, être
à l'écoute de la population.
Je m'en voudrais de terminer sans ajouter que ce projet de loi se situe
dans la continuité des grands actes, de ce qui a déjà
été fait. Depuis 1985, mon gouvernement a tenu a
développer un esprit de concertation avec les régions.
Aujourd'hui, avec les résultats que l'on connaît, je suis
persuadée que c'est cette concertation qui a permis aux régions
de préciser leurs besoins. Cette politique de développement
régional se situe dans la continuité de la bonne gestion de mon
gouvernement et c'est, pour moi, une raison de plus pour être très
fière du gouvernement libéral. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Mégantic-Compton. Je cède la parole, sur
ce même sujet, à Mme la députée de Johnson.
Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Est-ce que je
peux vous demander l'ajournement du débat?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion de
Mme la députée de Johnson, la proposition d'ajournement du
débat, est adoptée? Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Donc, le
débat est ajourné. En conséquence, compte tenu de l'heure,
les travaux de cette Assemblée sont suspendus jusqu'à 15
heures.
(Suspension de la séance à 12 h 55)
(Reprise à 15 h 6)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre
place, mesdames, messieurs. Nous reprenons les affaires du jour. M. le ministre
de l'Agriculture.
M. Picotte: Merci, M. le Président. Je vous demanderais,
s'il vous plaît, d'appeler, pour les fins de nos travaux, l'article
12.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 12,
l'Assemblée reprend le débat sur l'adoption du principe du projet
de loi 19, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant
les affaires régionales. Tel qu'avant la suspension des débats,
je reconnais Mme la députée de Johnson.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci beaucoup, M. le Président. Ce projet de
loi 19, qui contient 15 articles, je pense, semble être un projet de loi
tout à fait ordinaire; peu d'articles, mais, en fait, ce projet de loi
vient changer une décennie, pratiquement. Vous savez, dans toutes les
régions du Québec, il existait un programme qui s'appelait le
Fonds de développement régional et nous avions dans chacune de
nos régions aussi l'Office de planification et de développement
du Québec qui comprenait un certain nombre de personnes qui
travaillaient à l'intérieur pour desservir chacun des
comtés faisant partie de nos régions respectives.
Je ne pense pas, M. le Président, que le gouvernement ait
été obligé de faire ce projet de loi, le projet de loi 19,
parce que ça allait mal avec l'OPDQ ou le développement
régional. Je pense que si on demandait à chacun des
parlementaires ici quels étaient les services qu'ils recevaient dans
chacune de leur région, en relation avec les besoins de leur
comté et en relation avec les services qui étaient offerts au
niveau de l'OPDQ et au niveau du Fonds de développement
régional... Je ne crois pas me tromper en vous disant que les services
étaient là et que les fonctionnaires travaillant dans ces deux
entités étaient des gens qui connaissaient bien leur
région et qui faisaient en sorte d'appuyer les demandes des
municipalités ou des
députés qui faisaient, par ricochet, une aide aux demandes
qui étaient faites par les municipalités de leur comté. Ce
n'est certainement pas à cause d'une chose boiteuse, d'un instrument
boiteux, d'un service qui n'était pas convenable. Je ne crois pas, M. le
Président, parce que je pense que les régions, les personnes
travaillant dans nos régions donnaient un excellent service, à la
fois aux municipalités et aux députés responsables de ces
comtés.
Nous avions à acheminer nos dossiers vis-à-vis de ces
instances-là, et il y avait une analyse qui se faisait, et les relations
étaient très courtoises, et nous recevions par le fait même
les services auxquels nous avions droit. À notre grande surprise, il
découlait... Il faut que je dise aussi, M. le Président, qu'il
découlait de ces centres de services là les fameux sommets
socio-économiques, dont chacune de nos régions a dû
certainement profiter. Ces sommets socio-économiques, qui avaient lieu
aux quatre ans, finalement... C'était un sommet, c'était une
biennale, ensuite, c'était un sommet si le besoin du milieu se faisait
sentir. Ces sommets socio-économiques avaient plusieurs volets, entre
autres de pouvoir, pendant une année, une année, M. le
Président, de travail... Les gens de toute une région, les
pauvres comme les riches, les jeunes comme les plus âgés
s'assoyaient à une même table pour trouver quel était le
meilleur outil, le meilleur équipement qui ferait en sorte de
développer son petit coin de pays, à la fois chez lui, et faisant
en sorte que la collectivité de sa région pouvait profiter aussi
d'un équipement ou d'un service à la population qui était
inexistant. (15 h 10)
Au cours de cette année, où on s'assoyait tous ensemble,
on faisait connaissance. Socialement, on se retrouvait, on partageait les
mêmes idées, les mêmes idées pour dire: Bon, dans
notre région, là, après concertation
générale, on se rend compte que les manquements... Comme chez
nous, M. le Président, une région extraordinaire en termes de
tourisme et en termes de besoin d'équipements pour inviter chez nous
cette belle visite qui laisse de l'argent et qui fait en sorte que
l'économie tourne bien.
Donc, les gens de chez nous s'étaient assis pendant une
année et avaient monté leur sommet. Ça a eu lieu en
décembre - non, au printemps 1985. Au printemps 1985, le premier sommet
de la région de l'Estrie. Nous avions travaillé une année
avant, bien sûr, pour en arriver à une concertation. On avait fait
du déblayage, bien sûr - parce qu'au début tu as 51
dossiers que tu dois traiter, et puis ça s'en vient dans l'entonnoir
après discussion des uns et des autres - et nous en sommes
arrivés à faire une demande globale de quelques dossiers qui
restaient sur la table, et que tous et chacun autour avaient jugé les
plus cruciaux, les plus importants pour un développement harmonieux de
sa région.
C'était le lot de l'Estrie et nous en étions très
fiers. Nous avions réussi à asseoir à la même table
des gens qui ne s'étaient jamais parlé avant, et nous avions fait
ensemble une concertation extraordinaire et c'avait abouti sur des projets bien
concrets qui faisaient l'affaire des uns et des autres. M. le Président,
la région au complet était très heureuse d'avoir pu,
à la fois, se parler, à la fois décider ensemble de ce
qu'elle souhaitait pour un mieux-être de notre région. C'est ainsi
que nous avons travaillé pour obtenir ça.
Malheureusement, le Parti libéral, le gouvernement libéral
est entré en fonction, et quelques années après son
entrée en fonction voilà qu'on met un moratoire sur les sommets
socio-économiques et sur les biennales. On acceptait, bien sûr, de
tenir ceux qui étaient en liste, en selle, si vous voulez, mais ceux qui
avaient déjà tenu cette activité ne devenaient plus
éligibles et on mettait un moratoire sur tous les autres qui
espéraient en tenir un parce qu'on voyait bien que c'était un
«plus», un positif qui se passait dans les régions qui
avaient cet avantage-là de pouvoir tenir un sommet
socio-économique.
Malheureusement, M. le Président, le gouvernement libéral
a décidé de mettre la hache dans les sommets
socio-économiques. C'a commencé par un moratoire, soi-disant pour
mieux comprendre et mieux définir les besoins. Et après ça
on a dit: On verra, on va mettre un moratoire - si je me souviens bien. Ce ne
sont peut-être pas les mots exacts que le ministre responsable avait
utilisés à l'époque, mais il avait dit, en gros: On met un
moratoire, nous verrons ce qu'on fera par après. On va tenir ceux qui
sont préparés et après ça on verra.
Malheureusement, M. le Président, c'a été aboli.
Les sommets socio-économiques, comme on les connaissait et comme chacun
en tirait son profit, ont été abolis. Par le fait même, le
rôle de l'OPDQ, qui est un service bien fait en région, et le
rôle du développement régional devenaient - l'OPDQ au moins
- caducs. Donc, à ce moment-là, le ministre responsable a
décidé, avec la loi 19, de changer les règles du jeu.
Mais, par contre, avant de changer les règles du jeu, il a tout aboli et
il a mis le bâton et la carotte. Il a mis, à la face des
régions, une possibilité de 3 000 000 $ par région; 45 000
000 $ en tout, divisé par 15 régions, ça nous donne 3 000
000 $ par région. Il a dit: Tiens! chaque région va recevoir 3
000 000 $, sauf... Ça, c'était en décembre. Une belle
annonce! Ça paraît bien. Tu dis aux régions: 3 000 000 $
qui vont s'en aller chez vous; vous allez être les décideurs et
ça va fonctionner! Tu sais ce que je veux dire? Quand tu as des
régions qui ont besoin d'argent, tu sautes là-dessus, 3 000 000
$, tu es content. Même si tu ne sais pas trop où tu t'en vas, tu
dis: Aie! il y a 3 000 000 $ dans une enveloppe pour nous autres. Hein! tu
capotes quasiment. Tu dis: Aie!
notre région en a vraiment besoin, elle a le goût de faire
des choses. Ils ont le goût de bouger, ils ont le goût de s'aider,
ils ont le goût de se donner la main pour découvrir ensemble de
meilleurs dossiers pour chez nous - pour chez nous comme pour d'autres
régions, mais je connais mieux la mienne que les autres, bien
sûr.
Donc, les 3 000 000 $ étaient là. Les gens étaient
fougueux, ils voulaient faire quelque chose. Sauf que le ministre ne leur avait
pas dit comment ils utiliseraient ça. Il n'a pas dit ça. Il n'y a
pas eu d'orientations et il n'y a pas eu non plus de livre vert, comme on fait
toujours lorsqu'il y a une chose nouvelle qui s'implante. Parce que c'est
relativement nouveau. On n'a rien. On a mis l'argent, et on a dit: Bon!
débattez-vous avec ça et, après ça, on reviendra.
Après ça, où a été le débat public?
Ça a failli virer au vinaigre, parce que les 3 000 000 $ étaient
là, les gens voulaient avoir les 3 000 000 $, mais, là, on ne
savait pas dans quel cadre. Seraient-ce les maires ou les préfets qui
seraient responsables de ces fameux 3 000 000 $ là? Est-ce que ce serait
les socio-économiques? Est-ce que ce serait les députés de
la région? Mystère et boule de gomme! Nous n'avions pas,
absolument pas de référence. Il y avait les 3 000 000 $. Et,
aujourd'hui, regardez, on est rendu au 3 juin. Il a averti les régions
au mois de décembre 1991. Là, il nous arrive avec le projet de
loi 19, le 3 juin, six mois plus tard, après que les gens se sont
essayés de voir qui pourrait bien être les maîtres d'oeuvre,
être les parrains, si vous voulez, de ces 3 000 000 $ pour faire en sorte
qu'on les utilise de façon sage, qu'on les utilise de façon
à ce que les gens de notre région soient contents et qu'ils se
sentent partie prenante dans notre région, qu'ils se sentent partie
prenante à une décision importante d'utilisation de fonds
publics.
Je dois dire que les gens de l'Estrie n'ont pas les pieds dans la
même bottine, M. le Président. Ça fait longtemps que je
sais ça. Ce sont des gens de concertation. Il y avait une table de
concertation avant qui a été, bien sûr, transformée
un tant soit peu aux exigences du ministre pour faire en sorte qu'il y ait,
chez nous comme ailleurs... Mais, comme de raison, après que les
municipalités eurent subi le coût épouvantable que ce
gouvernement-là leur a donné sur la tête en changeant les
règles du jeu de la fiscalité municipale, eux pensaient bien que,
là, ces 3 000 000 $, ce serait eux qui les administreraient.
Chez nous, ça a été la foire. Je vous le dis, M. le
Président, la foire. Tout le monde tirait la couverte sur leur bord -
non, ce n'est pas toi, et oui, c'est moi, et ainsi de suite - pour finalement
s'asseoir à la même table, et il en a découlé qu'il
y a 36 personnes, finalement, qui font partie de cette fameuse régie ou
- je ne sais pas trop comment - CRD que vous l'appelez, conseil régional
de développement. Il y a sept maires, sept préfets, sept
députés - ça doit être le «lucky seven»
- et il y a 14 socio-économiques. Toute cette belle
équipe-là, c'est dirigé par le président, Janvier
Cliche, qui est un homme fort représentatif de notre région et
qui s'implique dans plusieurs dossiers. (15 h 20)
Ce sont des gens de bonne volonté, qui veulent faire des choses,
qui ont le goût de bouger, comme je disais tout à l'heure. Mais,
M. le Président, ils n'avaient pas les cadres, ils n'avaient pas entre
leurs mains les demandes, les exigences, les critères que le ministre
voulait bien nous imposer. Ils n'avaient pas ça. On l'a, là. On
est en train d'en discuter. Est-ce que ça va être tel quel qu'on
va l'adopter? Est-ce qu'on va le modifier? On ne le sait pas, on vient de
l'avoir.
Puis une politique faite à l'envers de même, comment
voulez-vous que les gens aient confiance en ça? On ne sait rien de la
politique. Le ministre n'a pas daigné consulter. Le ministre n'a pas
daigné faire de débat public. Le ministre n'a pas
présenté ses orientations au début du processus. C'est le
monde à l'envers. Tu as l'argent? Je te reviendrai dans quelque temps
avec les critères que tu as besoin de connaître. Sauf, M. le
Président, que, là, il faut que tu te poses une question. Tu dis:
Bon, bien, durant l'année où tu vas poser tes assises, l'argent,
les 3 000 000 $ que tu as dans ton enveloppe, tu ne peux pas les distribuer. Il
n'y en a pas de critères. Il n'y en a pas. Ça fait que ça
veut dire que les gens de ma région, comme les gens de toutes les
régions du Québec, vont connaître une année
sèche, M. le Président. Il n'y aura pas un cent de
dépensé, sauf les projets ad hoc, probablement, que le ministre
acceptera, lui.
Mais, en région, comment voulez-vous que notre région soit
fin prête à accorder, dès cette année, de l'argent,
pendant que la structure n'est pas validée? Puis, dans bien des
régions, ça a été pire que dans la mienne. J'ai
dit: Le diable est aux vaches chez nous, mais il y en avait ailleurs. Je me
suis informée à des collègues. J'ai dit: Comment ça
va, chez vous, l'implantation de la nouvelle réforme Picotte, comme on
l'appelle? M. le Président, ils ont dit: Bien, ça va mal chez
nous aussi. Les gens ne s'entendent pas. On n'a rien. Ils ont été
envoyés au front pas de fusil. Qu'est-ce que vous voulez faire? Pas de
directives, rien. Ces pauvres gens font bien leur possible, mais ils se disent:
Tout à coup qu'on fait quelque chose et que ça ne correspond pas
aux volontés du ministre ou du gouvernement, alors, ça ne nous
donne rien de travailler pour rien. On tire la couverte, on se chicane pour
rien, et c'est supposé être un outil de concertation, pas un outil
de «chicanation», comme on dit, pas un outil pour se battre, un
outil pour se concerter.
Alors, M. le Président, on est un peu beaucoup troublés
par un agissement comme
celui-ci. Ce n'est pas parce qu'on ne veut pas s'asseoir et se mettre
à travailler ensemble, mais découvrir ensemble quelle
était la meilleure façon de faire avancer les dossiers de notre
région. On a bien une petite idée qu'on pourrait s'en aller dans
le style tourisme, socioculturel et ainsi de suite. On a bien cette petite
idée-là, mais on n'est pas au point parce qu'on ne savait pas
comment le ministre souhaiterait que ça se passe dans notre
région. Il faut qu'on ait son aval, vous le savez, à la toute
fin, pour être capables d'ouvrir, finalement, cette fameuse enveloppe et
de retirer quelques centaines de milliers de dollars pour la réalisation
de ces projets.
Donc, M. le Président, ça va faire que, pour une
année, je l'ai dit tout à l'heure, toutes nos régions vont
sécher et elles n'auront pas un sou parce que ce n'est pas prêt.
Ça veut dire que le gouvernement, les 45 000 000 $, il va les garder
dans sa poche. Ça va retourner au fonds consolidé probablement,
hormis, comme je vous le dis, que le ministre me sortirait un lapin de son
chapeau aujourd'hui et qu'il me dirait: Bon, écoute, là, je n'ai
pas pu te le dire, mais je vais te sortir ça. Tu sais, le magicien,
là. Il sort un lapin, et il dit: Je vais tout te raconter ça. Si
c'est ça, bravo! Je vais rapporter la réponse du ministre chez
nous, et je vais dire: Regardez, j'ai questionné le ministre.
Voilà ce qu'il dit. Vous allez être capables de partir avec
ça. J'ai même des municipalités qui se sont
adressées à la structure qui n'est pas encore tout à fait
validée, mais ça semble vouloir prendre racine. Puis, il y a des
maires qui s'y sont adressés pour obtenir un certain montant pour des
choses très précises, entre autres, un parc économique
dans Valcourt et Valcourt canton pour des gens qui vont se regrouper pour
s'aider, afin de relever l'économie.
Vous savez, M. le Président, je l'ai dit à quelques
reprises, c'est 14 % de chômage qu'on a en Estrie. C'est catastrophique!
Il y a plusieurs entreprises qui ont fermé leurs portes. Donc, ce serait
le temps de sortir quelques centaines de milliers de dollars ou quelques
millions pour remettre ce train sur les rails. Si on avait eu une politique
bien campée et que les gens seraient partis là-dedans en sachant
où était la bonne voie à prendre, il n'y aurait pas eu une
année sèche pour nos régions. Il y aurait eu une
continuité et les gens auraient pu, tous ensemble, faire en sorte que
des dossiers se réalisent dès cette année et
améliorer la qualité de vie de nos régions.
M. le Président, je regrette mais, le projet de loi, ça ne
fait pas mon affaire pour le moment et ça ne fait pas l'affaire des gens
de ma région. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): alors, merci, mme la
députée de johnson. nous en sommes toujours à
l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 19, loi modifiant
diverses dispositions législatives concernant les affaires
régionales. Je reconnais Mme la présidente de la commission des
affaires sociales et députée de Taillon. Mme la
députée, je vous cède la parole.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Je vous remercie, M. le Président. Je pense
qu'il serait intéressant que, d'entrée de jeu, je souligne les
commentaires fort pertinents et fort judicieux de ma collègue de Johnson
qui, depuis un long moment, a à discuter, à échanger,
à négocier, à se concerter avec plus d'une trentaine de
municipalités dans son comté. Quand elle nous explique ce que
cela a comme effet, ce projet de loi, et ce que cela risque d'avoir comme
effet, ce projet de loi, elle nous traduit ainsi un quotidien à ras le
sol, mais qui concerne justement la vie des gens et qui fait en sorte que le
projet qui est devant nous, présenté par le ministre responsable
du Développement régional, finit par décevoir à peu
près tout le monde, M. le Président, et particulièrement
les intervenants sur le terrain.
Pendant le débat, je pourrai vous faire la démonstration
qu'il a aussi cet impact fort négatif dans une région comme la
mienne, la Montérégie, qui est différente,
évidemment, qui est plus urbanisée qu'une région comme
celle que représente ma collègue, la députée de
Johnson, mais pour laquelle on est confronté aux mêmes enjeux et
dans laquelle les acteurs sont aussi en désaccord, finalement, que dans
d'autres régions à travers le Québec.
Avant d'aborder ces aspects un petit peu plus précis du projet
qui est devant nous, j'aimerais me permettre de faire une réflexion sur
ce que ça peut signifier, la notion de développement
régional pour l'économie d'un pays et pour le bien-être des
citoyens et des citoyennes qui habitent ce pays. Ce que ça veut dire,
c'est que l'ensemble des sphères d'activité de notre vie
collective doivent être le mieux coordonné, le mieux agencé
possible. De la culture en passant par l'éducation, par la santé,
par la distribution des services sociaux, par le tourisme, par les
infrastructures de développement économique, par les parcs
industriels, que tout l'ensemble de ces secteurs d'activité essaient de
se coordonner pour que les décideurs concernés tirent ensemble,
dans la même direction, et que chacun des citoyens et chacune des
citoyennes qui vivent dans ces régions retire le maximum possible de
bienfaits des décisions qui sont prises en matière sociale,
culturelle, économique, etc. (15 h 30)
Le bien-être, je dirais le bien-être collectif dans ce
sens-là, se définit par le fait de pouvoir avoir la meilleure
qualité de vie possible. La meilleure qualité de vie possible, en
commençant d'abord par un minimum de quantités à
résoudre,
soit le pain et le beurre, soit l'emploi, parce que c'est là que
ça commence. Si on croit que c'est utile, que c'est nécessaire
d'améliorer la qualité de notre vie, on va d'abord s'assurer
qu'il y a une base solide sur laquelle construire. Bon. Alors, tous les gestes
que l'on pose à l'égard d'une politique de développement
régional - et je tiens aux mots «développement
régional» et non pas «affaires régionales»,
comme les mots qui sont utilisés par le ministre dans son projet de loi.
Une politique, donc, de développement régional, c'est
essentiellement une politique qui va tenter d'améliorer le
mieux-être collectif des gens qui habitent un territoire. C'est
ça, les fins d'une politique de développement
régional.
Ce qu'on constate actuellement, au Québec, M. le
Président, c'est que, dans tous les ministères qui sont
concernés, chez tous les décideurs politiques du niveau national,
on tire, chacun dans sa direction sans retrouver quelque part une
cohésion dans la philosophie, dans les principes et,
éventuellement, dans l'action, M. le Président. Puis, ce serait
intéressant, si les collègues étaient là, de
mentionner... Par exemple, au ministère de la Santé et des
Services sociaux, nous avons fait une révision de la Loi sur les
services de santé et les services sociaux dans son aspect de
distribution et d'organisation de la distribution des services. On a donc tout
révisé la façon dont on allait choisir les
décideurs au niveau régional. On a donc mis en place des
régies régionales. On l'a fait, il y a déjà
quelques années, du côté de la main-d'oeuvre et, je dirais,
de l'éducation populaire, de l'éducation aux adultes, en mettant
en place des tables de concertation pour lesquelles on propose des changements
en profondeur et pour lesquelles on propose, entre autres, la mise en place
d'une nouvelle institution concernant la main-d'oeuvre, une
Société de la main-d'oeuvre qui aura des assises
régionales. Il y a, au niveau de la culture, au niveau du tourisme, des
organismes issus du milieu, qui sont des conseils du tourisme, des conseils des
loisirs, de la culture, donc, issus du milieu et qui sont constitués en
organisations pour rendre des services aux gens et, parfois, pour
essentiellement concerter les décideurs qui sont là.
Alors, si on faisait comme ça tout le tour des secteurs
d'activité, on constaterait que ce gouvernement, M. le Président,
manque de vision, de perspective et de coordination de l'ensemble de ses
politiques pour une meilleure cohésion de ces politiques-là. Et,
quand chacun des ministres tire dans sa direction, on s'imagine qu'au moins le
ministre responsable du Développement régional - je
précise, non pas des affaires régionales, parce que ça
m'agace profondément ce qu'il veut qu'on change - devrait prendre, lui,
un petit peu de distance par rapport à cela, avoir une vision d'ensemble
un petit peu plus systématique et dire comment on va attacher les fils
d'une organisation à l'autre, comment on va mieux se coordon- ner et,
surtout, qui va devoir rendre des comptes à la population pour les
gestes qui vont être posés sur une base locale et régionale
- parce qu'on s'entend, on parle de développement régional.
Or, dans les faits - et c'est probablement un des plus grands reproches
qu'on peut faire au projet qui est devant nous - il n'y a pas cette vision
d'ensemble, cette perspective qui dirait: Voici comment et à quelles
fins nous concevons le développement régional. Voici quels sont
les interlocuteurs, voici quels sont les décideurs, voici quels sont les
intervenants et voici comment nous souhaitons mettre de la cohésion
à l'intérieur de cela, pour que les objectifs soient atteints
avec la meilleure façon possible de le faire. On continue, quand on
regarde ce qui se passe, d'avoir une vision morcelée de ce qui va se
faire sur le territoire et de ne pas être capables de tirer de ligne.
Je vais vous dire, M. le Président, que cela est aussi le
résultat d'une réalité à laquelle Québec est
confronté à cause de son statut politique, ce qui fait
hésiter très largement les gouvernements. Peu importe,
d'ailleurs, de quelle formation politique sont issus ces gouvernements, notre
statut politique fait en sorte que nous partageons déjà des
pouvoirs avec un État central, le niveau fédéral, en
matière de développement régional.
C'est peut-être moins vrai quand on regarde la santé ou
l'éducation, parce que sont des champs d'activité qui sont
clairement identifiés, qui sont de la responsabilité des
provinces, donc, dans notre cas, de la responsabilité du Québec.
Mais, à cause du pouvoir de dépenser qu'a le niveau central et
à cause aussi du manque de clarté quant aux
responsabilités de chacun des niveaux de gouvernement en matière
de développement économique et, donc, en matière de
transport, en matière de communications, en matière de tourisme,
en matière d'aménagement du territoire, en matière
d'infrastructures industrielles, à cause, donc, de ce manque de
clarté quant aux responsabilités respectives de chacun des
niveaux de gouvernement, le gouvernement de Québec se trouve sans
arrêt en situation de négocier avec le partenaire
fédéral qui, évidemment...
On pourrait constater par des exemples très précis,
là où il y a eu des ententes entre le Québec et le
gouvernement central, le gouvernement d'Ottawa, que la bureaucratie, la
lourdeur, l'absence de volonté politique d'une réelle entente,
parce que les champs d'activité sont mal partagés, on pourrait
constater que ça donne des lenteurs dont font les frais nos concitoyens
et nos concitoyennes, parce que, quand il y a lenteur, il y a absence d'action.
Il n'y a donc pas d'investissements dans nos infrastructures qui sont
nécessaires, peu importe dans quel secteur, je répète,
tourisme, aménagement du territoire, transport ou autre chose.
Donc, et je reviens au fondement même de la question, le dilemme
auquel est confronté le gouvernement actuel, auquel nous avons
été confrontés et auquel d'autres avant nous l'ont
été. C'est que nous sommes déjà dans une situation
ambiguë, quant aux responsabilités en matière de
développement régional, entre le gouvernement d'Ottawa et le
gouvernement de Québec et, donc, lorsqu'on veut passer à un autre
cran, si on veut, de partage de responsabilités et qu'on veut essayer
d'avoir une vision claire de ce que serait l'aménagement nouveau des
pouvoirs entre le niveau central à Québec et le niveau local ou
régional, que ce soit au niveau de la ville, de la municipalité,
ou de la MRC, de la municipalité régionale de comté, comme
on sait que c'est déjà compliqué que d'avoir à
départager les responsabilités et à les assumer, à
cause de ce pouvoir omniprésent d'Ottawa dans sa capacité de
dépenser, c'est évident que de passer à l'autre
étape, qui est de dire: Maintenant je prends la moitié des
pouvoirs que j'ai, parce que c'est la moitié dont je dispose comme
gouvernement... Puis c'est vrai, peu importent nos options politiques. La
moitié des pouvoirs que j'ai, maintenant je vais les repartager à
nouveau avec un autre palier de décision. Comme on sait fort bien qu'on
s'en irait vers une inefficacité, une incapacité d'agir, on
arrive avec ce que nous présente le ministre responsable du
Développement régional, on arrive avec des miettes, avec des
grenailles, avec des concepts qui ne sont pas précis, avec des
orientations qui ne sont pas claires, avec des niveaux de décision
où on ne sait pas qui va décider sur quoi, dans quel secteur, sur
quel territoire.
Puis il faut voir, actuellement, je dirais, le marchandage auquel on
assiste dans toutes les régions du Québec sur qui va former
l'instance régionale, qui va avoir le leadership de cette instance.
Est-ce que ce seront des élus qui sont imputables devant leur population
et qui ont des pouvoirs de taxation? Est-ce que ce seront des organismes
communautaires, des organismes sociaux ou des organismes culturels, qui ont
tout à faire, bien sûr, avec le développement
régional, qui sont des entités en soi et qui ne relèvent
pas du pouvoir local ou du pouvoir régional, mais qui ont des comptes
à rendre à un niveau central, quand ce n'est pas à un
niveau fédéral, lorsqu'il s'agit, entre autres, de groupes
communautaires, parce que c'est comme ça qu'on met en place tout un tas
de nouveaux services au Québec? Bien, on se retrouve devant un
véritable marchandage de type marchand de tapis, où chacun tire
sur la couverte. Pendant ce temps-là, qui paie la note de ça? Qui
paie la note de ça? Ce sont nos concitoyens et nos concitoyennes, qui ne
voient pas les ententes se réaliser, qui ne voient pas les
investissements se faire. À cet égard-là, je pense qu'on
ne se rend pas service, personne. (15 h 40)
Donc, le ministre est pris avec ce dilemme-là, et la
façon, évidemment, de tracer la voie pour sortir de cela -
ça fait déjà des années, ça fait
déjà quelques décennies qu'un projet très clair est
apparu, répondant à d'autres fondements, et appuyé sur
d'autres assises - c'est de dire que le Québec devrait avoir l'ensemble
de ces pouvoirs, l'ensemble de ces moyens pour se permettre de canaliser,
d'orienter et d'agir en matière de développement régional,
de développement de son territoire, et de mettre ces outils que sont les
possibilités qu'offre la concertation au service des habitants de ce
territoire.
Dans ce sens-là, la souveraineté permettrait de venir
clarifier les responsabilités de bien loger les pouvoirs, et à
mon point de vue, l'étape subséquente, c'est de voir ce qui doit,
ce qui peut et ce qui mérite, ce qui peut s'administrer aux niveaux
local et régional et faire en sorte de dégraisser le niveau
central pour qu'effectivement dans les régions on redonne aux leaders,
aux décideurs, aux élus locaux la capacité d'agir sur leur
milieu, avec la capacité aussi d'aller se chercher les moyens d'agir sur
leur milieu par les systèmes de taxation. Je pense que c'est dans cette
seule voie qu'on sortira de l'imbroglio dans lequel on s'enfonce de plus en
plus depuis des années, et je le répète, au
détriment de nos concitoyens et de nos concitoyennes. Je reste
convaincue que c'est la voie de solution pour nous permettre de mieux servir
nos intérêts collectifs.
Cela étant dit, je voudrais revenir sur le projet qui est
immédiatement devant nous. Je vais faire seulement quelques remarques.
Je suis toujours étonnée du peu de temps dont je dispose pour
faire mes interventions, peut-être parce que je m'emballe trop sur
certains thèmes qui me tiennent particulièrement à coeur,
mais enfin, revenons à cela. D'abord, je le mentionnais, le
développement régional devient les affaires régionales.
Alors, c'est déjà, M. le Président, évidemment, de
donner la mesure dans les mots parce que les mots traduisent toujours quelque
part quelque chose, une orientation, une philosophie des principes, et sont le
porteur d'une vision. Passer du développement régional aux
affaires régionales, cela vient dire déjà la façon
très réductrice que l'on a d'envisager ce qu'est le
développement régional, qui, à mon point de vue, devrait
être beaucoup plus large que ça.
Il est évident qu'au niveau de la décentralisation des
pouvoirs le projet de loi que nous étudions, M. le Président, ne
prévoit absolument rien à cet égard. De toute
façon, ce ne sont qu'une série de règles d'encadrement qui
soulèvent beaucoup plus de questions - le projet de loi qui est devant
nous - qu'elles n'apportent de réponses à cet égard. Donc,
on ne sent pas, on ne voit pas, on ne peut pas constater la volonté de
décentralisation, quel type de pouvoirs, dans quels secteurs, à
quelle instance.
Le troisième élément de ma critique, M. le
Président, c'est l'instance décisionnelle ou la composition de
l'instance régionale. Là, mais alors là on nous dit que
tout est à peu près possible. Et je peux en témoigner, M.
le Président, puisque j'ai participé à ce processus de
concertation. On nous dit que tout est possible, mais en même temps, que
vous aimiez ça ou pas, les législateurs que sont les
députés - parce que nous sommes d'abord des législateurs;
certains d'entre nous sont à l'Exécutif parce qu'ils sont membres
du gouvernement et sont membres du Conseil des ministres - vont être
membres d'office de cette instance, et à tous les paliers, que ce soit
l'assemblée générale, que ce soit le conseil
d'administration, ou que ce soit l'exécutif. Bon. alors, là, on
mêle les choux et les carottes, et sur un joyeux temps, m. le
président. vous allez voir que, dans les faits, ça va mettre les
gens dans des situations de conflits dont ils ne pourront sortir et qui vont
envenimer les situations plutôt que de faire en sorte qu'ils soient des
acteurs, des éléments positifs dans le développement
régional. alors, on dit: que vous aimiez ça ou pas, vous allez
prendre les députés. que vous aimiez ça ou pas, les
élus que sont, d'autre part, les maires de municipalités, les
préfets, les conseillers, eux vont avoir 50 % ou moins des voix dans
cette instance. après ça, les autres, eh bien, allez continuer le
marchandage, parce qu'on verra, selon les régions, selon les
intérêts des uns et des autres, comment on redépartagera
les autres fauteuils. après ça, on vous nommera, très
nombreux, de 50, 60 à 80, 90, 100 personnes, membres de ces conseils,
mais on vous donnera à peine - oui, m. le président, je vous
remercie - quelques millions de dollars à gérer, dont vous
continuerez le débat et les belles chicanes, c'est bien engagé,
et nous, nous continuerons, le gouvernement de québec, à
gérer les ententes que nous avons avec le gouvernement d'ottawa, et
là, on parlera des vraies affaires, puisque, là, on parle de
centaines de millions de dollars.
Remarquez qu'on livre la marchandise toujours à moitié
dans ces cas-là, parce qu'on sait que les objectifs ne s'atteignent
jamais, qu'on prévoit des ententes sur deux ans, trois ans, quatre ans,
de l'ordre de 100 000 000 $, 200 000 000 $, 300 000 000 $, et c'est toujours la
moitié qu'on réalise, c'est toujours à 40 %, 45 %, 50 %
qu'on operationalise, qu'on livre la marchandise de ces ententes qu'on fait
entre le Québec et Ottawa. Mais c'est là qu'est l'argent. Sauf
que ce que nous dit le ministre, c'est: Ça, ce n'est pas votre affaire,
c'est moi qui m'en occupe, ça continue d'être une
responsabilité du gouvernement; les régions, elles, et les
décideurs locaux se partageront ces modestes 3 000 000 $. Et vogue la
galère! Alors, ça peut bien s'appeler, son projet de loi, les
affaires régionales plutôt que le développement
régional.
Je pense que ça ramène à leur juste mesure la
vision et la perspective qu'a le ministre en nous présentant ce projet
de loi, M. le Président, et vous comprendrez que nous aurons l'occasion,
au moment de l'étude article par article, de défendre un point de
vue qui est fort différent de celui que nous présente le
ministre. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Taillon. Alors, je rappelle aux membres de cette
Assemblée que nous poursuivons l'étude du projet de loi 19
à l'adoption du principe, Loi modifiant diverses dispositions
législatives concernant les affaires régionales. Je reconnais Mme
la députée de Matane.
Mme Hovington: Matane.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la
députée, la parole est à vous.
Mme Claire-Hélène Hovington
Mme Hovington: Merci, M. le Président. C'est vraiment avec
enthousiasme - et je dis bien «enthousiasme» - que j'interviens sur
le projet de loi 19, le projet de loi qui introduit dans la Loi sur le
ministère du Conseil exécutif une section relative aux affaires
régionales. Il prévoit que le ministre responsable de
l'application de cette section élabore, propose et met en oeuvre une
politique en matière de développement régional. Ce projet
de loi détermine, en plus, les diverses fonctions du ministre. Il
prévoit l'abrogation de la Loi sur l'Office de planification et de
développement du Québec et il édicté, en plus, les
dispositions transitoires découlant de cette abrogation de l'OPDQ.
Le moins que l'on puisse dire, M. le Président, c'est que cette
politique de développement régional lancée par le ministre
arrive a point donné. En effet, nous arrivons à un aboutissement
heureux et surtout un aboutissement concret de la longue histoire du
développement économique régional du Québec. On se
rappellera, M. le Président, que le concept de développement
régional a permis aux différentes régions du Québec
d'affirmer de plus en plus leurs compétences, leurs capacités
économiques, leur esprit et leurs habitudes de concertation acquis dans
la foulée des conférences socio-économiques
régionales et aussi le souci accru des leaders régionaux de
prendre en main, enfin, le développement de leur région.
C'est dans ce contexte que le gouvernement du Québec a choisi,
après avoir évolué successivement comme État
entrepreneur et comme État partenaire, de devenir de plus en plus un
État accompagnateur, s'appuyant davantage sur le rôle primordial
des milieux régionaux en matière de développement
économique régional. Je me permettrai de rappeler ici que cette
nouvelle
stratégie gouvernementale en matière de
développement régional est le résultat d'une importante
réflexion sur le sujet initiée par le ministre responsable du
Développement régional qui, à la demande du premier
ministre, mettait en place, en février 1991, le groupe de travail
interministériel sur le développement régional,
présidé par M. Pierre Bernier, chargé de mission
auprès du secrétaire général du gouvernement, afin
de revoir l'ensemble des actions gouvernementales en matière de
développement régional. (15 h 50)
II importe, à ce stade-ci, de souligner que la nouvelle politique
du gouvernement du Québec prévoit mettre à la disposition
des milieux régionaux des budgets régionalisés - et
ça, c'est nouveau, M. le Président - dans les principaux secteurs
de l'activité socio-économique pouvant atteindre annuellement
quelque 500 000 000 $ et, en plus, un fonds régional de
développement d'environ 3 000 000 $ par région
administrative.
Nous conviendrons qu'il s'agit là d'un virage important dans le
développement économique des régions du Québec qui
va dans le sens des volontés régionales maintes fois
exprimées, plus particulièrement, souvenez-vous, dans le cadre de
la commission Bélanger-Campeau, dont j'étais commissaire, et des
états généraux du monde rural.
Voilà, M. le Président. Les régions sont
invitées, plus que jamais, à se prendre en main, et nous
joignons, nous, les actes aux paroles en mettant directement à leur
disposition d'importants budgets, notamment au niveau du démarrage
d'entreprises et du Fonds de développement régional. C'est du
concret, M. le Président.
J'aimerais souligner qu'en premier lieu le gouvernement libéral
reconnaît à la base que le développement régional,
c'est la résultante de l'ensemble des mesures prises par les milieux
régionaux, avec le partenariat de l'État, en vue de
l'amélioration des conditions économiques, sociales et
culturelles, et ce, dans le respect du milieu de vie des citoyens et des
citoyennes du Québec. À cet égard, le gouvernement du
Québec adopte, je le rappelle, comme stratégie d'action, le
principe d'accompagnement du dynamisme des régions, accompagnement qui
consiste à centrer les activités de l'État sur ces
fonctions fondamentales et, surtout, surtout à responsabiliser les
régions dans un contexte de concertation et de partenariat.
Il faut souligner, d'abord, que l'État doit veiller à la
cohérence du développement du Québec dans son ensemble. Il
doit dégager les orientations et les stratégies
générales pour éclairer les actions des intervenants
régionaux, optimiser ses interventions et rechercher surtout une plus
grande harmonisation interne de ses programmes et actions en matière de
développement régional. L'élaboration et la mise en oeuvre
des mesures spécifiques découlant de la stratégie d'action
pour le développement des régions seront donc maintenant la
responsabilité des ministères sectoriels.
De plus, certains défis importants, identifiés par le
ministère sectoriel - pensons, par exemple, à la
déstructuration des milieux ruraux, pensons au développement
industriel et technologique, à l'étalement urbain, à la
complémentarité des régions et plusieurs autres - tous ces
défis doivent être, au plus tôt, relevés. Ce mandat
d'harmonisation et de coordination si important sera confié au
secrétariat aux affaires régionales qui accompagnera la
démarche des régions. La démarche d'accompagnement du
dynamisme des régions nécessite des aménagements, tant au
niveau gouvernemental qu'au niveau de la région, en fonction de
l'évolution de leur rôle et de leurs nouvelles
responsabilités. C'est normal.
Alors, les conseils régionaux de développement sont
actuellement en formation autour des députés, des élus
municipaux, des agents socio-économiques et des représentants des
organismes du milieu. Ces conseils généraux de
développement seront institués dans chacune des 15 régions
administratives du Québec et, contrairement à ce
qu'avançait la députée de Taillon, tout à l'heure,
M. le Président, tout se fait dans l'harmonie. Celui de la
Gaspésie s'est formé la fin de semaine dernière. Tout
s'est fait dans l'harmonie, la solidarité la plus complète au
niveau de la Gaspésie. Le conseil du Bas-Saint-Laurent se fera cette fin
de semaine, et je suis sûre que ça se fera avec un degré de
maturité aussi grand qu'on a vécu dans la Gaspésie, en fin
de semaine dernière.
Ces conseils assureront la coordination du développement
régional en partenariat avec le gouvernement du Québec. Ces
conseils régionaux, en fait, auront de nombreuses fonctions dont, entre
autres: assurer la concertation des intervenants; donner des avis au
gouvernement; définir une stratégie de développement en
identifiant les priorités régionales et les axes de
développement, cette stratégie faisant l'objet d'une
entente-cadre signée avec le gouvernement; conclure des ententes
spécifiques avec les ministères ou organismes gouvernementaux
pour réaliser les interventions prévues dans l'entente-cadre;
assurer la coordination, le suivi d'actions, le programme de
développement sur leur territoire; enfin, M. le Président, de
gérer, conjointement avec le ministre délégué aux
affaires régionales, un fonds de développement qui sera
attribué à chacune des régions du Québec.
La concertation gouvernement-régions devra continuer de
déboucher sur la signature d'ententes-cadres de développement.
Les instances régionales profiteront alors des effets directs de la
régionalisation des programmes de développement régional
pour une somme d'environ 3 000 000 $ par région. Dans un premier temps,
le conseil régional aura pour responsabilité de définir,
donc, sous forme de planification strate-
gique, les axes et les priorités de développement de la
région pour un horizon environ de cinq ans.
Ces axes de développement feront ensuite l'objet d'une
négociation et d'une entente cadre de développement signée
entre le gouvernement et le conseil régional. Les ministères et
les organismes gouvernementaux seront alors associés aux
négociations préalables et, surtout, à l'accord sur
l'entente cadre, ceci afin de déterminer les modalités de leur
contribution au développement de la région. Une rencontre
statutaire annuelle entre le conseil régional et le ministre
délégué aux Affaires régionales déterminera
alors l'utilisation du Fonds de développement régional en tenant
compte de l'entente déjà conclue.
Enfin, des ententes spécifiques pourront être
signées en tout temps entre le conseil régional et un ou des
ministères et organismes gouvernementaux. L'entente cadre
précisera également la liste et les objets des ententes
spécifiques qui seront développées ultérieurement.
Et, comme je le disais précédemment, chacune des régions
du Québec recevra un montant annuel de l'ordre de 3 000 000 $,
après négociation d'entente à cet effet avec le
gouvernement.
Le nouveau Secrétariat aux affaires régionales disposera,
quant à lui, d'un budget de g 000 000 $ pour répondre à
des besoins conjoncturels et aussi permettre au ministre
délégué aux Affaires régionales de réagir
à des situations particulières et exceptionnelles dans des
régions qui connaissent le plus de difficultés, comme on le fait
actuellement pour la Gaspésie et comme on le fait pour le
Bas-Saint-Laurent.
Autre élément de nouveauté, M. le Président,
à partir de l'exercice budgétaire 1992-1993, les
ministères directement concernés par le développement
régional seront appelés à identifier à
l'intérieur de leur budget un programme ou un élément du
programme sous l'appellation «budget régionalisé».
Donc, une enveloppe spécifique aux régions. Cette importante
régionalisation des crédits des ministères pourra
atteindre, en vitesse de croisière, jusqu'à 500 000 000 $
annuellement, M. le Président, un demi-milliard de dollars.
L'affectation de ces ressources financières relèvera du
ministère sectoriel concerné en concertation avec chacun des
conseils régionaux de développement, dans le contexte, toujours,
de la signature d'une entente cadre dont l'une des annexes consignera
l'affectation des crédits des ministères.
Ces budgets spécifiques à impacts régionaux
proviendront, de plus, d'une quinzaine de ministères et d'organismes
différents et contribueront à créer un plus grand respect
du développement régional intégré de toutes les
régions concernées.
M. le Président, force est de constater que la nouvelle
stratégie gouvernementale, en matière de développement
régional, favorisera une réorganisation des moyens financiers
afin d'opti- miser les ressources dont dispose l'État pour le
développement des régions. La nouvelle démarche
d'accompagnement du dynamisme des régions exigeait, à cet
égard, la définition de nouvelles règles du jeu en faveur
des régions et des responsabilités, aussi, qu'elles auront
à assumer. C'est une réponse concrète, M. le
Président, à cette volonté des régions de prendre
en main leur propre développement.
En terminant, M. le Président, j'aimerais rappeler que, lors de
la tournée provinciale effectuée au cours des derniers mois, nous
avons pu constater un accueil excellent reçu aux propositions du
ministre responsable du Développement régional, et dans toutes
les régions du Québec. Ce signal très clair envoyé
à nos communautés régionales et locales permettra, j'en
suis convaincue, un redressement de l'«entrepre-neurship» dans nos
régions, mais surtout permettra la démarrage de nombreuses
entreprises, l'innovation, la technologie, la modulation de nos politiques, de
nos programmes et, enfin, un soutien direct aux régions en
difficulté, dont la Gaspésie.
Comme on le voit, M. le Président, le gouvernement libéral
a mis en oeuvre un plan visant à faire en sorte que l'État puisse
canaliser les forces du milieu et collaborer ainsi directement au
développement de chacune des régions, mais dans le respect de
leur spécificité, dans le respect de leurs particularités.
Voilà, M. le Président, quelle est la nouvelle politique de
développement régional de notre gouvernement, et j'en suis
très fière. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Matane. Sur ce même sujet, je cède la
parole, maintenant, à M. le député de Labelle. M. le
député, la parole est à vous.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: Merci, M. le Président. Nous avons
devant nous deux projets de loi en un seul. Je dis bien deux projets de loi. Je
vais simplement lire les notes explicatives, qui tiennent en deux paragraphes,
parce que, en fait, il est fort simple, mais lourd de conséquences,
comme projet de loi. (16 heures)
Le premier paragraphe dit: «Ce projet de loi introduit dans la Loi
sur le ministère du Conseil exécutif une section relative aux
affaires régionales. Il prévoit que le ministre responsable de
l'application de cette section élabore, propose et met en oeuvre une
politique en matière de développement régional. Il
détermine de plus les diverses fonctions de ce ministre.»
En quelques mots, c'est résumer beaucoup que de dire, sur ces
cinq lignes, les nouvelles fonctions d'un organisme qui sera dépendant
du Conseil exécutif. Deuxième paragraphe, M. le Président,
c'est celui-ci:
«Ce projet de loi prévoit de plus l'abrogation de la Loi
sur l'Office de planification et de développement du Québec et il
édicté les dispositions transitoires découlant de cette
abrogation.»
Effectivement, il y a deux projets de loi, compte tenu de ces
implications. L'abolition de l'Office de planification et de
développement du Québec et la création d'une sous-section
du Conseil exécutif, c'est cela, le projet de loi.
Bien, M. le Président, je voudrais d'abord traiter de cette
abrogation de la loi de l'OPDQ ou de l'OPDQ tel quel. Je voudrais rappeler
d'abord qu'après l'expérience traumatisante du BAEQ, qui
s'était appliquée dans l'Est du Québec, le gouvernement a
réfléchi considérablement, le gouvernement du temps avait
réfléchi à toute la situation, toute la
problématique du développement des régions du
Québec et en était arrivé à la conclusion qu'il
devait créer un Office de planification et de développement en
même temps qu'à côté de cet Office il créait
un Conseil de planification et de développement du Québec,
où les personnalités, les élites politiques, les
élites économiques et sociales pouvaient siéger pour
conseiller le gouvernement. C'est, en fait, à la suite de l'explosion
des structures de l'État du Québec, de ses mécanismes,
mais, au fond, de la société québécoise, qu'on en
était venu à la conclusion qu'il fallait créer un tel
Office. Devant la croissance quelquefois désordonnée des
ministères sectoriels, il était apparu nécessaire de
créer un Office par lequel le gouvernement essayait ou essaierait
d'entraîner la coordination de ses différentes actions sur le
territoire du Québec et, en particulier, dans les régions,
là où ses yeux étaient très loin de la
réalité.
L'Office de planification et de développement du Québec
s'est donc mis en place et a exercé différentes fonctions. Je
voudrais les rappeler. D'abord, une fonction par laquelle il
s'intéressait à la question de l'aménagement.
Rappelons-nous que le gouvernement avait... que tous les gouvernements avaient
été incapables d'adopter une loi de l'aménagement. Donc,
il avait confié à l'Office, à l'OPDQ, la mission de
constituer des schémas régionaux de développement. J'en
sais quelque chose, j'ai été responsable de l'OPDQ des
années 1977 à 1980. Il lui avait confié par la suite le
soin de négocier, d'appliquer et de gérer les ententes avec le
gouvernement fédéral. Rappelons-nous la pression que le
gouvernement fédéral exerçait sur les ministères du
gouvernement et sur le gouvernement du Québec, et c'est pour cela qu'on
a confié à un organisme central, tel l'OPDQ, le soin
d'administrer ces ententes de façon à éviter que le
gouvernement fédéral ne dicte ses volontés à chacun
des ministères du Québec qui auraient eu du mal à
résister les uns après les autres, pris en ordre
séparé.
L'OPDQ s'est intéressé, dans la foulée de
l'aménagement, au développement régional et avait obtenu
la création d'un fonds de développement régional. Lorsque
nous avons été au gouvernement, en 1977, ce fonds a pris une
expansion considérable et il accompagnait la gestion des ententes. Par
ce fonds, on espérait faire la coordination des gestes posés par
les différents ministères dans les régions et par le
gouvernement dans son ensemble.
M. le Président, la dernière fonction qu'on a
confiée à L'OPDQ, c'est une fonction de recherche et
d'étude économique. Le gouvernement n'avait pas d'organisme qui
faisait des études économiques et c'est l'OPDQ qui les a
réalisées. En particulier, je souligne que c'est l'OPDQ qui a, le
premier, souligné l'importance de la petite entreprise en matière
de création d'emploi. cet organisme s'est bien acquitté de ses
fonctions, je tiens à le dire, m. le président. je tiens à
rendre témoignage aux fonctionnaires qui ont travaillé dans cet
organisme, à ceux qui l'ont dirigé, qu'ils ont eu une très
haute conception de l'état québécois et du québec
en général et qu'ils ont mis en place des structures, des
mécanismes, qu'ils ont formé toute une génération
de fonctionnaires qui avaient cette conception de l'état
québécois. je voudrais leur rendre hommage quant à leur
dévouement au gouvernement, quant à leur dévouement
à la population du québec. bien sûr, il y a eu des
difficultés d'ajustement, c'est normal dans toute structure, surtout une
structure qui se voulait horizontale alors que chacun des ministères
développait sa problématique propre et sa propre dynamique.
l'opdq était là pour renseigner le gouvernement, pour le
conseiller et toujours en termes de rôle-conseil, donc, de l'aider
à faire une meilleure coordination, autant dans ses grandes
décisions que dans ses actions régionales.
M. le Président, L'OPDQ a vu son rôle transformé au
cours des années, mais rappelons quelques-unes de ses grandes
réalisations. J'ai parlé des ententes, j'ai parié de son
rôle de recherche, ce sont des succès, mais au cours des
dernières années c'est par l'OPDQ que l'on a organisé des
conférences socio-économiques. L'OPDQ n'était pas seul
mais, fondamentalement, c'est lui qui assurait toute la logistique de
l'opération et, quand on dit logistique dans ce genre d'action, on sait
quelle est son importance.
C'est lui qui a été à l'origine aussi
d'ententes-cadres, de contrats de relance et je pense que ce que l'on peut
dire, aujourd'hui, c'est qu'il a bien fait le travail qu'on lui a
confié. Le problème depuis presque le début, dans bien des
cas, c'est que les décisions d'orientation faisaient défaut, les
décisions claires d'orientation, et que, très souvent, devant la
nécessité de prendre une décision, le Conseil des
ministres hésitait et reportait les décisions, ce qui n'a pas
aidé l'OPDQ de façon concrète. Mais, en ce qui concerne le
mécanisme, il était là.
Aujourd'hui, le gouvernement, qui n'a, si je
comprends bien, pas encore plus pris de décision quant à
ses orientations, a décidé d'abolir l'OPDQ, parce que,
effectivement, l'existence d'un organisme comme cela au sein de l'État,
à qui on ne peut pas confier de mission claire parce qu'on n'en a pas
soi-même, est un témoignage extraordinaire de l'absence
d'orientation de l'État et qu'on ne peut pas le supporter. Donc, la
décision facile: On l'abolit. C'est ce qu'on a fait. (16 h 10)
M. le Président, il est apparu très clairement, au cours
de la tournée de la commission Bélanger-Campeau que, dans les
régions du Québec, toutes les régions du Québec, et
cela comprend tout le Québec parce que, lorsque l'on parle de
développement régional, on parle de tout le Québec sous
une autre dimension, une dimension plus territoriale, divisée en
régions, bien sûr... Alors, au cours des
pérégrinations de la commission Bélanger-Campeau, on s'est
aperçu qu'il y avait une immense insatisfaction quant au
développement régional. Le gouvernement a commencé
à se poser des questions là-dessus. Nous avons eu l'occasion de
voir un peu le fruit de ses réflexions par un mémoire qui a
circulé et par les décisions qu'il a rendues publiques par la
voix de son ministre de l'Agriculture, responsable du Développement
régional. J'en arriverai, à ce stade, plutôt aux solutions;
je pense, M. le Président, qu'il a été important de
consigner le témoignage que je voulais rendre à l'OPDQ
après toutes ces années, après ces 20 ans, parce que l'on
parie maintenant de 1969 à 1992, pratiquement 23 ans, un quart de
siècle, en quelque sorte, où il a servi le Québec.
M. le Président, le projet de loi qui est devant nous, il a
été résumé dans ces cinq lignes que j'ai lues tout
à l'heure et qui consistent, finalement, à démolir l'OPDQ
pour créer une sous-section du Conseil exécutif. J'ai lu ces
articles. J'ai lu ce projet de loi. J'ai lu le mémoire qui a
circulé, mémoire qui ne devait pas sortir normalement, et j'en
suis arrivé à la conclusion que, globalement, ce qu'on nous
proposait nous amenait à une politique centralisatrice et non pas
à de la décentralisation.
D'abord, je voudrais souligner le fait que ce secrétariat au
développement régional, cette section relative aux affaires
régionales, comme on dit, va relever directement du bureau du premier
ministre, du Conseil exécutif, donc du premier ministre qui va mandater
un de ses ministres, mais tout en gardant la responsabilité
fondamentalement, puisque c'est le premier ministre qui sera responsable de
l'application de sa loi et qui est responsable de l'application de la Loi sur
l'exécutif. C'est un point important. C'est un point important pour la
suite des choses. Je voudrais donc aller un peu plus loin.
Vous avez un premier ministre qui a différents ministres
sectoriels, mais qui va confier à l'un de ses ministres la fonction de
s'occuper des affaires régionales. Le gouvernement fonctionne avec des
ministres sectoriels, des ministères sectoriels. Chacun a sa
responsabilité et chacun est responsable devant l'Assemblée
nationale de son ministère. Il doit répondre devant
l'Assemblée nationale. Parallèlement à ces
ministères sectoriels, on va créer un secrétariat aux
affaires régionales, lequel aura droit de regard sur l'action des
ministères sectoriels dans chacune des régions. Qu'on se rende
compte de ce que cela veut dire: ou bien son droit de regard est efficace et,
alors, ça veut dire qu'il met les ministères sectoriels sous sa
coupe, ou bien il n'est pas efficace et, à ce moment-là, il ne
mérite pas d'exister.
Mais ce que je viens de dire, c'est que nous créons là une
situation conflictuelle, parce que, si vous avez un excellent ministre qui
s'occupe de son ministère, il ne souffrira pas une double
autorité quant aux gestes qu'il va poser, c'est-à-dire la sienne,
de laquelle il doit répondre ici en Chambre, et ensuite de
répondre à un ministre qui est chargé de la coordination
des gestes posés dans les régions. C'est conflictuel. En termes
de structure administrative, tous ceux qui connaissent la question vont
admettre et doivent admettre que c'est conflictuel à terme, et, s'il y a
conflits, qui vont se produire inévitablement, c'est le premier ministre
qui va prendre le dossier et qui va régler la question. Donc, nous
revenons à une centralisation, cette fois, sous la coupe même du
premier ministre. Je dis que ce projet de loi consiste à centraliser
l'action du gouvernement dans les régions.
Deuxième point que je voulais soulever, M. le Président,
ce projet de loi établit une confusion dans les rôles. Lorsque le
gouvernement dispose d'argent, par exemple, 75 000 000 $ pour distribuer dans
les régions pour faire ou favoriser du développement
régional, le gouvernement est responsable de ces fonds, il taxe. Il
prend la décision d'aller chercher des taxes chez les citoyens et c'est
lui qui, ensuite, distribue les fonds. Quand on crée, à
côté de ce mécanisme qui est le fondement même de
notre démocratie, un autre conseil qui, lui, ne taxe pas pour aller
chercher ses fonds, et qui est supposé quand même prendre des
décisions éclairées alors qu'il n'a pas à en rendre
compte directement devant la population parce que ce n'est pas lui qui est
allé chercher les fonds, je pense qu'on introduit une distorsion.
Plus que ça, M. le Président, le ministre propose que les
députés siègent sur ce conseil en tant que
députés des régions. Je vous souligne que le
député relève de l'instance législative, alors que
le ministre relève de l'instance executive. Il y a confusion des
rôles. C'est très important, ce que je dis là. Le
député, ce n'est pas lui qui a la responsabilité de
dépenser des fonds, mais c'est pourtant lui qui va prendre des
décisions sur ce plan-là. Le député est
consulté par les ministres dans les gestes qu'ils posent
dans les régions, c'est tout à fait normal. Cela fait
partie de la démocratie, mais ce n'est pas le député qui
prend les décisions. On l'assigne d'office membre d'un conseil
régional qui va prendre des décisions d'allocation de fonds. Je
dis, M. le Président, qu'il y a confusion des rôles entre le
législatif et l'exécutif. Ce que j'ai dit est très
important en termes de structure de l'État et de fonctionnement de
l'État.
Donc, à terme, nous aurons des situations conflictuelles,
inévitablement. Dans le milieu, la question va se poser
nécessairement quant à la légitimité des
décisions qui seront prises, quant à la légitimité
de ceux qui vont assumer ces décisions. S'ils ne sont que des gens qui
conseillent la distribution des fonds, fort bien! Mais si c'est cela qui
arrive, M. le Président, nous revenons à ce que je disais au
point de départ: Nous sommes dans une opération éminemment
centralisatrice, directement au bureau du premier ministre. C'est le contraire
de la décentralisation. Je pense que le point d'arrivée de cette
loi consiste en une centralisation absolue, directement au bureau du premier
ministre.
M. le Président, je m'en voudrais de ne pas dire un mot de la
façon dont ce projet de loi a procédé devant nous. Ce que
j'ai en main et ce que tout le monde a au Québec, c'est une copie d'un
mémoire au Conseil des ministres, lequel mémoire, normalement,
doit être confidentiel. D'autant plus qu'il y a une partie qui doit
être encore plus confidentielle, la dernière partie, qui est
réservée et dans laquelle il est bien dit que c'est une partie
confidentielle. Je me suis toujours interrogé sur
l'arrière-scène qui a amené ce mémoire à
couler pour servir des intérêts. Et puis, ce qu'il faut en
comprendre - vous me faites signe que j'achève, M. le Président -
c'est que, finalement, ce geste a été une façon
d'impliquer les collègues, d'amener les collègues à se
ranger, de faire une pression sur eux et, donc, c'est en quelque sorte un bris
de solidarité. Je le pense parce que, quand je vois un tel document,
avec ses conséquences sur le fonctionnement de l'État, je ne peux
pas m'em-pêcher de penser qu'un tel document est passé à
travers un Conseil des ministres sans qu'il y ait des objections fondamentales
et très, très sérieuses, même quant à ses
modalités de fonctionnement. M. le Président, ce document a
été semé dans la chicane, il va récolter la
chicane. Ma collègue, tout à l'heure a bien indiqué
à quel point la distribution d'un maigre 3 000 000 $ qui consiste,
finalement, en des sommes qu'on a déjà, fait ou sème
déjà la zizanie dans le paysage régional. (16 h 20)
M. le Président, je trouve que ce projet de loi est un
très mauvais projet de loi quant à ses principes fondamentaux,
qu'il fait disparaître une institution majeure dont le Québec
s'était doté il y a pratiquement 25 ans et qui avait fait ses
preuves. On fait disparaître l'OPDQ pour créer un organisme qui
sera conflictuel, et doublement conflictuel. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Labelle. Sur le même sujet, à savoir la
motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 19, Loi modifiant
diverses dispositions législatives concernant les affaires
régionales, en vous rappelant, M. le député, que vous
disposez d'une période maximale de 20 minutes, je cède la parole
à M. le député de Papineau.
M. Norman MacMillan
M. MacMillan: Merci, M. le Président. Il me fait surtout
plaisir de pouvoir suivre mon collègue de Labelle et de parler du projet
de loi 19. Mon collègue de Labelle nous parle de problèmes dans
des régions et nous dit que les gens ne sont pas d'accord. Alors, moi,
je réponds que, chez nous, dans l'Outaouais, tous les intervenants ont
déjà accepté de se regrouper le 11 août prochain et
de former le nouveau conseil régional de développement; et,
ça, c'est dans le sens que tout le monde, tous les intervenants sont
vraiment d'accord avec le projet de loi 19. Prochainement, même les
municipalités urbaines de notre région de l'Outaouais seront
prêtes à injecter des fonds pour pouvoir avoir une
société de diversification pour pouvoir combler... surtout avec
la décentralisation des pouvoirs qui semble s'en venir dans notre
région de l'Outaouais. Alors, je pense que, encore une fois, le
député de l'Opposition, comme son collègue de
Lévis, a fait plusieurs affirmations qui étaient loin
d'être exactes.
J'ai attentivement écouté et lu ses remarques pour
m'apercevoir que le député de Lévis tentait de
discréditer le gouvernement auprès des intervenants reliés
de près ou de loin aux affaires régionales. D'abord, le
député de Lévis a fait état de son
expérience alors qu'il occupait le poste de ministre de l'Agriculture
entre 1976 et 1985. À écouter le député de
Lévis, M. le Président, j'en arrive d'abord à une
conclusion fort simple: le député est profondément
nostalgique de cette époque. Il est également nostalgique et
prisonnier du passé, en ce sens que sa vision correspond à une
époque donnée, à une conjoncture donnée, mais qui
ne pouvait durer éternellement. C'est un peu pour cette raison qu'il est
nostalgique des conférences socio-économiques. Cette formule,
comme le rappelait le ministre responsable du dossier du développement
régional, était fort valable dans le temps. En effet, les sommets
socio-économiques ont permis aux différents intervenants du
milieu de s'exprimer clairement auprès des gouvernements,
d'établir des listes de projets ou de priorité de projets et,
enfin, d'en arriver à des ententes avec le gouvernement du Québec
en faveur du développement régional.
Mais, en 1992, la conjoncture a bien
changé. Les conditions ne sont plus celles qui prévalaient
au milieu des années soixante-dix. Nous venons de traverser une crise
économique passablement difficile et les régions ont
été les premiers intervenants à essuyer les coups durs.
Tout de même, le gouvernement libéral élu depuis
décembre 1985 n'a pas perdu de temps et a mis en place un plan d'action
en matière de développement régional qui a produit des
résultats concrets dans toutes les régions du Québec,
contrairement à ce qu'affirme le député de Lévis.
Le gouvernement libéral a également agi sous le sceau de la
concertation et de ¦'«entrepreneur-ship» avec l'ensemble des
régions du Québec. Il a maintenu, pour un bout de temps, la
structure des conférences socio-économiques, le temps de laisser
le processus aboutir. Mais notre souci a d'abord été, avant tout,
d'accélérer l'adoption des projets concrets afin que les
régions puissent toucher de près lés réalisations
de leur propre territoire.
Aujourd'hui, nous croyons que le temps d'une reforme est arrivé.
Nous croyons que les bases du passé peuvent nous servir pour mieux
édifier l'avenir. Nous croyons toujours au dynamisme des régions
du Québec, et nous voulons transformer l'État initiateur en
État accompagnateur pour la réalisation des projets qui seront le
fruit d'une acceptation du milieu, d'abord et avant tout. Nous désirons
également encourager l'esprit d'entreprise dans les régions; pour
y arriver, l'État offre toute la disponibilité possible pour
s'entendre, via les ententes-cadres, avec les milieux intéressés
dans les régions.
Nous désirons également que d'autres partenaires se
joignent à ce mouvement d'«entre-preneurship» en
région. C'est ainsi que les caisses populaires, la Caisse de
dépôt et placement ou les gestionnaires du Fonds de
développement technologique participent activement à la mise en
place de projets concrets en région. La réforme envisagée
par le gouvernement libéral s'inscrit dans une continuité,
à savoir que les régions seront, cette fois-ci, les maîtres
d'oeuvre de leur développement.
Si nous en sommes arrivés à ce point, c'est parce que nous
devons prendre pour acquis que le rôle de l'État a
évolué dans le temps. Le ministre traçait justement un
bilan du rôle de l'État en regard du développement
régional depuis les 25 ou 30 dernières années. En effet,
précisait-il, l'État a été obligé de
s'impliquer de façon importante au cours des années soixante et
soixante-dix pour véritablement construire toute une infrastructure que
nous retrouvons, encore aujourd'hui, dans toutes les régions du
Québec. Vous aurez compris que je fais allusion à cet
accroissement de pouvoirs de l'État à titre de dispensateur de
services auprès des citoyennes et des citoyens du Québec.
De façon parallèle, un mouvement de
décentralisation et de déconcentration a marqué l'histoire
du Québec au cours de 25 des 30 dernières années, parce
que l'État croyait justifié que la région puisse avoir
accès à des ressources de façon directe et étroite,
en établissant des bureaux régionaux de l'ensemble des
ministères un peu partout au Québec. Cette infrastructure est
toujours vivante aujourd'hui, et notre rôle consiste à
rationaliser les ressources disponibles, dans une conjoncture plus difficile
sur le plan économique et où les ressources financières
sont plus rares, tout en conservant ce titre de dispensateur de services de
qualité en région.
C'est un peu ça que l'Opposition officielle ne comprend pas, M.
le Président. Elle ne comprend pas qu'une certaine évolution a
fini par produire des fruits en région. Elle ne comprend pas que
l'ensemble des infrastructures de l'État québécois est
à peu près construit et bien lancé, en région. Il
nous reste à consolider les ressources disponibles et à orienter
les directions en fonction de la marge de manoeuvre que nous pouvons prendre au
fur et à mesure que la relance économique s'effectue.
Ainsi, la réforme de la politique en matière de
développement régional précononisée par le
gouvernement libéral repose d'abord sur un rôle d'accompagnateur
qu'assumera l'État québécois. Il est clair que
dorénavant il reviendra à l'État de créer les
conditions nécessaires et un climat favorable à l'investissement
et au développement économique en général dans les
régions du Québec. Il sera également établi, en
vertu du projet de loi 19, que les décisions seront prises par les
régions elles-mêmes, afin de déterminer les orientations
qu'elles désirent prendre et les réalisations qu'elles
désirent voir naître.
Ce n'est pas rêver en couleur que de dire franchement à la
population, M. le Président, que les ressources financières sont
plus rares qu'elles ne l'étaient autrefois. C'est faire preuve de
transparence, M. le Président, que de dire à la population
québécoise qu'elle devra faire preuve d'une initiative plus
grande et d'une plus forte volonté d'«entrepreneurship» pour
jouir du même niveau de qualité qu'avant. Ce n'est pas mentir
à la population, M. le Président, que de dire que l'État
québécois sera toujours là pour assurer son soutien
technique et financier auprès des régions afin de les aider a
réaliser de grandes choses.
Le problème, avec l'ancien gouvernement du Parti
québécois, M. le Président, c'est qu'il était
imprévisible. Il était imprévisible sur le plan
constitutionnel et il était imprévisible sur le plan
économique, sur les plans culturel et social. C'est là une
constatation majeure, surtout lorsque la population compte sur les
gouvernements pour lui venir en aide lorsque les temps sont plus
difficiles.
Pour vous convaincre de cette affirmation, je vous inviterais à
relire un certain passage des énoncés budgétaires du
ministre québécois des Finances depuis 1985. Pas un budget n'a
échappé à cette priorité d'assurer le
développement régional. Et les mesures que nous retrouvons
dans les différents budgets du ministre québécois
des Finances sont issues des orientations et des énoncés de
politique clairement établis par le gouvernement libéral. Donc,
en ce sens, le travail réalisé par l'ensemble du gouvernement
québécois en matière de développement
régional est bel et bien cohérent, transparent et efficace,
à un point tel que la majorité des intervenants reconnaissent le
bien-fondé de la réforme telle que préconisée par
le ministre responsable de ce dossier. (16 h 30)
L'Opposition officielle ne semble pas en mesure de comprendre que cette
réforme n'est aucunement improvisée. Cette réforme a
été précédée de consultations, de travaux de
recherche et de prospection à travers l'ensemble des milieux
intéressés de près ou de loin au développement
régional, d'une part, et à travers l'ensemble du travail
effectué par les ministères intéressés de
près au développement régional. C'est ainsi qu'en vertu de
cette réforme le travail de l'ensemble des ministères continuera
de se réaliser et, de façon plus précise, les
ministères devront identifier clairement un budget à la variable
du développement régional.
L'impact de la réforme en développement régional
sera énorme en région, bien sûr. Elles se verront attribuer
un budget précis et seront véritablement les maîtres
d'oeuvre quant à la gestion de ce budget. C'est là toute une
nouveauté par rapport au passé, du fait que le ministre pouvait
prendre à peu près n'importe quelle décision, avec ou sans
consultation du milieu intéressé. Dorénavant, le ministre
devra s'ajuster aux priorités que les régions elles-mêmes
auront déterminées pour la réalisation de projets
économiques, sociaux et culturels. D'ailleurs, le projet de la loi 19
identifie clairement les mandats qui seront confiés au ministre
responsable du Développement régional. À l'article 3.25 de
ce projet de loi, on peut lire notamment que le ministre devra «situer
l'action du gouvernement en matière de développement
régional en regard des orientations et priorités définies
par les régions». L'Opposition officielle qualifie ce type de
phrase d'une addition de mots sans contenu. Je regrette, M. le
Président, mais il est évident que l'ancien ministre en
matière d'Agriculture, qui était habitué à prendre
des décisions dans son bureau, devrait, s'il devait le faire
aujourd'hui, changer son fusil d'épaule et consulter le milieu.
De plus, en vertu de ce même projet de loi, le ministre
accroîtra l'efficacité de l'action du gouvernement en
matière de développement régional. Pour y arriver, il
favorisera l'harmonisation des politiques et des interventions du gouvernement
en ce domaine. Ce mandat est essentiel dans la mesure où plusieurs
ministères du gouvernement québécois sont appelés
à intervenir de près ou de loin dans le dossier régional.
C'est en ce sens que le ministre sera appelé à trancher et
à prendre des décisions au nom de l'harmonisation de ces
politiques. Le ministre conseillera enfin le gouvernement sur tous les moyens,
toutes les questions ayant trait au développement régional. Quoi
de plus normal dans un gouvernement libéral où le travail
d'équipe fait loi, M. le Président!
Le projet de loi définit plusieurs autres fonctions qui ont pour
but de favoriser la participation des personnes et organismes dans
différents secteurs d'activité en région. En somme, le
ministre sera chargé de promouvoir l'accroissement de la
responsabilité des intervenants qui s'intéressent de près
ou de loin aux affaires régionales. Il définira avec eux les
objectifs à atteindre en cette matière et les moyens à
mettre sur pied pour la réalisation des projets qui tiennent à
coeur aux régions du Québec. Le ministre pourra avoir la marge de
manoeuvre nécessaire pour favoriser la concertation et la coordination
de l'action gouvernementale en matière de développement
régional. Il assurera également une complémentarité
d'action dans l'ensemble des régions sur le développement
économique régional.
D'autres de mes collègues parleront de ces instances
décisionnelles en région, comme la mise sur pied des conseils
régionaux, pour justement concrétiser cette concertation et cette
coordination d'action. C'est là une innovation par rapport au
passé, M. le Président. C'est cela que l'Opposition officielle ne
prend pas. Elle voudrait voir les choses figées, une politique stagnante
en matière de développement régional. Nous disons, de ce
côté-ci de la Chambre, que beaucoup de réalisations ont pu
voir le jour grâce aux processus de décision et d'action qui ont
été mis sur pied à l'époque. Nous reconnaissons en
partie le bien-fondé des politiques mises de l'avant par l'ancien
gouvernement. Le ministre ne s'est pas gêné pour rendre hommage
à tous ceux et celles qui ont occupé ce poste depuis les 25 ou 30
dernières années, c'est-à-dire ceux et celles qui ont
été mandatés pour mener à bien la mission du
développement régional. Mais l'Opposition fait toujours preuve
d'ingratitude et de mesquinerie. Pour nous, il s'agit d'un pas en avant, et
d'un pas de géant.
M. le Président, nous croyons fermement à la
prospérité économique de chacune des régions du
Québec, et l'État québécois fera tout son possible
pour les aider à atteindre les objectifs qu'elles souhaitent. C'est au
nom d'une meilleure maîtrise de leur avenir que le gouvernement
libéral aidera les régions du Québec à
améliorer la qualité de vie. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Papineau. Alors, je vous rappelle que nous sommes
à discuter de la motion proposant l'adoption du principe du projet de
loi 19, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les
affaires régionales, et je suis
prêt à reconnaître le prochain intervenant, à
savoir Mme la députée de Marie-Victorin. Vous avez droit, Mme la
députée, à une période maximale de 20 minutes.
Mme Cécile Vermette
Mme Vermette: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M.
le Président, effectivement, le projet de loi 19 apporte certaines
modifications législatives, notamment en ce qui concerne le
développement régional. Évidemment, à la suite de
l'adoption du projet de loi, l'OPDQ disparaîtra et sera remplacé
par des conseils de développement régionaux.
Pourquoi, en fait, changer ces formules qui ont fait leurs preuves dans
le passé? Notamment, on sait très bien que l'OPDQ a plus de 35
ans d'existence, a favorisé dans bien des régions le
rapprochement des différents intervenants tant du milieu des affaires
que des milieux, en fait, social, culturel, communautaire, pour permettre de
prendre des décisions qui convenaient à l'ensemble d'une
région donnée, dans son devenir, dans son développement
économique ou dans son développement culturel et social.
Bien sûr qu'il y avait certaines modifications à apporter.
On a vu, au niveau des sommets socio-économiques, que la formule, en
fait, demandait à être revérifiée,
améliorée. Bien sûr. Mais nous savons aussi très
bien que, depuis que le gouvernement libéral a pris le pouvoir, en 1985,
il y a eu des modifications au niveau des sommets socio-économiques, et
c'est devenu beaucoup plus, à ce moment-là, des grands shows
politiques où on faisait des annonces importantes pour satisfaire un
public, mais en réalité ça a donné très peu
de performance, M. le Président.
Maintenant qu'on sait que dans deux régions on a
réellement fini les ententes-cadres des régions avec
Québec on s'aperçoit que, dans ma région, la
Montérégie, seulement 43 %, en fait, des sommes qui avaient
été promises et qui avaient été engagées
pour différents projets au niveau du développement
régional ont été dépensés. C'est très
peu, M. le Président, je le constate, et je trouve aussi que la
déception des intervenants est très importante face aux sommets
socio-économiques, non pas parce que la formule, il fallait qu'elle
disparaisse, mais parce que probablement ce gouvernement, les gens qui ont
manipulé ces formules ont fait en sorte qu'il y a eu un
«désapprouvement» et qu'il y a eu beaucoup de
déception, M. le Président.
Alors, on connaît ce gouvernement. Quand quelque chose ne va pas,
au lieu d'essayer d'améliorer la formule, bien, on change la structure.
On déplace une structure pour en mettre une autre, et très
souvent la structure qui est proposée est beaucoup plus coûteuse,
ne favorise pas nécessairement la concertation, mais permet davantage,
M. le Président, de faire ce qu'on pourrait appeler, dans un langage
peut-être plus ou moins courtois, du favoritisme. On appelle ça
des nids à patronage, quelquefois aussi, dans certains milieux.
Moi, je me pose ces questions: Pourquoi vouloir tant changer des
structures pour en mettre d'autres qui appellent davantage de personnel et qui
font appel à beaucoup plus de dépenses que les structures
existantes qui sont déjà en place? Nous ne sommes pas les seuls,
face à cette réforme, qui se posent de sérieuses
questions, parce que d'une part nous n'avons pas nécessairement tous les
éléments en main pour apporter vraiment notre assentiment hors de
tout doute à ce que ce projet de loi puisse avoir un impact
considérable dans le développement des régions. Il reste
bien des choses qui n'ont pas été énoncées, qui
n'ont pas été apportées par le ministre, et on sait
très bien à quel point, aussi, il y a eu, entre le ministre des
Affaires municipales, le ministre Ryan, et la ministre du développement
de la science et de la technologie... Les deux ne se sont pas réellement
entendus sur la proposition apportée dans le développement
régional du ministre du Développement régional, le
ministre Picotte. On voit bien que, même à l'intérieur du
Parti libéral, même à l'intérieur du cabinet, il y a
des réticences face à cette réforme apportée par le
ministre. Et, même plus, la ministre du développement de la
science et de la technologie disait: Écoutez, qu'est-ce que j'en ai
à foutre, moi, du développement régional, quand j'ai
à développer, en fait, une école ou à donner mon
autorisation pour une école de développement au niveau technique
ou autre? (16 h 40)
M. le Président, tout ça manque de vision, manque de
perspective. Ce gouvernement a de la difficulté, en fait, à se
donner un plan d'action global, à voir la globalité des choses,
la globalité de la gestion, la globalité des différentes
actions qui régissent le développement. On s'aperçoit
encore une fois que le ministre lance, comme ça, très rapidement,
une modification substantielle sans même... On se rappellera, en
décembre, il n'avait même pas encore consulté les
municipalités qui sont très concernées. Il faut se le
dire, il faut se le rappeler, lorsque le ministre des Affaires municipales a
apporté sa réforme, vous savez qui a fait les frais de cette
réforme? Ce sont les municipalités. Et, encore cette fois-ci, de
nombreux élus municipaux se posent des questions: Qu'est-ce qu'il va
arriver avec cette nouvelle tendance, avec cette nouvelle réforme?
Est-ce que, réellement, les choses vont continuer dans l'esprit qui
était instauré à l'OPDQ ou est-ce que, tout simplement, on
n'essaiera pas de modifier la formule pour favoriser certains projets
tape-à-l'oeil, qui donnent beaucoup de prestige sur le plan politique,
mais qui n'apportent rien, véritablement, dans le développement
que s'était proposé une région donnée dans un plan
d'ensemble? Et ça, oui, effectivement, ça préoccupe
énormément les élus municipaux, les
préfets de comté aussi. on se pose des questions et les
réponses ne viennent pas aussi rapidement, en tout cas, que les
questions sont posées.
Et le ministre voudrait qu'on accepte d'emblée, en fait, cette
réforme, en lui disant: On vous fait confiance, M. le ministre, vous
savez très bien dans quelle direction vous vous en allez. Mais, par
contre, M. le Président, on est obligé, pour savoir où le
ministre s'en va, de faire du coulage, de laisser des documents
apparaître de cette façon-là, non d'une façon
officielle mais tout simplement par coulage. C'est assez inusité, en
fait, quand un ministre est très fier d'une réforme ou sait
réellement où il s'en va. Je pense que ce n'est pas
réellement la façon, la procédure pour fonctionner.
Comment peut-on faire confiance à ce gouvernement en ce qui
concerne, aussi, les définitions que veut se donner le ministre? Le
ministre ne parle plus de développement régional mais il dit
qu'il faut qu'on s'occupe des affaires régionales. Quand on pense aux
termes «affaires régionales», c'est un peu comme si on avait
une préoccupation: «voguer» à ses affaires,
«vaguer» à ses affaires, occupations, obligations, en fin de
compte. Et ce n'est pas exactement de la même façon quand on parle
de l'ensemble des occupations et des activités d'intérêt
public. C'est beaucoup plus «dilatant» quand on peut aller
«vaguer» à ses affaires ou à ses occupations que d'en
faire un principe et d'en faire une préoccupation. Je pense que c'est un
état d'esprit qu'on est en train de développer avec cette
réforme et qui laisse, en tout cas, des doutes quant à la
façon dont elle sera appliquée, aussi, cette réforme.
On sait aussi très bien qu'il y aura un mandat à
l'intérieur de cette réforme et qu'on confiera, en fait... Il
sera comme une superstructure, en fait: un secrétariat qui sera sous la
responsabilité du premier ministre. Alors, je ne sais pas si c'est ce
qu'on appelle de la décentralisation, mais, quant à moi, quand on
met un secrétariat au niveau du Conseil exécutif, c'est que,
quelque part, en tout cas, on veut garder la mainmise. On veut bien donner des
miettes au niveau des régions: 3 000 000 $, en fait, par région.
Ce n'est pas de l'argent neuf, c'est déjà l'argent qui
était à l'intérieur des budgets de l'OPDQ et, en fait, on
se garde une mainmise sur la façon, à un moment donné,
dont on pourra développer ou dont on pourra utiliser ces sommes
d'argent. Alors, c'est plus de la déconcentration que de la
décentralisation, à notre avis. Aussi, il faut faire attention,
parce que les secrétariats, avec le gouvernement libéral, vous
savez ce qui leur arrive. Beaucoup de secrétariats ont disparu et, dans
le cas qui nous préoccupe à ce moment-ci, s'il fallait que le
ministre, le premier ministre, en fait, considère qu'il existe trop de
secrétariats et que c'est des dépenses qu'il considère
comme trop substantielles, bon, décide d'éliminer ce
secrétariat-là, on serait très mal pris, parce qu'il
n'existe plus d'OPDQ. C'est excessivement dangereux. On s'en va sur des voies
qui demandent, en tout cas, réflexion, M. le Président, et
effectivement on ne peut pas d'emblée accepter le projet de loi tel
qu'il est déposé actuellement.
On sait très bien le peu d'argent qui est mis dans les
régions, et le peu d'argent et le nombre de personnes qui auront
à prendre des décisions au niveau des projets risquent de causer
bien plus de problèmes, au niveau du développement d'une
région, que de favoriser la concertation. Pourtant, M. le
Président, on se souvient qu'en janvier 1992 M. Roger Nicolet, au niveau
des MRC, avait dit au ministre: Écoutez, pourquoi vous
précipiter? Nous sommes en train de développer de la
concertation, mais une véritable concertation, et c'est nous, les
élus, qui sommes responsables, qui avons l'imputabilité devant
notre électorat. C'est à nous que revient la
responsabilité des décisions, mais non pas des gens qui n'ont
aucune responsabilité vis-à-vis de l'électorat, aucune
imputabilité.
Ça aussi, ça agace, en fait, les gens du monde municipal,
la représentation au niveau de ces conseils. De quelle façon
cette concertation-là va-t-elle se vivre? De quelle façon, en
fait, les décisions au niveau des projets vont se prendre, M. le
Président? Est-ce que le gouvernement aura toujours la mainmise et qu'il
obligera, en fait, à prendre une direction? On ne le sait pas. On ne le
sait même pas parce que le gouvernement n'a pas de politique d'ensemble.
si, au niveau d'une région, le gouvernement était capable de
respecter une région pour son plan d'ensemble pour, en fait, la vision
de développement que cette région se donne en fonction de ses
ressources et en fonction de ses besoins, bien, peut-être qu'on pourrait
faire confiance, mais il n'y a rien qui nous dit que ça va aller dans ce
sens, m. le président. le ministre se conserve toujours le droit de
dépenser ces sommes d'argent, et beaucoup plus, m. le président,
en fait.
Le Conseil du trésor considère que c'est un engagement du
gouvernement, mais que ce n'est pas une obligation du gouvernement de rapporter
les sommes d'argent qui n'auront pas été dépensées
au niveau d'une région donnée. Écoutez, c'est assez
impressionnant, une déclaration de cet ordre-là du
président du Conseil du trésor, M. le Président. Et le
ministre des Finances va dans le même sens. C'est tout de même
impressionnant, quand on voit ces choses, et c'est inquiétant aussi,
à savoir quelles seront les sommes d'argent qui seront
véritablement imputées à une région
donnée.
Pas de garantie du tout. On dit que c'est un engagement. Un engagement,
oui, on prend l'engagement de... mais on peut réviser notre engagement.
Il n'y a aucune obligation du gouvernement, et ça, voyez-vous, encore
là, c'est
le flou de ce projet de loi. C'est ce qui fait qu'on demeure sur notre
appétit et qu'on demeure aussi avec plein d'incertitude et, en fait,
avec un questionnement des plus sérieux quant à l'avenir de ces
conseils régionaux là, M. le Président. Alors, je pense,
M. le Président, que, à l'heure actuelle, là où
s'en va le gouvernement, et on sait très bien aussi que ce n'est pas la
première fois que ce même gouvernement essaie d'apporter une
réforme...
On a bien vu que le ministre Côté, en 1988, avait
apporté une réforme à cinq volets. Ça s'appelait,
cette réforme-là, les affaires régionales. Vous savez
très bien ce qui est arrivé, en fait. Ça n'a pas fait long
feu. Il n'y a rien qui est arrivé, en fait, avec la réforme.
Alors, c'est pour ça que le ministre Picotte est obligé de
revenir, de reprendre, si vous voulez, le travail qui a été
inachevé de la part du ministre, de l'époque, des affaires
régionales. Maintenant, bien, enfin on est revenu avec un autre projet,
pensant que cette fois-ci ce serait beaucoup plus facile de faire passer ce
projet, puisque, bon, en fait, le ministre du Développement
régional, cette fois-ci, avec sa voix sans ambiguïté et sa
voix qui dit: Écoutez, il n'y a pas de place pour la discussion... Moi,
j'impose, à partir du mois d'avril, ma réforme et vous avez
jusqu'en juin pour vous trouver un mode de fonctionnement. (16 h 50)
Évidemment, peut-être que de cette façon-là
on peut arriver à obliger les gens à prendre des
décisions, mais est-ce que c'est plus heureux pour autant et est-ce que
le fonctionnement sera réellement à la hauteur de ce choix? Nous
ne le savons pas. Il faudra le vivre, et ce n'est que l'usure qui nous
démontrera, en fait, si la décision du ministre de mettre une
pression indue au niveau des différentes régions du Québec
était favorable à cet esprit de concertation qu'on veut
développer, au Québec.
Vous savez à quel point, au moment où on se parle, le
développement de nos régions, c'est crucial. C'est d'une
importance capitale et vitale lorsqu'on sait que, de plus en plus, nos
régions se vident parce qu'il y a justement, absence, d'abord, de fonds
nécessaires pour le développement des régions. Quand on
sait aussi l'absence de prise de décision dans certains domaines et
qu'on voit à quel point des industries importantes ferment leurs portes,
je pense que l'État a un rôle majeur à jouer comme leader
et il devrait, au contraire, donner des sommes substantielles pour permettre le
développement des régions et tout mettre en oeuvre pour que les
régions fonctionnent. Mais, pour cela, il faut entendre les partenaires,
il faut leur donner, à ces gens qui travaillent dans une région
donnée... de s'asseoir à une même table, de discuter, de
prendre des décisions pour le mieux-être de leur région et
non pas pour répondre à des impératifs de gouvernement et
s'ajuster en fonction des besoins d'un gouvernement.
M. le Président, c'est là, en fait, qu'on
s'aperçoit qu'il y a de l'improvisation de la part du ministre du
Développement régional et que, actuellement, nous ne sentons pas
cette volonté de la part du ministre régional. C'est aussi
pourquoi nous nous posons de sérieuses questions au niveau du projet de
loi, et nous ne pourrons pas souscrire à ce projet de loi tant et aussi
longtemps que ce sera aussi flou et qu'on n'aura pas non plus les modes, les
façons de vivre de ce conseil régional de développement et
de quelle façon aussi la mainmise, la centralisation du gouvernement se
vivra, M. le Président. En fait, on a l'impression que, quand le
gouvernement commence à avoir des problèmes budgétaires,
d'essoufflement et de déficit, il est très prêt à
transférer ses responsabilités. Il parle de
décentralisation, mais il aurait fallu, en fait, y voir beaucoup plus
tôt. Si on regarde ce qui a été fait avec le plan
Côté, quand on s'aperçoit du peu d'argent qui était
mis à la disposition pour le développement régional et le
peu d'argent qu'on a dépensé - je n'ai qu'à penser au
programme PRECEP qui a remplacé le PECEC - on s'aperçoit que les
subventions ont diminué, pour disparaître complètement en
avril 1992. On s'aperçoit aussi qu'au niveau des échanges entre
le fédéral et le provincial il y a très peu d'argent qui a
été dépensé pour le développement des
régions.
Quand on pense aussi, M. le Président, aux antennes
régionales de développement technologique, il n'en existe pas
encore dans nos régions. Nous sommes toujours en attente de ces antennes
régionales de développement technologique et vous savez à
quel point c'est essentiel pour nos régions. Alors, M. le
Président, dans un Fonds de développement technologique qui a
été créé en 1989, pour une durée de cinq
ans, vous savez combien d'argent on a dépensé? Seulement 40 000
000 $ sur les 350 000 000 $ prévus, M. le Président. C'est une
honte! Ce gouvernement vient nous dire qu'il est préoccupé par
les régions, qu'il change une structure pour une autre et que ça
va améliorer le développement économique des
régions; j'ai de la difficulté à le croire, M. le
Président. Ce n'est pas uniquement en changeant des structures qu'on
améliore une situation, mais c'est par une volonté de
gouvernement d'apporter des solutions concrètes et de permettre aux
régions de se prendre en main, non pas sous la tutelle du ministre et
avec une centralisation qui remet en cause leur prise de décision, mais
en leur donnant une véritable décentralisation, avec des pouvoirs
et leur permettre, justement, d'aller dans le sens de leur avenir. Je vous
remercie.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la
députée de Marie-Victorin. Sur le même sujet, je
cède la parole à Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve. Vous disposez d'une période de 20 minutes, Mme la
députée.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Je vous remercie, M. le Président. Il est vrai
que ce projet de loi inquiète. Je constate qu'il n'inquiète pas
que dans les régions. Il inquiète également à
Montréal. Ce sont les inquiétudes qui s'expriment à
Montréal dont je voudrais vous parler maintenant. Ce projet de loi
inquiète parce qu'on n'y indique d'aucune façon comment on entend
remplacer ce qu'on connaît actuellement et qui nous a bien servis.
J'aimerais, dans le temps qui m'est alloué, en faire un bref bilan.
Comment va-t-on remplacer ce qu'on connaît présentement,
c'est-à-dire l'Office de planification et de développement du
Québec, tel qu'on le connaît depuis des décennies à
Montréal, avec l'expertise qu'on lui reconnaît? Par quoi va-t-on
remplacer le secrétariat qui avait, au fil des années, pu
accumuler une expertise... Encore une fois, je le dis et j'insiste, parce que
cette expertise lui est, de façon très générale,
reconnue par l'ensemble des décideurs et des intervenants
montréalais. Quelle est donc, finalement, la structure qui sera mise en
place pour que tout cela ne se perde pas et que, dans une période
où Montréal est à ce point bousculé par des
changements... Comment peut-on essayer de justifier tous ces changements de
structure? C'est quelque chose d'absolument incroyable, absolument
inimaginable.
Quand on pense qu'en l'espace de quelques années à peine,
soit deux ans, la dégringolade du secteur manufacturier a
été absolument vertigineuse sur l'île de Montréal.
En l'espace de deux ans, c'est 42 000 emplois qui se sont perdus dans le
secteur manufacturier. Et ça, évidemment, sans avoir à
additionner toutes les autres fermetures qu'on a pu connaître. Dans le
secteur de la chimie, pétrochimie, depuis une décennie, c'est 4
raffineries sur 10. Je passe évidemment sur la fermeture du chantier
naval, le seul qui existait à Montréal, et on pourrait en ajouter
une liste impressionnante.
Mais là n'est pas mon propos. Au moment où on assiste
à cette progression sans précédent du nombre de personnes
sans emploi sur l'île de Montréal... C'est quand même
phénoménal. On a le championnat douteux de chômeurs qu'on
remporte sur Saint-Jean, Terre-Neuve, et même sur la
Nouvelle-Orléans, qui a pourtant le plus haut taux de chômage aux
États-Unis. Eh bien, même à ça, Montréal
détient encore ce record, comme je le dis, M. le Président, assez
douteux, d'un taux de chômage plus élevé qu'à
Saint-Jean de Terre-Neuve et qu'à la Nouvelle-Orléans. Au
même moment on assiste, là, à cette situation-là qui
est désespérante pour bien des gens.
D'un autre côté, de la part du gouvernement, il faut
constater une accumulation sans précédent aussi des changements
de structures. C'est quelque chose d'absolument incroyable. Prenez, par
exemple, le ministre des Affaires municipales et de l'habitation qui a
annoncé un groupe de travail qui va se charger de lui suggérer
les modifications, éventuellement, de structures et autres modifications
à opérer sur un territoire qui couvre 137 municipalités
sur l'île et autour de ITle. Au même moment, le ministre
responsable du développement économique de Montréal et
président du Conseil du trésor annonce, de son côté,
la création d'une société de développement
technologique sur laquelle il va y avoir un conseil d'administration où
vont siéger neuf personnes qu'il va nommer, qui va établir des
priorités, n'est-ce pas, qui devrait établir des priorités
de développement technologique, des priorités sur le même
territoire où vont se retrouver les cinq sociétés
régionales que découpe le projet de loi 19 qui est devant nous,
sur le même territoire qu'étudie le ministre des Affaires
municipales et de l'habitation, le même territoire où va se
créer la société d'innovation technologique. (17
heures)
Alors, là, vous allez retrouver cinq autres
sociétés régionales du ministre responsable du
Développement régional, chargées annuellement de
définir les priorités, et ça, c'est sans prendre en
considération la nouvelle société du ministre de la
Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle, nouvelle société qu'il va créer par le
projet de loi 408, qui devrait être déposé demain, et qui,
elle-même, va redécouper différemment la main-d'oeuvre avec
un projet de formation pour la main-d'oeuvre du territoire desservi, soit
l'île, soit Laval, et d'autres sociétés pour la
Montéré-gie.
Alors, il y a un enchevêtrement de changements de structures, un
brassage, M. le Président, comme on n'a jamais vu jusqu'à
maintenant, au moment où on aurait pourtant besoin d'un répit
dans les changements de structures. On aurait surtout besoin d'un gouvernement
qui sait où il s'en va et de ministres qui savent, avec le même
leadership, dans quelle direction ils veulent s'en aller. C'est quand
même étonnant, puis, là, je n'ajoute pas, M. le
Président, à tout cela, la nouvelle Société de
développement de la main-d'oeuvre du futur projet de loi 408, les
sociétés régionales du projet de loi 19, la
société Innovatech du projet de loi qui sera déposé
ce soir, m'a-t-on dit, et le groupe de travail du ministre. J'ajoute à
ça les grappes industrielles. Mais elles sont où dans tout
ça, finalement? Elles sont où, finalement?
Plutôt que de penser en fonction d'une politique régionale
pour essayer, justement, de renforcer notre structure industrielle là
où on est fort, on est en train, M. le Président, de multiplier
les structures, ce qui est, évidemment, inquiétant, d'autant
plus, je dirais, à Montréal, encore plus que dans les
régions parce que, en région, ça, je dois le dire et les
féliciter, ce soir, je dois rendre hommage aux gens des régions
parce que ça ne leur prend pas de temps
à se mobiliser quand il y a quelque chose qui se passe qui ne
fait pas leur affaire.
On en a vu des exemples récents: le ministre de la Justice a
laissé entendre, suite à des directives du Conseil du
trésor, par exemple, qu'il allait fermer des bureaux d'aide juridique en
Gaspésie, aux îles-de-la-Madeleine ou en Abitibi. Bien, ça
n'a pas pris de temps, M. le Président, qu'il y avait des
résolutions - j'en recevais des copies; c'était envoyé
directement au ministre de la Justice - des municipalités, des
organismes socio-économiques, de tout ce qui peut bouger dans ces
régions.
On l'a bien vu avec un autre exemple qui nous est arrivé encore
aujourd'hui quand, l'an passé, le Directeur général des
élections, Pierre-F. Côté, a annoncé qu'il allait
refaire la carte électorale du Québec et soustraire un
comté dans la région, justement, de la Gaspésie et trois
comtés sur l'île de Montréal. Je vous rappelle que, sur
l'île de Montréal, on a augmenté légèrement
de population depuis 10 ans et qu'il n'y avait aucune raison de faire
disparaître trois comtés, l'équivalent d'une région
comme l'Abitibi, d'un coup de baguette comme ça, M. le Président,
avec 150 000 personnes qui ne sont plus représentées ici
même, dans cette Assemblée. La Gaspésie avait
légèrement diminué de population, mais avec - et il faut
leur donner ce qu'ils ont, leur rendre hommage - toute la mobilisation dont ils
étaient capables, ils ont pris d'assaut l'opinion publique, les
médias d'information et ils ont obtenu immédiatement que le
gouvernement les rassure sur le fait qu'ils allaient garder autant leur bureau
d'aide juridique que leur comté que le Directeur général
des élections les menaçait de couper.
Mais le danger, c'est l'anonymat de la grande ville, parce que, dans
l'anonymat de la grande ville, c'est difficile de mobiliser; c'est difficile,
ça prend plus de temps. Vous allez me dire qu'une fois que la machine
est partie ça peut arriver au même résultat, mais ça
prend plus de temps. C'est d'autant plus important d'avoir des organismes qui
servent les intérêts des gens et des organismes qu'on
connaît bien, M. le Président, puis c'est important de ne pas
changer tout le temps.
Pensez, par exemple, au rôle stratégique qu'a joué
l'OPDQ tel qu'on le connaissait, tel que le fait disparaître le projet de
loi 19. Pensons au rôle stratégique que l'OPDQ a joué au
cours des 20 dernières années dans le développement
régional à Montréal. C'est absolument
phénoménal. J'ai tenté, avec les moyens modestes qui sont
les miens, d'en faire un très bref bilan, pour donner quelques exemples
de ce à quoi c'a pu servir, M. le Président, et du fait qu'il n'y
a aucune raison pour qu'on veuille faire disparaître ça sans
savoir actuellement, pour Montréal, par quoi on va le remplacer.
Quand je parle du rôle stratégique que ça a
joué, je pense, entre autres, au soutien financier, aux corporations de
développement économique et communautaire, et il faut se rappeler
que, pour l'est de Montréal, qui était très
éprouvé par les fermetures d'entreprises, pour le sud-ouest de
Montréal - on parle de Pointe-Saint-Charles, à ce
moment-là, particulièrement, en fait, de toute cette bande de
terre entre la Pointe-Saint-Charles et la Pointe-aux-Trembles, celle qui suit
le fleuve de Montréal et qui a été industrialisée
au début du siècle - il faut comprendre que c'est essentiellement
là où il y a eu la déstructuration industrielle, la
désindustrialisation, et c'est finalement par le soutien financier des
premières corporations, créées il y a maintenant cinq ans,
qu'a été rendue possible une politique de développement
local.
Ce n'était pas évident, ça, je vous garantis. Ce
n'était pas évident du tout, du tout, en 1985, quand Mme la
députée de Taillon, alors ministre, avait de façon
exploratoire lancé trois corporations à Pointe-Saint-Charles,
dans le centre-sud et dans Hochelaga-Maisonneuve. Pourtant, maintenant, tous
les gouvernements, toutes les administrations, tous les décideurs, tous
les intervenants régionaux applaudissent à cette politique de
développement local et tous les quartiers veulent obtenir leur
corporation de développement économique et communautaire. Mais
c'est grâce à l'OPDQ, à Montréal, que ça a
été rendu possible.
La même chose, M. le Président, pour le premier million de
dollars, et je me rappelle combien ce fut difficile d'obtenir ce premier
million. Mais c'est encore l'OPDQ qui a mis l'argent en question dans la SODIM,
la Société de développement industriel de Montréal.
Ça a été les premiers projets de revitalisation
industrielle, par, notamment, une subvention pour l'achat du parc Moreau, qui
longe le quartier de Hochelaga-Maisonneuve et qui est devenu un parc
industriel.
Avant, les parcs industriels, on ne les pensait qu'à
l'extérieur des villes. Alors, les villes se mouraient, sur le plan de
leur désindustrialisation, puis on allait ouvrir des parcs industriels
en périphérie. C'est finalement grâce à
l'intervention stratégique de l'OPDQ à Montréal que la
Société de développement industriel de Montréal a
pu voir le jour et a pu faire l'achat, par cette subvention, du premier parc
industriel, puis on verra évidemment se développer par la suite
toute une politique, encore une fois, de réindustrialisation des zones
vétustés.
Je pense à la mise en valeur du Vieux-Montréal. C'est
l'OPDQ qui a soutenu, qui a mis de l'avant ce projet de mise en valeur, bien
avant le ministère des Affaires culturelles. Il aura fallu des
années. Je dirais que la vision que l'OPDQ a du développement a,
dans la plupart des cas, précédé les interventions des
ministères. Ça a été le cas, je le rappelle, pour
le Vieux-Montréal. Ça a été le cas également
pour le dossier des parcs régionaux. Maintenant, Mont-
réal, et la région métropolitaine, et les
Montréalais et les Montréalaises sont tellement heureux de
pouvoir utiliser ces parcs régionaux, mais qui ont été
initiés grâce à l'intervention de l'OPDQ.
Cette intervention de l'OPDQ a précédé une
politique à long terme, en matière d'espaces verts, qui par la
suite a été adoptée par la Communauté urbaine. (17
h 10)
D'autres exemples, M. le Président, là, à la
connaissance que j'ai pu avoir de ces dernières années. Je pense
à la Société du centre de conférences
internationales de Montréal. C'est un projet qui avait été
initié par l'OPDQ, ce projet de Société du Centre de
conférences internationales de Montréal. C'est la seule grande
ville internationale que le Québec a. C'est sa porte sur le monde. Il
faut être fier, M. le Président, de ce que Montréal joue
aujourd'hui même un rôle clé, stratégique, à
ce grand rassemblement de l'univers à Rio, et il faut pouvoir avoir les
équipements. On ne les aura pas ailleurs au Québec si on ne les a
pas d'abord à Montréal. Il faut avoir ces équipements pour
faire venir des visiteurs, et ces équipements doivent être aussi
importants que ceux qui sont offerts dans d'autres grandes villes. Et c'est
finalement cette société du Centre de conférences
internationales de Montréal qui est en train de mener à terme
l'important projet d'un centre de conférences à vocation
internationale. Actuellement, le Centre de conférences de
Montréal là, il est dépassé, hein. 10 000, 12 000
personnes pour une conférence, maintenant, c'est considéré
comme les ligues mineures. Dans les ligues majeures, on en perd actuellement,
des conférences internationales importantes. On en perd faute
d'équipements adéquats. Et c'est finalement, il faut le
reconnaître, l'OPDQ de Montréal qui avait initié ce projet
de centre de conférences internationales.
Et faut-il encore parler des programmes PRECEP, des programmes qui ont
supporté un démarrage d'entreprise? C'était d'autant plus
important... Et, moi, je souhaite vraiment - je le lui dis s'il m'entend - que
le ministre responsable du Développement régional réponde
en commission parlementaire sur le sort qu'il entend réserver au
développement régional à Montréal. Vous savez que
les programmes de démarrage d'entreprise ont permis, en 20 ans, le
démarrage de 594 projets d'entreprise, avec pourtant un modeste 35 000
000 $ de subventions. On parle de 594 projets d'entreprise. Donc, 35 000 000 $
de subventions ou de prêts, pour des investissements qui ont
totalisé 226 000 000 $ et qui ont totalisé près de 8000
emplois entre à peine 10, 12 ans, M. le Président, à la
fin des années soixante-dix et au début des années
quatre-vingt-dix.
Alors, c'est important que ce coup de pouce qui était offert par
ces programmes demeure. C'est d'autant plus important que c'est justement dans
la ligne bien identifiée, celle qui est vétusté
présentement, identifiée notamment par le Conseil des affaires
sociales, le T, là, identifié par le Conseil des affaires
sociales dans son étude sur le Québec cassé en deux,
c'est-à-dire, finalement, la ligne nord-sud autour du boulevard
Saint-Laurent et la ligne est-ouest, particulièrement autour de la rue
Notre-Dame. C'est dans ce secteur-là que le support à la
subvention était le plus élevé, et c'était d'autant
plus important qu'il en soit ainsi que ça permettait le démarrage
d'entreprises dans des quartiers qui, sinon, auraient été
complètement négligés par les grandes entreprises qui,
elles, cherchent à s'installer là où il y a souvent
beaucoup plus de facilité.
L'OPDQ a réussi, à Montréal, à faire
beaucoup avec, finalement, quand on regarde ça, là, assez peu
d'argent et assez peu d'effectif. Et, moi, je veux en profiter aujourd'hui pour
leur rendre hommage; rendre hommage à cette équipe qui a bien
mérité, finalement, M. le Président, qu'on souligne sa
contribution au développement de Montréal. Et ça
m'apparaït important, à ce moment-ci où nous ignorons encore
ce que seront les structures, comment le ministre entend concilier sa vision du
développement régional en région avec celle du
développement régional à Montréal. On n'en
connaît absolument rien. Et, le danger, c'est un danger contre lequel je
le mets vraiment en garde. Ce danger-là, c'est de penser une structure
pour des régions puis, ensuite, par après, d'essayer de l'adapter
au contexte montréalais. La région métropolitaine,
ça ne peut pas être juste un contexte, M. le Président.
C'est une métropole. C'est la seule métropole sur laquelle le
Québec peut compter. C'est celle avec laquelle il doit se
réconcilier, avec laquelle il doit renouer un nouveau contrat de
manière à être d'attaque, M. le Président, sur les
marchés internationaux, et de manière aussi à être
d'attaque pour ne pas laisser s'enfoncer dans le chômage, dans la
pauvreté, une très grande partie de la main-d'oeuvre qui a perdu
son emploi sur l'île de Montréal. On parle actuellement
d'au-delà de 225 000 hommes et femmes sans emploi sur 111e de
Montréal. C'est plus de chômeurs réunis que dans toutes les
provinces atlantiques, ça. Plus de chômeurs à
Montréal, dans la ville seulement, que dans les provinces de
Terre-Neuve, de Nouvelle-Ecosse, du Nouveau-Brunswick, de
l'île-du-Prince-Édouard. Alors, il ne faut pas... Les structures,
ce serait une grave erreur, une erreur profonde d'essayer de penser à un
modèle pour l'ensemble du Québec, dans lequel on voudrait de
force faire entrer l'île de Montréal.
M. le Président, je souhaite qu'on ait, en commission
parlementaire, des réponses très précises sur comment le
ministre entend assurer le maintien de l'expertise qui, je le rappelle, a
été longuement développée au secrétariat de
l'OPDQ à Montréal, qui va disparaître avec son projet de
loi, comment il entend pouvoir con-
tinuer à offrir cette expertise aux Montréalais, à
offrir une représentativité dans les centres de décision
et comment, entre-temps, vont se prendre des décisions sur des projets
importants. Je pense, entre autres, à celui du Centre de
conférences internationales de Montréal, je pense à
l'Institut de recherche en biologie végétale, qui était
justement un des projets de l'OPDQ, je pense à la Maison des
régions du Québec, à la mise en place de la Maison des
régions et à tous ces autres projets qui étaient
déjà engagés.
Je voudrais, M. le Président, avoir des réponses
très claires du ministre. Alors, évidemment, dans les
circonstances qui sont celles que j'ai décrites, il est évident,
M. le Président, qu'on ne peut pas signer un chèque en blanc avec
le projet de loi 19 et qu'on a l'intention de voter contre. Je vous
remercie.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve. Sur le même sujet,
à savoir la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 19,
Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les affaires
régionales, je cède la parole à M. le député
de Jonquière. Vous avez droit à 20 minutes, M. le
député.
M. Francis Oufour
M. Dufour: Oui, merci, M. le Président. Moi aussi, comme
député venant des régions, je veux joindre ma voix
à tous ceux et celles qui m'ont précédé pour parler
d'un projet de loi qui, à mes yeux, présente un certain nombre
d'interrogations et aussi un certain nombre d'écueils auxquels nous
aurons à faire face au cours de sa mise en application.
J'ai entendu avec beaucoup d'attention les quelques rares interventions
provenant du parti ministériel concernant ce projet de loi. Je suis
heureux d'apprendre, mais pas convaincu, que ce projet de loi découle de
nombreuses études et de consultations sur le territoire. Je suis
obligé de constater, M. le Président, que le projet de loi qu'on
a devant nous ne découle pas de consultations tel qu'on l'entend chez
nous. Puisqu'il faut tout de même admettre une certaine part
d'habileté, je dirais presque machiavélique, de la part du
gouvernement, pour amener son projet de loi.
Comment ça s'est passé? De quelle façon on a
amené ce projet de loi au Parlement? De quelle façon le ministre
responsable du Développement régional a-t-il réussi
à passer son projet à travers le Conseil des ministres? Il faut
se rappeler d'abord qu'il y a eu, depuis quelques années, beaucoup
d'efforts, de la part des gens de la région de Montréal, pour se
doter ou pour demander un plan de relance qui toucherait l'ensemble de la
région de Montréal. Après beaucoup de tergiversations,
beaucoup de discussions et surtout beaucoup d'hésitations, parce que
c'est un gouvernement qui hésite toujours, qui est toujours dans
l'expectative, dans les suppositions, donc ce gouvernement a fini par aboutir
d'un projet d'environ 400 000 000 $ pour l'ensemble de la région de
Montréal.
Et ça, c'a amené justement le questionnement de la part
d'autres ministres, en particulier du ministre responsable du
Développement régional, à savoir ce qui arrive pour
l'ensemble des régions du Québec. Et là, eurêka! on
a trouvé la solution: II faut absolument qu'on aille dans les
régions et qu'on trouve des sources de revenus pour ne pas qu'on mette
en opposition les régions par rapport à Montréal. C'est
vraiment, à mes yeux, la façon dont la situation s'est
présentée et la façon dont on veut la solutionner. (17 h
20)
Je trouve que c'est machiavélique, puisqu'on prend les sommes
d'argent... Il n'y a pas d'argent nouveau, il n'y a pas de sommes d'argent
nouvelles, par rapport au projet de loi. On prend des sommes d'argent qui
existent ailleurs, les 54 000 000 $, et on dit: On va les distribuer sur
l'ensemble du territoire. Ça a eu pour effet... C'est quoi? Quel effet
ça a eu dans les régions? C'est là que je dis que le plan
est machiavélique, parce que, contrairement à ce qu'on aurait
été en lieu de penser, que le développement des
régions, d'abord, se ferait par les régions et pour les
régions, la seule façon qu'on a trouvée, c'est de
rebâtir ou d'essayer de jouer dans les structures. Voilà. Je
pourrais dire: Le lion est lâché et laissons-les faire sur le
territoire. On sait bien que, chaque fois qu'il y a des montants d'argent en
cause, ça va amener des centres d'intérêt, ça va
amener de la discussion et des parties de bras de fer. C'est ce à quoi
on a assisté depuis le début de l'annonce de cette
réforme. Et Dieu sait si les régions pourraient se passer de
ça, pourraient se passer de ces discussions qui, dans le fond, ne
mènent nulle part, si ce n'est qu'à des luttes de pouvoir
stériles et à savoir qui va emporter.
Est-ce que, vraiment, on s'est occupé ou on s'occupe de l'avenir
et des besoins des régions? Est-ce que, vraiment, on essaie de favoriser
une partie de notre population? Il y a un constat qui touche l'ensemble des
régions du Québec, et ça, on ne peut pas le nier: les
régions souffrent d'un chômage chronique. Un des premiers agents
de ce chômage ou un de ses premiers responsables, à mes yeux,
c'est le gouvernement libéral qui, depuis au moins 35 ans - que je
connais et que j'ai vécus - saupoudre sur l'ensemble du territoire du
Québec des sommes d'argent, des subventions, des guidis-guidis pour
trouver des remplacements à des travaux. Plutôt que de former de
la main-d'oeuvre permanente, on forme, effectivement, une classe
d'assistés sociaux et une classe de démunis, des classes de
chômeurs.
Rappelons-nous qu'en 1960 c'étaient des travaux de chômage
qui existaient, avec la
bénédiction du gouvernement fédéral, et,
quand ça ne travaillait pas, après ça,
l'assurance-chômage. C'était de même. Après
ça, on a trouvé encore d'autres programmes. Et, là, on est
rendu qu'on intervient dans les champs directs du gouvernement du
Québec, et on n'entend pas un mot, pas un traître mot. C'est le
fonds La Prade... On divise ça un petit peu partout. On saupoudre et on
crée des chômeurs permanents. C'est ça qu'on a
réussi à faire avec des programmes. Ça, c'est ce que
j'appelle la faillite de ce gouvernement fédéral qui est venu
agir sur notre territoire comme des sans dessein, comme des gens qui ne
savaient pas où ils allaient, mais qui se sont donné une
visibilité.
Ce que le gouvernement fédéral a fait, le gouvernement du
Québec, malheureusement, s'apprête à le faire parce que,
lui aussi, il veut aller par des subventions, lui aussi, il veut amener des
petits montants d'argent pour essayer d'apaiser. Ce n'est pas fou, ce que le
fédéral a fait, si on regarde au point de vue politique. Au point
de vue, par exemple, de faire avancer une société, au point de
vue de la situer au point de vue de son avenir, ça, c'est une autre
paire de manches. Il faut être conscient de ça. Quand je regarde
ce que le gouvernement du Québec s'apprête à faire avec son
projet de loi, les petits montants qui sont en cause, est-ce que vous pensez
que ça va virer la situation rapidement? Est-ce que vous pensez que
ça va donner des réponses aux chômeurs?
Il faut se méfier d'un gouvernement qui, chaque fois qu'il a un
problème, nous arrive avec des réformes de structures. Ce n'est
pas la première fois. En 1988, le ministre responsable du
Développement régional du temps, M. Marc-Yvan Côté -
un gros ministre, il parle fort - ce qu'il nous proposait: des plans de
relance, des plans de relance pour les régions. Il voulait
réparer tous les chemins au Québec. Il ne savait pas quoi faire
pour ce faire. Il allait fouiller un peu partout.
Une voix:...
M. Dufour: M. le Président, j'aimerais que vous rappeliez
au député de Chauveau que, s'il veut parler, il a un droit de
parole comme j'en ai un. Je n'accepte pas de me faire interpeller parce que
j'ai écouté des députés ministériels qui ont
discuté et je ne les ai pas interrompus, même si je n'étais
pas d'accord avec...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant! M. le
député de Chauveau, s'il vous plaît! Vous avez, M. le
député de Jonquière, raison de faire cette mise au point.
Vous avez le droit d'intervenir sans être interpellé. Allez-y.
M. Dufour: M. le Président, je vous remercie... Ha, ha,
ha! Ça fait que... Bon! En fait, le leader parlementaire nous tient
informés qu'il va hériter d'une partie de Chauveau. Ça
fait que... Espérons que ça sera un bon successeur ou un bon
héritier de la suite des choses.
Ce que je disais, M. le Président, c'est que le gouvernement
québécois, le gouvernement du Québec, actuellement,
s'apprête, par ses actions, à faire exactement ce que le
fédéral a fait sur le territoire, parce que, en faisant du
saupoudrage, en faisant participer la population à ce
saupoudrage-là, on la rend un peu complice, mais on ne trouve pas les
vraies solutions aux problèmes. Imaginez-vous que les 3 000 000 $ qui
vont être sur le territoire, ça va être une course
effrénée et des parties de bras de fer régulières
entre les partenaires pour savoir ce qu'on fait avec ça. Il y a
tellement peu. C'est tellement peu. C'est une goutte d'eau dans l'océan.
Ce n'est pas avec ça qu'on va réformer notre
société. Ce n'est pas avec ça qu'on va dire qu'on
amène des exemples qui vont permettre aux régions de mieux se
battre et de mieux se développer.
Comment on aurait pu agir pour arriver à des fins tout autres qui
sont vraiment les fins pour lesquelles un gouvernement existe,
c'est-à-dire permettre aux régions de respirer, de
prospérer et de se trouver des avenues nouvelles? On aurait pu le faire
en concertation avec le milieu. N'oublions pas qu'il y a opération
Dignité, et ça s'est fait avec des gens. Il y a, actuellement,
des opérations qui ont été faites dans certaines
régions, de concert avec l'Union des municipalités
régionales de comté, qui ont essayé de trouver certains
créneaux de développement, et qui se concrétiseront
à la fin de cette semaine, ici, à Québec, à
côté du parlement, où les régions viendront nous
dire ou viendront vous dire ce qu'elles veulent, elles, comme
développement, de quelle façon elles pourraient mieux se
développer.
Je suis sûr qu'il y aura des contradictions avec ce qui se passe.
Ce n'est pas les plans qui nous manquent à Québec pour
développer nos régions. On le sait qu'il y a du chômage. On
le sait que, dans la formation de la main-d'oeuvre, il faut agir. On le sait le
taux de chômage. On n'a pas besoin d'un nouveau ministère pour
nous dire c'est quoi le taux de chômage et c'est quoi les
difficultés qu'on a en région. Il y avait de l'argent, en fait,
de voté, il y a eu des sommets socio-économiques qui ont
existé dans les régions. Il y a eu des sommes d'argent de
votées. Ce n'est pas l'argent qui manque, c'est la volonté
politique de dépenser cet argent pour essayer de donner les fruits
escomptés. On ne l'a pas fait. On ne l'a pas fait. Moi, je
déplore ça.
Qu'est-ce que les régions vont faire pour que le gouvernement
soit à l'écoute? N'oublions pas que le ministère qu'on est
en frais de mettre sur pied, il va être en tutelle. C'est un
ministère qui va se rapporter directement au Conseil exécutif,
donc il va être sous la tutelle du premier ministre. Est-ce que le
premier ministre a le temps de s'occuper de toutes les régions? Je
veux dire, il peut bien s'en occuper, mais ce n'est pas son rôle.
Son rôle, c'est de s'occuper de l'ensemble des parties, de s'occuper du
tout, mais, quand ça arrive dans les parties, c'est quoi, là,
qu'on trouve? C'est quoi qu'on cherche, à travers ça, à
centraliser? Au contraire de la décentralisation, on centralise des
décisions, on centralise la mainmise sur les régions, on
centralise les pèlerinages parce que tout va être filtré,
tout va être tamisé, tout va être contrôlé, et
nos régions, elles n'auront pas cette chance de pouvoir faire valoir
leur point de vue, si ce n'est qu'on va assister, bien sûr, à des
discussions stériles qui n'amèneront pas grand-chose.
Méfions-nous d'un gouvernement qui nous apporte des solutions toujours
par des réformes de structures.
Tout à l'heure, j'écoutais le député de
Papineau, M. MacMillan, qui nous informait que c'était un gouvernement
qui était à l'écoute, et qu'il avait trouvé des
solutions. Ça fait sept ans que le gouvernement est là. Il aurait
dû commencer à trouver des solutions avant. En 1988, on nous
annonçait avec grande pompe et avec beaucoup de sens publicitaire qu'il
y avait des programmes qui s'appliqueraient à nos régions.
Malheureusement, on ne verra jamais ce que ça a donné, comme on
ne verra pas, pour aujourd'hui, ce que ça a donné, tous les
investissements qu'on a mis dans le réseau routier. On peut se
questionner très longuement et très fortement, il n'y a rien
là. Mais, pourtant, c'était un engagement solennel. On a pris la
peine de le faire, de l'annoncer, de dire: C'est comme ça que ça
va se passer à l'avenir. Les régions continuent à
souffrir, les régions continuent à manquer d'oxygène et,
actuellement, il ne se passe absolument rien. Est-ce qu'on va accepter
longtemps cette mainmise sur les régions par le gouvernement? (17 h
30)
Je pense que c'est le temps qu'on commence cette
réflexion-là. Ce n'est pas par des réformes de structures,
ce n'est pas en mettant de côté un organisme qui, possiblement,
avait besoin d'être réexaminé, d'être
amélioré, d'être soupesé. Mais, disons-nous que
l'OPDQ, l'Office de planification et de développement du Québec,
a joué un rôle primordial dans nos régions? Il a
joué le rôle que le gouvernement a bien voulu qu'il joue. Si on ne
lui a pas donné les sommes d'argent nécessaires pour intervenir,
il faut s'en plaindre. Ce n'est pas l'Office qui est coupable, c'est le
gouvernement qui est responsable. Ce n'est pas en changeant le mal de place
qu'on vient de régler le problème. On vient peut-être, par
exemple, pour le gouvernement qu'on a en face de nous, d'avoir encore un
répit de deux à trois ans, parce que, pendant qu'on joue à
peu près dans tout, on ne s'occupe pas de ce qui est important. On peut
penser que les régions vont oublier que le gouvernement n'est pas
à leur écoute, mais il y aura certainement un temps où les
régions s'élèveront et diront à ce gouvernement:
Assez, c'est assez! Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): merci, m. le
député de jonquière. sur le même sujet, je
cède la parole à m. le député de joliette et leader
de l'opposition officielle.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je voudrais
intervenir également dans ce débat parce que j'ai vécu, au
niveau de ma région, certains malaises, certains problèmes dans
la mise en application de la loi dite «réforme Picotte».
M. le Président, je pense que les gens, dans chacun de nos
milieux au Québec, mêlent deux choses. Ils mêlent d'abord le
développement économique régional et la
régionalisation ou la décentralisation en région. J'ai
été à même de me rendre compte, M. le
Président, que l'expérience des dernières années,
le pelletage des taxes dans la cour des municipalités a contribué
à créer une trouille assez forte, assez grande chez les
élus municipaux, si bien qu'au niveau de cette structure, qui n'est pas
une décentralisation mais plutôt une déconcentration, on
s'est rendu compte que, dans plusieurs milieux du Québec, les
élus municipaux ont eu peur. Ça a été le cas dans
mon coin, où ils visaient à aller chercher la majorité des
voix autour de la table de concertation régionale. À mon point de
vue, c'était bien mal comprendre le problème.
C'est deux choses, M. le Président, de voir un gouvernement
décentraliser des pouvoirs, décentraliser des points
d'impôt, décentraliser des responsabilités au niveau des
régions, les remettre entre les mains d'une structure élective
régionale et participer à une structure de concertation en vue
d'assurer un meilleur développement économique régional.
M. le Président, je pense que je ne suis pas le seul au Québec
à avoir vécu ce genre de problématique, mais nous nous
sommes expliqués avec les élus municipaux de notre région,
et je pense qu'ils ont compris que c'étaient deux dossiers
diamétralement opposés.
Mais, pour revenir à la réforme à laquelle nous
sommes conviés de voter par le biais de la loi 19, je vous dirai,
d'entrée de jeu, que ce n'est pas une décentralisation. C'est une
déconcentration, parce que, en bout de ligne, en bout de course, le
ministre se garde, bien sûr, le pouvoir de décider. C'est un
pouvoir, bien sûr, plus grand qu'avant, je le concède, moi, je le
reconnais, M. le Président, mais c'est un pouvoir de décision qui
n'est pas ultime. La sanction ministérielle est obligatoire à
tout projet et, ça, on appelle ça non pas de la
décentralisation mais de la déconcentration. Je pense qu'on
aurait eu avantage à expliquer davantage, justement, l'objectif de cette
réforme. On remet entre les mains du monde décisionnel, du monde
qui décide
au niveau des régions, on leur permet, on leur donne la
possibilité d'arbitrer, de «prioriser» certains projets de
développement économique. Je pense que cela, en soi,
c'était recherché depuis un certain nombre d'années par
les élus municipaux et par les décideurs économiques du
milieu. On a pris le budget global au niveau national, et le budget global
était de 45 000 000 $. On a dit: 3 000 000 $ par région. Une
simple division mathématique!
Mais, M. le Président, si je posais la question au ministre de
l'Industrie, du Commerce et de la Technologie, qui est ici en cette Chambre, et
si je lui disais: Est-ce que les besoins sont les mêmes d'une
région à l'autre? Est-ce qu'on a, à la grandeur du
Québec, les mêmes infrastructures d'une région à
l'autre? Est-ce qu'on a les mêmes besoins d'un milieu à un autre,
d'une région à une autre? Je ne suis pas certain, M. le
Président. Il me semble qu'il aurait pu y avoir des balises, des
critères pour tenir compte de la réalité. Ce n'est pas le
cas.
Ce qui inquiète aussi les gens de la région, chez nous -
et je le transmets ici comme je l'ai entendu - c'est que, présentement,
il se dépense, bon an, mal an, 4 900 000 $, me dit-on, par an.
Officiellement, il ne s'en dépensera que 3 000 000 $. Est-ce que ce sera
révisé? Est-ce qu'on pourra influencer ces sommes? Est-ce que la
coordination, parce qu'il m'apparaît que la structure relèvera,
à toutes fins pratiques, du pouvoir exécutif... Est-ce qu'on
pourra aller dans du hors-norme aussi exceptionnel que celui dans lequel nous
permettait d'aller, par exemple, l'OPDQ? Voilà des questions que sont en
droit de se poser les élus municipaux et les décideurs du milieu,
sur le plan économique, social, culturel et communautaire.
Je pense qu'une des principales difficultés, pour les gens du
milieu, c'est de comprendre que l'objectif d'une telle déconcentration,
qui n'est pas une décentralisation, je le rappelle, c'est de faire
comprendre qu'on se doit de mettre en commun, au niveau de notre région,
de mettre autour d'une même table la majorité des décideurs
du milieu. Je vous avoue que j'arrive mal à comprendre pourquoi on n'a
pas saisi cette réforme dans le sens suivant: qu'on n'a pas
pensé, dans plusieurs coins, dans plusieurs MRC, par exemple, que
l'objectif, c'était d'asseoir à une même table tous ceux
qu'on appelle les forces vives d'un milieu.
Il s'est vécu, à travers cette réforme, dans
certains milieux, un certain «power trip». Il y en a qui ont fait
du «power trip». J'ai assisté à des réunions,
M. le ministre aussi. Il sait très bien ce que je veux dire. Je pense
qu'à force de s'expliquer, à force de bien faire la distinction
entre une décentralisation des pouvoirs et des services et une
déconcentration sur son développement économique, je pense
qu'on réussit à amener des gens à comprendre qu'on a
intérêt, qu'on a avantage à s'asseoir tout le monde
ensemble, à dégager le plus large consensus.
Il y a une formule qui a été retenue chez nous qui
passera, bien sûr, au vote en juin prochain, le 30 juin prochain, qui
vise précisément à créer le climat de confiance
entre les deux groupes. C'est la double majorité. On a dit:
Écoutez, on n'est pas là, ni un groupe, ni l'autre, pour essayer
de s'avoir l'un, l'autre, de se flouer l'un, l'autre. On est là pour
essayer de créer le momentum du développement économique
qui sera le plus propice à notre région. On a avancé cette
formule qui, j'espère, sera retenue, pour bien démontrer qu'on
n'est pas là pour essayer de s'enfarger, de créer de
l'endettement des municipalités quand on connaît les pouvoirs du
monde municipal.
Il pourrait dire oui au sommet, puis dire non dans sa
municipalité, et il pourrait dire oui dans sa municipalité et
avoir un référendum, puis se faire battre. Il pourrait avoir un
veto du maire, à part de ça, pour un certain temps. Je veux bien
qu'on ait des ceintures et des bretelles et qu'on ait tout là, mais il
ne faut pas paralyser le développement d'une région parce que,
à mon point de vue, ce serait inopportun, inapproprié et
contraire à l'esprit qu'on cherche tous, de toute façon, depuis
plusieurs années, à créer autour de cette option, de cette
orientation de développement économique régional. (17 h
40)
Je peux vous dire que je ne pense pas, dans ça, qu'il n'y ait
personne de mauvaise foi pour le développement économique. Moi,
je ne pense pas. Quand on s'en va s'asseoir autour d'une table en
région, que tu sois député, que tu sois maire ou que tu
sois président de chambre de commerce, président de corporation
de développement économique ou bien président d'une
association communautaire, tu t'en vas t'asseoir là pour essayer de
présenter des projets, faire progresser l'économie de ton milieu,
soit par la création d'emplois dans les services, soit par la
création d'emplois dans le commerce, soit par la création
d'emplois au niveau de l'industrie. C'est clair, ça, M. le
Président. Et je suis surpris qu'on ait vécu ce
débalancement dans certains milieux. J'ose espérer que ce sera
temporaire, en tout cas, et qu'on pourra recréer ce climat de
concertation, parce que l'avenir et le développement économique
du milieu passent nécessairement par la concertation, M. le
Président.
Avec la structure du monde municipal que nous avons - et Dieu sait si on
en a, des municipalités au Québec, 1500 municipalités - il
est évident qu'à travers une région, M. le
Président, il s'agit de bâtir un tel type d'équipement dans
une paroisse, et ça devient la locomotive pour les autres. Il faut
comprendre qu'il y a des réseaux intégrés dans cela, qu'il
y a des superstructures ou des structures à un endroit qui permettent
précisément d'aider l'ensemble du territoire. Il y a une
expression que les vieux utilisaient: Ce qui est bon pour le curé est
bon
pour le bedeau. C'est donc dire qu'on pouvait, bien sûr... Par
exemple, je pense à la région de Lanaudière. Si on
développe le nord sur le plan touristique, c'est du voyagement à
travers la région et le sud peut en bénéficier au niveau
de l'hôtellerie, au niveau des restaurants, au niveau de la vente dans
les commerces, au niveau des stations d'essence. Il y a une foule de services
qui peuvent se développer en région, M. le Président,
parce qu'on a précisément des infrastructures de
développement, du développement structurant qui s'effectue dans
nos régions.
Moi, je pense que, de ce côté-là, il y a une
certaine compréhension qui commence à se dégager, qui
commence à transcender les luttes de pouvoir qu'on peut avoir à
une table de concertation régionale, parce qu'on n'a pas
distingué - je le répète et j'en suis sûr, et le
ministre pourrait sans doute me le confirmer - la décentralisation des
pouvoirs de l'État. On mêle ce dossier de décentralisation
des pouvoirs de l'État avec une concertation pour fins de
développement économique. Et, tant qu'on ne démêlera
pas cela, il y en a qui vont faire des luttes de pouvoir, qui vont faire des
«power trips», comme je vous le disais tantôt, qui vont
s'imaginer que tout contrôler, ça vient de régler le
développement économique. Au contraire, on peut
l'étouffer, parce que c'est souvent le secteur privé, M. le
Président, qui vient présenter un projet, puis ça lui
prend l'appui de son maire, ça lui prend l'appui de sa corporation de
développement économique. Et l'inverse est aussi vrai. Il y a des
municipalités qui ont des terrains à offrir, des territoires de
développement à offrir mais qui n'ont pas l'argent pour les
développer et qui font appel soit à des corporations de
développement économique soit à du capital privé
pour venir exploiter précisément ces espaces disponibles pour
fins de développement économique.
Quand tu as compris cela, tu ne t'en vas pas à un sommet
économique ou à une conférence économique pour
faire une lutte de pouvoir; tu t'en vas là pour participer.
Au-delà du fait que je considère que ce n'est pas une
décentralisation totale mais que c'est une déconcentration, qui
est désirée par plusieurs, je le reconnais, donc, à partir
de là, il faut, quand on comprend la structure, qu'on y participe. Moi,
c'est dans cet esprit-là que je pense qu'on doit regarder l'ensemble du
dossier.
Le projet de loi, malheureusement, à mon point de vue, est trop
muet. En tout cas, j'ai hâte de voir ce qu'on pourra faire en commission
parlementaire, parce qu'il y a des règlements, il y a des attentes
auxquelles on va faire allusion concrètement au niveau de l'étude
article par article. On va sûrement demander au ministre d'expliciter,
parce qu'il nous apparaît que, tel que libellé, il reste flou au
niveau des orientations, il reste sujet à des diktats de décrets.
En tout cas, la période de la commission parlementaire est faite pour
ça, pour clarifier les choses, et nous y collaborerons au niveau de la
commission parlementaire. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le leader de
l'Opposition officielle. Il n'y a pas d'autres interventions. J'arrive à
la réplique de M. le ministre. Je vous rappelle, M. le ministre, que
vous disposez d'une période maximale de 20 minutes pour exercer votre
droit de réplique. Allez-y, M. le ministre.
M. Yvon Picotte (réplique)
M. Picotte: Merci, M. le Président. Je dois dire que
l'Opposition officielle aurait eu avantage à s'inspirer du dernier
discours que je viens d'entendre, celui du député de Joliette, M.
le Président, en ce qui concerne la compréhension du
développement régional, et à s'inspirer du
député de Joliette, évidemment, parce qu'il a exactement
bien ciblé les orientations pour le futur. Il a exactement bien
ciblé ce que ça veut dire le développement
régional, et j'aimais plus particulièrement ce que disait le
député de Joliette, que, quand on est assis autour d'une table
dans une région, s'il y en a un qui veut contrôler quelque chose
au détriment de l'autre, c'est parce qu'il a oublié de constater
que tous ceux qui peuvent amener quelque chose qui développe davantage
son milieu, ce sont des partenaires importants. Il a oublié de constater
ça, M. le Président. Je pense que c'est la formule idéale
pour faire en sorte qu'en partenaires, sans obtenir et avoir de dicton en haut
lieu, on puisse être en mesure d'avoir cette marge de manoeuvre
importante pour développer son milieu tel qu'on le souhaite.
Bien sûr, il y a des gens qui vont trouver, M. le
Président, qu'on n'est pas assez précis dans le projet de loi.
C'est volontaire si on n'est pas précis dans le projet de loi. Arriver
avec beaucoup de précisions dans le projet de loi, c'est justement faire
ce dont s'inquiétait le député de Joliette et ce dont
d'autres députés se sont inquiétés, plus
particulièrement Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Si ma mémoire est fidèle, elle parlait des normes. Ça
devra être hors norme, parce qu'on ne doit pas avoir, dans une
région donnée, des normes identiques d'une paroisse à
l'autre, d'une municipalité à l'autre, à cause de sa
pauvreté. On pourrait édicter dans un projet de loi, M. le
Président, tellement de principes et non seulement des principes, mais
mettre tellement de balises avec tellement d'articles que, finalement, ce
serait comme si c'étaient nous qui dictions le développement
régional. C'est contraire à la philosophie. C'est ça qu'on
a fait depuis des années et c'est ça qu'on ne veut pas faire, M.
le Président.
Moi, je dois vous dire, cependant, que j'ai entendu deux sortes de
discours ici depuis le début de l'étude de notre projet de loi,
M. le
Président. J'ai entendu le discours de ceux et celles qui avaient
eu - je ne dis pas le courage, parce que ça ne prenait pas du courage -
le professionnalisme, comme députés, d'assister aux
réunions, donc qui avaient une meilleure compréhension et qui
savaient exactement ce que les gens du milieu souhaitaient. À cet
égard-là, on peut faire une nette démarcation, M. le
Président, avec les députés qui y ont assisté,
d'abord de deux ordres. Ceux qui y ont assisté ont été
beaucoup plus prudents dans leur intervention. C'est le cas du
député de Jonquière, c'est le cas du député
de Joliette et c'est le cas d'autres députés qui ont
assisté à nos rencontres. Il y a aussi des députés
qui ont assisté à nos rencontres et qui n'ont pas pris part au
débat, parce que je pense qu'ils ont compris exactement ce que ça
voulait dire et ce que c'est.
Mais, ce qui est impardonnable, M. le Président, ce sont les
députes qui ont osé se lever ici à l'Assemblée
nationale pour parler du projet et nous rabâcher - je ne sais pas si
ça se dit bien comme ça, mais qu'ils l'écrivent comme
ça, c'est ça que ça veut dire - tout simplement ramener
des vieux points, des vieux principes ou des choses qu'on avait
déjà validées, qu'on avait dites et puis qu'on avait
déjà éclairées, M. le Président.
Mais, ce qui est impardonnable, M. le Président, c'est justement
ces députés-là qui ont une nette méconnaissance du
dossier, de par leur faute, M. le Président. On pourrait regarder
ça facilement, hein. Le député d'Abitibi-Ouest, M. le
Président, qui est un ancien ministre du Développement
régional, lui, il n'a absolument rien compris. Ce n'est pas surprenant
qu'il n'ait rien compris, il n'a même pas assisté. D'ailleurs,
s'il avait entendu les commentaires de ses gens de son coin - parce qu'il
n'était pas là et parce qu'il n'y a pas assisté - bien,
peut-être, à un moment donné, qu'il aurait
préféré aujourd'hui ne pas parler. C'est un discours de
moins qu'il aurait eu dans son c.v. pour peut-être démontrer sa
parfaite méconnaissance, malgré le fait qu'il ait
été ministre du Développement régional, M. le
Président. J'ai été passablement moins mesquin que lui
dans mes tournées, parce que j'ai eu l'occasion de le louanger. J'ai eu
l'occasion de le louanger.
Bien sûr, M. le Président, ça n'enlève rien
à mes louanges, parce que je continue de croire que, oui, effectivement,
tous ceux et celles qui ont passé par là ont fait faire des pas
intéressants au développement régional. Je l'ai fait
partout, autant pour mes collègues de l'Opposition qui ont assumé
ces tâches-là que pour ceux qui étaient de mon parti. Puis,
je pense que je continuerai de le faire, M. le Président, parce que,
moi, je pense que oui, effectivement, ils ont fait faire un pas important au
développement. (17 h 50)
Donc, je suis obligé de constater que le député
d'Abitibi-Ouest, finalement, il a meublé du temps, ou il en a fait
perdre aux autres, mais il a meublé du temps, en tout cas, pour sa
formation politique. La députée de Terrebonne, M. le
Président... Quand j'étais étudiant, moi, et puis que je
parlais à des étudiants, quand j'étais professeur et que
je parlais à des étudiants qui avaient une parfaite
méconnaissance d'un dossier, je les traitais carrément
d'ignorants. La députée de Terrebonne est complètement
ignorante de cette situation-là. Elle a parlé, M. le
Président, et elle ne savait pas... Effectivement, dans tout son
discours, elle ne savait pas de quoi elle parlait. Elle se posait des questions
qui sont répondues depuis déjà fort longtemps, M. le
Président. Complètement ignorante, en lettres majuscules, d'une
situation, M. le Président, complètement ignorante d'une
situation. Évidemment, elle a été courageuse certainement
de prendre la parole pour parler de quelque chose qu'elle ne connaissait pas.
M. le Président, le moins qu'on puisse dire, c'est que la
députée de Terrebonne est courageuse. On l'a vu par un certain
geste qu'elle a posé dernièrement, où les gens l'ont
dénotée de courageuse pour s'être retirée d'une loi
qu'on a votée. Mais, je pense qu'elle s'est évaluée
exactement à ce qu'elle valait, à ce moment-là, en
décidant de ne pas y participer, M. le Président. On peut
s'évaluer soi-même - elle a décidé de le faire, elle
- et je pense qu'elle a été courageuse de le faire. Bien
sûr, on doit au moins lui rendre cet hommage-là.
M. le Président, j'ai écouté la
députée de Johnson aussi. C'est une autre que j'aurais bien
aimé, moi, qu'elle accepte l'invitation que j'ai lancée pour
participer dans sa région aux discussions. Elle n'était pas
là. Aujourd'hui, elle s'interroge sur le nombre d'articles, pour montrer
jusqu'à quel point c'est profond, c'est profond son discours, la
députée de Johnson. Elle dit: Ça ne doit pas être un
bon projet de loi parce qu'il n'y a pas beaucoup d'articles dedans.
Imaginez-vous! C'est profond comme... C'est subtil et profond, M. le
Président. Elle dit: On change l'OPDQ, puis on change le FDR. Il n'y en
aura plus de ça. Il n'y en aura plus de ça, M. le
Président? Le FDR reste là, mais au lieu qu'il soit
administré par moi et qu'elle soit obligée de faire des
courbettes parfois auprès de certains ministres pour obtenir des choses,
elle va pouvoir les défendre intelligemment dans sa région.
À condition qu'elle y participe, évidemment. Si elle fait comme
elle a fait là, sans y aller, bien sûr que ce sera un membre
inutile. Et peut-être qu'ils n'avaient pas besoin d'elle non plus.
À ce moment-là, c'est peut-être pour ça qu'elle a
jugé bon de ne pas y aller.
Elle dit: Le Fonds de développement régional n'est plus
là, M. le Président. Il n'est plus là parce qu'on le leur
remet entre les mains. Et elle est une partie intervenante, elle a un
siège pour en discuter, pour faire valoir son point de vue, M. le
Président. Et elle se ques-
tionne là-dessus. Quelle profondeur! Elle dit: il faut
fonctionner en région. Elle dit: Avant, on avait un sommet permanent
tous les quatre ans. On pouvait bénéficier d'un sommet permanent
tous les quatre ans. Bien oui! Aujourd'hui, on a un sommet tous les ans, M. le
Président. Tous les ans, il va y avoir un fonds qui va être
là et elle va agir exactement de la même façon tous les
ans.
Mieux adapté, mieux ciblé, une meilleure
efficacité, M. le Président. Quelle profondeur! Mais elle
n'était pas là, M. le Président. Comme elle n'était
pas là, évidemment, elle a parlé de ce qu'elle ne
connaissait pas. Elle a parlé encore des problèmes des
élus municipaux, M. le Président. Le député de
Joliette l'a très bien dit à la fin: Les élus municipaux,
maintenant, je pense qu'ils ont compris la formule, M. le Président. Et
c'est tellement vrai qu'il y a déjà six régions qui sont
prêtes, qui sont en attente pour signer des lettres patentes avec celui
qui vous parle pour mettre tout ça en marche. Elles se sont
déjà entendues sur la proportion. Elle nous dit encore: Tout le
monde, tous les élus municipaux se questionnent là-dessus. Bien
sûr, il y a peut-être quelqu'un qui lui a parlé de ça
quelque part, il y a déjà une décennie, et elle se
souvient de ça, M. le Président, mais elle n'était pas
là, donc elle ne sait pas de quoi elle parle.
J'ai malheureusement été obligé de ne pas
être là à son discours, pour un certain temps, parce que
j'étais appelé ailleurs, mais Mme la députée de
Taillon était présente à la conférence de presse
qu'a donnée mon collègue, M. Bour-beau, devant tout le monde du
milieu pour annoncer que la Société montérégienne
était celle qui était retenue par le grand consensus de tout le
monde pour être la table de concertation. Elle était là.
Elle ne s'est pas opposée. Elle n'a pas posé de question. Au
contraire, elle a agi comme si elle était d'accord avec tous ceux qui
étaient là. Peut-être que Mme la députée de
Taillon a deux façons de se comporter. Devant le monde de son milieu,
faire accroire qu'évidemment elle est d'accord avec eux, et,
arrivée à l'Assemblée nationale, elle veut faire un peu de
petite politique et essayer de charrier le gouvernement. C'est peut-être
ça. Je ne sais pas comment le décoder. De toute façon,
elle pourrait me l'expliquer à un moment donné, si elle souhaite
bien me l'expliquer.
Si elle avait eu vraiment du courage, elle aurait pu, là,
s'exprimer et dire devant les caméras de télévision,
devant des journalistes qui étaient là, parce que c'était
une conférence de presse: Moi, je suis opposée à
ça, et voici les raisons. Ce n'est pas ça qu'elle a fait, M. le
Président. Elle ne l'a pas fait parce que j'imagine que, devant ses
commettants, elle est pour et que, quand elle est ici, elle s'imagine que les
gens ne peuvent pas regarder les débats télévisés
et, à ce moment-là, elle se prononce différemment. Est-ce
qu'elle parle des deux côtés de la bouche en même temps? Je
ne le sais pas. De toute façon, je n'ai pas à la juger, non plus.
Mais c'est curieux, quand même, comme comportement. Elle a
peut-être voulu meubler du temps. Ça arrive parfois dans
l'Opposition - j'ai été dans l'Opposition, moi aussi - qu'il
faille meubler du temps, ou faire perdre du temps, un des deux. Mais moi, comme
je ne suis pas un gars négatif, j'aime mieux dire meubler du temps.
Le député de Labelle, lui, forcément, il
n'était pas présent et, lui, il a analysé ça en
grand pur et dur, celui qui connaît à peu près tout, les
finances publiques et tout, qui dit: II va y avoir incompatibilité, il y
a des gens qui vont être assis comme députés qui vont
devoir prendre des décisions, alors que c'est le ministre qui doit
engager des fonds, et, là, il va y avoir une zone grise. Ça,
c'est ce que le député de Labelle a dit.
Le député de Labelle, il arrive au monde,
évidemment, à ce moment-ci de nos discussions, parce qu'il a
oublié de constater, parce que peut-être qu'il n'y a jamais
participé non plus ou que ce n'était pas un grand partisan de la
démocratie, que les députés, ils ne sont pas assis
là rien que depuis que j'ai fait ma tournée régionale. On
leur a donné un siège officiel, mais les députés
étaient tous assis à leur siège dans les sommets. C'est
curieux, ils n'étaient pas en conflit d'intérêts, dans les
sommets. Là, ça va être un sommet qui va se faire
permanent, tous les jours, les gens pourront faire un sommet entre eux autres,
s'ils veulent, pour dépenser les 3 000 000 $ qu'on met à leur
disposition, et, là, comme par hasard, il y a un conflit
d'intérêts quelque part.
Je suis allé dans une biennale dernièrement. Le
député de Lévis était assis à la biennale,
il a pris la parole, il a dit des choses intéressantes et il
n'était pas en conflit d'intérêts. Tout à coup, le
député de Labelle, il sort de je ne sais pas trop quelle cuisse
de Jupiter, il sort de je ne sais pas trop quel néant, il sort de
vapeurs de je ne sais pas trop quoi - c'est peut-être son «Spray
net» qui est trop fort, M. le Président - et, tout à coup,
il décide, lui, comme par hasard, que, là, il y a un conflit
d'intérêts. Ça fait quatre ans qu'on fait ça et
personne ne s'en est aperçu. Pour moi, les vapeurs de son «Spray
net» sont trop fortes, j'imagine, parce que je ne suis pas capable de
comprendre ça.
C'est vrai que, lui, il n'est pas du même acabit que nous autres,
ici, en Chambre. Lui, il n'est pas du même rang que nous autres. Lui, ce
n'est pas pareil, c'est un gars qui connaît tout. Comme il connaît
tout, ça nous rend pas mal plus vulnérables, nous autres, les
petits ruraux qui ne connaissons pas grand-chose. Alors, on n'a pas,
évidemment, le même standing, mais, en tout cas... Il y a quelque
chose que je ne comprends pas, mais, de toute façon, comme je suis un
rural, il dira sans doute, lui, que je ne comprends pas. Bien sûr! Mais
je ne comprends
pas qu'on soit en conflit d'intérêts, comme
député, quand on siège pour faire de la concertation pour
développer son milieu.
J'ai entendu parler des ententes-cadres. Bien oui! Évidemment,
j'ai passé le discours de Mme la députée de Marie-Victorin
parce que, forcément, elle n'était pas présente et,
forcément, elle mêle tout. Elle n'était pas présente
et elle mêle tout. Je serais incapable d'ailleurs d'y répondre, je
n'ai pas été capable de la suivre, M. le Président. Alors,
je suis incapable d'y répondre, mais il faut que je souligne qu'elle a,
au moins, meublé un temps de 20 minutes ici, à l'Assemblée
nationale.
On a parlé, évidemment, des ententes-cadres. On dit:
Ça ne fonctionne pas. Est-ce que je peux vous dire que, depuis 1987, M.
le Président, il y a eu neuf ententes de développement. Je vais
terminer par ça pour satisfaire au temps, parce qu'on aura, bien
sûr, ensemble une commission parlementaire puis on pourra en discuter. Il
y a eu neuf ententes-cadres de développement, il y a eu sept biennales,
il y a eu 850 projets qui ont été soumis, il y a eu 718 projets
qui ont fait un engagement financier et, pour les gens qui prétendent
que ça a été trop peu et pas assez et qu'il ne s'est rien
fait, M. le Président, est-ce que je pourrais vous dire que, de 1987
à aller jusqu'à aujourd'hui, peut-être qu'il ne s'est pas
fait grand-chose dans les régions, mais il s'est dépensé,
avec le milieu, avec l'OPDQ, avec les ministères, avec le gouvernement
fédéral, en tout cas, l'ensemble des intervenants, 1 103 627 900
$. C'est ça qui s'est dépensé dans les ententes-cadres de
1987 à aujourd'hui. C'est vrai que ce n'est peut-être bien pas
suffisant, M. le Président. On voudrait en faire bien plus que
ça. Mais, entre dire que ça n'a rien donné, que ça
ne donne rien et que ce n'est pas bon, M. le Président, il y a une
marge. Alors, moi, je pense que j'ai trop de respect pour mes collègues
pour traiter ça de façon aussi cavalière et aussi, M. le
Président, légèrement.
Je pense que, moi, j'y crois au développement régional.
J'ai rencontré beaucoup de députés dans cette Chambre, de
ce côté-ci comme de l'autre côté, qui y croient au
développement régional et, compte tenu que le pas additionnel
qu'on voudra faire... Dans mes tournées, j'ai rencontré ça
partout. On peut regarder les découpures de journaux. Il y a même
des associations péquistes, dans la région de la Mauricie, qui
m'ont félicité pour avoir apporté ça, parce que
ça fait un pas de développement régional additionnel. (18
heures)
Alors, je dis, encore une fois, bravo à tous ceux qui y ont
concouru, bravo à tous ceux qui comprennent que la concertation, c'est
le développement de nos milieux et bravo, enfin, finalement, à
tous mes collègues qui y croient et qui y ont cru et à tous mes
collègues, autant du Parti québécois, qui ont
occupé cette fonc- tion, que ceux de mon parti, qui ont occupé
cette fonction-là, parce que je pense qu'ils ont été de
grands développeurs régionaux en voulant ajouter, bien sûr,
un pas additionnel à notre développement pour qu'on soit de moins
en moins pauvres, pour qu'on ait de plus en plus d'exigences, en sachant que
toutes les formules qu'on apportera, ce n'est pas ça qui va sauver
l'univers entier, mais que ça sera un pas de plus pour aider des
régions à avoir plus d'oxygène, M. le Président.
Voilà! Merci.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Est-ce que la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 19, Loi
modifiant diverses dispositions législatives concernant les affaires
régionales, est adoptée?
Des voix: Sur division.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté sur
division. M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'aménagement
et des équipements
M. Pagé: Alors, M. le Président, je fais
immédiatement motion pour que le projet de loi soit
déféré à la commission de l'aménagement et
des équipements pour étude détaillée.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion
de déférence est adoptée?
M. Pagé: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. Oui, M. le
leader.
M. Pagé: De plus, M. le Président, j'avise cette
Assemblée qu'aujourd'hui, donc, de 20 heures à 24 heures,
à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement
et des équipements procédera à l'étude
détaillée du projet de loi 19 dont nous venons de terminer
l'étude en deuxième lecture, la Loi modifiant diverses
dispositions législatives concernant les affaires régionales.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le leader.
Alors, il est 18 heures, et je suspends les travaux jusqu'à 20 heures ce
soir.
(Suspension de la séance à 18 h 2)
(Reprise à 20 h 4)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, Mmes et MM. les
députés, si vous voulez vous asseoir, s'il vous plaît. Nous
reprenons les travaux de l'Assemblée à l'étape des
affaires du jour. Avec quel article du feuilleton?
Mme Hovington: L'article 10, M. le Président.
Projet de loi 17 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 10 de
notre feuilleton, M. le ministre de l'Éducation propose l'adoption du
principe du projet de loi 17, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique.
Cependant, avant que nous entreprenions nos travaux de façon formelle,
je vais suspendre pour qu'il y ait quorum.
(Suspension de la séance à 20 h 5)
(Reprise à 20 h 13)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Tel qu'indiqué, nous entreprenons nos travaux à l'article
10 de notre feuilleton. M. le ministre de l'Éducation propose l'adoption
du principe du projet de loi 17, Loi modifiant la Loi sur l'instruction
publique. Je cède maintenant la parole à M. le ministre de
l'Éducation, en vous rappelant, M. le ministre, que vous disposez d'une
période maximale de 60 minutes pour votre intervention principale. M. le
ministre de l'Éducation.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président. Lors de ma
nomination comme ministre responsable du ministère de
l'Éducation, il m'est apparu de première importance de rencontrer
les multiples intervenants du réseau de l'éducation afin de
discuter des problèmes qu'ils vivent, des problèmes auxquels ils
sont confrontés quotidiennement et de voir avec eux comment y
remédier. Ainsi, au cours des premiers mois, j'ai tenté de
multiplier les rencontres avec les divers organismes représentatifs du
milieu de l'éducation, que ce soit la Fédération des
commissions scolaires du Québec, l'Association des commissions scolaires
protestantes, les diverses associations représentant les personnels, les
enseignants, les parents et, en fait, toutes celles et ceux qui sont
directement concernés et impliqués dans la démarche
éducative au Québec, quotidiennement.
J'ai invité, par ailleurs, tout le personnel du ministère
à être attentif, à l'écoute du milieu en vue de
chercher à bien identifier et surtout à bien comprendre les
problèmes soulevés afin d'y trouver des solutions. Lors de ces
multiples échanges, il ressortait que les mêmes problèmes
revenaient, et ce, quels que soient les personnes ou les organismes
rencontrés. Ces préoccupations étaient, dans un premier
temps, tantôt centrées sur l'élève, comme la
réussite scolaire, la pré- vention de l'abandon des
études, l'évaluation des apprentissages, les mesures alimentaires
en milieu défavorisé, la lutte contre la drogue ou l'abus
d'alcool, les services aux élèves; tantôt centrées
sur les enseignantes et les enseignants, telles les normes de
compétence, la formation et les conditions de travail; tantôt
centrées sur les parents, comme la relation entre l'école et la
famille, le soutien des parents à l'éducation de leurs enfants;
tantôt centrées sur les élus, les administratrices et
administrateurs scolaires, telles que la mise à jour de la
législation, l'assouplissement et la simplification des encadrements
administratifs et pédagogiques.
En raison de l'acuité des problèmes identifiés, le
ministère a lancé au cours de l'automne dernier un document
d'orientation devant orienter et préciser les énergies de tous
les intervenants au cours des prochaines années. Par la suite, j'ai eu
l'opportunité de me convier à une tournée provinciale de
consultation où il a été possible de discuter des
différents volets de ce document d'orientation. Discuter avec les
élèves, dans un premier temps. Je dois vous dire, M. le
Président, que ça a été très enrichissant
pour le ministre de l'Éducation. Discuter avec les parents qui sont
concernés au premier chef dans la démarche éducative de
leurs fils et de leurs filles. Échanger avec les enseignantes et les
enseignants, les autres personnels, les élus, les administrateurs
scolaires.
À la lumière de cette vaste consultation, j'ai eu
l'occasion de participer avec mes sous-ministres et l'ensemble de mon
équipe, finalement, dans chacune des régions, à
l'élaboration d'un plan d'action bien concret, bien ciblé,
proposant des modifications ou des approches différentes,
modulées, etc., dans le cadre d'un plan d'action que je serai en mesure
de rendre public incessamment.
D'autre part, parce qu'on sait que le ministère de
l'Éducation travaille étroitement avec ses partenaires, et
ça, c'est une tradition bien enracinée, divers comités
conjoints ont été formés avec nos partenaires du milieu
scolaire. Ces comités avaient comme mandat d'examiner la
problématique particulière qui leur était confiée
et de me proposer, comme ministre, des solutions concrètes.
M. le Président, le projet de loi qui fait l'objet de la
présente intervention aujourd'hui constitue l'aboutissement partiel de
l'excellent travail qui aura été effectué par l'un de ces
comités dont le mandat spécifique était de rechercher des
façons d'assouplir et de simplifier les encadrements administratifs et
pédagogiques du réseau scolaire. Ce comité avait, entre
autres, comme tâche d'identifier les éléments qui
pourraient permettre d'accroître la marge de manoeuvre des commissions
scolaires, tout en maintenant ou améliorant les mêmes services
à offrir aux élèves. Il s'agit là d'un objectif qui
me tient à coeur, et qui nous tient certes à tous, à
chacun et chacune d'entre nous, à coeur.
Il m'apparail important, ici, que je souligne la composition de ce
comité, M. le Président, afin de bien comprendre que les
modifications apportées par le présent projet de loi sont le
fruit d'un effort commun du ministère et de l'ensemble de nos
partenaires. Ce comité est composé, outre des
représentants du ministère, des représentants de la
Fédération des commissions scolaires du Québec, de
l'Association des commissions scolaires protestantes du Québec, de
l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires,
de l'Association des cadres scolaires du Québec, de la
Fédération québécoise des directeurs et directrices
d'école, de l'Association des administrateurs des écoles
catholiques du Québec et de l'Association des administrateurs scolaires
du Québec.
Au début de 1992, M. le Président, le comité a
soumis un rapport précisant les principaux irritants identifiés
au cours des travaux, de même que les pistes de solution que le
comité recommande en vue de procéder à la
décentralisation et à l'assouplissement souhaités. Ces
propositions touchent divers thèmes dont les principaux sont les
règles budgétaires, la Loi sur l'instruction publique, les
régimes pédagogiques et les conventions collectives. De plus,
elles s'adressent, ces recommandations, tantôt au ministère,
tantôt aux commissions scolaires.
Dans l'ensemble, M. le Président, la grande part des propositions
réfère soit aux règles budgétaires, aux
régimes pédagogiques ou encore aux conventions collectives. Pour
celles-ci, diverses démarches sont déjà amorcées
pour atteindre l'objectif visé. Toutefois, il faut retenir que certaines
des recommandations concernent directement la Loi sur l'instruction publique et
c'est principalement la raison pour laquelle j'ai déposé le
présent projet de loi. (20 h 20)
En résumé, M. le Président, ce projet de loi
modifie la Loi sur l'instruction publique afin d'assouplir les contrôles
exercés par le ministre de l'Éducation sur certaines fonctions et
responsabilités, certains pouvoirs des commissions scolaires et du
Conseil scolaire de IHe de Montréal. C'est ainsi que le projet de loi,
premièrement, abroge les dispositions de la loi qui font obligation aux
commissions scolaires et au Conseil d'obtenir l'autorisation du ministre pour
acquérir des biens ou encore effectuer des travaux sur leurs immeubles.
Deuxièmement, le projet de loi remplace l'obligation de faire approuver
par le ministre les plans et devis des travaux effectués sur les
immeubles des commissions scolaires et du Conseil par l'obligation d'obtenir
l'avis et le consentement du ministre. Troisièmement, ce projet de loi
abroge, enfin, l'obligation pour les commissions scolaires et le Conseil de
faire approuver par le ministre leur budget annuel de fonctionnement,
d'investissement et de service de la dette, et d'obtenir de celui-ci
l'autorisation pour adopter un budget qui prévoit des revenus
supérieurs aux dépenses qui y figurent.
Par ailleurs, M. le Président, le projet de loi habilite la
commission scolaire, sur demande motivée des parents d'un
élève, dans les cas déterminés par règlement
du ministre, à accorder une dérogation à l'âge
minimum d'admissibilité à l'éducation préscolaire
ou encore à l'enseignement primaire. D'ailleurs, M. le Président,
j'aurai l'occasion, en terminant mon propos, de déposer ou de rendre
accessibles aux membres de l'Opposition, notamment, les paramètres, les
règles sur lesquelles nous entendons nous appuyer pour que
l'école et la commission scolaire puissent décider de telles
recommandations.
Le projet de loi habilite également le gouvernement à
adopter des règlements pour déterminer les règles de
majoration du montant de base pour le calcul du produit maximal de la taxe
scolaire dans les cas de réunion ou d'annexion totale de territoires des
commissions scolaires ou de cessation d'existence d'une commission scolaire
régionale.
On sait que cette question est importante, puisque j'aurai
complété, comme ministre de l'Éducation, au nom du
gouvernement du Québec, le 1er juillet prochain, l'ensemble de la
démarche d'intégration des ordres d'enseignement primaire et
secondaire au Québec. C'est ainsi que nous serons passés de 202
commissions scolaires au Québec, l'an dernier, à 159 commissions
scolaires complètement intégrées primaire-secondaire, de
façon à favoriser un passage plus harmonieux entre le primaire et
le secondaire, de façon à assurer une démarche mieux
intégrée en fonction d'un objectif qui est celui de la
réussite éducative.
Enfin, M. le Président, le projet de loi vient corriger certaines
imprécisions relativement au pouvoir du ministre d'établir des
règles budgétaires annuelles. Or, comme je viens de vous
l'indiquer, ce projet de loi apporte des modifications à la Loi sur
l'instruction publique relativement aux objets suivants: immobilisations,
budget, dérogation à l'âge minimum d'admissibilité
à l'école, calcul de la taxe dans les cas de réunion,
d'annexion totale de territoires de commissions scolaires ou de cessation
d'existence d'une commission scolaire régionale et
l'établissement de règles budgétaires.
Pour la présentation plus détaillée de ce projet de
loi, je suggère, M. le Président, que nous procédions en
tenant compte de l'ordre des objets que je viens d'énumérer. En
agissant de la sorte, ça nous permettra de regrouper les articles par
thèmes, plutôt que de cheminer selon l'ordre chronologique des
articles figurant au texte du projet de loi.
La problématique de l'acquisition des biens concernant, somme
toute, les immobilisations. Actuellement, dans les cas où ça
exige d'avoir un recours à un crédit remboursable sur plus
d'un an, une commission scolaire doit demander obligatoirement
l'autorisation ministérielle pour acquérir, construire, agrandir,
aménager, améliorer, transformer, reconstruire ou encore
réparer ses immeubles, et ce, en vertu de l'article 268. Elle doit aussi
recevoir l'approbation ministérielle pour acquérir des biens
meubles de plus de 50 000 $. Or, les commissions scolaires mentionnent,
à juste titre, et recommandent, somme toute, qu'une telle exigence soit
éliminée, considérant qu'il est lourd et onéreux de
demander à chaque fois l'autorisation ministérielle. Elles font
valoir aussi qu'il y a d'autres contrôles administratifs en vigueur, plus
particulièrement ceux relatifs aux règles budgétaires
annuelles et aux emprunts à long terme.
Donc, la modification qui est proposée est purement et simplement
de procéder à l'abrogation des articles 268 et 269. Par
conséquent, la commission scolaire n'aura plus à demander
l'autorisation du ministre pour réaliser des travaux sur ses immeubles
ou acquérir des biens. Toutefois, dans les cas où le ministre
alloue une subvention, la commission scolaire demeure tenue de respecter les
conditions fixées par le ministre dans les règles
budgétaires. De plus, le pouvoir d'autorisation du ministre relativement
aux emprunts à long terme demeure, cela va de soi, et c'est normal qu'il
en soit ainsi.
Actuellement, une commission scolaire, en référence
à l'approbation des plans et devis des projets, ne peut effectuer ou
faire effectuer sur un immeuble des travaux qui nécessitent
l'élaboration de plans et devis, à moins que ces plans et devis
n'aient été approuvés par le ministre. C'est la situation
actuelle, tout ça. Le processus d'approbation, évidemment,
entraînait jusqu'à maintenant, ou entraîne jusqu'à
l'adoption de la loi, des délais supplémentaires dans la
réalisation des projets et exige des contrôles administratifs qui
contribuent, somme toute, à alourdir le système.
Au-delà de ces irritants qui nous ont été
identifiés par les commissions scolaires, le libellé actuel de
l'article 271 donne un pouvoir de tutelle au ministre quant aux
caractéristiques physiques de l'école à construire ou
à agrandir. Or, il nous apparaît que l'école appartient
d'abord au milieu de vie, au quartier, au village. C'est à celui-ci de
convenir avec les professionnels et les responsables concernés du choix
de l'école et de ses caractéristiques physiques. Dans cette
perspective, il nous semblait justifié de modifier l'article en
question, et c'est ainsi que l'article 271 est modifié par le projet de
loi, afin de remplacer le pouvoir d'approbation du ministre par une obligation
de demander un avis quant aux plans et devis d'un projet.
Donc, dorénavant, les commissions scolaires devront soumettre
leurs projets de construction et d'agrandissement au ministère pour avis
seulement. Compte tenu de l'expertise du ministère dans ce domaine et
considérant que celui-ci alloue des subventions dans la plupart des
projets, il est justifié de maintenir une implication du
ministère dans la préparation des projets, notamment quant aux
caractéristiques fonctionnelles d'une école.
De plus, considérant qu'il s'agit d'un avis, il reviendra, somme
toute, à la commission scolaire de prendre en compte ou non les
commentaires du ministre ou du ministère, lesquels visent souvent
à favoriser la réalisation dans le respect des budgets
établis. Dans cette perspective nouvelle, il est bien entendu que la
commission scolaire pourrait décider de réaliser un projet plus
dispendieux. Mais, à ce moment-là, elle devra en assumer le
coût à même ses propres revenus et prendre ainsi
l'entière responsabilité de son geste auprès de ses
commettants, c'est-à-dire celles et ceux qui élisent nos
commissaires d'écoles.
Il est entendu que cette modification législative sera
accompagnée d'une simplification des procédures, des processus et
des contrôles administratifs en vigueur, notamment par la non-obligation
de transmettre tous les projets au ministère. Les projets dont le
coût des travaux est estimé à moins de 1 000 000 $ et ceux
pour lesquels le ministère alloue une subvention correspondant à
moins de 50 % du coût du projet ne seront plus soumis à cette
exigence.
Concernant le budget, M. le Président, selon les dispositions
actuelles de la loi, les commissions scolaires préparent et soumettent
annuellement à l'approbation du ministre leur budget de fonctionnement,
d'investissement et de service de la dette. Ce budget est sans effet tant qu'il
n'a pas été approuvé par le ministre. En
conséquence, le ministre doit donc émettre une autorisation de
dépenser à la commission scolaire dont le budget n'a pu
être approuvé, et ce, avant le 1er juillet. A chaque année,
je dois signer - ça fait maintenant deux ans déjà - des
autorisations provisoires de budget tant et aussi longtemps que le budget
définitif de la commission scolaire n'est pas approuvé.
Le processus d'élaboration et d'approbation des budgets des
commissions scolaires est lourd du point de vue administratif, puisqu'il exige
dans une courte période que chaque commission scolaire ait transmis son
budget et que celui-ci ait été analysé et approuvé,
le cas échéant. On sait, d'autre part, M. le Président,
que, pour préparer leurs prévisions budgétaires, les
commissions scolaires doivent connaître les ressources dont elles
disposeront. Dans le contexte actuel des finances publiques, on a vu que les
décisions concernant les ressources financières dévolues
au réseau scolaire sont de plus en plus liées à
l'encadrement financier global du gouvernement.
Ces nouvelles contraintes retardent le moment où les commissions
scolaires peuvent connaître les règles budgétaires, leurs
paramètres de financement et le niveau de ressources qui en
découle. Ainsi, la période dont disposent les commissions
scolaires pour préparer et transmettre leurs budgets au ministère
pour analyse et approbation est de plus en plus courte. Par ailleurs, le
processus d'approbation des budgets par le ministre, qui est déjà
lourd du point de vue administratif, devient ainsi plus difficile à
réaliser de manière raisonnable selon les
échéanciers prescrits, et ce, sans créer de pressions
indues au sein des commissions scolaires en attente. (20 h 30)
C'est donc dans ce contexte d'allégement des encadrements
administratifs, M. le Président, que le projet de loi que je vous
propose pour étude ce soir prévoit l'abolition de l'étape
de l'approbation des budgets par le ministre. En effet, je pense que nous
pouvons avancer que les objectifs qui étaient visés par
l'étape de l'approbation des budgets peuvent maintenant être
atteints par le biais d'autres procédures qui permettront toujours au
ministre de l'Éducation du Québec de veiller à la bonne
santé financière des commissions scolaires du Québec.
Il est certain que l'étape des prévisions
budgétaires revêt une importance toute particulière pour
les commissions scolaires dont la situation financière est difficile ou
encore devient précaire. Il n'en demeure pas moins que l'adoption d'un
budget non équilibré constitue une mesure d'exception. Approuver,
pour moi, sous ma signature, un budget non équilibré, ce n'est
qu'exceptionnel. Cette exception est encadrée par une autorisation
expresse du ministre, qui est maintenue dans le projet de loi. Cette
autorisation est elle-même assortie de conditions qui sont liées
au retour à l'équilibre financier de la commission scolaire. En
fait, à chaque fois que j'approuve un budget d'une commission scolaire,
qui n'est pas équilibré, qui est déficitaire, il y a
continuellement une disposition comme quoi la commission scolaire doit nous
soumettre, à notre satisfaction, un plan de redressement financier.
Après plusieurs années de vécu autour des mesures
mises en place quant à l'adoption du budget non équilibré,
je pense qu'on peut affirmer que cet encadrement fonctionne bien et permet,
autant aux commissions scolaires impliquées qu'au ministre, de remplir
leurs obligations respectives. Ainsi, l'expérience des dernières
années montre que les commissions scolaires en situation de
déficit retrouvent leur équilibre financier dans un délai
qui ne dépasse généralement pas quatre ans, et il y a donc
un roulement notable dans la liste des commissions scolaires en
difficulté financière. Généralement, ça dure
trois ans, quatre ans et, plus souvent qu'autrement, le plan de redressement
réfère à un redressement sur une base de deux
années consécutives.
J'aimerais souligner, enfin, que, depuis plusieurs années, le
réseau scolaire présente une situation financière globale
stable et saine qui permet d'envisager avec confiance et
sérénité les allégements qui sont proposés
en cette matière ce soir. À cet égard, nous proposons que
l'article 277 de la Loi sur l'instruction publique soit modifié afin de
faire disparaître l'approbation du budget par le ministre, en la
remplaçant par la transmission du budget au ministre. Toutefois, comme
par le passé, le budget doit être transmis avant la date et dans
la forme déterminée par le ministre. La modification
proposée est à l'effet de conserver la nécessité
d'obtenir l'autorisation du ministre pour adopter un budget où les
dépenses excèdent les revenus, c'est-à-dire pour un budget
déficitaire non équilibré.
Le nouvel article 281 établit, quant à lui, qu'une
commission scolaire qui n'a pu adopter son budget avant le début de
l'exercice financier est autorisée à dépenser pour un
mois. Dans ce cas, cette autorisation, ça va de soi, est égale au
douzième du montant des dépenses de l'année
précédente. D'autre part, l'article 312 de la Loi sur
l'instruction publique est modifié pour indiquer que le taux de la taxe
scolaire est fixé après l'adoption du budget et non plus
après l'approbation du budget par le ministre. Enfin, les articles 435
et 445 de la Loi sur l'instruction publique viennent préciser que les
modifications déjà énoncées s'appliquent
également au Conseil scolaire de l'île de Montréal.
Donc, si on réfère maintenant aux impacts, l'abrogation de
l'obligation, pour les commissions scolaires et le Conseil de l'île de
Montréal, de faire approuver par le ministre leur budget annuel viendra
assouplir et simplifier les encadrements administratifs touchant nos
commissions scolaires. De plus, comme le processus d'élaboration et
d'approbation des budgets des commissions scolaires se faisait selon un
échéancier de plus en plus serré, la suppression de
l'étape de l'approbation des budgets par le ministre laissera plus de
temps aux organismes du réseau pour préparer et transmettre leur
budget au ministre.
La reconduction automatique, mais limitée du pouvoir de
dépenser des commissions scolaires qui n'ont pu adopter leur budget
avant le début de l'exercice financier constitue une autre
simplification des encadrements administratifs. Le maintien de l'autorisation
du ministre nécessaire à l'adoption d'un budget
déficitaire me paraît un geste propre à simplifier le
processus. Cette mesure s'appliquera uniquement, donc, aux commissions
scolaires en situation financière délicate. Enfin, la commission
scolaire pourra fixer son taux de taxe scolaire dès qu'elle aura
adopté son budget. Elle n'aura plus à attendre l'approbation de
son budget par le ministre.
Maintenant, M. le Président, je voudrais aborder avec vous
pendant quelques minutes un sujet qui se veut délicat, très
important, mais aussi un peu sensible: l'ensemble de la question de l'âge
minimum d'admissibilité à l'école. On a eu l'occasion d'y
référer à quelques reprises. Je me permets, ce soir, de
vraiment placer dans
leur véritable contexte les modifications qui sont
apportées au projet de loi.
M. le Président, les articles 1, 12 et 14 du projet de loi 17
traitent de l'âge d'admissibilité à l'école. Il est
question de l'âge d'admissibilité au préscolaire et au
primaire, ainsi que du passage, en cours d'année, du préscolaire
au primaire. L'âge d'admission demeure 5 ans au 1er octobre pour le
préscolaire et 6 ans au 1er octobre pour le primaire. Le projet de loi
retient la dérogation comme mode d'admissibilité des enfants de
moins de 5 ans ou encore de moins de 6 ans au 1er octobre.
Le projet de loi propose de confier dorénavant aux commissions
scolaires la responsabilité d'accorder une dérogation à
l'âge minimum d'admissibilité, tout en accordant aux parents un
droit d'appel auprès du ministre de l'Éducation. Le processus
actuel, M. le Président, d'octroi d'une demande de dérogation
laisse finalement peu de responsabilités décisionnelles aux
commissions scolaires, ainsi qu'au personnel enseignant et non enseignant de
leurs écoles. En vertu du processus actuel, un parent peut, s'appuyant
sur un rapport fourni par un professionnel, un psychologue, demander au
ministre d'accepter que son enfant soit admis avant l'âge prévu,
soit en maternelle ou encore en 1re année. Le ministre, lui, s'appuie
évidemment sur le dossier qui lui est préparé,
généralement par la direction régionale, en collaboration
avec la commission scolaire et les parents.
Le processus actuel minimise les possibilités de collaboration et
de concertation entre les parents et les équipes-école. Pour moi,
M. le Président, l'équipe-école est un vocable qui
reviendra régulièrement et même souvent. Pour moi,
l'école, c'est le véritable carrefour de l'éducation au
Québec, ce qui réunit autour des mêmes objectifs nos
enseignants et nos enseignantes au premier chef, parce que c'est elles et eux
qui articulent, qui font vivre, somme toute, l'éducation quotidiennement
dans leurs classes respectives. C'est aussi ces professionnels non enseignants
qui sont là pour s'inscrire en support et en appui à la
démarche éducative. Pour moi, l'équipe-école, c'est
aussi, évidemment, l'ensemble du personnel qui est soit de soutien, soit
au niveau de la direction de l'école.
Dans le plan d'action, tel que je l'évoquais il y a quelques
minutes, que je rendrai public incessamment, nous entendons appuyer l'ensemble
de nos démarches visant à augmenter et accroître la
réussite éducative de nos enfants québécois sur
l'équipe-école. Ce genre de forum dynamique, progressif,
audacieux est susceptible de rallier autour d'objectifs communs bien
campés et bien établis une démarche qui est fondamentale
dans une société comme la nôtre.
Je reviens donc à cette équipe-école qui devra
assumer une responsabilité, maintenant plus grande, qui était
généralement assumée, jusqu'à maintenant, par le
ministre de l'Éducation lui- même. En fait, M. le
Président, la loi actuelle n'offre pas toutes les garanties que les
meilleurs intérêts des enfants soient en tout temps
préservés. Dans un premier temps, les décisions sur les
demandes de dérogation sont prises en dehors du contexte de la vie des
enfants, puisque c'est moi, comme ministre de l'Éducation, qui dois
signer, approuver, ratifier ces demandes de dérogation. Puis, vous le
savez, M. le Président, et mes collègues le savent,
l'éducation, ce n'est pas au 15e étage du complexe G que
ça se vit, ni au 600, rue Fullum, à Montréal. La loi
actuelle donc, n'offre pas toutes les garanties qu'on agit dans les meilleurs
intérêts de l'enfant. Les décisions ensuite sont prises, et
celles qui sont prises ne garantissent pas que toutes les avenues de
réponse de l'école ou du milieu aux besoins spécifiques
des enfants ont pu être explorées et prises en compte. D'ailleurs,
le processus actuel compte plusieurs étapes qui ne permettent pas
d'assurer une réponse rapide aux besoins des enfants. (20 h 40)
Donc, les modifications qui sont ainsi proposées visent à
faire en sorte qu'on puisse transférer aux commissions scolaires un
pouvoir jusque-là réservé au ministre de
l'Éducation, soit celui d'accorder des dérogations à
l'âge minimum d'admissibilité. Le projet de loi vient
également baliser l'âge minimum auquel un enfant pourra
accéder à l'éducation préscolaire ou encore
à l'enseignement primaire. Il faudra avoir cinq ans ou six ans, selon le
cas, au cours de l'année scolaire pour laquelle une dérogation
est demandée. Le projet de loi propose ainsi d'établir la
possibilité de passage, par dérogation, d'un enfant du
préscolaire au primaire qui a atteint l'âge de 5 ans au 1er
janvier. Enfin, toujours pour garantir que l'occurrence d'une raison
humanitaire ou que la possibilité d'un préjudice grave à
un enfant ne saurait être minimisée ni sous-estimée, le
projet de loi introduit aussi une possibilité, pour un parent, de faire
appel auprès du ministre de l'Éducation, en cas de refus d'une
commission scolaire d'accorder une dérogation que le parent estime
fondée.
Le projet de loi, d'ailleurs, annonce une réglementation qui
viendra définir les motifs sous-tendant une demande de dérogation
ainsi que préciser les renseignements et les expertises devant
accompagner une telle demande. Ces modifications législatives à
l'âge d'admissibilité au préscolaire et au primaire visent
fondamentalement à raffermir le lien entre l'enfant et l'école,
à permettre aux personnes, les parents, les membres de
l'équipe-école, qui ont la meilleure connaissance de l'enfant,
parce qu'ils sont beaucoup plus près de cet enfant que le ministre de
l'Éducation peut l'être, malheureusement... Le ministre de
l'Éducation aimerait être le plus près possible des 1 400
000 élèves au Québec, mais tout le monde est unanime
à constater que c'est impossible. Donc, le premier objectif vise
à
raffermir le lien, la relation entre l'enfant et l'école,
enfant-école-famille-équipe-école.
En corollaire, elle se situe dans le sens de la démarche
ministérielle de décentralisation des pouvoirs vers les
commissions scolaires, en leur proposant des responsabilités accrues et
des marges de manoeuvre additionnelles. Par voie de conséquence,
également, elles entendent, ces modifications, résorber les
attitudes réfractaires de certains milieux à des décisions
qui sont prises ailleurs, qui étaient prises jusqu'à maintenant
au niveau ministériel, et ça, M. le Président, c'est
proposer, pour le mieux-être de l'enfant, un mode nouveau de
collaboration entre les parents et l'équipe-école.
Si on réfère maintenant au calcul de la taxe dans les cas
de réunion ou d'annexion totale de territoires de commissions scolaires,
on sait, M. le Président, qu'à l'heure actuelle on a
adopté, au cours des derniers mois, pas moins de 18 décrets
autorisant tantôt la cessation d'existence de commissions scolaires
régionales, tantôt la réunion ou l'annexion de territoires
de commissions scolaires. En procédant de la sorte, M. le
Président, le gouvernement vient permettre une continuité plus
harmonieuse des projets et objectifs éducatifs du primaire avec le
secondaire. De même, en ce faisant, on leur a permis une plus grande
rationalisation des ressources des commissions scolaires, qui va
entraîner très certainement une meilleure qualité des
services à nos enfants.
Je me rappelle fort bien, M. le Président, pour avoir
analysé un certain nombre de dossiers, qu'il nous apparaît
très clairement démontré que cette démarche
d'intégration nous permettra, dans plusieurs cas, de
récupérer rien de moins que des millions de dollars pour les
affecter au bénéfice de nos élèves, dans le cadre
des services éducatifs qu'on a à assumer. En effet, l'article 308
de la Loi sur l'instruction publique garantit à chaque commission
scolaire, dans le calcul de ses revenus autonomes, un montant de base de 150
000 $. Dans les présents cas de changements organisationnels, ces
montants de base seraient réduits de façon significative, si on
n'intervenait pas par la présente loi.
À titre d'exemple, dans la Beauce, où 6 commissions
scolaires en formeront une seule au 1er juillet prochain, les pertes à
titre de revenus autonomes seraient de 750 000 $, soit 5 fois 150 000 $, comme
revenu de base. Donc, les modifications proposées visent à
permettre au gouvernement de déterminer par règlement les
règles de majoration du montant de base relatif aux revenus autonomes,
suite à une réunion ou encore à l'annexion totale de
territoires de commissions scolaires ou suite à la cessation d'existence
d'une commission scolaire.
Les modifications à ces articles permettent également au
gouvernement de déterminer par règlement la période
où il y a lieu à majoration du montant de base. Il est donc
primordial que la
Loi sur l'instruction publique soit modifiée rapidement afin
d'éviter de déstabiliser ou d'affecter la situation
financière de ces commissions scolaires. Ces modifications permettront
non seulement de leur garantir une meilleure autonomie, une meilleure marge de
manoeuvre, mais également d'assurer le maintien et même
l'amélioration de la qualité des services à nos
enfants.
Concernant maintenant, M. le Président, les imprécisions
ou le caractère plus ou moins clair des fameuses règles
budgétaires, lors de divers échanges que j'ai eus ou que des
représentants de mon ministère ont entretenus dans le cadre de
cette démarche de comité conjoint ou de comité de travail
avec les différents intervenants du milieu de l'éducation, lors
aussi des rencontres portant sur le plan d'action, nous avons été
à même de constater que la Loi sur l'instruction publique souffre
de certaines imprécisions relativement au pouvoir dont je dispose pour
établir des règles budgétaires annuelles. En
conséquence, le gouvernement propose de modifier la loi de
manière à clarifier ces imprécisions qui sont, plus
souvent qu'autrement, d'ordre technique.
De plus, je vous signale, M. le Président, mon intention de
déposer en commission parlementaire deux amendements à ce projet
de loi. Ces amendements visent, d'une part, à habiliter les commissions
scolaires à offrir les services d'enseignement ou de formation en dehors
des périodes d'enseignement, exemple, les cours de rattrapage le samedi
matin, exemple, des périodes pour les leçons et les devoirs, qui
n'étaient pas autorisés en vertu de la loi actuelle. Plusieurs
commissions scolaires au Québec offrent des cours de rattrapage. Or,
l'ensemble des avis juridiques que j'ai obtenus nous démontre que les
commissions scolaires qui le faisaient jusqu'à maintenant se trouvaient
placées dans une situation d'illégalité. Moi, j'appelle
ça de la délinquance créatrice, mais j'entends profiter de
l'étude du projet de loi article par article pour apporter des
modifications de façon à valider ces actions combien positives de
la part d'un certain nombre de commissions scolaires au Québec.
Ainsi, M. le Président, ces amendements viseront à
habiliter les commissions scolaires à offrir des services d'enseignement
ou de formation en dehors des périodes d'enseignement et, d'autre part,
ces modifications viseront à leur permettre d'exiger une contribution
financière pour l'organisation de ces services. Ces amendements
contribueront, eux aussi, à assurer une plus grande autonomie aux
commissions scolaires désireuses d'offrir de tels services aux personnes
qui leur en feront la demande.
Si on se réfère, M. le Président, enfin, et je
termine là-dessus, à l'entrée en vigueur du projet de loi,
la présente loi entrera en vigueur dès son adoption, de telle
sorte que les modifications introduites, à l'exception de celles
relatives
à la dérogation de l'âge d'admission, seront
applicables en 1992-1993, et tout le volet des dispositions portant sur les
dérogations à l'âge d'admission s'appliqueront à
compter de septembre 1993. Ce délai vise à permettre aux
commissions scolaires de se donner les mécanismes, les outils
nécessaires pour remplir adéquatement leurs nouvelles
responsabilités. Elles visent aussi à ne pas perturber le
processus d'admission des élèves pour l'année 1992-1993,
qui commencera en septembre prochain, qui est en cours déjà
depuis au-delà de deux mois.
Alors, en terminant, M. le Président, permettez-moi de souligner
ici la contribution et l'intérêt des commissions scolaires qui
sont à l'origine de la plupart des modifications que contient le projet
de loi 17, et qui sont maintenant proposées pour adoption à
l'Assemblée. Par ces modifications que j'espère voir adopter
avant la fin de la présente session, la Loi sur l'instruction publique
se trouvera améliorée dans le meilleur respect des droits des
élèves. Et ça m'apparaît fondamental,
nécessaire de le dire, de le réitérer et de le formuler
continuellement: On doit recentrer chacune de nos interventions autour et en
fonction de l'élève, c'est lui qui constitue, évidemment,
notre avenir. Ces modifications aussi vont dans le sens d'un engagement que
nous avons pris comme gouvernement, que nous sommes à mettre en oeuvre
par des mesures comme celles proposées, c'est-à-dire
reconnaître l'autonomie des commissions scolaires et tout faire, faire le
maximum pour pouvoir décentraliser nos décisions de façon
à rapprocher le plus près possible de l'élève la
décision qui le concerne directement. Merci, M. le Président.
J'invite donc mes collègues à voter en faveur du principe du
projet de loi que je vous propose. Merci.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre de
l'Éducation. Je vous rappelle que nous sommes à discuter de la
motion du ministre de l'Éducation proposant l'adoption du principe du
projet de loi 17, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique. Je reconnais
maintenant M. le député d'Abitibi-Ouest, leader adjoint de
l'Opposition officielle et critique en matière d'éducation. Je
vous rappelle, M. le député, que vous disposez d'une
période de 60 minutes. Allez-y, M. le député. (20 h
50)
M. François Gendron
M. Gendron: Oui, M. le Président. Je voudrais d'abord,
d'entrée de jeu, indiquer au ministre de l'Education qu'il
m'apparaît exact qu'il s'agit de quelques modifications, à
certains égards, intéressantes, à d'autres égards,
un peu moins - au niveau du chapitre des dérogations, on y reviendra -
mais globalement, l'esprit de ces modifications-là est dans le sens
d'améliorer la Loi sur l'instruction publique, laquelle vieille loi a
été profondément et largement modifiée par la loi
107.
Je vais y aller tout de suite, parce que j'ai peur que l'ex-ministre de
l'Éducation nous quitte. C'est son droit le plus strict et il a
peut-être des obligations ailleurs. Mais j'écoutais attentivement
le ministre et ma pensée a été obligée de
s'arrêter parce que je voyais le député de Sauvé, le
député de Rimouski, le député de Sherbrooke, le
député de Saint-Louis qui étaient ici et l'ex-titulaire,
aujourd'hui ministre des Affaires municipales et de la Sécurité
publique, qui se faisait un ardent défenseur, entre autres, des articles
268, 269 et autres. Or, aujourd'hui, le ministre de l'Éducation de la
même formation politique vient nous dire: Non seulement je ne les modifie
pas, mais ça n'avait tellement pas de bon sens que je les abroge. Je les
abroge, ces articles-là.
Je voyais souvent les silencieux appuis du côté
ministériel, qui ne disaient pas un traître mot, comme c'est la
pratique habituelle en commission, mais qui m'écoutaient pendant des
heures en se disant combien ça n'avait pas de bon sens que j'indique au
ministre de l'Éducation qu'il se faisait dire par la
Fédération des commissions scolaires qu'il s'agissait
probablement du projet de loi le plus centralisateur qu'on n'avait jamais vu
dans les 25 dernières années. Qui disait ça? M. d'Anjou,
avec qui j'ai eu de bonnes relations, mais un copain, un ami du régime
en place, un ami de l'ex-titulaire de l'Éducation, un libéral
notoire - je n'ai rien contre ça, c'est son droit le plus strict - qui
était obligé de venir nous dire en commission: C'est du jamais
vu. C'est profondément centralisateur. Alors, ça me faisait rire
parce que je suis convaincu qu'aujourd'hui les mêmes personnages, que ce
soit le député de Sherbrooke, le député de
Sauvé, le député de Saint-Louis, vont voter
allègrement avec le ministre de l'Éducation d'aujourd'hui, mais
ça va être pour poser exactement le geste contraire qu'ils
posaient il y a deux ans avec la souveraineté suprême, dans le
sens que l'ex-titulaire n'était pas censé faire d'erreur en
éducation. C'était le maître à penser et, en
conséquence, même si on lui disait que c'était très
centralisateur, évidemment, nous étions dans les patates, nous ne
savions pas lire. C'est nous qui ne comprenions pas. Ce n'était pas
ça, le vrai problème, la vraie réalité. Alors,
certains ont déjà dit: D'autres jours, d'autres façons de
faire.
Mais je vais en venir plus précisément au projet de loi.
Le ministre de l'Éducation, dans le fond, ce qu'il nous indique, M. le
Président, c'est qu'il vient modifier la Loi sur l'instruction publique
et, très sincèrement, je le dis d'entrée de jeu, afin
d'assouplir des contrôles exercés tantôt par le ministre,
tantôt par les commissions scolaires elles-mêmes, mais, pour la
plupart des modifications, c'était sur des pouvoirs et des
fonctions qui n'auraient presque jamais dû être
attribués en exclusivité au 15e étage du G ou au 600, rue
Fullum. Ça fait gentil, aujourd'hui, de venir en Chambre et de dire,
écoutez - là, je cite au texte, le ministre actuel de
l'Éducation: II ne faut pas penser que les meilleures décisions
en éducation se prennent toujours au 15e étage et au 600, rue
Fullum. C'est drôle, c'étaient mes arguments avec l'ex-titulaire,
pour lui dire: Pourquoi faut-il que tout vous passe dans les mains? Pourquoi
pensez-vous que, s'il y a quelque chose, quelque part, qui ferait qu'une
décision se prend, dont vous n'avez pas pris connaissance, elle serait
inadéquate, inopportune, elle ne correspondrait pas au bien de
l'élève? C'est quoi, cette thèse-là, de tout voir,
de tout toucher, de tout palper et d'avoir la conviction que, si vous ne prenez
pas connaissance de tout, l'éducation s'arrête, les commissions
scolaires ne fonctionnent plus et il n'y a plus moyen d'opérer?
C'était ça, la thèse. Là, bien, le même
gouvernement, la même équipe libérale vient nous dire
aujourd'hui...
Avez-vous remarqué comment le ministre de l'Éducation a
commencé son projet de loi? Il a dit: Moi, depuis que je suis titulaire,
j'ai eu beaucoup d'échanges. Il a employé l'expression «de
multiples échanges avec beaucoup de monde». Je suis porté
à lui donner raison là-dessus, parce qu'il y a tellement de
choses qu'il nous a annoncées qui devraient être en vigueur depuis
des mois et des mois, et qu'on attend toujours; entre autres, le plan de
réussite scolaire pour contrer le phénomène grave du
décrochage. Je me rappelle, quand il avait annoncé ça, le
6 septembre 1991 - bientôt un an - le 6 septembre 1991, j'étais
très heureux, sincèrement, d'entendre un ministre de
l'Éducation, au Québec, qui disait: Écoutez, ça n'a
pas de bon sens qu'il y ait 36 %, 37 % ou 40 % de nos jeunes qui n'aient
même pas un diplôme de secondaire V pour envisager l'avenir. Ce bel
avenir, selon eux, dans une Constitution dont on voudrait se débarrasser
- mais ça, c'est un autre point de vue - pour être en mesure de
faire face au libre-échange, de faire face à la mondialisation,
de faire face aux défis internationaux, à la
compétitivité, toutes des belles notions qui exigent minimalement
un secondaire V.
Et là, ces gens-là nous disaient que c'était grave,
urgent, que ça n'avait pas de bon sens; le même ministre
annonçait ça en septembre, puis, au moment où on se parle,
à part d'avoir vu un chiffre budgétaire dans le discours du
budget du toujours souriant et jovialiste député de Bona-venture,
ministre des Finances, on n'a pas grand-chose à se mettre sous la dent
concrètement. Moi, il y a des gens qui m'appellent, ils disent: C'est
quoi, M. Gendron, le plan de réussite scolaire pour contrer le
phénomène du décrochage? Eh bien, je leur dis:
Écoutez, c'était février, c'était mars,
c'était avril, c'était mai... À un moment donné,
c'était avant le budget; à un moment donné, c'était
après le budget. Après le budget, il a dit: II faut que j'attende
la négociation avec la CEQ. Après la négociation avec la
CEQ, je ne sais pas ce qu'il attend. Probablement la fin de l'année
scolaire, mais il ne vient toujours pas.
Alors, pour revenir à mon propos, le ministre dit: Moi, j'ai
consulté des gens, j'ai eu de multiples échanges, puis,
là, je me suis rendu compte qu'il y avait des préoccupations en
éducation qui étaient centrées sur l'élève:
les apprentissages, le décrochage, la sous-alimentation. Je me suis
rendu compte qu'il y en avait d'autres qui étaient centrées sur
les enseignants - les personnels qu'on appelle ou les professionnels - d'autres
sur les parents, d'autres sur les administrateurs. J'ai un problème, M.
le Président, c'est que j'ai de la difficulté à comprendre
pourquoi ça requérait tant d'échanges pour convenir que
c'est bien sûr qu'en éducation il y a un certain nombre de
problèmes qui, à leur face même, M. le Président,
dans certains cas, trouvent leur point d'origine au niveau des
préoccupations qui sont plus centrées sur les
élèves. Dans d'autres cas, c'est bien sûr les personnels,
dans d'autres cas, c'est les parents, puis, dans d'autres cas, c'est les
administrateurs scolaires.
Mais ce qui m'a frappé, c'est qu'il concluait ceci comme
première note d'entrée et, encore là, je le cite au texte:
Constatant l'acuité des problèmes observés... Est-ce qu'il
n'était pas membre du même gouvernement? Est-ce que ce
gouvernement-là, malheureusement pour bien des éléments de
la société québécoise, ça fait trop
longtemps qu'il est là? Le gouvernement est élu depuis 1985 et
là le ministre de l'Éducation, aujourd'hui, dit: Constatant
l'acuité des problèmes observés... Puis, ça prend
sept ans avant de bouger. Est-ce qu'on bouge d'une façon majeure? Est-ce
qu'on bouge d'une façon significative? Est-ce que c'est des
modifications en profondeur pour aller dans le sens souhaité par la
Fédération des commissions scolaires, pour aller dans le sens de
n'importe quel observateur le moindrement au courant de la situation
éducative au Québec, à savoir qu'il y a davantage de
décisions qui risquent d'être plus efficaces, efficientes pour
l'élève, si elles sont prises à un niveau où,
effectivement, la connaissance du milieu, des besoins et des
particularités est mieux adaptée et plus évidente quand il
s'agit de décideurs locaux? Ça, il me semble que c'est une
vérité de La Palice, à moins d'être centralisateur
abusivement, comme, en tout cas, l'ex-titulaire l'était comme ce n'est
pas possible.
Il me semble qu'on n'avait pas besoin de virer le monde à
l'envers pour tenir compte de ces réalités, et ça a pris
bien du temps au ministre actuel. Je reconnais qu'il a voulu faire bouger
beaucoup de choses, qu'il a voulu changer beaucoup de choses. Comme il avait
affaire à un gouvernement qui n'est pas habitué à bouger,
qui
n'est pas habitué à prendre des décisions, surtout
avec un ex-titulaire qui possédait le contrôle total et la
vérité totale absolue sur tout, y compris l'ensemble des
créneaux en éducation, probablement qu'il ne devait pas y avoir
de problème au Conseil des ministres si jamais l'ex-titulaire voulait
rappeler certaines velléités de changer quelque chose. Ça
doit être ça qui explique que ça a pris tant de temps. Mais
est-ce qu'on vire, comme je l'ai dit tantôt, la cabane à l'envers,
M. le Président? La réponse, c'est non. (21 heures)
Je n'ai pas l'intention, parce que le temps est précieux, de
reprendre élément par élément. Mais le ministre a
touché assez adéquatement à ce qu'il a appelé les
principaux items de son projet de loi, en nous disant: Bon, eh bien, il y a
quelques articles qui se rapportent au budget. Il y a quelques articles qui
vont toucher les immobilisations scolaires. Il y a quelques dispositions
d'articles qui vont toucher l'âge de l'admission à l'école
et toute la dimension des dérogations concernant le préscolaire
et la capacité, lorsqu'un jeune a atteint cinq ans révolus le 1er
janvier, d'envisager d'accéder au niveau de la première
année du premier cycle de l'élémentaire. Ça, on
appelle ça le régime des dérogations. Il y a
également des dispositions concernant les règles
budgétaires, et il y a toute la question de la problématique de
l'acquittement des biens.
Donc, le ministre a assez bien résumé son projet de loi.
Je n'ai pas l'intention de revenir sur chacun des éléments. Je
vais plutôt y aller de commentaires un peu plus généraux,
et après ça, j'y irai d'une appréciation plus
serrée sur quatre ou cinq éléments. Il faut rappeler, M.
le Président, que ce projet de loi s'inscrit dans un contexte d'une
demande constante et constamment répétée et reprise, parce
que ça a l'air à être la seule façon de reprendre,
c'est-à-dire de remettre vingt fois sur le métier le même
message ou le même ouvrage avec ce gouvernement-là. Ils finissent
par avoir un minimum d'écoute, et dans ce sens-là, c'est un
projet de loi qui s'inscrit dans un contexte de mini-décentralisation de
pouvoirs en éducation, réclamée par le milieu au moins
depuis sept ans. Le milieu en réclamait probablement davantage depuis
plusieurs années. Pourquoi je pars de sept ans? C'est que la grande
modification à la Loi sur l'instruction publique, c'est quand même
l'ex-titulaire qui a décidé de la faire. C'est dans ce
sens-là qu'il y a eu un renforcement sans précédent, M. le
Président, de plusieurs articles qui, à leur face même,
auraient dû avoir une responsabilité beaucoup plus
décentralisée.
D'ailleurs, la Fédération des commissions scolaires,
récemment, M. le Président, a fait porter son congrès sur
quel thème? Elle l'a fait porter sur le thème de la
décentralisation, et elle a indiqué au ministre de
l'Éducation, qui a été présent à quelques
reprises à ce congrès-là, à cette assemblée
générale annuelle, qu'elle trouve la bureaucratie monstrueuse. Je
trouvais curieux d'entendre au «Téléjournal», si ma
mémoire est bonne, le ministre de l'Éducation qui disait:
Êtes-vous au courant, là? Il s'adressait, bien sûr, à
l'ensemble des intervenants de la Fédération des commissions
scolaires. Il disait: Êtes-vous au courant qu'au cours de cette
année je vous ai envoyé, si ma mémoire est bonne,
au-dessus de 750 instructions, missives. C'est le ministre de
l'Éducation! En voulant dire: Ce que j'ai fait, vous savez bien que
ça n'a pas de bon sens. Vous savez bien que ce n'est pas de même
que ça devrait marcher.
Il s'adresse à ces gens-là, et puis il dit: Bon, bien
écoutez, ce n'est pas la voie... Je comprends, le thème du
congrès de la Fédération, c'est: On est tanné de
votre bureaucratie monstrueuse. Brassons moins de papiers et occupons-nous de
l'essentiel, l'enfant, a lancé hier la présidente de la
Fédération des commissions scolaires du Québec, Mme Diane
Drouin. On ne peut pas lui en vouloir. Il semble que ce qu'il y a de plus
fondamental en éducation, c'est l'élève. Si on ne part pas
de l'élève, on a des problèmes de compréhension des
actions qu'on doit poser. là, vous avez une série d'articles:
pagé élargira les pouvoirs des commissions scolaires. on y
reviendra tantôt parce qu'à un moment donné il s'est
écartelé un peu trop. il s'est écartelé pas mal
parce qu'élargir le pouvoir des commissions scolaires, on ne peut pas
tout chambouler le système. c'est tellement vrai que, dans un sondage,
il y a quand même 40 % des commissions scolaires qui ont dit wo, wo, wo,
là! revenir à une négociation locale pour tout, pour
l'ensemble de la négociation, c'est exagéré. revenir
à toutes sortes de situations de déséquilibre ou de
disparités au niveau de l'éducation au québec, c'est
quelque chose qui ne répondrait sûrement pas aux exigences d'une
société moderne, mais qui a une responsabilité de
s'assurer, de maximiser la chance égale à qui que ce soit, peu
importe son milieu, ses origines, peu importe sa situation financière ou
celle de ses parents.
Michel Pagé veut sortir l'éducation de la paperasse
administrative. Donc, je ne veux pas être plus long là-dessus. Je
viens d'indiquer, M. le Président, que, oui, les commissions scolaires
ont accepté de relever le défi de la décentralisation,
mais elles ont ajouté: sous réserve, toutefois, d'une
réforme équitable de la fiscalité. Puis on pourra en
parler lors d'un autre débat, parce que je ne peux pas tout faire ce
soir.
Mais je voulais juste vous indiquer, d'entrée de jeu, que la
Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec
avait décidé de faire porter son assemblée
générale sur une réalité objective, en disant
à M. le ministre de l'Éducation: Si vous voulez refaire de
l'éducation une priorité au Québec, il ne s'agit pas
uniquement d'avoir le discours. Il ne s'agit pas uniquement de poser certains
gestes qui vont dans ce
sens-là. De temps en temps, ça prend ce que j'appelle une
réalité législative d'une instruction qui démontre
que le titulaire de l'éducation au Québec concrétise cette
belle prétention que, pour lui aussi, le moment est venu de prendre le
virage d'une véritable décentralisation et d'un plus grand
respect des pouvoirs locaux.
Lors de cette assemblée, les commissions scolaires ont
défini le cadre de décentralisation à négocier avec
le gouvernement, en lui servant cependant une sérieuse mise en garde. La
présidente a en effet insisté sur le fait que tout transfert de
responsabilités ne devrait pas prendre, M. le Président, l'allure
du pelletage improvisé de factures que ce gouvernement a servi au monde
scolaire et au monde municipal, au cours des dernières
années.
On est au courant. On sait qu'est-ce qu'ils ont fait avec le monde
rural. D'accord ou pas d'accord, voici votre coût de factures pour la
Sûreté du Québec. Qu'ils en aient besoin ou pas, que vous
ayez une incidence de criminalité ou pas, ça, ça ne nous
préoccupe pas. Voici la facture. Même chose pour la voirie
tertiaire. Qu'il y ait déséquilibre, qu'il y ait une
municipalité qui ait cinq petits ponts, cinq gros ponts, l'autre qui
n'en a pas, on s'en fout. Les chemins, c'est à toi. Comme si ce n'est
pas le Québec qui avait décidé de coloniser les
régions du Québec. C'est le Québec qui a pris cette
décision-là, de coloniser les régions du
Québec.
Pourquoi je rappelle ça? C'est justement... On dit: Chat
échaudé craint l'eau froide-Chaude? Chat échaudé
craint l'eau froide. Non, non, M. le Président, induisez-moi pas en
erreur. Je suis convaincu que j'avais bien cité l'adage populaire.
Une voix: Je m'excuse.
M. Gendron: Alors, je poursuis en disant que les commissions
scolaires se sont fait avoir dans le transfert des équipements
scolaires, et les municipalités se sont fait avoir à plusieurs
égards. Donc, au congrès, la Fédération a
avisé ce gouvernement-là et le ministre de l'Éducation:
Ça va faire. On veut bien assumer plus de responsabilités, mais
on ne veut pas juste des coups de pelle sans regarder où on garroche la
neige. Et là, l'entrée du garage est pleine, puis on dit aux
gens: Qu'est-ce qui se passe dans le garage? Plus moyen de voir, on l'a
bouché.
Alors, dans ce sens-là, le message a été on ne peut
plus clair. Une consultation récente, d'ailleurs, menée
auprès des membres de la Fédération avait confirmé
ce postulat que ces gens-là étaient aptes à assumer plus
de responsabilités, mais à condition qu'on respecte certaines
balises. Cette consultation avait également permis, M. le
Président, d'identifier d'autres prérequis essentiels à la
décentralisation. À titre d'exemples: le maintien de la
qualité des services éducatifs de base sur l'ensemble du
territoire, une formule de péréquation adéquate pour
assurer l'équité entre les régions et un transfert graduel
des pouvoirs décisionnels afin de maintenir une qualité constante
de services.
Rapidement, ces éléments-là, ça veut dire
qu'une décentralisation, ça a, règle
générale, des bons effets. Mais ça n'a pas tous les
mérites, si on ne tient pas compte qu'on ne peut pas faire toujours du
mur à mur, M. le Président. On ne peut pas appliquer les
mêmes politiques tous azimuts et avoir la conviction que ça va
toujours faire, que ça va toujours s'arrimer, parce que le Québec
de base n'est pas du même tissu social, économique que celui des
grandes villes. (21 h 10)
Je le connais, le Québec de base, et le Québec des
régions, et, en conséquence, M. le Président, si on n'a
pas de formule de péréquation pour venir
rééquilibrer, à certains égards, des
disparités, il me semble que c'est se soustraire à sa
responsabilité de gouverner adéquatement en se gardant des
mécanismes de redistribution plus équitables de la richesse, d'un
meilleur partage sur l'ensemble des territoires, et de faire attention, dans
certains transferts d'enveloppes, de ne pas accentuer ces écarts.
Règle générale, on parle, quand on parle comme ça,
d'une formule de péréquation pour rééquilibrer.
On doit se demander si le projet de loi 17 vient répondre
à toutes ces attentes du milieu. Je peux bien poser la question trois
fois, mais la réponse, elle va venir rapidement, et vite, c'est non. Le
projet de loi 17 ne vient pas répondre à l'ensemble des attentes
du milieu, et j'ai trouvé honnête le ministre de
l'Éducation de dire, dans sa présentation: II s'agit d'un
aboutissement partiel à l'objectif de simplifier, d'assouplir, de
responsabiliser davantage les élus locaux. Force nous est de constater
qu'il le fait en partie, mais que d'autres efforts devront cependant être
consentis pour y arriver, notamment au niveau des communications entre le
ministère et le réseau scolaire, et ça, pas toujours,
comme le ministre le disait lui-même, par paperasse, par instruction,
pour éviter que l'an prochain il aille les voir et dise: Ça a
changé beaucoup; au lieu de vous avoir envoyé 800 instructions
cette année, je vous en ai envoyé 750. On ne sera pas vraiment
plus avancé si le ministre reste dans ce climat-là.
Jusqu'à date, je pense qu'il n'est pas dans cet esprit-là,
contrairement à l'ancien titulaire. Il y a donc, à cet
égard, nécessité d'assouplir davantage les contrôles
du ministère, de réviser les mécanismes et les processus
régissant la réglementation, les nombreuses instructions et les
directives administratives de même que les informations et les nombreux
rapports demandés au réseau, parce qu'on continue à
demander de nombreux rapports au réseau de l'éducation.
C'est évident qu'il faudra consentir des énergies
additionnelles également afin d'amélio-
rer, quand bien même ce ne serait que la compréhension des
règles budgétaires qui sont complexes, difficiles,
alambiquées à bien des égards. Et il n'y a à peu
près personne qui ne se plaint pas de la complexité des
règles budgétaires. On peut également, quant à
nous, signaler notre inquiétude quant aux propos tenus par le ministre
dans une entrevue accordée au Devoir. Dans cette
entrevue-là... C'est là que j'avais mentionné,
tantôt, que le ministre de l'Éducation s'était largement
écartelé en disant qu'il accorderait des pouvoirs accrus aux
commissions scolaires. Mais dans l'édition du 30 mai où le
Devoir rapportait ses propos, il se réfère à un
éventuel élargissement de l'assiette fiscale en faveur des
commissions scolaires. Je ne peux pas faire un long débat
là-dessus, parce qu'on aura probablement d'autres occasions de le
faire.
Mais qu'est-ce que ça veut dire, M. le Président, pour un
ministre de l'Éducation, surtout quand il fait partie du Parti
libéral? On connaît ces gens-là à leurs actions
passées. Il voudrait avoir un État le plus petit possible, le
plus rapetissé possible, le moins interventionniste possible, peu
importe le secteur dans lequel la problématique se pose. Moi, je ne peux
pas accepter qu'en éducation on pense qu'on doive revenir aux
années vingt en créant des disparités, des
déséquilibres et en ne concevant pas que, si notre
modernité ne nous permet pas d'assumer, comme État, l'ensemble
des coûts au niveau du primaire et du secondaire, on fait partie d'une
société régressive, malade, mal gérée, en
difficulté, où les priorités ne sont pas à la bonne
place. On ne peut pas avoir des beaux discours, recentrer l'école au
niveau de l'élève, s'assurer que, de plus en plus,
l'éducation au Québec soit une priorité, et avoir de beaux
discours comme le ministre en a eus dernièrement en disant:
Écoutez, on va regarder ça et on va élargir l'assiette
fiscale. Comme si on pensait qu'on peut constamment jouer dans l'assiette
fiscale et qu'il y aura toujours de la place, au niveau du contribuable, pour
contribuer davantage, sans lui retourner des points d'impôt ou sans lui
accorder des dégrèvements fiscaux.
Ce même gouvernement qui veut dire: On va regarder la
possibilité d'élargir l'assiette fiscale au monde scolaire, il
sait que le municipal l'utilise abondamment; lui-même, comme
gouvernement, il l'utilise très abondamment avec la taxe de vente, la
TPS, les pompages de taxes de ce gouvernement-là pour au-delà de
3 000 000 000 $ au cours des dernières années, même s'il se
gargarise constamment: Ah! on n'a pas touché au contribuable. Voyons
donc! Allez au restaurant, il vous a touché. Allez vous habiller, il
vous a touché! Allez vous laver, il vous a touché! Allez chez le
notaire, il vous a touché! Allez chez l'avocat, il vous a touché!
Des souliers, il vous a touché! Des meubles, il vous a
touché!
Quelle hypocrisie, quelle hypocrisie de penser... Non, le contribuable
québécois, avec les rouges, les impôts n'ont pas
augmenté. Voyons donc! D'abord, il n'y a plus personne qui travaille...
dans bien des régions, 35 %, 40 % de chômeurs. Que tu poses
n'importe quel geste de société de consommation, tu vas te faire
«clen-cher». Tu te fais «clencher» par des politiques
budgétaires de ce gouvernement-là. Donc, vous repasserez, vous
repasserez avec votre belle théorie que vous n'avez pas touché
aux contribuables. Voyons donc! En tout cas, lui, il se sent touché
drôlement quand je le vois, le lundi, dans le bureau de comté.
Alors, je ne veux pas m'étendre là-dessus trop longuement,
mais c'est quoi, le signal que vous venez de donner, M. le ministre de
l'Éducation, par l'entremise du président de cette Chambre? C'est
un autre signal de désengagement de l'État envers ses
responsabilités en matière de financement de l'éducation.
Le financement de l'éducation au Québec est une
responsabilité de société, de gouvernement, d'État
responsable. On ne peut pas constamment rejouer avec ça en disant: Vous
en voulez un peu plus d'éducation dans votre milieu, vous paierez
davantage. Je ne crois pas... On peut exiger davantage de qualité, M. le
Président, en éducation - ça, j'espère qu'on va le
faire à un moment donné, le débat - mais je ne crois pas
que notre seule règle, pour qui que ce soit qui intervienne en
éducation, ça soit celles et ceux qui se préoccupent
constamment d'améliorer la qualité des gestes éducatifs,
la qualité des apprentissages, la qualité de la rétention
à l'école le plus longtemps possible, la motivation des jeunes
à performer, la motivation des jeunes à rester à
l'école, à réussir et à ce que l'école soit
de moins en moins ennuyante. Ça, c'est nos responsabilités, qui
que nous soyons, qui discourons sur des matières éducatives.
Cependant, pour ce qui est des dispositions administratives, parce que
je voudrais toucher quelques remarques particulières d'une façon
un peu plus exhaustive, c'est les modifications apportées. Ce sont des
modifications qui, dans l'ensemble, nous apparaissent acceptables. On aura des
réserves sur certaines d'entre elles, on questionnera davantage lors de
l'étude article par article. Mais, moi, je n'ai jamais eu deux discours,
M. le Président et je ne peux pas parler des deux côtés de
la bouche. Lorsque je disais de l'ex-titulaire qu'il avait des dispositions
réglementaires d'une centralisation abusive... Puis, aujourd'hui, on
vient abroger les articles sur lesquels je disais: Ça n'a pas de bon
sens. Je ne pourrai pas dire aujourd'hui que ça n'a pas d'allure parce
que c'est un autre titulaire qui les présente. Voyons donc! Alors, je
vais dire au ministre de l'Éducation actuel: Vous êtes sur la
bonne voie. Vous êtes dans la bonne ligne de décentralisation
minimale des responsabilités qui n'auraient jamais dû être
au 15e, qui n'auraient jamais dû être au 600, rue Fullum. Alors,
comme
vous restaurez, d'une certaine façon, la logique des choses,
bien, on va être d'accord pour ce bout-là.
Le projet de loi introduit quand même des modifications
substantielles au niveau d'une pratique, qui, encore là, grandit avec
l'arrivée des libéraux au pouvoir, mais surtout de la sagesse
pontificale, en éducation, où on a décidé, d'une
façon presque abusive, d'instaurer un régime de
dérogation. Le projet de loi 17 vient apporter une modification au
régime des dérogations scolaires. On va regarder ça un peu
plus concrètement parce que ce n'est pas une mince affaire. Ce n'est pas
une mince affaire de dire: Ce qui se faisait, d'une façon de plus en
plus importante et abusive au 15e étage, dorénavant, va se faire
à un niveau où la connaissance de l'élève est
meilleure. Là-dessus, je pense que le ministre avait raison, je n'ai pas
le temps de chercher sa citation, mais il avait raison, il disait: Je ne
connais pas ces élèves, moi. Donc, pourquoi c'est moi qui
attribuerais, au 15e étage, des dérogations? Sur la base de cette
logique, je ne peux pas être en désaccord parce qu'il m'ap-parait
que c'est plus logique que ces décisions se prennent le plus proche
possible du lieu, du vécu et de la connaissance que «des
personnels» professionnels, enseignants et autres peuvent avoir des
sujets concernés, c'est-à-dire des élèves. Mais
là où j'ai un drame, c'est que la logique demeure la même.
On instaure des règles et on se donne des mécanismes pour les
contrer. On appelle ça d'un mot scientifique, intéressant, un
noble mot qui veut dire: On va y déroger par des pratiques
écrites. On appelle ça des dérogations. (21 h 20)
Je veux vous rappeler au moins que, chez nous, l'Opposition officielle,
le Parti québécois, on a toujours eu à peu près le
même discours là-dessus. Je voudrais citer quelques points de vue
qu'on émettait sur les dérogations. La décision du
ministre de l'Éducation de multiplier les dérogations à
l'âge d'admission a créé un véritable fouillis dans
le milieu scolaire et rencontre une opposition quasi unanime chez les
intervenants concernés. La politique gouvernementale est mauvaise et
doit être corrigée dans les meilleurs délais, a
déclaré aujourd'hui le porte-parole de l'Opposition officielle en
matière d'éducation et député d'Abitibi-Ouest, M.
François Gendron. Le «aujourd'hui», c'était le 15
mars 1989!
Il y a d'autres intervenants qui nous disaient: La nouvelle formulation
de la directive a créé des complications, et on pense toujours
qu'il y a des dangers à accorder indûment des dérogations
puisque le ministre lui-même, dans une étude que son
ministère a conduite, a conclu que, lorsqu'un certain nombre de jeunes
sont admis trop rapidement à l'école, ils se placent en situation
d'échec scolaire potentiel plus que ceux qui sont admis lorsqu'ils ont
l'âge requis.
Donc, multiplier le nombre de dérogations,
M. le Président, a comme conséquence grave de placer plus
vite un plus grand nombre de jeunes dans des situations potentielles
d'échec. Dans ce sens-là, il me semble que c'est une pratique,
qu'il faut s'assurer que les règles auxquelles cette pratique sera
assujettie soient des plus claires, des plus justes, des plus précises
et n'ouvrent pas la porte à des hémorragies de
dérogations. Ce n'est pas pour rien que la CEQ a réagi avec
beaucoup de scepticisme et de doute en disant: Avant de confier cette
responsabilité aux commissions scolaires ou au niveau de l'école,
il va falloir être bien certain des balises que le ministre voudra
donner.
À ce sujet-là, je lui avais indiqué qu'avant de se
compromettre sur le fond du projet de loi, je voulais apprécier le
règlement auquel il fait référence parce que, dans son
projet de loi, il dit que les dérogations scolaires seront assujetties
à un règlement que lui-même se donne l'opportunité
de baliser, de rédiger et de préciser. Alors, moi, si je ne vois
pas le règlement concernant la façon de procéder pour les
dérogations scolaires, je ne suis pas plus avancé qu'avant. Je ne
suis pas plus avancé qu'avant, puis je ne peux pas me prononcer sur le
principe. Est-ce qu'on va multiplier les dérogations? Bien, ça
dépend des règles. Ça dépend des balises. Ça
dépend du règlement auquel le ministre va assujettir les
commissions scolaires, Puis, là, au moment où je vous parle, M.
le Président, je ne l'ai pas vu. Je ne l'ai pas vu. Je n'ai aucune
idée des règles qui vont régir cette pratique. Quant
à nous, très, très sincèrement, on
préférerait de beaucoup l'instauration d'une mesure universelle,
soit le report de la date d'admission à l'âge scolaire, à
défaut de quoi on devrait, à tout le moins, prioriser davantage
les jeunes de milieu défavorisé, dont les recherches prouvent
qu'ils ont besoin de stimulation précoce au profit des
élèves doués, à qui profite particulièrement
l'actuel système de dérogation.
On ne peut pas, dans une société, avoir toujours un
système qui nous conduit à la même place, à savoir
qu'on le sait que les plus doués ont plus d'avantages, plus
d'opportunités et plus de capacités. On est conscient de
ça, puis on établit des règles pour renforcir ou
développer davantage cette situation-là.
Une voix: Renforcer.
M. Gendron: Renforcer cette situation-là. Ça n'a
pas de bon sens, M. le Président! Ça n'a pas de bon sens! Il faut
s'assurer de temps en temps d'avoir des gestes et des règles qui
permettent d'améliorer la situation chez celles et ceux où on a
décelé qu'ils avaient besoin de plus de support, qu'ils avaient
besoin de plus d'entraînement, d'initiatives. On appelle ça, dans
le jargon scolaire, la stimulation précoce pour des jeunes qui,
malheureusement, sont nés dans des poches de pauvreté ou dans des
milieux défavo-
rises. Quand on sait qu'un ministre de l'Éducation est
obligé, dans ses budgets, d'avoir 10 000 000 $, 15 000 000 $, 20 000 000
$ pour l'alimentation de leur ventre avant de penser d'alimenter leur esprit,
ça vous donne une idée, M. le Président, combien il y a de
jeunes qui sont placés dans des situations difficiles d'apprentissage.
Et ça, il est urgent de corriger ça.
Donc, sur la dérogation, on doit être d'une prudence de
Sioux. On va être d'une prudence de Sioux. On va regarder le
règlement attentivement et on va se prononcer, à un moment
donné, M. le Président. Mais, pour l'instant, je ne trouve pas
que le ministre nous a donné les garanties que nous sommes en droit
d'exiger.
Sur les fonctions et pouvoirs reliés aux ressources
matérielles, la commission scolaire n'aura plus à obtenir
l'autorisation du ministre pour acquérir, construire, agrandir,
aménager ses immeubles, ni faire approuver les plans et devis. Je veux
dire juste une phrase. Je me rappelle, encore là, ce qu'on disait
à l'ex-titulaire. On disait: Oui, mais écoutez, là, s'ils
veulent juste faire une réparation mineure, s'ils veulent juste... Parce
que agrandir et aménager, dans certains cas, c'est mineur. Un
aménagement ou un agrandissement, ça peut être mineur. Vous
ne trouvez pas qu'à partir du moment où vous voulez confier une
responsabilité, déléguer, vous dites dorénavant aux
commissions scolaires: Je vous fais confiance, c'est vous qui aurez la
responsabilité d'administrer ça, et que passer son temps à
remonter au 15e ou à 600, rue Fullum, ça ralentissait
drôlement le processus, ça l'alourdissait, au moins en timbres et
en envoi postal de toute nature et en réplique? On envoie quelque chose,
le ministère prend quatre, cinq mois à regarder ça, il
retourne ça, puis il ne comprend pas et il demande des explications
additionnelles. Quatre mois plus tard, on fournit des explications
additionnelles, mais la construction n'est toujours pas autorisée,
l'agrandissement n'est toujours pas autorisé, l'aménagement n'est
toujours pas autorisé. Donc, c'est évident qu'à cet
article-là, à sa face même, il y avait abus. Il y avait
abus de système. Bon, elle devra, par contre, attendre l'avis du
ministre avant d'effectuer les travaux nécessitant l'élaboration
de plans et devis. Ça, je trouve ça légitime. On peut donc
se demander si une commission scolaire pourrait compromettre un projet ou le
retarder dans l'attente de l'avis du ministre, mais on regardera, lorsqu'on
étudiera article par article, s'il n'y aurait pas lieu d'instaurer la
notion de délai raisonnable.
Quant aux fonctions et aux pouvoirs relatifs aux ressources
financières, les commissions scolaires et le conseil ne seront plus
tenus de faire approuver par le ministre leur budget annuel de fonctionnement,
d'investissement et de service de la dette, ni d'obtenir du ministre une
autorisation pour adopter un budget qui prévoit des revenus
supérieurs aux dépenses, donc des surplus. On maintient,
cependant, celles relatives au déficit, ce qui est tout à fart
compréhensible; compréhensible au niveau du déficit,
logique au niveau du surplus, on les laisse aller.
Au niveau de la taxation scolaire, le gouvernement pourra
dorénavant adopter des règlements pour déterminer les
règles de majoration du montant de base pour le calcul du produit
maximum de la taxe scolaire dans les cas de réunion ou d'annexion totale
de territoire de commission scolaire ou de cessation d'existence d'une
commission scolaire régionale, et on aura certaines questions à
poser au ministre. Mais ça, c'est logique parce que, effectivement,
enfin - enfin! - en 1992, le ministre aura terminé cette légitime
préoccupation que nous avons eue au Québec de dire: Est-ce que le
moment ne serait pas venu de demander à chacune des commissions
scolaires de se responsabiliser davantage et d'assumer la totalité des
ordres d'enseignement sur son territoire? C'est tout à fait logique de
dire à une commission scolaire, puisqu'il y a quand même ce qu'on
appelle des passerelles entre ses différents services, et il
était important de dire à toutes les commissions scolaires du
Québec: Pourquoi ne vous occupez-vous pas de l'ensemble de
l'enseignement primaire et secondaire sur votre territoire? Et c'est ce qu'on a
appelé communément l'intégration des ordres
d'enseignement.
Pour ce qui est des règles budgétaires, on aura quelques
questions, mais j'aime mieux le faire à l'étude article par
article parce que ça nous donnera plus de temps d'échanger et d'y
aller avec les précisions.
Je ne voudrais pas prolonger, M. le Président. Je voudrais tout
simplement indiquer qu'en ce qui nous concerne on va accorder notre appui aux
modifications à caractère, pas administratif, mais à
caractère allant dans le sens de la décentralisation, comme je
l'ai indiqué tantôt, puisque c'est des modifications qui, au
chapitre d'immobilisation, budget, règles budgétaires et
problématique de l'acquisition des biens, vont dans le sens qu'on a
toujours défendu, vont dans le sens des revendications traditionnelles
de la Fédération des commissions scolaires et des plus
concernés. Et comme, nous aussi, on veut responsabiliser ces
gens-là, il n'y a aucun problème à donner notre accord
là-dessus. (21 h 30)
Pourquoi je ne peux pas donner mon accord globalement au projet de loi
à ce moment-ci? Je l'ai dit tantôt. Donc, je ne peux pas dire que
nous allons voter en faveur du principe du projet de loi, parce qu'un des
éléments majeurs, selon nous, du projet de loi 17, c'est tout le
régime de dérogation. Je vais en prendre connaissance. Je vais
prendre connaissance du régime de dérogation. On verra si,
effectivement, les règles sont balisées d'une façon
très, très sévère afin de limiter cette pratique,
parce que je suis en désaccord de faire ce qu'on a fait à un
moment
donné; c'est quasiment devenu la pratique générale,
l'ouverture aux dérogations, alors que ça devrait être
beaucoup plus limitatif. Après qu'on aura examiné cette
question-là, bien, on verra comment on se comportera pour les
étapes subséquentes de ce projet de loi.
Voilà, M. le Président, les commentaires que je voulais
faire, à ce moment-ci, comme porte-parole de l'Opposition officielle en
matière d'éducation. Merci.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition
officielle. Je vous rappelle que nous sommes à débattre la motion
du ministre de l'Éducation proposant l'adoption du principe du projet de
loi 17, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique. Sur ce sujet, je
cède maintenant la parole à M. le député de
Sauvé. Vous avez droit à une intervention de 20 minutes, M. le
député.
M. Marcel Parent
M. Parent: Merci beaucoup, M. le Président. Le projet de
loi que nous avons devant nous, le projet de loi 17, n'est certainement pas un
projet de loi majeur. C'est un projet de loi qui a pour but de bonifier et
d'améliorer ou d'actualiser la Loi sur l'instruction publique. C'est un
projet de loi, M. le Président, qui va certainement plaire à
l'Opposition. J'écoutais, tout à l'heure, les remarques de mon
collègue d'Abitibi-Ouest qui nous rappelait les heures que nous avons
vécues ensemble lors de la commission parlementaire, lorsque nous avons
adopté le projet de loi sur l'instruction publique au Québec.
Ils ont, je ne dirais pas reproché, mais attiré
continuellement l'attention du ministre sur une position centralisatrice. On
disait que le ministre voulait avoir la mainmise sur tout. On disait que le
ministre se donnait un grand pouvoir centralisateur. On disait que le ministre
ne reconnaissait pas l'autonomie des commissions scolaires. Mais je me souviens
aussi qu'à ce moment-là les gens de notre formation politique
sont intervenus. Nous avions dit: Si le projet de loi veut refaire la Loi sur
l'instruction publique et l'actualiser, si on veut réellement lui donner
son sens, on doit se donner les outils nécessaires pour la
contrôler et, au fur et à mesure que nous vivrons avec cette loi,
nous l'améliorerons et nous l'appliquerons aux exigences du moment.
C'est cette pensée de cohérence qui a animé nos
discussions et le travail que nous avons fait en commission parlementaire. Et
aujourd'hui, le ministre de l'Éducation vient redonner partiellement -
je dis bien «partiellement» - aux commissions scolaires une
certaine autonomie que le projet de loi sur l'instruction publique ne leur
reconnaissait pas. Plus d'autonomie dans certains dossiers, principalement le
dossier de la dérogation à l'âge d'admission.
En ce qui regarde les acquisitions de biens par les commissions
scolaires, l'approbation des plans et devis de construction, l'approbation des
budgets, le calcul de la taxe et tout ça, nous étions bien
conscients, à ce moment-là, que nous nous donnions des pouvoirs
qui, normalement, auraient dû être dévolus aux commissions
scolaires, mais si nous voulions donner une orientation aux commissions
scolaires, si nous voulions tracer des paramètres de façon
à ce que les commissions scolaires puissent prendre leurs
responsabilités et orienter leur démarche ou leur intervention
dans l'esprit de la Loi sur l'instruction publique, nous devions, à ce
moment-là, garder un contrôle beaucoup plus général
sur ces dossiers-là.
Aujourd'hui, à la suite du vécu, à la suite de
l'expérience - il y a déjà plus de deux ans que cette
loi-là existe - nous sommes en mesure de redonner aux commissions
scolaires une certaine autonomie, une autonomie, je le reconnais, M. le
Président, qui leur revient.
La Loi sur l'instruction publique, M. le Président, a régi
les relations entre les commissions scolaires et le ministère de
l'Éducation et aussi, ne l'oublions pas, les relations entre les
commissions scolaires et leurs clientèles. Depuis octobre 1990, le
ministre de l'Éducation a eu l'occasion d'examiner les relations entre
ces différentes instances. J'ai d'ailleurs eu le privilège d'en
discuter souvent avec lui, et ces contacts répétés ainsi
que son travail l'ont amené à déposer ce projet de
loi.
Ce projet de loi a un objectif global: alléger les
procédures administratives et confier plus de responsabilités aux
commissions scolaires comme elles le réclament, d'ailleurs, depuis
plusieurs années. La Fédération des commissions scolaires
réagissait par la voie des journaux, suite à l'invitation du
ministre. En conférence de presse, le président s'est
exprimé, et les quotidiens ont titré, à ce titre...
Principalement, La Presse du 1er juin disait: «Les commissions
scolaires relèvent le défi de la décentralisation».
Et on pouvait aussi lire, dans Le Devoir du 30 mai: «Le ministre
Pagé promet plus de responsabilités fiscales aux commissions
scolaires». Le même jour, on pouvait lire aussi dans Le Soleil
de Québec: «Pagé mise sur la décentralisation
pour éliminer le décrochage». C'est donc une idée
maltresse qui animait le ministre à ce moment-là, de
décentraliser certains pouvoirs vers les commissions scolaires.
On rapporte aussi que c'est dans le cadre du plan d'action sur la
réussite scolaire que le ministre de l'Éducation a
décidé de présenter ce projet de loi. Il faut donc
souligner que ce projet de loi fait partie d'un ensemble de mesures qui ne
visent qu'une chose: la réussite du plus grand nombre. L'objectif
visé par le ministre est clair: diminuer le taux d'abandon scolaire de 3
% par année durant les cinq
prochaines années.
J'ai eu aussi l'opportunité de discuter du processus de
consultation avec le ministre en ce qui concerne ce projet de loi et, comme ce
dernier le mentionnait tout à l'heure dans son exposé, ce projet
de loi a été analysé, discuté, validé par
bon nombre de représentants du monde scolaire. Et je vais vous en nommer
quelques-uns: la Fédération des commissions scolaires,
l'Association des commissions scolaires protestantes du Québec,
l'Association des directeurs généraux de commissions scolaires,
l'Association des cadres scolaires du Québec, la
Fédération des directeurs et directrices d'écoles du
Québec et l'Association des administateurs scolaires du Québec.
Tous ces gens-là, tous ces groupes-là ont été
consultés, et tous ces gens ont eu à donner leurs commentaires
sur la situation, et c'est ce qui a incité le ministre à
élaborer une suite de gestes concrets afin d'obtenir les
résultats escomptés. Le projet de loi 17 est un de ces gestes et
il vise à alléger la structure administrative.
Le ministre, M. le Président, était d'ailleurs cité
comme suit dans le journal Le Soleil du 30 mai: «700 circulaires
administratives dans une année, c'est trop.» Le projet de loi
s'inscrit dans une continuité immédiate avec cette
déclaration. Il vise simplement à décentraliser vers les
commissions scolaires, en ce qui concerne les dérogations à
l'âge minimum d'admission, les acquisitions de biens par les commissions
scolaires, l'approbation des plans et devis de construction, l'approbation du
budget, et le projet de loi touche aussi au calcul de la taxe dans le cas de
réunion et d'annexion de commissions scolaires qui ont été
impliquées dans un processus d'intégration.
Tous ces gestes, M. le Président, visent à rendre plus
autonomes les commissions scolaires et à diminuer le nombre de
formulaires de rapport. «750 formulaires dans une année, c'est
trop», et ce projet de loi vise justement à simplifier, à
alléger et à améliorer les relations des commissions
scolaires avec le ministère, avec leur unité administrative
régionale, avec leurs clientèles et avec leurs écoles.
Tous ces gestes visent enfin une seule chose. En fin de compte, c'est
recentrer l'attention de l'éducation sur l'élève, sur la
relation entre l'élève et l'enseignant. C'est ce que vise le plan
d'action sur la réussite éducative. Le projet de loi 17 est un de
ces outils nécessaires à la mise en branle de ce plan.
D'ailleurs, les représentants directement touchés y souscrivent
pleinement.
Quand on parle du plan d'action sur la réussite scolaire, il faut
savoir que le ministre de l'Éducation y travaille depuis plus d'un an.
Pour élaborer ce plan d'action, le ministre a parcouru la province, a
multiplié les rencontres avec tous les représentants du monde
scolaire. Des colloques régionaux ont eu lieu, et toutes ces
données ont été colligées dans ce plan d'action qui
devrait être lancé sous peu, d'ici quelques jours. Le ministre a
réussi, par ses interventions, à stimuler l'intérêt
de tous. Et pour avoir reçu des commentaires personnellement de ces gens
du monde scolaire, je puis vous confirmer, M. le Président, l'engagement
inconditionnel des gens du monde scolaire.
Quant au projet de loi lui-même, il contient des objectifs
très spécifiques. Tout d'abord, M. le Président, il touche
les dérogations quant à l'âge minimum d'admission. Confier
cette responsabilité aux commissions scolaires confirme la pratique de
qualité qui prévaut dans les commissions scolaires, diminue le
nombre de circulaires et d'interventions, et donne aux commissions scolaires,
le gouvernement le plus près de la clientèle, une autonomie dans
ce domaine qui lui revient. (21 h 40)
Le projet de loi traite aussi des pouvoirs d'acquérir des
immeubles. Auparavant, les commissions scolaires devaient obtenir l'assentiment
du ministre; avec ces amendements, le processus s'en trouvera maintenant
allégé. Il en va de même pour le budget. Auparavant, les
commissions scolaires se trouvaient confrontées avec l'obligation de
préparer un budget équilibré. Avec les amendements
proposés, les commissions scolaires auront la possibilité
d'adopter un budget excédentaire.
Clairement, en ce qui concerne le budget annuel, le réseau
scolaire aura une latitude plus accrue. Et, bien entendu, ces
allégements sont présentés dans le but d'appuyer
l'autonomie du réseau scolaire.
Par contre, il va sans dire que le gouvernement conserve des moyens de
contrôle. Le but du projet de loi est simple et sera atteint: confirmer
l'autorité des commissions scolaires par ce projet de loi; le
gouvernement, par la voix de son ministre de l'Éducation, appuie
l'expertise du réseau scolaire, lui réaffirme sa confiance et
lance la présente invitation de recentrer notre attention sur l'effort
éducatif. À cet effet, M. le Président, je joins ma voix
à celle du ministre et appuie sans réserve ce projet de loi, qui
est d'ailleurs validé et attendu par le réseau scolaire.
C'est pour ça que j'invite, M. le Président, tous mes
collègues de l'Assemblée nationale, autant de ce
côté-ci de la Chambre que de l'autre côté, à
voter favorablement en faveur de l'adoption du principe du projet de loi 17.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Sauvé. Sur le même sujet, je cède
la parole à Mme la députée de Terrebonne.
Mme Jocelyne Caron
Mme Caron: Merci, M. le Président. M. le Président,
le député de Sauvé l'a dit lui-même en début
de discours, nous nous retrouvons devant
un projet qui n'est pas majeur. C'est réel. Nous sommes d'accord.
J'avais précisé dans mon texte que le projet, c'est un projet
mineur. Donc, nous sommes d'accord là-dessus, M. le
Président.
Ce qui est étonnant, c'est qu'on aurait pu s'attendre, par
exemple, à un dépôt d'un projet majeur puisque le ministre
de l'Éducation a fait le tour du Québec au cours de la
dernière année, a entendu les revendications des commissions
scolaires, des enseignants, des parents, et qu'il a reconnu que le monde de
l'éducation vivait des problèmes aigus. Donc, la
nécessité de solutions précises pour répondre, de
solutions majeures pour répondre à ces problèmes aigus.
Donc, nous sommes en lieu de nous attendre à son fameux plan d'action
qui tarde toujours.
Ce projet mineur de loi 17 cadre bien, par contre, avec le menu
législatif qu'on nous offre depuis quelques jours. Il cadre bien par
deux points, de légères modifications qui viennent corriger des
projets de loi que ce même gouvernement nous a fait adopter il y a peu
d'années. Et, au moment de l'adoption de ces projets de loi, autant les
intervenants concernés que l'Opposition officielle avaient fait part au
ministre concerné des inquiétudes qu'ils avaient et de la
nécessité qu'ils auraient de légiférer. Nous nous
retrouvons aujourd'hui devant cette prédiction.
Donc, premier point, comme tous les autres projets qu'on nous
présente depuis une semaine, M. le Président, ce ne sont que des
correctifs pour venir corriger des projets de loi qui avaient été
mal faits.
Deuxième point, dans chacun des projets de loi qu'on nous
dépose depuis une semaine, on nous parle de règlement sans nous
donner le règlement. Je donnerai pour exemple: le dépôt du
projet de loi, jeudi dernier, M. le Président, le projet de loi 33 sur
les services de garde, où on nous a demandé de donner la
bénédiction à ce projet sans avoir vu du tout les
règlements, et tout le projet de loi 33 est bâti à partir
du règlement. Même chose dans le cas de la loi 19 que nous avons
étudiée ce matin, M. le Président, sur le
développement régional, qui s'appelle maintenant affaires
régionales, où on nous annonce un règlement qui
déterminera les véritables conditions du développement
régional. Encore là, M. le Président, l'Opposition
officielle n'a pas vu le règlement sur le développement
régional. Le ministre de l'Éducation vient tout juste de nous le
déposer à la fin de son discours. Vous comprendrez
qu'après n'avoir jeté qu'un bref coup d'oeil, n'avoir pu
l'analyser au complet, nous ne pourrons nous prononcer immédiatement, ce
soir, sur son règlement.
Donc, le projet de loi 17 nous apporte des modifications. Ce sont des
correctifs qui sont nécessaires si on regarde les demandes qui avaient
été exprimées lors de l'adoption du projet de loi 107. En
effet, on avait démontré à ce moment que le projet de loi
107 donnait un contrôle tout-puissant au ministre de l'Éducation
et on prévenait déjà le ministre que, dans la pratique,
cela entraînerait des contrôles administratifs extrêmement
difficiles à vivre pour les commissions scolaires. Le ministre actuel de
l'Éducation l'a constaté, et c'est ce qu'il a appelé la
paperasse administrative qui prenait beaucoup de place, et il a promis de
réduire cette paperasse administrative. Donc, les correctifs qu'on
retrouve dans le projet de loi 17 viennent apporter certaines corrections
à cette paperasse administrative.
C'est évidemment des mesures qui réduisent ce qu'on
appelait la «contrôlite» aiguë qui s'était
instaurée depuis quelques années dans le système
d'éducation. Tellement que, lorsqu'on rencontrait les directeurs
d'école, lorsqu'on rencontrait les cadres, lorsqu'on rencontrait les
commissaires, tout le monde nous disait: Nous n'avons plus le temps
d'enseigner, nous n'avons plus le temps de poser des gestes éducatifs,
nous sommes constamment en train de remplir des formulaires et de justifier des
demandes administratives. Donc, les articles 4, 5, 6, 7 et 11 qui touchent les
demandes par rapport au budget sont, évidemment, des
améliorations tout à fait nécessaires.
Vous retrouvez aussi dans ce projet de loi, M. le Président, une
mesure qui vient compléter le transfert qui avait été fait
par l'ex-ministre de l'Éducation en refilant la facture aux commissions
scolaires. Vous vous souviendrez que, sous le couvert de la responsabilisation,
c'est le terme qu'on utilisait à ce moment, on avait
transféré aux commissions scolaires une facture et on avait
surtout transféré aux commissions scolaires des obligations. On
leur remettait l'entretien des écoles, mais sans leur donner les budgets
qui allaient avec et sans éliminer tout le contrôle du
ministère de l'Éducation sur les plans et devis de cet entretien.
Donc, les articles 2 et 3 viennent réduire ce contrôle sans
toutefois l'abolir complètement et sans préciser le délai
raisonnable, et je pense que, là-dessus, on devrait pouvoir s'entendre
pour trouver une façon de donner une parfaite latitude aux commissions
scolaires sur ce dossier.
Il y a, évidemment, un point majeur et c'est celui des
dérogations. Vous savez, M. le Président, que l'Opposition
officielle s'est toujours prononcée pour le principe de
l'universalité, une mesure universelle et non des dérogations,
qu'elles soient faites par le ministre de l'Éducation ou qu'elles soient
faites par les commissions scolaires. D'ailleurs, c'était un engagement
électoral, faut-il le rappeler, du gouvernement libéral pour les
dérogations.
Nous souhaitions également que des mesures soient prises pour
favoriser les jeunes de milieux défavorisés en donnant des
services éducatifs à ces jeunes. Il faudra peut-être
rappeler le rapport Bouchard, «Un Québec fou de ses
enfants», qui ramenait cette mesure et qui proposait, pour
améliorer même le décrochage
scolaire, d'offrir des services dans les milieux
défavorisés aux tout-petits, c'est-à-dire à partir
de quatre ans, de créer des préscolaires pour ces jeunes,
d'offrir des services pour essayer de leur donner les outils qui leur manquent.
Donc, on aurait également souhaité une mesure qui aille
plutôt dans ce sens.
Nous nous retrouvons devant des dérogations. Et si on regarde la
pratique des dernières années, on sait à quel point cette
pratique a été difficile, surtout chaotique au niveau des
premières années d'instauration de cette dérogation qui
partait directement du bureau du ministre. Je me souviens très bien -
à ce moment-là, j'étais attachée politique -
à quel point le processus était long, et les parents attendaient
des réponses. Souvent, l'année scolaire était
commencée, ils n'avaient toujours pas la réponse. Cela amenait
aussi une certaine iniquité puisque, pour présenter une demande,
les parents devaient donner un rapport de spécialiste, rencontrer donc
des psychologues, et certains parents n'avaient pas nécessairement les
moyens de s'offrir les services de ces professionnels pour présenter
leur demande. Et ce n'est pas évident que les jeunes qui avaient le
talent pour commencer tout de suite avaient aussi l'argent pour
présenter leur dossier. (21 h 50)
Est-ce que la mesure proposée va permettre d'améliorer
cette iniquité? Je ne le sais pas, M. le Président, au moment
où on se parle. À l'examen du règlement, peut-être
aurons-nous la réponse, mais, au moment où on se parle, nous ne
l'avons pas. Il s'agit de s'assurer que partout, au niveau de toutes les
commissions scolaires, la qualité des services soit maintenue. Il s'agit
de s'assurer qu'il n'y aura pas d'iniquité par rapport aux demandes qui
seront présentées et que tous les parents, peu importe leur
situation financière, pourront présenter cette demande de
dérogation en toute justice. Vous savez, depuis plusieurs années,
certaines personnes avaient trouvé, même, une autre façon
de déroger. J'ai vu des exemples directement dans une commission
scolaire de mon territoire, que je connais bien. C'est une pratique qui remonte
à plusieurs années, où on avait trouvé une
façon de déroger. C'est-à-dire qu'on se disait: II y a un
âge pour entrer au niveau du préscolaire et il y a un âge
aussi fixé pour entrer au niveau d'une première année,
mais il n'y a pas d'âge pour entrer en deuxième année.
Donc, certains parents, qui connaissaient mieux le système, qui
étaient plus près des commissions scolaires ou qui étaient
plus avantagés financièrement parlant, décidaient de faire
suivre une première année privée à leurs jeunes et
de les faire entrer dans le système en deuxième année,
là où l'âge, finalement, n'avait pas une limite
précise. C'était une façon, bien sûr, de
déroger au système actuel.
Donc, M. le Président, je ne veux pas utiliser mon temps de
parole plus longtemps. Je pense que nous avons clairement
déterminé qu'au niveau des correctifs nous étions
d'accord, au niveau des correctifs qui touchaient le budget, au niveau des
correctifs qui vont permettre l'entretien des écoles et, bien sûr,
améliorer la qualité des services. Au niveau des
dérogations, évidemment, il y a toujours certaines questions.
En conclusion, M. le Président, j'aimerais peut-être
rappeler au ministre de l'Éducation que nous attendons toujours avec
impatience son plan d'action sur le décrochage scolaire. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la
députée de Terrebonne. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?
Alors, M. le ministre de l'Éducation, je vous cède la parole pour
vous permettre de procéder à votre réplique. Allez-y, M.
le ministre.
M. Pagé: M. le Président, purement et simplement,
je prévois m'abstenir d'utiliser mon droit de réplique, le temps
qui m'est alloué. J'aurai l'occasion de revenir en troisième
lecture. Je vous propose donc que nous puissons procéder à
l'adoption du principe immédiatement.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que la motion de
M. le ministre de l'Éducation, proposant l'adoption du principe du
projet de loi 17, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique, est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté, sur
division. M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la commission de
l'éducation
M. Pagé: m. le président, je fais motion pour que
le projet de loi soit déféré à la commission
parlementaire de l'éducation pour étude
détaillée.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion
de déférence est adoptée?
M. Pagé: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Pagé: M. le Président, je vous invite à
appeler l'article 18 du feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi 25 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 18 de
notre feuilleton, M. le premier ministre
propose l'adoption du principe du projet de loi 25, Loi modifiant la Loi
sur le Conseil permanent de la jeunesse. Alors, j'imagine, M. le leader du
gouvernement, que vous allez exercer le droit de parole du premier ministre.
Allez-y, M. le leader du gouvernement.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Posez-moi des questions! Posez-moi vos questions!
Alors, M. le Président, au nom du ministre responsable de la jeunesse,
c'est-à-dire le premier ministre du Québec, M. Robert Bourassa,
il me fait plaisir de prendre la parole à cette étape de
l'adoption du principe du projet de loi 25 qui, comme on le sait, a
été déposé par le premier ministre il y a quelques
semaines, un projet de loi qui vient modifier la Loi sur le Conseil permanent
de la jeunesse.
Je pense que le moment est tout à fait privilégié
pour qu'on puisse s'inscrire un peu en rétrospective et se rappeler que
c'est le 23 juin 1987, il y aura bientôt cinq ans, que l'Assemblée
nationale avait sanctionné la Loi sur le Conseil permanent de la
jeunesse, créant ainsi le Conseil permanent. Depuis 1987, compte tenu du
mode d'élection des 40 membres qui forment ce Conseil et de la
durée de leur mandat, deux conseils ont été formés
depuis 1987. Le premier en 1988 et le second en 1991.
On doit se rappeler que le Conseil permanent de la jeunesse a pour
fonction de conseiller le ministre responsable, c'est-à-dire le premier
ministre du Québec, sur toute question relative à la jeunesse.
Ces jeunes qui sont, soit encore à l'école, qu'ils soient
à l'école élémentaire, à l'école
secondaire; ces jeunes qui sont au cégep, à l'université;
ces jeunes qui, pour plusieurs, sont plutôt sur le marché du
travail, ces jeunes qui ont déjà formé une relation de
couple, ces jeunes qui veulent partir en affaires, qui veulent se former leur
entreprise, ces jeunes, somme toute, sur qui une société comme la
nôtre, une société en devenir, doit compter pour
bâtir son avenir et ses lendemains.
Donc, c'est tout à fait indiqué et c'est tout aussi
pertinent sinon encore plus aujourd'hui que le Conseil permanent de la jeunesse
puisse être là pour assumer son mandat, faire réaliser ses
études, formuler ses recommandations, d'autant plus que ces
recommandations sont déposées, sont portées à
l'attention ou formulées au premier citoyen de l'État
québécois, c'est-à-dire le premier ministre du
Québec. Récemment, d'ailleurs, le premier ministre demandait au
Conseil de lui présenter un avis sur l'enseignement
collégial.
De plus, et on sait, évidemment, que l'enseignement
collégial au Québec fait l'objet d'une démarche de
réflexion, d'analyse, d'évaluation de la part de ma
collègue, Mme la ministre de l'Enseignement supérieur et de la
Science, et je suis persuadé que le Conseil permanent de la jeunesse
sera en mesure, via les avis qu'il donne, qu'il a donnés et qu'il est
susceptible de donner en référence à l'avenir de
l'éducation au Québec, l'avenir de notre démarche
éducative qui est fondamentale, finalement, dans la capacité que
nous aurons, demain, d'assumer et de relever des défis parce que ces
défis commanderont l'adhésion pleine et entière de cette
jeunesse pour laquelle nous avons autant de fierté.
Donc, le Conseil donne des avis. Il est aussi susceptible de solliciter
des opinions, donc, faire des analyses, des études. Le Conseil a pour
mandat aussi de fournir de l'information au public et d'effectuer ou encore de
faire effectuer les études ou recherches qu'il juge utiles ou
nécessaires à l'exercice de son mandat et de sa
responsabilité. On doit reconnaître, et je pense que c'est le
moment privilégié pour le faire ce soir, que le Conseil n'a pas
chômé. Le Conseil a littéralement fourmillé
d'idées depuis sa création, des idées qui traduisent un
dynamisme, une créativité dont la société n'a pas
le moyen de se priver. D'ailleurs, la société doit profiter au
plus haut point de ces avis pertinents puisqu'ils originent, ils puisent leur
source chez celles et ceux qui sont visés, finalement, par les mandats
du Conseil, c'est-à-dire nos jeunes.
Huit avis ont été produits depuis 1988. Cinq
mémoires ont été présentés en commission
parlementaire, deux rapports exhaustifs ont été
réalisés, dont le plus important est, sans contredit «Les
Couleurs de la jeunesse... noir sur blanc», résultat des audiences
publiques sur la jeunesse de 1988, et source - et ça, il faut le dire -
d'inspiration constante pour les ministères et les organismes sur les
besoins et attentes des jeunes Québécois et des jeunes
Québécoises.
M. le Président, je constate par l'adhésion, l'appui,
l'acceptation, les propos de mes collègues qui sont pleinement d'accord
par leurs commentaires, même s'ils n'ont pas encore le droit de parole,
mais je les sens déjà brûler d'impatience et
d'intérêt à endosser pleinement ces propos qui se veulent
élogieux, somme toute, à l'égard du Conseil et du mandat
qu'il a à assumer.
M. le Président, lorsqu'on se réfère à ces
avis, de nombreux thèmes sont abordés, dans ces avis, ces
mémoires et ces rapports. Citons la réforme de l'aide sociale,
cette réforme qui a été mise en place depuis quelques
années au Québec et où le gouvernement a
été, je pense, de façon légitime,
interpellé, interpellé par les jeunes Québécois et
les jeunes Québécoises et, évidemment, par le Conseil
permanent, en ce qui concerne la parité des services ou encore la
parité des prestations versées, etc. Le désir, si on se
réfère donc à ces nombreux avis, la place des jeunes et la
présence des jeunes dans la fonction publique. Quelle sera la place de
ces jeunes dans la fonction publique de demain, dans un contexte de
sécurité d'emploi assez hermétique, assez
cloisonné, dans un contexte parallèle de croissance quand
même très limitée dans la
fonction publique? Et d'ailleurs, l'Office des ressources humaines du
gouvernement du Québec et son équipe, dans le cadre d'un colloque
de récente date, se questionnaient sur la relève des cadres et la
relève des employés de l'État d'ici à quelques
années. Encore là, le Conseil permanent de la jeunesse a
ajouté sa voix, ses réflexions, ses analyses et ses perceptions.
(22 heures)
La formation professionnelle a été au coeur des
représentations formulées par le Conseil, lesquelles sont suivies
non seulement par le ministre de la Main-d'oeuvre, mais aussi par le ministre
de l'Éducation. Je peux prétendre, je peux soutenir que, dans le
plan d'action que je rendrai public incessamment pour faire de la
présente décennie la décennie de la réussite
éducative au Québec, le Conseil permanent de la jeunesse se
retrouvera très certainement dans des éléments d'action,
dans des programmes, dans des interventions qui ont fait l'objet,
évidemment, de positions adoptées par le Conseil. Le Conseil
permanent de la jeunesse va se retrouver dans le plan d'action du ministre de
l'Éducation. Même chose en ce qui concerne la réforme de la
santé et des services sociaux, la relève culturelle, la politique
culturelle, l'avenir constitutionnel du Québec, l'aide financière
aux étudiants et aux étudiantes et, plus récemment, le
développement de la main-d'oeuvre et le décrochage scolaire.
Donc, c'est un organisme qui a un mandat, qui a des responsabilités et
qui les assume très bien, il faut en convenir, et il faut en convenir
ici, sur le parquet de l'Assemblée nationale du Québec.
Qui forme le Conseil permanent de la jeunesse? Ils sont 15 jeunes
âgés entre 15 et 30 ans. Leur élection, ils la doivent
à un collège électoral de 40 pairs formés à
tous les deux ans et réunis à huis clos lors d'une rencontre de
trois jours. Les 40 personnes du collège électoral sont, pour
leur part, nommées par le gouvernement à partir d'une liste
constituée dans le respect de la diversité de la jeunesse
québécoise et à partir de toutes les candidatures de
jeunes qui sont appuyés par, au moins, trois organismes jeunesse
oeuvrant dans au moins deux secteurs distincts.
La loi actuelle précise, en effet, que la liste des candidatures
au collège électoral doit comporter autant de femmes que
d'hommes. Elle doit être respectueuse des groupes d'âge et des
communautés culturelles. Elle doit assurer une représentation
diversifiée des régions et des secteurs d'activité dans
lesquels oeuvrent les organismes jeunesse, soit: affaires sociales, travail,
entreprenariat, loisirs, éducation et, évidemment, culture.
Je suis assuré, M. le Président, que tous les membres de
cette Assemblée, parce qu'on peut présumer de l'unanimité
autour d'un sujet, d'une démarche aussi noble, ne pourront que se
réjouir de l'intention du gouvernement de modifier la loi constitutive
du Conseil permanent de la jeunesse afin de lui permettre d'assumer son mandat
avec plus d'efficacité. Il est important de préciser, tout
d'abord, que le projet de loi ne modifie pas le mode d'élection des
membres du Conseil. C'est ainsi qu'on maintient la formule originale d'un
collège électoral formé de 40 pairs nommés à
partir d'une liste représentative de candidatures, les principales
modifications concernant le prolongement de la durée du mandat des
membres du Conseil et l'inclusion d'un nouveau secteur d'activité dans
le champ d'application de la loi.
En ce qui regarde la durée du mandat des membres, le projet de
loi propose qu'elle soit de trois ans au lieu de deux ans. C'est important
puisque, comme on le sait, entre le moment où l'élection par
leurs pairs est faite, entre le moment où le mandat s'amorce, le
processus devant conduire à des orientations plus précises en
termes d'analyses, d'études, de recherches, de documents à
présenter, à faire valoir prend quand même un certain
temps. L'expérience nous enseigne donc qu'il est
préférable que le mandat soit de trois ans, et c'est dans ce
sens-là que va le projet de loi.
Pour ce qui est du nouveau secteur d'activité, le projet de loi
ajoute le secteur de l'environnement, un secteur qui est très,
très important, un secteur qui est de plus en plus présent et qui
continuera d'être de plus en plus présent dans notre quotidien,
non seulement en termes de constat, mais en termes de sensibilisation, en
termes d'efforts à déployer pour bien protéger notre coin
de terre, notre coin de quartier, notre rue, notre village, notre province,
notre pays, somme toute notre planète. Donc, il était tout
à fait indiqué que nous profitions de l'ouverture de la loi pour
ajouter le secteur de l'environnement aux autres secteurs d'activité des
organismes jeunesse à l'article 19 de la loi.
On réfère aussi à une autre modification qui
prévoit que la déclaration de candidature au collège
électoral doit être appuyée par au moins trois organismes
oeuvrant dans deux secteurs d'activité distincts. On ne pourra que se
réjouir du fait que le Québec s'inscrit déjà dans
la foulée d'une des recommandations qui seront soumises. À partir
de ce qui s'est fait, à partir du travail du Conseil, on constate
déjà que l'aboutissement de ce travail, ça ne demeure pas
lettre morte dans des officines du gouvernement.
Lorsque je réfère à l'environnement comme mandat
additionnel au niveau des responsabilités, on ne pourra que se
réjouir du fait que le Québec s'inscrit dans la foulée
d'une des recommandations qui seront soumises aux États membres de
l'Organisation des Nations unies, dans le cadre de la Conférence sur
l'environnement et le développement qui débute aujourd'hui
même à Rio, et qu'on appelle le Sommet de la terre. Cette
recommandation vise une plus grande participation des jeunes, celles et ceux
qui auront à vivre demain avec les gestes que nous
posons aujourd'hui; notamment, une meilleure participation à
l'élaboration des politiques nationales en matière de protection
de l'environnement et de développement.
Les autres modifications viennent plutôt préciser certaines
dispositions de la loi afin d'en faciliter l'application. Ainsi, l'article 20
de la loi fixe certains critères qui doivent guider le gouvernement dans
le choix des membres du collège électoral. Parmi ces
critères, on retrouve celui des communautés culturelles. Or,
l'emploi de l'expression «communautés culturelles» s'est
avéré, à l'usage, un peu ambigu et, pour certains,
exclurait la communauté anglophone et les autochtones. C'est pourquoi le
projet de loi remplace l'expression «communautés
culturelles» par «communautés qui composent la
société québécoise».
Par ailleurs, bien que la loi établisse clairement que le
président du Conseil est nommé par le gouvernement et que les
vice-présidents sont choisis par les membres du Conseil, elle ne
précise pas le moment où le choix des vice-présidents doit
avoir lieu. Le projet de loi précise donc que ce choix doit se faire
lors d'une réunion convoquée à cette fin, et ce,
après que le président ait été nommé par le
gouvernement.
De plus, afin de faciliter la transition entre l'élection d'un
nouveau Conseil et la nomination d'un président, le projet de loi permet
au ministre de désigner un membre de l'ancien Conseil ou le
secrétaire du Conseil pour exercer les fonctions de président
pendant cette période.
Des modifications, M. le Président, sont également
apportées à la loi quant aux modalités de tenue des
réunions du Conseil. Le projet de loi précise que ces
réunions se tiendront entre les mois de septembre et de juin. Cette
modification permet plus de souplesse, particulièrement pour ces jeunes
aux études - et j'en sais quelque chose - qui assument souvent d'autres
obligations, dont celles souventefois d'un travail à temps partiel ou
d'un emploi d'été.
Le projet de loi précise enfin que le mandat du président
et des vice-présidents prend fin dès que le nouveau Conseil est
élu. C'est normal qu'il en soit ainsi.
En conclusion, M. le Président, ce n'est pas un hasard si
aujourd'hui encore un gouvernement du Parti libéral présente ce
projet de loi, puisque tous ceux qui se sont succédé depuis des
années ont toujours affirmé et traduit en des gestes concrets
leur volonté de donner aux diverses composantes de la
société québécoise une voix dans le processus
d'élaboration des politiques et des décisions.
L'histoire des gouvernements de notre parti est en effet jalonnée
de réalisations assurant un plus grand respect des droits et
libertés des individus, quel que soit leur sexe, leur âge, leur
origine, leur appartenance ethnique, ou encore leur statut. Pour ne citer que
deux exemples, mentionnons la Charte des droits et libertés de la
personne, adoptée en 1975, suivie en 1977 de la Loi sur la protection de
la jeunesse. Deux législations qui, plus de 15 ans plus tard, font
encore figure de proue sur la scène canadienne et internationale. (22 h
10)
Droits et libertés des individus, mais aussi une meilleure prise
en compte des besoins et attentes des divers groupes qui composent notre
société, laquelle s'est traduite par la création de
structures-conseils pour fournir des avis au gouvernement. Ce fut d'abord le
Conseil du statut de la femme, en 1973, suivi, en 1985, par le Conseil des
communautés culturelles et de l'immigration; en 1987, le Conseil
permanent de la jeunesse et, en 1988, le Conseil de la famille. Très
bientôt d'ailleurs, le Québec sera également doté
d'un Conseil des aînés, comme l'annonçait le discours
inaugural du mois de mars dernier.
En plus de ces structures chargées de transmettre les opinions,
les besoins et les attentes des individus qui composent des groupes
spécifiques, le gouvernement s'est également doté de
structures de coordination au sein du ministère du Conseil
exécutif qui agissent en aval et en amont du processus de
décision. Les secrétariats, dont le Secrétariat à
la jeunesse, s'assurent ainsi que les besoins de leurs clientèles
respectives sont considérés et pris en compte dans les projets de
législation, politiques ou programmes, et surtout qu'une fois ces
politiques et programmes adoptés ils produisent bel et bien les
résultats escomptés.
En qualité de ministre de l'Éducation et extitulaire du
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation,
j'ai eu, à plusieurs reprises, le plaisir de constater le
professionnalisme et le dynamisme du Conseil permanent de la jeunesse. Je n'ai
qu'à me rappeler ces contacts, quelques mois ou peu de temps
après la formation du Conseil, quand j'ai eu l'occasion de
déposer ici, à l'Assemblée nationale, des politiques
prévoyant un meilleur support des programmes, un meilleur support pour
la relève agricole au Québec. On doit reconnaître et on
doit constater aujourd'hui que ces éléments et ces interventions
ont été éminemment structurantes pour permettre, entre
autres, l'accès des jeunes à la propriété des
fermes québécoises, l'accès aussi des conjointes, des
épouses, des femmes en agriculture.
Je me réjouis aussi de voir, comme ministre de l'Éducation
maintenant, combien et jusqu'où le Conseil permanent est sensible,
préoccupé et surtout pertinent dans ses représentations,
et, d'ailleurs, je me suis fait un devoir d'inviter ou d'adresser une
invitation au président du Conseil permanent de la jeunesse pour
être à mes côtés lors du lancement du plan d'action.
En fait, le Conseil permanent remplit bien sa responsabilité. Comme
ministre de l'Éducation, je peux en témoigner, parce que ma
responsabilité comme ministre de l'Éducation, au nom du
gouvernement
du Québec, au nom du premier ministre, M. Bourassa, c'est de
faire en sorte qu'on puisse bâtir, élaborer, mettre en place non
seulement un contexte, mais un véritable milieu dynamique, progressif,
évolutif, tenant compte de l'individu, du jeune, qu'il ait 6 ans, qu'il
ait 14 ans, qu'il ait 18 ans, peu importe.
On doit absolument, compte tenu des défis énormes que nous
aurons à relever au cours des prochaines années, le défi
des technologies, le défi de la globalisation, des échanges, le
défi d'une planète qui devient de plus en plus petite en termes
de connaissances, un monde où la connaissance n'a plus de
frontières, l'avenir, la force et la vitalité du Québec,
un Québec qui est en devenir, un Québec qui a confiance dans ses
moyens.... Sa vitalité et son avenir dépendent de celles et ceux
qui, aujourd'hui, sont sur nos bancs d'école, celles et ceux qui se
préparent à aller à la maternelle, d'où
l'obligation, pour notre gouvernement, pour l'ensemble de la
société québécoise, d'être continuellement et
constamment non seulement préoccupé, mais en contact
étroit, soutenu et constant avec celles et ceux qui représentent
les jeunes Québécois et Québécoises et, à
cet égard, le Conseil perma-ment de la jeunesse s'acquitte très
bien de sa responsabilité dans le cadre du mandat qui lui est
dévolu. En bout de piste, M. le Président, ce sont les jeunes
eux-mêmes qui en tireront le plus de bénéfices, finalement,
du travail et de la responsabilité très bien assumée par
le Conseil permanent.
Je propose donc l'adoption du projet de loi, M. le Président, en
deuxième lecture. C'est évidemment avec beaucoup
d'intérêt que j'anticipe pouvoir écouter les propos, les
commentaires du député de Shefford, qui va certainement
s'inscrire d'une façon un peu critique - d'une façon un peu
critique, je connais le député de Shefford... Il est très
délicat dans ses représentations comme député, ses
représentations individuelles. Il déborde, il exagère,
à l'occasion, dans ses propos ici, à l'Assemblée
nationale, quand il se veut un peu plus critique. On voit que la ligne de parti
passe au-delà de l'appréciation, du jugement qu'on lui
connaît, et je suis persuadé déjà qu'il va nous
entretenir, qu'il va nous dire que c'est bien, que c'est beau, qu'il faudrait
faire plus. Mais avant qu'il succombe à la tentation, avant qu'il
succombe à cette tentation de nous dire ou de questionner le
gouvernement, parce que je suis persuadé qu'il va vouloir questionner le
gouvernement sur ce que nous faisons par nos politiques, nos programmes et nos
interventions pour la jeunesse québécoise, je me limiterai
à lui dire et à lui rappeler avant qu'il intervienne qu'en ce qui
concerne les organismes jeunes en général, cette année, ce
sera 35 700 000 $ de subventions pour 501 organismes. Depuis 1985, il s'agit
d'une hausse de 65 % des subventions et de 30 % du nombre d'organismes.
Ça veut dire quoi, con- crètement? 35 700 000 $ consenti,
payé par le gouvernement en termes de support et d'appui pour que les
jeunes s'organisent, se prennent en main, aient les outils nécessaires
pour faire valoir et se défendre. Seulement, ça, au niveau des
organismes jeunesse en général.
Organismes communautaires jeunesse. Depuis 1985-1986, hausse de 131 %
des subventions, M. le député de Shefford. J'espère que
vous allez faire une motion, non pas de report ou de scission, mais une motion
de félicitations pour le premier ministre, qui est responsable du
Conseil permanent de la jeunesse. À ce chapitre, hausse de 58 % du
nombre d'organismes subventionnés. Pour l'ensemble des programmes qui
touchent la jeunesse, en 1990-1991, on avait accordé 593 000 000 $,
au-delà d'un demi-milliard de dollars. En 1991-1992, c'est 691 000 000 $
que nous avons consentis dans la jeunesse, pour une hausse de 16,4 %.
Près de 30 programmes touchant plus de 11 ministères ou
organismes.
M. le Président, si on veut se référer... On va
certainement nous parler des itinérants, entre autres, ces centaines de
jeunes qui, malheureusement, n'ont pas de toit ou certains d'entre eux,
d'ailleurs, qui préfèrent vivre sans toit, habitués qu'ils
sont à un mode de vie, à un vécu quotidien où ils
se sentent, c'est assez délicat de le dire, peut-être
confortables. J'attends le député de Shefford sur
l'itinérance.
L'aide aux organismes communautaires jeunesse depuis 1985-1986 est en
hausse substantielle. Les maisons d'hébergement jeunesse, on sait que
c'est souvent la première référence pour intervenir. En
1985-1986, seulement 700 000 $ étaient accordés à 16
organismes du genre. En 1991-1992, c'est 4 300 000 $ pour 34 organismes que le
gouvernement supporte et appuie. Le gouvernement a pris le virage de la
prévention à ce chapitre par le plan d'action en matière
de jeunesse du ministère de la Santé et des Services sociaux,
suite aux rapports Bouchard, Harvey et Jasmin. si on se réfère
aux prêts et bourses, même chose; on a injecté 78 000 000 $
supplémentaires aux 370 000 000 $ prévus afin de satisfaire les
besoins d'aide financière aux étudiants. depuis trois ans, le
nombre de boursiers a augmenté continuellement. la bourse moyenne est en
hausse de 21,1 %, pour se chiffrer à 3206 $ en 1991-1992. c'est
là une aide directe à la poursuite des études
postsecondaires. pour 1992-1993, c'est 8 % d'augmentation en ce qui concerne
les bourses consécutives aux prêts; en 1991, c'était 234
000 000 $, en 1992, ce sera 252 000 000 $.
Si on se réfère maintenant à l'emploi et à
l'entrepreneurship jeunesse ou jeunes, sixième hausse du salaire minimum
depuis 1986. Plan d'action de janvier 1991 pour soutenir les PME parmi les
moins de 24 ans. D'ailleurs, 58 % parmi les 24 ans travaillent dans les PME. Le
tout suivi par une stratégie de développement économique.
Tout le concept des grappes industrielles, la
qualité totale qui va convier, encore une fois, des milliers de
jeunes à pouvoir non seulement nourrir des espoirs, mais les vivre, ces
espoirs.
Politiques de développement régional où ça
va de soi que les jeunes soient représentés. Nouvelle loi sur les
normes de travail qui, entre autres, prévoit une meilleure protection
pour les jeunes qui occupent un travail à temps partiel. Et on sait que
c'est important pour nombreux et nombreuses d'entre elles et d'entre eux, de
façon à arrondir les fins de mois pour payer l'université,
le collège, ou des frais inhérents à leur vécu
quotidien. (22 h 20)
M. le Président, c'est un projet de loi qui va dans le sens des
représentations qui nous ont été faites par le Conseil. Au
nom du premier ministre, au nom du gouvernement, je veux réitérer
ma fierté comme Québécois, comme ministre et aussi comme
ministre de l'Éducation, ça va de soi, à l'égard de
la qualité du travail qui est effectué par le Conseil permanent
de la jeunesse. Nous attendons rien de moins qu'un vote unanime sur cette
question. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de
l'Éducation et leader du gouvernement. Alors, nous en sommes à
l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 25, Loi modifiant la
Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse, et je cède la parole
à M. le porte-parole en cette matière de l'Opposition officielle,
M. le député de Shefford.
M. Roger Paré
M. Paré: Oui, merci, M. le Président. Vous allez me
permettre de prendre un certain temps pour faire le tour de la situation
globale de la jeunesse au Québec. Effectivement, je n'irai pas dans le
sens du ministre, parce que vouloir regarder la situation maintenant et aller
dans le même sens, avec les mêmes commentaires, sans donner l'image
réelle et vouloir plutôt encenser le gouvernement actuel, ce
serait regarder finalement avec des lunettes de bois ou des lunettes avec des
vitres en rose, alors que ce n'est pas la réalité.
Il faut se la montrer, la réalité, telle qu'elle est, ici,
dans cette Chambre, si on veut être capable de prendre les mesures
correctes pour changer la situation. On ne peut pas dire que ça va bien.
Ce serait faux, ce serait malhonnête et ce serait irresponsable. La
situation des jeunes, elle est plutôt catastrophique. Donc, si ça
ne va pas bien, est-ce qu'ici, parce qu'il y a un petit projet de loi qui est
déposé, nous allons dire: C'est un pas dans la bonne direction.
Ayez confiance, les jeunes, tout va bien dans le meilleur des mondes. La
preuve, c'est que, des deux côtés de la Chambre, on le dit.
Je m'excuse. Ce n'est pas ce que je vais dire. Ce que je vais
plutôt essayer de démontrer, c'est la situation réelle,
catastrophique, et je vais essayer de proposer des choses parce qu'on ne peut
pas accepter plus longtemps une situation aussi désastreuse. Mon Dieu,
qu'on ne parle pas souvent de la jeunesse ici, dans cette Chambre! C'est pour
ça que je vais probablement prendre plus de 15 minutes. Ça
n'aurait pas de bon sens qu'une occasion qui nous est donnée comme
ça, on n'en profite pas. Quelle occasion avons-nous de parler de nos
jeunes et de l'avenir de nos jeunes, donc de l'avenir du Québec tout
court?
On en a eu une en 1987, lorsqu'on a déposé la loi qui
créait le Conseil permanent de la jeunesse, et on en reparle maintenant,
on est en 1992, cinq ans plus tard. Entre-temps, on n'en parle pas parce que ce
n'est pas un ministère. Donc, il n'y a pas d'engagement financier. Il y
a l'étude des crédits une fois par année où on
réussit à se poser deux et, si on est chanceux et si on va vite,
trois questions.
Là, on a une occasion qui est importante et il faut en profiter
pour qu'on parle de la jeunesse, qu'on se sensibilise aux difficultés
que vivent nos jeunes et, ensuite de ça, essayer de se proposer des
solutions collectivement. Non, ça ne va pas bien, on ne se le cachera
pas. Le projet de loi 25, pour dire aux gens ce que c'est, c'est Loi modifiant
la Loi sur le Conseil permanent de la jeunesse. Je vais vous dire, ça ne
créera pas beaucoup d'emplois et ce n'est pas ça qui va lancer
beaucoup d'espoir pour nos jeunes.
Et ça, je ne le dis pas contre le Conseil permanent de la
jeunesse. Je vais y revenir tantôt. Ce que je suis en train de dire,
c'est que la jeunesse, la population comme telle attend bien autre chose, au
moment où on se parle, par rapport à l'avenir qui semble
bloqué pour nos jeunes. Je suis heureux d'intervenir, mais je vais
devoir commencer par quelque chose de négatif: l'absence du premier
ministre, qui est le ministre responsable de la jeunesse. Vous allez me dire:
II est bien occupé à autre chose. Oui, il est bien occupé
à autre chose, sauf que la plus grande richesse que le Québec
possède, c'est la richesse humaine, sa jeunesse. C'est tellement
important qu'on a dit: Ça doit être sous la responsabilité
du premier ministre lui-même.
Mon Dieu, s'il y a une loi pour la jeunesse par cinq ans, est-ce que le
premier ministre ne pourrait pas trouver le temps d'être ici?
M. Pagé: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président suppléant (M. Richard): M. le
ministre.
M. Pagé: Je ne peux pas, à ce moment-ci, accepter
l'allusion... D'ailleurs, ce n'est pas dans l'habitude du député
de Shefford de tenir des propos semblables pour tenir compte et faire
valoir ou indiquer que le premier ministre ne pouvait être ici ce
soir. C'est le premier ministre qui est responsable du Conseil permanent de la
jeunesse. C'est le premier ministre qui rencontre le Conseil permanent de la
jeunesse régulièrement. C'est le premier ministre qui prend
connaissance lui-même des avis qui y sont donnés. C'est le premier
ministre qui échange avec les ministres sur le sujet.
Je crois, M. le Président, que le député est non
avisé de se référer au fait que c'est moi, comme ministre
de l'Éducation, responsable aussi de la jeunesse
québécoise à plusieurs égards, qui ai
présenté ce projet de loi.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député, si vous voulez poursuivre.
M. Paré: Oui. Juste pour dire qu'effectivement le ministre
de l'Éducation a manqué le début de mon intervention,
sinon il ne serait pas intervenu. J'ai dit que je comprends très bien
que le premier ministre ne soit pas là, avec toutes ses occupations.
Mais j'ai dit ma déception, et je le dis, qu'il ne soit pas là
par rapport à un projet de loi qui relève du premier ministre. Je
dois dire qu'il faut s'en occuper, de nos jeunes. Il y en a qui vont plus loin
que moi, puis je dois vous dire que je partage leur opinion. Le nouveau
président du Comité national des jeunes du Parti
québécois dit que le premier ministre doit remettre à
quelqu'un d'autre la responsabilité du dossier des jeunes, car son
inaction a suffisamment nui aux jeunes du Québec, et ça, c'est
une réalité. Il n'a pas le temps? Qu'il confie ça à
quelqu'un qui, à temps plein, va s'occuper de ce qu'on a de plus
important pour notre avenir, c'est-à-dire nos jeunes qui demandent qu'il
y ait, enfin, des gestes concrets qui soient posés.
Ce qu'on nous amène ce soir, je m'excuse, ce n'est pas
l'idée du siècle et ce n'est pas ça qui va faire
qu'à partir de demain matin, quand on aura voté le projet de loi
25, il y aura des gestes, des programmes importants qui vont être
lancés pour dire: Voilà, c'est plein d'espoir pour nos jeunes;
votre misère est terminée. Ce n'est pas ça, la
réalité, et c'est pour ça qu'il faut que le premier
ministre, s'il décide que c'est important, s'en occupe davantage, sinon
qu'il délègue à une autre personne qui aura plus de temps.
Je le sais que c'est difficile administrer dans une situation comme on
traverse, au niveau constitutionnel et au niveau économique, mais, bon
Dieu! il faut s'occuper puis il ne faut pas délaisser ce qu'on a de plus
important, notre jeunesse.
Qu'est-ce que le gouvernement de l'autre côté a fait depuis
1985 pour nos jeunes, concrètement, et qui fait qu'on a la situation
qu'on connaît présentement? Ah! Il y a eu l'élection de
1985. C'était de toute beauté, tout était orienté
sur la jeunesse. Le premier geste qu'on a posé en 1987 -
l'élection était en 1985 - ça a été,
effectivement, la création du Conseil permanent de la jeunesse, une loi
pour créer un conseil. Je vous le dis, je ne suis pas contre le Conseil,
et je vais y revenir tantôt. Je le disais tantôt, je vais y revenir
et je vais en parler du Conseil, plus profondément. Mais le premier
geste concret posé, ça a été de créer un
conseil. Les jeunes étaient en droit de s'attendre à ça,
mais à beaucoup et beaucoup d'autres choses.
En 1987, le Conseil a été mis sur pied, a
été voté et, ensuite, il y a eu la tournée, les
élections, les nominations et, finalement, la mise en place du Conseil.
Qu'est-ce qui s'est passé ensuite? Bien, il s'est passé que la
situation allait de mal en pis. Malgré une période de croissance
économique, pour nos jeunes, tout allait de plus en plus mal.
Finalement, malgré cette loi qui créait le Conseil permanent de
la jeunesse, il y a une coalition pour un débat public sur la situation
de la jeunesse au Québec qui s'est créée en
décembre 1990, parce que, là, il y a des gens responsables dans
le milieu, dont les organismes communautaires et bénévoles dont
parlait le ministre de l'Éducation tantôt... Il y a une coalition,
un regroupement qui s'est créé demandant qu'il y ait une
commission d'enquête publique indépendante sur la situation des
jeunes, parce que c'était devenu inacceptable. C'était
titré, en juin 1991, donc ce n'est pas moi qui le dis, ce n'est pas mon
invention: «Un gouvernement à risque pour les jeunes». Donc,
cette coalition de plusieurs intervenants qualifiait le gouvernement
libéral: «Un gouvernement à risque pour les jeunes».
Et ça disait: Saviez-vous que 35 000 jeunes décrochent de
l'école secondaire au Québec, que 10 000 jeunes sont
itinérants à Montréal, que 50 000 jeunes sont exclus de
tout statut social, que 11 150 enfants sont placés en famille d'accueil
ou en centre d'accueil et que 112 000 personnes de 15 à 24 ans sont en
chômage? Et là, ils demandaient une enquête publique.
Ça, M. le Président, c'est en 1991, par un comité tout
à fait apolitique, parce que rien d'autre ne s'était
passé. (22 h 30)
Qu'est-ce que le gouvernement a fait ensuite pour aider les jeunes? - la
loi en 1987; il n'a pas répondu à la commission d'enquête
qui était demandée pour essayer de régler la situation
globale des jeunes, qui était devenue intenable - bien, c'est ce soir,
on nous amène un projet de loi, le projet de loi 25 qui vient modifier
des choses au niveau du Conseil permanent de la jeunesse, qui sont plus
techniques, qui sont quand même importantes, mais qui sont plus
techniques que si c'était un plan global ou, encore mieux, une politique
de la jeunesse telle que demandée par tellement de personnes, dont le
Conseil permanent de la jeunesse lui-même.
Donc, on se ramasse ici ce soir, dans le deuxième geste
législatif pour nos jeunes depuis 1985, qui est une modification au
Conseil per-
manent de la jeunesse. Donc, ce n'est pas un plan d'action, puis ce
n'est pas une politique. Et là, bien, on en est rendu là ce
soir.
Ça, ça va nous amener, M. le Président, à
regarder le projet de loi comme tel, très rapidement. Bien oui! Le
projet de loi dit que les gens qui sont membres du Conseil permanent de la
jeunesse vont être là pour trois ans au lieu de deux ans. Pas
d'objection, M. le Président, absolument pas d'objection. Les gens qui
sont là ont prouvé leur compétence, que ce soit ceux du
premier Conseil ou du Conseil qui est là présentement,
actuellement. Ces gens-là, chapeau! ils font un travail formidable. Le
travail qu'on leur confie, ils le font avec un dévouement qui
mérite d'être qualifié, qui est remarquable. Ces
gens-là, je pense, font même plus que ce qu'on leur demande. Donc,
qu'ils soient là trois ans pour plus de continuité, une
période plus longue pour être capables de poursuivre ce qu'ils ont
commencé, je pense que, trois ans, c'est tout à fait
acceptable.
Ensuite de ça, qu'on change dans la loi «communautés
culturelles» par «communautés qui composent la
société québécoise», M. le Président,
on ne revirera pas le monde à l'envers pour ça. Effectivement, si
on veut que le Conseil soit très représentatif de l'ensemble des
citoyens, peu importe où ils se retrouvent sur le territoire
québécois, bien oui, il ne faut pas penser seulement aux
Québécois tels qu'on se voit soi-même et les
communautés culturelles, mais il faut penser à la minorité
anglophone et aux autochtones. Bravo! Je ne peux pas être contre
ça.
Qu'on vienne donner aussi la responsabilité d'aller voir dans un
secteur qui est l'environnement, ça aurait dû être fait en
1987. On ne pourra pas être contre ça non plus. Est-ce que
l'environnement n'est pas une préoccupation majeure quand on regarde la
rencontre qui se passe présentement à Rio, quand on regarde les
catastrophes, quand on regarde ce qui se passe, ici même au
Québec, que ce soit les pneus de Saint-Amable, que ce soit à
Saint-Basile-le-Grand avec les BPC, que ce soit la nappe phréatique qui
est contaminée dans la ville de Mercier ou ailleurs, je dois vous dire:
il y a même urgence. Les premières personnes très
impliquées, très concernées, très inquiètes
par rapport à la préoccupation de l'environnement, c'est notre
jeunesse. Bien, qu'on permette au Conseil permanent de la jeunesse de
s'occuper, de se préoccuper et d'avoir des contacts avec les groupes qui
sont sur le terrain un peu partout avec cette préoccupation majeure par
rapport à l'environnement, tout à fait d'accord. Je pense
même que c'était un oubli, en 1987.
Donc, ce qu'on fait là, ce n'est pas un cadeau, c'est
plutôt une correction qu'on est en train de faire. On ne peut pas faire
en sorte que le Conseil permanent de la jeunesse, qui a une vision d'avenir et
qui s'occupe de ceux qui vont prendre la relève et qui sont
déjà pour nous, les Québécois, au moment où
ils sont là comme jeunes, une richesse d'aujourd'hui, on ne peut pas
faire autrement que de respecter leurs préoccupations. Et parmi les
préoccupations majeures, il y a, bien entendu, l'emploi et
l'inquiétude par rapport à toute la situation qu'on
connaît, qu'il va falloir régler à un moment donné.
Mais il y a aussi, et ils l'ont toujours exprimé, une question par
rapport à l'environnement. Bien, bravo qu'on fasse ça!
L'autre modification qu'on apporte - et si je parlais juste de la loi,
je vais vous dire que j'aurais presque terminé - c'est pour faire en
sorte qu'on retranche des choses dans la loi actuelle. Leur mandat, en parlant
des gens qui sont nommés au Conseil permanent de la jeunesse, on va
enlever... Leur mandat prend fin - non, non, on rajoute plutôt -
dès que les membres du nouveau Conseil ont été
élus. Ce que ça veut dire - et on l'avait dénoncé -
il y a eu un premier Conseil qui a été élu, en bonne et
due forme, correctement. Et je veux leur rendre hommage, à des gens qui,
pendant leur premier mandat, ont fait un travail extraordinaire. Je vais
revenir tantôt sur ce qui a été publié, sur ce que
ces gens-là ont produit pour être capables de guider le premier
ministre et le gouvernement.
Mais quand est arrivée maintenant la fin du mandat du premier
groupe, avec le deuxième groupe - c'était dans la loi - il devait
y avoir une période de transition, comme on le retrouve dans toutes les
sociétés d'État et dans les sociétés
normales, une période de transition où on permet que ceux qui
partent soient là jusqu'à l'arrivée des nouveaux avec une
transmission d'informations, de documents et d'échanges. Bien non!
Ça ne s'est pas produit. Le premier ministre a décidé de
trancher et de dire: Vous ne vous rencontrez même pas. Vous avez fini
votre mandat, allez-vous-en, vous ne rencontrerez pas les nouveaux qui
rentrent.
Est-ce que c'est parce que le premier Conseil avait été
trop critique? On peut se poser la question. Sauf que, je dois vous dire, le
deuxième l'est aussi beaucoup et il n'a pas le choix. S'il
n'était pas critique, il ne remplirait pas son mandat parce que les
jeunes ont le goût de crier un peu leur désespoir et leur
misère. Et c'est le Conseil permanent qui est le véhicule pour
être capable de passer ce message. Le gouvernement a décidé
de modifier la loi puisqu'il ne l'avait pas respectée et qu'il ne voudra
peut-être pas la respecter dans le futur. Donc, pas de transition. Quand
ils auront fini, ils auront fini et bonjour la visite! Et les nouveaux
rentreront en recommençant à zéro.
En fait, c'est plutôt comme un aveu que le premier ministre
n'avait même pas respecté lui-même la loi lors du changement
de personnes au Conseil permanent de la jeunesse. Donc, c'est ça le
projet de loi, en soi. C'est des modifications qui sont tout à fait
acceptables. C'est même des
modifications qui - on ne pourrait pas bien bien refuser -
étaient, elles, demandées, proposées par les membres du
Conseil permanent de la jeunesse pour être plus efficaces. Donc, tout
ça, plus le correctif que le premier ministre décide de se donner
pour avoir plus de pouvoir par rapport au changement de personnes sur le
Conseil permanent de la jeunesse lorsque le mandat d'un groupe est
terminé.
Donc, ce n'est pas plus compliqué que ça, finalement, et
ce n'est que ça. Ça ne change pas le monde mais ça nous
permet, par exemple, de parler du Conseil permanent de la jeunesse, de la
situation actuelle des jeunes et des propositions qu'on peut amener si on veut
améliorer la situation des jeunes parce que, quand on améliore la
situation des jeunes, c'est de l'espoir collectif qu'on se donne parce que
c'est la relève de demain, mais c'est la richesse d'aujourd'hui, notre
jeunesse, et il faut s'en occuper maintenant. Donc, c'est ça.
Le Conseil permanent de la jeunesse, je vous ai dit que j'y reviendrais,
tantôt. Bien là, je vais en profiter, effectivement, pour rendre
hommage et au premier groupe et aux gens qui sont en place présentement,
à qui on donne une année de plus à la barre du Conseil
permanent de la jeunesse. Ces jeunes qui ont été pris un peu
partout au Québec, de tous les secteurs, en essayant d'être les
plus représentatifs possible dans la composition de la commission, ont
travaillé avec une compétence qui mérite notre admiration
par rapport à tous les documents qu'ils ont produits. Et je vais en
nommer quelques-uns.
Suite à une consultation, en 1989, le Conseil permanent de la
jeunesse a déposé un document qui s'appelle «Les couleurs
de la jeunesse... noir sur blanc», qui permettait de voir la
réalité vécue des jeunes du Québec. Bon, bien
ça, ça permettait de voir la réalité telle qu'elle
était vue par les jeunes, telle que critiquée par le Conseil
permanent de la jeunesse et avec des recommandations précises. Et,
là-dedans, on a identifié des choses incroyables: Qu'on est dans
une société qui s'appauvrit; que, pour être capable de
changer les choses, il faut s'attaquer à la pauvreté et que la
meilleure façon de le faire, et probablement la seule façon
permanente et efficace, c'est par une politique de plein emploi. C'est ce qu'on
retrouve là-dedans.
Et pourtant, on n'entend jamais parler de politique de plein emploi. Et
pourtant, les politiques, surtout fiscales qui sont prises de l'autre
côté, appauvrissent la situation. Et ça, on n'a qu'à
regarder dans des documents qui viennent souvent de l'extérieur
où on dit, et je peux vous citer: «Québec crée la
pauvreté, entre autres par la réforme de l'aide sociale.»
Parce que, quand on augmente toutes les taxes, quand on augmente les permis,
quand on augmente la tarification, quand on augmente
l'électricité, quand on met la taxe sur les vêtements, les
chaussures, les textiles, sur les choses essentielles pour les familles, ce
n'est pas une politique familiale. C'est une politique fiscale. Et là,
on appauvrit les gens. Et quand on appauvrit les gens et quand on appauvrit la
classe moyenne et pauvre, quand on appauvrit les familles, c'est sûr
qu'il y a des victimes qui sont aussi les jeunes, les enfants et les
adolescents. (22 h 40)
Bon, bien, on n'a pas répondu à ce qui était
demandé par le Conseil permanent de la jeunesse. On n'a pas mis en
application les recommandations qui étaient là-dedans et on
était très critique là-dedans. On s'en est pris, entre
autres, à la loi 37, en la dénonçant spécialement
sur le partage du logement. Pourtant, le gouvernement n'a pas
écouté. C'est le Conseil permanent de la jeunesse, c'est des
jeunes qui ont consulté à travers tout le Québec, qui ont
eu des réunions dans toutes les régions du Québec, qui ont
produit un document avec des recommandations précises, dont
celle-là et d'autres, et des critiques par rapport à des coupures
du gouvernement très précises. Ils ont dénoncé,
entre autres, le dégel des frais de scolarité, les coupures dans
le programme Jeunes volontaires, les coupures dans le programme - parce que
ça aussi, le développement économique, c'est important -
Bourse d'affaires aux nouveaux entrepreneurs. Ils ont dénoncé les
choses qui étaient des décisions gouvernementales
là-dedans.
Le gouvernement n'est pas revenu sur ses décisions, n'a pas
amélioré les lois. Donc, on continue de s'appauvrir
collectivement. Pourtant, le document avait été produit par une
équipe compétente, qui a produit quelque chose que le premier
ministre aurait dû utiliser presque comme un guide, parce que c'est un
guide, un guide de recommandations où on voit une vision réelle
de la situation québécoise, de la situation vécue par nos
jeunes du Québec, avec des recommandations pour améliorer leur
situation.
Malheureusement, je n'ai jamais entendu le premier ministre le
commenter. Je ne sais pas s'il l'a lu, mais je sais qu'il n'a pas
répondu aux recommandations qu'on retrouve là-dedans. Pourtant,
le Conseil permanent de la jeunesse, son rôle est de conseiller le
premier ministre. C'est le premier document de cette envergure et de cette
importance qu'ils ont produit. Après une consultation faite par les
jeunes et pour les jeunes, le premier ministre aurait dû lire ça
et appliquer des choses là-dedans qui feraient en sorte que nos jeunes
seraient moins mal pris aujourd'hui, seraient moins en état difficile
comme celui que les jeunes connaissent aujourd'hui.
Donc, c'est une des choses que les jeunes ont faites. Ce n'est pas tout.
Dans tout ce qu'il ont produit, je dois vous dire, ils ont fait un travail
exceptionnel. Dans un autre, très appréciable, d'avis, de
recherches, de colloques, de
présentation de documents de toutes sortes, entre autres sur la
formation professionnelle, sur la participation des jeunes à la fonction
publique, sur une politique de la famille, sur la réforme de l'aide
sociale, sur la réforme de la santé et des services sociaux, sur
la réforme constitutionnelle, sur l'aide financière aux
étudiants. Je dois vous dire, le Conseil permanent de la jeunesse a
été partout. Partout où il se passait quelque chose, ils
étaient là pour faire valoir le point de vue des jeunes. Ils ont
été très critiques par rapport au gouvernement à
peu près sur tout ce que je viens de citer.
Ils sont allés loin, à part ça, M. le
Président. Les jeunes ont demandé qu'il y ait une
véritable politique de la jeunesse. Pour eux autres, c'est
indispensable. Ça a été demandé en 1990, nous
sommes en 1992, on n'en entend même pas parler de l'autre
côté. Au lieu de nous arriver avec une politique qui nous
permettrait de voir les objectifs et les orientations de ce gouvernement par
rapport à la jeunesse, on nous arrive avec des modifications au Conseil
permanent de la jeunesse.
Je vous l'ai dit tantôt, je ne suis pas contre ça. Sauf que
ce n'est pas ça. Ce n'est pas juste ça que ça prend. Le
Conseil permanent de la jeunesse a demandé ces modifications, mais il en
a demandé une encore bien plus fondamentale, bien plus majeure, c'est
une véritable politique de la jeunesse. Vous savez, on élabore
des politiques de la forêt, des politiques de l'environnement, des
politiques de l'habitation, des politiques à peu près dans tous
les secteurs. On dit: C'est majeur, c'est essentiel, c'est indispensable parce
qu'on considère que c'est un secteur important. Est-ce que la jeunesse
n'est pas importante? On ne se donne même pas de politique de la
jeunesse, comme si ce n'était pas notre première richesse
naturelle, une richesse renouvelable, une richesse productive et de mieux en
mieux formée. Pourtant, on n'est pas capable, on n'a pas la
volonté d'aider vraiment nos jeunes, et ça, dans un cadre
très défini d'une véritable politique globale. Mais non,
on a décidé que ce n'était pas ça, c'est un choix
qu'on a fait et il faut le respecter.
Mais, le Conseil permanent, je dois vous dire, je vais vous citer des
documents qui ont été produits, des études et des
colloques qui ont été tenus par les jeunes du Conseil permanent
de la jeunesse. Ça va vous montrer à quel point ces
gens-là sont actifs, productifs et remplissent bien leur rôle de
conseillers auprès du premier ministre. Leur grave problème,
c'est qu'ils ne sont pas écoutés. Il n'y a pas de
résultats par rapport à leurs demandes. Plus souvent
qu'autrement, et je vais vous donner des exemples tantôt, les
recommandations non seulement ne sont pas suivies, mais on fait tout à
fait le contraire. il y a eu, comme je le disais tantôt, les audiences
publiques sur la jeunesse en 1989, qui ont apporté ce volume, ce livre
qui permettait au gouvernement, en 1989, de connaître la situation,
l'image réelle de nos jeunes et les recommandations pour
améliorer ça.
Malheureusement, on n'en a pas tenu compte. En 1990, dans un autre
document conjoint, le Conseil permanent de la jeunesse s'est associé au
document «Être jeune et parent». Il faut donner à nos
jeunes le goût de valeurs fondamentales et la plus grande valeur
fondamentale d'une société, c'est la famille. Il faut leur donner
non seulement le goût de la famille - c'est quelque chose, ça,
puis, de toute façon, je pense que c'est inné chez l'être
humain - mais la capacité, à tout le moins, ne pas mettre trop
d'embûches à la création d'un ménage.
Je dois vous dire qu'il n'y a rien présentement qui facilite
ça. Il y a des difficultés d'accès à l'emploi
stable au départ. Donc, quand il n'y a pas d'emploi, quand on regarde la
situation du chômage, à l'heure actuelle, eh bien, les gens sont
inquiets; ils sont inquiets pour eux, pour leur capacité même de
se nourrir. Ils y pensent deux fois avant de fonder un foyer. L'organisation du
travail n'est pas faite en fonction des familles.
Les services à la famille. Je le disais tantôt, on peut
bien dire qu'on donne 8000 $ sur cinq ans au troisième enfant, mais ce
n'est pas beaucoup par rapport à toutes les augmentations,
spécialement pour les familles, les augmentations de taxes, la TPS, la
TVQ qui s'ajoutent sur des choses essentielles, indispensables. Faites juste le
calcul à savoir combien ça coûte pour nourrir, habiller,
les couches, tout l'essentiel pour un enfant; vous allez vous apercevoir que ce
n'est pas un cadeau, les 8000 $; ça ne couvre pas... C'est une
réalité et ça, ils sont obligés d'en tenir
compte.
La formation professionnelle en 1990. Oui, ces gens-là sont
sensibles, sont vraiment informés des besoins des jeunes et ils ont
produit un document, en 1990, «La formation professionnelle et les
jeunes», dans un rapport très clair, très précis,
qui dit, encore une fois, c'est quoi la situation vécue dans ce
secteur-là et ce que le gouvernement devrait faire. Encore une fois,
oui, on en parle puis on parle d'une politique globale de formation
professionnelle; là-dedans comme dans le reste, on dit que la seule
façon de le mettre en application, c'est le rapatriement total des
pouvoirs par rapport au placement, à la formation, à
l'assurance-chômage, à tout ce qui est soutien aux
employés, à tout ce qui est soutien au placement en entreprises.
Pour ça, il faut rapatrier d'Ottawa. C'est dit là-dedans et,
pourtant, on attend toujours la politique. On est toujours en attente.
C'était en 1990 et on est en 1992 puis, en attendant, il se gaspille des
sous, mais il ne se fait pas de formation et de moins en moins de
formation.
Les jeunes et l'avenir politique et cons-
titutionnel du Québec. Encore une fois, en 1990, les jeunes,
même s'ils sont au service de toute la collectivité et des jeunes,
même s'ils sont là comme conseillers spéciaux auprès
du premier ministre qui est responsable du dossier jeunesse, sont allés
dire au premier ministre et à l'ensemble de la population du
Québec: II faut la souveraineté politique du Québec si on
veut être capable de se donner une politique de plein emploi, si on veut
être capable de se sortir de cette pauvreté, d'avoir la
duplication qui coûte si cher et qui nous empêche d'avancer. Ils
l'ont dit, les jeunes. Là-dessus non plus, le premier ministre ne les a
pas écoutés.
En 1991, «Pour une politique québécoise de la
jeunesse». C'est ça que je vous disais tantôt. On ne les
écoute pas. C'était clair: ces gens-là ont sorti, en juin
1991, une véritable politique, ont demandé une politique
québécoise de la jeunesse. Et je vais vous lire le
télégramme que ces gens-là ont émis à ce
moment-là. Je pense que ça vaut la peine.
Le communiqué de presse qui a été mis par le
Conseil permanent de la jeunesse commençait par une citation qui
mérite d'être, encore une fois, citée: «II nous faut
continuer à édifier une société capable de
répondre adéquatement aux besoins de ses citoyennes et citoyens
et plus particulièrement de sa jeunesse qui demeure une de ses solides
assises collectives». Et il citait M. Robert Bourassa, premier ministre,
qui avait dit ça, le 20 juin 1991, après le lac Meech. Donc,
suite à ça, tout enthousiastes, les jeunes ont demandé
qu'il y ait une politique globale en matière d'habitation. Et on pouvait
lire, malheureusement, dans le journal, que ce n'est pas ça que le
gouvernement avait fait. (22 h 50)
Je cite le communiqué, en partie: «Québec, le 27
juin 1991. Faisant écho aux propos du premier ministre tenus à
l'occasion de la fête nationale du Québec, le Conseil permanent de
la jeunesse recommande au gouvernement du Québec de se doter d'une
véritable politique à l'égard de la jeunesse. Selon le
président du Conseil, M. Alain Perreault, le taux de chômage
élevé chez les jeunes, l'importance du décrochage
scolaire, l'absence de lien significatif entre l'école et le monde du
travail, l'accroissement de la pauvreté et l'érosion des revenus
des jeunes commandent une remise en question des actions gouvernementales
destinées à la jeunesse, groupe qui compte pour plus du quart de
la population québécoise.» M. le Président, c'est le
président du Conseil permanent de la jeunesse que je suis en train de
citer, et ça, c'était en juin 1991, il y a une année,
où il expliquait la gravité de la situation. Ça n'a fait
qu'empirer depuis une année, mais il faut dire que la politique n'a pas
été mise en application non plus.
Et on pouvait lire dans les commentaires, toujours de M. Perreault:
«L'absence de vision globale et à long terme contribue à la
margi- nalisation des jeunes et renforce le cercle vicieux de la
dépendance à l'égard de la famille et de l'État. On
est tannés de faire le même constat d'échec, a-t-il
poursuivi. Au-delà des voeux pieux, on veut de l'action.» C'est le
président du Conseil permanent de la jeunesse qui disait ça. Et,
dans sa sortie demandant une véritable politique, le Mouvement -
attendez un petit peu - des étudiantes et des étudiants du
Québec était tout à fait d'accord et recommandait la
même chose. Le Conseil national des jeunes de la CSN appuyait une
politique. Tous ces groupes, sous l'instigation du Conseil permanent de la
jeunesse, disaient qu'on en a assez des belles paroles.
Devant la situation que je viens de décrire, il faut
arrêter de placoter et il faut agir pour nos jeunes. Et ça, dans
le cadre d'une politique globale, c'était demandé, je vous l'ai
dit, il y a une année, en juin 1991. Pas de commentaires de l'autre
côté. Il n'est pas question de politique. On ne veut pas en
entendre parler. Ce n'est pas une idée de Roger Paré,
député de Shefford. C'est le Conseil permanent de la jeunesse,
à qui on est en train de donner, ce soir, une façon de
fonctionner améliorée. Bien, si on est d'accord avec ça et
si on dit qu'ils font une bonne job, parce qu'on les vante, il faudrait aussi
les écouter. Il ne faudrait pas seulement leur permettre de
déposer des beaux rapports qui deviennent des documents tablettes. C'est
trop dommage parce que les jeunes méritent mieux que ça et parce
que le contenu, ces rapports sont trop bien montés, trop bien
structurés, trop réalistes pour ne pas appliquer les
recommandations qui vont permettre de donner de l'espoir et une vie meilleure
à nos jeunes.
En 1991, toujours, il y a eu le Forum jeunes et société.
C'était en octobre dernier et c'était organisé par les
jeunes eux-mêmes, le Conseil permanent de la jeunesse, et ce que disait
toujours le président: On est tannés de faire le même
constat; on veut de l'action. Ça, c'est en septembre qu'on disait
ça. Et un dernier rapport, en 1992, celui-là, en mars 1992, c'est
tout récent, ça ne fait pas longtemps: «Raccrocher
l'école aux besoins des jeunes». Donc, quand on regarde ce que ces
jeunes-là ont produit, les documents qu'ils ont déposés
avec des études complètes, bien, les jeunes savent dans quoi ils
vivent. Le Conseil permanent de la jeunesse les connaît, les solutions,
il les propose. Ce qu'ils demandent, c'est qu'on les écoute, et les
écouter ne veut pas seulement leur dire: On vous a compris, puis on
trouve que vous faites une bonne job. C'est plutôt leur dire: On vous a
entendus correctement, on a compris ce que vous nous demandez et on va mettre
en application les recommandations que vous nous soumettez. Mais,
malheureusement, ce n'est pas ça qui est en train de se passer.
Et le fait de ne pas les écouter, ça nous amène
dans quelle réalité? Et là, je ne le dis pas
pour être négatif, parce que je me dis: II faut être
réaliste; il faut regarder la situation telle qu'elle est, ensemble,
collectivement, avec du courage, et, ensuite, proposer des solutions. Mais ce
n'est pas en se disant, comme le ministre de l'Éducation l'a fait au
début: On a fait tout ce qu'on a pu, et c'est vrai que c'est difficile,
mais ça ne va pas si mal. Ça va très mal. Et ceci
étant dit, on regarde où les problèmes se trouvent, puis
là on prend nos responsabilités. Où se trouvent les
problèmes de nos jeunes? Bien, je vais être obligé de vous
en donner une petite description, M. le Président, je ne peux pas faire
autrement. Je ne peux pas faire autrement; sinon, ce serait comme dire à
l'ensemble de la société et à nos jeunes: Si vous pensez
que ça va mal, vous vous trompez. Je ne peux pas leur dire ça
parce que je serais un menteur et je ne tiens pas à être un
menteur. Je dirais et je passerais le même commentaire à ceux qui
ont produit des documents, que ce soit le Conseil permanent de la jeunesse dans
tous les documents qu'il a produits, ou le rapport de M. Bouchard et compagnie
qui a produit un document, «Un Québec fou de ses enfants»,
où on retrouve les mêmes constatations, les mêmes
difficultés pour les jeunes et des recommandations très
importantes qui, encore une fois, ne semblent pas vouloir être suivies
ou, à tout le moins, pas très rapidement, alors que,
là-dedans, on disait: II y a urgence d'agir. Parce que plus on retarde
à aider nos jeunes, plus on risque d'avoir des adolescents et des
adultes de demain qui, non seulement pour eux mais pour l'ensemble de la
société, seront en état de problème,
coûteront plus cher à l'État et seront moins heureux.
Mais, vous savez, M. le Président, la réalité,
c'est que de décembre 1990 à décembre 1991, il y a eu une
augmentation de 21 000 jeunes de moins de 30 ans sur l'aide sociale. Je ne le
dis pas parce que ça me fait plaisir, je le dis parce que ça me
fait mal. Il y a 130 000 jeunes de moins de 30 ans sur l'aide sociale, dans une
société qu'on dit riche comme la nôtre en Amérique
du Nord. Ça n'a pas de bon sens. Des jeunes en santé, aptes au
travail dans la majorité ou la presque totalité des cas, 130 000
de notre jeunesse en pleine santé qui vivent de prestations d'aide
sociale, mais on ne parle toujours pas de politique de plein emploi. Ça,
c'est une augmentation... L'augmentation des jeunes sur l'aide sociale en une
année, ça représente 40 % de l'augmentation des gens qui
sont tombés sur l'aide sociale; c'est vraiment le terme,
«tombés» sur l'aide sociale. L'augmentation, elle est
très importante, elle est par dizaines de milliers, mais 40 % de
l'augmentation, c'est des jeunes de moins de 30 ans. Ça veut dire que
c'est les gens les plus pénalisés de la société ou
les plus mal pris. Ce n'est pas normal. C'est des jeunes qui, normalement, sont
formés parce qu'on a un système scolaire qui est supposé
d'être adéquat et parmi les meilleurs au monde - en tout cas,
c'est ce qu'on espère - ou il va falloir le corriger rapidement.
C'est des jeunes en pleine santé. Les jeunes, ça a
toujours été l'avenir d'une société et, pourtant,
c'est le groupe mal pris. La pauvreté touche 20 % des enfants
québécois et 29 % des jeunes familles. Je prends des statistiques
qu'on retrouve autant dans le rapport Bouchard, dans les livres du Conseil
permanent de la jeunesse que dans Statistique Canada ou des chiffres de la
Commission des affaires sociales, des chiffres officiels qui viennent
d'être déposés. C'est ça, la réalité,
il ne faut pas se la cacher. Il faut plutôt penser à la
dénoncer pour être capable de modifier ça.
Il y a 36 % des jeunes qui abandonnent avant la fin du secondaire. Je
dois vous dire que ça ne leur donne pas grand espoir quand on sait qu'au
tournant du siècle, ça va prendre de 16 à 17 ans de
scolarité pour être capable de travailler. Peut-être qu'en
attendant beaucoup de ces jeunes ont des «jobines», comme on dit
chez nous, dans des épiceries, des restaurants ou un peu partout; des
«jobines»! Sauf qu'on ait des «jobines» à temps
partiel ou pendant qu'on va à l'école, c'est quelque chose, mais
qu'on ait ça et seulement ça pour préparer son avenir,
c'est inquiétant. De 36 % à 40 % de nos jeunes ne finissent pas
le secondaire. Et au collégial, c'est 40 %; à
l'université, c'est le tiers. Ça veut dire qu'il y a des
problèmes, il va falloir modifier des choses. Là, on le sait.
C'est comme un patient qui va chez le médecin. Il faut d'abord faire le
diagnostic pour, ensuite, ou opérer ou donner des médicaments. Ce
qu'on est en train de faire, c'est le diagnostic; ça, c'est la
réalité qu'on vit chaque jour, que nos jeunes subissent chaque
jour.
Il y a 50 000 jeunes en difficulté qui sont présentement
dans les services de la protection ou de la sécurité publique au
Québec - c'est toujours pour les moins de 30 ans, ce dont je suis en
train de parler - et il y en a 12 000 qui sont pris en charge par la DPJ. Non
seulement pour ces jeunes, c'est comme un avenir bloqué, ou, en tout
cas, c'est une jeunesse en difficulté, mais pour l'État,
ça coûte beaucoup plus cher que si on avait des programmes d'appui
à la famille qui soient plus adaptés à la situation
actuelle. (23 heures)
Quand je vois que le nombre de voies de fait ou d'agressions sexuelles
exercées par les jeunes a augmenté du simple au double de 1986
à 1989, en passant de 1900 à 3500, ça, c'est nos jeunes
dans une société qui, d'après ce que je peux voir, est de
plus en plus violente. Et les chiffres que je vous donne, qui sont pris dans
les documents qui sont déposés, c'est de 1986 à 1989.
Pourquoi je tiens à spécifier, à revenir sur ces
années? Vous pourriez dire: C'est peut-être normal qu'en
période de crise économique il
y ait plus de violence parce qu'il y a plus de pauvreté. Entre
1986 et 1989, on était en période de croissance
économique, parce que la crise a commencé en 1990. Ça veut
dire qu'en pleine période de croissance économique la violence a
augmenté, nos jeunes ont continué d'avoir une vie plus difficile
parce que, de l'autre côté, on n'a pas pris les mesures sociales
et les politiques familiales nécessaires pour empêcher nos jeunes
d'être dans ce courant de reprise économique. Imaginez-vous! Les
chiffres sont pires aujourd'hui parce que, depuis deux ans, c'est la crise
économique.
C'est ce qui nous prouve, toujours selon l'étude qui est faite
par le ministère de la Santé et des Services sociaux, que 70 %
à 80 % de nos jeunes consomment de l'alcool et plus de 20 % de la
drogue. Je vais vous dire, ça, c'est inquiétant. C'est notre
jeunesse. On dit qu'il y a 10 000 jeunes qui vivent dans une famille d'accueil
et à peu près 8000, à Montréal, qui sont des
sans-abri. Pour une communauté qui se dit très civilisée,
qui se dit riche, qui est fière de ce qu'elle est... Et on peut
être fier, à part ça, d'être Québécois
et on peut être fier de notre métropole Montréal, qui
fête ses 350 ans de découverte ou de développement. Mais
non pas en pensant qu'il y a 8000 sans-abri, dans nos rues. Quand je parle de
8000, je parle de 8000 moins de 30 ans. C'est des jeunes qui devraient
être en train non seulement de bâtir leur avenir, mais de
bâtir notre société.
À la place, c'est l'itinérance et ça nous
amène à des titres aussi peu reluisants, aussi inquiétants
que ce qui était dans La Presse du mois de mai 1992, donc il y a
quelques semaines à peine: «Québec, médaillé
d'or dans l'indiscipline du suicide». C'est une réalité.
Moi, je vais vous dire, je ne sais pas, je n'ai pas les solutions non plus, je
ne les ai pas toutes, c'est évident, mais je vous dis que c'est
significatif. Si c'était cette année seulement, ou 1991 - parce
que, ça, c'est les derniers chiffres - je pourrais vous dire qu'il
arrive quelque chose dans l'air et le contexte n'est pas facile.
Mais ça, c'est depuis quelques années. Ça fait
quelques années qu'on a le championnat du suicide chez les jeunes. On ne
peut pas accepter ça. Quand je regarde mars 1992, L'actualité,
ça aussi, c'est une revue qu'en tout cas on peut considérer
comme sérieuse, que beaucoup de gens lisent. «Le Québec a
le record de l'abandon scolaire en Occident». Est-ce qu'on a pris les
mesures nécessaires, spécialement dans les crédits qui ont
été déposés dernièrement, pour que ça
change? Là, je vous ai montré le portrait, l'état du
patient et il n'est pas rose, il est comme ça.
Est-ce qu'on a pris et est-ce qu'on a annoncé pour l'année
à venir quelque chose qui va faire qu'il y ait plus d'espoir pour nos
jeunes que le projet de loi 25, qui va permettre, effectivement, au Conseil
permanent de la jeunesse de probablement être plus efficace dans son
rôle, et je reviens là-dessus, dans son rôle de conseiller
spécial auprès du premier ministre, donc du gouvernement, mais
pas son rôle d'ap-pliqueur, pas son rôle d'organisme qui va pouvoir
élaborer des programmes, mais de conseiller, en vous rappelant ce que je
vous ai dit tantôt par rapport à tous les documents qui ont
été déposés. Les recommandations n'ont pas eu une
écoute attentive et des résultats concrets dans
l'application.
Donc, qu'on leur facilite le travail, bravo! Pour conseiller le premier
ministre, il va falloir les écouter, non pas par des mesures comme les
dernières qu'on vient de prendre. Vous avez vu, le Conseil permanent de
la jeunesse a dénoncé et il était contre toute
augmentation de frais de scolarité. C'a augmenté de 130 % dans
deux ans et, cette année, parce qu'on a enlevé le plafond, dans
des universités l'augmentation des frais de scolarité, c'est 25 %
dans une période difficile où on demande à nos jeunes de
poursuivre leurs études en s'endettant.
C'est un peu inquiétant pour nos jeunes. Nous, on était
inquiets aussi, quand on était plus jeunes, de s'endetter. Les gens sont
inquiets de s'endetter pour une maison et une automobile. Ça ne veut pas
dire de ne pas s'endetter pour l'éducation, ce n'est pas le message que
je veux passer. C'est ce qu'il y a de plus important pour les jeunes de bien se
former, d'aller à l'école le plus longtemps possible et d'aller
chercher le maximum de diplômes parce que, même si on dit que les
diplômes ne garantissent pas d'emplois, au moins il y a une chose qu'il
faut reconnaître collectivement et les chiffres le confirment aussi: Plus
on a de diplômes, moins on est sur l'assu-rance-chômage, même
s'il y en a. Les chiffres montrent, en termes de comparaison, que plus on a de
diplômes, moins on est nombreux, en pourcentage, à être sur
l'aide sociale ou à l'assurance-chômage ou en attente ou en
recherche d'un emploi.
Au moins c'est ça. Ça veut dire de continuer, mais les
mesures qu'on prend, ce n'est pas très rassurant. Et c'est pour
ça...
Encore dernièrement, je regardais... Si vous prenez les journaux,
vous le voyez comme moi, maintenant, c'est les jeunes qui sont inquiets:
«Plus de 700 étudiants manifestent contre la remise en question de
la gratuité dans les cégeps.» Je vous ai donné des
chiffres tantôt où je vous disais que dans le décrochage,
c'est 36 % au secondaire, 40 % au collégial et 33 % à
l'universitaire. Est-ce que vous pensez qu'on va garder plus longtemps nos
jeunes au collégial en enlevant la gratuité des frais de
scolarité puis en leur amenant des dépenses de plus? Non. Moi, je
ne pense pas. Ce n'est pas ce genre de mesure qui fera en sorte qu'on va
intéresser davantage nos jeunes à demeurer à
l'école. Il faut de la formation. On ne peut plus penser que ce n'est
pas utile. Et ça, on a tous, des deux côtés de la Chambre,
un message important à passer à nos
jeunes: II faut le plus de formation possible, il ne faut pas
lâcher.
Mais, en même temps, le message que je passe au gouvernement de
l'autre côté: Arrêtez d'augmenter la charge chez nos jeunes
au niveau de l'éducation. Si on veut les encourager, si on veut les
stimuler, si on veut qu'ils aillent plus longtemps à l'école, ce
n'est pas en enlevant la gratuité dans les cégeps, ce n'est pas
en augmentant les frais de scolarité de 25 % dans les universités
qu'on va leur donner le goût et l'intérêt à la
poursuite de leurs cours. Vous savez, il y a des décisions qui ont
été prises et qui font en sorte que c'est souvent nos
décisions qui découragent et démobilisent et les familles
et les enfants, donc notre jeunesse.
Prenons des mesures importantes, devenons un peu enthousiastes, pas en
ayant juste une vision de budget, mais en ayant une vision de
société, en offrant quelque chose à nos jeunes, en leur
donnant de l'espoir. Et ça, ça prend des politiques. Oui,
ça prend des politiques. Et ce n'est pas des vains mots des politiques,
ça veut dire qu'on se fixe des objectifs. Quand on se fixe des
objectifs, on est un gouvernement responsable, on va chercher l'appui de
l'ensemble des intervenants de la société, la participation et la
collaboration des institutions et des entreprises. C'est comme ça qu'on
bâtit une société, parce qu'on se fixe des objectifs, on
implique les intervenants et on se donne les moyens d'atteindre nos objectifs.
Là-dessus, le milieu est prêt comme il ne l'a jamais
été. Au Forum pour l'emploi, qui a réuni des intervenants
de l'ensemble du Québec, que ce soient les banques, les caisses, le
Conseil du patronat, les chambres de commerce, les organismes communautaires,
les entreprises, les PME, des milliers de personnes se sont mobilisées
pour dire: On veut une politique de plein emploi, qui était
commencée, soit dit en passant. Les sommets économiques, les MRC,
toutes les structures ont été mises en place à partir de
1979-1980. Il y avait même en 1985, sous l'ancien gouvernement, un
ministère du plein emploi et de la concertation. Malheureusement,
ça a été aboli. Mais qu'on le ramène, qu'on ne se
gêne pas pour ramener des bonnes choses.
La concertation, c'est comme ça qu'on va se développer, en
se donnant des solidarités québécoises. Parce que le
développement du Québec - et ça, c'est prouvé;
même le ministre du Développement régional le dit
maintenant - va se faire par les régions, et le développement des
régions va se faire par les gens du milieu, par la capacité des
gens de développer les richesses qu'ils ont dans leur milieu. Et quand
je parle de richesse, je ne parle pas juste de forêt, de poisson et
d'agriculture, je parle d'abord de la première richesse, celle qu'on
retrouve entre les deux oreilles, la matière grise, et
spécialement chez nos jeunes qui sont de mieux en mieux formés.
Les Japonais l'ont compris, avec un petit territoire, sans richesses
naturelles. Ils ont décidé d'investir dans ce qu'ils ont de plus
important, leur jeunesse. On a l'impression, à regarder les lois qui
sont passées ici, que la jeunesse, c'est une maladie passagère,
en disant aux jeunes: Ne vous inquiétez pas, vous êtes jeunes,
vous avez de la misère, vous allez en guérir parce que vous allez
vieillir. Ce n'est pas vrai! La jeunesse, ce n'est pas une maladie, c'est une
richesse. C'est non seulement la richesse de la capacité de la
santé des jeunes, c'est la plus belle et la plus grande richesse
collective qu'on ait. C'est une richesse qu'on doit aujourd'hui utiliser et
qu'on doit aider à se développer. Quand ils sont bien
développés et qu'ils sont enthousiastes, nos jeunes, ils battent
des records, puis ils ont le goût de développer des
régions. (23 h 10) on le sait, et c'est dans un autre document produit
par le ministère de l'industrie, du commerce et de la technologie,
celui-ci, qui prouve que 80 % de nos emplois sont créés dans des
petites et moyennes entreprises, dans les villes, dans les villages, dans les
communautés, dans les régions. mais, ça, ça veut
dire qu'il faut avoir des programmes d'aide. il faut être stimulant, il
faut avoir quelque chose. mais ce n'est pas par les dernières politiques
qu'on voit où, très souvent, c'est plutôt
décourageant qu'autre chose, qu'on va l'avoir. entre autres, dans le
dernier budget on a annoncé des compressions, des coupures de 4 % des
effectifs dans la fonction publique. ce n'est pas sûr qu'on va être
regagnant. parce que qui va-t-on couper? ça va souvent être les
derniers services qu'on a rentrés dans les régions ou les
derniers embauchés. c'est qui, les derniers embauchés? c'est les
femmes et c'est les jeunes parce que c'est les derniers rentrés sur le
marché du travail. on va encore pénaliser ceux qui sont
déjà en difficulté de placement. bien non! et les jeunes,
là, ils sont imaginatifs. écoutons-les.
Je pense juste ici à la Fédération étudiante
universitaire du Québec qui, le 17 mars 1992, il n'y a pas longtemps, a
écrit au premier ministre, aux députés et à
l'ensemble - vous en avez tous reçu des copies - des suggestions. Ces
gens-là en ont, des idées, des suggestions. Entre autres,
pourquoi pas un impôt postuniversitaire? Pourquoi pas un impôt
postuniversitaire? Est-ce qu'on en a discuté de l'autre
côté? Est-ce qu'on l'a regardé? Parce que ça, c'est
plus équitable. C'est probablement même plus payant pour le
gouvernement. C'est plus juste parce que ça voudra dire que le jeune va
rembourser en fonction de ses revenus. C'est équitable, c'est juste,
c'est moins inquiétant. Bien non! On ne l'a pas vu.
Les jeunes ont demandé l'adoption d'une loi qui encadrerait le
processus de majoration des frais de scolarité, une loi qui viendrait
encadrer plutôt que de laisser aller, comme on le voit. Je vous l'ai dit
tantôt: 130 % d'augmentation en deux ans, les frais de scolarité.
Cette année,
parce qu'on a enlevé le plafond, c'est 25 %. Écoutez!
À nos jeunes qui ne travaillent pas et qui veulent s'instruire, est-ce
qu'on va toujours leur dire qu'à un moment donné ce n'est plus
accessible, l'éducation? Non. Ils ne nous disent pas qu'ils ne veulent
pas collaborer, ils ne nous disent pas qu'ils ne veulent pas participer. Ils
nous font même des suggestions et ils nous disent: On accepte ce qu'on a
payé et qui nous a coûté si cher, 130 % d'augmentation en
deux ans mais, pour l'avenir, est-ce qu'on ne pourrait pas savoir dans quoi on
s'embarque? On est prêt à faire notre part, mais on dit au
gouvernement: Faites la vôtre, investissez dans l'éducation.
Malheureusement, ce n'est pas ça qu'on fait de l'autre
côté, c'est des coupures, quand on a vu les crédits qui ont
été déposés et quand on voit le budget du ministre
des Finances qui, malheureusement, ne nous amène pas beaucoup
d'encouragement. Et la preuve que chaque ministre reconnaît que la
situation est grave, c'est qu'on est obligé de poser des gestes qui sont
des gestes curatifs ou des gestes de société en grave
problème et non pas des gestes de société en
développement.
Deux exemples. Deux exemples que je ne prends pas de moi, mais qui
viennent de copies de presse, qui datent toujours des dernières semaines
ou des derniers mois. Le ministre de l'Éducation m'a dit tantôt:
Vous allez dire qu'on n'aide pas les jeunes, et il m'a donné des
chiffres sur les groupes communautaires. C'est vrai. C'est vrai que les budgets
ont augmenté, mais si le nombre de groupes communautaires a
augmenté et qu'eux autres aussi font un travail extraordinaire, avec
très peu de ressources mais beaucoup d'énergie et de
bénévolat, si le nombre a augmenté et qu'on a
été obligé d'augmenter les budgets pour les aider, c'est
que les besoins sont rendus tellement grands que les groupes sont
obligés de se multiplier pour être capables d'aider nos jeunes en
difficulté. Bien, je comprends! À Montréal seulement, on
distribue 12 tonnes de nourriture par jour. Douze tonnes de nourriture par jour
à nos itinérants et à nos familles pauvres et le ministre
de l'Éducation lui-même s'engage à nourrir 50 000
écoliers dans les écoles.
Une école, c'est fait pour donner de l'information, de la
formation et préparer nos jeunes. C'est au niveau intellectuel, c'est au
niveau d'une formation globale. Bien là, on est rendu que c'est devenu
un endroit où on est obligé de nourrir nos jeunes parce qu'ils
ont trop faim pour apprendre. Et ça, c'est le ministre lui-même
qui le reconnaissait dans le programme qu'il a annoncé, où il
faut nourrir à coups de millions. Mais pourquoi on est obligé de
nourrir les enfants dans les écoles? En très grande partie, c'est
que les parents, malheureusement, n'ont plus les moyens, n'ont plus les moyens
de nourrir leurs enfants à force d'être taxés,
surtaxés, de voir tout augmenter: la tarification de
l'électricité, comme je vous disais tantôt, les taxes
scolaires, les taxes municipales. Il va falloir arrêter de penser juste
en termes de revenus et commencer à penser en termes
d'investissements.
Pour ce faire, je vous donne juste deux suggestions, rapidement, M. le
Président, parce que vous me dites qu'il me reste à peine
quelques minutes. Donnons-nous rapidement ce qui est demandé par le
Conseil permanent de la jeunesse depuis déjà deux ans: une
véritable politique québécoise de la jeunesse qui va au
moins montrer aux jeunes qu'on a une vision, qu'on a des objectifs, qu'on a des
orientations et qu'on a le goût de leur proposer une démarche.
Parce que, pour le moment, il n'y en a pas de démarche. Qu'on leur
propose une démarche qui pourra inclure une politique familiale, qui
pourra inclure une politique de formation pour les plus jeunes, d'aide en
attendant que les familles puissent s'en sortir. Il faut qu'on ait cette
politique qui est capitale.
La deuxième chose, c'est une invitation au premier ministre. Je
comprends qu'il ne soit pas là ce soir. Je l'ai dit et je le
répète, je le comprends. S'il n'a pas le temps, mais qu'il
décide quand même de garder la responsabilité par rapport
au dossier jeunesse, qu'il soit attentif aux recommandations que le Conseil
permanent de la jeunesse va lui faire, parce que les recommandations qui sont
contenues dans les documents que je vous ai montrés tantôt, M. le
Président, c'est applicable, c'est réaliste, c'est
réalisable, et c'est ce que les jeunes ont demandé. Et quand les
jeunes demandent, qu'ils font des suggestions, quand on va leur répondre
favorablement, on va avoir des alliés, on va avoir des gens qui n'auront
pas le goût de se suicider, mais qui vont avoir le goût de
bâtir une société.
Il faut écouter les gens du Conseil permanent de la jeunesse que
je salue tout particulièrement, en finissant, en leur disant: Oui, on va
voter pour le projet de loi, parce que vous l'avez demandé, parce que
ça va vous permettre d'être encore plus efficaces. Moi, je vous
dis, au nom de ma formation politique: Vous êtes des gens extraordinaires
qui méritez notre appui, qui travaillez très fort et qui
êtes toujours très présents. Je le dis, à toutes les
fois où il y a une rencontre de jeunes, peu importe dans quel coin du
Québec, vous êtes présents, parce que non seulement vous
êtes là pour conseiller le premier ministre, mais vous êtes
d'abord là pour écouter et identifier les problèmes des
jeunes. Je vous dis: Chapeau! Je vous dis: Bravo! Continuez. Mais je ne veux
pas qu'on soit juste des gens, à l'Assemblée nationale, qui
passent leur temps à féliciter ceux qui identifient les
problèmes, ceux qui identifient les besoins, ceux qui font des
recommandations, je veux que nous soyons de ceux qui, conscients des
problèmes, allons enfin nous décider à passer à
l'action. Comme nous le
disait M. Perreault, le président du Conseil permanent de la
jeunesse: C'est fini, le temps des belles paroles. Ce qu'on demande - et,
là, je parle au nom du Conseil permanent de la jeunesse, parce que c'est
le président qui le disait lui-même - à partir de
maintenant, c'est: Fini, les discours, il faut passer à l'action. Et ces
gens-là, ils ont raison. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Shefford, de votre intervention. Alors, je rappelle aux
membres de cette Assemblée que nous en sommes à l'étape de
l'adoption du principe du projet de loi 25, Loi modifiant la Loi sur le Conseil
permanent de la jeunesse. Je reconnais M. l'adjoint parlementaire du premier
ministre et député d'Orford. M. le député, je vous
cède la parole.
Des voix: Bravo!
M. Robert Benoit
M. Benoit: M. le Président, merci. Je voudrais tout
d'abord saluer l'honorable député de Shefford que j'ai
écouté avec grand intérêt depuis plus d'une heure.
Je vais essayer d'être beaucoup plus bref, M. le Président, et de
m'en tenir à l'esprit même de la loi 25 qui est, en fin de compte,
un projet de loi de 10 articles, plutôt simple, où nous voulons
extensionner de deux ans à trois ans le nombre d'années pendant
lesquelles les gens pourront siéger au Conseil permanent de la
jeunesse.
Alors, l'honorable député de Shefford nous a fait un
portrait de la situation complète du Québec. Le seul point que je
voudrais relever, c'est celui de l'assurer et d'assurer les jeunes du
Québec que le responsable des dossiers des jeunes au Québec, qui
est le premier ministre du Québec, est à leur écoute. Pas
plus tard qu'au mois d'avril il recevait les dirigeants du Conseil permanent de
la jeunesse et il est à l'écoute constamment.
Vous savez vous-même, M. le Président, vous qui êtes
à l'intérieur d'une formation politique où il y a une
commission jeunesse, avec quelle facilité ces jeunes-là ont
accès au premier ministre. Je peux vous dire, comme adjoint responsable
des dossiers des jeunes, quelle facilité nous avons, avec des jeunes, de
rencontrer le premier ministre et d'exposer les points de vue.
J'invite l'honorable député de Shefford à rester
à l'écoute, les prochains mois. Je pense qu'on arrivera avec un
bon nombre de mesures. Il a parlé d'un nombre d'études qui ont
été faites, autant par le Conseil permanent de la jeunesse que
par différents organismes sur différents sujets. Soyez
assuré, M. le Président, que ces études-là, nous
les avons compilées, nous en avons pris connaissance, et il y a un bon
nombre de politiques qui seront mises en place dans les prochaines semaines,
les prochains mois. (23 h 20)
S'il y a un sujet dont la société a à être
fière, M. le Président, c'est bien notre jeunesse. Jamais ne
passent inaperçues ses réussites, ses exploits, sa
créativité, son dynamisme, son sens du civisme, et j'en passe.
À l'opposé, il faut bien le reconnaître, toutes et tous se
sentent concernés lorsqu'ils voient ou entendent parler de jeunes aux
prises avec des problèmes scolaires, de chômage, de violence, de
santé mentale ou de toxicomanie. Quelle que soit la situation, parents,
amis et État sont tous mobilisés pour accompagner les jeunes dans
leur démarche d'insertion sociale et professionnelle, pour
prévenir le développement de phénomènes excessifs
de marginalisation.
Et je vous avouerai, M. le Président, que je suis toujours un peu
déçu quand j'écoute les gens de l'Opposition essayer de
politiser un débat comme celui des jeunes. J'aimerais qu'il n'y ait pas
de limite de parti, de ligne de parti, finalement, et que nous puissions
discuter ouvertement sans cette ligne de parti. J'ai senti tout au long de
l'heure qu'a prise l'honorable député de Shefford combien de fois
il aurait voulu être d'accord avec le projet de loi, mais il était
un peu lié avec cette ligne de parti. J'aimerais qu'on soit au-dessus,
finalement, des politiques partisanes quand on parle des jeunes et qu'on
regarde les problèmes tels qu'ils sont.
On doit ainsi se réjouir, M. le Président, de la
présence d'un organisme, tel que le Conseil permanent de la jeunesse,
qui fait un très bon ouvrage depuis l'arrivée au pouvoir, en
1985, des libéraux, auquel moment le Conseil permanent fut mis en place,
et, je dois l'admettre, organisme qui est a l'écoute des besoins et
attentes des jeunes. M. le député de Shefford parlait du document
«Les couleurs de la jeunesse... noir sur blanc. Bien sûr que nous
l'avons lu, j'étais personnellement présent au moment du
lancement du volume, et c'est effectivement un livre de chevet, non seulement
pour nous, mais pour les hauts fonctionnaires dans les différents
ministères à qui on a demandé de colliger à
l'intérieur de ce document le nombre de programmes qu'il y avait. Alors,
soyez assuré que les avis du Conseil permanent de la jeunesse, qui sont
reçus annuellement par le premier ministre, et à l'étude
des crédits aussi nous en avons discuté, c'est un document de
réflexion important au bureau du premier ministre.
Je voudrais aussi préciser. Encore une fois, le
député de Shefford a, pendant plus d'une heure, mentionné
un paquet de chiffres et combien ça allait mal chez les jeunes. Je
voudrais lui dire qu'il y a une prise de conscience à la grandeur du
Québec, chez les parlementaires et dans tous les niveaux, que ce soit
scolaire, municipal, et nous invitons les jeunes, nous invitons les jeunes
à prendre leur place à l'intérieur des structures
gouvernementales, que
ce soit dans les CLSC... Nous venons de finir une session
d'élections dans les CLSC, dans tout le régime de la
santé. Je n'ai pas vu beaucoup de députés de l'Opposition
essayer de faire élire des jeunes à ces différents postes
électifs. Je sais que, de notre côté, nous l'avons fait et
nous le ferons maintenant dans la décentralisation. Tous les
députés ont été invités, de notre
côté, à s'assurer que ces conseils régionaux aient
des jeunes qui soient partie prenante du processus décisionnel de ces
nouveaux organismes qui vont être très importants. Je n'ai pas vu
cette même préoccupation de l'autre côté,
peut-être quelques discours ici et là, mais, chez nous, des
députés se sont impliqués personnellement pour faire
avancer le processus décisionnel des jeunes dans la
société.
M. le Président, je finirai, je vous l'ai dit, je veux m'en tenir
à l'essence même du projet de loi 25 qui a, finalement, 10
articles, dont un qui est vraiment plus important que les autres, soit
d'extensionner de deux ans à trois ans le mandat. Mais je veux juste
rappeler aux gens qui nous écoutent ce soir qu'il y a eu 14 mesures dans
le dernier budget, non seulement dans le budget, mais dans le discours de la
trente-quatrième Législature. Il y a eu 14 mesures qui
s'adressent directement aux jeunes, et je voudrais juste en citer
quelques-unes.
Le plan d'action sur la réussite en éducation pour lequel
le gouvernement consacrera plus de 42 000 000 $, qui a été
annoncé par le ministre des Finances dans son dernier budget. Vous savez
tous qu'il y aura aussi une commission parlementaire à l'automne sur
toute la problématique de l'enseignement collégial, et nous
sentons déjà un très grand intérêt, autant
chez les jeunes de notre côté que chez les jeunes de l'autre
côté, et partout, je pense, au Québec, il y aura une
participation très grande dans cette réflexion en profondeur, 25
ans après la création des collèges. Il y aura la
création de la Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre où nous allons impliquer, et
avons impliqué, les jeunes dans son processus, un plan d'action pour
soutenir le développement optimal des jeunes résultant des
travaux des trois importants groupes de travail communément
appelés Bouchard, Jasmin et Harvey, une importante étude sur le
phénomène de la conciliation études-travail et son impact
sur l'abandon scolaire. Cette étude a été faite par le
Conseil supérieur de l'éducation, étude tout à fait
pertinente et intéressante, M. le Président, sur ces jeunes qui
pendant leurs études vont se chercher un ouvrage. Ce n'est pas un
phénomène québécois, c'est un
phénomène mondial en ce moment, et on a étudié dans
une optique du Québec quelles étaient les conséquences de
ce phénomène sociologique.
Nous avons aussi une prise de conscience, la modification de la Loi sur
la protection de la jeunesse. Nous avons aussi une réflexion impor-
tante sur le Québec des régions et les jeunes dans les
régions, la politique culturelle qui sera annoncée à la
fin de juin, un instrument très attendu pour la relève en
culture. Le phénomène de la pauvreté, une
réalité à laquelle doit faire face un nombre accru de
jeunes.
Un soutien accru. M. le député de Shefford a parlé
des jeunes familles et de toute la taxation. Je veux lui rappeler que depuis
1985, époque où on a pris le pouvoir, M. le Président, les
jeunes couples à 19 000 $ de revenus payaient de l'impôt. Il faut
maintenant chercher aux alentours, entre 27 000 $ et 29 000 $ pour les jeunes
couples avec enfants avant de payer une seule cent d'impôt au
Québec. Et ça, vraiment, non seulement c'est une politique
fiscale, mais c'a été une politique familiale.
Il y aura aussi une réorganisation des programmes d'aide aux
exploitations agricoles, de même qu'une nouvelle façon
d'encourager la formation et, notamment, la préparation à la
relève. M. le Président, il y a cinq ans, le gouvernement s'est
donné, en matière jeunesse, une structure, soit le Conseil
permanent de la jeunesse, structure qui fonctionne très bien. À
l'usage, on s'est aperçu qu'il y avait quelques changements qu'il
fallait apporter, la période où il y avait élections, les
deux ans versus les trois ans. Mais, finalement, la structure a
été bien pensée, elle fonctionne très bien, et je
pense que même les gens que nous avons consultés avant de faire ce
projet de loi, finalement, c'est leur réflexion que nous allons mettre
dans ces 10 articles.
M. le Président, à titre d'adjoint parlementaire au
premier ministre, je veux encore rappeler au député de Shefford
et aux jeunes du Québec qu'ils ont eu une écoute attentive
très grande, avec le Conseil permanent, auprès du bureau du
premier ministre, en tout temps. Et à chaque fois qu'un groupe de jeunes
a voulu rencontrer le premier ministre responsable des dossiers des jeunes au
Québec, ils n'ont eu aucune difficulté. Le premier ministre les a
rencontrés avec grand intérêt et a donné mandat
à chacun de ses ministres de procéder avec d'importantes
transformations et d'importantes études ont été faites.
Encore une fois, j'invite le député de Shefford à nous
suivre dans les prochains mois et les prochaines années. Il y a des
transformations importantes, des actions importantes qui vont toucher les plus
jeunes dans notre société. Merci, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député d'Orford. Est-ce que la motion, proposant l'adoption du
principe du projet de loi 25, Loi modifiant la Loi sur le Conseil permanent de
la jeunesse, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
ministre des Affaires municipales.
Renvoi à la commission des institutions
M. Ryan: m. le président, je fais motion pour que le
projet de loi 25 soit déféré à la commission des
institutions pour étude détaillée.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion
est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
ministre des Affaires municipales.
Une voix: C'est un nouveau leader?
M. Ryan: Je vous demande d'appeler l'article 13.
Projet de loi 20 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre, je vous
remercie. À l'article 13, M. le ministre des Affaires municipales
propose l'adoption du principe du projet de loi 20, Loi abrogeant la Loi
concernant les droits sur les divertissements. M. le ministre des Affaires
municipales.
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, je vais tenter d'être le
plus clair, et le plus bref, et le plus concret possible. Il s'agit d'un projet
de loi éminemment bienfaisant. J'entendais dire dans les corridors que
l'Opposition s'apprêterait à faire une lutte farouche à
l'encontre de ce projet de loi. Mais je suis sûr que lorsqu'elle aura
entendu les explications que nous avons à lui offrir, elle se rendra
compte de l'inanité de toute démarche obstructionniste à
l'endroit d'un projet de loi aussi constructif. On va partir de la
réalité et on va voir tout de suite la portée du projet de
loi. (23 h 30)
II y a parmi nous, comme parmi la population, des amateurs de
cinéma, de baseball, de théâtre, de hockey, d'endroits
comme le parc Safari, par exemple, le parc Belmont, des endroits d'amusement,
La Ronde à Montréal, etc. Le Cirque du soleil entre
là-dedans, justement. Si vous allez à un spectacle
présenté dans l'un de ces lieux, voici ce qui arrive
actuellement. Disons que le promoteur fixe le prix du billet d'admission
à 10 $. Là, vous avez 1 $ en droits sur le prix du billet.
Ça, c'est ce qu'on appelle les droits sur les divertissements, 1 $.
Ça porte le prix du billet à 11 $. En plus, est venue s'ajouter,
l'an dernier, la TPS. C'est la taxe fédérale de 7 % sur les
produits et services: 7 % de 11 $, ça fait 0,77 $. on est rendu à
11,77 $. là, normalement, après la décision
annoncée par le ministre des finances, dans son budget de l'an dernier,
devait venir s'ajouter à ce montant la tvq, la taxe de vente
québécoise de 8 %; 8 % sur 11,77 $, ça faisait 0,94 $.
vous additionnez le tout, votre billet vous coûterait 12,71 $, si on s'en
était tenu aux décisions annoncées l'an dernier, 12,71
$.
Maintenant, plaçons-nous sous la nouvelle économie qu'est
venu annoncer le discours sur le budget et que vient confirmer, en ce qui
touche les droits sur les divertissements, le projet de loi 20 que nous
discutons présentement. Alors, le prix du billet est toujours de 10 $
pour l'instant. Le 1 $ de droits sur les divertissements disparaît. C'est
l'objet du projet de loi. Le 1 $ disparaît. Donc, vous passez à 10
$; il reste les 7 % de la TPS. Eux restent là. Ça, ça
vient d'Ottawa. Nous n'avons pas de contrôle là-dessus. 7 % de 10
$, ça fait 0,70 $. Vous êtes rendus à 10,70 $. Là,
il y a la TVQ qui vient s'ajouter. La TVQ, le ministre des Finances l'a
portée de 8 % à 4 %. Alors, 4 % sur 10,70 $, ça fait 0,43
$. Vous ajoutez 0,43 $ à 10,70 $, ça fait 11,13 $.
Alors, voilà toute la signification du projet de loi que nous
discutons ce soir. Le billet que vous auriez payé normalement 12,71 $,
vous le paierez dorénavant, à condition que les promoteurs ne
veuillent pas mettre la différence dans leur poche ou dans leur caisse,
vous le paierez 11,13 $. C'est-à-dire que vous sauverez environ 12 % sur
le prix que vous auriez normalement payé. voilà
essentiellement... c'est un projet de loi qui est très simple, m. le
président. voilà ce que ce projet rapporte et je pense que ce
résultat est bon pour les spectateurs. je pense bien que toute personne
raisonnable et responsable préférera assister à un concert
où ça lui coûtera 11,13 $ plutôt que 12,71 $. si
moi-même je veux aller à une partie de base-bail - des fois,
certains commentateurs m'accusent d'avoir une certaine sympathie pour le
baseball, je ne le nie pas - alors au lieu de payer 12,71 $, ça me
coûtera 11,12 $ pour un siège d'une valeur moyenne. c'est
généralement là que je me situe. alors, ça vaut la
peine pour tout le monde. tous ceux qui se présentent à un lieu
de divertissement, parmi les catégories que j'ai
énumé-rées tantôt qui font partie de la loi
actuelle, bénéficieront, par conséquent, il faut le dire
en toute franchise, parce que je pense que, du côté de
l'opposition, on n'a jamais la loyauté de l'admettre, à moins que
je ne connaisse plus le sens que les dictionnaires donnent aux mots. là,
vous êtes témoins et la démonstration est faite clairement
d'une réduction du fardeau fiscal pour toute personne qui veut se
présenter à un lieu d'amusement pour assister à un
spectacle corn-
mercial.
Deuxièmement, c'est très bon pour les entreprises de
divertissement. Les entreprises de divertissement voyaient venir avec une
grande appréhension la fameuse TVQ venant s'ajouter à la TPS. Si
on avait eu les trois ensemble, le fardeau fiscal sur un billet d'admission
était rendu à un niveau de 27 % du prix de base, 27 % qui
venaient s'ajouter en taxes. Alors, avec la mesure que nous prenons, le fardeau
est réduit à 11,12 %. C'est une jolie réduction. Et j'ai
hâte d'entendre les objections qu'on voudra formuler tantôt
à rencontre d'une mesure comme celle-ci. C'est parfaitement clair, M. le
Président. Je pense que personne n'est capable de contester la
véracité de ces chiffres.
Maintenant, on nous dira du côté de l'Opposition: C'est
beau, c'est beau; du côté du gouvernement, vous vous montrez
magnanimes, mais avec l'argent des autres. Parce que le droit de divertissement
de 10 %, là, c'est la municipalité qui le percevait. C'est bien
facile pour le gouvernement de l'enlever dans un certain sens, parce que c'est
des revenus qui allaient du côté de la municipalité. On
peut nous dire: C'est bien facile de faire la charité avec le bien
d'autrui. Ceux qui nous feraient cette critique seraient fondés de la
faire. Mais si on se laisse aller à une telle critique, on
présente seulement un côté de l'histoire. Si on regarde
toute l'histoire, on va vite constater que le gouvernement a pris ses
responsabilités à l'endroit des municipalités. Le
gouvernement a voulu, fondamentalement, favoriser l'essor de l'industrie du
divertissement au Québec en allégeant considérablement les
charges fiscales qui pèsent sur le prix du billet d'admission. Mais, en
même temps, il offre aux municipalités des compensations fort
raisonnables et que je n'hésite pas à qualifier
d'équitables.
Tout d'abord, quand nous avons fait la réforme de la
fiscalité municipale l'an dernier, avec la loi 145, il y a eu des
discussions pendant au-delà d'une année sur le document qui avait
d'abord été présenté aux municipalités en
décembre 1990 et, quand nous avons adopté la loi 145 en juin
dernier, nous avions prévu dans cette loi-là que les droits sur
les divertissements portant sur les lieux culturels seraient
éventuellement abolis par le gouvernement. Ça, nous l'avions dit.
Nous avions inséré dans la loi une disposition qui permettait au
gouvernement de faire une exception. C'était explicitement
mentionné, dans toutes les explications que nous avons données,
que cette exception embrasserait les lieux où l'on présente des
événements à caractère culturel. Et quand nous
avons fait le réaménagement des sources de revenus
octroyées aux municipalités, nous avons augmenté le
rendement de certaines sources pour offrir une compensation équivalente
à 40 % des revenus que les municipalités tiraient des droits sur
les divertissements. Les revenus totaux que les municipalités avaient
retirés de l'année précé- dente étaient
d'à peu près 26 000 000 $, et nous avions estimé qu'en
enlevant les droits sur les divertissements culturels nous ferions perdre aux
municipalités 11 500 000 $, et, en compensation, nous avons
augmenté le rendement de certaines taxes, en particulier les droits sur
les mutations immobilières.
Les droits sur les mutations immobilières étaient
facultatifs jusqu'à l'année dernière, puis là
où une municipalité décidait de les instituer, elle
pouvait établir un droit équivalant à la moitié de
1 % sur le prix de la transaction. Nous avons modifié la loi pour donner
un peu plus d'espace aux municipalités. Nous avons dit: Pour le premier
50 000 $, ça va être la moitié de 1 %; entre 50 000 $ et
250 000 $, ça va être 1 %; et, au-delà de 250 000 $, ce
sera 1,5 %. Je vous donne un exemple. Quelqu'un qui ferait une transaction, qui
achète une maison, disons, de 100 000 $, sur le premier 50 000 $, il va
payer 0,5 %, ça fait 250 $; sur l'autre 50 000 $, il va payer 1 %,
ça veut dire qu'il va payer 500 $ plus 250 $, ce qui donne 750 $ dans
les coffres de la municipalité, alors que, dans bien des cas, elle ne
retire rien et que, dans la meilleure des hypothèses, elle pouvait
toucher 250 $. il y en a qui ont dit: c'est bien beau - puis il y a des maires
qui m'ont soutenu ça, des maires très importants - mais il n'y a
pas de commerce immobilier; le commerce immobilier est tranquille cette
année, il ne se passe pratiquement rien. mais savez-vous qu'hier soir,
m. le président, je suis allé à mon appartement à
québec et j'ai ouvert mon appareil de radio, ce qui m'arrive très
peu souvent, et là, il y avait une ligne ouverte avec un
représentant de la firme re/max de québec, ici. il racontait les
activités de la firme re/max à travers le québec au cours
des derniers mois. je n'en revenais pas, c'est des augmentations de 25 %, de 10
%, de 15 %, de 40 %, etc. je n'en revenais pas. le mouvement a beaucoup repris
dans les immeubles existants. et vous savez que l'an dernier, grâce aux
programmes d'aide à l'habitation du gouvernement, il y a eu pas mal de
mouvement aussi du côté de l'habitation neuve. alors, de ce point
de vue là - c'est un exemple que je donne, ça, très
concret - nous leur avons donné des sources de revenus additionnels qui
devaient compenser pour les 11 500 000 $ qu'elles allaient perdre par suite de
l'abolition des droits sur les événements présentés
dans des lieux classés comme culturels. (23 h 40)
Alors, il y a déjà ce montant-là. Je l'ai dit aux
municipalités autant comme autant. On peut bien le demander deux ou
trois fois, mais il a déjà été compris dans le
règlement qui a été inscrit dans la loi 145. Mais si on
calcule que les revenus étaient de 26 000 000 $ et disons que nous en
avons donné 12 000 000 $ par les sources de revenus accrus, il reste 14
000 000 $ à trouver.
Or, dans le discours sur le budget, le ministre des Finances a
annoncé ceci. Là, les droits sur les divertissements seront
abolis à compter du 1er juillet, donc pour la deuxième
moitié de l'année. Alors, pour la deuxième moitié
de l'année, nous donnons aux municipalités une compensation de 6
500 000 $, ce qui équivaut à 13 000 000 $ pour l'année, et
pour chacune des quatre années suivantes, 1993, 1994, 1995 et 1996, nous
leur donnons une compensation de 13 000 000 $ par année. Ajoutez les 12
000 000 $ dont j'ai parlé tantôt aux 13 000 000 $ qui ont
été annoncés par le ministre, à moins qu'on ne
sache pas compter, ça fait 25 000 000 $, ça. Les revenus que les
municipalités ont retirés, en 1991, des droits sur les
divertissements étaient de 26 000 000 $. Alors, en fait de
compensation... Avez-vous entendu des protestations des municipalités,
M. le Président, après le budget de M. Gérard D. Levesque?
Moi, je n'en ai pas entendu parce que les administrateurs municipaux sont des
personnes réalistes. Ils ont vite fait leur calcul et ils se sont
aperçu que le budget est une très bonne opération pour
eux.
En plus de ce que je viens de mentionner, il y a deux autres choses qui
étaient contenues dans le budget dont je n'ai pas eu l'occasion de
parler jusqu'à maintenant, mais je pense que l'occasion est bonne pour
le faire. Le ministre des Finances a institué, à compter de la
présente année budgétaire, un programme spécial
d'encouragement à la vie culturelle dans les municipalités de 5
000 000 $. Ça, c'est un programme qui consistera probablement en des
subventions de contrepartie. Les municipalités qui voudront agir dans le
domaine culturel, le gouvernement sera prêt à mettre une somme
d'argent en compensation de celle qu'elles mettront. Alors, ce montant de 5 000
000 $ que le ministre des Finances a annoncé qu'il sera
récurrent, c'est-à-dire qu'il va être inscrit dans la base
de financement du ministère des Affaires culturelles, vient s'ajouter
à la somme de 25 000 000 $ dont j'ai parlé. 25 000 000 $ plus 5
000 000 $, à moins que je ne sache pas compter, ça fait 30 000
000 $.
En plus, quand la TVQ a été annoncée l'an dernier,
quand il a été annoncé qu'on la transférerait sur
les services... Actuellement, elle existe déjà, la taxe de vente
du Québec, nous la payons tous sur les biens. Il y avait les chaussures,
les meubles et les vêtements qui étaient exemptés.
Maintenant, c'est général depuis un an et, là, elle devait
s'appliquer à tout le domaine des services, mais elle devait s'appliquer
à 8 %. Le ministre des Finances avait dit: On va donner une certaine
ristourne aux municipalités parce qu'elles vont payer la TVQ sur les
biens et services qu'elles se procurent. On leur donnera une ristourne qui sera
de l'ordre de 37 %, c'est-à-dire que sur toutes les dépenses
qu'elles auront encourues pendant une année, au titre de la TVQ, elles
auront droit à une ristourne de 37 % pour faire en sorte que l'effet de
la TVQ sur les finances des municipalités soit à peu près
neutre, qu'elles ne dépensent pas plus après la TVQ qu'avant.
Récemment, des calculs ont été faits et cette
base-là a été portée de 37 % à 40 %.
Ça a été annoncé dans le discours sur le budget.
Déjà là, il y a des économies considérables
pour les municipalités. En plus, la TVQ devait être à 8 %.
En la réduisant a 4 %, en accordant un certain nombre d'exemptions en
cours de route, savez-vous combien le ministre des Finances sauve aux
municipalités pour l'année 1993? Une autre somme de 35 000 000 $
que les municipalités devaient prévoir dans leur budget de l'an
prochain et qu'elles pourront soustraire de leur budget de dépenses
parce qu'elles auront des exonérations qui découlent des mesures
annoncées dans le discours du ministre des Finances. Alors, vous
additionnez tous ces montants ensemble et je pense que le gouvernement tient la
parole qu'il avait donnée aux municipalités quand il leur
garantissait qu'une fois effectuée l'opération de la loi 145, il
ne reviendrait pas avec d'autres mesures qui ajouteraient des charges à
leur fardeau fiscal, mais qu'au contraire il instaurerait un régime de
collaboration adulte, franche, loyale avec les municipalités. Je pense
que le ministre des Finances en a fait la preuve dans son dernier budget. Moi,
il m'incombe, comme ministre des Affaires municipales, vu que cette loi
relevait de ma compétence, de demander à cette Chambre de
renvoyer aux calendes grecques, c'est-à-dire d'abroger la loi qui
permettait aux municipalités d'instituer des droits de 10 % sur le prix
du billet d'admission à un spectacle. C'est une tâche très
agréable que j'ai, plus agréable que celle que j'avais l'an
dernier, en fait. Je suis bien content de m'en acquitter, comme je me suis
acquitté de l'autre l'an dernier, sans récriminer, en aucune
manière, parce que c'était pour le bien
général.
Voilà, M. le Président, tout l'essentiel du projet de loi.
Il y a d'autres choses qui sont de l'ordre des modalités. Les gens
disent: Ça, les droits sur les divertissements, ça va tomber
à compter du 1er juillet. Après le 1er juillet, si quelqu'un
demande à l'acheteur d'un billet un droit de divertissement de 10 %, il
sera un imposteur. Il faudra le dénoncer et il agira en violation de la
loi. À partir du 1er juillet, ces 10 %, c'est fini.
En faisant ça, nous abolissons une taxe qui durait, savez-vous
depuis quand? Depuis 1919. Depuis 73 ans. Et dans les villes de Montréal
et de Québec, elle durait depuis 1915, je pense. C'avait commencé
là. L'origine de cette taxe-là, au début, on se disait: II
faut financer les hôpitaux, les crèches, les orphelinats, toutes
ces choses-là. Et les gouvernements n'avaient pas beaucoup d'argent
à l'époque. C'avait été institué d'abord
pour fournir une contribution au fonds de financement des hôpitaux, des
orphelinats, des
crèches, des services sociaux comme ils existaient à
l'époque. Les plus anciens se souviennent de ça, ou ceux qui ont
étudié l'histoire des institutions sociales au Québec s'en
souviennent, nous avons eu une loi très importante en 1921. La loi qui a
créé le régime d'assistance publique au Québec, une
loi extrêmement importante dans l'histoire des lois sociales au
Québec. À ce moment-là, on avait décidé que
le produit de la taxe sur les divertissements devait aller en partie pour le
financement des hôpitaux et en partie pour financer le rôle des
municipalités en matière de service social.
Parce que pendant longtemps au Québec, l'assistance sociale a
relevé des municipalités. Les plus anciens se souviennent de la
crise des années trente qui avait mis les municipalités dans une
situation financière extrêmement difficile. Montréal, en
particulier, qui avait un taux de chômage très
élevé, beaucoup plus élevé que tout ce que nous
avons connu avec la récession des dernières années et
celle du début des années quatre-vingt. Les municipalités
avaient été obligées de s'endetter et de s'endetter pour
empêcher leurs chômeurs de crever de faim. Alors, on avait dit, il
y a ces petites sources de revenu qui pourront aider. Mais aujourd'hui
là, c'est complètement insignifiant par rapport aux besoins
beaucoup plus considérables de l'État. Il nous est apparu
qu'à ce moment-ci de l'évolution de notre société,
un revirement majeur s'imposait en matière de fiscalité.
Pendant les années qui ont suivi la dernière guerre
mondiale, c'est-à-dire pendant près de 40 ans, pendant au moins
35 ans, les gouvernements au Canada se sont financés surtout avec les
impôts directs. En particulier avec l'impôt sur le revenu des
particuliers; également avec l'impôt sur les revenus des
sociétés. On avait des tarifs, des taux de taxation variables
suivant l'importance des revenus. Ces taxes sont encore très importantes
dans le financement du gouvernement du Québec; également dans le
financement de l'État fédéral.
Nous constatons au Québec - le ministre des Finances l'a
souligné dans son budget - qu'il n'y a pas eu - je sais que ça
choque l'Opposition qu'on rappelle ce fait, mais c'est un fait de base -
d'augmentation de l'impôt sur le revenu depuis sept années
consécutives au Québec. Et non seulement n'y a-t-il pas eu
d'augmentation de l'impôt sur le revenu des particuliers, mais
l'impôt sur le revenu des particuliers a été réduit.
pEF' comme le ministre des Finances le rappelait l-jtrstement, quand nous
sommes arrivés au pouvoir en 1985, une famille de deux enfants, qui
gagnait plus que 10 000 $ par année, était obligée de
payer de l'impôt sur le revenu. Savez-vous où est le seuil de
non-imposition maintenant? C'est rendu à 26 000 $. Toute famille qui a
deux enfants et dont le revenu est inférieur à 26 000 $ ne paie
aucune forme d'impôt sur le revenu. Il y a eu des réductions pour
les autres classes de contribuables également. (23 h 50)
Pour les sociétés dans l'univers de concurrence
très vive où nous sommes entrés, les gouvernements ne
peuvent pas se payer le luxe de taxer trop librement les
sociétés. Pour quelles raisons? Deux raisons bien simples. Tout
d'abord, si le fardeau fiscal est trop lourd, les entreprises marginales vont
s'écraser, elles ne seront pas capables de faire face au fardeau, et
l'expérience des dernières années nous enseigne que la
proportion des entreprises qui sont marginales est très
élevée, très élevée. Par conséquent,
il faut que les gouvernements traitent les entreprises avec beaucoup de
prudence parce qu'un fardeau fiscal trop lourd risque de les faire basculer
dans les déficits, ensuite, évidemment, dans la faillite ou la
liquidation.
Un deuxième facteur doit guider l'action des gouvernements, c'est
le facteur de la concurrence avec les sociétés comparables. Si
nous imposons aux sociétés au Québec un fardeau fiscal
trop lourd, bien, la firme qui est installée à Lachute ou
à Grenville, dans mon comté, que pensez-vous qu'elle va faire, M.
le Président? Elle va aller s'installer à Hawkesbury, de l'autre
côté. Puis, pendant les années plus grises qu'a connues le
Québec, un très grand nombre d'entreprises sont ainsi parties de
la région que je représente, moi, à l'Assemblée
nationale. On traversait à Hawkesbury; il y a seulement un pont à
traverser. Elles sont installées de l'autre côté, il n'y a
pas de frontière, et j'espère personnellement qu'il n'y en aura
jamais. Alors, elles s'installent de l'autre côté, puis même
s'il y en avait une, elles vont avoir les mêmes firmes de comptables
à leur service qui vont leur dire: Ça coûte moins cher de
taxes l'autre côté, va là. C'est pour ça que le
ministre des Finances a veillé, au cours des dernières
années, à ce que le fardeau des entreprises ne soit pas plus
lourd au Québec que dans la province de l'Ontario. Et, jusqu'à
cette année, nous avions réussi à réduire
l'écart entre les deux provinces, au chapitre des entreprises, à
pratiquement zéro et, au chapitre des contribuables, de l'impôt
sur le revenu des particuliers, à quelque chose comme 2 % ou 3 %.
Là, je n'ai pas les dernières statistiques parce qu'il y a eu le
budget de l'Ontario, il y a eu le nôtre, mais je pense que l'écart
va avoir été diminué encore un peu, parce que l'Ontario
s'est engagée dans un budget qui comporte des charges très
lourdes.
Alors, de ce point de vue là, nous avons fait un gros travail et
nous constations... En outre, il y a une troisième raison, c'est que,
dans l'impôt sur le revenu des particuliers, même les revenus des
sociétés, les gouvernements sont en butte à des pressions
continuelles. Il y a les producteurs de ceci, les vendeurs de ceci, les
résidents de telle place, les gens de telle catégorie
d'âge, les gens de telle catégorie sociale,
qui vont voir leur député, leur ministre, le ministre des
Finances: Donne-nous donc une petite exemption ici, donne-nous donc une petite
exonération là, donne-nous donc un petit cas d'exception
là. Et là, il y a tellement d'exceptions dans les lois
d'impôt sur le revenu, il n'y a personne, à part des comptables ou
des avocats très avertis, qui est capable de se retrouver
là-dedans. Le nombre de personnes qui peuvent faire leur rapport
d'impôt seules est de plus en plus limité. C'est tellement
compliqué que vous risquez de vous appauvrir en faisant ça
vous-même.
Puis les gouvernements se sont aperçus qu'on peut augmenter le
taux d'impôt sur le revenu, mais le rendement n'est pas correspondant
à cause de tous ce régime d'exceptions qu'il y a. Ça fait
qu'on s'est dit, dans les pays développés, pas seulement au
Canada, c'est une tendance qui est générale, on s'est dit: II
faut trouver un autre moyen d'accroître les ressources fiscales des
gouvernements; il faut y aller par des taxes qui vont toucher plus directement
les dépenses des citoyens. C'est pour ça qu'on va de plus en plus
vers les taxes à la consommation, quitte à dédommager des
citoyens moins riches en leur donnant des crédits d'impôt qui vont
faire qu'à toutes fins utiles ils seront exempts de ce fardeau. C'est ce
que nous faisons au Québec, c'est ce que le gouvernement
fédéral fait, c'est ce que font de plus en plus de gouvernements,
M. le Président, et c'est ainsi que nous sommes allés, au Canada,
vers un régime où la taxe de vente sur les achats à la
consommation occupe une place beaucoup plus importante désormais et
occupera peut-être une place encore plus importante à l'avenir.
Alors, c'est ce que nous faisons avec cette mesure-ci, c'est un exemple, nous
transférons ailleurs un fardeau qui n'avait plus sa place à cet
endroit-ci, nous confirmons la tendance suivant laquelle les gouvernements
orientent de plus en plus leur fiscalité du côté des taxes
à la consommation. Puis il y a une chose qui nous sera évidente
à tous et à toutes, je pense bien, c'est que celui qui est plus
riche, il dépense plus, puis, dans la mesure où à peu
près tout est taxé, bien, là, il va peut-être donner
plus d'argent qu'il n'en donnait seulement avec l'impôt sur le
revenu.
Moi, j'étais scandalisé de lire dans les journaux, de
temps à autre, que des millionnaires ne payaient pas d'impôt sur
le revenu. Vous avez lu ça comme moi, M. le Président. Des gens
qui ont des revenus de 50 000 000 $, 100 000 000 $ par année, ils ont
tellement de trucs dans leur sac, tellement de bons conseillers qu'ils
s'arrangent, au bout de l'année, pour n'avoir pas une cent d'impôt
à payer au gouvernement. Mais quand ils vont aller acheter un manteau de
fourrure, quand ils vont aller se payer un repas de luxe dans un gros
restaurant, quand ils vont aller passer une fin de semaine dans un endroit
luxueux, quand ils vont s'acheter une Mercedes ou une Buick, ils vont payer ces
taxes-là directement. Ils ne peuvent y échapper. Autrement, le
marchand va payer l'amende. Ils vont se faire prendre par le collet. Je pense
que c'est ça qu'il faut. Il faut que ceux qui dépensent plus
fournissent davantage à la caisse de l'État pour que
l'État puisse s'acquitter de ses obligations envers tout le monde.
Mais, dans le cas de l'industrie du divertissement, le gouvernement est
très sensible aux difficultés de ce type d'industrie, en
particulier les entreprises qui sont engagées dans le divertissement
d'ordre culturel ou artistique. Déjà ces entreprises se financent
en grande partie à l'aide de subventions du gouvernement. S'il fallait
que, d'un côté, on les subventionne et que, de l'autre
côté, on les surtaxe, ça n'aurait pas de bon sens, c'est
vraiment multiplier les opérations artificielles, donner de la
respiration artificielle d'un côté et, de l'autre
côté, leur enlever l'espace pour respirer. On s'est dit: On va
mettre un petit peu d'ordre là-dedans. La meilleure chose à
faire, c'est de réduire le fardeau fiscal des entreprises de
divertissement, de manière que l'activité soit plus abondante de
ce côté-là. Si le fardeau fiscal est moins lourd, à
moins que je ne sois complètement perdu dans la considération de
ces choses, c'est évident que les gens vont être plus
intéressés à y aller. Vous le savez, si on offre un
produit à 10 $ au lieu de 12 $, toute la théorie
économique nous enseigne qu'il y a plus de chances que le produit se
vende à 10 $ qu'à 12 $.
C'est la même chose pour l'événement culturel. Dans
la mesure où on peut garder le prix à un niveau plus raisonnable,
dans la même mesure, il y aura plus de chances que l'activité
abonde. Si l'activité abonde - ça, je voudrais le souligner
à l'intention des municipalités qui ont fait des
représentations au gouvernement à cet égard - s'il y a
plus de monde au spectacle à Montréal et à Québec,
si plus de monde se présente aux événements sportifs et
culturels, ça fait plus de monde qui va engager aussi des
dépenses reliées à leur participation à ces
événements, les présences dans les restaurants, achat de
programmes, dépenses de transport pour se rendre à
l'événement, etc. On encourage le développement de
l'activité. Je pense que, dans l'état actuel de notre
économie, c'est ce qui est le plus nécessaire. Il faut que les
gouvernements prennent les initiatives qui vont inciter de nouveau les citoyens
à faire des dépenses raisonnables, à mettre en mouvement
des activités de toutes sortes, que les promoteurs se sentent plus
encouragés à promouvoir, à réaliser et à
entreprendre, que les citoyens se sentent plus incités à
répondre aux invitations que leur font les entreprises. Quand la roue
tournera un petit peu plus vite et de manière un peu plus consistante,
je pense qu'il y a bien d'autres problèmes qui seront
réglés.
Avec les compensations que nous garantis-
sons aux municipalités, à l'aide du dernier discours sur
le budget, je pense que tout le monde, sans exception, a raison de se
réjouir de la politique annoncée par le gouvernement en ce qui
touche les droits sur les divertissements. J'espère que nous pourrons
examiner ce projet dans l'esprit constructs qui me semble s'imposer.
J'espère que nous penserons surtout - c'est le but de ceci - à
ces deux éléments fondamentaux, d'abord, le citoyen qui a besoin
d'activités de divertissement pour que sa vie soit
équilibrée, qui a besoin d'être encouragé à
participer normalement à des événements de son choix. Vous
remarquerez que le gouvernement ne fait pas de discrimination. Vous, vous aimez
mieux une partie de baseball, l'autre aime mieux un concert, l'autre aime mieux
un spectacle de ballet, l'autre aime mieux aller faire une visite au parc
safari. Tout ça va être compris dans la mesure que nous
annonçons aujourd'hui. Les droits sur les divertissements sont abolis
pour toutes ces catégories d'événements. Il n'y en a pas
qui sont classés comme étant supérieurs ou
inférieurs par le gouvernement. C'est tout le secteur du divertissement
qui sera appelé à bénéficier de cette mesure
éminemment salutaire à ce stade-ci.
Cette mesure, encore une fois, constitue, dans mon esprit, un
très heureux complément au travail qui a été
commencé l'an dernier avec la loi 145. D'autres mesures viendront en
temps utile établir clairement que le but du gouvernement, c'est
d'établir avec les municipalités un partenariat responsable qui
permette à l'un et à l'autre de promouvoir l'activité
humaine dans tous les domaines, d'en partager les fruits équi-tablement
entre les deux ordres de gouvernement, municipal et provincial, de
manière que toute notre société fonctionne de façon
plus heureuse et plus harmonieuse. Merci, M. le Président, (minuit)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre
des Affaires municipales. Alors, je rappelle aux membres de cette
Assemblée que nous en sommes à l'adoption de principe du projet
de loi 20, Loi abrogeant la Loi concernant les droits sur les divertissements.
Je reconnais M. le vice-président de la commission de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation et député de
Jonquière. M. le député, la parole est à vous.
M. Francis Dufour
M. Dufour: M. le Président, je pense qu'on vient
d'assister à une démonstration de la part du ministre des
Affaires municipales qui est impressionnante et surtout surprenante et
désarmante. À l'entendre parier, les abolitions de sources de
revenu pour les municipalités c'est une très bonne chose; il va
les asservir dans le futur à des subventions, il va les soumettre
à des subventions. Donc, il y aura un contrôle encore plus fort
sur ces municipalités, ce qui fait que ce sera des créatures sur
lesquelles on aura la mainmise et on décidera ce qu'on voudra.
Ça, ça me semble raisonner à faux. Si on l'écoute
attentivement, il va finir par nous faire croire qu'on est plus riches cette
année que l'an passé. Et pourtant, en 1985, lorsque le Parti
québécois était au pouvoir, le budget du Québec
était autour de 26 000 000 $. Après sept ans d'administration
libérale, le budget est rendu - que j'aurais dû dire 26 000 000
000 $ - actuellement à 40 500 000 000 $. Si on met le transfert qu'on a
fait aux municipalités et aux commissions scolaires, c'est pratiquement
42 000 000 000 $. Donc, une augmentation d'environ 60 %. Et on va nous faire
accroire et on vient nous dire que les gens, ils sont plus riches. On a
parié ex cathedra. Dieu le Père a parié. On a dit: C'est
une bonne chose d'abolir des sources de revenu autonomes aux
municipalités, on va remplacer ça par des subventions, et des
subventions qui vont couvrir seulement la moitié de ce qu'on leur
enlève. Et on dit que c'est une bonne chose. Ça va permettre aux
gens d'aller aux spectacles et que ça coûte moins cher. Mais qui
va nous faire accroire ça?
Voulez-vous on va faire un retour en arrière, les deux
dernières années? Quels étaient les montants de taxe que
les citoyens payaient pour aller à un spectacle? C'était 10 %, le
fédéral n'était pas là. Entre-temps, le
fédéral a réussi à s'introduire par une taxe de 7
%. Le gouvernement du Québec a décidé que, lui, il prenait
4 %. Il taxe la taxe parce qu'il ne s'en contente pas. C'est 4,28, donc, 11,28
au lieu de 10 % il y a deux ans. Et on dit aux gens du spectacle: Voyez comme
vous êtes bien traités. Ça ne leur coûte pas moins
cher aux citoyens, c'est 1,28 % de plus. Ce qui est pire dans tout ça et
ce qui est plus aberrant c'est d'écouter le ministre des Affaires
municipales qui dit: On ne peut rien faire avec Ottawa. Ottawa a
décidé; on ne négocie pas, on se plie, on est à
quatre pattes devant le gouvernement fédéral et on accepte qu'il
vienne taxer la culture et nous autres on s'évacue du champ de la
taxation et on prend notre trou. C'est ça qu'on a fait, c'est ça
qui est inacceptable.
Le ministre aura beau avoir les discours qu'il voudra, il aura beau
faire accroire ce qu'il voudra aux gens, une chose est certaine, on a
dénoncé la loi 145 qui s'attaquait à la fiscalité
des municipalités et c'est cette attaque qu'on a dénoncée.
Le ministre, pas plus tard qu'il y a environ un mois, se réjouissait,
lorsqu'on a étudié les crédits du ministère des
Affaires municipales, que les gens n'aient pas réussi à monter
suffisamment aux barricades pour faire trembler les colonnes du temple pour
renverser le gouvernement. Je pense que c'était ronronner ou claironner
un peu rapidement et faire un constat trop superficiel des effets pernicieux,
des
effets bâtards, je pourrais dire, des taxes de la loi 145 qui
s'attaque aux municipalités.
On voit bien aujourd'hui que ce n'est pas fini. On a commencé par
enlever des sommes d'argent aux municipalités et on continue. J'avais
dit, à ce moment-là: Je pense, M. le ministre, que vous devriez
attendre une couple d'années avant qu'on puisse faire le constat de ce
que vous a donné une action aussi à courte vue, et le transfert,
non pas de responsabilités, le transfert de factures aux
municipalités. Et c'est ça qu'on continue à faire. Vous
savez, on peut bien avoir le pas tout seul, mais je pense que c'est dangereux,
dans une démocratie, que tout le temps il y ait seulement une personne
qui peut décider ex cathedra que tout ce qu'on fait c'est bien et tout
ce que les autres font c'est mal, le bien et le mal. Avec le ministre des
Affaires municipales il n'y a pas de choix, il n'y a pas de zone grise, c'est
bien ou c'est mal. Nous on est le mal, lui il est le bien, même si,
lorsqu'on regarde directement les actions qui sont posées, toutes les
tractations qui sont faites autour des loi, il n'y a rien là! On l'a
écouté tout à l'heure, sa loi c'est très bon. Si
c'est bon, pourquoi est-ce que les unions municipales, l'Union des
municipalités du Québec demande à être entendue sur
la loi 20, sur la loi 22 et la loi 37? Probablement parce que les
municipalités sont très contentes, très heureuses de ce
qui se passe, et elles sont bien reconnaissantes envers le ministre des
Affaires municipales, envers le gouvernement pour chaque jour faire leur
génuflexion et venir en commission parlementaire pour louer les actions
efficaces, raisonnables, amoureuses, je pourrais dire, du ministre des Affaires
municipales envers ses municipalités qu'il aime tellement bien qu'il est
en frais de les étouffer. C'est ça qui est en frais de se passer.
Il aura beau nous dire: J'ai remplacé ça par ci, j'ai
remplacé ça par ça, la taxe sur les immeubles. C'est
drôle de remplacer des taxes qui leur appartiennent par d'autres. Il a
dit: Écoutez un peu, ça faisait trop longtemps que ça
durait, depuis 1917 que ces taxes-là existaient, la taxe sur les
divertissements, et on l'abolit, et ce n'est pas plus grave que ça, on
tourne la page, les municipalités ont juste à se plier.
Vous savez, dans tout ça, il y a des dangers. La loi 145 ce n'est
pas le ministre des Finances qui l'a établie, c'est le ministre des
Affaires municipales qui a voulu l'imposer, et c'est lui qui l'a fait. Moi, je
commence à penser qu'il y aura des échéances à
quelque part. C'est impensable que quelqu'un ait toujours raison envers et
contre tous. Il peut bien ramer contre le courant, à un moment
donné il va partir dans la tempête. Il faudra bien qu'il se rende
compte qu'il est dans la tourmente et qu'il va aller dans la houle, il va finir
par aller dans le remous. Vous savez ce que ça fait quand on entre dans
un remous? Dans un remous on vire, on vire, on vire et on cale au fond. Et
c'est ça qui va lui arriver au ministre des Affaires municipales parce
que pour moi ce n'est pas vrai qu'on puisse dire au monde que c'est des bonnes
actions qu'on a faites. On aura beau essayer de faire les démonstrations
les plus savantes qu'on voudra, mais allons donc dire aux citoyens que
ça leur coûte moins cher. Allons leur dire que taxer sur la
consommation, sur les biens... bien sûr que la personne qui a plus de
moyens va payer, mais vous savez que les personnes qui sont riches elles
mangent juste trois repas par jour, comme les personnes qui sont pauvres
peut-être qu'elles en mangent seulement deux. Elles mangent
peut-être deux repas par jour, le riche en mange trois. Mais règle
générale il y a plus de pauvres que de riches, donc il y a des
chances que par les taxes sur la consommation on ne touche pas vraiment le
coeur de ceux qu'on veut taxer. Et je ne pense pas que ces taxes-là, si
c'est vrai, regardons par où on va aller chercher le plus de taxes,
c'est toujours sur la classe moyenne. Ce n'est pas sur le riche, ce n'est pas
sur le pauvre, c'est sur la classe moyenne. Ça c'est
démontré depuis toujours, et on pourra bien nous accuser de ne
pas savoir compter, mais, pour ceux qui savent compter, on a 4 000 000 000 $ de
déficit régulièrement depuis les sept dernières
années, la taxation avec l'Ontario, on a encore autant de
différence qu'on avait il y a sept ans.
On a profité de conjonctures, on s'est flatté, on s'est
gargarisé en disant: Voyez comme on est bon, voyez comme on est fin,
voyez comme on est intelligent. La flagornerie ça finit toujours: crache
en l'air tombe sur le nez. Je sais qu'il y a quelqu'un qui dit des fois: On
crache des deux côtés de la bouche en même temps et
ça crache dans le dos, mais j'ai beau essayer d'imaginer ça je ne
l'ai pas trouvé. Mais je sais par exemple que quelqu'un qui crache en
l'air ça lui tombe sur le nez, et je trouve que le gouvernement commence
à en avoir pas mal sur la tête et pas mal sur la gueule des
crachats, parce qu'il s'est flatté, il en a dit des choses. Aïe
nous autres on connaît ça! Et je pense qu'à partir de
maintenant, et déjà depuis quelques années, les citoyens
commencent à se rendre compte que c'est un gouvernement de peureux,
c'est un gouvernement soumis, un gouvernement qui ne gouverne pas, un
gouvernement qui de moins en moins occupe de la place dans la
société. C'est un gouvernement qui laisse les pauvres de plus en
plus pauvres et en même temps c'est un gouvernement qui taxe de plus en
plus, qui va chercher à travers les pauvres, pas nécessairement
des revenus, mais coupe des services à des citoyens les plus
démunis, ceux qui sont les plus sans défense. (Oh 10)
Vous savez, je sais qu'il y a beaucoup de citoyens qui se posent la
question à savoir si le ministre des Affaires municipales pourrait
changer quelque part. Est-ce que vraiment on peut
toujours railler ou prendre les gens pour ce qu'ils ne sont pas en
croyant que nous, ça ne cause pas de problème? La réforme
de la fiscalité municipale, le ministre en a parlé abondamment.
Je peux lui en parler aussi quelque peu.
Vous savez comment le gouvernement se comporte avec les
municipalité vis-à-vis de la taxation, vis-à-vis des taxes
foncières? On avait reconnu un droit, c'était que les
gouvernements, par rapport aux municipalités, se comportent comme des
contribuables à part entière. Vous savez comment il s'est
comporté, ce gouvernement-là, depuis les dernières
années? Il a décidé d'abord qu'il payait moins
d'impôt ou moins de taxes sur les réseaux d'éducation. Il a
décidé qu'il payait moins cher. Il a aussi, en même temps,
pris une action que je trouve déplorable parce que, non seulement il ne
paie pas 100 % de ses taxes, mais, où il paie, il veut en payer le moins
possible. J'ai justement un article ici qui dit que Hull doit rembourser 500
000 $ de taxes. C'est sur quoi? Sur les réseaux. Ça, c'est sur la
prison. C'est la valeur foncière. Cégep de l'Outaouais et prison
de Hull qui sont réduits de 50 % de taxation; cela prive la ville de
Hull de 50 % de revenus concernant ces bâtisses. Et cette
action-là qu'on fait à Hull, on la fait dans l'ensemble du
Québec. Tantôt, on conteste les HLM, tantôt, on conteste le
réseau scolaire, les hôpitaux, les écoles et on fait
ça dans tout le Québec. Donc, en même temps qu'on
enlève des sources de revenu aux municipalités, en même
temps qu'on paie moins de taxes, qu'on ne paie pas 100 %, qu'on est de moins en
moins contribuables à part entière, en même temps qu'on
fait ça on coupe des sources de revenu et on voudrait que les
municipalités viennent encenser, glorifier ce gouvernement. Je pense
qu'à ce moment-là il faut raisonner et
réfléchir.
On croit qu'il y a seulement ça en cause. Le gouvernement du
Québec a décidé, dans les mêmes actions, de faire
payer aux municipalités une partie de l'administration des corps
policiers avec aucun service supplémentaire, avec aucun pouvoir de la
part des municipalités sur leur corps policier. Il y a un principe
fondamental élémentaire lorsqu'on dit «no representation
without taxation». C'est clair que lorsque quelqu'un paie il a son mot
à dire. Et, en allant chercher des sources de revenu ou des montants,
des sommes d'argent des municipalités pour faire payer l'administration
des corps policiers sans qu'en retour les municipalités aient leur mot
à dire, ce n'est pas un transfert de responsabilités, c'est, hors
de tout doute, à mes yeux et aux yeux de l'ensemble de la population,
vraiment faire payer aux municipalités un service purement et simplement
et ça, c'est déplorable.
Ce n'est pas la seule action que ce gouvernement-là a faite. On
commence à faire payer pour les services policiers. L'an prochain, 1er
janvier... On s'est promenés dans toute la grandeur du Québec
pour dire qu'à l'avenir les municipalités vont prendre en charge
leur réseau routier. C'est possible que ce soit une
responsabilité municipale en partie, parce qu'il y aura toujours les
routes intermunicipales, les routes à caractère régional
qui sont l'apport du gouvernement. Mais changer une habitude ou une coutume qui
dure depuis toujours, d'une façon unilatérale comme on l'a fait,
sans s'assurer d'abord c'est quoi remettre le réseau routier en
fonction, en état normal, c'est quoi, les prix, s'assurer aussi que les
municipalités seraient capables d'exercer cette responsabilité
nouvelle, il faut croire que... pas l'intelligence, mais les capacités
de gérer, ça vient spontanément à des
administrateurs municipaux puisque le ministre des Affaires municipales a
décidé qu'à l'avenir les municipalités exerceront
ce pouvoir-là. Est-ce qu'on s'est assuré, premièrement,
que le réseau routier est en bon état? Est-ce qu'on s'est
assuré que les municipalités ont le moyen de payer ces
coûts-là, et est-ce qu'on s'est assuré qu'à l'avenir
on pourrait être capable de le faire d'une façon décente?
On sait que le gouvernement lui-même n'est pas acapable d'entretenir son
réseau routier, malgré toutes les taxes qu'il a perçues
dans les dernières années, des milliards qu'il est allé
chercher dans les poches des contribuables. Il n'entretient pas son
réseau. Puis il y a une partie qu'il va délaisser aux
municipalités.
Qu'est-ce qu'on fait pour empêcher les gens de trop crier, pour
empêcher un peu la montée aux barricades? Le ministre des Affaires
municipales s'est assuré qu'il va avoir un montant d'argent disponible
pour pouvoir récompenser ceux qui se comporteront comme il faut. Il y a
des millions qui vont se promener dans les poches... Comme le Père
Noël, il va se promener sur le territoire. Il va dire: Bien, si vous avez
besoin, faites-moi la démonstration. Si vous êtes gentils, je vais
en donner; si vous n'êtes pas gentils, je ne vous en donnerai pas.
Savez-vous, ça ressemble à l'époque de Duplessis,
ça! Dans le temps de Duplessis, c'était de même que
ça se passait. On faisait des pèlerinages. On est revenu à
cette époque-là. C'est surprenant d'avoir autant
décrié la façon ancienne de procéder et qu'on
revienne exactement dans les mêmes ornières et dans les
mêmes façons de faire. C'est condamnable, et on voit bien que le
gouvernement est essoufflé. Il n'y a pas d'autre méthode pour lui
d'aller chercher du revenu que d'augmenter les taxes, de faire payer par les
autres, de couper les services, trois méthodes qui sont
irréversibles. Sept ans qu'on subit ça ici, sept ans que la
population le subit, sept ans que nous, comme Opposition, on voit cette
démarche implacable, je pourrais dire sans coeur vis-à-vis des
gens, et tout le temps de la même façon, et tout le temps avec le
genre supplice.
Vous savez, il y a des problèmes. Le ministre des Affaires
municipales, au lieu de vouloir s'attaquer à briser ce qui existe,
d'es-
sayer de débâtir la réforme de la fiscalité
où il aurait pu faire oeuvre plus utile... Il aurait pu. Je pensais, M.
le Président, que j'avais droit à une heure comme critique.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, vous êtes le
représentant. Allez-y. Vous avez droit à une heure, en effet, M.
le député de Jonquière. Je m'excuse, 60 minutes.
M. Dufour: II aurait pu, M. le Président, comme ministre
des Affaires municipales, faire oeuvre utile, beaucoup plus importante, pour
les municipalités. Avec toute la crédibilité que certaines
personnes lui reconnaissent, il aurait pu s'attaquer aux vrais problèmes
qui touchent les municipalités, aux vrais problèmes qui
confrontent les régions, aux vrais problèmes qui confrontent
l'ensemble de la population au lieu de faire des démonstrations savantes
à l'effet que ça coûte moins cher quand je peux lui dire,
dans deux mots, que les 7 %, les 10 % que les gens payaient voilà deux
ans c'est rendu à 11 %, 11,28 %. Il ira dire ça aux gens du
spectacle que ça coûte moins cher. Bien sûr que le
Québec va en retirer un peu moins. Mais, effectivement, le spectacle,
c'est 1,28 % de plus, ce n'est pas moins.
Et ça, vous savez ce que ça donne dans le système,
dans une municipalité, ville comme Aima au Lac-Saint-Jean? C'est une
petite municipalité. Mon collègue de Lac-Saint-Jean... La ville
d'Aima, donnait au-dessus de 100 000 $. Et ça, je suis certain que mon
collègue qui est critique aux Affaires culturelles va
apprécier... une ville comme Aima trouvait le moyen de donner 100 000 $
pour une salle de spectacle qui donnait 21 spectacles dans l'année pour
les citoyens non seulement d'Alma, mais aux alentours. Vous savez que, cette
année... Vous savez c'est quoi la subvention pour la salle de spectacle?
C'est zéro. Est-ce que c'est parce que les municipalités sont
plus riches qu'avant ou bien c'est parce qu'elles sont plus pauvres? Pour la
question, c'est y répondre. (0 h 20)
Le ministre aimait ça, le baseball. Je vais lui en parler. Vous
savez, à un moment donné, ça ne fait pas tellement
longtemps, le club de baseball de Montréal, les Expos, était en
difficulté. Il avait besoin de fonds, d'entrée de fonds, puisque
son propriétaire voulait vendre l'équipe et tout ce qui
l'entoure. Il a eu un groupe d'hommes d'affaires, accompagnés de la
ville de Montréal, qui se sont offerts à acheter les Expos. Et la
ville de Montréal, bien sûr, reconnaît... On doit
reconnaître que les Expos ne sont pas une grande équipe, mais son
rayonnement dans l'ensemble de l'Amérique permet une certaine
visibilité à la métropole québécoise. Je
pense que son club de baseball, c'est un actif non seulement pour
Montréal, mais pour le Québec. À ce moment-là, la
ville de Montréal, par la voix de ses élus, a voulu s'engager
à maintenir l'équipe de baseball dans la ville de
Montréal. Pour ce faire, elle avait besoin d'une loi pour lui permettre
d'investir 15 000 000 $ pour garder les Expos à Montréal.
À ce moment-là, lorsqu'on a étudié le projet de
loi, j'avais suggéré que 15 000 000 $, c'était le montant
maximum que la ville de Montréal puisse engager. Ne nous leurrons pas,
c'est plus que 15 000 000 $; si la ville de Montréal voulait, elle
pourrait dépasser ces 15 000 000 $, et on n'aurait rien à dire
puisque la loi lui permet de prêter plus ou de s'engager pour plus que 15
000 000 $ pour le maintien des Expos à Montréal.
Pourquoi la ville de Montréal pouvait le faire? Non seulement
pour attirer le tourisme, non seulement pour amener des gens autour d'elle,
pour avoir plus de visibilité, au point de vue publicitaire, pour
encourager l'activité économique, mais aussi la ville de
Montréal recevait, en frais de divertissement, 1 800 000 $ de revenu. Ce
n'est pas compliqué, 1 800 000 $, ça pouvait couvrir les
intérêts, et plus, des 15 000 000 $ que la ville de
Montréal a avancés pour garder l'équipe de baseball
à Montréal. Et ça, c'étaient les règles
connues il y a trois ans. Et, en un tournemain, le ministre des Affaires
municipales vient de faire disparaître la source de revenu. La seule
façon qu'il a c'est de nous dire: II va peut-être en venir plus -
c'est ce qu'on ne sait pas, c'est aléatoire - et au lieu de donner 1 800
000 $, ce sera environ 900 000 $, parce que, nous, on va couvrir 50 % des
revenus que la municipalité avait. Et, rassurez vous! les quatre
prochaines années, on va vous donner les 50 %. Donc, cette année,
ça va coûter 6 500 000 $ pour l'ensemble du Québec; le
reste, les quatre autres années, c'est 13 000 000 $. Comme si les
coûts des municipalités, ça n'augmentait jamais. Il y a une
indexation; elle n'est même pas prévue. Ce n'est pas une
indexation, c'est 13 000 000 $; on appelle ça un plancher et un plafond.
C'est 13 000 000 $, c'est à prendre ou à laisser.
Les coûts des spectacles, que je sache, ils ont augmenté.
Les coûts des billets pour aller à une pièce de
théâtre ne sont pas les mêmes cette année qu'il y a
cinq ans, ça a varié. Le ministre, lui, il dit: Non, moi, j'ai
coulé dans le béton que c'est 13 000 000 $ que vous aurez, et
soyez bien contentes parce que vous ne perdez pas grand-chose, on vous en
rajoute. On vous a rajouté de l'argent, ce n'est pas grave, ça.
Ce n'est jamais grave, avec le ministre des Affaires municipales, c'est
toujours bénin, ce n'est jamais une opération dangereuse, parce
qu'il a décidé.
Il est allé à Oka. Vous savez ce qu'il a dit, là.
Il y avait l'armée. Ils ont acheté des armes, un peu de tout; il
n'y a rien là. Vous voulez vous promener à Châteauguay, M.
le Président? On n'en entend jamais parler. Les gens, dans ce
coin-là, pas de problème, le ministre veille sur
eux par la Sûreté du Québec. Mais quand on va voir
ces gens-là... Vous irez, je vous invite à aller vous promener
à Châteauguay. Allez parler avec les gens autour, vous allez voir
ce qu'ils ressentent. Vous allez voir que le ministre des Affaires municipales,
il peut peut-être nous tromper, nous, peut-être nous convaincre
qu'il n'y a rien là, mais il ira voir ces gens-là. Et c'est de
même dans tout. Il n'y a jamais de problème avec le ministre des
Affaires municipales, il y a juste des solutions, des solutions
spéciales parce qu'elles reçoivent sa bénédiction,
c'est consacré, c'est nouveau, il faut l'accepter, c'est la bonne, il
n'y en a pas d'autres. Il ne faut pas discuter de ça, c'est vraiment son
attitude. Et ça devient, à un moment donné, je pense,
déplaisant. Je pense bien que, de moins en moins, les gens vont se
laisser convaincre par un ministre qui, d'un côté, dit: Ça
ne coûte pas plus cher, et les gens, en recevant leur compte de taxe qui
sont haussés de 20 %, de 30 % ou 50 %, pas pour l'ensemble... Ça
ne se fait pas tout comme ça, là. Mais ces hausses-là,
ça finit par faire mal et ça finit par être
dérangeant.
Vous le savez, on l'avait dit, la loi 145 a des effets pernicieux, a des
effets dévastateurs. Et ces effets-là se continuent de plus en
plus et vont s'additionner et vont amener les gens à se questionner. Et
j'avais dit, à ce moment-là, que, si les municipalités ne
faisaient pas attention, c'est qu'au bout de deux ans, trois ans ce n'est plus
le gouvernement qui sera responsable, ça sera les municipalités
qui seront de mauvais administrateurs. Ça sera les municipalités
qui seront responsables. Et il faut bien le constater... Il faut constater avec
beaucoup de clairvoyance que, actuellement, les municipalités sont dans
le colimateur du gouvernement du Québec et ont de moins en moins
d'autonomie puisque le ministre nous dit qu'ils n'ont jamais enlevé rien
aux municipalités. C'est un bel exemple. Il n'y a pas tellement
longtemps le ministre nous disait qu'ils n'avaient jamais rien enlevé
aux municipalités. Ils leur avait seulement donné des
responsabilités. Et ça, ça s'est dit avec beaucoup de
certitude. Puis je pense que c'est difficile de le contrarier au moment
où il dit ça parce que ça semble vrai. Il a l'air vrai
quand il dit ça. Simplement un fait qu'on a devant nous, la loi 20 qui
nous est présentée ce soir enlève des choses aux
municipalités. On leur enlève une source de taxation. C'est
important pour une administration d'être autonome et de savoir
d'où proviennent ses revenus, et de savoir aussi... Ça va
complètement à l'encontre de la responsabilité de
l'autonomie municipale.
Vous savez, lorsque la loi... En 1979, la loi 157 de la fiscalité
municipale avait pour effet de responsabiliser les élus par rapport aux
citoyens. Et on est en frais de tout mettre ça par-dessus bord. C'est
ça qu'on est en frais de faire. On est en frais de donner des
responsabilités supplémentaires sans source de revenu
correspondante. Et ça, ça va vraiment à l'encontre des
désirs et des volontés municipales. On aurait pu agir autrement.
Le ministre des Affaires municipales aurait pu choisir, comme ministre
responsable des municipalités, d'aller dans des dossiers
différents. Il aurait pu s'attaquer au problème de
l'étalement urbain. Il aurait pu s'attaquer à la construction, au
logement. Et il pourra nous répondre: Oui, je le fais, mais
dépendant de l'attitude d'Ottawa, encore là. C'est toujours
dépendant d'autre chose. Il aurait pu décider de régler
les problèmes que les municipalités ont avec l'évaluation.
Ce n'est pas réglé, l'évaluation au Québec. Le
problème de la réforme de la fiscalité, ce n'est pas
réglé. Les problèmes que les municipalités
rencontrent avec les industries, c'est loin d'être réglé.
L'article 65.1 a autant de problèmes qu'au début de la loi.
Ça n'a pas commencé seulement en 1979, l'article 65.1. C'est
commencé depuis 1973. Ce n'est pas réglé, même si le
ministre nous a dit à quelques reprises: Je vais m'attaquer à
ça.
On a eu un mandat d'initiative de la commission de l'aménagement
et des équipements. Et on a demandé au ministre des Affaires
municipales, dans notre rapport, qu'il s'attaque à ce
problème-là, un problème qu'on trouve crucial. Et on n'a
pas de réponse. On ne sait pas quand on aura la réponse. Parce
que là ça pourrait être de nature... Parce que
c'était ça lorsqu'on avait fait la réforme de
l'évaluation foncière. C'était pour donner plus de revenus
aux municipalités. Mais là on se rend compte facilement que,
depuis que le gouvernement est en place, ce n'est pas de leur en donner plus,
c'est de prendre cette loi-là et de la ratatiner le plus possible pour
en enlever le plus possible. Vous savez, même au congrès des
évaluateurs municipaux, ils nous disent que c'est plus difficile de
faire de l'évaluation parce qu'il y a des problèmes de baisse de
marché. Comment les... (0 h 30)
Pourquoi on a de la difficulté, par exemple, à
évaluer? Pourquoi la ville de Hull est obligée de rembourser 500
000 $ sur la prison et le cégep et la ville de Jonquière, 3 500
000 $. Parce que c'est pas les mêmes évaluateurs qu'on a à
Jonquière puis Chicoutimi, les mêmes que dans la région de
Hull. Donc, est-ce qu'on va dire que tous les évaluateurs ne sont pas
bons et font de mauvaises évaluations ou si on va dire que c'est
plutôt les barèmes, les normes sur lesquelles on s'appuie qui sont
fausses, qui sont mal faites, ce qui fait que ça donne comme
résultat que les évaluations ne sont pas correctes?
Ça, ça a pour effet d'enlever aux
municipalités...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant, M. le
député de Jonquière. Oui, M. le député de
Rimouski.
M. Tremblay (Rimouski): M. le Président,
question de règlement. Je demanderais la pertinence du
débat. Le député de Jonquière, depuis tout à
l'heure, nous parle d'évaluation foncière. On est sur le projet
de loi 20, Loi abrogeant la Loi concernant les droits sur les divertissements.
Il est complètement en dehors du sujet. Je demanderais la pertinence du
débat, s'il vous plaît.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je pense qu'à
date, de façon générale, le député de
Jonquière s'en tient au projet de loi, qui est très vaste. C'est
une réponse à l'intervention principale du ministre. À
date, je considère qu'il est pertinent. Continuez, monsieur.
M. Dufour: Je vous remercie, M. le Président, de la
justesse de votre jugement. Si le député de Rimouski avait
été ici lorsque le ministre des Affaires municipales a
parlé, il se serait rendu compte qu'il a été le premier
à toucher la fiscalité et qu'il a parié de la loi 145. Ce
dont je parle, c'est rattaché avec la loi 145. Je le dis, mais pas pour
vous, vous avez compris, mais je le dis pour le député de
Rimouski, à son profit, parce que, lui, il faudrait lui faire
comprendre.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Effectivement, de façon à ce que M.
le député de Rimouski apprécie la justesse des propos du
député de Jonquière, je vous demanderais de
vérifier le quorum.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle les
députés.
Alors, allez-y, M. le député de Jonquière.
M. Dufour: Je vous remercie. J'étais à dire que le
ministre des Affaires municipales aurait pu décider et choisir de
s'attaquer aux vrais problèmes qui confrontent les municipalités,
et, pour moi, le problème de la fiscalité municipale en est un de
fait et en est un réel. Le ministre des Affaires municipales aurait pu
choisir d'améliorer la fiscalité en appliquant ou en trouvant des
normes qui permettent au gouvernement de mieux remplir son devoir de citoyen en
payant ses taxes. Il a décidé de couper une partie de ses taxes
et, en même temps, il a décidé de contester. Ces
contestations-là se font dans toutes les régions du
Québec, ce qui fait que le gouvernement paie de moins en moins de taxes
et les municipalités sont obligés de les transférer, vous
comprendrez. C'est facile à comprendre, c'est des vases communicants. Il
y a moins de revenus, mais ça ne coupe pas nécessairement les
dépenses des municipalités. Donc, les municipalités n'ont
qu'une façon d'aller chercher des revenus, c'est de hausser les taxes de
leurs citoyens. Un bel exemple de ça, ça, c'était pour les
municipalités, mais le gouvernement ne s'est pas contenté de
ça, il a dit: II faut que j'aille un peu plus loin. Au lieu de
s'attaquer au problème de l'étalement urbain, il a
décidé de le favoriser en coupant les subventions au transport en
commun. Il y a eu une unanimité rare ou une rare unanimité
concernant le transport en commun, où des intervenants sont venus,
l'ensemble des intervenants - il n'y a pas des intervenants qu'on peut choisir
- tous les intervenants sont venus nous dire en commission parlementaire qu'ils
s'opposaient aux coupures de subventions au transport en commun. Le ministre a
décidé d'y aller pareil. Et pourquoi il y est allé? Encore
pour aller chercher, pour remplir un court de caisse, pour essayer de renflouer
les coffres gouvernementaux. Et Dieu sait si ces coffres-là sont
toujours taris.
Le gouvernement du Québec est presque... il est à la
remorque du fédéral parce que plus il taxe, moins il a d'argent.
Plus les revenus augmentent, moins il a d'argent et plus on crée du
chômage, plus on cause des problèmes, et on aurait pu se forcer le
coco pour trouver d'autre chose que taxer ou couper les taxes, les revenus aux
municipalités pour améliorer leur sort. La loi 20 qu'on
étudie ce soir, qu'on s'apprête à étudier va
exactement dans le même sens. On recule devant Ottawa. Depuis sept ans,
ça a été un recul constant vis-à-vis de l'intrusion
du fédéral dans les champs de compétence du Québec.
On n'a jamais vu un gouvernement aussi peureux, aussi peu actif
vis-à-vis de sa perte d'autonomie ou vis-à-vis de l'intrusion
d'un autre ordre de gouvernement à travers des actions qui se passent
sur son territoire. Et on a l'a fait en disant: On ne peut rien faire. Donc,
ça nous démontre que non seulement le gouvernement est peureux,
mais que c'est un gouvernement impuissant; impuissant, puisqu'il ne peut pas,
il n'y a jamais de discussion sur la place publique pour essayer de faire
reculer le gouvernement. Les représentants qu'on a à Ottawa,
c'est des serviteurs - je pourrais dire - à tout crin pour servir le
fédéral, mais ils ne protègent pas beaucoup les
intérêts québécois. Et, par rapport à
ça, on va le chercher, on est en frais d'enlever le peu d'instruments
qu'on avait.
Pourquoi les taxes sur les divertissements? Je trouve que ça fait
mal aux municipalités. C'était la seule façon que les
municipalités avaient de justifier, et d'une façon
mathématique, à leurs contribuables que c'était bien et
que c'était une bonne chose d'aider la culture. D'une part, les
municipalités recevaient des montants d'argent que les gens venaient
payer, non seulement les gens de la place, mais les gens autour. Donc, pour une
fois, il y avait une espèce de répartition à
caractère régional pour des activités qui se faisaient ou
qui se tenaient dans un milieu donné. Et ça permettait, en
retour, aux municipalités de décider, de choisir d'aller dans ces
champs-là pour aider la culture,
pour aider les gens qui font la culture et, en même temps,
favoriser l'éclosion de talents qui, j'ai peur, dans la futur, n'auront
pas cette même chance. Les municipalités vont avoir peur de
s'embarquer dans le domaine. J'espère que je me trompe. J'espère
que les municipalités vont continuer à favoriser l'art sous
toutes ses formes. Je le souhaite ardemment, mais je ne peux pas le garantir
parce que, vous savez, le pain et le beurre c'est une chose; la culture, c'en
est une autre. On peut avoir les deux, mais, s'il y a à choisir, c'est
vivre ou aller un peu plus loin sans les moyens, à ce moment-là,
posons-nous pas de questions.
Les municipalités, il y en a quelques-unes, déjà,
qui ont décidé de couper dans la culture puisqu'elles ne peuvent
pas le justifier ou qu'elles n'ont pas cette volonté. Si, d'une part, on
leur enlève des moyens et qu'on leur donne d'autres obligations, des
obligations supplémentaires, ne cherchons pas, les municipalités
feront bien ce que l'autre gouvernement leur fait et les deux autres
gouvernements leur font régulièrement, ils leur font la passe,
parce que non seulement on augmente les taxes, mais aussi, en même temps,
on coupe des services. Donc, on est pénalisé deux fois. Si, comme
contribuables, les taxes augmentent et qu'on conserve nos services, on peut
dire: On a une pénalité. Mais, si on fait les deux choses en
même temps, on est pénalisé deux fois. (0 h 40)
Le ministre vient nous prétendre que taxer la consommation,
ça favorise des activités économiques et ça permet
aux riches de payer plus. Bien là, la démonstration n'est pas
forte, forte, parce que les pauvres ou les gens qui sont plusieurs à
table vont payer plus que une ou deux personnes. Moi, je pense qu'un riche,
quel qu'il soit, peut payer des taxes, mais il pourrait en payer probablement
plus si c'était mieux réparti. Pour moi, la source de revenus
d'un gouvernement est bien plus sur l'impôt, pour une répartition
de la richesse, que sur la taxe à la consommation. C'est tellement vrai
que, pour la culture, c'est ceux qui en profitent qui paient des taxes.
C'était ça, la taxe de divertissement. Le ministre a dit: Ce
n'est pas une bonne taxe, mais ils la gardent pour eux autres. Si elle n'est
pas bonne, pourquoi la prennent-ils? Si c'est une taxe désuète -
et c'était ça, l'argumentation qu'ils nous ont
présentée ce soir, la taxe de divertissement, c'est une vieille
taxe, ce n'est pas bon - si elle n'est pas bonne, pourquoi le gouvernement du
Québec la conserve? Il faudra bien qu'ils nous démontrent,
là, si elle est bonne pour lui et qu'elle n'est pas bonne pour les
autres, c'est quoi qui n'est pas bon. Est-ce que c'est parce que ce sont les
municipalités qui vont la chercher puisque c'est meilleur parce que
c'est le gouvernement du Québec ou Ottawa qui iront la chercher? Moi, je
ne comprends pas. Si la taxe n'est pas bonne pour les municipalités,
elle n'est pas meilleure pour le gouvernement.
On ne veut pas donner aux municipalités l'impôt sur le
revenu. Les municipalités seraient peut-être contentes d'avoir de
l'impôt sur le revenu. On a trouvé bon que ce n'était pas
leur source de taxation. On a décidé que l'impôt sur le
revenu, c'était leur principale source de taxation; la deuxième
chose, c'étaient toutes les taxes immobilières. C'était
ça, la principale source de taxation des municipalités. Il y a
d'autres taxes, qui sont la taxe de vente immobilière, la taxe de
bienvenue, qu'on appelle, qui est si mal nommée. Ça aussi, c'est
une source de revenus. Ce n'est pas la seule. Il y a la taxe sur les permis. On
va décider tantôt d'augmenter les amendes. On vient de
décider que les municipalités, ce sont des perceptrices
d'amendes, des collectrices d'amendes des citoyens, autrement dit. Moi, je
trouve que c'est presque immoral. J'aurai l'occasion d'en parler avec le projet
de loi 22. Mais je peux vous dire que je ne crois pas que tout ce qu'on a fait
avec la loi 145 puisse se comparer avec la loi 157 de la fiscalité
municipale qui, elle, vraiment, avait un but. On avait dit d'avance, le
gouvernement avait dit d'avance pourquoi il le faisait. Il avait dit que,
premièrement, il voulait augmenter l'autonomie des municipalités;
deuxièmement, il voulait que les administrations municipales soient
responsables de leurs actes. Et il avait obtenu les buts qui étaient
recherchés. C'était tellement bien exprimé qu'après
10 ans, 12 ans, 97 % des revenus des municipalités provenaient de
sources autonomes. Donc, au point de vue de l'Amérique et probablement
d'autres parties, d'autres contrées dans le monde, le Québec
était en avance et de beaucoup sur la façon, sur les moyens qu'il
avait fourni aux municipalités pour mieux se gérer, pour mieux
s'administer. Ça, c'était faire oeuvre utile puis faire oeuvre de
responsabilité. Je ne prétends pas qu'il n'y avait pas de
problème à travers cette réforme-là. Je ne
prétends pas non plus qu'il n'y avait pas des correctifs à
apporter. Mais on peut dire que c'est un grand pan de mur de ce qui avait
été fait qu'on enlève et qu'on continue à
éroder, à briser.
Et que deviendront les municipalités avec le temps, si on
continue à éroder tous leurs pouvoirs, à leur enlever
toutes leurs sources de taxation? Est-ce qu'on s'en vient avec l'argumentation
à l'effet que les municipalités seront de moins en moins
responsables, de plus en plus dépendantes par rapport au gouvernement?
Est-ce que c'est ça qu'on veut? Est-ce que, si, d'une part, on leur
enlève des responsabilités ou on leur enlève des sources
de revenus et que, d'autre part, on les met plus dépendantes par des
subventions, ça va faire de meilleures administrations, des meilleurs
partenaires? On s'apprête à faire un pas un peu plus loin. On
souhaite ardemment que le Québec finisse par devenir un pays. Est-ce que
ça ne permettra pas... Est-ce qu'en déresponsabilisant les
élus - c'est ça qu'on
fait quand on leur enlève les sources de taxation - on s'en fait
des partenaires responsables? Est-ce que ce n'est pas une forme de
centralisation à outrance? Est-ce qu'on n'est pas à retourner...
On est à retourner, actuellement - je ne pose pas la question, je fais
l'affirmation - à l'époque des pèlerinages, je ne dirais
pas annuels mais ce sera mensuel, pour que les municipalités puissent
avoir un peu d'oxygène pour respirer, pour mieux s'administrer, parce
que le gouvernement a fait un mauvais choix, M. le Président. Il a
décidé qu'il enlevait aux municipalités une source de
taxation qui, selon les dires du ministre, n'était plus acceptable,
puisque c'était une taxe qui avait été imposée en
1917, et, là, il a décidé qu'on devrait la remplacer par
des subventions. C'est décidé. Il a dit que la taxe
n'était pas bonne pour les municipalités, mais, lui, il s'en
empare, donc elle est meilleure, ça devient une bonne taxe. C'est une
source dite correcte pour le gouvernement du Québec, mauvaise pour les
administrations municipales.
Je me pose des questions, si vraiment il est le défenseur des
municipalités. Je me demande et je réfléchis
là-dessus, régulièrement, à savoir si le ministre
des Affaires municipales n'a pas trop de travail, si on ne lui a pas
confié trop de responsabilités, parce qu'il cherche les
à-côtés, il cherche les petites choses. Il cherche comment
causer des problèmes et il n'a pas le temps de régler les vrais
problèmes. Bien sûr qu'on a mis en consultation des cahiers aux
municipalités pour essayer de trouver des solutions à certains
problèmes, on fait certaines consultations. Et ça, c'est remis
à plus tard, ce n'est pas pour cette année, c'est pour
l'année prochaine, pour l'automne, comme si - il a dit qu'il
était proche de l'éternité - c'était
l'éternité, il peut prendre les problèmes, il sera
toujours là pour les régler. Il sera toujours là pour
donner des réponses. Il sera toujours là pour rassurer les
gens.
En dehors de cette belle assurance, je demande au ministre des Affaires
municipales, comme je le dis à la population: Est-ce que ça
coûte moins cher aux citoyens pour demeurer dans leur
municipalité? Est-ce que les citoyens ont les mêmes services,
est-ce que les mêmes besoins sont comblés avec les revenus
qu'elles ont, avec les moyens qu'elles ont à leur disposition? Est-ce
que les gens ne se rendent pas compte que les augmentations de taxes
successives qu'ils subissent par la faute du gouvernement, c'est une
façon éhontée de pressurer le citron, de faire payer aux
citoyens les désirs d'un gouvernement qui est dépassé, qui
est fatigué, qui n'a pas de solution à donner, qui ignore, une
fois pour toutes, les municipalités et qui ne les aime pas,
carrément? S'il aimait les municipalités, il les traiterait
différemment.
C'est pourquoi, M. le Président, je vous dis et je vous annonce
que nous serons contre ce projet de loi. Merci.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Jonquière. Sur le même sujet, je
cède la parole à M. le député de Saint-Jean. Je
vous rappelle que vous avez droit à 20 minutes, M. le
député de Saint-Jean. Allez-y.
M. Michel Charbonneau M. Charbonneau: Merci, M. le
Président. Des voix: Bravo!
M. Charbonneau: Alors, j'ai le plaisir, ce matin, d'intervenir au
soutien de l'adoption du principe du projet de loi 20 intitulé Loi
abrogeant la Loi concernant les droits sur les divertissements. Je
m'attacherai, dans un premier temps, à décrire les effets du
projet de loi non pas en termes financiers, mais plutôt au plan
juridique.
Pour bien comprendre, M. le Président, la portée d'un
projet de loi qui abroge une loi existante, il va de soi qu'il faut
connaître la teneur de cette dernière. C'est pourquoi je vais
tenter de décrire ce que prévoit l'actuelle Loi concernant les
droits sur les divertissements. À cette occasion, je m'attacherai
à démontrer à quel point cette loi est
vétusté et tout à fait inadaptée, dans ses concepts
mêmes, à la réalité de 1992. Il a été
dit, avec raison, que la taxe d'amusement, comme on l'appelle
communément, n'a plus sa place au plan économique dans le champ
des taxes à la consommation. En effet, ce champ est désormais
entièrement occupé par les gouvernements du Québec et du
Canada qui ont, maintenant, tous les deux, des taxes sur la fourniture de
services, y compris les services de divertissement. (0 h 50)
A cet argument économique, j'ajouterai celui du caractère
dépassé des dispositions législatives elles-mêmes
pour justifier la nécessité de l'abrogation de la Loi concernant
les droits sur les divertissements. Dans un second temps, j'exposerai le
contenu même du projet de loi 20 pour expliquer comment s'effectuera
concrètement l'abolition des droits sur les divertissements.
M. le Président, les textes qui forment la Loi concernant les
droits sur les divertissements remontent, à toutes fins utiles, à
1919. Certes, il y a eu des modifications relativement importantes en 1965,
lorsque le législateur a accordé aux municipalités le
droit de disposer à leur guise des recettes de la taxe d'amusement, mais
ces modifications n'ont pas altéré les dispositions de base qui
concernent l'imposition et la perception de cette taxe. De même, l'an
dernier, la loi 145 s'est principalement contentée d'ajouter des
dispositions sans remanier celles qui existaient déjà. Tout cela
fait que les municipalités appliquent essentiellement, en 1992, des
textes qui datent du début du siècle. Les inconvénients
de
cette situation sautent aux yeux comme je vais tenter de vous le
démontrer.
Voyons d'abord, M. le Président, quelles circonstances donnent
lieu au paiement du droit sur les divertissements. Comme on le sait, depuis le
1er janvier 1992, à la suite d'une modification apportée par la
loi 145 de l'an dernier, le droit sur les divertissements n'est perçu
que sur le territoire des municipalités locales qui ont adopté et
mis en vigueur un règlement décrétant cette perception.
Donc, sur un tel territoire, la loi prévoit qu'une personne ne peut
assister ou prendre part à un amusement dans un lieu d'amusement sans
avoir, au préalable, payé à la municipalité
concernée un droit équivalant à 10 % du prix
d'entrée. Cette règle comporte son lot d'imprécisions.
La première concerne le moment où la personne devient
débitrice du droit. Autrement dit, la personne doit-elle payer le droit
au moment de son entrée dans le lieu d'amusement ou au moment de l'achat
de son billet si elle l'achète d'avance? La pratique, évidemment,
veut que la taxe d'amusement soit payée en même temps que le
billet. Mais la personne pourrait-elle invoquer que sa dette ne prend
naissance, quant à la taxe, qu'au moment de son entrée dans le
lieu d'amusement? En temps normal, cette discussion a peu d'importance, mais,
dans le contexte où l'abolition de la taxe est prévue pour le 1er
juillet 1992, cette imprécision de la loi est remise en lumière.
En effet, une personne pourrait contester le fait qu'on lui réclame la
taxe d'amusement sur le billet qu'elle achète avant le 1er juillet 1992
pour un divertissement qui aura lieu après cette date en
prétendant que c'est le moment du divertissement qui compte et non celui
de l'achat du billet. C'est pour écarter cette dernière
interprétation que le projet de loi 20 contient une disposition
spécifique à ce sujet, comme nous le verrons.
La deuxième imprécision que l'on retrouve dans la
règle actuelle relative au paiement de la taxe d'amusement concerne la
notion fondamentale du lieu d'amusement. Il n'est pas inutile, M. le
Président, de citer ici la définition de ces mots que l'on
retrouve au paragraphe 1° de l'article 1 de la loi. Ce paragraphe se lit
comme suit: «Les mots "lieu d'amusement" signifient et comprennent un
théâtre, une salle de cinéma, une salle de concert, une
salle de musique, une salle de danse ou autres amusements, un cirque, une
annexe d'exhibition, une ménagerie, un champ de baseball, un parc de
jeux athlétiques, un parc d'amusements, une patinoire et autre endroit
où une exhibition ou représentation est donnée ou une
partie est jouée, et où un prix d'entrée est exigé
ou perçu par la vente de billets ou autrement, sauf s'il s'agit d'une
réunion de courses à laquelle aucun pari, gageure ou pool n'est
vendu, reçu ou enregistré en vertu d'un système de pari
mutuel.»
Comme on peut le constater, cette définition ne pêche pas
par excès de concision, M. le Président. Elle relève d'une
époque où la mode législative était à
l'énumération d'exemples plutôt qu'à
élaboration d'un concept. L'inconvénient d'une telle
définition par enumeration, c'est qu'on risque évidemment
d'oublier beaucoup de choses.
La troisième imprécision, c'est que le mot
«amusement» lui-même n'est pas défini, alors que c'est
un élément essentiel pour déterminer quand prend naissance
l'obligation de payer le droit sur les divertissements. Par exemple, le fait de
payer pour entrer dans un amphithéâtre, qui est un lieu
d'amusement, pour assister à l'homélie d'un prédicateur
donne-t-il lieu au paiement de la taxe d'amusement? Enfin, M. le
Président, la combinaison des imprécisions de la règle
actuelle et du principe qu'elle contient, selon lequel la taxe est liée
à l'entrée dans un lieu, a fait que plusieurs
municipalités se sont trouvées placées devant un trou
juridique quant à la perception de droits sur diverses activités
de loisir payantes qui se déroulent sur leur territoire: la descente de
cours d'eau en canot pneumatique, par exemple, les croisières
d'observation d'animaux marins, l'utilisation d'un appareil dans un parc
d'amusement et la location de cassettes vidéo, pour n'en nommer que
quelques-uns. Le moins qu'on puisse dire, c'est que la règle
d'imposition et de perception du droit sur les diverstissements n'a vraiment
pas suivi l'évolution des activités de loisir des
Québécois.
Un autre aspect de la loi actuelle dont il faut parler, c'est celui des
exceptions à la règle du paiement du droit sur les
divertissements. On a vu auparavant que le lieu où se tient une
réunion de courses n'est pas considéré comme un lieu
d'amusement si aucun pari n'y est fait. On peut déjà s'interroger
sur le bien-fondé de cette exception. Il y a également une
exception en faveur de la participation active à un sport
athlétique, dans la mesure où l'on peut faire la distinction
entre un sport athlétique et un sport ordinaire, où l'on est
capable de savoir à partir de quel degré d'effort la
participation peut être considérée comme active.
Mais c'est surtout de deux autres exceptions que je veux parier. La plus
ancienne se trouve à l'article 4 de la loi qui se lit comme suit:
«Le droit est exigible dans tous les cas, sauf quand un amusement est
donné sous les quatre conditions suivantes, à savoir: «a)
Par des organisateurs et amateurs résidant au Québec, qui ne
reçoivent aucune rémunération quelconque pour leurs
services à cette occasion; «b) Dans une église ou une salle
ouvrière ou paroissiale pour l'usage de laquelle aucun loyer n'est
payé ni aucune autre rémunération accordée pour
cette fin; cependant, n'est pas considéré comme une
rémunération, le paiement,
par les organisateurs au propriétaire de la place d'amusements,
du coût exact de l'éclairage, du chauffage et du nettoyage de la
place d'amusements occasionné par la représentation; «c)
Lorsque le total du revenu brut qui en revient est consacré
exclusivement à des fins charitables, agricoles ou religieuses;
«d) Quand cet amusement ne comprend pas de projection de films, pourvu
que la personne, société ou association qui donne l'amusement ait
auparavant demandé l'exemption requise du fonctionnaire municipal auquel
il appartient d'accorder ou de refuser telle exemption. Cette demande doit
être attestée sous serment, devant un officier du revenu, un
notaire, un juge de paix ou un commissaire de la Cour
supérieure.»
Comme vous le voyez, M. le Président, cette exemption, qui date
du début du siècle, pouvait convenir à l'époque
où les bingos paroissiaux constituaient à peu près le seul
divertissement méritant un engagement fiscal aux yeux du
législateur. Mais elle est totalement inadéquate de nos jours;
notamment, elle n'est d'aucune utilité aux municipalités qui
désirent, pour attirer ou conserver dans leur territoire un
théâtre d'été, un cirque, par exemple, accorder une
exemption ou une diminution de la taxe d'amusement au spectateur. (1 heure)
L'autre exemption dont je veux vous dire un mot est tout à fait
récente puisqu'elle a été introduite par la loi 145 l'an
dernier; il s'agit, M. le Président, de l'exemption en faveur des lieux
d'amusement prévus dans un éventuel règlement
gouvernemental. L'objectif qui était visé par le
législateur était de permettre au gouvernement de
déterminer les lieux d'amusement culturels. Cependant, quiconque a
essayé de définir ce qu'est la culture peut comprendre pourquoi
aucun règlement n'a été édicté en vertu de
ce nouveau pouvoir. De plus, on se heurte au problème suivant: Comment
justifier qu'un divertissement culturel, qui est présenté dans un
lieu dont la vocation est d'accueillir de tels événements, soit
exempté de la taxe d'amusement, mais qu'il ne soit pas exempté
lorsqu'il est présenté dans un autre lieu comme un stade sportif?
M. le Président, j'arrête ici mon exposé des
éléments de la loi actuelle. Je crois avoir suffisamment
démontré le caractère inadéquat de cette loi dans
le contexte actuel et, par conséquent, le bien-fondé de son
abrogation.
Je dirai maintenant quelques mots sur la façon dont le projet de
loi 20 prévoit procéder à cette abrogation. Ce projet de
loi fixe au 1er juillet 1992 la date de l'abrogation de la loi actuelle.
Cependant, cette abrogation est assortie d'aménagements. D'abord, pour
tenir compte du problème exposé plus haut quant à la
question de savoir si la taxe d'amusement est due au moment du paiement du
billet d'entrée ou au moment du divertissement, le projet de loi opte
pour la solution qui tient compte de la pratique. Celle-ci veut que la taxe
soit perçue lors du paiement du billet. En conséquence, dans le
cas où le billet est acheté avant le 1er juillet pour un
événement postérieur au 30 juin, le projet de loi 20
prévoit que le droit sur les divertissements demeure payable. Pour
éviter que la taxe de vente du Québec ne soit perçue en
même temps que la taxe d'amusement sur un tel billet, le projet de loi
exclut exceptionnellement l'application de la TVQ dans un tel cas.
Ensuite, M. le Président, un autre aménagement qu'il
importe de vous souligner, c'est que le projet de loi 20 prolonge
au-delà du 1er juillet 1992 l'effet des dispositions de la loi et des
règlements adoptés en vertu de celles-ci pour régir
l'usage qui doit être fait des sommes perçues avant cette date.
Par exemple, si le règlement de la municipalité prévoit
que les droits sur les divertissements perçus par l'exploitant d'un lieu
d'amusement sont remis à la municipalité dans les 10 jours qui
suivent la tenue de l'événement, ce règlement continue de
s'appliquer après le 1er juillet, si c'est nécessaire, pour la
remise des droits perçus avant cette date.
Enfin, je veux mentionner, M. le Président, que le projet de loi
20 contient des dispositions ayant pour but de valider la perception de la taxe
d'amusement qui a été faite depuis le 1er janvier 1992 sur le
territoire d'une municipalité qui a omis d'adopter ou de mettre en
vigueur, au préalable, un règlement décrétant cette
perception. Il semble, en effet, que cette nouvelle obligation imposée
par la loi 145 de l'an dernier ait été oubliée par un
certain nombre de municipalités.
Voilà, M. le Président, qui conclut les remarques que je
désirais formuler à l'appui de l'adoption du principe de la loi
20, Loi abrogeant la Loi concernant les droits sur les divertissements. Je vous
remercie, M. le Président, de votre bonne attention.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Saint-Jean. Alors, je rappelle aux membres de cette
Assemblée que nous en sommes au niveau de l'adoption du principe du
projet de loi 20, Loi abrogeant la Loi concernant les droits sur les
divertissements. Je reconnais M. le député de Labelle.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: merci, m. le président. tout à
l'heure, à mon écran de télévision, j'étais
à mon bureau et j'écoutais le ministre des affaires municipales
expliquer que la taxe...
M. Boulerice: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, vous avez une question de
règlement?
M. Boulerice: Oui, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Une question de
règlement.
M. Boulerice: Je suis persuadé que les observations de mon
collègue sont importantes et j'aimerais qu'elles soient entendues par
l'ensemble de cette Assemblée. Je vous demanderais de vérifier le
quorum.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): De vérifier le
quorum. Alors, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques,
effectivement, il n'y a pas quorum. Qu'on appelle les
députés!
Alors, le quorum est maintenant vérifié. M. le
député de Labelle, si vous voulez commencer votre
intervention.
M. Léonard: Merci, M. le Président. Effectivement,
je regardais dans mon écran de télévision tout à
l'heure, vers minuit je pense, le ministre des Affaires municipales, qui
m'écoute présentement, expliquer qu'il avait aboli la taxe
d'amusement, la taxe sur les divertissements. Il a donné un
schéma que je voudrais reprendre parce que je trouve ça amusant
de voir comment les choses peuvent tout à coup glisser. Ça m'a
même rappelé un petit adage qu'on se faisait entre nous quand on
était à la petite école, où on disait: Tout ce qui
brille n'est pas or. Or, l'or brille, donc, l'or n'est pas or.
Voici. Je reprends son schéma. Avant l'abolition, un promoteur de
spectacles qui avait un billet de 10 $ ajoutait 10 %, donc il vendait son
billet 11 $. Après l'annonce de la TPS et de la TVQ à 8 %, il a
fait le calcul devant vous tout à l'heure, le ministre, puis il a dit:
10 $ le billet pour le promoteur plus 1 $ de taxe sur les divertissements,
ça donnait 11 $ plus 7 % de TPS, ça fait 0,77 $; 11,77 $ plus 8 %
de TVQ, 0,94 $, total: 12,71 $. Tout le monde s'est levé,
évidemment, tout le monde s'est mis à manifester pour dire que
ça n'avait pas de bon sens que le prix du billet monte ou que les taxes
soient de 27 % sur le prix de base.
Donc, il y a eu tractation, il y a eu recul et tout ce qu'on veut et le
dernier discours sur le budget a produit la situation suivante: le prix du
billet au promoteur, 10 $, la TPS, 0,70 $, donc ça fait 10,70 $
après TPS, plus 4 % de TVQ, 0,43: 11,13 $. C'est ça, le billet au
consommateur.
Donc, avant, la situation ou le prix était de 11 $. Après,
maintenant, c'est de 11,13 $. Je ne chicanerai pas le ministre de dire que
c'est à peu près le même prix, 11 $, 11,13 $, 1 %
environ.
Là s'arrêtait son calcul à peu près parce
qu'il a expliqué que finalement les municipalités avaient
récupéré par ailleurs, etc., qu'il y avait eu une
augmentation, un champ d'impôt sur les mutations immobilières. Je
vois qu'il m'écoute et qu'il s'assoit à son siège en
m'écoutant et en souriant. Je l'ai trouvé très rusé
parce qu'on ne doit pas arrêter le calcul à ce point. Non.
Justement, il faut le reprendre parce que l'augmentation du champ d'impôt
des taxes sur les mutations immobilières coûte 12 000 000 $.
Ça rapporte 12 000 000 $ à la municipalité, mais ça
coûte 12 000 000 $ aux consommateurs. (1 h 10)
Alors, reprenons les calculs. 0,70 $ de TPS, le billet, 10 $. 7 % de TPS
donne 0,70 $ par billet. Le calcul total, ça donne au consommateur,
ça coûte au consommateur 18 200 000 $. Il faut le dire, ça,
c'est exactement ça. Effectivement, c'est 70 % des 26 000 000 $,
environ. Plus les 0,43 $ du 10 $, ce qui coûte aux consommateurs 11 200
000 $, qui sont payés en TVQ. Oui, mon calcul est exact. Je le
supporterai. Le total, c'est 29 400 000 $ contre 26 000 000 $ auparavant,
auxquels il ne faut pas oublier d'ajouter 12 000 000 $ d'augmentation de droits
sur les mutations immobilières. Il ne faut surtout pas l'oublier, de
sorte que le total total, c'est maintenant de 41 400 000 $ contre 26 000 000 $
auparavant comme coût aux contribuables consommateurs, etc., que l'on
prend comme ponction à l'ensemble de la collectivité.
Voilà, il faut vraiment faire ce calcul. Ça, c'est simplement en
termes de calcul comptable.
En l'écoutant, j'ai dit: Non, non, je vais refaire ces calculs.
Vraiment, c'est un peu gros, merci. Surtout qu'il s'agissait, par rapport
à la loi 145, d'une justification a posteriori. Je voudrais que le
ministre m'écoute parce que, lorsqu'il a vendu sa loi 145, il n'a pas
parlé de l'abolition des taxes sur les divertissements. Ça a
été évoqué, mais ce n'était pas une
décision, il faut quand même le dire. Alors, le consommateur
contribuable, d'une façon ou de l'autre, paie 41 400 000 $ contre 26 000
000 $ auparavant. Je pense que, quelle que soit la façon dont on le
calcule, je suis prêt à en discuter avec le ministre du Revenu,
d'ailleurs, qui est en train de converser avec son collègue, je crois
qu'il va me donner raison. Alors, le ministre dit: Nous avons remplacé
le tout par des subventions. Bon. Ou: Nous avons complété par des
subventions de l'ordre de 13 000 000 $, des subventions pour quatre ans, ce qui
ne constitue pas une assurance pour les municipalités à long
terme, puisqu'il n'y a pas là de champ d'imposition, il faut bien le
voir.
Je voudrais, M. le Président, aller un peu plus loin dans la
démarche. Il faut se demander: Ces 41 400 000 $, où vont-ils?
Où vont les 41 400 000 $? Où vont-ils? Alors, 12 000 000 $ aux
municipalités contre les 26 000 000 $ qu'elles avaient auparavant...
Évidemment, c'est complété par les subventions du
ministère, et j'y reviendrai tout à l'heure. Mais voilà
que le gouvernement du Québec, qui n'en tirait rien auparavant, retire
maintenant 11 200 000 $. Bien oui, les 4 % de TVQ. 11 200 000 $, il avait
zéro auparavant.
Et surtout, M. le Président, le fédéral, qui est un
nouveau venu en la matière, lui, il retire 18 200 000 $. Vous allez
comprendre qu'il faut qu'il paie son déficit. Mais il faut donc admettre
que le fédéral nous fait payer son déficit, fait payer le
monde du spectacle, à ce moment-ci. Auparavant, il retirait zéro.
Il est allé chercher 18 200 000 $, le Québec, il avait
zéro, il a 11 200 000 $ et les municipalités, 12 000 000 $.
Total: 41 400 000 $. Ça coûte pas mal plus cher au consommateur
contribuable, pas mal plus cher, de 26 000 000 $à41 400 000 $.
Voyez-vous, M. le Président, comment le ministre a bien vendu sa
salade, tout à l'heure, en disant qu'ils avaient tout ajusté, que
ça ne coûtait rien à personne, que les municipalités
récupéraient tout? Voyez ce que je viens d'établir, c'est
un calcul exact. J'espère, comme comptable, que je l'ai fait
professionnellement. Je crois l'avoir fait professionnellement, je suis
prêt à en discuter avec le ministre, je le verrai tout à
l'heure. Mais j'irai plus loin, maintenant. Le ministre sourit, je vois bien.
Il a bien vendu sa salade. Je l'ai trouvé rusé. J'ai
trouvé ça fantastique, mais je n'ai pas pu laisser passer la
chose, quand même.
Je voudrais dire quand même qu'il y a autre chose dans le dossier
qui, comme législateurs, doit nous intéresser parce que,
auparavant, les municipalités étaient intéressées
à ce que des promoteurs de spectacles, de divertissements, etc.,
organisent des activités sur leur territoire. Oui. Parce que, en
contrepartie des services de police qu'elles offraient, des services
municipaux, d'annonces, de tout ce que vous voulez, donc des services
municipaux en général, elles récoltaient les 10 % sur le
prix du divertissement, donc elles rentraient dans leurs coûts, dans
leurs frais. Et ça les intéressait de faire de telles
activités, parce que, au-delà du fait qu'elles rentraient dans
leurs coûts, il y avait des activités de nature culturelle qui se
passaient sur leur territoire.
En leur enlevant ce champ, c'est remettre en cause leur implication dans
de telles activités. Comprenez que, là, on vient de
démolir, de retirer leur intérêt à faire des
activités culturelles. C'est ça que je déplore le plus.
C'est ça que je déplore le plus. Elles avaient un champ de
taxation qui correspondait à cet intérêt. Tout était
égal, et je pense que le législateur dans le temps, lorsqu'il
leur avait donné ce champ d'imposition, avait pris une excellente
décision qu'on n'aurait pas dû remettre en cause, mais qu'on a
été amenés à remettre en cause à cause de
l'intrusion du fédéral par sa TPS puis par le fait qu'on s'est,
nous, harmonisés à la TPS fédérale, que le
gouvernement libéral s'est harmonisé à la TPS
fédérale en instaurant, en faisant sa réforme de la
TVQ.
La question que je pose maintenant, c'est: Est-ce que le
fédéral va venir s'occuper, lui, d'organisation de spectacles
dans les municipali- tés? La réponse, c'est que c'est non. La
réponse, c'est que ce n'est pas de ses affaires. La réponse,
c'est que, si on voulait qu'il le fasse, ça serait un service mal rendu,
mal organisé, parce que c'est un gouvernement qui est à Ottawa,
qui ne s'occupe pas de ça, puis je pense qu'il n'y a personne qui
souhaite qu'il s'en occupe parce que, au fond, ce n'est pas de ses oignons
qu'il s'occupe d'organiser des spectacles, des divertissements. Écoutez,
il est loin de son profit. Mais, pourtant, il va aller chercher 18 200 000 $
sur cette activité.
Deuxième question, est-ce que le gouvernement du Québec va
s'en occuper? Il avait zéro avant. Il ne s'en occupait pas, il avait
zéro. Mais, là, il tire 11 200 000 $. La réponse, c'est
qu'il n'ira pas s'impliquer dans des organisations de spectacles, des
organisations culturelles, des activités culturelles, en tout cas
sûrement pas de cette façon. Ce n'est pas aussi clair que dans le
cas du fédérai, parce que le Québec prétend, lui,
donner des subventions. Ah! le grand mot. Il va donner des cadeaux de temps en
temps, à la gueule du client, et là vous allez peut-être,
dans certains cas, oui... Le ministre a même évoqué qu'il y
avait des programmes de contrepartie. Il y avait ses 5 000 000 $, 5 000 000 $
qu'il a fait miroiter. Imaginez-vous! 5 000 000 $ pour la grandeur du
Québec, s'il va en organiser des spectacles! Au fond, c'est 5 000 000 $
qui sont assez discrétionnaires, qui vont être donnés
à condition que la municipalité en mette autant, donc qu'elle
aille mettre 5 000 000 $ elle aussi, etc., toutes sortes de conditions, et vous
venez de voir apparaître exactement la queue du dragon. En d'autres
termes, le gouvernement, lui, va s'ingérer dans ces activités en
autant que la municipalité paie autant que lui. Mais comme on sait qu'il
ne peut pas, le gouvernement ne peut pas à tout bout de champ s'occuper
de toutes sortes d'activités culturelles, ce ne sera que certaines
activités. (1 h 20)
Donc, vous venez de démolir l'ensemble des intérêts
du monde municipal de s'occuper d'activités culturelles, parce que vous
les avez rendues très loin de la chose, vous leur avez enlevé
l'intérêt financier qu'elles avaient à
récupérer les coûts qu'elles encouraient à organiser
des activités culturelles. Voyez-vous, c'est là où je
trouve qu'on est en train de démolir des choses sans qu'il n'y paraisse,
en utilisant quelques sophismes, je dirais des sophismes comptables, si
ça existe. En tout cas, j'ai bien vu comment le ministre avait vendu, de
façon très brillante, sa salade. Mais ce n'est pas exact. Je suis
obligé de le ramener à la réalité. Tout à
l'heure, il aura l'occasion de me répondre, j'en suis sûr. Mais le
contribuable, le consommateur va payer dorénavant 41 400 000 $ contre 26
000 000 $ auparavant. Il n'aura rien de plus. Au contraire! Très
probablement qu'il va avoir moins de services parce que l'essentiel de
ces 41 000 000 $, ça va aller pour 18 200 000 $ au
fédéral, pour 11 200 000 $ à Québec, très
loin des municipalités, et l'autre 12 000 000 $, ça ne sera pas
du tout relié, en termes d'intérêt, à la
culture.
Voilà, M. le Président, ce que je voulais dire. J'ai bien
compris - je pense que j'ai encore quelques minutes - que le ministre avait
glissé sur... Oui, j'ai encore beaucoup de temps, M. le
Président. Alors, le ministre a glissé sur l'excellente
réforme de son collègue, le ministre des Finances. Nous avons eu
un vaste débat sur la question, une commission parlementaire. Je
voudrais juste le ramener à des petits tableaux, qui ont
été publiés, d'ailleurs, dans les journaux, qui sont
pleins d'enseignements. Si le ministre veut que je lui en fasse parvenir des
copies au cas où il n'en aurait pas... Je voudrais simplement le ramener
à l'écart Québec-Ontario du fardeau fiscal du secteur
privé. Je vois qu'il a eu la copie 1992, l'article de Normand Girard
dans le Journal de Québec et le Journal de
Montréal.
Mais ce qu'il est important, intéressant de constater dans ces
tableaux, c'est que l'écart fiscal, au cours de ces années, est
passé de 3,5 % en 1990 à 7,5 % en 1991... Pardon, je reprends.
L'écart fiscal en 1990 était de 3,5 %, il est passé
à 7,5 % en 1991 et à 9,3 % en 1992. Il a augmenté. Il a
augmenté. Et là, le ministre a dit: Mais nous avons, dans le
temps, baissé l'impôt sur le revenu. Dans le temps! Mais qu'est-ce
qu'il a fait? C'est qu'il a augmenté les taxes de façon
considérable. C'est devenu un peu plus compétitif sur le plan de
l'impôt sur le revenu, nous le concédons. Nous le
concédons. Mais, sur le plan des taxes, ça a été
beaucoup plus que compensé. Et la preuve, dans le domaine de la
taxation, il ne faut jamais oublier une chose, le contribuable vote avec ses
pieds. Dans une municipalité, quand l'impôt foncier est trop
élevé, les contribuables s'en vont, les nouveaux en tout cas, et
quand ils peuvent vendre leur maison, ils s'en vont vivre dans une autre
municipalité.
Que font nos contribuables consommateurs à l'heure actuelle? Ils
vont acheter aux États-Unis! En grand nombre, en grande quantité.
Il y a une concurrence féroce qui s'exerce présentement. À
tel point que cela mine même les états financiers du gouvernement.
Quelle est la somme des achats et des dépenses des contribuables
québécois aux États-Unis à l'heure actuelle et
quelle est l'implication de ces achats sur les revenus du gouvernement du
Québec? C'est plusieurs, plusieurs centaines de millions. Personne ne
peut les chiffrer. Personne ne peut les chiffrer parce qu'on ne sait pas
exactement. Mais l'on sait qu'il s'agit de sommes considérables. Et
là-dessus, ce qu'ils ont gagné, en termes d'impôt sur le
revenu, ils l'ont perdu en termes de rendement sur les taxes à la
consommation. Au moins! Parce que l'impôt sur le revenu est payé
sur des salaires qui sont versés ici au Québec.
Donc, les entreprises versent des salaires et perçoivent à
la source des impôts sur le revenu. Dans le cas de la consommation, vous
ne les voyez pas parce que les achats sont faits aux États-Unis et
personne ne sait combien l'on perd par ces achats qui ne se font pas ici.
Très difficile à évaluer. Mais nous pouvons savoir qu'il
s'agit de millions et de millions. Ce sont les gens qui se déplacent
pour aller aux États-Unis.
Parlons maintenant de la contrebande. Elle existe dans le domaine des
cigarettes, du tabac, de l'essence. Ça aussi, ça implique des
sommes considérables, un manque à gagner considérable pour
le gouvernement.
Alors, M. le Président, j'invite le ministre à beaucoup de
modestie quand il parle de cette réforme des taxes à la
consommation. Les effets sont majeurs sur l'économie, sont majeurs sur
les équilibres financiers, sur le fardeau fiscal du secteur
privé. L'impôt des sociétés dépasse de 310
000 000 $, ici au Québec, l'impôt des sociétés des
Ontariens, des entreprises ontariennes. Les taxes à la consommation, 557
000 000 $; la tarification, 513 000 000 $; et l'impôt sur le revenu,
malgré les fleurs qu'il s'envoie, 2 526 000 000 $ de plus ici, au
Québec, qu'ailleurs.
Et je le ramène à son dernier devoir: les taxes
municipales. Les taxes municipales, il faudrait en parler, M. le
Président: 1 904 000 000 $ de plus ici, au Québec, qu'en Ontario.
Il n'y a pas de quoi se vanter. Et l'écart s'est accru grandement en
1990; où c'était 1 362 000 000 $ c'est monté maintenant
à 1 904 000 000 $. Je n'invente rien, M. le Président, ce sont
les tableaux du ministère des Finances que j'ai obtenus de peine et de
misère du ministre des Finances en commission parlementaire. Je les ai
maintenant. Merci au ministre des Finances de finalement les avoir rendus, et
merci, M. le Président, de votre attention.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Labelle. Alors, nous poursuivons l'étude du
projet de loi 20 au niveau de son principe, Loi abrogeant la Loi concernant les
droits sur les divertissements, et je reconnais M. le président de la
commission des institutions et député de Marquette.
M. Claude Dauphin
M. Dauphin: Merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais
donc maintenant vous parler des suites qu'entend donner le gouvernement du
Québec à l'abolition des droits sur les divertissements pour les
municipalités. Comme vous le savez, le ministre des Finances, M.
Gérard D. Levesque, annonçait, le 14 mai dernier, l'abolition des
droits de 10 % sur les divertissements actuellement prélevés par
certaines municipalités lors de son discours sur le budget.
Il est sans doute bon, M. le Président, de
préciser dès le départ que cette décision
gouvernementale ne touche pas l'ensemble des municipalités du
Québec, mais seulement quelque 164 municipalités, dis-je, pour
l'année 1992. Ces municipalités ne pourront plus percevoir ces
droits qui sont, dans les faits, une taxe à la consommation. Le
gouvernement se trouve donc à compléter la deuxième phase
de la réforme des taxes à la consommation en instaurant une TVQ
à 4 % pour l'industrie du spectacle et ainsi, en évitant un taux
exagéré pour ce secteur économique fort important.
En effet, M. le Président, nous savons tous que l'industrie du
divertissement devait faire face à un taux effectif de taxation de
l'ordre de 13 % en 1990, soit les droits de 10 % prélevés par les
municipalités et un 3 % additionnel de taxes indirectes résultant
de l'effet combiné des taxes de vente fédérale et
québécoise sur les produits achetés par cette industrie.
Or, l'arrivée de la TPS du gouvernement fédéral a fait
grimper ce taux à quelque 18,5 %, en incluant toujours les effets
indirects. Face à ce taux déjà élevé, le
gouvernement du Québec se devait de réagir non seulement de
façon à s'assurer que l'introduction de la TVQ, pour ce secteur,
n'alourdisse la charge fiscale exigée, mais aussi de manière
à tendre vers le taux effectif de 13 % qui était en application
avant l'entrée en vigueur de la TPS du gouvernement
fédéral.
Il y avait là tout un défi à relever. Le
gouvernement devait faire preuve de réalisme, puisqu'il s'agissait
là d'une question de survie pour bon nombre d'entreprises de
divertissement. Comme le taux de la TVQ pour les services a été
réduit à 4 % et que le gouvernement a décidé
d'abolir les droits de 10 % prélevés par les municipalités
sur les divertissements, le taux effectif de taxation pour l'industrie du
spectacle sera inférieur non seulement à la situation qui
prévalait en 1991, suite à l'entrée en vigueur de la TPS,
mais aussi, M. le Président, aux 13 % imposés en 1990.
En effet, le taux effectif sera inférieur à 12 %, soit
plus précisément 11,78 % à partir du 1er juillet prochain.
Il y a donc une amélioration sensible pour cette industrie
génératrice d'emplois qu'est l'industrie du divertissement. (1 h
30)
Voilà, M. le Président, un beau défi que le
gouvernement du Québec a su relever de brillante façon.
Maintenant, M. le Président, il était évident que
le gouvernement ne pouvait rester indifférent au manque à gagner
pour les municipalités attribuable à l'abolition des droits sur
les divertissements. On ne pouvait se satisfaire d'une nette
amélioration pour l'industrie du divertissement au détriment du
milieu municipal. En effet, les municipalités perceptrices des droits
sur les divertissements se trouvaient avec un manque à gagner de quelque
25 000 000 $, si on se fie aux montants mis comme recette par le munici-
palités elles-mêmes à leurs prévisions
budgétaires pour l'année 1990. Si on se base, par ailleurs, sur
les montants réellement perçus, tels que vérifiés
aux rapports financiers des municipalités pour cette même
année, le montant en cause serait plutôt de l'ordre de 28 600 000
$. Ce montant, M. le Président, serait le plus élevé
constaté jusqu'à maintenant, puisque, aux prévisions
budgétaires de l'année suivante, soit en 1991, les recettes
anticipées par les municipalités étaient de l'ordre de 27
400 000 $. De plus, M. le Président, à la lumière des
rapports financiers reçus par le ministère des Affaires
municipales pour cette même année, on constate une certaine baisse
des recettes réellement perçues, puisqu'elles seraient de l'ordre
de 26 000 000 $ pour 1991 au lieu des 27 400 000 $ prévus. quant aux
prévisions de recettes maintenant pour 1992, les 164
municipalités prélevant des droits ont anticipé un montant
de 26 400 000 $. bref, m. le président, si on faisait une moyenne de ces
montants au cours des dernières années, on ne se trompe pas en
affirmant que les municipalités se retrouveraient, à
défaut de compensation, avec un manque à gagner de l'ordre de 26
000 000 $.
Outre cette constatation, il est bon de signaler que 75 % de ce montant
de 26 000 000 $ sont perçus par deux villes seulement, soit
Montréal avec environ 62 % de l'ensemble des droits et Québec
avec environ 13 % des droits. En effet, 158 municipalités sur les 164
qui prélèvent ces droits sur les divertissements en 1992 se
répartissent moins de 1 % de l'ensemble des recettes. il y a donc une
très forte concentration des recettes perçues entre les mains des
deux municipalités citées, soit montréal et québec.
par ailleurs, m. le président, ceci ne veut pas nécessairement
dire que ces recettes sont peu importantes pour les municipalités qui
bénéficient de l'imposition de ces droits. en effet, pour
certaines municipalités, les revenus des droits sur les divertissements
peuvent représenter jusqu'à 1 % ou 2 % de leur budget, et
même jusqu'à 15 % ou 20 % pour des municipalités que vous
connaissez bien comme la municipalité d'hemmingford, je crois, qui est
située dans le comté de mon collègue qui est juste
derrière moi de saint-jean, pour son parc safari.
Dans un tel contexte, M. le Président, le gouvernement a donc le
devoir de compenser pour le manque à gagner que devront subir les
municipalités. Voilà pourquoi le ministre des Finances du
Québec, M. Levesque, annonçait, dans son discours sur le budget
du 14 mai dernier, un programme de compensation d'un montant de 6 500 000 $ en
1992 et de 13 000 000 $ pour chacune des années subséquentes,
soit 1993 à 1996 inclusivement, pour un grand total de 58 500 000 $.
Tout de suite, M. le Président, vous allez me dire que le montant de 13
000 000 $ ne correspond pas au manque à gagner des municipalités
évalué, comme je le
mentionnais tantôt, à 26 000 000 $. La compensation pour
une pleine année ne représente donc que 50 % du manque à
gagner. Précisons, premièrement, que le montant de 6 500 000 $
pour 1992 ne couvre les pertes de recettes des municipalités qu'à
compter du 1er juillet, soit pour les 6 derniers mois de l'année.
Deuxièmement, pour bien comprendre le montant annuel de 13 000 000 $, il
faut se rappeler que les municipalités ont déjà
été partiellement compensées dans le cadre de la politique
gouvernementale relative au nouveau partage de responsabilités
Québec-municipalités.
Vous vous souvenez, M. le Président, que le ministre des Affaires
municipales et responsable de l'Habitation, dont je signale la présence
avec nous depuis le début de la soirée, déposait, le 14
décembre 1990, une proposition d'un nouveau partage des
responsabilités entre le gouvernement et les municipalités.
À cette occasion, il avait été proposé d'abolir les
droits sur les divertissements. Un montant de 25 500 000 $ avait
été estimé comme perte de recettes pour les
municipalités, en se basant sur les prévisions budgétaires
pour l'année 1990. Tout au long de l'hiver et du printemps suivant, des
discussions se sont déroulées avec les municipalités qui
se disaient en désaccord avec l'intention gouvernementale. À la
suite de ces discussions, le ministre des Affaires municipales et responsable
de l'Habitation, M. Ryan, annonçait, le 18 mai 1991, que seuls les
droits à l'égard du secteur culturel seraient abolis. Dans un tel
contexte, les municipalités disposaient toujours de 14 000 000 $ comme
recettes perçues sur la partie non culturelle des droits sur les
divertissements. Dans le cadre de ce nouveau partage des
responsabilités, qui s'est concrétisé par l'adoption par
l'Assemblée nationale du projet de loi 145 le 21 juin dernier, les
municipalités ont alors été compensées pour la
partie abolie, soit la partie culturelle. Elles ont déjà
été compensées, M. le Président, par l'ajout de
revenus additionnels alors prévus notamment pour les droits sur les
mutations immobilières et par des compensations de plafonnement.
Comme les municipalités ont effectivement perçu en 1990
des recettes de quelque 28 000 000 $, il reste donc, M. le Président,
à compenser pour les 14 000 000 $ toujours accessibles aux
municipalités, soit 50 % de cette somme. Dans les faits, si on se fie au
montant perçu au cours des dernières années, soit 26 000
000 $ en moyenne par année, le gouvernement se trouve à verser
une aide de 13 000 000 $ par année, soit un montant équivalant,
effectivement, à 50 % des recettes. Comme vous pouvez le constater, le
montant annuel de compensation de 13 000 000 $ s'avère judicieux dans le
cadre de la nouvelle politique gouvernementale pour le partage des
responsabilités avec les municipalités.
Le ministre des Affaires municipales tra- vaille actuellement à
trouver la formule de répartition du montant de 13 000 000 $ de
façon à tenir compte de l'ensemble du contexte des
municipalités touchées par l'abolition complète des droits
sur les divertissements. En terminant, il devra tenir compte, dans sa
recherche, d'un certain nombre de faits. Notamment, il est bon de
préciser que le nombre de municipalités qui perçoivent des
droits a varié au cours des années. En effet, en 1992, il y a 40
nouvelles municipalités qui perçoivent des droits alors qu'elles
n'utilisaient pas ce champ de revenus auparavant. Par ailleurs, il y a 60
municipalités qui percevaient des droits en 1991 et qui n'en
perçoivent plus en 1992. Il y a donc un va-et-vient de
municipalités qui rend plutôt complexe l'exercice de
détermination d'une formule de répartition des compensations.
M. le Président, ça termine mon allocution et je vous
remercie de votre bonne attention.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Marquette, de votre intervention. Et, sur ce même
sujet, soit à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi
20, Loi abrogeant la Loi concernant les droits sur les divertissements, je
cède la parole à M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques. M. le député, vous avez la
parole.
M. André Boulerice
M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président. On voit,
dans votre ton, l'affection que vous avez pour ma circonscription qui,
d'ailleurs, vient d'accueillir une nouvelle concitoyenne, c'est-à-dire
madame votre mère. Et je me réjouis, M. le Président,
d'accueillir Mme Bissonnet mère comme nouvelle concitoyenne. Et je ne
doute pas quant à ses intentions de vote à la prochaine
élection. Vous serez de bon conseil, M. le Président, j'en suis
persuadé.
Ceci étant dit, M. le Président, dès la
première lecture du projet de loi 20 que nous présente le
ministre des Affaires municipales, je me suis forcément senti
interpellé puisque j'assume, et vous le savez fort bien, la belle et
noble tâche de voir au dossier des arts et de la culture. Et ce projet de
loi a, M. le Président, de toute évidence, un impact
considérable pour ce qui est du développement des arts et de
l'accessibilité à la culture sur l'ensemble du territoire
québécois. (1 h 40)
M. le Président, j'ai écouté avec
intérêt les propos des députés ministériels
qui ont tenté, je vais quand même vous l'avouer, avec très
peu d'arguments convaincants - je dis très peu, je devrais dire sans
aucun argument convaincant, quant à moi - de justifier le projet de loi
que dépose le ministre, qui abroge les droits sur les divertissements.
Ça a été, M. le Président, une avalanche de
chiffres, un nombre x de municipa-
lités, alors qu'à mon point de vue le débat devrait
être beaucoup plus élevé puisqu'il s'agit, et je le
répète, des arts et de la culture qui sont, à toutes fins
pratiques, le fondement même de notre existence et la raison
première de notre présence ici, dans cette Assemblée
nationale, puisque nous sommes une société distincte. Et nous
sommes une société distincte à cause de notre langue qui
est particulière sur ce continent et, forcément, de toute la
culture qui la sous-tend.
M. le Président, avant d'aller au fond des choses, il me faut, au
départ, faire un certain rappel. Au moment où je
répliquais sur le discours sur le budget, je me voyais dans l'obligation
de déposer une motion de censure où je blâmais ce
gouvernement, M. le Président, d'avoir, à l'intérieur du
budget présenté par le ministre des Finances et
député de Bonaventure, renié, pour la septième
année consécutive, son engagement solennel, lors de
l'élection de 1985, de consacrer 1 % du budget de l'État aux arts
et à la culture. Septième reniement consécutif. Le coq a
chanté, M. le Président, et le gouvernement a renié pour
employer un adage.
J'incluais, dans cette motion, aussi, M. le Président, et j'y
reviendrai un peu plus loin dans mon discours, si vous me le permettez,
l'insuffisance des fonds que le ministre additionnait aux crédits
déposés par le ministre, président du Conseil du
trésor, pour ce qui est du budget alloué aux arts et à la
culture. Et je terminais, M. le Président, en blâmant, toujours
sévèrement, ce gouvernement libéral - pas dans le sens
philosophique du terme, vous l'avez entendu comme moi, mais dans le sens
plutôt d'action, presque libertaire, M. le Président, quand il
s'agit de la culture - de ne pas avoir appliqué, pour ce qui est du
spectacle, la même donnée que pour ce qui est de l'édition
- un dossier, d'ailleurs, où nous avons rudement bagarré - qui
était l'exemption totale. Cela n'est pas fait.
Revenons, M. le Président, maintenant, sur le projet de loi 20 et
regardons d'où ça part. Premièrement, et il ne faut pas
l'oublier, ça part d'une intrusion du gouvernement fédéral
canadien de taxer la culture sur l'ensemble du territoire canadien. C'est
Ottawa qui a parti le bal de la taxation, en imposant sa TPS de 7 %. C'est le
fédéral qui a commencé. Forcément, ça n'a
pas été critiqué par nos amis d'en face puisque ça
fait probablement partie de leur conception du fédéralisme
asymétrique. Ça n'a même pas fait l'objet d'une offre de
taxation puisque je regarde le député de Marquette, qui
préside la commission sur les offres et qui me fait un peu penser
à un réparateur de Maytag, comme nous dit la bonne
publicité, parce qu'il attend les offres et les offres ne viennent pas;
alors, ça le tient quand même pas tellement, tellement
occupé. Donc, le fédéral s'est imposé dans un
domaine de compétence exclusivement québécoise. Quand je
le dis, je m'appuie, M. le Président, à la fois sur le rapport
Allaire, qui est un document important pour ce qui est de la formation
politique ministérielle, sur celui de la commission
Bélanger-Campeau, sur le rapport Arpin, un rapport qui a
été commandé par la ministre des Affaires culturelles et
que nous avons eu l'occasion de discuter au cours d'une longue, mais
passionnante, commission parlementaire à l'automne dernier.
Alors, le fédéral arrive avec 7 %. Forcément,
puisqu'il faut s'harmoniser... La symétrie signifie, pour nos amis d'en
face, l'obligation d'harmoniser au niveau de la taxation. Ottawa taxe, je taxe.
Un peu comme la publicité: Tout le monde le fait, faites-le donc. Donc,
le Québec annonce qu'il va imposer une taxe de 8 %. Alors, nous en
sommes déjà, M. le Président, à un taux de taxation
passablement élevé. Et, bien entendu, il y a la taxe sur le
divertissement. Donc, on risquait un taux cumulé d'environ 27,5 %.
Forcément, immédiatement, mobilisation; notamment, la
création d'une coalition sur les taxes sur le spectacle. Mais il faut
quand même dire que la formation de cette coalition, au même titre
que pour le livre, est venue au moment où Québec a taxé ou
a annoncé son intention de taxer. Je dois quand même avouer que
j'aurais préféré que l'offensive première soit
donnée vers Ottawa qui n'a aucune, aucune juridiction dans le domaine de
la culture. La culture appartient au Québec. Bon! Alors, ça ne
s'est pas fait. Maintenant, la coalition dit que, après un gain, qui est
une demi-taxation, elle ira vers le gouvernement fédéral. J'ose
espérer qu'elle fera cette offensive face au gouvernement
fédéral et j'offre ma collaboration pleine et entière,
mais il faut également que ce soit fait parce que le
fédéral n'a absolument aucun droit - je le répète,
c'est peut-être la quatrième fois depuis le début de mon
intervention que le dis, M. le Président, mais jamais je ne cesserai de
le dire - Ottawa n'a absolument rien à faire dans la taxation.
Donc, M. le Président, on dit: Oui, mais il y a le 10 % de taxe
de divertissement, il faudrait l'enlever. Nous - et, quand je dis nous, je
parle de ma formation politique, je parle de mon collègue,
député de Jonquière et porte-parole pour les affaires
municipales, ancien maire et ancien président de l'Union des
municipalités, donc, il connaît quand même le dossier
très bien; je parle de mon collègue, le député de
Labelle, qui est porte-parole pour les finances, qui est peut-être un
homme de chiffres, mais qui est également un homme de lettres puisque je
connais sa passion pour la culture, M. le Président, et vous la
reconnaissez vous-même - nous nous sommes immédiatement
campés en disant que, quant à nous, nous serions de
préférence en faveur d'une non-taxation, c'est-à-dire une
taxation au degré zéro, puisque zéro est un indice de
taxation, des spectacles. Mais le gouvernement décide d'aller à 4
%. Bon! Je pense que mon collègue a fait une démonstration assez
brillante au
niveau des chiffres - je ne vais pas la reprendre - mais là on se
retrouve, par contre, avec un problème qui n'est pas réglé
et qui ne sera pas réglé et qui, en fin de compte, illustre
l'espèce d'illogisme qui peut exister dans le financement des arts et de
la culture au Québec, et on pourrait même dire au Canada quoique
ma défense de la culture est plutôt portée vers le
Québec que vers le Canada.
Alors, M. le Président, durant toute cette commission
parlementaire à laquelle je faisais allusion tantôt où on
écoutait les intervenants qui intervenaient suite à la
publication du rapport Arpin, on a entendu des municipalités venir dire
qu'elles consacraient jusqu'à 3 %, presque en moyenne, et certaines
municipalités, dont une d'ailleurs de la région de l'Abitibi - je
suis persuadé que le député d'Abitibi-Est écoute
attentivement - qui, elle, consacrait 5 %. D'où la municipalité,
M. le Président, tirait-elle les revenus pour les réinjecter dans
le domaine de la culture? C'était à partir de cette taxe sur le
divertissement de 10 % qui était la seule taxe qui existait au niveau
des arts et de la culture. C'était la seule. Il n'y avait pas le
fédéral avant. Le Québec n'avait pas annoncé son
intention d'inclure une taxe. Alors, les municipalités disaient: Nous
voulons faire, nous avons l'intention de faire et le rapport Arpin, d'ailleurs,
c'était sa recommandation no 78, disait: Que les programmes culturels ne
fassent pas l'objet d'un délestage de la part du gouvernement dans le
cadre d'un nouveau partage... (1 h 50)
M. Dufour: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, M. le
député.
M. Dufour: Je m'excuse d'interrompre mon collègue de
Sainte-Marie-Saint-Jacques.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de
règlement?
M. Dufour: J'aimerais que vous constatiez le quorum.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À votre demande,
M. le député, je vais vérifier. Il n'y a effectivement pas
quorum. Qu'on appelle les députés. (1 h 52 - 1 h 55)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, nous poursuivons
l'adoption du principe du projet de loi 20. M. le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques, vous pouvez poursuivre votre intervention et je
vous indique qu'il vous reste huit minutes.
M. Boulerice: M. le Président, je vous remercie d'avoir
appelé le quorum, et je comprends votre tristesse de voir qu'en ce
Parlement on n'aime pas et on ne s'intéresse pas à la culture. M.
le Président, au moment où, à cause de la situation
économique, il y a malheureusement, compte tenu des revenus des
individus, des baisses significatives de fréquentation au niveau des
spectacles, alors que l'on n'a pas atteint un pourcentage adéquat,
c'est-à-dire au minimum 1 % du budget de l'État affecté
aux arts et à la culture, je trouve malheureux qu'un ministre vienne
abolir une taxe - oui, je suis malheureux qu'on abolisse une taxe - mais
l'abolisse de façon telle qu'il ne compense absolument pas ceux qui
bénéficiaient de cette taxe. On sait qu'avec cette taxe de
divertissement les municipalités pouvaient s'engager à fond dans
la culture. Ce ne sera que 6 500 000 $ qui seront remis et pour un plan
triennal, après, de 13 000 000 $, alors que ce serait normalement 30 000
000 $ auxquels les municipalités devraient s'attendre, si on se fie aux
calculs que nous avons. alors, comment pensez-vous, m. le président, que
l'on va en arriver à une politique culturelle, que nous promet la
ministre un peu comme si c'était la magna carta, dans laquelle on va
demander aux municipalités d'investir davantage, de s'investir aussi -
dans l'autre sens du terme - alors qu'on leur coupe des moyens d'intervention?
m. le président, avec la maigre compensation pour tout l'ensemble du
territoire - parce que c'est quand même au-delà de 160
municipalités qui pouvaient agir au niveau culturel en injectant ces
sommes - juste à titre d'exemple, comment pensez-vous que va pouvoir
continuer de fonctionner le conseil des arts de la communauté urbaine de
montréal, qui est un organisme subventionnaire extrêmement
important à montréal et auquel on doit d'ailleurs des
réalisations importantes? comment pensez-vous, m. le président,
que la grande région de la capitale nationale va essayer de soutenir les
arts, alors qu'ils n'ont plus cet argent? et je sais pertinemment que le maire
de la capitale était tenté de former un conseil des arts de la
communauté urbaine de québec. au moment où il y a une
taxation de 11 % - parce qu'il y a toujours la fédérale et celle
du québec - au moment où le québec se désengage
encore, mais sur le dos des municipalités qui faisaient des efforts
considérables, alors que l'augmentation du budget consacré aux
affaires culturelles ne touche absolument pas le soutien à l'artiste et
aux régions, et qu'on ajoute un maigre petit 5 000 000 $ qui,
dispersé pour l'ensemble du territoire québécois, ne va
signifier que des grenailles, comment pensez-vous, m. le président, que
le québec va réussir à assurer son caractère de
société distincte à travers le soutien des arts et de la
culture? et comment pensez-vous, m. le président, que l'on va pouvoir
régler ce qui est apparu évident à cette commission
parlementaire, qui était l'immense scepticisme du milieu de la culture
ou des milieux de la culture, si vous
préférez, face à une volonté du gouvernement
d'agir avec énergie dans le domaine de la culture? Comment allons-nous
contrer cette espèce de - et je cherche le mot - de sentiment de
«désabusion» que les artistes ont envers ce
gouvernement...
Une voix: Désabusement. (2 heures)
M. Boulerice: Désabusement, désamusement.
Désamusement et désabusement, oui effectivement, comme me font
remarquer certains de mes collègues. Alors que je crois que le premier
inspirateur devrait être le gouvernement du Québec, puisque c'est
à lui qu'appartient, en premier lieu - et en totalité d'ailleurs
- le soutien des arts et de la culture.
Donc, le projet de loi 20, M. le Président, n'est tout simplement
qu'un autre délestage, un autre pelletage dans la cour des
municipalités, à qui on dit: Faites-en, allez-y, gênez-vous
pas, on compte sur vous. Vous êtes à une table de concertation,
c'est extraordinaire. Et finalement, on ne veut pas leur concéder les
moyens, ou lorsqu'ils en ont, on leur enlève les moyens. Mais, par
contre, on ne donne rien d'équivalent en retour, leur permettant de
poursuivre dans une action qui est souhaitée par tous. Parce que nous
accusons au Québec, malheureusement, même si, dans l'ensemble,
beaucoup de municipalités font des efforts - et j'ai été
personnellement témoin des interventions de maires de
municipalité - mais nous accusons malheureusement au Québec
d'immenses retards par rapport à l'implication des municipalités
dans le domaine des arts et de la culture. Quand on regarde l'implication des
municipalités dans des pays telle la France, telle la Grande-Bretagne,
telle l'Italie, telle l'Allemagne, telle l'Espagne, pour ne citer que ces pays
- on s'aperçoit que malheureusement chez nous, ce n'est pas une
tradition. Elle commençait à naître tranquillement et on
aurait pu dire, dans quelques années, qu'il y avait une tradition
d'implication et que le discours culturel faisait partie du discours d'un maire
d'une ville. Mais on va ruiner ces chances, parce que, aux
municipalités, on dit: Allez-y, mais par contre, pour ce qui est d'y
aller, ne comptez pas sur nous pour vous donner un coup de main. Et les moyens
que vous aviez, on vous enlève. Et il n'est pas question de vous
compenser.
Triste fin de parcours pour la culture dans les municipalités, M.
le Président. Je vais conclure là-dessus, puisque vous me faites
signe, ça s'appelle projet de loi 20. Ce n'est pas l'autoroute 20 de la
culture. On met les municipalités dans un cul-de-sac, et c'est triste.
Mais ce n'est pas étonnant, c'est un gouvernement qui n'aime pas la
culture et ne s'intéresse pas à la culture, M. le
Président. Je vous remercie de m'avoir écouté, et surtout
soutenu, durant tout le long de ce discours.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. Est-ce qu'il y a d'autres
intervenants? M. le ministre des Affaires municipales, si vous désirez
répliquer, il n'y a pas d'autres interventions. Vous avez le droit, M.
le ministre, pour votre réplique, à une période de 20
minutes.
M. Claude Ryan (réplique)
M. Ryan: Ça ne durera pas 20 minutes, M. le
Président, ce sera très bref. Je voudrais simplement relever des
propos que j'ai entendus sur les lèvres du député de
Labelle, tantôt. Je crois qu'il est parti. Je le comprends, parce
qu'à cette heure-ci... Il écoute à la
télévision, c'est très bien.
Quand il a parlé de l'impact financier du projet de loi que nous
discutons ce soir, je pense qu'il a déformé la
réalité, parce qu'il a comparé des pommes avec des
oranges. J'ai soutenu - et il a été obligé de convenir de
l'exactitude des chiffres que j'ai avancés - pour la personne qui
fréquente un spectacle, le coût qu'elle devra payer par suite de
l'adoption du projet de loi 22 sera moins élevé, sensiblement
moins élevé. J'ai même établi le taux de
réduction à peu près à 12 %. C'est incontestable,
parce qu'il suffit de lire le projet de loi pour s'en rendre compte. Et cette
partie-là de l'exposé, le député de Labelle n'a pas
osé la mettre en doute. Mais il nous dit: La même personne qui va
bénéficier d'une réduction de 12 % sur le prix de son
billet pour aller à la Place des Arts - je veux faire plaisir au
député de Saint-Jacques - 12 %, le député de
Saint-Jacques l'admet aussi. J'espère qu'il n'y a pas de problème
entre nous là-dessus. Il dit: Elle va le payer quand elle va acheter une
maison, à Lachute, à Saint-Jérôme, à
Montréal ou à Mascouche. Il y a eu des ajustements dans les
droits sur les mutations immobilières. C'est un autre domaine. Ça
ne fait pas partie du tout du projet de loi 22, ni de la mesure qu'on institue
à propos des droits sur les divertissements. C'est une autre chose.
Nous avons dit que nous avons ajusté les droits sur les mutations
immobilières. Ils étaient facultatifs au Québec. À
part de ça, le maximum qu'une municipalité pouvait imposer,
c'était de 0,5 % sur le prix de la transaction. Je suis content que le
député de Labelle arrive parce que je vois que son sourire
indique qu'il est d'accord avec moi! On a augmenté les droits sur les
mutations immobilières. On les a rendus obligatoires partout. On les a
mis au même niveau qu'en Ontario. On n'a pas fait de choses renversantes.
Au même niveau qu'en Ontario. Et grâce aux ajustements que nous
avons institués, il y a des revenus additionnels; je pense que c'est
rendu à 80 000 000 $ qui vont dériver de cette source. C'est
évident que les 80 000 000 $... Ce n'est pas le Crédit social qui
est au pouvoir à Québec, là, c'est le Parti
libéral. On n'émet pas de monnaie, nous autres. Il faut
aller la chercher là où elle se trouve.
Ces revenus additionnels proviendront évidemment des montants
additionnels que débourseront ceux qui ont assez d'argent pour acheter
des propriétés, surtout des propriétés à
prix plus élevé que la petite moyenne. En fait, on le
reconnaît, c'est un déplacement de responsabilité. C'est un
déplacement. C'est évident. Quand nous avons dit aux
municipalités: Là, il y en a pour 400 000 000 $ que nous ne
sommes plus capables de vous donner sous forme de subvention, c'est
évident que nous impliquions qu'elles devraient le trouver par
elles-mêmes si elles voulaient maintenir le même niveau de
dépenses qu'auparavant. Il y en a plusieurs qui ont été
sages, qui ont coupé sur les dépenses. Et c'est un des objectifs
de la réforme, ça. Celles qui n'ont pas pu couper au complet sont
obligées de se prévaloir de la taxation parce que leur
capacité d'emprunt ne peut pas être utilisée pour des
déficits de fonctionnement.
Je pense qu'on est d'accord là-dessus. Il n'y a pas de
problème. Mais on ne peut pas dire... Je demande au député
de Labelle... Là, nous discutons du projet de loi 22, qui porte sur
l'abolition des droits sur les divertissements, mesure éminemment
bienfaisante à la fois pour le consommateur de divertissements et pour
les entreprises qui offrent des spectacles à la population sur une base
commerciale. Ces entreprises-là vont bénéficier d'une
marge de réduction dans le prix que doit payer le client, qui est
inscrite dans la mesure elle-même.
Pour cette raison, je suis convaincu que les milieux du divertissement
et la population en général sauront apprécier ce que
l'Opposition comprend très bien, mais ne veut pas admettre en public,
parce qu'elle est peut-être un petit peu trop professionnellement
oppositionniste!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): merci, m. le ministre.
est-ce que la motion du ministre des affaires municipales proposant l'adoption
du principe du projet de loi 20, loi abrogeant la loi concernant les droits sur
les divertissements, est adoptée.
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté sur
division. M. le leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'aménagement
et des équipements
M. Johnson: M. le Président, je fais motion pour que ce
projet de loi soit déféré à la commission de
l'aménagement et des équipements pour étude
détaillée.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion
de déférence est adoptée? Des voix:
Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, je vous demanderais d'appeler
l'article 15 de notre feuilleton.
Projet de loi 22 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 15 de
notre feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du
principe du projet de loi 22, Loi modifiant la Loi sur les cités et
villes, le Code municipal du Québec et la Loi sur les dettes et les
emprunts municipaux.
M. le ministre des Affaires municipales, vous avez droit à une
période maximale de 60 minutes pour votre intervention principale. On
vous écoute, M. le ministre.
M. Ryan: Est-ce que je pourrais vous demander une suspension de
deux minutes?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le ministre.
M. Ryan: Je veux simplement éliminer les documents qui
sont sur mon pupitre et qui se rapportent au projet de loi
précédent.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Votre demande est
acceptée. On suspend pour quelques minutes, M. le ministre.
(Suspension de la séance à 2 h 9)
(Reprise à 2 h 13)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, nous reprenons nos
travaux. Nous sommes à étudier la motion du ministre des Affaires
municipales proposant l'adoption du principe du projet de loi 22.
M. le ministre, tel qu'indiqué tout à l'heure, vous avez
droit à 60 minutes. Allez-y!
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, le projet de loi dont nous
abordons l'étude permettrait à l'Assemblée nationale
d'apporter plusieurs modifications substantielles à diverses
dispositions de la Loi sur les cités et villes et du Code municipal du
Québec qui régissent l'activité des élus municipaux
et des organismes décisionnels qu'ils
constituent.
Ainsi que vous le savez, des rapports fréquents de consultations
ont lieu entre le gouvernement et les deux unions qui regroupent les
municipalités du Québec, c'est-à-dire l'Union des
municipalités du Québec et l'Union des municipalités
régionales de comté et les municipalités locales du
Québec.
La table Québec-municipalités sert de forum
privilégié pour ces consultations qui ont eu lieu
fréquemment entre les unions et le ministère des Affaires
municipales. Au cours des derniers mois, la table
Québec-municipalités s'est réunie à plusieurs
reprises, et j'ai eu le plaisir, à l'occasion de ces réunions, de
saisir la table Québec-municipalités des modifications qui sont
proposées dans le projet de loi dont nous allons discuter. Et je crois
pouvoir affirmer en toute vérité que les modifications que nous
proposons d'apporter à notre législation municipale
répondent à des attentes explicites des municipalités et,
dans bien des cas, elles viennent apporter une réponse à des
attentes qui s'exprimaient depuis de nombreuses années.
Quand je dis ceci, je ne veux pas prétendre que le ministre
actuel serait plus fin que ceux qui l'ont précédé, pas du
tout. Mais certaines questions demandent à mûrir avant de pouvoir
faire l'objet de modifications législatives, et je suis heureux de
constater qu'un certain nombre de problèmes ont suffisamment mûri
pour que nous puissions en faire la matière de modifications
législatives qui sont de nature à améliorer, de
manière significative, les conditions dans lesquelles les élus et
les administrateurs municipaux s'acquittent de leurs responsabilités au
Québec.
Parmi les modifications que nous apportons à notre
législation municipale, je vais mentionner les principales. En premier
lieu, le montant maximal des amendes que peuvent instituer les conseils
municipaux pour des infractions aux règlements municipaux n'a pas
été ajustés depuis un bon bout de temps. La limite
actuelle des amendes que peuvent imposer les conseils municipaux est de 300 $.
C'est évident qu'un montant de 300 $ aujourd'hui n'est pas suffisant si
on pense que certaines infractions vont porter sur des règlements en
matière environnementale, en matière de circulation, en
matière de tenue des propriétés et de respect des
règlements d'urbanisme, par exemple. Il est évident qu'un montant
de 300 $ ne répond pas du tout aux exigences d'aujourd'hui. Dans le cas
des individus, le montant maximal de l'amende sera porté à 1000 $
et, dans le cas des sociétés, des compagnies, il sera
porté à un montant sensiblement supérieur. Ça,
c'est un premier point.
Je pense qu'avec ces dispositions, ce n'est pas que nous voulions
encourager en quelque manière que ce soit les municipalités
à se lancer à la chasse des auteurs d'infractions sur leur
territoire, mais il est normal, quand un conseil municipal croit devoir
édicter un règlement en matière d'urbanisme ou
d'environnement, par exemple, qu'il s'attende à ce que ce
règlement soit observé et qu'en cas d'inobservance du
règlement il puisse appliquer une sanction qui soit proportionnée
à la gravité de l'infraction. Je pense qu'avec les ajustements
que nous apportons, ajustements en vertu desquels, dans le cas des entreprises,
le montant maximal pourrait être deux fois supérieur à
celui qui sera applicable dans le cas des individus. J'ai mentionné,
pour les individus, un montant maximal de 1000 $; pour les entreprises, ce
montant maximal sera de 2000 $. Je pense que ce sont des chiffres raisonnables,
qui témoignent d'un souci fort compréhensible d'adaptation aux
réalités d'aujourd'hui.
En matière de placement, les municipalités ont souvent des
placements à court terme à faire. Tu sais, les paiements de
taxes, ça arrive à deux périodes de l'année. C'est,
en général, au début de l'année et au cours de
l'été. Les municipalités ont beaucoup plus de
liquidités à ce moment-là. Elles doivent éviter
d'investir toutes ces sommes dans des placements à long terme parce
qu'elles devront faire face à des obligations pendant tout le cours de
l'année. Alors, actuellement, elles sont autorisées à
acquérir des valeurs à court terme du gouvernement du
Québec, du gouvernement canadien, de certaines entreprises du
gouvernement du Québec comme Hydro-Québec, par exemple, mais
elles ne sont pas autorisées actuellement à acquérir des
titres à court terme d'autres municipalités, de régies
intermunicipales ou d'organismes inter ou supra-municipaux. (2 h 20)
Avec le projet de loi que nous présentons, les
municipalités seraient habilitées à acquérir des
titres de placement également d'autres municipalités et
d'organismes inter ou supramu-nicipaux. Ça, c'est un avantage
considérable qui permettra aussi de rapprocher, dans bien des cas, les
placements à court terme des municipalités des institutions qui
les environnent. Je pense que c'est une amélioration très
sensible, que je suis très heureux de parrainer à l'occasion de
l'examen de ce projet de loi.
En matière de régime d'assurance, les municipalités
sont assujetties aux dispositions législatives concernant les appels
d'offres. S'il s'agit, par conséquent, d'un contrat d'assurance dont la
valeur dépasse un montant de 5000 $, par exemple, elles doivent faire
appel à des propositions sur invitation, et si le montant dépasse
25 000 $, elles doivent procéder par un appel d'offres public.
En matière de contrat d'assurance, si la municipalité
prend un contrat de trois ans, le marché de l'assurance évolue
très vite. Une année, le prix de la prime qu'on doit payer
descend parce que les sinistres survenus l'année
précédente ont été à un niveau très
faible; une
autre année, ça peut monter beaucoup. Si la
municipalité est obligée, à l'expiration de chaque
contrat, de procéder par appel d'offres, il arrive qu'elle peut se
trouver prise dans un chassé-croisé de mouvements vers le haut et
vers le bas, qu'elle se trouve à être perdante. Dans ce cas-ci, on
lui permettrait, après une première période, de renouveler
un contrat d'assurance sans passer par appel d'offres, pour une période
limitée cependant. Un renouvellement pourrait se faire de cette
manière. De même, si un contrat d'assurance était pour une
durée de moins de trois ans, il pourrait également être
renouvelé sans passer par la procédure d'appel d'offres, de
manière à éviter que la municipalité soit
exagérément exposée aux aléas très
réels et souvent très coûteux du marché en ces
matières.
Plusieurs municipalités, au cours des dernières
années, ont senti le besoin de se protéger contre certaines
catégories de risques en épargnant de l'argent, en se disant:
Plutôt que d'aller sur le marché de l'assurance, on va mettre des
sommes de côté afin de faire face à des risques dont
l'occurrence est très improbable, mais contre lesquels il est
raisonnable qu'une administration sérieuse veuille se protéger.
Alors, ça a très bien fonctionné dans le cas... Il y a des
municipalités qui ont de tels régimes depuis des années.
Ça fonctionne très bien, et elles estiment avoir sauvé de
l'argent. Ça, c'est un privilège que les municipalités
ont; elles peuvent mettre de l'argent de côté et l'utiliser pour
telle forme de dépense qui consisterait à se dédommager
pour un risque qui aurait pu les frapper. Rien n'interdit de faire ça et
beaucoup de municipalités le font. Mais des municipalités, en
particulier l'Union des municipalités du Québec, qui
représente les municipalités qui ont un statut de ville ou de
municipalité urbaine, nous avaient dit: II faudrait permettre
également aux municipalités de se regrouper ensemble, de se doter
de régimes communs d'assurance, de mettre, en somme, leurs risques en
commun, de manière à pouvoir augmenter leur protection et de
manière à améliorer, aussi, les conditions
financières dans lesquelles cette protection est assurée. On ne
peut pas permettre aux municipalités de créer une compagnie
d'assurances sans les assujettir, si elles veulent poursuivre cette fin,
à la loi générale qui régit les assurances au
Québec. Ce n'est pas exactement ce que poursuivent les
municipalités. Elles ne veulent pas former une compagnie d'assurances
qui vendrait de l'assurance à des particuliers ou à des
entreprises. Elles nous ont demandé la possibilité de se doter de
fonds communs de protection pour les municipalités contre certains
risques qu'il leur appartiendrait de définir à cette
occasion.
Nous avons examiné cette demande des municipalités, de
concert avec l'Inspecteur général des institutions
financières. L'Inspecteur général des institutions
financières s'est montré très rigoureux. Il a la
responsabilité de veiller à la solidité financière
des institutions qui fournissent des services d'assurance ou d'épargne
ou de gestion de placements à la population du Québec et il est
normal qu'il se montre très exigeant en ces choses. Il me fait plaisir
de vous assurer, M. le Président, que nous avons pu inscrire dans le
projet de loi 22 des dispositions en vertu desquelles les municipalités
pourront se regrouper pour des fins d'assurances mutuelles. Et les conditions
que nous avons mises dans le projet de loi répondent - en suis-je
convaincu - aux conditions dans lesquelles fonctionnent les
municipalités et devraient permettre à celles qui le voudront -
ce sera libre, évidemment, aucune municipalité ne sera jamais
obligée d'adhérer à un tel régime - celles qui le
voudront pourront se regrouper pour se doter de conventions d'assurances
réciproques qui leur permettront de se donner elles-mêmes, dans
des conditions économiques, dans des conditions que j'appellerais
d'autogestion, de prise en responsabilité de leur propre protection,
dans des conditions qui satisferont, en même temps, aux exigences tout
à fait compréhensibles de l'Inspecteur général des
institutions financières.
Je n'en dis pas davantage pour l'instant, mais je pense qu'il y a
longtemps qu'on travaillait sur le sujet et que nous avons pu, grâce
à une collaboration très étroite entre les
municipalités, l'Inspecteur général des institutions
financières et le ministère des Affaires municipales, mettre au
point un projet qui me paraît fort défendable. Évidemment,
nous avons reçu certaines représentations des entreprises
d'assurances, qui nous ont dit qu'elles ne voudraient pas que les
municipalités se soustraient aux réalités du marché
en ces choses. Il y a bien des risques pour lesquels les municipalités
intéressées à se doter d'un fonds réciproque de
protection devront continuer à recourir aux services qui sont offerts
par les différentes entreprises et par les courtiers. Mais avec ces
dispositions que nous introduisons dans le projet de loi 22, les
municipalités pourront, si elles le veulent, se protéger contre
certains risques, par le moyen de la formule de la convention d'assurance
mutuelle.
Les règles actuelles du droit municipal ne semblent pas permettre
la conclusion d'un contrat de crédit-bail dont l'objet serait un meuble
acquis par voie de soumissions publiques ou sur invitation. En effet, le
contrat de crédit-bail nécessite l'intervention d'un tiers, le
crédit-bailleur, envers lequel l'adjudicateur n'est aucunement
lié. Les administrations municipales se montrent de plus en plus
intéressées à recourir à cette formule
d'acquisition de biens immeubles; jusqu'à maintenant, la
législation ne leur permet pas de le faire. Nous pensons que le moment
est venu d'élargir les dispositions de notre législation
municipale de manière que cette formule très répandue
d'acquisition de propriétés immobilières puisse être
rendue accessible aux municipalités. Il nous fera plaisir, à
l'occasion de
l'examen du projet de loi en commission, de donner aux
députés toutes les précisions nécessaires à
ce sujet.
Une question qui fait couler beaucoup d'encre depuis longtemps, c'est la
question des exigences de la loi en matière d'octroi de contrats de
services ou d'achat de marchandises ou de biens. En vertu de la loi actuelle,
comme les députés le savent, une municipalité est libre
d'octroyer un contrat d'une valeur de moins de 5000 $ sans passer par des
soumissions publiques. Si elle veut octroyer un contrat d'une valeur allant de
5000 $ à 25 000 $, là, elle doit procéder par appel de
propositions, c'est-à-dire qu'elle peut retenir une liste limitée
de fournisseurs, leur écrire, les inviter à soumettre des
propositions entre lesquelles elle devra choisir la plus avantageuse pour la
municipalité. Et quand le contrat envisagé doit dépasser
la somme de 25 000 $, la municipalité doit procéder par voie
d'appel de soumissions publiques, c'est-à-dire qu'elle doit publier un
avis dans les journaux invitant les fournisseurs intéressés
à lui soumettre une proposition, à déposer une soumission.
La municipalité est obligée, ensuite, de choisir la soumission
qui a été faite au prix le plus bas, pourvu qu'elle
réponde à toutes les exigences du devis qui a été
présenté.
Il m'est arrivé souvent, depuis que je suis ministre des Affaires
municipales, d'être obligé de trancher dans des cas où il y
avait trois soumissionnaires, par exemple, un qui soumissionne - je vais vous
donner un exemple - pour 200 000 $, un autre pour 205 000 $, un autre pour 201
000 $. Souvent, il est arrivé que le soumissionnaire à 201 000 $
est un résident de la municipalité qui rend toutes sortes de
services, tandis que les deux autres sont des étrangers qui viennent
d'ailleurs. Souvent, on m'a demandé: Nous permettriez-vous d'octroyer le
contrat au deuxième soumissionnaire parce que, dans notre cas, ça
vaut beaucoup plus que les avantages du contrat? À chaque reprise, sauf
dans un ou deux cas très exceptionnels, j'ai refusé, parce que le
principe de l'octroi du contrat au soumissionnaire le plus bas est un principe
très important, auquel nous ne devons déroger que dans des
conditions tout à fait exceptionnelles. Si on allait ouvrir les digues
de ce côté, je pense qu'au bout d'un an ou deux il ne resterait
plus grand-chose du principe, qui est une règle de base dans le
fonctionnement administratif de nos institutions publiques, pas seulement
municipales, mais québécoises également. (2 h 30)
Cependant, les seuils que définit la législation actuelle
ne correspondent plus aux réalités d'aujourd'hui. Les seuils que
nous avons, de 5000 $ et 25 000 $, sont dépassés par la
réalité d'aujourd'hui, et le temps est venu de les ajuster aux
conditions dans lesquelles les administrateurs municipaux doivent s'acquitter
de leurs devoirs en 1992. Et c'est pourquoi nous avons inséré
dans le projet de loi des dispositions qui apporteront des améliorations
très importantes.
J'ai bien mentionné, tantôt, le montant de 5000 $ va rester
là, le montant de 5000 $ reste tel quel, mais le 25 000 $ est
modifié. Dans le cas des municipalités de moins de 50 000
habitants, ce montant-là est porté à 50 000 $. Ça
veut dire qu'une municipalité pourra procéder par appel de
propositions pour un contrat allant de 5000 $ à 50 000 $ au lieu de 25
000 $ comme actuellement. Et si la municipalité a une population de plus
de 50 000 habitants, le seuil sera de 100 000 $ au lieu de 25 000 $ comme
actuellement, c'est-à-dire qu'elle pourra octroyer un contrat d'une
valeur de 100 000 $ sans être obligée de passer par un appel de
soumissions publiques, en se contentant de recourir à l'appel de
propositions.
Je pense qu'il s'agit d'une autre disposition qui permettra d'assouplir
considérablement la gestion des affaires municipales et paradoxalement,
dans bien des cas, de réaliser des économies appréciables.
Parce qu'aucun régime n'est parfait. Le régime actuel
entraîne souvent des coûts inflationnaires parce qu'il
entraîne un déploiement de formalités dont la lourdeur ne
correspond pas toujours à la nature exacte du problème qu'il faut
résoudre. Alors, ici, nous apportons des ajustements dont je suis
convaincu que les députés voudront reconnaître le
bien-fondé et l'utilité éventuelle.
Moi, j'ai été surpris d'apprendre que les
municipalités possèdent des pouvoirs assez limités en
matière d'achats en commun. Deux municipalités peuvent s'entendre
pour procéder à des achats en commun. Trois municipalités,
également, peuvent former une entente à cette fin, rien ne les
empêche de le faire. Mais à plusieurs reprises, ces
dernières années, les municipalités ont émis le
désir, surtout les municipalités affiliées à
l'Union des municipalités du Québec, de pouvoir effectuer
certains achats par l'entremise de leur Union légitimement reconnue,
c'est-à-dire l'Union des municipalités du Québec. Elles ne
peuvent pas le faire actuellement parce que l'Union des municipalités du
Québec - le député de Jonquière en conviendra, lui
qui en a déjà été le président - n'est pas
habilitée à prendre des initiatives de cette nature. On m'informe
qu'en matière, par exemple, d'achat d'énergie, il pourrait y
avoir des économies très appréciables à
réaliser si certaines initiatives pouvaient être prises par des
municipalités, par le truchement de l'Union des municipalités du
Québec.
Je ne sais pas quelle serait la mesure d'adhésion à de
semblables initiatives. On nous a fait valoir que l'Union des
municipalités du Québec pourrait jouer un rôle très
utile à cet égard, et nous ouvrons volontiers la porte à
des initiatives de ce genre. Avec le projet de loi, nous permettrions autant
à l'Union des municipalités du Québec qu'à l'UMRCQ
de prendre des
initiatives de cette nature, pourvu que ce soit, évidemment, avec
l'assentiment d'un nombre minimum de municipalités et que
l'adhésion à de semblables initiatives soit laissée
à la libre décision des municipalités concernées.
Alors, le projet de loi contient des dispositions à cette fin, et je
crois que, encore ici, on ouvre des avenues intéressantes pour la
collaboration intermunicipale.
Une autre chose qui a été portée souvent à
mon attention, ce n'est pas grand-chose. Actuellement, une municipalité
peut faire des emprunts temporaires pour rencontrer des dépenses
d'administration courante et aussi pour rencontrer les dépenses
qu'occasionne ou qu'autorise un règlement d'emprunt. Mais il arrive des
cas où une municipalité reçoit une lettre d'un ministre
qui lui dit: Je vous annonce que dans le cadre du programme AIDA, nous allons
vous octroyer une somme de 100 000 $. Là, la municipalité veut
procéder à l'engagement d'un ingénieur pour
procéder à des travaux de recherche pour trouver des sources
d'eau ou pour commencer à préparer des devis en vue de
l'amélioration du réseau d'aqueduc ou dégoût. Puis
elle ne peut pas le faire, actuellement; elle ne peut pas le faire actuellement
parce que tant que cet argent-là n'est pas entré, elle n'est pas
autorisée à emprunter sur une simple promesse.
Or, nous savons, par la jurisprudence, qu'une lettre d'un ministre qui
engage le gouvernement est effectivement un engagement pris au nom du
gouvernement. Des décisions judiciaires ont été rendues
à cette fin et, vu cette doctrine qui est maintenant reçue
communément, il nous apparaît qu'il serait normal, lorsque la
municipalité a reçu la lettre du ministre, qu'elle puisse aller
à la banque ou à la caisse populaire ou à une autre
institution financière et contracter un emprunt à
l'intérieur de cet engagement qui a été pris par le
gouvernement parce que, souvent, les retards qui surviennent en ces choses
entraînent des coûts considérables.
Je pense aux travaux en matière d'égout et d'aqueduc.
Ça, ça se fait surtout en été. Des fois, si la
lettre du ministre arrive, par exemple, au mois de juin, il faut faire les
travaux immédiatement et que le chèque ne vient qu'au mois de
septembre, si la municipalité n'a pas une certaine marge de manoeuvre,
ça peut arriver qu'on soit obligé de reporter les travaux
à l'autre année puis, à ce moment-là, les
coûts devant être encourus se révèlent
supérieurs au montant même de la subvention. Puis là, il
faut mettre les pieds à terre, il faut se dire: On fait ces subventions
pour rendre service aux municipalités, il faut que le «red
tape», là, la bureaucratie cède à la
réalité, qu'on se mette dans des conditions qui permettent
d'être le plus utiles puis le plus aussi efficaces en traitant avec les
municipalités.
Alors, il y a des améliorations de cette nature qui seront
permises par l'adoption du projet de loi. On permet également aux
municipalités de se doter d'instruments plus développés en
matière d'enlèvement des déchets. On avait contesté
le pouvoir des municipalités de se procurer certains instruments
nécessaires, certaines catégories de sacs, par exemple, pour la
cueillette des déchets, etc. Là, elles pourront faire des choses
de cette nature, ici. On leur donne la possibilité d'avoir un
accès plus facile à la technologie la plus récente en
matière, par exemple, de gestion des déchets ou
d'enlèvement des déchets, en particulier; c'est un domaine dans
lequel les municipalités sont très actives.
Enfin, nous diminuerons le nombre de documents que les
municipalités sont tenues, de par la loi, de fournir au ministre quand
elles sollicitent une approbation pour une chose ou l'autre. Je n'en reviens
jamais de la très grande quantité d'exigences qui sont contenues
dans notre législation municipale, à l'endroit des
municipalités, en matière de fourniture de documents à
l'intention du ministre. Il y a beaucoup trop d'exigences de ce
côté-là et là, nous proposons de modifier autant la
Loi sur les cités et villes que le Code municipal, de manière que
les municipalités ne soient tenues de fournir au ministre que des
documents strictement nécessaires et que le ministre possède, par
ailleurs, la faculté d'exiger certains documents, s'il les juge
nécessaires. Il y a beaucoup de documents qu'on exige, actuellement, qui
sont fournis au ministre, par ailleurs. Ce n'est pas nécessaire de les
exiger deux ou trois fois dans la même législation. Il y a
d'autres documents qui ne sont pas rigoureusement nécessaires. Il y a
toutes sortes de règlements municipaux que le ministre est appelé
à approuver. Il y en a certains qui requièrent une documentation
très simple, d'autres requièrent plutôt une documentation
plus abondante. Le ministre pourra déterminer les renseignements dont il
aura besoin. On pourra se dispenser d'un grand nombre des formalités que
requiert la législation actuelle, autant la Loi sur les cités et
villes que le Code municipal.
Voilà, M. le Président, les principales dispositions que
contient le projet de loi 22. Je suis convaincu, pour l'avoir
déjà entendu dire par les porte-parole autorisés des
municipalités, que les améliorations nombreuses que nous
proposons, par ce projet, d'apporter à la Loi sur les cités et
villes et au Code municipal seront très appréciées des
municipalités, seront de nature à faciliter l'exercice de leurs
fonctions par les élus municipaux. Et nous entendrons volontiers les
représentations que voudront faire autant les députés que
les milieux concernés dans le cadre de l'étude en commission
parlementaire, de manière, si possible, à améliorer encore
ce projet de loi afin de le rendre encore plus utile et plus acceptable
à ceux qui devront vivre les dispositions qu'il définit.
Alors merci, M. le Président, de cette
période que vous nous avez accordée. Je suis convaincu que
mon collègue, le député de Jon-quière, se fera un
plaisir de souscrire aux propositions que véhicule le projet de loi, et
s'il n'y souscrivait point, nous nous réservons le droit de lui
répondre. (2 h 40)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Nous sommes à étudier la motion de M. le ministre des Affaires
municipales proposant l'adoption du principe du projet de loi 22, Loi modifiant
la Loi sur les cités et villes, le Code municipal du Québec et la
Loi sur les dettes et les emprunts municipaux. M. le député de
Jon-quière, vous avez droit, en votre qualité de
représentant de l'Opposition officielle en cette matière,
à une période maximale de 60 minutes. Allez-y, M. le
député.
M. Francis Dufour
M. Dufour: Oui, je vous remercie, M. le Président, et vous
me permettrez au début de mon allocution de dénoncer quelque peu,
et avec véhémence je devrais dire, la façon dont le
Parlement opère lorsque commence la session intensive. Et c'est à
chaque fois la même chose. On oblige les parlementaires à
travailler la nuit, à des heures indues, avec des pressions qui ne sont
pas justifiées puisqu'il n'y a pas péril en la demeure, si ce
n'est qu'il y a une mauvaise planification des travaux par le gouvernement, si
ce n'est qu'on décide de se payer un peu d'agrément ou de
plaisir, et en fait on s'autoflagelle sur la place publique, et on discute de
projets de loi importants à l'insu de la population.
La population ne peut pas suivre nos travaux à 2 h 45 pour savoir
ce qu'on dit sur le projet de loi 20, 22, 45 ou 150. Ça ne me
dérange pas, mettez tous les numéros que vous voudrez, il y a de
la folie furieuse là-dedans! Moi je trouve que c'est irraisonnable,
c'est irrationnel, c'est illogique, c'est antidémocratique. Et on
fête les 200 ans du Parlement, et on bafoue les règles, parce que
ça n'a aucune maudite allure! Ça fait deux nuits actuellement que
les parlementaires ne dorment pas. Et on a un devoir, c'est de donner un point
de vue, donner une critique sur des projets de loi qui sont
déposés. Pourquoi est-ce qu'on n'aurait pas pu déposer ces
projets de loi avant? Pourquoi on n'aurait pas pu le faire en première
lecture? Pourquoi on n'aurait pas pu agencer les travaux d'une façon
telle qu'on aurait pu travailler dans des façons normales? Donc,
c'était le premier point de vue que je voulais exprimer au
départ, et je trouve que les règles parlementaires c'est des
règles fofolles, et je n'invite surtout pas les gens à nous
copier, parce que c'est la plus mauvaise façon, c'est le plus mauvais
côté des règles parlementaires qu'on applique actuellement,
lorsque la fin de session arrive.
Quant au projet de loi lui-même, M. le Président, je peux
vous dire que j'ai beaucoup d'interrogations le concernant. D'abord, puisqu'il
faut appeler les choses par leur nom, il faut bien se rappeler que la loi 145 a
eu pour effet d'enlever des revenus aux municipalités. Et, à ce
moment-là, le ministre avait promis, ou s'était engagé
à revoir les règles des amendes pour permettre aux
municipalités de se remplumer. Et c'est ça qu'on voit, c'est
ça qui se produit, c'est que ce projet de loi ne fait que confirmer
l'engagement du ministre des Affaires municipales lors de la discussion du
projet de loi 145, à l'effet de hausser les amendes pour que les
municipalités puissent avoir des sources de revenus différentes,
qui sont de nature à changer un peu ou à améliorer leur
état financier.
Il demeure que les augmentations sont très fortes. On part d'un
côté de 300 $ pour aller de 1000 $ à 2000 $, pour une
première infraction, ça c'est pour des matières
pénales, une infraction à un règlement municipal, et la
deuxième amende de 2000 $ à 4000 $. Donc, c'est des montants
énormes et, sous le couvert qu'on n'a pas augmenté les
coûts, bien, là, on vient d'en profiter et on donne encore un
coup. Et vous remarquez que toujours le discours du gouvernement: Ça ne
coûte rien, ça ne coûte à peu près rien. Mais
c'est des augmentations de plus que le triple. C'est quelque chose, il faut le
faire. Quant aux amendes de stationnement de 10 $ à 30 $, et de 25 $
à 75 $ pour la circulation... donc, ça triple. Il n'y a rien la,
l'argent ça ne compte pas, parce que ce n'est pas plus grave que
ça, les gens ont juste à payer, ils n'ont rien à dire, et
on ne dérangera pas grand-chose, les municipalités ont des
droits, ça fait quelques années qu'on n'a pas touché
à ça. Il faut bien qu'on permette aux municipalités
d'aller se chercher des revenus. Ça part des amendes de 300 $, pour la
première «shot», puis on va tomber à 1000 $, à
2000 $ et pour une récidive, je le répète, de 2000 $
à 4000 $. C'est évident que, si on veut avoir des amendes plus
élevées pour des cas très précis, disons-le, mais
qu'on l'applique pour tous les cas, ça me semble excessif et ça
me semble, aussi, un problème assez important auquel on aura à
faire face.
Les municipalités vont devenir des per-ceptrices d'amendes et,
à ce moment-là, j'ai toujours pensé que les amendes
étaient supposées avoir un effet dissuatif sur les gens et la
façon qu'on le fait, c'est pas ça, c'est pour apporter des
revenus aux municipalités pour permettre d'obtenir des revenus
supplémentaires. Ce qui fait que, moi, je trouve qu'au point de vue
moral, c'est pas tout à fait correct. Je pense pas que les gouvernements
doivent fonctionner en voulant «poigner». Le gouvernement, quel
qu'il soit, ne doit pas agir comme le surveillant pour essayer de
«poigner» un coupable. Ça, ce n'est pas une façon
démocratique puis ce n'est pas une manière civilisée de
traiter ses citoyens. Ça va être celui-là qui va le
«poigner».
On sait ce qui se passe dans les municipalités, quand le corps
policier qui applique ces amendes-là, la plupart du temps, quand il est
de bonne humeur, les coffres de la municipalité vont pouvoir se grossir.
Mais quand le corps policier va être en négociations ou autrement,
les coffres vont dégonfler. Ça fait qu'on donne encore un pouvoir
plus grand à un groupe, dans notre société, qui est
déjà pas si mal traité.
L'adjudication des contrats, c'est évident que le ministre des
Affaires municipales veut hausser le seuil de 50 000 $ à 100 000 $ pour
les municipalités de 50 000 habitants et plus et, de 0 à 50 000
habitants, ils vont avoir le droit, sans soumission, juste par appel d'offres,
ils peuvent aller jusqu'à 50 000 $. Vous comprendrez que 100 000 $, bien
sûr, il y a une contrainte de 50 000 et plus. Il faut qu'on passe par
appel d'offres, appel de soumissions et autres. Pour les municipalités,
ça représente un avantage certain. Mais la question qu'on doit se
poser: Est-ce que ça rend mieux service aux contribuables de la
municipalité? Parce qu'il peut y avoir du favoritisme qui se pose. C'est
ce qui se passe aussi. Si on passe juste par appel de soumissions, 100 000 $,
on fait ça 10 fois dans l'année, c'est 1 000 000 $. on le fait 20
fois, c'est 2 000 000 $. ça fait que c'est de tendance à
augmenter assez rapidement, et on aura certainement à questionner par
rapport à ça. quant à la question du
crédit-bailleur à un contrat, on verra bien, dans l'étude
du projet de loi, ce qu'on pourra faire.
Il y a une question qui nous pose un problème, c'est la
façon dont on veut procéder pour protéger les
municipalités contre des dommages. En 1984, si mes souvenirs sont
exacts, les municipalités ont rencontré certaines
difficultés pour s'assurer contre certains dommages. À ce
moment-là, il y a eu une concertation, sûrement, entre les
différents assureurs, et les risques ont été
déclarés très grands, ce qui a eu pour effet d'augmenter,
d'une façon énorme, les coûts aux municipalités pour
se doter d'assurances. Ça a multiplié, dans certains endroits,
par trois et par quatre; ce qui fait que les montants d'assurance pour les
municipalités, ça coûtait 110 000 $ pour s'assurer,
ça a coûté, pour un an, 400 000 $, 450 000 $. (2 h 50)
II y a un phénomène qu'il faut constater, c'est que les
municipalités avaient le pouvoir d'accorder un contrat d'assurance pour
un an seulement. Donc, il faut se mettre dans la peau de l'assureur qui, lui,
est obligé d'assumer de grands risques pour un an; donc, il ne peut pas
le répartir sur un certain nombre d'années, ce qui a eu pour
effet d'augmenter les coûts d'une façon importante. Le projet de
loi introduit une période de trois ans, ce qui fait que les
municipalités pourront s'assurer pour trois ans et, pour moi, ça
aura sûrement comme résultat de baisser les coûts pour les
assureurs et les coûts pour les municipalités.
Le ministre propose, en plus, le pouvoir de s'auto-assurer ou, on
appelle ça la réciproque, ça peut être une mutuelle,
je ne sais pas trop comment l'appeler, réciproque, pour moi, ce n'est
pas un mot familier, mais je comprends la mécanique. Les
municipalités pourront se faire un fonds commun pour pouvoir garantir
des dommages qu'elles pourraient subir. Ça, c'est nouveau. Il y a des
municipalités actuellement qui le font. Les municipalités qui le
font, cependant - j'écoutais le ministre tout à l'heure -
ça se fait par loi. Montréal, Québec, Longueuil,
dernièrement on a accordé à ville de Saint-Laurent le
pouvoir de se faire un fonds pour pouvoir se protéger. Et c'a
été entériné par la loi. Est-ce que les
municipalités ont le droit de le faire elles-mêmes sans passer par
la loi? Je ne vois pas pourquoi on l'a fait avec la loi de ville de
Saint-Laurent. Dans le bill privé dernièrement, ils se sont
donné un fonds, et c'était 1 % par année de leur budget
qu'ils pouvaient mettre en garantie ou dans un compte spécial. Et c'a
été accordé dans la loi. Moi, je n'ai pas fouillé
si les municipalités ont le droit de le faire elles-mêmes, mais je
sais que Longueuil, c'est dans sa charte. Je sais que Montréal, c'est
dans sa charte. Je sais que Québec aussi, c'est la même chose.
Donc, là, on pense et on veut leur permettre de se doter de fonds
communs et passer par l'intermédiaire des unions municipales. Je pense
qu'il y a une question fondamentale qu'il faut se poser, c'est: Est-ce que les
unions, c'est dans leur responsabilité? Est-ce que c'est la bonne
façon de le faire? Parce qu'il faut croire que ça pourrait se
faire différemment. Est-ce que ça ne pourrait pas se faire sur
une base régionale, plutôt que sur une base de l'ensemble du
territoire du Québec, si on est pour le faire? Parce qu'il y a quelque
chose. À chaque fois qu'on applique ou qu'on se dote d'un
système, ceux qui, normalement, sont les dépositaires de ce
système-là, ils retirent des sommes ou des montants qui leur
permettent de couvrir des coûts, mais en même temps, qui leur
permettent de s'approprier des fonds supplémentaires. Ça aura
pour effet, à mes yeux, d'augmenter la force des unions... Oui.
Le Vice-Président (M. Lefebvre):...
M. Léonard: M. le Président, mon collègue
dit des choses très intéressantes, je pense qu'il serait
important que les députés de la majorité
ministérielle l'entendent.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle les
députés. (2 h 52 - 2 h 56)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y, M. le
député de Jonquière. Vous pouvez continuer votre
intervention.
M. Dufour: Je vous remercie, M. le Prési-
dent. Voyez-vous, ça confirme ce que j'ai dénoncé
tout à l'heure, les curieuses de règles qu'on applique lorsque
commence la session intensive. Parce que si on voulait faire respecter le
quorum, on siégerait à peu près une minute sur deux. Ce
qui veut dire que sur le temps qu'on parlerait, ce serait toujours pour appeler
le quorum. Et je comprends les parlementaires. À trois heures du matin,
ce n'est pas une heure pour écouter des discours. Je pense que pour
celui qui le fait, ça lui demande un effort. Celui... pour l'entendre,
c'est probablement plus onéreux. C'est plus difficile. C'est aussi vrai
pour celui de la part du gouvernement que pour celui qui a à critiquer
ou à poser un regard sur les projets de loi qui nous sont
présentés.
Ce que je veux rappeler pour la suite des choses, c'est qu'on parle dans
ce projet de loi de confier ou de permettre à un ensemble de
municipalités de se doter d'un fonds d'auto-assurance concernant des
dommages qui peuvent se produire dans les municipalités et regrouper ces
conditions-là à l'intérieur des unions municipales.
Ça peut être l'Union des municipalités régionales de
comté, comme l'Union des municipalités du Québec.
Donc, le ministre dit: C'est intéressant. C'a de l'allure. Il a
même pu... Il nous dit: J'ai l'approbation du directeur
général des institutions financières. Ça, c'est
nouveau. Ce n'est pas marqué dans le projet de loi. Le directeur des
institutions financières voit ça d'un bon oeil. Mais moi, la
question que je pose, et que je vais poser: Est-ce que c'est vraiment le
rôle de l'Union des municipalités du Québec d'agir comme un
«broker» sur le marché des assurances? C'est ça, la
question fondamentale. Et si les deux unions se dotent du même service,
ça veut dire qu'il y a un intérêt. Est-ce que c'est
l'intérêt des municipalités membres ou
l'intérêt des unions? Ça peut être les deux. Mais
est-ce que c'est normal que nous, comme législateurs, on favorise les
unions pour se ramasser des fonds pour agir sur le territoire du Québec?
Est-ce que c'est ça, dans les lettres patentes, qui régit ces
unions-là? Est-ce que c'est ça, le but qu'on a visé,
lorsqu'on a fondé ces unions-là?
Parce qu'il faut bien se comprendre, là. Ce n'est plus une
coopératire pour défendre des unions. À mon point de vue,
c'était pour défendre les intérêts des
municipalités. Si c'est une coopérative de services, c'est
d'autre chose. Il faudra bien qu'on se pose la question clairement pour
savoir... pour bien comprendre ce qu'on fait. Parce que les montants qui seront
collectés ou qui seront mis dans un fonds commun, comment ça va
se gérer? Si la municipalité en sort, de quelle façon elle
pourra le faire? Et, pour moi, ça représente certaines
embûches qu'on devra questionner d'une façon très
précise. C'est nouveau. (3 heures)
Le deuxième point que je soulève, c'est la question de la
coopérative d'achat. Bien oui, c'est intéressant que l'ensemble
des municipalités puissent se mettre ensemble pour acheter en commun.
Mais au moment où on parle de développement régional,
où on parle que les régions se vident, perdent leurs
éléments, au moment où on dit que l'activité
économique sur le terrain diminue, est-ce que c'est le temps, c'est
ça la question, est-ce que c'est le temps de prendre cette
capacité de dépenser des régions pour l'amener dans un
pool commun qui aura pour effet encore de favoriser un plus grand ensemble au
détriment de plus petits ensembles? Et ça, ça me semble un
peu contradictoire puisque, d'une part, on veut favoriser l'abaissement des
coûts, et l'autre attitude qu'on a d'aller non pas par soumissions, mais
par appel d'offres sur des montants de 50 000 $ à 100 000 $, ça
va avoir pour effet d'augmenter les coûts. Donc, d'un côté,
le ministre des Affaires municipales, dans sa grande cohérence, dit aux
municipalités: Je vais permettre que vous alliez sur un marché
local, jusqu'à 100 000 $, juste par téléphone. Ça,
ça va augmenter les coûts. Donc, il ouvre la porte. Et, de l'autre
côté, il dit: II faudrait bien que les municipalités
diminuent leurs coûts. Donc, on va leur permettre de faire un pool commun
et on va acheter ça à l'extérieur. Moi, ça me
semble un danger. Il va falloir qu'on le regarde d'une façon un peu plus
spéciale, il va falloir creuser ça.
Et le ministre nous dit: J'ai rencontré les unions, moi, j'ai
négocié avec les unions. L'Opposition n'est pas là. Il
discute avec l'Opposition et il dit: Aïe! on se comprend. Depuis quand
est-ce qu'on se comprend? Ça fait seulement un an. Est-ce que le
ministre a des choses à se faire pardonner? Est-ce que le ministre a des
choses à se faire pardonner par rapport aux unions? Parce que là,
il a une grande compréhension, il les écoute et il suit leurs
recommandations. L'an passé, où étaient les unions et
où était le ministre? La carotte et le bâton. Ce n'est pas
le bâton du pèlerin, là, faisons attention, là,
c'est la carotte et le bâton. L'an passé on les a
bâtonnés et là, on va les ramener dans le giron en leur
donnant des petites affaires, en leur donnant des choses et en leur disant:
Vous êtes des gens responsables. Là, ils deviennent responsables
et l'an passé ils ne l'étaient pas. Maintenant qu'on les a
siphonnés, on va leur dire comment aller siphonner les autres. L'exemple
entraîne.
C'est ça qu'on est en frais de faire. On est en frais de leur
dire comment on va aller chercher l'argent, comment on va les poinçonner
à quelque part. Moi, je trouve que c'est dangereux. Le ministre nous
invite, bien sûr, à dire qu'il faudrait bien accepter ça.
Si le député... Ce n'est pas une menace, je comprends que...
À l'âge que j'ai là, ça fait longtemps que j'ai
perdu mes craintes, mais il nous dit: Si le député n'est pas
d'accord avec nous...
Mme Marois: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la
députée de Taillon.
Mme Marois: ...je sais qu'il est un peu tard, ou tôt, selon
le point de vue où on se place, mais j'aimerais que l'on vérifie
le quorum, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, qu'on appelle les
députés. (3 h 5 - 3 h 12)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Nous poursuivons
l'adoption du principe du projet de loi 22, Loi modifiant la Loi sur les
cités et villes, le Code municipal du Québec et la Loi sur les
dettes et les emprunts municipaux. M. le député de
Jonquière, si vous voulez poursuivre votre intervention.
M. Dufour: Merci, M. le Président. Je vais continuer sur
la même lancée, à savoir le questionnement, la façon
dont le ministre des Affaires municipales se réjouit concernant le
dépôt de ce projet de loi vis-à-vis des assurances et des
achats regroupés. On peut dire que oui... Et il a fait
référence, bien sûr, à la table
Québec-municipalités, où il y a des rencontres et des
discussions. Là, il semble y avoir un climat de collaboration
extraordinaire. Le ministre est heureux de nous apporter le projet de loi, de
nous le déposer, en disant: Ça rencontre des désirs des
municipalités.
Savez-vous, M. le Président, à ce moment-ci de cette
question, je m'interroge sérieusement à savoir qu'est-ce qui
pousse le ministre des Affaires municipales...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je demanderais la
collaboration des collègues. Le député intervient sur un
projet de loi très important et j'ai de la difficulté à
l'entendre. Je vous demanderais votre collaboration, malgré l'heure
qu'il est. Si vous voulez poursuivre.
M. Dufour: M. le Président, en tout cas, je vous invite
à surveiller et à écouter comme il faut ce qui se passe
parce que je pense que j'ai des droits et j'espère que vous allez les
faire respecter.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Jonquière, je suis ici de façon
très spécifique pour protéger vos droits, et c'est ce que
je vais faire. Ne soyez pas inquiet de ce côté-là.
M. Dufour: Merci, M. le Président. Je vous fais confiance.
Vous savez, le ministre des Affaires municipales est rendu à un point
tel, avec l'Union des municipalités, qu'ils vont main dans la main.
C'est le bonheur parfait, on est sur la même longueur d'onde et il va
passer des lois qui vont faire plaisir aux unions municipales.
D'abord, je dois rappeler que le ministre des Affaires municipales est
déjà et avant tout le ministre des municipalités et non
pas le ministre des unions municipales. C'est l'interlocuteur par lequel il
passe pour essayer de rencontrer les besoins et les désirs des
municipalités parce que ça serait difficile, malgré que
ça ne serait pas impossible dans son cas, de rencontrer les 1500
municipalités une par une. Je suis sûr que, s'il se donnait
ça comme défi, il finirait par le faire.
Il aime écouter les confessions. Il aime être un peu
partout. Il va visiter... Je suis sûr qu'il pourrait le faire. Mais il
passe par le canal des unions municipales, et je le comprends. Mais seulement,
il faut faire attention. Aujourd'hui, il est tellement à l'écoute
des municipalités qu'il va falloir le protéger, même sur
les erreurs qu'il pourrait être porté à faire. C'est
là qu'est le problème. Il va falloir regarder ce qui amène
le ministre à être aussi ouvert à des propositions des
unions municipales. Parce que le but des unions municipales, à mon point
de vue, ce n'est pas de se grossir, ce n'est pas d'essayer d'apporter des
éléments qui remplacent, qui se substituent aux
municipalités. Il faudra le regarder sérieusement. Il faut
comprendre que, dans les régions, il y a des besoins et ces
besoins-là, sûrement, devraient être mieux comblés
sur le terrain régional que sur le terrain du Québec en son
entier. Donc, il faudra l'examiner sérieusement, il faudra le
débattre et je vous dis d'avance que j'ai des objections
sérieuses concernant ce projet qui est avancé par le
ministre.
À l'intérieur du projet de loi, il y a des
éléments que le ministre a omis, ou ii a trouvé que ce
n'était peut-être pas important, mais je trouve qu'il y a un
endroit où c'a toujours été adopté par
règlement. Vous savez, lorsque les municipalités se dotent
d'assurances collectives, c'est pour longtemps. C'est assez rare qu'une
municipalité établisse un plan de fonds de pension ou d'assurance
collective pour un an, pour deux ans ou pour trois ans. À ce que je
sache, les municipalités qui se dotent d'un plan comme ça, c'est
pour toujours. Et le ministre permet, par le biais de ce projet de loi,
d'établir ces fonds d'assurances collectives par résolution au
lieu de les établir par règlement. Et vous savez - je fais appel
à votre compétence puisque vous avez été aussi dans
le domaine municipal - qu'une résolution, ça se change par une
résolution, et un règlement se change par un règlement.
C'est très différent puisque, à ce moment-là, le
règlement, il y a des avis de publication, et ça permet à
la population d'en prendre connaissance et d'en discuter avant de l'adopter. Et
ça, c'est les fonds des citoyens qu'on engage dans des fonds collectifs
d'as-
surance. Donc, si c'est des fonds qu'on engage, ça mérite
sûrement qu'on regarde pourquoi on veut le faire par résolution
plutôt que par règlement.
C'est un élément important. On ne peut pas escamoter
ça. Il va falloir qu'on le regarde très sérieusement, et
on verra s'il y a des choses qui sont correctes ou pas correctes par rapport
à ça, mais je vous dis que j'ai des restrictions au moment
où je le lis dans le projet qui nous est présenté.
Il y a un autre élément aussi que le ministre n'a pas
touché, c'est l'élément des contrats. Vous savez, il y a
une disposition municipale qui dit que, lorsqu'une municipalité veut
confier un contrat à un professionnel ou veut engager des sommes
d'argent pour des dépenses, le trésorier est obligé de
donner un certificat à l'effet que la municipalité possède
le montant qu'elle engage. C'est évident qu'il y a un problème
qui s'est posé depuis quelques années puisque, souvent, les
municipalités caressent des projets. Et, pour savoir les montants que
ça va coûter, c'est normal de confier un contrat à un
professionnel, de faire faire l'évaluation des coûts, même
d'aller en appel d'offres avant de soumettre le projet aux citoyens de la
municipalité. Donc, dans ce projet de loi, il sera permis à une
municipalité, sur approbation du ministre, d'engager des fonds pour
engager des professionnels pour préparer des plans et devis pour engager
des dépenses dans le futur ou pour préparer un règlement
d'emprunt. Voilà, en gros, ce que ça touche, comme projet de
loi.
Ce n'est pas un projet de loi volumineux. Il y a 69 articles. Je vous
dis d'avance qu'on sera très prudents dans l'étude de ce projet
de loi. Il y a un élément dont je n'ai pas parlé et que je
ne veux pas passer sous silence. Je sais actuellement, et le ministre ne nous a
pas donné l'information, que l'Union des municipalités du
Québec a demandé à être entendue en commission
parlementaire lors de l'étude du projet de loi 20, le 22... Le 37, ce
n'est pas le ministre des Affaires municipales, donc, ça sera une autre
paire de manches. Mais je vous dis que je me fais l'interprète,
même si je sais d'avance que l'Union des municipalités va venir
nous dire: Oui, oui, on est pour le projet de loi. Même si j'ai
été président de l'Union des municipalités, je suis
rendu à... Moi, je ne suis plus président de l'Union des
municipalités, je ne suis plus maire. Il faudra que les gens comprennent
que je suis un député, et mon rôle, c'est de
protéger l'intérêt du gouvernement et
l'intérêt des contribuables de toutes les municipalités du
Québec. Et je ne suis pas au service de l'Union des municipalités
du Québec, ni de l'Union des municipalités régionales de
comté, mais des citoyens et des citoyennes du Québec. (3 h
20)
Donc, même si je sais que c'est pour venir nous dire oui et pour
approuver le ministre, ça ne change pas mon opinion. Il faudra bien
qu'ils viennent nous donner des explications. Mais si le ministre accepte de
rencontrer l'Union des municipalités, je suis convaincu qu'il y aura
d'autres demandes. Je sais déjà qu'il y a une autre demande qui
est susceptible de nous parvenir, qui concerne les assureurs. Même s'il y
a des éléments qui nous semblent tentants, qui nous semblent
intéressants, il faudra tout de même qu'on prouve que - et il faut
faire attention - les projets de loi ou les articles qu'on va accorder, les
pouvoirs qu'on va accorder ne sont pas dans l'intérêt des unions
des municipalités, ne sont pas nécessairement dans
l'intérêt des municipalités, mais sont vraiment dans
l'intérêt des citoyens et des citoyennes du Québec. Si on
peut trouver, à l'intérieur de ce projet de loi, des
façons de renforcer les régions, je pense que là on pourra
ajuster le discours du gouvernement avec ce qu'il nous a proposé comme
loi en disant: Le pouvoir des régions... il faut les administrer, il
faut qu'elles se prennent en main. Ça sera possiblement... À
l'intérieur du projet de loi, on pourrait trouver des
éléments qui pourraient s'additionner et permettre à des
régions de mieux gérer leur patrimoine, donc, ce qui leur
appartient, parce que les taxes qui sont payées par les citoyens d'une
façon locale, à mon point de vue, doivent être
dépensées, autant que possible, d'une façon locale et,
à ce moment-là, chacun y trouve son intérêt. Et
ça, c'est l'intérêt des contribuables, ce n'est pas
l'intérêt de M. le maire ni des conseillers municipaux qui, eux,
pourraient peut-être vouloir favoriser quelqu'un pour favoriser leur
élection plutôt que penser à l'intérêt des
contribuables.
Vous savez, on a tendance régulièrement - et ça,
malheureusement, on le fait souvent -c'est qu'à la minute où
quelqu'un est investi d'un titre ou d'un pouvoir par élection, il pense
que tout lui est permis. Moi, j'ai vécu une expérience que je
veux vous souligner, la semaine dernière et aller jusqu'à hier
soir, où on parlait d'un projet de 300 000 000 $. Je vous passe un
papier que, pour ceux qui étaient autour de la table, ça semblait
un projet de 300 $. L'argent des contribuables, ce n'est pas grave. Je trouvais
qu'on avait mis de la pression pour passer le projet de loi. Ça a
été adopté sur division. Si ça avait
été son propre argent, est-ce qu'on l'aurait fait de la
même façon? Est-ce qu'on n'aurait pas creusé un petit peu
plus? Ça, c'est des questions que je me pose. On a tendance, trop
souvent, à oublier ceux et celles qu'on représente.
Pour ce projet de loi, je vous dis - et j'avertis d'avance - que
l'opinion, que l'attitude de l'Opposition... On sera contre le projet de loi;
le ministre aura à nous faire la démonstration que c'est un bon
projet de loi et que ça joue pour l'ensemble des contribuables du
Québec, mais pas pour se faire une bonne jambe avec les unions
municipales et avec les municipa-
lités, pour racheter tous les mauvais coups qu'il a faits dans
les deux dernières années. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député, de votre intervention. Est-ce qu'il y a un droit de
réplique? Alors, il n'y a pas de droit de réplique? Il n'y a pas
d'autre intervenant? Est-ce que la motion de M. le ministre des Affaires
municipales... Est-ce qu'il y a un droit de réplique, M. le
ministre?
M. Ryan: Oui, mais je ne l'exercerai pas.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est très bien.
Est-ce que la motion du ministre des Affaires municipales proposant l'adoption
du principe du projet de loi 22, Loi modifiant la Loi sur les cités et
villes, le Code municipal du Québec et la Loi sur les dettes et les
emprunts municipaux, est adoptée?
Des voix: Sur division.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur
division. M. le leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'aménagement
et des équipements
M. Johnson: M. le Président, je fais motion pour que ce
projet de loi soit déféré à la commission de
l'aménagement et des équipements pour étude
détaillée.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion
du leader adjoint est adoptée? Adoptée? Est-ce que cette motion
est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: Je vous demanderais d'appeler l'article 23 de notre
feuilleton, M. le Président.
Projet de loi 31 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 23,
M. le ministre délégué à l'Administration et
à la Fonction publique et président du Conseil du trésor
propose l'adoption du principe du projet de loi 31, Loi concernant le
régime de retraite pour certains employés du Centre hospitalier
de l'Université Laval et le régime de retraite pour certains
employés de la Commission des écoles catholiques de
Québec. M. le président du Conseil du trésor.
M. Daniel Johnson
M. Johnson: Merci, M. le Président. Le projet de loi dont
je propose aujourd'hui l'adoption du principe vise à permettre au CHUL,
le Centre hospitalier de l'Université Laval, d'effectuer des
modifications au régime de retraite de certains de ses employés
et à la Commission des écoles catholiques de Québec
d'effectuer également des modifications au régime de retraite
pour certains des employés de cette Commission. Comme ces modifications
entraînent des coûts additionnels, le projet de loi propose aussi
que le financement en soit assuré au moyen d'une partie des surplus
actuariels accumulés par ces deux régimes.
Pour ce faire, M. le Président, il est nécessaire de
déroger aux dispositions de l'article 125 de la Loi sur le RREGOP, le
régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes
publics, qui prévoit que toute modification à un régime
complémentaire de retraite régi par la Commission administrative
des régimes de retraite et d'assurances, la CARRA, doit être
à la charge exclusive des employés.
Je tiens d'abord à préciser, M. le Président, qu'il
s'agit de deux régimes complémentaires de retraite qui existaient
avant l'entrée en vigueur, le 1er juillet 1973, du RREGOP et auxquels
les employés qui y participaient à cette date ont choisi de
maintenir leur adhésion.
Par ailleurs, je souligne que mon collègue, le
député de Viau, notre whip, a présenté, en
décembre dernier, le projet de loi 196 qui a été
adopté en décembre - oui, le 18 décembre - et qui visait
à harmoniser et à bonifier le régime de retraite de
certains employés de la CECM, la Commission des écoles
catholiques de Montréal, au moyen, cette fois aussi, des surplus
actuariels accumulés. Il ne s'agit donc pas ici, aujourd'hui, d'une
première.
M. le Président, c'est d'abord dans un but d'harmonisation avec
la Loi sur les régimes complémentaires de retraite que des
modifications ont été ou doivent être apportées au
régime de retraite pour certains employés du CHUL et au
régime de retraite pour certains employés de la CECQ. Ainsi,
cette harmonisation implique, pour les deux régimes, les modifications
suivantes: l'introduction de la notion de prestations minimales,
c'est-à-dire une disposition qui prévoit que la participation
financière d'un employé ne peut excéder 50 % de la valeur
des prestations auxquelles lui-même ou un autre
bénéficiaire acquiert droit; deuxièmement, la modification
des prestations payables en cas de décès, avant ou après
la retraite, notamment afin de prévoir qu'au décès d'un
retraité son conjoint a droit, à moins d'y avoir renoncé,
à une rente égale à 60 % du montant de la rente de
retraite.
Une seconde série de modifications, M. le Président,
visent à bonifier les dispositions des régimes concernés,
toujours au moyen des surplus
actuariels accumulés. Il s'agit de permettre d'abord au CHUL de
modifier le régime de retraite pour certains de ses employés afin
de prévoir que toutes les rentes payables seront indexées,
à compter du 1er janvier 1991 jusqu'au 31 décembre 1993, de
l'excédent du taux d'augmentation de l'indice des rentes
déterminé par la Loi sur le régime de rentes du
Québec sur 3 %. C'est donc une indexation qui, dans notre jargon, est de
IPC 3 %. De plus, ces rentes pourront, sur autorisation de la Commission
administrative des régimes de retraite et d'assurances, être
indexées annuellement pour une ou plusieurs années, selon ce
même taux, si une évaluation actuarielle du régime
démontre qu'il existe un surplus suffisant pour en assumer la
totalité du coût.
Deuxièmement, M. le Président, il s'agit d'autoriser la
Commission des écoles catholiques de Québec à modifier le
régime de retraite pour certains de ses employés afin d'y
prévoir la baisse du taux de cotisation de 7,5 % à 7,25 % et
aussi le remplacement, dans le calcul du montant de la rente de retraite
anticipée, de l'équivalent actuariel par une réduction de
0,5 % par mois, calculée pour chaque mois compris entre la date à
laquelle la rente anticipée est accordée et la date normale de la
retraite.
En dernier lieu, M. le Président, il s'agit d'introduire,
toujours dans le régime de certains employés de la CECQ, le droit
à la retraite sans réduction à compter de 62 ans ou
après 32 années de service, si la prise de la retraite a lieu
entre le 1er janvier 1990 et le 30 juin 1993. Cette mesure pourra, sur
autorisation de la CARRA, être prolongée pour des périodes
qui n'excèdent pas trois ans si une évaluation actuarielle du
régime démontre qu'il existe un surplus suffisant pour en assumer
la totalité du coût. C'est là, M. le Président, les
quelques commentaires que je voulais faire valoir.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre.
Alors, sur ce même sujet, je reconnais maintenant madame...
M. Léonard: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député.
M. Léonard: S'il vous plaît. Avant que ma
collègue ne commence son intervention, est-ce que vous pourriez
vérifier le quorum, s'il vous plaît?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député, suite à votre demande, qu'on appelle les
députés! (3 h 30 - 3 h 36)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, si vous voulez
vous asseoir. Merci. Nous en sommes à l'adoption du principe du projet
de loi 31, Loi concernant le Régime de retraite pour certains
employés du Centre hospitalier de l'Université Laval et le
Régime de retraite pour certains employés de la Commission des
écoles catholiques de Québec.
Je reconnais Mme la présidente de la commission des affaires
sociales et députée de Taillon.
Mme Pauline Marais
Mme Marais: Je vous remercie, M. le Président. Comme vous
l'aurez constaté par l'intervention du président du Conseil du
trésor, il s'agit, encore une fois, et c'est souvent le cas de telles
lois, d'une loi hautement technique et qui concerne des régimes de
retraite complémentaires. D'ailleurs, c'est un projet qui est semblable
à un autre qui avait été étudié à
l'Assemblée nationale en décembre dernier, au moment où on
avait adopté une loi qui concernait le personnel non enseignant de la
Commission des écoles catholiques de Montréal. Donc, dans ce
sens-là, nous n'avions pas marqué d'opposition à ce
moment-là.
Je n'ai donc pas l'intention, je le répète, de reprendre
chacun des éléments techniques que nous a présentés
le président du Conseil du trésor. Je me contenterai de rappeler,
M. le Président, qu'au moment de l'étude en commission
parlementaire, article par article, j'aurai l'occasion de questionner,
évidemment, chacun des éléments de la loi pour nous
assurer, d'abord, que les consultations ont bien eu lieu, que les personnes
concernées ne sont pas lésées par les changements et,
devant des réponses qui, j'imagine, seront positives et permettront donc
de vérifier la conformité des articles qui sont là, nous
accepterons sans doute le projet de loi. Je suis donc d'accord, M. le
Président, pour le recevoir maintenant.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée. Alors, est-ce que la motion présentée par
M. le ministre délégué...
M. Johnson: Droit de réplique, M. le
Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Votre droit de
réplique, M. le président du Conseil du trésor.
M. Johnson: ...tant qu'à faire. Oui,
brièvement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le président
du Conseil du trésor, c'est parce que je voyais que vous ne vous leviez
pas. C'est pour ça que j'ai procédé. Alors, si vous voulez
faire votre droit de réplique, c'est bien à vous.
M. Daniel Johnson (réplique)
M. Johnson: M. le Président, simplement pour
répondre à l'avance à une question qu'a soulevée la
députée, à savoir sa préoccupation peut être
de s'enquérir des désavantages que les employés auraient
à subir. Je réindique ici, évidemment, que le projet de
loi vise à bonifier les prestations de retraite, les droits des
conjoints survivants; qu'en général, en vertu de la loi, s'il y a
une bonification, ça doit être supporté exclusivement par
les participants au régime et que le projet de loi que nous amenons ici
vise précisément à faire en sorte que ce ne soit pas cette
situation qui prévale, mais bien celle qui assurera le financement
à même les surplus actuariels qui se sont dégagés,
d'une part, de ces régimes. Pour l'avenir, s'il y avait des coûts,
ces coûts seraient à la charge des organismes concernés et
non du gouvernement, ni même, certainement, exclusivement à la
charge des participants, comme autrement on pourrait s'y attendre. C'est donc
dans l'intérêt de la distribution au profit des participants que
ce projet de loi est amené.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion de
M. le ministre délégué à l'Administration et
à la Fonction publique et président du Conseil du trésor
proposant l'adoption du principe du projet de loi 31 est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission du budget et de
l'administration
M. Johnson: M. le Président, je fais motion pour que ce
projet de loi soit déféré à la commission du budget
et de l'administration pour étude détaillée.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion
est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: Adopté. M. le Président, je vous
demanderais d'appeler l'article 26 de notre feuilleton.
Projet de loi 37 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 26,
M. le ministre délégué à l'Administration et
à la Fonction publique et président du Conseil du trésor
propose l'adoption du principe du projet de loi 37, Loi concernant la
prolongation des conventions collectives et la rémunération dans
le secteur public.
M. le ministre délégué à l'Administration et
à la Fonction publique. (3 h 40)
M. Daniel Johnson
M. Johnson: Je vous remercie, M. le Président. Je vous
souligne qu'il s'agit ici d'une redite ou d'une répétition d'un
exercice que nous avons déjà connu l'an dernier, suite à
la conclusion d'ententes avec les syndiqués du secteur public, et le
projet de loi vise, pour toutes sortes de raisons techniques, à donner
une suite juridique à l'entente.
Je rappelle qu'au printemps, l'an dernier, nous avions conclu avec les
organisations syndicales une entente qui visait à faire en sotte que, de
façon très réaliste, nos partenaires syndicaux
contribuaient à résorber les écarts financiers et
budgétaires. À cet égard, le scénario qui avait
été retenu et convenu prévoyait un gel de la
rémunération pour les six mois qui suivaient la fin de la
convention collective. Pour qu'on se comprenne et qu'on simplifie, en janvier
dernier, la prolongation était effectuée à l'égard
de la convention collective qui se terminait alors le 31 décembre 1991.
Pour une durée de six mois, il y avait cette prolongation.
Évidemment, aucune augmentation de salaire n'était prévue.
Mais il devait y avoir augmentation sur échelle de 3 % au 1er juillet
qui vient, 1992, et le maintien du forfaitaire de 1 % qui était
versé sur chacune des paies, qui devait l'être pendant 26 paies,
pendant 52 semaines, de juillet 1991 au 30 juin 1992; donc, gel de la
rémunération et prolongation pendant six mois, augmentation en
fin de période et maintien du paiement de 1 % forfaitaire jusqu'à
la conclusion d'une nouvelle entente.
À cette époque, nous croyions qu'une reprise
économique et que les paramètres généraux
d'inflation et de croissance permettraient de rencontrer - c'était
raisonnable de s'y attendre à l'époque - cette facture de 3 %
plus 1 %. Mais inutile de venir ici témoigner des quelques derniers
mois, des ralentissements que l'économie nord-américaine a
connus, nous n'y avons pas échappé, de telle sorte que, à
titre d'exemple, l'inflation qu'on pouvait envisager pour juillet prochain
comme étant de l'ordre de 4 % s'avère plutôt de l'ordre de
2 %. Ça peut être une bonne nouvelle, de juguler l'inflation,
d'assurer la stabilité des prix, mais c'est une mauvaise nouvelle au
titre des finances publiques lorsqu'on est engagé à verser 4 %
d'augmentation de salaire et que les revenus n'augmentent que de l'inflation,
ou à peu près, au rythme de 2 %.
C'est ces facteurs, notamment, combinés à
l'absence de croissance et à la moindre croissance que
prévu qui ont eu un impact considérable sur les finances
publiques et m'ont amené à revoir encore une fois, en
février dernier, nos partenaires syndicaux pour leur proposer de
recalibrer, réaménager l'engagement qui devait être
actualisé et exécuté en juillet prochain. j'ai d'abord
tenté de convaincre nos partenaires syndicaux que les 3 % plus le 1 % de
forfaitaire pouvaient être réaménagés sur deux ans
à raison de 1 % et 1 % six mois plus tard et 2 % en milieu de
période; ça n'a pas été accepté. j'ai, par
la suite, tenté de plus ou moins respecter - plus plutôt que moins
- le taux d'inflation observé afin d'assurer une protection du pouvoir
d'achat; donc, des augmentations sur deux ans de l'ordre de 2 % plus 2 %.
là aussi, compte tenu de l'engagement qui avait été
contracté, qui n'a jamais été nié, il y avait une
insistance réelle, du côté syndical, à amener le
gouvernement à verser à tout le moins les 3 % qui étaient
prévus pour juillet prochain, quitte à ce que la contestation
s'engage ou le litige s'ensuive sur la disposition que nous pourrions faire du
1 % et sur la période de prolongation.
C'est donc, éventuellement, M. le Président, une
augmentation de 3 % qui est consentie pour juillet prochain, une prolongation
d'un an des conventions collectives, c'est-à-dire jusqu'en juin 1993, et
de deux ans, je le souligne tout de suite, dans le cas des employés qui
sont représentés par la CEQ, la Centrale de l'enseignement du
Québec. Quant au forfait de 1 % qui devait continuer à courir, ce
paiement sera suspendu pour une période de neuf mois. Il n'y a pas,
évidemment, d'effet rétroactif à l'expiration des neuf
mois, de telle sorte qu'à compter du 1er avril 1993, dans la plupart des
cas, le paiement de 1 % sera restauré et intégré dans les
échelles de traitement. Par ailleurs, tous les employés auront
droit, et ceux qui y ont droit conservent ce droit, à une progression
dans leur échelle et voient donc leur rémunération
augmenter en conséquence. Les ententes qui touchent toutes les
augmentations dont nous pourrions disposer dans le cadre des relativités
de l'équité salariale sont également respectées.
Les masses dégagées pour la rémunération au
mérite sont maintenues.
C'est afin de donner suite à cette entente de principe que je
soumets aujourd'hui le projet de loi à la considération de
l'Assemblée. De façon plus précise, M. le
Président, la loi vise à autoriser les organismes qui y sont
définis et les associations de salariés à convenir du
report de la date d'expiration de leur convention collective et permettre que
la durée d'une convention collective ainsi prolongée
dépasse trois ans.
Le projet de loi prévoit les augmentations maximales des taux,
échelles de salaires et primes devant prévaloir dans ces
ententes, c'est-à-dire un maximum de 3 % le jour suivant la date
d'échéance des conventions collectives, et ce, pour les neuf
premiers mois, ces taux, échelles et primes pouvant être
majorés d'au plus 1 % pour au moins les trois mois qui suivront cette
période de neuf mois.
Le projet prévoit qu'à défaut d'une telle entente
de prolongation - c'est la disposition opérante - la date d'expiration
des conventions est reportée d'un an. Je répète, c'est en
cas où il n'y aurait pas entente. Pour obtenir les paramètres
salariaux qui sont prévus au projet de loi, les parties doivent
s'entendre à ce sujet, à défaut de quoi il n'y a pas,
évidemment, d'ajustement salarial de cette nature.
Le projet de loi prévoit la cessation du versement du montant
forfaitaire de 1 % dès le 1er juillet 1992, tel que je l'ai
indiqué, ou à une autre date selon le moment où expirent
les conventions collectives - parce qu'elles n'expirent pas toutes
nécessairement le 30 juin prochain - dès lors qu'il a
été versé, ce 1 %, pour une période d'au moins un
an.
Je note, M. le Président, que le personnel syndiqué de
quelques organismes est exclu. Tout d'abord Hydro, dont les principales
conventions collectives viennent à échéance à la
fin de 1992, et non pas en juin prochain, lesquelles conventions comprennent
des clauses de réouverture sur les salaires en fin de période.
Deuxièmement, la Société des alcools, où la loi
149, que nous avons adoptée l'an dernier, n'a pas encore trouvé
son application et portera l'échéance des conventions collectives
pour certaines unités d'accréditation en juillet 1993, et pour
d'autres en décembre 1993. Troisièmement, la Sûreté,
dont l'échéance de la convention est le 31 décembre 1992
et, finalement, la SEPAQ, la Société des établissements de
plein air du Québec, où une négociation est
présentement en cours.
Pour ce qui est des personnes qui ne sont pas comprises dans une
unité de négociation, c'est-à-dire les administrateurs
d'État, dirigeants, membres d'organismes publics, les cadres et
l'ensemble du personnel non syndiqué de la fonction publique, le projet
de loi fixe la majoration maximale de leur rémunération à
3 % pour la période du 1er juillet 1992 au 31 mars 1993, de même
pour les taux et échelles de salaires et les primes. Toutefois, ces
derniers seront à nouveau haussés d'un maximum de 1 % à
compter du 1er avril 1993 et ce, je l'ajoute, pour une période d'au
moins trois mois.
Le projet de loi oblige de plus toute personne ou conseil
d'administration habilité à déterminer la
rémunération des cadres ou des non-syndiqués des
organismes publics visés par la loi à prévoir pour ceux-ci
les mêmes mesures, ou leur équivalent, pour une période
minimale de 12 mois en 1992, 1993 ou 1994, selon le cas. Cette souplesse
s'explique, M. le Président, par l'intention du gouvernement de
respecter les conventions collectives en vigueur. Et souvent, dans un organisme
donné, la rémunération de certains cadres et celle des
non-syndiqués est ajustée selon celle des syndiqués. Le
même principe
s'applique pour le personnel d'un cabinet ministériel, pour le
personnel de cabinet de l'Assemblée nationale et pour le personnel d'un
député.
Quant aux députés, ils verront leur
rémunération évoluer de la même manière que
celle d'un cadre supérieur classe IV de la fonction publique. Les
députés recevront donc, six mois plus tard, ce que
reçoivent les cadres, c'est-à-dire, en janvier 1993, 3 % et, au
1er octobre 1993, le 1 %.
Pour ce qui est des juges, M. le Président, le projet de loi
ferait en sorte que leur traitement serait majoré selon les mêmes
paramètres et au même moment que celui des employés des
secteurs publics et parapublics auxquels ils sont liés,
c'est-à-dire les cadres. À propos des juges, M. le
Président, j'ajouterais que nous devons souligner que le début
des travaux du comité chargé d'étudier leur
rémunération en vertu de la loi, régimes de retraite et
autres avantages sociaux, est reporté du 1er juillet 1992 au 1er juillet
1993. (3 h 50)
Pour ce qui est de la rémunération des professionnels de
la santé, comme elle est basée de façon
générale sur des objectifs tarifaires et des tarifs, le projet de
loi propose des augmentations maximales de ces tarifs et objectifs tarifaires
de 3 % pour la période du 1er décembre 1992 au 31 août 1993
et de 1 % le 1er septembre 1993. Les taux et échelles de traitement
ainsi que les primes, dans le cas des médecins salariés,
évolueront de la même manière.
Les pharmaciens qui exercent en centre hospitalier verront leur
rémunération évoluer de la même façon que
celle des salariés des organismes publics à compter de juillet.
Il est important de préciser qu'en ce qui concerne les objectifs
tarifaires et les tarifs il s'agit là de paramètres maximaux. En
effet, il n'est pas exclu que le ministère de la Santé et des
Services sociaux puisse conclure des ententes avec des associations de
professionnels afin de rationaliser la fourniture de services assurés
suivant la Loi sur l'assurance-maladie. Il est aussi prévu que les dates
d'échéance des conventions collectives qui lient les titulaires
de permis de services d'ambulance et les associations de salariés
pourront être reportées, de sorte que leur durée pourra
excéder trois ans.
Le présent projet de loi contient aussi des dispositions
particulières pour les ingénieurs du gouvernement qui, comme on
le sait, M. le Président, voyaient leur rémunération
fixée par la Loi sur le plafonnement provisoire de la
rémunération dans le secteur public. La convention collective qui
en a résulté prévoyait l'octroi de 3 % au 1er juillet 1992
et le maintien de l'allocation d'un montant forfaitaire de 1 % à cette
date. Dans le but d'harmoniser la rémunération des
ingénieurs avec celle de l'ensemble des groupes de la fonction publique,
le projet de loi modifie la loi 149 en retirant aux ingénieurs l'octroi
du montant forfaitaire de 1 %, mais en maintenant l'augmentation de 3 % au 1er
juillet 1992.
Par ailleurs, dans les ententes entre le gouvernement et les
organisations syndicales, nous nous sommes engagés à proposer
à l'Assemblée, pour adoption, des dispositions
législatives qui permettent de prolonger de deux ans le délai de
rachat pour le service antérieur des participants au RREGOP. De plus,
l'entente avec la CEQ fait en sorte que le coût du Régime de
retraite des enseignants cesse d'être partagé 50-50 et le taux de
cotisation des participants et participantes est fixé
définitivement au taux applicable pour l'année 1992. Je
proposerai donc des modifications pour donner suite à cette entente, qui
est survenue après le dépôt du présent projet de
loi, et je transmettrai aux parlementaires, à titre d'information, copie
de ces modifications qui seront proposées lors de l'étude
détaillée en commission.
En terminant, M. le Président, je tiens à souligner le
réalisme et l'esprit de collaboration dont ont su faire preuve les
organismes syndicaux et tous leurs membres au cours des derniers mois en
acceptant ainsi la réouverture de l'entente du printemps 1991. En plus
de certaines économies générées au chapitre
salarial, la prolongation des conventions permet aux parties d'enclencher et de
conclure des discussions qui portent sur des aspects significatifs des services
publics en dehors d'un cadre traditionnel de négociation.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
président du Conseil du trésor. Sur ce même sujet, je
reconnais Mme la présidente de la commission des affaires sociales et
députée de Taillon. Je vous cède la parole.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Je vous remercie, M. le Président.
Effectivement, nous nous engageons dans l'étude du projet de loi 37, qui
concerne la prolongation des conventions collectives et la
rémunération dans le secteur public. En fait, je rappellerai
qu'effectivement ce projet de loi vise à permettre aux organismes
publics et aux associations de salariés de convenir de la prolongation
de conventions collectives actuellement en vigueur. Dans le cas où il
n'y aurait pas entente, le projet impose la prolongation d'une année des
conventions collectives. Le projet de loi prévoit aussi qu'à
compter du 1er juillet prochain, et ce, jusqu'au 31 mars 1993, les
salariés ne peuvent être augmentés de plus de 3 % et d'un
autre 1 % pour la période allant du 1er avril 1993 au 30 juin 1993. Par
la suite, ce montant forfaitaire serait intrégré aux
échelles, M. le Président.
Alors, j'aimerais qu'on se rappelle que le...
C'est le jour de la Saint-Valentin, en fait, c'est le 14 février
dernier que le président du Conseil du trésor avait eu la bonne
idée de proposer aux travailleuses et aux travailleurs des secteurs
public et parapublic de revenir sur une entente qui avait été
signée au printemps 1991. Cette entente prévoyait un certain
nombre d'engagements qui traitaient, entre autres, du prolongement des
conventions collectives, bien sûr, de gel des salaires, par contre, pour
une certaine période, d'augmentation salariale de 3 % mais applicable le
1er juillet 1992, du versement d'un forfaitaire de 1 % de juin 1991 et
jusqu'à la signature d'une nouvelle convention collective, et comportait
aussi un engagement du gouvernement de revoir la législation sur la
négociation. Ça, c'était l'engagement, en fait, qui avait
été signé par le président du Conseil du
trésor et qui était remis en question le 14 février
dernier.
Cette proposition du président du Conseil du trésor avait
soulevé, d'ailleurs, l'ire des centrales syndicales et venait risquer
aussi de briser les fragiles acquis lorsque les travailleurs et travailleuses
avaient accepté de signer les conventions l'année
précédente, en toute bonne foi, et allant bien en
deçà de tout ce qu'on avait connu jusqu'à maintenant dans
le cadre de telles négociations. Alors, cette réouverture, un peu
et beaucoup cavalière, de la part du ministre s'est même traduite
dans le livre des crédits où, avant même qu'on ait ou
négocié ou déposé un projet de loi comme celui qui
est devant nous, M. le Président, on avait pris pour acquis, le
président du Conseil du trésor avait pris pour acquis, dans le
dépôt des crédits, que c'est sa proposition, sa
décision qui serait retenue et, donc, avait intégré
à l'intérieur du livre des crédits, du document, donc, qui
concerne l'ensemble des dépenses du gouvernement du Québec, avait
intégré cette remise en question de l'entente, ce qui nous est
apparu absolument inacceptable, M. le Président, puisque, si on veut
présenter une image complète de la situation financière du
Québec, on ne peut pas prendre sur soi de modifier un contrat
signé puis de dire: Ce contrat-là n'existe plus et voici, moi,
maintenant, comment je l'envisage. Mais c'est ce qu'avait fait le
président du Conseil du trésor au moment du dépôt du
livre des crédits.
Alors, cette décision unilatérale de remettre en question
l'entente, évidemment, a amené la création ou le
renforcissement de la coalition intersyndicale qui était formée
de la CSN, de la FTQ, de la Fédération des infirmiers et
infirmières du Québec, du Syndicat de professionnels et du
Syndicat des fonctionnaires du gouvernement du Québec. La coalition,
devant cette décision fort cavalière, je le répète,
de la part du président du Conseil du trésor, a
décidé de présenter une contre-proposition au
gouvernement, et c'est au terme d'une négociation à laquelle
n'étaient absolument pas astreints les représentants et les
représentantes des travailleurs et des travailleuses, M. le
Président.
Cependant, ils se sont disciplinés et ont
«contre-proposé» certaines modifications, et ils ont donc
accepté de négocier et de rouvrir, tout compte fait, l'entente et
en sont arrivés à une nouvelle entente le 11 mai 1992. Cette
entente prévoit et je le répète, c'est le maintien de
l'augmentation de 3 % à compter du 1er juillet 1992, tel que
prévu dans l'entente précédente, la suspension du
forfaitaire de 1 % de juillet 1992 pour le reporter à avril 1993, et
vous allez voir, M. le Président, que cela a des conséquences
financières pour les gens qui ont accepté une telle proposition,
et, enfin, la prolongation d'un an des conventions collectives.
Le président du Conseil du trésor a, à ce
moment-là aussi, pris un engagement, à savoir celui que l'on
tienne un débat public sur la fiscalité, comme l'a demandé
et exigé l'ensemble de la coalition, appuyé en cela, d'ailleurs,
par beaucoup d'organismes sociaux et d'organismes économiques qui
croient aussi, et comme nous le croyons, M. le Président, utile que nous
ayons une discussion en profondeur sur les choix auxquels nous voulons
procéder à l'égard de la fiscalité, donc des
prélèvements d'impôt, finalement, M. le Président.
Il nous apparaît que la forme que va prendre ce débat est
importante. Nous attendons, à cet égard, que le président
du Conseil du trésor nous indique comment il compte procéder pour
ce faire. (4 heures)
Mais j'aimerais rappeler, cependant, du même souffle, aux membres
de cette Assemblée qu'il y a deux ans il y a des choix majeurs qui ont
été faits. Et, dans ce sens-là, même si je pense
qu'il est toujours pertinent que ce débat ait lieu, il demeure que nous
partons avec des balises qui sont encore toutes nouvelles. Et on pense, entre
autres, à ce virage majeur qui fait que l'on passe d'une
fiscalité essentiellement orientée sur l'impôt sur le
revenu à une fiscalité qui va être orientée
davantage sur les biens et les services. On sait tous les débats que
nous avons eus depuis un long moment quant à l'implantation de la TVQ
sur les services, à laquelle nous procéderons dans les semaines
qui viennent, d'ailleurs. Et ce virage a été pris il y a deux
ans, M. le Président. Donc, je dirais que ça vient un peu
contraindre le débat, même si on peut, évidemment, toujours
le remettre en question. Et ce virage a été pris sans que nous
ayons pu avoir l'information pertinente quant à l'impact qu'une telle
réorientation allait avoir sur l'économie
québécoise. On commence à avoir des données un peu
significatives et un peu intéressantes de la part du ministre des
Finances, mais c'est récent, M. le Président. Et, au moment
où on a débattu de ces grandes orientations, nous n'avons pu
bénéficier d'informations qui nous auraient semblé
pertinentes pour de tels choix. Cela étant dit, nous questionnerons le
président du Conseil du trésor et ses collègues du
gouvernement pour qu'ils nous indiquent dans quelle forme et à quel
moment nous pourrons procéder à ce débat sur la
fiscalité tel qu'on s'est engagé, du côté
gouvernemental, à le faire.
Je disais tout à l'heure, M. le Président, que cette
nouvelle entente prive, cependant, les travailleuses et les travailleurs de
certains montants qui leur auraient été versés si
l'entente précédente, de l'année dernière, avait
été intégralement respectée. En effet, nous
évaluons que c'est environ 125 000 000 $ dont risquent d'être
privés les travailleuses et les travailleurs, M. le Président, ce
qu'on pourra se faire confirmer, évidemment, au moment de l'étude
article par article, par le président du Conseil du trésor,
à moins qu'immédiatement il ne me donne l'information à
cet égard, au moment de sa réplique. C'est ce qui explique,
évidemment, que le ministre des Finances, lui, a dû modifier ses
chiffres au discours du budget puisque, comme le président du Conseil du
trésor avait tenu en compte le fait qu'il remettait en question
l'entente et avait conclu, lui, à un résultat différent de
celui auquel il est finalement arrivé, c'a amené le ministre des
Finances à revoir, lui, ses prévisions et à devoir
augmenter le niveau de ses dépenses de l'ordre de 225 000 000 $ au
budget, ce qu'avait escompté, évidemment, le président du
Conseil du trésor.
Le ministre rappelait, effectivement, que la Centrale des enseignants et
enseignantes du Québec a choisi de faire bande à part. Le 22 mai
dernier, cependant, elle a convenu aussi d'une entente avec le gouvernement.
Cette entente prévoit l'augmentation salariale de 3 % qui sera
accordée le 1er juillet et une autre de 1 % le 1er avril 1993.
Evidemment, on parle aussi de prolongement des conventions collectives et, dans
ce cas-là, de deux ans. Par contre, pour ce qui est des augmentations de
la deuxième année, ceci demeure à négocier.
De la part de la Centrale, de la CEQ qui avait choisi une formule qui
lui était propre, mais avec, je pense, une approche très sage,
tout compte fait, dans son projet de négociation, il y a aussi des gains
du côté du chapitre de l'équité salariale. Et on
introduit une obligation de tenir une liste de rappel pour les employeurs, de
même qu'un droit de regard sur l'utilisation d'une somme assez
substantielle, de l'ordre de 42 000 000 $, qui était prévue dans
le dernier budget et qui concerne l'amélioration de la réussite
scolaire, M. le Président.
Il faut que les membres de cette Assemblée constatent, que nous
constations ensemble que l'ensemble des personnes impliquées dans les
relations de travail, particulièrement dans les secteurs public et
parapublic au Québec, a fait preuve d'une très grande
maturité. Après les expériences que l'on a connues
beaucoup plus difficiles par le passé - je suis persuadée que
vous vous en souviendrez, M. le Président; si ce n'est pas le cas,
d'autres de vos collègues de cette Chambre s'en souviennent -
après des expériences, je dirais, difficiles, on a appris, je
crois, à s'apprivoiser mutuellement et à faire en sorte qu'on
soit sensibles à la conjoncture, à la mauvaise conjoncture, si on
veut, dans laquelle sont plongés des milliers de nos concitoyennes et de
nos concitoyens. À cet égard, il y a eu manifestement une bonne
volonté d'exprimée de la part des représentants des
travailleuses et des travailleurs. À cet égard, je crois qu'il
s'agit du résultat de longues expériences, d'expériences
pénibles parfois, mais qui nous amènent sûrement à
une plus grande maturité et qui, j'espère, auront une influence
aussi pour la suite des choses, M. le Président.
Le projet de loi, évidemment, respecte donc le contenu de ces
ententes. Le ministre, lorsqu'il nous l'a présenté dans son
intervention, a noté évidemment qu'il y avait un certain nombre
d'autres conditions de travail d'autres groupes dans notre
société qui étaient concernées par le projet de loi
37. Je n'y reviendrai pas, mais je voudrais soulever, cependant, le fait qu'il
y a une contrainte dans la loi qui prévoit que soient étendues
aux groupes qui n'auraient pas conclu d'entente certaines conditions
adoptées par la majorité des travailleuses et des travailleurs,
ou le prolongement de certaines conditions, sans qu'il y ait eu entente avec la
totalité des groupes concernés.
Sur le plan des principes, M. le Président, il m'apparaît
difficile d'accepter l'imposition de conditions de travail à ceux et
à celles qui n'auraient pas réussi à conclure une entente.
Peut-être le président du Conseil du trésor, dans sa
réplique, pourra-t-il me dire si effectivement il a réussi dans
tous les cas - j'ai essayé, en l'écoutant, de tirer des
conclusions à cet égard - et avec tous les groupes de
travailleuses et de travailleurs, s'il y a eu entente ou si, dans les faits,
les conditions auxquelles on fait référence dans le projet de loi
37 seront imposées à certains groupes. Cela pourrait,
évidemment, conditionner notre appui au projet de loi, parce qu'il nous
apparaît que c'est quand même majeur et, à partir du moment
où les ententes ont eu lieu, il n'y a pas catastrophe et urgence en la
demeure et, dans ce sens-là, puisque le projet ne fait que les
constater, finalement, ces ententes, peut-être le temps permettrait-il,
si jamais c'était le cas, de pouvoir conclure, justement, des ententes
avec d'autres groupes qui pourraient être concernés.
Alors, voilà pour les commentaires que je voulais faire à
ce moment-ci de nos travaux, M. le Président. La commission
parlementaire nous permettra d'étudier le projet de loi plus en
profondeur, de mieux comprendre les tenants et les aboutissants de chacun des
articles de la loi. J'aimerais bien, évidemment, M. le Président,
si le président du Conseil du trésor pouvait accéder
à mes demandes, obtenir réponse aux questions que j'ai
soulevées. Ceci nous permettrait sûrement
d'accélérer, bien sûr, nos débats et nos
discussions, et me permettrait, de mon côté, de donner un
aval au projet de loi, si c'était le cas. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je vous remercie, Mme la
députée de Taillon. M. le ministre délégué
à l'Administration et à la Fonction publique, vous avez droit
à votre réplique. Allez-y, M. le ministre.
M. Daniel Johnson (réplique)
M. Johnson: Très bien, M. le Président, sur deux
aspects. Le premier, qu'ont relevé plus d'une fois, depuis le 14 ou le
15 février, la députée de Taillon et certains de ses
collègues, que, à l'occasion du dépôt du livre des
crédits, nous aurions inscrit, évidemment, une économie
budgétaire qui présumait d'une entente autour des
paramètres suggérés le 14 février,
c'est-à-dire une économie de 350 000 000 $, une
renégociation totale de l'entente autour des paramètres initiaux
suggérés: 1 % en juillet, 1 % en décembre et 2 % en
juillet 1993. (4 h 10)
J'ai toujours indiqué - je continue à répondre
toujours dans le même sens - que, s'il y a une offre gouvernementale qui
est en voie d'être discutée, on doit, comme gouvernement, la
refléter dans nos documents officiels, ne pas faire semblant qu'on parle
d'autre chose. C'est ce qui explique, évidemment, que nous avions
indiqué aux crédits, à l'époque, le montant
d'économie que suggérait notre proposition, en présumant
qu'elle serait acceptée. N'ayant pas été acceptée,
évidemment, on corrige le tir, on l'indique. On indique que ça
coûte 227 000 000 $ de plus que l'économie de 350 000 000 $ qu'on
aurait crue, donc pour un net de 123 000 000 $, effectivement. C'est au
discours sur le budget qu'on a eu l'occasion de redresser les chiffres et d'en
profiter pour indiquer qu'il fallait financer ça, comme je l'avais
toujours indiqué, par d'autres mesures de compressions
budgétaires, de compressions d'effectifs.
Je profite de l'occasion pour relever au passage les déclarations
des représentants du Syndicat de professionnels du gouvernement du
Québec ou du Syndicat des fonctionnaires provinciaux du Québec,
aujourd'hui, qui s'étonnent des compressions d'effectifs, du gel de
l'embauche dans la fonction publique. Ils devraient être les derniers
surpris. Ce sont les premiers à qui j'ai dit, en février,
qu'à défaut de pouvoir conclure une entente qui nous permettait
de réaliser des économies de quelque 300 000 000 $ on devrait
prendre d'autres mesures pour diminuer la masse salariale: diminuer les
effectifs, diminuer les activités, diminuer les voyages, diminuer...
Alors, c'est ce qu'on annonce. Aujourd'hui, ils viennent s'insurger contre ces
faits-là. Ils disent qu'on ne peut pas et payer les 3 % et brimer les
travail- leurs en réduisant les effectifs. Je leur ai dit, il y a
longtemps, que c'était ça qui arriverait. Alors, il ne faut pas
déchirer sa chemise devant une réalité qui est celle de
respecter la capacité de payer de nos concitoyens.
Deuxième aspect important que la députée a
relevé à la fin de son intervention: est-ce qu'on est en train
d'imposer un modèle ou quoi que ce soit à nos travailleurs avec
lesquels on ne s'entend pas et est-ce qu'il y en a avec lesquels on ne s'est
pas entendu? À charge de vérifier dans le fin détail dans
certaines sociétés d'État, etc., quel est l'état de
la situation à ce moment-ci, j'indique qu'à l'égard de la
fonction publique, du réseau de la santé et du réseau de
l'enseignement et de l'éducation, à ma connaissance, à ce
moment-ci, et à celle de mes collaborateurs, seul le cas de 21 ou 22
perfusionnistes... Ce sont ces techniciens qui opèrent les machines
coeur-poumons artificiels. Donc, sur des effectifs de plus de 300 000
personnes, il y a 22 personnes avec lesquelles on ne s'est pas encore entendu,
à l'heure où on se parie, c'est ce qu'on m'indique. Alors, 22 sur
quelque 300 000, vous me permettrez de croire que ce n'est pas trop mal comme
moyenne au bâton.
L'effet de la loi qui est devant nous, s'il n'y a pas d'entente, est
d'octroyer aux travailleurs visés 3 % d'augmentation, mais non le 1 %,
évidemment, qui est prévu 9 mois plus tard. Mais la loi
prévoit toujours qu'on pourra s'entendre d'ici ce temps-là,
auquel cas, évidemment, le 1 %, s'il y a entente, sera également
versé. Ça, c'est en vertu du principe, M. le Président,
que c'est toujours préférable de s'entendre, qu'il y a toujours
quelque chose à aller chercher. Évidemment - et les
ingénieurs l'ont su la dernière fois et Hydro-Québec il y
a un petit moment - il est toujours préférable de s'entendre
parce que, si le gouvernement, en bout de ligne, légifère, il ne
peut pas légiférer sur la base de la dernière
mésentente. Il doit légiférer sur une base qui, je dirais,
incite les gens à pouvoir s'entendre et donc à aller chercher des
paramètres additionnels, des hausses qui pourraient être
consenties par libre négociation plutôt que d'attendre que le
gouvernement décrète une hausse. C'est évident que le
système serait totalement déséquilibré et
stérile si on devait légiférer des hausses de salaire
alors qu'on tente, justement, de conclure des ententes pour conclure une hausse
de salaire.
Alors, c'est l'état des réflexions à ce moment-ci,
que suscitent les commentaires de la députée, dans ce cas-ci. En
commission parlementaire, on aura à discuter du détail de ces
choses-là. Ça risque d'être bien pointu, mais on sera bien
assistés de part et d'autre par des collaborateurs qui en font leur pain
quotidien, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Est-ce que la motion du ministre délégué à
l'Administration et à la Fonction
publique et président du Conseil du trésor proposant
l'adoption du principe du projet de loi 37, Loi concernant la prolongation des
conventions collectives et la rémunération dans le secteur
public, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission du budget et de
l'administration
M. Johnson: M. le Président, je fais motion pour que ce
projet de loi soit déféré à la commission du budget
et de l'administration pour étude détaillée.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion
de déférence est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: Je vous demanderais d'appeler l'article 21 du
feuilleton, M. le Président.
Projet de loi 28 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 21 de
notre feuilleton, M. le ministre délégué à
l'Administration et à la Fonction publique et président du
Conseil du trésor propose l'adoption du principe du projet de loi 28,
Loi sur la Société Innovatech du Grand Montréal. M. le
ministre... M. le député de Labelle.
M. Léonard: Je suis convaincu, M. le Président, que
le président du Conseil du trésor va être très
heureux que je demande qu'on vérifie le quorum pour entendre le discours
important qu'il doit donner maintenant sur Innovatech.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Quorum
vérifié. Qu'on appelle les députés. nous reprenons
nos travaux à l'article 21 de notre feuilleton et je cède la
parole à m. le ministre délégué à
l'administration et à la fonction publique et président du
conseil du trésor. vous avez droit à 60 minutes, m. le ministre.
vous n'êtes pas obligé de le faire. (4 h 20)
M. Daniel Johnson
M. Johnson: On verra, M. le Président, on verra.
L'honorable lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi et il
en recommande l'étude à l'Assemblée. Ce projet de loi a
pour but de créer la Société Innovatech du Grand
Montréal dont l'objectif est de relever la capacité d'innovation
technologique dans le Grand Montréal et d'améliorer ainsi la
compétitivité et la croissance économique du
Québec.
Ce projet de loi fait suite au plan stratégique du Grand
Montréal que le gouvernement a rendu public en décembre dernier.
Ce plan a constitué un virage majeur. Pour la première fois, en
effet, le gouvernement se donnait une vision globale et à long terme du
développement de la région montréalaise. Pour la
première fois également le gouvernement osait mettre de
côté des solutions temporaires et palliatives pour s'attaquer aux
problèmes de base de l'économie montréalaise, en
privilégiant des mesures capables d'assurer la relance et un
redressement durable de l'économie, car les difficultés que
rencontre l'économie montréalaise ne sont pas conjoncturelles;
elles sont structurelles.
Le recul du Grand Montréal ne date pas d'hier. Il était
déjà perceptible à la fin des années cinquante
lorsque s'est amorcé le déplacement du secteur financier vers la
capitale ontarienne, puis s'est ajouté l'affaiblissement du secteur
manufacturier encore trop marqué par la prédominance d'industries
traditionnelles. Les politiques gouvernementales, quelquefois inadaptées
aux transformations de l'économie, ainsi que des facteurs politiques,
linguistiques, constitutionnels ont aussi pesé sur l'évolution de
l'économie montréalaise.
Ce serait donc s'illusionner, dans ce contexte, M. le Président,
de penser qu'une réanimation provisoire de l'économie apporterait
une solution durable. Le Grand Montréal a déjà trop perdu
de temps dans des développements quelquefois spectaculaires mais
coûteux. Il est impérieux maintenant d'avoir une vision à
long terme et de susciter des changements qui entraîneront un
redressement durable de l'économie du Grand Montréal.
Ce serait tromper la population de lui laisser croire qu'il suffirait
d'accélérer la construction de certains travaux de voirie pour
relancer l'économie montréalaise, mais je n'ai cessé de
répéter que des mesures immédiates sont indispensables
pour réduire la pression du chômage. Le plan stratégique du
mois de décembre en contient, d'ailleurs, plusieurs. J'ai annoncé
la mise en oeuvre de certaines d'entre elles, il y a une dizaine de jours.
Mais, à l'heure de la mondialisation de l'économie
où la concurrence est impitoyable et où les défis majeurs
à relever nous amènent à voir plus loin que le bout de
notre route, il faut maintenant que la grande région de Montréal
soit en mesure d'affronter la concurrence mondiale et de rivaliser avec les
autres grandes régions urbaines de taille. Pour ce faire, elle doit
renouveler sa base économique, en privilégiant
les industries d'avenir où elle dispose d'avantages comparatifs.
C'est dans cet esprit, M. le Président, que le gouvernement a
décidé de faire du Grand Montréal un centre d'innovation
et de commerce international. il est aisé de constater, partout dans les
pays industrialisés, que l'innovation technologique est devenue un
facteur déterminant de développement. La région de
Montréal dispose d'atouts majeurs en matière d'innovations, mais
elle se doit de faire davantage. La relance de l'économie passe donc
inévitablement par une augmentation de sa capacité d'innovation
technologique et une plus grande ouverture vis-à-vis des marchés
internationaux. Il faut que nos entreprises accordent beaucoup plus
d'importance à l'amélioration des technologies et à la
mise au point de nouvelles, si elles veulent demeurer compétitives. Il
faut que nos centres de recherche et nos universités intensifient leurs
efforts en matière de recherche et développement, et qu'ils
multiplient les liens avec les entreprises afin que la région de
Montréal puisse rivaliser avec les autres régions urbaines.
Le gouvernement du Québec a déjà adopté
diverses mesures pour encourager les entreprises, les centres de recherche et
les universités à privilégier davantage l'innovation
technologique, mais il reste encore des progrès à faire. C'est
pourquoi le gouvernement a convenu de franchir un pas de plus en créant
un nouvel organisme appelé Innovatech du Grand Montréal dont la
principale mission sera d'accroître la capacité d'innovation
technologique sur le territoire du Grand Montréal et d'améliorer
ainsi la compétitivité et la croissance du Québec.
Innovatech sera une société publique. Sa formation
nécessite donc l'adoption d'une loi dont le projet a été
déposé à l'Assemblée nationale le 14 mai dernier.
Dotée de crédits de 300 000 000 $ durant une période de 5
ans, Innovatech constitue sans doute une des entreprises les plus audacieuses
lancées par le gouvernement du Québec en vue de soutenir
l'innovation technologique de Montréal.
La Société Innovatech. S'y retrouvent quatre grands
principes. Premièrement, l'économie du Grand Montréal a
besoin d'une impulsion-choc, d'un effort substantiel, soutenu, centré
sur l'innovation technologique pour assurer une revitalisation de la base
industrielle. Le montant de 300 000 000 $ qui sera consacré à
Innovatech représente une contribution majeure et d'autant plus
significative dans le contexte budgétaire que l'on connaît.
Deuxièmement, les instruments d'intervention doivent être
flexibles et souples de manière à compléter efficacement
les mesures et les programmes gouvernementaux existants. Le champ
d'intervention devrait déborder du cadre traditionnel de la recherche et
du développement pour couvrir, entre autres, la qualification de la
main-d'oeuvre, les transferts technologiques et la diffusion des produits.
Troisièmement, les milieux impliqués dans l'innovation
technologique doivent participer directement à la définition des
orientations et aux décisions. Les acteurs devraient être les
décideurs. L'action gouvernementale aura d'autant plus de portée
qu'elle répondra adéquatement aux besoins des divers milieux
innovateurs de la région, étant entendu, par ailleurs, que
l'objectif ultime consiste à soutenir des initiatives offrant des
perspectives réelles dans l'avenir.
Et, finalement, la concertation entre partenaires innovateurs, qu'ils
soient du secteur privé ou public, est essentielle. Pour en tirer les
meilleurs résultats, l'innovation exige la coopération entre les
entreprises et l'établissement de liens étroits entre les centres
privés et les institutions universitaires.
C'est à partir de ces principes, M. le Président, que le
projet de la Société a été élaboré.
La Société aura donc pour mission de promouvoir et de soutenir
les initiatives propres à relever la capacité d'innovation
technologique sur le territoire du Grand Montréal. Pour la
réalisation de sa mission, la Société pourra notamment,
dans le cadre des orientations gouvernementales, susciter, accueillir et
évaluer les initiatives susceptibles de renforcer la capacité
d'innovation technologique sur le territoire du Grand Montréal; associer
à ces initiatives des partenaires du secteur privé et du secteur
public et favoriser la concertation entre eux; participer financièrement
à la réalisation de ces initiatives; favoriser la participation
financière de particuliers, de sociétés et de personnes
morales aux initiatives qu'elle soutient; sensibiliser la population du Grand
Montréal à l'importance des initiatives qu'elle soutient en
l'informant des réalisations qu'elles rendent possibles; conseiller le
ministre sur les politiques et stratégies relatives à
l'innovation technologique sur le territoire du Grand Montréal et lui
proposer les moyens de les mettre en oeuvre.
M. le Président, la Société jouira d'une large
autonomie. Il lui reviendra, par exemple, de définir elle-même,
par règlement soumis à l'approbation du gouvernement, les
critères d'admissibilité des initiatives qui lui sont
présentées, la forme, les modalités et, le cas
échéant, les limites de sa participation financière. La
Société pourra également décider elle-même
des aides financières de moins de 5 000 000 $.
Il importe, par ailleurs, que les activités de la
Société s'inscrivent dans le cadre des orientations
gouvernementales pour l'ensemble du Québec. À cette fin, le
projet de loi stipule que la Société devra informer les ministres
concernés des initiatives qu'elle entend soutenir parmi celles qui sont
admissibles.
La Société sera habilitée, dans le cadre de sa
mission, à conclure une entente avec toute personne,
société, organisme ainsi qu'avec le gouvernement, l'un de ses
ministères ou organis-
mes. Elle pourra aussi, conformément à la loi, conclure
une entente avec un gouvernement au Canada ou à l'étranger, l'un
de ses ministères ou organismes, une organisation internationale ou un
organisme de cette organisation. Il en sera de même avec la
Communauté urbaine de Montréal et toutes les municipalités
dont le territoire est compris dans le Grand Montréal. Une telle entente
pourrait, à l'occasion, déroger à la Loi sur
l'interdiction de subventions municipales.
Les affaires de la Société seront administrées par
un conseil d'administration composé de neuf membres provenant des
milieux de la recherche, de l'enseignement universitaire et collégial
ainsi que de nos entreprises. Les membres seront nommés par le
gouvernement. Trois représentants gouvernementaux seront
délégués comme observateurs auprès du conseil
d'administration. Dans un souci d'accroître l'autonomie de la
Société, le projet de loi prévoit également que le
président-directeur général de la Société
sera nommé par le conseil d'administration.
Pour remplir la mission qui lui est confiée, la
Société recevra du ministère des Finances un montant
maximal de 300 000 000 $ pour une période de 5 ans. La
Société fera connaître ses besoins financiers au
gouvernement. Ainsi, elle transmettra, avant le 15 décembre de chaque
année, son plan de développement pour l'exercice financier
suivant. De même, elle fournira au ministre, pour approbation par le
gouvernement avant le 15 décembre de chaque année, ses
prévisions budgétaires pour l'exercice financier suivant, selon
la forme et la teneur qui seraient déterminées. (4 h 30)
La Société Innovatech du Grand Montréal sera
dissoute en mars 1997, à moins que le gouvernement n'y pourvoie
autrement. Le projet de loi prévoit que le gouvernement pourrait
autoriser un organisme ou une personne morale qui aurait des objets similaires
à poursuivre la mission qui était confiée à cette
société, en vertu de la présente loi.
M. le Président, la Société Innovatech du Grand
Montréal entend être un outil de tout premier plan à la
disposition des gens de la région métropolitaine de
Montréal pour accélérer la relance de son
économie.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Sur le même sujet, je cède la parole à M. le
député de Labelle. Je vous rappelle, M. le député
de Labelle, qu'en vertu de l'article 209 vous avez droit à une
intervention de 60 minutes.
M. Jacques Léonard
M. Léonard: Merci, M. le Président. Merci beaucoup.
M. le Président, nous avons aujourd'hui, devant nous, un projet, la
Société Innovatech, qui va surtout agir dans le domaine de la
recherche et du développement. C'est ce qu'il faut comprendre de la loi
qui est devant nous. Je voudrais rappeler, M. le Président, et en
profiter aussi pour faire un bref survol des activités de recherche
qu'il y a eu au Québec et au Canada.
Faut-il le rappeler, dès le départ, que les
activités de recherche, de développement, dans des termes
modernes, représentent une activité humaine par excellence. C'est
celle de la réflexion et du questionnement que les humains ont toujours
nourris en face de l'avenir. Qu'ils soient enfants, adultes ou même dans
un âge avancé, tous se posent des signes. Et c'est, au fond, la
recherche-développement, le signe et la fonction de l'intelligence.
M. le Président, il y a eu beaucoup de choses d'écrites
là-dessus. Il y a beaucoup de littérature. J'ai découvert
un texte que j'ai trouvé particulièrement pertinent à nos
débats aujourd'hui, et c'est celui de M. Fernand Labrie, un chercheur de
l'Université Laval, dont je voudrais vous lire quelques extraits. Je
vais d'ailleurs m'inspirer largement de son texte pour cette réplique
à ce projet de loi.
La science est la clé du succès global d'un pays. Le Dr
Luigi Rossi Bernardi, président du Conseil national de recherche
d'Italie, exprime clairement le rôle crucial que la grande
majorité des citoyens accordent à la recherche. Je cite.
«En bout de ligne, la division entre la richesse et la pauvreté
repose sur la possibilité de créer et d'utiliser la science. De
fait, après mûre réflexion, la science fait, à elle
seule, la différence entre les pays industrialisés riches et les
pays pauvres. Rien d'autre. Différentes formes de gouvernement,
différents régimes économiques, différentes
cultures, différentes religions, différents climats et la
disponibilité de matières premières ne peuvent, de fait,
expliquer pourquoi seulement quelques pays ont pu atteindre un haut niveau de
développement. «La vérité toute crue que nous
oublions trop souvent est qu'un standard de vie élevé
dépend du niveau du développement scientifique et technologique.
De fait, les domaines d'importance capitale comme la santé publique, la
sécurité nationale, la productivité et le
développement industriel et, donc, la puissance économique et
l'influence de toute nation à travers le monde reposent sur le niveau de
la science contrôlée par ce pays».
M. le Président, voilà un texte très important qui
définit ce que représentent la recherche et le
développement pour tous les pays que nous connaissons et, en
particulier, les pays de l'OCDE et les pays occidentaux. M. le
Président, nous devons, avant tout, faire un bilan de ce qui s'est fait
ici, en ce qui concerne la recherche-développement. Nous visons dans le
continent nord-américain, à proximité des
États-Unis, avec des relations très suivies aussi avec l'Europe,
mais d'autres qui s'étendent au reste du monde. Mais, en particulier, il
faut dire que la proximité
des États-Unis nous a amené quelques problèmes et
cause quelques problèmes, ici, en termes de perception, ainsi que la
domination scientifique des États-Unis. L'association étroite
entre le Canada et les États-Unis a offert des avantages sociaux et
économiques majeurs au Canada, tout en développant chez nous
l'illusion que ce succès était acquis et mérité. La
force scientifique, technologique et financière des États-Unis a
fait en sorte qu'une multitude de filiales américaines se sont
installées au Canada, apportant avec elles toutes les connaissances de
technologie de pointe requises au succès de leurs entreprises
installées sur le territoire canadien.
Toutefois, le rôle des Canadiens pendant cette longue
période a été trop souvent ou même trop
généralement limitée à fournir une main-d'oeuvre
peu spécialisée et des matières premières obtenues
à faible coût, mais de grand volume. Le Canada a donc trop
longtemps vécu dans l'illusion de posséder la technologie de
pointe requise pour une économie compétitive, ce qui a
enlevé le stimulus nécessaire à nos universités,
à nos gouvernements et à nos entreprises pour développer
nos propres scientifiques et nos propres technologies.
Avec le libre-échange, cette illusion d'un pouvoir que nous ne
possédions pas vraiment est subitement disparue et la
réalité toute froide s'est dressée devant nous: de
protecteurs et pourvoyeurs de sciences, technologies et emplois, les
Américains sont subitement devenus nos compétiteurs, comme
d'ailleurs tous les autres pays du monde qui sont des acheteurs potentiels,
mais également des concurrents. Notre seule façon de faire des
affaires avantageuses et profitables dans le futur sera donc d'inventer et de
fabriquer des produits meilleurs que ceux disponibles dans les autres pays et
ce, à meilleur coût et avec une meilleure qualité.
En même temps que nous bénéficions des avantages de
la proximité des Américains, en même temps ceci nous
causait des problèmes, en même temps aussi nous suivions leur
propre périple en ce qui concerne la recherche et développement.
En fait, les Américains ont investi de façon massive dans la
recherche-développement à partir de la guerre. Et ils ont eu de
la difficulté à réorienter vers l'industrie leur
recherche-développement axée vers la guerre, alors que quelques
années après le conflit mondial, au début des
années soixante notamment, les Japonais et les Allemands ont investi
massivement en recherche-développement en tournant leurs efforts surtout
vers l'industrie et beaucoup moins, sinon pas du tout, vers l'armement, vers la
défense, de sorte qu'aujourd'hui, dans les années quatre-vingt,
quatre-vingt-dix, ces deux pays, notamment, ont pu prendre un essor
considérable vers la recherche-développement.
Quoi qu'il en soit, M. le Président, nous suivons ce
périple des Américains à l'heure actuelle. Nous en sommes
dépendants plus que de tout autre pays dans le monde et, en même
temps, il faut constater que les États-Unis, toutes proportions
gardées, en ce qui concerne la recherche-développement, sont
maintenant au quatrième rang dans le monde. (4 h 40)
Le Québec a fait des efforts, j'y reviens, mais, par ailleurs,
nous n'avons pas fait tous les efforts qu'il fallait faire et surtout je crois
qu'il faut noter à partir des États-Unis ce qui se passe au
Canada. Sur ce plan, je voudrais citer un article fort percutant de M. Claude
Piché, de La Presse, daté du 18 avril 1992, dont on se
rappellera sûrement, pour ceux qui l'ont lu, et qui s'intitule:
«Une tragédie dont personne ne parle». 11 a surtout
parlé du canada et du québec. il faisait référence
à des statistiques qui venaient d'être publiées. on
apprenait dans ces statistiques que le canada a consacré, en 1991, 9 700
000 000 $ à la recherche et développement. ce montant
représente une hausse de 6 % sur l'année
précédente. mais, derrière ces chiffres impressionnants,
dit m. piché, se dissimule une tragédie nationale. le dossier du
canada en matière de recherche scientifique et industrielle,
d'innovation technologique, de développement de nouveaux produits est
tellement pitoyable que cela fait peur. il fait un certain nombre de
considérations, par exemple: pour chaque dollar que le canada consacre
à la recherche et au développement, l'allemagne en investit 6 $,
le japon 12 $, les états-unis 18 $. calculé autrement, le japon
consacre 3,5 % de son produit intérieur brut à la recherche et au
développement, l'allemagne, 2,9 %, les états-unis, 1,9 %, le
canada, lui, tire de l'arrière avec 1,4 %. on peut voir dans certaines
publications scientifiques que l'on considère que, pour faire de la
recherche-développement, il faut, tout d'abord, pour se doter de
l'infrastructure nécessaire, 0,5 % du pib, pour assumer le coût
des infrastructures de base. donc, lorsque l'on compare ces pourcentages, il
faut tenir compte de cette soustraction en termes d'infrastructures pour mieux
évaluer les véritables efforts qui vont à la recherche
directe.
Or, plus une économie est de taille modeste, dit M. Piché,
plus elle a besoin d'investir dans l'innovation, la technologie, la recherche,
le développement. C'est ce qui explique, par exemple, qu'un pays comme
la Suède, bien que trois fois moins peuplé que le Canada, compte
autant de chercheurs. Le Canada fait exactement le contraire de ce qu'il faut.
La plupart des pays dynamiques augmentent leurs investissements en recherche et
en développement. Les Japonais, en 10 ans, ont quintuplé leurs
dépenses dans ce dossier. En 1980, ils y consacraient 28 000 000 000 $
ou 2,1 % de leur PIB, l'an dernier, c'était 125 000 000 000 $.
Qui plus est, le Canada est un des rares pays industrialisés
à diminuer ses investissements
en recherche et développement. En 1985, les Canadiens y
consacraient 1,44 % de leur PIB; quatre ans plus tard, ils affichaient un
piteux 1,35 % et, avec les chiffres annoncés cette semaine, pour 1991,
ils remontaient à 1,41 %. Ce qu'il faut conclure, c'est la
stagnation.
Et le Québec, maintenant, dans tout cela, fait encore pire figure
que l'ensemble du Canada; avec un taux de 1,15 %, il affiche un des pires
scores pour les pays industrialisés. M. le Président, on peut
prendre en exemple le secteur forestier, qui est quand même l'une de nos
grandes industries ici, et nous comparer avec la Finlande: la Finlande, 5 000
000 d'habitants, compte 800 chercheurs spécialisés en foresterie;
le Québec, qui compte 7 000 000 d'habitants, compte deux fois moins de
chercheurs. Ce n'est pas tout, M. le Président. Les
Québécois ne s'intéressent pas à la recherche, ou
pratiquement peu, dans le secteur de la forêt: 40 % des emplois de
chercheurs sont occupés par des spécialistes venus de
l'extérieur. Je n'ai rien contre, mais cela indique, cependant, que les
Québécois eux-mêmes s'intéressent peu à la
recherche. Ils font, évidemment, des choses intéressantes chez
Bombardier, chez Northern Telecom, au Conseil national de recherches, chez SNC,
dans des entreprises pharmaceutiques, dans des centaines d'entreprises, dans
des universités, dans plusieurs universités, mais, la
réalité, de conclure M. Piché, triste, brutale,
incontournable, c'est qu'il ne s'en fait pas assez, et de très loin.
M. le Président, voilà pour ce constat. Je pourrais
aligner aussi d'autres constats et les reprendre d'une autre façon, je
pense que c'est important. Les sommes consacrées à la recherche
scientifique et au développement expérimental se sont
élevées à 2 200 000 000 $ en 1989 et affichent une
croissance de 9,8 % par rapport à 1988, soit 5 % en termes réels.
La part québécoise de l'ensemble des dépenses de R-D au
pays a atteint sa valeur la plus élevée depuis 1979,
s'établissant à 25,2 %, alors qu'elle s'élève
à 51,6 % pour l'Ontario, le plus haut niveau pour cette province ayant
été en 1981.
Le ratio R-D-PIB a très peu progressé, passant de 1,40 %
en 1988 à 1,44 % en 1989, en raison, en particulier, de la croissance
nominale de 6,6 % du PIB pour cette dernière année. Ainsi, le
ratio R-D-PIB stagne sous 1,5 % depuis 1985 alors qu'il avait atteint un
sommet, à ce moment, de 1,47 %. Mais on doit cependant prendre note que
ce ratio a connu une baisse en Ontario, durant la même période,
passant de 1,87 % en 1985 à 1,64 % en 1989, mais c'est encore au-dessus
du Québec malgré cette baisse marquée.
La stagnation R-D-PIB du Québec est particulièrement
frappante en regard du plan d'action 1988-1992 présenté par le
gouvernement en juin 1988. De 1,5 % en 1987, prévu par le plan, le
ratio, qui était en réalité de 1,45 %, devait augmenter de
0,1 % par année pour s'établir à 2 % en 1992.
C'était le plan de 1988. Et, selon ce scénario gouvernemental, il
aurait dû se situer à 1,7 % en 1989. 0,1 % représente
environ 150 000 000 $ d'investissement, ce qui équivaut à un
sous-investissement de R-D de 400 000 000 $ en 1989 par rapport au plan
d'action.
Les dépenses du gouvernement fédéral expliquent une
part importante du plafonnement de l'effort de recherche au Québec
puisqu'ils ont tout simplement été gelés dans la province
entre 1987 et 1989, ce qui correspond à un recul en termes réels.
La part du Québec dans ces dépenses a chuté de 21 %
à 19 % entre ces deux années. Une augmentation de cette part
à 26 %, soit le poids démographique du Québec, ou une
injection de 175 000 000 $ réduirait de près de la moitié
le sous-investissement de la recherche-développement par rapport au plan
d'action. Par ailleurs, il est étonnant de constater que, sur la
période 1980-1985, les dépenses fédérales au
Québec ont crû de 21,2 % en moyenne annuellement contre 12,1 % en
Ontario. Cela a d'ailleurs fait monter la part du Québec de ces
dépenses de 14,9 % en 1979 à 20,2 % en 1985, alors que la
croissance de ces dépenses n'a été que de 2,5 % en moyenne
par année au Québec sur la période 1986-1989, contre 6,7 %
en Ontario. Et il faut conclure que le fédéralisme
coopératif n'est pas toujours rentable.
M. Baril: M. le Président, je m'excuse auprès de
mon collègue, j'aimerais ça si vous pouviez...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant, un instant.
Oui, M. le député d'Artha-baska.
M. Baril: J'aimerais ça, M. le Président, vu
l'importance du projet de loi, que vous vérifiiez le quorum.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle le
député. Allez-y, M. le député de Labelle. (4 h
50)
M. Léonard: merci, m. le président. pour sa part,
le gouvernement du québec a haussé sa contribution à la
recherche-développement de 13,1 % en 1989 par rapport à 1988. on
peut aussi contraster cette performance avec celle de l'ontario qui a
augmenté, elle, sa contribution de 28,8 % en 1989. entre 1986 et 1989,
la hausse annuelle moyenne a été de 19,2 % en ontario, contre 8,4
% au québec, si bien que l'ontario a maintenant rattrapé le
québec à ce chapitre, avec 210 000 000 $ contre 207 000 000 $
pour le québec.
Cette tendance se répète aussi dans le secteur de
l'enseignement supérieur. De 1986 à 1989, la croissance annuelle
moyenne du financement de la R-D par ce secteur a été de 3,2
%
seulement au Québec, contre 10,3 % en Ontario. Le gouvernement du
Québec est en partie responsable de cette piètre performance
puisqu'elle a vraisemblablement pour cause le sous-financement chronique des
universités québécoises. l'évolution du financement
de la r-d par les entreprises est beaucoup plus encourageante puisque le taux
de croissance est largement supérieur au québec, avec 16,2 %,
qu'en ontario, où cette croissance a été de 1,7 %, un
écart qui est apparu d'ailleurs en 1987. cependant, le ratio r-d
industrielle exécutée par le secteur privé est
resté stable à environ 0,8 % depuis 1985; il est de 0,84 % en
1989, la hausse du financement du secteur privé ayant été
accompagnée ou provoquée par une baisse de la contribution du
gouvernement fédéral à la r-d industrielle. notons que le
ratio ontarien a chuté de 1,15 % à 0,97 % sur cette même
période.
En conclusion, malgré la croissance appréciable du
financement par les entreprises, le Québec plafonne depuis 1985 dans la
part de sa production qu'il consacre à la recherche et au
développement. Le gouvernement fédéral est le grand
responsable de cette situation, mais le sous-financement du réseau
universitaire et la croissance modeste de ses dépenses de R-D font
porter aussi au gouvernement du Québec une bonne partie de la
responsabilité du retard considérable qui s'est creusé par
rapport aux objectifs qu'il s'était lui-même fixés dans son
plan d'action. Et, M. le Président, nous avons obtenu, en commission
parlementaire, un tableau important sur ce plan par rapport au Fonds de
développement technologique et à Innovatech Grand
Montréal, qui est encore à l'état de projet. Le
Québec a effectivement introduit des mesures fiscales pour appuyer les
risques financiers qui étaient pris par les entreprises en R-D, avec des
crédits d'impôt de 40 %. On a pu établir que le
fédéral, les imposant ou les déduisant avant,
lui-même, de donner ses propres crédits, cela équivalait
à les taxer et donc à les réduire et réduisait la
portée de ces crédits d'impôt.
Par ailleurs, le Fonds de développement technologique,
lancé en 1988 avec 300 000 000 $, auxquels on a ajouté un autre
montant de 50 000 000 $ ultérieurement, donc 350 000 000 $, ne se
dépense pas, et c'est cela, le problème. À chaque
année, on a mis dans les crédits quelque 60 000 000 $, mais,
après trois ans, il n'y a que 39 278 000 $ qui ont été
transférés vers les ministères, qui ne sont pas
nécessairement encore tous déboursés; malheureusement,
nous n'avons pas cette assurance, mais, admettons qu'ils soient
complètement déboursés, il s'agit de 39 278 000 $ sur une
somme qui devrait être beaucoup plus considérable. Nous, le
gouvernement - pas nous, mais les gens d'en face, le gouvernement - avait
investi ou a consacré 350 000 000 $ au Fonds de développement
tech- nologique. Après trois ans, c'est 39 000 000 $, même pas 40
000 000 $ qui sont déboursés. On nous parle des engagements, mais
les engagements, c'est vraiment beaucoup plus loin.
M. le Président, si on veut vraiment aussi évaluer ce qui
se fait et ce que l'on promet sur ce plan, l'on doit considérer ce qui
est apparu dans les comptes en ce qui concerne le projet de
Société Innovatech. Or, sur ces 300 000 000 $, qu'est-ce qu'il y
a? En 1992-1993: c'est 10 000 000 $; en 1993-1994: 15 000 000 $; et, en
1994-1995: 25 000 000 $. 50 000 000 $ sur ces trois ans, alors qu'on a
prévu 250 000 000 $. Est-ce qu'il se dépensera 100 000 000 $ en
1995-1996 et 150 000 000 $ en 1996-1997? Ça me paraît gros, compte
tenu des performances mêmes qu'on a trouvées dans le Fonds de
développement technologique.
De sorte que ce dont on parle c'est une somme totale de 650 000 000 $.
Depuis le plan de 1988, cependant, il s'est investi 39 000 000 $. Alors, c'est
comme si on faisait des vases communicants, qu'on agitait de gros chiffres
alors que la réalité elle est mince, maigre, pénible
à constater.
Nous avons fait le tour en commission parlementaire, avec le ministre de
l'Industrie et du Commerce, au sujet de ces fonds, mais il y a peu de
réponses pratiques, peu de réponses concrètes. Et je
comprends qu'en ce qui concerne Innovatech, comme la Société
n'est pas créée, il n'y a rien de précis encore. Ce sont
des montants globaux, mais minces en ce qui concerne les trois prochaines
années, 50 000 000 $: 10 000 000 $, 15 000 000 $ et 25 000 000 $. Alors,
on parlait d'un éléphant, on a accouché d'une souris.
M. le Président, je ne peux pas ne pas aborder une question qui
touche les universités en ce qui concerne la recherche. Il est
évident que les universités sont au centre de la
recherche-développement et que les relations avec l'industrie doivent
être suivies. Alors, dans Le Devoir du mois de mars 1991, il y a
eu un article fort important sur cette question, un article qu'on intitulait
«La recherche, orpheline de l'État, l'université, grande
victime du virage politique». Ce qui était dit dans ce texte est
très éclairant, M. le Président. Je réfère
ceux qui m'entendent à ce texte paru dans Le Devoir. Je crois que
c'est le 24 mars, je le cherche, le 24 mars 1991... 26 mars 1991. Merci. J'en
citerai quelques extraits, parce que, si on ne pouvait pas investir des sommes
considérables dans l'industrie, au moins il aurait fallu investir dans
les universités qui, elles, attendaient de l'argent de façon
considérable avec les problèmes de financement qu'elles avaient
connus.
Le virage technologique tombe en panne faute de carburant,
c'est-à-dire faute d'argent, dit l'auteur. L'industrie a une excuse, son
taux de croissance a été considérable. Mais, malgré
tout l'industrie finance un peu plus de la moitié
de la recherche québécoise et en exécute
près des deux tiers. Ce sont les universités cependant qui sont
la grande victime du récent capotage technologique
québécois parce qu'en 10 ans la part des universités dans
le financement de la recherche a diminué de moitié, et on ne peut
interpréter ces coupures que comme une volonté de l'État -
les coupures dans le financement des universités - d'asservir la
politique scientifique à la politique économique. La seule
politique clairement discernable dans la mise au régime des
universités, selon le sous-ministre adjoint au ministère de
l'Enseignement supérieur et de la Science, c'est la volonté de
l'État lui-même d'orienter, de concert avec l'industrie, la
direction que doit prendre la recherche.
Devant une telle politique, où l'université en est-elle
réduite à prendre ses fonds de recherche? Pas dans ses fonds
propres qui dépendent presque totalement du financement de
l'État, la fonte des fonds universitaires depuis 10 ans a réduit
de moitié le taux d'autofinancement de la recherche universitaire et a
doublé la dépendance des universités par rapport aux
dollars industriels. (5 heures)
On a ce son de cloche au ministère, à l'Université
McGill, à l'UQAM, où l'on dit exactement la même chose et
où l'on souligne, par exemple, que l'effet le plus pervers de cette
stagnation, c'est de conduire les institutions à ne financer - je cite -
«que le "top" de la crème des chercheurs» avec de l'argent
industriel. Devant l'obligation de livrer rapidement la marchandise, les
chercheurs n'embauchent que des professionnels et les apprentis chercheurs
restent sur le carreau. Du coup, c'est la relève scientifique
québécoise qui fout le camp. La tranche médiane des
chercheurs, les scientifiques réguliers de bonne qualité, qui
publient dans des revues de bon niveau, ceux qui initient d'ordinaire le plus
grand nombre d'étudiants et de diplômés à la
recherche, ceux-là en arrachent. De part et d'autre, on souligne que le
manque d'argent pour la recherche n'est pas que le résultat simple des
temps difficiles que nous traversons. «La principale cause, dit quelqu'un
de l'UQAM, c'est l'absence de politique globale de la recherche et la
dernière en liste, c'était le livre blanc de Camille Laurin, qui
remonte pratiquement au déluge.» Comme politique scientifique,
c'est loin.
Voilà pour le Québec, M. le Président. Alors, que
nous offre le gouvernement face à cette problématique? Bien
sûr, il y a le Fonds de développement technologique. Il y a
maintenant ce projet de société Innovatech. Mais ce projet
comporte certaines données. Le ministre l'a expliqué tout
à l'heure, je voudrais donc y revenir maintenant, de façon plus
concrète. Dans ce plan de redressement durable, appelé
«Pour un redressement durable», dans ce document «Pour un
redressement durable», appelé «Le plan stratégique du
Grand Montréal», on trouve une proposition qui touche une
société, et nous en voyons l'aboutissement dans ce que nous avons
aujourd'hui.
M. le Président, je prendrai deux points, majeurs, à mon
sens, en ce qui concerne ce projet de loi. Ce projet de loi consiste à
créer une société avec certaines modalités de
fonctionnement, comme il convient, mais une société dont le
territoire est limité. On l'appelle, on limite ce territoire au Grand
Montréal, qui consiste en le territoire de I He de Montréal, de
l'île Laval, de la couronne nord et sud, en comprenant
Vaudreuil-Soulanges. La question qu'on peut se poser par rapport à ce
territoire, c'est: Pourquoi est-il limité? Pourquoi est-il limité
de façon aussi restreinte alors qu'en fait la
recherche-développement se fait à 80 % sur ce territoire
déterminé? On crée une société à 300
000 000 $ pour faire de la recherche-développement sur ce territoire,
mais qu'en est-il et qu'arrivera-t-il de l'autre 350 000 000 $. On nous
répondra que peut-être Innovatech sera admissible aussi au fonds
de développement technologique. S'il ne l'est pas, cela veut dire que
les 350 000 000 $ sont exclus et, donc, que là où se fait 80 % de
la recherche, on n'aura que 300 000 000 $; la moitié, même pas la
moitié des sommes.
M. le Président, je pense que cela relève d'une conception
douteuse de la recherche-développement. La
recherche-développement est intégrée, elle touche tout le
Québec et, effectivement, le bassin où se fait la
recherche-développement, c'est dans la région
montréalaise. Le fait de limiter cette société au
territoire de Montréal, même s'il est agrandi, même si on
l'appelle le Grand Montréal, pose une question, non seulement de
principe, mais de pratique. De principe, parce que le coeur de la recherche est
là et que cette recherche-développement doit être
intégrée avec ce qui se fait même ailleurs au
Québec. Cela va d'ailleurs dans le sens des intérêts de
cette région et, à mon sens, ce n'est pas ce qui est fait
présentement.
Un des éléments qu'il faut considérer,
au-delà de cette théorie des grappes dont on parle beaucoup, et
qui est remise en cause d'ailleurs aux États-Unis par des chercheurs
réputés, c'est que la recherche-développement se fait
beaucoup plus... Ça n'exclut pas les grappes, mais elle se fait beaucoup
plus la diffusion des connaissances. Ce qu'on appelle en anglais «the
knowledge spill over», beaucoup plus. Cette conception a
été mise au point au cours des années quatre-vingt,
quatre-vingt-dix, et elle est beaucoup plus riche d'enseignement parce que,
finalement, elle démontre que les sociétés où il y
a une économie industrielle diversifiée progressent beaucoup plus
rapidement que là où l'économie est monoindustrielle...
Prouvée et qui remette jusqu'à un certain point en cause cette
théorie des grappes, bien qu'elle ne l'exclue pas corn-
plètement.
Dans le cas d'une société qu'on limite de façon
géographique comme ce qu'on vient de faire, je pense que le
Québec aura des problèmes ultérieurement, parce qu'on aura
divisé le Québec en deux: l'un où la recherche est
prédominante et un autre, avec un autre type de recherche. Je pense que
cette discrimination va jouer à l'en-contre des intérêts du
Québec, mais à rencontre aussi de la région de
Montréal. J'aimerais que le ministre s'exprime sur ce point, parce que
ça me paraît très important.
L'autre point que je voulais soulever, M. le Président, c'est
celui de savoir que c'est le président du Conseil du trésor qui
est responsable de cette loi. J'ai été très surpris de
l'apprendre. Même si cela avait été dit dans le document
qu'il a publié avant Noël, il reste que le ministre qui est
responsable de la recherche-développement ici au gouvernement, c'est le
ministre de l'Industrie et du Commerce. Le ministre de l'Industrie et du
Commerce, c'est lui qui est responsable de la recherche-développement,
c'est lui qui est responsable du Fonds de développement technologique,
parce que, un jour, étant donné que ce Fonds de
développement technologique était au Conseil exécutif,
j'ai dit que M. Bourassa en était responsable et qu'il était
lui-même responsable de ce que les fonds ne se dépensaient pas.
Quelqu'un a souligné qu'il avait passé le «buck»
comme on dit... qu'il avait passé le dossier, pardon, je retirerai ce
mot, au ministre de l'Industrie et du Commerce.
Alors, qu'est-ce qui arrive maintenant en ce qui concerne ce dossier? La
moitié du dossier va donc se retrouver dans les mains du
président du Conseil du trésor. Donc, un dossier divisé en
deux. Est-ce qu'il y a des problèmes qui se posent là? J'y
reviendrai. Mais je dirai surtout ceci: c'est qu'en tant que président
du Conseil du trésor, le ministre qui est devant nous est le
contrôleur du gouvernement. Lorsque l'on est contrôleur, on n'est
pas en même temps quelqu'un qui est dans l'action. Ce sont deux fonctions
séparées, de telle sorte qu'il est en situation potentiellement
conflictuelle avec son rôle vis-à-vis ses fonctions de ministre
responsable de la société Innovatech. Le président du
Conseil du trésor a une fonction horizontale dans le gouvernement et pas
du tout une fonction de responsabilité sectorielle précise,
même si elle s'applique sur un territoire donné. Je dis qu'il est
en situation potentiellement conflictuelle et je pense, quand je le dis comme
cela, il est en situation conflictuelle. (5 h 10)
M. le Président, les échos que nous avons ne sont pas
très gais là-dessus. C'est qu'il y aurait une querelle de bornage
entre le président du Conseil du trésor et le ministre de
l'Industrie et du Commerce. Alors, c'est une chose qui se dit un peu partout,
une lutte de pouvoirs. Je comprends qu'ils ont eu des relations auparavant, que
les piètres résultats de l'administration du ministre de
l'Industrie et du Commerce dans son ministère et lorsqu'il était
à la SDI, notamment, ne sont pas sans relation avec les anciennes
responsabilités de l'actuel président du Conseil du trésor
qui, lui, était ministre à l'époque et qui porte aussi la
même responsabilité de la maladministration à la SDI.
Alors, M. le Président, je pense que ce à quoi nous
assistons c'est, finalement, au résultat d'une partie de bras de fer
entre deux ministres qui se sont partagés les responsabilités. La
seule chose qui nous intéresse, M. le Président, c'est de savoir
qu'une telle situation ne sera pas dommageable à la
recherche-développement au Québec, que les points que je viens de
soulever ne nuiront pas à la recherche-développement au
Québec. Bien sûr, nous sommes pour le fait que le gouvernement
investisse des sommes considérables en recherche-développement.
Et même les 300 000 000 $ ne sont pas suffisants encore là.
M. le Président, je pense que, en dernier point, la question qui
se pose, c'est de savoir si une telle société est le
mécanisme efficace qui va amener le gouvernement à
dépenser, à débourser ces fonds. C'est ça, la
question. On peut avoir des hésitations là-dessus. Je comprends
que le gouvernement, ayant fait une faillite de son Fonds de
développement technologique, qu'il ne dépense pas après
trois ans, essaie de trouver d'autres dispositifs, d'autres mécanismes,
d'autres structures pour réussir, cette fois. Je pense que nous devons
lui donner cette chance de le prouver.
Il a déposé devant nous un projet de loi sur lequel on
peut se poser des questions, effectivement. C'est un projet de loi assez sec,
merci. Ça parle beaucoup, beaucoup de structures. Ce n'est qu'à
l'article 23 qu'on trouve les missions et pouvoirs de la Société,
où c'est un peu plus précis, où l'on comprend davantage ce
dont il s'agit. Mais le mécanisme lui-même, la question qui se
pose en ce qui le concerne, c'est: Sera-t-il efficace pour dépenser les
fonds, pour investir dans la recherche, pour établir les relations
université-entreprises-gouvernement en ce qui concerne la recherche,
pour que cela bouge une fois pour toutes, pour que, finalement, on
décolle de ce 1,4 qu'on a en recherche et qu'on atteigne les 2,0? Le
ministre de l'Industrie et du Commerce parlait des 2,5; la
réalité, c'est 1,4.
M. le Président, je voudrais aussi souligner une chose en passant
parce qu'il a parlé de quatre critères qu'il utiliserait, en
particulier des milieux impliqués qui doivent participer à la
société Innovatech. J'ai bien remarqué qu'à la page
35 de son document, il avait indiqué les organismes ou les intervenants
suivants: les entreprises, les syndicats, les universités, les milieux
de la recherche et les collèges. Nous avons constaté que les
syndicats étaient sautés
dans le projet de loi, donc un changement important. Est-ce qu'ils sont
exclus définitivement? Je pose la question au ministre pour savoir
pourquoi ils ne sont pas mentionnés dans l'article du projet de loi en
ce qui concerne les membres qui vont être admissibles à
siéger au conseil d'administration.
M. le Président, il est bien tard pour discuter de ce projet de
loi. Il a été amené à 4 h 30 du matin. Je
considère... Bien tard dans la soirée, et le ministre de
l'Agriculture, qui me sourit largement, dit qu'il est de bonne heure.
Effectivement, très tôt dans la matinée. Je trouve, M. le
Président, qu'ayant siégé depuis 10 heures hier matin,
l'Assemblée nationale aborde une question majeure, très
importante, à 4 h 30 du matin, avec un projet de loi qui est
supposé nous donner, nous doter d'un mécanisme pour stimuler la
recherche-développement dans la région de Montréal.
Je voudrais dire une chose en terminant. Nous avons d'énormes
réserves sur ce projet de loi que nous espérons éclaircir
en commission parlementaire. La question qui est intéressante, c'est que
le gouvernement a l'intention d'investir 300 000 000 $, de doter cette
société Innovatech de 300 000 000 $. Fort bien! Fort bien! Alors,
ce qu'on peut en dire, présentement, c'est qu'au moins, au plan des
intentions, il y a un geste. Personne ne peut être contre la vertu et
donc, sur ce plan, en deuxième lecture, nous allons appuyer le projet en
avertissant le ministre que nous avons des réserves quant à sa
société, quant à la structure de sa société,
quant à ses modalités d'opération, et nous verrons plus
tard, en commission parlementaire. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le
député de Labelle, de votre intervention. En vertu de votre droit
de réplique, M. le président du Conseil du trésor et
ministre délégué à l'Administration et à la
Fonction publique. M. le ministre.
M. Daniel Johnson (réplique)
M. Johnson: M. le Président, très
brièvement, pour reprendre certaines des réflexions et
commentaires du député de Labelle. D'abord, je le remercie de sa
contribution à dresser le portrait, l'importance que revêt
également la recherche et le développement à
l'égard du développement économique. J'ai trouvé
que les sources auxquelles il s'abreuvait sont de toute première
qualité et que la façon dont il en a parlé a ajouté
au débat.
J'ai également pris note, évidemment, de la confiance
implicite que le député manifeste à l'endroit du
gouvernement dans l'appui qu'il compte apporter à cette étape-ci
de nos débats pour appuyer, donc, ce projet de loi dans la mesure
où, effectivement, il y a des engagements réels du gouvernement
qui ont été formulés tout autant par un comité
ministériel, au nom du gouvernement, que par les énoncés
budgétaires du ministre des Finances. Et je me permets, comme
président du Conseil du trésor, de confirmer également que
ces sommes sont là pour être dépensées.
Quant au reste, dans le désordre, l'heure à laquelle on
peut appeler un projet de loi ne m'apparaît pas être un obstacle
pour le député de Labelle pour se prononcer, pour exercer son
droit de parole. Je constate avec tout le monde qu'il est ici pour s'exprimer.
Alors, qu'on s'exprime à 10 heures ou 22 heures, 16 heures ou 4 heures,
de toute évidence, ça ne change rien. Les gens
intéressés sont toujours là et peuvent donc
s'exprimer.
Quant au territoire qui est visé, c'est la première fois
que j'entends, de l'Opposition, que le territoire est trop petit. J'ai
été habitué, depuis le 17 décembre dernier et
même avant, de me faire dire que le territoire du Grand Montréal
était bien trop grand; mais, là, je viens d'apprendre qu'il est
bien trop petit. Alors, je prends acte de cette nouvelle approche en cette
matière de la part de l'Opposition.
Ce que je veux dire, évidemment - et c'est là qu'on se
rejoint - c'est qu'il soit trop petit ou trop grand, une fois qu'on a
délimité ce territoire-là, on doit constater que c'est
là que se déroulent la vaste majorité des activités
de recherche et de développement de pointe, d'innovation au sens large,
au Québec, et qu'en conséquence non seulement - et je fais le
lien avec Innovatech et le Fonds de développement technologique - cette
grande région bénéficie-t-elle de retombées
considérables de la part du Fonds de développement technologique,
dont les engagements sont largement supérieurs, à ce moment-ci,
aux déboursés, comme c'est la nature des choses dans ces
matières-là, mais elle bénéficiera
également, cette région, de 300 000 000 $ additionnels qui
viennent compléter ce que le Fonds de développement technologique
peut apporter. Compléter dans le sens que si un projet n'est pas
autrement admissible comme projet mobilisateur au Fonds de développement
technologique, si les facettes du projet ne sont pas admissibles au
crédit d'impôt à la recherche ou à quelque autre
forme de subvention qui est disponible dans nos différents programmes,
c'est alors que la société Innovatech, si le projet est
admissible selon les critères qu'elle déterminera, pourrait
l'appuyer financièrement. C'est donc un ajout net au titre de la
recherche et du développement, et non pas un conflit quelconque qu'on
pourrait prétendre y voir.
Autre conflit, celui-là encore plus imaginaire que réel,
celui qui existerait entre le député d'Outremont et
moi-même. Le ministre de l'Industrie et du Commerce et le
président du Conseil du trésor, le ministre membre du
comité ministériel permanent du développement du Grand
Montréal et le président que je suis de ce comité,
apparemment, si j'écoute le député de Labelle, ce sont des
choses, cette querelle de bornage, qui se disent dans les milieux qu'il
fréquente. M. le Président, je vous annonce que, moi, je ne
fréquente pas ces milieux-là. Je ne connais personne qui les
fréquente. Alors, on va rester comme ça, évidemment, sur
nos positions. Le député aura beau invoquer toutes les sources
possibles, imaginables, il est le seul à les connaître, de toute
évidence. (5 h 20)
Quant au reste, M. le Président, je reprends tout de suite le
commentaire sur la présence syndicale sur le conseil d'administration.
C'est pour fin de rédaction, quant à moi. Dans un document d'une
centaine de pages, on peut, évidemment, aller dans le détail et,
sans faire de la littérature, être passablement complet avec notre
prose. Dans un document, enfin, dans un texte comme celui qu'est un projet de
loi devant l'Assemblée nationale, j'aurais aimé qu'on comprenne
qu'un membre du conseil d'administration qui émanerait du milieu
syndical ne peut pas émaner d'ailleurs que du milieu de l'entreprise,
par ailleurs, au sens large. Ce n'est pas une table de concertation que ce
conseil d'administration, mais bien un lieu où les gens auront à
décider de l'admissibilité d'un projet d'innovation
technologique, et l'origine des gens, alors que nous avions, effectivement,
indiqué que ça pouvait être le milieu syndical, entreprise,
recherche et développement, enseignement supérieur et
universitaire, a été resserrée sans exclure qui que ce
soit qui, autrement, évidemment, en vertu du document que nous avons
publié, pouvait être compris comme étant un candidat
éventuel.
M. le Président, je vous remercie de l'attention. Merci de
l'attention de mes collègues à cette heure tardive. C'est,
évidemment, avec un plaisir anticipé que j'envisage nos
discussions en commission parlementaire.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le
ministre délégué à l'Administration et à la
Fonction publique. Est-ce que la motion présentée par M. le
ministre délégué à l'Administration et à la
Fonction publique et président du Conseil du trésor proposant
l'adoption du principe du projet de loi 28, Loi sur la Société
Innovatech du Grand Montréal, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader adjoint du gouvernement.
Renvoi à la commission du budget et de
l'administration
M. Johnson: M. le Président, je fais motion de
déférer ce projet de loi à la commission du budget et de
l'administration pour son étude détaillée.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion
est adoptée? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: Je vous demanderais d'appeler l'article 16 de notre
feuilleton, M. le Président.
Projet de loi 23 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 16,
M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation
propose l'adoption du principe du projet de loi 23, Loi modifiant la Loi sur la
mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche
et la Loi sur les produits laitiers et leurs succédanés. M. le
ministre de l'Agriculture.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Merci, M. le Président. Ce n'est
sûrement pas nous qui sommes habitués dans le monde rural, M. le
Président, et surtout à cette heure non pas tardive, mais un peu
tôt le matin. Habituellement, les agriculteurs et les agricultrices du
Québec commencent à besogner à cette heure-là.
Donc, on ne se plaindra pas, bien sûr, d'étudier les projets de
loi agricoles en fonction de l'heure. Au contraire, c'est à ce
moment-là, généralement, qu'on peut rejoindre
peut-être notre clientèle plus facilement.
M. le Président, le projet de loi 23 modifiant la Loi sur la mise
en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche
ainsi que certaines dispositions de la Loi sur les produits laitiers et leurs
succédanés est proposé pour répondre à des
besoins imminents. Ces amendements veulent essentiellement apporter des
solutions d'ordre pratique à divers problèmes survenus au cours
des deux dernières années. Il corrige, bien sûr,
également certaines dispositions pour les rendre plus appropriées
aux circonstances.
Rappelons d'abord qu'il existe une loi sur la mise en marché des
produits agricoles, au Québec, depuis 1956 et qu'après plusieurs
modifications faites au cours des années une refonte totale était
apportée en 1990. Cette révision donnait suite aux
recommandations d'un comité d'étude créé à
cet effet, le comité Prégent. Ce comité avait d'abord
rencontré les associations et groupements intéressés aux
problèmes de la mise en marché de produits agricoles, qu'il
s'agisse des organismes de producteurs, syndicaux et coopératifs, ceux
des transformateurs et divers autres intermédiaires ou encore des
associations
de consommateurs. Après avoir considéré les
nombreuses représentations qui lui ont été faites, le
comité proposait diverses réformes qui ont été
introduites dans un nouveau projet de loi. Ce dernier, bien sûr, M. le
Président, a ensuite été examiné en commission
parlementaire, et plusieurs associations intéressées y ont fait
de nouvelles représentations qui ont été examinées
avec attention.
C'est donc dire, M. le Président, que la loi actuelle est le
fruit d'une vaste consultation et, dirais-je même, d'une grande
concertation. C'est ainsi qu'à cette occasion nous avons ajouté
tout le secteur de la pêche commerciale à la loi, de telle sorte
que les pêcheurs peuvent maintenant utiliser, s'ils le désirent,
la formule des plans conjoints pour mieux organiser ou établir les
conditions de mise en marché de leurs produits. Déjà, des
pêcheurs de homards des îles-de-la-Madeleine se sont
prévalus de ce mécanisme et en sont à leur deuxième
convention.
Nous avons également introduit de façon formelle dans la
loi le concept de la concertation. Plusieurs associations ou groupements de
personnes visés par les plans avaient, en effet, souligner la
nécessité de ne pas s'astreindre à cette formule de plan
conjoint qui a plus de 30 ans, proposant d'ajouter un moyen
complémentaire, axé sur les besoins nouveaux des années
quatre-vingt-dix. À l'écoute du milieu et conscients des
changements majeurs qui se font et qui s'annoncent dans l'économie
québécoise, canadienne et mondiale, nous avons donné suite
à cette demande sous la forme des chambres de coordination et de
développement. Bien sûr, M. le Président, ces chambres ne
veulent pas remplacer les plans conjoints, bien au contraire. Elles peuvent,
cependant, ajouter une dimension nouvelle à l'organisation des
structures de mise en marché, complétant, lorsque les
circonstances s'y prêtent, l'action des plans et, lorsque possible, la
confrontation peut être remplacée par la concertation. Ce qui est
beaucoup mieux, M. le Président.
Certes, il ne s'agit pas d'un concept nouveau puisque bien des
éléments de politique de concertation étaient
déjà en place, mais je crois que, dans bien des cas, une
structure souple, polyvalente et pratique peut aider tant des producteurs que
des intermédiaires à établir ensemble des règles
qui pourront ouvrir ou développer des marchés pour nos produits.
La graine est semée, et j'entends continuer à en promouvoir,
dis-je, M. le Président, l'utilisation.
Toutefois, M. le Président, même si cette refonte de la loi
a été faite après une vaste consultation il y a moins de
deux ans, divers éléments récents requièrent
déjà d'y apporter quelques amendements. Est-il nécessaire
de souligner la gravité du débat qui s'est accru,
particulièrement l'an dernier, entre les producteurs de lait quant
à l'équité et au partage des marchés et des revenus
provenant de la vente du lait? Devant l'ampleur que prenait le différend
et l'impossibilité, pour les organismes de producteurs, de le
régler eux-mêmes, j'ai créé, en juin 1991, un groupe
de médiation spéciale composé de mon sous-ministre, M. Guy
Jacob, du président de l'Union des producteurs agricoles, M. Jacques
Proulx, et du secrétaire général de la Coopérative
fédérée du Québec, M. Mario Dumais. Ces
médiateurs avaient pour mandat de proposer une solution globale aux
différends existant entre les groupes de producteurs de lait, soit ceux
détenant majoritairement des quotas de lait de consommation et ceux
ayant surtout des quotas de lait industriel, concernant les règles, les
modalités et les délais pour mieux répartir les recettes
de vente de lait au Québec.
On se rappellera, M. le Président, les débats difficiles
et douloureux qui se sont faits pendant de longs mois, dans toutes les
régions du Québec, entre divers groupes de producteurs de lait,
sur le sujet d'un partage plus équitable des revenus provenant d'un lait
de qualité égale. Ces débats menaçaient non
seulement les mécanismes de mise en marché ordonnés, mis
en place et développés après tant d'efforts depuis des
décennies, mais également l'accord
fédéral-provincial qui est considéré si important
par les producteurs pour la stabilité de leurs revenus.
Il fallait agir rapidement et efficacement et, M. le Président,
c'est ce que j'ai fait en intervenant auprès des principaux groupes de
producteurs intéressés, et en confiant aux médiateurs
spéciaux le mandat qui leur a été donné.
Après avoir rencontré à maintes reprises les
nombreux groupes de producteurs en cause, les médiateurs ont
déposé un rapport le 31 août dernier. Ils recommandaient
une série de propositions de façon à en arriver
progressivement à un quota unique et à un prix unique au
Québec le 1er août 1996. J'y prévois, en plus, la mise en
place d'un programme d'aide financière pour les producteurs les plus
affectés par l'application de ces recommandations. Les recommandations
des médiateurs ont ensuite été soumises au
référendum de l'ensemble des producteurs de lait, tant de
consommation que de transformation, et ces derniers les ont approuvées
par une majorité de 71 %. L'appui des producteurs est donc majeur, et je
comprends, M. le Président, que la Fédération des
producteurs de lait du Québec, qui administre le plan conjoint, a
déjà pris les moyens appropriés pour la mise en
application progressive de ces recommandations.
Compte tenu de l'urgence de la situation et de l'importance
d'établir les règles pour assurer l'ordre dans ce secteur majeur
de notre économie agricole et du milieu rural, j'avais
préparé, M. le Président, un avant-projet de loi
intitulé Loi concernant l'application du plan conjoint (1980) des
producteurs de lait du Québec, afin de mettre en oeuvre le rapport des
médiateurs pour les fins de cette loi spéciale. Elle voulait
régler
tant le problème dont je viens de faire état ainsi que
celui de l'écrémage, également débattu à la
même époque. Il n'a pas été possible, toutefois, de
le présenter en temps utile à la dernière session de
l'Assemblée nationale, mais la Régie des marchés agricoles
et alimentaires du Québec a pu rendre des décisions de nature
intérimaire sur des règlements qui lui étaient
présentés par la Fédération et qui permettaient
d'entreprendre des mesures urgentes appropriées. Des procédures
ont alors été entreprises devant les tribunaux judiciaires, et un
jugement a récemment été rendu confirmant les pouvoirs et
la procédure utilisée par la Régie dans ce dossier.
Toutefois, les mesures prises ne sont pas suffisantes pour que toutes les
recommandations des médiateurs s'appliquent, particulièrement
quant à une compensation qui devrait être versée à
certains producteurs. Alors, j'y pourvois, M. le Président, en proposant
les amendements nécessaires à la Loi sur la mise en marché
des produits agricoles, alimentaires et de la pêche ainsi qu'à la
Loi sur les produits laitiers et leurs succédanés. (5 h 30)
Ainsi, en vertu des dispositions proposées par ce projet de loi,
un office de producteurs tel que la Fédération des producteurs de
lait du Québec pourra, par règlement, accorder une aide
financière à des producteurs en vue de favoriser la
restructuration des conditions de production de leurs produits. Cette aide
pourra être accordée aux producteurs et productrices les plus
affectés par des changements profonds qui peuvent frapper leur
industrie.
Pour remplir cette obligation, M. le Président, l'office des
producteurs pourra constituer un fonds spécial à cette fin et
imposer à des producteurs une contribution à cet effet. Cette
production spéciale pourrait être exigée, bien sûr,
de l'ensemble des producteurs et productrices ou d'une certaine
catégorie d'entre eux, déterminée par règlement
sujet à l'approbation de la Régie des marchés agricoles et
alimentaires.
Ces moyens nouveaux sont d'ordre général et pourront
être utilisés par tout office de producteurs qui pourrait avoir
intérêt à y recourir. Par ailleurs, la Régie des
marchés agricoles et alimentaires pourra tenir compte d'une telle
réglementation d'un office de producteurs de lait lorsqu'elle fixe le
prix du lait de consommation par ordonnance en vertu de la Loi sur les produits
laitiers et leurs succédanés.
L'ensemble de ces mesures devrait permettre à la
Fédération des producteurs de lait de prendre les moyens pour
régler le litige entre les producteurs qu'elle représente
conformément aux propositions des médiateurs et à la
volonté d'une large majorité de producteurs.
M. le Président, il y a un problème d'une autre nature que
le projet veut régler. C'est celui causé par
l'ambiguïté du texte de loi actuel quant aux obligations d'une
personne qui trans- forme un produit visé par un plan conjoint provenant
de ses propres terrains. Cette entreprise est-elle alors astreinte aux
obligations résultant du plan pour sa production? Il ne s'agit pas d'une
situation nouvelle. Depuis le début des plans conjoints en 1956 et
à diverses occasions au cours des années, c'est une question qui
s'est posée en général et on a considéré que
cette production était visée par le plan conjoint, tout comme
celle du producteur qui ne transforme pas le produit.
C'est ainsi que, dans plusieurs secteurs, les produits visés par
les plans conjoints et faits, entre autres, par des entreprises de
transformation ont été l'objet de règlements des offices
de producteurs, même s'il n'y avait pas alors de vente du produit. Il y a
plusieurs exemples, M. le Président, tels ceux de la volaille, du porc
et du lait. À la suite, toutefois, du jugement rendu par la Cour
supérieure mettant cette règle en doute, nous avons voulu
préciser les effets d'un plan en ajoutant une disposition
spécifique à ce sujet dans la loi lors de la refonte de 1990. En
effet, il est actuellement prévu que la personne ou
société, qui est à la fois un producteur du produit
visé par le plan et engagée dans la mise en marché de ce
produit, est assujettie aux droits et obligations de l'un et de l'autre.
Cependant, d'autres jugements rendus ultérieurement par les
tribunaux judiciaires ont semé des doutes sérieux sur les effets
de cette disposition. On considère, entre autres, que, puisqu'il n'y a
pas de vente de produit dans ces circonstances, il n'y a pas de mise en
marché du produit et, en conséquence, le plan conjoint ne
s'applique pas à cette production.
La même expérience a été vécue dans la
province de l'Ontario où, à partir d'un texte législatif
similaire, les tribunaux judiciaires ont refusé de l'interpréter
de la façon recherchée. On peut parler, évidemment, de
l'affaire Campbell Soup qui a eu lieu en Ontario. La loi de cette province a
ensuite été modifiée pour exprimer d'une façon
explicite qu'un plan conjoint et les règlements qui en découlent
peuvent viser toute la production, qu'elle soit faite par un producteur,
intégré ou non, et même s'il transforme son produit.
C'est également, M. le Président, ce que nous avons voulu
préciser en 1990 et que nous confirmons par le texte proposé,
tant à l'article 1 qu'à l'article 8 du présent projet de
loi. Il faut ajouter, bien sûr, que, si une entreprise se trouve dans une
situation particulière pouvant justifier une exemption à la
règle générale, la Régie des marchés
agricoles et alimentaires a déjà les pouvoirs nécessaires
pour en tenir compte. Chaque cas est alors examiné au mérite.
Il faut prendre en considération les problèmes
sérieux que l'interprétation actuelle des tribunaux peut apporter
aux offices de producteurs et à une application efficace des plans
conjoints. Dans certains cas, ce pourrait être la fin de plans
conjoints en vigueur depuis de nombreuses années puisqu'ils
deviendraient, en pratique, inopérants. Un examen des productions
visées par des plans conjoints qui se sont réalisés par
des transformateurs indique bien l'importance du sujet. Ainsi, dans le cas des
oeufs de consommation, c'est 60 %; dans celui des oeufs d'incubation, c'est 65
%; pour le poulet et le dindon, c'est environ 15 %, tandis que, pour le veau de
lait, c'est 75 %; dans le cas du porc, c'est 25 %; les fruits et
légumes, 30 %; les pommes de terre et les pommes, 25 % et 30 %
respectivement. Dans le secteur forestier, il est plus difficile de
l'établir puisque les données ne sont pas toujours disponibles.
Cela pourrait varier entre 10 %et30 %.
De plus, M. le Président, il serait facile actuellement, pour des
entreprises, de contourner les plans conjoints, par exemple, en signant une
série de baux avec des producteurs proclamants alors qu'elles produisent
sur leurs terres, comme on le dit si bien. Comment, alors, assurer un
contingentement adéquat et équitable d'une production si certains
producteurs, fussent-ils également transformateurs, en sont
automatiquement exemptés?
Et que dire de la situation dans le secteur laitier où plus de la
moitié des producteurs sont coopérateurs et ne vendent donc pas
leur lait à un acheteur? Comment garantir nos engagements, pris dans les
accords fédéraux-provinciaux, de limiter nos productions à
une quantité prédéterminée dans les secteurs du
poulet, du dindon, des oeufs et du lait? Les amendements proposés
apportent les précisions nécessaires pour éviter à
l'avenir toute ambiguïté à ce sujet.
Le secteur forestier est toutefois différent de l'agriculture, M.
le Président, parce que la Loi sur les forêts prévoit
déjà que les entreprises détenant des contrats
d'approvisionnement et d'aménagement sont soumises à des
mécanismes de contrôle de la production en fonction du rendement
soutenu de la forêt. C'est ainsi que les propriétaires de terrains
boisés de 800 hectares et plus, d'un seul tenant, c'est-à-dire un
seul bloc, doivent déposer au ministère les plans
d'aménagement et que les coupes seront autorisées en tenant
compte des règles du ministère et conformément à
ces plans d'aménagement. La recherche d'une production rationnelle et
d'une mise en marché ordonnée dans le cadre des plans conjoints
est donc déjà prévue dans le cadre de cette loi,
d'où l'exception que je fais à la règle
générale et qui est indiquée à la disposition
pertinente du projet de loi. Elle s'applique, bien entendu, seulement à
l'entreprise qui récolte le bois et le transforme dans une usine qu'elle
exploite.
Par ailleurs, diverses mesures étaient introduites dans cette loi
en 1990 cherchant à éviter, pour les administrateurs de plans
conjoints, des situations de conflit d'intérêts.
L'article 89 de la loi stipule présentement à ce sujet que
l'administrateur d'un office chargé d'appliquer un plan ne peut
être administrateur d'une entreprise de transformation ou de commerce du
produit visé, sauf si cette entreprise en fait également la
production. Ainsi, il suffit qu'une telle entreprise soit engagée dans
la production visée par le plan pour éviter la
déchéance prévue a la loi. Il serait inutile, M. le
Président, de conserver cette mesure telle qu'elle apparaît
actuellement dans la loi puisqu'elle permet, dans les faits, de
perpétuer le conflit d'intérêts.
Pour remédier à cette situation, je propose donc de
préciser le texte pour qu'il soit clair qu'un producteur doit d'abord
choisir entre ces deux fonctions conflictuelles. Ou bien il abandonne ses
fonctions à l'office des producteurs, ou celles qu'il occupe dans
l'entreprise engagée dans une activité reliée au produit
visé. La même personne ne doit pas se trouver des deux
côtés de la table de négociation.
Je propose également, M. le Président, des modifications
qui concernent l'organisme gouvernemental prévu à cette loi.
Ainsi, j'ajoute une disposition qui permettra au Conseil des ministres de
nommer auprès de la Régie, pour une période
déterminée, des régisseurs additionnels qui seront
chargés particulièrement de régler les litiges
résultant des décisions prises dans le cadre de la Loi sur le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, et
concernant les remises de taxes municipales et scolaires. Il est prévu
un appel des décisions du ministre auprès de la Régie et,
comme c'est la première année d'application de cette disposition
de la loi, il est actuellement impossible d'établir le nombre d'appels
qui pourront être logés. S'il est trop grand ou s'il y en a
plusieurs provenant des régions éloignées, il y aurait
avantage, tant pour le contribuable que pour les instances municipales et
scolaires, que ces affaires soient réglées dans des délais
raisonnables.
De plus, comme les autres organismes et ministères, la
Régie doit pouvoir imposer et percevoir des droits sur les
requêtes qui lui sont formulées ou sur les services qu'elle rend
à divers organismes. Les montants seraient déterminés par
règlements qui seront mis en vigueur conformément à la loi
et aux règlements.
En terminant, M. le Président, la Régie a son siège
social sur le territoire de la Communauté urbaine de Montréal et
elle doit avoir un bureau sur le territoire de la Communauté urbaine de
Québec. Elle a également des bureaux à l'extérieur
de ce territoire dans un but de rationalisation de ses opérations. La
Régie veut regrouper son personnel et, afin de lui fournir toute la
souplesse nécessaire, il y a lieu de prévoir qu'elle puisse avoir
un bureau ailleurs, dans la région de Québec, que sur le
territoire de la Communauté urbaine de Québec.
M. le Président, je propose des amende-
ments à la loi qui corrigent des erreurs de
référence et qui en améliorent le texte sur le plan de la
légistique. (5 h 40)
Dans un autre ordre d'idées et à la demande de divers
organismes administrant des plans conjoints, ainsi que de l'Union des
producteurs agricoles, il apparaît nécessaire d'assurer une
meilleure coordination entre les dispositions de la Loi sur la mise en
marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche et la
Loi sur les producteurs agricoles. Cette loi, également, a
été modifiée en 1990 en y ajoutant des dispositions qui
permettent à une association accréditée, l'Union des
producteurs agricoles dans le présent cas, de prévoir que les
producteurs regroupés en corporation ou en société ont
deux votes plutôt qu'un seul au cours de leur assemblée
générale. C'était le voeu émis par
l'assemblée générale des producteurs visés. Or,
puisque la presque totalité des plans sont administrés par des
organismes affiliés à l'UPA, les assemblées
générales tenues en vertu de ces deux lois se tiennent en
même temps. Il y a lieu d'éviter la confusion qui pourrait
résulter d'une situation où les mêmes producteurs devraient
voter de façon différente, selon les sujets, au cours de ces
assemblées. Je propose donc le même régime de vote dans
l'une ou l'autre de ces lois.
Je suis assuré, M. le Président, que ces modifications
permettront de résoudre des problèmes importants qui sont
survenus depuis deux ans, qu'elles aideront l'ensemble des producteurs et
productrices agricoles et forestiers, ainsi que les pêcheurs qui
désirent se prévaloir de cette formule de plan conjoint pour
établir les conditions d'une mise en marché de ces produits qui
soient mieux ordonnée.
M. le Président inutile de vous mentionner que, bien sûr,
nous avons travaillé de concert avec l'UPA, avec les organismes
concernés, avec le ministère des Forêts. Cette
loi-là, d'ailleurs, était en demande depuis deux ans et,
finalement, de par les accords de principe d'un peu tout le monde,
jusqu'à temps que nous ayons réussi à attacher tous ces
fils-là... C'est la raison pour laquelle nous la présentons
à ce moment-ci. Nous souhaitons qu'elle soit votée lors de la
présente session. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, nous en sommes
sur le projet de loi 23 quant à l'adoption du principe. M. le
député d'Arthabaska.
M. Jacques Baril
M. Baril: Oui, M. le Président. À 5 h 45 du matin,
la journée est de bonne heure. On m'avait dit que ces deux projets de
loi là seraient appelés vers minuit, mais je sais que, durant une
fin de session, on ne sait jamais quand tu vas parler. Mais on nous demande
d'être présents, puis d'être sur place. J'y suis. Mais,
avant de commencer, j'aimerais que le gouvernement soit là et je
demanderais le quorum, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, qu'on appelle les
députés. (5 h 45 - 5 h 52)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre
place, s'il vous plaît. Alors, nous en sommes à l'adoption du
principe du projet de loi 23 et je cède la parole à M. le
député d'Arthabaska.
M. Baril: Merci, M. le Président. Le projet de loi 23
vient modifier les dispositions relatives à l'application des plans
conjoints à l'égard des personnes engagées directement ou
indirectement dans la production, la transformation et la mise en marché
d'un même produit, et il prévoit les cas où certains
producteurs auront droit à deux votes lors d'un référendum
et des assemblées générales. Le projet de loi
prévoit des modifications afin de permettre la mise en oeuvre du rapport
du groupe de médiation dans le dossier du lait. Ainsi, un office de
producteurs pourra accorder une aide financière à des producteurs
affectés par la restructuration de leur industrie, imposer une
contribution spéciale aux producteurs et établir un fonds
spécial. Le projet de loi prévoit également que la
Régie tienne compte de cette aide financière, de la contribution
spéciale et du fonds spécial lorsqu'elle fixe le prix du
lait.
Avant, M. le Président, de parler davantage du projet de loi,
j'aimerais faire une sorte de rétrospective sur les dernières
années en matière agricole. Si on regarde les grands
événements qui ont marqué le milieu agricole en 1991-1992,
il y a plusieurs grands événements qui ont fait en sorte que le
milieu agricole actuellement est dans une période, je pense, des plus
difficiles que nous ayons connue depuis de nombreuses années. D'abord,
il y a eu tous les grands débats qui ont entouré les
négociations du libre-échange et l'application de ce
traité de libre-échange avec les États-Unis. Il y a,
évidemment, les négociations du GATT qui ne sont pas
terminées et qui remettent en cause nos offices de producteurs.
Actuellement, par le biais de cette loi, on essaie de les renforcer ou de les
redéfinir, et peut-être que, dans un an, deux ans ou trois ans,
ces mêmes offices ne pourront plus s'appliquer chez nous à cause
des négociations du GATT.
Il y a également le conflit du lait qui a, je pense,
perturbé depuis environ deux ans toute l'industrie laitière au
Québec, la principale industrie chez nous. Et ce conflit, je pense que
c'est celui qui a fait le plus mal à la classe agricole parce que les
groupes de producteurs se sont affrontés, se sont confrontés, et
il continue même actuellement, aujourd'hui encore, à y avoir des
divergences d'opinions entre les producteurs de lait. Il y a eu aussi tout le
débat entourant l'application des plans conjoints, des offices de
commercialisation, le débat entre le système
coopératif et le milieu syndical. Également le point principal
qui est la cause des problèmes des producteurs laitiers, c'est la
diminution ou la baisse de consommation de gras provenant des produits
laitiers. Et, si les personnes qui, depuis trois, quatre, cinq ou six ans, ont
mis tout en branle une publicité, une propagande anti-produits laitiers,
contre supposément cette fameuse maladie ou ce taux de
cholestérol élevé, si ces personnes-là
étaient le moindrement conscientes du tort qu'elles ont fait à
l'économie québécoise, j'espère au moins
qu'aujourd'hui elles en auraient des remords. L'automne dernier, je participais
au congrès du Conseil de l'industrie laitière et il y avait une
dame qui représentait l'Association des consommateurs du Canada, qui
elle-même mentionnait le tort, j'oserai dire irréparable, à
toute l'industrie laitière de cette sorte de phobie du
cholestérol. Et de plus en plus aujourd'hui on s'aperçoit que,
suite à des études, ce n'est pas du fait que tu boives ou que tu
manges des produits laitiers que ton taux de cholestérol va augmenter
d'une façon dangereuse.
On vit présentement un marasme extraordinaire dans l'industrie du
sirop d'érable. Et, à ce niveau, c'est surprenant de voir que le
gouvernement du Québec ne semble pas vouloir s'impliquer à fond
pour essayer de trouver une solution à ces surplus d'un produit qui est
unique en Amérique du Nord et qu'on ne semble pas être capable
d'écouler sur le marché. Les producteurs de sirop d'érable
se sont donné un plan conjoint qu'ils ont de la difficulté
à mettre en place. Il faut reconnaître ça. Il faut
reconnaître que la banque de sirop d'érable, qui était
responsable de ces surplus de sirop d'érable, l'a
transféré à une fédération des producteurs
de sirop d'érable qui n'avait pas les moyens de supporter cette
quantité énorme de sirop. Et c'est une des raisons, entre autres,
pourquoi ils ont une difficulté énorme à mettre en place
le plan conjoint.
Et ça me rappelle le début des années soixante-dix
lorsque les producteurs d'oeufs ont essayé de mettre en place leur plan
conjoint des producteurs d'oeufs. Et je me souviens que le président de
l'époque, M. Ovila Lebel, s'était même fait casser les
jambes à coups de batte de baseball par des personnes, des intervenants
qui ne voulaient absolument rien savoir du plan conjoint dans les oeufs, parce
qu'on se souvient, c'était les grosses compagnies, entre autres, qui
contrôlaient complètement la production d'oeufs et qui
exploitaient littéralement les agriculteurs et les agricultrices. Et
c'est pour cette raison que c'était eux qui étaient en
arrière et qui défendaient avec acharnement l'implantation des
plans conjoints dans les oeufs. Je pense que les producteurs acéricoles
vivent ce même phénomène que les producteurs d'oeufs ont
connu dans les années soixante-dix.
Il y a également le désengagement de l'État dans le
support à l'agriculture, qui fait aussi, je pense, un tort marqué
dans la situation financière des agriculteurs et des agricultrices.
Entre autres, qu'on nomme juste la prime à l'établissement. On se
souvient l'automne dernier de tout le débat qui a entouré la
prime à l'établissement, soit le 15 000 $ qui est versé
à une personne qui veut s'établir en agriculture. Le ministre a
modifié cette prime pour l'appliquer sur un versement,
l'échelonner sur trois ans au lieu de seulement une année. Et on
connaît le débat que ça a entraîné. Mais je
reviendrai un peu plus tard sur l'autre projet de loi quand on parlera de
l'Office du crédit agricole.
Il faut aussi mentionner, je pense, que ce qui a entraîné
tout ça, c'est le manque de vision, le manque d'orientations, le manque
de projets d'avenir. Le gouvernement ne semble absolument pas savoir quoi
faire, où amener l'agriculture. Depuis cinq ans, six ans, depuis sept
ans bientôt que le Parti libéral est au pouvoir et on regarde les
conséquences de son arrivée au pouvoir: une chute de revenus de
21 % depuis 1985, avec une chute des investissements de 41 % depuis 1985 et une
perte d'emplois directs, en agriculture, de 29 % des travailleurs agricoles. (6
heures)
Donc, si on résume ça, M. le Président, il ne faut
pas s'en faire pourquoi, il ne faut pas poser la question, à savoir
pourquoi les agriculteurs, les agricultrices sont tellement inquiets, sont
tellement dans une situation instable parce que, avec tout ce que je viens de
vous nommer, on ne sait absolument pas, eux, les agriculteurs, les
agricultrices ne savent absolument pas où orienter, comment investir et
quand investir parce qu'il n'y a pas de leader. Il n'y a pas de leader au
Québec qui est capable, actuellement, ou qui a la volonté de
dire: L'agriculture, aujourd'hui, elle est située à tel endroit
et notre objectif, notre projet d'avenir, c'est de l'amener à tel
endroit.
De 1976 à 1985, quand le Parti québécois est
arrivé au pouvoir, on a donné un élan considérable
à l'agriculture, qui a été marquée par des
investissements majeurs, par des créations d'emplois et une augmentation
de notre degré d'autosuffisance, d'une façon tout à fait
remarquable. Il y a un paquet d'usines de transformation qui ont mis sur le
marché différents nouveaux produits et ça a fait en sorte
que l'agriculture, tous les gens qui parlaient de l'agriculture, autant les
gens des villes que des paroisses, étaient fiers de parler des
agriculteurs, étaient fiers de parler de ce secteur économique
qui est très rémunérateur d'emplois et, aussi, qui donnait
cette fierté aux hommes et aux femmes qui en vivent d'avoir la
satisfaction d'être reconnus comme un groupe important dans la
société et de pouvoir participer au développement de
l'économie québécoise.
Trop souvent, depuis une année, entre au-
très, on s'aperçoit, avec tous les points que j'ai
relevés, qu'il y a eu toutes sortes de débats qui ont
amené, en sorte, que les agriculteurs et les agricultrices se sont
pratiquement, pour certains d'entrés eux, sentis de trop au
Québec. Le ministre n'est pas complètement indifférent
à tout ce malaise, à cause de ces différentes
interventions, à cause du manque de leadership de son gouvernement. Et,
quand il n'y a pas de guide, quand il n'y a pas de leader en avant, M. le
Président, vous savez comme moi que c'est beaucoup plus difficile de
rassembler des hommes et des femmes alentour de toi pour être capable de
remonter ce secteur économique.
Mais aussi, depuis tout le débat qui entoure les
négociations du GATT, il y a eu systématiquement,
différentes personnes qui ont fait en sorte d'essayer de démolir
les offices de commercialisation. Ils ont parlé de situations qu'ils ne
connaissaient absolument pas, absolument pas. Et, ici, je fais
référence, entre autres, au journaliste Alain Dubuc, de La
Presse, une personne que j'avais toujours appréciée, parce
que, quand Alain Dubuc était responsable de la chronique
économique de La Presse, c'était une personne tout
à fait objective. Il faisait des articles, c'était tout à
fait recherché, on voyait qu'il y avait beaucoup de recherches et ses
chiffres étaient difficilement contestables. Maintenant que M. Dubuc est
rendu directeur en chef du journal La Presse, il a dû probablement
endosser les orientations du journal La Presse, et j'irais
jusqu'à dire qu'il a un peu beaucoup vendu son âme parce qu'on
s'aperçoit que ses idées ont complètement changé -
que ce soit au niveau du projet constitutionnel - on s'aperçoit qu'il a
beaucoup plus tendance à démolir le Québec et à
rapetisser le Québec que de donner exactement ce qu'il en est.
Je reviens au niveau des offices de commercialisation. En date du 20
février 1992, M. Dubuc s'est permis de commenter les offices de
commercialisation. Et je ne vous lirai pas tout l'article, M. le
Président, parce que ce serait long, mais il commentait, entre autres,
que les offices de commercialisation participaient a augmenter le prix à
la consommation et, si l'alimentation au Québec était aussi
chère qu'elle est là, présentement, c'était
uniquement à cause des offices de commercialisation.
Il y a eu aussi Jean-Robert Sansfaçon, du journal Le Devoir,
qui, lui, a été encore beaucoup plus sévère
dans son analyse sur les offices de commercialisation. Il a
été... je dirais, il a erré davantage. Quand j'ai lu cet
article-là, j'en étais, M. le Président, j'en étais
désabusé, je n'en suis pas revenu. Je traduisais ça en
disant: C'est pareil comme si quelqu'un m'avait demandé de faire un
article, un editorial, sur une opération à coeur ouvert et que
j'aurais décidé de l'écrire. Mon article aurait
été aussi fol, aussi non fondé que l'article de
Jean-Robert Sansfaçon, dans le journal Le Devoir. Et on disait,
ici, juste quelques passages: «Chaque année, nos gouvernements
versent des milliards et des milliards de dollars pour maintenir un
système de production qui ne profite, en bout de ligne, qu'aux
agriculteurs.» Et, plus loin, on dit: «Nos producteurs
contrôlent donc tout le marché et les prix sont
décrétés par une régie gouvernementale qui les
indexe automatiquement à chaque augmentation des coûts de
fabrication.» Et ici, M. le Président, il faut absolument ne pas
connaître le fonctionnement de la Régie pour dire que c'est
augmenté automatiquement. Et il nous compare, il compare les
agriculteurs au monopole d'Hydro-Québec, Bell Canada et
Vidéotron. Ça n'a pas de bon sens. Il dit, en parlant des
agriculteurs: «Les producteurs de volaille, les producteurs laitiers et
les producteurs d'oeufs sont les seuls groupes au pays à profiter de
revenus pleinement indexés, même en temps de crise.» Et si
on regarde ça, au niveau des producteurs de lait, ils ont obtenu une
augmentation des prix, voilà à peine trois semaines, un mois - le
temps passe vite - à peine trois semaines, un mois, quand on sait que
ça faisait plus de deux ans que les producteurs laitiers n'avaient eu
aucune augmentation du prix du lait. Il y avait eu une augmentation qui avait
été décrétée au mois de juillet 1991, mais
cette augmentation avait été allouée uniquement aux
transformateurs et aux détaillants. Les producteurs de lait n'ont eu
aucune augmentation de leur revenu en 1991. Et, à partir de ces extraits
que je viens de vous lire de l'éditorialiste Jean-Robert
Sansfaçon, qui s'en vient nous dire que le prix du lait est
indexé pleinement à chaque occasion, c'est absolument ne pas
connaître ce que c'est exactement les plans conjoints et toute
l'élaboration des coûts de production. Et, bien entendu, M. le
Président, c'était dans l'optique de donner raison à la
position fédérale, du gouvernement canadien, de défendre
plus ou moins nos offices de commercialisation au niveau des
négociations du GATT.
Vous savez, à plusieurs reprises, le ministre Pierre Biais, que
ce soit à Ottawa, que ce soit à l'étranger, que ce soit au
Québec, disait - il a toujours dit - qu'il défendait nos
systèmes, nos piliers de l'agriculture québécoise qui sont
nos offices de commercialisation, nos assurances agricoles, le financement
agricole. Et à la dernière assemblée de la
Fédération des producteurs de lait, lui-même est venu dire
aux producteurs: Eh bien! Écoutez un peu, je ne suis pas sûr que
ça va passer. On continue à vous défendre, mais c'est de
moins en moins certain qu'on va avoir gain de cause aux négociations du
GATT. Deux jours après ou le lendemain, il est allé à
Ottawa, suite à la rencontre qui avait eu lieu avec le président
de la Communauté économique européenne, M. Jacques Delors,
qui, lui - je ne sais pas quel moyen il a utilisé - est venu dire
à Ottawa, devant le premier ministre Mulroney, bien entendu - un petit
coup de pouce ou un
petit coup de main entre personnalités, ça ne fait pas
tort, comme on dit - il est venu dire que le Canada avait une bonne position,
une position défendable et qu'il défendait bien les
intérêts de l'agriculture canadienne et de l'agriculture
québécoise, pendant que ce même M. Delors... Au mois de
février dernier, il y avait un grand article dans le journal Le
Devoir où lui-même, M. Delors, mentionnait que «la
position du gouvernement canadien aux négociations du GATT était
indéfendable, insoutenable. Parce qu'il défendait, il disait,
entre autres: On ne peut pas vouloir rouvrir nos marchés et les fermer
en même temps. Mais, comme je le disais, M. Mulroney a réussi
à lui soutirer ça publiquement et, tout de suite après, le
ministre Pierre Biais, qui dit à peu près n'importe quoi, tout de
suite est revenu sur sa décision et a dit: On a encore beaucoup
d'espoir, c'est fondé et on vous défend. Pourtant, la veille, il
était venu dire devant tous les producteurs que les carottes
étaient cuites et qu'il fallait déjà penser à
d'autres choses.
Ce qui est regrettable, M. le Président, c'est qu'à chaque
fois qu'on parle du coût de l'alimentation qui est élevé,
à chaque fois qu'on en parle, immédiatement, on accuse le
producteur, comme si le producteur agricole était le seul maillon de
toute la chaîne du secteur agroalimentaire. À chaque fois qu'un
produit quelconque augmente, on dit toujours: C'est la faute du producteur
agricole. Et j'aimerais, M. le Président, vous donner juste quelques
chiffres. Quand on regarde comment le producteur agricole en
bénéficie. L'augmentation des prix des aliments - ici, j'ai un
tableau - c'est le prix à la ferme et le prix de détail entre
1980 et 1989, et ça provient de la Banque royale; donc ceux qui veulent
vérifier mes chiffres, ce ne sont pas mes chiffres à moi. Et si
on regarde le prix de détail du porc, entre 1980 et 1989, a
augmenté de 0,39 $, tandis que l'augmentation du prix à la ferme
a augmenté de 0,062 $. Et à chaque fois que le porc augmente, on
dit toujours que c'est à cause de la production. Le prix du maïs,
le prix au détail a augmenté de 94,5 % et le prix à la
ferme a diminué de 0,13 % - a diminué, M. le Président.
Par contre, le prix au détail a augmenté de 94 %. Au niveau du
beurre, le prix au détail a augmenté de 66,13 % tandis
qu'à la ferme il a augmenté de 51,33 %. Au niveau du lait, le
prix au détail a augmenté de 89,3 %, tandis qu'à la ferme
il a augmenté de 44,73 %, à peu près juste la
moitié. Au niveau des fromages, le prix au détail a
augmenté, entre 1980 et 1989, de 86,4 % et à la ferme, le prix a
augmenté pour le producteur de 49,7 %. Et le poulet a augmenté,
au prix de détail de 0,727 $ et à la ferme, de 30,9 %. Et
après on viendra me dire, M. le Président, que c'est toujours
à cause du producteur agricole si les consommateurs, les consommatrices
paient trop pour leurs produits. Il faudrait bien comprendre que, avant que le
produit arrive sur la table, il a passé à différen- tes
étapes, et le producteur, à partir des chiffres que j'ai
donnés, est loin d'être le seul à profiter de ces
augmentations. (6 h 10)
II y a une autre étude qui a été faite par le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du
Québec en 1989. Cette étude a été
réalisée... Sur l'achat de 100 $, peu importe la personne qui
achète pour 100 $ d'alimentation, il y a 52 $ sur 100 $ qui vont au
niveau de la distribution. Ce sont les détaillants grossistes qui
prennent 52 $ à chaque fois que vous dépensez 100 $
d'alimentation. Au niveau des fournisseurs d'intrants, il y a à peu
près 12 % - 11,92 % - sur les 100 $ qui passent pour compléter ce
que les producteurs doivent acheter en engrais chimiques, en alimentation ou en
différents produits, comme de la machinerie agricole. Et il y a 25 % qui
vont au niveau de la chaîne de transformation. Il y a 6,48 $ au niveau
des coûts du producteur, pour lui, uniquement, au niveau de
l'exploitation de son entreprise, de son financement. Sur les 100 $ que chaque
personne achète pour s'alimenter, il reste exactement 2,36 $ au
producteur agricole pour vivre et faire vivre sa famille. 2,36 $, M. le
Président, sur 100 $ et à chaque fois on dit toujours que c'est
le producteur qui bénéficie largement des augmentations que les
consommateurs doivent payer en plus.
Le ministre a parlé tout à l'heure du conflit dans le
lait. C'est vrai que ce conflit-là était présent, il est
encore présent aujourd'hui. Et il y a des personnes dans le
système qui n'aident pas non plus, absolument pas, à
régler cette situation-là. Et quand je dis qu'il y a des
personnes qui n'aident pas à régler ce conflit-là, il y a,
entre autres, un M. Alain Paquet qui est directeur ou président, je ne
sais pas, de l'Association des consommateurs du Québec qui, encore
dernièrement, donnait une conférence de presse. Ça a
passé au Téléjournal de Radio-Canada, entre autres. Et
l'image que cet événement a créée, c'est
invraisemblable, M. le Président. Ça se résumait ainsi:
À cause de la dernière augmentation que la Régie a
accordée sur le prix du lait, on voyait un producteur laitier qui
arrosait ses champs dans un épandeur, dans un réservoir à
purin et, à cause de son surplus de lait, arrosait ses champs. Et on
arrivait à la conclusion que si le prix du lait était moins cher
à la consommation, les producteurs n'auraient pas besoin de jeter leur
lait et, encore une fois, on mettait la faute sur les offices de
commercialisation, soit sur les systèmes de quotas.
Je me demande, M. le Président, réellement, qui
défend ce monsieur... Ce M. Paquet représente qui,
représente quoi? S'il est responsable ou s'il représente
l'Association des consommateurs, je me demande quels consommateurs il
représente. Parce que, donner une image semblable de l'agriculture, il
faut complètement être déconnecté de la
réalité et ne pas connaître le
système. J'aimerais ça rencontrer ce M. Paquet sur une
tribune quelque part et je pense qu'on se parlerait un peu. Je pense qu'on se
parlerait un peu parce que donner une vision, une image de l'agriculture comme
il l'a donnée, c'est invraisemblable. Il faudrait se souvenir que dans
le passé, pendant qu'il n'y avait pas de système de quotas, il y
avait des surplus. Les producteurs, c'est vrai qu'ils produisaient et ils sont
encore capables de produire. Mais, il y avait des surplus de beurre et des
surplus de fromage que les consommateurs devaient payer par des subventions
gouvernementales pour entreposer ces fameuses montagnes de poudre et montagnes
de beurre et écouler ça à rabais sur le marché
international.
Il ne faut pas avoir pour deux cents de logique de penser comme ce cher
M. Paquet de l'Association des consommateurs pour dire à la population
que le prix du lait, d'abord, est trop cher, selon lui et que c'est uniquement
à cause des producteurs.
J'aimerais ça lui poser la question, puisqu'il semble être
contre les offices de commercialisation: Quand est-ce que ce même
monsieur de l'Association des consommateurs du Québec se lève
pour dénoncer la hausse vertigineuse, souvent, de la salade? Il n'y a
pas d'office de commercialisation dans la salade. Ma femme me disait encore
dernièrement qu'une pomme de salade était rendue, il y a 15
jours, à 1,69 $. Il y a un mois, elle dit qu'on payait ça trente
sous la pomme et, des fois, tu en avais deux pour 0,25 $.
L'Association des consommateurs n'a pas dénoncé ça.
Pourtant, il n'y a pas d'office de commercialisation là-dedans. Quand
les fruits et légumes, à quel prix on les paie, les fruits et
légumes? Il n'y a pas d'office de commercialisation là-dedans.
Ça vient d'ailleurs. Ça vient de l'Ontario, ça vient des
États-Unis, ça vient d'un peu partout. Pourquoi elle ne
dénonce pas ça? Fruits et légumes, les prix, ça
varie comme la température, comprends-tu, même plus souvent que la
température. Ils ne dénoncent pas ça. Qui il
protège, ce M. Paquet là? Qui il représente? L'Association
des consommateurs du Québec, ça représente qui, ça?
Donc, j'aimerais ça que ce monsieur-là commence à
s'informer sur les vraies causes des prix à la consommation et
peut-être, j'espère, si au moins il est en mesure de comprendre
ça, peut-être qu'il changerait un petit peu son fusil
d'épaule.
Et, dans tout le débat du libre-échange, dans tout le
débat de négociations du GATT, on a toujours parlé, on a
toujours dit: II va falloir, les agriculteurs, que vous soyez plus productifs.
Si vous voulez être compétitifs, soyez encore plus productifs
parce que nos produits à la consommation chez nous sont plus cher qu'aux
États-Unis. Et là, il y a du monde qui s'en vont l'autre bord
pour acheter leurs produits sur le marché américain parce que,
supposément, c'est bon marché; ils s'en vont à
Plattsburgh, entre autres. Et quand on sait qu'il y a des gens de Boston qui
montent, eux autres aussi, à Plattsburgh dans leur même pays pour
profiter des mêmes avantages. Puis, durant ce temps-là, nos gens
s'en vont acheter l'autre bord. Par contre, quand ils reviennent chez nous, ils
sont bien contents de profiter de nos systèmes sociaux, par exemple,
entre autres. (6 h 20)
Donc, avant de blâmer toujours uniquement les agriculteurs, il
faudrait voir aussi qu'il y a une augmentation de la productivité
à augmenter au niveau de la transformation et au niveau du
détaillant. Il y a énormément à faire à ce
niveau-là. Je donne souvent l'exemple: À Prin-ceville, chez moi,
il y a une usine, il y a une usine d'abattoir de porcs, une grosse usine
d'abattoir. Le salaire moyen, alentour de 18 $ l'heure. Ces gens-là, je
suis bien content pour eux autres, 18 $ l'heure; ils ont une bonne convention
collective parce que c'est une vieille entreprise. Quand on regarde au niveau
américain, le salaire moyen, à peu près, dans les
mêmes abattoirs, c'est 8 $ l'heure - 10 $ de moins. Quand des gars comme
Paquet chiâlent contre les producteurs, est-ce qu'ils pensent aux
travailleurs qui sont là et qui sont des consommateurs? Si on veut
être compétitifs pour le prix du porc, entre autres, encore
davantage compétitifs - malgré que nous le sommes, mais on veut
être encore davantage compétitifs - eux autres aussi vont avoir
des questions à se poser; eux autres aussi vont avoir des questions
à se poser. On dit, au Québec, que les détaillants
grossistes se prennent une marge d'opération sur un produit, je l'ai
donnée tout à l'heure, de 52 %; aux États-Unis, on dit que
ça varie entre 25 % et 30 %. Là aussi, il y a une marge; il y a
une grosse marge à faire, là. On a fait faire une étude,
je ne l'ai pas eue, je l'ai fait venir, j'ai hâte de lire ça,
comme de quoi, supposément, au niveau de toute la chaîne de
distribution, on est très compétitifs avec les Américains
et que ce n'est pas eux autres le problème. J'ai bien hâte de voir
ça, de lire cette étude-là, dans quel sens elle a
été faite.
Donc, tout ça pour vous dire, M. le Président, que je
pense qu'il y a des points qui doivent être rétablis et il y a un
support qui doit être donné à l'agriculteur, au milieu
agricole pour qu'il arrête de se sentir coupable. Il est accusé de
tous bords, tous côtés et il n'y a pas assez de personnes qui se
lèvent, qui sont capables de prendre les tribunes, qui ont l'avantage de
pouvoir parler aux consommateurs, de parler à différents
intervenants pour leur démontrer que, Tellement, effectivement, ils sont
un maillon important de la chaîne, il n'y a pas uniquement eux qui ont la
responsabilité de pouvoir nourrir la société en
général.
Les agriculteurs, le secteur agricole a démontré, dans le
passé, qu'il était capable de
relever des défis et le secteur agricole a démontré
qu'il était capable de diminuer ses coûts de production,
d'être compétitif. Ça a été
démontré depuis des générations. Juste, entre
autres, depuis les 10 dernières années au niveau des producteurs
de lait, leur production a augmenté, dans un rapport que je lisais
dernièrement, de 49 % dans 10 ans; de 49 % et on vient leur dire: Ce
n'est pas encore assez, les petits gars! Vous n'êtes pas productifs.
C'est le secteur de toute l'économie qui a augmenté sa
productivité d'une façon plus remarquable et on vient encore leur
dire: Vous n'êtes pas productifs. Des fois, j'ai l'impression que quand
les agriculteurs et les agricultrices se lèvent le matin, qu'ils s'en
vont à l'étable pour faire leur train, à peu près
à cette heure-ci - ou il y en a que ça fait une heure qui sont
partis déjà - qui doivent commencer à se dire: Coudon,
ça me «donne-t-u» quelque chose de me lever, moi? Ça
a dû leur coûter un peu de regarder dehors, de regarder dans le
chemin pour voir s'ils ne seraient pas accusés par quelqu'un.
Donc, je pense que, sur ce point, l'ensemble de la société
a des responsabilités envers cette classe, cette importante classe de la
société et qu'on doit les soutenir parce que l'agriculture, c'est
un secteur important de l'économie québécoise.
L'agriculture a passé par toutes sortes de situations, elle a toujours
réussi à s'en sortir avec, bien entendu, le support de l'ensemble
de la collectivité.
Je reviens, M. le Président, parce que je ne veux pas prendre
tout le temps qui m'est réservé pour ce projet de loi, je
comprends que ce n'est pas facile, je comprends que les députés,
surtout les députés de ville, commencent à avoir leur
quota! Je comprends ça, donc je ne veux pas faire un débat. Je
vous demande surtout de ne pas vous faire défendre par M. Paquet parce
que vous allez être très mal défendus. Mais je vais revenir
au projet de loi et si on regarde, M. le Président, entre autres,
à l'article 6, on dit que cet article «permettra à la
Régie, par règlement, de déterminer des droits,
honoraires, frais et dépens applicables aux demandes qui lui sont
soumises et aux services qu'elle rend». On sait qu'avant, quelqu'un qui
avait affaire à la Régie, c'était sans frais,
c'était gratuit et, maintenant, la Régie pourra, par
règlement, définir le prix ou le coût d'une telle
intervention.
Et je trouve ça difficile, parce que, d'abord, c'est un genre de
taxe déguisée. On sait qu'avant, c'est le gouvernement qui
finançait tout le fonctionnement de la Régie. Et avec cette loi,
maintenant, la Régie devra imposer des frais pour entendre
différentes causes. Et je suis loin d'être certain, loin
d'être convaincu que, dans certains cas, ça n'empêchera pas
le développement du secteur agro-alimentaire. Et je vais donner un
exemple, entre autres. Vous allez prendre... Il y a souvent des petits
producteurs qui demandent... Il faut qu'ils passent devant la
Régie pour obtenir un permis pour transformer d'une façon
artisanale leurs produits, les produits laitiers, entre autres.
On voit souvent des demandes qui sont faites à la Régie
pour obtenir un permis. Je ne me souviens pas si on appelle ça un
permier fermier ou bien un permis artisanal. En tout cas, il y a souvent des
demandes qui sont faites. Comment ça pourra être
évalué? À quel coût cela reviendra à un
individu, à un particulier, de faire une demande pour obtenir un tel
permis? Et je crains, je crains sincèrement, M. le Président, que
ça pourra empêcher des producteurs d'obtenir ce permis qui est
essentiel pour opérer ou transformer sur place, transformer à la
ferme le produit de son entreprise. Et on sait que le gouvernement a cette
facilité d'aller chercher dans la poche des citoyens indirectement ce
qu'il ne veut pas faire directement. Et on donnait les chiffres. Mes
collègues en ont parlé souvent. Juste dans la dernière
année, je crois, c'est plus de 1 000 000 000 $ que le gouvernement va
chercher des Québécois et des Québécoises d'une
façon tout à fait indirecte.
Donc, j'ai beaucoup de réserves sur cet article qui va obliger,
par règlement... Parce qu'on ne connaît pas les coûts... On
ne connaît pas les coûts qui sont rattachés, mais c'est la
Régie qui déterminera par règlement. À l'article 7,
encore une fois, le gouvernement veut accorder à certains producteurs...
Il veut changer le mode de vote. Mais c'est la Régie qui fera ça
par règlement. C'est encore la Régie qui définira les
règlements: quel mode, quel genre de référendum sera tenu
ou de quelle façon le référendum sera tenu, quel
producteur a droit à tant ou tant de votes. Et on dit aussi que
l'importance du vote de certains producteurs sera changée. Nous ne
connaissons pas les producteurs qui détiendront deux votes. Et la
Régie déterminera par règlement les catégories de
producteurs qui détiendront deux votes. Donc, c'est encore une fois par
règlement, M. le Président, que la Régie va
fonctionner.
Le ministre a parlé tout à l'heure des pa-petières
qui ne veulent pas ou ne se sentent pas impliquées dans l'application
des plans conjoints au niveau de la coupe du bois. Mais, sur ça, je
reviendrai en commission parlementaire. (6 h 30)
À l'article 11, cet article est de même nature que
l'article 7, mais certains producteurs ont le droit à deux votes lors
d'une assemblée de producteurs. La Régie désignera encore
par règlement les producteurs qui auront droit à deux votes. Et
aussi l'article 7 crée deux statuts de producteurs. Ces statuts ne sont
pas définis dans la loi. Cela, selon nous, est inacceptable et
dangereux, puisqu'un organisme gouvernemental pourra, par voie de
règlement, changer les règles habituelles de la démocratie
syndicale. Et je pense que c'est excessivement dangereux, encore une fois, que
le gouvernement laisse le pouvoir à
la Régie de décider par règlement ce qu'il
adviendra de l'application des catégories de producteurs.
Il y a également à l'article 14 qui dit: «Pour
favoriser la restructuration des conditions de production d'un produit
agricole, tout office peut, à l'égard du produit visé par
le plan qu'il applique, accorder par règlement, une aide
financière aux producteurs qui satisfont aux conditions que
détermine le règlement.» Les articles 14, 15, 16, 17 et 22,
entre autres, ça, c'est des articles qui reviennent, des articles qui
étaient dans l'avant-projet de loi qui avait été
déposé avant les fêtes dernières, au mois de
décembre, pour essayer de régler le conflit du lait. On
ramène ce qu'on n'a pas pu faire à cette époque. On n'a
pas ramené tout le projet de loi, mais on ramène des articles,
dans celui-là, qui vont faire en sorte que la Régie va donner des
droits à des offices ou à la Fédération des
producteurs de lait de percevoir des sommes d'argent pour être capable de
rembourser... pas de rembourser, mais d'appliquer sur une autre
catégorie de producteurs pour lesquels ces sommes-là ont
été perçues.
Et, au mois de décembre dernier, suite au dépôt de
l'avant-projet de loi qui devait, ce projet de loi... l'objectif,
c'était de mettre en application le rapport de médiation dont le
ministre a parlé tout à l'heure. J'avais écrit au
Bâtonnier du Québec, au Barreau pour qu'il me fasse
connaître son opinion sur les conséquences d'un tel projet de loi.
Et le ministre... D'ailleurs, ça, c'est en date du 20 décembre,
et le Barreau avait quand même été assez rapide à
faire connaître une réponse sur ce projet de loi. En tout cas, au
début de février, le Barreau se permettait d'écrire
directement au ministre de l'Agriculture pour lui faire part de toutes les
inquiétudes et de la situation qui était, selon lui, à
bien des articles, tout à fait abusive au niveau de l'application de cet
avant-projet de loi.
Donc, je dis que, présentement, à l'intérieur de la
loi 23, le gouvernement ramène en place des articles qui vont faire en
sorte, qui vont enlever, supposément, paraît-il, des droits acquis
à certaines catégories de producteurs. On sait très bien
que tout ce débat-là n'est pas fini. Il va se continuer, et je
trouve dangereux que le gouvernement se permette, dans ce projet de loi, de
présumer d'une future décision d'un jugement. Parce que c'est
certain, le ministre est conscient, tout ce problème-là,
ça va finir devant la cour, devant les tribunaux, un jour, c'est
évident. Il connaît le groupe de producteurs qui défendent
leurs droits et, même s'ils ont perdu en cour une première fois,
ce n'était pas sur le fond du dossier qu'ils y allaient, c'était
uniquement sur la forme, et sans doute que ces personnes-là vont se
reprendre.
J'ai eu, à cet effet-là... le ministre a reçu deux
demandes, une de la part du Regroupement provincial pour le maintien des droits
des producteurs de lait. En fait, il a fait une demande pour que ces
personnes-là soient entendues avant l'étude du projet de loi,
pour les raisons que je vous ai énumérées aussi. Et il y a
la Fédération nationale des associations de consommateurs du
Québec qui, également, a fait une demande au ministre pour
être entendue. Elle désire être entendue en commission
parlementaire pour faire connaître son opinion sur différents
articles de ce projet de loi là, parce qu'eux contestent le fait que,
pour régler supposément un problème de producteurs
laitiers, le rapport de médiation propose, suggère que ce soit
compensé par l'augmentation du prix du lait au litre. On évalue,
on présume que le lait pourrait augmenter de 0,01 $ à 0,02 $ par
année pour compenser... qui s'appliquerait, c'est-à-dire, aux
revenus des producteurs de lait de transformation pour qu'on arrive à un
prix égal, d'ici 1996, je crois, pour que les deux laits soient
exactement au même prix. Évidemment, la Fédération
nationale des associations de consommateurs du Québec conteste cette
application-là.
Aussi, en date du 27 mai 1992, on pouvait lire, et ça m'a assez
surpris: Le lait est trop cher, selon l'UPA, l'ACEF et la FNACQ, la
Fédération nationale, ce que je viens de dire. J'ai
été surpris quand j'ai lu ce titre, parce que je me suis dit: Le
président de l'Union des producteurs agricoles était membre du
comité de médiation avec le directeur de la coopérative,
M. Dumais, et le sous-ministre en titre, M. Jacob, qui préconise de
rapprocher le prix des deux laits par le biais d'une augmentation du prix du
lait à la consommation. Et M. Proulx, en date du 27 mai dernier, disait
que le prix du lait est déjà trop cher.
Donc, si le prix du lait est trop cher, comment vont-ils pouvoir
justifier devant la Régie une augmentation de 0,01 $ à 0,02 $
pour essayer de régler un problème que, je pense, on ne s'est pas
pris de la bonne façon pour le régler. Les gens étaient
sans doute de bonne foi, mais on ne s'est pas pris de la bonne façon
pour le régler.
Ici, en passant, quand on lit l'article, en toute
honnêteté, il faut donner justice aussi à l'article. On
parle entre autres que si le prix du lait est trop cher, c'est à cause
des fameuses ristournes que les transformateurs sont obligés de donner
aux détaillants. Il y a beaucoup de consommateurs qui ne savent pas,
puis il y a beaucoup de producteurs aussi qui ne savent pas que les laiteries
sont obligées de donner jusqu'à 0,10 $ et 0,16 $ le litre pour se
permettre d'avoir un espace dans les chaînes d'alimentation. Et ce 0,14
$, 0,15 $ ou 0,16 $ dont le détaillant profite, il ne diminue pas le
lait pour autant. Il I empoche directement dans ses revenus; il additionne
ça complètement dans ses revenus, et c'est additionné aux
revenus que déjà la Régie des marchés agricoles lui
accorde par la formule légale d'augmentation des prix du lait.
Ici, en passant, comment se fait-il, pour ceux qui m'écoutaient
tout à l'heure, que ce cher M. Alain Paquet de l'Association des
consommateurs du Québec, je ne l'entende pas souvent dénoncer
ça? Je ne l'entends pas souvent dénoncer ce système de
ristourne là qui est odieux. C'est rare qu'il en parle. C'est pour
ça que je vous dis: Qui représente-t-il et qui défend-il?
C'est les consommateurs qui sont attaqués directement par cette formule
de ristourne ou de marché noir, de paiement en dessous de la table
auquel les laiteries sont obligées de se soumettre si elles veulent
avoir un espace de tablette pour avoir l'autorisation et la permission
d'exposer ou de vendre leurs produits dans une telle chaîne.
Donc, il va y avoir beaucoup de questions évidemment, M. le
Président, qu'on va regarder en commission parlementaire pour essayer de
voir comment on peut améliorer le projet de loi. Je
réitère, au nom de ces deux associations-là, entre
autres... Je fais la demande au ministre, avant l'étude article par
article, d'entendre, d'écouter ces personnes-là. Ce ne sera pas
long. Même si on donnait une heure à chacun des organismes, ils
vont nous dire ce qu'ils pensent du projet de loi, et ça pourrait nous
aider à mieux bonifier ce projet de loi. J'espère que le ministre
aura son ouverture d'esprit habituelle pour répondre positivement
à la demande de ces deux groupes-là, qui sont en droit de venir
devant les élus de l'Assemblée nationale, qui sont en droit de
venir devant leur Assemblée pour faire connaître leur droit ou
leur compréhension de ce projet de loi qui aura des conséquences
pour les deux groupes, entre autres, qui veulent venir. S'il y en a d'autres
qui veulent s'ajouter à ces associations-là, moi, je n'aurai pas
d'objection, ça me fera plaisir de les entendre.
Donc, sur ce, M. le Président, on verra après
l'étude article par article ce que l'Opposition fera de ce projet mais,
pour l'instant, je me garde la troisième lecture pour prendre une
position définitive.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député d'Arthabaska, pour votre intervention. Alors, en vertu de
votre droit de réplique, M. le ministre de l'Agriculture. (6 h 40)
M. Yvon Picotte (réplique)
M. Picotte: M. le Président, je n'ai pas l'intention de
répliquer à tout ce qu'a dit le député
d'Arthabaska. J'aurai l'occasion de le faire en commission parlementaire. Je
voudrais cependant préciser tout de suite deux points: Je n'ai pas
l'intention de recevoir avant la commission parlementaire, ni avant, ni
pendant, ni après, les deux associations qui en ont fait la demande.
J'ai déjà demandé à un de mes attachés
politiques et à M. Prégent, de la Régie, de rencontrer,
évidemment, l'Association des consommateurs qui, demain matin,
rencontrera M. Prégent et M. Lacoursière. Et ce matin même,
à 10 heures, la Fédération des producteurs de lait
rencontrera évidemment M. Prégent et M. Lacoursière.
J'offre cependant au député la possibilité
d'être présent à cette rencontre-là, s'il le
souhaite, ou son recherchiste, pour lui faire rapport. Je lui offre ça.
Je pense que je connais déjà, moi, les doléances de ces
gens-là, l'Association des consommateurs. Je suis un peu d'accord avec
ce qu'a dit le député d'Arthabaska. Le M. Paquet en question, lui
aussi trouve évidemment que le lait coûte trop cher. Et ils ont
tellement d'autres choses dont ils pourraient discuter et parler, M. le
Président, sur les augmentations possibles avec tout ce qui se passe
dans notre société.
Je ne pense pas que ce soit en voulant ou en essayant de détruire
des plans conjoints ou de gestion de l'offre, comme on le fait, qu'on va se
discipliner dans nos domaines. Ce n'est pas là-dessus que des
consommateurs pourraient profiter, à un moment donné, d'un
désengagement de quelque producteur que ce soit ou de l'abolition de
plans conjoints. Je pense bien que les producteurs, à long terme, ne
pourraient pas bénéficier de ça. Je n'ai pas l'intention
d'écouter ce genre de doléances. Mais évidemment, il y a
des gens qui les écouteront. Alors, j'offre évidemment à
des collègues de la commission de l'agriculture, et à mon
collègue d'Arthabaska, lui-même ou l'un de ses
représentants, d'entrer en communication avec les gens de mon bureau.
Dès ce matin, 10 heures, il y aura une rencontre avec la
Fédération des producteurs, et demain on rencontrera
l'Association des consommateurs.
M. le Président, j'espère qu'on pourra étudier le
projet de loi article par article dans les meilleurs délais. Je vous
donnerai d'autres exemples et d'autres explications que le député
d'Arthabaska souhaite avoir, M. le Président. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion
proposant l'adoption du principe du projet de loi 23, Loi modifiant la Loi sur
la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la
pêche et la Loi sur les produits laitiers et leurs
succédanés, est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
ministre...
M. Baril: Sur division.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur
division.
M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation.
Renvoi à la commission de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation
M. Picotte: Vous comprendrez, M. le Président, que celui
qui vous parle n'est pas familier au rôle de leader adjoint. Sur la
recommandation de la talentueuse, et jeune, et jolie Christine... Elle m'a
demandé de vous mentionner que je fais motion pour que ledit projet de
loi soit déféré à la commission de l'agriculture,
des pêcheries et de l'alimentation pour étude
détaillée, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion
est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Picotte: Je vous prierais, M. le Président, d'appeler
l'article 20.
Projet de loi 27 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 20. M. le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation propose
l'adoption du principe du projet de loi 27, Loi sur la Société de
financement agricole et modifiant d'autres dispositions législatives. M.
le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, je vous
cède votre droit de parole.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Merci, M. le Président. Dans une
période où l'économie en général, et plus
particulièrement l'économie agricole, vit des modifications
profondes, alors que des approches traditionnelles ne réussissent plus
à soutenir le développement et la prospérité, il
devient impérieux de réajuster notre tir, et surtout de se donner
des moyens d'intervention souples, avec lesquels il sera possible de faire face
à des situations dont les dimensions réelles sont encore
inconnues.
Le projet de loi visant à créer la Société
de financement agricole s'inscrit dans cette approche. Cette
Société, qui succède à l'actuel Office du
crédit agricole du Québec, poursuit le mandat assumé par
ce dernier depuis 1936. Cependant, le cadre légal et
réglementaire en est profondément modifié, permettant
ainsi d'atteindre l'objectif souhaité de souplesse et d'adaptation
rapide aux multiples défis qui confrontent aujourd'hui le secteur
agricole.
Pour bien comprendre toute la portée de ce projet de loi, je
crois nécessaire de rappeler ici l'évolution de l'Office du
crédit agricole depuis ses débuts. Créé en 1936
pour répondre aux besoins en capitaux des agriculteurs du Québec,
alors mal desservis par les organisations en place, l'Office a continué
au fil des ans à jouer un rôle toujours plus important en
matière de développement des entreprises et du secteur dans son
ensemble.
Durant les premiers 25 ans de son existence, le programme de financement
de l'Office, basé uniquement sur le prêt hypothécaire
à long terme, n'a pas changé. Cette longue période sans
heurt correspondait en fait à la stabilité des autres composantes
de la société. Cependant, la Révolution tranquille du
début des années soixante s'est également
manifestée dans le secteur agricole. L'introduction de nouvelles
technologies, la spécialisation grandissante des fermes, entre autres,
ont amené l'Office à offrir de nouvelles formes de
financement.
En 1962, c'était le crédit à moyen terme qui
était offert aux agriculteurs et agricultrices, et en 1972, le
crédit à la production. Ces deux derniers programmes
étaient développés avec la participation des banques et
des caisses. L'Office se réservait le rôle de garantir les
prêts.
En 1978, M. le Président, des modifications importantes
étaient de nouveau apportées au programme québécois
Financement agricole, le prêt tandem était institué. On a
assisté alors à un partenariat complet entre l'Office du
crédit agricole et le secteur privé, c'est-à-dire les
banques et les caisses. Par ce système, le problème
d'approvisionnement en fonds du Trésor québécois
était résolu. Désormais, l'Office continuerait à
évaluer des demandes des entreprises agricoles mais, plutôt que de
consentir directement des prêts, il garantirait ceux consentis par le
secteur privé. On a aussi, à cette époque, augmenté
considérablement le plafond des prêts afin de mieux
répondre aux besoins des agriculteurs et agricultrices face à une
explosion de la valeur de leurs entreprises.
En 1986, M. le Président, une autre étape importante
était franchie, celle de l'amendement apporté à la Loi
favorisant la mise en valeur des exploitations agricoles. Cette modification a
fait passer de 8000 $ à 15 000 $ la subvention de l'établissement
des jeunes. En plus de permettre l'établissement de quatre personnes par
entreprise, elle reconnaissait la participation de l'épouse comme
partenaire à part entière dans l'entreprise agricole.
En 1987, un effort de rationalisation juridique a été
réalisé en regroupant, sous une seule loi et un seul
règlement, les huit lois et les multiples règlements
adoptés depuis 1936. À cette occasion, une orientation importante
a été donnée au programme Financement agricole du
Québec. Une bonification additionnelle d'intérêt pour les
jeunes possédant un certain niveau de formation académique
professionnelle a été mise en place. Par ce geste, le
gouvernement recon-
naissait toute l'importance des ressources humaines dans le
développement d'entreprises capables de relever les défis
technologiques et économiques auxquels l'ouverture inéluctable
des marchés nous confronte.
Des changements profonds de la structure agricole
québécoise, amorcés au cours des années soixante,
sont à la base de cette évolution de plus en plus
accélérée du contenu des programmes de Financement
agricole. Pour bien saisir l'importance de ces changements, il faut se rappeler
qu'au début de cette période, l'entreprise agricole
québécoise appartenait encore à un modèle unique,
principalement laitier, mais avec des activités connexes qui assuraient
une diversité et une certaine stabilité des revenus.
En 1971, la valeur moyenne des fermes financées par l'Office
était de 39 500 $ et leur passif moyen était de 21 000 $. Le
nombre de producteurs laitiers au Québec était, à ce
moment-là, de 38 000. Vingt ans après, en 1991 - 20 ans
après, ce n'est pas beaucoup, M. le Président - la valeur moyenne
des fermes financées par l'Office atteint l'importante somme de 490 000
$, alors que le passif moyen se situe à 235 000 $. Dans les deux cas,
c'est plus de 10 fois la valeur de 1971, alors que le taux d'inflation n'a
évolué que par un multiple de 4. La valeur réelle des
fermes en dollars constants s'est donc multipliée par trois. Pour ce qui
est du nombre de producteurs laitiers, ils sont environ aujourd'hui 13 500,
soit trois fois moins que 20 ans plus tôt. Ces quelques chiffres auxquels
je pourrais ajouter de nombreuses autres données illustrent bien les
changements majeurs survenus dans la structure de nos entreprises agricoles.
Ces nouvelles entreprises intègrent des techniques toujours plus
complexes. Elles appellent aussi des modes de gestion plus raffinés et
des marges d'erreur plus étroites. En conséquence, le financement
de ces entreprises, tant en termes de développement, d'opération
que de transfert, doit dorénavant pouvoir se réaliser à
partir de programmes souples et articulés. Ce besoin est d'autant plus
vrai que l'évolution des entreprises, sommairement
démontrée ici, est loin d'être terminée, et bien
malin celui qui pourrait déjà en fixer tous les contours.
Je termine cette brève rétrospective en mentionnant
l'intervention que j'ai moi-même pilotée, à mon
arrivée, comme ministre responsable du secteur de l'agriculture,
à l'automne 1990. De façon non équivoque, nous avons
choisi de consolider l'orientation déjà prise en faveur de la
formation des personnes. C'est pourquoi, désormais, la subvention
à l'établissement est liée à un niveau plus
adéquat de formation. Ce virage majeur a connu d'ailleurs, et j'en suis
très heureux, un appui complet de la part des représentants des
agriculteurs et agricultrices de même que celui de la relève. Une
augmentation significative, c'est-à-dire plus de 25 % du nombre
d'admissions au programme de gestion et d'exploitation de l'entreprise agricole
dans les cégeps du Québec pour l'automne 1992, témoigne
bien de la justesse des orientations déjà prises et de ses
impacts positifs pour le futur. (6 h 50)
L'Office du crédit agricole a toujours joué un rôle
de premier plan dans l'économie du secteur agricole. Avec un en-cours de
prêt de 2 000 000 000 $, l'Office finance actuellement un peu plus de 50
% de la dette globale du secteur de la production agricole
québécoise. Il y a actuellement 20 000 fermes clientes de
l'Office. Chaque année, c'est plus de 4000 nouveaux prêts qui
servent au transfert, à l'achat ou à la consolidation des fermes.
Des budgets annuels d'environ 120 000 000 $ ont supporté bon an, mal an,
les divers programmes d'aide de l'Office du crédit agricole au cours des
cinq dernières années.
L'implication majeure de l'Office dans le secteur de la production
agricole est largement démontrée. Elle illustre bien le
rôle essentiel qu'il a joué et qu'il continue de jouer dans le
développement économique du secteur. L'environnement
économique actuel est cependant totalement différent de celui qui
a prévalu jusqu'au début des années quatre-vingt. Durant
les décennies précédentes, malgré des changements
à la structure du secteur et à son environnement, tous les
programmes d'intervention ont évolué sans modification profonde.
Aussi, il n'est pas étonnant de voir que plusieurs institutions en
place, dont l'Office du crédit agricole, n'ont pas jugé
nécessaire de revoir le cadre réglementaire et leur approche de
fonctionnement.
Durant la dernière décennie, cependant, l'environnement
économique du secteur agricole a été marqué de
changements rapides et profonds. Par exemple, on a connu une instabilité
importante des taux d'intérêt. À l'été 1980,
le taux préférentiel des banques à charte était de
12,25 %. Un an plus tard, il dépassait largement le cap des 20 % et
demeurait à un niveau avoisinant pour une année complète.
Passant sous la barre de 10 % en 1987, il frôlait les 15 % au printemps
de 1990, pour se situer présentement à 7,75 %. De telles
fluctuations ne s'étaient jamais vues durant les décennies
antérieures. Le mouvement ascendant de la valeur des terres agricoles,
amorcé à la fin des années cinquante, s'est
arrêté au début des années quatre-vingt pour *
connaître un mouvement inverse qui vient tout juste de se stabiliser. Le
milieu rural québécois représente aussi, depuis quelques
années, des points de rupture jamais connus.
À l'échelle internationale, M. le Président, des
surplus chroniques de production ont entraîné une concurrence
ruineuse entre les pays qui ont voulu à la fois protéger leur
marché intérieur et augmenter leurs exportations. Les
négociations du GATT qui s'achèveront bientôt, je
l'espère, risquent de bouleverser totalement, à moyen terme, les
règles antérieures du commerce
international et les approches traditionnelles du support à
l'agriculture. Il nous faut, dès à présent,
réinventer les façons de faire, refaire des choix et relever les
défis nombreux d'un avenir désormais plus incertain. Cette
nécessité de faire des choix stratégiques m'a d'ailleurs
amené à convoquer les divers intervenants du milieu à un
sommet sur l'avenir de l'agriculture qui se tiendra du 11 au 13 juin prochain,
c'est-à-dire la semaine prochaine, M. le Président.
Malgré les nombreux amendements apportés aux programmes
québécois de financement depuis 1936, le cadre légal et
réglementaire est demeuré sensiblement le même. Dès
le début, et en accord avec la philosophie du temps, on a
enchâssé dans la loi et les règlements une multitude de
normes administratives décrivant des façons de faire, comme par
exemple, des cellules de remboursement... des cédules, excusez, de
remboursement, des techniques d'évaluation et autres
éléments qui, normalement, se retrouvent dans les politiques
administratives internes d'une organisation. Le regroupement des huit lois et
des multiples règlements en un seul, réalisé en 1987, n'a
pas enlevé cet encadrement rigide des opérations administratives.
Bien au contraire, dès l'été 1989, moins d'un an
après sa mise en application, une trentaine de modifications devaient
être apportées au texte réglementaire pour l'adapter
à des pratiques administratives plus rationnelles. Dans un cadre
légal plus articulé, ces ajustements auraient pu être faits
beaucoup plus rapidement par de simples modifications aux politiques
administratives de l'organisme sans qu'il ne soit nécessaire de mettre
en branle tout l'appareil gouvernemental.
Malgré ces retouches, le cadre légal actuel demeure
extrêmement lourd, et on y retrouve toujours un enchevêtrement
d'articles portant sur la mission et les pouvoirs de l'organisme,
mêlés aux normes et aux conditions détaillées des
programmes à administrer de sorte qu'une modification, même
minime, exige encore de faire appel aux instances centrales du gouvernement,
avec tous les délais qui y sont reliés.
Le projet de loi actuel propose un cadre où, essentiellement, on
retrouve dans la loi la mission et les pouvoirs généraux de
l'organisme alors que les termes et conditions des programmes sont
regroupés dans des règlements distincts, où le volet
financement est complètement séparé du volet aide à
l'établissement. Le principal avantage de cette approche
articulée, M. le Président, est de permettre, dans un contexte
changeant, comme on l'a expliqué précédemment, une
adaptation beaucoup plus rapide des programmes en même temps qu'une
gestion beaucoup plus simple. De même, si des nouveaux programmes
s'avéraient nécessaires pour faire face à des
problèmes nouveaux ou à des conjonctures sectorielles difficiles,
il serait facile de les adapter sans avoir besoin de changer la loi. Par
exemple, des prêts aux syndicats de machinerie, aux agriculteurs et
agricultrices à temps partiel seront rendus possibles dans le cadre de
cette nouvelle loi.
Dans ce projet, on propose également un nouveau nom pour ce qui a
été jusqu'ici un des organismes les plus liés au
développement de l'agriculture du Québec. En effet, d'une part,
le vocable «office» se réfère davantage à une
régie administrative qui fixe des normes et, à cet égard,
le cadre légal de l'organisme a, jusqu'à présent,
respecté cette orientation. D'autre part, le rôle reconnu de
l'Office du crédit agricole en est un fondamentalement de financement et
de développement. L'Office est identifié comme l'un des quatre
piliers de développement de l'agriculture québécoise, et
ce, à juste titre, car depuis plus d'un demi-siècle le
financement agricole a été le principal outil de
développement du secteur agricole.
Il m'apparaît important d'appeler les choses par leur nom et de
donner à cet organisme un vocabulaire plus en accord avec sa mission
réelle et les exigences normales de son fonctionnement. C'est pourquoi
«Société de financement agricole» devient la nouvelle
appellation de cet organisme voué au développement de l'ensemble
du secteur bioalimentaire du Québec.
M. le Président, ce projet de loi et les nouveaux
règlements qui suivront immédiatement son adoption proposent,
à toutes fins pratiques, une reconduction des programmes actuels de
financement. Ce n'est qu'après avoir consulté les parties
concernées que nous pourrons proposer des changements au programme
actuel ou l'ajout de nouveaux programmes. Ainsi, la formule de la garantie
totale des prêts et ouverture de crédits par le gouvernement est
reconduite. Un niveau de «subventionnement» et les plafonds actuels
des prêts sont également maintenus. Il en est de même des
aides à l'établissement des jeunes et de la formule très
appréciée du partenariat avec les institutions privées de
financement, représentées plus particulièrement par les
caisses populaires et les banques.
Cependant, le cadre plus général de la loi que je
dépose permettra à la nouvelle Société d'utiliser
des outils et des approches de financement plus souples et mieux adaptés
aux besoins et aux structures des entreprises agricoles modernes. Cette loi
permettra aussi d'offrir des choix qui pourront réduire les coûts
du financement. J'apporte comme exemple l'obligation actuelle faite à
nos emprunteurs d'obtenir leur prêt à un taux fluctuant
rattaché directement à celui du taux
préférentiel.
Il m'apparaît tout à fait normal que le gestionnaire d'une
entreprise agricole ait la possibilité de faire des choix quant à
la stabilité du taux de ses emprunts sur une période plus longue.
Pour un entrepreneur, ce genre de décision est stratégique pour
la rentabilité de son entreprise. Avec la conjoncture actuelle, les bas
taux d'intérêt, on peut penser que beaucoup
d'agriculteurs et agricultrices souhaiteraient obtenir des prêts
à taux fixe pour des périodes de quelques années, ce qui
n'est pas possible présentement.
En résumé, le projet de loi de la Société de
financement agricole, en plus du fait qu'il modifie le nom de l'Office du
crédit agricole du Québec, propose une transformation
complète du cadre légal et réglementaire rigide qui a
toujours soutenu les programmes de financement agricole du gouvernement du
Québec. Le cadre proposé est similaire à ceux d'autres
organismes de développement économique comme la SDI, par exemple,
qui ont besoin de s'adapter rapidement à des conjonctures
économiques, à des structures d'entreprise et à des outils
de financement variés et changeants.
Ce projet de loi correspond également aux engagements que j'ai
déjà pris envers les producteurs et productrices agricoles du
Québec lors du dernier congrès de l'UPA, en décembre 1991,
à l'effet qu'aucune modification importante au contenu des programmes
agricoles du gouvernement du Québec ne serait faite sans consultation
préalable des organismes. Or, un sommet regroupant tous les partenaires
du bioalimentaire est prévu pour le mois de juin, je l'ai
mentionné tantôt. C'est après cet événement
et selon les choix qui seront faits que des changements plus substantiels aux
programmes actuels pourraient être envisagés. Nous aurons alors un
véhicule moderne pour les mettre en place et ainsi répondre
adéquatement aux besoins changeants de l'agriculture et des producteurs
et productrices agricoles au Québec, M. le Président. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre.
Sur ce projet de loi 27, je reconnais M. le député d'Arthabaska.
M. le député d'Ar-thabaska, vous avez la parole. Nous vous
écoutons.
M. Jacques Baril
M. Baril: Oui, M. le Président. J'ai une heure?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Monsieur, question de
directive, vous avez, en tant que porte-parole, une heure. C'est effectif.
M. Baril: Bon! Merci bien, M. le Président. En prenant
connaissance de ce projet de loi, j'ai été un peu en
arrière et je me suis référé au 17 novembre 1987,
et je pouvais lire, ce qui m'a étonné... Le ministre de
l'agriculture de l'époque, M. Michel Pagé, avait modifié
la Loi sur le financement agricole, à l'automne 1987, et M. Pagé
commençait son discours en disant: «Mme la Présidente,
c'est avec beaucoup de fierté...» Probablement qu'il s'adressait
à la députée de Bellechasse, qui était
vice-présidente. «Le lieutenant-gouverneur a pris
connaissance...» Ce n'est pas ça. «C'est avec beaucoup de
fierté que j'aborde, en Chambre, au moment de la deuxième
lecture, ce projet de loi qui vient proposer une réforme majeure, une
refonte du régime québécois de financement agricole. On
peut convenir sans prétention qu'on s'apprête, par l'adoption de
ce projet de loi, à écrire une page très importante et
susceptible de marquer l'histoire de l'agriculture au Québec et son
développement.» (7 heures)
Ça ne fait même pas cinq ans, ça. Et si on regarde
de quelle façon le ministre a marqué l'agriculture
québécoise, avec son projet de loi... Je vous ai donné des
chiffres, tout à l'heure dans le projet de loi précédent
et, durant la même période, ça a occasionné une
chute de revenus de 21 % au niveau de agriculteurs, avec une chute des
investissements de 41 % et une perte des emplois de 29 %.
Donc, ce qui devait être un chapitre, une page majeure du
développement de l'agriculture québécoise, aujourd'hui on
déchire cette page d'histoire pour nous en ramener une autre. Ce projet
de loi 27 institue la Société de financement agricole, qui
remplace l'Office du crédit agricole du Québec. Je ne ferai pas
de plat, de drame sur le changement de nom de l'Office; que ça s'appelle
l'Office ou une société, en autant que cet organisme pourrait
atteindre ou voudrait garder les mêmes objectifs qu'il avait dans le
passé, je m'en réjouirais. Par contre, M. le Président, il
y a d'autres choses qui m'inquiètent beaucoup plus que le changement de
nom de cette société.
Le projet de loi 27, qui contient 52 articles, remplace une loi de 160
articles et actuellement les modalités, les conditions d'octroi de
l'aide financière sont inscrites dans la Loi sur le financement
agricole. Mentionnons les opérations de crédit, prêts
ouverture de crédit, prêts spéciaux, la contribution au
paiement de l'intérêt, la réduction du taux
d'intérêt et la subvention pour rétablissement des jeunes
agriculteurs. Mais, pour les changer, le gouvernement doit modifier la loi et
ainsi passer par l'Assemblée nationale. Tous les programmes que l'Office
administre présentement sont inscrits dans la loi et, pour en modifier
l'application ou modifier des programmes, le gouvernement est obligé de
passer par cette Chambre, ici, pour le faire; d'abord, pour que les
députés en prennent connaissance, c'est ce qui devrait être
fondamental et, par la suite, pour donner la chance aussi à ceux et
celles qui veulent se faire entendre sur certaines modifications.
Le projet de loi 27 enlève toute cette procédure puisque
les programmes seront établis par règlement par le gouvernement.
L'article 14 stipule: «pour la réalisation de son objet la
Société accorde une aide financière dans le cadre des
programmes établis par règlements du gouvernement.» Tout
à l'heure, sur l'autre loi précédente, on donnait à
la Régie des marchés
agricoles, à peu près tous les pouvoirs de
réglementation ou on se donnait des pouvoirs de fonctionnement par
règlement. Ça, M. le Président, je trouve que ce n'est
absolument pas acceptable dans notre système parlementaire, c'est
absolument injustifiable. Je suis certain que mes collègues qui sont ici
présents aiment ça discuter et aiment ça entendre parler
des lois, comprenez-vous. C'est notre rôle en tant que parlementaires
d'abord de décider.
J'ai été moi-même, évidemment, du
côté gouvernemental et j'aimais ça quand on discutait des
lois et ça nous permettait, au moins, d'avoir notre mot à dire,
de faire connaître nos impressions. Tandis qu'un décret ou un
règlement, c'est accepté par le Conseil des ministres, tu
n'entends jamais parler de ça, tu passes ça dans la Gazette
officielle du Québec. La Gazette officielle du Québec, pour
ceux et celles qui ont lu ça ou qui n'ont jamais lu ça, je dois
vous dire que ce n'est rien d'intéressant et que ce n'est rien de
motivant. Tu n'amènes pas ça pour lire en vacances.
Donc, le gouvernement enlève ce droit aux parlementaires, ce
privilège qui est accordé aux parlementaires de vérifier
ou de modifier différentes mesures par le biais de cette
Assemblée. On voit que le pouvoir législatif perd des
prérogatives énormes au profit du pouvoir exécutif.
Pour cette raison, entre autres, nous allons voter contre ce projet de
loi parce qu'on est élus pour faire des lois et puisque les
règlements, on ne voit absolument rien des règlements qui sont
acceptés par le pouvoir exécutif, qui est le Conseil des
ministres.
M. le Président, je dois vous dire que c'est tellement vrai ce
que j'avance là que dernièrement, au mois d'avril, dans un
journal qui est fourni par les syndicats de gestion à leurs membres des
syndicats de gestion, on pouvait lire, ici, en ce qui touchait à
l'Office du crédit agricole: «Des modifications à
l'admissibilité». On dit: L'Office du crédit agricole,
depuis quelque temps, resserre de façon importante l'accès au
crédit pour l'ensemble des agriculteurs. On sait que l'Office du
crédit agricole a été créé, je pense, il y a
36 ans, comme le ministre disait tout à l'heure, pour pallier à
un manque ou à un besoin d'argent qui, souvent, est conjoncturel de la
part des agriculteurs. Et, souvent, l'entreprise privée, les
institutions financières privées, pour différentes raisons
dans le passé, ne voulaient pas prêter aux agriculteurs et aux
agricultrices. Et l'Office a été, justement, pour pallier
à cet effet négatif de la part de l'entreprise privée.
Aujourd'hui, je dois vous dire, M. le Président, que c'est un peu
l'inverse parce que l'entreprise privée, les institutions
financières privées, que ce soient les caisses ou les banques,
sont beaucoup plus ouvertes au support à l'agriculture que le
gouvernement actuel ou l'Office du crédit agricole, et c'est ce que
mentionnait ici le conseiller en gestion de ce syndicat de gestion. On disait:
Maintenant, l'Office ne finance l'achat de quotas pour récupérer
la coupure que sur une durée de trois ans.
Et, tout à l'heure, on parlait de coupures de quotas de lait.
Juste pour l'information de ceux qui ont bien l'amabilité de
m'écouter, une ferme moyenne au Québec, à cause des
coupures de lait qui sont occasionnées à cause de la baisse de
consommation, ça coûte à un producteur de lait moyen entre
20 000 $ et 25 000 $ qu'il doit racheter du quota, juste pour maintenir son
revenu de l'année dernière. Il n'a pas fait un cent de plus
là, mais ça coûte entre 20 000 $ et 25 000 $ par
année, depuis quelques années, au-dessus de 12 % de coupures
depuis un certain temps; il y en a une autre au moins de 5 % qui s'en vient
pour le mois d'août, on parle même de 7 %. Donc, ça
coûte entre 20 000 $ et 25 000 $ juste pour maintenir son revenu de
l'année précédente.
Si on regarde l'Office du crédit agricole, il prête
seulement pour une durée de trois ans. Ça a comme
conséquence qu'il y a bien des producteurs qui, juste avec un
financement sur trois ans, ne sont pas capables de le rembourser; donc,
l'Office dit: Tu n'es pas capable de rembourser, tu deviens une ferme pas
rentable; on ne te prête pas. Donc, actuellement, dans la période
qu'on vit, tu as seulement les grosses fermes qui sont en bonne situation
financière qui peuvent acheter du quota pour maintenir leurs revenus de
l'année précédente et, surtout, ça affecte les
jeunes qui viennent de s'établir et dont la marge financière est
moins élevée que les autres, bien entendu.
Donc, le système actuellement profite à grossir ceux qui
sont plus gros et à faire diminuer ceux qui, eux, devraient grossir pour
être là encore demain. L'Office finance l'achat des quotas pour
l'expansion sur une durée maximale de cinq ans. Quand tu achètes
du quota, pas pour maintenir ton revenu, quand tu achètes pour te
développer, il te finance pour cinq ans. Il est maintenant impossible de
refinancer des comptes à payer, et ça, l'Office du crédit
agricole, son rôle premier est justement de pallier à un besoin,
à une situation conjoncturelle et, actuellement, l'Office ne remplit pas
ce rôle-là.
Lors de l'établissement, la durée maximum d'un prêt
d'établissement a été ramenée à 15 ou 16 ans
et, M. le Président, en plus de ça, dans l'amendement qui a
été fait, dans la modification qui avait été faite
en 1987, l'Office du crédit agricole avait changé aussi sa
méthode de calcul et il incluait, dans les dépenses courantes,
l'amortissement des bâtisses et de la machinerie. Et c'est le seul
secteur économique où une institution financière ajoute la
dépréciation des équipements et des bâtisses sur une
dépense annuelle. Et ça arrivait très couramment que
ça occasionnait le fait... Ça occasionnait très
souvent que la ferme devenait automatiquement pas rentable. Et, si on
regarde les grosses compagnies qui, à chaque année, diminuent,
enlèvent, soustraient pour fins d'impôt l'amortissement de leurs
bâtisses puis elle ne mettent pas plus l'argent en banque pour autant,
et, quand tu arrives au bout de 15 ou 20 ans, le gouvernement est obligé
de subventionner pour les moderniser, ces entreprises-là. Mais la classe
agricole, l'Office a appliqué une politique qui ne s'applique pas
ailleurs. (7 h 10)
Lors de l'établissement du conjoint, il est dorénavant
impossible d'effectuer un refinancement. Lors d'un transfert d'une
société ou d'un particulier à une compagnie, il est
maintenant impossible de transférer les prêts effectués
avant si on ne transfère pas les fonds de terre à la
compagnie.
Ici, M. le Président, je pourrais donner plusieurs... Je pourrais
prendre le temps de vous expliquer ça plus à fond, et je suis
certain que ça informerait de mes collègues qui sont
présentement présents et ça les informerait surtout... Je
vois qu'il y a beaucoup de députés de villes, de milieu urbain,
et ça les informerait davantage sur les difficultés qu'un
agriculteur, une agricultrice peut vivre maintenant dans les campagnes avec
toutes les complications. Mais je les invite à venir en commission
parlementaire parce que, moi, vous savez... Il est rendu 7 h 10, la
journée commence, mais là, ça fait deux jours qu'on n'a
pas arrêté. Ça fait que je vais avoir pitié de vous
autres et je vais essayer d'avoir pitié de moi-même.
Comme vous pouvez le constater, ce sont des changements importants qui,
comme toujours le conseiller en gestion disait, peu à peu affecteront
chacun d'entre vous et, de plus, l'Office du crédit agricole a pu
effectuer tous ces changements d'interprétation sans changer la loi ni
les règlements. Eux autres le spécifient. Pourtant, tout
était bien défini dans la loi, ce que l'Office doit faire ou ne
doit pas faire. Maintenant, avec la loi 27, l'Office pourra, en n'importe quel
temps, parce que c'est lui qui définira par règlement quel... Il
administrera ce que le gouvernement lui donnera par règlement, et il me
semble, ici, que c'est grandement le temps. Il invitait les agriculteurs, les
agricultrices. Il est grandement le temps, comme producteurs, de vous mobiliser
contre ces nombreuses modifications sinon, à moyen terme, cela va
résulter en la disparition de l'accès au crédit agricole
subventionné.
Donc, vous pouvez voir, M. le Président, ce n'est pas uniquement
le député d'Arthabaska qui a des réserves sur le projet de
loi, et cette information-là avait été transmise aux
producteurs bien avant que le projet de loi dont on discute actuellement ait
été déposé.
Si on regarde, M. le Président, le Parti libéral lorsqu'il
était dans l'Opposition, et comme je m'en souviens, critiquait le
gouvernement du Parti québécois de faire trop de
règlements, et affirmait que des gens étaient perdus dans la
réglementation. Je me souviens quand ce gouvernement-là a pris le
pouvoir et, en 1985, il avait fait toute une campagne électorale
à l'effet de dire: On va déréglementer, et ils ont
formé des comités de déréglementation parce qu'ils
avaient, à un moment donné, publicise je ne me souviens plus
combien il y avait de milliers et de milliers de pages de règlements au
Québec et que l'ensemble des citoyens ne s'y retrouvait plus. Bien,
c'est toujours... L'histoire se répète. Ce gouvernement,
actuellement, il y a deux projets de loi de suite qu'on vient de discuter, et
tout va se faire par règlement.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet):...
M. Baril: M. le Président, vous savez, il ne faut pas
être méchant, et je vais réfléchir
profondément à ce que je dis, mais vous ne devriez pas applaudir
comme vous faites là, parce que le projet de loi qu'on est en train de
passer la, ça brime vos droits de parlementaires, messieurs et mesdames,
et vous devriez davantage vous lever chacun votre tour et prendre au moins vos
20 minutes pour dénoncer votre gouvernement...
Des voix: Ah!
M. Baril: ...sur l'attitude qu'il utilise présentement par
ce projet de loi de vous enlever, à vous autres, des droits de
parlementaires qui vous sont dévolus, et c'est un privilège en
tant que parlementaires que vous avez de discuter des lois, de les
étudier et d'essayer de les modifier. Et ces droits-là, on vous
les enlève par le biais de ce projet de loi, et vous serez les premiers
tout à l'heure à le regretter et à en payer des
coûts.
La situation de l'agriculture, M. le Président, a tellement perdu
de son intérêt au niveau de la relève agricole, au niveau
des jeunes, que le nombre d'établissements de jeunes en agriculture est
passé de 2465, en 1988, à 1895, en 1989, et à seulement
1593, en 1990, soit une baisse de 35 % en deux ans seulement. Et ce n'est pas
par des mesures comme on fait présentement qu'on va davantage encourager
la relève à s'établir sur les fermes.
Ainsi, dans ce projet de loi, puisque le ministre se donne le pouvoir
d'aller récupérer des sommes d'argent ou des subventions qui
auraient... de l'aide financière qui aurait été
accordée aux agriculteurs, se donne le moyen d'aller
récupérer si ces sommes d'argent là n'ont pas
été dépensées pour les fins auxquelles elles
avaient été accordées. Et on se souvient que le ministre
avait échelonné, ou étalé sur trois ans
la prime à l'établissement, parce que, justement,
paraît-il qu'il y avait des jeunes qui se sauvaient avec cette prime
à l'établissement, qui avaient investi sur d'autres choses.
Je demande au ministre, est-ce que le ministre va maintenant
rétablir le versement de la prime à l'établissement dans
un seul versement puisque là il se donne... La raison pourquoi il
l'échelonnait sur trois ans, c'était parce qu'il voulait se
donner le moyen de voir un peu ce que les jeunes faisaient avec leurs primes,
pour ne pas qu'ils partent comme je l'ai déjà dit avec le silo,
ou bien un bout de drain, ou bien un bout de grange, qu'ils ont investies, dans
leur poche d'en arrière. Parce que c'est un peu ça que le
ministre pensait qu'ils faisaient.
Donc, puisqu'il avait étalé ça sur trois ans pour
prévenir des pertes potentielles au niveau des deniers publics, comme il
disait, est-ce que le ministre va rétablir le versement de la prime
à l'établissement dans un seul versement?
Je vais, M. le Président, d'abord, je vais vous faire plaisir
à vous, et sans doute à mes collègues, mais je les invite
fermement à étudier ce projet de loi. Je les invite à
venir en commission parlementaire pour essayer de faire comprendre au ministre
que le rôle premier du député, c'est de voter des lois, et
non des règlements. Et le fait que le gouvernement, encore une fois, va
tout chambarder et puis tout va se passer par réglementation, qu'on
n'aura rien à voir là-dedans, je vous invite, mesdames et
messieurs, je réitère mon invitation, je vous invite à
venir en commission parlementaire pour questionner le ministre et pour lui
demander, d'abord, qu'il nous les dépose. Est-ce que les
règlements sont prêts? Qu'il nous dépose les
règlements. Au moins, il me semble que ça serait fondamental de
connaître au moins les règlements avant de discuter, ou avant
d'adopter cette loi-là. Il me semble que ça serait fondamental.
Ça serait notre rôle, dans notre système
démocratique, dans notre système parlementaire, de
connaître les règlements avant de discuter de la loi. Parce que,
après qu'elle sera votée, on n'aura plus rien à voir dans
le fonctionnement de cette nouvelle société de financement
agricole. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet):...meci, m. le
député d'arthabaska. alors, m. le ministre de l'agriculture, en
vertu de votre droit de réplique.
M. Yvon Picotte (réplique)
M. Picotte: Merci, M. le Président. Ça sera bref,
M. le Président, parce que j'ai l'intention de répliquer à
plusieurs points à mon collègue au début de l'étude
article par article de notre commission parlementaire. Mais, ça ne me
surprend pas, évidemment, la réaction de mon collègue,
pour une raison bien simple: c'est une loi-cadre, M. le Président. Et
toute loi-cadre amène toujours ce même genre de discussions entre
nous, qui fait en sorte que quand on fait une loi-cadre, M. le
Président, bien sûr, on donne des pouvoirs
réglementaires.
Et quand j'entendais le député tantôt dire, bien, on
multiplie les règlements, M. le Président, je pense que c'est le
contraire. Le fait de se donner une loi-cadre va éliminer pas mal de
règlements parce qu'on a 140 quelques sortes de règlements
à l'Office du crédit agricole. C'est beaucoup trop, et ce qu'on
ne peut pas suivre, M. le Président.
Maintenant, il ne faut pas non plus... Faut faire attention, pour ne pas
induire les gens en erreur en disant: Les règlements, il n'y a personne
qui peut voir ça, M. le Président. Les règlements,
là, on les fait voir, et, moi, de plus en plus, depuis que je suis
ministre de l'Agriculture, M. le Président, les endroits où je le
fais de temps en temps, faire voir les règlements, en plus de la
Gazette officielle du Québec, je le fais voir dans la Terre de
chez nous qui rentre dans tous les foyers d'agriculteurs. Et, j'ai
trouvé cette méthode-là, et Dieu sait qu'il y a des gens
qui m'en ont félicité parce que ça arrive directement aux
agriculteurs. Donc, il y a des moyens qu'on peut se donner, M. le
Président, mais ça prend quatre mois. Je pense bien qu'il y a des
gens qui peuvent vérifier ça. Mais, de toute façon,
ça peut être, bien sûr, une façon différente
de le voir. Je ne nie pas ça, puis je ne contesterai pas ça au
député d'Arthabaska. Mais je pense que ça va nous rendre
beaucoup plus efficaces, beaucoup plus rapides, et ça va donner un
meilleur rendement.
Et, je dois vous dire d'ailleurs qu'on a consulté, à
quelques reprises, et non seulement à quelques reprises, mais on a fait
en sorte aussi de discuter avec le comité de financement de l'UPA, des
gens qui sont très aguerris à ça. Et le président
de l'Office du crédit agricole parlait encore ce matin à M.
D'Amours à cet effet-là, et je pense que c'est très bien
reçu, même à l'intérieur de ça, pour
améliorer la situation.
M. le Président, j'avais omis aussi de vous dire, et je termine
par ça, que le lieutenant, l'honorable lieutenant-gouverneur avait pris
connaissance de ce projet de loi, et il en recommande l'étude à
l'Assemblée. Alors, voilà, M. le Président, pour la
réplique. (7 h 20)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre.
Est-ce que la motion de M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation proposant l'adoption du principe du projet de loi 27 est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté, M. le
ministre de l'Agriculture.
M. Picotte: Je réitère les mêmes
qualificatifs que j'ai employés tantôt.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Un instant!
Adopté sur division. M. le ministre de l'Agriculture.
Renvoi à la commission de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation
M. Picotte: Je réitère les mêmes
qualificatifs que j'ai apportés tantôt au sujet de celles qui nous
aident à nous faire nos travaux pour vous dire que je fais motion pour
que ledit projet de loi soit déféré à la commission
de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation pour étude
détaillée, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion
est adoptée?
Des voix: Adopté.
M. Picotte: M. le Président, rendu à cette
heure-là, je voudrais souhaiter une bonne fin de soirée à
nos collègues et je fais motion pour que nos travaux soient
ajournés à jeudi, 4 juin 1992, à 10 heures. Bonne fin de
soirée.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion
est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors,
les travaux de cette Assemblée sont ajournés à ce matin,
10 heures.
(Fin de la séance à 7 h 21)