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(Dix heures huit minutes)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Si vous voulez vous
asseoir, mesdames et messieurs les députés, s'il vous
plaît.
Affaires du jour
Nous reprenons les travaux de l'Assemblée, ce vendredi 4
septembre, à l'étape des affaires du jour. À l'article 1
de notre feuilleton, l'Assemblée reprend le débat sur l'adoption
du principe du projet de loi 44, Loi modifiant la Loi sur le processus de
détermination de l'avenir politique et constitutionnel du Québec.
Je suis prêt à reconnaître le premier intervenant, à
savoir M. le ministre des Affaires municipales. M. le ministre, vous avez droit
à une intervention de 20 minutes.
Projet de loi 44
Reprise du débat sur l'adoption du principe M.
Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, l'adoption par
l'Assemblée nationale de la loi 150 prévoyant la tenue d'un
référendum au plus tard le 26 octobre 1992 remonte
déjà à plus d'un an. Mais il s'est produit, depuis ce
temps, des événements très importants qui nous obligent
à revoir non pas l'objectif même d'une consultation populaire sur
l'avenir politique du Québec, mais le sujet précis sur lequel
doit porter cette consultation.
Selon la loi 150, le référendum devait en effet porter sur
la souveraineté du Québec, mais en vertu du projet de loi 44 que
nous débattons présentement, la consultation populaire porterait
plutôt sur l'entente constitutionnelle survenue en août 1992 entre
les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral en vue
du renouvellement du fédéralisme canadien. Certains soutiendront
que ce changement trahit l'intention exprimée il y a un an par la
commission Bélan-ger-Campeau et l'Assemblée nationale. Je
soutiens, au contraire, que cette modification, tout en étant
fidèle aux orientations sans cesse reprises par le gouvernement
jusqu'à ce jour, fournira également à la population du
Québec l'occasion de se prononcer directement sur les fruits des
négociations intensives qui se sont poursuivies au cours des
dernières semaines sur la modification de notre système
fédéral.
Pour mesurer la portée du projet de loi 44, il faut d'abord
évoquer brièvement le contexte dans lequel fut adoptée la
loi 150. À cette époque, le Québec demeurait
profondément blessé à la suite du rejet de l'accord du lac
Meech. Les perspectives de renouvellement du fédéralisme canadien
apparaissaient plutôt minces. On parlait volontiers d'options plus
radicales. Il devenait de plus en plus courant, dans les milieux qui suivent
ces questions de près, de penser que les choix du Québec
devraient dorénavant se résumer à deux choix majeurs: soit
le renouvellement du fédéralisme canadien, soit la
souveraineté, c'est-à-dire l'indépendance politique. Le
rapport de la commission Bélanger-Campeau le disait clairement, et le
premier ministre du Québec, dans l'addendum qu'il avait
inséré au rapport, indiquait clairement que nous devions
rechercher avec loyauté les perspectives d'avenir suivant ces deux voies
majeures.
Nous savons tous qu'au cours des derniers mois le chef du gouvernement
n'a cessé de rappeler que le premier choix de son gouvernement
favorisait nettement la recherche d'un avenir plus intéressant et plus
solide pour le Québec à l'intérieur d'un système
fédéral canadien renouvelé qu'à l'extérieur,
c'est-à-dire dans la voie d'une aventure dont personne n'est en mesure
de définir toutes les implications éventuelles.
Le premier ministre l'a rappelé à maintes reprises.
Combien de fois nous l'avons entendu dans cette Chambre et sur toutes sortes de
tribunes? Il a rappelé que c'était la première option de
son gouvernement. Que, dans ce contexte, le gouvernement se soit
employé, au cours des derniers mois, à multiplier les contacts et
les échanges avec les autres gouvernements canadiens et avec les
différents milieux qui forment la société
québécoise et la société canadienne, afin
d'explorer les perspectives d'amélioration du système politique
canadien, je pense qu'il faudrait être absolument coupé de la
réalité pour lui en tenir le moindre grief. En agissant ainsi, le
gouvernement du Québec a exercé la responsabilité qui lui
incombait et accompli le mandat qu'il avait obtenu de la population en
1989.
Il est vrai que, dans la loi 150, l'objectif était de tenir un
référendum sur la souveraineté, c'est-à-dire sur
l'indépendance politique complète du Québec, mais il a
toujours été clair dans mon esprit et, je pense bien, dans
l'esprit de mes collègues de l'Assemblée nationale, que la loi
150 avait été conçue de cette manière afin
d'indiquer sans ambiguïté une date limite au-delà de
laquelle, en l'absence de perspectives satisfaisantes dans le cadre de l'option
fédéraliste, il faudrait être prêt à inviter
la population à se prononcer sur l'option plus radicale de
l'indépendance politique. (10 h 10)
C'est ça qui était le vrai sens de la loi 150. Si, au 26
octobre 1992, il n'y avait rien d'autre à envisager, nous étions
liés par la loi 150 à un engagement de consulter la population
sur la souveraineté du Québec, mais il était clair,
pour
qui lisait la loi attentivement et tous les attendus qui l'accompagnent,
que, dans l'hypothèse où les perspectives positives de
renouvellement du fédéralisme canadien seraient
réalisées avant le 26 octobre 1992, il faudrait bien que la
population en soit saisie.
Or, c'est ce qui est arrivé. Fidèle à l'orientation
profonde du parti qu'il représente dans cette Chambre, le gouvernement
s'est appliqué, au cours des derniers mois, à explorer
sincèrement et loyalement toutes les avenues possibles de renouvellement
du fédéralisme canadien. Tout en s'abstenant, jusqu'à ces
derniers temps, de participer à des négociations formelles avec
les autres gouvernements, il n'a cessé de maintenir des contacts avec
eux, de discuter, d'échanger, de brosser des perspectives de solution
possibles. Il s'est montré disposé à échanger en
tout temps avec tout interlocuteur sincère et capable d'agir. À
mesure que le temps s'écoulait et que l'on se rapprochait de
l'échéance définie par la loi 150, on a vu les
échanges se faire plus directs, plus concrets, plus constructs aussi et,
je dirais, plus vrais et plus réels.
Je suis très heureux que, dans le reste du pays, on ait
constaté que cette échéance fixée par le
Québec n'était pas une échéance fictive ou
artificielle, mais qu'elle signifiait quelque chose. Ce n'est qu'après
s'être assuré qu'il y aurait vraiment des propositions
concrètes à examiner que le premier ministre décidait, il
y a quelques semaines, de revenir à la table de négociation avec
les autres chefs de gouvernement du Canada. En acceptant de revenir à la
table de négociation, le premier ministre faisait un geste très
important. D'une part, il prenait un risque considérable. Il risquait de
se retrouver, comme c'est arrivé souvent dans le passé à
d'autres chefs du gouvernement du Québec, en face d'interlocuteurs
incapables de comprendre les objectifs et les aspirations du Québec.
À ce moment-là, il aurait été obligé de
revenir les mains vides. Mais il faisait aussi, et je lui en sais gré,
un acte de confiance dont doivent être capables, dans les situations
décisives, les chefs politiques éclairés et
généreux.
La politique est très souvent un lieu où l'on assiste
à des calculs sordides, des calculs où chacun essaie de
s'enrichir aux dépens de l'autre, souvent au détriment du bien
général. Mais la politique peut aussi être, lorsque les
chefs politiques le veulent, un lieu où l'on procède à des
échanges sincères et loyaux en vue de la recherche d'un bien
supérieur. C'est dans cet esprit que M. Bourrassa est allé
à la rencontre des autres chefs de gouvernement du Canada. C'est dans
cet esprit, nous a-t-il rapporté, qu'il a été accueilli
par ses collègues des autres provinces et du gouvernement
fédéral. C'est également dans cet esprit de dialogue et de
recherche du bien supérieur de tout le Canada qu'il a
négocié avec ses collègues une nouvelle entente
entraînant le renouvellement substantiel du fédéralisme
canadien sur un grand nombre de sujets.
Les pourparlers entre les chefs de gouvernement n'ont certes pas
réglé tous les problèmes. Personne n'a cette
prétention. Ils ont cependant produit des améliorations nettes et
substantielles dont nous devons prendre acte dans cette Chambre. Je les
résumerai brièvement, les gains que nous accomplissons. J'aurai
l'occasion, dans d'autres circonstances, d'élaborer davantage sur des
points qui relèvent davantage de ma compétence immédiate,
des gains que nous faisons dans le secteur de l'habitation, par exemple. Nous
aurons l'occasion d'en parler.
Je voudrais évoquer brièvement les gains majeurs que nous
faisons à la lumière d'un résumé que donnait, il y
a quelque temps, le président du Regroupement Économie et
Constitution, M. Claude Beauchamp. Alors, parmi les gains qui découlent
de l'entente constitutionnelle d'août 1992, relevons les suivants.
D'abord, la reconnaissance claire et nette de la société
distincte du Québec dans une clause qui servira à
interpréter la Constitution. Deuxièmement... Oui, puis nous vous
le prouverons en temps et lieu. Deuxièmement, un droit de veto, un droit
de veto sur tous les transferts de pouvoirs provinciaux qui pourraient se faire
en faveur du Parlement fédéral, avec droit de retrait pour le
Québec, compensation financière assurée. Ça, c'est
un point qui était dans l'accord du lac Meech, qui est confirmé
dans l'entente constitutionnelle du mois d'août.
Troisièmement, un droit de veto sur la formule d'amendement
à la Constitution. On ne pourra plus à l'avenir modifier la
Constitution du Canada sans que le Québec ait donné son
consentement. Il n'y aura plus de possibilité de
répétition de ce qui s'est produit en 1982. Un droit de veto sur
les changements aux institutions nationales que sont la Chambre des communes,
le Sénat et la Cour suprême; un veto des sénateurs
francophones sur les législations fédérales en
matière linguistique et culturelle; un minimum assuré à
perpétuité de 25 % des sièges à la Chambre des
communes, peu importe l'évolution démographique qui se produira.
En matière de pouvoirs, des ouvertures importantes sur plusieurs
secteurs. On peut minimiser, de l'autre côté de la Chambre, les
ouvertures dans le domaine de la formation et du placement de la main-d'oeuvre,
mais je pense qu'on ouvre, de ce côté-ci, des perspectives
extrêmement importantes pour l'avenir.
La constitutionnalisation éventuelle de l'accord sur
l'immigration est également un pas significatif. Et je mentionne encore
une fois qu'en matière de logement, le gouvernement
fédéral contracte chaque année, seulement dans le secteur
du logement social, des engagements de plus de 500 000 000 $ qui permettent de
donner à des foyers, vivant dans des conditions économiques
difficiles, une habitation convenable.
Bien, si l'accord se réalise, est confirmé par la
population, cette responsabilité et les sommes qui l'accompagnent
devront être dévolues au Québec. Nous aurons le droit de le
réclamer, et le gouvernement fédéral devra tenir compte de
la volonté exprimée par le gouvernement du Québec.
Il y a bien d'autres éléments de l'entente qui seront
soulignés par d'autres intervenants dans ce débat, mais la
question qui se pose à nous, aujourd'hui, M. le Président, est la
suivante: Devant des résultats comme ceux-là, est-ce qu'il serait
sérieux et logique de procéder directement à un
référendum sur la souveraineté, alors que l'option
préférentielle du gouvernement, qui représente la
majorité de la population dans cette Chambre, en vertu d'un mandat
légitime, est le renouvellement du fédéralisme canadien?
Je pense bien que nous avons le devoir, le devoir strict de soumettre au
jugement de la population l'entente qui a été conclue par les
chefs de gouvernement. Si nous allions faire un référendum sur la
souveraineté, qu'adviendrait-il de cette entente? Ça aurait
été un exercice vain, un exercice futile. Je pense qu'il suffit
de poser la question pour se rendre compte que non seulement nous avons le
droit, mais nous avons le devoir de procéder à une modification
de la loi 150 de manière que la population du Québec puisse
être consultée sur les résultats des négociations
qui ont eu lieu au cours des derniers mois. Et ces résultats ouvrent la
porte à des développements nouveaux. Ils ne règlent pas
tous les problèmes, comme je l'ai dit, mais ils nous donnent des
garanties de fond dont nous avions besoin pour continuer de fonctionner
à l'intérieur du système fédéral canadien.
Ils nous ouvrent des possibilités de développement.
Et je mentionnerai seulement un exemple, M. le Président.
Là, nous avons obtenu que le droit de veto que nous avions perdu, en
grande partie à cause de l'imprudence extraordinaire dont fit montre le
gouvernement du Parti québécois, en avril 1981, alors qu'il
reconnaissait le principe de l'égalité des provinces, il l'a
reconnu sous sa propre signature et, deuxièmement, sans mettre aucune
nuance, sans consulter la Chambre. Je me souviens très bien, nous avons
été saisis de ça par les journaux. Le premier ministre du
temps, M. Lévesque, était allé signer ça un soir
à Ottawa, sans en parler à personne. Là, nous l'avons
restauré, le droit de veto. Il revient intégralement, mais nous
aurons en plus, pour plusieurs modifications à l'avenir, la règle
du 7-50, qu'on appelle.
Cette règle du 7-50, ça veut dire ceci: c'est que sur un
grand nombre de sujets, il ne faudra pas l'unanimité de toutes les
provinces pour procéder à une modification, il suffira de
l'accord de sept provinces, représentant plus de 50 % de la population.
Mais si une décision était prise en vertu de cette règle,
transférant, par exemple, disons, la compétence en matière
d'enseignement universitaire au gouvernement fédéral, le
gouvernement du Québec pourrait se retirer de cet amendement-là
et dire: Nous conservons notre compétence, et exiger la part des
dépenses qu'encourrait le gouvernement fédéral qui devrait
être transférée au gouvernement du Québec.
Alors, en vertu de cette entente-là, nous avons un contrôle
sur toute modification éventuelle à l'équilibre
constitutionnel canadien. Deuxièmement, nous disposons d'une
règle plus souple pour les cas où le reste du pays voudrait se
donner certaines modifications qui répondraient à ses besoins. Je
comprends, quand on a une province comme l'île-du-Prince-Édouard,
par exemple, ou Terre-Neuve, qu'elles n'ont pas la population, elles n'ont pas
non plus les ressources pour se doter de tous les services dont peuvent se
doter des provinces comme l'Ontario et le Québec. Et moi, je comprends
qu'elles soient enclines à recourir au gouvernement
fédéral pour un certain nombre de choses. Mais en retour, quand
elles devront le faire et que le gouvernement fédéral pourra se
sentir justifié d'intervenir, nous autres, nous pourrons dire: Merci,
non merci, nous sommes capables de faire la tâche nous-mêmes et
nous la ferons. (10 h 20)
Si l'Opposition est capable de démontrer que ces affirmations que
nous faisons sont fausses, nous écouterons volontiers sa
démonstration. Mais si elle est incapable de le faire, elle devra
reconnaître, à son corps défendant, que nous avons
enregistré des progrès considérables à l'aide de
cette entente du mois d'août. Je suis confiant que lorsque l'entente sera
soumise au jugement de la population du Québec, celle-ci saura
reconnaître que sans fermer les voies de l'avenir, sans fermer la porte
à de nouvelles améliorations éventuelles dont nul ne peut
prévoir, pour l'instant, la nature et la portée, l'entente nous
donne les garanties de fond dont nous estimions avec raison avoir besoin pour
continuer de fonctionner avec confiance, sérénité et dans
un esprit construct à l'intérieur du système
fédéral canadien. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): merci, m. le ministre.
sur le même sujet, à savoir la motion proposant l'adoption du
principe du projet de loi 44, loi modifiant la loi sur le processus de
détermination de l'avenir politique et constitutionnel du québec,
je cède la parole à m. le député de shefford. vous
avez droit à 20 minutes, m. le député.
M. Roger Paré
M. Paré: Oui. Merci, M. le Président. Je vais
parler vite parce qu'il y a tellement de choses à dire là-dessus.
Premièrement, ce qu'il faut dire, c'est que le projet de loi 44,
contrairement à ce qu'on laisse entendre, ce n'est pas un petit
changement, mais c'est un change-
ment fondamental, majeur. Comme on dit en termes populaires: Ça
vire bout pour bout! Parce que là, ce n'est plus un
référendum sur la souveraineté, c'est tout à fait
l'inverse, c'est un référendum sur du fédéralisme
renouvelé mais plus centralisateur qu'on n'a jamais connu. Et ça,
on y reviendra lorsqu'on étudiera la question et les textes qui ont
été déposés. Mais pour ce matin, la loi 44, ce que
ça dit - et c'est là-dessus qu'il faut discuter - maintenant, on
va s'entendre sur un référendum où la proposition va
être un nouveau fédéralisme centralisateur par rapport
à la souveraineté qui avait été proposée
dans la loi 150.
Pour bien comprendre ce qui se passe, M. le Président, il faut
reculer en 1980 et arriver à aujourd'hui. Rappelons-nous, en 1980, les
Québécois ont dit: non. Les gens d'en face, qui nous disent
aujourd'hui que c'est une bonne entente et tout ça, n'oubliez pas, c'est
les mêmes personnes qui nous disaient qu'un non veut dire un oui. Un non
veut dire un oui, imaginez-vous! Rire du monde, c'est ça. Comment un non
peut vouloir dire un oui alors que c'est tout à fait l'opposé,
que c'est tout à fait contradictoire? Donc, on nous a fait accroire
n'importe quoi, comme on tente de nous en faire accroire encore
aujourd'hui.
Donc, on nous a dit: Un non veut dire un oui. Votez pour un non et vous
allez voir, il va y avoir modification à l'avantage des
Québécois. Qu'est-ce qui s'est passé? Avançons
toujours dans le temps. On arrive au rapatriement unilatéral de la
Constitution par le gouvernement d'Ottawa. Ottawa a décidé de
nous imposer une nouvelle Constitution faite en catimini. Vous vous rappellerez
«la nuit des longs couteaux», où le Canada anglais s'est
rallié contre le Québec. Et on nous impose une nouvelle
Constitution tellement inacceptable, M. le Président, que les deux
premiers ministres actuels, M. Bourassa et M. Mulroney, ont dit: II faut
refaire les devoirs parce que c'est inacceptable. Ils disaient même: II
faut réparer l'affront fait au Québec. Ça, c'est M.
Bourassa et M. Mulroney qui disent ça: II faut réparer l'affront
qui a été fait au Québec en 1982 d'une façon
unilatérale, alors que le gouvernement de ce temps n'a jamais
accepté, parce qu'on n'a jamais signé cette Constitution. Donc,
rapatriement unilatéral fait d'une façon inacceptable. Et
pourtant, lorsqu'à Ottawa on a fêté, on a signé
cette Constitution inacceptable, il y avait de ces ministres actuels, de
l'autre côté, qui sont allés applaudir, qui étaient
présents parce qu'ils étaient contents de ça, même
si le chef actuel a dit que c'était un affront au Québec.
Ensuite, il y a eu des négociations par l'ancien gouvernement du Parti
québécois et par le gouvernement libéral actuel,
négociations qui n'aboutissaient pas parce que c'est impossible de
s'entendre: il y a deux peuples dans ce pays, ça prend deux pays.
Mais ça n'a pas abouti. Est arrivée l'en- tente du lac
Meech en 1987. L'entente du lac Meech, encore une fois, c'est bon de le dire et
de se le rappeler, l'entente du lac Meech, c'était le minimum des
minimums. Jamais le Québec n'avait demandé si peu. Qui a dit
ça? Encore une fois, les premiers ministres actuels. Vous vous
rappellerez de ça. Meech, c'était le minimum des minimums. En bas
de ça, c'est un recul, c'est inacceptable. Et, pour moi, c'était
déjà un recul, Meech; ce n'était pas suffisant pour
pouvoir se développer dans tous les secteurs, social, économique
et culturel.
Mais il y a eu l'entente. Première erreur stratégique et
de négociation du gouvernement libéral. En toute vapeur, on est
réunis ici, à l'Assemblée nationale, pour voter l'entente
du lac Meech en juin 1987. C'était urgent. Il fallait qu'on soit les
premiers. Puis, ensuite de ça, bien, on a attendu les autres. Erreur
stratégique. C'est tellement une erreur stratégique que le
ministre Rémillard, le ministre de la Justice actuel, a dit: On ne se
refera pas prendre une deuxième fois. Cette fois-ci, on sera les
derniers à signer l'entente, parce qu'on s'est trompés la
dernière fois.
Puis on l'avait dit: Ne faites pas de coup vite, vous allez vous
attacher comme une saucisse, puis vous allez être dépendants des
autres provinces; ne faites pas cette erreur. On l'a faite. Très mauvais
négociateurs. Ça a commencé avec Meech, l'entente du lac
Meech.
Nous, il fallait, en toute vitesse, à toute vapeur, ratifier
à l'Assemblée nationale l'entente du lac Meech. On l'a fait puis,
ensuite de ça, bien, on a laissé les autres décider pour
nous, et ça a fait ce que ça a fait: finalement, l'échec
du lac Meech, rejeté par des gouvernements, le Manitoba et Terre-Neuve.
Mais, selon les sondages, c'était rejeté très
majoritairement par l'ensemble des Canadiens, de toute façon, des autres
provinces.
Qu'est-ce qui est arrivé suite à l'entente du lac Meech?
Vous vous rappellerez - et c'est bon de le dire, il faut que les
Québécois s'en rappellent - une déclaration du premier
ministre du 23 juin 1990. Il faut s'en rappeler. Il disait: En outre, c'est la
position de mon gouvernement de négocier dorénavant à 2 et
non à 11 avec le gouvernement canadien. On pouvait dire: Bien,
c'était le lendemain de l'échec de Meech, il s'est
défoulé. Sauf que, le 6 novembre 1990, il devait être
revenu sur ses deux pattes. Bien, là, il a déclaré,
à l'ouverture des travaux de la commission Bélanger-Campeau:
«Pour moi, l'échec de l'accord du lac Meech avait pour effet de
discréditer le processus de révision constitutionnelle existant
au Canada. On ne peut plus faire confiance, désormais, aux
mécanismes de négociation et de révision constitutionnelle
à 11 gouvernements.»
C'est notre premier ministre qui a dit ça, puis il n'était
pas forcé de le dire. C'est discréditer, cette façon
d'aller négocier de 1 à 11,
on est toujours perdants. Il nous disait ça.
Mais, suite à ça, on a mis sur pied la commission
Bélanger-Campeau où on a entendu des centaines et des centaines
de Québécois, des spécialistes venir nous dire que le
système actuel n'était pas viable. C'est le système actuel
qui n'est pas viable, parce que n'oubliez pas que la crise économique
qu'on vit, les 13 % de chômeurs qu'on a, l'économie qui tombe, ce
n'est pas dans un système souverain, c'est dans le système
fédéraliste actuel. Donc, c'est la réalité qu'on
est en train de vivre.
Les gens nous ont dit: Tant qu'il y aura dédoublement,
chevauchement de compétences, jamais on ne pourra se donner, ni au
Québec ni à Ottawa, des programmes pour relancer
l'économie. C'est ce que les économistes sont venus nous dire.
À tout le moins, si vous refaites une Constitution
fédéraliste, il ne faut plus qu'il y ait de dédoublement,
il ne faut plus qu'il y ait de chevauchement, sinon c'est l'inefficacité
et le gaspillage. Ce qu'on nous propose, c'est pire que ça n'a jamais
été, on va être en négociations perpétuelles
par des ententes administratives renouvelables à tous les cinq ans. (10
h 30)
Donc, il y a eu la commission Bélanger-Campeau. Ensuite, la loi
150. La loi 150 qu'on modifie ce matin, elle était claire: au plus tard
le 26 octobre 1992, un référendum sur la souveraineté du
Québec. Ensuite, le rapport Allaire, encore une fois où le
premier ministre actuel a son mot à dire - c'est son parti - le rapport
Allaire qui est arrivé exactement dans la même ligne que la
commission Bélanger-Campeau: il faut qu'il y ait au moins 22 secteurs
qui soient exclusifs au Québec. Mais exclusifs! Pas comme on nous
propose dans l'entente: exclusifs, non exclusifs! On «va-t-u»
arrêter de rire des gens si on veut être un peu crédible? Un
oui veut dire un non, exclusif veut dire non exclusif, ça veut dire le
partage. Voyons donc! Arrêtez de croire Robert, puis regardez dans le
«Petit Robert», vous allez peut-être comprendre la
signification des mots, il est temps. Donc, le rapport Allaire.
Ensuite, qu'est-ce qui est arrivé? Bien, là, il est
arrivé les offres fédérales de septembre 1991.
Levée de boucliers au Québec, inacceptable, c'est une camisole de
force pour le Québec. Est arrivé le rapport de la commission
Beaudoin-Dobbie. Levée de boucliers générale encore une
fois, de tous les milieux, inacceptable, une camisole de force pour le
Québec!
Arrive l'entente du 7 juillet dernier, encore une fois. Sauf que,
là, on approche de la date fatidique. Il y en a qui commencent à
amollir, mais toujours les mêmes. Même le premier ministre
lui-même a dit que cette entente, dans sa formulation telle qu'elle
était, elle est inacceptable. Et là, il y a eu des discours de M.
Bourassa qui a dit que jamais il n'acceptera un Sénat égal pour
le Québec, c'est un recul trop dangereux, c'est la fin de la
reconnaissance de deux peuples fondateurs. Jamais un Sénat égal,
M. Bourassa nous l'avait dit, il nous l'avait promis. Jamais il n'accepterait
une société distincte qui serait contrainte par la promotion et
le développement de ses minorités parce que, si on fait
ça, c'est au détriment de la majorité.
Donc, il y en a d'autres qui avaient fait des engagements aussi, l'autre
qui l'accompagnait à la table de négociation, le ministre de la
Justice et des Affaires intergouvernementales canadiennes, qui nous disait que
jamais le Québec n'accepterait, dans une nouvelle constitution, que
ça se fasse seulement par entente administrative renégociable,
c'est le chaos économique.
On s'est dit: Bien, il n'y pas de danger. Avec tout ce qu'ils ont dit et
tout ce qu'ils ont fait, ils n'iront pas négocier. Alors, malgré
tout ça, sans rien respecter, sans rien respecter, le premier ministre,
malgré ce qu'il avait dit que jamais il ne retournerait dans cette
façon de négocier à 11, est retourné à 17.
Malgré qu'il disait que l'entente du 7 juillet, ce n'était pas
bon, il n'y avait pas de garantie, il n'y avait même pas l'ombre de
l'essence de Meech, il est retourné pareil. On s'est dit: II a fait des
déclarations et le ministre de la Justice aussi, ils ont fait des
déclarations qu'ils n'accepteraient pas un Sénat égal,
qu'ils n'accepteraient pas une société distincte amoindrie et
qu'ils n'accepteraient pas des négociations perpétuelles
d'ententes administratives. En plus, on s'est dit: II y a la loi 150 et il y a
le rapport Allaire, on peut leur faire confiance. Quelle déception! Il a
cédé sur toute la ligne. Il y est allé, il y est
allé. Ce n'est pas l'entente d'un peuple qui s'est
négociée, ce n'est même pas l'entente d'un parti, ce n'est
même pas l'entente d'un gouvernement - ça, c'est dangereux, en
démocratie - c'est l'entente d'un homme.
La preuve que c'est l'entente d'un seul homme, c'est que, lorsque M.
Bourassa était à Ottawa, en train de négocier, personne ne
pouvait parler au Québec parce que personne du Conseil des ministres ne
savait ce qu'on négociait. On apprenait en même temps que tout le
monde ce qu'on avait perdu dans le jour. Aucun des ministres du Conseil des
ministres ne pouvait dire: L'entente veut dire telle chose. On nous a dit: On
va attendre le retour de M. Bourassa, qu'il nous explique. Le Parti
libéral, ça a été la même chose: On va
attendre le retour de M. Bourassa, il va nous expliquer, et on verra ce que lui
a décidé. Mais il n'a rien respecté, ni son parti, ni son
Conseil des ministres, pas son gouvernement, pas la loi 150. La preuve, c'est
que la loi 44 on est en train de la modifier. Il n'a pas respecté les
jeunes et il n'a même pas respecté ses propres principes et ses
engagements. Il n'a rien respecté, et ça, c'est incroyable.
Puis là, qu'est-ce que vous voulez? On nous arrive avec la loi
44, qui dit que le prochain référendum va porter, non pas sur la
souverai-
neté, mais sur l'entente constitutionnelle. Effectivement, de
quoi va-t-on parler au cours des prochains mois? On va parler de cette entente,
pour prouver aux Québécois qu'elle n'est pas bonne, qu'elle est
dangereuse, que c'est un recul à tous les niveaux. Donc, oui, ça
va porter là-dessus, et on va inviter les Québécois
à dire non à cette entente. Nous, on ne jouera pas le jeu des
gens d'en face, le jeu que ces gens-là ont joué en 1980 en disant
qu'un non veut dire un oui et qu'un oui veut dire un non. Un non, ça va
vouloir dire un non et un non par rapport à cette entente qui est
proposée aux Québécois. Cette entente n'est pas
acceptable. On dira aux Québécois: Dites non à cette
entente, cette entente d'un seul homme qui n'a respecté ni son parti,
surtout pas les Québécois et même pas son Conseil des
ministres. Dites non à cette entente inacceptable parce que ce n'est pas
assez.
Si on dit oui, on s'embarque ad vitam aeternam avec une camisole de
force qui nous ratatine. Il ne faut pas dire oui à ça parce que
ce n'est pas acceptable. Il faut dire non et ce que ça voudra dire
à Ottawa: On n'accepte pas cette entente, et au gouvernement: Vous allez
retourner négocier, avec l'appui de la population qui n'accepte pas si
peu. C'est ça que ça veut dire.
Ne rêvons pas en couleur, n'allons pas penser qu'on va pouvoir
recommencer ça ad vitam aeternam, hein? Je lisais dans le journal de ce
matin, ça vaut la peine de lire juste un paragraphe: «Le
Québec a obtenu le maximum», dit Marc Lalonde. Est-ce qu'il y a
plus fédéraliste? Lui, il l'a dit: Je vais être du
comité du oui. Puis, en même temps, ce qu'il dit - puis, n'oubliez
pas ça - «ceux qui pensent que le Québec pourrait aller
chercher plus dans une autre négociation constitutionnelle rêvent
en couleur. Le Québec a obtenu le maximum, croyez-moi, je connais assez
le Canada anglais.»
Alors, à ceux qui vous disent, l'autre côté, que ce
qu'on a là, c'est un minimum, qu'on va aller en chercher plus, c'est
faux! Arrêtez de mentir à la population! C'est faux! Même M.
Castonguay, qui est membre du comité du oui, aussi, nous a dit que,
quand on commence une négociation, ce qu'il y a sur la table, c'est le
maximum. Tout ce que ça peut faire pour le Québec, c'est de
diminuer. On en a eu la preuve, hein? On a quasiment tout perdu dans l'entente,
quand M. Bourassa a décidé de retourner, malgré ses
engagements. Là, c'est Marc Lalonde qui nous dit: On est allé
chercher le maximum. Alors, même ce que vous avez là, ne
rêvez pas en couleur. Tout ce que ça peut faire, c'est encore de
diminuer. Puis, c'est vrai, parce qu'on a laissé tomber tout ce qu'on
avait comme force.
M. Bourassa avait la chance d'avoir l'appui de son parti, l'appui de la
loi 150, l'appui de la commission Bélanger-Campeau. Qu'est-ce qu'il a
fait? Lui-même, lui-même, dans les semaines qui ont
précédé, il a dit: II n'y en aura pas, de
référendum sur la souveraineté. Voyons donc! On s'en va
négocier. On a la loi 150. On a la chance de l'utiliser comme force de
négociation pour aller en chercher un peu plus. Il dit: La loi 150,
inquiétez-vous pas, le Canada anglais, ce que je veux, c'est une entente
avec vous autres. Il n'y en aura pas, de référendum sur la
souveraineté.
Le samedi précédant la négociation, les jeunes
libéraux ont dit: Nous, on veut le respect de notre programme, le
rapport Allaire. Qu'est-ce qu'il a fait, M. Bourassa? Bien, il les a
réprimandés publiquement. Au lieu d'utiliser la force de la
jeunesse québécoise à l'intérieur de son parti, il
les a réprimandés comme des enfants. Au lieu d'utiliser ce
pouvoir, cet appui que ces jeunes lui donnaient, il les a ridiculisés.
Il les a chicanés, puis il a même utilisé sa
vice-première ministre. Voyons donc! Arrêtons de rire de la
population du Québec. Faisons confiance à notre jeunesse. On ne
l'a pas fait du tout. Bien, voyons donc! On s'est mis en état de
faiblesse, puis là, on se prépare à signer une entente qui
nous met en état, mon Dieu, presquement d'hibernation, puis on nous dit,
en même temps: Mais inquiétez vous pas! Quand on va
négocier des ententes administratives, bien là, on sera plus
forts. Bien, voyons donc! M. Castonguay vous l'a dit, M. Lalonde vous le dit -
des gens qui sont fédéralistes: Vous avez eu le maximum et, dans
l'avenir, vous allez avoir encore moins.
Quand on lit tout ce que tous les gens disent au Québec,
présentement, c'est unanime. C'est un recul. Les conseillers, les
spécialistes, les autres partis politiques, qui, au Québec,
maintenant, dit que c'est bon? Le chef du gouvernement, l'autre
côté, avec ceux qui, effectivement, sont du parti - puis ils
répètent -et Ghislain Dufour qui a toujours défendu, de
toute façon, les multinationales, puis les grandes entreprises qui ont
très souvent leur siège social en Ontario. Mais tous les autres,
y compris - puis, quand on regarde le journal, ce matin, on s'aperçoit
qu'ils sont nombreux - un nombre grandissant de libéraux qui trouvent
que ça n'a pas de bon sens.
Je pourrais vous les nommer, mais je dois vous dire, vous le savez
autant que moi, que ce soit M. Allaire, que ce soient deux autres personnes de
l'exécutif dont un qui l'a annoncé et l'autre qui devrait
l'annoncer aujourd'hui. Des membres de l'exécutif, des gens qui ont
travaillé avec acharnement et avec confiance disent qu'ils ne peuvent
pas accepter ça. Même le député de libéral de
Drummondville, M. St-Roch, qui dit qu'après avoir parlé à
M. Bourassa personnellement, à deux reprises, puis après avoir vu
les textes, il n'est pas capable d'accepter ça pour l'avenir des
Québécois. Bien, imaginez-vous! Il n'a même pas le Parti
libéral, dans sa totalité, qui est capable de défendre
ça. Il y en a qui l'ont dit, puis d'autres qui vont le dire
bientôt: C'est inacceptable! Là, on nous dit: Bien oui,
mais c'est pour la paix sociale et pour passer à autre chose, le
développement économique. C'est complètement le contraire,
et c'est ça qu'on va expliquer aux Québécois lors de la
campagne référendaire qui s'en vient. Quelle stabilité
allons-nous avoir et quelle paix sociale allons-nous avoir? C'est tout à
fait le contraire, c'est tout à fait le contraire. Quand on dit que
c'est dangereux, cette entente-là, ça veut dire que ça va
venir rouvrir le dossier linguistique. Ça va venir rouvrir un dossier
qui a amené tellement de problèmes au Québec. La paix
linguistique était revenue grâce à la loi 101. (10 h
40)
Bien, maintenant, c'est clair et net, on va rouvrir ce dossier. Le
premier ministre dit le contraire, l'autre côté, mais je dois vous
dire qu'il est le seul à dire ça. Clyde Wells, le premier
ministre de Terre-Neuve, a dit quoi, lui? Je l'accepte, parce que la
société distincte, ça ne veut rien dire. Aucun pouvoir de
plus au Québec. J'accepte ça maintenant, parce que ça va
être soumis à la clause Canada et ça va être soumis
à l'obligation de faire la promotion... S'occuper de la promotion du
développement, de la vitalité de la minorité anglophone au
Québec. Ça veut dire quoi? Bien, c'est clair et net, ce n'est pas
du français qu'on va le faire, c'est de l'anglais. Il est tout
tranquille. Tous les spécialistes ont dit que c'était un recul
par rapport à la société distincte, et même,
déjà, il y a des gens qui ont dit: Ne vous inquiétez pas,
on veut utiliser ça maintenant pour aller en appel. Bien voyons!
ça «peut-u» être plus clair? Donc, on vient non pas
ramener, non pas conserver la paix au Québec, la paix sociale, on s'en
vient rouvrir un dossier qui est tellement sensible qu'on connaît tout ce
que ça a amené comme problèmes. Au niveau des autochtones,
est-ce que ça va régler le problème des guérites,
des casinos et des bingos? Absolument pas, ça va venir com-plexrfier,
parce que, maintenant, on va reconnaître les gouvernements autochtones.
Et est-ce qu'on va relancer l'économie? Qu'est-ce que Québec a
été chercher pour être capable de relancer
l'économie? Absolument rien, au contraire, on vient de
constitutionnaliser les dédoublements, les chevauchements. On vient de
faire en sorte que les chevauchements, le gaspillage, l'inefficacité,
vont être multipliés et constitu-tionnalisés.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je vous demande de
conclure s'il vous plaît.
M. Paré: Cette entente est inacceptable, et c'est pour
ça qu'on va voter contre la loi 44 qui fait en sorte qu'on ne respecte
pas les Québécois. Et n'oublions pas que ces gens-là nous
faisaient accroire qu'un non voulait dire un oui. Si, aujourd'hui, ils nous
disent que c'est bon, soyons très prudents, soyons très
vigilants, les gens du Québec. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Shefford. Sur le même sujet, je cède la
parole à M. le député de Roberval et ministre du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche. M. le ministre, vous avez droit à 20
minutes.
M. Gaston Blackburn
M. Blackburn: Merci, M. le Président. Il y a de ces
occasions, dans la vie d'un député, qui sont toujours
extrêmement importantes, et le débat dans lequel nous sommes est
particulièrement important pour la population du Québec. Alors,
donc, il me fait plaisir, M. le Président, de m'adresser à cette
Assemblée en ma qualité de député du comté
de Roberval, bien sûr, et ministre régional du
Saguenay-Lac-Saint-Jean et titulaire du ministère du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche. Les prochaines minutes me permettront à moi
aussi d'expliquer l'importance de modifier la loi 150 votée en cette
Assemblée par notre gouvernement, et qui prévoit un
référendum sur la souveraineté du Québec.
Avant d'aller plus loin, M. le Président, je crois qu'il est
important de procéder à un bref historique de ce qui s'est
déroulé au plan constitutionnel au cours des dernières
années. Tous se souviendront qu'en 1980, les Québécoises
et les Québécois ont voté non lors du
référendum. La population avait alors décidé de
demeurer à l'intérieur du pays, le Canada, et, surtout, avait
décidé de se développer au sein de la
Fédération canadienne. En 1987, les premiers ministres de toutes
les provinces canadiennes concluaient un accord constitutionnel dans lequel le
reste du Canada reconnaissait, entre autres, le caractère distinct du
Québec et lui redonnait le droit de veto que nos amis de l'Opposition,
ces ardents défenseurs des droits du Québec laissaient tout
bonnement tomber en 1982. Et c'est important de ne pas l'oublier, parce que je
sais que ça fait mal à l'Opposition, durant tout ce débat,
de leur rappeler ces moments historiques.
En 1990, bien que la majorité des provinces aient
été d'accord avec cette entente, plus connue comme l'accord du
lac Meech, nous avons été plongés dans une crise
constitutionnelle dont le dénouement semble enfin proche. Je rappelle,
M. le Président, qu'à ce moment précis, notre premier
ministre avait déclaré qu'il revenait à la population du
Québec, et à elle seule, dorénavant, de prendre les
décisions et de faire les choix qui s'imposaient concernant son avenir
politique et constitutionnel. M. Bourassa a toujours respecté ce qu'il a
dit à cet égard. De plus, le Québec fut absent des
discussions constitutionnelles jusqu'à ce que les autres provinces
acceptent de négocier sur la base des acquis de Meech. Comme vous pouvez
le constater, M. le Président, beaucoup d'eau a coulé sous les
ponts depuis 1980, depuis que les Québécoises et les
Québécois ont décidé que le Canada était le
pays idéal pour assurer leur avenir.
M. le Président, à ce moment-ci, il faut parler de
l'évolution de notre société, tant du point de vue
intellectuel que politique. Il est vrai que cette Assemblée a
voté la loi 150. Il est vrai que cette loi prévoit la tenue d'un
référendum sur la souveraineté. Mais, depuis ce temps,
comme je l'ai dit plus tôt, le dossier constitutionnel a beaucoup
évolué. Il a fait un pas en avant, un pas important. Nous avons
maintenant une entente remarquable, habilement négociée par le
premier ministre du Québec, considéré à juste titre
comme l'homme de la situation, quoi qu'en dise les opposants, une entente des
plus acceptables qui permet au Québec de faire des gains importants sur
des aspects qui nous préoccupent de façon particulière.
Voilà pourquoi, M. le Président, nous devons proposer au peuple
québécois ces offres qui répondent aux besoins et aux
demandes traditionnelles du Québec. Voilà pourquoi nous devons
modifier la loi 150 pour que tous les Québécois et les
Québécoises aient l'occasion, l'opportunité, voire
même la chance de se prononcer sur leur avenir constitutionnel.
Peut-on blâmer le gouvernement de vouloir expliquer les choix
qu'il a faits et les conséquences d'un déchirement avec nos
voisins? Je ne le crois pas, très sincèrement. On peut bien
faire, comme le font depuis pas mal de jours l'Opposition et certains
opposants, de la démagogie; ils le font bien. On peut bien colporter
toutes sortes de choses à propos de cette entente, comme le fait depuis
plusieurs jours le Parti québécois; je ne crois pas que cela
aurait pour effet de bonifier le débat, au contraire. On sent bien que
l'Opposition n'a qu'une seule idée en tête - et c'est important de
ne pas l'oublier - soit celle d'empêcher la population
québécoise de connaître véritablement ce que
comportent ces offres.
Pour l'Opposition, il vaut mieux dire n'importe quoi que de laisser les
Québécoises et les Québécois décider de leur
avenir. Évidemment, il est plus facile de dire aux gens que ce qu'il y a
dans cette entente n'en vaut pas la peine, qu'il n'y a rien là-dedans,
que le Québec s'est fait avoir. Faites-nous confiance, clame le Parti
québécois. Comment peut-on accorder notre appui, comment peut-on
accorder notre support à un parti dont le seul et unique objectif, c'est
le démembrement du Canada, sans aucune condition? Ce n'est pas
compliqué, ce parti n'est pas capable de donner des indications de ce
que sera demain avec la souveraineté, le budget de l'an 1, quelle
monnaie on va utiliser - plusieurs formules sont proposées -
l'insécurité dans laquelle nous serions plongés.
Économiquement, par exemple, cette option aurait des conséquences
au mieux imprévisibles. L'éclatement d'une
fédération ne peut se faire sans de sérieux
problèmes, et surtout quand on essaie de camoufler cet éclatement
par des formules plus ou moins applicables.
Depuis quelques semaines déjà, les ténors
souverainistes utilisent toutes les tribunes imaginables afin de berner - je
dis bien «afin de berner» - la population. Il faut, M. le
Président, dire «Garde!» aux Québécoises et
aux Québécois contre ces démagogues, contre ces
alarmistes. Je le sais, je l'ai vu dans ma région, celle du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, que vous connaissez bien, où le Parti
québécois a tenté, lors d'une rencontre où il n'a
même pas réussi à faire tout à fait salle pleine -
à peu près 1000 personnes - où étaient
présents le chef du Parti québécois, M. Parizeau, le chef
du Bloc québécois, M. Bouchard, tous les ténors
souverainistes, pour plusieurs de la région... Toutes les organisations
avaient été mises à contribution. Et réussir
à remplir à peine une salle de 1000 personnes, c'est une
indication; et cela dans un coin de province où, prétend-on,
comme on le pense à tort, la cause souverainiste est gagnée
d'avance. Mais j'ai une petite nouvelle pour vous. Lorsque nous expliquerons le
contenu de l'entente - et c'est ce que nous commençons à faire
dès aujourd'hui - lorsque la population sera à même de
reconnaître les gains considérables du Québec, nos
concitoyens, et particulièrement ceux que je représente, diront
oui, un oui à notre épanouissement économique et culturel
dans le Canada. Mais, pour cela, il faut leur soumettre cette entente.
M. le Président, lorsque nous parlons de démocratie, nous
n'avons pas de leçon à tirer de l'Opposition. Ce parti ne veut
pas que la population se prononce sur ces offres, parce qu'il sait pertinemment
bien qu'elles sont acceptables, parce que cette entente marque un pas en avant
très important, et non un recul, comme le disait le chef de l'Opposition
dans cette Assemblée, hier. Tout le monde, y compris l'Opposition,
pleurait, en 1990, lors de l'échec de Meech. Maintenant que nous avons
tous les éléments compris dans Meech et même plus,
voilà qu'il n'est plus question de répondre positivement à
ces offres; ce n'est plus suffisant, ça ne fait pas leur affaire. Il ne
faut pas se questionner longtemps sur ce que désire vraiment
l'Opposition. Ce n'est sûrement pas une entente, c'est la dernière
des choses qu'elle désire. Ce qu'il faut se demander, et c'est ce que
veut la population du Québec, et cela... Elle veut une entente, M. le
Président, et c'est très clair, une entente qui respecte ses
droits, sa culture et qui assure son avenir. (10 h 50)
L'entente du mois d'août répond à ces aspirations.
Tout d'abord, le Québec est reconnu comme société
distincte. N'est-ce pas ce que nous demandions depuis plusieurs années
déjà? Même l'Opposition réclame tout haut cette
reconnaissance qui va nous permettre de jouer un rôle dynamique, tout en
faisant la promotion de notre statut particulier. Nous l'avons obtenu, mais
encore, on veut laisser croire qu'on aurait pu aller beaucoup plus loin.
Parlons un peu du droit de veto. Nous en avons obtenu pas moins de cinq.
Tout d'abord, le Sénat. Le Québec jouit maintenant d'une double
majorité au Sénat en matière de langue et de culture. Ce
veto absolu procure au Québec toute la sécurité dont il a
besoin afin de préserver et de promouvoir son identité
culturelle. Qu'il s'agisse du Sénat, de la représentation
à la Chambre des communes, de la composition de la Cour suprême ou
de la participation des nouvelles provinces à la procédure de
modifications constitutionnelles et au Sénat, le Québec
possède un véritable droit de veto, quoi qu'en dise l'Opposition.
En aucun temps, le Parti québécois n'a réussi à en
obtenir autant des autres provinces. Pourtant, il a déjà eu le
temps de le faire, lors de son passage au pouvoir. Et on va nous blâmer
d'en être venus à une entente?
M. le Président, l'entente que nous avons conclue a reçu
l'accord unanime de toutes les provinces, de tous les premiers ministres.
Déjà, d'avoir réussi cela, c'est tout un exploit. Lorsque
M. Bourassa s'est rendu au lac Harrington, on savait que ce ne serait pas
facile de faire avancer la cause du Québec. À force de travail,
le premier ministre a fait comprendre la position du Québec à ses
homologues des autres provinces. La marge de manoeuvre, on l'a vu, était
alors fort restreinte. On ne nous donnait pas grand chance d'en arriver
à cet accord. Mais, voilà, c'est fait! C'est une
réalité, et c'est important de prendre en considération,
et surtout, au cours des prochaines semaines, de dire à la population du
Québec d'être très prudente et, surtout, d'être
à l'écoute.
Évidemment, il est facile pour les amis d'en face de
prétendre qu'on aurait pu faire beaucoup mieux. Mais cela, on ne le
saura jamais. Le parti que je représente fièrement ne
prétend pas qu'il s'agit d'une entente parfaite. Nous sommes cependant
conscients que nous étions partie prenante d'une négociation
où se trouvaient plusieurs intervenants dont l'objectif était
d'obtenir le meilleur pour sa province. À cet égard, le
Québec peut dire: Mission accomplie!
Il ne faudrait pas non plus croire que cette entente constitue une fin
en soi. Je crois, M. le Président, que nous continuerons notre
évolution puisque cette entente va nous permettre d'obtenir d'autres
gains. On pourrait comparer l'entente à un solage, une base solide sur
laquelle nous bâtirons un avenir prometteur pour notre population. J'ai
entendu, maintes fois, des commentaires négatifs. Sur l'entente, on nous
dit qu'il va falloir encore négocier certaines ententes, notamment sur
le partage des pouvoirs, et que cela risque de s'éterniser. Oui, c'est
vrai qu'il va falloir, bien sûr, continuer ces négociations. Ce
processus de négociations va se poursuivre, c'est tout à fait
normal. Mais, contrairement aux indépendantistes, nous saurons avec qui
négocier, et ça, c'est clair. Car vous le savez, je ne suis pas
du tout certain que nous aurons beaucoup d'intervenants autour d'une
éventuelle table de négociation suite au
démantèlement du Canada. Voilà ce qu'on peut appeler nager
dans l'incertitude. Et c'est le lot du Parti québécois, et c'est
le lot qu'il propose à la population québécoise. Avec qui
allons-nous négocier? Sur quelle base? Il est assez clair que cela est
plutôt obscur.
Et comme si ce n'était pas suffisant, M. le Président,
voilà qu'on désire dissocier souveraineté et
indépendance d'un non aux offres constitutionnelles. Mais qu'est-ce que
cela veut dire? Je vous le demande. Peut-on dire non à des offres, mais
continuer à dire oui au Canada? Il faudrait se brancher. Il faudrait
savoir ce que l'on veut. Pour la nième fois, le Parti
québécois va tenter de mêler les cartes; c'est sa
spécialité. À les voir hier, la mine déconfite, on
sentait, et dans la façon de s'exprimer et dans le ton qu'ils emploient,
l'alarme qu'ils ont de la situation. On est en train de leur glisser le tapis
en dessous des pieds. Donc, dire non aux offres sans dire oui à
l'indépendance. De notre côté, cela est clair: on dit oui
à l'entente, oui au Canada, oui au développement de notre
province.
En terminant, M. le Président, je tiens à
réitérer que nous ne pouvons pas passer à
côté de cette entente. Sans être parfaite, elle va nous
permettre de réaliser de grandes choses. Pour cela, il faut qu'on
soumette ces offres à la population du Québec et c'est cela, j'en
suis convaincu, qu'elle désire ardemment. Alors, merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Sur le même sujet, je cède la parole à M. le
député de Westmount.
M. Richard B. Holden
M. Holden: Merci, M. le Président. Au cours du mois
d'août, le Parti libéral du Québec a fait un virage de 180
degrés; moi aussi, j'en ai fait un! La différence, M. le
Président, c'est que les libéraux se sont tournés vers le
passé, tandis que, moi, j'ai choisi l'avenir. Les libéraux se
sont réfugiés chez leur grand frère, à Ottawa,
tandis que, moi, j'ai décidé de demeurer au Québec. Et
l'avenir du Parti libéral du Québec semble dépendre de
Clyde Wells, Don Getty, Ovide Mercredi; le mien est attaché au peuple
québécois.
M. le Président, j'ai regardé avec des centaines et des
milliers d'autres Québécois le triste spectacle d'un Jean Allaire
applaudi, il y a 18 mois, rejeté aujourd'hui parce qu'il refusait de
jouer le jeu des tireurs de ficelles. Il faut donner crédit à Me
Allaire et aux jeunes libéraux qui persistent à s'opposer aux
offres malgré des pressions inouïes.
Clearly, Mr. Speaker, the federalists within the Liberal Party have won
the day. But for how long? Last year, the hero was Jean Allaire. Next
year, perhaps it will be Jean-Guy Lemieux. For the moment and for the
present, there is only one voice in the Liberal Party and that is the Premier's
voice. Mr. Speaker, the Premier is just buying time. He knows, we all know that
Que-beckers will not be satisfied for long with the crumbs they are getting
under this latest deal.
Pendant le congrès libéral, j'ai vu le ministre de la
Santé dire que le Parti libéral n'avait pas renié Allaire.
Il disait que le paquet fédéral était une étape
vers Allaire. Si tel est le cas, M. le Président, il faut le dire
à Clyde Wells. Parce que je l'ai vu, lui aussi, et lui, il disait que,
pour lui, cet accord, c'est final. Le Québec doit décider oui ou
non, une fois pour toutes, s'il veut rester dans la Confédération
canadienne. (11 heures)
Mr. Speaker, this deal will not satisfy Québec for even one year.
As soon as the negotiations over the unemployment insurance break down - and
they certainly will - this so-called «unity package» will fall
apart and we will all be back into recriminations and ultimatums, and the whole
debate will start once again.
Pourquoi obliger tout le monde à subir d'autres déceptions
et de nouveaux reproches et accusations? Ce n'est pas juste envers le Canada et
c'est injuste pour les Québécois. Soyons honnêtes, M. le
Président, disons non tout de suite. Au fond, les gens du reste du
Canada vont être soulagés parce que, eux, ils croient qu'ils ont
fait d'énormes sacrifices pour nous plaire. Admettez, admettez, vous
autres en face, que, pour vous, ce n'est qu'un début. Soyez francs avec
le reste du Canada. Les naïfs cherchent la solution Deschamps, «le
Québec indépendant dans un Canada uni», mais cela,
ça n'existe que dans les monologues et les rêves.
M. le Président, mon approche à la question
référendaire et aux offres, c'est plutôt juridique. Le
gouvernement, dans ce cas particulier, est le demandeur et, donc, il a le
fardeau de la preuve et il doit établir la validité de toutes et
chacu-nes de ces offres. Et puisque le fédéral a
décidé que le paquet dans son entier doit être soumis
à la population, il doit satisfaire le tribunal, c'est-à-dire le
peuple québécois, que chaque anneau de la chaîne tient.
Autrement, la solidité est brisée et la cause tombe en
miettes.
Mais avant d'analyser les failles dans la chaîne, examinons
l'ancre à laquelle elle est attachée. Ce n'est plus le Canada
formé par Macdonald et Cartier, dignes représentants des deux
peuples fondateurs. Non, M. le Président, c'est un nouveau pays que je
n'accepte pas, un pays à 10 ou à 12 ou à 17 ou à je
ne sais pas à combien. Le Canada que j'aimais est devenu un pays
chicanier et querelleur. Je ne suis pas un ennemi du Canada, je suis un ami du
Québec.
M. le Président, l'élément le plus faible de la
cause du gouvernement, c'est la soi-disant réforme du Sénat. Un
pays qui se veut attaché au système parlementaire britannique ne
peut pas accepter une institution aussi bizarre que celle proposée dans
le paquet fédéral. L'idée même est totalement
étrangère à nos moeurs et à notre concept de
représentation basé, autant que possible, sur
l'égalité de chaque citoyen et citoyenne. Comment expliquer, M.
le Président, que l'île de Montréal, avec 1 800 000
d'habitants, va avoir, disons, 2 sénateurs et que
l'île-du-Prince-Édouard, avec ses 175 000 habitants, va en avoir
6. C'est inconcevable et c'est inacceptable.
Mr. Speaker, the section of the package which deals with the Senate is,
in my view, the worst and most unacceptable part of this entire proposal. It is
not what the Triple-E supporters and advocates wanted, it is unacceptable to
women's groups all across Canada, and it undermines the concept of the two
founding nations, which is the basis of the country. To put it crudely, Mr.
Speaker, the new Senate is a dog's breakfast.
As recently as July 17th, the Premier, his office at least, was saying
that Mr. Bourassa was opposed to a Senate based on equal representation from
each province. What in the world happened to Mr. Bourassa when he joined the
expanded negotiating table? He bought into a deal which reduced Quebec's weight
in the Senate from 24 % to 9 %. That is some deal and some negotiator! He also
agreed to water down Quebec's protection of the French language and culture by
accepting that francophone Senators from Nouveau-Brunswick and Ontario and from
the West would take part in the so-called double majority.
Non seulement le Québec pourrait perdre tout contrôle sur
ces sujets vitaux mais s'il s'agit de garder une majorité
québécoise parmi les sénateurs francophones, c'est les
anglophones du Québec qui vont payer les frais, parce que le
gouvernement du Québec éliminerait le ou les sénateurs
anglophones pour combler le déficit.
Liberals will tell you that the 25 % guarantee of the Commons seats
makes up for the loss of Senate seats. That Mr. Speaker, is a snare and a
delusion. Québec has always had more than 25 % of the Members of the
House of Commons. In fact, in the Trudeau Government of 1970, the Québec
representation in the House of Commons was 28 %, and at that particular moment
that majority brought in the War Measures Act. As far as I am concerned,
Quebec's 25 % back in the War Measures Act was no help to Québec at
all.
As I said earlier, Mr. Speaker, the case for the Government is only as
strong as its weakest link. It is difficult for me to decide which of the
elements of this particular package is flimsier, because there is a multitude
of deficiencies. Take for example the distinct society clause, Mr. Speaker. It
is going to cause an incredible amount of trouble and litigation, and
it is not going to lead to better relations between the minorities and
the majorities.
Les gouvernements autochtones, M. le Président, qu'on veut
laisser aux juges, vont créer des problèmes innombrables:
problèmes sociaux, problèmes financiers, et surtout des
réclamations et espérances que ni les gouvernements ni les juges
ne peuvent satisfaire.
M. le Président, je termine avec un voeu, c'est que la population
du Québec, qui est fatiguée de se faire parler de la
Constitution, mette sa fatigue de côté pour quelques semaines.
Qu'elle écoute calmement les arguments de part et d'autre.
I say to you, Mr. Speaker, and through you to the people of the rest of
Canada, that the people of Québec will not be fooled by window dressing.
This whole exercise by Joe Clark and by his band of Premiers and Native leaders
is an exercise in smoke and mirrors. In fact, when they came up with the
package on July the 7th, they were not at all sure whether Québec would
buy into it or not. And Quebeckers never dreamed that their Premier would
actually be hoodwinked into accepting it. But he was and he did.
So now it is up to the citizens, Mr. Speaker, to do what the Premier
should have done: to say no. No to legislation by judges and courts; no to a
foreign notion of equality of the provinces; no to everlasting negotiations and
interminable squabbling over unemployment insurance, culture, immigration,
telecommunications, regional development and a host of other subjects, and no
to the end of the Canadian dream of a bicultural country founded by two great
peoples, the English and the French.
To say no, Mr. Speaker, one does not have to be a sovereignist or a
federalist, one has only to be a reasonable, rational Quebecker who realizes
that this package is a recipe for disaster.
This time, Mr. Speaker, no means no. Merci, M. le Président. (11
h 10)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, je vous rappelle
que nous sommes à débattre la motion proposant l'adoption du
principe du projet de loi 44, Loi modifiant la Loi sur le processus de
détermination de l'avenir politique et constitutionnel du Québec.
Je cède maintenant la parole à M. le député de
Saint-Hyacinthe. Vous avez droit à une intervention de 20 minutes, M. le
député.
M. Charles Messier
M. Messier: Merci, M. le Président. J'apprécie
vivement l'occasion qui m'est offerte aujourd'hui de m'adresser à mes
collègues de l'Assemblée nationale sur la modification que nous
apportons à la loi 150.
C'est pour moi une occasion privilégiée de faire valoir
les mérites de l'entente intervenue entre les premiers ministres
à Charlottetown. J'ai l'intention de procéder à cette
démonstration des mérites de l'entente constitutionnelle à
travers un bref rappel de l'histoire.
On se souvient, M. le Président, qu'en 1985, nous avons
été élus avec un programme politique contenant plusieurs
volets, dont un volet constitutionnel. On s'en rappelle fort bien. Si on devait
rapidement procéder, ou résumer ce volet constitutionnel d'un
programme politique sur lequel la population du Québec nous a fait
confiance en 1985, on pourrait dire qu'il s'agissait de réparer l'injure
faite à notre société au cours du rapatriement
unilatéral de la Constitution en 1982. Cette injure pourrait être
réparée moyennant la satisfaction de certaines conditions que
nous posions pour réintégrer la grande famille canadienne. Ces
conditions, elles sont connues. Ce sont la reconnaissance de la
société distincte, l'obtention de garanties touchant la
sécurité culturelle, notamment au niveau de l'immigration.
La limitation du pouvoir fédéral de dépenser, c'est
un point très important, une formule d'amendement qui permet au
Québec de s'opposer à toute modification constitutionnelle allant
à rencontre de ses intérêts. Enfin, un droit de
participation au processus de sélection et de nomination des juges
à la Cour suprême du Canada. On s'en souvient, M. le
Président, que ce sont ces conditions qui avaient été
acceptées en 1987, à l'occasion de la signature du lac Meech. On
se rappelle aussi que l'Assemblée nationale avait entériné
cet accord. On se rappelle surtout que deux Législatures provinciales
avaient refusé d'entériner cet accord, entraînant par cette
occasion sa perte ainsi qu'un profond sentiment de rejet au sein de la
population.
Faisant face à la situation, notre gouvernement a mis en place
une stratégie de négociation basée sur l'obligation de
résultats, et dans laquelle s'insère la loi 150 que nous
modifions aujourd'hui. La stratégie de notre gouvernement consistait
à créer un rapport de force susceptible de nous permettre
d'obtenir des offres acceptables de la part du reste du Canada. Jusqu'à
ce jour, la stratégie a fonctionné. Nous avons des offres, et
notre échéancier a été respecté par nos
partenaires canadiens.
Cela dit, nous franchissons, avec cette modification à la loi
150, un pas de plus dans la stratégie en vue d'obtenir le maximum de
gains pour la population que nous représentons. Ce pas de plus
intervient évidemment à la suite de l'entente intervenue entre le
premier ministre québécois et ses homologues canadiens. Il trouve
sa raison d'être dans les gains obtenus pour le Québec, au cours
de cette négociation, par notre premier ministre, M. Bourassa.
Ces gains, ils sont hautement significatifs. On doit d'abord dire que le
Québec a obtenu au
cours de cette négociation et dans cette entente plus que le lac
Meech. Il faut le dire sans réserve, et je vais vous le
démontrer, M. le Président. Cette entente constitutionnelle n'est
rien de moins qu'un Meech plus, et elle constitue un Meech plus pour plusieurs
raisons. La première raison tient évidemment au fait qu'on
retrouve dans cette entente les points convenus dans l'accord du lac Meech -
cela va de soi - ce qui veut dire que, dans cette entente, nous avons la
reconnaissance de la société distincte, une représentation
de 33 % des juges de la Cour suprême, des garanties touchant notre
sécurité culturelle, notamment au niveau de l'immigration, des
balises au pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral et,
finalement, des formules d'amendement qui permettent au Québec de
s'opposer à toute modification constitutionnelle allant à
rencontre de ses intérêts. Enfin, il y a, on le sait, plusieurs
veto contenus dans l'entente. Ainsi, on voit bien qu'en ce qui concerne les
conditions de Meech nous les avons dans cette entente. Elles sont là,
très présentes, et pratiquement dans les termes formulés
à l'époque.
Mais il y a plus que cela dans cette entente. C'est pourquoi nous
qualifions cette entente de Meech plus. Dans cette entente, il y a des gains
appréciables au chapitre de la représentation du peuple
québécois dans les institutions canadiennes. L'entente contient
des modifications importantes au niveau de la Chambre des communes et au
Sénat.
Voyons d'abord celles concernant la Chambre des communes. À la
suite de cette entente, le Québec aura 18 nouveaux sièges
à la Chambre des communes; il gagne ainsi 18 sièges de plus. La
proportion de sièges réservés au Québec passe ainsi
de 25 % à 27 %. Il s'agit là d'un gain qui est loin d'être
négligeable lorsqu'on considère le rôle et le poids de la
Chambre des communes dans la prise de décision au niveau de nos
institutions canadiennes. La Chambre des communes est le lieu par excellence
où se prennent des décisions politiques qui touchent l'ensemble
des Québécois et des Québécoises. Ainsi, une telle
augmentation de la représentation québécoise dans cette
enceinte constitue un gain appréciable pour le peuple
québécois. Évidemment, nos adversaires ignorent ou veulent
ignorer ce gain. Ils analysent ces gains et d'autres à partir d'une
situation ou d'une conception archaïque de la souveraineté, comme
le disait il y a quelques jours notre premier ministre.
L'archaïsme de leurs propos apparaît également tout
aussi évident dans leur évaluation des gains que nous avons
obtenus au Sénat. Les ténors de l'Opposition nous ont
accusés d'avoir accepté le principe de l'égalité
des provinces au Sénat. Mais, comme le disait le premier ministre du
Québec, M. Bourassa, il y a quelques jours, c'est d'autres avant nous
qui ont accepté ce principe. À cet égard, la
démarche de notre gouvernement n'est pas différente de celle des
gouvernements qui nous ont précédés, y compris le
gouvernement Lévesque, qui est à l'origine du beau risque.
Mais revenons à la Constitution canadienne, et en particulier au
Sénat, ce Sénat à l'intérieur duquel nous allons
détenir, à la suite de cette entente, un veto absolu en
matière de langue et de culture, beaucoup moins de pouvoirs que ne
l'auraient souhaité les provinces de l'Ouest, mais aussi, il faut le
dire, beaucoup moins de pouvoirs qu'à la Chambre des communes qui, comme
je l'ai dit auparavant, demeure le lieu par excellence des décisions
politiques qui affectent notre population. De plus, il faut dire qu'au niveau
de la Chambre des communes nous avons non seulement obtenu 18 sièges de
plus, mais également la garantie constitutionnelle d'être
représentés par au moins 25 % des sièges à la
Chambre des communes, et cela, indépendamment de notre poids
démographique. Il s'agit là d'une autre nouveauté par
rapport à Meech, une nouveauté qui représente une police
d'assurance et une reconnaissance explicite du caractère distinct du
Québec. Enfin, il s'agit d'une nouveauté qui assure un rôle
important à la population québécoise dans la conduite des
affaires canadiennes.
Mais il faut également souligner, au chapitre des institutions
canadiennes, que l'entente contient une garantie pour le Québec,
c'est-à-dire une discrétion pour choisir le mode de
sélection des sénateurs. Encore là, il s'agit d'une
nouveauté par rapport à Meech qui est loin d'être
négligeable si on l'examine, comme les autres, dans la perspective de la
souveraineté partagée qui est celle de notre formation politique,
également partagée dans les coins les plus dynamiques de notre
planète.
M. le Président, notre conception de la souveraineté,
c'est-à-dire la souveraineté partagée, est une conception
de structure politique adaptée à notre temps. Elle n'est pas,
comme celle de nos adversaires, héritée des siècles
passés. Elle est inscrite au coeur des grandes tendances de notre temps,
les tendances, faut-il le préciser, les plus dynamiques et les plus
actuelles en matière de partage de pouvoirs et de
délégation de pouvoirs, ou encore de souveraineté. (11 h
20)
M. le Président, notre conception de la souveraineté
partagée, telle qu'elle s'exprime dans cette entente conclue par les
premiers ministres, répond aux besoins de notre temps et est
adaptée à la réalité et aux contraintes tant
géographiques qu'économiques dans lesquelles nous évoluons
aujourd'hui. C'est parce que nous sommes convaincus que nous franchissons
aujourd'hui un pas de plus dans notre stratégie visant à faire en
sorte que ces gains qui dépassent largement l'entente du lac Meech
soient inscrits dans la Constitution canadienne. J'ai bien dit, M. le
Président, un pas de plus, c'est-à-dire que
nous sommes extrêmement soucieux d'éviter une reproduction
de l'épisode de Meech. Ce souci est présent dans tous nos gestes,
y compris dans celui que nous posons aujourd'hui avec cette modification
à la loi 150.
Comme vous le savez, M. le Président, cette modification vise
à permettre aux Québécois et aux Québécoises
de se prononcer sur les offres qu'ils ont reçues à travers cette
entente. Cette modification respecte l'esprit de la loi 150. La
possibilité de tenir une consultation populaire sur les offres provenant
du reste du Canada est implicite dans le texte de la loi 150. Ainsi,
contrairement à ce que disent nos adversaires, nous sommes pleinement
fondés de procéder, comme nous le faisons aujourd'hui, avec cette
modification à la loi. Nos adversaires tentent de démontrer le
contraire, et je pense qu'ils ont tort de le faire. Or, un seul regard sur
notre programme politique, y compris le rapport Allaire, suffit à
montrer que nous sommes plus légitimes de procéder comme nous le
faisons aujourd'hui. De ce côté-ci de la Chambre, la question ne
se pose même pas; elle se pose seulement du côté de
l'Opposition officielle.
C'est sans doute, M. le Président, ce qui explique, en bonne
partie - et on l'a vu malheureusement hier - les écarts de langage que
les observateurs attentifs de la scène publique ont constatés
chez nos adversaires. Ces écarts de langage, plutôt indignes, de
ceux et celles qui aspirent un jour à la gouverne dans notre
société ne devraient pas être tolérés ici, en
cette Chambre. La population, sur un autre point, n'est pas dupe devant la
démagogie que l'on constate chez certains des ténors de
l'Opposition depuis quelque temps. Mais il faut juste imaginer qu'on est sur la
loi 150; lorsqu'on va être dans le débat
référendaire, ça va être, d'après moi,
épouvantable.
J'en arrive maintenant, M. le Président, au terme de mon
allocution, et j'aimerais conclure en réaffirmant que, de cette entente,
il y a des gains appréciables pour le Québec, que ces gains
marquent un progrès réel par rapport à la situation qui
existe et que, si elle est ratifiée par l'ensemble de ceux qui ont
contribué à sa réalisation, la population du Québec
en sera d'autant plus fière parce que cette entente représente un
Meech plus. C'est une entente hautement appréciable à la
lumière de contraintes tant géographiques qu'économiques
et financières dans lesquelles évolue aujourd'hui le peuple
québécois.
En terminant mon allocution, M. le Président, j'ajouterai que je
suis fier d'appartenir à un gouvernement et à un parti capable de
servir aussi bien que nous l'avons fait les intérêts
supérieurs des Québécois et des Québécoises.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Saint-Hyacinthe. Sur le même sujet, je
cède la parole à M. le député de Joliette et leader
de l'Opposition officielle.
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Merci, M. le Président. M. le
Président, vous aurez remarqué que la loi qui est
déposée devant nous stipule que l'on enlève le
référendum sur la souveraineté pour le remplacer par un
référendum sur les offres. Donc, M. le Président, quand
notre formation politique disait qu'on devait parler des offres, c'est
précisément le gouvernement qui nous y amène, puisqu'il
modifie la législation en disant: Vous ne ferez pas un
référendum sur la souveraineté, comme je m'y étais
engagé, vous allez faire un référendum sur les offres que
j'ai concoctées à Charlottetown dernièrement.
Donc, il faut parler des offres, on n'a pas le choix, M. le
Président. C'est le législateur lui-même qui nous
amène à parler des offres. Le prototype de discours que nous
allons entendre, M. le Président, tout au cours de ce débat,
c'est: C'est mieux que rien. C'est à peu près le
résumé qu'on peut faire. Je viens d'écouter le
député de Saint-Hyacinthe: C'est mieux que rien, ça aurait
pu être pire. Ça te fait toute une argumentation, quand on a fait
rêver les Québécois, M. le Président, sur leurs
aspirations à coups de millions et ça, en pleine récession
économique.
Bélanger-Campeau, ça a coûté plus de 5 000
000 $. Les deux commissions parlementaires qui siègent sur la
souveraineté et sur les offres, ça a coûté plusieurs
millions. Quand on pense que le Canada également, en même temps, a
dépensé des dizaines et des dizaines de millions pour que les
Canadiens, eux, s'expriment et ça faisait partie... Les
Québécois s'exprimaient. 27 000 000 $, la commission Spicer.
Combien de millions avec Castonguay-Dobbie, Beaudoin-Dobbie? Beaudoin-Edwards,
combien de millions, M. le Président? Combien de millions dans la
propagande du Canada 125? Des centaines de millions de dollars ont
été dépensées, M. le Président, en pleine
période de récession économique où on frôle
les 13 % de chômage pour dire aux gens: Nous allons remodeler en
profondeur le Canada. Nous allons faire en sorte - et ça, c'est le
premier ministre de la TPS qui parle - que les Québécois
réintègrent la Confédération canadienne dans
l'honneur et l'enthousiasme. Donc, ce ministre de la TPS allait chercher dans
les poches de ceux qui manquaient d'ouvrage et faisait de la propagande
à tour de bras, en pleine période de récession, sans
qu'aucun programme de relance d'emploi ne soit fait par ce gouvernement.
Ici, au Québec, il y a eu, comme je l'ai dit,
Bélanger-Campeau, qui a coûté plus de 5 000 000 $.
Bélanger-Campeau, qui en arrivait à la conclusion... C'est vrai
qu'il y avait deux courants. Moi, je ne le nie pas. Il y avait un courant qui
disait - et très majoritaire à l'épo-
que - devant la commission Bélanger-Campeau, la forte
majorité des groupes qui sont venus s'exprimer sont venus dire:
Écoutez, on est capable d'assumer la totalité de nous pouvoirs.
On est capable de gérer et d'administrer la totalité de nos
impôts. On est capable aussi de signer nos traités. C'est
ça que disaient la majorité des groupes. Les autres groupes qui
venaient disaient ceci: II faut des changements en profondeur. Il faut des
changements en profondeur. Ça a donné naissance au rapport
Allaire, dans la formation libérale, qui ne demandait pas moins qu'une
vingtaine et plus de pouvoirs exclusifs au Québec. Tout le monde se
disait: Bon, eh bien, là, on va le remodeler pour que ça marche.
On va faire en sorte que les dédoublements cessent. On va faire en sorte
de rapatrier les pouvoirs pour qu'on puisse se gérer. Mais il y avait
une volonté, autant dans le groupe majoritaire que dans le groupe
minoritaire, de transformation profonde. C'est ça qui est arrivé
au Québec à coût de millions, je le
répète.
On nous arrive aujourd'hui, M. le Président, et on renie la
signature même. Le premier ministre renie sa signature du document
Bélanger-Campeau. Il renie le rapport Allaire auquel il a
adhéré, auquel il a amené sa formation d'ailleurs à
adhérer. M. le Président, il nous présente des offres.
Puisqu'il faut en parler, on va en parler.
Les Québécois nous avaient dit: Le Sénat,
là, c'est vétusté, c'est dépassé, ça.
Depuis 1967, nous autres, on a mis ça dehors. D'autant plus que,
rappelez-vous à l'époque, c'était facile d'avoir l'opinion
de mettre le Sénat dehors. Ils s'amusaient avec des cloches, au
Parlement d'Ottawa. Ça se conduisait comme des bouffons, au gouvernement
d'Ottawa. On maintient le Sénat, M. le Président. Ce n'est pas
ça que les Québécois nous ont demandé, de maintenir
un Sénat. Ils nous ont dit: dehors. Ça coûte 100 000 000 $
et plus. Ça n'a pas d'allure. C'est dépassé comme formule
de gestion, comme le disait notre député de Westmount
tantôt. C'est dépassé comme formule.
Non, M. le Président, on prend le Sénat et on dit: Le
Québec aura six sénateurs, comme
l'île-du-Prince-Édouard. Un gros gain! Sur le plan politique,
c'est toute une victoire! On passe de quelque 28 % à 8 %. C'est tout un
gain! C'est sur ça qu'il va falloir se prononcer le 26 octobre, M. le
Président, une dégringolade de 20 % comme poids politique. Puis
ils appellent ça une victoire? C'est mieux que rien? Ça aurait pu
être pire? Si ça avait pu être pire, qu'est-ce qu'il y
aurait eu au lieu? On en aurait eu un sur le total de 66? C'est quoi, cette
histoire-là, M. le Président? C'est inacceptable.
Mais ce qu'il y a de plus inacceptable, en plus que le poids politique a
baissé de quelque 20 % à 8 %, savez-vous c'est quoi, M. le
Président? Savez-vous qu'on va continuer à payer 25 % pour le
Sénat, nous autres? Ça, vous ne l'analysez pas. Il va falloir que
vous le disiez, le 26 octobre. Si vous votez pour ces offres, si vous votez
pour cette entente, le poids politique du Québec va baisser de 28 %
à 8 %, puis vous allez continuer, mes «coqs d'Indes»,
à payer 25 %. C'est ça fondamentalement que vous avez
négocié? Vous êtes d'excellents négociateurs!
Franchement, vous êtes solides! Franchement, c'est du solide ça,
négocier un Sénat dont le poids politique baisse et dont le poids
financier du Québec est maintenu à 25 % des coûts du
Sénat. C'est grave ça, M. le Président. C'est ça
qu'il faut dire le 26 octobre. Ah! ça aurait pu être pire, comme
disait le député de Saint-Hyacinthe. S'il avait fallu que
ça soit pire, imaginez-vous, M. le Président, on paierait le
Sénat tout seul et on n'aurait pas de délégués.
Voyons! (11 h 30)
M. le Président, dans les pouvoirs, dans la
récupération des pouvoirs, certains membres du Parti
libéral, et je les ai écoutés religieusement toute la
nuit, dans mon bureau, ici... Ils ont récupéré six
pouvoirs exclusifs, les mines, les forêts - je vois le ministre des
Forêts - et je me suis permis de lire l'Acte de l'Amérique du Nord
britannique, la Constitution canadienne. Les forêts, au cas où
vous ne l'auriez pas encore découvert, on a ça depuis 1867.
Là, on vient de découvrir dans le Parti libéral que c'est
un pouvoir exclusif qu'on a obtenu, M. le Président. Bien, il fallait se
rendre compte qu'on l'avait. Mais, qui plus est, une bonne entente, savez-vous
que pour pouvoir l'exercer de façon exclusive, M. le Président,
il va falloir conclure une entente? C'est pas des farces. Une très bonne
négociation. J'ai le pouvoir exclusif depuis 1867, j'en obtiens
l'exclusivité, puis je suis obligé de négocier une
entente, imaginez-vous, avant de pouvoir l'exercer. D'excellents
négociateurs, vous êtes fantastiques! J'ai négocié
pendant 16 ans dans ma vie puis, avoir signé une convention de
même, ils ne m'auraient jamais rengagé.
M. le Président, les mines. Ils viennent de découvrir que
les mines, c'est un pouvoir nouveau exclusif. C'est marqué dans la
Constitution canadienne qu'on a ça depuis 1867. Vous n'avez rien obtenu
là. Peut-être que vous venez de le découvrir, vous autres,
mais c'est marqué noir sur blanc dans la Constitution canadienne. Le
loisir, c'est noir sur blanc dans la Constitution canadienne. Ne venez pas nous
dire ici béatement que vous venez de découvrir que c'est un
pouvoir exclusif que le fédéral vient de vous donner. On a
ça depuis 1867. Je pourrais continuer, M. le Président. Les six
soeurs. Le monde municipal. Vous venez de découvrir qu'on a ça
depuis 1867. Arrêtez de dire que c'est un nouveau pouvoir que vous venez
d'obtenir. Ça a l'air fou un petit peu, ça. Je pense qu'on n'a
pas le droit comme Parlement, ici, de ne pas savoir que la Constitution
canadienne nous donne l'exclusivité des pouvoirs sur les six pouvoirs
qu'ils nous donnent.
M. le Président, très bons négociateurs. C'est
drôle. Puis, vous allez être obligés de signer des
protocoles d'entente pour exercer un pouvoir exclusif que vous avez depuis
1867! Vous êtes forts! Vous êtes forts! Ce n'est pas croyable.
Incroyable, mais vrai. Franchement!
M. le Président, plus que ça. Le premier ministre disait:
II faut absolument qu'on arrête les dédoublements, quand il
parlait du rapport Allaire. Il faut récupérer des pouvoirs.
Ça n'a plus d'allure d'avoir deux ministères de
l'Éducation, deux ministères de la Santé, deux
ministères de l'Environnement. On paie en double des fonctionnaires, on
paie en double de l'administration. On est obligés d'imposer des TVQ,
des TPS. On est obligés de pelleter dans la cour des commissions
scolaires des doubles taxes... On a doublé les taxes scolaires au
Québec. La taxe sur la police, la taxe sur la voirie, la taxe sur le
transport en commun, l'électricité qui a augmenté de 25 %.
Il nous faut, disait le premier ministre... Lui, n'énumérait pas
sa série de taxes, le premier ministre de la TVQ, mais il disait: II
faut absolument qu'on aille chercher de l'argent en évitant les
dédoublements. Les dédoublements, M. le Président, sont
tous maintenus. Ce sont des ententes administratives qu'il devra y avoir,
valables que pour cinq ans, et si ça va bien dans les
négociations. Qu'est-ce que nous avaient dit les Québécois
devant la commission Bélanger-Campeau? Trouvez des solutions durables,
arrangez-vous pour que les chicanes finissent, arrangez-vous pour qu'on ne
tergiverse plus dans les négociations, arrangez-vous donc pour qu'on
puisse avoir des solutions qui règlent les problèmes de
façon définitive, M. le Président.
Dédoublements tous maintenus, négociations
constitutionnalisées. Là, au lieu de se chicaner en
négociations, M. le Président, parce que ce n'était pas
dans la Constitution, ça va être marqué qu'on va pouvoir se
chicaner parce que ça va être marqué qu'on va être
obligés de négocier. Puis, si on ne s'entend pas, il n'y a pas de
mécanisme pour régler. C'est brillant, ça, M. le
Président. Excellents négociateurs.
Je vois le ministre du Travail devant moi. Aurait-il signé des
clauses de convention collective sans avoir, lui, prévu un
mécanisme en cas d'impasse dans les négociations pour le
régler? Aurait-il fait cela? Il se serait fait «fouter»
dehors de Canadair, M. le Président, même si, aujourd'hui, il y en
a peut-être qui sont heureux de voir qu'il n'est plus là. Mais
ça ne se fait pas. Quand on signe des conventions collectives du genre,
on prévoit des mécanismes de fin dans des conflits.
Je continue sur le dédoublement des services, M. le
Président, parce que ça, c'est un des points cruciaux. Comme on
maintient le dédoublement des services, les coûts, un petit
chèque d'allocations familiales du fédéral, un petit
chèque d'allocations familiales du provincial, un chèque de
rentes du Québec, un chèque de pension de vieillesse. Vous
êtes-vous imaginé ce que ça coûte, tout ça? Ce
n'est pas éliminé. C'est maintenu. Ah! il pourra peut-être
y avoir des ententes administratives - si on s'entend, M. le Président,
si on s'entend.
Je vois le ministre de la Santé, M. le Président. Dans
l'époque référendaire, ils sont allés chercher de
l'argent pour faire taire ça. On nous annonce qu'en 1996 il n'y aura pas
une cent de paiements de transfert en santé. Il n'y en aura plus en
1996. M. le Président, comment ça se fait qu'on n'a pas obtenu,
pour 1996 au moins, l'exclusivité, puisqu'ils ne paieront plus? Ah non!
il va devoir respecter les standards nationaux. Il essaiera de faire quelque
chose et il ne sera pas capable. C'est ça qui est dans l'entente qu'ils
ont négociée, M. le Président. Ils n'ont rien
réglé, absolument rien, dans le transfert des juridictions.
Hier soir, le ministre de la Main-d'oeuvre disait qu'il avait tout
obtenu. On a une lettre de M. Trefflé Lacombe qui dit clairement:
L'assurance-chômage, ce n'est pas transféré; qui dit
très bien à ses fonctionnaires: Ça va être long,
c'est nébuleux, il y a de l'interprétation.
Vous disiez que vous aviez obtenu de quoi en immigration. Le premier
ministre lui-même, et Benoît Bouchard ensuite, disaient: Ce n'est
pas fini, les pourparlers continuent en immigration. Donc, il n'y a pas
d'entente, si j'ai bien compris. On continue la négociation. On est en
train, par supercherie, de nous faire croire qu'il y a une entente. M. le
Président, c'est grave, tout cela. C'est grave, tout cela.
On laisse se promener dans le décor deux textes, un texte
français et un texte anglais, qui ne disent pas la même chose. Et
avec raison. Il ne faut pas que ça dise la même chose, M. le
Président, parce que si les Anglais voyaient ce qu'il y a dans le texte
français, peut-être que ça ne marcherait pas, et l'inverse.
On laisse se promener dans le décor des textes qui ont des nuances non
seulement de forme mais de fond. Et ça, M. le Président, c'est
grave sur le plan de la probité intellectuelle de laisser deux textes
dire des choses différentes. Et les anglophones du Canada ne se
prononceront pas sur la même chose qu'ici. Qu'est-ce qui va arriver
après, dans l'interprétation juridique, M. le Président,
quand il y a six juges de la Cour suprême... Six juges de la Cour
suprême, M. le Président. La tour de Pise, là, six contre
trois. Et on découvre, M. le Président...
Vous savez, M. Bourassa s'étirait les bretelles pour dire
qu'à la Cour suprême il avait gagné trois juges. Il faut
relire maintenant l'entente; c'est bien plus faible que c'était.
Maintenant, c'est prévu que c'est les membres du Barreau
québécois qui peuvent être juges du Québec. Donc, un
avocat de Terre-Neuve qui est membre du Barreau québécois, M. le
Président, pourrait être juge. C'est clairement établi,
ça. On a même fait un relevé. Ils seraient quelque
100 avocats en dehors du Québec, qui sont membres du Barreau
québécois, qui exercent ailleurs, et qui pourraient devenir
juges. Plus que ça, M. le Président, on découvre dans
l'entente sur les juges qu'ils ne sont pas obligés de les prendre si la
liste ne satisfait pas. Ils en nomment par intérim. Je connais
ça, des intérims, moi, dans un gouvernement. Ça peut
être des années, ça, des intérims dans un
gouvernement, M. le Président. C'est ça qui est dans l'entente.
C'est ça qui est dans l'entente textuelle. Je l'ai lu, formellement, M.
le Président. Et au niveau de la Cour suprême, rien.
Au niveau des autochtones, M. le Président, je vois le suave
ministre des Affaires intergouvernementales, vous savez, qui, avec beaucoup de
simplicité, toujours, se présente devant nous et nous dit:
Jamais, jamais le gouvernement du Québec n'acceptera le pouvoir des
juges dans les litiges opposant le Québec aux autochtones. C'est des
traités, c'est des ententes ou c'est des conventions. Il a
répété ça à Anjou. Il a
répété ça devant le Barreau canadien. Il a
répété ça à plusieurs reprises. Grande
surprise, M. le Président, sur quoi on aura à se prononcer le 26
octobre prochain? C'est que si les négociations ne sont pas bonnes dans
les cinq premières années, même s'il y a eu un peu de bonne
foi, bien, ce sera un juge qui va décider. Un juge va décider que
le Québec doit, par exemple, créer des enclaves territoriales sur
son territoire. Donner le pouvoir aux juges pour faire ça? Ce n'est pas
des gouvernements de juges, ce sont les élus du peuple qui ont le devoir
et le pouvoir de conclure des ententes sur le plan constitutionnel, M. le
Président, avec les peuples. Et deux peuples, ça traite
d'égal à égal par des traités, par des ententes,
par des conventions.
Et si on va plus loin dans ce qu'on appelle les clauses contextuelles,
M. le Président, on peut lire que même la Baie James peut
être remise en question. Et, ça, c'est grave. Ça, c'est
très grave, M. le Président. Ce qui a été
élaboré entre deux groupes, entre le gouvernement du
Québec et le peuple autochtone pour la Convention de la Baie James, ce
qui était un peu une première - c'est fantastique, ça -
ça pourrait être remis en question, M. le Président. (11 h
40)
Moi, je pense que ça n'a pas de bon sens. La campagne
référendaire va nous permettre de sensibiliser le monde, de
sensibiliser la population, de faire en sorte que les gens sachent exactement
ce à quoi les ont convié le premier ministre de la TVQ et le
premier ministre de la TPS. Il faut qu'ils sachent que ces deux hommes qui ont
endetté réciproquement la province et le pays ont concocté
quelque chose qui s'apparente beaucoup plus à de la poudre aux yeux.
Fondamentalement, les Québécois qui sont venus s'exprimer,
ils sont venus, M. le Président, s'exprimer pour dire qu'ils voulaient
des changements en profondeur ou bien le rapatriement de la totalité des
pouvoirs. Quand on se contente... ça aurait pu être pire, ce genre
de phrase là. C'est mieux que rien. Bien, M. le Président, on
n'incarne pas la volonté des Québécois, de tous les
gouvernements québécois antérieurs. On n'incarne pas la
volonté du peuple. On n'incarne pas le consensus qui s'était
dégagé au Québec de régler une fois pour toutes et
en profondeur pour éviter les interminables chicanes, pour éviter
les interminables collisions de négociations perpétuelles, parce
que chacun n'y retrouve pas son compte.
Le ministre Rémillard disait, en conclusion, M. le
Président: II faut apprendre que la meilleure façon, sur le plan
constitutionnel, de régler les choses, c'est de donner au gouvernement
qui est le plus près l'ensemble des pouvoirs. Nous étions
d'accord avec lui. Lui a changé de cap; nous, pas. Je vous dis, M. le
Président, à une entente aussi faible, à une équipe
de négociation qui a mangé la claque, comme on dit en bon
québécois, de façon si magistrale, on ne peut que dire
non. Merci.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Joliette et leader de l'Opposition officielle.
M. Ryan: Est-ce que le député de Joliette
accepterait que je lui pose une question?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je m'excuse, M. le
ministre, l'article 213, qui vous permettrait, en temps régulier, de
poser... de demander cette question au député de Joliette, est
suspendu en vertu de la motion. Alors, je vais maintenant reconnaître...
Un instant! Oui.
M. Gendron: je pense que vous avez raison. le leader du ministre
des affaires municipales, son propre leader, a suspendu cette règle.
alors, on regrette beaucoup.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, je suis prêt
à reconnaître le prochain intervenant. Est-ce qu'il y a d'autres
intervenants?
Une voix: Oui.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): alors, m. le
député de charlesbourg et ministre de la santé et des
services sociaux. m. le député de charlesbourg.
M. Marc-Yvan Côté
M. Côté (Charlesbourg): Merci, M. le
Président. Nous avons donc amorcé, depuis quelques jours, depuis
ces dernières heures, une étape extrêmement importante qui
consiste à apporter des amendements à la loi 150 en
parfaite conformité avec ce que le premier ministre du
Québec a toujours dit et ce qui a toujours été
l'interprétation de la partie gouvernementale. Importante puisqu'elle
vient remettre en perspective tout ce qui s'est passé
antérieurement et qui devra se passer au cours des prochaines semaines,
des prochains mois, et qui conditionnera l'avenir non pas du Canada, mais
l'avenir du Québec.
On a beau dire, on a beau faire, surtout lorsque l'Opposition dite
officielle du Québec s'arroge le droit d'être contre à peu
près tout ce qui se passe, tout ce qui bouge, et de manière plus
spécifique dans le dossier constitutionnel. Il y a longtemps que j'ai
perdu, quant à moi, M. le Président, mes illusions à
l'endroit de mes amis d'en face quant au dossier constitutionnel. De tous ces
partenaires de circonstance, qui vibreront aux mêmes créneaux dans
les prochaines semaines, le réveil risque d'être bien
pénible pour certains, surtout qu'un non n'est pas un oui à
l'indépendance.
Je veux en profiter, dès à présent, pour
féliciter Jean Allaire. Nous aurions voulu infiltrer le PQ que nous
n'aurions pas fait mieux, puisque nous devons nous rendre compte
qu'après une journée de présence sous le chapeau du non de
Jean Allaire, il a réussi à faire reculer ce parti sur son
idée fondamentale qui est celle de l'indépendance.
Des voix: Ha,ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Donc, 1-0 pour Jean Allaire
contre le chef du Parti québécois.
Dans tout cela, bien sûr, se profile dans la garde-robe Lucien,
l'ineffable Lucien, qui est en attente d'une prise réelle de pouvoir
pour pouvoir exercer sa totale et pleine splendeur. Il pourra toujours invoquer
qu'il y a des mariages de raison qui peuvent facilement se justifier, le temps
d'une cause, sauf que la cohabitation est tellement grossière ici
qu'elle dépasse l'entendement, qu'elle frise la supercherie de haute
voltige et l'opportunisme éhonté. Nous y reviendrons, M. le
Président, puisque nous aurons amplement le temps au cours des prochains
mois.
Ce qui m'apparaîl aujourd'hui important d'invoquer entre-temps,
c'est qu'on va donc s'embarquer dans un processus hautement démocratique
dans les prochaines semaines, où la population du Québec va
être appelée à se prononcer - et c'est elle et elle seule
qui décidera - sur des offres formelles, concrètes et tangibles.
Avouons-le très honnêtement si nous voulons être pris au
sérieux. Avouons-le. Nous, de notre côté, aurions
espéré davantage, mais c'est une négociation, et une
négociation ne se fait pas seule. La vision qu'ont les anglophones du
pays n'est pas en parfaite harmonie avec celle que nous avons. Lorsqu'on parle
de dualité, il nous faut avoir le respect des autres, mais aussi
respecter les autres. Ce sont là des principes fondamentaux d'une
négociation et d'une vision commune d'un Québec fort avec ses
moyens à l'intérieur d'un Canada qui, lui aussi, nous apporte ses
bénéfices.
Il faut en convenir, pour le commun des mortels, pour celui qui observe
tout cela de l'extérieur des officines gouvernementales, pour l'homme et
la femme de la rue qui en ont ras le bol d'entendre parler de constitution, il
n'est pas facile de s'y retrouver. Il faut, au minimum, avoir le respect de ces
gens-là, qu'ils soient du oui ou du non, qu'ils aient des tendances pour
le oui ou le non, que nous ayons un minimum de décence dans les propos
que nous allons tenir quant au fond, d'un minimum d'honnêteté
intellectuelle pour être capable de véhiculer la
vérité, et strictement la vérité, et de la
portée de ce que nous allons faire au cours des prochains jours.
M. le Président, oui, il s'en est passé des choses depuis
quelques mois, depuis quelques années et surtout depuis Meech. Il est
important de rappeler à la population du Québec ce que nous
avions obtenu dans Meech, puisque Meech avait été largement
partagé par une très grande majorité des
Québécois à l'époque, y compris des nationalistes
très identifiés et qui avaient retrouvé en Meech la
fierté que nous cherchons tous d'être Québécois
à l'intérieur du Canada et d'être Québécois
canadiens, et nous l'avions atteint, à ce moment-là, avec
Meech.
Voici pourquoi nous l'avions atteint, M. le Président. Parce que
la reconnaissance du Québec comme société distincte
était là; parce que les pleins pouvoirs en immigration, quant
à l'intégration économique, sociale et culturelle des
immigrants du Québec, étaient là; parce que la
possibilité pour le Québec de se soustraire de tout programme
fédéral futur et cofinancé dans les domaines provinciaux
et d'obtenir, du même coup, compensation financière pour lui,
permettait d'agir librement; parce que de changements à la Cour
suprême du Canada sans le consentement du Québec sur les plans,
notamment, de son existence, de ses pouvoirs et le fait de garantir la
présence de trois juges québécois sur neuf, nous l'avions;
parce qu'un droit de veto sur toutes les nouvelles modifications à la
Chambre des communces, au Sénat et à la Cour suprême, nous
l'avions; parce qu'une protection absolument sûre de s'opposer à
toute tentative de diminution des pouvoirs de l'Assemblée nationale,
nous l'avions, M. le Président.
Oui, je le dis et je le répète, Meech, à une
époque encore pas si lointaine, a constitué une base très
acceptable au Québec dans les revendications historiques du
Québec. Un début plus important que tout ce que nos
prédécesseurs d'en face n'ont jamais réussi à
obtenir avec la menace de l'indépendance, avec le beau risque, avec un
chef charismatique et qu'ils n'ont jamais... avec une ferveur populaire qui les
supportait qu'ils n'ont réussi à obtenir du gouvernement
fédéral
dans une négociation. Au contraire, M. le Président, il
faut le répéter. Au contraire, ce qu'ils nous ont laissé,
ce n'est rien. Même, ils ont accusé des pertes très
significatives, en particulier au niveau du droit de veto qui nous a conduit
dans l'impasse dans laquelle nous nous sommes retrouvés sur le plan
d'une négociation où, pour retrouver le droit de veto, nous
avions besoin de l'unanimité. (11 h 50)
Oui, je suis fier de ce que nous avons fait dans Meech. Je
l'étais et je le suis toujours, malgré les beaux discours de tous
et chacun d'entre vous et des ténors qui vous suivent, qui, partout
à travers le Québec, depuis trois ans, ont tenté de
discréditer l'opération, mais sans jamais renier le fond. Le fond
de Meech est demeuré, et il est dans l'entente que nous avons, du 28
août dernier. Il peut bien y avoir de beaux esprits dans votre parti,
à l'extérieur, qui interprètent à leur
manière et selon leurs propres convictions, de manière
différente, Meech. Meech demeure Meech, et Meech est un acquis pour le
Québec, y compris dans l'entente du 28 août dernier. Si vous
étiez fiers, à l'époque, vous avez encore raison
d'être fiers, même si vous êtes péquistes. Ça,
vous devez avoir l'honnêteté minimale de dire aux
Québécois que Meech est toujours là, que nous en sommes
toujours fiers, que c'est un plus pour le Québec, et que nous
continuerons de bâtir sur le plus. Voilà pour Meech, M. le
Président.
M. le Président, il y a plus que Meech. C'est ça aussi la
vérité, et cette vérité-là fait mal. Elle
fait mal à ceux qui ont tenté pendant de nombreuses
années, et qui ont rêvé, du temps de leur opposition, du
rêve de l'indépendance, tout en voulant cacher
l'indépendance aux Québécois - étant leur but
ultime - pour louvoyer et tenter de faire croire aux Québécois
que c'était un bon gouvernement qu'ils voulaient nous donner, alors que
l'objectif premier a toujours été l'indépendance du
Québec.
M. le Président, oui, il y a plus que Meech dans l'entente du 28
août, et je vais le dire et continuer de le dire partout à travers
le Québec. Qu'il suffise de penser que le Québec ne pourra jamais
avoir moins de 25 % des députés à la Chambre des communes
et ça, même si la population du Québec passe en dessous de
ce seuil. Qu'est-ce que ces beaux esprits d'en face, en particulier le
député de Lac-Saint-Jean, ont à nous dire lorsqu'on dit
que nous avons 18 députés de plus à la Chambre des
communes? Il dit: Si on est pour avoir 18 Benoît Bouchard, on est aussi
bien de ne pas en avoir. Eh que c'est plaisant à entendre. Benoît
Bouchard qui a été un de ceux qui ont supporté le oui en
1980, au référendum. Quel respect de ceux qui étaient avec
vous à l'époque. Quel beau respect des Québécois
qui ont été élus par la population, et qui ont un mandat
direct de la population pour défendre les intérêts du
Québec à la Chambre des communes à Ottawa, selon une
perspective qui est la leur, qui est celle canadienne, tout en défendant
les intérêts du Québec. Des Benoît Bouchard, je suis
intéressé à en avoir d'autres à Québec: 18,
ce ne sera pas de trop pour être capable de continuer à travailler
pour revendiquer ce à quoi on a droit.
Mais plus jamais un seul Lucien Bouchard qui nous a littéralement
fourrés, toutes les fois qu'il a été dans une situation de
décision, que ce soit comme ambassadeur du Canada à Paris.
Rappelez-vous le Sommet des pays francophones, comment est-ce qu'il a
isolé et tassé le Québec pour faire place au gouvernement
du Canada à l'époque. Rappelez-vous qu'il est le père de
la Loi sur l'environnement. Même si, aujourd'hui, il se cache, il est le
père de la Loi sur l'environnement qui isolait le Québec, ou
tentait d'isoler le Québec au niveau de son application et de son
importance. Vous préférez avoir des Lucien Bouchard? Je vous le
laisse. Probablement que vous avez déjà d'autres idées,
compte tenu du fait que votre chef actuel est dans de sérieuses
difficultés sur le plan de l'appréciation, et que vous caressez
le désir d'en avoir un qui semble un peu plus vendable que d'autres.
M. le Président, ça démontre véritablement
ce que vous êtes et ce que vous cherchez. M. le Président, de dire
qu'une garantie de 25 % des députés à la Chambre des
communes à Ottawa à vie n'est pas un gain pour le Québec,
c'est être malhonnête intellectuellement. Il y en a d'autres, et on
va vous le répéter pendant tout ce débat, pendant les deux
prochains mois, partout à travers le Québec, là où
il faut, pour vous mettre à votre place. Qu'il suffise de penser, M. le
Président, au droit de veto que les sénateurs francophones ont
à Ottawa. Qu'est-ce que ces beaux esprits ont à nous dire? Des
droits de veto sur des questions linguistiques et culturelles. Qu'est-ce que
ces beaux esprits ont à nous dire? Danger. Ils vont être
noyés parmi les francophones des autres provinces. Ils ont vu le danger.
Le danger ne vient plus des Anglais, le danger vient des francophones des
autres provinces. C'est extraordinaire! Quelle belle vision d'ouverture, quel
beau pays vous allez construire! Quelle belle vision, bien non, les
francophones des autres provinces, du Nouveau-Brunswick, les francophones de
l'Ontario, de la Saskatchewan. Quantité négligeable, on n'a pas
besoin de s'occuper de ça, c'est juste des francophones canadiens. Ce
n'est pas des francophones québécois. Quels beaux esprits, quelle
ouverture! René Lévesque devrait être très fier de
vous entendre à ce moment-ci.
M. le Président, d'autres, et il y en a... Regardez tout
simplement au niveau des autochtones. Ils sentent, ils le sentent, ils ont un
«feeling» que d'exploiter la cause autochtone au moment où
nous traversons des périodes difficiles, en particulier avec les gens de
Château-guay, les gens de Kanesatake, et avec les Cris,
que d'exploiter ce filon des autochtones, c'est payant au Québec
politiquement. Ça pourrait être payant, amener quelques votes pour
être capables de faire triompher l'idée, alors que la
générosité de René Lévesque était
totalement différente. Elle était ouverte à la
reconnaissance de ce que sont les autochtones et de ce qu'ils doivent
être chez nous, et c'est cette reconnaissance-là que la
Constitution canadienne modifiée va leur reconnaître. Que le
Québec soit indépendant ou pas, est-ce qu'il y aura toujours des
autochtones au Québec? Est-ce qu'il y aura toujours des Inuit? Comment
est-ce que vous allez régler le problème alors que vous prenez
des positions qui sont bassement électoralistes et qui visent à
mettre dans les urnes des votes aujourd'hui pour tenter de vous faire gagner?
Oui, cette générosité, René Lévesque, on va
très certainement finir par vous en parler.
M. le Président, oui à Meech plus. Meech plus est
l'entente du mois d'août. C'est une entente généreuse d'une
vision et d'un respect des deux peuples qui ont fondé ce pays, y compris
le Québec, et une ouverture aux autochtones qui étaient là
avant nous. C'est une ouverture généreuse, et l'histoire sera
aussi généreuse vis-à-vis de ceux qui ont cette
générosité et qui sont prêts à aller sur la
place publique pour la défendre. M. le Président, il y a plus, il
y a Meech, il y a plus que Meech. Il y a de l'ouverture, de la
générosité pour être capable de fonder ce pays, et
un Québec fort à l'intérieur du Canada. Il y a plus que
ça.
Quand j'entends, M. le Président, Larose, Daoust, Pagé,
quand je les entends, M. le Président, venir critiquer l'entente et
qu'on parle de main-d'oeuvre, formation de main-d'oeuvre et de rapatriement des
pouvoirs, et que j'entends ce monde-là nous parler de duplication,
est-ce que ce n'est pas un secteur en particulier où, M. le
Président, c'est clair et où l'intérêt
supérieur de ceux qui demain se chercheront un emploi, de ceux qui
aujourd'hui perdent un emploi et pourront avoir des cours, M. le
Président, pour se reformer, se réorienter et être capables
d'être ceux qui vont être actifs sur le marché de l'emploi
au Québec... Est-ce que cette entente-là n'est pas un plus pour
le Québec? Oui, elle est un plus, elle est un plus! Et je suis
scandalisé d'entendre des gens comme Larose, Daoust, Pagé, et je
pourrais en mettre d'autres... M. le Président, pouvez-vous rappeler le
député de Lévis à l'ordre.
Une voix: II vient d'arriver.
M. Côté (Charlesbourg): m. le président, il y
a un plus très évident de mise en commun, d'élimination
des duplications dont les profits vont se faire sentir à tout le monde.
et, dans ce sens-là, prenons-en d'autres. prenons le
développement régional. oui, prenons l'habitation, prenons les
loisirs. et la question qu'aurait voulu poser mon collègue d'Argenteuil
au député de Joliette tantôt, expert constitutionnaliste,
lorsqu'il parlait en particulier des Affaires municipales et du Loisir,
c'était de lui demander de donner l'endroit exact et la citation de la
Constitution canadienne de 1867 où il retrouvait ces pouvoirs. Et, dans
ce sens-là, M. le Président, qu'il aille voir pour l'habitation
aussi et il viendra nous donner ultérieurement les réponses. (12
heures)
M. le Président, il est clair, il est clair que nous sommes
engagés dans un débat constitutionnel où la force du Parti
libéral du Québec et de ce gouvernement, c'est clair, c'est de
l'ouverture. L'ouverture contre la fermeture. Non, une certaine ouverture
tactique, tactique, M. le Président. Tactique, lorsque l'on voit le
député de Westmount, tactique lorsqu'on voit l'ouverture, les
bras grands ouverts de ceux qui, à l'intérieur du Parti
libéral, se sentent mal à l'aise avec une décision
démocratiquement prise par le parti. Les bras grands ouverts, mais c'est
très circonstanciel. La véritable générosité
et la véritable ouverture, on les voit devant l'attitude de textes
d'ouverture aux anglophones, d'ouverture aux communautés culturelles,
d'ouverture aux autochtones. C'est ça, la véritable situation, et
elle vous fait mal. Et c'est ça, la vérité, et on va
continuer de la dire partout à travers le Québec.
M. le Président, le balancier sera cruel, cruel, aujourd'hui,
surtout lorsqu'on voit un parti qui, hier, était résolument
indépendantiste, s'allier avec des nationalistes
fédéralistes pour dire qu'un non à l'entente n'est pas un
oui à l'indépendance. À croire que Claude Morin est
revenu, le stratège du Parti québécois, de l'accession
à l'indépendance par étapes, tout cela, bien sûr,
contre rémunération, avec l'engagement de le déclarer
à l'impôt.
Des voix: Ha,ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): Et lui aussi, ce Claude
Morin, on le considère encore comme un intello suffisamment
crédible pour émettre son opinion et être
considéré comme un expert, tout en avouant, il faut bien se le
rappeler, qu'il aura fallu 15 ans à Nixon, aux États-Unis, pour
retrouver une certaine virginité et 15 jours à peine, au
Québec, pour que la presse redonne à Claude Morin sa presque
virginité d'antan. Le grand éclat de rire, c'est nous qui
revendiquons de l'avoir aujourd'hui.
Quand on prend connaissance, sondages obligent, du taux de confiance
accordé par la population au chef du Parti libéral par rapport au
chef du Parti québécois, il y a de quoi s'esclaffer doublement,
sachant que l'ami Lucien est dans la garde-robe et qu'il attend, sachant que
l'ami Lucien a tout un beau programme économique à proposer aux
Québécois et qu'il en a fait largement la démonstration
à Ottawa, et
qu'il l'a carrément dit qu'il était à Ottawa pas
pour défendre les intérêts du Québec mais pour
saboter le système canadien, et c'est ce qu'il a réussi à
faire. C'est ce même chef de l'Opposition officielle qui s'est
déjà fait le prophète de malheur en prédisant un
refus catégorique du Canada, comme s'il le souhaitait dans le fond de
son âme. Pourtant, aujourd'hui, la réalité est tout autre.
Elle fait mal au coeur à ceux qui n'ont d'autre objectif que de
détruire le système actuel.
Je termine, M. le Président, en disant à ces gens d'en
face: Comment les croire aujourd'hui? Comment les croire? Comment croire le
député de Lac-Saint-Jean qui, il y a quelques années,
était derrière Pierre Marc Johnson à défendre un
assouplissement de la thèse du PQ par rapport à
l'indépendance? Comment croire le député de Lac-Saint-Jean
d'aujourd'hui?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez
conclure...
M. Côté (Charlesbourg): Alors que le
député de L'Assomption d'aujourd'hui a voulu devenir chef,
lui-même pensait s'opposer parce que, sur le plan du programme du parti,
il n'était pas d'accord avec lui. Où sont les vrais, aujourd'hui?
Où sont ceux qui disent la vérité à la population
et qui n'ont pas d'autre intérêt que de défendre les
intérêts du Québec? Ils se trouvent de ce
côté-ci de la Chambre. Alors, eux ont toujours le goût du
pouvoir. M. le Président, merci.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous rappelle que
nous en sommes à l'adoption du principe du projet de loi 44...
Une voix: Nous autres, on ne met pas les poignards dans le dos.
On les met en plein coeur.
Des voix: Ha,ha, ha!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...Loi modifiant la Loi
sur le processus de détermination de l'avenir politique et
constitutionnel du Québec. Je reconnais M. le
député...
Des voix:...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Une voix:...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît,
à l'ordre! Je reconnais M. le député de
Pointe-aux-Trembles.
M. Garon: M. le Président, pour pas que le
député de Pointe-aux-Trembles soit dérangé,
j'aimerais que vous fassiez respecter...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député...
Une voix:...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.
M. Garon: En vertu du règlement, je demanderais que les
députés soient assis à leur place pour pas que...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Très bien. Alors,
en vertu de l'article 32, à la demande du député de
Lévis, je demanderais aux députés de reprendre les
banquettes qui leur sont assignées par la présidence. Je tiens
à vous dire, M. le député de Lévis, que je fais
tout mon possible pour maintenir l'ordre dans cette Assemblée, et c'est
ma première priorité. M. le député de
Pointe-aux-Trembles.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, quand Brian Mulroney a
été élu premier ministre du Canada en 1984, il a
parlé de ramener le Québec dans le giron constitutionnel canadien
dans l'honneur et l'enthousiasme. On a eu, hier, à la période de
questions, et on vient d'avoir, pendant 23 minutes, des exemples précis
qu'on veut nous ramener dans le giron constitutionnel canadien dans l'injure,
les mensonges, les demi-vérités et les roublardises. La
performance que vient de nous donner le député de Charlesbourg,
M. le Président, est du niveau d'une taverne, quand des
Québécois de toute allégeance discutent après avoir
bu cinq, six bières. Ce n'est pas du niveau intellectuel qu'il convient
de maintenir dans cette Assemblée, M. le Président. Ce que je
veux dire quand je dis cinq, six bières, je parle de grosses bouteilles
de bière, parce que le député de Charlesbourg nous a
distribué, à la Maurice Duplessis, une pluie d'injures et de
déclarations folichonnes, je dirais même presque bouffonnes, M. le
Président. Il dit, par exemple, le slogan du niveau de la taverne, que
ce qui a été obtenu est le lac Meech plus.
Je n'ai pas l'intention de faire le tour de toute l'entente, M. le
Président, juste de dire que, dans le lac Meech, le Québec avait
un droit de veto sur toute réforme des institutions
fédérales et que, là, on se retrouve à 8 % ou 9 %
de sénateurs dans un Sénat dont la composition n'était
même pas mentionnée dans l'accord du lac Meech. Ça faisait
partie des choses qui n'auraient pas pu se réaliser sans l'accord
exprès du Québec.
M. le Président, le député de Charlesbourg est
responsable de la Loi électorale du Québec. Comment peut-il se
réjouir d'une proposition qui ferait qu'à
l'île-du-Prince-Édouard il y aurait un
sénateur par 26 000 de population et qu'au Québec il y
aurait un sénateur par 1 200 000 de population? Je pense, M. le
Président, que la simple lecture du «transcript» des propos
du ministre et député de Charlesbourg va nous donner une
idée jusqu'où la démagogie peut aller quand on a quelque
chose d'impopulaire à défendre.
M. le Président, je suis un député de ITle
de Montréal et, sur l'île de Montréal, il y a quelque
chose qui est un enjeu fondamental au Québec depuis des
décennies: c'est à quel groupe linguistique les immigrants vont
s'identifier et s'intégrer. C'est ce qui a fait, M. le Président,
que mon parti a souscrit à l'énoncé de politique de la
ministre de l'Immigration quand elle a établi clairement une chose qui
fait consensus au Québec, c'est que, si on veut rester une
société à majorité francophone, les immigrants
doivent s'intégrer à l'école française et doivent
pouvoir, par la suite, travailler en français. L'une des questions que
les propositions sur la table soulèvent, M. le Président, c'est:
Est-ce que ces propositions pourraient mettre en cause la loi 101?
Je voudrais, M. le Président, lire des extraits - pas longs - du
texte qui est devant nous, notamment le nouvel article 2 de la Constitution qui
dirait: «Toute interprétation de la Constitution du Canada,
notamment de la Charte canadienne des droits et libertés, doit concorder
avec les caractéristiques fondamentales suivantes», et on en cite
plusieurs. Et à d, on dit: «L'attachement des Canadiens et de
leurs gouvernements à l'épanouissement et au développement
des communautés minoritaires de langue officielle dans tout le
pays». Fin de la citation. Et, après ça, M. le
Président, au paragraphe 2°, on dit: «La législature et
le gouvernement du Québec ont le rôle de protéger et de
promouvoir la société distincte.» Le premier ministre nous
a dit hier, M. le Président, que fait de même, vu que l'article
sur la promotion de la société distincte ne fait plus partie du
premier paragraphe de l'article 2, mais est devenu un deuxième
paragraphe, que ses experts, que ses juristes l'ont assuré que le
nouveau texte qui nous est proposé ne pourrait pas mettre en cause la
loi 101. (12 h 10)
Je ne suis pas convaincu par cet argument et je pense que les gens qui
nous écoutent peuvent être confondus par une logique aussi
ténue. La vérité, c'est que l'entente prévoit de
nouveau qu'on aura, au Québec, le gouvernement par les juges, que
ça soit pour la langue de travail, que ça soit pour la langue
d'enseignement pour les filles et les fils d'immigrants ou que ça soit
sur quoi que ce soit qui est prévu dans la Charte de la langue
française, à laquelle les Québécois sont
attachés.
M. le Président, faut-il rappeler que le premier ministre a cru
que l'affichage était du pouvoir du Québec jusqu'à ce que
la Cour suprême en décide autrement? Qu'est-ce qu'il a fait quand
les juges ont décidé que l'affichage devait se faire de telle ou
telle façon? Il a invoqué la clause «nonobstant» et
il a adopté une loi 178 qui ne fait l'affaire de personne.
Alors, la question est simple. Les Québécois sont
attachés, et en particulier à Montréal, à
l'idée que les immigrants devraient s'intégrer à la
société québécoise francophone en toute
amitié pour notre minorité anglophone. Qu'est-ce qu'on nous dit
dans ce texte? Bien, c'est que, comme il faut garantir l'épanouissement
et le développement de l'autre minorité linguistique - il y en a
deux au Canada, française dans certaines provinces, anglophone au
Québec - bien, un juge, un matin, pourrait décider par jugement
qu'en matière de langue d'enseignement, c'est le libre choix total qui
doit s'établir au Québec, soit plus que même ce qui
était mis de l'avant dans le rapport par ailleurs excellent de Mme
Chambers.
Alors, M. le Président, le gouvernement a le fardeau de la preuve
là-dessus et doit répondre aux citoyens dont le choix n'est pas
fait, ceux qui ne sont pas automatiquement pour le oui ou pour le non,
autrement dit, pour ceux que le discours du député de
Charlesbourg laisse froid parce que leur idée n'est pas faite. Est-ce
que la loi 101 pourrait être mise en cause par les textes qu'on a enfin
décidé de distribuer dans l'après-midi d'hier? La question
est fondamentale pour la majorité des Québécoises et des
Québécois. Qu'est-ce qui pourrait arriver à la langue
d'enseignement, à la langue de travail, en vertu de la proposition qui
est faite et sur laquelle les Québécoises et les
Québécois auront à se prononcer le 26 octobre prochain? Le
premier ministre nous dit: N'ayez crainte. Bon, je pense qu'il faudra, d'ici
peu, trouver un moyen d'établir clairement le droit dans cette
matière. Est-ce que l'entente peut mettre en cause la loi 101 sur la
langue d'enseignement, entre autres? Là-dessus, le gouvernement devra
nous répondre, M. le Président, autrement qu'en disant que quand
une partie de paragraphe devient un nouveau paragraphe, il n'y a plus
d'inquiétude à entretenir.
M. le Président, ça m'apparaît important parce que
la langue d'enseignement pour les immigrants, sur ffle de Montréal
principalement, fait partie du consensus et du contrat social. Les
Québécois pensent que c'était une sécurité
de décider, il y a 15 ans, que les filles et les fils d'immigrants
iraient à l'école de la majorité francophone. Est-ce que
l'entente dont on nous vante les mérites, la proposition que les
Québécoises et les Québécois auront à
décider le 26 octobre prochain, pourrait amener un juge à changer
ça? Je pense que le gouvernement a le fardeau de prouver qu'il a raison
de ne pas être inquiet.
Je pense que c'est également un peu indécent de dire que
dès que la moindre objec-
tion est soulevée à ce que les juges décident du
nouveau palier de gouvernement qui sera le gouvernement des nations
autochtones, que n'importe qui qui ose discuter une disposition qui est
discutable se range dans les racistes et ceux qui attaquent les autochtones
d'une façon vicieuse. M. le Président, le gouvernement nous dit
que la proposition qu'il y a devant nous est bonne.
Il y a eu une des dispositions de cette proposition qui dit que le droit
inhérent des autochtones à l'autodétermination,
après cinq années de négociation, pourra être
décidé par des juges. M. le Président, je n'invente rien.
Je voudrais lire ici le paragraphe b du fameux article 2 qui dit: «Le
fait que les peuples autochtones du Canada, qui ont été les
premiers gouvernants du territoire, ont le droit de promouvoir leur langue,
leur culture et leurs traditions et de veiller à
l'intégrité de leur société et le fait que leur
gouvernement forme un des trois ordres de gouvernement du pays.» Fin de
la citation.
M. le Président, il n'y a personne, de ce côté-ci de
la Chambre, qui est contre qu'il y ait un ordre de gouvernement, dans le pays
que nous habitons actuellement ou dans le pays dont nous prônons
l'émergence et la naissance, le Québec, qu'il y ait un ordre de
gouvernement autochtone. Il n'y a personne qui met ça en question.
René Lévesque avait piloté à l'Assemblée
nationale une déclaration de principe reconnaissant le droit des
premières nations au Québec à s'autodéter-miner
selon des modalités à convenir.
M. le Président, notre désaccord ne porte pas sur la
réalité de gouvernements autochtones, mais sur la façon de
les établir. Nous pensons qu'il est tout à fait inacceptable
qu'un ordre de gouvernement puisse être créé par une
décision d'un juge. M. le Président, à cet
égard-là, je voudrais, quand il se sera calmé, rappeler au
député de Charlesbourg qu'à l'intérieur de la
province de Québec actuelle, les ordres de relation et les juridictions
respectives des gouvernements que le Québec contrôle, que sont les
municipalités, je ne sache pas que ce soit des juges qui en
décident. Dans le cas de la réforme de la fiscalité
municipale, c'est le gouvernement de Québec qui a pris des
décisions que, d'ailleurs, nous avons contestées. Les questions
que pose la proposition qui nous est faite sont les suivantes: Un juge
pourrait-il décider, par hypothèse, que les gouvernements
autonomes des premières nations, qu'il y en a qui aurait le
contrôle des installations hydroélectriques de la Baie James? M.
le Président, ce n'est pas une question qui est théorique,
ça. Elle est pratique et elle touche au projet hydroélectrique du
premier ministre, sur lequel il a fondé une bonne partie de sa
carrière politique.
Or, le texte qu'on a devant nous pourrait permettre à un juge de
prendre une telle décision. Maintenant, les autochtones ont fait des
gains dans les négociations constitutionnelles auxquelles nous avons
assisté. Nous ne sommes pas de ceux qui négligent les talents de
négociateur d'un Ovide Mercredi. Il a bien négocié. Il a
fait de bonnes alliances, puis il a négocié pour les peuples
qu'il représente. On ne lui reproche d'aucune manière... On est
heureux que les peuples autochtones aient eu un meilleur négociateur que
le peuple québécois. C'est ainsi qu'on doit apprécier les
résultats de la proposition qui nous est faite.
Est-il acceptable qu'une société comme la nôtre dise
que des gouvernements vont exister sur son territoire, vont exercer des
pouvoirs, je suppose, fiscaux et autres, et que ça, c'est un juge, si
les négociations n'aboutissent pas, qui va établir quelle forme
ces gouvernements-là vont avoir? Est-ce que le ministre des Affaires
municipales aurait accepté que la ville de Montréal soumette
à un juge la question de savoir quel impôt foncier va être
pompé par cette municipalité-là, comme par des centaines
d'autres, pour assumer le transfert de factures que la réforme du
ministre des Affaires municipales a confiées. Mais non, on a dit: C'est
des relations de gouvernement à gouvernement puis, sur le territoire,
ici, c'est le gouvernement du Québec qui a le pouvoir de prendre des
décisions. (12 h 20)
Ce que le programme de mon parti politique dit, M. le Président,
c'est que par traité et par entente nous allons nous entendre avec les
premières nations sur leur droit à l'autodétermination et
les modalités pratiques leur permettant de l'exercer. Il n'y a pas autre
chose dans notre position. On ne veut pas jouer sur l'exaspération des
gens de Châteauguay ou de ceux d'Oka. On dit seulement que si on a un
nouveau niveau de gouvernement au Québec - et on est d'accord qu'il y en
ait un, on est d'accord que les premières nations puissent s'exprimer de
cette manière - c'est par négociation qu'on doit y arriver, parce
que les Québécoises et les Québécois
n'élisent pas les juges. Ils élisent des députés
pour prendre les décisions politiques, et c'est contraire à tout
notre système de droit de dire que, sur la langue de travail comme sur
la langue d'enseignement pour les immigrants, comme pour qui contrôle
l'hydroélectricité à la Baie James et de quelle
façon les gouvernements autonomes des premières nations vont
opérer... Les Québécois n'admettent pas cette idée
de se cacher derrière les juges pour qu'un juge décide à
la place de ceux que la population élit pour prendre des
décisions.
Je pense, M. le Président, que ce sont là de vastes
questions qui sont posées et qu'il faudra y répondre d'ici au 26
octobre. Pas y répondre d'une façon démagogique pour
plaire à ceux de nos concitoyens qui, spontanément, sont pour le
oui ou pour le non - ça, c'est un grand nombre de personnes - mais, dans
le fond, pour répondre aux questions des personnes qui se disent:
L'entente dont on nous dit que c'est mieux que rien - ça,
c'était l'argument au congrès libéral, dans les corridors;
ce n'est pas «vargeux», excusez l'expression, mais c'est bien mieux
que rien - est-ce qu'elle peut nous faire reculer en termes
d'intégrité territoriale? Et l'intégrité
territoriale, M. le Président, ce n'est pas une notion théorique.
Qui est propriétaire des 20 000 000 000 $ d'installations
hydroélectriques que les Québécois ont installées
à la Baie James? Une question éminemment pratique. Dans quelle
langue les filles et les fils d'immigrants vont-ils étudier? Dans quelle
langue les gens parlant français au Québec ont-ils le droit de
travailler? Ces questions-là, M. le Président, on nous propose de
confier aux juges le soin d'en décider. Et on a vu déjà
que, quand la population n'est pas d'accord avec les décisions des
juges, elle demande aux élus d'en rendre compte. Mais ce ne sont pas les
élus qui ont à en rendre compte.
Je pense donc, M. le Président, que d'ici au 26 octobre le
gouvernement doit nous répondre précisément sur les
questions opportunes que nous posons, et qui sont les suivantes: Est-ce que la
loi 101 est en cause dans cette entente? Est-ce que la Cour suprême
pourrait prendre des décisions qui bifferaient des dispositions de 101
comme la langue d'enseignement pour les immigrants? Est-ce que le gouvernement
peut nous expliquer pourquoi il a accepté que les juges décident
des pouvoirs d'un nouveau niveau de gouvernement, qui serait celui des
premières nations, et dont le ministre des Affaires constitutionnelles
nous avait dit que c'était absolument inacceptable? Bien, qu'on nous
dise ce qui en est pour que les gens dont l'opinion n'est pas faite et qui sont
importants décident en toute connaissance de cause si c'est une entente
qui fait juste ne pas nous donner grand-chose ou si ce n'est pas plutôt
une entente qui pourrait nous faire reculer? Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Pointe-aux-Trembles, de votre intervention. Sur ce
même sujet - nous en sommes à l'adoption du principe du projet de
loi 44 - je cède la parole à M. le député de Hull.
M. le député, la parole est à vous.
M. Robert LeSage
M. LeSage: M. le Président, c'est avec un grand plaisir
que j'interviens aujourd'hui en cette Chambre afin d'appuyer un amendement
à la loi 150, Loi sur le processus de détermination de l'avenir
politique et constitutionnel du Québec. Cette loi, M. le
Président, a été adoptée le 20 juin 1991,
rappelons-nous. Mais avant d'aller plus loin, permettez-moi de situer le
contexte qui nous amène aujourd'hui à rediscuter de cette
loi.
Depuis 1985, plus précisément le 2 décembre, le
gouvernement libéral, mon gouvernement, dont je suis fier, s'est mis
à la tâche de convenir avec les gouvernements
fédéral et provinciaux les termes de son adhésion à
la loi constitutionnelle de 1982. À cette fin, le gouvernement du
Québec a fait connaître ses cinq conditions. L'accord
constitutionnel de 1987 a traduit les termes de l'entente intervenue au lac
Meech entre le Québec, Ottawa et les neuf autres provinces en regard des
cinq conditions posées par le Québec. Mais malgré cette
entente unanime entre les 11 gouvernements, l'accord n'a pas recueilli le
consentement de toutes les Législatures provinciales, ce qui aurait
permis la proclamation et son entrée en vigueur. C'est pourtant la
première réponse jamais donnée par le reste du Canada aux
démarches constitutionnelles amorcées par le Québec. Son
échec, après trois années de débats publics, a
soulevé la question de l'avenir politique et constitutionnel du
Québec. La rigidité de la procédure de modification
constitutionnelle et la conjoncture politique canadienne, de 1987 à
1990, ont fait que nous sommes arrivés à un échec,
à une impasse. On a remarqué que les débats qui ont
entouré l'accord constitutionnel de 1987 ont montré que les
visions politiques, les identités nationales et les aspirations
semblaient de plus en plus difficiles à concilier.
De plus, le 4 septembre 1990, notre gouvernement créait la
Commission sur l'avenir politique et constitutionnel du Québec, la
commission Bélanger-Campeau, qui concluait, après son travail de
quelques mois, à la nécessité d'un changement majeur de
nos institutions politiques et à la volonté très profonde
du peuple québécois d'une plus grande autonomie. M. le
Président, le projet de loi 150 étudié en juin 1991
respectait en tout point le contenu du rapport Bélanger-Campeau,
c'est-à-dire la tenue d'un référendum au Québec au
plus tard le 26 octobre 1992, la mise sur pied de deux commissions
parlementaires spéciales: l'une ayant pour mandat d'étudier les
questions afférentes à l'accession du Québec à la
souveraineté, l'autre, d'analyser toute offre d'un nouveau partenariat
de nature constitutionnelle faite par le gouvernement du Canada. De cette
façon, notre gouvernement respectait les termes de l'important consensus
qui s'était forgé à la commission Bélanger-Campeau.
Le gouvernement libéral a pris les moyens nécessaires pour
exprimer ce qu'il considérait comme essentiel pour le Québec et
ce que nous ne pouvions avoir dans Meech et que nous devions avoir d'une
façon autre. Il faut le reconnaître, M. le Président, notre
gouvernement a agi de façon responsable et pondérée, comme
il l'a toujours fait depuis sa prise de pouvoir en 1985, et l'expérience
et la force de notre chef seront une contribution déterminante quant
à notre avenir.
M. le Président, la raison de cet amendement à la loi 150
est bien simple. C'est l'entente du 22 août 1992, les offres du
gouvernement fédéral. Cet amendement va permettre la tenue
d'un référendum, le 26 octobre, sur l'entente
constitutionnelle. Comme le disait mon collègue, le ministre des
Affaires intergouvernementales canadiennes, le 9 mai 1986, au Mont-Gabriel, et
je le cite, M. le Président: «L'avenir du Québec est
à l'intérieur du Canada. C'est là la conviction profonde
de l'immense majorité de la population du Québec comme c'est
là l'engagement premier et fondamental du présent gouvernement.
Le gouvernement du Québec croit au fédéralisme parce que,
à l'intérieur du régime fédéral, le
Québec peut être fidèle à son histoire et à
son identité particulière en y trouvant, à la fois, les
conditions favorables à son plein épanouissement
économique, social et culturel.» (12 h 30)
M. le Président, ce que nous propose l'entente constitutionnelle
de 1992, c'est un progrès pour le Québec. Cette entente comporte,
pour le Québec, des outils de protection et des outils de
changement.
En ce qui a trait à la protection de son identité, le
Québec dispose d'un arsenal qu'il n'a jamais pu obtenir et qui, à
certains égards, se compare avantageusement à Meech. Avec ses
trois juges à la Cour suprême, une clause de société
distincte efficace, la garantie de 25 % des sièges aux Communes, la
double majorité linguistique au Sénat, le droit de veto, le
Québec a certainement ici les outils nécessaires à son
épanouissement, avec les limites au pouvoir fédéral de
dépenser, de nouvelles règles du jeu pour l'immigration, pour la
formation de la main-d'oeuvre, pour la culture, pour les forêts, pour les
mines, pour le tourisme, pour le logement, pour les loisirs, pour les affaires
municipales, pour le développement régional. Ces changements sont
importants et ils contribuent certainement à créer dans les faits
une dynamique de décentralisation, et renforceront l'existence de la
société distincte.
M. le Président, l'entente comporte une autre dimension d'une
grande importance. Cette entente qu'a acceptée notre premier ministre
comporte de nombreux compromis, mais aucune compromission. Ce compromis est
raisonnable parce qu'il respecte ce que nous sommes et ce que nous voulons
être. M. le Président, comme le disait un éditorialiste, si
on fait passer la raison avant les émotions, le bien d'un peuple avant
les passions individuelles, la survie pour l'avenir plutôt que la
satisfaction du moment, il faut accepter l'entente.
M. le Président, dans la Constitution, c'est là que les
droits des citoyens sont inscrits et protégés. C'est là
que les pouvoirs du Québec et de l'Assemblée nationale sont
créés et garantis. La réforme de la Constitution, c'est
pour permettre au pays et au Québec de faire face aux défis de
l'avenir.
Pour le Québec, l'entente du 22 août 1992 comporte des
gains. Premièrement, un Québec distinct, la reconnaissance de la
société distincte, rôle dynamique et responsabilité
du gouvernement de promouvoir la société distincte, 33 % des
juges à la Cour suprême, l'ajout de 18 députés
à la Chambre des communes, la garantie de 25 % des sièges
à la Chambre des communes, la double majorité au Sénat en
matière de langue et de culture, un veto sur le Sénat, un veto
sur la représentation à la Chambre des communes, un veto sur
l'existence et la composition de la Cour suprême, un veto sur la
participation des nouvelles provinces à la procédure de
modificaton constitutionnelle et au Sénat, et le retrait de
compensations pour tout transfert de juridiction provinciale au
fédéral.
Deuxièmement, M. le Président, un partenariat
amélioré. La compétence exclusive provinciale accrue:
culture, perfectionnement, formation de main-d'oeuvre, tourisme, forêts,
mines, loisir, logement, affaires municipales et urbaines; la maîtrise
d'oeuvre en immigration, développement régional et
télécommunications, la constitutionnalisation de l'entente
d'immigration déjà conclue, l'encadrement du pouvoir
fédéral de dépenser et respect des priorités
provinciales, l'intégration économique accrue tout en maintenant
les outils de développement des provinces, l'implication des provinces
à l'égard de la composition de la Cour suprême, et un
nouveau pacte pour les autochtones.
M. le Président, lorsqu'on parle de crédibilité du
Parti libéral du Québec pour négocier, nous n'avons
qu'à nous remémorer tous les débats qui ont entouré
les négociations autour de l'Accord de libre-échange. Nous
remarquons que, dès le début des travaux préparatoires,
soit au début de 1986, le gouvernement a tenu à associer toutes
les parties intéressées, c'est-à-dire les entreprises, les
travailleurs et les syndicats ainsi que la population en général
à tout ce processus de détermination des intérêts du
Québec.
Voilà un bel exemple, M. le Président, pour expliquer
cette crédibilité qui a toujours appartenu au Parti
libéral du Québec quand vient le temps de décider
d'exprimer ce qu'il considère comme meilleur pour le Québec. Le
Parti libéral du Québec n'a donc aucune leçon à
recevoir de l'Opposition officielle quand vient le temps de défendre les
intérêts du Québec. En continuant d'agir comme il l'a
toujours fait, le Parti libéral du Québec contribuera à
créer un Québec encore plus fort. Ce n'est que la
continuité dans le discours qui rend crédible l'Opposition. Au
contraire, on ne sait trop où donner de la tête pour s'y
retrouver.
M. le Président, il faut le dire, le seul homme capable de
renforcer le Québec est notre premier ministre, M. Robert Bourassa. Cet
homme a réussi à faire passer par-dessus tout les
intérêts supérieurs du Québec. C'est maintenant
l'heure des choix pour les Québécoises et les
Québécois. Le contexte économique actuel est difficile,
vous en conviendrez avec moi, et, dans ce sens, les Québécois se
questionnent sur les
conséquences économiques de la souveraineté. Les
payeurs de taxes que nous sommes tous ne tarderont pas à en faire les
frais.
Avant de terminer, M. le Président, vous me permettrez, lorsque
l'on discute de questions économiques, de faire allusion à
certaines déclarations de certaines personnes, des gens d'en face, des
péquistes qui viennent de temps à autre dans l'Outaouais
québécois tenter de leurrer ma population en lui faisant accroire
qu'avec la souveraineté il n'y aurait pas de problème dans
l'Outaouais québécois. Les fonctionnaires fédéraux,
ne vous inquiétez pas, on va vous incorporer dans notre fonction
publique provinciale.
M. le Président, nous sommes près de 7 000 000 au
Québec. Il y a environ 3 000 000 de travailleurs au Québec. Il y
a environ 390 000 fonctionnaires ou personnes qui sont à la solde de
l'État au Québec. On veut en rajouter 125 000. On en aurait
au-delà de 500 000 payés par l'État au Québec.
Ça ne se voit nulle part, M. le Président, payer un nombre aussi
considérable de fonctionnaires dans un État. Lorsque l'on dit
également à ces mêmes personnes: Ne vous inquiétez
pas, on va transférer des ministères de la ville de Québec
dans l'Outaouais québécois pour maintenir le nombre d'emplois de
fonctionnaires dans l'Outaouais, les gens de l'Outaouais
québécois ne les croient pas. Et une des raisons principales pour
lesquelles ils ne les croient pas, M. le Président, ces mêmes
personnes, avec leurs propres fonctionnaires, lorsqu'elles étaient au
pouvoir, leur avaient donné des augmentations de salaire avant le
référendum, pour leur soutirer plus qu'elles ne leur en avaient
donné après le référendum, tout simplement pour
attirer leurs votes. M. le Président, les fonctionnaires provinciaux se
rappellent. Les fonctionnaires fédéraux le savent et sauront de
quelle façon voter au prochain référendum.
Je terminerai donc, M. le Président, en disant que c'est une
bonne entente. Le Québec a obtenu de solides protections pour son
identité et de nombreux transferts de pouvoirs. Les premiers ministres
ont proposé ce à quoi on ne croyait plus: une solution
négociée et un projet unanime. Comme le disait notre premier
ministre au congrès: Dans les choix que nous acceptons, nous devons
évaluer les risques pour le présent, mais surtout pour
l'avenir.
Une voix: C'est ça.
M. LeSage: Les paramètres qui nous ont guidés,
c'est la confiance, le réalisme et, bien entendu, l'intérêt
supérieur des Québécoises et des Québécois.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le
député de Hull, de votre intervention. Sur ce même sujet,
je reconnais maintenant M. le président de la commission de
l'aménagement et des équipements et député de
Lévis. M. le député, la parole est à vous.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, j'écoutais parler le
député de Hull, et il donnait un exemple frappant d'un parti qui
ne sait pas compter. Parce que, quand il parlait des fonctionnaires
fédéraux, justement, on paie 25 % des taxes à Ottawa et on
a 17 % des fonctionnaires au Québec. Ça veut dire qu'on paie pour
25 % de fonctionnaires, on en a 17 %, on paie pour les fonctionnaires
d'ailleurs. Essentiellement, c'est ça. Et qu'est-ce qu'on observe dans
cette entente-là? Une entente de gens qui ne savent pas compter, parce
que ces grands esprits qui pensent connaître l'économique, le seul
point, M. le Président, sur lequel ils ne se sont pas entendus, nous
disent-ils, c'est justement sur l'union économique. Et vous voyez
aujourd'hui ces gens sincères, M. Claude Castonguay, libéral
notoire, pour une paye de sénateur, maintenant, devient conservateur;
Mme Solange Chaput-Roiland, qui était une libérale en cette
Chambre, pour une paye de sénateur, maintenant, est une conservatrice.
Vous voyez M. Roch Bolduc, libéral notoire - il vient de Bellechasse, on
connaît la famille - siège maintenant, libéral notoire,
comme conservateur, pour une paye de sénateur. Vous voyez Mme
Lavoie-Roux, ministre dans cette Chambre, qui a quitté, nommée
à Ottawa; maintenant, elle est devenue bleue pour la paye. Et on va nous
dire que ces gens sincères là, ces grands esprits qui
étaient tous pour l'abolition du Sénat, maintenant, ils sont pour
la perpétuation du Sénat pour garder leur job, M. le
Président. Et, en même temps, alors qu'on a le chômage au
Canada, on crée des postes de députés additionnels comme
si on n'en avait pas assez de députés, comme si au lieu d'avoir
22 % des députés, avec 24 % ou 25 % des députés on
va gagner davantage, M. le Président, comme si on gagnait plus une
partie de hockey quand le «score» est 7-3 plutôt que 7-2.
Voyons donc, M. le Président! (12 h 40)
La seule partie sur laquelle ils n'ont rien discuté, c'est
l'économie. Ghislain Dufour, ce spécialiste du
libre-échange, pas un mot. Il devisait, avec Ovide Mercredi, du pays de
ses ancêtres, M. le Président. On a vu qui, après
ça? On a vu tous ces gens-là qui parlaient du
libre-échange. Pas un mot sur la question économique! Pourquoi?
Parce qu'ils ont fait durer un débat pendant deux ans pour ne pas en
parler. Je vais vous dire une chose: il y en a un qui va vous en parler pendant
les deux prochains mois, du débat économique.
On a actuellement, au Canada, 13 % de chômeurs, le niveau le plus
élevé de tous les pays du monde industrialisé. Il n'y a
pas un pays au monde actuellement industrialisé qui a
autant de chômeurs que le Canada. Une dette de près de 500
000 000 000 $. La dette la plus élevée de tous les pays du monde
industrialisé! Même les États-Unis, actuellement, qui
parlent qu'ils ont une grosse dette ont une dette d'à peu près la
moitié de celle du Canada si on tient compte de la population: 3 000 000
000 000 $. On est à 500 000 000 $. Si on avait 10 fois la population, 10
fois plus, il faudrait peut-être avoir 5 000 000 000 000 $ au lieu de 500
000 000 000 $, comparé à 3 000 000 000 000 $ aux
États-Unis, alors qu'ils trouvent que c'est trop gros, leur dette, et le
débat se fait là-dessus.
Nous autres, on a des beaux esprits qui parlent du Canada comme si on
était au XIXe siècle. Pendant ce temps-là, on parle des
relations est-ouest comme si c'était l'avenir, mais on voit ce que
ça donne: des compagnies d'aviation en faillite, des chemins de fer qui
ferment, des garages qui ferment pour les chemins de fer. Pourquoi? Parce que
l'avenir n'est pas dans les relations avec Regina, mais dans les relations avec
Boston, avec New York, avec Chicago. Qui avez-vous entendu dans le
débat? Le Conseil du patronat, Ghislain Dufour? Non. Pas un son. M.
Bourassa? Pas un son. Celui qui se prétend économiste, je n'ai
jamais vu son diplôme. Hein!
Parlons des gens sincères, des gens hypocrites. Je regrette.
Comme summum d'hypocrisie, nos sénateurs qui siègent comme
conservateurs à Ottawa, vous ne viendrez pas me dire, M. le
Président, que c'est ça, la sincérité. Ils sont
devenus conservateurs pour une paie. Aujourd'hui, on regarde un débat,
un débat où il n'y a rien sur l'économie. On ne s'entend
pas sur l'économie, de sorte qu'il n'y a rien sur l'économie.
Quand les gens vont écouter ça, le chômeur qui va dire: Ces
gens-là pensent à moi. Il va y avoir trois juges de la Cour
suprême. Grosse victoire! Grosse victoire, M. le Président. On en
avait trois avant, on en a encore trois. Grosse victoire! Des
députés, on va en avoir quelques-uns de plus dans le Parlement,
mais on ne dépassera pas 25 %. Comme société égale,
grosse victoire!
Le député de Chaiiesbourg, je l'écoutais parler. Je
suis persuadé qu'il ne comprend rien à l'entente, il ne parle pas
l'anglais, M. le Président. Vous avez un beau fédéraliste
qui ne parle pas l'anglais. Tous les textes sont faits en anglais. On vient
d'avoir les traductions et on apprend que les traductions ne sont pas bien
faites seulement. On a mal traduit les mots. Il n'a même pas compris
l'entente. Il veut apprendre l'anglais une fois qu'il aura quitté la
politique. Il serait mieux d'apprendre l'anglais et de venir en politique
après. Il comprendrait plus quand on négocie avec Ottawa.
M. le Président, on va arrêter de dire des sornettes. Ce
gouvernement-là, le mal qu'il y a au Canada actuellement, c'est un pays
en faillite. En faillite! Tous ceux qui savent compter savent que le Canada est
un pays en faillite, avec 500 000 000 000 $ de déficit. Quand on compte
les fonds de pension pas accumulés... Vous allez me dire: Ce n'est
pas... Oui. Plus de 425 000 000 000 $. Mais comptez que les fonds de pension,
au Canada, il n'y en a pas un de capitalisé. Les gens pensent qu'ils
sont en sécurité dans ce pays-là. Quelle somme est
capitalisée dans les fonds de pension des vétérans, des
fonctionnaires, des personnes âgées? Pas une cent! Tous des
systèmes «pay-as-you-go». Alors qu'actuellement 35 % des
revenus du gouvernement fédéral servent à quoi? À
payer les intérêts sur la dette, M. le Président. Mais
à quoi? Qui a fait ça? Deux premiers ministres ne comprenaient
rien à l'économie: M. Trudeau et M. Mulroney. Deux zéros
en économie. Aujourd'hui, M. Mulroney va nous faire le fanfaron alors
qu'il est à 12 % à 15 % dans les sondages depuis deux ans, alors
qu'il essaie de sauver sa peau en évitant de parler de la question
économique, alors que le taux d'insatisfaction à l'égard
du gouvernement libéral de M. Bourassa est à 70 % parce que c'est
un échec.
Essentiellement, ça va si bien, M. le Président. Les taxes
de vente sur les vêtements, les chaussures, les meubles et les appareils
ménagers ont été rétablies par ce
gouvernement-là il n'y a pas longtemps. La taxe sur l'essence, qu'ils
trouvaient épouvantable dans notre temps, qui était à
0,133 $, le litre est rendu à 0,199 $ le litre, M. le Président.
Le permis de conduire a augmenté de 6 $ à 20 $: 300 %
d'augmentation, plus de 300 %. L'immatriculation, qui coûtait 37 $, est
rendue à 120 $, M. le Président. Dans quelques années,
ça. Surtaxe de 30 %, même aux automobilistes. Même ceux de
l'île d'Orléans. Je vois mon collègue de Montmorency;
l'île d'Orléans paie 30 $ pour un transport en commun qu'elle n'a
même pas, M. le Président. Combien de municipalités comme
ça, au Québec, actuellement? Plus d'une centaine de
municipalités paient 30 $ du permis d'immatriculation alors qu'elles
n'ont même pas de transport en commun. HydroQuébec: depuis deux
ans, les taux ont augmenté de plus de 30 %. Des hausses de taxes
municipales, grâce à la réforme du ministre des Affaires
municipales, M. Claude Ryan, qui se présente comme un spécialiste
qui était à l'Éducation et qui n'a même pas vu qu'il
y avait 40 % de décrochage et que ça prenait trois ans et demi
pour faire deux ans de cégep, M. le Président.
Des gens aveugles comme ça, qui ne voient rien, c'est ça,
notre problème, actuellement. On n'est plus compétitifs. Les
taxes scolaires ont plus que doublé depuis trois ans. Les frais de
scolarité: hausse de 130 %, M. le Président. La TPS et la TVQ,
15,56 % de taxes maintenant. Vous allez aux États-Unis, et il y a des
États qui n'en ont même pas, de taxe de vente. Zéro au
New-Hampshire, à nos portes, au sud. Zéro de taxe de vente. Quand
on arrive là, les routes
sont belles. Il n'y a pas de craques, il n'y a pas de trous, il n'y a
pas d'ornières et il n'y a pas de vallons. Allez rien que sur la route
en arrière de Sherbrooke! Que le ministre des Transports aille faire un
tour! Quand je suis revenu en janvier, j'étais sur une route comme une
planche à laver. Rendu à Sherbrooke, j'ai dit à ma femme:
On devrait s'acheter un cheval; on a le «swing» tellement ça
saute. Je suis redescendu par cette route-là pour voir l'autre bord cet
été, si c'était mieux. J'avais l'impression d'être
sur un jeu de Nintendo, avec une route qui gondolait dans tous les sens.
Dangereuse à outrance! Avec une fausse autoroute 55 qui a rien que deux
voies, M. le Président! L'inflation verbale du ministre des Transports,
qui a promis toutes les autoroutes au Québec; il n'est pas resté
aux Transports, par exemple. Il a promis la 50, il a promis la 30, il a promis
la 25, il a promis la 13. Il les a toutes promises, il n'en a pas fait un
pouce. Le seul bout qu'il a fait, c'est 500 000 $ pour une route qui ne
mène nulle part, pour son «chum» qui était
président de l'Assemblée nationale, M. Jean-Noël Lavoie.
M. le Président, continuons: TPS, TVQ, alcool et tabac, des taxes
de partout, des tarifs de partout. La même chose à Ottawa. Est-ce
qu'ils ont parlé de ça? C'est ça qui intéresse les
gens. Ce qui intéresse les gens, c'est les taxes qu'ils paient. Pendant
deux ans, ces spécialistes du XIXe siècle, plus de souvenirs que
de projets, plus près du musée de cire que de l'avenir... Quand
je vois M. Bourassa accompagné du député de Bonaventure,
du député d'Argenteuil, de la députée de Chomedey,
j'ai bien plus l'impression de voir le passé que l'avenir, M. le
Président. J'ai l'impression de voir une équipe de «has
been». Pas de projet économique, rien sur l'économie dans
cette entente-là, puis ils pensent qu'on n'en parlera pas? M. Mulroney
pense qu'on n'en parlera pas.
Envoyer ensemble Bob Rae, Robert Bourassa puis Brian Mulroney, trois pas
bons! On va les battre, les trois ensemble, M. le Président. C'est eux
autres, la source des problèmes. C'est eux autres, la cause du
problème économique, avec des déficits incroyables. On
nous a dit qu'on faisait 3 000 000 000 $ de déficit, oui, quand les taux
d'intérêt étaient à près de 20 %. Avec eux,
les taux d'intérêt baissent et le déficit augmente. Cette
année, le déficit est de près de 4 000 000 000 $. Il a
augmenté considérablement depuis l'an dernier. Il a plus que
doublé, alors que les taux d'intérêt n'ont jamais
été aussi bas. Quelle est la raison? Il faudrait peut-être
bien apprendre à compter. M. le Président, il faudrait
peut-être bien apprendre à compter.
Une équipe qui ne connaît rien de l'économie! Rien
de l'économie! Ah! il y a des moralisateurs. Des Moïse, il y en a.
Ils se comportent dans leur congrès comme si le chef était le
pape, puis le ministre des Affaires municipales serait Moïse s'il arrivait
avec les Tables de la Loi. Puis les délégués, eux autres,
ils votent sur des textes qu'ils n'ont jamais vus. J'aurais aimé
ça que le ministre des Affaires municipales soit directeur du Devoir
à cette époque-là. Qu'est-ce qu'il aurait dit d'un
parti qui vote des constitutions sans même avoir les textes? Il aurait
trouvé ça infâme. Puis, aujourd'hui, il trouve ça
beau? Sépulcre blanchi! Sépulcre blanchi, M. le Président,
qu'un tel homme qui est prêt à accepter qu'on vote des textes sur
l'avenir d'un peuple sans même les voir! Bref, mépris de ses
partisans, mépris de ses militants, qui l'ont d'ailleurs sacré
dehors à la première opportunité. Puis il a vu qu'il
s'était trompé quand les éditoriaux puis les discours, ce
n'était pas pareil. (12 h 50)
Oui, comme ils disent, la vertu était dans la théorie,
mais le vice, dans la pratique. Le jupon dépasse, M. le
Président. Et ces gens-là vont venir nous enseigner la vertu! Les
gens sont fatigués de gens qui ne voient pas clair, des plans qui nous
touchent sur le plan économique, M. le Président, des normes par
rapport au libre-échange négocié en fous, pas parce que le
libre-échange est mauvais en soi, parce que c'a été mal
négocié. Il y a un secteur que... Je vais vous dire même
plus que ça. Le député de Hull en a parlé, il m'a
donné une belle ouverture. Puis, quand le ministre des Transports
à Ottawa, M. Crosbie, a dit: Je suis tellement gêné de la
partie qui a été négociée sur le transport que j'ai
honte. Est-ce que vous pensez que le reste, c'était mieux? On avait
donné tout notre marché dans le domaine maritime aux
Américains, alors qu'eux gardaient le système du Jones Act
protectionniste comme avant. Ils avaient la même protection puis, nous
autres, on avait tout enlevé la protection qu'on pouvait avoir. Urbi et
orbi. Même le ministre fédéral a dû admettre, il a
dit: On n'a pas le temps de renégocier ça. C'est
épouvantable! J'espère qu'ils étaient meilleurs dans le
reste. Regardez les usines qui ferment une par derrière l'autre.
Même votre chef libéral, qui va être sur les
mêmes tribunes que vous autres, M. Jean Chrétien, tantôt...
quand il demande la révision du libre-échange, est-ce qu'il
trouve ça bon? Est-ce qu'il y en a des dispositions sur le
libre-échange? Est-ce qu'il y a des dispositions sur la formation de la
main-d'oeuvre? Est-ce qu'il y a des dispositions concernant l'harmonisation?
Des ententes administratives? On en a une belle: TVQ, TPS. Le fouillis, le
bordel! Si les commerçants du Québec en veulent plus, qu'ils
votent oui à cette entente-là, ils vont en avoir en masse, de ces
ententes administratives avec des TVQ, TPS, avec des piles de rapports, avec
des fonctionnaires qui ne s'entendent pas.
Puis, l'Europe est en train de dire non à Maastricht, pourquoi?
Parce qu'ils disent non à la bureaucratie. Essentiellement, ils ne
disent pas non à l'Europe. Non à la bureaucratie.
Actuellement, on a un gouvernement paresseux qui nous dit le contraire
de ce qu'il fait. Rappelez-vous comment M. Mulroney traitait M. Trudeau, de
Chef Boyardee avec ses nouilles. Rappelez-vous de la première chose
qu'il a faite: il a engagé le marmiton en chef, Paul Tellier. Le
même marmiton que M. Trudeau pour s'occuper des questions
constitutionnelles, le même marmiton qu'il trouvait centralisateur. Ces
gens-là, vous dites, sont sincères. Voyons donc! Passe-moi
l'assiette au beurre! C'est ça, le slogan. Passe-moi l'assiette au
beurre! D'autres disent: Passe-moi l'auge! Mais ce débat
dépassé du XIXe siècle, M. le Président...
On va parler de l'économie, dans les deux prochains mois,
à des gens qui sont tannés d'être en chômage,
à des gens qui sont insécures, à des consommateurs qui
achètent même moins d'épicerie, tellement ils sont
insécures. Quand vous êtes rendus que les ventes au détail
baissent même dans le domaine de l'épicerie, M. le
Président, c'est parce que ça va mal, pas parce que les taux
d'intérêt sont hauts. Nous autres, on a vécu une
époque où c'était dur, avec des taux
d'intérêt qui étaient à près de 20 %.
Actuellement, on a des taux d'intérêt plus bas que jamais, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Berthier, vous avez une question de
règlement?
M. Houde: Oui, M. le Président, j'aimerais que les
parlementaires prennent leur place, s'il vous plaît, selon l'article
32.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): En vertu de l'article 32
et à la demande du député de Berthier, je demanderais aux
députés de prendre la banquette que la présidence leur a
assignée dans cette salle.
M. le député de Lévis, si vous voulez
poursuivre.
M. Garon: Je vais dire plus que ça, M. le
Président. On va parier des fonds de pension dans cette campagne, parce
que sachez, M. le Président, qu'à Ottawa, il n'y a pas de fonds
de pension capitalisé. Il n'y a pas de fonds de pension
capitalisé. Les gens qui avaient peur des fonds de pension sous
l'indépendance, je vais vous dire que vos fonds de pension sont en
danger sous le régime fédéral actuel. Sous le
régime fédéral actuel, les fonds de pension sont en danger
parce qu'ils ne sont pas capitalisés et, actuellement, la dette, au
niveau où elle est rendue, quand 35 % des revenus servent à payer
les intérêts de la dette, je vais vous dire, M. le
Président, que vous êtes en danger. Ça devance être
haut. Ceux qui savent compter, actuellement, vous commencez à voir
ça. L'Association des manufacturiers québécois, je ne
parie pas de Ghislain Dufour. Ghislain Dufour, il a vendu son âme.
Excepté que... parions de ceux qui parient et qui savent compter.
Regardez les commerçants comme ils sont contents de la TPS et de
la TVQ. Regardez les restaurateurs, à 15,56 %, comme ils sont contents
dans les restaurants. Demandez-leur si c'est la joie des consommateurs dans les
restaurants, alors qu'ils sont tous dans la misère. On va leur dire. M.
Cortina, du Michelangelo, je vais lui demander s'il aime autant les
libéraux aujourd'hui qu'il les aimait avant, quand il trouvait que, nous
autres, quand je pariais du pourboire et de taxer le pourboire, c'était
épouvantable, c'était des revenus. Je vais lui demander si,
à 15,56 %, il est content. On va prendre à témoin des gens
qui vous ont mis en place, puis qu'ils voient les taxes qui vont augmenter dans
l'essence, dans la TPS, dans la TVQ, dans les plaques d'automobiles, dans les
permis de conduire, dans l'hydro, dans l'impôt, partout. Une entente
constitutionnelle, ça ne porte pas nécessairement rien que sur du
placotage de sénateurs parce que ceux qui y étaient, qui
souhaitaient un référendum au Canada, l'ont-ils donné, le
choix, aux gens? Demandez-vous: Voulez-vous plus de sénateurs ou vous
voulez les abolir, les sénateurs? Je vais vous le dire d'avance:
à 90 %, on aime autant ne pas avoir de sénateurs. On va sauver
ça.
Demandez aux gens, faites-en un, référendum, franc. Si
vous pensez, quand vous négociez des postes de sénateurs pour
l'île-du-Prince-Édouard, quand vous négociez des postes de
sénateurs... Vous savez, l'île-du-Prince-Édouard, c'est la
population de mon comté avant qu'il ait été divisé
en deux, en 1989. J'aurais dû former, peut-être bien, une
île-du-Prince-Édouard avec mon comté, M. le
Président, j'aurais droit, j'aurais droit...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!
Un rappel au règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, compte tenu de l'importance
du sujet, j'aurais pensé qu'il y aurait un peu plus de monde de part et
d'autre. Alors, je fais un rappel au quorum.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Demande de quorum.
Alors, qu'on appelle les députés. (12 h 56 - 12 h 58)
Je suspends les travaux de cette Assemblée à 14
heures.
(Suspension de la séance à 12 h 59)
(Reprise à 14 h 7)
Le Président: Mmes, MM. les députés, nous
allons nous recueillir quelques instants.
Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.
Décision du député de
Drummond,
M. Jean-Guy St-Roch, de siéger
comme indépendant
J'ai reçu de M. le député de Drummond, aujourd'hui
même, une lettre dont je vous lis l'extrait suivant: «M. le
Président, permettez-moi, par la présente, de vous faire part de
la décision que j'ai arrêtée et communiquée au
premier ministre le 2 septembre 1992, soit celle de quitter l'équipe
gouvernementale libérale et de siéger, à partir de
maintenant, à titre de député indépendant.»
C'est signé: M. Jean-Guy St-Roch. Je dépose donc cette
lettre.
Nouveau diagramme de l'Assemblée
Également, je voudrais maintenant déposer le nouveau
diagramme de l'Assemblée nationale daté du 4 septembre 1992. Le
document est déposé.
Affaires courantes
Déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi.
Dépôt de documents, de rapports de commissions, de
pétitions.
Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de
privilège ou sur un fait personnel. En conséquence, nous allons
procéder immédiatement à la période de questions et
réponses orales.
Je vais reconnaître, en première question principale, M. le
chef de l'Opposition.
Questions et réponses orales
M. Parizeau: M. le Président, ma question s'adresserait au
premier ministre. Est-ce qu'il doit venir en Chambre d'ici peu?
Le Président: Très bien, M. le chef de
l'Opposition. On m'informe que le premier ministre sera en Chambre dans les
secondes qui suivent. Nous allons attendre quelques minutes pour le
début de la période de questions.
On m'informe que le premier ministre entre à l'instant. Alors,
à ce moment-ci, nous débutons officiellement la période de
questions et réponses et je reconnais, en première question
principale, M. le chef de l'Opposition.
M. Parizeau: M. le Président, je vous remercie.
J'espère que, depuis hier, le premier ministre est revenu à de
meilleurs sentiments, qu'il s'est calmé un peu et que nous pourrons,
aujourd'hui, aborder d'autres aspects des propositions constitutionnelles qu'il
entend soumettre à la population, calmement et bien
décidés, j'en suis sûr, lui et moi, d'aller au fond des
choses. (14 h 10)
Poursuite des négociations sur les
propositions constitutionnelles
du 28 août 1992
M. le Président, les fédéralistes, dans leur
majorité, j'imagine, au Québec, demandaient à ces
propositions constitutionnelles essentiellement trois choses. D'abord, que le
partage des pouvoirs entre Ottawa et le Québec soit profondément
modifié, de façon à transférer au Québec un
nombre important de compétences. Nous sommes tous d'accord, ça
fait très longtemps que les fédéralistes, que beaucoup de
fédéralistes au Québec demandent ça.
Deuxièmement, ils voulaient aussi que les chicanes s'arrêtent une
bonne fois, que le partage soit devenu clair et non que les gaspillages soient
éliminés entre Ottawa et Québec. Évidemment,
troisièmement, ils ne demandaient pas de recul par rapport à la
situation existante. Trois demandes éminemment raisonnables. Or, M. le
Président, on en est rendu à ceci: il est clair pour tout le
monde qu'il n'y aura pas de transfert appréciable de pouvoirs d'Ottawa
à Québec. Deuxièmement, on constitutionnalise les
chicanes. Comme le disait un quotidien de ce matin, sur les 60 points des
propositions constitutionnelles, il y en a 25 où on constitutionnalise
les discussions pour des années. Troisièmement, on commence
à voir qu'il y a un certain nombre de reculs. C'est sérieux,
l'avis des huit constitutionnalistes, qui est publié aujourd'hui dans
les journaux, indiquant des reculs certains quant à la clause de la
société distincte, en particulier.
Alors, puis-je demander au premier ministre ceci: Compte tenu de ce que
je viens de dire, compte tenu du fait que, clairement, ces propositions
constitutionnelles ne satisfont même pas sa clientèle,
après tout, les fédéralistes qu'il veut
représenter, est-ce qu'il a l'intention de poursuivre des
négociations avec Ottawa pour essayer d'améliorer un peu les
choses? En somme, le rapport dit «définitif» du consensus de
Charlottetown que nous avons devant nous, on sait que le premier ministre a
cherché à l'améliorer par des négociations
téléphoniques. Est-ce qu'il a l'intention de continuer? Est-ce
que le premier ministre va chercher à améliorer cette entente ou
si, dans son esprit, c'est définitif, ça?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, je félicite le chef
de l'Opposition pour le ton qu'il utilise, la sobriété. Quant au
fond, il me permettra de diverger avec lui. Il sait fort bien que dans certains
cas... Il a soulevé plusieurs points, probablement qu'il reviendra en
question additionnelle. Prenons le cas de la société distincte.
Il me semble que j'ai été très clair, hier, sur les gains
qu'a faits le Québec pour sa reconnaissance dans la Constitution comme
société distincte. Nous serons en mesure, en commission
pariemen-
taire, de le démontrer au cours du débat
référendaire. Il dit: Les fédéralistes ont
été déçus. C'est possible. J'ai moi-même
mentionné qu'on aurait souhaité en avoir davantage, mais il reste
à considérer, M. le Président, les gains réels qui
ont été faits. On peut toujours en avoir plus. Vous l'avez
constaté vous-mêmes lorsque vous avez essayé de
négocier. Je ne vois pas comment il peut dire que c'est un recul. Je
sais qu'un ancien collègue, M. Claude Morin, a écrit ça,
hier, dans Le Devoir, que c'est un recul. Ce grand patriote qui a
toujours servi bénévolement la patrie!
Des voix: Ha,ha, ha!
M. Bourassa: Alors, on sait que, pour lui, c'est peut-être
un recul. Lui qui a tenu la main de René Lévesque le 16 avril
1981, il est mal placé pour donner des leçons.
Alors, pour répondre au chef de l'Opposition, il n'y a pas de
recul, loin de là. Loin de là, quand on voit les gains qu'on
obtient dans l'immigration - on pourra élaborer là-dessus, on
aura l'occasion - les gains qu'on a obtenus dans le secteur de la
main-d'oeuvre. C'est clair que ça prend beaucoup, que ça va
prendre un certain temps pour arriver à une entente. Il y a des milliers
de fonctionnaires qui sont en cause. C'est clair que nous n'avons pas
demandé la récupération de la compétence
constitutionnelle de l'assurance-chômage. C'était dans le rapport
du Parti libéral, j'en conviens, mais il faut quand même... On
fixe des objectifs, mais le gouvernement doit prendre des décisions en
fonction de la réalité. Récupérer la
compétence constitutionnelle de l'assurance-chômage, si on l'avait
demandé, comme on le souhaitait dans le rapport du Parti, mais le
gouvernement doit examiner la réalité immédiate, c'est 1
000 000 000 $ qu'il aurait fallu trouver. Le chef de l'Opposition, qui a
été ministre des Finances, il sait que trouver 1 000 000 000 $
additionnel ce n'est quand même pas facile. Il a dû apprendre
à compter depuis qu'il a été ministre des Finances. Alors,
je dis au chef de l'Opposition...
Des voix: Ha,ha, ha!
Le Président: S'il vous plaît!
M. Bourassa: Je dis au chef de l'Opposition, M. le
Président, qu'il fallait quand même être réaliste.
Nous avons obtenu des gains considérables sur le plan des institutions,
sur le plan de la reconnaissance du Québec comme société
distincte, sur le plan du partage des pouvoirs. Nous avons participé
à la réconciliation avec l'histoire dans le cas des autochtones.
On pourra revenir. Peut-être que le député de
Lac-Saint-Jean va m'adresser des questions à cet égard
tantôt, mais je crois, M. le Président, que le chef de
l'Opposition devrait faire un petit effort d'objectivité et
reconnaître les gains sans précédent qu'a obtenus le
Québec dans cette négociation.
Des voix: Bravo!
Le Président: En question complémentaire, M. le
chef de l'Opposition.
M. Parizeau: Qu'est-ce que ça donne au premier ministre,
M. le Président, de procéder comme ça, par insinuations?
Les allusions à Claude Morin, c'est destiné à quoi,
exactement? Je demandais au premier ministre... Je faisais allusion...
Le Président: S'il vous plaît! À l'ordre,
s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous
plaît! M. le député, s'il vous plaît! Alors, la
parole est au chef de l'Opposition pour une question complémentaire.
Votre question, M. le chef de l'Opposition.
M. Parizeau: Je faisais allusion tout à l'heure devant le
premier ministre à ce rapport de huit constitutionnalistes auquel on a
fait allusion dans un quotidien hier, et qui est publié dans d'autres
quotidiens aujourd'hui. C'est un avis de huit constitutionnalistes, professeurs
de droit, qui est intitulé «La clause relative à la
société distincte du projet d'accord constitutionnel de 1992, un
recul pour le Québec». Est-ce que le premier ministre a lu
ça? Est-ce qu'il est conscient, est-ce qu'il a lu la liste des
signatures? Au cas où il ne l'aurait pas, je la lui donne. MM. Henri
Brun et Ghislain Otis, de l'Université Laval, MM. Jacques-Yvan Morin,
Daniel Turp et José Woehriing, de l'Université de
Montréal, M. Daniel Proulx de l'Université d'Ottawa, M. William
Schabas, de l'Université du Québec à Montréal, M.
Pierre Patenaude, de l'Université de Sherbrooke. Huit professeurs de
droit constitutionnel...
Le Président: Un instant, s'il vous plaît! À
l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! À l'ordre, s'il
vous plaît! Alors, M. le chef de l'Opposition.
M. Parizeau: Je ne comprends toujours pas ce qui les fait rire.
Est-ce que le premier ministre est conscient que cet avis de
constitutionnalistes nombreux et connus au Québec rejoint ce que le
professeur Dion dit aussi? Est-ce que le premier ministre se rend compte
qu'à l'heure actuelle, la majorité des opinions juridiques, c'est
que la clause de la société distincte dont il s'est targué
si longtemps est considérée par eux comme un recul pour le
Québec et décrite dans ces termes-là?
M. Bourassa: M. le Président... (14 h 20)
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: ...dans son préambule, le chef de
l'Opposition se réfère à mes propos sur Claude Morin. Si
je l'ai fait, c'est que lui-même a dit qu'il y avait recul. Or, hier,
dans un interview du Devoir, M. Morin reprenait également ces
propos-ià qu'il y avait recul, et il va le faire probablement comme il
l'a fait à la télévision, dimanche dernier.
Alors, j'ai droit, M. le Président, puisqu'il reprend les propos
de M. Claude Morin, de lui citer, et je m'étonne qu'il me le reproche.
Lui-même a dit qu'il avait posé un geste totalement inacceptable
en acceptant de l'argent comme informateur de la GRC. M. le Président,
alors... Lui-même l'a dit qu'il avait posé un geste totalement
inacceptable. Alors, il ne doit pas s'étonner. C'est le moins qu'on
puisse dire.
Le Président: Un instant, s'il vous plaît! Je vais
demander la collaboration de tous les collègues, s'il vous plaît.
Alors, je reconnais une personne à la fois. S'il vous plaît!
Alors, M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, sur les experts, le chef de
l'Opposition invoque des arguments d'autorité. Il invoque des arguments
d'autorité, bon, Jacques-Yvan Morin, André Turp... Non, Daniel.
André Turp, c'est le chanteur, ça. Daniel Turp.
Des voix: Ha,ha, ha!
M. Bourassa: II invoque des arguments d'autorité. Je dis,
M. le Président, nous aurons une commission parlementaire. Nous aurons
une commission parlementaire et, à ce moment-là,
différents experts pourront venir. Bon, je comprends qu'il invoque des
experts. On sait qu'ils ont milité pour son parti. Ça ne leur
enlève pas leur compétence, mais ils ne sont pas les seuls. Ils
ne sont pas les seuls à pouvoir donner un point de vue. Il y aura des
experts qui vont venir.
Nous, on a examiné la question. Je pense bien que le chef de
l'Opposition doit comprendre qu'on n'a pas accepte cette clause-là sans
protection, sans garantie. Nous l'avons examinée avec des experts qui
sont reconnus. On en discutera comme il veut le faire, je suis d'accord avec
lui, sobrement, objectivement, et on pourra évaluer les conclusions. Je
veux dire, je ne le blâme pas d'arriver, cet après-midi, et dire:
Bien, ces experts disent que ce n'est pas acceptable comme définition,
mais je lui dis, de mon côté, que ça me paraît un
progrès pour le Québec, même pour le profane, quand on
voit, par exemple, la distinction qui est faite entre les
éléments de la clause Canada, qui sont tous regroupés, et
qu'on voit que, dans le cas de la société distincte, c'est un
article isolé, indépendant, à part, qui est mis en relief.
Même pour des profanes, on peut conclure qu'il y a là un
véritable progrès du Québec.
Le Président: Toujours en question
complémentaire.
M. Parizeau: Le premier ministre m'a l'air d'être comme son
article, M. le Président, isolé.
Des voix: Ah! Ah!
M. Parizeau: Bien, quand on en est rendu à se vanter
d'isoler un article, franchement! Est-ce que le premier ministre serait capable
de nous expliquer - j'imagine qu'il l'a fait à son Conseil des ministres
et à son caucus - pourquoi il a accepté, en vertu du point 30 de
l'entente, pour ce qui a trait aux forêts, mines, tourisme, logement,
loisirs, affaires municipales, des secteurs où le Québec avait
une compétence exclusive depuis 1867 - ça fait 125 ans qu'on
avait la compétence exclusive là-dessus - que, et je cite le
point 30: «II conviendrait que les assemblées législatives
aient le pouvoir de limiter dans leur province les dépenses
fédérales»?
M. le Président, est-ce que je me trompe en disant que jamais la
Constitution canadienne n'avait reconnu l'ingérence du gouvernement
fédéral dans des secteurs comme ça? C'est vrai qu'il en
faisait, mais jamais on ne l'avait reconnu. Est-ce que je me trompe, M. le
Président, en prenant pour acquis que c'est la première fois que
la Constitution canadienne reconnaîtrait le droit du gouvernement
fédéral d'intervenir dans ces secteurs et que le seul pouvoir
qu'auraient les provinces, ce n'est pas d'exclure le fédéral, ce
serait simplement de le limiter à la suite d'ententes? Est-ce que je
comprends bien? Est-ce que c'est ça que le premier ministre a dit
à son Conseil des ministres pour lui faire accepter l'entente?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Je m'étonne, M. le Président, alors
que toutes ces questions pourront être abordées dans le
détail à la commission parlementaire, que le chef de l'Opposition
s'attarde sur ces points auxquels on pourra lui répondre, alors qu'on
s'aperçoit qu'il y a presque 13 % de chômeurs au Québec,
alors que les Québécois considèrent que le
développement économique est la grande priorité.
Là, on commence à invoquer des arguties juridiques pour essayer
de piéger le gouvernement, sans succès. Ce qu'on a fait, c'est
qu'essayer de réparer votre erreur de 1984, quand vous avez reconnu le
pouvoir de dépenser dans le développement économique
régional. Ça, vous l'oubliez. Alors, il faut se
désengager. Il faut se désengager, M. le Président, et
ça suppose un certain processus. Pourquoi, donc, le chef de l'Opposition
me pose des questions aussi évidentes dans leur réponse, dans
leur compréhension?
Le Président: En question principale, M. le
député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition.
Revendications du Québec au sujet du partage
des pouvoirs
M. Brassard: M. le Président, le nouveau partage des
pouvoirs a toujours été le coeur des revendications
constitutionnelles des gouvernements québécois qui se sont
succédé depuis plus de 30 ans, parce que c'était
jugé essentiel pour assurer le développement du peuple
québécois. Après la mort de Meech, le premier ministre ne
cessait de plaider en faveur d'une révision en profondeur du
fédéralisme, d'un nouveau partage des pouvoirs, qui soit clair et
qui mette fin au chevauchement et au dédoublement coûteux et
inefficace.
Or, le premier ministre n'a obtenu aucune compétence exclusive,
nouvelle pour le Québec dans la proposition de la conférence des
premiers ministres, comme le soulignait d'ailleurs avec pertinence M. Allaire.
Pourquoi le premier ministre a-t-il renoncé à obtenir de
nouvelles compétences exclusives, et pourquoi a-t-il abandonné
les revendications historiques du Québec pour se contenter de simples
ententes administratives? Comment le premier ministre peut-il, par exemple,
prétendre sérieusement, comme il l'a fait tantôt, que le
Québec obtient une compétence exclusive en matière de
formation de la main-d'oeuvre, alors que le texte de l'entente dit: Le
gouvernement fédéral devrait conserver sa compétence
exclusive à l'égard du soutien du revenu et des services connexes
qu'il fournit dans le cadre du régime d'assurance-chômage. Le
pouvoir fédéral d'engager des dépenses dans les programmes
de création d'emplois devrait être protégé au moyen
d'une disposition constitutionnelle, et il conviendrait d'inclure une
disposition constitutionnelle prévoyant que le gouvernement
fédéral continuera à jouer un rôle dans
l'établissement d'objectifs nationaux qui devront respecter les
programmes québécois. Pourquoi a-t-il abandonné le coeur
des revendications historiques et n'a-t-il pas réclamé le
rapatriement de nouveaux pouvoirs exclusifs?
Le Président: Alors, M. le premier ministre.
M. Bourassa: Je ne m'attendais pas, cet après-midi,
à devoir mettre les points sur les «i» au
député de Lac-Saint-Jean. Il sait fort bien que je peux le
référer à la page 25 du livre bleu auquel il a
collaboré, je présume. Non? Il était ministre du
gouvernement. M. le Président, je crois que...
Le Président: S'il vous plaît!
M. Parizeau:...
M. Bourassa: Alors, ce que je dis, c'est que... Je l'ai dit
à l'occasion du discours inaugural...
Le Président: O.K. Un instant, s'il vous plaît, M.
le premier ministre! Je vais demander la collaboration des collègues des
deux côtés afin d'éviter toute interpellation. J'ai
cédé la parole au premier ministre; je voudrais qu'on reconnaisse
uniquement le premier ministre et qu'on l'écoute. Alors, M. le premier
ministre.
M. Bourassa: M. le Président, j'ai dit à l'occasion
du discours inaugural que désintégrer certains pouvoirs du
gouvernement fédéral, ça suppose une période de
transition. Il y a un désengagement qui doit s'opérer. Dans
d'autres cas, il y a une coordination, comme dans le cas de la main-d'oeuvre ou
de l'assurance-chômage. Vous-mêmes, vous acceptez un marché
commun. Je ne sais pas si le chef de l'Opposition et le député de
Lac-Saint-Jean ont eu l'occasion, hier soir - je comprends qu'on a beaucoup
à faire, mais je l'ai fait, quant à moi - de constater la
performance extraordinaire du président Mitterrand à TV5, qui
est, comme on le sait, une réalisation de la francophonie à
laquelle nous avons participé. Alors, nous avons pu, hier soir,
constater jusqu'à quel point...
Une voix:...
(14 h 30)
M. Bourassa: Non, non, mais, M. le Président, j'y arrive,
j'y arrive. Je veux dire, il y en a qui vont faire le lien. Je parle de
marché commun. Il y a... Je parle... Je parle... Alors, je vois que je
n'ai pas été le seul, M. le Président. Ha, ha, ha! Je vois
que je n'ai pas été le seul à constater la qualité
de cette émission. C'est pertinent, le chef de l'Opposition m'a offert
un débat sur les accords de Maastricht. C'est le chef de l'Opposition
lui-même qui m'a offert un débat sur les accords de Maastricht, et
là on s'étonne que je...
Le Président: Rapidement, M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, on s'étonne que je me
réfère au marché commun européen, marché
unique. Alors, ce que je dis au député de Lac-Saint-Jean, lui qui
a une grande culture, il va comprendre sûrement que, dans un
marché commun canadien, s'il y a une pleine liberté de
circulation des biens, des services, des personnes, des capitaux, c'est
incontournable qu'il y ait des... Mais oui, mais on me pose des questions, M.
le Président. C'est incontournable qu'il y ait des accords, qu'il y ait
des ententes. Dans le cas de l'assurance-chômage, il ne m'a pas
écouté. J'ai répondu au chef de l'Opposition que nous
n'avions pas demandé la compétence exclusive sur
l'assurance-chômage parce que ça coûterait 1 000 000 000 $
de plus aux contribuables du
Québec. Il me semble que c'est facile à comprendre.
Ça vous indiffère, 1 000 000 000 $ de plus?
Le Président: Alors, en conclusion, M. le premier
ministre, s'il vous plaît.
M. Bourassa: Vous qui critiquez la hausse des impôts.
Alors, ça suppose des accords en respectant les priorités et les
droits historiques du Québec.
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
M. Brassard: M. le Président, d'abord, le premier ministre
reconnaît-il que l'essentiel des revendications historiques depuis 40
ans, ça a toujours porté sur le rapatriement, l'obtention de
nouveaux pouvoirs? Pas se faire reconnaître les pouvoirs qu'on
détient depuis 1867, mais le rapatriement de nouveaux pouvoirs
exclusifs? Reconnaît-il cela, d'abord? Reconnaît-il que dans
l'entente qu'il a signée - enfin, je ne sais pas s'il l'a signée
parce que, dans l'entente qu'on a, il n'y a pas de signature, je ne sais pas
s'il l'a signée - dans l'entente de Charlottetown, le
désengagement du gouvernement fédéral dont il parle, qui
va se faire par voie d'entente administrative, ça se fait dans des
secteurs de compétence exclusive depuis 1867 pour le Québec; il
n'y a donc pas là de pouvoirs nouveaux. Même chose pour la
main-d'oeuvre. Pourquoi? La question est très simple. Au moment
où il est allé à la table de négociation, pourquoi
a-t-il oublié, négligé, mis au rancart le coeur,
l'essentiel des revendications historiques du Québec,
c'est-à-dire obtenir pour le Québec, afin d'assurer son
développement, de nouveaux pouvoirs exclusifs? Où sont-ils, les
nouveaux pouvoirs exclusifs que vous avez réussi à obtenir?
Où sont-ils?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Je dois reprendre encore ce que j'ai dit en partie.
D'abord, quant à la signature, le député de Lac-Saint-Jean
devrait savoir qu'il y a un référendum sur les offres; c'est le
peuple qui va accepter de signer ou qui va refuser de signer. Alors, je pense
bien qu'il respecte le principe de la souveraineté populaire. Nous avons
accepté d'avoir un référendum sur les offres. Le chef de
l'Opposition lui-même a accepté que ce référendum
porte sur les offres, puisqu'il commence à préparer sa
stratégie à cet égard. Alors, ce que je dis au
député de Lac-Saint-Jean, c'est que je lui demande de ne pas
faire une lecture sélective du document du 28 août, d'examiner
tous les gains. Il y a des ententes, c'est inévitable qu'il y ait des
ententes pour le désengagement. Mais vous admettiez vous-mêmes,
quand vous avez tenté avec un succès mitigé de changer ou
de modifier la Fédération, vous admettiez vous-même, dans
vos documents, qu'il fallait négocier des accords. Mais, je veux dire,
on reconnaît... Je termine par cela. Si le député de Masson
a une question à me poser, je l'invite à le faire. Qu'il
demande...
M. Blais: J'aimerais bien ça!
M. Bourassa: Demandez à votre whip!
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: Alors, si vous voulez... S'il vous
plaît! Pour terminer, M. le premier ministre, rapidement.
M. Bourassa: M. le Président, il sait fort bien, s'il lit
attentivement, que dans le cas du tourisme, des affaires municipales, des
mines, des forêts, de la main-d'oeuvre, etc., ce sont des ententes qui
seront protégées par la Constitution. Pourquoi il ne le dit pas?
Ça m'étonne parce que, habituellement, il ne veut pas tromper la
population. Et là, il omet de dire que ces ententes vont être
protégées par la Constitution. Je m'étonne, aujourd'hui,
de cette approche sélective de mon ami, le député de
Lac-Saint-Jean.
Le Président: Toujours en question complémentaire,
M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Reconnaît-il d'abord, puisqu'il en a
parlé au tout début, que puisque c'est à l'occasion du
référendum que la décision sera prise, reconnaît-il,
à ce moment-là, que son gouvernement n'est pas encore lié
formellement à l'entente, comme le prétendait ce matin le
ministre, à la commission sur les offres?
Des voix: Ha,ha, ha! Des voix: Bravo! Bravo!
Une voix: Ah! C'est bon, ça!
M. Brassard: Et ma question, M. le Président, demeure la
même, puisque tout le monde, au Québec, reconnaît que le
gouvernement a été incapable d'obtenir de nouveaux pouvoirs
exclusifs pour le Québec, incapable.
Une voix: Tout le monde!
M. Brassard: Oui, tout le monde.
Le Président: Votre question, s'il vous plaît.
M. Brassard: Et la question est très simple: Pourquoi le
gouvernement du Québec, pourquoi le premier ministre accepte-t-il,
maintenant, ce qu'il a qualifié, il n'y a pas si longtemps, de
fédéralisme dominateur? C'est-à-dire un
fédéralisme où le gouvernement fédéral
maintient sa présence dans tous les secteurs, reconnaît, de
façon simplement formelle, la compétence exclusive...
Le Président: M. le député.
Des voix:...
Le Président: S'il vous plaît!
M. Brassard: Où sont les nouveaux pouvoirs? Je n'ai pas eu
de réponse à ma question. Où sont les nouveaux pouvoirs
qu'il a réussi à obtenir? Il n'y en a pas, il le sait, qu'il le
dise sincèrement et honnêtement.
Le Président: M. le député.
Des voix: Bravo!
M. Bourassa: M. le Président.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: D'abord, le député...
Mme Bacon: Écoutez donc la réponse, si vous voulez
l'avoir!
Le Président: Oui, s'il vous plaît! Mme Bacon:
Voyons! Voyons!
Le président: m. le député, m. le
député, s'il vous plaît! s'il vous plaît, m. le
député. je cède la parole au premier ministre. m. le
premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, je pense que le whip devrait
permettre une question au député de Masson.
Des voix: Ha,ha, ha!
M. Bourassa: M. le Président, j'ai
énuméré... D'abord, le député de
Lac-Saint-Jean a joué sur les mots quand il s'est
référé aux propos du ministre des Affaires
intergouvernementales candiennes. Je pense qu'il y a un
référendum, c'est voté par la loi, ça sera
voté par la loi au cours des prochains jours, ça respecte les
recommandations de la commission Bélanger-Campeau. M. le
Président, je pourrai... J'aurai à parler, la semaine prochaine,
sur la question qui sera proposée aux Québécois. J'aurai
l'occasion de préciser, à cet égard-là. M. Campeau
lui-même disait, il y a quelques semaines, que s'il y a des offres
acceptables, on peut faire un référendum sur les offres, mais
c'est le peuple qui aura le dernier mot. Mais, pour les pouvoirs comme tels, je
ne comprends pas que le député de Lac-Saint-
Jean ou le chef de l'Opposition s'imagine qu'on pourrait, comme
ça, sans qu'il y ait d'entente de désengagement... On est sur la
même planète, on est dans un même territoire, dans un
même marché commun. Alors, je veux dire... Dans l'interpellation
que j'aurai le plaisir d'avoir avec le chef de l'Opposition - on pourrait
s'entendre sur la date - on pourra peut-être élaborer plus en
profondeur et espérer... En commission également, on pourra
compléter, mais on parle... Entre nous, entre le chef de l'Opposition et
le premier ministre, on aura sûrement une interpellation et, à ce
moment-là, on pourra aller plus en profondeur, objectivement, comme
d'habitude, en laissant la population décider.
Une voix:...
M. Bourassa: Non, mais je vous l'ai dit, et je vous le
répète, dans le cadre... Je termine, M. le Président. Dans
le cadre de la période de questions, je réponds constamment... Le
président me fait signe d'être concis, d'être...
Comment?
Des voix:...
M. Bourassa: M. le Président, j'ai dit...
Le Président: S'il vous plaît!
M. Bourassa: ...j'ai répété... Je termine
par cela, M. le Président. Vous respectez l'esprit et la lettre pour la
période de règlement. J'ai dit tantôt, j'ai donné
toute une série d'accords, je pourrais élaborer tous les gains
qu'on a faits avec l'immigration, tous les gains qu'on va faire avec la
culture, avec la main-d'oeuvre, avec les autres secteurs, tous les gains qu'on
va faire sur la protection du Québec dans les institutions canadiennes
sans précédent depuis 125 ans. C'est ça que vous devrez
admettre un jour ou l'autre.
Le Président: En question principale, M. le leader adjoint
de l'Opposition et député d'Abi-tibi-Ouest.
Ajout de ressources financières pour augmenter
la sécurité du transport scolaire
M. Gendron: Oui, hier le gouvernement faisait connaître des
mesures qu'il entend préconiser afin d'assurer la sécurité
des quelque 700 000 écoliers transportés quotidiennement par
autobus scolaires. Le gouvernement recommande aux commissions scolaires
l'instauration de 24 mesures sur la sécurité scolaire, mais il
les avertit très sérieusement qu'il n'investira aucune somme
supplémentaire à cet effet, comme si les seuls investissements
pour ces gens-là au niveau des autobus jaunes étaient valables
pour le déplacement des congressistes libéraux. (14 h 40)
Or, on sait tous que le gros bon sens nous dicte qu'il est impensable de
croire que ces mesures de sécurité pourront se réaliser
à l'intérieur des subventions actuellement allouées par le
ministre des Transports, d'autant plus que la Fédération des
commissions scolaires du Québec prévient qu'il faudra un support
financier accru pour que les commissions scolaires puissent répondre aux
attentes. Ma question au ministre des Transports. Pour que le gouvernement
s'assure que ces mesures soient mises en place, parce que tout compte fait on
parle de protéger la vie de nos jeunes enfants, entend-t-il s'assurer
que l'application des mesures puisse se faire mais par l'ajout de ressources
financières?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Elkas: M. le Président, il est vrai qu'on transporte un
grand nombre d'enfants; à tous les jours, 650 000, 8000
véhicules, plus que 200 000 000 de kilomètres parcourus par
année. C'est tout un dossier à essayer de gérer. Ce n'est
pas fait nécessairement par un ministère. C'est l'affaire de tout
le monde, incluant les commissions scolaires. S'il y a une commission scolaire
qui a décidé d'engager des brigadiers scolaires et d'envoyer la
facture au gouvernement après avoir embauché ces gens pour faire
leur tâche, bien, il me semble que lorsqu'on parle d'imputabilité
- puis souvent, on en parle - ceux qui prennent la décision pour
dépenser de l'argent devraient faire leur devoir, aller chercher
l'argent pour payer les comptes.
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
M. Gendron: M. le Président, est-ce que le ministre se
rend compte que ça ne fait pas très sérieux et responsable
que vous prétendiez, trois ministres du même gouvernement, arriver
avec 24 recommandations après peut-être trois ans de retard sur la
nécessaire plus grande sécurité dans le transport scolaire
et que vous disiez: Nous, on vous recommande quoi faire, mais arrangez-vous
avec vos troubles, on n'a pas une cent à mettre là-dedans. Est-ce
que c'est une priorité pour vous autres ou ça n'en est pas
une?
Le Président: M. le ministre.
M. Elkas: M. le Président, je n'ai pas de leçon
à prendre de ce parti, pas de leçon à prendre de ces
gens-là. Ce gouvernement dépose à tous les ans, et cette
année, un montant record de 406 000 000 $ pour les commissions scolaires
pour faire le transport des écoliers. Quant aux montants additionnels
qu'on doit déposer pour assurer la sécurité, on va vous
dire une chose: il s'en est investi, il s'en est investi dans le passé.
Vous dites qu'on attend à la dernière minute pour agir et poser
des gestes concrets, c'est totalement faux; 62 % des commissions scolaires ont
travaillé cet été pour changer les parcours. C'est des
choses qui vont être faites, mais pas nécessairement d'encourir
des dépenses pour ceux qui doivent payer la facture.
Quant aux équipements additionnels, le bras d'arrêt, c'est
la loi aujourd'hui lorsqu'on en parie. C'est des investissements additionnels
qui ont été faits. On essaie aujourd'hui, au moment où on
se parie, des bras d'éloignement. Ce sont des équipements qui
doivent assurer la sécurité des jeunes, non seulement des
équipements qui vont aider les personnes mais des équipements qui
seront des aides à la formation de nos jeunes, pour que ces jeunes
sachent pour une fois que l'autobus scolaire, c'est un moyen de se transporter
mais qu'ils doivent le faire en grande sécurité. Il y a de la
formation qui s'ajoute à toutes les sommes d'argent qu'on dépose
aujourd'hui pour assurer la sécurité de nos jeunes.
Le Président: Pour une question principale, M. le
député de D'Arcy-McGee.
Engagement du gouvernement à
assurer la vitalité et le
développement
des minorités au Québec
M. Libman: Merci, M. le Président. M. le Président,
the First Ministers' agreement concluded recently in the Canada Clause, article
2.(1)(d) it says, and I quote: «Canadians and their Governments are
committed to the vitality and development of official language minority
communities throughout Canada.» Yesterday, the Premier began to back off
somewhat. He began to back down on this element of the Constitutional Agreement
that I believe is a very positive sign. It is a sign of tolerance and respect
towards minorities in Québec. I would like to know if the Premier is
willing today to affirm his government's commitment to the vitality and
development of minority communities in Québec, and will he play a
prominent role in convincing the other Premiers in this country to also commit
themselves to this clause?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, je crois qu'à
l'occasion des discussions à Charlottetown, au lac Harrington et
à l'édifice Pearson, nous avons longuement traité de ces
questions-là. Je ne vois pas ce que j'ai à ajouter sur ce que
j'ai répondu hier au chef de l'Opposition. J'ai constaté,
d'ailleurs, que le chef de l'Opposition manifestait quand même un peu
d'ouverture, probablement sous l'influence de l'ancien collègue du
député de D'Arcy-McGee, qui est rendu avec le Parti
québécois. Je n'ai rien à ajouter à ce que j'ai dit
hier.
Le Président: Pour une question complémentaire.
M. Libman: Would he be willing to reaffirm his commitment to this
clause that his government is committed to the vitality and development of
linguistic minorities in Canada by saying that he approves the first
recommendation of the Chambers Report which his own Minister of Education has
come out and favoured? Does he feel this would be a sign to the vitality and
development of minority communities in Québec if he affirms his approval
to that clause?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Je crois que c'est écrit dans l'accord. Je ne
comprends pas la pertinence de la question du député de
D'Arcy-McGee. Je veux dire, c'est écrit en toutes lettres. Il n'a
qu'à lire l'accord.
Le Président: Une dernière question
additionnelle.
M. Libman: Would the Premier of Québec give his approval
to this first recommendation of the Chambers Report as a sign of his
government's political commitment to the vitality and development of minority
communities in Québec?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: Même réponse, M. le
Président.
Le Président: Alors, en question principale maintenant,
Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Pouvoirs du Québec en matière de gestion
de la main-d'oeuvre et de l'assurance-chômage
Mme Harel: M. le Président, contrairement à
l'impression que veut maintenant laisser le premier ministre, son ministre de
la Main-d'oeuvre a maintes fois réclamé la gestion de
l'assurance-chômage et le rapatriement de la gestion de
l'assurance-chômage et, surtout, a maintes fois promis un guichet unique
aux Québécois.
Ce qu'on sait maintenant, M. le Président, en matière de
main-d'oeuvre, c'est que le gouvernement propose le mot à mot de
l'entente intervenue entre les premiers ministres anglophones le 7 juillet. Et
ce qui sera protégé par la Constitution, ce sont les
activités fédérales en matière
d'assurance-chômage, le pouvoir fédéral d'engager des
dépenses dans les programmes de création d'emplois et le pouvoir
fédéral de fixer les normes et les objectifs des programmes de
perfectionnement de la main-d'oeuvre, pourtant jugés de
compétence provinciale exclusive.
Comment le ministre de la Main-d'oeuvre peut-il prétendre
être rassuré et satisfait, alors que le directeur d'Emploi et
Immigration Canada au Québec écrit aux employés: La
gestion de l'assurance-chômage continuerait d'être
administrée par le gouvernement fédéral. Tout comme vous,
j'ai pu lire les déclarations de M. Bourbeau à l'effet que le
Québec assumerait cette responsabilité. Des négociations
devront être engagées. Elles risquent d'être complexes,
vraisemblablement longues et, pour l'instant, nous n'en connaissons pas
l'échéancier. Vous devez comprendre que certains points sont fort
nébuleux et méritent d'être clarifiés. D'autres
donnent déjà lieu à des interprétations
divergentes.
M. le Président, faut-il comprendre qu'en disant oui aux offres,
non seulement rien n'est fini mais qu'après avoir capitulé le
ministre de la Main-d'oeuvre propose de recommencer à
négocier?
Le Président: M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.
M. Bourbeau: M. le Président, il n'y a absolument aucun
changement par rapport a la situation actuelle avec ce que j'ai dit dans le
temps. Je suis content de voir que l'Opposition officielle est d'accord avec
nous, que ce que nous avons obtenu est exactement ce que nous avons
demandé, c'est-à-dire la totalité...
Le Président: Un instant! Je demande la collaboration,
encore une fois. Allez-y, M. le ministre!
M. Bourbeau: Nous avons demandé au gouvernement
fédéral la totalité de la juridiction en matière de
main-d'oeuvre. Nous l'avons. C'est clair dans l'entente du 28; je peux vous en
lire un extrait. On dit ceci: «La formation et le perfectionnement de la
main-d'oeuvre - donc, pas seulement la formation mais tout le champ de la
main-d'oeuvre, le développement; en anglais, on dit "development", en
français, on traduit par "perfectionnement" de la main-d'oeuvre -
devraient être reconnus à l'article 92 comme une sphère de
compétence provinciale exclusive.» Il me semble que c'est clair,
ça. C'est l'entente. Donc, dans la main-d'oeuvre, c'est clair, il n'y a
pas de problème. (14 h 50)
Pour ce qui est de l'assurance-chômage, nous n'avons pas
demandé la compétence, M. le premier ministre l'a dit
tantôt, pour une bonne raison: ça nous coûterait 1 000 000
000 $ si on la recevait, étant donné que le fonds
d'assurance-chômage est un fonds de péréquation canadien et
que le taux de chômage est plus élevé au Québec
qu'ailleurs. Quand on sait compter, on sait ce que ça veut dire. Donc,
nous n'avons pas demandé la compétence en matière
d'assurance-
chômage, mais la gestion du programme d'assurance-chômage.
Et ça, j'ai les garanties que le fédéral va
négocier avec le Québec pour la gestion de
l'assurance-chômage. Et d'ailleurs, dans la lettre que vient de citer la
députée tantôt, l'individu dont elle parlait reconnaissait
que le Québec va négocier - elle en a fait état
elle-même tout à l'heure - dans les prochains mois. Combien de
temps vont durer les négociations? Moi, je sais que ces
négociations-là devraient se tenir rapidement et aboutir à
ce que nous souhaitons tous et que nous aurons tous, j'en suis convaincu, un
réseau unique, un guichet unique en main-d'oeuvre au Québec et en
gestion d'assurance-chômage.
Des voix: Bravo!
Le Président: En question complémentaire.
Mme Harel: M. le Président, comment le ministre
espère-t-il convaincre les Québécois qu'il pourrait
obtenir de négocier après avoir signé ce qu'il n'a pas
obtenu avant de signer?
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: M. le ministre.
Des voix: II ne l'a pas demandée!
M. Bourbeau: M. le Président, le Québec n'obtiendra
pas la compétence constitutionnelle en matière
d'assurance-chômage, il ne l'a pas demandée et ne la veut pas, je
l'ai dit tout à l'heure. Pour ce qui est de la gestion de
l'assurance-chômage, nous avons des assurances que le gouvernement
fédéral va négocier avec nous le transfert au
Québec de la gestion de l'assurance-chômage, ce qui fait que nous
n'aurons, au Québec, qu'un seul réseau, réseau
main-d'oeuvre-assurance-chômage. En ce qui concerne le reste, M. le
Président, je ne vois pas où sont les problèmes de la
députée de Hochelaga-Maison-neuve.
Le Président: Toujours en question
complémentaire.
Mme Harel: M. le Président, comment le ministre peut-il se
contenter des assurances, comme il le dit, d'un gouvernement dont l'engagement
va durer le temps que va durer ce gouvernement, c'est-à-dire pas
très longtemps?
Le Président: M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, des ententes, le
Québec en a signé plusieurs, des ententes, dans le passé.
Pourquoi est-ce qu'on n'en aurait pas une ici, puisqu'on a déjà
un engagement du premier ministre du Canada? Et, quant à moi, si les
élections fédérales doivent arriver plus tôt que
plus tard, ça veut dire qu'on a de bonnes chances que l'entente arrive
plus tôt que plus tard.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: S'il vous plaît! Pour une question
complémentaire.
Mme Harel: M. le Président, est-ce que les ententes dont
parle le ministre sont celles que son gouvernement a signées et qui sont
échues depuis trois ans?
Le Président: M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, la députée de
Hochelaga-Maisonneuve fait des blagues. Elle parle d'ententes sur la
main-d'oeuvre alors que la main-d'oeuvre, c'est réglé. Je viens
de le lire tout à l'heure: juridiction exclusive des provinces. Donc, il
ne sera plus question de faire des ententes sur la main-d'oeuvre puisque le
fédéral se retire totalement, s'engage à se retirer
totalement du champ de la main-d'oeuvre. Donc, n'en parlons plus de la
main-d'oeuvre, c'est réglé. Parlons de la gestion de
l'assurance-chômage et là, dans les prochains mois, je suis
convaincu, parce que nous avons des assurances du premier ministre du Canada,
le gouvernement fédéral va signer une entente pour faire en sorte
que l'assurance-chômage soit gérée au Québec. Non
pas la compétence constitutionnelle, mais qu'elle soit
gérée au Québec.
En ce qui concerne les objectifs dont parlait tantôt la
députée, et non pas les normes - on parle d'objectifs nationaux -
bien, je n'ai aucune objection à ce que le fédéral indique
des objectifs nationaux. En ce qui nous concerne, nos objectifs, ils sont
internationaux. Donc, les objectifs nationaux, on peut s'en contenter
aussi.
Des voix: Bravo!
Le Président: Pour une dernière question
principale, M. le leader de l'Opposition et député de
Joliette.
Respect des règles démocratiques du
Québec
pour le financement du
référendum
du 26 octobre 1992
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Le gouvernement du
Québec a décidé de tenir un référendum le 26
octobre, conformément aux lois du Québec. M. le Président,
on sait que les camps du oui et du non, selon les normes du Québec, que
chaque camp aura probablement aux alentours de 4 000 000 $ et quelque chose
chacun. On sait, d'autre part, qu'au référendum de 1980, M. le
Président, malgré les lois québécoises, le
fédéral a injecté quelque 17 000 000 $; on parle
même allant jusqu'à 26 000 000 $,
27 000 000 $ à l'intérieur de cette campagne
référendaire, bafouant ainsi les règles
québécoises que nous nous sommes données. Le ministre
responsable de la réforme électorale et parlementaire a bien dit
qu'il espérait que les ténors du fédéral
comprennent qu'il fallait respecter les règles démocratiques du
Québec. Ma question est la suivante: Est-ce que le premier ministre du
Québec a obtenu les garanties formelles du gouvernement
fédéral à l'effet qu'il n'injectera aucun argent, sauf ce
qui est permis par les lois du Québec, dans cette campagne
référendaire?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Bourassa: M. le Président, d'abord, on doit constater
qu'on a accepté de respecter la loi du Québec dans ce
référendum national. Donc, il faut quand même voir
là la volonté du gouvernement fédéral de la
respecter, s'il accepte que la loi du Québec s'applique. J'entendais les
dirigeants des partis fédéraux qui disaient que c'est le premier
ministre du Québec qui serait responsable du comité du oui, et je
ne vois pas en quoi ils peuvent, d'un côté, respecter la loi du
Québec, accepter de la respecter et, par la suite, ne pas le faire. Je
veux dire, je conclus que si on dit que la loi fédérale le
permettait, nous allons respecter sa loi. La loi du Québec s'applique,
alors je ne vois pas en quoi, M. le Président, pour répondre
à la question... D'ailleurs, on respecte également la loi 150. On
l'a vu hier. On a décidé de faire le référendum
national selon la loi 150. Vous avez refusé de la voter, mais il faut
quand même constater que l'ensemble des provinces, tout le Canada
respecte l'échéancier établi par le gouvernement du
Québec. M. le Président, je veux dire, je tiens à
souligner ça. Le leader parlementaire est sceptique quant à
certaines intentions de ses anciens amis, parce qu'il a été
très proche, on le sait... Maintenant, est-ce que je pourrais, s'il vous
plaît, terminer la question?
Le Président: Alors, en conclusion, s'il vous
plaît.
M. Bourassa: C'est encore ses amis, probablement. Ce n'est pas
parce qu'il ne partage pas son point de vue que le premier ministre du Canada a
cessé d'être un ami du leader parlementaire de l'Opposition. Ils
ont travaillé plusieurs années ensemble. Mais je lui dis qu'il
fasse confiance. S'il y en a un qui connaît les dirigeants à
Ottawa, c'est lui. Ils ont dit qu'ils étaient pour accepter la loi du
Québec. Je termine, parce qu'on est arrivé à la fin. Ils
ont dit qu'ils étaient pour accepter la loi du Québec. S'ils
acceptent la loi du Québec, ils vont la respecter.
Le Président: Alors, c'est la fin de la période de
questions.
Il n'y a pas de votes reportés.
Avis touchant les travaux des commissions
Maintenant, aux avis touchant les travaux des commissions. Je vous avise
que mardi, le 8 septembre 1992, de 10 heures à 12 h 30, à la
salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'économie et du travail
se réunira afin de procéder à la vérification des
engagements financiers du ministère des Forêts, contenus dans les
listes des mois de juillet 1991 à juillet 1992.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.
Affaires du jour
Nous allons donc procéder aux affaires du jour. Aux affaires du
jour, nous allons reprendre le débat sur la motion d'adoption du
principe du projet de loi 44. Je demanderais simplement, à ce moment-ci,
l'attention des collègues, s'il vous plaît. Alors, nous allons
reprendre le débat sur la motion d'adoption du principe du projet de loi
44, Loi modifiant la Loi sur le processus de détermination de l'avenir
politique et constitutionnel du Québec. Au moment de la suspension, M.
le député de Lévis avait la parole. Je constate donc que
M. le député de Lévis a terminé son droit de
parole.
Je vais maintenant reconnaître comme intervenant M. le ministre de
la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle. À ce moment-ci, je requiers l'attention de tous les
collègues, s'il vous plaît. Merci. Je cède donc la parole
à M. le ministre.
Projet de loi 44
Reprise du débat sur l'adoption du principe M.
André Bourbeau
M. Bourbeau: Merci, M. le Président. On sait que
l'économie canadienne et celle du Québec essuient les bourrasques
d'une concurrence internationale plus vive que jamais. Elles sont sous la
grêle, pourrait-on dire, ou, du moins, sous la menace de grêle.
Comme le disait fort judicieusement le poète Aragon: Quand les
blés sont sous la grêle, est bien fou qui fait le délicat.
Il faut trouver un moyen de s'occuper à plein temps de ces
intempéries, de s'y prémunir, d'engranger le blé, et de
faire face aux défis de notre époque. (15 heures)
Les difficultés constitutionnelles du Québec sont
sérieuses. Je suis le premier à admettre que l'affront fait au
Québec en 1982, lors du rapatriement unilatéral de la
Constitution canadienne, doit être réparé dans l'honneur et
dans l'enthousiasme, comme on l'a dit un jour sur la Côte-Nord.
Je suis conscient aussi que nos luttes constitutionnelles accaparent,
tant au Québec qu'ailleurs au Canada, une part trop importante de nos
énergies, il faut sortir d'une impasse qui mine, petit à petit,
notre capacité de redresser l'économie pendant qu'il en est
encore temps. L'entente constitutionnelle intervenue il y a deux semaines entre
les premiers ministres représente la première lueur d'espoir que
l'on ait pu apercevoir depuis quelques années, un espoir de sortir fort
honorablement de cette impasse, un espoir qui se fonde sur les résultats
d'une négociation conduisant à la satisfaction des principales
demandes historiques du Québec, un espoir, enfin, parce qu'avec les
résultats obtenus, le Québec conserve l'influence majeure
qu'exerce le Québec au sein de la Confédération
canadienne.
Depuis fort longtemps, en effet, le Québec joue un rôle
déterminant dans le choix du gouvernement fédéral,
c'est-à-dire dans l'élection d'une majorité de
députés au gouvernement fédéral. Dans l'histoire
récente, c'est dans une très large mesure le Québec qui a
décidé du sort de plusieurs gouvernements dirigés par
Pierre Trudeau et des deux gouvernements de M. Mulroney, en garantissant,
quelle que soit notre évolution démographique, que nous
conserverons au moins 25 % des députés de la Chambre des
Communes. Là où se prennent les vraies décisions, nous
détenons un levier majeur et probablement déterminant dans le
choix des gouvernements fédéraux futurs. Il s'agit d'une
protection de taille, d'un véritable gain constitutionnel.
Je ne vais pas me livrer, M. le Président, à une
exégèse de l'entente constitutionnelle. Compte tenu de mes
responsabilités au sein du gouvernement, je tiens, à l'occasion
de cet important débat, à présenter les demandes
historiques du Québec dans le domaine de la main-d'oeuvre, les demandes
que notre gouvernement a formulées dans la présente ronde de
négociations et les résultats que nous avons obtenus. On pourra
voir que nous sommes allés au-delà des demandes historiques du
Québec et que nous avons atteint les objectifs ambitieux que nous nous
étions fixés. Voyons voir.
Le domaine de la main-d'oeuvre couvre un large spectre de
préoccupations, comprenant, notamment, la formation, le recyclage,
l'adaptation aux nouvelles technologies, la réorientation
professionnelle, la protection de l'emploi, l'aide à l'emploi, le
placement et la création d'emploi. Quand on parle de
développement de la main-d'oeuvre, on se situe donc au coeur du
développement économique. Les politiques de main-d'oeuvre
constituent donc des stratégies qui permettent de lutter contre le
chômage, d'accroître la compétence et la productivité
des travailleurs, d'assurer la compétitivité de notre
économie et la prospérité de notre société.
C'est dire l'importance cruciale de ce domaine pour l'avenir économique
du Québec. J'y reviendrai.
Depuis le début des années 1960, le Québec
revendique un plus grand contrôle des instruments d'une politique de
développement de la main-d'oeuvre. Ce fut une constante de l'attitude
des gouvernements qui se sont succédé à Québec
depuis la Révolution tranquille. Le premier ministre Jean Lesage
déclarait, en 1965, que le Québec doit instaurer sa politique de
main-d'oeuvre et d'emploi qui se révèle l'un des instruments
d'une planification économique efficace. «Au fur et à
mesure que le Québec exercera ses responsabilités en ces
matières, précisait-il, il deviendra nécessaire d'apporter
des modifications substantielles aux mesures fédérales
déjà en vigueur: réévaluation des programmes
conjoints, fonctionnement du service fédéral de placement,
transfert au Québec des budgets relatifs aux prêts et allocations
de déplacement et d'établissement de la main-d'oeuvre.» Fin
de la citation.
En 1967, M. Daniel Johnson, premier ministre de l'époque,
soutenait que le Québec doit devenir graduellement le seul responsable
sur son territoire de toute dépense publique relative au placement et
à la formation de la main-d'oeuvre.
Les programmes fédéraux doivent être assumés
par le Québec, disait-il. M. Claude Castonguay, en 1971,
défendait l'idée que le Québec doit avoir une
responsabilité prioritaire à la conception de la politique
sociale, ce qui inclut la formation professionnelle et les centres de
main-d'oeuvre. M. Castonguay ajoutait, et je cite: Quant à la politique
de main-d'oeuvre, elle vise à la fois le maintien de l'équilibre
du marché du travail et la protection sociale des personnes en cause. On
ne saurait dissocier ces deux aspects sans qu'il n'en résulte une
discrimination, un éparpillement des ressources et une concurrence
fausse.
Entre 1971 et 1985, le Québec a réclamé à
maintes reprises le rapatriement des sommes consacrées par le
gouvernement fédéral à la formation professionnelle. Nos
amis de l'Opposition officielle ont clamé bien haut ces positions
historiques du Québec sans ébranler les autorités
fédérales et sans empêcher une présence
fédérale de plus en plus marquée dans le domaine de la
main-d'oeuvre au Québec. Il est très important de souligner, M.
le Président, que pendant toute cette période, le Québec
n'a pas inclus dans ses revendications la gestion du régime
d'assurance-chômage. Nous avons été les premiers à
exiger la ratification d'une entente administrative qui permettra au
Québec de gérer le régime d'assurance-chômage sur
son territoire afin qu'il n'y ait qu'une seule organisation de main-d'oeuvre,
qu'un seul guichet, et nous l'avons obtenu.
Notre gouvernement a non seulement épousé les
revendications historiques du Québec en matière de main-d'oeuvre,
il a haussé la barre en réclamant du même souffle la
compétence exclusive en matière de formation et de
développement de la main-d'oeuvre, le rapatriement de
tous les budgets consacrés à ces fins, y compris ceux
puisés à même le compte d'assurance-chômage, une
entente administrative en vertu de laquelle le Québec gérera le
régime d'assurance-chômage sur son territoire, afin qu'il n'y ait
qu'une seule organisation de main-d'oeuvre au Québec.
C'est précisément ce que nous avons obtenu,
c'est-à-dire, premièrement, la reconnaissance d'une
compétence provinciale exclusive en matière de formation et de
développement de la main-d'oeuvre. Pour le gouvernement
fédéral, qui intervient dans ce domaine depuis 1901, il s'agit
d'une concession majeure. Dans ces domaines cruciaux, à la demande d'une
province, le gouvernement fédéral sera tenu de se retirer de ces
champs d'activité et de négocier des ententes qui
s'accompagneraient, dis-je, d'une juste compensation financière.
Voilà une réponse claire à une revendication incessante du
Québec depuis 30 ans. Deuxièmement, nous avons obtenu le
rapatriement au Québec de tous les budgets consacrés au
développement de la main-d'oeuvre. Troisièmement, un accord sur
le transfert au Québec de la gestion ou de l'administration de
l'assurance-chômage. Cette entente a fait l'objet d'un engagement clair
de la part du gouvernement fédéral, ce qui est confirmé
par le premier ministre du Canada dans une correspondance.
Qu'est-ce que cela signifie? Ça signifie que c'est au
Québec que seront arrêtées les priorités en
matière de formation, de recyclage, d'aide à l'emploi et de
placement. Ces priorités seront définies avec les partenaires du
marché du travail, notamment au sein de la Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre. Il n'y
aura plus de chevauchement des programmes fédéraux et
québécois de main-d'oeuvre. Le gouvernement du Québec
disposera d'un budget annuel dépassant le 1 000 000 000 $ pour les
programmes de développement de la main-d'oeuvre, lorsqu'il aura
complété le rapatriement des budgets fédéraux. Il y
aura une seule organisation de main-d'oeuvre, c'est-à-dire une fusion
des centres d'emploi du Canada, des commissions de formation professionnelle du
Québec et des autres services de main-d'oeuvre du gouvernement du
Québec. Plus de 6000 fonctionnaires fédéraux oeuvrant au
Québec sont affectés par cette entente et des prestations
d'assurance-chômage qui dépassent 5 000 000 000 $ par année
au Québec. (15 h 10)
Nous obtenons enfin le réseau unifié de main-d'oeuvre dont
parlent nos partenaires du marché du travail depuis tant
d'années, c'est-à-dire qu'il y aura un seul endroit où il
sera possible d'obtenir tous les services de main-d'oeuvre, y compris
l'assurance-chômage. Il s'agira des bureaux locaux de la
Société québécoise de développement de la
main-d'oeuvre et de la Société régionale de
développement de la main-d'oeuvre.
Mais pourquoi, M. le Président, cela est-il si important? Dans
les économies modernes, seules les nations qui peuvent mobiliser une
main-d'oeuvre qualifiée peuvent réalistement aspirer à la
prospérité. On ne peut pas espérer de progrès ou
d'expansion économique durable sans des investissements importants dans
le domaine de la main-d'oeuvre. Avec le développement technologique et
les fluctuations considérables des marchés, les besoins de
perfectionnement, de recyclage et d'adaptation de la main-d'oeuvre
s'accroissent. Pour y répondre, il faut un effort concerté des
patrons, des travailleurs et des gouvernements. Les pays qui ont relevé
le défi de la concertation sur les politiques de main-d'oeuvre
connaissent le plus de succès, tels l'Allemagne, les pays Scandinaves et
quelques autres.
Le marché du travail varie considérablement d'une
région à l'autre du Canada. Il faut que les politiques de
main-d'oeuvre et d'emploi en conséquence soient définies le plus
près possible des marchés régionaux du travail et qu'on
puisse réagir rapidement aux changements qui s'y opèrent. Il faut
pouvoir canaliser rapidement et efficacement tout l'argent disponible pour le
développement de la main-d'oeuvre vers les priorités du
marché québécois du travail. Il faut que cessent les
dédoublements, les chevauchements et les tiraillements entre deux
administrations qui interviennent chacune à leur façon sur le
territoire du Québec. La mise en place de cette organisation
regroupée peut conduire à des économies importantes au
plan des dépenses administratives. On estime que l'on pourrait
réaliser des économies de l'ordre de 250 000 000 $ par
année si on se compare aux autres pays de l'OCDE. C'est autant d'argent
que l'on pourrait affecter à des fins plus productives, pour le
développement de la main-d'oeuvre québécoise.
M. le Président, il faut briser l'isolement dans lequel se sont
cantonnés respectivement les employeurs, les représentants des
travailleurs, le secteur de l'enseignement et les institutions de
main-d'oeuvre. Désormais, il faut que ces gens se parlent, agissent
ensemble et travaillent en partenariat. Nous avons la possibilité de
développer ce partenariat au Québec. La Société
québécoise de développement de la main-d'oeuvre en sera
l'instrument privilégié. Le transfert des responsabilités
du développement de la main-d'oeuvre n'est pas un gage absolu de
prospérité, mais il s'agit d'une prémisse essentielle au
développement durable. Il nous appartiendra de tirer le plus grand
profit de cette compétence exclusive et du guichet unique de
main-d'oeuvre. Ce sera exigeant. On ne devient pas compétent et
compétitif sans effort, mais nous disposerons désormais des
leviers pour atteindre notre plein développement. L'Opposition
officielle, qui s'alimente à toutes les canonnières par les temps
qui courent, trouvera sans doute à redire de
cette entente de main-d'oeuvre même si nous avons obtenu davantage
que le Parti québécois n'en a jamais demandé lorsqu'il
formait le gouvernement.
Je vois déjà nos amis de l'Opposition s'en prendre aux
fameux objectifs nationaux, et on l'a vu tout à l'heure, M. le
Président, lors de la période des questions. L'entente stipule,
en effet, que le gouvernement fédéral continuera de jouer un
rôle dans l'établissement d'objectifs nationaux pour les aspects
du développement de la main-d'oeuvre. Ceux qui ont l'indignation
à fleur de peau pourraient s'imaginer que, par le biais de ces objectifs
nationaux, le gouvernement fédéral conserve le pouvoir ou
conserverait le pouvoir de contraindre le Québec à s'engager dans
des avenues qu'il ne privilégie pas. Je vais vous lire, M. le
Président, les quatre objectifs nationaux de la stratégie
canadienne de mise en valeur de la main-d'oeuvre.
Premier objectif: Obtenir du secteur privé qu'il joue un plus
grand rôle dans la formation des employés et veiller à ce
que la formation soit plus en harmonie avec les besoins actuels du
marché du travail. Au Québec, notre stratégie consiste
à travailler au développement d'une culture de la formation dans
les milieux de travail et à rapprocher l'école des entreprises.
Les objectifs fédéraux et québécois concordent donc
parfaitement.
Deuxième objectif: Réaffecter les dépenses à
l'intérieur du Régime d'assurance-chômage de façon
à ce qu'une plus grande proportion des ressources serve à
financer des activités dynamiques de formation et de réemploi
à l'intention des chômeurs. Nous avons adopté exactement la
même politique en matière de sécurité du revenu. Cet
objectif fédéral ne nous cause donc aucune difficulté.
Troisième objectif: Conformément à la Charte
canadienne des droits et des libertés, améliorer de façon
significative les prestations d'assurance-chômage afin de mieux
répondre aux besoins des parents qui exercent un emploi et d'encourager
la pleine participation au marché du travail des travailleurs de plus de
65 ans. Est-ce qu'il y a quelqu'un au Québec qui oserait s'élever
contre un objectif aussi noble?
Enfin, quatrième objectif de la stratégie
fédérale: Réduire les facteurs de désincitation que
comporte le Régime d'assurance-chômage. Encore là, bien mal
venu celui qui se lèvera pour combattre cet objectif.
Comme vous le voyez, M. le Président, les objectifs nationaux
sont rédigés de façon suffisamment générale
pour permettre d'y répondre de façons très diverses au
Québec et dans les autres provinces canadiennes. On a l'habitude de tels
objectifs nationaux dans le cadre du Régime d'assistance publique du
Canada, le RAPC. En vertu de ce régime, en effet, le gouvernement
fédéral défraie 50 % des dépenses provinciales
d'aide sociale en autant que les provinces se conforment à des objectifs
nationaux. L'existence de ces objectifs nationaux permet néanmoins au
Régime de la sécurité du revenu du Québec
d'être fort différent de celui de l'Ontario ou de celui de la
Colombie-Britannique. Bref, il faut savoir, M. le Président, à
l'occasion, tempérer son indignation. Elle pourrait ne reposer que sur
du vent.
M. le Président, j'ai plusieurs raisons d'accueillir
favorablement l'accord constitutionnel conclu par les premiers ministres. Dans
le domaine de la main-d'oeuvre, où nous avons atteint tous nos objectifs
de négociation, j'ai toutes les raisons de m'en réjouir. Et c'est
précisément, M. le Président, ce que je fais sans
détour, je m'en réjouis. Je vous remercie.
Le Vice-Président (m. bissonnet): alors, merci, m. le
ministre de la main-d'oeuvre, de la sécurité du revenu et de la
formation professionnelle. je reconnais sans plus tarder m. le
député de mercier. m. le député.
M. Gerald Godin
M. Godin: M. le Président, je vous remercie. Alors que
notre premier ministre négociait avec ses collègues un
Sénat trois «e» de manière à donner à
l'île-du-Prince-Édouard autant de sénateurs qu'au
Québec, ce qui est absolument aberrant, on peut demander, nous, membres
de l'Opposition, qu'il y ait à Québec un gouvernement trois
«r». Et je m'explique, M. le Président: un gouvernement
rapide, respectueux et rigoureux.
Rapide pourquoi, M. le Président? C'est parce que, au moment
où on se parle, on n'a pas encore lu le texte de l'entente, ni en
anglais, ni en français. Et les journaux de ce matin disent que
l'entente ne sera même pas déposée officiellement avant le
jour où on va voter sur ladite entente. Alors, seul un gouvernement
rapide pourrait reprendre le temps perdu et mettre à notre disposition
le texte officiel de l'entente en français ou en anglais pas trop loin
du français, comme d'habitude dans les textes gouvernementaux.
Autrement, on va voter sur ce qu'on ne connaît pas. Certains diront:
C'est normal dans un pays comme le Canada. Ainsi, le vote qui s'est pris pour
la Loi sur les mesures de guerre, à Ottawa, en octobre 1970, a
été pris, ce vote, dans l'ignorance relative, sinon totale, de la
situation au Québec par rapport à la justice et par rapport
à la manière dont les choses se déroulaient au
Québec. Mais une fois n'est pas coutume, je le souhaite, M. le
Président. C'est pourquoi je souhaite que le gouvernement devienne au
moins le porteur d'un «r», qui serait un gouvernement rapide, pour
qu'on ait les textes de l'entente en question le plus rapidement possible. (15
h 20)
Et je souhaite aussi qu'on ait un gouverne-
ment respectueux de ses commettants, donc de l'électorat
québécois, en l'informant régulièrement, ce qui ne
fut pas fait pendant la période avant la signature de Charlottetown, ce
qui fait qu'il y a peu de Québécois, au moment où on se
parte, sauf le premier ministre, sauf les experts constitutionnalistes
déjà nommés tout à l'heure par le chef de
l'Opposition officielle, qui ont pu lire à tête reposée
l'entente de Charlottetown, l'entente finale, que certains appellent un
consensus, ce qui est un drôle de mot, M. le Président, dans les
circonstances. Est-ce qu'il vaut mieux un «con sans suce ou une suce sans
con»? M. le Président, je suis sûr que vous comprenez ce
genre de... pour l'avoir pratiqué à plusieurs reprises à
l'époque où j'étais votre vis-à-vis, l'autre
côté, pendant des nuits entières, devrais-je dire. Alors,
un gouvernement aussi respectueux du peuple qui l'a élu deux fois de
suite... Et le respect du peuple, ça veut dire qu'on informe
constamment, comme MétéoMédia le fait toutes les deux
heures. On informe sur la météo au Québec, on informe de
manière permanente le peuple du Québec de l'évolution des
choses. Je me souviens d'une époque où les demandes du
Québec n'étaient pas pour une société distincte,
elles étaient pour un rapatriement des impôts. Le tout a
commencé sous Maurice Duplessis et a été poursuivi par
Daniel Johnson qui voulait 100 % de l'impôt sur le revenu, ce qui avait
déjà été réalisé par un gouvernement
précédent; le deuxième 100 %, c'était l'impôt
sur les entreprises, et le troisième, c'était l'impôt
sur...
Mme Bleau: Les successions.
M. Godin: ...les successions. Merci, Mme la députée
de Bleau. De Groulx, pardon. Bleau, c'est votre nom. Et si nous avions eu, par
exemple, un premier ministre qui était allé se battre à 1
contre 17 à une époque, qui avait dit qu'il ne négocierait
plus qu'à 1 à 1, comme le fameux match Fischer-Spassky, aux
échecs, qui vient d'avoir lieu en Finlande - je crois, à moins
que je ne me trompe de pays... Alors, le premier ministre souhaitait une partie
d'échecs entre lui et le premier ministre du Canada, mais il se
retrouvait un peu comme un joueur de hockey des Nordiques, seul en finale
contre cinq joueurs d'un autre club. Mais il y avait 17 joueurs de l'autre
club. Ce que je crains, c'est que nous soyons maintenant dans... Et c'est la
lecture que je fais à partir du texte du Globe and Mail, qui est
le seul journal qui l'a publié, le projet d'entente. Je crains que nous
ne nous retrouvions, dans tous les domaines vitaux pour le Québec, avec
des situations où le Québec jouerait sur la patinoire nationale
à quatre contre cinq perpétuellement, parce qu'au fond, si on
analyse bien le soi-disant gain de 25 % des élus du Parlement
fédéral, ça veut dire que nous sommes condamnés
à perpétuité dans ce Parlement-là, la
Chambre des communes et des communs. Je constate que nous sommes
condamnés à perpétuité au statut
d'infériorité, c'est-à-dire 25 %, alors que le reste du
pays aurait 75 %. Donc, on va constamment jouer à notre sport national,
le parlementarisme, ou le hockey, par analogie, à cinq contre quatre,
avec un homme en punition. Donc, ça a l'air beau, tout ça, et
c'est la façon, d'ailleurs, dont le gouvernement a
présenté ce gain soi-disant fabuleux. 25 % de la Chambre des
Communes sera composée de députés québécois.
Ça, ça nous condamne à perpétuité à
jouer à cinq contre quatre sur la patinoire, alors que les Anglais, eux,
sont condamnés à perpétuité à jouer avec le
reste, c'est-à-dire 75 % des députés.
Donc, ce qu'on appelle un gain, à mon avis, est une soumission
perpétuelle à la majorité anglaise du pays, qui est le
vieux rêve de Lord Durham et d'autres admirateurs de Lord Durham,
nommément Mordecai Richler, qui ont toujours rêvé, eux, et
Durham et Richler - il le rappelle dans un article qu'il a écrit pour
The Economist de Londres - il rappelle qu'il aurait fallu que Lord
Durham ait raison. Il le souhaitait a posteriori, puisque Lord Durham est mort
depuis longtemps, et il aurait souhaité, donc, que le Québec soit
avalé par une majorité quelconque, et que, par conséquent,
tôt ou tard, le Québec cesse d'être un empêcheur de
tourner en rond pour la majorité anglaise du Canada.
Mais contrairement à toutes les prévisions, à tous
les voeux, à tous les souhaits de ceux qui veulent que le Canada existe
sans être tenu et forcé de respecter la majorité
francophone ou française du Québec, au moins... Combien de
francophones hors Québec, chaque mois ou chaque semaine, sont
avalés par la majorité anglaise du pays? Je pense que c'est dans
les milliers, chaque semaine et chaque mois, qu'ils renoncent à leur
langue française et qu'ils s'anglicisent, c'est-à-dire qu'ils
s'assimilent plus rapidement, en fait, que dans le passé. Le grand
reproche qu'on peut faire au système fédéral, tel qu'on le
connaît, c'est précisément celui-là. C'est de
n'avoir jamais pris les... (15 h 30)
Le Québec distribue chaque année 5 000 000 000 $ aux
institutions anglaises du Québec, ce qui est plus que ce que le
fédéral donne de son côté pour le maintien de la
culture française dans les autres provinces. C'est plus, et quand...
j'ai eu une question tout à l'heure de M. ... pas «j'ai une
question», mais il y a une question que j'ai entendue du chef du Parti
Egalité, M. Libman, le député de D'Arcy-McGee, qui dit:
Pouvez-vous garantir, M. le premier ministre, que vous allez respecter le
deuxième paragraphe de la nouvelle entente, et protéger les
institutions anglaises du Québec? Je lui aurais dit, moi, illico,
immédiatement, sans même réfléchir longtemps, que,
déjà, le Québec est le plus généreux des
gouvernements provinciaux à
l'égard de sa minorité: 5 000 000 000 $ par année,
M. le député d'Argenteuil. Je sais que vous savez que ce que je
dis est la vérité. Alors, par conséquent, l'engagement, en
ce qui nous concerne, au Québec, est déjà pris et
respecté depuis longtemps. Si, d'autre part, le Canada anglais avait -
ou le fédéral, enfin - traité aussi bien les
minorités françaises hors Québec que le Québec a
traité sa minorité anglaise ici, on n'aurait pas les
problèmes que nous avons eus par le passé et nous serions
aujourd'hui une communauté francophone pancanadienne en bonne
santé linguistique, culturelle et même, je dirais,
institutionnelle.
Si vous faites l'inventaire des institutions anglophones du
Québec, universités, postes de radio, CLSC, hôpitaux, quand
on sait que le Québec y consacre 5 000 000 000 $ par année, on ne
peut que souhaiter que le même modèle se transfère hors
Québec de la part du fédéral et que les francophones hors
Québec aient maintenant, par la suite d'une telle politique aussi
généreuse que la nôtre à l'égard des
anglophones, qu'ils se rendent compte qu'ils ont erré pendant des
générations et des générations, périodes
pendant lesquelles les francophones hors Québec ont été
littéralement avalés par le crocodile canado-anglais, alors
qu'ici, il y a eu un développement du nombre de CLSC,
développement du nombre d'universités, développement du
nombre d'écoles anglaises, développement de cégeps.
Quand on voit le cégep Dawson, installé à demeure
dans un édifice historique, un des plus beaux sites de Montréal,
où d'ailleurs, c'est la congrégation Notre-Dame, CND, qui
correspond au collège Dawson, les mêmes portes en fer
forgé, donc, ont été conservées parce que
c'était les mêmes initiales. Quand on voit avec quel respect on
les a traités, M. le Président, et avec quelle
générosité, surtout... on ne peut que souhaiter que la
mentalité qui s'est développée au Québec soit
maintenue et, deuxièmement, se répande comme une tempête de
neige en hiver dans l'ensemble des autres provinces pour que nous soyons
sûrs que, dans le Manitoba, à Winnipeg, les patients francophones
soient traités avec autant d'égard que les patients anglophones
le sont au Québec dans leur langue par des médecins qui parlent
leur propre langue et avec un personnel infirmier et hospitalier dont la
condition d'emploi est précisément qu'ils maîtrisent la
langue de l'autre, alors que c'est le contraire qui se passe.
Je suis allé souvent, moi, au Manitoba. Je me suis informé
à chaque fois que j'y suis allé, dans les hôpitaux et
ailleurs dans les centres de santé, et le nombre de personnes...
À Kingston, ils appellent ça le Doo, l'Hôtel Doo, ils
appellent ça maintenant le Doo. «Go to the Doo», va au Dieu.
On ira peut-être un jour, mais c'est une autre histoire. Alors, quand on
va au Doo, à Kingston, M. le Président, on se rend compte que le
personnel, uniquement et spécialement bilingue, est à peu
près inexistant et que, deuxièmement, le personnel qui
maîtrise la langue de l'autre, c'est-à-dire, dans le cas qui nous
occupe, le français, est moins qu'inexistant, il est sous la barre des
zéros.
M. le Président, je fais un discours qui aborde la
réalité anglophone du Québec parce que je pense qu'on n'a
pas de leçon, comme disent les libéraux souvent, à
recevoir de personne par rapport au statut dont jouissent ici la
communauté anglaise et ses institutions. Alors, M. le Président,
c'était mon propos aujourd'hui. J'en ferai un autre plus tard. Merci
bien. Au revoir.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Mercier, de votre intervention. Je reconnais maintenant
M. le député de NDG.
M. Gordon Atkinson
M. Atkinson: M. le Président, nous sommes la nation la
plus chanceuse de toutes les nations sur la terre. De toutes les nations dans
notre hémisphère, le Canada est la seule nation qui fut
créée par évolution et non par révolution. Nous
avons évolué grâce au dialogue, non par la bouche des
canons. Je suis fier d'avoir servi dans les Forces armées canadiennes,
comme mon père avant moi, mon grand-père, et mon
arrière-grand-père avant lui, comme mon fils qui a
également servi pour défendre le Canada et les principes d'une
société libre et démocratique.
My ancestors would twirl in their graves if they even suspected that I
might participate in any movement to dismember the nation. Then there are those
people who left the United States during their revolution of 1776 to come to
Canada as United Empire Loyalists to create a nation through the evolutionary
process rather than the divisive process of revolution, and, along with the
French-speaking settlers of an earlier time, created the cornerstone the nation
of Canada that extends to three great oceans and encompasses the world's
largest landmass nation.
Le Canada a été une nation dans laquelle son peuple
discute de ses différences et évolue de consentement mutuel. Le
Canada aujourd'hui est très différent d'il y a 125 ans. Le Canada
de ma jeunesse était une nation très différente. Par le
respect mutuel et la consultation, nous sommes arrivés à cette
grande nation, le Canada. C'est ce que nous devons, ou devrions discuter, une
nation unie qui poursuit le but commun pour la justice afin d'assurer la
liberté individuelle à la poursuite des objectifs de chacun en
affaires, en éducation. Les Pères de la
Confédération ont imaginé cela comme étant la
mosaïque du Canada.
Somewhere, Mr. Speaker, we seem to have lost the sense of mutual
appreciation of the diversity of that mosaic. The agreement reached
by the First Ministers of Canada and our First Peoples of Canada has put
before us another in the long process of evolving as a people, as a nation of
people.
Mon coeur saignerait si les principes pour lesquels ma famille, votre
famille, tous nos ancêtres se sont battus depuis les débuts de
l'Amérique du Nord devaient être déchirés en
morceaux. Le processus continuel d'évolution est la
réalité du Canada.
When I was a child, I thought like a child, I acted like a child. But
now I am a man. I must put aside these childish behaviours and act like a man,
taking the full responsibility for all that implies, meaning that I must act
responsibly towards the nation that has succored five generations of my family.
And that responsibility weighs heavily on my heart. I cannot desert the
principles of my ancestors nor the values of these successive generations that
my family maintained in order that my nation might survive.
Je ne suis pas d'accord avec tout dans l'accord constitutionnel actuel.
Cela va à rencontre de ce que mon instinct et mon sens inné
disent ce qu'est un Canadien et un Québécois. Seulement un enfant
boude et agit de façon irritable quand on ne lui donne pas ce qu'il veut
sur un plateau d'argent. Nous ne sommes pas des enfants. Nous avons la
responsabilité de la nation. Je suis un Québécois
anglophone, mais, avant tout, je suis un Québécois qui est fier
de la diversité de notre nation et du petit coin de cette nation qui
sera toujours mon chez-moi.
The new accords are part of the evolution of the nation of Canada in the
same way as the original contract between the people of Canada evolved from the
primitive wilderness in which they first placed the plow to the ground, the axe
to the forests and the intellect to create a caring and just society of which
we might all be grateful and thankful.
These accords, Mr. Speaker, are not a restaurant menu where you pick one
from column A, two from column B, but rather these accords are a banquet, a
banquet to be enjoyed by all Canadians.
Nous persévérons. Nous changerons le visage du Canada
plusieurs fois avant la fin des temps, mais nous le ferons ensemble, avec
respect et honnêteté pour tous les peuples de la grande nation
qu'on appelle le Canada, de concert avec notre Québec. Merci, M. le
Président. (15 h 40)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce. Je rappelle aux membres de
cette Assemblée que nous en sommes à l'adoption du principe du
projet de loi 44, Loi modifiant la Loi sur le processus de détermination
de l'avenir politique et constitutionnel du Québec, et je cède la
parole à M. le député de l'Acadie.
M. Yvan Bordeleau
M. Bordeleau: Merci, M. le Président. À mon tour,
aujourd'hui, je veux intervenir pour me prononcer sur l'amendement que nous
désirons apporter à la loi 150, Loi sur le processus de
détermination de l'avenir politique et constitutionnel du Québec.
Permettez-moi, pendant quelques instants, de partager avec mes concitoyens du
Québec et mes confrères de l'Assemblée nationale mes vues
sur la situation actuelle et toutes les raisons qui nous amènent
aujourd'hui à débattre cette question.
Comme on se le rappelle tous, le gouvernement libéral s'est mis
à la tâche, depuis près de sept ans, de convenir avec les
gouvernements fédéral et provinciaux des termes de son
adhésion à la loi constitutionnelle de 1982. Pour ce faire, le
gouvernement du Québec a fait connaître ses cinq conditions. Un
accord constitutionnel, en juin 1987, a traduit les termes d'une entente
intervenue au lac Meech entre le Québec, Ottawa et les neuf autres
provinces au regard des cinq conditions posées par le Québec.
L'accord du lac Meech, conclu en 1987 avec l'assentiment de tous les
premiers ministres, comportait des conditions minimales qu'exigeait le
Québec pour réintégrer le pacte confédératif
de 1982. Malheureusement, cette entente unanime entre les 11 gouvernements n'a
pas recueilli le consentement de toutes les législatures provinciales,
ce qui aurait permis sa proclamation et son entrée en vigueur. Nous
avions donc, en partie, réussi à faire bouger le gouvernement
fédéral et les gouvernements provinciaux, à les asseoir
à une même table pour reprendre les discussions. Tous les premiers
ministres s'étaient entendus pour faire ratifier l'entente avant la fin
de juin 1990. Le tout s'est terminé malheureusement le 22 juin 1990.
La façon dont le gouvernement libéral a mené les
négociations jusqu'à la dernière minute prouve une fois de
plus la compétence de ce gouvernement dans ce domaine et
l'intérêt du gouvernement du Québec à
défendre les intérêts profonds des Québécois.
Ces événements nous forcèrent à souhaiter de plus
en plus ce que nous voulons de mieux pour notre avenir, en y mettant notre
coeur et notre énergie. Cependant, on aura noté que les
débats qui ont entouré l'Accord constitutionnel de 1987 ont
montré que les visions politiques, les identités nationales et
les aspirations au sein du régime fédéral canadien
semblaient de plus en plus difficiles à concilier. C'était ma
conviction profonde, M. le Président, que nous devions et allions
continuer à défendre jusqu'au bout ce régime qui nous a
accordé tant depuis tant d'années, et qu'on n'avait pas le droit
d'abandonner, en dépit des difficultés rencontrées.
Le 4 septembre 1990, le gouvernement libéral créait la
commission sur l'avenir cons-
titutionne! et politique du Québec, la commission
Bélanger-Campeau. M. le Président, le projet de loi 150,
étudié en juin 1991, respectait en tout point le rapport
Bélanger-Campeau, soit la tenue d'un référendum sur la
souveraineté du Québec au plus tard le 26 octobre 1992, la
constitution de deux commissions parlementaires spéciales, l'une ayant
pour mandat d'étudier les questions afférentes à
l'accession du Québec à la souveraineté et l'autre,
d'analyser toute offre d'un nouveau partenariat de nature constitutionnelle
faite par le gouvernement canadien. Ainsi, notre gouvernement respectait en
tout point l'important consensus développé à la commission
Bélanger-Campeau.
On doit se rappeler le Québec d'hier pour bien saisir et
comprendre le Québec d'aujourd'hui et, surtout, celui de demain. Quoi de
mieux pour ce faire qu'un survol des grandes réalisations
libérales, de 1960 à nos jours, pour réaliser
jusqu'à quel point notre société a été
dynamique et a pu s'épanouir à l'intérieur du cadre
fédéral.
À partir de 1960, les Québécois se sont
donné des outils de développement extrêmement importants.
Qu'il suffise de se référer à la Caisse de
dépôt et placement, à la Régie des rentes, à
la Société générale de financement, qui jouent des
rôles de premier plan pour le développement et le renforcement de
l'économie du Québec. Sur tous les plans, le Québec, au
cours de ces années, a vécu des mutations extrêmement
importantes. Ces acquis ne sauraient disparaître du jour au lendemain.
Aucun changement politique ne devra affecter de façon négative
l'évolution du Québec. Au contraire, nous devons assurer son
développement ou sa croissance dans la perspective de la
continuité et du renouvellement. L'objectif de notre gouvernement
était d'avoir un statut politique qui lui donnait tous les pouvoirs pour
promouvoir son identité tout en favorisant l'essor et le
développement économique. Ce sont là des objectifs
fondamentaux pour notre gouvernement et pour notre société.
La raison de cet amendement à la loi 150, aujourd'hui, est bien
simple: c'est l'entente du 22 août 1992 du gouvernement
fédéral et de tous les autres gouvernements canadiens. Le
préambule de la loi 150 reflétant l'essentiel des recommandations
de la commission Bélanger-Campeau et l'esprit dans lequel cette loi a
été conçue lors de son adoption nous permet de retrouver
les raisons profondes de notre débat actuel. En effet, il est clairement
indiqué ce qui suit, et je cite: «Considérant que la
commission sur l'avenir politique et constitutionnel du Québec
reconnaît, outre la voie de la souveraineté politique du
Québec, celle du renouvellement en profondeur du
fédéralisme que rendrait possible l'établissement d'un
nouveau partenariat de nature constitutionnelle; «Considérant la
volonté du Québec d'assurer l'égale compréhension
de tous tant à l'égard des changements nécessaires pour
rendre acceptable au Québec le système fédéral
canadien qu'à l'égard d'une juste définition de la
souveraineté et de ses implications politiques, économiques,
sociales et culturelles; «Considérant que le gouvernement du
Québec conserve en tout temps sa pleine faculté d'initiative et
d'appréciation des mesures favorisant les meilleurs
intérêts du Québec; «Considérant que
l'Assemblée nationale demeure souveraine pour décider de toute
question référendaire et, le cas échéant, adopter
les mesures législatives appropriées.»
Cet amendement va donc permettre la tenue d'un référendum
le 26 octobre, sur l'entente constitutionnelle et non sur la
souveraineté, tel que prévu à l'origine par la loi,
puisque nos partenaires ont su répondre aux besoins et aux aspirations
traditionnelles des Québécois. Nous étions confiants que
le gouvernement central ferait au Québec des offres de partenariat
constitutionnel raisonnables et ce, à l'intérieur de
l'échéancier que le Québec s'était fixé.
C'est ce qui arrive aujourd'hui, et nous devons en tenir compte.
Comme le disait notre premier ministre, M. Robert Bourassa, le 10 mars
1991, lors du congrès du Parti libéral du Québec, et je
cite: «Nous avons des valeurs communes, deux siècles d'histoire
commune. Le Canada est l'un des pays les plus enviés du monde. Les
Québécois veulent pouvoir développer leur identité
et assurer leur sécurité économique, mais ils
préfèrent que cela se fasse à l'intérieur de la
structure canadienne.» Nous avons donc devant nous une option valable et
très importante pour l'avenir du Québec.
Cette entente du 22 août dernier équivaut à des
gains inégalés au cours des 125 dernières années.
Premièrement, un Québec distinct: reconnaissance de la
société distincte; rôle dynamique et responsabilité
du gouvernement de promouvoir la société distincte; 33 % des
juges à la Cour suprême; ajout de 18 députés
à la Chambre des communes; garantie de 25 % des sièges à
la Chambre des communes; double majorité au Sénat en
matière de langue et de culture, donc un veto absolu; veto sur la
constitution du Sénat; veto sur la représentation à la
Chambre des Communes; veto sur l'existence et la composition de la Cour
suprême; veto sur la participation des nouvelles provinces à la
procédure de modifications constitutionnelles et au Sénat;
retrait et compensation pour tout transfert de juridiction provinciale au
fédéral. (15 h 50)
Deuxièmement, un partenariat amélioré:
compétence exclusive provinciale accrue en matière de culture, de
perfectionnement et de formation de la main-d'oeuvre, de tourisme, de
forêts, de mines, de loisirs, de logement, d'affaires municipales et
urbaines; maîtrise d'oeuvre en matière d'immigration, de
développement régional et de télécommunications;
constitution-
nalisation de l'entente d'immigration déjà conclue;
encadrement du pouvoir fédéral de dépenser, dans le
respect des priorités provinciales; intégration économique
accrue, tout en maintenant les outils de développement économique
des provinces; rôle accru des provinces dans le processus de nomination
des juges de la Cour suprême; nouveau pacte réaliste et
respectueux avec les autochtones.
M. le Président, comme le disait le ministre
délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes
lors de l'assemblée générale spéciale des membres
du Parti libéral du Québec le 29 août dernier, et je cite:
«C'est la première fois, dans 125 ans, qu'un gouvernement du
Québec, qu'un premier ministre du Québec revient de
négociations avec une entente de cette envergure. C'est la
première fois qu'on propose aux Québécois, d'une part leur
sécurité et, d'autre part, les outils de développement
nécessaires. Jamais, dans toute l'histoire du Québec, un premier
ministre n'aura fait autant pour le Québec. Il ne fait aucun doute que
le Québec croit plus que jamais nécessaire et légitime de
contrôler les pouvoirs et les outils essentiels à son
épanouissement et au maintien de sa
spécificité.»
À ce chapitre, M. le Président, il importe de souligner la
ratification d'une entente majeure signée en 1991 avec le gouvernement
fédéral en matière d'immigration. Cette entente remplace
l'entente Cullen-Couture qui existait depuis 1978. Elle s'inscrit dans la
logique de la récupération par le gouvernement du Québec
des pouvoirs essentiels à son développement. M. le
Président, cette entente a été constitutionnalisée
dans l'entente du 22 août. Voilà la preuve que le Québec
peut se développer dans le cadre d'un fédéralisme
évolutif. Qu'il suffise de se rappeler également les
négociations entourant le protocole d'entente entre le gouvernement
fédéral et le Québec concernant l'administration
unifiée de la TPS et de la taxe de vente québécoise.
Encore une fois, le gouvernement québécois
bénéficiait dès lors d'économies importantes, et
cela, toujours dans le but de défendre les intérêts des
Québécois.
M. le Président, c'est maintenant l'heure des choix pour les
Québécois. Le contexte économique est difficile, vous en
conviendrez avec moi, et, dans ce sens, les Québécois ont le
devoir de se questionner sur les conséquences économiques de
l'indépendance prônée par nos collègues d'en face.
Comment se fait-il que l'Opposition n'ait jamais abordé cette question
des coûts de la souveraineté? Quand on pense qu'un changement
politique important provoque des conséquences, il est essentiel, je
crois, de connaître celles-ci et de prendre des décisions en toute
connaissance de cause.
Au cours des prochaines semaines, nos compatriotes seront en mesure
d'évaluer la valeur de l'entente et la pertinence de son acceptation,
dans la perspective du développement et de l'épanouissement du
Québec. Notre gouvernement n'a ménagé aucun effort pour
impliquer la population dans ce processus déterminant et fondamental
pour l'avenir politique et constitutionnel du Québec, et c'est cette
dernière qui tranchera la question. Malgré nos
différences, nous sommes parvenus, au Québec, à
l'intérieur du Canada, à former une société qui
compte parmi les plus avancées au monde en ce qui concerne le standard
de vie, la créativité et l'innovation. Nous ne devons jamais
oublier cette réalité indéniable.
M. le Président, je terminerai donc en disant que je suis
convaincu que, pour le Québec, il s'agit du meilleur arrangement que
nous pouvions espérer à l'intérieur d'un processus
réaliste de négociations, et ce, en tenant compte des
règles actuelles du fédéralisme canadien.
Le 26 octobre prochain, un oui à l'égard de l'entente sera
un geste de réalisme et de confiance à l'égard de l'avenir
du Canada et du Québec. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de l'Acadie. Sur cette même question, je reconnais
M. le leader adjoint de l'Opposition officielle et député
d'Abitibi-Ouest.
M. François Gendron
M. Gendron: Oui, M. le Président. Je pense que nous
devons nous assurer que ce débat se fait dans des conditions autres que
ce que j'ai entendu ce matin. J'étais presque atterré,
renversé de voir que des membres de ce gouvernement-là avaient
employé davantage un discours de taverne, de brasserie. Ça a
été le cas, entre autres, du ministre de la Santé et des
Services sociaux. Je n'ai jamais vu de ma vie un discours aussi bassement
inexact, partisan, erroné, comme s'il n'avait qu'un seul chapeau,
être le chef des troupes serviles. Ils nous ont donné une preuve
évidente de ce qu'ils sont, lors de leur dernier congrès, comme
si l'intelligence les avait complètement abandonnés, et ce qui
leur servait de seul point de repère, c'est l'adoration du veau
d'or.
Je félicite les collègues, membres de cette
Assemblée de cet après-midi, d'avoir eu un discours à la
hauteur du débat qu'on devrait avoir. Je ne suis pas d'accord avec le
ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, mais il
a fait un discours de parlementaire responsable. Je viens d'écouter le
député de l'Acadie; je ne suis pas d'accord, il y a des choses
qui sont complètement erronées là-dedans, mais il a fait
un discours à la hauteur d'un parlementaire responsable.
J'essaierai, et je compte sur vous, M. le Président, pour me
permettre de faire un discours responsable, parce que la question est trop
importante, trop majeure pour la traiter avec
démagogie. Je vois quelques répondeurs automatiques qui se
questionnent de l'autre côté. Je vais vous donner trois exemples
avant d'aborder le fond du discours. Est-ce que, honnêtement, vous
croyez, comme parlementaires, que vous contribuez à éclairer le
débat et répondre aux aspirations des Québécois qui
veulent avoir l'heure juste lorsque vous affirmez que cette entente est
l'équivalent de l'accord du lac Meech? Vous répondrez
personnellement à cette question-là. Est-ce que vous croyez que
vous répondez aux attentes de la population et que vous contribuez
à éclairer le débat lorsque vous commencez ce qu'on est en
train de faire en disant: Si on discute de la loi 150 et si on la modifie,
c'est pour mieux la respecter? Vous répondrez à cette
question-là.
Quand un ministre responsable a le culot de commencer une modification
majeure à un projet de loi et qu'il dit: Si je la modifie, c'est parce
que nous, de ce côté-ci de cette Chambre - en parlant de ses chers
libéraux - on veut respecter la loi. Vous vous poserez la même
question lorsque vous pensez que vous contribuez à éclairer le
débat, alors que cinq, six d'entre vous affirment que, lorsque nous, on
dit à M. Allaire: Bien sûr que tu peux venir combattre les offres
avec nous parce que le débat va porter sur les offres, et que le
ministre de la Santé et des Services sociaux commence son propos en
disant: Voilà, ces gens-là ne sont plus souverainistes!
Voilà, ces gens-là viennent de renier leur option! Vous
répondrez à cette question-là et, si votre réponse
est que vous contribuez à éclairer le débat et permettre
aux citoyens et aux citoyennes de se faire une meilleure idée sur les
offres, vous resterez avec vos problèmes de conscience.
Dernier exemple. Lorsque ces gens-là, encore là, ont le
culot, comme j'appelle, de faire des bulles. Ces gens-là disent des
choses et ça s'arrête là. Je donne deux exemples. Je viens
d'entendre le député de l'Acadie - et je le répète,
j'ai trouvé qu'il avait fait un discours correct - mais quand il dit, en
parlant de nous: Pensez-vous que c'est responsable, comme alternative, quand on
sait que ces gens-là n'ont même pas examiné le coût
de la souveraineté? Ils n'ont jamais regardé cette
question-là, et juste de l'autre côté de cette Chambre, il
existe des paquets d'études comme ça qui ont prouvé, noir
sur blanc, qui ont fait la preuve de a à z des coûts de la
souveraineté et leur idole, leur veau d'or est assis sur ce paquet de
documents et le veau d'or ne veut pas rendre publics ces documents-là.
Vous croyez que ça contribue à éclairer la population
d'avoir de telles attitudes? Je m'arrête là, et je veux parler de
ce qui est sur la table. (16 heures)
Ce gouvernement-là a décidé de modifier la loi 150,
qui devait porter sur la souveraineté politique, et ils ont dit: Non,
ça ne portera pas là-dessus, ça va porter sur les offres.
Bien, écoutez, il me semble que quelqu'un de responsable doit parler des
offres. C'est là-dessus qu'il y aura une consultation
référendaire, même jour, même heure, même
poste, «coast to coast», à travers le Canada. Donc, en
passant, ce n'est pas le référendum des Québécois,
c'est le référendum du reste du Canada et parce que, dans la
vision de ces gens-là, le Québec est une province comme les
autres - d'ailleurs, ils l'ont prouvé dans l'entente quand ils
félicitent leur premier ministre - le Québec est une province
comme Terre-Neuve, comme PÎle-du-Prince-Édouard, c'est une
province comme les autres. Donc, on va passer par le même traitement que
les autres.
Mais, sur les offres, M. le Président, j'ai bel et bien
l'intention de prouver ce que je vais dire. Un, le 7 juillet, nous avons eu
l'annonce d'une entente, et cette entente-là a été
commentée par à peu près tout ce qui existe de
Québécois et de Québécoises,
fédéralistes, souverainistes, «blocquistes»,
indépendantistes, peu importe. Tous ces gens-là, unanimement, ont
dénoncé, décrié, pourfendu une entente qui ne
correspondait pas aux aspirations légitimes des Québécois
et des Québécoises.
Le 22 août, il y a eu une autre entente, et là je reviens
aux propos du ministre des Affaires municipales, et il disait ceci: Si M.
Bourassa a accepté de retourner à la table, c'est parce qu'il y
avait des propositions concrètes sur la table. M. le ministre des
Affaires municipales a raison quand il dit ça, mais ça
s'arrête là, parce qu'il a ajouté: il y est allé
dans un esprit d'ouverture, il a été accueilli et il a
négocié une nouvelle entente - comme s'il y avait une nouvelle
entente! C'est là que ça se gâte, parce que c'est de
là que vient toute la confusion entre ce que j'appelle l'habillage d'une
proposition qu'ils ne sont pas capables de vendre et ce qu'ils ont
décidé d'en dire sans rien prouver. Je vais essayer de le
prouver, point par point.
Les fonctionnaires fédéraux qui ont assisté aux
échanges, M. le Président, ont senti le besoin de dire à
M. Bourassa: M. Bourassa, vous n'avez rien obtenu de neuf. Là, ils
donnent un exemple. Parce que les hauts fonctionnaires, quand ils sont rendus
à être obligés de sortir pour expliquer que des policitiens
qui doivent servir dans leurs fonctions, pour lesquelles ces gens-là ont
prêté un serment d'office... J'ai été ministre de la
Fonction publique; j'ai beaucoup de respect pour les hauts fonctionnaires qui,
règle générale, servent correctement les gouvernements
pour lesquels ils sont mandatés. Là, les hauts fonctionnaires ont
dit à M. Bourassa: Je regrette, entre l'entente du 7 et celle du 22, au
chapitre du partage des compétences ou au chapitre de nouveaux pouvoirs,
c'est la même chose, il n'y a rien de neuf. Donc, arrêtez de faire
accroire à la population qu'il y a de quoi de neuf. Mais je peux
comprendre que ces gens-là essaient de faire accroire qu'il y a de quoi
de neuf. Quand on véhicule n'importe quoi sans le
prouver...
Et, à titre d'exemple - parce que j'ai dit que je parlerais avec
des exemples - quand j'ai le ministre régional - parce qu'il se fait
appeler de même en région - le député
d'Abitibi-Est... Le ministre du Revenu, là, je le cite. Regardez ce
qu'il dit, ce brillant personnage: L'entente intervenue contient de bons
éléments, particulièrement en ce qui touche
l'Abitibi-Témiscamingue, soit les secteurs des mines, des forêts
et du développement régional. Non, mais, écoutez, c'est
quand même grave, dramatique qu'un membre du gouvernement depuis 1985 ait
le culot d'indiquer que, pour les gens de l'Abitibi-Témiscamingue,
région que je connais et que j'essaie de servir le mieux possible depuis
16 ans, il y a là quelque chose d'extraordinaire parce que,
dorénavant, nous aurons pleine juridiction dans le domaine de la
forêt et des mines. Ça existe depuis 125 ans! Depuis que le Canada
existe, si vous allez chercher une copie de la Constitution à la
Bibliothèque nationale, vous allez constater que le Québec a
pleine et entière juridiction dans le domaine de la forêt, dans le
domaine des mines. Mais quand un membre de ce gouvernement-là - et
là je vous pose la question - vient affirmer haut et fort que l'entente
du 22 août est bien meilleure que celle du 7 juillet parce qu'elle nous
donne pleine juridiction dans des domaines comme la forêt et les mines,
qu'on a depuis 125 ans, la question que je vous pose: Est-ce que vous croyez
que ça contribue à éclairer les électeurs et les
électrices? Est-ce que vous pensez que ça contribue à
améliorer le débat? Moi, ma réponse, c'est toujours la
même: Bien non! Ce n'est pas parce qu'on répète qu'on fait
des bulles dans une piscine qu'on va augmenter le volume de l'eau dans la
piscine. Ces gens-là font des bulles en répétant les
mêmes phrases.
Alors, lui, M. le ministre régional, ça fait longtemps que
je savais qu'il faisait des bulles, mais, là, au niveau constitutionnel,
ça dépasse l'entendement. Faire accroire aux gens de la
région que parce que, dorénavant, on va avoir un champ de
juridiction exclusif - et lorsqu'on va voir les textes, ça ne dit
même pas ça - dans un champ de juridiction qui était
nôtre... Le texte, je vous le lis, là, intégralement:
«Ainsi, au chapitre de la division des pouvoirs, le texte de l'accord du
7 juillet demeure intact - demeure intact! Moi, j'ai appris ce que ça
voulait dire, le mot "intact" - à l'exception - parce que je veux lire
les textes exactement - des ajouts concernant - écoutez bien ça -
les promesses - donc, on est rendu au deuxième conditionnel - de tenir
dans l'avenir une conférence fédérale-provinciale dans le
but de banaliser le pouvoir fédéral de dépenser et
d'harmoniser la réglementation en matière de
télécommunications», ainsi de suite. Quand des hauts
fonctionnaires sont obligés de dire: Écoutez, la
réalité qu'on observe, nous, en siégeant à ces
réunions- là, est tout autre que celle qu'on tente d'affirmer,
j'ai l'impression que ça devrait éclairer les citoyens et les
citoyennes du Québec, comme ça a été dit,
d'ailleurs, ce matin.
Le député de Saguenay, lui, ne se l'est pas caché.
C'est vrai que ce n'est pas le plus fort de la gang, là, mais il ne
s'est pas caché, en disant: II ne sera pas question des offres. On n'en
parlera pas, des offres. Il l'a dit dans son discours, très clairement:
II n'est pas question qu'on parle des offres. Je le comprends. Ce n'est pas
vendable et, quand on veut cacher quelque chose, on l'ignore. Pas question de
parier des offres! Il dit: Nous, on fait le débat sur la
souveraineté et sur l'alternative. Imaginez! C'est brillant, alors que
ces gens-là, aujourd'hui, nous convoquent pour modifier la loi 150 pour
faire accroire qu'en la modifiant c'est pour mieux la respecter. Ça va
faire, le mensonge, M. le Président! Et ce n'est pas parce que je veux
faire des insultes. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise?
Tous les commentateurs... Parce que, là, moi, je
préfère croire des gens qui sont un peu plus neutres et un peu
plus détachés. Quand Mme Bissonnette, qui a suivi ce
dossier-là, qui a une expertise des dossiers constitutionnels, qui a
toujours développé une crédibilité honnête -
elle n'est pas à 11 % dans les sondages, elle n'est pas en course au
leadership, comme c'est le cas du ministre pancanadien Rémillard, elle
n'est pas dans une course au leadership - et elle, elle dit: Écoutez, la
vérité des choses: il n'y a rien de neuf là-dedans, et
l'entente du 7 et celle du 22, c'est exactement la même chose. La
différence, ça a été dit par leur
vice-président. Le vice-président de la commission politique du
Parti libéral a eu un sursaut d'honnêteté intellectuelle.
Il a dit: Je ne suis plus capable. Je ne suis plus capable, mais je vous
garantis que celle du 22, par exemple, elle va être mieux vendue; il n'y
aura pas d'erreur de stratégie dans la vente de cette entente-là
ou de ces offres-là. Moi, je vous le dis, ces offres-là n'ont
rien de différent de l'offre du 7 juillet qui a été
débattue, pourfendue, décriée, dénoncée par
tous.
Et on peut faire le même exercice au niveau de chacun des
éléments de l'entente. Je voudrais juste revenir au niveau du
droit de veto. Rappelez-vous les articles qu'on a pu observer quand M. Gilles
Lesage, un chroniqueur spécialisé, chevronné, a
été obligé de dire: Ça «prend-tu» un
premier ministre qui aime fafiner et rire du monde pour faire accroire que lui
avait obtenu cinq droits de veto! À titre d'exemple. Êtes-vous au
courant que le veto politique du Québec sur la création de
nouvelles provinces ne repose, en fait, que sur un simple engagement
écrit du ministre Joe Clark, dans une lettre adressée au chef du
gouvernement du Yukon? Le Québec ne détient pas de droit de veto
constitutionnel sur la création de nouvelles provinces. Ce n'est pas moi
qui dis ça, c'est des gens
avertis de ces questions-là, Lise Bissonnette, Gilles Lesage, des
spécialistes. Le premier ministre a ri d'eux autres.
Il y a huit constitutionnalistes qui regardent ça. C'est des
vauriens, c'est des gens qui ne connaissent pas ça, parce qu'eux autres
ils n'adorent pas le veau d'or, ils ne répètent pas tous la
même chose: qu'il s'agit des meilleures offres, qu'il s'agira de faire
des bulles, et qu'en faisant des bulles on va essayer de grossir le bulbe
jusqu'à la consultation, prétendant que les
Québécois vont marcher là-dedans.
Quand on lit, en immigration, que le texte définitif ne donne
rien de plus au Québec, j'aime bien mieux me fier à ça
qu'au discours que ces gens-là vont nous faire, quand on sait toute la
détermination qu'ils ont eue lors de leur congrès et de leur
caucus. Ils ont écouté, et ils ont été dociles,
attentifs. J'arrête là dans mes qualificatifs, parce que je veux
rester à un niveau correct. (16 h 10)
Quand on dit: Les efforts de dernière heure de Québec
échouent, quand on regarde n'importe quel document: Québec
n'obtient pas la gestion de l'assurance-chômage... Et le meilleur
exemple, c'est toujours de revenir à leur conseiller politique, Le
Président de la commission politique du Parti libéral, M.
Allaire. Et, je répète, M. Jean Allaire, président de la
commission politique du Parti libéral, dit très clairement: Ces
offres-là sont inacceptables, et il n'y a pas de nouveaux pouvoirs. Il
n'y a pas de nouveaux pouvoirs. Je rejette catégoriquement l'entente
constitutionnelle qui ne contient, selon moi, aucun nouveau transfert de
pouvoirs. Puis là, il y a de plus en plus de libéraux qui
répètent cette même réalité parce que c'est
la réalité. Gilles Lesage disait ceci: À la suite de
l'entente d'Ottawa, les hauts fonctionnaires fédéraux ont
donné, la semaine dernière, une séance d'information qui a
permis à la presse de savoir un peu mieux ce qui mijotait dans la
marmite constitutionnelle. On a appris que bien des gains revendiqués
par Québec devront faire l'objet d'ententes administratives ou d'accords
politiques ultérieurs. De plus, les fameux transferts de pouvoirs
célébrés par M. Bourassa ne signifient pas qu'Ottawa se
retire. Puis là, il nomme à peu près tous les
ministères.
Toujours, si on prend la peine d'apprécier véritablement
les vrais documents, je cite également M. Claude Castonguay. M.
Castonguay, moi, en ce qui me concerne, avant qu'il ne soit nommé
sénateur, a toujours réfléchi à ces
questions-là, et a une compétence qui permet de porter des
jugements. Le 7 juillet, M. Castonguay a dénoncé l'entente
à tour de bras. Puis le 22, il a décidé de donner son
appui à l'accord constitutionnel. Mais voici ce qu'il dit, par exemple.
Prenons un exemple au chapitre du pouvoir de dépenser. M. Castonguay a
au moins l'honnêteté que je ne retrouve pas en face, de ces
gens-là. M. Castonguay l'a dit, lui: Pour ce qui est du pouvoir de
dépenser du gouvernement fédéral dans le domaine des
compétences provinciales, j'admets que le Québec n'obtient pas de
garanties. Je répète: J'admets que Québec n'obtient aucune
garantie concernant la limitation du pouvoir de dépenser, qui est un
autre des secteurs qui a toujours constitué, dans nos demandes
traditionnelles historiques, un point important. Que M. Castonguay ajoute: Oui,
mais moi, je suis d'accord avec l'offre parce que je suis un
fédéraliste. C'est son droit, je respecte ça. Ce n'est pas
ça, le débat. Le débat, c'est: Est-ce que ces
offres-là correspondent à quelque chose qui reprend l'ensemble de
la problématique historique des Québécois et correspondent
à quelque chose de différent du 7 juillet? La réponse est
non. Même Claude Castonguay, qui est un fédéraliste, qui
est d'accord avec les offres, nous dit: Au chapitre de la limitation du pouvoir
de dépenser, je dis clairement... Parce que j'ai toujours pensé
que M. Castonguay avait pas mal plus d'honnêteté qu'on en a vu ici
en cette Chambre, de ces faux-fuyants, de ces gens qui soufflent le chaud et le
froid à la fois. Il l'a dit: Au niveau de la limitation du pouvoir de
dépenser, rien de neuf.
C'est un peu, M. le Président, pourquoi je pense que le
débat, il est très important, mais à la condition qu'on
soit assez convaincus, tous et chacun, que c'est un débat qui regarde le
peuple du Québec, et pour que le peuple du Québec puisse
l'arbitrer le mieux possible. On n'a pas le droit de faire passer ce qu'on
appelle nos convictions politiques très intimes dans ce
débat-là sans les éclairer sur le contenu des offres.
À chaque fois que vous direz: entre l'offre du 7 juillet versus celle du
22 août, au chapitre du pouvoir de dépenser, supposons, au
chapitre du partage des compétences, voici ce qu'il y a de plus... Bien,
prouvez-le donc, mais pas en disant ce que le ministre régional est venu
dire en Abitibi-Témiscamingue: C'est meilleur qu'avant parce qu'on a les
mines. Voyons donc! C'est rire du monde. Nous les avons depuis 125 ans. C'est
meilleur qu'avant parce que nous avons les forêts. Nous les avions depuis
125 ans comme pouvoir exclusif puis, dorénavant, on va être
obligés de s'entendre pour qu'ils se retirent de ces
juridictions-là.
Qu'est-ce que le premier ministre du Québec a répondu
à la question d'aujourd'hui sur les nouveaux partages de
compétences, sur ce qu'on a de plus? Rien d'autre que dire qu'il avait
obtenu, comme M. le ministre des Affaires municipales l'a laissé voir ce
matin, des clarifications, des précisions, des bidules, des informations
additionnelles. Mais ce n'est pas de ça qu'il s'agit, il s'agit de dire
aux Québécois: Est-ce que vous êtes d'accord avec ces
offres-là, alors que celles du 7 juillet ont été
pourfendues et décriées, et que celles du 22, il n'y a rien de
plus?
Donc, c'est sûr que le sort qu'on veut qui arrive aux offres
constitutionnelles du 22 août,
on veut que ce soit le même que celui du 7 juillet parce que, en
conclusion, M. le Président, ça ne correspond pas du tout,
honnêtement, aux aspirations traditionnelles, fondamentales et
légitimes des Québécois. Ça dessert nos
intérêts, puis ça ne permet pas de voir notre avenir.
Ça bloque à tout jamais l'avenir du Québec, si on se
confine dans un tel créneau.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député d'Abitibi-Ouest. Sur cette même question, je
reconnais M. le député de Jacques-Cartier. M. le
député, la parole est à vous.
M. Neil Cameron
M. Cameron: Merci, M. le Président. I must begin by saying
that it is a charateristic of the parliamentary system that those in office
have all the power, but those in Opposition get most of the fun, and I never
feel this more than when I watch the Member for Abitibi-Ouest or the Member for
Lac-Saint-Jean. They obviously are having a great deal of fun at the
Government's expense at the moment.
Nonetheless, I think it is easy for them to do that, partly because we
would not merely have to consider the special case of the Parti
québécois or the special case of the Province of Québec.
An Opposition party, anywhere, at anytime, has an advantage in attacking any
constitutional agreement whatsoever, since by the very nature of an accord, it
lays down specific provisions, which therefore means that it does not put down
other provisions. And all you have to do is think of the provisions that are
not in the accord and, then, spend as much time as you want talking about that,
irrespective of the virtues or vices of the accord itself. So, I do not think
this is too persuasive an argument, perhaps not even to some of the supporters
of the Parti québécois.
I think today I would like to look a little more broadly at the
constitutional context and the accord that is appearing now. We are not
declaring ourselves today as to exactly where we are in this accord, but we
can, at least, say something about what we think it means for the minorities in
Québec and for the political future of Canada in general, whether it
succeeds or fails.
Before taking up that topic or those topics however, I would also like
to say a little in response to the comments of the Member for Mercier and some
of the comments of the Member for Abitibi-Ouest.
The Member for Mercier raised an argument very often used in this House,
which is that the anglophone minority in Québec is wonderfully treated,
that billions of dollars are expended on its health and educational
institutions, that if such comparable generosity were extended for the other
provinces of Canada to the francopho- ne minorities, they might be in
comparable condition and we would not even face exactly the sort of political
division in the country we do.
I have heard this argument many times and it strikes me as amazing that
something so ridiculous can be put forward by someone as intelligent as the
Member for Mercier. I suppose it is part of the standard kind of cant that
always does get expressed in Parliaments but it, after all, bears no
correspondence to reality or to the actual evolution of institutions on the
part of the Anglophones here or the Francophones elsewhere.
It is important, I think, to remember the fundamental differences in
francophone and anglophone society: that, both in Québec and in other
parts of Canada, for most of the history of this country were defined far more
by the differences between the fundamental values of the Roman Catholic
religious faith and the mainly Protestant population of the rest of the country
or of the anglo minority here, that the approach to educational institutions
was profoundly different, that the approach to family life was profoundly
different and, for that matter, the approach to entering business, accumulating
capital, getting rich was profoundly different. That, I suppose, you could say
that the fact that the anglophone minority in Québec produced some
generations of entrepreneurial people like the Redpaths, the Workmans and the
McConnells, and then, more recently, the Bronf-mans and the Steinbergs should
be some indication therefore that Saint-Boniface and Sudbury should produce the
same.
Well, I suppose, around the case of Sudbury, we could even say to an
extent that it did: Mr. Campeau, for a while at least, and Mr. Desmarais still.
But the existence of strong English educational institutions in the Province of
Québec, the existence of major universities, the existence of large,
well-equipped, well-directed hospitals is not a consequence, after all, of the
generosity of the Québec Government and never has been. (16 h 20)
I will agree that there is a spirit of generosity and tolerance and
humane fairness in this society which is much appreciated by the
English-speaking population, but it is not the basis of their institutions. It
is merely something that makes it possible for them to continue, although
increasingly uncomfortably, as they depend on government financing in periods
when all institutions, both anglophone and francophone, are subject to the
restraint that comes about when governments begin to go broke.
I think it is also important, when I look at the debate that is taking
place so far in this House, to say that there are positions, not only on the
constitutional issue, but on politics in general in this Province, which really
need a
hearing here, which have not received a hearing so far. For instance,
once one has the issue of a party like the Parti québécois,
defining to some extent the terms of debate in Opposition, we are then forced
into the situation of watching a nominally federalist party and Government
trying its best to indicate how much power it has successfully wrenched away
from the Canadian Central Government or at the cost of the other provinces,
while the party that in fact supposedly does not care about Québec being
in Canada at all, but instead wishes to launch a new sovereign State, is busy
explaining that the Government has somehow failed to do this.
When I listen to this kind of debate, I occasionally wonder how many of
the individuals, if they could put aside their party labels for a moment, would
be willing to admit that a constant battle about whether Ottawa or
Québec gets the power in many areas conceals the fact that neither of
them exercise it very well, and that in many cases, it does not serve the
interest of other Canadians in general or Que-beckers in particular for the
power of the State to enter that area at all. It is open to question whether
some of the Ministries and some of the areas of jurisdiction that are being
discussed in the present constitutional agreement, for instance, in any way
contribute to the distinctive character of Québec or any other society.
They are, in fact, neutral Government Ministries, and we are talking only of an
argument about power, if we come to the idea of the sovereignty that is
advocated by the Parti québécois, or the substitute for it, if
you like, that is advocated by the Liberals, this in itself is a rather strange
thing at this point in the 20th century.
I might point out to Members of this House that, arguably, a man who
would be the world's most powerful banker in the United States, the best-known
and most influential one, named Walter Wriston, when he got out of the banking
business and finally decided to write a book, decided to call it «The
Twilight of Sovereignty». This is an American writing on such a subject.
That is, in other words, a man at the heart of the colossus, in New York City,
running Citicorp, looks at a world in which, he says, the financial and
governmental and business institutions of our time are ceasing to be sovereign
or characterized by the functioning of sovereign nation States, and this is
something that really belongs to another century, and it is pretty well all
over.
There will remain certainly interest groups, there will remain cultural
identities, there will remain desires by groups of people to maintain forms of
their identity, special kinds of meaning, special kind of language, and so on.
But the idea that, for instance, by gaining control of the traditional levers
of the State, you somehow acquire power, at the end of this century begins to
look stranger and stranger.
I might also point out just what is meant by the distinct society
clause, I suspect, is probably somewhat puzzling both to the supporters of the
present constitutional accord; and to the opponents of the constitutional
accord; and to those, like us, who just exist in agony. It is apparently the
case that it has now been changed compared to the one that greatly alarmed
those of us in the minority community in its original form.
What the change means, I will admit, I am not entirely sure. The idea of
development that is used in the present clause is one that, after all, even the
Parti québécois was willing to accept in a certain way. I have
always thought the Parti québécois has a genuine tolerance of the
minority. It is just that their tolerance is what I call the «colorful
native-dances'-type of tolerance. I always had the feeling that even Dr. Laurin
would have been willing to provide adequate subsidies for me to write articles
for magazines in Montréal in English as long as the magazines were the
appropriate kind of magazines. Whether or not he would feel as well disposed
towards the idea that we would write whatever we bloody well felt like,
including about, let's say, the Parti québécois Government,
there, I think, his enthusiasm would be somewhat more restrained.
Now, it is entirely possible for governments to simultaneously claim
they are promoting minorities, not just in Québec, but across Canada,
while effectively destroying them with some other part of their policy. It is
therefore not our assumption in the minorities or in this party that represents
them that the kind of legislation that will probably continue to exist or could
continue to exist as a result of this agreement is by any means of a kind that
makes us confident that rights will be fully restored to the anglophone
minority in Québec.
If we look at the other provisions of the agreement, on the other hand,
we could say they do not necessarily represent what someone demanding the
maximum amount of power for Québec would want, but they may represent
the maximum amount of powers that can reasonably be divided in a federal State
between a central government and a particularly large, important and unusual
province.
The idea that the rest of Canada treats Québec as a province like
the others is again, it seems to me, merely a sort of convenient fiction that
people will use in this House. This has, after all, never been the case, even
before our recent arguments and discussions. The flag that flies over Canada
now is, I think, widely popular, including in English Canada and, I believe,
with many Francophones. But, it is not the flag that the country got because
the majority English-speaking population wanted it. They did not want it at
all. The national anthem that is sung in this country and which was
actually
originally composed for the Saint-Jean-Baptiste Society was not
something that was particularly wanted by the majority English population of
the country. The changes in symbols, the changes in demarcations, the changes
in the use of terms like «royal» and all the rest of it that
applied across the country to the armed services, the post office and so on
were not necessarily what the majority English-speaking population in this
country wanted.
But to talk about something in a way even more substantial, the
Constitution of 1982 that Mr. Trudeau provided, the one that produces
controversy with everyone because it was first promised in the referendum
campaign in this Province, then, when it arrived, did not gain the signature of
Québec or, I should say, Québec did not sign an accord of
acceptance of this Constitution, that it provided a Charter of Rights and yet,
at the same time, provided a «notwithstanding» clause that seemed
to make the Charter of Rights ineffective at exactly the points where it would
need to be used.
That Constitution was not something that was imposed on this place by
the majority English-speaking population. I would say the majority
English-speaking population of Canada, and probably of Québec, did not
want Canada to have a written constitution of any kind, and, in fact, would
have preferred to proceed with the old arrangement, which had the immense
advantage that the Privy Council on the other side of the water might decide
for the Federal Government or for the provinces, and left a tremendous number
of things not down in written agreements anywhere where they can produce all
the politicking and wasteful consumption of time and energy and economic
difficulty that we now have in our new American-style system.
But we accepted those things. We accepted that flag. We accepted that
anthem. We accepted that Constitution. We accepted that Charter of Rights. We,
in some cases, accepted the «notwithstanding» clause and, in some,
did not, but, either way, assume we are dealing with what is in fact the
Constitution of the country. We accepted the idea that, in an imperfect world,
imperfect agreements are made by imperfect and fallible mortals, but they are
sometimes all you can get. And we also accepted the fact that we lived in a
great country and that although we could maintain our respect for those
individuals within it who entirely disagreed with us and wished to move out
into a country of their own, we did not believe that they represented the
majority of their own people and we did not believe then they were going to
succeed and we do not believe so now. Merci, M. le Président. (16 h
30)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Jacques-Cartier. Je rappelle que nous en sommes
à l'adoption du principe du projet de loi 44, Loi modifiant la Loi sur
le processus de détermination de l'avenir politique et constitutionnel
du québec, et je reconnais m. le chef de l'opposition officielle. m. le
chef de l'opposition officielle.
M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: M. le Président, nous nous trouvons, je
pense, placés à un moment que certains attendaient depuis
longtemps. Ce que je veux dire par là, c'est qu'un projet de loi
adopté en cette Chambre par un gouvernement qui manifestement n'y
croyait pas, peut-être voulait s'en servir comme instrument de manoeuvre,
a donné lieu pendant des mois à des déclarations de
membres du gouvernement et du premier ministre à l'effet que de toute
façon, à un moment donné, il serait changé. Bien,
M. le Président, il est changé. C'est de ça dont on
parle.
Il faut faire rapidement, je pense, la genèse de ce qui s'est
produit. C'est intéressant. Je vous rappelle, M. le Président,
qu'au sortir de la commission Bélanger-Campeau il n'y avait vraiment que
deux catégories de Québécois; tout au moins, c'est
l'impression qu'on avait. Il y avait les souverainistes qui avaient
trouvé dans les travaux de Bélanger-Campeau des raisons
additionnelles de croire que vraiment ce qu'ils cherchaient était non
seulement réalisable mais souhaitable, puis, il y avait des
fédéralistes pour qui il était évident que le
système fédéral devait être profondément
remanié. Des amateurs de statu quo, au Québec, à la sortie
de Bélanger-Campeau, je vous assure que c'était rare, M. le
Président, et les fédéralistes étaient les premiers
à le reconnaître. Le mot «statu quo», c'était
très péjoratif au sortir de Bélanger-Campeau. Il est clair
aussi qu'on s'attendait plutôt à ce que le gouvernement tombe, si
on le poussait suffisamment, vers la souveraineté ou une forme de
souveraineté.
C'est intéressant de voir, à cet égard, que les
conclusions de Bélanger-Campeau prévoient qu'il y a probablement
deux voies pour l'avenir: le renouvellement profond du
fédéralisme ou bien la souveraineté. Mais quand on est
arrivés aux recommandations, les recommandations de
Bélanger-Campeau comportaient une seule chose: un
référendum sur la souveraineté, au plus tard le 26
octobre. C'est tellement vrai ce que je dis que dans la loi... On ne parle
jamais de ce paragraphe-là dans la loi 150. Dans la loi, on indiquait
clairement que si le résultat - c'est à peu près ça
que dit la loi - est favorable à la souveraineté, le
résultat du référendum, le Québec devient un pays
souverain un an jour pour jour après la date du
référendum. C'était l'époque, M. le
Président, on s'en souviendra, où dans le public on disait
souvent: C'est M. Bourassa qui va faire la souveraineté.
Des voix: Ha,ha, ha!
M. Parizeau: On s'en souvient, hein! On avait réussi
à ce point à infléchir, à intoxiquer au fond, en un
certain sens, l'opinion qu'on s'attendait dans beaucoup de milieux a ce que
ça soit les libéraux qui fassent la souveraineté. Certains
d'entre nous, peut-être plus anciens à ces questions politiques,
avions un sain scepticisme. Moi, après toutes les années que j'ai
passées là-dedans, avant que je crois un instant que certains de
ceux dont je viens de parler seraient susceptibles même d'envisager la
souveraineté du Québec, on serait mieux, pour me persuader, de se
lever de bonne heure. Mais enfin!
À un moment donné, l'idée est apparue que sans
doute il y avait chez le gouvernement et chez le premier ministre du
Québec une sorte d'habileté diabolique pour faire reculer les
autres provinces, pour préparer des offres merveilleuses pour le
Québec, des propositions sensationnelles, imaginatives et nouvelles, le
premier ministre du Québec et son gouvernement s'étaient entendus
pour pousser dans le sens de la souveraineté, histoire de faire peur.
Vous vous souvenez, M. le Président, c'était l'idée du
couteau sur la gorge, la technique de négociation le couteau sur la
gorge. Bien, le couteau, il est tombé assez vite. Il y a eu quelque
chose qui s'est produit à un moment donné, où le premier
ministre du Québec - peut-être que c'était l'enthousiasme,
je ne sais pas, d'une entrevue avec le journal Le Monde; vous savez, ce
grand journal de Paris - a été dire: Ah bien! de toute
façon, ce n'est pas sur la souveraineté que je vais tenir un
référendum, c'est sur les offres. Il n'y avait rien sur la table
à ce moment-là, il n'y avait pas d'offres, mais lui était
persuadé qu'il y en aurait. Il avait fait son lit. Le couteau sur la
gorge est tombé par terre.
Il reste néanmoins qu'on se disait: Quand même, une
occasion comme ça de voter sur la souveraineté, s'il y a moyen,
pourquoi ne pas la prendre? Ça s'adonne qu'il y en a qui y croient,
à la souveraineté, eux, et ils pensent que ça devrait se
faire. Et là il y a un gouvernement qui, par imprudence peut-être,
par calcul peut-être, avait été flanquer dans un projet de
loi une promesse de référendum sur la souveraineté. Vous
comprendrez, M. le Président, que des gens comme nous, qui avions
voté contre la loi 150 - parce que, les considérants qu'il y
avait, c'était quelque chose; moi, je continue de considérer que
ces considérants méritaient un vote ce qu'il y a de plus
négatif - qui trouvaient que les deux commissions parlementaires - et
Dieu sait si on est en train, une fois de plus, de nous le démontrer
aujourd'hui - étaient des commissions parlementaires où il n'y
avait pas de sens commun. Nous, on avait voté contre la loi 150, mais il
y avait quand même cet engagement du gouvernement de tenir un
référendum sur la souveraineté.
Alors, on a poussé. On a poussé, avec des centaines de
milliers de Québécois, pour convaincre le gouvernement de tenir
un référendum sur la souveraineté. Ça
correspondait, d'ailleurs, à une situation de l'opinion publique qui
demeure. Les Québécois, à l'heure actuelle, ils veulent
voter sur quelque chose de façon à ce que les débats
constitutionnels s'arrêtent. Ils en ont assez. Ils veulent que ça
se règle, ces affaires-là. Alors, on se disait: Très bien,
les gens veulent que ça se règle, une majorité de
Québécois - tous les sondages le montraient - veulent un
référendum sur la souveraineté - ça ne veut pas
dire qu'ils vont tous voter oui, ça - la plupart veulent qu'il y ait un
référendum sur la souveraineté, poussons sur le
gouvernement. Alors, on a poussé sur le gouvernement.
On a poussé sur le gouvernement jusqu'à quand?
Jusqu'à hier. Et là, finalement, hier, le chat ou le lapin est
sorti du chapeau. Remarquez qu'il ne fallait pas être grand clerc, il ne
fallait pas avoir des pouvoirs de divination pour soupçonner que le chat
ou le lapin était dans le chapeau et qu'à un moment donné
il sortirait. Mais c'est hier, à 16 heures, qu'enfin le lapin fut
dévoilé. Là, il est clair que ce que le gouvernement veut,
c'est un référendum sur des offres.
Bon, bien, alors, on va parler un peu des offres. Quelles offres? Eh
bien! il est clair que les Canadiens, ils ont beaucoup travaillé sur des
offres, sur des propositions. Ah! il s'en est fait du travail sur la
Constitution au Canada depuis quelque temps. Il y a eu une série de
propositions. On s'en souvient à peine maintenant, parce que,
finalement, il y a une sorte d'écoeu-rement chez les gens à
propos de ces histoires-là, et le temps passe. Mais le premier jeu de
propositions, ça a été le 24 septembre dernier, 1991,
donc, il y a presque un an. Ça, c'étaient les propositions du
gouvernement fédéral - du gouvernement fédéral.
Ça a été abattu en flammes à peu près en
trois jours au Québec, mais aussi à cause d'un certain nombre
d'implications économiques dans le reste du Canada, dans les milieux
d'affaires en particulier. Ça a pris trois jours. Et pourtant, qu'est-ce
qu'ils avaient travaillé là-dessus! C'était beau, ces
propositions. Ce n'est pas comme les emmanchures qu'on nous présente
aujourd'hui, miméographiées à la dernière minute.
C'était sur papier glacé, imprimé, avec des belles
couvertures en couleur. Trois jours, que ça a pris! (16 h 40)
Ensuite, il y a eu Castonguay-Dobbie, et là, ça s'est
perdu quelque part dans les marécages du Manitoba. C'est devenu
Beaudoin-Dobbie. Beaudoin-Dobbie... Là, attention, ce n'était
plus le gouvernement fédéral; c'était le rapport des trois
partis politiques fédéraux, propositions. Ça, ça a
tenu trois jours. C'est là que notre premier ministre a
dénoncé l'exercice comme en étant un de
fédéralisme dominateur, excusez du peu. Soit dit en passant,
c'est là que les histoires d'enten-
tes, là, dont on parle à l'heure actuelle, toutes ces
ententes qui vont durer encore des années, c'est là que c'a
été inventé, Beaudoin-Dobbie. Alors, pour le premier
ministre, à ce moment-là, c'était du
fédéralisme dominateur. À l'heure actuelle, ces ententes
qui vont se poursuivre pendant des années dans à peu près
tous les domaines, il trouve ça adorable. Comme quoi les temps changent
et les gens aussi!
Et puis, qu'est-ce qu'il y a eu à part ça? Eh bien, il y a
eu l'entente du 7 juillet. Ce coup-ci, l'entente du 7 juillet, c'était
les leaders autochtones, les neuf premiers ministres anglophones, puis le
ministre fédéral des... comment dire, de la Constitution.
Là, 9s ont fait une entente en dessous ou, enfin, plus
défavorable pour le Québec à Beaudoin-Dobbie, nettement.
Le 7 juillet, c'a été pour bien des Québécois
l'horreur intégrale. C'est là que le premier ministre du
Québec s'est rendu compte que ça glissait tellement que
bientôt, il se ferait estamper sur le mur. Là, il fallait qu'il
retourne, le pauvre homme, à la table de négociation. Mais on
était en train de le massacrer complètement. Il avait mis tous
ses oeufs dans le panier des propositions. Il lui en faut, des propositions, au
premier ministre du Québec.
Et là, de période en période, de négociation
en négociation, on était en train de l'enfoncer dans le mur. Vous
vous souvenez, le 7 juillet? Mais, est-ce qu'il y a eu une voix au
Québec, après le 7 juillet, pour vanter ces
propositions-là? C'a été condamné
uniformément, partout, même par des gens qu'on considérait
comme des fédéralistes patentés. M. Castonguay se voile la
face après le 7 juillet. Le sénateur Beaudoin se voile la face
après le 7 juillet. Il faut le faire! Il n'y avait pas un
Québécois qui était prêt à supporter
ça.
Alors, le premier ministre du Québec s'est
précipité à Ottawa en disant: Écoutez, ne faites
pas les fous. Donnez-moi un peu quelque chose. Permettez-moi de sauver la face
un peu. Bon. Alors, on a essayé à Ottawa, pendant quelques jours,
puis ensuite à Charlottetown, de lui sauver la face. Quel sauvetage,
quelle farce, M. le Président!
Le Sénat égal. Le premier ministre du Québec
s'était engagé manifestement à accepter une forme
quelconque de Sénat égal. Le Sénat, il est égal, M.
le Président, il l'est. Mais on a ajouté des postes à la
Chambre des communes en disant: Écoutez, là, 18 sénateurs
que vous perdez, 18 de plus à la Chambre des communes. Vous êtes
contents, un sénateur pour un député, ça devrait
faire. Oui, évidemment, c'était un certain sauvetage de face.
Puis on a dit: Dorénavant, vous n'aurez jamais comme
députés moins que 25 % des députés
fédéraux. Ah! Combien est-ce qu'on en a actuellement? 25,4 %.
Est-ce qu'on n'a jamais eu en bas de 25 %? Non, on n'a jamais eu en bas de 25
%. Qu'est-ce qu'il faudrait pour qu'on soit en bas de 25 % sans cette
garantie-là? Bien, comme disait le ministre - ça vous indique
d'ailleurs comment toutes ces propositions, avec quel sérieux c'est pris
- comme le disait M. Sihota, le ministre des Affaires constitutionnelles de
Colombie-Britannique: II faudrait qu'ils arrêtent toute activité
sexuelle au Québec pendant un bout de temps. Bon. Franchement,
franchement! Puis on appelle ça une garantie, une protection.
Mais attention, sur le Sénat, par exemple, il faut voir ce qui a
été fait. Je vais vous en donner un exemple. Parce qu'il faut,
des fois, rentrer dans ces choses-là un peu précisément.
L'entente, là, finale, définitive, enfin, provisoirement
définitive qu'on a devant nous depuis maintenant deux jours, cette
entente-là prévoit que le Sénat va nommer, va autoriser
les nominations, va entériner les nominations du gouverneur de la Banque
du Canada. Ça, tout le monde le savait déjà. Mais on
savait qu'il y aurait d'autres postes dont ils entérineraient la
nomination. Alors, là, on apprend que ça va être les
dirigeants des grandes institutions culturelles, puis des organismes de
réglementation.
Savez-vous ce que ça veut dire ça, M. le Président?
C'est que Le Président de Radio-Canada, il ne sera pas nommé sans
être entériné par la moitié des sénateurs. Si
plus de la moitié des sénateurs disent non à sa
nomination, il ne sera pas nommé. Ça, ça veut dire que les
présidents de toutes les grandes institutions culturelles canadiennes
vont être placés dans cette situation-là. Le
président du CRTC, celui qui répartit les ondes entre la
télévision, la radio, etc., les postes, celui qui contrôle
Bell Canada et ce genre de choses-là, cet homme-là ne pourra
être nommé que moyennant l'accord du Sénat. Est-ce qu'on se
rend compte que l'Office de commercialisation des produits agricoles, c'est un
organisme de réglementation, ça? Il va être nommé
par le Sénat. Qui nomme tous ces gens-là, à l'heure
actuelle? C'est le cabinet fédéral. Dans le cabinet
fédéral, il y a toujours à peu près 25 % de
ministres du Québec - à peu près un quart, des fois plus,
des fois moins, mais, en général, c'est à peu près
ça. Et là, on renonce à ce que ce soit le cabinet
fédéral qui nomme pour que ce soit le Sénat, dans lequel
le Québec aura nettement moins que 10 % des sièges. Est-ce qu'on
se rend compte de ce qu'on vient de faire?
Comme succès du grand négociateur, c'est quelque chose!
Et, comme des crétins, nous allons payer quelle proportion du coût
du Sénat? Le quart. On va payer 25 % du coût du Sénat pour
avoir 8,8 % des sièges. Ah bien, brillant! Ah bien, bravo! Je suppose
que c'est conforme, comme dit le premier ministre, aux intérêts
supérieurs du Québec. Quand ils sont soignés comme
ça, les intérêts supérieurs du Québec, on
aimerait mieux qu'il s'occupe d'autre chose, ce qui, j'imagine, va lui arriver
d'ici pas longtemps.
Les veto. Il a dit: Aïe! j'ai réussi à en
récupérer, des veto! Bien, il a récupéré des
veto
comme celui qui se précipite pour fermer la porte de la grange
une fois que le cheval est sorti. Les veto dont on parlait dans Meech,
c'était quoi? C'étaient des veto qui devaient s'appliquer avant
la réforme du Sénat, de la Chambre des communes. Là, il va
récupérer des veto après ces changements-là. S'il y
a une chose qui est claire, M. le Président, c'est que s'il fallait que
ça marche, ces propositions constitutionnelles, le Canada ne discuterait
plus de constitution pour les 50 prochaines années. Alors, là,
parce que ce n'est pas un veto du Québec, il faudra l'unanimité
des provinces pour des changements que personne ne va envisager dans le
prochain demi-siècle, après que les changements actuels auront
été entérinés. Illusion! Poudre aux yeux!
Et, ce que ça veut dire, M. le Président, c'est que,
maintenant, après ces épisodes assez lamentables, on a un
amendement pour dire que c'est sur ces propositions qu'un
référendum va être demandé, en vertu de la loi 150.
Propositions, oui. Est-ce que ce sont des propositions en vertu de la loi que
nous avons devant nous? M. le Président, je voudrais déposer ici
un avis juridique de Me Real Forest, de Stikeman, Elliott, que nous avons
demandé parce que, à la commission des offres, de l'autre
côté, dans le salon rouge, ils n'en ont pas demandé, eux
autres. Là, ils sont en train de discuter des offres, et on leur
demande: Est-ce que c'est liant? Est-ce que ce sont de vraies offres en vertu
de la loi? Est-ce que, en vertu de la loi, c'est liant pour le gouvernement
fédéral et les provinces? Avez-vous des avis juridiques? Ah! ils
disent non. Avez-vous demandé? Je ne le sais pas. Mais comment
pouvez-vous alors discuter d'amendements à la loi si vous ne savez
même pas si ce que vous avez devant vous est conforme à la
loi?
Bon, bien, M. le Président, est-ce qu'on m'autorisera à
déposer cet avis juridique?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Y a-t-il consentement
pour le dépôt du document?
Une voix: ...déposé à la commission qui va
étudier les offres.
Des voix: Ho! Ho! Franchement!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): II n'y a pas de
consentement.
S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le leader adjoint du
gouvernement, je m'excuse. J'ai demandé s'il y avait un consentement, il
n'y en a pas. Vous poursuivez votre intervention, et je vous indique qu'il vous
reste une minute. M. le leader... (16 h 50)
M. Parizeau: Voilà, M. le Président, on ne veut pas
savoir. On cache. Vous comprenez, M. le Président, puisque je dois
terminer, je termine rapidement. Vous comprendrez, M. le Président,
pourquoi le cheminement que nous avons à suivre, nous, à l'heure
actuelle, nous paraît tellement clair? Oui, c'est vrai, nous allons,
nous, les souverainistes, travailler avec ces fédéralistes qui
voulaient profondément renouveler un système dans lequel ils
croyaient et dans lequel certains croient encore, j'en suis convaincu. Nous
allons travailler ensemble à faire battre ces propositions qui, au fond,
non seulement sont contraires aux intérêts du Québec, mais
représentent en plus de ça une sorte de tentative de camouflage,
une poudre aux yeux qui, en un certain sens, est indigne des
Québécois. Oui, nous allons avoir comme tâche, dans les six
prochaines semaines, de faire battre ces propositions, de faire en sorte que
les Québécois rejettent ce qui, au fond, à bien des
égards, pour nous tous, est une sorte de marque de mépris qu'on
nous sert.
Je sais bien que nos amis libéraux sont enragés à
la seule pensée que, pendant six semaines, au lieu de faire une campagne
sur la souveraineté, on va les prendre au mot et leur dire: Vous voulez
qu'on juge ces propositions, jugeons ces propositions. Vous nous demandez ce
qu'on pense de ces propositions? Nous rejetons ces propositions. Oui, c'est
vrai que pendant six semaines, c'est cela que nous allons faire avec, je pense,
beaucoup d'énergie, avec beaucoup d'espoir aussi que, au fond, en six
semaines, en peu de temps, le succès couronnera ces efforts et que, une
bonne fois, ces gens qui auront cherché à flouer les
Québécois apprendront enfin que ça ne se fait pas et que
ça n'est pas possible.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Bélisle: En vertu de l'article 213 de notre
règlement, M. le Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je m'excuse, M. le
leader adjoint du gouvernement. Conformément à la suspension des
règles, il n'y a pas de question en vertu de l'article 213. Mme la
députée de Mégantic-Compton.
Mme Madeleine Bélanger
Mme Bélanger: Merci, M. le Président. Nous sommes
ici réunis pour une raison bien précise: amender la loi 150 sur
le processus de détermination de l'avenir politique et constitutionnel
du Québec. Mais pour bien comprendre cela, je crois qu'il faut faire un
petit tour en arrière et se rappeler le mandat de la loi 150.
Lorsqu'elle fut votée, cette pièce législative devait nous
conduire à un référendum sur la souveraineté, un
référendum qui devait avoir lieu entre le 8 et le
22 juin 1992 ou bien entre le 12 et le 26 octobre de cette même
année.
Mais, entre-temps, M. le Président, bien des choses se sont
produites. Nous avons, en effet, mis sur pied deux commissions parlementaires:
l'une chargée d'étudier toute question afférente à
l'accession du Québec à la souveraineté, l'autre,
d'apprécier toute offre d'un nouveau partenariat de nature
constitutionnelle faite par le gouvernement du Canada liant formellement
celui-ci et les autres provinces.
Mais l'événement majeur est sans contredit l'entente
survenue le 22 août dernier entre le premier ministre du Québec,
le premier ministre du Canada, les premiers ministres des autres provinces et
les représentants autochtones. En effet, suite à ces
négociations, qui se sont échelonnées sur une dizaine de
jours, des offres ont été faites au Québec.
M. Perron: Je m'excuse après de ma collègue.
Mme Bélanger: Des offres...
M. Perron: je m'excuse auprès de ma collègue.
est-ce que la règle du quorum est suspendue aussi, par rapport au vote
qui a été pris hier?
Le Président suppléant (M. Gauvin): Non, si vous
appelez le quorum...
M. Perron: On demande le quorum.
Le Président suppléant (M. Gauvin): J'appelle le
quorum. (16 h 56 - 17 h 3)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Nous avons maintenant
quorum et nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet
de loi 44. Mme la députée de Mégantic-Compton, qui a la
parole, peut poursuivre son intervention, et je lui indique qu'il lui reste 17
minutes à son intervention.
Mme Bélanger: Merci, M. le Président. Alors, comme
je le disais, il y a eu une entente, le 22 août, entre le premier
ministre du Canada, les premiers ministres des autres provinces et le
gouvernement du Québec ainsi que les représentants autochtones.
En effet, suite à des négociations qui se sont
échelonnées sur une dizaine de jours, des offres ont
été faites au Québec, des offres que nous qualifions de
valables et d'acceptables et contenant un progrès réel pour le
Québec. Mais, avant de les qualifier comme telles, il a fallu les
examiner attentivement point par point. Il a fallu voir également en
quoi chacun de ces points soulevés dans l'entente était
acceptable pour le Québec.
Mais, M. le Président, comment peut-on espérer que
l'Opposition trouve quoi que ce soit de bon dans cette entente quand on sait
que la raison d'être du Parti québécois, c'est
l'indépendance? On sait, et vous avez entendu les ténors d'en
face, que même avant qu'on ait une entente, c'est-à-dire pendant
qu'on négociait, on accusait le premier ministre de faire de
l'à-plat-ventris-me, d'être un traître. Et, depuis qu'ils
ont les textes, ils les interprètent d'une façon
démagogique, comme c'est leur habitude. Mais c'est après une
étude plus que minutieuse du contenu de cette entente que notre chef et
premier ministre, M. Robert Bourassa, accompagné du ministre des
Affaires intergouvernementales canadiennes, M. Gil Rémillard, a conclu
que le Québec faisait des gains appréciables en l'acceptant. Ces
gains, M. le Président, je vous en parlerai plus en détail dans
quelques instants. Mais, auparavant, je crois qu'il est bon de rappeler les
choix qui s'offrent aux Québécois et
Québécoises.
Une voix: Lesquels sont?
Mme Bélanger: On sait qu'il y a la souveraineté
pleine et entière: ça, c'est le choix des péquistes. Mais
ce choix, M. le Président, n'est pas nécessairement celui des
Québécois et des Québécoises. En effet, cette voie
suppose des conséquences économiques que notre premier ministre
qualifie d'imprévisibles. On peut comprendre que faire éclater
une Fédération ne se fait pas sans heurts. Mais, surtout, il est
difficile de croire toutes les belles paroles de nos adversaires lorsque
l'issue est à toutes fins pratiques incertaine. Pour nous, du Parti
libéral, cette voie n'est pas souhaitable, entre autres parce qu'elle ne
permet pas de garantir la sécurité économique, sociale et
politique des Québécois et des Québécoises.
Alors, M. le Président, c'est en pesant le pour et le contre de
l'offre qui nous a été faite par le reste du Canada que nous en
sommes arrivés à la conclusion que ces dernières offraient
la meilleure sécurité pour les Québécois et les
Québécoises. Plus encore, ces offres, nous en sommes
persuadés, feront avancer le Québec, mais, ça, à
l'intérieur de la Fédération canadienne.
Premièrement, le Québec obtient la reconnaissance du
principe de la société distincte. Ce principe, M. le
Président, sera dans la Constitution canadienne. Concrètement,
avec cette entente, le rôle de promotion de la société
distincte ne se trouve plus noyé parmi les autres valeurs
interprétatives. Ensuite, l'entente stipule que la reconnaissance du
Québec comme société distincte demeure une valeur
canadienne servant à l'interprétation de l'ensemble de la
Constitution, y compris le partage des pouvoirs. Cette reconnaissance ne se
limite pas au préambule de la Constitution ou à la seule section
de la Charte, mais couvre plutôt l'ensemble de la Constitution.
Deuxièmement, en ce qui a trait à l'immigration,
l'Assemblée nationale devient, avec cette entente, responsable de
l'intégration économique, sociale et culturelle des immigrants au
Québec français. Là aussi, M. le Président, vous
conviendrez avec moi qu'il s'agit d'un avantage pour le Québec. La
question de l'immigration était importante pour nous, puisque l'on sait
que notre avenir est intimement lié à notre poids
démographique. Et lorsque l'on prend conscience de cette
réalité, il est nécessaire, voire capital, de pouvoir
intégrer les immigrants, tant sur le plan culturel et économique
que linguistique.
Troisièmement, M. le Président, j'aimerais aborder la
question du pouvoir de dépenser du gouvernement fédéral.
Comme on le sait, le Québec insiste depuis longtemps sur le besoin
d'encadrer ce pouvoir de dépenser. Mais voilà qu'après des
années de débats sur cette question, un engagement
constitutionnel se matérialise. Cet engagement implique qu'on devra
désormais tenir compte, dans le pouvoir de dépenser, des
priorités québécoises; on devra également tenir
compte des chevauchements et des dédoublements. Enfin, le gouvernement
du Québec pourra se soustraire de tout programme fédéral
futur et cofinancé dans des domaines provinciaux et obtenir compensation
financière. Cela, M. le Président, nous permettra d'agir plus
librement. Il y a là un gain pour le Québec; il sera inclus dans
la Constitution canadienne.
Quatrièmement, aucun changement ne pourra être
apporté à la Cour suprême du Canada sans le consentement du
Québec en ce qui concerne son existence, ses pouvoirs et le fait garanti
de la présence de trois juges québécois sur neuf. Cela
aussi sera inclus dans la Constitution canadienne.
Pour ce qui est des modifications aux institutions centrales de la
Fédération canadienne, le Québec gagne un droit de veto,
lui aussi enchâssé dans la Constitution du Canada. Enfin, le
Québec obtient une protection absolument sûre de pouvoir s'opposer
à toute tentative de diminution des pouvoirs de son Assemblée
nationale. Il aura un droit de retrait avec compensation financière.
Là aussi, cet aspect sera dans la Constitution du Canada. M. le
Président, il est donc facile de constater que le Québec obtient
des gains avec cette entente. Il s'agit de gains substantiels qui renforceront
l'action du Québec au sein de la Fédération canadienne.
(17 h 10)
À titre d'exemple, j'aimerais vous dire, et j'en suis
fière, qu'avec cette entente, le Québec ne pourra jamais avoir
moins de 25 % de députés à la Chambre des communes, cela
même si la population du Québec passe en dessous de ce seuil de 25
%. Également, les sénateurs francophones auront un droit de veto
absolu au Sénat égal contre toute mesure qui aurait pour effet de
diminuer les droits de la langue et de la culture françaises du Canada.
De plus, l'As- semblée nationale pourra continuer de disposer de
l'intégralité de ses pouvoirs linguistiques en vue de
défendre et de promouvoir la langue française. Cela aussi est
dans la Constitution canadienne. Quant aux francophones hors Québec, aux
Québécois anglophones et aux membres des autres
communautés nationales du Québec, ils seront
considérés comme des citoyens à part entière ayant
droit à la survie et à l'épanouissement. En ce qui a trait
aux peuples autochtones, il auront le statut de partenaires de plein droit du
pays par l'octroi de l'autonomie gouvernementale sujette au principe de
l'intégrité du territoire québécois, du respect des
lois et de l'obligation de négocier de bonne foi des ententes.
Au-delà de cette enumeration sommaire, il est un aspect de
l'entente qui demeure l'un des plus importants pour le gouvernement du
Québec. Il s'agit des pouvoirs de l'Assemblée nationale.
Déjà, dans la Constitution, l'Assemblée nationale a un
nombre imposant de pouvoirs, lesquels ont permis au gouvernement de bâtir
le Québec tel qu'on le connaît aujourd'hui. Mais, avec cette
entente, de nouveaux pouvoirs explicites seront ajoutés à
l'Assemblée nationale afin de consolider l'autonomie gouvernementale du
Québec. Tout d'abord, la formation et le perfectionnement de la
main-d'oeuvre deviennent une compétence exclusive du Québec,
renforçant ainsi les pouvoirs de l'Assemblée nationale sur les
ressources humaines. Ensuite, la culture devient une compétence
exclusive du Québec avec possibilité pour le gouvernement
fédéral de continuer d'aider nos artistes, mais en respectant la
politique culturelle du Québec.
Ensuite, sur simple demande du gouvernement du Québec, le
fédéral se retirera des six secteurs suivants en versant une
pleine compensation financière. Il s'agit des affaire urbaines, le
logement, le loisir, les mines, les forêts et le tourisme. Le pouvoir de
dépenser du fédéral dans ces secteurs est à toutes
fins pratiques éliminé et le respect des pouvoirs
constitutionnels du Québec, garanti. Pour ce qui est des communications,
elles seront l'objet d'une entente protégée par la Constitution
pour permettre au Québec de s'assurer que les décisions en
matière de communications seront prises par des Québécois
et en conformité avec les ententes du Québec.
En ce qui a trait aux ententes de développement régional,
là où le Québec a la maîtrise d'oeuvre, elles auront
désormais une protection constitutionnelle pour ainsi éviter les
désengagements unilatéraux du gouvernement fédéral.
Enfin, pour ce qui est de l'union économique, il y aura
enchâssement du principe que le Canada est une union économique,
de l'engagement des gouvernements à ne pas ériger de
barrière allant à l'encontre des quatre libertés, avec une
liste d'exceptions. Le Québec conserve donc ses outils de
développement, tout en bénéficiant d'une
intégration économique accrue.
Avec cette entente, il est évident que l'avenir non seulement du
Québec, mais aussi du Canada est en train de se jouer sous nos yeux. Des
choix devront être faits par l'ensemble de la population
québécoise et canadienne, des choix que nous devrons assumer pour
l'avenir, des choix que nous devrons assumer pour les générations
futures. Mais, lorsqu'on a des choix à faire, il faut être
conscient qu'il peut être risqué d'assumer trop d'inconnu. Cette
voie de l'inconnu, c'est celle que prône le chef de l'Opposition
officielle, soit l'indépendance du Québec. Les membres de
l'Opposition sont ceux qui viennent nous dire que cette entente n'est pas
acceptable, qu'elle est insuffisante.
Mais devrais-je leur rappeler que cette entente est plus que le
Québec n'a jamais obtenu, plus que ce que demandait le gouvernement
péquiste en 1985. Si on regarde la question du partage des pouvoirs, nos
adversaires politiques nous disent qu'il ne répond pas aux attentes du
Québec. Mais si la situation actuelle nous a permis de nous
développer et de connaître un essor remarquable, il est faux de
prétendre que ce que nous propose l'entente en cette matière
viendra nuire au Québec. Elle ne peut que renforcer et améliorer
la situation actuelle. De plus, la garantie d'un minimum de 25 % de
sièges au Parlement fédéral est un gain substantiel pour
le Québec. Cela nous permettra de participer encore davantage à
l'élaboration des politiques canadiennes.
Alors, M. le Président, ce sont ces raisons, et bien d'autres
encore, qui me portent à croire que s'il existe des traîtres dans
toute la politique québécoise, ce n'est pas de ce
côté-ci de la Chambre qu'ils sont. Je n'accepterai jamais qu'on
vienne amoindrir ou rabaisser les efforts de négociation de M. Bourassa
à ce niveau. N'eût été de sa détermination et
de sa volonté, nous n'en serions pas là aujourd'hui, à
discuter des modalités de cette entente constitutionnelle.
C'est pourquoi, M. le Président, je veux rendre hommage à
notre chef et premier ministre pour avoir atteint son objectif et celui du
gouvernement: protéger l'avenir du Québec. M. Bourassa a
toujours, depuis 25 ans, travaillé pour les intérêts
supérieurs des Québécois et des Québécoises,
et il sait que la seule façon pour le Québec et pour l'ensemble
du Canada de préparer un avenir solide pour nos enfants est d'amener
tous les gouvernements à travailler ensemble, en mutuelle confiance, et
non isolément, chacun de son côté. Merci, M. le
Président.
Une voix: Bravo, madame!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée. Sur ce même sujet, je cède maintenant la
parole au vice-président de la commission du budget et de
l'administration et député de La Prairie. M. le
député, la parole est à vous.
M. Denis Lazure
M. Lazure: Merci, M. le Président. Si nous sommes
aujourd'hui en train de discuter entre parlementaires, c'est parce que ce
gouvernement a décidé d'amender la loi qu'il avait lui-même
pilotée il n'y a pas si longtemps, la loi 150, qui lui imposait
l'obligation de faire un référendum sur la souveraineté du
Québec.
Ce gouvernement nous demande, puisqu'il a changé d'idée,
de maintenant faire le référendum sur les offres, sur les
propositions constitutionnelles. Et, en même temps, les gens d'en face
ont le culot de venir nous dire: Vous allez parler de souveraineté. On
vient de nous convoquer ici justement pour nous dire: II n'y en aura pas, de
référendum sur la souveraineté; le
référendum va porter sur les offres. Et on nous reproche de
parler des offres. Je pense que ce gouvernement avait peur de faire un
référendum sur la souveraineté. Il savait que 70 % des
gens voulaient un référendum sur la souveraineté. Il sait,
depuis hier, que près de 800 000 personnes ont signé la
pétition demandant que le gouvernement respecte sa parole et fasse un
référendum sur la souveraineté. En dépit de tout
ça, il dit: Non. J'ai enfin eu quelque chose qui ressemble à des
offres, et c'est là-dessus qu'on va faire le
référendum.
M. le Président, il faudrait que les ministériels cessent
d'être aussi illogiques. Hier soir, on a entendu l'élite des
ministériels, la troupe de choc des ministériels: le
député de Mille-Îles, le député de Saguenay,
le député de Louis-Hébert, ceux qui disent n'importe quoi
n'importe comment, surtout le député de Saguenay. Le
député de Mille-Îles a un peu de lettres. Il se prend
même pour un écrivain, parfois. _ II s'est pris pour un
écrivain, le député de Mille-Îles, mais il a un peu
plus de lettres que le député de Saguenay. Mais ces
gens-là ont recouru hier soir et ce matin - et il semble bien que c'est
leur intention de faire la même chose durant la campagne
référendaire - à ce qu'il y a de plus bas, à peu
près, en faisant appel au sentiment de peur de la population
québécoise, en disant: Si vous votez non, ça va vouloir
dire la séparation, la souveraineté, et là vous allez
avoir de la misère. C'est ça qu'on a entendu hier soir, M. le
Président. Heureusement, la qualité du débat a
changé un peu aujourd'hui, avec les derniers orateurs qu'on a eus du
côté ministériel.
Mais, M. le Président, je me demande où sont les
députés ministériels qui sont les ténors du
nationalisme. Le député de Vanier, on ne l'a pas vu depuis deux
jours. Le député des îles-de-la-Madeleine, on ne l'a pas vu
depuis deux jours. Où sont-ils? Là, je vois le
député de Saguenay arriver, mais c'est le député de
Vanier que je voudrais entendre, moi. (17 h 20)
Alors, M. le Président, les conditions... Ce que nous avons
devant nous, dans ce méli-mélo
de documents qui sont plus ou moins officiels, plus ou moins officieux,
plus ou moins terminés, plus ou moins en négociations encore, ce
que nous avons devant nous, au fond, ce sont les conditions que le Canada
anglais et le fédéral mettent au retour du Québec dans la
famille canadienne, puisque le Québec a été exclu à
deux reprises du Canada. Il faut s'en rappeler, M. le Président. En
1982, par Pierre Elliot Trudeau, qui a passé sur le corps de tout le
monde au Québec, et à peu près tous les
députés de l'Assemblée nationale ont voté contre le
rapatriement de Pierre Elliot Trudeau, sauf cinq ou six libéraux,
à l'époque. Donc, c'était quasi unanime au Québec.
Première exclusion en 1982, Pierre Elliot Trudeau.
Deuxième exclusion, l'accord du lac Meech. Rappelons-nous, de
1987 à 1990, M. Mulroney et M. Bourassa ont fait des pieds et des mains
pour que le Québec réintègre la famille canadienne dans
l'honneur et l'enthousiasme. Mais, on sait ce qui est arrivé. Pour une
deuxième fois, le Québec s'est fait exclure par le Canada
anglais. C'est une troisième reprise, une troisième chance, pour
ainsi dire.
Alors, voyons un peu ce qu'il y a dans ces offres-là. Mais avant,
voyons aussi qui a été le négociateur en chef: notre cher
premier ministre. Et je vais me permettre, M. le Président, de vous
citer quelques paragraphes d'un editorial, celui du lundi 24 août, dans
Le Devoir. Je pense que ça décrit bien le comportement du
négociateur en chef des intérêts supérieurs du
Québec. Je cite: «Ses défenses sont tombées à
la vitesse de l'éclair. Mardi matin, il acceptait officiellement le
processus de négociations multilatérales qu'il boycottait
jusque-là en le disant "entièrement discrédité".
Mercredi, il acceptait une réforme du Sénat fondée sur
l'égalité des provinces, principe répudié par lui
et par son parti. Jeudi, il concourait à la création d'un
troisième ordre de gouvernement au Canada, celui des autochtones, et
ravalait son opposition au jugement final des tribunaux sur la
définition de ses pouvoirs. Vendredi, il remballait la requête
québécoise d'une nouvelle répartition des
compétences et se rangeait à l'accord canadien-anglais du 7
juillet, donc au "fédéralisme dominateur" qu'il avait
dénoncé. Samedi, il acceptait de tempérer la fameuse
clause de "société distincte" avec un engagement touchant la
dualité linguistique, malgré qu'il ait promis de quitter les
lieux si ses homologues poussaient jusque-là l'offensive. Si dimanche
n'avait été jour de repos, il aurait fallu élargir le
cimetière des aspirations perdues.»
Et c'est cette personne-là, qui s'est contredite jour
après jour pendant toute la semaine, c'est cette personne-là qui
prétend maintenant nous faire accepter des offres qui sont absolument
inacceptables, qui constituent le pire recul! Parce que, M. le
Président, la loi 150, elle découlait du rapport
Bélanger-Campeau. Et, au cours des séances de
Bélanger-Campeau, on a vu clairement - comme plusieurs l'ont dit, mais
il vaut la peine de le répéter - que la plupart des groupes qui
sont venus disaient: Oui, il faut mettre un terme à ces chicanes
constitutionnelles. Ou bien nous obtenons un changement majeur dans le
fédéralisme, un renouvellement fondamental du
fédéralisme - ça, c'était la position honnête
des fédéralistes - ou bien, position tout aussi honnête,
qui ralliait encore plus de monde, à ce moment-là, prenons un
vote sur la souveraineté du Québec. C'est ça,
l'historique.
Et combien de groupes sont venus dire: On veut ce
référendum sur la souveraineté. Je me rappelle, entre
autres... Et des groupes qui avaient fait des sondages parmi leurs rangs: la
FADOQ, la Fédération de l'âge d'or du Québec,
après un sondage, constatait que les 2/3 de ses membres, non seulement
voulaient un référendum sur la souveraineté mais
étaient prêts à voter pour la souveraineté du
Québec.
Alors, regardons-les, ces offres-là, M. le Président. Moi,
je pense qu'il y a au moins cinq raisons pour lesquelles il faut les rejeter.
Premièrement, c'est la fin du pacte des deux peuples fondateurs et c'est
le début d'un régime où le Québec est sur le
même pied que toutes les autres provinces; deuxièmement, il n'y a
aucun nouveau pouvoir; troisièmement, il n'y a aucun frein au pouvoir de
dépenser du fédéral; quatrièmement, la
société distincte est toute rapetissée, et,
cinquièmement, les gouvernements autochtones seront
décidés par les tribunaux.
La première caractéristique, la fin de la notion qui
était à la base même du pacte de la
Confédération en 1867, les deux peuples fondateurs, c'est fini,
c'est fini. Par exemple, on l'a, la preuve, dans le nouveau Sénat
où le Québec aura comme représentation la même chose
que toutes les autres provinces, y compris d'une province qui a une population
de 160 000. Alors, au Québec, on aura^ un sénateur pour 1 200 000
personnes et, à l'île-du-Prince-Édouard, on aura un
sénateur pour 26 000 personnes. C'est fini la notion d'une
Confédération basée sur deux peuples fondateurs.
Deuxième caractéristique: aucun nouveau pouvoir, et
ça, c'est à la base même de notre position, de notre
opposition à ce projet, M. le Président, parce que,
historiquement, depuis au moins une cinquantaine d'années, tous les
premiers ministres ont ou bien refusé des offres semblables à
celle-là ou ont réussi à obtenir des concessions du Canada
anglais. Le seul premier ministre depuis 50 ans qui n'a rien obtenu et qui a
même cédé des choses, c'est Adélard Godbout, en
1942, mais au moins, M. le Président, il avait l'excuse que
c'était en temps de guerre et qu'il fallait prêter des pouvoirs de
taxation au fédéral. Mais on sait ce que l'histoire a
réservé à l'honorable Adélard Godbout: l'oubli le
plus total.
Et, 50 ans plus tard, on a le premier ministre Robert Bourassa qui, lui,
vient nous
dire: Je suis content, j'ai une offre, j'ai une proposition qui est un
début, c'est mieux que rien. Mais on a vu que, dans son propre parti, la
personne qui était responsable du dossier constitutionnel, M. Jean
Allaire, il a démontré noir sur blanc que non seulement son
premier ministre n'avait rien rapporté de ces
négociations-là, mais au contraire qu'il avait
cédé, que c'était un recul, et c'est contre ce recul que
nous allons nous battre.
Troisième caractéristique: aucun frein, aucun stop au
pouvoir fédéral de dépenser dans tous les domaines. M. le
Président, lorsqu'on vient nous dire que cette entente va apporter la
paix dans les relations fédérales-provinciales, c'est faux, parce
que tout ce qu'on fait, c'est de commencer une ronde interminable de
négociations dans à peu près 22 secteurs. Quand on
connaît la capacité, l'endurance du fédéral de
prolonger des négociations, vous pouvez être sûr, M. le
Président, qu'on va se retrouver, si jamais la population du
Québec disait oui à ces propositions, dans une négociation
à n'en plus finir.
La société distincte, ce que ce document nous
révèle, c'est qu'elle est moins forte que ce que Meech offrait.
Pourquoi? Parce qu'elle est neutralisée par l'obligation que les
gouvernements des provinces ont de promouvoir la langue seconde. Ça veut
dire pour le Québec, en clair, que le gouvernement du Québec sera
obligé - et c'est le tribunal qui décidera - de faire la
démonstration que le français, langue du travail, ça ne
nuit pas à l'épanouissement de l'anglais. Vous pouvez être
sûr, M. le Président, que les avocats vont avoir beaucoup de
clients très payants qui vont se rendre jusqu'à la Cour
suprême, et on sait d'avance que la Cour suprême, quand il s'agit
de la loi 101, elle penche toujours du même côté. Cette
société distincte, toute ratatinée, toute
rapetissée que notre premier ministre nous rapporte, c'est la pire des
choses qui pouvait arriver à la loi 101. Ça compromet de
façon majeure l'avenir de la loi 101. (17 h 30)
Une autre caractéristique. Les tribunaux auront à
décider si, après cinq ans, les gouvernements ne s'entendent pas
avec les autochtones, à supposer que le Québec et les autochtones
ne s'entendent pas, ce sont les tribunaux qui décideront quelle sorte de
gouvernement les autochtones auront au Québec, quels pouvoirs ils
auront.
M. le Président, le premier ministre et son ministre des Affaires
canadiennes ont répété à satiété:
Jamais nous n'accepterons que ce soit les tribunaux qui viennent dicter une
ligne de conduite. Il faut que ce soit les élus du peuple qui
décident, en négociations avec les autochtones, le genre de
gouvernement autochtone qui existera. Le débat commence. Le débat
commence, mais déjà on voit dans le camp du oui toute cette
confusion, cette démagogie, parce que le camp du oui, ce n'est pas
seulement les gens d'en face ici, c'est aussi, évidemment, les
collègues du fédéral.
Pas plus tard qu'hier soir, l'ineffable Benoît Bouchard disait, un
peu comme les ministériels le disent ici depuis hier: Un vote non, c'est
un vote pour détruire le Canada. Mais, par contre, André Ouellet,
porte-parole libéral qui faisait partie de la commission
Bélanger-Campeau, M. André Ouellet dit: Non, un vote non à
ces propositions-là, ça veut dire que la population n'en veut
pas, ne les trouve pas satisfaisantes.
C'est pour ça, M. le Président, que dans la coalition du
non, la position, contrairement à la coalition du camp du oui, dans le
camp du non, la position est claire. Nous allons faire la démonstration,
comme nous tentons de le faire depuis hier, que ces offres-là sont un
recul épouvantable pour le Québec, et nous allons le faire avec
des amis qui partagent les mêmes idées, les mêmes
convictions, à commencer par M. Jean Allaire. Celui que les
libéraux d'en face considéraient comme leur expert en
matière constitutionnelle depuis quelques années, tout d'un coup,
parce qu'il a l'honnêteté de dire: C'est inacceptable, il devient
à leurs yeux, M. le Président, un être à
rejeter.
C'est ça, le manque de démocratie dans ce Parti
libéral. M. Jean Allaire, d'autres, des jeunes, notamment, vont
travailler dans le camp du non. Parce que, M. le Président, il faut, une
fois pour toutes, que le peuple québécois se prononce en jugeant
de la valeur du bien-fondé de ces conditions que le Canada met au retour
du Québec dans la Confédération, parce que ce sont des
conditions du Canada anglais. On le voit dans cet ensemble que, pour eux,
ça reflète l'image qu'ils se font d'une société
canadienne. Mais, M. le Président, ça ne mettra pas fin au
gaspillage, ça ne mettra pas fin au dédoublement, ça ne
mettra pas fin non plus au fédéralisme dominateur que le premier
ministre, secondé par son ministre de l'Environnement et le
député de Saguenay aussi, avaient dénoncé il n'y a
pas si longtemps.
Alors, en conclusion, M. le Président, il faut que la population
prenne le temps de bien écouter non pas les arguments
démagogiques des ministériels qui sont en face, qui ont recours
à l'instinct de la peur pour fausser le débat, mais il faut que
la population prenne ces soi-disant conditions une par une, les analyse en
regard des demandes historiques du Québec, et on s'apercevra, M. le
Président, que sur toute la ligne c'est un net recul. Alors, il faut
dire non, non à la fin de ce qui était un pacte des deux peuples
fondateurs, il faut dire non à des gouvernements autochtones
dictés par les tribunaux, il faut dire non au pouvoir de dépenser
du gouvernement fédéral qui, entre parenthèses, sera
à surveiller dans les premières semaines parce que les millions
vont pleuvoir pour supporter la propagande qui, d'ailleurs, est
commencée depuis quelque temps.
Alors, M. le Président, nous pensons, de ce côté-ci
de la Chambre, que le premier ministre est revenu avec un papier qui a l'air
d'une entente, qui a l'air de conditions de retour, mais qui en
réalité est une série de capitulations et, à la
capitulation... Si le député de La Peltrie veut me poser une
question, il aura son tour tantôt.
Alors, M. le Président, je dis, en terminant, que le recul que
ces offres constituent doit être accompagné d'un non retentissant
de la population. Merci!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de La Prairie. Sur ce même sujet, je reconnais
maintenant M. l'adjoint parlementaire au ministre de l'Environnement et
député de Saguenay.
M. Ghislain Maltais
M. Maltais: Merci beaucoup, M. le Président. Je ferai une
très brève intervention, mais il faudrait peut-être placer
dans le contexte les propos de mon aimable collègue, le
député de La Prairie, lorsqu'il reproche aux gens d'en face de
manquer de lettres. À mon égard, je crois qu'il a raison. Manquer
de lettres n'est pas manquer d'éducation, n'est pas manquer
d'instruction, n'est pas manquer de savoir-vivre et, surtout lorsqu'on ne
partage pas une option politique, c'est peut-être faire preuve de rigueur
intellectuelle, comme l'ensemble des Québécois et des
Québécoises se proposent de le faire.
M. le Président, je suis tout à fait peiné que mon
collègue ait quitté, puisque, suivant ses bons conseils, il y a
quelques minutes, après m'être fait dire que je manquais de
lettres, j'ai décidé de m'instruire, et pas de m'instruire dans
n'importe quel livre, le livre de M. René Léves-que, ancien
premier ministre du Québec, «Attendez que je me rappelle».
Et voilà ce qu'il disait concernant mon ami, le docteur Lazure,
député de La Prairie: «Puis, le docteur - lui aussi,
l'appelait comme moi, et je le cite - revient d'un long voyage pour repartir
aussitôt pour de bon.» Voilà, il a même fait un
mensonge à l'ancien premier ministre, puisqu'il est revenu et il est
reparti de la Chambre tantôt. Il est revenu pour une chose - et on doit
reconnaître au député de La Prairie qu'il n'a aucune
ambition politique, aucune ambition d'être au Conseil des ministres - sa
seule ambition, c'est la séparation du Québec. Voilà,
c'est ça, il nous l'a dit, carrément! Il l'a
répété, et je respecte son engagement, puisqu'il a
été franc et il n'a pas, par exemple, comme certains de ses
ex-collègues, fait de tergiversations, de la valse à trois temps,
à deux temps. Tout simplement, il a été honnête
envers lui-même, et on doit reconnaître ça.
Mais, vous savez, lorsqu'on reproche aux gens, souvent, de manquer de
lettres, il faut toujours faire attention, parce que la science n'est pas une
vertu, elle s'apprend. La psychana- lyse que le bon Dr Lazure pratique
régulièrement, des fois, ça lui joue des tours. Un de ses
collègues, dans Le Journal de Québec de mercredi, un
eminent psychanalyste aussi, le Dr Lapoin-te, disait, au sujet du Parti
québécois, que le grand ménage était à
faire. Les idées psychanalysées étaient
démodées, les idées étaient vieilles,
dépassées, mal comprises, bref, on devrait repartir à
zéro. Encore une fois, je cite l'ancien premier ministre du
Québec: «Le Dr Lazure est reparti.»
Or, M. le Président, il est bien important, dans le débat
qu'on est en train de préparer, d'avoir les idées claires. Je
pense qu'entre psychiatres ils devraient se comprendre. Moi, je n'ai pas
compris exactement ce que voulait dire le Dr Lapointe mais, lui, le Dr Lazure,
député de La Prairie, l'a certainement compris. Sans doute,
puisque c'est un de ses collègues. Et je ne suis pas sûr qu'il
partage son avis. Voilà, M. le Président: des
constitutionnalistes d'un côté, des constitutionnalistes de
l'autre, qui ne partagent pas leurs avis; des psychiatres d'un bord, des
psychiatres de l'autre, et je ne suis pas sûr que le Dr Lazure et
député de La Prairie partage profondément l'analyse faite
par le psychiatre Lapointe dans Le Journal de Québec. Il devra
nous répondre. Ce sont des gens de même profession, mais qui ne
partagent pas, sans doute, les mêmes opinions. (17 h 40)
Je l'ai écouté aussi tout à l'heure et,
voilà, un psychiatre n'est pas nécessairement un bon historien,
M. le Président. Lorsqu'il s'est attaqué à l'ancien
premier ministre du Québec, le très honorable Adélard
Godbout, en oubliant de mentionner que l'histoire a marqué
Adélard Godbout comme celui qui avait permis aux femmes du Québec
d'avoir le droit de vote, et de permettre aussi aux femmes de rentrer à
l'Assemblée nationale; n'eût été d'Adélard
Godbout, des dizaines, quinzaines, vingtaines, 25, 30 personnes de sexe
féminin, des Québécoises, ne pourraient siéger
à l'Assemblée nationale. Il nous aurait privés de la
députée de Châteauguay, de la députée de
Mata-ne ici, de Mme la députée de Mégantic-Compton, de Mme
la députée de Groulx, de Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve, de Chicoutimi et d'autres collègues.
Voilà, M. le Président, lorsqu'on retourne dans l'histoire, il
faut s'assurer qu'on a bien lu l'histoire. Je pense que mon collègue de
La Prairie a très mal lu l'histoire.
M. le Président, le débat, qu'il soit agressif, qu'il soit
mesquin, ça demeurera toujours un débat. Les
Québécois sont friands de politique. Notre sang latin qui coule
dans nos veines ne pourra empêcher, tout au long de ce
référendum, certaines émotions. On compare des
constitutionnalistes. Le député de La Prairie, tout à
l'heure, citait une personne de notre parti, M. Allaire, qui a contribué
à notre parti politique, qui, dans son programme, a contribué
aussi à l'entente signée du 23 août. J'aurais pu ou je
pourrais lui
parler longtemps de son guide politique, l'ex-député de
Louis-Hébert, l'ex-ministre des Affaires internationales qui, lui,
maintenant - on ne sait plus à la solde de qui... Je ne sais pas si le
député de Mercier pourrait me dire pour qui il travaille
présentement et, surtout, qui le paie! Voilà! Lorsqu'on touche et
qu'on lance des pierres, il faut faire attention, lorsqu'on a vécu et
qu'on vit dans une maison de verre, que les pierres ne fassent pas trop de
dégât.
Ce qui est important, M. le Président, tout au long de ce
débat... Je ne pense pas qu'on pourrait faire le débat
référendaire ici pendant six mois, on ne convaincrait sans doute
personne des deux côtés. Ce qui est important, c'est que chacun
d'entre nous, des deux côtés de la Chambre, sur le terrain, qu'on
offre à la population des explications de notre compréhension.
Tous les députés en cette Chambre, ici, ont la prétention
d'avoir la vérité, la seule et la vraie. Pourtant, sur les 7 000
000 de Québécois qu'on est, il y aura un résultat. Ce qui
est important pour nous, les membres de l'Assemblée nationale, ça
sera de se soumettre au résultat puisque le peuple du Québec aura
été souverain, comme il l'a été en 1980 et comme il
le sera en 1992. Mais le devoir de chacun et de chacune des membres de
l'Assemblée nationale, c'est de respecter cette souveraineté. La
seule vraie souveraineté qui existe dans des pays, dans des provinces,
dans des comtés, c'est la voix du peuple. C'est à
celle-là, cette voix-là, que chacun des membres de
l'Assemblée nationale, nous avons la responsabilité de nous
soumettre et, de ce côté-ci, on le fera avec plaisir. Merci, M. le
Président.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Saguenay. Je vous rappelle que nous sommes à
discuter de la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 44, Loi
modifiant la Loi sur le processus de détermination de l'avenir politique
et constitutionnel du Québec. Je cède la parole à M. le
député de Masson. Vous avez droit à 20 minutes, M. le
député.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Je viens
d'assister à un échange entre deux députés, deux
collègues, un de chaque côté, qui, mutuellement, se
parlaient d'avoir ou pas des lettres. Vous savez, c'est excessivement difficile
à évaluer parce qu'Edmond Rostand, dans «Cyrano de
Bergerac», disait, après sa grande tirade du nez... De lettres,
vous n'en avez que trois qui forment le mot: sot! Eussiez-vous eu, d'ailleurs,
l'invention qu'il faut pour pouvoir devant ces nobles galeries, me servir de
telles plaisanteries, que vous n'en eussiez pas articulé le quart de la
moitié du commencement d'une, car je me les sers moi-même avec
assez de verve, mais je ne permets pas qu'un autre me les serve.
C'est bien sûr que d'un côté ou de l'autre, quand on
se sert des invectives, on pense toujours que les nôtres sont les
meilleures. Ce n'est pas nécessaire d'avoir beaucoup de lettres pour
qu'on fasse de l'autocontemplation de cette façon, M. le
Président.
Une chose que j'aimerais bien dire, ici nous sommes réunis
d'urgence pour changer la loi 150, qui, elle, disait que le gouvernement
s'engage à tenir un référendum sur la souveraineté
le 26 octobre au plus tard. Le gouvernement, ne voulant pas tenir un
référendum sur la souveraineté, nous rappelle en Chambre
et change complètement la visée de la loi 150 et demande à
l'Assemblée nationale de changer cette loi par la loi 44 afin que ce
référendum porte sur les offres d'Ottawa. C'est le choix du
gouvernement, c'est lui qui est majoritaire.
Un tout petit historique. Nous avons perdu l'élection de 1985.
Les libéraux ont pris le pouvoir et leur chef, ça a pris deux ou
trois élections avant qu'il rentre, mais il est venu à bout de
rentrer en Chambre. Et ce chef-là, malgré une centaine de
députés, il n'avait pas été élu, il rentre
en Chambre, et pour leitmotiv, il s'était dit: II faut absolument que je
règle la question constitutionnelle. Je veux passer à l'histoire
et je veux régler cette question constitutionnelle, et on ne peut pas ne
pas lui pardonner une chose de même, on ne peut pas l'en blâmer, il
avait droit à ça, c'était son rôle, M. le
Président. Il a dit: Je veux absolument régler la
Constitution.
Alors, il s'est engagé, et ça a abouti... Il voulait
régler à tout prix, à tout prix. Alors, il a dit: Pour
régler, il faut que je fasse les demandes les plus basses que le
Québec n'a jamais faites. Et devant les demandes les plus basses que le
Québec n'a jamais faites, c'est bien sûr que mes compères
des autres provinces et Ottawa me diront oui. Il est arrivé avec les
petites propositions, les petites propositions, les miettes des revendications
québécoises qui étaient le Lac Meech. Et ces
miettes-là, mêmes les infimes parties des revendications
historiques du Québec, ont été refusées par les
autres provinces.
Alors, le premier ministre était outré comme nous. Nous,
nous étions outrés parce que notre fierté était
blessée; lui, parce qu'il n'avait pas gagné son défi. Il a
dit lui-même - je l'ai entendu en pleine télévision - qu'il
n'est pas un nationaliste naturel mais un nationaliste parce qu'il est
là comme chef d'un peuple, et, ce peuple-là étant
nationaliste, il se doit rationnellement de l'être un peu, au moins de
façon verbale et non de façon viscérale. Il a droit
à ça. Les placides, en politique, sont souvent de bons
politiciens. Mais il reconnaît qu'étant placide, n'ayant pas de
vibrations nationalistes, n'étant pas ébranlé par ses
racines ancestrales, automatiquement, cet homme-là devait se
créer
au moins une fierté artificielle. Et c'est pour ça que
dans certaines lois il mettait un brin de nationalisme. Il avait subi
l'échec de Meech.
Alors, il s'est dit: Écoutez-moi, citoyennes et citoyens - je le
parodie, là - le Québec dorénavant demeurera libre de ses
choix et de son destin. C'était très beau. Les plus ardents
nationalistes n'en auraient pas dit mieux. Et il dit: Dorénavant,
après plus de 30 ans de discussions avec les autres provinces de ce
Canada géographique, Québec, qui est distinct, ne fera plus de
propositions à Ottawa. Nous allons attendre qu'il nous en fasse et nous
dirons comme gouvernement si nous acceptons leurs propositions. Et là,
il dit, dans un élan de générosité semble-t-il: Je
demande le consensus des Québécois et des
Québécoises, de tous les partis, de toutes les associations, pour
que nous nous donnions la main pour avoir un consensus et des revendications,
sur des revendications nationales du peuple québécois.
On ne pouvait pas, de ce côté-ci, de façon
générale, ne pas dire au moins: On vous tend la main, nous allons
travailler en consensus. Ça a été fait. J'ai
été le seul en cette Assemblée nationale à ne pas
être d'accord sur Bélanger-Campeau parce que je disais: C'est
impossible, c'est une duperie, l'homme n'est pas sincère. Il n'a jamais
été nationaliste, il ne le sera jamais. Et c'est vrai, il le dit
lui-même. Il faut même respecter ce qu'il dit, de temps en temps.
(17 h 50)
Alors, la commission Bélanger-Campeau il y eut. Du
côté didactique, c'a été excellent. Du
côté didactique, une réussite. Plus de 82 % des
intervenants sont arrivés avec de la documentation
étoffée, et ils ont dit à l'ensemble des
Québécois: C'est la souveraineté ou à peu
près que l'on veut. Quelques-uns, bien sûr, l'association des
vétérans polonais, Alliance Québec et quelques groupes
comme ça sont venus dire non à la souveraineté. Mais
même la Chambre de commerce demandait 26 pouvoirs. Même la FADOQ
demandait, après le sondage dans ses rangs, à 84 %, la
souveraineté du Québec. C'était à peu près
unanime.
Cependant, le chef de l'Opposition et le premier ministre devaient
nommer les gens de la commission Bélanger-Campeau dans ce tendage de
mains. Mais le chef de l'Opposition a eu une malchance familiale. Dans la
dernière semaine, sa femme est disparue et il était pris, bien
sûr, par cette peine, à rester dans sa famille et à
organiser le départ de sa chère disparue. Et, pendant ce temps,
il a nommé unilatéralement quatre, cinq personnes pour donner une
majorité de fédéralistes à Bélanger-Campeau.
Alors, quand est venu le temps de voter, qu'est-ce que les gens vous ont dit?
Quel est le rapport que vous faites? Malgré l'ensemble qui avait dit de
prendre une orientation, ils ont dit: II y a deux orientations, soit le
fédéralisme renouvelé, soit la souveraineté. Est-ce
que ça prenait une commission puis des dépenses de millions pour
nous faire dire une affaire comme ça? On le savait avant. Donc, on
arrivait dans le piège et le cul-de-sac. Le consensus? On offre la main,
mais on l'a mordue. Cette morsure, je me la rappelle. Ça ne prend pas
beaucoup de lettres pour s'en rappeler non plus. Je me la rappelle, cette
morsure!
M. le Président, après ça, on ne discute plus
à 11, le Québec attend les offres. Les offres se sont
répétées comme des coups de canon sur un champ de
bataille. Et à chaque fois, l'obus ne frappait pas la cible. Dès
que l'obus arrivait sur la cible, tout éclatait. C'est l'obus qui
prenait sa cible et qui s'effoirait, comme on dit en québécois,
et non pas la cible qui disparaissait. La balle n'a jamais été
assez forte pour atteindre la cible, même si se faisait à
répétition sur le champ de bataille constitutionnel.
Et quand on est arrivés à la dernière, le 7,
là, tout le monde a dit encore: Ce n'est pas bon. Et là, la date
de la loi du Québec du 26 octobre commençait à rendre un
peu mal à l'aise le gouvernement en place. C'est normal! Si j'avais
été à leur place, j'aurais été pareil. Il y
avait toujours la loi du 26, là, et il se sentait obligé de faire
un référendum sur la souveraineté. C'est ça qu'on
étudie aujourd'hui. Et le gouvernement nous dit: Non, on ne le fera pas,
le référendum sur la souveraineté. Alors, un peu avant, en
Europe, il nous dit: Je n'en fais pas, un référendum sur la
souveraineté. Alors, autrement dit, MM. les Anglais des autres
provinces, je vous ai fait poser devant vos parlements des
épouvan-tails. N'en tenez pas compte! Je ne le ferai pas. Offrez-moi ce
que vous voulez, je ne le ferai pas, le référendum sur la
souveraineté.
Alors, qu'est-ce qu'ils ont offert? La même chose qu'avant. Des
miettes non acceptables au moindre petit moineau québécois.
Comment voulez-vous qu'on arrive avec un référendum et faire
picorer la population dans ces miettes constitutionnelles? On ne fait pas de
trottoir constitutionnel, de ce côté-ci. Il y a des bases, il y a
des planchers où on ne peut plus descendre. Sinon, c'est indigne d'un
représentant en cette Chambre ou indigne d'un citoyen du peuple qui
habite le territoire québécois. Et ça n'a rien à
voir avec les partis politiques. Rien à voir! C'est une option de
fédéralisme qui est là, sur la table. Je suis un
souverainiste, je n'en veux même pas. Je suis un souverainiste, mais par
respect pour les Québécois puis par respect pour ceux qui m'ont
élu dans un système fédéral député
provincial et colonisé, je me dois de les défendre, et c'est
ça que je vais faire pendant les six semaines qui viennent. Pas parce
que je suis péquiste, c'est parce que je suis un
Québécois, point à la ligne. Et ceux qui veulent
comprendre ces éléments qui ne nous seront pas offerts comme
condiments à notre repas constitutionnel, eh bien, qu'ils aient un gros
rapport, pour une fois, un vrai, un gros rapport, et qu'ils disent: Cette table
est indigeste. Je ne mange
pas de ce repas. Elle passe, la Constitution, ou elle casse. Bien, elle
casse, monsieur. C'est ça qu'on va faire. Elle casse.
M. le Président, quand est arrivé cet échec,
comment vouliez-vous que le grand défenseur de la
Fédération canadienne - la fée, la «fée des
rations» canadiennes... La «fée des rations»
canadiennes ne veut pas donner sa ration au Québec. C'est une fée
qui n'est pas juste; elle ne fait pas bien sa distribution comme
«fée dérale». Ce n'est pas une bonne
«fée dérale». Ce n'est pas une bonne
«fée des rations» canadiennes, parce que, notre ration, elle
ne veut pas nous la donner. Elle ne veut pas. Ce serait si simple: qu'elle
garde ce dont elle a besoin dans sa cour et qu'elle s'amuse, et qu'elle nous
laisse nous amuser avec ce dont nous avons besoin dans une entente
économique très agréable. Elle ne veut pas, cette
fée. C'est une «fédéraste», une
«féroce».
M. le Président, quand on a vu, de l'autre côté,
arriver cet échec constitutionnel, on a repris le trottoir
constitutionnel, on a recommencé à faire du trottoir
constitutionnel. Jamais je ne discuterai à 11! On a repris le trottoir,
et on a dit: Viens-t'en! Viens-t'en! En fin de compte, il y est allé.
Mais c'était sûr d'avance que le «Viens-t'en!»,
c'était voué soit à dire non de là-bas ou à
s'en venir ici et à discuter avec son monde pour dire: Est-ce
acceptable, ce qui arrive? Il ne voulait tellement pas en discuter avec son
monde qu'il a dit, pour la première fois... C'est la première
fois qu'un premier ministre fait ça, dire oui de là-bas avant de
voir son monde et avant de voir les textes. De là-bas! Comme Moïse
avec les Tables de la Loi. Il est descendu de sa colline avec les Tables de la
Loi, il est arrivé sur le bord de la mer Rouge - le congrès
libéral - il a séparé les eaux. Ceux qui n'étaient
pas d'accord, il les a fait passer, et après que ceux qui
n'étaient pas d'accord aient été dans le centre, il a dit:
Ramenez les eaux. Ils sont restés sur le bord, avec leurs Tables de la
Loi. C'est beau, c'est beau, mais, moi, je n'accepte pas ça, M. le
Président. Je n'accepte pas ça.
Et on l'avait prévu, M. le Président. La loi 150, j'ai
été un grand artisan de ce côté-ci - ne cherchez pas
qui - j'ai été un des grands artisans pour qu'on vote contre,
parce que j'ai dit: C'est encore une duperie. Et c'est prouvé
aujourd'hui, on est après la changer. C'est encore une duperie. Et, M.
le Président, ce n'est pas nouveau au Parti libéral, ça.
Dans les grandes idées, quel était le slogan du Parti
libéral en 1976? Et je n'étais pas candidat, moi, j'étais
vivant, je voyais les choses aller. Le slogan sur toutes les affiches,
c'était: Non aux séparatistes. C'était une fausse
représentation. On a gagné. Est-ce que ça voulait dire oui
à la séparation? Bien non! Le Québec ne s'est pas
séparé parce qu'on est rentré le 15 novembre 1976. Fausse
représentation! Référendum de 1980.
La question, c'était: Voulez-vous qu'on négocie avec
Ottawa? La réponse, ça a été non. On a
considéré ça comme un non, on a pris le pouvoir tout de
suite après. Nous autres, on a respecté. Là, on s'en vient
avec une question: Êtes-vous pour les offres d'Ottawa? On va dire oui,
dans la population, ou on va dire non. Nous, on choisit le non. S'ils disent
non, est-ce que ça veut dire oui à autre chose? Arrêtez de
duper le monde! Mais on est toujours des souverainistes, que ce soit oui ou que
ce soit non, le résultat. À la prochaine élection, nous
autres, on s'en vient comme souverainistes...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le
député de Masson...
M. Blais: ...et on va vouloir gagner.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je m'excuse, M. le
député de Masson. À moins qu'il n'y ait une indication
qu'il y a un consentement, je dois suspendre.
M. Blais: Ah! J'ai fini, là. Je ne savais pas que mon
temps était fait.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je dois suspendre,
à moins qu'il n'y ait une entente en sens contraire.
M. Blais: Je vais conclure, M. le Président.
M. Cannon: Oui. M. le Président, à mon entendement,
effectivement, il y a une entente qui est intervenue entre les leaders pour
qu'on puisse poursuivre au-delà de 18 heures...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Pas de suspension?
M. Cannon: ...jusqu'à la fin du débat. Il n'y a pas
de suspension.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): On ne suspend pas les
travaux. Alors, allez-y, M. le député de Masson.
M. Blais: II reste combien de temps, M. le Président?
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui. Il reste encore
à votre intervention une période de cinq minutes.
M. Blais: Je vais conclure, M. le Président. Je ne
voudrais pas accaparer trop, parce que c'est excessivement rare que les
députés écoutent en Chambre, mais quand je parle, ils le
font, et je ne voudrais pas trop les fatiguer; nous sommes rendus un vendredi
soir. Alors, M. le Président, je vais conclure bientôt. (18
heures)
II est très malheureux que ce qui nous arrive aujourd'hui ait
été prévu. J'ai été un de ceux qui l'ont
prévu. Je ne voulais pas de la commission Bélanger-Campeau; je
disais que c'était une duperie. La loi 150, je savais que c'était
encore un écrit pour des dupes, pour faire croire au monde que,
peut-être, notre premier ministre pourrait penser à la
souveraineté. Il nous a trompés sur toute la ligne. Aujourd'hui,
le rideau tombe, et on voit le vrai visage de ceux qui ont joué la
scène depuis cinq, six ans, qui ont joué sur la scène
constitutionnelle. Alors, nous, M. le Président, de notre
côté, on va dire non, parce qu'il faut que ce soit non. Le peuple
québécois mérite plus que ça. Il mérite au
moins d'être reconnu de façon directe. Et quand arriveront, mardi
prochain, les discussions sur les offres mêmes, on prendra le temps de
les lire. Il n'y en a pas un, de l'autre côté - on nous parle des
offres, on les a ici - il n'y en a pas un qui lit un morceau de texte des
offres que l'on a là. Oh! oh! oh! c'est bien trop compromettant.
Attendez voir, la semaine prochaine, M. le Président, on va les lire.
C'est épouvantable ce qui est écrit là-dedans. Ce n'est
pas bon pour le Québec, et c'est écrit en toutes lettres.
Ça commence, d'abord: Cette nouvelle Constitution est le
résultat de la ronde Canada. Québec n'était pas là.
On n'était pas là. Et ça va de même sur toute la
ligne. C'est une entente des 10 premiers ministres. Le onzième n'y
étant pas, ils se sont entendus pour faire une petite chose dont ils
avaient besoin eux-mêmes et ils ont dit: Bien, viens donc faire un petit
tour et on va mettre ton nom quelque part là-dedans. On va mettre un
petit paragraphe à part: société distincte.
On en parlera la semaine prochaine, M. le Président. En
attendant, je suis horrifié qu'on vienne changer la loi 150 parce que
c'est encore une fois un gouvernement qui ne tient pas la parole qu'il a
donnée à la population. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): merci. merci, m. le
député de masson. sur le même sujet, je cède
maintenant la parole à m. le député de duplessis.
M. Denis Perron
M. Perron: Merci, M. le Président. Vous me permettrez une
introduction à cette question que nous avons devant nous, face à
la loi 44 qui amende la loi 150, par un editorial du 31 août dernier,
sous la signature de Raymond Giroux. «La fin des subtilités. Le
Parti libéral du Québec a renié son programme
constitutionnel et s'est applaudi lui-même pour se rassurer. Le
congrès extraordinaire de samedi, sous le signe de la
fidélité au chef plutôt qu'aux idées, marque la fin
de l'ère des subtilités. «Si c'est bon pour M. Bourassa,
c'est bon pour moi, a lancé un délégué»
libéral. «Tous les ministres qui depuis le 23 juin 1990 criaient
au loup contre les ingérences répétées du
gouvernement fédéral dans leur champ d'activité ont
soudainement viré capot. «Le Québec ne gagne aucun pouvoir
réel hormis la formation de la main-d'oeuvre, mais tous sont heureux. Si
les Québécois ratifient la nouvelle Constitution, ils auront le
droit de négocier à perpétuité des ententes
renouvelables aux cinq ans.» Ils acceptent ce que la majorité
canadienne leur reconnaît, sans intention d'en demander plus.
M. le Président, j'aurais préféré l'article
1 de la loi 150 qui s'intitulait comme suit: «Le gouvernement du
Québec tient un référendum sur la souveraineté du
Québec entre le 8 juin et le 22 juin 1992 ou entre le 12 octobre et le
26 octobre 1992.» Écoutez bien: «Le résultat du
référendum a pour effet, s'il est favorable à la
souveraineté, de proposer que le Québec acquière le statut
d'État souverain un an, jour pour jour, à compter de la date de
sa tenue.» Sur les 32 articles que nous avons dans la loi 150, en aucun
temps, à l'exception de l'article 1, on ne parle de
référendum, mais surtout en aucun temps, dans quelque article de
ces 32 articles que je viens de mentionner, il n'est question d'un
référendum sur les offres fédérales.
La loi 44 stipule ceci, à l'article 1: «Le gouvernement du
Québec tient, au plus tard le 26 octobre 1992, un
référendum sur l'entente concernant un nouveau partenariat de
nature constitutionnelle résultant des réunions sur la
Constitution tenues en août 1992.» Pendant quelques jours, notre
premier ministre du Québec s'est affairé à signer
n'importe quoi, à négocier à peu près n'importe
quoi à la baisse pendant qu'au cours des trois dernières
années, soit depuis le 23 juin 1990, il n'a été
présent d'aucune façon à quelque table que ce soit au
niveau constitutionnel. Mais c'est tout un changement que nous avons devant
nous, actuellement, par rapport à la loi 150, parce que cet amendement
n'a pas le même but, mais aucunement le même but pour lequel elle
avait été votée par le gouvernement, en 1991.
On parlera des offres d'abord parce que c'est ça que
spécifie l'amendement qui est apporté à la loi 150 par le
gouvernement libéral. C'est ce que veut ce gouvernement et c'est ce
qu'il aura de notre part, autant ici à l'Assemblée nationale
qu'en commission parlementaire ou sur le terrain, lorsque nous aurons la
question, la semaine prochaine ou la semaine après. Mais nous allons
faire tout le nécessaire pour, justement, faire en sorte que les
citoyens et citoyennes du Québec, ces Québécois et ces
Québécoises qui, depuis plusieurs mois, pour ne pas dire
plusieurs années, n'ont pas été informés
correctement de la part des représentants et représentantes de ce
gouvernement libéral.
Nous avons eu droit à toutes sortes de
déclarations à l'emporte-pièce de la part de
ministres libéraux, de la part du premier ministre lui-même, mais
aussi de la part du ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes
pour se faire passer, de l'autre côté, comme étant des
souverainistes, comme étant des personnes qui voulaient défendre
les intérêts du Québec. Mais qu'est-ce que nous avons eu
dans cette entente, dans cet accord, dans ce papier, que, moi, je qualifie de
torchon? Qu'est-ce que nous avons eu qui donne plus, à savoir ce que le
Québec a actuellement?
M. le Président, pour votre information, j'ai pris la peine de
lire le document qui a été déposé ici en cette
Chambre, en date d'hier et, à plus ou moins 40 reprises, ça
amène des négociations perpétuelles entre le gouvernement
du Québec, les autres gouvernements des autres provinces canadiennes
ainsi que le gouvernement fédéral. D'autre part, ça
amène pas moins de 28 accords politiques à l'intérieur de
ce document, et tout le monde sait très bien que tout accord politique
qui est signé entre les parties se devra d'être
négocié.
Alors, si on fait le total, une quarantaine de négociations en
plus des négociations sur les accords politiques, ça donne
près de 70 endroits où on devra négocier avec les autres
provinces canadiennes et le gouvernement fédéral.
M. le Président, pour moi qui, depuis 38 ans, défend la
souveraineté du Québec, qui, depuis 38 ans, s'évertue
à faire comprendre aux Québécois et aux
Québécoises l'essentiel de cette souveraineté, je regrette
énormément que cet article 1 de la loi 150 soit disparu, parce
que c'est ce pour quoi je me suis présenté en politique, c'est ce
pour quoi j'ai tenu à continuer au cours des 16 dernières
années à défendre les intérêts du
comté de Duplessis, à défendre les intérêts
de la région de la Côte-Nord, et à défendre aussi
les intérêts de l'ensemble du territoire québécois
et des personnes qui y demeurent, les hommes et les femmes, les familles
complètes.
M. le Président, nous avons aujourd'hui, cependant, une
décision du gouvernement qui fait justement en sorte qu'on ne parle pas
de la souveraineté, mais qu'on va parler plutôt des offres
à la baisse de ce gouvernement, qui ont été
entérinées par ce gouvernement, mais entérinées
sans papier, entérinées sans preuve de quoi que ce soit. D'abord,
au niveau du Conseil des ministres; ensuite, au niveau du congrès
libéral; ensuite, au niveau du Conseil des députés; et,
par la suite, ici même en cette Assemblée nationale lorsque nous
avons commencé hier, où les papiers officiels ont
été déposés à peu près une heure
après le début de la session, hier après-midi à 14
heures. Donc, ça a été fait aux alentours de 15 heures, 15
heures 15.
Comment peut-on être aussi indécents que d'endosser un
accord comme celui-là sans avoir le texte d'une telle entente, qui n'est
même pas, en passant, un texte juridique, parce qu'on dit que les textes
juridiques, ça va prendre n'importe où entre une année et
trois années pour pouvoir les compléter. Alors, imaginez-vous
toutes les négociations qu'il va y avoir au cours des prochains mois et
des prochaines années pour en arriver à avoir des textes
juridiques qui se tiennent debout. Alors, dans cette chose-là, dans ce
genre de patente-là, organisée par les libéraux du
Québec, avec l'accord des neuf premiers ministres anglophones du Canada
ainsi que le premier ministre Brian Mulroney, je ne marche pas du tout. Ce que
je dis aujourd'hui, je le fais au nom de mes concitoyens et de mes
concitoyennes du Québec.
Il ne faut pas oublier, d'après ce que je viens de dire
concernant les négociations et les accords politiques, que ça
nous oblige, de façon systématique et de façon
régulière, avec cette entente qui est de la foutaise, qui est de
la bouillabaisse, qui est un ramassis de voeux pieux, même à la
baisse, ça va nous obliger à des négociations
perpétuelles qui vont nous condamner à discuter avec le
gouvernement fédéral et les provinces canadiennes anglaises, et
c'est une condamnation, comme on dit en français, à
perpète. On n'est pas sortis du bois, on a encore pour 125 ans à
négocier avec les autres provinces canadiennes et avec le gouvernement
fédéral. (18 h 10)
M. le Président, lorsque, hier, j'ai vu la façon
indécente où le ministre des Affaires intergouvernementales
canadiennes a déposé l'accord du 22 août, a
déposé ensuite un document de 1981, et un document de 1985,
j'aimerais, pas discuter sur le fond par rapport au document de 1985, mais
j'aimerais, si vous permettez, M. le Président, concernant ce
dépôt d'hier, dire à cette Chambre ce qui a
été écrit par Lysiane Gagnon de La Presse, samedi
en date du 22 août, M. le Président, c'est-à-dire le 4
septembre dernier par M. Gilles Lesage. Ça, c'est en date d'aujourd'hui:
«Pour ajouter à la confusion, s'il en est besoin, voilà que
le gouvernement profite du rappel à l'Assemblée nationale pour
publier enfin le texte de Charlottetown, mais aussi deux textes de 1981 et de
1985 remontant donc au gouvernement de René Lévesque. Il tente
ainsi d'étayer sa thèse selon laquelle ces offres et ces gains
soumis au référendum du 26 octobre rejoignent en tout point, si
elles ne les dépassent pas, les ententes des péquistes d'hier et
de leur père fondateur». Et je voudrais qu'on écoute, en
face, le restant du paragraphe: «II est épouvantable de se servir
de la sorte d'un illustre mort pour en arriver à des fins qui, de toute
évidence, ne peuvent se suffire à elles-mêmes et ont besoin
d'une caution d'outre-tombe.» Alors, M. le Président, qu'on laisse
tranquille la personne qui a présenté ces offres en 1985, qui a
fait ces demandes constitutionnelles en 1985, qui, en passant, et la
preuve a été faite, sont beaucoup plus
élevées que ce que vous avez endossé en tant que
gouvernement.
M. le Président, en date d'hier, le ministre, toujours le
ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes, répondait
à mon collègue de Lac-Saint-Jean à une question concernant
les autochtones se rapportant à l'entente elle-même ainsi que les
tribunaux. Et la réponse du ministre a été la suivante,
j'en donne en partie: «C'est en 1984, M. le Président, dans cette
Assemblée, qu'il a été décidé que les
autochtones devraient pouvoir avoir leur gouvernement autonome.» Et il
continue par la suite: «Et ce que nous avons dans l'entente, M. le
Président, reflète essentiellement ce qui a été
décidé ici dans cette Assemblée en 1984.» D'abord,
ce n'était pas en 1984, la motion de René Lévesque,
c'était en 1985. Et il continue, à la fin: «II me semble
que refuser ce droit aux autochtones, c'est particulièrement
mesquin.»
M. le Président, en aucun temps nous n'avons refusé ce
droit aux autochtones quant au gouvernement autonome. Et, d'ailleurs, c'est
avec beaucoup de plaisir que j'ai non seulement travaillé à la
motion du 20 mars 1985, mais c'est aussi avec plaisir que j'ai voté pour
cette motion concernant les droits des autochtones, et où d'ailleurs le
Parti libéral s'est lui-même mis de côté en votant
contre cette entente. Puis, aujourd'hui, il s'en sert et il vient nous dire
qu'on n'a pas fait notre travail.
M. le Président, qu'on se rappelle des 15 principes du 9
février 1983 où les 15 principes concernant les nations
autochtones du Québec avaient été endossés à
l'unanimité par le Conseil des ministres, et où par la suite il y
a eu des présentations qui ont été faites auprès de
toutes les nations autochtones du Québec. Qu'on se rappelle aussi de
cette motion du 20 mars 1985. Ni les 15 principes ni la motion elle-même
de mars 1985 ne parlent de la présence des tribunaux. On y parie de
négociation. On y parie de signature d'ententes après
négociation et on y parie de respect des ententes après
signature; il n'était pas question de tribunaux dans quelque texte que
ce soit. M. le Président, je n'ai pas besoin de déposer cette
motion du 20 mars 1985 à l'Assemblée nationale, mais je vais
cependant me charger d'en lire quelques phrases.
La résolution de l'Assemblée nationale... Le 20 mars 1985,
l'Assemblée nationale adoptait la résolution dont le texte suit:
Motion portant sur la reconnaissance des droits des autochtones. «Presse
le gouvernement de poursuivre les négociations avec les nations
autochtones en se fondant, sans s'y limiter, sur les 15 principes qu'il a
approuvés le 9 février 1983 en réponse aux propositions
qui lui ont été transmises le 30 novembre 1982 et à
conclure avec les nations qui le désirent ou l'une ou l'autre des
communautés qui les constituent des ententes leur assurant l'exercice:
«a) du droit à l'autonomie au sein du Québec; «b) du
droit à leur culture, leur langue, leurs traditions; «c) du droit
de posséder et de contrôler des terres; «d) du droit de
chasser, pêcher, piéger, récolter et participer à la
gestion des ressources fauniques; «e) du droit de participer au
développement économique du Québec et d'en
bénéficier, de façon à leur permettre de se
développer en tant que nations distinctes ayant leur identité
propre et exerçant leurs droits au sein du Québec.
«Déclare que les droits des autochtones s'appliquent
également aux hommes et aux femmes.»
M. le Président, que les libéraux d'en face, hommes ou
femmes, libéraux, libérales, essaient de me trouver dans ce texte
que nous étions d'accord avec le fait que les cours
fédérales interprètent la signature d'une entente ou des
ententes négociées avec les autochtones. Qu'on me dise où
ça se trouve, et je vais me plier, et je vais même aller m'en
excuser.
Mais, à ce que je sache, M. le Président, en aucun temps,
dans cette motion, dans cette résolution de l'Assemblée nationale
qui a été présentée par René
Lévesque, on ne mentionne la question des tribunaux. Mais ce qui vient
de nous arriver actuellement, et ce, dans l'ensemble du chapitre IV se
rapportant aux nations autochtones, c'est qu'à peu près dans tous
les cas, à peu près dans toutes les négociations, à
peu près dans n'importe quoi, on va se ramasser avec une cour de justice
fédérale qui va venir mettre son mot, puis prendre la place de
gens qui devraient prendre leur décision aujourd'hui.
M. le Président, ce n'est pas la faute des représentants
et représentantes du Parti québécois, de l'Opposition
officielle à l'Assemblée nationale si les libéraux d'en
face, avec leur premier ministre en tête, ont décidé, au
lieu de prendre leurs responsabilités propres comme
députés à cette Assemblée nationale... Ce n'est pas
notre problème à nous, mais c'est leur problème à
eux et à elles d'avoir décidé qu'au lieu de prendre leurs
responsabilités politiques, au lieu de négocier vraiment des
ententes, au lieu de signer vraiment des ententes avec les autochtones, au lieu
de mettre en application des ententes qui pourraient être signées
éventuellement ou qui ont déjà été
signées... C'est de prendre leurs responsabilités politiques de
façon légale.
Je voudrais bien dire aux gens d'en face qu'ils se rappellent que,
lorsqu'il y a eu l'entente de la Baie James et du Nord québécois
de signée en date du 11 novembre 1975, c'était les
libéraux, à ce moment-là, qui étaient au pouvoir.
C'est vrai et, en ce qui me concerne, c'est une bonne entente, c'était
une première. Donc, ça se
fait si c'était une première, et on n'avait pas besoin que
ça soit mis dans la Constitution pour faire ça. Mais, là,
il nous arrive, actuellement... c'est qu'on se ramasse avec toute la question
des autochtones dans la Constitution, et si j'avais à choisir un
négociateur pour aller négocier quelque chose pour le
Québec, je prendrais quelqu'un du style d'Ovide Mercredi plutôt
que de prendre quelqu'un comme le premier ministre que nous avons en face de
nous, qui a négocié à peu près tout à
rabais.
M. le Président, je voudrais vous lire ici une partie de
l'entente concernant les autochtones, une partie seulement, lorsqu'on dit, par
exemple, à la page 16, concernant le processus de négociations,
le mécanisme de déclenchement des négociations. «Il
conviendrait que les négociations sur l'autonomie gouvernementale soient
engagées par les représentants des peuples autochtones, quand ils
y seront disposés.» Ils seront disposés quand, les
représentants et les représentantes des nations autochtones,
lorsqu'on parle du délai de cinq ans à l'intérieur de
ça? Quelles sont les nations autochtones qui, aujourd'hui, sont
prêtes, sur le territoire québécois, à
négocier des ententes formelles avec le gouvernement du Québec?
Il y en a très peu. Vous avez les Algonquins sur un côté et
vous avez le CAM de l'autre, le Conseil Attikamek-Montagnais, avec les
Attikameks et les Montagnais, mais à part ça, quels sont les
représentants et représentantes des nations autochtones qui ont
déjà les outils nécessaires pour négocier des
ententes?
M. le Président, je suis l'une des personnes les plus favorables
à la négociation, à la signature d'ententes avec les
autochtones, mais que ça se fasse de la part d'un gouvernement politique
qui se tient debout, puis qui est capable de négocier, de signer des
ententes, puis, par la suite, de les mettre en application.
Je vais conclure en disant, M. le Président, qu'en aucun temps,
sur cette question précise concernant les autochtones, je n'accepterai
que ce soit des cours de justice qui prennent la place des politiciens et des
politiciennes pour avoir des ententes concrètes et, par la suite,
être dans l'obligation, par une décision de la cour, de les mettre
en application. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions?
M. Boulerice: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le...
M. Boulerice: ...mais je me demande s'il y a assez de
députés dans cette Chambre.
Une voix: Quorum...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors il y a une demande
de quorum. Qu'on appelle les députés!
(18 h 20 - 18 h 22)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, allez-y, M. ie
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, vous avez droit à
une période de 20 minutes pour votre intervention.
M. André Boulerice
M. Boulerice: Vous comprendrez qu'il est passablement anormal
qu'un gouvernement qui convoque d'une façon urgente ce Parlement ne soit
pas capable d'assumer le quorum, M. le Président. Un gouvernement qui
suspend toutes les règles de procédure... D'ailleurs, remarquez
que le fait n'est pas nouveau. C'est le champion de la suspension des
règles de procédure. On l'a vu en fin de session, au mois de juin
dernier où, d'ailleurs, il nous fallait à tout moment exiger le
quorum puisqu'il n'était pas capable de l'assumer, donc suspendre les
règles de procédure pour voter en bloc une quarantaine de lois.
Des démocrates, M. le Président. De toute façon, ils nous
ont donné une très belle illustration,
télédiffusée d'ailleurs, de leur démocratie, qui a
été leur congrès ici, à Québec, et j'y
reviendrai ultérieurement.
M. le Président, pour mon intervention, je me suis dit: Je vais
tenter d'écouter le discours d'un ou d'une députée du
parti ministériel, celui qui, à mon point de vue,
refléterait sans aucun doute le mieux l'image de cette formation
politique. Mon choix s'est porté sur la vice-première ministre et
députée de Chomedey, et j'ai trouvé ça, encore
là, fort révélateur, M. le Président. Je vous
demanderais d'ailleurs, à nouveau, de vérifier le quorum.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle les
députés! (18 h 24 - 18 h 26)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, allez-y, M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.
M. Boulerice: Alors, je vous disais que j'avais pris comme
modèle, mais modèle dans le sens de prototype, la
députée de Chomedey, quoique, remarquez, j'aurais pu m'inspirer
de la région de Montréal aussi qui, à mon point de vue,
est la plus partisane de ce gouvernement. J'ai remarqué dans son
discours qu'elle avait découvert Napoléon. Remarquez que
ça manquait beaucoup à sa culture, mais je suis heureux qu'elle
l'ait fait. Elle parle à tout bout de champ de l'intérêt
supérieur de la nation. On voit que la vice-première ministre a
l'intérêt supérieur à la nation. Je l'aurais crue,
M. le Président, reposée, compte tenu des moments de
détente qu'elle a passés dans le comté de Charievoix,
comme l'ensemble de ses collègues du Conseil des ministres, qui ont tous
séjourné quelques heures
dans la maison de campagne d'un riche homme d'affaires franco-ontarien,
qui, sans doute, leur indiquait quelle était la bonne piste à
suivre dans le cas d'une entente constitutionnelle. Mais il faut croire que ce
séjour dans la belle région de Charlevoix ne l'a pas suffisamment
reposée.
La ministre disait: «À l'aube du prochain millénaire
- remarquez qu'elle est forte en mathématiques, bravo! - à chaque
jour, la télévision, la radio, les journaux rapportent et
analysent les transformations à survenir, tantôt en Europe de
l'Est, et l'on peut constater à quel point elles ne se font pas dans
l'honneur, dans la paix et dans le respect des droits.»
Voilà un bel exemple de démagogie coutu-mière
à laquelle nous habitue la députée de Chomedey, M. le
Président. Il est intéressant qu'elle parle de l'Europe de l'Est,
mais elle aurait dû ajouter que c'était, pour la majorité
de ces pays, la façon qu'ils avaient de recouvrir l'indépendance
qu'ils avaient et qu'ils avaient perdue - la Lituanie, l'Estonie, la Lettonie,
la Moldavie, la Biélorussie... et je pourrais en nommer plusieurs
autres. Donc, la ministre essaie de mélanger les genres, et la ministre
est en train de sombrer dans cette image - je me souviendrai toujours, en 1976,
d'une image qui avait été employée par une folle, que je
ne nommerai pas, une folle délirante qui, au moment de l'approche de
l'élection disait que ce sera terrible, le Québec sera à
la sauce chili - la ministre essaie encore d'aller un peu dans ce
sens-là.
La ministre, toujours aussi sobre dans son propos, toujours aussi calme,
rajoutait un petit peu plus loin: «Dire oui à l'entente, c'est
dire oui au réalisme, c'est dire oui aux grands projets, c'est dire oui
à un type de modernité qui s'empare de tous les pays du
monde.»
Oui, le Québec est différent, comme l'Allemagne est
différente, comme le Mexique est différent, comme les
États-Unis sont différents. La différence n'empêche
pas ces sociétés, M. le Président, et je la cite,
«de rechercher à faire partie de grands ensembles. La toute
puissante Allemagne, qui pourrait fort bien faire route seule, a choisi le
parapluie européen qui n'est rien d'autre qu'une forme de
fédéralisme», M. le Président. (18 h 30)
C'est dommage qu'elle nous ait quittés, je sais qu'il y a un
grand bassin de population dans Chomedey, donc elle doit aller les rencontrer,
mais, M. le Président, quand on parle de l'Europe, la
vice-première ministre devrait se rappeler que ce sont des pays qui
sont, d'abord et avant tout, souverains. L'Allemagne, la France, la
Grande-Bretagne, l'Irlande, l'Espagne, l'Italie n'ont renoncé à
rien de leur souveraineté. Ils peuvent avoir
délégué à un Parlement certaines
responsabilités, mais, pour les déléguer, il faut les
avoir. Donc, ils ont la souveraineté.
La ministre mélange les genres, M. le Président. La
ministre essaie de faire croire que rechercher une souveraineté... Et
là j'en parle, parce qu'ils ne veulent pas qu'on en parle; ils modifient
le projet de loi 150, qui devait porter sur un référendum qui
donne accès à la souveraineté pour le Québec.
Ça, ils l'ont changé. Ils nous reprochent de ne pas en parler.
Moi, je vous le dis, je vais en parler quand je vais le vouloir; ça ne
me gêne pas du tout. Je ne vais pas mélanger le monde non plus,
par contre. Je sais que le non sera un non prémonitoire, il va de soi,
à un autre non qui surviendra quelques moments après, où
on verra disparaître du paysage ce que j'ai devant moi, très
rapidement. Et quand on connaît les majorités qu'ils ont eues,
d'ailleurs, ça ne serait pas difficile pour certaines organisations dans
certaines circonscriptions. On n'a qu'à penser à la rive sud, en
particulier.
Donc, la vice-première ministre, ministre de l'Énergie,
essaie de mélanger tous les genres. Elle essaie de dire, comme je viens
de le dire, qu'on essaie de mettre en sourdine notre option, alors que c'est
eux qui ne veulent absolument pas que nous en parlions, puisqu'ils sont ici,
rassemblés d'urgence, en Parlement, pour modifier une loi qu'ils ont
voulue, qui a été votée, issue d'un rapport où leur
premier ministre a apposé sa signature. Et voilà que tout cela
est défait de façon à tourner une page de l'histoire -
est-ce qu'on peut ouvrir les portes à deux battants, s'il vous
plaît? Pardon! - de façon à ouvrir une porte sur
l'histoire, comme le disait la ministre un peu plus loin dans son texte.
Oui, mais cette page d'histoire, le gouvernement a décidé
quelle page ce serait et a décidé dans quel livre. La seule page
d'histoire issue du seul livre qui était acceptable, c'était la
page dite 150 - pour faire référence à la loi 150 - issue
du seul livre qui devait nous guider et qui est le rapport
Bélanger-Campeau. Au demeurant, ils auraient peut-être pu employer
le rapport Allaire, mais on a bien vu ce que ça donnait.
Déjà, un deuxième reniement! On aurait cru le Parti
libéral plongé dans l'histoire biblique, où le coq chanta
trois fois avant le reniement et la trahison.
La ministre va toujours en disant: une réconciliation avec
l'histoire - c'est quoi, une réconciliation avec l'histoire? - avec en
tête un objectif de paix. Ah! Sommes-nous en guerre? Sommes-nous en
guerre? La ministre ne blesse même pas avec ses paroles; heureusement, la
ministre n'est pas armée. Je me dis: Mais quelle paix? Oui! Et qui a
dit: II faut signer une entente avec les autochtones qui garantisse au
Québec l'intégralité territoriale? Eh bien! je pense que
s'il y a un spécialiste en ce domaine, c'est le député de
Duplessis. On se rend compte que l'intégrité territoriale
québécoise, elle n'est même plus dans les mains des
Québécois, elle est dans les mains des tribunaux, donc de la Cour
suprême du Canada. Il faut toujours se rappeler
de cette phrase de Duplessis, qui n'était peut-être pas un
modèle à tous égards, mais qui, à ce
niveau-là, avait raison: «La Cour suprême, c'est comme la
tour de Pise; ça penche toujours du même bord, et les jugements de
la Cour suprême du Canada ont toujours penché vers le
Canada.» Rappelons-nous aussi que la dernière fois qu'un jugement
de tribunal a eu lieu quant à un territoire québécois,
c'est dans le début des années 1900, et ça a
été le Labrador que le Québec a perdu au profit
Terre-Neuve, qui n'était pas une province canadienne. Ceux qui ont
observé une carte géographique se rendent bien compte que oui,
Terre-Neuve est un prolongement du territoire québécois, qui est
une île. C'est une He.
M. le Président, on a assisté, durant la fin de semaine,
à un congrès libéral vraiment très édifiant,
où on a décidé que les jeunes n'avaient pas leur place. Il
a d'ailleurs paru, en tout début de semaine, un article fort
intéressant dans le journal Voir. Je vais me permettre, M. le
Président, de vous en citer certains extraits: «Pour leurs
débats du week-end dernier, les libéraux ont utilisés une
des deux patinoires du Pavillon d'éducation physique de
l'Université Laval. «Deux équipes se sont
affrontées. D'un côté, le puissant appareil du parti, avec
son capitaine Robert Bourassa, pour qui ce congrès devait être
aussi prévisible qu'un épisode de «Lance et Compte».
De l'autre, la Commission-Jeunesse du PLQ - et, d'ailleurs, j'aimerais saluer
un jeune militant de la Commission-Jeunesse du Parti libéral,
Frédéric Dubé, qui a démissionné et qui va
maintenant travailler avec l'équipe du non, et non pas le clan du oui
-avec Mario Dumont dans les buts, pour qui Bourassa est le champion du patinage
à reculons. «Mais Dumont et ses troupes se sont rapidement fait
plaquer dans la baie vitrée par les John Kordic du PLQ. Un jeune
libéral désabusé dit avoir compté dans les gradins
150 membres de la circonscription de Jean-Talon, celle de M. Rémillard.
Un autre, David, de la région de Québec, affirme que son
député l'avait sommé de démissionner plutôt
que de semer la pagaille au congrès. Des hordes de supporters venus dans
la Vieille Capitale en autobus scolaire aux frais de leurs
députés ont complété l'attaque-avant de
l'équipe Bourassa. «Les Bacon, Ryan et autres Rémillard
venus vendre à leurs membres une entente qui n'avait pas encore
été rendue publique - et on sait que l'entente ne le sera pas
avant même le référendum du 26 - n'ont pas
ménagé leurs efforts pour semer la confusion dans le camp
adverse. "On ne sait plus quoi penser de cette entente", a lancé
Stéphane Davidson, un jeune du comté de Bertrand sur la rive sud.
Le premier ministre a beau postillonner de tout son saoul sur écran
géant à propos de l'accord qu'il a conclu le 22 dernier, il ne
réussissait pas à convaincre Stéphane et ses voisins:
"Bourassa et Rémillard nous disent que l'entente est très bonne
pour nous, mais des constitutionnalistes comme Léon Dion nous disent
qu'elle est mauvaise..." «Il n'y avait cependant aucune confusion dans
l'esprit de Marc Snyder. "J'ai subi beaucoup de pression depuis le mois de mai,
raconte celui qui représente l'est de Montréal sur
l'exécutif de la Commission-Jeunesse. Seulement cette semaine, j'ai
participé à une dizaine de rencontres au sommet avec
l'establishment du parti, le chef, les ministres, Le Président,
nomme-les." «mais la pression ne semble pas l'atteindre. alors que
rémillard s'égosillait sur les six droits de veto que l'entente
du 22 août a donnés au québec, marc blaguait avec ses
collègues: "six veto? c'est drôle, avant, il disait qu'on en avait
gagné cinq. c'est la multiplication des pains!" rémillard a
continué en soulignant que bourassa avait assuré au québec
25 % des sièges à la chambre des communes. "un gain majeur!" a
ironisé snyder en faisant tournoyer son poing à la arsenio hall.
"qu'est-ce que ça change? on a déjà 24 % des sièges
aux communes, a pour sa part commenté stéphane davidson. de toute
façon, ce ne sont pas deux ou trois jean chrétien de plus qui
vont travailler dans les intérêts du québec!".» je
pense que c'était fort pertinent comme information.
M. Marcil: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant. M. le
député de Salaberry-Soulanges.
M. Marcil: Ça semble tellement intéressant, ce que
le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques dit, qu'il serait
intéressant également que nos collègues puissent
l'écouter. Pourriez vous demander le quorum, s'il vous plaît?
M. Boulerice: Merci! Merci! Ha, ha, ha!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Donc, qu'on appelle les
députés. (18 h 39 - 18 h 44)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, vous pouvez continuer votre
intervention. Je vous rappelle que vous disposez encore d'une période de
six minutes.
M. Boulerice: Alors, vous avez vu comme moi, M. le
Président, que cette chronique du congrès libéral de la
fin de semaine, surtout vu par les jeunes de la Commission-Jeunesse du Parti
libéral, est fort révélatrice du grand esprit
démocratique qui animait ce congrès.
Pour revenir à l'entente, M. le Président, c'est
très simple. Effectivement, moi, j'aurais préféré
avoir comme négociateur, même si je ne partage pas son point de
vue, Ovide Mercredi. Si l'on regarde ce qu'il a fait, M. le Président,
ce n'est pas compliqué. Il a regardé l'ensemble de
ceux qui étaient alentour de la table, puis il a dit: Ce n'est
pas compliqué. Moi, je vais prendre le plus mou. Le plus mou, puis si je
suis capable de lui rentrer une cheville, ça va bien aller. Et,
forcément, le plus mou, ce n'est pas compliqué, c'est toujours le
même, c'est le premier ministre du Québec, qui nous arrive avec
des propositions qu'on ne connaît pas, dont on n'a pas les textes, que la
population du Québec n'aura pas avant le lendemain, alors que, si en
France on est en train de se prononcer sur le traité de Maastricht, il
faut quand même convenir que 38 000 000 d'exemplaires de ce traité
ont été distribués dans toutes les portes, alors que chez
nous on ne peut même pas les déposer en Chambre; on est
obligé de crier pour les obtenir, et on s'aperçoit que ce n'est
pas définitif et que les seuls vrais textes définitifs ne seront
disponibles que le lendemain du jour où la population du Québec
aura à voter sur ces pseudos-offres, qui n'en sont pas, M. le
Président.
Si je regarde le domaine particulier qui me concerne, eh bien, il faut
dire qu'inévitablement le Québec n'a rien gagné, et c'est
pour ça, d'ailleurs, que dans L'actualité de cette
semaine, si on lit l'interview que donne la ministre des Affaires culturelles,
eh bien, je suis fort sympathique à son propos. Mais, malheureusement,
elle le dit elle-même, elle est obligée de le dire, qu'elle ne
peut parler qu'en son nom personnel, parce qu'elle ne peut malheureusement pas
compter sur son premier ministre pour aller chercher des pouvoirs importants
qui sont les pouvoirs dans le domaine de la culture, au même titre que,
comme elle a déjà assumé le ministère des
Communications, elle sait fort bien que, quand la vice-première ministre
parle de modernité, la modernité, ce sont les communications. Il
n'y a aucun nouveau pouvoir au niveau des communications.
M. le Président, on va en discuter plus amplement, des offres, et
on ne va pas se gêner. Je l'ai dit, je l'ai dit très clairement,
nous n'allons pas mélanger la population. Ce non qui
«va-t-être» donné...
M. Marcil: Qui va être.
M. Boulerice: ...n'est qu'un non...
M. Marcil: Pas «va-t-être», «va
être».
M. Boulerice: Va être donné. Je remercie M. le
député de Vaudreuil-Soulanges d'avoir corrigé,
malheureusement, une mauvaise conjugaison que j'ai faite. Lui a fait une
mauvaise union. Que voulez-vous, ça se corrige mieux, une conjugaison,
qu'une union. Lui a décidé de s'unir au oui, moi, j'ai
décidé d'aller vers le non, mais un non qui ne sera qu'un non aux
offres. Mais ne vous inquiétez pas, l'autre étape arrivera, et
l'autre étape, dans la circonscription de Sainte-Marie-Saint-Jacques,
sera principalement dirigée par M.
Gaston Clermont, qui était l'ancien adjoint du regretté
député fédéral Jean-Claude Malépart, et on
sait fort bien que, si Jean-Claude vivait, il serait avec le non parce qu'il
jugerait inacceptables ces offres. M. Clermont, d'ailleurs, est aussi un ancien
organisateur du député libéral défait de
Sainte-Marie, Michel Laporte, et il est maintenant avec nous pour combattre ces
offres avec de nombreux organisateurs du Parti libéral dans Sainte-Marie
qui sont maintenant passés du côté du non aux offres, mais
d'un oui profond à des ambitions plus grandes pour le Québec, des
ambitions plus nobles pour le Québec.
Une voix: L'indépendance. C'est ça.
M. Boulerice: Oui, l'indépendance, comme la Syrie est un
pays indépendant. L'indépendance. Mais le Québec,
naturellement, ne sera pas une force impérialiste d'occupation au Liban,
mais... Oui, l'indépendance du Québec, l'indépendance du
Québec, absolument, et nous allons faire la bataille. Et je tiens
personnellement à vous inviter tous, les uns comme les autres, à
venir dans cette circonscription. Vous êtes les bienvenus. Si vous voulez
des débats contradictoires, on est disponibles. Mais le Plateau
Mont-Royal et le Centre-Sud ont dit oui au Québec en 1970. En 1992, ils
vous répondront non, comme ils vous ont répondu non, aussi, de
façon successive au cours des élections depuis 1970; et
après, on replacera des gens sérieux et on fera un Québec
qui se tient. Pas avec un premier ministre qui part à genoux, qui
négocie à quatre pattes, puis qui revient à plat ventre.
Ça, ce n'est pas vrai. Pas avec un mou, pas avec un mou. Ah bien, avec
quelque chose de concret. (18 h 50)
Et, pour reprendre le journal Voir, il y a une importante
caricature, il y a une chaise sur laquelle il y a une fleur de lis, puis il y a
une chaise de bébé sur laquelle il y a une feuille
d'érable. Bien, on sera des adultes, au Québec, on ne sera plus
uniquement les petits enfants du fédéral et des gens convaincus
aussi - je termine là-dessus, M. le Président - pas les faux
ténors, les girouettes du nationalisme qui se promènent. Il y en
a, d'ailleurs, de ces pseudo-ténors qu'on n'a pas vus depuis le
début de cette session. Est-ce que c'est parce qu'ils ont des transes et
des angoisses ou qu'ils espéreraient bien que les caméras de
télévision s'inquiètent de leur absence et aillent les
interroger, ce qui leur permettrait de passer un bon petit clip de 30 secondes
à la télévision? On a vu ce que ça donnait, M. le
Président, les pseudo-nationalistes, ceux qui se répandaient en
transes à l'extérieur, et qui avaient de profondes
hésitations. On a vu quelles étaient leurs vraies valeurs. Ceux
qui, véritablement, ont de la valeur...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je vous demande de
conclure.
M. Boulerice: ...étaient à la Commission-Jeunesse
du Parti libéral.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Sur le même sujet,
soit la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 44, Loi
modifiant la Loi sur le processus de détermination de l'avenir politique
et constitutionnel du Québec, je cède la parole à M. le
député de Louis-Hébert. Vous avez droit à 20
minutes, M. le député.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: Merci, M. le Président. N'eût
été le fait que l'orateur précédent a
décidé de faire parler les morts, je me serais abstenu
d'intervenir. M. le Président, quand on est obligé de faire appel
à des gens qui sont décédés pour justifier sa prise
de position, en pariant du député Malépart... Je pense
qu'il y a des moyens qui ne sont pas très, très catholiques.
C'est assez spécial de déterrer les morts pour avoir raison.
Une voix:...
M. Doyon: II n'est pas le premier à le faire? Je
regardais, dans Le Devoir...
Une voix:...
M. Doyon: M. le Président, je pense que j'ai la parole. M.
le député, si vous voulez vous taire et m'écouter. C'est
votre tour de m'écouter.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant! Un instant!
M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, on vous a permis de
vous exprimer, tout à l'heure, en toute quiétude. Je requiers,
pour le député de Louis-Hébert, la même ambiance.
Allez-y, M. le député de Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président. J'ai bien l'intention de
continuer, M. le Président, dans ce que j'avais à dire. Qu'on
soit obligé d'aller chercher des gens qui ne se sont pas
prononcés là-dessus, qui n'ont pas eu l'occasion de voir
l'entente, qui n'ont pas eu l'occasion d'évaluer les gains que fait le
Québec pour avoir une approbation de l'au-delà... Je pense qu'il
y a des moyens dont on pourrait s'abstenir. Il n'est pas le premier à le
faire. Là-dedans, il suit l'exemple de... Je pense que c'est Claude
Morin qui déterre Duplessis, qui déterre Daniel Johnson, Bertrand
et Jean Lesage pour prétendre que, si ces gens-là avaient
à se prononcer... Parce que, lui, il les connaît tellement qu'il
sait ce qu'ils auraient dit, «mes premiers ministres». Je peux vous
dire ce qu'ils diraient, moi, «mes premiers ministres». Le
député de Sainte-Marie-Saint-Jacques rit. Il fait pire que
ça parce que, eux autres, au moins, ça fait plus longtemps qu'ils
sont morts. Il trouve ça drôle quand on parle de Claude Morin,
mais quand on parle de lui, il ne trouve pas ça drôle. Pourtant,
c'est la même affaire, il n'y a pas de différence.
M. le Président, le référendum que nous allons
vivre est, comme on dit en langage de cinéma, un remake. C'est un remake
de ce qui s'est passé en 1980. Je peux vous dire que, comme tous les
remakes, ça va se terminer de la même façon: c'est que les
forces fédéralistes vont l'emporter. Un remake, ça a la
même fin, en l'occurrence un «happy end», une bonne fin, une
fin qui finit bien. Ce remake, M. le Président, on s'en serait bien
passé. Nous sommes obligés de le faire pour établir une
fois pour toutes - et j'espère que ce sera la dernière -que les
Québécois ont choisi la voie du fédéralisme, avec
toutes les imperfections qu'il y a dans ce système-là, avec
toutes les difficultés qu'il comporte, mais en même temps tous les
défis.
Il y a des gens qui préfèrent jouer dans les ligues
mineures. Dans les ligues mineures, ils sont certains de gagner. Ils ont peur
des ligues majeures. Les Québécois, moi, je suis certain qu'ils
ne sont pas comme ça. Ils ne sont pas comme ça, M. le
Président. C'est entendu que le fédéralisme, c'est un
combat qui n'est jamais gagné, qui est toujours à recommencer. Ce
n'est pas une situation de tout repos, le fédéralisme. Ce n'est
pas une situation qui plaît aux paresseux, que ce soient les paresseux
«physiquement paresseux» ou «mentalement paresseux»,
parce qu'on est obligé de toujours prouver qu'on est capables de se
défendre, qu'on est capables de gagner des points, qu'on est capables
d'avancer.
Mais ça, M. le Président, c'est gratifiant pour les gens
qui n'ont pas peur de l'effort. C'est gratifiant parce qu'on ne gagne pas
contre des pas-bons. On gagne dans des ligues majeures. C'est ça que
j'invite la population québécoise à décider de
continuer de faire, comme ils ont décidé de le faire le 20 mai
1980. À un moment donné, il va falloir en revenir des referenda -
parce que c'est pluriel. Il va falloir en revenir des referenda, M. le
Président, parce qu'un après l'autre, ça ne peut pas
durer. C'est pour ça que le fiel qui nous vient de l'autre
côté s'explique. Ils jouent leur survie, M. le Président.
Ils le savent fort bien. Ils le savent fort bien que, pour eux, une acceptation
des offres est un déni à leur endroit qui ne leur laisse plus de
place sur l'échiquier politique du Québec.
Devant cette évidence, ils sont comme des noyés qui sont
prêts à s'accrocher au moindre fétu de paille. Ils sont
prêts à apostasier leur foi, leur foi séparatiste,
souverainiste. Ils sont prêts à apostasier tout ce qu'ils ont de
plus cher et ce qui est leur raison d'exister. La preuve, M. le
Président, vous avez entendu pas n'importe qui, le chef des forces
séparatistes, des forces souverainistes dire: Nous autres, la
souveraineté, on n'en parle pas, ça ne nous regarde pas. Il
n'est pas question de souveraineté à ce
référendum-là. Ah oui? Ah oui? Vous demanderez aux gens un
peu partout. Ce n'est que de ça que vous pariez. Vous avez vécu
par la souveraineté, vous périrez par la souveraineté. Je
vous l'annonce. Je vous l'annonce parce que c'est inévitable. Qui vit
par l'épée périt par l'épée. Qui vit par la
souveraineté périt par la souveraineté.
Vous avez cette immense pierre au cou qui vous entraîne dans le
fond, et vous le savez. Vous allez caler, vous allez sombrer, vous allez vous
noyer. C'est inévitable. C'est écrit. Tous les cris que vous
pourrez lancer ne vous épargneront pas le sort qui vous attend. Il est
évident... et je ne peux pas, malgré le bon coeur que j'ai, c'est
reconnu partout, avoir la moindre sympathie pour vous autres.
Des voix: Ha, ha, ha! Bravo! Bravo!
M. Doyon: Quand on court après quelque chose et qu'on se
fait rattraper par cette chose, bien, on ne peut pas dire autrement que c'est
bien fait. C'est bien fait.
M. le Président, on en entendra de toutes les couleurs. C'est
drôle qu'on change de fusil d'épaule quand ça nous
plaît. Mais, là, le fusil, non seulement vous êtes en train
de le changer d'épaule, vous êtes en train de le pointer vers
vous. Ne tirez pas sur la gâchette parce que ça va mal finir pour
vous autres. Trompez-vous pas, là.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Doyon: C'est ça que vous êtes en train de faire.
Vous n'êtes pas capables de vous apercevoir que le Québec est en
train de faire des gains extraordinaires et que d'avoir eu un gouvernement qui
a eu la force d'aller chercher ça, avec le premier ministre qui s'est
battu, mois après mois, semaine après semaine, heure après
heure, M. le Président. Ça a été un combat qui
aurait découragé Goliath lui-même. Et ça finit comme
avec David. C'est que David le remporte.
Il faut amener cette preuve-là devant la population qui est
prête à dire oui. La population est prête à dire oui
parce que les offres, fondamentalement, sont bonnes. La société
distincte, la Cour suprême, le partage des pouvoirs, la limite dans le
pouvoir de dépenser, l'immigration. On peut passer toutes les demandes
traditionnelles du Québec. Nous faisons des gains indéniables
partout. (19 heures)
II faudrait être malade pour tenter sa chance en disant: Le pot
n'est pas assez gros. Quand on joue au poker et qu'on a un beau jeu, on ne fait
pas monter les enchères indéfiniment jusqu'à ce que
quelqu'un se trouve avec une «full straight» ou avec un
carré d'as. À un moment donné, on se dit: J'ai trois
dames, deux valets, je pense que je suis capable d'aller chercher le pot.
Il est assez gros, le pot, pour moi. C'est ça qu'on a fait. C'est
ça qu'on a fait. Il y en a dans tous les casinos du monde. On en aura
peut-être ici. Moi, je ne suis pas trop pour ça, mais c'est une
autre histoire. Il y en a dans tous les casinos du monde qui tentent leur
chance jusqu'à la dernière piastre. Ils sont à la
roulette, puis ils viennent de ramasser, là. Ils ont misé sur le
2 et le 3, puis les deux ont sorti de suite. Ils disent: Je prends tout ce que
j'ai ramassé, puis je le mets sur le 0. Le 0 ne sort pas. Il dit:
Maudit, j'aurais dû partir avec mon 2 et mon 3, j'aurais
été pas mal mieux. Il est trop tard, trop tard. La politique, ce
n'est pas un jeu de poker, c'est trop sérieux pour ça. Les gens,
dans tous nos comtés ici, ne veulent pas qu'on joue au poker avec leur
avenir. Ils ne sont pas prêts à risquer de tout perdre pour
montrer qu'on est brave, qu'on n'a pas peur du vide devant nous.
Quand je regarde les péquistes agir, je me dis que ce sont des
adeptes du «bungee» politique. Ce sont des adeptes du
«bungee» politique, mais ils ne sont pas sûrs de leur
élastique. Ils ne sont même pas sûrs d'être
attachés après, mais ils veulent se lancer pareil parce qu'ils
n'ont pas peur! Bon. C'est un choix que vous faites, mais emmenez-nous pas avec
vous autres.
M. le Président, parfois, pour faire comprendre des situations
qui paraissent très sérieuses et très compliquées,
il faut avoir recours à la caricature. On comprend mieux avec des
caricatures. Ça paraît rigolo ce que je raconte, M. le
Président, mais transposez ça dans la vie politique, vous verrez
que le poker et le «bungee» s'appliquent parfaitement à nos
adversaires politiques. Je ne leur reproche pas de jouer au poker, je ne leur
reproche pas de sauter dans le vide, ça, c'est leur affaire. Tout ce que
je leur dis: On n'y va pas avec vous autres, puis n'amenez pas la population.
C'est tout ce que je vous dis. Mais, remarquez bien que la terre est parfois
assez rigide et assez solide. Elle est comme la réalité, elle a
le défaut d'être têtue, et elle ne cède pas la place,
qu'est-ce que vous voulez? Alors, vous risquez d'avoir des ecchymoses, c'est le
moins qu'on puisse dire.
Alors, M. le Président, moi, je comprends difficilement le
raisonnement péquiste, je ne le comprends pas sur bien des points de
vue. J'écoutais juste le chef de l'Opposition en période de
questions, tout à l'heure. Il nous disait que l'entente
constitutionnelle était pour constitutionnaliser la chicane
fédérale-provinciale, parce qu'il faudrait signer des ententes
dans différents domaines, dans le domaine de l'environnement, dans le
domaine de la formation professionnelle, etc. Ça, que c'était la
pire des choses, que c'était pour constitutionnaliser la chicane,
disait-il. Pourtant, il est le premier à dire: Nous autres, on va faire
un pays à part, et on va signer des traités. Qu'est-ce que c'est
qu'un traité? Ce n'est pas une négociation, une discussion, ce
n'est pas de la chicane à un
niveau de pays à pays? Il n'y a pas de différence entre
signer un traité entre un Québec indépendant et un Canada
qui ferait bande à part, et signer des ententes qu'on signera et qu'on
constitutionnalisera. C'est beaucoup plus difficile. C'est beaucoup plus
difficile parce que le rapport de force est moins favorable pour nous, moins
favorable. C'est reconnu.
Qu'est-ce que vous pensez qu'on a l'air, nous autres du Québec,
tout seuls? Je ne nous enlève pas nos qualités, je dis tout
simplement que celui qui est assez fin pour s'allier avec quelqu'un qui est
plus fort que lui sort grandi, et celui qui s'est allié avec lui aussi.
Je me dis qu'on a tout avantage à discuter avec les États-Unis en
ayant comme partenaire politique, économique, social, à tous les
niveaux, le reste du Canada, qu'on va s'en tirer avec une entente qui va faire
bien plus notre affaire. Si la logique péquiste dit que les ententes
constitutionnelles à signer, à intervenir sont de la chicane, que
seront les traités à intervenir entre un Québec
éventuellement et potentiellement - d'une façon
éloignée - indépendant vis-à-vis des partenaires
qu'il voudra, avec lesquels il voudra signer des traités, que ce soit
dans le domaine économique, que ce soit dans le domaine de la
défense, que ce soit dans n'importe quel domaine?
Alors, M. le Président, je suis à court de
compréhension dans la logique péquiste. Ils nous disent: On ne
s'entendra pas avec des gens avec lesquels on est habitués de s'entendre
depuis 125 ans. Ça fait 125 ans qu'on fait des affaires avec ce
monde-là, puis là, la pire des affaires qui puisse nous arriver,
c'est de continuer d'en faire. Ça, c'est la fin du monde.
Mais, d'un autre côté, on ne recule pas, on ne fait pas
état des efforts qu'il y aurait à faire pour signer des
traités, par exemple, avec d'autres partenaires qui nous sont totalement
étrangers, avec lesquels on n'a jamais transigé, qui s'appellent
les États-Unis, qui s'appellent le Mexique, qui s'appellent l'Europe et,
pourtant, ça, ça ne leur fait pas peur. Philosophie du
«bungee», M. le Président, philosophie du poker. On dit: On
va tout risquer pour avoir plus, en risquant de tout perdre, alors qu'il est
évident que la table tourne en faveur du tenancier et non pas en faveur
du joueur, parce que le casino, il fermerait autrement, si ce n'était
pas comme ça.
M. le Président, je suis un peu désemparé devant la
façon dont les choses se passent. J'aurais souhaité que nous
puissions discuter des articles de l'entente. On a ici l'entente, le rapport du
comité sur la Constitution, Charlottetown, 28 août 1992, un texte
définitif, qui fait une vingtaine de pages, 21 pages, et qui nous
permettrait de prendre les clauses l'une après l'autre, regarder ce qui
en est, évaluer les gains que fait le Québec.
Ce n'est pas ça qu'on fait. On dit: On refuse parce qu'on
préfère risquer plus pour avoir le tout, en sachant que les
chances d'avoir le tout sont absolument minimes. Il est décourageant, M.
le Président, d'avoir à recommencer indéfiniment ce genre
de discussion et à faire des preuves ad nauseam que, dans la
réalité de tous les jours, ce qu'ils appellent la «Real
Politik», les choses ne se passent pas comme ça, parce que la
politique, qu'elle se fasse à n'importe quel niveau - le premier
ministre le disait l'autre jour - c'est un rapport de force, et il faut savoir
évaluer ses propres forces, il faut savoir calculer ses faiblesses, il
faut savoir savoir compenser ses faiblesses avec des alliances avec d'autres
partenaires, et c'est ça que de faire une politique intelligente.
Je n'ai pas entendu de discours de la part du Parti
québécois qui puissent nous mettre vis-à-vis des
alternatives viables, qui puissent nous amener vers des solutions favorables
à la population. On nage dans une espèce de noman'sland,
où on ne sait pas trop où on se situera, et on veut
entraîner la population là-dedans. Moi, la gageure que je prends,
M. le Président, c'est que la population n'est pas prête à
faire confiance au Parti québécois pour nous amener dans une
aventure risquée comme celle-là.
Il est sûr que l'aventure peut être tentante, que, si
j'avais à écrire un roman qui n'aurait pour effet que de
délasser, de dérider et de faire passer une bonne soirée,
j'écrirais un roman d'aventures qui aurait pour thème la
souveraineté. Mais je serais dans le domaine romantique, M. le
Président, je serais dans la fiction, je serais dans la
politique-fiction. Mais là, on n'est pas dans la politique-fiction. Nous
sommes dans la réalité, et on ne peut pas prendre de tels
risques. Les gens qui ne travaillent pas, les gens qui ont toutes les
difficultés du monde, et il y en a dans tous nos comtés, parce
que j'ai eu des téléphones.
Aujourd'hui, je suis allé faire du bureau de comté
tantôt. M. le Président, les gens m'appellent et me disent: J'ai
de la difficulté à trouver les 75 $ que ça me coûte
pour faire entrer mon enfant à l'école. Je leur dis: Oui, oui,
mais on va tout régler ça avec la souveraineté.
Probablement qu'il y a une option de ce côté-là. Si vous
saviez, M. le Président, le genre de réponse que j'ai à ce
moment-là. Est-ce que les collègues péquistes font du
bureau de comté? Est-ce qu'ils n'ont pas ce genre de
téléphone?
M. le Président, je les invite et j'invite la population à
la prudence, au réalisme, de façon à ce que nous puissions
faire ce débat le plus normalement possible, d'une façon la plus
civilisée possible, mais que nous le fassions de façon à
ce qu'une fois pour toutes, nous mettions fin à ces tergiversations et
que, enfin, nous sachions qu'au Québec les choses se passent à
l'intérieur du Canada, avec ce que ça comporte de bien et de mal.
Merci, M. le Président. (19 h 10)
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Louis-Hébert. Mme la députée de
Terrebonne, je vous cède la parole. Vous avez droit à une
période de 20 minutes.
Mme Jocelyne Caron
Mme Caron: Merci, M. le Président. Le député
de Louis-Hébert, avant de faire des sermons à mon
collègue, le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, devrait
faire des sermons à ses propres collègues qui ne cessent depuis
deux jours d'utiliser le nom de René Lévesque, le fondateur de
notre parti, qui a quitté le Parti libéral parce qu'il croyait
à la souveraineté du Québec, qui, en 1980, savait qu'il
voulait la souveraineté et votait pour le oui. Et vous ne cessez de
l'utiliser depuis deux jours. Donc, vos sermons, faites-les donc pour vos
collègues! Et si vous n'avez pas encore compris que quitter le statut
d'une province pour devenir un pays, c'est effectivement quitter les ligues
mineures pour aller dans les ligues majeures, vous ne comprendrez jamais.
M. le Président, l'intervention précédente me
faisait pitié, et je comprends que la population n'ait aucunement
confiance dans les politiciens et qu'ils n'aient aucune
crédibilité pour elle. M. le Président, on peut utiliser
des caricatures, mais on n'est pas obligé d'en être une
soi-même. On n'a pas à gager sur l'avenir constitutionnel du
peuple québécois, on a à lui laisser faire ses choix.
M. le Président, oui, nous faisons du bureau de comté
régulièrement, et nous avons dû mettre sur pied, dans nos
comtés, des comités de dépannage, instaurer des cuisines
collectives, parce que ce gouvernement est incapable d'administrer et parce que
nous n'avons pas en main tous les outils économiques pour notre propre
développement.
M. le Président, la semaine prochaine, nous aurons des
célébrations sur notre système démocratique, sur le
Bicentenaire, et nous nous retrouvons encore aujourd'hui devant un non-respect
du système parlementaire - nous avons aboli les règles
parlementaires - le non-respect d'une loi votée par ce gouvernement, la
loi 150, le non-respect des signatures, le non-respect des engagements du
premier ministre et du responsable du dossier constitutionnel et le non-respect
de la population.
M. le Président, non-respect du gouvernement libéral pour
sa propre loi 150, qui l'oblige à revenir devant l'Assemblée
nationale pour l'amender par la loi 44. Et certains ont même
tenté, M. le Président, de nous dire qu'on modifiait la loi 150
pour mieux la respecter. Eh bien! si on la respectait, nous ne nous
retrouverions pas devant deux projets de loi, M. le Président, nous
n'aurions que la loi 150, et nous serions déjà en train de
discuter de la question référendaire sur la souveraineté.
C'est ça, la réalité. Si nous avons le projet de loi 44
entre les mains, c'est que ce gouvernement a décidé de ne pas
respecter la loi 150. Non-respect également de la signature du premier
ministre et de ceux qui ont participé à la commission
Bélanger-Campeau, parce que, il faut le rappeler, toutes ces personnes
avaient signé pour un référendum sur la
souveraineté du Québec, au plus tard le 26 octobre. Non-respect
également pour leur propre programme, pour leur propre parti politique,
M. le Président. Non-respect pour l'aile jeunesse. Non-respect pour
celui qui avait présenté ce qui était, à leur avis,
la meilleure proposition constitutionnelle, le rapport Allaire. Il faut
rappeler que le premier ministre avait signé et fait approuver par son
parti le rapport Allaire, qui prévoyait qu'à défaut
d'obtenir 22 pouvoirs pour le Québec un référendum sur la
souveraineté aurait lieu, M. le Président. Donc, non-respect pour
leur propre signature. Le premier ministre avait même dit, au terme des
travaux de la commission Bélanger-Campeau, et je cite: «Un
changement profond est, je crois, la volonté du peuple
québécois, de la très grande majorité du peuple
québécois.» Donc, un non-respect également de cette
population, M. le Président, non-respect de la population qui a
signé, à plus de 700 000 personnes, une pétition pour
demander de respecter un référendum sur la souveraineté.
Non-respect des personnes qui se sont prononcées à 75 % pour la
tenue d'un référendum sur la souveraineté, et non-respect
de leurs propres engagements, M. le Président, engagements du premier
ministre et engagements du responsable du dossier constitutionnel. Et je vais
leur rappeler ces engagements, M. le Président.
Le 14 juin 1991, dans Le Devoir, le ministre des Affaires
canadiennes nous disait: Les cinq conditions sont toujours là, mais
l'accord du lac Meech est mort. Les cinq conditions sont un premier pas vers
une réforme, mais ce que nous voulons, c'est une réforme
complète de la Constitution, des changements au partage des
compétences législatives et aux institutions comme la Cour
suprême et le Sénat.
M. le Président, ils n'ont pas réalisé cet
engagement. Le premier ministre lui-même, le même jour, disait: II
faut mettre fin au fédéralisme compétitif, au
dédoublement, et en arriver à un fédéralisme
efficace. Aucun nouveau pouvoir, on n'a aucunement mis fin au
dédoublement dans les ministères, M. le Président.
Non-respect aussi de leurs engagements, faut-il le rappeler. Le premier
ministre, dans Le Monde, nous disait: Trois points étaient
prioritaires. Il fallait les maintenir à n'importe quel prix. Il faut
d'abord que soit reprise la substance de l'accord du lac Meech à propos
du statut de société distincte pour le Québec. Huit
constitu-tionnalistes, hier, nous ont dit que, non, ça n'avait pas
été tenu, non, ça n'avait pas été
respecté. Il faut ensuite un nouveau partage du pouvoir qui permette un
fédéralisme plus effi-
cace. Aucun nouveau partage. Aucun nouveau pouvoir exclusif. Et il
ajoutait, et là on n'en entend plus parier, mais plus du tout, M. le
Président: II faut, enfin, que, sur les autres objectifs de la
réforme constitutionnelle - l'adoption d'une charte sociale, le
renforcement de l'union économique canadienne et la réforme du
Sénat -les pouvoirs du Québec ne soient pas réduits. C'est
exactement ça qu'il a fait, il a laissé réduire les
pouvoirs du Québec sur le Sénat. Et aucune charte sociale, M. le
Président.
M. le Président, on a également oublié de tenir
compte des revendications des femmes. On n'en parie pas beaucoup en cette
Chambre, c'est très rare, M. le Président. Il faut
peut-être rappeler que, lors de Bélanger-Campeau, des
regroupements de femmes étaient venus parier de revendications. On avait
demandé de récupérer des pouvoirs pour une politique
familiale. On avait demandé de récupérer les allocations
familiales pour cesser le dédoublement. Personne n'en a tenu compte,
peut-être parce que dans ce groupe de négociateurs il n'y avait
aucunement de femmes, M. le Président. Les femmes autochtones aussi ont
déploré ce qui s'était passé lors des
négociations.
M. le Président, parmi les non-respects de leurs engagements, il
faut rappeler également, bien sûr, l'engagement du premier
ministre le 23 juin 1990: C'est la décision de mon gouvernement de
négocier dorénavant à 2 et non à 11. C'est vrai
qu'il n'avait pas parié de 17, M. le Président, à ce
moment-là.
Toujours, le 5 mai 1992, M. Bourassa commençait à
émettre de très sérieuses réserves sur l'ampleur
des pouvoirs à confier au Sénat et il a dit carrément non
au principe d'une représentation égale pour chaque province. Nous
nous retrouvons avec cette représentation égale. Tout le monde, 6
sénateurs. Le Québec a perdu 18 sénateurs, mais le
Québec n'a pas perdu sa part pour payer 25 %, par exemple, du
Sénat.
M. le Président, devant tous ces non-respects, c'est difficile de
parier d'un système politique démocratique. Le plus
étonnant, M. le Président, c'est que je m'attendais à ce
que le premier ministre et le porteur du dossier constitutionnel, le ministre
de la Justice, responsable de la Protection du consommateur - il ne faut pas
l'oublier, même si lui-même semble l'oublier souvent - sont
allés négocier et ont démontré qu'ils
étaient des consommateurs tout à fait irresponsables. J'invite le
ministre de la Justice, responsable de la Protection du consommateur, à
relire les revues qu'il vante amplement deux fois par année, M. le
Président, lorsqu'on parie de la Semaine de la protection du
consommateur et lorsqu'on parie de la Journée des droits des
consommateurs. Ça arrive deux fois par année. Il nous parle
beaucoup de la revue Protégez-Vous. Je la feuillette
régulièrement, moi, M. le Président, pas deux fois par
année, et on nous dit que, pour tout achat, pour toute
négociation, pour un bien et un service, avant de vous engager,
vérifiez. N'hésitez pas à poser des questions.
Évaluez vos besoins et, surtout, le consommateur doit exiger un contrat
écrit. Le responsable de la protection du consommateur est allé
négocier, il n'a pas demandé de contrat écrit, on n'en a
toujours pas - et il faut rappeler qu'il est ministre de la Justice aussi - et
les textes juridiques n'arriveront pas avant le référendum. Et
c'est celui qui est supposé défendre les droits des
consommateurs! (19 h 20)
M. le Président, on nous demande de lire les étiquettes
lorsqu'on achète un bien. On nous demande de vérifier lors de
l'achat d'une automobile, lors de l'achat d'une maison, de ne rien signer avant
d'avoir lu, d'avoir vu le véritable texte et d'exiger un contrat
écrit. Et pour l'avenir d'un peuple, pour ce contrat collectif, aucune
protection. On se fie sur la parole de négociateurs qui n'ont jamais
défendu nos intérêts. M. le Président, je vous avoue
que c'est déplorable et je ne comprends absolument pas que des personnes
qui sont supposées être responsables et qui allaient
négocier au nom du peuple québécois l'aient fait de cette
façon, d'une manière qui nous protégeait moins que lors de
l'achat d'un bien ou d'un service. C'est révoltant!
On a peut-être oublié, parce qu'on voulait revenir avec un
projet verbal à tout prix, parce qu'il y avait la fameuse date du 26
octobre, ce qu'on allait négocier. Ce qu'on allait négocier,
c'était d'abord et avant tout des pouvoirs additionnels pour le
Québec. En 1867, le Québec possédait 11 pouvoirs
exclusifs; aujourd'hui, avec les offres, 6 pouvoirs exclusifs, un recul de 5
et, en plus, ces 6 pouvoirs, nous devrons continuer à négocier.
Le rapport Allaire, quant à lui, vous vous en souvenez très bien,
demandait 22 pouvoirs, et sans oublier tous les groupes qui sont venus à
Bélanger-Campeau et qui réclamaient, eux, tous les pouvoirs.
Étant responsable de la protection du consommateur, je
rappellerai, évidemment, les demandes de la Fédération des
ACEF du Québec, Fédération qui existe depuis plus de 20
ans, qui regroupe 12 associations réparties dans 10 grandes
régions du Québec. Je me contenterai de la conclusion de leur
mémoire, qui était extrêmement intéressant et qui
dénotait les principales lacunes du système actuel. On nous
disait: Après cet exposé de notre perception de la
société québécoise actuelle et de nombreuses
questions qui se posent pour décider de son avenir, nous en venons
à la nécessité de reprendre en main tous les pouvoirs
nécessaires à la réalisation d'un nouveau projet de
société, que ces pouvoirs soient politiques, économiques
ou administratifs. Mais surtout, surtout, le Québec a besoin d'un
gouvernement courageux qui ne balaie pas ses problèmes sociaux sous le
tapis. Il est urgent de
redonner à tous les Québécois et à toutes
les Québécoises, jeunes, âgés, riches, pauvres,
autochtones, immigrants, la foi en un projet de société où
il n'y aura pas d'exclus. M. le Président, nous avons eu un gouvernement
qui est allé négocier sans courage, un gouvernement qui est
allé négocier à genoux et qui était vraiment sous
le tapis, contrairement à tout ce que les groupes avaient
demandé.
Évidemment, à titre de porte-parole des corporations
professionnelles, je rappellerai également que la Chambre des notaires
du Québec avait, elle aussi, réclamé le rapatriement de
tous les pouvoirs. Nous revenons sans aucun nouveau pouvoir additionnel.
L'Ordre des comptables agréés avait également
réclamé le rapatriement de l'assurance-chômage - nous ne
l'avons pas -le rapatriement de l'ensemble de la main-d'oeuvre et non de
négociations pour la main-d'oeuvre, le rapatriement de tous les pouvoirs
pour la recherche et le développement, pour la formation
professionnelle, pour l'immigration. L'Ordre des agronomes avait
également demandé ces mêmes pouvoirs, plus le respect du
pouvoir exclusif de l'éducation. Le gouvernement fédéral
ne se gêne pas pour dépenser dans ce pouvoir qui était
supposé nous être exclusif et ne le ramène pas dans les
pouvoirs exclusifs, il faut se le rappeler. La Fédération des
médecins omnipraticiens du Québec avait également
demandé le rapatriement de la main-d'oeuvre, M. le Président.
Conclusion: Les différents groupes... et le porteur du dossier
constitutionnel, lui-même, l'a rappelé dans son discours, hier.
Bélanger-Campeau était claire, il fallait un renouvellement en
profondeur du fédéralisme ou l'accession à la
souveraineté. Comme il n'y a eu aucun renouvellement en profondeur du
fédéralisme, nous devions donc passer à l'autre
étape, c'est-à-dire à l'article 1 de la loi 150, un
référendum sur la souveraineté.
M. le Président, de l'autre côté, on a tenté
de minimiser. On a tenté de dire que les arguments ne venaient que du
Parti québécois. Pourtant, tous les autres intervenants ont
dénoncé ces pouvoirs que le ministre n'est pas allé
chercher. Jean Allaire, ce n'est pas un péquiste, il a renouvelé
sa foi au Parti libéral et, pourtant, il reconnaît que cette
négociation est inacceptable. M. Garceau. Les jeunes libéraux, ce
ne sont pas des péquistes, M. le Président. Les chefs des
syndicats et plusieurs députés du côté du Parti
libéral s'interrogeaient ce matin dans nos journaux, trouvaient qu'il y
avait encore des imprécisions. J'en vois un, là, il avait des
imprécisions ce matin. Huit const it utionnalistes, qui ne sont pas tous
des péquistes, M. le Président, eux aussi ont trouvé que
la société distincte, c'était un recul par rapport
à ce que nous avons actuellement. M. le Président, ça me
rappelle un petit peu les projets de loi que nous discutions l'an dernier,
où on nous disait qu'il n'y avait que le Parti québécois
qui s'opposait à la TPS, qu'il n'y avait que le Parti
québécois qui s'opposait à la TVQ, qu'il n'y avait que le
Parti québécois qui s'opposait aux augmentations de taxes.
Pourtant, nous n'étions pas les seuls, M. le Président.
J'ai commencé une tournée de comté au début
du mois d'août, et je peux vous assurer que les peurs que le Parti
libéral va vouloir faire n'atteignent plus personne, M. le
Président. Ce sont eux qui ont peur, et depuis deux jours, cette peur,
on la sent. Ils ont peur de perdre un référendum sur la
souveraineté; donc, on amende la loi 150. Ils ont peur de voir leur
parti divisé; donc, on étouffe les débats. Ils ont peur de
perdre le pouvoir parce que, suite à cet échec, le 26 octobre,
ils devront faire des élections, M. le Président. Ils ont peur
d'avoir peur. La peur de vous tenir debout comme un peuple, comme tous les
peuples de la terre. Mais le peuple du Québec, lui, il n'a pas peur, et
moi j'ai confiance en ce peuple du Québec. (19 h 30)
Le peuple du Québec, lui, sait qu'il mérite d'être
traité comme un peuple et non comme une minorité, sauf pour
l'argent qu'elle apporte dans le système de ce Canada ruiné. Le
peuple du Québec sait que les offres sont un recul, qu'elles ne
répondent aucunement à ces demandes exprimées sur toutes
les tribunes, sur toutes les commissions qui nous ont coûté une
fortune, M. le Président. Le peuple du Québec en a assez de faire
rire de lui par l'ensemble canadien en payant pour les autres et en payant pour
continuer les querelles fédérales-provinciales. Le peuple du
Québec veut qu'on le respecte. C'est pourquoi nous dirons non avec lui
à des offres inacceptables, qui ne viennent aucunement régler les
problèmes que nous vivons, qui ne viennent aucunement régler le
problème du chômage, la récession, la pauvreté qui
grandit. Non, nous sommes un peuple qui se respecte, et aux offres
réchauffées de septembre 1991 et du 7 juillet...
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je vous demande de
conclure, madame.
Mme Caron: ...nous disons non, M. le Président.
Le Vice-Président
(M. Lefebvre): merci. merci, mme
la députée de terrebonne. alors, le reconnais maintenant m. le
député d'anjou. vous avez droit également à une
période d'intervention de 20 minutes.
M. Pierre Bélanger
M. Bélanger (Anjou): Je vous remercie, M. le
Président. Je trouve assez particulier qu'on se retrouve maintenant en
train de discuter d'un amendement à la loi 150. En effet, M. le
Président, lors de la dernière session, à maintes
reprises, on se faisait répéter par le premier ministre et par le
ministre de la Justice que la
loi 150 telle quelle permettait ce genre de consultation populaire sur
des offres. Alors, non, M. le Président, on décide tout
simplement, maintenant, que ce n'est plus le cas et on amende la loi. Mais,
alors, la perle, M. le Président, je pense qu'elle revient au ministre
de la Justice, qui dit: On amende la loi pour mieux la respecter. Alors,
là, M. le Président, pour un avocat, se présenter devant
un juge et avoir un tel argument, je pense que c'est un motif pour se faire
renvoyer sur un banc d'école. En effet, M. le Président, on ne
modifie pas une loi pour la respecter. On la respecte telle qu'elle est, et
c'est un argument qui ne tient absolument pas en soi.
C'est dommage, M. le Président, qu'on amende ainsi la loi, parce
que je pense que le Québec va manquer un rendez-vous avec l'histoire. En
effet, M. le Président, chez les gens, on sentait cette
nécessité d'avoir un débat, un débat de fond qui
allait régler la question constitutionnelle du Québec, et ce que
les gens réclamaient - d'ailleurs, les pétitions au nombre de 700
000 signatures qui ont été déposées depuis les
derniers mois le disaient - les gens voulaient un référendum sur
la souveraineté. Ils voulaient réellement se prononcer sur la
réelle question qui les préoccupait.
Non, M. le Président, tout simplement pour éviter le
réel débat, pour éviter un débat sur la
souveraineté, on amende la loi 150, on amende la loi 150 pour faire
porter le débat sur les offres. Car, M. le Président, c'est
ça, le débat qu'il va y avoir pendant les prochaines semaines.
C'est un débat sur les offres et non sur la souveraineté, non pas
parce qu'on l'a voulu, parce que le parti au pouvoir, parce que le gouvernement
du Parti libéral a décidé que ce référendum
porterait sur les offres.
On aimerait, évidemment, faire le procès de la
souveraineté. Mais, si on voulait faire le procès de la
souveraineté, M. le Président, il faudrait que la question, que
le référendum porte sur la souveraineté. Si ces offres
étaient ou sont tellement bonnes, M. le Président, pourquoi ne
pas avoir laissé la loi 150 telle qu'elle est? Ça aurait
été une arme redoutable, ces offres, si elles sont si bonnes que
ça. Ça aurait été une arme redoutable justement
pour repousser la souveraineté, battre définitivement la
souveraineté et ainsi régler une fois pour toutes la question
constitutionnelle au Québec. Non, M. le Président. On a
décidé de ne pas prendre de chance. Ces offres sont tellement
boiteuses, sont tellement ridicules qu'on a décidé d'enlever tout
risque. On a enlevé complètement la souveraineté du
prochain débat référendaire.
Ainsi, M. le Président, quand ces offres seront battues, eh bien,
ça ne créera aucune obligation pour le gouvernement de
créer, de faire la souveraineté. C'est ça, l'enjeu. Je
pense que le gouvernement a vu comme tout le monde les récents sondages
qui disaient qu'une majorité de francophones, s'ils avaient à
choisir entre les offres qui leur sont présentées
présentement et la souveraineté du Québec, une
majorité opterait pour la souveraineté du Québec, et c'est
une chance que le gouvernement ne veut pas prendre. Alors, je ne comprends
absolument pas l'indignation du gouvernement à ce qu'on refuse de faire
le procès de la souveraineté. C'est eux qui l'ont choisi. C'est
eux, maintenant, qui devront vivre avec le référendum et qui
devront vivre avec le débat qui va se faire.
Alors, regardons, M. le Président, ces offres. Regardons ces
offres faites par le Canada anglais. Première chose que nous devons nous
demander, c'est: Quelles sont ces offres? Car, dès notre arrivée
à l'Assemblée nationale, notre convocation, à notre grande
suprise, on a constaté qu'il n'existait aucun document, qu'il n'y avait
aucun document qui nous a été déposé devant cette
Assemblée, qui est à notre disposition pour pouvoir
étudier réellement ces offres. Encore plus, M. le
Président, on a appris que les textes juridiques, c'est-à-dire
les textes liant les gouvernements, ces textes ne seront pas disponibles avant
le référendum. C'est donc dire qu'ils ne sont pas prêts,
c'est donc dire qu'ils ne sont pas rédigés, qu'ils n'ont pas
été encore négociés.
Alors, M. le Président, je me demande comment on peut demander
qu'un réel débat se fasse sur des offres, alors que ces offres ne
sont même pas concrètement terminées. Nous avons quand
même certains documents informels, des documents d'entente. Alors, faute
de mieux, nous allons nous contenter de ces documents. Au niveau des
revendications traditionnelles du Québec, M. le Président, un des
éléments essentiels dans ces revendications était
l'attribution de nouveaux pouvoirs, une nouvelle redistribution des pouvoirs.
La majorité, la grande majorité des intervenants et des
organismes qui se sont présentés devant la commission
Bélanger-Campeau ont témoigné de la
nécessité d'un nouveau partage des pouvoirs et d'un rapatriement
des pouvoirs vers le Québec.
Alors, qu'est-ce qu'on constate, M. le Président? Aucun nouveau
pouvoir pour le Québec. Aucun! alors que, comme je vous l'ai dit, M. le
Président, ces organismes avaient mis en évidence la
nécessité de mettre fin aux fameux dédoublements des
compétences entre le gouvernement fédéral et le
gouvernement provincial, ces dédoublements qui nous coûtent si
cher en impôts, en perte de temps, en perte d'énergie. Alors,
aucun nouveau pouvoir; donc, c'est le statu quo. La Constitution de 1867 nous
en reconnaissait 11, pouvoirs, qui étaient exclusifs au gouvernement du
Québec. Maintenant, grâce à ce grand pas en avant, il ne
nous en reste que 6.
M. Bourassa, finalement, a accepté le partage des pouvoirs qu'il
avait rejeté à trois reprises lors les offres
précédentes. J'ai bien
hâte de voir de quelle façon on va vendre aux
Québécois le fait qu'il y a des gains là-dedans. En plus,
dans les six pouvoirs qu'il nous reste, il y a la nécessité pour
le gouvernement du Québec de conclure des ententes administratives avec
le gouvernement fédéral. Alors, où est le gain? On le
cherche, et on le cherchera longtemps.
Le deuxième aspect important, c'est le concept de
société distincte. En effet, depuis longtemps, les
Québécois ont compris qu'il était essentiel de se doter
d'instruments pour pouvoir conserver au Québec son caractère
distinct, son caractère de peuple distinct. Contrairement à
Meech, la clause de la société distincte qui faisait l'objet
d'une clause spéciale, maintenant, on la retrouve noyée dans une
clause dite «Canada». Elle est diluée et elle est mise sur
le même pied que sept autres éléments de cette clause
Canada. Ce qui est vraiment dangereux dans cette clause Canada, c'est qu'elle
crée l'obligation pour le Québec de contribuer à
l'épanouissement et au développement de la langue et de la
culture de sa minorité anglophone. Ça ne prend pas un grand
constitutionnaliste pour vous dire qu'à cause de cette clause la loi
101, qui fait quand même l'objet d'un large consensus auprès des
francophones, cette loi 101 est maintenant menacée. En effet, les
anglophones pourront facilement dire que, vu leur recul au niveau
démographique, ils ont besoin de plus de protection, ils ont besoin de
plus de droits pour leur langue, au niveau de l'affichage, au niveau de
l'accès à l'école anglaise pour les immigrants. Alors
qu'il y avait un genre de paix au niveau linguistique, cette clause de la
société distincte va rouvrir une guerre, va rouvrir une
brèche dans cette loi 101. C'est tout à fait inacceptable pour le
Québec, et je ne comprends pas le premier ministre d'avoir
accepté une telle clause.
Je ne comprends pas non plus comment il peut dire qu'il y a un gain par
rapport à la clause de la société distincte. On se
souvient, d'ailleurs, que cette même clause de la société
distincte, dans Meech, avait fait l'objet d'une résistance farouche de
la part de Clyde Wells. Or, maintenant, M. le Président, depuis que
cette clause de la société distincte se retrouve dans les
nouvelles offres, M. Wells est même prêt à venir au
Québec pour la vendre. Les Québécois ne sont pas fous. Ils
se rendent bien compte que, si M. Wells est maintenant si farouchement en
faveur de cette nouvelle clause de la société distincte, c'est
qu'elle ne veut plus rien dire. Elle n'est que l'expression d'un voeu pieux. Ce
n'est tout simplement qu'un bonbon qu'on donne aux Québécois en
leur disant: Écoutez, maintenant, vous êtes
protégés, on vous donne l'étiquette de
société distincte. Une étiquette sans contenu, une
étiquette sans pouvoirs qui lui sont rattachés. C'est tout
à fait inacceptable, et je peux vous dire que, quand le débat va
réellement se faire là-dessus, je suis certain que les
Québécois vont en comprendre l'impact et l'importance.
D'ailleurs, huit constitutionnalistes... J'entendais le premier
ministre, aujourd'hui, dire que ces huit constitutionnalistes étaient
des péquis-tes. M. le Président, il ne faudrait quand même
pas charrier! Ces huit constitutionnalistes disent: Comme la clause mentionne
trois critères de distinction du Québec - majorité
d'expression française, culture unique et droits civils - il serait
vain, à notre avis, de faire appel à la clause de la
société distincte pour défendre les lois sociales et
économiques comme des lois sur les valeurs mobilières, et tout
ça. Un peu plus loin dans cet article, ils confirment que la clause de
la société distincte va menacer l'intégrité de la
loi 101. (19 h 40)
Autre aspect important, le Sénat. Demandez aux
Québécois ce qu'ils pensent du Sénat, ils vont vous
répondre très rapidement: On devrait l'éliminer, comme on
l'a fait au Québec. Or, non, M. le Président. On essaie
maintenant de nous dire que le Sénat est un grand pas en avant. Non, M.
le Président. Le Sénat, c'est tout simplement une concession
encore qu'on a faite au Canada anglais. En effet, les petites provinces voient
dans le Sénat un instrument qui va réussir à les
protéger de la domination du Québec et de l'Ontario.
Alors maintenant, M. le Président, on va avoir un magnifique
Sénat. Un magnifique Sénat où le Québec va se
retrouver avec six sénateurs, soit autant que
l'île-du-Prince-Édouard. Même pas 10 % des sénateurs.
Ah! en contrepartie, notre premier ministre est allé nous chercher des
garanties. Quelles sont ces garanties? 25 % des députés à
la Chambre des communes, 25 % alors que nous avons 25 % depuis fort longtemps.
On l'a toujours eu, ce 25 %. Pourtant, ce 25 %, ça n'a pas
empêché Ottawa de promulguer la Loi sur les mesures de guerre,
ça n'a pas empêché Ottawa de faire un rapatriement
unilatéral de la Constitution. Puis là, ça devrait
constituer pour nous une garantie, ça, 25 %.
Alors, on crée un Sénat, un Sénat qui va avoir des
pouvoirs. Il va pouvoir, premièrement, bloquer certaines lois et, de
plus, il va faire des nominations politiques à des postes très
importants, comme la Banque du Canada et plusieurs autres organismes
fédéraux.
Autre point qui, d'après mois, est très important et qui
constitue un recul dans cette entente, c'est le droit des autochtones. J'ai
bien hâte de voir comment certains députés libéraux
vont faire leur campagne pour le oui avec cette clause des autochtones. Je dois
tout de suite dire, M. le Président, que les autochtones ont des
revendications légitimes auxquelles le gouvernement du Québec,
peu importe sa composition, devra faire face, et il devra faire des ententes
qui tiennent compte des aspirations des autochtones. Et le Parti
québécois a été le
premier parti au Québec à reconnaître ces
aspirations dans son programme. Cependant, nous avons toujours pensé que
ces revendications des autochtones devront être réglées par
voie de traité et d'entente à l'amiable entre le gouvernement du
Québec et les autochtones. M. le Président, ce qu'on apprend,
c'est que dans cette constitution on prévoit une négociation qui
va durer cinq ans avec les autochtones. Après l'expiration de ces cinq
années, il reviendra aux tribunaux de déterminer quels seront les
droits inhérents qui reviennent à ce troisième palier de
gouvernement qui sera le gouvernement autochtone.
M. le Président, ça ne prend pas quelqu'un de très
expérimenté en négociations pour comprendre ce qui va se
passer. N'importe quelle personne qui a participé à une
négociation vous dira que quand il y a un temps limite dans cette
négociation, on attend à la dernière minute avant de
commencer à négocier. Et quand le temps est expiré,
à ce moment-là, on regarde ce qu'on a obtenu et, si on n'est pas
satisfaits, on prend notre chance et on s'en va devant les tribunaux.
Alors, ce qui va arriver dans cinq ans, M. le Président,
c'est-à-dire, les tribunaux... Ça sera la Cour suprême en
dernier ressort qui dira quels seront les pouvoirs inhérents des
autochtones, quelles seront les limites de leurs territoires, quelles seront
les limites de leurs droits et de leurs pouvoirs. Et le Québec devra
être impuissant. L'Assemblée nationale restera impuissante face
à ce jugement de la Cour suprême du Canada.
M. le Président, c'est tout à fait inacceptable, et j'ai
bien hâte de voir comment on va réussir à vendre ça
aux Québécois, en particulier dans les comtés qui sont
limitrophes aux réserves. Je pense que c'est tout à fait explosif
comme clause, c'est tout à fait inacceptable. D'ailleurs, même le
ministre de la Justice, le ministre Rémillard, avait dit à Anjou
qu'il n'accepterait jamais que les tribunaux, en dernier ressort, accordent ou
définissent les pouvoirs délégués aux autochtones.
Il semblerait qu'il a changé d'avis, M. le Président. Il a
changé d'avis, mais ça ne fait pas en sorte qu'on doive accepter
cette chose.
Alors, M. le Président, voilà les offres du Canada. Pas
besoin de vous dire qu'elles ne créent aucun emballement. On l'a vu lors
de la convention libérale. On ne viendra pas nous dire quand même
que Jean Allaire est un péquiste, que Mario Dumont est un
péquiste. On l'a vu, d'ailleurs, après la convention
libérale, M. Dumont a encore répété son
allégeance à son parti. Mais ça ne l'empêche pas de
voir clair dans ces offres, de voir que ces offres ne correspondent pas du tout
aux aspirations des jeunes Québécois, tant du Parti
québécois que du Parti libéral.
Alors, il n'y a aucun emballement qui est créé. Il n'y a
aucun emballement non plus qui est créé chez les militants
libéraux, j'en suis certain. Ah! évidemment, il y a quelques purs
durs dont nous avons, je pense, un grand échantillonnage ici à
l'Assemblée nationale. Pour ces purs durs, évidemment, tout ce
qui vient du Canada et des montagnes Rocheuses, c'est bon, il faut le prendre.
Mais, quand on va arriver dans les comtés, finalement, à stimuler
nos membres, à mobiliser nos membres, ça va être une autre
paire de manches.
M. le Président, le Québec a manqué une chance en
or de vraiment sortir de ce bourbier constitutionnel. En effet, M. le
Président, on avait réussi, avec cette éventualité
de référendum sur la souveraineté, avec cette commission
Bélanger-Campeau, avec tous ces événements qui tournaient
autour de la souveraineté, on avait réussi à créer
un rapport de négociations. On avait réussi à prouver au
Canada anglais que, pour une fois dans notre vie, nous, les francophones, on se
tiendrait debout, qu'on savait ce qu'on voulait. Mais le ballon de notre
premier ministre s'est dégonflé.
On l'a vu, M. le Président, dans les dernières semaines.
Tout à coup, notre premier ministre a tout réglé en 3 ou 4
jours. Alors qu'en 30 ans, M. le Président, on n'a rien réussi
à régler, en 3 jours, lui, il a tout réglé.
D'ailleurs, c'en était risible à la télévision,
quand on voyait à tous les jours M. Mulroney et M. Bourassa qui venaient
à la caméra pour dire: On a maintenant une entente
là-dessus. La journée d'après: On a maintenant une entente
là-dessus. Ça arrivait à un rythme tellement fou qu'on
avait peine à croire ce qu'on voyait. D'ailleurs, je pense que les
Québécois ne sont pas dupes. Ils voient bien que, s'il y a eu une
entente, c'est au prix de concessions inacceptables.
On voulait une entente à tout prix, car le premier ministre avait
compris qu'il ne pouvait pas revenir les mains vides devant cette
Assemblée nationale, qu'à ce moment-là ça ne
laisserait qu'un choix aux Québécois, c'est-à-dire celui
de se prendre en main et de faire la souveraineté du Québec.
Mais notre premier ministre, quand même, il faut lui donner
quelque chose, il connaît bien les Québécois. Ce n'est pas
pour rien, d'ailleurs, qu'il est premier ministre depuis si longtemps, c'est
qu'il les connaît bien. Il a senti chez les Québécois une
lassitude, une lassitude de toute cette question constitutionnelle, quand on
est pris dans une crise économique qui perdure et qui crée
tellement de misère partout au Québec. Il a vu cette lassitude et
il croit que les Québécois, endormis par cette lassitude, vont
accepter n'importe quoi. Mais, où il a fait son erreur, M. le
Président, c'est que cette lassitude n'a pas éteint la
fierté des Québécois.
Les Québécois veulent un règlement durable. Ils ne
veulent pas tout simplement un genre de panacée. Et c'est ce qu'on leur
offre. Aucun Québécois ne va croire que cette entente
règle
une fois pour toutes la question constitutionnelle au Québec.
Ça ne règle rien. Au contraire, dès que cette entente
serait acceptée, ça serait le feu vert pour une série
ininterrompue de négociations fédérales-provinciales.
Ça ne cessera jamais. Il y aura toujours un tribunal... En tout cas,
pour la question autochtone, il y aura un tribunal, en plus, qui sera là
pour trancher décisivement sans que l'Assemblée nationale puisse
réagir.
C'est un recul pour le Québec, M. le Président, et
j'invite tous les Québécois, de toutes tendances politiques,
à réaliser exactement ce qui se passe et à réagir
d'une façon vigoureuse en votant non sur ces offres. Je vous
remercie.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député d'Anjou.
Nous sommes à discuter de la motion proposant l'adoption du
principe du projet de loi 44, Loi modifiant la Loi sur le processus de
détermination de l'avenir politique et constitutionnel du Québec.
Je reconnais maintenant M. le député de Gouin. Vous avez droit
également à une intervention de 20 minutes, M. le
député.
M. André Boisclair
M. Boisclair: Merci, M. le Président. L'intervention que
j'aurai à faire aujourd'hui sera sans doute une de celles qui seront des
plus déterminantes dans toutes celles que j'ai eu l'occasion de faire
depuis que je siège avec vous, M. le Président, à cette
Assemblée.
M. le Président, au moment où le Québec
connaît un taux de chômage inacceptable de 13 %, à un moment
donné, dans le quartier de Rosemont, le quartier de la Petite-Patrie,
des paroisses comme celle de Saint-Étienne, des paroisses comme celle de
Sainte-Gemma connaissent, selon les derniers recensements de 1985, des taux de
chômage de 17 %, 18 %, 19 %. (19 h 50)
Alors, M. le Président, le Québec que nous
représentons ici, en cette Chambre, à chaque jour, se casse un
peu plus rapidement, va un peu plus loin dans les divisions qui
déchirent notre tissu social, qui déchirent des familles, qui
déchirent le bonheur, qui déchirent, finalement, ce que nous
avons de plus précieux. À un moment où, cependant, aussi,
nous sommes interpellés par de nouvelles réalités;
à un moment où, M. le Président, des gens de tous les
coins du monde font des efforts remarquables en termes de formation, en termes
de création d'emploi; à un moment où on discute
d'environnement, comme on l'a fait de façon significative à
l'occasion de la dernière conférence de Rio; à un moment
où les Européens discutent d'un traité sur le fond
important, qui viendra changer la face de l'Europe; à un moment, M. le
Président, où le Canada vient de signer un traité, un
traité d'union économique, avec le Mexique et, bien sûr,
par l'entremise des États-Unis et avec les États-Unis, chez nous,
M. le Président, on discute de constitution. M. le Président, je
n'étais pas encore né que nous parlions, à cette
Assemblée, de constitution.
M. le Président, parfois, je serais tenté de dire que
notre potentiel créateur, ce qui fait ce que nous sommes aujourd'hui, se
trouve parfois menacé. Nous nous trouvons à discuter de
constitution, nous nous trouvons à discuter encore pire, non seulement
de constitution de façon générale, mais nous sommes
à discuter d'une proposition fédérale, d'une proposition
fédérale qu'aucun membre de cette Assemblée n'a lue pour
la simple et bonne raison que les textes ne sont pas encore disponibles. Oui,
nous avons bien un document, que tout le monde a en sa possession, un rapport
du consensus sur la Constitution. Mais il s'agit là - et tout le monde
l'a compris - d'une entente politique. Nous n'avons pas de textes
juridiques.
Il faut bien comprendre l'intervention de mon collègue, le
député de Joliette, qui avait demandé à votre
président, qui siégeait à un autre moment où vous
n'étiez pas là, de s'assurer que tous les parlementaires puissent
connaître les textes. Mais non, M. le Président. À un
moment, M. le Président, où on nous apprend que le Canada se
classe le 20e sur 22 pays industrialisés en ce qui concerne la
possibilité future de compétitivité; à un moment
où le Canada se classe respectivement 18e et 19e sur 22 pays en ce qui
concerne la formation professionnelle et la recherche et le
développement; à un moment, M. le Président, où, en
1980, à l'occasion du référendum sur la
souveraineté, la dette fédérale s'élevait à
72 000 000 000 $, en 1980, elle est actuellement de 420 000 000 000 $, M. le
Président; à un moment, M. le Président, où une
récente étude du Conseil fédéral du Trésor
établit que 67 % de tous les programmes fédéraux
chevauchent ou dédoublent les programmes du gouvernement du
Québec, nous discutons d'un texte politique, d'une entente qui sera
soumise par le biais de la motion qui est présentée devant nous,
qui sera soumise au peuple québécois.
M. le Président, vous me permettrez d'affirmer clairement que
cette entente, même si on peut se permettre de porter un jugement sur le
fond, sans avoir saisi toute la quintessence de cette entente parce que les
textes juridiques ne sont pas soumis, mais certainement, avec les commentaires
des experts, avec les analyses que des gens neutres, que des gens objectifs,
que des gens qui ont une compétence dans leur domaine, que ce soit en
matière d'immigration, que ce soit en matière d'affaires
culturelles, que ce soit en matière de partage des pouvoirs ou dans
d'autres domaines, à un moment où tout le monde, M. le
Président, questionne les vertus de cette entente, nous sommes ici en
train de discuter de la
possibilité de soumettre cette entente au peuple
québécois. Ça serait l'objet, M. le Président, de
la motion qui sera - il faut bien le comprendre - adoptée, si ce n'est
qu'à cause de l'impressionnante majorité libérale, M. le
Président.
Donc, cette entente qui sera soumise, par voie de
référendum, au peuple québécois, que faut-il en
dire, de cette entente? Première chose, M. le Président: que
cette entente ne règle rien. Si nous pouvons admettre, M. le
Président, que depuis des années - la commission
Bélanger-Campeau le reconnaissait - depuis que le Québec a pris
conscience de ses capacités, depuis que le Québec a
décidé de participer au monde moderne, que les
Québécois et Québécoises ont toujours voulu
s'affirmer de façon encore plus précise, de façon encore
plus dynamique à tous les niveaux. Au niveau économique, au
niveau social, au niveau culturel, le Québec a toujours voulu les moyens
de ses ambitions, a toujours voulu les pouvoirs qui allaient lui permettre de
réaliser ses rêves, qui allaient lui permettre de progresser, qui
allaient permettre à ses enfants de grandir dans un contexte harmonieux
et de participer pleinement à l'évolution du Québec
moderne. À un moment, M. le Président, où l'ensemble des
premiers ministres qui se sont succédé à la place du
député de Saint-Laurent, où tous, les uns après les
autres, ont demandé plus de pouvoirs pour le Québec, nous nous
retrouvons avec une entente qui ne règle rien et qui reporte aux
calendes grecques toute possibilité de progrès pour le
Québec.
Et c'est pourquoi, M. le Président, parce que le progrès
est si important, parce que les Québécois et les
Québécoises, parce que les gens de ma circonscription ont besoin
de plus de pouvoirs, parce que les gens de ma circonscription veulent grandir,
parce que ces gens-là ne veulent pas être rapetisses, parce que
les gens ont besoin d'aller plus loin, parce que les gens ont besoin de
s'identifier, parce que les gens ont besoin de s'affirmer, à cause de
toutes ces raisons, M. le Président, je pense que, de façon
très claire, très simple, sans aucune amertume, sans aucune
animosité, sereinement, nous sommes en mesure... Et je serai de ceux et
celles qui, avec fierté, feront partie du camp du non.
Et, M. le Président, au-delà de cette volonté
d'affirmation toujours plus grande du Québec, je pense qu'il est
important de faire comprendre à nos concitoyens et à nos
concitoyennes que cette campagne que nous ferons dans le camp du non, nous la
ferons, bien sûr, négativement, parce que nous militerons pour le
non, mais nous la ferons de façon positive, cette campagne, M. le
Président. Nous la ferons en respectant ceux et celles qui nous ont
élus, en leur expliquant les mérites ou l'absence de
mérites de cette entente, en leur expliquant les faiblesses de cette
entente, tout comme, M. le Président, n'importe quel syndiqué au
Québec qui, après une entente que son syndicat a pu conclure avec
la partie patronale, évalue les mérites de la proposition,
discute s'il y a des choses qui sont bien, qui pourraient être
améliorées, s'il y a des choses qui lui nuisent, qu'il rejette,
de la même façon qu'un syndiqué qui connaît
ça, qui est habitué à regarder un texte et à
l'analyser peut porter un jugement sur le contenu de l'entente. De la
même façon, M. le Président, que ces gens-là sont
capables de porter un jugement, de la même façon, nous, de cette
formation politique, discuterons du contenu de cette entente, parce que les
gens ne seront pas dupes. On essaiera de les amener sur toutes sortes de
terrains, tous aussi glissants les uns que les autres, mais la seule
réalité, il faudra se le rappeler, la seule vérité,
M. le Président, le seul véritable débat sera ce qui se
retrouvera dans cette entente.
M. le Président, le premier problème, c'est que cette
entente, nous ne l'avons pas entre les mains. Tous mes collègues l'ont
souligné, nous avons un texte politique, mais qui ne veut rien dire. Un
texte politique! Voyons donc! Réveillez-vous, de l'autre
côté! Clyde Wells avait bien signé une entente politique.
Qu'est-il arrivé trois mois plus tard? Rejet de l'entente politique.
Filmon, au Manitoba, avait pourtant signé une entente politique.
Quelques semaines plus tard, rejet de l'entente politique. On sait tous, ici,
peu importe notre formation politique, qu'une entente politique ne veut rien
dire tant et aussi longtemps qu'il n'y a pas de texte juridique. N'importe qui
comprendrait ça, même le député de Saint-Laurent, M.
le Président. Mais non! Nous discutons d'une entente politique.
Mais essayons de regarder, M. le Président, avec les informations
que nous avons et malgré toute la confusion qui anime à l'heure
actuelle nos concitoyens et nos concitoyennes, qui anime les
Québécois et les Québécoises... Parce qu'on lit les
journaux un jour, on nous dit que c'est un recul; on lit un autre journal, huit
constitu-tionnalistes se prononcent: Un autre recul pour le Québec. On
nous dit qu'il y a une divergence entre les textes français et anglais.
Mais c'est pire que l'auberge espagnole, M. le Président! C'est à
y perdre son latin. C'est finalement mépriser de façon
très claire les gens que d'avoir un discours politique semblable
à celui-là, mais c'est pourtant la réalité qui nous
entoure, M. le Président. Mais, malgré tout ça, essayons
de nous en tenir au texte et essayons d'expliquer aux gens, M. le
Président, ce que cette entente politique - parce que c'est de ça
dont nous devons discuter - contient. (20 heures)
J'ai eu l'occasion précédemment de vous dire, M. le
Président, que depuis 30 ans le Québec revendique de nouveaux
pouvoirs pour tendre à cette entente. Et il fallait voir, cet
avant-midi, mon collègue, le député de Lac-Saint-Jean,
demander au premier ministre: Quels nouveaux pouvoirs avez-vous obtenus?
L'exercice
de quelles juridictions, de façon exclusive, avez-vous obtenu?
Aucune réponse n'est venue de la bouche du député de
Saint-Laurent, M. le Président. Aucune réponse! C'est bien
surprenant. Si, pourtant, nous avions été fiers, s'il avait
été fier de cette entente, s'il voulait vraiment s'en faire le
vendeur et le défenseur, il se serait fait un grand plaisir de nous
illustrer l'ensemble des pouvoirs qu'il avait obtenus, mais non, aucun mot, M.
le Président, aucun pouvoir exclusif, aucun pouvoir nouveau pour le
Québec. Rien de moins, M. le Président, qu'un net recul.
Qu'y a-t-il d'autre aussi dans cette entente? Notre premier ministre -
et on pourra diverger de point de vue - a accepté le principe d'un
Sénat égal, ce qui veut dire que le Québec est
relégué au rang de simple province. Oublions les peuples
fondateurs, oublions un peuple québécois qui a droit à son
autodétermination, oublions tous ces principes qui ont fait la
fierté des Québécois, le Québec reconnu comme une
province comme les autres, le même nombre de sénateurs au
Québec qu'à l'île-du-Prince-Édouard.
Pour les défenseurs du fédéralisme, peut-être
y verra-t-on un avantage certain. On nous chante au Québec que oui, nous
avons accepté le Sénat égal, mais à condition
d'avoir toujours 25 % des sièges, à la fois à la Chambre
des communes et au Sénat, qui sont réservés au
Québec, 25 %. On nous présente ça comme un gain
énorme pour le Québec. Mais, M. le Président, combien
sommes-nous à l'heure actuelle? Combien de sièges avons-nous,
à l'heure actuelle, si on réunit le Sénat à la
Chambre des communes? Un peu plus de 25 %. Tout le monde le reconnaît,
c'est confirmer le statu quo. On pourra nous dire: Oui, mais c'est une garantie
pour 10 ans. Mais toutes les prévisions statistiques nous disent que,
d'ici 10 ans, la population du Québec va se maintenir et que,
finalement, cette garantie de 25 % n'est que confirmer une situation de fait,
que ces 25 % ne sont qu'un simple hochet pour amuser les gens, pour attirer
leur attention. Mais 25 %, quelle autre garantie est-ce que ça peut nous
donner? Aucune, M. le Président.
Il y a des gens qui savent, qui connaissent la réponse à
cette question. Parlez à Pierre Elliott Trudeau. À son
époque, 28 % des parlementaires, à la fois au Sénat et
à la Chambre des communes, 28 % représentaient les
Québécois et Québécoises. Mais avec 28 %, M. le
Président, nous avons eu un gouvernement libéral à Ottawa
qui a adopté le rapatriement unilatéral de la Constitution,
malgré un consensus ici en cette Chambre. Nous avons un gouvernement qui
a adopté la Loi sur les mesures de guerre, et pourtant, ce cher M.
Trudeau, il avait 28 %, à cette époque, de représentants
du Québec. Tout le monde aura compris que tant et aussi longtemps que la
ligne de parti s'appliquera, tant et aussi longtemps que les
députés à Ottawa seront prisonniers dans cette camisole de
force qu'est la ligne de parti, cette garantie de 25 %, ce n'est qu'un simple
hochet.
Rappelons un exemple encore plus récent, à un moment
où, dans cette Chambre, de façon unanime, nous adoptions une
motion pour condamner l'intervention fédérale dans le domaine de
l'environnement, à un moment où tout le monde faisait pression
auprès des députés conservateurs à Ottawa pour
qu'ils votent contre cette loi. On disait: On va faire de ces véritables
députés des défenseurs du Québec. Mais non. Les uns
après les autres, ils ont plié l'échiné,
prisonniers de cette camisole de force qu'est la ligne de parti. Et 25 %, 26 %,
27 %, peu importe, ce qui est arrivé, c'est qu'on a grugé des
pouvoirs qui sont les nôtres, ici à cette Assemblée. On a
pris des pouvoirs de l'Assemblée nationale et contre notre
volonté, contre notre gré, malgré une motion unanime,
malgré les propos du ministre de l'Environnement, nous avons
enlevé les pouvoirs à notre Assemblée nationale et sommes
allés les transférer au gouvernement d'Ottawa.
M. le Président, nous sommes venus confirmer le statut du
Québec comme étant une province comme les autres, sur le
même pied que l'île-du-Prince-Édouard. M. le
Président, deuxième recul du gouvernement Bourassa, d'un
gouvernement qui, malgré toutes ses déclarations, qui avait dit
que le processus de négociations était discrédité,
qui avait dit qu'il n'était plus question de négocier à
11, qu'on négocierait face à face, le gouvernement du
Québec, l'Assemblée nationale, avec le gouvernement
fédéral. Nous sommes retournés, non pas à une
négociation à 11, M. le Président, mais à une
négociation à 17.
Troisième recul, M. le Président, du gouvernement
Bourassa.
M. le Président, quatrième recul: l'exercice du droit
à l'autodétermination des autochtones. Tout le monde ici peut
comprendre la légitimité des revendications autochtones, mais
sommes-nous prêts, nous, comme parlementaires, de prendre d'autres
pouvoirs de cette Assemblée et les transférer entre les mains des
juges qui ne sont pas élus par la population? Sommes-nous prêts
à accepter, comme parlementaires, que, dans cinq ans, ce ne sera pas
nous, les représentants de la population, nous, les membres de cette
Assemblée nationale, mais bien des juges non élus qui
détermineront le contenu et la portée des textes juridiques?
Est-ce que nous sommes prêts à accepter cette situation de fait?
Non, M. le Président! C'est le quatrième recul du gouvernement
libéral.
M. le Président, cinquième recul du gouvernement
libéral en matière linguistique et ça, je le dis,
appuyé par d'éminents constitutionnalistes, appuyé par
Léon Dion lui-même, qui invoquait la proposition
fédérale et qui en disait qu'elle était encore pire que la
situation actuelle, parce qu'on reconnaît dans cette entente, qui est
similaire, finalement, à celle du 7 juillet, qui
avait été dénoncée par tout le gouvernement
libéral. On reconnaît l'obligation du Québec de contribuer
au développement et à l'épanouissement de la langue, de la
culture de sa minorité anglophone. Concrètement, ce que ça
veut dire, c'est qu'au nom de cette clause, des citoyens et citoyennes pourront
s'adresser aux tribunaux pour, par exemple, faire invalider des pans importants
de la loi 101, pour s'assurer peut-être que des immigrants puissent aller
à l'école anglaise. C'est la concrétisation de ces textes
qui sont proposés. Nous acceptons un libellé, le gouvernement
libéral accepte un libellé directement inspiré du rapport
Beaudoin-Dobbie, rapport que, pourtant, le ministre de la Justice, le premier
ministre et tout le cabinet avaient unanimement rejeté. Bien de l'eau a
coulé sous les ponts, M. le Président.
Tous ces reculs, et on n'a pas parlé du droit de veto... Un droit
de veto politique, une lettre signée du ministre des Affaires
constitutionnelles, l'honorable Joe Clark. Le gouvernement se contente d'un
droit de veto politique résultant d'un engagement écrit du
ministre Clark plutôt que d'obtenir un véritable droit de veto
constitutionnel sur la création de nouvelles provinces, comme nous
avions pourtant, auparavant, dans l'accord du lac Meech. Sixième recul,
M. le Président, du gouvernement Bourassa.
Donc, M. le Président, recul après recul, pas un, pas
deux, pas trois, six reculs, et nous, comme membres de cette Assemblée,
devant ces faits, devant cette situation, qu'allons-nous dire à nos
concitoyens? Qu'allons-nous dire à ces Québécois et
Québécoises qui, comme je l'exprimais au début de mon
intervention, se retrouvent, pour plusieurs, dans des situations fort
difficiles? Qu'allons-nous leur dire? Nous allons leur dire, de façon
très claire, que notre implication se fera, et nous le disons avec
beaucoup de courage et avec beaucoup de fierté, contre ces offres. Elle
se fera, cette campagne, de façon positive, je le souhaite. Elle se fera
dans un contexte où les jeunes réussiront là où
leurs aînés ont échoué, parce que cette campagne
référendaire que nous amorcerons bientôt ne sera pas une
réplique de la campagne de 1980. La campagne référendaire
que nous amorcerons bientôt ne sera pas l'occasion pour des gens d'une
autre génération de procéder à des
règlements de compte.
Je vous promets que les jeunes seront unanimes à dénoncer
cette entente parce que nous le ferons, Jacques Parizeau, le chef de
l'Opposition, les membres de l'Opposition officielle le feront parce qu'ils
sont conscients des responsabilités qu'ils ont à l'égard
de l'avenir, parce qu'ils ont décidé non pas d'essayer de
régler des querelles internes, comme c'est le cas des libéraux -
on sait les nombreuses querelles qui les animent - non pas à essayer de
régler à rabais, de régler à tout prix.
Ça ne sera pas ça notre point de vue.
Notre point de vue, ce sera de parler de l'avenir, de parler de la
réalité des gens, de parler de l'avenir des jeunes qui, nombreux,
viendront bientôt - et je les invite à venir manifester devant le
parlement, à venir manifester, M. le Président, et c'est le 8, si
je ne m'abuse, mardi prochain. Je les invite à venir nombreux ici, dire
ce qu'ils pensent du gouvernement que nous avons en face de nous, parce que ces
gens-là veulent progresser, veulent vivre dans un Québec moderne,
un Québec dynamique, un Québec qui va leur permettre de
s'affirmer un peu partout dans le monde, parce que ces gens veulent plus de
pouvoirs pour assurer leur véritable développement, ces gens
diront non à ces propositions qui, non seulement, confirment le statu
quo, mais, en plus, s'érigent en véritables obstacles à
leur développement. C'est ce que nous dirons. Nous le ferons, non pas en
utilisant, comme le premier ministre l'a fait cet après-midi en Chambre,
en utilisant des arguments de bas étage, nous le ferons en respectant
les gens, en respectant le bon sens, en respectant la réalité et,
surtout, en respectant la réalité historique du Québec.
J'invite tous mes concitoyens, M. le Président, à faire comme moi
et à s'opposer à ces offres. Je vous remercie. (20 h 10)
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le
député de Gouin. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Alors,
je vais permettre à M. le ministre de procéder à sa
réplique. Vous avez droit à 20 minutes, M. le ministre.
M. Gil Rémillard (réplique)
M. Rémillard: M. le Président, je vous remercie.
C'est la première journée où nous pouvons vraiment
discuter de cette entente conclue à Charlottetown, avec des textes qui
nous permettent donc de nous référer à ce qui a
été entendu, décidé entre les premiers ministres
à Charlottetown, la semaine dernière. Avant que ces textes ne
soient déposés, on pouvait entendre toutes sortes de choses,
toutes sortes de faussetés. Mais, maintenant que j'ai
déposé ces textes à l'Assemblée nationale, on ne
pourra plus dire ces faussetés. M. le Président, à
plusieurs reprises, j'ai entendu des membres de l'Opposition, qui sont venus
faire différents commentaires - c'est leur droit, je respecte leur
option souverainiste; je ne la partage pas, mais je la respecte. Ils veulent la
souveraineté du Québec, et c'est vrai que ce que nous avons
négocié et obtenu dans cette entente, ce n'est pas la
souveraineté du Québec, c'est un fédéralisme
profondément renouvelé, un fédéralisme avec une
approche qui nous permet de voir l'avenir avec confiance, parce que nous
récupérons tout d'abord la sécurité que nous avions
perdue par la perte des droits de veto. Nous avons les outils de
développement culturel et économique dont nous avons tant besoin
comme société, comme
peuple.
M. le Président, nous récupérons, oui, cette
sécurité qui avait été perdue en 1981-1982, et
j'entendais les intervenants de l'Opposition faire leurs commentaires. Personne
n'a mentionné qu'on avait récupéré les droits de
veto. Je n'ai entendu personne dire: Merci, bravo pour ce que vous avez fait.
Au moins, on aurait mérité que vous nous remerciiez.
Une voix: Ce n'est pas à leur honneur.
M. Rémillard: Vous auriez pu nous dire: Vous êtes
allés réparer les erreurs qu'on a faites en 1981-1982, droit de
veto sur la société distincte que nous avons maintenant. Nous
avons clairement établi dans la Constitution la société
distincte. Québec comme société distincte, et non
seulement le Québec comme société distincte mais, en plus,
le rôle de l'Assemblée nationale de protéger et de
promouvoir cette société distincte.
Je lisais, ce matin, dans les journaux, l'intervention de huit
professeurs de droit, pour lesquels j'ai beaucoup de considération, peu
importe leur option politique, beaucoup de considération et, pour
certains, même beaucoup d'amitié, mais quand je regarde cet
article et que dès les premières lignes où on commente la
clause Canada, on se réfère au mot «engagement»,
alors que c'est exactement le contraire qu'on a utilisé, le mot
«attachement», simplement pour mettre de la confusion...
Une voix: C'est l'inverse.
M. Rémillard: ...ou bien parce que, par inadvertance, on
n'a pas utilisé le bon mot. Comment se fait-il que ces collègues,
que je sais très méticuleux, aient pu faire une relation
pareille? Ce que nous avons dans la clause Canada, nous allons le
démontrer en commission parlementaire, dès mardi prochain, avec
les experts qui viendront témoigner, quelques-uns des plus
éminents juristes du Québec et du Canada, qui vont venir
témoigner, et venir nous démontrer que la langue
française, que la loi 101 n'a jamais été aussi bien
protégée que par ce que nous avons obtenu par cette
reconnaissance du Québec comme société distincte, par la
reconnaissance de ce rôle de l'Assemblée nationale et du
gouvernement de protéger et non seulement de protéger, mais de
promouvoir cette société distincte. M. le Président, dans
tout cet article, donc de ces professeurs de droit, pas un mot, pas un seul mot
sur la clause «nonobstant». Pas un mot. Comment peut-on
écrire un article sur la langue, la protection de la langue, sur la
clause Canada et la société distincte sans mentionner une seule
fois la clause «nonobstant» qui est garantie, qui est là,
qui ne pourra jamais être changée sans l'accord du
Québec?
M. le Président, encore ce soir, je sortais tout à l'heure
de l'édifice parlementaire, et une dame m'a dit: M. Rémillard,
c'est effrayant, on a perdu la clause «nonobstant». J'ai dit:
Madame, au contraire, on a la garantie que cette clause va demeurer dans la
Constitution, qu'elle ne pourra jamais être changée sans l'accord
du Québec. Je ne crois pas que mes collègues, mes anciens
collègues universitaires aient voulu cacher ce fait, aient voulu faire
en sorte que les gens, finalement, pensent qu'on a laissé tomber la
clause «nonobstant», que la clause «nonobstant»
n'existe plus. Non, ils n'ont pas voulu ça, M. le Président. Ils
ont sans doute oublié d'en parler, de cette clause
«nonobstant».
Mais, M. le Président, quand on connaît l'importance
d'avoir ces garanties, ces sécurités que nous avons pour l'avenir
du peuple québécois, l'avenir de la société que
nous sommes, on ne peut pas négliger ces sécurités que
nous sommes allés chercher: société distincte et le
rôle de protéger et de promouvoir qui nous est garanti. On ne
pourra pas le changer sans qu'on soit d'accord. Qu'on vienne me dire le
contraire. Qu'on vienne me dire le contraire. Clause «nonobstant».
Quand le gouvernement doit l'utiliser, il l'utilise. On ne pourra pas toucher
à cette clause «nonobstant» sans notre accord. Qu'on vienne
me dire le contraire. Droit de veto sur le Sénat. Droit de veto sur la
Chambre des communes avec cette garantie de 25 %.
M. le Président, j'entendais des commentaires disant: Wof! 25 %,
voyons donc! Cette garantie de 25 %, on n'a pas besoin de ça.
Présentement, on est à 25,3 %. On va passer à 27,6 % du
nombre de députés à la Chambre des communes. Ça me
fait penser à des gens qui disent: Moi, pas besoin de m'assurer, je ne
passerai jamais au feu. Je ne m'assure pas, moi, pas de problème. M. le
Président, c'est quand on passe au feu qu'on a besoin d'être
assuré, et cette assurance pour l'avenir d'une société,
d'un peuple comme le nôtre, c'est tellement important, puisque c'est
à la Chambre des communes que tout se décide, que c'est la
Chambre des communes qui va décider des lois fédérales. Le
Sénat va jouer ce rôle de Chambre de la Fédération
en quelque sorte avec des processus de suspension qui ramènent au niveau
de la Chambre des communes, dans une réunion conjointe où le
Sénat et la Chambre des communes ensemble vont avoir à voter.
Mais c'est là que ça va se décider, et nous allons avoir
18 députés de plus avec ce droit de veto, donc sur ces 25 %.
C'est drôle, je n'ai pas entendu un seul commentaire venant de
l'Opposition qui nous dise ça.
Droit de veto sur l'entrée de nouvelles provinces. J'entendais
tout à l'heure le dernier intervenant, le député de Gouin,
je crois, qui disait: Même pas de droit de veto sur les nouvelles
provinces. Mais c'est faux. Qu'il consulte les textes qui sont
déposés. On ne laissera pas dire des faussetés. C'est
directement inscrit dans l'entente que, dans la formule d'amendement, il ne
pourra pas y avoir une autre province sans
l'accord du Québec. Au niveau du Sénat, il ne pourra pas y
avoir une nouvelle province sans l'accord du Québec. Ce qui fait le
coeur d'une constitution, M. le Président, c'est cette
possibilité de la changer, de la faire évoluer, c'est la formule
d'amendement; c'est la clé de voûte de la constitution, le
contrôle. C'est nous qui l'avons, cette clé de voûte, M. le
Président, et on vient nous dire qu'on n'a pas de veto sur
l'entrée des nouvelles provinces? Au niveau du Sénat, avec nos 25
% en plus et, au niveau du Sénat, on a un contrôle parfait.
Là aussi, droit de veto. (20 h 20)
M. le Président, il ne peut pas y avoir une nouvelle province, et
au niveau du Sénat et au niveau de la formule d'amendement, sans
l'accord du Québec. C'est ça qu'on a obtenu. Encore une fois, on
a réparé les erreurs qui ont été faites par le
gouvernement péquiste en 1981-1982.
J'entendais aussi des commentaires, tout à l'heure, disant - et
ça a été le thème... C'est facile de voir un petit
peu comment les choses évoluent en regardant leurs interventions, le
thème: Pas un seul nouveau pouvoir. Tout le monde répétait
la même phrase: Pas un seul nouveau pouvoir! Pas un seul nouveau pouvoir!
M. le Président, quelle fausseté! Quelle fausseté! Huit
compétences exclusives que nous avons: six dans des domaines, dans des
secteurs qui sont tellement importants pour le Québec. M. le
Président, dans ces six secteurs, que ce soit le tourisme, que ce soit
le logement, les loisirs, les affaires municipales, les mines, les
forêts, j'entendais des intervenants dire: Mais on les avait
déjà. On les avait déjà, ces secteurs-là,
c'était à nous. M. le Président, allez donc y comprendre
quelque chose.
D'abord, qu'ils regardent donc la Constitution. Les mines, les
forêts, oui, on peut les retrouver dans la Constitution. Les quatre
autres ne se retrouvaient pas dans la Constitution. On pouvait bien
prétendre que c'était à nous, mais le
fédéral le prétendait aussi. Qu'on m'explique donc, du
côté de l'Opposition, qu'on m'explique donc comment il se fait
qu'en 1984 ils ont signé avec le gouvernement fédéral une
entente de développement économique régional où ce
tourisme, ces logements, ces loisirs, ces affaires municipales, la culture
faisaient partie de ces ententes avec le gouvernement fédéral.
Comment peuvent-ils venir prétendre maintenant que c'était notre
juridiction, alors qu'ils ont même fait une entente avec le gouvernement
fédéral pour pouvoir coordonner l'action du gouvernement
fédéral dans ces domaines-là?
M. le Président, il y a une limite. Là, ça suffit.
Il va falloir, quand même... On a nos textes qui sont là, on va
s'y référer, et on va parler maintenant de ce qui a
été négocié et de ce que nous avons obtenu. On va
procéder, mot par mot, s'il le faut, mais il y aura une commission
parlementaire qui va siéger mardi et jeudi prochains, avec nos experts.
On va démontrer, sans l'ombre d'un doute, que le Québec, avec
cette entente, obtient une sécurité qu'il n'a jamais eue dans 125
ans, que le Québec répare les erreurs faites par le gouvernement
péquiste en 1981-1982 en particulier, et que le Québec obtient,
avec cette entente, les outils de son développement: outils culturels,
outils économiques, main-d'oeuvre.
J'entendais mon collègue, le ministre responsable de la
Main-d'oeuvre, répondre aux questions de l'Opposition, cet
après-midi. Mon collègue, qui a sa politique de main-d'oeuvre,
qui met tellement d'énergie, et qui va pouvoir la mettre en application
pour que nous puissions avoir la maîtrise d'oeuvre de cette ressource
humaine qui sera la ressource du XXIe siècle, comme ma collègue
des Affaires culturelles, qui aura la maîtrise d'oeuvre au niveau
culturel. On vient nous dire... Je les entendais, un par derrière
l'autre, qui venaient nous dire: Vous n'avez obtenu aucun nouveau pouvoir.
Qu'on regarde, M. le Président. On n'a pas le droit de dire des choses
pareilles. Les textes sont là. On va constater. Les
Québécois ne sont pas dupes.
M. le Président, ce que nous avons comme entente est une base,
une base solide, forte, une base de sécurité avec nos droits de
veto, avec ces garanties que nous avons, une base de développement avec
les outils que nous récupérons pour le Québec, le
développement culturel, le développement économique. M. le
Président, dans 125 ans de Fédération, jamais un
gouvernement du Québec n'a réussi à conclure une telle
entente. Jamais!
Des voix: Bravo!
M. Rémillard: M. le Président, à partir de
mardi prochain, nous serons en commission parlementaire avec nos experts, et
nous allons étudier mot à mot cette entente. En ce qui regarde la
protection de la langue française, en ce qui regarde nos droits de veto,
en ce qui regarde les institutions, Chambre des communes, Sénat, en ce
qui regarde le partage des pouvoirs, on va étudier, M. le
Président, mot à mot, ce que nous avons obtenu, ce que cette
entente signifie. M. le Président, les Québécois vont
comprendre très clairement que ce que nous avons comme entente pour
renouveler le fédéralisme est quelque chose qui va nous
permettre, comme société, comme peuple, de faire face aux
défis de l'avenir, comme nous devons faire face avec confiance, avec
détermination, et avec ce défi de l'excellence qui a toujours
été au coeur de notre existence comme société,
comme peuple québécois. Je vous remercie, M. le
Président.
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.
Est-ce que la motion...
Une voix: C'est un vrai Québécois.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que la motion
proposant l'adoption du principe du projet de loi 44, Loi modifiant la Loi sur
le processus de détermination de l'avenir politique et constitutionnel
du Québec, est adoptée?
M. Bélisle: Vote enregistré, M. le
Président, et nous demandons que le vote soit reporté
après la période des questions, le mardi 8 septembre.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, vous demandez un
vote enregistré et, en même temps, de reporter. Alors, le vote est
reporté à mardi prochain. M. le leader adjoint du
gouvernement.
M. Bélisle: Je fais motion, M. le Président, pour
ajourner nos travaux au mardi 8 septembre 1992, à 14 heures.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion
est adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. Alors, les
travaux de l'Assemblée nationale sont ajournés au mardi 8
septembre, à 14 heures.
(Fin de la séance à 20 h 28)