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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le mardi 16 mars 1993 - Vol. 32 N° 73

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

(Quatorze heures onze minutes)

Le Président: M mes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants. Je vous remercie, veuillez vous asseoir.

Affaires courantes

Nous allons procéder aux affaires courantes.

Il n'y pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous demanderais, M. le Président, d'appeler l'article a du feuilleton.

Projet de loi 245

Le Président: À l'article a du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi 245, Loi concernant la ville d'Outremont. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose donc ce rapport.

Et, en conséquence, M. le député de Saint-Louis présente le projet de loi d'intérêt privé 245, Loi concernant la ville d'Outremont.

Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.

M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je fais donc motion pour que ce projet de loi d'intérêt privé soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements pour étude détaillée et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté. Le Président: Adopté.

Dépôt de documents

Maintenant, dépôt de documents.

M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et responsable du développement régional.

Rapport annuel de la Commission des courses du Québec

M. Picotte: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1991-1992 de la Commission des courses du Québec. Merci.

Le Président: Ce rapport est déposé. M. le leader du gouvernement.

Rapport annuel du Conseil cri de la santé et des services sociaux de la Baie James

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, au nom du ministre de la Santé et des Services sociaux, je dépose le rapport annuel 1991-1992 du Conseil cri de la santé et des services sociaux de la Baie James.

Le Président: Ce document est déposé. M. le ministre des Transports.

Rapport d'activité de l'Office des autoroutes du Québec

M. Elkas: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport d'activité 1991-1992 de l'Office des autoroutes du Québec.

Le Président: Ce rapport est déposé. M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles.

Rapports annuels 1989-1990 et 1990-1991 de l'Ordre des audioprothésistes du Québec

M. Savoie: Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer les rapports annuels 1989-1990 et 1990-1991 de l'Ordre des audioprothésistes du Québec.

Une voix: De 1989?

M. Savoie: On vient tout juste de le recevoir.

Le Président: S'il vous plaît.

M. Savoie: Et j'ai l'honneur de déposer également les rapports annuels 1991-1992...

Une voix: De 1891!

Le Président: Un instant, M. le ministre, s'il vous plaît.

Je demande la collaboration de tout le monde là.

Allez-y. Allez-y, M. le ministre.

M. Savoie: Je l'ai reçu, je le dépose.

Rapports annuels des corporations du Barreau du Québec, des ergothérapeutes

du Québec, des infirmières et des

infirmiers du Québec, de la Chambre

des notaires du Québec, des orthophonistes

et audiologistes du Québec, de

l'Ordre des podiatres du Québec

et des urbanistes du Québec

J'ai l'honneur de déposer également, M. le Président, les rapports annuels 1991-1992 des corporations suivantes: du Barreau du Québec, des ergothérapeutes du Québec, des infirmières et des infirmiers du Québec, de la Chambre des notaires du Québec, des orthophonistes et audiologistes du Québec, de l'Ordre des podiatres du Québec et des urbanistes du Québec.

Le Président: Donc, ces rapports sont déposés.

M. leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: Est-ce que je pourrais demander au ministre si c'est bien 1989 le premier rapport?

Le Président: Très bien. Les documents sont donc déposés.

M. Savoie: On ne peut pas déposer les rapports qu'on n'a pas.

Rapports annuels du Conseil interprofessionnel du Québec et de l'Office des professions du Québec

J'ai l'honneur également de déposer le rapport annuel 1991-1992 du Conseil interprofessionnel du Québec de même que le rapport annuel 1991-1992 de l'Office des professions du Québec.

Le Président: Ces rapports sont donc déposés.

M. le ministre des Forêts.

Rapport annuel du ministère des Forêts

M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1991-1992 du ministère des Forêts.

Le Président: Ce rapport est déposé. Dépôt de rapports de commissions.

Dépôt de pétitions

Dépôt de pétitions.

M. le député de Rouyn-Noranda-Témisca-mingue.

Que la clinique de planning des naissances du CHUL offre les mêmes services qu'auparavant

M. Trudel: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 116 pétitionnaires membres du Regroupement des intervenants en planning du Québec.

Les faits invoqués sont les suivants: «Considérant que la diminution des services offerts par la clinique de planning des naissances du Centre hospitalier de l'Université Laval, et plus particulièrement du service d'avortement, influence la qualité des services à la population que nous desservons; «Considérant que notre clientèle est soumise à un délai supplémentaire d'attente pour l'obtention d'une interruption volontaire de grossesse; «Considérant que notre clientèle doit être orientée vers d'autres centres déjà fort occupés et qui sont encore plus éloignés de nos régions; «Considérant que ces mesures, qui ne sont, à notre avis, qu'administratives, négligent le vécu des femmes devant vivre une interruption de grossesse;»

L'intervention réclamée se résume ainsi: «Nous demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du ministre de la Santé et des Services sociaux afin que la clinique de planning des naissances du CHUL offre les mêmes services qu'auparavant.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition, M. le Président.

Le Président: Alors, votre pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

Questions et réponses orales

Nous allons procéder à la période des questions et réponses orales.

Je reconnais, en première question principale, M. le chef de l'Opposition.

Intentions de la Caisse de dépôt et placement du Québec à l'égard de Provigo

M. Parizeau: M. le Président, ces jours-ci, comme à quelques reprises depuis que le Parti libéral est au pouvoir, la question du contrôle québécois de grands groupes commerciaux ou industriels se pose. On l'avait vu, il y a quelque temps, avec la vente de Consolidated-Bathurst.

Là, ces jours-ci, c'est Provigo ou Culinar. De son côté, Blackstone, vu l'opposition de la Caisse de dépôt et placement, a retiré son offre d'achat. Fort bien, mais cela ne résout pas la question de façon définitive, on le voit bien ce matin.

Qu'est-ce qui va arriver au groupe Provigo? Est-ce que le président du Conseil du trésor, ministre des Finances par intérim, peut nous indiquer s'il s'est informé auprès de la Caisse pour voir la suite des choses, pour voir, en particulier, de quelle façon la Caisse de dépôt, le gouvernement, les actionnaires d'Univa peuvent relancer le dossier pour en arriver à un règlement satisfaisant?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Johnson: M. le Président, étant le premier à m'adresser à l'Assemblée alors que le chef de l'Opposition est maintenant parmi nous, je lui souhaite la bienvenue, évidemment, et je lui indique que, dans ce dossier qu'il a cultivé lui-même, les partenariats avec nos voisins américains et nos cousins français, et, à partir du moment où on se rend compte qu'il est possible de faire affaire au Québec avec des partenaires qui viennent d'ailleurs, la Caisse de dépôt, comme n'importe quel actionnaire d'importance, doit, à l'intérieur de ses balises et de ses fonctions, regarder toutes les occasions d'affaires qui se présentent à elle.

On voit que, dans le cas présent, elle ne semble pas avoir été satisfaite des perspectives de rentabilité de son investissement. On doit souhaiter que, par des mesures constructives à venir, elle puisse effectivement contribuer à consolider les opérations commerciales d'un grand groupe québécois.

Le Président: En question complémentaire.

M. Parizeau: Je remercie le président du Conseil du trésor et ministre des Finances par intérim des voeux pieux qu'il vient d'exprimer au sujet de Provigo, mais je dois lui demander: Est-ce qu'il s'est renseigné ces jours-ci - je comprends qu'il n'est pas normalement ministre des Finances, mais, enfin, il l'est par intérim à l'heure actuelle... Ces jours-ci, doit se sceller le sort de Provigo. Est-ce qu'il s'est renseigné auprès de la Caisse de dépôt pour savoir ce que la Caisse de dépôt va faire? On sait maintenant ce que la Caisse de dépôt ne veut pas. Est-ce qu'on va savoir ce que la Caisse de dépôt veut?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Johnson: M. le Président, je remercie le chef de l'Opposition de souligner le fait que je puisse occuper par intérim le poste de ministre des Finances. C'est vrai depuis une heure ou deux à peine. Alors, vous me permettrez, en cette qualité très récente, de ne pas avoir eu le temps de communiquer avec qui que ce soit.

Quant à l'engagement que je pourrais formuler de le faire, je veux dire ici tout de suite qu'il m'apparaît que la Caisse de dépôt, à l'intérieur de ses attributions, de façon extrêmement constructive, a toujours démontré l'imagination qui lui permet d'arriver à des transactions rentables pour elle et pour la société québécoise et qui ne met pas en péril, évidemment, la vie commerciale et financière de qui que ce soit au Québec.

Le Président: Toujours en question complémentaire. (14 h 20)

M. Parizeau: M. le Président, vous comprendrez alors que je reviendrai demain ou après-demain sur cette question, quand le ministre des Finances par intérim aura eu le temps de se familiariser avec ses nouvelles fonctions.

Au sujet de Culinar, est-ce que le ministre de l'Agriculture et le ministre de tutelle de la Société québécoise d'initiatives agro-alimentaires, SOQUIA...

Le Président: Un instant, s'il vous plaît! Pour une question principale, maintenant?

M. Parizeau: M. le Président, j'avais, dans mon préambule, parlé de Provigo et de Culinar.

Le Président: Oui, évidemment, mais, à ce moment-ci, je serais prêt à vous reconnaître plutôt une question principale, si vous voulez bien, puisque votre question première était sur Provigo. Pour Culinar, ce serait une deuxième question principale. Ça va?

Position de SOQUIA à l'égard de la vente de Culinar

M. Parizeau: Parfait. Alors, puis-je demander au ministre de l'Agriculture, qui est ministre de tutelle de SOQUIA, la Société québécoise d'initiatives agro-alimentaires, quelle est la position de SOQUIA à l'égard de la vente de Culinar?

SOQUIA a 35 % des actions. Ces 35 % des actions, qui appartiennent aux contribuables du Québec, valent à peu près 60 000 000 $ au prix du marché. On peut donc demander au ministre de l'Agriculture: Quelle est la position de SOQUIA à l'égard de la vente d'un certain nombre d'actifs de Culinar? Elle est pour? Elle est contre?

Si on comprend bien les journaux, SOQUIA s'est abstenue à l'occasion des votes au conseil d'administration. SOQUIA est-elle d'accord pour que l'on vende, comme le disait le député d'Arthabaska, des actifs qui rapportent pour

renflouer des actifs en déficit? Quelle est la position de SOQUIA à cet égard?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Picotte: M. le Président, le chef de l'Opposition pourrait s'inspirer des questions qu'a posées son collègue d'Arthabaska, la semaine dernière, qui me semblaient beaucoup plus exhaustives que celle qu'il me pose lui-même aujourd'hui. Il aurait dû, évidemment, à ce moment-ci de nos discussions, puisqu'il a dû revenir un petit peu avant la période des questions, savoir, M. le Président, qu'à l'occasion de cette discussion-là SOQUIA s'était abstenue, n'ayant justement pas suffisamment de renseignements pour être en mesure de dire oui ou non à une transaction possible. Cependant, en 1978, lorsque le gouvernement auquel vous apparteniez avait décidé que SOQUIA... et SOQUIA avait décidé d'emboîter le pas dans ce qu'on appelle Culinar, n'avait pas pris la précaution, comme on le fait depuis 1986, de se garder un droit de regard sur toute vente possible. C'est la raison pour laquelle, étant donné que nous sommes minoritaires et que l'actionnaire majoritaire a décidé de vendre, nous sommes dépourvus de moyens face à cette situation-là. C'est cette raison-là. Sinon, si on avait vécu les mêmes expériences qu'on vit depuis 1986 où on oblige, quand une transaction se passe, M. le Président, à ce qu'on ait non seulement un droit de regard, mais qu'on puisse avoir un certain droit de refus aussi, bien, la question ne se poserait même pas.

Le Président: En question complémentaire, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: Maintenant que SOQUIA est parfaitement renseignée, est-ce que SOQUIA est pour ou est contre? Ils ont 35 % des actions. Est-ce que SOQUIA est d'accord avec cette transaction ou n'est pas d'accord avec cette transaction? C'est une question tout à fait simple. Je comprends qu'elle n'est pas exhaustive. Mais c'est quoi, la réponse?

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: Ils sont pour ou ils sont contre?

Le Président: M. le ministre.

M. Picotte: M. le Président, je pense que le conseil d'administration de SOQUIA est assez grand pour prendre ses décisions. Mais je dis ceci au chef de l'Opposition, et je pense que c'est important qu'il le comprenne bien. J'ai déjà dit publiquement, à maintes reprises, que j'étais favorable à ce que Culinar, s'il existe une transaction, qu'elle se fasse envers des intérêts québécois dans la mesure du possible. C'est souhaitable, et j'espère qu'on aura l'imagination de trouver des gens intéressés au Québec qui sont prêts à faire ce marché-là. Et nous ne fermons pas la porte, d'aucune façon, chez SOQUIA et chez celui qui vous parle, à regarder toute transaction qui pourrait être intéressante et à laquelle on pourrait être associés, M. le Président.

Le Président: Toujours en question complémentaire.

M. Parizeau: M. le Président, est-ce que nos amis d'en face peuvent comprendre que, quand quelque chose est aussi gros que Provi-go - 25 000 emplois, avec les affiliées, sont impliqués - quand il s'agit de quelque chose, sur le plan des grappes industrielles du ministre, aussi important...

Le Président: Un instant, M. le chef de l'Opposition.

Sur un rappel au règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Strictement une question d'information. Est-ce que nous sommes revenus à une question principale, parce que, là, il s'agit de Provigo? Parce que, s'il s'agit d'une question additionnelle, je rappellerais bien poliment au chef de l'Opposition les dispositions de l'article 78, qui stipule que ses questions doivent être brèves, précises et sans préambule.

Le Président: Très bien. Alors, pour une question complémentaire, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: M. le Président, c'est la raison pour laquelle je voulais lier les deux questions.

Est-ce que le ministre de tutelle, le ministre responsable de SOQUIA, pourrait, plutôt que de nous exprimer son opinion, nous dire quelle est l'attitude, quelle est l'opinion, comment va voter SOQUIA. C'est ça qu'on veut savoir. Ce n'est pas le ministre qui va voter à la réunion qui décidera, ça va être le président de SOQUIA. Comment va-t-il voter, oui ou non en faveur de la vente?

Le Président: M. le ministre.

M. Picotte: M. le Président, on ne fera sûrement pas de référendum pour savoir ça. Chose certaine... et ça m'étonne, la question du chef de l'Opposition, M. le Président, lui qui se targue d'être un homme d'expérience et un économiste.

Comme le disait si bien dans son discours le député d'Arthabaska, avec l'impression qu'il avait des économistes, je me demandais ce qu'il pensait

de son chef, mais ça m'étonne, cette question-là, parce que le chef de l'Opposition sait très bien qu'avant de dire oui ou non il faudra regarder pour voir si même des intérêts québécois qui seraient intéressés et susceptibles d'acheter Culinar ne le feront pas dans le but de rationaliser leurs opérations dans leurs propres usines et fermer, justement, une partie de cette industrie-là et mettre des emplois à terre. À ce moment-là, c'est peut-être préférable de regarder alentour de soi au lieu de regarder en avant de soi. Ça, vous devriez le savoir, vous qui vous vantez d'avoir une expérience incommensurable.

Le Président: Pour une... S'il vous plaît! Alors, pour une question complémentaire, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: M. le Président, est-ce que le ministre de l'Agriculture et ministre de tutelle de SOQUIA conviendrait qu'au lieu de poser les questions qu'il vient de poser, il devrait être capable de s'amener en Chambre avec des réponses à ces questions-là. Le dossier, ça fait assez longtemps qu'on en parle; il en est encore rendu à se poser des questions?

Le Président: M. le ministre.

M. Picotte: M. le Président, je pense qu'encore là la sagesse du chef de l'Opposition n'est pas forte, forte. Il y a un conseil d'administration à SOQUIA. Vous devriez savoir ça. Vous me demandez ce qu'ils vont dire avant d'avoir une transaction sur la table, où ils devront se pencher s'ils vont être d'accord ou pas d'accord. Mais d'où sortez-vous? De grâce, restez par ici au lieu d'être à Paris!

Des voix: Ha,ha, ha!

Le Président: En question principale maintenant, M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition.

Réforme de l'enseignement collégial

M. Brassard: M. le Président, voulant marquer leur opposition au projet de réforme de l'enseignement collégial et inciter la ministre à revoir sa copie, près des trois quarts des 140 000 cégépiens font la grève présentement ou tiennent une journée d'étude. Pendant que ces derniers contestent la venue prochaine d'éventuels tickets modérateurs basés sur la durée des études ou sur l'échec scolaire, la ministre, elle, essaie de nous faire croire que l'introduction de ces mesures punitives et coercitives aurait fait l'objet de consensus en commission parlementaire.

Question à la ministre, M. le Président: Est-ce que la ministre pourrait reconnaître bien honnêtement qu'elle est en train, présentement, de falsifier et de dénaturer les consensus de la commission parlementaire en prétendant... Des voix: Oh! Oh!

Le Président: S'il vous plaît!

M. Brassard: ...que la mise en vigueur de mesures punitives et coercitives serait l'objet de consensus alors qu'elle sait très bien qu'il n'y a que quelques intervenants sur plus d'une centaine entendus en commission parlementaire qui ont privilégié ces mesures, les autres ayant plutôt réclamé non seulement le maintien intégral de la gratuité, mais également son élargissement aux étudiants à temps partiel?

(14 h 30)

Le Président: Mme la ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.

Mme Robillard: D'abord, M. le Président, je n'ai pas à revoir une copie du projet de la réforme, le projet de la réforme n'a pas encore été déposé officiellement, premièrement.

Deuxièmement, quand on me dit de ne pas falsifier, dénaturer les consensus à la commission parlementaire, M. le Président, je demanderais au critique de l'Opposition d'avoir un petit peu plus de responsabilité, comme l'Opposition en avait eue aussi au niveau des travaux de la commission parlementaire. Je veux bien croire qu'on veut se rapprocher du milieu des jeunes dans l'Opposition, mais, au moins, faites-le avec de la responsabilité.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: M. le Président, la ministre, pourrait-elle cesser de faire preuve d'arrogance et de suffisance...

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: M. le député de Lac-Saint-Jean, vous êtes en question complémentaire, posez une question, s'il vous plaît!

Une voix: II avait posé une question.

Le Président: alors, s'il vous plaît! à l'ordre, s'il vous plaît! un instant! à l'ordre, s'il vous plaît! m. le député, s'il vous plaît! s'il vous plaît! alors, question complémentaire.

M. Brassard: Pourrait-elle reconnaître, M. le Président, que dans le propre document de son ministère concernant la synthèse des mémoires et des délibérations en commission parlementaire il est très clairement indiqué, en toutes lettres, que pour ce qui est des mesures punitives, coercitives en matière de durée des études, il n'y a pas

consensus. c'est écrit en toutes lettres qu'il n'y a pas consensus, que le seul consensus qui existe, c'est le maintien intégral de la gratuité des études collégiales.

Le Président: Mme la ministre.

Mme Robillard: M. le Président, demeurons calmes. Donnons l'exemple à notre jeunesse. Quand on parle calmement, fermement, avec certitude, suite à la commission parlementaire, on va nous traiter d'arrogance? M. le Président, je ne sais pas aujourd'hui qui utilise un ton solennel pour provoquer encore plus des crises inutiles.

M. le Président, j'inviterais davantage les étudiants et les étudiantes à concentrer leur énergie sur la réussite éducative de cette année et d'attendre le dépôt du projet de la réforme au lieu d'être obligés d'allonger une session, ce que, je pense, les étudiants ne souhaiteraient pas. Attendons donc le dépôt de la réforme et nous pourrons en discuter avec calme, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire.

M. Brassard: M. le Président, la ministre ne convient-elle pas que, si elle veut vraiment mobiliser tous les acteurs du milieu collégial pour des changements qu'elle juge essentiels - c'est ça, son objectif, de mobiliser tout le monde - il est absolument impérieux, dans les circonstances, qu'elle renonce à mettre en vigueur des mesures qui auront pour effet de multiplier les abandons plutôt que d'augmenter le taux de réussite et que, si elle veut réussir sa réforme, il faudrait qu'elle renonce à ces mesures publiquement, officiellement? Ce serait faire acte de salubrité publique.

Le Président: Mme la ministre.

Mme Robillard: M. le Président, la sagesse du critique de l'Opposition a été de courte durée. Je vais lui rappeler ses propres paroles dans son communiqué de presse: «Nous ignorons encore, dit-il, l'argumentation qui fonde les orientations gouvernementales. Nous ne pouvons faire un choix éclairé», a-t-il dit.

Des voix: Bravo!

Le Président: Toujours en question complémentaire.

M. Brassard: M. le Président, la ministre, s'il est vrai que j'attends son énoncé de politique pour me prononcer sur l'ensemble des changements qu'elle propose, est-ce que, au moins, elle est prête à admettre que l'une des conditions fondamentales de la réussite d'une réforme de l'enseignement collégial, c'est que le gouvernement s'engage formellement à ne pas toucher, de quelque façon que ce soit, à la gratuité des études collégiales? c'est là une condition essentielle pour la réussite de n'importe quelle réforme qu'elle peut envisager.

Le Président: Mme la ministre.

Mme Robillard: M. le Président, le présent gouvernement s'engage à soutenir la réussite des jeunes au Québec, et c'est dans ce sens-là qu'il prépare sa réforme de l'enseignement collégial.

Le Président: Alors, en question principale, M. le leader de l'Opposition et député de Joliette.

Enquête sur l'Ordre du Temple solaire

M. Chevrette: Merci, M. le Président.

À la suite d'une saisie d'armes chez des membres de l'Ordre du Temple solaire, la semaine dernière, par la Sûreté du Québec, des faits passablement troublants ont été rendus publics. Cet Ordre aurait recruté près du tiers de ses membres parmi les employés d'Hydro-Québec, certaines séances de formation ont été dispensées dans des bureaux d'Hydro-Québec et il y aurait même eu des dépenses d'engagées à même le budget de la société d'État.

Suite à la demande d'enquête ou à l'enquête déclenchée par le président d'Hydro-Québec, est-ce que la ministre de l'Énergie peut nous assurer qu'elle mettra cette Chambre au courant de toutes les révélations de cette enquête?

Le Président: Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.

Mme Bacon: Je pourrais dire, M. le Président, que les informations que nous donne aujourd'hui le député de Joliette, leader de l'Opposition, sont importantes, mais non vérifiées. Alors, attendons, s'il vous plaît, d'avoir le dossier complet de l'enquête interne qui est faite en ce moment à Hydro-Québec, qui n'est pas terminée. Je la ferai valoir sur la place publique, M. le Président, et je sais très bien que le président fera la même chose.

Le Président: En question complémentaire.

M. Chevrette: M. le Président, est-ce que Mme la ministre pourrait nous dire s'il y a des suspensions de faites présentement, au moment où on se parle, dans ce cas-là?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Bacon: Beaucoup de choses ont été dites, M. le Président, et non vérifiées, je le répète encore au leader de l'Opposition. Attendons que l'enquête soit terminée. S'il y a lieu, je pense qu'à ce moment-là Hydro-Québec prendra

ses responsabilités, et je verrai à ce que ça se fasse.

Le Président: En complémentaire.

M. Chevrette: M. le Président, je vais reprendre ma question.

Est-ce que la ministre sait s'il y a eu ou non une ou des suspensions à Hydro-Québec suite au début de cette enquête?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Bacon: à ma connaissance, il peut y en avoir eu une, mais, encore une fois, je le dis sous toutes réserves. attendons que tous les faits soient vérifiés pour savoir qui doit être suspendu, si suspension est nécessaire, et quels seront les résultats de l'enquête, et nous la ferons connaître, m. le président.

Le Président: En question complémentaire, toujours.

M. Chevrette: M. le Président, est-ce que Mme la ministre de l'Énergie peut nous dire, en sa qualité de vice-première ministre, s'il y a une enquête qui se fait au ministère des Finances pour également vérifier les allégations à l'effet que certains fonctionnaires du ministère des Finances seraient impliqués?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: Encore une fois, je pense qu'on a mentionné des noms sur la place publique, on a mentionné des ministères, on a mentionné des organismes. Je pense que tout ça devrait être vérifié avant que, vous comprendrez bien, je m'exprime sur la place publique, M. le Président.

Le Président: Toujours en complémentaire.

M. Chevrette: M. le Président, pour permettre à la ministre de pouvoir faire exécuter une enquête la plus complète, pourrait-elle demander de vérifier si des membres de l'Ordre du Temple solaire auraient connu des engagements par certaines vice-présidences à Hydro-Québec et auraient connu des promotions également, pour que l'enquête soit vraiment complète?

Le Président: Mme la vice-première ministre.

Mme Bacon: Je pense que ça fait partie d'une enquête complète qu'est en train de faire Hydro-Québec, M. le Président.

Le Président: Alors, en question principale...

M. Dufour: Complémentaire.

Le Président: ...complémentaire, M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Oui. Le ministre de la Sécurité publique est-il en mesure de nous confirmer les informations parues dans le journal La Presse de samedi dernier à l'effet que l'Ordre du Temple solaire s'apprêtait à commettre des attentats politiques?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Ryan: Non, M. le Président.

Le Président: Toujours en question complémentaire, M. le député de Jonquière.

M. Dufour: Si le ministre n'est pas prêt à se commettre dans ce sens-là, est-ce qu'il peut nous assurer que, lorsqu'il aura tous les faits, il va s'assurer que, s'il y avait ces possibilités-là, ce serait vraiment neutralisé par la Sûreté du Québec, lorsqu'il pourra nous faire rapport?

Le Président: M. le ministre. (14 h 40)

M. Ryan: La Sûreté est sous directive permanente de veiller à la sécurité du Québec, à la protection de la sécurité publique. C'est entendu que, lorsque des personnages publics sont menacés dans leur vie ou dans leur sécurité physique, il y a une responsabilité non seulement de la Sûreté du Québec mais de tous les corps de police du Québec. Pour le moment, les journaux ont rapporté que des personnes ont été mises sous arrêt pour avoir pratiqué un commerce d'armes qui était illégal. Nous n'en savons pas davantage pour l'instant. Tout le reste est à venir.

Le Président: Pour une autre question complémentaire.

M. Dufour: Est-ce que le ministre peut nous assurer si, effectivement, il y a une enquête en marche actuellement par la Sûreté du Québec concernant tous ces allégués?

Le Président: M. le ministre.

M. Ryan: C'est très dangereux. Il faut être prudent, et je pense que la Sûreté l'est aussi, et je l'apprécie. L'enquête a porté sur des individus précis - je n'ai pas à vous donner tout le contexte - mais de là à transférer l'enquête vers une organisation, il faut y penser bien comme il faut. Il faut avoir des indications très sûres que l'organisation elle-même cultivait l'illégalité ou incitait ses membres à des comportements criminels. Nous n'en sommes pas là d'après la preuve que nous avons, et je demanderais qu'on soit très prudent dans les jugements qu'on porte

sur les organismes.

M. Chevrette: M. le Président, en additionnelle.

Le Président: Alors, pour une dernière question additionnelle.

M. Chevrette: Oui, tout en étant très prudent.

Est-ce que la Sûreté du Québec, lorsqu'elle a des motifs de croire, par exemple, qu'il peut y avoir utilisation des deniers publics ou abus de pouvoir à l'intérieur d'une structure, n'a pas le mandat de facto d'enquêter également et de ne pas se contenter d'une simple enquête administrative?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Ryan: Regardez, lorsqu'il y a des raisons sérieuses de croire que des actions criminelles ont été commises ou sont en préparation, il y a une responsabilité de la Sûreté du Québec qui me paraît évidente, de même que des autres corps policiers encore une fois.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Projet de privatisation d'installations de la SAQ

Mme Harel: M. le Président, le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie s'apprête à céder à des intérêts privés les équipements d'embouteillage de la Société des alcools du Québec situés à Anjou. Des pressions de plus en plus fortes venant des rangs des députés libéraux réclameraient des privatisations à tout prix, et le ministre s'apprêterait à y succomber.

Est-ce que le ministre est prêt à soumettre à une consultation publique les différents scénarios de privatisation qu'il a chargé la Société des alcools du Québec de lui préparer?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie.

M. Tremblay (Outremont): II est vrai, M. le Président, que le rapport Poulin a suggéré la privatisation de l'usine d'embouteillage de la Société des alcools du Québec. Il est également vrai que l'Association des détaillants en alimentation fait des représentations depuis près de deux ans pour élargir la gamme de vins disponibles dans le réseau des épiceries. Il est également vrai, M. le Président, que j'ai rencontré les représentants des travailleurs et des travailleuses au niveau syndical. Aucune décision n'a été prise.

Nous analysons la situation dans son ensemble, et j'ai convenu, avec toutes les parties, que les décisions se prendraient dans la transparence et dans la consultation. Alors, lorsque les évaluations tant quantitatives que qualitatives seront terminées, je me suis engagé, avec les parties impliquées, à les consulter et à leur faire part des décisions qui pourraient être prises éventuellement.

Le Président: En question complémentaire.

Mme Harel: M. le Président, qu'est-ce que l'élargissement de la vente de vins dans les dépanneurs a à voir avec la privatisation des installations d'embouteillage? Le ministre peut-il nous indiquer combien d'emplois seraient touchés par un tel scénario de privatisation?

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): On ne peut dissocier la privatisation de l'usine d'embouteillage de l'élargissement de la gamme dans les épiceries. Attendez, là!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Très bien. J'apprécierais qu'il n'y ait pas de commentaires, s'il vous plaît, ni d'un côté ni de l'autre.

M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): On ne peut dissocier les deux dossiers parce que, dans les ententes internationales négociées avec la Communauté économique européenne, et dans le contexte du GATT, les seuls vins qui peuvent être vendus en épicerie sont des vins embouteillés au Québec, donc, usines d'embouteillage et marques Québec. Alors, on n'a pu dissocier les deux dossiers, ils sont indissociables.

Lorsque nous aurons évalué le dossier dans son ensemble, on pourra répondre à des questions additionnelles. Mais une chose est certaine, c'est évident que, pour un gouvernement qui crée des emplois, la protection de l'emploi devient une des priorités.

Le Président: Toujours en question complémentaire.

Mme Harel: M. le Président, pourquoi essayer d'associer, comme le fait le ministre présentement, l'élargissement de la gamme de vins dans les dépanneurs? Pourquoi le fait-il présentement quand, finalement, les vins embouteillés par la SAQ pourraient très bien, par une entente avec les... par les distributeurs, évidemment, embouteiller ces vins?

M. le Président, est-ce que le ministre n'est pas conscient qu'avec les 3000 valideuses dans les dépanneurs, qu'avec la hausse du taux pour la vente, justement, des billets de loterie, qu'avec l'élargissement de la gamme de vins, il s'agit là

d'un prix de consolation pour les dépanneurs qui sont durement touchés par la controverse de la Loi sur les heures d'affaires?

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Toute privatisation éventuelle de l'usine d'embouteillage implique que l'acheteur éventuel va vouloir maintenir la possibilité d'avoir accès, de façon privilégiée, au réseau des épiciers. Alors, dans ce sens-là, on ne peut dissocier les deux dossiers. Mais quelles que soient les questions, M. le Président, une chose est certaine, c'est que nous allons évaluer le dossier à son mérite et nous ne ferons certainement pas ce que le Parti québécois a fait lorsqu'il a tenté de privatiser la Société des alcools du Québec. La Société des alcools du Québec et le gouvernement du Québec sont présentement aux prises avec des poursuites judiciaires importantes qui sont le reflet de ce que vous avez fait lorsque vous avez tenté de privatiser la Société des alcools du Québec, il y a de nombreuses années.

Le Président: Toujours en question complémentaire.

Mme Harel: M. le Président, est-ce que je peux inviter le ministre à relire les déclarations de son collègue, le député de Laporte, lorsque, au nom de l'Opposition officielle libérale, il s'opposait avec la dernière véhémence à la privatisation partielle de la SAQ? Et le ministre peut-il répondre à cette question: Est-il prêt à soumettre à une consultation publique les différents scénarios de privatisation qu'il a chargé la SAQ de lui préparer?

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): J'ai mentionné tout à l'heure, M. le Président, que j'ai l'intention de consulter toutes les parties impliquées dans une privatisation éventuelle de la Société des alcools du Québec, mais je réitère les propos suivants, à savoir qu'aucune décision n'a été prise. Plusieurs intervenants ont fait des représentations, mais, avant de prendre quelque décision que ce soit, nous allons évaluer le dossier à son mérite, de façon quantitative, également de façon qualitative, M. le Président.

Négociations pour récupérer une portion des coûts du référendum du 26 octobre 1992

Le Président: En question principale, M. le leader de l'Opposition et député de Joliette.

M. Chevrette: M. le Président, on a appris, la semaine dernière, que le référendum du 26 octobre dernier avait coûté 104 000 000 $ aux contribuables canadiens et, ça, ça ne tient pas compte des 40 000 000 $ que nous, citoyens québécois, avons payés pour le référendum sous notre juridiction ou sous la loi référendaire du Québec. Or, on sait très bien que, par nos impôts, nous payons 25 % de la facture canadienne, donc 25 000 000 $, ce qui représenterait un coût de 65 000 000 $ pour les Québécois, ce qui est tout à fait injuste par rapport aux autres contribuables canadiens. on se rappellera que le ministre criait assez fort, en mai dernier, en disant: ii n'y a pas de problème - non pas en mai, mais en septembre dernier - nous allons négocier au plus haut niveau et nous allons aller chercher notre quote-part. quel est le fruit de vos négociations, m. le président?

Le Président: M. le ministre délégué à la Réforme électorale.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, vous aurez facilement compris que le député de Joliette a réponse à sa question lorsqu'il a dit que la négociation était au plus haut niveau. Je ne me considère pas dans ce niveau.

Des voix: Ha,ha, ha!

Le Président: En question complémentaire.

M. Chevrette: Franchement, M. le Président, ce n'est pas que les contribuables québécois veulent savoir s'il y a des résultats ou s'il y a du pédantisme dans la réponse!

Le Président: M. le ministre. (14 h 50)

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je connais très bien le député de Joliette et je suis pleinement convaincu qu'il ne pensait pas du tout les derniers mots qu'il a prononcés.

Une voix: C'est vrai. Des voix: Ha,ha, ha!

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, vous comprendrez que du travail a été fait à un autre niveau que le mien, soit au niveau du premier ministre, et que, dans les circonstances, je désirerais prendre avis de la question et, dès que possible, tenter de donner réponse à votre question, qui est une question qui se justifie très bien à ce moment-ci.

Le Président: Toujours en question complémentaire.

M. Chevrette: M. le Président, la question a d'autant plus d'importance, et je voudrais m'adresser au ministre à nouveau pour lui demander: Au moment où son gouvernement s'apprête à couper quelque 442 000 000 $, ne

croit-il pas important d'aller chercher au moins les sommes qui nous sont dues avant de procéder à des coupures?

Le Président: M. le ministre.

M. Côté (Charlesbourg): m. le président, je pense qu'il faut tout faire, et c'est ce que nous faisons, pour aller récupérer des sommes qui, normalement, nous sont dues.

Négociations au sujet de l'entente trilatérale de Lac-Barrière

Le Président: En question principale, M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Merci, M. le Président.

Le 12 février dernier, dans un climat d'intimidation généralisé, le gouvernement du Québec suspendait unilatéralement l'entente trilatérale de Lac-Barrière à l'égard des Algonquins qui, de leur côté, refusent de céder sur les questions de l'identification des zones sensibles et de la zone tampon de 60 mètres. Durant les dernières semaines, le ministre délégué aux Affaires autochtones a envenimé un peu la situation en qualifiant les Algonquins d'absolutistes et d'intégristes. Ces derniers ont répliqué en accusant le ministre des Forêts d'être le principal obstacle à la résolution du problème de la gestion intégrée des ressources dans le parc de La Vérendrye. D'un autre côté, le représentant des Algonquins, M. Clifford Lincoln, a trouvé, d'après moi, les mots appropriés en disant: Le Québec n'a pas le droit légal et moral de suspendre les négociations.

Je voudrais savoir de la part du ministre des Forêts s'il peut répondre aux allégations d'être le responsable de ce dossier en difficulté et je voudrais savoir de sa part quelles sont les interventions qu'il a fait valoir auprès de son collègue des Affaires autochtones et du Conseil des ministres afin de favoriser un déblocage dans cette crise.

Le Président: M. le ministre des Forêts.

M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le Président, en conformité avec la décision du Conseil des ministres, je crois que les Algonquins doivent reconnaître que ce sont les lois du Québec et du Canada qui s'appliquent dans les opérations forestières du parc de La Vérendrye.

Pour répondre au député de Laviolette, je ne suis pas le responsable des problèmes que nous vivons là, parce qu'à chaque fois que nous sommes intervenus il y a toujours eu des demandes additionnelles pour faire en sorte de retarder les opérations forestières et de priver de travail les employés de la région de Grand-Remous et de Maniwaki.

Maintenant, si le ministre délégué aux

Affaires autochtones veut compléter ma réponse, ça me fera plaisir de lui céder la parole.

Le Président: Alors, en question complémentaire, M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: M. le Président, est-ce que le ministre des Forêts, comme son collègue d'ailleurs des Affaires autochtones, considère qu'il n'est plus question de discuter des zones sensibles et qu'il faut maintenant passer directement à la phase d'élaboration du pian d'aménagement intégré des ressources?

Le Président: M. le ministre des Forêts.

M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le Président, si les Algonquins et leur représentant veulent collaborer, je pense que nous allons faire de grands pas dans la rédaction d'un plan d'aménagement intégré des ressources renouvelables, ce qui fait l'objet de l'entente qui a été signée en 1991.

Le Président: Toujours en complémentaire.

M. Jolivet: Oui. Est-ce que le ministre croit que la norme de protection dont il est question ici, en difficulté - c'est la zone tampon de 20 mètres, tel que prévu par la loi actuelle - ne pourrait pas, dans les circonstances, pour permettre un déblocage de la situation dans le contexte des négociations, être considérée au niveau demandé par les autochtones comme ailleurs au Canada, en Ontario en particulier?

Le Président: M. le ministre.

M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le Président, j'aime bien ça quand le député de Laviolette me cite l'Ontario et le Canada comme exemples.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Côté (Rivière-du-Loup): C'est que la bande de 20 mètres qui sert pour la protection des cours d'eau et de chemin pour la faune, M. le Président, elle a été élaborée par des spécialistes en la matière de l'Université Laval, et je ne pense pas qu'il y ait personne dans cette Assemblée qui a la compétence de discuter de cette norme-là.

Le Président: Alors, en question complémentaire, M. le député de Duplessis.

M. Perron: M. le Président, ma question s'adresse au ministre délégué aux Affaires autochtones. Le ministre ne reconnaît-il pas que, dans ce dossier de Lac-Barrière, la déclaration sévère de son ancien collègue du Conseil des ministres, M. Lincoln, en rapport avec les activités du gouvernement constitue un désaveu

formel de sa propre gestion dans la crise actuelle? et le ministre pourrait-il nous informer quand il va cesser de pratiquer le chantage économique à l'égard des algonquins de lac-barrière et plutôt réagir en fonction de négociations, de signature d'entente en rapport avec les algonquins de lac-barrière?

Le Président: M. le ministre délégué aux Affaires autochtones.

M. Sirros: M. le Président, il faut d'abord, pour la première partie de la question, bien comprendre que le représentant des Algonquins est exactement ça, un représentant des Algon-guins, qui agit en leur nom. Il est clair que nous avons un différend qui nous a amenés à une deuxième impasse, et M. Lincoln a réitéré ce que les Algonquins ont, par le passé, affirmé sans beaucoup d'autres appuis, M. le Président, au niveau de la façon dont les choses se sont déroulées depuis 18 mois.

Maintenant, quant au désir que nous avons d'aller de l'avant et d'essayer d'amener cette entente à terme, il faut bien comprendre que la différence se trouve au niveau de la façon dont chacun d'entre nous entrevoit le but de l'entente. Pour nous, ce n'est pas une entente de cogestion qu'on a signée, mais une entente qui nous aurait permis de tenir compte des activités traditionnelles des Algonquins dans la confection d'un plan de gestion intégrée des ressources. Pour les Algonquins, c'est des droits de gestion qu'ils voient et c'est pour ça que les propositions qu'ils font quant à la gestion du territoire n'ont pas de contenu indigène ou autochtone, mais ce sont des propositions qui touchent à l'ensemble de l'intervention forestière, M. le Président.

Le Président: Pour une autre question complémentaire.

M. Perron: M. le Président, est-ce que le ministre peut nous confirmer si oui ou non il y a eu des rencontres entre lui-même, son collègue des Forêts ainsi que M. Lincoln et les Algonquins au cours des dernières semaines en rapport avec le dossier qu'il vient de mentionner?

Le Président: M. le ministre délégué aux Affaires autochtones.

M. Sirros: II n'y a pas eu de rencontre entre M. Lincoln et les ministres. M. Lincoln, je le réitère et je le répète, c'est le représentant engagé par les Algonquins pour les représenter à la table avec notre représentant spécial. J'ai rencontré le chef des Algonquins; M. Lincoln était présent à cette rencontre, le 12 février dernier, si ma mémoire est bonne.

Rôle de la Caisse de dépôt et

placement du Québec dans la réforme

des institutions financières

Le Président: En question principale, M. le député de Jacques-Cartier.

M. Cameron: Merci, M. le Président.

My question is for the Minister of Industry, Trade and Technology. At the moment, the Minister of Financial Institutions is considering a substantial reform on the level of financial institutions. At the same time, your colleague sitting next to you is listening to some long public hearings concerned with the reform of professions, but no one seems to be able to do anything about the money managers of the Caisse de dépôt.

It strikes me that I would be looking for a syndic or some kind of reform in institutions if I were a minority shareholder in Unigesco and I wonder if the Minister of Industry, Trade and Technology would not agree that the recent action of the Caisse is not exactly the sort of thing that will encourage investment and development in Québec.

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie.

M. Tremblay (Outremont): Je pense que c'est une question qui devrait être posée au ministre des Finances.

Des voix: Par intérim.

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Question complémentaire.

M. Cameron: I would have been happy to address it to the Minister of Finance. In his absence, therefore, I will do as the leader of the Opposition did, discussing the same question and refer it to the President of the Treasury Board.

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Johnson: I really thought I answered the substance of the question in my original reply to the leader of the Opposition.

I do not believe that the consultations that my colleague responsible for financial institutions is currently conducting have any bearing on this specific subject that has been raised. I do not think it even has a bearing on the general subject that has been raised.

Le Président: En question complémentaire. (15 heures)

M. Cameron: I would like to ask the Director of the Treasury Board, if what financial institutions do in Québec does not have any

bearing on what is done by the Caisse de dépôt, what does have a bearing on what is done by the Caisse de dépôt?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Johnson: M. le Président, pour remettre les choses en place, la consultation que ma collègue, la ministre des institutions financières... enfin, à laquelle elle s'occupe actuellement, vise à assurer un cadre réglementaire et législatif qui permette à nos institutions financières, telles que définies, on les connaît, à se comporter sur le marché d'une façon qui ne met pas en danger leur base financière, leur ratio de capitalisation et, en conséquence, ne mette pas en danger les épargnes des Québécois.

C'est une question de jugement, par ailleurs, que le député soulève. Quant à savoir si un actionnaire d'Univa ou l'autre décide quelle est la rentabilité, quelle est la nature de la transaction dans laquelle il veut s'impliquer et quelle est la décision qu'il doit prendre à l'endroit de cette transaction, ça m'apparaît n'avoir absolument aucun rapport avec la consultation que ma collègue conduit actuellement.

Le Président: Alors, c'est la fin de la période des questions.

Il n'y a pas de votes reportés.

S'il y avait consentement, nous procéderions immédiatement aux avis touchant les travaux des commissions. Est-ce qu'il y a consentement à cet effet?

M. Chevrette: Oui.

Le Président: II y a consentement.

Donc, M. le leader du gouvernement, en requérant l'attention de tous les collègues, s'il vous plaît!

Avis touchant les travaux des commissions

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Compte tenu du consentement, M. le Président, j'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 22 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'éducation poursuivra ses auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur l'avant-projet de loi intitulé Loi modifiant le Code des professions et d'autres lois professionnelles.

De 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 22 heures ainsi que demain, le mercredi 17 mars 1993, de 10 heures à 14 heures, à la salle du Conseil législatif, la commission de l'économie et du travail poursuivra ses auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le plan de développement 1993-1995 d'Hydro-Qué- bec.

J'avise également cette Assemblée, M. le Président, que demain, le mercredi 17 mars 1993, de 10 heures à 13 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission des affaires sociales procédera à l'étude détaillée du projet de loi 43, Loi modifiant la Loi sur le régime de rentes du Québec et d'autres dispositions législatives.

Par ailleurs, je rappelle à cette Assemblée que demain, le mercredi 17 mars 1993, de 10 heures à 13 heures, à la salle Louis-Hippo-lyte-LaFontaine, la commission de l'aménagement et des équipements entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé 244, Loi concernant le Conseil de développement touristique Hull-Chelsea-La Pêche inc.

Le Vice-Président (m. bissonnet): est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 143? consentement. donc, vos avis sont déposés.

Avis de débat de fin de séance

Je vous rappelle que, tel que convenu à la séance du jeudi 11 mars dernier, il y aura aujourd'hui un débat de fin de séance au début des affaires du jour. Ce débat concerne les coupures dans le domaine de la culture. Mme la ministre de la Culture répondra à M. le député de Gouin.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Je vous informe que demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'Opposition, l'Assemblée entendra le débat sur la motion inscrite par M. le whip de l'Opposition officielle. Cette motion se lit comme suit: «Que cette Assemblée se déclare en faveur du maintien intégral du principe de la gratuité des études collégiales».

Alors, ceci met fin aux avis.

Motions sans préavis

Motions sans préavis.

M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

Rendre un hommage aux athlètes

québécois qui ont excellé récemment

sur la scène internationale

M. Gaston Blackburn

M. Blackburn: Merci, M. le Président.

Je demande que cette Assemblée accepte de débattre de la motion suivante, afin de rendre un hommage particulier à Mme Myriam Bédard, qui a

remporté la médaille d'or aux 7,5 kilomètres lors des championnats du monde de biathlon à Borovetsc, en Bulgarie, à Mme Isabelle Brasseur et M. LJoyd Eisler, qui sont maintenant les nouveaux champions du monde en patinage artistique en couple en vertu de la médaille d'or que ces deux athlètes ont remportée lors du championnat du monde tenu à Prague, à M. Bruny Surin, nouveau champion du monde des 60 mètres en salle, à M. Jean-Luc Brassard, qui a décroché la première place à la compétition des bosses au championnat mondial de ski acrobatique et, finalement, à M. Philippe LaRoche, champion mondial des sauts à ski.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Chevrette: M. le Président, il y a consentement, mais si on les faisait au jour le jour, il y en aurait moins dans la même.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): II y a consentement. Je demanderais aux collègues de porter attention, s'il vous plaît!

Alors, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Blackburn: On ne peut certes pas, M. le Président... Alors, M. le Président...

M. Blais: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le député de Masson.

M. Blais: J'aimerais demander: Est-ce que c'est la même motion qui a été refusée à Mme la députée, Mme Juneau, mardi passé?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, il y a eu consentement. Donc, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche a la parole.

M. le ministre.

M. Blackburn: Merci, M. le Président.

Le tout premier mot qui me vient à l'esprit lorsque j'entends tous ces noms, c'est «fierté». Je suis persuadé que tous les membres de cette Assemblée, bien sûr, mais qu'aussi toute la population du Québec et du Canada est plus qu'heureuse des résultats obtenus et, par le fait même, des performances établies par ces grandes personnalités sportives. Au fil des ans, le Québec a vu naître de grands athlètes, tant du côté amateur que professionnel, qui nous ont fait vibrer. À toutes les fois que des Québécoises et des Québécois dominent leur sport respectif, plus particulièrement au plan international, nous ressentons un sentiment tout à fait spécial; nous sommes alors transportés par un vent d'enthousiasme, et ces athlètes deviennent sans contredit une source de motivation sans précédent pour les plus jeunes.

C'est le cas de le dire, au cours des dernières semaines et des dernières heures, le Québec a retenu l'attention de toute la scène sportive internationale, d'abord par la magnifique performance de Myriam Bédard. Il en a coulé beaucoup d'eau sous les ponts entre la première compétition internationale à laquelle elle a pris part en 1985, à Borovets, en Bulgarie, où elle a ébloui tout le monde en décrochant la médaille d'or aux 7,5 kilomètres lors des championnats du monde de biathlon. De plus, deux jours plus tôt, elle mettait la main sur la médaille d'argent du 15 kilomètres. Le nom de Myriam Bédard est sur à peu près toutes les lèvres depuis quelques années déjà. Ai-je besoin de vous rappeler qu'il y a à peine un an Mme Bédard décrochait une médaille de bronze lors de l'épreuve de 15 kilomètres aux Jeux olympiques d'Albertville? Elle devenait, alors, la toute première athlète nord-américaine à gagner une médaille en sport nordique, qui comprenait le ski de fond, le biathlon et le saut à ski.

Le Québec a poursuivi son ascension vers les plus hauts sommets lors de la victoire de Mme Isabelle Brasseur et de M. LJoyd Eisler qui sont maintenant les deux nouveaux champions mondiaux de patinage artistique en couple grâce à la performance éblouissante qu'ils ont offerte à Prague. J'ai eu la chance et le privilège de les voir à l'oeuvre la semaine dernière et je comprends pourquoi. Ils ont ébloui le monde entier par leur habilité et leur agilité; ils volaient littéralement sur la glace, et il fallait voir toute l'ardeur qu'ils ont déployée pour devenir les meilleurs du monde.

Et comme si cela n'était pas assez, nos Québécois ne se sont pas arrêtés là. Frappant à la vitesse de l'éclair, M. Bruny Surin est devenu le monarque mondial des 60 mètres en salle lors d'une magnifique performance réalisée à Toronto. Favori parmi tous les athlètes présents, Bruny Surin n'a pas fait mentir sa réputation qui se consolide depuis sa prestation des Jeux olympiques de Barcelone. Tous se souviennent de sa prestation de l'été dernier, alors qu'il était venu près de décrocher une médaille olympique.

Un peu plus loin de Toronto, cette fois, en Autriche, un autre Québécois, M. Jean-Luc Brassard, a, pour sa part, remporté la compétition des bosses au championnat mondial de ski acrobatique. Pour les deux prochaines années, il est le champion mondial de cette discipline. M. Brassard est un athlète fort prometteur. Après avoir terminé deuxième lors des qualifications, il a démontré qu'il possédait l'étoffe des plus grands dans une discipline sportive fort spectaculaire.

La semaine s'est terminée de belle façon par la victoire de Philippe LaRoche en Autriche.

Cette performance reconfirmait sa suprématie dans les sauts à ski. Il avait, d'abord, décroché l'or en 1991, à Lake Placid, sans parler d'une autre médaille, d'une médaille d'or arrachée, cette fois, lors des Jeux olympiques d'Albertville. Comme cela est son habitude, M. LaRoche y a mis toute l'énergie nécessaire lors de ses sauts, ce qui lui a valu d'être reconduit comme maître incontesté de cette épreuve.

M. le Président, toutes ces performances démontrent que le Québec regorge d'athlètes qui nous font honneur un peu partout dans le monde. Nous devons être fiers de ce qu'ils ont accompli parce que, en tout temps, ils ne visent qu'un objectif, soit d'être les meilleurs parmi les meilleurs. (15 h 10)

J'aimerais aussi profiter de l'occasion afin de souligner le travail accompli par les entraîneurs de ces athlètes. Ces gens-là, pratiquement à toute heure du jour et de la nuit, leur rôle est essentiel à la réussite de ces athlètes qui, trop peu souvent, reçoivent l'encouragement et la petite tape dans le dos que cela leur prend pour aller un peu plus loin. Je m'en voudrais de ne pas profiter de l'occasion, de passer sous silence l'appui que reçoivent ces athlètes de la part de leurs parents, ces premières personnes qui les ont supportés dans leurs premières activités sportives. Trop souvent, nous minimisons cet appui des parents qui, parfois, peut faire la différence entre une victoire et une défaite.

Comme ministre responsable du sport amateur au Québec et surtout comme Québécois, je suis très fier des performances offertes par Mmes Bédard et Brasseur et par MM. Eisler, Surin, Brassard et LaRoche. De telles performances par des athlètes, que plusieurs d'entre nous avons déjà peut-être côtoyés, ne peuvent que produire des effets très positifs pour le développement et l'avancement du sport amateur au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre.

Je suis prêt à reconnaître Mme la députée de Johnson. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci, M. le Président.

C'est avec joie que l'Opposition s'associe au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour féliciter ces valeureux athlètes que sont Myriam Bédard, Isabelle Brasseur, Uoyd Eisler, Bruny Surin, Jean-Luc Brassard et Philippe LaRoche. Chacun et chacune, dans sa propre discipline, a su faire preuve de ténacité, d'endurance, mais surtout d'une volonté inébranlable pour ainsi atteindre l'excellence.

Isabelle Brasseur et Uoyd Eisler patinent ensemble depuis six ans. Leur exploit ne date pas d'hier, puisqu'ils courtisent cette première place depuis bientôt quatre ans. En 1990, ils terminaient seconds aux championnats du monde, et répétaient l'exploit en 1991. L'année dernière, ils se classaient troisièmes aux Jeux d'Albertville. Et j'ai une extraordinaire belle photo, M. le Président. On a l'impression qu'elle vole vers la première place.

De son côté, Myriam Bédard a commencé à pratiquer le biathlon lors de son passage dans les cadets. Sa première course, elle l'a gagnée grâce à sa forme physique exceptionnelle, puisqu'elle skiait avec des skis de fond loués. Depuis ses débuts, on constate qu'elle était prédisposée à un brillant avenir. Son tableau d'honneur est exceptionnel: championne canadienne junior en 1987; meilleure performance pour une Canadienne, huitième aux championnats mondiaux senior en 1988; quatrième au 5 kilomètres aux mondiaux junior en 1989; deuxième à la Coupe du monde, en Autriche, en 1990; deux médailles d'or, deux médailles d'argent, une médaille de bronze et deux places au classement général de la Coupe du monde en 1991; médaille de bronze aux Jeux olympiques d'Albertville en 1992; médaille d'argent au 15 kilomètres; et médaille d'or au 7,5 kilomètres, aux Championnats du monde de Borovets en Bulgarie; et, actuellement, première au classement général de la Coupe du monde en 1993. C'est tout un exploit! C'est tout un personnage que cette Myriam Bédard, M. le Président!

Les exploits du sprinter Bruny Surin sont également impressionnants. Ce jeune Québécois, d'origine haïtienne, porte-parole officiel de la Semaine interculturelle, est maintenant champion du monde des 60 mètres en salle. Il s'est même permis de briser le record canadien en parcourant la distance en 6,50 secondes. Cet athlète exceptionnel pratique la course depuis 1989.

Je m'en voudrais enfin de ne pas souligner les performances de Jean-Luc Brassard et de Philippe LaRoche, deux leaders mondiaux dans le ski acrobatique et, de surplus, M. le Président, originaires de ma région.

Vous savez, M. le Président, j'écoutais à la télévision un reportage d'Isabelle Brasseur, en direct de Prague, et ce qui m'a frappée, c'est ses valeurs humaines, parce qu'elle disait que ce qui était important, c'était de travailler pour réussir ce qu'on faisait. Elle a aussi mentionné le fait que son père l'avait beaucoup aidée, que son père, malheureusement, elle l'a perdu l'année dernière, et qu'elle a traversé des moments très difficiles. J'ai remarqué cette chaleur quand elle parlait de ses proches, quand elle donnait l'évaluation de ses valeurs humaines, et c'est ça, je pense, qui est important, M. le Président. C'est les valeurs humaines que tu peux avoir à l'intérieur de toi-même. Ça, je pense que c'est plus important, et c'est ce qui fait que tu réussis dans la vie.

Bruny Surin, qui était au programme «Le Point», hier soir, disait aussi comment c'était

important, pour lui, de rester lui-même, même avec toutes les médailles, même avec toutes ses premières places, comment c'était important, pour lui, de rester lui-même en ce qui a trait à sa personnalité, à son côté humain, à son côté chaleureux que n'importe qui pouvait sentir.

Sauf, M. le Président, que je suis bien obligée d'apporter ce bémol à ce qu'on vit aujourd'hui. On devrait, bien sûr, ne pas passer sous silence ce que le ministre est en train de faire dans les loisirs.

M. le Président, c'est inacceptable ce qu'il fait présentement. Je regardais... La ministre de l'Éducation aussi. Dans un journal, on disait: Semaine historique pour le Québec. On disait: Quelle semaine incroyable pour le sport québécois! C'est Mario Brisebois qui disait ça. Il disait: «Ces réussites successives ont de quoi faire réfléchir les ministres de l'Éducation, qui veut retirer l'éducation physique des écoles, et du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, qui tente de couper les budgets de la Fédération sportive du Québec. »

M. le Président, depuis la semaine dernière, jeudi passé, quand j'ai posé une question sur les coupures des CRL, 46 % de coupures, il a voulu faire son «smart», il m'a répondu par une motion qu'il présente cinq jours après. Cette motion, aujourd'hui, devait être faite la semaine passée, comme le leader le disait, il en aurait peut-être eu moins à féliciter à la fois. Mais remarquez bien qu'on est très fiers aussi de les féliciter. mais en ce qui a trait aux coupures dans les crl, il y a eu un editorial la semaine dernière par un chroniqueur sportif de l'estrie qui, à la radio, a dit ceci, après avoir félicité, bien sûr, nos athlètes qui revenaient des jeux du québec, et je le cite, m. le président: si je suis très heureux que le gouvernement québécois conserve sa subvention de 275 000 $ versée aux villes hôtesses des jeux du québec, je m'élève contre l'hypocrisie de ce même gouvernement qui, depuis 1984, ne donne que 38 000 $ au conseil régional des loisirs de l'estrie pour organiser les finales régionales de ces mêmes jeux. ce même gouvernement, qui vient de couper les vivres à sports-québec, cela se traduit par urne coupure de 46 % à notre région, de 229 000 $; la subvention de sports-québec à l'estrie vient d'être coupée de 105 000 $. ça, c'est de l'argent pour les stages d'entraîneurs, de premiers soins, de soutien à plusieurs organismes.

Bref, si plusieurs pavoisent de la réussite de nos jeunes - et de nos plus âgés, et de nos athlètes dont on parle aujourd'hui - dans le sport, ces coupures sauvages d'un gouvernement hypocrite handicapent sérieusement l'affaire du développement chez nous. J'espère qu'il y aura de la contestation, que les municipalités qui se retrouveront avec le magot, que les bénévoles qui se retrouveront encore plus surchargés vont manifester leur mécontentement, car c'est un choix de société qui se pose. Des coupures, il doit probablement y en avoir, mais est-ce qu'on cesse d'investir dans notre jeunesse pour payer la sécurité publique plus tard? Est-ce que c'est ça qu'on veut comme société, des jeunes qui font moins de sport? C'est exactement là où on s'en va.

Pourquoi j'ai amené ça, M. le Président? Parce qu'il se disait fier tout à l'heure de dire que ces grands champions, dont vraiment on doit être fiers tout le monde, mais pas juste fiers du bout des lèvres, il faut être fiers en ce sens que c'est important pour un gouvernement d'aider ses jeunes athlètes.

J'ai reçu une cinquantaine de lettres des CRL qui se voient obligés, s'il y a une compression de 46 %, de laisser tomber nos jeunes athlètes, M. le Président. Et ça, je ne peux pas comprendre et je ne peux pas accepter ça. Parce que, pendant qu'ils font du sport, ils ne sont pas sur les machines à boules et ils ne sont pas à traîner les rues. C'est ça qui est important. Et ça, je trouve ça terrible qu'on coupe les vivres à ceux qui, dans le milieu, vont chercher nos jeunes et leur montrent à faire du sport pour en arriver à ce qui arrive aujourd'hui à Isabelle Brasseur, à Bruny Surin, à Myriam Bédard et à toute cette panoplie de jeunes dont on est si fiers. (15 h 20)

Ça m'inquiète, M. le Président. Je trouve ça inacceptable de la part d'un gouvernement qui a été élu par une population et qui doit faire en sorte de supporter le sport, de supporter les jeunes athlètes pour que, demain, on soit fiers d'eux, pour que demain ils portent nos couleurs à travers le monde et qu'ils arrivent premiers, pour qu'on arrive ici et leur dire: Oui, on est fiers de toi; oui, tu as du courage; oui, tu as bien fait ça; oui, on est tous très heureux de ce qui se passe pour vous autres et pour nous, parce que vous portez nos couleurs. Mais, si on leur coupe îles vivres, on ne pourra plus les féliciter un peu plus tard.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Johnson, de votre intervention.

Alors, sur cette même motion, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député.

M. Gordon Atkinson

M. Atkinson: M. le Président, Mr. Speaker, I take this occasion to congratulate Quebec's Myriam Bédard who, over the past couple of years, has continued to perform at the highest possible level and over this past week she, once again, was placed on the podium after winning the gold medal for the 7, 5 km at the World Biathlon Championships in Bulgaria.

I am delighted to add my voice of con-

gratulations to Isabelle Brasseur and her partner, LJoyd Eisler, in winning the gold medal at the World Figure Skating Championships. I think it only right, Mr. Speaker, that LJoyd Eisler be included in our congratulations as he, a native of Ontario, now resides in Québec where he and his partner, Isabelle Brasseur, now train at the southshore Montréal community of Boucherville. For this young pair, it is the culmination of a 3-year dream where they stood on the winners' podium, but never in the dominant gold medal place. They have competed as a duo in six world championships, beginning in 1987 where they placed seventh after placing ninth at the Calgary Olympics.

Mr. Speaker, I also take great pride in those other Québec and Canadian athletes who also won gold medals in recent weeks. I would like to pay tribute to Bruny Surin of Montréal, who after being continuously overshadowed by Ben Johnson, won, last Friday, the World Indoor Championship crown as the fastest sprinter in the world over 60 meters. Philippe LaRoche of Lac-Beauport defended his world free style ski title over this past weekend. This competition held every second year has seen no nation other than Canada win the men's aerial competition. So, my congratulations to Philippe LaRoche. Not to be forgotten in the plethora of medals by Québec and Canadian athletes, I must also congratulate Jean-Luc Brassard for his gold-medal win in the mogul ski competitions. As a side note to his victory, Mr. Speaker, I point out that Jean-Luc is the boyfriend of gold medalist Isabelle Brasseur. Could a victory be more sweet than to have a love story intertwined with gold medal victories for two young Québec athletes?

For 40 years, I was involved in the various Olympic, panamerican, international competitions, the Canadian Games, as a commentator on the English network of CBC Television and Radio. Over that span of time, I was rewarded most amply by hearing Canada's national anthem being played as our athletes won the major prize of the gold medal. There is nothing more stearing than standing for «0 Canada» following a long, hard, gruelling competition, that lasts, in some cases, for days, the same thrill of accomplishment and pride in our athletes, I felt, when they mounted the podium to receive their well-deserved gold medal.

To all who competed, my sincerest best wishes and congratulations for a job well done. It made my ancient sports commentator's heart grow glad and proud of their accomplishments.

And on a final note, Mr. Speaker, I would like to say «bonne chance!» to the City of Québec in its drive to have the first Olympic Games of the 21 st century.

Thank you, Mr. Speaker.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, en vertu de votre droit de réplique, en vous indiquant qu'il y a un temps maximum de 20 minutes.

M. Gaston Blackburn (réplique)

M. Blackburn: Merci, M. le Président.

J'écoutais, tout à l'heure, la députée de Johnson qui répondait à la motion, bien sûr, qui était faite pour féliciter les athlètes, et je trouve un peu déplorable, pour ne pas dire plus, qu'elle profite de cette occasion pour faire de la politique de mauvais goût. Vous savez, c'était une motion de félicitations à des athlètes qui avaient fait des performances extraordinaires au plan international, et je pense que c'était dans cet esprit-là qu'on se devait d'intervenir. Et quand on veut revenir sur des questions qui ont été posées la semaine passée et sur des choix que le gouvernement a faits pour, justement, protéger ces clientèles que sont ces athlètes sportifs, que sont ces personnes âgées, que sont ces personnes handicapées, c'est justement pour éviter des choses extrêmement fondamentales.

Ça, malheureusement, l'Opposition l'a oublié de 1976 à 1985. Quand on a gonflé le déficit du Québec de 6 000 000 000 $ à 26 000 000 000 $, qu'on a multiplié ça par 600 %, c'est évident que quelque part, aujourd'hui, on est obligés de faire des choix importants, mais qui nous sont imposés par les conséquences de la mauvaise gestion financière que vous avez faite dans ce temps-là.

Et là, les choix qu'on fait comme gouvernement responsable, comme gouvernement responsable, c'est de ne plus, justement, continuer de gonfler ce déficit de façon indue puis d'être responsable pour pouvoir laisser à nos générations futures des déficits acceptables, avec lesquels elles vont être capables de vivre. Quand on choisit de préserver nos clientèles, personnes âgées, personnes handicapées puis nos jeunes, êtes-vous en désaccord avec ça? Ça veut dire qu'à ce moment-là, si vous voulez, au lieu de couper dans les structures qu'il nous restait...

Parce que, dans un communiqué de presse que vous avez fait parvenir la semaine passée, vous disiez, Mme la députée de Johnson, qu'encore une fois les CRL vont être touchés. Ça fait 10 ans qu'ils n'ont pas été touchés. Il y a 3 ans, on a choisi de ne pas les toucher parce que, justement, on était capables d'éviter de les toucher, tout en ne touchant pas aux clientèles qu'on avait choisies. Mais là, on ne pouvait plus faire autrement que de toucher encore à des structures et des structures qui demeuraient. Il y avait parmi celles-ci les CRL. Les CRL, bien sûr, on devait faire le choix: ou bien on coupait dans ces structures administratives ou on leur demandait de faire la rationalisation que le gouvernement fait comme exercice. Dans mon propre ministère, sur une demande de réduction de

10 900 000 $, il y a 7 000 000 $ qui sont dans les services administratifs du ministère. Il reste 3 900 000 $ au niveau des budgets de transfert.

Bien sûr que, quelque part, on dit: Si le gouvernement et les ministères font cet exercice de travail de réflexion, de rationalisation, on dit probablement qu'aussi il est possible, dans les structures administratives qui demeurent - et, bien sûr, parmi celles-ci, il y a les CRL - il est possible, pour ces structures, de faire un exercice de réflexion et de préserver, encore une fois, toujours, bien sûr, nos clientèles, protéger les programmes qui touchent directement nos clientèles, diminuer le soutien gouvernemental aux structures administratives pour le concentrer plus encore vers la base, davantage vers la base, préserver l'intervention auprès des clientèles cibles que je vous mentionnais tout à l'heure.

Je dis aux CRL: Dans votre réflexion de rationalisation, vous devez soutenir les petites municipalités et les organismes locaux. Vous devez soutenir la formation des entraîneurs, des administrateurs bénévoles, le soutien aux manifestations régionales, le mérite sportif, la soirée de reconnaissance des bénévoles. Quand je demande à deux structures provinciales qui s'appellent Sport étudiant, la Fédération québécoise du sport étudiant et de Sport-Québec, quand je leur demande de faire un exercice de rationalisation à l'intérieur, je leur propose tout simplement ceci: Ne serait-il pas possible qu'au lieu d'avoir deux structures provinciales pour les mêmes clientèles on n'en ait qu'une qui, avec le budget qui va demeurer, parce qu'il y avait 1 000 000 $ dans ces deux structures, on fait une coupure de 150 000 $ dans chacune. Puis on dit: Peut-être que si vous...

M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le député de...

M. Gendron: Bien oui, c'est très simple. Je veux dire, on veut bien accorder un droit de réplique sur une motion qui est présentée, mais ce que le ministre du Loisir est en train de faire n'a rien, mais rien à voir avec la motion à laquelle on a donné notre consentement. Il est en train de nous expliquer les mesures de rationalisation de son ministère.

Ça n'a rien à voir avec la motion qui est présentée, une motion de félicitations aux athlètes.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur la question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: J'hésite à souligner ce qui apparaît le manque d'expérience du leader adjoint. De toute évidence, il s'amuse ici.

Le droit de réplique vise justement à permettre au ministre de répliquer. Il s'agit d'écouter ce que la députée de Johnson avait à dire pour comprendre que c'est la réplique de ce qu'elle a dit qui est en train de se dérouler.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre, si vous voulez terminer votre réplique le plus rapidement possible.

M. Blackburn: M. le Président, je peux juste dire... simplement dire, pour renchérir, que si la critique de l'Opposition n'était pas sortie effectivement de l'esprit, on serait restés probablement dans l'esprit du texte et, à ce moment-ci, on ne serait pas à faire ce débat. Mais elle m'a ouvert la porte, et je le fais, l'exercice d'explication, pour qu'elle comprenne que ce que nous avons fait, c'est un exercice de rationalisation.

C'est cette même demande que nous faisons aux organismes pour voir dans quelle mesure ils pourraient aussi faire cette même démarche de réflexion, de justification de leur intervention, tout en préservant nos clientèles puis, bien sûr, de préserver ces structures nécessaires, mais dans un exercice de questionnement. (15 h 30)

Alors, je reviens à nos Sport étudiant, à Sport-études puis à Sport-Québec. Pourquoi n'y aurait-il pas qu'une fédération provinciale qui, avec les 700 000 $ qui vont demeurer, ne serait pas capable de donner cette même prestation de service, voire même l'améliorer, à ces mêmes clientèles? C'est ça, l'exercice que j'ai demandé à toutes ces structures, déjà depuis plusieurs semaines: que les fonctionnaires du ministère les rencontrent, puis on continue la démarche avec elles, toutes ces structures, avec toutes ces organisations, pour les aider à trouver véritablement les réponses aux problèmes que ça peut leur poser temporairement.

Mais je suis convaincu qu'en bout de ligne, quand on va arriver avec, bien sûr, cette démarche positive, proactive, intelligente et non pas seulement politique, quand on va arriver avec cette démarche qui va être faite correctement, on va arriver à des solutions qui vont nous permettre de maintenir des services à des clientèles cibles, puis on va nous permettre non seulement de les maintenir, mais de les améliorer, et cet exercice-là, toute la société québécoise, toutes les structures...

Bien sûr, la population nous regarde aller, puis elle a raison, elle nous regarde aller et elle dit: Eh bien, faites donc cet exercice-là de réflexion parce que, à quelque part, si vous ne le faites pas, on va vous poser des questions. Donc, on fait cet exercice-là tout à fait normalement, dans toutes les structures administratives de tous les niveaux de gouvernement, dans tous les ministères, dans tous les étages de chacun des ministères. On dit à ces structures qui existent encore dans les autres parties du Québec: Faites aussi cette même démarche pour qu'on soit capable de justifier auprès de la population que

la gestion des deniers publics se fait correctement à tous les niveaux de notre société.

C'est ça, tout simplement, M. le Président, l'exercice que, justement, nous demandons de faire à cette structure, qui est tout à fait justifié et qui est tout à fait correct. C'est dans cette perspective que le gouvernement du Québec va continuer d'assumer sa responsabilité. Je pense que ça, c'est fondamental justement pour nos clientèles que sont les jeunes, pour nos clientèles justement que sont encore les personnes âgées, que sont les personnes handicapées, pour être capable de maintenir des sommes d'argent pour leurs besoins, selon leurs besoins, pour répondre à des choses dont ils ont fondamentalement besoin et questionner des structures qui leur donnent des services, bien sûr, mais, à quelque part, on a à faire des choix: ou bien on questionne ces structures, ou bien on questionne les budgets.

Les bourses aux athlètes, Mme la députée de Johnson, vous auriez préféré qu'on coupe ces bourses aux athlètes avant de couper dans les structures des CRL. Vous auriez préféré qu'on coupe ces bourses à ces athlètes ou bien aux entraîneurs parce que eux autres, ces entraîneurs, sont extrêmement importants, on en a parlé tout à l'heure. C'est fondamental, quand on veut avoir des athlètes qui performent au plan international. C'est parce qu'à quelque part il y a des athlètes, c'est parce qu'à quelque part il y a des entraîneurs. Vous auriez préféré qu'on coupe dans les programmes de formation des entraîneurs. Non.

On a choisi de questionner des structures qui étaient encore en place, qui méritaient d'être questionnées et qui méritaient qu'on fasse cet exercice tout à fait démocratique et raisonnable dans un contexte budgétaire difficile. Et ça, quand on parle de difficile, actuellement, dans un contexte budgétaire, je pense qu'il y a juste une partie de l'Assemblée nationale qui est ici présente qui ne comprend pas qu'il y a des problèmes budgétaires au gouvernement du Québec, et c'est l'Opposition.

Malheureusement, le gouvernement, vous pouvez être sûr, M. le Président, va continuer d'assumer sa responsabilité. Il va continuer de livrer la marchandise parce que c'est une responsabilité fondamentale à laquelle, bien sûr, nous allons continuer de contribuer avec toute la lucidité et le sens des responsabilités qui nous est imparti.

Mme Juneau: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors... Oui, Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: Est-ce qu'en...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, en vertu de l'article 213, est-ce que M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche permet à la députée de Johnson de lui poser une question en vertu du règlement?

Une voix: II n'y a pas de problème.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, il n'y a pas de problème. Je tiens à vous dire, Mme la députée, que votre question doit être brève et que la réponse doit être brève également.

Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: Est-ce que le ministre ne reconnaît pas que les CRL s'autofinancent à 40 % et qu'il va les couper à 46 % de leur financement? Est-ce que le ministre peut comprendre qu'à ce moment-là il n'y aura plus personne pour faire en sorte que nos jeunes sportifs puissent en arriver à devenir de grandes vedettes, il n'y aura plus personne à la base pour travailler parce que vous leur coupez les vivres? Est-ce que vous reconnaissez ça?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, à la question, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Blackburn: Le budget des CRL, M. le Président, était de 3 500 000 $ annuellement. Il va rester 1 900 000 $ encore de disponibles à ces structures provinciales, et je dis, je reviens à l'exemple que je donnais tout à l'heure dans l'exercice de questionnement: Pourquoi doit-il y avoir encore à chaque année des structures au niveau régional par rapport aux fédérations de sports... les Jeux du Québec? Pourquoi doit-il y avoir des finales régionales, à chaque année encore, dans les finales au niveau des Jeux du Québec? Pourquoi va-t-il y en avoir encore à tous les deux ans?

Mais c'est des questionnements comme ceux-là qui doivent se faire par des structures comme celles-là. C'est avec cet excercice-là qu'on va certainement être capable de maintenir des services à des clientèles qui en ont besoin.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ceci termine la question.

Nous en sommes à l'étape des renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Est-ce qu'il y a des renseignements sur les travaux de l'Assemblée? Ceci met fin à la période des...

Mise aux voix

Est-ce que la motion est adoptée? Je m'excuse.

Une voix: Oui, adoptée.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): La motion est adoptée.

Alors, ceci met fin à la période des affaires courantes.

Affaires du jour

Nous procédons maintenant aux affaires du jour et, tel que convenu à la séance du jeudi 11 mars dernier, nous allons donc procéder immédiatement à un débat de fin de séance. Ce débat concerne les coupures dans le domaine de la culture. Mme la ministre de la Culture répondra à M. le député de Gouin.

Débat de fin de séance Coupures dans le domaine de la culture

Permettez-moi de vous rappeler les temps de parole pour ce débat. M. le député de Gouin a droit à une première intervention de cinq minutes; Mme la ministre, à une intervention de cinq minutes, et également un droit de réplique de deux minutes au député de Gouin. Il s'agit de droits restrictifs, et le temps de parole doit être de cinq minutes et deux minutes au droit de réplique.

M. le député de Gouin.

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, je prends acte que vous, qui êtes un homme bien informé, nous confirmez les craintes de l'Opposition en nous annonçant qu'il y aura effectivement des coupures dans le secteur culturel. J'en prends acte, M. le Président.

La semaine dernière, je demandais à la ministre de la Culture de préciser les intentions de son gouvernement à l'égard du niveau de financement des arts et de la culture au Québec. Plus particulièrement, l'Opposition demandait à la ministre de la Culture de réitérer l'engagement de son gouvernement à l'effet de consacrer 57 800 000 $ sur trois ans, dont 30 400 000 $ pour 1993, afin d'assurer la mise en oeuvre de la toute récente politique culturelle, engagement, d'ailleurs, pris solennellement en cette Chambre, devant l'ensemble des parlementaires, le 19 juin dernier, par le gouvernement libéral et qui avait, au niveau de la pratique, concrétisé l'engagement du gouvernement libéral d'élever la culture au rang des missions essentielles de l'État parce que, rappelons-le, M. le Président, la mise en oeuvre de la politique culturelle repose d'abord et surtout sur la capacité financière dont disposent les artistes, créateurs et organismes culturels.

Alors, jeudi dernier, le gouvernement libéral, loin, loin, M. le Président, de faire taire les rumeurs de compressions, loin de réaffirmer les consensus, loin aussi de rappeler l'apport que les milieux culturels ont déjà fourni à l'assainissement des finances publiques, loin de réaffirmer aussi la valeur intrinsèque de l'activité culturelle sur les plans économique et social - rappelons que le secteur de la culture occupe le sixième secteur d'activité économique, crée plus de 75 000 emplois et génère un chiffre d'affaires de plus de 3 000 000 000 $ par année - loin aussi de braquer le faisceau haut et loin sur les objectifs de la politique, le gouvernement a préféré entretenir la confusion en plus d'amorcer un recul qui, s'il s'avère fondé, serait certainement catastrophique et risquerait aussi de miner les efforts des dernières années. Plutôt que de se tourner vers l'avenir, plutôt que de regarder en avant, la ministre a préféré se tourner vers le passé en nous rappelant tout simplement quelques structures, quelques réformes de structures, en nous rappelant la création du Conseil des arts et le changement de nom de son ministère, nous laissant ainsi croire, M. le Président, que la politique culturelle de son gouvernement se limitait à un changement de nom pour son ministère et à la création et à la mise sur pied d'un Conseil des arts gérant en lieu et place du ministère les programmes qui, auparavant, étaient ceux de son ministère avec les mêmes budgets, sans aucune augmentation et sans même aucune indexation, nous laissant surtout, M. le Président, croire à l'isolement de la députée de Marguerite-Bourgeoys au Conseil des ministres ainsi qu'à la mise sous tutelle de son ministère par le président du Conseil du trésor. Son ministère devra maintenant subir la tutelle, le joug et les diktats du Conseil du trésor.

La question fort simple que nous voulons aujourd'hui adresser à la ministre pour, s'il y a lieu, nous prendre en défaut, nous lui donnons l'occasion, nous demandons, M. le Président, si le communiqué qu'elle émettait le 19 juin fait toujours lieu et place de politique du gouvernement libéral. Est-ce que, le 19 juin dernier, lorsque la députée de Marguerite-Bourgeoys parlait en cette Chambre et s'engageait solennellement, au nom de son gouvernement, à consacrer 57 800 000 $ sur trois ans, dont 30 400 000 $ en 1992-1993, la ministre parlait parce qu'elle avait l'assurance qu'elle pouvait le faire ou, plutôt, est-ce que la ministre le faisait pour mieux faire passer sa politique culturelle, trompant ainsi, flouant ainsi tous les milieux culturels qui, de bonne foi, avaient repris le flambeau et avaient cru à l'initiative du gouvernement? Est-ce que la ministre, oui ou non, estime, comme elle s'y engageait dans son communiqué du 19 juin, que, pour 1993-1994, 30 400 000 $ sont toujours nécessaires à la mise en oeuvre de sa politique? (15 h 40)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la ministre de la Culture.

Mme Liza Frulla Mme Frulla: Merci, M. le Président.

Je rappelle, d'ailleurs, à la suite de la politique culturelle, que, depuis le 21 décembre, je suis effectivement ministre de la Culture.

Permettez-moi tout d'abord, M. le Président, d'exprimer aussi mon étonnement à l'égard de ce débat de fin de séance, débat sur l'application de la politique culturelle, je tiens à le préciser. Je suis aussi étonnée, parce que le député de Gouin aura l'occasion de poser toutes les questions qu'il jugera nécessaires à l'étude détaillée des crédits du ministère de la Culture, qui devrait avoir lieu au printemps qui vient.

Je veux aussi profiter de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui pour faire l'état de la situation du secteur des arts et de la culture au Québec et démontrer ainsi l'ouverture et le soutien de notre gouvernement à l'égard du milieu culturel. Et j'espère que cela permettra au député de l'Opposition de se familiariser davantage avec ses nouvelles fonctions comme critique de l'Opposition en matière de culture. Je lui suggère aussi de lire les 284 mémoires déposés en commission parlementaire l'an dernier; ça aussi l'éclairera.

M. le Président, le 19 juin 1992, le gouvernement posait un geste historique. Il devenait, d'ailleurs, le premier au Canada et l'un des rares dans le monde à se doter d'une politique et d'un plan d'action gouvernemental en matière de culture. D'ailleurs, l'UNESCO décernait au Québec une mention d'honneur en août 1992 à ce sujet. Cette première année de mise en oeuvre, contrairement à ce que le député de l'Opposition affirme, nous avions prévu un montant de 9 900 000 $ et, une fois de plus, nous avons livré la marchandise.

Maintenant, en ce qui concerne les crédits 1993-1994, le député de Gouin sait très bien qu'il appartient au président du Conseil du trésor de rendre publics les détails et la ventilation de l'ensemble des crédits gouvernementaux, ainsi qu'au ministre des Finances en ce qui a trait au budget 1993-1994. Alors, par respect pour les institutions, M. le Président, vous allez me permettre de parler de l'année en cours et non pas de l'année qui vient.

Cette politique culturelle, M. le Président, représente une assise pour ceux et celles qui font la culture québécoise, c'est-à-dire nos artistes, nos artisans et, évidemment, nos créateurs. Même le prédécesseur du député de Gouin déclarait en cette Chambre, le 19 juin dernier, et je cite: «Le dépôt d'une politique culturelle constitue un pas important dans la bonne direction».

M. le Président, avec cette politique culturelle, nous avons en main tous les outils pour favoriser la création artistique, sa diversité, son renouvellement, son excellence, en plus de rendre la culture accessible à tous les citoyens, et ce, à travers toutes les régions du Québec.

Cette politique s'accompagne aussi d'un plan d'action - ce n'est pas que des voeux pieux - et ce plan d'action comporte une série de mesures concrètes dont plusieurs sont déjà en application. Je ne fais que citer l'augmentation de l'aide aux artistes et aux organismes, une augmentation de 9,1 %, largement supérieure, d'ailleurs, à l'inflation. Et je veux rappeler aussi au député de Gouin qu'au cours des deux dernières années le ministère de la Culture a bénéficié d'une augmentation de 63 000 000 $, soit une augmentation de 24 %. Ces 24 % sont destinés, et je le répète et j'insiste, à toutes les régions du Québec. S'ajoutent aussi plusieurs mesures gouvernementales dans le domaine de la culture, qui ne sont pas comptabilisées au niveau du budget du ministère: 32 000 000 $ de compensations sur la taxe de vente sur le livre; 30 000 000 $ de crédits d'impôt consentis dans le secteur cinématographique et 5 000 000 $ consentis au budget dernier, pour un plan de relance du spectacle. À ce jour, notons, M. le Président, que, grâce à ce plan de relance, par rapport à l'an dernier, il y a eu une augmentation de l'ordre de 15 % de la vente des billets, et ce, à partir du 3 décembre dernier.

Alors, nos efforts ne s'arrêtent pas là, M. le Président. Dans le prolongement de notre politique culturelle, nous sommes à revoir, en concertation avec les intervenants concernés, le rôle, les structures et le mode de fonctionnement des organismes chargés de soutenir les industries culturelles, et plus particulièrement ceux qui concernent, évidemment, le cinéma et l'audiovisuel. Nous allons revoir aussi notre action au niveau des conservatoires.

Mais ce que je voudrais dire, M. le Président, au nouveau critique de l'Opposition en matière de culture: je l'invite, à l'exemple de son prédécesseur, à s'élever au-dessus de la par-tisanerie, au nom de notre développement culturel, même si, de réputation, cette action peut lui paraître insurmontable, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre de la Culture.

Alors, M. le député de Gouin, en vertu de votre droit de réplique, en vous indiquant un temps maximum de deux minutes.

M. André Boisclair (réplique)

M. Boisclair: M. le Président, la ministre, en choisissant sciemment de me renvoyer à l'étape de l'étude des crédits, alors qu'elle, en cette Chambre, avant même l'étude des crédits, s'est engagée à livrer 30 400 000 $ en 1993-1994, nous indique que son gouvernement a choisi de rouvrir le débat sur l'importance des arts et de la culture. Nous comprenons, M. le Président, que la ministre a fait un chèque sans provision pour se rallier les milieux culturels lors de l'annonce de sa politique. Le chèque est aujourd'hui rappelé pour insuffisance de fonds. Était-ce une autre

promesse inconsidérée de la part du gouvernement ou un engagement pris sciemment, sans aucune garantie? Nul ne le sait et nul ne le saura. Toutefois, si tel est le cas, M. le Président, le gouvernement libéral et la ministre en tête ont littéralement floué les milieux culturels lors de l'annonce de sa politique. Sa duperie méprisante ne lui attirera que la méfiance et le désabusement des milieux culturels, qui y ont pourtant cru, tout comme les membres de l'Opposition et tout comme le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, qui ont cru en ses engagements.

La ministre a choisi de compromettre sa politique après avoir donné l'espoir que la culture serait enfin traitée comme tous les parlementaires le souhaitent, peu importe leur allégeance politique, comme la ministre nous le rappelait, peu importe du côté où ils se situent en cette Chambre, pour que la culture soit considérée comme une mission essentielle de l'État.

M. le Président, l'ingénue d'hier est aujourd'hui devenue une incomprise, et ce, au détriment des artistes, des créateurs et des organismes culturels, qui étaient en droit de s'attendre à plus de rigueur et plus de profondeur, qui étaient en droit de s'attendre au respect des engagements, si, pour le gouvernement et pour la ministre des Affaires culturelles, la ministre de la Culture plutôt...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure.

M. Boisclair: ...ce mot a encore une signification.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Gouin, de votre intervention.

Ceci met fin à ce débat de fin de séance de jeudi dernier.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: M. le Président, un message du lieutenant-gouverneur, signé de sa main.

Message du lieutenant-gouverneur

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, veuillez vous lever, s'il vous plaît.

Alors, l'honorable lieutenant-gouverneur soumet à l'Assemblée nationale, conformément aux dispositions de l'article 54 de la Loi constitutionnelle de 1867, une partie des crédits pour l'année financière se terminant le 31 mars 1994, représentant 7,4 % des crédits du programme Sécurité du revenu du ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, et 24,6 % des crédits du programme Sécurité du revenu des chasseurs et piégeurs cris du même ministère, soit une somme de 276 489 933 $, et recommande ces crédits à la considération de l'Assemblée. Alors, je dépose ce document. y a-t-il consentement de l'assemblée pour déroger à la section 1 du premier chapitre du titre v du règlement concernant les crédits budgétaires pour donner suite à ce message?

Des voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): II y a consentement? Consentement.

Projet de loi 78 Présentation

Alors, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor, au nom du ministre des Finances, propose la présentation du projet de loi no 1 sur les crédits 1993-1994. y a-t-il consentement pour la présentation de cette motion?

Des voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement.

M. le leader adjoint du gouvernement...

M. Gendron: Oui, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...de l'Opposition.

M. Gendron: ...c'est ça, il y a consentement, tel qu'entendu, avec un droit de parole de 10 minutes, notre temps de parole.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, il y a consentement pour qu'une intervention de 10 minutes soit accordée au député de La Prairie, suivie d'une intervention de 10 minutes au ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. Il y a consentement?

Des voix: Consentement. (15 h 50)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, consentement.

Je reconnais M. le député de La Prairie pour une période de 10 minutes.

M. Denis Lazure

M. Lazure: Merci, M. le Président.

Alors, je veux, tout de suite, préciser que l'Opposition va, évidemment, voter en faveur de ce projet de loi bien spécial. Ce n'est pas à une époque où le ministre responsable des bénéficiaires de l'aide sociale s'apprête à sabrer dans les prestations, ce n'est pas à une époque comme ça

que l'Opposition va avoir des doutes. C'est évident que nous allons voter pour cette motion qui est technique, qui est mécanique, qui permet au gouvernement de pouvoir verser, pour le mois de mars, les prestations.

M. le Président, dans les quelques minutes que vous me permettez d'utiliser, je voudrais revenir sur les paroles du ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu aux journalistes de La Presse, la semaine passée. Le ministre a fait état de son intention de couper de 30 $ par mois les prestations des bénéficiaires de l'aide sociale qui sont aptes au travail et qui sont disponibles. Le ministre dit: Les deux tiers de ces personnes-là refusent les offres de mesures de préparation à l'emploi que nous leur proposons.

Première question, M. le Président: Est-ce que le ministre pourrait déposer le type de document qui lui permet d'affirmer de façon catégorique que les deux tiers refusent des mesures d'employabilité ou des mesures qui les aideraient à se préparer au marché du travail?

J'ai devant moi aussi... Dans la même interview, le ministre précise, dans un autre ordre d'idées mais touchant les bénéficiaires de l'aide sociale, qu'il vient de mettre un terme aux visites systématiques des bénéficiaires par des agents visiteurs, les boubous macoutes. M. Bourbeau précise avoir été sensibilisé par les représentations des évêques du Québec qui désapprouvaient que le gouvernement conserve une telle présomption de culpabilité sur l'ensemble des prestataires. Je veux le féliciter. Ça lui a pris du temps à comprendre, presque deux ans, mais il a compris. Mieux vaut tard que jamais. Mais je lui demanderais, M. le Président, d'avoir la même obéissance à l'égard de l'Assemblée des évêques qu'il a eue pour les boubous macoutes, de l'avoir, cette fois-ci, pour le projet deloiC-113.

Le ministre de la Main-d'oeuvre, la semaine dernière, a voté contre notre motion. L'Opposition disait: L'Assemblée nationale devrait demander au gouvernement fédéral de retirer ce projet de loi C-113 qui va avoir des conséquences néfastes pour les travailleurs, pour les chômeurs du Québec. L'Assemblée des évêques, M. le Président, s'est prononcée contre ce projet de loi. J'espère que le ministre va avoir la même considération pour l'opinion de l'Assemblée des évêques sur le projet C-113 qu'il a eue au sujet des boubous macoutes.

M. le Président, il faut reconnaître que le ministre avance parfois des chiffres ou des affirmations sans trop, trop être sûr. Il a dit, il n'y a pas longtemps: C-113, il n'y a pas de problème; même un pays aussi progressiste, social-démocrate que la Suède exclut des prestations d'assurance-chômage les gens qui partent volontairement d'un travail. Après vérification, c'est inexact, c'est faux. Il y a une pénalité de 5 à 12 semaines, en Suède. Il n'y a pas d'exclusion.

J'ai cité, la semaine passée, le tableau de l'OCDE de l'an passé, le rapport annuel, et la Suède ne les exclut pas.

Alors, je répète ma question. Quand le ministre affirme que les deux tiers refusent, j'aimerais bien qu'il dépose le document pertinent.

Autre remarque. À Montréal, il y a un groupe qui s'appelle le RESO, le Regroupement pour la relance économique et sociale du sud-ouest. Il y a quelques jours, cet organisme a dit, et je cite: «Le ministre Bourbeau alimente les préjugés contre les assistés sociaux en prétendant que les deux tiers refusent des programmes d'employabilité. Nous, au RESO, vivons quotidiennement la dure réalité des assistés sociaux disponibles qui veulent s'en sortir. Lorsque nous recrutons pour une formation académique générale ou une formation professionnelle, nous devons refuser plus de monde que nous ne pouvons en accepter.» Et, M. le Président, je voudrais insister là-dessus. Lorsque le gouvernement qui est en face de nous, pour la première fois dans l'histoire de l'éducation des adultes, établit l'enveloppe fermée, refuse - et je ne parle pas seulement des bénéficiaires de l'aide sociale mais pour l'ensemble des adultes - des applications d'adultes qui veulent poursuivre leurs études, deuxième mesure, lorsque le même gouvernement impose un ticket modérateur de i $ pour chaque cours, même aux bénéficiaires de l'aide sociale, ce gouvernement-là, m. le président, n'a pas le droit de prétendre que les assistés sociaux abusent du système, comme le ministre le laisse entendre trop souvent.

Nous disons, de ce côté-ci de la Chambre: ii y a un mécanisme de prévu, de toute façon; lorsqu'un bénéficiaire de l'aide sociale refuse sans raison valable une mesure d'employabilité, automatiquement, il ou elle est pénalisé, change de catégorie, devient non disponible. ça existe, ça. ça existe.

De plus, nous disons que la vraie solution au problème actuel, c'est le manque d'emploi flagrant dans la société québécoise. Sur les 400 000 personnes adultes qui sont à l'aide sociale, presque 300 000 sont des gens qui pourraient travailler, qui sont aptes au travail. Le problème de notre société, c'est l'absence de plein emploi. Et ça existe. Ce n'est pas une foutaise, ce n'est pas un rêve, le plein emploi. Il y a des petits pays, en Europe - la Suède justement, le Danemark, la Suisse, l'Autriche - qui ont réalisé depuis des années le plein emploi. Le chômage: 2 %, 3 % ou 4 %, au maximum. Justement, ce sont les mêmes pays qui offrent les conditions les plus généreuses pour les chômeurs et pour les bénéficiaires de l'aide sociale.

Alors, M. le Président, je pense que le gouvernement fait fausse route, le ministre fait fausse route lorsqu'il dit: II y a des abus, il y a des gens qui refusent, on va couper dans les

prestations, on va enlever 30 $. C'est une mesure mesquine. Nous allons étudier cette mesure bien en détail à un moment donné, lorsque le ministre va déposer son projet, mais, en attendant, M. le Président, je vais répéter que la seule façon de vraiment diminuer le nombre de bénéficiaires de l'aide sociale qui sont aptes au travail, ce n'est pas de couper leurs prestations sous prétexte qu'ils refusent, parce qu'il n'y a pas de refus généralisé lorsqu'il y a des mesures intéressantes de retour à l'emploi; il n'y a pas de refus généralisé lorsque le gouvernement ouvre la porte à l'éducation aux adultes au lieu de la fermer comme il le fait.

M. le Président, nous allons voter pour ce projet de loi, évidemment, mais nous en profitons pour rappeler le ministre à de meilleures dispositions vis-à-vis d'une clientèle qu'il devrait aider plutôt que dénoncer.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de La Prairie.

Conformément à l'entente, je cède la parole à M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, en lui indiquant que son temps de parole est d'un maximum de 10 minutes. M. le ministre.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président.

D'abord, commençons par les détails, si vous voulez. Pour pouvoir émettre, le 1er avril prochain, les prestations de la sécurité du revenu à 456 000 ménages québécois, le gouvernement doit rendre disponibles, dès le 23 mars prochain, des crédits de l'ordre de 276 500 000 $. Or, ces crédits ne seront disponibles qu'à compter du 1er avril prochain, soit au début de la prochaine année financière du gouvernement, et ils n'auront pas encore été votés par l'Assemblée nationale. Nous devons donc recourir à la Loi sur les subsides pour obtenir, en quelque sorte, l'autorisation de cette Assemblée d'effectuer les dépenses qui ne peuvent pas être reportées à plus tard. Voilà la raison technique de ce débat. Bien sûr, on ne s'en tient pas à cette simple technicité parlementaire. L'occasion est particulièrement bien choisie pour lever le voile sur les dépenses du ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle pour l'année 1993-1994.

Faire état des dépenses d'un ministère, cela revient à annoncer les choix stratégiques qui ont été arrêtés pour faire face à la conjoncture. C'est indiquer le résultat de l'arbitrage que le gouvernement a dû faire entre les nombreuses demandes de développement qui lui sont demandées. Les dépenses d'un ministère comme celui de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle illustrent la cons- tance de l'engagement du gouvernement dans des politiques de longue haleine comme celles de l'incitation au travail, l'équité envers les plus démunis et aussi le développement de la main-d'oeuvre. (16 heures)

Pour l'ensemble de ces activités, le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle disposera, en 1993-1994, de crédits de 4 400 000 000 $, en hausse de 268 000 000 $ par rapport au budget de l'exercice financier qui prend fin dans quelques semaines.

Le gros de cette augmentation budgétaire est attribuable au régime de la sécurité du revenu. La clientèle qui aura recours à la sécurité du revenu durant la prochaine année devrait augmenter de 22 900 ménages, pour une moyenne mensuelle de 454 030 ménages. Nous devrions encore ressentir, dans les prochains mois, les effets de la récession que nous venons de traverser. S'ajoute à ce phénomène conjoncturel l'impact des changements apportés au régime de l'assurance-chômage, qui devraient, à eux seuls, faire augmenter d'environ 3500 le nombre de ménages à la sécurité du revenu. La hausse de la clientèle et la variation des prestations devraient nécessiter des crédits additionnels de 186 200 000 $.

Globalement, le ministère consacrera 3 700 000 000 $ en prestations de la sécurité du revenu, dans les prochains 12 mois, en assistance maladie et aussi pour le programme APPORT. Il s'agit là d'une augmentation de 6,3 % par rapport aux dépenses probables de l'année courante. Ce chiffre de 6,3 % apparaît élevé en comparaison d'un taux d'inflation qui frôle les 2 %, mais je vous assure, M. le Président, qu'il faut déployer des efforts inouïs pour maintenir, ces années-ci, la croissance du budget des programmes de sécurité sociale à un niveau aussi bas que 6,3 %.

Dans certaines provinces canadiennes, les taux de croissance sont beaucoup plus élevés, mais il ne faut pas s'arrêter là, bien entendu. Avec la fin de la récession, nous devrions commencer à enregistrer, au cours de l'année 1993, une croissance de l'emploi permettant une diminution des pressions qui s'exercent, depuis plusieurs mois, d'ailleurs, sur le régime de la sécurité du revenu. La reprise sera probablement plus lente que nous le souhaiterions. Cependant, pour que cette reprise soit durable, il faut que les politiques de sécurité du revenu soient axées, pour les personnes aptes au travail, sur l'intégration en emploi. C'est là la raison pour laquelle, en dépit d'une conjoncture budgétaire extrêmement difficile, le gouvernement augmente de 43 % les crédits affectés à l'intégration au marché du travail des prestataires de la sécurité du revenu aptes au travail. Le gouvernement inclut dans son plan de relance de l'économie ces mesures d'aide à l'emploi pour les chômeurs de longue durée.

Nous avons toujours soutenu que l'aide la plus précieuse que le gouvernement peut apporter aux personnes aptes au travail, qui ont recours temporairement à la sécurité du revenu, consiste en des mesures d'intégration au marché de l'emploi. Il ne faut pas se laisser emporter par un climat de morosité, selon lequel les turbulences de l'économie condamnent, quoi qu'on fasse, plusieurs milliers de personnes au sous-emploi. Nous n'avons pas le droit d'abandonner les clients de la sécurité du revenu à une sorte de désespoir, à nier leur capacité de reconquérir le marché du travail. L'emploi doit demeurer la voie d'accès privilégiée à l'indépendance financière et une voie raisonnablement accessible.

L'un des instruments les plus indiqués pour paver cette voie qui conduit au marché du travail demeure le programme PAIE, c'est-à-dire le Programme d'aide à l'intégration en emploi. Depuis que nous avons lancé ce programme de subventions salariales à la grandeur du Québec, en 1990, 36 925 personnes ont accédé à un véritable emploi, et elles ont quitté le régime de la sécurité du revenu. Certaines ont dû y revenir, j'en conviens. On constate, néanmoins, que 37 % des clients de la sécurité du revenu, qui ont bénéficié du programme PAIE, étaient encore en emploi, trois mois après l'arrêt de la subvention salariale. Dans le contexte de turbulences économiques que nous connaissons, il s'agit là d'un succès remarquable pour un programme d'intégration à l'emploi. Nous allons donc poursuivre nos efforts.

Le début du prochain exercice financier marque une ère nouvelle dans le domaine de la main-d'oeuvre. À compter du 1er avril prochain, en effet, la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre sera mise en place. Les partenaires du marché du travail, c'est-à-dire des représentants des employeurs et des travailleurs, participeront, avec le gouvernement, à l'élaboration et à la gestion des programmes de main-d'oeuvre. Un budget de 278 000 000 $ leur est confié.

La Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre va changer la dynamique des rapports entre les principaux acteurs dont les actions influencent considérablement le fonctionnement du marché du travail. La mise en place de cette société brise, d'une certaine manière, l'isolement relatif dans lequel se sont historiquement cantonnés les patrons, les syndicats, les gestionnaires des programmes de main-d'oeuvre et les porte-parole du secteur de l'enseignement.

Désormais, tous ces acteurs importants vont travailler ensemble, chercher des consensus et des solutions pratiques aux problèmes du développement de la main-d'oeuvre et de l'emploi. Il en sera de même dans les régions du Québec, parce que les exercices de concertation en faveur du développement de la main-d'oeuvre et de l'emploi seront assumés par les sociétés régiona- les qui succéderont aux actuelles commissions de formation professionnelle. Les sociétés régionales de main-d'oeuvre vont également définir les priorités de la région, adapter les programmes à leur réalité propre et offrir aux entreprises, aux travailleurs et aux chômeurs les services de main-d'oeuvre.

La Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre accueillera également, nous l'espérons, les budgets fédéraux de main-d'oeuvre, afin de créer le guichet unique réclamé par ceux qui subissent la lourdeur et la relative inefficacité de deux réseaux de main-d'oeuvre au Québec. Des discussions ont présentement cours au niveau politique, et nous en espérons un dénouement positif.

M. le Président, nous aurons, bien sûr, l'occasion de discuter abondamment de l'ensemble des projets du ministère lors de l'étude des crédits détaillés, dans quelques semaines. En attendant, je me permets de ramener les membres de cette Assemblée au but premier de cet exercice, qui est d'autoriser le ministère à engager 276 500 000 $ dans les prochains jours afin d'émettre les prestations de la sécurité du revenu de même que les allocations aux chasseurs et piégeurs cris à compter du 1 er avril prochain.

Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre, de votre... Oui?

M. Lazure: En vertu de 213...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En vertu de l'article 213, est-ce que, M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, vous permettez au député de La Prairie de vous poser une brève question, et y répondre brièvement?

M. Bourbeau: Avec plaisir! Avec plaisir, M. le Président!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, la permission vous est accordée, M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Merci, M. le Président, à vous et au ministre.

Je voulais simplement que le ministre confirme ou nie l'affirmation du RESO. Le RESO, c'est le Regroupement pour la relance économique et sociale du sud-ouest qui dit, et je cite: «Lorsque nous recrutons pour une formation académique générale ou une formation professionnelle chez les assistés sociaux disponibles, nous devons refuser plus de monde que nous ne pouvons en accepter». Est-ce exact ou est-ce faux?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): La question, M. le ministre de la Main-d'oeuvre.

M. Bourbeau: M. le Président, le député a fait état tout à l'heure, dans son allocution - et je pense bien que je peux revenir là-dessus - de certaines affirmations qui sont plus ou moins exactes. Mais celles dont, moi, j'ai parlé, c'est un fait, ce n'est pas des affirmations gratuites.

Parmi les assistés sociaux disponibles, ceux qui disent être disponibles pour exercer des mesures pour s'intégrer dans les mesures de développement de l'employabilité, nous devons proposer une mesure à trois personnes avant qu'une ne l'accepte, c'est-à-dire qu'il y en a deux des trois personnes, généralement parlant, dans toute expérience que nous avons dans notre réseau, deux personnes sur trois, qui se sont dites disponibles, refusent les mesures d'employabilité que nous leur proposons, soit le rattrapage scolaire, soit les stages en milieu de travail ou les travaux communautaires. (16 h 10)

C'est donc dire qu'à chaque fois qu'on veut trouver une personne il faut en demander trois. Les deux autres s'étaient dites disponibles mais ne l'étaient pas, à l'évidence. Donc, M. le Président, ça justifie, bien sûr, les déclarations que j'ai faites.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, est-ce que l'Assemblée... S'il vous plaît! L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie du projet de loi 78?

Adopté.

M. Gendron: J'ai envie de dire non.

Adoption du principe et adoption

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre des Finances propose l'adoption du principe ainsi que l'adoption du projet de loi 78, Loi no 1 sur les crédits 1993-1994. Est-ce que ces deux motions sont adoptées?

M. Gendron: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté.

Donc, les motions d'adoption du principe et l'adoption du projet de loi 78, Loi no 1 sur les crédits 1993-1994, sont adoptées.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Johnson: Oui, M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 3 du feuilleton.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Article 3.

Projet de loi 68 Adoption du principe

M. le ministre des Communications propose l'adoption du principe du projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

M. le ministre des Communications.

M. Lawrence Cannon

M. Cannon: Merci, M. le Président.

Je crois qu'il serait peut-être opportun, avant d'aborder l'adoption de principe de ce projet de loi, de faire très rapidement la chronologie des événements qui nous ont conduits, comme parlementaires, à être saisis aujourd'hui de ce projet de loi.

Il faut se rappeler, M. le Président, qu'en 1975 l'Assemblée nationale adoptait unanimement la Charte québécoise des droits et libertés de la personne et, particulièrement à l'article 5, reconnaissait le droit à la vie privée. Quelques années plus tard, c'est-à-dire en 1982, on se rappellera que l'Assemblée nationale, à la suite de la commission Paré, adoptait la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Aujourd'hui, cette loi célèbre son dixième anniversaire, et c'est une loi, je pense, qui a quand même fait beaucoup de chemin à travers les gouvernements modernes de nos sociétés occidentales.

En 1984 étaient adoptées les lignes directrices régissant la protection de la vie privée et des flux transfrontières par l'OCDE. Il s'agissait, effectivement, de faire en sorte qu'il n'y ait pas de barrières économiques entre les entreprises de différents pays qui transigeaient entre elles, mais qui s'assuraient que les renseignements, également, les renseignements à caractère personnel, donc les renseignements nominatifs, étaient protégés. En 1986, le gouvernement du Québec chargeait le Groupe de recherche informatique et droit de l'Université du Québec à Montréal de procéder à une analyse de ces directives, et la conséquence a été d'accepter ces directives et de faire en sorte que le gouvernement du Québec adhère non seulement aux lignes directrices, mais aussi aux principes de la Communauté européenne.

En 1988, à la suite d'une initiative du ministre de la Justice, le comité interministériel qui a été formé recommandait que le gouvernement du Québec légifère dans le secteur. Plus loin, la même année, la commission de la culture qui s'était réunie avait également recommandé d'étendre au secteur privé les dispositions à l'égard de la protection des renseignements dans le secteur privé.

On a vu plus loin, il y a de cela quelques mois maintenant, l'an passé, l'adoption du projet ou, enfin, l'adoption du nouveau Code civil, nouveau Code civil qui a été le fruit d'un travail énorme de la part du ministre de la Justice et aussi de tous les parlementaires en cette Assemblée. Particulièrement, le nouveau Code civil porte, bien sûr, sur les dispositions législatives, mais aussi sur la protection des renseignements

privés, et j'attire l'attention des parlementaires sur les articles 35 à 41.

À la suite, bien sûr, de l'adoption du nouveau Code civil, il nous fallait donc présenter un projet de loi qui, lui, porte sur l'application des dispositions des articles 35 à 41, c'est-à-dire quel en serait l'encadrement, comment pourrions-nous fonctionner à l'intérieur de ça. Alors, il y a eu une commission parlementaire, on s'en rappellera, commission parlementaire qui s'est tenue à l'automne de 1991, où les parlementaires de la commission des institutions ont été saisis d'un certain nombre de requêtes, d'un certain nombre de mémoires, de documents qui sont venus, je dirais, d'une vaste partie ou d'un vaste échantillonnage de la population, tantôt les assureurs, tantôt les institutions financières, tantôt la Ligue des droits et libertés, tantôt les gens qui sont particulièrement inquiets des dispositions législatives à l'égard, par exemple, des renseignements qui sont transmis au niveau du logement. Tout ça, ça nous a conduit, comme parlementaires, à être saisis d'un projet de loi, le projet de loi 68, qui vise essentiellement à assurer le respect du caractère confidentiel des renseignements personnels sur autrui et, particulièrement, sur les personnes qui les recueillent. Cela, M. le Président, résume, en grande partie, l'historique, je dirais chronologique, pour ne pas faire de pléonasme, de l'intention des législateurs que nous sommes tous depuis les dernières années dans ce dossier.

Alors, je disais donc que, à la suite d'un exercice en commission parlementaire, nous avons davantage parlé de trouver des moyens de convergence, de s'assurer que nous puissions dégager un certain nombre d'éléments pour que, comme parlementaires, nous ayons une démarche progressiste et une démarche dynamique dans le cadre de la protection des renseignements. Je dirais que tous ceux qui se sont présentés devant la commission parlementaire ont confirmé que - et je pense que c'est tout à fait normal - compte tenu de l'évolution très rapide au niveau des technologies, tout le monde a confirmé que le secteur privé utilise massivement les technologies de l'information dans le traitement des renseignements personnels, et, que ce soit pour la cueillette des informations, la constitution de banques de données personnelles ou le transfert de ces renseignements, l'utilisation des technologies de plus en plus performantes va sans cesse en augmentant. C'était là, M. le Président, à notre avis, une des raisons qui nous plaçaient devant l'urgence de donner à la personne la maîtrise des informations qui la concerne en lui donnant le droit d'autoriser ou non l'échange et l'utilisation de ces renseignements à des fins spécifiques, pour une durée limitée.

Je disais donc, M. le Président, à l'époque, que le Québec était mûr pour une loi qui protégerait la confidentialité des renseignements personnels, dans le secteur privé, et l'objectif, en présentant le projet de loi, était de rechercher le consensus ou un consensus le plus large possible, consensus dans le sens de convergence, M. le Président. Donc, les travaux de cette commission de l'automne de 1991 avaient également démontré qu'il nous fallait harmoniser nos mesures aux règles en vigueur ailleurs dans le monde. Et, à cet égard, j'indiquais que l'autoré-glementation, sans incitatif législatif, assortie de sanctions et de recours, ne me semblait pas assez efficace comme démarche. Je faisais état également qu'une approche prudente s'imposait, puisqu'une législation trop coercitive risquait d'être à la fois trop lourde et trop coûteuse à administrer et pouvait défavoriser les entreprises québécoises, voire nuire à leur compétitivité. Il faut bien le préciser, M. le Président, notre objectif n'était pas de restreindre les activités des entreprises qui oeuvrent dans ce domaine. (16 h 20)

Nous nous sommes donc mis à la tâche avec prudence et circonscpection. Le résultat de notre travail, le fruit de notre travail, c'est le projet de loi 68 sur la protection des renseignements personnels, appliqué au secteur privé. Ce projet de loi a provoqué la tenue d'une deuxième commission parlementaire dont les travaux ont pris fin le 4 mars dernier. La commission de la culture a donc, M. le Président, permis à une quarantaine de groupes et d'individus de venir nous dire ce qu'ils pensaient du projet de loi. Et la convergence dont je parlais plus tôt, je l'ai réellement sentie à l'occasion de cette commission parlementaire, en ce sens que, sans exception, tous ont reconnu la nécessité d'un projet de loi, tous sont d'accord avec le principe de ce projet de loi. Toutefois, la plupart des intervenants nous ont fait part de leurs préoccupations, de leurs réticences face à certains articles de la loi, tels qu'ils sont rédigés. C'était là, d'ailleurs, M. le Président, l'objectif ultime de cette consultation publique; c'était d'aller chercher et de recueillir les propos de ceux et celles qui sont directement touchés par l'application de ce projet de loi.

C'est pourquoi, M. le Président, j'ai rappelé, à l'occasion de la clôture de la commission, que plusieurs points feront l'objet d'un réexamen détaillé et que nous, comme parlementaires, introduirons certains amendements afin de bonifier le projet de loi 68 et de répondre, en partie, aux représentations qui nous ont été faites. Vous me permettrez, M. le Président, de reprendre brièvement les éléments qui font l'objet de notre réexamen.

Il y a d'abord cette question de la liberté de presse. Je tiens à rassurer, encore une fois, les parlementaires que ce n'est pas l'intention des membres de la commission, comme ce n'est pas mon intention, de venir circonscrire une liberté, déjà inscrite dans la Charte, par l'application d'une autre liberté. La Charte est là pour

coexister avec tous les principes, les éléments et les fondements de notre démocratie. Donc, il faut trouver une façon d'aménager ces dispositions, et cela ne m'apparaît pas comme étant insurmontable. Alors, nous apporterons une correction.

Il y a l'autre question qui a été soulevée, qui est celle des flux transfrontières des données personnelles. La préoccupation que je peux avoir à cet égard, et qui est partagée par mon collègue de l'Opposition, est la suivante. C'est qu'il y a des renseignements qui, au Québec, peuvent être recueillis par une entreprise. Une autre entreprise peut faire exactement la même chose, dans un domaine semblable ou comparable, et une troisième entreprise peut hypothétiquement faire la même chose. L'inquiétude que nous pouvons avoir, c'est que ces entreprises, n'ayant pas particulièrement leur siège social au Québec, pourraient, dans un autre pays ou dans une autre province, constituer, à l'aide d'un mariage de ces banques dites d'information, un profil sur le comportement du consommateur - par exemple, sur vous, M. le Président, ou sur moi - et qui pourraient dégager un profil au niveau de vos achats, un profil au niveau de votre tendance de consommation dans les types de restaurants, un profil de consommation au niveau de votre habillement, au niveau de vos lectures, etc. C'est ça qui a inquiété mon collègue, le député de Pointe-aux-Trembles, et, d'ailleurs, les autres membres de la commission. Alors, c'est une chose sur laquelle nous allons devoir travailler pour faire en sorte que ce genre de pratique, décrite dans plusieurs revues par des spécialistes, ne se matérialise pas ici, au Québec, et que, véritablement, le citoyen puisse avoir la maîtrise d'oeuvre sur les renseignements qui le concernent.

Un autre élément qui attire notre attention, c'est toute cette question qui touche la collecte des renseignements. On a été, je vous dirai, estomaqué par la présentation d'un certain nombre de groupes de locataires, qui sont venus nous rencontrer en commission parlementaire pour nous indiquer qu'il y avait des renseignements qui étaient exigés avant même de pouvoir visiter l'appartement ou le loyer, et avant même d'avoir établi la solvabilité de l'individu, pour savoir si, bien sûr, il est capable de payer l'appartement ou non, une série d'informations qui portaient, par exemple, sur le numéro d'assurance-maladie. Vous me direz, M. le Président, que le numéro d'assurance-maladie, c'est un numéro que, volontairement, on fournit à l'occasion d'une visite chez le médecin. C'est tout à fait normal, il va de soi, c'est la raison d'être de ce numéro-là, mais ce n'est certainement pas des particularités de logement qui doivent être fournies par un individu qui désire obtenir un logement, ni son numéro d'assurance sociale, ni son numéro de permis de conduire, ni ses cartes de crédit. Donc, ça m'apparaît comme étant des renseignements qui sont peut-être pertinents au niveau du propriétaire, mais, somme toute, entre vous et moi, M. le Président, ce sont des renseignements qui ne sont pas nécessaires à une prise de décision, au même titre que lorsqu'on demande confidentiellement - et j'ai le document devant moi... Une société d'habitation et de développement de Montréal demande aux individus leur nationalité, soit canadienne ou autre, pour savoir si, oui ou non, on va leur louer un logement. Ça n'a aucune espèce de bon sens de fournir ce genre de renseignements là.

Alors, c'est des choses qui nous ont estomaqués, oui. C'est des pratiques qui existent et qui, spécifiquement, spécifiquement, sont une entrave à la Charte québécoise des droits et libertés, mais particulièrement à l'article 5 de cette Charte. Alors, nous examinerons des amendements qui vont toucher cet aspect-là.

Il y a toute cette question de consentement par écrit. Certaines personnes nous ont saisis très formellement de la nécessité de voir cette question de consentement par écrit. Exemple: est-ce qu'à chaque fois qu'un avocat aura à traiter mon dossier, ou votre dossier, ou que votre banquier aura à traiter une transaction, ça va prendre votre consentement par écrit? Ou est-ce qu'à l'occasion, M. le Président - vous qui ne voyagez pas beaucoup, mais qui autorisez des parlementaires à voyager dans l'exercice de leurs fonctions parlementaires - ça permet à ces individus-là, bien sûr, de fournir à l'agence de voyages des renseignements de nature confidentielle? Bon. Est-ce qu'à toutes les deux minutes ou à chaque fois que l'agence va faire une transaction elle sera tenue d'appeler, d'écrire ou d'obtenir un consentement de la part de l'usager? Il s'agit de trouver une façon de mieux baliser, je dirais, le consentement. Et c'est là-dessus que nous travaillons présentement.

Un dernier point, ou un avant-dernier point, M. le Président, toujours dans l'optique de modifier notre projet de loi pour le rendre plus applicable ou plus souple, concerne la confirmation de l'existence d'un dossier, c'est-à-dire l'article 103. L'article 103, je vous rappellerai, M. le Président, est un article qui fait en sorte que tout individu ou société qui détient des informations sur une personne devra, dans l'année qui suit l'adoption du projet de loi, aviser le client qu'il a de l'information à son sujet.

Je l'ai dit en commission parlementaire, M. le Président, et je le réitère aujourd'hui, je suis prêt à revoir cette disposition-là. Mais, ce qui est important, c'est le consensus qui s'est dégagé autour de cette table de la commission parlementaire. C'est que les Québécois et les Québécoises aient accès à leur dossier, aient la capacité de corriger le dossier et sachent également que ce dossier-là existe. Je suis ouvert à des modalités, je suis ouvert à des amendements, à des propositions d'amendements, mais jamais on ne cédera sur l'élément essentiel de permettre aux Québé-

cois et aux Québécoises accès à leur dossier de crédit et aussi à la possibilité de corriger ce dossier de crédit. (16 h 30)

Un dernier élément concerne, M. le Président, le chevauchement. Plusieurs corporations professionnelles sont venues nous voir pour nous dire que la loi comme telle ne s'appliquait pas à la corporation professionnelle, ni à ceux des institutions financières et des assureurs qui ont, tour à tour, ces groupes, souligné leur inquiétude face au projet de loi. Encore une fois, on verra à établir une cohérence et on verra à permettre au citoyen accès à son dossier. Je comprends qu'il peut y avoir des exceptions. Je pense qu'on nous a largement fait part, par exemple au niveau de la corporation des psychologues, des réticences qu'il pourrait y avoir, mais, néanmoins, le principe étant que, vous, M. le Président, et tous les parlementaires ainsi que tous les Québécois aient accès à leur dossier et puissent avoir la possibilité de le corriger. Qu'ils soient protégés par une corporation professionnelle, ça nous apparaît tout à fait normal et logique, mais le projet de loi 68, c'est un projet de loi plancher. Si on est capable d'améliorer sur le type et le niveau de protection qu'on peut fournir d'abord à quelqu'un qui pratique une profession, mais aussi au consommateur et à la consommatrice, ça, ça nous apparaît tout à fait louable; non seulement louable, mais souhaitable.

Le dernier élément, M. le Président, concerne la Commission d'accès à l'information. De nombreux groupes nous ont aussi fait part de leurs interrogations quant aux pouvoirs dévolus à la Commission: le pouvoir d'élaboration de codes de conduite, le pouvoir de surveillance, le pouvoir d'adjudication. Alors, j'ai l'intention de revoir ces choses-là, particulièrement au niveau de ce qui pourrait apparaître comme étant un conflit dans la fonction première, toujours, d'accès et la possibilité de rectifier un dossier qu'un individu a sur un autre individu. Alors, sur cet élément-là, M. le Président, on verra à travailler avec l'Opposition et les membres de cette commission sur des amendements qui pourraient venir bonifier le projet de loi.

Je dirais, M. le Président, que le Québec... et la société, c'est une société moderne, c'est une société dynamique. Je pense que, comme parlementaires, depuis une dizaine d'années, on l'a prouvé dans le domaine des institutions qu'on a créées pour protéger les renseignements dans le secteur public, les renseignements nominatifs, et donner accès... la même chose avec le projet de loi 68. Et donc, nous devons, je pense, comme parlementaires, emboîter le pas avec les autres pays du monde libre et ainsi nous doter d'une législation qui vise spécifiquement à protéger les renseignements dans le secteur privé.

Les secteurs public et parapublic sont protégés, comme je l'ai mentionné plus tôt, depuis une dizaine d'années maintenant, et mon intention, M. le Président, est de faire adopter, avec le concours des parlementaires ici et les membres de l'Opposition, le projet de loi 68 d'ici la fin de la session, afin que nous puissions étendre les grands principes dont j'ai traité, il y a quelques instants dans mon intervention, au secteur privé.

M. le Président, en conclusion, je répète ce que j'ai dit en commission parlementaire. Ce projet de loi, le projet de loi 68, n'est pas le projet de loi d'un individu ni d'un gouvernement. C'est le projet de loi d'une société, d'une société qui se veut moderne, d'une société qui s'est donné des principes en 1975, avec l'adoption de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, et c'est une société qui, aujourd'hui, veut traduire cette réalité dans un projet de loi.

Nous pouvons, M. le Président, y souscrire, nous pouvons y arriver si la volonté existe. J'ai pu comprendre, M. le Président, que cette volonté existait et je pense qu'à l'occasion de son adoption, ce sera non seulement la célébration d'une Assemblée nationale, mais ce sera la célébration d'une population qui s'est donné les moyens pour protéger sa vie privée.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre des Communications.

Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Je reconnais M. le député de Pointe-aux-Trembles, porte-parole de l'Opposition officielle dans cette matière. M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Michel Bourdon

M. Bourdon: M. le Président, l'Opposition officielle va voter la loi qui est devant nous pour ce qui est de son adoption de principe, parce que nous pensons que ça fait des années qu'on discute de la protection des renseignements personnels. Il y a déjà eu jusqu'ici deux commissions parlementaires qui ont étudié successivement le problème, et je suis heureux de voir et de constater que le ministre a l'intention de passer à l'action et de donner aux Québécois et aux Québécoises, avant la fête nationale, une loi qui protège les renseignements confidentiels dans le secteur privé.

Je voudrais rappeler, M. le Président, que, sous le gouvernement du Parti québécois, la loi actuelle sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels a été adoptée. Le ministre de l'époque, Jean-François Bertrand, suite à des études, avait tenu à piloter un projet de loi qui a donné, comme le ministre l'a rappelé à bon droit, des résultats appréciables dans le secteur

public, et qui a créé la Commission d'accès à l'information, à qui le ministre propose, dans son projet de loi, de donner l'application de la loi qui est devant nous, ce avec quoi nous sommes, en principe, d'accord.

Je ne veux pas dire, M. le Président, que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes dans le secteur public. C'est évident que la Commission d'accès, à mon avis, a donné un délai indûment élevé, un délai prolongé à la Commission de la santé et de la sécurité du travail, par exemple, pour garantir mieux la confidentialité des données qui sont détenues par cet organisme, qui a des millions de dossiers - par nature, sensibles, parce qu'il s'agit de l'état de santé des citoyens - dans ses ordinateurs. Et on sait, M. le Président, qu'il faudra toujours être vigilant pour éviter, par exemple, qu'un code d'accès à un ordinateur, dans un ministère ou dans un organisme, devienne un secret de polichinelle. Dans le cas de la CSST, il avait été révélé qu'on n'avait même pas un moyen de garder trace de ceux qui avaient eu accès à l'ordinateur, et je pense que la Commission a donné un délai trop long à la CSST pour s'adapter. Mais il reste que la Commission, en général, a un comportement irréprochable, et on peut dire que la loi s'applique d'une façon fort correcte depuis maintenant une décennie.

Il s'agissait, et il s'agit encore, M. le Président, de faire l'équivalent pour le secteur privé. Les sondages, notamment ceux qu'Équifax a commandés, illustrent que la population est très consciente qu'il y a de plus en plus, sur son compte, des renseignements qui circulent. L'ordinateur qui a enrichi et embelli nos existences, jusqu'à un certain point, a rendu la dissémination, la propagation d'informations plus facile, plus faisable que jamais auparavant. Donc, il y a des abus que cette loi va venir corriger.

Le ministre a rappelé, M. le Président, qu'il s'agit d'une loi d'application des articles 35 à 41 du Code civil et, à cet égard, le ministre me permettra de lui rappeler que son collègue de la Justice n'a pas fait preuve d'une diligence à toute épreuve. La Ligue des droits et libertés est venue en commission parlementaire rappeler qu'en 1988 le ministre lui avait promis, comme cadeau de Noël, de mettre en vigueur les articles 35 à 41 du Code civil. Ils n'ont pas eu leurs étrennes de 1988; ils n'ont pas eu leurs étrennes de 1989; ils n'ont pas eu leurs étrennes de 1990; ils n'ont pas eu les étrennes de 1991 ni de 1992. Ça fait des années, M. le Président, que les groupes particulièrement intéressés à ces questions - et la Ligue des droits et libertés l'est de façon éminente, c'est normal, c'est son mandat - se font promettre de l'action. Là, la satisfaction que j'éprouve, c'est de voir que le ministre a mis le projet de loi sur la table et qu'il a l'intention, et que son gouvernement a l'intention de le faire adopter pour la Saint-Jean. (16 h 40)

En commission parlementaire, M. le Président, il y a une trentaine de groupes qui se sont fait entendre, et les groupes sont tous, en principe, d'accord, mais, dans certains cas, l'accord de principe donne lieu, après, à un projet d'enterrement de première classe. C'est évident, M. le Président. Je pense à l'Association des banquiers canadiens, qui est venue nous dire qu'ils n'avaient rien à faire dans la bâtisse ici, puisqu'au plan constitutionnel, disent-ils, ils relèvent du fédéral. Vous savez, M. le Président, il y a des débats entre nous, ministériels et de l'Opposition, sur le fait suivant: On serait un peuple ou une société distincte? Dans le cas de l'Association des banquiers, j'ai eu l'impression, par moments, M. le Président, qu'ils ne reconnaissaient même pas qu'on est une province, parce que c'était vraiment splendide et la possession tranquille de la vérité informatique, de la vérité de l'information.

Mais, entre-temps, M. le Président, on apprend que les banques fournissent nos numéros de cartes de crédit aux bureaux de crédit; ce n'est pas insignifiant, M. le Président. Il a fallu, en février, que le journal Le Soleil, le 24, publie qu'Équifax donnait à n'importe qui, qui est abonné à ce bureau de crédit, et ça coûte 60 $... Que les banques donnaient nos numéros de cartes de crédit. Et le porte-parole d'Équifax, en commission, est venu dire qu'il avait commencé à corriger la situation le 23 février. D'où ma question en commission: Si Le Soleil ne l'avait pas publié, si Normand Lester de Radio-Canada n'avait pas dit que des employés d'Équifax se faisaient passer pour des fonctionnaires de Revenu Québec cherchant des personnes pour leur remettre un chèque de TVQ - ce qui était de la fausse représentation - ça se ferait probablement encore. Tout comme se ferait une collaboration, qui est intense, avec le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. Les fonctionnaires de ce ministère échangent des renseignements de nature confidentielle avec Équifax et, dans certains cas, en vendent et en retirent, dit-on, un profit personnel. Ça, c'est ce que Le Devoir nous a révélé.

Dans ce sens-là, M. le Président, Équifax n'est pas un bureau de crédit meilleur ou pire qu'un autre, mais c'est le plus gros. Il détient, dit-on, 15 000 000 de dossiers au Canada. Ils ne veulent pas donner le chiffre pour le Québec, mais on peut imaginer que c'est 4 000 000 ou 5 000 000 de personnes qui sont fichées chez Équifax. Il n'y a pas qu'Équifax dans le domaine, il y a les agences d'investigation qui recourent parfois à des moyens déloyaux pour obtenir des renseignements, et il y a aussi les courtiers en listes, parce qu'il y a des types d'entreprises qui donnent très cher pour avoir des renseignements sur les personnes et, parfois, ça donne lieu...

Ma mère, qui a 72 ans, par deux fois, en revenant de son hôpital, a reçu des appels pour

lui proposer des préarrangements funéraires. Et depuis que j'ai révélé ça, M. le Président, je reçois des dizaines d'appels de personnes à qui on a fait la même chose à d'autres égards. Tantôt, c'est une personne qui va subir un traitement de chimiothérapie en rapport avec son cancer et qui, immédiatement après, est sollicitée par une entreprise de frais funéraires. Je pense, M. le Président, que c'est grave que des personnes vulnérables par définition - on sort de l'hôpital, on a 70 ans, on a été inquiet, avec raison, pour sa vie - bien, là, se font appeler par Magnus Poirier, pour ne pas nommer le premier, ou le Centre commémoratif de Montréal, pour ne pas nommer le deuxième. Et il paraît qu'au Centre commémoratif ils sont encore plus portés à ce genre de sollicitation là que Magnus Poirier, mais les deux l'ont fait dans le cas de ma propre mère.

C'est donc dire, M. le Président, que même dans le secteur public où il y a déjà une loi, on voit que les courtiers en listes du secteur privé recourent à toutes sortes de moyens pour avoir des renseignements qui ne les regardent pas. Il est heureux qu'on ait devant nous un projet de loi qui va corriger la situation et qui va faire en sorte qu'on va civiliser quelque peu les rapports.

Le ministre a fait preuve d'une souplesse louable pour ce qui est des corporations professionnelles qui ont déjà des mécaniques. Le ministre a eu raison de dire qu'il suffirait, en vertu de la loi qu'on est en train d'étudier, en fin de course, que les citoyens aient un recours auprès de la Commission d'accès à l'information.

Sur les flux transfrontières, je suis du même avis que le ministre. Si on ne trouve pas un moyen de les assujettir à la loi, il y a un danger qu'on fasse faire par Plattsburg ou Burlington ou Buffalo ce qui est interdit à Chicoutimi, Québec et Montréal. Donc, dans ce sens-là, il ne s'agit pas d'aller à la frontière dire qu'on peut réglementer le commerce international, ce n'est pas le cas dans le cadre constitutionnel actuel, mais la loi, pensons-nous, pourrait prévoir que nul citoyen québécois ou nul entreprise du Québec ne peut donner un renseignement à l'étranger qu'elle n'est pas autorisée à donner en vertu de la loi québécoise ou ne peut en utiliser un venant de l'étranger.

Je pense que, M. le Président, parmi les représentations qui ont été faites à la commission parlementaire, je pense au Mouvement Desjardins, qui joue un rôle majeur en matière de crédit et qui compte ses 5 000 000 de sociétaires, les critiques qui ont été faites sur la lourdeur des mécaniques prévues dans le projet de loi sont fondées. Moi, dans le cas des fiches de crédit, entre autres, que les gens ont le droit de connaître et que les citoyens doivent avoir un moyen efficace de faire corriger quand elles sont inexactes, bien, je pense que le projet de loi fait erreur en disant que c'est le Bureau de crédit qui doit envoyer un avis au citoyen. Je pense que ça va donner des millions de lettres et pas les dossiers de crédit en cause. Je crois qu'on serait mieux de prévoir, dans un délai raisonnable, que les utilisateurs des dossiers de crédit, je pense au Mouvement Desjardins, aux caisses populaires, devraient les remettre à leurs clients et qu'il y ait une mécanique simple pour les faire corriger quand ils sont erronés.

M. le Président, je voudrais, en aparté, mentionner que, bien sûr, il y a des renseignements qu'une entreprise a le droit légitimement d'obtenir. Quand une personne veut emprunter de l'argent, il est normal qu'on vérifie de façon correcte et légale si la personne est solvable. Ce qui est dommage, c'est que, dans la situation actuelle, non seulement les citoyens ne sont pas bien protégés, mais il y a des raisons de penser que les dossiers de crédit, entre autres, sont faits de travers et ne reflètent pas comme il faut la situation de la personne.

Donc, par une législation qui est là essentiellement pour garantir les droits des citoyennes et des citoyens, on pourrait même obtenir une efficacité supplémentaire, puisque, les gens ayant accès à leur dossier et pouvant les faire corriger, les dossiers de crédit entre autres vont être plus adéquats. Et je crois, M. le Président, que, dans ce sens-là, si on donne du temps et de la latitude aux entreprises pour remettre aux intéressés les renseignements qu'elles détiennent à leur endroit - et je pense aux fiches de crédit entre autres - je pense qu'à ce moment-là la réforme va atteindre les objectifs qu'elle poursuit.

Puis, en terminant, quant aux conflits d'intérêts possibles de la Commission d'accès à l'information, je suis persuadé, suite aux explications du président de la Commission, que, pourvu que la Commission soit dotée du personnel nécessaire, les fonctions comme l'information, le conseil et ce qu'on appelle dans le jargon l'adjudication, mettons les décisions de tribunal administratif de la Commission, en autant que ce ne sont pas les mêmes personnes qui assument les rôles divers de la Commission, l'intérêt public sera bien servi. (16 h 50)

En terminant, M. le Président, je voudrais assurer le ministre que, contre vents et marées, si le lobbying produit des vents et des marées, et depuis l'invention du téléphone, on est toujours assurés qu'une personne peut faire des représentations.

Le signe est la preuve, je le dis au ministre, il y a une législation en décembre qui a été adoptée sur la sollicitation pour les préarrangements funéraires, et son collègue de la Justice a promis qu'elle serait en vigueur en février. Elle n'est pas encore en vigueur, et on est en mars. Mais c'est comme d'habitude dans le cas du collègue du ministre des Communications, mais, cette fois-ci, j'ai une action préventive parce qu'il est juste deux semaines en retard. Mais,

apparemment, il a des discussions avec des entreprises comme Magnus Poirier et le Centre commémoratif de Montréal pour se donner une autoréglementation à la place de la loi. C'est sûrement des thèmes qui vont être familiers au ministre. Puis, sur ce dernier point-là, je voudrais dire que les préarrangements funéraires, la loi qui a été adoptée, ce n'est pas juste pour une personne qui sort de l'hôpital, c'est quand, dans un centre d'accueil, une personne fait de la sollicitation pour des préarrangements funéraires, ça crée un climat irrespirable. La loi qui a été adoptée dit que la sollicitation devrait se faire par la radio, la télévision et les journaux et pas par des contacts personnels. Mais ça, elle n'est pas encore en vigueur. Elle n'est que deux semaines en retard, mais j'en parle tout de suite parce qu'avec le ministre de la Justice les retards sont comme l'évolution, en ce sens qu'ils évoluent.

En terminant, M. le Président, je veux assurer le ministre que, contre vents et marées, l'Opposition va appuyer ce projet de loi. Notre vote n'est pas encore acquis en troisième lecture parce qu'on verra les amendements à apporter, mais sur le principe de cette loi, puis on est à l'adoption du principe, le ministre peut être certain que ce n'est pas une question de politique partisane. C'est une question sociétale, et les Québécois et les Québécoises méritent qu'une loi comme la loi 68 soit adoptée et mise en vigueur le plus rapidement possible. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, nous en sommes sur l'adoption du principe du projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Je reconnais Mme la députée de Saint-Henri.

Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Merci, M. le Président.

Le projet de loi 68, portant sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, est une pièce législative de taille. Ce projet de loi remet en perspective toute la notion de droit individuel dans une société aussi moderne que la nôtre. Il nous éclaire davantage sur le sens à donner à la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Le gouvernement québécois juge non seulement opportun de présenter un tel projet de loi, mais il arrive à temps, à ce moment-ci de notre histoire, si on le compare à ce qui a été fait ailleurs au Canada ou dans le monde. En effet, M. le Président, grâce à ce projet de loi, le Québec se met au diapason des pays européens et se conforme aux lignes directrices de l'OCDE.

Deuxièmement, ce projet de loi a pour effet de redonner aux citoyens le contrôle des informations qui les concernent. En effet, nous avons lu ou entendu dire que beaucoup de plaintes ont été formulées concernant la circulation des renseignements ou d'informations personnelles qui circulent un peu partout dans le secteur privé. Le projet de loi 68 viendra corriger cette anomalie dont les effets pervers n'étaient pas protégés dans la législation.

Par rapport au nouveau Code civil, le projet de loi 68 se veut une loi d'application. On fait ici allusion aux articles 35 à 41 du nouveau Code civil. En quatrième lieu, ce projet de loi est en parfaite harmonie avec la loi sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels dans le secteur public que nous avons déjà discutée en Chambre. Ce projet de loi, M. le Président, se veut également en harmonie avec la Charte des droits et libertés, dont les principes sont jalousement surveillés dans notre société et à raison, d'ailleurs.

Maintenant, M. le Président, j'aimerais revenir sur quelques éléments que je viens d'énu-mérer pour les expliciter davantage dans la perspective de cette législation. Mentionnons d'abord que, comme le gouvernement du Québec, le gouvernement canadien a assujetti son secteur public à une loi sur la protection des renseignements personnels. Cette loi rencontre également ses engagements envers l'OCDE.

Pour le secteur privé, le gouvernement fédéral s'est engagé à ce que les entreprises agissant sur son territoire se dotent de codes de conduite de façon à appliquer les principes prévus dans les lignes directrices. C'est dans cet élan qu'il a demandé officiellement à tous les gouvernements provinciaux d'en faire autant auprès des entreprises faisant affaire sur leur territoire.

Au Québec, il y a une particularité en ce sens qu'on se trouve dans un territoire où le progrès de la technologie, l'informatisation croissante de la société, la prolifération des banques de données dans le secteur privé ont amené le gouvernement à s'interroger sur la protection de la vie privée.

Mais, d'abord, parlons de la commission parlementaire qui s'est tenue sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, où le public était invité à donner son avis sur le rapport intitulé: «Vie privée, zone à accès restreint». Le bilan de cette commission est fort simple. Les entreprises ou leurs représentants ont affirmé leur nette préférence pour l'autorégle-mentation ou l'adoption de codes de conduite qui reprendraient les principes de l'OCDE sans obligation légale.

D'autre part, l'adoption du nouveau Code civil du Québec, qui a été adopté le 18 décembre 1991, introduisait un régime particulier au chapitre du respect de la réputation et de la vie privée. Ce sont les articles 35 à 41, auxquels je faisais allusion tout à l'heure. L'adoption de ces articles représente un pas important dans le domaine de la protection des renseignements personnels détenus dans le secteur privé. En

effet, plusieurs droits et obligations y sont prévus, notamment la constitution d'un dossier dans un intérêt sérieux et légitime.

D'autres pays, M. le Président, ont opté pour des voies de compromis entre le caractère contraignant et l'autoréglementation. En effet, les lois néerlandaises et finlandaises adoptées à la fin des années quatre-vingt portaient sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Ces lois, M. le Président, garantissent le respect d'un certain nombre de principes et consacrent des droits fondamentaux tout en imposant des obligations minimales à tous. Elles obligent les entreprises ou permettent à celles-ci de se doter de codes de conduite pour adapter ou compléter les principes de base aux exigences de leur secteur respectif.

On peut qualifier, M. le Président, ces lois à la fois de générales et de spécifiques. L'objet de la loi qui nous intéresse ici est d'assurer le respect du caractère confidentiel des renseignements personnels détenus par une personne exploitant une entreprise. De même, elle établit des conditions et modalités de consultation et de rectification de tout dossier contenant des renseignements personnels. Elle vient également compléter les droits et obligations édictés dans le nouveau Code civil du Québec. La loi élabore les règles en matière de collecte, de conservation, d'utilisation, de communication et d'accès aux renseignements personnels. Elle prévoit aussi des restrictions à l'accès par la personne concernée, des recours ainsi qu'un droit d'appel. Il est tout aussi important de préciser que la loi s'applique à toute personne qui recueille, détient, utilise et communique des renseignements dans l'exploitation d'une entreprise.

Une dernière remarque, M. le Président, concernant les lois sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels dans le secteur public. En vertu de ce projet de loi 68, pour des raisons de cohérence et d'interdépendance entre les secteurs privé et public, d'expertise acquise et d'efficacité, la loi fait en sorte que l'exercice des fonctions édictées est confié à la Commission d'accès à l'information. Maintenant, pour faire le lien entre la fonction d'autoréglementation, précisons que la Commission d'accès à l'information sera chargée de favoriser cette autoréglementation et de prêter assistance à toute personne qui désirera se doter de règles de conduite relatives à l'application des dispositions de la loi.

M. le Président, comme on le voit, la loi est incitative en ce sens que cet organisme qu'est la Commission d'accès à l'information prêtera assistance aux entreprises ou groupes d'entreprises qui voudraient se doter elles-mêmes d'un code de conduite. Celui-ci n'est cependant pas obligatoire, et l'approbation d'un organisme de surveillance n'est pas nécessaire pour qu'il soit appliqué.

Un mot maintenant, M. le Président, sur la nature des renseignements qui seront protégés. Dans le projet de loi 68, il n'y a pas de distinction entre renseignement personnel à caractère public et renseignement nominatif, comme c'est le cas dans la Loi sur l'accès. La distinction qui est faite pour le secteur public provient de notre addition d'accessibilité de certains renseignements nécessaires au bon fonctionnement de la société et que le législateur a avalisée dans la Loi sur l'accès. Dans le secteur privé, les renseignements personnels sont tous sur le même pied. Donc, on parle ici de tout renseignement qui concerne une personne et permet de l'identifier, qui deviendra ainsi un renseignement personnel au sens de la loi. Donc, au plan des principes de protection des renseignements personnels proposés dans la loi, précisons qu'ils seront les mêmes que ceux que l'on retrouve dans la Loi sur l'accès. On veut dire ici les notions de consentement, de confidentialité, de droit d'accès et de rectification. Ce sont les modalités d'application qui changent, mais non les principes.

De même, on perçoit, à travers ce projet de loi, le côté libéral, dans son sens large du terme, car, dans cette étape, le gouvernement juge qu'il serait prématuré d'obliger les entreprises à se doter de règles spécifiques ou de leur imposer une réglementation gouvernementale sectorielle. Le ministre a déjà souligné que cette nécessité de telles mesures n'a pas été démontrée, mais il a également souligné qu'il prévoit une seconde étape à cette démarche. En effet, après cinq ans d'application, le gouvernement procédera à une évaluation de la mise en oeuvre de cette loi. (17 heures)

Le projet de loi 68 contient une clause de révision quinquennale comparable à celle qui est libellée à l'article 179 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Cette clause, M. le Président, rend obligatoire la révision de la loi. Il est raisonnable de croire qu'après cinq ans l'organisme mandaté pour surveiller l'application de la loi soit en mesure de faire des recommandations sur l'opportunité, soit d'adopter une réglementation plus spécifique, soit d'obliger des entreprises ou des secteurs d'entreprises à s'autoréglementer.

Entre-temps, les entreprises pourront se doter d'un code de conduite, bien qu'il ne soit pas obligatoire, et c'est important de le redire. Il reviendra à la Commission d'accès à l'information de leur prêter assistance, ou de leur en proposer un. Cette loi est importante, en ce sens qu'elle franchit un pas marquant vers un encadrement plus serré de la circulation des renseignements personnels dans le secteur privé.

Le projet de loi 68 répondra, nous en sommes assurés, aux préoccupations du public québécois. Le public québécois se sentira mieux protégé, et le gouvernement se sentira plus à l'aise de fonctionner dans ce système pour, un jour, être plus sévère, s'il fallait le devenir.

En terminant, M. le Président, je tiens à souligner que le projet de loi 68 fait appel à la collaboration de tous ceux et celles qui interviennent de près ou de loin dans le secteur des renseignements personnels. Le projet de loi 68 est basé sur cette notion de confiance à l'égard du secteur privé, afin d'harmoniser son mode d'application avec l'esprit et la lettre de ce projet de loi.

Merci, M. le Président, de votre bonne attention.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Saint-Henri, de votre intervention.

Sur ce même sujet, soit l'adoption du principe du projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, je cède la parole à M. le député de D'Ar-cy-McGee.

M. Robert Libman

M. Libman: Merci beaucoup, M. le Président.

The presence of Bill 68 in the discussions... The discussions that followed are very important and very timely, in fact. They respond to the requirements of the Civil Code reform in Québec, but also they respond to very important changes in our society, changes that we have had to adapt to over the last several years, changes that involve the transfer of information, data banks, but mainly the rapid exchange of personal information that takes place on a daily basis in everyone's life to a far greater extent today than they have ever before.

Now, the parliamentary commission, la commission de la culture, qui a examiné le projet de loi 68, était caractérisée par une ouverture d'esprit. Il faut reconnaître le travail important du ministre dans le domaine, l'importante discussion qui était autour des présentations des mémoires, et reconnaître aussi le travail important du député de Pointe-aux-Trembles, le critique de l'Opposition officielle dans cette matière. J'aimerais aujourd'hui souligner quelques points qu'il vient de mentionner, et aussi quelques-unes de ses inquiétudes que nous partageons, notre formation politique.

Nous sommes favorables au concept, au principe du projet de loi. Alors, on va voter en faveur, à cette étape de l'adoption de principe du projet de loi 68. Aussi, nous allons probablement appuyer le projet de loi dans son adoption finale, si certaines modifications sont apportées à la loi. On peut présumer que certaines de ces modifications seront apportées, à la lumière de l'esprit d'ouverture que le ministre a montré pendant les audiences publiques.

Now, it was also mentioned that certain consensus developed. And the important consensus to underline is the fact that most people, if not all, that appeared before the parliamentary commission were favorable to the principle, to the guiding concept behind this bill. But an important thing to recognize - and this is the challenge that faces us, and this is the challenge that faces the Minister, as we move to the next stages in the legislation - is what many of the presentations showed us. It showed the dilemma we have in finding this very important common ground, this middle ground between the champions of access to information, on the one hand, versus some of the corporations or the businesses, on the other hand, who will have to dole out this information at their own expense, and finding that middle ground is a difficult proposition. And the Minister has, as I said, shown us his deliberate interest in showing flexibility to find this middle ground, and he has shown the openness in recognizing that this bill is not perfect, that this bill needs modifications and needs improvement. And we will work towards that, so we can have the most effective piece of legislation possible.

Mais une chose pour laquelle je ne suis pas d'accord avec le ministre et sur quelque chose qu'il vient de dire, M. le Président. Il a dit, cet après-midi, que ce n'est pas un projet de loi pour l'individu; c'est un projet de loi pour la société.

I beg to differ, M. le Président, because the one important foundation behind this law is the fact that it is a law for the individual, it is a law that protects the individual in our society. And it is the individual components that make up our society. And it is this piece of legislation that protects the individuals' right to know, the individuals' access to his own information and the individuals' right to privacy of his own information.

And these are the two fondamental components of this legislation: number one, that an individual should be able to maintain confidentiality in his personal information, but, secondly, that the law facilitates access for the individual to his own file. And we all know what an important or what a difficult period we are going through economically, an economic period that will leave many difficult scars on individuals' financial profile.

So, nothing could be more important, in light of this serious economic context, for an individual in our society to have access to personal information that may prejudice his future ability to affect a loan or to make a certain financial transaction, because of the important information that exists, with respect to his personal financial status and, therefore, his ability to make changes to his personal file, to update his personal file, to improve inaccuracies in his personal financial profile, that this is crucial. And the fact that this law opens up access or facilitates one's ability to improve or update his personal financial files is perhaps the most important element in this law, an element

of this law that all Quebeckers must rally behind as a reason for its passage as soon as possible.

Now, this, on the one hand, is what we have to recognize as crucial, but on the other hand, one thing that the Commission hearings clearly showed was that the impact this bill will have on personal information agencies, most of whom were not opposed to the principle of the legislation, but who had serious concerns about the law in its present form, these agencies, these businesses felt that the law places an unfair and a cumbersome financial burden on them, forcing them, for example, to inform each and every individual of whom they have a file on, that this file exists and that this person can have access to this file.

Now, while we and they believe that this law is necessary, we have to understand and we have to be sensitive to the strain that this law may mean on some of these businesses. And I feel that it would be very much in the Minister's interest and the Government's interest to, by way of amendments, make application of Bill 68 much more palatable for many of these businesses.

And I hope and I believe that he is open, in the next phase of this legislation, to seeking this very important common ground, to seeking ways by which the legislation can be improved to make it acceptable to some of the corporations that came before our commission to express their concerns. Representatives of business groups, insurance companies, banks, credit companies and particularly the Conseil du patronat made a very important case, and they were met with some resistance by our commission, with a certain level of hostility, perhaps, in rhetoric, and I think we have to be very open and sensitive to their underlying concerns.

Yes, it feels good to have a piece of legislation before us that breaks new ground, that represents our society's evolution into the new technological age. Yes, that is something for a National Assembly to be proud of, something that can build unanimous consensus, but that does not mean that we can not be sensitive to the mitigating impacts it could have on business.

We have to look at that very very seriously. We have to understand that the difficult constraints on small businesses are being felt very very harshly during this economic cycle that we are going through right now. And these businesses have to sustain themselves in this difficult economic environment. And is the law imposing upon them a burden that will make it even more difficult for them to cope? We must assure, in the final draft of this legislation, that we are not adding to the costly burden of these businesses. (17 h 10)

The Minister and I had an opportunity to discuss briefly, the other day, some of the articles or one of the articles, in particular, that may impose a burden on these businesses, that we must look at before we get to the final draft of this legislation. Article 103 is a perfect example: «Tout agent de renseignements personnels doit, dans l'année qui suit l'entrée en vigueur du présent article, informer chaque personne concernée par un dossier qu'il détient, de l'existence de ce dossier et du droit de consultation et de rectification que cette personne peut exercer, le cas échéant.»

In the hearings, we have seen already many different interpretations of this article, Article 103, as well as many differing analyses of the costs of applying this article to the real world. For example, Équifax quoted a figure of 6 000 000 $ to inform all the individuals upon whom they have a file of the existence of this file. Other companies quoted other figures which were very, very important or very substantial with respect to the size of these companies, with respect to the financial burden that it would impose upon some of these companies.

As I said, the Minister has indicated that he will clarify article 103 to allow some of these businesses to incorporate into their regular business practices a formula to inform individuals, a formula that would be less cumbersome, but a formula that they could apply in their everyday operations so that this article can still maintain its impact, maintain its objective of informing individuals that a file does exist on them. But at least it will not impose upon these companies, for example, the restriction of having to send by mail to each of these individuals a notification, a separate notification, which could incur considerable costs. He even invoked, at one time, the possibility of allowing these businesses to inform the individuals by telephone, which is something that we can explore, but at least it shows that the necessary flexibility is there, that the Minister has the intention of incorporating, in the next stage, via amendments, the necessary flexibility so that the bill could still achieve its objective while not imposing upon businesses some of the difficulties that go with some of these aspects, some of the financial burdens that might exist.

Another formula that we might consider is to place the entire burden with the Commission d'accès à l'information, who will be the guardian of this law, who may perhaps... We may feel, in analyzing this law «article par article», that maybe they should have the burden of informing all individuals in our society of the fact that files exist with certain companies. We may ask the Commission to advertise on a regular basis a few times a year or list a few times a year in the newspapers that all of these companies have files on individuals in Québec and if these individuals would like to have access to their files they need only contact these companies to have access to their files. That is something we can consider. If we, in an analysis, find that the

burden on the individual companies is too much to bear, maybe we can consider another formula whereby the Commission notifies all Quebeckers via the media that files exist with certain companies and they, themselves, should undertake to have access to their files.

Another element to the law which we are glad to see the Minister has recognized, in the public hearings, the importance of changing is the concern of the media, that their access to information might be curtailed, that the freedom of the press might be curtailed. And I believe that the Minister has shown his willingness to create an exemption in the law to bring forward an amendment to exempt the media from this disposition. This is something that is very important that was stressed during the public hearings and must be amended before we get to the next stage of legislation.

Now, another area, in conclusion, M. le Président, that did not receive too much attention during the public hearings but, in fact, is an element of the law that, I believe, needs fixing, needs improvement, is an area that on a practical level probably affects Quebeckers' daily lives more than any other aspect of the legislation, that is Articles 20 to 23. And it deals with the whole question of someone's privacy being invaded by the mere fact that their name appears on lists, and this is by telemarketing or mass mailing. How in the world does someone assert his privacy within this world of massmar-keting? And there is an aspect of the law that tries to attack this discomfort, but I believe it only scratches the surface.

It was raised by some of the groups that it is not only the existence of one name on one list, one day, that he might be telemarketed, but there are lists and sub-lists, and names are transferred very rapidly, to the point that you lose control. Even if you pinpoint the source of where your name comes from, there is no way of knowing how your name has been promulgated in very different areas. I think this is something that we have to look at more carefully. We have to find a mechanism to be more efficient to apply this objective of the law to fit the real world, and this is something that we can discuss.

I think that at least one necessary step that must be taken is to make it illegal for certain companies to transmit your name without specific consent. For example, if you ask for a subscription to a magazine or you apply for a credit card, before that mazagine or that credit card company can submit your name, or cannot transmit your name to other lists, they must request your specific permission to do so, whether it is to tick off a box in the application, that is a specific requirement that must be built into the law.

The law does speak of this in general terms at the present time, but it does not, I believe... unless the Minister can point out to me more clearly in his «réplique» that there is a specific aspect of the law that denies permission for companies to transmit a list without it having to be the burden of the individual to contact afterwards the company to have the name removed from the list. I think this should be right at the beginning, when the application is made. I do not think the consumer should have to specify that he wants his name taken off. I believe the company making the request should contact the consumer via some form of the application or some aspect of the application form, that the consumer should be asked instead of the consumer having to ask. I think that is a distinction that must be made.

Now, another thing that we must look at is concerns expressed by certain groups. Whether or not the Commission d'accès à l'information is capable right now, for filling this mandate, whether it is in conflict of interest with itself, I think that has to be looked at carefully before we allow this law to go forward.

Now, finally, we recognize the fact that some people have brought before the Commission a belief that the law does not go far enough. I think that we have to ask some of these people, who feel that the law does not go far enough, or that the law does not have enough teeth, we have to ask these individuals or these groups to recognize that this law itself is already a major step forward, and a fine line has to be understood between this law and some of the constraints imposed upon business. So, at this stage, I think it is important to ask these groups who feel that the law is not strong enough to understand that we must have this law on the books, and if the law becomes ambiguous, seems to be ambiguous, or does not achieve some of the objectives afterwards, then it can be looked at afterwards. But, for now, it is a major step forward and quite a radical departure. So, some of these groups must understand that the law must be accepted in its present form, from that angle, and the only modifications we should look at now is making it easy for businesses to cope with the reality of this new legislation.

But, as I said, M. le Président, at this early stage, «l'adoption de principe», our group is very favorable to the principle behind this legislation. The key phase or the real important chronology of the adoption of this legislation is the next level, in committee, where we bring forward the amendments, and determine whether this law will be sufficient in the real world to meet the challenges of confidentiality of personal information, while at the same time, not impose too cumbersome a burden on our individual enterprises. And if we can achieve that - the Minister, and the Commission, and this National Assembly can achieve that - we will have before us a very important piece of legislation that we should all be proud of.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de D'Arcy-McGee.

Alors, un simple rappel pour vous informer que nous en sommes à l'adoption du principe du projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Je cède la parole à M. le député de Richelieu. M. le député, la parole est à vous. (17 h 20)

M. Albert Khelfa

M. Khelfa: Merci, M. le Président.

C'est avec plaisir que je m'adresse à mes collègues de la Chambre, ici à l'Assemblée nationale, sur le projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Il s'agit d'un projet de loi extrêmement important pour les citoyennes et les citoyens du Québec. Les gens de notre société, nous avons le droit à la vie privée. Vous n'êtes pas sans savoir, M. le Président, qu'il s'agit de l'un des droits les plus fondamentaux, les plus importants de ceux et celles qui vivent en démocratie.

Vous savez également que c'est pour cette raison que le droit à la vie privée se trouve reconnu, depuis 1975, par la Charte des droits et libertés de la personne, à l'article 5. Si on a cru bon de l'inscrire dans notre Charte des droits et libertés de la personne, c'est, en quelque sorte, pour lui permettre une pérennité qui va au-delà de l'époque qui en établit le bien-fondé. C'est aussi pour fournir aux citoyennes et aux citoyens du Québec un rempart juridique contre les atteintes à la vie privée qui, elles aussi, peuvent prendre des formes différentes suivant les époques.

Aujourd'hui, ce qui est en cause, ce sont les effets sur la vie privée, et surtout des menaces à celle-ci, que font peser le progrès de la technologie, l'informatisation croissante de la société et la prolifération des banques de données dans le secteur privé. En effet, M. le Président, ce sont les progrès considérables accomplis dans le domaine de la technologie, l'informatisation croissante de la société et la prolifération des banques de données dans le secteur privé qui ont amené le gouvernement du Québec, qui ont amené le ministère des Communications et le ministre des Communications à se pencher sur la protection de la vie privée et à élaborer le projet de loi que nous avons devant nous aujourd'hui.

M. le Président, le projet de loi 68 que nous discutons aujourd'hui ici, à l'Assemblée nationale, a, comme l'ensemble des projets de loi sur lesquels l'Assemblée nationale est amenée à statuer et à se pencher, sa propre histoire, et je crois utile de vous en rappeler les grandes étapes, les grandes lignes. Vous savez bien que la décennie quatre-vingt a été la décennie de ce qu'on appelle aujourd'hui la décennie des technologies de l'informatique. L'informatique a con- nu un développement sans précédent. Les télécommunications ont connu, elles aussi, un essor considérable avec, notamment, tout l'essor de la «numéralisation» qui a augmenté la possibilité de la transition à l'infini. On a vu apparaître d'impressionnantes banques de données dans tous les domaines, y compris ceux relatifs à la vie privée des citoyens. Des citoyens et des groupes de citoyens ont attiré l'attention des pouvoirs publics sur les dangers et les menaces éventuelles à la vie privée que pouvait engendrer cet essor considérable et inédit des technologies de l'information depuis une quinzaine d'années.

À cet égard, M. le Président, on se rappellera que le gouvernement libéral est sensible aux représentations des citoyens et des groupes de citoyens sur cette question. Dès 1986, le ministère de la Justice et plusieurs autres ministères et organismes publics ont commandé une étude à des experts en informatique et en droit. Cette étude, publiée en 1990 et intitulée «L'identité piratée», recommandait à l'époque au gouvernement du Québec de légiférer de manière à appliquer au secteur privé les principes et les lignes directrices établis par l'Organisation de coopération et de développement économique, l'OCDE. La valeur de cette recommandation n'a pas été démentie par la suite; elle a même été confirmée à deux reprises, voire même trois reprises. En effet, un comité interministériel d'experts en la matière concernée a réitéré la pertinence de l'à-propos d'une législation gouvernementale afin d'amener le secteur privé à appliquer les principes de l'OCDE en matière de protection de la vie privée et relativement aux effets sur celle-ci des technologies de l'information et de l'informatique.

De même, M. le Président, en est-il des travaux des députés qui ont procédé à l'examen de cette question au sein de la commission de la culture à l'Assemblée nationale, qui avait à l'époque, et je le rappelle, le mandat de réviser la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. L'examen de mes collègues nous avait conduits à recommander au gouvernement d'étendre au secteur privé les principes de protection des renseignements personnels consacrés dans la loi actuelle.

Vous le savez, M. le Président, ce rapport a donné lieu à des consultations publiques à la faveur desquelles les entreprises oeuvrant dans le domaine des renseignements privés ont pu faire connaître au gouvernement leur point de vue, et les groupes de défense de la vie privée ont fait la même chose. De cette consultation, il est ressorti que les entreprises avaient une nette préférence pour l'autoréglementation ou l'adoption de codes de conduite qui reprendraient des principes de l'OCDE. De leur côté, les groupes de défense de la vie privée souhaitaient voir le gouvernement du Québec obliger les entreprises, par une législation, à se doter de codes de

conduite, ou encore voir à assujettir le secteur privé à une loi comparable à la loi sur l'accès.

On voit donc, M. le Président, que le gouvernement du Québec se devait de trouver une solution acceptable, tant pour les entreprises oeuvrant dans le domaine du renseignement que pour les groupes de défense de la vie privée. Et il l'a trouvée, et ce, en s'inspirant des expériences finlandaise et néerlandaise en cette matière. Ces pays, et d'autres, ont adopté, vers la fin des années quatre-vingt, des nouvelles lois sur la protection des renseignements personnels dans le secteur de la vie privée. Ces lois, dites de seconde génération, sont en quelque sorte des compromis entre la loi à caractère contraignant et l'autoréglementation pure et simple. Ces lois ont pour caractéristiques de garantir le respect d'un certain nombre de principes, de consacrer les droits fondamentaux et d'imposer des obligations minimales à tout le monde. Ainsi, l'approche qui est privilégiée par le gouvernement dans ce projet s'inspire de cette nouvelle génération de lois sur la protection des renseignements personnels.

De façon plus concrète, M. le Président, on peut dire que l'objet du projet de loi 68 est de s'assurer et d'assurer le respect du caractère confidentiel des renseignements personnels détenus par une personne exploitant une entreprise et d'établir des conditions et des modalités de consultation et de rectification de tout dossier concernant les renseignements personnels. C'est ce qu'on appelle le recours. De plus, M. le Président, la loi élabore des règles en matière de collecte, de conservation, d'utilisation, de communication et d'accès aux renseignements personnels et prévoit des restrictions à l'accès pour la personne concernée. Donc, le recours est important, le droit "de recours est un droit d'appel.

M. le Président, avec ce projet de loi, le Québec se donne une loi comparable à celle qui existe dans l'ensemble des sociétés industrialisées en matière de protection des renseignements personnels - et je vois mon collègue de Papineau qui est d'accord avec moi, avec son sourire - et de la vie privée aussi. Donc, je reviens, M. le Président. Cette loi rattrape ainsi un retard qu'a accusé en cette matière le Québec. (17 h 30)

D'autre part, il importe de souligner que la loi vient compléter les droits et les obligations «édictives» dans le nouveau Code civil en matière de renseignements personnels.

En terminant, M. le Président, je tiens à réaffirmer qu'avec ce projet de loi le Québec se dote, en matière de renseignements personnels et de la vie privée, d'une législation adaptée aux réalités de notre temps et aux réalités des besoins des citoyens. La vie privée des citoyens et des citoyennes du Québec se trouve renforcée, et sans pour autant que les entreprises qui oeuvrent dans le domaine ne voient leur activité menacée d'une façon ou d'une autre. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Richelieu, de votre intervention.

Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à l'adoption du principe du projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Je reconnais M. le député de LaFontaine. M. le député, la parole est à vous.

M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président.

L'étude de cet avant-projet de loi 68 permet à nous, parlementaires, et donc responsables de la gestion de ce pays et aussi de la défense des droits des citoyens de notre société, de faire le point et de nous pencher sur des transformations technologiques, des transformations d'habitude qui vont, si nous n'y prenons garde, avoir des effets très importants dans la vie quotidienne de l'ensemble de nos concitoyens.

En effet, depuis quelques décennies, grâce aux technologies modernes, soit l'informatique, la télématique, les fax et la téléphonie, il est très facile pour toute personne ou toute société d'accumuler et de colliger des informations sur un certain nombre de personnes, de citoyens ou d'organismes ou d'entreprises. Et, bien entendu, ces informations, M. le Président, sont souvent colligées dans le but d'être utilisées à des fins de décision. Alors, ça peut être des informations dans le domaine de la santé. Par exemple, on peut chercher à savoir les genres de maladie que certaines personnes peuvent avoir, certains traitements qu'elles peuvent obtenir, ceci dans le but particulier, par exemple, de vendre des médicaments ou tout simplement d'obtenir des échantillonnages de personnes afin de favoriser certaines pratiques commerciales.

Le député de Pointe-aux-Trembles le faisait valoir lorsqu'il donnait en exemple le cas de sa mère qui avait été sollicitée, suite à sa sortie de l'hôpital, par des commerçants qui voulaient faire la promotion d'arrangements préfunéraires. Cela démontre très bien, M. le Président, que cette information qui est maintenant colligée, qui est maintenant collectée et traitée par cette méthode ultramoderne qui est l'informatique peut avoir des effets les plus surprenants.

Nous n'avions pas ça, dans le temps. Je me souviens, à une époque, M. le Président, où, pour acheter une automobile, nous appelions, du moins le concessionnaire automobile appelait la banque, vérifiait le compte de banque du client et, avec ces informations, pouvait établir, selon les connaissances et son jugement, la note de crédit de son client. Ce qui n'est plus le cas maintenant. À ce moment-là, les gens appellent une entreprise spécialisée et, automatiquement, pour une somme très modeste, un grand nombre d'in-

formations arrivent sur cette personne. Cela va de la carte de crédit qui a été payée 15 jours en retard en passant par l'hypothèque qu'on a obtenue de la caisse populaire et qu'on a renouvelée une semaine ou dix jours après la date d'entrée en vigueur, et ça va aussi pour le citoyen qui, pour des raisons particulières, peut avoir une pension alimentaire à payer à son épouse, ou peut avoir des dettes accumulées et qu'il doit rembourser régulièrement. Cela permet de faire un portrait financier de cette personne et de prendre une décision par la suite quant à sa solvabilité au niveau commercial.

Alors, si cela semble être logique et normal - et je ne pense pas qu'une personne puisse s'offusquer que l'on puisse chercher des informations avant de faire une transaction commerciale ou professionnelle avec un individu - je crois qu'il faut faire attention de ne pas tomber dans l'excès contraire et de nous retrouver avec des entreprises qui ont des fichiers sur l'ensemble des citoyens, et cela, partant de la naissance, où les entreprises sont intéressées à avoir de l'information venant des hôpitaux où les naissances se font pour pouvoir vendre des couches ou vendre des produits pour enfants, et se retrouver par la suite, comme ce fut le cas de la mère du député de Pointe-aux-Trembles, jusqu'à l'arrangement préfunéraire. Nous serions, à ce moment-là, pris en charge par des banques de données qui contrôleraient un peu notre existence, car ces données serviraient à des entreprises, à des individus pour venir nous solliciter, nous vendre des produits ou simplement déterminer quel est le niveau de vie qu'on peut avoir dans notre pouvoir d'achat.

Ce projet de loi, M. le Président, a quelque chose de très intéressant. C'est certainement un des meilleurs projets de loi dans le monde. J'ai vu plusieurs pays européens, et je n'ai pas vu dans un grand nombre de pays un projet de loi qui se penche d'une manière aussi globale sur la protection de l'information, mais surtout la protection de la vie privée des citoyens. Et je crois, M. le Président, que c'est là certainement encore un des grands acquis de la société québécoise qui fait que, sur un certain nombre de sujets, il y a un consensus de notre société et que l'ensemble des parlementaires puissent abonder dans le même sens, car c'est là un projet de loi d'intérêt particulier pour l'ensemble de la population.

M. le Président, imaginons un peu quelqu'un qui désire faire une transaction et qui apprend qu'il est fiché dans une entreprise et qu'il n'aurait pas accès à ces renseignements. Le commerçant y aurait accès, mais lui ne pourrait pas y avoir accès ou ne pourrait pas faire en sorte de corriger des informations qu'il jugerait non correctes ou non complètes, qui auraient pu être introduites dans son dossier par erreur, ou par un commerçant, ou par un organisme qui n'aurait pas fait son travail jusqu'au bout. Il se retrouverait fiché, donc, avec des renseignements qui pourraient lui porter préjudice, et ce citoyen ne pourrait y avoir accès. Or, le projet de loi va permettre, justement, va renforcer cette capacité du citoyen d'avoir accès non seulement à son dossier mais de pouvoir y amener des corrections. Je crois que c'est là une des choses fondamentales, car s'il existe le droit à l'information pour prendre une décision d'affaires, une transaction financière, il existe aussi le droit à l'information juste et correcte pour le citoyen afin que celui-ci ne soit pas pénalisé.

Il y a aussi, M. le Président, tous les renseignements du côté médical, du côté santé, et c'est là, je pense, quelque chose qui est encore plus important que l'information financière, car, si l'on peut avoir, dans une entreprise, une filière ou un dossier qui dénote qu'on a pu payer une carte de crédit un peu en retard, ou quelque chose comme ça, qui pourrait dire qu'on a la cote A, A1 ou A2 en termes de crédit, il y a encore plus important que les fichiers: la protection des renseignements au niveau de la santé. Imaginons que des entreprises ou des groupes pourraient obtenir des portraits complets de toute la condition physique, morale et psychologique d'un certain nombre de citoyens. Imaginons le pouvoir important d'influence sur ces citoyens que ces gens, que ces décideurs pourraient avoir.

À titre d'exemple, il pourrait y avoir des citoyens qui ont eu, au cours de leur vie, certaines maladies qu'ils ne désirent pas mettre de l'avant. Ça peut être au niveau psychologique ou au niveau parasitaire, ça peut être au niveau de maladies qui pourraient mettre en jeu leur emploi ou leur capacité d'occuper certaines fonctions professionnelles. Et c'est là, M. le Président, je pense, un des grands, grands, grands atouts importants du projet de loi, c'est qu'on ne peut pas et on ne doit pas faire en sorte que se crée, au Québec et dans notre société, ce genre de banque. Alors, le projet de loi est innovateur. Non seulement il est innovateur, mais il est peut-être unique dans nos pays occidentaux. (17 h 40)

M. le Président, je vois que le ministre, en l'apportant, a démontré qu'il avait cette clairvoyance et ce jugement. D'ailleurs, l'appui de l'Opposition à son projet - je le disais précédemment - confirme les paroles que j'ai à ce moment-ci. À part quelques organismes de notre société qui ont toujours un peu de difficulté à s'adapter aux changements, même si, à l'occasion, on peut aller dans le même sens qu'eux pour d'autres projets, je ne vois pas pourquoi on ne devrait pas tous ensemble, comme société, au Québec, applaudir et aller dans le même sens et dans la même direction que le ministre veut nous faire aller en prenant ce projet de loi-là, car c'est un projet de loi utile, un projet de loi qui va permettre d'apporter à notre société un cer-

tain nombre de protections et de barrières et faire en sorte de valoriser aussi les informations qui seront dans certaines banques, parce que nous serons assurés qu'elles correspondent à la réalité.

M. le Président, le projet de loi 68, c'est un projet de loi très intéressant, novateur, un projet de loi qui est au mérite du ministre et du gouvernement que nous sommes, M. le Président, et je fais voeu que l'ensemble des collègues de ce Parlement, nous l'appuyions afin de démontrer à la population, encore une fois, qu'on ne peut pas, dans notre société, laisser les choses libres et sauvages sans mettre un certain nombre de barrières et de balises afin d'assurer un minimum de respect de l'individu.

M. le Président, en terminant, j'appuie ce projet de loi là et je réitère le voeu que l'ensemble des parlementaires, y compris ceux de l'Opposition, puissent avoir le même support envers le projet de M. le ministre.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de LaFontaine, de votre intervention.

Sur ce même sujet, je reconnais M. le président de la commission de la culture et député de Louis-Hébert.

M. Réjean Doyon

M. Doyon: Oui, M. le Président.

M. le Président, le peu de voix qui me reste me permettra cependant de faire connaître l'approbation que j'ai du projet de loi qui vient d'être présenté. Ça a été extrêmement gratifiant, comme président de la commission de la culture, d'avoir à présider la commission parlementaire qui a siégé pendant une quinzaine de jours et qui a reçu au-delà de 40 organismes et groupes de personnes, des personnes privées, à divers titres, qui sont venues nous entretenir de leur point de vue en ce qui concerne le projet de loi 68.

Sachons d'abord, M. le Président, que le projet de loi 68 a pour objet de protéger la vie privée des gens dans le secteur privé. Il s'agit, pour ce projet de loi, de s'assurer que les renseignements divers et extrêmement nombreux détenus par toutes sortes d'organismes, par toutes sortes de personnes morales et physiques avec lesquelles nous transigeons quotidiennement, que ces renseignements puissent être colligés, puissent être échangés, puissent être commercialisés au détriment de ceux qui font l'objet de ces renseignements-là.

Il est devenu facile, par la technologie moderne, par l'informatique, de marier, de coupler, de conjuguer des renseignements. Un renseignement pris individuellement, très souvent, a une signification limitée. Mais si on le met avec d'autres renseignements qui viennent de tous bords et de tous côtés, on arrive à tracer un profil, un profil de la personne où on arrive à pouvoir déterminer avec certitude ou avec une certaine certitude le genre de personne à qui on a affaire. On est capable, comme ça, de cibler cette personne-là pour viser un certain nombre d'objectifs qui peuvent être des objectifs de vente, des objectifs de sollicitation, des objectifs de vente sous pression, ce qui fait que l'individu qui se voit assailli de cette façon ne dispose pas d'instruments, il ne dispose pas de moyens de défense suffisants.

Ce que nous avons voulu faire par ce projet de loi, et ce que le ministre a voulu faire lors de la commission parlementaire, c'est de tester, de tester la réaction des gens qui seraient affectés par ce projet de loi, de tester la réaction de la clientèle à être protégée et de tester aussi la réaction des gens, des organismes divers de toutes natures qui auraient, justement, à se plier à une réglementation qui aurait sa source dans le pouvoir habilitant que donnerait la loi.

Notre consultation a été extrêmement éclairante. En gros, je vous dirai, M. le Président, que la consultation a révélé qu'au fil des ans il y a eu une évolution considérable à ce sujet-là. C'est remarquable. Au fil des ans s'est dégagé un consensus en faveur d'une législation du gouvernement du Québec pour assurer la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Ça n'a pas toujours été le cas. Ça n'a pas toujours été le cas. On a eu, il y a peu de temps, un an ou un an et demi, une commission parlementaire qui est allée voir comment réagissait le public en général à ça. Et, à ce moment-là, c'était loin d'être évident qu'un projet de loi semblable à celui que nous avons devant nous rencontrerait un consensus suffisamment grand pour nous permettre d'espérer le faire passer dans des délais quand même rapides si l'on considère que, d'ici à la fin du mois d'avril - le ministre l'annonçait - il est dans les intentions du gouvernement d'avoir cette loi-là - du mois d'avril qui vient - d'avoir cette loi-là adoptée par cette Assemblée nationale, quitte à ce que les mécanismes d'application suivent leur cours et que ça puisse se faire dans les mois qui suivent. C'est d'autant plus facile et d'autant plus possible de réaliser un objectif aussi élevé que nous avons la collaboration totale de l'Opposition à ce sujet-là.

L'Opposition a fait preuve d'une grande responsabilité en acceptant de travailler main dans la main avec le gouvernement. Ce n'est pas tous les jours, M. le Président, que vous m'entendrez prononcer des paroles semblables. Et je le dis avec fierté, que le député de Pointe-aux-Trembles a été d'une aide précieuse et qu'il nous a permis de trouver des moyens de rencontrer les objectifs qui étaient les nôtres grâce à son expérience personnelle, son expérience de syndicaliste, son expérience de personne particulièrement arrimée à certains groupes particuliers de la société montréalaise en particulier, ce qui

nous a permis d'ouvrir un certain nombre d'horizons vers des solutions que nous n'avions pas, au tout début, envisagées. Et le ministre était d'autant plus aise de les accepter que lui-même, d'entrée de jeu, à la fin de la commission, a annoncé qu'il y aurait des amendements importants sur lesquels, me disait-il tout à l'heure, déjà, des gens de son ministère sont en train de travailler. Et ça nous permettra de rencontrer les quelques objections qui ont été soulevées.

Le défi qui nous est fait, M. le Président, est de ne pas faire une législation tellement lourde, tellement pesante qu'elle finisse par écraser les commerces, les détenteurs ou les détentrices de renseignements personnels, les compagnies qui font profession de colliger des renseignements personnels, de les mettre à la disposition des prêteurs, par exemple, des commerçants, étant bien entendu, M. le Président, que, finalement, dans un commerce ainsi fait et bien fait, selon les règles honnêtes qui doivent s'appliquer dans un tel cas, nous en sommes tous les bénéficiaires. Ni vous ni moi, M. le Président, n'avons avantage à ce que quelqu'un qui est un mauvais payeur, qui est un mauvais emprunteur, puisse aller chercher du crédit auprès d'une institution de crédit, ne rembourse pas et que, finalement, l'institution prêteuse n'étant pas remboursée se voie dans l'obligation d'augmenter son taux d'intérêt pour compenser les pertes qu'elle subit.

Moi, je suis complètement d'accord que les dettes qui sont encourues doivent être remboursées. Il n'est pas question que quelqu'un qui ne rembourse pas ses dettes puisse profiter des mêmes avantages que vous, par exemple, M. le Président, qui êtes, bien sûr, un emprunteur modèle quand ça vous arrive. Vous ne voudriez pas vous voir en butte avec un mauvais emprunteur qui, parce que lui ne rembourse pas, aurait fait rejaillir sur votre propre crédit, qui est impeccable au moment où je vous parle, j'en suis certain, ce qui vous obligerait à des remboursements plus élevés que ceux qui sont déjà, me disiez-vous l'autre jour, suffisamment lourds pour vous. Alors, vous ne pourriez pas accepter une telle chose.

Alors, on dit beaucoup de mal d'Équifax, on dit beaucoup de mal d'Équifax. Moi, je trouve qu'Équifax joue un rôle utile dans notre société. Si Équifax n'existait pas, je pense qu'il faudrait l'inventer. Si Équifax ne permettait pas à quelqu'un qui va chez un commerçant et qui veut acheter à crédit un système de son, qu'il ne permettrait pas à ce commerçant de savoir qu'il n'a pas payé son frigidaire non plus la dernière fois qu'il a emprunté, qu'il est en retard de six paiements sur sa voiture et que sa télévision vient de lui être saisie parce qu'il a oublié qu'il lui restait 33 paiements à faire - c'était un 36 paiements... Alors, je pense qu'Équifax est utile dans ce cas-là. (17 h 50)

Je caricature un peu, M. le Président, tout simplement pour vous faire réfléchir. Castigat ridendo mores, disait Virgile; je corrige les moeurs en riant. Castigat ridendo mores. Je caricature un peu pour mieux faire comprendre que, Équifax, ce n'est pas l'enfer sur terre, ce n'est pas du méchant monde, c'est des gens qui ont une utilité dans une société de marché comme la nôtre. Je suis certain qu'un des problèmes que connaît actuellement la Russie des tsars, c'est qu'il n'y en a pas d'Équifax là parce qu'ils n'ont pas de tradition de crédit. Qu'est-ce que tu fais quand tu veux partir une économie de marché, puis jamais personne n'a eu une carte de crédit dans ses poches, que jamais personne n'a emprunté 0,05 $ parce que ça ne se faisait pas, parce qu'il n'y avait pas de banque prêteuse? Tu fais quoi pour avoir une économie de marché? Je suis certain que la Russie, en d'autres termes, M. le Président, nous envie Équifax, parce que d'avoir Équifax, ça veut dire qu'on est dans un système qui fonctionne. Et ça, je voulais le souligner.

Je veux souligner aussi une autre chose, M. le Président, c'est que... Moi, je suis député depuis près de 12 ans maintenant et j'ai reçu des plaintes dans tous les domaines. J'en ai reçu parce que les lumières de rue étaient brûlées, j'en ai reçu de locataires parce que la porte était gelée. J'ai reçu toutes les sortes de plaintes, mais je n'ai jamais eu de plaintes concernant Équifax et, pourtant, les gens ne se gênent pas pour venir voir le député et se plaindre au député de toutes sortes de choses. Pourtant, je n'ai jamais eu de plaintes d'Équifax.

Donc, tout ça pour dire que c'est vrai qu'il faut baliser. C'est vrai qu'il faut jalonner, c'est vrai qu'il faut réglementer, mais il faut le faire avec délicatesse, il faut le faire en essayant de ne pas écraser sous la lourdeur d'une réglementation qui aurait pour effet d'étouffer l'économie, d'étouffer le commerçant, d'étouffer les gens qui veulent faire des affaires pour protéger quelques exceptions qui pourraient se produire, ici et là, et qui se produisent, malheureusement.

Quand on a les explications sur ces exceptions-là qui nous ont été données, en commission parlementaire... M. le ministre était là. On nous avait fait grand état de madame... Je pense que c'est Mme Rozon, disait-on. Mme Rozon avait un litige épouvantable avec Équifax, sauf que, quand Équifax est venue devant nous autres, puis on a dit: Qu'en est-il de Mme Rozon? ils nous ont donné des explications parfaitement correctes, où on voyait que, finalement, ce n'était pas si simple que Mme Rozon se plaisait à l'expliquer dans sa façon de voir. Il y a toujours deux côtés d'une médaille, et une commission parlementaire telle que celle que nous avons tenue pendant une quinzaine de jours nous a permis de voir les deux côtés de cette médaille-là.

Nous travaillons donc dans le domaine de la protection des renseignements personnels dans le

secteur privé, mais nous le faisons dans un cadre plus vaste. Nous le faisons, premièrement, dans le cadre beaucoup plus vaste de la Charte des droits et libertés de la personne. La Charte des droits et libertés de la personne, M. le Président, existe, et le droit à la vie privée est reconnu dans la Charte depuis 1975, mais ce qui nous manquait, c'étaient des règles administratives qui fixent l'application de la protection de cette vie privée. Donc, le cadre est beaucoup plus vaste pour nous permettre de légiférer dans le domaine de la protection de la vie privée, dans le cadre, donc, de la Charte des droits et libertés de la personne.

Au-delà de ça, depuis quelques mois maintenant, M. le Président, nous agissons aussi à l'intérieur du nouveau Code civil. Les articles 35 à 41 du Code civil font en sorte que les individus, les personnes au Québec, maintenant, d'après le Code civil... Donc, le Code civil, qui est sanctionné par les tribunaux de droit commun, ce Code civil, les articles 35 à 41 font maintenant en sorte que quinconque juge que sa vie privée a été brimée a un droit d'action, en vertu du droit civil, devant les tribunaux. Il n'a pas vraiment besoin de la loi sur la protection de la vie privée. Il n'a pas vraiment besoin de ça. Il pourrait tout simplement le faire au moyen des tribunaux, sauf que, M. le Président, ça a pour effet, ça, d'alourdir énormément la procédure.

Ce qu'on s'est dit, le raisonnement qu'on se fait, et c'est pour ça... Le ministre... C'est pour ça que le gouvernement présente ce projet de loi. Si le gouvernement a jugé bon de se soustraire ni plus, ni moins à l'ensemble de la législation générale dont je parle, la Charte, le Code, en se soumettant à la Commission d'accès à l'information, en ce qui concerne le secteur public. Est-ce qu'il n'est pas logique, est-ce qu'il n'est pas rationnel, est-ce qu'il n'est pas parfaitement raisonnable de dire que la même façon de faire pourrait devoir s'appliquer aux renseignements personnels dans le secteur privé? En d'autres termes, si c'est bon dans le secteur public, pourquoi ce ne serait pas bon dans le secteur privé? Et c'est ce que nous avons fait, c'est ce que nous sommes en train de faire.

Moi, je suis extrêmement heureux de voir la tournure des événements. Je suis extrêmement heureux de voir que le Québec s'inscrit encore une fois dans une ligne qui est déjà tracée dans la plupart des pays industrialisés. L'OCDE, l'Organisation de coopération et de développement économiques, a demandé aux pays membres de l'OCDE de se doter d'une législation qui a pour but, pour objectif, d'assurer la protection de la vie privée. Dans le contexte de mondialisation - ça devient un cliché de le dire, mais c'est aussi en même temps qu'un cliché une réalité - le Québec ne peut pas échapper à ça, et c'est dans ce sens-là que le Québec se conforme ni plus ni moins à ce qui existe ailleurs, se conforme à l'engagement pris par le Canada envers l'OCDE d'emmener les provinces canadiennes à légiférer dans ce domaine. Et le Québec le fait d'une façon qui va, en même temps, donner satisfaction aux représentations fondées qui nous ont été faites par les regroupements de locataires, les regroupements de consommateurs, la Ligue des droits et libertés de la personne, qui nous ont fait valoir d'une façon fort éloquente le besoin qu'il y avait d'agir dans ce domaine. Mais en même temps que nous sommes à l'écoute de ces représentations, nous ne sommes pas sourds à ce que nous disent les gens comme le Conseil du patronat, comme l'association canadienne des banques, comme le Bureau d'assurance du Canada, comme les caisses populaires, par exemple.

Alors, nous avons, en même temps, des sons de cloche qui, tout différents qu'ils soient, ne sont pas contradictoires. C'est extrêmement gratifiant de pouvoir légiférer dans un tel contexte, de pouvoir faire oeuvre utile sans brimer personne, en améliorant la qualité de vie collective, en s'assurant que les objectifs que nous poursuivons sont des objectifs qui vont être atteints avec un minimum de dépenses. C'est très important et ça a été une préoccupation que le ministre a eue du début à la fin.

Et c'est pour ça, entre autres choses, que la Commission d'accès à l'information va être l'organisme responsable de l'application de cette loi 68. Le gouvernement aurait pu décider de créer un organisme différent. Il ne le fait pas, malgré qu'il y a, on le reconnaît, certaines anomalies, un certain agacement, à certains endroits, de voir la Commission d'accès à l'information jouer un rôle d'adjudicateur, bien sûr, un rôle de conseiller, un rôle d'enquêteur et un rôle de réglementation en même temps. Tous ces rôles-là, la Commission les joue, mais elle doit les jouer d'une façon compartimentée pour réussir à rendre des décisions qui sont basées sur des preuves qui lui sont soumises en faisant abstraction de certaines autres interventions qu'elle a eu à faire.

Alors, les renseignements et les rapports que nous avons sur l'oeuvre que fait la Commission d'accès à l'information sont extrêmement positifs. Nous avons un président de la Commission d'accès à l'information en la personne de M. Comeau, qui est une personne respectée dans tous les milieux, qui fait un travail extrêmement important et extrêmement valable. Alors, tous les éléments, en d'autres termes, M. le Président, sont réunis pour que ce projet de loi, dès le mois d'avril, soit adopté et que nous puissions au Québec, comme dans bien d'autres pays industrialisés, avoir une loi adéquate, une loi moderne dans le domaine de la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M.

le député de Louis-Hébert, de votre intervention.

Il est maintenant 18 heures, et je vais suspendre les travaux de cette Assemblée jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 20 h 5)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Si vous voulez prendre place. Nous poursuivons l'assemblée, aux affaires du jour. Nous sommes à l'adoption du principe du projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.

Je reconnais M. le député d'Iberville.

M. Yvon Lafrance

M. Lafrance: Merci, M. le Président.

M. le Président, le droit à la vie privée est un principe reconnu, notamment dans la Charte des droits et libertés. Plus encore, ce droit à la vie privée, une liberté fondamentale, doit être respecté par tous, sans exception. C'est d'ailleurs ce principe, M. le Président, qui a amené l'élaboration du projet de loi 68, qui fait l'objet du débat actuel.

Il s'agit d'un projet de loi qui a pour objet d'établir des règles particulières à l'égard des renseignements personnels qui sont recueillis, détenus, utilisés ou communiqués à des tiers dans le cadre de l'exploitation d'une entreprise dans le secteur privé.

Mais, avant d'en élaborer davantage le contenu, j'aimerais expliquer les motifs de notre gouvernement dans l'élaboration de cette législation. Tout d'abord, je crois que ce sont les abus de toutes sortes qui ont donné lieu à la mise en place de ce projet de loi. Il existe, en effet, plusieurs exemples de non-respect du droit à la vie privée, et jusqu'à maintenant, les citoyennes et citoyens avaient difficilement recours à des moyens juridiques pour protéger les renseignements qui les concernent.

D'autre part, nous ne pouvons ignorer le progrès de la technologie, l'informatisation croissante de la société et la prolifération des banques de données dans le secteur privé. Cela nous a, bien sûr, amenés à nous interroger sur la protection de la vie privée.

Deuxièmement, nous avons décidé d'harmoniser l'intervention québécoise avec les nombreux efforts qui sont faits sur le plan international, notamment à l'Organisation de coopération et de développement économiques, mieux connue sous le titre OCDE, et à la Communauté économique européenne, ceci dans le but de faciliter la circulation des données personnelles, mais en s'assurant que celles-ci soient protégées. À cet égard, vous vous rappellerez que le Canada a adhéré, voilà maintenant près de 10 ans, soit en 1984, aux lignes directrices régissant la protection de la vie privée et les flux transfrontières de données à caractère personnel émises par l'Organisation de coopération et de développement économiques. Ces règles de l'OCDE visent, entre autres, à promouvoir l'adoption de mesures de protection de la vie privée par les membres, tant pour le secteur privé que pour le secteur public. Par ailleurs, le gouvernement canadien, comme on le sait, a assujetti son secteur public à une loi dite sur la protection des renseignements personnels qui rencontre en partie ces engagements envers l'OCDE.

Pour ce qui est du secteur privé, le gouvernement fédéral s'était engagé à ce que les entreprises qui agissent sur son territoire se dotent de codes de conduite de façon à appliquer les principes prévus dans les lignes directrices. Vous vous rappelerez, d'ailleurs, que le gouvernement fédéral avait demandé officiellement aux gouvernements provinciaux d'en faire autant auprès des entreprises faisant affaire sur leur territoire. Toutefois, vous aurez constaté que peu d'entre elles se sont dotées de tels codes de conduite. D'ailleurs, le Canada, à cet égard, a fait l'objet de critiques de la part de l'OCDE. (20 h 10)

M. le Président, je suis donc très heureux de constater que le projet de loi 68 s'inscrit dans la foulée de ce qui se passe à travers le monde à cet égard. Devant une utilisation croissante de l'information à titre de matière première et les importantes capacités d'enregistrement et de traitement qui sont offertes par les fichiers informatisés, une protection juridique comme celle que nous présentons ce soir s'est véritablement imposée à presque tous les pays développés. En d'autres termes, M. le Président, c'est donc dans le but d'harmoniser l'intervention québécoise avec ce qui s'est fait à l'OCDE que nous avons élaboré le projet de loi qui est devant nous ce soir.

Troisièmement, je vous parlerai de cette législation versus l'adoption du nouveau Code civil du Québec. Pour ce faire, je vous rappellerai que c'est le 18 décembre 1991 que cette Assemblée nationale adoptait le nouveau Code civil du Québec. Et je m'en souviens très bien, M. le Président, puisque j'ai eu l'honneur de présider la commission parlementaire spéciale qui s'est penchée sur l'étude article par article - et il y en avait plus de 3000 - de ce projet de loi qu'on a qualifié d'historique.

Vous vous souvenez sûrement que ce nouveau Code civil introduit un régime particulier au chapitre du respect de la réputation et de la vie privée. L'adoption des articles s'y référant représente, à n'en pas douter, un pas important quant à la protection des renseignements personnels détenus dans le secteur privé. D'autre part, ces articles reprennent certains principes qui sont énoncés dans les lignes di-

rectrices, comme je l'ai mentionné, de l'OCDE. On y prévoit, notamment, la constitution d'un dossier dans un intérêt sérieux et légitime et le droit, par l'intéressé, au consentement à la communication à des tiers ou à l'utilisation à des fins incompatibles avec la constitution du dossier. Toutefois, les résultats de la commission parlementaire de 1991, à laquelle j'ai aussi participé, confirmaient la nécessité, pour le gouvernement, de compléter les règles du Code civil, ce qui l'a amené, bien sûr, à élaborer le présent projet de loi, soit le projet de loi 68.

Ainsi, M. le Président, cette nouvelle législation vient compléter notre Code civil en ce qui a trait à la cueillette, à la détention et à la communication de renseignements personnels. Ce n'est là qu'un aperçu des raisons qui ont motivé notre gouvernement à présenter le projet de loi qui nous concerne aujourd'hui. Mais, à la base, une seule chose demeure: la préoccupation du gouvernement libéral de protéger les Québécoises et les Québécois quant à la sécurité des données personnelles qui les concernent. Nous voulions, en fait, que les citoyens puissent avoir le contrôle et l'utilisation des informations qui sont recueillies à leur sujet. C'est donc dans un souci de transparence que notre gouvernement a voulu légiférer.

M. le Président, j'aimerais, avant de terminer, expliquer quelque peu le contenu du projet de loi. Cela nous permettra tous de mieux comprendre son application réelle. Ainsi, la loi élabore des règles en matière de collecte, de conservation, d'utilisation, de communication et d'accès aux renseignements personnels. Elle prévoit également des restrictions à l'accès par la personne concernée des recours ainsi qu'un droit d'appel.

Concrètement, la loi s'applique à toute personne qui recueille, détient, utilise et communique des renseignements nominatifs dans l'exploitation d'une entreprise sur le territoire québécois. Pour des raisons de cohérence et d'interdépendance entre les secteurs public et privé, d'expertise acquise et d'efficacité, il est donc proposé que l'exercice des fonctions édictées dans la loi soit confié à la Commission d'accès à l'information.

Pour ce qui est des pouvoirs qui lui sont dévolus, la Commission d'accès à l'information entendra les demandes de révision faites en vertu de la loi. Elle exercera des fonctions de surveillance de l'application de la loi et de médiation. Elle pourra également faire des enquêtes sur son fonctionnement et sur son observation, puis elle sera chargée de favoriser l'autoréglementation et de prêter assistance à toute personne qui voudra se doter de règles de conduite relatives à l'application des dispositions de la loi.

J'aimerais également dire quelques mots, M. le Président, sur la nature des renseignements qui seront protégés par la nouvelle loi. Ainsi, le projet de loi ne prévoit pas de distinction entre renseignements personnels à caractère public et renseignements nominatifs, comme c'est le cas dans la loi sur l'accès. La distinction qui est faite pour le secteur public provient de la tradition d'accessibilité de certains renseignements nécessaires au bon fonctionnement de la société, et que le législateur a avalisée dans la loi sur l'accès. En ce qui a trait au secteur privé, les renseignements personnels sont tous sur le même pied. Alors, tout renseignement concernant une personne et permettant de l'identifier sera dorénavant un renseignement personnel au sens de la loi. Toutefois, un renseignement ne sera pas considéré comme personnel s'il possède, en vertu de la loi, un caractère public.

M. le Président, ce n'est là qu'un léger aperçu du contenu du projet de loi 68 concernant la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Il y aurait évidemment d'autres volets à aborder. Toutefois, puisque le temps me presse, je me limiterai à ceci. Comme moi, vous comprendrez que nul ne peut contester le bien-fondé de cette législation. En effet, ce projet de loi vient garantir le respect du droit à la vie privée, un concept de liberté qui devrait s'appliquer à tous et à toutes. L'intention du gouvernement a donc été claire, M. le Président. Nous avons voulu donner à tout individu la maîtrise des renseignements et des informations qui le concernent, mais nous avons également voulu lui fournir la possibilité d'un recours législatif, le tout dans un esprit de justice. M. le Président, vous comprendrez donc que, pour ces raisons, il me fera plaisir de voter en faveur de l'adoption du projet de loi 68.

Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le député d'Iberville, de votre intervention.

Je vous rappelle que nous en sommes à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. (20 h 20)

Je reconnais M. le député de Champlain. M. le député, la parole est à vous.

M. Pierre A. Brouillette

M. Brouillette: Merci, M. le Président.

C'est avec grand intérêt que je prends la parole aujourd'hui pour m'adresser à mes collègues de la Chambre sur le projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Le projet de loi 68 en est un d'une importance considérable pour les citoyens et les citoyennes de notre société. Il est relatif à leur droit à la vie privée.

Effectivement, M. le Président, ce qui est au coeur de ce projet de loi, c'est le respect de la vie privée des citoyennes et des citoyens de

notre société. Vous, tout comme d'ailleurs l'ensemble de nos collègues, n'ignorez pas, M. le Président, que la vie privée et son respect sont l'un des droits les plus importants de ceux et de celles qui, comme nous, avons la chance et le privilège de vivre dans une démocratie établie comme la nôtre. Au regard de notre formation politique et de notre gouvernement, il s'agit là d'une valeur à laquelle nous sommes profondément attachés, et même l'un des piliers de la philosophie libérale que nous nous efforçons de traduire quotidiennement dans les législations que nous sommes appelés à adopter ici, dans cette enceinte.

À cet égard, M. le Président, vous n'êtes pas sans savoir que c'est sous le gouvernement libéral que le droit à la vie privée a été reconnu, en 1975, à travers son enchâssement dans la Charte des droits et libertés, et ce, à l'article 5. Si un gouvernement libéral a jugé pertinent de l'enchâsser dans notre Charte des droits et libertés de la personne au milieu de années soixante-dix, c'est dans la perspective de donner à ce droit une longévité qui va au-delà des moments singuliers qui en ont établi la pertinence et l'à-propos dans le contexte contemporain qui est le nôtre. S'il en est ainsi, M. le Président, c'est également et surtout pour permettre aux citoyennes et aux citoyens de disposer de protection juridique contre les atteintes à la vie privée qui, comme vous le savez, épousent des formes différentes selon les décennies. Depuis quelques années, ce qui figure au premier rang des préoccupations en matière de préservation de la vie privée, ce sont les effets sur celle-ci que font peser l'essor considérable des technologies, l'informatisation croissante de la société et, surtout, la prolifération de banques de données dans le secteur privé.

M. le Président, ce sont effectivement les développements considérables et, il faut le dire, le progrès remarquable accompli dans le domaine de la technologie et dans celui de l'informatisation croissante de la société ainsi que dans celui de la prolifération des banques de données dans le secteur privé qui sont à l'origine de notre débat d'aujourd'hui sur la protection de la vie privée. Ce sont ces progrès qui ont amené le gouvernement à se pencher sur la protection de la vie privée afin d'élaborer le projet de loi que nous avons devant nous. Le projet de loi 68 est le résultat de l'ensemble des démarches qui se sont échelonnées au cours des dernières années. Il n'est pas inutile, M. le Président, de vous donner une «contextualisation» plus étroite des considérations qui sont intervenues dans son élaboration.

C'est un fait connu de tous, la décennie quatre-vingt a été, dans le domaine scientifique et technologique, la décennie de ce qu'il est devenu courant d'appeler les technologies de l'information. Au rang des technologies de l'information, M. le Président, on retrouve d'abord l'informatique. Vous savez qu'elle a connu un développement considérable. L'ordinateur, grand ou petit, a envahi littéralement un grand nombre des sphères de l'existence des femmes et des hommes vivant en société. L'informatique n'est pas le seul domaine des technologies de l'information à avoir connu un essor. Il faut mentionner celui des télécommunications. Les télécommunications ont connu, elles aussi, un essor très significatif avec, évidemment, l'avènement de la numérisation dont l'un des effets est de multiplier presque à l'infini les possibilités de transmission.

Un autre volet de ces technologies de l'information qui s'est également considérablement développé au cours des 10 dernières années, c'est celui qui concerne plus spécifiquement le projet de loi que nous avons devant nous, soit celui des banques de données. On a assisté, M. le Président, à leur multiplication dans toutes les sphères, y compris celles relatives à la vie privée. Le développement a été tel qu'on parle aujourd'hui d'une industrie du renseignement. Même si l'expression est sans doute quelque peu expressive, son usage est néanmoins révélateur de l'importance qu'ont prise, dans notre société, les banques de données. Leur développement a soulevé un certain nombre d'inquiétudes chez les citoyennes et les citoyens de notre société. En effet, les individus, les groupes d'individus ont attiré l'attention du gouvernement sur les menaces potentielles à la vie privée que pouvait engendrer ce développement remarquable et inédit des technologies de l'information et, au premier chef, des banques de données depuis une quinzaine d'années.

Conformément à sa philosophie, et comme vous le savez, notre gouvernement met l'accent sur les valeurs fondamentales de notre démocratie et ainsi s'est montré sensible aux représentations des citoyens et des groupes de citoyens sur cette question. La sensibilité de notre gouvernement s'est d'abord manifestée aussitôt après notre arrivée au pouvoir. En effet, je vous rappelle, M. le Président, que dès 1986 le ministère de la Justice et plusieurs autres ministères et organismes ont commandé une étude à des experts en informatique et en droit. Vous vous souvenez sûrement que cette étude intitulée «L'identité piratée» recommandait au gouvernement du Québec, à l'époque, d'intervenir de manière à appliquer au secteur privé les principes et les lignes directrices que l'OCDE, c'est-à-dire l'Organisation de coopération et de développement économiques, a établi en cette matière, il y a quelques années. De façon générale, M. le Président, on peut dire que la valeur des recommandations du comité n'a pas été démentie par les preuves des faits. Sans réserve, le contraire peut même être affirmé, puisque les orientations mises de l'avant dans cette étude ont été, à quelques reprises par la suite, réaffirmées.

Un comité interministériel d'experts dans les matières concernées est arrivé aux mêmes conclusions en reconnaissant le bien-fondé d'une législation gouvernementale en cette matière afin d'amener le secteur privé à appliquer les principes de l'OCDE. En outre, il faut souligner également que cette perspective d'intervention gouvernementale a été réaffirmée par un comité composé de notre Assemblée, c'est-à-dire l'Assemblée nationale. Les travaux de réflexion de nos collègues les avaient conduits, je vous le rappelle, à recommander au gouvernement d'étendre au secteur privé les principes de protection des renseignements personnels consacrés dans la loi actuelle.

Je vous rappelle également, M. le Président, que le rapport de nos collègues a donné lieu à des consultations publiques à la faveur desquelles les intervenants concernés dans le domaine du renseignement privé ont pu se faire entendre. Il s'agit surtout des entreprises oeuvrant dans le domaine des renseignements privés ainsi que des groupes de défense de la vie privée.

Cette consultation publique a permis de faire ressortir deux choses. D'une part, les entreprises avaient une nette préférence pour l'autoréglementation et l'adoption du code de conduite reprenant les principes de l'OCDE. D'autre part, les groupes de défense de la vie privée ont exprimé le désir de voir le gouvernement contraindre les entreprises, par voie législative, à se doter de codes de conduite ou, encore, à un assujettissement du secteur privé à une loi comparable à la loi sur l'accès à l'information.

Dans cette perspective, M. le Président, il allait de soi que le gouvernement se devait de trouver une solution de compromis, une solution acceptable, tant pour les entreprises oeuvrant dans le domaine du renseignement que pour les groupes de défense de la vie privée. Ce compromis, il l'a trouvé en s'inspirant notamment des expériences néerlandaises et finlandaises sur cette question de la protection de la vie privée.

En effet, M. le Président, une recherche effectuée par le ministère des Communications a montré que ces deux petits pays avaient été, à la fin des années quatre-vingt, confrontés à des problèmes analogues à celui auquel nous répondons aujourd'hui par ce projet de loi. Les solutions retenues par ces pays sont des solutions dites de compromis entre les lois à caractère contraignant et l'autorégulation pure. Il s'agit de lois qui ont pour singularité de garantir le respect d'un certain nombre de principes et de consacrer des droits fondamentaux, et d'imposer des obligations minimales à tous. (20 h 30)

Je signale en passant, M. le Président, que l'on qualifie ces lois de lois dites de seconde génération en matière de protection de la vie privée. Pour être plus précis et surtout plus concret, on peut dire du projet de loi 68 que son objet est d'assurer le respect du caractère confidentiel des renseignements personnels détenus par une personne exploitant une entreprise et d'établir des conditions et des modalités de consultation et de rectification de tous les dossiers concernant les renseignements personnels et de protection de la vie privée. En outre, le projet de loi 68 élabore des règles en matière de collecte, de conservation, d'utilisation, de communication et d'accès aux renseignements personnels et prévoit une restriction à l'accès pour les personnes concernées, des recours ainsi qu'un droit d'appel.

Le Québec, M. le Président, avec ce projet de loi, se donne une loi très comparable à celles qui existent dans les pays de l'OCDE en matière de protection de renseignements personnels et de la vie privée. Ce faisant, il rattrape ces pays en ayant une législation comparable et, ainsi, rattrape un retard en cette matière.

De plus, il est utile de souligner que la loi vient compléter les lois et obligations édictées par ce nouveau Code civil en matière de renseignements personnels. M. le Président, je veux souligner le fait qu'avec ce projet de loi notre société se donne, en matière de protection des renseignements personnels et de la vie privée, une loi adaptée aux réalités de la présente décennie. Comme vous le savez, elle va aussi être marquée par un grand essor des technologies de l'information.

Enfin, je tiens à réaffirmer que le projet de loi 68 est en accord complet avec la philosophie de notre formation politique. La vie privée des citoyennes et des citoyens de notre société se trouvera, avec son adoption, renforcée. Les entreprises du secteur du renseignement pourront poursuivre leurs activités tout en se conformant aux règles qu'édicté le projet de loi en cette matière. Enfin, je crois qu'avec ce projet de loi, il n'y a pas de gagnants.

Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Champlain.

Est-ce qu'il y a d'autres intervenants dans ce dossier?

Mise aux voix

Alors, le principe du projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de la culture

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le

Président. Dans les circonstances, je fais motion pour que ledit projet de loi soit déféré à la commission de la culture pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté.

M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je vous demande d'appeler l'article 18 du feuilleton.

Projet de loi 56 Reprise du débat sur l'adoption

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 18, l'Assemblée reprend le débat, ajourné le 11 mars dernier, sur l'adoption du projet de loi 56, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et d'autres dispositions législatives.

Est-ce qu'il y a des intervenants dans ce dossier?

M. Gendron: II n'y a pas d'intervenants de ce côté-ci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a un droit de réplique? Il n'y a pas de droit de réplique.

Est-ce que le projet de loi 56, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme... Il y a un intervenant?

M. Gendron: C'était celui qui arrive, l'intervenant. Alors, je m'excuse.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Montmorency, la parole est à vous.

M. Gendron: Je m'excuse.

M. Jean Filion

M. Filion: Merci, M. le Président.

Je profite de l'occasion qui m'est offerte, à titre de député, pour m'adresser à nouveau à l'Assemblée nationale sur le projet de loi 56, le projet de loi qui, à toutes fins pratiques, apporte la deuxième génération des schémas d'aménagement au Québec.

M. le Président, comme je l'ai fait dans mon intervention en deuxième lecture, je pense qu'il est très intéressant de constater que l'on doive toujours améliorer la qualité de vie des citoyens et citoyennes du Québec. Cependant, M. le Président, il faut non seulement adopter les projets de loi mais aussi faut-il s'assurer en cette Assemblée que les projets de loi sont bel et bien appliqués sur le territoire québécois et qu'ils sont bien adoptés par les MRC à travers le Québec.

M. le Président, de la première génération des schémas d'aménagement, deux schémas d'aménagement ne sont pas encore adoptés au Québec, dont un schéma d'aménagement se situe sur le territoire de la MRC de La Côte-de-Beaupré. Les citoyens et citoyennes, au moment où on se parle, sont toujours piégés, sont pris en otage devant une problématique où intervient la susceptibilité ou encore la confusion de communication entre deux ministères, soit celui de l'Environnement et celui des Affaires municipales.

Vous savez, il y a une problématique très simple qui est celle où on doit délimiter la limite des hautes eaux, ce qui entraîne une problématique à l'adoption du schéma d'aménagement. 212 riverains le long de la côte, au niveau de la côte de Beaupré, n'ont pas encore réussi à convaincre le gouvernement et les deux ministères concernés à procéder le plus rapidement possible à l'adoption du schéma d'aménagement et à la détermination de la limite des hautes eaux.

M. le Président, je profite de cette tribune pour à nouveau sensibiliser l'Assemblée nationale. Oui, c'est excellent, l'adoption du projet de loi 56. Oui, il faut aller plus loin. Oui, il faut amener une nouvelle réglementation pour permettre une meilleure qualité de vie. Mais faut-il encore, M. le Président, être conscient que ces projets de loi ont besoin d'être poussés davantage et d'être sensibilisés davantage au niveau de la mécanique d'application, où les ministères doivent jouer un rôle important. m. le président, les citoyens et les citoyennes de château-richer, de l'ange-gardien, de boischatel, àe sainte-anne-de-beaupré sont des citoyens et des citoyennes qui ne demandent pas mieux que d'avoir un schéma d'aménagement et surtout, m. le président, ne demandent pas mieux que la problématique de la limite des hautes eaux soit enfin fixée et qu'ils puissent savoir à quoi s'en tenir au niveau de l'utilisation de leurs terrains.

Je pense que ce dossier, qui dure maintenant depuis plus de sept ou huit ans, n'a pas encore reçu de dénouement. On s'attend, bientôt, à ce qu'il y ait une étude, j'espère, qui devrait, normalement, faire l'objet du BAPE, où on va pouvoir enfin arriver à entendre les différents intervenants et où on va pouvoir enfin, également, arriver à des conclusions où, j'espère le plus rapidement possible, on saura informer la population de la côte de Beaupré qu'ils pourront enfin adopter leur schéma d'aménagement de la première génération. Là, on est rendus à la deuxième, et la première génération, dans le comté de Montmorency, actuellement, n'a pas encore trouvé son application. . 5379

M. le Président, je crois et je pense que l'Assemblée nationale doit prendre au sérieux ce qui se passe à Château-Richer. Les gens sont exaspérés. Ils n'ont pas encore reçu de réponse positive à un règlement dans le dossier, et, entre-temps, on se retrouve avec une foule de problèmes d'application parce qu'il n'y a pas de schéma d'aménagement, M. le Président. C'est très important, un schéma d'aménagement. C'est ce qui contrôle le développement urbain d'une localité.

Parce qu'il n'y a pas de schéma d'aménagement, on a subi, l'an dernier, des problèmes d'application et de développement urbain. D'ailleurs, ça a fait la manchette. Vous savez, le campement de Wolfe près de la chute Montmorency, M. le Président, a fait l'objet d'un développement domiciliaire parce que les gens de la municipalité de Boischatel n'ont pas la réglementation appropriée pour contrôler d'une façon ordonnée le développement de la municipalité. Alors, la municipalité a permis légalement qu'on puisse faire un développement domiciliaire qui, à toutes fins pratiques, se situait en bordure ou presque sur un terrain historique qui avait une culture et une histoire, que l'on a appelé le campement de Wolfe, M. le Président.

Alors, imaginez-vous, parce que le schéma d'aménagement n'est pas adopté, on a des problèmes incroyables que l'on occasionne à une collectivité. À ce niveau-là, on s'est retrouvés, M. le Président, avec, comme on le sait, des tollés de protestation. Les gens ne comprenaient pas qu'on puisse développer sur un territoire ou sur un site historique. Les gens ne comprenaient pas qu'on puisse accepter des développements domiciliaires. Pourtant, M. le Président, le développement en soi avait ses droits acquis, avait sa pleine légalité réglementaire, convenue par la municipalité. Quand on regarde le fond de l'histoire, on se rend bien compte que, s'il y avait eu vraiment un schéma d'aménagement, c'est-à-dire la première génération des schémas d'aménagement, si, effectivement, il avait été adopté et appliqué sur le territoire de la MRC de La Côte-de-Beaupré, cela aurait facilité et ordonné le développement et probablement évité ce genre de situation de confusion où les gens se retrouvent pris dans une situation où ils ne comprennent pas pourquoi on arrive à accepter de tels développements sur des sites historiques. (20 h 40)

Alors, là, on a vu que des fonds importants ont été dégagés pour faire des expertises, des contre-expertises, pour aller vérifier, effectivement, si le développement domiciliaire se retrouvait sur le site historique ou pas.

Alors, M. le Président, ça occasionne des problèmes incroyables. Quand on sait également que les 211 riverains propriétaires sur la côte de Beaupré ne savent pas quoi faire de leur terrain, jusqu'où ils peuvent aller. Ils déplacent une roche. Ils se retrouvent dans des poursuites judiciaires, ils se retrouvent avec des inspecteurs qui arrivent, qui disent: Écoutez, ne touchez pas à cette roche-là, c'est important. Ils sont confondus entre des lois fédérales aquatiques, des lois provinciales. Ils communiquent avec les ministères. On leur dit: Bien, écoutez, c'est une question d'environnement. L'Environnement dit: Bien, il y a une question également des Affaires municipales.

Alors, tout ça mis ensemble, M. le Président, la population est complètement confuse, et les gens se demandent: Bien, écoutez, quand est-ce qu'on va avoir un dénouement? Où elle se situe, la limite des hautes eaux? Est-ce qu'elle se situe à un niveau, par exemple, qui engloberait le boulevard Sainte-Anne ou elle se situe selon les écarts naturels?

Alors, M. le Président, je sais que le temps s'écoule, mais je voulais profiter des quelques minutes, parce que je voulais à nouveau sensibiliser l'Assemblée nationale à l'importance des schémas d'aménagement, mais aussi à leur application et à leur adoption sur le territoire. Je souhaite qu'il y ait vraiment un dénouement le plus rapide dans le dossier, en ce qui nous concerne ou en ce qui concerne la population de la côte de Beaupré, et que nous aurons très bientôt des audiences publiques qui permettront enfin l'adoption et compléter l'adoption des schémas d'aménagement de la première génération qui nous permettra, par la suite, bien sûr, d'évaluer à sa juste valeur le projet de loi 56 qui, actuellement, fait l'objet de la présente législation et qui, sûrement, aidera et ordonnera un meilleur développement et une plus grande qualité de vie des citoyens et citoyennes du Québec.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Montmorency, de votre intervention. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants?

Mise aux voix

Le projet de loi 56, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 8 du feuilleton.

Projet de loi 75 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article

8, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du principe du projet de loi 75, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant l'abolition de la Société d'aménagement de l'Outaouais.

M. le ministre des Affaires municipales.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, le projet de loi 75 est l'expression d'un large consensus régional dans l'Outaouais. Il complète la liquidation de la Société d'aménagement de l'Outaouais en proposant l'abrogation, dans la loi de la Communauté urbaine de l'Outaouais, des quelque 60 ou 75 articles qui traitaient de la Société d'aménagement de l'Outaouais. Et, en retour, le projet de loi invite l'Assemblée nationale à conférer à la Communauté urbaine de l'Outaouais des pouvoirs nécessaires pour être en mesure de prendre charge la promotion du développement économique sur son territoire et même le pouvoir de créer, s'il le juge opportun, un organisme distinct à cette fin.

Pour comprendre de quoi nous traitons, je dirai un bref mot de la région de l'Outaouais, dont traiteront tantôt avec beaucoup plus de compétence, évidemment, nos collègues qui viennent de cette région et qui parleront en son nom. Je parlerai ensuite de la Société d'aménagement de l'Outaouais et, finalement, de la solution qu'apporte le projet de loi à des problèmes qui préoccupaient le gouvernement depuis déjà cinq ou six ans.

La Société d'aménagement de l'Outaouais fut créée en 1969. Elle commençait de fonctionner en janvier 1970. Elle fut créée dans une époque qui nourrissait des inquiétudes quant aux ambitions territoriales de la Commission de la capitale nationale et du gouvernement fédéral sur la partie du territoire québécois qui est située dans le voisinage immédiat de la région de la capitale nationale.

La Société d'aménagement de l'Outaouais s'était vu confier un mandat d'aménagement du territoire de manière que le Québec puisse prendre les devants dans bien des secteurs au lieu d'être toujours à la remorque du gouvernement fédéral. Pendant cette période, pendant, par conséquent, 23 ans, la Société a fait beaucoup de choses. Elle a créé cinq centres touristiques dans le secteur rural du territoire qu'elle avait à desservir, qui était tout l'Outaouais. Elle a créé trois parcs récréatifs urbains dans les municipalités d'Aylmer, de Gatineau et de Hull. Elle avait créé des parcs industriels, deux parcs industriels. Elle a créé, à Gatineau et à Aylmer, un aéroport - à Gatineau - un parc technologique à Hull. Tous ses biens, au cours des dernières années, ont été cédés aux municipalités concernées pour la somme de 1 $ chacun. Ça veut dire que la ville de Gatineau, aujourd'hui, peut s'enorgueillir d'un parc industriel et aussi d'un aéroport, qui est devenu sa propriété, alors qu'elle n'a payé que la somme de 1 $ pour en faire l'acquisition. Pour toutes ces initiatives de la Société d'aménagement de l'Outaouais, le gouvernement du Québec a investi des sommes considérables. Nous estimons que, depuis 1970, les sommes investies par le gouvernement dans la Société d'aménagement de l'Outaouais dépassent les 110 000 000 $, autant en budgets de fonctionnement qu'en budgets d'investissement.

Mais on remarquait, depuis quelques années, un certain ralentissement dans les activités de la SAO, comme on l'appelle en Outaouais. Cette société est un organisme créé par le gouvernement, et qui était contrôlée par le gouvernement aussi. Tous les membres du conseil d'administration de la SAO étaient nommés par le gouvernement, tout comme son président et son directeur général. Cette structure était contraire à la philosophie du gouvernement, qui veut que le développement régional soit pris en charge non pas de manière paternaliste et aristocratique à partir de Québec, mais par les agents eux-mêmes du milieu, agissant sous leur responsabilité. Tout le monde était convenu, tout le monde, ces dernières années, qu'il fallait trouver une autre façon de promouvoir et de coordonner le développement économique et social dans la région de l'Outaouais.

Or, les solutions que le gouvernement a mises sur pied à cette fin sont doubles. D'un côté, on appliquera dans la région de l'Outaouais, comme dans les autres du Québec, le plan de structure mis au point par le ministre responsable du développement régional, c'est-à-dire que, pour la région de l'Outaouais, on créera prochainement, si ce n'est déjà fait, une sorte de conférence régionale du développement, qui regroupera tous les maires de la région, urbains et ruraux, composant à peu près la moitié de l'ensemble du nouvel organisme, et l'autre moitié devant être formée de représentants du milieu. Cette structure existera en Outaouais comme ailleurs et se verra attribuer, par le Secrétariat au développement régional, un budget de l'ordre de 3 000 000 $ par année, pour assurer son activité, et susciter la mise au point de projets ou d'initiatives à caractère économique dans la région de l'Outaouais.

Mais il ne suffit pas que l'on ait cette structure embrassant toute la région. Les milieux urbains de la région, représentés par les villes de Hull, Gatineau, Aylmer, Masson, Angers et Buckingham nous ont fait valoir qu'il y a des problèmes propres aux milieux urbains dans cette région, et ils nous ont souligné avec beaucoup d'insistance qu'ils avaient besoin également d'un organisme capable de prendre en charge des initiatives en matière de développement économique, dans la partie urbaine du territoire, et de là émane le projet de loi que nous avons à l'étude, là, ce soir. (20 h 50)

Ce projet de loi vise à donner à la Communauté urbaine de l'Outaouais la compétence nécessaire pour faire les choses suivantes. Déjà, la communauté urbaine a le pouvoir d'assurer la facturation et l'envoi des comptes de taxes. Elle a des pouvoirs en matière d'assainissement des eaux et d'alimentation en eau potable, en matière d'élimination, de récupération et de recyclage des déchets, en matière de schéma d'aménagement, évidemment, en matière de travaux d'aménagement reliés aux lacs et cours d'eau de la région. Elle a tous ces pouvoirs-là déjà, mais, avec le projet de loi, nous lui ajouterions les pouvoirs suivants. D'abord, le pouvoir de susciter sur son territoire l'implantation d'entreprises et la venue de capitaux, et de favoriser la réalisation de projets ayant un impact économique significatif; deuxièmement, le pouvoir de promouvoir sur les marchés extérieurs les biens et les services produits sur son territoire - activités de promotion d'exportation à l'extérieur du territoire; troisièmement, le pouvoir d'établir des liens avec les organismes qui oeuvrent au développement économique de son territoire; et, finalement, le pouvoir de mettre sur pied des groupes de concertation sectoriels en vue d'établir les priorités d'intervention. Alors, voilà les pouvoirs généraux qui seraient conférés à la Communauté urbaine de l'Outaouais avec le projet de loi 75, si l'Assemblée nationale décide de l'adopter.

Et, en second lieu, la Communauté urbaine de l'Outaouais sera également habilitée à créer un organisme de promotion économique pour lui déléguer, aux conditions qu'elle déterminera, l'exercice de tout ou partie des compétences économiques dont je viens de parler. Alors, les compétences économiques sont là: promotion du développement de la région au point de vue économique et, deuxièmement, le pouvoir de créer un organisme qui pourra prendre ces fonctions en charge. Et, si nous insistons sur ceci, c'est parce que nous répondons ainsi à un voeu exprimé par tous les intervenants responsables et représentatifs du milieu.

On se souviendra que, l'an dernier, le gouvernement avait créé un groupe de travail spécial sous la présidence de l'ancien maire de Hull, qui est aujourd'hui président de la Commission de la capitale nationale, M. Marcel Beaudry, et ce groupe s'était vu confier le mandat d'examiner l'avenir de la région de l'Outaouais, autant dans la perspective de renouvellement du fédéralisme que dans la perspective d'autres options constitutionnelles. Et la recommandation principale que le groupe Beaudry a retenue est la suivante: II faudrait créer, pour la région de l'Outaouais, une société de diversification économique.

On constate, en effet, que cette région, qui est la troisième en importance au point de vue urbain de tout le Québec, tout de suite après Montréal et Québec, a connu un développement considérable au plan urbain, mais son économie ne s'est pas développée d'une manière suffisam- ment diversifiée. Vous savez comme moi, M. le Président, que la présence du gouvernement fédéral dans le territoire de Hull, Gatineau, Aylmer est considérable. Saviez-vous, M. le Président, que 15 % du territoire de la Communauté urbaine de l'Outaouais est la propriété du gouvernement fédéral? Saviez-vous que 30 % du territoire de la ville de Hull est la propriété du gouvernement fédéral? Au cours des dernières années, appliquant en cela une politique qui remonte à une vingtaine d'années, le gouvernement fédéral a transposé, transplanté dans la région de l'Outaouais québécois des milliers d'emplois qui, autrefois, étaient de l'autre côté de la rivière des Outaouais. Nous en étions très heureux. Ces emplois et toutes les installations qui les accompagnent ont été accueillis avec satisfaction par la plupart des intervenants économiques, politiques et sociaux de la région. Mais, en tout, il en est résulté une économie qui dépend peut-être un petit peu trop du secteur public.

Et, pendant ce temps-là, le secteur du commerce, le secteur de l'industrie et le secteur des activités tertiaires privé ne se sont pas développés avec suffisamment de vigueur. Et l'on constate en particulier de grandes disparités dans le développement économique des milieux ruraux de l'Outaouais et dans le développement économique des milieux urbains. Les milieux urbains bénéficient beaucoup de la présence des installations fédérales, tandis que les milieux ruraux n'ont pas ce genre d'activité à leur service, ce qui fait que si la région dans son ensemble a un taux de chômage qui est inférieur à celui du Québec, si vous isolez les quatre MRC, la MRC des Collines-de-l'Outaouais, la MRC de Pontiac, la MRC de La Vallée-de-la-Gatineau et la MRC de Papineau, évidemment, là, vous constatez que le niveau de vie et le taux de chômage présentent un tableau qui est loin d'être rose. Il faut absolument faire quelque chose.

C'est évident que du développement économique des milieux urbains qui sont au coeur de cette région découleront toutes sortes de chances pour les travailleurs qui vivent à la périphérie des milieux urbains. Alors, le but de notre projet de loi, c'est de donner suite à la principale recommandation du rapport Beaudry, de permettre à la Communauté urbaine de l'Outaouais d'exercer, en matière de promotion économique de la région, des fonctions que seule, de l'avis de tous les observateurs, elle est en mesure d'assumer aujourd'hui.

Or, voilà, M. le Président, en quelques mots l'essentiel du projet que nous vous soumettons aujourd'hui. Je voudrais résumer brièvement le cheminement qu'a suivi le gouvernement pour en venir là. En décembre dernier, pour commencer, le 16 décembre, le gouvernement décidait que la Société d'aménagement de l'Outaouais cesserait l'essentiel de ses opérations le 31 décembre 1992 et qu'elle cesserait définitivement d'exister le 30 juin 1993. Il décidait dès lors que le conseil

d'administration de la SAO serait réorganisé de manière à préparer la transition vers le passage à la responsabilité des municipalités urbaines par le truchement de la CUO. C'est ainsi qu'on nommait des maires pour faire partie du conseil d'administration à la place des anciens administrateurs, pour faciliter le passage vers le régime nouveau dont il est question dans le projet de loi 75.

En plus, on confiait au ministre des Affaires municipales le soin de présenter au Conseil des ministres un projet de loi permettant à la Communauté urbaine de l'Outaouais de se constituer en successeur de la Société d'aménagement de l'Outaouais et d'exercer les fonctions qui découlent de ceci. En même temps, le gouvernement souscrivait au principe de la création d'un organisme de promotion et de développement économique ayant pour objet de favoriser l'essor économique de la région de l'Outaouais, de faire la promotion économique de la région et d'oeuvrer à la diversification. Le mot clé ici est peut-être le mot «diversification», d'oeuvrer à la diversification économique de la région.

Or, voilà, M. le Président, ça, c'était le 16 décembre. Comme nous sommes un gouvernement qui aime agir, nous sommes à la mi-mars et, déjà, le projet de loi a franchi toutes les étapes des comités ministériels qui sont souvent laborieuses. Dans ce cas-ci, les choses ont été raisonnablement bien, et nous sommes en mesure de présenter dès maintenant ce projet de loi de manière à permettre à la Communauté urbaine de l'Outaouais, avant l'échéance de juin 1993 qui doit marquer la fin complète des activités de la SAO, d'assumer la relève et de faire en sorte que l'activité de promotion puisse continuer sous l'égide d'un organisme à base régionale et non plus d'un organisme dirigé ou téléguidé à partir de Québec.

Le gouvernement, en même temps qu'il a pris sa décision, avait été invité évidemment à fournir une contribution financière à un nouvel organisme qui serait éventuellement créé. Le gouvernement a pris la décision suivante. Il restait, à la SAO, des actifs d'une valeur qui peut aller de 3 000 000 $ à 4 000 000 $. Les principaux actifs de cet ensemble sont des terrains qui peuvent se prêter à des développements formidables au cours des années à venir. Il est difficile d'en apprécier la valeur exacte, parce que, vous le savez comme moi, M. le Président, aussi longtemps que vous n'allez pas sur le marché en ces choses, vos évaluations risquent d'être théoriques, mais selon tous les avis que nous avons reçus, les valeurs des actifs de la Société d'aménagement de l'Outaouais seraient entre 3 000 000 $ et 4 000 000 $, et le gouvernement transfère tout ceci à la Communauté urbaine de l'Outaouais, de manière qu'elle puisse, avec cette aide, avoir un commencement de capitalisation qui pourra lui permettre d'assumer ses responsabilités.

J'ai dit l'essentiel, je pense bien. Je voudrais seulement terminer en remerciant tout d'abord toutes les personnes qui ont oeuvré au service de la Société d'aménagement de l'Outaouais depuis maintenant 23 ans. Je voudrais souligner de manière spéciale - je pense que les députés de l'Outaouais me seconderont à cet égard - le travail magnifique, désintéressé et hautement empreint d'esprit civique qu'a accompli M. Jean-Marie Séguin, le président-directeur général de la Société.

Une voix: Bravo!

M. Ryan: Je connaissais M. Séguin depuis longtemps et je ne l'avais pas vu à l'oeuvre de près depuis de nombreuses années. J'ai eu le plaisir puis, en même temps, le défi, parce que ce n'était pas facile, de discuter avec lui de la transition que nous envisageons. Je peux vous dire que nous avons reçu de M. Séguin une collaboration empreinte d'un désintéressement et d'un souci du bien public exemplaires. (21 heures)

Je remercie également toutes les personnes qui ont siégé au conseil de la Société d'aménagement de l'Outaouais et/ou qui ont travaillé à son service en qualité d'employés permanents ou occasionnels.

Je remercie également les maires des cinq villes qui forment la Communauté urbaine de l'Outaouais: le maire de Hull, le maire de Gati-neau, le maire de Masson-Angers, la mairesse d'Aylmer et le maire de Buckingham, tous de bons amis avec qui nous avons d'excellents rapports. Ce n'est pas la même chose du côté de l'Opposition. Je pense qu'ils en viendront à une meilleure compréhension des choses quand ils seront au courant de tout.

Alors, je les salue particulièrement et je pense que, si ce n'avait été de leur disposition à prendre des responsabilités qui vont au-delà des responsabilités que s'attribuent généralement... ou que le législateur attribue ordinairement à des administrateurs municipaux, nous n'aurions pas ce dénouement et nous serions pris dans une impasse très difficile. Alors, je les salue particulièrement. Je les assure de la collaboration active du gouvernement et de la grande ouverture avec laquelle nous recevrons toujours les représentations qu'ils voudront nous adresser.

En matière de financement de l'organisme, j'ajoute un autre point. Il a été prévu, par des aménagements internes aux nouveaux organismes de coordination qui existeront dans la région de l'Outaouais, qu'une part des budgets pourrait être réservée pour le nouvel organisme que créera la Communauté urbaine de l'Outaouais, par le jeu combiné du transfert d'actifs que nous avons fait et de ce mécanisme qui permettra au nouvel organisme de bénéficier d'une partie des budgets de développement prévus pour la région et en

ajoutant, évidemment, la contribution que voudront apporter les municipalités concernées. Il y aura tout ce qu'il faut pour assurer le fonctionnement de base de l'organisme en misant, premièrement, sur le sens de la responsabilité de la Communauté urbaine de l'Outaouais et des municipalités qui la constituent.

Je ne veux pas terminer ces observations sans remercier également les cinq députés de la région de l'Outaouais. Au premier chef, cela va de soi, mon collègue, le ministre délégué aux Transports, député de Pontiac, qui a suivi ce dossier avec beaucoup de continuité, l'a défendu avec force au Conseil des ministres et a toujours manifesté un empressement exemplaire à répondre à toutes les interpellations que je lui adressais à ce sujet.

Je vois également les députés de Hull et Papineau dans cette salle. Je veux les remercier particulièrement parce que nous avons été en consultation constante à ce sujet et, si ce n'avait été de leur collaboration, je ne pense pas que nous en serions venus à une solution consensuelle du type de celle que nous avons.

Il y a deux députés qui ne sont pas dans cette Chambre, actuellement: le député de Ga-tineau et le député de Chapleau. Ils ont participé également à nos travaux. Je pense que nous pouvons les associer sans aucune restriction à cet effort vraiment collectif, vraiment solidaire que nous avons fait ensemble.

Je termine en adressant à la Communauté urbaine de l'Outaouais mes salutations cordiales et mes voeux de succès dans toutes les entreprises qu'elle voudra instituer en vue d'exercer les nouveaux pouvoirs que l'Assemblée nationale lui conférera très probablement en vertu du projet de loi 75.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre des Affaires municipales.

Nous en sommes à l'adoption du principe du projet de loi 75, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant l'abolition de la Société d'aménagement de l'Outaouais. Je cède la parole à M. le leader adjoint de l'Opposition officielle, député d'Abitibi-Ouest et porte-parole en cette matière pour l'Opposition officielle. M. le député, la parole est à vous.

M. François Gendron

M. Gendron: Merci, M. le Président. J'estime qu'il s'agit d'une étape importante par ce projet de loi là puisque, comme le titre l'indique d'une façon très claire, le projet de loi 75 abolit l'existence, à compter du 1er juillet prochain, de la Société d'aménagement de l'Outaouais, bien connue dans le milieu et dans tout le Québec sous l'appellation de la SAO.

Ce faisant, suite à l'abolition, les compétences autrefois dévolues à la Société d'aménage- ment seront transférées à la Communauté urbaine de l'Outaouais, la nouvelle CUO, qui possédera ainsi les pouvoirs de faire la promotion économique de son territoire pour y favoriser l'essor et la diversification de l'économie. J'y reviendrai tantôt parce que c'est un objectif que nous partageons. Nous trouvons tout à fait logique et légitime que la nouvelle instance qui continuera à exister dans l'Outaouais puisse se préoccuper d'une responsabilité aussi significative que celle-là, compte tenu, justement, de ce que le ministre a très bien exposé, le caractère tout à fait particulier et spécifique de la région de l'Outaouais.

Ce n'est pas parce qu'on a moins d'amis et que je suis obligé de composer avec la petite remarque partisane du ministre des Affaires municipales, parce que ça n'aurait pas été lui, qu'on ne connaît pas l'Outaouais. Je veux dire, j'ai eu l'occasion, comme ministre de l'Aménagement et du Développement régional, à maintes reprises, probablement avant la plupart de ces gens-là, ici, en Chambre, sauf le député de Chapleau, de saluer et de rencontrer ces gens-là. Je pense à ma collègue, Mme Marois, qui, pendant des années, a eu l'occasion également de travailler avec cette population. Tout ce que je veux dire, c'est qu'on est en mesure, nous aussi, de reconnaître le caractère spécifique et particulier de cette région.

Donc, je disais, M. le Président, que le projet de loi va faire de la nouvelle Communauté urbaine de l'Outaouais l'instance qui aura comme mandat de faire la promotion économique de son territoire, de favoriser l'essor de cette région-là et surtout de travailler à sa diversification, qui est l'objet le plus fondamental. Elle pourra également, la nouvelle structure, être véritablement un agent de développement économique soit en suscitant l'implication des entreprises sur place, soit en essayant d'apporter des capitaux ou en essayant de développer à l'étranger les avantages de son territoire puisque, effectivement, le territoire de l'Outaouais présente plusieurs avantages, compte tenu de sa proximité avec un autre palier de gouvernement.

Cette même Communauté urbaine de l'Outaouais pourra également confier à un organisme de promotion économique les pouvoirs précédemment mentionnés. Elle agira alors par l'entremise d'un pouvoir de délégation. Et je pense que c'est correct que le projet de loi permette que cette nouvelle Communauté urbaine puisse procéder par voie de délégation sur des mandats spécifiques où elle croira que certains autres organismes du milieu sont plus habilités qu'elle-même à développer certains créneaux, de temps en temps industriels, de temps en temps touristiques et de temps en temps de tout autre nature, mais il ne nous appartient pas de décider à sa place quels seront les mandats qui pourront être confiés par voie de délégation.

Le reste du projet de loi, puis après qu'on

a dit ce que je viens de vous dire, M. le Président, c'est des modalités administratives normales, puisqu'on abolit, on met fin à une structure qui existait. Donc, dans des cas comme ça, il faut toujours prévoir des modalités de transition. Il faut prévoir également des exemptions concernant les droits sur les mutations immobilières des immeubles appartenant à l'ancienne Société d'aménagement de l'Outaouais, qui, bien sûr, seront transférés à la nouvelle.

Mais ce serait trop simple s'il n'y avait que ça. Je pense qu'on ne peut pas mettre fin à une instance qui a marqué le développement du milieu dans les bonnes années, parce qu'il y a déjà eu des bonnes années. Il y a déjà eu un gouvernement responsable, au Québec, qui avait le goût de bouger et de poser des gestes et des actions concrètes, ce qui a fait que, à un moment donné...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: Ah oui, vous pouvez bien rire, mais, si on regardait le budget que vous lui avez laissé, à la SAO, je comprends que vous n'ayez pas le choix de la faire disparaître. Qu'est-ce que vous voulez qu'elle fasse? Vous l'avez saignée complètement.

Une voix: On va en parler tantôt.

M. Gendron: Vous en parlerez. On va vous laisser pérorer là-dessus, il n'y a pas de problème. Mais ce que je veux indiquer, c'est que c'est évident que, à partir du moment où on n'avait plus confiance à cette structure, puis qu'on l'ait eu saignée complètement de toute disposition budgétaire agissante, bien, qu'est-ce que vous voulez, il ne restait pas 50 alternatives. On ne peut pas passer notre temps à dire: Voilà une nouvelle structure, une structure importante dans l'Outaouais, mais arrangez-vous, vous n'avez aucune aide financière. La SAO a déjà eu des budgets à gérer. Elle l'a fait convenablement, puis elle s'est acquittée des mandats qu'elle avait. (21 h 10)

Alors, je veux juste faire un rappel historique parce que je trouve que la SAO a eu sa raison d'être. Mais je trouve également aujourd'hui, je vous l'ai dit d'entrée de jeu, que la nouvelle structure que vous proposez est intéressante et on est favorables, complètement favorables à la nouvelle structure qui est proposée. Mais je disais que, en 1958, la Commission de la capitale nationale, qui couvrait, à l'époque, 1800 milles carrés de territoire des deux côtés de la rivière des Outaouais, en menait pas mal large. Cette commission avait tous les pouvoirs. C'est facile, aujourd'hui, de dire combien... Je comprends, quand on défend tout le régime, peu importent les gestes qu'il pose... J'écoutais le ministre des Affaires municipales dire combien ça avait été magnifique d'avoir la CCN, parce que la Commission de la capitale nationale a fait des choses extraordinaires. C'est vrai, il n'y a pas de cachette. C'est vrai, mais je trouve que c'est un côté de la médaille.

Lorsqu'on arrive avec ses gros sabots sur un territoire qui n'est pas le nôtre et qu'on ne s'occupe pas du tout du milieu qui l'habitait et qui l'occupait, ce n'est pas une façon toujours légitime d'entrevoir du développement endogène quand on n'a pas beaucoup de notions quant à du développement durable. Et ce n'est pas pour rien que le ministre le confirme aujourd'hui. Il dit: Oui, il y a un petit problème. C'est bon au niveau des emplois, mais ça ne fait pas beaucoup de diversification. C'est passablement monolithique. Bien, il n'a pas tort. Si c'est monolithique, c'est qu'il y a eu des choses qui ne se sont pas faites nécessairement comme ça aurait dû être fait.

On ne peut pas, je pense, abolir la SAO sans faire un rappel historique. À la suite de la création de la Commission de la capitale nationale, le gouvernement du Québec... C'est leur gouvernement, en passant, et je trouve qu'il a bien fait, en 1966, de créer une commission présidée par M. Henri Dorion, qui avait pour mandat d'étudier les problèmes réels reliés au caractère frontalier et spécifique de la région de l'Outaouais québécois et aux nombreuses interventions de la Commission de la capitale nationale. Où, M. le Président? En territoire québécois. Évidemment, ce n'est pas le ministre des Affaires municipales qui va dire ça, parce qu'il dit: C'est mon cercle d'amis, et on est bien «chums» avec eux autres. J'y reviendrai tantôt. Ça, je le sais, c'est évident. La toile est bien tissée. Mais la Commission de la capitale nationale venait faire des interventions en territoire québécois. C'est facile de dire que ces gens-là ont contribué au développement. C'est vrai, je ne le nie pas. On les félicite, M. le Président. J'ai dit que c'était un côté de la médaille. Il y a l'autre.

Ce n'est pas de même, je pense... On ne peut pas toujours arriver en territoire autre que le nôtre et ne pas tenir compte des gens qui l'occupent. Dans ce sens-là, les gens de l'Outaouais avaient un certain nombre de reproches à faire à la Commission de la capitale nationale, y compris à leur gouvernement, parce que, si le gouvernement libéral n'avait eu aucun reproche à faire à la CCN, ce n'est pas vrai qu'on aurait créé une SAO. Ce n'est pas vrai. Je ne suis pas venu au monde hier. Quand on a créé la Société d'aménagement de l'Outaouais, c'est parce qu'on voulait que le gouvernement du Québec puisse se préoccuper lui aussi du développement d'une de ses régions qu'il avait complètement oubliée. Parce que, à ce que je sache, quand on regarde la carte, l'Outaouais, ça fait partie du Québec. L'Outaouais québécois, en ce qui nous concerne, nous, c'est dans le Québec, c'est dans l'État

québécois. Et, dans ce sens-là, il y avait lieu de faire contrepoids aux interventions multiples, répétées et pas toujours dans le sens d'un développement respectueux, durable, endogène au niveau du territoire québécois.

Alors, moi, je dis merci pour ce que vous avez fait, mais je dis merci également à ceux qui ont eu la sagesse, à l'époque, de dire: II est important d'avoir une structure québécoise qui va s'occuper que le Québec tienne davantage compte de cette réalité du territoire. C'était ça, la responsabilité de la SAO.

Une voix:...

M. Gendron: Oui, oui, c'est ce que je vous dis. C'est ce que je dis, que c'était vous autres. Je sais qu'ils ne connaissent pas ça. Je suis obligé de leur faire de l'histoire, à ces jeunots-là. C'était ça que j'étais en train d'expliquer. En 1968, le Parti québécois n'en menait pas large. Alors, c'est évident que c'est vous autres. C'est ça que je dis, pour ceux qui suivent le débat. Et, ça, c'est nouveau que ces gens-là suivent le débat.

Alors, en 1968, la commission Dorion remet son rapport qui constate - écoutez ça - l'état de sous-développement de l'Outaouais; pas de surdéveloppement, de sous-développement chronique. J'aurais aimé ça que le ministre des Affaires municipales en parle un peu. Ça aurait montré un peu la nuance, l'équilibre. On ne peut pas toujours arriver avec le grand balai, parce que c'est nos amis et que ces gens-là contrôlent cette région-là aujourd'hui. Il dit: Non, non, tout est beau, tout est bien, et ça a toujours bien marché parce que c'est la CCN, nos amis d'en face, Ottawa, le fédéral. Nous, on sait que le fédéral a fait des interventions utiles, mais il en a fait qui ont nui drôlement au développement de l'Outaouais pendant des années. Et ça prend une visière vraiment baissée et presque fermée pour ne pas en convenir. M. Dorion avait vu ça, et M. Dorion, quand il a remis son rapport, a critiqué avec raison les nombreux empiétements du gouvernement fédéral sur l'intégrité du territoire québécois. Mais comment voulez-vous que ça sonne quelque chose aux oreilles de ces gens-là aujourd'hui? L'intégrité du territoire québécois, eux autres, ça ne les dérange pas. Bien, ça dérangeait, les gens qui vivaient sur le territoire, par exemple. Ça les dérangeait, puis le gouvernement libéral, à l'époque, a eu cette sagesse-là de dire...

Une voix:...

M. Gendron: En 1968, vous avez raison. Vous avez raison, c'est le gouvernement de l'Union Nationale. Il a raison. Il a raison sur le plan historique. Quand il a raison, il a raison.

Une voix: Daniel Johnson.

M. Gendron: Voilà! Alors, en 1968, on a créé la SAO, parce qu'on trouvait que le gouvernement du Québec ne s'acquittait pas assez de sa responsabilité, un, pour contrer les empiétements du fédéral, puis, deux, pour avoir un développement qui permettrait à la région de l'Outaouais de faire partie davantage du Québec. En 1969, une conférence constitutionnelle fédérale-provinciale confirme l'intégration de la région de Hull à la Commission de la capitale nationale et le caractère bilingue et biculturel de tout le territoire.

La même année, pour faire suite au rapport Dorion et pour contrebalancer les positions entérinées à la conférence constitutionnelle, le gouvernement du Québec crée trois organismes spécifiques et propres à l'Outaouais: d'abord, la Communauté régionale de l'Outaouais, la CRO, qui comprenait les municipalités québécoises incluses dans le territoire de la Commission de la capitale nationale; ensuite la SAO, la Société d'aménagement de l'Outaouais, qui a pour mandat de favoriser le développement d'infrastructures industrielles, commerciales et touristiques ainsi que de promouvoir le développement économique; enfin, troisième organisme, la Commission de transport en commun de l'Outaouais est aussi créée afin d'assurer le transport en commun des citoyens résidant dans la CRO.

De 1969 à 1983, la Société d'aménagement de l'Outaouais accomplit son mandat avec diligence. Des parcs industriels sont créés, une promotion touristique sans précédent est faite et la Société réussit, par ses actions convergentes, à attirer plusieurs entreprises qui, effectivement, ont contribué à un certain essor dans l'Outaouais. Et, enfin, le gouvernement du Québec avait un certain rayonnement.

Et je m'en rappelle, pour y avoir été à cette époque-là. Cette époque-là, je la connais pas mal plus, de 1979 à 1985, parce que j'étais au Conseil des ministres. Les gens de l'Outaouais étaient fiers de parler de la SAO et des interventions de la SAO, parce que, pour eux autres, la SAO, c'était le Québec. C'était le pendant à la Commission de la capitale nationale. Et c'était important d'avoir un pendant parce que, si on recule avant l'arrivée de la SAO, tous les gens ne voyaient que le drapeau canadien. Puis c'est un peu normal, compte tenu des propriétés territoriales.

Le ministre des Affaires municipales d'aujourd'hui l'a dit lui-même. Quand on pense que 35 % de la région de Hull est occupée, est propriété de territoires fédéraux, au Québec, chez nous... Oui, mais c'est nos taxes. C'est facile. Je vois le ministre de la région... C'est toujours facile de faire accroire que ces gens-là sont tellement gentils et généreux pour nous. Je comprends! Il y a un déficit de 465 000 000 000 $. Moi, je ne trouve pas qu'il y a une générosité abusive parce que, quand je regarde mon talon de paye ou de chèque et que je constate que mes

impôts continuent à être de plus en plus importants en termes de déductions à Ottawa puis que je sais, par exemple, que vous recevez des lettres où les transferts fédéraux sont en chute libre, il ne faut pas être bien, bien bon comptable, contrairement à ce que vous avez essayé d'affirmer, pour comprendre que ça ne nous mène pas loin, ça, une situation comme ça. Puis c'est ça, la réalité. Juste cette année, vous avez quelque 2 000 000 000 $ de moins en transferts fédéraux. Puis on me fait signe, encore, de la piastre, comme si c'était juste ça qui comptait. Alors, la Commission de la capitale nationale, bien sûr qu'elle a contribué à du développement, mais la SAO a fait sa job; la SAO a très bien travaillé; la SAO a permis une présence québécoise forte, intéressante et nécessaire.

En 1983, le gouvernement du Parti québécois sent le besoin de revoir la vocation de la Société d'aménagement de l'Outaouais ainsi que la pertinence de son existence. Je répète: la pertinence de son existence. Donc, nous aussi, on était réalistes par rapport à ce qu'elle avait fait. La SAO avait un mandat. Elle s'en est acquittée, mais c'était légitime d'envisager qu'une instance qui s'était acquittée de son mandat puis de ses responsabilités puisse, à un moment donné, changer de vocation, surtout avec l'arrivée des MRC, surtout avec l'arrivée de la structure de concertation régionale, que ce soit le CRD de l'Outaouais, qui est une instance qui a essayé de faire de la concertation sur une échelle importante avant - ce dont on parlera dans quelques minutes - la réforme Picotte... (21 h 20)

Donc, à partir de l'époque 1983-1984, il est évident que la problématique frontalière particulière à l'Outaouais n'est pas nécessairement la même. C'est toujours réel que c'est frontalier dans cette région-là, mais, compte tenu du développement, de l'essor, de la promotion touristique, de l'acquisition de biens et services, le portrait avait changé. À partir de cette époque, le mandat de la Société d'aménagement de l'Outaouais devient de plus en plus flou. Il n'y a pas de jugement envers les personnes et H n'y a pas de trouble avec les personnes - j'y reviendrai tantôt. Et là, à partir de l'époque, le gouvernement du Québec a commencé à réduire son aide financière et la Société d'aménagement de l'Outaouais s'est départie d'un certain nombre de ses actifs - aéroport de Gatineau, parc industriel, centre d'information touristique - parce que la SAO, elle gérait pas mal d'affaires, à un moment donné.

De 1987 à 1992, c'est la dégringolade budgétaire. Je répète, de 1987 à 1992. Là, il n'y a pas de confusion chez personne, on le sait, qui est au pouvoir, de 1987 à 1992. C'est la dégringolade budgétaire. Alors, le ministre, tantôt, disait: Regardez si on est beaux, on est fins, puis on est rapides, et on s'est concertés en 1993. Depuis 1987 qu'ils ne donnent plus de vi- vres à la SAO. Donc, s'ils avaient été si responsables que ça, il aurait fallu s'attendre, en 1987, 1988 au maximum, à une nouvelle structure, puisqu'elle arrive en 1993. Je comprends, vous l'avez saignée complètement, la SAO - aucune possibilité d'exercer quelque mandat que ce soit - et sept, huit ans plus tard, ils se pensent fins, beaux, tout à fait corrects, en disant: Voici, nous agissons. Mais c'est important de faire cet historique-là. De 1987 à 1992, c'est la dégringolade budgétaire, puisque les subventions gouvernementales passent de 6 000 000 $, M. le Président, 6 000 000 $, pas 8 000 000 $, pas 15 000 000 $, pas 1 000 000 $, 6 000 000 $, à combien? 500 000 $! 6 000 000 $ à 500 000 $!

Les intentions du gouvernement sont limpides, elles sont claires. Vous avez fait votre temps, il faut changer cette structure-là. Puis, c'est évident qu'on voulait mettre la clé dans la porte, mais, de temps en temps, on manque de courage. Ça a pris du temps pour qu'il ait le courage de poser le geste. Donc, pendant six, sept ans, il aime mieux saigner, et, quand ils n'ont à peu près plus d'argent et plus d'aide financière, là, on arrive avec le projet de loi et on dit: Regardez si on est beaux, puis on est fins. Nous, on comprend la réalité, et on l'adapte au territoire. Ce n'est pas aussi simple que ça, M. le Président.

Parallèlement, dans la foulée de la commission Bélanger-Campeau sur l'avenir constitutionnel du Québec, le gouvernement créait, en juillet 1991, le Comité Outaouais. Ce comité, présidé par M. Marcel Beaudry, avait pour mandat d'étudier les impacts, sur l'Outaouais, d'un éventuel changement au statut constitutionnel du Québec. Puis, ça, je trouve que c'était légitime de faire ça, c'était correct. Le comité Beaudry compléta ses travaux en avril 1992, avec une multitude de recommandations, dont certaines avaient trait à l'avenir de ce qu'on discute ce soir, à savoir la SAO. L'un des principaux constats, M. le Président, du comité Beaudry est à l'effet que la région de l'Outaouais a un urgent besoin de diversifier son économie, qui était - et est toujours trop - essentiellement axée sur la fonction publique fédérale.

Ah bon! Là, la vertu extraordinaire du grand frère n'a pas tous les mérites. Ça aurait peut-être été intéressant d'en parler, c'est ce qu'on dit. La vertu du grand frère fédéral n'a pas tous les mérites, parce que ça a créé la situation qu'on est obligé de gérer aujourd'hui. L'Outaouais est probablement une des régions où l'économie est la moins diversifiée. La structure secondaire n'est pas tellement forte. La structure primaire, ça peut être comparable. La structure tertiaire est très forte, les services. Je comprends, c'est une ville de services avec les nombreux emplois fédéraux. Mais cette réalité-là n'est pas une réalité de 1993. C'est une réalité depuis le début. La SAO compense cette réalité tant qu'elle a des budgets. Après qu'on la saigne,

elle ne peut plus jouer son rôle. Il aurait été utile de poser tout de suite le geste que nous posons ce soir. Ça n'a pas été fait.

Comme je ne vis pas dans le passé, on va parler du présent. Or, comme la SAO était plutôt inefficace, les membres du comité Beaudry, forts d'un large consensus... Là-dessus, le ministre avait raison de souligner ça. Je pense qu'il a raison de dire que, ce qu'il propose, n'est pas... ça ne vient pas d'un comité ministériel, ça ne vient pas uniquement de l'équipe qu'il a félicitée, ça vient d'un large consensus de la population. À peu près toutes les instances qui ont été consultées, y compris les représentants, dans l'Ou-taouais, du Parti québécois, qui ont participé à ce consensus-là - puis, ils sont d'accord - sont d'accord avec la création d'une société de diversification de l'économie de la région de l'Outaouais parce que, si on ne diversifie pas, ça va poser des problèmes dans le temps et c'est dangereux par rapport à l'avenir de cette région qui fait, comme je l'ai mentionné tantôt, M. le Président, toujours partie du Québec. Cette société, qui relèverait des élus municipaux, disposerait d'un budget de 5 000 000 $ réparti comme suit - je ne pense pas que le ministre l'ait indiqué tantôt: 3 000 000 $ du gouvernement du Québec, 1 000 000 $ de la Communauté urbaine de l'Outaouais et 1 000 000 $ provenant du Fonds de développement régional.

Là, j'aimerais ça que le ministre, si jamais il exerce son droit de réplique, ou en commission parlementaire, m'indique si les 1 000 000 $ provenant du Fonds de développement régional seront pris dans l'enveloppe des 3 000 000 $ de la grande table de concertation, suite à la réforme Picotte. Si c'est le cas, bien, là, on n'est pas plus avancés. Si c'est en sus des 3 000 000 $, là, il a raison de dire que la région de l'Outaouais va bénéficier, comme les autres régions, de la structure de concertation qui existe partout ailleurs. Parce que, dans la région de l'Outaouais, il va y avoir aussi ce qu'on appelle, là, une conférence régionale, suite à la réforme Picotte et au Secrétariat aux affaires régionales, qui aura une somme de 3 000 000 $ à se partager.

Mais, si dans les 3 000 000 $ qu'ils ont, on en prend tout de suite 1 000 000 $ et on les donne à la nouvelle structure qu'on crée par législation ce soir, moi, je pense que ce n'est pas équitable, parce qu'on vient de traiter d'une façon particulière le problème de l'Outaouais et qu'on dit: II est requis, pour les mêmes raisons que vous évoquiez tantôt, parce que c'est frontalier, que cette région ait une structure qui fasse la promotion touristique et la diversification de son économie. Et on achète cette affaire-là. On aura l'occasion d'en jaser un peu plus loin.

Le conseil d'administration, le ministre l'a bien expliqué, je n'y reviens pas. Je fais juste un commentaire parce que, quand on veut être, en- tre guillemets, un peu prétentieux, on dit ce qu'il a dit. Il a dit: Écoutez, ce gouvernement-là a une philosophie tellement respectueuse de la volonté des gens du milieu qu'on ne voulait pas faire ce qu'on avait fait avec la SAO, nommer les gens directement du gouvernement.

Pourtant, quand on regarde la loi qu'on adopte ce soir, pour laquelle on va convenir, parce qu'on en est sur le principe et non sur ses modalités, je lis: De plus, trois autres membres sans droit de vote pourraient siéger au conseil d'administration. Il s'agit d'un représentant du Secrétariat aux affaires régionales, du président du conseil régional et d'un député de l'Outaouais, désigné par qui, vous pensez, M. le Président? Désigné par le gouvernement du Québec. Et ces gens-là qui ont le culot de nous faire accroire: Ah! nous, on respecte les gens de région. Nous, on permet aux gens...

Vous ne trouvez pas que ça serait pas mal plus intelligent de leur permettre que ça soit elle-même, la région, qui choisisse le député qui sera élu parmi la population, puis que les gens de l'Outaouais disent... Bien, écoutez, il y a cinq circonscriptions dans l'Outaouais, et, nous autres, on souhaiterait que, parmi les trois, les quatre ou les cinq qu'ils auront élus, parce que c'est ça la démocratie, ils décident qu'ils veulent que le siège que vous voulez confier au député soit occupé par le député de Papineau, le député de Gatineau, le député de Hull. Ils décideront. Ils décideront.

Et, moi, il me semble que quelqu'un qui prétend qu'il a un très grand souci du respect des régionaux, il ne devrait pas jouer au paternalisme, comme ce qu'on vient de voir et d'entendre, dire: Nous, on ne veut pas dire à chaque région quoi faire, mais on va vous dire que le député qu'on va nommer, c'est le gouvernement qui va le nommer. Alors, moi, je ne serai pas d'accord là-dessus, certain.

Les mandats que la société aura, je suis complètement d'accord. Je suis complètement d'accord avec les mandats que la société aura. Favoriser l'essor économique de l'Outaouais, on est d'accord là-dessus. Faire la prospection et la promotion économique, tant sur le plan national, complètement d'accord là-dessus. Mettre en oeuvre un plan de diversification, logique, on achète ça.

Donc, le projet de loi 75 respecte en tous points le rapport Beaudry en confiant à la Communauté urbaine le soin de mettre sur pied la société de diversification de l'économie. Il reviendra aux élus de la Communauté urbaine de l'Outaouais de décider s'ils appliqueront à la lettre les recommandations du comité Beaudry en ce qui concerne la composition du conseil d'administration. Il semble, cependant, que les suggestions du comité Beaudry seront reprises intégralement. On verra. (21 h 30)

Quant au financement, le gouvernement du

Québec a la plus grosse part du gâteau. Le budget total de la société sera de 5 000 000 $, et Québec consentira pour 3 000 000 $. Officiellement, ces questions ne sont pas encore réglées. Le gouvernement et la Communauté urbaine de l'Outaouais ont jusqu'au 1er juillet, début prévu des activités de la société, pour s'entendre. C'est des choses qu'on aura l'occasion d'apprécier article par article, en termes de détails.

Le ministre des Affaires municipales, qui pilote cette opération, pourrait peut-être s'engager à fournir à l'ensemble des députés de l'Assemblée nationale un état de la situation quant à la mise en marche de la nouvelle société, en particulier sur les modalités de financement de même que la composition du conseil d'administration. Parce que j'avais l'occasion de regarder le rapport de la SAO, et le ministre n'a pas été très volubile sur ce qui arrive au niveau des effectifs, ce qui arrive au niveau des professionnels, ce qui arrive au niveau des gens qui étaient syndiqués ou non, des cadres de la SAO. Est-ce que c'est un transfert automatique? Pas un mot. Je ne dis pas que ce n'est pas réglé, je dis que j'aurais aimé que le ministre en dise quelques mots, parce qu'on adopte le principe du projet de loi.

Alors, M. le Président, la problématique frontalière de l'Outaouais a toujours été reconnue par les gouvernements qui se sont succédé au Québec, parce que nulle part ailleurs nous ne retrouvons une telle problématique. Et nous en sommes. Nous en sommes, nous sommes d'accord avec le projet de loi. Nous pensons, en conclusion, M. le Président, que le projet de loi 75 reflète cette problématique unique en permettant à la population de l'Outaouais de se doter des outils qu'elle estime nécessaires pour faire face à cette situation originale. Ce projet de loi est le fruit d'un large consensus régional. La société de diversification de l'économie mérite donc un aussi large consensus de la part des membres de l'Assemblée nationale du Québec et, du côté de l'Opposition officielle, nous sommes heureux de concourir à l'adoption de cette loi.

Et, en terminant, tout comme le ministre l'a fait, je voudrais féliciter les mandataires de la SAO, les membres du conseil d'administration; je voudrais féliciter, effectivement, le président actuel, parce que la SAO existe toujours. M. Jean-Marie Séguin a fait un travail extraordinaire; ça, c'est exact. M. Séguin a été très ouvert pour regarder d'autres alternatives à la réalité qu'on connaît. Et je conclurai en reprenant la remarque, que j'ai trouvée très déplorable, du ministre des Affaires municipales, qui a toujours sa petite couleur un peu partisane, en faisant semblant de rien, en disant qu'eux, ces chers libéraux, n'avaient aucun trouble avec les maires de la région de l'Outaouais.

Moi, je tiens à dire que nous non plus, on n'a aucun trouble, nous, avec celles et ceux qui n'ont aucun problème à distinguer l'intérêt public des intérêts privés et personnels. Je répète, on n'a aucun trouble, nous, avec les gens qui font de l'administration publique et qui n'ont pas de trouble à distinguer l'intérêt public par rapport à l'intérêt personnel et privé. Dans ce sens-là, les gens qui sont là pour servir plutôt que se servir, on n'a aucun trouble, de ce côté-ci de la Chambre, avec ces gens-là qui font de l'administration publique. Alors, celles et ceux qui pensent qu'ils n'ont pas de trouble à distinguer entre l'intérêt public et l'intérêt privé, bien, tout de suite, dès ce soir, comme porte-parole de l'Opposition officielle, je peux leur dire qu'ils sont bienvenus, on les considère comme des collaborateurs, on les considère comme des gens qui font oeuvre utile et qui posent leur pierre dans l'édification de cette société, ce qui n'est pas facile.

Mais il faut faire les distinctions, et je ne suis pas sûr que, de l'autre côté, quand on y va sans nuance comme ça, on est capables de les faire, surtout pas quand on sait que tous ces gens-là, presque systématiquement, ont toujours été, sur le plan du financement des partis politiques, à la solde d'un seul parti. C'est leur droit, M. le Président, le plus strict, le plus légitime. On ne le conteste pas, mais vous n'aurez pas le type qui va faire ces larmoiements que j'ai entendus tantôt, ou cette remarque très partisane à l'effet que, nous, on aurait du trouble avec les élus. On n'a aucun trouble avec les élus. Moi, j'en ai 50, élus, dans ma circonscription, puis je n'ai pas de trouble avec celles et ceux, comme je l'ai mentionné tantôt, qui savent se dévouer pour l'intérêt public plutôt que les intérêts partisans privés et qui sont là pour servir les communautés, servir les intérêts collectifs de celles et ceux qu'ils représentent plutôt que de se servir. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest.

Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 75, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant l'abolition de la Société d'aménagement de l'Outaouais. Je cède la parole à M. le député de Hull.

M. Robert LeSage

M. LeSage: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir, ce soir, M. le Président, d'intervenir sur le projet de loi 75 qui a pour objet de modifier la loi sur la Communauté urbaine de l'Outaouais pour lui accorder, à partir du 1er juillet 1993, la compétence en matière de promotion économique de son territoire en vue de favoriser l'essor et la diversification de son économie.

Mais vous me permettrez également, M. le Président, de reprendre certaines remarques du député d'Abitibi-Ouest. Je veux bien comprendre

qu'il puisse taxer mon ministre des Affaires municipales de faire un peu de partisanerie, mais ce qu'il vient de nous donner comme exposé, je pense que ça, c'était de la partisanerie. Lorsqu'il nous dit que lui et la députée de Taillon connaissent l'Ôutaouais québécois, M. le Président, je m'inscris en faux là-dessus. Il ne connaît rien à l'Outaouais québécois parce qu'il n'aurait pas parlé comme il a parlé ce soir.

M. le Président, en 1970, quand tous les maires de la région de l'Outaouais québécois ont fait des pieds et des bras pour avoir les investissements du gouvernement fédéral sur le côté québécois, qu'est-ce qui existait avant 1970 dans l'Outaouais québécois? Il était où, lui, le député d'Abitibi-Ouest, avant 1970? Et la députée de Taillon? Qu'est-ce qu'ils connaissent de ce qui se passait avant 1970 dans cette région? On avait des petites industries qui employaient des petites gens de l'Outaouais québécois à des petits salaires. On avait une disparité flagrante entre l'Outaouais québécois et l'Ontario. Nous avons, par l'entremise des politiciens du temps, fait en sorte que le gouvernement fédéral investisse chez nous, avec nos impôts et les impôts de tous les Canadiens.

Moi, je défie qui que ce soit dans cette Chambre, M. le Président, qu'il fasse le tour de la province de Québec et vérifie les berges de toutes les rivières du Québec. Et, s'il y a des berges mieux entretenues que celles de l'Outaouais québécois, vous viendrez m'en reparler. Et qui les entretient? C'est la CCN avec les deniers de tous les Canadiens.

M. le Président, quand la Commission de la capitale nationale, par l'entremise du ministère des Travaux publics et de son gouvernement fédéral, a décidé d'implanter des édifices dans Hull, ça a fait quoi, ces édifices-là? Ça a attiré du monde. Moi, je ne connais pas beaucoup de gens qui sont partis de l'Outaouais québécois, depuis 1975, 1980, pour aller travailler en Gas-pésie ou aller travailler au Lac-Saint-Jean ou aller travailler en Abitibi-Ouest, mais j'en connais plusieurs qui sont partis de ces endroits-là pour venir détenir un emploi du gouvernement fédéral à Hull. Et ces gens-là viennent nous dire maintenant que ce mauvais gouvernement fédéral a fait en sorte qu'il a nui à l'économie du Québec, et plus spécifiquement à l'Outaouais québécois. M. le Président, il faut quand même être sérieux. Il faut quand même reconnaître ce qui a été fait et ce qui a été bien fait.

Je veux juste vous ramener à aujourd'hui avec la réforme municipale qui a été déposée par M. Ryan. Ça a fait quoi dans Hull, cette réforme-là? Ça a fait en sorte que, depuis deux ans, les taxes municipales dans Hull sont gelées. Il n'y en a pas eu, d'augmentation de taxes. Et ça va faire quoi pour les trois prochaines années, selon le conseil municipal et son maire, le maire qui vient d'être élu, Yves Ducharme? Les taxes seront gelées encore pour trois ans. Ça, ce n'est pas grâce au Parti québécois et ce qu'il prône, l'indépendance, M. le Président, c'est grâce à la présence du gouvernement fédéral dans Hull avec ses édifices et les taxes qui peuvent être perçues comme elles le sont présentement, sans bouger un crayon. La ville de Hull va chercher au moins 10 % sur un budget d'à peu près 85 000 000 $, ils vont chercher 10 % des revenus sans rien faire. C'est mauvais, le gouvernement fédéral? Ça a augmenté le standard de vie du monde dans l'Outaouais québécois. C'est mauvais, le gouvernement fédéral, ça ne devrait pas exister, ça, selon eux autres.

M. le Président, je pense que ces gens-là, je ne dirai pas qu'ils ne sont pas honnêtes, mais ça frise quelque chose qui est l'inverse de ça. M. le Président, il nous disait tantôt que, jusqu'à 1983, il y avait des bons budgets à la SAO. C'est vrai qu'il y avait des bons budgets. Mais qu'ils aillent donc vérifier ce que le député de Labelle, le député péquiste de Labelle, dans le temps qu'il était ministre des Affaires municipales, a fait, lui, quand il a déposé un mémoire au Conseil des ministres pour complètement abroger, annuler, se débarrasser de la SAO sans aucun rechange. Il n'y avait rien en rechange. Ça, c'était une vision pour l'Outaouais. Là, on protégeait les gens de l'Outaouais québécois. (21 h 40)

M. le Président, en 1983, c'est eux autres qui étaient là et c'est vrai que les budgets ont commencé à baisser depuis ce temps-là. Je discutais récemment avec le président-directeur général de la SAO, M. Jean-Marie Séguin. N'eût été de ces gens-là, M. le Président, qui ont changé la vocation de la SAO, par exemple, pour enlever les attraits touristiques qu'on avait, et ce qui a été cédé à la SEPAQ, la SAO serait peut-être encore là aujourd'hui.

M. le Président, le ministre mentionnait tantôt que, dans le rapport du Comité Outaouais, présidé par Marcel Beaudry, quand ils en viennent à la conclusion qu'il faut diversifier l'économie aujourd'hui, bien sûr, qu'il faut la diversifier, les gouvernements n'ont plus d'argent. On s'est endetté et pas juste ici; le fédéral pareil. Et, eux autres, ils en savent quelque chose; pour s'endetter, ils étaient capables dans le temps. Ils nous disaient encore, voilà pas longtemps, M. le Président, en cette Chambre: Qu'est-ce que vous avez à couper partout? Montez les impôts. Empruntez. Ça, c'est notre chef de l'Opposition qui nous prônait ça. M. le Président, il faut avoir une vision d'avenir un peu plus réaliste que ça.

Quand Me Beaudry dit dans son rapport qu'il faut diversifier l'économie, c'est parce qu'on sait qu'il va y avoir des changements au niveau constitutionnel. Il va y en avoir; on s'en attend. Et, même s'il n'y en avait pas là, ils vont diminuer la fonction publique et il va y avoir moins de jobs dans l'Outaouais québécois.

Présentement, nous sommes la troisième plus

grande agglomération urbaine du Québec. Nous avons une population d'environ 250 000 personnes dans l'Outaouais québécois. De ces 250 000 personnes, il y en a 110 000 qui ont une job, qui travaillent à quelque part. De ces 110 000, M. le Président - et là c'est important, ça ne prend pas une tête à Papineau pour calculer ça... Il y a 110 000 personnes dans l'Outaouais québécois qui ont une job. Il y en a 26 000 là-dessus qui travaillent pour le gouvernement fédéral et qui demeurent dans l'Outaouais québécois. Il y en a 24 000 autres qui demeurent dans l'Outaouais québécois mais qui travaillent en Ontario. On est comme rendus à 50 000 jobs, là, reliées directement soit à l'Ontario, à l'entreprise privée en Ontario, ou soit au gouvernement fédéral. Lorsqu'on dit qu'une job directe crée au moins une job indirecte, est-ce qu'on peut penser à un moment donné que, s'il n'y a plus personne qui travaille pour le gouvernement fédéral et que l'Ontario se met à nous mettre des critères pour empêcher nos travailleurs de la construction, comme nous le faisons présentement ici en empêchant les travailleurs de l'Ontario de venir travailler au Québec, s'ils faisaient juste ce qu'on fait, nous, on perdrait 50 000 jobs directes? Est-ce qu'on pourrait penser qu'à ce moment-là il n'y a plus personne qui travaille dans l'Outaouais québécois?

M. le Président, il faut avoir une vision d'avenir et ce n'est surtout pas avec ce que le PQ nous prône. C'est vrai que l'Outaouais fait encore partie du Québec. Je leur dis et je leur répète, ça me fait plaisir de le dire en cette Chambre parce que je l'ai dit déjà dans l'Outaouais québécois, ce qu'ils prônent, qui est l'indépendance du Québec, ils ne le feront pas dans l'Outaouais québécois. Je le répète en cette Chambre, quelqu'un qui vient dans l'Outaouais québécois prôner l'indépendance, M. le Président, ça frise la malhonnêteté. Je dirais même et je dirais plus, c'est presque criminel. On ne peut pas nous faire ça dans l'Outaouais québécois et on ne les suivra pas. Faites-la, votre indépendance, si vous le voulez, au Québec. Je vais vous le dire tout de suite dans cette Chambre... Oui, oui, vous pouvez faire ce que vous voulez, mais je vous le dis tout de suite, je vais partir un mouvement. Et, si je suis trop vieux pour le faire, il y a quelqu'un qui va le faire. On ne vous suivra pas dans votre petite entreprise d'indépendance, partie sur un nuage, sans avoir des garanties que les gens de l'Outaouais québécois vont pouvoir survivre. On ne peut pas accepter ça!

Une voix: «C'est-u» clair?

M. LeSage: M. le Président, tout ça pour vous dire que la Société d'aménagement, effectivement, va cesser d'exister; par contre, il y a quelque chose qui va la remplacer. Moi, je suis convaincu que les gens qui vont siéger dans cette nouvelle structure qui, pour le moment, va assurer l'intérim, et où on retrouve présentement les maires de Hull, Gatineau, Aylmer, Masson et Buckingham, ces gens-là ont une vision d'avenir. C'est des gens qu'on connaît très bien. C'est des gens qui connaissent, eux, l'Outaouais québécois, contrairement aux gens du Parti québécois qui prétendent le connaître. Bien, eux autres, ils le connaissent. Moi, je fais confiance à ces gens-là pour nous faire des recommandations, M. le Président, lesquelles recommandations vont aboutir à cette création de la société de diversification économique pour le bien-être des gens de l'Outaouais québécois et de Hull. M. le Président, je vous remercie de m'avoir accordé le peu de temps que j'ai pris.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: En vertu de l'article 213, je voudrais savoir si le député...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En vertu de l'article 213, un instant. M. le député de Hull, est-ce que vous permettez une question au député d'Abitibi-Ouest en vertu de l'article 213?

M. LeSage: Certainement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, la question doit être brève et la réponse également. M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Une question très brève. Est-ce que le député ne reconnaît pas que c'est la commission Dorion, en 1968, qui constatait l'état de sous-développement chronique de l'Outaouais et non le député d'Abitibi-Ouest, comme vous l'avez affirmé tantôt?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Hull, à la question.

M. LeSage: M. le Président, je n'ai jamais dit le contraire de ça. Tout simplement, ce que j'ai dit, c'est: Avant 1970, quelle sorte de jobs on trouvait dans l'Outaouais québécois? C'étaient des jobs de petites industries, et on voulait éviter cette disparité des salaires qui existait entre l'Outaouais québécois et l'Ontario. C'est pour ça que mon gouvernement a mis de l'argent dans la Société d'aménagement pour, justement, diversifier l'économie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député.

Je rappelle que nous en sommes à l'adoption du principe du projet de loi 75, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant l'abolition de la Société d'aménagement de l'Ou-

taouais. Je reconnais M. le député de Jonquiè-re.

M. Francis Dufour

M. Dufour: Merci, M. le Président. Je vous le dis honnêtement, j'étais descendu à l'Assemblée, à partir de mon bureau, ayant l'espoir qu'on pourrait avancer assez rapidement avec ce projet de loi, mais, en entendant le député de Hull qui m'a habitué à des discours beaucoup plus posés, beaucoup plus calmes, il m'a donné vraiment le goût de répondre quelque peu, parce que la vérité a des droits. Et je parodie un peu le ministre des Transports, Sam Elkas, qui dit que la vérité a des droits. Moi, je pense que, pour le parti de l'Opposition, on a ces mêmes droits et on doit rétablir les faits lorsque les discours ou lorsque les paroles sont prononcées.

Vous savez, lorsqu'on demande au Parti québécois ou on demande à des membres de la formation politique du Parti québécois où ils étaient en 1970, bien, on peut vous dire qu'on n'était même pas constitués en parti politique. Donc, il ne faudrait pas nous attribuer des torts qu'on ne peut pas supporter, d'aucune façon. En 1970, que je sache, il y avait trois partis: il y avait le Parti libéral, qui a été très longtemps au pouvoir, il y a eu le parti de l'Union Nationale et il y avait le Crédit social. Il y avait peut-être un ou deux indépendants. C'était ça, l'histoire de la politique jusqu'en 1970. Je veux juste faire ce rappel pour s'assurer qu'on parle des mêmes choses.

Donc, le député d'Abitibi-Ouest parle d'un constat à l'effet qu'on a reconnu que, dans l'Outaouais, il y avait des lacunes. Donc, ça a permis de mettre sur pied ou ça a obligé les gouvernements successifs à mettre sur pied la Société d'aménagement de l'Outaouais. Lorsqu'on nous reproche ou qu'on reproche à l'ex-ministre des Affaires municipales, en 1983, d'avoir voulu mettre la hache dans la Société d'aménagement de l'Outaouais, il faut bien remarquer que le parti ne l'a pas fait, le gouvernement ne l'a pas fait. Ce qu'un individu pense, quelle que soit sa fonction, ça ne donne pas la couleur du gouvernement. Ça, ça me semble une logique implacable. Si on savait tout ce qui se passe dans la tête des ministres, je peux vous dire que, des fois, peut-être on sortirait de la Chambre. Il y en a que même l'Assemblée nationale, ça doit les fatiguer terriblement, parce que c'est une place où il y a de la contradiction et il y a de la contestation. Mais on n'est pas pour juger des intentions. Il faut juger sur les faits précis et, sur les faits précis qu'on a à juger, la Société d'aménagement de l'Outaouais avait commencé, à mon point de vue, son vrai déclin. Et je vous invite à regarder à travers toutes nos démarches, c'est à partir de 1986 ou 1987 que le ministre des Affaires municipales, le ministre Bourbeau, a commencé et a déclaré solennellement que la

Société d'aménagement de l'Outaouais disparaîtrait d'ici à deux ans. Ça, ce sont des faits véridiques.

Une voix: Vérifiables. (21 h 50)

M. Oufour: Si les gens de l'Outaouais nous disent qu'ils sont d'accord avec ça, bravo pour leur beau programme. Parce que, moi, j'ai dénoncé régulièrement, au moins deux, trois fois par année, régulièrement, dans tous les engagements de crédits et à toutes les fois qu'on a eu l'occasion de faire des échanges avec le ministre des Affaires municipales, j'ai toujours posé un certain nombre de questions concernant la Société d'aménagement de l'Outaouais. Où étaient les députés de l'Outaouais dans ce temps-là? Où étaient ces députés? Comment on peut expliquer que ces gens-là à aucun moment ne se sont opposés aux coupures que le gouvernement libéral était en frais d'effectuer dans leur propre société? Le seul endroit au Québec qui avait ce traitement de faveur ou un traitement particulier qui n'existait à nulle part... 6 000 000 $ pour faire du développement économique, du développement touristique, ce n'est pas rien, ça. Seule l'Outaouais avait accès à ces sources de financement là. Les autres régions, nenni, rien.

Les députés de l'Outaouais, pas un mot. Ah! ils travaillaient peut-être en arrière des couvertes, peut-être en arrière des rideaux. Mais, moi, je n'ai vu à nulle part un député de l'Outaouais, en commission parlementaire ou ici, à l'Assemblée nationale, dire au ministre des Affaires municipales: Vous n'êtes pas correct. Ils ont laissé faire. Et le résultat, on a mis la hache dans la Société d'aménagement de l'Outaouais. Ce n'est pas sa disparition qui est tellement grave au moment où on se parle, parce que tout le dommage, il est fait. Tous les employés sont dehors, la plupart des employés. Les équipements, dehors! Le gouvernement s'est débarrassé. C'est les municipalités qui paient pour actuellement. On a bien beau dire que ça n'a pas coûté cher, mais les parcs, ça coûte quelque chose; c'est les municipalités qui ont pris le relais. C'est comme ça qu'on a traité les municipalités, même que le gouvernement s'est désengagé. Le dommage, il est fait ça fait longtemps.

Et, là, qu'est-ce qui arrive? C'est qu'on prend ce qui reste, les dépouilles, puis on dit: On va donner ça à la CUO, la Communauté urbaine de l'Outaouais. Voilà! C'est un débarras, c'est une vente de débarras. Le gouvernement s'en lave les mains. Peut-être qu'il va continuer à donner quelques montants d'argent pour un petit bout de temps pour faire de la promotion économique. Il n'y a rien de garanti. Il n'y a rien de garanti là-dedans. On verra ce qu'un autre gouvernement fera, parce que l'exemple vient de haut. Si les gens de l'Outaouais n'ont jamais parlé à venir jusqu'à maintenant, pourquoi ils parleraient quand un autre gouvernement va

apporter d'autres actions puis prendre d'autres décisions? Parce qu'ils sont à la remorque du fédéral. Ils sont à la remorque du fédéral, ces gens-là. Quand ils nous disent: Une chance qu'on a le fédéral, bien, j'ai des petites nouvelles pour les gens de l'Outaouais. Les 450 000 000 000 $ ou 500 000 000 000 $ de déficit, pensez-vous que vous allez commencer, continuer dans ce «deal» ou dans cette façon de procéder? Vous pensez qu'il ne se produira rien? Les fédéraux, ils vont vous protéger? Vous allez être en circuit fermé? Puis ça vous a surpris que des gens du Lac-Saint-Jean et du Saguenay aillent travailler chez vous? Le deuxième plus haut taux de chômage au Québec, c'est chez nous, ça, 16,5 % de chômage.

Une voix:...

M. Dufour: Je m'excuse, si le député de Gatineau veut parler... de Papineau, s'il veut parler, il prendra son siège, M. le Président. Je suis à sa disposition pour lui répondre, à n'importe quel temps, parce que j'en ai vu des choses aussi, moi. J'ai le respect des gens qui patient à part de ça, j'aimerais le lui rappeler.

Je veux vous dire, M. le Président, que ce qui se passe dans l'Outaouais, c'est dramatique. C'est dramatique ailleurs, c'est dramatique là aussi. Les députés du coin, du coin, ils ont laissé faire. Ils ont laissé démantibuler quelque chose qui leur appartenait, qui était unique. Ils n'ont plus rien à dire. Ils ont seulement qu'à se fermer puis à dire: Bravo! Ils iront expliquer ça à leur monde. C'est le fédéral qui décide pour eux autres.

Je suis allé, moi, visiter... Je ne connais pas ça l'Outaouais, moi. Je suis allé, par exemple, voir ça un peu. Je ne peux pas dire que je connais ça. Je n'ai pas été élevé à Ottawa. Je n'ai pas été élevé dans ce coin-là. Mais je peux vous dire, M. le Président, que les gens de l'Outaouais, il y a des places que la CCN, la Commission de la capitale nationale... Il ne se fait pas ce que vous pensez, ce que vous pensez que je pense, parce que ça les embarrasse de voir cette société, avec ses gros pieds, tout ramasser les beaux morceaux de terrain, sans savoir ce qu'ils vont en faire. Ce n'est pas important, ça. Même les administrateurs municipaux ne savent pas ce qu'ils vont faire avec ces terrains-là. La CCN, elle accroche les terrains, elle met ça dans sa besace: Attendez, on va faire du chantage. C'est comme ça qu'on se comporte avec des gens qui ne sont pas des sinistrés, mais des colonisés. C'est de même qu'Ottawa traite l'Outaouais.

Il y a des gens dans l'Outaouais, malheureusement, qui sont des représentants qui sont d'accord avec ces situations-là. Moi, je ne peux pas faire autrement que de le déplorer, parce que la confiance puis la fierté, ça commence à quelque part. Il y a des prix, bien sûr, pour la fierté, mais il ne faut pas avoir honte de ça.

C'est une qualité très importante, à mon point de vue. Quand vient le temps de discuter, quand vient le temps de négocier, quand vient le temps de se tenir debout... Puis on respecte seulement les gens qui se tiennent debout, pas les gens qui n'ont pas de conviction, pas les gens qui sont à la merci de tout le monde, pas les gens qui ont juste un miroir puis qui se regardent, puis qui disent: Dis-moi qui est le plus beau, qui est le plus fin. Je trouve ça malheureux.

Vous savez, la démonstration à laquelle je viens d'assister, je la déplore. Ce n'est pas pour rien que je me suis levé. Moi, je déplore ça, à mon âge, de regarder ce qui s'est passé. Nous autres, dans l'Outaouais, ça va pas trop pire; les autres, chez le diable! Le Québec, on s'en fout; vivez comme vous voudrez; nous autres, l'Outaouais, on veut tirer nos marrons du feu. On veut continuer à avoir ce qui est là. Les autres, on s'en fout. On aurait pu dire ça chez nous, nous autres, au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Le saviez-vous, M. le Président, que c'a été la troisième région la plus riche, là, pendant longtemps, au point de vue industriel et économique? Si on avait fait comme les gens de l'Outaouais: Allez chez le diable, puis on va garder nos montants d'argent pour nous autres... Les ressources hydroélectriques, les alumineries: Chez le diable, le gouvernement du Québec, vous n'aurez pas les impôts. On aurait pu faire ça, on aurait pu dire: On va se séparer, nous autres, chacun pour soi. Là, c'est les autres, les gros et les gras durs, les replets et les repus, mais, dans 5 ans et dans 10 ans, comment ils seront, ces gens-là? Parce que, avec le fédéral qui est en faillite actuellement, pensez-vous qu'ils vont venir encore nous faire de la broue, puis venir se péter les bretelles devant tous nous autres pour dire: Regardez, nous autres, on est plus fins que tout le monde?

Je pense, M. le Président, qu'on assiste à une démonstration qui est malheureuse. Ce n'est pas comme ça qu'on aurait dû faire. D'abord, l'Opposition était d'accord sur le démantèlement de... Le critique de l'Opposition, le porte-parole, il a dit qu'il était favorable au projet de loi. Il n'a pas commencé à faire de la politique là-dessus, en disant: Écoute un peu... Moi, j'en fais un peu plus que lui, de la politique, parce qu'on ne peut pas ne pas répondre à des absurdités et à des grosses choses de même, comme ça. C'est de l'enflure verbale, ce n'est pas acceptable. Bien moi, je vous dis que je déplore ça.

Vous savez, quand on part avec des emplois et qu'on se surprend qu'on a des gens qui viennent travailler chez nous... Ils devraient être contents, ils sont en augmentation de population. Partout dans le Québec, on est dans le déclin. Ils n'ont pas, eux autres, à se casser la tête sur la ruralité des régions. J'inviterais les députés de l'Outaouais, qui nous disent qu'on ne connaît pas ça, j'aimerais les inviter à venir par chez nous pour voir s'ils connaissent ça, eux autres aussi.

On pourrait peut-être se parler après. Quand ils seront venus visiter les régions, quand ils auront descendu de leur tour d'ivoire, quand ils auront fini d'entendre le carillon du parlement, à Ottawa, peut-être qu'ils reviendront les pieds sur la terre, quand ils auront arrêté de visiter les musées, qu'ils verront c'est quoi ce qu'on voit, ce qui se passe, le désastre qui se passe sur le terrain, la mortalité, moi, j'appelle, des régions, parce qu'il y a des régions qui sont pratiquement mortes. Ça prendrait de la respiration artificielle.

Les gens de l'Outaouais: Non, nous autres, ça ne nous dérange pas. On vit dans notre tour d'ivoire. On est au-dessus de la mêlée. On se bat pour nos acquis. Les autres, on s'en fout. C'est ça qu'on vient de se faire dire. Je n'accepterai jamais ça, M. le Président, au même titre que quand, lui, dit: Moi, je n'accepterai pas que vous alliez vivre sur votre nuage avec votre souveraineté. Bien, je peux vous dire une chose: Au moins, avec notre projet de société ou notre projet de souveraineté, on offre quelque chose au monde. On leur offre une solution de rechange. On leur offre la confiance en eux, parce que ces gens-là, ils n'auront jamais confiance en eux autres. C'est pour ça qu'ils n'ont pas confiance aux autres, ils n'ont déjà pas confiance en eux, parce que leur première confiance, c'est envers le fédéral. La deuxième confiance qu'ils ont, là, c'est qu'ils n'en ont pas pantoute. Ils sont à la remorque d'idées. Ils en manquent. Ils sont en manque d'idées. Ils sont en manque d'imagination. Et, comme ils n'ont pas confiance en eux, ils ne peuvent pas avoir confiance aux autres, et c'est comme ça que, pour eux, la souveraineté, ça va être toujours inaccessible, parce que c'est un constat d'impuissance ou d'incapacité.

Et, moi, je vous dis, M. le Président, qu'à partir de maintenant il faut absolument que les gens de l'Outaouais reviennent à de meilleurs sentiments, reviennent avec des idées beaucoup plus froides, beaucoup plus claires, et de penser que ce n'est pas nous autres qui attaquons l'Outaouais, c'est leur propre parti qui est en frais de se débattre contre eux autres. C'est le Parti libéral qui, actuellement, est en frais d'essayer de détruire les actions qui ont été posées en Outaouais.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je m'excuse de vous interrompre, compte tenu qu'il est 22 heures. Je vous rappelle qu'il vous restera huit minutes à votre intervention, lorsque le projet de loi 75 sera appelé. Compte tenu de l'heure, les travaux de cette Assemblée sont ajournés à demain, le mercredi 17 mars, à 10 heures.

(Fin de la séance à 22 heures)

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