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(Quatorze heures onze minutes)
Le Président: M mes et MM. les députés, nous
allons nous recueillir quelques instants. Je vous remercie, veuillez vous
asseoir.
Affaires courantes
Nous allons procéder aux affaires courantes.
Il n'y pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi
Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous demanderais, M. le
Président, d'appeler l'article a du feuilleton.
Projet de loi 245
Le Président: À l'article a du feuilleton, j'ai
reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de
loi 245, Loi concernant la ville d'Outremont. Le directeur de la
législation a constaté que les avis ont été faits
et publiés conformément aux règles de fonctionnement des
projets de loi d'intérêt privé. Je dépose donc ce
rapport.
Et, en conséquence, M. le député de Saint-Louis
présente le projet de loi d'intérêt privé 245, Loi
concernant la ville d'Outremont.
Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet
de loi?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'aménagement
et des équipements
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je fais
donc motion pour que ce projet de loi d'intérêt privé soit
déféré à la commission de l'aménagement et
des équipements pour étude détaillée et pour que le
ministre des Affaires municipales en soit membre.
Le Président: Est-ce que cette motion est
adoptée?
Des voix: Adopté. Le Président:
Adopté.
Dépôt de documents
Maintenant, dépôt de documents.
M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation et responsable du développement régional.
Rapport annuel de la Commission des courses du
Québec
M. Picotte: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport annuel 1991-1992 de la Commission des courses du
Québec. Merci.
Le Président: Ce rapport est déposé. M. le
leader du gouvernement.
Rapport annuel du Conseil cri de la santé et
des services sociaux de la Baie James
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, au nom du
ministre de la Santé et des Services sociaux, je dépose le
rapport annuel 1991-1992 du Conseil cri de la santé et des services
sociaux de la Baie James.
Le Président: Ce document est déposé. M. le
ministre des Transports.
Rapport d'activité de l'Office des autoroutes
du Québec
M. Elkas: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport d'activité 1991-1992 de l'Office des
autoroutes du Québec.
Le Président: Ce rapport est déposé. M. le
ministre responsable de l'application des lois professionnelles.
Rapports annuels 1989-1990 et 1990-1991 de l'Ordre des
audioprothésistes du Québec
M. Savoie: Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de
déposer les rapports annuels 1989-1990 et 1990-1991 de l'Ordre des
audioprothésistes du Québec.
Une voix: De 1989?
M. Savoie: On vient tout juste de le recevoir.
Le Président: S'il vous plaît.
M. Savoie: Et j'ai l'honneur de déposer également
les rapports annuels 1991-1992...
Une voix: De 1891!
Le Président: Un instant, M. le ministre, s'il vous
plaît.
Je demande la collaboration de tout le monde là.
Allez-y. Allez-y, M. le ministre.
M. Savoie: Je l'ai reçu, je le dépose.
Rapports annuels des corporations du Barreau du
Québec, des ergothérapeutes
du Québec, des infirmières et
des
infirmiers du Québec, de la Chambre
des notaires du Québec, des
orthophonistes
et audiologistes du Québec, de
l'Ordre des podiatres du Québec
et des urbanistes du Québec
J'ai l'honneur de déposer également, M. le
Président, les rapports annuels 1991-1992 des corporations suivantes: du
Barreau du Québec, des ergothérapeutes du Québec, des
infirmières et des infirmiers du Québec, de la Chambre des
notaires du Québec, des orthophonistes et audiologistes du
Québec, de l'Ordre des podiatres du Québec et des urbanistes du
Québec.
Le Président: Donc, ces rapports sont
déposés.
M. leader de l'Opposition officielle.
M. Chevrette: Est-ce que je pourrais demander au ministre si
c'est bien 1989 le premier rapport?
Le Président: Très bien. Les documents sont donc
déposés.
M. Savoie: On ne peut pas déposer les rapports qu'on n'a
pas.
Rapports annuels du Conseil interprofessionnel du
Québec et de l'Office des professions du Québec
J'ai l'honneur également de déposer le rapport annuel
1991-1992 du Conseil interprofessionnel du Québec de même que le
rapport annuel 1991-1992 de l'Office des professions du Québec.
Le Président: Ces rapports sont donc
déposés.
M. le ministre des Forêts.
Rapport annuel du ministère des
Forêts
M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le
Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1991-1992
du ministère des Forêts.
Le Président: Ce rapport est déposé.
Dépôt de rapports de commissions.
Dépôt de pétitions
Dépôt de pétitions.
M. le député de Rouyn-Noranda-Témisca-mingue.
Que la clinique de planning des naissances du CHUL
offre les mêmes services qu'auparavant
M. Trudel: M. le Président, je dépose l'extrait
d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par
116 pétitionnaires membres du Regroupement des intervenants en planning
du Québec.
Les faits invoqués sont les suivants: «Considérant
que la diminution des services offerts par la clinique de planning des
naissances du Centre hospitalier de l'Université Laval, et plus
particulièrement du service d'avortement, influence la qualité
des services à la population que nous desservons;
«Considérant que notre clientèle est soumise à un
délai supplémentaire d'attente pour l'obtention d'une
interruption volontaire de grossesse; «Considérant que notre
clientèle doit être orientée vers d'autres centres
déjà fort occupés et qui sont encore plus
éloignés de nos régions; «Considérant que ces
mesures, qui ne sont, à notre avis, qu'administratives, négligent
le vécu des femmes devant vivre une interruption de
grossesse;»
L'intervention réclamée se résume ainsi:
«Nous demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir
auprès du ministre de la Santé et des Services sociaux afin que
la clinique de planning des naissances du CHUL offre les mêmes services
qu'auparavant.»
Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à
l'original de la pétition, M. le Président.
Le Président: Alors, votre pétition est
déposée.
Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de
privilège ou sur un fait personnel.
Questions et réponses orales
Nous allons procéder à la période des questions et
réponses orales.
Je reconnais, en première question principale, M. le chef de
l'Opposition.
Intentions de la Caisse de dépôt et
placement du Québec à l'égard de Provigo
M. Parizeau: M. le Président, ces jours-ci, comme à
quelques reprises depuis que le Parti libéral est au pouvoir, la
question du contrôle québécois de grands groupes
commerciaux ou industriels se pose. On l'avait vu, il y a quelque temps, avec
la vente de Consolidated-Bathurst.
Là, ces jours-ci, c'est Provigo ou Culinar. De son
côté, Blackstone, vu l'opposition de la Caisse de
dépôt et placement, a retiré son offre d'achat. Fort bien,
mais cela ne résout pas la question de façon définitive,
on le voit bien ce matin.
Qu'est-ce qui va arriver au groupe Provigo? Est-ce que le
président du Conseil du trésor, ministre des Finances par
intérim, peut nous indiquer s'il s'est informé auprès de
la Caisse pour voir la suite des choses, pour voir, en particulier, de quelle
façon la Caisse de dépôt, le gouvernement, les actionnaires
d'Univa peuvent relancer le dossier pour en arriver à un
règlement satisfaisant?
Le Président: M. le président du Conseil du
trésor.
M. Johnson: M. le Président, étant le premier
à m'adresser à l'Assemblée alors que le chef de
l'Opposition est maintenant parmi nous, je lui souhaite la bienvenue,
évidemment, et je lui indique que, dans ce dossier qu'il a
cultivé lui-même, les partenariats avec nos voisins
américains et nos cousins français, et, à partir du moment
où on se rend compte qu'il est possible de faire affaire au
Québec avec des partenaires qui viennent d'ailleurs, la Caisse de
dépôt, comme n'importe quel actionnaire d'importance, doit,
à l'intérieur de ses balises et de ses fonctions, regarder toutes
les occasions d'affaires qui se présentent à elle.
On voit que, dans le cas présent, elle ne semble pas avoir
été satisfaite des perspectives de rentabilité de son
investissement. On doit souhaiter que, par des mesures constructives à
venir, elle puisse effectivement contribuer à consolider les
opérations commerciales d'un grand groupe québécois.
Le Président: En question complémentaire.
M. Parizeau: Je remercie le président du Conseil du
trésor et ministre des Finances par intérim des voeux pieux qu'il
vient d'exprimer au sujet de Provigo, mais je dois lui demander: Est-ce qu'il
s'est renseigné ces jours-ci - je comprends qu'il n'est pas normalement
ministre des Finances, mais, enfin, il l'est par intérim à
l'heure actuelle... Ces jours-ci, doit se sceller le sort de Provigo. Est-ce
qu'il s'est renseigné auprès de la Caisse de dépôt
pour savoir ce que la Caisse de dépôt va faire? On sait maintenant
ce que la Caisse de dépôt ne veut pas. Est-ce qu'on va savoir ce
que la Caisse de dépôt veut?
Le Président: M. le président du Conseil du
trésor.
M. Johnson: M. le Président, je remercie le chef de
l'Opposition de souligner le fait que je puisse occuper par intérim le
poste de ministre des Finances. C'est vrai depuis une heure ou deux à
peine. Alors, vous me permettrez, en cette qualité très
récente, de ne pas avoir eu le temps de communiquer avec qui que ce
soit.
Quant à l'engagement que je pourrais formuler de le faire, je
veux dire ici tout de suite qu'il m'apparaît que la Caisse de
dépôt, à l'intérieur de ses attributions, de
façon extrêmement constructive, a toujours démontré
l'imagination qui lui permet d'arriver à des transactions rentables pour
elle et pour la société québécoise et qui ne met
pas en péril, évidemment, la vie commerciale et financière
de qui que ce soit au Québec.
Le Président: Toujours en question complémentaire.
(14 h 20)
M. Parizeau: M. le Président, vous comprendrez alors que
je reviendrai demain ou après-demain sur cette question, quand le
ministre des Finances par intérim aura eu le temps de se familiariser
avec ses nouvelles fonctions.
Au sujet de Culinar, est-ce que le ministre de l'Agriculture et le
ministre de tutelle de la Société québécoise
d'initiatives agro-alimentaires, SOQUIA...
Le Président: Un instant, s'il vous plaît! Pour une
question principale, maintenant?
M. Parizeau: M. le Président, j'avais, dans mon
préambule, parlé de Provigo et de Culinar.
Le Président: Oui, évidemment, mais, à ce
moment-ci, je serais prêt à vous reconnaître plutôt
une question principale, si vous voulez bien, puisque votre question
première était sur Provigo. Pour Culinar, ce serait une
deuxième question principale. Ça va?
Position de SOQUIA à l'égard de la vente
de Culinar
M. Parizeau: Parfait. Alors, puis-je demander au ministre de
l'Agriculture, qui est ministre de tutelle de SOQUIA, la Société
québécoise d'initiatives agro-alimentaires, quelle est la
position de SOQUIA à l'égard de la vente de Culinar?
SOQUIA a 35 % des actions. Ces 35 % des actions, qui appartiennent aux
contribuables du Québec, valent à peu près 60 000 000 $ au
prix du marché. On peut donc demander au ministre de l'Agriculture:
Quelle est la position de SOQUIA à l'égard de la vente d'un
certain nombre d'actifs de Culinar? Elle est pour? Elle est contre?
Si on comprend bien les journaux, SOQUIA s'est abstenue à
l'occasion des votes au conseil d'administration. SOQUIA est-elle d'accord pour
que l'on vende, comme le disait le député d'Arthabaska, des
actifs qui rapportent pour
renflouer des actifs en déficit? Quelle est la position de SOQUIA
à cet égard?
Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Picotte: M. le Président, le chef de l'Opposition
pourrait s'inspirer des questions qu'a posées son collègue
d'Arthabaska, la semaine dernière, qui me semblaient beaucoup plus
exhaustives que celle qu'il me pose lui-même aujourd'hui. Il aurait
dû, évidemment, à ce moment-ci de nos discussions,
puisqu'il a dû revenir un petit peu avant la période des
questions, savoir, M. le Président, qu'à l'occasion de cette
discussion-là SOQUIA s'était abstenue, n'ayant justement pas
suffisamment de renseignements pour être en mesure de dire oui ou non
à une transaction possible. Cependant, en 1978, lorsque le gouvernement
auquel vous apparteniez avait décidé que SOQUIA... et SOQUIA
avait décidé d'emboîter le pas dans ce qu'on appelle
Culinar, n'avait pas pris la précaution, comme on le fait depuis 1986,
de se garder un droit de regard sur toute vente possible. C'est la raison pour
laquelle, étant donné que nous sommes minoritaires et que
l'actionnaire majoritaire a décidé de vendre, nous sommes
dépourvus de moyens face à cette situation-là. C'est cette
raison-là. Sinon, si on avait vécu les mêmes
expériences qu'on vit depuis 1986 où on oblige, quand une
transaction se passe, M. le Président, à ce qu'on ait non
seulement un droit de regard, mais qu'on puisse avoir un certain droit de refus
aussi, bien, la question ne se poserait même pas.
Le Président: En question complémentaire, M. le
chef de l'Opposition.
M. Parizeau: Maintenant que SOQUIA est parfaitement
renseignée, est-ce que SOQUIA est pour ou est contre? Ils ont 35 % des
actions. Est-ce que SOQUIA est d'accord avec cette transaction ou n'est pas
d'accord avec cette transaction? C'est une question tout à fait simple.
Je comprends qu'elle n'est pas exhaustive. Mais c'est quoi, la
réponse?
Le Président: M. le chef de l'Opposition.
M. Parizeau: Ils sont pour ou ils sont contre?
Le Président: M. le ministre.
M. Picotte: M. le Président, je pense que le conseil
d'administration de SOQUIA est assez grand pour prendre ses décisions.
Mais je dis ceci au chef de l'Opposition, et je pense que c'est important qu'il
le comprenne bien. J'ai déjà dit publiquement, à maintes
reprises, que j'étais favorable à ce que Culinar, s'il existe une
transaction, qu'elle se fasse envers des intérêts
québécois dans la mesure du possible. C'est souhaitable, et
j'espère qu'on aura l'imagination de trouver des gens
intéressés au Québec qui sont prêts à faire
ce marché-là. Et nous ne fermons pas la porte, d'aucune
façon, chez SOQUIA et chez celui qui vous parle, à regarder toute
transaction qui pourrait être intéressante et à laquelle on
pourrait être associés, M. le Président.
Le Président: Toujours en question
complémentaire.
M. Parizeau: M. le Président, est-ce que nos amis d'en
face peuvent comprendre que, quand quelque chose est aussi gros que Provi-go -
25 000 emplois, avec les affiliées, sont impliqués - quand il
s'agit de quelque chose, sur le plan des grappes industrielles du ministre,
aussi important...
Le Président: Un instant, M. le chef de l'Opposition.
Sur un rappel au règlement, M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Strictement une question
d'information. Est-ce que nous sommes revenus à une question principale,
parce que, là, il s'agit de Provigo? Parce que, s'il s'agit d'une
question additionnelle, je rappellerais bien poliment au chef de l'Opposition
les dispositions de l'article 78, qui stipule que ses questions doivent
être brèves, précises et sans préambule.
Le Président: Très bien. Alors, pour une question
complémentaire, M. le chef de l'Opposition.
M. Parizeau: M. le Président, c'est la raison pour
laquelle je voulais lier les deux questions.
Est-ce que le ministre de tutelle, le ministre responsable de SOQUIA,
pourrait, plutôt que de nous exprimer son opinion, nous dire quelle est
l'attitude, quelle est l'opinion, comment va voter SOQUIA. C'est ça
qu'on veut savoir. Ce n'est pas le ministre qui va voter à la
réunion qui décidera, ça va être le président
de SOQUIA. Comment va-t-il voter, oui ou non en faveur de la vente?
Le Président: M. le ministre.
M. Picotte: M. le Président, on ne fera sûrement pas
de référendum pour savoir ça. Chose certaine... et
ça m'étonne, la question du chef de l'Opposition, M. le
Président, lui qui se targue d'être un homme d'expérience
et un économiste.
Comme le disait si bien dans son discours le député
d'Arthabaska, avec l'impression qu'il avait des économistes, je me
demandais ce qu'il pensait
de son chef, mais ça m'étonne, cette question-là,
parce que le chef de l'Opposition sait très bien qu'avant de dire oui ou
non il faudra regarder pour voir si même des intérêts
québécois qui seraient intéressés et susceptibles
d'acheter Culinar ne le feront pas dans le but de rationaliser leurs
opérations dans leurs propres usines et fermer, justement, une partie de
cette industrie-là et mettre des emplois à terre. À ce
moment-là, c'est peut-être préférable de regarder
alentour de soi au lieu de regarder en avant de soi. Ça, vous devriez le
savoir, vous qui vous vantez d'avoir une expérience incommensurable.
Le Président: Pour une... S'il vous plaît! Alors,
pour une question complémentaire, M. le chef de l'Opposition.
M. Parizeau: M. le Président, est-ce que le ministre de
l'Agriculture et ministre de tutelle de SOQUIA conviendrait qu'au lieu de poser
les questions qu'il vient de poser, il devrait être capable de s'amener
en Chambre avec des réponses à ces questions-là. Le
dossier, ça fait assez longtemps qu'on en parle; il en est encore rendu
à se poser des questions?
Le Président: M. le ministre.
M. Picotte: M. le Président, je pense qu'encore là
la sagesse du chef de l'Opposition n'est pas forte, forte. Il y a un conseil
d'administration à SOQUIA. Vous devriez savoir ça. Vous me
demandez ce qu'ils vont dire avant d'avoir une transaction sur la table,
où ils devront se pencher s'ils vont être d'accord ou pas
d'accord. Mais d'où sortez-vous? De grâce, restez par ici au lieu
d'être à Paris!
Des voix: Ha,ha, ha!
Le Président: En question principale maintenant, M. le
député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition.
Réforme de l'enseignement
collégial
M. Brassard: M. le Président, voulant marquer leur
opposition au projet de réforme de l'enseignement collégial et
inciter la ministre à revoir sa copie, près des trois quarts des
140 000 cégépiens font la grève présentement ou
tiennent une journée d'étude. Pendant que ces derniers contestent
la venue prochaine d'éventuels tickets modérateurs basés
sur la durée des études ou sur l'échec scolaire, la
ministre, elle, essaie de nous faire croire que l'introduction de ces mesures
punitives et coercitives aurait fait l'objet de consensus en commission
parlementaire.
Question à la ministre, M. le Président: Est-ce que la
ministre pourrait reconnaître bien honnêtement qu'elle est en
train, présentement, de falsifier et de dénaturer les consensus
de la commission parlementaire en prétendant... Des voix: Oh! Oh!
Le Président: S'il vous plaît!
M. Brassard: ...que la mise en vigueur de mesures punitives et
coercitives serait l'objet de consensus alors qu'elle sait très bien
qu'il n'y a que quelques intervenants sur plus d'une centaine entendus en
commission parlementaire qui ont privilégié ces mesures, les
autres ayant plutôt réclamé non seulement le maintien
intégral de la gratuité, mais également son
élargissement aux étudiants à temps partiel?
(14 h 30)
Le Président: Mme la ministre de l'Enseignement
supérieur et de la Science.
Mme Robillard: D'abord, M. le Président, je n'ai pas
à revoir une copie du projet de la réforme, le projet de la
réforme n'a pas encore été déposé
officiellement, premièrement.
Deuxièmement, quand on me dit de ne pas falsifier,
dénaturer les consensus à la commission parlementaire, M. le
Président, je demanderais au critique de l'Opposition d'avoir un petit
peu plus de responsabilité, comme l'Opposition en avait eue aussi au
niveau des travaux de la commission parlementaire. Je veux bien croire qu'on
veut se rapprocher du milieu des jeunes dans l'Opposition, mais, au moins,
faites-le avec de la responsabilité.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: En question complémentaire, M. le
député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: M. le Président, la ministre, pourrait-elle
cesser de faire preuve d'arrogance et de suffisance...
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: M. le député de
Lac-Saint-Jean, vous êtes en question complémentaire, posez une
question, s'il vous plaît!
Une voix: II avait posé une question.
Le Président: alors, s'il vous plaît! à
l'ordre, s'il vous plaît! un instant! à l'ordre, s'il vous
plaît! m. le député, s'il vous plaît! s'il vous
plaît! alors, question complémentaire.
M. Brassard: Pourrait-elle reconnaître, M. le
Président, que dans le propre document de son ministère
concernant la synthèse des mémoires et des
délibérations en commission parlementaire il est très
clairement indiqué, en toutes lettres, que pour ce qui est des mesures
punitives, coercitives en matière de durée des études, il
n'y a pas
consensus. c'est écrit en toutes lettres qu'il n'y a pas
consensus, que le seul consensus qui existe, c'est le maintien intégral
de la gratuité des études collégiales.
Le Président: Mme la ministre.
Mme Robillard: M. le Président, demeurons calmes. Donnons
l'exemple à notre jeunesse. Quand on parle calmement, fermement, avec
certitude, suite à la commission parlementaire, on va nous traiter
d'arrogance? M. le Président, je ne sais pas aujourd'hui qui utilise un
ton solennel pour provoquer encore plus des crises inutiles.
M. le Président, j'inviterais davantage les étudiants et
les étudiantes à concentrer leur énergie sur la
réussite éducative de cette année et d'attendre le
dépôt du projet de la réforme au lieu d'être
obligés d'allonger une session, ce que, je pense, les étudiants
ne souhaiteraient pas. Attendons donc le dépôt de la
réforme et nous pourrons en discuter avec calme, M. le
Président.
Le Président: En question complémentaire.
M. Brassard: M. le Président, la ministre ne convient-elle
pas que, si elle veut vraiment mobiliser tous les acteurs du milieu
collégial pour des changements qu'elle juge essentiels - c'est
ça, son objectif, de mobiliser tout le monde - il est absolument
impérieux, dans les circonstances, qu'elle renonce à mettre en
vigueur des mesures qui auront pour effet de multiplier les abandons
plutôt que d'augmenter le taux de réussite et que, si elle veut
réussir sa réforme, il faudrait qu'elle renonce à ces
mesures publiquement, officiellement? Ce serait faire acte de salubrité
publique.
Le Président: Mme la ministre.
Mme Robillard: M. le Président, la sagesse du critique de
l'Opposition a été de courte durée. Je vais lui rappeler
ses propres paroles dans son communiqué de presse: «Nous ignorons
encore, dit-il, l'argumentation qui fonde les orientations gouvernementales.
Nous ne pouvons faire un choix éclairé», a-t-il dit.
Des voix: Bravo!
Le Président: Toujours en question
complémentaire.
M. Brassard: M. le Président, la ministre, s'il est vrai
que j'attends son énoncé de politique pour me prononcer sur
l'ensemble des changements qu'elle propose, est-ce que, au moins, elle est
prête à admettre que l'une des conditions fondamentales de la
réussite d'une réforme de l'enseignement collégial, c'est
que le gouvernement s'engage formellement à ne pas toucher, de quelque
façon que ce soit, à la gratuité des études
collégiales? c'est là une condition essentielle pour la
réussite de n'importe quelle réforme qu'elle peut envisager.
Le Président: Mme la ministre.
Mme Robillard: M. le Président, le présent
gouvernement s'engage à soutenir la réussite des jeunes au
Québec, et c'est dans ce sens-là qu'il prépare sa
réforme de l'enseignement collégial.
Le Président: Alors, en question principale, M. le leader
de l'Opposition et député de Joliette.
Enquête sur l'Ordre du Temple solaire
M. Chevrette: Merci, M. le Président.
À la suite d'une saisie d'armes chez des membres de l'Ordre du
Temple solaire, la semaine dernière, par la Sûreté du
Québec, des faits passablement troublants ont été rendus
publics. Cet Ordre aurait recruté près du tiers de ses membres
parmi les employés d'Hydro-Québec, certaines séances de
formation ont été dispensées dans des bureaux
d'Hydro-Québec et il y aurait même eu des dépenses
d'engagées à même le budget de la société
d'État.
Suite à la demande d'enquête ou à l'enquête
déclenchée par le président d'Hydro-Québec, est-ce
que la ministre de l'Énergie peut nous assurer qu'elle mettra cette
Chambre au courant de toutes les révélations de cette
enquête?
Le Président: Mme la ministre de l'Énergie et des
Ressources.
Mme Bacon: Je pourrais dire, M. le Président, que les
informations que nous donne aujourd'hui le député de Joliette,
leader de l'Opposition, sont importantes, mais non vérifiées.
Alors, attendons, s'il vous plaît, d'avoir le dossier complet de
l'enquête interne qui est faite en ce moment à
Hydro-Québec, qui n'est pas terminée. Je la ferai valoir sur la
place publique, M. le Président, et je sais très bien que le
président fera la même chose.
Le Président: En question complémentaire.
M. Chevrette: M. le Président, est-ce que Mme la ministre
pourrait nous dire s'il y a des suspensions de faites présentement, au
moment où on se parle, dans ce cas-là?
Le Président: Mme la ministre.
Mme Bacon: Beaucoup de choses ont été dites, M. le
Président, et non vérifiées, je le répète
encore au leader de l'Opposition. Attendons que l'enquête soit
terminée. S'il y a lieu, je pense qu'à ce moment-là
Hydro-Québec prendra
ses responsabilités, et je verrai à ce que ça se
fasse.
Le Président: En complémentaire.
M. Chevrette: M. le Président, je vais reprendre ma
question.
Est-ce que la ministre sait s'il y a eu ou non une ou des suspensions
à Hydro-Québec suite au début de cette enquête?
Le Président: Mme la ministre.
Mme Bacon: à ma connaissance, il peut y en avoir eu une,
mais, encore une fois, je le dis sous toutes réserves. attendons que
tous les faits soient vérifiés pour savoir qui doit être
suspendu, si suspension est nécessaire, et quels seront les
résultats de l'enquête, et nous la ferons connaître, m. le
président.
Le Président: En question complémentaire,
toujours.
M. Chevrette: M. le Président, est-ce que Mme la ministre
de l'Énergie peut nous dire, en sa qualité de
vice-première ministre, s'il y a une enquête qui se fait au
ministère des Finances pour également vérifier les
allégations à l'effet que certains fonctionnaires du
ministère des Finances seraient impliqués?
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: Encore une fois, je pense qu'on a mentionné des
noms sur la place publique, on a mentionné des ministères, on a
mentionné des organismes. Je pense que tout ça devrait être
vérifié avant que, vous comprendrez bien, je m'exprime sur la
place publique, M. le Président.
Le Président: Toujours en complémentaire.
M. Chevrette: M. le Président, pour permettre à la
ministre de pouvoir faire exécuter une enquête la plus
complète, pourrait-elle demander de vérifier si des membres de
l'Ordre du Temple solaire auraient connu des engagements par certaines
vice-présidences à Hydro-Québec et auraient connu des
promotions également, pour que l'enquête soit vraiment
complète?
Le Président: Mme la vice-première ministre.
Mme Bacon: Je pense que ça fait partie d'une enquête
complète qu'est en train de faire Hydro-Québec, M. le
Président.
Le Président: Alors, en question principale...
M. Dufour: Complémentaire.
Le Président: ...complémentaire, M. le
député de Jonquière.
M. Dufour: Oui. Le ministre de la Sécurité publique
est-il en mesure de nous confirmer les informations parues dans le journal
La Presse de samedi dernier à l'effet que l'Ordre du Temple
solaire s'apprêtait à commettre des attentats politiques?
Le Président: M. le ministre de la Sécurité
publique.
M. Ryan: Non, M. le Président.
Le Président: Toujours en question complémentaire,
M. le député de Jonquière.
M. Dufour: Si le ministre n'est pas prêt à se
commettre dans ce sens-là, est-ce qu'il peut nous assurer que, lorsqu'il
aura tous les faits, il va s'assurer que, s'il y avait ces
possibilités-là, ce serait vraiment neutralisé par la
Sûreté du Québec, lorsqu'il pourra nous faire rapport?
Le Président: M. le ministre. (14 h 40)
M. Ryan: La Sûreté est sous directive permanente de
veiller à la sécurité du Québec, à la
protection de la sécurité publique. C'est entendu que, lorsque
des personnages publics sont menacés dans leur vie ou dans leur
sécurité physique, il y a une responsabilité non seulement
de la Sûreté du Québec mais de tous les corps de police du
Québec. Pour le moment, les journaux ont rapporté que des
personnes ont été mises sous arrêt pour avoir
pratiqué un commerce d'armes qui était illégal. Nous n'en
savons pas davantage pour l'instant. Tout le reste est à venir.
Le Président: Pour une autre question
complémentaire.
M. Dufour: Est-ce que le ministre peut nous assurer si,
effectivement, il y a une enquête en marche actuellement par la
Sûreté du Québec concernant tous ces
allégués?
Le Président: M. le ministre.
M. Ryan: C'est très dangereux. Il faut être prudent,
et je pense que la Sûreté l'est aussi, et je l'apprécie.
L'enquête a porté sur des individus précis - je n'ai pas
à vous donner tout le contexte - mais de là à
transférer l'enquête vers une organisation, il faut y penser bien
comme il faut. Il faut avoir des indications très sûres que
l'organisation elle-même cultivait l'illégalité ou incitait
ses membres à des comportements criminels. Nous n'en sommes pas
là d'après la preuve que nous avons, et je demanderais qu'on soit
très prudent dans les jugements qu'on porte
sur les organismes.
M. Chevrette: M. le Président, en additionnelle.
Le Président: Alors, pour une dernière question
additionnelle.
M. Chevrette: Oui, tout en étant très prudent.
Est-ce que la Sûreté du Québec, lorsqu'elle a des
motifs de croire, par exemple, qu'il peut y avoir utilisation des deniers
publics ou abus de pouvoir à l'intérieur d'une structure, n'a pas
le mandat de facto d'enquêter également et de ne pas se contenter
d'une simple enquête administrative?
Le Président: M. le ministre de la Sécurité
publique.
M. Ryan: Regardez, lorsqu'il y a des raisons sérieuses de
croire que des actions criminelles ont été commises ou sont en
préparation, il y a une responsabilité de la Sûreté
du Québec qui me paraît évidente, de même que des
autres corps policiers encore une fois.
Le Président: En question principale, Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Projet de privatisation d'installations de la
SAQ
Mme Harel: M. le Président, le ministre de l'Industrie, du
Commerce et de la Technologie s'apprête à céder à
des intérêts privés les équipements d'embouteillage
de la Société des alcools du Québec situés à
Anjou. Des pressions de plus en plus fortes venant des rangs des
députés libéraux réclameraient des privatisations
à tout prix, et le ministre s'apprêterait à y
succomber.
Est-ce que le ministre est prêt à soumettre à une
consultation publique les différents scénarios de privatisation
qu'il a chargé la Société des alcools du Québec de
lui préparer?
Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce
et de la Technologie.
M. Tremblay (Outremont): II est vrai, M. le Président, que
le rapport Poulin a suggéré la privatisation de l'usine
d'embouteillage de la Société des alcools du Québec. Il
est également vrai que l'Association des détaillants en
alimentation fait des représentations depuis près de deux ans
pour élargir la gamme de vins disponibles dans le réseau des
épiceries. Il est également vrai, M. le Président, que
j'ai rencontré les représentants des travailleurs et des
travailleuses au niveau syndical. Aucune décision n'a été
prise.
Nous analysons la situation dans son ensemble, et j'ai convenu, avec
toutes les parties, que les décisions se prendraient dans la
transparence et dans la consultation. Alors, lorsque les évaluations
tant quantitatives que qualitatives seront terminées, je me suis
engagé, avec les parties impliquées, à les consulter et
à leur faire part des décisions qui pourraient être prises
éventuellement.
Le Président: En question complémentaire.
Mme Harel: M. le Président, qu'est-ce que
l'élargissement de la vente de vins dans les dépanneurs a
à voir avec la privatisation des installations d'embouteillage? Le
ministre peut-il nous indiquer combien d'emplois seraient touchés par un
tel scénario de privatisation?
Le Président: M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): On ne peut dissocier la privatisation de
l'usine d'embouteillage de l'élargissement de la gamme dans les
épiceries. Attendez, là!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Très bien. J'apprécierais qu'il n'y ait pas de commentaires, s'il
vous plaît, ni d'un côté ni de l'autre.
M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): On ne peut dissocier les deux dossiers
parce que, dans les ententes internationales négociées avec la
Communauté économique européenne, et dans le contexte du
GATT, les seuls vins qui peuvent être vendus en épicerie sont des
vins embouteillés au Québec, donc, usines d'embouteillage et
marques Québec. Alors, on n'a pu dissocier les deux dossiers, ils sont
indissociables.
Lorsque nous aurons évalué le dossier dans son ensemble,
on pourra répondre à des questions additionnelles. Mais une chose
est certaine, c'est évident que, pour un gouvernement qui crée
des emplois, la protection de l'emploi devient une des priorités.
Le Président: Toujours en question
complémentaire.
Mme Harel: M. le Président, pourquoi essayer d'associer,
comme le fait le ministre présentement, l'élargissement de la
gamme de vins dans les dépanneurs? Pourquoi le fait-il
présentement quand, finalement, les vins embouteillés par la SAQ
pourraient très bien, par une entente avec les... par les distributeurs,
évidemment, embouteiller ces vins?
M. le Président, est-ce que le ministre n'est pas conscient
qu'avec les 3000 valideuses dans les dépanneurs, qu'avec la hausse du
taux pour la vente, justement, des billets de loterie, qu'avec
l'élargissement de la gamme de vins, il s'agit là
d'un prix de consolation pour les dépanneurs qui sont durement
touchés par la controverse de la Loi sur les heures d'affaires?
Le Président: M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): Toute privatisation éventuelle de
l'usine d'embouteillage implique que l'acheteur éventuel va vouloir
maintenir la possibilité d'avoir accès, de façon
privilégiée, au réseau des épiciers. Alors, dans ce
sens-là, on ne peut dissocier les deux dossiers. Mais quelles que soient
les questions, M. le Président, une chose est certaine, c'est que nous
allons évaluer le dossier à son mérite et nous ne ferons
certainement pas ce que le Parti québécois a fait lorsqu'il a
tenté de privatiser la Société des alcools du
Québec. La Société des alcools du Québec et le
gouvernement du Québec sont présentement aux prises avec des
poursuites judiciaires importantes qui sont le reflet de ce que vous avez fait
lorsque vous avez tenté de privatiser la Société des
alcools du Québec, il y a de nombreuses années.
Le Président: Toujours en question
complémentaire.
Mme Harel: M. le Président, est-ce que je peux inviter le
ministre à relire les déclarations de son collègue, le
député de Laporte, lorsque, au nom de l'Opposition officielle
libérale, il s'opposait avec la dernière véhémence
à la privatisation partielle de la SAQ? Et le ministre peut-il
répondre à cette question: Est-il prêt à soumettre
à une consultation publique les différents scénarios de
privatisation qu'il a chargé la SAQ de lui préparer?
Le Président: M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): J'ai mentionné tout à
l'heure, M. le Président, que j'ai l'intention de consulter toutes les
parties impliquées dans une privatisation éventuelle de la
Société des alcools du Québec, mais je
réitère les propos suivants, à savoir qu'aucune
décision n'a été prise. Plusieurs intervenants ont fait
des représentations, mais, avant de prendre quelque décision que
ce soit, nous allons évaluer le dossier à son mérite, de
façon quantitative, également de façon qualitative, M. le
Président.
Négociations pour récupérer une
portion des coûts du référendum du 26 octobre 1992
Le Président: En question principale, M. le leader de
l'Opposition et député de Joliette.
M. Chevrette: M. le Président, on a appris, la semaine
dernière, que le référendum du 26 octobre dernier avait
coûté 104 000 000 $ aux contribuables canadiens et, ça,
ça ne tient pas compte des 40 000 000 $ que nous, citoyens
québécois, avons payés pour le référendum
sous notre juridiction ou sous la loi référendaire du
Québec. Or, on sait très bien que, par nos impôts, nous
payons 25 % de la facture canadienne, donc 25 000 000 $, ce qui
représenterait un coût de 65 000 000 $ pour les
Québécois, ce qui est tout à fait injuste par rapport aux
autres contribuables canadiens. on se rappellera que le ministre criait assez
fort, en mai dernier, en disant: ii n'y a pas de problème - non pas en
mai, mais en septembre dernier - nous allons négocier au plus haut
niveau et nous allons aller chercher notre quote-part. quel est le fruit de vos
négociations, m. le président?
Le Président: M. le ministre délégué
à la Réforme électorale.
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, vous
aurez facilement compris que le député de Joliette a
réponse à sa question lorsqu'il a dit que la négociation
était au plus haut niveau. Je ne me considère pas dans ce
niveau.
Des voix: Ha,ha, ha!
Le Président: En question complémentaire.
M. Chevrette: Franchement, M. le Président, ce n'est pas
que les contribuables québécois veulent savoir s'il y a des
résultats ou s'il y a du pédantisme dans la réponse!
Le Président: M. le ministre. (14 h 50)
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je
connais très bien le député de Joliette et je suis
pleinement convaincu qu'il ne pensait pas du tout les derniers mots qu'il a
prononcés.
Une voix: C'est vrai. Des voix: Ha,ha, ha!
M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, vous
comprendrez que du travail a été fait à un autre niveau
que le mien, soit au niveau du premier ministre, et que, dans les
circonstances, je désirerais prendre avis de la question et, dès
que possible, tenter de donner réponse à votre question, qui est
une question qui se justifie très bien à ce moment-ci.
Le Président: Toujours en question
complémentaire.
M. Chevrette: M. le Président, la question a d'autant plus
d'importance, et je voudrais m'adresser au ministre à nouveau pour lui
demander: Au moment où son gouvernement s'apprête à couper
quelque 442 000 000 $, ne
croit-il pas important d'aller chercher au moins les sommes qui nous
sont dues avant de procéder à des coupures?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Charlesbourg): m. le président, je
pense qu'il faut tout faire, et c'est ce que nous faisons, pour aller
récupérer des sommes qui, normalement, nous sont dues.
Négociations au sujet de l'entente
trilatérale de Lac-Barrière
Le Président: En question principale, M. le
député de Laviolette.
M. Jolivet: Merci, M. le Président.
Le 12 février dernier, dans un climat d'intimidation
généralisé, le gouvernement du Québec suspendait
unilatéralement l'entente trilatérale de Lac-Barrière
à l'égard des Algonquins qui, de leur côté, refusent
de céder sur les questions de l'identification des zones sensibles et de
la zone tampon de 60 mètres. Durant les dernières semaines, le
ministre délégué aux Affaires autochtones a
envenimé un peu la situation en qualifiant les Algonquins d'absolutistes
et d'intégristes. Ces derniers ont répliqué en accusant le
ministre des Forêts d'être le principal obstacle à la
résolution du problème de la gestion intégrée des
ressources dans le parc de La Vérendrye. D'un autre côté,
le représentant des Algonquins, M. Clifford Lincoln, a trouvé,
d'après moi, les mots appropriés en disant: Le Québec n'a
pas le droit légal et moral de suspendre les négociations.
Je voudrais savoir de la part du ministre des Forêts s'il peut
répondre aux allégations d'être le responsable de ce
dossier en difficulté et je voudrais savoir de sa part quelles sont les
interventions qu'il a fait valoir auprès de son collègue des
Affaires autochtones et du Conseil des ministres afin de favoriser un
déblocage dans cette crise.
Le Président: M. le ministre des Forêts.
M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le
Président, en conformité avec la décision du Conseil des
ministres, je crois que les Algonquins doivent reconnaître que ce sont
les lois du Québec et du Canada qui s'appliquent dans les
opérations forestières du parc de La Vérendrye.
Pour répondre au député de Laviolette, je ne suis
pas le responsable des problèmes que nous vivons là, parce
qu'à chaque fois que nous sommes intervenus il y a toujours eu des
demandes additionnelles pour faire en sorte de retarder les opérations
forestières et de priver de travail les employés de la
région de Grand-Remous et de Maniwaki.
Maintenant, si le ministre délégué aux
Affaires autochtones veut compléter ma réponse, ça
me fera plaisir de lui céder la parole.
Le Président: Alors, en question complémentaire, M.
le député de Laviolette.
M. Jolivet: M. le Président, est-ce que le ministre des
Forêts, comme son collègue d'ailleurs des Affaires autochtones,
considère qu'il n'est plus question de discuter des zones sensibles et
qu'il faut maintenant passer directement à la phase d'élaboration
du pian d'aménagement intégré des ressources?
Le Président: M. le ministre des Forêts.
M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le
Président, si les Algonquins et leur représentant veulent
collaborer, je pense que nous allons faire de grands pas dans la
rédaction d'un plan d'aménagement intégré des
ressources renouvelables, ce qui fait l'objet de l'entente qui a
été signée en 1991.
Le Président: Toujours en complémentaire.
M. Jolivet: Oui. Est-ce que le ministre croit que la norme de
protection dont il est question ici, en difficulté - c'est la zone
tampon de 20 mètres, tel que prévu par la loi actuelle - ne
pourrait pas, dans les circonstances, pour permettre un déblocage de la
situation dans le contexte des négociations, être
considérée au niveau demandé par les autochtones comme
ailleurs au Canada, en Ontario en particulier?
Le Président: M. le ministre.
M. Côté (Rivière-du-Loup): M. le
Président, j'aime bien ça quand le député de
Laviolette me cite l'Ontario et le Canada comme exemples.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Côté (Rivière-du-Loup): C'est que la bande
de 20 mètres qui sert pour la protection des cours d'eau et de chemin
pour la faune, M. le Président, elle a été
élaborée par des spécialistes en la matière de
l'Université Laval, et je ne pense pas qu'il y ait personne dans cette
Assemblée qui a la compétence de discuter de cette
norme-là.
Le Président: Alors, en question complémentaire, M.
le député de Duplessis.
M. Perron: M. le Président, ma question s'adresse au
ministre délégué aux Affaires autochtones. Le ministre ne
reconnaît-il pas que, dans ce dossier de Lac-Barrière, la
déclaration sévère de son ancien collègue du
Conseil des ministres, M. Lincoln, en rapport avec les activités du
gouvernement constitue un désaveu
formel de sa propre gestion dans la crise actuelle? et le ministre
pourrait-il nous informer quand il va cesser de pratiquer le chantage
économique à l'égard des algonquins de lac-barrière
et plutôt réagir en fonction de négociations, de signature
d'entente en rapport avec les algonquins de lac-barrière?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Affaires autochtones.
M. Sirros: M. le Président, il faut d'abord, pour la
première partie de la question, bien comprendre que le
représentant des Algonquins est exactement ça, un
représentant des Algon-guins, qui agit en leur nom. Il est clair que
nous avons un différend qui nous a amenés à une
deuxième impasse, et M. Lincoln a réitéré ce que
les Algonquins ont, par le passé, affirmé sans beaucoup d'autres
appuis, M. le Président, au niveau de la façon dont les choses se
sont déroulées depuis 18 mois.
Maintenant, quant au désir que nous avons d'aller de l'avant et
d'essayer d'amener cette entente à terme, il faut bien comprendre que la
différence se trouve au niveau de la façon dont chacun d'entre
nous entrevoit le but de l'entente. Pour nous, ce n'est pas une entente de
cogestion qu'on a signée, mais une entente qui nous aurait permis de
tenir compte des activités traditionnelles des Algonquins dans la
confection d'un plan de gestion intégrée des ressources. Pour les
Algonquins, c'est des droits de gestion qu'ils voient et c'est pour ça
que les propositions qu'ils font quant à la gestion du territoire n'ont
pas de contenu indigène ou autochtone, mais ce sont des propositions qui
touchent à l'ensemble de l'intervention forestière, M. le
Président.
Le Président: Pour une autre question
complémentaire.
M. Perron: M. le Président, est-ce que le ministre peut
nous confirmer si oui ou non il y a eu des rencontres entre lui-même, son
collègue des Forêts ainsi que M. Lincoln et les Algonquins au
cours des dernières semaines en rapport avec le dossier qu'il vient de
mentionner?
Le Président: M. le ministre délégué
aux Affaires autochtones.
M. Sirros: II n'y a pas eu de rencontre entre M. Lincoln et les
ministres. M. Lincoln, je le réitère et je le
répète, c'est le représentant engagé par les
Algonquins pour les représenter à la table avec notre
représentant spécial. J'ai rencontré le chef des
Algonquins; M. Lincoln était présent à cette rencontre, le
12 février dernier, si ma mémoire est bonne.
Rôle de la Caisse de dépôt
et
placement du Québec dans la
réforme
des institutions financières
Le Président: En question principale, M. le
député de Jacques-Cartier.
M. Cameron: Merci, M. le Président.
My question is for the Minister of Industry, Trade and Technology. At
the moment, the Minister of Financial Institutions is considering a substantial
reform on the level of financial institutions. At the same time, your colleague
sitting next to you is listening to some long public hearings concerned with
the reform of professions, but no one seems to be able to do anything about the
money managers of the Caisse de dépôt.
It strikes me that I would be looking for a syndic or some kind of
reform in institutions if I were a minority shareholder in Unigesco and I
wonder if the Minister of Industry, Trade and Technology would not agree that
the recent action of the Caisse is not exactly the sort of thing that will
encourage investment and development in Québec.
Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce
et de la Technologie.
M. Tremblay (Outremont): Je pense que c'est une question qui
devrait être posée au ministre des Finances.
Des voix: Par intérim.
Le Président: S'il vous plaît! S'il vous
plaît! Question complémentaire.
M. Cameron: I would have been happy to address it to the Minister
of Finance. In his absence, therefore, I will do as the leader of the
Opposition did, discussing the same question and refer it to the President of
the Treasury Board.
Le Président: M. le président du Conseil du
trésor.
M. Johnson: I really thought I answered the substance of the
question in my original reply to the leader of the Opposition.
I do not believe that the consultations that my colleague responsible
for financial institutions is currently conducting have any bearing on this
specific subject that has been raised. I do not think it even has a bearing on
the general subject that has been raised.
Le Président: En question complémentaire. (15
heures)
M. Cameron: I would like to ask the Director of the Treasury
Board, if what financial institutions do in Québec does not have any
bearing on what is done by the Caisse de dépôt, what does
have a bearing on what is done by the Caisse de dépôt?
Le Président: M. le président du Conseil du
trésor.
M. Johnson: M. le Président, pour remettre les choses en
place, la consultation que ma collègue, la ministre des institutions
financières... enfin, à laquelle elle s'occupe actuellement, vise
à assurer un cadre réglementaire et législatif qui
permette à nos institutions financières, telles que
définies, on les connaît, à se comporter sur le
marché d'une façon qui ne met pas en danger leur base
financière, leur ratio de capitalisation et, en conséquence, ne
mette pas en danger les épargnes des Québécois.
C'est une question de jugement, par ailleurs, que le
député soulève. Quant à savoir si un actionnaire
d'Univa ou l'autre décide quelle est la rentabilité, quelle est
la nature de la transaction dans laquelle il veut s'impliquer et quelle est la
décision qu'il doit prendre à l'endroit de cette transaction,
ça m'apparaît n'avoir absolument aucun rapport avec la
consultation que ma collègue conduit actuellement.
Le Président: Alors, c'est la fin de la période des
questions.
Il n'y a pas de votes reportés.
S'il y avait consentement, nous procéderions immédiatement
aux avis touchant les travaux des commissions. Est-ce qu'il y a consentement
à cet effet?
M. Chevrette: Oui.
Le Président: II y a consentement.
Donc, M. le leader du gouvernement, en requérant l'attention de
tous les collègues, s'il vous plaît!
Avis touchant les travaux des commissions
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Compte tenu du consentement, M. le
Président, j'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, de 15 heures
à 18 heures et de 20 heures à 22 h 30, à la salle
Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'éducation poursuivra ses
auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur
l'avant-projet de loi intitulé Loi modifiant le Code des professions et
d'autres lois professionnelles.
De 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 22 heures ainsi
que demain, le mercredi 17 mars 1993, de 10 heures à 14 heures, à
la salle du Conseil législatif, la commission de l'économie et du
travail poursuivra ses auditions publiques dans le cadre de la consultation
générale sur le plan de développement 1993-1995
d'Hydro-Qué- bec.
J'avise également cette Assemblée, M. le Président,
que demain, le mercredi 17 mars 1993, de 10 heures à 13 heures, à
la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission des affaires sociales
procédera à l'étude détaillée du projet de
loi 43, Loi modifiant la Loi sur le régime de rentes du Québec et
d'autres dispositions législatives.
Par ailleurs, je rappelle à cette Assemblée que demain, le
mercredi 17 mars 1993, de 10 heures à 13 heures, à la salle
Louis-Hippo-lyte-LaFontaine, la commission de l'aménagement et des
équipements entendra les intéressés et procédera
à l'étude détaillée du projet de loi
d'intérêt privé 244, Loi concernant le Conseil de
développement touristique Hull-Chelsea-La Pêche inc.
Le Vice-Président (m. bissonnet): est-ce qu'il y a
consentement pour déroger à l'article 143? consentement. donc,
vos avis sont déposés.
Avis de débat de fin de séance
Je vous rappelle que, tel que convenu à la séance du jeudi
11 mars dernier, il y aura aujourd'hui un débat de fin de séance
au début des affaires du jour. Ce débat concerne les coupures
dans le domaine de la culture. Mme la ministre de la Culture répondra
à M. le député de Gouin.
Renseignements sur les travaux de
l'Assemblée
Je vous informe que demain, lors des affaires inscrites par les
députés de l'Opposition, l'Assemblée entendra le
débat sur la motion inscrite par M. le whip de l'Opposition officielle.
Cette motion se lit comme suit: «Que cette Assemblée se
déclare en faveur du maintien intégral du principe de la
gratuité des études collégiales».
Alors, ceci met fin aux avis.
Motions sans préavis
Motions sans préavis.
M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
Rendre un hommage aux athlètes
québécois qui ont excellé
récemment
sur la scène internationale
M. Gaston Blackburn
M. Blackburn: Merci, M. le Président.
Je demande que cette Assemblée accepte de débattre de la
motion suivante, afin de rendre un hommage particulier à Mme Myriam
Bédard, qui a
remporté la médaille d'or aux 7,5 kilomètres lors
des championnats du monde de biathlon à Borovetsc, en Bulgarie, à
Mme Isabelle Brasseur et M. LJoyd Eisler, qui sont maintenant les nouveaux
champions du monde en patinage artistique en couple en vertu de la
médaille d'or que ces deux athlètes ont remportée lors du
championnat du monde tenu à Prague, à M. Bruny Surin, nouveau
champion du monde des 60 mètres en salle, à M. Jean-Luc Brassard,
qui a décroché la première place à la
compétition des bosses au championnat mondial de ski acrobatique et,
finalement, à M. Philippe LaRoche, champion mondial des sauts à
ski.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a
consentement pour débattre de cette motion?
M. Chevrette: M. le Président, il y a consentement, mais
si on les faisait au jour le jour, il y en aurait moins dans la même.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): II y a consentement. Je
demanderais aux collègues de porter attention, s'il vous
plaît!
Alors, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
M. Blackburn: On ne peut certes pas, M. le Président...
Alors, M. le Président...
M. Blais: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de
règlement, M. le député de Masson.
M. Blais: J'aimerais demander: Est-ce que c'est la même
motion qui a été refusée à Mme la
députée, Mme Juneau, mardi passé?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député, il y a eu consentement. Donc, M. le ministre du Loisir,
de la Chasse et de la Pêche a la parole.
M. le ministre.
M. Blackburn: Merci, M. le Président.
Le tout premier mot qui me vient à l'esprit lorsque j'entends
tous ces noms, c'est «fierté». Je suis persuadé que
tous les membres de cette Assemblée, bien sûr, mais qu'aussi toute
la population du Québec et du Canada est plus qu'heureuse des
résultats obtenus et, par le fait même, des performances
établies par ces grandes personnalités sportives. Au fil des ans,
le Québec a vu naître de grands athlètes, tant du
côté amateur que professionnel, qui nous ont fait vibrer. À
toutes les fois que des Québécoises et des
Québécois dominent leur sport respectif, plus
particulièrement au plan international, nous ressentons un sentiment
tout à fait spécial; nous sommes alors transportés par un
vent d'enthousiasme, et ces athlètes deviennent sans contredit une
source de motivation sans précédent pour les plus jeunes.
C'est le cas de le dire, au cours des dernières semaines et des
dernières heures, le Québec a retenu l'attention de toute la
scène sportive internationale, d'abord par la magnifique performance de
Myriam Bédard. Il en a coulé beaucoup d'eau sous les ponts entre
la première compétition internationale à laquelle elle a
pris part en 1985, à Borovets, en Bulgarie, où elle a
ébloui tout le monde en décrochant la médaille d'or aux
7,5 kilomètres lors des championnats du monde de biathlon. De plus, deux
jours plus tôt, elle mettait la main sur la médaille d'argent du
15 kilomètres. Le nom de Myriam Bédard est sur à peu
près toutes les lèvres depuis quelques années
déjà. Ai-je besoin de vous rappeler qu'il y a à peine un
an Mme Bédard décrochait une médaille de bronze lors de
l'épreuve de 15 kilomètres aux Jeux olympiques d'Albertville?
Elle devenait, alors, la toute première athlète
nord-américaine à gagner une médaille en sport nordique,
qui comprenait le ski de fond, le biathlon et le saut à ski.
Le Québec a poursuivi son ascension vers les plus hauts sommets
lors de la victoire de Mme Isabelle Brasseur et de M. LJoyd Eisler qui sont
maintenant les deux nouveaux champions mondiaux de patinage artistique en
couple grâce à la performance éblouissante qu'ils ont
offerte à Prague. J'ai eu la chance et le privilège de les voir
à l'oeuvre la semaine dernière et je comprends pourquoi. Ils ont
ébloui le monde entier par leur habilité et leur agilité;
ils volaient littéralement sur la glace, et il fallait voir toute
l'ardeur qu'ils ont déployée pour devenir les meilleurs du
monde.
Et comme si cela n'était pas assez, nos Québécois
ne se sont pas arrêtés là. Frappant à la vitesse de
l'éclair, M. Bruny Surin est devenu le monarque mondial des 60
mètres en salle lors d'une magnifique performance réalisée
à Toronto. Favori parmi tous les athlètes présents, Bruny
Surin n'a pas fait mentir sa réputation qui se consolide depuis sa
prestation des Jeux olympiques de Barcelone. Tous se souviennent de sa
prestation de l'été dernier, alors qu'il était venu
près de décrocher une médaille olympique.
Un peu plus loin de Toronto, cette fois, en Autriche, un autre
Québécois, M. Jean-Luc Brassard, a, pour sa part, remporté
la compétition des bosses au championnat mondial de ski acrobatique.
Pour les deux prochaines années, il est le champion mondial de cette
discipline. M. Brassard est un athlète fort prometteur. Après
avoir terminé deuxième lors des qualifications, il a
démontré qu'il possédait l'étoffe des plus grands
dans une discipline sportive fort spectaculaire.
La semaine s'est terminée de belle façon par la victoire
de Philippe LaRoche en Autriche.
Cette performance reconfirmait sa suprématie dans les sauts
à ski. Il avait, d'abord, décroché l'or en 1991, à
Lake Placid, sans parler d'une autre médaille, d'une médaille
d'or arrachée, cette fois, lors des Jeux olympiques d'Albertville. Comme
cela est son habitude, M. LaRoche y a mis toute l'énergie
nécessaire lors de ses sauts, ce qui lui a valu d'être reconduit
comme maître incontesté de cette épreuve.
M. le Président, toutes ces performances démontrent que le
Québec regorge d'athlètes qui nous font honneur un peu partout
dans le monde. Nous devons être fiers de ce qu'ils ont accompli parce
que, en tout temps, ils ne visent qu'un objectif, soit d'être les
meilleurs parmi les meilleurs. (15 h 10)
J'aimerais aussi profiter de l'occasion afin de souligner le travail
accompli par les entraîneurs de ces athlètes. Ces gens-là,
pratiquement à toute heure du jour et de la nuit, leur rôle est
essentiel à la réussite de ces athlètes qui, trop peu
souvent, reçoivent l'encouragement et la petite tape dans le dos que
cela leur prend pour aller un peu plus loin. Je m'en voudrais de ne pas
profiter de l'occasion, de passer sous silence l'appui que reçoivent ces
athlètes de la part de leurs parents, ces premières personnes qui
les ont supportés dans leurs premières activités
sportives. Trop souvent, nous minimisons cet appui des parents qui, parfois,
peut faire la différence entre une victoire et une défaite.
Comme ministre responsable du sport amateur au Québec et surtout
comme Québécois, je suis très fier des performances
offertes par Mmes Bédard et Brasseur et par MM. Eisler, Surin, Brassard
et LaRoche. De telles performances par des athlètes, que plusieurs
d'entre nous avons déjà peut-être côtoyés, ne
peuvent que produire des effets très positifs pour le
développement et l'avancement du sport amateur au Québec. Merci,
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
ministre.
Je suis prêt à reconnaître Mme la
députée de Johnson. Mme la députée, la parole est
à vous.
Mme Carmen Juneau
Mme Juneau: Merci, M. le Président.
C'est avec joie que l'Opposition s'associe au ministre du Loisir, de la
Chasse et de la Pêche pour féliciter ces valeureux athlètes
que sont Myriam Bédard, Isabelle Brasseur, Uoyd Eisler, Bruny Surin,
Jean-Luc Brassard et Philippe LaRoche. Chacun et chacune, dans sa propre
discipline, a su faire preuve de ténacité, d'endurance, mais
surtout d'une volonté inébranlable pour ainsi atteindre
l'excellence.
Isabelle Brasseur et Uoyd Eisler patinent ensemble depuis six ans. Leur
exploit ne date pas d'hier, puisqu'ils courtisent cette première place
depuis bientôt quatre ans. En 1990, ils terminaient seconds aux
championnats du monde, et répétaient l'exploit en 1991.
L'année dernière, ils se classaient troisièmes aux Jeux
d'Albertville. Et j'ai une extraordinaire belle photo, M. le Président.
On a l'impression qu'elle vole vers la première place.
De son côté, Myriam Bédard a commencé
à pratiquer le biathlon lors de son passage dans les cadets. Sa
première course, elle l'a gagnée grâce à sa forme
physique exceptionnelle, puisqu'elle skiait avec des skis de fond loués.
Depuis ses débuts, on constate qu'elle était
prédisposée à un brillant avenir. Son tableau d'honneur
est exceptionnel: championne canadienne junior en 1987; meilleure performance
pour une Canadienne, huitième aux championnats mondiaux senior en 1988;
quatrième au 5 kilomètres aux mondiaux junior en 1989;
deuxième à la Coupe du monde, en Autriche, en 1990; deux
médailles d'or, deux médailles d'argent, une médaille de
bronze et deux places au classement général de la Coupe du monde
en 1991; médaille de bronze aux Jeux olympiques d'Albertville en 1992;
médaille d'argent au 15 kilomètres; et médaille d'or au
7,5 kilomètres, aux Championnats du monde de Borovets en Bulgarie; et,
actuellement, première au classement général de la Coupe
du monde en 1993. C'est tout un exploit! C'est tout un personnage que cette
Myriam Bédard, M. le Président!
Les exploits du sprinter Bruny Surin sont également
impressionnants. Ce jeune Québécois, d'origine haïtienne,
porte-parole officiel de la Semaine interculturelle, est maintenant champion du
monde des 60 mètres en salle. Il s'est même permis de briser le
record canadien en parcourant la distance en 6,50 secondes. Cet athlète
exceptionnel pratique la course depuis 1989.
Je m'en voudrais enfin de ne pas souligner les performances de Jean-Luc
Brassard et de Philippe LaRoche, deux leaders mondiaux dans le ski acrobatique
et, de surplus, M. le Président, originaires de ma région.
Vous savez, M. le Président, j'écoutais à la
télévision un reportage d'Isabelle Brasseur, en direct de Prague,
et ce qui m'a frappée, c'est ses valeurs humaines, parce qu'elle disait
que ce qui était important, c'était de travailler pour
réussir ce qu'on faisait. Elle a aussi mentionné le fait que son
père l'avait beaucoup aidée, que son père,
malheureusement, elle l'a perdu l'année dernière, et qu'elle a
traversé des moments très difficiles. J'ai remarqué cette
chaleur quand elle parlait de ses proches, quand elle donnait
l'évaluation de ses valeurs humaines, et c'est ça, je pense, qui
est important, M. le Président. C'est les valeurs humaines que tu peux
avoir à l'intérieur de toi-même. Ça, je pense que
c'est plus important, et c'est ce qui fait que tu réussis dans la
vie.
Bruny Surin, qui était au programme «Le Point», hier
soir, disait aussi comment c'était
important, pour lui, de rester lui-même, même avec toutes
les médailles, même avec toutes ses premières places,
comment c'était important, pour lui, de rester lui-même en ce qui
a trait à sa personnalité, à son côté humain,
à son côté chaleureux que n'importe qui pouvait sentir.
Sauf, M. le Président, que je suis bien obligée d'apporter
ce bémol à ce qu'on vit aujourd'hui. On devrait, bien sûr,
ne pas passer sous silence ce que le ministre est en train de faire dans les
loisirs.
M. le Président, c'est inacceptable ce qu'il fait
présentement. Je regardais... La ministre de l'Éducation aussi.
Dans un journal, on disait: Semaine historique pour le Québec. On
disait: Quelle semaine incroyable pour le sport québécois! C'est
Mario Brisebois qui disait ça. Il disait: «Ces réussites
successives ont de quoi faire réfléchir les ministres de
l'Éducation, qui veut retirer l'éducation physique des
écoles, et du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, qui tente de
couper les budgets de la Fédération sportive du Québec.
»
M. le Président, depuis la semaine dernière, jeudi
passé, quand j'ai posé une question sur les coupures des CRL, 46
% de coupures, il a voulu faire son «smart», il m'a répondu
par une motion qu'il présente cinq jours après. Cette motion,
aujourd'hui, devait être faite la semaine passée, comme le leader
le disait, il en aurait peut-être eu moins à féliciter
à la fois. Mais remarquez bien qu'on est très fiers aussi de les
féliciter. mais en ce qui a trait aux coupures dans les crl, il y a eu
un editorial la semaine dernière par un chroniqueur sportif de l'estrie
qui, à la radio, a dit ceci, après avoir félicité,
bien sûr, nos athlètes qui revenaient des jeux du québec,
et je le cite, m. le président: si je suis très heureux que le
gouvernement québécois conserve sa subvention de 275 000 $
versée aux villes hôtesses des jeux du québec, je
m'élève contre l'hypocrisie de ce même gouvernement qui,
depuis 1984, ne donne que 38 000 $ au conseil régional des loisirs de
l'estrie pour organiser les finales régionales de ces mêmes jeux.
ce même gouvernement, qui vient de couper les vivres à
sports-québec, cela se traduit par urne coupure de 46 % à notre
région, de 229 000 $; la subvention de sports-québec à
l'estrie vient d'être coupée de 105 000 $. ça, c'est de
l'argent pour les stages d'entraîneurs, de premiers soins, de soutien
à plusieurs organismes.
Bref, si plusieurs pavoisent de la réussite de nos jeunes - et de
nos plus âgés, et de nos athlètes dont on parle aujourd'hui
- dans le sport, ces coupures sauvages d'un gouvernement hypocrite handicapent
sérieusement l'affaire du développement chez nous.
J'espère qu'il y aura de la contestation, que les municipalités
qui se retrouveront avec le magot, que les bénévoles qui se
retrouveront encore plus surchargés vont manifester leur
mécontentement, car c'est un choix de société qui se pose.
Des coupures, il doit probablement y en avoir, mais est-ce qu'on cesse
d'investir dans notre jeunesse pour payer la sécurité publique
plus tard? Est-ce que c'est ça qu'on veut comme société,
des jeunes qui font moins de sport? C'est exactement là où on
s'en va.
Pourquoi j'ai amené ça, M. le Président? Parce
qu'il se disait fier tout à l'heure de dire que ces grands champions,
dont vraiment on doit être fiers tout le monde, mais pas juste fiers du
bout des lèvres, il faut être fiers en ce sens que c'est important
pour un gouvernement d'aider ses jeunes athlètes.
J'ai reçu une cinquantaine de lettres des CRL qui se voient
obligés, s'il y a une compression de 46 %, de laisser tomber nos jeunes
athlètes, M. le Président. Et ça, je ne peux pas
comprendre et je ne peux pas accepter ça. Parce que, pendant qu'ils font
du sport, ils ne sont pas sur les machines à boules et ils ne sont pas
à traîner les rues. C'est ça qui est important. Et
ça, je trouve ça terrible qu'on coupe les vivres à ceux
qui, dans le milieu, vont chercher nos jeunes et leur montrent à faire
du sport pour en arriver à ce qui arrive aujourd'hui à Isabelle
Brasseur, à Bruny Surin, à Myriam Bédard et à toute
cette panoplie de jeunes dont on est si fiers. (15 h 20)
Ça m'inquiète, M. le Président. Je trouve ça
inacceptable de la part d'un gouvernement qui a été élu
par une population et qui doit faire en sorte de supporter le sport, de
supporter les jeunes athlètes pour que, demain, on soit fiers d'eux,
pour que demain ils portent nos couleurs à travers le monde et qu'ils
arrivent premiers, pour qu'on arrive ici et leur dire: Oui, on est fiers de
toi; oui, tu as du courage; oui, tu as bien fait ça; oui, on est tous
très heureux de ce qui se passe pour vous autres et pour nous, parce que
vous portez nos couleurs. Mais, si on leur coupe îles vivres, on ne
pourra plus les féliciter un peu plus tard.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Johnson, de votre intervention.
Alors, sur cette même motion, M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce. M. le député.
M. Gordon Atkinson
M. Atkinson: M. le Président, Mr. Speaker, I take this
occasion to congratulate Quebec's Myriam Bédard who, over the past
couple of years, has continued to perform at the highest possible level and
over this past week she, once again, was placed on the podium after winning the
gold medal for the 7, 5 km at the World Biathlon Championships in Bulgaria.
I am delighted to add my voice of con-
gratulations to Isabelle Brasseur and her partner, LJoyd Eisler, in
winning the gold medal at the World Figure Skating Championships. I think it
only right, Mr. Speaker, that LJoyd Eisler be included in our congratulations
as he, a native of Ontario, now resides in Québec where he and his
partner, Isabelle Brasseur, now train at the southshore Montréal
community of Boucherville. For this young pair, it is the culmination of a
3-year dream where they stood on the winners' podium, but never in the dominant
gold medal place. They have competed as a duo in six world championships,
beginning in 1987 where they placed seventh after placing ninth at the Calgary
Olympics.
Mr. Speaker, I also take great pride in those other Québec and
Canadian athletes who also won gold medals in recent weeks. I would like to pay
tribute to Bruny Surin of Montréal, who after being continuously
overshadowed by Ben Johnson, won, last Friday, the World Indoor Championship
crown as the fastest sprinter in the world over 60 meters. Philippe LaRoche of
Lac-Beauport defended his world free style ski title over this past weekend.
This competition held every second year has seen no nation other than Canada
win the men's aerial competition. So, my congratulations to Philippe LaRoche.
Not to be forgotten in the plethora of medals by Québec and Canadian
athletes, I must also congratulate Jean-Luc Brassard for his gold-medal win in
the mogul ski competitions. As a side note to his victory, Mr. Speaker, I point
out that Jean-Luc is the boyfriend of gold medalist Isabelle Brasseur. Could a
victory be more sweet than to have a love story intertwined with gold medal
victories for two young Québec athletes?
For 40 years, I was involved in the various Olympic, panamerican,
international competitions, the Canadian Games, as a commentator on the English
network of CBC Television and Radio. Over that span of time, I was rewarded
most amply by hearing Canada's national anthem being played as our athletes won
the major prize of the gold medal. There is nothing more stearing than standing
for «0 Canada» following a long, hard, gruelling competition, that
lasts, in some cases, for days, the same thrill of accomplishment and pride in
our athletes, I felt, when they mounted the podium to receive their
well-deserved gold medal.
To all who competed, my sincerest best wishes and congratulations for a
job well done. It made my ancient sports commentator's heart grow glad and
proud of their accomplishments.
And on a final note, Mr. Speaker, I would like to say «bonne
chance!» to the City of Québec in its drive to have the first
Olympic Games of the 21 st century.
Thank you, Mr. Speaker.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, en vertu de
votre droit de réplique, en vous indiquant qu'il y a un temps maximum de
20 minutes.
M. Gaston Blackburn (réplique)
M. Blackburn: Merci, M. le Président.
J'écoutais, tout à l'heure, la députée de
Johnson qui répondait à la motion, bien sûr, qui
était faite pour féliciter les athlètes, et je trouve un
peu déplorable, pour ne pas dire plus, qu'elle profite de cette occasion
pour faire de la politique de mauvais goût. Vous savez, c'était
une motion de félicitations à des athlètes qui avaient
fait des performances extraordinaires au plan international, et je pense que
c'était dans cet esprit-là qu'on se devait d'intervenir. Et quand
on veut revenir sur des questions qui ont été posées la
semaine passée et sur des choix que le gouvernement a faits pour,
justement, protéger ces clientèles que sont ces athlètes
sportifs, que sont ces personnes âgées, que sont ces personnes
handicapées, c'est justement pour éviter des choses
extrêmement fondamentales.
Ça, malheureusement, l'Opposition l'a oublié de 1976
à 1985. Quand on a gonflé le déficit du Québec de 6
000 000 000 $ à 26 000 000 000 $, qu'on a multiplié ça par
600 %, c'est évident que quelque part, aujourd'hui, on est
obligés de faire des choix importants, mais qui nous sont imposés
par les conséquences de la mauvaise gestion financière que vous
avez faite dans ce temps-là.
Et là, les choix qu'on fait comme gouvernement responsable, comme
gouvernement responsable, c'est de ne plus, justement, continuer de gonfler ce
déficit de façon indue puis d'être responsable pour pouvoir
laisser à nos générations futures des déficits
acceptables, avec lesquels elles vont être capables de vivre. Quand on
choisit de préserver nos clientèles, personnes
âgées, personnes handicapées puis nos jeunes,
êtes-vous en désaccord avec ça? Ça veut dire
qu'à ce moment-là, si vous voulez, au lieu de couper dans les
structures qu'il nous restait...
Parce que, dans un communiqué de presse que vous avez fait
parvenir la semaine passée, vous disiez, Mme la députée de
Johnson, qu'encore une fois les CRL vont être touchés. Ça
fait 10 ans qu'ils n'ont pas été touchés. Il y a 3 ans, on
a choisi de ne pas les toucher parce que, justement, on était capables
d'éviter de les toucher, tout en ne touchant pas aux clientèles
qu'on avait choisies. Mais là, on ne pouvait plus faire autrement que de
toucher encore à des structures et des structures qui demeuraient. Il y
avait parmi celles-ci les CRL. Les CRL, bien sûr, on devait faire le
choix: ou bien on coupait dans ces structures administratives ou on leur
demandait de faire la rationalisation que le gouvernement fait comme exercice.
Dans mon propre ministère, sur une demande de réduction de
10 900 000 $, il y a 7 000 000 $ qui sont dans les services
administratifs du ministère. Il reste 3 900 000 $ au niveau des budgets
de transfert.
Bien sûr que, quelque part, on dit: Si le gouvernement et les
ministères font cet exercice de travail de réflexion, de
rationalisation, on dit probablement qu'aussi il est possible, dans les
structures administratives qui demeurent - et, bien sûr, parmi celles-ci,
il y a les CRL - il est possible, pour ces structures, de faire un exercice de
réflexion et de préserver, encore une fois, toujours, bien
sûr, nos clientèles, protéger les programmes qui touchent
directement nos clientèles, diminuer le soutien gouvernemental aux
structures administratives pour le concentrer plus encore vers la base,
davantage vers la base, préserver l'intervention auprès des
clientèles cibles que je vous mentionnais tout à l'heure.
Je dis aux CRL: Dans votre réflexion de rationalisation, vous
devez soutenir les petites municipalités et les organismes locaux. Vous
devez soutenir la formation des entraîneurs, des administrateurs
bénévoles, le soutien aux manifestations régionales, le
mérite sportif, la soirée de reconnaissance des
bénévoles. Quand je demande à deux structures provinciales
qui s'appellent Sport étudiant, la Fédération
québécoise du sport étudiant et de Sport-Québec,
quand je leur demande de faire un exercice de rationalisation à
l'intérieur, je leur propose tout simplement ceci: Ne serait-il pas
possible qu'au lieu d'avoir deux structures provinciales pour les mêmes
clientèles on n'en ait qu'une qui, avec le budget qui va demeurer, parce
qu'il y avait 1 000 000 $ dans ces deux structures, on fait une coupure de 150
000 $ dans chacune. Puis on dit: Peut-être que si vous...
M. le Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de
règlement, M. le député de...
M. Gendron: Bien oui, c'est très simple. Je veux dire, on
veut bien accorder un droit de réplique sur une motion qui est
présentée, mais ce que le ministre du Loisir est en train de
faire n'a rien, mais rien à voir avec la motion à laquelle on a
donné notre consentement. Il est en train de nous expliquer les mesures
de rationalisation de son ministère.
Ça n'a rien à voir avec la motion qui est
présentée, une motion de félicitations aux
athlètes.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur la question de
règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: J'hésite à souligner ce qui
apparaît le manque d'expérience du leader adjoint. De toute
évidence, il s'amuse ici.
Le droit de réplique vise justement à permettre au
ministre de répliquer. Il s'agit d'écouter ce que la
députée de Johnson avait à dire pour comprendre que c'est
la réplique de ce qu'elle a dit qui est en train de se
dérouler.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre, si vous
voulez terminer votre réplique le plus rapidement possible.
M. Blackburn: M. le Président, je peux juste dire...
simplement dire, pour renchérir, que si la critique de l'Opposition
n'était pas sortie effectivement de l'esprit, on serait restés
probablement dans l'esprit du texte et, à ce moment-ci, on ne serait pas
à faire ce débat. Mais elle m'a ouvert la porte, et je le fais,
l'exercice d'explication, pour qu'elle comprenne que ce que nous avons fait,
c'est un exercice de rationalisation.
C'est cette même demande que nous faisons aux organismes pour voir
dans quelle mesure ils pourraient aussi faire cette même démarche
de réflexion, de justification de leur intervention, tout en
préservant nos clientèles puis, bien sûr, de
préserver ces structures nécessaires, mais dans un exercice de
questionnement. (15 h 30)
Alors, je reviens à nos Sport étudiant, à
Sport-études puis à Sport-Québec. Pourquoi n'y aurait-il
pas qu'une fédération provinciale qui, avec les 700 000 $ qui
vont demeurer, ne serait pas capable de donner cette même prestation de
service, voire même l'améliorer, à ces mêmes
clientèles? C'est ça, l'exercice que j'ai demandé à
toutes ces structures, déjà depuis plusieurs semaines: que les
fonctionnaires du ministère les rencontrent, puis on continue la
démarche avec elles, toutes ces structures, avec toutes ces
organisations, pour les aider à trouver véritablement les
réponses aux problèmes que ça peut leur poser
temporairement.
Mais je suis convaincu qu'en bout de ligne, quand on va arriver avec,
bien sûr, cette démarche positive, proactive, intelligente et non
pas seulement politique, quand on va arriver avec cette démarche qui va
être faite correctement, on va arriver à des solutions qui vont
nous permettre de maintenir des services à des clientèles cibles,
puis on va nous permettre non seulement de les maintenir, mais de les
améliorer, et cet exercice-là, toute la société
québécoise, toutes les structures...
Bien sûr, la population nous regarde aller, puis elle a raison,
elle nous regarde aller et elle dit: Eh bien, faites donc cet
exercice-là de réflexion parce que, à quelque part, si
vous ne le faites pas, on va vous poser des questions. Donc, on fait cet
exercice-là tout à fait normalement, dans toutes les structures
administratives de tous les niveaux de gouvernement, dans tous les
ministères, dans tous les étages de chacun des ministères.
On dit à ces structures qui existent encore dans les autres parties du
Québec: Faites aussi cette même démarche pour qu'on soit
capable de justifier auprès de la population que
la gestion des deniers publics se fait correctement à tous les
niveaux de notre société.
C'est ça, tout simplement, M. le Président, l'exercice
que, justement, nous demandons de faire à cette structure, qui est tout
à fait justifié et qui est tout à fait correct. C'est dans
cette perspective que le gouvernement du Québec va continuer d'assumer
sa responsabilité. Je pense que ça, c'est fondamental justement
pour nos clientèles que sont les jeunes, pour nos clientèles
justement que sont encore les personnes âgées, que sont les
personnes handicapées, pour être capable de maintenir des sommes
d'argent pour leurs besoins, selon leurs besoins, pour répondre à
des choses dont ils ont fondamentalement besoin et questionner des structures
qui leur donnent des services, bien sûr, mais, à quelque part, on
a à faire des choix: ou bien on questionne ces structures, ou bien on
questionne les budgets.
Les bourses aux athlètes, Mme la députée de
Johnson, vous auriez préféré qu'on coupe ces bourses aux
athlètes avant de couper dans les structures des CRL. Vous auriez
préféré qu'on coupe ces bourses à ces
athlètes ou bien aux entraîneurs parce que eux autres, ces
entraîneurs, sont extrêmement importants, on en a parlé tout
à l'heure. C'est fondamental, quand on veut avoir des athlètes
qui performent au plan international. C'est parce qu'à quelque part il y
a des athlètes, c'est parce qu'à quelque part il y a des
entraîneurs. Vous auriez préféré qu'on coupe dans
les programmes de formation des entraîneurs. Non.
On a choisi de questionner des structures qui étaient encore en
place, qui méritaient d'être questionnées et qui
méritaient qu'on fasse cet exercice tout à fait
démocratique et raisonnable dans un contexte budgétaire
difficile. Et ça, quand on parle de difficile, actuellement, dans un
contexte budgétaire, je pense qu'il y a juste une partie de
l'Assemblée nationale qui est ici présente qui ne comprend pas
qu'il y a des problèmes budgétaires au gouvernement du
Québec, et c'est l'Opposition.
Malheureusement, le gouvernement, vous pouvez être sûr, M.
le Président, va continuer d'assumer sa responsabilité. Il va
continuer de livrer la marchandise parce que c'est une responsabilité
fondamentale à laquelle, bien sûr, nous allons continuer de
contribuer avec toute la lucidité et le sens des responsabilités
qui nous est imparti.
Mme Juneau: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors... Oui, Mme la
députée de Johnson.
Mme Juneau: Est-ce qu'en...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, en vertu de
l'article 213, est-ce que M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la
Pêche permet à la députée de Johnson de lui poser
une question en vertu du règlement?
Une voix: II n'y a pas de problème.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, il n'y a pas de
problème. Je tiens à vous dire, Mme la députée, que
votre question doit être brève et que la réponse doit
être brève également.
Mme la députée de Johnson.
Mme Juneau: Est-ce que le ministre ne reconnaît pas que les
CRL s'autofinancent à 40 % et qu'il va les couper à 46 % de leur
financement? Est-ce que le ministre peut comprendre qu'à ce
moment-là il n'y aura plus personne pour faire en sorte que nos jeunes
sportifs puissent en arriver à devenir de grandes vedettes, il n'y aura
plus personne à la base pour travailler parce que vous leur coupez les
vivres? Est-ce que vous reconnaissez ça?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, à la
question, M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.
M. Blackburn: Le budget des CRL, M. le Président,
était de 3 500 000 $ annuellement. Il va rester 1 900 000 $ encore de
disponibles à ces structures provinciales, et je dis, je reviens
à l'exemple que je donnais tout à l'heure dans l'exercice de
questionnement: Pourquoi doit-il y avoir encore à chaque année
des structures au niveau régional par rapport aux
fédérations de sports... les Jeux du Québec? Pourquoi
doit-il y avoir des finales régionales, à chaque année
encore, dans les finales au niveau des Jeux du Québec? Pourquoi va-t-il
y en avoir encore à tous les deux ans?
Mais c'est des questionnements comme ceux-là qui doivent se faire
par des structures comme celles-là. C'est avec cet excercice-là
qu'on va certainement être capable de maintenir des services à des
clientèles qui en ont besoin.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ceci termine la
question.
Nous en sommes à l'étape des renseignements sur les
travaux de l'Assemblée. Est-ce qu'il y a des renseignements sur les
travaux de l'Assemblée? Ceci met fin à la période
des...
Mise aux voix
Est-ce que la motion est adoptée? Je m'excuse.
Une voix: Oui, adoptée.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): La motion est
adoptée.
Alors, ceci met fin à la période des affaires
courantes.
Affaires du jour
Nous procédons maintenant aux affaires du jour et, tel que
convenu à la séance du jeudi 11 mars dernier, nous allons donc
procéder immédiatement à un débat de fin de
séance. Ce débat concerne les coupures dans le domaine de la
culture. Mme la ministre de la Culture répondra à M. le
député de Gouin.
Débat de fin de séance Coupures dans le
domaine de la culture
Permettez-moi de vous rappeler les temps de parole pour ce débat.
M. le député de Gouin a droit à une première
intervention de cinq minutes; Mme la ministre, à une intervention de
cinq minutes, et également un droit de réplique de deux minutes
au député de Gouin. Il s'agit de droits restrictifs, et le temps
de parole doit être de cinq minutes et deux minutes au droit de
réplique.
M. le député de Gouin.
M. André Boisclair
M. Boisclair: M. le Président, je prends acte que vous,
qui êtes un homme bien informé, nous confirmez les craintes de
l'Opposition en nous annonçant qu'il y aura effectivement des coupures
dans le secteur culturel. J'en prends acte, M. le Président.
La semaine dernière, je demandais à la ministre de la
Culture de préciser les intentions de son gouvernement à
l'égard du niveau de financement des arts et de la culture au
Québec. Plus particulièrement, l'Opposition demandait à la
ministre de la Culture de réitérer l'engagement de son
gouvernement à l'effet de consacrer 57 800 000 $ sur trois ans, dont 30
400 000 $ pour 1993, afin d'assurer la mise en oeuvre de la toute
récente politique culturelle, engagement, d'ailleurs, pris
solennellement en cette Chambre, devant l'ensemble des parlementaires, le 19
juin dernier, par le gouvernement libéral et qui avait, au niveau de la
pratique, concrétisé l'engagement du gouvernement libéral
d'élever la culture au rang des missions essentielles de l'État
parce que, rappelons-le, M. le Président, la mise en oeuvre de la
politique culturelle repose d'abord et surtout sur la capacité
financière dont disposent les artistes, créateurs et organismes
culturels.
Alors, jeudi dernier, le gouvernement libéral, loin, loin, M. le
Président, de faire taire les rumeurs de compressions, loin de
réaffirmer les consensus, loin aussi de rappeler l'apport que les
milieux culturels ont déjà fourni à l'assainissement des
finances publiques, loin de réaffirmer aussi la valeur
intrinsèque de l'activité culturelle sur les plans
économique et social - rappelons que le secteur de la culture occupe le
sixième secteur d'activité économique, crée plus de
75 000 emplois et génère un chiffre d'affaires de plus de 3 000
000 000 $ par année - loin aussi de braquer le faisceau haut et loin sur
les objectifs de la politique, le gouvernement a préféré
entretenir la confusion en plus d'amorcer un recul qui, s'il s'avère
fondé, serait certainement catastrophique et risquerait aussi de miner
les efforts des dernières années. Plutôt que de se tourner
vers l'avenir, plutôt que de regarder en avant, la ministre a
préféré se tourner vers le passé en nous rappelant
tout simplement quelques structures, quelques réformes de structures, en
nous rappelant la création du Conseil des arts et le changement de nom
de son ministère, nous laissant ainsi croire, M. le Président,
que la politique culturelle de son gouvernement se limitait à un
changement de nom pour son ministère et à la création et
à la mise sur pied d'un Conseil des arts gérant en lieu et place
du ministère les programmes qui, auparavant, étaient ceux de son
ministère avec les mêmes budgets, sans aucune augmentation et sans
même aucune indexation, nous laissant surtout, M. le Président,
croire à l'isolement de la députée de Marguerite-Bourgeoys
au Conseil des ministres ainsi qu'à la mise sous tutelle de son
ministère par le président du Conseil du trésor. Son
ministère devra maintenant subir la tutelle, le joug et les diktats du
Conseil du trésor.
La question fort simple que nous voulons aujourd'hui adresser à
la ministre pour, s'il y a lieu, nous prendre en défaut, nous lui
donnons l'occasion, nous demandons, M. le Président, si le
communiqué qu'elle émettait le 19 juin fait toujours lieu et
place de politique du gouvernement libéral. Est-ce que, le 19 juin
dernier, lorsque la députée de Marguerite-Bourgeoys parlait en
cette Chambre et s'engageait solennellement, au nom de son gouvernement,
à consacrer 57 800 000 $ sur trois ans, dont 30 400 000 $ en 1992-1993,
la ministre parlait parce qu'elle avait l'assurance qu'elle pouvait le faire
ou, plutôt, est-ce que la ministre le faisait pour mieux faire passer sa
politique culturelle, trompant ainsi, flouant ainsi tous les milieux culturels
qui, de bonne foi, avaient repris le flambeau et avaient cru à
l'initiative du gouvernement? Est-ce que la ministre, oui ou non, estime, comme
elle s'y engageait dans son communiqué du 19 juin, que, pour 1993-1994,
30 400 000 $ sont toujours nécessaires à la mise en oeuvre de sa
politique? (15 h 40)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la ministre de la
Culture.
Mme Liza Frulla Mme Frulla: Merci, M. le Président.
Je rappelle, d'ailleurs, à la suite de la politique culturelle,
que, depuis le 21 décembre, je suis effectivement ministre de la
Culture.
Permettez-moi tout d'abord, M. le Président, d'exprimer aussi mon
étonnement à l'égard de ce débat de fin de
séance, débat sur l'application de la politique culturelle, je
tiens à le préciser. Je suis aussi étonnée, parce
que le député de Gouin aura l'occasion de poser toutes les
questions qu'il jugera nécessaires à l'étude
détaillée des crédits du ministère de la Culture,
qui devrait avoir lieu au printemps qui vient.
Je veux aussi profiter de l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui
pour faire l'état de la situation du secteur des arts et de la culture
au Québec et démontrer ainsi l'ouverture et le soutien de notre
gouvernement à l'égard du milieu culturel. Et j'espère que
cela permettra au député de l'Opposition de se familiariser
davantage avec ses nouvelles fonctions comme critique de l'Opposition en
matière de culture. Je lui suggère aussi de lire les 284
mémoires déposés en commission parlementaire l'an dernier;
ça aussi l'éclairera.
M. le Président, le 19 juin 1992, le gouvernement posait un geste
historique. Il devenait, d'ailleurs, le premier au Canada et l'un des rares
dans le monde à se doter d'une politique et d'un plan d'action
gouvernemental en matière de culture. D'ailleurs, l'UNESCO
décernait au Québec une mention d'honneur en août 1992
à ce sujet. Cette première année de mise en oeuvre,
contrairement à ce que le député de l'Opposition affirme,
nous avions prévu un montant de 9 900 000 $ et, une fois de plus, nous
avons livré la marchandise.
Maintenant, en ce qui concerne les crédits 1993-1994, le
député de Gouin sait très bien qu'il appartient au
président du Conseil du trésor de rendre publics les
détails et la ventilation de l'ensemble des crédits
gouvernementaux, ainsi qu'au ministre des Finances en ce qui a trait au budget
1993-1994. Alors, par respect pour les institutions, M. le Président,
vous allez me permettre de parler de l'année en cours et non pas de
l'année qui vient.
Cette politique culturelle, M. le Président, représente
une assise pour ceux et celles qui font la culture québécoise,
c'est-à-dire nos artistes, nos artisans et, évidemment, nos
créateurs. Même le prédécesseur du
député de Gouin déclarait en cette Chambre, le 19 juin
dernier, et je cite: «Le dépôt d'une politique culturelle
constitue un pas important dans la bonne direction».
M. le Président, avec cette politique culturelle, nous avons en
main tous les outils pour favoriser la création artistique, sa
diversité, son renouvellement, son excellence, en plus de rendre la
culture accessible à tous les citoyens, et ce, à travers toutes
les régions du Québec.
Cette politique s'accompagne aussi d'un plan d'action - ce n'est pas que
des voeux pieux - et ce plan d'action comporte une série de mesures
concrètes dont plusieurs sont déjà en application. Je ne
fais que citer l'augmentation de l'aide aux artistes et aux organismes, une
augmentation de 9,1 %, largement supérieure, d'ailleurs, à
l'inflation. Et je veux rappeler aussi au député de Gouin qu'au
cours des deux dernières années le ministère de la Culture
a bénéficié d'une augmentation de 63 000 000 $, soit une
augmentation de 24 %. Ces 24 % sont destinés, et je le
répète et j'insiste, à toutes les régions du
Québec. S'ajoutent aussi plusieurs mesures gouvernementales dans le
domaine de la culture, qui ne sont pas comptabilisées au niveau du
budget du ministère: 32 000 000 $ de compensations sur la taxe de vente
sur le livre; 30 000 000 $ de crédits d'impôt consentis dans le
secteur cinématographique et 5 000 000 $ consentis au budget dernier,
pour un plan de relance du spectacle. À ce jour, notons, M. le
Président, que, grâce à ce plan de relance, par rapport
à l'an dernier, il y a eu une augmentation de l'ordre de 15 % de la
vente des billets, et ce, à partir du 3 décembre dernier.
Alors, nos efforts ne s'arrêtent pas là, M. le
Président. Dans le prolongement de notre politique culturelle, nous
sommes à revoir, en concertation avec les intervenants concernés,
le rôle, les structures et le mode de fonctionnement des organismes
chargés de soutenir les industries culturelles, et plus
particulièrement ceux qui concernent, évidemment, le
cinéma et l'audiovisuel. Nous allons revoir aussi notre action au niveau
des conservatoires.
Mais ce que je voudrais dire, M. le Président, au nouveau
critique de l'Opposition en matière de culture: je l'invite, à
l'exemple de son prédécesseur, à s'élever au-dessus
de la par-tisanerie, au nom de notre développement culturel, même
si, de réputation, cette action peut lui paraître insurmontable,
M. le Président. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre
de la Culture.
Alors, M. le député de Gouin, en vertu de votre droit de
réplique, en vous indiquant un temps maximum de deux minutes.
M. André Boisclair (réplique)
M. Boisclair: M. le Président, la ministre, en choisissant
sciemment de me renvoyer à l'étape de l'étude des
crédits, alors qu'elle, en cette Chambre, avant même
l'étude des crédits, s'est engagée à livrer 30 400
000 $ en 1993-1994, nous indique que son gouvernement a choisi de rouvrir le
débat sur l'importance des arts et de la culture. Nous comprenons, M. le
Président, que la ministre a fait un chèque sans provision pour
se rallier les milieux culturels lors de l'annonce de sa politique. Le
chèque est aujourd'hui rappelé pour insuffisance de fonds.
Était-ce une autre
promesse inconsidérée de la part du gouvernement ou un
engagement pris sciemment, sans aucune garantie? Nul ne le sait et nul ne le
saura. Toutefois, si tel est le cas, M. le Président, le gouvernement
libéral et la ministre en tête ont littéralement
floué les milieux culturels lors de l'annonce de sa politique. Sa
duperie méprisante ne lui attirera que la méfiance et le
désabusement des milieux culturels, qui y ont pourtant cru, tout comme
les membres de l'Opposition et tout comme le député de
Sainte-Marie-Saint-Jacques, qui ont cru en ses engagements.
La ministre a choisi de compromettre sa politique après avoir
donné l'espoir que la culture serait enfin traitée comme tous les
parlementaires le souhaitent, peu importe leur allégeance politique,
comme la ministre nous le rappelait, peu importe du côté où
ils se situent en cette Chambre, pour que la culture soit
considérée comme une mission essentielle de l'État.
M. le Président, l'ingénue d'hier est aujourd'hui devenue
une incomprise, et ce, au détriment des artistes, des créateurs
et des organismes culturels, qui étaient en droit de s'attendre à
plus de rigueur et plus de profondeur, qui étaient en droit de
s'attendre au respect des engagements, si, pour le gouvernement et pour la
ministre des Affaires culturelles, la ministre de la Culture
plutôt...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez
conclure.
M. Boisclair: ...ce mot a encore une signification.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Gouin, de votre intervention.
Ceci met fin à ce débat de fin de séance de jeudi
dernier.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: M. le Président, un message du
lieutenant-gouverneur, signé de sa main.
Message du lieutenant-gouverneur
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, veuillez vous
lever, s'il vous plaît.
Alors, l'honorable lieutenant-gouverneur soumet à
l'Assemblée nationale, conformément aux dispositions de l'article
54 de la Loi constitutionnelle de 1867, une partie des crédits pour
l'année financière se terminant le 31 mars 1994,
représentant 7,4 % des crédits du programme
Sécurité du revenu du ministère de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, et 24,6 %
des crédits du programme Sécurité du revenu des chasseurs
et piégeurs cris du même ministère, soit une somme de 276
489 933 $, et recommande ces crédits à la considération de
l'Assemblée. Alors, je dépose ce document. y a-t-il consentement
de l'assemblée pour déroger à la section 1 du premier
chapitre du titre v du règlement concernant les crédits
budgétaires pour donner suite à ce message?
Des voix: Consentement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): II y a consentement?
Consentement.
Projet de loi 78 Présentation
Alors, M. le ministre délégué à
l'Administration et à la Fonction publique et président du
Conseil du trésor, au nom du ministre des Finances, propose la
présentation du projet de loi no 1 sur les crédits 1993-1994. y
a-t-il consentement pour la présentation de cette motion?
Des voix: Consentement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement.
M. le leader adjoint du gouvernement...
M. Gendron: Oui, M. le Président...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...de l'Opposition.
M. Gendron: ...c'est ça, il y a consentement, tel
qu'entendu, avec un droit de parole de 10 minutes, notre temps de parole.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, il y a
consentement pour qu'une intervention de 10 minutes soit accordée au
député de La Prairie, suivie d'une intervention de 10 minutes au
ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la
Formation professionnelle. Il y a consentement?
Des voix: Consentement. (15 h 50)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, consentement.
Je reconnais M. le député de La Prairie pour une
période de 10 minutes.
M. Denis Lazure
M. Lazure: Merci, M. le Président.
Alors, je veux, tout de suite, préciser que l'Opposition va,
évidemment, voter en faveur de ce projet de loi bien spécial. Ce
n'est pas à une époque où le ministre responsable des
bénéficiaires de l'aide sociale s'apprête à sabrer
dans les prestations, ce n'est pas à une époque comme
ça
que l'Opposition va avoir des doutes. C'est évident que nous
allons voter pour cette motion qui est technique, qui est mécanique, qui
permet au gouvernement de pouvoir verser, pour le mois de mars, les
prestations.
M. le Président, dans les quelques minutes que vous me permettez
d'utiliser, je voudrais revenir sur les paroles du ministre de la Main-d'oeuvre
et de la Sécurité du revenu aux journalistes de La Presse,
la semaine passée. Le ministre a fait état de son intention
de couper de 30 $ par mois les prestations des bénéficiaires de
l'aide sociale qui sont aptes au travail et qui sont disponibles. Le ministre
dit: Les deux tiers de ces personnes-là refusent les offres de mesures
de préparation à l'emploi que nous leur proposons.
Première question, M. le Président: Est-ce que le ministre
pourrait déposer le type de document qui lui permet d'affirmer de
façon catégorique que les deux tiers refusent des mesures
d'employabilité ou des mesures qui les aideraient à se
préparer au marché du travail?
J'ai devant moi aussi... Dans la même interview, le ministre
précise, dans un autre ordre d'idées mais touchant les
bénéficiaires de l'aide sociale, qu'il vient de mettre un terme
aux visites systématiques des bénéficiaires par des agents
visiteurs, les boubous macoutes. M. Bourbeau précise avoir
été sensibilisé par les représentations des
évêques du Québec qui désapprouvaient que le
gouvernement conserve une telle présomption de culpabilité sur
l'ensemble des prestataires. Je veux le féliciter. Ça lui a pris
du temps à comprendre, presque deux ans, mais il a compris. Mieux vaut
tard que jamais. Mais je lui demanderais, M. le Président, d'avoir la
même obéissance à l'égard de l'Assemblée des
évêques qu'il a eue pour les boubous macoutes, de l'avoir, cette
fois-ci, pour le projet deloiC-113.
Le ministre de la Main-d'oeuvre, la semaine dernière, a
voté contre notre motion. L'Opposition disait: L'Assemblée
nationale devrait demander au gouvernement fédéral de retirer ce
projet de loi C-113 qui va avoir des conséquences néfastes pour
les travailleurs, pour les chômeurs du Québec. L'Assemblée
des évêques, M. le Président, s'est prononcée contre
ce projet de loi. J'espère que le ministre va avoir la même
considération pour l'opinion de l'Assemblée des
évêques sur le projet C-113 qu'il a eue au sujet des boubous
macoutes.
M. le Président, il faut reconnaître que le ministre avance
parfois des chiffres ou des affirmations sans trop, trop être sûr.
Il a dit, il n'y a pas longtemps: C-113, il n'y a pas de problème;
même un pays aussi progressiste, social-démocrate que la
Suède exclut des prestations d'assurance-chômage les gens qui
partent volontairement d'un travail. Après vérification, c'est
inexact, c'est faux. Il y a une pénalité de 5 à 12
semaines, en Suède. Il n'y a pas d'exclusion.
J'ai cité, la semaine passée, le tableau de l'OCDE de l'an
passé, le rapport annuel, et la Suède ne les exclut pas.
Alors, je répète ma question. Quand le ministre affirme
que les deux tiers refusent, j'aimerais bien qu'il dépose le document
pertinent.
Autre remarque. À Montréal, il y a un groupe qui s'appelle
le RESO, le Regroupement pour la relance économique et sociale du
sud-ouest. Il y a quelques jours, cet organisme a dit, et je cite: «Le
ministre Bourbeau alimente les préjugés contre les
assistés sociaux en prétendant que les deux tiers refusent des
programmes d'employabilité. Nous, au RESO, vivons quotidiennement la
dure réalité des assistés sociaux disponibles qui veulent
s'en sortir. Lorsque nous recrutons pour une formation académique
générale ou une formation professionnelle, nous devons refuser
plus de monde que nous ne pouvons en accepter.» Et, M. le
Président, je voudrais insister là-dessus. Lorsque le
gouvernement qui est en face de nous, pour la première fois dans
l'histoire de l'éducation des adultes, établit l'enveloppe
fermée, refuse - et je ne parle pas seulement des
bénéficiaires de l'aide sociale mais pour l'ensemble des adultes
- des applications d'adultes qui veulent poursuivre leurs études,
deuxième mesure, lorsque le même gouvernement impose un ticket
modérateur de i $ pour chaque cours, même aux
bénéficiaires de l'aide sociale, ce gouvernement-là, m. le
président, n'a pas le droit de prétendre que les assistés
sociaux abusent du système, comme le ministre le laisse entendre trop
souvent.
Nous disons, de ce côté-ci de la Chambre: ii y a un
mécanisme de prévu, de toute façon; lorsqu'un
bénéficiaire de l'aide sociale refuse sans raison valable une
mesure d'employabilité, automatiquement, il ou elle est
pénalisé, change de catégorie, devient non disponible.
ça existe, ça. ça existe.
De plus, nous disons que la vraie solution au problème actuel,
c'est le manque d'emploi flagrant dans la société
québécoise. Sur les 400 000 personnes adultes qui sont à
l'aide sociale, presque 300 000 sont des gens qui pourraient travailler, qui
sont aptes au travail. Le problème de notre société, c'est
l'absence de plein emploi. Et ça existe. Ce n'est pas une foutaise, ce
n'est pas un rêve, le plein emploi. Il y a des petits pays, en Europe -
la Suède justement, le Danemark, la Suisse, l'Autriche - qui ont
réalisé depuis des années le plein emploi. Le
chômage: 2 %, 3 % ou 4 %, au maximum. Justement, ce sont les mêmes
pays qui offrent les conditions les plus généreuses pour les
chômeurs et pour les bénéficiaires de l'aide sociale.
Alors, M. le Président, je pense que le gouvernement fait fausse
route, le ministre fait fausse route lorsqu'il dit: II y a des abus, il y a des
gens qui refusent, on va couper dans les
prestations, on va enlever 30 $. C'est une mesure mesquine. Nous allons
étudier cette mesure bien en détail à un moment
donné, lorsque le ministre va déposer son projet, mais, en
attendant, M. le Président, je vais répéter que la seule
façon de vraiment diminuer le nombre de bénéficiaires de
l'aide sociale qui sont aptes au travail, ce n'est pas de couper leurs
prestations sous prétexte qu'ils refusent, parce qu'il n'y a pas de
refus généralisé lorsqu'il y a des mesures
intéressantes de retour à l'emploi; il n'y a pas de refus
généralisé lorsque le gouvernement ouvre la porte à
l'éducation aux adultes au lieu de la fermer comme il le fait.
M. le Président, nous allons voter pour ce projet de loi,
évidemment, mais nous en profitons pour rappeler le ministre à de
meilleures dispositions vis-à-vis d'une clientèle qu'il devrait
aider plutôt que dénoncer.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de La Prairie.
Conformément à l'entente, je cède la parole
à M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du
revenu et de la Formation professionnelle, en lui indiquant que son temps de
parole est d'un maximum de 10 minutes. M. le ministre.
M. André Bourbeau
M. Bourbeau: Merci, M. le Président.
D'abord, commençons par les détails, si vous voulez. Pour
pouvoir émettre, le 1er avril prochain, les prestations de la
sécurité du revenu à 456 000 ménages
québécois, le gouvernement doit rendre disponibles, dès le
23 mars prochain, des crédits de l'ordre de 276 500 000 $. Or, ces
crédits ne seront disponibles qu'à compter du 1er avril prochain,
soit au début de la prochaine année financière du
gouvernement, et ils n'auront pas encore été votés par
l'Assemblée nationale. Nous devons donc recourir à la Loi sur les
subsides pour obtenir, en quelque sorte, l'autorisation de cette
Assemblée d'effectuer les dépenses qui ne peuvent pas être
reportées à plus tard. Voilà la raison technique de ce
débat. Bien sûr, on ne s'en tient pas à cette simple
technicité parlementaire. L'occasion est particulièrement bien
choisie pour lever le voile sur les dépenses du ministère de la
Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle pour l'année 1993-1994.
Faire état des dépenses d'un ministère, cela
revient à annoncer les choix stratégiques qui ont
été arrêtés pour faire face à la conjoncture.
C'est indiquer le résultat de l'arbitrage que le gouvernement a dû
faire entre les nombreuses demandes de développement qui lui sont
demandées. Les dépenses d'un ministère comme celui de la
Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle illustrent la cons- tance de l'engagement du gouvernement dans
des politiques de longue haleine comme celles de l'incitation au travail,
l'équité envers les plus démunis et aussi le
développement de la main-d'oeuvre. (16 heures)
Pour l'ensemble de ces activités, le ministère de la
Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation
professionnelle disposera, en 1993-1994, de crédits de 4 400 000 000 $,
en hausse de 268 000 000 $ par rapport au budget de l'exercice financier qui
prend fin dans quelques semaines.
Le gros de cette augmentation budgétaire est attribuable au
régime de la sécurité du revenu. La clientèle qui
aura recours à la sécurité du revenu durant la prochaine
année devrait augmenter de 22 900 ménages, pour une moyenne
mensuelle de 454 030 ménages. Nous devrions encore ressentir, dans les
prochains mois, les effets de la récession que nous venons de traverser.
S'ajoute à ce phénomène conjoncturel l'impact des
changements apportés au régime de l'assurance-chômage, qui
devraient, à eux seuls, faire augmenter d'environ 3500 le nombre de
ménages à la sécurité du revenu. La hausse de la
clientèle et la variation des prestations devraient nécessiter
des crédits additionnels de 186 200 000 $.
Globalement, le ministère consacrera 3 700 000 000 $ en
prestations de la sécurité du revenu, dans les prochains 12 mois,
en assistance maladie et aussi pour le programme APPORT. Il s'agit là
d'une augmentation de 6,3 % par rapport aux dépenses probables de
l'année courante. Ce chiffre de 6,3 % apparaît élevé
en comparaison d'un taux d'inflation qui frôle les 2 %, mais je vous
assure, M. le Président, qu'il faut déployer des efforts
inouïs pour maintenir, ces années-ci, la croissance du budget des
programmes de sécurité sociale à un niveau aussi bas que
6,3 %.
Dans certaines provinces canadiennes, les taux de croissance sont
beaucoup plus élevés, mais il ne faut pas s'arrêter
là, bien entendu. Avec la fin de la récession, nous devrions
commencer à enregistrer, au cours de l'année 1993, une croissance
de l'emploi permettant une diminution des pressions qui s'exercent, depuis
plusieurs mois, d'ailleurs, sur le régime de la sécurité
du revenu. La reprise sera probablement plus lente que nous le souhaiterions.
Cependant, pour que cette reprise soit durable, il faut que les politiques de
sécurité du revenu soient axées, pour les personnes aptes
au travail, sur l'intégration en emploi. C'est là la raison pour
laquelle, en dépit d'une conjoncture budgétaire extrêmement
difficile, le gouvernement augmente de 43 % les crédits affectés
à l'intégration au marché du travail des prestataires de
la sécurité du revenu aptes au travail. Le gouvernement inclut
dans son plan de relance de l'économie ces mesures d'aide à
l'emploi pour les chômeurs de longue durée.
Nous avons toujours soutenu que l'aide la plus précieuse que le
gouvernement peut apporter aux personnes aptes au travail, qui ont recours
temporairement à la sécurité du revenu, consiste en des
mesures d'intégration au marché de l'emploi. Il ne faut pas se
laisser emporter par un climat de morosité, selon lequel les turbulences
de l'économie condamnent, quoi qu'on fasse, plusieurs milliers de
personnes au sous-emploi. Nous n'avons pas le droit d'abandonner les clients de
la sécurité du revenu à une sorte de désespoir,
à nier leur capacité de reconquérir le marché du
travail. L'emploi doit demeurer la voie d'accès
privilégiée à l'indépendance financière et
une voie raisonnablement accessible.
L'un des instruments les plus indiqués pour paver cette voie qui
conduit au marché du travail demeure le programme PAIE,
c'est-à-dire le Programme d'aide à l'intégration en
emploi. Depuis que nous avons lancé ce programme de subventions
salariales à la grandeur du Québec, en 1990, 36 925 personnes ont
accédé à un véritable emploi, et elles ont
quitté le régime de la sécurité du revenu.
Certaines ont dû y revenir, j'en conviens. On constate, néanmoins,
que 37 % des clients de la sécurité du revenu, qui ont
bénéficié du programme PAIE, étaient encore en
emploi, trois mois après l'arrêt de la subvention salariale. Dans
le contexte de turbulences économiques que nous connaissons, il s'agit
là d'un succès remarquable pour un programme d'intégration
à l'emploi. Nous allons donc poursuivre nos efforts.
Le début du prochain exercice financier marque une ère
nouvelle dans le domaine de la main-d'oeuvre. À compter du 1er avril
prochain, en effet, la Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre sera mise en place. Les partenaires du
marché du travail, c'est-à-dire des représentants des
employeurs et des travailleurs, participeront, avec le gouvernement, à
l'élaboration et à la gestion des programmes de main-d'oeuvre. Un
budget de 278 000 000 $ leur est confié.
La Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre va changer la dynamique des rapports
entre les principaux acteurs dont les actions influencent
considérablement le fonctionnement du marché du travail. La mise
en place de cette société brise, d'une certaine manière,
l'isolement relatif dans lequel se sont historiquement cantonnés les
patrons, les syndicats, les gestionnaires des programmes de main-d'oeuvre et
les porte-parole du secteur de l'enseignement.
Désormais, tous ces acteurs importants vont travailler ensemble,
chercher des consensus et des solutions pratiques aux problèmes du
développement de la main-d'oeuvre et de l'emploi. Il en sera de
même dans les régions du Québec, parce que les exercices de
concertation en faveur du développement de la main-d'oeuvre et de
l'emploi seront assumés par les sociétés régiona-
les qui succéderont aux actuelles commissions de formation
professionnelle. Les sociétés régionales de main-d'oeuvre
vont également définir les priorités de la région,
adapter les programmes à leur réalité propre et offrir aux
entreprises, aux travailleurs et aux chômeurs les services de
main-d'oeuvre.
La Société québécoise de
développement de la main-d'oeuvre accueillera également, nous
l'espérons, les budgets fédéraux de main-d'oeuvre, afin de
créer le guichet unique réclamé par ceux qui subissent la
lourdeur et la relative inefficacité de deux réseaux de
main-d'oeuvre au Québec. Des discussions ont présentement cours
au niveau politique, et nous en espérons un dénouement
positif.
M. le Président, nous aurons, bien sûr, l'occasion de
discuter abondamment de l'ensemble des projets du ministère lors de
l'étude des crédits détaillés, dans quelques
semaines. En attendant, je me permets de ramener les membres de cette
Assemblée au but premier de cet exercice, qui est d'autoriser le
ministère à engager 276 500 000 $ dans les prochains jours afin
d'émettre les prestations de la sécurité du revenu de
même que les allocations aux chasseurs et piégeurs cris à
compter du 1 er avril prochain.
Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre,
de votre... Oui?
M. Lazure: En vertu de 213...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): En vertu de l'article
213, est-ce que, M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la
Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, vous
permettez au député de La Prairie de vous poser une brève
question, et y répondre brièvement?
M. Bourbeau: Avec plaisir! Avec plaisir, M. le
Président!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, la permission
vous est accordée, M. le député de La Prairie.
M. Lazure: Merci, M. le Président, à vous et au
ministre.
Je voulais simplement que le ministre confirme ou nie l'affirmation du
RESO. Le RESO, c'est le Regroupement pour la relance économique et
sociale du sud-ouest qui dit, et je cite: «Lorsque nous recrutons pour
une formation académique générale ou une formation
professionnelle chez les assistés sociaux disponibles, nous devons
refuser plus de monde que nous ne pouvons en accepter». Est-ce exact ou
est-ce faux?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): La question, M. le
ministre de la Main-d'oeuvre.
M. Bourbeau: M. le Président, le député a
fait état tout à l'heure, dans son allocution - et je pense bien
que je peux revenir là-dessus - de certaines affirmations qui sont plus
ou moins exactes. Mais celles dont, moi, j'ai parlé, c'est un fait, ce
n'est pas des affirmations gratuites.
Parmi les assistés sociaux disponibles, ceux qui disent
être disponibles pour exercer des mesures pour s'intégrer dans les
mesures de développement de l'employabilité, nous devons proposer
une mesure à trois personnes avant qu'une ne l'accepte,
c'est-à-dire qu'il y en a deux des trois personnes,
généralement parlant, dans toute expérience que nous avons
dans notre réseau, deux personnes sur trois, qui se sont dites
disponibles, refusent les mesures d'employabilité que nous leur
proposons, soit le rattrapage scolaire, soit les stages en milieu de travail ou
les travaux communautaires. (16 h 10)
C'est donc dire qu'à chaque fois qu'on veut trouver une personne
il faut en demander trois. Les deux autres s'étaient dites disponibles
mais ne l'étaient pas, à l'évidence. Donc, M. le
Président, ça justifie, bien sûr, les déclarations
que j'ai faites.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, est-ce que
l'Assemblée... S'il vous plaît! L'Assemblée accepte-t-elle
d'être saisie du projet de loi 78?
Adopté.
M. Gendron: J'ai envie de dire non.
Adoption du principe et adoption
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre des
Finances propose l'adoption du principe ainsi que l'adoption du projet de loi
78, Loi no 1 sur les crédits 1993-1994. Est-ce que ces deux motions sont
adoptées?
M. Gendron: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté.
Donc, les motions d'adoption du principe et l'adoption du projet de loi
78, Loi no 1 sur les crédits 1993-1994, sont adoptées.
M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Johnson: Oui, M. le Président, je vous demanderais
d'appeler l'article 3 du feuilleton.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Article 3.
Projet de loi 68 Adoption du principe
M. le ministre des Communications propose l'adoption du principe du
projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le
secteur privé.
M. le ministre des Communications.
M. Lawrence Cannon
M. Cannon: Merci, M. le Président.
Je crois qu'il serait peut-être opportun, avant d'aborder
l'adoption de principe de ce projet de loi, de faire très rapidement la
chronologie des événements qui nous ont conduits, comme
parlementaires, à être saisis aujourd'hui de ce projet de loi.
Il faut se rappeler, M. le Président, qu'en 1975
l'Assemblée nationale adoptait unanimement la Charte
québécoise des droits et libertés de la personne et,
particulièrement à l'article 5, reconnaissait le droit à
la vie privée. Quelques années plus tard, c'est-à-dire en
1982, on se rappellera que l'Assemblée nationale, à la suite de
la commission Paré, adoptait la Loi sur l'accès aux documents des
organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.
Aujourd'hui, cette loi célèbre son dixième anniversaire,
et c'est une loi, je pense, qui a quand même fait beaucoup de chemin
à travers les gouvernements modernes de nos sociétés
occidentales.
En 1984 étaient adoptées les lignes directrices
régissant la protection de la vie privée et des flux
transfrontières par l'OCDE. Il s'agissait, effectivement, de faire en
sorte qu'il n'y ait pas de barrières économiques entre les
entreprises de différents pays qui transigeaient entre elles, mais qui
s'assuraient que les renseignements, également, les renseignements
à caractère personnel, donc les renseignements nominatifs,
étaient protégés. En 1986, le gouvernement du
Québec chargeait le Groupe de recherche informatique et droit de
l'Université du Québec à Montréal de
procéder à une analyse de ces directives, et la
conséquence a été d'accepter ces directives et de faire en
sorte que le gouvernement du Québec adhère non seulement aux
lignes directrices, mais aussi aux principes de la Communauté
européenne.
En 1988, à la suite d'une initiative du ministre de la Justice,
le comité interministériel qui a été formé
recommandait que le gouvernement du Québec légifère dans
le secteur. Plus loin, la même année, la commission de la culture
qui s'était réunie avait également recommandé
d'étendre au secteur privé les dispositions à
l'égard de la protection des renseignements dans le secteur
privé.
On a vu plus loin, il y a de cela quelques mois maintenant, l'an
passé, l'adoption du projet ou, enfin, l'adoption du nouveau Code civil,
nouveau Code civil qui a été le fruit d'un travail énorme
de la part du ministre de la Justice et aussi de tous les parlementaires en
cette Assemblée. Particulièrement, le nouveau Code civil porte,
bien sûr, sur les dispositions législatives, mais aussi sur la
protection des renseignements
privés, et j'attire l'attention des parlementaires sur les
articles 35 à 41.
À la suite, bien sûr, de l'adoption du nouveau Code civil,
il nous fallait donc présenter un projet de loi qui, lui, porte sur
l'application des dispositions des articles 35 à 41, c'est-à-dire
quel en serait l'encadrement, comment pourrions-nous fonctionner à
l'intérieur de ça. Alors, il y a eu une commission parlementaire,
on s'en rappellera, commission parlementaire qui s'est tenue à l'automne
de 1991, où les parlementaires de la commission des institutions ont
été saisis d'un certain nombre de requêtes, d'un certain
nombre de mémoires, de documents qui sont venus, je dirais, d'une vaste
partie ou d'un vaste échantillonnage de la population, tantôt les
assureurs, tantôt les institutions financières, tantôt la
Ligue des droits et libertés, tantôt les gens qui sont
particulièrement inquiets des dispositions législatives à
l'égard, par exemple, des renseignements qui sont transmis au niveau du
logement. Tout ça, ça nous a conduit, comme parlementaires,
à être saisis d'un projet de loi, le projet de loi 68, qui vise
essentiellement à assurer le respect du caractère confidentiel
des renseignements personnels sur autrui et, particulièrement, sur les
personnes qui les recueillent. Cela, M. le Président, résume, en
grande partie, l'historique, je dirais chronologique, pour ne pas faire de
pléonasme, de l'intention des législateurs que nous sommes tous
depuis les dernières années dans ce dossier.
Alors, je disais donc que, à la suite d'un exercice en commission
parlementaire, nous avons davantage parlé de trouver des moyens de
convergence, de s'assurer que nous puissions dégager un certain nombre
d'éléments pour que, comme parlementaires, nous ayons une
démarche progressiste et une démarche dynamique dans le cadre de
la protection des renseignements. Je dirais que tous ceux qui se sont
présentés devant la commission parlementaire ont confirmé
que - et je pense que c'est tout à fait normal - compte tenu de
l'évolution très rapide au niveau des technologies, tout le monde
a confirmé que le secteur privé utilise massivement les
technologies de l'information dans le traitement des renseignements personnels,
et, que ce soit pour la cueillette des informations, la constitution de banques
de données personnelles ou le transfert de ces renseignements,
l'utilisation des technologies de plus en plus performantes va sans cesse en
augmentant. C'était là, M. le Président, à notre
avis, une des raisons qui nous plaçaient devant l'urgence de donner
à la personne la maîtrise des informations qui la concerne en lui
donnant le droit d'autoriser ou non l'échange et l'utilisation de ces
renseignements à des fins spécifiques, pour une durée
limitée.
Je disais donc, M. le Président, à l'époque, que le
Québec était mûr pour une loi qui protégerait la
confidentialité des renseignements personnels, dans le secteur
privé, et l'objectif, en présentant le projet de loi,
était de rechercher le consensus ou un consensus le plus large possible,
consensus dans le sens de convergence, M. le Président. Donc, les
travaux de cette commission de l'automne de 1991 avaient également
démontré qu'il nous fallait harmoniser nos mesures aux
règles en vigueur ailleurs dans le monde. Et, à cet égard,
j'indiquais que l'autoré-glementation, sans incitatif législatif,
assortie de sanctions et de recours, ne me semblait pas assez efficace comme
démarche. Je faisais état également qu'une approche
prudente s'imposait, puisqu'une législation trop coercitive risquait
d'être à la fois trop lourde et trop coûteuse à
administrer et pouvait défavoriser les entreprises
québécoises, voire nuire à leur
compétitivité. Il faut bien le préciser, M. le
Président, notre objectif n'était pas de restreindre les
activités des entreprises qui oeuvrent dans ce domaine. (16 h 20)
Nous nous sommes donc mis à la tâche avec prudence et
circonscpection. Le résultat de notre travail, le fruit de notre
travail, c'est le projet de loi 68 sur la protection des renseignements
personnels, appliqué au secteur privé. Ce projet de loi a
provoqué la tenue d'une deuxième commission parlementaire dont
les travaux ont pris fin le 4 mars dernier. La commission de la culture a donc,
M. le Président, permis à une quarantaine de groupes et
d'individus de venir nous dire ce qu'ils pensaient du projet de loi. Et la
convergence dont je parlais plus tôt, je l'ai réellement sentie
à l'occasion de cette commission parlementaire, en ce sens que, sans
exception, tous ont reconnu la nécessité d'un projet de loi, tous
sont d'accord avec le principe de ce projet de loi. Toutefois, la plupart des
intervenants nous ont fait part de leurs préoccupations, de leurs
réticences face à certains articles de la loi, tels qu'ils sont
rédigés. C'était là, d'ailleurs, M. le
Président, l'objectif ultime de cette consultation publique;
c'était d'aller chercher et de recueillir les propos de ceux et celles
qui sont directement touchés par l'application de ce projet de loi.
C'est pourquoi, M. le Président, j'ai rappelé, à
l'occasion de la clôture de la commission, que plusieurs points feront
l'objet d'un réexamen détaillé et que nous, comme
parlementaires, introduirons certains amendements afin de bonifier le projet de
loi 68 et de répondre, en partie, aux représentations qui nous
ont été faites. Vous me permettrez, M. le Président, de
reprendre brièvement les éléments qui font l'objet de
notre réexamen.
Il y a d'abord cette question de la liberté de presse. Je tiens
à rassurer, encore une fois, les parlementaires que ce n'est pas
l'intention des membres de la commission, comme ce n'est pas mon intention, de
venir circonscrire une liberté, déjà inscrite dans la
Charte, par l'application d'une autre liberté. La Charte est là
pour
coexister avec tous les principes, les éléments et les
fondements de notre démocratie. Donc, il faut trouver une façon
d'aménager ces dispositions, et cela ne m'apparaît pas comme
étant insurmontable. Alors, nous apporterons une correction.
Il y a l'autre question qui a été soulevée, qui est
celle des flux transfrontières des données personnelles. La
préoccupation que je peux avoir à cet égard, et qui est
partagée par mon collègue de l'Opposition, est la suivante. C'est
qu'il y a des renseignements qui, au Québec, peuvent être
recueillis par une entreprise. Une autre entreprise peut faire exactement la
même chose, dans un domaine semblable ou comparable, et une
troisième entreprise peut hypothétiquement faire la même
chose. L'inquiétude que nous pouvons avoir, c'est que ces entreprises,
n'ayant pas particulièrement leur siège social au Québec,
pourraient, dans un autre pays ou dans une autre province, constituer, à
l'aide d'un mariage de ces banques dites d'information, un profil sur le
comportement du consommateur - par exemple, sur vous, M. le Président,
ou sur moi - et qui pourraient dégager un profil au niveau de vos
achats, un profil au niveau de votre tendance de consommation dans les types de
restaurants, un profil de consommation au niveau de votre habillement, au
niveau de vos lectures, etc. C'est ça qui a inquiété mon
collègue, le député de Pointe-aux-Trembles, et,
d'ailleurs, les autres membres de la commission. Alors, c'est une chose sur
laquelle nous allons devoir travailler pour faire en sorte que ce genre de
pratique, décrite dans plusieurs revues par des spécialistes, ne
se matérialise pas ici, au Québec, et que, véritablement,
le citoyen puisse avoir la maîtrise d'oeuvre sur les renseignements qui
le concernent.
Un autre élément qui attire notre attention, c'est toute
cette question qui touche la collecte des renseignements. On a
été, je vous dirai, estomaqué par la présentation
d'un certain nombre de groupes de locataires, qui sont venus nous rencontrer en
commission parlementaire pour nous indiquer qu'il y avait des renseignements
qui étaient exigés avant même de pouvoir visiter
l'appartement ou le loyer, et avant même d'avoir établi la
solvabilité de l'individu, pour savoir si, bien sûr, il est
capable de payer l'appartement ou non, une série d'informations qui
portaient, par exemple, sur le numéro d'assurance-maladie. Vous me
direz, M. le Président, que le numéro d'assurance-maladie, c'est
un numéro que, volontairement, on fournit à l'occasion d'une
visite chez le médecin. C'est tout à fait normal, il va de soi,
c'est la raison d'être de ce numéro-là, mais ce n'est
certainement pas des particularités de logement qui doivent être
fournies par un individu qui désire obtenir un logement, ni son
numéro d'assurance sociale, ni son numéro de permis de conduire,
ni ses cartes de crédit. Donc, ça m'apparaît comme
étant des renseignements qui sont peut-être pertinents au niveau
du propriétaire, mais, somme toute, entre vous et moi, M. le
Président, ce sont des renseignements qui ne sont pas nécessaires
à une prise de décision, au même titre que lorsqu'on
demande confidentiellement - et j'ai le document devant moi... Une
société d'habitation et de développement de
Montréal demande aux individus leur nationalité, soit canadienne
ou autre, pour savoir si, oui ou non, on va leur louer un logement. Ça
n'a aucune espèce de bon sens de fournir ce genre de renseignements
là.
Alors, c'est des choses qui nous ont estomaqués, oui. C'est des
pratiques qui existent et qui, spécifiquement, spécifiquement,
sont une entrave à la Charte québécoise des droits et
libertés, mais particulièrement à l'article 5 de cette
Charte. Alors, nous examinerons des amendements qui vont toucher cet
aspect-là.
Il y a toute cette question de consentement par écrit. Certaines
personnes nous ont saisis très formellement de la
nécessité de voir cette question de consentement par
écrit. Exemple: est-ce qu'à chaque fois qu'un avocat aura
à traiter mon dossier, ou votre dossier, ou que votre banquier aura
à traiter une transaction, ça va prendre votre consentement par
écrit? Ou est-ce qu'à l'occasion, M. le Président - vous
qui ne voyagez pas beaucoup, mais qui autorisez des parlementaires à
voyager dans l'exercice de leurs fonctions parlementaires - ça permet
à ces individus-là, bien sûr, de fournir à l'agence
de voyages des renseignements de nature confidentielle? Bon. Est-ce qu'à
toutes les deux minutes ou à chaque fois que l'agence va faire une
transaction elle sera tenue d'appeler, d'écrire ou d'obtenir un
consentement de la part de l'usager? Il s'agit de trouver une façon de
mieux baliser, je dirais, le consentement. Et c'est là-dessus que nous
travaillons présentement.
Un dernier point, ou un avant-dernier point, M. le Président,
toujours dans l'optique de modifier notre projet de loi pour le rendre plus
applicable ou plus souple, concerne la confirmation de l'existence d'un
dossier, c'est-à-dire l'article 103. L'article 103, je vous rappellerai,
M. le Président, est un article qui fait en sorte que tout individu ou
société qui détient des informations sur une personne
devra, dans l'année qui suit l'adoption du projet de loi, aviser le
client qu'il a de l'information à son sujet.
Je l'ai dit en commission parlementaire, M. le Président, et je
le réitère aujourd'hui, je suis prêt à revoir cette
disposition-là. Mais, ce qui est important, c'est le consensus qui s'est
dégagé autour de cette table de la commission parlementaire.
C'est que les Québécois et les Québécoises aient
accès à leur dossier, aient la capacité de corriger le
dossier et sachent également que ce dossier-là existe. Je suis
ouvert à des modalités, je suis ouvert à des amendements,
à des propositions d'amendements, mais jamais on ne cédera sur
l'élément essentiel de permettre aux Québé-
cois et aux Québécoises accès à leur dossier
de crédit et aussi à la possibilité de corriger ce dossier
de crédit. (16 h 30)
Un dernier élément concerne, M. le Président, le
chevauchement. Plusieurs corporations professionnelles sont venues nous voir
pour nous dire que la loi comme telle ne s'appliquait pas à la
corporation professionnelle, ni à ceux des institutions
financières et des assureurs qui ont, tour à tour, ces groupes,
souligné leur inquiétude face au projet de loi. Encore une fois,
on verra à établir une cohérence et on verra à
permettre au citoyen accès à son dossier. Je comprends qu'il peut
y avoir des exceptions. Je pense qu'on nous a largement fait part, par exemple
au niveau de la corporation des psychologues, des réticences qu'il
pourrait y avoir, mais, néanmoins, le principe étant que, vous,
M. le Président, et tous les parlementaires ainsi que tous les
Québécois aient accès à leur dossier et puissent
avoir la possibilité de le corriger. Qu'ils soient
protégés par une corporation professionnelle, ça nous
apparaît tout à fait normal et logique, mais le projet de loi 68,
c'est un projet de loi plancher. Si on est capable d'améliorer sur le
type et le niveau de protection qu'on peut fournir d'abord à quelqu'un
qui pratique une profession, mais aussi au consommateur et à la
consommatrice, ça, ça nous apparaît tout à fait
louable; non seulement louable, mais souhaitable.
Le dernier élément, M. le Président, concerne la
Commission d'accès à l'information. De nombreux groupes nous ont
aussi fait part de leurs interrogations quant aux pouvoirs dévolus
à la Commission: le pouvoir d'élaboration de codes de conduite,
le pouvoir de surveillance, le pouvoir d'adjudication. Alors, j'ai l'intention
de revoir ces choses-là, particulièrement au niveau de ce qui
pourrait apparaître comme étant un conflit dans la fonction
première, toujours, d'accès et la possibilité de rectifier
un dossier qu'un individu a sur un autre individu. Alors, sur cet
élément-là, M. le Président, on verra à
travailler avec l'Opposition et les membres de cette commission sur des
amendements qui pourraient venir bonifier le projet de loi.
Je dirais, M. le Président, que le Québec... et la
société, c'est une société moderne, c'est une
société dynamique. Je pense que, comme parlementaires, depuis une
dizaine d'années, on l'a prouvé dans le domaine des institutions
qu'on a créées pour protéger les renseignements dans le
secteur public, les renseignements nominatifs, et donner accès... la
même chose avec le projet de loi 68. Et donc, nous devons, je pense,
comme parlementaires, emboîter le pas avec les autres pays du monde libre
et ainsi nous doter d'une législation qui vise spécifiquement
à protéger les renseignements dans le secteur privé.
Les secteurs public et parapublic sont protégés, comme je
l'ai mentionné plus tôt, depuis une dizaine d'années
maintenant, et mon intention, M. le Président, est de faire adopter,
avec le concours des parlementaires ici et les membres de l'Opposition, le
projet de loi 68 d'ici la fin de la session, afin que nous puissions
étendre les grands principes dont j'ai traité, il y a quelques
instants dans mon intervention, au secteur privé.
M. le Président, en conclusion, je répète ce que
j'ai dit en commission parlementaire. Ce projet de loi, le projet de loi 68,
n'est pas le projet de loi d'un individu ni d'un gouvernement. C'est le projet
de loi d'une société, d'une société qui se veut
moderne, d'une société qui s'est donné des principes en
1975, avec l'adoption de la Charte québécoise des droits et
libertés de la personne, et c'est une société qui,
aujourd'hui, veut traduire cette réalité dans un projet de
loi.
Nous pouvons, M. le Président, y souscrire, nous pouvons y
arriver si la volonté existe. J'ai pu comprendre, M. le
Président, que cette volonté existait et je pense qu'à
l'occasion de son adoption, ce sera non seulement la célébration
d'une Assemblée nationale, mais ce sera la célébration
d'une population qui s'est donné les moyens pour protéger sa vie
privée.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre
des Communications.
Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes
à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 68, Loi sur
la protection des renseignements personnels dans le secteur privé.
Je reconnais M. le député de Pointe-aux-Trembles,
porte-parole de l'Opposition officielle dans cette matière. M. le
député de Pointe-aux-Trembles.
M. Michel Bourdon
M. Bourdon: M. le Président, l'Opposition officielle va
voter la loi qui est devant nous pour ce qui est de son adoption de principe,
parce que nous pensons que ça fait des années qu'on discute de la
protection des renseignements personnels. Il y a déjà eu
jusqu'ici deux commissions parlementaires qui ont étudié
successivement le problème, et je suis heureux de voir et de constater
que le ministre a l'intention de passer à l'action et de donner aux
Québécois et aux Québécoises, avant la fête
nationale, une loi qui protège les renseignements confidentiels dans le
secteur privé.
Je voudrais rappeler, M. le Président, que, sous le gouvernement
du Parti québécois, la loi actuelle sur l'accès aux
documents des organismes publics et sur la protection des renseignements
personnels a été adoptée. Le ministre de l'époque,
Jean-François Bertrand, suite à des études, avait tenu
à piloter un projet de loi qui a donné, comme le ministre l'a
rappelé à bon droit, des résultats appréciables
dans le secteur
public, et qui a créé la Commission d'accès
à l'information, à qui le ministre propose, dans son projet de
loi, de donner l'application de la loi qui est devant nous, ce avec quoi nous
sommes, en principe, d'accord.
Je ne veux pas dire, M. le Président, que tout est pour le mieux
dans le meilleur des mondes dans le secteur public. C'est évident que la
Commission d'accès, à mon avis, a donné un délai
indûment élevé, un délai prolongé à la
Commission de la santé et de la sécurité du travail, par
exemple, pour garantir mieux la confidentialité des données qui
sont détenues par cet organisme, qui a des millions de dossiers - par
nature, sensibles, parce qu'il s'agit de l'état de santé des
citoyens - dans ses ordinateurs. Et on sait, M. le Président, qu'il
faudra toujours être vigilant pour éviter, par exemple, qu'un code
d'accès à un ordinateur, dans un ministère ou dans un
organisme, devienne un secret de polichinelle. Dans le cas de la CSST, il avait
été révélé qu'on n'avait même pas un
moyen de garder trace de ceux qui avaient eu accès à
l'ordinateur, et je pense que la Commission a donné un délai trop
long à la CSST pour s'adapter. Mais il reste que la Commission, en
général, a un comportement irréprochable, et on peut dire
que la loi s'applique d'une façon fort correcte depuis maintenant une
décennie.
Il s'agissait, et il s'agit encore, M. le Président, de faire
l'équivalent pour le secteur privé. Les sondages, notamment ceux
qu'Équifax a commandés, illustrent que la population est
très consciente qu'il y a de plus en plus, sur son compte, des
renseignements qui circulent. L'ordinateur qui a enrichi et embelli nos
existences, jusqu'à un certain point, a rendu la dissémination,
la propagation d'informations plus facile, plus faisable que jamais auparavant.
Donc, il y a des abus que cette loi va venir corriger.
Le ministre a rappelé, M. le Président, qu'il s'agit d'une
loi d'application des articles 35 à 41 du Code civil et, à cet
égard, le ministre me permettra de lui rappeler que son collègue
de la Justice n'a pas fait preuve d'une diligence à toute
épreuve. La Ligue des droits et libertés est venue en commission
parlementaire rappeler qu'en 1988 le ministre lui avait promis, comme cadeau de
Noël, de mettre en vigueur les articles 35 à 41 du Code civil. Ils
n'ont pas eu leurs étrennes de 1988; ils n'ont pas eu leurs
étrennes de 1989; ils n'ont pas eu leurs étrennes de 1990; ils
n'ont pas eu les étrennes de 1991 ni de 1992. Ça fait des
années, M. le Président, que les groupes particulièrement
intéressés à ces questions - et la Ligue des droits et
libertés l'est de façon éminente, c'est normal, c'est son
mandat - se font promettre de l'action. Là, la satisfaction que
j'éprouve, c'est de voir que le ministre a mis le projet de loi sur la
table et qu'il a l'intention, et que son gouvernement a l'intention de le faire
adopter pour la Saint-Jean. (16 h 40)
En commission parlementaire, M. le Président, il y a une
trentaine de groupes qui se sont fait entendre, et les groupes sont tous, en
principe, d'accord, mais, dans certains cas, l'accord de principe donne lieu,
après, à un projet d'enterrement de première classe. C'est
évident, M. le Président. Je pense à l'Association des
banquiers canadiens, qui est venue nous dire qu'ils n'avaient rien à
faire dans la bâtisse ici, puisqu'au plan constitutionnel, disent-ils,
ils relèvent du fédéral. Vous savez, M. le
Président, il y a des débats entre nous, ministériels et
de l'Opposition, sur le fait suivant: On serait un peuple ou une
société distincte? Dans le cas de l'Association des banquiers,
j'ai eu l'impression, par moments, M. le Président, qu'ils ne
reconnaissaient même pas qu'on est une province, parce que c'était
vraiment splendide et la possession tranquille de la vérité
informatique, de la vérité de l'information.
Mais, entre-temps, M. le Président, on apprend que les banques
fournissent nos numéros de cartes de crédit aux bureaux de
crédit; ce n'est pas insignifiant, M. le Président. Il a fallu,
en février, que le journal Le Soleil, le 24, publie
qu'Équifax donnait à n'importe qui, qui est abonné
à ce bureau de crédit, et ça coûte 60 $... Que les
banques donnaient nos numéros de cartes de crédit. Et le
porte-parole d'Équifax, en commission, est venu dire qu'il avait
commencé à corriger la situation le 23 février.
D'où ma question en commission: Si Le Soleil ne l'avait pas
publié, si Normand Lester de Radio-Canada n'avait pas dit que des
employés d'Équifax se faisaient passer pour des fonctionnaires de
Revenu Québec cherchant des personnes pour leur remettre un
chèque de TVQ - ce qui était de la fausse représentation -
ça se ferait probablement encore. Tout comme se ferait une
collaboration, qui est intense, avec le ministère de la Main-d'oeuvre,
de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. Les
fonctionnaires de ce ministère échangent des renseignements de
nature confidentielle avec Équifax et, dans certains cas, en vendent et
en retirent, dit-on, un profit personnel. Ça, c'est ce que Le Devoir
nous a révélé.
Dans ce sens-là, M. le Président, Équifax n'est pas
un bureau de crédit meilleur ou pire qu'un autre, mais c'est le plus
gros. Il détient, dit-on, 15 000 000 de dossiers au Canada. Ils ne
veulent pas donner le chiffre pour le Québec, mais on peut imaginer que
c'est 4 000 000 ou 5 000 000 de personnes qui sont fichées chez
Équifax. Il n'y a pas qu'Équifax dans le domaine, il y a les
agences d'investigation qui recourent parfois à des moyens
déloyaux pour obtenir des renseignements, et il y a aussi les courtiers
en listes, parce qu'il y a des types d'entreprises qui donnent très cher
pour avoir des renseignements sur les personnes et, parfois, ça donne
lieu...
Ma mère, qui a 72 ans, par deux fois, en revenant de son
hôpital, a reçu des appels pour
lui proposer des préarrangements funéraires. Et depuis que
j'ai révélé ça, M. le Président, je
reçois des dizaines d'appels de personnes à qui on a fait la
même chose à d'autres égards. Tantôt, c'est une
personne qui va subir un traitement de chimiothérapie en rapport avec
son cancer et qui, immédiatement après, est sollicitée par
une entreprise de frais funéraires. Je pense, M. le Président,
que c'est grave que des personnes vulnérables par définition - on
sort de l'hôpital, on a 70 ans, on a été inquiet, avec
raison, pour sa vie - bien, là, se font appeler par Magnus Poirier, pour
ne pas nommer le premier, ou le Centre commémoratif de Montréal,
pour ne pas nommer le deuxième. Et il paraît qu'au Centre
commémoratif ils sont encore plus portés à ce genre de
sollicitation là que Magnus Poirier, mais les deux l'ont fait dans le
cas de ma propre mère.
C'est donc dire, M. le Président, que même dans le secteur
public où il y a déjà une loi, on voit que les courtiers
en listes du secteur privé recourent à toutes sortes de moyens
pour avoir des renseignements qui ne les regardent pas. Il est heureux qu'on
ait devant nous un projet de loi qui va corriger la situation et qui va faire
en sorte qu'on va civiliser quelque peu les rapports.
Le ministre a fait preuve d'une souplesse louable pour ce qui est des
corporations professionnelles qui ont déjà des mécaniques.
Le ministre a eu raison de dire qu'il suffirait, en vertu de la loi qu'on est
en train d'étudier, en fin de course, que les citoyens aient un recours
auprès de la Commission d'accès à l'information.
Sur les flux transfrontières, je suis du même avis que le
ministre. Si on ne trouve pas un moyen de les assujettir à la loi, il y
a un danger qu'on fasse faire par Plattsburg ou Burlington ou Buffalo ce qui
est interdit à Chicoutimi, Québec et Montréal. Donc, dans
ce sens-là, il ne s'agit pas d'aller à la frontière dire
qu'on peut réglementer le commerce international, ce n'est pas le cas
dans le cadre constitutionnel actuel, mais la loi, pensons-nous, pourrait
prévoir que nul citoyen québécois ou nul entreprise du
Québec ne peut donner un renseignement à l'étranger
qu'elle n'est pas autorisée à donner en vertu de la loi
québécoise ou ne peut en utiliser un venant de
l'étranger.
Je pense que, M. le Président, parmi les représentations
qui ont été faites à la commission parlementaire, je pense
au Mouvement Desjardins, qui joue un rôle majeur en matière de
crédit et qui compte ses 5 000 000 de sociétaires, les critiques
qui ont été faites sur la lourdeur des mécaniques
prévues dans le projet de loi sont fondées. Moi, dans le cas des
fiches de crédit, entre autres, que les gens ont le droit de
connaître et que les citoyens doivent avoir un moyen efficace de faire
corriger quand elles sont inexactes, bien, je pense que le projet de loi fait
erreur en disant que c'est le Bureau de crédit qui doit envoyer un avis
au citoyen. Je pense que ça va donner des millions de lettres et pas les
dossiers de crédit en cause. Je crois qu'on serait mieux de
prévoir, dans un délai raisonnable, que les utilisateurs des
dossiers de crédit, je pense au Mouvement Desjardins, aux caisses
populaires, devraient les remettre à leurs clients et qu'il y ait une
mécanique simple pour les faire corriger quand ils sont
erronés.
M. le Président, je voudrais, en aparté, mentionner que,
bien sûr, il y a des renseignements qu'une entreprise a le droit
légitimement d'obtenir. Quand une personne veut emprunter de l'argent,
il est normal qu'on vérifie de façon correcte et légale si
la personne est solvable. Ce qui est dommage, c'est que, dans la situation
actuelle, non seulement les citoyens ne sont pas bien protégés,
mais il y a des raisons de penser que les dossiers de crédit, entre
autres, sont faits de travers et ne reflètent pas comme il faut la
situation de la personne.
Donc, par une législation qui est là essentiellement pour
garantir les droits des citoyennes et des citoyens, on pourrait même
obtenir une efficacité supplémentaire, puisque, les gens ayant
accès à leur dossier et pouvant les faire corriger, les dossiers
de crédit entre autres vont être plus adéquats. Et je
crois, M. le Président, que, dans ce sens-là, si on donne du
temps et de la latitude aux entreprises pour remettre aux
intéressés les renseignements qu'elles détiennent à
leur endroit - et je pense aux fiches de crédit entre autres - je pense
qu'à ce moment-là la réforme va atteindre les objectifs
qu'elle poursuit.
Puis, en terminant, quant aux conflits d'intérêts possibles
de la Commission d'accès à l'information, je suis
persuadé, suite aux explications du président de la Commission,
que, pourvu que la Commission soit dotée du personnel nécessaire,
les fonctions comme l'information, le conseil et ce qu'on appelle dans le
jargon l'adjudication, mettons les décisions de tribunal administratif
de la Commission, en autant que ce ne sont pas les mêmes personnes qui
assument les rôles divers de la Commission, l'intérêt public
sera bien servi. (16 h 50)
En terminant, M. le Président, je voudrais assurer le ministre
que, contre vents et marées, si le lobbying produit des vents et des
marées, et depuis l'invention du téléphone, on est
toujours assurés qu'une personne peut faire des
représentations.
Le signe est la preuve, je le dis au ministre, il y a une
législation en décembre qui a été adoptée
sur la sollicitation pour les préarrangements funéraires, et son
collègue de la Justice a promis qu'elle serait en vigueur en
février. Elle n'est pas encore en vigueur, et on est en mars. Mais c'est
comme d'habitude dans le cas du collègue du ministre des Communications,
mais, cette fois-ci, j'ai une action préventive parce qu'il est juste
deux semaines en retard. Mais,
apparemment, il a des discussions avec des entreprises comme Magnus
Poirier et le Centre commémoratif de Montréal pour se donner une
autoréglementation à la place de la loi. C'est sûrement des
thèmes qui vont être familiers au ministre. Puis, sur ce dernier
point-là, je voudrais dire que les préarrangements
funéraires, la loi qui a été adoptée, ce n'est pas
juste pour une personne qui sort de l'hôpital, c'est quand, dans un
centre d'accueil, une personne fait de la sollicitation pour des
préarrangements funéraires, ça crée un climat
irrespirable. La loi qui a été adoptée dit que la
sollicitation devrait se faire par la radio, la télévision et les
journaux et pas par des contacts personnels. Mais ça, elle n'est pas
encore en vigueur. Elle n'est que deux semaines en retard, mais j'en parle tout
de suite parce qu'avec le ministre de la Justice les retards sont comme
l'évolution, en ce sens qu'ils évoluent.
En terminant, M. le Président, je veux assurer le ministre que,
contre vents et marées, l'Opposition va appuyer ce projet de loi. Notre
vote n'est pas encore acquis en troisième lecture parce qu'on verra les
amendements à apporter, mais sur le principe de cette loi, puis on est
à l'adoption du principe, le ministre peut être certain que ce
n'est pas une question de politique partisane. C'est une question
sociétale, et les Québécois et les
Québécoises méritent qu'une loi comme la loi 68 soit
adoptée et mise en vigueur le plus rapidement possible. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, nous en sommes
sur l'adoption du principe du projet de loi 68, Loi sur la protection des
renseignements personnels dans le secteur privé.
Je reconnais Mme la députée de Saint-Henri.
Mme Nicole Loiselle
Mme Loiselle: Merci, M. le Président.
Le projet de loi 68, portant sur la protection des renseignements
personnels dans le secteur privé, est une pièce
législative de taille. Ce projet de loi remet en perspective toute la
notion de droit individuel dans une société aussi moderne que la
nôtre. Il nous éclaire davantage sur le sens à donner
à la protection des renseignements personnels dans le secteur
privé.
Le gouvernement québécois juge non seulement opportun de
présenter un tel projet de loi, mais il arrive à temps, à
ce moment-ci de notre histoire, si on le compare à ce qui a
été fait ailleurs au Canada ou dans le monde. En effet, M. le
Président, grâce à ce projet de loi, le Québec se
met au diapason des pays européens et se conforme aux lignes directrices
de l'OCDE.
Deuxièmement, ce projet de loi a pour effet de redonner aux
citoyens le contrôle des informations qui les concernent. En effet, nous
avons lu ou entendu dire que beaucoup de plaintes ont été
formulées concernant la circulation des renseignements ou d'informations
personnelles qui circulent un peu partout dans le secteur privé. Le
projet de loi 68 viendra corriger cette anomalie dont les effets pervers
n'étaient pas protégés dans la législation.
Par rapport au nouveau Code civil, le projet de loi 68 se veut une loi
d'application. On fait ici allusion aux articles 35 à 41 du nouveau Code
civil. En quatrième lieu, ce projet de loi est en parfaite harmonie avec
la loi sur l'accès à l'information et la protection des
renseignements personnels dans le secteur public que nous avons
déjà discutée en Chambre. Ce projet de loi, M. le
Président, se veut également en harmonie avec la Charte des
droits et libertés, dont les principes sont jalousement
surveillés dans notre société et à raison,
d'ailleurs.
Maintenant, M. le Président, j'aimerais revenir sur quelques
éléments que je viens d'énu-mérer pour les
expliciter davantage dans la perspective de cette législation.
Mentionnons d'abord que, comme le gouvernement du Québec, le
gouvernement canadien a assujetti son secteur public à une loi sur la
protection des renseignements personnels. Cette loi rencontre également
ses engagements envers l'OCDE.
Pour le secteur privé, le gouvernement fédéral
s'est engagé à ce que les entreprises agissant sur son territoire
se dotent de codes de conduite de façon à appliquer les principes
prévus dans les lignes directrices. C'est dans cet élan qu'il a
demandé officiellement à tous les gouvernements provinciaux d'en
faire autant auprès des entreprises faisant affaire sur leur
territoire.
Au Québec, il y a une particularité en ce sens qu'on se
trouve dans un territoire où le progrès de la technologie,
l'informatisation croissante de la société, la
prolifération des banques de données dans le secteur privé
ont amené le gouvernement à s'interroger sur la protection de la
vie privée.
Mais, d'abord, parlons de la commission parlementaire qui s'est tenue
sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé,
où le public était invité à donner son avis sur le
rapport intitulé: «Vie privée, zone à accès
restreint». Le bilan de cette commission est fort simple. Les entreprises
ou leurs représentants ont affirmé leur nette
préférence pour l'autorégle-mentation ou l'adoption de
codes de conduite qui reprendraient les principes de l'OCDE sans obligation
légale.
D'autre part, l'adoption du nouveau Code civil du Québec, qui a
été adopté le 18 décembre 1991, introduisait un
régime particulier au chapitre du respect de la réputation et de
la vie privée. Ce sont les articles 35 à 41, auxquels je faisais
allusion tout à l'heure. L'adoption de ces articles représente un
pas important dans le domaine de la protection des renseignements personnels
détenus dans le secteur privé. En
effet, plusieurs droits et obligations y sont prévus, notamment
la constitution d'un dossier dans un intérêt sérieux et
légitime.
D'autres pays, M. le Président, ont opté pour des voies de
compromis entre le caractère contraignant et
l'autoréglementation. En effet, les lois néerlandaises et
finlandaises adoptées à la fin des années quatre-vingt
portaient sur la protection des renseignements personnels dans le secteur
privé. Ces lois, M. le Président, garantissent le respect d'un
certain nombre de principes et consacrent des droits fondamentaux tout en
imposant des obligations minimales à tous. Elles obligent les
entreprises ou permettent à celles-ci de se doter de codes de conduite
pour adapter ou compléter les principes de base aux exigences de leur
secteur respectif.
On peut qualifier, M. le Président, ces lois à la fois de
générales et de spécifiques. L'objet de la loi qui nous
intéresse ici est d'assurer le respect du caractère confidentiel
des renseignements personnels détenus par une personne exploitant une
entreprise. De même, elle établit des conditions et
modalités de consultation et de rectification de tout dossier contenant
des renseignements personnels. Elle vient également compléter les
droits et obligations édictés dans le nouveau Code civil du
Québec. La loi élabore les règles en matière de
collecte, de conservation, d'utilisation, de communication et d'accès
aux renseignements personnels. Elle prévoit aussi des restrictions
à l'accès par la personne concernée, des recours ainsi
qu'un droit d'appel. Il est tout aussi important de préciser que la loi
s'applique à toute personne qui recueille, détient, utilise et
communique des renseignements dans l'exploitation d'une entreprise.
Une dernière remarque, M. le Président, concernant les
lois sur l'accès à l'information et la protection des
renseignements personnels dans le secteur public. En vertu de ce projet de loi
68, pour des raisons de cohérence et d'interdépendance entre les
secteurs privé et public, d'expertise acquise et d'efficacité, la
loi fait en sorte que l'exercice des fonctions édictées est
confié à la Commission d'accès à l'information.
Maintenant, pour faire le lien entre la fonction d'autoréglementation,
précisons que la Commission d'accès à l'information sera
chargée de favoriser cette autoréglementation et de prêter
assistance à toute personne qui désirera se doter de
règles de conduite relatives à l'application des dispositions de
la loi.
M. le Président, comme on le voit, la loi est incitative en ce
sens que cet organisme qu'est la Commission d'accès à
l'information prêtera assistance aux entreprises ou groupes d'entreprises
qui voudraient se doter elles-mêmes d'un code de conduite. Celui-ci n'est
cependant pas obligatoire, et l'approbation d'un organisme de surveillance
n'est pas nécessaire pour qu'il soit appliqué.
Un mot maintenant, M. le Président, sur la nature des
renseignements qui seront protégés. Dans le projet de loi 68, il
n'y a pas de distinction entre renseignement personnel à
caractère public et renseignement nominatif, comme c'est le cas dans la
Loi sur l'accès. La distinction qui est faite pour le secteur public
provient de notre addition d'accessibilité de certains renseignements
nécessaires au bon fonctionnement de la société et que le
législateur a avalisée dans la Loi sur l'accès. Dans le
secteur privé, les renseignements personnels sont tous sur le même
pied. Donc, on parle ici de tout renseignement qui concerne une personne et
permet de l'identifier, qui deviendra ainsi un renseignement personnel au sens
de la loi. Donc, au plan des principes de protection des renseignements
personnels proposés dans la loi, précisons qu'ils seront les
mêmes que ceux que l'on retrouve dans la Loi sur l'accès. On veut
dire ici les notions de consentement, de confidentialité, de droit
d'accès et de rectification. Ce sont les modalités d'application
qui changent, mais non les principes.
De même, on perçoit, à travers ce projet de loi, le
côté libéral, dans son sens large du terme, car, dans cette
étape, le gouvernement juge qu'il serait prématuré
d'obliger les entreprises à se doter de règles spécifiques
ou de leur imposer une réglementation gouvernementale sectorielle. Le
ministre a déjà souligné que cette nécessité
de telles mesures n'a pas été démontrée, mais il a
également souligné qu'il prévoit une seconde étape
à cette démarche. En effet, après cinq ans d'application,
le gouvernement procédera à une évaluation de la mise en
oeuvre de cette loi. (17 heures)
Le projet de loi 68 contient une clause de révision quinquennale
comparable à celle qui est libellée à l'article 179 de la
Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la
protection des renseignements personnels. Cette clause, M. le Président,
rend obligatoire la révision de la loi. Il est raisonnable de croire
qu'après cinq ans l'organisme mandaté pour surveiller
l'application de la loi soit en mesure de faire des recommandations sur
l'opportunité, soit d'adopter une réglementation plus
spécifique, soit d'obliger des entreprises ou des secteurs d'entreprises
à s'autoréglementer.
Entre-temps, les entreprises pourront se doter d'un code de conduite,
bien qu'il ne soit pas obligatoire, et c'est important de le redire. Il
reviendra à la Commission d'accès à l'information de leur
prêter assistance, ou de leur en proposer un. Cette loi est importante,
en ce sens qu'elle franchit un pas marquant vers un encadrement plus
serré de la circulation des renseignements personnels dans le secteur
privé.
Le projet de loi 68 répondra, nous en sommes assurés, aux
préoccupations du public québécois. Le public
québécois se sentira mieux protégé, et le
gouvernement se sentira plus à l'aise de fonctionner dans ce
système pour, un jour, être plus sévère, s'il
fallait le devenir.
En terminant, M. le Président, je tiens à souligner que le
projet de loi 68 fait appel à la collaboration de tous ceux et celles
qui interviennent de près ou de loin dans le secteur des renseignements
personnels. Le projet de loi 68 est basé sur cette notion de confiance
à l'égard du secteur privé, afin d'harmoniser son mode
d'application avec l'esprit et la lettre de ce projet de loi.
Merci, M. le Président, de votre bonne attention.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée de Saint-Henri, de votre intervention.
Sur ce même sujet, soit l'adoption du principe du projet de loi
68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur
privé, je cède la parole à M. le député de
D'Ar-cy-McGee.
M. Robert Libman
M. Libman: Merci beaucoup, M. le Président.
The presence of Bill 68 in the discussions... The discussions that
followed are very important and very timely, in fact. They respond to the
requirements of the Civil Code reform in Québec, but also they respond
to very important changes in our society, changes that we have had to adapt to
over the last several years, changes that involve the transfer of information,
data banks, but mainly the rapid exchange of personal information that takes
place on a daily basis in everyone's life to a far greater extent today than
they have ever before.
Now, the parliamentary commission, la commission de la culture, qui a
examiné le projet de loi 68, était caractérisée par
une ouverture d'esprit. Il faut reconnaître le travail important du
ministre dans le domaine, l'importante discussion qui était autour des
présentations des mémoires, et reconnaître aussi le travail
important du député de Pointe-aux-Trembles, le critique de
l'Opposition officielle dans cette matière. J'aimerais aujourd'hui
souligner quelques points qu'il vient de mentionner, et aussi quelques-unes de
ses inquiétudes que nous partageons, notre formation politique.
Nous sommes favorables au concept, au principe du projet de loi. Alors,
on va voter en faveur, à cette étape de l'adoption de principe du
projet de loi 68. Aussi, nous allons probablement appuyer le projet de loi dans
son adoption finale, si certaines modifications sont apportées à
la loi. On peut présumer que certaines de ces modifications seront
apportées, à la lumière de l'esprit d'ouverture que le
ministre a montré pendant les audiences publiques.
Now, it was also mentioned that certain consensus developed. And the
important consensus to underline is the fact that most people, if not all, that
appeared before the parliamentary commission were favorable to the principle,
to the guiding concept behind this bill. But an important thing to recognize -
and this is the challenge that faces us, and this is the challenge that faces
the Minister, as we move to the next stages in the legislation - is what many
of the presentations showed us. It showed the dilemma we have in finding this
very important common ground, this middle ground between the champions of
access to information, on the one hand, versus some of the corporations or the
businesses, on the other hand, who will have to dole out this information at
their own expense, and finding that middle ground is a difficult proposition.
And the Minister has, as I said, shown us his deliberate interest in showing
flexibility to find this middle ground, and he has shown the openness in
recognizing that this bill is not perfect, that this bill needs modifications
and needs improvement. And we will work towards that, so we can have the most
effective piece of legislation possible.
Mais une chose pour laquelle je ne suis pas d'accord avec le ministre et
sur quelque chose qu'il vient de dire, M. le Président. Il a dit, cet
après-midi, que ce n'est pas un projet de loi pour l'individu; c'est un
projet de loi pour la société.
I beg to differ, M. le Président, because the one important
foundation behind this law is the fact that it is a law for the individual, it
is a law that protects the individual in our society. And it is the individual
components that make up our society. And it is this piece of legislation that
protects the individuals' right to know, the individuals' access to his own
information and the individuals' right to privacy of his own information.
And these are the two fondamental components of this legislation: number
one, that an individual should be able to maintain confidentiality in his
personal information, but, secondly, that the law facilitates access for the
individual to his own file. And we all know what an important or what a
difficult period we are going through economically, an economic period that
will leave many difficult scars on individuals' financial profile.
So, nothing could be more important, in light of this serious economic
context, for an individual in our society to have access to personal
information that may prejudice his future ability to affect a loan or to make a
certain financial transaction, because of the important information that
exists, with respect to his personal financial status and, therefore, his
ability to make changes to his personal file, to update his personal file, to
improve inaccuracies in his personal financial profile, that this is crucial.
And the fact that this law opens up access or facilitates one's ability to
improve or update his personal financial files is perhaps the most important
element in this law, an element
of this law that all Quebeckers must rally behind as a reason for its
passage as soon as possible.
Now, this, on the one hand, is what we have to recognize as crucial, but
on the other hand, one thing that the Commission hearings clearly showed was
that the impact this bill will have on personal information agencies, most of
whom were not opposed to the principle of the legislation, but who had serious
concerns about the law in its present form, these agencies, these businesses
felt that the law places an unfair and a cumbersome financial burden on them,
forcing them, for example, to inform each and every individual of whom they
have a file on, that this file exists and that this person can have access to
this file.
Now, while we and they believe that this law is necessary, we have to
understand and we have to be sensitive to the strain that this law may mean on
some of these businesses. And I feel that it would be very much in the
Minister's interest and the Government's interest to, by way of amendments,
make application of Bill 68 much more palatable for many of these
businesses.
And I hope and I believe that he is open, in the next phase of this
legislation, to seeking this very important common ground, to seeking ways by
which the legislation can be improved to make it acceptable to some of the
corporations that came before our commission to express their concerns.
Representatives of business groups, insurance companies, banks, credit
companies and particularly the Conseil du patronat made a very important case,
and they were met with some resistance by our commission, with a certain level
of hostility, perhaps, in rhetoric, and I think we have to be very open and
sensitive to their underlying concerns.
Yes, it feels good to have a piece of legislation before us that breaks
new ground, that represents our society's evolution into the new technological
age. Yes, that is something for a National Assembly to be proud of, something
that can build unanimous consensus, but that does not mean that we can not be
sensitive to the mitigating impacts it could have on business.
We have to look at that very very seriously. We have to understand that
the difficult constraints on small businesses are being felt very very harshly
during this economic cycle that we are going through right now. And these
businesses have to sustain themselves in this difficult economic environment.
And is the law imposing upon them a burden that will make it even more
difficult for them to cope? We must assure, in the final draft of this
legislation, that we are not adding to the costly burden of these businesses.
(17 h 10)
The Minister and I had an opportunity to discuss briefly, the other day,
some of the articles or one of the articles, in particular, that may impose a
burden on these businesses, that we must look at before we get to the final
draft of this legislation. Article 103 is a perfect example: «Tout agent
de renseignements personnels doit, dans l'année qui suit l'entrée
en vigueur du présent article, informer chaque personne concernée
par un dossier qu'il détient, de l'existence de ce dossier et du droit
de consultation et de rectification que cette personne peut exercer, le cas
échéant.»
In the hearings, we have seen already many different interpretations of
this article, Article 103, as well as many differing analyses of the costs of
applying this article to the real world. For example, Équifax quoted a
figure of 6 000 000 $ to inform all the individuals upon whom they have a file
of the existence of this file. Other companies quoted other figures which were
very, very important or very substantial with respect to the size of these
companies, with respect to the financial burden that it would impose upon some
of these companies.
As I said, the Minister has indicated that he will clarify article 103
to allow some of these businesses to incorporate into their regular business
practices a formula to inform individuals, a formula that would be less
cumbersome, but a formula that they could apply in their everyday operations so
that this article can still maintain its impact, maintain its objective of
informing individuals that a file does exist on them. But at least it will not
impose upon these companies, for example, the restriction of having to send by
mail to each of these individuals a notification, a separate notification,
which could incur considerable costs. He even invoked, at one time, the
possibility of allowing these businesses to inform the individuals by
telephone, which is something that we can explore, but at least it shows that
the necessary flexibility is there, that the Minister has the intention of
incorporating, in the next stage, via amendments, the necessary flexibility so
that the bill could still achieve its objective while not imposing upon
businesses some of the difficulties that go with some of these aspects, some of
the financial burdens that might exist.
Another formula that we might consider is to place the entire burden
with the Commission d'accès à l'information, who will be the
guardian of this law, who may perhaps... We may feel, in analyzing this law
«article par article», that maybe they should have the burden of
informing all individuals in our society of the fact that files exist with
certain companies. We may ask the Commission to advertise on a regular basis a
few times a year or list a few times a year in the newspapers that all of these
companies have files on individuals in Québec and if these individuals
would like to have access to their files they need only contact these companies
to have access to their files. That is something we can consider. If we, in an
analysis, find that the
burden on the individual companies is too much to bear, maybe we can
consider another formula whereby the Commission notifies all Quebeckers via the
media that files exist with certain companies and they, themselves, should
undertake to have access to their files.
Another element to the law which we are glad to see the Minister has
recognized, in the public hearings, the importance of changing is the concern
of the media, that their access to information might be curtailed, that the
freedom of the press might be curtailed. And I believe that the Minister has
shown his willingness to create an exemption in the law to bring forward an
amendment to exempt the media from this disposition. This is something that is
very important that was stressed during the public hearings and must be amended
before we get to the next stage of legislation.
Now, another area, in conclusion, M. le Président, that did not
receive too much attention during the public hearings but, in fact, is an
element of the law that, I believe, needs fixing, needs improvement, is an area
that on a practical level probably affects Quebeckers' daily lives more than
any other aspect of the legislation, that is Articles 20 to 23. And it deals
with the whole question of someone's privacy being invaded by the mere fact
that their name appears on lists, and this is by telemarketing or mass mailing.
How in the world does someone assert his privacy within this world of
massmar-keting? And there is an aspect of the law that tries to attack this
discomfort, but I believe it only scratches the surface.
It was raised by some of the groups that it is not only the existence of
one name on one list, one day, that he might be telemarketed, but there are
lists and sub-lists, and names are transferred very rapidly, to the point that
you lose control. Even if you pinpoint the source of where your name comes
from, there is no way of knowing how your name has been promulgated in very
different areas. I think this is something that we have to look at more
carefully. We have to find a mechanism to be more efficient to apply this
objective of the law to fit the real world, and this is something that we can
discuss.
I think that at least one necessary step that must be taken is to make
it illegal for certain companies to transmit your name without specific
consent. For example, if you ask for a subscription to a magazine or you apply
for a credit card, before that mazagine or that credit card company can submit
your name, or cannot transmit your name to other lists, they must request your
specific permission to do so, whether it is to tick off a box in the
application, that is a specific requirement that must be built into the
law.
The law does speak of this in general terms at the present time, but it
does not, I believe... unless the Minister can point out to me more clearly in
his «réplique» that there is a specific aspect of the law
that denies permission for companies to transmit a list without it having to be
the burden of the individual to contact afterwards the company to have the name
removed from the list. I think this should be right at the beginning, when the
application is made. I do not think the consumer should have to specify that he
wants his name taken off. I believe the company making the request should
contact the consumer via some form of the application or some aspect of the
application form, that the consumer should be asked instead of the consumer
having to ask. I think that is a distinction that must be made.
Now, another thing that we must look at is concerns expressed by certain
groups. Whether or not the Commission d'accès à l'information is
capable right now, for filling this mandate, whether it is in conflict of
interest with itself, I think that has to be looked at carefully before we
allow this law to go forward.
Now, finally, we recognize the fact that some people have brought before
the Commission a belief that the law does not go far enough. I think that we
have to ask some of these people, who feel that the law does not go far enough,
or that the law does not have enough teeth, we have to ask these individuals or
these groups to recognize that this law itself is already a major step forward,
and a fine line has to be understood between this law and some of the
constraints imposed upon business. So, at this stage, I think it is important
to ask these groups who feel that the law is not strong enough to understand
that we must have this law on the books, and if the law becomes ambiguous,
seems to be ambiguous, or does not achieve some of the objectives afterwards,
then it can be looked at afterwards. But, for now, it is a major step forward
and quite a radical departure. So, some of these groups must understand that
the law must be accepted in its present form, from that angle, and the only
modifications we should look at now is making it easy for businesses to cope
with the reality of this new legislation.
But, as I said, M. le Président, at this early stage,
«l'adoption de principe», our group is very favorable to the
principle behind this legislation. The key phase or the real important
chronology of the adoption of this legislation is the next level, in committee,
where we bring forward the amendments, and determine whether this law will be
sufficient in the real world to meet the challenges of confidentiality of
personal information, while at the same time, not impose too cumbersome a
burden on our individual enterprises. And if we can achieve that - the
Minister, and the Commission, and this National Assembly can achieve that - we
will have before us a very important piece of legislation that we should all be
proud of.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de D'Arcy-McGee.
Alors, un simple rappel pour vous informer que nous en sommes à
l'adoption du principe du projet de loi 68, Loi sur la protection des
renseignements personnels dans le secteur privé.
Je cède la parole à M. le député de
Richelieu. M. le député, la parole est à vous. (17 h
20)
M. Albert Khelfa
M. Khelfa: Merci, M. le Président.
C'est avec plaisir que je m'adresse à mes collègues de la
Chambre, ici à l'Assemblée nationale, sur le projet de loi 68,
Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur
privé.
Il s'agit d'un projet de loi extrêmement important pour les
citoyennes et les citoyens du Québec. Les gens de notre
société, nous avons le droit à la vie privée. Vous
n'êtes pas sans savoir, M. le Président, qu'il s'agit de l'un des
droits les plus fondamentaux, les plus importants de ceux et celles qui vivent
en démocratie.
Vous savez également que c'est pour cette raison que le droit
à la vie privée se trouve reconnu, depuis 1975, par la Charte des
droits et libertés de la personne, à l'article 5. Si on a cru bon
de l'inscrire dans notre Charte des droits et libertés de la personne,
c'est, en quelque sorte, pour lui permettre une pérennité qui va
au-delà de l'époque qui en établit le bien-fondé.
C'est aussi pour fournir aux citoyennes et aux citoyens du Québec un
rempart juridique contre les atteintes à la vie privée qui, elles
aussi, peuvent prendre des formes différentes suivant les
époques.
Aujourd'hui, ce qui est en cause, ce sont les effets sur la vie
privée, et surtout des menaces à celle-ci, que font peser le
progrès de la technologie, l'informatisation croissante de la
société et la prolifération des banques de données
dans le secteur privé. En effet, M. le Président, ce sont les
progrès considérables accomplis dans le domaine de la
technologie, l'informatisation croissante de la société et la
prolifération des banques de données dans le secteur privé
qui ont amené le gouvernement du Québec, qui ont amené le
ministère des Communications et le ministre des Communications à
se pencher sur la protection de la vie privée et à
élaborer le projet de loi que nous avons devant nous aujourd'hui.
M. le Président, le projet de loi 68 que nous discutons
aujourd'hui ici, à l'Assemblée nationale, a, comme l'ensemble des
projets de loi sur lesquels l'Assemblée nationale est amenée
à statuer et à se pencher, sa propre histoire, et je crois utile
de vous en rappeler les grandes étapes, les grandes lignes. Vous savez
bien que la décennie quatre-vingt a été la décennie
de ce qu'on appelle aujourd'hui la décennie des technologies de
l'informatique. L'informatique a con- nu un développement sans
précédent. Les télécommunications ont connu, elles
aussi, un essor considérable avec, notamment, tout l'essor de la
«numéralisation» qui a augmenté la possibilité
de la transition à l'infini. On a vu apparaître d'impressionnantes
banques de données dans tous les domaines, y compris ceux relatifs
à la vie privée des citoyens. Des citoyens et des groupes de
citoyens ont attiré l'attention des pouvoirs publics sur les dangers et
les menaces éventuelles à la vie privée que pouvait
engendrer cet essor considérable et inédit des technologies de
l'information depuis une quinzaine d'années.
À cet égard, M. le Président, on se rappellera que
le gouvernement libéral est sensible aux représentations des
citoyens et des groupes de citoyens sur cette question. Dès 1986, le
ministère de la Justice et plusieurs autres ministères et
organismes publics ont commandé une étude à des experts en
informatique et en droit. Cette étude, publiée en 1990 et
intitulée «L'identité piratée», recommandait
à l'époque au gouvernement du Québec de
légiférer de manière à appliquer au secteur
privé les principes et les lignes directrices établis par
l'Organisation de coopération et de développement
économique, l'OCDE. La valeur de cette recommandation n'a pas
été démentie par la suite; elle a même
été confirmée à deux reprises, voire même
trois reprises. En effet, un comité interministériel d'experts en
la matière concernée a réitéré la pertinence
de l'à-propos d'une législation gouvernementale afin d'amener le
secteur privé à appliquer les principes de l'OCDE en
matière de protection de la vie privée et relativement aux effets
sur celle-ci des technologies de l'information et de l'informatique.
De même, M. le Président, en est-il des travaux des
députés qui ont procédé à l'examen de cette
question au sein de la commission de la culture à l'Assemblée
nationale, qui avait à l'époque, et je le rappelle, le mandat de
réviser la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics
et sur la protection des renseignements personnels. L'examen de mes
collègues nous avait conduits à recommander au gouvernement
d'étendre au secteur privé les principes de protection des
renseignements personnels consacrés dans la loi actuelle.
Vous le savez, M. le Président, ce rapport a donné lieu
à des consultations publiques à la faveur desquelles les
entreprises oeuvrant dans le domaine des renseignements privés ont pu
faire connaître au gouvernement leur point de vue, et les groupes de
défense de la vie privée ont fait la même chose. De cette
consultation, il est ressorti que les entreprises avaient une nette
préférence pour l'autoréglementation ou l'adoption de
codes de conduite qui reprendraient des principes de l'OCDE. De leur
côté, les groupes de défense de la vie privée
souhaitaient voir le gouvernement du Québec obliger les entreprises, par
une législation, à se doter de codes de
conduite, ou encore voir à assujettir le secteur privé
à une loi comparable à la loi sur l'accès.
On voit donc, M. le Président, que le gouvernement du
Québec se devait de trouver une solution acceptable, tant pour les
entreprises oeuvrant dans le domaine du renseignement que pour les groupes de
défense de la vie privée. Et il l'a trouvée, et ce, en
s'inspirant des expériences finlandaise et néerlandaise en cette
matière. Ces pays, et d'autres, ont adopté, vers la fin des
années quatre-vingt, des nouvelles lois sur la protection des
renseignements personnels dans le secteur de la vie privée. Ces lois,
dites de seconde génération, sont en quelque sorte des compromis
entre la loi à caractère contraignant et
l'autoréglementation pure et simple. Ces lois ont pour
caractéristiques de garantir le respect d'un certain nombre de
principes, de consacrer les droits fondamentaux et d'imposer des obligations
minimales à tout le monde. Ainsi, l'approche qui est
privilégiée par le gouvernement dans ce projet s'inspire de cette
nouvelle génération de lois sur la protection des renseignements
personnels.
De façon plus concrète, M. le Président, on peut
dire que l'objet du projet de loi 68 est de s'assurer et d'assurer le respect
du caractère confidentiel des renseignements personnels détenus
par une personne exploitant une entreprise et d'établir des conditions
et des modalités de consultation et de rectification de tout dossier
concernant les renseignements personnels. C'est ce qu'on appelle le recours. De
plus, M. le Président, la loi élabore des règles en
matière de collecte, de conservation, d'utilisation, de communication et
d'accès aux renseignements personnels et prévoit des restrictions
à l'accès pour la personne concernée. Donc, le recours est
important, le droit "de recours est un droit d'appel.
M. le Président, avec ce projet de loi, le Québec se donne
une loi comparable à celle qui existe dans l'ensemble des
sociétés industrialisées en matière de protection
des renseignements personnels - et je vois mon collègue de Papineau qui
est d'accord avec moi, avec son sourire - et de la vie privée aussi.
Donc, je reviens, M. le Président. Cette loi rattrape ainsi un retard
qu'a accusé en cette matière le Québec. (17 h 30)
D'autre part, il importe de souligner que la loi vient compléter
les droits et les obligations «édictives» dans le nouveau
Code civil en matière de renseignements personnels.
En terminant, M. le Président, je tiens à
réaffirmer qu'avec ce projet de loi le Québec se dote, en
matière de renseignements personnels et de la vie privée, d'une
législation adaptée aux réalités de notre temps et
aux réalités des besoins des citoyens. La vie privée des
citoyens et des citoyennes du Québec se trouve renforcée, et sans
pour autant que les entreprises qui oeuvrent dans le domaine ne voient leur
activité menacée d'une façon ou d'une autre. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Richelieu, de votre intervention.
Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes
à l'adoption du principe du projet de loi 68, Loi sur la protection des
renseignements personnels dans le secteur privé.
Je reconnais M. le député de LaFontaine. M. le
député, la parole est à vous.
M. Jean-Claude Gobé
M. Gobé: Merci, M. le Président.
L'étude de cet avant-projet de loi 68 permet à nous,
parlementaires, et donc responsables de la gestion de ce pays et aussi de la
défense des droits des citoyens de notre société, de faire
le point et de nous pencher sur des transformations technologiques, des
transformations d'habitude qui vont, si nous n'y prenons garde, avoir des
effets très importants dans la vie quotidienne de l'ensemble de nos
concitoyens.
En effet, depuis quelques décennies, grâce aux technologies
modernes, soit l'informatique, la télématique, les fax et la
téléphonie, il est très facile pour toute personne ou
toute société d'accumuler et de colliger des informations sur un
certain nombre de personnes, de citoyens ou d'organismes ou d'entreprises. Et,
bien entendu, ces informations, M. le Président, sont souvent
colligées dans le but d'être utilisées à des fins de
décision. Alors, ça peut être des informations dans le
domaine de la santé. Par exemple, on peut chercher à savoir les
genres de maladie que certaines personnes peuvent avoir, certains traitements
qu'elles peuvent obtenir, ceci dans le but particulier, par exemple, de vendre
des médicaments ou tout simplement d'obtenir des échantillonnages
de personnes afin de favoriser certaines pratiques commerciales.
Le député de Pointe-aux-Trembles le faisait valoir
lorsqu'il donnait en exemple le cas de sa mère qui avait
été sollicitée, suite à sa sortie de
l'hôpital, par des commerçants qui voulaient faire la promotion
d'arrangements préfunéraires. Cela démontre très
bien, M. le Président, que cette information qui est maintenant
colligée, qui est maintenant collectée et traitée par
cette méthode ultramoderne qui est l'informatique peut avoir des effets
les plus surprenants.
Nous n'avions pas ça, dans le temps. Je me souviens, à une
époque, M. le Président, où, pour acheter une automobile,
nous appelions, du moins le concessionnaire automobile appelait la banque,
vérifiait le compte de banque du client et, avec ces informations,
pouvait établir, selon les connaissances et son jugement, la note de
crédit de son client. Ce qui n'est plus le cas maintenant. À ce
moment-là, les gens appellent une entreprise spécialisée
et, automatiquement, pour une somme très modeste, un grand nombre
d'in-
formations arrivent sur cette personne. Cela va de la carte de
crédit qui a été payée 15 jours en retard en
passant par l'hypothèque qu'on a obtenue de la caisse populaire et qu'on
a renouvelée une semaine ou dix jours après la date
d'entrée en vigueur, et ça va aussi pour le citoyen qui, pour des
raisons particulières, peut avoir une pension alimentaire à payer
à son épouse, ou peut avoir des dettes accumulées et qu'il
doit rembourser régulièrement. Cela permet de faire un portrait
financier de cette personne et de prendre une décision par la suite
quant à sa solvabilité au niveau commercial.
Alors, si cela semble être logique et normal - et je ne pense pas
qu'une personne puisse s'offusquer que l'on puisse chercher des informations
avant de faire une transaction commerciale ou professionnelle avec un individu
- je crois qu'il faut faire attention de ne pas tomber dans l'excès
contraire et de nous retrouver avec des entreprises qui ont des fichiers sur
l'ensemble des citoyens, et cela, partant de la naissance, où les
entreprises sont intéressées à avoir de l'information
venant des hôpitaux où les naissances se font pour pouvoir vendre
des couches ou vendre des produits pour enfants, et se retrouver par la suite,
comme ce fut le cas de la mère du député de
Pointe-aux-Trembles, jusqu'à l'arrangement préfunéraire.
Nous serions, à ce moment-là, pris en charge par des banques de
données qui contrôleraient un peu notre existence, car ces
données serviraient à des entreprises, à des individus
pour venir nous solliciter, nous vendre des produits ou simplement
déterminer quel est le niveau de vie qu'on peut avoir dans notre pouvoir
d'achat.
Ce projet de loi, M. le Président, a quelque chose de très
intéressant. C'est certainement un des meilleurs projets de loi dans le
monde. J'ai vu plusieurs pays européens, et je n'ai pas vu dans un grand
nombre de pays un projet de loi qui se penche d'une manière aussi
globale sur la protection de l'information, mais surtout la protection de la
vie privée des citoyens. Et je crois, M. le Président, que c'est
là certainement encore un des grands acquis de la société
québécoise qui fait que, sur un certain nombre de sujets, il y a
un consensus de notre société et que l'ensemble des
parlementaires puissent abonder dans le même sens, car c'est là un
projet de loi d'intérêt particulier pour l'ensemble de la
population.
M. le Président, imaginons un peu quelqu'un qui désire
faire une transaction et qui apprend qu'il est fiché dans une entreprise
et qu'il n'aurait pas accès à ces renseignements. Le
commerçant y aurait accès, mais lui ne pourrait pas y avoir
accès ou ne pourrait pas faire en sorte de corriger des informations
qu'il jugerait non correctes ou non complètes, qui auraient pu
être introduites dans son dossier par erreur, ou par un
commerçant, ou par un organisme qui n'aurait pas fait son travail
jusqu'au bout. Il se retrouverait fiché, donc, avec des renseignements
qui pourraient lui porter préjudice, et ce citoyen ne pourrait y avoir
accès. Or, le projet de loi va permettre, justement, va renforcer cette
capacité du citoyen d'avoir accès non seulement à son
dossier mais de pouvoir y amener des corrections. Je crois que c'est là
une des choses fondamentales, car s'il existe le droit à l'information
pour prendre une décision d'affaires, une transaction financière,
il existe aussi le droit à l'information juste et correcte pour le
citoyen afin que celui-ci ne soit pas pénalisé.
Il y a aussi, M. le Président, tous les renseignements du
côté médical, du côté santé, et c'est
là, je pense, quelque chose qui est encore plus important que
l'information financière, car, si l'on peut avoir, dans une entreprise,
une filière ou un dossier qui dénote qu'on a pu payer une carte
de crédit un peu en retard, ou quelque chose comme ça, qui
pourrait dire qu'on a la cote A, A1 ou A2 en termes de crédit, il y a
encore plus important que les fichiers: la protection des renseignements au
niveau de la santé. Imaginons que des entreprises ou des groupes
pourraient obtenir des portraits complets de toute la condition physique,
morale et psychologique d'un certain nombre de citoyens. Imaginons le pouvoir
important d'influence sur ces citoyens que ces gens, que ces décideurs
pourraient avoir.
À titre d'exemple, il pourrait y avoir des citoyens qui ont eu,
au cours de leur vie, certaines maladies qu'ils ne désirent pas mettre
de l'avant. Ça peut être au niveau psychologique ou au niveau
parasitaire, ça peut être au niveau de maladies qui pourraient
mettre en jeu leur emploi ou leur capacité d'occuper certaines fonctions
professionnelles. Et c'est là, M. le Président, je pense, un des
grands, grands, grands atouts importants du projet de loi, c'est qu'on ne peut
pas et on ne doit pas faire en sorte que se crée, au Québec et
dans notre société, ce genre de banque. Alors, le projet de loi
est innovateur. Non seulement il est innovateur, mais il est peut-être
unique dans nos pays occidentaux. (17 h 40)
M. le Président, je vois que le ministre, en l'apportant, a
démontré qu'il avait cette clairvoyance et ce jugement.
D'ailleurs, l'appui de l'Opposition à son projet - je le disais
précédemment - confirme les paroles que j'ai à ce
moment-ci. À part quelques organismes de notre société qui
ont toujours un peu de difficulté à s'adapter aux changements,
même si, à l'occasion, on peut aller dans le même sens
qu'eux pour d'autres projets, je ne vois pas pourquoi on ne devrait pas tous
ensemble, comme société, au Québec, applaudir et aller
dans le même sens et dans la même direction que le ministre veut
nous faire aller en prenant ce projet de loi-là, car c'est un projet de
loi utile, un projet de loi qui va permettre d'apporter à notre
société un cer-
tain nombre de protections et de barrières et faire en sorte de
valoriser aussi les informations qui seront dans certaines banques, parce que
nous serons assurés qu'elles correspondent à la
réalité.
M. le Président, le projet de loi 68, c'est un projet de loi
très intéressant, novateur, un projet de loi qui est au
mérite du ministre et du gouvernement que nous sommes, M. le
Président, et je fais voeu que l'ensemble des collègues de ce
Parlement, nous l'appuyions afin de démontrer à la population,
encore une fois, qu'on ne peut pas, dans notre société, laisser
les choses libres et sauvages sans mettre un certain nombre de barrières
et de balises afin d'assurer un minimum de respect de l'individu.
M. le Président, en terminant, j'appuie ce projet de loi
là et je réitère le voeu que l'ensemble des
parlementaires, y compris ceux de l'Opposition, puissent avoir le même
support envers le projet de M. le ministre.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de LaFontaine, de votre intervention.
Sur ce même sujet, je reconnais M. le président de la
commission de la culture et député de Louis-Hébert.
M. Réjean Doyon
M. Doyon: Oui, M. le Président.
M. le Président, le peu de voix qui me reste me permettra
cependant de faire connaître l'approbation que j'ai du projet de loi qui
vient d'être présenté. Ça a été
extrêmement gratifiant, comme président de la commission de la
culture, d'avoir à présider la commission parlementaire qui a
siégé pendant une quinzaine de jours et qui a reçu
au-delà de 40 organismes et groupes de personnes, des personnes
privées, à divers titres, qui sont venues nous entretenir de leur
point de vue en ce qui concerne le projet de loi 68.
Sachons d'abord, M. le Président, que le projet de loi 68 a pour
objet de protéger la vie privée des gens dans le secteur
privé. Il s'agit, pour ce projet de loi, de s'assurer que les
renseignements divers et extrêmement nombreux détenus par toutes
sortes d'organismes, par toutes sortes de personnes morales et physiques avec
lesquelles nous transigeons quotidiennement, que ces renseignements puissent
être colligés, puissent être échangés,
puissent être commercialisés au détriment de ceux qui font
l'objet de ces renseignements-là.
Il est devenu facile, par la technologie moderne, par l'informatique, de
marier, de coupler, de conjuguer des renseignements. Un renseignement pris
individuellement, très souvent, a une signification limitée. Mais
si on le met avec d'autres renseignements qui viennent de tous bords et de tous
côtés, on arrive à tracer un profil, un profil de la
personne où on arrive à pouvoir déterminer avec certitude
ou avec une certaine certitude le genre de personne à qui on a affaire.
On est capable, comme ça, de cibler cette personne-là pour viser
un certain nombre d'objectifs qui peuvent être des objectifs de vente,
des objectifs de sollicitation, des objectifs de vente sous pression, ce qui
fait que l'individu qui se voit assailli de cette façon ne dispose pas
d'instruments, il ne dispose pas de moyens de défense suffisants.
Ce que nous avons voulu faire par ce projet de loi, et ce que le
ministre a voulu faire lors de la commission parlementaire, c'est de tester, de
tester la réaction des gens qui seraient affectés par ce projet
de loi, de tester la réaction de la clientèle à être
protégée et de tester aussi la réaction des gens, des
organismes divers de toutes natures qui auraient, justement, à se plier
à une réglementation qui aurait sa source dans le pouvoir
habilitant que donnerait la loi.
Notre consultation a été extrêmement
éclairante. En gros, je vous dirai, M. le Président, que la
consultation a révélé qu'au fil des ans il y a eu une
évolution considérable à ce sujet-là. C'est
remarquable. Au fil des ans s'est dégagé un consensus en faveur
d'une législation du gouvernement du Québec pour assurer la
protection des renseignements personnels dans le secteur privé.
Ça n'a pas toujours été le cas. Ça n'a pas toujours
été le cas. On a eu, il y a peu de temps, un an ou un an et demi,
une commission parlementaire qui est allée voir comment
réagissait le public en général à ça. Et,
à ce moment-là, c'était loin d'être évident
qu'un projet de loi semblable à celui que nous avons devant nous
rencontrerait un consensus suffisamment grand pour nous permettre
d'espérer le faire passer dans des délais quand même
rapides si l'on considère que, d'ici à la fin du mois d'avril -
le ministre l'annonçait - il est dans les intentions du gouvernement
d'avoir cette loi-là - du mois d'avril qui vient - d'avoir cette
loi-là adoptée par cette Assemblée nationale, quitte
à ce que les mécanismes d'application suivent leur cours et que
ça puisse se faire dans les mois qui suivent. C'est d'autant plus facile
et d'autant plus possible de réaliser un objectif aussi
élevé que nous avons la collaboration totale de l'Opposition
à ce sujet-là.
L'Opposition a fait preuve d'une grande responsabilité en
acceptant de travailler main dans la main avec le gouvernement. Ce n'est pas
tous les jours, M. le Président, que vous m'entendrez prononcer des
paroles semblables. Et je le dis avec fierté, que le
député de Pointe-aux-Trembles a été d'une aide
précieuse et qu'il nous a permis de trouver des moyens de rencontrer les
objectifs qui étaient les nôtres grâce à son
expérience personnelle, son expérience de syndicaliste, son
expérience de personne particulièrement arrimée à
certains groupes particuliers de la société montréalaise
en particulier, ce qui
nous a permis d'ouvrir un certain nombre d'horizons vers des solutions
que nous n'avions pas, au tout début, envisagées. Et le ministre
était d'autant plus aise de les accepter que lui-même,
d'entrée de jeu, à la fin de la commission, a annoncé
qu'il y aurait des amendements importants sur lesquels, me disait-il tout
à l'heure, déjà, des gens de son ministère sont en
train de travailler. Et ça nous permettra de rencontrer les quelques
objections qui ont été soulevées.
Le défi qui nous est fait, M. le Président, est de ne pas
faire une législation tellement lourde, tellement pesante qu'elle
finisse par écraser les commerces, les détenteurs ou les
détentrices de renseignements personnels, les compagnies qui font
profession de colliger des renseignements personnels, de les mettre à la
disposition des prêteurs, par exemple, des commerçants,
étant bien entendu, M. le Président, que, finalement, dans un
commerce ainsi fait et bien fait, selon les règles honnêtes qui
doivent s'appliquer dans un tel cas, nous en sommes tous les
bénéficiaires. Ni vous ni moi, M. le Président, n'avons
avantage à ce que quelqu'un qui est un mauvais payeur, qui est un
mauvais emprunteur, puisse aller chercher du crédit auprès d'une
institution de crédit, ne rembourse pas et que, finalement,
l'institution prêteuse n'étant pas remboursée se voie dans
l'obligation d'augmenter son taux d'intérêt pour compenser les
pertes qu'elle subit.
Moi, je suis complètement d'accord que les dettes qui sont
encourues doivent être remboursées. Il n'est pas question que
quelqu'un qui ne rembourse pas ses dettes puisse profiter des mêmes
avantages que vous, par exemple, M. le Président, qui êtes, bien
sûr, un emprunteur modèle quand ça vous arrive. Vous ne
voudriez pas vous voir en butte avec un mauvais emprunteur qui, parce que lui
ne rembourse pas, aurait fait rejaillir sur votre propre crédit, qui est
impeccable au moment où je vous parle, j'en suis certain, ce qui vous
obligerait à des remboursements plus élevés que ceux qui
sont déjà, me disiez-vous l'autre jour, suffisamment lourds pour
vous. Alors, vous ne pourriez pas accepter une telle chose.
Alors, on dit beaucoup de mal d'Équifax, on dit beaucoup de mal
d'Équifax. Moi, je trouve qu'Équifax joue un rôle utile
dans notre société. Si Équifax n'existait pas, je pense
qu'il faudrait l'inventer. Si Équifax ne permettait pas à
quelqu'un qui va chez un commerçant et qui veut acheter à
crédit un système de son, qu'il ne permettrait pas à ce
commerçant de savoir qu'il n'a pas payé son frigidaire non plus
la dernière fois qu'il a emprunté, qu'il est en retard de six
paiements sur sa voiture et que sa télévision vient de lui
être saisie parce qu'il a oublié qu'il lui restait 33 paiements
à faire - c'était un 36 paiements... Alors, je pense
qu'Équifax est utile dans ce cas-là. (17 h 50)
Je caricature un peu, M. le Président, tout simplement pour vous
faire réfléchir. Castigat ridendo mores, disait Virgile; je
corrige les moeurs en riant. Castigat ridendo mores. Je caricature un peu pour
mieux faire comprendre que, Équifax, ce n'est pas l'enfer sur terre, ce
n'est pas du méchant monde, c'est des gens qui ont une utilité
dans une société de marché comme la nôtre. Je suis
certain qu'un des problèmes que connaît actuellement la Russie des
tsars, c'est qu'il n'y en a pas d'Équifax là parce qu'ils n'ont
pas de tradition de crédit. Qu'est-ce que tu fais quand tu veux partir
une économie de marché, puis jamais personne n'a eu une carte de
crédit dans ses poches, que jamais personne n'a emprunté 0,05 $
parce que ça ne se faisait pas, parce qu'il n'y avait pas de banque
prêteuse? Tu fais quoi pour avoir une économie de marché?
Je suis certain que la Russie, en d'autres termes, M. le Président, nous
envie Équifax, parce que d'avoir Équifax, ça veut dire
qu'on est dans un système qui fonctionne. Et ça, je voulais le
souligner.
Je veux souligner aussi une autre chose, M. le Président, c'est
que... Moi, je suis député depuis près de 12 ans
maintenant et j'ai reçu des plaintes dans tous les domaines. J'en ai
reçu parce que les lumières de rue étaient
brûlées, j'en ai reçu de locataires parce que la porte
était gelée. J'ai reçu toutes les sortes de plaintes, mais
je n'ai jamais eu de plaintes concernant Équifax et, pourtant, les gens
ne se gênent pas pour venir voir le député et se plaindre
au député de toutes sortes de choses. Pourtant, je n'ai jamais eu
de plaintes d'Équifax.
Donc, tout ça pour dire que c'est vrai qu'il faut baliser. C'est
vrai qu'il faut jalonner, c'est vrai qu'il faut réglementer, mais il
faut le faire avec délicatesse, il faut le faire en essayant de ne pas
écraser sous la lourdeur d'une réglementation qui aurait pour
effet d'étouffer l'économie, d'étouffer le
commerçant, d'étouffer les gens qui veulent faire des affaires
pour protéger quelques exceptions qui pourraient se produire, ici et
là, et qui se produisent, malheureusement.
Quand on a les explications sur ces exceptions-là qui nous ont
été données, en commission parlementaire... M. le ministre
était là. On nous avait fait grand état de madame... Je
pense que c'est Mme Rozon, disait-on. Mme Rozon avait un litige
épouvantable avec Équifax, sauf que, quand Équifax est
venue devant nous autres, puis on a dit: Qu'en est-il de Mme Rozon? ils nous
ont donné des explications parfaitement correctes, où on voyait
que, finalement, ce n'était pas si simple que Mme Rozon se plaisait
à l'expliquer dans sa façon de voir. Il y a toujours deux
côtés d'une médaille, et une commission parlementaire telle
que celle que nous avons tenue pendant une quinzaine de jours nous a permis de
voir les deux côtés de cette médaille-là.
Nous travaillons donc dans le domaine de la protection des
renseignements personnels dans le
secteur privé, mais nous le faisons dans un cadre plus vaste.
Nous le faisons, premièrement, dans le cadre beaucoup plus vaste de la
Charte des droits et libertés de la personne. La Charte des droits et
libertés de la personne, M. le Président, existe, et le droit
à la vie privée est reconnu dans la Charte depuis 1975, mais ce
qui nous manquait, c'étaient des règles administratives qui
fixent l'application de la protection de cette vie privée. Donc, le
cadre est beaucoup plus vaste pour nous permettre de légiférer
dans le domaine de la protection de la vie privée, dans le cadre, donc,
de la Charte des droits et libertés de la personne.
Au-delà de ça, depuis quelques mois maintenant, M. le
Président, nous agissons aussi à l'intérieur du nouveau
Code civil. Les articles 35 à 41 du Code civil font en sorte que les
individus, les personnes au Québec, maintenant, d'après le Code
civil... Donc, le Code civil, qui est sanctionné par les tribunaux de
droit commun, ce Code civil, les articles 35 à 41 font maintenant en
sorte que quinconque juge que sa vie privée a été
brimée a un droit d'action, en vertu du droit civil, devant les
tribunaux. Il n'a pas vraiment besoin de la loi sur la protection de la vie
privée. Il n'a pas vraiment besoin de ça. Il pourrait tout
simplement le faire au moyen des tribunaux, sauf que, M. le Président,
ça a pour effet, ça, d'alourdir énormément la
procédure.
Ce qu'on s'est dit, le raisonnement qu'on se fait, et c'est pour
ça... Le ministre... C'est pour ça que le gouvernement
présente ce projet de loi. Si le gouvernement a jugé bon de se
soustraire ni plus, ni moins à l'ensemble de la législation
générale dont je parle, la Charte, le Code, en se soumettant
à la Commission d'accès à l'information, en ce qui
concerne le secteur public. Est-ce qu'il n'est pas logique, est-ce qu'il n'est
pas rationnel, est-ce qu'il n'est pas parfaitement raisonnable de dire que la
même façon de faire pourrait devoir s'appliquer aux renseignements
personnels dans le secteur privé? En d'autres termes, si c'est bon dans
le secteur public, pourquoi ce ne serait pas bon dans le secteur privé?
Et c'est ce que nous avons fait, c'est ce que nous sommes en train de
faire.
Moi, je suis extrêmement heureux de voir la tournure des
événements. Je suis extrêmement heureux de voir que le
Québec s'inscrit encore une fois dans une ligne qui est
déjà tracée dans la plupart des pays
industrialisés. L'OCDE, l'Organisation de coopération et de
développement économiques, a demandé aux pays membres de
l'OCDE de se doter d'une législation qui a pour but, pour objectif,
d'assurer la protection de la vie privée. Dans le contexte de
mondialisation - ça devient un cliché de le dire, mais c'est
aussi en même temps qu'un cliché une réalité - le
Québec ne peut pas échapper à ça, et c'est dans ce
sens-là que le Québec se conforme ni plus ni moins à ce
qui existe ailleurs, se conforme à l'engagement pris par le Canada
envers l'OCDE d'emmener les provinces canadiennes à
légiférer dans ce domaine. Et le Québec le fait d'une
façon qui va, en même temps, donner satisfaction aux
représentations fondées qui nous ont été faites par
les regroupements de locataires, les regroupements de consommateurs, la Ligue
des droits et libertés de la personne, qui nous ont fait valoir d'une
façon fort éloquente le besoin qu'il y avait d'agir dans ce
domaine. Mais en même temps que nous sommes à l'écoute de
ces représentations, nous ne sommes pas sourds à ce que nous
disent les gens comme le Conseil du patronat, comme l'association canadienne
des banques, comme le Bureau d'assurance du Canada, comme les caisses
populaires, par exemple.
Alors, nous avons, en même temps, des sons de cloche qui, tout
différents qu'ils soient, ne sont pas contradictoires. C'est
extrêmement gratifiant de pouvoir légiférer dans un tel
contexte, de pouvoir faire oeuvre utile sans brimer personne, en
améliorant la qualité de vie collective, en s'assurant que les
objectifs que nous poursuivons sont des objectifs qui vont être atteints
avec un minimum de dépenses. C'est très important et ça a
été une préoccupation que le ministre a eue du
début à la fin.
Et c'est pour ça, entre autres choses, que la Commission
d'accès à l'information va être l'organisme responsable de
l'application de cette loi 68. Le gouvernement aurait pu décider de
créer un organisme différent. Il ne le fait pas, malgré
qu'il y a, on le reconnaît, certaines anomalies, un certain agacement,
à certains endroits, de voir la Commission d'accès à
l'information jouer un rôle d'adjudicateur, bien sûr, un rôle
de conseiller, un rôle d'enquêteur et un rôle de
réglementation en même temps. Tous ces rôles-là, la
Commission les joue, mais elle doit les jouer d'une façon
compartimentée pour réussir à rendre des décisions
qui sont basées sur des preuves qui lui sont soumises en faisant
abstraction de certaines autres interventions qu'elle a eu à faire.
Alors, les renseignements et les rapports que nous avons sur l'oeuvre
que fait la Commission d'accès à l'information sont
extrêmement positifs. Nous avons un président de la Commission
d'accès à l'information en la personne de M. Comeau, qui est une
personne respectée dans tous les milieux, qui fait un travail
extrêmement important et extrêmement valable. Alors, tous les
éléments, en d'autres termes, M. le Président, sont
réunis pour que ce projet de loi, dès le mois d'avril, soit
adopté et que nous puissions au Québec, comme dans bien d'autres
pays industrialisés, avoir une loi adéquate, une loi moderne dans
le domaine de la protection des renseignements personnels dans le secteur
privé.
Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M.
le député de Louis-Hébert, de votre
intervention.
Il est maintenant 18 heures, et je vais suspendre les travaux de cette
Assemblée jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 heures)
(Reprise à 20 h 5)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Si vous voulez prendre place. Nous poursuivons l'assemblée, aux
affaires du jour. Nous sommes à l'adoption du principe du projet de loi
68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur
privé.
Je reconnais M. le député d'Iberville.
M. Yvon Lafrance
M. Lafrance: Merci, M. le Président.
M. le Président, le droit à la vie privée est un
principe reconnu, notamment dans la Charte des droits et libertés. Plus
encore, ce droit à la vie privée, une liberté
fondamentale, doit être respecté par tous, sans exception. C'est
d'ailleurs ce principe, M. le Président, qui a amené
l'élaboration du projet de loi 68, qui fait l'objet du débat
actuel.
Il s'agit d'un projet de loi qui a pour objet d'établir des
règles particulières à l'égard des renseignements
personnels qui sont recueillis, détenus, utilisés ou
communiqués à des tiers dans le cadre de l'exploitation d'une
entreprise dans le secteur privé.
Mais, avant d'en élaborer davantage le contenu, j'aimerais
expliquer les motifs de notre gouvernement dans l'élaboration de cette
législation. Tout d'abord, je crois que ce sont les abus de toutes
sortes qui ont donné lieu à la mise en place de ce projet de loi.
Il existe, en effet, plusieurs exemples de non-respect du droit à la vie
privée, et jusqu'à maintenant, les citoyennes et citoyens avaient
difficilement recours à des moyens juridiques pour protéger les
renseignements qui les concernent.
D'autre part, nous ne pouvons ignorer le progrès de la
technologie, l'informatisation croissante de la société et la
prolifération des banques de données dans le secteur
privé. Cela nous a, bien sûr, amenés à nous
interroger sur la protection de la vie privée.
Deuxièmement, nous avons décidé d'harmoniser
l'intervention québécoise avec les nombreux efforts qui sont
faits sur le plan international, notamment à l'Organisation de
coopération et de développement économiques, mieux connue
sous le titre OCDE, et à la Communauté économique
européenne, ceci dans le but de faciliter la circulation des
données personnelles, mais en s'assurant que celles-ci soient
protégées. À cet égard, vous vous rappellerez que
le Canada a adhéré, voilà maintenant près de 10
ans, soit en 1984, aux lignes directrices régissant la protection de la
vie privée et les flux transfrontières de données à
caractère personnel émises par l'Organisation de
coopération et de développement économiques. Ces
règles de l'OCDE visent, entre autres, à promouvoir l'adoption de
mesures de protection de la vie privée par les membres, tant pour le
secteur privé que pour le secteur public. Par ailleurs, le gouvernement
canadien, comme on le sait, a assujetti son secteur public à une loi
dite sur la protection des renseignements personnels qui rencontre en partie
ces engagements envers l'OCDE.
Pour ce qui est du secteur privé, le gouvernement
fédéral s'était engagé à ce que les
entreprises qui agissent sur son territoire se dotent de codes de conduite de
façon à appliquer les principes prévus dans les lignes
directrices. Vous vous rappelerez, d'ailleurs, que le gouvernement
fédéral avait demandé officiellement aux gouvernements
provinciaux d'en faire autant auprès des entreprises faisant affaire sur
leur territoire. Toutefois, vous aurez constaté que peu d'entre elles se
sont dotées de tels codes de conduite. D'ailleurs, le Canada, à
cet égard, a fait l'objet de critiques de la part de l'OCDE. (20 h
10)
M. le Président, je suis donc très heureux de constater
que le projet de loi 68 s'inscrit dans la foulée de ce qui se passe
à travers le monde à cet égard. Devant une utilisation
croissante de l'information à titre de matière première et
les importantes capacités d'enregistrement et de traitement qui sont
offertes par les fichiers informatisés, une protection juridique comme
celle que nous présentons ce soir s'est véritablement
imposée à presque tous les pays développés. En
d'autres termes, M. le Président, c'est donc dans le but d'harmoniser
l'intervention québécoise avec ce qui s'est fait à l'OCDE
que nous avons élaboré le projet de loi qui est devant nous ce
soir.
Troisièmement, je vous parlerai de cette législation
versus l'adoption du nouveau Code civil du Québec. Pour ce faire, je
vous rappellerai que c'est le 18 décembre 1991 que cette
Assemblée nationale adoptait le nouveau Code civil du Québec. Et
je m'en souviens très bien, M. le Président, puisque j'ai eu
l'honneur de présider la commission parlementaire spéciale qui
s'est penchée sur l'étude article par article - et il y en avait
plus de 3000 - de ce projet de loi qu'on a qualifié d'historique.
Vous vous souvenez sûrement que ce nouveau Code civil introduit un
régime particulier au chapitre du respect de la réputation et de
la vie privée. L'adoption des articles s'y référant
représente, à n'en pas douter, un pas important quant à la
protection des renseignements personnels détenus dans le secteur
privé. D'autre part, ces articles reprennent certains principes qui sont
énoncés dans les lignes di-
rectrices, comme je l'ai mentionné, de l'OCDE. On y
prévoit, notamment, la constitution d'un dossier dans un
intérêt sérieux et légitime et le droit, par
l'intéressé, au consentement à la communication à
des tiers ou à l'utilisation à des fins incompatibles avec la
constitution du dossier. Toutefois, les résultats de la commission
parlementaire de 1991, à laquelle j'ai aussi participé,
confirmaient la nécessité, pour le gouvernement, de
compléter les règles du Code civil, ce qui l'a amené, bien
sûr, à élaborer le présent projet de loi, soit le
projet de loi 68.
Ainsi, M. le Président, cette nouvelle législation vient
compléter notre Code civil en ce qui a trait à la cueillette,
à la détention et à la communication de renseignements
personnels. Ce n'est là qu'un aperçu des raisons qui ont
motivé notre gouvernement à présenter le projet de loi qui
nous concerne aujourd'hui. Mais, à la base, une seule chose demeure: la
préoccupation du gouvernement libéral de protéger les
Québécoises et les Québécois quant à la
sécurité des données personnelles qui les concernent. Nous
voulions, en fait, que les citoyens puissent avoir le contrôle et
l'utilisation des informations qui sont recueillies à leur sujet. C'est
donc dans un souci de transparence que notre gouvernement a voulu
légiférer.
M. le Président, j'aimerais, avant de terminer, expliquer quelque
peu le contenu du projet de loi. Cela nous permettra tous de mieux comprendre
son application réelle. Ainsi, la loi élabore des règles
en matière de collecte, de conservation, d'utilisation, de communication
et d'accès aux renseignements personnels. Elle prévoit
également des restrictions à l'accès par la personne
concernée des recours ainsi qu'un droit d'appel.
Concrètement, la loi s'applique à toute personne qui
recueille, détient, utilise et communique des renseignements nominatifs
dans l'exploitation d'une entreprise sur le territoire québécois.
Pour des raisons de cohérence et d'interdépendance entre les
secteurs public et privé, d'expertise acquise et d'efficacité, il
est donc proposé que l'exercice des fonctions édictées
dans la loi soit confié à la Commission d'accès à
l'information.
Pour ce qui est des pouvoirs qui lui sont dévolus, la Commission
d'accès à l'information entendra les demandes de révision
faites en vertu de la loi. Elle exercera des fonctions de surveillance de
l'application de la loi et de médiation. Elle pourra également
faire des enquêtes sur son fonctionnement et sur son observation, puis
elle sera chargée de favoriser l'autoréglementation et de
prêter assistance à toute personne qui voudra se doter de
règles de conduite relatives à l'application des dispositions de
la loi.
J'aimerais également dire quelques mots, M. le Président,
sur la nature des renseignements qui seront protégés par la
nouvelle loi. Ainsi, le projet de loi ne prévoit pas de distinction
entre renseignements personnels à caractère public et
renseignements nominatifs, comme c'est le cas dans la loi sur l'accès.
La distinction qui est faite pour le secteur public provient de la tradition
d'accessibilité de certains renseignements nécessaires au bon
fonctionnement de la société, et que le législateur a
avalisée dans la loi sur l'accès. En ce qui a trait au secteur
privé, les renseignements personnels sont tous sur le même pied.
Alors, tout renseignement concernant une personne et permettant de l'identifier
sera dorénavant un renseignement personnel au sens de la loi. Toutefois,
un renseignement ne sera pas considéré comme personnel s'il
possède, en vertu de la loi, un caractère public.
M. le Président, ce n'est là qu'un léger
aperçu du contenu du projet de loi 68 concernant la protection des
renseignements personnels dans le secteur privé. Il y aurait
évidemment d'autres volets à aborder. Toutefois, puisque le temps
me presse, je me limiterai à ceci. Comme moi, vous comprendrez que nul
ne peut contester le bien-fondé de cette législation. En effet,
ce projet de loi vient garantir le respect du droit à la vie
privée, un concept de liberté qui devrait s'appliquer à
tous et à toutes. L'intention du gouvernement a donc été
claire, M. le Président. Nous avons voulu donner à tout individu
la maîtrise des renseignements et des informations qui le concernent,
mais nous avons également voulu lui fournir la possibilité d'un
recours législatif, le tout dans un esprit de justice. M. le
Président, vous comprendrez donc que, pour ces raisons, il me fera
plaisir de voter en faveur de l'adoption du projet de loi 68.
Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le
député d'Iberville, de votre intervention.
Je vous rappelle que nous en sommes à l'étape de
l'adoption du principe du projet de loi 68, Loi sur la protection des
renseignements personnels dans le secteur privé. (20 h 20)
Je reconnais M. le député de Champlain. M. le
député, la parole est à vous.
M. Pierre A. Brouillette
M. Brouillette: Merci, M. le Président.
C'est avec grand intérêt que je prends la parole
aujourd'hui pour m'adresser à mes collègues de la Chambre sur le
projet de loi 68, Loi sur la protection des renseignements personnels dans le
secteur privé. Le projet de loi 68 en est un d'une importance
considérable pour les citoyens et les citoyennes de notre
société. Il est relatif à leur droit à la vie
privée.
Effectivement, M. le Président, ce qui est au coeur de ce projet
de loi, c'est le respect de la vie privée des citoyennes et des citoyens
de
notre société. Vous, tout comme d'ailleurs l'ensemble de
nos collègues, n'ignorez pas, M. le Président, que la vie
privée et son respect sont l'un des droits les plus importants de ceux
et de celles qui, comme nous, avons la chance et le privilège de vivre
dans une démocratie établie comme la nôtre. Au regard de
notre formation politique et de notre gouvernement, il s'agit là d'une
valeur à laquelle nous sommes profondément attachés, et
même l'un des piliers de la philosophie libérale que nous nous
efforçons de traduire quotidiennement dans les législations que
nous sommes appelés à adopter ici, dans cette enceinte.
À cet égard, M. le Président, vous n'êtes pas
sans savoir que c'est sous le gouvernement libéral que le droit à
la vie privée a été reconnu, en 1975, à travers son
enchâssement dans la Charte des droits et libertés, et ce,
à l'article 5. Si un gouvernement libéral a jugé pertinent
de l'enchâsser dans notre Charte des droits et libertés de la
personne au milieu de années soixante-dix, c'est dans la perspective de
donner à ce droit une longévité qui va au-delà des
moments singuliers qui en ont établi la pertinence et l'à-propos
dans le contexte contemporain qui est le nôtre. S'il en est ainsi, M. le
Président, c'est également et surtout pour permettre aux
citoyennes et aux citoyens de disposer de protection juridique contre les
atteintes à la vie privée qui, comme vous le savez,
épousent des formes différentes selon les décennies.
Depuis quelques années, ce qui figure au premier rang des
préoccupations en matière de préservation de la vie
privée, ce sont les effets sur celle-ci que font peser l'essor
considérable des technologies, l'informatisation croissante de la
société et, surtout, la prolifération de banques de
données dans le secteur privé.
M. le Président, ce sont effectivement les développements
considérables et, il faut le dire, le progrès remarquable
accompli dans le domaine de la technologie et dans celui de l'informatisation
croissante de la société ainsi que dans celui de la
prolifération des banques de données dans le secteur privé
qui sont à l'origine de notre débat d'aujourd'hui sur la
protection de la vie privée. Ce sont ces progrès qui ont
amené le gouvernement à se pencher sur la protection de la vie
privée afin d'élaborer le projet de loi que nous avons devant
nous. Le projet de loi 68 est le résultat de l'ensemble des
démarches qui se sont échelonnées au cours des
dernières années. Il n'est pas inutile, M. le Président,
de vous donner une «contextualisation» plus étroite des
considérations qui sont intervenues dans son élaboration.
C'est un fait connu de tous, la décennie quatre-vingt a
été, dans le domaine scientifique et technologique, la
décennie de ce qu'il est devenu courant d'appeler les technologies de
l'information. Au rang des technologies de l'information, M. le
Président, on retrouve d'abord l'informatique. Vous savez qu'elle a
connu un développement considérable. L'ordinateur, grand ou
petit, a envahi littéralement un grand nombre des sphères de
l'existence des femmes et des hommes vivant en société.
L'informatique n'est pas le seul domaine des technologies de l'information
à avoir connu un essor. Il faut mentionner celui des
télécommunications. Les télécommunications ont
connu, elles aussi, un essor très significatif avec, évidemment,
l'avènement de la numérisation dont l'un des effets est de
multiplier presque à l'infini les possibilités de
transmission.
Un autre volet de ces technologies de l'information qui s'est
également considérablement développé au cours des
10 dernières années, c'est celui qui concerne plus
spécifiquement le projet de loi que nous avons devant nous, soit celui
des banques de données. On a assisté, M. le Président,
à leur multiplication dans toutes les sphères, y compris celles
relatives à la vie privée. Le développement a
été tel qu'on parle aujourd'hui d'une industrie du renseignement.
Même si l'expression est sans doute quelque peu expressive, son usage est
néanmoins révélateur de l'importance qu'ont prise, dans
notre société, les banques de données. Leur
développement a soulevé un certain nombre d'inquiétudes
chez les citoyennes et les citoyens de notre société. En effet,
les individus, les groupes d'individus ont attiré l'attention du
gouvernement sur les menaces potentielles à la vie privée que
pouvait engendrer ce développement remarquable et inédit des
technologies de l'information et, au premier chef, des banques de
données depuis une quinzaine d'années.
Conformément à sa philosophie, et comme vous le savez,
notre gouvernement met l'accent sur les valeurs fondamentales de notre
démocratie et ainsi s'est montré sensible aux
représentations des citoyens et des groupes de citoyens sur cette
question. La sensibilité de notre gouvernement s'est d'abord
manifestée aussitôt après notre arrivée au pouvoir.
En effet, je vous rappelle, M. le Président, que dès 1986 le
ministère de la Justice et plusieurs autres ministères et
organismes ont commandé une étude à des experts en
informatique et en droit. Vous vous souvenez sûrement que cette
étude intitulée «L'identité piratée»
recommandait au gouvernement du Québec, à l'époque,
d'intervenir de manière à appliquer au secteur privé les
principes et les lignes directrices que l'OCDE, c'est-à-dire
l'Organisation de coopération et de développement
économiques, a établi en cette matière, il y a quelques
années. De façon générale, M. le Président,
on peut dire que la valeur des recommandations du comité n'a pas
été démentie par les preuves des faits. Sans
réserve, le contraire peut même être affirmé, puisque
les orientations mises de l'avant dans cette étude ont
été, à quelques reprises par la suite,
réaffirmées.
Un comité interministériel d'experts dans les
matières concernées est arrivé aux mêmes conclusions
en reconnaissant le bien-fondé d'une législation gouvernementale
en cette matière afin d'amener le secteur privé à
appliquer les principes de l'OCDE. En outre, il faut souligner également
que cette perspective d'intervention gouvernementale a été
réaffirmée par un comité composé de notre
Assemblée, c'est-à-dire l'Assemblée nationale. Les travaux
de réflexion de nos collègues les avaient conduits, je vous le
rappelle, à recommander au gouvernement d'étendre au secteur
privé les principes de protection des renseignements personnels
consacrés dans la loi actuelle.
Je vous rappelle également, M. le Président, que le
rapport de nos collègues a donné lieu à des consultations
publiques à la faveur desquelles les intervenants concernés dans
le domaine du renseignement privé ont pu se faire entendre. Il s'agit
surtout des entreprises oeuvrant dans le domaine des renseignements
privés ainsi que des groupes de défense de la vie
privée.
Cette consultation publique a permis de faire ressortir deux choses.
D'une part, les entreprises avaient une nette préférence pour
l'autoréglementation et l'adoption du code de conduite reprenant les
principes de l'OCDE. D'autre part, les groupes de défense de la vie
privée ont exprimé le désir de voir le gouvernement
contraindre les entreprises, par voie législative, à se doter de
codes de conduite ou, encore, à un assujettissement du secteur
privé à une loi comparable à la loi sur l'accès
à l'information.
Dans cette perspective, M. le Président, il allait de soi que le
gouvernement se devait de trouver une solution de compromis, une solution
acceptable, tant pour les entreprises oeuvrant dans le domaine du renseignement
que pour les groupes de défense de la vie privée. Ce compromis,
il l'a trouvé en s'inspirant notamment des expériences
néerlandaises et finlandaises sur cette question de la protection de la
vie privée.
En effet, M. le Président, une recherche effectuée par le
ministère des Communications a montré que ces deux petits pays
avaient été, à la fin des années quatre-vingt,
confrontés à des problèmes analogues à celui auquel
nous répondons aujourd'hui par ce projet de loi. Les solutions retenues
par ces pays sont des solutions dites de compromis entre les lois à
caractère contraignant et l'autorégulation pure. Il s'agit de
lois qui ont pour singularité de garantir le respect d'un certain nombre
de principes et de consacrer des droits fondamentaux, et d'imposer des
obligations minimales à tous. (20 h 30)
Je signale en passant, M. le Président, que l'on qualifie ces
lois de lois dites de seconde génération en matière de
protection de la vie privée. Pour être plus précis et
surtout plus concret, on peut dire du projet de loi 68 que son objet est
d'assurer le respect du caractère confidentiel des renseignements
personnels détenus par une personne exploitant une entreprise et
d'établir des conditions et des modalités de consultation et de
rectification de tous les dossiers concernant les renseignements personnels et
de protection de la vie privée. En outre, le projet de loi 68
élabore des règles en matière de collecte, de
conservation, d'utilisation, de communication et d'accès aux
renseignements personnels et prévoit une restriction à
l'accès pour les personnes concernées, des recours ainsi qu'un
droit d'appel.
Le Québec, M. le Président, avec ce projet de loi, se
donne une loi très comparable à celles qui existent dans les pays
de l'OCDE en matière de protection de renseignements personnels et de la
vie privée. Ce faisant, il rattrape ces pays en ayant une
législation comparable et, ainsi, rattrape un retard en cette
matière.
De plus, il est utile de souligner que la loi vient compléter les
lois et obligations édictées par ce nouveau Code civil en
matière de renseignements personnels. M. le Président, je veux
souligner le fait qu'avec ce projet de loi notre société se
donne, en matière de protection des renseignements personnels et de la
vie privée, une loi adaptée aux réalités de la
présente décennie. Comme vous le savez, elle va aussi être
marquée par un grand essor des technologies de l'information.
Enfin, je tiens à réaffirmer que le projet de loi 68 est
en accord complet avec la philosophie de notre formation politique. La vie
privée des citoyennes et des citoyens de notre société se
trouvera, avec son adoption, renforcée. Les entreprises du secteur du
renseignement pourront poursuivre leurs activités tout en se conformant
aux règles qu'édicté le projet de loi en cette
matière. Enfin, je crois qu'avec ce projet de loi, il n'y a pas de
gagnants.
Merci beaucoup, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Champlain.
Est-ce qu'il y a d'autres intervenants dans ce dossier?
Mise aux voix
Alors, le principe du projet de loi 68, Loi sur la protection des
renseignements personnels dans le secteur privé, est-il
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
Renvoi à la commission de la culture
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le
Président. Dans les circonstances, je fais motion pour que ledit
projet de loi soit déféré à la commission de la
culture pour étude détaillée.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion
est adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté.
M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je
vous demande d'appeler l'article 18 du feuilleton.
Projet de loi 56 Reprise du débat sur
l'adoption
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 18,
l'Assemblée reprend le débat, ajourné le 11 mars dernier,
sur l'adoption du projet de loi 56, Loi modifiant la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme et d'autres dispositions
législatives.
Est-ce qu'il y a des intervenants dans ce dossier?
M. Gendron: II n'y a pas d'intervenants de ce
côté-ci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a un
droit de réplique? Il n'y a pas de droit de réplique.
Est-ce que le projet de loi 56, Loi modifiant la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme... Il y a un intervenant?
M. Gendron: C'était celui qui arrive, l'intervenant.
Alors, je m'excuse.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Montmorency, la parole est à vous.
M. Gendron: Je m'excuse.
M. Jean Filion
M. Filion: Merci, M. le Président.
Je profite de l'occasion qui m'est offerte, à titre de
député, pour m'adresser à nouveau à
l'Assemblée nationale sur le projet de loi 56, le projet de loi qui,
à toutes fins pratiques, apporte la deuxième
génération des schémas d'aménagement au
Québec.
M. le Président, comme je l'ai fait dans mon intervention en
deuxième lecture, je pense qu'il est très intéressant de
constater que l'on doive toujours améliorer la qualité de vie des
citoyens et citoyennes du Québec. Cependant, M. le Président, il
faut non seulement adopter les projets de loi mais aussi faut-il s'assurer en
cette Assemblée que les projets de loi sont bel et bien appliqués
sur le territoire québécois et qu'ils sont bien adoptés
par les MRC à travers le Québec.
M. le Président, de la première génération
des schémas d'aménagement, deux schémas
d'aménagement ne sont pas encore adoptés au Québec, dont
un schéma d'aménagement se situe sur le territoire de la MRC de
La Côte-de-Beaupré. Les citoyens et citoyennes, au moment
où on se parle, sont toujours piégés, sont pris en otage
devant une problématique où intervient la susceptibilité
ou encore la confusion de communication entre deux ministères, soit
celui de l'Environnement et celui des Affaires municipales.
Vous savez, il y a une problématique très simple qui est
celle où on doit délimiter la limite des hautes eaux, ce qui
entraîne une problématique à l'adoption du schéma
d'aménagement. 212 riverains le long de la côte, au niveau de la
côte de Beaupré, n'ont pas encore réussi à
convaincre le gouvernement et les deux ministères concernés
à procéder le plus rapidement possible à l'adoption du
schéma d'aménagement et à la détermination de la
limite des hautes eaux.
M. le Président, je profite de cette tribune pour à
nouveau sensibiliser l'Assemblée nationale. Oui, c'est excellent,
l'adoption du projet de loi 56. Oui, il faut aller plus loin. Oui, il faut
amener une nouvelle réglementation pour permettre une meilleure
qualité de vie. Mais faut-il encore, M. le Président, être
conscient que ces projets de loi ont besoin d'être poussés
davantage et d'être sensibilisés davantage au niveau de la
mécanique d'application, où les ministères doivent jouer
un rôle important. m. le président, les citoyens et les citoyennes
de château-richer, de l'ange-gardien, de boischatel, àe
sainte-anne-de-beaupré sont des citoyens et des citoyennes qui ne
demandent pas mieux que d'avoir un schéma d'aménagement et
surtout, m. le président, ne demandent pas mieux que la
problématique de la limite des hautes eaux soit enfin fixée et
qu'ils puissent savoir à quoi s'en tenir au niveau de l'utilisation de
leurs terrains.
Je pense que ce dossier, qui dure maintenant depuis plus de sept ou huit
ans, n'a pas encore reçu de dénouement. On s'attend,
bientôt, à ce qu'il y ait une étude, j'espère, qui
devrait, normalement, faire l'objet du BAPE, où on va pouvoir enfin
arriver à entendre les différents intervenants et où on va
pouvoir enfin, également, arriver à des conclusions où,
j'espère le plus rapidement possible, on saura informer la population de
la côte de Beaupré qu'ils pourront enfin adopter leur
schéma d'aménagement de la première
génération. Là, on est rendus à la deuxième,
et la première génération, dans le comté de
Montmorency, actuellement, n'a pas encore trouvé son application. .
5379
M. le Président, je crois et je pense que l'Assemblée
nationale doit prendre au sérieux ce qui se passe à
Château-Richer. Les gens sont exaspérés. Ils n'ont pas
encore reçu de réponse positive à un règlement dans
le dossier, et, entre-temps, on se retrouve avec une foule de problèmes
d'application parce qu'il n'y a pas de schéma d'aménagement, M.
le Président. C'est très important, un schéma
d'aménagement. C'est ce qui contrôle le développement
urbain d'une localité.
Parce qu'il n'y a pas de schéma d'aménagement, on a subi,
l'an dernier, des problèmes d'application et de développement
urbain. D'ailleurs, ça a fait la manchette. Vous savez, le campement de
Wolfe près de la chute Montmorency, M. le Président, a fait
l'objet d'un développement domiciliaire parce que les gens de la
municipalité de Boischatel n'ont pas la réglementation
appropriée pour contrôler d'une façon ordonnée le
développement de la municipalité. Alors, la municipalité a
permis légalement qu'on puisse faire un développement
domiciliaire qui, à toutes fins pratiques, se situait en bordure ou
presque sur un terrain historique qui avait une culture et une histoire, que
l'on a appelé le campement de Wolfe, M. le Président.
Alors, imaginez-vous, parce que le schéma d'aménagement
n'est pas adopté, on a des problèmes incroyables que l'on
occasionne à une collectivité. À ce niveau-là, on
s'est retrouvés, M. le Président, avec, comme on le sait, des
tollés de protestation. Les gens ne comprenaient pas qu'on puisse
développer sur un territoire ou sur un site historique. Les gens ne
comprenaient pas qu'on puisse accepter des développements domiciliaires.
Pourtant, M. le Président, le développement en soi avait ses
droits acquis, avait sa pleine légalité réglementaire,
convenue par la municipalité. Quand on regarde le fond de l'histoire, on
se rend bien compte que, s'il y avait eu vraiment un schéma
d'aménagement, c'est-à-dire la première
génération des schémas d'aménagement, si,
effectivement, il avait été adopté et appliqué sur
le territoire de la MRC de La Côte-de-Beaupré, cela aurait
facilité et ordonné le développement et probablement
évité ce genre de situation de confusion où les gens se
retrouvent pris dans une situation où ils ne comprennent pas pourquoi on
arrive à accepter de tels développements sur des sites
historiques. (20 h 40)
Alors, là, on a vu que des fonds importants ont été
dégagés pour faire des expertises, des contre-expertises, pour
aller vérifier, effectivement, si le développement domiciliaire
se retrouvait sur le site historique ou pas.
Alors, M. le Président, ça occasionne des problèmes
incroyables. Quand on sait également que les 211 riverains
propriétaires sur la côte de Beaupré ne savent pas quoi
faire de leur terrain, jusqu'où ils peuvent aller. Ils déplacent
une roche. Ils se retrouvent dans des poursuites judiciaires, ils se retrouvent
avec des inspecteurs qui arrivent, qui disent: Écoutez, ne touchez pas
à cette roche-là, c'est important. Ils sont confondus entre des
lois fédérales aquatiques, des lois provinciales. Ils
communiquent avec les ministères. On leur dit: Bien, écoutez,
c'est une question d'environnement. L'Environnement dit: Bien, il y a une
question également des Affaires municipales.
Alors, tout ça mis ensemble, M. le Président, la
population est complètement confuse, et les gens se demandent: Bien,
écoutez, quand est-ce qu'on va avoir un dénouement? Où
elle se situe, la limite des hautes eaux? Est-ce qu'elle se situe à un
niveau, par exemple, qui engloberait le boulevard Sainte-Anne ou elle se situe
selon les écarts naturels?
Alors, M. le Président, je sais que le temps s'écoule,
mais je voulais profiter des quelques minutes, parce que je voulais à
nouveau sensibiliser l'Assemblée nationale à l'importance des
schémas d'aménagement, mais aussi à leur application et
à leur adoption sur le territoire. Je souhaite qu'il y ait vraiment un
dénouement le plus rapide dans le dossier, en ce qui nous concerne ou en
ce qui concerne la population de la côte de Beaupré, et que nous
aurons très bientôt des audiences publiques qui permettront enfin
l'adoption et compléter l'adoption des schémas
d'aménagement de la première génération qui nous
permettra, par la suite, bien sûr, d'évaluer à sa juste
valeur le projet de loi 56 qui, actuellement, fait l'objet de la
présente législation et qui, sûrement, aidera et ordonnera
un meilleur développement et une plus grande qualité de vie des
citoyens et citoyennes du Québec.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député de Montmorency, de votre intervention. Est-ce qu'il y a
d'autres intervenants?
Mise aux voix
Le projet de loi 56, Loi modifiant la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme et d'autres dispositions législatives, est-il
adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le
leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je vous
demanderais d'appeler l'article 8 du feuilleton.
Projet de loi 75 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article
8, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du
principe du projet de loi 75, Loi modifiant diverses dispositions
législatives concernant l'abolition de la Société
d'aménagement de l'Outaouais.
M. le ministre des Affaires municipales.
M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, le projet de loi 75 est
l'expression d'un large consensus régional dans l'Outaouais. Il
complète la liquidation de la Société d'aménagement
de l'Outaouais en proposant l'abrogation, dans la loi de la Communauté
urbaine de l'Outaouais, des quelque 60 ou 75 articles qui traitaient de la
Société d'aménagement de l'Outaouais. Et, en retour, le
projet de loi invite l'Assemblée nationale à conférer
à la Communauté urbaine de l'Outaouais des pouvoirs
nécessaires pour être en mesure de prendre charge la promotion du
développement économique sur son territoire et même le
pouvoir de créer, s'il le juge opportun, un organisme distinct à
cette fin.
Pour comprendre de quoi nous traitons, je dirai un bref mot de la
région de l'Outaouais, dont traiteront tantôt avec beaucoup plus
de compétence, évidemment, nos collègues qui viennent de
cette région et qui parleront en son nom. Je parlerai ensuite de la
Société d'aménagement de l'Outaouais et, finalement, de la
solution qu'apporte le projet de loi à des problèmes qui
préoccupaient le gouvernement depuis déjà cinq ou six
ans.
La Société d'aménagement de l'Outaouais fut
créée en 1969. Elle commençait de fonctionner en janvier
1970. Elle fut créée dans une époque qui nourrissait des
inquiétudes quant aux ambitions territoriales de la Commission de la
capitale nationale et du gouvernement fédéral sur la partie du
territoire québécois qui est située dans le voisinage
immédiat de la région de la capitale nationale.
La Société d'aménagement de l'Outaouais
s'était vu confier un mandat d'aménagement du territoire de
manière que le Québec puisse prendre les devants dans bien des
secteurs au lieu d'être toujours à la remorque du gouvernement
fédéral. Pendant cette période, pendant, par
conséquent, 23 ans, la Société a fait beaucoup de choses.
Elle a créé cinq centres touristiques dans le secteur rural du
territoire qu'elle avait à desservir, qui était tout l'Outaouais.
Elle a créé trois parcs récréatifs urbains dans les
municipalités d'Aylmer, de Gatineau et de Hull. Elle avait
créé des parcs industriels, deux parcs industriels. Elle a
créé, à Gatineau et à Aylmer, un aéroport -
à Gatineau - un parc technologique à Hull. Tous ses biens, au
cours des dernières années, ont été
cédés aux municipalités concernées pour la somme de
1 $ chacun. Ça veut dire que la ville de Gatineau, aujourd'hui, peut
s'enorgueillir d'un parc industriel et aussi d'un aéroport, qui est
devenu sa propriété, alors qu'elle n'a payé que la somme
de 1 $ pour en faire l'acquisition. Pour toutes ces initiatives de la
Société d'aménagement de l'Outaouais, le gouvernement du
Québec a investi des sommes considérables. Nous estimons que,
depuis 1970, les sommes investies par le gouvernement dans la
Société d'aménagement de l'Outaouais dépassent les
110 000 000 $, autant en budgets de fonctionnement qu'en budgets
d'investissement.
Mais on remarquait, depuis quelques années, un certain
ralentissement dans les activités de la SAO, comme on l'appelle en
Outaouais. Cette société est un organisme créé par
le gouvernement, et qui était contrôlée par le gouvernement
aussi. Tous les membres du conseil d'administration de la SAO étaient
nommés par le gouvernement, tout comme son président et son
directeur général. Cette structure était contraire
à la philosophie du gouvernement, qui veut que le développement
régional soit pris en charge non pas de manière paternaliste et
aristocratique à partir de Québec, mais par les agents
eux-mêmes du milieu, agissant sous leur responsabilité. Tout le
monde était convenu, tout le monde, ces dernières années,
qu'il fallait trouver une autre façon de promouvoir et de coordonner le
développement économique et social dans la région de
l'Outaouais.
Or, les solutions que le gouvernement a mises sur pied à cette
fin sont doubles. D'un côté, on appliquera dans la région
de l'Outaouais, comme dans les autres du Québec, le plan de structure
mis au point par le ministre responsable du développement
régional, c'est-à-dire que, pour la région de l'Outaouais,
on créera prochainement, si ce n'est déjà fait, une sorte
de conférence régionale du développement, qui regroupera
tous les maires de la région, urbains et ruraux, composant à peu
près la moitié de l'ensemble du nouvel organisme, et l'autre
moitié devant être formée de représentants du
milieu. Cette structure existera en Outaouais comme ailleurs et se verra
attribuer, par le Secrétariat au développement régional,
un budget de l'ordre de 3 000 000 $ par année, pour assurer son
activité, et susciter la mise au point de projets ou d'initiatives
à caractère économique dans la région de
l'Outaouais.
Mais il ne suffit pas que l'on ait cette structure embrassant toute la
région. Les milieux urbains de la région,
représentés par les villes de Hull, Gatineau, Aylmer, Masson,
Angers et Buckingham nous ont fait valoir qu'il y a des problèmes
propres aux milieux urbains dans cette région, et ils nous ont
souligné avec beaucoup d'insistance qu'ils avaient besoin
également d'un organisme capable de prendre en charge des initiatives en
matière de développement économique, dans la partie
urbaine du territoire, et de là émane le projet de loi que nous
avons à l'étude, là, ce soir. (20 h 50)
Ce projet de loi vise à donner à la Communauté
urbaine de l'Outaouais la compétence nécessaire pour faire les
choses suivantes. Déjà, la communauté urbaine a le pouvoir
d'assurer la facturation et l'envoi des comptes de taxes. Elle a des pouvoirs
en matière d'assainissement des eaux et d'alimentation en eau potable,
en matière d'élimination, de récupération et de
recyclage des déchets, en matière de schéma
d'aménagement, évidemment, en matière de travaux
d'aménagement reliés aux lacs et cours d'eau de la région.
Elle a tous ces pouvoirs-là déjà, mais, avec le projet de
loi, nous lui ajouterions les pouvoirs suivants. D'abord, le pouvoir de
susciter sur son territoire l'implantation d'entreprises et la venue de
capitaux, et de favoriser la réalisation de projets ayant un impact
économique significatif; deuxièmement, le pouvoir de promouvoir
sur les marchés extérieurs les biens et les services produits sur
son territoire - activités de promotion d'exportation à
l'extérieur du territoire; troisièmement, le pouvoir
d'établir des liens avec les organismes qui oeuvrent au
développement économique de son territoire; et, finalement, le
pouvoir de mettre sur pied des groupes de concertation sectoriels en vue
d'établir les priorités d'intervention. Alors, voilà les
pouvoirs généraux qui seraient conférés à la
Communauté urbaine de l'Outaouais avec le projet de loi 75, si
l'Assemblée nationale décide de l'adopter.
Et, en second lieu, la Communauté urbaine de l'Outaouais sera
également habilitée à créer un organisme de
promotion économique pour lui déléguer, aux conditions
qu'elle déterminera, l'exercice de tout ou partie des compétences
économiques dont je viens de parler. Alors, les compétences
économiques sont là: promotion du développement de la
région au point de vue économique et, deuxièmement, le
pouvoir de créer un organisme qui pourra prendre ces fonctions en
charge. Et, si nous insistons sur ceci, c'est parce que nous répondons
ainsi à un voeu exprimé par tous les intervenants responsables et
représentatifs du milieu.
On se souviendra que, l'an dernier, le gouvernement avait
créé un groupe de travail spécial sous la
présidence de l'ancien maire de Hull, qui est aujourd'hui
président de la Commission de la capitale nationale, M. Marcel Beaudry,
et ce groupe s'était vu confier le mandat d'examiner l'avenir de la
région de l'Outaouais, autant dans la perspective de renouvellement du
fédéralisme que dans la perspective d'autres options
constitutionnelles. Et la recommandation principale que le groupe Beaudry a
retenue est la suivante: II faudrait créer, pour la région de
l'Outaouais, une société de diversification
économique.
On constate, en effet, que cette région, qui est la
troisième en importance au point de vue urbain de tout le Québec,
tout de suite après Montréal et Québec, a connu un
développement considérable au plan urbain, mais son
économie ne s'est pas développée d'une manière
suffisam- ment diversifiée. Vous savez comme moi, M. le
Président, que la présence du gouvernement fédéral
dans le territoire de Hull, Gatineau, Aylmer est considérable.
Saviez-vous, M. le Président, que 15 % du territoire de la
Communauté urbaine de l'Outaouais est la propriété du
gouvernement fédéral? Saviez-vous que 30 % du territoire de la
ville de Hull est la propriété du gouvernement
fédéral? Au cours des dernières années, appliquant
en cela une politique qui remonte à une vingtaine d'années, le
gouvernement fédéral a transposé, transplanté dans
la région de l'Outaouais québécois des milliers d'emplois
qui, autrefois, étaient de l'autre côté de la
rivière des Outaouais. Nous en étions très heureux. Ces
emplois et toutes les installations qui les accompagnent ont été
accueillis avec satisfaction par la plupart des intervenants
économiques, politiques et sociaux de la région. Mais, en tout,
il en est résulté une économie qui dépend
peut-être un petit peu trop du secteur public.
Et, pendant ce temps-là, le secteur du commerce, le secteur de
l'industrie et le secteur des activités tertiaires privé ne se
sont pas développés avec suffisamment de vigueur. Et l'on
constate en particulier de grandes disparités dans le
développement économique des milieux ruraux de l'Outaouais et
dans le développement économique des milieux urbains. Les milieux
urbains bénéficient beaucoup de la présence des
installations fédérales, tandis que les milieux ruraux n'ont pas
ce genre d'activité à leur service, ce qui fait que si la
région dans son ensemble a un taux de chômage qui est
inférieur à celui du Québec, si vous isolez les quatre
MRC, la MRC des Collines-de-l'Outaouais, la MRC de Pontiac, la MRC de La
Vallée-de-la-Gatineau et la MRC de Papineau, évidemment,
là, vous constatez que le niveau de vie et le taux de chômage
présentent un tableau qui est loin d'être rose. Il faut absolument
faire quelque chose.
C'est évident que du développement économique des
milieux urbains qui sont au coeur de cette région découleront
toutes sortes de chances pour les travailleurs qui vivent à la
périphérie des milieux urbains. Alors, le but de notre projet de
loi, c'est de donner suite à la principale recommandation du rapport
Beaudry, de permettre à la Communauté urbaine de l'Outaouais
d'exercer, en matière de promotion économique de la
région, des fonctions que seule, de l'avis de tous les observateurs,
elle est en mesure d'assumer aujourd'hui.
Or, voilà, M. le Président, en quelques mots l'essentiel
du projet que nous vous soumettons aujourd'hui. Je voudrais résumer
brièvement le cheminement qu'a suivi le gouvernement pour en venir
là. En décembre dernier, pour commencer, le 16 décembre,
le gouvernement décidait que la Société
d'aménagement de l'Outaouais cesserait l'essentiel de ses
opérations le 31 décembre 1992 et qu'elle cesserait
définitivement d'exister le 30 juin 1993. Il décidait dès
lors que le conseil
d'administration de la SAO serait réorganisé de
manière à préparer la transition vers le passage à
la responsabilité des municipalités urbaines par le truchement de
la CUO. C'est ainsi qu'on nommait des maires pour faire partie du conseil
d'administration à la place des anciens administrateurs, pour faciliter
le passage vers le régime nouveau dont il est question dans le projet de
loi 75.
En plus, on confiait au ministre des Affaires municipales le soin de
présenter au Conseil des ministres un projet de loi permettant à
la Communauté urbaine de l'Outaouais de se constituer en successeur de
la Société d'aménagement de l'Outaouais et d'exercer les
fonctions qui découlent de ceci. En même temps, le gouvernement
souscrivait au principe de la création d'un organisme de promotion et de
développement économique ayant pour objet de favoriser l'essor
économique de la région de l'Outaouais, de faire la promotion
économique de la région et d'oeuvrer à la diversification.
Le mot clé ici est peut-être le mot «diversification»,
d'oeuvrer à la diversification économique de la
région.
Or, voilà, M. le Président, ça, c'était le
16 décembre. Comme nous sommes un gouvernement qui aime agir, nous
sommes à la mi-mars et, déjà, le projet de loi a franchi
toutes les étapes des comités ministériels qui sont
souvent laborieuses. Dans ce cas-ci, les choses ont été
raisonnablement bien, et nous sommes en mesure de présenter dès
maintenant ce projet de loi de manière à permettre à la
Communauté urbaine de l'Outaouais, avant l'échéance de
juin 1993 qui doit marquer la fin complète des activités de la
SAO, d'assumer la relève et de faire en sorte que l'activité de
promotion puisse continuer sous l'égide d'un organisme à base
régionale et non plus d'un organisme dirigé ou
téléguidé à partir de Québec.
Le gouvernement, en même temps qu'il a pris sa décision,
avait été invité évidemment à fournir une
contribution financière à un nouvel organisme qui serait
éventuellement créé. Le gouvernement a pris la
décision suivante. Il restait, à la SAO, des actifs d'une valeur
qui peut aller de 3 000 000 $ à 4 000 000 $. Les principaux actifs de
cet ensemble sont des terrains qui peuvent se prêter à des
développements formidables au cours des années à venir. Il
est difficile d'en apprécier la valeur exacte, parce que, vous le savez
comme moi, M. le Président, aussi longtemps que vous n'allez pas sur le
marché en ces choses, vos évaluations risquent d'être
théoriques, mais selon tous les avis que nous avons reçus, les
valeurs des actifs de la Société d'aménagement de
l'Outaouais seraient entre 3 000 000 $ et 4 000 000 $, et le gouvernement
transfère tout ceci à la Communauté urbaine de
l'Outaouais, de manière qu'elle puisse, avec cette aide, avoir un
commencement de capitalisation qui pourra lui permettre d'assumer ses
responsabilités.
J'ai dit l'essentiel, je pense bien. Je voudrais seulement terminer en
remerciant tout d'abord toutes les personnes qui ont oeuvré au service
de la Société d'aménagement de l'Outaouais depuis
maintenant 23 ans. Je voudrais souligner de manière spéciale - je
pense que les députés de l'Outaouais me seconderont à cet
égard - le travail magnifique, désintéressé et
hautement empreint d'esprit civique qu'a accompli M. Jean-Marie Séguin,
le président-directeur général de la
Société.
Une voix: Bravo!
M. Ryan: Je connaissais M. Séguin depuis longtemps et je
ne l'avais pas vu à l'oeuvre de près depuis de nombreuses
années. J'ai eu le plaisir puis, en même temps, le défi,
parce que ce n'était pas facile, de discuter avec lui de la transition
que nous envisageons. Je peux vous dire que nous avons reçu de M.
Séguin une collaboration empreinte d'un désintéressement
et d'un souci du bien public exemplaires. (21 heures)
Je remercie également toutes les personnes qui ont
siégé au conseil de la Société d'aménagement
de l'Outaouais et/ou qui ont travaillé à son service en
qualité d'employés permanents ou occasionnels.
Je remercie également les maires des cinq villes qui forment la
Communauté urbaine de l'Outaouais: le maire de Hull, le maire de
Gati-neau, le maire de Masson-Angers, la mairesse d'Aylmer et le maire de
Buckingham, tous de bons amis avec qui nous avons d'excellents rapports. Ce
n'est pas la même chose du côté de l'Opposition. Je pense
qu'ils en viendront à une meilleure compréhension des choses
quand ils seront au courant de tout.
Alors, je les salue particulièrement et je pense que, si ce
n'avait été de leur disposition à prendre des
responsabilités qui vont au-delà des responsabilités que
s'attribuent généralement... ou que le législateur
attribue ordinairement à des administrateurs municipaux, nous n'aurions
pas ce dénouement et nous serions pris dans une impasse très
difficile. Alors, je les salue particulièrement. Je les assure de la
collaboration active du gouvernement et de la grande ouverture avec laquelle
nous recevrons toujours les représentations qu'ils voudront nous
adresser.
En matière de financement de l'organisme, j'ajoute un autre
point. Il a été prévu, par des aménagements
internes aux nouveaux organismes de coordination qui existeront dans la
région de l'Outaouais, qu'une part des budgets pourrait être
réservée pour le nouvel organisme que créera la
Communauté urbaine de l'Outaouais, par le jeu combiné du
transfert d'actifs que nous avons fait et de ce mécanisme qui permettra
au nouvel organisme de bénéficier d'une partie des budgets de
développement prévus pour la région et en
ajoutant, évidemment, la contribution que voudront apporter les
municipalités concernées. Il y aura tout ce qu'il faut pour
assurer le fonctionnement de base de l'organisme en misant,
premièrement, sur le sens de la responsabilité de la
Communauté urbaine de l'Outaouais et des municipalités qui la
constituent.
Je ne veux pas terminer ces observations sans remercier également
les cinq députés de la région de l'Outaouais. Au premier
chef, cela va de soi, mon collègue, le ministre
délégué aux Transports, député de Pontiac,
qui a suivi ce dossier avec beaucoup de continuité, l'a défendu
avec force au Conseil des ministres et a toujours manifesté un
empressement exemplaire à répondre à toutes les
interpellations que je lui adressais à ce sujet.
Je vois également les députés de Hull et Papineau
dans cette salle. Je veux les remercier particulièrement parce que nous
avons été en consultation constante à ce sujet et, si ce
n'avait été de leur collaboration, je ne pense pas que nous en
serions venus à une solution consensuelle du type de celle que nous
avons.
Il y a deux députés qui ne sont pas dans cette Chambre,
actuellement: le député de Ga-tineau et le député
de Chapleau. Ils ont participé également à nos travaux. Je
pense que nous pouvons les associer sans aucune restriction à cet effort
vraiment collectif, vraiment solidaire que nous avons fait ensemble.
Je termine en adressant à la Communauté urbaine de
l'Outaouais mes salutations cordiales et mes voeux de succès dans toutes
les entreprises qu'elle voudra instituer en vue d'exercer les nouveaux pouvoirs
que l'Assemblée nationale lui conférera très probablement
en vertu du projet de loi 75.
Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre
des Affaires municipales.
Nous en sommes à l'adoption du principe du projet de loi 75, Loi
modifiant diverses dispositions législatives concernant l'abolition de
la Société d'aménagement de l'Outaouais. Je cède la
parole à M. le leader adjoint de l'Opposition officielle,
député d'Abitibi-Ouest et porte-parole en cette matière
pour l'Opposition officielle. M. le député, la parole est
à vous.
M. François Gendron
M. Gendron: Merci, M. le Président. J'estime qu'il s'agit
d'une étape importante par ce projet de loi là puisque, comme le
titre l'indique d'une façon très claire, le projet de loi 75
abolit l'existence, à compter du 1er juillet prochain, de la
Société d'aménagement de l'Outaouais, bien connue dans le
milieu et dans tout le Québec sous l'appellation de la SAO.
Ce faisant, suite à l'abolition, les compétences autrefois
dévolues à la Société d'aménage- ment seront
transférées à la Communauté urbaine de l'Outaouais,
la nouvelle CUO, qui possédera ainsi les pouvoirs de faire la promotion
économique de son territoire pour y favoriser l'essor et la
diversification de l'économie. J'y reviendrai tantôt parce que
c'est un objectif que nous partageons. Nous trouvons tout à fait logique
et légitime que la nouvelle instance qui continuera à exister
dans l'Outaouais puisse se préoccuper d'une responsabilité aussi
significative que celle-là, compte tenu, justement, de ce que le
ministre a très bien exposé, le caractère tout à
fait particulier et spécifique de la région de l'Outaouais.
Ce n'est pas parce qu'on a moins d'amis et que je suis obligé de
composer avec la petite remarque partisane du ministre des Affaires
municipales, parce que ça n'aurait pas été lui, qu'on ne
connaît pas l'Outaouais. Je veux dire, j'ai eu l'occasion, comme ministre
de l'Aménagement et du Développement régional, à
maintes reprises, probablement avant la plupart de ces gens-là, ici, en
Chambre, sauf le député de Chapleau, de saluer et de rencontrer
ces gens-là. Je pense à ma collègue, Mme Marois, qui,
pendant des années, a eu l'occasion également de travailler avec
cette population. Tout ce que je veux dire, c'est qu'on est en mesure, nous
aussi, de reconnaître le caractère spécifique et
particulier de cette région.
Donc, je disais, M. le Président, que le projet de loi va faire
de la nouvelle Communauté urbaine de l'Outaouais l'instance qui aura
comme mandat de faire la promotion économique de son territoire, de
favoriser l'essor de cette région-là et surtout de travailler
à sa diversification, qui est l'objet le plus fondamental. Elle pourra
également, la nouvelle structure, être véritablement un
agent de développement économique soit en suscitant l'implication
des entreprises sur place, soit en essayant d'apporter des capitaux ou en
essayant de développer à l'étranger les avantages de son
territoire puisque, effectivement, le territoire de l'Outaouais présente
plusieurs avantages, compte tenu de sa proximité avec un autre palier de
gouvernement.
Cette même Communauté urbaine de l'Outaouais pourra
également confier à un organisme de promotion économique
les pouvoirs précédemment mentionnés. Elle agira alors par
l'entremise d'un pouvoir de délégation. Et je pense que c'est
correct que le projet de loi permette que cette nouvelle Communauté
urbaine puisse procéder par voie de délégation sur des
mandats spécifiques où elle croira que certains autres organismes
du milieu sont plus habilités qu'elle-même à
développer certains créneaux, de temps en temps industriels, de
temps en temps touristiques et de temps en temps de tout autre nature, mais il
ne nous appartient pas de décider à sa place quels seront les
mandats qui pourront être confiés par voie de
délégation.
Le reste du projet de loi, puis après qu'on
a dit ce que je viens de vous dire, M. le Président, c'est des
modalités administratives normales, puisqu'on abolit, on met fin
à une structure qui existait. Donc, dans des cas comme ça, il
faut toujours prévoir des modalités de transition. Il faut
prévoir également des exemptions concernant les droits sur les
mutations immobilières des immeubles appartenant à l'ancienne
Société d'aménagement de l'Outaouais, qui, bien sûr,
seront transférés à la nouvelle.
Mais ce serait trop simple s'il n'y avait que ça. Je pense qu'on
ne peut pas mettre fin à une instance qui a marqué le
développement du milieu dans les bonnes années, parce qu'il y a
déjà eu des bonnes années. Il y a déjà eu un
gouvernement responsable, au Québec, qui avait le goût de bouger
et de poser des gestes et des actions concrètes, ce qui a fait que,
à un moment donné...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Gendron: Ah oui, vous pouvez bien rire, mais, si on regardait
le budget que vous lui avez laissé, à la SAO, je comprends que
vous n'ayez pas le choix de la faire disparaître. Qu'est-ce que vous
voulez qu'elle fasse? Vous l'avez saignée complètement.
Une voix: On va en parler tantôt.
M. Gendron: Vous en parlerez. On va vous laisser pérorer
là-dessus, il n'y a pas de problème. Mais ce que je veux
indiquer, c'est que c'est évident que, à partir du moment
où on n'avait plus confiance à cette structure, puis qu'on l'ait
eu saignée complètement de toute disposition budgétaire
agissante, bien, qu'est-ce que vous voulez, il ne restait pas 50 alternatives.
On ne peut pas passer notre temps à dire: Voilà une nouvelle
structure, une structure importante dans l'Outaouais, mais arrangez-vous, vous
n'avez aucune aide financière. La SAO a déjà eu des
budgets à gérer. Elle l'a fait convenablement, puis elle s'est
acquittée des mandats qu'elle avait. (21 h 10)
Alors, je veux juste faire un rappel historique parce que je trouve que
la SAO a eu sa raison d'être. Mais je trouve également
aujourd'hui, je vous l'ai dit d'entrée de jeu, que la nouvelle structure
que vous proposez est intéressante et on est favorables,
complètement favorables à la nouvelle structure qui est
proposée. Mais je disais que, en 1958, la Commission de la capitale
nationale, qui couvrait, à l'époque, 1800 milles carrés de
territoire des deux côtés de la rivière des Outaouais, en
menait pas mal large. Cette commission avait tous les pouvoirs. C'est facile,
aujourd'hui, de dire combien... Je comprends, quand on défend tout le
régime, peu importent les gestes qu'il pose... J'écoutais le
ministre des Affaires municipales dire combien ça avait
été magnifique d'avoir la CCN, parce que la Commission de la
capitale nationale a fait des choses extraordinaires. C'est vrai, il n'y a pas
de cachette. C'est vrai, mais je trouve que c'est un côté de la
médaille.
Lorsqu'on arrive avec ses gros sabots sur un territoire qui n'est pas le
nôtre et qu'on ne s'occupe pas du tout du milieu qui l'habitait et qui
l'occupait, ce n'est pas une façon toujours légitime d'entrevoir
du développement endogène quand on n'a pas beaucoup de notions
quant à du développement durable. Et ce n'est pas pour rien que
le ministre le confirme aujourd'hui. Il dit: Oui, il y a un petit
problème. C'est bon au niveau des emplois, mais ça ne fait pas
beaucoup de diversification. C'est passablement monolithique. Bien, il n'a pas
tort. Si c'est monolithique, c'est qu'il y a eu des choses qui ne se sont pas
faites nécessairement comme ça aurait dû être
fait.
On ne peut pas, je pense, abolir la SAO sans faire un rappel historique.
À la suite de la création de la Commission de la capitale
nationale, le gouvernement du Québec... C'est leur gouvernement, en
passant, et je trouve qu'il a bien fait, en 1966, de créer une
commission présidée par M. Henri Dorion, qui avait pour mandat
d'étudier les problèmes réels reliés au
caractère frontalier et spécifique de la région de
l'Outaouais québécois et aux nombreuses interventions de la
Commission de la capitale nationale. Où, M. le Président? En
territoire québécois. Évidemment, ce n'est pas le ministre
des Affaires municipales qui va dire ça, parce qu'il dit: C'est mon
cercle d'amis, et on est bien «chums» avec eux autres. J'y
reviendrai tantôt. Ça, je le sais, c'est évident. La toile
est bien tissée. Mais la Commission de la capitale nationale venait
faire des interventions en territoire québécois. C'est facile de
dire que ces gens-là ont contribué au développement. C'est
vrai, je ne le nie pas. On les félicite, M. le Président. J'ai
dit que c'était un côté de la médaille. Il y a
l'autre.
Ce n'est pas de même, je pense... On ne peut pas toujours arriver
en territoire autre que le nôtre et ne pas tenir compte des gens qui
l'occupent. Dans ce sens-là, les gens de l'Outaouais avaient un certain
nombre de reproches à faire à la Commission de la capitale
nationale, y compris à leur gouvernement, parce que, si le gouvernement
libéral n'avait eu aucun reproche à faire à la CCN, ce
n'est pas vrai qu'on aurait créé une SAO. Ce n'est pas vrai. Je
ne suis pas venu au monde hier. Quand on a créé la
Société d'aménagement de l'Outaouais, c'est parce qu'on
voulait que le gouvernement du Québec puisse se préoccuper lui
aussi du développement d'une de ses régions qu'il avait
complètement oubliée. Parce que, à ce que je sache, quand
on regarde la carte, l'Outaouais, ça fait partie du Québec.
L'Outaouais québécois, en ce qui nous concerne, nous, c'est dans
le Québec, c'est dans l'État
québécois. Et, dans ce sens-là, il y avait lieu de
faire contrepoids aux interventions multiples, répétées et
pas toujours dans le sens d'un développement respectueux, durable,
endogène au niveau du territoire québécois.
Alors, moi, je dis merci pour ce que vous avez fait, mais je dis merci
également à ceux qui ont eu la sagesse, à l'époque,
de dire: II est important d'avoir une structure québécoise qui va
s'occuper que le Québec tienne davantage compte de cette
réalité du territoire. C'était ça, la
responsabilité de la SAO.
Une voix:...
M. Gendron: Oui, oui, c'est ce que je vous dis. C'est ce que je
dis, que c'était vous autres. Je sais qu'ils ne connaissent pas
ça. Je suis obligé de leur faire de l'histoire, à ces
jeunots-là. C'était ça que j'étais en train
d'expliquer. En 1968, le Parti québécois n'en menait pas large.
Alors, c'est évident que c'est vous autres. C'est ça que je dis,
pour ceux qui suivent le débat. Et, ça, c'est nouveau que ces
gens-là suivent le débat.
Alors, en 1968, la commission Dorion remet son rapport qui constate -
écoutez ça - l'état de sous-développement de
l'Outaouais; pas de surdéveloppement, de sous-développement
chronique. J'aurais aimé ça que le ministre des Affaires
municipales en parle un peu. Ça aurait montré un peu la nuance,
l'équilibre. On ne peut pas toujours arriver avec le grand balai, parce
que c'est nos amis et que ces gens-là contrôlent cette
région-là aujourd'hui. Il dit: Non, non, tout est beau, tout est
bien, et ça a toujours bien marché parce que c'est la CCN, nos
amis d'en face, Ottawa, le fédéral. Nous, on sait que le
fédéral a fait des interventions utiles, mais il en a fait qui
ont nui drôlement au développement de l'Outaouais pendant des
années. Et ça prend une visière vraiment baissée et
presque fermée pour ne pas en convenir. M. Dorion avait vu ça, et
M. Dorion, quand il a remis son rapport, a critiqué avec raison les
nombreux empiétements du gouvernement fédéral sur
l'intégrité du territoire québécois. Mais comment
voulez-vous que ça sonne quelque chose aux oreilles de ces
gens-là aujourd'hui? L'intégrité du territoire
québécois, eux autres, ça ne les dérange pas. Bien,
ça dérangeait, les gens qui vivaient sur le territoire, par
exemple. Ça les dérangeait, puis le gouvernement libéral,
à l'époque, a eu cette sagesse-là de dire...
Une voix:...
M. Gendron: En 1968, vous avez raison. Vous avez raison, c'est le
gouvernement de l'Union Nationale. Il a raison. Il a raison sur le plan
historique. Quand il a raison, il a raison.
Une voix: Daniel Johnson.
M. Gendron: Voilà! Alors, en 1968, on a créé
la SAO, parce qu'on trouvait que le gouvernement du Québec ne
s'acquittait pas assez de sa responsabilité, un, pour contrer les
empiétements du fédéral, puis, deux, pour avoir un
développement qui permettrait à la région de l'Outaouais
de faire partie davantage du Québec. En 1969, une conférence
constitutionnelle fédérale-provinciale confirme
l'intégration de la région de Hull à la Commission de la
capitale nationale et le caractère bilingue et biculturel de tout le
territoire.
La même année, pour faire suite au rapport Dorion et pour
contrebalancer les positions entérinées à la
conférence constitutionnelle, le gouvernement du Québec
crée trois organismes spécifiques et propres à
l'Outaouais: d'abord, la Communauté régionale de l'Outaouais, la
CRO, qui comprenait les municipalités québécoises incluses
dans le territoire de la Commission de la capitale nationale; ensuite la SAO,
la Société d'aménagement de l'Outaouais, qui a pour mandat
de favoriser le développement d'infrastructures industrielles,
commerciales et touristiques ainsi que de promouvoir le développement
économique; enfin, troisième organisme, la Commission de
transport en commun de l'Outaouais est aussi créée afin d'assurer
le transport en commun des citoyens résidant dans la CRO.
De 1969 à 1983, la Société d'aménagement de
l'Outaouais accomplit son mandat avec diligence. Des parcs industriels sont
créés, une promotion touristique sans précédent est
faite et la Société réussit, par ses actions convergentes,
à attirer plusieurs entreprises qui, effectivement, ont contribué
à un certain essor dans l'Outaouais. Et, enfin, le gouvernement du
Québec avait un certain rayonnement.
Et je m'en rappelle, pour y avoir été à cette
époque-là. Cette époque-là, je la connais pas mal
plus, de 1979 à 1985, parce que j'étais au Conseil des ministres.
Les gens de l'Outaouais étaient fiers de parler de la SAO et des
interventions de la SAO, parce que, pour eux autres, la SAO, c'était le
Québec. C'était le pendant à la Commission de la capitale
nationale. Et c'était important d'avoir un pendant parce que, si on
recule avant l'arrivée de la SAO, tous les gens ne voyaient que le
drapeau canadien. Puis c'est un peu normal, compte tenu des
propriétés territoriales.
Le ministre des Affaires municipales d'aujourd'hui l'a dit
lui-même. Quand on pense que 35 % de la région de Hull est
occupée, est propriété de territoires
fédéraux, au Québec, chez nous... Oui, mais c'est nos
taxes. C'est facile. Je vois le ministre de la région... C'est toujours
facile de faire accroire que ces gens-là sont tellement gentils et
généreux pour nous. Je comprends! Il y a un déficit de 465
000 000 000 $. Moi, je ne trouve pas qu'il y a une
générosité abusive parce que, quand je regarde mon talon
de paye ou de chèque et que je constate que mes
impôts continuent à être de plus en plus importants
en termes de déductions à Ottawa puis que je sais, par exemple,
que vous recevez des lettres où les transferts fédéraux
sont en chute libre, il ne faut pas être bien, bien bon comptable,
contrairement à ce que vous avez essayé d'affirmer, pour
comprendre que ça ne nous mène pas loin, ça, une situation
comme ça. Puis c'est ça, la réalité. Juste cette
année, vous avez quelque 2 000 000 000 $ de moins en transferts
fédéraux. Puis on me fait signe, encore, de la piastre, comme si
c'était juste ça qui comptait. Alors, la Commission de la
capitale nationale, bien sûr qu'elle a contribué à du
développement, mais la SAO a fait sa job; la SAO a très bien
travaillé; la SAO a permis une présence québécoise
forte, intéressante et nécessaire.
En 1983, le gouvernement du Parti québécois sent le besoin
de revoir la vocation de la Société d'aménagement de
l'Outaouais ainsi que la pertinence de son existence. Je répète:
la pertinence de son existence. Donc, nous aussi, on était
réalistes par rapport à ce qu'elle avait fait. La SAO avait un
mandat. Elle s'en est acquittée, mais c'était légitime
d'envisager qu'une instance qui s'était acquittée de son mandat
puis de ses responsabilités puisse, à un moment donné,
changer de vocation, surtout avec l'arrivée des MRC, surtout avec
l'arrivée de la structure de concertation régionale, que ce soit
le CRD de l'Outaouais, qui est une instance qui a essayé de faire de la
concertation sur une échelle importante avant - ce dont on parlera dans
quelques minutes - la réforme Picotte... (21 h 20)
Donc, à partir de l'époque 1983-1984, il est
évident que la problématique frontalière
particulière à l'Outaouais n'est pas nécessairement la
même. C'est toujours réel que c'est frontalier dans cette
région-là, mais, compte tenu du développement, de l'essor,
de la promotion touristique, de l'acquisition de biens et services, le portrait
avait changé. À partir de cette époque, le mandat de la
Société d'aménagement de l'Outaouais devient de plus en
plus flou. Il n'y a pas de jugement envers les personnes et H n'y a pas de
trouble avec les personnes - j'y reviendrai tantôt. Et là,
à partir de l'époque, le gouvernement du Québec a
commencé à réduire son aide financière et la
Société d'aménagement de l'Outaouais s'est départie
d'un certain nombre de ses actifs - aéroport de Gatineau, parc
industriel, centre d'information touristique - parce que la SAO, elle
gérait pas mal d'affaires, à un moment donné.
De 1987 à 1992, c'est la dégringolade budgétaire.
Je répète, de 1987 à 1992. Là, il n'y a pas de
confusion chez personne, on le sait, qui est au pouvoir, de 1987 à 1992.
C'est la dégringolade budgétaire. Alors, le ministre,
tantôt, disait: Regardez si on est beaux, on est fins, puis on est
rapides, et on s'est concertés en 1993. Depuis 1987 qu'ils ne donnent
plus de vi- vres à la SAO. Donc, s'ils avaient été si
responsables que ça, il aurait fallu s'attendre, en 1987, 1988 au
maximum, à une nouvelle structure, puisqu'elle arrive en 1993. Je
comprends, vous l'avez saignée complètement, la SAO - aucune
possibilité d'exercer quelque mandat que ce soit - et sept, huit ans
plus tard, ils se pensent fins, beaux, tout à fait corrects, en disant:
Voici, nous agissons. Mais c'est important de faire cet historique-là.
De 1987 à 1992, c'est la dégringolade budgétaire, puisque
les subventions gouvernementales passent de 6 000 000 $, M. le
Président, 6 000 000 $, pas 8 000 000 $, pas 15 000 000 $, pas 1 000 000
$, 6 000 000 $, à combien? 500 000 $! 6 000 000 $ à 500 000
$!
Les intentions du gouvernement sont limpides, elles sont claires. Vous
avez fait votre temps, il faut changer cette structure-là. Puis, c'est
évident qu'on voulait mettre la clé dans la porte, mais, de temps
en temps, on manque de courage. Ça a pris du temps pour qu'il ait le
courage de poser le geste. Donc, pendant six, sept ans, il aime mieux saigner,
et, quand ils n'ont à peu près plus d'argent et plus d'aide
financière, là, on arrive avec le projet de loi et on dit:
Regardez si on est beaux, puis on est fins. Nous, on comprend la
réalité, et on l'adapte au territoire. Ce n'est pas aussi simple
que ça, M. le Président.
Parallèlement, dans la foulée de la commission
Bélanger-Campeau sur l'avenir constitutionnel du Québec, le
gouvernement créait, en juillet 1991, le Comité Outaouais. Ce
comité, présidé par M. Marcel Beaudry, avait pour mandat
d'étudier les impacts, sur l'Outaouais, d'un éventuel changement
au statut constitutionnel du Québec. Puis, ça, je trouve que
c'était légitime de faire ça, c'était correct. Le
comité Beaudry compléta ses travaux en avril 1992, avec une
multitude de recommandations, dont certaines avaient trait à l'avenir de
ce qu'on discute ce soir, à savoir la SAO. L'un des principaux constats,
M. le Président, du comité Beaudry est à l'effet que la
région de l'Outaouais a un urgent besoin de diversifier son
économie, qui était - et est toujours trop - essentiellement
axée sur la fonction publique fédérale.
Ah bon! Là, la vertu extraordinaire du grand frère n'a pas
tous les mérites. Ça aurait peut-être été
intéressant d'en parler, c'est ce qu'on dit. La vertu du grand
frère fédéral n'a pas tous les mérites, parce que
ça a créé la situation qu'on est obligé de
gérer aujourd'hui. L'Outaouais est probablement une des régions
où l'économie est la moins diversifiée. La structure
secondaire n'est pas tellement forte. La structure primaire, ça peut
être comparable. La structure tertiaire est très forte, les
services. Je comprends, c'est une ville de services avec les nombreux emplois
fédéraux. Mais cette réalité-là n'est pas
une réalité de 1993. C'est une réalité depuis le
début. La SAO compense cette réalité tant qu'elle a des
budgets. Après qu'on la saigne,
elle ne peut plus jouer son rôle. Il aurait été
utile de poser tout de suite le geste que nous posons ce soir. Ça n'a
pas été fait.
Comme je ne vis pas dans le passé, on va parler du
présent. Or, comme la SAO était plutôt inefficace, les
membres du comité Beaudry, forts d'un large consensus...
Là-dessus, le ministre avait raison de souligner ça. Je pense
qu'il a raison de dire que, ce qu'il propose, n'est pas... ça ne vient
pas d'un comité ministériel, ça ne vient pas uniquement de
l'équipe qu'il a félicitée, ça vient d'un large
consensus de la population. À peu près toutes les instances qui
ont été consultées, y compris les représentants,
dans l'Ou-taouais, du Parti québécois, qui ont participé
à ce consensus-là - puis, ils sont d'accord - sont d'accord avec
la création d'une société de diversification de
l'économie de la région de l'Outaouais parce que, si on ne
diversifie pas, ça va poser des problèmes dans le temps et c'est
dangereux par rapport à l'avenir de cette région qui fait, comme
je l'ai mentionné tantôt, M. le Président, toujours partie
du Québec. Cette société, qui relèverait des
élus municipaux, disposerait d'un budget de 5 000 000 $ réparti
comme suit - je ne pense pas que le ministre l'ait indiqué tantôt:
3 000 000 $ du gouvernement du Québec, 1 000 000 $ de la
Communauté urbaine de l'Outaouais et 1 000 000 $ provenant du Fonds de
développement régional.
Là, j'aimerais ça que le ministre, si jamais il exerce son
droit de réplique, ou en commission parlementaire, m'indique si les 1
000 000 $ provenant du Fonds de développement régional seront
pris dans l'enveloppe des 3 000 000 $ de la grande table de concertation, suite
à la réforme Picotte. Si c'est le cas, bien, là, on n'est
pas plus avancés. Si c'est en sus des 3 000 000 $, là, il a
raison de dire que la région de l'Outaouais va bénéficier,
comme les autres régions, de la structure de concertation qui existe
partout ailleurs. Parce que, dans la région de l'Outaouais, il va y
avoir aussi ce qu'on appelle, là, une conférence
régionale, suite à la réforme Picotte et au
Secrétariat aux affaires régionales, qui aura une somme de 3 000
000 $ à se partager.
Mais, si dans les 3 000 000 $ qu'ils ont, on en prend tout de suite 1
000 000 $ et on les donne à la nouvelle structure qu'on crée par
législation ce soir, moi, je pense que ce n'est pas équitable,
parce qu'on vient de traiter d'une façon particulière le
problème de l'Outaouais et qu'on dit: II est requis, pour les
mêmes raisons que vous évoquiez tantôt, parce que c'est
frontalier, que cette région ait une structure qui fasse la promotion
touristique et la diversification de son économie. Et on achète
cette affaire-là. On aura l'occasion d'en jaser un peu plus loin.
Le conseil d'administration, le ministre l'a bien expliqué, je
n'y reviens pas. Je fais juste un commentaire parce que, quand on veut
être, en- tre guillemets, un peu prétentieux, on dit ce qu'il a
dit. Il a dit: Écoutez, ce gouvernement-là a une philosophie
tellement respectueuse de la volonté des gens du milieu qu'on ne voulait
pas faire ce qu'on avait fait avec la SAO, nommer les gens directement du
gouvernement.
Pourtant, quand on regarde la loi qu'on adopte ce soir, pour laquelle on
va convenir, parce qu'on en est sur le principe et non sur ses
modalités, je lis: De plus, trois autres membres sans droit de vote
pourraient siéger au conseil d'administration. Il s'agit d'un
représentant du Secrétariat aux affaires régionales, du
président du conseil régional et d'un député de
l'Outaouais, désigné par qui, vous pensez, M. le
Président? Désigné par le gouvernement du Québec.
Et ces gens-là qui ont le culot de nous faire accroire: Ah! nous, on
respecte les gens de région. Nous, on permet aux gens...
Vous ne trouvez pas que ça serait pas mal plus intelligent de
leur permettre que ça soit elle-même, la région, qui
choisisse le député qui sera élu parmi la population, puis
que les gens de l'Outaouais disent... Bien, écoutez, il y a cinq
circonscriptions dans l'Outaouais, et, nous autres, on souhaiterait que, parmi
les trois, les quatre ou les cinq qu'ils auront élus, parce que c'est
ça la démocratie, ils décident qu'ils veulent que le
siège que vous voulez confier au député soit occupé
par le député de Papineau, le député de Gatineau,
le député de Hull. Ils décideront. Ils
décideront.
Et, moi, il me semble que quelqu'un qui prétend qu'il a un
très grand souci du respect des régionaux, il ne devrait pas
jouer au paternalisme, comme ce qu'on vient de voir et d'entendre, dire: Nous,
on ne veut pas dire à chaque région quoi faire, mais on va vous
dire que le député qu'on va nommer, c'est le gouvernement qui va
le nommer. Alors, moi, je ne serai pas d'accord là-dessus, certain.
Les mandats que la société aura, je suis
complètement d'accord. Je suis complètement d'accord avec les
mandats que la société aura. Favoriser l'essor économique
de l'Outaouais, on est d'accord là-dessus. Faire la prospection et la
promotion économique, tant sur le plan national, complètement
d'accord là-dessus. Mettre en oeuvre un plan de diversification,
logique, on achète ça.
Donc, le projet de loi 75 respecte en tous points le rapport Beaudry en
confiant à la Communauté urbaine le soin de mettre sur pied la
société de diversification de l'économie. Il reviendra aux
élus de la Communauté urbaine de l'Outaouais de décider
s'ils appliqueront à la lettre les recommandations du comité
Beaudry en ce qui concerne la composition du conseil d'administration. Il
semble, cependant, que les suggestions du comité Beaudry seront reprises
intégralement. On verra. (21 h 30)
Quant au financement, le gouvernement du
Québec a la plus grosse part du gâteau. Le budget total de
la société sera de 5 000 000 $, et Québec consentira pour
3 000 000 $. Officiellement, ces questions ne sont pas encore
réglées. Le gouvernement et la Communauté urbaine de
l'Outaouais ont jusqu'au 1er juillet, début prévu des
activités de la société, pour s'entendre. C'est des choses
qu'on aura l'occasion d'apprécier article par article, en termes de
détails.
Le ministre des Affaires municipales, qui pilote cette opération,
pourrait peut-être s'engager à fournir à l'ensemble des
députés de l'Assemblée nationale un état de la
situation quant à la mise en marche de la nouvelle
société, en particulier sur les modalités de financement
de même que la composition du conseil d'administration. Parce que j'avais
l'occasion de regarder le rapport de la SAO, et le ministre n'a pas
été très volubile sur ce qui arrive au niveau des
effectifs, ce qui arrive au niveau des professionnels, ce qui arrive au niveau
des gens qui étaient syndiqués ou non, des cadres de la SAO.
Est-ce que c'est un transfert automatique? Pas un mot. Je ne dis pas que ce
n'est pas réglé, je dis que j'aurais aimé que le ministre
en dise quelques mots, parce qu'on adopte le principe du projet de loi.
Alors, M. le Président, la problématique
frontalière de l'Outaouais a toujours été reconnue par les
gouvernements qui se sont succédé au Québec, parce que
nulle part ailleurs nous ne retrouvons une telle problématique. Et nous
en sommes. Nous en sommes, nous sommes d'accord avec le projet de loi. Nous
pensons, en conclusion, M. le Président, que le projet de loi 75
reflète cette problématique unique en permettant à la
population de l'Outaouais de se doter des outils qu'elle estime
nécessaires pour faire face à cette situation originale. Ce
projet de loi est le fruit d'un large consensus régional. La
société de diversification de l'économie mérite
donc un aussi large consensus de la part des membres de l'Assemblée
nationale du Québec et, du côté de l'Opposition officielle,
nous sommes heureux de concourir à l'adoption de cette loi.
Et, en terminant, tout comme le ministre l'a fait, je voudrais
féliciter les mandataires de la SAO, les membres du conseil
d'administration; je voudrais féliciter, effectivement, le
président actuel, parce que la SAO existe toujours. M. Jean-Marie
Séguin a fait un travail extraordinaire; ça, c'est exact. M.
Séguin a été très ouvert pour regarder d'autres
alternatives à la réalité qu'on connaît. Et je
conclurai en reprenant la remarque, que j'ai trouvée très
déplorable, du ministre des Affaires municipales, qui a toujours sa
petite couleur un peu partisane, en faisant semblant de rien, en disant qu'eux,
ces chers libéraux, n'avaient aucun trouble avec les maires de la
région de l'Outaouais.
Moi, je tiens à dire que nous non plus, on n'a aucun trouble,
nous, avec celles et ceux qui n'ont aucun problème à distinguer
l'intérêt public des intérêts privés et
personnels. Je répète, on n'a aucun trouble, nous, avec les gens
qui font de l'administration publique et qui n'ont pas de trouble à
distinguer l'intérêt public par rapport à
l'intérêt personnel et privé. Dans ce sens-là, les
gens qui sont là pour servir plutôt que se servir, on n'a aucun
trouble, de ce côté-ci de la Chambre, avec ces gens-là qui
font de l'administration publique. Alors, celles et ceux qui pensent qu'ils
n'ont pas de trouble à distinguer entre l'intérêt public et
l'intérêt privé, bien, tout de suite, dès ce soir,
comme porte-parole de l'Opposition officielle, je peux leur dire qu'ils sont
bienvenus, on les considère comme des collaborateurs, on les
considère comme des gens qui font oeuvre utile et qui posent leur pierre
dans l'édification de cette société, ce qui n'est pas
facile.
Mais il faut faire les distinctions, et je ne suis pas sûr que, de
l'autre côté, quand on y va sans nuance comme ça, on est
capables de les faire, surtout pas quand on sait que tous ces gens-là,
presque systématiquement, ont toujours été, sur le plan du
financement des partis politiques, à la solde d'un seul parti. C'est
leur droit, M. le Président, le plus strict, le plus légitime. On
ne le conteste pas, mais vous n'aurez pas le type qui va faire ces larmoiements
que j'ai entendus tantôt, ou cette remarque très partisane
à l'effet que, nous, on aurait du trouble avec les élus. On n'a
aucun trouble avec les élus. Moi, j'en ai 50, élus, dans ma
circonscription, puis je n'ai pas de trouble avec celles et ceux, comme je l'ai
mentionné tantôt, qui savent se dévouer pour
l'intérêt public plutôt que les intérêts
partisans privés et qui sont là pour servir les
communautés, servir les intérêts collectifs de celles et
ceux qu'ils représentent plutôt que de se servir. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député d'Abitibi-Ouest.
Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes
à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 75, Loi
modifiant diverses dispositions législatives concernant l'abolition de
la Société d'aménagement de l'Outaouais. Je cède la
parole à M. le député de Hull.
M. Robert LeSage
M. LeSage: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir, ce
soir, M. le Président, d'intervenir sur le projet de loi 75 qui a pour
objet de modifier la loi sur la Communauté urbaine de l'Outaouais pour
lui accorder, à partir du 1er juillet 1993, la compétence en
matière de promotion économique de son territoire en vue de
favoriser l'essor et la diversification de son économie.
Mais vous me permettrez également, M. le Président, de
reprendre certaines remarques du député d'Abitibi-Ouest. Je veux
bien comprendre
qu'il puisse taxer mon ministre des Affaires municipales de faire un peu
de partisanerie, mais ce qu'il vient de nous donner comme exposé, je
pense que ça, c'était de la partisanerie. Lorsqu'il nous dit que
lui et la députée de Taillon connaissent l'Ôutaouais
québécois, M. le Président, je m'inscris en faux
là-dessus. Il ne connaît rien à l'Outaouais
québécois parce qu'il n'aurait pas parlé comme il a
parlé ce soir.
M. le Président, en 1970, quand tous les maires de la
région de l'Outaouais québécois ont fait des pieds et des
bras pour avoir les investissements du gouvernement fédéral sur
le côté québécois, qu'est-ce qui existait avant 1970
dans l'Outaouais québécois? Il était où, lui, le
député d'Abitibi-Ouest, avant 1970? Et la députée
de Taillon? Qu'est-ce qu'ils connaissent de ce qui se passait avant 1970 dans
cette région? On avait des petites industries qui employaient des
petites gens de l'Outaouais québécois à des petits
salaires. On avait une disparité flagrante entre l'Outaouais
québécois et l'Ontario. Nous avons, par l'entremise des
politiciens du temps, fait en sorte que le gouvernement fédéral
investisse chez nous, avec nos impôts et les impôts de tous les
Canadiens.
Moi, je défie qui que ce soit dans cette Chambre, M. le
Président, qu'il fasse le tour de la province de Québec et
vérifie les berges de toutes les rivières du Québec. Et,
s'il y a des berges mieux entretenues que celles de l'Outaouais
québécois, vous viendrez m'en reparler. Et qui les entretient?
C'est la CCN avec les deniers de tous les Canadiens.
M. le Président, quand la Commission de la capitale nationale,
par l'entremise du ministère des Travaux publics et de son gouvernement
fédéral, a décidé d'implanter des édifices
dans Hull, ça a fait quoi, ces édifices-là? Ça a
attiré du monde. Moi, je ne connais pas beaucoup de gens qui sont partis
de l'Outaouais québécois, depuis 1975, 1980, pour aller
travailler en Gas-pésie ou aller travailler au Lac-Saint-Jean ou aller
travailler en Abitibi-Ouest, mais j'en connais plusieurs qui sont partis de ces
endroits-là pour venir détenir un emploi du gouvernement
fédéral à Hull. Et ces gens-là viennent nous dire
maintenant que ce mauvais gouvernement fédéral a fait en sorte
qu'il a nui à l'économie du Québec, et plus
spécifiquement à l'Outaouais québécois. M. le
Président, il faut quand même être sérieux. Il faut
quand même reconnaître ce qui a été fait et ce qui a
été bien fait.
Je veux juste vous ramener à aujourd'hui avec la réforme
municipale qui a été déposée par M. Ryan. Ça
a fait quoi dans Hull, cette réforme-là? Ça a fait en
sorte que, depuis deux ans, les taxes municipales dans Hull sont gelées.
Il n'y en a pas eu, d'augmentation de taxes. Et ça va faire quoi pour
les trois prochaines années, selon le conseil municipal et son maire, le
maire qui vient d'être élu, Yves Ducharme? Les taxes seront
gelées encore pour trois ans. Ça, ce n'est pas grâce au
Parti québécois et ce qu'il prône, l'indépendance,
M. le Président, c'est grâce à la présence du
gouvernement fédéral dans Hull avec ses édifices et les
taxes qui peuvent être perçues comme elles le sont
présentement, sans bouger un crayon. La ville de Hull va chercher au
moins 10 % sur un budget d'à peu près 85 000 000 $, ils vont
chercher 10 % des revenus sans rien faire. C'est mauvais, le gouvernement
fédéral? Ça a augmenté le standard de vie du monde
dans l'Outaouais québécois. C'est mauvais, le gouvernement
fédéral, ça ne devrait pas exister, ça, selon eux
autres.
M. le Président, je pense que ces gens-là, je ne dirai pas
qu'ils ne sont pas honnêtes, mais ça frise quelque chose qui est
l'inverse de ça. M. le Président, il nous disait tantôt
que, jusqu'à 1983, il y avait des bons budgets à la SAO. C'est
vrai qu'il y avait des bons budgets. Mais qu'ils aillent donc vérifier
ce que le député de Labelle, le député
péquiste de Labelle, dans le temps qu'il était ministre des
Affaires municipales, a fait, lui, quand il a déposé un
mémoire au Conseil des ministres pour complètement abroger,
annuler, se débarrasser de la SAO sans aucun rechange. Il n'y avait rien
en rechange. Ça, c'était une vision pour l'Outaouais. Là,
on protégeait les gens de l'Outaouais québécois. (21 h
40)
M. le Président, en 1983, c'est eux autres qui étaient
là et c'est vrai que les budgets ont commencé à baisser
depuis ce temps-là. Je discutais récemment avec le
président-directeur général de la SAO, M. Jean-Marie
Séguin. N'eût été de ces gens-là, M. le
Président, qui ont changé la vocation de la SAO, par exemple,
pour enlever les attraits touristiques qu'on avait, et ce qui a
été cédé à la SEPAQ, la SAO serait
peut-être encore là aujourd'hui.
M. le Président, le ministre mentionnait tantôt que, dans
le rapport du Comité Outaouais, présidé par Marcel
Beaudry, quand ils en viennent à la conclusion qu'il faut diversifier
l'économie aujourd'hui, bien sûr, qu'il faut la diversifier, les
gouvernements n'ont plus d'argent. On s'est endetté et pas juste ici; le
fédéral pareil. Et, eux autres, ils en savent quelque chose; pour
s'endetter, ils étaient capables dans le temps. Ils nous disaient
encore, voilà pas longtemps, M. le Président, en cette Chambre:
Qu'est-ce que vous avez à couper partout? Montez les impôts.
Empruntez. Ça, c'est notre chef de l'Opposition qui nous prônait
ça. M. le Président, il faut avoir une vision d'avenir un peu
plus réaliste que ça.
Quand Me Beaudry dit dans son rapport qu'il faut diversifier
l'économie, c'est parce qu'on sait qu'il va y avoir des changements au
niveau constitutionnel. Il va y en avoir; on s'en attend. Et, même s'il
n'y en avait pas là, ils vont diminuer la fonction publique et il va y
avoir moins de jobs dans l'Outaouais québécois.
Présentement, nous sommes la troisième plus
grande agglomération urbaine du Québec. Nous avons une
population d'environ 250 000 personnes dans l'Outaouais
québécois. De ces 250 000 personnes, il y en a 110 000 qui ont
une job, qui travaillent à quelque part. De ces 110 000, M. le
Président - et là c'est important, ça ne prend pas une
tête à Papineau pour calculer ça... Il y a 110 000
personnes dans l'Outaouais québécois qui ont une job. Il y en a
26 000 là-dessus qui travaillent pour le gouvernement
fédéral et qui demeurent dans l'Outaouais
québécois. Il y en a 24 000 autres qui demeurent dans l'Outaouais
québécois mais qui travaillent en Ontario. On est comme rendus
à 50 000 jobs, là, reliées directement soit à
l'Ontario, à l'entreprise privée en Ontario, ou soit au
gouvernement fédéral. Lorsqu'on dit qu'une job directe
crée au moins une job indirecte, est-ce qu'on peut penser à un
moment donné que, s'il n'y a plus personne qui travaille pour le
gouvernement fédéral et que l'Ontario se met à nous mettre
des critères pour empêcher nos travailleurs de la construction,
comme nous le faisons présentement ici en empêchant les
travailleurs de l'Ontario de venir travailler au Québec, s'ils faisaient
juste ce qu'on fait, nous, on perdrait 50 000 jobs directes? Est-ce qu'on
pourrait penser qu'à ce moment-là il n'y a plus personne qui
travaille dans l'Outaouais québécois?
M. le Président, il faut avoir une vision d'avenir et ce n'est
surtout pas avec ce que le PQ nous prône. C'est vrai que l'Outaouais fait
encore partie du Québec. Je leur dis et je leur répète,
ça me fait plaisir de le dire en cette Chambre parce que je l'ai dit
déjà dans l'Outaouais québécois, ce qu'ils
prônent, qui est l'indépendance du Québec, ils ne le feront
pas dans l'Outaouais québécois. Je le répète en
cette Chambre, quelqu'un qui vient dans l'Outaouais québécois
prôner l'indépendance, M. le Président, ça frise la
malhonnêteté. Je dirais même et je dirais plus, c'est
presque criminel. On ne peut pas nous faire ça dans l'Outaouais
québécois et on ne les suivra pas. Faites-la, votre
indépendance, si vous le voulez, au Québec. Je vais vous le dire
tout de suite dans cette Chambre... Oui, oui, vous pouvez faire ce que vous
voulez, mais je vous le dis tout de suite, je vais partir un mouvement. Et, si
je suis trop vieux pour le faire, il y a quelqu'un qui va le faire. On ne vous
suivra pas dans votre petite entreprise d'indépendance, partie sur un
nuage, sans avoir des garanties que les gens de l'Outaouais
québécois vont pouvoir survivre. On ne peut pas accepter
ça!
Une voix: «C'est-u» clair?
M. LeSage: M. le Président, tout ça pour vous dire
que la Société d'aménagement, effectivement, va cesser
d'exister; par contre, il y a quelque chose qui va la remplacer. Moi, je suis
convaincu que les gens qui vont siéger dans cette nouvelle structure
qui, pour le moment, va assurer l'intérim, et où on retrouve
présentement les maires de Hull, Gatineau, Aylmer, Masson et Buckingham,
ces gens-là ont une vision d'avenir. C'est des gens qu'on connaît
très bien. C'est des gens qui connaissent, eux, l'Outaouais
québécois, contrairement aux gens du Parti
québécois qui prétendent le connaître. Bien, eux
autres, ils le connaissent. Moi, je fais confiance à ces gens-là
pour nous faire des recommandations, M. le Président, lesquelles
recommandations vont aboutir à cette création de la
société de diversification économique pour le
bien-être des gens de l'Outaouais québécois et de Hull. M.
le Président, je vous remercie de m'avoir accordé le peu de temps
que j'ai pris.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: En vertu de l'article 213, je voudrais savoir si le
député...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): En vertu de l'article
213, un instant. M. le député de Hull, est-ce que vous permettez
une question au député d'Abitibi-Ouest en vertu de l'article
213?
M. LeSage: Certainement.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, la question doit
être brève et la réponse également. M. le
député d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Une question très brève. Est-ce que le
député ne reconnaît pas que c'est la commission Dorion, en
1968, qui constatait l'état de sous-développement chronique de
l'Outaouais et non le député d'Abitibi-Ouest, comme vous l'avez
affirmé tantôt?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Hull, à la question.
M. LeSage: M. le Président, je n'ai jamais dit le
contraire de ça. Tout simplement, ce que j'ai dit, c'est: Avant 1970,
quelle sorte de jobs on trouvait dans l'Outaouais québécois?
C'étaient des jobs de petites industries, et on voulait éviter
cette disparité des salaires qui existait entre l'Outaouais
québécois et l'Ontario. C'est pour ça que mon gouvernement
a mis de l'argent dans la Société d'aménagement pour,
justement, diversifier l'économie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député.
Je rappelle que nous en sommes à l'adoption du principe du projet
de loi 75, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant
l'abolition de la Société d'aménagement de l'Ou-
taouais. Je reconnais M. le député de
Jonquiè-re.
M. Francis Dufour
M. Dufour: Merci, M. le Président. Je vous le dis
honnêtement, j'étais descendu à l'Assemblée,
à partir de mon bureau, ayant l'espoir qu'on pourrait avancer assez
rapidement avec ce projet de loi, mais, en entendant le député de
Hull qui m'a habitué à des discours beaucoup plus posés,
beaucoup plus calmes, il m'a donné vraiment le goût de
répondre quelque peu, parce que la vérité a des droits. Et
je parodie un peu le ministre des Transports, Sam Elkas, qui dit que la
vérité a des droits. Moi, je pense que, pour le parti de
l'Opposition, on a ces mêmes droits et on doit rétablir les faits
lorsque les discours ou lorsque les paroles sont prononcées.
Vous savez, lorsqu'on demande au Parti québécois ou on
demande à des membres de la formation politique du Parti
québécois où ils étaient en 1970, bien, on peut
vous dire qu'on n'était même pas constitués en parti
politique. Donc, il ne faudrait pas nous attribuer des torts qu'on ne peut pas
supporter, d'aucune façon. En 1970, que je sache, il y avait trois
partis: il y avait le Parti libéral, qui a été très
longtemps au pouvoir, il y a eu le parti de l'Union Nationale et il y avait le
Crédit social. Il y avait peut-être un ou deux
indépendants. C'était ça, l'histoire de la politique
jusqu'en 1970. Je veux juste faire ce rappel pour s'assurer qu'on parle des
mêmes choses.
Donc, le député d'Abitibi-Ouest parle d'un constat
à l'effet qu'on a reconnu que, dans l'Outaouais, il y avait des lacunes.
Donc, ça a permis de mettre sur pied ou ça a obligé les
gouvernements successifs à mettre sur pied la Société
d'aménagement de l'Outaouais. Lorsqu'on nous reproche ou qu'on reproche
à l'ex-ministre des Affaires municipales, en 1983, d'avoir voulu mettre
la hache dans la Société d'aménagement de l'Outaouais, il
faut bien remarquer que le parti ne l'a pas fait, le gouvernement ne l'a pas
fait. Ce qu'un individu pense, quelle que soit sa fonction, ça ne donne
pas la couleur du gouvernement. Ça, ça me semble une logique
implacable. Si on savait tout ce qui se passe dans la tête des ministres,
je peux vous dire que, des fois, peut-être on sortirait de la Chambre. Il
y en a que même l'Assemblée nationale, ça doit les fatiguer
terriblement, parce que c'est une place où il y a de la contradiction et
il y a de la contestation. Mais on n'est pas pour juger des intentions. Il faut
juger sur les faits précis et, sur les faits précis qu'on a
à juger, la Société d'aménagement de l'Outaouais
avait commencé, à mon point de vue, son vrai déclin. Et je
vous invite à regarder à travers toutes nos démarches,
c'est à partir de 1986 ou 1987 que le ministre des Affaires municipales,
le ministre Bourbeau, a commencé et a déclaré
solennellement que la
Société d'aménagement de l'Outaouais
disparaîtrait d'ici à deux ans. Ça, ce sont des faits
véridiques.
Une voix: Vérifiables. (21 h 50)
M. Oufour: Si les gens de l'Outaouais nous disent qu'ils sont
d'accord avec ça, bravo pour leur beau programme. Parce que, moi, j'ai
dénoncé régulièrement, au moins deux, trois fois
par année, régulièrement, dans tous les engagements de
crédits et à toutes les fois qu'on a eu l'occasion de faire des
échanges avec le ministre des Affaires municipales, j'ai toujours
posé un certain nombre de questions concernant la Société
d'aménagement de l'Outaouais. Où étaient les
députés de l'Outaouais dans ce temps-là? Où
étaient ces députés? Comment on peut expliquer que ces
gens-là à aucun moment ne se sont opposés aux coupures que
le gouvernement libéral était en frais d'effectuer dans leur
propre société? Le seul endroit au Québec qui avait ce
traitement de faveur ou un traitement particulier qui n'existait à nulle
part... 6 000 000 $ pour faire du développement économique, du
développement touristique, ce n'est pas rien, ça. Seule
l'Outaouais avait accès à ces sources de financement là.
Les autres régions, nenni, rien.
Les députés de l'Outaouais, pas un mot. Ah! ils
travaillaient peut-être en arrière des couvertes, peut-être
en arrière des rideaux. Mais, moi, je n'ai vu à nulle part un
député de l'Outaouais, en commission parlementaire ou ici,
à l'Assemblée nationale, dire au ministre des Affaires
municipales: Vous n'êtes pas correct. Ils ont laissé faire. Et le
résultat, on a mis la hache dans la Société
d'aménagement de l'Outaouais. Ce n'est pas sa disparition qui est
tellement grave au moment où on se parle, parce que tout le dommage, il
est fait. Tous les employés sont dehors, la plupart des employés.
Les équipements, dehors! Le gouvernement s'est débarrassé.
C'est les municipalités qui paient pour actuellement. On a bien beau
dire que ça n'a pas coûté cher, mais les parcs, ça
coûte quelque chose; c'est les municipalités qui ont pris le
relais. C'est comme ça qu'on a traité les municipalités,
même que le gouvernement s'est désengagé. Le dommage, il
est fait ça fait longtemps.
Et, là, qu'est-ce qui arrive? C'est qu'on prend ce qui reste, les
dépouilles, puis on dit: On va donner ça à la CUO, la
Communauté urbaine de l'Outaouais. Voilà! C'est un
débarras, c'est une vente de débarras. Le gouvernement s'en lave
les mains. Peut-être qu'il va continuer à donner quelques montants
d'argent pour un petit bout de temps pour faire de la promotion
économique. Il n'y a rien de garanti. Il n'y a rien de garanti
là-dedans. On verra ce qu'un autre gouvernement fera, parce que
l'exemple vient de haut. Si les gens de l'Outaouais n'ont jamais parlé
à venir jusqu'à maintenant, pourquoi ils parleraient quand un
autre gouvernement va
apporter d'autres actions puis prendre d'autres décisions? Parce
qu'ils sont à la remorque du fédéral. Ils sont à la
remorque du fédéral, ces gens-là. Quand ils nous disent:
Une chance qu'on a le fédéral, bien, j'ai des petites nouvelles
pour les gens de l'Outaouais. Les 450 000 000 000 $ ou 500 000 000 000 $ de
déficit, pensez-vous que vous allez commencer, continuer dans ce
«deal» ou dans cette façon de procéder? Vous pensez
qu'il ne se produira rien? Les fédéraux, ils vont vous
protéger? Vous allez être en circuit fermé? Puis ça
vous a surpris que des gens du Lac-Saint-Jean et du Saguenay aillent travailler
chez vous? Le deuxième plus haut taux de chômage au Québec,
c'est chez nous, ça, 16,5 % de chômage.
Une voix:...
M. Dufour: Je m'excuse, si le député de Gatineau
veut parler... de Papineau, s'il veut parler, il prendra son siège, M.
le Président. Je suis à sa disposition pour lui répondre,
à n'importe quel temps, parce que j'en ai vu des choses aussi, moi. J'ai
le respect des gens qui patient à part de ça, j'aimerais le lui
rappeler.
Je veux vous dire, M. le Président, que ce qui se passe dans
l'Outaouais, c'est dramatique. C'est dramatique ailleurs, c'est dramatique
là aussi. Les députés du coin, du coin, ils ont
laissé faire. Ils ont laissé démantibuler quelque chose
qui leur appartenait, qui était unique. Ils n'ont plus rien à
dire. Ils ont seulement qu'à se fermer puis à dire: Bravo! Ils
iront expliquer ça à leur monde. C'est le fédéral
qui décide pour eux autres.
Je suis allé, moi, visiter... Je ne connais pas ça
l'Outaouais, moi. Je suis allé, par exemple, voir ça un peu. Je
ne peux pas dire que je connais ça. Je n'ai pas été
élevé à Ottawa. Je n'ai pas été
élevé dans ce coin-là. Mais je peux vous dire, M. le
Président, que les gens de l'Outaouais, il y a des places que la CCN, la
Commission de la capitale nationale... Il ne se fait pas ce que vous pensez, ce
que vous pensez que je pense, parce que ça les embarrasse de voir cette
société, avec ses gros pieds, tout ramasser les beaux morceaux de
terrain, sans savoir ce qu'ils vont en faire. Ce n'est pas important,
ça. Même les administrateurs municipaux ne savent pas ce qu'ils
vont faire avec ces terrains-là. La CCN, elle accroche les terrains,
elle met ça dans sa besace: Attendez, on va faire du chantage. C'est
comme ça qu'on se comporte avec des gens qui ne sont pas des
sinistrés, mais des colonisés. C'est de même qu'Ottawa
traite l'Outaouais.
Il y a des gens dans l'Outaouais, malheureusement, qui sont des
représentants qui sont d'accord avec ces situations-là. Moi, je
ne peux pas faire autrement que de le déplorer, parce que la confiance
puis la fierté, ça commence à quelque part. Il y a des
prix, bien sûr, pour la fierté, mais il ne faut pas avoir honte de
ça.
C'est une qualité très importante, à mon point de
vue. Quand vient le temps de discuter, quand vient le temps de négocier,
quand vient le temps de se tenir debout... Puis on respecte seulement les gens
qui se tiennent debout, pas les gens qui n'ont pas de conviction, pas les gens
qui sont à la merci de tout le monde, pas les gens qui ont juste un
miroir puis qui se regardent, puis qui disent: Dis-moi qui est le plus beau,
qui est le plus fin. Je trouve ça malheureux.
Vous savez, la démonstration à laquelle je viens
d'assister, je la déplore. Ce n'est pas pour rien que je me suis
levé. Moi, je déplore ça, à mon âge, de
regarder ce qui s'est passé. Nous autres, dans l'Outaouais, ça va
pas trop pire; les autres, chez le diable! Le Québec, on s'en fout;
vivez comme vous voudrez; nous autres, l'Outaouais, on veut tirer nos marrons
du feu. On veut continuer à avoir ce qui est là. Les autres, on
s'en fout. On aurait pu dire ça chez nous, nous autres, au
Saguenay-Lac-Saint-Jean. Le saviez-vous, M. le Président, que c'a
été la troisième région la plus riche, là,
pendant longtemps, au point de vue industriel et économique? Si on avait
fait comme les gens de l'Outaouais: Allez chez le diable, puis on va garder nos
montants d'argent pour nous autres... Les ressources hydroélectriques,
les alumineries: Chez le diable, le gouvernement du Québec, vous n'aurez
pas les impôts. On aurait pu faire ça, on aurait pu dire: On va se
séparer, nous autres, chacun pour soi. Là, c'est les autres, les
gros et les gras durs, les replets et les repus, mais, dans 5 ans et dans 10
ans, comment ils seront, ces gens-là? Parce que, avec le
fédéral qui est en faillite actuellement, pensez-vous qu'ils vont
venir encore nous faire de la broue, puis venir se péter les bretelles
devant tous nous autres pour dire: Regardez, nous autres, on est plus fins que
tout le monde?
Je pense, M. le Président, qu'on assiste à une
démonstration qui est malheureuse. Ce n'est pas comme ça qu'on
aurait dû faire. D'abord, l'Opposition était d'accord sur le
démantèlement de... Le critique de l'Opposition, le porte-parole,
il a dit qu'il était favorable au projet de loi. Il n'a pas
commencé à faire de la politique là-dessus, en disant:
Écoute un peu... Moi, j'en fais un peu plus que lui, de la politique,
parce qu'on ne peut pas ne pas répondre à des absurdités
et à des grosses choses de même, comme ça. C'est de
l'enflure verbale, ce n'est pas acceptable. Bien moi, je vous dis que je
déplore ça.
Vous savez, quand on part avec des emplois et qu'on se surprend qu'on a
des gens qui viennent travailler chez nous... Ils devraient être
contents, ils sont en augmentation de population. Partout dans le
Québec, on est dans le déclin. Ils n'ont pas, eux autres,
à se casser la tête sur la ruralité des régions.
J'inviterais les députés de l'Outaouais, qui nous disent qu'on ne
connaît pas ça, j'aimerais les inviter à venir par chez
nous pour voir s'ils connaissent ça, eux autres aussi.
On pourrait peut-être se parler après. Quand ils seront
venus visiter les régions, quand ils auront descendu de leur tour
d'ivoire, quand ils auront fini d'entendre le carillon du parlement, à
Ottawa, peut-être qu'ils reviendront les pieds sur la terre, quand ils
auront arrêté de visiter les musées, qu'ils verront c'est
quoi ce qu'on voit, ce qui se passe, le désastre qui se passe sur le
terrain, la mortalité, moi, j'appelle, des régions, parce qu'il y
a des régions qui sont pratiquement mortes. Ça prendrait de la
respiration artificielle.
Les gens de l'Outaouais: Non, nous autres, ça ne nous
dérange pas. On vit dans notre tour d'ivoire. On est au-dessus de la
mêlée. On se bat pour nos acquis. Les autres, on s'en fout. C'est
ça qu'on vient de se faire dire. Je n'accepterai jamais ça, M. le
Président, au même titre que quand, lui, dit: Moi, je n'accepterai
pas que vous alliez vivre sur votre nuage avec votre souveraineté. Bien,
je peux vous dire une chose: Au moins, avec notre projet de
société ou notre projet de souveraineté, on offre quelque
chose au monde. On leur offre une solution de rechange. On leur offre la
confiance en eux, parce que ces gens-là, ils n'auront jamais confiance
en eux autres. C'est pour ça qu'ils n'ont pas confiance aux autres, ils
n'ont déjà pas confiance en eux, parce que leur première
confiance, c'est envers le fédéral. La deuxième confiance
qu'ils ont, là, c'est qu'ils n'en ont pas pantoute. Ils sont à la
remorque d'idées. Ils en manquent. Ils sont en manque d'idées.
Ils sont en manque d'imagination. Et, comme ils n'ont pas confiance en eux, ils
ne peuvent pas avoir confiance aux autres, et c'est comme ça que, pour
eux, la souveraineté, ça va être toujours inaccessible,
parce que c'est un constat d'impuissance ou d'incapacité.
Et, moi, je vous dis, M. le Président, qu'à partir de
maintenant il faut absolument que les gens de l'Outaouais reviennent à
de meilleurs sentiments, reviennent avec des idées beaucoup plus
froides, beaucoup plus claires, et de penser que ce n'est pas nous autres qui
attaquons l'Outaouais, c'est leur propre parti qui est en frais de se
débattre contre eux autres. C'est le Parti libéral qui,
actuellement, est en frais d'essayer de détruire les actions qui ont
été posées en Outaouais.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je m'excuse de vous
interrompre, compte tenu qu'il est 22 heures. Je vous rappelle qu'il vous
restera huit minutes à votre intervention, lorsque le projet de loi 75
sera appelé. Compte tenu de l'heure, les travaux de cette
Assemblée sont ajournés à demain, le mercredi 17 mars,
à 10 heures.
(Fin de la séance à 22 heures)