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Version finale

34e législature, 2e session
(19 mars 1992 au 10 mars 1994)

Le jeudi 9 décembre 1993 - Vol. 32 N° 142

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

(Dix heures quatorze minutes)

Le Président: Alors, Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Présence du consul général de la Fédération de Russie, M. Nikolai Smirnov

J'ai le grand plaisir de souligner la présence, dans les tribunes, du consul général de la Fédération de Russie, M. Nikolai Smirnov.

Affaires courantes

Alors, nous allons procéder aux affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article a du feuilleton.

Projet de loi 146

Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales présente le projet de loi 146, Loi modifiant de nouveau la Loi sur la fiscalité municipale et d'autres dispositions législatives. Alors, M. le ministre des Affaires municipales.

M. Ryan: Alors, M. le Président...

Le Président: Je vais demander l'attention des collègues, s'il vous plaît! Alors, M. le ministre.

M. Claude Ryan

M. Ryan: M. le Président, il me fait plaisir de constater la présence dans les galeries du président de l'Union des municipalités du Québec, M. Ulric Blackburn, et du directeur général de l'Union, M. L'Italien. Je les salue cordialement.

Le projet de loi 146, que j'ai l'honneur de déposer, modifie la Loi sur la fiscalité municipale et d'autres lois, principalement dans le domaine de l'évaluation industrielle et agricole et dans celui des droits sur les mutations immobilières et dans celui de la taxation du secteur non résidentiel.

En ce qui concerne l'évaluation industrielle et agricole, le projet de loi modifie la Loi sur la fiscalité municipale pour faire en sorte qu'un immeuble soit porté au rôle même s'il peut être considéré comme un élément ou un accessoire d'une machine ou d'un appareil utilisé ou destiné à des fins de production industrielle ou d'exploitation agricole, lorsqu'il s'agit de l'un des immeubles suivants: Un terrain, un ouvrage d'aménagement de terrain, un édifice, une base de béton sur laquelle un bien est placé ou destiné à l'être ou un immeuble dont l'utilisation ou la destination principale est d'assurer l'utilité d'un autre immeuble devant être porté au rôle.

Le projet de loi modifie la Loi sur la fiscalité municipale pour faire en sorte que l'évaluateur ne soit plus contraint de porter au rôle une partie seulement de la valeur d'un immeuble lorsque celui-ci remplit partiellement à la fois les conditions prévues par la disposition concernant l'exclusion du rôle de la machinerie industrielle ou agricole et les conditions prévues par la disposition qui concerne l'inclusion au rôle de certains éléments ou accessoires de cette machinerie.

Le régime applicable à la partie principale de l'immeuble sera désormais applicable à l'immeuble dans son entier. Le projet de loi fait en sorte que ces nouvelles règles n'aient pas pour effet de permettre des modifications au rôle pour les exercices financiers antérieurs à celui de 1994, et cela, afin d'éviter des remboursements ou des suppléments de taxes pour le passé. À tous égards, le projet de loi protège les causes actuellement pendantes.

En ce qui concerne les droits sur les mutations immobilières, le projet de loi modifie la loi concernant les droits sur les mutations immobilières, de manière à tenir compte de l'entrée en vigueur, le 1er janvier prochain, du Code civil du Québec.

Le projet de loi comprend enfin des dispositions transitoires qui permettront aux municipalités locales désirant recommencer à imposer la taxe d'affaires de remédier au fait qu'elles n'auraient pas, pour 1994, de rôle de valeur locative ou que le rôle aurait été déclaré inapplicable pour l'année 1994. Le projet de loi contient enfin diverses modifications de concordance et des dispositions transitoires appropriées.

Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le

Président, je vous demanderais d'appeler l'article b du feuilleton.

Projet de loi 273

Le Président: À l'article b du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi 273, Loi concernant la ville de Saint-Léonard. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport et, en conséquence, M. le député de Viau et whip en chef du gouvernement, au nom de M. le député de Jeanne-Mance, présente le projet de loi d'intérêt privé 273, Loi concernant la ville de Saint-Léonard.

Mise aux voix

Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président: Donc, adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission de l'aménagement et des équipements

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je fais donc motion, M. le Président, pour que ce projet de loi d'intérêt privé soit déféré à la commission de l'aménagement et des équipements pour étude détaillée et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre. (10 h 20)

Le Président: Est-ce que cette dernière motion est adoptée? Donc, adopté.

Dépôt de documents

Maintenant, dépôt de documents. M. le ministre de la Justice.

Recommandations du Commissaire

aux plaintes des clients des distributeurs d'électricité

M. Rémillard: M. le Président, je dépose le rapport sur les recommandations faites à Hydro-Québec par le Commissaire aux plaintes des distributeurs d'électricité, pour la période du 1er novembre 1992 au 30 avril 1993.

Le Président: Ce rapport est déposé.

Mme la ministre de l'Éducation... Alors, M. le leader du gouvernement au nom de Mme la ministre de l'Éducation et ministre de l'Enseignement supérieur et de la Science.

Rapport annuel du Fonds pour la formation de chercheurs et l'aide à la recherche

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Au nom de Mme la ministre et conformément à notre règlement, je dépose le rapport annuel 1992-1993 du Fonds pour la formation de chercheurs et l'aide à la recherche.

Le Président: Alors, ce rapport est déposé. Maintenant, M. le ministre du Revenu.

Rapport annuel du ministère du Revenu

M. Savoie: Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1992-1993 du ministère du Revenu.

Le Président: Alors, ce rapport est déposé.

Dépôt de rapports de commissions

Maintenant, dépôt de rapports de commissions. Mme la Présidente de la commission des affaires sociales et députée de Taillon.

Vérification des engagements financiers concernant

le Conseil exécutif, programme 3, et les organismes relevant de la ministre déléguée à la Condition féminine et responsable de la Famille

Mme Marois: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des affaires sociales qui a siégé le 30 novembre 1993 afin de procéder à la vérification des engagements financiers contenus dans les listes des mois de janvier 1992 à septembre 1993, concernant le Conseil exécutif, programme 3, et les organismes relevant de la ministre déléguée à la Condition féminine et responsable de la Famille.

Le Président: Alors, ce rapport est déposé.

Maintenant, dépôt de pétitions.

Je m'excuse. M. le vice-président de la commission des institutions et député de Rouyn-Noranda? Témiscamingue.

Étude détaillée du projet de loi 138

M. Trudel: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des institutions qui a siégé le 8 décembre 1993 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 138, Loi modifiant la Loi de police. Le projet de loi a été adopté. Et je voudrais également, M. le Président... Est-ce que vous procédez à l'adoption de ce premier rapport?

Le Président: Non, c'est simplement un dépôt. Donc, le rapport est déposé. Le deuxième rapport maintenant.

Vérification des engagements financiers

relevant du ministre délégué aux Affaires

intergouvernementales canadiennes

M. Trudel: J'ai l'honneur aussi, M. le Président, de déposer le rapport de la commission des institutions qui a siégé le 30 novembre 1993 afin de procéder à la vérification des engagements financiers relevant du ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes contenus dans les listes des mois de décembre 1985, février 1988 à octobre 1993 inclusivement.

Le Président: Merci. Ce rapport est également déposé.

Dépôt de pétitions

Maintenant, dépôt de pétitions. Alors, au dépôt de pétitions, M. le député de Bertrand.

Maintien du service de prélèvements sanguins au CLSC des Seigneuries, à Sainte-Julie

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 1001 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de Sainte-Julie, dans le comté de Bertrand.

Les faits invoqués sont les suivants: «Attendu qu'à compter du 22 novembre 1993, le service des prélèvements sanguins offert par le point de service du CLSC des Seigneuries à Sainte-Julie sera transféré et centralisé dans les locaux du CLSC à Bou-cherville; «Attendu que ce transfert de service occasionnera de nombreux inconvénients pour la population de Sainte-Julie, entre autres des dépenses de transport importantes pour les personnes qui n'ont pas de voiture; «Attendu qu'il n'existe pas de service de transport public entre Sainte-Julie et Boucherville et que le coût moyen d'un aller-retour en taxi est d'environ 25$; «Attendu que les délais d'attente sont déjà de neuf semaines au point de service de Boucherville et que le transfert n'est même pas encore en vigueur;»

L'intervention réclamée se résume ainsi: «Nous, soussignés, prions l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du ministre de la Santé et des Services sociaux pour que le service de prélèvements sanguins soit maintenu au point de service du CLSC des Seigneuries, à Sainte-Julie.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Votre pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

Questions et réponses orales

Alors, nous allons procéder à la période de questions et réponses orales des députés. Je reconnais, en première question principale, M. le chef de l'Opposition.

Action gouvernementale concernant les mesures protectionnistes adoptées en Ontario

M. Parizeau: M. le Président, on sait que dans l'industrie de la construction, entre l'Ontario et le Québec, il y a un conflit qui dure maintenant depuis un certain temps quant à savoir si les entrepreneurs en construction ou les sous-traitants d'une province pourront soumissionner dans une autre.

En réponse à une question posée par la députée de Hochelaga-Maisonneuve le 27 octobre dernier, le ministre de l'Industrie et du Commerce demandait au nouveau gouvernement, à Ottawa, de tenir le plus rapidement possible une conférence fédérale-provinciale pour essayer de régler ça. Nous n'avons pas entendu parler du gouvernement fédéral depuis ce temps, et on ne voit rien poindre à l'horizon.

Dans le projet de loi 142, le gouvernement a ouvert une porte à ce qui pourrait être un règlement à l'égard des entrepreneurs en construction et des sous-traitants. On ne sait pas très bien si l'Ontario va saisir cette occasion de régler la question, mais nous venons d'apprendre, depuis deux jours, que le gouvernement de l'Ontario a décidé d'étendre l'interdiction de soumissionner pour la vente de quelque produit que ce soit qui rentre dans un édifice ontarien, du secteur public ou péri ou parapublic: partout, un embargo sur tous les produits du Québec. Et ça s'est manifesté d'abord par la protestation, auprès du bureau du premier ministre en Ontario, d'une entreprise québécoise de meubles de bureau qui s'appelle Précision.

Ceci est tout à fait nouveau, qu'une province établisse à l'égard d'une autre province un embargo, une défense de vendre. On n'a pas vu ça depuis un certain temps. Ça n'a rien à voir avec les politiques d'achat du gouvernement du Québec, c'est une interdiction de vendre. Est-ce que je peux demander au ministre de l'Industrie et du Commerce d'abord s'il a l'intention de donner un coup de main à cette entreprise québécoise, qu'il s'adresse au gouvernement de l'Ontario et qu'il dise: Levez cet embargo? Ça ne peut pas exister, ça, dans le monde d'aujourd'hui, un embargo comme celui-là.

Est-ce que le ministre de l'Industrie et du Commerce voit de quelle façon il peut aider cette entreprise québécoise à l'heure actuelle?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie.

M. Tremblay (Outremont): M. le Président, je pense que la question du chef de l'Opposition est très pertinente parce qu'elle ne concerne pas uniquement une

entreprise, elle concerne des dizaines et des dizaines d'entreprises québécoises qui ne peuvent plus, à cause de mesures discriminatoires, transiger sur une base d'affaires avec l'Ontario. J'ai rencontré à cet effet il y a quelques semaines la ministre responsable du commerce de l'Ontario, Mme Lankin, et je lui ai clairement exposé la position du gouvernement du Québec. J'ai également rencontré M. Arthur Mauro, qui est le coordonnâtes, pour le gouvernement fédéral, de tous les négociateurs provinciaux. J'ai également rencontré hier M. John Manley, le ministre du Commerce, et nous allons avoir une rencontre le 25 et le 26 janvier pour discuter de ce sujet. Par contre, je pense que nous ne pourrons pas attendre au 25 et au 26 janvier, parce que la situation ou les positions prises par l'Ontario sont totalement inacceptables et prennent de plus en plus des proportions alarmantes.

J^e choix que nous avons, c'est: Est-ce que, comme gouvernement, comme Assemblée nationale, est-ce que nous sommes prêts à prendre des mesures de représailles contre l'Ontario? Parce que c'est là que nous en sommes rendus, M. le Président, parce que l'Ontario se sert du débat de la construction pour mettre en place des barrières additionnelles et protectionnistes pour les marchés publics.

Alors, j'ai une rencontre dans les heures qui viennent pour étudier de façon très sérieuse la position que le gouvernement du Québec va prendre. J'ai sensibilisé hier mes collègues du Conseil des ministres. Si jamais nous en arrivions à une position comme celle-là, ce serait réellement aller à rencontre tant de la position du gouvernement que de la position de l'Opposition, prendre des mesures de répression contre l'Ontario. Mais je vais parler à ma collègue également cet après-midi, je veux dire ma collègue de l'Ontario, pour voir comment on peut régler ce problème dans les plus brefs délais. La situation est très sérieuse, M. le Président.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Parizeau: Complémentaire, au ministre des Affaires internationales. Est-ce que les règlements du GATT autorisent qu'une situation comme celle-là puisse apparaître entre deux pays membres, entre deux pays souverains, ou si c'est une situation qui est propre à notre appartenance au fédéralisme canadien?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Parizeau: Bien, je pose la question. Est-ce que le GATT autorise des pratiques pareilles entre deux pays souverains?

Le Président: M. le ministre des Affaires internationales.

M. Ciaccia: Vous me demandez une question plutôt juridique sur les conséquences et les implications des différentes provinces ou des autorités subnationales en ce qui concerne les pratiques du GATT. Je crois que c'est quelque chose que nous pouvons examiner, mais je ne crois pas que c'est parce que nous sommes partie du Canada, que nous avons la Constitution canadienne que les règles du GATT vont nous pénaliser ou que la Constitution nous pénalise. C'est quelque chose que je suis prêt à examiner, voir si nous pouvons avoir des recours, d'après les nouvelles règles du GATT, dans une circonstance telle qu'elle existe présentement.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Parizeau: Est-ce que le ministre des Affaires internationales ne sait pas qu'en vertu de la clause de la nation la plus favorisée, qui est la règle de base du fonctionnement du GATT, les pratiques que nous venons, le ministre de l'Industrie et du Commerce et moi, de dénoncer seraient absolument interdites entre pays souverains?

Le Président: M. le ministre. (10 h 30)

M. Ciaccia: M. le Président, il y a beaucoup de pratiques protectionnistes qui sont encore permises, même avec le GATT. Et je ne suis pas prêt à aller aussi loin que le chef de l'Opposition vient de le dire, que ces pratiques ne seraient pas permises si c'étaient deux pays souverains. Regardez les pratiques des États-Unis, regardez les pratiques des subventions dans l'agriculture de la Communauté européenne. C'est pour ça qu'on essaie de négocier des règles du GATT. Des pratiques protectionnistes existent et, même avec le GATT, peut-être peuvent continuer à exister dans certains domaines. Alors, je ne suis pas prêt à aller aussi loin que le chef de l'Opposition voudrait nous faire aller.

Le Président: Toujours en question complémentaire.

M. Parizeau: Est-ce qu'en vertu des règles du GATT il est possible à un pays d'interdire les importations en provenance d'un seul autre pays parmi tous les membres? Voyons! le ministre des Affaires internationales sait bien que c'est interdit en pays souverain.

Le Président: M. le ministre.

M. Ciaccia: Que dites-vous de la section 22 de la loi américaine ou de l'article 301 de la loi américaine? C'est exactement ça qu'ils font, puis le GATT existe. Voyons donc! Voyons donc!

Le Président: Un instant! Un instant, s'il vous plaît! S'il vous plaît! En question complémentaire.

M. Parizeau: Est-ce que le ministre se rend compte qu'il est en train de discuter des règlements sur

le dumping? Ce n'est pas seulement à l'égard de pays, mais à l'égard d'entreprises spécifiques. Ça n'a rien à voir avec ce dont nous parlons maintenant. Voyons!

Le Président: M. le ministre.

M. Ciaccia: Je ne suis pas d'accord avec le chef de l'Opposition. La section 22 est appliquée non seulement pour le dumping; elle peut exclure des industries et elle peut exclure des produits aux États-Unis. Et l'article 301 aussi peut être une réaction au dumping, mais, dans les faits, il peut être appliqué, et il a déjà été appliqué contre certains pays pour empêcher l'importation de certains produits.

Le Président: Pour une autre question complémentaire.

M. Parizeau: Allant jusqu'à l'embargo? Voyons! M. le Président, il sait bien que ce n'est pas...

Le Président: Votre question, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: II ne sait pas de quoi il parle. Des voix: Oh!

M. Parizeau: Je m'excuse. C'est ça. Mais c'est ça.

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Sur un rappel au règlement, M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Simplement pour rappeler le chef de l'Opposition aux dispositions des articles 77 et 78 du règlement et lui indiquer que, lorsque ces articles sont appliqués par les parlementaires, ils peuvent retrouver la confiance des Québécois, mais, s'ils les violent, ils vont la perdre à tout jamais.

Des voix: Oh!

Le Président: S'il vous plaît! J'invite le chef de l'Opposition à poser une question sans commentaire, s'il vous plaît.

M. Parizeau: Je retourne au ministre de l'Industrie et du Commerce. Est-ce qu'il a obtenu quelque réponse que ce soit du gouvernement fédéral quant à l'engagement qu'il prenait à l'égard de la députée de Hochelaga-Maisonneuve le 27 octobre dernier ? ça fait quand même un certain temps ? à l'effet de tenir une conférence fédérale-provinciale pour faire disparaître ce genre de pratique? A-t-il eu une réponse quelconque du gouvernement fédéral depuis maintenant un mois et demi?

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie.

M. Tremblay (Outremont): Ma demande au gouvernement fédéral, lors du débat sur les hélicoptères, n'était pas principalement pour discuter des barrières interprovinciales, c'était pour discuter d'une stratégie industrielle pour le Canada.

J'ai mentionné tout à l'heure, dans ma réponse, que, le 25 et le 26 janvier, les ministres responsables du commerce intérieur ainsi que le ministre fédéral responsable du commerce se rencontreront pour discuter de ce problème.

Il faut être pratique, M. le Président. On peut parler de souveraineté, mais une chose est certaine, c'est que nos petites et moyennes entreprises dans toutes les régions du Québec veulent transiger sur une base d'affaires avec nos partenaires de l'Ontario. Nos partenaires de l'Ontario ont pris une décision, une décision qui empêche les entreprises du Québec de soumissionner sur des contrats, que ce soient des hôpitaux, des écoles et au niveau des municipalités. C'est totalement inacceptable, et c'est dans ce sens-là que le gouvernement du Québec tente...

Et vous devriez être d'accord, M. le chef de l'Opposition, parce que le vice-président du Parti québécois, M. Bernard Landry, l'a dit: Le Québec doit éviter de répondre à cette provocation par des mesures de représailles. Il faut exiger des négociations rapides et de bonne foi entre les deux provinces pour résoudre ce conflit.

C'est exactement ce que nous essayons de faire: trouver une solution concrète, rapide, qui ne passe pas par la souveraineté pour régler ce problème entre des partenaires au Canada.

M. Parizeau: Est-ce que...

Le Président: Pour une dernière question complémentaire, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: Je m'excuse, M. le Président, de cette avalanche de questions complémentaires, mais il y a des mémoires sélectives, là.

Le Président: Alors, votre question.

M. Parizeau: Est-ce que le ministre de l'Industrie et du Commerce, qui vient de nous dire qu'il n'a pas demandé une conférence fédérale-provinciale pour régler ce débat dans l'industrie de la construction, se souvient d'avoir dit en cette Chambre, tel que rapporté non seulement par les galées, mais, enfin, j'ai l'article de La Presse canadienne: «Nous espérons sincèrement que le nouveau gouvernement libéral du Canada convoquera, dans les plus brefs délais, une rencontre avec tous les

ministres responsables du commerce intérieur pour régler ce différend, celui de la construction, le plus rapidement possible.»

Il ne s'agissait pas d'hélicoptères. Il ne se souvient pas de ce qu'il a dit il y a un mois et demi? Il l'a demandée, la conférence fédérale-provinciale pour régler ce problème entre l'Ontario et le Québec. Il ne se souvient pas de l'avoir demandée? Est-ce qu'il a eu une réponse du gouvernement fédéral? Est-ce qu'il s'occupe encore de ce dossier-là?

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Le problème de mémoire, M. le Président, n'est pas de ce côté de la Chambre. Il y a quelques instants, la question du chef de l'Opposition, c'était de dire: Est-ce qu'on va discuter des barrières interprovinciales? Il n'a pas mentionné la construction. Là, il s'en vient avec la construction. Ce que le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie a demandé, c'est que nos partenaires canadiens convoquent une conférence fédérale-provinciale pour discuter d'une stratégie industrielle pour favoriser le développement économique du Canada. Parce que notre position, c'est: un Québec fort, un Canada fort, ça fait un pays fort. C'est ça, la position du gouvernement. Et, dans ce sens-là, la réunion va se tenir le 25 et le 26 janvier.

Tout ce que je soulève aujourd'hui, c'est que l'urgence de la situation de nos petites et moyennes entreprises... Parce qu'en fait le chef de l'Opposition se fait le porte-parole de l'Association des manufacturiers du Québec, du Conseil du patronat du Québec et de nombreuses entreprises qui ont des préjudices. Je pense que c'est ça qui est important. C'est ça qu'on doit régler ensemble au lieu de parler de la souveraineté et de commencer à brasser des concepts qui ne répondent pas aux attentes légitimes des entreprises.

Le Président: Alors, en question principale, M. le leader adjoint de l'Opposition et député d'Abitibi-Ouest.

Ampleur du déficit

M. Gendron: II y a à peine quelques jours, la ministre des Finances rendait publiques ses prévisions budgétaires pour l'année en cours et annonçait que le déficit, malheureusement prévu à 4 100 000 000 $, passerait à 4 500 000 000 $. Pas plus tard qu'hier le futur premier ministre du Québec, lui, n'a pas hésité à parler de 5 000 000 000 $ pour la présente année.

Ma question à la ministre des Finances: Est-ce que vous soutenez toujours, contre toute vraisemblance et à rencontre des propos même du futur premier ministre du Québec, que le déficit 1993-1994 ne dépassera pas les 4 500 000 000 $, tel qu'annoncé par un document officiel?

Le Président: Mme la ministre des Finances.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je trouve dangereux de la part d'un journaliste de prendre les propos de mon collègue à titre d'illustration pour des vérités. Et je trouve, par contre, incorrect de la part de l'Opposition de prendre les mêmes chiffres encore pour des vérités alors que, si on relit les galées, on va se rendre compte que mon collègue dit: Encore une fois, ce n'est pas des annonces, on prend des chiffres pour fins d'illustration. Donc, M. le Président, je n'ai pas l'intention de commenter ces propos.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Gendron: Donc, M. le Président, la ministre des Finances nous confirme qu'il y a une seule version officielle, c'est la synthèse des opérations financières. Et, selon vous, le déficit est à 4 500 000 000 $ et non à 5 000 000 000 $. C'est ça que la ministre des Finances nous dit aujourd'hui. Il n'y a qu'un seul document officiel.

Le Président: Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, j'ai fait connaître, la semaine dernière, la synthèse des opérations financières, et on a bien vu que le déficit était de 375 000 000 $. Il était composé d'une baisse de 300 000 000 $, entre autres par rapport aux revenus autonomes. Mais, ce que je veux dire, M. le Président, c'est que la synthèse des opérations, c'est le portrait des six premiers mois. Bon. Et, finalement, s'il faut rectifier le tir par la suite, on le fera, mais il n'est nullement question à ce moment-ci de changer le cap sur les dépenses. Nous allons tout faire pour maintenir le contrôle de nos dépenses, nous l'avons dit, et nous allons contrôler nos dépenses d'ici la fin de l'année. Mais il est beaucoup trop tôt, et ce sont des hypothèses, M. le Président, que de dire que le déficit sera de l'ordre qu'en fait mention le député de l'Opposition. (10 h 40)

Le Président: Alors, en question complémentaire, M. le chef de l'Opposition.

M. Parizeau: Toujours à la ministre des Finances. Est-ce qu'elle ne trouve pas ça imprudent un peu de lancer des illustrations comme celle-là quand on connaît la nervosité des marchés financiers à l'heure actuelle et la réaction des agences de crédit chaque fois que des possibilités apparaissent, d'augmentation du déficit? Est-ce que ce n'est pas très imprudent de la part du président du Conseil du trésor d'avoir lancé des chiffres pareils?

Le Président: Mme la ministre des Finances. Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, ce

n'est pas la première fois que mon collègue utilise de telles illustrations. Et, finalement, si l'Opposition est assez naïve pour prendre ces illustrations pour des vérités, M. le Président, je trouve ça tout à fait incorrect. Mais je demanderais à mon collègue, qui a discuté avec le député de Labelle hier, de compléter ma réponse, M. le Président.

Le Président: Alors, M. le président du Conseil du trésor.

M. Johnson: M. le Président, ça fait au moins deux ans que j'utilise, pour fins d'illustration, le boulet que représente, dans les finances publiques, l'endettement que nous a légué le député de L'Assomption. Absolument! Absolument! Absolument! Ça fait au moins deux ans, M. le Président.

Le Président: Un instant! Un instant, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! Non, non. À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît. S'il vous plaît!

Alors, M. le président du Conseil du trésor.

M. Johnson: M. le Président, dans l'échange que j'ai eu avec le député de Labelle, j'ai reconnu, parce que c'était ça qu'on avait dans les crédits supplémentaires, que les dépenses, cette année, seront de 40 858 000 000 $. Il me semble que c'est clair, ça. Je l'ai dit, c'est presque 41 000 000 000 $. Dans les minutes qui ont suivi, à titre d'illustration, j'ai repris un exemple numérique en parlant de 40 000 000 000 $. Est-ce que soit la presse, soit l'Opposition va nous féliciter d'avoir coupé les dépenses de 1 000 000 000 $ de plus en quelques minutes? On va se mettre au clair.

Ça fait longtemps que j'utilise ces chiffres-là. De toute évidence, ça jette de la confusion dans l'esprit du chef de l'Opposition. Je vais utiliser d'autres chiffres à l'avenir.

Le Président: Alors, en question principale, M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition.

Projet de protocole sur le programme d'infrastructures

M. Brassard: M. le Président, hier, dans sa réponse, le premier ministre, concernant la maîtrise d'oeuvre dans le programme d'investissement sur les infrastructures, a fait un petit oubli, sans doute anodin. Il a omis d'informer l'Assemblée nationale de l'existence d'un projet de protocole sur le programme d'infrastructures urbaines présenté par le gouvernement fédéral. Selon Le Soleil de ce matin, le gouvernement du Québec ne se retrouverait pas dans cette ébauche.

Est-ce que le premier ministre aurait l'obligeance d'indiquer à cette Chambre ce qui est proposé par le gouvernement fédéral dans son projet de protocole et les raisons pour lesquelles le projet fédéral n'est pas acceptable dans sa forme actuelle pour le Québec?

Le Président: Alors, M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, je n'ai pas pris connaissance des articles de journaux ce matin. J'avais une fête hier avec ma famille libérale, une fête très agréable.

Je ne peux que répéter ce que j'ai dit au député de Lac-Saint-Jean des conclusions de la rencontre que j'ai eue avec M. Marcel Massé, qu'il n'était pas question que la juridiction du Québec ne soit pas respectée. Je ne comprends pas l'entêtement du député de Lac-Saint-Jean. Je comprends que la situation économique s'améliore. On a vu les 62 000 nouveaux emplois, de novembre 1992 à novembre 1993, mais il reste qu'il y a encore des problèmes économiques très aigus. Et j'ai dit au député de Lac-Saint-Jean que, dans la mesure où nous respectons la juridiction du Québec, nous sommes prêts à examiner en pratique tous les projets communs, qui sont d'intérêt commun au niveau municipal, au niveau provincial et au niveau fédéral, de manière à accélérer le plus possible la création des emplois que veulent les Québécois.

Qu'il demande à ses concitoyens du comté de Lac-Saint-Jean. Je veux dire, dans la mesure où il est encore intéressé à avoir des chances de réélection à la prochaine campagne électorale, qu'il demande...

Une voix: Ça, on verra.

M. Bourassa: On verra, M. le Président. Moi, je suis quand même rassuré par les talents de professeur d'histoire du député de Lac-Saint-Jean. S'il y avait... J'ai confiance dans les... C'est quand même des comtés que nous avons déjà remportés, nous, les libéraux, et je suis convaincu que nous avons... Oui...

Des voix: ...

Le Président: Alors, en conclusion, M. le premier ministre. Non, non! Écoutez, un instant, s'il vous plaît! Donc, à l'ordre s'il vous plaît! Alors, une brève conclusion, M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, j'ai dit hier que nous nous étions entendus sur les objectifs de faciliter le plus rapidement possible la création d'emplois, et c'est ce que veulent les Québécois. D'aucune façon le gouvernement fédéral n'a l'intention de ne pas respecter la juridiction du Québec, mais nous sommes d'accord avec lui, pratiquement, pour trouver et obtenir des résultats le plus rapidement possible.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Brassard: Est-ce que le premier ministre est

en train de me dire qu'il n'est pas au courant du projet de protocole du gouvernement fédéral sur le programme? Est-ce qu'il est au courant du projet de protocole? Il n'a peut-être pas lu les journaux aujourd'hui parce qu'on l'a fêté hier, mais est-ce qu'il est au courant au moins du projet de protocole sur le programme d'infrastructures? Est-ce qu'il est au courant que ça ne répond pas complètement, entièrement aux attentes du gouvernement du Québec, aux dires même de la ministre des Finances, qui dit qu'il y a encore des ficelles à attacher? Quel genre de ficelles? C'est juste des ficelles ou bien donc des câbles à attacher? (10 h 50)

Le Président: Alors, M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, on m'a remis des textes, et j'ai examiné des textes avec mes collègues, avec la ministre des Finances, avec le ministre des Affaires intergouvernementales, des textes exploratoires, de manière à préparer l'entente finale, et j'ai dit tantôt que j'avais eu des discussions exploratoires. Mais je répète encore une fois au député de Lac-Saint-Jean que, dans ces discussions que nous pouvons avoir ? c'est normal, nous voulons agir le plus rapidement possible ? nous pouvons échanger des textes qui ne sont pas des textes définitifs. Mais, ce qui est important pour nous, pour le gouvernement du Québec, ce qui est important également pour l'ensemble des citoyens du Québec, c'est de pouvoir s'entendre le plus rapidement possible sans remettre en cause les pouvoirs ou la juridiction du Québec. Alors, nous essayons d'avoir des textes, de nous entendre sur ces textes-là qui concilient à la fois la volonté très ferme des Québécois de pouvoir obtenir des gains économiques tout en respectant la Constitution du Canada et les pouvoirs du Québec. Ce sont des objectifs que nous avons toujours respectés depuis un quart de siècle.

Je comprends, M. le Président, que le député de Lac-Saint-Jean ne se souvienne pas de ces années, mais le chef de l'Opposition peut en témoigner. Dans les années soixante, dans les années soixante-dix, dans les années quatre-vingt, dans les années quatre-vingt-dix...

Des voix: ... Ha, ha, ha!

Le Président: En conclusion, M. le premier ministre.

M. Bourassa: Le chef de l'Opposition, quand même, me semble encore prêt à continuer. Pourquoi il réfère aux années 1800?

Le Président: Alors, en question principale, Mme la députée de Taillon.

Application des nouvelles nonnes environnementales aux compagnies papetières

Mme Marois: Merci, M. le Président. Hier, alors qu'il annonçait des investissements de 37 500 000 $ pour la mise aux normes de l'usine de Clermont, le président de Donohue, M. Pagé, sommait le gouvernement de ne pas reculer sur ses échéanciers et d'appliquer, tel que prévu, les nouvelles normes pour les papetières, et ce, à partir de septembre 1995. On sait qu'à 20 mois de l'échéance seulement sept des 26 entreprises visées ont fait leur demande de certificat de conformité au gouvernement. Il est d'ailleurs pour le moins curieux que ce soit un représentant de l'industrie, ancien collègue du ministre, qui le rappelle à l'ordre. Cela est un peu inquiétant pour les milieux environnementaux qui se préoccupent réellement de la qualité de leur environnement.

Que compte faire le ministre de l'Environnement pour mettre en oeuvre les nouvelles normes, et ce, à partir de septembre 1995, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. C'est le gouvernement du Québec, par la voie du ministère de l'Environnement, qui fixe les normes. L'obligation de se conformer aux normes est une obligation qui relève du secteur privé, en l'occurrence les papetières québécoises. L'ancien ministre et présentement président de Donohue montre l'exemple. Il investit et il assure le gouvernement qu'il va se conformer aux normes environnementales. Je pense qu'il s'agit là d'une conduite exemplaire que l'ensemble des autres compagnies auraient avantage à suivre. Et je tiens à féliciter le président de Donohue.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

Mme Marois: C'est gentil quand même, hein. Est-ce que le ministre de l'Environnement, à titre de premier responsable de la protection de l'environnement, de l'application de la Loi sur la qualité de l'environnement, a un plan précis et clair pour s'assurer qu'à 20 mois de l'échéance, alors qu'on sait que cela prend 14 mois pour construire certains équipements, est-ce que le ministre a un plan précis, concret pour assumer sa responsabilité, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, la question telle que formulée par Mme la députée de Taillon nous indique clairement qu'elle n'a pas la même connaissance approfondie qu'avait son prédécesseur, le député de La Prairie, de toute la section des papetières. Lorsqu'on parle de chacune des usines, il faut regarder chacune des usines de façon précise. Elles ne polluent pas toutes le même domaine, elles ne sont pas toutes équipées, elles n'ont pas toutes le même...

Le Président: Un instant! Je vais demander la

collaboration des collègues, s'il vous plaît. Mmes et MM. les députés! S'il vous plaît! Alors, M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Elles n'ont pas toutes les mêmes correctifs à apporter. Nous avons, comme gouvernement, établi un dialogue, dans un premier temps, avec l'association qui les représentait. Et, dans un deuxième temps, nous sommes entrés en contact avec chacune des compagnies. Et, dans un troisième temps, nous «adressons» la problématique au niveau de chacune des usines.

Je tiens à assurer Mme la députée que le suivi est effectué, qu'aucune entreprise ne pourra plaider l'ignorance de la législation et de la réglementation environnementales, qu'aucune entreprise ne pourra plaider que le gouvernement ne lui a pas donné le temps nécessaire pour se conformer aux normes environnementales et, en ce qui concerne l'actuel ministre de l'Environnement, il n'a pas l'intention d'augmenter ces délais, et le rappel fait par l'entreprise Donohue, par son président, Michel Pagé, s'adresse surtout à ses compétiteurs, non pas au ministre de l'Environnement.

Le Président: En question principale, M. le député de Westmount.

Mesure budgétaire sur les contributions

des employeurs à des régimes privés d'assurance-maladie et de soins dentaires

M. Holden: Merci, M. le Président. L'Association canadienne des compagnies d'assurances continue de s'opposer à la mesure du dernier budget qui vise à rendre imposables pour les particuliers les contributions versées par leur employeur à un régime privé d'assurance-maladie et de soins dentaires.

S'appuyant sur une étude de SECOR, l'Association estime que le gouvernement ne récoltera pas l'effort qu'il espère, que l'industrie est menacée et qu'à terme c'est le secteur public qui devra en défrayer les coûts.

Alors, ma question pour la ministre des Finances: La ministre des Finances, qui étudie ce dossier depuis quelque temps, est-elle prête à imposer un moratoire sur cette mesure, le temps d'en étudier les impacts véritables, comme le lui demande l'Association?

Le Président: Mme la ministre des Finances.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je pense qu'il faut resituer ce dossier dans le contexte du budget. Vous vous souviendrez que c'était une mesure budgétaire et que le gouvernement du Québec allait chercher des revenus de 103 000 000 $ à partir, bien sûr, de sommes qui allaient être perçues pour des personnes qui avaient certains privilèges au niveau des assurances.

Il y a quelques semaines, j'ai moi-même rencontré les différents intervenants au dossier. J'ai écouté attentivement leurs objections. Toutefois, il est clair, bien sûr, M. le Président, que le ministère des Finances n'est pas tout à fait d'accord avec l'étude de SECOR, notamment en ce qui a trait aux revenus générés par la mesure.

Les commentaires dont j'ai fait part à ce moment-là aux assureurs, M. le Président, c'est que le gouvernement n'avait pas l'intention d'émettre un moratoire sur la mesure, qu'il s'agissait, bien sûr, d'une mesure importante dans le contexte budgétaire, et que si on ne percevait pas ces sommes à partir de cette décision, il fallait bien sûr aller les chercher ailleurs, et il n'était pas question de faire payer par l'ensemble de la population une mesure qui donnait un certain privilège à une catégorie de clientèles, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire.

M. Holden: Est-ce que la ministre dispose d'études de son ministère qui infirment les conclusions de l'Association? Et, si oui, est-ce qu'elle est prête à les déposer en Chambre?

Le Président: Mme la ministre des Finances.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je n'ai pas avec moi ces études. Je dois dire que nous avons examiné, par contre, les chiffres contenus dans le rapport SECOR et nous avons discuté longuement avec les assureurs de ces chiffres. Comme je le mentionnais, nous ne sommes pas tout à fait d'accord avec le contenu de l'ensemble de l'étude de SECOR.

Le Président: En vous remerciant de votre attention, alors... Vous allez m'excuser! Vous allez m'excu-ser, s'il vous plaît! Je vous remercie de votre attention.

En question principale, M. le député de Dubuc.

Privatisation de la gestion des parcs et des réserves fauniques

M. Morin: Merci, M. le Président. Les 10 et 11 décembre, soit demain et samedi, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche tiendra des assises sur la faune. À la lecture des différents mémoires qui ont été déposés, le volet portant sur le partenariat et la privatisation rencontre l'opposition de la plupart des organismes. De plus, dans une étude commandée par le gouvernement à la firme Laliberté, Lanctôt, Coopers & Lybrand, les auteurs déconseillent fortement de privatiser l'ensemble des parcs et réserves fauniques. D'autres rapports internes arriveraient à la même conclusion.

Alors, M. le Président, devant cette opposition de plus en plus généralisée, le ministre entend-il imiter son collègue, le ministre de l'Agriculture, qui s'est engagé à tenir compte de l'opinion du monde agricole par rapport à son projet de loi, et revenir sur sa décision et conserver ainsi au gouvernement l'entière responsabilité de la gestion des parcs et des réserves?

Le Président: M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. (11 heures)

M. Blackburn: II n'est pas question, M. le Président, d'aucune façon, que l'on revienne sur cette décision qui a été prise d'une orientation. Le rapport Coopers & Lybrand, tel que mentionné par le député de Dubuc, faisait effectivement des recommandations dans le sens d'aller dans une délégation de gestion ou de responsabilité commerciale, et, bien sûr, c'est dans ce sens-là que nous allons continuer. Il allait même plus loin, ce rapport, il allait même au niveau d'une tarification qu'on devrait faire au niveau de l'accès à ces parcs, chose que nous n'avons pas retenue.

Mais ce qu'il est important de dire, c'est que nous respectons l'intégrité de ces territoires, c'est fondamental, et l'État demeure responsable de l'application des lois à l'intérieur de ces parcs. C'est, bien sûr, extrêmement important et, à quelque part aussi, il y a des expériences qui existent où on a fait la démonstration qu'avec des partenaires qui assumaient des responsabilités c'était très bien fait et très bien assumé.

Le Président: En question complémentaire.

M. Morin: Alors, M. le Président, comment le ministre peut-il s'entêter, alors que l'étude, qui a coûté 188 000 $ au gouvernement, arrive à des conclusions nettes, précises, contraires aux intentions du ministre? De plus, le ministre accepterait-il de faire preuve de transparence en rendant publiques les études internes sur la question?

Le Président: M. le ministre.

M. Blackburn: Je le répète, M. le Président ? c'est faux, ce que le député de Dubuc vient de dire ? à savoir qu'on va dans le sens des recommandations, bien sûr, de Coopers & Lybrand, on va exactement avec ce qu'ils souhaitaient. Ils allaient même plus loin, ils disaient qu'on devrait tarifer, ce que l'on n'a pas fait. Ce qu'il est important de dire, c'est un processus important dans le réalignement de l'appareil gouvernemental d'une délégation de gestion ou de responsabilité à des organismes du milieu. Ça va aussi dans le sens de ce que ces organismes-là souhaitent, prendre en main des responsabilités qui leur reviennent et faire mieux avec moins. Ça, c'est extrêmement important dans un contexte budgétaire difficile et, ça, la population du Québec le sait. Je pense que l'Opposition et le député de Dubuc l'ignorent encore.

M. Morin: M. le Président... Le Président: En complémentaire.

M. Morin: ...à la lumière du bilan négatif du rapport sur les expériences de privatisation dans le domaine des parcs et des réserves qui ont été vécues jusqu'à maintenant, le ministre ne croit-il pas qu'il devrait plutôt se retrousser les manches pour donner à nos parcs la notoriété, l'image de qualité et l'envergure qu'ils devraient avoir?

Le Président: M. le ministre.

M. Blackburn: À travers le plan d'action, M. le Président, que j'ai rendu public il y a quelques mois, le plan d'action qui va être respecté dans ce cadre même de cette délégation, je pense que c'est important de le dire, le Québec, le gouvernement du Québec a fait des choses extrêmement importantes pour ce qui est des parcs et de leur notoriété. Nous allons continuer d'assumer cette responsabilité extrêmement importante.

Pour ce qui est de l'autre volet, où il prétend qu'il y a eu des expériences malheureuses ? oui, une, dans le cas du parc d'Oka ? ça a été corrigé. J'inviterais le député de Dubuc à prendre connaissance de ce qui existe maintenant avec SERPO et à voir exactement ce qu'il en est au niveau des résultats. Il va être renversé. Et c'est ce modèle-là qu'on veut exporter à travers le Québec. Je pourrais lui en donner un autre bel exemple, quand on parle d'interprétation et d'éducation: la société charlevoisienne, dans le parc des Grands Jardins. J'inviterais le député de Dubuc à en prendre connaissance aussi. Il va être épaté et il va voir que c'est, à quelque part, un projet extrêmement important, qui donne des résultats qui sont tout à fait probants et que c'est un projet porteur d'avenir, contrairement à ce que le député de Dubuc dit actuellement.

Le Président: En question principale, M. le député de Duplessis.

Avis du gouvernement fédéral sur le projet hydroélectrique Sainte-Marguerite 3

M. Perron: Oui, M. le Président, au ministre de l'Environnement. Près de six mois après que le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement eut publié son rapport sur le projet hydroélectrique Sainte-Marguerite 3, le dossier est actuellement presque au point mort. En effet, le ministre de l'Environnement n'a pas encore formulé sa recommandation au Conseil des ministres, puisqu'il attend toujours les avis sectoriels du gouvernement fédéral. Pour la région nord-côtière, c'est-à-dire pour les travailleurs et travailleuses de la construction, c'est-à-dire aussi pour les entreprises, la mise en oeuvre de ce projet, quelle que soit sa forme, est réellement essentielle. Le ministre de l'Environnement a-t-il eu un son de cloche de la part de ses homologues fédéraux se rapportant à l'émission des avis du gouvernement fédéral? Sinon, quand les attend-il et quelles pressions concrètes a-t-il faites au moment où on se parle, depuis un certain temps, pour justement que ces avis-là sortent dans de courts délais?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je remercie le député de Duplessis de sa question. D'une façon quotidienne, Mme la ministre de l'Énergie m'adresse la même question. D'une façon quotidienne, mon collègue et adjoint parlementaire, le député de Saguenay, m'adresse la même question.

L'évaluation environnementale est terminée en ce qui concerne le gouvernement du Québec. J'ai pris connaissance du rapport du bureau d'audiences publiques en matière environnementale. Je suis prêt à effectuer mes recommandations auprès du Conseil des ministres et je suis prêt depuis plusieurs mois. Lorsque l'ancien gouvernement fédéral était au pouvoir, j'ai eu des contacts avec le ministre de l'Environnement, le ministre des Transports, le ministre des Pêches fédéral de façon à ce que, de leur côté, et en ce qui concerne leur domaine de juridiction, ils fassent diligence de façon à apporter une réponse à une population qui s'inquiète de l'avenir de ce projet.

J'ai repris contact, dès la formation du nouveau cabinet, avec les mêmes ministres, soit de l'Environnement, Pêches et Océans Canada et Transports Canada, à l'occasion de la réunion du Conseil canadien des ministres de l'Environnement à Halifax il y a quelques semaines. Je me suis entretenu privément avec mon homologue fédéral, Mme la vice-première ministre, et j'ai insisté sur l'urgence d'une décision fédérale dans ce dossier. Je me suis engagé, à l'occasion de l'étude des crédits, hier, avec Mme la députée de Taillon, à lui déposer la correspondance qui indique que nous avons talonné le gouvernement fédéral dans ce dossier. Je vais déposer cette correspondance aujourd'hui auprès de Mme la députée de Taillon. Si vous avez des suggestions additionnelles à me faire, je suis tout aussi impatient que vous de recevoir cette réponse du fédéral.

Le Président: En question complémentaire.

M. Perron: M. le Président, mis à part ce que vient de dire le ministre, est-ce qu'il a des indications réelles, à savoir quand les avis du gouvernement fédéral seront transmis au gouvernement du Québec pour que ce dernier puisse prendre la décision formelle se rapportant àSM3?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. En plus des contacts ministériels, il y a eu, au cours des dernières semaines, des contacts sous-ministériels. Mon sous-ministre a parlé au sous-ministre du ministère fédéral des Transports, qui est le porteur de ballons au nom du gouvernement fédéral dans ce dossier. On m'indique que le fédéral en avait encore pour quelques semaines avant d'être capable d'établir officiellement sa position.

Il s'agit, et là je ne tente pas de défendre ce qui peut apparaître parfois comme des lenteurs gouvernementales, d'un dossier complexe où on tente de marier à la fois un développement économique indispensable à une région du Québec avec la protection de l'environnement. Et on sait que dans cette région on retrouve une des plus belles rivières à saumon sur la planète. Ça a été personnellement difficile pour le ministre de l'Environnement du Québec, qui a consulté tout le monde dans le dossier, y inclus le député de Duplessis, d'en arriver à une conclusion et à faire des recommandations au Conseil des ministres. J'imagine que ce n'est pas plus facile du côté fédéral. Ils ont eu un événement qu'on n'a pas eu au Québec. Ils ont connu une élection qui a fait en sorte que les gens sortants n'ont pas eu le temps de prendre la décision. Et les gens qui arrivent ont sans doute voulu prendre le temps de rendre la meilleure des décisions. À ce moment-ci, je suis d'accord avec vous que le temps à prendre devient exagéré et j'insiste, et je pense que c'est un voeu unanime de l'Assemblée nationale, pour que cette décision nous soit communiquée dans les plus brefs délais par le gouvernement fédéral.

Le Président: Pour une autre question complémentaire, M. le député de Duplessis.

M. Perron: M. le Président, est-ce que, malgré le protocole d'entente qui existe entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec se rapportant aux audiences publiques et après les audiences publiques, le gouvernement du Québec peut quand même prendre la décision sans avoir reçu les avis du gouvernement fédéral?

Le Président: M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Le député de Duplessis fait référence à un domaine de coopération fédérale-provinciale où, au lieu et à la place de se chicaner, au lieu et à la place de dédoubler les procédures environnementales, le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral ont convenu d'un seul mécanisme d'évaluation environnementale. Le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral ont convenu d'un seul bureau d'audiences publiques avec juridiction majoritairement provinciale, mais où on a ajouté des commissaires fédéraux de façon à ne pas obliger le promoteur à doubler tout son travail. Je pense qu'on assiste, dans ce cas-là, à un exemple de fédéralisme coopératif que même le député de Duplessis ne peut que louanger. (11 h 10)

En ce qui concerne la possibilité pour le gouvernement du Québec de rendre sa décision isolément, sur le plan théorique, elle existe. Mais le député de Duplessis a suffisamment d'expérience parlementaire, a suffisamment d'expérience de l'appareil politique comme tel pour savoir que, lorsque le fédéral se doit d'émettre des permis, ce serait totalement académique, ce serait briser un processus qui a fait preuve de beaucoup d'harmonie, ce serait

aventureux, ça pourrait compromettre le projet, et vous savez à quel point le ministre de l'Environnement ne veut compromettre aucun projet de développement économique et de développement durable au Québec.

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, c'est la fin de la période de questions.

Il n'y a pas de votes reportés.

Alors, maintenant, motions sans préavis. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Avant les motions sans préavis, et de façon à ce que les parlementaires puissent organiser leurs travaux, je demanderais le consentement du leader de l'Opposition officielle pour donner les travaux des commissions immédiatement, lui indiquant toutefois que dans ces avis, il n'y aurait aucune commission qui commencerait à siéger avant 15 heures aujourd'hui.

M. Chevrette: Avant 15 heures aujourd'hui?

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Avant 15 heures aujourd'hui. Ça va?

Le Président: S'il y a consentement, nous passons immédiatement aux avis touchant les travaux des commissions. Consentement. Vous pouvez procéder, M. le leader du gouvernement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. J'avise donc cette Assemblée, M. le Président, qu'aujourd'hui de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle du Conseil législatif, la commission de l'économie et du travail poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 142, Loi modifiant la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction et modifiant d'autres dispositions législatives.

De 15 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 132, Loi modifiant la loi constitutive de la Régie des alcools, des courses et des jeux, ainsi que diverses lois portant sur les activités surveillées par cette Régie.

De 15 heures à 18 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May, la commission de l'aménagement et des équipements poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 139, Loi modifiant la Loi sur les pesticides.

De 20 heures à minuit, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May, la commission de la culture poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 135, Loi sur le Conservatoire de musique et d'art dramatique du Québec.

Le Président: Très bien. Maintenant, s'il y avait consentement, je voudrais... À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, s'il y avait consentement, je voudrais donner un autre avis pour qu'une quatrième commission puisse siéger. Est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement. Alors, je vous avise qu'aujourd'hui, le jeudi 9 décembre 1993, la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation se réunira de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à 22 heures à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine. L'objet de cette séance est de procéder à l'examen des orientations, des activités et de la gestion de la Société québécoise d'initiatives agro-alimentaires. Ceci met donc fin aux avis touchant les travaux des commissions.

Motions sans préavis

Nous revenons maintenant aux motions sans préavis et, à ce moment-ci, je vais reconnaître M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Cannon: Oui, merci, M. le Président. M. le Président, en raison de l'urgence de...

Le Président: Une petite seconde, s'il vous plaît.

M. Chevrette: II y a peut-être...

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Je veux juste souligner que peut-être qu'il y a un malentendu, M. le Président. Nous avions convenu que c'était l'Année internationale des populations autochtones et qu'il y avait un intervenant de chaque côté. Avant de soulever la question ? que je connais d'avance mais que je n'ai pas le droit d'annoncer moi-même ? donc, est-ce que le leader du gouvernement accepterait qu'il y ait un intervenant de chaque côté, considérant que c'est la fin de l'année internationale des autochtones?

Le Président: Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, dans les circonstances, si on en fait un ordre de la Chambre, un intervenant de part et d'autre, on pourrait procéder immédiatement à la motion.

Le Président: Alors, je comprends donc qu'il y aurait une motion présentée par M. le ministre délégué aux Affaires autochtones et que, sur cette motion, il y aurait une intervention du ministre et une intervention d'un représentant de l'Opposition officielle. Est-ce qu'il y a accord à ce sujet-là? Il y a accord. C'est un ordre de l'Assemblée? C'est un ordre de l'Assemblée. Donc, aux motions sans préavis, je reconnais M. le ministre délégué aux Affaires autochtones.

Souligner la clôture de l'Année internationale des populations autochtones

M. Sûtos: Merci, M. le Président. Alors, je ferai motion, M. le Président, que l'Assemblée nationale souligne la clôture de l'Année internationale des populations autochtones et également le fait qu'on célèbre aujourd'hui le 30e anniversaire depuis l'implication du Québec en milieu nordique ainsi que le 15e anniversaire depuis la création de ce qui est aujourd'hui le Secrétariat aux Affaires autochtones, M. le Président.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement à la présentation de cette motion?

Une voix: Consentement.

Le Président: II y a consentement pour en débattre. Donc, consentement. Vous avez la parole, M. le ministre des Affaires autochtones.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Très brièvement, M. le Président. Il y a 30 ans, le Québec débutait ses contacts et son implication au niveau du milieu nordique, M. le Président. Et 30 ans, c'est une période très courte quand on pense à tous les siècles qui ont pu précéder d'abord la vie et l'existence des peuples sur ces territoires-là, mais également, au niveau de l'histoire comme telle, 30 ans, c'est très peu. Et pourtant, beaucoup a été fait, M. le Président, depuis ces 30 ans. Le fait que le Québec a commencé à prendre contact il y a 30 ans, avec les deux tiers de son territoire et les populations qui y habitent; le fait qu'on ait pu par la suite, 15 ans plus tard, négocier le premier traité moderne qui reste toujours le seul endroit au Canada où une province a pu conclure une entente avec des populations autochtones; marquer de façon nette, claire et précise la volonté du gouvernement et de la société québécoise, je dirais, de s'ouvrir et d'entrer en relations approfondies avec les premiers habitants de ce territoire dans l'ère moderne. Et si nous pouvons constater tout le progrès qui a été fait, il est évident qu'il y a beaucoup encore qui reste à faire, M. le Président.

J'aurai l'honneur et le plaisir de recevoir tantôt, au Parlementaire, les pionniers dans ce domaine, M. le Président, les gens qui, il y a 30 ans, ont été les premiers à aller travailler en milieu nordique, à ouvrir les contacts qu'on a approfondis depuis ce temps-là. J'aurai également le plaisir d'avoir avec moi le député de Duplessis, de l'Opposition officielle, ainsi que le grand chef des Cris, le représentant des Inuit et d'autres premières nations. J'espère que ça pourra souligner le départ d'une relation nouvelle, M. le Président, tel que je le souhaitais également devant la commission royale où on a fait une présentation, il y a quelques jours à peine. Souhaitons qu'ensemble on puisse prendre les mesures qu'il faut pour bien faire la part des choses entre les choses qui restent à faire, les choses qui restent à corriger et les choses qui restent à changer pour ne plus venir envenimer nos relations, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre, je vous inviterais, dans un premier temps, à déposer... M. le ministre. M. le ministre délégué aux Affaires autochtones, je vous demanderais de déposer votre motion, s'il vous plaît. Vous avez un texte?

M. Sirros: Oui, oui. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous avez un texte?

M. Sirros: Vous me donnez deux minutes? Je la dépose.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Duplessis, sur cette même motion, je vous cède la parole.

M. Denis Perron

M. Perron: Merci, M. le Président. C'est avec plaisir qu'au nom de l'Opposition officielle et du Parti québécois je souscris à la motion du ministre délégué aux Affaires autochtones à l'effet qu'en cette fin d'année 1993, l'Assemblée nationale du Québec souligne la clôture de l'Année internationale des populations autochtones, c'est-à-dire les 30 ans de présence du Québec en milieu nordique, de même que le quinzième anniversaire du Secrétariat aux affaires autochtones.

Permettez-moi de mentionner que l'année 1993, bien qu'au départ remplie de promesses et de réconciliations entre la nation autochtone et la nation non autochtone, s'est avérée, encore une fois, extrêmement pénible et frustrante pour tous ceux concernés. En effet, en 1993, il appert que la contrebande de cigarettes et d'alcool ainsi que l'application inégale des lois ont carrément remplacé les campagnes de dénigrement à l'échelle internationale de 1992 pour empêcher un rapprochement entre les peuples, qui est primordial si on ne veut pas se retrouver avec une rupture de confiance permanente entre les citoyens de toutes tendances et les institutions elles-mêmes. En ce sens, au Québec ? et c'est malheureux ? l'année internationale des peuples autochtones n'aura pas été un franc succès.

Sur le deuxième aspect de cette motion, il vaut la peine de souligner, effectivement, que la création, en 1963, de la direction générale marque le début des échanges entre le Québec et les autochtones, c'est-à-dire de vrais échanges. Cette étape est importante, parce que des services commencent alors à être offerts aux Inuit et aux Cris, dans le domaine de l'éducation, en particulier.

Troisièmement, on ne peut passer sous silence le rôle essentiel en matière de coordination des interventions gouvernementales sectorielles destinées aux

autochtones, joué depuis 1978 par le Secrétariat des activités gouvernementales en milieu amérindien et inuit, c'est-à-dire l'ancien SAGMAI, ainsi que par son successeur, l'actuel Secrétariat des affaires autochtones.

M. le Président, revenons au coeur du problème. Il semble évident que les Blancs et les autochtones ont de la misère à se comprendre. Ils parlent de la même chose, mais avec une optique si différente qu'il est rare qu'un point d'entente apparaisse à l'horizon. Or, il est urgent que des ponts soient construits avant que le tout ne tourne à la foire monumentale ou ne tombe carrément dans un chaos social qui risquerait de dégénérer vers l'anarchie totale. (11 h 20)

Qu'ont fait les autorités gouvernementales pour rapprocher les peuples fondateurs blancs et autochtones de ces pays que sont le Québec et le Canada? Hélas, bien peu, jusqu'à tout récemment. Le gouvernement fédéral se complaisait dans un immobilisme qui frisait l'indifférence. La mise de l'avant de la commission Erasmus-Dussault constitue, par ailleurs, un pas dans la bonne direction. Les informations ayant filtré jusqu'à maintenant semblent révéler des pistes de solution très intéressantes. Concrètement, cependant, il faudra attendre plus d'une année avant de voir un rapport final sur la table.

Au Québec, depuis la tournée du ministre délégué aux Affaires autochtones en 1991, les choses semblaient tourner au ralenti au sein du gouvernement libéral. En fait, il est plus que temps que le ministre dévoile publiquement sa fameuse politique en matière d'autonomie gouvernementale autochtone, qui devrait s'avérer, en quelque sorte, la concrétisation de la résolution adoptée par une Assemblée nationale en majorité péquiste le 20 mars 1985, et où, pour la première fois, on avait reconnu l'existence des nations autochtones du Québec. Nous attendons cette politique depuis des lunes. Rappelons que le ministre nous avait dit, lors de l'étude des crédits, au mois d'avril dernier, que celle-ci devait être rendue publique dans les semaines à venir. Aucune nouvelle depuis ce temps.

Heureusement, le récent passage du ministre à la commission royale d'enquête semble apporter une lueur d'espoir. Après avoir dénoncé à juste titre le climat d'hystérie régnant au Québec à l'égard des Amérindiens, il a suggéré aux autochtones de se soustraire à la tutelle de la Loi sur les Indiens, une loi fédérale. Ce dernier point va d'ailleurs carrément dans le sens de ce qu'il a déclaré publiquement récemment, à l'effet que la loi était raciste ou, du moins, qu'elle portait en elle des germes de racisme. Rien de plus vrai, M. le Président.

Lors de sa présentation, le ministre a aussi soulevé certaines avenues de solution intéressantes, dont la création d'un forum politique conjoint visant à définir les conditions d'exercice d'une éventuelle autonomie gouvernementale et la mise sur pied d'un mécanisme de résolution des conflits qui obligerait les parties à soumettre leurs litiges au jugement d'un tiers.

À court ou à moyen terme, le ministre a aussi invité les autochtones à amorcer des discussions dans les plus brefs délais sur des sujets affectant la qualité de vie dans les réserves, dont les problèmes sociaux et le sous-développement économique. Présentement, ce qu'il faut donc espérer, c'est que le ministre ne s'éternisera pas et rendra finalement publique, et ce, dès le début de 1994, une politique formelle lui servant de guide en la matière et que des négociations s'ensuivent très rapidement.

Par ailleurs, de nombreux observateurs présents auraient souligné que la démarche du ministre, ressemblant à s'y méprendre à celle proposée auparavant par le Forum paritaire québécois-autochtone, laissera peu de prise à des critiques fondées sur la reconnaissance du droit inhérent des autochtones à l'autodétermination. Dans la même veine, le vice-chef de l'Assemblée des premières nations pour le Québec et le Labrador, M. Ghislain Picard, aurait indiqué qu'il ne saurait être question pour les autochtones de renoncer au concept de droit inhérent à l'autodétermination. Mentionnons que, dans la seule négociation globale actuellement en cours, soit celle avec le Conseil des Atikamekw et des Monta-gnais, un point d'achoppement majeur entre les participants risque très précisément de toucher ce dernier aspect.

Que faut-il faire pour améliorer substantiellement la situation actuelle? Il faudra d'abord et avant tout effectuer un virage qui ira bien au-delà des mots et des cataplasmes monétaires ou encore matériels. C'est bel et bien une attitude qu'il faut transformer, la nôtre. Nos tendances paternalistes doivent être transformées dans l'acceptation et le respect de la différence autochtone. De fait, il faut en arriver à un nouveau contrat social avec les premières nations où nous les acceptons comme partenaires au développement du Québec et où elles donnent leur accord pour bâtir avec nous un Québec qui, selon moi, ne pourra être que souverain. Il faudrait avoir le courage et l'ingéniosité de créer des ententes évolutives, conclues sans extinction des droits autochtones et où seront définies les modalités de notre collaboration et du partage de nos ressources. Seulement à la suite de la constitution de ce nouveau contrat social pourrons-nous résolument nous tourner vers l'avenir avec optimisme au lieu d'avec appréhension.

En guise de conclusion, M. le Président, je tiens de nouveau à souligner, en cette fin d'année internationale de 1993 des peuples autochtones, qu'il me fait honneur personnellement, et ce, au nom de l'Opposition officielle, d'endosser la présente motion présentée par le ministre délégué aux Affaires autochtones. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Duplessis.

Mise aux voix

Est-ce que la motion de M. le ministre délégué aux Affaires autochtones, qui se lit comme suit: «Que cette Assemblée souligne la clôture de

l'Année internationale des populations autochtones», est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis?

M. Cannon: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader adjoint du gouvernement.

Motion d'urgence proposant la suspension

de certaines règles de l'Assemblée afin de permettre l'adoption du projet de loi 130

M. Lawrence Cannon

M. Cannon: Oui, M. le Président. «Que, en raison de l'urgence de la situation et en vue de permettre l'adoption du projet de loi 130, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile et d'autres dispositions législatives: «Les premier et deuxième paragraphes de l'article 19, les articles 20 et 21, les mots "ou sur un fait personnel" au quatrième paragraphe de l'article 53 et le septième paragraphe du même article, l'article 54, les articles 71 à 73, les deuxième et troisième alinéas de l'article 84, les mots "ou à la demande d'un député" au premier alinéa de l'article 86 ainsi que le deuxième alinéa du même article, les deuxième, troisième et huitième paragraphes de l'article 87, les articles 88 à 93, 100 et 101, 105 à 108, 111 à 114, 164 et 165, 175 et 176, les mots "et, le cas échéant, de ses observations, conclusions et recommandations" à l'article 177, les articles 194 et 195, 205 à 209, 212 et 213, 215 et 216, 230, le deuxième alinéa de l'article 244, les mots "et l'adoption du projet de loi est fixée à une séance subséquente" au deuxième alinéa de l'article 248, les articles 249 à 251, le premier alinéa de l'article 252, les premier et troisième alinéas de l'article 253, l'article 254, les deuxième et troisième alinéas de l'article 256, l'article 257 et les articles 304 à 307 soient suspendus jusqu'à l'adoption dudit projet de loi; «II soit permis, dès l'adoption de la présente motion, à un ministre ou à un leader adjoint du gouvernement de procéder à l'étape des avis touchant les travaux des commissions malgré les dispositions de l'article 53; «Dès l'adoption de la présente motion, malgré l'article 53, la commission permanente de l'aménagement et des équipements mette fin à ses travaux quant à l'étude détaillée du projet de loi 130, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile et d'autres dispositions législatives et dépose son rapport à l'Assemblée; «Tout député puisse, au plus tard une heure après le dépôt dudit rapport, transmettre au bureau du secrétaire général copie des amendements qu'il entend y proposer; les travaux de l'Assemblée soient alors suspendus jusqu'à l'expiration de ce délai; «La durée du débat sur la prise en considération du rapport de la commission soit fixée à un maximum de 60 minutes, dont 25 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 25 minutes au groupe parlementaire formant l'Opposition officielle et cinq minutes au groupe des députés indépendants; le ministre qui présente le projet de loi puisse exercer un droit de réplique d'une durée maximale de cinq minutes; «Une fois terminé le débat sur la prise en considération du rapport de la commission permanente, les amendements soient mis aux voix successivement sans appel nominal, de la manière indiquée par le Président, et les amendements adoptés soient intégrés au rapport qui est ensuite mis aux voix sans débat et sans appel nominal; «La durée du débat sur l'adoption du projet de loi 130, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile et d'autres dispositions législatives, soit fixée à un maximum de 30 minutes, dont 10 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes au groupe parlementaire formant l'Opposition officielle, cinq minutes au groupe des députés indépendants et une réplique d'une durée maximale de cinq minutes au ministre qui présente le projet de loi; (11 h 30) «Au cours du débat sur l'adoption dudit projet de loi, un ministre ou un leader adjoint du gouvernement puisse faire motion pour qu'il soit envoyé en commission plénière en vue de l'étude des amendements qu'il indique; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal; en commission plénière, l'étude soit limitée à l'amendement proposé; la durée du débat en commission plénière soit fixée à un maximum de 15 minutes, dont cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'Opposition officielle, trois minutes au groupe des députés indépendants et deux minutes de réplique au ministre qui présente le projet de loi, au terme de laquelle les amendements seraient mis aux voix immédiatement, sans débat et sans appel nominal, de même que les amendements dont la commission n'aurait pas disposé, y compris les amendements que le ministre qui présente le projet de loi n'aurait pas pu proposer en cours d'étude; «À l'expiration du délai de 15 minutes, le Président de la commission plénière fasse rapport à l'Assemblée; ce rapport soit mis aux voix immédiatement, sans débat et sans appel nominal; «Une motion de suspension de la séance puisse être proposée à tout moment par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«L'ajournement du débat, l'ajournement de l'Assemblée ou le retrait d'une motion puissent être proposés à tout moment de la séance par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal; «L'Assemblée puisse siéger tous les jours...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant! Un instant, M. le leader adjoint. Oui, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, il n'y a pas de commission qui siège ce matin, si j'ai bien entendu les avis. C'est une motion quand même très importante, c'est une motion de bâillon qui est en train de se faire à toutes fins pratiques. J'apprécierais qu'on ait le quorum pour écouter le ministre.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle les députés! (11 h 31 ? 11 h 39)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Nous reprenons les travaux de l'Assemblée nationale. M. le ministre des Communications et leader adjoint du gouvernement, je vous invite à continuer la lecture de votre motion, s'il vous plaît.

M. Cannon: Merci, M. le Président. «L'Assemblée puisse siéger tous les jours, à compter de 10 heures, jusqu'à ce qu'elle décide d'ajourner ses travaux; «Sous réserve de ce qui précède, les dispositions du règlement particulières aux mois de juin et décembre soient appliquées; et les règles ci-haut mentionnées puissent s'appliquer jusqu'à l'adoption du projet de loi 130, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile et d'autres dispositions législatives.»

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, votre motion est déposée, M. le leader adjoint du gouvernement. M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais demander une suspension de quelques minutes. Vous comprendrez que c'est une motion de cinq pages. J'aurai peut-être une suggestion, au retour, au leader adjoint du gouvernement. Ce serait peut-être plus simple d'écrire ce qu'il nous reste comme droits plutôt que d'enlever ceux-là. Donc, je demanderais quelques minutes pour au moins...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, il y a effectivement une coutume qui veut qu'on vous permette de prendre connaissance de la motion. Je suspends donc les travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 11 h 41)

(Reprise à 11 h 46)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Nous reprenons les travaux de l'Assemblée. M. le leader de l'Opposition officielle, vous avez pris connaissance de la motion du leader adjoint du gouvernement?

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je serais tenté de parler de la recevabilité, mais je vais m'en abstenir, pour la raison que tout simplement les points techniques ne seraient pas... Ça demanderait des délibérés trop long dans les circonstances, et je pense que l'idéal c'est d'aller sur le fond.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, je déclare la motion recevable. Règle générale, sur les motions de suspension des règles, vous savez tous les deux qu'on discute de cette motion à l'intérieur d'un débat restreint, c'est-à-dire un débat d'une durée maximale de deux heures. Le partage du temps, habituellement... a été établi de la façon suivante pour ce débat restreint: 10 minutes sont allouées à l'ensemble des députés indépendants, les deux groupes parlementaires se partageront également le reste de la période des deux heures consacrées au débat.

Débat sur la motion

Alors, M. le leader adjoint du gouvernement, je suis prêt à vous entendre, ou quelqu'un d'autre de votre formation, sur la motion comme telle. Allez-y.

M. Cannon: M. le Président, je vous invite à demander à mon collègue, le ministre des Transports...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre des Transports...

M. Cannon: ...d'intervenir.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, M. le ministre des Transports, sur la motion de suspension des règles déposée par votre collègue.

M. Chevrette: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le leader.

M. Chevrette: Je considère que le ministre fera peut-être le discours de sa carrière et je voudrais qu'on ait quorum.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant. Un instant, je vais vérifier. Qu'on appelle les députés! (11 h 47- 11 h 49)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, j'invite les députés qui sont à l'intérieur de l'Assemblée de bien vouloir prendre place à leur banquette, s'il vous plaît.

M. le ministre des Transports, je vous invite à intervenir et je vous indique que vous intervenez sur la motion de suspension des règles. Allez-y.

M. Sam L. Elkas

M. Elkas: Merci, M. le Président. Nous utilisons aujourd'hui une procédure vraiment particulière afin d'étudier la loi 130 dans son ensemble, et, j'espère, avec sérénité.

Après l'étude du principe que nous avons faite la semaine dernière, en quelques heures, en parlant normalement, comme on l'a fait dans les années passées, ça s'est fait pour une longue période de temps, mais, ça a pris quelques heures, nous avons procédé à l'étude article par article en commission pour étudier ce projet de loi.

En commission, M. le Président, nous avons investi 14 heures ? je répète, 14 heures ? et tout ce temps pour étudier à peine le premier article. Dans le premier article, on retrouve trois paragraphes. On s'est rendus au deuxième paragraphe. Le premier article, on l'a passé, sur division. Deuxième article, c'est là qu'il y a eu une impasse. Et je dois déposer, M. le Président, des motions. Y en a-t-il eu, des motions du député de Lévis! Une, deux, trois, quatre, cinq, six, sept amendements, M. le Président, qui ne touchaient même pas le fond du projet de loi.

De plus, M. le Président, le député de Lévis a été bien clair la semaine passée, mardi dernier en fin de soirée. Il a dit qu'il ne donnerait jamais son consentement pour qu'on puisse se rendre à l'adoption de ce projet de loi. Il était vraiment clair, M. le Président, que le député de Lévis ne voulait rien savoir de ce projet de loi. Et pour nous, M. le Président, qu'est-ce qui est important? C'est que ce projet de loi découle du dernier discours du budget. C'est important qu'on le passe pour la simple raison que ces montants d'argent sont déjà engagés. On n'a jamais voulu se rendre au deuxième article. En plus de ça, M. le Président, on nous a recommandé, avec un amendement, qu'on se rende au dixième article. Débuter par le dixième article, au lieu de débuter par le premier article. Et, ça, ça n'a pas passé. On a décidé d'aller au quatrième article et débuter là. À savoir si c'est une façon de faire les choses. On nous a niaises pendant 14 heures; des choses qu'on aurait pu faire... Passer ce projet de loi, le passer même si vous étiez contre. Déposer vos arguments contre, mais qu'on aille sur un autre projet. Il y a d'autres choses à faire dans cette Chambre. Moi-même, j'ai deux autres projets de loi, M. le Président: le projet de loi sur le chemin de fer, le projet de loi sur le Code de la sécurité routière, qui est important pour la société. Les gens se demandent: Est-ce que c'est ça, la contribution des élus? C'est bien beau de dire qu'on est contre, mais apportez-nous les arguments. Mais, nous faire niaiser pendant 14 heures, c'est totalement inacceptable.

M. le Président, savoir que le gouvernement s'est servi de ce projet de loi pour, comme j'ai mention- né, abolir des excédents aux distributeurs assurés, ça a été discuté pleinement dans le discours du budget. Ça a été discuté, et les ouvertures sur cette question ont été faites après le budget. Dieu sait que le député de Lévis s'est souvent levé pour dire que c'était du siphonnage. C'est un fait accompli. Le but de ce projet de loi, ce n'est pas seulement de s'approprier un montant d'argent, mais de s'assurer que la Société de l'assurance automobile du Québec soit autonome et que les montants d'argent qu'on s'approprie sur une période de 10 ans soient remplacés: 120 000 000 $ par année, M. le Président, dans la loi, pour une période de 10 ans qui nous amène à l'an 2003.

M. le Président, j'ai vraiment de la difficulté à croire qu'on puisse essayer d'induire les gens en erreur en disant qu'on vide la caisse. Il n'a jamais été question de vider la caisse, parce que, si on étudie la loi et on prend le temps de la regarder, on remarque qu'il y a 300 000 000 $ qui sont maintenus dans la caisse et qu'on remplace le montant approprié de 1 000 000 000 $ à 120 000 000 $ par année sur une période de 10 ans. Et je le répète parce que, trop souvent, on a dit le contraire. Que ce soit lui ou le député d'Arthabaska, ou le député de Dubuc, toujours le même argument, ils reviennent toujours sur ça: qu'on est en train de voler et que le résultat va être qu'il va y avoir une augmentation des immatriculations ainsi que des permis de conduire.

En effet, M. le Président, il y a eu une baisse des permis de conduire, de 26 $ à 20 $. Il y a eu une baisse dans son ensemble, si on compare les deux, dans les dernières années. Chose qu'on a pu faire parce que, évidemment, on a réduit le nombre d'accidents, on a augmenté les indemnités. On vient juste de les augmenter de 10 000 000 $ avec la loi 113. Il me semble que c'est des gestes qui démontrent la saine gestion de la Société. Puis on n'est pas prêts à fermer la porte sur notre Société, M. le Président. Dans cette loi, on garantit, comme je l'ai mentionné, l'autonomie.

Puis je regrette qu'on en vienne à ce point-là parce que, toutes les fois qu'on s'est approprié... Puis ça fait quatre fois, oui, on va le dire, puis j'ai été le gars qui a dû livrer le projet de loi. Puis ça me blesse de penser que, quand on me demande de le faire, le député de Lévis, au début, est bien clair dans son message: Ça ne passera jamais. Mais je sais que je vais être pris à attendre pendant 14, 15... jusqu'à 20 heures avant qu'on n'arrive à cette étape où, soit qu'on passe le bâillon ou qu'on suspende les règles pour, en effet, passer ce projet de loi.

Alors, ce sont les raisons, M. le Président, pour lesquelles on en est venu à ce point et pour débattre en effet ce projet. Et j'espère que l'Opposition va comprendre qu'on a toujours démontré un peu de sérieux de ce côté-ci. Je demanderais qu'eux en fassent autant. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Alors, sur cette même motion de suspension

des règles, je cède la parole à M. le député de Joliette, leader de l'Opposition officielle.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. M. le Président, ce n'est pas la première fois qu'on a une motion de suspension des règles. Je pourrais, M. le Président, en relever: depuis 1989, il y a eu neuf suspensions des règles, il y a eu 10 motions de clôture. Aujourd'hui, le ministre dit 14 heures, alors qu'on a fait faire le relevé officiel; en ce qui nous concerne, le relevé officiel donne 9 h 49 min d'étude. Notre porte-parole précisera davantage le temps que la partie ministérielle a pris par rapport à la partie de l'Opposition.

M. le Président, ce que je voudrais faire noter à ce stade-ci, dans cette motion longue de cinq pages... Je faisais peut-être une boutade au début, quand le leader adjoint du gouvernement a présenté cette motion, mais je vous ferai remarquer, M. le Président, que ça aurait été effectivement plus simple de dire ce qui nous était permis que ce qui nous était enlevé. C'est rendu que des motions suspendent à peu près tous les droits et privilèges de cette Chambre. Et en particulier, ce qui est réintroduit aujourd'hui, je crois que c'est la deuxième fois. La première fois, je n'en ai presque pas parlé, mais j'étais intervenu sur un autre point. Mais, là, ce qui commence à me fatiguer, c'est qu'on coupe même la plénière pour l'étude du rapport. Et ça, à mon point de vue, M. le Président, c'est contraire aux notions ou aux façons de légiférer. On coupe même la plénière. On laisse une heure à des députés pour aller porter des amendements qu'on va voter sans étude. Ça, ça m'appa-raît extrêmement contentieux, M. le Président. Je comprends que, quand bien même je me lèverais pour dire: C'est inadmissible, même si c'est inadmissible, je suis obligé de me rendre compte que c'est légal. C'est légal de bâillonner au point qu'on n'est soi-même plus capable de s'asseoir en commission plénière pendant une heure ou deux pour étudier au moins les amendements, M. le Président. Je dois vous dire que, cette partie-là, je la trouve extrêmement déplorable de la part du gouvernement. (12 heures)

On a eu des lois d'exception en cette Chambre. On en a eu, des motions de clôture et des motions de bâillon, des motions de suspension de règles, mais il a été très, très rare dans le passé qu'on suspende la plénière pour l'étude des amendements. On laisse les groupes politiques présenter des amendements, on leur laisse le droit d'en présenter, mais ce ne sera même pas étudié, parce qu'on a coupé l'article...

Des voix: ...

M. Chevrette: M. le Président, j'aimerais qu'on me permette de faire mon exposé.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): MM. les députés, les députés de ma gauche et les députés de ma droite.

Une voix: À gauche, il n'y a personne.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Bien, il y a un député de la gauche qui est rendu à droite. Je ne suis pas obligé de le nommer, là. Continuez, M. le député de Joliette.

M. Chevrette: Donc, M. le Président, je disais que la nouveauté aujourd'hui, c'est la suspension de la plénière permettant l'étude article par article. Je me souviens qu'on est allés dans des projets de loi extrêmement importants dans le passé, mais pas plus importants et pas moins importants que celui d'aujourd'hui, où on fait une ponction de 1 000 000 000 $ dans la caisse des assurés à la Société de l'assurance automobile du Québec, une ponction de 1 000 000 000 $! Ça doit être tout aussi important, M. le Président, que la motion, par exemple, concernant le parc industriel Deschambault-Portneuf; on avait pris au moins une heure, si ma mémoire est fidèle, le 18 avril 1991, pour étudier les amendements déposés. On a eu une motion de clôture sur la Charte de la langue française, c'était très important, et on a eu la chance de l'étudier en plénière. On a eu l'institut Armand-Frappier, le 7 décembre 1989; on avait eu du temps en plénière pour étudier les articles et les amendements.

Sur les services Hydro-Québec en 1990; le décret de la construction, le 17 mai 1990; le parc industriel de Deschambault, le 18 avril 1991; l'adoption des crédits, le 25 mars 1992; une motion omnibus pour faire adopter 28 projets de loi, rappelez-vous, 28 projets de loi en cette Chambre, M. le Président, le projet de loi 408 de la main-d'oeuvre, entre autres, en juin 1992. On a eu une motion omnibus pour faire adopter quatre projets de loi, incluant trois clôtures, le 17 décembre 1992. On a eu également le projet de loi 61 sur l'environnement; les heures d'affaires; la voirie; la fiscalité municipale. Tous par des motions de clôture, on a toujours eu du temps en commission plénière pour étudier au moins les amendements. Le projet de loi 86 sur la langue française en juin 1993, le 17, et les négociations du secteur public, le 16 juin 1993 également.

Quant aux motions de clôture, M. le Président, on a eu l'instruction publique, le 13 juin 1990; les heures d'affaires, le 14 juin 1990; l'assurance automobile, pour une deuxième fois, le 15 juin 1990; la taxe de vente, le 10 décembre 1990; la Caisse de dépôt, le 12 décembre 1990; la fiscalité municipale, le 13 juin 1991; la TVQ, le 12 décembre 1991; la CSST, le 5 juin 1992; la fête du Canada, le 12 juin 1992; la désassuran-ce, le 15 juin 1992. Alouette, M. le Président!

On légifère par bâillon, sous prétexte que c'est dur. Le ministre est fatigué après huit, neuf heures. Il est fatigué. Ça lui prend son projet de loi. Il y a des citoyens qui fatiguent en mosus aussi de le voir prendre une ponction de 1 000 000 000 $. Les citoyens, ils sont

des millions, là, à dire: Avez-vous fini de gruger dans la caisse de la Société de l'assurance automobile du Québec? C'est de l'argent qui appartient à ceux qui paient leur permis et leurs plaques d'immatriculation. Pourquoi vous vous en servez pour le fonds consolidé? C'est ça, la question de fond dans ce dossier, M. le Président.

On suspendait nos règles, nos droits, mais, cette fois-ci, on y va un peu plus fort, ils enlèvent la plénière. Je ne serais même pas surpris, M. le Président, qu'on nous arrive avec un autre bâillon qui va nous enlever même le droit de répliquer en troisième lecture. Ce n'est pas là une façon bien, bien démocratique de gouverner. C'est contraire à nos règles du Parlement. Une motion de bâillon, M. le Président, ça doit être utilisé dans une extrême limite. On est aujourd'hui le 8 ou le 9 décembre...

Une voix: Le 9.

M. Chevrette: Le 9 décembre. On siège jusqu'au 21 décembre, et on met un bâillon, on met une clôture après neuf heures de débat en commission parlementaire. Franchement, M. le Président, je vais laisser mon collègue argumenter sur les prétentions du ministre lui-même, que le ministre a soulignées. Je suis convaincu que mon collègue de Lévis saura rétablir les faits tels qu'ils sont, tels qu'ils se sont passés en commission. Donc, M. le Président, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je suis prêt à entendre le prochain intervenant sur cette motion de suspension des règles. M. le leader adjoint du gouvernement et ministre des Communications.

M. Lawrence Cannon

M. Cannon: Merci, M. le Président. Vous savez, M. le Président, j'ai, comme vous actuellement, occupé cette fonction de la vice-présidence ici et, vous comme moi, avez occupé la fonction de leader du gouvernement, leader adjoint du gouvernement.

Il est clair... Le leader de l'Opposition a absolument raison lorsqu'il dit que c'est uniquement dans des cas exceptionnels que nous devons suspendre les règles de l'Assemblée. Je ne mets pas, mais d'aucune façon, en doute ses propos. Il a absolument raison quand il dit que c'est une chose très importante.

Et, si, M. le Président, le gouvernement est obligé d'intervenir de cette façon exceptionnelle, nous en convenons tous, c'est qu'il n'a pas vu une lueur d'espoir de collaboration, le début d'une forme quelconque d'intérêt pour faire avancer le projet de loi dans les étapes nécessaires à son adoption.

Oui, M. le Président, nous sommes très respectueux de l'institution, et ce n'est pas ce qui est en cause. Dieu sait, depuis quelques jours maintenant, s'il y a une formation politique qui a été respectueuse de cette institution, c'est le côté ministériel. Ça, ce n'est pas en cause.

Lorsque mon collègue, le ministre des Transports, indique que, en commission parlementaire, après 14 heures de discussions... C'est clair qu'on dira peut-être... J'entends le député de Lévis dire: Ce n'est pas vrai. Mais c'est clair qu'on dira: C'est peut-être neuf heures. Mais tous ici savent et connaissent très bien la ponctualité de notre collègue. Et, si, effectivement. ..

M. Garon: Question de règlement. Il y a un minimum de vérité dans cette Chambre.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Non, non, non. Un instant, s'il vous plaît! Non, non. S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît, M. le député de Lévis! Vous avez droit à la vérité, mais l'Assemblée... S'il vous plaît! Vous aurez tout à l'heure l'opportunité d'intervenir, et si vous êtes en désaccord avec les propos tenus par le... Vous aurez tout à l'heure l'opportunité d'intervenir et de contredire... S'il vous plaît, M. le député de Lévis! Vous me laissez rendre ma décision. Laissez-moi terminer. C'est vous qui plaidez ou c'est M. le leader? Un ou l'autre, là. Allez-y, M. le député de Lévis.

M. Garon: J'aimerais que vous fassiez relever les galées pour qu'on nous dise le temps qu'il y a eu de commission à date. Ce n'est pas vrai qu'il y a eu 14 heures. Il y a eu à peine neuf heures, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Lévis, vous savez très bien qu'il n'appartient pas à la présidence d'aller vérifier elle-même si c'est 14, huit ou 12 ou 24 heures. L'opinion du leader adjoint du gouvernement quant à la durée des travaux de la commission pourra, si vous désirez le faire, être contredite par vous ou un autre parlementaire. Vous pourrez même, à ce moment-là, tenter d'en faire la preuve de la façon que vous jugerez la plus opportune, mais il n'appartient pas à la présidence, pour le moment, d'aller plus loin, sinon de permettre au leader adjoint de s'exprimer, puis vous pourrez le contredire si vous souhaitez le faire.

M. Chevrette: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: Moi, je fais une question de règlement, M. le Président, sur les propos du ministre, qui s'attaque à la question des présences, à l'assiduité, à la ponctualité. Je crois que c'est tout à fait pas de mise et je demanderais, M. le Président, que vous rétablissiez les faits.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Là-dessus, j'invite le leader adjoint du gouvernement à être prudent...

M. Cannon: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui.

M. Cannon: M. le Président, sur la même question de règlement, je pense qu'il est tout à fait normal de pouvoir invoquer ici en cette Chambre... Et je n'ai pas dit que le député en question ne vaquait pas à ses occupations; d'aucune façon j'ai indiqué que le député avait contrevenu aux dispositions de notre article. J'ai simplement dit... S'il me reprend sur une insinuation, c'est à lui de faire la démonstration. J'ai simplement indiqué ici à cette Chambre, M. le Président, et à nos collègues qu'il arrive parfois que les commissions soient convoquées à 8 heures et qu'on débute les commissions à 8 h 30. C'est ça que j'ai dit, M. le Président. (12 h 10)

M. Chevrette: M. le Président, je m'excuse. Sur la question de règlement, je reviens.

M. le Président, si on commence ça, je pourrais vous donner un exemple d'hier où on a commencé les commissions à 16 heures alors qu'on était convoqués à 15 heures. Il est de coutume dans ce Parlement, M. le Président... Si on commence ça, on va dire: Telle journée, c'est le ministre qui est arrivé en retard, l'autre journée, c'est un député. Ça ne se fait pas, ça.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je suis prêt à rendre ma décision. En vertu de l'article 35:« Le député qui a la parole ne peut attaquer la conduite d'un député, si ce n'est par une motion mettant sa conduite en question.» Et c'est en vertu de cet article-là qu'on ne peut pas souligner l'absence d'un député à l'Assemblée nationale ou dans une commission parlementaire.

Je considère que le commentaire du leader adjoint du gouvernement est tout juste à la limite et je vous inviterais à continuer sur le fond de la motion comme tel, M. leader adjoint du gouvernement.

M. Chevrette: M. le Président, avec votre permission et avec le consentement du leader adjoint du gouvernement, je voudrais déposer les statistiques de...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a un consentement pour le dépôt de ce document-là?

Document déposé

Alors, déposez le document. M. Chevrette: Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Cannon: M. le Président, on vient d'assister, évidemment, à un échange quand même intéressant. On se justifie mathématiquement en disant: Non, ce n'est pas exact. Telle chose s'est produite. Puis, non, ça s'est déroulé par... J'ai fait de l'obstruction systématique pendant neuf heures et quart. Non, on en a fait pendant quatre heures, 14 heures.

Ce n'est pas ça, la question, M. le Président. Ce n'est pas ça du tout, la question, M. le Président. La question, c'est: est-ce qu'il y avait une forme de collaboration? Est-ce qu'il y avait une possibilité de faire avancer, à travers toutes les étapes nécessaires à sa sanction, le projet de loi? Et la réponse est claire, M. le Président, c'est non. C'est non. Alors, c'est la raison pour laquelle nous sommes intervenus.

M. Garon: M. le Président...

M. Cannon: Mon collègue, le ministre...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Un instant! M. le député de Lévis.

M. Garon: En vertu de notre règlement...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, quelle est votre question de règlement?

M. Garon: Le ministre n'a pas le droit d'imputer des motifs à l'Opposition et de dire qu'elle est de mauvaise foi. Il n'a pas le droit d'imputer de motifs. Et l'Opposition a le droit de faire valoir ses arguments, et il n'a pas le droit d'imputer de motifs, M. le Président.

M. Cannon: M. le Président, sur la même question de règlement!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Écoutez, là, soyons calmes. Soyons calmes.

M. Cannon: Sur la question de règlement, s'il vous plaît, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur la question de règlement.

M. Cannon: M. le Président, votre prédécesseur vient d'expliquer clairement que celui qui a la parole peut terminer. Il a effectivement le droit de parler. J'ai effectivement le droit de faire mes interventions. Si mon collègue, le député de l'Opposition officielle, n'est pas en accord avec mes propos, il pourra les rectifier à la suite de mon intervention.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez poursuivre, M. le député, je vous écoute attentivement.

M. Cannon: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, j'étais à indiquer aux collègues de cette Chambre qu'effectivement nous n'avions pas de collaboration,

nous n'avons pas senti de collaboration. Et c'était dans ce sens-là que nous étions obligés aujourd'hui d'intervenir en proposant à cette Chambre une motion de suspension des règles.

On a, et mon collègue, le ministre des Transports, Ta indiqué il y a quelques instants, l'intention... non pas l'intention mais, très fermement... Les propos qui ont été tenus en commission parlementaire, à la commission de l'aménagement et des équipements, faisaient en sorte que le député de Lévis avait clairement indiqué ? c'est inscrit, M. le Président, aux galées ? il avait clairement indiqué qu'il n'était pas du tout de son intention que ce projet de loi passe. Ce n'est pas une attitude et une position qui doit être prise par...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Lévis.

M. Cannon: Non, ça va, M. le Président!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non, non, un instant! Un instant! M. le député de Lévis, quand vous voulez parler, il faut que vous ayez la parole. Or, vous ne l'avez pas actuellement.

M. Garon: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui?

M. Garon: Comme le ministre réfère aux galées, est-ce qu'il peut déposer les galées qui soutiennent les propos qu'il avance?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, vous vous lèverez, à ce moment-là, M. le député de Lévis, pour me faire une question de règlement, une question de directive.

Alors, si vous voulez poursuivre, M. le ministre. Est-ce que vous avez cité des galées? Je ne vous ai pas entendu, à ce moment-là.

M. Cannon: Je n'ai pas cité des galées, M. le Président, mais ça va me faire plaisir de lui déposer une copie ici, oui.

Document déposé

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le député va... Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt des documents? Consentement.

M. le ministre, si vous voulez poursuivre.

M. Cannon: Oui, M. le Président, alors, on verra bien que, dans ce document-là, il est clairement indiqué de la part du critique de l'Opposition en matière de transport qu'il n'avait nullement l'intention de collaborer à l'adoption de ce projet de loi. Il a même indiqué très clairement que ce projet de loi ne devait pas passer. Et, M. le Président, vous conviendrez avec moi qu'une telle attitude, une telle position ne peut être acceptable en cette Chambre. Et c'est aussi, bien sûr... M. le Président, est-ce que vous pourriez demander au député de Lévis d'écouter mes propos?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député! M. le ministre, si vous voulez poursuivre votre intervention.

M. Cannon: Alors, M. le Président, j'écoutais mon collègue le député de Joliette et le leader dire: Écoutez, pensez-vous que c'est important aujourd'hui, on est le 9 décembre, 12 h 15, le gouvernement avait amplement le temps ? puisque, légalement, nous pouvons siéger jusqu'au 21 décembre ? le gouvernement avait amplement le temps de faire adopter ce projet de loi. Techniquement, il a raison; il a raison, mais, encore une fois, faut-il au moins avoir, comme il le dit si bien, un tantinet, un tantinet, une lueur d'espoir qu'il y aura une collaboration. Mais, il n'y a pas de collaboration. On a débuté la commission parlementaire, M. le Président, en disant ceci après les remarques préliminaires, avec un amendement, un amendement qui visait l'étude de l'article 10 du projet de loi. C'est-à-dire plutôt que de commencer par le numéro 1, ce qui est toujours la façon dont nous procédons, on a fait, du côté de l'Opposition, le député de Lévis, une proposition pour discuter de l'article 10. C'est clair, on en a discuté et on en a discuté. Évidemment, l'amendement a été rejeté. On est revenu après avec un autre amendement, cette fois-ci pour discuter de l'article 4 prioritairement, et ainsi de suite.

Mon collègue a montré il y a quelques instants, lorsqu'il avait la parole, les nombreux amendements qui ont été présentés. J'en suis, M. le Président. C'est notre devoir comme parlementaires, c'est notre devoir comme parlementaires de disposer de ces choses-là, mais il faut aussi, à travers toutes ces discussions-là, voir si, véritablement, il y a un sérieux derrière ces propos-là, voir si, effectivement, on veut faire avancer le projet de loi. Et le gouvernement, M. le Président, ne peut pas pas tolérer qu'il soit lui-même bâillonné, et c'est la raison pour laquelle, M. le Président, nous avons décidé d'aller de l'avant avec le projet de loi.

Dernier commentaire, M. le Président, très rapidement, avec, quand même, preuve à l'appui. On disait tantôt... Et ça fait maintenant plusieurs mois que j'entends les gens de l'Opposition dire: Ça n'a pas de bon sens, le précédent qui est^créé par le gouvernement! Ils sont en train de siphonner... M. le Président, vous étiez, je crois, député à ce moment-là, mais, si on revient à 1984, j'ai devant moi ici un article d'un journaliste très bien connu, M. Normand Girard, qui indique: Trois nouveaux percepteurs d'impôt qui rapporteront des millions au fisc. Ce n'est pas nous qui sommes au pouvoir, là, c'est le gouvernement du Parti québécois dont le député de Lévis était un membre. Et je vous lis quelques passages pour que nous puissions très bien situer le précédent qui a été créé. Il est inscrit ici: Le gouvernement Lévesque aura transformé au cours de l'année trois organismes d'État en autant de nouveaux percepteurs

d'impôt pour ses propres fins. La Régie de l'assurance automobile est venue s'ajouter la semaine dernière à la Régie de l'assurance-maladie et à Hydro-Québec. Cela porte de deux à cinq le nombre d'organismes gouvernementaux qui auront dorénavant le mandat de faire indirectement ce que les gouvernements n'auront pas le courage de faire directement, c'est-à-dire d'augmenter les charges fiscales des citoyens.

Ce n'est pas le gouvernement libéral qui a fait ça. Le précédent, il est créé, là. Il était là. Et le député, effectivement, le député qui, aujourd'hui, est le critique et qui critique abondamment notre collègue, il était dans le cabinet, il était ministre, il était même parmi ceux qui ont cautionné directement cette décision-là. Et j'invite les gens, j'invite les recherchistes de l'Opposition à relever les crédits supplémentaires de l'année 1984 ou 1985 pour s'apercevoir que l'ancien ministre des Transports, Michel Clair, avait effectivement déposé des crédits supplémentaires de 40 000 000 $. (12 h 20)

Alors, M. le Président, vous savez, on est prêts à accepter bien des choses et on accepte que, pour le bon fonctionnement non seulement du gouvernement mais pour cette institution, il était nécessaire, voire notre devoir d'aller de l'avant et de mettre fin à cette obstruction systématique qui nous a été lancée à maintes reprises pour une période supérieure, me dit-on, à neuf heures, pour mettre fin à cette espèce de forme de harcèlement, pour que nous puissions procéder avec une motion, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous en sommes sur la motion de suspension des règles. Je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant.

Une voix: Combien de minutes?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): II reste à l'Opposition officielle 48 minutes. Je m'excuse, dans le partage du temps, est-ce qu'il y a un maximum de... Je n'étais pas ici lorsqu'il y a eu le partage du temps.

Une voix: C'est 55, 55.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est 55, 55. Est-ce qu'il y a une limite de temps dans les...

M. Cannon: Non, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, il n'y a pas de limite. Il reste 48 minutes à l'Opposition officielle. Alors, M. le Président de la commission, c'est 48 minutes.

M. Garon: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: Essentiellement, c'est parce que la vérité a des droits, et quand on dit qu'on a siégé 14 heures, on n'a pas siégé 14 heures, on a siégé exactement 10 h 10 min, M. le Président. Deuxièmement, là-dessus, je vais vous dire essentiellement: Quand on dit que c'est l'Opposition qui a fait de l'obstruction, j'ai fait le calcul; l'Opposition a parlé 5 h 50 min, le parti ministériel, avec le ministre, 3 h 23 min, et la présidence 59 minutes. Ça veut dire, à toutes fins pratiques, que l'Opposition a parlé près de six heures, et le parti ministériel et la présidence ensemble ont parlé quatre heures et demie, M. le Président. Alors, qu'on vienne dire que le temps a été pris uniquement par l'Opposition, c'est complètement faux. La vérité a quand même ses droits, comprenez-vous, M. le Président. C'est le décompte, c'est facile et c'est verifiable par tout le monde. Un.

Deuxièmement, on aurait pu avoir des débats beaucoup moins longs si le ministre avait accepté le Club automobile de Québec, qui a demandé à être entendu par la commission, qui représente 650 000 membres. Si on n'avait pas été obligés de faire une motion pour essayer de convaincre le ministre de l'entendre, on n'aurait pas passé de temps là-dessus et il y aurait eu une heure de moins de débat. Parce que le Club automobile a demandé à être entendu, et il représente juste 650 000 automobilistes. Ils ont dit: Ce n'est pas important, ce n'est rien que 15 % des automobilistes au Québec. C'est ça qui a été dit en Chambre par les libéraux. Deuxièmement, on a demandé à entendre Me Patrice Garant, qui a donné une opinion juridique importante sur ces questions-là, qui est un spécialiste dans cette question-là, et c'est lui qui a été engagé par le Club automobile pour parler de cette question-là.

Je vais vous dire une chose: on a été obligés de discuter là-dessus, M. le Président. J'aurais pu faire des motions sur le Barreau. Je vais vous dire ce que le Barreau a dit, pour vous montrer à quel point c'est injuste, une loi comme celle-là, et que c'est le rôle de l'Opposition de la combattre. Quand les fiers-à-bras sont allés dans les bureaux des députés, qu'est-ce qu'ils ont dit, les députés? Ils ont dit: II y a un Parlement pour s'exprimer. Hein! Mais, quand il n'y a plus de Parlement pour s'exprimer, qu'est-ce qu'il reste aux gens pour le faire, M. le Président?

Essentiellement, si l'Opposition est bâillonnée, qu'est-ce qui reste aux gens pour s'exprimer? Il reste la rue. Je l'ai déjà dit en cette Chambre, il reste la rue. Et, comme nous n'avons plus de place pour nous exprimer dans le Parlement ? on fait des bâillons ? nous nous exprimerons avec la population dans la rue. C'est clair, M. le Président, un Parlement dans une société démocratique est là pour permettre aux députés de représenter la population et dire au nom de la population ce qu'elle aurait voulu dire si elle avait été dans le Parlement. C'est ça, le rôle d'un Parlement démocratique.

Mais quand l'Opposition ne peut plus parler parce qu'on la bâillonne, parce qu'on l'empêche de parler et

qu'on ne veut pas qu'elle parle, alors que c'est un projet de loi, M. le Président, que je dis ignoble... M. le Président, on va dire: Le député de Lévis est partisan. Je vais citer le bâtonnier du Québec, Me Denis Paradis, qui est le frère du leader du gouvernement. Peut-être qu'il est moins partisan que moi. Et voici ce qu'il dit.

Dans la dernière revue du Barreau ? ce n'est pas vieux, M. le Président, c'est Le Journal du Barreau du 1er au 15 décembre 1993; ça vient de sortir: Le gouvernement s'apprête à modifier la Loi sur l'assurance automobile pour que la Société verse au fonds consolidé du revenu un montant de 1 000 000 000 $ d'ici le 31 mars 1995. Ce régime public d'assurance financé par les automobilistes du Québec voit donc une partie de ses revenus transférée au fonds consolidé du revenu. Encore une fois et rétroactivement, on vient de créer un nouvel impôt, une nouvelle taxe. Ces façons détournées d'accroître les revenus de l'État, soit par des tarifications qui servent à d'autres fins que celles pour lesquelles elles sont perçues ou carrément par voie législative en imposant aux automobilistes des frais d'assurance transférés au fonds consolidé du revenu, entachent la crédibilité du système.

C'est Me Denis Paradis qui dit ça, bâtonnier du Barreau du Québec, qu'une des tâches, c'est le respect des lois, une des tâches du Barreau; il le dit. Je continue ce qu'il dit, Me Denis Paradis, frère du leader du gouvernement: Le citoyen a le droit de savoir s'il paie un impôt servant au financement des services gouvernementaux ou un tarif pour un service en particulier comme, par exemple, l'assurance. Il ne doit pas de sentir siphonné à outrance, dit Denis Paradis, frère de Pierre Paradis. C'est dans le respect des principes et des règles de base d'une démocratie que le gouvernement doit agir. Les principes reliés à la non-rétroactivité des lois et ceux reliés à l'adoption et à la mise en place d'impôts et de taxes sont importants tant pour le Barreau que pour l'honorabilité du gouvernement, dit Me Denis Paradis, bâtonnier du Québec, et de ceux qui le constituent. On parle de l'honorabilité du gouvernement et de ceux qui le constituent. Il continue: Le respect de ces principes par le gouvernement l'obligerait sans doute à se rendre compte qu'on est rendu au bout des anciens moyens, qu'il doit être lui aussi imaginatif et créatif pour aborder des approches nouvelles, pour apporter des solutions nouvelles, et non pas pour nous enlever ce que nous avons acquis démocratiquement, ce que nous avons acquis avec de l'argent déjà imposé. C'est ça qu'il dit, Me Denis Paradis: Ce que nous avons acquis avec de l'argent déjà imposé. Est-ce qu'au Québec la maxime «no taxation without representation» serait devenue «no representation without large taxation»? Qui dit ça? Le bâtonnier du Barreau, Me Denis Paradis, frère de Pierre Paradis, leader du gouvernement. Il ne doit pas être tellement partisan. Et il parle au nom du Barreau, qui a une obligation de voir au respect des lois.

Aujourd'hui, qu'est-ce qu'on fait? On dit: On n'a pas aimé le débat, on a trouvé qu'il était trop long. Alors que... Combien il y a d'éditoriaux? Tous ceux qui ont écrit... Il n'y a personne au Québec qui supporte le gouvernement. Le gouvernement est surpris que l'Opposition, qui parle au nom des citoyens, s'oppose au projet de loi, parle contre le projet de loi, veut faire dire au projet de loi au moins ce qu'on donne comme explication. M. le Président, il y a eu des motions, oui. Des motions pour entendre le Club automobile du Québec, 650 000 membres; une motion pour entendre Me Patrice Garant, spécialiste en droit administratif; une motion pour commencer par l'article 10. Pourquoi? Parce que l'article 10, c'est l'article de fond où on va chercher 1 000 000 000 $, qui rend tous les autres, après ça, possibles parce qu'on va chercher 1 000 000 000 $. On a dit: On va commencer par le premier, le plus important.

Le deuxième, on a demandé après ça: Vous ne voulez pas commencer par l'article 10? Il faudrait commencer par l'article 4. Pourquoi? Parce que c'est des garanties de paiement, parce que, quand on aura pris 1 000 000 000 $, il n'y aura pas assez d'argent dans la caisse, il va falloir donner des garanties de paiement. Et, après ça, on va commencer à l'article 1, où il faut changer tout le système parce qu'on a siphonné la caisse au cours des années et qu'on a pris 3 000 000 000 $ dans la caisse. Est-ce que c'est irraisonnable? Au contraire, c'était la logique.

Il y a eu un amendement aussi pour changer le mot «revalorisation» par «indexation». Pourquoi essentiellement? Parce que la définition du mot «revalorisation» ne dit pas les explications que nous donnait Me Claude Gélinas, chef du contentieux de la Société de l'assurance automobile du Québec, qui nous disait que les chiffres des contributions d'assurance pouvaient diminuer ou augmenter, alors que la définition de «revalorisation» ? et je vous prie de regarder le dictionnaire, ceux qui veulent la voir ? ça dit que ça peut rendre la valeur plus grande, ça peut augmenter, et on dit: Le contraire, c'est «déprécier», «dévaluer», alors que les explications qu'on donnait n'étaient pas, ne représentaient pas le mot «revalorisation». On dit: Le seul mot qui peut être là, c'est «indexation». D'ailleurs, c'est le mot qui était utilisé auparavant, qu'on avait changé par «revalorisation» parce que le mot «indexation», lui, veut dire faire bouger des chiffres en fonction d'un indice, et les chiffres peuvent rester stables, augmenter ou diminuer. Un amendement pourquoi, M. le Président? Pour dire...

M. Elkas: Question de règlement, s'il vous plaît. Le député de Lévis...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le ministre, en vertu de quel article?

M. Elkas: Ah pas de règlement, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est quoi, votre question?

M. Elkas: Bien, je voulais simplement voir que le député s'adresse à la présidence et pas à ce côté-ci de la Chambre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le député, si vous voulez poursuivre et vous adresser toujours à la présidence.

M. Garon: Vous voyez pourquoi ça a pris du temps en commission, c'est des niaiseries de même qu'on entendait...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député!

M. Garon: ...M. le Président. Alors, je m'adresse toujours à la présidence et je ne m'adresse jamais au ministre...

M. Elkas: Non, non...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît!

M. Garon: ...parce que je sais que je n'aurai jamais de réponse.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! M. le député de Lévis, je voudrais que vous retiriez les derniers propos que vous avez adressés au député.

M. Garon: Pardon?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Les derniers propos que vous avez adressés au député.

M. Garon: «Niaiserie» est un mot parlementaire.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous allez les retirer, s'il vous plaît.

M. Garon: Ah! Le mot «niaiserie»?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez retirer vos propos.

M. Garon: Est-ce que le mot «niaiserie», dans votre jurisprudence, est antiparlementaire?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous demande de retirer ces propos-là.

M. Garon: Je peux bien les retirer, si vous voulez, les propos ne seront pas meilleurs.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est très bien. Si vous voulez poursuivre, M. le député. (12 h 30)

M. Garon: M. le Président, c'est ce genre de farce là qu'on a eu en commission parlementaire, d'un ministre qui n'est jamais capable de répondre aux questions, qui est totalement ignorant de son projet de loi, qui est complètement incompétent, qui ne fait pas son travail de ministre. Et, après ça, on nous dit que ça prend du temps, quand il faut poser dix fois la même question pour avoir même pas une réponse, M. le Président. Et, finalement, en désespoir de cause, il nous passe un fonctionnaire parce que, lui, il ne le connaît pas, son projet de loi, M. le Président. C'est irresponsable pour un premier ministre d'avoir un ministre de cet acabit, M. le Président! C'est irresponsable pour un premier ministre. Et tout le monde au Québec est conscient que le ministre ne sait pas de quoi il parle quand il parle de ces questions-là.

M. le Président, on parle de milliards. On ne parle pas de cents, on parle de milliards. Et on a interdit à l'Opposition d'en parler, alors que le pouvoir premier de l'Opposition, c'est concernant les fonds. L'indépendance américaine s'est faite parce que les Américains ont refusé d'avoir des taxes sans être représentés. Aujourd'hui, qu'est-ce qu'on fait en cette Chambre, on bâillonne les représentants du peuple et, après ça, on se surprend que les gens viennent dans les bureaux des députés pour les brasser!

M. le Président, tant que l'Opposition n'a pas le droit de parler en cette Chambre, le peuple a le droit de s'exprimer de la manière qu'il le souhaite. C'est aussi clair que ça. L'Opposition est là pour exprimer ce que la population aimerait dire si elle était en cette Chambre. Et je vais vous dire qu'actuellement, en cette Chambre, les seuls qui parlent au nom du peuple, ce sont les députés de l'Opposition. Il n'y a pas un député ministériel qui peut me dire que, dans son comté, il y a un seul citoyen qui l'a appelé pour lui dire qu'il était en faveur de ce projet de loi pour siphonner 1 000 000 000 $ dans la caisse de la Société de l'assurance automobile du Québec.

Aujourd'hui, les seuls représentants du peuple en cette Chambre qu'on veut bâillonner, ce sont les députés de l'Opposition. Les députés ministériels ont refusé, dans ce projet de loi, d'être les représentants du peuple; ils sont les représentants d'un parti fanatique, partisan et qui se fout des intérêts de la population, M. le Président! C'est pourquoi, c'est le rôle de l'Opposition de faire valoir les droits des citoyens, comme les citoyens voudraient les voir défendus.

Je vais vous dire une chose, M. le Président. En commission parlementaire, nous avons essayé de faire comprendre... D'abord, on a essayé de faire en sorte que les propos que l'on tenait comme explication soient au moins ce qu'il y a dans le projet de loi. Quand on vous donne des définitions, alors que les mots veulent dire d'autre chose... On est rendu, M. le Président, dans un projet de loi de l'assurance automobile hypocrite, un projet de loi mauvais. Non seulement ça, mais, dans les mots qu'on a changés, on a changé le mot «indexation» par «revalorisation» et on dit: Oui, ça veut dire la même

chose. Ce n'est pas vrai. Tous les moyens sont bons pour tromper les gens avec ce gouvernement.

J'avais déjà dit en cette Chambre que le premier ministre partirait comme en 1976. C'est ça qui arrive. Il est parti dans les manifestations, il est parti dans le trouble, dans le chaos social en 1976 et il repart de la même façon actuellement. Pourquoi? Parce qu'il ne respecte pas les citoyens, parce qu'il ne respecte pas la population.

Aujourd'hui, qu'est-ce qu'on fait? On fait une motion de bâillon pour empêcher même qu'on en parle en Chambre. On dit que c'est un précédent, maintenant. On ne veut même pas qu'on en parle. Si on avait pu faire que le bâillon se fasse ailleurs qu'en cette Chambre, on l'aurait fait, M. le Président! On fait en sorte qu'on ne puisse pas parler en Chambre sur ce projet de loi pour que les gens ne soient pas trop au courant ? ceux qui ne le sont pas encore ? de ce qu'on est en train de faire.

C'est un gouvernement minable! Minable! Minable! Hypocrite! Manquant de franchise! Sans aucune transparence! Qui n'a pas le courage de ses opinions, à l'image de son premier ministre, M. le Président!

M. le Président, quand on n'est pas capable de permettre à l'Opposition de parler, les gens vont parler ailleurs. Et ceux qui pensent, dans cette Chambre, que les gens ne parleront pas parce qu'on interdit à l'Opposition d'exprimer ce qu'elle aurait voulu dire... Ceux qui pensent que, dans cette Chambre, ils vont bâillonner le monde, ils se trompent. Us se trompent, parce que la population va parler pareil, sauf qu'elle ne parlera pas par la bouche de ses représentants en Chambre. Il lui restera la rue! Quand il n'y a pas de Parlement pour faire l'expression de la population, quand les gens ne peuvent plus s'exprimer dans le Parlement, qu'est-ce qu'ils peuvent faire? La rue! Je vais vous dire une chose, M. le Président, je vais être avec eux dans la rue, parce que je n'en ai pas peur, moi, de la rue. Je n'en ai pas peur de la rue. Et ceux qui ne veulent pas que l'Opposition parle en Chambre sont responsables du chaos social qu'ils engendrent parce qu'ils ne lui permettent pas un débat démocratique. Je le sais. En cette Chambre, j'ai fait passer 60 lois comme ministre; aucune avec bâillon, zéro avec bâillon, M. le Président. Aucune! Aucune!

Une voix: On a été obligés de toutes les reprendre.

M. Garon: Non. Il y a un ministre qui essaie de les changer actuellement, puis le monde ne veut pas. Je pense que le député de Papineau pourrait au moins se renseigner. On essaie de la zigonner, la Loi sur la protection du territoire agricole, depuis des années, puis on voit que la population se lève à chaque fois. Pourquoi? Parce qu'elle était bien faite. Elle était bien faite. Ce n'est rien que les spéculateurs, les fournisseurs de caisse électorale, les grenouilleurs puis la vermine qui appuient le gouvernement.

Des voix: Ah! Ah!

M. Garon: Trompons-nous pas! L'ensemble de la population, comprenez-vous, n'est pas favorable à ce projet de loi, puis là ça va être exprimé.

M. Cannon: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député. M. le leader adjoint du gouvernement.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Cannon: M. le Président, j'apprécierais que vous puissiez rappeler au député de s'adresser à la présidence et de ne pas avoir, de part et d'autre, des commentaires.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez, M. le député, poursuivre votre intervention et vous adresser à la présidence comme vous le devez. Si vous voulez poursuivre, M. le député de Lévis, je vous écoute attentivement.

M. Garon: M. le Président... Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Le député de Lévis a la parole. M. le ministre, c'est lui qui parle. Ceux qui veulent parler, je les reconnaîtrai lorsqu'ils se lèveront, lorsque le député aura terminé. M. le député, si vous voulez poursuivre.

M. Garon: M. le Président, il y a beaucoup de députés qui sont dans cette Chambre qui ne parleront pas pour défendre les intérêts du peuple. C'est pour ça qu'ils seront retournés chez eux aux prochaines élections. Ceux qui disent qu'ils pensent que le député de Lévis ne leur survivra pas, les gageures sont ouvertes. Je vais vous dire une chose, M. le Président, beaucoup de députés en cette Chambre qui vont voter pour ce projet de loi là, ça va être un de leurs derniers votes. Je vais vous dire que, dans le prochain Parlement, je vais y être, avec le courage de défendre les citoyens...

Une voix: Au cabinet des ministres.

M. Garon: ...avec le courage de défendre les citoyens où que ce soit...

Des voix: Oui.

M. Garon: ...où que ce soit, selon ce que je

pense qui est bon pour les citoyens, toujours avec l'appui des citoyens. Avec l'appui des citoyens. Je vais vous dire une chose, vous vous ferez élire dans l'Opposition avec 10 000 voix de majorité. Alors, vous allez voir que ça n'arrive pas souvent. Pourquoi? Parce que les gens savent reconnaître que le député de Lévis défend leurs intérêts. Il n'a pas peur de défendre leurs intérêts. Puis ce n'est pas des lignes de parti qui vont l'empêcher de défendre les intérêts de la population, puis ils le savent, ça, aussi. Je vais vous dire qu'il n'y a pas beaucoup de députés qui ont ce courage-là dans cette Chambre. Évidemment, des fois ça brasse la canisse. Qu'est-ce que vous voulez, M. le Président? Quand vous êtes élu comme représentant du peuple, vous êtes un représentant du peuple, et un représentant du peuple doit faire ce qu'il pense qu'il doit faire, et non pas appliquer la phrase de Laborit qui disait: Écoutant sa conscience qui ne lui disait rien, il s'écria: Courage, fuyons! qui est la devise du Parti libéral.

Des voix: Ha, ha, ha!

Des voix: Bravo!

M. Garon: Et je vois des députés dans cette Chambre dont je vais aller dans les comtés dans les prochaines élections pour leur dire... Ce n'est pas pour rien que le ministre, M. le Président, dans son bâillon, met qu'il ne veut pas de vote enregistré. Ça, c'est la marque la plus abjecte de la lâcheté. On ne veut même pas que les votes des députés libéraux en faveur de ce projet de loi là soient inscrits, M. le Président. Je dis même, M. le Président, que c'est irrégulier. Irrégulier! C'est un outrage au Parlement, M. le Président, que cette motion. C'est parce que la population a le droit de savoir de quelle façon ses députés ont voté. Elle a le droit de savoir ça.

Aux États-Unis, dans un système vraiment démocratique, chaque vote est enregistré et chaque vote est annoncé. Et, quand le député se représente aux prochaines élections, ils peuvent lui dire à chaque fois comment il a voté, lui dire: Tu avais tort ou tu avais raison. Il est évalué sur son bilan. Le député de La Peltrie a proposé quoi, M. le Président? Qu'il n'y ait pas d'enregistrement des votes, pour ne pas qu'on puisse reprocher aux députés la façon dont ils ont voté. Sauf que j'ai pris des précautions en commission parlementaire, M. le Président, j'ai demandé à chaque fois un vote enregistré pour que je puisse aller dire dans les comtés, comprenez-vous, avec preuve à l'appui, de quelle façon ont voté ces députés-là, pour faire en sorte qu'on vienne les siphonner, qu'on vienne enlever de l'argent dans la caisse de la Société de l'assurance automobile, puis les pénaliser, alors que tout le monde est contre le projet de loi. (12 h 40)

Puis on nous dit que ce sont des représentants du peuple? Un représentant du peuple, ça fait quoi? Est-ce que c'est là contre le peuple? Parce qu'un député, essen- tiellement, la seule définition, c'est d'être un représentant du peuple. Quand les gens, les députés votent pour ce projet de loi là, M. le Président, est-ce qu'ils sont toujours des représentants du peuple? Et le pouvoir le plus important des députés, c'est par rapport aux sommes d'argent qu'on peut imposer au peuple. C'est le pouvoir le plus important des députés de faire en sorte que les gens ne soient pas siphonnés, ne soient pas volés, ne soient pas abusés par le système parlementaire. Aujourd'hui, on ne veut pas même que les votes des députés aillent... Il n'y a pas grands députés libéraux qui vont mériter la croix Victoria du courage, hein! Ils ne veulent même pas que leur vote soit enregistré tellement ils ont honte de leur vote! C'est la première fois que je vois ça, M. le Président. C'est la première fois. Ils ne veulent pas qu'il reste de marque! Bien, je vais vous dire une affaire, votre vote là-dessus va faire que, tous, vous allez voter pour et vous allez être aussi gênés qu'un baptisé en enfer, M. le Président. Ça va être une marque indélébile de honte, comme quoi vous avez voté pour siphonner les citoyens, vous avez voté pour détourner de l'argent, vous avez voté pour enlever de l'argent qui avait été collecté comme des primes d'assurance, en disant ? il l'a dit, c'est dans les galées, ça aussi ? comme le ministre l'a dit: Oui, mais il y en a, là! Est-ce qu'un voleur de banque peut dire devant le juge: Je n'avais pas d'argent, il y en avait là, j'en ai pris?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Est-ce qu'il peut dire ça, lui, devant le juge? Le ministre, c'est ça qu'il a dit. Il a dit: Le gouvernement manque d'argent, il y en a là!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: C'est ça, la réalité, M. le Président. Honteux! Honteux! On dirait que le ministre a de la misère à fonctionner dans un régime démocratique. Il se fait l'exécuteur des basses oeuvres du gouvernement. Évidemment, ce n'est pas tout le monde qui aurait voulu présenter un projet de loi comme ça.

Je me rappelle que le député de Maskinongé, quand est arrivé un projet de loi pour imposer des charges aux municipalités, a été changé. Je suis persuadé qu'il n'a pas voulu. Le député d'Argenteuil, lui, pas de problème! Moi, je suis le bon vengeur du Seigneur! Le bon Dieu punit ceux qu'il aime! Je vais vous organiser pour vous montrer qu'il vous aime à mort! Alors, il n'y a pas de problème. L'homme le plus détesté au Québec ? on l'a vu dans les derniers sondages ? l'homme le plus détesté au Québec, l'exécuteur des basses oeuvres du gouvernement.

Le ministre actuel a dit: II n'y a rien de trop beau, s'il est capable de faire ça, moi, je suis peut-être bien capable d'essayer de le rejoindre! Et le ministre des Transports, qu'est-ce qu'il fait, actuellement? Il nous présente une loi en son nom, qui va rester à jamais dans

les annales du Parlement comme une loi épouvantable. On en parlera comme exemple dans les cours de droit comme une loi injuste. On parlera de cette loi comme d'un détournement de fonds fait avec la complicité d'un gouvernement, mais avec la complicité d'hommes politiques trop faibles pour dire non et de députés trop faibles également pour dire non dans leur caucus; trop faibles pour dire non, même à l'intérieur des portes closes d'un caucus, de sorte que, aujourd'hui, les citoyens seront dépouillés par un bâillon où on veut empêcher l'Opposition de parler. Pourquoi? Parce qu'on les dépouille. Moi, je trouve ça honteux. Je trouve ça honteux!

Je pense que le premier serment que devrait faire un député, ce n'est pas un serment à la reine. Ce n'est pas un serment à la reine, ça ne donne rien, ça, ça devrait être un serment pour dire: J'aurai le courage de défendre les citoyens même quand c'est difficile. J'aurai le courage de défendre le peuple que je représente même quand ça va me demander beaucoup d'abnégation; peut-être de refuser des honneurs, éventuellement; peut-être de ne pas avoir les nominations que j'aurais aimé avoir. Mais je défends les citoyens en premier. Pas me dire: Je suis prêt à laisser mon comté, je vais le perdre de toute façon. À la condition de me faire nommer quelque part, pour ça, il faut que je montre patte blanche en attendant. C'est ça qui fait la différence.

M. le Président, notre société est tellement dans la merde jusqu'au cou actuellement, qu'aux prochaines élections, ce qu'il va falloir avoir, c'est des gens qui ont le courage de leurs opinions, qui ont le courage de défendre les citoyens et qui sont d'abord des représentants du peuple avant d'être des carriéristes. Malheureusement, c'est encore une espèce rare, même dans cette Chambre, actuellement. C'est pourquoi le bâillon va être appuyé par beaucoup de députés, parce qu'ils n'auront pas le courage de représenter les citoyens qu'ils représentent et de dire non au gouvernement dans un projet de loi infâme, adopté par bâillon, où les députés vont voter, croyez-le ou non, pour que leur nom ne soit pas publié, pour ne pas qu'on sache comment ils ont voté et que leur nom ne soit pas enregistré parce qu'ils ne veulent pas que les gens sachent de quelle façon ils ont voté. Mais nous trouverons le moyen de faire en sorte, lorsque se prendra le vote, que les gens trouvent les moyens de savoir comment ont voté leurs députés. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Lévis.

Nous sommes sur la motion de suspension des règles. Je reconnais M. l'adjoint parlementaire du ministre des Transports et député de Rousseau. M. le député, la parole est à vous.

M. Robert Thérien

M. Thérien: Merci beaucoup, M. le Président. Ça me fait plaisir de prendre la parole à l'Assemblée nationale, mais je suis toujours un peu triste de prendre la parole après le député de Lévis qui, selon lui, est un exemple parlementaire. Selon lui, c'est un modèle de défenseur, le sire Lancelot des Québécois, celui qui est à l'écoute des citoyens, celui qui respecte toujours les citoyens.

Je lui rappelais en commission parlementaire: Où était-il lorsqu'il a voté la loi 111 où on enlevait la Charte des droits et libertés aux citoyens du Québec? Il n'y a rien de pire que ça. Il y a une charte que les citoyens ont pour les défendre et les représenter. Où était-il? Est-ce qu'il a voté? J'étais en train de faire sortir... Où il était? Est-ce qu'il transporte cette tache-là? Les Québécois se sont vu enlever leurs privilèges par la loi 111, et le député de Lévis nous dit que, nous, on bâillonne l'Opposition.

Le ministre ne l'a peut-être pas dit, mais ce n'est pas l'Opposition qu'on bâillonne, M. le Président; souvent, c'est le député de Lévis. Vous l'avez écouté, c'est effrayant! Effrayant! Il dit qu'il faut administrer correctement. Écoutez, je pense que vous connaissez ses cassettes. Nous, on les connaît aussi, ses cassettes. Il sort toujours les mêmes cassettes, M. le Président.

Je pense que les citoyens du Québec nous félicitent du moins d'une chose ? et je parlerai de la loi tantôt ? c'est de le bâillonner. C'est de le bâillonner. Ça n'a pas de bon sens, M. le Président, de crier, d'injurier les gens. Même en commission, il a ridiculisé les Chevaliers de Colomb et d'autres. Il y a lui qui a raison au Québec, il y a lui qui a raison. Il n'y a pas d'autres personnes.

M. le Président, qu'on parle de 14 heures ou qu'on parle de 10 heures, ça ne prend pas une heure pour voir ce que l'Opposition a comme orientation. Et, là, avec tout le respect que j'ai pour l'Opposition, je ne suis pas sûr que c'est l'Opposition qui veut aller là. L'Opposition veut émettre sa position. Ils l'ont déjà émise en Chambre, sur la loi 130. Mais où va le député de Lévis? Ça, c'est différent, M. le Président. Et, nous, en commission parlementaire, ça n'a pas pris cinq heures, on le savait, où il allait. Même, il surprenait ses collègues parce que même son collègue qui était avec lui ne savait même pas où il allait parce que, des fois, il devait le brasser puis dire: Je n'ai plus de temps de parole, c'est à toi de parler. C'est ça qui s'est passé. Ce n'est pas inscrit dans les galées, là, mais on était là. C'était le député de Dubuc, tout surpris parce que le député de Lévis n'avait plus de temps puis ça prenait quelqu'un pour continuer ce qu'il avait décidé de faire, bloquer la loi 130.

Il peut être contre, M. le Président, la loi 130. Il a le droit. Il a le droit de donner les principes sur lesquels il pense qu'il est contre. Oui, il a le droit, M. le Président. Mais de saccager, de faire perdre le temps des parlementaires inutilement à une institution qui doit être le modèle! Non. M. le Président, de bâillonner l'Opposition, ce n'est pas dans l'idée du tout des parlementaires ministériels. C'est beaucoup plus de bâillonner le député de Lévis. Puis, je suis convaincu... Je n'ai peut-être pas eu d'appels de citoyens qui disaient qu'ils

étaient en faveur de la loi 130, mais j'ai plusieurs citoyens qui me disent qu'ils sont contents de voir qu'on est capable de lui fermer, à l'occasion... À l'occasion, parce qu'il répète toujours la même chose. Et je suis surpris qu'il n'ait pas parlé de son tunnel pour les golfeurs parce que, habituellement, c'est dans sa cassette. Il n'a peut-être pas eu le temps, mais c'est dans sa cassette, M. le Président.

Si c'est ça, défendre les Québécois, bien, je peux vous dire que je ne me fais pas du député de Lévis un exemple. Un exemple que, j'en suis convaincu, la plupart de mes collègues, même de ses collègues... Ils ne parlent pas, c'est évident. Les gens l'appuient. Mais, M. le Président, ce qu'on a tenté de faire, ce que le ministre a tenté de faire... Regardez tantôt, au lieu de parler du fond, au lieu de parler de l'importance, il s'est mis à injurier notre ministre. Notre ministre a beaucoup de patience. Depuis plusieurs années, il a à subir toutes les attaques du député de Lévis qui essaie, dans bien des cas, de détruire beaucoup plus la crédibilité que de parler de l'essence même du projet. (12 h 50)

Nous, on l'a vu aller. C'est vrai qu'on a pris du temps pour parler parce que, M. le Président, je préfère entendre parler mes collègues que de continuer à l'entendre parler. C'est clair, ça. C'est tout à fait clair. Et on a essayé de démontrer aussi que les motions qu'il a amenées... C'est vrai qu'il a amené le Club automobile du Québec... puis peut-être que ça aurait pu être une orientation intéressante. Mais il faut dire que la loi 130, c'est une loi un peu spéciale, M. le Président. C'est une orientation du budget qui a déjà été déposé. Comme je vous l'ai dit, je respecte énormément les parlementaires qui peuvent être contre, mais c'est inscrit au budget et c'est l'application d'une décision.

Et je n'ai pas honte des décisions que je prends. Il peut venir dans mon comté. Il va être le bienvenu, le député de Lévis, absolument. On a même des théâtres qui vont peut-être l'engager. Il y a des théâtres d'été qui aiment ça, des gens qui peuvent faire rire le monde. On peut l'engager facilement. Je ne sais pas à quel cachet, mais on peut l'engager.

Donc, M. le Président, lorsqu'il a demandé le Club automobile du Québec, on s'est dit contre pour la simple raison que ces gens-là ont déjà pu s'exprimer face au ministre. M. le Président, ce qu'il ne vous a pas dit, le député de Lévis, c'est que, quand il a vu que le gouvernement s'objectait à l'audition du Club automobile, il a fait une motion ? un parlementaire, puis un juriste ? il a fait une motion en obligeant le Club automobile d'avoir M. Patrice Garant, un expert. Donc, il obligeait même le Club automobile à prendre un défenseur. Imaginez-vous! Lui, il a tous les droits, ce parlementaire-là. C'est ça qu'on veut dire un peu, M. le Président.

Après 10 heures, c'était assez. Le gouvernement a décidé d'aller de l'avant avec la loi 130, avec les conséquences et les conditions de la loi 130 qui ont été très bien expliquées. Ce n'est pas une question d'accord ou de désaccord. C'est une question qu'on allait de l'avant. On était en train de perdre un temps considérable, et c'est pour ça que le gouvernement a décidé d'emmener la loi. Donc, de bâillonner le député de Lévis, c'est de rendre service à la population du Québec.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Thérien: C'est de rendre service à la population du Québec.

M. le Président, ça me fait plaisir, je lui parle régulièrement, au député de Lévis, parce que, moi, je lui trouve un petit côté charmant. Quand même, là, il faut quand même être... Il est intéressant. Il est 11 heures, on est fatigués, il est distrayant. Puis on rit, même. On rit, même.

Une voix: II vous fait rire?

M. Thérien: Oui, oui. On rit, même. Sauf que l'objectif premier, M. le Président, ce n'est pas de s'amuser, c'est de passer à l'action. C'est surtout d'être responsable des orientations que le gouvernement s'est données.

Donc, je vous le répète, M. le Président, on a partagé le temps, mais on évitait aussi, puis vous le savez, le député de Lévis. Ce n'est pas en criant, ce n'est pas en criant qu'on informe nos citoyens, et je pense que, d'informer les citoyens, c'est de donner surtout une orientation pour leur dire qu'il y a une situation économique qui est difficile. Ce n'est plus une crise économique, là. C'est une réorientation de la société, tout simplement, et on a décidé, et je lui ai expliqué en commission... Il a écouté, par exemple, je dois quand même reconnaître sa capacité d'écoute. Il est capable d'écouter.

Une voix: II entend tout, mais il ne comprend rien.

M. Thérien: C'est ça...

Des voix: ...

M. Thérien: Bon. M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! M. le député de Rousseau, vous avez la parole. Je demanderais à votre collègue, à votre droite, de bien vouloir vous écouter. Si vous voulez poursuivre.

Des voix: À gauche.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À sa droite à lui. C'est ça.

M. Thérien: Mon collègue, il rêverait aussi de parler, parce que je suis convaincu qu'il partage mes propos, puis il pourrait sûrement rajouter des choses fort

intéressantes sur les attitudes du député de Lévis. Là, on parle de la motion qui nous réunit ici aujourd'hui, mais je pense qu'on a surtout voulu lui indiquer que c'est un projet de loi qui a des conséquences et que c'est un projet de loi que le gouvernement se doit de voter parce qu'il était inscrit au niveau de la budgétisation. Et on connaît les conséquences. Mais on est prêts à les expliquer. On est prêts à expliquer le contexte économique aussi qui nous a imposé cette orientation-là.

Donc, M. le Président, j'ai d'autres collègues qui souhaiteraient parler sur cette motion. Ça m'a fait plaisir de quand même vous signaler, M. le Président, que le bâillon a été déposé surtout pour concrétiser les orientations du gouvernement, et surtout pour éviter que les instances parlementaires ne soient pas dévaluées un peu par certains propos. Donc, M. le Président, on va être en faveur de la motion.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le député de Masson, je vous cède la parole, mais, compte tenu de l'heure, je vais suspendre les travaux jusqu'à 15 heures. Je vous reconnaîtrai à 15 heures.

M. Blais: Merci, M. le Président. Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. (Suspension de la séance à 12 h 55)

(Reprise à 15 h 8)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, Mmes et MM. les députés, si vous voulez vous asseoir, s'il vous plaît. Nous reprenons les travaux de l'Assemblée nationale.

Nous sommes toujours à discuter de la motion de suspension des règles du leader adjoint du gouvernement. Je vous rappelle que le parti ministériel dispose encore d'une période de 22 minutes; l'Opposition officielle, de 25 minutes et les députés indépendants, de 10 minutes. M. le député de Masson, je vous cède la parole.

M. Yves Blais

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. M. le Président, une autre motion de bâillon de l'Opposition durant cette session. Si le gouvernement, quand il a regardé son budget, avait eu la noblesse du geste et d'aller chercher des taxes de façon directe, jamais, de ce côté-ci, il n'y aurait une opposition à cette loi 130. Ce bâillon nous arrive parce que le gouvernement n'a pas voulu aller directement chercher le milliard qui lui manquait pour avoir son 4 500 000 000 $ de déficit ? nous parlons de ce chiffre-là et, aujourd'hui, il est rendu à 5 200 000 000 $, mais parlons du chiffre du budget supposé ? et c'est normal, M. le Président, que l'Opposition s'objecte à cette façon indirecte d'aller taxer...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Masson, j'aimerais vous entendre moi aussi. Alors, je vais inviter les collègues à être un peu plus discrets. Allez-y, M. le député de Masson.

M. Blais: M. le Président, nous avons devant nous une loi d'une importance capitale qui regarde le budget du gouvernement pour l'année 1993-1994. Et, quand un ministre fait son budget, il déclare qu'à compter de ce soir minuit, par exemple, telle taxe sera chargée. Toutes les taxes et tous les fonds qu'il veut apporter au fonds consolidé de la province, il faut que, s'il y a une loi qui les soutient, cette loi soit votée avant le 31 mars de l'année qui vient. On a encore du temps pour le faire. On a encore du temps pour le faire, d'autant plus, M. le Président, qu'on dit qu'on siégera à compter du 17 janvier pour donner la chance à la nouvelle équipe ministérielle de se faire valoir avec son nouveau chef, ce qui est possible. Donc, on aura encore du temps, normalement. On n'a pas besoin de ce bâillon aujourd'hui pour ce faire. C'est outrageant, M. le Président! Le gouvernement ouvre toutes grandes les rues à la protestation parce qu'il ferme de façon trop délibérée ses livres. (15 h 10)

Je sais, M. le Président, que ce gouvernement a des difficultés financières énormes. Il n'est pas le seul gouvernement qui a des difficultés financières. C'est assez simple, M. le Président, le Québec est sur le bord de la faillite. On annonçait, dans le budget qui vient de passer, un déficit de 4 500 000 000 $; il va être monté à 5 200 000 000 $. Si le gouvernement voulait donc être clair dans ses positions plutôt que d'être ténébreux dans ses chiffres, il dirait à la population la difficulté réelle dans laquelle il oeuvre. On dit, on voit et on rapporte qu'au 31 mars 1994 qui vient le déficit du gouvernement va atteindre, au total, la dette va être de 40 500 000 000$. Ce qui est archifaux, M. le Président. Archifaux! Archifaux!

La dette du gouvernement actuel, la dette directe qu'on appelle, au 31 mars 1994 qui vient ? je ne compte pas les 700 000 000 $ supplémentaires qu'on va avoir comme déficit, cette année ? elle va être de 40 376 000 000 $, la dette directe. La dette au régime de rentes et de retraite va s'élever à 21 265 000 000 $ et la dette subventionnée, pour laquelle le gouvernement et notre Parlement répondent, paient intérêts et capital, elle va s'élever à 15 023 000 000 $. Ce qui fait une dette de 76 664 000 000$. La dette réelle du Québec, si on l'appelle comme ça, ce que le Parlement du Québec doit ? capital et intérêts ? par ses engagements, actuellement, c'est 76 664 000 000 $, plus les 500 000 000 $ ou 700 000 000 $ supplémentaires de cette année. Ça veut dire que, pour parler en chiffres ronds, nous devons 77 000 000 000 $ au 31 mars 1994, sans compter les 21 000 000 000 $ de 1978 qui étaient actualisés et qu'on ne compte pas là-dedans. On est rendu à près de 100 000 000 000 $ comme dette. Le Parlement est responsable, ici, directement, de 100 000 000 000$ de dette.

C'est bien sûr que, les gens étant surtaxés jusqu'à la lie, M. le Président, le gouvernement a trouvé dans la caisse de l'assurance automobile un beau petit milliard qui y gisait. Ce voyant, dit-il, ce gouvernement, qui est assez ténébreux et qui ne va jamais directement: Voici un milliard tout trouvé! Voici un milliard tout trouvé pour que mon déficit ne soit pas de 81 000 000 000 $ au total. Il est de 77 000 000 000 $, 78 000 000 000 $ actuellement. Alors, s'en allant dans le tunnel de ses ténèbres, le gouvernement a dit: Ce que je ne veux pas faire directement, parce que trop apparent, je vais le faire de façon indirecte. Alors, il dit: La caisse, on va transférer un coup 625 000 000 $, un coup 375 000 000 $. Ça fait un beau petit milliard tout trouvé, et ça paraît bien.

M. le Président, c'est à cause du côté ténébreux de la chose et du côté qui est presque illégal d'aller chercher ce milliard que, de ce côté-ci, on s'est objecté avec presque fureur. La ministre des Finances étant là, c'est avec fureur qu'on s'y objecte. C'est presque illégal. Il y a une sortie légale pour une partie de ça, peut-être, peut-être.

Quels sont les objectifs du régime, le régime d'assurance automobile? Et je suis persuadé que ma collègue connaît ça par coeur, mais, moi, ayant moins de mémoire qu'elle, je l'ai noté ici et je vais les relire. Il y en a cinq: premièrement, une indemnisation meilleure et rapide au plus bas coût possible pour les accidentés; réduire les coûts d'administration de l'assurance automobile; l'accessibilité à l'assurance à tous les conducteurs; favoriser le développement des entreprises québécoises en canalisant vers le secteur public une partie des fonds générés par l'assurance; le quatrièmement, il pourrait peut-être améliorer le bilan routier par l'établissement de mesures de sécurité routière afin de diminuer le coût du régime. Ça, là, il est possible qu'il y ait une petit fuite vers la légalité dans ce transfert-là pour une partie, mais, si on y va un peu plus à fond, M. le Président, je vais vous noter ceci.

Entre 1986 et 1994, la ministre actuelle des Finances ou ses ministres antécédents sont allés chercher 2 500 000 000 $ de cette façon-ci: 566 000 000 $ de façon directe... Mais l'application des 2 500 000 000$ ?je vais commencer par ça ? les 2 500 000 000 $ qu'ils sont allés chercher à la caisse de l'assurance automobile: sur la voirie, ils ont mis 740 000 000 $, sur les routes; 205 000 000 $ pour le transport ambulancier ?à la rigueur, je ne le crois pas, mais à la rigueur ? mais 950 000 000 $ sont versés directement dans le fonds consolidé. ça, c'est purement illégal, purement illégal. et qui plus est, le budget du transport du québec, dans toutes ses facettes, c'est à peu près 1 100 000 000 $ par année. ce 1 100 000 000 $ de dépenses en amélioration, en construction, etc., et en entretien, si la ministre des finances, ou le ministre des finances qui a fait la loi 130, allait chercher, supposons, 625 000 000 $ cette année et qu'il l'ajoutait pour la sécurité des routes au budget déjà existant, peut-être, m. le président, qu'il pourrait se défendre de la légalité indirecte de son geste. Mais, là, ce n'est pas ça qu'il fait. Le budget du ministère des Transports, depuis plusieurs années, baisse. Il baisse et on siphonne d'année en année de l'argent dans la caisse de l'assurance automobile. M. le Président, c'est inacceptable. Les gens vont dire...

J'entends le président du Conseil du trésor, qui nous dirait: Comment ça se fait que l'Opposition s'objecte à ce que nous allions chercher de l'argent dans le fonds de l'assurance automobile des Québécois? Ils demandent toujours de plus en plus de services et ils nous disent que les Québécois sont trop taxés. Il y a une réserve, allons la chercher. C'est justement ce que nous blâmons le gouvernement de faire. Nous le blâmons à ce point que c'est encore un bâillon qui nous arrive.

On sait, M. le Président, que les difficultés de tous les gouvernements, c'est terrible, surtout quand c'est un gouvernement assis sur des positions, qui est à peu près immuable et qui ne prend aucune décision. On dirait qu'il rumine le foin qu'il a mangé il y a trois ans. C'est long à digérer pour arriver à une décision de l'autre côté. C'est excessivement long. On rumine. Parfois, on broute, mais on rumine. Il y a beaucoup d'estomacs. On dirait qu'il y a beaucoup d'estomacs avant d'arriver à la boule maîtresse, pour aller dans l'estomac qui digère de façon directe. Et qu'on a la boule, de l'autre côté, M. le Président! La grande caractéristique du gouvernement actuel, c'est un gouvernement qui a la boule du foin. Et il rumine. Les estomacs sont multiples, et c'est long à digérer une décision. C'est pour ne pas avoir un langage moins poli que je prends ce symbole.

Mais on sait, M. le Président, de ce côté-ci, que les difficultés sont énormes. On sait qu'à compter de la guerre de... Il y a eu la grosse crise en 1929, la grosse, grosse crise. Il est arrivé, après ça, la guerre, comme un soupir de soulagement du côté économique, pas du côté humain, mais une espèce de soupir de soulagement économique. Ça a progressé. Est arrivée tranquillement la Révolution tranquille, la syndicalisation, les revendications des gens, les demandes de plus en plus larges, de plus en plus amples de la population. Aussi, sont arrivés des politiciens des plus avides de prendre le pouvoir, qui répondaient de façon directe ou indirecte aux soupirs des demandes des gens dans les années soixante et soixante-dix, au moindre soupir, parce qu'ils avaient une soif de pouvoir qui était tellement grande qu'il n'y a pas de qualificatif pour dire quelle était cette soif. Eh, bien, quand est arrivée la crise, la première crise après celle de 1929, qui nous est arrivée au début de 1981, 1982, là, on a vu que le fait qu'il y a eu une syndicalisation de travailleurs spécifiques, qu'il y a eu des régimes qui ont été installés pour des moments de prospérité, on s'est rendu compte qu'on n'avait plus les moyens de payer. On le reconnaît, de ce côté-ci, et on le sait. On est capable de faire des analyses de budget, quand même. Voyons donc! On sait analyser. On sait analyser. (15 h 20)

Dans la vie, tu n'es rien ou tu es quelque chose

(l'autre, mais, au moins, on peut être capable de compter. On peut au moins être capable de compter, ce que l'on sait faire. On est capable de compter. Dites-nous pas: Toi, Blais, tu n'es rien, tu ne sais pas compter. Il ne faut pas dire ça. Je suis capable de compter. Peut-être un peu poète des chiffres. Possible. Fort possible. Mais un poète des chiffres, ça sait manier le chiffre et le verbe. Et on est tous capables, de ce côté-ci, de manipuler sans ruminer trop longtemps pour faire notre boule, hein. Mais, là, on est arrivés dans une dette collective, au 31 mars, de 78 000 000 000 $. Pas 4 500 000 000 $, M. le Président, 78 000 000 000 $.

On sait qu'il faut qu'il y ait un virage, il faut que l'imagination reprenne le pouvoir. Il faut que l'imagination reprenne le pouvoir. C'est ce qui manque, actuellement; c'est pour ça qu'il y a des moyens détournés. Il y a des moyens détournés, M. le Président, d'aller chercher des fonds. Si on prenait l'autre volet. Si le gouvernement en place prenait un tantinet ses responsabilités, au lieu d'aller chercher 1 000 000 000 $ dans la Caisse de dépôt... pas dans la Caisse de dépôt, dans la caisse de l'assurance automobile, je m'excuse, il y a 1 000 000 000 $ qu'il perd en ne prenant pas ses responsabilités dans le noir: la contrebande du tabac, la contrebande de l'essence, des cigarettes, etc.

Il a 1 000 000 000 $ à aller chercher là. Il ne va pas le chercher. Un gouvernement qui ne fait pas respecter ses lois ne mérite plus que la population le respecte et il devrait démissionner, M. le Président. Il devrait démissionner. C'est bien sûr que ça va venir parce que, au mois de septembre, ça va faire cinq ans, il va bien falloir qu'il parte. juste une chose, aussi, s'il avait un peu d'imagination. regardez, m. le président, les intérêts ont déjà été à 18 %, 20 %, 14 %, 12 %. ils sont bas, les intérêts, là. c'est bas, les taux d'intérêt, là. ils sont très bas: 5 %, 6 %, 5,50 %, 5,75 %. on paie certaines pénalités, mais les gens brillants qui ont une hypothèque de 20 000 $ à 14 % pendant 20 ans, ils vont à leur banque et ils renégocient à un taux plus bas avec une petite pénalité. mais pourquoi l'imagination ne gagnerait pas pour une fois ce gouvernement? et, pour le 40 000 000 000 $ de dettes qu'ils appellent directes, allez voir quelles sont les parties négociables là-dedans. s'ils ont prêté à 12 %, à 11 % et à 13 %, ils pourraient négocier aujourd'hui à 5 %, à 6 %, à 4,50 %, ou que sais-je encore. parce que le gouvernement, actuellement, paie, en intérêts seulement, 6 562 000 000 $ par année, juste en intérêts sur la dette; juste en intérêts sur la dette, 6 562 000 000 $, si le budget que vous avez actuellement est bon. je sais qu'il n'est pas bon, il y a 500 000 000 $ ou 600 000 000 $ qui vont être rajoutés dans les dépenses, dans le déficit.

Un petit peu d'imagination, un tout petit peu, ça aiderait beaucoup, beaucoup, beaucoup, et les gens seraient reconnaissants envers le gouvernement. D'abord, il n'aurait pas besoin d'amener des bâillons, parce que le l'Opposition est outrée, c'est outrageant de nous bâillonner sur une loi de budget. C'est très rare qu'une loi de budget ait bâillon. On le sait que c'est rare. Ça arrive, mais c'est rare. Une loi budgétaire, ça va, normalement, de soi. Mais elle est odieuse! Elle est odieuse! C'est une loi de couleuvre qui a peur de l'obstacle et qui contourne la taxation tranquillement. La vie perd son nom avec eux autres. La vie perd son nom. Ils nous disent des sornettes, M. le Président, ils nous disent des sornettes.

Je sais que, ce chemin tortueux du déficit, on ne peut pas toujours en saisir tous les coulis, c'est sûr, M. le Président, mais, en dévalant la côte de leur raisonnement, on court la chance d'attraper un arbre et de se fendiller le front. Vous n'êtes pas assez francs. Un peu de franchise, un peu de noblesse! Si vous avez 1 000 000 000 $ de taxes à faire, faites-les, mais n'allez pas les chercher dans des taxes déjà payées et qui sont des contributions, en réalité, pour aider les personnes qui sont des accidentées de la route.

M. le Président, c'est un gouvernement que je trouve décourageant, déconcertant. Ce n'est pas pour rien que le député de Lévis, à qui on disait tantôt: Ce n'est pas à l'Opposition officielle qu'on veut fermer la gueule ? on n'a pas dit le mot «gueule», mais, moi, je peux le dire, là ? on veut fermer le député de Lévis, on trouve son orifice à sons est un petit peu trop élevé comme décibels. Bien, M. le Président, je crois que le député de Lévis avait entièrement raison d'avoir un ton élevé, outragé. Pourquoi? Et il le disait: Si on muselle l'Opposition, qui est la voix du peuple... Le gouvernement est censé l'être, et, quand le gouvernement n'est pas la voix du peuple et que c'est l'Opposition qui doit remplacer les protestations, quand on muselle l'Opposition, c'est la rue qui devient la seule échappatoire à l'opposition qui doit être faite au gouvernement ici, en Chambre. Vous nous éliminez par des lois de bâillon, vous nous tassez dans un coin, vous nous écrabouillez. Eh bien, si on ne peut pas parler, si on ne peut plus dire les revendications de nos gens, ils vont prendre la rue pour vous le dire. Moi aussi, j'irai dans la rue avec eux, tant qu'il n'y a pas de violence, et on ne peut pas contrôler. Vous êtes des créateurs... Sur la fin de mandat de 1975-1976, le gouvernement actuel, avec le même chef, avec le même chef, il a laissé la province dans un état lamentable, dans une période de crise sociale, dans une période de protestations, dans une période de violence. Eh bien, là, c'est encore le même scénario. On dirait qu'il y a des gens qui ne savent pas noblement quitter leur poste. C'est un fait, et c'est le propre de tous les hommes qui ont été longtemps au pouvoir.

Quelques exemples. Quand M. Trudeau s'est rendu compte qu'il ne pouvait pas reprendre le pouvoir, il a démissionné. Quand M. Drapeau s'est rendu compte qu'il ne pouvait pas reprendre le pouvoir, il a démissionné. Quand M. Lévesque s'est rendu compte qu'il ne pouvait pas reprendre le pouvoir, il a démissionné. Quand M. Mulroney s'est rendu compte qu'il ne pouvait pas reprendre le pouvoir, il a démissionné. Et là M. Bourassa ne peut pas reprendre le pouvoir, et il le sait, il démissionne. À chaque fois qu'est arrivé un

démissionnaire, dans les mois qui suivaient, le sondage... Le nouvel arrivant qui remplaçait le démissionnaire était toujours un peu plus haut dans les sondages. La dernière, c'est Mme Campbell, et elle a suivi le même phénomène que les autres. Elle était plus haute dans les sondages que les libéraux. Elle a tenu le fort longtemps, mais, mon Dieu, elle est arrivée avec deux députés. On dit: Un char sport dont un siège est éjectable. Deux sièges seulement, c'est terrible, et il va vous arriver exactement la même chose.

Moi, je m'attends, au mois de janvier, qu'il y ait un petit sondage qui va peut-être mettre les libéraux un peu en avance. Ça ne me surprendrait pas, ça a toujours été comme ça. Ça a toujours été comme ça. Le remplaçant d'un premier ministre fini a toujours... Il y a petit rebond de noblesse de la population, comme une espèce de geste de remerciement, parce que, dans une vie publique, on fait toujours des bonnes choses.

Mais la loi 130 qui est là, M. le Président, ce n'est pas une bonne chose. On s'y objecte. On s'objecte à la façon que vous voulez la faire passer. On s'objecte au bâillon que vous mettez. En nous muselant, vous ouvrez la rue toute grande à la protestation, et vous subirez les conséquences des gestes que vous posez. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Masson. Sur cette même motion de suspension des règles, je cède la parole à M. le député de Drummond. Vous avez droit, à titre de député indépendant, à une période de 10 minutes, M. le député.

M. Jean-Guy St-Roch

M. St-Roch: Merci, M. le Président. M. le Président, je me contenterai, dans un premier temps, d'intervenir sur la motion de suspension de certaines règles et je regarderai, les peu de temps de parole qui me sont consacrés, à la prise en considération du rapport de la commission parlementaire sur la loi 130.

M. le Président, encore une fois, aujourd'hui, on muselle et on bâillonne les députés. J'ai eu l'occasion, au cours des 16 derniers moins, de dénoncer avec toute la vigueur qu'on peut me reconnaître cet abus de l'exécutif sur le législatif.

D'entrée de jeu, M. le Président, j'aimerais vous citer, dans un traité des professeurs Morin et Woehrling, «Les constitutions du Canada et du Québec du régime français à nos jours», étude suivie d'un recueil de textes, ce qu'on en dit: «La primauté de l'exécutif sur le Parlement dans la réalité politique résulte de la combinaison de plusieurs facteurs dont trois principaux: le fait que les gouvernements sont habituellement élus avec une forte majorité parlementaire à l'égard de laquelle ils exercent une discipline rigoureuse ? c'est ce qu'on appelle, dans notre jargon, la ligne de partie; l'existence d'un contrôle gouvernemental sur l'activité parlementaire ? je pense qu'on en a encore une preuve aujourd'hui ? et l'abus des délégations de pouvoir réglementaire qui entraîne un véritable transfert de la fonction législative à l'exécutif», M. le Président. Et c'est ça qu'on fait aujourd'hui en suspendant les règles. (15 h 30)

M. le Président, lorsque j'ai été élu député, on m'a fait prêter serment ici, et mon serment d'office était ceci: Je jure ? en disant mes nom et prénom ? solennellement que je serai loyal envers le peuple du Québec et que j'exercerai mes fonctions de député avec honnêteté et justice dans la respect de la constitution du Québec.

M. le Président, à mon sens, dans la constitution du Québec, la Loi sur l'Assemblée nationale, telle que définie, est incluse comme étant une des lois fondamentales. Quand je regarde les considérants de la Loi sur l'Assemblée nationale, M. le Président, un qui m'appa-raît fondamental à notre débat d'aujourd'hui est celui-ci: «Considérant que l'Assemblée nationale, par l'intermédiaire des représentants élus qui la composent est l'organe suprême et légitime d'expression et de mise en oeuvre de ces principes,» bien, M. le Président, en me bâillonnant aujourd'hui, on m'enlève le droit, encore une fois, de représenter mes citoyens. On m'enlève le droit de prendre mes temps de parole de 20 minutes qui sont normalement reconnus à tous les parlementaires.

M. le Président, la présidence a déclaré le 17 décembre, devant une plaidoirie avec le leader de l'Opposition, le député de Joliette et moi, alors qu'on plaidait sur la recevabilité du sens d'«urgence» ? on n'a pas plaidé aujourd'hui parce qu'on est convaincu que notre règlement est fautif ? M. le Président, j'aimerais rappeler, avec toute la sagesse de la présidence, ce qu'elle déclarait à ce moment-là. Elle disait: «La disposition à laquelle a recours le leader ? qui était l'utilisation du mot "urgence" pour faire adopter la Loi sur les heures d'affaires, entre autres ? peut paraître pour le moins extraordinaire. A-t-elle été voulue ainsi, ayant été introduite au règlement en 1984 à l'unanimité des membres de l'Assemblée? C'est à l'usage que l'on décèle les avantages et inconvénients d'une disposition. Avait-on prévu, à l'époque, toutes les possibilités qu'offre cette disposition? Le moment serait-il venu de remettre en question cette procédure? Pour le savoir, une discussion s'impose dans un cadre tout désigné, celui de la sous-commission permanente de la réforme parlementaire qui devrait s'en saisir».

M. le Président, un an après, la commission parlementaire ne s'est pas saisie de cette matière, et, de plus en plus, on consacre, législation après législation, le droit de bâillon comme étant le droit de la majorité de bâillonner l'expression populaire.

M. le Président, la journée où un député n'est plus le mandataire de ses citoyens à cette Assemblée ici, je souscris à ce que quelques collègues de l'Opposition ont mentionné: Lorsqu'on perd le respect de nos institutions, qu'elles soient législatives, qu'elles soient executives, qu'elles soient corporatives, bien, malheureusement, M. le Président, on désolidarise nos citoyens et nos citoyennes et on voit, à ce moment-là, qu'on

transforme le tout en individualisme, puis individualisme égale jungle égale régler les problèmes dans la rue.

Vous allez dire, M. le Président, que le député de Drummond abuse. M. le Président, quelques titres: «À peine 9 % des Québécois font confiance aux chefs politiques». Les Québécois doutent de plus en plus de leurs politiciens, et on est malheureusement, encore une fois, M. le Président, pour une troisième session consécutive, à prouver qu'on n'a plus le droit de parole dans cette Assemblée.

Je reviens à la motion d'urgence, M. le Président. Pour le bénéfice de mes citoyens et de mes citoyennes, j'aimerais leur dire que le projet de loi a été déposé le 11 novembre 1993. Le principe a été adopté le 3 décembre, M. le Président.

M. le Président, le but ultime du projet de loi 130 est de rapatrier 1 000 000 000 $ dans les coffres de l'État pour éponger un déficit, pour faire en sorte qu'on baisse le déficit et qu'on le garde en bas des 5 000 000 000 $. Quand je regarde le projet de loi, ce projet de loi, les notes explicatives ? c'est l'Exécutif qui les a écrites, M. le Président, et non moi: «Ce projet de loi modifie, en outre, la Loi sur la Société de l'assurance automobile du Québec afin de permettre le versement au fonds consolidé du revenu, pour les exercices financiers 1993-1994 et 1994-1995 du gouvernement, des sommes prévues au Discours sur le budget.»

M. le Président, à moins que j'erre, le budget a été prononcé au mois de mai, ici, dans cette Assemblée. Moi, je ne peux pas croire qu'un Exécutif qui est responsable, qui veut respecter le droit de ses parlementaires, n'ait pas été capable d'amener ce projet de loi, de l'inscrire au feuilleton avant la session de juin, puis d'utiliser l'intersession, M. le Président, pour le discuter article par article. Ça, ça aurait été de la démocratie. Après huit heures, M. le Président, on nous dit qu'on a bâillonné.

M. le Président, il y a une autre chose que je veux signaler, et mon collègue, le député de Lévis, l'a fait. Il a mentionné qu'à un moment donné on est pris, en tant que parlementaires, en commission parlementaire, à se mettre les doigts dans un projet de loi et à passer le bras au complet, parce qu'on est rendu... Puis, c'est le deuxième projet de loi. Je serai dans quelques minutes de l'autre côté à étudier le projet de loi 142. Or, on s'aperçoit encore, comme dans ce projet de loi, ici ? et mon collègue l'a très bien signifié ? que la clause majeure est à 10 et qu'en tant que parlementaires, si on approuve 1, 2, 3, 4, on vient de passer dans le tordeur. Les traditions veulent qu'après qu'un article a été adopté ça prend le consentement unanime pour le réouvrir ou essayer, en troisième lecture, d'amener des amendements. Est-ce que c'est un précédent? Dans le projet de loi 142, à l'article 10, on définit ce que c'est un secteur résidentiel, et on essaie de nous faire approuver 1, 2, 3, 4, qui ont un effet majeur au niveau des définitions de principe.

M. le Président, est-ce que c'est une nouvelle méthode de légiférer? Est-ce qu'on a découvert une entourloupette pour essayer de faire passer en catimini, à la dernière minute, des projets de loi, en disant: MM. les parlementaires, vous avez approuvé les articles 1, 2, 3, 4, on ne peut pas comprendre que vous refusiez et que vous vous objectiez maintenant à l'article 10? C'est ce dangereux procédé, M. le Président, que j'aimerais encore une fois dénoncer aujourd'hui dans cette Assemblée.

M. le Président, aussi, de plus en plus, je vois évoluer notre législation. On est rendu qu'on fait des lois-cadres et on essaie de définir le tout, après ça, dans la Gazette officielle du Québec, par règlement. Dieu sait qu'encore... Encore, M. le Président, le leader du gouvernement, je le mets au défi d'appeler le projet de loi que le leader adjoint du gouvernement, le député de Mille-Îles, a déposé en cette Chambre pour faire en sorte qu'on soit capable d'avoir les tenants et les aboutissants d'une loi, de voir ses impacts. Il a été déposé, et je suis convaincu, M. le Président, qu'on partira en session des fêtes et que ce sera encore aussi au feuilleton. Je suis convaincu que le gouvernement espère déclencher des élections pour que ça meure au feuilleton, parce qu'on n'osera pas l'appeler. Si jamais on ose l'appeler, on fera la même chose qu'on a faite à mon collègue de Verdun, on fera amendement après amendement pour dénaturer, finalement, la signification d'un projet de loi.

Alors, M. le Président, moi, c'est avec toutes les énergies qu'on peut me connaître que je me défends de cette procédure abusive. On utilise des fins de session, quand nos citoyens et nos citoyennes sont préoccupés, à ce moment-ci, par la période des fêtes ? on est à 16 jours de Noël ? pour dire en catimini: On va aller leur chercher bien subtilement 1 000 000 000 $ dans leur goussets et, préoccupés qu'ils sont à préparer l'esprit familial, à retrouver leurs yeux d'enfant, ils ne l'auront pas vu et ils auront d'autres préoccupations. Et ils ont bâti, de l'autre côté, sur la mémoire de l'électorat, en pensant que le peuple a une mémoire seulement de six mois et qu'il aura oublié dans le passé.

M. le Président, je peux vous dire, moi, là, lorsque je viendrai dans le fond, que je me chargerai, comme je l'ai fait jusqu'ici, de dire: Maintenant, on est plus pauvre de 1 000 000 000 $. Et j'aurais compris, M. le Président, moi, le ministre des Transports, s'il m'avait amené dans ce projet de loi là, de dire: Je vais prendre le milliard de ce projet de loi là et voici ce que je vais faire avec. Je vais corriger les points noirs sur nos routes et nos autoroutes. Et, Dieu sait, il faut voyager seulement sur la route 20, qui est censée être la route par excellence, pour voir qu'on pourrait dépenser facilement pour corriger les points noirs, ce qui ferait en sorte, finalement... comme une loi a été faite, à un moment donné, dans la réforme de toute la loi de la sécurité automobile, parce que, ça, on oublie ça. S'il y a 1 000 000 000 $, aujourd'hui, c'est parce qu'on a fait une réforme de fond qui a amené ces fonds-là. Et, aujourd'hui, au lieu d'en faire bénéficier l'ensemble et essayer de bâtir sur cette loi-là, engranger davantage

pour corriger les problèmes, on va le mettre pour payer des dépenses courantes. Et c'est pour ça, M. le Président, que je voterai contre cette motion.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Drummond. Alors, je rappelle aux députés que l'Opposition officielle dispose encore de cinq minutes, le parti ministériel de 22 minutes. M. le député de Lotbinière, je vous cède la parole.

M. Lewis Camden

M. Camden: Merci, M. le Président. M. le Président, nous sommes face à une motion de suspension des règles de procédure pour faire en sorte qu'un projet de loi essentiel, d'une part, aux finances publiques, puisse être adopté.

M. le Président, je suis membre de la commission de l'aménagement et des équipements, qui a la responsabilité de se pencher sur le projet de loi 130. J'ai été à même de constater, au cours des derniers jours, les travaux, pour, d'une part, les avoir présidés, avoir présidé la séance de lundi soir dernier, et d'avoir, également, participé au débat de la commission de l'aménagement et des équipements. C'est un peu avec beaucoup de stupéfaction, d'étonnement que j'entends les commentaires des gens de l'Opposition, à l'effet qu'on abuserait, évidemment, du système, qu'on les bâillonnerait.

M. le Président, la situation est la suivante, c'est que ces gens-là ont profité, ont abusé, ont exploité au maximum le règlement, en ont tiré le maximum en nombre d'heures. Mais, s'il y a suspension, c'est consé-quemment, évidemment, à ce manque de responsabilité que j'avais porté à l'attention des membres de l'Opposition lors de nos débats en commission parlementaire. Nous n'avons pas privé nos collègues du droit de parole. Nous ne les avons pas privés de l'opportunité de s'exprimer. S'ils ont gaspillé, utilisé d'une mauvaise façon le temps, la responsabilité leur appartient, qu'ils l'assument, M. le Président. (15 h 40)

Je porte à votre attention qu'à la séance du 6 décembre 1993, en soirée, le parti de l'Opposition, sur un débat qui a duré 3 h 35 min, en excluant les périodes de suspension, le parti de l'Opposition s'est exprimé pendant 2 h 42 min. Nous avons laissé toute la place disponible à faire en sorte qu'ils puissent s'exprimer. La présidence, dans ses interventions à l'égard du règlement, ses propos, est intervenue pendant 16 min 9 s; le ministre, pour 16 min 18 s; le parti ministériel, 19 min 48 s.

On s'est exprimé, M. le Président, sur le projet. Le parti de l'Opposition, je le rappelle, 2 h 42 min. Le mardi 7 décembre, l'Opposition, sur un débat de 2 h 37 min, s'est exprimée 1 h 22 min; le ministre, pendant 50 minutes, la présidence, pendant 13 minutes. Et on a dû suspendre à chaque fois parce qu'il y avait des motions qui étaient présentées, parce qu'elles ne rencontraient pas toujours le caractère de la recevabilité. À d'autres moments, elles étaient formulées dans un langage qui laissait à désirer, le choix des épithètes n'était pas adéquat.

À la séance du 8 décembre, au cours de la journée du 8 décembre, les débats ont duré 3 h 58 min. L'Opposition a profité d'une première phase de 33 minutes, puis de 1 h 11 min. M. le Président, ils ont eu tout le loisir pendant nos débats, qui ont duré 10 h 10 min. C'est assez étonnant, M. le Président, vous qui êtes d'une région rurale, quand on raconte ça évidemment à nos commettants, qu'on puisse, après 10 heures de débat, ne pas avoir franchi et réglé même l'article 1 du projet de loi. C'est assez étonnant et stupéfiant qu'on fonctionne et qu'on marche à pas de tortue.

D'ailleurs, M. le Président, je le rappelais au député de Lévis le 6 décembre en soirée, à 23 h 45, je lui disais: «Probablement que, si l'on nous entendait débattre depuis 8 heures, elle serait estomaquée ? faisant référence à 20 heures en soirée ? elle serait estomaquée de tout le temps qu'on a perdu, et qu'on n'est pas encore passé à l'article 1, et que, en principe, selon mes commettants, on aurait sans doute dû être rendus à l'article 12, à la fin du projet de loi», puisqu'il n'y a que 12 articles, M. le Président, pas 1200 articles, 12 articles.

Et le député de Lévis me disait: «Savez-vous ce qu'ils diraient? Ah! certainement ?je lui répondais. Les gens de Lotbinière seraient renversés, M. le Président, et considéreraient que c'est une dépense futile et un gaspillage de temps.» Vous retrouvez ça consigné aux débats de la commission de l'aménagement et des équipements. C'est stupéfiant, M. le Président, de gaspiller son temps comme ça pour entendre parler, durant ces débats, non pas du contenu de la référence du projet de loi à l'égard du versement au fonds consolidé d'argent en provenance de la Société de l'assurance automobile du Québec, mais bien plutôt d'entendre parler des culottes à Vautrin.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Camden: Extraordinaire, vous savez. Ça s'est passé il y a de nombreuses décennies. Il faut remonter, M. le Président, à quelque 40 ans, où là on faisait ressortir qu'un ministre de l'époque s'était acheté, sur le bras du gouvernement, des culottes de 2 $. Et c'est là-dessus qu'on a fait tout un débat, M. le Président, pendant une partie de la soirée. Extraordinaire, vous savez! On s'accroche au passé. On est retournés vers l'arrière au lieu de regarder par en avant.

Évidemment, ça ne s'est pas arrêté là-dessus, M. le Président, ça aurait été déjà trop bref, vous comprendrez bien, pour meubler toutes ces 10 h 10 min de débat. On a réussi, imaginez-vous, le député de Lévis a réussi à nous insérer Dracula, croyez-le ou non! C'est incroyable, ça, vous savez, à cette période-ci des fêtes, être aussi sanguinaire dans ses propos qu'il a référé à

Dracula. Puis je vais vous lire ici, pour votre information, ce qui justifie, je pense, amplement, la suspension de nos règles, il dit: «C'est comme Dracula, ça, qui sort de sa tombe la nuit, les soirs de pleine lune, pour aller mordre quelqu'un dans le cou, pour s'abreuver de sang, pour pouvoir continuer, à travers les siècles, sa mission ignoble, avec ses grandes dents qui avancent.» Si c'est ça, M. le Président, l'esprit visionnaire qui anime le député de Lévis et les gens de l'autre côté, c'est impressionnant ce qu'ils nous promettent pour les prochaines années.

Et il nous a cité, évidemment, Marc Lalonde ? encore le passé ? qui disait, lui... C'est assez impressionnant, M. le Président: «Moi, je ne voudrais pas que le ministre devienne le Dracula de la Société de l'assurance automobile, autrement, comme disait Marc Lalonde, qui avait une face de Dracula ? peu respectueux, également, des personnes, en passant ? quand il disait: Je ne confierais pas la banque de sang à Dracula, il la boirait à lui seul, mais, là, je ne voudrais pas que le ministre ait», et là trois petits points. On passe à travers l'histoire. Impressionnant, M. le Président! Une vision d'avenir que ces gens-là ont à nous proposer!

Et, évidemment, on est revenu à des débats un petit peu plus civilisés, à un autre moment. On nous a parlé de la cigale et de la fourmi. Et, après ça, on est revenu... Vous savez, on était dans la nature, bien sûr, alors on est passé à la mare. On nous a parlé, entretenu des ouaouarons. Pertinent, M. le Président, au débat! C'est incroyable! On parle d'argent, et, là, on nous parle des ouaouarons, des cigales, des fourmis. Enfin, vous savez, ils s'animent de ce côté-là. C'est incroyable! Ils fourmillent.

Et, évidemment, dans un élan un petit peu plus élevé, là, on a fait référence aux Horaces et aux Curia-ces. Là, voici, on faisait étalage de nos connaissances et de notre culture. Extraordinaire, M. le Président! C'est enrichissant! Mais ça ne fait pas trop avancer les débats.

On nous a formulé, M. le Président, des motions, des motions dilatoires. La première motion: on voulait entendre le Club automobile du Québec. Pas ses membres, ni son président: on voulait entendre le Club automobile. Une fiction! C'est écrit comme ça. Et, par la suite, évidemment, on voulait entendre Me Patrice Garant avec le Club automobile. On imposait, au Club automobile, M. Garant; le professeur Garant. Et là, évidemment, le député de Lévis a pris un texte. Il avait droit à 30 minutes sur cette motion. Alors, il nous a fait la lecture d'un texte du professeur Garant pendant 30 minutes de temps, au lieu de déposer tout simplement le document et d'épargner, évidemment, aux membres de la commission, cette lecture pendant 30 minutes.

Et là, évidemment...

M. Garon: Je n'ai pas lu...

M. Camden: M. le Président, voulez-vous rap- peler au député de Lévis que, de présumer qu'on ne lit pas les documents, ce n'est pas trop conforme? Parce que, M. le Président, à l'effet de ne pas lire, ils auraient dû lire, entre autres, peut-être, les rapports d'activité, rapport annuel de la Régie de l'assurance automobile du Québec.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant, M. le député de Lotbinière. M. le député de Lévis, question de règlement sur quoi, là?

M. Garon: Oui, me donnez-vous la parole? Est-ce qu'en vertu du même principe le député peut déposer son discours? On le lira.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous voyez bien que j'avais raison d'être sceptique sur votre question de règlement. M. le député de Lotbinière, continuez votre intervention.

M. Camden: M. le Président, le député de Lévis est cohérent avec lui-même, seulement avec lui-même. Parce que, vous savez, je lui ai dit, également, dans une précédente commission parlementaire, qu'au lieu de nous répéter ses discours, on pourrait, tout simplement, au Journal des débats, de l'autre côté, à la radiotélédif-fusion, reprendre la cassette et la faire jouer tous les jours, une heure par jour. Ça nous éviterait, évidemment, de devoir payer des gens, de l'autre côté, pour faire ce travail. On l'aurait en reprise! Mais, soyez assuré, les clubs vidéo, dans son comté, n'ont pas encore demandé la cassette pour fins de location. Soyez assuré!

Et là, M. le Président, on nous a présenté d'autres motions. Mon collègue, le député de Rousseau, a formulé une motion pour qu'on passe à l'adoption de l'article 1. Écoutez un peu, on a trouvé le tour, de l'autre côté, de nous faire des amendements pour passer à l'étude, plutôt, de l'article 10. Et, là, on s'est révisé; dans un mouvement de recul et de repli, on est revenu à l'article 4. Moi, j'ai été un peu renversé, parce qu'on est passé à 10 d'un coup. Je pensais qu'on allait passer à l'article 12, M. le Président, à l'adoption finale, d'un coup, mais non, on était à l'article 10. On sautait les autres. (15 h 50)

Vous savez, l'ordre de rédaction des projets de loi, M. le Président, ce n'est pas important, ça, pour le député de Lévis, et encore moins pour ses collègues, parce qu'ils étaient là à la table, souscrivaient, renforçaient, l'appuyaient, le soutenaient. Il était accompagné, évidemment, d'un recherchiste qui lui faisait bénéficier de ses excellents conseils et de son éclairage. On avait, vous savez, des belles lanternes devant nous autres. C'est extraordinaire.

Puis là on a fait deux autres amendements: un,

qu'on changeait le mot «revalorisation» pour «indexation». Puis on a refait, de l'autre côté, un amendement pour inscrire «civile» après les mots «pour l'année», référant à l'année financière de la Société de l'assurance automobile, pour inscrire «civile». Et là, M. le Président, on nous a fait un beau débat là-dessus, on nous a entretenus, évidemment, pendant de longues minutes, et, pour agrémenter tout ce débat riche d'histoire, tout en faisant toujours référence à Dracula, à «La cigale et la fourmi», aux ouaouarons. Des fois, on confondait, il y avait des bruits qui venaient de la salle, des bruits sourds, mais, enfin, on était dans la nature, M. le Président. Et là le député de Lévis nous a arrosés de ses propos pendant de nombreuses heures, accompagné de son collègue de Dubuc, puis il a eu les renforts du député d'Arthabaska, qui est venu porter main forte à son collègue de Lévis, vieil ami, et les gens qui ont aussi parcouru le Québec pour faire campagne pour le mener au leadership de son parti. M. le Président, c'est impressionnant.

On a débattu de tout ça pendant 10 h 10 min, toute la soirée de lundi soir, une partie de la journée de mardi puis de mercredi. M. le Président, il faut entendre ça en commission. Ce serait un délice pour certains enfants, vous savez, d'entendre «La cigale et la fourmi», puis, pour d'autres qui ont l'esprit un petit peu plus sanguinaire, d'entendre «Dracula» raconté et vu par le député de Lévis. M. le Président, les scénarios de films pourraient être enrichis considérablement. Ce ne serait pas étonnant qu'un jour ou l'autre on voie partir le député de Lévis pour la Californie pour devenir producteur cinématographique. Alors, la cinématographie vue par le député de Lévis.

M. le Président, si on avait voulu, de l'autre côté, procéder rapidement, on aurait déposé en vrac ces amendements. Bien non! On faisait le débat des motions dilatoires pour étirer, faire durer, perdurer le plaisir, pour se convaincre eux-mêmes qu'ils avaient raison. Or, M. le Président, j'aurai l'occasion... Parce qu'on en a découvert de superbes dans tout ça. Je suis allé faire une petite recherche à la bibliothèque et à l'intérieur des rapports d'activité. J'aurai l'occasion de vous recommenter ça au moment de l'étude du projet de loi plus en détail, et on vous communiquera ces informations-là pour ces purs et durs qui sont devant nous, vous savez, qui n'ont jamais puisé dans cette caisse, mais au grand jamais.

Et j'ai fait une petite addition rapide au fil des années. Eux ne faisaient pas ça avec un projet de loi. Ils arrêtaient d'envoyer l'argent tout simplement à la Régie. C'était plus simple et plus souple. Finalement, je comprends la référence aux culottes à Vautrin, là. Je comprends très bien ça. La grande noirceur, bref. Et, de cette façon-là, ils ont réussi subtilement à conserver 290 000 000 $ dans leurs coffres et à ne pas les transférer à la Régie de l'assurance automobile du Québec, qui est la compagnie mère de la Société.

Des voix: Ah! Ah!

M. Camden: M. le Président, pour ces raisons, je pense que ça mérite que la motion de suspension de nos règles soit adoptée par nos membres ici, pour faire en sorte qu'on procède, qu'on fasse le travail pour lequel on a été élus.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Lotbinière. M. le député de Westmount, vous disposez de cinq minutes.

M. Richard B. Holden

M. Holden: Merci, M. le Président. Le député de Lotbinière, au lieu de traiter cette question de bâillon sérieusement, comme il se doit, il aime mieux faire des farces aux dépens du député de Lévis. Quand il parlait de Dracula, j'avais l'impression que, au moins, si on parlait de Dracula, avec sa cravate rouge, il n'y aurait pas de tache sur lui s'il avait des problèmes avec Dracula.

M. le Président, le bâillon aujourd'hui est devenu chose courante, mais ça me fait penser, M. le Président, à la question de la perte de la démocratie et de la perte de la liberté, et à l'histoire du grand ministre protestant en Allemagne, pendant la période des nazis. Quand ils sont venus chercher les Juifs, il n'y a personne qui a parlé. Quand ils sont venus ? et je n'ai pas parlé moi-même ? chercher les catholiques, je n'ai pas parlé, je n'ai rien dit, parce que ça ne m'affectait pas. Quand ils sont venus me chercher, il n'y avait plus personne pour parler en ma faveur. C'est comme ça, petit à petit, qu'on perd la démocratie et qu'on perd la liberté.

S'il n'y a pas des gens comme le député de Lévis, et s'il n'y a pas d'Opposition pour parler contre le bâillon, chaque fois que ça revient devant la Chambre, on va perdre notre démocratie, on va perdre nos droits parlementaires, on va perdre notre liberté, parce que ça devient chose courante.

Alors, pourquoi écouter l'Opposition? On va adopter toutes les lois à la vapeur, par le bâillon, parce qu'on n'a plus besoin d'écouter l'Opposition. On n'a plus besoin d'écouter personne, on a juste à adopter les lois à la vapeur. En session intensive, par le bâillon, on en a adopté 23 une fois, quatre la dernière fois. Cette fois, on semble vouloir approcher ça une à la fois. Alors, je suppose qu'aujourd'hui on adopte cette loi à la vapeur, avec le bâillon, que, demain, ça va être le bill 142 et que, lundi, ça va être une autre loi. Alors, on va le faire une à la fois, cette année. Au lieu de le faire 23 à la fois, on va le faire une à la fois.

Mais ce n'est pas en ridiculisant les députés de l'Opposition que ça va résoudre le problème de la démocratie, et en faisant fi des arguments de l'Opposition. Ce n'était pas juste pour amuser le député de Lotbinière que le député de Lévis a parlé de scandale, du vol de 1 000 000 000 $ dans la caisse. C'était justement pour représenter le peuple. Le peuple québécois sait ce qui se passe par cette loi et ce qui se passe à cause de l'imposition du bâillon, ce soir. Ils savent que le gouvernement

n'est pas assez honnête pour dire au public: On a mal administré, on a besoin d'autres fonds. Alors, au lieu d'imposer des taxes et d'en subir les conséquences, on vole. On vole dans la caisse. On vole l'argent qui était censé être utilisé pour les victimes d'accidents. On fait fi de la moralité de ce geste. On ridiculise l'Opposition, on ne s'occupe plus des commissions parlementaires, on se moque des amendements et, finalement, on arrive à la fin de session, on adopte une loi à la vapeur, on ignore tous les arguments à ['encontre de ce geste absolument immoral. Là, on essaie de faire en sorte que le public ne sache pas, parce qu'on veut faire ça à la cachette, à la vapeur et par l'entremise du bâillon.

Dans le temps, le bâillon... En 1956, on a imposé le bâillon à Ottawa, M. le Président; c'était devenu un scandale. Le gouvernement est tombé à cause de l'usage du bâillon en 1956. Le gouvernement qui avait été là pendant 23 ans a été renvoyé du pouvoir à cause de l'imposition du bâillon. Aujourd'hui, on ne s'occupe plus du bâillon. On ne veut plus entendre parler l'Opposition, on accepte le bâillon. Ce gouvernement, maintenant, est tellement fatigué, usé. Il a abusé du pouvoir. Ils sont complètement en dehors de toutes les questions démocratiques. Ils ne veulent plus rien entendre de qui que ce soit.

Alors, le temps est venu, M. le Président, que ce gouvernement s'en aille, qu'il demande une élection. Le bâillon, ça va devenir le bâillon du peuple envers ce gouvernement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci. (16 heures)

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, merci, M. le député de Westmount. De la période de temps allouée au débat restreint, à savoir deux heures, il reste exactement sept minutes. C'est à vous de le faire, Mme la députée de Bellechasse.

Mme Louise Begin

Mme Begin: Merci, M. le Président. C'est en tant que membre de la commission de l'aménagement et des équipements que je désire intervenir sur la motion de suspension des règles qu'a présentée notre leader du gouvernement.

La commission de l'aménagement et des équipements, c'est elle qui a reçu mandat d'étudier article par article le projet de loi 130. Mais, comme l'ont dit les gens ici de ma formation, M. le Président, on en est toujours au paragraphe 1 de l'article 1 dudit projet de loi, et ça, après 11 heures. On est bien d'accord pour discuter, on veut discuter si les discussions portent à bonifier le projet de loi, mais ce n'est pas le cas. Après 11 heures, on en est toujours au projet de loi, puis avec des amendements qui, selon moi, sont dilatoires.

Quand on nous présente un amendement, M. le Président, pour ajouter, après «l'année 1996», le mot «civile», entre vous et moi, ça «ajoute-tu» de quoi au débat? Et, quand aussi on fait une dissertation sur est-ce qu'on doit utiliser le mot «indexer» ou le mot «revaloriser»... On a eu droit à presque 60 minutes, à savoir si on devait utiliser le mot «indexer» ou «revaloriser». Et, lorsqu'on regarde «Vocabulaire juridique», qui a été écrit par Henri Capitant, on s'aperçoit que «indexer» puis «revaloriser», c'est synonyme. Tout simplement, ce qu'on désire par le mot «revaloriser», c'est utiliser un terme français, le député de Lévis devrait être content, parce que, «indexer», ça vient d'un terme anglais; «revaloriser» est plus français.

Donc, ne venez pas admettre, M. le Président, que la commission fonctionne; ça ne fonctionne pas. On veut tout simplement empêcher la commission et l'Assemblée nationale d'adopter le projet de loi 130. Pourquoi on désire retarder l'adoption du projet de loi 130? Au dire du député de Lévis, on veut siphonner la SAAQ, puis, au dire du député de Westmount, on veut la voler.

Bien moi, si vous me le permettez, je vais prendre le rapport du Vérificateur général de cette année. On l'aborde souvent, on entend parler souvent du rapport du Vérificateur général. J'aimerais, lorsqu'on parle de la Société de l'assurance automobile du Québec, vous faire référence à un petit article, plus précisément au paragraphe 4 de l'alinéa 3 de l'article 5.293 à la page 211 où il est dit, puis je vais le citer, M. le Président: «Dans l'exercice de son mandat, la Société ? en parlant de la Société de l'assurance automobile du Québec ? doit prélever des cotisations en fonction de ses seuls besoins, y compris la constitution d'une réserve de stabilisation. Si celle-ci devient excessive ? écoutez bien ça, M. le Président ? le surplus doit être retourné à la couronne ? c'est qui, ça, la couronne, si ce n'est pas nous autres? ? puisque les biens de la Société font partie...»

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Excusez, Mme la députée de Bellechasse. Oui, M. le député de Lévis.

M. Garon: En vertu de notre règlement, M. le Président, il est interdit de parler d'une chose qui est sub judice. Il y a un procès devant les tribunaux actuellement là-dessus. Il y a une cause devant les tribunaux là-dessus, M. le Président, et c'est le ministre lui-même qui le disait lors des débats.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant! M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Cannon: Oui, M. le Président. Sur la même question de règlement, je vous inviterais à demander au député de préciser ce à quoi il réfère, d'une part, et, d'autre part, si ce n'est pas le cas, d'arrêter d'intervenir pour interrompre la députée de Bellechasse.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, si ce

que vous dites est exact, évidemment, on ne peut pas faire référence à une cause pendante devant les tribunaux, que ce soit... Un instant! Laissez-moi terminer, s'il vous plaît. En vertu de la règle 35, 3°, que ce soit une cause civile ou criminelle. Alors, si vous insistez, je vais suspendre les débats, on va vérifier si c'est le cas et on reviendra. Alors, je suspends les débats pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 4)

(Reprise à 16 h 14)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mmes et MM. les députés.

Alors, c'est la question de règlement soulevée par M. le député de Lévis, à savoir que Mme la députée de Bellechasse, dans son intervention, pouvait être en dérogation avec l'article 35, paragraphe 3°.

J'ai parlé et à M. le député de Lévis et à M. le ministre des Transports, responsable de la SAAQ, et je vous inviterais, Mme la députée de Bellechasse... Effectivement, il semblerait que ce à quoi vous faisiez référence est débattu devant les tribunaux, au moment où on se parle, quant au principe, quant à la question. Ce n'est pas un reproche que je vous fais, Mme la députée de Bellechasse, je rapporte les faits. Je rapporte les faits, je rapporte les faits. Alors, en vertu de l'article 35, 3°, étant donné qu'il s'agit d'une cause civile, vous devez être extrêmement prudente quant à la possibilité de causer un préjudice ? et vous connaissez la règle autant que moi ? à l'une ou l'autre des deux parties.

Alors, en résumé, je vous inviterais à, peut-être, continuer votre intervention, mais en laissant ce sujet de côté. Allez-y, Mme la députée de Bellechasse.

Mme Begin: De toute façon...

M. Cannon: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui.

M. Cannon: Sur la question de règlement qui a été soulevée, effectivement, vous dites que vous avez revérifié les galées et que vous avez communiqué votre réponse au député de Lévis, de même que...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): J'ai vérifié. J'ai vérifié avec les deux parties en cause.

M. Cannon: Oui, vous avez vérifié? De ma perspective à moi... Pardon!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Non, non. Allez-y, allez-y.

M. Cannon: Depuis quand, Mme la députée, que vous intervenez? Je parle au président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y. Allez-y, M. le leader adjoint.

M. Cannon: Ce que je dis simplement, M. le Président, c'est que, de ma perspective, et ce que mes collègues et moi nous avons constaté, c'est qu'en aucun cas et d'aucune façon ma collègue, la députée de Bellechasse, n'est venue en violation de cet article-là. Comme vous l'avez si bien dit, elle citait la page 211 du rapport du Vérificateur.

Donc, je conclus, M. le Président, comme je l'ai mentionné au tout début, que c'était une tactique dilatoire de la part du député de Lévis pour retarder ma collègue.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Article 35, paragraphe 3°: «35. Le député qui a la parole ne peut: «3° parler d'une affaire qui est devant les tribunaux ou un organisme quasi judiciaire, ou qui fait l'objet d'une enquête, si les paroles prononcées peuvent porter préjudice.»

Alors, évidemment, lorsqu'on parle de «peuvent», lorsqu'on dit textuellement «peuvent porter préjudice», c'est une question qui est très relative. Ce n'est pas deux et deux font quatre.

Alors, j'ai fait une mise en garde à Mme la députée de Bellechasse. C'est à vous à décider, à juger, après la mise en garde que je vous ai faite, si votre propos, si votre intervention, qui va se continuer à partir de maintenant, pourrait éventuellement causer un préjudice à l'une ou l'autre des deux parties. Allez-y, Mme la députée de Bellechasse.

M. Blais: M. le Président, question de règlement, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Sur quoi, M. le député de Masson?

M. Blais: Le fait de vous donner raison. Son temps est complètement écoulé, il ne reste aucune seconde.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Non, allez-y, continuez. Continuez votre intervention.

M. Blais: II ne reste aucune seconde, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je m'excuse. Pendant la suspension pour le délibéré, le temps alloué à madame ne courait pas. Allez-y, Mme la députée de Bellechasse.

M. Blais: Question de règlement, M. le Président.

Mme Begin: Ça fait mal, ça fait mal!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Question de règlement... Un instant! Question de règlement sur quoi, M. le député de Masson?

M. Blais: À cause de la répartition du temps. Voulez-vous me dire, de façon spécifique, combien il reste de temps aux ministériels, s'il vous plaît? J'ai vérifié, il n'en reste plus.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mme la députée de Bellechasse, vous disposez encore exactement de deux minutes. Allez-y.

Mme Begin: Merci, M. le Président. Ceci étant dit, je tiendrais à dire à cette Chambre et aux gens qui nous écoutent que le gouvernement du Québec agit d'une façon claire. On n'a qu'à s'en référer au rapport du Vérificateur général. Je demanderais à ces gens de vérifier la page 211. Il est clair que les biens de la Société immobilière du Québec sont du domaine public et, comme tels, appartiennent au gouvernement.

Ceci étant dit, M. le Président, j'aimerais aussi dire à cette Chambre que, par le projet de loi qui est devant vous, le projet de loi 130...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant, Mme la députée de Bellechasse.

M. le député de Masson, le personnel qui est en avant de moi répond à la présidence et à aucun autre député. Alors, je vous demanderais, s'il vous plaît, d'écouter la députée de Bellechasse et non pas d'invectiver, comme vous le faites, le personnel de la table.

M. Blais: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, Mme la députée de Bellechasse, allez-y. L'incident est clos.

M. Blais: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y, Mme la députée de Bellechasse.

M. Blais: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Sur quoi? M. Blais: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Sur quoi? Allez-y, allez-y.

M. Blais: Je vais vous le dire. Je n'ai pas invectivé la table devant vous, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, c'est une question d'interprétation. L'incident est clos. Allez-y, Mme la députée de Bellechasse.

Mme Bégin: Bon, ceci étant dit, M. le Président, le projet... La motion de suspension veut aussi nous permettre d'en finir avec le projet de loi 130, d'autant plus que ce projet de loi 130 là donne suite au discours sur le budget du ministre des Finances, du 20 mai 1993. Donc, je vais être en faveur de la motion, parce que je veux, pour le bien du gouvernement, qu'on puisse adopter le plus vite possible le projet de loi 130. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée de Bellechasse.

Cette dernière intervention met fin au débat sur cette motion de clôture de M. le leader adjoint du gouvernement, motion que je vais, à partir de maintenant, mettre aux voix. Alors, vous demandez un vote enregistré, M. le whip de l'Opposition officielle?

M. Brassard: Oui.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle les députés, s'il vous plaît! (16 h 19 - 16 h 29)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): S'il vous plaît, Mmes et MM. les députés, je vous demande de regagner vos banquettes.

Mise aux voix

Je vais maintenant procéder à la mise aux voix de la motion suivante. Est-ce que la motion de M. le leader adjoint du gouvernement et ministre des Communications proposant la suspension de certaines règles de procédure en vertu des articles 182 et 183 du règlement de l'Assemblée nationale est adoptée? (16 h 30)

Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Rémillard (Jean-Talon), M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Charlesbourg), M. Bourbeau (Laporte), M. Dutil (Beauce-Sud), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Sirros (Laurier), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Savoie (Abitibi-Est), M. Middlemiss (Pontiac), M. Cherry (Sainte-Anne), M. Cannon (La Peltrie), M. Cusano (Viau), M. Blackburn (Roberval), Mme Bleau (Groulx), M. Houde (Berthier), M. Maciocia (Viger), M. Maltais (Saguenay), Mme Trépanier (Dorion), M. Bel isle (Mille-îles), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel (Sherbrooke), M. Doyon (Louis-Hébert), Mme Bégin (Bellechasse), Mme Pelchat (Vachon), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Lemire (Saint-Maurice), M. MacMillan (Papineau), M. Thérien (Rousseau), M. Benoit (Orford), M. Dauphin (Marquette), M. Poulin

(Chauveau), M. Fradet (Vimont), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Charbonneau (Saint-Jean), M. Bradet (Charlevoix), M. Joly (Fabre), M. Camden (Lotbinière), M. Gautrin (Verdun), M. Forget (Prévost), M. LeSage (Hull), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Lafrenière (Gatineau), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Audet (Beauce-Nord), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brouillette (Champlain), M. Després (Limoilou), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Khelfa (Richelieu), M. Lafrance (Iberville).

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), M. Perron (Duplessis), M. Biais (Masson), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Artha-baska), Mme Juneau (Johnson), Mme Caron (Terre-bonne), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), M. Morin (Dubuc), M. Filion (Montmorency), M. Holden (Westmount), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), M. Bélanger (Anjou).

M. St-Roch (Drummond).

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a des abstentions?

Le Secrétaire: pour: 57 contre: 22 abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, la motion est adoptée. M. le leader du gouvernement. Alors, M. le leader... Oui, Mme la députée de Mégantic-Compton.

Dépôt du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Mme Bélanger: Alors, M. le Président, je dépose le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé les 6, 7 et 8 décembre 1993 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 130, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile et d'autres dispositions législatives. L'étude détaillée du projet de loi n'a pas été complétée.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, en vertu de la motion elle-même, je dois, à partir de maintenant, suspendre les travaux de l'Assemblée.

M. Chevrette: ...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, oui, M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: Est-ce que c'est bien la règle? Parce que la commission avait été convoquée pour 11 heures, ce matin, et, par après... C'est-à-dire, pas convoquée parce que le leader a changé d'avis, il ne l'a pas rappelée pour 15 heures dans les avis que l'on avait. Normalement, est-ce que, M. le Président, la commission ne doit pas répondre à un ordre de la Chambre?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Moi, je dois m'en tenir au contenu de la motion qui vient d'être votée, qui dit, à sa page 2: «Que [...] tout député puisse, au plus tard une heure après le dépôt dudit rapport, transmettre au bureau du secrétaire général copie des amendements qu'il entend y proposer; les travaux de l'Assemblée soient alors suspendus jusqu'à l'expiration de ce délai».

Alors, moi, je suis lié par la motion elle-même et je dois, à. partir de maintenant, suspendre les travaux de l'Assemblée.

(Suspension de la séance à 16 h 36)

(Reprise à 17 h 51)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre place.

M. Chevrette: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: Est-ce que je dois attendre le dépôt des amendements? Parce que j'ai une question de... Comme je les ai eus, là, j'aurais une question de règlement à vous poser.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ce que je vais faire, nous allons entreprendre la procédure, et je vous donnerai la parole au niveau de la recevabilité.

Prise en considération du rapport

de la commission qui en a fait l'étude

détaillée et des amendements du ministre

Alors, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi 130, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile et d'autres dispositions législatives, ainsi que les amendements transmis par M. le ministre des Transports aux articles 3 et 11 du projet de loi. Ces amendements sont receva-bles.

M. le leader de l'Opposition officielle.

Débat sur la recevabilité des amendements

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, j'ai lu l'amendement qui est proposé par le ministre à l'article 3. Et je voudrais vous soumettre une question de règlement et vous demander de le juger irrecevable pour les motifs suivants...

M. Cannon: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur la question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Cannon: Oui. Je comprends, là, ce qui va se produire, mais le président vient de déclarer les deux amendements recevantes. Donc, la décision est rendue.

M. Chevrette: Je voudrais expliquer, M. le Président, que la présidence ne peut même pas le déclarer recevable, et je vais expliquer les motifs.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vais vous écouter, M. le leader.

M. Chevrette: Et l'article de la procédure de règlement...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Il y a juste un président ici, là. Si vous voulez poursuivre.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. M. le Président, la loi, quand on lit les notes explicatives, est claire comme deux et deux font quatre. La loi vise une seule chose, c'est de répondre au discours du budget. Le ministre des Finances s'est levé en cette Chambre, il a lu un discours du budget, puis il a dit: II faut aller chercher tant d'argent sur trois ans. C'est ça, le principe de la loi, alors que l'amendement à l'article 3, M. le Président, est beaucoup plus que donner suite à cet ordre du ministre des Finances qu'on a le devoir, comme Parlement, de transformer maintenant dans un texte légal. L'amendement proposé fixe les montants que devra verser la SAAQ au fonds consolidé, concernant le coût des services de santé occasionné par les accidents d'automobile.

Donc, à notre point de vue, M. le Président, le ministre des Transports outrepasse carrément l'objectif même, les principes mêmes votés en deuxième lecture dans cette Chambre, et on n'a pas le droit d'introduire de nouveaux principes dans une législation. Le principe était d'aller donner des suites, M. le Président, au discours du budget, donc d'aller chercher les montants fixés dans le discours du budget. Toute somme addition- nelle, M. le Président, qui devrait être annoncée devrait l'être d'abord par un message du lieutenant-gouverneur en conseil et par une déclaration à cette Chambre du ministre des Finances qui dirait: Je change les montants que j'avais prévus, comme ministre des Finances, en date du x du mois d'avril l'an dernier. Ça, c'est une première chose.

La deuxième chose, M. le Président, le principe de la loi ne prévoit pas non plus de modifier la Loi sur l'assurance automobile pour changer la mécanique. Nulle part dans les notes explicatives on ne peut voir apparaître un principe qui dit que nous changeons la mécanique du décret, tel que prévu dans la loi, pour fins d'établissement des coûts pour l'assurance-accidents. Nulle part.

Donc, M. le Président, deux raisons fondamentales. La première: il n'y a jamais eu d'annonce qu'on pouvait en permettre plus. Il n'y a pas eu de message du lieutenant-gouverneur. Il n'y a pas eu de nouvelle déclaration de la ministre des Finances. Ça, c'est un premier point très sérieux. Le deuxième, c'est qu'on n'a jamais adopté un principe de changer les modalités de la législation, M. le Président.

Il s'agit d'un nouveau principe qui n'est absolument pas traité dans le projet de loi 130, tel qu'adopté par l'Assemblée lors de l'étude du principe. Le principe du projet de loi, M. le Président, est de donner suite au discours sur deux points seulement, à part ça: les garanties de revenus que la SAAQ fournit au gouvernement et les sommes à être versées par la SAAQ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, je m'excuse. Question de règlement, oui.

M. Cannon: Je m'excuse d'interrompre mon collègue, M. le Président. Je voudrais simplement que, pour les fins de la procédure, je puisse bien comprendre ce qui se déroule.

Vous avez pris la responsabilité des débats en étant informé par les gens de la table qu'effectivement il y avait deux amendements que vous avez jugé recevables de votre siège, de votre fauteuil. Après quoi le leader de l'Opposition s'est levé pour faire une plaidoirie. Est-ce que je comprends que vous revenez sur votre décision et qu'on outrepasse l'article 41, ou vous écoutez la plaidoirie...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non, moi, je...

M. Cannon: Non, c'est parce que c'est... Je veux simplement comprendre, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non, ça va, je vais vous le dire. Oui, oui, je comprends, oui.

M. Cannon: Parce que, si, ça, c'est le cas, ça change un peu, là, la façon dont on va procéder, vous comprendrez.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le leader adjoint du gouvernement, le leader de l'Opposition officielle, suite au dépôt de ses deux amendements, a des revendications à faire, un plaidoyer à faire, que j'écoute. J'écoute parce que c'est une chose que... C'est des informations qui me sont données qui n'ont probablement pas été analysées lorsqu'on a étudié la recevabilité de ces amendements-là, et je me dois de l'écouter.

Alors, je continue à vous écouter, M. le député.

M. Cannon: Donc, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Et je vais vous écouter après, sur ses arguments.

M. Cannon: Non, non, je ne veux pas argumenter là-dessus. Je veux savoir si, oui ou non, M. le Président ? et je m'excuse, là, d'être directif ? je veux savoir si, oui ou non, le leader de l'Opposition est en train de discuter en appel de votre décision en vertu de 41.

Vous avez dit, je vous ai clairement entendu, les parlementaires vous ont entendu, vous avez jugé ces amendements-là recevables. Je dois donc présumer que les officiers, vos conseillers juridiques ont analysé cette question-là, vous ont fait rapport et parce qu'on a précisément prévu une heure pour les déposer et les analyser. Si, maintenant, il y a une plaidoirie qui se fait, je pense que, légitimement, elle se fait dans un contexte qui n'est pas celui dans lequel elle doit se faire. Vous l'avez jugé recevable.

M. Chevrette: Sur la question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur la question de règlement, M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: M. le Président, j'ai pris la peine de me lever avant même que vous ne déposiez le rapport. Il faut se rappeler ce qui s'est passé en cette Chambre. J'ai pris la peine de vous dire que je jugeais un amendement irrecevable. J'ai pris la peine de vous dire cependant: Bien, écoutez, appelez-vous le rapport avant ou si je dois plaider tout de suite? J'ai pris toute cette précaution-là, M. le Président, avant de plaider. Vous m'avez dit: Je vais recevoir le rapport et vous plaiderez ensuite. Ce n'est pas moi, naturellement, qui préside. J'ai pris la peine de le faire parce que je jugeais fondamentalement que l'amendement no 3 était irrecevable. Donc, je ne peux pas avoir fait plus, moi, comme leader, pour vous demander l'opportunité de plaider. Je ne peux pas avoir demandé plus que ça.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, avant de commencer les travaux, M. le leader adjoint du gouvernement, M. le leader de l'Opposition officielle m'a informé, avant que les travaux ne commencent, qu'il avait une question de règlement. Je ne savais pas de quelle nature était la question de règlement. Alors, sa question de règlement, il la fait sur la recevabilité. Alors, j'ai peut-être été un peu vite; j'aurais peut-être dû lui donner la possibilité de faire cette question de règlement là avant qu'on ne commence. Et, comme je l'ai déclarée recevable, pour le moment, je décide de l'écouter, et peut-être que je réviserai, s'il y a lieu, la recevabilité que je vous ai mentionnée tantôt. Et je poursuis à vous écouter, et je me dois de l'écouter.

M. Cannon: O.K. Non, je veux juste comprendre, là, M. le Président. Là, je résume. Vous me dites que, lorsque vous les avez jugés recevables, vous n'étiez pas prêt à les juger recevables. Là, ce que vous me dites, c'est que vous allez écouter la plaidoirie de mon collègue, le leader de l'Opposition officielle, à l'égard de l'amendement qui est déposé à l'article 3 et, après quoi, vous allez, j'imagine, soit de votre fauteuil ou en délibéré, prendre quelques instants pour y réfléchir. Donc, nous revenons, et ce que vous m'avez dit tantôt quant à la recevabilité ne compte plus. (18 heures)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est-à-dire que le leader de l'Opposition officielle, tel que je vous l'ai mentionné, m'a informé qu'il avait une question de règlement. Habituellement, il n'avait pas besoin de m'in-former, il aurait pu se lever dès le début. Il l'a fait et, étant donné qu'on a un ordre de la Chambre, donc j'ai commencé à informer la Chambre que nous en étions à la prise en considération et que les amendements étaient déclarés recevables, mais je ne savais pas que M. le leader de l'Opposition officielle voulait intervenir sur la recevabilité des amendements. Donc, j'ai peut-être été prématuré, pour moi, de les déclarer recevables, mais je lui permets de faire le plaidoyer qu'il a à me faire et je déciderai s'il y a lieu.

M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: M. le Président, pour bien se faire comprendre, je considère, dès le départ, qu'il y a un nouveau principe, alors que le projet de loi avait deux principes: la garantie de revenus de la SAAQ fournie au gouvernement et les sommes à être versées, de la SAAQ, au fonds consolidé, le 1 000 000 000 $ prévu.

Le nouveau principe qui est introduit, M. le Président, ça fixe les montants que devra verser la SAAQ au fonds consolidé, concernant le coût des services de santé occasionnés par les accidents d'automobile au Québec. Quand vous lisez les notes explicatives, vous vous rendez bien compte que c'est un nouveau principe. Notre règlement dit bien, et vous pourrez vous référer, M. le Président, à la décision du président d'une commission, ici, lorsqu'on a, précisément, à part ça... Rappelez-vous, c'est sur la loi qui traitait de l'assurance-automobile, il y a plusieurs années. En l'occurrence, Mme Payette, qui était ministre, à l'époque, de Fassurance-automobile du Québec, avait présenté un nouveau principe dans la loi. Jean-François Bertrand

avait dit: Je ne peux pas recevoir l'amendement parce qu'il y a un nouveau principe dedans.

Après qu'on a adopté le principe, ici, M. le Président, on ne peut pas modifier les principes, d'aucune manière. On ne peut pas, après que c'est adopté comme principe, aucune commission parlementaire, et, même si la loi, même si les règlements, aujourd'hui, ont suspendu un paquet d'articles, on ne peut pas modifier. C'est dans le temps et la façon de faire, mais on ne modifie pas le processus d'adoption législatif. En d'autres mots, la plénière de une heure ? pour présenter des amendements ? ne donne pas plus de droit, ni à un ministre, ni à un membre de l'Opposition, d'introduire un nouveau principe dans la législation, M. le Président.

En aucune façon, la fixation des montants concernant les coûts de santé n'a fait l'objet du projet de loi 130. En aucune façon! Au contraire, ces contributions sont prévues dans un autre chapitre de l'assurance automobile et sont soumises à une mécanique de fixation par décret, qui est déjà en branle, d'ailleurs, M. le Président, et qui est devant la commission de l'aménagement et des équipements. D'ailleurs, le seul article du projet de loi 130, l'article 3, qui discute du sujet des coûts de santé, vise justement à insérer une rétroactivité, lorsque les montants auront été fixés par le gouvernement, suite au rapport de la commission de l'aménagement et des équipements.

Pour toutes ces raisons, l'amendement est un principe complètement nouveau, qui court-circuite l'Assemblée, M. le Président, et il doit être rejeté. La protection de la présidence est d'autant plus importante, M. le Président, que nous sommes en pleine suspension des règles de procédures et que nous sommes limités dans le temps. Le gouvernement ne peut profiter d'une telle suspension des règles pour faire n'importe quoi au niveau de la recevabilité des amendements. Aux dernières nouvelles, M. le Président, ces règles valent toujours.

Et j'ajoute le deuxième point que j'ai donné au début, M. le Président. Quand on lit l'amendement, en plus, c'est rendu qu'en 1992 il y a 9 000 000 $ additionnels. Sommes additionnelles: en 1993, une somme additionnelle de 10 167 776 $. Pour l'exercice financier 1994, une augmentation de 92 185 000 $, somme additionnelle. M. le Président, est-ce que vous avez reçu un message du lieutenant-gouverneur en conseil? Est-ce que la ministre des Finances s'est levée en cette Chambre pour vous dire: En plus des sommes que j'ai décrétées dans mon budget en avril dernier... Est-ce que le ministre des Transports est habilité à aller chercher plus? Il n'y a pas un ministre dans cette Chambre, pas un député sauf le ministre des Finances qui est habilité à aller chercher des sommes plus grandes que celles qu'il a annoncées lui-même. Ça, c'est clair, M. le Président. C'est dans les coutumes parlementaires. C'est dans le droit parlementaire.

Et, pour ces deux motifs, M. le Président, vous devez les juger irrecevables, mais plus particulièrement parce qu'on ne peut introduire aucun nouveau principe, aucun, de quelque façon que ce soit, dans une législation après que l'Assemblée nationale ait adopté le principe de deuxième lecture ici. Ça m'apparaît clair, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le leader de l'Opposition officielle. M. leader adjoint du gouvernement.

M. Jean-Pierre Bélisle

M. Bélisle: Oui, M. le Président. Afin d'être très précis et concis, si je prends le texte du projet de loi 130, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile et d'autres dispositions législatives, et que je regarde seulement les notes explicatives qui sont en première page, il n'y a pas deux principes, il y a trois principes. Premier principe, au deuxième paragraphe, le projet de loi 130 «autorise le gouvernement à fournir à la Société de l'assurance automobile du Québec une garantie de revenus pour assurer son autonomie financière et introduit une disposition permettant au gouvernement de revaloriser, à compter de 1996, les contributions d'assurance». On parle des contributions d'assurance de base. Ça, c'est le premier principe.

Deuxième principe, troisième paragraphe des notes explicatives, qui sont un miroir fidèle, M. le Président, du projet de loi. Deuxième principe: Le projet de loi 130 «modifie, en outre, la Loi sur la Société de l'assurance automobile du Québec afin de permettre le versement au fonds consolidé du revenu, pour les exercices financiers 1993-1994 et 1994-1995 du gouvernement, des sommes prévues au Discours sur le budget.» Alors, les sommes qui étaient précisées au discours du budget sont prévues à l'intérieur même de ce projet de loi.

Mais également, ce que le leader de l'Opposition a oublié de voir dans le projet de loi, c'est le troisième principe. Il y a un troisième principe qui est aux notes explicatives. Et jamais le leader de l'Opposition ou les gens de l'Opposition ne se sont objectés à l'existence d'un troisième principe. Et je lis, M. le Président: «Enfin, ce projet de loi précise la disposition autorisant le gouvernement à réévaluer le montant des coûts des services de santé occasionnés par les accidents d'automobile et comporte des modifications de nature technique et de concordance.»

Alors, M. le Président contrairement à ce que le leader de l'Opposition vient de vous énoncer comme position, c'est inexact de dire que le projet de loi ne comporte que deux principes. Le projet de loi comporte trois principes. Et l'amendement qui est sous étude présentement, et l'amendement à l'article 155.3, qui est contenu au projet de loi à l'article 3, à la page 4, le texte initial se lisait, dans le projet de loi ? je regarde à la page 4: «Lorsque la somme visée à l'article 155.1 a déjà été versée par la Société pour l'année où le gouvernement fixe une nouvelle somme en vertu du présent article, le gouvernement peut, pour tenir compte de

l'évolution du coût des services de santé occasionnés par les accidents d'automobile, établir par décret un montant additionnel devant être versé par la Société et représentant l'écart entre la somme déjà versée pour cette année et la nouvelle somme fixée en vertu du présent article.»

Encore une fois, il est inexact de dire, comme le dit le leader de l'Opposition, que l'introduction du projet de loi 130, lorsqu'il a été déposé à l'Assemblée nationale en première lecture et lors du dépôt, ne contenait pas ce troisième principe là d'ajuster ? je relis, là ? «un montant additionnel devant être versé par la Société et représentant l'écart entre la somme déjà versée pour cette année ? ce qui a déjà été prévu ? et la nouvelle somme fixée en vertu du présent article» pour l'évolution du coût des services de santé. Si les services de santé coûtent plus cher au Québec en 1994 ou en 1995, le gouvernement peut le faire par décret. C'est ce que ce texte dit.

Or, ce que dit le leader de l'Opposition, ce n'est pas fondé, M. le Président. C'était dans le projet de loi. C'est un principe qui est dans le projet de loi. Ce n'est pas un nouveau principe. Ce que vient faire seulement l'amendement 155.3, c'est de préciser la méthode, effectivement, et les montants respectifs de cet écart-là qui est prévu. Alors, je lis l'amendement qui a été déposé, que vous avez déclaré recevable tantôt, M. le Président: «...pour tenir compte de l'évolution du coût des services de santé...» Alors, qu'on ne vienne pas me dire que ce n'est pas un principe qui était à l'article 3 du projet de loi. Je vous répète le texte: «...pour tenir compte de l'évolution du coût des services de santé occasionnés par les accidents d'automobile, établir par décret un montant additionnel devant être versé.» Je continue dans le nouvel amendement, M. le Président: «La Société verse au fonds consolidé du revenu, premièrement, pour l'exercice financier de 1992 de la Société, en outre du montant de 78 000 000 $, qui est le montant de base déjà versé en application de l'article 155.1?tout à fait logique parce qu'on fait référence à l'article 3, on y dit ? une somme additionnelle de 9 987 992 $». Et quelle est l'origine de ce montant, M. le Président? C'est simple. L'article 3 du projet de loi 130, tel que déposé, c'est un écart de l'évolution du coût des services de santé occasionnés par les accidents d'automobile. Nous le connaissons maintenant, ce montant. Donc, nous le mettons dans le projet de loi. (18 h 10)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, s'il vous plaît! J'ai écouté tantôt le leader de l'Opposition officielle. Je pense que les gens l'ont écouté ici, et je vous demanderai de ne pas argumenter. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: M. le Président, c'est suffisamment technique pour... J'essaie du mieux que je peux de vous expliquer ce qui se passe avec l'amendement qui est ici. Le deuxièmement de cet amendement-là, le nouvel article qui a été déposé, l'amendement qui vous a été déposé précise cet écart dans l'évolution des coûts de santé pour l'année 1993, l'année qui s'écoule. Alors, je lis le texte: «pour l'exercice financier 1993 de la Société, en outre du montant de 80 298 830 $ déjà versé ? c'est-à-dire que, conformément à la loi qui existe comme elle existe, le 155.1, dans le texte avant l'introduction du projet de loi 130, nous ajoutons «déjà versé», parce que ça a déjà été versé ? une somme additionnelle de 10 167 776 $». C'est ce qui fait suite au document qui est là, dans le projet de loi, à l'article 3, et c'est ce qui précise le montant exact parce que nous le connaissons.

Et enfin, M. le Président, «pour l'exercice financier 1994 de la Société, une somme de 92 185 472 $, conformément aux modalités prévues», ce qui est permis par la loi au troisième alinéa de l'article 155.1. Et 155.1 existe déjà, là. Ce n'est pas dans le projet de loi 130 qu'il a été introduit, le 155.1, là; 155.1 existe déjà dans la loi bien avant l'introduction du projet de loi 130.

Alors, je ne pense pas que le leader de l'Opposition vienne nous dire ce soir que, ce qu'on fait en vertu d'une loi qui a déjà été adoptée il y a belle lurette par l'Assemblée nationale, ce n'est pas recevable. Il ne peut pas demander la non-recevabilité de ce qui s'est fait il y a 10 mois ou un an à l'Assemblée. C'est simplement un projet de loi de concordance et de précision.

Moi, je pense qu'en termes de saine administration, au lieu de s'objecter à ce que les gouvernements qui nous succèdent à la tête du Québec, qui mettent des belles phrases dans les projets de loi, qui ne spécifient pas les coûts et les montants en frais et coûts additionnels pour telle et telle chose ? exemple, l'évolution d'un coût spécifique dans tel domaine ? et qui le précisent dans un projet de loi...

Moi, pour un, comme parlementaire, j'ai déposé un projet de loi devant cette Assemblée, le projet de loi 195, où j'ai drôlement besoin de savoir c'est quoi les coûts exacts pour la population, c'est quoi les coûts exacts pour la société, pour faire mon travail de député. Qu'on ne vienne pas me dire ici que le fait de l'insérer dans un projet de loi, comme amendement, que ça vient mettre un nouveau principe qui était déjà évoqué dans les notes explicatives mêmes, au dernier paragraphe des notes explicatives. En plus, déjà, à l'article 155.1 de la loi, qui existe depuis x mois, et où, en plus, à l'article 3, on a déjà, lors du dépôt du projet de loi, indiqué que le gouvernement pouvait se réserver, en fonction d'un décret, de le préciser. C'est beaucoup mieux, M. le Président, que ça se fasse devant l'Assemblée nationale, dans la loi, que ça se fasse par décret. Si le leader de l'Opposition, effectivement, me conteste là-dessus, qu'il pose la question au député de Lévis, qui est à côté, M. le Président, pour lui demander, effectivement, s'il préfère que ce soit dans un décret ou s'il préfère que ce soit fait dans une loi.

M. Chevrette: M. le Président, je veux ajouter...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure, oui. M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Donc, M. le Président, à l'article 3 du projet de loi 130, c'est une mécanique qui est prévue, une mécanique accessoire, même. Le principal venait de la loi et également de la commission de l'aménagement et des équipements. Là, avec l'amendement, on veut introduire le principe suivant: Dorénavant, dans la loi, on fixera des montants fixes, alors que ce n'est pas ça que dit la loi 130, même dans le troisième principe qu'il veut introduire.

M. le Président, la loi dit qu'il y a un montant prévu, qu'on peut l'indexer, qu'on peut le modifier, mais que le tout est soumis à une mécanique bien précise. La mécanique qui est prévue dans la loi, M. le Président, c'est qu'on passe par la commission de l'aménagement et des équipements et, suite à ce rapport, le gouvernement doit décider. Donc, M. le Président, qu'on ne vienne pas nous dire.

Regardez l'article 3, tel que rédigé. D'ailleurs, c'est pour échapper ? il faut bien le dire, ils ne les diront pas, eux, les vrais motifs ? justement au principe de la soumission et à l'étude de la commission de l'aménagement et des équipements qu'on veut introduire ce nouvel amendement, M. le Président.

L'article 3, tel qu'il est rédigé, c'est: «Lorsque la somme visée à l'article 155.1 a déjà été versée par la Société pour l'année où le gouvernement fixe une nouvelle somme en vertu du présent article, le gouvernement peut, pour tenir compte de l'évolution du coût des services de santé ? exactement comme on parle, là, la mécanique? [...] établir par décret un montant additionnel devant être versé par la Société et représentant l'écart entre la somme déjà versée pour cette année et la nouvelle somme fixée en vertu du présent article. Le décret prévoit les conditions et les modalités de ce versement.»

M. le Président, il est clair que, le ministre des Transports, ce qu'il vise, c'est à introduire, dorénavant, que les montants soient fixés par la loi et éviter toute la procédure. Ça, ils ne se sont pas engagés, au niveau des principes, à modifier la procédure de paiement pour ces fins-là. Je vais demander à... Le leader du gouvernement a invité à ce que je fasse appel au député de Lévis, qui connaît encore mieux le projet de loi que moi, pour bien lui dire si c'est vrai ou si c'est faux qu'on introduit un nouveau principe.

M. Bélisle: M. le Président. M. Chevrette: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Bélisle: Écoutez...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je m'excuse. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: M. le Président, on va argumenter à deux sur la recevabilité. On argumente à trois. Ce n'est pas ça, là. Ce n'est pas ça, là, ce qui est posé comme question. Est-ce que vous me permettez une courte réplique, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, allez-y. M. Jean-Pierre Bélisle

M. Bélisle: Bon. Moi, je préfère de beaucoup, puis c'est une question de principe, avoir, dans un...

M. Chevrette: C'est une question de règlement.

M. Bélisle: M. le Président, je prends au mot ce que le leader de l'Opposition vient de nous dire quand il nous dit: C'est une question de règlement. Je pense qu'on a assez taponné avec les règlements dans notre société qu'il est peut-être temps qu'on voie, dans les projets de loi, comme payeurs de taxes, c'es.t quoi les montants que le gouvernement vient chercher dans nos poches. Et qui va faire le reproche au gouvernement du Parti libéral du Québec de venir préciser un article en disant: Pour telle année, telle année, telle année, voici les coûts pour la société? Le leader de l'Opposition est fort mal placé pour venir nous dire ça, M. le Président. Je pense, là, qu'en termes d'administration publique, puis en termes de recevabilité, si ça, ce n'était pas rece-vable, je pense qu'on est parti sur une drôle de mauvaise «track» en termes de gestion des fonds de l'État au Québec.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député. Courte intervention, M. le député de Lévis, très brève, et je vais regarder ça.

M. Jean Garon

M. Garon: C'est tellement vrai ce qu'a dit le député de Joliette, qu'on va contre la disposition de la loi à l'article 155.1 à 115.3, parce que les deux premiers alinéas fixent les montants pour l'exercice financier 1992 et le deuxième, pour l'exercice financier 1993, en mettant les montants dans le projet de loi, alors que c'est un projet de décret du ministre actuellement qui est devant la commission de l'aménagement et des équipements. Et c'est pour ça qu'il veut abolir, dans ses amendements, l'article 11 qui donnait un effet rétroactif, parce que, essentiellement, en vertu de 155.3, le gouvernement peut revaloriser les montants des frais seulement à tous les trois ans: en 1989, en 1992 et en 1995. En 1992, il a omis de le faire. Et, comme j'étais à la commission, j'ai soulevé moi-même la question au fonctionnaire du ministère, au chef du contentieux, Me Gélinas, et il m'a dit: Bien, il y a un projet de loi qui a été déposé devant l'Assemblée nationale qui va permettre de donner un effet rétroactif à ce qui va être décidé en commission.

Mais, à ce moment-là, le projet que nous avons

en commission, M. le Président, sur lequel nous avons commencé à délibérer, comporte l'exercice financier 1992 et 1993, mais on voit que, dans le projet de loi, ici, on rajoute en plus un troisième alinéa, l'exercice 1994, alors que, là, on revient à indexer, en vertu de 155.1, selon un paragraphe pour lequel les chiffres ne sont mêmes pas encore connus, M. le Président, puisque l'indexation du montant du deuxième paragraphe se fait selon l'article 119 de la Loi sur le régime de rentes du Québec et que l'année 1993 n'est pas finie. On n'a même pas les chiffres d'indexation du mois de décembre. Il faut quand même laisser le temps d'avoir les chiffres d'indexation.

Alors, M. le Président, c'est complètement en dehors du projet. Je suis estomaqué de voir cet amendement-là, et la preuve, la meilleure preuve, c'est que le gouvernement abolit son article 11 parce qu'il sait qu'il n'en a plus besoin, à ce moment-là, parce qu'il a fait par loi ce que, normalement, il aurait dû faire, puis c'est ça qu'il voulait faire: donner un effet rétroactif au projet de décret du ministre qui est étudié en commission parlementaire et pour lequel le rapport n'a pas été fait parce que le pouvoir rétroactif n'existait pas dans la loi actuelle. Et, à ce moment-ci, il écarte tout le processus qui est prévu dans la loi aux articles 155.1 et 115.3 pour fixer dans la loi, maintenant, avec cet amendement-là, les montants qui doivent être fixés d'une autre manière, prévue à la Loi sur l'assurance automobile, M. le Président. (18 h 20)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Lévis. Alors, suite aux arguments que j'ai écoutés des deux côtés, je vais suspendre... Un instant! Oui, M. le leader?

M. Bélisle: Simplement pour savoir, en termes d'agencement de l'horaire de l'Assemblée, pour les membres de l'Assemblée, M. le Président... Vous savez qu'on doit continuer de siéger en vertu de l'ordre de la Chambre. Est-ce que vous pourriez nous donner, à tout le moins, une indication parlementaire aux ci-présents, vers quelle heure vous allez revenir en Chambre?

M. Chevrette: Moi, M. le Président, j'aurais une suggestion à faire au leader.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, je vais vous écouter, M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: Étant donné, M. le Président, que c'est quand même... Même si l'ordre... Il y a quand même... On connaît les limites dans le temps de toute l'adoption de ce processus-là. Et, compte tenu de l'heure, il serait peut-être intéressant qu'on ajourne pour l'heure du souper et qu'on revienne, après cela, à une heure correcte, sur consentement des deux parties.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Écoutez bien. Moi, je ne peux pas... Je m'excuse. Je ne peux pas vous dire combien ça va prendre de temps pour analyser ça. Nous allons l'analyser dans les plus brefs délais. Compte tenu qu'il y a un ordre de la Chambre, c'est sûr que je vais suspendre. Combien de temps ça va prendre? Je ne peux pas vous le dire. Mais, s'il y a un consentement, vous savez que, lorsqu'il y a un consentement unanime, ici, je pourrais suspendre d'une façon provisoire...

M. Chevrette: Pour une heure...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...en tout cas, pour un certain temps, et quitte à y revenir.

M. Bélisle: Jusqu'à 19 h 30, jusqu'à 19 h 30, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Puis, si ma décision n'est pas prise... Alors, je vais suspendre de consentement...

M. Chevrette: Jusqu'à 19 h 30.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...l'Assemblée jusqu'à 19 h 30.

(Suspension de la séance à 18 h 21)

(Reprise à 20 h 23)

Décision du président sur la recevabilité

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre place.

Alors, je vais maintenant rendre ma décision quant à la recevabilité des amendements présentés par M. le ministre des Transports aux articles 3 et 11 du projet de loi 130, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile et d'autres dispositions législatives.

Ces deux amendements sont recevables pour les motifs suivants. Les amendements ne vont pas à l'encon-tre du principe du projet de loi. Les principes que renferme le projet de loi 130 sont, à mon avis, le financement de la Société de l'assurance automobile du Québec, la SAAQ, et le versement de sommes par la SAAQ au fonds consolidé du revenu. L'article 3 du projet de loi prévoit le versement de sommes par la SAAQ au fonds consolidé du revenu pour tenir compte de l'évolution du coût des services de santé occasionnés par les accidents d'automobile. Il s'agit de sommes additionnelles à celles déjà versées par la SAAQ au fonds consolidé du revenu en vertu de l'article 155.1 de la Loi sur l'assurance automobile. Ces sommes additionnelles sont établies par décret.

L'amendement reprend les mêmes éléments que l'article 3 du projet de loi. Il précise toutefois certaines modalités et est formulé d'une façon différente. Tout

comme l'article du projet de loi, l'amendement porte sur le versement, par la SAAQ, au fonds consolidé du revenu, de sommes additionnelles à celles versées en vertu de l'article 155.1 de la Loi sur l'assurance automobile, et ce, toujours pour tenir compte de l'évolution du coût des services de santé occasionnés par les accidents d'automobile. Cependant, au lieu de laisser le soin au gouvernement de le faire par décret, c'est par un amendement à la loi que l'on fixe le montant des sommes additionnelles versées par la SAAQ au fonds consolidé du revenu. Il s'agit là d'une simple modalité et non d'un nouveau principe.

Je ne peux retenir l'argument présenté par M. le leader de l'Opposition officielle à l'effet que cet amendement nécessite un message du lieutenant-gouverneur. De fait, selon le principe constitutionnel de l'initiative financière de la couronne, codifié à l'article 30 de la Loi sur l'Assemblée nationale, un message du lieutenant-gouverneur est requis lorsqu'un projet de loi a pour objet, notamment, l'engagement de fonds publics. Dans le présent cas, il s'agit d'une situation inverse. En effet, il n'y a aucune somme prise sur le fonds consolidé du revenu, mais plutôt des sommes versées au fonds consolidé du revenu.

L'amendement à l'article 11 du projet de loi est intimement lié à l'article 3. Cet amendement supprime l'article 11 du projet de loi qui prévoit que l'article 3 a effet depuis le 1er janvier 1992. Cette disposition rétroactive est maintenant intégrée au projet de loi par le biais de l'amendement de l'article 3. Ainsi, l'amendement ne change pas la situation déjà prévue au projet de loi.

En terminant, permettez-moi de vous rappeler que la jurisprudence est à l'effet que les notes explicatives d'un projet de loi, bien que révélatrices dans certains cas, n'ont aucune valeur juridique en soi pour déterminer les principes d'un projet de loi. Ces notes ne constituent que des lignes indicatrices. Par conséquent, je réitère que les amendements présentés par M. le ministre des Transports sont recevables.

Débat sur la prise en considération du rapport et des amendements du ministre

Alors, nous en sommes à la prise en considération du rapport. Je rappelle les temps de parole: 25 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement; 25 minutes au groupe parlementaire formant l'Opposition officielle; cinq minutes à l'ensemble des députés indépendants et cinq minutes de droit de réplique à celui qui présente le projet de loi, soit M. le ministre des Transports.

Je suis prêt à reconnaître un premier intervenant. M. le ministre des Transports.

M. Sam L. Elkas

M. Elkas: Merci beaucoup, M. le Président. M. le Président, les deux amendements, ce sont les articles 3 et 11, et le résultat de cet exercice est bien connu. Le projet de loi est d'ordre financier. Il vise, non seulement à donner suite à certaines mesures annoncées dans le discours du budget, mais, également, à assurer le gouvernement de revenus additionnels au cours de l'exercice financier 1993-1994. La précision apportée aux articles 3 et 11 vise essentiellement à permettre au gouvernement de récupérer des sommes qui représentent une évaluation sérieuse de l'évolution des coûts des services de santé occasionnés par des accidents d'automobile depuis le 1er janvier 1992.

Il y a lieu de noter aussi, M. le Président ? comme on l'a révélé amplement dans les travaux récents de la commission parlementaire de l'aménagement et des équipements ? que ces sommes additionnelles devant être versées par la Société de l'assurance automobile du Québec, pour tenir compte de l'évolution des coûts de ces services, ont été unanimement reconnues et acceptées par les trois partenaires en cause, soit la Société de l'assurance automobile du Québec, la Régie de l'assurance-maladie du Québec et le ministère de la Santé et des Services sociaux. Tous s'entendant pour reconnaître que les coûts réels des services de santé, pour l'année 1992, sont de 88 867 000 $, et la Société de l'assurance automobile du Québec a dit publiquement qu'elle était d'accord pour verser ce montant, car il représente l'évolution du coût réel des services de santé occasionné par les accidents d'automobile du Québec.

Prétendre que les sommes additionnelles devant être versées par la SAAQ, pour les années 1992-1993, ne font pas partie du discours sur le budget, m'apparaît, M. le Président, un vrai non-sens. En effet, un examen attentif de ce discours démontre clairement, après vérification ? les autorités compétentes du ministère des Finances ? que les sommes additionnelles de 9 987 000 $ pour l'année 1992 et de 10 167 000 $ pour l'année 1993, soit un total de 20 155 000 $, sont déjà comprises dans l'équilibre budgétaire du gouvernement, à la page 28 du Discours sur le budget, sous la rubrique «Gouvernement du Québec ? Revenus divers», où il est prévu un montant de 594 000 000 $ de revenus provenant de la vente des biens et services de la santé occasionnés par les accidents d'automobile depuis le 1er janvier 1992. M. le Président, non seulement les articles 3 et 11 sont justifiés, mais ils sont nécessaires pour maintenir l'équilibre budgétaire du gouvernement.

M. le Président, j'aimerais exprimer à cette Chambre que les états financiers de la Société de l'assurance automobile du Québec sont en bon état, et c'est faux d'assumer qu'on vide la caisse, comme il est souvent dit par le député de Lévis. Non seulement le bilan financier est-il bon, mais, aussi, le bilan routier, depuis 1980, a démontré une amélioration quasiment incroyable. On parlait de 2000 décès dans les années quatre-vingt et, l'an passé, 953, mais 953 de trop; c'est une baisse énorme. Ça ne se fait pas simplement en sortant la baguette magique et «waving it», mais c'est des efforts qui sont faits par l'ensemble des équipes du gouvernement, non seulement les gens de la Société de l'assurance automobile du

Québec mais les forces policières du Québec, le ministère des Transports, nos partenaires à la santé. Tout ce beau monde là a fait un effort incroyable pour s'assurer que le bilan continue à s'améliorer. (20 h 30)

M. le Président, il va sans dire que le manque de contrôle routier n'a pas aidé dans les années passées. Pour ceux qui pensent qu'on n'a absolument rien fait, devons-nous leur rappeler que des gestes très importants ont été posés pour assurer la sécurité, non seulement des automobilistes, mais des camionneurs aussi?

Je remercie nos amis, M. le Président, je remercie les gens dans cette Assemblée qui ont reconnu la nécessité de voter de l'argent additionnel pour mettre sur nos routes. Il est évident, dans le temps des péquistes, qu'on a mis un moratoire sur quasiment tout. Il n'y a absolument rien qui se faisait. J'étais en Chambre il y a deux ou trois semaines et j'avais pensé que le député de Lévis ou quelqu'un dans la région de Montréal m'aurait questionné sur les travaux de la 30. Personne n'a questionné sur des travaux de 70 000 000 $, tous faits pour améliorer le réseau routier, pour soulager certaines routes, comme la 40, qui sont trop occupées, 144 000 déplacements par jour, des gestes qui sont faits pour rendre le sort des Québécois et Québécoises meilleur. Ces gens-là, de l'autre côté, n'ont jamais pu comprendre pourquoi il y avait une nécessité d'aller chercher ces fonds et de les mettre sur nos routes pour, en effet, améliorer la sécurité routière.

Et les conséquences d'une bonne gestion à la Société de l'assurance automobile du Québec, contrairement à ce que le député de Lévis... Il induit évidemment les gens en erreur en disant que les conséquences, c'est que les immatriculations vont continuer à augmenter et les permis vont continuer à augmenter. Mais, en 1987, pas sous le gouvernement péquiste, mais sous le gouvernement de notre formation, l'immatriculation a baissé de 114$ à 99$, en juillet 1987. En 1991, diminution encore de 99 $ à 85 $. Au niveau des permis, en 1992, une diminution de 26 $ à 20 $. Alors, au total des deux, une diminution de 140 $ à 105 $.

Pendant ce temps-là, on a contribué aux accidentés, sous forme d'indemnisations, près de 3 000 000 000 $. On ne s'est pas assis à ne rien faire. Puis on a introduit des modifications à nos lois pour s'assurer que les assurés reçoivent de plus en plus des indemnisations qui sont à l'évolution de ce qu'on vit aujourd'hui en 1993. La preuve est que la loi 113 ? on vient de la passer, on va l'adopter ce soir ? augmente les contributions aux assurés de 10 000 000 $. Et tout ce que j'entends de l'autre côté: On va siphonner la caisse. Les contribuables vont perdre de l'argent. Les immatriculations vont continuer à augmenter. Les permis vont continuer à augmenter. Vous diminuez le montant d'argent que vous envoyez aux assurés. Je viens de faire la preuve, M. le Président, que c'est le contraire, c'est basé sur une bonne gestion, une très, très bonne gestion.

J'aimerais vous dire aussi, M. le Président, que le principe de s'approprier des montants d'argent de la

Société de l'assurance automobile du Québec a été initié par notre gouvernement. Si on le fait aujourd'hui, puis c'est la quatrième fois... Je fais partie de cette équipe, c'est la quatrième fois que j'introduis une loi semblable dans mes quatre ans ici, mais je dois vous avouer, M. le Président, que je l'ai toujours fait à la clarté du jour. Je ne l'ai pas fait en cachette comme ils l'ont fait de l'autre côté. En 1980-1981, on a transféré le Bureau des véhicules automobiles à la Régie de l'assurance automobile du Québec, puis on leur a envoyé, le gouvernement très généreux dans le temps, 13 000 000 $, ce qui était l'équivalent de deux mois. L'année suivante, on a réalisé qu'on devait le faire pour une période de 12 mois; alors, on a transféré 62 000 000 $, un montant assez important qui reconnaissait l'importance de continuer à verser des montants d'argent pour administrer ce qu'on appelait dans le temps le BVA.

Mais, en 1983-1984, M. le Président ? c'est ça, le petit hic, là, 1983-1984 ? la facture était de 84 000 000 $; 84 000 000 $, puis l'argent n'a pas été transféré. En effet, si le député de Lévis veut référer à du siphonnage, c'est la première ponction qui a été faite. Ce que j'ai déploré, parce qu'on me l'a fait dire, c'est que ça a été fait un peu en cachette, puis ça a été répété l'année après, en 1984-1985. Je trouve déplorable d'arriver, puis de nous accuser pendant quatre ans de temps d'avoir fait des ponctions à la Société de l'assurance automobile du Québec, puis de nous «traiter» de vol lorsqu'on le fait dans l'Assemblée nationale où tout le monde peut nous entendre, M. le Président. On ne l'a pas fait en cachette. L'Opposition a toujours pensé que notre côté faisait quelque chose d'illégal. Pantoute, M. le Président!

Mon collègue, le député de Lotbinière, va vous parler aussi d'une autre ponction, si vous voulez, qui a été faite encore à la cachette. Puis il me semble que le député de Lévis faisait partie du Conseil exécutif, puis il a fait partie des décisions qui avaient été prises dans le temps. Mais, cette personne qui est tellement pure, de se lever, puis de nous accuser d'incompétence, puis nous accuser de vol, c'est totalement inacceptable parce qu'on l'a fait devant le monde, puis on l'a expliqué. C'était dans le discours du budget. Ça a été discuté. Ça fait des mois qu'on en parle.

Puis, les trois derniers jours, M. le Président, j'ai déploré la position et l'attitude du député de Lévis parce que ce qui a été dit par le député de Lotbinière a été vérifié non seulement par des membres de notre parti, mais aussi un membre du bureau du Vérificateur général était présent, puis j'espère qu'il a pris des notes pour démontrer l'attitude et le comportement du député de Lévis, chose qui est totalement inacceptable. On a trouvé ça totalement une «joke», si vous voulez.

Mais, moi, je ne trouve pas ma tâche, comme parlementaire, une «joke». J'ai toujours travaillé dans l'intérêt des gens qu'on sert. Et puis, M. le Président, c'est avec une espèce de fierté que je peux dire que les gestes qui sont posés sont là pour l'ensemble de notre société ? non seulement pour un petit groupe, mais

l'ensemble de notre société ? et c'est pour ça que je cherche l'appui de mes collègues pour l'adoption de ces amendements et de ce projet de loi. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Alors, je vous indique qu'il reste 12 minutes au groupe formant le gouvernement. Je suis prêt à reconnaître un autre intervenant. M. le président de la commission de l'aménagement et des équipements et député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, je n'ai pas l'intention de parler sur ce projet de loi, dans une mascarade de nature fasciste, où on impose des bâillons à l'Opposition! Alors, l'opposition, je la ferai dans la rue, avec le peuple, M. le Président!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, question de règlement, M. le député.

M. Bélisle: M. le Président, ça fait quelque temps que je ne me suis pas levé debout pour des questions de règlement sur la conduite d'un député, mais je pense que le langage du député de Lévis, M. le Président, est tout à fait déplacé pour un parlementaire de son calibre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sur la question de règlement?

M. Bélisle: Fasciste...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député! Excusez, M. le leader adjoint de l'Opposition officielle.

M. Gendron: Oui, M. le Président, sur la question de règlement. Moi aussi, ça fait assez longtemps que je suis en cette Chambre pour savoir que, de tout temps, il y a une sanction qu'on appelle la sanction politique pour les propos qu'un député a. Il appartient aux parlementaires... D'aucune façon, l'expression qu'il a utilisée, qui est utilisée couramment dans des Législatures lorsqu'on a un point de vue, surtout sur une motion de bâillon... Et, M. le Président, les propos qui ont été tenus lui appartiennent. Il est capable de les porter et de vivre avec; et c'est ça, le règlement! Et, d'aucune façon, il n'y a une question de règlement là-dedans.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Lévis, vos propos, à mon point de vue, ne sont pas antiparlementaires. Le public écoute et juge les propos de chaque parlementaire. Si vous voulez poursuivre, M. le député. Avez-vous terminé?

M. le député de Lotbinière.

(20 h 40)

M. Lewis Camden

M. Camden: Merci, M. le Président. M. le Président, nous utilisons aujourd'hui une mesure particulière afin d'étudier le projet de loi 130 dans son ensemble et avec célérité. Après l'étude du principe du projet de loi, que nous avons faite la semaine dernière, nous avons tenté de procéder à l'étude article par article du projet de loi. Et, évidemment, M. le Président, ce travail a été fait en commission parlementaire et nous avons investi plus de 10 heures à cet effet.

Les gens, évidemment, de l'Opposition... Je comprends fort bien, aujourd'hui, au moment où on se parle, que le député de Lévis ne souhaite pas parler, puisque beaucoup plus que la moitié du temps en commission a été utilisé par l'Opposition afin de présenter des motions dilatoires qui visaient à empêcher, évidemment, l'adoption des articles du projet de loi. Alors, pour cette raison, nous n'en sommes donc encore qu'au premier article du projet de loi. De plus, M. le Président, le critique de l'Opposition nous avait bien fait comprendre, mardi dernier, en fin de soirée, qu'il ne donnera pas son consentement pour qu'on puisse se rendre à l'adoption de ce projet de loi nécessaire.

Comme vous le savez, ce projet de loi a pour objectif principal de donner suite au dernier discours du budget. L'action que nous posons vise à transférer au gouvernement du Québec de l'argent ayant fait l'objet d'une annonce lors du dernier budget et à faire bénéficier les Québécois de cet argent, au lieu de le laisser dormir dans les fonds de la caisse de la Société de l'assurance automobile du Québec. Nous tirerons donc de la réserve de stabilisation de la Société de l'assurance automobile du Québec un montant de 1 000 000 000 $ sur deux années fiscales. Or, ces fonds sont nécessaires et essentiels à la bonne gestion de l'État québécois et au bénéfice, également, des Québécois.

Le fait saillant du dernier budget provincial, en ce qui concerne la Société, consiste en deux versements au gouvernement d'une somme de 1 000 000 000 $ à même l'excédent, M. le Président, de la caisse de la Société de l'assurance automobile. L'opération se déroulera comme suit: avant le 31 mars 1994, 675 000 000$ seront transférés, versés au fonds consolidé du Québec; avant le 31 mars 1995, 325 000 000 $ le seront également. La différence de 68 700 000 $ sera retournée à la réserve de stabilisation.

M. le Président, il y aura une compensation de 120 000 000 $ à la Société de l'assurance automobile du Québec, versée tous les ans, à même les droits du gouvernement, et ce, sur une période de 10 ans. Cette compensation, qui a pour but d'équilibrer les finances de la Société, prendra effet le 1er janvier 1994. De plus, le ministre des Finances, à l'intérieur de son budget, garantit à la Société une réserve de stabilisation minimale de 300 000 000 $ en tout temps. M. le Président, c'est important: une réserve de stabilisation minimale de 300 000 000 $ en tout temps.

Également, la solution que nous avons retenue

pour équilibrer les finances de la Société de l'assurance automobile ne vient pas affecter la prime d'assurance de l'automobiliste québécois. Les revenus de la Société sont augmentés, dès janvier 1994, de 120 000 000 $ sur une pleine année, en provenance du gouvernement, et les revenus du gouvernement réduits du même montant. Ceci aura pour effet de combler le déficit annuel du régime à court terme, puisque les revenus transférés augmenteront avec l'évolution du parc automobile.

Le député de Lévis parle de double indexation. S'il a dit cela, c'est qu'il comprend mal, M. le Président, le processus de calcul des actuaires. En effet, en calculant l'augmentation de la réserve actuarielle nécessaire pour les indemnités de l'année en cours, les actuaires incluent une prévision pour l'inflation, mais seulement pour ce groupe d'accidentés. En fait, ce groupe d'accidentés de l'an prochain comportera une structure de coûts et un niveau d'augmentation de réserve actuarielle différents de l'année courante, de sorte que, si la tarification est adéquate maintenant, elle ne le sera pas nécessairement l'an prochain, notamment en raison de l'évolution des coûts. Il serait donc illusoire de penser que les contributions peuvent être perpétuellement constantes, à moins qu'une amélioration continuelle du bilan routier ne compense ces augmentations de coûts.

En conclusion, M. le Président, le montant de 120 000 000 $ que le gouvernement transfère à la Société de l'assurance automobile du Québec en 1994 en réduisant les droits d'immatriculation et de permis de conduire est intégré aux contributions d'assurance et permet d'augmenter de 27 % les revenus de contribution d'assurance de la Société sans changer la facture totale pour l'automobiliste québécois. Ceci protège donc la facture totale pour l'automobiliste. Ceci protège également, donc, l'automobiliste contre les augmentations importantes des contributions d'assurance. De plus, un transfert annuel permettra à la Société des revenus additionnels de plus de 1 000 000 000 $ sur une période de 10 ans.

M. le Président, le projet de loi 130 renferme des garanties de revenus adéquates en vue de maintenir l'équilibre budgétaire de la Société et, surtout, de préserver son autonomie financière. M. le Président, en conclusion, je vous indique que ce projet de loi est important pour les finances publiques du Québec. Ce sont des sommes d'argent qui étaient la propriété, qui sont la propriété des Québécois et qui demeurent la propriété des Québécois pour leur plus grand bénéfice, et, évidemment, plusieurs de ces montants d'argent ont bénéficié aux automobilistes québécois sur les routes au cours de l'année. Certains fonds, on pourrait même dire, vont aux services de la santé. Bref, ils sont versés au fonds consolidé du revenu du gouvernement du Québec. Donc, il ne s'agit pas de gaspil, mais bien de fonds pour le bénéfice des Québécois et la bonne gestion de l'État québécois.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Lotbinière. Est-ce qu'il y a d'autres interve- nants? En vertu de votre droit de réplique, est-ce que vous voulez intervenir, M. le député? Alors, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, est-ce que je pourrais savoir combien de temps il nous reste?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Verdun, il reste cinq minutes à la formation politique que vous représentez.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci. Alors, M. le Président, je pense qu'il est important ici d'intervenir et de bien réfuter l'ensemble des erreurs que j'ai entendues de la part de l'Opposition. On a essayé de faire peur à l'ensemble des Québécois avec ce projet de loi en disant: On fait une ponction dans la caisse de la SAAQ et la SAAQ ne sera plus en mesure de payer les prestations qui étaient nécessaires. C'est totalement faux! C'est totalement faux, M. le Président.

Il faut bien être conscient que, dans la SAAQ, il y a trois types d'enveloppes. Il y a une enveloppe qui est l'enveloppe de réserve actuarielle à l'intérieur de la Société. Cette enveloppe de réserve actuarielle n'est pas touchée, en aucune manière, par ce projet de loi. C'est-à-dire que les 2 820 000 000 $ qu'il y a dans l'enveloppe de la réserve actuarielle, qui sont nécessaires pour payer les prestations aux accidentés de la route, ne sont absolument pas touchés et, en aucune manière, on ne va remettre cela en question.

Par contre, il y avait une deuxième enveloppe, qu'on a appelée l'enveloppe du fonds de stabilisation. Et, vous comprenez qu'il doit y avoir un rapport entre l'enveloppe du fonds de stabilisation et l'enveloppe pour la réserve actuarielle. Ce fonds de stabilisation... Comme l'a expliqué M. le ministre, la bonne gestion, la diminution de la fréquence des accidents a crû beaucoup trop vite, ce qui fait qu'à l'heure actuelle, dans le fonds de stabilisation, on a 1 500 000 000 $, alors que tous les calculs, en termes de rapport entre l'importance du fonds de stabilisation et de la réserve actuarielle, prévoient qu'elle devrait être de l'ordre de 300 000 000 $ à 400 000 000 $. Et c'est dans ce fonds de stabilisation, M. le Président, que le projet de loi va chercher l'argent et le transférer au fonds consolidé. Donc, il est bien important de comprendre qu'en aucune manière, en aucune manière, M. le Président, ce projet de loi ne va remettre en cause la réserve actuarielle.

D'autre part, il y avait un troisième élément dans le projet de loi... En aucune manière il ne remet en cause la réserve actuarielle, mon cher monsieur! (20 h 50)

M. Morin: La réserve de stabilisation...

M. Gautrin: La réserve actuarielle ? il est important, M. le député de Dubuc, de bien le comprendre ? n'est remise aucunement en cause!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député, adressez-vous à la présidence, s'il vous plaît.

M. Gautrin: Merci. Je répète, à ce moment-là, car c'est extrêmement important de bien comprendre cela. Deuxièmement, c'est sur la réserve de stabilisation, qui est différente de la réserve actuarielle, qu'est faite la ponction de 1 000 000 000 $, étalée sur deux années budgétaires.

Troisièmement, M. le Président, la Société avait un déficit structurel. Et, en termes strictement d'opération, le projet de loi, à l'heure actuelle, en transférant au budget de la Société 120 000 000 $, va combler la situation de déficit structurel.

Donc, il faut bien être conscient des mouvements d'argent qu'il y a à l'intérieur du projet de loi. On ne touche, en aucune manière, la réserve actuarielle, c'est-à-dire le montant d'argent nécessaire pour payer les prestations aux bénéficiaires. Strictement, on équilibre les rapports entre la réserve de stabilisation et la réserve actuarielle, c'est-à-dire qu'on rend la réserve de stabilisation à ce qu'elle devrait être normalement, dans un rapport à peu près de 17 % à 20 % entre la réserve actuarielle et la réserve de stabilisation, c'est-à-dire qu'on maintient la réserve du fonds de stabilisation à 300 000 000 $ et on la garantit à 300 000 000 $, et on règle le déficit structurel qui était dans la Société de l'assurance automobile du Québec.

M. le Président, il faut bien comprendre ce projet de loi. Malgré toutes les... ?je ne veux pas le dire parce que c'est non parlementaire ? que j'ai pu entendre, à l'heure actuelle, c'est un projet de loi sain sur le plan financier et qui protège l'ensemble des assurés, des automobilistes et des accidentés de la route, M. le Président. C'est absolument important de bien comprendre ça. La réserve actuarielle n'est aucunement mise en cause. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Alors, je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant. M. le député de Dubuc.

M. Gérard R. Morin

M. Morin: Merci, M. le Président. Je me retrouve encore devant la même situation que la dernière fois. Je m'étais préparé quelques petites notes en prévision de mon intervention, puis j'ai encore le député de Verdun qui parle tout juste avant moi et qui semble vouloir nous faire une leçon sur le volet actuariel. Je ne peux pas m'empêcher de revenir à la charge parce qu'il dit seulement la portion qu'il veut bien dire.

Évidemment, quand il attaque, il soutient que la ponction ou le siphonnage du gouvernement n'atteint pas, ne touche pas la réserve actuarielle. Ça, il nous l'a répété à satiété. On a tous compris ça. Sauf qu'il dit juste ça, là. C'est uniquement ça qui est vrai. Mais il ne dit pas la balance. Il ne parle pas de la réserve de stabilisation et, lorsqu'on parle d'expertise actuarielle, il faut commencer d'abord par les contributions de l'assuré ou de l'usager. Et ça, il n'en parle pas. Il n'en parle pas.

Parce que, en termes actuariels, M. le Président, une première chose: à quoi ça sert, une expertise actuarielle? Uniquement et exclusivement à une chose: c'est pour s'assurer que les contributions sont suffisantes pour assurer les obligations du plan d'assurance ou du régime de retraite. Uniquement ça. Alors, à partir du moment où les contributions sont suffisantes, et elles sont plus que suffisantes puisque le gouvernement se permet d'aller puiser dans la réserve de stabilisation à coups de milliards, vous ne pensez pas que, si on laissait jouer le jeu des actuaires comme ça devrait l'être, à ce moment-là, enfin, les surplus de la réserve de stabilisation, ce serait non pas au profit du fonds consolidé du revenu du gouvernement mais au profit des contributions des assurés. Ceci dit, M. le Président, je regrette, mais il dit seulement la moitié de la vérité.

Deuxième élément que je voudrais...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! MM. les députés. M. le député, je fais respecter la règle ici. Si vous voulez poursuivre. S'il vous plaît!

M. Morin: Merci, M. le Président. Un autre point sur lequel je voudrais revenir, c'est qu'on entend souvent dire et parler du projet de loi comme étant une façon de répondre aux obligations du ministre des Finances, c'est-à-dire au dernier budget. Ce n'est pas tout à fait vrai, M. le Président. Ça fait plusieurs... Depuis que je suis ici à l'Assemblée nationale, à chaque année, on a un projet de loi justement pour obtenir le transfert des fonds. Mais, là, ce projet de loi là va plus loin que ça, M. le Président. C'est beaucoup plus qu'un transfert de fonds de 1 000 000 000 $. C'est que le projet de loi a pour but de colmater quelques irrégularités, d'abord, que certains qualifieraient d'illégalités et, en plus, se trouve à mettre dans la loi, à consacrer cette habitude du gouvernement, à moyen et à long terme, de façon permanente, de siphonner la caisse des assurés, des automobilistes.

M. le Président, je vois le ministre qui me fait signe, il lève le bras. Il n'a pas le droit de faire ça. Ça a l'air de menaces, et vous savez que vous n'avez pas le droit de faire ça.

M. le Président, ce à quoi je veux faire allusion, lorsqu'on a soulevé l'objection sur la recevabilité, on a reconnu qu'il y avait trois principes dans le projet de loi. D'abord, bien sûr, le siphonnage de 1 000 000 000 $, le volet des garanties ? ah oui, je vois le député qui a défendu ça, là, puis qui trouvait ça tout à fait normal, on va y revenir ? et les nouveaux pouvoirs du gouvernement, parce que ce projet de loi là octroie au gouvernement des pouvoirs qu'il n'avait pas. Et ne tentez pas de le nier, le ministre lui-même, après l'avoir forcé, acculé au pied du mur pour qu'il le reconnaisse... Ça a été tout un travail de lui faire reconnaître que l'article 1, entre autres, qui ajoute 151.4 aux articles

151.1, 151.2, et 151.3, constitue un nouveau pouvoir pour le gouvernement, parce que, avant, M. le Président, les indexations des contributions étaient sous la responsabilité de la Société. À partir de maintenant, le ministre, le gouvernement s'octroie le nouveau pouvoir de valoriser les contributions financières.

C'est un nouveau pouvoir, et c'est ça qui est grave, M. le Président, parce que, dans le passé, même si on n'était pas d'accord, O.K., il y avait des surplus à la réserve de stabilisation. Bon, alors plutôt que laisser faire la Société, eh bien, on a dit: On va aller chercher l'argent, on n'est pas capables de gérer. La Société de l'assurance automobile, elle, gère bien. Nous, en tant que gouvernement, on n'est pas capables; donc, on va aller chercher de l'argent dans les caisses de ceux qui savent gérer. En tout cas, on commençait à s'habituer, sauf que le scandale, M. le Président, c'est que le gouvernement s'octroie un nouveau pouvoir. Il dit: En plus, dorénavant, à chaque année, je m'octroie le pouvoir de valoriser les contributions. Et c'est ça qui est grave. C'est pour ça que je dis que c'est un nouveau pouvoir qui fait scandale, M. le Président, parce que, en plus, ça constitue une ingérence, ni plus ni moins. Pourquoi est-ce qu'on ne laisse pas la Société gérer ses propres affaires?

Comme on le mentionne, le gouvernement, pour l'année 1996 ou pour chaque année subséquente, peut revaloriser les contributions d'assurance fixées. On a tenté d'amender, M. le Président, le projet de loi pour s'assurer que la revalorisation du gouvernement ne servirait qu'à des fins d'assurance et non pas à d'autres fins. Mais vous savez ce qui est arrivé. On a tenté, par des amendements, au moins d'éviter le pire, mais ça n'a pas duré longtemps parce qu'on a considéré ça comme du boycottage ou du blocage, ou je ne sais pas quel terme on utilise. Mais, bien sûr, qu'on n'a pas été capables, à un point tel que ça fait drôle de parler sur la considération du rapport. Ça fait drôle, parce que c'est un curieux de rapport, il n'y a pas eu de commission. Puis on nous dit, là... C'est ça qu'on fait, M. le Président, avant la troisième lecture, c'est la prise en considération du rapport de la commission de l'aménagement et des équipements. Savez-vous, si je m'écoutais, je me rassoirais. Je me demande de quoi on parle; il n'y en a pas eu, de commission. Il n'y en a pas eu. Ne riez pas, c'est de votre faute. (21 heures)

Donc, M. le Président, on reprend tout ça. Il y a la continuité du gouvernement d'aller chercher dans la caisse des assurés 1 000 000 000 $. Il y a le nouveau pouvoir, c'est l'article 1, bien sûr, de valoriser les contributions financières. C'est un nouveau pouvoir, puis ça, c'est grave. Je me demande comment ça se fait que les membres du conseil d'administration de la Société n'ont pas démissionné en bloc. Ce n'est pas acceptable, ça. Les autres choses... Il y a un surplus... Le gouvernement, c'est l'autorité, ça va, mais qu'il s'octroie le pouvoir de dire: Les contributions, dorénavant, vous, la Société, vous avez le droit de les indexer, mais, en plus, je m'octroie le pouvoir, pour différentes considérations, de les valoriser, et, ça, c'est grave...

Maintenant, les garanties. Bien sûr que... Et c'est là, je pense, que le gouvernement veut se protéger contre des irrégularités ou des illégalités, parce qu'il reconnaît qu'à force d'aller chercher de l'argent dans le fonds, non pas que ces ponctions ont pour effet d'affecter la réserve actuarielle, mais bien la réserve de stabilisation, c'est pour ça que, dans le présent projet de loi, M. le Président, le gouvernement veut colmater cette brèche en ajoutant un nouveau chapitre à la loi, qui a pour but justement d'offrir une garantie. Alors, le gouvernement dit: Si jamais ? sous-entendu: après avoir siphonné une certaine somme d'argent ? la réserve de stabilisation baissait en bas de 300 000 000 $, et qu'il y avait un déficit au niveau de l'opération annuelle, je m'engage à vous fournir les garanties pour que la réserve de stabilisation soit rehaussée à son minimum de 300 000 000 $.

Donc, d'un côté, le gouvernement dit: Je siphonne tant que je peux, mais si jamais c'était un peu trop sur le bord du scandale actuariel, à ce moment-là, on va mettre, dans le projet de loi, qu'on apporte la garantie nécessaire pour que, finalement, ça se tienne un peu. Alors, voilà le ridicule. On siphonne tant qu'on peut. On s'octroie un nouveau pouvoir de valoriser les contributions financières, et, pour se donner bonne conscience, on dit: On va fournir toutes les garanties nécessaires, évidemment, pour ne pas trop avoir l'air fou. Il y a quand même des choses qui se passent et qui se brassent. Ce n'est pas sûr que ce soit tout régulier, M. le Président.

Évidemment, il y a l'article concernant les coûts de santé. Même dans son commentaire, le ministre dit qu'il a été obligé d'amender la loi parce que, en faisant étudier le décret par la commission de l'aménagement et des équipements, c'était trop d'ouvrage, ça risquait de bloquer et de trop retarder. Là, il avait besoin de l'argent immédiatement. C'est une étape qui l'embarrassait énormément. Donc, on a apporté un amendement pour faire en sorte qu'on établisse les règlements. Bien sûr, le collègue, je l'écoutais quand il trouvait ça normal qu'on fixe les montants. Bien sûr, moi, je trouve ça normal qu'on fixe les montants, sauf que ça a pour effet d'éliminer une étape de consultation en commission parlementaire. C'est ça qui est grave. Ce n'est pas tellement qu'on les fixe, parce que, lors de l'étude qui a été faite entre les parties ? soit le ministère de la Santé, la Société de l'assurance automobile du Québec et le ministère ? elles ont convenu d'un montant d'actualisation des coûts de santé. Elles en ont convenu, sauf qu'ils l'ont soumis à la commission parlementaire pour nous permettre de poser des questions sur les critères qui avaient pu servir de base pour en arriver à des nouveaux coûts des soins de santé. C'est tout à fait normal, sauf que, le ministre, ça l'oblige trop à répondre à des questions. Alors, il dit: Dorénavant, on va le mettre dans la loi, on va amender ça, et on va établir les montants tout de suite. Je n'ai rien contre ça, sauf que ça élimine une

autre étape de consultation et ça permet peut-être à l'Opposition de renchérir la loi.

Alors, ceci dit, M. le Président, c'est un projet de loi qui est grave, et c'est pour ça que je comprends mon collègue, le député de Lévis, de ne pas avoir voulu contribuer au présent débat, parce que c'est assez grave, ce qui se produit. Je pense que les députés qui se contentent uniquement de parler à l'effet que ça n'affecte pas la réserve actuarielle, c'est limiter le débat, c'est ne pas comprendre grand-chose. Même, l'autre député que j'entendais, qui, lui, trouvait ça beau parce que le projet de loi, l'amendement avait pour but d'établir des montants bien précis, et que les citoyens étaient favorables à ça de connaître les montants. C'est une façon de voir, M. le Président, qui ne conviendrait pas aux citoyens s'ils étaient en mesure de venir voir ce qui se passe en commission parlementaire. Contrairement à ce qu'on a dit, le scandale ne serait pas celui que vous pensez si on était venu en commission parlementaire pour voir la façon dont on traitait l'Opposition et la façon qu'on refusait de justifier le projet de loi.

Alors, ceci, M. le Président, je sais.que, de toute façon, comme je vous le disais la dernière fois, c'est peu probable qu'on réussisse à convaincre le ministre, à ce stade-ci. J'en doutais lors du débat sur l'adoption de principe. Alors, avec tout ce qu'on vient de mettre en oeuvre, de suspension des procédures, ça veut dire qu'il y a une volonté du gouvernement d'aller jusqu'au bout. Donc, je ne pense pas qu'il soit utile de prolonger plus loin mon intervention. Alors, ceci dit, M. le Président, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Dubuc, sur cette... sur l'adoption du...

Nous en sommes à la prise en considération du projet de loi 130. Je cède la parole à M. le député de Drummond, en lui indiquant que son temps maximum est de cinq minutes. M. le député.

M. Jean-Guy St-Roch

M. St-Roch: Merci, M. le Président. M. le Président, je ne veux pas vous reprendre, mais je vous ferais remarquer que j'aimerais, dans un premier temps, remercier la grande générosité du leader du gouvernement, parce qu'on me donnera personnellement 75 secondes. J'ai un maximum de 300 secondes grâce à la collaboration de mes collègues du Parti Égalité, de mon collègue le député indépendant. Alors, je les remercie de m'avoir consacré leurs 75 secondes, ce qui me fera 300 secondes, M. le Président. C'est ça qu'on a, M. le Président, comme démocratie, pour s'expliquer à l'Assemblée nationale: 75 secondes pour être capable de faire comprendre et de défendre ses citoyens au Québec.

M. le Président, j'en suis à la prise en considération du rapport de la commission. Un député, M. le Président, qui veut représenter ses citoyens, avec la complexité de nos tâches parlementaires, il se doit de suivre les débats. Il ne peut pas participer à toutes les commissions parlementaires. Il se doit de suivre les débats et, à partir des enregistrements, des copies, de se faire une idée puis d'être capable de retourner chez lui. Puis, ça, c'est une des missions, M. le Président, d'un député: retourner chez lui puis expliquer à ses citoyens le pourquoi d'un projet de loi. Et, ce soir, M. le Président, grâce à la grande générosité du leader du gouvernement envers la démocratie, on me donnera 75 secondes. N'eut été, M. le Président, de l'affabilité, des grandes générosités de mes collègues, bien, je n'aurais même plus le temps de parler maintenant. Vous m'auriez dit: M. le député, je regrette, votre temps est écoulé. C'est ça, M. le Président, que j'ai essayé de dénoncer dans mes remarques, tout à l'heure, dans les 10 minutes que j'avais sur la motion.

Au niveau de la prise en considération du rapport de la commission, lorsque je lis, moi, les minutes qui ont été transcrites et celles qui viendront dans les prochains jours, vous avez entendu les débats, vous comme moi, M. le Président. Qu'est-ce que vous pensez que... Si j'allais devant mes citoyens, puis si je disais: Voici ce qui s'est dit à la commission parlementaire, voici ce qui...

M. le Président, vous savez, il y a de la violence qui est autre que physique dans cette Assemblée. Alors, j'aimerais... Je n'ai jamais dérangé personne. J'aimerais, M. le Président, moi, avoir mes temps de parole, le peu qu'on me donne pour parler ici dans cette Assemblée. Et, le prochain coup, j'identifierai, pour vous aider, M. le Président, d'où viennent les voix.

M. le Président, je ne prendrai pas plus de temps qu'il faut, parce que j'aurai l'occasion de revenir sur le fond de la motion et de voir où on peut gérer 1 000 000 000 $, puis comment on peut expliquer ça à nos citoyens. Alors, j'essaierai de leur faire comprendre encore, M. le Président, comme je l'ai fait en juin, comme je l'ai fait en décembre de l'année dernière et comme je le ferai à l'intersession, de dire aux citoyens qui me poseront des questions: Bien, voici à peu près ce que le législateur voulait faire, à ce moment-ci, avec 1 000 000 000 $ de vos fonds.

Est-ce que c'est justifié? Est-ce que ce n'est pas justifié? Quand je regarde les argumentations, M. le Président, bien, j'en reste sur mon appétit, parce que, en toute honnêteté, je ne peux pas remplir mon mandat d'expliquer à mes citoyens en toute équité le contenu de ce projet de loi là, parce qu'on a bâillonné encore la démocratie puis qu'on a essayé de couper. Et je l'ai dit, M. le Président, ce projet-là aurait pu être apporté dès la fin de juin, alors qu'on aurait eu toute l'intersession, tout le temps voulu pour essayer de regarder chacun des paramètres.

Sur ceci, M. le Président, bien, je vais laisser les quelques secondes qui restent au cas où un de mes collègues indépendants aurait à ajouter sur ce projet de loi là. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Drummond. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? En vertu de votre droit de réplique, M. le

ministre des Transports, avec un maximum de cinq minutes.

M. Elkas: M. le Président, tout a été dit. Je propose l'adoption.

Mise aux voix des amendements du ministre

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, conformément à la motion de suspension des règles qui a été adoptée, je vais d'abord mettre aux voix l'amendement proposé par M. le ministre des Transports à l'article 3 du projet de loi. Cet amendement est-il adopté?

M. Gendron: Sur division.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division.

L'amendement à l'article 11 du projet de loi est-il adopté?

Des voix: Adopté.

M. Gendron: Sur division.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. Les articles et le titre du projet de loi 130 ainsi modifiés sont-ils adoptés?

M. Gendron: Sur division.

Adoption du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. Le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi 130, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile et d'autres dispositions législatives, ainsi amendé, est-il adopté?

M. Gendron: Adopté sur division.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division.

Adoption

Nous passons maintenant à l'étape de l'adoption du projet de loi 130. Il s'agit d'un maximum de 30 minutes: conformément à la motion adoptée pour la suspension des règles, 10 minutes au groupe formant le gouvernement, 10 minutes au groupe formant l'Opposition officielle, cinq minutes à l'ensemble du groupe des députés indépendants et une réplique d'une durée maximale de cinq minutes à M. le ministre des Transports.

Je suis prêt à reconnaître un premier intervenant. M. le ministre des Transports. (21 h 10)

M, Elkas: Alors, M. le Président, est-ce que je peux vous demander la suspension pour deux minutes, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vais suspendre pour deux minutes, très rapidement.

(Suspension de la séance à 21 h 11)

(Reprise à 21 h 14)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): J'apprécierais que les députés s'assoient à leur place, s'il vous plaît, à ma droite.

Alors, nous en sommes à l'adoption du projet de loi 130. Il s'agit d'un débat de 30 minutes: 10 minutes pour la formation ministérielle, 10 minutes à l'Opposition officielle, cinq minutes au groupe des indépendants et cinq minutes de droit de réplique au ministre présentant le projet de loi. M. le ministre des Transports.

M. Sam L. Elkas

M. Elkas: M. le Président, mes propos vont être très, très brefs. On a entendu, pendant les deux dernières heures, le contenu de ce discours sur le budget et le débat sur ce projet de loi qui, malheureusement, n'a pas pu être débattu article par article en commission. Le député de Drummond aura juste à lire le libellé et il va savoir qu'est-ce qui s'est passé en commission et les raisons pour lesquelles on a invoqué une mesure spéciale pour limiter ce débat.

M. le Président, il est évident que notre gouvernement ne veut pas faire les choses en cachette, comme je l'ai mentionné. Les choses sont assez claires. On s'approprie un montant d'argent, un montant de 1 000 000 000 $. On laisse 300 000 000 $. On retourne, année par année, pour une période de 10 ans, 120 000 000 $. Et c'est sûr, comme toute autre chose, qu'il y aura des périodes où on devra indexer, si je veux me servir du terme du député de Lévis, où on ne pourra pas augmenter. Notre bilan a été, je pense, assez positif. Au niveau des assurés, tout a été à la baisse. M. le Président, comme je l'ai mentionné, tout a été dit, et je propose l'adoption de ce projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le président de la commission de l'aménagement et des équipements et député de Lévis, la parole est à vous.

M. Garon: M. le Président, je ne participerai pas plus en troisième lecture, pour quelques minutes, à cette mascarade de démocratie de nature fasciste où on bâillonne l'Opposition et, dans l'avenir, je serai dans la rue avec les citoyens pour exprimer...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député,

M. le député. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Alors, M. le ministre, réplique.

M. Elkas: Je propose l'adoption, M. le Président.

M. Gendron: Appel nominal.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Appel nominal? Alors, je mets au voix. L'appel nominal est demandé. Alors, qu'on appelle les députés. (21 h 17 - 21 h 25)

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, si vous voulez prendre place, s'il vous plaît. S'il vous plaît, à l'ordre! Je mets aux voix la motion du ministre des Transports ? s'il vous plaît! ? proposant l'adoption du projet de loi 130, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile et d'autres dispositions législatives.

Que ceux et celles qui sont pour cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Ryan (Argenteuil), M. Bourbeau (Laporte), M. Dutil (Beauce-Sud), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Middlemiss (Pontiac), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cherry (Sainte-Anne), M. Cusano (Viau), Mme Bleau (Groulx), M. Houde (Berthier), M. Maciocia (Viger), M. Kehoe (Chapleau), Mme Trépanier (Dorion), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beaudin (Gaspé), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Hamel (Sherbrooke), Mme Bégin (Bellechasse), Mme Pelchat (Vachon), M. Paradis (Matapédia), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Leclerc (Taschereau), M. MacMillan (Papineau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Poulin (Chauveau), M. Farrah (îles-de-la-Madeleine), M. Fradet (Vimont), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Charbonneau (Saint-Jean), M. Bradet (Charlevoix), M. Joly (Fabre), M. Camden (Lotbinière), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Gautrin (Verdun), M. Forget (Prévost), M. LeSage (Hull), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), Mme Boucher Bacon (Bourget), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Audet (Beauce-Nord), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brouillette (Champlain), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Khelfa (Richelieu), M. Lafrance (Iberville).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Chevrette (Joliette), M. Perron (Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi),

M. Blais (Masson), M. Garon (Lévis), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), Mme Juneau (Johnson), Mme Caron (Terrebonne), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), M. Morin (Dubuc), M. Filion (Montmorency), M. Holden (Westmount), M. Boisclair (Gouin)...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, excusez-moi! Excusez-moi! M. le député de Chauveau, là, c'est assez! Si vous voulez poursuivre. M. le député de Chauveau, premier rappel à l'ordre! Mme la secrétaire.

La Secrétaire adjointe: M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), M. Bélanger (Anjou).

M. St-Roch (Drummond).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des abstentions? Aucune abstention. le secrétaire: pour: 54 contre: 22 abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, le projet de loi 130 est adopté. Alors, je vais suspendre les travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 21 h 29)

(Reprise à 21 h 32)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...je cède la parole à M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Article 3, M. le Président.

Projet de loi 110 Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 3. L'Assemblée reprend le débat, ajourné le 4 novembre dernier, sur l'adoption du principe du projet de loi 110, Loi modifiant la Loi sur les allocations d'aide aux familles. Alors, lors de l'ajournement du débat sur cette motion, M. le député de Richelieu avait la parole. Je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant. Est-ce que... Oui, M...

M. Garon: ...s'assoient à leur siège ou qu'ils s'en aillent ailleurs, parce que...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le député de Lévis, en vertu de l'article 32, je demanderais

aux députés de prendre la place qui leur a été assignée par la présidence, et ce, immédiatement. Je demanderais aux députés de prendre leur place, qui leur a été assignée par la présidence. Alors, s'il vous plaît!

Mise aux voix

Alors, est-ce que le projet de loi 110, quant à l'adoption du principe, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Bélisle: Je fais motion, M. le Président, pour que ledit projet de loi 110 soit déféré à la commission des affaires sociales pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Bélisle: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Article 5, M. le Président.

Projet de loi 115 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 5. M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle propose l'adoption du principe du projet de loi 115, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. Est-ce qu'il y a des interventions?

M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président.

M. le Président, dans une large mesure, le projet de loi 115, qui modifie la Loi sur le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, a pour effet d'adapter la loi constitutive du ministère à la réalité des communications électroniques et informatiques modernes.

En effet, avec l'essor qu'a connu l'informatique au cours des dernières années, les administrations ont changé leur façon de communiquer avec leur clientèle. Il est devenu d'usage courant que les clients reçoivent un imprimé informatique les informant des montants aux- quels ils ont droit, ou encore des dettes qu'ils doivent rembourser. Ces documents remplacent, de plus en plus, les lettres personnalisées et signées que nous recevions jusqu'à encore tout récemment.

Cette nouvelle façon de faire se développe autant dans les administrations publiques que dans les entreprises privées. Le recours à l'informatique n'en conserve pas moins une grande fiabilité, d'autant plus que des mécanismes rigoureux de vérification sont mis en place. Nos systèmes informatiques permettent, par exemple, de conserver la trace de tout document expédié, d'identifier la personne qui l'a émis, la date de la transmission, ainsi que le détail sur le contenu du document. Si nous voulons tirer profit des possibilités que nous offre l'informatique et bénéficier des économies qu'elle permet, nous devons ajuster la loi du ministère en conséquence.

Par exemple, la loi doit indiquer explicitement qu'une décision transmise par un document non signé sera reconnue officielle en autant que le document qui informe le client de cette décision porte l'en-tête du ministère et qu'on indique clairement la direction ou encore la personne qui a émis le document ou la décision. En cas de contestation, le ministère doit pouvoir mettre en preuve des documents informatiques officiels sans être limité à des copies de lettres signées.

Enfin, puisque les systèmes informatiques conservent en mémoire tous les détails des documents émis, on doit présumer, en cas de contestation, qu'une décision ou un document a bel et bien été transmis. Autrement, il faudrait recourir systématiquement au courrier recommandé, ce qui, tant au plan de la lourdeur administrative que des coûts directs, représenterait une dépense exorbitante. Par exemple, lorsque nous émettons un certificat confirmant une dette à la Sécurité du revenu, nos systèmes informatiques nous indiquent à quelle adresse, à quelle date et par quelle personne ce certificat a été émis. À moins de circonstances extraordinaires et hautement improbables, la personne concernée recevra chez elle le certificat en question. Si elle veut prétendre ne pas l'avoir reçu, elle devra s'expliquer plutôt que de contraindre le ministère à faire la preuve que l'avis a été expédié et reçu. Nous sommes prêts à admettre le doute raisonnable, mais il est impossible de nous prémunir contre une contestation facile qui consisterait à prétendre que la personne n'a pas reçu ce que nous lui avons expédié.

Le projet de loi 115 veut également permettre au ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle de conclure des ententes d'échange de renseignements avec d'autres gouvernements provinciaux et même certains États américains. Il est largement admis que certains prestataires de la Sécurité du revenu au Québec reçoivent aussi des prestations de l'Ontario ou encore du Nouveau-Brunswick. Il se peut que certaines personnes soient également inscrites au régime de la sécurité sociale d'États américains limitrophes. Les ententes d'échange de renseignements nous permettront de vérifier l'admissibilité au programme d'aide de dernier recours et la détection des cas de

fraude, et ce, de façon à réduire d'autant le coût des programmes et ainsi favoriser une gestion équitable au bénéfice de notre clientèle. (21 h 40)

Nous avons l'intention de soumettre à la Commission d'accès à l'information les projets d'entente sur l'échange de renseignements avec un organisme externe au Québec, comme nous le faisons lorsqu'il s'agit d'échange de renseignements nominatifs avec un autre organisme du gouvernement du Québec.

Dans un autre ordre d'idée, le projet de loi 115 habiliterait le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle à conclure des contrats afin de fixer le prix d'un bien ou d'un service lorsque le ministère ou le ministre en assume totalement ou partiellement le coût pour les fins d'administration de programmes. Dernièrement, nous avons été confrontés à une difficulté qui nous a incités à inclure cette disposition dans la loi constitutive du ministère. Dans le cadre d'un programme de remboursement d'une bonne part des dépenses encourues pour l'alimentation de jeunes enfants dont les parents sont prestataires de la Sécurité du revenu, nous voulons conclure une entente avec les fournisseurs de lait maternisé. On a soulevé des doutes quant à la légalité de pouvoir procéder à de telles ententes dans le contexte législatif actuel. Pour dissiper cette incertitude, nous avons choisi d'introduire une disposition dans la loi sur le ministère. Le ministère, bien sûr, M. le Président, de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.

Voilà, M. le Président, l'essentiel du contenu ? un peu technique, je le concède ? de sept des articles de ce projet de loi qui modifie la Loi sur le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. Je souhaite que nous procédions sans délai indu à son analyse, puis à son adoption.

Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le ministre de la Main-d'oeuvre.

Je cède la parole, maintenant, au porte-parole officiel en cette matière, M. le député de La Prairie, et vice-président de la commission du budget et de l'administration. M. le député, la parole est à vous.

M. Denis Lazure

M. Lazure: Merci, M. le Président.

Alors, M. le Président, il se fait depuis un certain nombre d'années des échanges d'informations, de fichiers électroniques, et les gouvernements se doivent d'être de plus en plus prudents dans l'usage de ces échanges. Avec ce projet de loi, on sent une certaine menace d'opérer une brèche dans le respect de la vie privée. En effet, tel que présenté, le projet de loi ne précise pas exactement le genre de renseignements nominatifs qui seront échangés entre les différents gouverne- ments. Ce qui est un peu inquiétant aussi, M. le Président, c'est que, dans les notes explicatives, on parle non seulement de gouvernements à ministères, mais autres organismes étrangers. Ce texte-là pourrait permettre d'échanger des fichiers électroniques non seulement avec des gouvernements, mais aussi avec des organismes privés. J'y reviendrai tantôt, puisqu'on sait que ce gouvernement a déjà des visées, des plans pour confier à l'entreprise privée la gestion de ses fichiers électroniques, avec tous les dangers que ça comporte.

Le gouvernement du Parti québécois, conscient des dangers d'atteinte à la vie privée, avait mis sur pied la Commission d'accès à l'information. La Commission d'accès à l'information, qui agit, par conséquent, comme un chien de garde de la vie privée, a posé deux conditions aux ententes qu'entend conclure le ministère. Premièrement, il faudra que seuls les renseignements nécessaires à la prévention, la détection ou la répression de fraudes soient échangés, et non pas l'ensemble des données du dossier du bénéficiaire. Deuxièmement, il faudra que chacune des ententes conclues soit préalablement soumise à l'approbation de la Commission.

La Commission, dès son rapport de 1990-1991?j'en cite quelques extraits ? s'inquiétait des atteintes à la vie privée, qui pouvaient résulter de l'utilisation de ces fichiers électroniques par différentes personnes, souvent mal identifiées. Et je cite quelques extraits, la page 15, du rapport annuel du Vérificateur général, qui fait allusion à ces craintes-là, lui aussi. Donc, ce n'est pas seulement la Commission d'accès à l'information qui agit comme chien de garde du respect de la vie privée des individus, mais il y a aussi, évidemment, le Vérificateur général, qui a des remarques tout à fait pertinentes, dès 1990-1991, M. le Président. Et je cite: «Nous avons noté que l'accès aux ressources informatiques importantes n'était pas limité exclusivement aux personnes responsables de ces ressources; les droits d'accès ne sont pas toujours accordés en tenant compte des responsabilités réelles des utilisateurs et la mise à jour de ces droits d'accès comporte souvent des déficiences; enfin, le caractère confidentiel des codes d'identification et des mots de passe permettant d'accéder aux divers fichiers n'est pas toujours assuré.» Et, deuxième remarque, toujours dans ce rapport 1990-1991 du Vérificateur général: «Nous souhaitons contribuer à l'amélioration de cette situation en revenant à nouveau sur le sujet; nous sommes convaincus que l'information constitue un actif gouvernemental d'importance majeure et qu'il est urgent de la protéger en conséquence.» L'année suivante, le même Vérificateur général revenait sur cette question de la circulation des informations touchant la vie privée. Et je cite quelques extraits du rapport 1991-1992, à la page 15: «Encore cette année, j'accorde une attention particulière au degré de sécurité de ces données. En effet, mes travaux de vérification révèlent encore des faiblesses dans ce domaine. Ainsi, les droits d'accès aux banques de données ne sont pas toujours attribués en tenant compte des responsabilités réelles des utilisateurs [...] De plus, le caractère confidentiel des

codes d'identification et des mots de passe permettant d'accéder aux divers fichiers n'est pas toujours assuré.» Il a fait la remarque l'année précédente; il la refait encore en 1991-1992. «Il serait malheureux que l'on attende des fuites de données confidentielles pour renforcer davantage les contrôles d'accès aux informations.» Et, enfin, il dit, le Vérificateur: «Bien peu de progrès ? et le ministre de la Sécurité du revenu devrait s'en inquiéter ? ont été réalisés à ce chapitre, bien que le Vérificateur général en ait fait un élément majeur de son rapport annuel de l'an dernier. Qu'attend le gouvernement pour agir?»

La troisième année, 1992-1993, le Vérificateur général revient encore sur la question, et la Commission d'accès à l'information aussi. Dans son rapport 1992-1993, la Commission d'accès à l'information concluait que le respect de la vie privée fut le sujet principal des nombreuses inquiétudes qu'elle a eues au cours de l'année. La Commission identifiait la collecte de certains renseignements personnels, à commencer par le numéro d'assurance sociale, de même que le numéro d'assurance-maladie, comme posant des problèmes. Et je cite: Avec l'une ou l'autre de ces deux données, il est possible d'obtenir de certaines banques de données importantes une masse d'informations sur telle ou telle personne. Plus un fichier contient de renseignements sensibles, plus impérieuse se fait la tentation d'y accéder, pour ce qui est de la recherche d'informations sur une personne précise. La Commission rappelait ensuite aux gestionnaires publics le principe à la base de toute cueillette de renseignements personnels, à savoir: ces renseignements doivent être nécessaires à l'accomplissement du mandat confié à un organisme public. Comme on le voit, l'utilisation généralisée les identifiant suscite un motif d'inquiétude sérieux. (21 h 50)

Alors, le ministre devrait être très explicite quand il parle d'échanger des renseignements. Et je peux tout de suite lui dire, M. le Président, pour son intérêt et sa planification des travaux, que nous serons contre son projet de loi, à moins, à moins, à moins qu'il accepte des amendements importants lors de l'étude article par article. Et ce n'est pas compliqué, il y aura trois amendements principaux. Je lui dis tout de suite. Premièrement, il faudra non seulement qu'il sollicite l'avis de la Commission d'accès à l'information, mais il faudra qu'il suive ses avis; deuxièmement, il faudra qu'il sollicite les avis de la Commission des droits de la personne et qu'il suive ses avis; et, troisièmement, il faudra qu'il s'engage à déposer ici, à l'Assemblée nationale, les projets d'entente.

Comme il vient de me signifier, par son langage non verbal, qu'il allait rejeter ces propositions, nous pouvons, M. le Président, d'ores et déjà, lui annoncer que nous voterons contre l'adoption de ce projet tel qu'il est présenté.

Dans un rapport publié en octobre 1987 et portant le titre «Une vie privée mieux respectée, un citoyen mieux informé», la Commission d'accès à l'information identifiait le défi que comporte son mandat. Et on pouvait y lire ce qui suit: «La prochaine étape de ce défi sans cesse renaissant porte davantage sur la protection des renseignements personnels à cause de l'évolution rapide des technologies nouvelles dans le traitement des banques de données nominatives et du besoin insatiable des administrateurs de colliger davantage et davantage des renseignements».

Dans son dixième rapport annuel présenté au mois de juillet dernier, le Commissaire canadien à la protection de la vie privée ? et le collègue, ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, va sans doute être intéressé à ce point de vue d'un représentant d'un organisme fédéral ? M. Bruce Phillips, dit ceci: «Les législateurs laissent malheureusement s'accroître la menace que font courir les nouvelles technologies sur les renseignements personnels. La technologie évolue si rapidement que les gouvernements, comme l'entreprise privée, ne sont plus en mesure de contrôler l'accès aux innombrables banques de données compilées sur chacun d'entre nous.»

C'est grave, M. le Président. C'est le commissaire canadien à la vie privée, M. Bruce Phillips, un ancien journaliste bien connu, qui nous met en garde. Et il identifiait cette menace des grands réseaux d'information comme quelque chose d'extrêmement important, extrêmement grave. Et, selon lui, il faudra adopter une démarche visant à concilier la révolution informatique et la protection de la vie privée.

Et voilà le défi, M. le Président. Nous, de l'Opposition officielle, nous sommes évidemment favorables à l'utilisation maximale des systèmes électroniques, mais, en même temps, nous voulons avoir toutes les garanties nécessaires pour qu'il n'y ait pas atteinte à la vie privée des individus, et, surtout, dans le cas qui nous occupe ici, il s'agit de vie privée d'individus qui sont faibles dans la société. Il s'agit principalement de personnes qui sont à l'aide sociale, c'est-à-dire le dernier recours, il s'agit des gens dans la société qui sont les plus mal pris. en effet, m. phillips n'est pas le seul à penser ainsi, que c'est un problème très grave, problème moderne, problème contemporain très grave. dans un sondage récent, en 1992, novembre 1992, on voit que 62 % des canadiens pensent que les utilisations présentes des ordinateurs représentent une véritable menace d'atteinte à la vie privée. 62 %, deux canadiens sur trois sont inquiets.

Alors, pour éviter les écueils, la Commission d'accès à l'information proposait, notre commission proposait, dans son dernier rapport, en décembre 1992, l'élaboration de mesures de sécurité adéquates, telles un accès limité aux fichiers et la désignation au jour le jour des personnes qui doivent légalement avoir accès aux fichiers. Et, en plus, elle faisait la recommandation suivante: le législateur devrait confier à la Commission la réalisation d'un document qui servirait à guider les organismes publics lorsqu'ils désirent se prévaloir des techniques de l'informatique pour créer des fichiers de renseignements personnels.

Si la Commission d'accès à l'information exige tant de précautions, M. le Président, c'est parce que certaines vérifications entreprises par le passé permettent de dégager des conclusions inquiétantes. Entre autres, auprès de la Régie des rentes, du ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, du ministère de celui qui nous présente un projet de loi, ce soir.

La Commission d'accès à l'information identifiait le ministère de la Main-d'oeuvre comme étant un des ministères où il y avait le plus de failles, où il y avait le plus de risques d'atteinte à la vie privée. Ces organismes publics, dont son ministère, éprouvent de la difficulté à mettre en place des mesures de sécurité adéquates. Ce n'était pas la première fois, d'ailleurs, que le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle était pointé du doigt en matière de sécurité des renseignements confidentiels. Il suffit de se rappeler qu'au mois d'août 1991, M. le Président, une dizaine de caisses de dossiers de l'aide sociale avaient été retrouvées sur le trottoir devant les bureaux de Travail-Québec à Saint-Jérôme. Ces dossiers comportaient des renseignements particulièrement sensibles sur des personnes assistées sociales ayant fait l'objet d'enquêtes de la part du ministère, certains y étant soupçonnés de fraude. Il faut donc conclure, avec la Commission, que le ministère n'a pas de politique précise lorsqu'il s'agit de se défaire de documents confidentiels.

Dans ce projet de loi, le ministre désire se doter de mesures qui sont risquées et dangereuses pour combattre un problème dont il ne connaît pas encore l'ampleur. Certains juristes pourraient rappeler au ministre qu'il existe une règle, et le ministre, qui a une formation juridique, la connaît bien cette règle, M. le Président. Il faut que les mesures qu'on prend soient proportionnelles à l'objet recherché.

L'objet recherché, M. le Président. Ce projet de loi, comme la plupart des actions du ministre, depuis quelques années, c'est sa course à la fraude, sa course frénétique à la fraude parmi les personnes assistées sociales, partant de la philosophie que toutes les personnes qui doivent, par nécessité, toucher de l'aide sociale sont des fraudeurs, des fraudeuses en puissance. C'est ça, la philosophie du ministre. Et le ministre, en partant de cette obsession qu'il faut surveiller tout le monde, a pris un certain nombre de mesures que nous connaissons bien, que les personnes assistées sociales, surtout, connaissent bien, et, ça, c'est une de ces mesures. Quand on lui demande... Puisque cet échange d'information de gouvernement à gouvernement est dans le but de dépister des fraudeurs, quand on lui a demandé: Quelles sont les sommes impliquées? il nous a répondu: Ça peut varier de 500 000 $à2000000$ou3000 000 $ par année. On a déjà vu plus précis comme évaluation, comme estimation. Dans cette entreprise que le ministre mène depuis un bon bout de temps, de poser des gestes qui, souvent, sont excessifs, sous prétexte qu'il va aller chercher 500 000 $, ou 2 000 000 $ ou 3 000 000 $, nous devons constamment le surveiller.

C'est pour ça que nous disons, en accord avec les préoccupations de la Commission d'accès à l'information, en accord avec les préoccupations du Vérificateur général, en accord avec les inquiétudes du Commissaire à la protection de la vie privée, M. Bruce Phillips, du gouvernement fédéral, que nous disons: II faut absolument que le ministre nous fasse la démonstration, en acceptant des amendements au projet de loi lors de l'étude article par article, en acceptant des amendements qui vont venir nous donner une sécurité, qui vont donner une sécurité aux 750 000 individus qui sont à l'aide sociale, individus qui sont à l'aide sociale actuellement. (22 heures)

J'ai fait allusion tout à l'heure au fait que ce gouvernement, toujours inspiré par un vent de panique, est en train, nous dit-on, de préparer la passation à l'entreprise privée de la gestion des systèmes électroniques. M. le Président, je pense qu'il y a lieu de s'inquiéter d'une telle mesure, si elle est prise. Et je peux tout de suite informer cette Assemblée qu'à titre de vice-président de la commission du budget et de l'administration j'ai écrit au président de la commission du budget et de l'administration, lui demandant instamment de convoquer cette commission afin d'entendre les ministres qui seraient concernés par ce projet de passer à l'entreprise privée la gestion des systèmes électroniques.

Alors, nous avons appris à nous méfier du ministre et nous ne sommes pas les seuls. Nous ne sommes pas les seuls. Je vois devant moi, par exemple, un editorial du Soleil, il n'y a pas longtemps, jeudi le 11 novembre. «Aide sociale: on fait trop de mystère.» Ce qu'on peut reprocher au ministre qui nous présente ce projet de loi ce soir, c'est que, souvent, il prend des décisions administratives qui vont affecter des centaines de milliers de personnes ou il présente des projets de loi non pas dans le but d'améliorer la clientèle dont il devrait se préoccuper, mais toujours dans le but de répondre à des commandes de son collègue, le président du Conseil du trésor.

Ce projet de loi, qui a pour objectif d'aller chercher, nous dit-il, entre 500 000 $ et 3 000 000 $, peut-être, est tout à fait dans la même veine que d'autres mesures qui ont été prises tout récemment, qu'il s'agisse, par exemple, des vérificateurs, des personnes qu'on appelle communément boubous macoutes ou super-boubous macoutes. Et, là aussi, c'est toujours basé sur sa philosophie qu'il faut être à l'affût constamment de la personne assistée sociale parce que c'est un fraudeur, c'est une fraudeuse en puissance.

Et je cite un editorial de La Presse du mois de novembre aussi, 8 novembre, qui est intitulé, d'ailleurs, «Les "boubou-macoutes'V Alors, ça dit: «Si le ministre voulait confirmer l'hypothèse que les "boubou-macou-tes" n'ont été créés que pour discréditer les bénéficiaires de l'aide sociale dans l'opinion publique, il ne s'y prendrait pas autrement. Depuis sept ans que ce système fonctionne, il doit bien exister, quelque part,» dans son ministère, «des chiffres permettant d'évaluer son utilité en comparant ce qu'il a coûté avec le gaspillage... Bien

des citoyens se sont résignés à voir un mal pour un bien dans cet odieux recours à des "boubou-macoutes" présenté comme la seule parade efficace aux abus. Si l'opération n'était pas qu'une manoeuvre de diversion pour masquer l'incapacité du gouvernement de s'attaquer à la source du mal plutôt qu'à ses conséquences, il serait temps d'en faire un bilan exhaustif. Tant qu'il faudra se contenter des propos vagues du ministre, on ne saura blâmer ceux qui n'y ont toujours vu qu'un exercice hautement démagogique.»

Nous disons, de ce côté-ci, M. le Président, que les personnes assistées sociales, surtout ces années-ci, sont les individus les plus mal pris dans cette société et, de plus en plus, un grand nombre d'entre elles, ces personnes-là, sont des gens qui ont perdu leur emploi, surtout depuis deux ou trois ans, qui ont épuisé leur assurance-chômage et qui n'ont d'autre recours maintenant que d'aller à l'aide sociale. Et, plutôt que de vraiment s'acharner à préparer une économie qui va créer des emplois, on vient présenter, toujours, des mesures qui ne font qu'accentuer les préjugés négatifs à l'égard de la personne assistée sociale.

Alors, ce projet de loi, M. le Président, en conclusion, nous allons nous y opposer, à moins que le ministre nous offre les garanties, en acceptant les amendements dont j'ai parlé tantôt, que la vie privée des personnes dont il a la charge par le biais de l'aide sociale sera parfaitement respectée. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de La Prairie. En vertu de votre droit de réplique, M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. M. le ministre.

M. André Bourbeau (réplique)

M. Bourbeau: M. le Président, quelques mots seulement en réplique aux propos tenus par le député de La Prairie. Je voudrais simplement rappeler, M. le Président, qu'un des objets du projet de loi, c'est de permettre au ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle de pouvoir conclure des échanges de renseignements par voie de couplage de fichiers informatiques avec des gouvernements d'autres provinces canadiennes, tels l'Ontario, par exemple, ou le Nouveau-Brunswick.

M. le Président, ce n'est pas de gaieté de coeur que nous demandons ce pouvoir-là. Parce que nous avons fait une expérience-pilote semblable ? d'ailleurs, je peux en parler, parce qu'on en a parlé dans les journaux ? avec le gouvernement de l'Ontario; pas tout l'Ontario, seulement une petite partie, la municipalité de comté de Ottawa-Carleton. On a fait en sorte de comparer les listes de personnes assistées sociales dans cette municipalité ontarienne avec les listes québécoises et, M. le Président, on s'est rendu compte qu'il y avait quelques centaines de personnes qui percevaient des chèques d'aide sociale à la fois en Ontario et au Québec, donc qui faisaient du «double dipping», comme on dit, qui pigeaient des deux côtés de la frontière en même temps. M. le Président, vous comprendrez que c'est là l'équivalent d'une fraude et que, si on permet ce genre de chose, c'est les contribuables qui ont à défrayer les coûts.

Alors, ce qu'on veut faire, on veut être capables de le faire sur une grande échelle, c'est-à-dire avec à peu près tout ce qu'il peut y avoir de possibilités, soit en Ontario, soit au Nouveau-Brunswick, qui sont des provinces limitrophes, ou encore, peut-être, avec des États américains. Alors, je pense bien qu'il n'y a personne au Québec qui va s'objecter à ce que le gouvernement du Québec fasse en sorte de prévenir, comme ça, la fraude en utilisant ces moyens modernes.

Alors, nous ne le faisons pas en sauvages, ni, entre guillemets, en cow-boys, M. le Président. Nous avons demandé l'avis de la Commission d'accès à l'information et nous avons préparé des documents. La Commission d'accès à l'information nous a demandé de faire des modifications. On a fait les modifications dans le projet de loi pour se conformer aux demandes de la Commission. On a même accepté, M. le Président, de présenter à la Commission, quand ils seront prêts, nos projets d'ententes, comme on le fait dans les autres ententes qu'on a déjà conclues, d'ailleurs, avec d'autres ministères, parce qu'on fait déjà des couplages de fichiers informatiques avec d'autres ministères ou d'autres organismes gouvernementaux québécois.

On en fait, par exemple, avec la Régie des rentes du Québec, avec la Commission de la santé et de la sécurité du travail, avec la Société de l'assurance automobile. On compare nos listes avec les leurs pour s'assurer qu'il n'y a pas de personnes qui reçoivent à la fois des prestations, par exemple, de la Régie des rentes et de l'aide sociale, parce que vous savez que, l'aide sociale étant un système de dernier recours, on doit tenir compte des revenus des gens. Alors, comme on a déjà, M. le Président, une certaine expertise là-dedans, ayant, dans le passé, convenu avec la Commission d'accès à l'information de la façon de procéder, on entend procéder exactement de la même façon quand on comparera nos fichiers avec l'Ontario, par exemple.

Alors, ce que l'Opposition nous demande, c'est d'aller plus loin dans la procédure, avec l'Ontario, par exemple, que ce qu'on fait déjà avec nos propres organismes. Alors, si ça fonctionne bien avec les organismes québécois, pourquoi on devrait ajouter encore à la complexité de l'opération? Je ne vois pas pourquoi. La demande du député de La Prairie m'apparaît déraisonnable. M. le Président, il y a une procédure d'établie, il y a des habitudes qui ont été prises et qui se sont révélées correctes, puis on n'a jamais entendu personne venir se plaindre que la vie privée des gens avait été brimée dans le passé; enfin, pas depuis qu'on a des ententes qui ont été acceptées par la Commission d'accès à l'information. Alors, moi, M. le Président, je veux bien faire plaisir au député de La Prairie, mais je ne veux quand même pas,

non plus, que le gouvernement se perde en procédures inutiles et en paperasserie inutile. (22 h 10)

M. le Président, c'est bien à regret que je dois constater que j'ai l'impression que je ne pourrai pas satisfaire les demandes du député de La Prairie. Je voudrais bien le faire, M. le Président, vous connaissez ma grande sollicitude et ma volonté de toujours tenter d'en venir à une entente avec nos amis de l'Opposition. Mais, à partir du moment où ça m'apparaît déraisonnable et pas dans l'intérêt public, il est bien difficile pour moi de concéder des choses semblables. Mais, la nuit portant conseil et le député de La Prairie ayant entendu la justesse de mes propos et, dans toute sa sagesse, M. le Président, peut-être qu'il va en venir à amender sa position. C'est ce que j'espère du plus profond de mon coeur. Je vous remercie.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Le principe du projet de loi 115, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, est-il adopté?

M. Lazure: Sur division.

Une voix: Adopté.

M. Lazure: Sur division.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Béiisle: Je fais motion pour que le projet de loi 115, M. le Président, soit déféré à la commission des affaires sociales pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Béiisle: Adopté.

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Béiisle: L'article 9, M. le Président.

Projet de loi 128

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 9, M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle propose l'adoption du principe du projet de loi 128, Loi modi- fiant la Loi sur la sécurité du revenu. Est-ce qu'il y a des interventions? Oui, Mme la députée de Johnson.

Question de règlement sur les notes explicatives du projet de loi

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: M. le Président, avant qu'on commence, que le ministre commence son intervention sur le projet de loi 128, j'aimerais soulever la question de règlement suivante concernant les notes explicatives du projet de loi. Je ne désire pas interrompre, mais pas du tout là, le débat comme tel, mais, le sujet étant néanmoins important, j'apprécierais obtenir le plus tôt possible une réponse de votre part sur ce point.

Le projet de loi 128, et plus précisément aux articles 2 et 3, modifie les règles d'admissibilité au programme APTE pour les personnes âgées de 55 à 60 ans. Il instaure un délai de carence de six mois pour l'admissibilité à ce type de programme, notamment, encore une fois, pour les 55 à 60 ans. Ces modifications sont précises et claires; on peut différer d'opinion sur le bien-fondé ou non, mais personne ne contestera que c'est bien le but précis recherché par le législateur, on n'en disconvient pas.

Or, les notes explicatives du projet de loi content une tout autre histoire. Elles disent ceci. Écoutez bien, M. le Président, et, si vous prenez le projet de loi 128, vous allez pouvoir retrouver ce que je suis en train de vous dire. «Ce projet de loi modifie la Loi sur la sécurité du revenu afin de préciser certaines modalités des programmes "Soutien financier" et "Actions positives pour le travail et l'emploi" et du programme "Aide aux parents pour leurs revenus de travail".»

Ce laconisme des notes est carrément imprécis, pour ne pas dire trompeur. Je sais fort bien que la jurisprudence parlementaire ne confère pas à ces notes une valeur juridique et qu'il ne s'agit pas d'un guide qui doit être d'une valeur informative absolue. Cependant, leur contenu m'apparaît, tout de même, important pour deux raisons, M. le Président.

C'est après avoir entendu la lecture de ces notes explicatives que l'Assemblée décide de se saisir ou non du projet de loi présenté par un ministre ou un député, l'article 233. Il est arrivé, tout de même, quelquefois qu'un vote intervienne à cette étape et il est fort important que les députés comprennent bien de quoi il retourne. Le Répertoire législatif de l'Assemblée nationale émis à chaque année par l'Assemblée reprend intégralement, pour décrire les projets, le contenu des notes explicatives. Si imprécision, laconisme ou faussetés il y a, ils seront répétés dans ce recueil officiel qui relève de l'Assemblée.

J'estime donc que ces notes qui sont destinées à l'Assemblée peuvent faire l'objet d'une forme de contrôle ou de directive de la part de la présidence puisqu'elles relèvent de l'Assemblée et que le seul texte légal ou réglementaire qui fait référence à la notion de

notes explicatives est le règlement de l'Assemblée à l'article 233. Donc, même si ces notes sont rédigées par l'Exécutif et examinées par le Comité de législation du gouvernement, je crois tout de même que le libellé de l'article 233 permet au président d'intervenir, soit pour donner des lignes directrices à ceux qui veulent présenter des projets de loi ou, à tout le moins, pour obtenir la correction de notes imprécises ou trompeuses. Cela est d'autant plus nécessaire qu'elles ne peuvent être examinées ou modifiées en commission.

En conclusion, M. le Président, je pense qu'il y a amplement matière à réflexion pour la présidence dans la question que je viens de soulever, notamment par rapport à cette zone grise entre l'Exécutif et l'Assemblée dans l'élaboration de l'imprimerie des projets de loi, et je crois que ce qui s'est produit dans le cas du projet de loi 128 est un bel exemple pour illustrer ce qui ne devrait plus se produire à l'Assemblée en matière de notes explicatives. Nous comptons donc, M. le Président, sur la présidence pour statuer sur le cas précis du projet de loi 128 et, de façon plus générale, sur l'ensemble du problème. Voilà, M. le Président. J'aimerais que vous me donniez une réponse à ce que je viens de soulever.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des informations là-dessus? Est-ce qu'il y a d'autres demandes? Non? Est-ce que vous voulez intervenir sur la question de règlement de Mme la députée? Vous voulez intervenir, M. le ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu?

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: M. le Président, j'ai écouté avec attention les propos de la députée de Johnson qui voudrait que les notes explicatives qui précèdent le projet de loi 128 soient encore plus explicatives, si je comprends bien, que ce qu'elles contiennent présentement. Les notes explicatives de ce projet de loi, M. le Président, comportent cinq paragraphes pour un projet de loi qui contient 19 articles. Vous savez comme moi, M. le Président, qu'on a parfois des projets de loi qui contiennent des centaines et des centaines d'articles et où les notes explicatives font, en général, six, sept ou huit paragraphes.

Alors, la députée de Johnson, dans ses remarques, a cité un auteur célèbre, dont j'ai oublié le nom, qui fait état de cas où les notes explicatives feraient preuve d'imprécision, de laconisme ou de faussetés. M. le Président, oublions tout de suite les faussetés. S'il y en a, je suis convaincu que la députée de Johnson nous les aurait signalées. Pour ce qui est de laconisme, M. le Président, je pense que, par définition, les notes explicatives doivent être plutôt laconiques; sans quoi, on répéterait tout le projet de loi dans les notes explicatives. Quant à l'imprécision, M. le Président, je ne crois pas qu'elles soient imprécises. Bien sûr, comme je l'ai dit tout à l'heure, elles ne reprennent pas la totalité du projet de loi, mais elles décrivent, dans l'ensemble, je crois, les objets du projet de loi sans entrer, bien sûr, dans les détails.

La députée a aussi parlé, M. le Président, de notes qui pourraient être trompeuses. Je la défie de me dire en quoi ces notes-là sont trompeuses, M. le Président. Elles ne le sont certainement pas. Maintenant, est-ce qu'elles sont imprécises? Elles le sont dans la mesure, M. le Président, où on ne peut pas, dans un paragraphe d'introduction, reprendre l'essentiel de ce qu'il y a dans le projet de loi. Mais, si on regarde les notes, M. le Président, telles qu'elles sont rédigées, on voit qu'elles décrivent, d'une façon générale, l'objet du projet de loi, sans entrer dans les détails. Et, quant à moi, c'est exactement ce que devraient être les notes explicatives. Maintenant, on ne va pas jusqu'à décrire mot à mot chacune des dispositions du projet de loi et, pour ça, il faut se donner la peine de lire le projet de loi lui-même.

M. le Président, je vous soumets que, si on devait reprendre, dans les notes explicatives, chacun des points précis, des objets précis d'un projet de loi, bien, on n'aurait, à toutes fins pratiques, pas besoin du projet de loi. On pourrait avoir seulement les notes explicatives. M. le Président, je vous soumets, en conclusion, qu'il m'apparaît que ces notes-là sont suffisantes pour attirer l'attention des députés et de ceux que ça intéresse et que, si une personne ayant lu les notes explicatives veut en savoir plus long, dans les détails, elle n'a, M. le Président, qu'à lire le projet de loi au long. Je vous remercie.

M. Gendron: M. le Président... (22 h 20)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader adjoint de l'Opposition officielle et député d'Abitibi-Ouest.

M. François Gendron

M. Gendron: M. le Président, très sérieusement, je ne veux pas intervenir sur le fond, comme leader adjoint. Je pense que ma collègue... Je suis convaincu que vous avez entendu les remarques qu'elle vous a faites. Je ne les reprends pas. Je voudrais, cependant, que vous preniez le temps de regarder ça. On ne demande pas que vous rendiez une décision ce soir, mais, effectivement, on pense que c'est un bel exemple sur lequel la présidence devrait se prononcer par rapport à la question de règlement soulevée, pour le futur. Et c'est dans ce sens-là que je souhaiterais que vous preniez le temps, M. le Président, de regarder attentivement les remarques qui ont été faites par ma collègue de Johnson, afin qu'une décision de la présidence puisse nous guider mieux à l'avenir dans les projets de loi.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, comme vous l'avez dit, M. le leader adjoint de l'Opposition officielle, il est sûr que c'est pour le futur, mais je

tiens à vous dire immédiatement que les notes explicatives ne dépendent pas, c'est-à-dire ne sont pas sous l'autorité de l'Assemblée ici. C'est le parrain du projet de loi, évidemment, qui présente ces notes explicatives. Mais je prends bonne note de vos remarques; je peux le prendre en délibéré et regarder la question, et je soulignerai à la présidence de l'Assemblée de regarder cette situation-là, s'il y a lieu.

M. Gendron: Oui, M. le Président, si vous me le permettez, très amicalement...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.

M. Gendron: ...je veux bien, mais nous rappeler qu'en termes de jurisprudence parlementaire vous ne conférez pas de jurisprudence aux notes explicatives et qu'elles n'ont pas de valeur juridique, nous le savons, c'est un des arguments qu'on a dits.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, oui, c'est ça, oui.

M. Gendron: Je vous rappelle juste, rapidement, ce qu'on vous a dit. C'est que, l'Opposition, ce n'est toujours uniquement qu'après avoir entendu les notes explicatives que, nous, on a la première occasion de porter un jugement: Oui, M. le Président, nous acceptons que ce projet de loi soit déposé. Et de deux choses l'une: ou bien les indications qui sont là reflètent le contenu du projet de loi, et cela a un sens de nous demander notre accord pour le dépôt, ou bien les notes explicatives n'ont rien à voir, et, dans ce sens-là, ça devient ? et je ne le dis pas contre vous à la présidence, mais je le dis contre le parlementarisme ? carrément une espèce de demande qui n'a aucune signification quant à l'étape où nous sommes rendus. Et je fais juste vous rappeler, en conclusion, que c'est après avoir entendu les notes explicatives que l'Assemblée décide de se saisir ou non d'un projet de loi.

Or, dans le présent cas, manifestement... J'ai entendu la réplique ? je suis obligé d'aller un petit peu sur le fond; ça va être court ? du ministre porteur du projet de loi. On n'a pas que dit que ces notes explicatives étaient plutôt laconiques. On a carrément dit que, dans le présent cas, «ce projet de loi modifie la Loi sur la sécurité du revenu afin de préciser certaines modalités des programmes ? exemple ? "Soutien financier" et "Actions positives pour le travail et l'emploi" et du programme "Aide aux parents..."». Et, dans les notes explicatives, il n'a jamais été question de l'admissibilité au programme pour les 55 ans à 60 ans. Alors, ça commence à faire pour influencer notre accord par rapport au dépôt. C'est un des éléments essentiels du projet de loi et il n'en est même pas question dans les notes explicatives.

Donc, M. le Président, et je m'arrête là, je vous dis juste: On ne veut pas se faire rappeler que les notes explicatives n'ont pas de valeur juridique. Nous le sa- vons. Mais on veut que vous preniez note, dans le présent cas: Est-ce que, oui ou non, la présidence constate que les notes explicatives permettent d'avoir une bonne première compréhension des principes du projet de loi? Si la réponse est oui, il me semble que l'exercice auquel vous nous conviez est légitime. Si la réponse est non dans votre décision, là, il me semble qu'on a réellement raison de vous saisir d'un problème important, parce que tous les consentements que nous donnons en première étape n'auraient aucune espèce de signification et aussi bien ne plus nous le demander et que le législateur dépose sans s'informer si l'Opposition est d'accord ou pas. C'est ça, M. le Président, que nous aimerions que vous appréciiez. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, suite à votre demande, et compte tenu de ce que vous soulignez, la présidence étudiera le présent cas comme exemple et nous ferons connaître, dans un avenir que je ne peux pas vous indiquer à ce moment-ci, notre position suite aux remarques qui nous ont été formulées par Mme la députée de Johnson sur ce sujet. Nous allons procéder à la deuxième lecture, mais c'est pour l'avenir, si j'ai bien compris, que vous voulez qu'on vérifie une situation qui pourrait se représenter à nouveau de la façon que vous l'avez expliquée.

Adoption du principe

M. le ministre, nous en sommes à l'adoption du principe du projet de loi 128, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu. M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. M. le Président, lorsque cette Assemblée a adopté, en 1989, la Loi sur la sécurité du revenu, je vous ai prévenu que nous devrions périodiquement amender cette loi afin de l'ajuster constamment à un contexte social et économique changeant. Le gouvernement a aussi exprimé sa volonté de corriger rapidement tout effet non désiré de la loi, effet qui pourrait s'avérer contraire à l'équité envers les prestataires du régime. Nous y revoilà donc.

Si cette fois sur le métier nous reprenons notre ouvrage, c'est pour apporter, au-delà des points techniques, trois modifications importantes au régime de la sécurité du revenu. Nous voulons bonifier, en premier lieu, le programme APPORT, le programme Aide aux parents pour leurs revenus de travail. En second lieu, le projet de loi 128 révise l'accessibilité aux barèmes de disponibilité. Enfin, nous proposons de considérer les prestataires de 55 à 60 ans aptes au travail comme des personnes qui veulent se rendre utiles et qui peuvent participer au développement économique et social du Québec et se rendre utiles à la société.

Le programme APPORT constitue l'une des

composantes essentielles du régime québécois de la sécurité du revenu. La réforme de l'aide sociale, on s'en souviendra, M. le Président, fut largement axée sur l'incitation au travail. C'est ainsi que le montant des prestations accordées, ce que les fonctionnaires appellent les barèmes de la sécurité du revenu, varie de l'ordre de 150 $ par mois, selon la volonté du prestataire de prendre part à des activités qui favorisent son intégration au marché du travail.

Il fallait, cependant, corriger un paradoxe de taille. En effet, certains ménages percevaient, en 1989, davantage de revenus de l'aide sociale que d'un emploi à plein temps. Aucune société normale ne peut tolérer longtemps une telle bizarrerie économique. Tout en augmentant périodiquement le taux du salaire minimum, nous avons offert aux parents à faibles revenus un programme leur garantissant qu'en tout temps ils sont gagnants de demeurer en emploi même au salaire minimum. Il s'agit là, M. le Président, du programme APPORT. Le programme APPORT verse à quelque 20 000 ménages québécois des prestations pouvant aller jusqu'à 600 $ par mois et même plus lorsque des frais de garde supérieurs à la moyenne sont déclarés. Il s'agit là d'un supplément du revenu de travail qui tient compte, notamment, des revenus d'emploi et des charges familiales de la personne.

L'Opposition officielle a beaucoup dénigré le programme APPORT en raison de sa relative complexité. Je reconnais que la gestion de ce programme a connu sa part de difficultés, mais elles étaient sans commune mesure avec la virulence des attaques de l'Opposition. Ces problèmes résultent en partie du fait qu'il faut estimer, en début d'année, le revenu annuel des familles admissibles et leur verser sous forme d'avances des prestations à chaque mois. Or, les travailleurs à faibles revenus n'ont pas nécessairement des emplois stables, et il arrive que leurs estimations de revenus soient chambardées par des événements hors de leur contrôle, ce qui nous oblige à procéder à des ajustements de la prestation mensuelle qui ne font plaisir à personne. C'est pourquoi nous avons déployé d'importants efforts pour limiter les situations qui entraîneraient des modifications dans le niveau des prestations APPORT. (22 h 30)

Le projet de loi 128 s'attaque cette fois au changement dans la composition du ménage qui survient en cours d'année. Dorénavant, pour éviter de verser des trop-payés, nous considérerons la situation familiale mensuelle réelle, plutôt que la situation familiale prédominante dans l'année. Bien sûr, la situation idéale consisterait à accorder une prestation uniforme durant toute l'année, mais puisqu'en toute équité il faut tenir compte des revenus réels d'emploi nous devons composer avec un programme qui comporte des fluctuations.

L'importance d'améliorer le sort des familles à faibles revenus dépasse de beaucoup les inconvénients liés à la difficulté de prévoir le revenu annuel. Autrement dit, M. le Président, vaut mieux un programme imparfait qui permet à des milliers de familles d'arrondir leurs fins de mois et de leur donner le goût de persévérer en emploi que pas de programme du tout.

Au cours des derniers mois, il s'est dit et écrit passablement de balivernes au sujet de la comparaison des revenus provenant d'un emploi et de la sécurité du revenu. À entendre certains animateurs de lignes ouvertes et même quelques pseudo-fiscalistes ? je ne voudrais pas en nommer, M. le Président ? la famille d'un ou deux enfants, qui ne gagne pas 30 000 $ et même 40 000 $ par année est mieux sur le BS, dit-on. Ces déclarations sont faites avec une assurance de nature à confondre les derniers sceptiques. On comprend aisément qu'un nombre grandissant de nos concitoyens croient qu'effectivement les clients de la sécurité du revenu sont, entre guillemets, M. le Président, gras dur et que, tout compte fait, ça ne vaut pas la peine de travailler à faibles revenus.

Ces chiffres, M. le Président, relèvent pourtant de la pure fabulation. Il est totalement faux de prétendre qu'une personne puisse être gagnante dans la dépendance de la sécurité du revenu ou de l'aide sociale. Comparons brièvement le revenu annuel disponible après impôt et toute autre déduction d'une personne seule et d'une famille selon qu'elle travaille au salaire minimum ou qu'elle reçoive des prestations de la sécurité du revenu au barème de disponibilité.

La personne seule a un revenu disponible de 10 702 $ par année en travaillant au salaire minimum, comparativement à 6884 $ si elle était prestataire de la sécurité du revenu. L'écart, M. le Président, vous en conviendrez, est significatif en faveur de la personne qui travaille au salaire minimum.

La chef de famille monoparentale d'un enfant qui déclare un montant moyen de frais de garde, en considérant les prestations du programme APPORT, touchera, en travaillant au salaire minimum, un revenu disponible de 18 067 $ par année contre 11 467 $ si elle était à la sécurité du revenu ou à l'aide sociale. Même en ne considérant que le strict point de vue financier, le travail demeure toujours plus avantageux que les prestations de la sécurité du revenu. Il faut aussi tenir compte de la valorisation du travail qui représente la forme la plus courante d'épanouissement personnel et de reconnaissance sociale.

Nous avons donc l'intention de faire connaître ces faits à la population du Québec de manière à situer le régime de la Sécurité du revenu dans sa juste perspective économique et à redonner au travail la reconnaissance sociale qui lui revient. Le projet de loi 128 fait en sorte que, pendant ses six premiers mois de présence à la Sécurité du revenu, le prestataire est invité à consacrer l'essentiel de son temps et de ses énergies à se chercher du travail. C'est pourquoi nous ne lui accorderons pas le barème de disponibilité et nous ne lui proposerons pas de participer à des mesures de développement de l'em-ployabilité au cours de ces six premiers mois.

Tout cela nécessite, bien sûr, des explications. La Loi sur la sécurité du revenu incite les prestataires à prendre part à des activités de formation ou d'aide à

l'emploi qui améliorent leurs chances d'accéder au marché du travail. Lorsqu'une personne se dit intéressée par ces activités et que le ministère n'a pas immédiatement de mesures à lui proposer, elle reçoit, en attendant, le barème dit de disponibilité qui majore la prestation de 50 $ par mois. Lorsque, subséquemment, une activité de développement de l'employabilité est offerte au prestataire, ce dernier reçoit un autre montant additionnel de 100 $ par mois, s'il participe à cette activité, ou encore il perd le barème de disponibilité de 50 $ par mois s'il refuse d'y prendre part. Tout cela est bien logique, M. le Président.

Les évaluations de nos programmes démontrent que les personnes qui y participent quittent plus rapidement la Sécurité du revenu que celles qui boudent ces mesures. Un étude plus récente est cependant venue faire ressortir que, pour certaines clientèles, le fait de participer aux mesures prolonge leur séjour à l'aide sociale, que la participation a ou aurait un effet de rétention, comme le disent les statisticiens. C'est comme si la participation à une mesure leur permettait de développer une certaine routine qui les distrait en quelque sorte de l'objectif premier que doit poursuivre toute personne apte, c'est-à-dire celui de chercher un emploi afin de recouvrer son autonomie financière.

C'est pourquoi nous faisons en sorte, dans les six premiers mois qui suivent l'arrivée de la personne à la sécurité du revenu, qu'elle soit fortement incitée à se chercher un emploi. D'abord parce que le montant de l'aide représente un écart significatif avec les revenus de travail et même les revenus que la personne peut tirer de l'assurance-chômage, puis nous signifions très clairement à la personne que sa seule préoccupation pendant cette période, c'est-à-dire pendant les six premiers mois de sa présence à l'aide sociale, c'est de chercher de l'emploi, que son passage à la sécurité de revenu, si elle a la capacité d'occuper un emploi, n'est que transitoire. Cela ne veut pas dire que, pendant les six premiers mois, la personne est laissée à elle-même, le ministère peut aider le prestataire dans sa démarche de recherche d'emploi, mais je répète qu'il ne la distraira pas avec des activités autres que la recherche active d'un travail, travail qui lui permettrait de quitter la sécurité du revenu pour son plus grand bien. je vous signale, m. le président, que 28 % djes personnes quittent la sécurité du revenu dans les six premiers mois. si, après cette période, la personne est toujours à la sécurité du revenu, il est opportun alors de lui offrir des mesures permettant de favoriser son intégration au marché du travail. le régime régulier continue donc de s'appliquer à compter du septième mois.

Le projet de loi 128 propose une exception notoire à la suspension du barème de disponibilité au cours des six premiers mois. Il s'agit des chefs de famille monoparentale que nous incitons à entreprendre, des leur arrivée à la sécurité de revenu, des démarches plus structurées qui favorisent leur intégration à l'emploi. On sait que ces clientes ont des contraintes particulières qui ont pour effet de prolonger leur séjour à la sécurité du revenu. Il est donc important de répondre favorablement et sans délai à une chef de famille monoparentale qui désire participer à une mesure de formation ou à une expérience de travail. (22 h 40)

Nous avons en outre l'intention de modifier un critère qui permet de reconnaître une personne non disponible si elle est âgée de 55 ans et plus. Dorénavant, les personnes de 55 ans à 60 ans aptes au travail seront traitées comme les autres, c'est-à-dire que le ministère les accompagnera dans leurs efforts pour intégrer le marché du travail. Bien sûr, on ne les référera pas à la mesure Rattrapage scolaire ou au programme Jeunes Volontaires, mais nous allons leur offrir des activités qui correspondent à leurs capacités et à leur désir de demeurer actifs sur le marché du travail. Au Québec et dans la plupart des sociétés occidentales, l'âge habituel de la retraite se situe entre 60 et 65 ans. À la Régie des rentes du Québec, on estime qu'à compter de 60 ans une personne peut décider de prendre sa retraite. C'est pourquoi nous avons toujours ressenti un certain malaise à considérer les personnes de 55 ans et plus comme étant non disponibles à participer à des activités favorisant leur intégration à l'emploi.

Le barème de non-disponibilité majore, il est vrai, la prestation de 100 $ par mois. Il faut aussi savoir que la participation à une mesure de développement de l'employabilité augmente la prestation de 150 $ par mois. De plus, la participation favorise la sortie de la sécurité du revenu, c'est-à-dire l'indépendance financière. Or, c'est là la véritable solution pour les personnes aptes au travail.

Les personnes de 55 à 60 ans font partie de la main-d'oeuvre active. La plupart d'entre elles veulent continuer à faire oeuvre utile à la société par un travail productif. Elles ne veulent pas vivre dans la dépendance et une relative pauvreté mais accéder à un emploi. Il faut respecter à la fois cette volonté et le mode de fonctionnement du marché du travail qui n'exclut pas cette catégorie de travailleurs.

M. le Président, les amendements à la Loi sur la sécurité du revenu ne font jamais l'unanimité dans cette Assemblée. Toute modification au régime d'aide de dernier recours fournit à l'Opposition officielle l'occasion de faire de la surenchère sur la protection sociale des personnes démunies. C'est de bonne guerre, M. le Président, mais la majorité de nos concitoyens savent bien faire la part des choses. Ils reconnaissent que le régime de la sécurité du revenu accorde une aide convenable aux personnes qui en ont besoin, tout en les incitant à déployer des efforts pour sortir d'une situation qu'ils n'ont pas souhaitée, pour la très grande majorité d'entre eux.

La population du Québec ressent assez clairement que le régime de la sécurité du revenu préserve un équilibre raisonnable entre la compassion et la responsabilisation qui doivent caractériser notre attitude à l'égard des prestataires. Le projet de loi 128 s'inscrit dans cette continuité, M. le Président. Je vous remercie.

Le Président: Je cède maintenant la parole à M. le député de La Prairie.

M. Denis Lazure

M. Lazure: Merci, M. le Président. M. le Président, comme remarques préliminaires, je dois constater que le ministre ne vit pas sur la même planète que nous. Quand le ministre dit: Nous voulons interdire par ce projet de loi aux nouvelles personnes assistées sociales, pendant six mois, leur droit que leur donnait la loi 37, le droit de devenir disponibles pour une mesure d'employabilité, le ministre justifie cette interdiction, qui veut dire une baisse de la prestation évidemment ? pour une personne seule, ça veut dire 493 $ par mois ? il justifie ça en disant: Pendant six mois, on va vous libérer à plein temps pour aller chercher du travail, alors qu'une fois sur deux, les personnes, quel que soit leur âge, qui entrent à l'aide sociale depuis un an et demi, une fois sur deux, sont des personnes qui ont perdu leur emploi suite à des fermetures d'entreprise ou à des faillites.

Et il applique le même raisonnement, il a le culot d'appliquer le même raisonnement aux personnes âgées de 55 à 60 ans en disant: II faut qu'elles se rendent utiles à la société. Il les a même comparées à lui-même l'autre jour en Chambre. Je pense qu'il faut être déconnecté de la réalité pour comparer une personne âgée de 58, 59 ans qui a comme seul recours d'aller à l'aide sociale parce qu'il a perdu ou elle a perdu son emploi, elle est seule dans la vie, elle n'a aucun autre revenu, pour comparer une telle personne avec une personne qui est ministre, même si cette personne-là a 56 ans ou 57 ans. Je pense que c'est de la pure démagogie et, en plus, c'est faire preuve d'un manque de réalisme et d'un manque de compréhension surtout à l'égard de ces concitoyens et de ces concitoyennes.

M. le Président, je voudrais reprendre les paroles sages de ma collègue de Johnson, quand elle s'est levée tantôt pour vous faire remarquer, M. le Président, que les notes explicatives de ce projet de loi étaient fort peu explicites. Je pense qu'elle a été très généreuse dans son langage, dans les termes qu'elle a employés; je vais l'être moins, M. le Président.

Je pense que le ministre a délibérément camouflé la réalité de son projet de loi. La réalité de son projet de loi, c'est de dire deux choses principalement aux 55 à 60 ans: Dorénavant, vous n'avez plus droit à la prestation maximale, comme c'était le cas depuis toujours. Et la deuxième chose que ça dit, ce projet de loi, et que la note explicative ne dit pas, M. le Président, la deuxième chose importante, c'est que, dorénavant, toutes les personnes assistées sociales seront mises au frigo pendant six mois. Elles n'auront pas le droit de devenir disponibles, elles seront forcées de ne toucher que le minimum de la prestation. Pour une personne seule, je le répète, 493 $ par mois.

Si le ministre veut comparer ses capacités physiques ou mentales au travail avec celles des personnes de son âge qui sont obligées d'aller à l'aide sociale, je lui proposerais d'essayer de vivre pendant six mois avec 493 $ par mois, M. le Président. Je pense qu'il verrait un peu, qu'il apprendrait enfin ce que c'est, la réalité quotidienne des personnes assistées sociales. Il n'a pas l'air de l'avoir appris, même si ça fait au-delà de cinq ans qu'il est en charge de cette clientèle.

M. le Président, je comprends le ministre d'avoir tenté de camoufler, tenté de maquiller les objets réels de son projet de loi, parce que les deux objets réels de son projet de loi, c'est ça: une mesure, celle qui touche les 55 à 60 ans, qui va lui rapporter, après vitesse de croisière, après quelques années ? c'est son personnel politique, Mme Lyne Rowley, porte-parole du ministre Bourbeau, qui l'a dit ? 20 700 000 $ par année, parce qu'elle va toucher 24 000 personnes nouvellement arrivées à l'aide sociale, entre 55 et 60 ans, et la deuxième mesure, dit-elle, 5 700 000 $ par année, parce qu'elle va toucher 8700 personnes. La véritable raison de ce projet de loi, c'est d'aller chercher, sur une commande de son protégé et futur chef, le président du Conseil du trésor, 20 000 000 $ aux dépens des personnes de 55 à 60 ans et 5 700 000 $ aux dépens de l'ensemble des autres âges qui arriveront à l'aide sociale à partir du moment où cette loi-là, odieuse, sera mise en vigueur. Espérons qu'elle ne sera pas mise en vigueur. (22 h 50)

M. le Président, moi, je n'ai pas d'autre qualificatif que de dire que le ministre a manqué de courage. Il a manqué de courage. Et, dans son discours, tout à tout à l'heure, il nous a fait toute sorte de belles comparaisons entre le salaire minimum et l'aide sociale, toutes les mesures d'employabilité fantastiques que l'aide sociale offre aux prestataires.

Première contradiction: il a fait l'éloge de ses propres mesures d'employabilité et, en même temps, il dit aux nouvelles personnes qui s'en viennent à l'aide sociale: Vous n'aurez plus le droit d'y participer avant six mois. Je vous interdis d'être disponibles pour six mois.

Pensez-vous vraiment, M. le Président, que c'est parce qu'il veut donner plus de temps aux bénéficiaires de l'aide sociale pour aller chercher des emplois? Pas du tout. C'est strictement pour économiser une certaine somme d'argent aux dépens des plus mal pris, des plus démunis. Et toutes ses actions, au ministre, depuis quelques années, ont toujours été dans le même sens: de réduire les prestations. Ses fameux changements d'octobre dernier ont pénalisé plus de 50 % des personnes assistées sociales, ont réduit leurs prestations.

Et, tantôt, M. le Président, il disait du revers de la main: C'est normal, l'Opposition va toujours s'opposer. C'est facile de s'opposer quand il s'agit de l'aide sociale. C'est de bonne guerre, disait-il. Mais ce n'est pas seulement l'Opposition officielle qui s'oppose à ces coupures aux dépens des plus démunis. M. le Président, il existe un organisme qui s'appelle le Conseil permanent de la jeunesse, qui relève d'ailleurs du premier ministre. C'est un organisme gouvernemental qui n'est

pas influencé plus qu'il faut par l'Opposition officielle ou le Parti québécois, mais ce Conseil permanent qualifie de scandaleux les changements au régime d'aide sociale que le ministre a présentés il y a quelques mois.

Et j'en cite quelques extraits parce que le ministre tente de leurrer la population en disant: N'écoutez pas l'Opposition, ce que je vous présente, c'est bon. C'est bon. Même pour les gens de l'aide sociale, c'est bon, et l'Opposition parle contre parce que c'est normal que l'Opposition s'oppose. Ils sont les seuls à s'opposer. Mais c'est faux, M. le Président. Le Conseil permanent, organisme créé par le gouvernement libéral, qui relève du bureau du premier ministre, critique sévèrement, très sévèrement les modifications que le ministre de la Sécurité du revenu apporte au régime d'aide sociale à compter du 1er octobre, il y a quelques mois, et je cite: «Les modifications sont scandaleuses et ne font qu'aggraver la situation des jeunes pauvres qui sont abandonnés et relégués aux bas-fonds ? c'est assez fort! Ces modifications démontrent que, pour le gouvernement, les jeunes sont des paresseux et des irresponsables qui ne veulent pas travailler.»

Ce n'est pas le député de La Prairie qui le dit, là, M. le Président, c'est le président, M. Alain Perreault, du Conseil nommé par votre gouvernement et qui vous tape sur les doigts à bon droit. M. Perreault rappelle que c'est contre leur gré que la plupart des jeunes sont exclus du marché du travail. Par exemple, le Conseil permanent de la jeunesse note que les jeunes assistés sociaux doivent attendre six mois avant d'être éligibles aux mesures de développement, et, là, ce ne sera pas seulement les jeunes: tout le monde. Pendant ce temps, ils doivent se contenter de la prestation minimale qui est maintenant de 490 $. Au contraire, dit-il, il aurait fallu désigner les jeunes sans emploi comme clientèle prioritaire pour les mesures de développement de la main-d'oeuvre. et là, le ministre, il touche à tout le monde: il touche aux jeunes, mais il touche aux personnes âgées aussi. ma collègue de johnson va vous en parler tantôt. il a le culot de dire: ii faut qu'ils donnent une contribution à la société même s'ils ont 50 ans, 55 ans ou 59 ans. et qu'est-ce qu'il fait de la contribution que ces gens-là ont fournie à la société dans les années difficiles, que lui n'a pas connues, que, moi, j'ai moins connues aussi qu'eux? mais il faut se représenter, m. le président, une réalité qui existe. dans la région de montréal, par exemple, les médias nous rapportaient encore récemment que 20 % de la population vit sous le seuil de la pauvreté. le nombre de personnes assistées sociales est de 757 000, m. le président. c'est un record absolu, et ça monte toujours de mois en mois. et le ministre, toujours, a son sourire et se console en disant: oui, mais cette année, ce mois-ci, par rapport à l'an passé, c'a augmenté moins rapidement; c'a augmenté seulement de 6 % plutôt que de 9 %. m. le président, il serait grandement temps que le ministre prenne une attitude marquée de compassion à l'égard des personnes assistées sociales.

Vous savez, dans la mesure qui va interdire maintenant aux personnes assistées sociales de se rendre disponibles pour une mesure d'employabilité, le ministre règle un problème. Depuis quelques années ? il a dû l'avouer lui-même ? il y avait toujours plus de candidats et de candidates aux mesures d'employabilité qu'il y avait de postes disponibles. Alors, il y avait trop de candidats et candidates qui voulaient des mesures d'employabilité. Il y a un problème. Qu'est-ce qu'il fait? Il ne va pas créer d'autres mesures d'employabilité, il va leur interdire de devenir disponibles. Il les gèle, il les met sur la glace pendant six mois. Drôle de façon de régler le problème.

À part ces deux aspects majeurs du projet de loi et les deux seuls véritables que le ministre a tenté de camoufler, il y en a un autre aspect qui va mériter des explications de la part du ministre, ce qu'il appelle les indemnités additionnelles. Si on comprend bien ce qu'il veut dire par ça, c'est que, dorénavant, en plus de payer le trop-versé et l'intérêt qui va avec le trop-versé lorsqu'il y a eu, disons, de la part de la personne assistée sociale, qu'elle n'a pas déclaré par exemple tous ses revenus, de bonne foi, non pas de façon frauduleuse, mais de bonne foi, qu'elle n'a pas donné tous les renseignements, on va imposer une amende en plus à la personne assistée sociale. Ça, ça ne s'est jamais vu, M. le Président. C'est du nouveau. Et, chaque fois, on dirait, que le ministre apporte des nouveautés à sa loi sur l'aide sociale, presque à chaque fois c'est pour pénaliser la personne assistée sociale; c'est pour réduire, comme on l'a vu au mois d'octobre; c'est pour exclure les nouvelles personnes assistées sociales de la catégorie «disponibilité», les laisser pendant six mois au barème le plus bas; c'est pour enlever aux personnes de 55 à 60 ans qui avaient toujours eu le barème maximal, le leur enlever. Pourquoi les gouvernements dans le passé ont toujours dit: À partir de 55 ans, automatiquement, ce sera le barème maximal? Parce que les gouvernements, à bon droit, se disaient: C'est quasi impossible pour une personne de 55 à 60 ans de se recycler sur le marché du travail, surtout certains groupes de la société qui n'ont pas eu beaucoup d'instruction. (23 heures)

Et, parlant d'instruction, disons quelques mots du programme Rattrapage scolaire. Tout le monde convient qu'en 1994 le minimum des minimums, si on veut avoir un travail le moindrement décent, le minimum des minimums, c'est un diplôme d'études secondaires. Tout le monde convient de ça, sauf le ministre responsable de l'aide sociale. Parce qu'il y avait un programme qui fonctionnait bien. En avril 1993, M. le Président, il y avait 37 000 personnes assistées sociales qui participaient à cette mesure de développement de F employ abi-lité qui s'appelle Rattrapage scolaire, 37 000. Et il y avait même des listes d'attente. Et là le ministre dit: Non, ça, ce n'est pas vraiment des emplois que je peux déclarer au jour le jour. Moi, je veux créer des choses qui vont être déclarables comme: Nous avons créé ce mois-ci 10 000 emplois, 5000 emplois, etc. Alors, là, il

ordonne à son ministère de réduire le nombre de postes au Rattrapage scolaire de 37 000 à 20 000 d'ici avril 1994. L'opération est déjà enclenchée, si bien que, depuis le mois de septembre dernier, partout au Québec on refuse des personnes assistées sociales qui veulent compléter leurs études secondaires. Et ensuite on sera surpris de constater que ces adultes, jeunes ou moins jeunes, qui sont à l'aide sociale et qui n'ont même pas complété leur secondaire pourront demeurer à l'aide sociale plus longtemps que s'ils étaient allés terminer leurs études secondaires. Tout le monde comprend ça, sauf le député de Laporte, ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu.

Et en réduisant un programme de préparation au monde du travail qui fonctionnait bien, le Rattrapage scolaire, il ne touche pas seulement les jeunes adultes qui veulent compléter leurs études, mais il touche aussi les adultes souvent moins jeunes qui n'ont pas eu la chance, dans leur jeunesse, de fréquenter l'école: des analphabètes, des gens qui sont illettrés, qui n'ont pas d'instruction. Et, de plus en plus dans notre société, on voit des gens de tous les âges qui veulent terminer leur secondaire. Bien, ces gens-là... Et il y a des dizaines de groupes au Québec, des groupes d'alphabétisation, M. le Président ? il y en a dans votre comté, il y en a dans le mien, il y en a un peu partout ? et ces groupes d'alphabétisation, où on retrouve beaucoup de bénévolat de toute façon, ces groupes-là sont pénalisés depuis l'automne, à tel point qu'ils ont dû couper dans leurs programmes de façon radicale.

Un troisième groupe que ça touche, cette mesure odieuse du ministre, il s'agit de personnes immigrantes. Les personnes immigrantes qui veulent, en français, acquérir certaines connaissances élémentaires et qui fréquentent des cours à l'intérieur du programme Rattrapage scolaire. Alors, ces personnes-là aussi se trouvent pénalisées.

M. le Président, je voudrais citer quelques extraits d'une lettre ? puisque le ministre ne l'a pas fait ? une lettre que le Protecteur du citoyen a fait parvenir au ministre au sujet du projet de loi 128 il y a quelques jours, et j'en cite quelques extraits: La modification proposée, en retardant l'admissibilité aux barèmes de non-disponibilité ? ce qui permettait à la personne de 55 à 60 ans d'avoir 590 $ par mois au lieu de 490 $, que dorénavant elle touchera ? semble laisser croire que la situation du marché du travail s'est améliorée au point qu'il devient obligatoire de participer à ces mesures d'employabilité. Malheureusement, le marché n'a fait que se détériorer ces dernières années. La modification proposée ignore donc cette réalité ? et le ministre ignore cette réalité ou fait semblant de l'ignorer ? elle semble viser essentiellement à opérer une coupure dans le budget de la sécurité du revenu.

Ce n'est pas l'Opposition qui le dit, M. le Président, là, c'est le Protecteur du citoyen. Le Protecteur du citoyen, qui se fait l'avocat de gens qui sont pénalisés par ce gouvernement. Et ce n'est pas étonnant que ce gouvernement n'ait pas renouvelé le mandat du

Protecteur du citoyen. Ça fait déjà un long moment, M. le Président, que cet excellent Protecteur du citoyen, M. Jacoby, est dans un état précaire, dans un emploi précaire parce que son engagement n'a pas été renouvelé. Est-ce que c'est parce qu'il émet des opinions parfois sévères à l'égard de certains projets de loi? On peut poser la question.

Et, de plus, ajoute-t-il, cette modification se concilie mal avec l'objectif poursuivi par votre ministère lorsqu'il reconnaît, par le programme conjoint d'aide aux travailleurs âgés, le programme PATA, que ces personnes, 55-60 ans, rencontrent des difficultés particulières face à l'emploi au point de leur offrir, en certaines circonstances, une aide financière sans pour autant les rendre nécessairement admissibles à la sécurité du revenu. Ici encore, le projet de loi semble ignorer cette réalité. Et il y a une incohérence apparente entre ce que ce ministère fait par rapport au programme PATA et par rapport au projet de loi 128.

Et sur le délai de six mois: Cette attente de six mois, dit le Protecteur du citoyen, se concilie très mal avec la Loi sur la sécurité du revenu, dont les objectifs sont de favoriser le retour à l'emploi et la participation aux mesures puisqu'elle va augmenter l'écart entre les prestations accordées aux participants et celles qui sont accordées aux non-participants. La disposition nous semble prolonger indûment la période d'inactivité des prestataires. Ainsi, un prestataire qui, après 12 mois de chômage, fait une demande d'aide à la Sécurité du revenu, risque d'être inactif pendant 18 mois avant d'avoir une occasion de se recycler.

Et le ministre avait le culot, tantôt, de dire: On veut qu'il retourne le plus vite possible sur le marché du travail. D'une part, il fait l'éloge de ces mesures d'employabilité qu'il a développées depuis quelques années et, d'autre part, il leur dit: Elles sont fameuses, mes mesures, mais je ne veux pas que vous y participiez pendant six mois de temps; je ne veux pas.

M. le Président, c'est ce genre de raisonnement tordu qu'on entend de la part du ministre de la Sécurité du revenu depuis un bon moment. Je comprends qu'il est mal pris pour arriver à justifier logiquement, humainement parlant, un projet de loi aussi inacceptable. La vérité, M. le Président, c'est qu'il n'y en a pas d'emplois disponibles: il n'y en a pas pour les jeunes, il y en a encore moins pour les gens de 55 à 60 ans. Tout le monde comprend ça.

Alors, depuis 1988, début 1989, depuis la mise en vigueur de cette loi 37, on a vu toute une série de mesures qui ont été développées par le ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu. Chaque fois, ces mesures ? je le répète, on ne le répétera jamais suffisamment ? sont issues d'une mentalité gouvernementale à l'effet qu'il faut en donner le moins possible aux personnes assistées sociales, à l'effet qu'il faut les surveiller au maximum, à l'effet que si un programme marche trop bien, qu'il y a une liste d'attente, on va leur interdire de participer à ce programme et on aura réglé le problème de la liste d'attente.

Je voudrais aborder une autre mesure qui s'en vient, qui n'est pas contenue dans ce projet de loi mais qui a été décrétée il y a quelques mois et qui dénote encore là le même souci de faire la vie dure aux personnes assistées sociales. Pour la première fois en 25 ans, le 1er janvier qui vient, il n'y aura pas d'indexation des prestations d'aide sociale pour les personnes qui sont aptes au travail. Pour la première fois, M. le Président. Ça fait 25 ans que l'aide sociale, comme on la connaît, existe au Québec, et jamais aucun gouvernement n'a eu l'effronterie, n'a eu la bassesse de décréter qu'il n'y aurait pas d'indexation.

Ça a été difficile. Moi, je me rappelle très bien qu'au moment de la crise, en 1981-1982, la seule indexation pour l'aide sociale, même s'il y avait moins de personnes à l'aide sociale qu'aujourd'hui, beaucoup moins, ça coûtait plusieurs dizaines de millions de dollars. Malgré ça, ça a été fait pour l'ensemble des personnes assistées sociales. Pour la majorité des personnes assistées sociales, le cadeau de Noël, le cadeau des fêtes du ministre, du député de Laporte, M. le Président, c'est de dire: Vous êtes gelés, aucune indexation. C'est ça, le cadeau de Noël. Et là il ajoute d'autres cadeaux spéciaux pour les 55-60 ans qui vont arriver le 1er janvier, et il ajoute un autre cadeau spécial pour les nouvelles personnes assistées sociales qui vont devoir commencer à toucher de l'aide sociale en 1994, avec sa nouvelle loi. (23 h 10)

En même temps ? c'est rendu public maintenant, on le sait ? le ministre a bien hâte, il en parle ouvertement, il va bientôt quitter ce ministère-là. Alors, c'est le cadeau de départ du ministre, ça aussi, de dire: En partant, je vous donne le coup de Jarnac, ce qu'aucun ministre responsable de l'aide sociale n'a fait depuis 25 ans, moi, je vais le faire, le député de Laporte va le faire. Alors, M. le Président, je pense qu'il démontre par tous ces gestes qu'il manque de compréhension, qu'il manque de compassion vis-à-vis des groupes de citoyens, de citoyennes qu'il devrait constamment, dans son travail, considérer comme étant des personnes pour qui il doit veiller à ce que leurs droits soient bien protégés.

Nous avons, au Parti québécois, annoncé publiquement que cette affreuse loi 37, nous allions la réviser en profondeur lorsque le public nous fera confiance et nous demandera de succéder à ce gouvernement qui est en train de s'effriter. Je voudrais aussi dire au ministre que nous allons combattre avec toute la vigueur possible ce projet de loi. Lorsque nous arriverons à l'étude en commission parlementaire, article par article, je vais demander au ministre, et je lui demande tout de suite, de bien vouloir au moins entendre quelques groupes, quelques groupes de personnes, notamment le Front commun des personnes assistées sociales. Je sais que le Front commun des personnes assistées sociales a fait une demande ? j'ai reçu copie de la demande faite au Secrétariat des commissions parlementaires ? et j'espère que le ministre va avoir plus de courage en répondant: Oui, nous allons vous écouter en commission parlementaire, qu'il en a eu en préparant les notes explicatives où il camouflait, où il maquillait les véritables intentions de son projet de loi.

On a aussi l'Association québécoise de défense des droits des retraités-es et préretraités-es, l'AQDR, qui endosse complètement les prises de position du Front commun des personnes assistées sociales. Alors, nous pensons que le ministre, même s'il n'a pas l'habitude de rencontrer des personnes assistées sociales très souvent, il devrait au moins avoir la décence de les inviter en commission parlementaire et de les écouter patiemment et de se laisser influencer par ce que ces gens-là auront à lui dire.

M. le Président, je reviens encore, en terminant, sur cette attitude un peu tendancieuse du ministre qui, dans son discours tout à l'heure essayait de faire croire à la population que c'est seulement l'Opposition du Parti québécois qui prend une telle position vis-à-vis son projet de loi. Il sait très bien que non seulement les personnes assistées sociales mais aussi les personnes âgées... mais aussi il a connu l'opposition de plusieurs groupements dans la société québécoise à sa loi 37: la ligue des droits de l'homme, la Commission des droits de la personne, l'Assemblée des évêques. On pourrait énumérer des douzaines d'organismes intermédiaires dans la société québécoise qui ont dit à ce gouvernement: Vous allez trop loin, cessez de traiter les personnes assistées sociales comme si c'étaient des fraudeurs, des fraudeuses. Ayez plus de compassion.

Alors, nous avons le devoir, l'obligation de parler au nom de ces gens et c'est au nom de l'ensemble de la population qui, lorsqu'on lui explique de façon très claire quels sont les revenus des personnes assistées sociales: personnes seules, je le répète, 493 $ par mois. M. le Président, ce n'est pas facile de vivre de façon décente avec un montant aussi peu élevé. Alors, nous allons évidemment voter contre ce projet de loi en deuxième lecture, nous allons le combattre, nous allons aussi insister pour que le ministre, et j'espère que dans sa réplique il pourra nous donner une réponse là-dessus, pour que le ministre, en audiences particulières, reçoive un certain nombre de groupes pour mieux comprendre, mieux comprendre les raisons profondes qui font que nous nous opposons à ce projet de loi.

Merci, M. le Président.

Le Président: Nous allons poursuivre le débat avec l'intervention de M. le député de Taschereau.

M. Jean Leclerc

M. Leclerc: Merci, M. le Président. M. le Président, je vous avoue que j'avais d'abord l'intention de poser au député qui m'a précédé, comme nous le permet le règlement, une question, mais il me semble qu'il sera préférable que je prenne quelques minutes pour lui rappeler un certain nombre de faits.

Est-ce qu'il se rappelle, le député de La Prairie,

M. le Président, qui demande à tout le monde: Comment peut-on vivre avec 493 $ par mois ? et on a raison de poser ce genre de question parce qu'on conçoit tous ici que ce n'est pas facile de vivre avec 493 $ par mois ? que sous la gouverne du Parti québécois, jusqu'en 1985, les jeunes de moins de 30 ans avaient 100 $ par mois, M. le Président?

Si c'est difficile de vivre avec 493 $ en 1993, combien ça pouvait l'être de vivre avec 100 $ par mois en 1985, M. le Président? Combien ça pouvait l'être? Et, M. le Président, des jeunes de moins de 30 ans sur l'aide sociale, en 1985, il y en avait beaucoup. On ne parle pas de quelques centaines d'individus, de quelques milliers d'individus. On parlait à l'époque de plusieurs dizaines de milliers d'individus. Et je m'en rappelle très bien, M. le Président, parce qu'il y a une institution dans mon comté qui s'occupait justement des jeunes de moins de 30 ans en difficulté, qui s'appelle la maison Marie Frédéric, et on l'avait aidée, je me rappelle très bien, avec la ministre de la Santé et des Services sociaux à l'époque, parce qu'elle ne suffisait pas à la demande.

Et tout à coup, alors que la réforme gouvernementale de l'aide sociale prenait force et que les jeunes de moins de 30 ans avaient obtenu ce qu'on appelait et ce qu'on appelle toujours la parité avec les jeunes de plus de 30 ans, eh bien, cette maison-là a vu la pression qu'elle devait subir au jour le jour baisser dramatiquement parce que, minimalement, les jeunes avaient maintenant le moyen de se payer chambre et pension avec quelque 400 $ par mois ? la parité avec les autres ? alors que sous le gouvernement du Parti québécois et 100 $ par mois, ils étaient à la mendicité, M. le Président.

Donc, il faudrait que le député de La Prairie se rappelle de cela. Il faisait partie lui-même de ce gouvernement-là, M. le Président. Et je trouve qu'il a la mémoire très courte, ce soir, lorsqu'il nous demande: Comment peut-on vivre avec 493 $ par mois?, alors que lui-même, pendant huit ans, a fait partie d'un gouvernement qui donnait 100 $ par mois seulement aux moins de 30 ans, M. le Président.

Le député de La Prairie, également, nous a dit: On dirait que le gouvernement veut contrôler le plus possible les assistés sociaux en leur donnant le moins possible. M. le Président, j'ai deux choses à dire là-dessus. La première, quand je suis arrivé ? vous vous rappelez, on a été élus le 2 décembre 1985; le 1er décembre 1985, ça doit être avant nous autres ça, M. le Président ? il y avait eu une distribution main à main des chèques aux assistés sociaux au sous-sol de l'église Saint-Roch, dans mon comté. Le 1er décembre 1985. Ce n'est pas hier ça, M. le Président. Ce n'est pas sous l'actuel gouvernement. C'était sous nos prédécesseurs, qui avaient commencé les distributions main à main.

Et, M. le Président, huit ans plus tard, ils se lèvent, ils nous disent: On dirait que ce gouvernement veut contrôler de plus en plus les assistés sociaux. On ne veut pas contrôler de plus en plus les assistés sociaux, M. le Président. On veut s'assurer, comme ils l'ont voulu à leur époque, que ceux qui avaient droit à un chèque le reçoivent, mais seulement ceux-là. Et une des façons de procéder à ce genre de contrôle-là, c'est de faire occasionnellement au cours d'une année des remises de main à main. Évidemment, en s'adressant à une clientèle apte, qui est capable de se déplacer, M. le Président. (23 h 20)

Et le député de La Prairie nous dit également: On trouve que le gouvernement veut donner le moins possible aux assistés sociaux. Celle-là est un peu grosse, M. le Président, parce que s'il y a un élément fondamental dans la réforme que nous avons introduite il y a quelques années, c'était de donner un montant supérieur aux inaptes au travail. M. le Président, tout le monde conçoit, dans la société, que ceux et celles qui sont malades, qui ne sont pas capables de travailler pour des raisons de limitation physique ou psychologique, ont des dépenses plus importantes. Quand vous êtes très malade, trop malade pour ne pas pouvoir travailler, il est possible que, l'hiver, vous ne puissiez pas vous-même déblayer votre perron de porte. Il est possible que vous ayez besoin d'aide pour faire votre grand ménage, il est possible que vous ayez besoin d'aide pour aller faire vos commissions, aller à l'épicerie et, par conséquent, il est possible que vous ayez à mettre plus souvent la main dans votre poche que si vous étiez apte. Ceux qui nous ont précédés, M. le Président, jamais, jamais n'avaient même pensé à donner davantage d'argent comme nous le faisons, 20 % de plus, M. le Président, à ceux et celles qui sont inaptes au travail. Il est donc faux de dire, M. le Président, que nous voulons contrôler toujours plus les assistés sociaux et que nous voulons toujours leur donner moins.

M. le Président, la réforme que nous avons administrée et que nous continuons à améliorer... Et, en cela, je pense qu'il faut rendre hommage au ministre qui, session après session, nous arrive avec des modifications ponctuelles pour toujours améliorer le programme d'aide sociale. S'il y a une modification importante que la réforme amenait, M. le Président, c'était d'avoir des barèmes différenciés selon l'état de ceux qui avaient à recevoir des chèques. Je trouve normal, M. le Président, dans notre société, que l'on traite différemment les aptes et les inaptes, bien sûr, je l'ai dit, qu'on ne traite pas différemment ceux qui ont plus de 30 ans et moins de 30 ans, parce que tout le monde conviendra que la livre de beurre coûte le même prix pour tout le monde, mais que l'on traite différemment ceux qui participent à des mesures et ceux qui ne participent pas à des mesures, ceux qui sont disponibles et ceux qui sont non disponibles. Par conséquent, M. le Président, nous avons changé la mécanique du calcul des prestations d'aide sociale, mais nous avons changé également une certaine mentalité que tout le monde au Québec nous demandait de changer. Beaucoup d'assistés sociaux, également, nous disaient: Moi, j'ai envie de faire quelque chose. Je suis tanné d'être à la maison à attendre mon chèque. Ceux qui paient de leurs taxes les prestations d'aide

sociale nous disaient: On est d'accord pour aider les démunis de notre société, mais on imagine qu'ils devraient peut-être faire un minimum pour avoir leur chèque.

M. le Président, il y avait un certain consensus autour de cette idée-là, et il me semble que la réforme que nous avons mise en marche il y a quelques années et que nous tentons d'améliorer, cette réforme-là a changé cette mentalité-là où le gouvernement était un organisme qui postait des chèques. Maintenant, avec un certain nombre de mesures, avec des mesures qui peuvent s'adapter à toutes sortes d'individus et à toutes sortes de circonstances, on essaie de faire en sorte que ceux et celles qui sont des prestataires de l'aide sociale et, pour la très grande majorité, qui ne veulent pas le rester toute leur vie ? et là, je parle des aptes au travail ? eh bien, donc, on a un certain nombre de mesures pour leur permettre d'améliorer leur employabilité, pour leur permettre d'effectuer un certain nombre de travaux utiles pour la société et pour leur permettre d'améliorer leurs connaissances scolaires.

Par conséquent M. le Président, je voulais simplement prendre ces quelques minutes pour mettre en relief certaines contradictions de celui qui m'a précédé, qui a oublié qu'il a fait partie d'un gouvernement, de 1976 à 1985, qui donnait 100 $ par mois aux jeunes de moins de 30 ans qui étaient sur l'aide sociale et qui, aujourd'hui, ose nous faire la morale sur la façon dont nous traitons les assistés sociaux au Québec, M. le Président. C'est ce que je voulais vous faire remarquer. Je vous remercie.

Le Président: Je reconnais maintenant Mme la députée de Johnson.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci, M. le Président. M. le Président, compte tenu qu'on est rendu déjà au 9 décembre, que la session avant les fêtes se terminera bientôt et que, comme j'ai annoncé que je ne me représenterais plus aux prochaines élections, c'est possiblement une des dernières interventions que j'aurai à faire en cette Chambre. J'aurais bien aimé, M. le Président, bien aimé pour cette dernière intervention, ou à peu de chose près, venir annoncer puis venir féliciter le ministre responsable pour lui dire: Bon, on annonce une augmentation des prestations pour les jeunes, on annonce une augmentation pour les aînés, pour les familles monoparentales. Malheureusement, M. le Président, ce n'est pas ça qu'on vient faire aujourd'hui. Et j'ai écouté très attentivement, comme je le fais toujours quand je suis en Chambre, j'ai écouté très attentivement ce que le ministre responsable a dit, ce que mon collègue, le député de La Prairie, responsable du dossier a dit, ce que l'intervenant précédent, le député de Taschereau, vient de dire. Mais, lui, là, il a dépassé les mesures, M. le Président. Il faut que je relève certaines choses qu'il a dites: ça n'a pas de bon sens!

M. le Président, le député de Taschereau vient de nous dire ? sans gêne à part de ça, il n'est même pas devenu rouge, il l'est d'avance, mais il n'est même pas devenu rouge, M. le Président ? il a dit dans toute sa candeur: À chaque session, le ministre responsable revient ici à la Chambre et fait des améliorations au sujet de l'aide sociale. Ça n'a pas de bons sens, M. le Président! J'ai dit: Ça ne se peut pas qu'il dise des affaires de même! Ce ne sont pas des améliorations! Vous avez fait systématiquement des compressions, des coupures, des diminutions d'aide aux personnes. Vous les avez, en un mot, zigouillées. C'est ça que vous avez fait. Il vient dire qu'à chaque session il a amélioré la situation des gens sur l'aide sociale. Moi, j'aurais honte de dire des affaires de même. J'aurais honte de dire des choses comme ça, M. le Président. Et, quand j'aurai fini mon intervention, j'aimerais ça que le député de Taschereau vienne nous dire ce que ça va améliorer dans la situation des gens de 55 à 60 ans, la mesure qu'on a dans le projet de loi qu'on discute aujourd'hui, la 128. J'aimerais ça qu'il vienne nous expliquer ça, là. Qu'est-ce que ça va faire pour nos gens de 55 à 60 ans? Si ça va être une amélioration ou si on comprend la même chose.

Ne nous faisons pas d'accroires, M. le Président. Les gens de 55 ans à 60 ans auront une diminution de 100 $ par mois; 100 $ par mois, c'est 1200 $ par année. Et, quand tu es pauvre, 1200 $ par année, c'est une fortune. Le député de Taschereau vient nous dire que ça va être un bienfait. J'aimerais ça qu'il aille rencontrer les personnes de 55 à 60 ans qui, dans la loi actuelle ? on ne le répétera pas assez, M. le Président ? dans la loi actuelle, les personnes qui, à 55 ans, avaient le malheur... Je dis «le malheur» parce que c'est un malheur de perdre son emploi quand tu as 55 ans, parce que les entreprises vont prendre des jeunes, quand ils en prennent, bien sûr. Pas dans le moment, M. le Président, parce qu'on n'a pas mis de l'avant... ce gouvernement-là n'a pas mis de l'avant de programmes pour aider à repartir la machine, à ce que les gens retournent sur le marché du travail. Les gens de 55 ans qui perdent leur emploi sont à peu de chose près certains qu'ils n'en retrouveront pas d'autre.

Pensez-vous que chez Domtar, chez nous à Windsor, où c'est une grosse entreprise, ils vont reprendre des gens qui ont 55 à 60 ans? Non, M. le Président. Non. Ils ne les reprendront pas. Ils vont prendre des jeunes, puis je les comprends. Je les comprends, parce que ça coûte cher, faire la formation pour entrer dans une entreprise. Ça coûte aux entrepreneurs de l'argent parce qu'il faut qu'ils leur donnent de l'expérience. Donc, ils calculent en ce sens que le jeune qui va prendre de l'expérience va être plusieurs années à l'emploi de la compagnie. Les gens de 55 ans, ils ne les reprendront pas, M. le député de Taschereau. Je m'excuse, mais ils ne les reprendront pas. Et, dans la loi actuelle... (23 h 30)

Et, à part de ça, je dois ajouter, M. le Président, qu'on a des nouveaux chômeurs. Ce n'est pas dans le

sens qu'on entendait anciennement, c'est des entreprises complètes qui sont obligées de fermer leurs portes parce que la récession ne finit plus, et ça fait des flots de personnes qui, du jour au lendemain, se retrouvent sans emploi. Et, bien souvent, on veut mettre à pied ceux qui sont âgés de 55 ans.

Il me fait rire quand il dit que ça a amélioré la situation des gens qui sont sur l'aide sociale. Les gens de 55 ans avaient, dans l'actuelle loi, la possibilité de pouvoir demander le barème de non-disponibilité. Il me semble que cela va de soi, M. le Président. En plus de ne pas avoir la possibilité de se reclasser, on vit encore une difficulté épouvantable où les entreprises ne voient pas la fin de la récession. Donc, encore plus qu'en temps normal, ces gens-là ne retrouveront pas leur emploi, et l'amélioration dont parlait le député de Taschereau, c'est qu'ils n'auront plus droit ? je le dis bien, M. le Président ? à la non-disponibilité. Ça veut dire que les six premiers mois qu'ils vont être sur l'aide sociale, ils vont avoir 100 $ de moins par mois. Au bout de six mois, là ils vont dire: Je vais appliquer pour une mesure d'employabilité, parce que si j'applique, je vais avoir 50 $ par mois de plus. Ils vont appliquer pour la mesure pendant un certain temps, mais pensez-vous que ça va leur donner de l'emploi ça? Non. Ils vont en chercher, c'est bien sûr, pour avoir un petit peu plus d'argent; ils vont en chercher. Mais quand le ministre dit que c'est pour rendre la dignité aux personnes de 55 à 60 ans en les reconnaissant dans la population active, M. le Président, ça, c'est rire du monde. C'est rire du monde. Ça n'a pas de bon sens de dire des affaires de même, parce qu'au lieu de leur rendre la dignité il leur enlève le pain de la bouche. C'est ça qu'il fait.

En plus de ça, si vous regardiez les statistiques, vous vous apercevriez qu'il y a beaucoup de gens âgés qui se suicident, qui se suicident parce qu'ils sont rendus au bout de leur rouleau. Ce ne sont pas les gens de 55 et 60 ans qui ont abusé du système. Ce n'est pas vrai ça; ce n'est pas vrai. Les gens de 55 à 60 ans, d'abord, quand ils sont sortis des études, il y avait de l'emploi. Puis les mesures d'assurance chômage, d'aide sociale, ça n'existait pas à l'époque. Donc, ils ont travaillé, ils ont gagné leur vie et la vie de leur famille, et vous savez qu'à l'époque, ce n'était pas des familles de un et deux enfants, c'était des familles de 10, 12 et 15 enfants. Ces gens-là, ils l'ont gagnée durement leur vie. Aujourd'hui, ils sont rendus à 55 ans, M. le Président, et il n'y a plus d'emploi pour eux parce que l'entreprise ferme, parce qu'il n'y en a plus d'ouvrage, parce que leurs produits ne se vendent plus à cause de la récession, parce qu'ils n'ont pas eu la possibilité de se moderniser. Donc, l'entreprise ferme.

M. le Président, quand, en mars dernier, Générale Électrique du Canada annonçait 120 chômeurs de plus, est-ce que vous pensez qu'ils étaient en mesure de prendre des gens de 55 à 60 ans? Non, M. le Président. Quand Gicleurs Astra est entré en faillite à Sherbrooke, qu'on annonçait ça dans La Tribune, notre journal local, pensez-vous qu'ils auraient pris des gens de 55 ans à leur emploi? Ils sont en faillite à cause de la récession. Et vous venez me dire que c'est pour donner de la dignité aux gens de 55 ans? M. le Président, jamais je ne pourrai accepter une affaire de même, jamais.

Et quand le député de Taschereau vient nous dire que ça va améliorer, que ça a amélioré la situation, M. le Président, c'est rire du monde. C'est leur donner une occasion de plus d'avoir honte, comme ils disent, les gens de cet âge-là: J'ai honte de ne pas être en mesure de travailler. J'ai de la peine parce que je ne suis plus capable de gagner ma vie. Parce que c'est une fierté d'avoir son travail. C'est une fierté d'apporter de l'argent à la maison. C'est une fierté de savoir que les gens ont besoin de toi, ont besoin d'eux. Ils sont sur l'aide sociale. Pensez-vous que c'est de leur faute? Non, M. le Président, ce n'est pas de leur faute. Et on va les pénaliser. On va leur dire: Tu te cherches du travail, sinon on te coupe. C'est ça l'amélioration dont nous faisait part le député de Taschereau. C'est ça, M. le Président.

Pensez-vous que les Fibres Donnite, qui ont fait faillite à Richmond, qu'ils en auraient pris des gens de 55 ans? Non. S'ils repartent, Fibres Donnite, ils vont commencer avec des jeunes. Je ne suis pas contre ça. Je ne suis pas contre les jeunes, j'en ai des jeunes. J'ai six enfants. Je le sais qu'ils ont besoin de travailler. Heureusement, ils ont du travail.

Puis je pourrais vous en nommer d'autres entreprises qui ont fermé parce qu'il y a de la récession, parce qu'elles ont des problèmes, parce qu'elles ont mis des quantités d'hommes et de femmes à pied et qu'elles ne les ont pas repris parce que les portes sont encore fermées. Vous allez me dire que c'est une amélioration pour les gens de 55 ans? Aïe! Il faut arrêter de rire du monde, là. À un moment donné, assez, c'est assez, hein! Les gens, là, ils trouvent qu'ils en ont ras-le-bol avec toutes les taxes que vous avez imposées, avec les impôts qui ont augmenté, avec tout ce qui s'est passé, les transferts dans les municipalités. C'est toujours, au bout de la ligne, la même personne qui paie.

Et quand le député de Taschereau nous parlait du temps où on était au pouvoir, M. le Président, ça fait huit ans qu'ils sont là et ça fait huit ans qu'il y a des problèmes tout partout. Ils n'ont même pas eu la ju-geotte de mettre des programmes de l'avant pour relancer l'économie, même pas. Alors, on se pose la question, on dit: Comment ça se fait, là, comment ça se fait qu'il y a tout près de 800 000 personnes sans emploi, assurance-chômage, l'aide sociale? Comment ça se fait? Il faut croire que ça ne va pas bien. C'est ça qu'il faut croire.

Il faut croire que ça ne va pas bien, puis vous n'avez rien fait pour arranger la situation, rien. Puis l'autre s'en vient nous dire qu'il s'en vient à chaque session pour améliorer la situation des assistés sociaux. Aïe, mon oeil! mon oeil! S'il a amélioré quelque chose, ce ne sont pas les assistés sociaux qui ont été améliorés. C'est d'essayer de boucher des trous en enlevant du pain de la bouche de ces gens-là. Une économie, prétend-on, de 20 000 000 $, 20 700 000 $. Ça va toucher 24 000

adultes, 24 000 personnes qui vont se creuser la tête, puis qui vont essayer d'étirer une piastre pour en faire deux, pour en arriver à la fin du mois, en pouvant manger trois repas par jour. C'est ça, une amélioration? Bien, je m'excuse. Des améliorations comme ça, on s'en passerait.

M. le Président, trouvez-vous ça normal que des gens de 55 ans ne puissent pas profiter du barème de non-éligibilité? Trouvez-vous ça normal? Parce que la Régie des rentes, elle, ne peut pas payer personne avant l'âge de 60 ans. Les règles sont établies depuis longtemps. Puis la pension du fédéral des personnes âgées, ça commence à 65 ans. Qu'est-ce qu'on va faire de 55 à 60 ans pour ces personnes-là? On va les tenir dans les airs puis on va dire: Attendez d'avoir 60 ans, vous allez être corrects. Ce n'est pas ça qu'ils font. Ce n'est pas ça, M. le Président.

Puis je pense qu'il n'y a pas une personne qui a du coeur le moindrement qui va accepter qu'une chose de même se produise pour nos gens de 55 à 60 ans. Il n'y a pas une personne qui accepterait ça. Mon collègue, le député de La Prairie en a parlé tout à l'heure. Il y a de grandes associations qui sont là pour aider les personnes de cet âge-là. Il y a l'AQDR qui a dit qu'elle n'accepterait jamais ça. Il y a la Fédération de l'âge d'or du Québec, qui ne peut pas non plus accepter une chose de même. Combien de personnes qui ont, eux autres, peut-être connu la misère? Moi, je ne suis pas sûre que le ministre responsable de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu, il l'a connu la misère. Je ne suis pas sûre. Parce que quand tu as connu la misère, puis quand tu n'as pas été capable, tu as eu de la misère au bout puis que tu n'avais pas d'argent, tu y penses, aujourd'hui, à ceux qui n'en ont pas. Tu y penses puis ça te fait de quoi de voir qu'ils sont encore plus malheureux qu'ils étaient. (23 h 40)

Une voix: Tu es «cheap»!

Mme Juneau: Non, je ne suis pas «cheap»! Une voix: Tu es bien «cheap»!

Mme Juneau: Non, je ne suis pas «cheap», mais j'en connais de l'autre bord qui le sont. J'en connais.

M. le Président, c'est inacceptable qu'on fasse des choses de même. En plus de ça, dans les notes explicatives de la loi, jamais on aurait pu penser que c'était une affaire de même. C'est effrayant, c'est une cachette. On ne voulait pas en entendre parler. Les gens de l'AQDR disaient: ...ils ont déposé discrètement, par le ministre André Bourbeau, à l'Assemblée nationale, le 11 novembre 1993, vient modifier la loi du revenu de façon telle qu'il attaque les conditions de vie déjà précaires des personnes dé 55 à 60 ans et qu'il va à rencontre de la philosophie de la loi de la sécurité du revenu.

On les attaque de tous côtés, de tous les bords. Parce qu'ils n'ont peut-être pas de tribune. Ils n'ont peut-être pas de lobby assez fort. Parce qu'ils financent peut-être moins le Parti libéral. «C'est-u» parce qu'ils n'ont pas de tribune pour se défendre qu'on les attaque comme ça, une fois de plus?

M. le Président, jamais, de notre côté, on ne pourra voter pour un projet de loi qui s'attaque aux gens démunis, et surtout quand tu as l'âge de 55 ans et que tu n'es plus en moyen de te retrouver de l'emploi. Vous savez, je pense que si je demandais, indépendamment, en dehors de la Chambre, aux gens, à mes collègues, autant de l'autre côté que de ce côté-ci, si je leur demandais: Qu'est-ce que tu ferais si c'était ton père ou ta mère qui était dans cette situation-là? Est-ce que tu aimerais ça qu'on lui coupe 100 $ par mois? Puis tu lui pousserais dans le dos pour aller travailler? Je ne pense pas qu'il y ait une personne de l'autre côté qui dirait: Je suis d'accord avec ça. Coupez-leur leurs 100 $. Coupez-leur, ça ne me fait rien. Je ne pense pas M. le Président. Tu ne peux pas avoir l'âme assez basse pour faire mal à des gens de cet âge-là. Je ne peux pas croire ça.

Et j'espère, M. le Président, que, autant les collègues de l'autre côté que les collègues de ce côté-ci, on va être en mesure de convaincre le ministre que s'attaquer à des personnes de 55 ans qui ont eu le malheur ? je dis bien «le malheur» ? de perdre leur emploi... Qu'on puisse au moins les aider sur l'aide sociale jusqu'à ce qu'ils puissent recevoir la Régie des rentes du Québec, jusqu'à ça M. le Président. C'est cinq ans qu'on va être obligés de les aider s'ils n'ont pas la possibilité de se trouver un emploi. On sait que dans un temps de récession, ce n'est pas facile. On sait que dans un temps de récession, même nos jeunes ne peuvent pas trouver de l'emploi. Vous comprendrez que les gens de 55 ans et plus, c'est encore deux fois plus difficile.

M. le Président, si le ministre ne revient pas sur cette mesure-là, qui est tout à fait inacceptable pour nous autres, bien sûr... Parce qu'on n'acceptera pas ça, mais j'espère que de l'autre côté, lors des caucus, il y en a qui vont se faire parler dans le tuyau de l'oreille.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée de Johnson.

Sur la même motion, je cède la parole à Mme la députée du comté de Chutes-de-la-Chaudière.

Mme Denise Carrier-Perreault

Mme Carrier-Perreault: Oui, je vous remercie, M. le Président. Alors, moi aussi, je vais m'exprimer un peu sur le projet de loi 128. Je vais prendre quelques minutes, M. le Président. Ça va peut-être vous étonner, mais, moi, je comprends le ministre d'avoir été flou dans ses notes explicatives. Je pense effectivement que ce n'est pas de bon goût de faire de la partisanerie politique sur le dos des démunis. Écoutez, M. le Président, c'est un projet de loi qui, en soi, est inacceptable. Au fond, quand on regarde le projet de loi, on se rend compte... Et c'est ça la logique, au fond, du projet de loi. Le ministre a beau nous parler de toutes sortes de logiques, la logique du projet de loi, finalement, M. le

Président, c'est de récupérer 26 000 000 $. Grosso modo 26 000 000 $, chiffre confirmé d'ailleurs par les gens de son cabinet; 26 000 000 $ sur le dos des plus démunis de notre société.

Bien sûr, on va avoir quelques mesures qui vont coûter quelques sous au gouvernement, mais minimes, M. le Président, tout à fait minimes. Ce qu'on fait essentiellement dans ce projet de loi, c'est qu'on va chercher 26 000 000 $ sur le dos des assistés sociaux au Québec.

C'est évident, M. le Président, qu'on est dans un contexte économique difficile. Tout le monde le dit, tout le monde en parle, tout le monde en convient. Il y a une économie parallèle, il y a du travail au noir, on le sait, il y a de la contrebande. Pourtant, à ces égards-là, le gouvernement fait preuve, démontre un laxisme absolument fantastique, mais quand il s'agit d'aller chercher des sous, chacun des ministères a sa commande et chacun des ministères n'a pas l'air de se parler non plus. Ils ont chacun leur petit bout à aller chercher, ils ont leur bout de coupures à effectuer, et on y va à peu près comme on peut avec des mesures qui nous arrivent du genre de celle-là.

J'entendais ma collègue de Johnson, tout à l'heure, s'exprimer par rapport à la clientèle qu'elle défend en cette Chambre depuis au moins quatre ans: la clientèle des personnes âgées, plus particulièrement. Moi, j'aimerais parler, bien sûr, des familles monoparentales, et ça, j'y reviendrai, M. le Président, mais ce projet de loi, tout simplement, vient changer les barèmes. On sait qu'à l'aide sociale il y a différents barèmes qui font en sorte que les gens ont plus ou moins de sous chaque mois, dépendant sur quel barème ils sont installés, ils sont enregistrés. Or, les gens qui arrivent à l'aide sociale présentement, en majorité, ils sont considérés comme non disponibles. Les gens de 55 ans et plus étaient de tout temps considérés comme non disponibles. On le sait, ce n'est pas facile pour des gens de 55 ans de se retrouver un emploi. On voit aujourd'hui, avec les taux de chômage que l'on connaît, des gens qui ont le malheur de perdre leur emploi à cet âge-là. Bien, écoutez, ce n'est pas demain la veille qu'ils ont la possibilité de se retrouver un emploi.

Alors, le ministre nous dit: C'est une logique qui est difficile à comprendre. Il nous l'admet comme ça. Il dit: Ça mérite quelques explications pour qu'on comprenne mieux et, selon le ministre, c'est pour les aider qu'il va les couper de 100 $ par mois. On va passer les gens qui arrivent maintenant à l'aide sociale... On nous dit: Bien sûr, c'est juste pour la future clientèle, la clientèle qui va s'inscrire, parce que ceux-là qui sont là déjà ont des droits acquis, donc on ne les touchera pas. Mais pour la future clientèle, à l'avenir, bien, c'est ça qui va arriver: on va les passer de non disponibles à barème de base non-participant. Coupure de 100 $ par mois, M. le Président. Tout ça sous le beau principe qu'il faut absolument aider ces gens-là à se trouver un emploi. S'ils ont 100 $ de moins par mois, bien, dans la logique du ministre, ça va les forcer à prendre leurs affaires en main, à aller rencontrer des employeurs, à faire des applications et à se trouver un emploi. Quel raisonnement, M. le Président! Je vais vous dire franchement, ça ne me convainc pas du tout, ça ne me convainc pas du tout. Quelqu'un qui gagne 100 $ de moins par mois aura sûrement beaucoup plus de difficultés, à mon sens, à faire des dépenses supplémentaires, parce que, quand on va rencontrer des employeurs, quand on va faire des demandes d'emploi, quand on fait des démarches comme celle-là, c'est évident que ça occasionne des dépenses supplémentaires. Alors, j'ai de la difficulté à comprendre la logique du ministre, juste la logique en termes mathématiques. Comment faire avec 100 $ de moins par mois? On va inciter les gens à faire plus de démarches, à faire plus de dépenses personnelles pour se trouver un emploi alors qu'ils auront de la misère effectivement à boucler leur budget pour l'épicerie et le logement.

C'est un raisonnement, M. le Président, qui, vraiment, de toute façon, n'est pas convaincant. De toute évidence, le ministre avait besoin de faire des coupures. Depuis un certain temps, on se rend compte qu'au niveau du ministère de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, c'est ce qu'on trouve de plus simple à faire, des coupures. Quand on parle de mesures qui aident les gens à retourner à l'emploi, à se retrouver un emploi, ce n'est pas en les coupant de 100 $ par mois qu'on va les inciter, qu'on va les aider, qu'on va les soutenir, si on veut, dans ces démarches à faire pour se trouver un emploi. Je voyais dernièrement les coupures que le ministre a effectuées. On a vu que les seules réactions du ministre pour mieux contrôler ses dépenses plutôt que de chercher à solutionner les drames, les nombreux drames que vivent les personnes qui sont acculées à l'aide sociale, bien, on a vu que le ministre a coupé dans le Rattrapage scolaire et dans les programmes d'alphabétisation parce que, maintenant, ces programmes-là sont contingentés. Là-dessus, M. le Président, je prenais connaissance d'une directive qui a été envoyée justement par son ministère, pour vous démontrer la véracité des faits, aux commissions scolaires pour expliquer les modifications à la mesure Rattrapage scolaire. C'est très clair. On expliquait aux commissions scolaires qu'à l'avenir, dans le cadre des mesures de compressions budgétaires, nous devrons réduire le nombre de personnes participant à Rattrapage scolaire de 29 %, soit environ 1000 prestataires. Ça, c'est récent, M. le Président. On parle d'une directive qui a été émise le 21 octobre 1993. Alors, déjà, on commençait à resserrer, à encourager ou à aider un peu moins les gens qui voulaient se refaire un peu au niveau de l'alphabétisation, au niveau du rattrapage scolaire, pour pouvoir en arriver à se trouver un emploi éventuellement. (23 h 50)

Par ailleurs, dans son grand coeur, le ministre continuait et disait: Si les prestataires en attente de participation désirent suivre des cours, en respectant les critères de la mesure de rattrapage scolaire, nous rembourserons les frais d'inscription, d'encadrement et de

matériel pédagogique, tel que prévu à notre entente. Alors, il prévoyait rembourser cette partie-là des frais, mais, par ailleurs, très clairement, il indiquait que les frais afférents: ...vous indiquant que nous ne rembourserons que les frais scolaires. La personne ne recevra pas le barème de participation ni les frais de garde. Alors, on coupe encore. On dit: Puisque c'est contingenté, s'ils veulent continuer, on peut quand même payer les frais scolaires, les frais de scolarité, mais, par rapport à son barème, ils vont tomber de toute façon, ils vont perdre leur barème de participation et, en plus, il annonçait qu'ils perdraient aussi les frais de garde.

Moi, M. le Président, compte tenu de la clientèle que j'essaie de représenter, les femmes, les familles monoparentales, quand on regarde par rapport aux frais de garde, je me dis: Ça vient de s'éteindre. Cette clientèle ne pourra sûrement plus, de toute façon, participer aux mesures de rattrapage scolaire ainsi qu'aux mesures d'alphabétisation.

Hier, en cette Chambre, il y avait l'étude des crédits supplémentaires et, aux questions que mon collègue de La Prairie posait au ministre par rapport justement aux clientèles de familles monoparentales, le ministre répondait qu'il avait fait des efforts accrus pour aider cette clientèle parce qu'il était très sensible à cette clientèle. Il nous a affirmé ça en toutes lettres, on a ça dans le verbatim, et il nous parlait justement de ces fameux frais de garde, M. le Président. Pourtant, c'est clair, net et précis dans la directive, quand il s'agit de gens qui ne sont pas acceptés par rapport au contingentement, les frais de garde, on peut oublier ça.

C'est vrai que le ministre avait 26 000 000 $ à aller chercher, mais peut-être aurait-il pu s'y prendre autrement, M. le Président. D'ailleurs, je pense que le ministre a été assez clair aussi, hier, en cette Chambre, il a répondu à mon collègue, toujours, de La Prairie, qui le questionnait à cet égard-là, même s'il n'avait pas en main les chiffres, qu'on espère avoir incessamment, il a répondu très clairement qu'il était tout à fait favorable à un système de perception des pensions alimentaires, un système de perception automatique des pensions alimentaires. C'est vrai, M. le Président, qu'en Ontario les chiffres nous démontrent que la mise en place du système de perception automatique des pensions alimentaires, avec retenues à la source, bien sûr, qui est en place uniquement depuis 1992, à toutes fins pratiques, et qui ne touche que les nouveaux divorcés, les nouveaux jugements, si on veut, qui sont tombés depuis cette date-là, aurait permis, selon les chiffres qu'on a en main, de récupérer, à l'aide sociale de l'Ontario, le montant de 23 000 000 $. C'est à peu près l'équivalent, grosso modo, des montants d'argent que le ministre va pouvoir aller récupérer avec son fameux projet de loi qu'il nous présente ici ce soir, en allant le récupérer sur le dos de tout le monde.

Alors, peut-être aurait-il mieux valu, M. le Président, que le ministre se fasse un peu plus convaincant auprès de son collègue de la Justice qui, lui, a certains problèmes de conviction à cet égard-là, puisque le ministre est conscient, lui, qu'il y a des gens dans notre société qui ne prennent pas leurs responsabilités et, puisqu'ils ne prennent pas leurs responsabilités, c'est l'ensemble de la société qui écope du non-sens des responsabilités de ces gens.

Probablement que, si le ministre avait eu un petit peu plus de poigne, un petit peu plus de poignet, comme il y en a qui disent, il aurait pu convaincre sérieusement son collègue de la Justice d'acquiescer à la demande de nombreux groupes de femmes, de la Chambre des notaires, de nombreux groupes au Québec qui font cette demande-là depuis longtemps. Et dernièrement, tout récemment, en début novembre, le Protecteur du citoyen a lui aussi déposé un rapport et s'est montré très clair à ce sujet-là.

Alors, M. le Président, pour des montants à peu près équivalents, peut-être que le ministre aurait pu, à ce moment-là, contribuer à vraiment récupérer des montants d'argent importants qui, à mon sens, ne sont pas payés, et probablement que ces gens-là sont plus fraudeurs encore, parce que vous savez, M. le Président, qu'un jugement de divorce, c'est une facture, c'est une créance qu'il faut respecter, qui est obligatoire, c'est un jugement. Alors, si les gens ne paient pas, ils dérogent à la loi, à la règle. Alors, pour moi, c'est aussi de la fraude. Peut-être qu'en récupérant sur le dos de ceux qui le méritent vraiment, qui devraient payer, plutôt que de récupérer les montants sur le dos de tous ceux qui en ont besoin, bien, ça aurait rendu un bien meilleur service à l'ensemble de la société.

Alors, M. le Président, c'est évident, je pense que mes collègues ont été clairs, c'est sûr que, pour l'Opposition ? et sans vouloir faire de politique, je le répète, M. le Président, de politique partisane sur le dos des gens qui sont les plus démunis ? on va voter contre le principe de ce projet de loi parce que ça n'a pas de bon sens, M. le Président, d'avoir une gestion à courte vue à ce point-là, de manquer autant de cohérence. Je pense que... Je ne sais pas si un jour, M. le Président, au gouvernement, chacun des ministres pourra discuter ensemble pour essayer de rendre ça un peu plus cohérent, discuter de chacune des enveloppes qui leur sont allouées. Peut-être que... Je ne sais pas si c'est possible, mais, depuis que je suis ici, je n'ai pas constaté cette cohérence-là et je dois vous dire que je trouve ça très inquiétant. Chacun des ministères se gère comme s'il était chacun une entreprise privée, et, pourtant, c'est l'ensemble du gouvernement qui fait un tout et qui gère les montants des contribuables.

Alors, probablement que si le ministre avait pu convaincre son collègue, il aurait récupéré son même montant et ça aurait été une façon beaucoup plus juste, beaucoup plus équitable que de pénaliser tous les assistés sociaux qui entreront sur ce régime à partir du moment où cette loi sera sanctionnée.

Voilà, M. le Président. Nous voterons contre le projet de loi parce que c'est inacceptable et que ce n'est pas une mesure qui vient aider au niveau du Québec. Même si on comprend que le gouvernement est obligé

d'effectuer des coupures, je pense qu'il y a moyen d'effectuer les coupures aux bons endroits, puis de récupérer aussi les revenus aux bons endroits. Parce que c'est faux de penser, c'est faux de diffuser que les assistés sociaux sont plus fraudeurs que les autres catégories de notre société. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée. M. le député de Rouyn-Noranda? Témiscamingue, sur cette même motion. Vous avez droit à une intervention de 20 minutes.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président, de m'autori-ser à prendre la parole sur ce projet de loi 128 à cette première étape de la discussion à l'Assemblée nationale.

M. le Président, plusieurs de mes collègues, dont, au premier titre, en premier lieu, le député de La Prairie, ont pris soin d'exposer il y a quelques minutes les motifs fondamentaux qui animent l'Opposition dans ses critiques, dans ses observations, dans ses suggestions au ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu. Et c'est le premier... il est responsable de la formation professionnelle. On va parler un peu de Rattrapage scolaire dans quelques secondes. Vous aviez bien raison de le rappeler parce que, comme il en reste de moins en moins, vous allez finir par perdre votre titre de responsable de la formation professionnelle; on dirait que c'est un objectif. Comme il y en a de moins en moins, finalement, la particule va être déposée bientôt à l'Assemblée nationale.

Mon collègue de La Prairie ainsi que mes collègues de l'Opposition auraient probablement pu, M. le Président, ce soir, se retirer confortablement dans leur bureau, sinon à la maison, et dire: Bien, écoutez, il vient d'y avoir 15 000, 20 000 personnes qui seront davantage victimes de nouvelles coupures parce que, chaque jour du mois de décembre qui s'amène, il y a une nouvelle tranche de la population qui est touchée par des restrictions, par des coupes de revenu, par des coupes de services à la population, tout ça pour une bonne raison, M. le Président, même si ce n'est pas introduit dans les remarques ou dans les indications préliminaires au projet de loi 128: parce que nous sommes face à un gouvernement qui a lamentablement échoué sur le plan de l'administration de notre bien public. M. le Président. Ce n'est pas compliqué: c'est rendu, ici, M. le Président, qu'on s'obstine sur si on va prendre la version de Mme la ministre des Finances ou du président du Conseil du trésor ? bientôt, nous dit-on, premier ministre ? pour savoir si on est en matière d'un déficit de 4 500 000 000 $ ou de 5 000 000 000 $. Ça, c'est du jamais vu. Pour les gens qui ont encore la patience de nous écouter à cette heure-ci et qui trouvent très certainement intéressant que nous puissions soulever les aspects les plus détestables de ce projet de loi 128 qui vise à aller chercher des millions dans les poches des assistés sociaux, en particulier chez les gens de 55 ans à 65 ans, bien, ces gens-là doivent comprendre effectivement qu'on est en face d'un gouvernement qui a échoué lamentablement sur le plan économique. Ils vont nous avoir monté le plus gros déficit de notre histoire, de notre administration nationale au Québec, M. le Président, (minuit)

Vous savez, ces gens-là qui ont répété pendant sept ou huit ans... D'abord, ils se sont présentés deux fois devant l'électorat avec la prétention d'être des bons administrateurs. Je regrette, conclusion après huit ans: des mauvais administrateurs. Ils ont mal balancé; les colonnes ne balancent plus; ils nous amènent dans le trou. Et ces gens-là sont obligés d'aller chercher aujourd'hui du fric, de l'argent, chez les plus démunis de notre société, tout simplement parce que, sur le plan de la gestion des affaires de l'État, de notre bien commun, c'est une faillite monumentale. Ils ont répété pendant un très grand nombre d'années qu'ils payaient, paraît-il, la dette des autres gouvernements qui les ont précédés quasiment depuis Mathusalem.

Eh bien, M. le Président, on va prendre seulement la tranche du budget de l'année 1992-1993 ? puis ça va porter longtemps et les gens doivent entendre ça à la maison, partout où on nous écoute, là ? ce gouvernement nous a monté, uniquement pour l'année 1992-1993, un «bill» de 5 000 000 000 $. Puis ils vont devoir la faire suivre, cette facture, puis cette facture va suivre ces gens-là pendant les mois qui vont venir, parce qu'on ne laissera pas ça passer impunément, M. le Président, on va contribuer à l'information des citoyens. Les gens doivent comprendre qu'aujourd'hui on en est réduit à l'obligation d'aller chercher, d'aller grafigner des millions dans les poches des assistés sociaux. On est obligé de dire aux gens de 55 ans: Si vous voulez, on va vous mettre maintenant une période d'attente.

Lorsque vous avez 55 ans et qu'on vous donnait auparavant... Écoutez, quand on a 55 ans, M. le Président, et qu'on perd son emploi, quand on est dans une situation d'absence de revenus réguliers, franchement, M. le Président, il ne faut quand même pas... Les Québécois et les Québécoises de cet âge-là, qui ont contribué largement au maintien et au développement de nos régimes sociaux, de notre régime de santé, de l'ensemble de nos régimes qu'on s'est donnés dans notre société québécoise, eh bien, ces gens-là ne se rendent pas à l'aide sociale de gaieté de coeur. C'est parce que le Québec est dans une telle situation économique, qu'on est à faire face à de si grandes difficultés économiques que ces personnes sont réduites à se présenter à l'aide sociale, et elles peuvent compter sur la dernière mesure, le dernier filet de sécurité que nous nous sommes donné au Québec, c'est-à-dire l'aide sociale. Écoutez, c'est le minimum de la solidarité, ça, M. le Président. C'est le minimum de la solidarité. Lorsqu'on a 55 ans et qu'on a contribué à l'État pendant un très grand nombre d'années, qu'on est dans une passe extrêmement difficile, on dit: Nous, on va vous aider pendant cette période.

Et là, qu'est-ce qu'on leur dit, à ces personnes? On leur dit: Savez-vous, on va vous donner une période de probation, dans le fond, pour savoir si vous êtes des gens qui ont encore la capacité de contribuer. On n'est pas sûr que vous êtes suffisamment honnêtes, que vous avez suffisamment la capacité d'entreprendre des mesures de rattrapage, des mesures d'employabilité. On va vous donner une pénalité supplémentaire de six mois. On va vous enlever un 100 $ par mois, M. le Président, pendant les six premiers mois qui suivent votre demande, et ce n'est qu'après cette période qu'on vous donnera ce qui a toujours été considéré comme étant un minimum vital.

Quand on est dans l'ordre de 500 $ à 600 $ par mois, M. le Président, vous savez, on n'est pas en matière de richesse et on n'est pas en matière d'abus, puis on n'est pas en matière de citoyens qui abusent de leur État. On est en matière de citoyens qui, dans une situation extrêmement difficile, peuvent compter sur la solidarité de leurs concitoyens et concitoyennes. C'est ça qu'ils espèrent de l'État. Us n'en demandent pas beaucoup, M. le Président. Ce n'est pas des sans-coeur, ce n'est pas des lâches, ce n'est pas des gens qui ne veulent pas travailler, ce n'est pas des gens qui ne veulent pas s'impliquer dans la société, ce n'est pas des gens qui refusent toute participation à la richesse collective. Non, non.

M. le Président, on est dans sa collectivité rurale, dans son quartier, dans sa collectivité urbaine; l'usine ferme, il y a un gouvernement qui navigue à vue, il ne voit presque plus rien. Les chômeurs, ça se multiplie chaque jour. Pas de programmes, pas de plan, pas d'espoir. Puis on dit à ces gens-là: Si vous vous retrouvez au bureau de l'aide sociale, 100 $ de punition, M. le Président, pour les six premiers mois. Parce que vous êtes tombés dans une telle trappe de pauvreté, nous, on vous dit, en plus: On va vous imposer un moratoire, on va vous imposer une période de carence. Comme l'espèce de délai de punition qu'on donne aux personnes, au gouvernement fédéral, quand elles ont le malheur de perdre leur emploi et que ces personnes sont admissibles à F assurance-chômage. On va aller chercher une vingtaine de millions, selon les chiffres, dans les poches de ces personnes-là.

Bien, M. le Président, ce n'est pas surprenant d'entendre les propos de Mme la députée de Johnson. Mme la députée de Johnson, elle défend en particulier cette clientèle-là. Tout le monde sait le grand coeur de Carmen Juneau, députée de Johnson. Tout le monde sait les intérêts de cette excellente députée qui, malheureusement, faut-il le noter, a annoncé qu'elle ne renouvellerait pas son mandat à l'Assemblée nationale. Ça va nous manquer beaucoup. Elle va nous manquer beaucoup parce que du monde de coeur comme ça, ça nous en prend au sein de cette Assemblée pour défendre des personnes qui sont au seuil du minimum, des personnes qui ont besoin et qui doivent compter sur la solidarité sociale et qui espèrent que, lorsqu'elles vivront des situations extrêmement difficiles, elles pourront se dire:

Je peux compter sur la compassion, je peux compter sur des mesures d'aide.

Non, M. le Président, ce n'est pas ça qui se passe, ce n'est pas ça qui est présenté dans le projet de loi 128; c'est exactement l'inverse. Et je le répète, M. le Président, parce qu'il faut bien faire la relation entre les différents événements: C'est parce que ce gouvernement nous a monté, en 1992-1993, une facture, un déficit de 5 000 000 $. Ah, il pourrait arriver que quelqu'un se lève là et qu'il dise: Ouf!

Une voix: 5 000 000 000 $.

M. Trudel: Des milliards de dollars, bien sûr, 5 000 000 000 $. Il pourrait arriver que quelqu'un se lève, M. le Président, et dise: Pas 5 000 000 000 $. Mme la ministre des Finances a dit, aujourd'hui: Minimum, dans l'écriture, 4 500 000 000 $. M. le Président, on est habitués, elle révise ça à tous les trois mois, à tous les six mois. Les revenus sont moindres pour le gouvernement et les dépenses augmentent parce qu'il n'y a pas de création d'emplois. Il n'y a pas de dynamique de développement, il n'y a pas de pistes d'espoir qui sont tracées par ce gouvernement.

Alors, le petit refrain, M. le Président, le petit refrain longuement répété que c'est à cause des déficits passés que ce gouvernement est dans une mauvaise situation, eh bien, il va falloir l'adapter là, hein? Il va falloir dire que, grâce à leurs médiocres talents d'administrateurs, à leur mauvaise capacité de gestion, ils auront monté aux jeunes du Québec le plus gros déficit annuel jamais observé de tous les temps de l'administration publique au Québec. Ce n'est pas peu dire, ça, M. le Président. On va traîner ça pendant, bien sûr, des années et des années. ces 5 000 000 000 $, c'est du jamais vu, c'est un niveau qu'on n'a jamais atteint au québec et puis, là, comme on en est réduits à gratter à peu près tout ce qu'il y a à gratter et qu'on ne peut pas espérer des rentrées supplémentaires, parce qu'il n'y a pas d'emplois... toutes les régions du québec, m. le président, se retrouvent à montréal. dimanche dernier, une publication de statistiques sur le taux réel des sans-emploi à montréal, 30 %. m. le président, 30 % de la population sur l'île de montréal. je ne parle pas des 28 municipalités, là. dans l'ensemble du grand montréal, sur l'île de montréal, 30 % des personnes aptes au travail sont sans emploi. alors, allez y comprendre quelque chose sur pourquoi on nous a monté un tel niveau de déficit. bien, ça s'explique comme cela: il ne peut pas y avoir de rentrées d'argent, les gens sont au chômage. il n'y a pas de dynamique, il n'y a pas de plan de développement. alors, 30 % de sans-emploi. parce que, si on prend les taux de statistique canada, on va se réveiller avec des taux de 14 %, 15 %, 16 %. on le sait comment ces échelles, ces évaluations sont construites et ça ne nous donne pas l'heure juste sur le plan des sans-emploi. les personnes aptes au travail, je pense que la méthode pour

les calculer est bien évaluée, bien éprouvée maintenant: sur l'île de montréal, 30 %. (0 h 10)

Les gens de l'Abitibi-Témiscamingue, que je représente ici à l'Assemblée nationale, M. le Président, 27 %, 27 % lorsqu'on additionne les 10 000 personnes qui sont officiellement au chômage et les 11 000 personnes qui sont dépendantes des paiements de transfert au niveau de l'aide sociale, toutes des personnes qui voudraient travailler, qui voudraient être sur le marché du travail, qui voudraient intervenir pour augmenter le produit intérieur brut du Québec, qui voudraient participer aux mesures de relance.

Alors, M. le Président, ce gouvernement nous a plongés dans une crise financière sans précédent. Il tente de masquer son incompétence, son incapacité à gérer les finances publiques, à gérer le déficit, à gérer la situation économique, et tout ce qu'il trouve à nous présenter, à la session, à la toute veille de Noël et du Jour de l'an, c'est de dire: On en est réduits à aller piger dans les poches des plus pauvres de notre société: 100 $ pour les assistés sociaux entre 55 ans et 65 ans. C'est incroyable! Incroyable! Ces gens qui manifestent leur volonté d'être disponibles au marché du travail, si on leur demande: Est-ce que vous voulez entreprendre des mesures d'em-ployabilité?

Ces personnes on leur avait dit: Écoutez, à 55 ans, on peut comprendre, de façon solidaire, que c'est extrêmement difficile et, comme vous vous retrouvez dans une situation plus difficile, on va vous admettre à ce barème de disponibilité pour vous aider. Ce qui n'empêche pas d'espérer que ces personnes vont avoir la volonté de se réinsérer sur le marché du travail. M. le Président, c'est par définition, ça: même si elles ont 55 ans, ces personnes, lorsqu'il y a du travail disponible, sont prêtes à réaliser les efforts nécessaires. Chacune veut retrouver sa dignité dans le travail.

Tout le monde espère avoir une intervention dans la société, parce qu'il n'y a rien de pire, dans n'importe quel type de société dans laquelle on vit, M. le Président, que d'être une personne sans statut, d'être une personne qui n'a pas la dignité qu'apporte un travail valorisant, de participer à la construction de son pays, de construire sa région, d'aider au développement de son quartier, d'aider à des causes humanitaires, de faire en sorte que je peux dire: Je suis un citoyen responsable, je contribue. Je contribue aux mesures générales de notre système de santé, de notre système de sécurité sociale. Il y a de quoi être fier. Il y a une fierté légitime, et on le sait. Les Québécois et les Québécoises ? et c'est particulièrement le temps de se le dire pendant le temps des fêtes ? sont des gens qui sont solidaires, des gens qui ont la volonté d'aider les plus démunis. Il suffit de voir les nombreuses campagnes qui se déroulent dans les villes, dans les municipalités, dans les quartiers à cette période-ci, et c'est des gens généreux, les Québécois, c'est des gens ouverts.

Alors, ce gouvernement, M. le Président, par le projet de loi 128, dit: Nous allons en ajouter un petit morceau sur les mesures de désolidarisation sociale. Parce que ce gouvernement auquel nous faisons face, M. le Président, c'est le plus grand spécialiste de la désolidarisation sociale. M. le Président, non seulement on veut s'attaquer aux plus démunis, on veut aller chercher 20 000 000 $ dans leurs poches, à ces 55 à 65 ans qui ont le malheur de tomber dans la trappe du chômage, dans la trappe, souvent, de la pauvreté, dans la trappe de l'absence de travail, eh bien, M. le Président, on a vu, pour toute cette clientèle, le ministre de la Sécurité du revenu être obligé, en quelque sorte, d'avouer qu'au plan du rattrapage scolaire ? peu importe son âge ? on est passé récemment de 37 000 à 20 000 places. M. le Président, ça, c'est carrément...

M. Lazure: Je m'excuse auprès de mon collègue.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de La Prairie.

M. Lazure: Je m'excuse auprès de mon collègue de Rouyn-Noranda?Témiscamingue, mais je constate que nous n'avons pas quorum et qu'il s'agit d'un projet de loi très important.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle les députés! (0 h 14 - 0 h 16)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, nous reprenons nos travaux. M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue, continuez votre intervention, s'il vous plaît.

M. Trudel: Merci, M. le Président. J'ai quasiment envie de remercier mon collègue de La Prairie qui a soulevé la question du quorum à l'Assemblée nationale. Évidemment, je sais que ça intéresse peu les ministériels lorsqu'on parle des plus démunis, qu'on parle des gens en difficulté. C'est, par les temps qui courent, le moindre de leurs soucis. On peut facilement le comprendre, mais non l'accepter. On ne peut pas accepter cela, M. le Président, et c'est pourquoi il faut toujours insister pour que le parti ministériel soit obligé, en vertu de notre règlement, de venir entendre des choses qu'il n'aime peut-être pas entendre nécessairement là-dessus.

M. Garon: M. le Président, c'est évident qu'il n'y a pas de commissions qui siègent à cette heure-ci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle les députés! (0 h 17 - 0 h 22)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue, je vous cède la parole. Si vous voulez terminer votre intervention, s'il vous plaît.

M. Trudel: Merci, M. le Président. Je remercie le député de Lévis d'avoir pris soin de réveiller les

morceaux, s'il en reste, de la conscience des ministériels pour qu'au moins ils viennent écouter ici, à l'Assemblée nationale, de quoi il retourne du projet de loi 128 qui attaque le dernier quarteron de notre population qui n'avait pas été touché au cours de la dernière année ou des dernières années, là, la catégorie de la population qui va être «punchée» ? vous m'excuserez l'expression ? pour 20 000 000 $. Alors, c'est tout un ensemble de personnes. On cherche maintenant lesquelles on peut grafigner. On se lève le matin, du côté ministériel, et on dit: Ce matin, c'est quelle gang qu'on va poigner, qu'on va prendre? Je comprends, par ailleurs, qu'ils n'ont pas le choix. Quand tu as une facture de 5 000 000 000 $ due à ton incompétence, eh bien, il faut que tu ailles en chercher quelque part; sans ça, le FMI est à tes portes: il va te rappeler à l'ordre, il va te dire que tu es un mauvais administrateur et il va te chasser, bien sûr, de cette responsabilité que tu es incapable d'occuper en termes d'administration publique.

M. le Président, dans ce projet de loi 128, il y a encore un petit peu plus odieux que ça. Je voyais le ministre du Revenu qui était avec nous, il y a quelques minutes. Le ministre du Revenu a la responsabilité, bien sûr, de la loi, de l'application de la loi, de la «collection» des impôts, des revenus des entreprises, des organisations pour le gouvernement. À cet égard, bien, on trouve souvent la loi de l'impôt extrêmement sévère pour les petites et moyennes entreprises, dans le sens où, compte tenu des difficultés économiques que l'on vit actuellement, bien, il va arriver fréquemment qu'une petite entreprise soit confrontée à l'obligation de retarder les remises de ses déductions à la source ou des remises de TVQ, de taxe de vente du Québec, etc. On voit rapidement que le fisc, le ministère du Revenu, va arriver avec un avis dans les jours qui vont suivre pour, bien sûr, récupérer ce qui est dû à l'État et imposer à cette entreprise-là des frais d'intérêt, puisque, pendant le nombre de jours où l'on n'a pas fait les versements, eh bien, l'État a perdu un certain nombre de revenus pour assurer ses dépenses. Dans la loi de l'impôt, c'est obligatoirement assorti d'amendes qui sont très lourdes, qui sont extrêmement difficiles. Qui n'a pas eu, dans cette Chambre, une demande de l'une ou l'autre des petites entreprises dans son comté. Cette entreprise vous dit: Moi, je ne peux pas passer à travers, j'ai retardé mes paiements. Est-ce que maintenant je peux avoir une entente? Et on procède avec le ministère du Revenu aux ententes, s'il y a lieu de le faire.

Eh bien, imaginez-vous, M. le Président, là, on va assimiler les assistés sociaux au même régime en termes de récupération lorsqu'il y a eu des erreurs, lorsqu'il y a eu des trop-payés, lorsqu'il y a eu des différences entre ce que la personne aurait dû recevoir et ce qu'elle a reçu. M. le Président, on va imposer des amendes sur les récupérations d'argent aux personnes qui sont victimes ou qui sont dans un processus qui fait en sorte qu'elles auraient touché des sommes auxquelles l'État pense qu'elles n'avaient pas droit.

M. le Président, qu'il y ait demande de récupéra- tion ou exigence, c'est normal, c'est de l'argent qui appartient à l'État, la personne n'avait pas le droit. Qu'il y ait des charges d'intérêt, M. le Président, vous savez, quand on est à 500 $ par mois et qu'on a 55 ans, on n'est pas en matière, là, de gros gaspil. Là, on va imposer une amende en plus. Mettre une amende, M. le Président, avez-vous pensé à ça? Les assistés sociaux vont être mis à l'amende parce qu'il y a des erreurs dans le système et qu'elles ont reçu des trop-perçus. M. le Président, le vase déborde. Le peuple va parler bientôt et je suis sûr que ces gens-là vont être ramenés à l'ordre, mais à l'ordre définitivement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue. Je suis prêt à entendre le prochain intervenant. M. le ministre, est-ce que vous voulez procéder à votre réplique? Allez-y, M. le ministre.

M. André Bourbeau (réplique)

M. Bourbeau: M. le Président, vu l'heure tardive, je n'ai pas l'intention de parler très longtemps sur le projet de loi. Je dois dire, M. le Président, que je n'ai pas particulièrement apprécié la démagogie dont vient de faire preuve le député qui vient de parler en dernier lieu et qui laisse croire, M. le Président, que nous allons imposer des amendes à des gens qui ont eu le malheur de ne pas avoir les moyens suffisants de payer leurs dettes à l'aide sociale.

M. le Président, les amendes dont on parle, ce sont les mêmes amendes que le ministère du Revenu impose aux gens non seulement quand ils font défaut de payer ? ça, ce n'est pas des amendes, c'est des intérêts ? mais quand le défaut de payer provient, M. le Président, de ce qui est équivalent à la fraude; là, les amendes sont mises en vigueur. Les seuls cas où il y aura des amendes de «chargées» à des ex-prestataires de la sécurité du revenu, ce sont dans les cas où les gens, M. le Président, auront agi d'une façon qui équivaut à de la fraude. Je pense que les citoyens du Québec reconnaissent que, quand une personne, M. le Président, recourt à des moyens semblables, il est normal qu'on impose une amende. N'oubliez pas, M. le Président, que les sommes d'argent qui sont ainsi gaspillées, ce sont des sommes d'argent qui proviennent de la poche des contribuables. Alors, les citoyens du Québec savent que, dans certains cas, on impose des amendes et il n'y a pas de distinction, M. le Président, dans ces cas-là, entre quelque catégorie de citoyens que ce soit.

M. le Président, je n'en ai pas pour longtemps, mais on a dit plus tôt ici, depuis le début ? le député de La Prairie l'a dit et d'autres aussi, la députée de Johnson ? que tout ce que le gouvernement faisait depuis quelques années, c'était de couper dans les prestations d'aide sociale chaque fois qu'on se lève en cette Chambre. M. le Président, il est vrai qu'à l'occasion les mesures que nous avons proposées ont eu pour effet de faire ce

qu'on appelle une certaine rationalisation, mais, dans tous les cas, on l'a faite après avoir considéré d'une façon totale les conséquences des gestes que nous avons posés. Et je dirais que nous avons aussi souvent augmenté, M. le Président, les prestations ou apporté des bonifications dans les interventions que nous avons faites que l'inverse.

Et je n'ai pas, M. le Président, une liste exhaustive, je n'ai écrit, tout à l'heure, pendant quelques secondes, que quelques mots sur un bout de papier ici. Je vous en nomme quatre augmentations, quatre bonifications que nous avons apportées à l'aide sociale au cours des dernières semaines, des derniers mois, M. le Président. Exemple: dans le projet de loi qui est devant nous, où on dit qu'on coupe, M. le Président, il y a une mesure qui va nous permettre de subventionner dorénavant les femmes à l'aide sociale qui ont de jeunes enfants de moins de six mois et qui doivent donner du lait maternisé.

Jusqu'à maintenant, M. le Président, c'est malheureux de le dire, mais il n'y avait aucune aide aux femmes qui avaient de jeunes enfants et, comme elles ne sont pas très à l'aise financièrement, certaines d'entre elles ne donnaient pas de lait maternisé et avaient même recours parfois à du lait de vache, ce qui n'est pas très bon pour la santé des jeunes. Dorénavant, M. le Président, il y aura une subvention importante: on va subventionner les deux tiers du coût du lait maternisé; enfin, les deux tiers, je devrais plutôt dire la moitié, M. le Président. Non, les deux tiers effectivement; on va subventionner l'excédent de 35 $ par mois et, comme ça coûte à peu près 100 $ par mois, même 110 $ par mois pour du lait maternisé, effectivement, on va subventionner les deux tiers. (0 h 30)

On va aussi, M. le Président, porter de 20 $ à 50 $ par mois la prestation pour allaitement. Alors, les femmes enceintes, M. le Président, qui sont à la sécurité du revenu, je m'excuse, pas les femmes enceintes mais les mères, M. le Président, qui ont de jeunes enfants et qui vont choisir d'allaiter leur enfant auront 50 $ par mois plutôt que 20 $ par mois, ce qui est une prime importante, M. le Président, et une augmentation substantielle. Ça, on n'en a pas parlé du côté de l'Opposition.

M. le Président, le projet de loi prévoit également, pas le projet de loi mais un règlement que nous avons déposé en même temps, que les familles et les femmes monoparentales qui vont quitter la sécurité du revenu dorénavant auront droit à la carte-médicaments pendant six mois. C'est une amélioration, M. le Président, ça n'existait pas avant, pour permettre une intégration au marché du travail, pour inciter les familles monoparentales, les chefs de famille monoparentale à intégrer le marché du travail.

M. le Président, nous avons récemment bonifié F allocation-logement, dont la moyenne, pas la moyenne mais le maximum est passé à 90 $ par mois. L'allocation-logement est une mesure que nous avons instaurée pour venir en aide surtout aux familles monoparentales qui ont à payer dans des situations, par exemple dans des milieux urbains, des loyers qui sont plus élevés que la moyenne. Vous savez que la prestation d'aide sociale est la même partout au Québec. Qu'on demeure dans une ville où les logements sont chers ou dans un petit village où les logements sont beaucoup moins dispendieux, la prestation est la même, ce qui pourrait, M. le Président, être interprété comme une injustice à l'endroit de ceux qui doivent défrayer des loyers plus élevés. Pour corriger cette situation, nous avons introduit, lors de la réforme de l'aide sociale, une allocation-logement. Nous venons de la bonifier substantiellement, M. le Président, et, encore là, je signale que 70 % des bénéficiaires sont des familles monoparentales.

Et je termine, M. le Président, avec une autre mesure, mais il y a des dizaines d'autres bonifications que nous avons apportées. Je vous signale qu'aussi récemment que le 14 juillet dernier le gouvernement a accepté d'ouvrir l'enveloppe pour les mesures de développement de Femployabilité. Jusqu'à cette époque-là, le montant d'argent disponible était limité à une certaine somme d'argent, et on pouvait nous accuser, à l'occasion, de retarder l'entrée de certains prestataires, l'arrivée de prestataires à des mesures de développement de l'employabilité. Dorénavant, l'enveloppe est ouverte, c'est-à-dire qu'il y a autant d'argent là-dedans qu'on en a besoin pour suffire à la demande.

M. le Président, ces quatre mesures-là dont je viens de parler ? ce n'est pas exhaustif, j'ai seulement fait la liste comme ça sur un bout de papier ? indiquent bien que c'est faux de prétendre que le gouvernement ne fait que couper dans l'aide sociale. On ajoute aussi, M. le Président, et aussi souvent on ajoute des bonifications, on améliore le système. Donc, la loi de l'aide sociale, c'est une loi qui évolue, M. le Président, au fur et à mesure que la société évolue et c'est comme ça que nous voulons la conserver de façon à ce que, cette loi-là, elle réponde toujours aux aspirations et aux besoins de notre clientèle. Je vous remercie M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre.

M. Lazure: M. le Président, en vertu de 213...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le député de La Prairie.

M. Lazure: ...est-ce que le ministre accepterait que je lui pose une courte question qui demanderait une courte réponse?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que vous acceptez?

M. Lazure: Je pose la question au ministre, c'est au ministre à répondre.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que vous acceptez, M. le ministre?

M. Bourbeau: M. le Président, je n'ai aucune objection à répondre aux questions du député.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, allez-y, M. le député. Une courte question, courte réponse.

M. Lazure: Une courte question concernant les amendes proposées par le projet de loi. Est-ce que le ministre reconnaît que le Protecteur du citoyen lui dit, dans la lettre qu'il lui a expédiée, qu'il n'est pas légitime d'imposer des amendes lorsqu'il s'agit non pas de fraude mais de déclarations non conformes faites sans désir de fraude? Est-ce qu'il reconnaît que le Protecteur du citoyen lui dit que ce n'est pas légitime de faire ça?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président il est évident que, les cas dont on parle, ce sont des cas de fraude, M. le Président. Nous n'imposerons pas d'amende dans des cas où des gens se sont trompés, c'est évident. Alors, s'il y a eu mauvaise interprétation de la part du Protecteur du citoyen M. le Président, on le lui a déjà dit ? on le lui a déjà dit ? ou, si la lettre n'est pas rendue, on va le lui dire, mais, moi, je peux vous dire que, ce qui est visé ici, ce sont des cas de fraude. Et si le député s'objecte à ce qu'on impose des amendes à des gens qui fraudent, M. le Président, bien, qu'il vive avec ses propres convictions, mais de notre côté, ici, on pense que c'est une chose qui se fait régulièrement dans l'administration publique. Et, M. le Président c'est ce que nous avons l'intention de faire. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci. Alors, est-ce que la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 128, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu, est adoptée?

M. Lazure: Vote enregistré, vote enregistré.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vote enregistré.

M. Bélisle: M. le Président, je vais faire motion pour reporter le vote.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous savez que, pour que vous puissiez requérir le vote enregistré, vous devez être au moins cinq députés.

M. Bélisle: Ils ne sont pas cinq.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que la motion proposant...

M. Garon: II faudrait vérifier le quorum.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): ...l'adoption du principe du projet de loi 128...

M. Garon: M. le Président, pouvez-vous vérifier le quorum?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, il y a quorum.

Mise aux voix

Est-ce que la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 128, Loi modifiant la Loi sur la sécurité du revenu, est adoptée?

Des voix: Adopté.

M. Lazure: Vote enregistré.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Bélisle: Je fais motion, M. le Président, pour que le projet de loi 128 soit déféré à la commission des affaires sociales pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Article 32, M. le Président.

Projet de loi 129

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Lefebvre): À l'article 32 de notre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 129, Loi modifiant la Loi sur les cours municipales.

Est-ce qu'il y a des interventions sur ce rapport? M. le ministre de la Justice, je vous cède la parole.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: M. le Président, nous procédons donc, ce soir, à la prise en considération du rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 129,

intitulé Loi modifiant la Loi sur les cours municipales.

M. le Président, cette loi, dont l'étude en commission a été complétée le 2 décembre dernier, propose diverses mesures ayant trait à la procédure d'établissement d'une cour municipale commune; deuxièmement, au traitement des demandes relatives aux cours municipales à l'occasion du regroupement de territoires municipaux ou de fusion de municipalités; et, troisièmement, au suivi des dossiers judiciaires en cas d'abolition d'une cour municipale ou de retrait d'un territoire de la juridiction d'une telle cour.

Alors, M. le Président, les modifications que nous proposons par ce projet de loi 129 visent essentiellement à bonifier la procédure de traitement des demandes relatives aux cours municipales sans compromettre toutefois les principes qui ont été établis par la réforme sur les cours municipales que nous avons faite en 1989. C'est ainsi qu'il propose certains assouplissements de la procédure d'établissement d'une cour municipale commune par des municipalités locales en permettant de traiter concurremment les différentes demandes. Et ce processus devrait éviter aux municipalités des délais additionnels qu'occasionne actuellement le traitement de telles demandes, et ce, dans l'intérêt des justiciables.

Le projet prévoit aussi que, lors d'un regroupement de territoires municipaux, la cour municipale locale ou commune déjà établie deviendra, sans autres formalités, la cour de la nouvelle municipalité, s'il n'y avait qu'une seule cour existante au moment du regroupement et si seules les municipalités parties à la demande étaient desservies par cette cour.

Le projet de loi 129 contient de plus des dispositions visant à favoriser une plus grande accessibilité de certaines municipalités aux avantages de la Loi sur les cours municipales.

Alors, M. le Président, ce projet de loi vient compléter la réforme que nous avons faite en 1989 et est dans la continuité de ce que nous faisons comme projets de loi pour développer l'accessibilité à la justice. Nous avions, en 1989, fait un travail où tous les membres de cette Assemblée nationale avaient donc voté un projet de loi qui avait permis de restructurer, de repenser les cours municipales. Avec ces amendements, qui ne touchent pas au principe que nous avons déjà voté, ça nous permet d'être encore plus efficaces, de permettre aux municipalités de pouvoir se regrouper et de fusionner leurs cours municipales; donc, M. le Président, encore plus d'accessibilité et toujours en fonction aussi du principe d'humaniser l'administration de la justice.

M. le Président, je dois dire que la commission parlementaire a très bien travaillé et je voudrais remercier les membres de cette commission parlementaire. Le député de Hull, M. le Président, a eu à intervenir à plusieurs reprises; de par son expérience au sein d'une administration municipale à la ville de Hull, il a su nous éclairer sur bien des points. Le député de Chapleau, comme adjoint au ministre de la Justice, a été aussi d'une précieuse collaboration, et je voudrais remercier le député d'Anjou qui, au nom de l'Opposition, a participé très activement et de façon aussi extrêmement profitable pour que nous puissions avoir un projet de loi qui, au-delà de toute partisanerie politique, M. le Président, nous amène à une belle réalisation en matière de justice. C'est aussi une conséquence directe du Sommet de la Justice, M. le Président. Je suis fier de l'apporter, ici en cette Chambre, après un bon travail en commission parlementaire. Je vous remercie, M. le Président. (Oh 40)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Sur la même motion, M. le député d'Anjou, je vous cède la parole.

M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Je vous remercie, M. le Président. Comme nous l'avons mentionné lors de l'adoption du principe du projet de loi, nous sommes en faveur du principe sous-jacent, qui est celui de la réorganisation territoriale des cours municipales. En effet, les cours municipales sont présentement en train de se réorganiser, soit pour, tout simplement, se fusionner, soit pour agrandir le territoire qu'elles desservent. Et ce mouvement a été amorcé en 1989, lors de la réforme, comme l'a mentionné le ministre de la Justice.

Les problèmes qu'il y avait, M. le Président, ce qu'on pouvait constater, c'était que, parfois, quand il y avait des réorganisations territoriales de municipalités, de villes ? donc, automatiquement, ça touchait aussi la compétence des cours municipales ? on avait des problèmes entre ce qui touchait le ministère des Affaires municipales et ce qui touchait le ministère de la Justice. Parce que la réorganisation territoriale touche le ministère des Affaires municipales et la réorganisation des cours municipales touche le ministère de la Justice. Il y avait des processus qui étaient longs au niveau de la fusion des cours, de la disparition d'une cour au profit de la nouvelle cour. Donc, je pense que ce projet de loi donne une certaine souplesse, vient aider ce mouvement de réorganisation des cours municipales. Et je pense que, comme je vous le disais, le principe est tout à fait bénéfique et tout à fait justifiable.

Cependant, comme parlementaire et comme porte-parole de l'Opposition officielle en matière de justice, M. le Président, ce qui est important aussi, c'est que cette réorganisation se fasse dans un souci de meilleure accessibilité de notre système de justice et non pas uniquement pour des raisons qu'on pourrait dire financières. Et je pense que c'est tout à fait primordial de garder ça à l'esprit.

La principale préoccupation que j'avais relativement à ce projet de loi, c'était le problème de disparition de cours municipales. On sait que les juges des cours municipales, dans plusieurs municipalités, M. le Président, ce sont des avocats de pratique privée qui ont des contrats pour devenir juge de cour municipale les soirs, à temps partiel. Alors, ces juges sont nommés

jusqu'à l'âge de 70 ans ou jusqu'à la disparition de leur cour. Ça, c'est très important, il faut absolument garder ça à l'esprit. Donc, ils ont une certaine ? comment je pourrais dire, M. le Président ? une certaine permanence. Et c'est important, parce que l'article 23 de la Charte des droits et libertés dit que toute personne a le droit d'avoir un procès devant un tribunal indépendant, autonome et impartial. Donc, il faut qu'il y ait une certaine stabilité au niveau des juges municipaux. Alors, le problème que certains juges municipaux, que certains intervenants du milieu des cours municipales se posaient, c'est: Est-ce que, par ce projet de loi, finalement, il va y avoir disparition de juges municipaux, de cours municipales? Et est-ce qu'ainsi ce critère d'autonomie et d'indépendance des juges municipaux ne se verra pas menacé? Ce qui pourrait, à ce moment-là, soulever une certaine contestation de la part de certains intervenants quant à la constitutionnalité des cours municipales. On pourrait dire tout simplement: Écoutez, comme le juge municipal maintenant est vulnérable de par la menace qui pèse sur lui de disparition de sa cour, est-ce qu'il perd cette autonomie et cette indépendance qui est tout à fait essentielle pour que la cour municipale soit reconnue par notre système constitutionnel? Alors, c'est la question que je me posais, M. le Président.

On a, je pense, fouillé la question d'une façon assez abondante. Du côté de la justice, M. le Président, on pourrait dire que le ministère de la Justice ne semble pas penser que c'est une menace qui est sérieuse. J'espère qu'ils ont raison. On en a discuté longuement, M. le Président; j'espère qu'ils ont raison. Quant à moi, j'ai encore, je vous le dirais, certaines réserves, car, dans certains milieux municipaux, il faut le dire, M. le Président, quand on parle de cour municipale, on pense beaucoup plus, des fois, à certains équilibres budgétaires, plutôt qu'à uniquement une priorité d'accessibilité de la justice, non pas de mauvaise foi, mais, tout simplement parce que, évidemment, de par leur formation, les conseillers municipaux, les élus municipaux, ont plus un souci, souvent... leur premier réflexe est tout simplement d'avoir un équilibre budgétaire plutôt que de voir uniquement l'aspect de l'accessibilité des cours municipales, l'accessibilité à la justice. Certains juges municipaux, à tort ou à raison, M. le Président, sentent, des fois, qu'ils ont une certaine pression au niveau de la rentabilité de leur cour municipale, c'est-à-dire que, s'il n'y a pas un taux de convictions assez élevé, si la cour, au niveau des amendes, n'obtient pas un certain rendement, ils se sentent des fois un peu comme s'ils avaient certaines pressions, à tort ou à raison, M. le Président, je dois le dire, à tort ou à raison. Des fois, ça peut être des fausses perceptions que certains juges municipaux ont, mais c'est quand même une certaine pression qu'ils sentent et ça les inquiète de voir ainsi le statut de leur cour, disons, plus vulnérable.

Une des hypothèses qui ont été soulevées lors de la commission était de savoir: Est-ce qu'il ne serait pas possible de prévoir comme des banques d'emplois? C'est-à-dire que, quand un juge municipal voit sa cour disparaître, est-ce qu'à ce moment-là il ne pourrait pas faire partie d'une banque d'emplois régionale, c'est-à-dire que, lors de la création d'une nouvelle cour municipale dans la région, à ce moment là, évidemment, ça serait ce juge-là qui aurait, disons, une priorité pour pouvoir combler le poste? À ce moment-là, ça répondrait aux exigences de stabilité au niveau des juges municipaux et ça enlèverait ce caractère de vulnérabilité.

Je l'ai répété à plusieurs reprises lors des auditions de la commission, M. le Président, que, pour moi, le souci, ce n'est pas de protéger les emplois d'avocats. J'ai été moi-même avocat en pratique privée pendant près de 10 ans et c'est le lot des avocats de pratique privée de perdre des contrats, de perdre des clients. Ma préoccupation n'est absolument pas de préserver des emplois pour les avocats de pratique privée. Mon seul souci, c'est de prévenir une contestation de nos cours municipales, du statut de nos cours municipales. Pour ça, je pense que c'est important et ça doit être une priorité pour nous, législateurs. On doit prévenir plutôt que guérir, et je pense qu'on ne le répétera jamais assez.

Alors, nous avons eu des échanges sur le sujet. Du côté du ministère de la Justice, on nous a fait part qu'il était très difficilement concevable de créer ce genre de banque régionale, qu'on avait évalué la situation et que, d'après le ministère de la Justice, il n'y avait pas de danger. On nous a rassurés aussi ? et, ça, je pense que c'est important de le dire ? au niveau du ministère de la Justice, que, quand une demande de fusion, quand une demande de réorganisation de la cour municipale était présentée au ministère de la Justice, le critère premier n'était pas un critère d'ordre financier mais un critère d'ordre d'accessibilité à la justice et de faire en sorte que la fusion ou le réaménagement de la cour municipale ne crée pas d'injustice ou de problème quant à l'accessibilité de la nouvelle cour municipale.

Donc, ce sont ces engagements et ces précisions-là qui nous ont été donnés par le ministère de la Justice qui ont fait en sorte que nous avons donné notre consentement quant à ce projet de loi qui, comme je vous le disais, au niveau de ses intentions, est tout à fait louable en soi. Donc, M. le Président, ce projet de loi a été étudié d'une façon attentive. Je pense que les débats ont été très constructifs. Les gens qui vont pouvoir, à ce moment-là, suivre nos débats pourront voir que les questions qui devaient être posées ont été posées. J'espère que l'avenir donnera raison au ministre de la Justice et que, je pourrais dire, la certaine vulnérabilité, maintenant, que certaines cours municipales vont avoir ne donnera pas ouverture à des contestations. Alors, c'est ça, M. le Président.

Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Anjou. Le rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi 129, Loi modifiant la Loi sur les cours municipales, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Article 33, M. le Président.

Projet de loi 131

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 33, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 131, Loi modifiant le Code de procédure civile et diverses dispositions législatives. Y a-t-il des interventions sur ce rapport, M. le ministre de la Justice?

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: Oui. M. le Président, nous procédons donc ce soir à la prise en considération du rapport de la commission des institutions sur le projet de loi 131 intitulé Loi modifiant le Code de procédure civile et diverses dispositions législatives.

Or, cette loi, M. le Président, dont l'étude en commission des institutions a été complétée le 2 décembre dernier, propose des modifications législatives concernant les procédures abusives ou dilatoires, l'utilisation du télécopieur en matière de procédure civile, de même que des mesures complémentaires en matière de perception des pensions alimentaires.

M. le Président, lors de l'étude détaillée de ce projet de loi en commission des institutions, des amendements ont été apportés, dont certains étaient d'ordre technique. Par contre, d'autres portaient sur des questions de fond qui ont permis de bonifier le contenu du projet de loi. Alors, M. le Président, très brièvement, je voudrais en rappeler quelques-uns, de ces amendements. (0 h 50)

Le premier volet a trait, tout d'abord, à l'utilisation abusive ou dilatoire de recours devant le tribunal. Alors, à ce sujet, M. le Président, il arrive à l'occasion que de tels recours soient présentés devant les tribunaux, malheureusement. Et, comme je l'ai mentionné lors de l'adoption du projet de loi, de son principe, des décisions récentes de la Cour supérieure du district judiciaire de Montréal ont déjà dénoncé cette situation. Or, vous conviendrez avec moi, M. le Président, qu'il est important que le droit d'agir en justice ne donne pas lieu à de tels abus au détriment d'une personne, qui, de ce fait, se voit dans l'obligation d'engager des frais pour les seules fins de protéger ses droits face à ces procédures abusives. Afin de pallier à cette situation, donc, notre projet de loi propose que le tribunal de première instance puisse, lorsqu'il rejette une action ou une procédure frivole ou, manifestement, qui est mal fondée, puisse condamner la partie qui agit en justice de manière abusive ou dilatoire et condamner à payer des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par l'autre partie. M. le Président, le projet de loi a été amendé pour tenir compte de la compétence matérielle des tribunaux et de permettre aux juges de réserver, le cas échéant, à la partie intéressée le droit de s'adresser au tribunal compétent pour réclamer le montant des dommages-intérêts.

Le deuxième volet du projet de loi, M. le Président, concerne l'utilisation du télécopieur en matière de procédure civile. Alors, ces nouvelles règles visent à adapter la loi à une réalité qui est largement répandue et notamment parmi les praticiens du droit dans le domaine des communications. Bien que reconnaissant les qualités du mode traditionnel de fonctionnement des tribunaux et des règles actuelles sur la valeur probante des écrits, la communauté juridique demandait que celles-ci soient adaptées à la technologie moderne par souci d'efficacité. C'est donc ce que nous faisons avec ce projet de loi, M. le Président.

Et, finalement, le troisième et dernier volet de ce projet de loi, qui a retenu en très grande partie les travaux de notre commission parlementaire, regarde un sujet qui me préoccupe grandement, M. le Président, c'est la perception des pensions alimentaires. J'avais annoncé, M. le Président ? et c'est dommage que nous en soyons à cette heure si tardive de la nuit, puisqu'il est 0 heure 54 minutes, au petit matin de ce vendredi ? donc, M. le Président, j'aurais aimé qu'on puisse en parler, peut-être, dans d'autres circonstances. Mais je vais le faire brièvement. Je ne veux pas ennuyer mes collègues qui sont ici encore à cette heure-ci, mais je veux simplement dire que c'est un sujet, c'est un projet de loi pour moi qui est très important comme ministre de la Justice et j'y ai travaillé pendant, je dirais, au moins les cinq années où j'ai été ministre de la Justice.

Nous voulons trouver le meilleur moyen pour assurer que les pensions alimentaires soient payées, et, M. le Président, c'est un problème. C'est un problème au Québec, c'est un problème dans toutes les provinces canadiennes, c'est un problème dans tous les pays du monde, de faire en sorte que, lorsqu'il y a séparation dans un couple et qu'il y a pension à payer par l'un des conjoints, ça puisse se faire le mieux possible.

M. le Président, nous avons déjà légiféré, avec un système de perception automatique lorsqu'il y a défaut de payer, une loi qui a nécessité beaucoup de travail au niveau de l'accommodement que nous devons apporter au système informatique. Elle sera en application, cette loi, dès 1994, M. le Président, j'espère à l'automne 1994. Et cette loi va apporter, donc, un élément de plus au système que nous avons et, en plus, avec le projet de loi que nous étudions aujourd'hui et à la suite de la commission parlementaire, nous apportons de nouvelles mesures, M. le Président, entre autres, en ce qui regarde les possibilités de pouvoir utiliser de nouveaux moyens pour percevoir les pensions alimentaires.

Alors, je veux simplement répéter, M. le

Président: ces mesures que nous avons maintenant vont nous permettre d'être encore plus efficaces, entre autres, M. le Président, en permettant le dépôt au greffe, à la suite d'une ordonnance, des revenus d'un travailleur autonome ou d'une personne qui travaille pour un employeur ne résidant pas au Québec ainsi que la saisie des prestations versées par la Régie des rentes du Québec à titre de rente de retraite ou d'invalidité. Le projet de loi permet aussi un remboursement des sommes dues au débiteur alimentaire en vertu d'une loi fiscale, qu'elles puissent être affectées au paiement d'une dette alimentaire lorsque le percepteur des pensions alimentaires en est chargé.

Alors, M. le Président, toutes sortes de mesures qui vont permettre de nous rendre encore plus efficaces. Et, M. le Président, sans être long, je veux simplement dire que nous avons discuté en commission parlementaire de cette façon de percevoir les pensions alimentaires qui a été développée en Ontario et qu'on appelle un système automatique. J'aurais aimé que tous mes collègues députés aient suivi nos travaux de commission parlementaire parce que je suis convaincu que ça les aurait intéressés. Et j'aurais aimé que ça se situe, M. le Président, dans un forum beaucoup plus large. Parce que j'avais tenu à ce moment-là à avoir avec moi les spécialistes du ministère de la Justice qui étaient là pour répondre aux questions des membres de la commission parlementaire sur ce sujet extrêmement important.

Et, avec ces spécialistes, dont Me Pierre Tan-guay qui est le principal responsable au niveau du ministère de la Justice de toutes ces études pour développer de nouveaux moyens pour la perception des pensions alimentaires, nous avons pu faire la comparaison entre le système ontarien et le système québécois.

Et, M. le Président, quand je disais que je cherchais le meilleur moyen et que, selon moi, selon les informations que j'avais au niveau du ministère de la Justice, ce meilleur moyen, c'était celui que nous avons avec ce projet de loi en relation à ce que nous avons déjà avec le système de perception automatique lorsqu'il y a défaut de payer, avec notre système aussi du percepteur de pensions alimentaires qui est là aussi dans 58 points de service partout sur le territoire du Québec... Et, M. le Président, Me Tanguay, en particulier, est venu expliquer à tous les membres de la commission les chiffres et la situation en Ontario par rapport à la nôtre pour démontrer que le système ontarien ce n'était pas la panacée et ce n'était pas ce qu'on devait suivre. Et je fais une parenthèse rapidement, M. le Président, parce que ce matin on disait que mon collègue de la Sécurité du revenu était, lui, en faveur de la perception automatique en Ontario, alors que c'est faux, ce n'est pas ça qu'il a dit du tout, absolument pas. Il n'est pas d'accord avec le système ontarien parce que, lui aussi, il connaît les chiffres. Il sait les chiffres que nous avons, il sait les résultats qu'ils ont en Ontario. Il a même aussi consulté des gens de l'Ontario et les résultats sont là, M. le Président, ce n'est pas des résultats probants.

Alors, nous avons un système, M. le Président, en résumé, nous avons un système au québec qui fait que, en bout de piste, il y a 8,3 % des pensions alimentaires qui ne sont pas payées, alors qu'en ontario, avec un système automatique, ils ont plus de 51 % des pensions alimentaires qui ne sont jamais payées. alors, 51 % pour l'ontario, 8,3 % pour nous, c'est ça les chiffres qui nous sont donnés par mon ministère de la justice qui, eux, les tiennent du ministère de la justice de l'ontario.

Et, M. le Président, il me semble que ces chiffres parlent par eux-mêmes. Et ce que nous avons dit en commission parlementaire, M. le Président, c'est tout simplement ceci: Avec la loi sur la perception automatique à la suite de défaut de payer, qui va être en application à l'automne prochain, avec la loi sur la médiation familiale, qui va changer aussi l'approche que nous avons face aux pensions alimentaires: une pension alimentaire, ce n'est pas une pénalité, une pension alimentaire, c'est une responsabilité... Et je crois que la médiation que nous avons maintenant au niveau du divorce et au niveau des séparations va aider à développer cette mentalité. Ajoutons ce que nous faisons avec ce projet de loi que nous avons maintenant ce soir avec d'autre moyens pour aller chercher l'argent qui est dû à la femme qui a cette pension alimentaire ? en très grande partie, on sait que c'est pour la femme qui a la charge, la responsabilité de la famille.

Alors, M. le Président, selon les experts que nous avons au ministère de la Justice, que nous avons à la Sécurité du revenu, la conclusion, elle est claire: nous allons avoir un des meilleurs systèmes de perception de pensions alimentaires que l'on puisse avoir et, ça, c'est la conclusion que nous avons. (1 heure)

M. le Président, si jamais ce n'était pas le cas, alors, ce que j'ai suggéré en toute bonne foi, c'est qu'il y ait une commission parlementaire, qu'il y ait une commission parlementaire au printemps prochain et qu'on fasse le point et qu'on fasse venir les gens de l'Ontario, qu'on fasse venir les gens de l'Ontario ou qu'on leur pose directement les questions. Parce que, le Protecteur du citoyen a produit des chiffres qui ne correspondent pas aux chiffres que nous avons ici. Absolument pas. Donc, il y a un problème quelque part. Des groupes aussi d'intervention qui ont produit des chiffres, ce n'est absolument pas les mêmes chiffres que nous avons. Moi, comme ministre, M. le Président, je n'ai pas de raison pour ne pas me référer aux chiffres qu'on m'a donnés au ministère de la Justice. Et j'ai aussi parlé aux gens de l'Ontario. J'ai rencontré la ministre de l'Ontario, à quelques reprises, et je sais que ce que nous faisons actuellement, c'est vraiment ce que nous devons faire. Si on arrivait à la conclusion qu'il faut faire quelque chose d'autre, à ce moment-là, M. le Président, bien, il faudrait le repenser parce que je pense qu'on cherche tous ici le même... On a le même objectif, trouver le meilleur moyen.

Alors, M. le Président, je dois dire que ce fut une très bonne commission parlementaire. Nous avons

travaillé ensemble en fonction d'un même objectif. Les membres ont pu avoir l'expertise de fonctionnaires qui ont été particulièrement, je dirais, éloquents, compétents, et le résultat, c'est un projet de loi dont je suis particulièrement heureux comme ministre de la Justice, toujours en fonction de ces engagements que j'ai pris lors du Sommet de la Justice, de rendre la Justice plus accessible et plus humaine. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de la Justice. Alors sur ce rapport de la commission des institutions, M. le député d'Anjou.

M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Je vous remercie, M. le Président. Alors, ce projet de loi touchait plusieurs dispositions du Code de procédure civile. Je pense qu'il faut quand même un peu s'attarder sur les autres dispositions. Je comprends que, disons, le «focus» au niveau de ce projet de loi là, au niveau de l'attention du public, était principalement basé sur l'aspect de la perception des pensions alimentaires. Mais il y avait aussi deux autres aspects, je pense, qu'il est important de souligner et qui représentaient, en tout cas, un certain intérêt de la part des praticiens, de la part des avocats.

Le premier point, c'est l'amendement apporté par l'article 2 à l'article 75.2 du Code de procédure civile. Comme le ministre l'a fait remarquer, un amendement a dû être nécessaire. L'article, tel qu'initialement présenté, disait: Lorsqu'un juge rejette une action, une procédure frivole ou manifestement mal fondée, le tribunal peut d'office ou sur demande condamner la partie qui agit en justice de manière abusive ou dilatoire à payer des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par une autre partie si leur montant est établi. Dans le cas contraire, le tribunal peut suspendre l'instance pour le temps et aux conditions qu'il détermine afin d'obtenir la preuve nécessaire à l'établissement du montant des dommages-intérêts.

Alors, cet article, évidemment, M. le Président, avait comme but, dans sa forme initiale, d'empêcher les avocats, on pourrait dire, pris de cette maladie qu'est la «procédurite», de présenter des recours frivoles, comme on le voit dans certains cas, surtout en droit matrimonial, on doit le dire, M. le Président, par une minorité d'avocats, pour engorger le système, pour ainsi se donner un certain pouvoir de négociation dans certains dossiers. C'est une conduite qui est reprehensible, qui est condamnée par tous, même par le Barreau et par l'ensemble des avocats. Alors, on a cru bon de mettre un article pour justement condamner l'avocat téméraire qui serait tenté d'utiliser à mal escient la «procédurite».

Cependant, l'article tel qu'il était initialement libellé posait un problème. Qu'arrive-t-il si nous sommes devant la Cour du Québec, donc, avec une juridiction limitée au niveau du montant, et que les dommages causés par la procédure frivole excèdent la compétence du juge qui vous entend? À ce moment-là, on disait: Ce juge-là ne pourra pas condamner la personne aux dommages, l'avocat aux dommages ou la partie aux dommages, puisque le montant des dommages excède finalement sa compétence initiale. Donc, on a dû faire un amendement. Nous avons été aidés en ce sens par le représentant du Barreau du Québec qui nous a donné ses commentaires quant à sa perception de cet article, et nous avons réussi à arriver à un consensus pour vraiment régler ce problème. Évidemment, on avait certaines réticences aussi relativement à cet article-là, parce que pour, disons, régler le problème d'une poignée de plaideurs peut-être téméraires, on met un article maintenant qui va couvrir tout le monde. Et ce dont on avait peur aussi, autant du côté du Barreau que du côté des membres de la commission, c'est qu'avec un tel article, finalement, on allait décourager peut-être certains plaideurs à plaider du droit nouveau, au risque de se faire dire, finalement, que leur action était complètement mal fondée, frivole et de se retrouver finalement à payer une amende.

Donc, finalement, l'article 75, de la manière qu'il a été modifié, fait en sorte que, premièrement, le problème de compétence qu'on pouvait avoir est réglé et, aussi, on a enlevé le mot «d'office», c'est-à-dire que le juge ne peut pas «d'office» le condamner. Je pense que ça met aussi à l'abri, disons, les avocats de certains juges qui pourraient, à un moment donné, pour des conflits de personnalité ou pour certaines raisons, être tentés, d'une façon impulsive, de rejeter une requête sur le banc. Alors, je pense que cet article, tel que modifié, va remplir le rôle qu'on veut lui destiner.

La deuxième modification touche particulièrement la signification de documents ou de procédures, la transmission de certains documents par fac-similé, par photocopieur. On sait que le photocopieur est maintenant rendu un instrument, on pourrait dire, essentiel de tout bureau d'avocate; malheureusement, notre Code de procédure civile ne reconnaissait pas la transmission de documents par télécopieur ni la signification de documents. Nous avons réussi, je pense, par ces dispositions, à simplifier grandement les choses et à adapter le Code de procédure civile à la technologie moderne. Encore là, nous avons dû nous pencher sérieusement sur les complications que cette modification pouvait apporter.

En particulier, la question qu'on se posait, c'est, bon, si on envoie un original par télécopieur, l'original d'un document, et qu'on doute de l'exactitude de la copie qui nous a été transmise, on voulait prévoir un mécanisme qui fasse en sorte que la partie adverse ait un recours pour pouvoir examiner l'original. Donc, nous avons modifié l'article 3 du projet de loi pour faire en sorte que, sur demande, une des parties peut demander à ce moment-là qu'on lui communique l'original pour pouvoir vérifier la copie qu'elle a reçue par télécopieur et l'original. Je pense qu'encore là le Barreau partageait cette appréhension et nous a fait des recommandations. Les membres de la commission, on a regardé ça et on est arrivés à cet amendement de l'article 3 qui devrait, je crois, régler ce problème et faire en sorte que,

maintenant, ce mode de signification, ce mode de transmission soit répandu d'une façon assez, on pourrait dire, universelle, sans problème.

Évidemment, le noeud de ce projet de loi, le corps de ce projet de loi touchait en particulier la perception des pensions alimentaires. Tel que je l'avais mentionné lors du discours d'adoption du principe, M. le Président, pour nous, de l'Opposition officielle, il est évident que ce projet de loi ne vient que bonifier un système qui ne fonctionne pas adéquatement. Comme l'avait dit la représentante de la Fédération des associations des familles monoparentales du Québec, on met un cataplasme sur une jambe de bois, c'est-à-dire que ce qui est contenu dans ce projet de loi n'est pas nocif, au contraire, ça améliore ce qui est présentement en place, mais, même en améliorant ce qu'il y a en place, c'est-à-dire le système du percepteur de pensions alimentaires, ça ne répond pas à la réalité, ça ne répond pas aux demandes et ça ne répond pas aux besoins des familles, en particulier des familles monoparentales, qui sont les plus démunies. Donc, on ne pouvait pas et on ne peut pas encore s'opposer à ce projet de loi, mais nous disons, et nous le dirons encore, que le système de perception des pensions alimentaires, tel que proposé, même tel qu'amélioré, ne répondra pas à la situation.

Le ministre de la Justice a fait mention, tout à l'heure, du rapport du Protecteur du citoyen. Le 4 novembre dernier, le Protecteur du citoyen avait déposé un rapport qui est très critique du système de perception des pensions alimentaires et, en particulier, du percepteur des pensions alimentaires. Pour reprendre uniquement quelques items qui avaient été constatés par le percepteur des pensions alimentaires, notamment la difficulté d'obtenir un rendez-vous, c'est assez aberrant quand même que, pour obtenir un rendez-vous chez le percepteur des pensions alimentaires, il faut se rendre sur place parce qu'on n'est même pas capable d'avoir la ligne. Le rôle du percepteur des pensions alimentaires n'est pas compris aussi, n'est pas bien compris par la société. Les informations et la tenue du dossier ne sont pas encore informatisées. (1 h 10)

Distribution, il y a des retards dans la distribution. Si, pour une raison ou pour une autre, il y a un retard dans le dépôt par le débiteur alimentaire, à ce moment-là, la distribution se voit retardée d'un mois. On avait ainsi plusieurs autres problèmes, comme le fait aussi que le percepteur des pensions alimentaires ne peut pas poursuivre pour outrage au tribunal. Il n'y a pas non plus de service d'enquête au niveau du percepteur des pensions alimentaires. Alors, ce sont toutes des choses qu'a décriées, qu'a constatées le Protecteur du citoyen. Donc, on est très critiques relativement au système actuel.

J'ai entendu, tout à l'heure, le ministre de la Justice parler du SAPPA, c'est-à-dire le système automatique de perception des pensions alimentaires, tel que proposé par le projet de loi qu'on a adopté ici, en cette Chambre, en 1988. M. le Président, c'est en 1988 qu'on l'a adopté, on est en 1993 et ça ne sera pas vraiment en vigueur, ce projet de loi là, avant fin 1994 ou mi 1995, tel que le dit le Protecteur du citoyen. Alors, cinq ans entre la sanction du projet de loi et sa mise en vigueur éventuelle.

Et, malgré tout, ce système de perception automatique des pensions alimentaires, même amélioré... Je comprends que Me Tanguay, comme l'a mentionné le ministre de la Justice, soit venu nous vanter les mérites de son nouveau système, que ça va fonctionner, que ça va être efficace, mais, M. le Président, ça ne sera pas vraiment efficace, ça ne sera pas vraiment efficace parce que ce système, ce qu'il fait, finalement, c'est un suivi informatique, pendant une période de un an, d'une saisie, d'un dossier en particulier. Après une année, comme on pourrait dire, de probation, bien, on revient au système antérieur, c'est-à-dire que tout disparaît et on recommence à zéro. Donc, le SAPPA, ce système automatique de perception des pensions alimentaires, mais sans retenues à la source, malgré ce que peut en penser Me Tanguay, malgré ce que peut en penser le ministère de la Justice, ça ne sera pas réellement adéquat et ça ne sera pas réellement efficace, malheureusement.

J'aimerais pouvoir partager l'optimisme du ministère de la Justice, j'aimerais pouvoir partager l'optimisme de Me Tanguay, mais, malheureusement, je ne le peux pas parce qu'il ne répond pas à une certaine exigence de la perception des pensions alimentaires, et cette exigence, c'est la retenue à la source, c'est la retenue à la source directement de l'employeur.

Pour revenir sur certaines dispositions contenues dans ce projet de loi, il y a certaines choses, comme je l'ai dit, qui sont tout à fait souhaitées, souhaitables et avec lesquelles nous sommes tout à fait en accord. C'est, premièrement, maintenant, «les aliments accordés par jugement portent, de plein droit, intérêt au taux légal à compter de la date d'échéance de leur versement». Ça, je pense que ça va de soi, c'était une amélioration qui était demandée par tous les milieux et nous sommes tout à fait en faveur de cette modification.

Maintenant, aussi, les rentes versées par la Régie des rentes du Québec seront saisissables pour des pensions alimentaires. Encore là, nous sommes tout à fait en faveur de cette disposition. Cependant, il faut constater que ce n'est quand même pas énormément de gens qui sont à la fois prestataires de la Régie des rentes du Québec et qui ont encore des pensions alimentaires à payer. On peut se poser des questions quant à savoir l'impact que va réellement avoir une telle disposition. Ça améliore, mais quel est l'impact vraiment de cette disposition, de cette amélioration-là? D'après moi, c'est quand même assez mineur.

Maintenant, le percepteur va aussi pouvoir aller saisir directement les montants dus au débiteur alimentaire par le ministère du Revenu. S'il y a un retour d'impôt qui est dû au débiteur, à ce moment-là, le percepteur va pouvoir aller le chercher. Encore là, c'est une amélioration, mais le montant des retours d'impôt n'est pas toujours excessivement grand; ce ne sont pas

des montants qu'on pourrait dire très appréciables par rapport à l'ensemble d'une pension alimentaire payable à quelqu'un.

Un article qui, lui, posait beaucoup plus de problèmes, c'est l'entente avec le débiteur. C'est-à-dire, on donne maintenant le pouvoir au percepteur des pensions alimentaires de prendre une entente avec le débiteur quant au paiement de certains arrérages de pensions alimentaires. Nous étions, au début, tout à fait opposés à cet article parce que le percepteur, au début, n'avait qu'à demander le consentement pour pouvoir prendre une entente avec le débiteur, le consentement du créancier, mais après ça le créancier n'avait plus de droit de regard sur l'entente, n'avait plus de droit de regard. Pour nous, c'était important que le consentement du créancier soit demandé quant au contenu de l'entente. Si l'entente ne fait pas l'affaire du créancier, pourquoi donner son accord au percepteur des pensions alimentaires? Il faut comprendre que cette entente, finalement, vient retarder la perception de la pension alimentaire. C'est un délai encore additionnel qu'on donne au débiteur alimentaire. Donc, pour nous, il était important de donner un droit de regard au créancier alimentaire, pour faire en sorte que, s'il n'était pas satisfait de l'entente, bien, à ce moment-là, il dise au percepteur des pensions alimentaires: Non, je ne veux pas d'entente; continuez vos moyens d'exécution, c'est important, et je ne veux pas que nous arrêtions et que nous donnions ainsi un nouveau délai au débiteur alimentaire.

Autre modification dans le projet de loi, M. le Président, c'est que, maintenant, la simple signification d'une contestation de la saisie n'arrêtera pas la distribution de la pension alimentaire. Je pense que ça, c'était souhaité, surtout depuis le jugement de la Cour supérieure dans l'affaire Lacroix; c'était demandé par tous les intervenants.

On a aussi, maintenant, donné le pouvoir au percepteur de pouvoir, maintenant, par ordonnance, interroger un débiteur alimentaire sur ses revenus, soit ses revenus autonomes ou les revenus qu'il a hors Québec, qu'il pourrait avoir hors Québec. Je pense qu'encore là c'est une amélioration. Sauf que, quand on constate que le percepteur des pensions alimentaires n'a pas de système d'enquête, n'a pas de système, non plus, pour évaluer la solvabilité des gens, alors, à ce moment-là, M. le Président, on peut se demander quels vont être réellement les pouvoirs du percepteur s'il procède à cette enquête, puisqu'il n'aura aucun moyen de vérifier l'exactitude des données qui vont être données par la personne qui vient se soumettre à cet interrogatoire.

Donc, M. le Président, dans l'ensemble, les dispositions de ce projet de loi viennent bonifier, d'une certaine façon, le système existant. Mais ça ne répondra pas aux besoins qui sont exigés pour une bonne perception des pensions alimentaires.

J'ai entendu le ministre, tout à l'heure, parler du système ontarien. Jamais l'Opposition officielle n'a réclamé le système ontarien. Nous ne réclamons pas le système ontarien; nous disons que nous voulons un système de perception automatique des pensions alimentaires, avec prélèvements à la source, mais pas nécessairement le système ontarien, M. le Président. Pour nous, c'est important. On ne demande pas, on ne dit pas qu'il y a un système qui est parfait; on ne dit pas qu'un système est parfait. Nous disons tout simplement que c'est le principe de perception...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.

Mme Carrier-Perreault: Oui, M. le Président. Compte tenu de l'importance du sujet, j'aimerais que vous vérifiiez si on a quorum.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, qu'on appelle les députés! (lh 18- 1 h 21)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre place.

Alors, nous poursuivons la prise en considération du rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi 131, Loi modifiant le Code de procédure civile et diverses dispositions législatives. J'indique au député d'Anjou qu'il lui reste 14 minutes à son droit de parole. M. le député.

M. Bélanger: M. le Président, comme je le mentionnais, nous n'avons jamais dit que le système ontarien était le système parfait. Ce serait tout à fait mal comprendre nos représentations que de dire que le système ontarien est parfait. Tout ce que je dis et tout ce que nous disons, c'est qu'il y a un modèle ontarien depuis mars 1992 qui est en application depuis plus de un an, qui a obtenu certains résultats, et je pense qu'on doit regarder le résultat de cette expérience ontarienne pour pouvoir regarder de quelle façon on pourrait adapter le modèle ici, au Québec. On peut le bonifier, on peut l'améliorer, M. le Président, mais...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Un petit peu d'ordre! M. le député, si vous voulez poursuivre.

M. Bélanger: Merci, M. le Président. Donc, on peut l'améliorer et on peut le modifier d'une façon sensible pour pouvoir l'adapter à la réalité québécoise. Mais le système tel quel, avec prélèvement à la source des pensions alimentaires, je pense que c'est le système, c'est le modèle et c'est le principe qu'on doit adopter si on veut vraiment arriver à une amélioration de la situation, et pour plusieurs raisons.

Premièrement, ça enlève un intermédiaire. Il n'y aura plus d'intermédiaire au niveau du paiement des pensions alimentaires. Je veux dire, il va y avoir un intermédiaire, il n'y aura plus de contact direct entre les conjoints. On sait que c'est source de conflit, source de

tension, le fait de cette relation qui est toujours maintenue quant à la perception de la pension alimentaire, entre les conjoints. Souvent, même, les enfants sont pris en otage. Un conjoint se sert de l'enfant pour passer un message à l'autre conjoint pour dire de payer à temps sa pension alimentaire. C'est le genre de friction qui est tout à fait non souhaitable, qui est tout à fait reprehensible et qui est source de plusieurs conflits. Il y a ça.

Il y a aussi le fait que ça ne pénalise pas non plus... Certains pourraient peut-être avancer l'argument que ça pénalise les bons payeurs, mais ça ne pénalise pas les bons payeurs, puisque, de toute façon, la personne qui la paie régulièrement, bien, ça va se faire encore d'une façon automatique, sans frais pour cette personne, et la personne qui reçoit la pension alimentaire va être assurée d'avoir une pension à échéance régulière. Donc, c'est tout à fait, je pense, le principe même de la perception automatique des pensions alimentaires avec retenue à la source, le modèle qu'on doit retenir, qui doit prévaloir.

Maintenant, quand le ministre parle de ses chiffres, je me pose certaines questions. C'est que, dans son rapport, le Protecteur du citoyen mentionne avoir obtenu ses chiffres du ministère de la Justice. Alors, là, je ne le sais pas, peut-être qu'il y a eu un manque de communication entre le Protecteur du citoyen et le ministère de la Justice. Je ne le sais pas, là, exactement ce qui s'est passé. Mais le Protecteur du citoyen mentionne avoir reçu ses chiffres du ministère de la Justice. Donc, je comprends mal comment on arrive avec des résultats ou avec des chiffres tout à fait contradictoires. Parce que, finalement, la conclusion à laquelle on est arrivés à la fin de notre commission parlementaire, c'est de constater qu'on avait des chiffres qui étaient tout à fait irréconciliables quant à l'efficacité du système ontarien, complètement irréconciliables entre le ministère de la Justice, et l'Opposition, et les groupements aussi qui travaillent auprès des familles monoparentales. Alors, la conclusion, c'est que soit le ministre de la Justice, soit l'Opposition fait de la désinformation et que le débat, disons, est mal parti, est mal enclenché, puisqu'on a des chiffres tout à fait contradictoires.

Nous aurions voulu un engagement peut-être plus ferme du ministre de la Justice quant à donner à la commission des institutions un mandat pour écouter, pour entendre des gens du ministère ontarien et entendre aussi le percepteur des pensions alimentaires du Québec pour savoir et pour vraiment apprécier l'efficacité du système québécois et l'efficacité aussi du système ontarien. Quant à nous, les chiffres que nous avons, c'est que, quand même, il y a une amélioration très, très importante de la perception des pensions alimentaires en Ontario depuis l'implantation du système ontarien. Et, dans son rapport, le Protecteur du citoyen mentionne, à la page 49, que la mise en oeuvre du régime, malgré les difficultés normales de démarrage, a permis de percevoir, la première année, 8 000 000 $ de plus que l'année précédente. De plus, en mai 1993, le régime avait généré 22 000 000 $.

Donc, il y a des résultats qui sont très positifs, mais, encore là, on ne dit pas que le système ontarien est le système parfait. On ne dit pas qu'on voudrait prendre le système ontarien et l'implanter directement au Québec. Ce n'est pas ça qu'on dit. On dit qu'il y a une expérience qui a été faite en Ontario, et, maintenant, c'est devenu un système permanent. Nous croyons que les résultats sont intéressants, très intéressants et que le principe de la perception automatique des pensions alimentaires avec prélèvement à la source est le principe qui doit être retenu.

Quant à, comme je le disais, le SAPPA, c'est-à-dire le système automatique de perception des pensions alimentaires, mais sans retenue à la source, tel que préconisé par le ministère de la Justice, je ne crois pas qu'il va être vraiment des plus efficaces. Je me souviens encore des démonstrations faites par Me Tanguay, qui nous expliquait maintenant que, grâce à la magie de l'informatique, des formules vont se taper toutes seules, que l'information va apparaître immédiatement à l'écran. C'est vrai que, avec la technologie, on peut améliorer, on peut obtenir ce genre de raffinement, mais ça ne change pas le fait, M. le Président, que, une fois que la formulaire de saisie a été tapé, il faut le faire signifier. Il y a toute la procédure de saisie qui vient s'enclencher, qui vient se réaliser. Et c'est ça qui est lourd. C'est ce temps de réaction là qui est lourd.

Et, aussi, il y a toute la localisation des débiteurs alimentaires. J'ai déjà eu des dossiers, M. le Président, où des gens, des clients à moi qui étaient allés voir le percepteur des pensions alimentaires avaient retenu mes services pour localiser un débiteur alimentaire. J'avais trouvé l'adresse du débiteur alimentaire, sa source de revenus. Ça a pris six semaines à deux mois avant que le percepteur des pensions alimentaires fasse la saisie, avec toutes les informations en main, parce qu'il est tout simplement débordé, le percepteur des pensions alimentaires. Il est débordé. Il n'a pas les ressources adéquates pour le faire. Et, justement, un système de perception automatique des pensions alimentaires avec retenue à la source aurait comme avantage de faire en sorte de libérer le percepteur des pensions alimentaires d'une bonne partie de la perception des pensions alimentaires pour qu'il puisse se concentrer, à ce moment-là, sur les cas, vraiment, qu'on pourrait dire, les cas problèmes, les cas où on a de la difficulté à percevoir. Et je pense que ça doit être, à ce moment-là, le but réservé, le dessein réservé au percepteur des pensions alimentaires.

Donc, en conclusion, M. le Président, ce projet de loi, comme tel, nous avons concouru quant à son adoption, mais nous souhaitons ardemment que le successeur du ministre de la Justice... Parce qu'il faut bien s'en rendre compte, que ce ne sera pas le ministre de la Justice, ce n'est pas celui qui est là présentement qui va être en commission pour écouter les débats sur le système de perception automatique des pensions alimentaires avec retenue à la source. J'espère que son engagement, qui, malheureusement, ne lie pas son successeur,

malheureusement, on doit le constater, sera quand même suivi parce qu'il y a de plus en plus de pressions de la part des différents milieux pour que ce système voit le jour. Et, si on veut faire un débat constructif, on doit le faire à partir de chiffres incontestables. Si le ministre de la Justice arrive avec ses chiffres, nous, de l'Opposition, et nous, des milieux des familles, nous arrivons avec d'autres chiffres, comment pouvons-nous faire un débat vraiment constructif? Je pense que c'est tout à fait impensable. Et le dossier est trop important pour que ce débat parte de cette façon tout à fait désordonnée.

Alors, j'espère que nous serons très rapidement amenés à débattre de l'implantation de ce système de perception des pensions alimentaires avec retenue à la source dans un avenir très rapproché, et, en attendant, M. le Président, nous allons voter en faveur de ce projet de loi. Je vous remercie, M. le Président. (1 h 30)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Anjou. Sur ce même sujet, je cède la parole maintenant à Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Denise Carrier-Perreault

Mme Carrier-Perreault: Oui. Je vous remercie, M. le Président. Effectivement, dès le départ, on l'avait dit ici, en cette Chambre, lors de l'adoption du principe du projet de loi 131, l'Opposition était en faveur, avait déjà affirmé, confirmé au ministre que nous n'avions pas l'intention de nous opposer au projet de loi. Par ailleurs, nous avions certaines réticences, parce qu'on trouvait qu'en matière de perception des pensions alimentaires, perception automatique des pensions alimentaires, le projet de loi n'allait pas suffisamment loin, ne comblait pas les besoins qui avaient été d'ailleurs mentionnés de façon très claire par le Protecteur du citoyen, entre autres.

Alors, M. le Président, c'est évident qu'en commission parlementaire on a eu des échanges. On avait des questions et on a échangé longuement avec le ministre et avec les fonctionnaires du ministère pour obtenir les réponses, des réponses plus claires en fait par rapport aux données sur lesquelles on se basait, si on veut, pour demander, exiger ce système de perception automatique. Alors, oui, nous avons eu des questions. Nous avons pu apprendre le fonctionnement, en long et en large, le fonctionnement futur du prochain système informatique, mais il reste que par rapport à l'ensemble des données, je peux vous dire, M. le Président, que les réponses qu'on a eues par rapport aux chiffres, entre autres, ne nous satisfont pas plus aujourd'hui après la commission qu'ils n'étaient satisfaisants avant la commission.

Le ministre nous donne des chiffres, nous en avons d'autres évidemment. Par rapport à l'Ontario surtout, il y a des vérifications à faire. On est conscients qu'il faudra en faire nous aussi de supplémentaires. Mais par rapport à celles du ministère, j'ai beaucoup de diffi- cultés à comprendre les écarts. En quelque sorte, il y a des chiffres qui nous sont fournis et qui vont dans la même ligne que ceux qui nous ont été fournis par le Protecteur du citoyen. Par ailleurs, dans le rapport du Protecteur du citoyen le ministre a fourni aussi l'explication de ces chiffres, ces mêmes chiffres qu'il nous donne, les fameux 8,4 % uniquement, alors qu'on sait qu'il y a 55 % des pensions alimentaires qui sont impayées ou partiellement payées.

Alors, M. le Président, je pense que c'est important de rappeler l'analyse de ces données qui sont fournies par le ministre, les mêmes qu'il vient de nous expliquer encore ce soir, les mêmes qu'on a eues en commission parlementaire. Alors, pour le Protecteur du citoyen les analyses du ministère de la Justice doivent être analysées avec beaucoup de prudence puisqu'elles proviennent d'une étude réalisée au début des années quatre-vingt, dans un contexte sociologique qui a pu évoluer, et ça, je pense que tout le monde en convient. de plus, le protecteur continue, il nous explique: ces chiffres sont équivoques. les statistiques ne font ressortir que les cas où les mesures d'exécution ont été entreprises, 55 %. c'est sûr qu'ici au québec la seule façon de comptabiliser, d'aller chercher des renseignements sur les pensions alimentaires qui sont impayées, c'est par le biais justement des gens qui portent plainte, qui vont soit vers le percepteur soit vers des avocats en pratique privée pour récupérer cette pension à laquelle ils ont droit. alors, ces 55 % là, on ne parle que des plaintes.

Parmi les 45 % qui seraient non litigieux, plusieurs parents gardiens, par ignorance ou par crainte de représailles, ne font pas appel au service de perception des pensions alimentaires et ce, même si la pension n'est ni versée, ni payée en totalité, ni payée à temps. D'autres se refusent à utiliser le service par crainte de répercussions négatives sur les enfants qui sont la proie idéale des conflits. Parmi les 55 % de cas litigieux, rien n'établit que les parents gardiens qui ont pris des procédures une fois n'y renoncent pas par la suite pour les raisons évoquées plus haut. Or, M. le Président, c'est le constat du Protecteur du citoyen, suite aux chiffres que le ministre nous donne, qu'il nous a donnés en commission parlementaire et que, évidemment, il a essayé d'expliquer au Protecteur du citoyen.

Je partage en grande partie cette analyse du Protecteur du citoyen, M. le Président, parce que moi aussi, personnellement, je suis convaincue qu'il y a beaucoup de monde, beaucoup de gens qui ne font pas appel au percepteur des pensions alimentaires, pour toutes sortes de raisons, et on en a discuté d'ailleurs avec le ministre qui semblait aussi le reconnaître, même s'il continue de penser que son système, le système informatique de pension, de perception chez les mauvais débiteurs... Parce que le ministre continue de nous expliquer qu'il y aura la perception automatique au Québec, mais ce n'est pas de la vraie retenue automatique à la source des pensions alimentaires. Le système qui sera en place soit fin 1994 ou milieu 1995, dépendant... Ça aussi, on en a

discuté en commission parlementaire, parce que vous savez, M. le Président, le Vérificateur général, dans son dernier document, son dernier rapport, nous faisait état de l'implantation complète de ce système par rapport au système des perceptions alimentaires, qui ne peut être envisagé avant le milieu de l'année 1995. Alors, quand on a souligné cette mention-là du Vérificateur général au ministre et à ses fonctionnaires, on nous a dit qu'on ne savait où le Vérificateur avait pris cette information, que, vraiment, il n'y avait rien de confirmé là-dedans, autrement dit, que le Vérificateur général avait sûrement erré dans ses propos, dans son rapport. Suite à une vérification qu'on a effectuée, parce qu'on a dit: Est-ce que c'est possible? est-ce que le Vérificateur général, quand il écrit des choses comme ça dans son rapport, peut aller aussi loin sans preuve, sans avoir vérifié vraiment? Alors, c'est très clair, M. le Président. On a eu une réponse des gens du bureau du Vérificateur général. Effectivement, les gens se sont informés et, par rapport aux données qu'ils ont pu obtenir du ministère même de la Justice, c'est très clair, M. le Président, qu'au moment où la vérification s'est faite il n'était pas possible de mettre en place le système avant le milieu de 1995, confirmé par les gens de ce même ministère. par la suite, on a appris... au bureau du vérificateur général, on nous a mentionné que, si cette mesure-là était rendue possible avant le milieu de 1995, c'est que forcément on devra y mettre beaucoup de temps, donc beaucoup de temps supplémentaire aussi, pour ce système qui... en 1989-1990, on prévoyait que ce système-là nous coûterait 9 000 000 $. alors, combien nous coûtera-t-il pour traiter à peu près 20 % de cas litigieux en termes de pension alimentaire? parce qu'il ne s'agit uniquement que de mauvais débiteurs, de mauvais payeurs.

M. le Président, je vous dis qu'au niveau des chiffres on a des écarts. On a eu des explications du ministère, des gens du ministère, du ministre, qui rejoignent ce que le Protecteur du citoyen nous explique et dont on partage tout à fait l'analyse. Mais, qui plus est, M. le Président, il y a des trous dans les chiffres qu'on a pu obtenir du ministère. Vous savez, la loi ontarienne qui a été mise en place en 1992, on parle d'une règle, d'une mesure qui permet d'aller retenir à la source, au niveau des salaires '? c'est au niveau des salariés ? ces pensions alimentaires, de façon automatique. Le jugement est déposé et, automatiquement, l'employeur retire, conserve, si on veut, les montants qui sont alloués pour les pensions alimentaires. Donc, au niveau des salariés, c'est une mesure qui, normalement, devrait être tout à fait efficace. Ça se fait de façon aussi efficace qu'on peut vous relever votre impôt sur votre chèque de paie, vous savez, M. le Président. C'est très facile. Et, d'ailleurs, du côté du ministère, on nous dit que les salariés, bien sûr, ce sont les clients les plus faciles. C'est de ceux-là dont on a le plus de facilité à obtenir, à récupérer les pensions qui sont non payées.

Alors, l'interrogation qui nous vient à l'esprit, c'est tout de suite: on demande le pourcentage des sala- riés par rapport aux mauvais payeurs qu'on a chez nous, par rapport aux plaintes que l'on a. Eh bien! là, ça a été une surprise totale, je dois vous dire, M. le Président, parce que, même si on ne cesse de dire, et on a la prétention de dire qu'on aura le meilleur système, bien, croyez-le ou non, on m'a avoué carrément en commission, à cette question-là, le pourcentage de salariés qu'on récupère, que cette donnée-là n'avait pas été comptabilisée. Ce sont des chiffres qui n'existent pas comme tels. La réponse que j'ai obtenue: Je ne sais pas s'ils existent, madame; on va vérifier, mais je ne peux pas vous garantir. Alors, comment peut-on affirmer que notre système est très efficace, beaucoup plus efficace que le système ontarien, alors qu'on ne sait même pas, chez nous, au moment où on se parle, le pourcentage de salariés par rapport aux plaintes qu'on a en matière de perception?

Le ministre de la Sécurité du revenu n'a pas dit que l'Ontario était la panacée. D'ailleurs, ce n'est pas ce qui a été écrit. La loi ontarienne n'était pas la panacée. Il n'a pas dit ça, jamais, M. le Président. Nous non plus. Nous non plus, nous n'avons jamais prétendu que la loi ontarienne était la panacée. Ce n'est pas ce qui apparaissait dans les journaux de ce matin. Mais le ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu est sûrement très conscient des économies qui ont été faites en Ontario par rapport à son ministère à lui. Alors, c'est pour ça, j'imagine, qu'il est en faveur de la perception automatique des pensions alimentaires et, là-dessus, M. le Président, il a été très clair.

Alors, la seule chose qu'on peut regretter, c'est que... Bien sûr, le projet de loi apporte certaines bonifications, mais on est convaincus qu'il ne réglera pas le problème. Et la commission parlementaire, si on attend que les mesures que le ministre nous annonce soient mises en place pour aller vérifier, bien, on peut dire que le ministre nous a annoncé une commission parlementaire, M. le Président, pour 1995-1996, dans la meilleure des dates. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière

Oui, M. le député de Lévis et président de la commission de l'aménagement et des équipements. (1 h 40)

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président... l'opportunité de parler sur le projet de loi 131, de saisir le ministre de la Justice d'un problème qui a été soulevé lors de l'étude d'un autre projet de loi, le projet de loi 113 concernant les victimes d'accidents d'automobile. Pourquoi, M. le Président? Parce qu'on s'est rendu compte, dans l'actuel projet de loi 113 que, lors du décès d'un enfant mineur, si la victime est mineure et n'a pas de personne à charge à la date de son décès, sa mère et son père ont droit à parts égales à une indemnité forfaitaire de 15 000 $.

J'ai saisi le ministre de cette question, ministre

des Transports, lui disant: Est-ce qu'on tient compte du fait qu'il y a un parent qui s'occupe ou qui ne s'occupe pas de l'enfant? Parce que, aujourd'hui, on sait que 30 % des familles sont des familles monoparentales. Il y a des parents qui, même s'ils ne sont pas les gardiens de leur enfant, contribuent ou supportent l'entretien de l'enfant en payant une pension alimentaire, mais on sait à quel point ? la députée des Chutes-de-la-Chaudière vient de le mentionner ? il y a souvent des femmes qui sont gardiennes des enfants, qui élèvent les enfants à leurs frais, et s'il arrive un accident d'automobile, bien, les 15 000 $ vont être répartis moitié-moitié entre le père et la mère alors que, dans les cas où un des deux parents n'est même pas le gardien de l'enfant, ne s'en occupe pas, il ne paie pas de contribution alimentaire, au décès d'un enfant, ce parent-là qui ne s'occupe aucunement de son enfant aura droit à la moitié des 15 000 $.

Ça nous apparaissait injuste, et je l'ai mentionné à ce moment-là au ministre des Transports qui, lui, a dit: Je suis du même avis que vous. Mais il nous a laissé entendre à ce moment-là que le ministère de la Justice n'était pas très vite à revoir les lois dans un plus grand sens de l'équité. Parce que, il me semble, alors qu'on parle de cette question-là, il me semble que, souvent, des parents qui ont déjà deux ou trois enfants, s'il y en a un qui décède et un montant est payé par la Société de l'assurance automobile, on devrait au moins s'occuper que le montant d'argent soit payé davantage à la personne qui s'occupe de son enfant. je comprends que les deux ne le gardent pas nécessairement également. dans certains cas, il y a un des deux parents qui ne s'en occupe pas du tout, m. le président. il me semble que, à ce moment-là, on devrait avoir une plus grande équité, faire en sorte que l'enfant décédé et pour lequel il y a une prestation, un montant d'indemnité qui est payé, que le montant soit versé au parent qui en avait la garde, qui en avait la garde, je veux dire, qui le supportait entièrement. s'il y a une contribution des deux ou si les deux s'en occupent, même s'il y en n'a rien qu'un qui en a la garde, c'est évident que le partage peut être fait peut-être à moitié-moitié, bien, il me semble que de le faire de façon arbitraire, dans la loi de la société de l'assurance automobile du québec, un partage de cette façon en disant, aussi bêtement que ça, sans aller plus loin, dire: si la victime est mineure et n'a pas de personne à charge à la date de son décès, sa mère et son père ont droit à parts égales à une indemnité forfaitaire de 15 000 $, je pense qu'une disposition comme celle-là ne reflète plus les besoins de la famille d'aujourd'hui. au moins, s'il y a seulement une personne dans les familles monoparentales ? puis c'est presque 30 % de nos familles au québec ? qui s'occupe de ses enfants, bien, il me semble que lorsqu'il y en a un, un enfant qui est victime d'un accident, celui qui devrait avoir le montant, c'est celui qui s'en occupe, et non pas diviser à 50-50 comme ça, aveuglément.

Le ministre des Transports avait l'air à être d'accord avec mon argumentation, mais il semble... Il m'a dit... Il n'a pas voulu accepter l'amendement immédiatement, mais il m'a dit: J'ai saisi la Justice de cette question-là. D'ailleurs, je me posais les mêmes questions. Alors, M. le Président, il me semble que, dans la révision de ces lois-là, il faut tenir compte de l'état des familles actuellement. Pas les familles d'il y a 20 ans, il y a 30 ans, pas les familles du 19e siècle, mais les familles de 1993, en allant vers l'avenir, M. le Président. Aujourd'hui, on vit beaucoup plus dans une situation de familles divisées, dans une grande proportion ? 30 % des enfants sont élevés par des familles monoparentales ? et on devrait s'occuper davantage de faire en sorte que, dans la répartition des sommes d'argent, il y ait un plus grand équilibre. Je vois que le député de Mille-Îles hoche la tête. Il devrait lui-même...

M. Bélisle: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Question de règlement, M. le...

M. Bélisle: Pertinence, M. le Président, au projet de loi 131, la perception des pensions alimentaires. Le député de Lévis est en train de nous faire encore un cirque en essayant d'amener ce qui n'est pas pertinent au projet de loi dans le projet de loi.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je rappelle au député de Lévis que vous êtes sur le projet de loi numéro 131, à la prise en considération du rapport de la commission des institutions. Alors, j'aimerais bien vous entendre sur ce rapport, M. le député.

M. Garon: Bien, le rapport, essentiellement, M. le Président, c'est un projet de loi qui porte... Il le dit dans les notes explicatives: «Ce projet de loi modifie certaines dispositions relatives à la perception des pensions alimentaires, notamment en permettant le dépôt au greffe, à la suite d'une ordonnance, des revenus d'un travailleur autonome ou d'une personne qui travaille pour un employeur ne résidant pas au Québec, ainsi que la saisie des prestations versées par la Régie des rentes du Québec à titre de rentes de retraite ou d'invalidité. Il permet également qu'un remboursement des sommes dues au débiteur alimentaire en vertu d'une loi fiscale puisse être affecté au paiement d'une dette alimentaire lorsque le percepteur des pensions alimentaires en est chargé.»

Essentiellement, ce que je dis, M. le Président: Lorsqu'il s'agit... Je dis que le projet de loi est incom- ¦ plet... On parle sur le rapport de la commission... Je veux dire que le projet de loi est incomplet. Je déplore qu'en même temps que le ministre des Transports et moi nous avons... en même temps que la commission étudiait ce projet de loi, le ministre des Transports et moi déplorions le fait que, lorsqu'un enfant est victime d'un accident... On a des lois, vous savez, M. le Président ? je vois le député de Mille-Îles... Mais regardez cette semaine, là: il est arrivé qu'un chauffard qui n'était pas en état de conduire a frappé quatre personnes, qui sont

décédées. Les personnes qui sont décédées ont eu des montants minimes, alors que le chauffard, à lui tout seul, a eu deux fois plus que les quatre victimes ensemble, qui sont mortes à cause de lui. Pour tous les gens qui ont une tête sur les épaules, là, il y a quelque chose qui ne va pas, et toute l'opinion publique a été révoltée de voir que ça fonctionnait comme ça.

Et, de la même façon, quand, aujourd'hui, je dis: On parle de ces questions-là, des questions d'argent qui est dévolu à la personne qui élève les enfants, quand on parle de pension alimentaire, c'est la personne qui élève les enfants. Une pension alimentaire peut prendre différentes formes. Si un des enfants qu'elle élève est victime d'un accident, ça n'est pas la personne qui élève les enfants, qui les supporte qui va avoir l'argent; ça va être partagé 50-50 entre le père et la mère, indépendamment de s'informer si la personne qui supporte le reste de la famille le fait à ses frais. Le ministre des Transports dit la même chose que moi. J'aimerais ça que le ministre des Transports, M. le Président ? je sais qu'il est ici, parce que je lui ai parlé, justement, de prendre la parole ? j'aimerais ça qu'il en dise un mot, lui également, puisque le ministre des Transports me disait: Je partage votre opinion et aujourd'hui même j'en saisis le ministre de la Justice pour qu'on regarde cette question-là, pour qu'il y ait une plus grande équité dans les sommes qui sont réparties sous forme de pension alimentaire ou sous forme de succession, qui vont pouvoir aider aussi au reste de la famille qui est encore vivante.

M. le Président, c'est une question importante et, comme le ministre des Transports m'a dit qu'il était sensibilisé, qu'il saisissait le ministère de la Justice, j'aurais aimé que le ministère de la Justice puisse ? et il est peut-être encore temps... qu'il y ait une disposition en troisième lecture, parce qu'il est encore possible d'apporter des amendements, M. le Président, en troisième lecture, sur un projet de loi, après la prise en considération du rapport. C'est pour ça que je fais mes remarques, parce qu'à ce moment-là le ministre de la Justice aurait encore le temps d'apporter un amendement en conversant avec le ministre des Transports, parce que nous avons discuté de cette question-là en commission parlementaire la semaine dernière. Et il me semble qu'à ce moment-là, en troisième lecture, puisque le ministre de la Justice pourrait apporter encore des amendements à son projet de loi... et c'est pourquoi je prends la parole lors de la prise en considération du rapport pour dire qu'on pourrait ajouter un élément pour qu'il y ait une plus grande justice pour les survivants des victimes d'accidents d'automobile, pour que la succession soit mieux répartie, en fonction des gens, justement, qui s'occupent de l'entretien de leurs enfants, par rapport à ceux qui ne s'en occupent pas. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Alors, vous avez un droit de réplique de cinq minutes, M. le...

M. Rémillard: M. le Président, non. Je voudrais simplement vous demander si c'est possible, avec la permission de cette Assemblée, d'appeler ces deux projets de loi dont nous prenons en considération le rapport de la commission des institutions, si on peut les appeler en troisième lecture.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...le consentement, là, je vais commencer par faire adopter le rapport, là.

Mise aux voix du rapport

Alors, le rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi 131, Loi modifiant le Code de procédure civile et diverses dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Non. (1 h 50)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. Adopté sur division?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Adopté ou pas adopté?

Une voix: On l'a dit.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors, c'est adopté.

Il y avait une demande du ministre. Est-ce qu'il y a un consentement?

Une voix: Non...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Pas de consentement. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: L'article 35, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 35, M. le ministre de la Justice propose l'adoption du projet de loi 106, Loi sur l'aide et l'indemnisation des victimes d'actes criminels. M. le ministre de la Justice.

Projet de loi 106

Adoption M. Gil Rémillard M. Rémillard: M. le Président, le projet de

loi 106, intitulé Loi sur l'aide et l'indemnisation des victimes d'actes criminels, propose le regroupement de la Loi sur l'aide aux victimes d'actes criminels et de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels. Il apporte, de plus, des améliorations substantielles en matière d'aide et d'indemnisation des victimes d'actes criminels afin de répondre davantage à la réalité des victimes.

Alors, M. le Président, tout d'abord, ce projet de loi, nous nous rappelons, fait en sorte que nous puissions avoir maintenant, pour les victimes, un guichet unique. Au lieu d'avoir deux organismes, c'est-à-dire la LIVAC et le BAVAC, des organismes dont l'un était là pour aider les victimes d'actes criminels et l'autre pour les indemniser, nous avons maintenant une responsabilité globale qui se retrouve au sein du ministère de la Justice, M. le Président. Alors, ça rend encore la justice plus accessible. Ça rend la justice aussi d'une façon plus humaine de par les modifications que nous apportons au système qui, actuellement, s'applique en matière d'indemnisation et d'aide aux victimes d'actes criminels.

Alors, M. le Président, le projet de loi modifie en profondeur le régime actuel d'indemnisation des victimes d'actes criminels pour le rendre plus humain, plus équitable et plus accessible. Il y a de nouvelles mesures qui visent l'élargissement de l'admissibilité au régime à un plus grand nombre de personnes. C'est ainsi, M. le Président, qu'il prévoit pour les proches d'une victime la possibilité de recevoir des traitements de réadaptation en physiothérapie lorsque... en psychothérapie, dis-je, lorsqu'ils sont nécessaires à la réadaptation de la victime. Il prévoit, par ailleurs, l'admissibilité de tels services aux proches d'une victime d'homicide ou d'enlèvement.

Alors, M. le Président, l'annexe des crimes visés par le régime d'indemnisation a également été revue afin d'inclure certains crimes contre la personne, tels l'enlèvement d'enfants, la prise d'otage, la torture, le harcèlement criminel et les menaces de mort ou de blessures graves. Les personnes blessées lors d'une intervention pour contrer un crime seront désormais admissibles à une indemnisation et, de plus, l'actuel délai de prescription d'un an sera porté à trois ans.

Alors, M. le Président, le projet de loi maintient, quant à l'admissibilité, certaines exclusions, tel le cas où une victime aurait, par sa faute lourde ou en étant partie à une infraction, contribué au préjudice qu'elle subit. Le projet de loi propose également l'ajout d'une mesure permettant d'exclure la personne qui, par sa participation à des activités illégales, aurait contribué à la réalisation de son préjudice.

De nouvelles dispositions en matière d'admissibilité ont par ailleurs été introduites et elles concernent l'obligation de la victime de signaler le crime et de coopérer avec l'autorité de la justice compétente. Elles résultent du devoir qui incombe aux citoyens et citoyennes d'aider à contrer le crime.

M. le Président, je l'ai déjà mentionné devant cette Assemblée, les valeurs d'une société se reflètent dans les lois dont elle se dote et, lorsque les manquements à ces lois portent atteinte à l'intégrité des personnes, il devient d'autant plus important qu'ils puissent être sanctionnés, et, à ce titre, les victimes jouent un rôle de premier plan pour contrer la criminalité.

M. le Président, c'est l'un des aspects de cette loi que nous avons discutés très...

M. Garon: ...M. le Président, le ministre fait un discours important. On devrait avoir quorum, je pense, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, qu'on appelle les députés, s'il vous plaît!

Mmes et MM. les députés, nous reprenons nos débats. M. le ministre de la Justice, je vous cède la parole.

M. Rémillard: Oui, M. le Président. Tout simplement, pour revenir sur cet aspect très important, je vais être très bref. M. le Président, c'est que nous avons eu à discuter, en commission parlementaire, longuement sur ce principe à l'effet que les victimes doivent pouvoir collaborer pour que nous puissions dénoncer leurs agresseurs, pour que nous puissions les protéger et protéger la société. Et nous avons eu de grandes discussions et, finalement, je crois que nous avons un très bon consensus dans ce projet de loi puisque le ministre... Lorsque, manifestement, la victime est dans un état psychique ou physique qui ne lui permet pas de venir témoigner ou de participer au processus à rencontre, donc, de son agresseur, cette personne est dispensée de cette obligation de collaborer. Mais, M. le Président, le principe demeure que la victime doit collaborer pour recevoir aide et indemnisation.

M. le Président, je tenais...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant! Un instant, M. le ministre! Alors, M. le ministre, vous êtes à quelques pieds de moi et j'ai de la difficulté à vous entendre. Allez-y, M. le ministre.

M. Rémillard: Oui. Alors, donc, M. le Président, nous avons donc réussi à obtenir un bon consensus à ce niveau. (2 heures)

Alors, il est maintenant près de 2 heures du matin, M. le Président, matin de ce 10 décembre, alors ce n'est pas l'heure de faire de grands discours. Alors, on va terminer. Voilà, je crois qu'on est d'accord avec moi, alors je vais donc terminer. Je vais être bref et je vais simplement remercier la commission parlementaire et l'ensemble des députés qui ont permis de travailler à cette pièce législative majeure. C'est une conséquence du Sommet de la Justice. Je tenais beaucoup, M. le Président, avant de quitter mes fonctions comme ministre de la Justice, à ce que cette loi puisse être adoptée. Ça nous a pris plusieurs jours en commission parlementaire. Nous avons fait du très bon travail, on a même

entendu des groupes qui sont venus, le Barreau et le groupe Plaidoyer-Victimes, en particulier, qui sont venus nous exprimer leur point de vue. Je veux les remercier, remercier le Barreau, remercier Plaidoyer-Victimes, de leur contribution. Ce tut très efficace, je crois, parce que nous avons un projet de loi qui sera voté à l'unanimité par cette Chambre et qui apporte une contribution significative à une justice plus humaine, plus accessible.

Je veux remercier, M. le Président, les députés qui ont participé à la commission parlementaire: le député de Chapleau, l'adjoint-parlementaire au ministre de la Justice, qui, comme à l'habitude, a été d'un grand apport; Mme Christine Viens, qui a été notre spécialiste, de par son expérience au niveau de l'IVAC, qui a pu nous aider aussi sur le plan technique à faire ce projet de loi, et, de mon cabinet, Mmes Sophie Gagnon et Julienne Pelletier, qui ont beaucoup travaillé sur ce projet de loi.

Alors, ça nous a pris, M. le Président, peut-être trois ans à travailler sur ce projet de loi, trois ans de consultations, mais les résultats sont extrêmement, pour ma part, satisfaisants, et je crois que ce projet de loi est une pièce maîtresse lorsque nous voulons parler d'une justice plus humaine, plus accessible et surtout lorsque nous parlons des victimes d'actes criminels. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre de la Justice. Sur la même motion, M. le député d'Anjou, je vous cède la parole.

M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Merci, M. le Président. Comme l'a mentionné le ministre de la Justice, la commission a travaillé, je pense, d'une façon tout à fait constructive pour vraiment étudier ce projet de loi qui, je pense, touche un système tout à fait important pour notre système de justice, qui est celui de l'indemnisation des victimes d'actes criminels.

Le principal point qui, disons, faisait les manchettes, défrayait les manchettes, était le fait que, dans ce projet de loi, maintenant, on imposait l'obligation de dénonciation et de collaboration aux victimes d'actes criminels pour pouvoir être indemnisées. Malgré le fait que, dans toutes les provinces canadiennes ? sauf au Québec ? ce principe était établi, pour le Québec, c'était une nouveauté qui effrayait énormément les groupements qui travaillent auprès des victimes d'actes criminels. Donc, on peut dire que c'était l'article 11 du projet de loi qui véhiculait cette notion de dénonciation et de collaboration, et c'est cet article 11 qui a retenu énormément les propos, les discussions de la commission.

Finalement, nous sommes arrivés à un compromis, à une entente, et nous avons amendé cet article 11 en rajoutant un article 11.1, qui vient, finalement, donner une certaine discrétion au ministre pour pouvoir dispenser la victime de son obligation de dénonciation et de collaboration. Alors, cet article 11.1 se lit ainsi: «Le ministre peut exempter le réclamant de l'obligation de signaler ou de coopérer, prévue respectivement aux paragraphes 4° et 5° de l'article 11, lorsque les circonstances le justifient», notamment: premièrement, du fait que l'état physique ou psychique du réclamant l'en empêche; deuxièmement, du fait que sa participation au processus judiciaire pourrait compromettre son état physique ou psychique.

Alors, c'est le compromis que, finalement, on a réussi, on pourrait dire, à dégager de la part des différents intervenants, du Barreau du Québec, et tout ça, pour pouvoir essayer de trouver un juste milieu. Parce que, quand même, quand on travaille auprès de victimes d'actes criminels, il faut comprendre qu'il y a certaines circonstances qui... Ce n'est pas évident, pour certaines victimes d'actes criminels, de dénoncer la personne qui a, justement, commis l'acte criminel. On n'a qu'à penser à tous les cas de victimes de violence conjugale. Ce n'est pas évident de dénoncer son conjoint, surtout quand on a repris la vie commune avec son conjoint. Ce n'est pas évident de dénoncer son conjoint quand on a peur de son conjoint. Donc, ce sont toutes des circonstances, des cas d'espèce qui font en sorte qu'il faut prévoir une certaine discrétion si on veut faire en sorte de ne pas, finalement, faire une double victimisation des victimes d'actes criminels et de ne pas priver ces victimes d'actes criminels du secours et de l'aide qui sont fournis par la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels. Donc, cet article 11.1, nous l'espérons, sera la solution à cette préoccupation à la fois qui est d'indemniser les vraies victimes et aussi de permettre à ceux qui veulent être exemptés de l'obligation de dénoncer de pouvoir l'être. Alors, cet article 11.1 a été adopté tel quel.

Nous avons reçu une lettre ? et le ministre de la Justice en a reçu aussi copie ? de Mme Arlène Gau-dreault, au nom de plusieurs organismes. Cette lettre, datée du 24 novembre 1993, donc après l'étude article par article du projet de loi, se lit ainsi: «M. le ministre, nous tenons à vous remercier de nous avoir permis de transmettre nos commentaires en commission parlementaire lors de l'étude du projet de loi sur l'aide et l'indemnisation des victimes d'actes criminels. «Vous avez fait preuve d'ouverture en acceptant de revoir de nombreux articles et en introduisant plusieurs amendements. La nouvelle loi reflète une plus juste compréhension des besoins des victimes. «Malgré les amendements apportés, nous ne sommes pas rassurés quant à l'interprétation et à l'application de l'article 11. Nous continuons à croire que plusieurs victimes risquent d'être privées de leur droit à l'indemnisation car la notion d'"état physique ou psychique" ne sera guère plus facile à évaluer que celle de "motif sérieux", quand il s'agira d'exempter les victimes de l'obligation de dénoncer le crime ou de collaborer avec les autorités de justice compétentes.

«Étant donné les incertitudes qui persistent autour de cet article, il serait hautement souhaitable que l'on prévoie une évaluation de l'application de l'article 11 un an après la mise en vigueur de la Loi sur l'aide et l'indemnisation des victimes d'actes criminels. Une telle évaluation permettrait de voir si cet article compromet le droit des victimes à l'indemnisation et d'apporter les correctifs nécessaires, s'il y a lieu. Nous sommes convaincus que vous serez sensible à cette demande exprimée par nos groupes et que vous n'hésiterez pas à vous engager à y donner suite. «Veuillez agréer, M. le ministre, l'expression de nos sentiments distingués.»

Et c'est signé: Arlène Gaudreault, pour l'Association québécoise plaidoyer-victimes, le Regroupement québécois des centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel, la Fédération des ressources d'hébergement pour femmes violentées en difficulté du Québec et le Regroupement provincial des maisons d'hébergement et de transition pour femmes victimes de violence conjugale.

Donc, on peut voir, M. le Président, que cet article 11.1, ce genre de compromis que nous avons trouvé en commission, ne rassure pas complètement les associations qui travaillent auprès des victimes d'actes criminels. Donc, je pense que ça serait tout à fait raisonnable pour le ministre de s'engager justement à faire cette réévaluation, l'impact finalement de cet article 11.1. Si on constate que cet article 11.1 répond aux préoccupations du ministère de la Justice et des différents intervenants, d'accord. S'il répond à son rôle, c'est parfait. Mais, si, après un an, on voit justement que cet article 11.1, qui est complètement de droit nouveau, il faut l'admettre, si on constate que cet article 11.1 ne satisfait pas nos préoccupations et nos exigences...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant, M. le député d'Anjou. Oui, M. le député de Montmorency. Qu'on appelle les députés! (2 h 9 - 2 h 10)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député d'Anjou, je vous cède la parole.

M. Bélanger: Alors, M. le Président, comme je le mentionnais, cet article 11.1, nous espérons qu'il va finalement satisfaire les exigences du ministère et qu'il va répondre aussi aux préoccupations des victimes d'actes criminels. Mais, cependant, nous ne savons pas exactement comment la pratique quotidienne, finalement, avec l'application quotidienne de cet article, quels sont les résultats qui vont être obtenus. Donc, ce que nous voulons surtout, c'est éviter que certaines personnes, finalement, ne soient réticentes à faire appel à notre système d'indemnisation des victimes d'actes criminels à cause de cette disposition. Car, on le sait, certains crimes, malheureusement, certaines catégories de victimes d'actes criminels ne font aucune plainte, ne dénoncent même pas le crime même, ne font aucune demande, restent complètement dans l'anonymat, justement de par cette peur du système judiciaire et du système aussi, peut-être, d'indemnisation des victimes d'actes criminels.

Donc, c'est pourquoi je pense que c'est tout à fait raisonnable, et j'espère que le ministre va s'engager, d'ailleurs, à faire une évaluation d'ici un an de l'impact de ce nouvel article 11.1 et à faire en sorte que, justement, nous puissions, à ce moment-là, réévaluer d'une façon tout à fait impartiale l'impact de cet article.

On peut, évidemment, vouloir faire un système le plus parfait possible; je pense que c'est le but de n'importe quel législateur. Sauf que, comme l'a mentionné tout à l'heure mon collègue de Lévis lors d'un discours sur une autre loi, il y a des carences dans ce système, on doit malheureusement le constater. Quand on constate que toute victime d'acte criminel, en vertu de la loi d'indemnisation des victimes d'actes criminels, ne perd pas son recours en droit civil contre l'auteur de ces dommages, donc c'est un système qui vient se rajouter ou qui vient être complémentaire au système d'indemnisation de droit commun qui est le recours de droit commun contre l'auteur des dommages.

Cependant, il y a une exception. Cette exception-là, je pense qu'on doit la dénoncer. C'est que, si vous êtes victime d'un acte criminel et que cet acte criminel a été commis avec une voiture, vous n'avez pas de recours contre l'auteur des dommages parce que la loi de l'assurance automobile vous empêche de poursuivre, à ce moment-là, la personne qui conduisait le véhicule, qui a commis un acte criminel avec ce véhicule et qui vous a causé des dommages.

Donc, à ce moment-là, on a un système qui est injuste envers les victimes d'actes criminels qui sont victimes d'actes criminels avec un véhicule moteur. Et je pense qu'il devrait y avoir, à ce moment-là, des pressions faites par le ministère de la Justice pour harmoniser ce fait-là. Si une victime d'acte criminel a été victime d'un acte criminel suite à la conduite d'un véhicule automobile, je ne vois pas pourquoi cette victime-là en particulier se verrait privée de son recours de droit commun contre l'auteur des dommages. On arrive, à ce moment-là, à des situations comme celle dénoncée par mon collègue de Lévis, c'est-à-dire que le chauffard, comme dans le cas qui a été répertorié par les journaux cette semaine, qui a tué quatre jeunes lors d'un accident d'automobile a reçu 86 000 $ en indemnités et les quatre victimes ont touché globalement 32 000 $. Donc, l'auteur d'un acte criminel avec un véhicule automobile, 86 000 $ en indemnisations et 32 000 $ pour les victimes. Et les victimes n'ont même pas le droit de poursuivre le chauffard parce qu'il conduisait un véhicule automobile et, donc, en vertu de la loi de l'assurance automobile, on ne peut pas poursuivre au civil un conducteur d'un véhicule automobile, même s'il a commis un acte criminel avec ce véhicule automobile.

Là, je pense qu'il y a une carence, il y a un problème relativement à l'administration de ces deux systèmes-là. Et, je pense, d'une façon assez simple, on pourrait amender le projet de loi, en particulier sur

l'assurance automobile, pour régulariser cette situation, M. le Président.

Donc, M. le Président, malgré tout, je pense, malgré ces deux remarques que je pourrais dire, ces deux critiques qu'on pourrait faire au système, même après avoir étudié article par article le projet de loi, je pense, malgré tout, qu'on vient quand même de bonifier le système d'indemnisation des victimes d'actes criminels. Et je crois que, somme toute, les milieux qui travaillent auprès des victimes d'actes criminels seront tout à fait satisfaits quant à l'impact de ce nouveau projet de loi. Et nous allons donc voter en faveur de ce projet de loi, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci. M. le député d'Anjou, merci. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, puisqu'en même temps que les collègues étudiaient ce projet de loi 106 nous étudiions le projet de loi 130, même si ça a été partiellement, nous avons constaté que les frais administratifs étaient très élevés, puisque, dans l'année 1992, M. le Président, les victimes d'accidents d'automobile auront reçu 359 000 000 $, dans l'année, mais les frais administratifs auront été de 177 000 000 $. Et là je remarque que le gouvernement a tendance de plus en plus à confier des responsabilités à la Société de l'assurance automobile, sauf que les automobilistes doivent payer l'administration, alors qu'il ne s'agit pas nécessairement d'accidents d'automobile. Et on remarque, quand il s'agit de cas d'actes criminels par accident d'automobile, que là c'est celui qui cause l'accident qui est indemnisé comme si c'était un accident du travail. M. le Président, il y a quand même une totale incohérence. La victime d'un accident d'automobile, la victime d'un acte criminel, c'est elle qui va le moins recevoir, M. le Président. Me Bellemare a souligné avec beaucoup de justesse, cette semaine, ce fait.

Vous savez, c'est le gouvernement libéral qui a fait d'une infraction criminelle, des infractions criminelles... qui les a rentrées dans le Code de la sécurité routière. Mais il n'a pas fait son travail comme il faut, il a fait encore un travail improvisé, de sorte qu'on se retrouve aujourd'hui avec une loi qui fait en sorte que celui qui a commis l'acte criminel reçoit plus que la victime. L'exemple très bien, que tout le monde a connu dans la région de Québec, c'est le chauffard qui, sur la Grande Allée, a tué quatre jeunes. Les quatres jeunes ont reçu chacun, c'est-à-dire qu'ils sont décédés, mais leur famille, chacune 8000 $, 32 000 $ au total, alors que celui qui a causé l'accident recevra 86 000 $, comme s'il était en devoir, M. le Président. Il y a toujours des limites, M. le Président.

On va nous dire qu'on fait des lois, qu'on a regardé ça, alors que le gouvernement n'a pas fait son travail. Le gouvernement improvise encore une fois, puis, immédiatement, on voit que le système craque. et, en plus, l'ensemble des gens va devoir payer pour ça. l'ensemble des citoyens va devoir payer l'administration, qui est déjà considérable, puisque, je le disais, c'est 177 000 000 $ de frais d'administration à la société de l'assurance automobile pour administrer le régime d'assurance automobile, alors qu'on paie aux victimes 359 000 000 $. ça veut dire quoi au fond? c'est que les frais d'administration représentent 50 % des montants versés aux victimes d'accidents. la réforme n'a pas été faite correctement, m. le président.

Moi, je me rappelle, quand je suis arrivé à l'Agriculture, qu'administrer 1 $ d'assurance-récolte ça coûtait 0,70 $. Quand je suis parti, en 1985, administrer 1 $ d'assurance-récolte, ça ne coûtait pas 0,70 $, ça coûtait 0,07 $, 10 fois moins. Aujourd'hui, on se rend compte qu'administrer 1 $ d'assurance automobile ça coûte 0,50 $. Les frais d'administration de l'assurance automobile s'élèvent à 50 % du montant payé aux victimes au cours de l'année 1992, dans le rapport annuel de 1992. Ça représente des frais considérables, M. le Président. Et, en plus, on constate qu'il y a des gens qui paient des assurances, au fond, l'assurance automobile... ce sont les victimes qui sont pénalisées, et celui qui est coupable d'infraction criminelle, c'est lui qui retire le plus. Drôle de loto, M. le Président, c'est vraiment le casino en faveur non pas des victimes, mais en faveur des chauffards. Et ça, ça doit changer. (2 h 20)

À plusieurs reprises, des gens, des citoyens, dont les membres de la famille ont été pénalisés, ont fait signer de nombreuses pétitions, qu'ils ont remises aux instances gouvernementales, à Ottawa surtout, pour les infractions criminelles, mais maintenant qu'il y a des infractions criminelles, il faudrait tirer les conséquences que ceux qui sont victimes d'infractions criminelles devraient au moins, leur famille, recevoir des compensations plus élevées que ceux qui sont la cause des infractions criminelles.

C'est le cas aussi pour des gens qui reçoivent de fausses accusations. Demandez au député de Duplessis combien ça lui a coûté, sa cause. Un procureur de la couronne qui ne fait pas sa job ou encore un ministère qui accuse des gens, alors que le juge, sur le banc, a été très sévère pour ceux qui avaient porté des plaintes contre le député de Duplessis, mais c'est lui qui se retrouve avec la facture, par exemple. C'est lui qui se retrouve avec la facture. Ou encore, on voit des gens dont les enquêtes de police se retrouvent dans les journaux et il n'y a jamais d'accusation, sauf qu'ils se retrouvent avec la facture et avec la réputation aussi, M. le Président.

Je pense que, actuellement, on ne s'occupe pas assez des victimes. On s'occupe beaucoup plus du confort des responsables des accidents criminels que des victimes d'accidents. M. le Président, je sais que l'avocat Bellemare en a parlé. Il a raconté que la Loi sur l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile contient une double injustice: les victimes d'un accident

routier n'ont pas le droit de poursuivre le responsable devant les tribunaux quand l'accident est le fruit d'un acte criminel; la loi prévoit l'indemnisation du coupable de l'accident, classé criminel, même pendant la période de son incarcération. Comprenez-vous? On a l'impression qu'il est traité pour un accident du travail. Me Bellemare a demandé au gouvernement de profiter de l'étude d'une loi actuellement débattue ? c'est cette loi, la loi 106, débattue devant l'Assemblée nationale, sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels ? pour apporter les changements requis et mettre fin à cette injustice, particulièrement en ce qui touche les criminels de la route.

M. le Président, pourquoi adopter le projet de loi ce soir, alors qu'on a encore... La session va jusqu'au 21 décembre. Pourquoi ne pas prendre le temps d'adopter des articles dans le projet de loi pour faire en sorte que les victimes d'accidents soient moins pénalisées qu'elles ne le sont actuellement par le régime que nous avons? Tout le monde en a parlé, de cet accident, qui a été rendu public récemment. Les montants ont été rendus publics récemment. Tout le monde en a parlé. On est pressé, comprenez-vous. On est pressé parce que les députés veulent s'en aller chez eux de bonne heure, alors qu'ils sont payés pour travailler. Pourquoi faire des projets de loi la nuit... Le ministre de la Justice, au contraire, devrait compléter son projet de loi pour faire en sorte que les victimes d'accidents d'automobile, quand il s'agit d'infractions criminelles, soient au moins mieux indemnisées que celui qui a causé l'accident. Ça m'apparaît évident et ça paraît évident à tout le monde.

Pourquoi les gens ont perdu confiance dans la politique, M. le Président? Parce qu'ils ne comprennent pas que des évidences pour tous ne soient pas corrigées par les parlementaires. Et, aujourd'hui, ces faits, qui arrivent fréquemment... On se rend compte que, actuellement, les projets de loi ne sont pas corrigés parce que le gouvernement est fatigué. Il a hâte de s'en aller en vacances pour Noël, alors qu'il n'y a rien qui dit qu'on n'a pas le temps d'étudier les projets de loi. Si on n'a pas le temps de les étudier complètement avant Noël, bien, on reviendra en janvier, on reviendra en février, jusqu'aux élections. Il n'y a pas de presse pour adopter un projet de loi qui n'est pas complet. Complétons-le pour faire en sorte que les victimes ne soient pas doublement victimes: victimes de l'accident et victimes de notre système de justice, qui font qu'elles recevront moins que les chauffards qui ont causé leur accident. Il me semble que c'est évident. Il me semble que des députés qui ont le coeur à la bonne place devraient comprendre ça et devraient dire au ministre: Retirez le projet de loi et apportez des amendements, parce qu'en troisième lecture on a encore le droit d'apporter des amendements pour faire en sorte que ce soit bonifié.

Qui vous dit que, demain, le député de Prévost, ce ne sera pas lui qui va être une victime? Évidemment, il a les moyens, il doit avoir des assurances très fortes, comprenez-vous, c'est un gros cultivateur. Mais il y a combien de gens qui sont victimes d'accidents qui n'ont pas les moyens d'être assurés et que, finalement, la famille se retrouve dans la rue parce qu'ils ont été victimes d'un accident, et il n'y a pas les indemnités qu'il devrait y avoir?

M. le Président, le rôle d'un Parlement, c'est d'être juste, de faire des lois équitables, de protéger ceux qui sont démunis ou ceux qui sont faibles devant le système, et non pas de renforcer, de rendre plus fortes les pénalités des victimes, celles qui sont déjà pénalisées. La victime, qui a subi l'accident, ou la famille, qui est privée d'un membre parce que cette personne a été victime d'un accident, a le droit, au moins, d'être traitée justement. Elle n'a pas cherché l'accident; elle n'a pas voulu l'accident. L'accident est arrivé. Il faudrait, au moins, que nos lois reflètent cette réalité-là. C'est beau d'avoir des beaux principes!

Je me rappelle, autrefois, lorsque le député de Verdun était le chef du NPD, il avait une vocation sociale. Il parlait des principes sociaux d'une façon incroyable. C'était beau! Mais, depuis qu'il est député libéral, on dirait que l'application... la vertu était dans la théorie et les problèmes dans la pratique. Et, là, on se rend compte que, là, finis les beaux principes! Je me rappelle de l'avoir écouté lorsqu'il était à sa convention et qu'il disait aux délégués qui ne voulaient pas qu'il soit leur candidat: Que vous le vouliez ou non, je serai votre candidat! J'avais entendu ça à la radio, aux nouvelles. Je me dis... Je ne sais pas comment ça marche dans les conventions dans le Parti libéral, en tout cas, il y a un système spécial: même si les gens ne veulent pas, celui qui veut peut être candidat.

Sauf qu'aujourd'hui nous sommes dans un système où il y a beaucoup d'injustices. J'en ai mentionné tantôt. Lorsqu'un jeune est victime dans un accident d'automobile, que la mère le garde, qu'elle a payé pour lui, que le père n'a pas fourni une cent, malgré tout, croyez-le ou non, on partagera les 15 000 $ entre les deux. Et celui qui ne fait rien pour son enfant aura le droit à la moitié de la somme pareil. C'est inéquitable, M. le Président!

C'est pourquoi il faut faire nos lois, surtout si on veut faire travailler la nuit, avec des députés fatigués, on devrait travailler de jour pour que les députés soient moins fatigués pour étudier les projets de loi, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

Mise aux voix

Est-ce que la motion proposant l'adoption du projet de loi 106, Loi sur l'aide et l'indemnisation des victimes d'actes criminels, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Article 61, M. le Président.

Projet de loi 207 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Lefebvre): L'article 61 de notre feuilleton, M. le leader adjoint du gouvernement, au nom de M. le député de Sherbrooke, propose l'adoption du principe du projet de loi 207, Loi concernant la succession de Cora Frances Dunkerley.

Mise aux voix

Cette motion est-elle adoptée? Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. Adoption

M. le leader adjoint, au nom du député de Sherbrooke, propose l'adoption du projet de loi 207. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté. M. le député de Sherbrooke, vous ne voulez pas intervenir?

M. André J. Hamel

M. Hamel: Merci, M. le Président. J'interviendrai très brièvement, étant donné que nous sommes vendredi, 10 décembre, 2 h 30 du matin. Mais, vous comprendrez qu'à titre de parrain de ce projet de loi 207, concernant la succession de Mme Cora Frances Dunkerley, je pense qu'il est important de souligner...

M. Garon: M. le Président, étant donné l'importance du discours du député de Sherbrooke, j'aimerais que vous appeliez le quorum.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle les députés! (2 h 29 - 2 h 34)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, M. le député de Sherbrooke, continuez votre intervention.

M. Hamel: Merci, M. le Président. Comme je le mentionnais tantôt, je suis très heureux d'intervenir ce soir à titre de parrain à cette dernière étape du projet de loi privé 207, Loi concernant la succession de Cora Frances Dunkerley.

M. le Président, de 10 heures à 18 heures, les parlementaires, tant ministériels que ceux de l'Opposition, ont joué le rôle de législateurs avec un intérêt et un sérieux remarquables, afin de respecter les dernières volontés, les dernières volontés exprimées dans le testament de Mme Cora Frances Dunkerley.

Nous avions, dans un premier temps, M. le Président, abordé l'étude de ce projet de loi il y a déjà quatre ans. Mais l'opposition de certaines personnes nous avait persuadés de reporter l'étude et l'adoption de ce projet de loi privé. Cette période de temps, M. le Président, a permis de clarifier certains points, de réaliser un consensus avec la municipalité d'Ulverton et enfin d'arriver à l'adoption du projet de loi 207, à la grande satisfaction des gens concernés par ce testament.

Je suis donc très heureux, M. le Président, que l'on puisse procéder à la troisième et dernière étape de ce projet de loi privé, et ceci dans l'esprit et la lettre du parlementarisme dont nous sommes les acteurs privilégiés.

Je tiens à souligner l'excellent travail de mon collègue, député de Chapleau et adjoint parlementaire au ministre de la Justice, qui a fait un travail remarquable, ainsi que de tous ceux et celles de mes collègues qui ont contribué à l'adoption du projet de loi 207, Loi concernant la succession de Cora Frances Dunkerley. Merci, M. le Président. Bon, et voilà!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Lévis, je vous cède la parole.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, je suis très heureux également, en troisième lecture, de concourir à l'adoption du projet de loi 207 concernant la succession de Cora Frances Dunkerley, parce qu'on sait à quel point, parfois, les successions peuvent être complexes. Le député de Sherbrooke l'a souligné, quand on lit le projet de loi, on s'en rend compte. On dit: «Attendu que, par son testament fait le 10 octobre 1959 et vérifié par la Cour supérieure le 17 janvier 1962 (numéro 1155 des dossiers de la Cour supérieure pour le district d'Arthabaska), Cora Frances Dunkerley, décédée le 31 décembre 1961, ? imaginez-vous, M. le Président ? a légué à ses fiduciaires J. Gordon Smith et Ralston M. Graham, tous ses biens à charge par eux d'utiliser les revenus de sa succession selon les fins et modalités décrites dans ce testament; «Que Ralston M. Graham, l'un des légataires fiduciaires, est décédé le 1er janvier 1963, laissant J. Gordon Smith seul et unique légataire fiduciaire de la succession de Cora Frances Dunkerley; «Qu'à la suite d'une requête présentée par J. Gordon Smith, le présent requérant, Richard Eugène Saint-Dizier, par jugement daté du 26 janvier 1966 et portant le numéro 450-14-000038-76 des dossiers de la Cour supérieure pour le district de Saint-François, a remplacé J. Gordon Smith; «Que parmi les biens légués en fiducie par Cora Frances Dunkerley se trouve un immeuble situé à Ulver-ton, province de Québec;

«Que le testament de Cora Frances Dunkerley contient une clause stipulant que cet immeuble et la maison érigée dessus ne devront pas être vendus, la maison pouvant être transformée en un immeuble à revenus de deux logements; «Que cette clause de prohibition de vendre ne semble avoir été inscrite que pour assurer un revenu certain aux "Stewards of the Ulverton United Church"; «Que les revenus provenant de la location de cet immeuble sont insuffisants pour faire face aux frais élevés d'entretien et de réparation constants que nécessite cet immeuble; «Que, dans l'intérêt de l'exécuteur de la succession de Cora Frances Dunkerley de même que dans celui des bénéficiaires des revenus de cette succession, il est à propos que l'exécuteur fiduciaire de la succession soit autorisé à vendre cet immeuble et à utiliser les revenus provenant du produit de cette vente suivant les dispositions du testament; «Que les bénéficiaires des revenus, "The Stewards of the Ulverton United Church", ont été avisés de la présentation du présent projet de loi et qu'ils consentent à sa présentation et à son adoption.»

Qu'est-ce qui a été décidé, M. le Président, avec l'énumération des faits que nous venons de mentionner dans le préambule? «Malgré la prohibition de vendre stipulée dans le testament de Cora Frances Dunkerley, daté du 10 octobre 1959 et vérifié le 17 janvier 1962 (numéro 1155 des dossiers de la Cour supérieure pour le district d'Artha-baska), l'exécuteur fiduciaire de cette succession est autorisé à vendre l'immeuble concerné et ci-après décrit: (2 h 40) «Un certain immeuble situé dans la municipalité d'Ulverton connu et désigné comme étant les lots numéros 106 et 107 aux plan et livre de renvoi pour le canton de Durham, à distraire cependant la partie de l'immeuble déjà vendue à James Mills en vertu d'un acte de vente enregistré au bureau de la division d'enregistrement de Richmond sous le numéro 29945 du volume B-41, et à distraire également de cet immeuble les lisières de terrain acquises par expropriation par la corporation municipale d'Ulverton et décrites aux actes enregistrés au bureau de la division d'enregistrement de Richmond sous les numéros 157769 et 169640. «Avec bâtisses dessus construites, circonstances et dépendances. «L'exécuteur testamentaire de la succession de Cora Frances Dunkerley devra utiliser des revenus provenant du produit de la vente de l'immeuble visé à l'article 1 conformément aux dispositions du testament. «L'enregistrement d'une copie conforme de la présente loi se fera par dépôt. «L'exécuteur fiduciaire peut se rembourser sur le produit de la vente de l'immeuble visé à l'article 1 des frais assumés pour l'adoption de la présente loi, l'obtention d'une copie conforme de celle-ci, l'enregistrement de ce document et la réalisation de la vente.»

M. le Président, quand on voit la série d'événe- ments qui remontent aux années cinquante, les événements qui se sont produits depuis les années soixante et par la suite, je suis persuadé que toute la famille est très heureuse que, finalement, la question soit réglée parce que je pense qu'il y allait de l'intérêt des individus, mais aussi des gens qui dépendaient de cette succession pour leurs revenus puisque, comme on l'a vu, un groupe des bénéficiaires des revenus, «The Stewards of the Ulverton United Church», ont été avisés de la présentation du présent projet de loi et qu'ils ont consenti à sa présentation et à son adoption.

M. le Président, il était bon que les choses se règlent. Le travail a été fait en commission parlementaire et vous voyez qu'il y avait une certaine urgence puisqu'on adopte ce projet de loi à trois heures moins quart du matin, au mois de décembre, alors que nous avons à travailler une partie de la nuit, semble-t-il, nous nous préparons à travailler jusqu'au déjeuner pour faire en sorte que certains projets de loi voient le jour en plein milieu de la nuit, essentiellement pourquoi, M. le Président? Parce que les députés libéraux veulent quitter avant le temps. Us ne veulent pas se rendre jusqu'au 23 décembre. Alors, on est obligés de travailler de nuit et c'est très difficile parce que, constamment, il faut demander le quorum parce que le leader du gouvernement veut les faire travailler et semble-t-il qu'il y en a plusieurs qui font l'école buissonnière, qui ne comprennent pas l'importance des projets de loi, qui ne participent pas aux discussions et qui sont seulement à tenir le quorum mais, pour ça, il faut les rappeler constamment à l'ordre.

M. le Président, vous comprendrez qu'en troisième lecture d'un projet d'une telle importance, comme l'a mentionné le député de Sherbrooke, il faut absolument, et c'est pourquoi tout à l'heure j'ai demandé le quorum pour qu'il soit impossible que ce projet de loi soit adopté sans que la présence réglementaire de 21 députés sur 125... Ce n'est pas exagéré, M. le Président, 21 députés sur 125. Il n'y a pas de commission qui siège à cette heure-ci. Alors, il était important que les députés, au moins 21 députés... Ce n'est pas beaucoup, 21 députés, mais il faut qu'il y en ait au moins 21. Je suis persuadé que pour régler la succession de Mme Cora Frances Dunkerley il est beaucoup plus de mise qu'il y ait quorum en cette Chambre et c'est pourquoi, malgré que j'ai dérangé certains députés qui sommeillaient, il m'a paru important de le faire parce qu'il est important que, quand le Parlement siège, le quorum y soit, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce que la motion de M. le député de Sherbrooke... Oui, M. le député de Laviolette. Je vous cède la parole. Vous avez droit à une intervention de 10 minutes.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: M. le Président, à l'heure où nous sommes rendus à ce moment-ci, je veux ajouter ma voix

à celle de mon collègue, le député de Lévis, et à celle du député de Sherbrooke en vous disant que quelqu'un qui était intéressé par ce dossier, ma collègue, la députée de Johnson, ayant eu des occupations très chargées aujourd'hui, en fait hier, devrais-je dire, et en aura davantage aujourd'hui, n'a pas pu être ici. Elle aurait aimé, tout comme le député de Sherbrooke, faire mention de l'importance d'un tel dossier, d'autant plus que, quand on le regarde avec attention, et je fais juste insister pour bien le rappeler, un des attendus indiquait ceci: Que les revenus provenant de la location de cet immeuble sont insuffisants pour faire face aux frais élevés d'entretien et de réparation constants que nécessite cet immeuble; 2° que, dans l'intérêt de l'exécuteur de la succession de Cora Frances Dunkerley de même que dans celui des bénéficiaires des revenus de cette succession, il est à propos que l'exécuteur fiduciaire de la succession soit autorisé à vendre cet immeuble et à utiliser le revenu provenant du produit de cette vente suivant les dispositions du testament...

Voilà que des gens, au moment où ils font des testaments, proposent des choses qui, en cours de route, s'avèrent néfastes pour ceux qui ont à vivre du fruit de ces revenus et pour lesquels ils sont, vous le savez très bien, attachés par le testament lui-même. On ne se défait pas d'un testament pour le plaisir de s'en défaire. Il faut prendre les moyens qui s'imposent, et dans des cas comme ceux-là ? c'est un exemple typique ? on en arrive à devoir utiliser des lois qui viennent, d'une certaine façon, corriger une situation qu'il serait impossible, pour quelque personne, que ce soit l'exécuteur testamentaire, ceux qui ont des revenus de l'exécution de ce testament... d'en profiter pleinement.

Le but recherché par la personne qui, par testament, délègue des choses n'est pas de nuire à ses successeurs. Il est, au contraire, M. le Président, bien évident que, ce qu'on recherchait, à l'époque des années cinquante, n'est pas ce qui, malheureusement, arrive dans les années quatre-vingt-dix. Ça a pris, donc, quelque temps avant qu'on ne répare cette difficulté, mais il était important qu'on fasse appel à une décision législative. Dans certaines circonstances, des fois, des testaments comme ceux-là... On en a eu plusieurs où il a fallu faire appel aux tribunaux pour interpréter des testaments, pour interpréter des chicanes de famille qui peuvent surgir.

J'ai eu l'occasion de lire, avec beaucoup d'attention, un document qui a été préparé par Jean-Louis Dugal, qui est de Grand-Mère, mais qui a publié à Montréal, compte tenu de ce qu'il a vécu avec les gens auxquels il porte conseil... de dire comment on peut arriver à régler des problèmes avant que le testament ne soit fait, de façon que notre famille, ceux qui vont nous succéder, puissent amplement le faire dans le calme, la sérénité. Alors, quand des testaments qui sont faits arrivent à occasionner certains problèmes, il faut donc utiliser la voie légale, c'est-à-dire prendre un projet de loi et le présenter comme projet de loi privé pour que les gens puissent profiter pleinement de ce qui leur est donné par legs testamentaire.

On en a eu, à plusieurs occasions, des exemples qui sont près de nous. Chacun, parmi nous, devrait s'en souvenir. C'est, des fois, bien difficile. On a une maison quelque part, et les gens ne s'entendent pas entre eux sur la façon de diviser les parts, de telle sorte que, finalement, l'immeuble ne se vend pas, se détériore. Les gens veulent acheter ces propriétés et ne peuvent pas parce qu'une des personnes refuse, pour toutes sortes de raisons. Vous savez, ce n'est pas toujours facile. On en a des exemples à Grand-Mère même. Aujourd'hui, c'est devenu un dépanneur, qui s'appelle Petro-Canada. Mais ce dépanneur était un coin où il y avait une bâtisse qui, longtemps, a été laissée à l'abandon parce que les gens, les bénéficiaires du testament ne pouvaient pas s'entendre. Alors, voilà un exemple où des personnes doivent faire appel au législateur par l'objet d'un projet de loi privé. (2 h 50)

Vous avez la députée de Johnson, je vous le disais, qui aurait voulu participer à cette dernière étape, pour dire combien elle était heureuse, finalement, qu'on en arrive au dénouement d'une telle difficulté. Elle a été prise, cette journée... En fait, on est rendu quoi, on est rendu vendredi? Jeudi, hier, elle a été prise par beaucoup d'activités, ici à l'Assemblée. Elle a participé à des débats, et aujourd'hui elle aura à faire d'autres activités pour ses commettants. Mais elle me disait, justement, qu'elle était fière, finalement, que ce projet de loi passe. Il y a des gens, comme... Je prends l'exemple du député d'Orford, qui est ici, qui aura certainement un mot à dire puisque c'est quelqu'un de sa région, mais ça, c'est une décision qui lui appartiendra. Mais, moi, il me semblait de mon devoir d'intervenir pour démontrer, finalement, qu'il est possible, même s'il est très tard dans la nuit, de prendre de très bonnes décisions. Ce n'est pas toujours facile. On aura l'occasion d'avoir des discussions sur d'autres sujets d'ici 8 heures ce matin, j'en suis assuré. Mais, il reste une chose, c'est que nous avons devant nous un projet de loi qui fait l'unanimité et, avec mon collègue de Lévis, le député de Sherbrooke et, j'espère, le député d'Orford, de cette région, on pourra, à ce moment-là, adopter, de façon unanime, un tel projet de loi, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Montmorency, sur la même motion, vous avez droit à 10 minutes.

M. Jean Filion

M. Filion: Merci, M. le Président. J'aimerais, moi aussi, souscrire à ce projet de loi, M. le Président.

Je pense qu'effectivement un projet de loi privé en matière de fiducie testamentaire est toujours un projet de loi qui peut arriver à corriger une situation d'inéqui-té, une situation, M. le Président, où on se retrouve dans l'exécution d'un testament... Et on se rend bien compte qu'une clause testamentaire peut provoquer, chez

l'administrateur de la fiducie ou l'exécuteur testamentaire, une problématique incroyable. On avait prévu dans un testament, comme on l'a vu dans la succession de Mme Cora Frances Dunkerley, qu'effectivement il y avait l'administration d'un bien immeuble, un bien immeuble qui, à toutes fins pratiques, ne générait pas de revenus suffisants, les dépenses étaient plus élevées que les revenus et ça allait contre l'esprit même du de cujus, le décédé, M. le Président, qui avait effectivement prévu que les revenus devraient être de façon suffisante et, à ce moment-là, le bien en question ne générait pas suffisamment ces revenus.

M. le Président, je préfère, et de loin, étudier un projet de loi lorsque l'on modifie une succession au niveau de son pouvoir d'exécuteur que de modifier une succession, comme j'ai vu l'an dernier, où on allait prolonger la période pour éviter qu'il y ait disposition présumée du bien. Et lorsqu'il y a disposition présumée du bien, M. le Président, avec la règle de 21 ans, il y a de l'incidence fiscale. L'an dernier, on a étudié en cette Chambre le report d'une disposition présumée de la règle de 21 ans qui occasionnait, effectivement, des économies d'impôt faramineuses, M. le Président, au niveau d'une fiducie inter vivos, entre vifs. Mais, là, on est au niveau d'une fiducie, d'une succession, au niveau d'une fiducie testamentaire, et là on ne fait que venir aider une situation de gestion. Je préfère de beaucoup aider une situation de gestion à une situation de donner, encore une fois, une possibilité de reporter l'impôt à plus tard. Vous savez, M. le Président, lorsqu'on reporte l'impôt à plus tard, on vient créer, bien sûr, un manque à gagner dans le trésor public et on sait qu'actuellement les manques à gagner dans le trésor public, vraiment, on peut s'en passer, parce qu'on en a grandement besoin. Alors, ce projet de loi, M. le Président, n'est pas un projet de loi où on reporte l'incidence fiscale. C'est un projet de loi où on vient corriger, corriger vraiment, et permettre à l'exécuteur testamentaire de pouvoir administrer et être conforme au testament.

M. le Président, là où je suis un petit peu en même temps... et je trouve que le projet de loi est arrivé quand même tardivement; en tout cas, vaut mieux tard que jamais. On parle d'un décès qui serait survenu le 31 décembre 1961. M. le Président, c'est bien sûr qu'avec l'évolution des coûts, etc., on se retrouve dans une situation où le revenu est à peu près inexistant et, là, on vient corriger, effectivement, ce pouvoir de gestion.

M. le Président, je pense que les parlementaires sont toujours très soucieux et demeurent toujours à l'affût de ce genre de projet de loi, puisque nous sommes là, justement, pour corriger le genre de situation où on se retrouve dans de l'absurdité, et, cette fois-ci, je pense qu'effectivement nous sommes face à de l'absurdité, où nous avions à corriger une situation de gestion de testament. Je pense que ce projet de loi là, M. le Président, comme Opposition officielle et comme parlementaire en cette Chambre... nous sommes d'accord, bien sûr, pour son adoption, et nous allons, bien sûr, aider à la correction d'une anomalie qui ne permettait pas, justement, d'être conforme à la pensée de la personne décédée lorsqu'elle a accouché de son testament, M. le Président. Alors, M. le Président, inutile de vous dire que cette situation-là, maintenant, elle est corrigée et que nous voterons, bien sûr, M. le Président, en accord avec ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Montmorency. Oui, M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Pourriez-vous demander le quorum?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle les députés. (2 h 56 - 3 heures)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, si vous voulez prendre place. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants?

Mise aux voix

Est-ce que la motion proposée par M. le député de Sherbrooke sur l'adoption du projet de loi 207, Loi concernant la succession de Cora Frances Dunkerley, est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Article 4, M. le Président.

Projet de loi 112 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 4, M. le ministre du Revenu propose l'adoption du principe du projet de loi 112, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts et diverses dispositions législatives. M. le ministre du Revenu.

M. Raymond Savoie

M. Savoie: Alors, merci, M. le Président. Alors, je soumets pour adoption de principe à l'Assemblée nationale le projet de loi 112 qui a été présenté le 11 novembre 1993. Ce projet de loi a pour objet principal de donner suite au Discours sur le budget du ministre des Finances du 20 mai 1993, ainsi qu'aux bulletins d'information 93-1, 93-2 et 93-4 émis par le ministère des Finances respectivement le 23 avril 1993, le 28 juillet 1993 et le 8 octobre 1993.

À cette fin, il modifie, d'abord, la Loi sur les impôts, mais aussi plusieurs autres lois fiscales, notamment la Loi concernant les droits sur les mutations

immobilières, la Loi sur la fiscalité municipale, la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec, ainsi que la Loi sur le remboursement d'impôts fonciers.

Je rappelle que ce projet de loi contient, entre autres mesures, l'abolition de la déduction générale pour revenu d'emploi, la transformation en crédits d'impôt des déductions pour dons ou pour cotisations à l'assurance-chômage ou à un régime de rentes et l'institution d'un crédit d'impôt à l'égard de la nouvelle cotisation au Fonds des services de santé du Québec. Il modifie les règles relatives au Régime d'épargne-actions, notamment à l'égard de la restriction de l'accès à ce Régime aux corporations en croissance. Il introduit également des règles portant sur la cotisation au Fonds des services de santé du Québec exigée de certains particuliers.

J'invite donc, M. le Président, les membres de cette Assemblée à adopter le principe du projet de loi 112 conformément aux règles et coutumes des projets de loi du Revenu faisant suite à un discours et à une présentation du budget de la part du ministre des Finances.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, sur ce même sujet, je cède la parole à M. le député de Montmorency et je vous indique que, comme vous êtes le porte-parole de l'Opposition officielle, vous avez droit à un maximum de temps d'une heure.

M. Jean Filion

M. Filion: Merci, M. le Président. M. le Président, nous sommes, effectivement, à l'adoption de principe du projet de loi 112. M. le Président, encore une fois, on se retrouve avec une loi assez volumineuse ? comme à l'habitude, bien sûr, ça ne change pas. On a 197 pages, M. le Président, de projet de loi. Inutile de vous dire qu'en commission parlementaire nous aurons encore beaucoup de questions afin d'analyser ce projet de loi là puisqu'il y a beaucoup de mesures un peu particulières même, M. le Président. Et, quand je regarde rapidement le résumé qu'il en est fait au début du projet de loi, on parle, bien sûr, de l'inclusion, dans le calcul du revenu d'emploi, M. le Président, de la valeur de l'avantage découlant des cotisations d'employeurs à certains régimes d'assurance.

M. le Président, le projet de loi reprend essentiellement le budget du mois de mai dernier et certains bulletins d'information où on avait vu certaines mesures déplaire à la population, M. le Président. Et je pense, entre autres, M. le Président, à la double surtaxation applicable, M. le Président, à l'impôt des salariés. On est rendus, M. le Président, dans notre législation fiscale ? et c'est un peu criant; même, je vous dirais que c'est très criant, M. le Président ? non pas avec de la surtaxation, on est rendus avec de la double surtaxation, deux 5 %, M. le Président. Un premier 5 % sur le premier 5000 $ d'impôt et, lorsqu'on est rendu à 10 000 $, on rajoute un autre S % et de façon rétroactive, M. le Président. Et c'est un peu le projet de loi qui vient, moi, je dirais, consacrer au Québec que la fiscalité, elle est très, très, très, très, très malade, M. le Président, et quand la fiscalité va mal, M. le Président, l'économie va très mal.

Et je pense que ce projet de loi, que nous allons étudier en commission parlementaire, comporte beaucoup de mesures, M. le Président, que j'appellerais des mesures de fonds de tiroirs. On est rendu à appliquer des mesures fiscales qui, à toutes fins pratiques, sont tordues, tordues parce qu'elles créent chez les contribuables une tension, de l'agressivité, elles rendent les gens inconfortables et les gens, M. le Président, sont devenus des gens qui cherchent à leur façon à se faire justice fiscale. Et, quand les gens se sont retrouvés au mois de juillet avec la double surtaxation de S % de façon rétroactive, M. le Président, ça a créé des tollés. Ça a créé des tollés parce que, M. le Président, les gens, au moins, je dirais, dans les quatre et cinq dernières années, ont subi un phénomène de surtaxation incroyable. Et je pense que nous en sommes rendus à un niveau tel, M. le Président, que les gens se sentent injustement taxés.

Et voici pourquoi je dis ça, M. le Président, et nous avons les documents et les preuves à l'appui. Parce que, quand on regarde le budget, le budget avait prévu des recettes fiscales qui sont déjà compromises, ces recettes fiscales-là, cette année. Elles sont déjà compromises, M. le Président, puisque, au niveau des revenus, M. le Président, on a un manque à gagner de 450 000 000 $ par rapport aux prévisions et, sur ce, de 300 000 000 $ au niveau de l'impôt des particuliers. M. le Président, c'est un peu alarmant parce que, lorsque vous regardez les mesures fiscales qui ont été apportées, ce sont des mesures fiscales de surtaxation pour aller chercher des recettes additionnelles et là on se rend compte que ces recettes additionnelles, M. le Président, on ne les perçoit même plus, ces surtaxes-là, ces doubles surtaxes, et on en perçoit moins, 300 000 000 $ de moins que prévu.

Inutile de vous dire qu'on a atteint le seuil des rendements décroissants en matière fiscale. Il est très clair qu'on a atteint ce seuil des rendements décroissants, M. le Président, et plus on va en ajouter, moins on va en percevoir. Ça, c'est comme la contrebande du tabac, M. le Président. Vous avez beau taxer, lorsque vous avez atteint le seuil des rendements décroissants, vous créez davantage de conséquences économiques négatives que vous créez véritablement, M. le Président, une politique fiscale rentable pour le trésor public. Au contraire, M. le Président, vous vous placez dans une situation où on ne peut, à toutes fins pratiques, percevoir des deniers publics, puisque la mesure fiscale va trop loin. La fiscalité est devenue tout simplement très, très malade, M. le Président; les gens se sentent mal taxés et les recettes fiscales n'entrent plus.

M. le Président, on les retrouve, ces mesures fiscales, dans le projet de loi. Une mesure fiscale que je considère, encore une fois, désincitative, désincitative, M. le Président, c'est l'abolition de la déduction

générale pour revenu d'emploi. M. le Président, encore une fois, un montant de 750 $ auquel on avait droit de façon automatique; les salariés avaient droit de réclamer une déduction allant jusqu'à 750 $, M. le Président. D'un seul coup, on enlève cette déduction-là qui, à toutes fins pratiques, procurait quand même, M. le Président, beaucoup d'économie chez les gens. Et, quand vous regardez l'abolition de cette déduction-là, ce qu'elle va donner au trésor public, ce n'est pas qu'une petite affaire. On prévoit, en 1993-1994, des économies, c'est-à-dire qu'on n'aura pas besoin de retourner l'argent aux contribuables, de 478 000 000 $. Ce n'est pas une petite mesure.

C'est une mesure qui, à toutes fins pratiques, touche d'abord tout le, monde, touche les gens sur leur salaire, leur revenu qui leur permet, bien sûr, de payer leur pain et leur beurre. On vient chercher une déduction fiscale, on enlève une déduction fiscale et on crée des économies au trésor public pour 478 000 000 $, M. le Président. Alors, M. le Président, inutile de vous dire que cette mesure-là, à toutes fins pratiques, est une mesure qui touche tout le monde. Et, quand vous ajoutez cette déduction fiscale là de 750 $ à la double pénalité, M. le Président, les gens ont l'impression qu'on veut tout aller leur chercher. Et c'est là, M. le Président, que ça commence à blesser et à rendre les gens... Je vous dirais, M. le Président, que les gens se comportent de façon agressive dans l'économie. Mais ce n'est pas une agressivité constructive, c'est une agressivité négative car, à toutes fins pratiques, les gens se sentent traités inéquitablement, M. le Président. (3 h 10) une autre petite mesure vicieuse, m. le président, qui n'a l'air de rien, mais qui nuit considérablement, c'est la fameuse mesure de la transformation en crédits d'impôt des déductions pour dons ou pour cotisations à l'assurance-chômage ou à un régime de rentes. m. le président, pourquoi on fait ça, cette transformation-là? c'est très simple: c'est que le ministre des finances va chercher les fonds de tiroirs. on sait pertinemment que le système prévoyait une déduction fiscale. quand on a une déduction fiscale, m. le président, on peut aller chercher en déduction jusqu'à 25 %, 26 %, 27 % de retour d'impôt. mais, quand on y va avec un crédit d'impôt de 20 %, automatiquement, on est sûr qu'on ne pourra pas dépasser 20 % de retour d'impôt, tandis qu'avec une déduction fiscale on pouvait se rendre jusqu'à 24 %, 25 %, 26 %, dépendamment du taux de taxation. et, si on ajoutait par-dessus...

M. Jolivet: M. le Président...

M. Filion: ...la double pénalité rétroactive...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Sur un projet de loi aussi important, j'aimerais que le quorum soit présent.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, on demande la vérification du quorum. Alors, qu'on appelle les députés. (3 h 12 - 3 h 16)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, si vous voulez prendre place. Nous en sommes à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 112, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts et diverses dispositions législatives, et je cède la parole, pour lui permettre de poursuivre son intervention, à M. le député de Montmorency.

M. Filion: Merci, M. le Président. Nous étions à regarder la transformation en crédits d'impôt des déductions pour dons, M. le Président, ou pour cotisations à l'assurance-chômage ou à un régime de rentes. M. le Président, le dernier budget du Québec était un budget de fonds de tiroirs où on est allé chercher toutes sortes de modifications fiscales un peu spéciales. On a vu la double surtaxation, mais là on voit qu'on change une déduction fiscale en crédit d'impôt. quand on le lit rapidement, m. le président, on a l'impression qu'il ne se passe rien, mais il se passe quelque chose, parce que, lorsqu'on change une déduction en crédit, le gouvernement enlève aux citoyens et aux citoyennes la possibilité de réclamer davantage de retour d'impôt. on limite le retour d'impôt, dans un crédit, à 20 %. tandis que, lorsqu'on prend une déduction fiscale, m. le président, on peut aller chercher un retour d'impôt jusqu'à 25 %, 26 %. alors, m. le président, c'est évident que cette façon de procéder a pour effet d'aller chercher des sommes d'argent additionnelles au niveau des contribuables, des québécois et des québécoises, m. le président. et, ce genre de mesure là, c'est le genre de mesure qui, à toutes fins pratiques, enlève du pouvoir d'achat et fait en sorte, m. le président, que les gens se retrouvent avec beaucoup moins d'argent pour les besoins de leur consommation et pour les besoins, m. le président, de leur coût de vie.

Une autre mesure, M. le Président, qui est dans ce projet de loi et que nous étudierons en commission parlementaire, c'est la suspension pour un an de l'indexation des montants représentant la valeur des besoins essentiels reconnus dans le régime d'imposition. M. le Président, on touche ici au livre blanc sur la fiscalité. Ça a l'air de rien, mais, quand vous ajoutez toutes les dérogations qu'on fait à notre fiscalité, M. le Président, on se retrouve avec une fiscalité qui ne tient plus la route. Et, M. le Président, c'est un exemple ici qui a l'air anodin, mais les besoins essentiels, M. le Président, c'est ce dont on a besoin comme collectivité, ce qu'on doit réaliser comme gain avant d'être taxé. M. le Président, c'est ce sur quoi sont basés les crédits d'impôt de base, qu'on appelle. Les gens n'ont pas à payer d'impôt tant et aussi longtemps qu'ils n'ont pas satisfait leurs besoins essentiels de vie.

Et là, M. le Président, on vient enlever l'indexation sur les besoins essentiels de vie. M. le Président, ça n'a pas de bon sens. Les gens qui n'ont déjà pas assez

d'argent pour vivre, m. le président, si vous n'indexez pas les besoins essentiels de vie, ils vont avoir encore moins d'argent parce qu'ils vont payer de l'impôt sur le montant de l'indexation que vous n'avez pas faite. et, quand on se situe à un niveau de revenus que j'appelle faibles revenus, ces gens-là sont touchés par ce genre de mesure là. l'année antérieure, on avait un taux d'indexation. on a un taux d'inflation de 2 %, m. le président, on devrait indexer de 2 %. alors, comment se fait-il qu'on est rendu dans ce genre de petites mesures qui viennent compromettre des principes qu'on avait mis dans le livre blanc sur la fiscalité? (3 h 20)

D'ailleurs, en 1985, les libéraux se sont empressés de récupérer ces concepts-là et de les appliquer à notre fiscalité. Et, quand on vient suspendre, ne serait-ce que pour un an, l'indexation, bien, on vient mettre une brèche à un concept fiscal qui, à toutes fins pratiques, ne doit pas être touché. Et c'est dans cet esprit-là, bien sûr, que nous allons revoir cette mesure fiscale lors du projet de loi. Mais, quand vous l'additionnez à la double surtaxation rétroactive, quand vous l'additionnez à toutes les surtaxations qu'on a dans notre fiscalité, bien, c'est ce qui fait que notre système fiscal est boiteux, que notre système fiscal ne fonctionne plus et que les gens ont l'impression d'être traités injustement.

Alors, bien sûr, on va revoir l'introduction de la surtaxe pour les particuliers. On en parle ici, M. le Président. Et nous allons revoir, bien sûr, d'autres mesures concernant l'imposition des cotisations versées par un employeur à certains régimes d'assurance. M. le Président, entre autres, dans la loi fiscale, il y avait certaines exonérations. C'est qu'une personne, l'employeur, pouvait payer certaines primes d'assurance, d'assurance-vie, entre autres. Les primes d'assurance-vie jusqu'à 25 000 $ n'étaient pas taxables. Ah bien, là, M. le Président, le législateur a décidé que, même si on payait des primes d'assurance-vie jusqu'à 25 000 $, ces primes-là dorénavant seront rajoutées au revenu, au salaire de la personne et ces primes-là seront maintenant taxables. M. le Président, on se retrouve dans une situation où, encore une fois, on va aller chercher des deniers publics qui auparavant étaient exemptés.

J'aimerais reprendre les mesures une par une pour voir comment le gouvernement, à travers ce projet de loi là que nous allons étudier, va aller chercher ses recettes fiscales, mais, en même temps, en sensibilisant immédiatement l'Assemblée, M. le Président. Même si on est à l'adoption de principe et qu'il est 3 h 20 cette nuit, M. le Président, inutile de vous dire qu'on doit immédiatement sensibiliser l'Assemblée à ce que nous allons étudier en commission parlementaire. Et laissez-moi vous dire, M. le Président, que ce n'est pas très rose, tout ce qui nous attend. Ce n'est pas très rose parce qu'on s'aperçoit immédiatement que ces mesures-là qui étaient prévues pour créer des recettes un peu exceptionnelles, on est en train de virer le système fiscal à l'envers pour essayer d'aller en chercher plus, puis on se rend compte, avec les dernières données, qu'il en rentre moins. Imaginez-vous dans quelle situation on va regarder ces mesures-là. On se rend bien compte que ces mesures-là, à toutes fins pratiques, n'auront pas donné le résultat escompté.

Et la première mesure, M. le Président, qui va rapporter, quand même, des sommes d'argent assez impressionnantes, quand vous regardez l'augmentation, la progressivité de l'impôt, c'est quand on parle de la double surtaxation rétroactive. Une double surtaxation rétroactive, M. le Président, c'est quelque chose. Déjà que de faire une surtaxation c'est terrible, là on en fait une double. Quand on y pense, là, c'est quelque chose dans le système fiscal. On fait de la double surtaxation rétroactive. C'est un concept qui, à toutes fins pratiques, devrait être banni de notre fiscalité. Qu'on aille donc tout simplement ajuster le taux d'impôt. Ça, c'est clair, M. le Président. Qu'on augmente le taux d'impôt, mais qu'on ne commence pas à mettre des concepts de double surtaxation rétroactive. M. le Président, les gens se sentent doublement surtaxés. C'est une question de concept, c'est une question d'image, c'est une question de confiance, M. le Président. Et c'est ça que les gens reprochent.

Regardez les 30 $. Je me bats depuis un an et demi sur les 30 $, hein? C'est la même chose, M. le Président. C'est la même philosophie que je suis en train d'expliquer à l'Assemblée. Quand vous taxez d'une façon injuste, les gens ne l'acceptent pas. Imaginez-vous, à l'île d'Orléans... Applaudissez si vous voulez, mais à l'île d'Orléans, c'est assez spécial. On a six municipalités sur l'île. Il n'y a pas de transport en commun sur l'île. Dans aucune municipalité il n'y a de transport en commun. Bien, croyez-le ou non, j'ai trois municipalités sur six qui paient les 30 $ ? oui, monsieur ? puis j'en ai trois autres qui ne les paient pas, M. le Président. Imaginez! C'est ce genre de politique fiscale, M. le Président, que les gens n'acceptent plus. Et les gens se disent: Comment se fait-il que, moi, qui demeure dans une des six municipalités, je paie les 30 $ et que ma soeur, qui demeure dans la municipalité voisine, elle ne le paie pas, M. le Président? Puis, là, les gens appellent le député et disent: M. le député, c'est quoi, ces folies-là? Qu'est-ce que vous répondez? Qu'est-ce que vous répondez, M. le Président?

On se retrouve dans une situation pour dire: Écoutez, on est face à des politiques fiscales qui ne tiennent pas la route. On ne le dénoncera jamais assez, M. le Président. On ne le dénoncera jamais assez parce que c'est ce genre de situations où les gens décrochent, où les gens s'en vont vers une économie parallèle, où les gens s'en vont vers une économie au noir, parce que ces mesures, ils les comprennent et c'est à ce genre d'irritants, M. le Président, qu'il faut mettre fin.

Je pense qu'effectivement ces petites mesures fiscales créent beaucoup plus de pertes économiques qu'elles ne créent de recettes fiscales véritables, M. le Président. Alors, M. le Président, inutile de vous dire que cette double surtaxation rétroactive, qui a fait couler beaucoup d'encre, à mon point de vue, M. le Président,

va continuer à en faire couler, parce que, à toutes fins pratiques, on se rendra bien compte, d'ici cinq, six mois, quand on verra le budget final l'an prochain, que c'est ce genre de mesures que, à toutes fins pratiques, les gens n'acceptent pas et n'accepteront jamais, M. le Président.

Et les revenus autonomes! Les revenus autonomes, M. le Président, c'est basé sur la confiance économique des gens. Alors, à partir du moment où les revenus autonomes ne sont plus produits ? parce que le ministère du Revenu, c'est un système d'autocotisation, il faut produire nous-mêmes nos revenus au ministère ? et que ces revenus ne rentrent plus et ne sont plus déclarés au ministère, ça vous a donné quoi, de faire une double surtaxation? Ça n'a rien donné. Les gens ne vous les produiront même plus, leurs revenus, parce qu'ils ont décidé qu'ils se faisaient leur propre justice fiscale. M. le Président, c'est ça que le gouvernement doit comprendre. Il faut arrêter de légiférer dans ce genre d'irritants qui provoquent, au contraire, M. le Président, ce genre de situations où les revenus autonomes sont moins élevés. Ce n'est pas que l'économie est en régression, M. le Président; c'est que l'économie est devenue une économie parallèle. Les gens ont décidé qu'il fallait qu'ils vivent dans l'économie parallèle s'ils voulaient survivre. C'est aussi simple que ça.

Alors, M. le Président, je pense que le projet de loi que nous allons étudier... Bien sûr que nous, au niveau du revenu, on ne fait qu'appliquer une mesure fiscale, mais il faut profiter de notre droit de parole, quand même, M. le Président, pour expliquer les conséquences de ces mesures fiscales, pour toujours sensibiliser le législateur à faire des corrections qui, à toutes fins pratiques, méritent d'être faites.

Et je vais continuer l'absurdité de mes 30 $, M. le Président. Vous savez, tout à l'heure, je vous disais qu'il y avait trois municipalités sur six qui payaient les 30 $ et trois autres qui ne les payaient pas. M. le Président, dans l'application de ces 30 $, on a amené un concept qu'on appelle le «navetage».

Une voix: La pertinence!

M. Filion: Oui, c'est très pertinent. C'est pour expliquer comment la surtaxation rétroactive et les concepts sont importants, M. le Président. Alors, je pense que, quand on parle de la fiscalité, on parle de concepts où les gens n'acceptent plus ce genre de situations.

M. le Président, bien sûr, dans mes trois municipalités qui payaient les 30 $ et les autres ne le payaient pas, il y en a une, maintenant, avec les nouvelles statistiques de 1991... Parce qu'on marche avec un taux de «navetage» de Statistique Canada, un taux de «navetage» qui est établi aux 10 ans. On fait le recensement aux 10 ans, on établit un taux de «navetage» aux 10 ans et on peut, à partir de ce taux de «navetage», établir si on peut être exonéré.

Alors, M. le Président, à l'île d'Orléans, j'ai une quatrième paroisse qui devrait être exonérée. Depuis 1991, M. le Président, on devrait exonérer la paroisse de Sainte-Famille parce que le taux de «navetage» est moins de 50 %, M. le Président. Alors, j'ai bien sûr, récemment, sur la place publique, demandé l'exonération, M. le Président, des 30 $ pour Sainte-Famille. Mais, M. le Président, ça n'a pas de bon sens parce que, si on se base sur les statistiques de 1991, qui ont été rendues publiques en juin cette année, on devrait rembourser les 30 $ rétroactivement jusqu'à 1992, M. le Président, parce que le taux de «navetage» existait en 1991. (3 h 30)

Dans les faits, ils devaient être exonérés, mais on les a taxés, parce qu'on se basait sur le taux de 1981; de 1981 parce que les 1991 n'étaient pas disponibles. M. le Président, comment voulez-vous que les gens se sentent traités en toute équité, et, quand vous leur ajoutez à ça ce genre de situation de double surtaxation rétroactive, ils se disent: Bien oui, vous me rembourserez de façon rétroactive aussi parce que, moi, j'ai payé de façon injuste depuis 1991.

Ah, j'ai soulevé le débat, mais quand il s'agit de rembourser, M. le Président, j'ai l'impression que c'est plus compliqué un peu. Le gouvernement n'est peut-être pas tout à fait prêt à avoir une oreille en toute équité parce que, effectivement, on doit rembourser de façon rétroactive. Ces gens-là depuis 1991, dans les faits, sont exonérés. Ils sont exonérés et doivent être remboursés.

Alors, M. le Président, quand je vois arriver des doubles surtaxations rétroactives, ça me fait penser aux 30 $ qu'on doit rembourser de façon rétroactive. M. le Président, c'est ce genre de concept là qu'il faut éliminer de notre taxation. C'est ce genre de concept là, M. le Président, qui, à toutes fins pratiques...

M. Garon: Mon collègue fait un discours très important, je pense que ce serait bon qu'il y ait quorum.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, M. le député. On va vérifier. Alors, qu'on appelle les députés.

Alors, si vous voulez prendre place. Alors, nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi 112, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts et diverses dispositions législatives. Je cède la parole à M. le député de Montmorency pour qu'il poursuive son intervention.

M. Filion: Merci, M. le Président. Alors, j'étais sur le concept de la double taxation rétroactive et je faisais un parallèle avec les 30 $ qui occasionnent déjà, et, je pense, des situations de remboursement rétroactif. M. le Président, on a développé une fiscalité, chez nous, de mesures fiscales rétroactives, et je pense que c'est ce genre de situation là qui est décrié sur la place publique et que les gens n'acceptent plus.

Une autre mesure, M. le Président, que j'ai soulignée tout à l'heure, et dont j'aimerais parler un peu

plus en détail, c'est celle de l'abolition de la déduction générale du revenu d'emploi. Alors, l'introduction de cette mesure ne permettra plus au contribuable de déduire de son revenu d'emploi le moindre de 6 % de son revenu ou 750 $, lors de son prochain rapport d'impôt. On met une double surtaxation rétroactive et on enlève une déduction générale, une déduction générale qui rapporte 478 000 000 $ dans les coffres de l'État. C'est beaucoup d'argent. Plus, M. le Président, l'augmentation de la progressivité de l'impôt et de la double surtaxation rétroactive: on parle de 260 000 000 $. C'est des mesures, quand même, M. le Président, qui rapportent beaucoup d'argent qui va directement, de façon générale... et de façon... distribué à travers toute la masse salariale, qui est applicable, bien sûr, et qui est généré dans l'économie québécoise.

Inutile de vous dire que les gens l'ont vue, les gens l'ont ressentie, avec, bien sûr, les implications, au mois de juillet dernier. Et que les gens, depuis ce temps, M. le Président, se sentent, encore une fois, surtaxés et mal taxés... Je pense que ce genre de situation va simplement, à travers le temps, continuer à créer des tensions, va continuer à créer de l'animosité pour développer une économie parallèle.

M. le Président... non, ce n'est pas en conclusion. J'aimerais bien ça vous dire «en conclusion», mais je pense qu'on n'en parlera jamais assez. Vous allez mieux comprendre lorsque vous allez faire votre budget, au printemps prochain. Vous allez mieux comprendre où on est rendu dans notre économie. Vous allez mieux comprendre que vous ne serez même plus capable de l'équilibrer, votre budget, à l'Assemblée nationale, parce que les recettes n'entreront plus. Et c'est grave, M. le Président! C'est très grave, parce que c'est dans quels programmes sociaux qu'on va couper, M. le Président? C'est où qu'on va mettre la hache parce que les recettes n'entrent plus? Mais les recettes n'entrent plus parce qu'il y a des séries de mesures fiscales, des petites mesures, la petite goutte d'eau, M. le Président, qui fait en sorte que, à un moment donné, les gens décrochent, les gens y vont carrément dans l'économie parallèle. M. le Président, vous le savez, on le vit tous, à tous les jours: les gens consomment dans une économie parallèle. (3 h 40)

M. le Président, je pense que, bien sûr, en commission parlementaire, on va revoir toutes ces mesures-là, mais je profite du temps qui m'est consacré pour sensibiliser l'Assemblée, parce que, tout à l'heure, il y en aura d'autres mesures qui seront faites, il y en aura d'autres mesures qu'on étudiera. Mais j'espère qu'on va finir par prendre des notes quelque part dans ce Parlement pour qu'on commence à changer la philosophie de taxation, qu'on commence à changer la façon de voir nos politiques fiscales. C'est fondamental, et s'il y a des gens qui ne comprennent pas ça, M. le Président, ça va être terrible. Je sais qu'en cette Chambre il y a des gens actuellement qui ne comprennent pas, là, mais il faut que les gens comprennent, M. le Président, c'est très important.

J'aurais bien aimé parler, M. le Président, à une autre heure que 03 h 40 du matin, mais qu'est-ce que vous voulez, on m'a donné un temps de parole durant la nuit. Alors, il faut bien que je le prenne, M. le Président, c'est à cette heure-ci qu'on me l'a donné. C'est sûr qu'il y a moins d'auditeurs qui nous écoutent, ça, je peux comprendre, M. le Président, mais, au moins, il y a des députés ici en cette Chambre qui nous écoutent, M. le Président, et je pense qu'eux pourront, au moins à leur façon, transmettre l'information à la ministre des Finances qui a un budget à préparer bientôt, et elle doit comprendre que ce genre de mesures fiscales...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Lévis.

M. Garon: II serait bon de vérifier le quorum, parce que mon collègue fait un discours important.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, qu'on appelle les députés.

Veuillez prendre place. S'il vous plaît messieurs, mesdames. Je rappelle que nous en sommes à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 112 ? Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts et diverses dispositions législatives.

J'informe le député de Montmorency qu'il lui reste 32 minutes à son temps de parole. M. le député.

M. Filion: Merci M. le Président. Je vais utiliser de façon judicieuse ces quelques minutes qui me restent, M. le Président.

Alors, M. le Président, une autre mesure que nous allons voir dans ce projet de loi, ce sont les crédits d'impôt personnels, les allocations familiales qui resteront au même niveau cette année. Sauf que, M. le Président, tout comme je le disais tout à l'heure, avec le niveau de vie et les besoins essentiels, l'indexation, M. le Président, a été omise. On n'a pas indexé nos exemptions, on n'a pas indexé nos crédits, alors tout le concept qui avait été mis en place, M. le Président, le concept, je dis bien... Je parle de concept. Je ne parle pas de mesures, M. le Président. Les mesures, ça, elles sont là, elles ont été annoncées, mais je pense qu'il faut profiter des mesures pour dénoncer les concepts qui sont violés. Et un autre concept qui est violé, M. le Président, c'est celui des besoins essentiels.

C'est que notre fiscalité avait été prévue, avec le livre blanc, pour que personne ne soit taxé, tant et aussi longtemps que les gens n'ont pas gagné suffisamment de revenus pour payer leur coût de vie, pour payer leurs besoins essentiels de vie. Et ça, M. le Président, il faut le comprendre, le concept, et il ne faut pas y toucher. Si on accepte que les gens ne soient pas taxés avant qu'ils aient gagné suffisamment d'argent pour satisfaire leurs besoins essentiels, il ne faut pas y toucher, M. le Président, parce que si vous enlevez l'indexation à ces besoins essentiels là, vous venez tout simplement de

réduire le niveau de taxation, vous le mettez à un niveau plus bas, et les gens se retrouvent, bien entendu, à le payer, ce taux d'indexation là, le coût de vie est là. le coût de la vie, m. le président, il l'a pris, le 2 %. alors, si vous ne le mettez pas au taux d'indexation à l'exonération fiscale, les gens se retrouvent avec un seuil plus bas. si vous le mettez plus bas, à ce moment-là, il y a des gens qui paient une note fiscale, et c'est ça qu'il faut dénoncer, m. le président. ce n'est pas juste le 2 %, c'est le principe, c'est le concept qui est remis en cause. et je pense qu'on n'a pas à remettre en cause des concepts comme celui-là.

C'est ça qui fait, M. le Président, qu'on défait toute notre fiscalité, que notre fiscalité se retrouve toute croche et que tout le monde se retrouve à dire: Comment se fait-il que je paie encore plus d'impôt? Comment se fait-il que, l'année passée, je n'en payais pas et que, cette année, j'en paie? Bien, c'est ça, M. le Président, c'est parce qu'on est en train de ne pas... On oublie d'indexer ces exemptions-là et ces besoins essentiels de vie là, M. le Président. Je trouve ça malheureux, parce qu'on avait, effectivement, mis un concept en place. C'est vous, les libéraux, qui l'avez mis en place, ce concept-là, M. le Président, suite au rapport du livre blanc qui avait été fait en 1984-1985. Dès que vous êtes entrés au pouvoir, vous l'avez mis en place. Vous avez mis les crédits d'impôt en conséquence, vous avez reconnu ce concept-là, de besoins essentiels de vie, que les gens n'ont pas à payer d'impôt tant qu'on n'a pas satisfait nos besoins essentiels de vie. Vous l'avez mis en place, mais, aujourd'hui, vous compromettez ce concept-là quand vous n'indexez pas le coût de la vie. Et c'est important, M. le Président.

C'est très important. On n'a pas à aller chercher des fonds de tiroirs sur des concepts comme ça, comme on n'a pas à aller chercher des fonds de tiroirs sur des concepts de taux de «navetage» pour 30 $ de financement de transport en commun, M. le Président. Il faut que ces situations-là soient corrigées dans la législation. On n'a pas à légiférer d'une façon aussi bebête, M. le Président. On est capable de jouer avec les concepts fiscaux de façon claire, de façon... Sans équivoque, dire: Oui, prenons 2 % d'augmentation dans les tables d'impôt. Ça, c'est clair, M. le Président. Allons taxer les droits successoraux, ça c'est clair, M. le Président. Enlevons l'exonération de gains en capital, ça c'est clair, M. le Président. Mais d'y aller sur des mesures aussi petites qui défont des concepts, il faut le décrier, M. le Président. Oui, il faut le décrier, il faut arrêter ce genre de législation là. C'est ça qui rend les gens malades, c'est ça que les gens n'acceptent plus. Alors, qu'au ministère des Finances, M. le Président... Je sais que ces gens-là dorment. Ces gens-là dorment, bien entendu, mais, M. le Président, ils doivent comprendre qu'actuellement ils ont fait de la législation fiscale au Québec une situation qui n'est plus tolerable et qui n'est plus acceptable.

M. le Président, une autre mesure, bien sûr, qui, encore une fois... Celle-là, par rapport au concept,

M. le Président, elle est plus tolerable, c'est concernant les déductions fiscales. On change les déductions fiscales pour des crédits d'impôt. C'est moins alléchant pour le contribuable, mais, au moins, on ne déroge pas à des concepts fiscaux, M. le Président. On va chercher des deniers publics à travers une transformation des déductions fiscales pour des crédits d'impôt. Alors, cette mesure-là, M. le Président, va procurer 95 000 000 $. On fait juste changer la nature de la déduction pour des crédits et on va chercher 95 000 000 $ additionnels, M. le Président. Inutile de vous dire que ce genre de situation là va procurer des deniers publics intéressants à l'État. Quand je fais l'addition des petites mesures dont je viens de parler, M. le Président, on est rendu, écoutez bien, parce qu'on change les concepts fiscaux, parce qu'on est devenu un gouvernement qui se fout des concepts de base comme celui des besoins essentiels, on doit d'abord gagner nos besoins essentiels avant d'être taxé, on va aller chercher, en mesures fiscales additionnelles, 1 508 000 000 $. Et là, je ne parle pas de la taxation au noir que décriait le député de Lévis, avec le projet de loi 130, où on va chercher 1 000 000 000 $ à la Société de l'assurance automobile du Québec. Ça, c'est en plus, M. le Président. C'est en plus. Là, on a fait des mesures fiscales de surtaxation, on a défait nos concepts de taxation, on va chercher 1 508 000 000 $ de plus et, M. le Président, quand on regarde le dernier budget qu'on vient d'avoir ici, les deniers ne rentrent même pas, M. le Président, on est à court de 300 000 000 $ au niveau de l'impôt des particuliers. M. le Président, mais où on s'en va? À quelle place on s'en va? Bien, ce n'est pas compliqué, on a atteint le seuil des rendements décroissants. Arrêtez de surtaxer, vous avez atteint votre seuil. Il faut réaménager l'assiette, puis il faut revoir l'application de nos mesures fiscales pour s'assurer que les gens reviennent dans une économie contrôlée. L'économie parallèle, il faut que vous y touchiez. Il faut que vous commenciez à mettre en place des concepts pour changer l'orientation de l'économie parallèle. Tant qu'on va légiférer comme vous le faites, on ne pourra pas contrôler cette économie-là et elle va continuer à se développer. Et plus elle va se développer, plus on va avoir des problèmes, M. le Président, avec notre seuil des rendements décroissants. On ne pourra pas arriver à équilibrer nos finances publiques. Ce n'est pas possible. Ce n'est pas possible. C'est mathématique, M. le Président. C'est mathématique. (3 h 50)

Mais aussi, à travers toute cette application fiscale là, il faut garder en tête que les gens... Arrêtez de penser que les gens ne comprennent pas. Les gens, ils comprennent, M. le Président. Puis quand vous leur donnez une double surtaxe rétroactive, ils font plus que comprendre, M. le Président. Vous vous retrouvez avec une déclaration de revenu au ministre du Revenu où les revenus autonomes sont coupés pour 300 000 000 $ d'impôts l'année suivante. Qu'est-ce que vous avez gagné? Rien. Vous avez créé une tension, tout simplement, et on n'a absolument rien gagné.

La fiscalité, c'a des principes d'équité aussi, puis il faut respecter ça, il faut arrêter de s'en éloigner. Puis je vous le dis, le 30 $, il faut le revoir, parce que le 30 $, M. le Président, là, il y a des gens avec le niveau de «navetage» qui est sorti, il y a des municipalités qui vont redevenir taxables et qui étaient exonérées. Vous irez expliquer à des gens qui ne payaient par le 30 $, M. le Président, que, à partir de l'an prochain, il vont le payer, le 30 $. Ils ne comprendront pas. Puis d'autres qui le payaient ne le paieront plus? Ils ne comprendront pas, M. le Président. C'est ce genre de petites mesures là qu'il faut arrêter. Il faut vraiment arrêter, M. le Président. C'est ça qui vient, tout simplement, M. le Président, créer des tensions et ne rapporte presque rien à l'État.

M. le Président, un autre sujet qui touche également l'équilibre des finances publiques et qui touche en même temps, bien sûr, la fiscalité, M. le Président, et qui est très catastrophique et qui est devenu aussi un autre incitatif au développement de l'économie parallèle, c'est la contrebande du tabac, M. le Président. La contrebande du tabac, M. le Président, c'est devenu l'excuse par excellence. Ajoutez-la, la contrebande du tabac, à ce que je viens de vous dire, qu'on vient de bousiller nos concepts fiscaux des besoins essentiels, qu'on vient vous appliquer une double surtaxe rétroactive et qu'on regarde que la contrebande du tabac, on n'est pas capable d'y arriver avec notre législation fiscale. On marche avec une béquille. Ottawa nous laisse tomber.

Pourtant, on est tous d'accord, en cette Chambre, qu'on doit réduire les taxes. Mais comment se fait-il, M. le Président, que ça fait un an qu'on en parle, puis on ne les a même pas encore réduites, nos taxes, que c'est encore devenu l'exemple et l'excuse par excellence pour les gens de se faire leur propre justice fiscale? Rajoutez à ça la double politique fiscale qui existe entre autochtones et autres Québécois et Québécoises, M. le Président, où tout le monde se sent effectivement dans une double politique d'application fiscale, M. le Président... J'espère que vous n'êtes pas surpris de vous retrouver avec le déficit qu'on va avoir l'an prochain. On va probablement dépasser 5 000 000 000 $, M. le Président, puis peut-être même 6 000 000 000 $. Puis là, quand vous allez avoir fini de siphonner les sociétés d'État, là, à coups de milliards, vous allez vous retourner vers qui? La SAAQ, bien sûr. Mais la SAAQ, elle a des limites aussi. La SAAQ, une fois qu'on aura pris 1 000 000 000 $, M. le Président, il n'y en aura plus. C'est fini. On va aller où? On va augmenter les primes d'assurance des automobilistes par de la taxation indirecte déguisée?

M. le Président, les gens, ils nous voient venir avec nos gros sabots. Ils nous voient venir avec les gros sabots du gouvernement, M. le Président. Puis on va continuer, peut-être, d'y aller avec Hydro-Québec. Pourquoi pas? Ça fait un bout de temps qu'on y a avec Hydro-Québec. On augmentera la tarification de la consommation.

M. le Président, il faut que ça arrête, ce genre de situation là. Il faut mettre des mesures concrètes. Il faut corriger le tir. Et la contrebande du tabac est devenue effectivement un dossier, M. le Président, qui touche tout le monde, qui devient l'exemple par excellence que quand la contrebande est devenue légitime dans une société, tout le monde se dit: On peut faire n'importe quoi. On peut faire n'importe quoi. La contrebande, c'est légitime. M. le Président, c'est ça. Et tantôt, ça va être quoi, la facture de santé pour la contrebande? Avez-vous une idée? Savez-vous, nos jeunes, maintenant, depuis un an, comment ils ont développé une habitude à la consommation de la cigarette? Comment on va voir les jeunes dans nos cours d'école, on leur donne un paquet de cigarettes et on leur dit: Tiens, mon jeune, fume donc, fumes-en une, elle n'est pas chère, celle-là. Tu n'auras même pas besoin de l'acheter au dépanneur, on vient te la livrer dans la cour d'école. C'est ça. On vient de susciter un courant, M. le Président, où nos jeunes se retrouvent dans une situation où, à toutes fins pratiques...

M. Garon: M. le Président, je pense qu'il y aurait lieu de compter le quorum.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Lévis, vous avez une demande de quorum. Alors, qu'on appelle les députés.

Nous reprenons les travaux de l'Assemblée nationale. M. le député de Montmorency, vous disposez encore de 20 minutes. (4 heures)

M. Filion: Merci, M. le Président. M. le Président, j'étais à exposer toute la dynamique de l'économie parallèle et de la contrebande du tabac qui fait partie, à mon point de vue à moi, d'un incitatif majeur, incitatif majeur qui s'ajoute à tous ceux dont on vient de parler depuis maintenant tout près de 40 minutes, M. le Président. Et je pense que la contrebande du tabac... Je vous avoue, M. le Président, je regarde un peu ce qui se passe avec la ministre des Finances qui a eu une rencontre avec le fédéral tout récemment, et on se rend compte, M. le Président, qu'Ottawa est encore un peu indifférent à ce qui se passe chez nous, à ce qui se passe avec ce fléau économique catastrophique, M. le Président, le pire fléau économique des 50 dernières années, je dirais même du siècle, M. le Président.

C'est devenu, à toutes fins pratiques, je vous dirais, M. le Président, le pire des fléaux, parce que actuellement on perd au-delà de 1 000 000 000 $ de taxes. Je comprends que vous soyez rendus à faire de la surtaxation rétroactive, de la double surtaxation rétroactive. Juste avec le tabac, M. le Président, l'année dernière on avait prévu 628 000 000 $ d'entrées fiscales. Cette année, on en a prévu 360 000 000 $. Imaginez-vous! Puis, là, on parle de la taxe spécifique sur le tabac. C'est une des cinq taxes qui taxent les produits du tabac, M. le Président. La taxe spécifique sur le tabac, c'est une taxe parmi cinq taxes qui taxent les produits du

tabac, M. le Président. Et cette taxe-là, imaginez-vous, elle a été révisée à la baisse sur l'espace de un an. L'an dernier, on avait 628 000 000 $ d'entrées fiscales prévues sur la taxe spécifique sur le tabac; cette année, on a prévu 360 000 000 $. Et, selon les dernières données financières, la synthèse des opérations financières, M. le Président, la taxation sur le tabac, on s'attend à ce qu'elle soit moindre que 360 000 000 $.

Or, M. le Président, imaginez-vous dans quelle situation on se retrouve. On se retrouve dans une situation où, à toutes fins pratiques, on est en train de légiférer des lois fiscales, d'abord qui sont tout croches, des lois fiscales dont les concepts d'équité ne sont plus présents et non seulement nos concepts d'équité ne sont plus présents, mais on maintient toujours vivante une situation qui devrait être éliminée. Et, d'ailleurs, le ministre du Revenu est d'accord avec moi sur ça, depuis longtemps, mais on se rend compte que c'est maintenant Ottawa qui a le problème et Ottawa, à toutes fins pratiques, ne veut pas collaborer avec le Québec pour solutionner cette surtaxation-là, M. le Président, une sur-taxation qui n'est pas peu banale.

On parle de surtaxation depuis tout à l'heure, mais la surtaxation des produits du tabac, ce n'est pas peu banal. M. le Président. Quand on est rendus qu'on a 4,60 $ de taxes par paquet et qu'à New York on en a pour 1 $ de taxes par paquet, c'est une surtaxation quand même un peu particulière, merci. Et, M. le Président, tant que cette surtaxation-là ne sera pas éliminée à un niveau acceptable et concurrentiel avec le marché, je dirais, d'Amérique, on sera toujours avec une pression de contrebande qui sera toujours existante sur le territoire.

M. le Président, je vous dirais que cette situation doit cesser le plus rapidement possible, parce que la facture, tout à l'heure, on va l'avoir aussi. Il va y avoir des factures de dépenses de santé qui vont être phénoménales et, les recettes, on ne les aura plus.

Je comprends, M. le Président, quand on est dans une fin de régime, on est peut-être plus ou moins soucieux de ce genre de situation là, mais je pense qu'il faut être soucieux de ça et il faut passer les messages aux politiques fiscales. Les politiques fiscales doivent être redressées; les politiques fiscales, les irritants doivent être corrigés et cette situation-là, M. le Président, allons-y seul s'il le faut, le Québec, mais faisons un geste au niveau de la consommation et de la contrebande du tabac, M. le Président.

Et c'est dans cet esprit-là, M. le Président, qu'effectivement on se doit, comme parlementaires, d'insister à chaque fois que c'est possible de le faire, et c'est pour ça que je prends tout le temps qui est nécessaire, parce que je pense que cette partie-là du dossier demeure une partie majeure de l'économie parallèle. Pardon? Est-ce que j'ai encore 20 minutes, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Tantôt c'était 20, là, c'est 15.

M. Filion: Ah oui? Ça passe vite.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Soixante secondes à la minute. Allez-y, M. le député de Montmorency.

M. Filion: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, ce que j'étais en train de dire, je parlais de la surtaxation des produits du tabac. M. le Président, je voudrais informer cette Chambre, parce que, quand on parle de cinq taxes, il y a trois taxes qui sont perçues par le fédéral et...

Une voix: ...

M. Filion: Non, non, non. Je ne vous ai pas dit quelles taxes, M. le député.

Une voix: Tu répètes toujours la même chose.

M. Filion: Vous avez des droits d'accise, vous avez la taxe d'accise, au niveau fédéral, et vous avez la taxe de vente, au niveau fédéral. Alors, vous avez trois niveaux de taxes. Sur un paquet de cigarettes, par exemple, des droits d'accise, vous en avez pour 0,69 $, des taxes d'accise, vous en avez pour 1,29 $ et, des taxes de vente, vous en avez pour 0,41 $; le total, 2,39 $ pour le niveau fédéral. Et, quand vous comparez le niveau fédéral avec le niveau du Québec, M. le Président, vous avez une taxe spécifique sur le tabac de 1,72 $ et une taxe de vente de 0,48 $, ce qui fait 2,20 $.

M. le Président, quand je dis les mots «taxe de vente», encore une fois, je veux attirer votre attention sur un concept qui agresse les gens: la taxe sur la taxe. La taxe sur la taxe, ça a l'air anodin, ce principe-là, mais, la taxe sur la taxe, c'est ça. Quelqu'un disait que c'était écoeurant, eh bien, c'est ça, M. le Président. Les gens, quand ils paient la taxe sur la taxe, ils trouvent ça abusif. Mettez donc un taux d'imposition clair, mais pas la taxe sur la taxe. Ça a l'air de quelque chose que vous voulez forcer. Vous mettez des concepts que les gens n'acceptent pas: la taxe sur la taxe, la double taxation rétroactive, la contrebande du tabac, la surtaxation. M. le Président, ça n'a pas de bon sens. Et c'est ce genre d'irritants là, M. le Président, je vous le dis, les politiques fiscales doivent être orientées d'abord sur l'élimination des irritants. Qu'on arrête de galvauder et de compromettre nos principes de taxation, M. le Président, et peut-être qu'effectivement, à ce moment-là, on se rendra compte que l'économie parallèle... et les gens pourront peut-être penser à revenir dans une confiance de transactions économiques. Et c'est ça qui a été perdu à travers toutes ces politiques fiscales là, M. le Président. Je pense qu'on ne le dénoncera jamais assez.

Une autre situation, M. le Président, qui, je pense, touche de plus en plus et qui rend les gens agressifs: la taxation de l'essence, M. le Président. L'essence est, encore une fois, le produit au Québec qui est le plus taxé. On est les champions canadiens de la taxe sur

l'essence avec 0,19 $ le litre. Encore une fois, M. le Président, c'est de la surtaxation. Les gens s'en rendent compte. Les gens qui voyagent un peu, M. le Président, qui vont aux États-Unis et qui reviennent, disent: Voyons donc! Qu'est-ce qui se passe au Québec? Eh bien, ce n'est pas compliqué, ce qui se passe au Québec, c'est qu'on a la surtaxation sur l'essence, aussi. Alors, les gens se sentent surtaxés de partout, de tout bord et de tout côté en même temps, M. le Président.

Alors, M. le Président, inutile de vous dire qu'on a, à ce niveau-là également, quatre niveaux de taxation. Il faut arrêter de mettre des taxes, des taxes, des taxes, des taxes. Les gens se disent: Ça n'a pas de bon sens. Il faut revoir l'assiette fiscale, il faut revoir ce qu'on doit taxer. Il faut revoir comment on peut arriver à avoir une taxe qui va stimuler un développement économique concurrentiel. Pas un développement économique déloyal, pas un développement économique où on se dit: Si, moi, je consomme dans le système légal, je ne pourrai pas survivre, je me dois de consommer dans un système parallèle si je veux avoir suffisamment d'argent pour pouvoir fonctionner. M. le Président, je peux vous dire que la situation actuelle est une situation que je qualifierais de très catastrophique, parce que je pense que, si on ne commence pas immédiatement à faire des corrections d'orientation de nos politiques fiscales, M. le Président, le retour à une économie légale et à une économie de confiance va être de plus en plus... la période de retour va être beaucoup plus longue. M. le Président, eh bien, ce sera les gens qui, à travers cette consommation-là, seront préjudiciés. (4 h 10) et, moi, m. le président, je peux vous dire qu'effectivement les années à venir ne sont pas très roses, parce que, quand je revois encore ce projet de loi là, ici, devant moi, un projet de loi qui amène... bien sûr, il faut en prélever, des impôts! ça, on est tous d'accord avec ça, prélever des impôts. mais la façon de les prélever, par exemple, m. le président, c'est ça qu'il faut revoir. il faut la revoir, en même temps, en essayant de montrer l'équité d'application. c'est ça que les gens décrient. quand vous voyez comment les permis, hein... les permis ont augmenté de 300 %.

On paie des frais... Moi, M. le Président, d'ailleurs, je l'avais dit au ministre du Revenu. Quand c'est rendu qu'on fait affaire avec le ministre du Revenu puis qu'il faut payer nos frais pour faire affaire avec le ministre du Revenu, comme si nos impôts qu'on avait payés, ce n'était pas suffisant, 10 000 $, 12 000 $ ou 15 000 $, puis qu'on veut s'opposer à une cotisation, il faut payer un 20 $ additionnel, M. le Président, c'est ce genre de situation là que les gens se disent: Bien, voyons donc! Comment se fait-il qu'il faut que je paie 20 $ additionnel pour m'opposer à une cotisation parce que je pense qu'un vérificateur fiscal se serait trompé? Il faut que j'envoie un 20 $ additionnel si je veux qu'il y ait un réexamen de ma déclaration. M. le Président, c'est ça que les gens... Ils vous le disent, ils vous le reflètent dans l'économie qu'on vit. C'est ce qui se produit. Les gens consomment en parallèle, puis ils vous le démontrent; à tous les jours, M. le Président, à tous les jours, on vous le démontre.

Alors, M. le Président, inutile de vous dire que je ne décrierai jamais assez le concept de la double surtaxation rétroactive. Et je ne dénoncerai jamais assez le concept de «navetage» derrière la taxation du 30 $. Un concept de «navetage» que l'on réajuste aux 10 ans. Je ne le dirai jamais assez, M. le Président, je ne le dirai jamais assez.

Et, M. le Président, bien sûr qu'il y a une autre mesure, M. le Président, qui a l'air anodin, encore une fois...

M. Bélisle: Anodine!

M. Filion: Mais... Un fait anodin, un fait anodin, M. le Président. Je suis content de voir que le député de Mille-Îles est avec nous, M. le Président. bon, alors, m. le président, une autre mesure fiscale que j'aimerais... qui a été annoncée avec le dernier budget, qui a été annoncée avec le dernier budget, m. le président. et la mesure est très simple, c'est concernant la restriction à l'égard des frais de représentation. m. le président, vous ne pouvez pas vous imaginer. et, là, m. le président, ces gens-là qui sont à tendance, je dirais, d'affaires ? on sait que les libéraux ont toujours eu une vision d'affaires ? bien, vous autres, qui avez une vision d'affaires, vous avez une mesure fiscale qui, à mon point de vue à moi, m. le président, n'aurait pas dû être. quand on est rendu qu'on coupe les frais de représentation à une entreprise, qu'on les coupe au niveau de la déduction fiscale... us avaient droit à une déduction fiscale de 80 %, on la ramène à 50 %, m. le président. bien, c'est comme si vous disiez à l'entreprise: on ne veut plus t'encourager à te développer, puis on ne veut plus t'encourager à ce que tu sois connu, puis on ne veut plus t'encourager à ce que tu puisses faire des affaires avec les gens, parce que, nous, on va réduire ta déduction fiscale de 80 % à 50 %, m. le président. des frais de représentation, c'est important, m. le président. une entreprise qui fait du commerce a besoin de se faire connaître, elle a besoin de rencontrer des gens. bien oui! il faut qu'elle aille voir des gens dans des situations, par exemple, de repas, dans des situations de loisirs. il y a des frais qu'une personne doit encourir si elle veut, effectivement, se faire connaître et développer des affaires, m. le président. et il y avait une mesure dans la loi fiscale, m. le président, qui permettait, quand on faisait une dépense de la sorte ? de frais de représentation, pour se faire connaître et développer sa business, comme on dit ? il y avait une mesure qui accordait une déduction de 80 % du montant qu'on payait. alors, le dernier budget, dans sa vision, dans une vision économique éclairée ? que je ne sais pas où elle l'a prise, cette vision économique éclairée là ? est venu réduire l'incitatif, est venu réduire l'incitatif à 50 %.

M. le Président, ça a l'air de rien, mais c'est ce genre de mesure là qui fait que la personne va limiter ses dépenses de frais de représentation. Puis, en limitant ses dépenses de frais de représentation, elle nuit à son propre développement économique, à son propre développement d'affaires, M. le Président. Et, quand j'ai vu ce sur quoi on s'était basé pour amener cette politique fiscale là, on s'était basé, M. le Président, sur un comparable avec les Américains, qui vont bientôt le réduire; les Américains, M. le Président, ne l'ont pas réduit. Puis, moi, je trouve ça drôle qu'on se compare aux Américains pour ce genre de mesure là et qu'on ne se compare pas aux Américains quand on parle de la surtaxation du tabac, par exemple. On joue un double discours, M. le Président. Par rapport aux États-Unis, on taxe quatre fois et demi le tabac chez nous, puis, quand vient le temps d'appliquer une mesure incitative à l'économie, bien, là, on va se raccrocher aux Américains. Mais, M. le Président, les États-Unis n'ont même pas encore légiféré pour couper cette déduction-là. Les Américains, M. le Président, n'ont pa encore légiféré. Nous, on est en avance. On est en avance pour enlever les incitatifs à nos entrepreneurs. On est en avance pour enlever le développement économique à nos entrepreneurs.

Et, M. le Président, je pense qu'effectivement c'est une mesure qui nuit considérablement. Ça nuit considérablement parce que les gens se disent: Bien, coudon, qu'est-ce qu'on va devoir faire, nous, au Québec pour développer notre entreprise? Qu'est-ce qu'on va devoir faire, nous, au Québec pour retrouver une justice et une équité fiscale? Et les gens se retrouvent, bien sûr, dans des situations où, à toutes fins pratiques, M. le Président... Je pense que ces gens-là se demandent véritablement comment ils peuvent arriver à équilibrer leur propre budget, à équilibrer leurs opérations, leurs revenus, leurs dépenses. Est-ce qu'il doivent le faire dans un système parallèle ou s'ils doivent le faire dans un système légal?

M. le Président, on sait que, dans la contrebande du tabac, les contrebandiers se font concurrence. Et c'est normal. Et tout le monde trouve ça normal. M. le Président, je comprends que vous ayez des problèmes d'équilibre budgétaire. Je commence à comprendre pourquoi ça ne fonctionne pas. C'est bien sûr, M. le Président, on ne peut pas équilibrer un budget de finances publiques avec une économie parallèle qui se développe à outrance, M. le Président.

Et, M. le Président, encore une fois, on est allé taxer des avantages aux employés, des cotisations versées par un employeur pour l'assurance-vie collective, pour les régimes d'assurance-maladie. On leur rajoute ça, M. le Président. Une autre mesure fiscale, un autre petit clou. On vient de rajouter. La masse salariale, on vient lui en donner un autre coup, et les gens se retrouvent, encore une fois, avec une mesure fiscale qui touche l'individu.

M. le Président, je pense que la dernière mesure que j'ai dénoncée tout à l'heure et à laquelle je veux revenir, c'est la question des crédits d'impôt: crédit d'impôt pour remplacer la déduction de l'assurance-chômage; crédit d'impôt pour remplacer la déduction de la Régie des rentes; crédit d'impôt pour remplacer la déduction pour dons de charité, un crédit d'impôt qui est limité à 20 % quand on aurait pu, avec l'ancien système, se rendre jusqu'à 25 % de déduction fiscale.

Et, M. le Président, moi, je pense que l'orientation qu'a prise le dernier budget... Et le projet de loi qu'on est appelé à étudier en commission parlementaire, ce projet de loi là, M. le Président ? oui, M. le Président ? ce projet de loi là qui va être appelé à être étudié en commission parlementaire est une série de mesures fiscales qu'il faut dénoncer. Il faut les dénoncer. On va l'étudier, on va l'adopter. Je le sais, M. le Président. Puis on ne pourra pas changer grand-chose, je le sais, M. le Président. Sauf qu'au moins, M. le Président, en cette Chambre, on peut dire qu'on est sur une mauvaise route, une mauvaise orientation, une allure de législation qui n'a plus sa place, une taxation qui est très malade, une économie qui est très malade. Ça va ensemble, ça. Ce n'est pas dissociable. Et les gens sont mal taxés. Il faut que vous envoyiez des messages aux politiques fiscales. Ces gens-là doivent comprendre. Je comprends qu'ils n'ont plus de marge de manoeuvre. Mais, quant à faire quelque chose, il faut bien le faire. Il ne faut pas le faire croche, il faut le faire avec des ponctions fiscales qui, au moins, ne seront pas injustes et inéquitables, M. le Président. Merci de votre attention.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Montmorency. Alors, nous sommes à discuter de la motion proposant l'adoption du principe du projet de loi 112. M. le député de Lévis, je vous cède la parole.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention les propos de mon collègue de Montmorency. J'ai constaté qu'il n'a pas été aussi sévère qu'il aurait pu l'être concernant le projet de loi puisque les gens, au Québec, sont surtaxés. Et actuellement, la taxe est devenue le principal frein au développement de l'économie. (4 h 20)

Je regardais, il y a quelques mois, au début de l'année 1993, il y a quelqu'un de ma famille qui est allé à Cuba, qui m'a rapporté un cigare, un bon cigare, un Monte-Cristo, et qui m'avait dit qu'il avait payé la boîte de 25 cigares no 3,53 $ américains. Ce qui veut dire, en dollars canadiens, à peu près 70 $. Je voulais voir combien ça coûtait ici, une boîte de 25 cigares qui coûtaient 70 $ à Cuba, et je suis allé à la Tabagie Giguère. J'ai demandé quel était le prix d'une boîte de 25 cigares, qui coûtaient 53 $ américains à Cuba, c'est-à-dire 70 $ en monnaie de ce moment-là, du début de janvier 1993, combien ça coûtait, cette boîte de 25 cigares, qui coûtait 70 $ en dollars canadiens à Cuba et 53 $ américains,

combien ça coûtait ici. Savez-vous combien ça coûte, M. le Président? 430,80 $! Pas un frigidaire, une petite boîte de 25 cigares! Et, si vous les achetez à l'unité, c'est près de 20 $, comme si quelqu'un qui fume un cigare commet un crime contre l'humanité.

Quand je regarde les cigarettes aujourd'hui, M. le Président... Moi, j'ai arrêté en septembre 1981. À 1,25 $ le paquet de 25, je trouvais que c'était trop cher. J'ai arrêté de fumer en septembre 1981. Quand je vois qu'aujourd'hui les gens paient 6 $ ou 7 $, ceux qui paient le prix courant, ceux qui n'achètent pas leurs cigarettes en contrebande, qu'ils paient 6 $ ou 7 $, 6,50 $, 7 $ du paquet, je me dis: il y a quelque chose qui ne va pas dans notre société.

Quand on va aux États-Unis, on paie un gallon de gaz 1,06 $, 1,08 $, 1,10 $, dépendamment de l'État. Ici, c'est presque aussi cher du litre. Il y a quatre litres et demi dans un gallon américain. Ici, on est à 0,60 $ du litre de gaz: 0,193 $ le litre de taxes. Il n'y a aucun État américain qui charge plus que 0,19 $ du gallon, M. le Président! Nous autres, on est à 0,193 $ du litre! Avant longtemps, on chargera les taxes au demiard pour pas que ça paraisse trop, ou à la chopine, M. le Président.

On regarde les repas: 15,56 % de taxes. Ça n'existe nulle part en Amérique du Nord. Nous sommes malades, M. le Président! Malades! Avec un système de taxation exhorbitant, abusif, injuste, inéquitable, qui, en fait, est un frein au développement économique actuellement.

Et, quand vous regardez le projet de loi qui vient en remettre, qui vient en remettre, M. le Président: «L'inclusion, dans le calcul du revenu d'emploi, de la valeur de l'avantage découlant des cotisations d'employeurs à certains régimes d'assurance»... Vous avez, d'un côté, le ministre de la Santé qui veut mettre des tickets modérateurs pour ne pas que le monde se fasse soigner et, d'un autre côté, vous avez le ministre du Revenu qui met des taxes pour vos régimes d'assurance privés. On dit: On va te poigner! Tu es malade? On va te poigner! Comme si, être malade, encore là, c'était un crime. On va poigner le citoyen en disant: On va te taxer parce que tu as un régime d'assurance dans l'entreprise où tu es. Qu'est-ce qu'on va faire en résultat, M. le Président? On va décourager les entreprises d'avoir des régimes d'assurance collective.

On a vu, cette semaine, les gens des entreprises qui disent: Arrêtez ça! Ça n'a pas de bon sens! Nous sommes sans doute le seul endroit, encore là, en Amérique du Nord, qui fait un tel système d'imposition. Nous sommes malades, M. le Président! Nous abolissons la déduction générale pour revenu d'emploi. Il y avait quelque chose qui touchait les gens, il y avait une déduction pour revenu d'emploi, un montant minime, quelques centaines de dollars. On a dit: On va vous l'enlever. On va vous l'enlever. «La transformation en crédits d'impôt des déductions pour dons ou pour cotisations à l'assurance-chômage ou à un régime de rentes». On veut, en fait, faire quoi? Pénaliser les gens. Pour l'assurance- chômage, ce soir, on voyait, de façon incroyable, que l'assurance-chômage augmenterait peut-être en janvier de 7 %. Pourquoi? Parce que le gouvernement, aujourd'hui, qu'est-ce qu'il fait, M. le Président? C'est lui qui qualifie des gens pour les envoyer sur Fassurance-chômage, parce que ce n'est pas lui qui collecte les taxes sur Fassurance-chômage, ce sont les employés et les employeurs qui paient une cotisation d'assurance-chômage et qui font le pot de l'assurance-chômage. Et le gouvernement, qui agit comme un bandit, qu'est-ce qu'il fait? Il qualifie des gens qui devraient avoir des mesures sociales pour les faire retirer de l'assurance-chômage pour ne pas qu'ils émargent à son budget. Et vous regardez les pêcheurs, par exemple, de Terre-Neuve, qu'est-ce que le gouvernement fait? C'est lui qui leur donne des montants d'argent pour les qualifier sur l'assurance-chômage pour qu'ils sortent du budget fédéral, pour qu'ils tombent sur le budget de ceux qui paient de Fassurance-chômage, M. le Président. Parce que là ce n'est pas le gouvernement qui collecte des taxes, ce sont les employés et les employeurs qui paient des cotisations.

C'est rendu aujourd'hui, M. le Président, que le gouvernement, ce n'est pas un organisme qui nous protège, c'est un organisme dangereux. Les gens apprennent actuellement à détester le gouvernement, à détester l'État, M. le Président. Pourquoi? Parce que, essentiellement, c'est lui qui adopte toutes sortes de mesures qui abusent des citoyens. on a vu, il y a quelques années, la nouvelle-zélande qui a été dans un régime, à peu près semblable au nôtre, de surtaxation, de surtaxation. là, il y a eu des esprits brillants là-bas qui ont dit: on va faire des gros projets pour repartir le moteur. on s'est rendu compte qu'on avait endetté davantage la nouvelle-zélande. et, finalement, de quelle façon est reparti le moteur en nouvelle-zélande? essentiellement en baissant les impôts. d'un taux marginal de 60 % on l'a baissé à 30 %, m. le président. nous sommes à un taux marginal de 60 % ici, si on tient compte de l'impôt fédéral et de l'impôt provincial. nous sommes à un taux marginal de 60 %, où l'incitatif, il est où? où les gens n'ont plus d'incitatif à travailler.

On voyait sur le journal qu'il y a 20 % des gens à Montréal qui vivent de l'aide sociale, une personne sur cinq, puis il y en a de plus en plus; 150 000 000 $ de plus qu'on avait prévu. Il n'y a plus d'incitation à travailler. Il n'y a plus d'intérêt à travailler. Pourquoi? Parce que ceux qui paient vraiment les taxes telles qu'elles sont fixées par le gouvernement sont en train de devenir la minorité. Puis on va varger davantage, avec un projet de loi comme celui-là, sur l'honnête citoyen, M. le Président. Alors, l'incitatif maintenant, c'est d'être au noir. D'autant plus que le gouvernement se met au noir lui-même. Quand il va siphonner la caisse de la Société de l'assurance automobile, il taxe au noir. Il prend de l'argent comme si c'était une taxe, alors que c'est une prime d'assurance. Il taxe au noir, puis il se demande comment ça se fait que les gens font ça. Les

gens, ils font comme le gouvernement. Ça n'a pas de bon sens, M. le Président!

Nous sommes dans une société où il y a un problème structurel majeur. Ça ne m'étonne pas que le ministre du Revenu, M. le Président, ait décidé de ne pas se représenter aux prochaines élections. Ça ne m'étonne pas. Ça ne m'étonne pas parce qu'il sait qu'il n'est plus capable de faire les bilans du gouvernement. Quand quelqu'un ne veut plus se représenter, il ne veut plus défendre le bilan du gouvernement, puis il dit: Je m'en vais chez nous; on a assez fait de folies.

Vous savez, le député de Beauce-Sud ne se représente pas lui non plus. Il va retourner dans le bicycle. Il va retravailler sur le pédaleur automatique, voyez-vous. Il dit: J'ai assez pédalé dans le vide dans le gouvernement. Vous rappelez-vous qu'ils disaient: Nous sommes des hommes d'affaires. Nous allons gérer ça comme des hommes d'affaires. Ah, certainement! Le voyage d'ambulance qui coûtait 75 $ pour tout le monde, aujourd'hui, il est rendu à 3000 $ pour la Société de l'assurance automobile, puis il est rendu à 3000 $ pour ceux qui sont sur l'aide sociale. Je vais vous dire, administrer le Québec comme des hommes d'affaires, on serait en faillite, s'il fallait administrer le gouvernement. Une chance que, des hommes d'affaires, on en a pas trop! C'est ceux qui nous coûtent le plus cher dans le gouvernement, M. le Président, parce qu'ils ne savent pas la valeur de l'argent.

Une voix: M. le Président, j'aimerais vous rappeler que nous n'avons pas le quorum.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Qu'on appelle les députés!

(4 h 29 - 4 h 32)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Lévis, on vous écoute.

M. Garon: M. le Président, on devrait m'écou-ter davantage. Si le gouvernement m'écoutait davantage, l'économie irait mieux.

Des voix: Ah! Ah!

M. Garon: Je vois les députés qui ont l'air épuisés. On est à la veille d'ouvrir la cuisine. Là, on entend les rasoirs électriques qui commencent à partir pour se faire la barbe. Il est 4 h 30 du matin. On dit: Taxons les gens. On n'a pas assez du jour; maintenant, on les taxe à 4 h 30 du matin. Ça veut dire que ça marche jour et nuit, la taxe au Québec, avec un député de l'Abitibi qui ne se représente pas. Il ne se représente pas.

Et, en plus, M. le Président, on veut suspendre pour un an l'indexation des montants représentant la valeur des besoins essentiels. Là, on est rendu vraiment dans le fond du baril. On dit: Maintenant, on n'indexera pas la valeur des biens essentiels. Qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire que les biens essentiels, l'an pro- chain, on aura moins d'argent pour les payer, les biens essentiels, puisqu'il n'y aura pas d'indexation concernant les biens essentiels. La suspension pour un an de l'indexation des montants représentant la valeur des biens essentiels reconnue dans le régime d'imposition, ça veut dire que les gens vont être même taxés sur les biens essentiels, M. le Président. Il n'y a pas de limite au gouvernement. Il n'y a pas de limite.

Puis, en plus, il en a assez taxé. Il a enlevé la déduction pour l'emploi. Il taxe les biens essentiels. Il inclut les cotisations pour des régimes d'assurance collective. Puis, après ça, là, il va faire le summum, M. le Président: en plus d'avoir mis la TPS au fédéral, puis la TVQ dont on taxe une partie de la TPS, il introduit une surtaxe pour les particuliers. Donc, dans le régime d'impôt, une fois qu'on verra tant d'impôt à payer, vous aurez une taxe sur la taxe, comme si, en payant une taxe, c'était l'équivalent d'avoir acheté un produit pour lequel vous payez une taxe. Il y a la taxe sur la taxe. On est en train de généraliser le système de taxation de la taxe, M. le Président. Ça rend les gens dégoûtés, M. le Président. C'est un système abject où on taxe la taxe, comme si la taxe était un service que le gouvernement nous rendait ou un produit qu'il nous donnait. On met une taxe sur la taxe, M. le Président.

On s'en va en banqueroute. 46 000 000 000 $ de déficit à Ottawa. Cette année, malgré le milliard qu'on prend dans la caisse de l'assurance automobile, on a un déficit de 5 000 000 000 $. Ça veut dire: déficit réel, 6 000 000 000 $, M. le Président, cette année. Pourquoi? Parce qu'on a des apprentis administrateurs publics. Des gens qui se sont mis administrateurs publics, qui se sont inventés administrateurs publics. On est cassé, mais quand il y a une allocation de départ pour quelqu'un qui part: 150 000 $. Le sous-ministre qui devient juge: 200 000 $ d'indemnités, comme si on le pénalisait en le nommant juge, alors qu'il va gagner plus cher comme sous-ministre adjoint à la Justice.

M. le Président, on a l'impression de vivre dans un asile public où, actuellement, dans les administrateurs publics, il y a des gens qui ont besoin de se faire examiner, M. le Président. C'est un asile. Et les gens regardent ça, découragés, découragés, complètement découragés. Ils n'en peuvent plus, M. le Président. Ils sont épuisés par le gouvernement qui les taxe sans arrêt, d'une façon illimitée et sans retenue. Le premier ministre s'en va. Bien oui, il s'en va. Il s'en va parce que, lui, il sait bien que la situation est désespérante et désespérée, M. le Président. Le premier ministre a décidé de quitter le bateau. C'est facile une fois que tu as mis le monde dans les récifs, dans une mer, comprenez-vous, démontée où vous ne contrôlez plus rien. Le capitaine dit: Je m'en vais. Organisez-vous. Et les matelots sautent à l'eau. Combien y a-t-il de députés et de ministres qui ont dit qu'ils ne se représentent pas parce qu'ils sentent que maintenant, pas capables de faire face à leur bilan devant la population, trop gênant, M. le Président. Puis, aujourd'hui, on a vu le summum. On a fait un bâillon, on ne voulait même plus enregistrer les votes

des députés, M. le Président ? c'est quelque chose ? pour ne pas qu'on puisse montrer aux gens comment ils avaient voté.

Et aujourd'hui, nous sommes à 4 heures 37, étudiant un projet de loi pour taxer davantage les citoyens. M. le Président, le gouvernement de Robert Bourassa a été un malheur entre 1970 et 1976 puis il laisse un héritage épouvantable en quittant, en s'en allant vers les prochaines élections. Un héritage épouvantable. Et les Québécois qui ont eu la faiblesse de voter libéral vont le payer amèrement, amèrement. Et je vais vous dire qu'aux prochaines élections il n'en restera pas beaucoup de cette tangence libérale. Ils vont être mis à la retraite, mis à la retraite, M. le Président. Pourquoi? Parce qu'ils n'ont pas préservé l'intérêt public. J'ai demandé au ministre tantôt: Le gouvernement fédéral a mis, il y a quelques années, une mesure d'équité fiscale, qu'on appelle l'équité fiscale, où les gens peuvent revenir sur leurs rapports d'impôt jusqu'en 1985. Le gouvernement du Québec? Ah! non. Lui, il reste trois ans en arrière, ça suffit.

M. Jolivet: M. le Président. Mon collègue a besoin de tranquillité, et je vois...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous demandez le quorum?

M. Jolivet: Non, non. Je ne demande pas le quorum pour le moment. Je veux juste vous demander une question.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y.

M. Jolivet: Est-ce que vous pouvez demander aux deux estafettes du Parti libéral d'arrêter de se promener?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, vous demandez... Continuez votre intervention, M. le député de Lévis. Je vous rappelle qu'il vous reste une minute.

M. Garon: Une minute.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): 60 secondes.

M. Garon: Je peux vous dire que ce sont des centaines de milliards qui vont couler pendant cette minute-là, parce que c'est un projet de loi, M. le Président, qu'on nous présente aujourd'hui de près de 200 pages. 197 pages, 251 articles pleins de taxes. On taxe pendant 200 pages de temps les citoyens en plus. Et là, on prend les plus pauvres, ceux qui ont le moins d'argent, et on fait toutes sortes de manigances, et je ne serais pas étonné, M. le Président, que le gouvernement essaie de déclencher des élections avant son prochain budget, c'est-à-dire avant le mois de mai, sans doute au mois de mars ou avril, pour ne pas que les gens voient l'effet de ce budget épouvantable avant la présentation d'un prochain budget et, possiblement même, avant le dépôt des crédits de la troisième semaine de mars. Mais nous sommes prêts à aller en élections et à retourner aux douches ce gouvernement qui est nuisible pour la population.

(4 h 40)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: ...

M. Garon: Mais, M. le Président, avant que le député collègue ne commence, j'aimerais bien qu'on ait le quorum en cette Chambre.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle les députés! (4 h 41 - 4 h 47)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Nous reprenons les travaux de l'Assemblée nationale. M. le député de Laviolette.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. J'étais un peu surpris quand, il y a maintenant près d'une heure ? oh! près de deux heures, je crois, environ ? quand le ministre responsable du ministère du Revenu a présenté un projet de loi qui fait suite au budget, un projet de loi, comme le disait mon collègue de Montmorency, de 197 pages, M. le Président; 197 pages, 251 articles. J'étais surpris de voir l'empressement qu'avait le ministre, en le présentant, de s'asseoir. J'étais surpris, mais habitué de le voir agir de la même façon, parce que j'ai eu l'occasion de voir le ministre dans d'autres dossiers, dans les mines, en particulier, à l'époque où j'avais à participer à des commissions parlementaires, et le ministre semble un peu désenchanté de présenter de tels projets de loi. On ne sent pas, chez lui, le goût de défendre plus qu'il ne faut les propositions qui ont été faites, dans un discours du budget, par le ministre responsable de l'époque.

Mais je ne peux pas passer sous silence cette possibilité que j'ai de pouvoir faire des commentaires, d'autant plus qu'il y a un principe qui indique que à force de forger on devient forgeron, dit-on dans le dicton, à force de planter toujours le même clou, un peu comme le principe pédagogique que l'on a, c'est... On essaie d'entrer le principe qu'on défend dans l'esprit des gens, dans la mentalité des gens, de leur donner la chance de bien comprendre. (4 h 50)

Je me souviens, mon collègue responsable des finances, le député de Labelle, à plusieurs occasions, est revenu sur un fait. Il a posé des questions à la ministre par intérim, et qui est maintenant la ministre en titre des Finances, sur une question qui était importante, M. le Président. Cette question, elle est, dans les notes

explicatives, indiquée de la façon suivante: que nous modifions la loi des impôts... Et on donne les mesures qui font suite à ce budget, et on dit: «Ces mesures concernent notamment: Ie l'inclusion, dans le calcul du revenu d'emploi, de la valeur de l'avantage découlant des cotisations d'employeurs à certains régimes d'assurance^

Et là, je suis toujours, dans ma mémoire, prêt à rappeler ce que disait le député de Labelle aux questions posées à la ministre: Est-ce que vous avez l'intention de revenir en arrière et d'enlever la taxation que vous avez mise, l'impôt que vous avez mis sur les primes d'assurance payées par l'employeur, que vous considérez comme étant un revenu pour l'individu qui en profite? Et, à maintes occasions, le député de Labelle est revenu sur cette question, soit ici par des questions à la période de questions, soit ailleurs.

Dernièrement, pas plus tard que voilà deux jours, à la télévision, les compagnies d'assurances ont répété, ont martelé, ont indiqué, de la même façon que mon collègue de Labelle, les difficultés que comportait une telle mesure et qui avait pour effet de faire en sorte qu'il y aurait peut-être moins d'assurance; que les gens, compte tenu de ça, se désassureraient et, par le fait même, ça aurait, comme le disait mon collègue de Montmorency, comme mesure déposée dans le budget, un effet inverse à celui que voulait avoir le ministre des Finances, c'est-à-dire d'aller récupérer de l'argent. Si les gens ne paient plus, n'achètent plus de ces primes d'assurance, si l'employeur n'en donne plus, on ne peut pas les taxer, ce n'est pas des revenus.

Mais là, me revenaient à la mémoire des choses que j'avais entendues et qui me paraissaient énormes, et, je dois vous dire, tellement énormes que je ne les croyais pas jusqu'à ce que, hier soir ? puisqu'on est vendredi ? aux nouvelles de jeudi soir, à 23 heures, à TVA, un journaliste nous indique exactement ce dont on avait entendu parler à l'époque et que mes collègues avaient mentionné à des ministres responsables, d'une vieille dame de 70 ans, dépassée, malade à cause d'une crise de coeur, avec du Parkinson, qui avait été obligée de laisser son loyer, était maintenant dans des loyers modiques ? dans son cas à elle je crois que plutôt que d'un loyer modique, c'est plutôt dans un centre d'accueil ? et qui recevait des services ? écoutez bien, là ? monétaires pour payer quelqu'un qu'elle engageait par le CLSC. Je m'explique. Pour venir en aide à cette personne, pour éviter que ça coûte plus cher à la société, pour ne pas être laissée dans un hôpital de soins de longue durée, placée dans un centre d'accueil, on lui disait: Madame, le CLSC va vous venir en aide et à tous les mois il va vous verser 100 $ pour vous permettre de vous engager quelqu'un. M. le Président, je m'excuse...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Allez-y.

M. Jolivet: Je m'excuse, M. le Président. Je vous demande l'ordre, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Ça va. Ça va.

Il y a des réactions à votre intervention. Pour le moment, ça va, allez-y, M. le député de Laviolette.

M. Garon: M. le Président, il y a un règlement et il va falloir que vous l'appliquiez. Les gens sont supposés être assis. Ce n'est pas la terrasse Dufferin, ici, d'abord.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant! Un instant!

M. Garon: Les députés sont supposés être assis à leur siège. J'aimerais que vous appliquiez le décorum qu'on est supposé avoir dans un Parlement. Si les gens sont trop fatigués, ajournons, M. le Président, tout simplement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): L'ordre est respecté. Si vous demandez, et vous pouvez l'exiger, que chaque député soit à sa banquette... Demandez-le. C'est ce que vous venez de faire. Quant au reste, ça allait bien. Chaque député à sa banquette. Vous savez, M. le député de Lévis, des réactions à une intervention, en autant que les réactions sont normales, ça fait partie évidemment des débats parlementaires. Allez-y, M. le député de Laviolette. Allez-y, M. le député de Laviolette.

M. Garon: En vertu de notre règlement, les députés sont supposés être assis à leur siège; ils ne sont pas supposés se promener comme si on était sur la terrasse Dufferin. S'ils veulent prendre une marche, ils peuvent aller dans les corridors. J'aimerais ça que vous fassiez appliquer le règlement sans qu'on soit obligés de le signaler à chaque fois. Alors, ce n'est pas une terrasse, ici. Il y a la terrasse Dufferin pour ceux qui veulent aller prendre une marche, mais...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant, un instant! Alors, j'invite chaque député ? il est 5 heures du matin et non pas de l'après-midi ? à respecter les prescriptions de nos règlements, particulièrement l'article 32, qui traite du décorum. Je pense que je n'ai pas à insister, vous connaissez les règles autant que moi. M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: M. le Président, ce n'est pas de notre faute si on est obligé de parler à cette heure-là. D'autant plus, M. le Président, que j'aimerais bien parler dans le calme. Ce que je suis en train de dire, c'est quelque chose qui est arrivé, qui est exact, et qui mérite que, comme députés de l'Assemblée nationale, on se la pose, la question, pour voir si c'est normal ou pas normal. Si, au moins, on me laissait expliquer ce que moi-même j'ai entendu, comme plusieurs Québécois et Québécoises ont entendu, hier soir, à 23 heures, je suis assuré, M. le Président, que les gens ne réagiraient pas de cette façon.

Ce que je suis en train d'expliquer...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je n'ai pas l'intention de me lever à toutes les 30 secondes. Si vous décidez de rester à l'intérieur de l'Assemblée nationale, faites-le en respectant les prescriptions auxquelles j'ai fait référence tout à l'heure, l'article 32 particulièrement. C'est une règle qui vaut à n'importe quel moment, qu'il soit S heures de l'après-midi ou S heures du matin. Je n'ai pas l'intention de me lever à toutes les 30 secondes. M. le député de Laviolette, continuez.

M. Jolivet: J'étais en train de dire, M. le Président, qu'une dame a reçu un avis du ministère du Revenu ? laissez-moi finir...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Jolivet: M. le Président, il n'a pas parlé bien, bien quand c'était le temps de parler du projet de loi. Laissez-moi expliquer. Un avis du gouvernement fédéral comme quoi elle avait un revenu. Mais en vertu des lois qui nous gouvernent et des ententes- qu'il y a entre le fédéral et le provincial, je ne suis pas sûr qu'elle ne recevra pas la même chose du provincial. On verra bien! Mais, il y a une chose qui est certaine, c'est que cette personne s'est fait dire qu'elle était un employeur, et que, comme employeur, elle devait faire en conséquence des remises à l'impôt pour d'abord, le salaire qu'elle avait reçu et transmis à une autre, puisqu'on considère que c'est un revenu, les 100 $ qu'elle reçoit du CLSC. Puis, parce que la personne qui a reçu les 100 $ en contrepartie des services qu'elle a rendus à la personne, et qui a demandé, compte tenu de son état, un congé de maternité, cette jeune femme, les gens se sont agglutinés, si je peux prendre le terme bien français, autour de cette pauvre vieille personne pour aller lui dire: Madame, vous deviez faire des remises à l'impôt. Vous n'avez malheureusement pas de numéro d'employeur. Vous n'avez pas fait de remise au Régime de rentes. Vous n'avez pas fait de remise à l'assurance-chômage. C'est quoi, ça, Madame? Comme si cette pauvre dame, à qui on rend service et qui coûte moins cher à la société, devait être embarrassée, à son âge, avec la maladie qu'elle avait, par des conditions qui n'ont pas de bon sens. Ce n'est pas de parler dans les airs, c'est de parler de sa réalité de tous les jours. C'est une réalité qui n'a pas de bon sens. Et qu'a répondu le ministère ? fédéral, pour le moment? C'est qu'il a dit: Ça, je ne veux pas en faire une victime, mais je suis obligé d'aller au bout avec ça pour prouver si j'ai tort ou raison. Ce n'est pas à elle à subir les contrecoups de décisions comme telles, M. le Président.

Mais, quand on regarde le projet de loi qui est devant nous, qui parle de l'ensemble des mesures fiscales, on a crainte de penser que ça pourrait arriver. Si, en plus, on regarde la partie qui concerne les assurances, c'est une chose qui peut se comparer, M. le Président. L'individu qui est un employé, pour lequel l'employeur paie une prime d'assurance, on considère que c'est du revenu pour l'individu, et qu'en conséquence il doit payer. C'est ça qu'on dit. Ça donne quoi, comme résultat? Dans le cas de la vieille dame, c'est qu'on va arrêter de lui en donner, de l'argent. On va s'organiser quoi? On va l'amener dans un centre d'accueil avec soins prolongés ou à un centre hospitalier de soins prolongés. Ça va coûter plus cher à l'ensemble de la société que les petits 100 $ qu'on lui donne. (5 heures)

D'un autre côté, dans le cas des assurances, on va donc désassurer les gens parce qu'ils n'en prendront plus. L'employeur va refuser d'en donner. C'est elles-mêmes qui l'ont dit, les compagnies d'assurances. C'est eux-mêmes qui l'ont dit, les employeurs, que ça n'a pas de bon sens. La demande qui a été faite par mon collègue, c'est: Est-ce que la ministre des Finances a l'intention de présenter un budget soustrayant cette partie-là? La réponse, nous l'avons, ce soir, cette nuit, c'est: Non, nous continuons. Malgré le bon sens, le ministre continue à vouloir dire: J'ai un budget devant moi, je ne changerai pas, je ne bougerai pas.

Un autre exemple, M. le Président, que je peux donner et qui est réel, celui-là aussi. En vertu des lois qui gouvernent à la fois le Québec et le fédéral, une personne qui est autochtone ne paie pas d'impôts, de taxes, quand elle est sur la réserve. En dehors de la réserve, quand elle travaille, qu'elle gagne un revenu, c'est autre chose. Je parle sur la réserve. Il y a quelqu'un qui, un jour, décide de soumissionner comme constructeur de maisons dans des réserves chez moi, où est Weymontachie, à Obedjiwan, à Manouane. Cette personne-là décide de soumissionner, va voir les Indiens, les Amérindiens ? on les appelle les Attikameks, chez nous ? et elle leur dit: Écoutez, messieurs dames, voilà, j'ai mon numéro et avec ça je suis exempt de taxes. La personne, qu'est-ce qu'elle fait? Elle construit des maisons préfabriquées. C'est une entreprise reconnue. Elle bâtit les pans de mur, la toiture, les fermes de toit, de plancher dans l'usine. Elle prend tout ça, amène ça sur le site et, ensuite, remonte la bâtisse tel que prévu, et les Amérindiens habitent la bâtisse.

On revient cinq ans plus tard. On dit: Monsieur, c'est de valeur, je suis obligé de vous «charger» la taxe que vous n'avez pas retournée, je suis obligé de vous «charger» une pénalité pour ne pas l'avoir fait, plus les intérêts. Le gars dit: Oui, c'est drôle, je ne suis pas supposé payer de taxes puisque l'Indien n'en paie pas, j'ai marqué le numéro de l'Indien, du conseil de bande. Savez-vous ce qu'on a répondu, à la fois au fédéral comme au provincial? On a répondu: Mon Dieu, Seigneur, ce n'est pas vrai. Qui est l'utilisateur de la maison? On dit: L'Indien, c'est lui qui vit dedans. C'est l'Amérindien qui vit dedans. Us ont dit: Non, non, non, c'est le gars qui l'a construite. Il dit: Je ne comprends rien. Oui, il aurait fallu que tu aies deux contrats: un contrat pour faire la bâtisse et un autre contrat pour l'amener là-bas et la bâtir là-bas. Oui, mais il dit: Si je fais ça, cela veut dire que je vais payer des taxes. Qu'a répondu le fonctionnaire au fédéral? Bien oui, c'est normal. L'utilisateur du matériau, c'est la compagnie

constructrice parce qu'elle fait des modules. En conséquence, elle aurait dû «charger» la taxe et vendre à l'Indien, à cet Amérindien-là plus cher. C'est ce qu'on me répond. Il a dit: Oui, mais il ne paie pas de taxe. Ah oui, mais tu avais juste à la mettre dedans, à «charger» le prix global et à dire au gars qu'il ne payait pas de taxe.

Là, il n'y a plus rien à comprendre. Savez-vous que ça a coûté 90 000 $ à l'entreprise? C'est 90 000 $. D'abord, quelque 48 000 $ parce qu'elle n'a pas payé les taxes, plus une pénalité, plus les intérêts. 90 000 $ en temps de récession actuel, M. le Président! Ce n'est pas des mensonges que je vous conte là. C'est la réalité. Je suis allé jusqu'au ministère auprès des fonctionnaires, auprès du cabinet du ministre pour discuter de cette question-là. La réponse qu'on m'a donnée, M. le Président, c'est flou. Là, quand je regarde ça, M. le Président, je me dis: Où est le bon sens? Où est le sens pratique? Où est le sens qui indique justement, si on n'a pas à »charger» de taxes, pourquoi on va être pénalisé pour ne pas l'avoir demandé? Je m'excuse.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le député.

M. Khelfa: M. le Président, il reste combien de temps pour le député?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Richelieu, M. le député de Laviolette dispose de huit minutes encore.

M. Khelfa: Est-ce qu'on peut demander la pertinence...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Trois minutes.

M. Khelfa: ...pour les trois minutes qui lui restent? La pertinence, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): C'était pertinent, à date. Continuez, M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: C'est huit ou trois?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Trois. Quatre minutes exactement.

M. Jolivet: M. le Président, je dois vous dire que j'essaie de démontrer que, dans un projet de loi comme celui-là... Parce que, si le député de Richelieu avait pris la peine de le regarder, s'il avait pris la peine de voir l'ensemble des projets qui sont dedans, peut-être qu'il aurait été un peu moins impertinent, M. le Président.

Je vais vous donner un autre cas: assujettissement des membres d'une société civile au paiement de l'impôt sur les opérations forestières. À 16° des notes explicatives. Je vais vous en donner d'autres. «Il modi- fie, en neuvième lieu, la Loi sur la taxe de vente du Québec afin d'y apporter des modifications de concordance reliées à l'introduction dans la Loi sur les impôts des mesures portant sur l'imposition de la valeur des cotisations versées par un employeur à certaines régimes d'assurance.»

M. le Président, j'ai été pertinent jusqu'à maintenant. C'est justement dans ce sens-là que je dis: Quand on met des taxes comme celles-là et que, finalement, on pénalise des gens en plein temps de récession parce qu'on n'est pas capable de déterminer la zone dite grise ? c'est ça qu'on m'a dit, on m'a parlé d'une zone grise ? bien, il me semble que c'est peut-être le temps de corriger des zones comme celles-là, M. le Président, dans le contexte d'un projet de loi qui parle de mesures fiscales, de permettre à des gens de savoir s'ils doivent payer ou pas des taxes, s'ils doivent payer ou pas des impôts, mais de quelle façon ils doivent les payer, ces taxes et ces impôts, M. le Président.

M. Garon: M. le Président, avant que mon collègue entreprenne sa conclusion, j'aimerais qu'il y ait quorum, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle les députés! (5 h 7 - 5 h 9)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Laviolette, vous avez 60 secondes pour conclure.

Une voix: Deux fois trop!

M. Jolivet: M. le Président, vous savez, quand on fait de la violence verbale comme on fait là, on ne peut pas le permettre longtemps. Non, mais c'est dérangeant, M. le Président, hein! Quand il y a quelqu'un, ici, en arrière de moi et que c'en est trop pour lui, peut-être que lui en a trop; moi, je n'en ai pas trop.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je n'ai rien entendu de tout ça. Allez-y.

M. Jolivet: Mais, moi, je l'entends, M. le Président. Mais écoutez...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Je ne l'ai pas entendu, moi.

Continuez votre intervention, s'il vous plaît!

M. Jolivet: Je la commence, là, parce que c'était une question de règlement que je faisais.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Continuez votre intervention.

M. Jolivet: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Vous avez 60 secondes.

M. Jolivet: ...donc, j'étais en train de dire que, dans l'ensemble, ce projet de loi, nous aurons l'occasion de le regarder profondément en commission parlementaire. J'espère que le ministre va être plus volubile qu'il ne l'a été lors de la présentation de ce projet de loi: quelques secondes pour cacher les intentions qu'ils ont de taxer davantage par des formules totalement inédites, dont l'assurance-vie payée par l'employeur, dont les formules qui sont prévues dans les notes explicatives et qui ont été très bien expliquées par mon collègue responsable de ce dossier, le député de Montmorency. Alors, M. le Président, il est évident qu'on ne peut pas accepter de telles choses. Je vous laisse maintenant le soin de proposer un autre intervenant dans ce dossier. (5 h 10)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Laviolette. Alors, je suis prêt à entendre le prochain intervenant. Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudières. Allez-y, Mme la députée.

Mme Denise Carrier-Perreault

Mme Carrier-Perreault: Oui, je vous remercie, M. le Président. M. le Président, il est 5 h 10 du matin, je sais que les gens sont très fatigués, en tout cas, le monde semble très fatigué à ce moment-ci, mais j'aimerais quand même rappeler à mes collègues ministériels, s'ils trouvent le temps long, qu'on n'est pas nécessairement très nombreux à intervenir et qu'on ne fait pas un chahut d'enfer, nous de l'Opposition officielle, même s'il y a des projets de loi qui nous ont été déposés ici, ce soir, pour adoption de principe, qui sont très controversés et qui sont très discutés par rapport à l'ensemble de nos populations.

Vous savez, M. le Président, depuis 11 heures hier soir, on a eu à discuter de neuf projets de loi, à date. C'est le neuvième projet de loi dont on discute depuis 11 heures hier soir. Il y a eu les trois projets de loi du ministre de la Main-d'oeuvre et de la Sécurité du revenu, et vous vous rappellerez, M. le Président, que le projet de loi 128 est un de ceux qui sont très contestés, très contestables aussi. Ensuite de ça, on a eu, évidemment, les projets de loi du ministre de la Justice, trois en ligne. Ensuite de ça, on s'est ramassé avec deux projets de loi privés, M. le Président. Puis, présentement, on est sur le projet de loi sur la fiscalité, un projet de loi, bien sûr, qui ne fait l'affaire de personne.

L'Opposition s'est déjà prononcée lors des discours qu'on a faits après le dépôt du budget. Je pense qu'il n'y a pas de surprise pour personne: on n'est pas d'accord avec le projet de loi, on n'est pas d'accord avec la façon de fonctionner du gouvernement. Et je pense que nous, les députés de l'Opposition, qui sommes, à toutes fins pratiques, la voix des gens qui sont en désaccord avec les ministériels, c'est à nous de nous prononcer aussi au minimum, de façon minimale en tout cas, à tout le moins, sur ce genre de projet de loi.

M. le Président, on se rappellera de certaines mesures du discours du budget. Vous savez, à chaque année, quand arrive le moment du dépôt du budget, la population, les gens commencent à avoir un petit peu peur de ce que va annoncer le gouvernement, parce que, depuis quatre ans, on a eu, à tout bout de champ, à chaque année, des mesures qui ont vraiment déplu, qui coûtent très cher à nos populations. Cette année, quand on a vu le discours du budget, je me souviens que, dans cette Chambre... M. le Président, habituellement, on voit les députés qui applaudissent leur ministre des Finances à la minute où il fait un bon coup, mais, cette année, contrairement aux années antérieures, M. le Président, dans cette Chambre, au moment du dépôt du discours, quand M. le ministre des Finances a fait son discours du budget, on a vu les visages, de part et d'autre, s'allonger. Même du côté ministériel, ça a fait comme un grand silence, c'était très tranquille.

Je pense que le projet de loi qu'on a devant nous vient justement, M. le Président, mettre en application ? en fait, mettre en application, non, c'est un bien grand mot ? vient rendre conformes 13 lois, parce qu'on sait que les mesures qui découlent du discours du budget sont automatiquement mises en application. Alors, ce projet de loi qu'on a devant nous, très technique d'ailleurs, comporte 251 articles, mais on sait très bien que ce genre de projet de loi découle des mesures complètement impopulaires lors du discours du budget.

Je pense que c'est important d'en rappeler et quelques-unes, M. le Président. Entre autres, on se rappellera que c'est lors du dernier budget qu'on nous a annoncé, pour aller chercher un peu plus de sous, par rapport aux dernières trouvailles du gouvernement libéral, l'inclusion, dans le calcul du revenu d'emploi, de la valeur de l'avantage découlant des cotisations d'employeurs à certains régimes d'assurance. Alors, on considère maintenant que, si l'employeur donne des cotisations sur des régimes d'assurance-vie ou d'autres formes d'assurance, bien, ça fait partie des revenus d'emploi, donc que c'est des revenus imposables pour les travailleurs.

C'est aussi lors du dernier budget qu'on a appris l'abolition de la déduction générale pour revenu d'emploi; une autre petite perle. La transformation en crédits d'impôt des déductions pour dons ou pour cotisations à l'assurance-chômage ou à un régime de rentes; celle-là, elle est un petit peu plus technique. Les gens l'ont peut-être vue un petit peu moins passer, mais il reste que c'est, encore là, une façon d'aller chercher des sous chez les contribuables. C'est dans ce budget aussi qu'on a trouvé la suspension pour un an de l'indexation des montants représentant la valeur des besoins essentiels reconnus dans le régime d'imposition.

Et, finalement, M. le Président, il y a plusieurs autres mesures, mais la plus grosse mesure, celle qui a le plus fait mal, qui a le plus touché notre monde, vous le savez, M. le Président, c'est la fameuse introduction de la surtaxe pour les particuliers, surtaxe qui, en plus, s'est appliquée de façon rétroactive à partir de juillet. On a commencé en juillet, mais on nous avait dit, en mai, que ça devait partir de janvier, donc qu'à partir de

juillet on la paierait en double. Bien sûr, en janvier prochain, les gens vont voir une légère amélioration parce que, là, ils vont pouvoir commencer à payer en simple, finalement, parce que, là, elle ne sera plus rétroactive. Ils payent en double depuis juillet, bien, ils vont avoir une légère diminution par rapport aux prochaines paies de janvier. C'est peut-être une amélioration, comme on pourrait dire, M. le Président, si on peut parler d'une amélioration.

Mais il reste que ces mesures-là, c'était du jamais vu en soi. Une surtaxe rétroactive, ça a fait couler beaucoup d'encre. L'Opposition s'était beaucoup prononcée là-dessus et disons que la population a eu beaucoup de difficultés à prendre ça. Nos contribuables ne l'ont pas trouvée drôle du tout, M. le Président, et je pense qu'il faut encore le répéter, il ne faut pas que les gens oublient ce genre de mesures que le gouvernement libéral nous impose.

Si, au moins, M. le Président, toutes ces façons d'aller chercher des sous chez les contribuables, dans les budgets des gens, ça avait contribué à équilibrer les finances publiques, on se dirait: Ils ont peut-être fait un effort, ce n'est pas drôle pour les gens, tu sais, c'est coinçant pour un certain temps, mais, au moins, peut-être que ça a permis d'améliorer. Mais, là, ce soir ? ce soir... je devrais dire ce matin, M. le Président ? quand on parle de ces mesures, au moment où on se parle, on sait très bien que le budget du gouvernement non seulement n'est pas équilibré, mais que le déficit comme tel... On parle de 4 500 000 000 $, quoique le président du Conseil du trésor parlait d'à peu près 5 000 000 000 $. Finalement, on se rend compte que l'équilibre, c'est loin d'être chose faite au niveau des finances publiques.

M. le Président, depuis les quatre dernières années, je le disais tout à l'heure, le budget du gouvernement a rendu les gens du Québec, les Québécois, un petit peu plus pauvres à chaque année. On a eu toutes sortes de taxes, des taxes directes, des taxes indirectes. Mon collègue de Montmorency parlait des fameux 30 $. Celle-là, je dois vous dire que ça a fait mal dans Montmorency, on le sait. Il y a des problèmes majeurs par rapport à l'île d'Orléans où plusieurs municipalités sont touchées alors qu'elles ne profitent d'aucun service.

Mais je peux vous dire que, dans le comté des Chutes-de-la-Chaudière aussi, on ne l'a pas trouvée drôle, cette mesure-là, M. le Président, parce que plusieurs des municipalités ne profitent pas des services publics, non plus. Des municipalités, chez nous, ont des services d'autobus privés et, en plus, elles doivent payer la fameuse surtaxe, les fameux 30 $ sur les permis, les enregistrements, pour finalement remettre les fonds à la CTCUQ qui est sur la rive nord et dont les gens ne peuvent pas bénéficier, à toutes fins pratiques. Alors, nous autres, chez nous, on paye les 30 $, mais les fonds ne vont pas dans la compagnie publique, dans l'entreprise publique qui est Trans-Sud pour la rive sud de Québec. Les fonds, 24 $ sur 30 $, s'en vont dans la compagnie d'autobus publique de la rive nord, de Québec.

On n'a pas le métro, nous autres, mais le ministre nous a dit: Ah, on a fait la même chose sur la rive sud de Montréal, vous allez avoir la même affaire chez vous. Pourtant, nous autres, chez nous, il n'y a pas de métro, il n'y a pas de connexion, si on veut, entre les deux réseaux de transport public. Chacun y va chacun pour soi. Le transport public de la rive nord fonctionne pour lui-même, le transport public de la rive sud fonctionne pour lui-même. On a coupé les subventions aux deux niveaux présentement. Les 30 $ sont répartis de façon très inégale, très inéquitable. La compagnie de la rive sud avec 6 $, la compagnie de la rive nord qui reçoit 24 $, et tout ça de nos contribuables, M. le Président.

J'en avais d'ailleurs parlé, de cette mesure-là. Je vois le ministre régional de notre région qui est ici, qui est encore ici avec nous, à cette heure-ci, M. le Président. Je l'avais mis au courant de cette situation-là. Mon collègue de Lévis en a longuement discuté, en a longuement parlé et, pourtant, rien n'y fait, rien n'y a fait: la rive sud continue d'être pénalisée par cette mesure qui pénalise beaucoup de citoyens. Et tout continue comme si de rien n'était, M. le Président, malgré les différentes démarches. Je sais que les gens de chez nous font encore des démarches présentement pour au moins, au moins essayer de récupérer une partie des montants pour rééquilibrer et refaire un peu le ménage dans leur propre système de transport. J'espère que les réponses seront plus intéressantes et plus favorables. C'est vrai, M. le Président, qu'il y a des élections qui s'en viennent; alors, peut-être que le gouvernement pourrait essayer de faire un effort pour faire croire au monde qu'il est capable de faire un effort de temps en temps. (5 h 20)

Bref, M. le Président, je n'ai pas l'intention, moi, de faire 20 minutes complètes là-dessus. Je pense que, comme Opposition officielle... Je savais, M. le Président, qu'il y a certains députés ministériels qui comprennent le discours qu'on tient ce soir ici. Je suis certaine que plusieurs d'entre eux, depuis le fameux discours du budget, ont pu être sensibilisés par leurs propres contribuables, parce que, eux aussi, M. le Président, ont des bureaux de comté et ont à rencontrer leurs concitoyens qui vont sûrement leur dire les mêmes choses que nos concitoyens viennent nous dire, à nous autres. D'ailleurs, on reçoit beaucoup de correspondance à cet égard-là. Le député de Lotbinière est voisin, M. le Président, de chez moi. Je connais beaucoup de gens de Lotbinière, puisqu'on est de comtés limitrophes, à toutes fins pratiques. Il y en a même qui rencontrent le député de Lévis, à l'occasion. Bref, plus sérieusement, M. le Président, je suis persuadée que tous, même les députés ministériels, sont conscients du mal que ces mesures ont causé. Parce que, même si on adopte le projet de loi ce soir, on le sait, il est en application. Le projet de loi est en application. Alors, on sait l'ampleur des problèmes qu'on a pu causer à l'ensemble de nos contribuables.

Nous, à l'Opposition, on était contre. On est encore contre, c'est bien évident. Et je suis persuadée qu'il y aura des 'discussions entre mon collègue de Montmorency et le ministre du Revenu. Le ministre du Revenu pourra en profiter pour discuter plus longuement de ce projet de loi là, parce que, semble-t-il, c'est un des derniers projets de loi qu'il aura à discuter, en tout cas, en matière de revenu. Alors, M. le Président, c'est pour ça que je tenais à m'exprimer. C'est pour ça que je voulais me prononcer aussi en tant que représentante des citoyens...

M. Garon: Avant que ma collègue finisse, M. le Président, j'aimerais demander le quorum.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le député de Lévis. Qu'on appelle les députés, s'il vous plaît! (5 h 23 ? 5 h 25)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, si vous voulez prendre place, s'il vous plaît! Je vous informe que nous en sommes toujours à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 112, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts et diverses dispositions législatives. Je cède la parole à Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière pour lui permettre de terminer son intervention.

Mme Carrier-Perreault: Oui, M. le Président. Alors, j'en étais à terminer mon intervention, tout simplement pour dire que, malgré l'heure tardive, je tenais quand même à intervenir en tant que représentante des citoyens de mon comté et pour représenter, aussi, l'opinion de tous les gens au Québec qui en ont assez, plus qu'assez, d'être surtaxés. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur ce projet de loi? Alors, le principe du projet de loi 112, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts et diverses dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Un vote enregistré?

M. Filion: M. le Président, vote enregistré. Nominal.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Le vote nominal est demandé.

M. Bélisle: Bon. Alors, M. le Président, je fais une motion pour reporter le vote à la période...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader adjoint du gouvernement.

Vote reporté

M. Bélisle: Je vous remercie, M. le Président. Alors, je fais motion pour reporter le vote à la période des affaires courantes de ce matin, 10 décembre, vendredi, à votre convenance, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, à votre demande et en vertu du règlement, le vote est reporté à l'Assemblée, ce matin, à 10 heures, après les affaires courantes, à l'item «Votes reportés». M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Merci, M. le Président. Et, étant donné que nous faisons du bon travail, nous vous demandons d'appeler l'article 10.

Une voix: Bravo!

Projet de loi 140 Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 10, M. le ministre responsable des lois professionnelles propose l'adoption du principe du projet de loi 140, Loi modifiant le Code des professions et d'autres lois professionnelles. M. le ministre responsable des lois professionnelles.

M. Raymond Savoie M. Savoie: Merci, M. le Président.

Une voix: Lui, il est bon!

Des voix: Bravo!

M. Savoie: On constate, malgré l'heure avancée, c'est-à-dire qu'on approche du déjeuner, que, de ce côté-ci de la Chambre, là, on sent...

Une voix: Le dynamisme.

M. Savoie: ...une sincérité, un dynamisme.

Des voix: Bravo!

M. Savoie: Je dois dire que, de votre côté, ça s'essouffle, ça s'essouffle! Il n'y a pas de doute.

Des voix: Bravo!

M. Savoie: Force est de le constater. Alors, M. le Président, nous abordons aujourd'hui le débat sur l'adoption du principe du projet de loi 140, Loi modifiant le Code des professions et d'autres lois professionnelles.

Voilà 20 ans, un ministre du gouvernement de

M. Robert Bourassa se levait dans cette Chambre pour proposer un ensemble législatif qui allait doter le Québec de règles et d'institutions propres à protéger le public dans le domaine professionnel. Il s'agissait alors de légiférer de la façon la plus complète possible sur la protection du public. Des professionnels, constitués en ordres, recevaient alors le mandat de maintenir les conditions essentielles de cette protection, à savoir le contrôle de la compétence des professionnels, la vérification de leur pratique, l'élaboration de l'application du code de déontologie qui fixerait les règles fondamentales de comportement et, enfin, un dispositif d'enquête et de discipline permettant aux ordres professionnels de sanctionner les manquements de leurs membres.

Ce système, impliquant d'autres partenaires importants tels que le Conseil interprofessionnel du Québec et l'Office des professions du Québec, était une innovation en 1973. Il demeure, en 1993, une formule gagnante, tout comme il représente un modèle de structure et d'efficacité pour nombre de nos voisins canadiens ou américains. En effet, nos voisins envient ce système caractérisé par l'autogestion, le jugement par les pairs et qui n'implique qu'une intervention limitée de l'État.

C'est donc pour moi, en tant que ministre du gouvernement de M. Robert Bourassa, un honneur de me lever à mon tour en cette Chambre, 20 ans plus tard, pour proposer l'adoption d'un projet de loi qui, sans remettre en cause...

Des voix: Bravo!

M. Savoie: ...qui, sans remettre en cause les grands principes du système mis en place en 1973, vise à tirer les leçons de l'expérience.

Ce projet de loi est la plus importante modification envisagée aux lois professionnelles. Il se situe dans le prolongement de l'avis que l'Office des professions du Québec m'adressait en octobre 1990 sur le système disciplinaire des professions. L'Office recommandait alors de rendre le système disciplinaire plus transparent, plus accessible, plus rapide et moins coûteux. La législation que vous avez devant vous s'adresse en grande partie à cette question. Elle comporte aussi d'autres dispositions importantes relatives, notamment, à l'assouplissement du processus réglementaire, à l'assurance-responsabilité professionnelle, à la citoyenneté, au statut et à l'action du Conseil interprofessionnel du Québec, de même qu'à la prévention comme à la sanction des abus sexuels. (5 h 30)

Les aménagements que nous proposons au système professionnel ont fait l'objet d'une consultation importante depuis 1990. Ainsi, en mai 1990, l'Office a consulté le Conseil interprofessionnel du Québec et chacun des ordres professionnels sur l'exigence de la citoyenneté canadienne. En septembre 1990, il consultait le Conseil interprofessionnel du Québec sur les hypothèses relatives aux mécanismes disciplinaires. En novembre 1990, le Conseil interprofessionnel du Québec et chacun des ordres professionnels ont été consultés sur la base de l'avis que l'Office me remettait sur la discipline. À la même époque, l'Office consultait, sur le même sujet, le Protecteur du citoyen et certains groupes, telle la Fédération nationale des associations de consommateurs. En mars 1991, l'Office a consulté, toujours sur le même sujet, le président de comités de discipline et le Tribunal des professions. Une consultation a également eu lieu auprès des secrétaires des comités de discipline des ordres les plus actifs en discipline. En juillet 1991, l'Office consultait le Conseil interprofessionnel du Québec et chacun des ordres professionnels sur l'assouplissement du processus réglementaire. En octobre 1991, l'Office consultait le Conseil interprofessionnel du Québec et chacun des ordres professionnels sur la réglementation relative à l'assurance-responsabilité professionnelle.

Au terme de ce long processus de consultation, l'Office a préparé, à ma demande, un avant-projet de loi qui a été présenté devant l'Assemblée nationale en décembre 1992. En février et mars 1993, la commission de l'éducation a tenu une consultation générale sur cet avant-projet de loi qui, en quelque sorte, est la souche de celui qui vous est proposé actuellement. Cette consultation a permis de recevoir et d'entendre 60 mémoires ou groupes qui ont fait valoir les points de vue les plus divers. On a pu alors constater que les orientations de l'avant-projet de loi, élaborées sur la base des recommandations de l'Office, se situaient à mi-chemin entre ce qu'auraient voulu le Protecteur du citoyen et des groupes de consommateurs, d'une part, et ce qu'auraient voulu bon nombre d'ordres professionnels, d'autre part. L'exercice s'est montré des plus utiles. Le moins que l'on puisse dire est qu'au terme de longs échanges en commission l'Opposition a déclaré que l'avant-projet était des plus constructifs.

Depuis, l'Office a retravaillé, à ma demande et souvent en ma présence, plusieurs aspects de l'avant-projet de loi et plus de 20 rencontres de travail ont eu lieu avec l'Office, le Conseil interprofessionnel du Québec et plusieurs autres intervenants pour affiner le projet et tenir compte des nombreuses suggestions qui nous ont été faites.

Enfin, pour chaque loi professionnelle dont une modification est prévue au présent projet, l'ordre professionnel concerné a été consulté et j'ai moi-même consulté les principaux intéressés sur ce qui fait l'essentiel de ce projet.

Le projet maintient l'objectif général de protection du public en tant que priorité de l'État mais ne remet pas en cause les deux caractéristiques du système professionnel que sont le jugement par les pairs et l'autogestion des professions. En effet, nous ne transfigurons pas le système mis en place en 1973 avec le Code des professions. De même que l'autonomie participe à la définition de ce que c'est l'activité professionnelle, l'autogestion des professions reste avec ce projet une des caractéristiques essentielles de notre système.

Pour bien comprendre le but et la portée, de

même que les limites de ce que ce projet propose, il faut se rappeler que, voilà 20 ans, le Code des professions innovait en mettant en place un système voué tout entier à la protection du public et qui, en même temps, laissait aux ordres professionnels le soin d'organiser eux-mêmes les aspects essentiels de leur profession et de veiller à la déontologie et à la discipline en vue de la protection du public. Le législateur donnait aux ordres ainsi constitués le mandat clair de protéger le public et les dotait, à cette fin, des structures claires et homogènes pour réglementer, surveiller et discipliner la pratique professionnelle. Le gouvernement laissait aux professionnels la charge de faire la preuve que les ordres professionnels peuvent efficacement assumer cette protection.

Il s'agissait alors d'un pari pour le gouvernement * qui, rappelons-le, a délégué aux ordres professionnels d'importantes prérogatives de puissance publique. Ce pari a-t-il été tenu? Et le système mis en place par le Code des professions reste-t-il un cadre adapté à l'objectif de la protection du public? L'autogestion et le jugement par les pairs se sont-ils, à l'expérience, révélés compatibles avec cet objectif de protection? Beaucoup ont encore la perception d'un système qui protégerait les intérêts des professionnels avant ceux du public. Le défi de l'Office et du gouvernement a été, ces dernières années, de discerner ce qui relève du préjugé et ce qui, dans cette perception, prend racine dans des problèmes réels.

Le projet qui vous est soumis constitue l'aboutissement de cette réflexion et reflète la volonté du gouvernement de mettre à jour le système professionnel, en apportant des solutions pratiques et complètes à des problèmes réels et vérifiés.

Il ne s'agit donc ni d'un chambardement de structures ni d'un rapatriement de prérogatives des puissances publiques déléguées aux ordres professionnels en 1973. Comme vous pouvez le constater, le système conserve sa structure largement décentralisée. Les ordres professionnels conservent la responsabilité de protéger le public et restent investis du pouvoir de réglementer et de contrôler la compétence et le comportement des professionnels.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député.

M. Garon: En vertu de notre règlement, j'aimerais que, par solidarité, les collègues du ministre viennent faire quorum avec lui.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): On va vérifier le quorum, M. le député. Qu'on appelle les députés.

Alors, si vous voulez prendre place.

Nous en sommes à l'étape du principe du projet de loi 140, Loi modifiant le Code des professions et d'autres lois professionnelles. M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles, je vous cède la parole.

M. Savoie: Merci, M. le Président. Je ne vous cacherai pas, M. le Président, que le renouvellement de cette délégation de telles prérogatives aux ordres s'est posé comme une question fondamentale que nous devions examiner aux vues de l'expérience passée. La réévaluation d'ensemble que nous avons faite et dans laquelle l'Office des professions a joué un rôle précieux d'initiatives, d'études et de propositions nous a conduits à proposer en cette Chambre de nombreux aménagements avant de renouveler le pari de l'autogestion.

Ces aménagements sont essentiels au maintien ou à la restauration de la crédibilité du système. Crédibilité sans laquelle l'État ne saura légitimement déléguer ou laisser de tels pouvoirs à des entités autogérées. (5 h 40)

Problème réel, disions-nous, le système professionnel et principalement le mécanisme disciplinaire ont en effet attiré certains reproches. D'abord, le mécanisme disciplinaire manquerait de transparence. Chaque ordre professionnel est responsable, en première ligne, de l'application des lois et règlements qui le concernent et en particulier de la discipline. Certains ont pu en déduire que les membres d'une même confrérie pourraient tout faire pour se protéger et qu'ils n'auraient pas le goût de poursuivre les uns et les autres lorsqu'un acte dérogatoire serait commis.

Le comité de discipline étant composé aux deux tiers de collègues de l'intimé, certains ont pu estimer, dans le même esprit, que les condamnations seraient finalement rares. La réalité est cependant différente. S'il est vrai que le syndic qui porte des plaintes et la majorité des membres du comité de discipline qui entendent ces plaintes sont des membres de l'ordre, le bureau, composé en partie de membres de public, peut demander au syndic de porter une plainte, et tout membre du public, pour sa part, peut également porter une plainte au comité de discipline.

Rappelons également que la présidence de chaque comité de discipline est confiée à un avocat d'expérience nommé par le gouvernement du Québec. Cette présence allogène est un premier facteur de transparence.

Par ailleurs, il est vrai que l'initiative de porter des plaintes au comité de discipline revient principalement, et dans la plupart des cas, au syndic, lequel dispose d'un pouvoir d'appréciation important quant à la décision d'enquêter et de porter plainte. L'exercice de ce pouvoir d'appréciation par les syndics a donné lieu à certaines critiques, parfois fondées. Aux fins d'une meilleure transparence, le projet de loi prévoit que la décision de ne pas porter plainte au comité de discipline contre un professionnel ne serait plus la décision du seul syndic de l'ordre.

En effet, si, au terme d'une enquête demandée par un citoyen sur un professionnel, le syndic conclut qu'il n'a pas lieu de porter plainte au comité de discipline, le citoyen pourra prendre l'avis d'une nouvelle instance, le comité de révision. Ce comité, formé de cinq personnes, dont deux choisies parmi les administrateurs nommés par l'Office des professions, pourra

notamment demander au syndic de compléter son enquête ou de désigner une personne qui portera plainte.

Le projet qui vous est soumis contient également des dispositions visant à renforcer l'indépendance du syndic, et qui fixent à cette fin des conditions qui doivent être réunies pour sa destitution par le bureau de l'ordre.

Depuis 1988, les audiences des comités de discipline sont publiques, à moins que le comité ne fasse droit à une demande justifiée de huis clos, le caractère public des audiences étant un pas vers la transparence du système. Toutefois, l'expérience montre qu'on pouvait et qu'on devait aller plus loin. Pour permettre au public d'assister aux audiences des comités de discipline, il fallait que le public puisse prendre connaissance du rôle d'audience de ce comité. À cette fin, le projet de loi prévoit que le rôle d'audience du comité de discipline d'un ordre professionnel devra être affiché de manière à permettre au public de prendre connaissance des plaintes qui doivent être entendues et d'assister aux audiences.

Dans le même esprit, il sera précisé que les dossiers des comités de discipline seront accessibles à compter du début de l'audience, sous réserve d'une ordonnance contraire du comité.

Un autre reproche adressé au mécanisme disciplinaire, autant par les ordres que par le public, est qu'il sera coûteux. La personne qui communique avec un syndic pour lui demander d'enquêter sur un professionnel qui aurait commis une infraction n'a rien à débourser. Signalons, en passant, qu'à l'invitation de l'Office des professions la plupart des ordres professionnels se sont dotés d'une ligne 1-800, ou encore acceptent les frais téléphoniques du public.

De plus, les coûts de l'enquête du syndic sont entièrement assumés par l'ordre professionnel. De même, lorsque le syndic décide de porter plainte au comité de discipline à la suite de cette enquête, l'ordre assume tous les frais. Par contre, lorsque, à la suite du refus du syndic de porter plainte au comité de discipline, une personne décide de le faire elle-même, elle a à sa charge les honoraires des avocats qu'elle requiert et peut, en outre, à la discrétion du comité de discipline, être contrainte à payer les débours.

Tirant des leçons de l'expérience, le projet de loi prévoit que le comité de discipline ne pourra imposer les débours de l'affaire à un plaignant privé, à moins que le professionnel n'ait été acquitté sous tous les chefs de la plainte et que la plainte soit manifestement mal fondée. Plus encore, il sera désormais permis à un comité de discipline d'ordonner à l'ordre de remettre au plaignant tout ou partie de l'amende versée.

Dans un tout autre ordre d'idées, les ordres professionnels ont eux-mêmes souligné les coûts engendrés par des infractions mineures, dès lors qu'elles aboutissent devant un comité de discipline, c'est-à-dire devant une structure conçue pour traiter des infractions plus graves. Par ailleurs, le mécanisme disciplinaire ne favoriserait pas, dit-on, le règlement des problèmes des personnes s'adressant au syndic. Il convient de souligner ici que la plupart des syndics exercent déjà, et à des degrés divers, certaines fonctions de conciliation et de médiation. Cette action des syndics permet de résoudre, dans une meilleure communication, les litiges qui naissent souvent d'une mauvaise compréhension entre le professionnel et son client.

Pour donner un cadre juridique plus clair à cette activité importante et précieuse des syndics, le projet de loi propose d'attribuer à ces derniers une fonction de conciliateur des différends. Dans ce contexte, le syndic pourra prendre diverses initiatives dont celle de suggérer au professionnel d'adresser des excuses à son client.

Au-delà des aspects financiers dont j'ai parlé tout à l'heure, certains ont relevé des problèmes d'accessibilité au mécanisme disciplinaire. Il serait compliqué, pour ne pas dire difficile, pour le public de formuler des demandes d'enquête ou de plainte. Afin de permettre au public d'exercer utilement ces recours à travers un système parfois complexe, il est prévu d'établir et de distribuer des formulaires de demande d'enquête et de plainte. Par ailleurs, une personne qui demande la tenue d'une enquête ou, encore, qui dispose d'une plainte de son propre chef au comité de discipline pourra être assistée à toute étape par une personne dont elle requerrait les services.

Une dernière critique adressée au mécanisme disciplinaire est qu'il est souvent trop lent. L'Office reçoit régulièrement des plaintes sur la lenteur du cheminement qui mène à la décision du syndic de porter plainte ou non. Les choses varient beaucoup d'un ordre à l'autre, mais il faut constater que la notion de délai raisonnable prévu au Code des professions n'est pas comprise de la même façon partout. Ainsi, l'Office doit-il trop souvent s'informer auprès d'un ordre professionnel du cheminement d'une enquête demandée un ou deux ou trois ans auparavant. Le projet de loi répond à cet inconvénient en prévoyant que, dans le cas où le syndic n'aurait pas terminé son enquête 90 jours après avoir été saisi de la demande, il devra en informer le plaignant par écrit et, par la suite, le tenir au courant de la progression de son enquête. Par ailleurs, pour éviter de devoir reprendre à zéro une procédure entamée depuis longtemps devant un comité de discipline qui perdrait entre-temps un de ses membres, la loi permettra au comité de discipline de terminer une affaire à deux membres plutôt qu'à trois.

D'autres inconvénients ont pu se présenter dans le cas d'actes dérogatoires commis hors du Québec. Ainsi, dans le but de rendre l'intervention plus rapide, le projet de loi prévoit qu'il sera permis au bureau d'un ordre professionnel d'utiliser une décision disciplinaire ou une condamnation criminelle rendue au Canada ou à l'étranger pour refuser l'admission ou l'inscription au tableau d'une personne ou, encore, pour radier un membre. De plus, les décisions de radiation permanente, de révocation de permis, de limitation ou de suspension permanente du droit d'exercer seront exécutoires dès leur signification au professionnel. L'effet de ces mesures visant à la protection immédiate du public était parfois retardé du fait

d'appels ou autres procédures. Enfin, les amendes prévues au Code des professions seront haussées.

Comme on le voit, il s'agit d'une mise à jour importante qui aura pour effet de rendre le mécanisme disciplinaire plus transparent, plus accessible, plus rapide, mais aussi plus sévère, et qui surtout lui donnera ou lui rendra la crédibilité, qui est une condition essentielle de son efficacité.

Le projet comporte également un certain nombre d'autres dispositions touchant l'Office des professions du Québec. Il est prévu, par exemple, que, dans le but d'accroître la représentation du public dans le système professionnel, l'Office sera composé de cinq membres, dont un non-professionnel choisi par le gouvernement pour son intérêt et pour la protection du public. De plus, l'Office pourra, sur autorisation du ministre, faire enquête sur un ordre professionnel qui ne remplira pas les devoirs que la loi lui impose. L'expérience montre, en effet, que le devoir de surveillance que la loi confère à l'Office peut difficilement s'exercer de façon utile si ce dernier n'a pas les moyens efficaces de requérir les renseignements sur la situation qu'il doit surveiller ou encore de faire lui-même les constats nécessaires. De plus, le gouvernement pourra placer sous l'administration d'une ou de plusieurs personnes un ordre qui ne remplira pas les devoirs que lui impose la loi.

Avec le temps et à la lumière de l'expérience se sont révélés des domaines où le devoir de surveillance et de répression appellent des mesures spécifiques. Ainsi, des dispositions s'ajoutent au Code des professions pour clarifier la notion de faute à caractère sexuel et pour prévenir et sanctionner ces comportements fautifs.

Sur le plan plus technique, le processus d'adoption, d'approbation et d'entrée en vigueur des 534 règlements que compte le système professionnel apparaît à tous comme lourd et complexe. Bien que l'Office a déjà considérablement rationalisé et accéléré ce processus, certaines améliorations peuvent être apportées. C'est pourquoi le projet de loi qui vous est soumis contient les dispositions visant à simplifier et alléger le processus d'adoption et d'entrée en vigueur de ces règlements, notamment en supprimant certaines étapes. (5 h 50)

Au niveau de l'assurance-responsabilité, M. le Président, la protection du public passe également par la prévoyance. Ainsi, il sera obligatoire pour chaque ordre professionnel d'adopter un règlement sur l'assurance-responsabilité professionnelle souscrite par les membres individuellement. De même, les ordres dont les membres sont appelés à détenir les sommes d'argent ou autres valeurs seront tenus de déterminer les modalités et les normes de réception, de garde et de disposition de ces sommes et valeurs. Il me fait également plaisir, M. le Président, de souligner l'effort de rationalisation législative qui a permis de mettre en concordance et en cohérence l'ensemble des dispositions de la législation professionnelle. Ainsi, afin d'étendre à tous des règles qui étaient particulières à certains ordres, des dispositions ont été intégrées dans le Code des professions.

En somme, il s'agit d'un projet de loi à la fois modeste et ambitieux qui vise à apporter des solutions concrètes à des problèmes réels. Les initiatives qui sont à son origine, les consultations nombreuses de même que les efforts et les suggestions qui sont venus de partout nous livrent deux messages. Il existe désormais un large consensus du milieu sur la manière de mieux protéger le public. Les changements ou adaptations proposés au législateur sont par ailleurs nécessaires ou pour le moins opportuns.

Les ordres professionnels auront donc de nouveaux outils pour remplir leur mandat. Il leur restera à agir résolument pour protéger le public et justifier, sans défaillance, la confiance du législateur. En route vers ce prochain succès, il ne faudra pas perdre de vue que ces changements sont une des conditions de la restauration de l'image du système professionnel auprès du public. Cette structure, qui aura bientôt 20 ans, peut bien avoir toutes les vertus que nous nous plaisons à lui reconnaître, nous ne pouvons pour autant nous contenter d'en admirer les avantages et méconnaître, en même temps, les problèmes d'image et de fonctionnement qui constituent, et ne nous le cachons pas, des obstacles réels à la confiance du public. Il faut le constater, les solutions législatives raisonnables mises de l'avant pour pallier les problèmes rencontrés sont déjà, de par leur nature, l'aveu que le système, pourtant autogéré, a dû recourir à un supplément de règles et à l'arbitrage du législateur pour maintenir ou recréer les conditions de sa légitimité.

Quelle que soit la part des préjugés, les événements de ces dernières années ont attiré l'attention du public, de l'Office et du gouvernement sur certaines défaillances du mécanisme disciplinaire, occultant ainsi les qualités premières du système professionnel en laissant le public à des conclusions d'autant moins contrôlables qu'elles vont dans le sens desdits préjugés. C'est pourquoi l'effort de réalignement du système professionnel que représente ce projet de loi est une chance rare de donner au monde professionnel des balises qui, en rendant plus crédible le mécanisme de surveillance et de discipline, permettra au public de porter son attention sur la sécurité que lui confèrent la compétence, l'éthique et, en général, le professionnalisme d'un quart de millions de personnes qui se sont instruites et organisées pour le servir.

Quant à nous, en cette Chambre, en adoptant ce projet de loi, nous serons présents au rendez-vous que nous donnait le législateur en 1973 pour réévaluer et parfaire son oeuvre.

En terminant, M. le Président, je tiens à remercier tous ceux et celles qui, par des efforts soutenus, ont contribué à la réalisation de ce projet de loi, particulièrement le Conseil interprofessionnel, tel que représenté par la présidente, Mme Sylvie de Grandmont, l'avocat-conseil, Me Godbout. Je tiens à souligner également la présence de M. Castonguay, qui était alors ministre dans le gouvernement de M. Bourassa en 1973; de l'Office des professions du Québec, M. Robert Diamant,

président, Me Maryse Beaumont, responsable des travaux législatifs et conseillère principale juridique auprès de l'Office, de même que le vice-président qui a maintenant quitté l'Office des professions, M. Louis Roy, pour leur travail exceptionnel.

Je voudrais également remercier, M. le Président, tous les gens du public qui ont su répondre à notre demande et qui ont participé aux différentes études, de même que tous les ordres professionnels qui composent, finalement, le Conseil interprofessionnel du Québec, pour leur apport soutenu et dynamique à la réalisation de cette réforme. Je vous remercie, M. le Président.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, nous en sommes à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 140, Loi modifiant le Code des professions et d'autres lois professionnelles. Je cède la parole à Mme la députée de Terrebonne. Mme la députée, la parole est à vous.

Des voix: Bravo! Bravo!

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci, M. le Président. M. le Président, je trouve vraiment triste, regrettable et déplorable qu'on présente une réforme du Code des professions, première réforme après 20 ans, qu'on présente cette réforme à 6 heures le matin, M. le Président, et je suis très étonnée qu'on appelle aussi ce projet de loi pour l'adoption de principe, alors que nous sommes le 10 décembre, M. le Président, et que, si on veut être très réaliste, ce projet de loi 140 compte exactement 453 articles que nous devrons étudier article par article d'ici la fin de la session. Alors, M. le Président, je me pose deux questions: Ou, du côté du gouvernement, on ne sait pas planifier les travaux, et je pense que la nuit qu'on vient de passer le démontre un peu: nous sommes au dixième projet de loi que nous avons étudié, alors qu'il y a eu très peu d'intervenants sur chacun des projets de loi ? donc, une mauvaise planification des travaux ? ou le ministre n'a pas réussi à convaincre son leader du gouvernement d'appeler ce projet de loi, qui m'apparaît être un projet important, de l'appeler à un moment où il aurait pu profiter d'une heure d'écoute un peu plus intéressante, où il aurait été un peu plus éveillé lui aussi, M. le Président, et de faire appeler ce projet de loi là dans un délai raisonnable pour que nous puissions l'étudier. Parce que je vous avoue, M. le Président, qu'au moment où on se parle j'ai encore des doutes sur la possibilité de sanctionner ce projet de loi là. À moins qu'on décide de passer un bâillon sur une réforme du Code des professions, ce qui m'apparaîtrait très déplorable.

Alors, M. le Président, ce projet de loi, il a tardé. À chacune des étapes, il y a eu des retards impor- tants, et nous allons d'abord faire un petit rappel historique. La première annonce du projet de loi a été faite non en cette Chambre, M. le Président. La première annonce du projet de loi, elle a été faite dans Le Devoir, le 20 septembre 1991, donc il y a déjà plus de deux ans. Et le ministre nous disait à ce moment-là: Vers une réforme en profondeur du Code des professions. On va dire tout de suite, là, que la réforme n'est pas vraiment une réforme en profondeur. On s'entend. Et il nous disait qu'il était pour s'engager sous peu dans cette vaste réforme du Code des professions. Sous peu: 20 septembre 1991; nous sommes le 10 décembre 1993, M. le Président. Et, dans ce premier article, le ministre nous parlait surtout... l'objectif premier de cette réforme, c'était que les corporations absorberont les coûts de l'Office des professions. Ça, c'était l'objectif majeur de la réforme, qu'on ne retrouve pas, d'ailleurs, dans le projet de loi 140 que nous étudions, M. le Président, mais bien dans le projet de loi 67, projet de loi que nous avons étudié ? nous avons eu l'adoption du principe au printemps dernier ? et qui est resté au feuilleton depuis ce temps-là, M. le Président. Donc, c'était l'objectif premier, de transférer les coûts de l'Office des professions aux corporations professionnelles. Et le ministre le disait, je le cite: Le gouvernement veut se retirer le plus rapidement possible du financement des professions au Québec. Les objectifs... Il faut dire qu'à ce moment-là, M. le Président, et je m'en suis aperçue un petit peu plus tard, au moment où nous avons fait les audiences, le ministre ne semblait pas connaître beaucoup notre système professionnel, ni ses faiblesses ni ses forces et encore moins sa composition. Nous avons eu la chance de voir ça au niveau des audiences, M. le Président. Donc, l'objectif était aussi d'alléger le système et, comme il nous l'a dit tantôt, le rendre plus cohérent, moins coûteux et plus transparent. Et je vous citerai tantôt le Protecteur du citoyen, qui s'est prononcé sur ce projet de loi et qui conclut qu'il n'est pas plus transparent, qu'il n'est pas plus cohérent et qu'il n'est pas plus intéressant du tout pour le public. Nous y reviendrons un petit peu plus tard, M. le Président. (6 heures)

Donc, septembre 1991, nous allions sous peu vers une vaste réforme. Nous avons dû attendre, M. le Président, et questionner le ministre à quelques reprises pour connaître ses intentions. Nous avons dû attendre l'avant-projet de loi en décembre 1992. Donc, plus d'un an plus tard, M. le Président, le ministre a déposé en cette Chambre l'avant-projet de loi.

Cet avant-projet de loi a été étudié lors des auditions publiques en février et mars 1993. Nous n'avons pu, cependant, M. le Président, à notre grand regret, entendre l'Office des professions lors des auditions. Ça aurait été intéressant, M. le Président, parce que l'Office des professions avait certaines réserves sur l'avant-projet de loi. On peut au moins qualifier de «certaines réserves».

Lors de ces auditions, M. le Président, nous avons très rapidement pu nous rendre compte que non

seulement les ordres sous l'ancien nom «Corporation professionnelle» avaient de très, très, très grandes réserves contre le projet de loi, mais aussi les associations de consommateurs. Les associations de consommateurs considéraient que l'avant-projet de loi n'apportait pas ce système plus transparent qu'elles souhaitaient. Et le Protecteur du citoyen, qui était venu aux auditions publiques, nous avait fait part de ces mêmes recommandations, avait même proposé son propre système pour le traitement des plaintes, un système qui permettait une meilleure transparence. Donc, tout au long des auditions publiques, M. le Président, tous les intervenants sont venus dire, finalement, au ministre que son avant-projet de loi ne répondait pas à la commande.

Pourtant, M. le Président, lorsque nous allons examiner le projet de loi, nous allons vite nous rendre compte qu'il ressemble étrangement à l'avant-projet de loi, que le ministre n'a aucunement tenu compte des recommandations qui avaient été faites, sauf sur un point, et j'y reviendrai tantôt, M. le Président.

Donc, nous avons eu les auditions publiques. Le processus qui devait suivre, par la suite, c'est le ministre lui-même qui nous l'avait présenté dans sa motion de clôture, et je vais vous le citer, M. le Président. Donc, le 16 mars, au moment où nous terminions les auditions publiques, nous avons évidemment demandé au ministre de nous expliquer les étapes qui devaient suivre cet avant-projet de loi, et le ministre nous a dit, et je cite: Nous allons préparer un projet de loi, échanger de nouveau avec l'Office des professions et le Conseil interprofessionnel. Je serai disposé, même à ce moment-là, à m'asseoir avec les membres de cette commission pour échanger avec eux sur le nouveau projet de loi et à déposer le tout à l'Assemblée nationale avant la fin de juin pour qu'on puisse avoir l'été pour, justement, examiner le projet de loi déposé et arriver avec les dernières retouches. Bien, M. le Président, le ministre n'a absolument pas convoqué les membres de la commission de l'éducation pour étudier le projet de loi, aucunement, et vous avez bien vu, M. le Président, qu'il ne l'a pas déposé avant la fin juin à l'Assemblée nationale.

Je continue à citer le ministre: Je compte bien, donc, procéder de cette façon, prendre le temps d'y réfléchir, échanger avec l'Office des professions, établir un mécanisme de travail avec le Conseil interprofessionnel pour quelques rencontres et préparer le projet de loi, échanger de nouveau avec l'Office et le Conseil interprofessionnel et, évidemment, les membres de cette commission lors de rencontres informelles ? nous n'avons eu aucune rencontre informelle des membres de la commission, M. le Président ? et déposer le tout avant la fin de juin à l'Assemblée nationale pour y donner suite. Donc, M. le Président, le ministre n'a absolument pas respecté ce plan qu'il nous avait présenté lors de ses notes de clôture.

Nous avons appris que le projet de loi nous arriverait cet automne, M. le Président, à nouveau, vous ne vous en surprendrez point, non en cette Chambre, mais à nouveau dans le journal Le Devoir. Il semble que ce soit le lieu pour le ministre d'annoncer ses projets plutôt que l'Assemblée nationale. Donc, dans Le Devoir du 10 octobre 1993, le ministre nous disait qu'il était pour déposer sa fameuse réforme et que l'Office aurait beaucoup à faire au cours des dernières semaines pour rallier toutes les corporations professionnelles au projet de loi et qu'il serait déposé dès cet automne à l'Assemblée nationale. donc, vous comprendrez, m. le président, que nous nous attendions évidemment à ce que ce soit un des premiers projets de loi déposés. on devait l'avoir au mois de juin. donc, on l'attendait immédiatement au mois d'octobre, au début de la session. ce projet de loi a été déposé le dernier jour, le dernier jour selon les délais prévus par notre règlement, soit le jeudi 11 novembre. et, m. le président, il n'était pas dans la version que nous avons maintenant, il était sur de grandes feuilles %la x 14, déposé en catastrophe, la dernière journée, pour être sûr qu'on pourrait l'étudier en respectant les règles. alors, au niveau de ce qui avait été présenté, on peut dire, m. le président, que ça n'a pas été vraiment respecté.

J'aborderai maintenant, M. le Président, suite à ce rappel historique, le contenu du projet de loi. Lorsqu'on regarde le système professionnel québécois, ce n'est pas comme le ministre a semblé le laisser entendre, ce n'est aucunement, M. le Président, un système mur à mur. Autant dans l'avant-projet de loi, autant au moment des auditions que dans ses remarques sur l'adoption du projet de loi, M. le Président, le ministre, je pense, n'a jamais compris qu'au Québec il y a deux sortes de corporations professionnelles dans notre système. Nous avons tenté par tous les moyens, lors des auditions, de lui expliquer qu'il y avait deux sortes de corporations professionnelles dans notre système.

Nous avons 41 corporations professionnelles, et ces 41 corporations professionnelles ne sont pas identiques. Vous avez 21 corporations à titre exclusif, et ces corporations à titre exclusif doivent assurer de la protection de la même façon que les corporations à titre réservé. Et les corporations à titre réservé, M. le Président, il y en a 20. Au niveau de la protection du public, ça fait une très grande différence, M. le Président. Une différence tellement importante qu'en ne touchant pas à ce problème, à ce noeud du problème du système professionnel au Québec, le ministre passe à côté. Sa réforme ne vient aucunement régler les problèmes de protection du public, parce qu'il a complètement oublié cette réalité-là.

M. le Président, quand on parle de corporations à titre exclusif, on pense évidemment aux avocats, aux notaires, aux médecins, aux dentistes...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député de Lévis? Excusez-moi. Je pensais que M. le député de Lévis avait une question de règlement.

Si vous voulez poursuivre, Mme la députée.

Mme Caron: Merci, M. le Président. Donc, les

corporations à titre exclusif. Nous pensons aux avocats, aux notaires, aux médecins, aux dentistes, aux pharmaciens, aux optométristes, aux médecins vétérinaires, aux agronomes, aux architectes, aux ingénieurs, aux arpenteurs-géomètres, aux ingénieurs forestiers, aux chimistes et aux comptables agréés, aux techniciens en radiologie, aux denturologistes, aux opticiens d'ordonnances, aux chiropraticiens, aux audioprothésistes, aux podiatres et aux infirmières.

M. le Président, pourquoi je prends la peine de les nommer? C'est que partout au Québec, si on questionne le public, lorsqu'on parle des ordres professionnels, tout le monde est convaincu qu'il n'y a que cinq professions au Québec, et donc que toutes les corporations professionnelles sont des corporations avec des professions où les gens ont un salaire très élevé, où les conditions sont extraordinaires. Et ce n'est pas ça la réalité, M. le Président. Vous avez des corporations professionnelles où il y a des salaires très peu élevés; vous avez aussi les corporations à titre réservé.

M. le Président, le point important des corporations à titre réservé, c'est que quelqu'un peut tout de même exercer une profession à titre réservé, et ce, sans faire partie de sa corporation professionnelle s'il n'utilise pas le titre. Et qu'est-ce que ça veut dire pour le public, M. le Président? Ça veut dire que si vous allez recevoir des services, par exemple, chez un travailleur social qui décide de vous donner ce service mais sans utiliser ce titre, qui pratique privément et ne fait pas partie de la Corporation professionnelle des travailleurs sociaux ? et il a le droit de ne pas en faire partie ? lorsque vous allez déposer votre plainte pour les mauvais services reçus, ils ne seront aucunement couverts par la protection du public de cette corporation, parce qu'ils n'en sont pas membres, et le projet de loi 140 ne vient aucunement régler ça. (6 h 10)

Alors, M. le Président, pour 20 professions au Québec, 20 professions, si les personnes décident d'exercer sans utiliser le titre, elles ne sont pas obligées d'être membres. Et, à ce moment-là, peu importe la plus belle réforme du monde, M. le Président, nous ne sommes pas couverts, à ce moment-là, au niveau de la protection du public. Et le ministre n'a pas touché à ce problème-là. C'est le noeud du problème au niveau des corporations professionnelles.

Je ne peux pas vous dire, M. le Président, que je suis surprise qu'il n'y ait pas touché parce que, au moment où nous avons commencé les auditions, il n'avait pas l'air de se rendre compte que c'était un problème. Et, dans les notes de clôture, il n'en a pas parlé non plus; il n'en a même pas parlé encore ce soir, M. le Président.

Alors, pour avoir un véritable système professionnel où la protection du public sera véritablement assurée, il faudra qu'un gouvernement, et probablement un autre gouvernement, M. le Président, décide de régler ce problème des corporations à titre réservé.

M. le Président, il y avait, évidemment, concer- nant tout le système des plaintes, beaucoup, beaucoup de demandes de la part autant des associations de consommateurs que du Protecteur du citoyen concernant le système de plaintes. Ce qu'on reprochait surtout, M. le Président, c'était le manque de transparence. Et je pense très sincèrement que ce qui manquait aussi beaucoup, M. le Président, c'est l'information au public. Et je pense que, là-dessus, on peut dire que l'Office des professions a quand même manqué son mandat au niveau de l'information du public parce que, après 20 ans d'un système professionnel, qu'on se retrouve avec un système qui n'est pas connu, mais pas du tout, M. le Président ? et je suis convaincue qu'une proportion extrêmement importante, même, des membres de cette Assemblée nationale ne connaissent pas le système professionnel québécois ? bien, je pense qu'il y a eu un manque au niveau de l'Office des professions.

Dans le projet de loi que nous avons, le projet de loi 140, M. le Président, tout cet aspect de l'information est absent aussi. Donc, est-ce qu'on va régler le problème majeur du manque d'information sur les comités, sur la façon de procéder? Bien, M. le Président, il va falloir que le ministre, en commission parlementaire, nous présente certains moyens que l'Office des professions va se donner, que les ordres vont pouvoir se donner pour améliorer cette facette-là.

Au moment du dépôt de l'avant-projet de loi, le Protecteur du citoyen avait dit, et je le cite: Tant par sa composition que par son fonctionnement, le comité d'examen des plaintes risque d'alourdir le processus par l'ajout d'une bureaucratie inutile, coûteuse, complexe et qui n'améliore pas le système actuel. Bon. On peut se demander, M. le Président, si, suite au dépôt du projet de loi, le Protecteur du citoyen croit qu'il y a amélioration par rapport à l'avant-projet de loi.

Alors, M. le Président, le Protecteur du citoyen faisait parvenir au ministre responsable de l'application des lois professionnelles ? c'est tout récent, le 6 décembre ? faisait parvenir au ministre ses commentaires. Et, M. le Président, je commencerai par la conclusion, pour revenir sur certains points: En conclusion, bien que le projet de loi 140 présente des percées positives, il ne constitue pas la réforme fondamentale qui, selon moi, demeure nécessaire pour restaurer la confiance du public dans le système de contrôle professionnel et pour bien intégrer les principes de transparence, accessibilité et efficacité, essentiels à la crédibilité d'un tel système. Je crois aussi toujours opportun de réitérer la suggestion de structure que je proposais dans mon rapport de janvier 1992. M. le Président, je vous donnerai les principaux points d'objection du Protecteur du citoyen.

Alors, M. le Président, au niveau du syndic. Au niveau du syndic, il faut souligner qu'il y a des points nouveaux qui sont quand même importants, parce qu'il fallait donner plus de pouvoirs au syndic. Et je vous donne un exemple. Par exemple, si un citoyen présentait une plainte auprès d'un syndic d'une corporation professionnelle dont la personne était membre, si le motif de la plainte ne faisait pas partie du code de déontologie du

professionnel, bien, le syndic ne pouvait rien faire. On retrouve maintenant dans le projet de loi 140 une clause un petit peu omnibus qui va permettre au syndic de pouvoir quand même se prononcer sur la plainte. Et ça, je pense que c'était un élément qui était important.

Concernant le comité de révision au niveau des plaintes, le Protecteur du citoyen n'est pas très tendre. Compte tenu de la composition du comité, rien n'empêchera le bureau de former un comité de révision exclusivement composé de membres issus de l'Ordre. De plus, vu son quorum de trois, la présence d'un membre issu du public aux travaux du comité ne sera pas assurée.

Bien que ce comité soit habilité à conclure qu'il y a lieu de porter plainte devant le comité de discipline, il n'aura le pouvoir d'entendre ni le professionnel ni des témoins autres que le syndic ou le plaignant. Ainsi privées, il me paraît que seront rares les instances où le comité conclura qu'une plainte devrait être portée.

Il aura plutôt tendance à suggérer au syndic à ce moment de compléter son enquête, et si le syndic complète l'enquête et juge toujours qu'une plainte ne devrait pas être portée, la personne qui a demandé l'enquête pourrait se retrouver à nouveau devant le comité de révision.

De plus, le Protecteur du citoyen soulignait aussi que, concernant le plaignant privé, et ça, M. le Président, c'est, par exemple, si je porte plainte au syndic, le syndic refuse ma plainte. Je décide de porter ma plainte au comité de révision, on décide à nouveau de rejeter ma plainte. J'ai toujours le droit, comme plaignant privé, de déposer une plainte au Tribunal des professions.

Alors, ce que déplore le Protecteur du citoyen, c'est que le projet de loi maintient encore la situation que le plaignant privé doit assumer seul le fardeau de poursuivre le professionnel devant un comité de discipline, ce qui, évidemment, est souvent très difficile pour le citoyen avec les risques qu'on connaît effectivement de ne pas gagner. Donc, il y a eu certaines petites améliorations là-dessus, mais il doit quand même assumer le fardeau de poursuivre le professionnel, et ça limite donc, évidemment, l'accessibilité au niveau du citoyen.

Ensuite, M. le Président, au niveau de l'Office des professions, le Protecteur du citoyen s'inquiète de l'indépendance de l'Office. Et il a raison de s'inquiéter parce que si on fait le lien en plus avec le projet de loi 67 sur le financement de l'Office des professions, eh bien, l'indépendance de l'Office des professions est loin d'être assurée, M. le Président, puisqu'à ce moment-là ce seront les corporations professionnelles elles-mêmes qui financeront l'Office des professions. Alors, l'indépendance, on pourra s'en reparler.

Le Protecteur du citoyen s'inquiétait aussi au niveau du secret professionnel, parce qu'il y a quand même certains articles qui, dans le but louable de pouvoir permettre à l'Office de faire enquête, par l'article 14.3 du Code, il sera interdit de refuser un renseignement ou un document en disant qu'ils sont protégés par le secret professionnel. Mais est-ce que c'est justifié? Et le Protecteur du citoyen pose la question. Un tel pouvoir accordé à l'Office est-il nécessaire et justifié dans le contexte d'une enquête sur un ordre et non sur un professionnel? Parce que le Protecteur du citoyen le détermine très bien, M. le Président. Vous savez que, dans l'article 171, le projet propose la liste de personnes et d'organismes qui peuvent prendre connaissance d'un dossier tenu par un professionnel. Et la liste est assez impressionnante. (6 h 20)

Donc, à ce moment-là, le secret professionnel ne sera pas vraiment assuré pour la personne. On peut s'inquiéter à ce niveau-là, et le Protecteur du citoyen rappelait le droit au respect du secret professionnel enchâssé dans l'article 9 de la Charte des droits et libertés de la personne. Alors, il souhaitait, et on va essayer en commission parlementaire d'amender là-dessus pour qu'il y ait quand même un encadrement, que ce soit bien réduit au strict minimum, le nombre de personnes qui pourront avoir accès à un dossier. Parce que, M. le Président, je pense que ce n'est pas très intéressant pour un citoyen qu'une liste impressionnante de personnes ou d'organismes, sous prétexte qu'il y a une enquête, connaissent tout ce que vous avez dans votre dossier de services qui vous sont donnés par un professionnel. Parce qu'il ne faut pas oublier que ça peut toucher votre situation financière, mais ça peut aussi toucher votre santé, M. le Président. Et que ce soient plusieurs personnes qui prennent connaissance de votre dossier personnel, on peut s'interroger, M. le Président, si c'est vraiment nécessaire.

Du côté du comité de révision des plaintes, M. le Président, il y a eu aussi des oppositions de la part de différentes corporations professionnelles, mais de la part aussi du Barreau. Le Barreau, principalement, souhaitait qu'on ait une autre structure, qu'on touche davantage aux comités de discipline, à la composition des comités de discipline. Et, là-dessus, M. le Président, je vais vous donner un exemple. Le Barreau avait demandé que, dans la composition des comités de discipline, on retrouve un membre du public, pour que, dès la première instance du jugement, on puisse à ce moment-là avoir une personne du public qui soit là pour juger, pour apporter un peu plus de transparence. Et, la Loi sur le Barreau, on avait déposé un amendement, et je vous le lis, M. le Président. L'article 92.1. Le Barreau souhaitait que «le comité de discipline est formé d'au moins trois membres, dont un président et un membre du public. Le président du comité de discipline est nommé conformément au Code des professions. Les autres membres du comité de discipline sont choisis dans chaque cas par le bâtonnier du Québec ou, à défaut, par le comité administratif à partir d'une liste d'au moins 50 avocats et membres du public, à l'exclusion des conseillers en loi, désignés par le conseil général.» M. le Président, cette demande-là a été faite, mais il n'y a pas eu suite à cette demande qui avait été déposée par le Barreau.

L'autre inquiétude, M. le Président, concernant le traitement des plaintes à partir du comité de révision des

plaintes, c'est, évidemment, la lourdeur bureaucratique que le Protecteur du citoyen soulignait. M. le Président, quand on regarde, par exemple, certaines corporations professionnelles... Je vais prendre celles où on avait le plus de plaintes, en 1990-1991: les avocats, 350 demandes d'enquête; les dentistes, 294; les médecins, 467; les notaires, 194; les pharmaciens, 317. Alors, M. le Président, si toutes ces demandes qui peuvent être rejetées se retrouvent au comité de révision des plaintes, on risque d'alourdir le processus, effectivement. Parce que, quand vous allez vous retrouver avec quelque 500 demandes de révision, c'est loin d'être évident que la corporation professionnelle va être capable de mettre en application le comité de révision des plaintes. Et dans le cas des corporations professionnelles où il y a peu de membres ou les corporations professionnelles à titre réservé, juste d'assumer cette structure-là, M. le Président, et de s'assurer que les membres vont pouvoir siéger, ce n'est pas évident. Dans la pratique, je pense que le Protecteur du citoyen a raison de s'inquiéter de la lourdeur du système.

Certaines corporations professionnelles avaient proposé des changements, des changements de structure qui ressemblaient un petit peu aux changements proposés par le Protecteur du citoyen, et qui présentaient un système beaucoup plus simple. Et je vais ne vous en citer qu'un seul, M. le Président: le modèle qui était présenté, par exemple, par l'Ordre des optométristes. Alors, ce qu'on proposait, c'était tout simplement, bon: première demande de plainte au syndic. Le syndic pouvait s'informer auprès d'un comité aviseur, mais dès que la plainte était refusée, il proposait un protecteur, un ombudsman des services professionnels. Alors, directement, la personne pouvait déposer sa plainte auprès d'un ombudsman des services professionnels qui, lui, à ce moment-là, avait le droit de déposer la plainte au comité de discipline. Donc, à ce moment-là, la personne, ce n'était pas elle qui devait assumer d'aller déposer cette plainte-là. C'était l'ombudsman qui pouvait le faire. Et je pense que ce système aurait été beaucoup plus simple et beaucoup plus transparent.

M. le Président, lors des audiences, nous avons eu, également, un autre point qui a été soulevé et qui n'apparaissait aucunement dans l'avant-projet de loi du ministre. Le ministre l'a abordé brièvement, tantôt, M. le Président. m. le président, lors des audiences, en février et mars 1993, nous avons rencontré des personnes qui étaient victimes d'abus sexuels de la part de professionnels et, au cours de ces auditions, nous avons pu nous rendre compte que le pourcentage, dans certaines corporations professionnelles, pouvait être très élevé. le ministre nous avait dit à ce moment-là, et je le cite: c'est un problème énorme. les statistiques nous disent que 10 %, 12 %, 13 %, dans certains services professionnels, se livrent à des activités de harcèlement sexuel, et que ça n'apparaît pas devant le traitement de la discipline non plus. il faut intervenir, poser des gestes et assurer qu'on puisse y mettre fin d'une façon convenable. J'ai pris l'engagement ferme ? ferme ? d'arriver avec des mesures pour corriger la situation, pour s'assurer que les femmes ? parce que c'est surtout des femmes qui font l'objet de harcèlement sexuel ? puissent avoir un mécanisme rapide et efficace et que les corporations professionnelles puissent donner et même les obliger à faire face à cette question de harcèlement sexuel.

Et, là-dessus, là encore, on ne peut pas faire comme Hamlet, on ne peut pas hésiter pendant une période très longue sur l'intervention que nous allons faire dans ce projet de loi. Il faut poser des gestes.

M. le Président, le président de l'Office des professions, quant à lui, à ce moment-là, M. Thomas Mulcair ? qui, depuis, a été remercié de ses services et remplacé par M. Diamand ? lui, disait: Harcèlement sexuel commis par les professionnels, le Code des professions se dirige vers la tolérance zéro. M. le Président, on s'est aperçu que, finalement, dans la plupart des ordres professionnels, le problème, c'est que, dès qu'une plainte arrivait au syndic, elle ne pouvait pas être traitée parce qu'il y a une seule corporation professionnelle qui spécifiait bien dans son code de déontologie que c'était interdit, M. le Président. Et c'est la Corporation professionnelle des psychologues.

La Corporation professionnelle des psychologues, M. le Président, allait beaucoup plus loin que ce qu'on retrouve dans le Code des professions déposé par le ministre. Et je vous cite les articles, M. le Président:

L'article 58 du code de déontologie des psychologues: En plus des actes mentionnés aux articles 57 et 58 du Code des professions, les actes suivants sont dérogatoires à la dignité de la profession: 11. avoir des relations sexuelles avec son client.

Le ministre a décidé de légiférer uniquement dans ce qu'il considère, lorsqu'il y a des cas d'abus ou de harcèlement. Lorsqu'on regarde le mémoire qui a été déposé par la Corporation professionnelle des psychologues... Et je suis convaincue que les victimes qui sont venues se faire entendre lors des auditions vont être d'accord avec la Corporation professionnelle des psychologues. Elle va beaucoup plus loin. Elle a décidé de s'appuyer sur certains règlements, comme celui de l'Ontario et sur les règlements ou dans les codes de déontologie du côté des États-Unis qui vont beaucoup plus loin et qui interdisent de sexualiser la relation entre un thérapeute et son client, au moins durant une période de deux ans et tout le temps de la thérapie. Tout le temps de la relation professionnelle, il y a interdiction.

Ce n'est pas ça qu'on retrouve dans le code déposé par le ministre, M. le Président. Ce qu'on dit aussi, au niveau du code de déontologie des psychologues américains, c'est qu'il y a toute la notion ? et là, je sais que c'est un petit peu compliqué, M. le Président, un petit peu technique ? il y a un lien fiduciaire et, lorsque je ferai mes recommandations, lors de l'étude article par article, M. le Président, évidemment, je vous avoue que j'ai l'intention de prendre beaucoup de temps pour expliquer. Je ne vous lirai pas ce soir, M. le

Président, les quatre pages touchant ce lien fiduciaire, mais simplement ce que ça veut dire, M. le Président. (6 h 30)

C'est que, selon les psychologues, très régulièrement, et on peut dire même dans 90 % des cas, lorsqu'il y a une thérapie, et pas uniquement avec le psychologue, M. le Président, on peut penser à certains autres services professionnels, médecins, avocats, un travailleur social, lorsqu'il y a un lien très intime entre le client et le thérapeute, il est très fréquent qu'effectivement il y ait des sentiments qui se développent, et que c'est de la responsabilité du professionnel d'interdire qu'il y ait des relations sexuelles, parce qu'il y a un lien de vulnérabilité par rapport à la personne qui reçoit les services du professionnel.

Là-dessus, M. le Président, je pense qu'il y a même des jugements qui ont été déposés, et je vais rappeler un jugement récent, à la Cour suprême du Canada, qui a reconnu le fait qu'une relation professionnelle peut non seulement s'analyser d'un point de vue contractuel, mais aussi d'un point de vue constatant la présence d'un lien fiduciaire. Et la Cour suprême définissait ce lien comme la confiance d'une personne ayant des pouvoirs restreints en une autre personne investie de pouvoirs et de responsabilités plus grands. Elle exercera ce pouvoir pour son bien et agira au mieux de ses intérêts. Et ce que le jugement disait un petit peu, M. le Président, c'est qu'à un moment donné le thérapeute peut effectivement confondre son propre intérêt avec le bien du client ou de la cliente.

Et la proposition des psychologues, M. le Président, je vais vous la lire parce que je pense que cet amendement-là est quand même intéressant et il va falloir, en commission parlementaire, en discuter et prendre position, à savoir si on décide d'offrir aux Québécois et aux Québécoises une protection qu'on retrouve aux États-Unis ou si on décide de se limiter à ce que le ministre a proposé dans son projet de loi.

Donc, le nouveau projet qui est proposé par la Corporation des psychologues du Québec, ça serait à l'article 59.1:

Constitue un acte dérogatoire le fait pour un professionnel, pendant la durée de la relation professionnelle qui s'établit avec la personne à qui il fournit des services: 1 ° d'abuser de cette relation pour avoir avec elle des relations sexuelles, de poser des gestes injustifiés à caractère sexuel ou de tenir des propos injustifiés à caractère sexuel; 2° d'avoir des relations sexuelles avec elle si la relation professionnelle est basée sur un lien fiduciaire ? comme je vous l'expliquais tantôt, M. le Président.

Et, deuxièmement, constitue également un acte dérogatoire le fait pour un professionnel, après la relation professionnelle qui s'est établie avec la personne à qui il a fourni des services et si cette personne se trouve dans un état de vulnérabilité, d'abuser de cet état pour avoir des relations sexuelles avec elle, pour poser des gestes injustifiés à caractère sexuel à son endroit ou pour tenir des propos injustifiés à caractère sexuel à son endroit.

M. le Président, c'est évident que nous apporterons en commission parlementaire tous les documents, et ils sont nombreux, de l'extérieur. J'ai avec moi, M. le Président, des règlements au niveau de l'Ontario. J'ai avec moi également les codes de déontologie du côté des États-Unis. Évidemment, nous présenterons tous ces arguments-là en commission parlementaire. Nous avons également aussi la Société canadienne de psychologie qui s'est prononcée sur le sujet et qui va beaucoup plus loin que ce que le ministre souhaite dans son projet de loi, et un dernier document, qui a été publié en 1993, M. le Président, sur toute l'éthique au niveau des professionnels. On retrouve très clairement identifié ce fameux lien fiduciaire qui peut exister entre un thérapeute et un client.

M. le Président, c'est évidemment un point qui va être extrêmement important. Je pense que, si on se limite à ce que le ministre propose, c'est évident qu'on ne répond pas aux demandes qui ont été faites en commission parlementaire, M. le Président. Même les demandes qui avaient été déposées en commission parlementaire voulaient aller plus loin que le code de déontologie actuel des psychologues. Et ce que le ministre nous propose, ce n'est pas d'aller plus loin, c'est d'aller moins loin que le code de déontologie actuel des psychologues. Alors, M. le Président, je pense que ce débat-là va être extrêmement long et risque de prendre un peu de temps en commission parlementaire.

Nous avons aussi, évidemment, reçu des demandes, autant au moment de Favant-projet que lors du dépôt du projet de loi, de l'Association des usagers de la langue française. Et ça aussi, M. le Président, c'est assez volumineux.

Le projet de loi que nous avons vient corriger un seul mot. C'est un petit peu comme si le ministre avait compris que, finalement, il fallait changer «corporation professionnelle» par «ordre professionnel». Lorsqu'on regarde toutes les remarques qui nous ont été envoyées par l'Association des usagers de la langue française, on s'aperçoit que c'est beaucoup plus complexe que ça. Et il ne le change pas au niveau du Code. Alors, on maintient le «Code des professions», alors qu'on devrait retrouver, évidemment, le «Code des ordres professionnels». Lorsqu'on parle d'un membre d'un ordre, on ne parle pas d'un membre d'une corporation, mais bien d'un membre d'un ordre. À ce moment-là, on ne peut même pas dire professionnel, parce que l'ordre veut dire que c'est professionnel, donc membre d'un ordre.

Alors, M. le Président, le président de l'Association des usagers de la langue française nous a fait parvenir, encore cette semaine, 19 erreurs, au niveau de la langue française, qu'on retrouve dans le texte du projet de loi 140, des anglicismes, des erreurs de fond beaucoup plus graves aussi. Il y en a 19, M. le Président. Je pense que nous devrons aussi, à chaque article, essayer de corriger, au fur et à mesure que nous les étudierons, pour s'assurer que, finalement, ce Code

des ordres professionnels non seulement réponde au niveau du contenu, mais réponde aussi au niveau de la forme, de l'utilisation de la langue française. Ça m'ap-paraît important que, quant à faire cette réforme, 20 ans après, aussi bien la faire comme il faut, M. le Président.

Nous avons reçu, également, des demandes particulières, parce que vous comprenez ? je vous l'ai dit tantôt ? il y a 41 corporations professionnelles. Donc, chaque corporation professionnelle a, évidemment, déposé certains commentaires. Le projet de loi non seulement vient modifier le Code des professions, mais vient aussi modifier plusieurs lois particulières d'ordres professionnels. Or, M. le Président, il y a principalement des recommandations de la part de l'Ordre des CGA, des recommandations de la part de la Chambre des notaires, de l'Ordre des optométristes, de l'Ordre des chimistes.

Du côté des CGA, on ne se surprendra pas d'une demande de modification, parce que ce qu'on retrouve du côté de la loi des CGA, M. le Président, c'est qu'on retrouve, parmi les services que rendent les CGA, la tenue de livres, qui a changé un petit peu avec tout le système informatique qu'on retrouve aujourd'hui. Les CGA font beaucoup plus ce qu'on appelle des services de gestion. Donc, il y aura lieu de modifier à ce niveau-là. Et il y aura peut-être lieu aussi de questionner le ministre, à ce moment-là, sur ce qu'il a l'intention de faire des demandes qui se retrouvent devant lui. Ces demandes-là ont été aussi devant ses prédécesseurs. Je pense que ça fait plus de 30 ans, 36 ans même, pour être précise, qu'il y a des demandes du côté de la vérification. Alors, peut-être que le ministre pourra nous donner ses intentions à ce moment-là.

M. le Président, du côté de la Chambre des notaires, il y a des points extrêmement importants, principalement l'importance, je pense, de séparer la comptabilité en fidéicommis et le fonds d'indemnisation. Les dispositions sont différentes, M. le Président. Ce sont deux processus tout à fait distincts. Et le projet de loi 140, qui vient modifier ça, propose d'unir ces deux points et de faire un seul règlement, ce qui est tout à fait impossible dans le cas de la Chambre des notaires.

Il y a un autre élément important, bien sûr. Pour assurer la protection du public et permettre de remettre certains montants d'argent au public lorsqu'il y a, par exemple, des fraudes, eh bien, on veut la possibilité de pouvoir utiliser les sommes qui sont dans le fonds d'études notariales, dans le cadre de l'inspection professionnelle, pour mieux protéger le public.

On retrouve aussi, parmi les demandes... Ça, c'est étonnant, M. le Président, que le ministre responsable de l'application des lois professionnelles, qui est lui-même membre de la Chambre des notaires, ait laissé échapper cette erreur, M. le Président. Vous savez que, du côté des notaires, on travaille, évidemment, à partir des différents bureaux, à partir des palais de justice. Le ministre, dans sa loi, propose d'utiliser les régions administratives pour le domicile et les bureaux des professionnels. Alors, du côté des notaires, évidemment, ça posera un problème extrêmement grave parce que les palais de justice ne se retrouvent pas nécessairement dans les régions administratives où le professionnel a son bureau. Alors, là-dessus, il va falloir aussi, évidemment, apporter des modifications. Il y a plusieurs autres modifications concernant la Chambre des notaires que nous devrons traiter en commission parlementaire. (6 h 40)

Même chose du côté de l'Ordre des optométristes, M. le Président, et là c'est assez volumineux. Il y a des recommandations à différents articles. On revient, évidemment, là aussi, du côté du secret professionnel, sur toute la procédure du comité de révision des plaintes. Et, là aussi, lorsque nous arriverons sur ces articles, nous devrons faire certaines remarques.

Du côté de l'Ordre des chimistes du Québec, M. le Président, le ministre s'était engagé, en commission parlementaire, à apporter une modification à l'avant-projet de loi. Par contre, on retrouve à nouveau, dans le projet de loi 140, le même libellé qu'on retrouvait au moment de l'avant-projet et, avec la suppression des articles 10 et 11 de la loi de l'Ordre des chimistes, on se trouve à supprimer la période d'entraînement du candidat à l'exercice de la profession. Et ça, l'Ordre des chimistes s'était prononcé contre, dès l'avant-projet de loi. Le ministre s'était engagé à apporter des modifications. Et, lors de la lecture du projet de loi, on retrouve exactement la même chose. Alors, il y a évidemment là aussi une modification à apporter.

Donc, M. le Président, j'aborderai maintenant d'autres éléments qui m'apparaissent extrêmement importants, lorsqu'on parle de protection du public, et qu'on retrouve peu à l'intérieur du projet de loi 140. On parle peu de la formation continue. Et pourtant je pense que c'est l'élément, aussi, essentiel pour assurer une protection du public. Si les ordres professionnels et si les professionnels eux-mêmes ne se donnent pas un mandat de formation continue... Et les ordres professionnels, la plupart, M. le Président, le font, ont des programmes, mais il n'y a pas nécessairement l'obligation pour chaque professionnel de suivre la formation continue. Mais, M. le Président, lorsqu'on parle de professionnels, il me semble qu'il faut qu'il y ait une mise à jour, peu importe le secteur professionnel dans lequel on opère, et que cette formation continue est la meilleure garantie pour le public. M. le Président, on peut avoir un beau système de plaintes, mais ce qu'il faut souhaiter idéalement au Québec, c'est qu'on en ait très peu de plaintes concernant les professionnels, parce que, justement, ils seront bien formés, ils continueront une formation continue. Et il n'y aura pas de plaintes, parce qu'ils seront toujours à jour et parce qu'ils vont travailler d'une manière toujours très professionnelle et qu'ils seront tous couverts par le système de protection. Alors, M. le Président, là-dessus, il faut déplorer qu'il n'y ait pas de mesures plus incitatives concernant la formation continue.

L'information du public, je l'ai abordée un peu tantôt, M. le Président. Il faudra que le ministre

s'engage à des mesures précises d'information du public. Parce que, après 20 ans, notre Code des professions actuel est inconnu, rien ne nous garantit que le nouveau va l'être davantage. Et, là-dessus, il va falloir que le ministre s'engage, M. le Président.

On a parlé beaucoup de délais imposés aux syndics, de délais imposés aux ordres. Mais, M. le Président, on a omis la partie obligation de l'Office des professions. Et là aussi je souhaite des amendements importants pour donner des délais, aussi, à l'Office des professions.

M. le Président, je vais vous donner juste deux exemples. Concernant la féminisation des titres professionnels, eh bien, M. le Président, vous ne le croirez pas, mais le dossier traîne depuis au moins cinq ans. Est-ce que c'est normal qu'un dossier comme celui-là, qui m'apparaît quand même assez simple, la féminisation des titres professionnels... Cinq ans, M. le Président, et on n'a pas réussi encore à se prononcer à l'Office des professions. Et le ministre nous a dit, en commission parlementaire, qu'on continuait à étudier. Parce que ça semble être bien compliqué de féminiser les titres des professionnels.

M. le Président, un autre exemple: le Barreau, lui-même, a adressé des lettres régulièrement au ministre responsable de l'application des lois professionnelles. La première demande... Écoutez bien, M. le Président, janvier 1991, il demande à l'Office des professions de pouvoir modifier la Loi sur le Barreau, afin de permettre au Barreau du Québec de pouvoir suspendre un de ses membres, lorsque ce dernier se voit déclarer coupable d'une infraction criminelle en première instance. M. le Président, malgré cette demande, janvier 1991, le Barreau n'a toujours pas reçu de réponse. Décembre 1993, toujours pas de réponse là-dessus, M. le Président. Et même, on a fait part au bâtonnier, au nouveau bâtonnier, qu'il n'y avait jamais eu de correspondance à ce sujet. Le nouveau bâtonnier, Me Denis Paradis, a dû envoyer toute la correspondance de ses prédécesseurs pour informer à nouveau l'Office des professions de ces demandes-là.

Alors, M. le Président, je pense qu'il m'apparaît très clair qu'il va falloir, là aussi, mettre des délais. On doit mettre des délais au syndic pour que le public soit sûr que sa plainte chemine dans un délai raisonnable, mais on doit aussi mettre des délais à l'Office des professions pour s'assurer que, lorsque les ordres proposent des changements pour assurer la protection du public, l'Office ne traîne pas ces changements-là pendant deux, trois, quatre, cinq ans, M. le Président. Et ça, c'est très fréquent. Je vous ai donné deux exemples, et il n'y a pas que deux exemples, M. le Président, j'aurais pu vous citer toute une série d'exemples. On a des règlements à peu près ça d'épais, M. le Président, qui sont en attente à l'Office des professions, et la procédure est extrêmement lourde. La loi 140 va amener un certain allégement du côté de ces procédures-là, mais il y a encore place à l'amélioration. Je pense que la possibilité d'ajouter le délai nous permettrait de mieux encadrer l'Office des professions à ce niveau-là.

M. le Président, je pense que je vous ai démontré que, oui, il y a une réforme; oui, il y a des points intéressants dans la réforme. C'est-à-dire qu'à partir du moment où on fait une réforme c'est déjà un premier pas. Mais il ne faut surtout pas croire que, juste le fait de dire qu'on fait une réforme, la réforme est bonne automatiquement. Je pense que, par les remarques dont je vous ai fait part, M. le Président, autant les remarques de différents ordres professionnels, autant les remarques du Protecteur du citoyen, les remarques des associations de consommateurs, le projet de loi 140, qui est devant nous, va nécessiter des amendements. Il va nécessiter des amendements importants. Évidemment, M. le Président, je ne serai pas contre l'adoption de principe parce que c'est déjà un premier pas, mais j'annonce déjà au ministre que, s'il n'y a pas les amendements majeurs que je lui ai déjà annoncés de mon côté, nous serons contre le projet de loi 140 au moment de son adoption, M. le Président, parce qu'il y a des amendements importants à apporter.

Je ne ferai que citer, M. le Président, je n'ai pas fait de citations de journalistes et je ferai cette dernière citation pour terminer mon intervention: «II fallait donner un sérieux coup de barre. Le gouvernement le donne, quoique de façon trop timide et au prix de compromis boiteux.» Et je cite, M. le Président, Gilles Lesage, du Devoir. Donc le même journal, M. le Président, que le ministre a utilisé pour la plupart de ses annonces. «Il faut encore mieux assurer la protection du public. Sans être anodines, les initiatives ne donnent aucune assurance que le mécanisme sera plus souple, plus accessible et moins coûteux. Le projet fait bel et bien mention de correctifs, mais d'aucuns qui donnent l'assurance de plus de rapidité. Le comité de discipline ne pourra imposer les déboursés de l'affaire à un plaignant privé, à moins que le professionnel ait été acquitté sur toute la ligne et que la plainte soit manifestement mal fondée. Mais cette proposition fait problème parce qu'elle risque de détourner de son objectif essentiel la discipline des fautifs, un mécanisme qui ne vise pas d'abord à la réparation des torts. Le projet ne va pas aussi loin que plusieurs l'auraient souhaité: vers l'objectif de la tolérance, concernant les abus sexuels, zéro.»

M. le Président, je pense qu'autant ceux qui ont pu suivre les travaux, et je pense à M. Gilles Lesage, autant le Protecteur du citoyen et autant du côté de l'Opposition, nous considérons qu'il y a des amendements à apporter à ce projet de réforme. Et j'avertis, évidemment, le ministre ? il ne sera pas surpris ? que nous allons faire une étude extrêmement sérieuse, article par article. Et je rappelle, M. le Président, au ministre, qu'il y a 453 articles dans son projet de loi et que nous sommes le 10 décembre. (6 h 50)

Donc, M. le Président, nous sommes d'accord au niveau du principe, mais, s'il n'y a pas les amendements majeurs dont je vous ai fait part, l'Opposition devra s'opposer au moment de l'adoption, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée. Alors, je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, ça me fait plaisir de prendre la parole sur ce projet de loi, surtout après un exposé aussi brillant de notre collègue, qui est critique en matière du Code des professions et qui a indiqué au ministre qu'il va falloir qu'il travaille plus vigoureusement, puisqu'il y a 453 articles, beaucoup de changements à apporter. Et je ne suis pas sûr que le ministre a porté toute l'attention et la perspective, dans ce projet de loi, qu'on doit trouver dans un pays qui vient de signer le libre-échange avec les États-Unis et le libre-échange avec le Mexique.

Il me semble que, d'une façon très traditionnelle, on a vu le Code des professions ou les activités professionnelles comme des activités presque pas concurrentielles, des activités où on était pépère, un peu, où il n'y avait à peu près aucune concurrence. Et on se rend compte aujourd'hui que, dans certains cas, les services professionnels, on en paie le prix parce que, aujourd'hui, il n'y a pas la concurrence qu'il devrait y avoir. Éventuellement, il y aura de plus en plus de concurrence dans le secteur des services professionnels, ce qui va vouloir dire une beaucoup plus grande vigilance au point de vue de la protection du public. Et je ne suis pas certain aujourd'hui, M. le Président, qu'il y a toute la protection du public qu'il devrait y avoir, au contraire.

Quand on voit, dans nos universités, par exemple, que, parce que les professeurs ne corrigent plus les examens, on fait des examens en groupe, et il y a des gens qui arrivent à la fin de leur cour qui n'ont fait à peu près aucun travail tout seuls. Autant il peut être bon de développer l'esprit de leadership avec des travaux en groupe, autant quand, plus tard, l'étudiant qui a étudié dans un secteur professionnel aura à pratiquer, il ne pratiquera pas en gang, il va pratiquer tout seul dans beaucoup de domaines. Et, si, lors de sa formation universitaire, il a fait juste des travaux à deux, à trois, à quatre, et dans certaines facultés, on dit même à six, M. le Président... Vous savez ce qui se passe, au fond, c'est qu'on s'entend pour que, dans le groupe, un tel fasse tel travail, un autre fasse tel travail, un autre fasse tel travail et, finalement, au lieu d'avoir fait six travaux, chacun en a fait un. Sur le plan de la formation professionnelle, je ne suis pas persuadé que ça soit la meilleure façon de le faire. Et, comme dans nos universités il n'y a à peu près aucune concurrence, M. le Président, on paie, à mon avis, chèrement cette façon de faire.

Quand on regarde, par exemple, dans une ville comme Montréal, il y a quatre universités de 40 000 étudiants, à toutes fins pratiques, avec un bassin de population desservie d'à peu près 3 500 000. Mais, quand on regarde à Boston, avec Boston, Cambridge, la région de Boston et Cambridge, où il y a 3 500 000 de population, il y a 60 universités. Il y a de la concurrence. Quand on arrive dans une région comme la région de Québec, on parle de formation universitaire, il n'y a pas de concurrence, il y en a une université, mais elle en a 40 000. On serait bien mieux d'avoir trois, quatre universités qui ont autour de 10 000, certaines peut-être 5000, pas nécessairement couvrir tous les départements, mais qu'il y ait de la concurrence.

À mon avis, M. le Président, nous manquons totalement le bateau dans le domaine de la formation professionnelle parce que nous n'avons pas de concurrence et que nous n'avons pas encouragé la concurrence entre nos institutions, de sorte qu'on se retrouve, dans trop de domaines, avec des institutions pépères.

Quand on regarde, par exemple, dans le domaine des arpenteurs-géomètres. Il y a une faculté; faculté à l'Université Laval. Les arpenteurs-géomètres, quand ils ont fini leurs cours, ils se présentent aux examens de la profession. Savez-vous, aux derniers examens, comment il y en a qui ont réussi? 12 %! 88 % ont échoué, M. le Président.

Quand vous regardez la formation des comptables, on se rend compte qu'aujourd'hui un très grand nombre de comptables échouent leurs examens. Quand on parle d'économie, dans notre société, on paie pour avoir des diplômes, on paie des milliers de dollars par année, par étudiant, puis, finalement, à la fin du cours, il y en a 40 % puis 50 % qui bloquent. Pourquoi? Parce qu'il n'y a pas de concurrence. Il n'y a pas de concurrence et on a un système qui n'est pas bon dans un système où on va devoir de plus en plus être concurrentiel. Qu'on ne pense pas que c'est avec le genre de formation universitaire qu'on a au Québec, avec des grosses boîtes empoussiérées, qu'on va développer des secteurs professionnels compétitifs, alors qu'ailleurs, aux États-Unis entre autres, il y a une très grande concurrence entre les boîtes. Ici, il n'y en a pas. On a des étudiants qui, au secteur primaire, font des examens objectifs, ils répondent vrai ou faux, ou bien ils répondent à travers des choix multiples. Quand ils arrivent pour rédiger, ils ne sont pas capables. au secondaire: 40 % de décrochage. au cégep, ça prend trois ans pour faire deux ans. on se rend compte que, quand ils arrivent à l'université puis qu'ils essaient de composer en français, ils ne sont pas capables. composer dans une autre langue, encore moins, m. le président. la langue d'expression n'est plus une langue qui prend toute la dimension qu'elle devrait prendre sur le plan de la précision et de la clarté.

Dans le domaine professionnel, Mme la Présidente... M. le Président. Je m'excuse du lapsus, je regardais ailleurs quand j'ai dit... Je suis venu pour dire «M. le Président», j'ai dit «Mme la Présidente». Vous comprendrez qu'il est 6 h 55... 6 h 57, le cuisinier est en train de faire cuire les oeufs. Vous savez, M. le Président, je ne pense pas qu'actuellement, dans le domaine professionnel, nous soyons en train de donner les services qu'on devrait donner, et nous ne nous assurons pas suffisamment la qualité par la concurrence.

On va nous dire qu'il y a des examens maison.

On fait des examens maison. Moi, quand les dirigeants des cégeps sont venus nous voir il y a quelques mois, ceux des libéraux, et ils nous ont rencontrés également, ce qui m'a frappé, c'est que la principale demande, c'est qu'ils ne voulaient pas avoir d'examens nationaux, pour ne pas qu'on puisse voir en réalité le degré de succès ou d'échec de chaque institution. Est-ce qu'on pense que c'est de cette façon-là qu'on va former, sur le plan professionnel et technique, des gens concurrentiels et compétents, quand on n'a pas de système de concurrence dans le domaine de la qualification?

Aujourd'hui, M. le Président, on se retrouve avec un système qui, à mon avis, n'est pas efficace. Quand on regarde, après ça, qu'on aura à être en concurrence avec des gens qui ont un plus grand souci d'efficacité, une plus grande efficacité de travail et qu'on se rend compte que notre système universitaire est le seul au monde à donner des certificats... Ça n'existe pas nulle part ailleurs, des certificats. Nous autres, on a des certificats, des diplômes maison qui ne valent rien sur le marché du travail. On fait ça pourquoi? Parce qu'on joue au bébé, on joue à la mère avec nos étudiants, alors qu'on devrait, au contraire, avoir un plus grand souci de l'excellence, du travail bien fait et de la qualité du travail réalisé. Qu'on ne pense pas qu'on va devenir efficace et concurrentiel dans un monde qui va être de plus en plus concurrentiel avec le genre de formation que l'on donne dans nos maisons d'enseignement, avec des vrai ou faux, des choix multiples, des travaux en groupe seulement.

Il va falloir penser davantage, sur le plan des institutions, à former. On commence à découvrir à quel point les échecs de notre système... On commence à se rendre compte, par exemple... Je suis un peu étonné, parce qu'on a eu le député d'Argenteuil qui avait la réputation d'être un homme qui faisait ses devoirs, un homme de devoir, qui faisait ses devoirs, et pourtant il ne s'est même pas rendu compte que notre système d'éducation ne fonctionnait pas. On se rend compte actuellement qu'il y a des milliers d'étudiants qui sont rendus au cégep et qui n'ont même pas fini leur secondaire, parce que les cégeps veulent avoir les subventions qui vont avec un étudiant additionnel. Est-ce que c'est comme ça qu'on pense qu'on va former une nation forte, avec des gens qualifiés puis concurrentiels? (7 heures)

Je pense que nos standards sont beaucoup trop médiocres dans trop de secteurs et que, actuellement, c'est la plus mauvaise préparation qu'on puisse faire dans le cadre d'une perspective nouvelle qui est le cadre du libre-échange nord-américain. Il y aura de plus en plus de concurrence. Et on voit de plus en plus, on l'entend à tous les jours, des entreprises qui ferment, qui changent de place. Pourquoi? Parce que, essentiellement, et de plus en plus, c'est avec la formation technique et professionnelle qu'on va pouvoir réussir.

Quand on regarde les Japonais, M. le Président, qui sont la nation qui réussit le mieux actuellement dans le monde, il n'y a pas de ressources naturelles, il n'y a pas de pétrole, il n'y a pas de charbon, il n'y a pas de métaux, il n'y a pas de blé, il n'y a aucune ressource sauf une: les trois ou quatre pouces qu'il y a au-dessus des sourcils et les six pouces entre les deux oreilles. Le petit ordinateur qu'ils ont ici, c'est là seulement qu'ils investissent. Résultat: les Japonais, qui n'ont aucune ressource, nous vendent toutes sortes d'appareils.

Si on vous avait dit, il y a 30 ans... Et je vois Fex-général ou colonel qui est devant nous; il se rappelle, après la guerre, sûrement, quand on voyait les Japonais, quand on voyait quelqu'un qui avait un produit japonais, après la guerre, en 1945, qui s'achetait une caméra, on lui disait: Ne prends pas trop de photos si tu veux que la caméra dure toute l'année. Et si on vous avait dit dans ce temps-là qu'un jour à peu près toutes les caméras dans le monde seraient japonaises, que les magnétoscopes de télévision seraient japonais, que les appareils de télévision seraient japonais, que les automobiles seraient japonaises, vous auriez passé pour un fou il y a 25 ou 30 ans ? avec un peuple sans ressources, sans aucune ressource matérielle. Sauf que, au Japon, il y a une chose fantastique, il y a des Japonais, et travaillant avec le souci du travail bien fait. nous, est-ce qu'on pense qu'on va être concurrentiels avec le système d'enseignement «sloppy» que nous avons au québec? avec le manque de souci de l'excellence? avec des écoles trop grosses, hein, des écoles trop grandes où l'enfant ne peut pas s'identifier? avec des polyvalentes à milliers d'étudiants où, aujourd'hui, dans notre budget du ministère des transports, le plus important, c'est le transport scolaire? avec des écoles trop grosses, ce qui fait qu'il faut aller chercher les enfants de plus en plus loin? avec une école qui les tanne, dont ils ont hâte de sortir le plus rapidement possible? avec 40 % de décrochage dans le secondaire? avec, encore, des écoles secondaires trop grosses, des polyvalentes trop grosses, des cégeps? le cégep de sainte-foy, qui est rendu au-dessus de 7000 étudiants, qui ne veut pas, et le ministère de l'éducation qui continue. avec des universités à 40 000 alors qu'on est un peuple qui n'est pas très populeux?

Et, aux États-Unis, cherchez-les, les universités à 40 000; il n'y en a pas, à toutes fins pratiques. La plus grosse université de Boston, qui a la population de la région de Montréal, c'est Harvard. Il y a 15 000, et ils veulent baisser à 14 000; ils ne veulent pas augmenter, ils veulent baisser. Et on dit qu'actuellement, aux États-Unis, une étude récente dit que l'université idéale, c'est 8000 étudiants pour être capable d'avoir un suivi sur le plan de la qualité professionnelle et d'avoir une bonne formation. Je ne dis pas qu'il faut faire comme à Harvard, avoir seulement des travaux individuels, n'avoir aucun travail de groupe. Mais, entre ça et avoir rien que des travaux de groupe, il y a une différence.

Quand j'expliquais à quelqu'un récemment, qui ne voulait pas aller à la faculté d'administration de l'Université Laval parce que les travaux étaient tous faits en groupes, à deux ou à trois... Il me disait: Ce n'est rien; en sciences, c'est à six. On ne fera pas des enfants

forts de cette façon-là, M. le Président. On ne fera pas des professionnels forts de cette façon-là. le code des professions. c'est beau, contrôler la profession, mais il faudrait d'abord s'assurer que la formation professionnelle qui est donnée dans nos maisons d'enseignement est valable. et, si on veut économiser de l'argent, il va falloir se demander, m. le président, quand à la faculté des arpenteurs-géomètres, à l'université laval, 88 % bloquent leurs examens de la corporation, où est le problème, parce qu'il y a sûrement un problème. on a payé pour 100 % et on en a 12 %. ça coûte cher. ça coûte cher, ça, hein?

M. le Président, le député, le ministre qui nous présente ce projet de loi, il s'en va. Il s'en va. Est-ce qu'il sera là après Noël? La députée qui vient de parler, la députée de Terrebonne, vient de dire avec raison: 453 articles, et nous sommes rendus au 10 décembre. Je crois que les libéraux veulent ajourner le plus rapidement possible. Est-ce qu'ils ont le temps d'étudier 453 articles en quelques jours, alors que le ministre prend sa retraite? Ou, est-ce que, en réalité, le projet de loi sera étudié avec un nouveau ministre, qui aura été appointé par un nouveau premier ministre? La question...

Une voix: Appointé?

M. Garon: Appointé? Non, je pense que c'est un anglicisme. J'aurais dû dire «nommé». Le nouveau ministre qui aura été nommé par le nouveau premier ministre. La question se pose, puisqu'on apprend que le nouveau cabinet sera peut-être formé seulement au mois de janvier, est-ce que le projet de loi sera, à ce moment-là, étudié avec un ministre qui est déjà dans la porte de sortie, qui a déjà mis ses claques, son foulard et son chapeau? Est-ce qu'on va étudier un projet de loi, 453 articles, sur l'avenir de notre Code des professions, l'encadrement des professionnels au Québec, avec un ministre qui s'en va, qui est quasiment parti? M. le Président, on le voit, d'ailleurs. II est déjà parti. On le voit.

Le peuple n'est pas assez grand, pas assez fort, et on ne fera pas des enfants forts de cette façon-là. Pourquoi? Je le dis, parce que le secteur professionnel et le secteur technique sont les secteurs les plus importants dans le cadre économique nouveau dans lequel nous nous trouvons. On parle de libre-échange. À partir du 1er janvier 1994, nous serons dans le libre-échange continental, puisque dans quelque temps, peu de temps après l'application du libre-échange avec les États-Unis, le Canada et le Mexique, on sait que le Chili et d'autres pays vont suivre.

J'écoutais justement une nouvelle, tantôt, entre deux discours. Il y avait un orateur qui était moins intéressant, alors je suis allé écouter un bout de nouvelles. Je voyais justement qu'une entreprise québécoise s'en allait investir au Chili. Le Chili, en dedans de deux ans, sera dans le libre-échange. Je pense qu'avant longtemps on sera dans un libre-échange de toute l'Amérique ? l'Amérique du Sud, l'Amérique centrale et l'Amérique du Nord. J'ai le sentiment...

L'Ontario vit dans un système de protectionnisme dépassé. M. Bob Rae, je regrette de le dire, il incarne bien plus le passé que l'avenir, malgré son jeune âge, ses conceptions dépassées d'un monde qui n'existe plus, avec une Ontario conçue en fonction du XIXe siècle.

M. le Président, l'avenir, c'est la concurrence. La concurrence, c'est la compétence. La compétence, ça s'acquiert avec un secteur professionnel vigoureux, pas seulement dans les casinos, avec un petit «gratteux». Il y a des gens qui pensent faire fortune en grattant quelque chose, mais je ne pense pas que c'est la façon, vraiment, de développer notre économie. On voit actuellement toutes sortes de façons particulières de développer l'économie. Je regardais ça aujourd'hui: «Sherbrooke aura son Pussycat!» Je ne suis pas convaincu que le développement régional devrait se faire de cette façon-là, quant à moi. Je pense qu'il y a d'autres choses différentes, avec lesquelles il va falloir bâtir. Pas des casinos, hein? J'entendais dire récemment qu'à Rimouski, par exemple, on a une prison dans le parc industriel, en construction, une école navale, et il est question de mettre un bar «topless» aussi. Ça va faire un drôle de secteur industriel! Je ne suis pas persuadé que c'est de cette façon-là...

C'est pourquoi l'enseignement professionnel va être fondamental, à condition qu'on le prenne au sérieux, qu'on développe des secteurs professionnels compétents, avec un enseignement compétent, avec de la concurrence à l'intérieur de nos murs. Nos institutions, actuellement, n'ont pas de concurrence entre elles. On vit encore dans un monde oecuménique où on ne fait pas de concurrence. On se partage le territoire, sauf que tout ça a pour résultat d'affaiblir la concurrence technique, d'affaiblir la compétence technique de nos écoles. (7 h 10)

M. le Président, je sais que vous venez d'une région qui a eu à faire des efforts. Je sais à quel point, quand le secteur de l'amiante est devenu... à cause d'une forme de concurrence déloyale des États-Unis, quand il y a eu une publicité effrénée contre l'amiante, vous avez eu, votre région a dû se réorganiser, se recycler. Elle a dû se recycler, se réorganiser et ça veut dire développer des secteurs, des industries dans des domaines nouveaux. Beaucoup l'ont fait et, aujourd'hui, on a rattrapé un niveau d'emploi enviable. Pourquoi? Parce que les gens ont décidé de s'organiser. Le secteur le plus important pour cette réorganisation, c'est le secteur de la formation technique et de la formation professionnelle.

M. le Président, on pourra faire tous les placota-ges qu'on voudra, si on n'a pas un secteur professionnel et technique fort, vigoureux, on va bâtir sur du sable. On va bâtir sur du sable. C'est pourquoi je suis d'accord à 100 % avec la députée de Terrebonne, qui a parlé au nom de l'Opposition officielle; elle doit faire une analyse très vigoureuse et très vigilante de ce projet de loi là,

d'autant plus que le ministre s'en va. Et comme il s'en va, il n'aura peut-être pas les mêmes exigences sur le plan de la rigueur intellectuelle que quelqu'un qui commence. Et comme il y aura des élections avant longtemps et qu'il est possible, il y a des grandes chances que le gouvernement change, je pense qu'il ne faudrait pas hériter d'une mauvaise loi dans le secteur professionnel. C'est pourquoi j'encourage notre collègue à faire un travail de chien de garde, un travail de moine également...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Veuillez conclure, M. le député.

M. Garon: ...un travail très rigoureux pour qu'on ait le meilleur Code des professions possible, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Lévis.

Mise aux voix

Est-ce que la motion, proposant l'adoption du principe du projet de loi 140, Loi modifiant le Code des professions et d'autres lois professionnelles, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre du Tourisme.

Renvoi à la commission de l'éducation

M. Vallerand: M. le Président, je fais motion pour que ledit projet de loi soit différé à la commission de l'éducation pour étude détaillée.

Une voix: Différé?

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Cette motion de déférence est adoptée?

M. Vallerand: Déféré, c'est ça.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Adopté.

M. Vallerand: Oui.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Quel article du feuilleton, M. le ministre?

Projet de loi 108 Adoption

M. Vallerand: Article 36, M. le Président, pour l'adoption du projet de loi 108, Loi modifiant la Loi sur les forêts et abrogeant diverses dispositions législatives.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Article 36. M. le ministre des Forêts, comme vient de l'indiquer M. le ministre du Tourisme, propose l'adoption du projet de loi 108, Loi modifiant la Loi sur les forêts et abrogeant diverses dispositions législatives. Est-ce qu'il y a des interventions?

M. Garon: M. le Président, avant que le ministre commence son important discours, j'aimerais vérifier le quorum, s'il vous plaît, pour lui faire honneur.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle les députés! (7 h 13 ? 7 h 15)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le ministre des Forêts, vous avez droit à une intervention de 60 minutes.

M. Albert Côté

M. Côté (Rivière-du-Loup): merci, m. le président. comptez sur moi. j'ai pas mal tout dit lors des étapes précédentes sur ce projet de loi. mais, tout de même, m. le président, je voudrais vous rappeler qu'en décembre 1986 l'assemblée nationale adoptait la loi sur les forêts à l'unanimité et les dispositions entrées en vigueur à cette date, en avril 1987, modifiaient de fond en comble la façon de gérer les forêts du domaine public du québec. heureusement que le québec a évolué dans cette direction et qu'il a pris ce virage pour en arriver à l'adoption de cette loi. sans ce virage, m. le président, nos produits forestiers seraient boycottés sur les marchés mondiaux. quand on pense que nous exportons 75 % de cette production, ça serait dramatique, m. le président.

Cette loi s'appuyait sur deux grands principes: le rendement soutenu et la protection de toutes les ressources du milieu. Déjà, M. le Président, nous avons modifié cette loi à trois reprises, et ceci dans le respect des principes de base et selon l'objectif d'assurer une meilleure gestion de cette importante ressource. Encore une fois, le projet de loi 108, que j'ai présenté le 26 octobre dernier à l'Assemblée nationale, s'inscrit dans ce même objectif, mais aussi dans un mouvement mondial d'amélioration de la gestion forestière. Le projet de loi, que j'espère voir adopter par tous les membres de cette Assemblée, propose donc des améliorations à la Loi sur les forêts.

À nouveau, M. le Président, je remercie tous les membres de la commission de l'économie et du travail pour leur grande disponibilité. Je suis tellement convaincu de l'importance de ce projet que j'ose espérer qu'il recevra l'appui de tous les membres de cette Assemblée. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. M. le député de Laviolette, je vous cède la parole.

M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Malheureusement pour le ministre du Tourisme, qui se demande si je peux être aussi rapide que le ministre, je dois dire non, pour des raisons bien simples. C'est que, quand j'ai commencé à discuter avec le ministre de ce projet de loi, mes intentions étaient de l'appuyer parce que les principes que le ministre mettait dans ce projet de loi, qui étaient des amendements à la Loi sur les forêts, qui avait d'ailleurs été adoptée, à l'époque, à l'unanimité, malgré que nous étions en désaccord sur certaines modalités, on était quand même d'accord sur l'ensemble des principes. Je pense que c'était, à ce moment-là, important. C'était, de la part du ministre, une loi qui faisait suite à ce que j'avais déposé comme membre du gouvernement de l'époque ? en 1985, donc ? ce livre blanc qui a été déposé au mois de juin 1985 et qui a été mis en loi en 1986.

Je dois vous dire que nous n'avions pas mis d'objection à ce grand principe de changement de mentalité important dans l'ensemble de la forêt en tenant compte qu'il fallait faire disparaître les grands contrats d'approvisionnement qu'on connaissait à l'époque, surtout dans le sciage, mais surtout des grandes concessions forestières où les compagnies étaient, selon les termes habituels de ces concessions de 99 ans et plus, quasiment rois et maîtres.

Alors, les changements de mentalité quant à ces modes de récolte, quant à ces modes de coupe, quant à ces travaux sylvicoles appropriés amenant de l'aménagement forestier, nous nous étions mis d'accord sur ces grands principes. Ce sur quoi nous étions en désaccord, c'était sur les modalités d'application. Nous avions même dit, à l'époque, que nous aurions à revenir continuellement, et c'est la réalité, c'est ça qui nous arrive encore aujourd'hui. Et tant et aussi longtemps que le ministre s'entêtera à faire de mauvais amendements, je vais devoir le critiquer. C'est mon travail, c'est mon devoir, d'autant plus que je représente ici les gens qui n'ont pas de voix autrement que par la mienne. Le ministre ? je vous donne juste un exemple ? nous a entraînés sur ce que je peux appeler ça un «ego trip», à l'époque où il était sous la tutelle du ministre de l'Énergie et des Ressources, actuel ministre des relations internationales. Il a été ensuite sous la tutelle de la ministre de l'Énergie et des Ressources, qui est actuellement la vice-première ministre. Il avait décidé de créer son ministère des Forêts. (7 h 20)

Écoutez, il nous disait que c'était la voie que le gouvernement empruntait. J'avais dit à l'époque, et je le répète aujourd'hui parce que ça va devenir essentiel et important dans les semaines qui vont venir, j'avais dit que nous n'avions pas d'objection à la création du ministère des Forêts parce que c'était ce que le ministre voulait, mais ce n'était pas notre voie qu'on désirait comme membres de l'Opposition et on espérait, on voulait davantage, plutôt, la création d'un ministère des ressour- ces renouvelables. Et, même en 1984-1985, alors que j'étais ministre délégué, je le disais, l'étape que nous vivons actuellement des changements à l'intérieur de la forêt publique et des aides apportées à la forêt privée, incluant l'ensemble des plantations à venir, ce n'était qu'un changement migratoire, si je peux l'appeler comme tel, vers d'autre chose. Et cette autre chose, c'est là qu'on est arrivé aujourd'hui, c'est le ministère des ressources renouvelables. Les rumeurs qui circulent à travers les informations que nous avons venant de diverses sources nous indiquent que le gouvernement jongle avec la possibilité de rapatrier le ministère des Forêts à l'intérieur d'un vaste ministère regroupant le ministère de l'Énergie et des Ressources, regroupant le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, la partie Chasse et Pêche, le ministère de l'Environnement, une partie, en fait, et le ministère des Forêts dans un ministère des ressources renouvelables.

Vous vous imaginez, M. le Président? Voilà trois ans que ce ministre-là nous a présenté un projet créant le ministère des Forêts, amenant le changement que ça a apporté à travers le Québec dans tous les lieux de travail sur le territoire dans ce qu'on appelle les régions, les sous-régions, et le ministère lui-même, parti du 200B, chemin Sainte-Foy, vers l'Atrium, à Charlesbourg, puis revenu, avec la création du ministère, sur le chemin Sainte-Foy, un peu plus loin, là où étaient autrefois les ? pour ceux qui connaissent Québec ? les permis de conduire du ministère des Transports, juste au coin de Belvédère, où se retrouve... Ça, c'était le ministre des Transports actuel... Non, mais le ministre des Transports actuel me dit: La SAAQ. Je lui dis: Pour ceux qui connaissent Québec... Parce que, quand je venais chercher mon permis de conduire en 1970, c'était là et c'était le ministère des Transports qui était là. C'est devenu la Société de l'assurance automobile du Québec, mais je vous dis que c'était dans ces lieux-là, maintenant, que se trouve le ministère des Forêts. Puis, là, on le rapatrierait, semblerait-il, vers l'Atrium.

Vous vous imaginez l'argent gaspillé? L'argent gaspillé par des décisions prises pour répondre à ce que j'ai appelé «l'ego trip» du ministre, qui était en chicane avec ses ministres de tutelle à l'époque. Tout le monde sait ça. Personne ne va nier ça. On le sait. Et, dans ce contexte-là, il nous amène un projet de loi qui, lui, ne répond pas à l'ensemble des besoins. Je vous dirai, par des documents qui nous ont été communiqués par l'Ordre des ingénieurs forestiers... Je le prends parce que c'est un communiqué qui était public, et il dit: Le projet de cession des lots intramunicipaux en Abitibi-Témiscamingue. Les ingénieurs forestiers demandent de ne pas dilapider la forêt.

J'ai d'autres documents, La Terre de chez nous, semaine du 11 au 17 novembre ? ce n'est pas tellement loin ? «Bataille pour les derniers boisés d'Abitibi-Témiscamingue». On dit: «Le milieu agro-forestier d'Abitibi-Témiscamingue hurle à la trahison de certains élus.» On a, dans La Terre de chez nous toujours, en date du 4 au 10 novembre, une semaine avant: «Des

modifications qui affecteront les boisés privés». On est donc, M. le Président, dans un contexte où le ministre semble encore malheureusement prendre la mauvaise décision. Mauvaise décision quant à la création du ministère, dans un contexte où on va reprendre, dans un ministère grossi, compte tenu des décisions du futur premier ministre, de l'argent gaspillé de la même façon que je reprends les discussions que j'ai eues avec lui sur les lots intramunicipaux.

Qu'est-ce que demandent les gens que représente l'Ordre des ingénieurs forestiers du Québec par son président, M. Magella Morasse, en ce qui concerne la cession des 9000 lots intramunicipaux aux municipalités? Bien, il dit que cette cession est intéressante, car elle responsabilise les élus les plus proches des citoyens, mais ? mais, il y a un mais, M. le Président ? selon lui, la proposition gouvernementale met en péril le développement durable à long terme en ne reconnaissant pas de niveau régional de coordination, de la planification et de l'encadrement des activités en forêts et en négligeant de mettre de l'argent dès le départ dans le fonds régional prévu pour financer l'aménagement forestier des lots. Exactement ce que j'ai dit lors de l'étude de ce projet de loi, aussi bien à l'étape de son adoption de principe, qu'à l'étape de l'étude en commission parlementaire, qu'à l'étape de prise en considération du rapport et qu'à l'étape actuelle de l'adoption finale du projet de loi, M. le Président.

Il faut se le rappeler, l'aménagement forestier, ce n'est pas une question de planter un arbre le matin du printemps et le récolter au soir de l'automne. C'est un peu plus long que ça. Ce n'est pas comme un épi de blé d'Inde qu'on plante au printemps et qu'on récolte à l'automne. Ce n'est pas comme aux États-Unis, avec le «kenaf», une plante qui grossit comme une canne à sucre du printemps jusqu'à l'automne. Ce sont des horizons de 25, 30, 40, 50 et 60 ans, M. le Président. Il faut donc être plus «précautionneux», comme dirait ma grand-mère, quand on fait ces travaux-là et quand on prévoit pour le futur.

Bien, c'est exactement ça que l'Ordre des ingénieurs dit: L'aménagement des forêts se fait sur des horizons d'au moins 25 à 30 ans et ne doit pas consister à liquider le bois sur pied. Si l'objectif visé est que les lots intramunicipaux servent au développement régional d'activités permanentes et économiquement viables, les ingénieurs forestiers proposent au gouvernement du Québec de modifier le projet de loi 108, qui est présentement devant l'Assemblée nationale, afin d'y ajouter une structure légère de concertation régionale qui verra, entre autres, à fixer des critères communs pour l'allocation des lots intramunicipaux sylviculteurs des MRC de l'Abitibi-Témiscamingue et le suivi des plans de gestion.

M. le Président, que disent les gens, à l'intérieur de l'article dont je vous fais mention, sur les derniers boisés d'Abitibi-Témiscamingue? Ils disent: «Conseil régional de développement et municipalités prêts à brader la stratégie de mise en valeur des lots intramunici- paux adoptée l'an dernier après consultation régionale. L'enjeu: les dernières réserves de bois d'Abitibi-Témiscamingue.» C'est l'offre de Québec de céder les 9000 lots intramunicipaux, comme on les appelle, à 80 municipalités, ce qui a mis le feu aux poudres, dit-on, à l'UPA puis le Syndicat des producteurs de bois. Donc, vous avez un organisme de gestion régionale, qui est le Conseil régional de développement de l'Abitibi-Témiscamingue, qui avait fait des propositions au ministère des Forêts qui ont résulté à la mise en place d'un projet de loi. Vous avez, à côté de ça, les syndicats des producteurs de bois qui disent: Un instant, il faut faire attention. C'est sûr que c'est quelque chose dont il faut, comme la prunelle de nos yeux, en faire la protection.

On ne peut pas, à ce moment-ci, accepter l'offre telle que proposée par le ministre des Forêts parce que c'est un guet-apens. C'est malheureux de le dire comme tel, mais le ministre semble vouloir dire aux gens: Écoutez, l'Abitibi-Témiscamingue, c'est le lieu le plus propice pour faire l'expérience que je veux faire. Cette expérience-là, je veux la faire, mais en disant aux gens: Écoutez, je vous donne les lots, je les donne aux municipalités, mais je ne vous donne pas l'encadrement nécessaire, je ne vous donne pas l'argent nécessaire, puis je vous laisse aller. (7 h 30)

Qu'est-ce qui va arriver, vous pensez? Les municipalités, si elles refusent, le ministre va dire: Écoutez, vous me le demandiez, je vous l'ai offert, puis vous me dites non. Bien, il va dire: Laissez-moi tranquille. S'il elles les prennent sans avoir toutes ces capacités de passer à travers, qu'est-ce qui va arriver? C'est qu'elles vont manquer leur coup. Ils vont dilapider le fonds forestier, et là le ministre va dire: Vous voyez, à travers le Québec, l'Abitibi, c'était le lieu le meilleur, messieurs, dames, pour faire l'expérience que j'ai prise et que j'ai mise dans un projet de loi. Puis, ils ont manqué leur coup, soit parce qu'ils les ont refusés ou soit parce qu'ils les ont acceptés, puis qu'ils ont manqué leur coup. Bien, je ne peux pas exporter ce modèle-là ailleurs, messieurs, dames: c'est impossible. C'est ça que le ministre va dire.

Mais je n'accepte pas ça, M. le Président. Ce n'est pas de même que ça marche. Les gens, ce qu'ils veulent, c'est, à partir du projet qu'ils avaient... qui était, à mon avis, logique et qui permettait peut-être de faire des ajustements et qui permettait, en même temps, de répondre à ce que disent les gens, qui sont les ingénieurs forestiers. Ce ne sont pas des innocents! C'est des gens qui connaissent le bois; ils savent comment ça marche.

De plus en plus, ils veulent se responsabiliser, puis ils vont être responsabilisés, en autant qu'un gouvernement leur donne la chance. Mais, que dit la proposition du Comité ministériel permanent de l'aménagement, du développement régional et de l'environnement, appelé, dans le langage ministériel, le COMPADRE, ou le «COMPADRE», comme ils disent à propos du projet de loi 108? Bien, voilà ce que dit le COMPADRE:

Transfert des lots publics intramunicipaux et parts de 400 hectares ou moins en faveur des municipalités, établissement de conventions d'aménagement avec les municipalités pour les blocs de lots intramunicipaux, le support à la mise en valeur des lots privés, la mise en place d'un fonds régional pour la mise en valeur des lots intramunicipaux de l'Abitibi-Témiscamingue. Bon. Voilà! O.K.? Mais aucun mécanisme de mise en marché du bois n'est privilégié.

Que disent encore les ingénieurs forestiers de cette proposition? Bien, deux faiblesses; deux faiblesses, et deux faiblesses majeures. Quand on parle de faiblesses majeures, c'est le risque de mettre en péril des propositions qui devraient normalement être intéressantes. Bien, voilà: le financement de la mise en valeur est une de ces faiblesses. On le dit: Le financement de la mise en valeur de l'aménagement forestier des lots intramunicipaux à même la vente des lots et des bois provenant des lots cédés néglige de mettre de l'argent dès le départ pour financer et encadrer toute l'opération, retardant de plusieurs mois, sinon de plusieurs années, l'application réelle sur le terrain.

Deuxième faiblesse majeure. Que disent les ingénieurs forestiers?: La proposition gouvernementale diffère de la proposition régionale quant à l'identification du niveau de responsabilité des intervenants régionaux. Alors que la région privilégie la mise en place d'une table régionale de gestion, le gouvernement retient le niveau des municipalités. Et, ça, c'est prévu aux articles 19 et suivants de la loi qu'on est en train d'adopter de façon finale, M. le Président. Donc, le gouvernement est en train de créer, selon leurs termes ? toujours des ingénieurs ? un pattern qui pourrait s'étendre aux régions du Québec où des lots intramunicipaux sont disponibles. Ce choix est intéressant, disent-ils, car il responsabilise les élus et la plupart des citoyens. Il est plus facile, à court terme, sur le plan législatif, et il est pratique pour le gouvernement du Québec ? mais, mais, mais je le répète ? la proposition gouvernementale ne permet pas la reconnaissance légale d'un lieu régional de concertation qui aurait pour mission de coordonner la planification et l'encadrement de la mise en valeur des lots intramunicipaux.

Voilà, M. le Président, des raisons majeures de voter maintenant contre ce projet de loi là. J'avais dit, à l'époque, que j'étais d'accord avec les principes. Nous avions appuyé le ministre en lui disant: J'espère que vous allez corriger ça lors de l'étude article par article. Il n'a rien fait. On a accepté le rapport parce que le rapport était réel de ce qui a été fait en commission parlementaire. Mais, maintenant, nous sommes à l'étape finale de l'adoption, et nous allons, M. le Président, voter contre. On ne peut pas accepter de participer à ce guet-apens que le ministre est en train de mettre sur pied.

Pourquoi, maintenant, avoir un organisme régional? Je reprends, parce que ça adonne bien que ce communiqué de presse des ingénieurs arrive à cette date, parce que c'est la même position que nous tenons. Je n'ai pas changé. Vous pourrez lire tout ce que j'ai dit jusqu'à maintenant, et on arrive aux mêmes conclusions. Et j'en profite pour dire: Pourquoi un organisme régional, selon l'Ordre des ingénieurs? Bien, d'une part, la mise en valeur des lots intramunicipaux doit participer au développement régional d'activités permanentes, économiquement viables, en tenant compte de l'ensemble des ressources identifiées, pas juste du bois, là: la chasse, la pêche, la récréation, la villégiature, tout l'ensemble des activités.

La structure doit donc favoriser la mise en place de petites entreprises structurantes basées sur une bonne planification à long terme. D'une part, la gestion des forêts doit se faire selon un horizon, comme on le disait, à moyen terme, de 10 ans, et à long terme, de 25 à 30 ans. C'est souvent l'horizon de travail de l'ingénieur forestier. Qui, ici, dans cette salle, n'a pas vécu... Moi, j'ai actuellement, dans le syndicalisme, 13 ans, et dans l'enseignement, 13 ans au total, et 17 ans comme membre de cette Assemblée; ça fait 30 ans que je suis sur le marché du travail. Bien, c'est la même chose pour l'ingénieur forestier. Trente ans, c'est une vie normalement active d'une personne, 30 à 35 ans.

Pourquoi, maintenant, elle apparaît essentielle pour les ingénieurs forestiers, cette structure régionale? Premièrement, cette structure permet de coordonner la planification de la mise en valeur des lots intramunicipaux avec un horizon régional et à long terme selon le principe du développement durable. Deuxièmement, elle permet de mettre en place un système de contrôle du prélèvement admissible et de voir à l'établissement d'un niveau d'aménagement forestier par territoire de MRC. J'ajouterais même, personnellement, peut-être même de regroupements de MRC dans certains cas. Elle permet de fixer des critères communs pour l'allocation des lots intramunicipaux. Elle permet de définir et de coordonner la mise en place du support nécessaire à la mise en valeur des lots intramunicipaux: assistance technique, formation, information, recherche et développement. Elle permet de stimuler l'entrepreneur, les sylviculteurs et sylvicultrices et l'implantation et le développement de projets d'entreprises de transformation.

Et le ministre devrait être conscient de ça. Il a lui-même participé, comme moi, à l'époque où j'étais ministre, à la mise en place d'usines de transformation. Lui, à La Tuque, avec la Coopérative forestière du Haut-Saint-Maurice, et moi avec la coopérative qui existe à Sacré-Coeur, dans le comté de Saguenay. Et Boisaco provient d'une décision comme celle-là. Et elle permet de s'assurer que les interventions tiendront compte de la mise en valeur de l'ensemble des ressources: matière ligneuse, faune, eau et récréo-touristique. Exactement ce que je dis moi-même dans un document du Parti québécois, et qui existe et qui a été distribué lors d'une conférence de presse au mois de mai dernier et qui parle exactement de la même chose, M. le Président.

Et enfin, cette structure régionale permet de voir à ce que les activités forestières soient supervisées ou

réalisées sous la responsabilité d'un ingénieur forestier. Partout à travers le Québec, où je suis allé pour parler de la politique que nous allons établir quand nous formerons le gouvernement, par le ministère des Ressources renouvelables, c'est ça que je dis: II est important que l'ingénieur forestier ne dépende plus ni du ministère ni d'une compagnie forestière pour l'ensemble de l'exploitation d'un lieu appelé la forêt. Je le dis et je le redis, M. le Président, je conçois mal maintenant, à ce moment-ci, pourquoi il faudrait que l'usine de transformation de deux par quatre, comme on dit, de planches, que l'usine de transformation de panneaux gaufrés, que l'usine de transformation de panneaux agglomérés, que l'usine de transformation de panneaux dits par déroulage, que l'usine qui fait de la pâte, quelle que soit la forme de pâte ou le papier ou le carton, que cette compagnie-là, maintenant, dans le futur, soit responsable de l'exploitation forestière. Pourquoi ne pas laisser à d'autres le soin de le faire? (7 h 40)

Et l'exemple que je donne, c'est toujours un exemple boiteux, parce qu'un exemple, c'est toujours boiteux, mais je ne connais pas d'usine de textile qui a à la fois son champ de coton ou son champ de moutons, mais pourtant, elle fait de la laine et elle fait du coton et elle les tisse. Pourquoi il faut que les usines de pâtes et papier, les usines de sciage ou de déroulage aient leur champ de transformation par l'exploitation forestière? Pourquoi, à ce moment-là, nous ne les donnons pas à d'autres personnes dans des unités de production viables, ces choses? Sur le principe suivant: Qu'il faut avoir, pour l'usine qui doit faire un deux par quatre, une planche, un déroulage, de la pâte pour le papier, le carton, qu'elle ait quatre choses importantes, que tout le monde reconnaît: un bois de qualité, selon l'usine, bien entendu; en quantité suffisante; en temps voulu, quand c'est commandé pour le mardi, ce n'est pas le jeudi qu'on en a besoin, le mardi, ce qu'on appelle dans le langage d'aujourd'hui «just in time» et, quatrième chose, au prix du marché. Et quand je parle de ça, M. le Président, j'en parle fort aise puisque, à l'époque, ou à ce moment-ci, aujourd'hui même, en fait je devrais dire hier puisqu'on est rendu vendredi, jeudi, il y avait signature entre l'Association des manufacturiers de bois de sciage du Québec et les syndicats producteurs de bois de certaines régions dont celles de Québec, Beauce, Mauricie, Estrie, la signature pour des contrats d'approvisionnement à l'usine de sciage, ce qui n'était pas visible il y a deux mois, six mois, un an, c'étaient des choses impensables. Il y avait des batailles à la Régie des marchés agricoles sur des contrats à long terme pour le sciage.

Mais, remarquez-vous, M. le Président, que c'est en marche parce que les gens qui sont dans les boisés privés, de plus en plus, au lieu de faire un billot de quatre pieds, ils devront faire des billots de 8, 12, 16 pieds, permettant d'abord à la bille de passer à l'usine de sciage et de déroulage, les résidus allant à l'usine de pâte. Alors, dans ce contexte, M. le Président, dans la même veine que l'Ordre des ingénieurs forestiers qui dit, en résumé: En ne reconnaissant pas de niveau régional de planification, d'encadrement et de consensus et en négligeant de créer les conditions de financement de l'aménagement forestier dès le départ, la proposition du gouvernement du Québec ne prend pas les mesures suffisantes pour protéger le patrimoine forestier et favoriser le bien-être de la société. À court terme ? écoutez bien ça, c'est important. M. le Président, puisque le ministre m'écoute aussi, il le sait très bien, ce dont je parle ? il renvoie sur les épaules des élus municipaux les pressions des industriels forestiers en manque de bois.

La députée de Matane, qui connaît très bien le secteur, va dire la même chose que moi sur ce point-là. Elle le sait très bien, d'ailleurs. La première responsabilité du ministre, d'après le communiqué des ingénieurs forestiers qui dit: La première responsabilité du ministre des Forêts doit être de mettre en place une structure de contrôle du pillage des lots boisés. Voilà une des raisons majeures pour lesquelles nous nous devons, M. le Président, d'être contre le projet de loi.

Une autre raison, puisqu'il y en a d'autres. S'il y avait juste celle-là, vous me diriez: Ce n'est peut-être pas suffisant. Non, M. le Président, il y en a d'autres. Là, ça vient d'un autre groupe. Là, Mme la députée de Matane est aussi au courant que moi puisque ça vient du Comité forestier ? région Matane, qui concerne les permis de bois de chauffage aux détenteurs de contrats d'approvisionnement et d'aménagement forestier. Que disent les gens qui nous ont fait parvenir, à la députée de Matane, de Kamouraska, d'Abitibi, de Laviolette, au niveau du ministère ainsi qu'au ministre des Forêts lui-même? Ils ont pris connaissance, comme tout le monde, du volume 64, numéro 38 de Terre de chez nous, dont je faisais mention tout à l'heure, des modifications qui affecteront les boisés privés. Ils ont vu, comme tout le monde, qu'il y avait des problèmes au niveau des permis de bois de chauffage. Ils disent, dans la lettre: Nous avons pris connaissance, donc, dans Terre de chez nous, de l'intention de votre ministère d'adopter des modifications à la Loi sur les forêts, entre autres, de votre intention de délivrer des permis de bois de chauffage aux détenteurs ? écoutez bien, pour ceux qui connaissent ça ? des contrats d'approvisionnement et d'aménagement forestier. Pas à des individus qui en ont besoin, pour le besoin de leur propre cheminée, comme je dirais, un foyer à la maison, pour des gens qui vont être des détenteurs 3e CAAF. Nous sommes conscients qu'à la suite des coupes forestières des détenteurs de contrats d'approvisionnement, qui récoltent principalement des essences de bois résineux pour leurs opérations de transformation, un volume significatif de bois feuillu demeure sur les champs de coupe et que ceci représente un non-sens, un gaspillage potentiel de notre richesse forestière

Ça n'a pas de bon sens qu'on continue comme avant. Tout le monde veut des changements. C'était amorcé, ces changements, ce n'était pas suffisant, mais voilà que le ministre en remet, comme on dit en langage populaire.

Ils disent au ministre: Cependant, votre intention de permettre aux industriels détenteurs de contrats d'approvisionnement et d'aménagement forestier de mettre en marché ce volume de bois feuillu en bois de chauffage représente une menace inacceptable pour nos petits propriétaires de boisés privés et notre population rurale.

Au moment où on parle de rural ité, de revenir à des concepts qui sont différents du passé, voilà que le ministre, qui connaît le secteur, agit autrement. La vente de bois de chauffage, disent-ils, par les petits propriétaires de boisés privés constitue souvent la différence entre la pauvreté et une qualité de vie minimum, entre le déficit et la rentabilité minimum. La possibilité de voir arriver sur le marché du bois de chauffage en quantité industrielle, à des prix qui risquent de représenter une concurrence déloyale et excessive, constitue une autre menace à la survie de nos populations rurales. et je sais que le ministre responsable de l'environnement, qui est à la fois leader du gouvernement, mais aussi dans un secteur où il y a des boisés privés, dans brome-missisquoi, puisque dans sa région 95 % des boisés sont privés, le sait très bien que c'est éminemment dangereux pour les petits propriétaires de boisés privés. nos populations rurales réclament une plus grande emprise sur leurs territoires et sur les richesses collectives s'y trouvant. vos intentions sont donc encore perçues comme une autorisation aux industriels de piller encore plus notre patrimoine, notre richesse collective.

Vous comprendrez que nous ne pouvons être d'accord avec vos intentions de permettre aux industriels détenteurs de cartes de produire du bois de chauffage. Par conséquent, nous vous demandons d'abandonner cette modification à la Loi sur les forêts et d'envisager plutôt un nouveau contrat social avec nos populations rurales, qui pourraient, à leur profit, récupérer leur richesse collective, leurs forêts.

Voilà donc ce que disent des gens et d'autres que je pourrais vous nommer, M. le Président, qui font la même chose en termes de représentation. Et je vous dirai que ce que je dis à ces gens... si le ministre décide de passer le projet de loi, puisque c'est son intention qui semble être à ce moment-ci, celle qui est perçue, je vous dirai que, nous, comme membres du Parti québécois, nous avons l'intention d'agir autrement. Cet agissement, vous le retrouverez dans le programme du parti qui a été adopté au mois d'août dernier.

Vous le retrouverez dans les documents qui font actuellement l'objet, à tous ceux qui le demandent, d'information à travers le Québec, de consultation de ces documents qui disent: Oui, nous sommes d'accord pour qu'il y ait, à ce moment-ci, une autre façon que de voir la forêt publique être le moyen de mettre une pression sur la forêt privée. Ça, je pense qu'il faut être clair. Le ministre lui-même est responsable en termes légaux du bois public.

C'est lui qui détermine, dans les contrats à renouveler à ce moment-ci avec des industriels qui possè- dent des usines de transformation, le volume de bois à être pris sur la forêt publique, c'est lui qui le fait. Il doit donc profiter de cette circonstance pour justement, s'il s'aperçoit que ce bois-là doit être diminué en termes de volume, je parle du bois public, au profit d'une augmentation du boisé privé, qu'il le fasse.

Qu'il le fasse pour le bien-être de nos populations rurales. C'est la proposition que nous avons commencé à élargir dans l'ensemble de la population pendant deux ans que j'ai fait le tour du Québec, M. le Président. J'ai vu les populations locales. Je le redis et je le redis que nous avons l'intention de revenir à des sentiments qui soient autres que ceux que le ministre a actuellement.

Nous allons mettre en place, dans cette forêt dite forêt habitée... Pour ceux qui connaissent la forêt, ils sauront que c'est ce qu'on appelait autrefois la forêt de banlieue. C'était celle qu'on appelait autrefois la forêt domaniale, en particulier. Ça s'appelle des «lots intramu-nicipaux», des «lots épars». Tout ça dans un contexte où on parle d'une forêt habitée d'environ 50 km autour des municipalités, plus ou moins, dépendant des secteurs, parce que, quand on arrive à Baie-Comeau, 50 km autour, on n'ira pas chercher du bois dans la mer. Il n'y en a pas. (7 h 50)

Mais on ira chercher plus loin. Nous donnons des formules à être envisagées dans chacune des régions. Nous allons mettre en place, comme partout ailleurs, en Abitibi-Témiscamingue, on le demande. Dans le Bas-Saint-Laurent?Gaspésie, on le demande. Chez nous en Mauricie, des études sont faites où, là, on regarde des secteurs plus ou moins boisés, collines, montagnes, rivières, lacs, dans des unités de production viables, intégrant l'ensemble des ressources, comme le disent les ingénieurs forestiers, pour permettre à des gens de pouvoir vivre de la forêt et de ramener dans le milieu les gens au travail dans un contexte comme Roosevelt a fait à l'époque des années de crise aux États-Unis, et dont profitent, à ce moment-ci, les Américains, puisque les bois se sont rapprochés des usines, se sont rapprochés des lieux habités où, là, les routes existent, où, là, les services existent, où, là, il est possible à des gens de pouvoir aller travailler dans le bois et revenir coucher chez eux, le soir.

C'est possible de faire ça si on donne le goût aux Québécois et aux Québécoises de le faire. Nous avons l'intention, comme gouvernement, de le faire, M. le Président. C'est ma responsabilité comme porte-parole de le dire et de le redire. C'est ce que nous avons annoncé, le chef, M. Parizeau et moi-même en conférence de presse, au mois de mai dernier, et qui est devenu réalité par l'adoption de ce projet de forêt habitée, à notre congrès du mois d'août dernier.

Mais dans ce contexte où le ministre est en train de mettre des difficultés, on a toujours l'impression que le ministre, sachant tout ça, sachant qu'il va laisser aller sa place, puisqu'il a l'intention de quitter et de ne pas se représenter ? tout le monde sait ça, c'est de commune renommée... Bien, il était peut-être en train de mettre

des bâtons dans les roues, mais je lui dis: Faites attention, M. le ministre, ça n'a pas de bon sens.

Un autre exemple où il devient difficile, maintenant, M. le Président, d'accepter le projet de loi... M. le Président, le ministre du Tourisme, qui a passé une belle nuit, qui a eu la chance de se reposer, ne me dérange pas. Moi, je n'ai pas encore dormi. J'ai été ici pour faire mon travail de député de l'Opposition, mais je vous dirai, M. le Président, qu'il y a des choses aussi qui inquiètent le monde chez nous comme ailleurs. Ça, ce n'est pas...

M. Garon: M. le Président...

M. Jolivet: Oui, qu'est-ce qu'il y a, monsieur?

M. Garon: ...étant donné l'heure, ça vaudrait la peine de vérifier le quorum, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Qu'on appelle les députés. (7 h 52 - 7 h 55)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): M. le député de Laviolette, allez-y.

M. Jolivet: M. le Président, ce que j'étais en train de dire, c'est que, il y a aussi d'autres choses dans le projet de loi. J'ai parlé des lots intramunicipaux, j'ai parlé du bois de chauffage, mais je n'ai pas parlé de la troisième chose qu'on a répétée au ministre à plusieurs occasions. Et même le ministre était surpris de savoir que j'avais pas mal d'informations que lui n'avait même pas, qui pourtant circulaient à l'intérieur de son propre ministère. Je le vous dis, M. le Président, c'était la question de l'affichage du tonnage des ponts dans la mesure où, dans le projet de loi, il est prévu que le ministre peut mettre des pénalités pour des gens qui passent sur des ponts en dehors des limites permises.

Bien, imaginez-vous que, le plus drôle que ça puisse paraître, c'est que le ministre n'était même pas au courant qu'il y avait une étude dans son propre ministère à l'effet de faire sauter les pancartes, les pancartes qui annoncent le tonnage. Vous l'avez ici: La compagnie marque 57 tonnes métriques ? c'est elle qui passe dessus avec ses camions ? et le ministre, lui, il marque 5 tonnes ou 10 tonnes. Ça fait une méchante différence en termes de transport forestier, ça. Et ça, le ministre avait une étude qui était en train de se faire en disant que l'affichage des ponts, on enlèverait ça parce que ça coûterait trop cher, on sauverait de l'argent. Bien, vous vous imaginez, si moi, je passe sur un pont, puis le tonnage n'est pas indiqué et on m'accuse d'avoir passé dessus, je paie l'amende. C'est drôle!

Mais ça, c'est les inquiétudes de tout le monde. C'est des villégiateurs, c'est toutes sortes de personnes qui vivent... Ceux qui ont des routes forestières comme les miennes le savent très bien. Quand la personne de Montréal ou d'ailleurs vient faire un tour à Clova ou vient faire un tour à Matawin ou vient faire un tour sur le pont que le ministre des Transports a fait construire à Matawin même, sur la rivière Saint-Maurice, ou qui va venir sur la route 10 ou la route 25 ? comme on les appelle chez nous ? elle va savoir que c'est quasiment des autoroutes forestières qu'on a maintenant. Mais une fois qu'on a fait ça, il y a des routes secondaires, des routes tertiaires. Et là, il y a des affichages de ponts qui doivent être faits, parce que le ministère a la responsabilité, sur ces chemins forestiers là, d'après ce que le ministre me disait, de surveiller le tonnage pour éviter qu'il y ait des accidents.

Et ça, ça a commencé, vous savez où, M. le Président? Ça a commencé dans le Wayagamac, chez nous, le chemin entre La Tuque et Rivière-à-Pierre. Il y un camion d'huile qui était venu porter son chargement dans les chalets du lac Wayagamac, il a pris la côte difficilement, il est tombé en bas du pon{ et là on a dit que le pont n'était pas sécuritaire et ces choses-là alors qu'il y avait eu d'autres choses qui faisaient en sorte que peut-être l'individu conduisait un peu trop rapidement.

Alors, imaginez-vous, à partir de ça, on a décidé de faire la vérification de chacun des ponts. Ce n'est pas le ministère des Transports là, c'est le ministère des Forêts qui a décidé ça. Mais, en même temps, dans une autre direction, on envisageait, pour répondre aux besoins du ministre du Conseil du trésor, de faire disparaître les pancartes. Et dans son projet de loi, le ministre dit: Celui qui ne respectera pas les tonnages des ponts et qui sera pris en flagrant délit aura, M. le Président ? imaginez-vous ? une amende. C'est grave, là. Alors, on lui a expliqué que ça n'avait pas de bon sens. (8 heures)

Deuxièmement, je vais vous donner un autre exemple de ce qui se passe dans nos chemins forestiers comme ceux-là. Vous avez des clubs privés, pas ceux qu'on connaissait autrefois qui avaient le seul droit de chasse, le seul droit de pêche. Des clubs privés, ça existe encore; légalement, ils existent. Ces clubs privés là, ils ont des chemins pour se rendre à leurs clubs privés. Alors, qu'est-ce qui arrive? C'est que s'ils décidaient d'enlever les fardoches, comme on dit ? «défardocher» en bon québécois ? de couper les branches de chaque bord du chemin, de faire les calvet-tes, les ponceaux, nettoyer ça sans avoir la permission préalable, bien, imaginez-vous, ils pourraient être pénalisés, ils pourraient être mis sous amende. C'est la première fois que je vois des gens mis sous amende pour avoir fait des choses merveilleuses. C'est comme si ? ce n'est pas le mot exact, «amender» ? on mettait des amendes à des gens qui faisaient des bonnes choses. Vous savez bien'que ça n'a pas de bon sens. Mais c'était ça, le projet de loi, et on demande au ministre de s'apercevoir qu'il pourrait arriver des choses semblables et qu'en conséquence il devrait s'assurer que ce que dit le projet de loi, ce n'est pas de mettre de l'amende à la vertu. Alors, le ministre pouvait bien nous dire, dans les discussions qu'on a eues avec lui, que ce n'est pas l'intention du ministère, qu'ils ne feront pas ça. Mais je ne le vois pas dans le projet de loi.

Moi, j'ai bien beau écouter les paroles du ministre, ça ne veut pas dire que je le crois sur parole. Je suis obligé de croire sa réponse, mais je ne suis pas obligé de croire qu'il a raison. Une fois que j'ai dit ça, je dis: Maintenant, mettez-le dans le projet de loi; assurez-vous que vous ne taxez pas la vertu, que vous ne pénalisez pas la vertu; assurez-vous que ce que vous recherchez est fait. Ce n'est pas dans le projet de loi, M. le Président.

Une dernière chose avant de terminer, une inquiétude qu'il me reste dans l'esprit. Vous savez, en vertu du projet qui a été mis sur pied sur la fiscalité municipale, il y avait eu des programmes de remboursements à des propriétaires de boisés privés qui sont considérés comme faisant du travail dans leur milieu, donc ce qu'on appelle le producteur forestier. Le producteur forestier doit faire des travaux sylvicoles, doit couper du bois. Ces gens-là ont une carte de producteur forestier. Vous le savez, à travers le Québec, il y a à peu près 120 000 propriétaires de boisés privés. Bon an, mal an, 25 000 à 30 000 de ces gens-là font de la mise en marché ou font des travaux sylvicoles. De ceux-là, il y en a une partie qui sont des propriétaires à la fois agricoles et sylvicoles, ce qu'on appelle des agro-forestiers. Ces gens-là maintenant, comme tous les producteurs forestiers, qu'ils soient cultivateurs ou pas, ont droit à des remboursements d'impôt foncier, des taxes foncières qu'on appelle. Alors, ce qui arrive, c'est qu'on leur donne des remboursements.

Cette session-ci, il y a eu un projet de loi 127 présenté par le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et qui concerne justement ça. Normalement, quand on fait les concordances normales, on devrait voir la même chose, puisque c'est des formes de remboursements identiques. Ceux qui sont dans la zone verte puis ceux qui sont dans les zones forestières ont droit à des remboursements, à la condition de faire, comme je vous dis, des travaux sylvicoles appropriés. Alors, que dit le projet de loi des pêcheries? «Ce projet de loi a pour objet de modifier la Loi sur le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, afin de réviser le montant des taxes foncières et des compensations que le ministre remboursera pour l'exercice financier municipal 1994 et pour l'exercice financier scolaire 1993-1994.» Parce que, elles, elles se situent du mois de juillet au mois de juin suivant, au niveau scolaire. «Ce projet de loi permet, en outre, que les demandes de remboursement pour l'exercice financier municipal 1992 ? donc rétroactif ? et l'exercice financier scolaire 1991-1992 puissent être faites jusqu'au 30 juin 1994.»

Donc, le gouvernement dit: Je vais rembourser ce qui est là, mais j'ai jusqu'au 30 juin 1994, donc je sauve de l'argent, parce que je ne paie pas tout de suite, je ne sors pas de l'argent de mes coffres, puis je fais de l'intérêt avec celui qui dort. Mais qu'est-ce qu'il dit? Bien, on dit, à l'article 2: «Le montant remboursable en application de l'article 36.4 est, pour l'exercice financier municipal 1994 et pour l'exercice financier scolaire 1993-1994, réduit, selon le cas, de l'un ou l'autre des montants suivants: «1° un montant de 150 $ dans le cas où le montant remboursable serait de 1000 $ ou moins; «2° un montant de 150 $ auquel s'ajoute un montant représentant, jusqu'à concurrence de 400 $, 10 % de la différence entre le montant qui sera remboursable et 1000 $, dans les autres cas.»

Voilà donc un moyen que le gouvernement s'est trouvé pour aller récupérer de l'argent. Bien ça, là, M. le Président, si ça se fait pour les secteurs agricoles, ma crainte est aussi exacte pour le secteur agro-forestier, pour le forestier. Je suis surpris de voir qu'il n'y a pas un projet de loi qui vient faire exactement dans le forestier ce que le ministre fait dans l'agriculture. Et ça, c'est inquiétant, M. le Président, parce que le ministre a toujours considéré que ces aides qu'il apporte dans le programme d'aide, soit individuel ou soit collectif, au forestier, c'est un cadeau qu'il leur faisait. Bien, moi, je lui ai répété, et je le lui répète encore aujourd'hui, que ce n'est pas de même qu'il faut faire les choses. Ce n'est pas un cadeau que l'on fait à des propriétaires de boisés privés. C'est qu'on donne à des gens l'aide nécessaire pour, justement, l'investissement national, l'investissement national qu'a fait Roosevelt dans son milieu et qui profite à la société américaine à ce moment-ci. Ce qu'on doit faire ici au niveau du Québec, M. le Président, c'est de s'assurer que nos agriculteurs, nos forestiers deviennent, dans le futur, des gens qui vont aménager et couper correctement la forêt, selon des principes sylvicoles appropriés, mais à condition d'être amenés à le faire. vous le savez, 120 000 propriétaires de boisés privés au québec, 30 000 à 35 000 annuellement font des travaux sylvicoles ou mettent la mise en marché, qui représentent 10 % de la forêt québécoise, mais qui représentent 20 % de la mise en marché. vous vous imaginez, cette forêt qui est proche des usines, qui est proche du milieu habité, si elle était travaillée et transformée, aller chercher les bois nécessaires qui pourrissent actuellement ou qui tombent par chablis, ça pourrait donner à des industriels du bois de qualité, à condition qu'ils soient aidés à le faire, dans un investissement national de travail pour les gens. c'est ça que le parti québécois propose, m. le président. c'est de remettre entre les mains de ces gens un 10 % de la frange de la forêt publique qui permettrait de mettre en marché fort probablement de 35 % à 40 % de la mise en marché des bois, en tenant compte de tout le reste.

Allez voir le président de la Fédération des producteurs de bois, Marius Biais, en Estrie. Allez voir Desrosiers, qui est président des coopératives.... non, excusez-moi, qui est président des organismes de gestion en commun, connu sous le regroupement RESAM, qui, lui aussi, a, comme tout le monde, commencé à faire autre chose que juste de la récolte de bois. Allez voir Léonard Otis, dans le Bas-Saint-Laurent?Gaspésie, qui fait autre chose que de la coupe de bois; il va aller chercher son bois, bon an mal an, tout en préservant le

bois futur selon des techniques qui sont nouvelles et qui auraient dû être anciennes cependant. Parce que c'était ce que disait Esdras Minville, alors qu'il était à cette École des hautes études commerciales, dans les années vingt, il disait qu'il aurait fallu faire ce que l'on commence à penser à faire aujourd'hui et qui nous donne un retard à ce moment-ci de près de 70 ans sur la façon d'aménager notre boisé privé et notre boisé public.

Ce n'est pas des mensonges que je vous conte. Quand j'ai fait ma conférence de presse au mois de mai, j'en ai fait mention au monde. J'ai lu un texte. J'ai dit: Voilà un texte que je vais vous lire. Puis, quand j'ai eu fini, j'ai dit: Quand est-ce que ça a été écrit et par qui ça a été écrit? La réponse, c'était: Eldras Minville, 1924-1925. Imaginez-vous si on avait fait ça dans ce temps-là, aujourd'hui on aurait des forêts où on pourrait aller à la chasse, même au sanglier. Chez nous, dans notre région, et le député de Trois-Rivières qui m'écoute le sait très bien, parce qu'il l'a probablement vu comme moi, les wapitis qu'il y a dans la région du comté de Champlain, de notre collègue Brouillette, qui ont des bois de haute qualité, et qui peuvent permettre d'avoir une chair de bonne qualité aussi. Vous avez des places, de plus en plus à travers le Québec, de sangliers dans les bois comme ceux-là. On pourrait donc faire l'intégration de tout l'ensemble des activités forestières et là ne plus juste penser à la récolte forestière. L'ingénieur forestier de demain, le sylviculteur de demain, M. le Président, la sylvicultrice de demain, ce sont des personnes qui vont penser développement de la forêt dans son intégralité selon le développement durable, pas juste pour la cueillette du bois, pour tout l'ensemble des activités. (8 h 10)

Alors, voilà pourquoi, M. le Président, le projet de loi qui est devant nous ne répond en rien à ces préoccupations pour les lots en Abitibi-Témiscamingue, ne répond en rien pour les lots dans le Bas-Saint-Laurent?Gaspésie, à la demande de tout le monde, ne répond en rien pour les lots de la Mauricie. J'énumére-rais partout, toutes les régions au Québec, M. le Président, ça ne répond en rien. Ça ne fait que mettre, encore une fois, la pagaille potentielle comme on a dans la construction à ce moment-ci. Le ministre est en train de mettre les germes de la discorde. C'est un gouvernement de discorde qu'on a devant nous, M. le Président, au lieu d'amener le monde à se ramasser pour développer la région.

J'invite donc les gens à bien lire le programme du Parti québécois qui les invite à ça, qui invite à ce rassemblement des forces vives du milieu pour leur donner les capacités, région par région, selon des modalités différentes. Parce que M. le ministre des Transports, ici, ou les autres députés dans la salle, ou le député de Papineau ne sont, comme tout le monde le sait très bien, pas capables de porter la même sorte de chemise, 15 pouces de collet puis 32 pouces de manches; on n'a pas la même grosseur.

Ça veut dire que nous avons les obligations de considérer nos régions selon leurs besoins, leurs capaci- tés et de leur donner les outils nécessaires. Voilà ce que l'on propose, M. le Président, et voilà ce que refuse le projet de loi, tel que présenté devant nous. Et c'est pour ça, M. le Président, que nous allons voter contre.

Le Président: Très bien, M. le député de Laviolette. Je reconnais maintenant M. le député de Lévis.

M. Jean Garon Motion d'ajournement du débat

M. Garon: M. le Président, à cette heure, je pense que ce serait le temps de proposer une motion d'ajournement.

Le Président: Alors donc, vous proposez une motion d'ajournement du débat? Cette motion est débat-table. Alors, vous voulez intervenir, M. le député de Lévis? Vous avez la parole pour un maximum de 10 minutes.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, comme il est 8 h 12, que nous fonctionnons sans arrêt depuis hier après-midi, que le rendement des députés ministériels est affaibli puisque nous devons constamment demander le quorum et si on ne veut pas que ça sente trop le Casimir dans le Parlement, il va falloir donner un «break» aux députés pour aller prendre une douche, se faire la barbe, se peigner et revenir pour la session à 10 heures, M. le Président. Autrement, c'est la loi des accidents du travail que nous allons devoir invoquer. Tantôt, j'ai vu que les gens «checkaient» leur pouls pour voir si les battements de leur coeur étaient encore au bon rythme. Et je pense qu'à ce moment-ci ça serait dans l'ordre des choses d'avoir une motion d'ajournement.

Nous avons eu une soirée active pour compenser la soirée inactive de la veille. Mais je pense que chaque chose a son temps, que chaque chose a sa limite et qu'à cette heure-ci il est raisonnable, je pense, de proposer une motion d'ajournement pour que les caucus qui doivent commencer, préparatoires à la période de questions de 10 heures, puissent avoir lieu et que les députés aient le temps de se préparer pour être à temps à cette période de la journée qui recommence, la journée de vendredi.

M. le Président, je vois que vous venez de remplacer vos collègues et que vous êtes venu faire le chiffre de jour. Je vois plusieurs députés, là... Je pense que ce serait irresponsable de continuer parce qu'il y a des députés qui vont faire des crises cardiaques. Puis on sait que c'est le matin... je viens justement de lire un article, M. le Président, dans le Globe and Mail, et, justement, il y a un article où on dit que c'est le matin que c'est le plus dangereux, les crises cardiaques plutôt que le soir.

Alors, je pense, M. le Président, que, si on veut vraiment faire du travail sérieux aujourd'hui, il faut

donner la chance aux députés d'ajourner à 8 h 15 pour aller se préparer pour la séance de la journée. On a adopté plusieurs loi, pas de la meilleure façon. Je vois le député d'Iberville qui manifeste que c'est le temps d'ajourner. Nous avons adopté plusieurs loi, je pense, pas dans les meilleurs conditions, et ce serait le temps de passer à autre chose en vue de revenir à 10 heures, M. le Président, d'autant plus qu'un Parlement qui siège de nuit comme ça ce n'est pas ce qu'il y a de mieux. Ce n'est pas rassurant pour la population qui se lève, de voir des députés à la barbe longue, dans certains cas trop pâles, fatigués, qui n'ont pas l'air en forme, M. le Président.

Les femmes, je ne veux pas parler parce que, comme je connais moins leur condition, moi, je ne peux pas me prononcer. Mais, comme, dans ce débat d'ajournement, il y a 10 minutes pour le parti ministériel et il y a 10 minutes de réplique, à ce moment-là, je pense qu'une personne du sexe opposé, chez les ministériels ou de notre côté, pourrait prendre la parole pour dire ce qui en est.

Mais, vous-même, je vois dans vos yeux, M. le Président, vous vous demandez: Est-ce qu'ils vont être assez fous pour passer la nuit? C'est pour ça que, à ce moment-ci, je pense que, si on veut avoir l'air sérieux, je pense qu'il faudrait voter la motion d'ajournement pour qu'on puisse se préparer pour une journée d'activité, pour pouvoir passer toute la journée. Je pense que le leader du gouvernement abuse de ses députés lorsqu'il commande, en fin de session comme ça, des nuits complètes; ce n'était pas nécessaire. Notre règlement nous dit qu'on peut aller jusqu'à 48 heures avant Noël, ce qui nous permettrait de faire les travaux et, après ça, légiférer de jour, au mois de janvier, s'il le faut, en convoquant la session. D'ailleurs, il y aura un nouveau premier ministre. Il pourra montrer son énergie en convoquant une session au mois de janvier, par exemple, et on pourrait étudier tous les projets de loi avec le temps voulu plutôt que d'escamoter les travaux dans des travaux de nuit qui ne sont pas souhaitables.

Je remarque que, malgré un menu législatif minime, le leader du gouvernement s'est senti obligé de nous faire passer une nuit pour faire croire qu'il y avait tellement d'ouvrage qu'il fallait passer la nuit, alors qu'il n'a pas besoin. La veille, on avait ajourné. On n'avait pas de session la veille parce qu'il y avait des fêtes dans le parlement. Alors, on aurait pu siéger facilement, M. le Président. Ce n'était pas nécessaire de faire une nuit, cette nuit. Il y a des fois où on ajourne au début de l'après-midi et il n'y a rien qui se passe dans le parlement. Quelle est l'utilité, à ce moment-là, de faire une nuit pour faire des discours, pour présenter des projets de loi importants? J'en ai vu qui avaient jusqu'à 200 pages: la Loi sur les impôts, qui a été présentée cette nuit et dont on a discuté, a 197 pages, 251 articles; un Code des professions, qui est assez épais également, 453 articles; un grand nombre de lois. Je pense que ce n'est pas la meilleure façon de faire des études que de faire ça à cette heure tardive, où il est de bonne heure, mais, dans le fond, on est encore sur la session d'hier, sur la séance... On est toujours sur la séance d'hier, au fond, alors que nous sommes rendus à 8 h 15 du matin, presque 8 h 20 maintenant.

Alors, je pense qu'il est raisonnable de présenter ? je ne fais pas d'abus, j'aurais pu la présenter plus tôt ? une motion d'ajournement à 8 heures le matin, M. le Président, je pense bien que personne ne va penser qu'on abuse et que ce n'est pas légitime de présenter une telle motion. Il y a d'autre temps pour faire les travaux. Il n'est pas nécessaire de faire ça à cette heure tardive. Et les gens vont nous penser bien plus intelligents et ils vont avoir beaucoup plus confiance dans les parlementaires si on travaille à des heures normales plutôt que de travailler à des heures de fou. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le leader du gouvernement.

M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, très brièvement, M. le Président. J'ai beaucoup de sympathie pour mon bon ami, le député de Lévis, qui, pratiquement tout seul, tout au cours de la nuit, a eu à «s'autofilibuster». Maintenant, des forces fraîches sont arrivées. Je reconnais Mme la députée de Johnson, qui vient lui prêter main-forte. Il est 8 h 20, elle arrive de chez elle, elle est capable de s'exprimer clairement sur tous les projets de loi qui seront appelés par le gouvernement. (8 h 20)

De ce côté-ci, l'équipe a été modifiée tout au long de la nuit. Des députés ont pu aller se coucher, d'autres sont revenus. Nous avons une équipe fraîche et nous entreprenons cette journée, M. le Président, avec un horaire chargé, dans le but d'adopter le maximum de projets de loi pour le bénéfice de la population québécoise.

Le Président: Alors, M. le député de Laviolette. M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: M. le Président, même si on n'a pas dormi durant la nuit, on est quand même frais et dispos, mais je vous dirai, M. le Président, que, si mon collègue propose une motion d'ajournement à ce moment-ci, je suis prêt à l'appuyer. Je vais vous dire pourquoi.

Dans un contexte où, à plusieurs occasions... Je le répète et je vais le répéter souvent. À un moment donné, ça va venir à rentrer dans la tête du monde. Il y a des projets de loi qui peuvent être déposés à un moment où la session agit et ils ne devraient pas avoir le droit, à moins d'une urgence, d'être adoptés sans faire toutes les consultations qui s'imposent, M. le Président. Donc, elle ne devrait, cette loi-là qui a été déposée à une session du printemps, admettons, être adoptée qu'à la session d'automne.

Durant la nuit, on est allé voir des gens de l'autre côté dans les petits salons. À un moment donné, on a eu la chance de dialoguer ensemble. Même si on n'est pas du même avis, il y a certains points sur lesquels on se rencontre souvent. Les gens nous disent: Tu as raison, tu as raison, Jean-Pierre. Tu as raison, on ne devrait plus arriver à des folies comme celles-là. On n'avait pas le choix, le menu, ce n'est pas nous qui le déterminons. Le menu, il est ici, là. Ce n'est pas nous, les membres de l'Opposition, qui l'avons voulu, c'est le gouvernement qui nous l'a donné. Et regardez, tout ça là, ça a été forcé dans la gorge des gens.

Le leader dit: Nous avons eu des forces fraîches. Je sais qu'il a été pas mal ici toute la nuit, mais je peux vous dire que, en cours de route, on en a vu des pas mal défraîchis, nous autres, dans les bureaux. On en a vus de l'autre bord, aussi, qui avaient hâte de partir, qui ne regardaient pas trop, trop d'un bon oeil le leader, parce qu'ils disaient: Ça n'a pas de bon sens de nous forcer à faire ça. Même, j'irais jusqu'à dire qu'il y a des vice-présidents qui ne trouvaient pas ça drôle cette nuit, M. le Président. Pour des raisons bien simples, c'est qu'on avait un menu chargé, un menu chargé parce qu'il y a eu des discussions qui ont pris plus de temps que prévu mardi sur certains sujets. Et vous aviez la responsabilité de prendre des décisions importantes, puisque c'était prioritaire au niveau des décisions. On n'a pas pu faire autre chose, tant et aussi longtemps que votre décision n'était pas rendue. Donc, nous n'avons pas à vous blâmer, M. le Président, ce n'est pas vous qui l'avez mis là. Vous, vous aviez à décider.

Ça, c'était mardi, donc on n'a quasiment pas siégé, puis, quand vous avez rendu votre décision finale, le leader du gouvernement a dit: Bravo, on s'en va chez nous, on revient demain matin. Mais ça, c'est sa responsabilité, M. le Président. Le menu qu'on a ici, il y en a une partie qui devait être faite mardi qui n'a pas été faite. Il faut être conscient de ça, là.

Deuxièmement, mercredi, pour des raisons qui appartiennent au gouvernement, il leur avait dit d'avance... C'est le leader qui fait l'agenda, nous on le subit, cet agenda, M. le Président, comme membres. Le leader du gouvernement me fait signe que c'est conjointement, de part et d'autre. Non, non, il nous indique ce qu'il a l'intention de faire, puis, nous autres, on indique combien de personnes vont parler dessus. Il y a une chose qui est certaine, «leader», comme on dit en bon québécois, les leaders, là, puis «dealer», c'est autre chose. Notre leader, il ne «deal» pas. Notre leader a des responsabilités, puis notre «dealer», il les prend comme il faut. Que l'autre côté nous indique des actions à prendre, on va agir en conséquence. Mais je vous dirai que ce n'est pas nous qui avons mis le menu comme celui-là, M. le Président.

C'est pour ça que je dis que ça n'a pas de bon sens. Y «a-tu» des choses dedans qui pressaient à ce point d'être obligé de l'adopter aujourd'hui? Je vais donner un exemple bien typique. Le député de Lévis en a fait mention, ma collègue la députée de Terrebonne, avant qu'elle nous quitte tout à l'heure, qui a passé la nuit avec nous, elle l'indiquait aussi. Le ministre, qui nous propose le Code des professions, et je le regarde là, c'était: Adoption de principe, Code des professions. Est-ce que c'était urgent de le faire à ce moment-ci, M. le Président? Oui, c'était probablement urgent pour le ministre qui quitte, le ministre qui ne sera pas là après les fêtes. Ce ministre va avoir son nom dans l'histoire comme ayant proposé le nouveau Code des professions, parce qu'il nous expliquait que ça faisait 25, 30, 40 ans, je ne me souviens pas, là, le nombre d'années où il n'avait pas été changé. Là, c'est beau, c'est lui, là, qui va dire: Écoutez, c'est moi qui l'ai proposé. Mais, le mois prochain, il ne sera plus là.

Prenez l'exemple typique du ministre de la Justice qui venait nous dire que, sur les victimes d'actes criminels, il y aurait une commission parlementaire après les fêtes. Il s'en va, il ne sera pas là. Est-ce que c'était urgent que ce soit lui qui le présente? Non, M. le Président. N'importe qui aurait pu le présenter à la session de mars. Il n'y a aucune urgence. Il n'y a aucune urgence. Le ministre n'avait pas raison de nous faire veiller toute la nuit sur ces choses. Et c'est pour ça, M. le Président, que, si on agit correctement, tous les députés, ici, à l'Assemblée, vont le dire... On devrait y réfléchir davantage. Les leaders, avec le président, devraient davantage y réfléchir, parce que je sais que vous êtes d'accord avec moi, M. le Président, à titre d'homme qui croit que la façon dont les travaux se font, à certains moments donnés, ça n'a pas de bon sens. Un projet de loi devrait être déposé à la session du printemps, n'être adopté qu'à la session de l'automne, et vice versa. Là, à ce moment-là, on aurait le temps de faire les consultations qui s'imposent dans l'intersession.

Et l'exemple typique, c'est mon collègue de Lévis qui l'a fait, M. le Président. Combien de fois dans le passé, à la fin de session, on était à magasiner, dans une commission parlementaire, sur des lois privés. À titre de président de la commission, avec son vice-président, on a décidé ensemble de faire ça à l'intersession. Combien de projets de loi qu'on a étudiés à l'intersession, des projets de loi privés, ont vu leur adoption en série après ça, à l'ouverture de la session qui était en cours! Parce que c'est une façon différente de faire de la législation, c'est une façon où on a le temps de dialoguer avec les gens.

L'exemple typique d'une loi privée comme ça, mon collègue de FAbitibi, qui est ici, à ce moment-là était aussi responsable d'un projet de loi avec Trois-Rivières. On s'en souvient. Trois journées où il a fallu faire venir le monde. On a fait de la conciliation, mon collègue a travaillé comme un forcené avec le ministre des Affaires municipales, ils ont obtenu un projet de loi qui fait l'unanimité maintenant dans la région. Mais, s'il avait été adopté comme c'était prévu, en fin de session, ça aurait été la pagaille, M. le Président. Ça faisait deux ans qu'il était retardé parce que c'était la pagaille. Mon collègue a travaillé à l'intersession, j'étais là pour l'appuyer, le président de la commission, le député de

Lévis, était là. Nous avons travaillé dans des conditions normales, sans pression. Et c'est pour ça, M. le Président, que je dis: Mon collègue de Lévis a raison de proposer la motion d'ajournement, et je vais l'appuyer jusqu'au bout, M. le Président.

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions? Pas d'interventions.

M. Garon: Oui.

Le Président: Réplique? Réplique pour un maximum de cinq minutes, M. le député de Lévis.

M. Jean Garon (réplique)

M. Garon: M. le Président, j'ai écouté les propos très éloquents de mon collègue de Laviolette, qui parle avec beaucoup de sagesse, d'autant plus que tous les députés sont d'accord. Sauf que, je ne sais pas ce qu'il y a, quelle maladie ça prend, un leader, on dirait qu'à un moment donné il faut que ça joue au petit boss, et il dit: Je vais vous faire veiller. Ça montre que ça a de l'autorité, tu sais. Sauf que c'est niaiseux, M. le Président, c'est niaiseux. Essentiellement, il a donné un bon exemple, le député de Laviolette. Avant, on faisait, des sessions, les bills privés le jeudi soir, dans la nuit, dans toutes sortes de consentements, un «free-for-all» épouvantable, et tout le monde sortait frustré. Depuis qu'on fait ça à un autre moment...

Je me rappelle la première fois, c'étaient des gens de la ville de Québec. Il y avait beaucoup d'opposants. Ils sont venus, ils ont tous été entendus, ils sont tous partis contents. Pourquoi? Parce qu'on a fait ça dans des conditions idéales. On ne devrait pas légiférer de cette façon-là. Moi, je ne pense pas que c'est bon pour le Parlement de faire des marathons qui ne riment à rien. S'il le faut, la session commence le 15 octobre, finit le 15 décembre, recommence le 15 mars et finit le 21 juin; qu'on la fasse commencer le 1er octobre si on n'a pas assez de temps, qu'on la fasse commencer le 15 septembre, M. le Président. Les députés sont payés 12 mois par année; ils pourraient siéger plus longtemps s'ils ont besoin de plus de temps pour siéger.

Pourquoi faire en sorte de siéger de cette façon-là, d'une façon qui, moi, je pense, contribue à déprécier le Parlement? La meilleure façon, c'est que ça puisse se faire visière levée, que les gens puissent savoir de quoi il est question, que les gens puissent savoir qu'est-ce qui en découle, que les gens puissent être entendus. Cet après-midi encore, le leader du gouvernement a refusé d'entendre des gens, M. le Président. Il a refusé d'entendre des gens qui ont des entreprises, qui ont un projet de loi qui les concerne, qui va les affecter, qui va leur rendre la vie difficile, pour, encore là, être à la course et ne pas les entendre. Pourquoi? Pourquoi? C'est quoi, cette maladie-là de jouer au petit boss, au petit boss, tu sais, au chef de gang? Ce n'est pas ça, ce n'est pas ça, un Parlement.

Un Parlement, essentiellement, c'est quoi? C'est un système démocratique où les gens qui sont là, normalement, veulent adopter les meilleures mesures pour la population. La meilleure façon de le faire, c'est que les gens ne soient pas frustrés, qu'on opère à des heures du jour normales, qu'on entende les gens normalement, qu'on prenne le temps qu'il faut, qu'on réfléchisse le temps qu'il faut. Dans notre Parlement, on légifère beaucoup trop vite. Qu'est-ce qui arrive? Le résultat, c'est que nos lois pètent. Regardons les municipalités qui sont mal prises maintenant avec des surtaxes municipales parce que c'est des lois faites avec des bâillons. J'avais dit au ministre des Affaires municipales, à ce moment-là, qu'il arriverait que sa loi aurait des difficultés parce qu'elle n'avait pas été étudiée. Et c'est arrivé. C'est le résultat, comprenez-vous. Et les gens ont des problèmes, actuellement, à cause d'une loi qui a été mal adoptée, qui n'a pas été étudiée, qui a eu des bâillons. Résultat: tout le monde a des problèmes, actuellement, avec une surtaxe qui a été déclarée nulle, illégale, ultra vires par les tribunaux. (8 h 30)

M. le Président, je pense qu'une fois pour toutes il va falloir en venir à une décision concernant ces marathons de fin de session, qui font partie beaucoup plus du folklore que de la bonne gestion parlementaire. Beaucoup de choses ont été améliorées dans le Parlement, sauf qu'il reste ces fins de session là qui ont l'air du folklorique, comprenez-vous, du folklorique, où les gens essaient de se faire croire qu'ils travaillent fort parce qu'ils passent une nuit dans des conditions pitoyables, avec des façons de faire pitoyables, puis ça devrait être changé.

Moi, je vois des femmes, des fois, qui me disent... Vous avez parlé tantôt, Mme la députée... Oui, il y des femmes qui m'ont dit: S'il y avait plus de femmes dans le Parlement, ça ne se ferait pas parce qu'elles verraient à ce que ça ne se fasse pas, des folies de même. Peut-être que les femmes, justement, ont moins le besoin de se sentir viriles, d'essayer de faire des sessions 24 heures par jour, des façons qui n'ont pas de bon sens.

Alors, c'est pourquoi, M. le Président, je dis que la motion d'ajournement est bienvenue, c'est le bon temps pour la faire. Il est 8 h 30, on va pouvoir aller se faire la barbe, prendre une douche et aller déjeuner, puis revenir et continuer dans des caucus avant la session qui va recommencer à 10 heures, M. le Président. Je pense que ce sera la meilleure façon de faire les choses. Il faut commencer à un moment donné, ce serait le temps de commencer, M. le Président, et je souhaite que les députés ministériels ne se laissent pas imposer une dictature par leur leader gouvernemental, par mollesse, par faiblesse, en disant: Bien, le leader veut, alors, faisons les zigotos.

Mise aux voix

Le Président: Le débat étant terminé, est-ce que

cette motion est adoptée? Alors, pour le vote enregistré, suivant nos règlements, il vous manque un parlementaire pour un vote enregistré. S'il vous plaît! Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Président: Adopté sur division. Alors, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le projet de loi 108? Il n'y a pas d'autre intervention?

La motion est rejetée, je m'excuse. La motion est rejetée. Évidemment, la motion d'ajournement est donc rejetée.

Donc, est-ce qu'il y a d'autres interventions sur le projet de loi 108?

M. Garon: M. le Président...

Le Président: M. le député de Lévis.

M. Garon: Moi, je voudrais revenir sur le projet de loi, mais le ministre n'est pas là, puis je ne vois pas comment je pourrais intervenir sur un projet de loi sur les forêts, alors que le ministre...

M. Cannon: Question de règlement, M. le Président.

M. Garon: ...auquel je veux m'adresser...

Le Président: Un instant, M. le député de Lévis. Question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Cannon: M. le Président, vous savez aussi bien que moi que, le ministre, il est présent, il est là. Je rappelle le député au règlement. Il ne peut pas interpeller un individu, un membre de cette Assemblée de cette façon-là. Alors, je lui demanderais de respecter le règlement. Je comprends qu'il est fatigué, mais qu'il respecte le règlement et l'institution.

Le Président: Alors, évidemment, vous pouvez parler sur le projet de loi, le projet de loi est appelé. Si vous voulez discuter, c'est votre droit le plus strict. Est-ce que vous voulez intervenir? Vous avez 20 minutes, M. le député de Lévis.

M. Jean Garon (suite)

M. Garon: M. le Président, essentiellement, pourquoi? C'est parce que, normalement, il y a un porte-parole au nom du gouvernement, et je pensais que c'était le ministre des Forêts qui était le porte-parole au nom du gouvernement. Alors, je voulais essayer de le convaincre, un peu, par rapport à son projet de loi, sur un certain nombre de questions, mais à la condition qu'il soit là. Je ne veux pas parler au mur, alors que les autres... Je ne pense pas que c'est la ministre responsable des Institutions financières qui est familière avec la forêt, les chemins forestiers, différentes catégories de chemins forestiers dont nous a parlé le député de Laviolette tout à l'heure. Je penserais bien que ce n'est pas le député de Montréal non plus qui est très familier avec les chemins forestiers.

J'aurais aimé que le ministre soit là pour répondre au nom du gouvernement de son projet de loi, M. le Président. Or, comme il n'est pas là, bien, je parlerai à un autre moment, à une autre étape du projet de loi.

Le Président: Très bien. Il n'y a pas d'autre intervention?

Mise aux voix

Alors, est-ce que la motion d'adoption du projet de loi 108, Loi modifiant la Loi sur les forêts et abrogeant diverses dispositions législatives, est adoptée?

Une voix: Sur division.

Le Président: Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Cannon: Are you ready, Sam? M. le Président, je vous prierais d'appeler l'article 37, s'il vous plaît.

Projet de loi 113 Adoption

Le Président: À l'article 37 du feuilleton, M. le ministre des Transports propose l'adoption du projet de loi 113, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile. M. le ministre des Transports.

M. Sam L. Elkas

M. Elkas: Merci, M. le Président. M. le Président, j'en suis un qui a passé la nuit ici, puis j'ai trouvé un peu mesquine la façon dont on a essayé de bloquer ce projet de loi qui prend sa fin. C'est un rapport sur la commission, qui est un gros plus. Et, en plus, le député de Lévis qui siège sur cette commission ? d'ailleurs, il est président ? qui a siégé les 23, 24 et 25 novembre... unanimement pour ce projet de loi, puis là, à la dernière minute, on veut bloquer. Ils ont pris autant de temps pour essayer d'ajourner qu'on aurait pu prendre pour passer ce projet de loi.

M. le Président, je rappelle les faits. Ce projet de loi nous permet d'avoir une nouvelle définition de «personne ou enfant à la charge». Il est aussi question de dommage non pécuniaire, qui permet aussi une nouvelle définition qui, non seulement va nous permettre

d'évaluer la rente au temps de l'accident, mais lorsqu'une décision sera prise. Les montants d'argent alloués pour l'indemnité payée aux accidentés sont augmentés. Au niveau de l'indemnité forfaitaire, M. le Président, il y a une augmentation de 3 000 000 $; dommage non pécuniaire, 5 500 000 $; et remplacement du revenu, 1 500 000 $.

M. le Président, c'est un beau projet de loi, tout le monde est en faveur, et je n'aurai pas d'autre chose à dire que...

Une voix: ...

Le Président: Un instant.

M. Elkas: ...

Le Président: Bon, d'accord. Alors, M. le député de Lévis.

M. Garon: Comme les gens n'ont pas voté une motion d'ajournement, j'aimerais qu'on vérifie au moins le quorum, M. le Président.

Le Président: Très bien. Donc, l'intervention du ministre est terminée. Alors, maintenant, sur la question du quorum... Alors, qu'on appelle les députés! (8 h 37 - 8 h 42)

Le Président: Alors, Mmes et MM. les députés, veuillez prendre place, s'il vous plaît. Alors, nous avons maintenant quorum, et je suis prêt à reconnaître une prochaine intervention. M. le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, comme je constate que le quorum est difficile à obtenir et à garder et que le ministre a l'air fatigué, et que j'ai eu l'occasion à plusieurs reprises de faire valoir mon point de vue pour faire en sorte que certains amendements soient apportés, je ne prolongerai pas le débat, et nous allons pouvoir passer immédiatement à l'adoption du projet de loi.

Le Président: Alors, merci, M. le député de Lévis. Il n'y a pas d'autre intervention? Pas d'autre intervention.

Mise aux voix

Alors, est-ce que la motion d'adoption du projet de loi 113, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. En conséquence, le projet de loi est adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Cannon: Oui, M. le Président, je vous prierais d'ajourner les travaux de la Chambre à ce matin, 10 heures.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. En conséquence, les travaux... S'il vous plaît! Alors, les travaux sont donc ajournés à ce matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 8 h 44)

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